(Quatorze heures huit minutes)Le Président: Alors, Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.
Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.
Affaires courantes
Nous allons procéder aux affaires courantes.
Il n'y a pas de déclarations ministérielles.
Présentation de projets de loi.
Dépôt de documents
Liste des membres et membres suppléants du Bureau de l'Assemblée nationale et lettres confirmant leur désignation
Dépôt de documents. Conformément à l'article 91 de la Loi sur l'Assemblée nationale, je soumets la liste des députés qui ont été désignés comme membres et membres suppléants du Bureau de l'Assemblée nationale. Il s'agit, comme membres pour le parti gouvernemental, de M. le député de Rousseau, M. le député de Charlevoix, M. le député de Richmond, M. le député de Limoilou et M. le député de Chapleau; comme membres suppléants pour le parti gouvernemental, de M. le député de Champlain, de M. le député de Papineau, de Mme la députée de Châteauguay, de Mme la députée de Saint-Henri et de Mme la députée de Bourget; comme membres pour le parti de l'Opposition officielle, de M. le député de Lac-Saint-Jean, de Mme la députée de Johnson et de M. le député de Sainte-MarieSaint-Jacques; comme membres suppléants pour le parti de l'Opposition officielle, de M. le député de Masson, de Mme la députée de Marie-Victorin et de Mme la députée de Terrebonne; comme membre pour l'autre parti représenté dans l'Opposition, de M. le député de Jacques-Cartier; et, comme membre suppléant pour l'autre parti représenté dans l'Opposition, de M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je dépose cette liste ainsi que les lettres de désignation signées par M. le premier ministre, M. le chef de l'Opposition officielle et M. le député de Jacques-Cartier. Alors, ces documents sont donc déposés. Maintenant, M. le vice-président.
M. Bissonnet: M. le Président, je propose l'adoption de la liste des membres et membres suppléants du Bureau de l'Assemblée nationale.
Le Président: Alors, est-ce que cette motion est adoptée?
Des voix: Adopté.
(14 h 10)
Le Président: Donc, adopté. Alors, cette motion étant adoptée, maintenant, je convoque le Bureau de l'Assemblée nationale aujourd'hui même, le mardi 29 mars 1994, immédiatement après les affaires courantes, à la salle 1.38 de l'Édifice Pamphile-Le May.
Dépôt de rapports de commissions
Maintenant, dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission de l'économie et du travail et député de Fabre.
Examen du rapport général de suivi de l'«Engagement de performance 1993-1995» d'Hydro-Québec et de rapports particuliers
M. Joly: Oui, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'économie et du travail qui a siégé les 23 et 24 mars 1994 afin de procéder à l'examen du rapport général de suivi au 31 décembre 1993 de l'«Engagement de performance 1993-1995» d'Hydro-Québec ainsi que des rapports particuliers au 31 décembre 1993 sur l'efficacité énergétique, les pratiques commerciales et l'équilibre énergétique. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président: Alors, je vous remercie, M. le député de Fabre. Ce rapport est donc déposé. Maintenant, Mme la présidente de la commission des affaires sociales et députée de Taillon.
Étude détaillée du projet de loi 125
Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission des affaires sociales, qui a siégé les 22 et 23 mars 1994 afin de procéder à l'étude détaillée du proje de loi 125, Loi modifiant la Loi sur l'assurance-maladie et la Loi sur la Régie de l'assurance-maladie du Québec. Le projet de loi a été adopté avec des amendements.
Le Président: Merci, Mme la députée de Taillon. Ce rapport est également déposé.
Dépôts de pétitions.
Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.
Questions et réponses orales
Alors, nous allons procéder à la période de questions et réponses orales, et je reconnais en première question principale M. le député de Labelle.
Équité en matière de fiscalité
M. Léonard: M. le Président, dans son discours inaugural, le premier ministre déclarait, et je le cite au texte, que «nous pouvons envisager dans les années qui viennent, dans la mesure où la reprise accélère, comme nos actions peuvent le permettre, distribuer aux consommateurs et aux contribuables une partie du dividende de cette croissance afin, là aussi, de relancer la consommation».
Après avoir largement contribué à freiner la consommation en relevant le fardeau fiscal de plus de 4 000 000 000 $ en pleine récession, le ministre des Finances compte-t-il corriger les erreurs passées de son gouvernement et introduire un peu plus d'équité en matière de fiscalité, comme le lui demandent les associations patronales, les consommateurs, les travailleurs, les personnes âgées et plein d'autres personnes?
Le Président: M. le ministre des Finances.
M. Bourbeau: M. le Président, l'objectif du gouvernement, c'est de traiter tous les contribuables avec équité, et le député peut ajouter à la liste des demandeurs le premier ministre lui-même, qui en a fait la demande et qui l'a exposée lors du discours inaugural. Pour ce qui est du reste, M. le Président, je n'ai pas l'intention de faire le discours sur le budget ici aujourd'hui.
Le Président: En question complémentaire.
M. Léonard: M. le Président, compte-t-il se rendre à la première recommandation de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante, qui, hier, le 28 mars, recommandait que le taux de la taxe sur la masse salariale soit modifié en un taux progressif, pour tenir compte de l'impact plus grand de cette taxe sur les petites entreprises, afin, évidemment, de créer des emplois?
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, la demande qui m'a été faite hier lors d'une consultation prébudgétaire va être prise en considération, comme toutes les autres demandes, d'ailleurs, qui sont faites au ministre des Finances. Ce que je peux dire quand même à l'endroit des petites entreprises, c'est que, déjà, le système que nous avons fait en sorte de les privilégier à plusieurs égards. Entre autres, je citais le cas des crédits d'impôt, qui sont deux fois plus importants à l'égard des petites entreprises que des grandes entreprises: crédits d'impôt à la recherche et au développement et à l'adaptation de la main-d'oeuvre, par exemple, crédits d'impôt remboursables à la formation. Donc, il y a déjà, M. le Président, un certain nombre de mesures qui sont plus favorables aux petites entreprises.
Le Président: Alors, pour une question complémentaire, Mme la députée de Johnson.
Mme Juneau: M. le Président, compte tenu que le ministre des Finances veut traiter tout le monde avec iniquité, avec équité, pardon...
Des voix: Ha, ha, ha!
Mme Juneau: Bien, c'est de l'iniquité, ça. Le ministre des Finances partage-t-il la vision de l'Association québécoise de défense des droits des retraités-es et préretraités-es, qui a dénoncé le caractère inéquitable de la contribution au Fonds des services de santé et le caractère inéquitable aussi des modifications apportées au remboursement des impôts fonciers? Compte-t-il corriger ces iniquités dans son prochain budget?
Une voix: Bravo!
Le Président: M. le ministre.
M. Bourbeau: M. le Président, l'objectif est de traiter tous les citoyens avec la même justice, la même équité, et certainement les personnes âgées qui ont un grand mérite, tout le monde le reconnaît.
Je voudrais simplement dire qu'à l'égard des personnes âgées il est faux de prétendre que le gouvernement s'attaque aux personnes âgées. Regardons, si vous voulez, regardons les chiffres tels qu'ils sont. Une personne qui a moins de 65 ans et qui vit seule commence à payer de l'impôt à partir d'un revenu de 8853 $; si elle a 65 ans et plus, elle ne commence à payer de l'impôt qu'à partir d'un revenu de 11 793 $ donc, un traitement plus favorable pour les personnes âgées de 65 ans et plus. D'autre part, si une personne gagne 15 000 $, si elle a moins de 65 ans, elle va payer 1120 $ d'impôt; si elle a plus de 65 ans, elle va payer 630 $ d'impôt. C'est donc dire que les personnes âgées ont un traitement préférentiel par rapport aux autres.
Est-ce que je pourrais ajouter, M. le Président, qu'à part le montant de 2 $ elles ont les médicaments gratuits sauf le 2 $? Elles ont souvent des tarifs réduits dans le transport en commun, elles ont droit aussi, si elles sont pauvres, à du logement social. Donc, M. le Président, on peut dire que la société québécoise, je crois, traite les personnes âgées avec beaucoup de déférence, et il est normal qu'il en soit ainsi.
Le Président: Alors, pour une autre question complémentaire.
Mme Juneau: M. le Président, est-ce que c'est volontaire que le ministre ait oublié son 1 % à partir de 5000 $?
Le Président: Alors, M. le ministre des Finances.
M. Bourbeau: M. le Président, la contribution au Fonds des services de santé, jusqu'à l'an dernier, n'était exigée que des travailleurs salariés. Dans le budget de l'an dernier, le gouvernement avait décidé d'étendre cette contribution à tout le monde; non seulement les personnes âgées, mais les travailleurs autonomes aussi et les autres personnes qui ont des revenus autres que des revenus de salaire.
Alors, M. le Président, le montant a été non pas de 3,75 $ du 100 $, comme c'est le cas pour les salariés, mais de 1 % seulement. Et, M. le Président, je disais tout à l'heure que, finalement, il y a d'autres éléments dans le dossier, qui font que les personnes âgées ont droit à certains avantages, entre autres les médicaments qui sont gratuits sauf le 2 $.
Une voix: ...
M. Bourbeau: Oui. Et ça me fait penser, M. le Président, à la déclaration du chef de l'Opposition, le député de L'Assomption, qui déclarait, dans un extrait de journal que j'ai devant moi, ici, que les médicaments gratuits pour les personnes âgées, c'était une erreur. Jacques Parizeau, M. le Président. Alors...
Le Président: En question principale maintenant, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière.
Rémunération des éducatrices en garderie
Mme Carrier-Perreault: Parmi les priorités gouvernementales annoncées lors du discours inaugural, la famille occupe une place de choix. Entre autres engagements, le premier ministre nous indiquait, et je le cite, «la révision de toutes les mesures touchant les services de garde». Cependant, M. le Président, si on s'en tient aux propos qui ont été tenus ici en cette Chambre par la ministre responsable, la semaine dernière, cette révision promise par le premier ministre n'aura aucun effet sur l'épineux problème du salaire des éducatrices en garderie. Demain, comme prévu, la CSN déclenchera une grève générale illimitée qui, à brève échéance, compliquera sérieusement la vie de milliers de parents au Québec.
À la ministre déléguée à la Condition féminine: Comment, après 18 mois d'échanges avec les services de garde, avec la CSN, avec la CEQ, la ministre peut-elle justifier qu'elle ne soit arrivée à aucune proposition acceptable pour l'ensemble des intervenants du milieu?
Le Président: Mme la ministre déléguée à la Condition féminine et responsable de la Famille.
Mme Trépanier: M. le Président, l'épineux problème de la rémunération des éducatrices en garderie est un problème fort complexe. À preuve, il y a plusieurs intervenants dans ce dossier-là, la CSN, Concertaction, la CEQ, et personne ne s'entend sur la forme que doit prendre la solution à ce problème-là.
Nous sommes tous conscients qu'il y a un problème de fond et nous sommes prêts à nous y attaquer. Nous avions dit l'an dernier, en avril dernier, que je mettrais une année à évaluer le dossier, ce qui a été fait. Je dois dire que j'ai rencontré la CSN le 17 mars, qui m'a fait une proposition, laquelle proposition j'ai rejetée parce qu'elle ne convenait pas, elle ne respectait pas les principes de la politique des services de garde.
(14 h 20)
Par ailleurs, étant fort conscient du problème, le gouvernement, voulant trouver une solution, le premier ministre, ce matin même, a accepté de rencontrer... à sa demande, rencontrera les responsables de la CSN et les responsables de Concertaction, demain, pour faire une évaluation du problème.
Le Président: En question complémentaire.
Mme Carrier-Perreault: Mis à part les rencontres et les beaux discours sur la famille, sur l'importance de la conciliation du travail et de la famille, qu'est-ce que la ministre a à offrir aux parents, demain matin, qui vont être aux prises avec un manque de services de garde et qui seront très mal pris devant cette situation-là?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Trépanier: M. le Président, nous parlons de deux choses fort différentes. La députée des Chutes-de-la-Chaudière nous parle des places en services de garde, présentement, et je dois dire que le gouvernement a fait plus que sa part dans ce domaine-là. Nous avions, en 1988, 64 000 places de garde, et nous avons présentement, en février 1994, 101 000 places de garde qui répondent aux besoins de 120 000 enfants, parce qu'il y a des places qui sont utilisées de façon occasionnelle également. Nous avons débloqué des budgets: de 93 000 000 $ qu'ils étaient, en 1988, nous sommes passés à 207 000 000 $ pour l'année 1994-1995, un ajout de 19 000 000 $ sur le budget de l'année passée.
Le Président: Pour une autre question complémentaire.
Mme Carrier-Perreault: M. le Président, je ne parle pas de places en services de garde. On parle du salaire des éducatrices...
Le Président: Votre...
Mme Carrier-Perreault: ...du redressement, qui n'est pas réglé. Il y aura une grève demain matin.
Le Président: Un instant! Un instant! À l'ordre, s'il vous plaît! Vous êtes en question complémentaire. Vous devez poser une question sans préambule, Mme la députée.
Mme Carrier-Perreault: Qu'est-ce que la ministre a à offrir, demain matin, aux parents qui vont faire face au problème du manque d'éducatrices dans les services de garde, du manque de services, carrément, à ce niveau-là, demain matin?
Le Président: Mme la ministre.
Mme Trépanier: Alors, j'ai souvent dit, et je le répète ici, que la solution que nous cherchons passera par le soutien à la famille. J'ai dit aux éducatrices, la semaine dernière, par la CSN, que la solution que nous cherchions passerait par le soutien à la famille, et qu'il fallait qu'ils nous donnent quelques semaines additionnelles pour arriver à une solution concrète. Alors, malheureusement, les gens ont décidé de débrayer demain. Malheureusement, trois garderies débraieront demain, ce que je trouve extrêmement malheureux, d'autant plus que le premier ministre lui-même les rencontrera demain après-midi. Alors, j'espère que le mouvement ne s'étendra pas. Nous aurons des solutions concrètes, à brève échéance, mais il faut nous donner le temps. Merci.
Le Président: En question principale, M. le député d'Anjou.
Efficacité du système de perception des pensions alimentaires
M. Bélanger: Merci, M. le Président. Un journal en fin de semaine faisait état de la situation déplorable que subissent de nombreux parents, incapables de percevoir le paiement de la pension alimentaire qui leur a été octroyée par jugement pour leur enfant. On rappelait, dans cet article, qu'au Québec seulement 45 % des débiteurs de pensions alimentaires respectent les conditions du jugement et paient avec diligence. Le ministre de la Justice déclarait, quant à lui, dans cet article, que puisque près de la moitié des pensions sont payées adéquatement, notre système n'est pas si mauvais.
Ma question au ministre de la Justice: Comment le ministre peut-il trouver acceptable la situation de notre système de perception des pensions alimentaires, alors qu'unanimement le Protecteur du citoyen et les associations oeuvrant auprès des familles dénoncent l'inefficacité du système?
Le Président: M. le ministre de la Justice.
M. Lefebvre: Merci, M. le Président. Depuis 1981, il existe au Québec un système de perception de pensions alimentaires, système de perception de pensions alimentaires qu'on a décidé, nous, comme gouvernement, d'améliorer, parce que, de façon évidente, ce système de perception de pensions alimentaires n'est pas adéquat quant à un nombre considérable de créanciers des pensions, qui sont, pour 98 %, des femmes.
Ce qu'il faut cependant bien évaluer et bien comprendre, c'est qu'il y a, au moment où on se parle, au Québec, plus d'un débiteur sur deux qui s'acquitte de sa pension alimentaire. Ce sur quoi il faut travailler, M. le Président, c'est de s'assurer que les débiteurs qui, par toutes sortes de manoeuvres, se sauvent de leur obligation soient contraints de verser ce qui est dû par jugement, à savoir la pension alimentaire et je me répète à des femmes, pour 98 % des cas. Il faut s'assurer d'améliorer la performance, mais tout en étant prudent quant à la judiciarisation d'un débiteur sur deux.
Et je termine en disant qu'il faudrait peut-être, dans un premier temps, vérifier avec les créancières elles-mêmes qui reçoivent pour plus de 60 % à 65 % leur pension alimentaire sans devoir passer par le percepteur. Alors, ce sur quoi il faut travailler et je termine là-dessus c'est ceux, les maris, qui refusent de payer leur pension alimentaire, et le système de perception alimentaire automatique que nous sommes à mettre en place, qui entrera en vigueur en 1994, j'en suis convaincu, réglera ce problème-là.
Des voix: Bravo!
Le Président: Alors, pour une question complémentaire.
M. Bélanger: M. le Président, est-ce que le ministre reconnaît que son prédécesseur et lui-même, ça fait des années qu'ils disent ça à l'Opposition, et est-ce qu'il n'admet pas qu'il serait grand temps pour le Québec d'envisager, à l'instar de l'Ontario et des États-Unis, l'instauration d'un système de perception automatique des pensions alimentaires avec retenues à la source?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Lefebvre: M. le Président, ce que plein d'intervenants nous suggèrent, c'est d'avoir ici, au Québec, un système mixte, à savoir permettre au débiteur qui veut s'acquitter volontairement de sa pension alimentaire de le faire volontairement, mais en même temps, et c'est ce que j'ai dit tout à l'heure en question principale, améliorer la perception pour les débiteurs fautifs. Et je vous rappellerai, M. le Président, qu'ici au Québec on a plus l'habitude de s'acquitter volontairement de sa pension alimentaire, contrairement et je suis un peu surpris que le député de Mercier nous donne l'exemple de l'Ontario à ce qui se passe...
Des voix: Anjou.
M. Lefebvre: ...député d'Anjou, contrairement à ce qui se passe en Ontario. C'est une question d'habitude. Ici, au Québec, on a plus l'habitude de s'acquitter volontairement de sa pension alimentaire. Et le nouveau Code civil, essentiellement, souhaite une meilleure responsabilisation des débiteurs, particulièrement en ce qui a trait au versement des pensions alimentaires aux épouses monoparentales et aux enfants.
Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Rouyn-NorandaTémiscamingue.
Projet-pilote sur la pratique des sages-femmes dans l'Outaouais
M. Trudel: Oui, M. le Président. La loi 4 sur la pratique des sages-femmes dans le cadre de huit projets-pilotes au Québec a été adoptée par l'Assemblée nationale le 22 juin 1990. Deux décrets suivaient pour enclencher la réalisation de ces projets-pilotes. À Gatineau, la semaine dernière, la maison des naissances du CLSC des Draveurs a été inaugurée en l'absence de représentants du ministère de la Santé et des Services sociaux du Québec. Voilà qu'hier également nous apprenions que le projet-pilote à Gatineau est maintenant compromis par le refus des fédérations médicales d'y collaborer, tel que le stipule la loi, avant d'avoir l'autorisation de procéder pour quelconque projet-pilote au Québec.
Devant une telle situation, la ministre de la Santé peut-elle nous dire aujourd'hui si elle a l'intention de reconnaître le protocole d'entente qui a été réalisé, qui a été passé avec un médecin de l'Ontario et ainsi de donner le feu vert à un premier projet-pilote sur la pratique des sages-femmes au Québec dans la région de l'Outaouais?
Le Président: Alors, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Robillard: M. le Président, je suis présentement à examiner cette situation. Il est vrai que, le 12 mars 1993, mon prédécesseur avait autorisé le projet-pilote à Gatineau pour la pratique des sages-femmes; il était en accord avec la loi 4, à ce moment-là, mais sous deux conditions. Premièrement, la localisation de la maison des naissances la plus proche possible du Centre hospitalier de Gatineau, ce qui est le cas. Deuxième condition, un protocole d'entente avec le Centre hospitalier de Gatineau.
Malheureusement, M. le Président, après des mois d'efforts de tous les intervenants concernés, on n'arrive pas à établir ce protocole d'entente avec le Centre hospitalier de Gatineau, d'où les intervenants du milieu ont voulu signer un protocole d'entente avec des médecins de l'Ontario, plus spécifiquement d'Ottawa.
Il me reste à regarder, M. le Président, au-delà des difficultés pour la mise en place de ces projets-pilotes si la sécurité des mères et des enfants va être préservée à l'intérieur de ces protocoles d'entente. J'examine donc la situation avec soin et, d'ici quelques jours, je ferai connaître ma décision dans le dossier.
(14 h 30)
Le Président: Alors, pour une question complémentaire.
M. Trudel: La ministre peut-elle nous ajouter quels moyens elle entend prendre pour faire en sorte de parvenir à une entente avec les fédérations médicales du Québec afin de donner le feu vert aux huit projets-pilotes en matière de pratique des sages-femmes au Québec? Quels moyens va-t-elle utiliser pour parvenir à une entente avec les médecins, pour convaincre les médecins de collaborer à ces projets-pilotes?
Le Président: Alors, Mme la ministre.
Mme Robillard: M. le Président, par un dialogue à toujours maintenir avec tous les intervenants concernés par la santé des Québécoises et des Québécois.
Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Lac-Saint-Jean et whip de l'Opposition.
Création de commissions scolaires linguistiques
M. Brassard: M. le Président, tout le monde se rend compte que la mise en vigueur des dispositions de la loi 107, la loi de l'instruction publique, concernant les commissions scolaires risque de provoquer confusion et désordre, un vrai fouillis, plus particulièrement à Montréal en multipliant les réseaux d'écoles publiques au moins six compromettant ainsi dangereusement la francisation et l'intégration des enfants d'immigrants.
L'article 93 de la Constitution canadienne protège, on le sait, les commissions scolaires confessionnelles. La Cour suprême l'a confirmé. La création de commissions scolaires linguistiques viendrait compliquer encore davantage le système de l'éducation, empêchant la mise en place d'une véritable école publique commune.
Question au ministre de l'Éducation: Le ministre de l'Éducation reconnaît-il que, quelles que soient les recommandations du comité dont il attend le rapport, cette multiplication des structures scolaires ne pourra que nous conduire au chaos scolaire et social ainsi qu'à la formation de véritables écoles ghettos?
Le Président: Alors, M. le ministre de l'Éducation.
M. Chagnon: Merci, M. le Président. Non, M. le Président, je ne peux pas reconnaître cette affirmation. D'abord, le comité Kenniff, qui regroupe tous les présidents des associations de commissions scolaires, et les présidents des commissions scolaires concernées dont le député a mentionné le nom sont regroupés ensemble et vont, à la fin de juin, remettre au ministre de l'Éducation un rapport sur la façon de s'organiser pour avoir le transfert des commissions scolaires confessionnelles en commissions scolaires linguistiques pour que ce transfert se fasse de la façon la plus facilitante possible.
Dans ce cadre-là, moi, j'attends le rapport du groupe Kenniff et j'attends, effectivement, qu'on puisse faire en sorte, pour le 1er juillet 1996, que les commissions scolaires au Québec soient des commissions scolaires linguistiques.
Le Président: Alors, en question complémentaire.
M. Brassard: Le ministre reconnaît-il que l'article 93 de la Constitution canadienne est un obstacle majeur à la simplification et à la modernisation de nos structures scolaires et qu'il faut se débarrasser de cette contrainte archaïque qui date du XIXe siècle?
Le Président: Alors, M. le leader du gouvernement, sur un rappel au règlement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, je ne me suis pas levé en question principale, de façon à laisser la chance au coureur, mais cette fois-ci, le député de Lac-Saint-Jean vient de revioler les dispositions des articles...
Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!
M. Paradis (Brome-Missisquoi): M. le Président, je sais qu'on ne veut pas l'entendre de l'autre côté...
Le Président: S'il vous plaît! Allez-y.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): ...mais si on n'a pas de respect pour nos institutions... Les alinéas 3°, 4° et 5° de l'article 77 du règlement stipulent que la question posée en principale, M. le Président, et là on est en additionnelle ne peut «viser à obtenir un avis [...] personnel; suggérer la réponse demandée; être formulées de manière à susciter un débat.» Lorsqu'on formule en disant: Est-ce que le ministre ne serait pas d'avis que, etc., on viole ces trois dispositions, M. le Président, et je vous demanderais de rappeler le député de Lac-Saint-Jean à l'ordre.
Le Président: Alors, effectivement, ça ne peut comporter une question d'opinion, mais il y a deux questions qui ont été posées par le député de Lac-Saint-Jean. Donc, je laisse la parole au ministre pour la réponse.
M. Chagnon: M. le Président, l'article 93 de l'Acte de l'Amérique du Nord britannique, effectivement, donne des garanties confessionnelles à quelques commissions scolaires: la CECM, le PSBGM, la CECQ, entre autres. Or, les présidents de ces commissions, M. le Président, siègent sur le comité Kenniff dont je parlais plus tôt, premièrement.
Deuxièmement, sans vouloir anticiper sur le vote que prendra le conseil des commissaires de la CECQ, nous avons tous pu lire l'opinion de M. Flamand, qui est président de cette commission et que je connais depuis au moins une dizaines d'années et qui n'a pas changé d'idée sur cette question-là. Et la Commission des écoles catholiques de Québec a déjà statué sur le fait qu'elle désirait être reconnue comme commission scolaire linguistique. En ce qui concerne le PSBGM, la commission scolaire protestante du Grand Montréal, son président, M. Butler, que j'ai rencontré au moins trois ou quatre fois depuis... et que je connaissais aussi, et que j'ai rencontré au moins trois ou quatre fois depuis mon assermentation, m'a confirmé, et ça c'était important, que la commission scolaire protestante du Grand Montréal voulait devenir une commission scolaire confessionnelle. Or, il reste le cas de la CECM, où la moitié du conseil ou presque la moitié du conseil des commissaires a demandé, et je les connais aussi...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Chagnon: Ils ont demandé...
Le Président: S'il vous plaît, s'il vous plaît!
M. Chagnon: ...M. le Président, de regarder la possibilité de faire une commission scolaire linguistique francophone sur l'île de Montréal. Ce sera là le sujet d'un débat qui, dans les mois qui vont venir, va faire en sorte de nous éclairer davantage.
Le Président: Alors, toujours en question complémentaire.
M. Brassard: Le ministre reconnaît-il que, même si les commissions scolaires confessionnelles actuelles se métamorphosaient en commissions scolaires linguistiques, reconnaît-il que par le biais du droit à la dissidence, des parents catholiques et des parents protestants pourraient ressusciter, en vertu de l'article 93, les commissions scolaires confessionnelles? On se retrouverait dans la même situation.
Le Président: Alors, en sollicitant votre collaboration, s'il vous plaît. Alors, M. le ministre de l'Éducation.
M. Chagnon: Effectivement, Pâques, c'est dimanche. En ce qui concerne la résurrection de ces groupes de parents catholiques ou protestants, sachez que les gens ne changeront pas leur confessionnalité et leur choix confessionnel parce qu'ils vont voir leurs enfants, M. le Président, être instruits non pas dans des commissions scolaires linguistiques; les enfants ne sont pas instruits dans des commissions scolaires, ils sont instruits dans des écoles. Et ces écoles-là auront toujours le choix d'avoir le statut d'école confessionnelle protestante ou catholique, au choix des parents. Alors, les droits des parents seront toujours conservés dans notre système scolaire.
Le Président: Alors, en question principale, M. le député d'Abitibi-Ouest et leader adjoint de l'Opposition.
Table de concertation du Grand Montréal métropolitain
M. Gendron: Le ministre des Affaires municipales a annoncé, vendredi dernier, la création d'une table de concertation du Grand Montréal métropolitain pour faire suite, a-t-il dit, au rapport Pichette. Cette table de concertation sera appelée à se prononcer sur un certain nombre de dossiers importants pour la région de Montréal, dont le développement économique, l'aménagement du territoire, le transport en commun ainsi qu'une série d'autres éléments. Toutefois, ajoutée aux structures gouvernementales qui interviennent déjà dans la région métropolitaine, il y a sûrement lieu de craindre que la table de concertation ne soit victime des très nombreux dédales de l'administration libérale qu'on connaît.
Question, M. le Président, au ministre des Affaires municipales: Est-ce qu'il peut nous indiquer, est-ce que le ministre des Affaires municipales peut nous indiquer quel ministre aura l'oreille du gouvernement dans le Grand Montréal? Est-ce que ça sera le ministre de l'Industrie et du Commerce, qui préside le Comité ministériel permanent de développement du Grand Montréal par décret du nouveau premier ministre, ou le ministre responsable des cinq conseils régionaux de développement de cette grande région là, ou le ministre des Affaires municipales, qui vient de se nommer lui-même président de la table de concertation qu'il a créée?
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: M. le ministre des Affaires municipales.
M. Ryan: Ha, ha, ha! Inutile de vous assurer, M. le Président, que la décision prise par le Conseil des ministres l'a été après consultation de tous les autres ministres concernés. Elle a été examinée, par exemple, au Comité ministériel de développement du Grand Montréal; elle a fait l'objet de consultations avec le ministre responsable du développement régional, et toutes les interrelations ou interconnexions dont a parlé le député d'Abitibi-Ouest ont été examinées. Il s'agit évidemment de structures qui sont en bonne partie exploratoires ou évolutives.
(14 h 40)
Il a été créé, récemment, sur l'île de Montréal, un comité de développement régional. Il était dit en toutes lettres dans le communiqué qui accompagnait la décision qu'il s'agit d'une structure transitoire dont on ne sait pas ce que l'avenir lui réserve, mais elle va servir pour les fins, en particulier, de l'application du programme de création décentralisé d'emplois sur le territoire de l'île de Montréal.
La table de concertation dont j'annonçais la formation, vendredi, est une table qui a reçu un mandat d'un an. Elle a pour mandat d'amener autour d'une même table les maires des trois principales villes de la région Laval, Longueuil et Montréal de même que les préfets des MRC concernées et, en plus, la présidente de l'exécutif de la Communauté urbaine de Montréal, et des représentants des villes de la banlieue de Montréal. La table examinera sept sujets différents, entre autres. Le ministre fera rapport au gouvernement au bout d'un an. Puis, le gouvernement décidera en temps utile de l'avenir des structures, qui préoccupe beaucoup le député d'Abitibi-Ouest. Pour le moment, c'est le travail concret et non pas les structures qui nous importent d'abord.
Le Président: Alors, en question complémentaire.
M. Gendron: La prétention du ministre des Affaires municipales à l'effet que toutes ces structures ont été examinées par les différents comités ministériels, est-ce que vous ne convenez pas que ça aurait dû vous amener à constater que ce n'est pas en multipliant les structures et les interlocuteurs que vous allez obtenir des résultats concrets mais bien plutôt en les simplifiant?
Le Président: M. le ministre.
M. Ryan: Tout ce que je puis dire pour l'instant, c'est que la table de concertation dont la création a été annoncée vendredi est une structure souple, légère, claire, qui est appelée à se réunir dès le mois prochain, qui produira les résultats attendus et ne créera d'embarras pour personne d'autre.
Le Président: Alors, en question complémentaire, Mme la députée de Hochelaga-Maisonneuve.
Mme Harel: Alors, en complémentaire, M. le Président. Est-ce que le ministre reconnaît qu'il y a une grave sous-représentation dans la composition de sa table de concertation puisque, avec les deux tiers de la population de la grande région, soit 1 800 000 personnes, l'île de Montréal ne compte au total que le tiers seulement des représentants, c'est-à-dire sept sièges? Comment peut-il justifier un déficit démocratique aussi important?
Le Président: Alors, M. le ministre.
M. Ryan: S'il fallait adopter littéralement le critère que propose la députée de Hochelaga-Maisonneuve à toutes les structures de concertation intermunicipale que nous avions, il n'en resterait pas beaucoup. Les MRC fonctionnent sur le principe premier de l'égalité des municipalités membres; la considération de la population vient en second lieu. Si on avait pris uniquement la population, il y a beaucoup de MRC qui n'auraient jamais été capables de fonctionner autrement que sous la domination d'une ville principale.
Dans ce cas-ci, comme il s'agit d'une table de concertation ce n'est pas une table qui va prendre des décisions qu'il existe, la députée en est sans doute consciente, des sentiments d'appréhension très prononcés sur la rive nord, par exemple, à l'endroit de l'île de Montréal, sur la rive sud également, sur l'île de Montréal par rapport aux rives nord et sud, il nous est apparu que le principe de composition de la table le plus réaliste à l'heure actuelle, c'était de donner une représentation égale à chacun des trois grands segments dans la recherche de consensus. Si on peut trouver des consensus, tant mieux; et s'il n'y avait pas de consensus au bout de cette période, il sera toujours temps pour le gouvernement de se prononcer. Mais, si on avait voulu procéder comme le suggère la députée de Hochelaga-Maisonneuve, je pense que même la table de concertation ne pourrait pas avoir lieu. C'est tellement vrai que j'ai consulté le maire de Montréal avant de procéder; lui-même a reconnu que c'était une manière beaucoup plus sage de procéder, celle que nous avons retenue, que celle que se donne l'air de préconiser la députée de Hochelaga-Maisonneuve. Je sais que ce n'est pas ce qu'elle pense.
Le Président: Alors, pour une question principale, M. le député de Lévis.
Augmentation des frais d'immatriculation pour les automobilistes québécois
M. Garon: M. le Président, les droits d'immatriculation augmenteront encore de 5 $ le 1er avril prochain, et le coût d'immatriculation au Québec, sans l'assurance, aura passé de 37 $ en 1986 à 105 $ par année le 1er avril prochain auxquels il faut ajouter 30 $ pour le transport en commun ce qui fait que nos plaques d'immatriculation, sans l'assurance, coûtent 135 $ au Québec, soit le double, plus du double de la moyenne canadienne. Et, si on compare avec les États-Unis, bien, dans le Maine, c'est 22 $ au lieu de 135 $; dans le Massachusetts, c'est 40 $ pour deux ans; au Vermont, c'est 42 $; au Nouveau-Brunswick, c'est 45 $; nous autres, on est à 135 $, dans le libre-échange. Cette hausse s'ajoute, en plus, aux autres décrétées par le gouvernement libéral depuis 1985. La taxe sur l'essence est passée de 0,133 $ à 0,194 $ le litre; le permis de conduire est passée de 6 $ à 20 $ le permis de conduire; sans compter le siphonnage de la caisse de la Société de l'assurance automobile du Québec de 3 000 000 000 $ depuis 1986 jusqu'à, en fait, 1994. Même s'ils sont devenus la vache à lait ma question suit immédiatement du gouvernement libéral, les automobilistes québécois roulent sur les pires routes de l'Amérique du Nord.
La question au ministre des Transports: Est-ce que le ministre, en toute franchise, puisqu'il est nouveau dans ses fonctions, trouve cela normal de payer autant pour immatriculer un véhicule de promenade au Québec, et considère-t-il qu'il s'agit d'un juste prix, d'un prix raisonnable pour avoir des routes en aussi mauvais état, pleines d'ornières et pleines de nids-de-poule?
Le Président: M. le ministre des Transports.
M. Cherry: M. le Président, même si notre collègue, le député de Lévis, a souligné que j'étais nouveau dans ces responsabilités-là, je peux l'assurer que, pour celles qui ont précédé, qui ont été les miennes, et celles de maintenant, je réponds toujours avec la même franchise. Ceux qui se souviendront des responsabilités qui étaient les miennes, en décembre dernier, dans un dossier aussi difficile que la loi 142, j'ai maintenu la même ligne, et j'ai l'intention, dans le dossier du transport, M. le Président, d'agir de la même façon, avec franchise et transparence.
M. le Président, le député de Lévis a bien sûr omis ou bien il a oublié ou il a choisi d'avoir une mémoire sélective il a oublié de rappeler que, dans les frais au Québec, il y a une partie d'assurance, frais qui ne sont pas nécessairement comparables avec des États pour lesquels il a cité ou d'autres... Mais ça, bien sûr, évidemment, il n'a pas à en parler, ça ne fait pas partie de ça.
Dans un deuxième temps, lorsqu'on a fait, tout récemment, ensemble, une journée complète sur l'étude des engagements financiers de l'année précédente, on a convenu ensemble que, parmi des solutions... Pour comparer l'état des routes, par exemple, aux États-Unis par rapport à celles du Québec, on a convenu que, contrairement et ça, je suis content de profiter de l'occasion aux États-Unis, quand les camionneurs québécois doivent utiliser des routes, il y a un nombre de routes auxquelles ils n'ont pas accès. Ils doivent prendre des routes prédéterminées et n'utiliser que celles-là seulement pour ménager leur réseau routier, pendant qu'au Québec, jusqu'à maintenant, ça n'a pas été le cas. Mais il le sait, je l'ai informé lors de cette journée, des routes, des tracés prédéterminés avec l'association des camionneurs du Québec qui, eux également, souhaitent que la même réciprocité s'applique. Au Québec, ils ont accès à nos 39 endroits d'entrée, pendant qu'aux États-Unis nous n'avons accès qu'à 19. Nous sommes prêts à leur offrir la même réciprocité, et dans ce sens-là, ça aurait un effet extrêmement positif sur la qualité des routes pour lesquelles les Québécois paient au Québec, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Président: En question complémentaire.
M. Garon: M. le Président, le ministre a-t-il compris que j'ai posé mes questions sur les droits d'immatriculation, sans compter le prix de l'assurance seulement les coûts d'immatriculation quand j'ai fait la comparaison? Mais il ne semble pas avoir compris.
À quelques semaines du dépôt du budget, est-ce que le ministre des Transports, qui vient de s'avouer complice de ses collègues, aura enfin le ferme propos dans cette semaine de Pâques, et entend-il suggérer à son collègue des Finances de réduire le fardeau fiscal des automobilistes, qui sont les plus taxés en Amérique du Nord, tout en ayant les pires routes de toute l'Amérique du Nord?
Le Président: M. le ministre.
M. Cherry: Quant à la première partie de la question du député de Lévis, M. le Président, il ne m'appartient pas... Le ministre des Finances, en temps à propos, répondra à cette position. Quant à la deuxième, je crois que la façon dont j'ai décrit... Je crois que l'utilisation des routes par les camionneurs étrangers et les correctifs qu'on s'apprête à faire vont répondre en partie aux problèmes qu'a soulevés le député de Lévis, M. le Président.
Le Président: En question principale, M. le député de D'Arcy-McGee.
Administration et qualité d'enseignement à l'école du Barreau
M. Libman: M. le Président, ce matin, 500 étudiants de l'école du Barreau de Montréal ont protesté devant le palais de justice contre un certain nombre de griefs concernant l'administration et la qualité de l'école du Barreau.
Quelques-unes des plaintes des étudiants sont: la piètre qualité de l'enseignement, un taux élevé d'échecs dû à la nature arbitraire du processus de correction, qu'il n'y a aucun rapport entre les examens et ce qui est enseigné en classe, et le fait que l'école du Barreau profite financièrement, chaque fois qu'un élève échoue à ses examens.
(14 h 50)
Par cette politique d'élimination, l'école du Barreau a, par les reprises d'examens, tiré des revenus qui sont passés de 35 000 $ en 1991, à 91 000 $, en 1992, soit une augmentation de 158 %. Alors, le ministre de l'Éducation et responsable des corporations professionnelles a-t-il l'impression que ce procédé est juste que l'école profite ainsi des échecs de ses étudiants?
Le Président: M. le ministre de l'Éducation et ministre responsable de l'application des lois professionnelles.
M. Chagnon: M. le Président, j'ai rencontré les étudiants représentants de l'école du Barreau, vendredi dernier, et ils m'ont fait part de leurs récriminations sur un sujet. Semble-t-il que les examens du Barreau ne correspondent pas exactement aux cours donnés par le Barreau. Cela devra être vérifié, et dans ce cas-là, évidemment, les choses vont suivre leur cours normal.
Le Président: Question complémentaire.
M. Libman: Will the Minister commit today to follow up his meeting of last week, to act immediately to press the Montréal Bar school to resolve many of these very important grievances of our future lawyers?
