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Version finale

35e législature, 1re session
(29 novembre 1994 au 13 mars 1996)

Le jeudi 23 mars 1995 - Vol. 34 N° 27

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Quatorze heures quatre minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît.

Nous allons nous recueillir quelques instants.

Merci, veuillez vous asseoir.


Affaires courantes

Nous allons procéder aux affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, j'apprécierais que vous appeliez l'article a de notre feuilleton.


Projet de loi 71

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre du Revenu présente le projet de loi 71, Loi visant l'amélioration des relations entre le ministère du Revenu et ses clientèles. M. le ministre du Revenu.


M. Jean Campeau

M. Campeau: M. le Président, ce projet de loi modifie principalement la Loi sur les impôts et la Loi sur le ministère du Revenu, afin, notamment, de donner suite au plan d'action visant l'amélioration des relations entre le ministère du Revenu et ses clientèles.

Le projet de loi prévoit, en matière d'opposition, la simplification des modalités relatives à la signification d'un avis d'opposition, la possibilité pour le ministre de proroger le délai pour faire opposition lorsqu'une personne lui en fait la demande, l'assouplissement des conditions relatives à la prorogation du délai d'opposition ou d'appel et la possibilité, pour une personne qui demande un remboursement, de signifier une opposition lorsque aucune réponse ne lui est parvenue dans les 180 jours de cette demande.

Enfin, le projet élargit les pouvoirs du ministre en matière de renonciation et d'annulation à l'égard de pénalités et d'intérêts et permet la détermination du remboursement au-delà du délai prévu à certaines lois, afin de donner suite à une demande de remboursement.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le ministre du Revenu. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, je vous demande d'appeler l'article b de notre feuilleton.


Projet de loi 73

Le Président: À l'article b du feuilleton, M. le ministre des Transports présente le projet de loi 73, Loi modifiant le Code de la sécurité routière en matière de circulation routière. M. le ministre des Transports.


M. Jacques Léonard

M. Léonard: M. le Président, ce projet de loi modifie diverses dispositions du Code de la sécurité routière relatives à la circulation des véhicules routiers. Il précise les dispositions régissant les voies de circulation obligatoires et modifie les pouvoirs de réglementation attribués aux municipalités relativement aux prohibitions de circulation dans leur territoire. Il autorise, en matière de circulation, les personnes responsables de l'entretien d'un chemin public à restreindre ou à interdire sur ce chemin la circulation des véhicules lourds, tout en permettant une exception à l'égard de ceux utilisés pour la livraison locale.

Ce projet de loi comporte également des modifications relatives à l'équipement des véhicules hors normes et ajuste le montant de certaines amendes.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le ministre des Transports. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. J'apprécierais que vous appeliez l'article 6 de notre feuilleton.

Le Président: L'article c du feuilleton?

Des voix: L'article c.


Projet de loi 72

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le ministre des Ressources naturelles présente le projet de loi 72, Loi modifiant la Loi sur les forêts. M. le ministre des Ressources naturelles.


M. François Gendron

M. Gendron: M. le Président, ce projet de loi a pour objet de modifier la Loi sur les forêts, afin de permettre d'effectuer le paiement des droits prescrits en vertu de la loi par la réalisation ou le financement de nouvelles activités d'aménagement forestier visant à favoriser la protection ou la mise en valeur des ressources du milieu forestier.

Les activités d'aménagement forestier réalisées par le bénéficiaire devront notamment être prévues aux plans d'aménagement forestier et être acceptées par le ministre à la suite de la présentation d'un rapport annuel d'intervention. En ce qui concerne l'admissibilité du financement d'activités d'aménagement forestier, celui-ci devra être prévu dans une entente préalable, approuvée par le ministre, conclue entre le bénéficiaire et la personne à laquelle est accordé le financement pour la réalisation des activités. Les conditions d'attribution des crédits applicables au paiement des droits prescrits seront déterminées par le gouvernement.

Ce projet de loi contient, outre les nouvelles mesures proposées, des modifications de concordance visant l'intégration et la mise en oeuvre des nouveaux modes de paiement qu'il instaure.


Mise aux voix

Le Président: Merci, M. le ministre. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Une voix: Excellent projet de loi.


Dépôt de documents

Le Président: Adopté. Au titre maintenant des dépôts de documents, M. le ministre des Finances.

(14 h 10)

M. Campeau: M. le Président, un message du lieutenant-gouverneur signé de sa main.


Message du lieutenant-gouverneur


Dépôt des crédits pour l'année financière 1995-1996

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur du Québec: «Le très honorable lieutenant-gouverneur de la province du Québec transmet à l'Assemblée nationale les crédits pour l'année financière se terminant le 31 mars 1996, conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée.» Et c'est signé: le très honorable Martial Asselin.

Veuillez vous asseoir. À l'ordre, s'il vous plaît! M. le ministre des Finances.

M. Campeau: M. le Président, pour donner suite au message de Son Honneur le lieutenant-gouverneur, qu'il me soit permis de déposer les crédits pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 1996, ainsi que les renseignements supplémentaires.

Le Président: Merci, M. le ministre des Finances. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission plénière

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Je voudrais faire motion pour déférer les crédits budgétaires 1995-1996 en commission plénière, afin que l'Assemblée nationale étudie et adopte, conformément à l'article 280 du règlement, le quart de ces crédits.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Adopté.


Dépôt de rapports de commissions

Le Président: Adopté. Dépôt de rapports de commissions. M. le président de la commission du budget et de l'administration et député d'Arthabaska.


Audition du président de la CARRA en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics

M. Baril (Arthabaska): En effet, M. le Président, je dépose le rapport de la commission du budget et de l'administration qui a siégé le 22 mars 1995, afin d'entendre le président de la Commission administrative des régimes de retraite et d'assurances, en vertu de l'article 8 de la Loi sur l'imputabilité des sous-ministres et des dirigeants d'organismes publics.

Le Président: Merci, M. le président. Ce rapport est déposé.

Il n'y a pas de dépôt de pétitions.

Pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège ou sur un fait personnel.


Questions et réponses orales

Nous en sommes à la période de questions et réponses orales. Et vous avez la parole, M. le député de Robert-Baldwin, pour une question principale.


Fermeture éventuelle d'hôpitaux

M. Marsan: Merci, M. le Président. Suite au débat sur la motion que j'ai déposée hier, il semble clair maintenant que le ministre de la Santé et des Services sociaux a comme seule solution de fermer des hôpitaux pour pallier aux lacunes de son pseudo-plan de restructuration. Son plan de restructuration, ça, c'était le discours, M. le Président. Maintenant, les faits. Nous pouvons enfin connaître la vérité, puisque, dans les crédits rendus publics aujourd'hui, le ministre de la Santé et des Services sociaux annonce une coupure de 155 000 000 $ dans les services de centres hospitaliers, et ça, pour le 1er avril.

Est-ce que le ministre peut enfin faire preuve de courage avant le référendum et dire à la population, une fois pour toutes, quels hôpitaux seront fermés?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Oui, M. le Président. Je voudrais d'abord rappeler que la fermeture de lits d'hôpitaux, et éventuellement d'hôpitaux, n'est pas une partie du problème, mais une partie de la solution, et même l'élément essentiel de la solution. Parce que, comme je l'ai dit et redit, et c'est très démontré et connu de tout le monde, on a trop de nos ressources qui sont littéralement coulées dans le béton et qu'il faut libérer, recirculer pour développer le type de services dont la population a besoin, pour monsieur et madame qui rencontrent des difficultés à obtenir des services dont on nous parle souvent ici, en Chambre, des services à domicile, des services près d'eux qu'il faut leur donner. Il faut libérer les ressources pour faire ça.

Présentement, chacune des régies régionales prépare et soumet des plans de réorganisation sur son territoire et organise une consultation auprès de la population. Et c'est à la suite de ce processus, comme on l'a dit, transparent de participation et d'ouverture qu'on va pouvoir identifier, au cours des prochaines semaines et des prochains mois, où exactement les ressources seront mobilisées et transformées, y compris les lits d'hôpitaux. Mais c'est une décision d'identification à laquelle on n'est pas encore arrivé, mais qui est en consultation auprès de la population. Merci.

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, pour une question complémentaire.

M. Marsan: M. le Président, est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux pourrait répondre à ma question? Je lui demande et je lui répète: Quels sont les hôpitaux qui vont fermer? Est-ce qu'il peut nous répondre avant le référendum, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, à ma connaissance, la date du référendum n'est pas encore décidée. Alors, c'est bien difficile de vous dire si je réponds avant ou après.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, la décision quant à l'identification de l'endroit où les lits d'hôpitaux seront fermés n'a rien à voir avec le référendum. C'est une question d'une administration efficace des services de santé – pour donner aux citoyens, aux Québécois et aux Québécoises, les services dont ils ont besoin en qualité et en quantité – qui est nécessaire. Et ces décisions-là – et je demanderais simplement qu'on écoute quand la réponse est donnée – vont être prises dans les prochaines semaines et les prochains mois. Les projets sont présentement à l'étude au niveau de chacune des régions, et les partenaires et la population sont présentement consultés à ce sujet.

Le Président: Mesdames, messieurs les parlementaires, je constate qu'il y a un bruit de fond constant actuellement, qui m'empêche de comprendre les réponses, autant que les questions, d'ailleurs. Alors, j'en appelle à votre collaboration. M. le député de Robert-Baldwin, pour une deuxième question complémentaire.

M. Marsan: M. le Président, c'est la troisième fois que j'adresse ma question: Est-ce que le ministre de la Santé et des Services sociaux peut nous dire quels hôpitaux seront fermés et quand?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, je me rappelle vaguement d'une certaine règle pédagogique qui dit qu'à force de répéter tout le monde finit par comprendre, même...

Une voix: Le silence est d'or.

Le Président: S'il vous plaît! À l'ordre! M. le ministre.

M. Rochon: J'allais dire, M. le Président, même ceux qui connaissent la réponse, de toute façon. C'est tout simple. Il a été très bien décidé, identifié le nombre de lits qu'il faut fermer, où, dans quelle région il faut en fermer, à peu près en quelle quantité. Et on est justement dans le processus, avec les régies régionales, en consultation avec les partenaires et la population, à procéder à l'identification de où. Alors, actuellement, je ne peux pas vous donner la liste. Ce n'est pas décidé encore, où exactement les lits seront fermés. C'est ce qui va se décider dans les prochaines semaines. Voilà.

Le Président: M. le député de Robert-Baldwin, toujours en complémentaire.

M. Marsan: En principale, M. le Président.

Le Président: En principale.


Centres d'hébergement pour les personnes âgées

M. Marsan: Lors de la campagne électorale, tous les candidats péquistes avaient promis de créer 1 000 places par année en centres d'hébergement pour les personnes âgées. Ça, c'est le discours. Les faits, maintenant, M. le Président.

Comment le ministre de la Santé et des Services sociaux pense-t-il conserver un minimum de crédibilité, alors qu'aujourd'hui il coupe 43 000 000 $ pour l'hébergement pour les personnes âgées et qu'à ce jour aucune place n'a encore été créée?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, lors de la discussion sur la motion présentée par le député de Robert-Baldwin hier, j'ai eu l'occasion de dire – mais, là aussi, on va répéter, ça va finir par passer – très clairement que les travaux étaient à peu près complétés pour faire une annonce d'un plan d'action pour le déploiement et le développement de nouveaux lits d'hébergement, qu'un mémoire à cet effet est déjà devant le Comité des priorités, sera dans les prochaines semaines vu et discuté au Conseil des ministres et qu'on peut s'attendre, d'ici fin avril ou quelque chose comme ça, à une annonce complète à ce sujet.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, pour une question principale.


Centres de réadaptation pour personnes ayant une déficience intellectuelle ou physique

M. Copeman: Oui, M. le Président, principale. Malgré qu'on constate que des personnes handicapées vivent des situations difficiles et même tragiques par manque de soins de qualité, le ministre de la Santé nous apprend, à la lecture des crédits, qu'il coupe près de 8 000 000 $ dans les centres de réadaptation de déficience intellectuelle et physique.

Pourquoi est-ce que le ministre de la Santé s'attaque aux personnes qui sont parmi les plus vulnérables membres de notre société, M. le Président?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

(14 h 20)

M. Rochon: M. le Président, il faudrait que je puisse vérifier les sources qui donnent lieu à cette question, parce qu'il n'y a pas présentement de réallocation à l'intérieur des différents budgets, mais on n'est pas en voie de couper dans les ressources qui sont données aux personnes âgées. Mais, là-dessus, je vais devoir vérifier, parce que je ne peux pas voir à quoi exactement fait référence le député dans sa question, M. le Président.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, pour une question complémentaire.

M. Copeman: M. le Président, pour aider le ministre dans son travail pour répondre à ma question, peut-être qu'il peut faire référence à la page 21-6 des crédits déposés par le ministre des Finances aujourd'hui, qui indiquent clairement une coupure de...

Le Président: M. le député, vous réalisez que nous sommes au moment d'une question complémentaire. À ce moment-ci, si vous avez une question à poser, je vous inviterais à le faire. Ça va? Bon! Alors, je serais prêt à recevoir une autre question principale, à ce moment-là. M. le député, donc, de Notre-Dame-de-Grâce, pour une question complémentaire.

M. Copeman: Est-ce que le ministre est au courant des faits que je viens de citer, qu'on coupe de tels montants dans des centres de réadaptation, et pourquoi est-ce qu'on procède de cette manière dans le premier ensemble de crédits déposé par le gouvernement du Parti québécois?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, comme je l'ai dit, si vous voulez vraiment que je vous donne une réponse complète, vous allez me permettre de prendre cette question en délibéré, et je vais répondre dans les meilleurs délais.

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, je comprends, M. le ministre, que vous prenez avis de la question. M. le député de Verdun, pour une question principale.


Aide financière aux étudiants

M. Gautrin: M. le Président, le livre des crédits 1995-1996 indique une diminution de 14 000 000 $ du programme de bourses, dans l'aide financière aux étudiants, et une augmentation de 700 000 $ pour l'administration de l'aide financière.

Alors, je demande au ministre de l'Éducation quel effet cela va avoir sur l'endettement des étudiants et l'accessibilité aux études supérieures?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Garon: Je répondrai, M. le Président, qu'on n'envisage aucune coupure dans les bourses aux étudiants et qu'au contraire on envisage des coupures dans les taux d'intérêt, étant donné les profits bancaires, ces temps-ci.

Le Président: M. le député de Verdun, en question complémentaire.

M. Gautrin: M. le Président, est-ce que le ministre a lu la page 9-5 du livre des crédits déposé aujourd'hui, qui fait état, pour 1995-1996, pour les bourses, de 261 334 000 $, alors que les crédits étaient de 275 783 000 $ l'année précédente?

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: Je viens de vous répondre. Je viens de vous répondre qu'il n'y a pas de coupures, dans les prêts aux étudiants, qui sont envisagées. Il y a, évidemment, le nombre d'étudiants, il y a les demandes venant de différents secteurs, du secondaire, du collégial, de l'universitaire, avec des nombres, mais il n'y a pas de coupures d'envisagées dans les prêts aux étudiants. C'est ça que vous essayez de faire dire là; ça ne dit pas ça. Essentiellement, on vous dit, par exemple, qu'on a l'intention de récupérer de l'argent en payant moins cher en taux d'intérêt, selon différentes modalités qui seront à définir plus tard. Mais vous allez voir que le processus est enclenché, et bien enclenché.

Le Président: S'il vous plaît! M. le député de Verdun, pour une question complémentaire.

M. Gautrin: Oui. Le ministre est-il conscient qu'en diminuant les crédits alloués aux bourses – et je parle spécifiquement ici des bourses – mais en augmentant les montants d'administration, cela voudra dire que les étudiants auront plus de non, mais plus rapidement?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Garon: On ne peut pas interpréter ça de cette façon-là, au contraire. Et, lors de l'étude des crédits, je vous ferai la démonstration par a + b qu'il n'y a pas de diminution dans les prêts aux étudiants, des bourses aux étudiants. Mais je vais vous dire une chose, M. le Président, et je vais vous dire une chose...

Une voix: Envoye donc.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Garon: C'est très simple, M. le Président. C'est que, dans les crédits, habituellement – l'année dernière, par exemple – quand on annonçait les crédits, il y en avait tant qui étaient déjà périmés avant qu'ils ne soient annoncés, alors il n'y avait pas le vrai montant dans les crédits. Alors que le montant que vous avez, c'est le vrai montant, cette année. Et les montants dont on dispose sont exactement ceux qui sont prévus, alors que, l'an dernier, il y avait des crédits périmés. Au même moment où le ministre responsable du Conseil du trésor annonçait les crédits, il y en avait une grande partie qui n'étaient déjà pas là, parce qu'ils avaient été gelés, puis ils ne pouvaient pas être dépensés.

Le Président: M. le député de Marquette, pour une question principale.


Fonctionnement des commissions scolaires

M. Ouimet: M. le Président, on apprenait hier que le mépris exprimé par le ministre de l'Éducation à l'égard des commissions scolaires, depuis plusieurs mois, est partagé par un bon nombre de députés péquistes, dont les députés de Louis-Hébert, de Fabre et de Matane, qui souhaitent rien de moins que la disparition des commissions scolaires. Aujourd'hui, le mépris se poursuit. On apprend que...

Le Président: M. le député, s'il vous plaît, je vous inviterais quand même à une certaine prudence dans l'utilisation des termes. Je pense que le mot «mépris»... À l'ordre, s'il vous plaît! Je pense que le mot «mépris»... À l'ordre, s'il vous plaît! Dans les circonstances, le mot «mépris» me semble aller peut-être un peu loin. Je vous invite à la prudence dans la formulation de votre question. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. On a eu l'occasion, à l'occasion d'échanges antérieurs, de s'échanger des lexiques qui sont bien connus de tous les parlementaires, qui ont été mis à jour par le Secrétariat général de l'Assemblée nationale, et le terme que vous venez de souligner n'est jamais apparu, jusqu'à cette minute, dans ces lexiques. Est-ce qu'on est en train de créer une nouvelle jurisprudence?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président. Le terme «mépris», quand il est directement attribué à un individu au niveau d'un procès d'intention, est irrecevable en cette Chambre. C'est clair? Parce qu'on a pointé directement des députés ou des ministres. Et le député sait très bien que, s'il utilise le mot «mépris» en un sens large, sans attribuer ou faire un procès d'intention à un député, il peut être admissible. Mais, dès le moment qu'il s'en sert pour faire un procès d'intention, c'est complètement contraire à l'esprit de nos règlements et à la lettre.

Le Président: Alors, j'en appelle, là, à la collaboration des deux côtés de cette Chambre. À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Dépendant du contexte – à l'ordre, s'il vous plaît! – dans lequel on utilise un mot, il peut arriver, effectivement, que ce mot-là soit jugé comme étant non parlementaire. À ce moment-ci, j'invite simplement, sans pour autant déclarer le terme comme étant non parlementaire, le député de Marquette à la prudence, parce qu'il arrive qu'une expression employée d'un côté suscite un genre de va-et-vient qui fait en sorte que le décorum de cette Assemblée s'en trouve affecté.

Alors, j'en appelle à votre collaboration, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Aujourd'hui, ce manque de considération inacceptable se poursuit. On apprend que l'éducation ne constitue pas une priorité pour le Parti québécois. En effet – et peut-être que je l'apprends au ministre de l'Éducation – une coupure de 90 000 000 $ sera imposée à l'enseignement primaire et secondaire, alors que tous s'entendent qu'il faut investir pour préparer la relève de demain.