Le Président: M. le ministre.
M. Chagnon: M. le Président, je vais effectivement demander au bâtonnier ou au Barreau de faire en sorte que leurs examens correspondent à leurs cours. Merci.
Le Président: Pour une autre question complémentaire.
M. Libman: In light of the list of grievances that they discussed today, in light of the fact that 20 % to 25 % of the students of the Montréal Bar school are Anglophones and that courses are not given in English, that materials are not available in English, will the Minister address, in his discussions with the bâtonnier, the intense frustration of anglophone students in the Montréal Bar school so that they could change their policy immediately?
Le Président: M. le ministre.
M. Chagnon: M. le Président, c'est la première fois que j'entends cette récrimination-là. Je vous le répète, j'ai reçu les étudiants du Barreau vendredi passé et il n'y a pas un chat qui m'a parlé de ça.
Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Laviolette. Bon... En question principale, M. le député de Laviolette.
Entente fédérale-provinciale sur la forêt privée
M. Jolivet: Au printemps 1992, l'ex-ministre des Forêts annonçait en grande pompe la conclusion d'une entente fédérale-provinciale sur la forêt privée, d'une valeur de 110 000 000 $, sur quatre ans. Depuis ce temps, on assiste à des coupures qui totalisent près de 20 000 000 $. La majeure partie de ces coupures, c'est-à-dire près de 78 %, entrerait en vigueur au 1er avril qui vient et provoquerait, par rapport à l'an dernier, la perte de 1000 à 2000 emplois dans les régions du Québec.
Ma question au ministre des Ressources naturelles: Peut-il nous dire s'il a l'intention d'écouter son premier ministre, qui a annoncé, lors du discours inaugural, la création d'emplois, dit-il, par la mise en place d'un plan organisé de développement de la ressource forestière, et est-ce que son gouvernement a finalement décidé de changer d'idée et de favoriser plutôt la création d'emplois que la continuité du chômage ou, pour certains, le bien-être social, dans les régions?
Le Président: M. le ministre des Ressources naturelles.
M. Sirros: M. le Président, j'écoute toujours mon premier ministre, qui, d'ailleurs, a pris des engagements que beaucoup de Québécois trouvent tout à fait pertinents, et j'ai le plaisir d'annoncer au député, M. le Président, parce que j'ai rencontré les représentants de la forêt privée, il y a à peu près trois semaines... Ils m'ont fait part de leurs problèmes et de la façon qu'ils voyaient ça. On a convenu, dans un premier temps, qu'on allait, ensemble, mettre sur pied un processus nous menant à un sommet sur la forêt privée pour revoir l'ensemble des programmes qui datent déjà d'un certain nombre d'années. Et j'avais pris l'engagement, M. le Président, de regarder toute la question de la baisse des montants d'argent prévus dans l'entente Canada-Québec.
J'ai le plaisir d'annoncer aujourd'hui au député qu'il n'y aura pas un sou de moins cette année qu'il y en avait l'année passée, M. le Président. Pas un sou de moins, pas une job de moins. Au contraire, avec l'activité augmentée en milieu forestier, il y a des jobs de plus, M. le Président, et la forêt privée va bénéficier exactement des mêmes montants cette année qu'ils ont pu bénéficier l'année passée, parce que nous avons, au ministère, pris les décisions qu'il fallait prendre pour réaménager les sommes d'argent et mettre l'argent là où ça compte: sur le terrain, M. le Président.
Le Président: Alors, en question complémentaire.
M. Jolivet: Oui. Le ministre peut-il m'expliquer pourquoi, alors, dans les crédits déposés la semaine dernière, il y a, par rapport à l'an passé, une coupure de plus de 10 %, une baisse, donc, des crédits octroyés à la forêt privée?
Le Président: Alors, M. le ministre.
Document déposé
M. Sirros: M. le Président, il me fera plaisir de déposer une lettre que j'ai envoyée ce matin à mon homologue fédéral, lui proposant la façon de faire que je sais d'avance qu'il va accepter qui fera en sorte qu'exactement les mêmes sommes d'argent prévues pour la forêt privée le seront également cette année. Le député pourra en prendre connaissance.
Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement au dépôt du document... concernant le document déposé? Question principale?
M. Dufour: Oui.
Le Président: Question principale, M. le député de Jonquière.
Altercation entre un «peacekeeper» et un automobiliste, sur le territoire de Kahnawake
M. Dufour: La Sûreté du Québec enquête présentement sur une violente altercation survenue la semaine dernière sur le territoire de Kahnawake entre un «peacekeeper» et un couple de personnes âgées revenant de vacances. Le journal La Presse nous apprend ce matin que le «peacekeeper» en question était formellement accusé de voies de fait simples pour des gestes qui auraient été commis en octobre et novembre dernier à l'endroit d'automobilistes sur le territoire de Kahnawake.
Le ministre de la Sécurité publique peut-il nous expliquer comment il se fait que le «peacekeeper» en question était toujours en fonction la semaine dernière alors que des accusations étaient portées à son endroit?
Le Président: M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, une stricte mise en garde à ce moment-ci de nos travaux, M. le Président, à titre préventif. Rappeler aux membres de cette Assemblée les dispositions du troisième alinéa de l'article 35 qui stipule que, lorsqu'un député a la parole, il ne peut «parler d'une affaire qui est devant les tribunaux ou un organisme quasi judiciaire, ou qui fait l'objet d'une enquête, si les paroles prononcées peuvent porter préjudice à qui que ce soit», M. le Président.
Et j'inviterais les membres de cette Assemblée à se remémorer, autant dans les questions que dans les réponses, les dispositions de cette article.
Le Président: Alors, l'article 35, 3° est là, en application pour tous les membres de l'Assemblée. Alors, j'invite... À l'ordre, s'il vous plaît! Écoutez, s'il vous plaît! Alors, je reconnais le ministre de la Sécurité publique.
M. Middlemiss: Comme l'indiquait le leader, M. le Président, je ne ferai pas de commentaires sur l'incident qui est devant les tribunaux. Toutefois, je dois vous dire que la plainte de M. Ouellette a été portée à la Sûreté du Québec qui, rapidement, a mené l'enquête, M. le Président. Et, aujourd'hui même, ils devront rencontrer le procureur désigné pour déposer les résultats de cette enquête, et le processus judiciaire suit son cours.
Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions.
Il n'y a pas de votes reportés.
Motions sans préavis. Motion sans préavis, M. le député de Lévis.
M. Garon: Une motion sans préavis, sans débat, pour souhaiter bonne fête à ma collègue de bureau, la députée de Taillon.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, s'il vous plaît! M. le leader du gouvernement.
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. Sans débat, c'est adopté. Il y a également la fête des collègues de Rimouski et de Jeanne-Mance et, demain, en préavis, celle de Mme la ministre de la Culture, qui souhaite toujours son projet de loi.
Le Président: Alors, la motion proposée par M. le député de Lévis est adoptée? Donc, adoptée.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président: Alors, maintenant, aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.
Avis touchant les travaux des commissions
M. Paradis (Brome-Missisquoi): Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, ainsi que demain, le mercredi 30 mars 1994, de 10 heures à 13 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission de l'économie et du travail poursuivra l'étude détaillée du projet de loi 116, Loi modifiant le Code du travail.
À la salle du Conseil législatif, la commission des institutions poursuivra ses auditions publiques dans le cadre de la consultation générale sur le régime d'aide juridique et sur le document intitulé «L'aide juridique au Québec: une question de choix, une question de moyens». Et je dépose les avis.
Le Président: Alors, merci, M. le leader du gouvernement. Je vous avise que la commission du budget et de l'administration se réunira aujourd'hui, le mardi 29 mars 1994, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures et de 20 heures à 22 heures à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. L'objet de cette séance est de procéder à l'audition du sous-ministre du Revenu en vertu de l'article 8 de la Loi sur la réduction du personnel dans les organismes publics et l'imputabilité des administrateurs d'État et des dirigeants d'organisme public.
Je vous avise également que la commission de l'éducation se réunira demain, le mercredi 30 mars 1994, de 10 heures à 13 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine. L'objet de cette séance sera de compléter l'audition des dirigeants d'établissements universitaires afin de discuter des rapports sur l'implication des règles budgétaires annuelles sur le niveau des effectifs, en application de l'article 6 du chapitre 35 des lois de 1993.
(15 heures)
Alors, ceci complète les avis. Je demanderais, s'il vous plaît, la collaboration et l'attention de tous les collègues, s'il vous plaît.
Renseignements sur les travaux de l'Assemblée
Maintenant, aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée, alors, moi-même, cependant, je dois vous informer que, demain, si le débat sur le discours d'ouverture est terminé, lors des affaires inscrites par les députés de l'Opposition, sera débattue la motion inscrite par M. le député de Rouyn-NorandaTémiscamingue. Cette motion se lit comme suit: «Que l'Assemblée est d'avis que les problèmes actuels de sous-financement du réseau de la santé et des services sociaux sont essentiellement dus au désengagement du gouvernement fédéral.»
Alors, il n'y a pas d'autres renseignements sur les travaux de l'Assemblée, donc ceci termine les affaires courantes.
Affaires du jour
Affaires prioritaires
Reprise du débat sur le discours d'ouverture et sur les motions de censure
Maintenant, aux affaires du jour, nous allons reprendre le débat sur le discours d'ouverture prononcé par M. le premier ministre le 17 mars dernier et sur les motions de censure de M. le chef de l'Opposition officielle et de M. le député de D'Arcy-McGee. Alors, je suis prêt à reconnaître un premier intervenant.
Alors, je ne voudrais déranger personne, à ce moment-ci, dans les députés qui sont présents à l'Assemblée! Vous me permettrez de m'excuser grandement, Mmes, MM. les députés!
Donc, nous reprenons le débat sur le discours inaugural et je vais maintenant reconnaître Mme la ministre c'est ça Mme la ministre de l'Éducation.
Une voix: ...
Le Président: Non? Excusez-moi.
Une voix: ...
Le Président: Pas de l'Éducation. Excusez-moi. Oui! Alors, vous étiez bien debout pour la bonne cause, c'est mon erreur. Bien, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Lucienne Robillard
Mme Robillard: Merci, M. le Président. C'est avec beaucoup de fierté, M. le Président, que j'interviens aujourd'hui dans le cadre du débat sur le discours inaugural. Il est très clair que le message qu'a voulu passer le premier ministre du Québec, c'est que notre gouvernement va être axé résolument vers la création d'emplois, et ce, dans tous les dossiers qui concernent le gouvernement.
M. le Président, je dois vous dire que, comme députée de Chambly mais aussi comme ministre de la Santé et des Services sociaux, je partage entièrement cet objectif gouvernemental. Il est clair que, comme députée de Chambly, je suis amenée à réaliser avec l'ensemble des concitoyens et des concitoyennes combien cette question de création d'emplois préoccupe la population, comment il devient essentiel que tous les partenaires, tous les gens qui sont concernés par ce développement d'emplois se concertent davantage pour qu'on arrive tous ensemble à relever ce défi.
Dernièrement, M. le Président, j'invitais tous les partenaires concernés à une assemblée dans mon propre comté. Il y avait au-delà de 130 personnes, des leaders de la communauté au niveau socio-économique, des gens qui se préoccupent du bien-être de la population qui étaient là pour se sensibiliser au plan d'action gouvernemental de relance de l'économie et de soutien à l'emploi. C'est un plan qui doit s'implanter dans toutes les régions du Québec, y compris dans le comté de Chambly, y compris dans la Montérégie, où nous avons un Fonds décentralisé d'emplois d'au-delà de 8 000 000 $ pour aider à susciter, justement, cette création d'emplois, aider à ce que toutes les personnes de notre société jouent un rôle très actif. Alors, vous comprenez bien, M. le Président, que je me sens tout à fait concernée par cette priorité gouvernementale, non seulement comme députée de Chambly mais aussi comme ministre de la Santé et des Services sociaux.
Oui, M. le Président, la ministre de la Santé et des Services sociaux se préoccupe aussi de l'emploi. Et pourquoi? Parce qu'il est très clair que l'emploi est devenu maintenant un enjeu non seulement économique, mais un enjeu social. Chaque individu, et je pense que tous les gens de cette Assemblée pourraient le confirmer, chaque individu a le désir de travailler, dans sa vie. Je pense qu'il n'y a personne qui choisit volontairement de devenir un assisté social ou un chômeur. Tout individu a besoin du travail pour sentir qu'il a une certaine fierté, pour sentir une dignité, une estime de soi, pour sentir qu'il est capable de faire vivre sa famille, qu'il joue un rôle actif dans notre société québécoise. C'est une des bases, je dirais, M. le Président, comme l'a b c, pour que quelqu'un sente qu'il a une estime de soi et qu'il joue un rôle, non seulement dans sa famille mais dans la société en tant que telle.
D'ailleurs, M. le Président, quand on regarde l'état de santé et de bien-être de la population, on s'aperçoit très facilement que les gens qui ont un travail rémunérateur et un travail valorisant sont des gens qui sont beaucoup moins malades que les autres personnes, sont des gens qui sentent qu'ils ont un contrôle sur leur vie et, donc, ils sont moins appelés à faire appel aux services de santé et aux services sociaux.
M. le Président, il est très clair que cet objectif gouvernemental de création d'emplois est largement, je dirais, partagé par tous les intervenants du milieu de la santé et des services sociaux. Mais, au-delà de cet objectif, nous l'avons vu, M. le Président, dans le discours inaugural, le premier ministre du Québec a aussi annoncé des mesures qui sont reliées, je dirais, à l'état de santé et de bien-être de la population de façon générale.
Et je pense qu'on doit reconnaître au nouveau premier ministre du Québec toute cette préoccupation qu'il a des problématiques sociales qui se vivent présentement chez nous. Oui, la récession a été très difficile en 1990, en 1991. Oui, la récession a affecté beaucoup d'individus. Oui, elle a affecté beaucoup de familles. Et, M. le Président, comme gouvernement, on se doit de se préoccuper de toute cette problématique.
Et il est très clair qu'il y a un engagement du gouvernement à se préoccuper autant du développement social que du développement économique. D'ailleurs, je pense qu'on ne peut plus parler de l'un sans parler de l'autre. Les deux sont intimement reliés dorénavant dans nos vies, et il est très clair qu'un gouvernement doit se préoccuper autant de tout ce développement social que du développement économique de notre société.
Nous l'avons vu au Québec, M. le Président, depuis la Révolution tranquille, je dirais, nous avons fait des pas énormes dans l'amélioration de tout ce secteur de la santé et des services sociaux. Nous avons fait des progrès fort significatifs, et au fil des ans, et plus souvent qu'autrement, je dirais, sous la gouverne des différents gouvernements libéraux, les Québécois et les Québécoises ont investi considérablement d'énergie et de créativité, de compétence et d'argent pour se doter d'un système sociosanitaire qui fait maintenant l'orgueil et l'envie de plusieurs autres pays.
Pourtant, M. le Président, malgré ce magnifique système que nous nous sommes donné depuis les années soixante, il y a toujours au Québec des gens qui souffrent, des gens qui souffrent physiquement, des gens qui souffrent psychologiquement ou psychiquement, des enfants, des jeunes, des femmes, des hommes, des personnes âgées qui souffrent. Et c'est clair que, devant toute cette souffrance, il y a aussi des gens qui sont autour d'eux qui se sentent impuissants, il faut le dire, qui ressentent un profond sentiment d'impuissance, et souvent même avec l'impression que notre système si chèrement acquis ne fait pas tout ce qu'il faut pour enrayer la souffrance et les maux auxquels leurs proches sont confrontés. Cela est compréhensible, M. le Président, parce que tous les jours les malheurs et les souffrances des autres, des personnes qui nous entourent nous rappellent que dans le domaine de la santé et des services sociaux rien n'est gagné à tout jamais.
(15 h 10)
Malgré tous les gains que nous avons réalisés et malgré tous ceux que nous pouvons encore espérer, la souffrance quotidienne de milliers de personnes ne nous permet pas de célébrer longtemps nos victoires dans ce grand réseau. Même si ces victoires sont incontestables, même si celles-ci ont largement contribué à améliorer notre qualité de vie et notre espérance de vie, à chaque jour, diverses situations nous rappellent que, malgré tous les efforts déployés, notre système sociosanitaire n'arrive toujours pas à prévenir et à solutionner tous les problèmes ou à répondre à toutes les attentes et à tous les besoins.
Nous sommes toutes et tous conscients qu'il y a encore des enfants qui se font maltraiter, des enfants qui sont négligés, des enfants qui sont abandonnés. Eh oui, M. le Président, en 1994, au Québec, dans un pays développé, il y a encore des enfants qui sont abusés sexuellement par des proches à qui ces enfants-là font confiance. Il y a encore des itinérants. Il s'agit de se promener dans nos grands centres urbains et de constater cette misère humaine, de constater que, maintenant, on retrouve un nombre de jeunes itinérants. C'est une réalité qui existe. Il ne faut pas se cacher les yeux devant cette réalité-là. C'est une misère humaine qu'on doit absolument soulager; on doit essayer de trouver tous les moyens.
Et il y a encore des personnes âgées, M. le Président, qui vivent dans des conditions inacceptables, et je pense en particulier à toute la question des foyers clandestins. Nous avons vu, dernièrement, un reportage à la télévision qui nous montrait la réalité des foyers clandestins. Nous savons tous qu'il y a une partie de ces foyers clandestins où les propriétaires sont responsables et offrent des services acceptables à la population. Mais il y a une autre catégorie de foyers clandestins, M. le Président, où, quand on constate les conditions de vie de ces personnes-là, on ne peut faire autrement que de réagir. Nous le constatons régulièrement et plusieurs députés de cette Assemblée nationale sont sensibilisés à cette question parce que des foyers clandestins se retrouvent dans leur propre comté.
Alors, vous voyez les défis qui sont devant nous parce que, comme société, on ne peut pas accepter que des enfants soient négligés, comme on ne peut pas accepter non plus que des personnes âgées soient négligées dans leur milieu de vie. Il faut poser des actions. Ce n'est pas toujours facile de trouver les solutions, mais ce gouvernement, M. le Président, s'engage résolument à poser des gestes pour améliorer les conditions de vie de ces personnes de notre société québécoise. Et, face à toutes ces situations, il est évident que nous ne pouvons pas, individuellement ou collectivement, nous faire croire que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes ou que notre système de santé et de services sociaux frise la perfection. Nous ne devons pas non plus baisser les bras, M. le Président, et nous dire qu'il n'y a plus rien à faire pour trouver de nouvelles solutions à ces problèmes. Il faut continuer à améliorer notre système afin qu'il puisse répondre le plus adéquatement possible aux défis qui se posent à lui.
S'il y a un domaine ou le gouvernement libéral a toujours agi avec fermeté pour surmonter les défis, c'est bien celui de la santé et des services sociaux. Encore au cours des récentes années que nous venons de passer, le gouvernement a consacré de nombreux efforts pour améliorer tout le système de la santé et des services sociaux, et les résultats de cette réforme ont été, commencent à être reconnus par plusieurs personnes.
M. le Président, je dois ici rendre hommage à mon prédécesseur qui a piloté cette réforme de la santé et des services sociaux. Ce n'était pas facile à faire. On le sait, à chaque fois qu'on apporte des changements dans des grands réseaux comme celui de l'éducation ou de la santé et des services sociaux, c'est toujours difficile de conduire des changements. Et, pourtant, mon prédécesseur a réussi à mener à terme cette réforme, cette réforme qui visait à apporter toute une nouvelle dynamique dans le réseau de la santé et des services sociaux. Ce fut un chantier très vaste où beaucoup d'énergies ont été accordées, ont été canalisées pour mettre en place tous les éléments de cette réforme.
M. le Président, quand j'ai été assermentée, le 11 janvier dernier, comme ministre de la Santé et des Services sociaux, j'ai retrouvé ce réseau que je connaissais. J'y avais déjà travaillé 20 ans. J'ai déjà travaillé 20 ans dans ce réseau de la santé et des services sociaux. Je l'ai retrouvé, ce réseau et les intervenants de ce réseau, dans un état de grande turbulence, suite à cette réforme. C'est normal, quand on change toutes les structures d'un gros système, ça prend quelques années avant que les intervenants puissent voir exactement où se dirige ce nouveau système.
Mais, M. le Président, il faut réaliser que, maintenant, il n'est plus question de se préoccuper des structures. Les structures sont en place, elles sont là. Les structures, c'est des moyens pour atteindre des objectifs. Concentrons-nous maintenant sur nos objectifs. Suffisamment de temps et d'énergie dans ce réseau ont été consacrés à mettre en place les nouvelles structures. Maintenant, je pense qu'il s'agit de rester collé à notre réalité, de rester collé à notre mission de base, qui est de servir la personne qui est devant nous et qui souffre. Il est clair que tout ce secteur de la santé et des services sociaux a à vivre de nouveaux défis, puisqu'une nouvelle réforme a été mise en place et qu'au même moment on demande aussi à tous les intervenants du réseau un effort supplémentaire pour qu'ils deviennent plus efficaces et plus efficients.
M. le Président, presque 13 000 000 000 $ sont affectés au réseau de la santé et des services sociaux au Québec. C'est beaucoup d'argent; beaucoup d'argent. C'est un système qui progresse très rapidement au niveau du rythme de dépenses. Ce qu'on demande maintenant à ce réseau, c'est de faire tous les efforts nécessaires pour tenter de freiner la croissance en ne limitant pas les services à la population, mais surtout en trouvant d'autres façons de livrer des services. Je pense qu'il y a là une place énorme à poser des actions de la part des intervenants de la santé et des services sociaux. Il n'est nullement question qu'on songe à quelque ticket modérateur que ce soit avant que tout cet effort d'efficacité et d'efficience soit fait dans le réseau.
M. le Président, quand une personne se présente dans un des services, quand elle se présente dans un hôpital, qu'elle a un malaise quelconque, cette personne-là n'est pas en mesure de décider elle-même ce dont elle a besoin. Elle n'est pas en mesure de décider si, oui ou non, elle doit subir huit tests, ou huit examens, ou 10 ou 12. C'est le professionnel de la santé et des services sociaux qui, lui, offre les services à la personne. Et, M. le Président, d'après toutes les analyses que nous avons présentement, nous réalisons qu'il y a de la place encore à rationaliser, à cibler davantage la pratique, à améliorer la performance au niveau de la pratique de tous les professionnels du système, au niveau de l'organisation des services pour qu'on puisse continuer à conserver ce système qui nous est si cher.
Mais, M. le Président, je ne saurais terminer sans vous dire combien la deuxième préoccupation, importante, du présent gouvernement... J'ai dit que la première, c'est qu'il était temps de laisser les structures de côté et de s'orienter directement vers la personne qu'on doit servir. Mais la deuxième préoccupation de ce gouvernement, M. le Président, c'est d'accorder toute la place aux services sociaux autant qu'au niveau des services de santé. À cet égard, le premier ministre du Québec a annoncé des mesures qui regardent la petite enfance, a annoncé des mesures qui regardent tout le domaine de la violence au niveau des jeunes et des personnes âgées. Nous allons poser des actions très concrètes dans chacun de ces domaines-là. Je pense qu'il faut réaliser que les problématiques sociales sont devenues aussi importantes que les problèmes de santé au niveau du Québec et qu'il faut y accorder une très grande importance, et c'est ce que la population nous donne nous demande, excusez-moi.
(15 h 20)
M. le Président, je termine sur ce point. À l'heure actuelle, dans chacune des régions du Québec, les régies régionales mènent des exercices avec la population pour fixer les grandes priorités. Vous savez ce qui ressort de ces consultations, M. le Président? Dans beaucoup de régions la dernière, c'était au Saguenay Lac-Saint-Jean la population nous demande d'intervenir d'abord et avant tout sur la violence faite aux jeunes, la violence faite aux femmes, la violence faite aux personnes âgées. Et, donc, la priorité sera donnée aux services sociaux. Merci beaucoup.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, Mme la ministre. Maintenant, je vais reconnaître M. le député de Lac-Saint-Jean, critique de l'Opposition officielle en matière d'éducation. M. le député.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, dans les circonstances actuelles, c'est-à-dire en fin de mandat deuxième mandat, en plus certains vont même dire en fin de régime, dans une situation de fin de régime, avec un gouvernement qui s'agrippe, qui s'accroche au pouvoir et qui a bien l'intention, semble-t-il, d'après ce qu'on peut constater, d'étirer le plus loin possible, au maximum, le mandat constitutionnel qui lui est accordé, la question qu'on peut se poser, M. le Président, c'est: Quelle est la valeur d'un discours inaugural prononcé par un gouvernement dans une situation semblable? Fin de mandat, fin de régime, gouvernement qui s'accroche au pouvoir, qui est visiblement usé, vieilli et à bout de souffle. Quelle est la valeur d'un tel discours inaugural?
M. le Président, ma réponse, quant à moi, est très simple: valeur nulle, sans valeur, produit pour parler comme le premier ministre désigné sur le marché politique, invendable, absolument invendable. C'est vrai que, habituellement, un discours inaugural, ça comporte, peu importent la situation, le contexte ou le temps où on le prononce, bien des voeux pieux et bien de bonnes intentions souvent très floues, très vagues. Mais, là, le premier ministre désigné nous a servi un discours inaugural qui est un aveu d'échec, qui est un bilan d'échec, qui est plein de volte-face, de retournements, de changements de cap assez curieux, étranges, ou qui ne sont pas vraiment étranges si on considère que c'est en réalité du pur racolage électoral. Il s'agit manifestement, pour le gouvernement, de séduire l'électorat à la veille d'une élection, donc ces volte-face et ces retournements sont de l'ordre beaucoup plus du racolage électoral que de véritables réorientations ou de véritables convictions.
Beaucoup de phrases creuses aussi, forcément, dans un pareil discours. Mais ce qui ressort, quant à moi, quand je prends connaissance du discours inaugural, M. le Président, c'est son absence de crédibilité. C'est évident, quand on regarde, quand on écoute le gouvernement prononcer un pareil discours, la conclusion qui s'impose, c'est qu'on est en face d'un discours ou d'un comportement qui n'est pas crédible. Il y a absence de crédibilité. Ce n'est pas vrai que le premier ministre désigné peut effacer d'un trait plus de huit ans de pouvoir libéral, deux mandats complets. Ce n'est pas vrai. Il peut bien souffrir d'amnésie ou faire mine de souffrir d'amnésie, mais pas nous. L'Opposition officielle n'est pas amnésique. L'électorat, la population du Québec n'est pas amnésique non plus. Donc, on se souvient très bien, on se rappelle très bien les huit ans qui ont précédé le discours inaugural, huit ans de gouvernement libéral. On peut bien faire mine, en face, que ça n'existe pas, que c'est un nouveau gouvernement, un gouvernement neuf qui arrive comme ça, là, qui sort de la cuisse de Jupiter, mais il n'y a personne qui le croit; c'est l'ancien gouvernement qui est là depuis 1985. Ce qui fait que, quand on regarde les sujets traités, on arrive vite à la conclusion qu'on est en face d'un gouvernement peu crédible, qui tient un discours creux et qui annonce des actions qu'il ne sera pas en mesure d'entreprendre et de mener à terme.
Le premier exemple, M. le Président, l'emploi. Voilà que, par une opération, disons, du Saint-Esprit, probablement qu'il y a une langue de feu qui est descendue au-dessus de la tête du premier ministre désigné. Par une opération du Saint-Esprit, le premier ministre désigné a soudainement pris conscience que le chômage existe, que le chômage est un fléau social, est un véritable désastre économique, et que, par conséquent, la priorité des priorités, ça doit être désormais la création d'emplois.
Eh bien! Ce discours tout à fait nouveau, inédit dans la bouche du premier ministre, c'est aussi un aveu d'échec. C'est un aveu d'échec et d'impuissance. J'ai ici, M. le Président, les taux de chômage, les moyennes annuelles de chômage, au Québec, depuis 1985, depuis l'arrivée au pouvoir des libéraux. Savez-vous qu'en 1985 le taux de chômage était de 11,8 % au Québec? Savez-vous qu'en 1993 le taux de chômage au Québec est de 13,1 %, et que, bon an, mal an, depuis 1985, le taux de chômage n'a pas vraiment descendu en bas de 10 %? Il s'est toujours maintenu autour de 10 % et plus: 12 %, 11 %, 10,3 %, 11,9 %, 12,8 %, 13,1 % l'an dernier, moyenne annuelle. Ça, c'est les taux de chômage qu'on connaissait au Québec.
Qu'est-ce qui se passe? Est-ce que le gouvernement était ignorant de ces chiffres, de cette réalité, ou est-ce qu'il était indifférent face à cette réalité terrible que constitue un chômage aussi élevé, aussi effarant? Il ne le savait pas? Comment un gouvernement peut-il sérieusement venir dire à la population que, désormais, sa priorité numéro un, c'est la lutte au chômage, c'est la création d'emplois, alors que, depuis 1985, le chômage n'a jamais baissé en bas de 10 %? Voyons donc!
Ou alors, c'est l'alternative suivante, c'est le dilemme suivant, M. le Président. Ou alors, pour ce gouvernement, depuis 1985, la lutte au chômage constituait une préoccupation centrale, majeure, capitale, c'était leur priorité des priorités. Puis là, bien, évidemment, il faut constater à ce moment-là que, si c'était le cas, ils ont échoué, ils n'ont pas réussi. Si c'était ça leur lutte, leur priorité, lutter contre le chômage depuis 1985 sans arrêt, sans interruption... Bien, il suffit de regarder les taux de chômage. Ils n'ont pas réussi. C'est l'échec. C'est l'échec lamentable.
Donc, dans ces circonstances-là, on peut se demander, à ce moment-là: Qu'est-ce qui nous fait croire, qu'est-ce qui nous assure que maintenant ils vont réussir, à quelques semaines d'une élection, alors qu'ils ont eu deux mandats pour le faire, puis qu'ils ont échoué lamentablement? Voyons! C'est évident qu'il n'y a personne qui croit ça. Ce n'est pas crédible. Leur bilan en cette matière est un véritable fiasco, un véritable gâchis, puisque le taux de chômage n'a pas bougé, n'a pas baissé. Et là il baisserait soudainement, maintenant? Auraient-ils trouvé la recette magique? J'en doute fort, M. le Président.
Ou alors, ça ne les a pas intéressés du tout pendant huit ans. La lutte au chômage, puis la création d'emplois, c'était le cadet de leurs soucis. Ça, c'est l'autre alternative, l'autre branche de l'alternative. Ce n'était pas leur priorité, d'aucune façon. Ils étaient obsédés, préoccupés par autre chose: par des coupures, par des restrictions budgétaires, par la lutte au déficit, par la réduction de l'endettement. C'était ça, leurs priorités, pendant des années, au détriment de la relance puis au détriment de la croissance. Alors, si c'est ça, si c'est le cas, leur conversion soudaine nous porte à conclure qu'on était en face, pendant des années, d'un gouvernement sans coeur, d'un gouvernement qui était complètement insensible devant cette réalité épouvantable qu'est le chômage de 13 % de la population du Québec, un gouvernement insensible devant les dégâts de la récession et les dégâts du chômage.
(15 h 30)
Dans les deux cas, M. le Président, ou c'était sa préoccupation pendant neuf ans, puis il a échoué lamentablement, ou ça ne l'était pas. C'était le cadet de ses soucis, puis, à ce moment-là, on est vraiment en face d'un gouvernement qui n'a aucune sensibilité, qui est un sans-coeur, et dans les deux cas, M. le Président, il faut s'en débarrasser. Dans les deux cas, ce gouvernement-là ne mérite pas la confiance de la population. Dans les deux cas, ce gouvernement-là mérite le congédiement, et on espère qu'il y aura des élections générales le plus vite possible pour que la population puisse être en mesure, justement, de lui signifier, à ce gouvernement, son avis de congédiement.
Deuxième sujet, M. le Président, l'éducation. C'est un dossier que je connais un peu mieux. Je m'y intéresse beaucoup, comme porte-parole. Qu'est-ce qu'on retrouve dans le discours inaugural concernant l'éducation? Je vous le dis tout net, un discours creux, un discours vide de sens, une envolée oratoire pathétique, sans doute, sur l'importance prioritaire de l'éducation, sur l'importance capitale de la formation professionnelle pour améliorer la qualité de nos ressources humaines, sur la lutte efficace au décrochage. C'est ça qu'on retrouve dans le discours inaugural prononcé par le premier ministre désigné. Et je dis que ce sont là des phrases creuses, vides de sens, des fleurs de rhétorique qui ne veulent rien dire. On est en face, tout simplement, d'une tromperie. On est en face du toc. C'est du toc, M. le Président. Ça sonne faux et ça sonne creux. Pourquoi? Parce qu'il y a une contradiction flagrante, énorme, entre le discours et la réalité.
C'est quoi, la réalité? Priorité à l'éducation, M. le Président, que prétend ce gouvernement, quand on sait que depuis 10 ans, le système d'éducation a dû subir des milliards de compressions budgétaires, en particulier, l'ordre d'enseignement primaire-secondaire. Ça dépasse le milliard de dollars de compressions et de restrictions budgétaires. L'an passé, je m'étais dit: Ils ne cessent de prétendre que l'éducation, c'est une priorité. J'imagine que ça va se traduire, dans les crédits budgétaires, par un arrêt des compressions. Ils vont arrêter ça pour qu'il y ait un peu de cohérence dans leur action, ils vont stopper les compressions. Pas du tout. Ils ont continué.
Cette année, dans le discours inaugural, même affirmation, même envolée sur la priorité que doit constituer l'éducation. Quelques jours plus tard, les crédits sont déposés, compressions budgétaires, encore, de l'ordre de 166 000 000 $ qu'on impose au système d'éducation, plus de 130 000 000 $ au seul ordre d'enseignement primaire-secondaire. Ce n'est pas sérieux, ça, M. le Président. Vraiment, on n'est pas sérieux, là! Ça fait plus de neuf ans que, d'année en année, on impose des compressions budgétaires substantielles au système d'éducation, et puis, d'année en année, on continue de claironner que l'éducation est une priorité. Il n'y a plus personne qui les croit. C'est faux, là. Il y a une distorsion évidente entre le discours et la réalité.
Même chose pour la formation professionnelle, M. le Président. Depuis 1986-1987, on a assisté à la dévalorisation de la formation professionnelle au Québec, et ça s'est traduit, évidemment, par un déclin considérable des inscriptions chez les jeunes. Il y en avait plus de 40 000 qui étaient inscrits, parmi les jeunes, en formation professionnelle, en 1986-1987. Aujourd'hui, c'est moins de 20 000. C'est moins de 13 000 inscriptions de jeunes en formation professionnelle. C'est un échec lamentable, épouvantable! Et, dans le discours inaugural, le premier ministre désigné vient nous dire, en bombant le torse, que la formation professionnelle, c'est un outil extraordinaire dont va se servir le gouvernement pour améliorer la qualité des ressources humaines, pour améliorer la qualité de la main-d'oeuvre. Mais vraiment, M. le Président, pour qui prend-on les Québécois? C'est ce même gouvernement qui a provoqué la faillite de notre système de formation professionnelle qui vient nous dire qu'il va se servir de ce système-là pour améliorer la qualité de la main-d'oeuvre. Allons donc! Là non plus, M. le Président... La crédibilité est nulle. Crédibilité nulle. Personne ne les croit. Personne n'est dupe.
Troisième élément, toujours concernant l'éducation, le décrochage. Là aussi, le premier ministre sort ses trompettes et claironne l'ouverture, le déclenchement de la lutte au décrochage scolaire, qui est considéré comme un fléau social. Très bien, sauf qu'ils ont commencé bien avant; du temps de Michel Pagé, il y a trois ans, ils ont commencé cette lutte au décrochage scolaire. Ça s'est appelé un «plan d'action pour la réussite du plus grand nombre», la réussite scolaire. Résultat après trois ans: ça n'a pas bougé, pas d'un poil, M. le Président. Le taux de décrochage est exactement le même. Il y a eu une légère remontée l'an passé, ce qui a provoqué des réjouissances de l'autre côté. Ça a chuté cette année au même niveau qu'il y a deux ans. Ça ne marche pas. Ça ne réussit pas. Le décrochage scolaire, oui, c'est un fléau, sauf que le gouvernement est absolument incapable, impuissant à entreprendre une lutte efficace contre ce fléau. Alors, M. le Président, en cette matière, en matière d'éducation, le gouvernement, manifestement, n'est pas sérieux, et il y a un divorce flagrant entre le discours pompeux, le discours très, très rhétorique et la réalité. Contradiction.
Troisième sujet, M. le Président: le dossier constitutionnel. Ça aussi, c'est un dossier qui m'intéresse au premier chef. Je m'en suis occupé pendant longtemps, pendant plusieurs années. Et voilà que, dans le discours inaugural, le premier ministre désigné saisit l'occasion pour pousser quelques cocoricos nationalistes, mais qui, au fond, ne réussissent pas mais alors pas du tout à masquer et à camoufler la réalité brute. Cette réalité brute, qu'est-ce que c'est? C'est que ce gouvernement adhère foncièrement, sans réserve, au statu quo constitutionnel, au régime tel qu'il fonctionne, donc une position tout à fait orthodoxe de fédéralisme inconditionnel. Et l'autre élément de la réalité, l'autre dimension de la réalité, c'est qu'on est en face d'un gouvernement qui a déjà capitulé devant l'amorce d'une offensive centralisatrice en provenance d'Ottawa, enclenchée par le nouveau gouvernement fédéral de M. Chrétien.
M. le Président, c'est évident que le gouvernement ne change pas vraiment ses convictions. Elles sont toujours les mêmes. Le cri du coeur n'est pas effacé. Le cri du coeur, c'est celui qu'il a proféré au moment où il est entré en course à la chefferie... Enfin, il n'y a pas eu de course. Mais c'était: Je suis Canadien d'abord et avant tout. C'est ça, le cri du coeur du premier ministre désigné. Et cette conviction-là ne disparaît pas, mais ses conseillers ont dû lui dire: Écoutez, M. le premier ministre, les Québécois sont habitués à des premiers ministres qui ont quand même une petite coloration nationaliste, une petite tendance nationaliste. Il vous faudrait, là, un petit coup de gueule à saveur nationaliste dans votre discours inaugural. Et c'est ce qu'il a fait, sauf que c'est un pur discours, ce rappel sur la société distincte, ce que M. Bourassa faisait à l'occasion pour faire bonne figure. Évidemment, cela ne convainc personne parce que, au-delà des cocoricos nationalistes, le premier ministre je conclus là-dessus, M. le Président ne fait rien. Il a décidé et il a également annoncé du même souffle qu'il n'y avait pas de revendications, il n'y avait pas de réclamations. Il ne voulait pas tout le pouvoir. Il n'était pas question de recommencer les négociations constitutionnelles, et, par conséquent, il se contentait parfaitement du statu quo.
Alors, voilà, M. le Président, ma conclusion sur le discours inaugural. Un discours creux, avec des virages, des changements de cap qui sont beaucoup plus du racolage électoraliste, quelques cocoricos à caractère nationaliste, encore une fois, pour essayer de plaire à l'électorat québécois, surtout francophone. Mais, au fond, personne n'est dupe devant cette absence de crédibilité du gouvernement, et tout le monde n'attend qu'une chose: des élections pour pouvoir s'en débarrasser.
(15 h 40)
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Vimont et adjoint parlementaire au premier ministre. M. le député.
M. Benoît Fradet
M. Fradet: Merci, M. le Président. M. le Président, ça me fait plaisir d'intervenir sur le discours inaugural qu'a prononcé mon premier ministre, notre premier ministre, la semaine dernière, en cette Chambre, où il a vraiment noté la priorité du gouvernement en matière de création d'emplois et en matière de soutien aux familles.
On en a entendu bien des choses depuis le début de ce débat dans cette Chambre, M. le Président. On en a lu, des articles et des titres dans les journaux, et je constate que l'Opposition du Parti québécois, encore une fois, ne fait que critiquer, sans aucune fois, aucune fois, parler de son alternative, l'alternative qui est proposée par le chef de l'Opposition. Les députés qui sont ici, du Parti québécois, en face de nous, M. le Président, aspirent à faire partie du prochain gouvernement. C'est le même gouvernement que les Québécois ont mis dehors en 1976 qui, aujourd'hui, aspire, avec les mêmes idées, les mêmes vieilles solutions, à venir prendre le pouvoir et diriger le Québec aujourd'hui.
J'entendais le député de Lac-Saint-Jean et même le chef de l'Opposition parler de cocoricos nationalistes. Bien, M. le Président, j'aime bien mieux avoir un coq dans mon équipe qu'une poule mouillée. Et ça, je suis convaincu que les citoyens, au Québec, vont s'en rendre compte et vont donner leur appui à Daniel Johnson lors des prochaines élections.
On a entendu et on a lu du cynisme, de l'électoralisme. Je me demande qui dans cette Chambre fait part de cynisme et d'électoralisme, M. le Président. Et le député de Marie-Victorin, c'est-à-dire le député de la Rive-Sud, M. François Beaulne, disait, la semaine passée, dans son discours, qu'il comparait les citoyens québécois à des perruches. Bien, moi, je trouve ça honteux qu'on compare les citoyens de Laval et du comté de Vimont à des perruches. Je trouve ça honteux et j'espère que le député de Bertrand va retirer ses paroles.
M. le Président, le député de Bertrand a dit en cette Chambre qu'avec le projet de l'indépendance du Québec, de la souveraineté c'est le seul qui en a parlé, les autres cachent tous leur option, c'est le seul qui en a parlé lui, il a dit qu'avec l'indépendance du Québec il ferait le plein emploi au Québec; ça représenterait 1 %. Et, depuis le tout début, on entend les députés du Parti québécois critiquer l'objectif légitime du premier ministre, Daniel Johnson, et du Parti libéral du Québec de diminuer le taux de chômage sur cinq ans de 5 %, ce qui créerait 400 000 emplois. Et eux, aujourd'hui, disent qu'avec l'indépendance du Québec on va avoir le plein emploi et qu'on pourra créer 800 000, 900 000, 1 000 000 d'emplois. Et de l'autre côté on ridiculise le gouvernement libéral.
C'est ça, du cynisme. C'est ça, de l'électoralisme, M. le Président. C'est de cacher ses profondes convictions parce que ça fait peur à la population, puis ce n'est pas ça que la population veut. Les gens de Vimont, les gens de Laval, ce n'est pas ça qu'ils veulent. Ils veulent travailler. Ils ne veulent pas avoir des petites promesses. On n'est pas des petits Schtroumpfs bleus, nous autres, qui voient la vie en rose. On n'est pas des petites Schtroumpfs bleus qui ont un rêve. Nous sommes des gens réalistes, avec des priorités réalistes qui rejoignent les priorités de la population.
M. le Président, lorsqu'on a l'habitude de voir le verre à moitié vide, on ne le voit pas à moitié plein. Et tout ce qu'on fait, c'est critiquer sans apporter des solutions concrètes. Et on lit, encore aujourd'hui, dans un article de La Presse canadienne : «Les péquistes préparent leur arsenal pour la bataille référendaire». Les comités de l'après-référendum ou de l'an 1... Ils sont déjà à préparer l'après-référendaire. Ils ne sont mêmes pas encore rendus au pouvoir, puis ils ont peur de parler de leur option ici, en cette Chambre, mais tout ce qu'ils disent, c'est qu'ils critiquent les politiques efficaces du gouvernement libéral, efficaces, puis je vais vous expliquer comment et pourquoi. Et on va prendre le cas de Laval.
M. le Président, à Laval, de 1976 à 1985, il y a eu un moratoire sur le développement économique. Souvenez-vous qui était là, à Laval, de 1976 à 1985. C'est le même vieux gouvernement qui veut reprendre le pouvoir aujourd'hui. C'est eux qui étaient là. Ils ont décrété un moratoire sur le transport à Laval. Ils ont décrété un moratoire sur le développement économique. Laval était toujours dépendante de la grande région de Montréal et de l'île de Montréal.
Depuis 1985, le Parti libéral du Québec est rendu au pouvoir. Qu'est-ce qu'on a fait à Laval, par exemple? On a régionalisé les services. Une ville de 320 000 habitants qui est capable de diriger ses services au Québec. Ce n'est pas juste dans les tours d'ivoire à Québec, M. le Président, qu'on doit organiser, c'est en région. Et ça, c'est le ministre des Affaires régionales, M. Yvon Picotte, qui a initié cette démarche: la régionalisation des services.
On a notre collègue qui a pris la parole, tout à l'heure, de la Santé et des Services sociaux. Qu'est-ce qui est important à Laval, M. le Président? C'est qu'on puisse être autonome et gérer nos services de santé. On a créé la Régie régionale de la santé à Laval. Et, depuis ce temps-là, il y a des gens, Lavallois, qui sont élus sur cette régie, sur ce comité pour gérer les services de santé à Laval.
C'est ça que le gouvernement libéral a fait. Le gouvernement libéral a mis en place, comme je vous l'ai dit tout à l'heure, un conseil de développement régional à Laval. On vient d'annoncer, il y a quelques semaines, un Fonds décentralisé de création d'emplois: 10 500 000 $ sur trois ans, à Laval, pour créer des emplois. Pas avec l'indépendance du Québec, pas en faisant rêver les citoyens, avec une action concrète et immédiate. C'est ça qu'on a fait. Dans ce fonds-là, M. le Président, les citoyens peuvent proposer un projet, et à l'intérieur de 30 jours, ils ont la réponse et ils ont l'argent. C'est ça que ça prend, M. le Président, pour créer de l'emploi. Pas laisser voir aux gens qu'on pourrait tout régler avec l'indépendance du Québec. Mon collègue, le député d'Anjou, en est conscient de ça. Il la connaît, la réalité, mais il est attaché par ses collègues, il ne peut pas le dire. C'est malheureux. C'est malheureux, M. le Président.
Moi, j'ai été élu dans Vimont. Pourquoi, vous pensez? Pour dire la vérité aux gens, pour leur expliquer la vérité. C'est ça que je fais. C'est ça que j'ai fait. Et c'est ça que je continuerai à faire pendant le prochain mandat, M. le Président, être honnête avec moi-même, mon parti, avec les citoyens que je représente et leur dire la vérité. C'est vrai que ça ne va pas tellement bien depuis trois ans. Ça aurait pu aller mieux. C'est un contexte mondial, un contexte international. Mais les députés du Parti québécois pensent que, juste le Québec, lorsqu'on va être indépendants, on ne sera pas attaché avec le contexte économique mondial et on va pouvoir créer 800 000, 900 000, 1 000 000 d'emplois, avoir le plein emploi et satisfaire l'ensemble des besoins des citoyens du Québec.
C'est ça, M. le Président. Vous avez l'air à douter. Moi aussi j'en doute. C'est écrit dans le journal ici. C'est le député de Bertrand qui a traité les citoyens et citoyennes, dont les Lavallois, de perruches. Je serais gêné, M. le Président, d'avoir traité les Lavalloises et les Lavallois de perruches. M. le Président, dans Laval, la politique gouvernementale a fonctionné.
J'écoutais le député de Laval-des-Rapides, la semaine dernière, parler des Lavallois et des Lavalloises. Il ne connaît pas encore les dossiers de Laval. C'est vrai qu'il vient juste d'arriver. C'est vrai qu'ils vient d'être élu. C'est vrai aussi que c'est un citoyen de la rive sud de Montréal qui s'en vient à Laval essayer de défendre les intérêts des Lavallois. Je comprends ça. Ça va lui prendre un certain temps avant de s'habituer aux dossiers, avant de comprendre les dossiers et de pouvoir les défendre. Mais à Laval, M. le Président, c'est une ville dynamique, une ville qui se prend en main. Vous connaissez Laval, M. le Président. C'est une ville qui, lorsque le gouvernement a décidé de lui donner les moyens de se prendre en main, a décidé de travailler main dans la main avec le gouvernement pour la création d'emplois, pour l'amélioration de la qualité de vie des familles. À Laval, M. le Président, on retrouve une moyenne d'âge assez jeune. Des jeunes familles viennent s'installer parce qu'il y a un climat de santé, un climat de vie très alléchant qui fait en sorte que les citoyens viennent s'installer dans une belle ville comme cette ville-là.
Alors, moi, M. le Président, quand j'entends des députés de l'Opposition dire qu'on fait du racolage électoral, dire que c'est juste du «bluff», et que je vois des résultats concrets dans mon comté, dans ma ville, je me dis, eh bien, «tabarnouche», ils ne sont pas présents partout. Ils ne sont pas conscients ou ils ne se promènent pas, ils ne voient pas, ces députés-là, ce qui se passe sur le terrain. Alors, c'est là que je constate que c'est vraiment des paroles électoralistes.
Lorsqu'on nous fait part du cynisme du premier ministre Johnson, ce n'est pas vrai. Le premier ministre Johnson a des priorités réelles, comme son parti: la création d'emplois. Et on a mis en place un plan de relance au Québec. On nous dit qu'on oublie les huit dernières années de pouvoir. Ce n'est pas vrai. Le premier ministre Johnson vient d'arriver en poste. Il ne dirige pas de la même façon que l'ancien premier ministre, pour qui j'ai beaucoup de respect. Il a sa façon à lui d'agir. Il a sa façon à lui, il a sa philosophie, et il dirige un bon gouvernement dynamique, expérimenté et rajeuni. Ça sera ça, l'alternative aux prochaines élections: le gouvernement libéral, qui crée de l'emploi avec des actions concrètes, avec des résultats concrets, et un vieux gouvernement qu'on a déjà mis dehors en 1976, qui propose, M. le Président, un rêve avec des actions peut-être concrètes après l'an 1.
(15 h 50)
Mais, M. le Président, après le référendum, selon leur propre programme, qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont créer des comités pour négocier la dette, créer un comité pour négocier l'armée avec le gouvernement fédéral, créer un comité pour négocier la monnaie, créer un comité pour négocier l'entente de libre-échange. Ils «vont-u» avoir le temps de s'occuper de l'emploi, M. le Président? Est-ce que, lorsque ces gens-là vont être rendus au gouvernement, ils vont avoir le temps et les préoccupations de s'occuper de l'emploi? Bien non, ils vont s'occuper de créer des comités. Le budget de l'an 1, Pierre Boileau, ça doit être quelqu'un que vous connaissez, ça, Pierre Boileau? Si vous ne le connaissez pas, c'est parce que vous n'allez pas à la permanence de votre parti assez souvent.
Alors, nous autres, M. le Président, c'est avec des actions concrètes, avec des sous directement investis dans la création d'emplois que nous allons parcourir les prochains mois avant la campagne électorale, et c'est avec ce bilan-là que nous nous présenterons devant l'électorat. J'arriverai devant mes électeurs, moi, à Laval, M. le Président, en leur disant: Mission accomplie, avec de l'action concrète et non pas avec des rêves. Et je dirai toujours la vérité, et je m'y engage encore aujourd'hui, M. le Président. Les Lavalloises et les Lavallois vont toujours avoir la vérité du député de Vimont et la loyauté du député de Vimont pour faire en sorte de défendre leurs propres intérêts et leurs propres priorités et non pas un agenda de rêveries d'un parti politique. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un député de l'Opposition officielle, le député de Lévis et critique en matière de transports. M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Merci, M. le Président. J'écoutais le député de Laval, un de ceux qui restent, et j'ai remarqué qu'il n'a pas parlé des ministres sur l'île Laval, parce qu'on voit à quel point même les députés du Parti libéral sont heureux puisqu'il y en a déjà trois qui sont partis, dans le même mandat. Le député qui vient de parler est un des seuls qui restent, et il vient sans doute de faire son chant du cygne, M. le Président, parce qu'il n'y a plus de ministre. Et même la députée, Mme Bacon, qui était vice-première ministre, a quitté en disant: Si je peux rendre service, en m'en allant, pour que Laval cesse d'être pénalisée, je suis prête à me retirer. Et elle s'est retirée. Imaginez-vous qu'elle n'avait pas tout à fait le même discours que le député de Vimont.
De la même façon, M. le Président, dans la région de Québec, quand on voit qu'on a un demi-ministre, le député de Taschereau, ce n'est pas sérieux, M. le Président. Je comprends qu'il y a seulement 1 000 000 de personnes dans la grande région de Québec, qu'on n'a pas les 3 000 000 ou 3 500 000 qu'il y a à Montréal, mais d'en avoir un demi par rapport à 13, ça fait dur. Tu sais, on a beau parler d'une capitale, comprenez-vous, alors, ça ne fait pas fort comme capitale. Et tous les gens de Québec qui voient clair se rendent bien compte que ça n'a pas de bon sens. Je ne le dis pas par partisanerie, parce que je trouve ça inacceptable, quel que soit le parti politique. Je pense qu'il y avait des gens qui étaient députés dans la région de Québec et qui auraient pu occuper des fonctions de ministre, et je trouve anormal qu'on ne les ait pas nommés alors que... Ce n'est pas parce qu'on en a nommé d'autres qu'il n'y en a pas d'autres. On en a nommé seulement un, le député de Taschereau, avec un portefeuille qui n'est pas le portefeuille le plus important et qui n'est pas le plus décisionnel.
Moi, ce qui m'inquiète le plus, M. le Président, je vais vous le dire. Essentiellement, le député de Vimont disait: Ça nous prendrait des plans de relance. Bien, écoutez, Montréal a eu un plan de relance, et en plus, celui qui est en charge du plan de relance, c'est celui qui est devenu premier ministre. Résultat: Montréal est la ville la plus pauvre dans les grandes villes du Canada et est maintenant devenue la ville la plus pauvre en ayant qui comme ministre responsable? Celui qui est devenu premier ministre, et avec un plan de relance pour Montréal. Est-ce que, maintenant, on dit: Bon, mission accomplie pour Montréal; maintenant, occupons-nous du reste du Québec? Pourquoi le premier ministre qu'on a actuellement serait tellement bon pour le Québec alors qu'il a été pourri pour Montréal? Montréal est dans la dèche actuellement. Il y a plus de 20 % de chômeurs à Montréal. Qui était responsable de Montréal depuis 1986? Le député de Vaudreuil-Soulanges qui, aujourd'hui, est premier ministre, avec le député d'Outremont, incapable de prendre une décision. On le voit dans le dossier des chantiers, on le voit dans le dossier du taxol en Gaspésie, dans le dossier des chantiers maritimes à Lévis. Incapable de prendre une décision. Puis ces gens-là seraient meilleurs actuellement? C'est exactement le même gouvernement.
Le gouvernement, qu'est-ce qu'il dit? Il veut se désengager de tout. C'est quoi, son discours? Il faut se désengager. Hein? Il veut se désengager de la santé, il veut se désengager de plus en plus des médicaments, il veut se désengager des frais dentaires, il veut se désengager des examens de la vue pour des gens qui ne sont pas... pour la grande partie de la population. Il veut se désengager des routes, il veut même privatiser les routes et les ponts; il veut se désengager de l'éducation; il veut se désengager des parcs publics. Mais il veut administrer des casinos. Voyez-vous? On est rendus à se demander si le gouvernement prend le Québec pour une barbote, M. le Président.
Il veut se désengager de ce qui est, dans tous les pays au monde, du ressort du gouvernement, mais il veut en même temps s'engager à ce qui, dans tous les pays au monde, n'est pas l'administration fonctionnelle ou habituelle des gouvernements: administrer du «blackjack», des «slot machines», toutes sortes de machines de jeux, M. le Président. C'est un tenancier, aujourd'hui, notre gouvernement. C'est un tenancier. Est-ce que c'est ça, un État? Est-ce que c'est ça, un État? On nous dit: On veut redéfinir l'État et la société, et on s'engage dans l'administration des casinos, puis on veut se désengager dans les mesures sociales et économiques qui sont normalement du ressort du gouvernement.
M. le Président, ça fait curieux. Ça fait curieux, puis on n'a pas besoin de réfléchir très longtemps pour se rendre compte que ça n'a pas de bon sens. Pas besoin d'être quelqu'un de très averti pour se rendre compte que la conception du gouvernement, je vais vous dire, c'est un dé à coudre. Je sais bien que, parler au gouvernement puis essayer de le convaincre, c'est un peu comme essayer de mettre 10 onces dans un dé à coudre. Mission quasiment impossible, M. le Président. Mais, en même temps, on s'adresse à la population pour montrer à quel point le gouvernement est incohérent.
Il nous dit, par exemple, le gouvernement: On veut faire plus avec moins. Moi, ce que j'ai vu depuis neuf ans, c'est des gens qui font moins avec plus. Je vais vous donner des exemples. Puis je ne prendrai pas les exemples bien loin, je vais les prendre à côté; à côté, M. le Président. Dans mon comté puis dans le comté de Bellechasse, on a une école de machinerie lourde qui, sous le député d'Argenteuil, a été modernisée, à Lévis, école de machinerie lourde qui est là depuis une vingtaine d'années, qui est l'école de marchinerie lourde pour la formation des gens qui utilisent des machineries lourdes dans tout l'est du Québec, alors qu'il y en a une autre, école, dans la région de Montréal.
En 1990, le ministre de l'Éducation, député d'Argenteuil, décide qu'on devrait investir 5 000 000 $ dans cette école-là pour la consacrer école de formation puis d'opération en machinerie lourde, et en nous disant, puis c'était toute la problématique du temps, que mettre ensemble la formation et l'opération, c'était ce qu'il y avait de plus rationnel; ça en ferait un véritable centre spécialisé. 1990. L'inauguration de l'école en 1991. Et savez-vous ce qu'on vient d'apprendre, M. le ministre de l'Éducation actuel? Que, apparemment, l'école qui est là depuis plus de 20 ans, les terrains ne sont pas parfaitement au point puis il faudrait bâtir une autre école à quelques kilomètres plus à l'est, dans le comté de Bellechasse, à Beaumont. Alors, on se demande quel sorte de gouvernement... On vient de moderniser l'école! On vient de le faire! Le terrain, depuis 25 ans, personne n'a appris que les gens avaient étudié dans un endroit qui n'était pas propice.
C'était le ministre de l'Éducation, le député d'Argenteuil. J'ai vu les lettres de la commission scolaire. J'ai écrit moi-même. J'ai vu les lettres également du ministre de l'Éducation. On disait: C'était ça qu'il fallait faire. On nous dit maintenant qu'il faut rediviser la formation de l'opération des machineries parce que, apparemment, l'école d'opération des machineries qui, elle, était là de tout temps, depuis plus de 25 ans, ne serait pas à la bonne place. Ça vous dit que ça fait un ministère de l'Éducation qui est rapide! Ou bien elle est à la bonne place et c'est du gaspillage, ou bien elle n'est pas à la bonne place puis c'est une gang d'incompétents. Une gang d'incompétents! C'est clair comme de l'eau de source, M. le Président.
(16 heures)
Même chose pour l'école des monteurs de ligne. Il y a une école qui est là, à Saint-Henri. J'étais député, puis elle était là depuis longtemps déjà. Là on nous dit: Il faut la déplacer à Beaumont. Il n'y a pas de rapport entre la machinerie lourde et les monteurs de lignes, sauf qu'il y a une chose. Je me dis: Pourquoi ils veulent absolument déplacer, on me dit, à peu près 400 poteaux d'électricité? Quatre cents poteaux d'électricité pour faire des monteurs de lignes.
Je me suis posé la question suivante, parce que j'ai parlé au ministre de l'Éducation, et il m'a dit: Ah! C'est une demande qui vient d'Hydro. Je me méfie justement d'Hydro et je sais comment Hydro fonctionne. Quand il m'a dit: Ça vient d'Hydro... Parce que, à la commission scolaire, on a dit: Ça ne vient pas de nous autres, ça vient du ministère de l'Éducation, comme si eux autres n'avaient rien à faire là-dedans et qu'ils n'étaient pas capables de défendre ces deux projets-là. Le ministre de l'Éducation me dit: Ça vient d'Hydro. Ça ne vient pas de lui, ça vient d'Hydro. Je me suis dit: Qu'est-ce qui arrive à Beaumont qui fait que la situation peut être différente? Là, j'ai eu une intuition. Le premier ministre vient d'annoncer Sainte-Marguerite. Il va falloir que l'électricité passe en quelque part, et il s'adonne que les tours d'Hydro sont à Beaumont. Comme elles ont été faites avant Grondines, il n'y a pas eu de tunnel, là. Elles ont été faites il y a plusieurs années, il n'y a pas eu de tunnel; à Grondines, on a fait un tunnel. Est-ce que ça ne serait pas parce qu'Hydro ne veut pas faire de tunnel à Beaumont, quand ils vont descendre leurs lignes de Sainte-Marguerite, puis ici, bon, là, vous avez déjà ces tours-là, vous avez déjà l'école des monteurs de lignes avec 400 poteaux d'électricité? Bah! On n'a pas besoin du tunnel à Beaumont. Est-ce que c'est ça, le truc, dire: Déstructurons le territoire pour justifier notre passage après avec des pylônes à Beaumont et à l'île d'Orléans? Est-ce que c'est ça, le truc? En tout cas, je vous pose la question.
Je connais le territoire comme le fond de ma poche. Je connais ce territoire-là pour y avoir circulé depuis 50 ans. Je vous dis: Quand on fait Sainte-Marguerite et qu'on annonce en même temps la ligne Lévis-des Cantons c'est Saint-Jean-Chrysostomedes Cantons j'aimerais savoir, là, entre les deux lignes, à quelle place que le fleuve va être traversé et qu'est-ce qu'on veut faire à Beaumont? Est-ce qu'on veut actuellement, justement, créer un corridor, déstructurer le territoire et, après ça, dire: On peut passer des lignes, puis ça va être la place pour les passer? Je pose la question.
D'autant plus que quand il y a eu l'étude d'impact qui a été payée par la municipalité on n'a pas voulu rendre la première étude publique. La commission scolaire, apparemment, ne voulait pas, ne donnait pas la permission à la municipalité. Apparemment, on aurait corrigé la première et on viendrait d'autoriser de publier la deuxième étude d'impact. Est-ce que ce ne serait pas mieux de publier la première, justement? Parce que les gens sont en droit de savoir ce qui les attend. Est-ce que le gouvernement va nous dire, après ça, que c'est un gouvernement qui fonctionne bien?
M. le Président, je regarde, dans le domaine des dépenses, je viens d'apprendre que l'usine de la Communauté urbaine de Québec, l'usine d'assainissement des eaux, qui a coûté la bagatelle de 342 000 000 $, dans laquelle le gouvernement du Québec a fourni 292 000 000 $, on vient d'apprendre dans les journaux qu'elle ne fonctionne pas vraiment, que les bassins de décantation fonctionnent, mais que, aussitôt qu'on arrive à la biofiltration, ça ne fonctionne pas. Là, on aurait apparemment la Cadillac des usines. On a sans doute le pare-chocs, les portes, l'antenne, mais le moteur ne fonctionne pas. Or, en de grandes périodes de temps, l'eau s'en va directement au fleuve. L'eau s'en va directement au fleuve. Et 350 000 000 $ plus tard, M. le Président! 350 000 000 $ plus tard!
Je n'entends pas beaucoup... J'ai écrit pour demander des renseignements, j'ai hâte de voir si je vais les avoir. Je veux poser des questions, parce qu'il me semble que, à 350 000 000 $ de fonds publics, 342 000 000 $ au total, mais 292 000 000 $ de subventions... La Société québécoise d'assainissement des eaux, elle, m'a répondu très rapidement. Je n'ai jamais eu une réponse aussi rapide, M. le Président, à une lettre que j'ai écrite. On me disait très rapidement qu'on n'avait eu rien à faire dans le dossier.
Alors, qui a eu affaire dans le dossier? Ça adonne que le dispensateur de l'usine d'assainissement traverse le fleuve puis va déverser ses eaux, assainies ou pas assainies, surtout du côté sud. Ça adonne que, du côté sud, il y a quelques municipalités qui prennent leur eau dans le fleuve pour la boire. Je pense que c'est une question importante. J'ai hâte de voir. C'est une usine, apparemment clé en main, mais on vient d'apprendre dans les journaux qu'elle ne fonctionne pas vraiment comme elle devrait fonctionner, alors qu'elle est en rodage depuis deux ans, et que, très souvent, on jette l'eau telle quelle dans le fleuve depuis l'automne dernier.
Est-ce que le gouvernement va nous donner des explications ou s'il considère qu'on peut mettre 300 000 000 $ comme ça, sans qu'on ait les résultats? Quand j'achète une automobile, moi, M. le Président, je ne dis pas au garage... Je n'aimerais pas que le garage me dise: Bon, on a essayé de faire votre automobile, mais celle qu'on voulait faire, qui vous appartenait, vous ne l'aurez pas, elle ne marche pas. Je ne paierais pas. Est-ce que le gouvernement a payé les 300 000 000 $ pour une usine qui ne marche pas? Est-ce qu'il y a des garanties qu'il a prises pour s'assurer que l'usine va marcher? Le rodage a duré combien d'années? Ça fait deux ans qu'on rode, puis ça ne marche pas.
Le gouvernement a mis 292 000 000 $. C'est à lui à prendre des garanties pour que les affaires marchent. Quand celui qui donne 292 000 000 $... la Communauté urbaine a dû mettre 50 000 000 $... Si le gouvernement a mis 292 000 000 $, quelles garanties a-t-il prises pour s'assurer que l'usine marche? Il me semble que ce n'est pas une question méchante, mais c'est une question fondamentale. On ne paie pas 292 000 000 $ pour une usine qui ne marche pas. Est-ce qu'on a mis l'argent de côté? Moi, j'ai appris que non, qu'on a payé. On a payé sans s'assurer que ça marcherait. Maintenant, qui va exécuter les garanties, qui va s'assurer que l'usine va fonctionner? Il y a des gens qui sont élus, mais il y a des fonds publics là-dedans: 342 000 000 $ de fonds publics. La Communauté urbaine est impliquée, avec les différents maires qui en font partie, puis le gouvernement du Québec, lui, sur 342 000 000 $, il n'a mis que 292 000 000 $! Est-ce qu'on pourrait avoir au moins des réponses d'un gouvernement qui dit qu'il veut faire plus avec moins, alors qu'il fait surtout moins avec plus?
Le gouvernement va dire qu'il est cassé. Parfait, il est cassé. Il y a des mesures qu'il pourrait adopter qui ne coûtent pas un cent. Je vais en donner un exemple de mesures qui ne coûtent pas un cent. Pas un cent! Une loi simplement. J'aimerais ça que tous ces beaux esprits, le député d'Argenteuil, tous ces gens-là qui sont bons dans les éditoriaux, qui sont bons dans la pensée profonde, qui sont bons dans la logique... Comment se fait-il qu'aux États-Unis... Je suis certain que le député de Louis-Hébert, qui est ici... Je suis certain qu'on discute ensemble et qu'on pense aux mêmes choses. Ce n'est pas une question politique.
Comment ça se fait, par exemple, qu'aux États-Unis certains dirigeants d'organismes dont les actions sont cotées à la Bourse, leur rémunération doit être rendue publique de même que tous les avantages que vous retirez de la compagnie votre rémunération et tous les avantages, les dépenses, les automobiles fournies, les chauffeurs, les droits d'achat d'actions ou d'options sur des actions, encore, les fonds de pension, fonds de retraite. Ça doit être rendu public dans tous les États-Unis, en Ontario. Nous autres, non.
La ministre qui, heureusement, est partie, qui était responsable des institutions financières, a quitté, Mme Robic, elle disait: Non, ce serait gênant. Voyons donc! On est dans le libre-échange. On nous parle des Américains puis de la compétition internationale. Alors que, dans tous les États-Unis et en Ontario, les salaires des dirigeants sont rendus publics, nous, ici: Non! J'entends des gens dire: Oui, mais on pourrait les rendre publics globalement. Non, non. Aux États-Unis, c'est individuellement, ce qui permet aussi maintenant de voir la critique dans l'administration des entreprises, où on critique les compagnies. Les actionnaires critiquent les compagnies qui donnent des augmentations de salaire à des gens, au fond, qui n'ont pas mérité parce qu'ils n'ont pas performé. Ça permet de l'évaluer.
(16 h 10)
Nous, regardons ce qui s'est passé à La Laurentienne, ici. Voilà une compagnie qui n'a pas performé. Voilà un groupe qui n'a pas performé. J'aimerais ça savoir quels ont été les salaires de ces dirigeants-là au cours des dernières années. Quand on a appris que, pour vendre la compagnie 1 $, M. Drouin a retiré 1 100 000 $. Puis là, on ne sait pas combien Desjardins lui a payé pour acheter son contrat, dont on ne sait pas pendant combien d'années il devait durer. Ce ne serait pas normal que, comme aux États-Unis, ce soit connu publiquement? Aux États-Unis, ce serait connu publiquement. On va demander tantôt la solidarité aux gens, on va couper des occasionnels, comme au ministère des Transports, qui avait 1500 occasionnels qui travaillaient quatre mois ou six mois par année, puis, en même temps, les dirigeants, on leur donne des primes, puis, aux recteurs, 15 %, 10 % pour performer. C'est quoi, la performance d'un recteur, entre vous puis moi, à part d'attendre les inscriptions des étudiants? Comment ça s'évalue, ça? On voit toutes sortes de gens dans le domaine public qui recoivent des primes de performance alors que leur performance est à peu près impossible à analyser, alors que, dans les secteurs où c'est possible, on n'a pas de règles.
Moi, je trouverais, par exemple, qu'il serait normal que les salaires des dirigeants de la Confédération Desjardins, des caisses populaires Desjardins, que même les dirigeants de chacune des fédérations soient publics. Quand on a 4 500 000 d'actionnaires, de sociétaires sur un territoire, est-ce qu'on n'est pas dans l'ordre public? Ça ne serait pas nécessaire et utile? Ça ne coûte rien au gouvernement, ça, mais ça permettrait, par exemple, de rendre les règles du jeu plus claires. Ça permettrait aux gens de voir, par exemple, si actuellement, dans la fusion Laurentienne-Desjardins, c'est Desjardins qui va s'ajuster à La Laurentienne, ou La Laurentienne à Desjardins. Et, habituellement, quand on est obligé de rendre son salaire public, c'est bien difficile de se donner des salaires dont on n'a pas honte et qu'on n'est pas capable de défendre publiquement. Comme députés, on le sait, à quel point c'est compliqué, les salaires des députés. Pourquoi? On n'est pas porté à se donner des augmentations quand les salaires sont publics. Ça ne devrait pas être caché, ça devrait être normal. Et, à ce moment-là, on pourrait demander plus de solidarité, parce que les gens sauraient que les salaires des dirigeants sont connus comme les salaires de ceux qui ne sont pas des dirigeants.
Ce n'est pas une question politique. C'est une question, moi, je pense... Dans la période que nous allons vivre M. le Président, je vais terminer là-dessus on va être obligé de demander beaucoup de solidarité aux Québécois. Et je pense qu'une des façons de leur donner le maximum de solidarité c'est de faire en sorte que les salaires des dirigeants d'entreprises soient rendus publics, comme aux États-Unis et comme Ontario, d'autant plus que nous sommes en Amérique du Nord, dans le libre-échange, puis on devrait être un peu plus internationaux, nous aussi.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître M. le député de Montmagny-L'Islet et whip adjoint. M. le député de Montmagny-L'Islet.
M. Réal Gauvin
M. Gauvin: Merci, M. le Président. Dans le discours inaugural prononcé la semaine dernière, nous faisons de l'emploi notre priorité, notre obsession et notre objectif. En fait, la création d'emplois représente pour notre gouvernement un défi quotidien. Par conséquent, nous allons occuper les prochains mois et les prochaines années à susciter les conditions propices à la création d'emplois par milliers pour les Québécoises et les Québécois qui souhaitent, nous le savons, mettre l'épaule à la roue et participer au développement économique du Québec. En ce moment, la reprise est véritablement amorcée, ce qui permet l'émergence d'idées nouvelles en termes de création d'emplois. Nous allons profiter pleinement de cette situation et mettre en place des mécanismes permettant de créer des emplois partout au Québec.
M. le Président, notre défi est d'abaisser le taux de chômage de 5 % au Québec d'ici la fin d'un prochain mandat. C'est un défi énorme, mais que nous relèverons si, tous ensemble, nous y consacrons l'énergie nécessaire. C'est pourquoi nous entendons déployer des efforts de créativité, d'audace mais aussi de générosité et de tolérance. Nous savons que c'est par l'emploi et le travail qu'on a un avenir, un avenir individuel mais aussi collectif. Nous savons également que c'est par l'emploi et le travail qu'on peut faire des projets et qu'on peut développer nos idées. Mais, par-dessus tout, l'emploi permet l'enrichissement collectif. C'est ce qui permet aux jeunes de donner leur pleine mesure, en permettant une meilleure distribution de notre richesse, et c'est ce qui permet d'assurer une plus grande justice sociale.
Dans ce contexte, le devoir de tout gouvernement est de promouvoir de toutes les façons possibles cette équité qui favorise une plus grande justice sociale. Pour cette raison, les gestes que nous allons poser devront soutenir les initiatives d'entreprises québécoises. Nous devons évaluer la façon dont nous pouvons soutenir la création d'emplois, nous devons promouvoir le développement de secteurs qui représentent une création d'emplois beaucoup plus réelle et rapide que certains secteurs dits traditionnels.
Tout en continuant dans cette direction, M. le Président, je voudrais assurer la population que nous allons agir dans les régions, car notre devoir concerne aussi le développement de tout le Québec. Le Fonds décentralisé de création d'emplois constitue, à ce titre, un bon exemple de la volonté du gouvernement d'agir sur tous les plans pour assurer des emplois de qualité à tous les citoyens, peu importe la région où ils vivent.
Et j'aimerais, à ce moment-ci, vous rappeler au discours inaugural, où notre premier ministre mentionnait que la véritable indépendance, celle des citoyens, passe par l'emploi. Le Québec détient déjà la liberté, les pouvoirs et les moyens qui lui donnent une maîtrise sur son avenir et sur son développement.
En vertu de ce Fonds, la grande région de Québec, que je représente ici à l'Assemblée nationale, dispose de 1 600 000 $ à dépenser jusqu'au 31 mars 1994. Cette même région disposera de 7 990 000 $ par année pour les trois années du programme, créant ainsi 1045 emplois par année.
Un autre programme, soit le programme d'infrastructures industrielles, technologiques et touristiques, mis en place en février dernier de concert avec le gouvernement fédéral, vise à permettre aux municipalités, à la faveur d'une aide financière, de réaliser divers travaux. Ces travaux de réfection, d'agrandissement ou de construction d'infrastructures doivent être utiles et d'intérêt pour la collectivité et avoir un impact déterminant sur l'emploi. En bout de ligne, ce programme fédéral-provincial permettra de créer et maintenir quelque 20 000 emplois directs au Québec et entraînera des investissements directs ou indirects de 1 580 000 000 $.
Ce ne sont là que quelques exemples d'initiatives qui permettront de créer des emplois en région, M. le Président. Ils démontrent en fait qu'une société peut atteindre les objectifs qu'elle s'est fixés lorsque son gouvernement mise sur des idées neuves et des manières d'agir différentes.
M. le Président, c'est ce à quoi nous allons consacrer toutes nos énergies, et nous allons nous acquitter de cette obligation en agissant sur le rôle et la place de l'État dans notre société. La réflexion que nous avons amorcée sur cette question amènera à agir afin de réinventer l'État. L'État doit se rapprocher des citoyens et se recentrer sur ses missions essentielles. Nous allons nous laisser guider par ce que doit être le rôle catalyseur et accompagnateur d'un gouvernement pour favoriser la création d'emplois. Ce sont ces principes qui détermineront notre action, parce que nous devons miser sur des idées nouvelles et des façons d'agir qui correspondent davantage à la réalité et aux besoins de la population du Québec. Ce que les citoyens désirent d'un bon gouvernement, c'est qu'il s'occupe des priorités d'aujourd'hui et de demain plutôt que de celles du passé. Les citoyens veulent que leur gouvernement soit avant tout efficace et plus juste dans sa façon d'aborder les problèmes et les solutions. Pour répondre aux désirs et aux voeux des Québécoises et des Québécois, notre gouvernement va dès maintenant remodeler sa manière d'exercer ses responsabilités.
M. le Président, nous avons le devoir d'assurer le développement équilibré de tout le Québec, et nous allons nous en acquitter, notamment en réalignant l'appareil de l'État. Nous allons agir en recentrant l'État sur les véritables besoins des citoyens. Nous allons, de plus, nous assurer que tous les ministères travaillent de concert afin de supporter le développement de l'emploi. Des objectifs précis seront fixés, et ces ministères disposeront de toute la marge de manoeuvre nécessaire pour atteindre les résultats que nous nous serons fixés dans l'intérêt des travailleurs québécois. Nous allons aussi mieux agir au meilleur coût là où l'intervention gouvernementale est requise et nous retirer des secteurs dans lesquels le privé peut mieux agir, là encore, au meilleur coût. Mais ces mesures, M. le Président, s'effectueront avec un seul souci en tête: que le contribuable en ait pour son argent et qu'il puisse bénéficier des services auxquels il s'attend. Notre action sera ainsi guidée par les besoins de la population, des besoins qui gravitent autour de l'urgence de créer des emplois. Certains nous accusent de vouloir démanteler la fonction publique. Au contraire, nous nous sommes engagés à maintenir le patrimoine de nos acquis sociaux. Nous devons maintenant être créatifs dans nos façons de faire.
(16 h 20)
M. le Président, nous sommes déterminés à agir pour que les Québécoises et les Québécois participent à l'enrichissement collectif. Nous allons remettre le Québec au travail par le biais de projets qui nécessiteront certes des efforts et de l'audace, mais qui donneront des résultats concluants et, plus encore, des emplois aux travailleurs, parce que notre véritable défi, c'est celui de redonner aux Québécoises et aux Québécois le goût d'agir et l'occasion de travailler. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un député de l'Opposition officielle, M. le député de Bertrand. M. le député.
M. Bertrand: De Portneuf, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Pardon?
M. Bertrand: De Portneuf.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Excusez-moi. M. le député de Portneuf, je m'excuse.
M. Roger Bertrand
M. Bertrand: Merci, M. le Président. Voici donc le temps de réagir au discours d'ouverture du premier ministre à l'occasion de la troisième session de la Trente-quatrième Législature. Un discours, M. le Président, qui a fait grand étalage de bonnes intentions, mais qui nous ramène en définitive devant cet étalage, au bilan des huit ou neuf dernières années des libéraux au pouvoir. On nous rappelle en fait tout ce que le gouvernement précédent et l'autre qui l'a précédé depuis 1985 n'ont pas réussi à faire, un étalage de phrases ronflantes, de réchauffé, d'engagements et de promesses dont on sait qu'elles ne seront pas tenues; bref, le discours d'un bord et la réalité d'un autre bord. Et une déclaration récente ou une invitation récente du premier ministre n'est, à cet égard, pas très rassurante. Il nous disait: Ne regardez pas ce que je dis, regardez ce que je vais faire. Mais, justement, c'est là qu'est le problème. Avec ce qui a été fait depuis maintenant huit ans, je pense qu'il n'y a rien pour nous rassurer.