Ma question: Le ministre de l'Éducation peut-il prendre l'engagement ferme, devant cette Chambre, qu'aucun élève de la province de Québec ne fera les frais de ces compressions de 90 000 000 $ et de la guerre que ses collègues et lui-même livrent actuellement aux commissions scolaires?

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Garon: M. le Président, la réponse est très simple, je l'ai donnée tantôt au député de Verdun: il y aura, en fait, une augmentation de crédits dans les prêts aux étudiants. Crédits réels, pas des crédits périmés après compression. Mais, dans un budget fermé. Il va y avoir plus de sommes.

Dans le cas des commissions scolaires aussi, il y aura des changements sur le plan de l'administration. Mais est-ce que ça va se répercuter... Oui, oui, vous pouvez regarder ça, sauf que je vais vous dire une chose, on ne paiera pas, par exemple, pour des écoles vides. Rien que là, c'est 4 000 000 $. L'an prochain, on a l'intention de ne pas payer également – et je vais le dire d'avance aussi – pour des locaux vides à l'intérieur des écoles, ce qui va permettre à des gens qui veulent mettre des garderies, mettre différents services qui pourront aller dans les écoles, de faire en sorte qu'on ait une école plus complète, avec plus de services à la communauté. Parce que ça ne donne rien pour le gouvernement, les fonds publics des contribuables de payer pour des classes vides.

(14 h 30)

Alors, essentiellement, oui, il y a de la réorganisation; oui, il y a de la réadministration et, oui, il y a une façon différente de faire les choses. Mais, au bout du compte, on regardera les résultats obtenus quand on verra, item par item... Je n'ai pas peur, je vais répondre à toutes vos questions. Demandez-en, des heures – vous avez le droit à 20 par ministère – je suis prêt à être celui qui va en avoir le plus. Je vais vous dire une chose, on va dire, au contraire, qu'il va y avoir des choses qui vont être faites différemment.

Concernant les commissions scolaires, je peux vous dire, ce matin, que je rencontrais – et...

Le Président: En terminant, M. le ministre.

M. Garon: ...je termine là-dessus, M. le Président – les différents intervenants pour la formule des états généraux. Je peux vous dire que j'ai eu, de différents intervenants du monde de l'éducation, de bord en bord du Québec, des principaux intervenants – du préscolaire en passant par l'alphabétisation, par les commissions scolaires, par les gens du secondaire, du collégial, de l'universitaire – un consensus sur la formule pour les états généraux que nous aurons l'occasion d'annoncer au moment où le déterminera le premier ministre. Je vous remercie.

Le Président: M. le député de Marquette, pour une question complémentaire.

M. Ouimet: M. le Président, le ministre de l'Éducation, au lieu d'improviser comme il le fait actuellement, ne devrait-il pas plutôt s'engager à décentraliser et à briser les contraintes des conventions collectives, afin que nos élèves, qui représentent notre avenir, ne subissent pas les contrecoups des coupures aveugles du ministre?

Le Président: M. le ministre.

M. Garon: Pouvez-vous m'indiquer les coupures aveugles? M. le Président, est-ce que le député peut m'indiquer les coupures aveugles? Parce que, lui, il dit qu'il y a des coupures aveugles, donc il les voit.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Garon: Est-ce qu'il peut les montrer? Je l'incite à me dire où sont les coupures aveugles qu'il indique, dans le document. Moi, je peux vous dire une chose, qu'il va y avoir des choses qui vont être faites différemment, que les ententes, actuellement, vont très bien avec les gens du secteur de l'enseignement, que, dans les négociations, ça va très bien. J'ai rencontré des gens des commissions scolaires ce matin; ils sont contents de la formule des états généraux, ils vont y participer, ils m'en ont donné l'assurance.

Dans les débats, il y a des gens qui ont différentes opinions, et je pense que le député de Matane a droit à une opinion. Moi, je n'ai jamais été de la formule du «crois ou meurs». Si, au Parti libéral, vous êtes comme l'armée de Napoléon ou l'armée d'Hitler, c'est une affaire. Ici, on a le droit de penser.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: M. le député de Westmount–Saint- Louis, pour une question principale.


Rémunération des employés de la fonction publique

M. Chagnon: Merci, M. le Président. Au mois de décembre, la présidente du Conseil du trésor a fait plusieurs cocoricos concernant les accords-cadres qu'elle avait signés avec la FTQ, avec la CSN et d'autres syndicats comme le Syndicat des fonctionnaires. Au mois de décembre aussi, j'avais déposé le guide de préparation de la revue de programmes, qui exposait très clairement qu'il n'y avait aucune indexation pour les salaires et les autres dépenses. Grâce à ses excellentes relations avec les différents chefs syndicaux, ce dont je la félicite, Mme la présidente du Conseil du trésor peut-elle nous dire comment ont réagi les chefs syndicaux lorsqu'elle leur a annoncé ce qu'il y avait dans les crédits, concernant la rémunération? C'est-à-dire que non seulement on va conserver les effets de la loi 102 pour les années à venir, mais qu'avec les nouveaux crédits ils vivront l'équivalent de quatre jours de plus de vacances supplémentaires non rémunérées. Comment ont-ils réagi?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Marois: Alors, je remercie le député, M. le Président, de sa question. D'abord, ça va me permettre de lui dire, de même qu'à ses collègues, qu'ils font malheureusement une mauvaise lecture du budget de dépenses du gouvernement et que, nous, nous avons décidé de dire clairement et à tous égards comment nous utiliserions les crédits, que nous n'avons pas gonflé par des crédits périmés le budget de dépenses du gouvernement, de telle sorte...

Des voix: Bravo!

Mme Marois: Alors, je les inviterais à consulter – ils connaissent bien ce type de document, M. le Président – le livre sur les renseignements supplémentaires, et ils pourront voir exactement le niveau de dépenses qui est prévu, budget par budget, programme par programme, et ils pourront constater que le ministre de l'Éducation a augmenté effectivement les crédits prévus de dépenses pour l'aide aux étudiants.

Cela étant, la loi 102, là, M. le Président, moi, j'en ai hérité, et, à ce que je sache, ce n'est pas nous autres qui l'avons adoptée, mais c'est de l'autre côté, par exemple, qu'on l'a adoptée. Hein? Bon! On va se parler un peu.

Le Président: Brièvement, Mme...

Mme Marois: M. le Président, dès le moment où j'ai assumé les nouvelles responsabilités que j'occupe, j'ai rencontré les chefs syndicaux, j'ai rencontré leurs collaborateurs et je leur ai dit dans quelle situation nous étions. Je leur ai dit aussi, M. le Président, que nous retirerions la loi 198. Nous l'avons fait, M. le Président. Je leur ai dit que nous reviserions la loi 102. J'y travaille, M. le Président. Je leur ai dit aussi que, compte tenu de l'état des finances publiques, si nous pouvions trouver des gains de productivité, ils en bénéficieraient, M. le Président. C'est ça que je leur ai dit.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint- Louis, en question complémentaire.

M. Chagnon: Complémentaire, M. le Président. La présidente du Conseil du trésor ne comprend-elle pas que non seulement les employés de l'État vivent avec la loi 102, dont elle décrie le passage, mais elle leur promet, dans le fond, non seulement de conserver la loi 102, mais de leur en donner deux autres de plus?

Le Président: Mme la présidente du Conseil du trésor.

Mme Marois: Alors, M. le Président, j'imagine que le député aura l'occasion de nous prouver ça à un moment ou l'autre de nos débats. Je pense que nous avons une plénière la semaine prochaine sur les crédits. Nous, ce qui apparaît aux documents qui sont présentés, c'est que nous avons respecté l'engagement que nous avions pris à l'égard de la population québécoise, à l'égard de nos partenaires syndicaux, que nous gèlerions le niveau des dépenses. Mission accomplie, M. le Président, nous sommes à croissance zéro pour l'année 1995-1996, en plus, M. le Président, je vous rappellerai, d'avoir ramassé les dégâts qu'ils nous avaient laissés, de l'ordre de 264 000 000 $.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint- Louis, pour une question complémentaire.

M. Chagnon: Non, principale.

Le Président: Principale?


Coupures de postes dans la fonction publique

M. Chagnon: M. le Président, au cours de la dernière période des fêtes, la présidente du Syndicat de la fonction publique du Québec, Mme Danielle-Maude Gosselin, très connue présidente générale et aussi présidente, si je ne m'abuse, de la commission régionale Chaudière-Appalaches, écrivait à chacun des membres de cette Assemblée que 1995, malgré les difficultés rencontrées au cours des années antérieures, «nous permet d'établir entre l'État et son personnel un régime de relations patronales et syndicales répondant aux aspirations légitimes des travailleuses et travailleurs, et ce, dans l'intérêt de la population québécoise».

M. le Président, comment le premier ministre pourra-t-il expliquer à Mme Maude Gosselin que la présidente du Conseil du trésor vient de couper 2 000 des postes de son syndicat?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, la présidente du Conseil du trésor vient d'expliquer justement sur quelles bases ces discussions avec nos partenaires syndicaux, sur quelles bases elle les a commencées, sur quelles bases elle les poursuit. Il y a là, je pense, la source d'une amélioration importante dans le climat qui a régné pendant plusieurs années entre l'État du Québec comme employeur et les syndicats représentant les fonctionnaires. La situation s'améliore au fur et à mesure qu'on cherche à être tout à fait limpides quant à nos objectifs, quant à ce qu'on a l'intention de faire, quant aux moyens dont nous disposons.

À cet égard, tout ce que je peux dire au député, c'est que je crois que la présidente du Conseil du trésor est sur la bonne piste, que ça avance très bien, ces rapports-là, qu'on se comprend de mieux en mieux et qu'on devrait voir d'ici assez rapidement un changement de climat important pour, après tout, améliorer la seule chose qui est importante, vraiment, hein, dans nos fonctions comme dans celles des fonctionnaires, c'est-à-dire les services que nous rendons au public, nos vrais clients.

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, pour une question complémentaire.

(14 h 40)

M. Chagnon: En additionnelle, M. le Président. Comment le premier ministre peut-il expliquer qu'il y aura toujours ces excellentes relations patronales-ouvrières avec les employés de l'État quand on vient de couper 435 000 000 $, près d'un demi milliard dans leur rémunération? N'est-il pas en train de leur préparer la phase II de l'excellent plat qu'il leur avait déjà servi en 1983 en leur coupant 20 % de leur salaire sur les premiers trois mois de leur année?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, je défie le député, en plénière ou à l'occasion de l'examen des crédits du Conseil du trésor, de démontrer ce qu'il a avancé là. Pensez-vous vraiment que c'est ça qu'on ferait, couper les rémunérations? Pourquoi on ferait ça? Encore une fois, prendre des chiffres comme ceux que nous présentons aujourd'hui dans les crédits implique que l'on compare dépense avec dépense.

Je reviens sur ce que le ministre de l'Éducation a dit, et que la présidente du Conseil du trésor a dit aussi avant moi aujourd'hui. Nous avons l'habitude, depuis plusieurs années, d'avoir des montants de crédits qui sont, dans certains cas, périmés le jour même de leur dépôt, histoire de, un, montrer au public que le gouvernement fait quelque chose, et, deux, qu'il cherche à lutter contre son déficit. Qu'est-ce que ça a donné comme résultat au bout du compte? Que le déficit du gouvernement, à travers ses illusions – du gouvernement qui nous a précédés – a triplé en quatre ans. Ces gens-là se sont raconté des histoires, ils ont brandi des chiffres comme des drapeaux, ils ont périmé des chiffres qu'ils présentaient au public comme des annonces, ils ont géré n'importe comment...

Le Président: En terminant, M. le premier ministre.

M. Parizeau: Nous partons d'un déficit de 6 000 000 000 $ et nous cherchons à améliorer en même temps le service aux clients et à avoir...

Le Président: En terminant.

M. Parizeau: ...des rapports avec les fonctionnaires qui, je l'espère, vont être sans aucune commune mesure avec ceux que nos prédécesseurs ont pu avoir. Merci.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Westmount–Saint-Louis, pour une question complémentaire.

M. Chagnon: M. le Président, en additionnelle, le premier ministre admet-il que nous retrouvons ces données, entre autres, dans les crédits par supercatégories – catégories que l'on retrouve à la page C-14 des crédits – d'une part. Deuxièmement, pourrait-il finalement nous annoncer aujourd'hui que, compte tenu des crédits qui viennent d'être déposés, il est presque virtuellement impossible de faire en sorte de répondre à sa promesse électorale d'arriver à un budget de dépenses qui soit libéré des immobilisations, à zéro, d'ici deux ans, un budget équilibré qui tienne compte de ces crédits?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, nous avons annoncé aujourd'hui un niveau de dépenses de programmes qui est exactement le même qu'en 1994-1995. De dépenses. Nous avons bien l'intention de le réaliser. Ce sera la première fois depuis 25 ans, au Québec, que les dépenses de programmes, globalement, seront gelées. Pour la première fois. D'autre part – et nous avons eu l'occasion de le montrer à plusieurs reprises en cette Chambre, nous allons le montrer encore davantage – nous cherchons à ramasser les impôts qui sont dus, à lutter contre le travail au noir, à lutter contre la contrebande, à faire en sorte que les impôts qui doivent être payés soient payés, et, en procédant de cette façon, oui, en réorganisant la collecte des impôts, en rétablissant un peu de justice véritable dans le système et en gelant les dépenses de programmes du gouvernement, oui, nos engagements, nous allons les tenir.

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en question principale.


Redéfinition du mandat de Radio-Québec

Mme Frulla: M. le Président, moi, je le regarde de toutes les façons, mais les chiffres sont là. D'autant plus qu'on se souvient qu'en novembre dernier Lisette Lapointe, conseillère spéciale du premier ministre, rencontrait Mme Françoise Bertrand, alors présidente de Radio-Québec, pour lui parler, entre autres, de la mission de la société d'État et, plus spécifiquement, de sa volonté d'une présence accrue de Radio-Québec en région. Comment alors expliquer le revirement total, un, par rapport à la volonté exprimée de Mme Lapointe, deux, par rapport au discours historique du Parti québécois sur le rôle de cette télévision d'État? On peut le demander à plusieurs ex-critiques, quand on note dans les crédits une coupure de l'ordre de 23 % de la subvention gouvernementale, ce qui réduit celle-ci de 70 412 000 $ à 55 149 000 $, couvrant à peine l'ensemble des salaires, le loyer et les frais financiers de Radio-Québec.

Alors, ma question au ministre de la Culture et des Communications et premier ministre: Trouve-t-il logique d'avoir accepté une telle compression avant même d'avoir étudié en profondeur et redéfini le mandat de Radio-Québec?

Le Président: M. le premier ministre et ministre de la Culture et des Communications.

M. Parizeau: Je remercie le député...

Une voix: La!

M. Parizeau: ...la députée de la délicatesse avec laquelle elle a introduit ma femme dans ce débat. C'est vraiment... ça démontre – comment dire? – un goût certain!

Effectivement, la présidente de Radio-Québec a demandé à voir ma femme, qui est conseillère à mon cabinet; c'est à sa demande. Ma femme a exprimé, comme les journaux l'ont si bien dit et comme Mme Bertrand...

Oui, un instant! Je n'aime pas beaucoup qu'on touche à ces choses-là, moi, surtout pas de cette façon-là. Alors, on va me permettre de dire ce que je pense de ça. Il y a là une façon de procéder, n'est-ce pas, qui est amusante. Je réponds à la question...

M. Paradis: M. le Président.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, sur une question de règlement.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Est-ce que vous pourriez, aimablement, rappeler au premier ministre les dispositions de notre règlement qui prévoient qu'il ne doit pas s'adresser à un député en cette Chambre, mais plutôt à vous, M. le Président?

Le Président: Alors, M. le premier ministre, s'il vous plaît.

M. Parizeau: Je m'adressais à vous, M. le Président, mais je la regardais. Mes excuses!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Parizeau: Ma conseillère...

Des voix: Ah!

M. Parizeau: ...a eu le tort immense de dire à la présidente de Radio-Québec qu'il serait important que Radio-Québec ait, comme son nom l'indique, davantage de présence dans les régions du Québec et davantage d'accent sur les questions québécoises. Nos excuses, M. le Président, de mettre un accent pareil sur ce qui paraîtrait la fonction évidente de Radio-Québec.

Cela étant dit, comme tellement de gens l'ont soulevé depuis un bout de temps, il est temps de redéfinir la mission de Radio-Québec. Moi, j'ai été regarder des choses comme TVOntario; c'est pas mal, TVOntario. Beaucoup de gens considèrent que c'est une sorte de modèle dans ce genre-là. J'ai regardé combien ça coûte; j'ai regardé quel cadre de personnel il y a là-dedans.

D'autre part, nous avons une télévision éducationnelle, éducative au Québec, en plus de Radio-Québec, qui est Télé-université. Il y a 20 000 000 $ qui vont là-dedans. En fait, dans les télévisions d'État au Québec, on met, à l'heure actuelle, pas loin de 100 000 000 $.

Le Président: En terminant, M. le premier ministre.

M. Parizeau: Bien! Il faut réexaminer ça. Là, nous allons suivre une démarche. J'ai demandé... le conseil d'administration de Radio-Québec est en train de finir, de terminer une sorte d'étude, comme ça, de l'avenir de Radio-Québec. J'ai l'intention de poursuivre la démarche par quelque chose que j'annoncerai; je pense qu'il faut, assez rapidement, se brancher là-dessus et faire en sorte qu'on réoriente Radio-Québec en fonction d'objectifs, anciens pour certains, nouveaux dans d'autres, qu'on intègre bien la télévision éducationnelle au Québec. Et je pense que ça peut se faire à moins cher que ce que nous avons dépensé jusqu'à maintenant.

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en question complémentaire.

Mme Frulla: M. le Président, est-ce que le premier ministre peut avouer qu'on ne met pas en doute la bonne volonté et les démarches de tout un chacun? Ce que l'on dit, c'est: Est-ce qu'il n'est pas plus facile de redéfinir le mandat d'une télévision avant de l'étouffer et d'essayer de lui donner la respiration artificielle pour que celle-ci revive?

Le Président: M. le premier ministre et ministre de la Culture et des Communications.

(14 h 50)

M. Parizeau: Ça, ça dépend, M. le Président, de quel côté de la barrière on se trouve. Il est évident que, quand on est de l'autre côté, il est facile de dire: Réduisez le déficit, réduisez les dépenses, mais ne touchez pas à mon dossier! C'est facile. Je vous dirai qu'à certains moments j'ai déjà pratiqué ça, mais qu'il faut, quand on est responsable des choses, se mettre aussi dans la situation suivante: Ce déficit de 6 000 000 000 $ ne peut pas durer. Tout ne peut pas être considéré comme essentiel comme niveau de dépenses. Il faut essayer, lorsqu'on est devant des réorganisations de certains services publics, d'avoir le courage de les réorganiser, de les lancer vers des objectifs valables puis de faire ça moins cher. C'est ça que j'essaie de faire.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, en question principale.

M. Johnson: M. le Président, oui. Je prends acte de l'admission et de l'aveu du premier ministre qu'il a déjà pratiqué l'art de la critique; on voit où ça mène.

Des voix: Ha, ha, ha! Bravo!

M. Johnson: Alors, il serait malvenu de se plaindre de la façon dont on fait notre travail, M. le Président.


Crédits de la première année de l'indépendance du Québec

On a finalement déposé les crédits pour l'année qui commence le 1er avril prochain, 1995-1996. Force est de constater, M. le Président, qu'il n'y a pas un souffle qui permet de voir où sont les priorités du gouvernement. Le gel des dépenses, ou l'approche du gel des dépenses, semble, de toute évidence, avoir été fait mur à mur. Le premier ministre a pratiqué le mur-à-mur, qu'il dénonce par ailleurs.