J'utiliserai, M. le Président, avec votre permission, certains extraits du discours d'ouverture du premier ministre pour illustrer, justement, que le discours, d'un côté, et la réalité, d'un autre côté, c'est vraiment deux choses totalement différentes. Par exemple, on nous dit, dans le discours d'ouverture, qu'il est le temps de passer à l'action, le temps de bouger. Le premier ministre nous dit: «Nous avons, pour les prochains mois, des défis réels, tous, à relever ensemble. Le défi de redonner aux Québécois le goût d'agir et l'occasion de travailler.» Au cours des prochains mois. Il reste donc peu de temps.
Mais qu'est-ce qui a été fait depuis neuf ans, depuis huit ans par ce gouvernement, alors qu'on se retrouve, après quatre ans, entre autres, d'une récession sévère, avec un taux de chômage qui a connu des sommets et qui perdure, avec un niveau d'endettement qui, encore là, n'a jamais connu de précédent au Québec, avec un taux de taxation qui, vraiment, représente encore des sommets? M. le Président, si c'est le temps de bouger, je pense que le bilan des huit ou neuf dernières années du gouvernement n'a rien de très rassurant. Et on voit déjà un indice de ce sur quoi on va compter, justement, pour réaliser un certain redressement, alors que le premier ministre réfère à toutes les occasions que la reprise peut nous offrir de construire encore plus rapidement et solidement notre société. Parce que le problème est là, M. le Président. On aura attendu une éventuelle reprise pour donner comme l'illusion qu'on commence à bouger, alors que, depuis quatre ans, on connaît une très sévère récession et que ce n'est qu'en décembre dernier que, de façon très timide, le premier ministre du temps annonçait, à même un grand projet de 1 000 000 000 $ d'investissement, que 30 000 000 $ seraient investis cette année dans la relance. Vraiment rien pour relancer véritablement l'économie et l'emploi. Alors, qu'a fait ce gouvernement depuis huit ou neuf ans? C'est la question qu'on doit se poser devant les promesses qui nous sont faites aujourd'hui.
Une autre partie du discours du premier ministre nous parle de capacité d'écoute. On nous dit, et je cite: «Non seulement cette capacité d'écoute, mais aussi cette capacité d'action détermineront nos succès.» Qu'en est-il, justement? Quel est le bilan du gouvernement au niveau de sa capacité d'écoute? Rappelons-nous, M. le Président, la loi 145, où on a confié un certain nombre de responsabilités, à leur corps défendant, aux municipalités du Québec, dans des conditions, vraiment, où elles ont dû assumer un fardeau important de dépenses. Est-ce qu'il y a eu vraiment écoute, à ce moment-là? Je me souviens que le ministre du temps a fait sa réforme, vraiment dans son propre bureau, à toutes fins pratiques en ne consultant pas véritablement les principaux intéressés à cette réforme.
Qu'en est-il de la loi 142, M. le Président, dans le domaine de la construction, où on a modifié fondamentalement les règles du jeu dans le domaine de la construction résidentielle? Quelle a été la consultation? Un sommet bidon, qui s'est tenu à l'automne, au terme duquel on est arrivé, effectivement, avec un certain nombre de consensus, mais un projet de loi qui faisait tout sauf reprendre ces consensus-là. Alors, quand on nous parle de la capacité d'écoute du gouvernement, je pense qu'on peut l'inviter à repasser, M. le Président.
Un autre thème abordé dans le discours d'ouverture a trait à l'emploi. On en parle, en fait, tout le long de ce discours-là. Encore là, est-ce que le gouvernement, en rapport avec ses objectifs de relance de l'emploi, peut être considéré comme tenant un discours crédible? On dit là-dedans, et je cite: «Nous aurons, dans cette écoute et cette attention à l'action, à concentrer toutes nos énergies vers l'emploi, la création d'emplois, le maintien de l'emploi, de même que sur tous les leviers que peuvent permettre cette création, ce maintien et ce soutien de l'emploi.» Et on pérore sur cette question-là à différents endroits dans le discours d'ouverture. À un moment donné, on va aussi loin que dire: «Pourquoi l'emploi? Parce que c'est un signe fondamental du respect que nous avons pour nos concitoyens [...] c'est par le travail que nous pouvons tous, individuellement, retrouver la fierté et la dignité.» Quand je me réfère à des discours ronflants, c'est un peu ça, M. le Président. Tout le monde est pour la tarte aux pommes, mais quand c'est le temps de livrer la marchandise, il y a comme un problème. Qu'on se rappelle 1989, 1990, 1991, 1992, 1993. Taux de chômage au Québec: 9,3 %, 10,1 %, 11,9 %, 12,8 %, et à toutes fins pratiques, 13 %, en 1993. Alors, quand on parle de la fierté et de la dignité que nos concitoyens doivent pouvoir avoir grâce à de l'emploi de qualité, je pense qu'encore là le gouvernement peut repasser. Je pense, encore là, qu'il ne tient pas un discours qui est en ligne avec ses réalisations. Et le premier ministre de continuer, un peu plus loin, dans son discours, de la façon suivante: «Nous avons décidé et nous avons réitéré notre volonté de diminuer le chômage au Québec de 5 % dans les prochaines années.» 5 %, donc, à diminuer en quatre ans. Comment, dit-on? En misant sur une confiance sans bornes dans la reprise économique. Encore là, par des espèces d'effets externes au gouvernement. La capacité d'entreprendre est où, chez ce gouvernement-là? Je me pose la question.
Qu'on se rappelle, M. le Président, qu'il n'y a pas eu de mesures d'investissements autres que le plan de relance annoncé au mois de novembre passé qui prévoyait 47 000 emplois et des investissements de 1 000 000 000 $. Sur ces 47 000 emplois, 21 000, M. le Président, s'adressent aux personnes assistées sociales, par la création de 800 corporations intermédiaires de travail. Ce sont des emplois d'une durée de 26 semaines, 39 semaines dans le domaine de l'aide à domicile pour les personnes âgées. Alors, pour un nouveau gouvernement, comme on veut le faire croire à la population, le discours inaugural en matière d'emploi ressemble beaucoup plus à une reprise du plan de relance de M. Bourassa, en novembre dernier, qui, encore une fois, prévoyait cette année 30 000 000 $ d'investissements, et non pas 1 000 000 000 $. Après ça, on verra. C'est ce qu'on nous avait annoncé à ce moment-là.
Les moteurs de la relance. Dans son discours, également, le premier ministre nous parle justement d'un certain nombre de moteurs. On pourrait les regarder, il y en a cinq. Mais on peut en regarder seulement quelques-uns. Je pense que ça ne vaut pas la peine de passer l'ensemble des différents volets. On nous parle du deuxième moteur, celui de l'investissement: «Il est évident que, comme gouvernement, comme tous les gouvernements du monde occidental, maintenant, nous privilégions l'investissement par le secteur privé.» Problème: ça fait trois ans que l'investissement privé diminue au Québec de façon dramatique. Alors, quand on nous parle de ce moteur-là, je veux dire, quel genre de crédibilité pouvons-nous donner au présent gouvernement?
(16 h 30)
Sur le rôle de l'État, un peu plus loin, le premier ministre nous dit des choses comme: «Au-delà de ces moteurs de la création d'emplois et de l'économie, l'État lui-même est un acteur.» Il nous parle de l'État qui doit intervenir, mais qui, aussi, si on se fie aux actions du gouvernement, est plus souvent qu'autrement un poids, doit agir «par son silence, par son inaction dans d'autres cas», de façon qu'il ne vienne pas «nuire à l'expansion des entreprises québécoises». Imaginez la perspective dans laquelle nous place le présent gouvernement: un État rapetissé, une fonction publique vassalisée, à mettre au service d'un parti, à neutraliser, à en faire le moins possible, justement. Je pense que c'est l'étiquette du présent gouvernement, M. le Président. À cet égard, il est assez intéressant de constater jusqu'à quel point on a là une autre démonstration que les discours du gouvernement et la réalité, c'est vraiment deux choses. Référons-nous au dépôt des derniers crédits budgétaires, sur lesquels nous aurons l'occasion de revenir en un autre temps, M. le Président, j'en conviens. L'augmentation de 2,9 % des dépenses gouvernementales 1994-1995 prouve, selon nous, que l'opération réalignement du gouvernement est un échec. Rappelons que l'opération en question vise à réduire la taille de l'appareil gouvernemental et qu'elle avait été présentée comme le moyen d'assainir les dépenses publiques. En effet, les ténors de ce gouvernement-là nous ont chanté sur toutes les tribunes que le réalignement de l'État sortirait le Québec du piège de l'endettement. On n'a jamais été aussi endettés.
Et, en lisant les crédits budgétaires pour la prochaine année, on constate que les libéraux font exactement le contraire de ce qu'ils ont toujours dit. En effet, malgré la réduction prévue de 2400 postes, environ, en équivalent temps complet, les dépenses gouvernementales augmenteront de 1 200 000 000 $ en 1994-1995; de mémoire, 1 % de plus que l'inflation. On réduit justement la taille de la fonction publique, et on voit augmenter les dépenses. Comment est-ce qu'on peut nous expliquer ça? On reviendra avec ces questions-là en temps opportun, lorsque nous examinerons, justement, les crédits gouvernementaux.
Alors, on tente depuis plusieurs années, dans ce gouvernement-là, de faire porter le blâme du dérapage des finances publiques sur les fonctionnaires de l'État. Et le dépôt des derniers crédits démontre qu'un tel argument ne sert qu'à camoufler la vérité, dans un but, au fond, purement politique. La hausse du déficit émane de l'absence d'une politique efficace pour relancer l'économie. Seule une économie prospère donnera les ressources fiscales nécessaires au bon fonctionnement du gouvernement. Plutôt que d'agir en ce sens, le gouvernement préfère s'en prendre à ses employés, augmenter les taxes de toutes sortes, appauvrir la population et compresser les dépenses au chapitre des services sociaux à une époque où les besoins s'accroissent de façon alarmante.
M. le Président, voilà donc le résultat, justement, des actions du gouvernement jusqu'à présent. Alors, quand on nous prêche toutes sortes de bonnes intentions dans le discours inaugural, je dois vous dire que, en termes de crédibilité là, j'ai des petits problèmes à l'égard du gouvernement.
On y va également de solutions miracle dans le domaine public, hein? On veut mettre de l'ordre. Alors, de quelle façon procède-t-on? On propose la formation de comités. Imaginez donc! Encore là, du réchauffé. C'est tout ce qu'on trouve comme idée. «C'est à ce titre et là je cite, M. le Président d'ailleurs [...] que le gouvernement a demandé à un groupe de travail en matière de législation et de réglementation du revenu [...] de restaurer l'équité fiscale, de diminuer les coûts pour le contribuable...» etc. On trouve une autre suggestion de comités. «Nous avons également un peu plus loin [...] mis sur pied un comité visant à, très rapidement, ces jours-ci, faire rapport au gouvernement sur les perspectives de déréglementation, de réduction de la paperasse et d'amélioration des rapports, encore une fois, entre le gouvernement et les citoyens.» Encore une fois, la même méthode.
Ce n'est pas la première fois qu'on parle de déréglementation, que le gouvernement actuel s'engage par rapport à ça. Déjà, en 1985, le 16 décembre 1985, la ministre du temps, Mme Bacon, nous disait: Le gouvernement entreprend dès maintenant le processus de la déréglementation. Un ministre a déjà le mandat de procéder dans ce sens. Qu'est-ce qu'il y a de nouveau, M. le Président? Strictement rien. Qu'est-ce qu'il y a de rassurant? Fort peu de choses dans ce discours.
Et un autre comité. Enfin, je passe par-dessus ça, mais on nous parle également d'engagement... Il s'agit de réitérer la détermination du gouvernement de respecter ses engagements en matière, par exemple, d'endettement public, alors qu'on sait qu'on est toujours dans des sommets de ce côté-là.
Un autre thème abordé dans le discours concerne l'intégration des jeunes, au fond. On dit: «Dans toutes les régions du Québec [...] le gouvernement a cette responsabilité première d'assurer le développement équilibré de tout le Québec. La clé de la sérénité et de la stabilité de notre société réside dans cette capacité de pouvoir donner à chaque citoyen et chaque citoyenne ce sentiment qu'il fait partie de la grande famille québécoise, où qu'il habite.» Et on précise: Chez les jeunes, «notre responsabilité à leur égard est [...] de leur permettre de s'insérer dans la trame économique du Québec, de pouvoir réaliser tous leurs talents au service non seulement de leur propres ambitions, mais de celles de tous ceux qui les entourent.» Or, M. le Président, est-il nécessaire de se rappeler la situation, justement, du chômage chez les jeunes actuellement au Québec?
Je vais commencer uniquement en 1989 ou 1990, disons: 1989, 11,8 %; 1990, 13,1 %; 1991, 16,5 %; 1992, 16,6 %, 1993, 17 %. Quand on parle d'intégration harmonieuse de nos concitoyens à la collectivité, et des jeunes, entre autres, je pense que l'emploi constitue le moyen le plus valable. Et on peut voir, d'après le bilan actuel, qu'il n'y a rien de très rassurant. Il faut prendre conscience, M. le Président, que le chômage touche actuellement près de 145 000 jeunes, et, lorsque certains se trouvent du travail, les conditions sont de plus en plus précaires: travail occasionnel, temps partiel, travail à contrat, à la pige, faible rémunération, conditions médiocres, absence d'avantages sociaux, travail au noir, double emploi, absence de représentation syndicale ou de protection de quelque nature que ce soit. Alors, au lieu d'améliorer le sort des jeunes, le gouvernement les aide à s'enliser: 158 000 emplois perdus entre 1990 et 1993. C'est ça, le bilan. Alors, quand on nous parle d'une intégration des Québécoises et des Québécois à la société, et des jeunes, notamment, via justement l'emploi, je pense que, encore là, on a des problèmes de crédibilité au niveau du discours.
On nous parle également, dans le discours d'ouverture, de l'importance que le gouvernement accorde au développement économique régional et de l'occasion que le gouvernement aura bientôt de négocier une nouvelle entente avec le gouvernement fédéral en cette matière. Est-ce qu'il est nécessaire de se rappeler, M. le Président, que le plan Côté de 1988 prévoyait ceci, bon, que l'entente Canada-Québec sur le développement économique constituait une armature du plan d'action de 1988, alors qu'au 31 décembre 1992, à trois mois de la première échéance de l'entente, les déboursés de 281 000 000 $ représentaient à peine 34 % des sommes prévues, 820 000 000 $? Alors, quand on parle de développement régional, de nouvelles ententes, qu'on fait miroiter, entendez-vous, que les millions vont nous tomber sur le dos suite à de nouvelles négociations, la propre performance du gouvernement dans des ententes antérieures n'est certainement pas rassurante à cet égard. Et on pourrait donner d'autres exemples de... certainement pas de réussite, en tout cas, en ce qui regarde la mise en oeuvre ou les tentatives de mise en oeuvre du plan Côté, qui a dû, à toutes fins pratiques, être mis de côté, d'ailleurs.
M. le Président, on pourrait continuer de cette façon, dans le détail, au niveau de différents éléments du discours du budget. J'irais simplement en choisissant un peu au hasard un autre engagement que s'apprête à faire le gouvernement: importance recouvrée de l'agriculture. Imaginez donc! «L'agriculture retiendra également notre attention», dit le premier ministre. Bon, on évoque, bien sûr, les rapports du GATT puis l'attention particulière qu'il faut accorder au domaine de l'agriculture, dans les circonstances.
Est-ce que je peux rappeler à l'attention de cette Assemblée que plusieurs indicateurs économiques démontrent, depuis 1986, que l'agriculture québécoise recule sur tous les fronts? Le poids de l'agriculture dans l'ensemble de l'économie québécoise a diminué de 20 %, M. le Président, depuis 1986. En 1992, le revenu net d'un producteur agricole n'était plus que de 17 217 $, une diminution en termes réels de 13 % par rapport à 1985. En 1993, les emplois agricoles s'élevaient à 70 000, soit une perte de 15 100 depuis 1985 ou 18 % de la main-d'oeuvre agricole. Le déficit commercial des produits alimentaires a augmenté à 608 000 000 $ en 1992, une hausse de 79 % par rapport à 1985. On voit bien que, depuis qu'ils sont là, les libéraux ont supprimé, à toutes fins pratiques, les progrès que nous avions réalisés dans la période 1977 à 1985. On peut dire que les libéraux ont abandonné ce secteur économique qui génère beaucoup d'emplois au Québec.
Et quand on nous parle, dans le discours d'ouverture, que le ministre de l'Agriculture annoncera bientôt la date des assises sur l'industrie bio-alimentaire, qui tiendra ses assises sous le thème de «la conquête des marchés dans le nouveau contexte mondial», il n'y a rien de rassurant, M. le Président, quand on sait qu'il y a eu un sommet sur ce thème pas plus tard qu'en juin 1992, et qu'on devrait, à ce stade-ci, en être à l'étape des actions et des réalisations et non pas à l'étape de la répétition d'un exercice qui avait été mené il y a déjà deux ans.
Alors, M. le Président, encore un autre exemple, juste pour illustrer le fait que, quand le premier ministre nous parle de ses engagements au nom du gouvernement, je pense qu'on peut être largement soupçonneux quant à sa capacité, justement, de livrer en quelques mois la marchandise qu'il n'aura pas su livrer pendant huit ou neuf ans.
(16 h 40)
Un dernier point, M. le Président. Bien sûr, ça va de soi, le premier ministre y va de sa profession de foi sur le plan constitutionnel quand il nous dit, bon: «Aujourd'hui toutefois, les citoyens du Québec, comme ceux du Canada, estiment que leurs gouvernements doivent s'attaquer avec énergie au défi de l'emploi et à l'assainissement des dépenses publiques plutôt qu'au règlement des différends constitutionnels». Et de continuer à l'effet que, bon, finalement, on pourra prospérer très bien dans le cadre constitutionnel actuel.
Et, pas plus loin que quelques lignes plus tard, M. le Président, le même premier ministre y va d'une sortie assortie d'un constat d'échec. En une minute, M. le Président: «Mais, par son pouvoir de dépenser, le gouvernement fédéral s'est impliqué au fil des ans dans des domaines de la juridiction du Québec. Ces incursions ont introduit des chevauchements, duplications et dédoublements qui, dans le contexte de l'endettement croissant, aggravent une situation budgétaire dont les principales victimes sont les contribuables de tout le pays. Ces incursions ne sont pas justifiables. Le dossier de la main-d'oeuvre en est un cas évident: nos gouvernements se tiraillent pendant que les chômeurs attendent». Voilà, M. le Président, je pense que le premier ministre a très bien fait le constat que nous faisons déjà depuis longtemps et qui nous amène justement à vouloir changer fondamentalement le régime actuel.
En terminant, M. le Président, nous sommes devant un gouvernement qui dit blanc et qui fait noir. Nous sommes devant un premier ministre qui nous dit: Ne regardez pas ce que je dis, regardez ce que je fais. Bien, c'est justement ça qui nous inquiète. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Portneuf. Alors, nous poursuivons le débat sur le discours d'ouverture prononcé par M. le premier ministre, le 17 mars dernier, et sur les motions de censure présentées par M. le chef de l'Opposition officielle et M. le député de D'Arcy-McGee. Je cède la parole maintenant à M. l'adjoint parlementaire au ministre de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie et député d'Orford. M. le député, la parole est à vous.
M. Robert Benoit
M. Benoit: M. le Président, merci. C'est avec grand plaisir que je m'adresse à cette Assemblée cet après-midi pour vous parler un peu du discours que faisait en cette salle le premier ministre, il y a quelques jours.
J'ai entendu, depuis quelques heures, les gens de l'Opposition, bien sûr, nous dire comment tout allait mal. Et si j'étais péquiste, M. le Président, moi aussi, je dirais que ça va mal. D'abord, parce que c'est leur job. Ils sont payés pour dire ça, de un. De deux, réalisez-vous qu'entre 1980 et 1994, M. le Président... Il y avait 40 % de Québécois, en 1980, qui étaient pour l'indépendance; en 1994, il y en a 43 %. Imaginez-vous, si j'étais indépendantiste, moi, si je m'ennuierais. Je m'ennuierais tellement que je ferais un petit calcul: à coups de 3 % par 14 ans, ça me prend combien de temps pour arriver à la souveraineté du Québec parce que, vous savez, la souveraineté, c'est mieux que l'indépendance et j'arrive à un âge où je n'existerais même plus, auquel peut-être je pourrais rêver de voir l'indépendance.
Or, ces gens-là, vous savez, ils sont malheureux. Ils sont malheureux dans leur soupe à l'heure du midi, ils sont malheureux le matin quand ils se lèvent, puis ils sont malheureux le soir. Et peu importe quelle nouvelle il y a, qu'elle soit bonne ou mauvaise, quand on sait que l'indépendance, on ne la verra pas de notre vivant, parce que ça progresse de 3 % par 14 ans, bien, on est malheureux, quand on est indépendantiste.
Et, depuis plusieurs jours, je les entends nous dire comment ça va mal au Québec. Eh bien moi, je vais vous dire comment ça va bien au Québec, M. le Président, parce que, historiquement, les gens qui m'ont vu aller depuis nombre d'années savent que les gens heureux sont des gens positifs, des gens qui regardent par en avant, et surtout quand ils ont un chef de la qualité du nôtre, qui parle d'emplois, et qu'on le suit... On le suit puis on va y arriver.
M. le Président, savez-vous qu'au Québec il y a pas mal de choses positives qui se passent. J'étais en commission parlementaire, avec Hydro-Québec, la semaine passée. C'est la plus importante industrie, ici au Québec, à tous égards. 94 % des Québécois sont heureux d'Hydro-Québec, de la performance d'Hydro-Québec, de la façon dont ils sont traités par Hydro-Québec; 94 %, M. le Président, c'est pas mal loin, ça, des 43 % dont je vous ai parlé tantôt qui étaient pour la souveraineté du Québec. Il y a des gens heureux qui disent... En tout cas, chez nous, dans mon petit village de Austin, on a un bon service avec Hydro-Québec. C'en est une, première statistique.
Savez-vous, M. le Président, que les gens au Québec réalisent qu'on a le plus bas taux de grève, d'arrêt de travail dans l'État québécois, dans la province de Québec, depuis 30 ans? Trente ans là, ça fait pas mal d'années, ça. Le plus bas taux de grève qu'on n'a jamais vu. Les gens travaillent, et ils retournent le matin travailler, et ils ne pensent pas à faire la grève. Les choses vont bien, les relations de travail sont harmonieuses. Notre ministre de l'Industrie et du Travail a fait des choses extraordinaires dans ce secteur-là. Ça, ils n'en ont pas parlé. Depuis une semaine, je les écoute parler, là, ils sont malheureux avec le 43 % d'indépendantistes, mais ils ont oublié de mentionner ça: plus bas taux de grève depuis 30 ans dans l'histoire du Québec.
Savez-vous, M. le Président, de quel pourcentage nous avons augmenté nos exportations? Vous savez que le Québec, depuis l'arrivée de Robert Bourassa en 1985 et suivi par M. Johnson, a eu une politique agressive pour l'exportation. Combien de petites PME, dans mon propre comté... J'en parlais, il y a quelques semaines, de ce bonhomme qui a patenté ce commutateur à distance pour partir vos voitures l'hiver. Bien, le marché du Québec, ça n'a pas été long qu'il l'a rempli au complet. Il est rendu dans les grandes chaînes américaines. M. le Président, il y a eu, grâce aux politiques du gouvernement libéral depuis 1985, grâce à Robert Bourassa et à Daniel Johnson, une augmentation, dans la dernière année, de 22 % des exportations au Québec. Dans certaines régions, comme la mienne, plus de 30 %. Il y a quelque chose là, il y a du monde qui travaille, il y a du monde qui veut compétitionner avec les meilleurs de l'univers, que ce soit aux États-Unis, en Amérique du Sud.
Vous avez vu à la télévision, la semaine dernière ils n'en ont pas parlé, c'était le gouvernement fédéral cette grande exposition au Mexique. L'ensemble des compagnies dynamiques du Québec étaient représentées là. J'écoutais à Radio-Canada une émission où combien d'hommes et de femmes d'affaires revenaient du Mexique et nous disaient: Nous allons développer ces marchés-là. Bien, M. Bourassa a appuyé l'entente de libre-échange avec les États-Unis et a appuyé ensuite l'entente avec le Mexique. Ces politiques mises par le Québec, les maisons du Québec, maintenent que nous avons fait des maisons économiques avec nos différentes résidences un peu partout à travers le monde, maintenant, nous en avons des fruits. Dans le milieu d'une récession, nous exportons, nous augmentons nos exportations de 22 %. M. le Président, je pense que ça va bien au Québec.
Le ministre de l'Industrie et du Commerce, M. Gérald Tremblay, a annoncé il y a quelques semaines, avec le Conseil des ministres, plus de 1 400 000 000 $ pour la création d'emplois au Québec, directement. Ces mêmes gens-là, qui sont toujours malheureux avec les 43 % d'indépendantistes, ces même gens-là, on vient de nous dire combien dans leurs villages respectifs, combien dans leurs PME respectives ou dans la grande entreprise, telle que Canadair, Bombardier... Bombardier, à Valcourt, vient de créer 800 jobs, il y a deux semaines. Ça, on n'en a pas parlé, M. le Président. Alors, cette politique de 1 400 000 000 $, partout, que ce soit le petit inventeur dans ma petite ville de Austin, que ce soit l'inventeur un peu plus important, que ce soient même les gens sur l'aide sociale, il y a un programme pour aider ces gens-là, pour revenir à l'entreprise, pour créer leur propre entreprise, M. le Président.
Je vous ai parlé de 1 400 000 000 $ pour la création d'emplois dans l'entreprise. Je vous parle maintenant de 1 500 000 000 $ que le ministre des Affaires municipales nous a annoncé. Chaque municipalité il y en a 1500 au Québec chaque municipalité du Québec, les 22 municipalités du comté d'Orford, sans exception, m'ont dit: Nous, on va participer. Nous, on va améliorer nos systèmes d'eau. On va améliorer nos infrastructures de transport. On va même, dans plusieurs secteurs, dans plusieurs municipalités, améliorer des choses pour la qualité de vie: le loisir, les arénas, peut-être un petit centre communautaire en passant pas loin de la rue principale. M. le Président, 1 500 000 000 $, et ça ça va aller vite. Vous avez vu les formulaires? Peut-être qu'ils ne les ont pas regardés, ils sont tellement préoccupés par ces 43 %, M. le Président. Moi, je l'ai lu, le formulaire, je l'ai dans ma serviette: deux petites pages, trois petites pages. C'est simple. Tu nommes la municipalité, tu nommes ton projet, un peu de description, si possible un petit plan avec ça, et comptez sur le ministre des Affaires municipales, ils vont avoir une réponse rapidement. On veut remettre le monde à l'ouvrage rapidement. C'est ça, le discours du trône, M. le Président, l'emploi, et nous allons y arriver.
Les deux chiffres que je vous ai donnés, M. le Président, c'est 2 900 000 000 $ sur deux ou trois ans. C'est beaucoup d'argent, ça, et je pense que nous allons créer les emplois que nous désirons.
M. le Président, c'est M. Johnson qui disait, pendant ce discours, que la véritable indépendance, la véritable indépendance des individus, la véritable indépendance des peuples, c'est d'être économiquement forts. Et M. Johnson disait que, les pouvoirs, nous les avons déjà. Ces gens-là ont été capables de faire des lois aussi poussées, où on a brimé des libertés individuelles, lois qui se sont fait renverser en Cour suprême, fois après fois. La loi 101, ces gens-là ont été capables de passer des lois aussi loin que celle-là. Nous avons, au Québec, tous les pouvoirs que nous désirons pour faire notre développement économique.
(16 h 50)
M. le Président, ça va bien au Québec. Nous avons un leader absolument extraordinaire, le nouveau chef du Parti libéral du Québec. Cet homme-là, il a d'abord, vous savez, la jeunesse, mais il a aussi l'expérience. Il est ici, à l'Assemblée nationale, depuis une quinzaine d'années. C'est une famille de gens en politique. En Europe, on parle de tradition politique, des gens qui, de père en fils, ont fait ça. C'est le cas de M. Johnson, un homme qui est venu au monde comme lui-même le dit: J'ai été saucé dedans très jeune un homme qui a goûté à la politique très jeune et qui a cette expérience, non seulement de la politique du Québec, mais qui a étudié dans les grandes universités à travers le monde, qui est revenu ici. Mais, plus que ça, M. Johnson, avant d'aller en politique, est allé chercher une expérience dans le milieu des affaires. Et, la semaine passée, j'entendais le leader de l'Opposition, et ça me faisait mal. Il essayait d'insinuer, on connaît son style... Il est en vacances, là, c'est plus calme un peu ici, à Québec en ce moment. On connaît son style batailleur de rue, devrais-je dire. Alors, il essayait d'insinuer que M. Johnson arrivait d'une grande entreprise, et peut-être que... Des insinuations pas très correctes, là. Bien, moi, je vais vous dire: Nous sommes voisins des États-Unis, M. le Président, et moi, des gens de la trempe de M. Johnson, qui acceptent de donner un certain nombre d'années pour la chose publique, j'ai énormément d'admiration pour ça. Et, aux États-Unis, quand tu vois les Iacocca de ce monde, que le président américain appelle «le président de Chrysler» et qu'il dit: M. le président de Chrysler, j'aurais besoin d'aide pour amasser, pour la statue de la Liberté, 200 000 000 $, pourriez-vous m'aider, M. le président... Et le président Iacocca dit, dans son livre: Je n'ai pas hésité une seule seconde, je devais rendre service à l'État. Quand le président de Merrill Lynch, Pierce, Fenner & Smith, un des plus grands hommes d'affaires, fut appelé par le président, lui aussi, il conte ça dans ses mémoires, il dit: Je n'ai même pas hésité. C'était mon devoir de citoyen, quand le président m'a appelé, d'y aller. M. Johnson, ça a été un très bon homme d'affaires. Il est maintenant ici, et nous allons pouvoir nous servir de cette expérience qu'il amène.
M. le Président, ça va bien non seulement au gouvernement, mais au Parti libéral du Québec. Réalisez-vous, M. le Président, que dans les démocraties modernes, peu de partis politiques et à peu près pas de gouvernements ont eu un règne de huit ans et demi sans aucune cause d'éthique importante? Aucun député de l'Assemblée nationale, autant de l'Opposition que de notre côté, aucun membre de notre gouvernement n'a eu une cause d'éthique depuis que nous sommes là, en 1985. C'est tout à fait extraordinaire et exceptionnel dans les démocraties, M. le Président. À l'occasion, je vois ces gens-là, de l'Opposition, essayer de faire des pétards mouillés, essayer de nous dire qu'il y a des choses épouvantables qui se passent. La dernière, c'est le député de Lévis. Quel magouilleur professionnel! Essayant de dire que le recteur de l'Université Laval a eu une augmentation de salaire. Des chiffres démesurés. Le président du conseil d'administration, M. Béland, le recteur de l'université, les deux conjointement, en même temps, disaient: Ce n'est pas vrai que le recteur a eu une augmentation de salaire. Son salaire est gelé, et il sera gelé encore pour deux ans. Et le député de Lévis continuait, n'écoutant que son courage, à prétendre qu'il avait une augmentation de salaire. Le président du Mouvement Desjardins a dû revenir à la charge; le recteur a dû aller en conférence de presse, disant: C'est faux, ce n'est pas vrai, c'est un pétard mouillé, mon salaire est gelé. Il ne cesse pas, il continue de prétendre que le salaire du recteur de l'Université Laval a été augmenté.
M. le Président, je pense que ça va bien au Québec. Le déficit de l'Ontario, en avez-vous une idée? On va se comparer un peu, M. le Président. J'écoutais le dernier député qui a parlé avant moi. Réalisez-vous que le déficit de l'Ontario, entre 1989 et 1994, fut augmenté par 10, par une multiplication de 10, 10 fois? Celui du Québec, dans la même période de temps, M. le Président, a été multiplié par deux. Le déficit de l'Ontario, il n'y avait pas de déficit en 1989, c'était 90 000 000 $; en 1994, ils auront 10 000 000 000 $ de déficit en Ontario, nos voisins. Nous, au Québec, nous avions 1 600 000 000 $, environ, en 1989, et nous aurons 4 100 000 000 $ en 1993-1994. Il faut se comparer à des choses comparables, M. le Président. On n'est pas encore un État souverain avec 43 %. J'ai calculé que je serais mort quand ils arriveraient à faire l'indépendance du Québec. Mais, quand on se compare à nos voisins de l'Ontario, des gens qui, historiquement, ont été plus riches que nous, on s'aperçoit que leur déficit sera deux fois et demi ce que sera le déficit du Québec cette année. M. Johnson a été un gardien important des deniers publics du Québec. M. Levesque, comme ministre des Finances, a été un très bon ministre des Finances, a tenu, ce que nos parents disaient, le sac serré, là. Et M. Johnson a aussi tenu le sac serré, M. le Président. Il a contrôlé les dépenses du Québec, et ça, j'aime ça, moi. J'aime ça, savoir que celui qui tient le sac ne permet pas que l'argent aille tous azimuts. Et ça, M. Johnson l'a fait et va continuer à le faire comme premier ministre du Québec.
Vous savez, si on veut parler de gestion tous azimuts, là, je lisais récemment: La privatisation de la Société des alcools. Vous avez vu ce que le juge a dit, là. C'est épouvantable! Le juge a dit: Le ministre de l'époque, M. Biron, c'est épouvantable ce qu'il a fait. Là, je vois que le PQ, ils prennent ce gars-là... Ça va nous coûter 7 000 000 $ pour réparer les pots cassés de la privatisation de la Société des alcools du Québec. Ils prennent ce même ministre-là, de l'époque, M. Biron, et ils le mettent sur un comité. Le député avant moi a parlé de comités. Bien, c'est ce même gars-là qui va faire dépenser 7 000 000 $ au Québec, parce qu'ils ont mal privatisé la Société des alcools, à l'époque. Puis, on a été obligé de tout reprendre ça. C'est ce même-là que le PQ est après mettre sur un comité pour créer de l'emploi. Je ne vous parlerai pas des autres qui sont là, il n'y en a jamais un là-dessus qui a créé une seule job dans sa vie!
M. le Président, je vous garantis... Comme le disait si bien le leader de l'Opposition, la semaine passée: Barrez les portes pour ne pas qu'ils ne sortent, parce que, plus ils vont sortir, plus ils vont causer du trouble!
M. le Président, je voudrais finir en vous parlant, pendant deux minutes ça non plus, ils n'en ont pas parlé de ce document que nous avons eu à la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté. Vous vous rappellerez qu'il y a eu deux commissions. Nous, les libéraux, nous avons assisté aux deux commissions, parce qu'on était prêts à entendre, on était prêts à écouter. Eux, comme toujours, possédant la vérité, ne sont pas venus à la première commission, ils ne sont venus qu'à la Commission d'étude des questions afférentes à l'accession du Québec à la souveraineté.
À un moment donné, on s'est demandé: Qu'est-ce qu'il adviendrait si nous devenions souverains? Qu'est-ce qu'il adviendrait si nous devenions souverains? Qu'est-ce qu'il adviendrait de la situation économique du Québec? Et nous avons demandé à un M. Mahesh Kotecha, un des grands de ce monde dans les agences de crédit américaines... M. Kotecha, il a travaillé, entre autres, avec Moody's, avec Merrill Lynch, Pierce, Fenner & Smith; il a travaillé avec les grands de ce monde.
Je voudrais vous citer quatre pages, M. le Président. Moi, vous savez, il n'y a pas grand-chose qui me fait peur. Les gens qui me disent: Vous autres, les fédéralistes, vous faites peur au monde... Je n'ai pas besoin de faire peur à personne. Je crois que, le Canada, c'est un des plus beaux pays au monde. Je crois que les libertés fondamentales les plus grandes, nous les avons. Je crois que mes enfants ont bien grandi dans ce système-là, et moi aussi. Alors, je n'ai pas besoin de faire peur à personne, mais je veux être réaliste, d'autre part, et c'est ce que je vais faire.
Alors, ce monsieur, il a été invité chez nous, mais le document a été mis public seulement la semaine dernière. Qu'est-ce qu'il dit, à la page 6 de son document? Je vais vous le citer rapidement. Il dit: Les agences ont exprimé certaines inquiétudes à propos des questions constitutionnelles et des perspectives budgétaires à la page 6 du document traduit. Toujours à cette page, il dit: Si le Québec décidait de se séparer pour devenir un État souverain, il pourrait arriver au cours du processus que sa cote de crédit soit réévaluée et modifiée à la baisse pour une période indéterminée. Il ne nous dit pas que ça va être pour la période où tel chef est là, le temps qu'ils changent de chef, le temps que l'autre arrive d'Ottawa. Il ne nous dit pas ça, là. Il dit: Pour une période indéterminée. Alors, vous savez, «indéterminée», c'est l'éternité, c'est long un peu. Un peu plus loin, à la page 15, ce même bonhomme, qui est un grand de ce monde c'est un grand de ce monde lui, nos problèmes, il en analyse à l'année longue, de tous les pays. Ce sont des agences de crédit, et ils n'ont pas de préjugés favorables ou défavorables, pas plus quand ils entrent en Pologne ou en Belgique. Ces gens-là regardent ça bien froidement. D'ailleurs, quand il était venu faire la présentation, j'avais assisté à cette présentation, et je dois vous dire que ce n'était pas le genre de gars pour prendre panique. Bien calme, il en avait vu d'autres, lui.
Alors, à la page 15 du document traduit, un peu plus loin, ce même monsieur nous dit: L'évaluation des risques économiques et politiques que présenterait un Québec souverain présente une multitude de difficultés. Il est possible de prévoir avec précision quelle serait sa cote de crédit et les conséquences qui en découleraient en matières de finances et d'emprunts. Un peu plus loin, M. le Président, à la page 16, il dit: Tous souhaitent... C'est peut-être là l'essence du document, le plus important. Il dit: Vous savez, quand on prêche à 43 %, on n'a pas grand-chose à perdre, on sait qu'on ne gagnera pas. Alors, il dit: Tous souhaitent une séparation à l'amiable et des conséquences favorables, mais des précédents historiques ont montré qu'une cession des pouvoirs politiques ou une rupture amorcée dans un contexte où il existe des différences d'ordre linguistique, religieux ou culturel peut engendrer un climat acrimonieux. Je pense, par exemple, aux cas de la Belgique et de l'Irlande. Ce n'est pas moi qui dis ça, c'est un monsieur qui en analyse à la journée longue, des pays et des provinces.
(17 heures)
Un peu plus loin, à la page 18, il dit: Des secteurs comme l'industrie laitière et celle du textile... Ça, ça a été mon plus gros cheval de bataille au dernier référendum, parce que, dans les deux cas, chez nous, on a l'industrie laitière et le textile. Il dit: Des secteurs comme l'industrie laitière et du textile cesseraient d'être protégés, et les partenaires commerciaux s'opposeraient aux avantages consentis dans différents secteurs.
M. le Président, vous me faites signe que mon temps est terminé. Je vous en remercie, M. le Président. Je veux finir en vous disant que le Québec a un leader extraordinaire en la personne du nouveau chef du Parti libéral, a une équipe extraordinaire. Et, vous savez, être leader, c'est mettre les priorités à la bonne place, dans les bonnes séquences, à la bonne vitesse, avec les bonnes personnes. Et je pense que, quand M. Johnson parle d'emplois, chez nous, au Parti libéral, on y croit, et nous allons y arriver. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford. Je rappelle aux membres de cette Assemblée que nous poursuivons les débats sur le discours d'ouverture prononcé par M. le premier ministre le 17 mars dernier et sur les motions de censure présentées par M. le chef de l'Opposition officielle et M. le député de D'Arcy-McGee. Et je cède la parole à M. le député d'Anjou. M. le député, la parole est à vous.