À travers l'examen – et on y reviendra la semaine prochaine et dans les commissions parlementaires – des crédits, on peut constater qu'il n'y a pas de véritable priorité du côté de la santé, par exemple, du côté de l'éducation. C'est très certainement ce que mes collègues ont fait ressortir tout à l'heure par leurs questions. Et, dans un contexte référendaire, on peut voir qu'il y a très certainement la priorité référendaire de la part du premier ministre.

Dans la mesure où, cette année, il y aurait un référendum, en juin ou autrement, comme le premier ministre l'a dit, est-ce que le premier ministre ne considérerait pas, ne s'engagerait pas à déposer le plus tôt possible, et, de toute façon, avant le référendum, les crédits de l'année de transition, avec les coûts que ça comporte? Est-ce que le premier ministre ne nous ferait pas l'honneur de nous présenter les crédits de la première année de l'indépendance du Québec? S'il veut éclairer les Québécois, si les Québécois ont besoin davantage de renseignements, est-ce que le premier ministre ne devrait pas s'engager ici à montrer aux Québécois de quoi ça aurait l'air, les crédits après un oui, dans l'année de transition, et de quoi ça aurait l'air, les crédits dans une année où le Québec serait un pays séparé?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: M. le Président, si le chef de l'opposition veut bien s'associer à moi pour qu'on aille négocier tout de suite avec Ottawa le coût d'un certain nombre de choses, on va faire ça la main dans la main, puis on va les déposer.

Des voix: Bravo!

M. Parizeau: C'est très valable. C'est très valable, ce qu'il vient de me dire. Par exemple, notre part du service de la dette fédérale. On va aller négocier ça ensemble, d'accord? Je compte sur vous. Parce que, pour mettre ça dans les crédits, le service de la dette d'un Québec souverain, il faut que cette affaire-là ait été réglée. Je compte sur le chef de l'opposition pour nous donner un coup de main là-dessus, hein. On sait bien que le gouvernement fédéral, et il nous l'a assez répété, ne voudra pas discuter de choses comme celle-là avant le référendum. C'est justement pour ça qu'il faut tenir un référendum en 1995. Mais si le chef de l'opposition pense, à cause des rapports privilégiés qu'il a à Ottawa, que lui et moi, ensemble, on peut ouvrir les négociations avant le référendum, je marche là-dedans.

Quant aux priorités – je ne peux pas éviter, quand même, ce préambule assez long qu'il a utilisé et qui se transformait en une sorte d'incompréhension fondamentale: Comment, pas de priorités dans ces crédits? Mais oui, il y a des priorités dans ces crédits. Il y a une priorité très nette, dans les services de santé, de remplacer des places, des lits d'hôpital qui coûtent 500 $ par jour par des lits de soins prolongés à 150 $ par jour. Oui, il y a une priorité dans ce sens-là. Il y a une priorité pour faire en sorte que de la chirurgie d'un jour, qui coûte moins cher au trésor public que de la chirurgie qui laisse les gens trois, ou quatre jours, ou cinq jours à l'hôpital, soit développée et nous amène à une proportion voisine de celle de l'Amérique du Nord. Oui, il y a une priorité dans ce sens-là.

Au ministère de l'Industrie et du Commerce, c'est vrai qu'il y a un programme de garanties de prêts...

Le Président: En terminant, M. le premier ministre.

M. Parizeau: ...qui, jusqu'à maintenant, en l'espace de quelques mois, a créé 14 000 emplois. Oui, il y a une priorité dans ce sens-là. Il y en a plusieurs autres, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, j'aimerais juste rappeler aux membres de cette Chambre que le président est très bien en mesure de juger de la longueur des questions et des réponses. À l'ordre, s'il vous plaît! Dans le dernier cas que nous avons connu, la question a dépassé le temps normalement imparti et la réponse a dépassé le temps normalement imparti. Alors, je vous en prie, concentrez-vous sur vos questions et vos réponses et laissez le président gérer cette période. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: M. le Président, dans la première partie de sa réponse, est-ce que le premier ministre n'a pas simplement démontré qu'il n'a pas la moindre idée de ce que ça coûte, les crédits de dépenses; de ce que ça coûte, le gouvernement d'un Québec séparé comme il l'envisage? Est-ce qu'il n'est pas en train de nous dire qu'il veut négocier, avec un pays étranger, les crédits de dépenses d'un Québec souverain? Ça n'a pas de bon sens, cette affaire-là!

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: Ce qui n'a pas de bon sens, M. le Président, c'est qu'après autant d'années à discuter de ces questions le chef de l'opposition n'a toujours pas compris. Le service de la dette était évalué par le secrétariat de la commission Bélanger-Campeau à peu près à 18 % du service de la dette fédéral. Évidemment, il y en a, du côté du Canada anglais, qui demandent pas mal plus.

Au lieu d'avoir un certain nombre des amis du chef de l'opposition qui se promènent à Toronto pour dire: Il faut faire souffrir le Québec s'il vote oui, moi, j'aimerais infiniment que le chef de l'opposition s'associe à moi pour qu'on aille dire que, notre part du service de la dette, ça va être autour de 18 %. Remarquez que ce n'est pas trop grave, M. le Président, pour la raison suivante: c'est que, ce coup-ci, ce n'est pas nous qui allons attendre les chèques du fédéral, c'est le fédéral qui va attendre notre chèque.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle, pour une question complémentaire.

M. Johnson: Très brièvement, pour demander au premier ministre quand il entend s'adresser au fond du dossier au lieu d'insulter des Québécois qui n'ont jamais dit les choses qu'il prétend qu'ils disent – et il le sait, il le sait – au lieu d'endurer son ministre, comme le ministre de l'Éducation, ou son ancien adjoint, M. Pierre Bourgault, qui insultent les gens comme ils le font régulièrement. Voyons donc!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Parizeau: Le premier des groupes de gens dont a parlé le chef de l'opposition, le groupe des mal cités, depuis quelques jours, je le regrette pour eux, effectivement, ils ont constaté – M. Stanley Hartt, M. Stéphane Dion, M. Michel Bélanger – que ça fait mal d'aller critiquer le Québec ou de chercher à diminuer le Québec en dehors du Québec ou à l'étranger. Là, ils ont constaté que ça fait mal, alors, depuis 48 heures, ils disent qu'ils sont mal cités. Je souris.

Le Président: Alors, c'est la fin de la période de questions et de réponses orales.

Il n'y a pas de votes reportés.

Au titre des motions sans préavis, M. le député de Charlevoix. Alors, il n'y a pas de motions sans préavis.


Avis touchant les travaux des commissions

Avis touchant les travaux des commissions. J'inviterais encore une fois les membres de cette Assemblée, pour ceux qui doivent quitter, de le faire dans l'ordre, s'il vous plaît.

M. le leader du gouvernement.

(15 heures)

M. Chevrette: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures, et demain, le vendredi 24 mars, de 10 heures à 12 h 15...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Je recommence, M. le Président, en excusant les trois collègues de là-bas et les deux, trois ici, là. Je pense que ça n'a pas de bon sens, M. le Président.

Le Président: Effectivement, vous avez tout à fait raison, M. le leader du gouvernement. J'ai invité tout à l'heure les membres de cette Chambre qui doivent vaquer à d'autres occupations à bien vouloir quitter, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. J'avise pour la troisième fois – jamais deux sans trois – cette Assemblée qu'aujourd'hui de 15 heures à 18 heures, demain, le vendredi 24 mars, de 10 heures à 12 h 15, le lundi 27 mars, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à 21 h 30, et, finalement, le mardi 28 mars, de 10 heures à 12 h 15, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine, la commission des affaires sociales poursuivra les consultations particulières sur le projet de loi 60, Loi facilitant le paiement des pensions alimentaires.

Également, j'avise cette Assemblée qu'aujourd'hui, de 15 heures à 16 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau, la commission des institutions poursuivra les consultations particulières sur la justice administrative et que, par la suite, de 16 heures à 18 heures et de 20 heures à 22 heures, dans la même salle, la commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi public suivant: Loi sur l'établissement de la liste électorale permanente et modifiant la Loi électorale et d'autres dispositions législatives.

Le Président: Merci, M. le leader du gouvernement. M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président, si j'ai bien compris les avis, tels que lus par le leader du gouvernement, les audiences publiques originalement prévues à la commission des institutions dans le cadre du projet de loi sur la justice administrative étaient convoquées pour cet après-midi et ce soir. Il y avait deux groupes qui étaient supposés être appelés, ils ne sont plus appelés. On sait que, pour appeler des groupes en commission parlementaire, ça prend un préavis de sept jours donné par l'Assemblée nationale.

Comment, là, et en vertu de quelle disposition du règlement le leader peut-il tasser cette commission et la remplacer par une autre, au détriment des gens, là, qui avaient été convoqués sept jours d'avance?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Oui, M. le Président, j'avais prévu naturellement cette objection et j'ai même préparé ma plaidoirie, ce qui prouve, M. le Président, qu'on n'a pas besoin de collusion avec la présidence ou de quelque nature que ce soit pour se préparer correctement.

M. le Président, tout d'abord, à ma demande, vendredi dernier, le 17 mars, le président de la commission des institutions a convoqué ladite commission pour poursuivre les consultations particulières sur la justice administrative aujourd'hui. Cette convocation a été faite sur avis du leader, puisque l'Assemblée ne tenait pas de séance. Et je vous réfère à l'article 147 de nos règlements.

Cette convocation, M. le Président, faisait suite à un mandat en vertu de l'article 146 de notre règlement, adopté en Chambre le 2 février dernier. Cet ordre, comme on peut le lire au procès-verbal du 2 février, était à l'effet que la commission des institutions procède à des consultations particulières, et tienne des auditions publiques sur la justice administrative – et à bien lire, M. le Président – à compter du 15 mars 1995, et, à cette fin, entende les organismes suivants. Il y avait une série d'organismes.

M. le Président, l'ordre adopté en cette Chambre était à l'effet qu'à compter du 15 mars la commission des institutions devait commencer les consultations. Cet ordre, nous l'avons respecté en toutes lettres. La commission des institutions a effectivement commencé ses consultations à compter du 15 mars.

Contrairement aux prétentions de l'opposition, M. le Président, nous n'avons aucunement besoin de leur consentement pour modifier l'horaire dans le cas présent. C'est exact qu'un consentement aurait été nécessaire cependant, ou qu'une révocation de la Chambre aurait été nécessaire, mais uniquement dans le cas où on aurait décidé de ne pas tenir la séance le 15 mars, parce que l'obligation de faire était à compter du 15 mars. Mais tel n'est pas le cas. Nous avons tenu ces consultations, tel que prévu, le 15 mars, tel que l'ordre adopté en Chambre.

Si l'on regarde attentivement, maintenant, l'ordre adopté le 2 février, il n'y avait pas d'obligation, M. le Président, d'entendre les groupes aujourd'hui et de siéger à telle date. Non. Les seules obligations étaient de commencer le 15 mars et d'entendre les organismes qui étaient cités dans l'ordre. Après le 15 mars, la planification et la convocation revient au leader du gouvernement, M. le Président, exactement comme dans les projets de loi. Ainsi, si nous avons trois projets de loi pour une commission, qui décide d'appeler? C'est le leader du gouvernement qui choisit entre les trois. Et, si je suivais le raisonnement du leader de l'opposition...

Je sais bien qu'il s'est essayé pour la forme, parce qu'il sait bien que ça ne résiste pas à l'analyse. Si j'avais un ministre de malade, pour un projet de loi, qu'est-ce que je ferais? Je rappellerais l'autre, M. le Président. Donc, je me suis conformé en tous points à l'ordre de la Chambre, qui était de faire commencer les travaux le 15 mars. Mais, après cela, n'en déplaise au leader de l'opposition, il n'est plus ici, c'est donc moi qui dois, comme on dit en anglais «caller les shots».

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, toujours sur cette même question.

M. Paradis: Oui. De façon subsidiaire, M. le Président, même si vous en veniez à la conclusion – et ce n'est pas évident que ce sera ça – que l'argumentaire du leader du gouvernement a une certaine base en droit, il faut quand même lui rappeler que, sur le plan de la courtoisie parlementaire que l'on doit exercer envers les groupes que l'on invite, la Fédération des travailleurs et travailleuses du Québec a été convoquée, elle s'apprête à venir nous rencontrer. C'est la même chose de la Centrale des syndicats démocratiques, de la Confédération des syndicats nationaux, du Syndicat de la fonction publique du Québec et du Syndicat de professionnels et professionnelles du gouvernement du Québec, suivant l'horaire qui avait été préétabli. Et, je le dis subsidiairement, l'Assemblée doit conserver, avec les gens qu'elle invite, un minimum de courtoisie.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: C'est ce que j'ai fait, M. le Président, par l'intermédiaire de mes attachés politiques, tout comme Mme Johanne Whittom l'avait fait, l'employée de M. le leader de l'opposition. Je voudrais déposer deux cas de jurisprudence, celui de Mme Whittom et celui de Martin Côté, qui sont tout à fait identiques, c'est-à-dire que Martin Côté, mon employé, a procédé de la même façon que Mme Whittom avait procédé. Mais nous avons gardé la CSN qui, elle, sera entendue de 15 heures à 16 heures, parce qu'on n'a pas pu les rejoindre suffisamment à temps. Donc, c'est pour ça que j'ai modifié l'ordre en deux. Quant au reste, ils ont été suffisamment avisés pour qu'ils n'entreprennent pas de déplacements.


Documents déposés

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a tout d'abord consentement pour le dépôt de ces documents? Consentement.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Nous en sommes maintenant aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Oui, M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Oui, M. le Président, une question au leader. De tout temps, M. le Président, à tous les trois mois, le gouvernement dépose la synthèse des opérations financières. Or, la synthèse des opérations financières au 31 décembre dernier n'a pas encore été déposée. Et je souligne que jamais, dans l'histoire récente du Québec, le gouvernement n'a attendu aussi tard que le 23 mars pour déposer la synthèse des opérations financières.

Alors, je demande au leader: À quel moment le gouvernement entend-il déposer cette synthèse des opérations financières qui nous permet d'apprécier la situation financière du gouvernement au 31 décembre 1994?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, on m'informe que tous les chiffres et tous les commentaires apparaîtront dans le prochain discours du budget 1995-1996.

Le Président: M. le député de Laporte.

M. Bourbeau: Une autre question, M. le Président. Je comprends de la réponse du leader qu'il n'y aura pas de synthèse au 31 décembre, mais qu'elle va être fusionnée avec le budget. Alors, je reprends ma question: Quand la synthèse va-t-elle être rendue publique, c'est-à-dire avec le budget?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: M. le Président, étant donné que je ne suis pas ministre des Finances – je trouve que j'en ai suffisamment – je prends avis de la question. Mais, moi, ce qu'on m'avait dit... On m'avait prévenu qu'il y aurait une question sur la synthèse, et la réponse qu'il fallait donner, c'était que tous les chiffres apparaîtront au discours du budget. Mais, compte tenu du fait que votre question est plus pointue, à savoir s'il y aurait une synthèse de la situation financière du Québec – jusqu'au 31 décembre, vous dites? – je vais m'enquérir de la question et vous l'aurez à la prochaine occasion.

(15 h 10)

Le Président: Et, incidemment, j'aimerais peut-être juste rappeler aux membres de cette Assemblée qu'une telle question, normalement, aurait pu être posée à la période de questions et de réponses orales. Normalement, les demandes de renseignements doivent porter sur des matières qui apparaissent au feuilleton. Donc, je souhaiterais qu'on puisse en tenir compte subséquemment.

Je vous rappelle, quant à moi, que l'interpellation prévue pour demain, le vendredi 24 mars 1995, portera sur le sujet suivant: «La signification et la portée de l'opinion légale de Rogers & Wells sur l'éventuelle réaction du gouvernement américain à la suite d'une hypothétique séparation du Québec.» M. le député de Mont-Royal s'adressera alors à M. le ministre délégué à la Restructuration.

Je vous avise également que l'interpellation prévue pour le vendredi 31 mars 1995 portera sur le sujet suivant: les coupures budgétaires dans le réseau de la santé. M. le député de Robert-Baldwin s'adressera alors à M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Décision du président sur une question de règlement du leader de l'opposition concernant la convocation de la commission des institutions, afin de discuter de la démarche d'information et de participation sur l'avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec

Nous en sommes toujours aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Et je serais en mesure, à ce moment-ci, de rendre ma décision relativement à la question que posait, la semaine dernière, le leader de l'opposition officielle. Alors, il s'agit de la question de règlement soulevée mardi dernier, concernant la nature de l'obligation qui est faite à la commission des institutions par la motion adoptée le 9 décembre 1994, qui se lit comme suit:

«Que la commission des institutions se réunisse afin de déterminer de quelle manière les travaux de cette commission pourront préparer et faciliter la démarche d'information et de participation qui aura lieu sur l'avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec.»

L'article 186 du règlement édicte ce qui suit: «Toute motion adoptée devient soit un ordre, soit une résolution de l'Assemblée: un ordre quand l'Assemblée enjoint à une commission, à un député ou à toute autre personne de faire quelque chose; une résolution quand elle exprime une opinion ou une intention, affirme un fait ou un principe.

«Un ordre ou une résolution ne peuvent être révoqués que sur motion sans préavis d'un ministre.»

Il découle clairement de cette disposition que la motion en cause constitue un ordre de l'Assemblée, puisqu'elle impose à la commission des institutions de faire quelque chose. Toutefois, la motion ne précise pas à quel moment la commission est tenue de se réunir. Dans un tel cas, étant donné qu'il s'agit d'un mandat de l'Assemblée, l'article 147 du règlement prévoit que la commission est convoquée sur avis du leader du gouvernement. En effet, cet article est ainsi libellé:

«La commission qui a reçu un mandat de l'Assemblée est convoquée par son président, sur avis du leader du gouvernement. L'avis, dont copie est adressée au président de l'Assemblée, indique l'objet, la date, l'heure et l'endroit de la réunion. Si l'Assemblée tient séance, le leader du gouvernement convoque la commission au moment prévu de la période des affaires courantes.»

En conséquence, en adoptant la motion sans indiquer le moment et l'endroit de la convocation de la commission, l'Assemblée, par l'article 147, a laissé le soin au leader du gouvernement d'indiquer la date, heure et endroit de la réunion. À la lecture du mandat, cependant, le leader du gouvernement s'est vu imposer une limite dans le temps où il peut utiliser sa discrétion, à savoir, tant et aussi longtemps que l'avant-projet de loi sur la souveraineté du Québec pourra faire l'objet d'information ou de discussion.

Dans ce cadre, et tant que l'ordre subsistera, il est du devoir du leader du gouvernement de donner l'avis relatif à la convocation de la commission des institutions pour l'exécution du mandat qui lui a été confié par l'Assemblée.

Nous en venons maintenant... Ceci termine la période réservée aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Nous passons aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: M. le Président, je vous avoue que je viens d'en perdre mon latin, là. C'est parce que, s'il ne reste pas d'événements, je «peux-tu» vous demander une directive additionnelle? Parce que, étant donné que j'interprétais le mandat différemment – et je ne veux pas contester votre décision, là – je regardais le leader de l'opposition et je me disais: Qu'est-ce que je vais faire? Parce que, à supposer que tout a été décidé en ce qui regarde toute la procédure, si la procédure était terminée en ce qui regarde l'avant-projet et que je ne me sois pas conformé au mandat, parce que je ne le savais pas avant qu'il y avait obligation de faire, qu'est-ce qui m'arrive?