M. Pierre Bélanger
M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. J'écoutais attentivement le député d'Orford et je me rendais compte que lui aussi se rendait compte aussi, de toute façon, que le fameux message de son premier ministre ne passait pas la rampe, ne passait pas la barre. On le voit d'ailleurs dans le dernier sondage. Donc, ayant lu ces éditoriaux, ce qu'on remarque, c'est que, maintenant, on va faire la chasse aux séparatistes, M. le Président. C'est la chasse aux séparatistes qui est déclenchée. Pas aux souverainistes. Parce que, voyez-vous, un souverainiste, ça pourrait avoir quelque chose d'affirmatif, de positif. Non, non. Les méchants séparatistes.
On revient, M. le Président, exactement au bon vieux discours, au bon vieux langage par notre cher aimé ancien premier ministre, Pierre Elliott Trudeau, et repris maintenant de plus belle par son fidèle lieutenant d'alors, M. Jean Chrétien. Non, non. Surtout, ne parlons pas de souverainistes. Parlons uniquement de séparatistes. Ne parlons pas de souveraineté du Québec, mais de séparation du Québec. Ne parlons, évidemment, que des possibilités les plus noires, que des plus sombres scénarios. Alors, c'est exactement, je pense, ce qu'on va faire maintenant du côté ministériel, voyant que le message, évidemment, de rêve, d'espoir, mais d'espoir qui est basé absolument sur tout ce qu'on pourrait dire d'artificiel... On voit que les gens n'acceptent pas, les gens sont sceptiques vis-à-vis de ce message qui est dénué de tout fondement. Donc, on va y aller tout simplement par des messages négatifs. On va attaquer les séparatistes, les méchants séparatistes qui veulent briser ce beau Canada où tout va bien, M. le Président.
Tout va bien. Écoutez le député d'Orford, tout va bien dans son village, comme il l'a dit. Tout va bien. J'espère qu'il sort de son village, M. le Président. J'espère qu'il rencontre des gens en dehors de son village, M. le Président, parce que ça ne va pas bien au Québec. Vous le savez, M. le Président, vous aussi, vous rencontrez des gens de votre comté, vous rencontrez des citoyens, comme ici, tous les députés en cette Chambre. On voit des jeunes avec des diplômes qui ne trouvent pas d'emploi, qui ont un avenir bouché. La main-d'oeuvre spécialisée qui ne trouve pas d'emploi, qui envoie des centaines de c.v. avant d'avoir uniquement une lueur d'espoir quant à un emploi permanent. Pas uniquement un emploi à contrat, parce que, maintenant, ça va être la génération des gens à contrat qu'on va avoir au Québec. Des gens de 50 ans qui se voient licenciés après avoir travaillé 20, 25 ans pour une compagnie, puis on leur dit maintenant qu'ils ne sont plus bons à rien. Plus aucune perspective d'emploi pour ces gens-là, M. le Président. Je suis certain que vous en avez eu dans votre comté. J'en ai dans mon comté. On n'a rien qu'à penser à la saga de Steinberg, des gens qui pensaient avoir un emploi à vie, qui, à 50 ans, se retrouvent licenciés. Ils ne sont même pas admissibles au programme de la PATA, parce qu'on dit qu'ils ne sont pas admissibles, ils n'ont pas l'âge requis. Cependant, ils ne sont plus bons à rien. On leur dit: Vous ne trouverez pas d'emploi. Ou on leur laisse miroiter, en se promenant dans des clubs de recherche d'emploi: Cherchez. Vous ne cherchez pas assez; vous allez peut-être trouver à un moment donné. Non, M. le Président.
On assiste vraiment à ce qu'on pourrait appeler un Québec brisé en deux, M. le Président, où vous avez maintenant les gens, on pourrait dire, de plus en plus pauvres et les gens de plus en plus riches. Et, dans le milieu, on a une classe moyenne qui, je pourrais dire, M. le Président, vivote. Elle vivote. Elle ne vit pas, elle ne prospère pas, elle ne fait que vivoter. Alors, c'est ça qu'on a au Québec. Et ça va bien. On entend le député d'Orford dire: Ça va bien, le Canada, c'est beau, le Canada. À l'entendre parler, j'étais presque ému. J'étais presque ému. Non, mais, c'est vrai. Avec l'unifolié, je voyais l'unifolié battre au vent, et avec le beau fédéralisme canadien efficace qui crée des emplois, M. le Président. Voyons donc! Voyons donc! Il n'y a plus grand monde qui croit à ça. Même les fédéralistes, parce qu'il en reste, au Québec, évidemment, mais même les fédéralistes ne croient plus à ça. Même les fédéralistes se rendent compte que ça ne fonctionne pas. Même les fédéralistes veulent des pouvoirs additionnels pour le Québec. Donc, on ne peut pas tout simplement se borner à dire aux gens: Tout va bien. En tout cas, moi, je ne me vois pas en train de faire une campagne dans le comté d'Anjou en leur disant: Écoutez, tout va bien, bon peuple, dormez en paix. Tout va bien, tout va se régler par l'opération du Saint-Esprit. Nous avons un grand visionnaire, M. Daniel Johnson, comme premier ministre, qui va tout régler vos problèmes. Faites-lui confiance. Il ne vous dit pas comment il va le faire, mais faites-lui confiance: 400 000 emplois.
Et on a vu comment, justement, dès, on pourrait dire, l'accession au poste de premier ministre de M. Johnson. Qu'est-ce qu'on a fait? On a essayé de faire croire que, par une opération qu'on pourrait appeler presque du Saint-Esprit, a émergé un nouveau gouvernement, comme si, avec du vieux, on pouvait faire du neuf. Parce que, regardons le Conseil des ministres. La grande majorité des ministres qui sont ministres présentement étaient ministres dans l'ancien Conseil des ministres. On a cinq nouveaux députés qui ont été promus au rang de ministre, et maintenant, on a un nouveau gouvernement. On oublie tout ce qui a été fait pendant les huit années de règne libéral. C'est dans un aveuglement volontaire de huit ans que, tout simplement, on n'a pas vu ce qui s'est passé. On a pris des mauvaises décisions, mais ce n'est pas grave. Maintenant, après huit ans, la vérité infuse, on l'a. On le sait, maintenant, ce qu'il faut faire.
L'Hôtel-Dieu, ces mêmes gens qui étaient au Conseil des ministres, qu'on ne voyait pas défendre, finalement, le maintien de l'Hôtel-Dieu sur son site actuel, maintenant, écoutez, il était temps que ce gouvernement prenne la bonne décision. On l'annonce tout de suite, dès la venue de M. Johnson comme premier ministre. Comme si c'était évident. Et, pendant huit ans, je ne sais pas ce qu'on a fait avec ces membres du Conseil des ministres qui n'étaient pas d'accord avec cette décision-là, je ne sais pas ce qu'on leur a fait, tout à coup, ils reviennent à la vie après huit ans. Ils dénoncent ce projet, et maintenant, ils y mettent fin dans une bonne décision gouvernementale.
La baisse des taxes sur les cigarettes, M. le Président. Depuis des années, on demande au gouvernement d'abaisser les taxes sur la cigarette à cause justement de la contrebande, qui était rendue une situation endémique. C'était terrible. Alors, tout à coup, on nous annonce: Baisse des taxes sur les cigarettes; nous venons de régler le problème de la contrebande des cigarettes. Après trois ans de harcèlement de la part de l'Opposition, tout à coup, on a trouvé la solution.
Mais, pendant les huit dernières années, qu'est-ce qu'on faisait? Ah bien, là, M. le Président, on avait même créé une police des cigarettes. Je pense qu'on a dû être la risée de l'Amérique du Nord, voire même d'autres continents, avec notre police des cigarettes formée essentiellement d'anciens agents de la Sûreté du Québec à la retraite qui pouvaient cotiser, imaginez-vous donc, en plus, à un nouveau fonds de pension, en étant policiers des cigarettes. Et ils ne réussissaient à prendre, ouf! presque rien, vraiment une goutte dans la mer, quand ils réussissaient à prendre quelques paquets de cigarettes, peut-être, qu'ils trouvaient chez leurs voisins. Alors, on a été la risée, pendant des années, de l'Amérique du Nord relativement à cette police des cigarettes.
Alors, pour revenir à ce discours inaugural, dans ce discours inaugural, on a beau essayer de trouver un peu de substance, vraiment, ce ne sont que des paroles, ce n'est que du vent qu'il y a dans ce discours inaugural. L'emploi, on en parle. Ah oui! On en parle. Je pense que c'est plus d'une quarantaine de fois qu'on en parle, comme si, à force de prononcer le mot «emploi», comme par magie, l'emploi allait apparaître. Ah oui, on en parle: 5 % en quatre ans, M. le Président. Quand on a présenté le fameux livre rouge, non pas le «Livre rouge» de Mao, mais le livre rouge de ce gouvernement libéral, qu'est-ce qu'on a dit? Deux cent mille emplois sont nécessaires pour faire baisser le taux de chômage de 5 % en quatre ans. Erreur, M. le Président. Une chance, on leur a donné les vrais chiffres: c'est 400 000 emplois. C'est 400 000 emplois qu'il faut créer en quatre ans pour pouvoir abaisser à 5 % le taux de chômage. Pourquoi? Tout simplement parce que le pourcentage de la population active au Québec va augmenter pendant ces quatre prochaines années.
Ah! Mais le ministre de l'Industrie et du Commerce est venu nous rappeler à l'ordre: Non, non, non! L'Opposition a mal calculé. Ce n'est pas 400 000 emplois, c'est 396 000 emplois. Ah! C'est vrai. Erreur de 4000 emplois. Mais c'est quand même moins pire qu'une erreur de 200 000 emplois, comme elle a été faite par M. Johnson.
(17 h 10)
Alors, c'est ça, M. le Président, on va créer, comme ça, à peu près 100 000 emplois par année, sauf que, si on regarde depuis 1970, il y a uniquement une année où le gouvernement du Québec a pu générer plus de 100 000 emplois. Alors, comment va-t-on, pendant quatre années consécutives, réussir à créer 100 000 nouveaux emplois pour ainsi obtenir, comme on dit, ce résultat annoncé à maintes reprises par ce gouvernement?
Les gens ne sont pas dupes. J'écoutais le député d'Orford et son collègue, député de Vimont, qui nous disaient qu'on était cyniques. Non, M. le Président, ce n'est pas l'Opposition qui est cynique, c'est la population en général qui ne croit plus à ces promesses, qui ne croit plus à ces annonces qu'on pourrait dire électoralistes. Oui, électoralistes! Quand, à Davos, notre premier ministre annonce des emplois du haut des montagnes suisses, bien, au même moment, alors qu'on annonce quelques centaines d'emplois répartis sur plusieurs années, il y a des milliers d'emplois, pendant cette même période, qui se perdent présentement au Québec.
Hydro-Québec, M. le Président, regardez la belle annonce qu'on nous fait: SM 3 va être mis en route. Ça va créer des centaines, voire même peut-être des milliers d'emplois. Mais, ce qu'on oublie de nous dire, M. le Président, c'est qu'en même temps on impose à Hydro-Québec des restrictions qui vont faire en sorte qu'il va y avoir perte d'emplois, de 1500 emplois d'ici 1995. Et, de 1995 à l'an 2000, 1500 emplois vont encore se perdre à Hydro-Québec. Donc, finalement, M. le Président, les emplois qu'on va créer pour SM 3, des emplois temporaires qui vont durer, évidemment, uniquement pendant la durée de la construction du barrage, bien, ces emplois temporaires vont finalement prendre la place d'emplois permanents qui existaient à Hydro-Québec, à cause, justement, de ce que ce gouvernement impose à Hydro-Québec.
Et on parlait de la fierté d'Hydro-Québec. Ah oui! On en est tellement fier que, finalement, on diminue l'emploi à Hydro-Québec. Alors, c'est ce genre d'annonce, M. le Président, ce genre d'annonce tape-à-l'oeil, comme on pourrait dire, électoraliste, parce que ce ne sont que des chiffres lancés en l'air, mais qui cachent, dans le fond, une réalité qui est tout autre, une réalité qui pousse, en tout cas, certains de nos électeurs au désespoir justement à cause de la situation de l'emploi qui est inacceptable, à cause de l'avenir qu'on lègue présentement à nos jeunes, qui est tout à fait inacceptable.
Et j'ai recherché vous comprendrez, M. le Président dans ce discours, évidemment, quelque chose sur la justice. En tant que porte-parole de l'Opposition officielle en matière de justice, j'ai dit: Bon, écoutez, il doit y avoir un petit peu de choses sur la justice. Après tout, en 1992, on a eu un sommet québécois de la justice. Et on se souvient encore de quelle façon éloquente le ministre de la Justice, M. Rémillard, en parlait, et en parlait à peu près à chaque discours. Il avait de quoi en être fier. Ça avait été un bel événement, sauf que cet événement avait créé des attentes. On s'attendait qu'après un tel événement des choses concrètes se réaliseraient. Donc, il reste encore beaucoup de choses, justement, à réaliser suite à ce Sommet de la Justice. Alors, je m'attendais, M. le Président, peut-être que, dans le discours, on m'annoncerait des choses vraiment concrètes, là, quant à des nouvelles choses qui pourraient être améliorées en notre système de justice, qui demandent à être améliorées, parce qu'un système de justice est toujours perfectible, M. le Président. On peut toujours en rajouter. Ce n'est jamais parfait, et ça évolue parce que la société évolue, les besoins de la population évoluent. Donc, le système de la justice se doit de s'adapter aux changements dans notre société.
Alors, qu'est-ce qu'on dit? Quelques lignes, tout simplement. «De la même façon et là je reprends le discours de M. Johnson nous réviserons toutes les mesures touchant les services de garde et étendrons à tout le Québec des services de médiation familiale.» Ah oui! Médiation familiale. Et je vois ma collègue des Chutes-de-la-Chaudière sourire. Évidemment, M. le Président, on a étendu à l'ensemble du Québec des services de médiation familiale, mais après introduction d'une instance judiciaire, c'est-à-dire une fois, comme on dit, que la chicane est prise devant les tribunaux, alors qu'on avait, à Québec et à Montréal, un système de médiation familiale avant procès qui obtenait des résultats incroyables. On a aboli ça, M. le Président, mais en contrepartie, on l'étend à l'ensemble du Québec. On diminue le produit, mais on en met partout. C'est un peu ça, finalement, qu'on essaie de vendre à la population, M. le Président. J'ai toujours dit que, si on veut vraiment améliorer notre système de justice, on se doit d'aller vers des solutions nouvelles, M. le Président, des règlements alternatifs des conflits, des modes de règlement alternatif des conflits. La médiation en est un privilégié. Qu'on pense aux coûts judiciaires qui peuvent être sauvés, qu'on pense aussi aux coûts sociaux qui peuvent être sauvés par le fait d'éviter un procès ou faire un procès à l'amiable plutôt qu'un procès contesté. Alors, voyez-vous, on nous annonce donc... Premièrement, ça avait déjà été annoncé en 1992. La loi est déjà passée, M. le Président, et, cependant, bon, il faut bien trouver quelque chose à annoncer. Notre premier ministre, dans sa grande vision éclairée, l'annonce de nouveau. Alors, voilà, si vous voulez chercher du neuf, cherchez ailleurs.
Alors, qu'est-ce qu'on a? Je continue encore le discours du premier ministre. «De la même façon et, je dirais, au même titre, il nous appartient de diminuer et même de contrer partout où nous pouvons le faire cet accroissement de la violence faite aux jeunes, aux femmes et aux aînés.» Bravo! Comment est-ce qu'on va s'y prendre? Alors là, faites-moi confiance, j'y arrive! C'est le message, un peu, de notre cher premier ministre: «Nous publierons également les conclusions et agirons rapidement à l'égard du rapport Jasmin sur les jeunes contrevenants.» C'est le problème, M. le Président. Le rapport Jasmin, on le connaît depuis 1992. Depuis 1992, on est supposé avoir de l'action là-dessus. On est maintenant en 1994 et on en est encore à l'annoncer. Alors, on réannonce encore des choses en disant qu'à force de les réannoncer peut-être qu'à un moment donné on fera une deuxième élection avec les mêmes promesses.
Et on nous dit, en conclusion, parce que, oui, malheureusement, c'est à peu près tout ce qu'il y a sur la justice: «Les ministères de la Justice, de la Sécurité publique, de la Santé et des Services sociaux et de la Condition féminine seront appelés à mieux coordonner et coordonner davantage leurs actions dans ce domaine, qui visent à contrer la violence...» Alors, M. le Président, quand on parle de voeux pieux, je pense que c'est tout à fait ça. On dit beaucoup de choses sans rien dire, sans dire comment on va les faire, mais on dit: Faites-moi confiance, j'y arrive, faites-moi confiance.
Mais, voyez-vous, quand on regarde les différents sondages qui se suivent, maintenant, et qui commencent à se ressembler, on voit que les gens n'ont pas confiance, on voit que les gens ne croient pas, justement, à ces belles annonces. Et ils nous demandent, même à nous, députés de l'Opposition, ce que, concrètement, on va faire; non pas uniquement brandir des objectifs irréalisables, mais dire de quelle façon on va le faire, montrer qu'on a une vision globale de la situation, qu'on a vraiment des solutions concrètes à proposer.
Au niveau de la justice, pour uniquement parler de quelques dossiers qui... Malheureusement, je ne trouve pas d'écho à ces dossiers dans le discours inaugural. L'aide juridique. Nous sommes présentement en train d'écouter des gens, à une commission parlementaire sur l'avenir de l'aide juridique, où les gens viennent nous déposer des mémoires, nous faire des propositions; l'aide juridique, les barèmes, l'admissibilité à l'aide juridique. Les barèmes n'ont pas été touchés depuis 1985. Donc, ça fait en sorte que, de plus en plus, le pourcentage de la population couvert par l'aide juridique diminue telle une peau de chagrin depuis, on pourrait dire, 1970, depuis la création du régime d'aide juridique.
On a aboli le service d'immigration, des permanents de l'aide juridique qui faisaient de l'immigration. C'était un service qui était reconnu de tous, qui était apprécié de tous. On l'a aboli. Et le pire, c'est que, quand on abolit des permanents à l'aide juridique, on ne sauve pas de l'argent, parce que la loi est ainsi faite que, s'il n'y a pas de permanent pour faire le travail, à ce moment-là, ça va être un avocat de pratique privée qui va faire le travail. C'est le principe des vases communicants. Donc, on démantèle un réseau permanent d'aide juridique, ce qui fait en sorte que ça entraîne une augmentation des mandats d'aide juridique de pratique privée. On ne sauve rien, M. le Président. On détruit, mais on ne sauve rien. Alors, si c'est ça, faire une gestion éclairée des biens de l'État, alors là, nous ne sommes pas impressionnés.
Aussi, à l'accessibilité de la justice, la hausse du tarif judiciaire: maintenant, pour intenter une action, ça coûte de plus en plus cher. Maintenant, on parle de 250 $ de timbres judiciaires pour intenter une action pour un montant qui n'est pas élevé. On parle d'aux alentours de 5000 $. L'Institut de réforme du droit, M. le Président, qui est, je pense, un instrument essentiel dont on avait besoin justement pour adapter notre système de justice, adapter notre nouveau Code civil qui est tout juste en vigueur depuis le 1er janvier, l'adapter aux changements de la société, bien, l'Institut de réforme du droit, qui avait ce mandat de faire en sorte que notre droit évolue, finalement, rapidement, s'adapte rapidement, eh bien, tout simplement, on apprend qu'il ne verra pas le jour. Le ministre de la Justice me dit que, probablement, il va voir le jour pareil. Quand? Alors là, aucune idée. Mais, encore là: Faites-nous confiance.
Perception automatique des pensions alimentaires. Encore aujourd'hui, en Chambre, j'ai interrogé le ministre de la Justice pour savoir ce qu'il en était de sa vision relativement au système de perception automatique des pensions alimentaires. Il a fait une déclaration, en fin de semaine, le ministre de la Justice, en disant que notre système n'est pas si mal que ça. Après tout, 45 % des gens paient convenablement leur pension alimentaire. Très bon système, 45 %! Ça fait juste 55 % qui ne la paient pas, qui la paient en retard, qui ne la paient pas du tout. C'est pas pire. C'est bon. C'est bon, M. le Président: 55 %, plus de la moitié. C'est bien acceptable dans notre société, surtout quand on considère que ces gens-là qui attendent leur chèque de pension alimentaire parce que ce n'est pas du luxe, ça, c'est une obligation alimentaire, c'est le strict nécessaire, minimum dont on a besoin pour la vie eh bien, ce sont souvent des familles monoparentales qui attendent après. Ce sont uniquement des familles, même, monoparentales qui attendent après ces chèques-là. Les plus vulnérables n'ont pas les moyens de se prendre des avocats pour courir après le créancier délinquant. Donc, on pourrait s'attendre au moins à une certaine vision, à un certain engagement relativement à la perception automatique des pensions alimentaires.
(17 h 20)
Donc, M. le Président, le ministre semble trouver que tout va bien dans le meilleur des mondes ou, en tout cas, il va y avoir des petits ajustements, comme on pourrait dire, des ajustements mineurs, mais que, dans l'ensemble, tout va bien. Quant à nous, il est essentiel de voir à l'instauration d'un système automatique de perception des pensions alimentaires avec retenue à la source. Pour nous, c'est essentiel, M. le Président.
Et je terminerai, quant à la justice, M. le Président, surtout sur quelque chose qui, pour moi, est un constat d'échec total de la part de ce gouvernement. Il existe toujours au Québec la notion qu'il existe deux justices: une pour les Blancs, une pour les autochtones. On n'a rien réglé avec la situation de la contrebande des cigarettes. On a abaissé les taxes sur les cigarettes, mais rien n'est réglé quant à la contrebande. On n'a pas touché aux réseaux. On n'a pas démontré à l'ensemble des citoyens du Québec que la loi du Québec s'applique sur l'ensemble du territoire du Québec. Quant à ça, rien n'a été fait. Cette notion d'iniquité, d'inégalité, persiste toujours, M. le Président. On n'a pas touché aux réseaux actifs de contrebande. Et on sait qu'il se fait présentement beaucoup de contrebande d'alcool et d'armes, et rien n'est fait à ce niveau-là. Et c'est ce qui crée énormément de mécontentement et de révolte, un sentiment de révolte dans la population, M. le Président.
Donc, M. le Président, pour conclure, ce discours inaugural est décevant pour la population. Il n'apporte pas d'espoir, il n'apporte que des voeux pieux. Et je pense que l'ensemble de la population n'est pas dupe, M. le Président, et ne porte aucune crédibilité aux annonces purement électoralistes qui sont faites dans ce discours. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Anjou, de votre intervention. Alors, sur ce même sujet, je cède la parole à M. l'adjoint parlementaire à M. le premier ministre et député de Matapédia. M. le député, la parole est à vous.
M. Henri Paradis
M. Paradis (Matapédia): Merci, M. le Président. Ça me fait plaisir d'intervenir sur le discours inaugural dans le débat, avec satisfaction et aussi beaucoup de fierté. Satisfaction parce que le discours inaugural, évidemment, reflète essentiellement les objectifs que nous devons avoir comme société, c'est-à-dire, un, la création d'emplois. Et ce n'est pas un rêve, ce n'est pas irréaliste. On prétend, on prévoit que nous pouvons diminuer de cinq points le taux de chômage au Québec dans le prochain mandat.
Nos amis d'en face nous critiquent de façon très acerbe, mais, pour eux, c'est le plein emploi qui est beaucoup plus réaliste, d'après eux, le plein emploi ou à peine 1 %; certains députés conviennent que ça pourrait être 1 %, le taux de chômage au Québec. Alors, je ne sais pas quel côté est irréaliste, mais, à mon sens, de travailler pour créer, permettre à nos concitoyens et nos concitoyennes de retrouver leur dignité dans toutes les régions du Québec avec ce plan d'action j'y reviendrai un petit peu plus tard plus en détail je pense que c'est un objectif que nous devons tous avoir pour permettre, je l'ai dit et je le répète, de retrouver notre dignité.
Le deuxième point qui est important dans ce discours inaugural, c'est le développement des jeunes. On en parle beaucoup. On doit adapter notre formation pour faire face à la concurrence internationale. On sait que, dans les dernières années, on a peut-être négligé un petit peu l'aspect plus formation professionnelle. J'ai eu la chance de faire un voyage en Allemagne, où j'ai pu me rendre compte à quel point ces gens-là sont avancés pour la formation de leur main-d'oeuvre, pour la formation de leurs jeunes. Et je pense que nous devons aussi prendre ce virage de la formation au niveau technologique pour permettre à nos jeunes d'être formés lorsqu'ils arrivent sur le marché du travail et d'être capables aussi de remplir les emplois qui sont disponibles.
Le troisième élément important de ce discours inaugural, c'est la santé et les services sociaux. Tous les pays occidentaux, quels qu'ils soient, sont confrontés à des coûts galopants de la santé et des services sociaux. Alors, ce que l'on dit dans le discours inaugural, c'est d'essayer de préserver, c'est de préserver tous les acquis que nous avons au niveau de la santé et des services sociaux, mais tout en étant capables d'être créatifs, d'être imaginatifs comme on l'a été à la fin des années soixante, début des années soixante-dix, pour se doter de ce service de santé et de services sociaux du Québec.
Je me rappelle, lorsque j'étais je suis encore jeune jeune étudiant, M. le Président, à l'université, on voyait de la publicité à la télé de la fameuse carte-soleil, lorsqu'elle est sortie en 1970, et, à l'époque, on disait: Profitez-en, c'est gratis, profitez-en, c'est gratis. Aujourd'hui, on se rend bien compte que ce n'est pas gratuit. On a juste à faire notre rapport d'impôt. Lorsque l'on prend l'étude des crédits, bon, qui a été déposée pas plus tard que jeudi dernier, on voit que la santé s'accapare quelque chose comme 31 % ou 32 % des dépenses gouvernementales. Bon, on ne peut pas dire que c'est gratis, la santé et les services sociaux. Dans ce sens-là, on a beaucoup de pas à faire pour essayer de préserver, garder nos acquis sociaux, tout en essayant de trouver de nouvelles pistes, d'être créatifs, imaginatifs, pour essayer de faire les choses de façon différente, mais en gardant l'essentiel des services à notre population.
Évidemment, le quatrième élément de ce discours inaugural reflète sur l'identité du Québec. On est une formation politique qui ne prétend pas s'isoler pendant que toutes les grandes nations au monde sont en train de se donner la main, de s'incorporer. On n'a qu'à prendre l'Europe. Ils étaient six, ils sont rendus 12, et il y en a quatre autres qui cognent à la porte, soit la Suède, la Norvège, la Finlande et l'Autriche. On prétend qu'au 1er janvier 1995 ils seront donc 16 à faire partie de la Communauté européenne. Pendant ce temps-là, nos adversaires politiques, nos bons amis d'en face, eux prétendent qu'en isolant le Québec, qu'en faisant l'indépendance du Québec on sera capable de «compétitionner» ces grandes nations, ces grands ensembles économiques qui sont en train de se créer.
Alors, nous, on prétend au contraire que nous devons renforcer notre identité québécoise. Nous avons fait la preuve que nous sommes capables de faire les choses de façon différente et de tirer notre épingle du jeu. Nous avons créé de toutes pièces, à partir, oui, de l'aide de sociétés d'État dans certains cas, nous avons formé des entrepreneurs qui ont été capables de prouver hors de tout doute que, au Québec, on est capables de se prendre en main et de faire les choses correctement, et de les faire dans ces grands ensembles économiques et non pas en s'isolant. Donc, notre identité de Québec, c'est aussi la francophonie, mais c'est aussi notre capacité entrepreneuriale qu'on a pu démontrer au cours des dernières années.
Et finalement, M. le Président, tout à l'heure je vous disais que j'étais satisfait du discours inaugural, mais aussi fier à la fois, et c'est évidemment le cinquième élément de ce discours inaugural, où, évidemment, je trouve cette fierté, où on a parlé de développement régional. Depuis mon engagement politique, je suis de ceux qui défendent avec acharnement le développement régional pour permettre aux régions de se prendre en main. Parce que, qui est mieux placé que les hommes, les femmes qui vivent dans ces régions pour être en mesure d'apprécier les besoins, d'être en mesure de connaître les besoins des régions, aussi bien au niveau santé, au niveau éducation, au niveau formation professionnelle, au niveau aussi des outils dont nous avons besoin pour se prendre en main au niveau économique? Alors, c'est avec beaucoup de fierté, parce que, évidemment, lors du dernier conseil général du Parti libéral, j'ai piloté une résolution qui a été adoptée à l'unanimité et qui va donner, et qui oblige, finalement... Parce que le gouvernement s'est engagé, par le discours inaugural, par la voix du premier ministre, à donner aux régions et à soutenir les régions, comme nous l'avons commencé dans le passé.
Les régions ne demandent pas, M. le Président, de reconstituer dans leur capitale régionale ou dans les sous-régions, dans chacune des MRC du Québec, tous les services gouvernementaux. On ne revendique pas une université. On ne revendique pas un hôpital universitaire. Ce que les gens veulent, c'est avoir des services de qualité. Pour les soins superspécialisés, en ce qui concerne la santé, les gens sont prêts à se déplacer, ils sont prêts à comprendre, ils sont prêts à apprécier que le gouvernement ne peut pas implanter dans toutes les régions du Québec des instituts de cardiologie. Ce qu'on veut, c'est des soins de base, de première ligne pour permettre à nos concitoyens et concitoyennes d'avoir accès à ces services. Et c'est en bonne voie de réalisation. Au cours des quatre dernières années, plus de 2 000 000 000 $ ont été investis dans la santé soit pour donner de nouveaux services aux régions du Québec, soit pour la rénovation d'hôpitaux, pour permettre la création de cliniques d'urgence plus adéquates dans nos régions, permettre à des CLSC où il n'y a pas d'hôpital de devenir la porte d'entrée du système et permettre à des hommes et des femmes d'avoir les services que nous avions.
(17 h 30)
C'est la même chose au niveau éducation. Je l'ai mentionné un petit peu tout à l'heure. Les gens ne revendiquent pas à tout prix tous les services, toutes les options professionnelles ou toutes les grandes universités. On est conscient qu'on n'a pas les moyens, comme société, de s'offrir ça. Mais ce qu'on veut, par exemple, c'est d'être capable de retenir le plus longtemps possible nos jeunes chez nous, de bien les former, que cette formation soit adaptée aux besoins de notre région, et que nos jeunes puissent y travailler, gagner leur vie honorablement, avec toute la dignité que cela suppose.
M. le Président, le gouvernement du Québec, depuis notre accession au pouvoir, le 2 décembre 1985, on a posé des gestes très concrets en ce qui concerne le développement régional. D'abord, ce que l'administration précédente n'avait jamais réussi ou n'avait jamais eu le courage de faire, c'est de finaliser le découpage de la carte administrative, donc des régions du Québec. Alors, à l'époque, en 1986, nous avons pris des décisions, où on a créé 16 régions administratives, pour leur donner les services nécessaires, pour rejoindre le plus grand nombre de citoyens dans leur entité, dans leur homogénéité de territoire.
Ceci étant fait, par la suite, on a travaillé sur un document, qu'on appelait pour permettre aux régions de se prendre en main. Ça a été le plan d'action en matière de développement régional. C'est ce qui a été poursuivi à la suite de notre réélection en 1989. Mais, à l'époque, on disait quoi? On disait qu'on voulait stimuler l'entrepreneurship, le démarrage d'entreprises, pour permettre à ces gens-là d'avoir peut-être un avantage comparatif, parce qu'on était dans une situation plus éloignée des grands centres. C'est ce qu'on a fait avec le programme PRECEP, où on a permis à nos entrepreneurs d'avoir accès à du capital de risque, à peu près 35 % d'un investissement global, contrairement à des régions plus centrales où cet indice-là était à 15 %. Là, on a vu apparaître pour la première fois dans le gouvernement, dans l'appareil gouvernemental, cette modulation qui permet de soutenir de façon plus importante les régions qui sont le plus en difficulté. On a créé des SPEQ régionales, avec des avantages fiscaux importants, pour permettre à des entrepreneurs ou à des investisseurs surtout, d'investir dans leurs propres entreprises régionales. C'est pour ça qu'on est rendu maintenant, avec les SPEQ régionales, à des avantages fiscaux de 150 % pour un investissement dans des sociétés de placement régionales.
Le deuxième item dont on a parlé à l'époque, c'est l'innovation technologique. On n'a pas la prétention de vouloir refaire de la recherche et du développement fondamental dans chacune des régions du Québec, mais ce que les régions veulent, par contre, c'est d'avoir accès à cette information-là, d'avoir accès à l'information technologique, d'avoir de ces antennes pour permettre à nos entrepreneurs, peut-être, d'ajuster leurs méthodes de production et d'être plus compétitifs. On a donné, évidemment, la faculté de génie à l'Université du Québec à Rouyn-Noranda de même que celle de Rimouski. Voilà des exemples concrets qui vont permettre de créer, en région, une émulation, une dynamique qui va nous permettre de garder nos jeunes. C'est prouvé que, lorsqu'il y a eu une faculté d'administration à l'Université du Québec, à Rimouski notamment, il y a eu une progression tout à fait remarquable au niveau de la meilleure gestion de nos entreprises, dans l'Est du Québec. Avec cette faculté de génie, on pourra entreprendre un virage et une orientation qui pourra nous soutenir davantage.
Ce qu'on disait aussi, à l'époque, de ce plan d'action en matière de développement régional, c'est qu'on voulait une modulation des programmes, et c'est maintenant dans les faits. Suite à ce document-là, de 1988, le ministre actuel, responsable du développement régional, est allé encore plus loin lorsqu'on a permis aux conseils régionaux de concertation et de développement d'avoir à décider eux-mêmes de ce qu'ils veulent faire de ce qu'on appelait, à l'époque, l'argent dévolu à l'OPDQ. Dans chaque région du Québec, on avait un fonds, quelque chose comme 3 000 000 $, qui était dévolu à chacune des régions du Québec pour soutenir des projets de toutes sortes. Aujourd'hui, donc, avec la nouvelle politique de développement régional, on donne cet argent-là, c'est-à-dire qu'il est administré par les gens du milieu, les gens qui viennent de chacune des MRC, pour former une grande région administrative. C'est là que ça prend tout son sens, le fait de se dire de se prendre en main. Ce n'est plus les fonctionnaires, ce n'est plus le gouvernement, ce n'est plus le politicien qui va dire qu'on va investir dans telle ou telle entreprise, c'est dorénavant le milieu lui-même, qui représente le monde municipal, le monde de l'éducation, les entrepreneurs, la grande, la petite entreprise, qui forme un conseil d'administration et qui décide de quelle façon il est capable de soutenir son économie locale. Alors, ce sont des exemples, M. le Président, qui font en sorte qu'aujourd'hui la décentralisation ou la modulation des programmes va faire en sorte que les régions seront plus dynamiques et capables de se prendre en main.
On est allés encore plus loin que ça. Dans le plan de relance qui a été annoncé en novembre dernier, il y a un volet tout à fait important. C'est 320 000 000 $ qui seront dévolus aux différentes régions du Québec, encore là pour la création d'emplois et permettre à nos décideurs locaux, régionaux, ceux qui font partie, évidemment, du CRCD, avec un comité régional d'emplois, de décider dans quelles entreprises on pourra investir pour créer de l'emploi durable. Et, pour la première fois, il n'y a pas de critères. Combien de fois on a entendu de nos entrepreneurs dire: Mais comment ça se fait? Je ne suis pas admissible à ce programme-là. C'est trop compliqué. Il y a trop de paramètres. Alors, cette fois-ci, c'est 300 000 000 $ sur trois ans qui sont dévolus à l'ensemble des régions du Québec, où on permet aux décideurs locaux, régionaux de décider eux-mêmes dans quelles entreprises, dans quels types d'entreprises ils vont venir créer de l'emploi et soutenir l'économie. Alors, c'est tout à fait exceptionnel, d'autant plus qu'on a ajouté aussi 19 000 000 $ dans le Fonds d'aide aux entreprises. Et, pour la première fois, on a créé un fonds d'investissement local, donc au niveau des MRC.
Combien de fois, le monde municipal, combien de fois, des entrepreneurs sont venus nous voir: Ce n'est pas 100 000 $, ce n'est pas 1 000 000 $ qu'on veut, c'est un montant de support pour nous donner le coup de pouce nécessaire pour partir notre entreprise. Alors, c'est le fonds d'investissement local on appelle ça le FIL qui sera dévolu à chacune des MRC. Et, dans les MRC les plus pauvres, le gouvernement investira 150 000 $, et la part du milieu, la part des municipalités qui décideront bien d'investir dans ce fonds-là, on leur demande 100 000 $, ce qui crée un fonds de 250 000 $.
Et, si elles veulent aller plus loin, elles peuvent s'inscrire avec le Fonds de solidarité de la FTQ, les caisses populaires Desjardins et là, créer une Société locale d'investissement et de développement, ce qu'on appelle communément, dans le langage, des SOLIDE. Alors, des MRC, à ce moment-ci, auront le choix d'investir soit dans un FIL ou dans un SOLIDE, tout dépendant de la décision qu'elles auront à prendre.
Et un élément non négligeable, M. le Président, c'est le plan d'infrastructures que nous avons à notre disposition. Ce plan d'infrastructures pourra permettre à toutes les régions du Québec, à toutes les municipalités parce que le ministre a permis à toutes les municipalités de s'inscrire dans ce volet d'infrastructures de redonner à certains équipements qui étaient vétustes dans plusieurs municipalités... de remettre en ordre soit un système d'égout, un système d'aqueduc ou une captation d'eau, ou encore de créer de toutes pièces, de rénover un garage municipal ou de créer un centre communautaire. Alors, c'est des instruments tout à fait importants qui sont mis à la disposition des municipalités, et l'Opposition devrait être contente. C'est un programme fédéral, c'est vrai; c'était un engagement que le Parti libéral fédéral avait pris durant la dernière élection, qu'il nous a livré. Mais l'Opposition devrait applaudir parce que le gouvernement fédéral nous a donné la gestion. Donc, c'est nous qui avons le pouvoir de décider de quelle façon on va les appliquer dans nos régions respectives.
Avant qu'on me dise que le gouvernement en a fait, des choses, mais là il parle de décentralisation puis il parle de donner aux municipalités des responsabilités qu'elles ne veulent pas, moi, j'invite l'Opposition parce que, nous aussi, on a des archives j'invite l'Opposition à regarder très attentivement ce qu'elle a fait dans le passé, puis pas le courage de rendre public. C'est votre fascicule no 5 que vous avez élaboré et qui forçait les municipalités à prendre certaines responsabilités, puis j'aimerais vous en nommer quelques-unes: le développement socioculturel, l'aménagement du territoire, la gestion des ressources naturelles, le transport, l'éducation, les services de santé, le loisir, la culture, le tourisme. Alors, c'est ce dont vous vouliez vous désengager pour le donner aux municipalités.
(17 h 40)
Là, arrêtez d'ergoter puis de vous en aller sur la place publique: Nous, le développement régional, c'est important; nous allons nous asseoir et négocier avec les MRC, avec les municipalités. Vous avez déjà des petites affaires cachées. Sortez-les puis ayez le courage de le dire. Faites face à la musique puis arrêtez de vous servir d'une baguette magique que vous aviez en 1976 pour essayer de régler tous les problèmes. Votre baguette, elle est cassée. Vous l'avez complètement cassée entre 1976 et 1985. Et ce n'est pas le grand économiste qui vous sert de chef qui va nous ramener à l'ère de la prospérité. C'est lui qui a été le pire endetteur que le Québec ait jamais connu.