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Chevrette: Bien, c'est clair. Je pense que la question...

Le Président: M. le leader du gouvernement – à l'ordre, s'il vous plaît! – je vous rappelle que nous en sommes toujours à la période de consultations sur l'avant-projet de loi, et tant et aussi longtemps que cette période-là n'est pas terminée, vous avez deux options possibles...

M. Chevrette: ...

Le Président: Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: C'est parce que, le mandat, c'était de définir l'organisation, si je comprends bien. Le mandat qui était donné au leader du gouvernement, et à l'Assemblée nationale, par ricochet, par l'Assemblée nationale, dis-je, à la commission des institutions, c'était de convoquer la commission pour organiser des travaux. Moi, j'ai pris pour acquis, devant le retrait de la formation politique de l'opposition officielle, sa non-participation, j'ai pris pour acquis que je ne pouvais pas convoquer quelqu'un pour organiser quelque chose à quoi il ne veut pas participer.

Là, vous venez de me dire, aujourd'hui, que la limite pour organiser quelque chose, c'est la fin de l'étude de tout avant-projet. Ha, ha, ha! Toutes les organisations sont faites quant à l'avant-projet. Je les consulterais... Je suis bien prêt à les convoquer, moi, n'importe quand, mais pourquoi? Pour organiser quoi? Moi, de nature, M. le Président, je ne suis pas du genre à aller m'asseoir pour le plaisir d'aller m'asseoir. On va s'asseoir s'il y a quelque chose à faire. Et, comme il n'y a plus rien à faire, je voudrais vous demander qu'est-ce qui pourrait m'arriver. Une motion de censure au leader du gouvernement? C'est quoi?

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle.


M. Pierre Paradis

M. Paradis: Oui, M. le Président, nous avions prévu cette réaction de notre bon ami, le leader du gouvernement, et c'est pourquoi, dès le 3 février dernier, nous avions soulevé la question de directive en cette Chambre, pour lui permettre de prendre conscience du sérieux et de la gravité d'un ordre de l'Assemblée nationale. Et il a eu, depuis ce temps, toutes les possibilités de remédier à sa lacune.

Maintenant, la décision que vous venez de rendre confirme qu'il y a, effectivement, un ordre de l'Assemblée nationale. Quelles sont les sanctions qui découlent pour quelqu'un qui ne donne pas suite à un ordre de l'Assemblée nationale? Le leader du gouvernement connaît ces sanctions, il peut se référer et à la loi de l'Assemblée nationale et aux règlements de l'Assemblée nationale.

Le Président: Bon, j'attire votre attention sur le fait, simplement, que, dans un premier temps, ce n'est pas à la présidence d'indiquer quelles pourraient être les sanctions. Si l'opposition officielle juge qu'il y a eu manquement, elle pourra initier les procédures qui sont prévues à notre règlement.

Ceci étant dit, et je vous donnerais, à ce moment-ci, des indications... À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous donnerais, à ce moment-ci, des indications. Si tant est que ma réponse ne vous semblait pas satisfaisante, je prendrais cette question-là, à ce moment-ci, en délibéré, pour permettre d'avoir vraiment une réponse encore plus complète. Mais j'attire votre attention simplement sur le fait que vous avez référé, ni plus ni moins, tout à l'heure, aux consultations qui ont eu cours via les commissions régionales. Bon.

J'attire votre attention sur le fait qu'il s'agit de commissions régionales qui relèvent de l'Exécutif et non pas du Parlement. L'Exécutif aurait pu entreprendre d'autres formes de consultations sur l'avant-projet de loi, il peut le faire à loisir, ça relève de sa compétence. En ce qui regarde le travail des parlementaires et le travail de cette Assemblée nationale, à ce moment-ci, nous sommes toujours devant un avant-projet de loi, et aucune consultation d'ordre parlementaire n'a encore été initiée. Par voie de conséquence, il vous est toujours loisible, soit de convoquer la commission des institutions pour qu'elle réponde à l'ordre qui lui est donné, ou bien d'initier une autre procédure. Comme il en est question dans la décision, vous auriez toujours la possibilité de révoquer cet ordre.

Alors, je ne sais pas si ces explications vous satisfont...

M. Chevrette: Je comprends qu'en vertu...

Le Président: M. le leader du gouvernement.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: Je comprends, M. le Président, qu'en vertu de 186, deuxième paragraphe, on peut procéder à la révocation d'un ordre. Ça, je le comprends. Mais, je ne voulais pas révoquer nécessairement l'ordre. J'avais cru comprendre – parce que vous n'avez pas rendu une sentence écrite, là; je pourrai la relire plus lentement – que j'avais obligation de faire, en fonction du travail qui se fait sur l'avant-projet.

(15 h 20)

Je sais que les consultations sur l'avant-projet, elles, je ne peux plus procéder à travailler sur l'organisation, l'organisation est en voie de réalisation finale. Si c'est circonscrit aux travaux parlementaires, je les convoquerai, M. le Président, à profusion, à volonté, et surtout cette commission où je siège depuis quelque 60 heures et que je connais bien.

Le Président: Alors, donc, je comprends qu'après que vous ayez éventuellement pris connaissance de la décision vous pourriez éventuellement revenir sur cette question à la prochaine période, peut-être, des affaires courantes ou ultérieurement.


Affaires du jour

Avec votre collaboration, nous en revenons aux affaires du jour. M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Je vous demanderais d'appeler l'article 12 du feuilleton.


Projet de loi 237


Adoption du principe

Le Président: À l'article 12 du feuilleton, M. le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue propose l'adoption du principe du projet de loi 237, Loi concernant la Ville de Rouyn-Noranda. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'adoption du principe de ce projet de loi? Oui, M. le député de Rouyn-Noranda– Témiscamingue.

M. Trudel: Est-ce qu'il y a une autre étape après? Oui, si vous permettez, j'interviendrai à ce moment-ci, à l'avant-dernière étape.

Le Président: Alors, M. le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, vous avez la parole.

M. Trudel: Merci, M. le Président. Le projet de loi qui est soumis à l'attention de l'Assemblée nationale, après que nous ayons étudié ce projet de loi article par article en commission parlementaire, la commission de l'aménagement et des équipements, tel que le prévoit le processus d'adoption législatif à l'Assemblée nationale, nous en sommes donc ici à nouveau saisis de l'état, en vue de l'adoption du projet de loi 237 qui, essentiellement, a trois objets, M. le Président. C'est un petit projet de loi, en quelque sorte, puisque c'est un projet de loi privé qui vise...


Mise aux voix

Le Président: M. le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, je crois que vous n'intervenez pas sur le principe, mais plutôt sur le fond du projet de loi, actuellement. Alors, je vous demanderais simplement, s'il n'y a pas d'intervention au niveau du principe du projet de loi... J'aimerais vérifier si le principe du projet de loi 237, Loi concernant la Ville de Rouyn-Noranda, est adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption

Le Président: Adopté. Alors, M. le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue propose donc l'adoption du projet de loi 237, Loi concernant la Ville de Rouyn-Noranda. Est-ce qu'il y a des interventions sur l'adoption du projet de loi 237? M. le député de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, vous avez la parole.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: Je disais donc, M. le Président, avant que nous adoptions le principe de la loi 237, que ce projet était relatif au fait d'habiliter la ville de Rouyn-Noranda, à l'égard de trois dimensions bien importantes: pour faire en sorte de donner la capacité à la municipalité de Rouyn-Noranda, d'abord, pour l'autoriser à exploiter un centre des congrès, ce qui n'est pas permis actuellement à l'égard de la Loi sur les cités et villes, et, deuxièmement, l'autoriser à contribuer et aussi – et j'y reviendrai brièvement, M. le Président – l'autoriser à confier à un organisme subsidiaire l'administration courante de cet équipement collectif que constitue un centre des congrès pour la ville de Rouyn-Noranda.

M. le Président, le projet de loi 237, qui est soumis à l'attention de l'Assemblée pour adoption, est la fin d'un processus assez long, finalement, qui a débuté il y a au-delà de 24 mois, lorsque plusieurs intervenants du monde socioéconomique de la région de Rouyn-Noranda ont fait en sorte d'établir un consensus pour développer, à l'intérieur de la ville de Rouyn-Noranda, un équipement collectif qui est présent dans la plupart des grandes municipalités du Québec, c'est-à-dire un équipement de centre des congrès, un équipement de salle pour recevoir un assez grand nombre de personnes, qui permet non seulement de répondre aux besoins communautaires de la population, du bassin de population, de 40 000 de population de la région de Rouyn-Noranda, mais également pour permettre de répondre aux besoins, en termes d'équipement, de l'industrie touristique de la région de Rouyn-Noranda.

Et, lorsque, M. le Président, on aborde ces questions de développement d'un centre des congrès dans les villes de grande ou de moyenne importance au Québec, il y a toujours deux ou trois questions cruciales qui se posent.

Est-ce que c'est de la responsabilité, de la mission d'une municipalité de construire, d'administrer éventuellement, une salle à congrès? Et l'économie générale de la Loi sur les cités et villes nous amène à dire que non, ce n'est pas de la mission fondamentale généralement reconnue pour les villes d'administrer de tels équipements, parce que ça n'appartient pas à la mission première d'une municipalité, qui vise d'abord à donner des services à ses citoyens et citoyennes et à recueillir un certain nombre d'impôts, de taxes, pour en arriver à rendre ces services.

Cependant, et c'est le cas qui est devant nous, et nous en avons tous convenu en commission parlementaire des deux côtés de la Chambre ici, un certain nombre de villes ont demandé des exceptions déjà dans le passé, et c'est le cas maintenant pour la ville de Rouyn-Noranda, pour lui permettre de se doter de cet équipement, mais, en même temps, de faire en sorte qu'on puisse lui donner des pouvoirs habilitants pour n'engendrer aucun déficit qui ferait en sorte que les citoyens ou les citoyennes et les commerçants soient appelés à payer pour le fonctionnement de cet équipement de salle de congrès.

Dans ce sens-là, le projet de loi autorise d'abord la ville de Rouyn-Noranda à établir et exploiter un centre des congrès. C'est le pouvoir habilitant fondamental. Deuxièmement, pour en arriver à ce que ce centre existe, le deuxième article du projet de loi va prévoir que la ville de Rouyn-Noranda pourra contribuer au financement pour la construction de cet équipement. C'est un projet majeur, M. le Président, pour la région de Rouyn-Noranda. Au total, c'est un projet d'au-delà de 8 300 000 $, qui est divisé en deux parties: une partie privée, d'abord, d'au-delà de 3 000 000 $, et la partie publique, finalement, le centre des congrès, de 4 600 000 $, tel qu'il a été expliqué déjà en commission parlementaire.

La construction de ce centre des congrès, d'un total de 4 600 000 $, sera financée de la façon suivante – tel que, encore une fois, nous l'avons expliqué, mais il est utile, sinon nécessaire, de le répéter ici, à l'Assemblée nationale – à partir de trois éléments. C'est d'abord la ville de Rouyn-Noranda elle-même qui a annoncé, à l'intérieur de ses prévisions budgétaires, une contribution de 1 150 000 $ pour la construction de cette salle de congrès. Le gouvernement du Québec, à même le programme des infrastructures, tel que s'était engagé à le faire l'ex-ministre des Affaires municipales, M. Ryan, et tel que poursuivi, en termes de politique, par le ministre actuel, le député de Joliette, M. Chevrette, va contribuer pour une somme de 2 300 000 $, en fait plus précisément 2 350 000 $ de contribution pour la construction. La différence, soit 1 106 000 $, ce sera la contribution d'un promoteur privé qui, lui, va faire en sorte que cette salle de congrès, qui sera annexée à son complexe hospitalier... à son complexe hôtelier – déformation d'une vie antérieure – donc, servira en termes d'équipement servant à promouvoir ou à développer le secteur des affaires du complexe hôtelier, en fait de l'hôtel Noranda.

Alors, M. le Président, en très simple, le deuxième article du projet de loi prévoit donc que la ville pourra contribuer financièrement à la construction – je reviendrai sur l'administration dans un troisième temps – en recevant une subvention du gouvernement du Québec et en la versant au projet de salle de congrès à Rouyn-Noranda, en versant à même ses fonds propres une somme de 1 150 000 $ et aussi on va permettre de recevoir et de verser, à un organisme sans but lucratif, une contribution de 1 100 000 $ d'un entrepreneur privé, pour en arriver à la construction d'une salle de congrès essentielle pour les citoyens et citoyennes de la région Rouyn-Noranda et pour l'industrie touristique de cette région, de 4 600 000 $.

Et, finalement, M. le Président, le troisième article de ce projet de loi, et c'est l'élément le plus essentiel sur lequel, à mon avis, on doit se pencher comme législateur: Est-ce qu'une ville, qui est autorisée à établir et à exploiter un centre des congrès, une ville qui est autorisée à verser des montants, est en mesure de s'assurer qu'il n'y aura pas de déficit, peu importent les circonstances, qui pourrait retomber sur les épaules des citoyens ou des citoyennes ou des citoyens corporatifs dans cette ville-là? Parce que, nous le rappelons, la mission fondamentale d'une ville, d'une municipalité, c'est d'abord de donner des services aux citoyens directement et non pas d'exploiter des équipements qui servent, oui, bien sûr, au développement et à rendre un certain nombre de services aux citoyens et citoyennes, mais également aux gens de l'extérieur.

(15 h 30)

C'est pour ça que l'article 3 de ce projet de loi autorise la ville de Rouyn-Noranda à conclure avec un organisme sans but lucratif toute entente – en fait, c'est avec un tiers. Les mots de la loi sont de contracter ou de conclure une entente avec un tiers pour lui confier l'administration de cette salle à congrès. De cette façon, M. le Président, il y aura construction et permission à la municipalité d'utiliser des fonds à cette fin, peu importe la provenance; deuxièmement, de signer une entente avec un tiers pour en assumer la responsabilité d'administration et ainsi éviter, de façon formelle, à l'intérieur d'un contrat, tout déficit annuel qui pourrait être engendré par cet équipement et, de cette façon, en arriver à ne pas obliger les citoyens et citoyennes à payer des taxes ou des impôts qui serviraient à payer ce déficit annuel.

M. le Président, il a été mentionné par M. le maire, Pierre Grandmaître, de la ville de Rouyn-Noranda et par son directeur général, M. Denis Charron, que cette entente avec un organisme sans but lucratif, qui va être le porteur du ballon au plan administratif et le promoteur privé qui va en assurer la gestion, est, à toutes fins utiles, négociée. Il faut, pour être capable de rendre à terme ce contrat, cette entente, le pouvoir habilitant – que nous allons donner aujourd'hui, je le souhaite vivement, à la ville de Rouyn-Noranda – pour ce faire, pour qu'on puisse y arriver, et, dès que cela sera fait, tous les termes du contrat pourront arriver à éclore et faire en sorte qu'on pourra, dans les jours qui viennent et suivant les dispositions généralement prévues en pareille matière par la Loi sur les cités et villes, permettre de lancer des appels d'offres et ériger à Rouyn-Noranda un centre des congrès d'une valeur de 4 600 000 $ en annexe à un projet hôtelier privé de 3 600 000 $, ce qui nous amène à un investissement total de 8 212 000 $, M. le Président, dans la municipalité de Rouyn-Noranda au cours des semaines à venir.

Voilà, essentiellement, M. le Président, l'objet ou les objets sur lesquels porte le projet de loi et qui vont permettre à la collectivité de Rouyn-Noranda de se doter de cet équipement essentiel et sur lequel nous mettons les efforts collectivement depuis au-delà de 24 mois.

Et j'en profiterai, M. le Président, rapidement en terminant, justement pour souligner les efforts de tous ceux et celles qui ont participé à ce montage, en quelque sorte, qui nous amène aujourd'hui à être aux abords du fait de lancer le processus de construction d'un centre des congrès et de la rénovation d'un complexe hôtelier d'une valeur de 8 200 000 $. D'abord, la Chambre de commerce et, en particulier, son président, M. Guy Veillette, qui a énormément travaillé, mis beaucoup d'heures à l'élaboration du montage financier et du montage juridique pour en arriver à ce résultat; l'ex-maire de la ville de Rouyn-Noranda, M. Gilles Cloutier, également, qui a mis beaucoup d'efforts. Vous savez, quelquefois, malheureusement – Mme la députée de Jean-Talon en sait quelque chose – parfois, il nous arrive de mettre au monde un certain nombre de projets et on n'est plus là pour en arriver à les accoucher, ou à les faire élever, ou à les ériger, ces projets. C'est le cas de M. le maire, Gilles Cloutier, de Rouyn-Noranda, qui a laissé ses fonctions au mois de novembre dernier, mais qui a mis aussi beaucoup d'efforts dans ce projet-là au cours de son mandat à la mairie de Rouyn-Noranda. Je veux souligner également le travail de M. Pierre Grandmaître, l'actuel maire de la ville de Rouyn-Noranda, et de ses collaborateurs, en particulier MM. André Savard et Denis Charron, le directeur général, pour en arriver à ce que nous puissions établir finalement ce projet dans la collectivité de Rouyn-Noranda.

Mais je vais aussi, M. le Président, en conclusion, ne pas oublier de donner à César ce qui est à César. L'ex-ministre des Affaires municipales, M. Claude Ryan, avait convenu et décidé, à la toute fin de son mandat, d'accorder une subvention de 2 300 000 $, via le député du Parti québécois du comté de Rouyn-Noranda–Témiscamingue, une subvention de 2 300 000 $. M. Ryan n'est plus ici, bien sûr, mais je veux quand même, aux fins, aujourd'hui, du procès-verbal, que soient soulignés le travail, l'acceptation et la décision de l'ex-ministre des Affaires municipales, qui était très préoccupé, à cet égard, par le développement régional et la présence de certains types d'équipements comme celui-là dans les collectivités locales.

Je veux remercier, bien sûr, aussi l'actuel ministre des Affaires municipales, M. Guy Chevrette, député de Joliette, qui a accepté de reconduire la décision de l'ex-ministre et de faire en sorte qu'on puisse, tous ensemble, dire que, collectivement, peu importe que l'on soit d'un côté ou de l'autre de la Chambre, peu importent quelles sont nos affiliations dans le monde politique dans la grande collectivité de l'Abitibi-Témiscamingue ou de Rouyn-Noranda, nous aurons tous, à un titre ou à un autre, contribué à la progression de ce dossier et à faire en sorte qu'aujourd'hui, avec l'adoption de cette loi, non seulement on se réjouisse à Rouyn-Noranda, mais qu'on puisse dire que, bientôt, nous pourrons lancer l'appel d'offres pour la construction d'un centre à congrès à Rouyn-Noranda d'une valeur totale de 8 200 000 $, et avec une salle à congrès qui, elle, va équivaloir à un budget en soi – pour la salle à congrès – de 4 600 000 $. Je souhaite vivement que nous puissions adopter cette loi dans les meilleurs délais possibles, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci. Je remercie M. le député de Rouyn-Noranda– Témiscamingue. Y a-t-il d'autres interventions? Mme la députée de Jean-Talon, je vous cède la parole.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, j'aimerais souligner, M. le Président, tout le plaisir que j'ai aujourd'hui de discuter avec vous du projet de loi 237. Je ne reprendrai pas ici l'historique qu'a bien voulu nous relater mon collègue de Rouyn-Noranda– Témiscamingue. Je voudrais tout simplement ajouter à ses propos en mentionnant que, s'il est vrai que construire ou exploiter un centre de congrès ne fait pas nécessairement partie des missions premières d'une municipalité, il faudrait peut-être se rappeler que, au fil des ans, les municipalités ont vu leurs responsabilités accrues, pas nécessairement par de la législation, mais par des besoins que la population nous exprimait, M. le Président. Alors, on a vu les municipalités se mêler de transport en commun, gérer des arénas. Et, quant à moi et à mon parti, on n'a aucun problème à vivre avec le fait qu'une municipalité veuille développer sa région et veuille s'impliquer au même titre que ses partenaires régionaux dans le développement de cette région-là, dis-je bien, par le biais d'un centre de congrès.

Ce n'est pas la première fois que le gouvernement amende la Loi sur les cités et villes pour permettre, justement, ce pouvoir habilitant. Ça a été fait en 1990, M. le Président, lorsque la ville de Baie-Comeau a voulu, elle aussi, se doter d'un centre de congrès. On se retrouve aujourd'hui avec ce projet-là, le projet de loi 237 – et il y en aura un autre qui suivra dans quelques minutes – et, en tant que critique officielle pour le parti de l'opposition en ce qui regarde les affaires municipales, je ne peux que concourir et accepter cette décision de la ville de Rouyn-Noranda.

Je les félicite, d'ailleurs, de vouloir s'impliquer dans le développement de leur région. Ça rejoint aussi l'importance qu'on accorde à l'autonomie que les municipalités ont, depuis de nombreuses années, de se prendre en main. On est actuellement à discuter, à plusieurs niveaux, de décentralisation, de responsabilisation. Je sais que ce gouvernement va vouloir au moins définir ce que signifient ces termes, mais disons que, dans le monde municipal, de vouloir prendre ses responsabilités, ça fait longtemps, M. le Président, que c'est sur la table.

Alors, je pense qu'avec le projet de loi 237, qui s'ajoute à d'autres décisions qui ont été prises par ce gouvernement et par les gouvernements précédents dans le sens de permettre à la municipalité de gérer son développement en partenariat, je ne peux que féliciter tous les intervenants régionaux. J'ai eu l'occasion, comme mes collègues qui font partie de la commission, de rencontrer M. le maire Pierre Grandmaître ainsi que son directeur général, M. Denis Charron. Il est clair que ces gens-là ont travaillé depuis fort longtemps en collaboration avec le milieu des affaires, le milieu municipal, pour doter leur région de cet équipement majeur qui va permettre à cette région de pouvoir se développer. Alors, M. le Président, je n'ajouterai rien d'autre puisque mon collègue a très éloquemment présenté le dossier, et je vous dirai que nous sommes d'accord avec l'adoption de ce projet de loi.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, merci, Mme la députée de Jean-Talon. Le projet de loi 237, Loi concernant la Ville de Rouyn-Noranda, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader du gouvernement.

(15 h 40)

M. Gendron: Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je vous demanderais de... voyons, d'amener, d'amener l'article... d'appeler, pardon, l'article 11 du feuilleton.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Je suis avec vous autres.


Projet de loi 236


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Très bien, M. le leader du gouvernement. À l'article 11 du feuilleton, M. le député de Jonquière propose l'adoption du principe du projet de loi 236, Loi concernant la Ville de Jonquière.


Mise aux voix

Il n'y a pas d'intervention sur l'adoption du principe? Le principe du projet de loi 236, Loi concernant la Ville de Jonquière, est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le député de Jonquière propose l'adoption du projet de loi 236, Loi concernant la Ville de Jonquière. Alors, M. le député de Jonquière, en tant qu'auteur du projet de loi, vous disposez d'un temps de parole de 30 minutes. Je vous cède la parole.


M. Francis Dufour

M. Dufour: Merci, M. le Président. On va essayer de s'en tirer à moins de ça. Mais je pense qu'il est intéressant, après 15 ans d'existence de ce centre des congrès, d'en parler et de ramener cette question avec un projet de loi spécial, puisque ce centre des congrès a été mis sur pied légalement, je dois l'affirmer, puisque, dans le temps, on avait seulement besoin de l'approbation de la Commission municipale du Québec pour engager des crédits au nom des municipalités.

Rappelons-nous donc que ce centre des congrès, qui a été bâti en 1981, était le premier centre des congrès en dehors de la ville de Montréal et de la ville de Québec à prendre naissance sur le territoire québécois, même avant celui de Hull. Donc, on avait, à ce moment précis, à établir une relation d'affaires entre la municipalité et des promoteurs pour mettre sur pied un centre des congrès et un complexe hôtelier.

Les coûts, dans le temps, c'était environ 8 000 000 $, ce qui voulait dire un hôtel d'au-dessus de 153 chambres, mais un centre des congrès qui pouvait accueillir à peu près 1 200 personnes, entre 1 000 et 1 200 personnes. Je demandais tout à l'heure au député de Rouyn-Noranda combien son centre va pouvoir accueillir de personnes, et il me parle de 500 personnes, à peu près. Voyez-vous, les prix ont changé quelque peu, parce que, de 1981 à 1995, le centre des congrès qu'on a chez nous, qui, en fait, est la propriété de la ville de Jonquière, vaudrait certainement autour de 5 000 000 $.

Donc, il y a un placement que la ville a fait dans ce centre des congrès, qui lui a permis d'opérer et de vivre. Et comment la ville s'est engagée? C'était par l'engagement de crédits, d'un loyer de 25 000 $... que le centre des congrès coûte 2 000 000 $ et plus. Le complexe hôtelier devait, pour son coût de construction, environ 6 000 000 $, et, s'il y avait plus de 2 000 000 $ à investir dans ce centre des congrès, c'est le complexe hôtelier qui devait en faire les frais.

Ce complexe a fonctionné depuis les 15 dernières années, et c'est évident qu'après 15 ans de fonctionnement il a besoin d'être rafraîchi, autant le complexe que l'hôtel comme tel. Et c'est ça qui amène ce projet de loi, puisque la ville, en négociant avec le propriétaire du complexe hôtelier, a décidé de rafraîchir son centre des congrès, qui est sa propriété. Et l'hôtel, en soi, demande environ 1 200 000 $, et la ville de Jonquière est prête à s'engager, engager son crédit pour 800 000 $, ce qui fait que le loyer va passer de 25 000 $ à 29 000 $ par mois jusqu'à la période de l'an 2005. Et, en 2005, lorsque la ville aura payé tous ses engagements de crédits, la ville pourra en prendre pleinement possession, de ce centre des congrès, pour 1 $.

Ce centre des congrès, c'est aussi un stationnement. C'est aussi une bâtisse attachée à un centre d'achats, donc, une hypothèque assez importante qui appartient à la ville, parce que, s'il y avait une expropriation en cours de route, la ville pourrait non seulement retrouver sa mise de fonds, mais y compris les augmentations à sa mise de fonds, qui reviendraient à la ville. Donc, pour moi, je trouve que la municipalité, ou la ville de Jonquière, a agi correctement. C'est une des belles salles, ça sera certainement une des plus belles salles de la ville de Jonquière pour recevoir des visiteurs, mais qu'elle pourra mettre aussi à la disposition des résidents de la ville de Jonquière. Donc, on doit se réjouir que ce complexe puisse se rajeunir, se rénover, sans grever trop fortement le budget de la municipalité.

C'est à peu près, en gros, ce qui se passe. Et pourquoi on a été obligés de demander une loi spéciale? C'est qu'en cours d'existence de ce centre de congrès, dans les années 1984, il y a eu un changement à la loi qui... contrairement à ce qui existait auparavant – c'est-à-dire que la Commission municipale devait accorder son approbation – à partir de 1984, ça devait être le ministre des Affaires municipales qui devait approuver ces engagements de crédits pour plus de trois ans. Donc, comme l'engagement de crédits qu'on demande, ou auquel on fait face actuellement, c'est 10 ans, il a fallu et il faut, à la demande du ministre des Affaires municipales, présenter un projet de loi spécial, qu'on a devant nous, qui va permettre de donner une existence légale, avec les nouvelles lois... ou la loi qu'on a adoptée dans les années 1984. Voilà, en gros, ce que ça pourra faire. Et, en même temps, ça permettra que la ville de Jonquière continue à s'inscrire dans un projet de développement.

Bien sûr, on peut se demander pourquoi les municipalités vont dans les centres de congrès. Il s'agit de regarder sur le terrain ce qui se passe en réalité. La plupart des centres de congrès existants au Québec font partie d'ententes entre les promoteurs et les municipalités. Pourquoi? Parce que ce n'est pas une activité rentable directement. Même les salles de congrès qu'on connaît, où le gouvernement s'est impliqué directement, comme celui de Montréal, c'est beaucoup plus par les activités économiques que ça génère que c'est rentable plutôt que l'investissement direct qu'on y fait. Donc, c'est une infrastructure qui est nécessaire et qui permet, justement, de s'inscrire dans une démarche de développement économique au point de vue des régions.

J'ai insisté déjà, à plusieurs reprises, et j'en profite pour refaire cette demande auprès du ministre des Affaires municipales, pour lui souligner qu'on devrait avoir une politique de centres de congrès au Québec. Et que cette politique inscrirait un centre de congrès, avec entrepreneurs privés et publics – donc, une municipalité, possiblement, et un entrepreneur privé – pour mettre sur pied ou pour bâtir un centre de congrès qui pourrait avoir des subventions gouvernementales, puisqu'on pourrait établir un réseau.

Autrement dit, Montréal pourra obtenir et Québec pourra obtenir leurs congrès à grand gabarit, qui amènent beaucoup de monde. En région, on ne devrait pas être des concurrents de Québec et de Montréal. Mais, comme on sait que le marché des congrès, juste au point de vue national, au point de vue du Québec, il y a peut-être 300 associations qui tiennent des congrès – entre 300 et 500; ça a déjà été plus frais à ma mémoire parce qu'on avait fait des recherches dans ce sens-là... Il y a beaucoup de congrès qui se font, des centaines de congrès qui se font au Québec, qui sont des congrès qui peuvent aller entre 50, 100 personnes, jusqu'à 500, 700 et 800 personnes. Ces centres de congrès là pourraient aller en région. Et ces centres de congrès pourraient permettre à des congressistes de mieux connaître leur territoire. Autrement dit, une année, ils pourraient aller à Rouyn-Noranda, si c'était accepté, dans une politique d'ensemble; une autre année, ils pourraient aller à Rimouski; une autre année, ils pourraient aller à Jonquière. Et on pourrait établir un réseau, ce qui pourrait faire que, sur une période de 10, 12 ans, chaque région pourrait recevoir un nombre de congressistes intéressant. Ça pourrait permettre de mieux connaître son territoire et son pays. Et, ça, ça me semblerait quelque chose d'extrêmement valable.

(15 h 50)

Ça pourrait même permettre à des centres de congrès, au lieu de travailler individuellement, de mettre des efforts, ensemble, pour pouvoir attirer ces congrès-là en région. Et voilà toute une dynamique qu'on pourrait mettre en place. Un centre des congrès, contrairement à ce qu'on a tendance à penser, ce n'est pas seulement un hôtel, ce n'est pas seulement une salle pour recevoir des visiteurs, c'est aussi un endroit qui génère des activités économiques. Ça permet à des garagistes, à des restaurants, à des théâtres, à un milieu culturel... ça permet à des artistes, même, de venir donner des spectacles. C'est une activité pas mal intéressante et qui amène vraiment des retombées économiques importantes, pas nécessairement pour le conseil municipal, parce que ce n'est pas sa première vocation, mais, dans le milieu, un centre des congrès ou un congrès, ça permet non seulement d'amener des gens en région, mais de les disperser en région. Parce qu'il n'y a pas d'hôtel, et, ce qu'on vient d'adopter tout à l'heure pour Rouyn-Noranda, ce sera la même chose pour Jonquière.

Vous savez bien que, quand on reçoit un congrès de 600 personnes, on ne peut pas les loger à l'hôtel. Je vous ai dit que c'était environ 150 chambres. Eh bien, ça se disperse ailleurs. Il y en a qui vont à Chicoutimi, il y en a qui peuvent se disperser autour de la municipalité de Jonquière, et on n'a rien contre ça. Au contraire. On ne peut pas avoir un complexe de 500 et de 600 chambres qui va fonctionner juste lorsqu'il y a des congrès.

Donc, ça permet une meilleure ouverture, et je pense que la suggestion que je fais mériterait d'être étudiée un peu. C'est évident que ça va demander peut-être non seulement un peu de concertation, mais un peu d'obligation et d'engagement. Mais j'ai l'impression que les retombées sont suffisamment importantes, surtout pour le gouvernement du Québec, qui, lui, va retirer des bénéfices avec la TPS ou la TVQ, ce qui va lui permettre d'avoir des retombées directement dans ses activités économiques. Voilà pourquoi je suis heureux d'avoir présenté ce projet de loi.

J'ai eu l'honneur, comme maire de la ville de Jonquière, de penser ou de mettre sur pied ce centre de congrès, qui, je pense, a été un succès, qui permet au conseil municipal actuel d'aller dans la même lancée ou dans la même vision. Je pense que ça devient extrêmement intéressant. Ça fait déjà quelque temps que je suggérais... pas parce qu'il y avait besoin de suggestion, mais je trouvais qu'on devait rénover et faire des changements.

Vous savez, dans l'entreprise privée, un gage de succès, c'est lorsqu'on investit, lorsqu'on rénove, lorsqu'on met les affaires en place. D'abord, ça permet d'amener des gens à y croire et ça donne un peu aussi la vision que ces équipements-là sont des équipements vivants, qui servent.

Donc, le conseil municipal a pris cette initiative. J'en suis heureux. L'hôtel va changer de bannière en même temps. Donc, l'hôtel va avoir une réparation, ou des immobilisations, ou de la rénovation, pour 1 200 000 $; le centre de congrès, au moins 800 000 $. Donc, je pense que ces 2 000 000 $ supplémentaires, ça va créer de l'emploi et ça va amener un afflux économique important, intéressant. Ça va remettre le centre de congrès sur le réseau et ça va permettre aussi à la ville de retourner des bénéfices au gouvernement.

Et je pense que ça s'inscrit correctement dans la politique de création d'emplois puis, en même temps, de développement des régions. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jonquière. Je vais céder la parole maintenant à Mme la députée de Jean-Talon.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Alors, merci, M. le Président. Dans le cas du projet de loi 236, nous avons eu l'occasion de rencontrer, en commission parlementaire, M. le maire Martel ainsi que son directeur général. Je tiens ici à les remercier du temps qu'ils ont pris pour venir nous expliquer les objectifs qui étaient recherchés par ce projet de loi. Ils nous ont également expliqué les différentes étapes qui nous ont amenés à voter sur un tel projet de loi.

Ce n'est pas tellement compliqué. Je pense qu'il faut se rappeler que, lorsque ce centre de congrès avait été mis sur pied, c'était la Commission municipale, à l'époque, qui autorisait, qui donnait finalement l'autorisation au conseil municipal d'aller de l'avant avec un tel projet.

Comme l'a mentionné le député de Jonquière, il y a eu amendement en cours de route, et la ville de Jonquière se retrouve donc devant nous, nous demandant de rendre conforme, si on veut, cette décision pour lui permettre de rénover, de restaurer et d'aller de l'avant avec cet outil de développement économique qui est si important, comme on le mentionnait tout à l'heure dans le cas du centre de congrès de Rouyn-Noranda.

Je pense que tout le monde s'entend pour dire que, si les municipalités ont comme mission première de donner d'abord des services directs à la population, je pense que tout le monde s'entend également pour dire que, aujourd'hui, si les municipalités ne se mêlent pas de développement économique, si elles ne concluent pas d'ententes avec leurs partenaires économiques, ça n'en dit pas long pour le développement économique des régions.

Alors, je ne m'attarderai pas tellement longtemps sur ce projet, puisque, en fait, il ne s'agit pas ici d'autoriser la construction, puisque le projet a déjà été construit en 1981. Je me permettrais, si je peux me permettre, de féliciter le maire, à l'époque, de sa vision en ce qui regarde le développement économique. Vous me permettrez, M. le Président, de ne pas le féliciter, ni lui ni son gouvernement, puisque, depuis tout à l'heure, j'entends parler de développement économique, de développement régional, d'outils de développement et que, aujourd'hui, ce propre gouvernement a déposé ses crédits et a eu le front de couper 40 000 000 $, M. le Président, dans le développement régional. Alors, je veux par contre dire à la ville de Jonquière que mon parti et moi, en tant que critique officiel de l'opposition en matière d'affaires municipales, nous avons le plaisir d'être d'accord et de voter en faveur de ce projet de loi.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. S'il n'y a plus d'autres interventions, je vais mettre aux voix le projet de loi. Le projet de loi 236, Loi concernant la Ville de Jonquière, est-il adopté?

M. Gendron: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: Je fais motion pour que... Non, le projet de loi est adopté...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, adopté.

M. Gendron: ...c'est fini, merci beaucoup.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gendron: Je voudrais, à ce moment-ci, M. le Président, appeler l'article 3 du feuilleton.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce ne sera pas très long, on va essayer de retrouver où est l'article 3. Non, c'est parce qu'on ne suit pas l'ordre qu'on m'avait indiqué. Ha, ha, ha!

Des voix: Ha, ha, ha!


Projet de loi 66


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, j'ai retrouvé l'ordre. Donc, l'article 3: à l'article 3, M. le ministre des Ressources naturelles propose l'adoption du principe du projet de loi 66, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les terres du domaine public. M. le ministre, vous avez l'intention d'intervenir?

M. Gendron: Ah oui!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. Alors, vous disposez d'un temps de parole de 60 minutes. Je vous cède la parole.


M. François Gendron

M. Gendron: Merci, M. le Président. Oui, j'ai vraiment l'intention d'intervenir. Il s'agit de l'adoption du principe d'un projet de loi, et ce qu'il signifie, essentiellement, ce projet de loi là, c'est de vouloir modifier la Loi sur le ministère des Ressources naturelles, également modifier la Loi sur les terres du domaine public, la Loi sur les forêts et les lois municipales. Il vise essentiellement à améliorer la gestion des terres du domaine public en répondant d'une façon plus adéquate au contexte économique actuel et aux besoins exprimés par les régions.

En tant que principal gestionnaire du domaine public au Québec, le ministère des Ressources naturelles doit, entre autres, disposer de moyens pour rapprocher le plus possible le processus décisionnel des milieux locaux et régionaux. Or, l'encadrement actuel n'est pas approprié pour un transfert de responsabilités de grande envergure en faveur des municipalités locales et régionales, en particulier en ce qui concerne la gestion des terres publiques. Les pouvoirs de gestion du ministre des Ressources naturelles sur les terres publiques lui sont attribués par la Loi du ministère et sont définis dans la Loi sur les terres du domaine public.

(16 heures)

Cette loi, adoptée en 1987, a remplacé la Loi sur les terres et les forêts dans son volet Administration des terres. Elle met l'accent sur la connaissance et l'aménagement des terres publiques ainsi que sur l'accessibilité au domaine public – et c'est un aspect intéressant pour ceux qui savent lire les crédits, on va avoir l'occasion d'en discuter un peu plus longuement lors de l'étude des crédits – mais j'ai l'impression qu'une des responsabilités d'un ministère responsable c'est de s'assurer que, si on veut agir le plus correctement possible sur le développement des ressources du Québec, il faut disposer du meilleur outil de connaissance possible. On intervient bien en forêt privée quand on a un bon niveau de connaissance des parterres, des inventaires, de la réalité objective qu'il y a en forêt privée.