Et ce n'est pas faire peur au monde que de dire, pendant que des grands ensembles économiques sont en train de se créer, que si le Québec devenait souverain, puis ce n'est pas nous autres qui le disons, ce sont, comme le mentionnait mon collègue d'Orford tout à l'heure, quand même des gens qui connaissent et qui font la cote du Québec, comme celle du Canada et des pays et des grandes entreprises, ce serait une erreur monumentale. Et, même un économiste qui vous est favorable, M. Pierre Fortin, le disait lui-même: Au bas mot, il va y avoir un coût économique très important. Alors, oubliez votre souveraineté, oubliez votre indépendance pour foutre le Québec, les citoyens et les citoyennes du Québec dans un chaos qui serait inacceptable. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Matapédia. Alors, nous poursuivons le débat sur le discours d'ouverture prononcé par M. le premier ministre le 17 mars dernier et sur les motions de censure présentées par M. le chef de l'Opposition officielle et M. le député de D'Arcy-McGee. Et je cède la parole à Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Mme la députée, la parole est à vous.
Mme Denise Carrier-Perreault
Mme Carrier-Perreault: Je vous remercie, M. le Président. J'entendais le député de Matapédia expliquer comment ce serait épouvantable, la souveraineté du Québec. Je pense que mon collègue de Matapédia, effectivement, a droit à ses propres peurs, a droit à son opinion. Moi, je suis convaincue que la souveraineté du Québec est le seul moyen pour faire du Québec un endroit intéressant. Parce que, le fédéralisme comme tel, je pense que la preuve est faite, M. le Président, ça ne marche pas, et c'est beaucoup plus épeurant, à mon sens, de demeurer dans ce fédéralisme canadien sclérosé que d'aller vers la voie de l'avenir, la voie de la souveraineté du Québec. Je ne pouvais pas laisser passer ces affirmations de mon collègue sans au moins faire une rectification.
M. le Président, on est... Moi, comme députée ici en cette Chambre, c'est la troisième fois que j'assiste à une présentation d'un discours inaugural. C'est bien évident que j'entends les députés de part et d'autre et je me rends compte qu'on n'a pas les mêmes réactions. C'était à s'y attendre, M. le Président, comme pour à peu près tous les discours qu'on entend ici, soit sur les discours du budget et tout ça, on réagit toujours différemment. Mais il reste que, moi, je tiens à vous dire que, personnellement, j'ai trouvé que, des trois discours inauguraux que j'ai eu à entendre ici dans cette Chambre, c'est probablement le discours le plus ennuyeux qu'il m'a été donné d'entendre. Je vais vous dire pourquoi. Ça a été pour moi un discours, d'abord, interminable, un discours qui m'a semblé interminable, qui a été livré d'une façon technocratique, sans âme, à l'image même, je dirais, du président du Conseil du trésor, qui est devenu le premier ministre du Québec.
C'est un discours je sais que mes collègues l'ont mentionné, mais je pense qu'on ne peut pas faire autrement que de le répéter, c'est l'évidence même qui était truffé, un discours truffé de formules toutes faites, un discours truffé d'évidences. Je vais vous en citer quelques-unes, le genre d'évidences comme: «...c'est par l'emploi et le travail qu'on peut fonder un foyer». Je pense que tout le monde sait ça. Ce n'est pas une grosse révélation qu'on a eue là. Des évidences du genre: «Mais c'est également, collectivement, notre sécurité que nous assurons par l'emploi, notre sécurité par la cohésion que le travail détermine», etc. Voyez-vous le genre? Pour moi, ça, c'est des évidences. On n'a pas besoin de faire une heure de discours inaugural pour dire des choses comme ça à la population. Je pense qu'on s'attend à autre chose que ça.
Un discours truffé aussi de généralités. Des évidences, des généralités du genre de: «...la grandeur des défis exige de nous que nous déployions des efforts de créativité et d'initiative sans précédent». C'est très large, c'est très général. Il n'y a pas grand monde qui va contredire le premier ministre là-dessus. Je pense qu'il n'y a pas de quoi écrire à sa mère là-dessus non plus.
Des généralités, malheureusement, aussi au niveau des engagements. Normalement, on s'attend à des engagements clairs, précis, bon, des choses qui nous donnent une idée de vers où on s'en va. Non. On a eu droit à des généralités aussi dans le domaine des engagements, et je vais vous le citer encore une fois: «Nous entendons, dans les semaines et les mois qui viennent, proposer et adopter des mesures qui permettent de réconcilier les responsabilités familiales et les exigences du marché du travail.» Qu'est-ce que ça veut dire, ça, M. le Président? Personne n'en sait rien. Quelles mesures? Personne ne le sait au moment où on se parle. Il nous dit, un peu plus loin, et je cite toujours au texte le premier ministre: «De la même façon, nous réviserons toutes les mesures touchant les services de garde et étendrons à tout le Québec des services de médiation familiale.» Bon, bien, ce bout-là, mon collègue d'Anjou en a parlé, on sait ce que ça veut dire pour le premier ministre, des services en médiation familiale. On parle de médiation familiale en district judiciaire, quand c'est recommandé par un juge. Mais, pour ce qui est des mesures touchant les services de garde, là, toutes les mesures touchant les services de garde, on ne sait pas du tout qu'est-ce que c'est, ce genre de mesures là qui seront touchées. Alors, des évidences, des généralités; tout le long du discours, ça a été comme ça. Ce n'est pas particulièrement intéressant d'entendre ce genre de discours là durant une heure de temps, et je ne suis pas sûre non plus que la population, dans l'ensemble, s'est permis une écoute d'une heure devant le premier ministre qui nous déblatérait ce genre de généralités.
Moi, M. le Président, tout au long du discours, j'ai été attentive. J'ai fait un effort. J'ai écouté avec beaucoup d'attention ce que le premier ministre avait à nous dire, tout en surveillant, bien sûr, de façon plus particulière les dossiers, les annonces, les engagements qu'il pouvait prendre dans les dossiers que, moi, j'ai à défendre ici, à l'Assemblée nationale. Quand je parle des dossiers que j'ai à défendre, je pense que vous le savez, M. le Président, je parle des dossiers qui touchent la condition féminine, les dossiers qui touchent la famille et l'équité salariale. Pour ce qui est de la famille, j'y reviendrai, parce que le premier ministre en a effectivement beaucoup parlé, souvent, malheureusement, de façon très générale, mais pour ce qui est du dossier des femmes, bien, là, contrairement aux autres discours inauguraux, surprise, on n'en en pas entendu parler. Je dois vous dire que je ne sais pas si je dois m'en réjouir ou m'en désoler, parce que, le 28 novembre 1989, c'était le premier discours inaugural, ici, en cette Chambre, M. le premier ministre. J'étais, n'est-ce pas, toute nouvelle arrivée, toute nouvellement élue, encore un peu naïve, bien sûr, devant les propos tenus par le premier ministre de l'époque, et je l'entendais, à ce moment-là, M. Bourassa, qui nous disait: La situation économique des femmes et la place qu'elles occupent sur le marché du travail continueront d'être des priorités pour le gouvernement. Là, M. le Président, je vous ramène au 28 novembre 1989. C'était un engagement ferme du premier ministre, le 28 novembre 1989. Qu'est-ce qui s'est passé depuis ce temps-là, M. le Président? On a vu beaucoup d'articles. On a vu beaucoup de statistiques, très peu d'actions gouvernementales pour rétablir les choses à ce niveau-là, mais on a vu des statistiques très claires qui nous démontrent qu'aujourd'hui le visage de la pauvreté au Québec est composé, justement, majoritairement de femmes et de jeunes. Et ça, je peux vous dire, M. le Président, qu'on a des chiffres qui sont très clairs, pas donnés par le Parti québécois. Ça ne vient pas de nos livres, ça vient de la politique, évidemment, des statistiques qui ont été fournies lors du dépôt de la politique en matière de condition féminine de la ministre, l'automne dernier, parce que ce dont je vous parlais tantôt, c'est un engagement de 1989, là, on s'entend. Alors, depuis 1989 que c'est supposé être la priorité du gouvernement libéral, pourtant, l'automne dernier, quand la ministre a déposé les plus récentes statistiques sur la condition des femmes sur le marché du travail, bien, on nous disait que les femmes représentent près de la moitié de la population active en 1991 mais occupent toujours 66 % des emplois à temps partiel, parce que c'est ce qui s'est créé, depuis plusieurs années, M. le Président, des emplois à temps partiel. Et ce sont les femmes qui les occupent majoritairement, 66 %. On nous disait aussi, des écarts, et ça, c'est tiré textuellement des livres mêmes du gouvernement: Des écarts importants de rémunération persistent entre les femmes et les hommes. En 1991, les femmes qui travaillaient à temps plein ont gagné, en moyenne, 30 % de moins que les hommes.
(17 h 50)
Alors, qu'est-ce qui s'est fait par le gouvernement depuis le 28 novembre 1989 pour améliorer la situation économique des femmes? M. le Président, tout ce qu'on a eu, c'est le dépôt d'une politique en matière de condition féminine, des mesures qui sont supposées se mettre en place, petites mesures, mais on n'a pas d'échéancier, on attend toujours. Et j'ai été surprise de constater que le premier ministre, il aurait pu au moins donner cette mesure-là. Sa collègue, la ministre déléguée à la Condition féminine, s'est pourtant engagée de façon très claire, à l'automne, lors du dépôt de sa politique, à mettre en place une loi en matière d'équité en emploi. On sait que les femmes n'ont pas l'équité en emploi. On sait que les femmes n'ont pas l'équité salariale. Je sais que la ministre ne veut pas parler d'équité salariale, mais, à tout le moins, j'espérais entendre le premier ministre nous parler de la fameuse mesure de la ministre déléguée à la Condition féminine, une loi en matière d'équité en emploi. Nenni, pas un mot dans le discours inaugural. Doit-on s'en plaindre ou pas? Ça, c'est une autre histoire. Quand on regarde ce qu'il est advenu des engagements du gouvernement libéral en 1989, bien, peut-être que c'est aussi bien qu'on n'en parle pas trop, M. le Président.
Bien sûr, je vous disais qu'au niveau des femmes j'ai été surprise. Au niveau de la politique familiale, bien, là, j'ai eu quelques chocs, bien sûr, parce que la seule chose très précise qu'on nous a annoncée, c'est une politique en matière de petite enfance. En fait, cette politique-là est attendue depuis très longtemps, très longtemps. On se rappellera que le groupe de travail présidé par Camil Bouchard avait déposé un rapport en 1991. C'est en 1991 que le rapport Bouchard a été déposé, et ce rapport-là, c'était «Un Québec fou de ses enfants», donc un document qui présente un portrait de l'ampleur des situations, des abus, des négligences dont sont victimes les enfants, et aussi, bien sûr, une série de mesures, des actions que le gouvernement devrait mettre en oeuvre pour enrayer ce fléau-là, pour protéger la petite enfance.
Jusqu'à maintenant, on n'avait eu aucune suite au rapport Bouchard, beaucoup de placotages, beaucoup de discours, bien sûr, mais aucune suite. Alors, j'espère que la politique de la petite enfance qui sera déposée, supposément, à cette session-ci va refléter, bien sûr, va s'inspirer grandement des recommandations du rapport Bouchard. Bref, une nouvelle qui n'en était pas une, parce que la ministre, déjà l'an dernier, avait annoncé que cette politique-là s'en venait, et, bon, bien sûr, nous a réitéré cet engagement-là l'automne dernier. Et, ce printemps, le premier ministre nous a annoncé cette mesure-là. Bien, coudon, bravo! On attend, par exemple, avant de passer des commentaires, de voir ce qu'il y a dedans, parce que c'est ce qu'il va y avoir, ce qui va découler comme mesures de cette politique-là qui va être important.
Bref, par rapport au discours inaugural, quand je regarde les mesures qui touchent la famille, le genre de généralités dont je vous faisais état tout à l'heure, disons qu'on n'en sait guère plus, M. le Président. Qu'est-ce qui sera révisé, de toutes les mesures au niveau des services de garde? Est-ce que le gouvernement libéral va réviser sa fameuse politique de subventions au fonctionnement, politique qui a laissé créer des iniquités par rapport aux services de garde existant présentement? On le sait, c'est un problème majeur, inéquitable. On sait qu'il y a des problèmes dans les régions, particulièrement là où les gens sont défavorisés, puisque ces subventions que le gouvernement octroie pour faire fonctionner les services de garde, évidemment, sont basées sur le revenu que les parents remettent au service de garde. On le sait, c'est 30 % des montants qui sont payés par les parents qui retournent aussi en subventions, plus le montant de base. Alors, il y a des iniquités qui sont créées. Est-ce que le gouvernement va aller dans une révision en profondeur de son système de subventions au fonctionnement? C'est demandé depuis plusieurs années. Je ne le sais pas. On ne le sait pas, M. le Président. Ce n'est pas clair. On nous dit que toutes les mesures seront révisées.
En tout cas, ce qui semble clair, cet après-midi, en Chambre, la ministre déléguée à la Condition féminine a laissé enfin savoir que c'était une fin de non recevoir en ce qui a trait aux salaires des éducatrices en garderie. On sait que ces éducatrices en garderie gagnent des salaires absolument discriminants. C'est inéquitable, ça n'a aucun bon sens. Tout le monde s'entend là-dessus, il y a un consensus au Québec. Pourtant, la ministre continue de s'entêter à dire qu'elle ne peut pas corriger la situation, qu'elle n'en a pas les moyens, même si, année après année, la ministre ne réussit pas à dépenser les augmentations de budget qui lui sont allouées pour le budget des services de garde.
Par rapport au discours inaugural du premier ministre, c'était tellement flou, M. le Président, que je préfère ne pas trop m'y attarder. Mais j'ai relu la réplique, le discours de ma collègue, ma vis-à-vis qui est responsable du dossier de la politique familiale. Bien sûr que la ministre se vante des mesures qui ont été mises en place par son gouvernement. Et, comme c'était prévu, elle nous explique que les sommes qui ont été consacrées à l'aide aux familles ont plus que triplé, passant de 829 000 000 $, en 1985 à 2 564 000 000 $, en 1993. M. le Président, je reprendrai tout simplement... Ce n'est pas parce qu'on est à l'Opposition officielle, ce sont les propos des intervenants du milieu, hein, qui disent exactement ce que, moi... Je veux vous les répéter, leurs propos à eux, parce que, nous, il semble que l'Opposition, c'est notre rôle: on n'est jamais d'accord. Alors, si je vous répète le point de vue de M. Perreault, M. Denis Perreault aucun lieu de parenté avec moi, là, M. le Président secrétaire de la COFAQ, Confédération des organismes familiaux du Québec, il disait, lors du forum: «Au Québec, le gouvernement nous dira il prévoyait déjà que son soutien financier pour les familles est passé de 814 000 000 $, en 1985, à 2 515 000 000 $, en 1993.» Il nous avait dit que le gouvernement le ferait, mais il nous dit pourtant: «Par ailleurs, il ne nous dit pas quelle a été l'augmentation de ses revenus par le biais de la taxation, de la tarification pour la même période.»
Évidemment, on n'a pas entendu le premier ministre en parler. Je n'ai pas entendu ma collègue, la ministre déléguée à la Condition féminine, responsable du dossier de la famille, en parler, de ces taxations-là, M. le Président, mais il reste qu'il y a des chiffres qui sortent régulièrement, et on sait très bien que les nouvelles taxes, la TPS, la TVQ, les taux d'imposition des familles expliquent largement l'augmentation au niveau des taxes qu'il y a eue sur les revenus familiaux.
Selon les experts, les familles de 1991 paient en moyenne 3000 $ de plus en impôt que celles de 1984. En fait, selon le Conseil de la famille, pour un revenu moyen de 47 161 $, la charge fiscale des familles québécoises, au cours de l'année 1992, à l'égard des impôts et des taxes de toutes sortes, s'élève à 21 808 $, ce qui représente 46,2 % des revenus des familles.
Alors, M. le Président, on se rend compte que le gouvernement, d'une part, a essayé d'augmenter, bien sûr, les rétributions. Il le dit et il s'en vante. Mais, par ailleurs, ce qu'il est allé chercher au niveau des revenus familiaux, bien, ça, il s'en vante un peu moins. Vous savez, au Québec, il y a une demande qui est faite par rapport justement au... plusieurs groupes de demandes, mais particulièrement les groupes qui interviennent en milieu familial. On demande une réforme de la fiscalité. C'est demandé par plusieurs autres groupes aussi. J'y reviens.
Tout ce qu'on a entendu dans le discours inaugural: Est-ce que le gouvernement veut faire une réforme de la fiscalité? Pas du tout. Tout ce que le premier ministre nous a dit: Nous réviserons toutes les... Non, excusez-moi, là, je me suis trompée, mais ça ressemble encore à ça, de toute façon. Ce qu'il nous dit, à toutes fins pratiques, c'est qu'il veut faire réviser, par le biais des légistes, par le biais du conseil de la législation, la réglementation en matière de fiscalité. Alors, sans aucune espèce d'audience, sans aucune vérification, le premier ministre nous dit: On va faire faire des petites corrections par le bureau de la législation. Faites-vous en pas. C'est comme ça qu'on va corriger les écarts, les iniquités fiscales.
Bref, M. le Président, c'est un discours inaugural qui m'a fort déçu, qui est très décevant aussi pour l'ensemble de la population, et je dois vous dire... Je reprendrais tout simplement les mots, je pense que les gens l'ont vécu comme ça... Je reprendrais les propos, en terminant, de Laurent Laplante. Bien sûr, M. Laplante s'exprimait par rapport au congrès d'orientation du Parti libéral; mais M. Laplante, on pourrait reprendre exactement les mêmes propos par rapport au discours inaugural, quand il nous dit: «D'une part, en effet, le Parti libéral demande à l'électorat d'oublier en un clin d'oeil ce qu'ont été les neuf années du gouvernement Bourassa et le rôle qu'a rempli M. Johnson dans ce gouvernement. D'autre part, M. Johnson lui-même juge les Québécois assez stupides pour croire encore à la magie et aux miracles. Pareil mépris du public dépasse l'entendement.»
Voilà, M. le Président. Ça rejoint tout à fait ce que je pense du discours inaugural. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée des Chutes-de-la-Chaudière. Compte tenu de l'heure et conformément au règlement, les travaux de cette Assemblée sont suspendus jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 20 h 3)
Le Vice-Président (M. Tremblay): Mmes, MM. les députés, nous allons reprendre nos travaux. Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.
Je suis prêt à reconnaître un nouvel intervenant, député de l'Opposition officielle ou ministériel? Alors, M. le député de Rouyn-NorandaTémiscamingue. M. le député.
M. Rémy Trudel
M. Trudel: M. le Président, je ne sais pas si, après vérification, l'alternance a été respectée dans le cas des discours que vous venez d'autoriser. Oui, je serais prêt, bien sûr, à m'adresser à cette Assemblée réunie ce soir. Je ne sais pas, cependant, si cela correspond, encore une fois, en réponse au discours d'ouverture qui nous a été prononcé par le premier ministre, il y a maintenant quelques jours, parce que, évidemment, il y a beaucoup de choses à dire sur ce texte qui nous a été présenté par le premier ministre.
À cet égard, M. le Président, on avait un peu l'impression, lorsque le nouveau premier ministre s'est levé pour livrer ce discours d'ouverture d'une nouvelle session parlementaire, d'entendre un vieux disque, d'entendre ce que d'aucuns vont appeler, dans les arts cinématographiques, un remake. Nous avions l'impression de reprendre un ensemble d'éléments, du déjà entendu, du réchauffé, la même fricassée, si vous me permettez l'expression, que l'on retrouvait dans les mots, dans la bouche du premier ministre, mais servie d'une façon différente et servie d'une façon quelque peu étonnante, M. le Président. On croyait entendre un homme qui n'avait pas repassé ses propres discours, ses propres paroles, son propre credo, ses propres énoncés, ce qu'il avait dit dans cette Assemblée nationale à titre principalement de président du Conseil du trésor depuis quatre ans.
M. le Président, c'était tout à fait étonnant. Vous le savez bien, j'agis, pour la formation de l'Opposition, comme porte-parole en matière de santé et de services sociaux. Pendant de longs mois, j'ai eu à croiser le fer avec le prédécesseur de Mme la députée de Chambly, maintenant ministre de la Santé et des Services sociaux, avec le député de Charlesbourg. J'ai eu l'occasion de faire un certain nombre de débats, de participer à un certain nombre de débats sur des orientations qui ont précisément été données, nous le savons, par l'ex-président du Conseil du trésor, qui occupe temporairement certains diraient, par rapport à d'autres situations, que d'autres ont eu un emploi d'été; ici, on est en matière de travaux d'hiver maintenant le fauteuil de premier ministre ici, à l'Assemblée nationale.
M. le Président, c'est tout à fait étonnant d'avoir participé à des débats, à des affirmations claires, à des orientations bien prononcées en matière d'organisation de la dispensation des services de santé et des services sociaux au Québec, sous la responsabilité, en termes de direction financière du président du Conseil du trésor et, à l'époque, du député de Charlesbourg, M. Marc-Yvan Côté, et, maintenant, d'entendre ce discours, mais qui ne correspond d'aucune façon avec la réalité.
Je me souviens encore comme si c'était hier du porte-parole de ce gouvernement, de ce président du Conseil du trésor, le ministre de la Santé et des Services sociaux, que j'interrogeais en juin 1993, à qui je demandais, à l'aube de la campagne fédérale, s'il allait appuyer le changement de cap, le virage fait par les députés conservateurs, qui, après avoir prêché l'imposition de tickets modérateurs, après avoir dénoncé, avoir affirmé haut et fort, de leur côté, comme on l'a entendu pendant quatre ans et demi ici, à l'Assemblée nationale, que les citoyens sont des abuseurs de leurs services de santé, qu'il fallait leur imposer des tickets modérateurs, qu'il fallait modérer la fréquentation chez le médecin, qu'il fallait modérer la fréquentation de l'hôpital, comme s'il fallait modérer la fréquentation des services sociaux, qu'il fallait modérer la fréquentation de son CLSC, retraitaient et affirmaient que nous n'avions plus besoin d'imposer de tickets modérateurs pour les personnes qu'on avait accusées, pour la population qu'on avait accusée allégrement, pendant des mois et des mois, d'être des abuseurs.
Le ministre de la Santé et des Services sociaux de ce gouvernement disait à peu près textuellement: Tous ceux et celles qui se promènent dans la population et qui font accroire que nous n'allons pas être obligés d'introduire des tarifs, d'introduire des frais modérateurs ou des frais pour maintenir les services de santé et les services sociaux au Québec trompent la population. Le député de Charlesbourg, l'ex-ministre de la Santé et des Services sociaux, qui a défendu pendant les quatre années de son mandat, comme membre du gouvernement libéral, la nécessité d'imposer des tickets modérateurs, la nécessité d'imposer des frais modérateurs aux utilisateurs de nos services de santé et services sociaux, qui l'a prêché sur tous les toits et, bien évidemment, avec l'autorisation, avec le consensus qui existait au sein du gouvernement libéral, eh bien, M. le Président, à la veille d'une campagne électorale...
Qu'est-ce que vous voulez? il y a quand même une chose que ce gouvernement ne peut pas changer, c'est la Constitution. Il voudrait bien retarder les élections au-delà de la période de cinq ans permise par la Constitution pour un mandat normal. Il voudrait bien prolonger à six ans, sept ans, parce que, quand on est rendu au bout et qu'on a des résultats assez désastreux on va en convenir bien, on tente par tous les moyens de changer les termes de l'échéance. Mais comme ça, c'est impossible, eh bien, on décide de changer le discours, de tenter de duper la population, d'avoir un comportement d'aigrefin, M. le Président, un comportement qui fait en sorte que les gens ne reconnaissent pas le discours qu'ils ont tenu pendant les quatre premières années de leur mandat.
(20 h 10)
M. le Président, il fallait imposer les tickets modérateurs. Discours du premier ministre: Il n'y aura pas de ticket modérateur, il n'y aura pas de frais imposés aux utilisateurs. Pourquoi, M. le Président? Pour la simple et bonne raison qu'on s'est rendu à reconnaître une vérité quant aux utilisateurs du système de santé et des services sociaux, tel que ça avait été affirmé dans le document sur le financement à la commission parlementaire que nous avons tenue en février 1992: les citoyens et les citoyennes du Québec ne sont pas des abuseurs, ils n'abusent pas de leurs services de santé et de leurs services sociaux. Les tickets modérateurs, les frais orienteurs, les tarifs qu'on veut imposer sont simplement des taxes supplémentaires qu'on veut imposer à la population pour qu'elle puisse être capable de jouir de ses services de santé et de ses services sociaux parce qu'on a été incapables de bien gérer les finances publiques et qu'on veut, M. le Président, faire payer à la santé le désastre des finances publiques au Québec.
M. le Président, changement de discours, tromperie; on vire bout pour bout, on change le discours. Comme le disait l'ex-ministre, la réalité vous rattrapera un jour ou l'autre. Lui-même, donc, affirmait en juin 1993 que tous ceux qui faisaient accroire à la population qu'on ne pouvait pas avoir de frais supplémentaires tout en maintenant les services, ces gens-là allaient tromper la population. C'est le discours qu'ils adoptent, M. le Président.
Pendant tout ce temps-là, M. le Président, ces gens se sont bien docilement soumis aux diktats du gouvernement fédéral. Ce même gouvernement qui, il le sait, au même moment où il axe son discours d'ouverture sur la création de l'emploi, doit couper pour 250 000 000 $ de services dans le domaine de la santé et des services sociaux, eh bien, M. le Président, en même temps, ce gouvernement est capable de publier un document officiel du gouvernement qui dit que les problèmes que nous avons dans le domaine de la santé et des services sociaux, en termes de services que nous nous payons comme population, les services...
Parce qu'il n'y a pas de services gratuits, M. le Président. Il n'y a pas un Québécois, pas une Québécoise qui a jamais cru à cette expression que les services de santé et les services sociaux, c'était gratuit. Tout le monde sait très bien que les trois caractéristiques de notre régime, l'universalité, l'accessibilité et, troisième caractéristique, son financement public, sont des caractéristiques de base, et jamais personne n'a pensé que ces services étaient donnés. Nous nous les payons parce que nous avons décidé, M. le Président, en 1970 ou au tournant des années soixante-dix, de nous donner un régime universel, accessible, financé publiquement, que nous n'allions plus laisser ni votre père, ni votre frère, ni vos parents, dans la région du Bas-du-Fleuve, du Bas-Saint-Laurent, de la Gaspésie, de l'Abitibi, de l'Outaouais, de Montréal ou de Québec, que, peu importe sa condition, nous n'allions laisser personne sans soins médicaux, sans soins de santé requis par son état. Nous allions financer ça de façon solidaire.
Pendant tout ce temps-là, M. le Président, le gouvernement fédéral a commencé à se désengager, c'est-à-dire que les 50 % de la facture pour payer nos services, avec nos taxes que nous envoyons à Ottawa... Eh bien, le gouvernement a commencé, au tournant des années 1985-1986, à se désengager et à garder par-de-vers lui 200 000 000 $, M. le Président, 200 000 000 $. Ça, c'est un document du gouvernement du Québec qui nous le dit très bien, aux pages 41 et 42 d'«Un financement équitable à la mesure de nos moyens»: Dans le domaine de la santé et des services sociaux, le gouvernement fédéral nous prive de 200 000 000 $ par année depuis 1985-1986, si bien que, pendant la seule année 1992-1993 et la population doit savoir cela, M. le Président la position constitutionnelle, la position rampante du gouvernement du Québec devant le gouvernement fédéral, son acceptation inconditionnelle des politiques de transfert nous ont amenés à un manque à gagner de 1 200 000 000 $ pour la seule année 1992-1993.
Imaginez ça, à la maison, les gens qui nous écoutent. Imaginez ça, M. le Président, 1 200 000 000 $ de nos taxes que nous payons à Ottawa qui ne reviennent plus ici et qui imposent à ces messieurs et à ces mesdames, héroïquement, de couper pour 200 000 000 $ de services par année, parce que c'est à ça qu'il est astreint, M. le Président, ce gouvernement-là. C'est à ces gestes qu'il est astreint. Pourquoi ils doivent faire cela? Ils sont trappés. L'argent n'entre plus, et il faut bien que, vis-à-vis les finances publiques, on n'augmente pas au-delà d'une dose, je dirais, irraisonnable, le déficit pour l'amener à un niveau là où on est rendus actuellement, au seuil des 5 000 000 000 $ annuellement.
Eh bien, qu'est-ce qu'ils sont obligés d'imposer, M. le Président? Ils sont obligés de s'imposer, de nous imposer, d'imposer aux Québécois et aux Québécoises pour 200 000 000 $ de coupures de services par année, et ça, exclusivement parce que le gouvernement fédéral, lui, a décidé unilatéralement de garder ces 200 000 000 $ dans ses goussets, de les investir ailleurs: dans l'entente du Nid-de-Corbeau, dans le transport des grains de l'Ouest, dans les subventions aux chemins de fer, dans les subventions à l'Ontario en recherche et développement, dans les subventions aux Provinces maritimes. Mais c'est nos millions de dollars, M. le Président, pendant que, nous, on doit se priver au niveau de nos services de santé et de nos services sociaux, parce que l'attitude rampante de ce gouvernement nous a conduits dans cette direction.
Le discours d'ouverture du premier ministre ose nous dire que tout ça est enrobé sous le grand thème de l'emploi. M. le Président, on veut créer, nous dit-on dans le discours, 400 000 emplois. Dans la même semaine, on nous indique que, dans le seul domaine de la santé et des services sociaux, l'équivalent de 1000 personnes à temps complet, pour la seule année 1994-1995, vont perdre leur emploi. On dit, M. le Président, que 40 000 000 $, pour l'application de la loi 198, devront être coupés dans le seul domaine de la santé et des services sociaux. Ça, ça va équivaloir à 1000 personnes à temps complet. On ne dit pas qu'on va couper des emplois à des personnes. On dit: On va couper les heures supplémentaires. On va couper les heures aux gens qui ont des statuts précaires, à mi-temps. On va couper des heures à des gens qui, par exemple, fonctionnent sur des contrats à durée limitée, de six mois en six mois, comme j'en ai rencontré dans un certain nombre de régies régionales ou dans un certain nombre de CLSC, qui fonctionnent depuis des années et des années, qui sont, plus souvent qu'autrement, des femmes, qui sont souvent aussi on le relatait par rapport à d'autres situations, aujourd'hui dans des situations de famille monoparentale, chefs de famille monoparentale.
On va s'attaquer, M. le Président, aux plus petites personnes dans notre société en termes de gains. Dans notre système de santé et de services sociaux, c'est 1000 personnes en équivalent temps complet, et nos évaluations nous disent que ça va toucher entre 2500 et 4000 personnes qui vont se faire couper des heures, qui vont se faire couper des semaines, qui vont se faire couper des mois d'emploi, qui vont, en quelque sorte, être invitées à être encore davantage dans une situation de précarité de l'emploi. M. le Président, c'est ça, le résultat de la réalité: c'est 240 000 000 $ qu'on va couper au seul titre de l'application de la loi 198 dans le domaine de la santé et des services sociaux.
Et on a, M. le Président, l'outrecuidance de venir nous dire ici, dans le discours d'ouverture: Nous sommes un gouvernement qui veut axer tout son travail et son action parlementaire, et notre action ici, à l'Assemblée nationale, donc, sur le plan de la création d'emplois. La semaine suivante: dépôt des crédits, rencontre des présidents et des directeurs généraux des régies régionales de la santé et des services sociaux. Qu'est-ce qu'on leur annonce, M. le Président? Il y aura une coupure supplémentaire de 182 000 000 $ dans le domaine de la santé et des services sociaux à partir de la nouvelle année financière, d'ici quelques jours.
M. le Président, vaste programme de création d'emplois: 1000 postes équivalents temps complet qui vont toucher au-delà de 2500 personnes. Et là, on n'a pas encore le scénario de tous les établissement de santé, de tous les établissements dans le domaine des services sociaux, de tous les établissements dans le domaine de l'hébergement des personnes âgées, qui vont devoir se restreindre, M. le Président, pour 182 000 000 $. Et, si vous pensez qu'on ne coupera pas encore un nombre supplémentaire d'emplois... Ça va de soi qu'on va s'approcher de ce que l'ex-ministre de la Santé et des Services sociaux avait identifié ici comme étant une réalité qui allait se situer à entre 6000 et 8000 personnes, de perte d'emplois ou de postes qui disparaîtront dans le système de santé et de services sociaux pour le prochain terme.
(20 h 20)
M. le Président, 182 000 000 $ de coupures annoncées, de demandes qu'on vient de placer auprès des régies régionales de la santé et des services sociaux pour la seule année 1994-1995. M. le Président, la même chose pour 1995-1996; la même chose pour 1996-1997. M. le Président, devant la population, on ne peut pas dire à nos administrateurs d'établissements de santé et de services sociaux, on ne peut pas dire aux nombreux usagers qui sont sur les listes d'attente: Nous voulons développer et maintenir notre régime de santé et de services sociaux, nous voulons créer de l'emploi, et le premier geste que nous posons, c'est d'abord de vous supprimer vos emplois. M. le Président, c'est de la duplicité.
M. le Président, le discours qui nous a été présenté, les paragraphes qui nous ont été livrés en matière de santé et de services sociaux, les faits au cours des quatre dernières années, les actions qui ont été posées et qui sont décrétées depuis trois semaines nous indiquent, en termes de réalité, que c'est exactement le contraire qui va se produire. La population n'est pas dupe, M. le Président, la population saura reconnaître ce discours des deux côtés de la bouche. Les responsables, les gestionnaires, les travailleurs, les travailleuses dans notre système de santé et de services sociaux savent très bien ce que ça veut dire, ces jours-ci, ce discours axé sur l'emploi. En réalité, c'est un rétrécissement du marché de l'emploi, c'est un rétrécissement de l'effort de l'État et du support de l'emploi au Québec.
Et c'est dans ce contexte-là, M. le Président, que nous allons, nous aussi, bien sûr, demander que ce gouvernement pose un seul geste courageux et qu'il demande donc à la population de se prononcer. Qu'il appelle des élections générales, M. le Président. La population se fera arbitre et nous verrons bien qui a raison sur le vrai discours. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un député de la formation ministérielle, le nouvel élu de Shefford, M. le député de Shefford. Allez-y.
M. Bernard Brodeur
M. Brodeur: M. le Président, ce qui ressort du discours inaugural, c'est la nécessité de faire participer tous les citoyens du Québec au développement économique. Il ressort aussi de ce message l'importance, voire l'urgence d'agir en partenariat dans la collaboration afin de relever le défi de la création d'emplois. Tout le monde sait que le problème du sous-emploi est réel. Trop d'individus sont sans emploi et ne peuvent subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Trop de Québécois ne peuvent contribuer à l'enrichissement de notre société. C'est pourquoi il est important de prendre les moyens qui s'imposent afin de régler ce problème d'une façon définitive. Nous allons agir pour l'emploi, nous allons agir pour que les Québécois et les Québécoises retrouvent leur dignité. Des projets, M. le Président, nous en avons. Nous avons également des idées et une vision qui feront du Québec cette société qui permet à tout individu de s'épanouir et de trouver sa dignité dans le travail.
Tout d'abord, il est important de signifier clairement à toute la population du Québec que nous allons favoriser la création d'emplois grâce à des priorités bien précises. Vous vous rappellerez que le plan de relance économique que nous avons dévoilé il y a quelques mois comporte des projets concrets et réalistes. On y prévoit la création de plusieurs milliers d'emplois grâce à des investissements massifs. Récemment, nous avons établi une aide financière et technique à ceux et celles qui veulent développer leur propre emploi. Là encore, plusieurs emplois seront créés. Nous avons mis en place un projet de soutien aux jeunes, qui favorise l'embauche de jeunes scientifiques et techniciens par des PME. Nous visons également le renforcement de la politique de développement régional déjà en vigueur avec le Fonds décentralisé. Ce Fonds, M. le Président, permettra de créer des emplois dans chacune des 16 régions du Québec et appuiera financièrement des projets de développement local et régional. Enfin, encore tout récemment, nous avons établi conjointement avec le gouvernement fédéral un programme visant à permettre aux municipalités de réaliser des travaux de réfection, d'agrandissement ou de construction d'infrastructures. Ce programme, lui aussi, aura une incidence directe sur la création et le maintien de plusieurs milliers d'emplois directs au Québec. M. le Président, ce sont là des actions qui démontrent que le processus de création d'emplois est déjà bien amorcé.
Il y a un deuxième point sur lequel je voudrais brièvement m'attarder: il s'agit de la volonté du gouvernement libéral d'agir au niveau de l'agriculture. M. le Président, nous savons tous le rôle moteur que joue l'agriculture dans notre économie. Le secteur bioalimentaire représente en effet plus de 17 000 000 000 $ de chiffre d'affaires. Puisque des milliers de Québécoises et de Québécois vivent directement de ce secteur d'activité, il nous revient de mettre en place des projets qui permettent d'encourager le secteur agricole.
Dans les prochains mois, nous entendons adopter le projet modifiant la loi de protection du territoire agricole. Cette loi permettra de reformuler les critères de décision et la prise en considération des particularités régionales. Par le biais de cette même législation, nous prévoyons constituer un fonds spécial afin d'assurer la défense des producteurs poursuivis en raison des poussières, des odeurs ou des bruits qui résultent de leurs activités agricoles. Enfin, l'adoption d'un autre projet de loi permettra d'introduire de nouveaux pouvoirs réglementaires pour assurer une plus grande souplesse dans l'administration de la loi de protection du territoire agricole. M. le Président, ces législations vont contribuer à améliorer tout ce qui touche de près ou de loin les activités agricoles au Québec. C'est pourquoi nous allons travailler très fort pour continuer de développer ce secteur et pour aider les producteurs agricoles de toutes les régions du Québec.
Concrètement, nous visons la consolidation et la rentabilité de l'entreprise agricole québécoise. Nous allons aussi protéger l'agriculture, ses ressources humaines, son environnement et améliorer la qualité des aliments. Enfin, nous allons agir afin d'accroître la compétitivité du produit québécois. En bout de ligne, notre économie en sortira renforcée puisque nous aurons consolidé un secteur d'activité qui donne de l'emploi à plus de 360 000 travailleurs. Notre volonté d'agir en ce domaine est incontestable. M. le Président, notre objectif est de doter le Québec d'une politique claire en matière agricole et non d'affaiblir la position du Québec sur la scène internationale.
M. le Président, je voudrais dire une dernière chose et, cette fois-ci, pour le bénéfice du député d'Arthabaska.
Des voix: Il n'est pas là.
M. Brodeur: Il n'est pas là. Je voudrais lui dire qu'il s'est trompé dans son discours de la semaine dernière. Je n'ai jamais prétendu être l'agriculteur le plus informé de cette Chambre, même s'il est vrai que je connais ce secteur pour y avoir évolué. Je connais l'agriculture parce que je suis issu d'un comté où ce secteur prend une grande importance. En fait, je connais assez l'agriculture pour affirmer que notre gouvernement a fait beaucoup plus ces derniers temps que légiférer sur des peccadilles, comme le disait le député d'Arthabaska.