On fait exactement la même chose dans le domaine minéral. Si on veut avoir des interventions significatives dans le développement des ressources minérales du Québec, il faut connaître les potentiels, il faut avoir de bons instruments, de bons outils de connaissance. Et, encore hier soir, on avait l'occasion de rencontrer les dirigeants de la mine Noranda... pas la mine Noranda, de la Noranda, parce que la Noranda, c'est pas mal plus large que le secteur mines. Et c'est avec beaucoup de fierté qu'on constatait comment ces gens-là sont présents à peu près partout, dans l'ensemble des activités liées au développement des ressources du Québec, de la haute technologie, ainsi de suite. Mais, dans la discussion, ils nous disaient: Pour nous, l'entreprise, il est fondamental d'avoir accès aux territoires et d'avoir les bonnes données, d'avoir le maximum de connaissances sur les ressources du Québec si on veut les développer.

Et, pour situer, peut-être en dehors des affaires officielles du projet de loi, essentiellement, ce projet de loi là, ce n'est pas compliqué, c'est pour donner suite à un meilleur usage de ce qu'on appelle les lots intramunicipaux, et ça donne suite surtout à une entente spécifique. Dans le cadre de l'entente de développement général de l'Abitibi-Témiscamingue, il y a une entente spécifique qui porte sur une meilleure gestion des lots intramunicipaux. Pour être capable de donner suite à des dispositions de l'entente spécifique, il faut modifier la loi du ministère. C'est ce que je suis en train d'expliquer.

Mais pourquoi il faut le faire? C'est pour être capable d'agir par rapport aux éléments compris dans l'entente spécifique, qui dit: Le ministère des Ressources disposait d'un certain nombre de lots inutilisés, puis le ministère de l'Agriculture en avait un certain nombre. Puis, dans notre coin, c'est important, parce que c'est au-delà de 9 000 lots qui étaient sous-utilisés, parce que le propriétaire foncier était, dans un cas, le ministère de l'Énergie et des Ressources, puis, dans l'autre cas, le MAPAQ. Puis, comme on a eu affaire un certain temps à des gouvernements qui avaient souvent de belles intentions mais pas beaucoup de génie pratique pour donner suite à leurs belles intentions, bien, ces gens-là, entre autres, je me rappelle, en 1976, chez nous, ils ont acheté un paquet de lots. On leur a dit: Qu'est-ce que vous voulez faire avec ça? On verra! Un de ces jours, on va créer une banque de lots puis on va pouvoir recréer ce qu'on appelle une dynamique qui permettra de mettre en valeur ces lots-là.

Ça va faire bientôt 19 ans que je suis en politique active, puis on est obligé, comme équipe régionale, de prendre l'engagement: Ça va faire, les folies! puis on va les mettre en valeur. Mais on va prendre les moyens pour les mettre en valeur. Et pour les mettre en valeur, il faut les retourner au milieu, il n'y a pas d'autre façon. Il faut les donner au milieu puis il faut dire: Écoutez, montrez-moi que vous avez des usages qui vont générer plus d'activité économique pour redynamiser vos collectivités. Parce que la réalité du Québec cassé en deux – en passant, que nos amis d'en face ont contribué à casser en deux – il y a le Québec des grands centres puis il y a le Québec des régions. Puis, dans le Québec des régions, on assiste à un phénomène qui s'aggrave de plus en plus qui s'appelle le phénomène de déperdition. Ça veut dire, en français: les paroisses se vident, en gros. Et, si on ne pose pas de gestes pour redynamiser la ruralité du Québec et les communautés de base, je ne suis pas sûr qu'on va contribuer à avoir un Québec fort, puis un Québec prospère, puis un Québec dynamique, puis un Québec fier.

Pour être capable de viser ça, chez nous, entre autres... Et, entre-temps, il y a d'autres régions qui trouvent que c'est intéressant, en particulier la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, qui, d'après moi, est la plus prête à hériter d'un modèle qui n'est pas nécessairement en tout point conforme au nôtre, parce qu'on ne veut pas que notre modèle soit celui des autres. On dit tout simplement: En autant que les modèles ont tous le même objectif: mettre en valeur le plus possible ce qui dort, pour générer plus d'activité économique, générer de la richesse, générer une fierté d'appartenance puis sortir de la dépendance chronique dans laquelle beaucoup de communautés ont été placées dû à des politiques de fou dans certains cas, dû à des circonstances dans d'autres cas, mais dû toujours à une espèce de pratique que l'État avait toutes les solutions pour tout le monde. Et, là, on sort de ça et on essaie d'avoir des législations qui vont permettre d'articuler jusque... à notre aide, dans le fond, pour au moins l'équipe régionale, qui était: On va vous le remettre entre les mains parce que ça fait des années que vous nous dites: Donnez-les-nous, les sols, les terres, et on va vous prouver qu'on est capables, nous, de les mettre en valeur et de générer de l'activité économique qui va contribuer au mieux-être de nos communautés d'abord – c'est légitime – et au mieux-être de toute la communauté québécoise.

Alors, si je retourne dans le jargon du projet de loi, ça ne ressemblera pas à ce que je viens de dire, en termes de compréhension, mais c'est ça, l'objectif de modifier la loi, et je suis obligé de le traiter avec les dispositions qui nous obligent... Pourquoi doit-on apporter une série de modifications? C'est pour arriver aux fins que je viens de définir. Mais, après qu'on l'aura fait, on aura une assise. Nous aurons une assise, M. le Président, qui permettra à toutes les régions du Québec, si elles le désirent, si elles sont prêtes, si le milieu est d'accord de procéder comme ça, de s'offrir pour être le gestionnaire d'une meilleure mise en valeur des ressources au Québec à partir de la première ressource, qui est de disposer de la terre, pas de la terre au sens agraire du terme, mais de la terre en termes de l'espace économique à développer.

Quant à la Loi sur les forêts, celle-ci donne le cadre légal du régime forestier applicable sur les terres publiques et établit certaines règles quant au soutien à la forêt privée.

Les principales modifications que je propose dans le projet de loi pour lequel je sollicite l'adoption du principe, en regard des terres publiques, visent à permettre, dans un cadre spécifique, l'application de modes de gestion différents de celui prévu à la Loi sur les terres du domaine public, c'est-à-dire l'utilisation des terres publiques pour une mise en oeuvre de politiques gouvernementales liées à du vrai développement local et régional.

Cette modification est requise pour mieux répondre aux nouvelles exigences de la société québécoise axées sur la nécessité de développer chaque région du Québec par une plus grande implication des communautés locales et des agents économiques locaux dans la mise en valeur des ressources du domaine public et également sur l'importance d'instaurer à cette fin de nouvelles formules de partenariat avec les pouvoirs locaux et régionaux. Ce n'est pas vrai que, de tout temps, on va continuer à dire: Le domaine public, il y a un utilisateur unique, c'est l'État québécois, et, si ce n'est pas l'État québécois qui est l'utilisateur unique du patrimoine collectif du terroir québécois, bien, il faut attendre, ce n'est pas bon parce que les locaux ou les régionaux ne sont pas en mesure de générer assez d'activité économique pour mettre à profit cette plus-value qu'on requiert quand on intervient dans le patrimoine québécois. Moi, je pense que le monde municipal, qui est un de nos principaux interlocuteurs dans cette nouvelle approche de gestion, il est très prêt et bien initié à ce type de partenariat et il veut vivre d'autres expériences de partenariat.

En effet, l'alliance entre les milieux locaux et régionaux organisée vers la fin des années soixante-dix, notamment par la création, selon la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, des municipalités régionales de comté, s'est renforcée récemment par l'avènement des conseils régionaux de concertation et de développement. Par ailleurs, l'application de cette loi, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, a fait en sorte que les élus municipaux ont pris conscience, par le biais des échanges dans le cadre de la confection des plans d'affectation et des schémas d'aménagement, des possibilités de développement liées aux ressources du domaine public et de l'intérêt pour eux d'exercer certains pouvoirs de décision sur l'orientation de leur développement et sur les modes de gestion qui leur sont applicables.

J'avais l'habitude de dire, d'ailleurs, en région, quand j'ai vendu la loi 125: Pourquoi fait-on un schéma d'aménagement? Il y a une seule logique à faire un schéma d'aménagement, c'est pour mieux recevoir le développement qui devrait suivre. Parce qu'on n'a pas d'affaire à faire de schéma d'aménagement si on ne s'attend pas qu'il se fasse du développement par la suite. Pour que le développement soit plus harmonieux, pour que le développement soit plus respectueux d'un certain nombre de prises en compte d'éléments interreliés, bien, on fait un schéma d'aménagement pour que les choses arrivent non pas – on dit, dans le langage populaire – cul par-dessus tête ou pêle-mêle, mais pour que les choses arrivent avec un bon sens...

Une voix: ...

M. Gendron: Ah, lorsque l'opposition est presque absente, on n'a pas de problème, et tout est parlementaire. J'ai dit «presque». J'ai dit «presque». Il n'y a pas de problème. Alors, de toute façon, je suis convaincu que mes propos étaient complètement parlementaires et surtout très compréhensibles, mon cher collègue.

(16 h 10)

Alors, ce que j'indiquais, c'est que, un schéma d'aménagement, on a fait ça pour mieux recevoir le développement, et les modifications qu'on propose, c'est effectivement pour nous permettre d'en recevoir, du développement, mais qui est plus structuré par rapport à un développement plus harmonieux, plus polyvalent, plus multiressources.

C'est ainsi que, depuis quelques années, le ministère reçoit des demandes des régions, des MRC et des municipalités qui visent à contrôler le développement et la mise en valeur des terres publiques, particulièrement celles situées dans leurs limites respectives, communément appelées les terres publiques intramunicipales. Elles veulent bénéficier plus directement des retombées des activités de mise en valeur des ressources que supportent ces territoires. Les pouvoirs publics régionaux cherchent ainsi à favoriser une nouvelle dynamique de développement régional par une concertation plus grande des intervenants régionaux, qui ont une meilleure connaissance du territoire, ainsi qu'un rapprochement des pouvoirs de décision des communautés et des différents utilisateurs.

Les MRC et les municipalités demandent de participer aux décisions concernant leurs territoires. Le précédent gouvernement a poursuivi au cours des dernières années, avec beaucoup d'hésitation mais tout de même, le travail que nous avions amorcé afin de donner aux régions plus de contrôle sur leur développement, leur permettant ainsi de faire preuve de créativité. Nous voulons dorénavant aller plus loin en ce sens et appuyer notre action sur un véritable partage, avec les milieux locaux et régionaux, des responsabilités de gestion et une mise en valeur des terres publiques et des ressources qu'elles supportent.

Cependant, ce partage devra se faire dans le respect des grandes orientations gouvernementales, notamment le développement durable, parce que léguer du patrimoine à des communautés locales ou régionales, il n'y a pas de difficulté dans notre esprit à convenir que nous en sommes là, M. le Président. Mais le léguer sans aucune condition, sans aucun préalable, sans aucun principe par rapport à un certain nombre de réalités modernes comme la biodiversité, le développement durable, générer des activités qui sont palpables et qui peuvent créer moins de dépendance sociale, et autre... Ça, c'est des principes auxquels ont doit tenir quand on libère du patrimoine à des intervenants du milieu. Parce que, ce dont on discute, c'est du patrimoine collectif des Québécois et des Québécoises qui s'est accumulé au fil des générations. Les terres publiques, ce n'est pas au Parti libéral, ce n'est pas au Parti québécois, puis ce n'est pas à l'ADQ, ou au PADQ, c'est à tout le monde. Les terres publiques, c'est une propriété des Québécois et des Québécoises. C'est le patrimoine collectif. Et, si on libère un certain nombre d'espaces pour que ces espaces soient mieux aménagés, qu'ils génèrent plus d'activité, il faut le faire avec un minimum d'encadrement, ce qui nous donne des garanties que le patrimoine qu'on lègue servira à du développement économique durable.

Les décisions de gestion qui en découleront devront également respecter les exigences du système économique qui est le nôtre. Donc, ce n'est pas une mince affaire. C'est tout un défi. Mais les régions, que je connais assez bien, souhaitent relever ce défi-là. Les régions souhaitent qu'on leur fasse confiance. Elles souhaitent qu'on leur donne des responsabilités et qu'on leur donne des outils supports pour développer les nouveaux créneaux qui sont intéressants à être envisagés par le biais de l'occupation plus utile des terres publiques.

Il appartient donc au gouvernement d'accompagner les locaux et les régionaux dans cette démarche. De tout temps, le territoire public au Québec a constitué une assise importante de développement. C'est un des premiers principes, d'ailleurs, que j'ai toujours défendu quand je m'occupais de développement régional, je disais toujours: Pour faire du développement, un des premiers principes, ça doit passer par l'occupation du territoire. Tu sais, si tu veux développer le territoire, il faut que tu commences par regarder les possibilités de l'occuper, puis te faire un plan de développement suite à l'occupation du territoire.

Comme ministre de la gestion de ce territoire et des Ressources naturelles, je dois m'assurer que nous disposons de tous les outils nécessaires à l'accompagnement des acteurs régionaux et locaux dans la mise en oeuvre de leurs orientations d'aménagement et de développement régional, et plus particulièrement pour permettre un nouveau partage des responsabilités concernant la gestion et la mise en valeur des ressources tant sur les terres publiques intramunicipales que dans les territoires non organisés. Les gens qui sont familiers avec ça, là, ce qu'on entend par «territoires non organisés», c'est qu'il reste encore, malheureusement, un certain nombre de territoires physiques au Québec où il n'y a pas de structures de municipalisation, et le terme qu'on applique habituellement, on appelle ça des TNO, territoires non organisés. C'est ce que ça signifie, un TNO. Ce n'est pas péjoratif pour ces territoires-là, ça veut juste dire que, compte tenu que, souvent, il n'y a plus de populations qui habitent ces territoires-là parce que, entre-temps, c'est des petits villages qui ont été déstructurés par toutes sortes de situations, il y a là des espaces qui ne sont pas du domaine public, du grand domaine public, de la forêt publique ou des terres publiques, au sens de l'aménagement des CAAF entre autres, et ces TNO, règle générale, sont à proximité de milieux habités. Moi, j'en connais plusieurs. Dans ma propre circonscription, je pense que j'ai cinq parties de territoire qu'on appelle des territoires non organisés.

Mais, sur ces TNO-là, il y a de la richesse, il y a des potentiels, il y a de l'agrotourisme, il y a de l'agroforestier à développer, il y a de la ressource faunique, il y a toutes sortes de ressources qu'il faut mettre en valeur. Ce n'est pas parce qu'il n'y a plus d'habitants ou de citoyens qui habitent ces territoires-là qu'on regarde passer la parade, comme on a assisté pendant 15, 20 ans, en disant: Bien, peut-être qu'un jour le gouvernement va prendre ses responsabilités puis il va faire du développement. On s'est rendu compte que ça n'a pas marché de même. En conséquence, il faut libérer ces territoires-là pour s'assurer qu'il s'en fasse, du développement.

Je voudrais vous parler maintenant un peu plus spécifiquement de la problématique très concrète des lots intramunicipaux, qu'on appelle les terres publiques intramunicipales. Les terres publiques intramunicipales, ce n'est pas des minces affaires qu'on discute là, c'est 73 000 km². Alors, c'est un carré de sable qui commence à être intéressant. Elles sont composées d'une partie morcelée comprenant les lots épars et les blocs de lots – des blocs de lots, il y en a pour 13 000 km² dans le domaine privé – et une autre partie constituée de grands tenants – les grands tenants, c'est de ça que je parlais tantôt, les immenses espaces qu'on a fractionnés en CAAF – 60 000 km², contigus aux territoires non organisés.

L'aménagement forestier et la récolte de bois se pratiquent, sur la majorité de ces grands tenants, conformément au contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier – je vous l'ai dit tantôt, la mauvaise expression pour les non-initiés. Quand on parle de CAAF, c'est les initiés. Pour ceux qui le sont moins, ça veut dire ce que je viens de dire. Un CAAF, quand je parlerai de ça dans la suite de mon exposé, ça voudra toujours dire un contrat d'approvisionnement et d'aménagement forestier.

Il y a également les zones d'exploitation contrôlée de la faune, qu'on appelle les zecs, qui sont aussi présentes de façon importante et se retrouvent en bonne partie sur les grands tenants. Elles se superposent généralement aux territoires sous CAAF. La problématique de la gestion du domaine public diffère passablement selon qu'il s'agit des territoires situés à l'intérieur ou à proximité des limites municipales ou qu'il s'agit du territoire de la grande forêt publique. La grande forêt publique est déjà vouée, en majeure partie, à l'exploitation des ressources de la forêt – forêt et faune – suivant des formules – je les répète rapidement – «caafisiques», qui, sans être parfaites, parce qu'il y a des lacunes avec ces formules-là, permettent quand même de maintenir – et écoutez l'expression, M. le Président, c'est ça qui est important – un niveau d'activité économique qui génère des profits pour l'État québécois et génère des profits pour l'ensemble des localités du Québec. Ça, c'est sur les grands tenants.

Mais les principales préoccupations exprimées par les communautés de base, les communautés locales, des villes et villages, quant à la gestion de ces territoires ont trait à la régénération et à la pérennité des ressources, à la stabilité des emplois liés à leur exploitation ainsi qu'à l'amélioration du processus d'information et de consultation des populations en vue de permettre un usage plus polyvalent de ces territoires et, bien sûr, un meilleur respect des besoins de tous les utilisateurs.

(16 h 20)

Par contre, sur les terres publiques à l'intérieur et à proximité des limites municipales, milieux d'appartenance, les communautés régionales remettent en cause le rôle assumé jusqu'alors par l'État dans la mise en valeur de ces terres et de leurs ressources. Les régions revendiquent un nouveau partage des rôles et des responsabilités entre elles, le milieu et l'État. Afin de permettre que cette mise en valeur des terres et de leurs ressources se fasse d'une façon plus optimale et plus diversifiée, que leur intérêt en matière de développement socioéconomique soit considéré, généralement, les régions urbaines et périurbaines, où la forêt est davantage utilisée à des fins récréatives qu'économiques... Et c'est normal, il n'y a pas de jugement de valeur là-dedans. C'est évident que, allez dans l'Ouest, il y a une bonne partie du patrimoine forestier qui est utilisée comme parcs, réserves ou forêts récréatives. On n'a rien contre cet objectif-là autour de grandes concentrations urbaines, mais là où il n'y a pas de concentrations urbaines, il est très difficile de maximiser le potentiel forestier uniquement pour des usages récréologiques ou récréatifs. Il faut maximiser le potentiel forestier pour des usages à caractère économique.

Dans les régions où la forêt est identifiée comme un actif qui leur permettrait de prendre en main leur développement, elles souhaitent, ces régions-là, gérer ces territoires et leurs ressources de façon à engendrer un minimum d'activité économique additionnelle, mais où le profit serait mesurable directement pour les populations concernées. Et c'est là que j'employais l'expression, tantôt, «sortir de la dépendance». Si on génère des activités économiques pour Dupuy, La Sarre... C'est des petites communautés de base que je parle, chez moi, Clairval... Parce que, en passant, j'en ai 50 municipalités dans mon comté. Il y a une circonscription au Québec qui a 50 municipalités, c'est la mienne. Alors, ce sont des petites localités rurales qui ont mis beaucoup d'espoir, qui ont mis beaucoup de travail et d'efforts pour s'accaparer d'un certain nombre de lots publics non utilisés. Et si ça génère un peu d'activité économique, ça va «redensifier» un tant soit peu ces villages, ça va donner une image d'espoir et de vitalité à de nombreux jeunes qui quittent rapidement parce qu'ils ne voient pas de solutions, parce que ce qu'ils ont vu depuis 15, 20 ans, c'est un non-usage; c'est de la brousse ou c'est de la repousse en aunage.