Je voudrais simplement vous rappeler que le gouvernement libéral, par la révision de la loi sur la mise en marché, a voulu s'assurer d'une mise en marché plus ordonnée non seulement pour les produits agricoles, mais pour les produits marins au Québec, ceci en précisant les rôles des divers intervenants et en leur donnant des moyens nouveaux en vue d'une plus grande concertation. C'est notre gouvernement qui a signé l'entente-cadre Canada-Québec sur le développement agro-alimentaire. Cette entente de 40 000 000 $ est destinée à soutenir les efforts de recherche, d'expérimentation et de transferts technologiques en agro-alimentaire.
Vous vous rappellerez aussi que le ministre de l'Agriculture a convoqué, il y a quelques mois, tous les intervenants à participer à un Sommet de l'agriculture afin d'évaluer les progrès effectués au cours de cette première année. À la lumière des travaux réalisés, de nouveaux objectifs de travail ont été identifiés et un calendrier de réalisation a été dressé.
M. le Président, vous voyez bien que le gouvernement libéral du Québec fait plus que prononcer des beaux discours. Il agit pour et au nom du monde agricole, parce que nous savons que le secteur alimentaire et agricole constitue l'une de nos principales forces économiques. C'est donc en poursuivant nos efforts et en votant des législations adaptées aux réalités d'aujourd'hui que nous contribuerons à améliorer les conditions de vie de nos producteurs agricoles de toutes les régions du Québec. L'action des prochains mois s'orientera dans cette direction.
(20 h 30)
Avant de terminer, M. le Président, j'aimerais vous dire que nous allons réussir à bâtir un avenir pour notre société. Nous allons réussir parce que nous sommes véritablement à l'écoute des besoins des Québécoises et des Québécois. Nous savons ce qu'ils désirent. Nous comprenons qu'ils ont besoin de travailler pour subvenir à leurs besoins. Nous comprenons que, pour réaliser et matérialiser des idées, pour avoir des projets, pour bâtir notre avenir, il nous faut un emploi. C'est ce à quoi nous travaillerons d'arrache-pied, M. le Président, dans les mois à venir. Le défi de l'emploi constituera le coeur de notre action.
Nous déposerons prochainement différentes pièces législatives, des politiques et des programmes qui viendront à leur tour aider les gens et répondre à leurs besoins. Nous allons déposer une politique des services à la petite enfance et un projet de loi qui modifiera les normes de travail afin de réconcilier les responsabilités parentales et le travail. Nous allons déposer un programme d'aide au retour au travail pour les chefs de famille monoparentale et proposer une politique de lutte à la violence conjugale. Nous allons également déposer une loi pour rendre plus sévère la vente du tabac aux jeunes et renforcer la protection des non-fumeurs dans certains milieux publics. Nous allons déposer une politique de développement durable en agriculture et proposer une révision du régime de fiscalité applicable aux établissements agricoles. Nous allons procéder à la création d'une société du tourisme et négocier une nouvelle entente fédérale-provinciale sur le développement régional. Enfin, nous déposerons un plan de développement de la voirie jusqu'à l'an 2000, M. le Président.
Je m'arrête ici pour simplement redire et répéter à toutes mes concitoyennes et à tous mes concitoyens que notre gouvernement est là pour agir en leur nom et pour eux. Le chef de l'Opposition officielle, on le sait, vise la séparation du Québec. Mais, au lendemain de cette séparation, il entend plonger le Québec dans des projets de négociation. Pour notre part, nous voulons simplement agir. Notre idéal, c'est remettre le Québec au travail. Nous ne sommes pas là pour rêver ou pour établir des scénarios incertains. Ce que nous voulons, c'est susciter la création d'emplois par milliers aux Québécoises et aux Québécois. C'est ce sur quoi nous agirons pour les Québécois et les Québécoises de toutes les régions. Merci, M. le Président.
Des voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un député indépendant, M. le député de Drummond. M. le député.
M. Jean-Guy St-Roch
M. St-Roch: Merci, M. le Président. J'ai eu l'occasion, au cours des neuf dernières années, de m'exprimer à quelques occasions sur les discours du trône ou sur les discours du budget. J'ai toujours affirmé en cette Chambre qu'une des pièces législatives et un des moments forts de notre vie parlementaire, c'était le dépôt et la lecture d'un discours du trône. Parce que ces discours du trône se doivent de donner les orientations, se doivent de donner les solutions aux grandes problématiques et aussi les orientations du gouvernement. Et, avec les crédits et le budget, qui est la deuxième pièce la plus importante, elles se veulent aussi, ces informations-là, surtout le discours du trône, un phare qui oriente la vie de la collectivité québécoise.
M. le Président, j'ai aussi dit, le 8 septembre 1992, lorsque j'avais pris la décision de devenir indépendant, que, d'ores et déjà, dans le futur, toutes mes actions seraient orientées en pensant aux préoccupations de la jeunesse du Québec et que j'orienterais tous mes efforts pour avoir l'assurance qu'on est en train de confectionner un coffre d'outils avec les outils pour régler les problèmes à court, moyen et long termes. Lorsque je regarde ce discours du trône, je retrouve un outil dans le coffre: il est rouge, il est flamboyant; il y a un outil et c'est un mot: emploi, emploi, emploi! Mais vous allez comprendre que, si on laisse un coffre d'outils à une génération, actuelle et future, avec un outil, on peut s'attendre qu'on va avoir des difficultés à rencontrer toutes les problématiques de notre vie moderne.
Alors, ce soir, j'essaierai de regarder avec vous et avec mes collègues de cette Assemblée, ici, ce qui manque et les différentes facettes qu'on aurait dû retrouver dans ce budget. J'ai affirmé, à maintes occasions, que la vie démocratique doit passer par le respect de nos institutions, par le respect que nos citoyens et nos citoyennes auront envers les députés de cette Assemblée. Parce que, lorsqu'on élit un député et je le prétends encore ce soir, M. le Président c'est un leader de sa société qui est capable d'orienter ses concitoyens et concitoyennes vers l'obtention d'objectifs à court, moyen et long termes.
Alors, qu'est-ce que je retrouve au niveau de la revalorisation des institutions dans ce discours du trône, M. le Président? Rien. Mais est-ce qu'on doit s'en étonner? Je vais vous donner un petit extrait du Devoir du 19 août 1990, à la lecture duquel on comprendra peut-être qu'on a oublié, dans le discours du trône, cette facette. Je cite, M. le Président, cet article de Mme Isabelle Paré: «J'ai vu la politique d'assez proche pour voir que les députés se désillusionnent assez vite et que le système parlementaire leur donne un rôle marginal. On peut faire beaucoup plus de millage et agir sur le contenu comme directeur de cabinet plutôt que comme simple député, soutient M. Pierre Anctil.»
Alors, c'est peut-être une des raisons pourquoi nous ne retrouvons rien, M. le Président, au niveau de la revalorisation... Il y a deux volets, entre autres je tairai, ce soir, le volet du vote libre où je me serais attendu qu'on était pour avoir une orientation gouvernementale beaucoup plus accentuée et l'un, c'est la revalorisation du rôle des commissions parlementaires. Je suis membre d'une commission parlementaire où on a réussi mon collègue de Laviolette pourra en témoigner après maints efforts, après cinq ans d'efforts pour remplir notre mandat, à n'avoir qu'un organisme à surveiller qui était la CSST. Qu'est-ce qu'on a retrouvé dans la presse qui a suivi ces auditions? Vous regarderez, on a dit: Pour une des rares fois, des parlementaires se sont acquittés de leur tâche et ont poussé au bout leur rôle de contrôleurs et de surveillants des organismes gouvernementaux. Ça a été positif pour l'ensemble de cette Assemblée, M. le Président.
Une autre chose à laquelle je me serais attendu: une orientation, M. le Président. Je me suis levé ici à quatre occasions, à quatre fins de session, en juin 1992, décembre 1993... et, les quatre fins de session, on a eu des bâillons dans cette Chambre. Au-delà de 30 projets de loi ont été passés par bâillon. J'ai demandé à maintes reprises, et souvent même le leader du gouvernement disait que, oui, il était peut-être temps de regarder notre règlement, de voir à redéfinir le mot «urgence». Or, M. le Président, je ne retrouve rien, dans le discours du trône, qui va faire en sorte que la commission de l'Assemblée nationale va se pencher dans les plus brefs délais pour revoir l'utilisation du mot «urgence» parce que, lorsque je regarde les législations qui en sont issues, et on aura l'occasion d'y revenir, M. le Président, elles n'ont pas été porteuses de promesses et d'avenir.
Une autre chose que je me serais attendu à voir dans ce discours du trône, c'est une vraie réorganisation territoriale du Québec, une vraie décentralisation de la machine gouvernementale. Et cette décentralisation, M. le Président, passera par une assise sur les MRC parce que, lorsque je regarde l'ensemble des régions du Québec à l'heure actuelle, avec les années, basées sur des découpages géographiques qui datent du passé, la plupart de nos citoyens ne se reconnaissent plus. Et, souvent, à cause de l'accroissement de la population et avec notre Loi électorale, bien, on fait en sorte que des municipalités n'ont plus maintenant aucun lien d'appartenance dans les nouvelles circonscriptions où elles ont été désignées. Alors, je me serais attendu à voir une vraie décentralisation. Et, lorsqu'on parlera de vraie décentralisation, on parlera peut-être de ce que j'ai entendu ici du député de Saint-Laurent et premier ministre du Québec à un moment donné, de dire un mot nouveau pour des problèmes nouveaux, et c'est «subsidiarité». Oui, M. le Président, je me serais attendu, au vrai mot, à la vraie utilisation dans le discours du trône de la subsidiarité. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire qu'on décentralise et qu'on redonne la chance aux citoyens de régler les problèmes à la source au lieu de tout rapatrier et de centraliser ici, à Québec.
Oh oui, il y a eu des tentatives de décentraliser maintenant, avec la politique de développement régional. Le premier ministre y a fait référence dans son discours. Mais, M. le Président, lorsque je regarde cette décentralisation-là, oui, on a décentralisé beaucoup de responsabilités, mais on jugera l'arbre à la valeur des fruits qu'il produira. Et je ne suis pas convaincu, M. le Président, qu'on sera capable d'en avoir beaucoup.
Je me serais attendu aussi qu'on puisse dire une fois pour toutes, dans cette optique de décentraliser et de rasseoir le Québec sur une vraie organisation territoriale, qu'on était pour revoir les régions administratives. Et, quand on regarde l'ensemble de notre collectivité, M. le Président, ce n'est pas 16 régions administratives, mais c'est plutôt 20 régions avec trois communautés urbaines qui serait réaliste et représenterait la vie d'aujourd'hui.
Un autre volet, M. le Président, auquel j'aimerais m'attacher avec vous, c'est la gestion publique. Mais oui, on a eu une commission parlementaire ici. Tous les intervenants de la collectivité québécoise demandaient une commission parlementaire assise sur une révision de la fiscalité québécoise. On a eu droit, à la place, en janvier 1993, à une commission parlementaire assise sur l'assainissement des finances publiques. Et on a vu les objectifs qu'on s'était donnés: 1 % de réduction, 1 % d'accroissement. On a vu le dépôt des crédits on aura la chance d'y revenir c'est 3 %, c'est trois fois plus. On a mis de côté ce volet-là.
Une chose à laquelle je me serais attendu aussi, en gestion moderne, lorsqu'on parle d'une vraie gestion publique, ça aurait été de recréer ce climat de confiance avec tous les intervenants, les fonctionnaires, les employés de l'État, ces grands serviteurs, à quelque niveau qu'ils soient, M. le Président. On a vu, à travers les années... Puis j'ai insisté ici, comme adjoint parlementaire, dans le passé, au ministre du Travail et comme député indépendant, sur le fait qu'il était temps maintenant de revoir tout le mécanisme qui régit les conventions collectives et de dire: Si on crée un ministère de l'Emploi, faisons donc en sorte que tous les fonctionnaires, qu'ils soient du privé ou du public, soient intégrés avec une même législation. Je me serais attendu qu'on jette les ponts pour développer ce sentiment-là, M. le Président.
(20 h 40)
Je me serais attendu aussi, à regarder notre fonctionnement au courant des années, à voir développer dans ce budget-là une vraie réforme majeure de l'administration, au même titre que dans une société moderne où il faut bouger efficacement et rapidement. Je me serais attendu qu'on profite de la réorganisation ministérielle qui est arrivée pour redonner une autorité et une autonomie à chacun des ministères. En d'autres mots, ôter l'emphase qu'on a sur le fameux fonds délégué, le fonds consolidé du Québec. À l'heure actuelle, il n'y a pas un ministère qui est intéressé, M. le Président, à aller chercher des revenus supplémentaires, parce qu'ils iront, ces revenus-là, dans le fonds consolidé. Lorsqu'on révélera le budget de chacun des ministères, on aura des coupures. Il serait peut-être temps de revoir cette administration-là, et de faire en sorte que chaque ministère ait la responsabilité de collecter ses revenus et de gérer efficacement ses fonds. Ça, M. le Président, ce serait peut-être un moyen. Au lieu de privatiser plusieurs services de l'État, il faudrait être capable d'avoir la même efficacité, la même efficience en donnant cette autonomie.
Ça implique, ce que je viens de dire, de revoir le rôle du Conseil du trésor. Le rôle du Conseil du trésor, je pense, se doit d'être revu. Si on donne la responsabilité aux ministères d'avoir cette autonomie de gestion, le rôle du Conseil du trésor devrait, au même titre qu'on le voit dans l'entreprise privée, être un rôle de vérificateur, un rôle d'auditeur et de comptable agréé qui regarde la gestion de l'État et qui confirme qu'elle a été conforme, dans le cas de l'administration publique, aux lois, aux règlements et aux budgets qui ont été donnés.
Je me serais attendu aussi, M. le Président, qu'on nous annonce, pour une fois, une vraie réforme de la fiscalité, qu'on commence à dégager et à revoir ce qui a été fait dans le passé. M. le Président, on a eu, aux États-Unis, une commission parlementaire qui s'est appelée le «Blue Tax Reform». Après avoir regardé le système parlementaire américain des années soixante-dix, on est arrivé à la conclusion qu'il faudrait avoir un revenu garanti si on veut minimiser et contrôler l'accroissement des dépenses de l'État. On a vu, en Angleterre, à la fin des années soixante-dix, le «Mead Report» qui est arrivé à la même conclusion. Plus près de nous, M. le Président, on a eu la commission Macdonald, vers la mi-décennie des années quatre-vingt, qui a dégagé les mêmes perspectives. Tout récemment, des chercheurs du Manitoba sont arrivés à la même conclusion. Je n'ai pas vu de réforme, d'amorce ou de débouché vers un nouveau contrat social qui aurait été porteur d'union.
M. le Président, j'ai hâte de voir le député de Saint-Louis, mon collègue, parce que, dans les années quatre-vingt-dix, avec un groupe de députés, on a rêvé d'avoir un projet de loi, ici, qui forcerait le gouvernement, dans ses dépenses courantes, à avoir un déficit zéro. Votre présidence, M. le Président, et je ne veux pas en discuter l'opportunité, a jugé une fin de non-recevoir parce que la présidence avait décidé, à ce moment-là, que seul un ministre pouvait passer un projet de loi qui engageait les dépenses de l'État. Maintenant que mon collègue de Saint-Louis a joint ce haut lieu, en tant que ministre de l'Éducation, j'espère qu'on verra réapparaître bientôt cette philosophie, ce projet de loi qui s'appelait, dans le temps, si ma mémoire est fidèle, le projet de loi 197. Ça, c'était un outil indispensable, qu'on devra, un jour, ici, se donner obligatoirement, par loi, afin d'arriver, dans les dépenses courantes, à un déficit zéro. Et je ne l'ai pas trouvé.
M. le Président, il y a notre collègue de Mille-Îles qui, en donnant sa démission et en quittant cette Assemblée nationale, nous a rappelé avec justesse toute l'importance qu'il y avait, dans la gestion moderne des fonds publics, de se donner, ici, en tant que législateurs, par un projet de loi, les outils nécessaires pour gérer efficacement les dépenses de l'État. Qu'est-ce qu'il disait, ce projet de loi, M. le Président? Ce projet de loi disait que, dans chaque législation, on devait avoir l'économie de la loi: quels sont les impacts sur les ressources humaines, quels sont les impacts sur les entrées de fonds du gouvernement, quels sont les impacts sur les sorties.
J'ai ajouté, et j'ajoute encore, un autre élément, M. le Président: avant que les règlements de cette loi soient promulgués, ils devraient être étudiés en commission parlementaire. Vous allez dire: Le député de Drummond utilise une vieille cassette. M. le Président, je vais vous donner un petit exemple. En novembre 1993, le 4 novembre, on sanctionnait la Loi sur la publicité légale des entreprises individuelles, des sociétés et des personnes morales. Grand titre, M. le Président, qui veut dire que chacune des corporations, maintenant, lorsqu'elle s'enregistre, est obligée de payer un dû. Si vous regardez, M. le Président, à la lecture de cette loi-là, il n'y a pas un parlementaire de cette Assemblée, ici, qui pourrait être contre. Mais, lorsqu'on a vu les modalités d'application avec les règlements, avec la promulgation de cette loi qui est entrée en vigueur le 1er janvier, qu'est-ce qu'on fait, M. le Président? On va taxer par la bande, de côté avec ce projet de loi là, on va chercher 12 000 000 $, grosso modo, pour un budget total de 35 000 000 $. C'est ça qui a été le résultat de la loi 95. Et, pire que ça, M. le Président, on a ici, au Québec, 36 348 organismes, ce qu'on appelle des OSBL, des organismes à but non lucratif, qui seront maintenant obligés, à toutes les années, de produire une demande de renouvellement de nom de corporation, mais surtout de payer aussi les 30 $ qui l'accompagneront: un petit 1 090 000 $ vitement qu'on est allés chercher. On a taxé le bénévole.
Et j'avise mes collègues parce qu'on est en train d'envoyer à chacun des citoyens et des citoyennes, maintenant, ces renouvellements-là. On sait, lorsqu'on regarde les personnes physiques, le petit commerce de chez nous, la personne autonome qui décide d'avoir une raison sociale, de s'enregistrer, qu'autrefois on s'enregistrait une fois dans un district judiciaire. Ça coûtait 20 $, et c'est tout ce que ça coûtait. Lorsqu'on regarde cette loi 95 avec la réglementation qui en découle, qu'est-ce qu'on va faire, M. le Président? Alors, pour 335 385 de nos citoyens, à chaque année, on sera obligé de réemplir le formulaire, de payer 30 $, pour un autre petit 10 000 000 $ bien vitement passé que personne n'a vu. Et je pourrais continuer comme ça pour 35 000 000 $. Voilà l'importance pour nous, les législateurs, d'exiger maintenant et c'est ça que je me serais attendu, moi, de retrouver dans le discours du trône d'avoir dans chacun des projets de loi ces économies de loi là, et surtout que chacune des commissions parlementaires puisse prendre la réglementation.
Vous allez dire: Ah, c'est un exemple que vous avez pris. M. le Président, il n'y a personne qui va mettre en doute les normes du travail. Il n'y a personne qui va mettre en doute la loi qu'on a modifiée en 1991, les articles 122 et 124, la loi qui régit, finalement, le Bureau du commissaire général du travail. Encore là, par une mesure administrative, nous, les législateurs, on a décidé quelque chose qui était fantastique, ici, dans cette Assemblée: redonner la chance, lorsqu'on était un travailleur singulier, d'aller directement au commissaire du travail sans avoir à passer... Mais, par une décision administrative, maintenant, on sera obligé de se déplacer. On recentralise les bureaux dans les deux grandes capitales qui sont Montréal et Québec, puis on dit: Dans un rayon de 100 km, au lieu de faire comme on faisait dans le passé, d'envoyer un commissaire avec l'enregistreuse pour venir prendre les dépositions et rendre son jugement, on fera se déplacer nos citoyens et nos citoyennes. Et ça fait partie, M. le Président, des tracasseries administratives, tel qu'on l'a vu.
Au niveau de l'éducation, M. le Président, je vais vous mettre au défi de me trouver une organisation qui serait capable de survivre en disant: Un de mes produits sur cinq va être un échec. M. le Président, à l'heure actuelle, on sait que le tiers de nos jeunes ne complètent pas leur secondaire. On sait, M. le Président, avec des réformes qui sont mises sur la table, à l'heure actuelle, qu'on espère avoir un taux de succès de 80 %, qui est un sur cinq de nos jeunes qui ne va pas réussir.
Notre collègue le député d'Outremont et ministre de l'Industrie et du Commerce disait: J'ai inventé un nouvel outil de gestion. Ça va dorénavant s'appeler le qualimètre. Sommes-nous les meilleurs? Prouvons-nous-le, disait-il. Eh bien, M. le Président, lorsque je regarde, moi, un système d'éducation qui va produire, en bout de piste, 20 % de nos jeunes sans diplomation, lorsque je regarde le discours contenu dans ce budget-là, lorsqu'on dit: Ce qui est l'avenir, c'est la haute technologie, c'est les voies de l'informatique, et lorsqu'on dit que nos jeunes qui ne finissent pas le secondaire ne pourront pas se trouver une job, bien, on est en train de créer ici 20 % de chômeurs dans les générations futures.
Et quelles mesures avons-nous, M. le Président, pour encourager? Oh! on nous a fait miroiter la haute technologie. La haute technologie n'est pas créatrice d'emplois. La haute technologie s'adresse à ceux qui ont quatre et cinq talents. Mais quels sont les emplois traditionnels qu'on va créer ici avec ce budget pour 20 % de nos jeunes? M. le Président, lorsque je regarde le taux de sans-emploi à l'heure actuelle, que ce soit ceux qui sont sur l'assurance-chômage ou ceux sur l'aide sociale à 23 %, eh bien, je me demande, moi, ce qu'on fera en tant que société avec la baisse de travailleurs et de travailleuses qui viendront sur le marché pour être capables d'absorber 23 % des gens auxquels on ne donnera pas la chance de gagner honorablement leur pitance.
M. le Président, est-ce qu'il y avait des lois... C'est beau de faire l'intervention que je fais et de dire: Voici les choses qui ne sont pas correctes. Il y a un domaine, ici, au Québec, où on pourrait innover, où on pourrait créer de l'emploi, et c'est tout le domaine de la foresterie. Mon collègue de Laviolette vous parlera de forêt habitée. J'ai eu l'occasion d'échanger avec lui, et il a raison. L'avenir du Québec en création d'emplois est dans la création d'emplois pour les jeunes qui ne peuvent pas avoir les habiletés de compléter leurs études, M. le Président, et passera, au Québec, par un retour à la foresterie.
(20 h 50)
Je me suis amusé à regarder, M. le Président, les statistiques et c'est les statistiques canadiennes qui sont, quant à moi, le reflet de la collectivité québécoise. Dans les années soixante-dix, M. le Président, c'est 256 000 000 de m³ de bois qu'on coupait, ici, pour toutes les utilisations au Québec. En 1986, M. le Président, on était descendu à 204 000 000 de m³. Si on regarde les prédictions, M. le Président, on nous dit que bientôt, dans 30 à 40 ans d'ici, on sera en rupture de stock. Et ceux qui s'intéressent à la foresterie, on s'apercevra, M. le Président, lorsqu'on travaille dans ces milieux là... C'est 30 à 50 ans d'ici. Il faut y voir dès maintenant, M. le Président. Je me serais attendu, moi, au lieu de voir les coupures de budget comme on a vu dans le milieu de la foresterie, qu'on aurait eu des accroissements.
Et j'aimerais rappeler à mes collègues, M. le Président, qu'à chaque fois que le gouvernement donne 1 $ de subvention et principalement dans la forêt habitée qu'est la forêt privée du Québec on regénère 3 $ de revenu au bout, dont 0,50 $ reviennent dans les coffres de l'État. Alors, je me serais attendu, M. le Président, que, avec un ajout, pour les cinq prochaines années, d'une trentaine de millions de dollars, on aurait été capables de combler tous nos besoins et surtout de créer des emplois, ici même dans le coeur du Québec habité et aussi dans nos régions. Et ça, ça aurait été du vrai développement régional.
Vous me faites signe, M. le Président, qu'il me reste très peu de temps. Bien, M. le Président, je terminerai avec le dernier volet. Vous m'indiquez qu'il me reste seulement une minute. Je conclurai avec la question constitutionnelle, M. le Président, et je vous dirai que je déplore le statu quo qu'on remarque à travers toutes les allocutions qu'on a entendues, ici, de l'autre côté de la Chambre et dans le discours du budget. M. le Président, la souveraineté, ça ne se négocie pas; ça s'assume, pour un peuple. Et on serait capables d'être souverains chez nous et d'avoir vraiment les outils nécessaires pour être capables d'être créateurs d'emplois, et on serait capables de laisser non pas un coffre étincelant rouge, mais un vrai coffre d'outils. Et ça passera, M. le Président, par la souveraineté à l'intérieur d'une Constitution dont, j'espère, on pourra se doter dans les plus brefs délais. Je vous remercie.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Avant de reconnaître un prochain intervenant, je voudrais rappeler à l'ordre le député de Nelligan, s'il vous plaît, et le député de Saint-Henri, dans cette Chambre. Et je vais reconnaître le prochain intervenant, M. le député de Dubuc et critique officiel de la Faune, de la Chasse et de la Pêche. M. le député de Dubuc.
M. Gérard R. Morin
M. Morin: Alors, merci, M. le Président, pour votre gentille présentation. Avant de commencer mon intervention telle que je l'avais pensée ou préparée, je ne peux m'empêcher de faire une petite remarque sur l'intervention du nouveau député de Shefford, qui, lors de ses propos, soutenait que le porte-parole, critique de l'Opposition en matière d'agriculture, ne semblait pas connaître ses dossiers, qui, lors de son intervention de la semaine dernière, s'était trompé et soutenait aussi, par le fait même, que son gouvernement, le gouvernement libéral, était un gouvernement qui savait légiférer ou gouverner en fonction de l'intérêt du monde agricole. Alors, je pense, M. le Président, qu'il serait important qu'on lui rappelle ce qui est advenu du projet de loi 123, un projet de loi modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole et d'autres dispositions, projet de loi qui a été présenté par le ministre le 11 novembre 1993 et qui est demeuré au feuilleton sans qu'on sache ce que deviendrait ce projet de loi sur le zonage agricole. Alors, pour un gouvernement qui sait légiférer, qui connaît les besoins du monde agricole, je pense que cette hésitation-là est fort questionnable. Alors, à ce moment-là, j'inviterais le nouveau député de Shefford à creuser et à se faire un peu plus critique par rapport aux agissements de son propre gouvernement et du ministre titulaire de l'Agriculture.
Ceci dit, M. le Président, je voudrais revenir au discours inaugural que j'ai écouté religieusement. Mais, en regardant attentivement le premier ministre par intérim, ça me rappelait l'arrogance dont il avait fait preuve envers le chef de l'Opposition alors que ce dernier l'interrogeait lors de l'étude des crédits, je pense, en 1992. En effet, à une question du chef de l'Opposition sur les crédits, il avait tout simplement répondu que ce n'était pas de ses affaires, que ça ne le regardait pas. Alors, imaginez, M. le Président, dire à un chef de l'Opposition qui pose des questions au président du Conseil du trésor que ça ne le regarde pas! Une telle attitude démontre un flagrant mépris envers notre système démocratique et son institution parlementaire dont une des composantes essentielles est, bien sûr, l'Opposition officielle. Il ne faut donc pas se surprendre que ce même individu, ce même personnage ait adopté dans son discours inaugural un comportement empreint d'un manque de respect et de considération envers l'ensemble de la population du Québec victime de l'incurie gouvernementale des cinq dernières années.
Si je tiens des propos d'une telle sévérité à l'endroit du premier ministre par intérim, c'est qu'il les mérite amplement. Ce que je veux dire, M. le Président, c'est que la faillite des cinq dernières années du présent gouvernement ne l'autorise pas à tenir un discours à ce point électoraliste sous prétexte qu'il n'en était pas le chef, car, s'il y a eu un acteur au Conseil des ministres qui a contribué à la paralysie chronique du gouvernement, c'est bien l'ex-président du Conseil du trésor.
Ce qui écoeure le peuple, M. le Président, ce n'est pas le fait que les gouvernements ne règlent pas tous les problèmes de la société le citoyen n'est pas à ce point naïf c'est plutôt le sentiment de se faire tromper sans vergogne par des ministres et un chef de gouvernement sans scrupule, et cela, à répétition. Ce ras-le-bol, cette perte de confiance du citoyen envers les gouvernements n'est pas apparu sur un tas de fumier comme un champignon. Le présent gouvernement libéral en est amplement responsable. Pourtant, le nouveau premier ministre libéral par intérim n'hésite pas dans son discours à se transformer en marchand d'illusions. Et, si je dis toujours «premier ministre par intérim», c'est que, si, d'une part, je lui reconnais son poste de chef du Parti libéral, il n'en est pas question, en ce qui me concerne, en tant que premier ministre. Et, toutes les fois qu'il se comporte comme tel, comme premier ministre, je considère qu'il se comporte comme un usurpateur d'un poste que la population ne lui a jamais accordé.
Ce discours, M. le Président, que Michel David du Soleil qualifie candidement de «nonchalance verbale», je serais tenté plutôt de le qualifier de malhonnêteté intellectuelle et d'opportunisme. Car non satisfait d'avoir trompé la population qui avait fait confiance à son gouvernement en 1989, le premier ministre contribue par des propos insensés à cultiver ce phénomène de rejet des institutions politiques qui se généralise au Québec. Le chef du Parti libéral ne semble pas conscient que la patience du Québec a atteint ses limites. Le premier ministre par intérim semble ignorer que le mécontentement généralisé s'est manifesté dans la rue comme nous ne l'avions pas vu au cours des 10 dernières années. Conséquemment, l'échec scandaleux du présent gouvernement ne l'autorise pas à parler d'avenir. Aussi simple que ça!
Le premier ministre devrait avoir assez d'honneur pour reconnaître que l'échec de son gouvernement lui retire le droit de parler d'avenir comme il l'a fait dans son discours inaugural. Ce droit d'engager l'avenir du Québec, M. le Président, se mérite par un passé pouvant être garant de cet avenir. Et, là-dessus, le premier ministre ne possède aucune crédibilité. Si, en 1989, lors des élections, le Parti libéral a réussi à donner l'image d'un parti pouvant le mieux résoudre la crise constitutionnelle, s'il a réussi à faire croire qu'il était en mesure de relever les défis économiques et qu'il possédait le meilleur programme pour restaurer le climat social, bien, aujourd'hui on découvre derrière ce masque de 1989 le vrai visage d'un gouvernement artificiel et à la réputation surfaite.
(21 heures)
Évidemment, ce ne sont pas les exemples qui manquent et en faire l'énumération risquerait d'être long et fastidieux. Je vais donc me contenter, au cours des minutes qui me restent, de démontrer l'absence totale de crédibilité du premier ministre par intérim en illustrant les contradictions, l'incohérence et l'incompatibilité entre ce qu'il dit et ce qu'il fait. On va commencer, M. le Président, par un premier exemple touchant le développement régional.
Le discours inaugural affirme que le gouvernement libéral négociera de nouvelles ententes sur le développement économique des régions avec le gouvernement fédéral. Et, ça, le premier ministre nous dit ça bien candidement, comme si ça se faisait tout seul. Ah, c'est à en rire. Si je ne m'étais pas retenu, M. le Président, je me serais roulé par terre. Parce qu'il faut avoir du culot pour tenir de tels propos quand on connaît le bilan des ententes signées depuis 1986. Rappelons d'abord que, deux ans après la signature de l'entente-cadre, les deux paliers de gouvernement cherchaient encore à s'entendre sur les différents programmes à mettre en place. Et cinq ans après la signature, à peine un tiers des sommes allouées dans l'entente étaient engagées. Et je ne pense pas qu'on puisse prétendre que c'était par manque de volonté, manque de projets des régions. Et, pendant que les deux gouvernements s'entendent pour prolonger l'entente de deux ans parce que, bien sûr, en cinq ans, on n'a été capable de rien faire, ce n'est pas assez long le gouvernement fédéral, lui, annonce des coupures que le gouvernement du Québec n'a jamais eu le courage de dénoncer. En conséquence, si les chômeurs misent sur une nouvelle entente pour travailler, ils risquent d'être encore longtemps sans travail. Et dire qu'on nous parle de création d'emplois! Il faut le faire.
Un deuxième sujet, M. le Président, qui touche les affaires municipales. Encore là, dans le discours inaugural, il est question d'entreprendre des pourparlers avec le monde municipal en prévision d'une autre modification de la fiscalité municipale. Il ne faut pas être gêné. Il ne faut pas être gêné du tout pour faire une telle déclaration quand on a vu le gouvernement libéral pelleter sans pudeur ses responsabilités dans la cour des municipalités. Qui ne se souvient pas de la réforme Ryan, avec le slogan pompeux: pour un partage équitable des responsabilités. Ce n'est pas à cause que ce n'est pas beau. C'est vrai. C'est peut-être pour ça qu'il a refusé de se présenter au congrès de l'UMQ, à un moment donné. C'était de la supercherie... Eh! M. le Président, vous êtes tenté de la remettre à l'ordre, mais vous ne le faites pas parce que vous savez qu'on fait partie de la même commission, puis il s'est malgré tout développé certaines amitiés. Je vous comprends. Mais c'est plus facile de développer de telles amitiés lorsqu'on n'est pas en face des véritables responsables de la situation.
Personnellement, je me souviens qu'en commission parlementaire les mémoires déposés par dizaines s'opposaient à l'unanimité à l'adoption du projet de loi 145 sur la fiscalité municipale. Mais le ministre des Affaires municipales n'a pas hésité à faire savoir au monde municipal qu'avec ou sans leur accord son gouvernement était décidé à transférer 500 000 000 $. Son gouvernement étant en difficulté financière, il fallait trouver 500 000 000 $ quelque part. C'était d'ailleurs la commande du Conseil du trésor. Sans reprendre tous les éléments que contient cette loi 145, rappelons simplement que l'invalidation de la surtaxe sur les immeubles non résidentiels démontre avec beaucoup d'acuité l'incompétence du gouvernement car, il faut le rappeler, ce volet de la fiscalité municipale était ni plus ni moins le bonbon pour faire digérer ou faire avaler cette politique puisque le ministre avait réussi à faire croire aux municipalités qu'il leur donnait un nouveau champ de taxation qui était moins limité que la taxe d'affaires, de là des perspectives de nouveaux revenus. Beaucoup de municipalités, plusieurs élus municipaux y ont cru.
Et que dire de cette taxe déguisée de 30 $ appliquée sur les droits d'immatriculation en guise de contribution au transport en commun? Le ministre des Affaires municipales a poussé la farce jusqu'à imposer cette taxe de 30 $ à des citoyens dont le territoire n'est nullement desservi par le transport en commun. M. le Président, j'irai même jusqu'à donner un exemple de mon comté. Au-delà des explications du ministre, parce qu'il est allé nous chercher des statistiques au fédéral pour réussir à aller chercher l'argent en guise de compensation pour ses propres coupures. Imaginez ce n'est pas l'imagination qui lui manque une statistique pouvant lui amener suffisamment de contribuables pour justifier une telle imposition. Or, dans mon comté, entre autres, il y a un certain nombre de municipalités où les citoyens se voient imposer ces 30 $ en guise de compensation pour un transport en commun qui n'existe pas, et ce, même si les municipalités sont à environ 20, 25, 30, 40 km des municipalités où il y a un transport en commun. Donc, on ne peut même pas invoquer l'utilisation de ce même transport en commun. C'est une farce monumentale. Ça ne prend que le ministre des Affaires municipales pour passer une telle chose. Je reçois encore, d'ailleurs, des pétitions dans mon comté, parce que, même si les taxes ne sont jamais populaires ça, on en convient à un moment donné, quand ça ne passe pas, ça ne passe pas. Ces 30 $ pour les municipalités, pour les citoyens qui sont situés à 25, 30 km d'un service en commun, eh bien, il faut le faire!
Voilà donc, M. le Président, l'illustration des relations pitoyables entre le gouvernement et les municipalités, qui justifient l'inquiétude et l'appréhension du monde municipal lorsqu'on entend le premier ministre parler de décentralisation et de fiscalité municipale. Un premier ministre qui en parle candidement, comme s'il n'y avait rien, comme si son passé était tellement glorieux qu'il pouvait se permettre n'importe quel propos. Je ne les digère pas, ses propos. C'est pour ça que je reviens toujours là-dessus. Ça ne passe pas. Ce n'est pas une question de ne pas être d'accord, c'est que ça ne passe pas. Je suis convaincu que ça ne passe pas dans la population non plus.
Un troisième point, M. le Président, qui me touche plus particulièrement: le secteur de la faune, des parcs et des réserves. S'il y a un dossier sur lequel le premier ministre fut plutôt discret dans son discours inaugural, c'est sans contredit la faune, les parcs et les réserves, quoique son court propos suffira à démontrer l'incohérence de l'orientation gouvernementale sur la gestion du patrimoine faunique et la privatisation. Le premier ministre appelle cela la cogestion des ressources naturelles. Je pense que, s'il ne s'était pas gêné, il aurait appelé ça de la cogénération des ressources naturelles, mais il a eu un moment de gêne. S'il y a un domaine où le gouvernement a fait preuve d'une improvisation incomparable, insoupçonnable, c'est bien au niveau de la faune. Rappelons à cet égard quelques faits qui démontrent bien l'incompétence gouvernementale. D'abord, en 1991, le Fonds mondial pour la nature porte un jugement très sévère sur le gouvernement du Québec, en déclarant qu'il détient l'un des pires records des pays développés en ce qui concerne les espaces protégés sur l'ensemble de son territoire. En fait, le taux était d'environ 0,5 %, comparativement à la moyenne canadienne, qui était d'environ 5 %.
Alors, afin de redorer le blason du Québec, le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche d'alors annonça un plan de développement du réseau des parcs par la création de quatre parcs nationaux et une nouvelle politique de soutien à l'implantation de parcs régionaux. Cette annonce fut, bien sûr, accueillie par l'ensemble de la population, et particulièrement, de la part des organismes sensibles à l'équilibre des écosystèmes du Québec, avec beaucoup de satisfaction. Une fois réalisé, ce plan aurait permis de porter le taux du territoire protégé à près de 4 %, sauf que la réjouissance fut de courte durée, puisqu'en septembre dernier le Conseil du trésor, dont le premier ministre était le président il faut toujours se rappeler ça; il ne faut jamais oublier le passé, parce qu'il n'y a pas de place pour l'avenir ordonna un certain nombre de compressions budgétaires, dont une de 33 000 000 $ sur trois ans, constituant ainsi l'élimination totale des crédits applicables à la gestion des parcs et des réserves fauniques.
(21 h 10)
Dans les circonstances, M. le Président, une seule alternative restait au ministre d'alors et cette alternative était forcément la privatisation de la gestion des parcs et des réserves. La première décision du gouvernement du nouveau premier ministre fut d'abord de démanteler le MLCP pour confier au ministre de l'Environnement la responsabilité de réaliser le plan de privatisation.
Alors, je vais accélérer, M. le Président, pour me conformer à vos directives.
Alors, pendant ce temps, l'improvisation se manifeste de plus belle par le transfert du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche au ministère des Affaires municipales pendant un mois; donc, la Société des établissements de plein air du Québec, ça a été un mois aux Affaires municipales, pour se retrouver, ensuite, sous l'égide du ministère de l'Industrie, du Commerce, de la Science et de la Technologie. Si c'est ça, de la planification, M. le Président, bien, c'est une nouvelle technique, une nouvelle méthode que je ne connais pas.