Or, je connais des usages pour le pin, l'épinette, le sapin, le tremble, le bouleau, les bois francs – les bois francs, que ce soient le chêne, l'hêtre, ainsi de suite – mais je ne connais pas beaucoup d'usages économiques pour des aunes, actuellement. Peut-être que la technologie en l'an 2030 nous permettra d'utiliser ça, mais, actuellement, quand des terres reprennent en friche avec toutes sortes d'essences qu'on ne veut pas, pour lesquelles il n'y a pas d'usages, ce n'est pas bien, bien un signe encourageant de développement qui est stimulant pour des jeunes qui ont vu ça défriché par leurs ex-grands-parents il y a 50, 60 ans, puis que tout ce qu'on a trouvé à générer, c'est que ça repousse en branches, qu'on appelle, ou en arbustes.

Il n'y a pas d'usages économiques, puis les jeunes nous demandent: C'est qui, qui est propriétaire de ça? C'est à qui, ces lots-là? Au gouvernement. Qu'est-ce qu'il fait avec? Ah! ça fait 20 ans qu'il les a puis... je ne sais pas. Bien, c'est assez. Alors, c'est ça, là. C'est ça qui est sur la table, puis c'est un projet de loi pour dire que c'est assez puis que ça ne devrait plus se passer comme ça.

Au fil des ans, le gouvernement, pour répondre aux besoins variés des individus ou des entreprises, a consenti de nombreux droits sur les terres publiques intramunicipales. Dans leurs revendications récentes, les milieux régionaux et locaux demandent de réévaluer la pertinence du maintien de ces droits, particulièrement ceux accordés aux industriels forestiers. Aussi, chaque cas doit être évalué au mérite, en faisant ressortir les avantages, les inconvénients de maintenir ou de reconduire des droits consentis ou encore de les remplacer par des projets alternatifs de développement faisant l'objet de consensus entre les intervenants locaux et régionaux, y compris les actuels détenteurs de droits.

Autrement dit, ce n'est pas parce que, il y a 20, 25 ans, on a défini que les utilisateurs de droits sur forêts publiques, ça serait à vie, pour la vie éternelle... Deux types de fonctions, essentiellement: les zecs, pour le patrimoine faunique, puis les CAAF, pour le patrimoine forestier, puis ça, à vie, c'est le modèle du Québec. Ce n'est pas parce qu'on a dit ça qu'il n'y a pas lieu de requestionner ça.

Ça ne veut pas dire que je suis en train de chambouler tout le fonctionnement qui nous a conduits quand même, au Québec, à certains égards, à du développement économique pour lequel on doit être fier. Moi, l'industrie forestière du Québec, j'en suis fier; l'évolution de l'industrie forestière au Québec, j'en suis fier. Dans la technologie qu'on a développée là-dedans et la préoccupation de la pérennité du développement durable, je n'ai pas honte des niveaux qu'on a atteints. Mais, pour les entités dont je parle, je suis un peu gêné de voir que, pendant 15, 20 ans, il y a eu à peu près, pour l'ensemble du Québec, peut-être 20 000, 22 000 lots sans aucun usage pendant 20, 25 ans. Ça n'a pas d'allure! Il n'y a pas d'État responsable qui peut endurer ça encore pour 15, 20 ans. Alors, on veut mettre fin à ça.

Depuis 1980, regardons ce qui s'est passé. Les politiques, les programmes sectoriels établis depuis le début des années quatre-vingt et jusqu'à maintenant par les ministères des Ressources naturelles et de l'Agriculture et des Pêcheries avaient pour objectifs principaux de consolider les terres morcelées, de rationaliser leur gestion foncière, de favoriser leur mise en valeur, de les rendre plus accessibles aux populations et de rechercher un mode d'exploitation forestière ou agricole qui était mieux adapté à la réalité des parties de ces territoires-là.

Si les actions gouvernementales ont permis d'alléger la gestion foncière de la partie morcelée du domaine public, elles n'ont pas eu les effets moteurs escomptés sur la mise en valeur des terres et de leurs ressources. Il suffit de se promener, depuis plus de 20 ans, dans la région de l'Abitibi pour déchanter devant ces milliers de lots publics laissés en friche. Et je disais tantôt, c'est ça, l'image que les jeunes nous renvoient, en disant: Qu'est-ce qui se passe? Qu'est-ce que vous faites? Et l'équipe régionale, avec d'autres, parce qu'on ne fait jamais ces choses-là tout seuls, avec beaucoup d'élus municipaux qui avaient cette conscience depuis trois, quatre ans, ils ont dit: Ça va faire; on se retrousse les manches puis on met une proposition sur la table. Ça s'est appelé la proposition de la mise en valeur des lots intramunicipaux, avec une formule d'encadrement puis un cadre spécifique, puis ça a été signé. Et la nouvelle équipe, rapidement, lorsque nous sommes arrivés au pouvoir, j'ai repris le dossier, puis, là, ça adonnait que, compte tenu que le premier ministre m'avait confié cette responsabilité, c'est évident que j'ai tenté de donner suite rapidement à six modifications majeures à l'entente qui avait été paraphée avec l'administration précédente.

Pourquoi six modifications majeures? Pour m'assurer que je place le tout dans un cadre de réussite potentielle. Moi, des cadeaux de Grec, je n'aime pas bien, bien ça. Mais, je pense que c'était un peu ce qu'on avait reçu, en disant: On va vous donner les lots épars. Il n'y aura pas de multiressources là-dedans. Puis, rapidement, on va transférer ça aux localités. Alors, moi, on m'a dit: Est-ce qu'il y a certaines localités qui sont capables de les prendre? Encore hier, il y avait un message, quelqu'un qui disait: La décentralisation, c'est bon à mort, à condition que celle qui reçoit le décentralisé soit prête, le veuille et soit apte à le gérer. Si la réponse est non pour ces trois questions-là, elle n'est pas prête, elle n'en voulait pas puis elle n'est pas apte à le gérer, c'est ce que j'appelle un cadeau de Grec. C'est un peu ce qu'on avait reçu.

Alors, on a essayé de corriger pour placer dans des conditions plus objectives de réussite et de succès la transmission éventuelle des lots à des personnes morales ou aux municipalités. Puis c'est pour ça que la loi ne le permet pas. Actuellement, la loi ne permet pas. Le ministre ne peut pas dire: Dorénavant, les cinq lots suivants appartiennent à la municipalité de Dupuy, ou de Laferté, ou de La Morandière, ou de Despinassy. Alors, on veut faire ça.

Et cette problématique, elle existe au Saguenay, en Abitibi, sur la Côte-Nord, un peu moins dans la région des Bois-Francs, mais c'est une réalité qui existe. Donc, les programmes qu'on veut mettre en place par les modifications aux législations, c'est pour accroître la contribution des terres publiques et intramunicipales et de leurs ressources au développement régional en favorisant le développement d'une vision d'ensemble partagée et la mise en place de formules de gestion simples, souples, intégrées, adaptées aux différents contextes.

L'entente spécifique avec l'Abitibi, c'est une entente qui a été conclue pour faciliter le transfert des lots publics intramunicipaux aux municipalités. Et, le Conseil régional de développement de l'Abitibi-Témiscamingue, ça me permet d'en parler, je suis très fier du rôle d'unification, de concertation et de sensibilisation aux objectifs qu'on voulait poursuivre qu'il a joué. Le CRDAT, de tous temps, a été un allié de taille pour cette cause, a été un précieux allié. Il a posé les gestes de sensibilisation qui devaient être posés. Il a informé la population. Et je fais juste rappeler ce que je disais tantôt, l'entente spécifique en juin 1994 – 1994, c'est nos amis libéraux – prévoit la cession aux municipalités de l'Abitibi-Témiscamingue de la propriété de 2 600 lots publics épars; 2 600 lots publics épars.

(16 h 30)

Un lot épars, pour ceux qui ne sont pas familiers, ça veut dire morcelé, ça veut dire perdu. Un lot épars, par définition, il est quelque part, il est perdu, il est enclavé. Non, non, mais, je veux dire, il n'est pas perdu, il n'a pas nécessairement le même potentiel que des blocs de lots. Parce que, des industriels ou des groupes qui veulent intervenir d'une façon significative avec un projet de développement, il est possible que ça requière cinq, six unités de lots. La notion de lot, là, pour les citadins, ce n'est pas la même chose que pour les ruraux. Un lot, c'est une terre, pour un rural; pour un citadin, un lot, bien souvent, si je me suis acheté un lot, c'est pas mal plus petit que chez nous. Chez nous, une terre ou un lot, c'est 100 acres; un mille de profondeur, cinq arpents de façade. C'est ça qui est une terre, traditionnellement, comme les terres ont été faites au Québec.

Alors, je reviens à l'entente en Abitibi-Témiscamingue: c'était 2 600 lots épars. Elle prévoyait également leur transférer la responsabilité de la mise en valeur des ressources forestières pour environ 7 000 lots publics intramunicipaux regroupés en blocs de lots. Afin de rassurer tous les intervenants régionaux, il a été jugé utile d'en définir un peu plus certaines modalités d'application. C'est ainsi qu'en décembre 1994 – et c'est là qu'est arrivée notre décision – notre gouvernement a procédé à la signature d'un addenda qui venait enrichir l'entente spécifique afin de donner aux instances régionales et locales les moyens concrets pour, rapidement, prendre en main leur développement. Parmi les éléments qui ont enrichi l'entente, j'en résume quelques-uns: premièrement, mise en disponibilité d'une enveloppe de 1 000 000 $. Ah bon! Parce que nos amis avaient oublié de mettre des moyens. Ils ont dit: On vous les transfère, mais arrangez-vous avec ça! Là, les localités ont dit: Les inventaires ne sont pas faits; on n'a pas une bonne connaissance, exactement, de ce qui se passe sur ces territoires-là. Le gouvernement a répondu: Ce n'est pas notre problème! Arrangez-vous! Vous ferez les études; vous regarderez ça. Alors, c'est ce que j'appelais, tantôt, un peu un cadeau de Grec.

Nous, le premier geste, on a dit: Si on leur donne quelque chose, on va les aider financièrement à bien étudier ce dont ils héritent. Est-ce qu'il y a des lots qui ont un potentiel plus faunique que forestier? Est-ce qu'il y a des lots qui ont un potentiel plus agricole, tout court, que agrotouristique ou agroforestier? On appelle ça une bonne connaissance de ce dont tu hérites.

Deuxièmement, on a créé dans chaque MRC – et, ça, j'y tiens; j'y tiens pour la population du Québec, j'y tiens pour l'avenir – un comité multiressources – multiressources – qui devra transmettre un avis au conseil de la MRC sur chaque projet de mise en valeur qui sera présenté par les personnes morales de la municipalité Y, Z, W, ou ainsi de suite.

Et, là, je voudrais m'expliquer un peu en dehors de cette paperasse-là, encore. Ça signifie très clairement que, moi, je souhaitais... et d'autres... Supposons qu'un parlementaire, ici, a un bon projet pour la mise en valeur de cinq lots à La Reine. Moi, je voulais que, son projet, il soit passé à travers une espèce de tamis, à travers un fil multiressources, où des intervenants de secteurs différents – un aménagiste, un forestier, un sylvicole, un économiste – diraient: Bien, dans les 11 projets qu'on a reçus pour la mise en valeur de ces quatre lots-là, le meilleur projet qui répond à des objectifs de développement durable, qui répond à des objectifs d'une meilleure mise en valeur, qui va générer le plus d'activité économique, c'est le projet de la députée de Kamouraska-Témiscouata, supposons. Alors, ce projet-là, il faut qu'il passe dans le tamis – comme par hasard. Et, si ce n'est pas ce projet-là qui passe dans le tamis, bien, il faut prendre le meilleur projet qui, lui, va répondre aux critères que j'ai exigés dans le comité multiressources.

J'ai quelques mots sur la demande du Saguenay–Lac-Saint-Jean. La région du Saguenay est aussi en demande quant à l'implantation de nouveaux modèles de gestion. Mais si mon collègue... Comme je sais qu'un de mes collègues va dire quelques mots, tantôt, veut en parler, moi, je lui laisse l'occasion d'en parler. Je sais que j'aurai l'occasion, demain, de visiter la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean, et je sais que ces gens-là vont m'en parler. Il y a d'autres choses à parler, également, mais ils vont sûrement me parler de leur demande, que je connais bien. Leur demande est assez bien préparée. Ils savent exactement ce qu'ils veulent. C'est d'envergure. Ils ont une demande très importante, très significative, d'envergure. Il va falloir la traiter assez rapidement au cours de l'année 1995. Mais je dois l'évaluer, moi, en parallèle avec le cheminement d'autres travaux.

Et, là, ça m'amène aux propos que je veux poursuivre sur la forêt habitée. Parce que, quand je veux mettre le territoire en valeur, je ne veux pas avoir juste une problématique. Et c'est pour ça qu'au Parti québécois on a pris un engagement de travailler fort sur l'élaboration d'une politique de la forêt habitée. C'est quoi, en gros? C'est, au-delà du dossier des lots intramunicipaux, quand je vise une utilisation polyvalente du territoire forestier et à intensifier des efforts d'aménagement intégré d'un rayon économique plus proche des populations qui l'habitent. C'est de même qu'on est arrivé à la définition ou à la logique de définir la forêt habitée.

La forêt habitée, c'est la forêt autour des périmètres où il y a des citoyens. Mon collègue, député de Laviolette, qui avait travaillé là-dessus pendant une couple d'années comme ministre délégué aux Forêts, c'est un projet qu'il avait intitulé: «Pour mieux vivre de sa forêt». Et il avait travaillé fort, avec plusieurs intervenants. Et, nous, on pense que le moment est venu d'aller plus loin dans la définition des paramètres, d'aller plus loin dans un certain nombre de principes qu'il faut resserrer pour s'assurer qu'elle sera applicable, cette politique de la forêt habitée, mais pas nécessairement, encore là, en déplaçant toute l'industrie forestière et en disant: On ne veut plus vous voir. Non, moi, je veux voir encore l'industrie forestière. J'en ai besoin, comme ministre responsable des ressources, et, compte tenu du développement qu'ils en font et des retombées économiques dont le Québec a besoin, je veux garder une industrie forestière dynamique, prospère, et je veux les intégrer à cette réflexion de la forêt habitée, parce que je voudrai faire, un peu plus tard, des expériences-pilotes pour vérifier le modèle de la forêt habitée, pour voir comment ça s'articule et si ça répond à des objectifs de polyvalence, vraiment d'usage qui répond à des objectifs de développement durable, de respect des communautés locales, de garantie que ça génère plus d'activité économique que ça n'en détruit. Ça ne m'intéresse pas de faire moins d'activité économique qu'il y en a actuellement, je veux en faire plus. Je veux la diversifier.

Et les milieux régionaux du Québec forestier, je pense ici davantage aux régions comme l'Abitibi, Saguenay, Côte-Nord, Bas-Saint-Laurent, Gaspésie, Hautes-Laurentides et Mauricie, ils auraient un grand intérêt à s'associer de près à la définition du concept de la forêt habitée. Et celui qui vous parle va prendre les moyens pour s'assurer que l'ensemble des partenaires soient associés aux étapes subséquentes. Parce qu'on est rendu pas mal loin. Je sais pas mal où je m'en vais. L'important, ce n'est pas tellement que je le sache, l'important, c'est que la population soit très associée à la démarche et, à un moment donné, qu'elle convienne, elle aussi, qu'il y va de son intérêt d'aller dans le sens indiqué par une politique de forêt habitée.

Sur les modifications à la loi, il y en aura de nature plus technique, mais, essentiellement, je ne veux pas de solution mur à mur. Je veux des modifications mur à mur pour me permettre de ne plus faire du mur-à-mur, d'avoir assez de souplesse pour être capable d'intervenir dans certains projets du Saguenay qui n'auront peut-être pas le même mode de tenure que ceux de l'Abitibi. Puis, après? Moi, en autant que les mêmes objectifs sont là: développement durable, générer plus d'activité, ça va m'agréer. Et c'est ça qu'on va viser par les modifications au projet de loi, parce que les régions n'ont pas nécessairement la même problématique. Puis c'est bon qu'il en soit ainsi si on veut motiver chacune des régions à s'articuler sur des projets de développement qui répondent davantage à sa problématique.

Actuellement, la Loi sur les terres du domaine public ne permet pas de répondre à des demandes de partage de responsabilités sur les terres publiques intramunicipales. Cette loi pourvoit à la gestion courante des terres à la pièce, par exemple par l'octroi de baux de villégiature en faveur d'individus. Elle ne prévoit pas de mécanismes de partenariat qui permettent d'attribuer des responsabilités à des partenaires et de mettre à leur disposition les moyens nécessaires à leur participation. Le contexte budgétaire difficile, la volonté des parties impliquées de participer aux décisions qui les concernent et le mandat que le gouvernement s'est donné de mettre le Québec au travail, non seulement dans son ensemble mais dans chacune des régions, sont les principaux moteurs des orientations prises actuellement. La politique de développement régional s'inscrit dans ce courant.

(16 h 40)

Outre les dispositions relatives à la gestion plus globale des terres publiques traitée dans la Loi sur le ministère des Ressources naturelles, il est nécessaire, M. le Président, de vous présenter les modifications touchant la gestion courante des terres publiques, qui se retrouveront dans la Loi sur les terres du domaine public. Ces modifications découlent, d'une part, de l'exercice de réingénierie du processus d'octroi et de gestion des droits fonciers, exercice requis dans le contexte budgétaire et entrepris au ministère depuis près d'un an, et, d'autre part, d'une mise à jour de certaines dispositions pour les préciser ou les adapter au Code civil du Québec, ou, dans certains cas, de l'ajout d'une disposition.

Ainsi, donc, les principales modifications que je propose pour cette loi sont les suivantes – et ça sera probablement ma conclusion. Une première disposition permettra la délégation d'activités de gestion foncière, identifiée comme un moyen de gérer le domaine public avec la participation d'intervenants extérieurs. Également, à titre d'exemple, il sera possible de déléguer l'émission des baux sur une partie des terres publiques, ou de certaines catégories de baux. Ces baux demeureront, par ailleurs, soumis aux dispositions de la Loi sur les terres du domaine public et de la réglementation qui s'y rapporte. Afin d'éviter toute ambiguïté, les modifications sont proposées à certains articles pour préciser que l'autorité du ministre s'étend également aux bâtiments, aux meubles et aux améliorations situées sur les terres publiques dont il a la responsabilité et qui font partie du domaine public.

Par ailleurs, à titre de gestionnaire public foncier, je suis appelé à régulariser de nombreuses occupations sur les terres sous mon autorité, ce qu'on appelle les occupations illégales. Et il y aura également des modifications qui permettront de faire ces dispositions-là. Il y a toute la rénovation du cadastre, également, qui est enclenchée depuis plusieurs années au ministère, pour laquelle on va apporter certaines modifications afin que le ministère puisse terminer les travaux qui sont commencés. Il y a également une modification à la Loi sur les forêts, qu'on aura l'occasion d'expliquer à l'étude article par article, et, enfin, quelques modifications à la Loi sur les cités et villes et au Code municipal du Québec pour s'assurer que, quand le gouvernement voudra transférer directement et être assujetti au mécanisme qui gère ou régit les localités – c'est-à-dire le Code municipal – nous ne soyons pas en infraction ou en incapacité de faire ces modifications-là.

Voilà, M. le Président, l'essentiel des éléments sur lesquels il y avait lieu d'insister pour bien présenter le principe de ce projet de loi là. Merci.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata, porte-parole de l'opposition officielle en matière de forêts. Je vous cède la parole, Mme la députée, tout en vous rappelant que vous avez un droit de parole maximal de 60 minutes. À vous la parole.