Enfin, dernier épisode de cette comédie loufoque, le ministre de l'Environnement, devant l'opposition grandissante contre la privatisation, à l'approche des élections, déclare que le gouvernement conservera la gestion des parcs et des réserves encore quelques mois. Vous conviendrez avec moi, M. le Président, qu'il y a de quoi s'interroger face à un gouvernement devenu maître d'oeuvre et spécialiste en matière de loteries et de casinos, mais qui hésite à jouer son rôle primordial de gardien du territoire public et du patrimoine faunique.
M. le Président, il me reste une minute. Ce ne sont là que quelques sujets. On pourrait continuer longtemps. On pourrait parler de la colère des travailleurs de la construction, de la situation chez les autochtones qui n'est pas réglée, du non-respect des lois fiscales. On pourrait en dire beaucoup plus sur le chômage que sur la création d'emplois, sur le ticket modérateur et sur la désassurance au niveau des soins de santé.
Conclusion, M. le Président. Si Michel David, du quotidien Le Soleil , soutient, à la lecture du discours inaugural, qu'il faille prendre ce discours avec un grain de sel, je suis plutôt d'avis que la population québécoise réservera au premier ministre le jugement salé que lui aura mérité la faillite constitutionnelle, économique et sociale des cinq dernières années. Je vous remercie, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un député de la formation ministérielle et le président du caucus de la partie ministérielle, M. le député de Rousseau. M. le député.
M. Robert Thérien
M. Thérien: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, d'abord, de parler sur le discours inaugural qui est un vent de fraîcheur au Québec. Mais, à écouter les collègues de l'Opposition, j'ai décidé de changer un peu mon orientation. Je suis surtout fier, M. le Président, que ce soit vous qui soyez assis là connaissant votre sensibilité aux citoyens du Québec.
Lorsque j'entends le député de Dubuc dire que mon chef est sans scrupule, que mon chef manque de mémoire, je peux vous dire qu'il n'a pas analysé le sien, son chef. Qu'est-ce qu'il a fait dans le passé, son chef?
Une voix: ...
M. Thérien: Non, il était au pouvoir, votre chef, il était ministre des Finances.
Une voix: ...
M. Thérien: M. le Président, j'ai écouté religieusement et c'est pénible de l'écouter, je n'ai pas parlé...
Une voix: ...
M. Thérien: Je n'ai pas parlé. Je n'ai pas parlé, M. le Président.
Une voix: ...
Le Vice-Président (M. Tremblay): Un moment, s'il vous plaît! Un moment, s'il vous plaît! M. le député de Dubuc, s'il vous plaît, je vous rappelle à l'ordre. On va écouter le député de Rousseau, ce qu'il a à dire. On vous a écouté religieusement tout à l'heure, on va respecter... Très bien. Alors, M. le député, s'il vous plaît. M. le député de Rousseau.
M. Thérien: M. le Président, je voudrais m'excuser auprès du député de Dubuc, j'ai peut-être pris un qualificatif qui est exagéré. Disons que le fait de m'interrompre, ça m'a sorti de mes gongs, mais je l'ai écouté. Je l'ai écouté. Lorsqu'on parle de malhonnêteté du premier ministre actuel, on ne peut pas ne pas réagir parce que son chef, qui a la prétention de devenir premier ministre du Québec, a, lui aussi, un passé. Si on compare le passé de mon chef et celui de son chef, je suis sûr que l'évaluation est en faveur du mien. Mais, si je compare l'avenir du mien et l'avenir du sien, je suis convaincu que le mien a de l'avenir. Je suis convaincu, M. le Président.
Une voix: Pas mal plus long à part ça.
M. Thérien: Je suis convaincu. Mieux que ça, M. le premier ministre...
Une voix: M. le Président.
M. Thérien: ...M. le Président, excusez-moi. Excusez-moi, M. le Président.
Une voix: Pas à ce point-là.
M. Thérien: M. le Président, pire que ça, son chef avait quitté le bateau, lorsqu'il s'est aperçu que les politiques qu'il avait mises de l'avant comme ministre des Finances... M. le Président, qu'est-ce qu'il a fait? Il a quitté le bateau. Est-ce qu'il va faire la même chose si, par malheur, il prend le pouvoir ou si, par malheur, il invite les gens à la séparation du Québec... Lorsque les gens vont être dans le gouffre, il va quitter le bateau. C'est ça qu'il propose aux Québécois?
Puis le député de Dubuc dit que mon chef est malhonnête intellectuellement. Qu'on ne parle pas du passé du président du Conseil du trésor où lui s'est tenu debout, même en période de difficultés économiques. Mieux que ça, il a décidé d'aller au poste de premier ministre pour, justement, orienter différemment, aménager le gouvernement du Québec de différente façon. Donc, M. le Président, je pense que le député de Dubuc, s'il veut miner la crédibilité de notre chef, qu'il regarde juste un peu les sondages de crédibilité entre les deux personnages. Je peux vous dire que ça ne se compare même pas. Un n'est même pas élu puis il n'est déjà pas crédible. Imaginez-vous! Imaginez-vous, M. le Président!
Je n'ai pas l'habitude d'avoir un discours aussi négatif parce que le discours inaugural, c'est un discours, effectivement, optimiste, positif, tourné vers l'avenir, qui cherche surtout à construire. C'est ça qu'il faut se rappeler dans le discours inaugural du premier ministre du Québec. Le premier ministre du Québec démontre bien aux citoyens du Québec que l'indépendance que tout être humain souhaite passe par l'emploi. Si les gens travaillent, ce sont des gens indépendants. Il ne s'agit pas de confronter une province à d'autres provinces pour réussir à améliorer le sort des Québécois. Il s'agit de les faire travailler, et c'est ce que le discours inaugural a démontré de façon claire.
Je vous le disais, M. le Président, le seul reproche que le Parti québécois a à faire, c'est qu'on fait quelque chose pour les Québécois, et, ça, il leur pousse des boutons d'entendre parler que les gens puissent travailler. C'est ça qui est le malheur de ça, M. le Président. Les bonnes choses... ce n'est pas de nature en cette Chambre d'entendre les côtés positifs. C'est dommage. C'est dommage, M. le Président.
J'écoutais, et là aussi je n'ai peut-être pas l'habitude d'intervenir... Il y a le député de Drummond qui se dit indépendant et il voudrait réformer les structures parlementaires, les structures gouvernementales. Quand on sait que lui a été élu au sein du Parti libéral, s'il voulait vraiment changer les structures, il avait juste à démissionner et à se représenter à titre d'indépendant pour vraiment démontrer qu'il est légitime, parce que ce député-là, M. le Président, n'est pas légitime auprès de sa population.
(21 h 20)
Je veux revenir aussi un peu sur ce que le député de Dubuc parlait, de la réforme de M. Ryan, en se moquant de cette réforme qui visait le partage équitable. J'aimerais me servir de mon expérience d'ex-maire pour vous dire que la réforme de M. Ryan était vraiment équitable, et j'inviterais le député de Dubuc à demander à ses maires s'ils refusent la subvention pour la voirie locale. S'ils la refusent! Parce qu'à l'époque où j'étais maire, les subventions adressées aux municipalités pour la voirie municipale, il n'y en avait pas, il n'y en avait absolument pas. J'ai été maire de 1979 à 1985 et j'attends encore les budgets pour la voirie municipale. Il n'y en avait pas. Et mieux que ça, quand il parle de partage équitable, je me souviens, comme ex-maire, d'avoir combattu le fait qu'on avait enlevé aux municipalités la taxe de vente. On recevait 3 % de la taxe de vente. On a enlevé ça. On a dit: On va être plus équitables; il va y avoir une taxe municipale et une taxe scolaire à la baisse. Les gens ont été trompés, M. le Président. Ils ont été trompés complètement, parce que vous avez vu l'écart qui s'est fait à la hausse. Et, mieux que ça, qu'est-ce que le chef de l'Opposition s'est engagé à faire auprès des instances municipales? C'est de réintégrer la taxe de vente. C'est lui qui l'a dit. Ce n'est pas moi. Ce n'est pas un libéral, M. le Président. C'est le chef de l'Opposition. Pour mieux équilibrer les finances des municipalités, il faudrait peut-être réintéger les 3 % de taxe de vente que lui-même, lorsqu'il était ministre des Finances, a enlevés. Si c'est ça, le renouveau, si c'est ça d'être souverain, je peux vous dire que c'était exactement ça qui se passait dans les années 1970-1980.
M. le Président, quand le député de Dubuc se moque de la réforme de M. Ryan, je pense qu'il a perdu complètement la mémoire, parce qu'il y a eu des réformes qui se devaient d'être basées sur l'équité et qui n'ont pas été basées sur l'équité. Donc, M. le Président, c'est triste d'entendre une telle comparaison, parce que le discours inaugural dit aux citoyens du Québec: On va travailler, on va améliorer les conditions familiales, les conditions sociales des gens et le côté de l'éducation aussi, mais on a besoin de la participation des citoyens.
Je me permets de vous raconter un petit fait que j'ai vécu comme député, qui est fort important, sur les orientations. Lorsqu'il y a eu le dernier référendum, les gens du cégep, les étudiants du cégep ont invité tous les partis politiques à venir s'exprimer. C'est juste pour vous démontrer, M. le Président, l'importance d'écouter les gens, parce que la politique, ce n'est pas fait pour les politiciens, ça se fait avec les gens, M. le Président. Donc, à la table, il y a tous les partis politiques, conservateurs, libéraux fédéraux, péquistes, libéraux provinciaux, bloquistes; on pige les noms et mon nom sort, le dernier intervenant, donc une position habituellement favorable. Donc, on commence à expliquer. La salle est comble, M. le Président. On commence à expliquer.
Le premier intervenant, c'est le député Duceppe, pas n'importe qui, du Bloc québécois, qui dit aux citoyens: Écoutez, la souveraineté s'en vient; on voit la lumière au bout du tunnel; ça va peut-être être coûteux dans les premières années, mais, au moins, il y a une lumière au bout du tunnel. Et là la chicane commence à prendre entre le bloquiste et le conservateur, le libéral fédéral, et ainsi de suite. Je lève ma main, M. le Président, et je dis à l'animateur: J'aimerais parler immédiatement. L'animateur est tout à fait surpris que je veuille parler immédiatement. Donc, je prends la parole et je m'excuse auprès des étudiants, parce que la discussion, c'est une confrontation. On est venus les renseigner. Et j'ai dit: Moi, j'ai juste une intervention, je vais vous demander une question: Le député bloquiste a dit: Ça va coûter plus cher dans les premières années, vous allez être obligés de vous sacrifier. J'ai dit: Moi, je vous pose une question: Êtes-vous prêts à vous sacrifier pour être indépendants? Ils m'ont dit: Non les étudiants, puis ils ont applaudi. C'est ça, la question. La question, c'est les gens...
Puis regardez présentement les sondages. On est en train de séparer une population. Le discours inaugural unit une population en la faisant travailler. L'exemple du cégep, M. le Président, est fort important, parce que la politique, ça se fait avec les gens, et les jeunes ne sont pas prêts à se sacrifier pour un idéal que certains politiciens, je dirais un peu moroses des années soixante à soixante-dix, proposent... encore un modèle qui n'est plus le modèle présent. C'est dommage, M. le Président. C'est dommage. Ces gens-là sont de bonne foi. Ils sont encore nostalgiques, ils écoutent encore les disques d'Elvis Presley. Ils n'ont pas changé. C'est beau, écouter, mais ça ne tient pas le palmarès. C'est ça, M. le Président. Je sais que vous comprenez. Je sais que vous comprenez, M. le Président. Vous allez l'air, du moins, à comprendre.
Donc, M. le Président, je reviens au discours inaugural qui traduit très bien la volonté et l'effort du gouvernement de mettre les gens au travail. Je prends juste un exemple qu'on vit dans nos bureaux de comté, qui est le nouveau programme de création d'emplois, un programme très facile où, pour une fois, le feuillet d'inscription comporte à peu près deux pages, deux pages, et la réponse est en deçà de 30 jours, et on donne un montant équivalent à chaque emploi à l'employeur qui désire remettre les gens au travail.
À mon bureau de comté, M. le Président, on a au moins 10 demandes par semaine 10 demandes. Et les premiers milliers de dollars ont déjà été donnés. C'est ça, de la création d'emplois. Et je sais que plus on va en parler, plus il va leur pousser des boutons. Mais c'est ça, la réalité. C'est exactement ça. On vit ça dans nos comtés.
Je suis convaincu que les députés d'expérience, de l'autre côté, vivent ça dans leur comté. Ils ne peuvent pas nous le dire, que c'est bien, qu'ils sont d'accord. Mais c'est ça, remettre des gens à l'emploi. Ce n'est pas de les diviser, ce n'est absolument pas de les diviser. C'est un peu ça, M. le Président, que le premier ministre du Québec a dit aux citoyens. C'est exactement ça, M. le Président.
J'écoutais aussi le député d'Abitibi qui dénonçait des diminutions de postes dans la fonction publique, des statuts précaires et ainsi de suite. M. le Président, qui a inventé les statuts précaires? Qui a inventé les statuts précaires? J'ai eu la chance d'être adjoint parlementaire pendant des années, au ministère des Transports. Et la plupart des occasionnels, au ministère des Transports, ça fait 15 à 20 ans qu'ils sont là. Et le plus gros noyau était sous le régime précédent. On faisait travailler un peu les gens pour maquiller la situation, puis on ne se souciait pas de ça. La question que le premier ministre du Québec pose dans le discours inaugural, ce n'est pas des statuts précaires que ça nous prend, c'est des emplois durables, surtout générés par l'entreprise privée. C'est ça que le premier ministre du Québec nous a dit.
Et il est tout déçu qu'on annonce qu'il y a des coupures de statuts précaires. Nous, on est davantage d'accord à dire que l'argent doit servir d'abord aux bénéficiaires du système, et à créer une employabilité durable. Donc, il ne faut pas dénoncer certaines de ces coupures parce qu'il y a des programmes, justement, pour rattraper ces personnes qui ne sont plus dans un statut précaire, mais qui vont revenir dans le système de travail durable. Il dénonce ça.
Au niveau de la voirie... et je vous donnais cet exemple-là, M. le Président... Je suis convaincu que les gens, pour la plupart, parce qu'on est à peu près tous des gens, ici, qui faisons du bureau de comté, qui allons voir nos citoyens sur place, sont contents d'entendre parler, enfin enfin d'emplois et non de constitution. Vous savez, on a beau étaler n'importe quel programme avec toute humilité, il y a des failles. Mais, au moins, il y a un programme. Il y a des essais mis de l'avant. Mais ce qu'on propose en contre-échange: on va être indépendants et tout va se solutionner demain matin.
Mais je peux vous dire, si ces gens-là croient que la population est dupe... Non, M. le Président. On démontre beaucoup d'efforts, et ce n'est pas facile de créer des emplois, dans un système économique qui est en changement continuel. Mais il n'y a personne qui va me dire, M. le Président, que, demain matin, on va changer notre système et ça va créer automatiquement 800 000 emplois. C'est impossible à croire que, demain matin, on va engager tous les fonctionnaires fédéraux. D'abord, ce ne sont pas des chômeurs, ce sont des travailleurs. Donc, ça ne créerait aucun nouvel emploi. Qu'est-ce qu'on va faire? C'est quoi, les solutions?
J'aurais cru que ces gens-là auraient peut-être rajouté... Il ne me reste que deux minutes, M. le Président? C'est dommage, mais je veux quand même compléter avec une conclusion tout à fait positive. Le discours inaugural je reviens là-dessus c'est un vent de fraîcheur, basé sur l'optimisme, basé sur le réalisme, avec des objectifs élevés. Mais, pour atteindre un standard, c'est comme pour les athlètes, M. le Président, il faut se fixer des objectifs élevés. Et c'est jour après jour. Je l'ai dit aux journalistes récemment: Notre meilleur allié, c'est le temps, parce que le temps va démontrer clairement que l'avenir du Québec passe par le Parti libéral du Québec et non par des gens qui rêvent. Ces mêmes gens étaient là dans les années soixante, soixante-dix. Le discours n'est pas nouveau, absolument pas nouveau.
(21 h 30)
Donc, M. le Président, ça m'a fait plaisir de prendre la parole pour ce discours inaugural. M. le Président, vous avez vu... Je trouve ça dommage. Je suis convaincu que le député est fatigué, parce que, habituellement, il a un civisme qu'on lui connaît.
Donc, M. le Président, j'incite les gens du Québec à lire attentivement. Il y a des députés qui ont entendu le discours inaugural, mais qui ne l'ont pas compris. C'est dommage. Moi, je suis un ancien enseignant, je suis disponible à leur indiquer, vraiment... à leur expliquer le discours inaugural. On va mettre des heures, comme des élèves attardés. On est prêt à donner des cours. Surtout, à faire comprendre le discours inaugural. Merci, M. le Président.
Une voix: Bravo!
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un autre député de la formation ministérielle, le député de Gaspé et adjoint parlementaire aux Pêcheries. M. le député.
M. André Beaudin
M. Beaudin: Merci, M. le Président. M. le Président, la période qui est consacrée à la réponse au discours inaugural va se terminer demain. J'ai voulu profiter des quelques minutes que ma formation met à ma disposition, ce soir, pour apporter un témoignage supplémentaire au réalisme qui est véhiculé dans le discours du trône. M. le Président, pour en témoigner, je prendrai un exemple pratique que j'ai vécu en fin de semaine, dans mon comté, à Grande-Vallée, alors que 250 personnes se réunissaient dans une salle pendant toute la journée de samedi pour réfléchir ensemble sur l'Année internationale de la famille. Par le fait même, M. le Président, j'ai eu l'occasion de voir que plusieurs éléments que comportait le discours du trône à l'égard de la famille, du soutien à la famille, pouvaient se tester facilement sur le terrain. Non pas dans une assemblée partisane puisque, M. le Président, cette journée-là était animée par nul autre que M. Mathias Rioux. Alors, les affinités avec ma formation politique sont assez lointaines, merci. Cependant, nous avons tous été d'accord, les 250 personnes qui étaient là, pour réagir à des réalités de la famille d'aujourd'hui et réagir, également, à un certain nombre d'éléments que comportait le discours inaugural à l'égard du soutien à la famille.
Tout le monde sait que, dans les 15 à 20 dernières années, la notion de la famille traditionnelle a évolué d'une façon telle que les gens de ma génération, par exemple, sommes obligés de regarder la famille, son contexte, en ajustant notre tir et en ajustant, également, notre jugement de la famille des années 2000 ou, tout au moins, des années quatre-vingt-dix.
M. le Président, vous vous souviendrez que dans le discours inaugural le premier ministre du Québec a insisté sur un certain nombre de points qui regardent directement la famille. Par exemple, je ne prends que quatre ou cinq points. Seulement une énumération. D'abord, les politiques de services à la petite enfance. Je dois dire, entre parenthèses, que la journée à Grande-Vallée était justement organisée par un groupe qui s'occupe de la petite enfance, soit les enfants de 0 à 5 ans. Alors, un enfant, vous savez, est justement, et plus souvent qu'autrement, formé et orienté dans les cinq ou six premières années de sa vie.
Il y a également, dans le discours inaugural, la notion d'un projet de loi modifiant les normes du travail afin de réconcilier les responsabilités parentales et le travail. Alors, on sait très bien que la composition des familles, aujourd'hui, fait en sorte que souvent les deux conjoints sont au travail. Et il y a définitivement une recherche. La ministre qui est responsable de la Famille au Québec s'est engagée à travailler là-dessus dans les plus brefs délais. Il y a définitivement un effort et de nouvelles pratiques à rechercher en ce qui concerne la conciliation du travail et de la famille.
Également, dans le discours inaugural, il y avait mention, aussi, d'un programme d'aide de retour au travail pour les chefs de famille monoparentale. Alors, on sait que les familles monoparentales composent aujourd'hui une grande partie de nos familles, et cela, ça se vérifie chaque jour dans nos écoles. Le gouvernement du Parti libéral, le gouvernement de M. Johnson va faire en sorte qu'il y ait un programme qui permette à ces chefs de famille là de revenir au travail.
Nous avons eu l'occasion aussi, M. le Président, au cours de cette journée, de faire une espèce d'inventaire des mesures qui ont été adoptées, je ne dis pas dans les 10 dernières années mais dans les 15 dernières années, pour venir en aide aux familles. Mais on s'est rendu compte vite, et sans en faire mention nécessairement, on s'est rendu compte vite que les plus grandes mesures ont été adoptées par le gouvernement du Parti libéral, qu'il s'agisse de la fiscalité... l'impôt sur le revenu est passé d'un plancher de 10 000 $ à 25 000 $, les services de garde, les garderies ont augmenté d'une façon extraordinaire au Québec dans les cinq, six dernières années. Le programme APPORT vient souvent si ce n'est pas le cas dans tout le Québec, c'est au moins le cas dans ma région le programme APPORT vient en aide à plusieurs familles. Et, sur le plan de l'habitation, vous vous rappellerez simplement le programme PARCQ et les programmes qui sont en vigueur depuis peu, depuis l'automne dernier, le plan RéparAction, le plan Virage Rénovation et le plan PRIL, qui sont toutes des mesures qui sont directement ou indirectement des soutiens à la famille.
M. le Président, je n'avais demandé que quelques minutes et je vais m'arrêter là, simplement pour répéter que plusieurs éléments qui étaient dans le discours inaugural sont testables sur le terrain et sont reconnus comme tels par les gens qui vivent aujourd'hui des problèmes autour de la famille notamment.
Et je voudrais simplement terminer en citant deux phrases, trois phrases du discours inaugural, et je m'arrêterai là-dessus. Et je cite le premier ministre: Notre défi, c'est de redonner aux Québécoises et aux Québécois le goût d'agir et l'occasion de travailler. Nous devons tous collectivement, mais aussi individuellement, saisir toutes les occasions, toutes les opportunités de construire encore plus rapidement et solidement nos familles, nos villages et notre société. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Je vais maintenant reconnaître un député de l'Opposition officielle, le député de Duplessis. M. le député.
M. Denis Perron
M. Perron: Merci, M. le Président. M. le Président, en 17 ans comme député à l'Assemblée nationale du Québec, je n'ai vraiment jamais vu un discours inaugural aussi terne avec un contenu aussi faible que celui que nous avons entendu de la part du premier ministre du Québec, celui que nous avons actuellement, ce premier ministre par intérim. Ce discours inaugural était pour moi et pour bien d'autres personnes de la poudre aux yeux, c'était plein de voeux pieux. Et ça fait plus de huit ans que l'on entend l'armée rouge d'en face se pavaner sur tout ou encore sur rien. Les discours libéraux que j'ai entendus la semaine dernière et cette semaine nous démontrent que ça ressemble étrangement à une répétition folklorique de la dernière minute en prévision de la prochaine campagne électorale.
M. le Président, mon allocution portera principalement sur différents sujets importants pour la Côte-Nord, pour le comté de Duplessis et pour le Québec. À titre d'exemple, la question des autochtones, le secteur jeunesse, les pêcheries, le développement régional, les transports.
(21 h 40)
En ce qui a trait aux autochtones, de ce côté-ci de la Chambre, c'est-à-dire du côté du Parti québécois, nous avons un cadre général par rapport aux 11 nations autochtones du Québec face à un éventuel gouvernement du Parti québécois. Nous avons, à l'intérieur de notre programme, signifié les ententes particulières qui devront se faire par négociation, pour être ensuite signées et pour en assurer le suivi. Mais, en attendant, ce que nous disons de ce côté-ci de la Chambre, c'est que nous voulons de la part de l'ensemble des Québécois et des Québécoises ainsi que de l'ensemble des autochtones que les lois du Québec soient respectées ainsi que les règlements qui en découlent. Et ce n'est pas ce que nous avons vu au cours des dernières années du régime libéral. Parce que de l'autre côté de la Chambre, c'est-à-dire les gens d'en face, pour nous, c'est la désolation, pour nous, c'est l'attente et, pour nous, c'est le statu quo. Et, quant au discours inaugural, je voudrais rappeler ceci. Concernant les nations autochtones, le premier ministre indique que nous avons la responsabilité d'assurer des relations harmonieuses avec eux, et il considère que ces nations ont les mêmes ambitions que les familles québécoises et qu'il faut les aider dans leur développement économique. Là où le bât blesse cependant, M. le Président, c'est lorsqu'on constate que le gouvernement libéral n'a toujours pas rendu publique la politique globale en matière d'autonomie gouvernementale des autochtones. En fait, après une série de consultations auprès des peuples autochtones, qui s'est terminée à l'automne 1991, le gouvernement avait prévu déposer une politique au plus tard à l'automne 1992. En réalité, cette intention n'a jamais été respectée, le ministre délégué aux Affaires autochtones évoquant le contexte constitutionnel comme Charlottetown et les derniers développements, c'est-à-dire ceux de la Commission royale d'enquête sur les peuples autochtones, pour repousser aux calendes grecques toute possibilité de divulgation d'une vraie politique sur le sujet. Depuis 1985 que le dossier des revendications autochtones traîne en longueur au sein du gouvernement libéral.
Lors de l'allocution d'ouverture du lieutenant-gouverneur, en 1989, il faisait mention que le gouvernement entendait accroître ses efforts de négociation avec les nations autochtones afin de faciliter le développement économique et social de leurs communautés et de poursuivre l'harmonisation de ses relations avec chacune des nations concernées. En réalité, il fallut attendre le choc créé par la crise d'Oka de 1990 pour voir ce gouvernement réagir dans le dossier autochtone.
En octobre 1991, le ministre délégué aux Affaires autochtones lançait une vaste période de consultation. Le processus de cette consultation avait été rendu public auparavant, soit en février 1991. Cette enquête devait précéder l'adoption d'une politique gouvernementale globale en matière autochtone prévue pour décembre 1992. Cette politique devait permettre de concrétiser la résolution adoptée par l'Assemblée nationale à la demande du premier ministre, M. René Lévesque, en mai 1985.
Lors du discours inaugural de mars 1992, encore une fois, nous avons eu droit au même énoncé d'intention, soit la poursuite de l'harmonisation des relations avec les différentes nations autochtones, ce qui, selon le premier ministre Bourassa, le premier ministre du temps, et je le cite: «demeure au coeur des préoccupations de notre société».
En juillet 1992, le gouvernement du Québec décidait de reprendre officiellement les négociations constitutionnelles. Ces négociations justifièrent d'ailleurs le report de la troisième étape prévue à l'élaboration de la politique gouvernementale en matière d'affaires autochtones, c'est-à-dire la publication des orientations du gouvernement. L'échec de Charlottetown, en octobre 1992, servit de justification au gouvernement libéral, celui qui est toujours en place, pour retarder à nouveau le cheminement de l'élaboration de cette politique.
Par ailleurs, le 22 avril 1993, lors de l'étude des crédits, où j'étais présent, le ministre délégué s'engageait à publier, dans les prochaines semaines, la position du gouvernement libéral en matière autochtone. En novembre 1993, le ministre délégué aux Affaires autochtones invoquait les audiences de la commission Erasmus-Dussault et la rencontre, prévue en février 1994, des ministres responsables des Affaires autochtones du Canada pour, une fois de plus, justifier les retards qu'accuse le gouvernement à publier la politique promise.
En décembre 1993, il n'y a pas tellement longtemps, le même ministre comparaissait devant la commission Erasmus-Dussault et proposait trois solutions au dossier autochtone. Premièrement, proposition d'une série d'attitudes et de mesures pratiques visant à améliorer les conditions de vie dans les communautés autochtones, notamment dans le domaine de la santé, de l'administration de la justice, des services policiers et du développement économique. Deuxièmement, mise sur pied d'un forum politique tripartite afin de définir les paramètres de l'autonomie gouvernementale. Troisièmement, l'élaboration de mécanismes de résolution des conflits.
M. le Président, je répète que, lors du discours inaugural, le premier ministre indiquait que nous avons la responsabilité d'assurer la relation harmonieuse avec les autochtones. Il considère que ces nations ont les mêmes ambitions que les familles québécoises et qu'il faut les aider dans leur développement économique. Bref, encore une fois, c'est du réchauffé.
En conclusion sur la question autochtone, tous ces délais confirment les reculs, les hésitations, les délais, les tergiversations constantes du gouvernement libéral dans le dossier. Au départ, on hésitait à mettre en oeuvre les résolutions historiques mises de l'avant par le Parti québécois, lorsque M. René Lévesque était premier ministre du Québec. Ensuite, on s'est caché derrière les échecs constitutionnels et la présence de commissions d'enquête. Finalement, on se débarrasse de la responsabilité dans ce dossier, en envoyant la balle aux leaders amérindiens, pour forcer ceux-ci à retourner auprès de leur base pour élaborer des propositions cohérentes et représentatives des besoins qui sont exprimés.
Est-ce que la population du Québec, incluant les autochtones, va attendre longtemps avant que le gouvernement se branche? Tout ça pour vous dire, M. le Président, que les tergiversations du Parti libéral du Québec représentent le cul-de-sac nous conduisant vers du racisme et, même, à des reculs substantiels face à l'évolution du Québec.
Maintenant, qu'en est-il du secteur jeunesse? Encore là, le message est vide de sens. Premièrement, peu d'insistance concernant le problème du chômage chez les jeunes. Le discours sur l'emploi est généralisé à l'ensemble de la population du Québec. On mentionne bien qu'il faut donner de l'espoir en l'avenir et des perspectives d'emplois, mais sans plus. Le premier ministre du Québec, l'actuel premier ministre par intérim, aurait pu mettre l'accent sur les mesures concernant les jeunes: taux de chômage de 13,1 % pour l'ensemble de la population, mais de 17 % chez les 15 à 29 ans, 12,1 % en 1988. Deuxièmement, le discours n'est pas positif, dynamique face à la jeunesse québécoise. On ne démontre pas de confiance en elle, on ne considère pas les jeunes comme des partenaires capables de réflexion, de détermination, d'implication dans la société québécoise.
En 1985, le gouvernement libéral faisait du dossier jeunesse une priorité, en lançant son document «Priorité jeunesse» lors de la campagne électorale. Les jeunes devaient alors bénéficier, au premier chef, du développement économique. Et qu'en est-il, aujourd'hui? Le chômage touche actuellement près de 140 000 jeunes, garçons et filles, et, lorsqu'ils trouvent du travail, les conditions sont de plus en plus précaires: travail occasionnel, temps partiel, travail à contrat, travail à la pige, faibles rémunérations, conditions médiocres, absence d'avantages sociaux, travail au noir, double emploi, absence de représentation syndicale, conventions collectives à double échelle salariale, et j'en passe.
Au lieu d'améliorer le sort des jeunes, ce gouvernement libéral les aide à s'enliser davantage. Et je cite en exemple 158 000 emplois perdus entre 1990 et 1993, coupures au niveau des programmes d'aide consentis aux jeunes promoteurs, aux jeunes entrepreneurs et aux groupes de soutien aux initiatives jeunesse, coupures au niveau de la fonction publique pénalisant les derniers rentrés, la plupart du temps des jeunes du Québec, augmentation dans les conventions collectives des clauses orphelines qui prévoient une échelle salariale et des conditions de travail inférieures pour les nouveaux salariés, et très souvent des jeunes. Et c'est ça, M. le Président, la planification libérale. Ce gouvernement libéral amoindrit considérablement l'avenir du Québec en ne faisant pas des jeunes le fer de lance de notre société, le fer de lance de l'éducation et de l'économie future de l'ensemble du territoire.
M. le Président, dans un autre dossier, pas un traître mot des pêcheries. Je me demande ce qu'en pense le député de Gaspé qui vient de s'adresser à l'Assemblée nationale au cours des dernières minutes. Ici, le gouvernement pèche par omission car lors de la dernière allocution du lieutenant-gouverneur, prononcée le 19 mars 1992, celui-ci avait indiqué qu'il y aurait une présentation d'un projet de loi concernant le statut de pêcheur commercial. Pas un traître mot là-dessus lors du discours inaugural du premier ministre actuel par intérim.
Depuis ce temps, rien n'a été fait et, dans le présent discours, on a passé le tout sous silence. On constate donc facilement que le dossier des pêcheries n'est pas une priorité pour le gouvernement libéral car cette pièce législative s'avère essentielle pour favoriser une restructuration efficace de ce secteur d'activité économique dans l'Est du Québec.
(21 h 50)
Pourtant, les problèmes sont toujours là. Depuis 1988, toujours sous l'égide libérale: fermetures d'usines, mises à pied massives des travailleurs et des travailleuses d'usine, réduction des emplois dans les usines toujours existantes, pêcheurs et aides-pêcheurs perdent leur emploi, faillites personnelles suite à des actions gouvernementales, aucun programme de recherche et de développement dans le domaine des pêcheries. Et, par surcroît, nous regardons aller le gouvernement fédéral avec ses gros sabots dans l'ensemble du territoire des pêcheries du Québec.
Ce gouvernement fédéral pratique une mauvaise évaluation de la ressource, laisse faire la surpêche de la commission économique européenne, ne fait rien concernant la surpopulation des phoques. Pour le premier ministre du Québec, celui que nous avons là par intérim, ce n'est tellement pas grave que point n'est besoin de souligner, même de souligner, les recettes possibles pour les pêcheurs du Québec, pour les aide-pêcheurs du Québec, pour les propriétaires d'usine ou encore pour les travailleuses et les travailleurs qui restent.
Quant au secteur du développement régional, le discours inaugural s'en remet aux projets gouvernementaux déjà en opération, soit la réforme Picotte de décembre 1992 et les crédits annoncés dans le plan de relance de décembre 1993. Bref, c'est la poursuite des politiques antérieurement annoncées, qualifiées de «bourassiennes».
Deuxièmement, le discours inaugural affirme que le gouvernement aura à négocier de nouvelles ententes avec le gouvernement fédéral. Encore une fois, M. le Président! Or, le bilan des ententes signées depuis 1986 entre le gouvernement libéral actuel et le gouvernement Mulroney porte sur des caractéristiques que nous pouvons dévoiler. En outre, le gouvernement libéral n'a jamais dénoncé les coupures annoncées par le gouvernement fédéral dans les deux derniers budgets fédéraux, ce qui n'augure rien de bon pour les négociations à venir.
D'autre part, nous savons très bien que, des ententes de 1986, à peu près un tiers des fonds ont été dépensés et que le gouvernement actuel et le gouvernement fédéral ont dû renouveler cette entente pour qu'on puisse dépenser les fonds qui y étaient compris. Là-dessus, la réalité, elle n'est pas rose, et je cite, à titre d'exemple, l'attitude du gouvernement dans le domaine de la réforme Picotte: On avait, en 1992, un montant de 45 000 000 $ pour l'ensemble des opérations régionales du territoire québécois; on a pris ces 45 000 000 $, on a divisé ça par 15 régions, 3 000 000 $ par région, et ce, sans tenir compte des disparités régionales que nous avons dans chacune des régions du Québec ou entre chacune des régions du Québec.
M. le Président, comment voulez-vous qu'une politique de développement régional soit cohérente lorsqu'on ne tient pas compte de la grandeur du territoire, lorsqu'on ne tient pas compte de l'isolement des populations, lorsqu'on ne tient pas compte de l'éloignement de certaines populations, comme dans mon comté, Fermont, comme dans mon comté, Havre-Saint-Pierre, comme dans mon comté aussi, dans le comté de Duplessis, lorsqu'on parle de Blanc-Sablon? Pourquoi le gouvernement libéral, en 1985 lorsqu'il a pris le pouvoir, n'a pas reconduit le plan quinquennal du développement économique de la Basse-Côte-Nord et du golfe Saint-Laurent entre Kegaska et Blanc-Sablon. Il l'a tabletté et, aujourd'hui, on voit ce qui s'y passe: 80 % des personnes à l'est de Havre-Saint-Pierre ne travaillent pas; elles sont soit sur l'assurance-chômage ou encore sur l'aide sociale, et très majoritairement sur l'aide sociale.
Et, M. le Président, on ne peut pas comprendre non plus pourquoi ce gouvernement a fait une répartition, comme il a fait en 1992, toujours que nous vivons aujourd'hui, et qui sera probablement la même répartition au cours du prochain budget... Comment a-t-il pu agir de cette façon sans tenir compte du nombre de localités qu'il y a dans chacun des comtés du Québec? On tient compte, bien sûr, dans certains cas, de ce qu'on appelle une municipalité. Mais, M. le Président, saviez-vous, et vous autres, les membres de cette Chambre, en face de moi puis à côté de moi, est-ce que vous saviez qu'une municipalité dans le comté de Duplessis, il n'y a pas plus tard que deux ans, regroupait 15 localités sur un territoire de 200 mi de côte? Mais non! on prend des décisions en fonction du nombre de municipalités sur un territoire de 250 mi de côte. C'est impensable. On oublie, à ce moment-là, carrément les populations qui sont isolées, qui sont dans ces villages. On oublie, à ce moment-là, carrément le fait que ces gens-là ont aussi besoin de développement régional. Et, M. le Président, comment peut-on agir de la sorte aux dépens de la création d'emplois, de la prise en charge des régions par les gens qui y demeurent? C'est de la foutaise que les décisions de ce gouvernement.
Et, M. le Président, sur le plan des transports, je voudrais vous signifier ceci. C'est le néant en cette matière. Et le discours inaugural annonçait la réintroduction du projet de loi 126 sur le Code de la sécurité routière, c'est-à-dire les permis de conduire avec photo. Ça, c'est gros. Ça, c'est intéressant pour la population du Québec. Ah, ça, c'est très économique, M. le Président. Ça crée beaucoup d'emplois. Et je vous fais remarquer que ce projet de loi avait été déposé lors de la dernière session.
Et, deuxièmement, le discours inaugural ne dévoile pas les intentions du gouvernement sur les projets contenus dans le plan de transport de la région Côte-Nord, pas plus que du plan de transport de l'ensemble des régions du Québec. Un exemple, la route 138. Et je vois l'ancien ministre délégué aux Transports qui, lorsqu'il est venu à Havre-Saint-Pierre, avait promis qu'on était pour sortir en soumission à l'automne 1994. Et je viens d'avoir la réponse du bureau du ministre actuel, c'est-à-dire le député de Roberval, à l'effet que ces soumissions ne sortiraient qu'au printemps 1995, ce qui repousse d'un an l'ouverture de 18 km de route vers Natashquan 18 km de route vers Natashquan en 1998. Est-ce ça, M. le Président, une planification pour les régions du Québec? Moi, je dis non.
Il en est de même pour la route 389 pour se rendre de Fermont, dans le comté de Duplessis, au Labrador, territoire terre-neuvien. Promesse en 1988, rien de fait à date, même pas de plans et devis.
Tout ça pour vous dire, M. le Président, que, lorsque ce gouvernement parle de sécurité, il devrait la pratiquer lui-même et ne pas prêcher l'insécurité. Tout ça pour vous dire, en conclusion, que, lorsque ce gouvernement, dans le discours inaugural, parle de dignité, lorsqu'il n'est pas plus digne de siéger parce qu'il n'est pas capable de prendre des décisions pour l'ensemble du territoire québécois... Et, finalement, lorsque ce gouvernement parle de fierté, il ne peut en parler puisqu'il ne sait même pas ce que ça peut représenter dans l'ensemble québécois.
M. le Président, ce que je souhaite le plus au monde, c'est que les Québécois et les Québécoises s'élisent un prochain gouvernement qui sera responsable, qui fera du vrai développement régional, qui prendra les vraies décisions et les bonnes décisions, par, pour et avec les populations du Québec. Merci, M. le Président.
Le Vice-Président (M. Tremblay): Très bien, M. le député. Compte tenu de l'heure, je mets fin à la présente séance et j'ajourne les travaux à demain, 30 mars, à 10 heures.
(Fin de la séance à 21 h 58)