Mme France Dionne

Mme Dionne: Merci, M. le Président. Je vous dirai tout de suite, M. le Président, que je ne prendrai pas tout mon droit de parole et toutes les 60 minutes qui me sont dévolues pour ce projet de loi. Je pense que, dans un sens, si on veut être efficace... J'ai écouté avec beaucoup d'attention le ministre expliquer son projet de loi. J'ai certains commentaires à faire sur ce projet de loi, mais ça ne prendra pas 60 minutes, c'est bien certain.

Tout d'abord, il est certain qu'un projet de loi comme celui qu'on a devant nous, qui concerne les terres du domaine public, c'est souvent et normalement, pour avoir vu beaucoup de cas de comté, un projet de loi qui est très technique. Sauf qu'ici, cette fois-ci, on apporte une nouvelle dimension, puisqu'on parle de décentralisation. Et c'est important, puisqu'on en est à une époque où les régions, de plus en plus, se prennent en main. Les municipalités ou les organismes se prennent en main et veulent faire des choses à leur façon, et c'est important de pouvoir les encourager.

J'ai écouté tout à l'heure le ministre des Ressources naturelles parler de sa carrière politique depuis 19 ans et parler du fait que, dans sa région, effectivement, ça a pris du temps avant qu'un projet soit mis de l'avant. Mais, tout en parlant, il a aussi mentionné que, pendant qu'il était là, pendant que son gouvernement était au pouvoir, il ne s'était rien passé, et il était comme impatient que le gouvernement précédent, qui était du Parti libéral, n'ait pas agi plus rapidement. Alors, il faut dire que, 19 ans, ça devait être bien long pour les gens de son comté, de sa région, effectivement. Et on voit qu'il y a eu plusieurs difficultés, parce que, à l'époque du Parti québécois, il y avait sûrement quelques difficultés. Avec la décentralisation, on était sûrement très, très hésitant.

Alors, M. le Président, quand on regarde ce projet de loi et quand on regarde certains des articles, on s'aperçoit, effectivement, que la décentralisation, c'est important, puisqu'on parle d'un exemple bien précis, d'un projet bien précis dans la région d'Abitibi-Témiscamingue.

Mais, par contre, quand je regarde, par exemple, l'article 17.13 de ce projet, qui est en première page, et c'est dans la section «Développement régional et autres politiques gouvernementales», on semble partir du fait que c'est le ministre lui-même qui va établir les programmes avec l'approbation du gouvernement. Alors, ça fait un peu cocasse, comme premier article sur le développement régional, que ce soit le ministre lui-même qui «peut, avec l'approbation du gouvernement, élaborer des programmes propres à mettre en valeur les terres du domaine public qui sont sous son autorité afin de favoriser le développement régional ou de mettre en oeuvre toute autre politique gouvernementale.»

M. le Président, quand j'ai lu cet article 17.13, je me suis dit: Qui prend le devant, là? Alors, le ministre prend le devant ou il va appuyer les initiatives du milieu? Alors, cet article-là dit qu'il prend le devant. Alors, j'espère qu'il va laisser de la place aux initiatives du milieu, qui me semblent fort intéressantes, puisqu'on en a un premier exemple dans sa région.

M. le Président, quand je regarde, également, certains autres articles de ce projet de loi, je me dis: Effectivement, on parle de donner des responsabilités aux municipalités, et, dans ce sens, on ne peut pas être contre ça, puisque les municipalités, de plus en plus, tiennent à prendre leurs responsabilités quant au développement local. Et le développement local, dans certaines régions du Québec, passe effectivement par les terres publiques. Il ne faut pas se le cacher, et il y en a de plus en plus. Il y a des lots intramunicipaux qui sont là et on peut, je pense bien, faire beaucoup pour améliorer la situation de ces lots, puisque, bien des fois, l'aménagement forestier qui devait être fait n'a pas été fait, dans certains cas. Et le fait que les municipalités ont décidé de prendre ça en main, je pense que c'est tout en leur honneur. Ils connaissent bien, effectivement, la façon de travailler.

Quand on parle de lots intramunicipaux, M. le Président, on ne peut pas parler de la même façon du Saguenay–Lac-Saint-Jean, de l'Abitibi-Témiscamingue que du Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, par exemple. Et je tiens à en parler de façon particulière, puisque, au Bas-Saint-Laurent, les lots intramunicipaux sont dans les périmètres, effectivement, des municipalités, comme ailleurs. Par contre, les municipalités sont tellement rapprochées que la forêt publique, dans un sens, elle est tout près. C'est vraiment la forêt habitée, puisqu'on est à l'intérieur des 50 milles du clocher de chaque église. Et, d'un clocher à l'autre, ce serait toute de la forêt habitée ou ça pourrait être tous des lots intramunicipaux. Mais ce que je voudrais dire de façon particulière, c'est que les lots intramunicipaux, par exemple au Témiscouata, ont été donnés sous bail, depuis plusieurs années, aux groupements forestiers.

Parce que, vous savez, les groupements forestiers, M. le Président, quand ils ont été mis de l'avant dans les années soixante-dix, c'était, au départ, justement pour se prendre en main. Et j'aimerais vous rappeler qu'ils ont été mis sur pied par le gouvernement libéral de l'époque, et c'était pour appuyer les efforts du milieu du Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, et par la forêt la plus près des municipalités, soit les lots intramunicipaux.

D'ailleurs, ça s'est étendu comme idée et comme façon de travailler, puisque, des groupements forestiers, on en retrouve un peu partout à travers le Québec. Ils sont regroupés sous une association qui s'appelle RESAM, et ils sont des générateurs d'emplois très importants dans plusieurs municipalités du Bas-Saint-Laurent–Gaspésie, entre autres, et de tout le Québec.

Alors, une des questions qui va être à poser au ministre: Qu'est-ce qu'on fait avec les lots intramunicipaux qui sont déjà sous bail avec les organismes? Est-ce que, à la fin du bail, on va leur dire: Eh bien, bravo, vous avez terminé, merci beaucoup de ce que vous avez fait comme travail! Maintenant, ce seront les municipalités, ou la municipalité où ils sont situés, qui prendra la relève. Et, ensuite, les groupements forestiers, eux, pour tout leur travail, qu'est-ce qui va arriver?

On sait qu'un travail, au niveau forestier, c'est pas un travail à court terme. Alors, quand on fait de l'aménagement forestier, qu'on parle de la plantation, de l'entretien des plantations jusqu'au moment où l'arbre est rendu mature, il se passe 20 ans, 30 ans, 40 ans. Alors, c'est du travail à long terme. Donc, quand on parle de travailler avec des partenaires comme les municipalités, il faut se rendre compte, effectivement, qu'il y a des partenaires qui sont déjà en place qui s'occupent de lots intramunicipaux, et qui sont là. En plus de parler aussi des entreprises qui font l'exploitation forestière à partir de CAAF, comme l'a mentionné le ministre.

(16 h 50)

Mais il faut voir aussi, dans l'avenir, ces investissements qui sont déjà faits, qui ont été faits, certaines fois, à partir de programmes gouvernementaux – que ce soient ceux du ministère des Ressources naturelles, du ministère des Forêts ou de REXFOR ou de tout autre organisme qui pouvait investir de l'argent – ce qui arrivera. Est-ce qu'on est prêt à les garder comme maîtres d'oeuvre ou on devra passer par les municipalités ou par un autre palier gouvernemental? Si on veut se rapprocher du milieu, si on veut être plus efficace, si on veut que chaque région prenne en main ses lots intramunicipaux et sa forêt, là, je dirais, habitée, il faut quand même penser qu'il y a déjà des choses qui ont été faites, et il faudrait s'assurer que tous les partenaires sont impliqués.

Une autre question que je me pose, que je poserai au ministre en commission parlementaire, M. le Président, c'est: Est-ce que – et je reviens toujours à l'article 17.13 – ce sera chaque région, à partir de son schéma d'aménagement, à partir de ses idées, à partir des municipalités et des organismes, qui pourra déposer des projets au gouvernement ou pour l'autorisation du ministre, ou ce seront les programmes du gouvernement qui s'appliqueront les premiers? Alors, il faudra s'entendre sur une façon de faire. Il y a des conseils régionaux de développement, comme celui du Bas-Saint-Laurent, M. le Président, qui a déjà appuyé les groupements forestiers, par exemple, cette année, pour l'année 1994-1995, dans leur travail d'aménagement. Quand on parle des municipalités, encore, est-ce qu'on va dire: Bien, maintenant, ce seront les municipalités, ou il y aura une marge de manoeuvre pour que les municipalités puissent s'adapter à ce qui est déjà fait, ce qui est déjà programmé dans les régions?

D'autre part, M. le Président, un autre point qui est important quand on parle de tout remettre ça ensemble, c'est de dire aussi qu'il y a des plans de villégiature qui ont été mis de l'avant, qui ont été travaillés au niveau de chaque municipalité, de chaque MRC et de chaque région. C'est un travail qui a été fait avec beaucoup d'attention, où on a parlé non seulement de l'exploitation forestière, mais aussi du récréotouristique, pour éviter, bien sûr, qu'il y ait des installations un peu partout, là, des installations illégales, mais aussi pour avoir un développement ordonné autour des lacs. Et je prends la région du Bas-Saint-Laurent: il y a énormément de lacs, le plan de villégiature est en train de se travailler. Est-ce qu'on a prévu que ces plans de villégiature vont concorder, justement, avec les planifications que l'on voit à partir des municipalités? Alors, c'est une question que je pose, que je reposerai au ministre lors de la commission parlementaire, parce que c'est un point fort important.

D'autre part, il y a, bien sûr, tout ce qui se fait comme exploitation forestière. Il y a l'acériculture, qui est de plus en plus importante, un autre secteur dans lequel il y a du travail, il y a de plus en plus de pression. Et on sait que cette année il y a l'augmentation du prix du sirop d'érable qui rend l'acériculture de plus en plus intéressante comme secteur économique, que ce soit dans ma région ou un peu partout à travers le Québec. On a, dans le moment, un moratoire qui est là, qui empêche d'ajouter d'autres entailles ou d'autres hectares, là, aux territoires déjà appelés acéricoles, si on veut.

Alors, il est certain que, quand on regarde les terres publiques et tout ça, il faudra voir aussi à s'assurer la complicité de tous et chacun, parce qu'il est certain qu'il pourrait y avoir complicité, mais aussi, on le sait fort bien, il y a compétition. Il y a compétition, parce que, aujourd'hui... Prenons le Bas-Saint-Laurent, M. le Président: l'exploitation forestière a été coupée de 17 %, les CAAF ont été coupés de 17 %, parce que la ressource, dans le proche avenir, ne pourra pas fournir les industries forestières, les scieries. Alors, il est certain que, quand on coupe de 17 %, on coupe déjà l'emploi de travailleurs forestiers ou de travailleurs dans les scieries de 17 %, en plus des changements technologiques qu'on y voit maintenant.

Alors, la population de nos régions est en droit de regarder ça, mais d'une façon globale, et je pense que la modification de la loi 150, qui a été faite, je pense en 1994, par le ministre, obligeant les compagnies à s'asseoir avec la population pour discuter, était un bon pas pour sensibiliser et faire participer la population à toute l'évolution des terres publiques.

D'autre part, M. le Président, une question que je me pose aussi, c'est à savoir: Le ministre prend comme instance importante les municipalités, et, quand on vient pour parler d'un fonds en tant que tel, on parle des MRC. Pourquoi spécifier les MRC en tant que détentrices d'un fonds forestier? Est-ce que ce sera la seule possibilité, la seule instance qui saura gérer ce fonds-là ou être mandatée pour avoir un tel fonds?

De plus, M. le Président, quand on regarde le projet de loi, il y a un point sur lequel je voudrais m'arrêter, c'est qu'une municipalité – et je vais ici prendre l'article 14.15... En tout cas, ça pourrait se référer à d'autres articles, mais celui-là de façon particulière. Alors, on dit: «Sous réserve du programme visé à l'article 14.11, une municipalité peut utiliser à toute fin pour laquelle elle a compétence une terre acquise du domaine public ou l'aliéner.» Jusqu'où on peut aller? Alors, on dit, dans le deuxième paragraphe de l'article 14.15: «À moins qu'il en soit prévu autrement dans le programme, le prix de l'aliénation de cette terre par la municipalité doit correspondre à sa valeur marchande.» Est-ce que je comprends bien, M. le Président, que ça veut dire qu'une municipalité qui a un projet donné en tant que tel pourrait, si le projet ne fonctionne pas, s'il y a des intérêts pour certains propriétaires privés, aliéner des terres qui ne sont plus sous le programme forestier et faire peut-être un développement autre que celui qui est prévu par entente avec le ministère?

Alors, c'est une question que je me posais en lisant cela. Je me dis: C'est fort important, puisque, de plus en plus, vous savez, M. le Président, les terres publiques qui ne sont quand même pas si loin des endroits habités, du choeur des églises, des clochers d'église, sont fort intéressantes et les lacs sont de plus en plus ensemencés... Alors, il y a beaucoup de travail qui se fait au niveau local. Mais est-ce qu'on pourra éventuellement vendre? Est-ce que je comprends qu'une municipalité pourrait vendre certains terrains sur le bord d'un lac? Alors, ce serait une question qu'on pourrait regarder lors de la commission parlementaire, puisque je pense qu'au départ ce n'est peut-être pas ce que le plan de villégiature qui aurait été accepté par le ministère et le milieu aurait prévu, mais pour d'autres raisons, parce qu'on ne parle pas seulement de cinq ans, on parle de 10 ans, de 15 ans, de 20 ans, et on va se retrouver possiblement avec une forêt qui aura été peut-être beaucoup plus «de ville» que ce qu'on pensait au départ. Alors, il faudrait vérifier ça, M. le Président, et je pense qu'en commission parlementaire on le regardera de façon particulière.

Ce n'était pas inscrit, effectivement, dans le projet de loi du ministre, mais on a parlé tantôt de comités multiressources au niveau de chacune des MRC. Je pense que c'est important que l'exercice se fasse dans chacune des MRC, comme le plan de villégiature, c'était un programme dans ce sens-là.

Quand on parle de personne morale, M. le Président, j'espère que le ministre va nous dire, en commission parlementaire, jusqu'où on peut aller. Une personne morale, ça représente quoi, dans le sens du projet de loi? Est-ce que ça va jusqu'à une compagnie privée, un organisme à but non lucratif? Jusqu'où on va pouvoir aller, M. le Président? Ce serait important de le savoir, parce que, comme je vous le disais, quand le bois se vend bien, par exemple, il y a un paquet d'acheteurs de lots. Alors, il y a différents mécanismes par lesquels certaines personnes pourraient possiblement – j'espère que non – abuser de la loi que l'on met de l'avant à ce moment-ci.

D'autre part, je lisais que les terres cédées aux municipalités, M. le Président, ne seront pas soumises à la Loi sur la protection du territoire agricole. J'avais deux questions. La première était à l'effet: Ces terres-là, ce que je comprends, c'est qu'elles ne sont pas soumises à la loi du territoire dans le moment et qu'elles ne le seront pas dans l'avenir. Si c'est bien ce que je comprends, alors là, la Loi sur la protection du territoire agricole ne s'applique pas, et, si ça s'applique dans certaines régions, compte tenu de la proximité des municipalités, est-ce qu'on a référé possiblement... Est-ce que l'UPA est d'accord? Est-ce que différents partenaires sont d'accord?

(17 heures)

D'autre part, le ministre, dans son intervention, implique beaucoup le cas des municipalités, les MRC également, par des modifications au Code municipal et à la Loi sur les cités et villes. Est-ce qu'on a eu des échanges à l'effet que les deux unions, que la Table Québec-municipalités a été saisie d'un tel projet? Est-elle d'accord avec ce projet de loi?

Alors, M. le Président, mon dernier point serait au niveau de la surveillance, parce que, à partir du moment où le ministre cède, par programmes, les terres publiques aux municipalités, est-ce que... Il y a des règles, quand même, qui sont fort importantes. Prenons, par exemple, celle du rendement soutenu en forêt publique: un arbre planté pour un arbre coupé, M. le Président. Quel est le suivi? Comment va-t-on s'assurer de la pérennité de notre forêt avec les différents plans qui seront mis de l'avant dans les régions du Québec? Est-ce qu'il y aura certaines normes de base ou si on laissera, effectivement, les municipalités faire le suivi? Parce qu'on sait fort bien que, sur l'aménagement, quand on parle de... Est-ce qu'on aura besoin de techniciens forestiers, est-ce qu'on aura besoin de gens compétents dans le domaine? Ça, c'est une question à laquelle j'aimerais qu'on puisse nous répondre en commission parlementaire.

Alors, M. le Président, je m'arrête là-dessus. Et j'aimerais dire, en terminant, que le principe de ce projet de loi me paraît fort louable, fort intéressant, puisque, moi-même, venant des régions, je pense que, de plus en plus, on voit et on a vu, depuis les 10 dernières années, que, en tout cas, le Bas-Saint-Laurent s'est pris en main parce qu'il avait le goût de le faire; d'autres régions du Québec l'ont fait dans différents domaines. On continue de vouloir le faire, et le développement des terres publiques est fort intéressant parce que c'est un point avec lequel on peut faire beaucoup de choses.

Je dirais également – en tout cas, je vais sûrement poser des questions au ministre là-dessus – que, quand on parle de l'émission des baux et de la partie administrative du ministère, on sait que, pour plusieurs de nos citoyens, on semble trouver que c'est toujours long, les différentes étapes pour, par exemple, acquérir un lot qui doit être vendu. En tout cas, les étapes sont longues. Comment pourrait-on faire pour les améliorer? Le ministre a dit qu'il y aurait peut-être un changement de gérance au niveau de l'émission des baux, mais est-ce qu'on pourrait accélérer aussi les ventes qui sont déjà enclenchées d'une façon quelconque? Je pense que ça améliorerait les services aux citoyens, parce que ça m'apparaît long comme processus et, si on peut l'améliorer, le rendre plus rapide, les citoyens n'en seront que plus satisfaits.

Alors, voilà, M. le Président, et on se retrouvera en commission parlementaire pour regarder différents points sur lesquels je suis certaine que je vais en apprendre beaucoup. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jonquière et délégué régional pour la région du Saguenay–Lac-Saint-Jean.


M. Francis Dufour

M. Dufour: Oui, merci, M. le Président. Je suis heureux de parler sur ce projet de loi qui a une importance certaine et qui fait l'objet, depuis quelques mois et je pourrais dire depuis quelques années, d'une attention soutenue de la part des gouvernements, mais pas toujours avec le même succès. Il faut reconnaître que la forêt est la plus grande ressource ou la plus grande créatrice d'emplois au Québec. Malheureusement, comme citoyens, on est obligés d'admettre qu'on s'est conduit souvent comme des prédateurs de la forêt. On a été les premiers à la détruire et à pressurer cette ressource collective d'une façon, je dirais, presque sauvage, puisque, pendant les années soixante-dix, on n'a jamais parlé de rupture de stock. On disait toujours que la forêt était presque la dispensatrice, avec une richesse renouvelable, puis qu'on pouvait en faire ce qu'on voulait. En fait, c'était inépuisable comme ressource.

Au cours des années, on s'est rendu compte que, malheureusement, on n'avait pas traité la forêt avec les égards qu'il se devait, puisque la forêt a beaucoup de qualités et, en même temps, on doit la traiter différemment. Et ce que le gouvernement du Parti québécois a compris, c'est que la forêt fait partie d'un jardin important; c'est une richesse collective au Québec, qui mérite d'être traitée avec égard et en tenant compte des milieux.

Une des caractéristiques qu'on a, comme gouvernement, c'est de régionaliser, décentraliser. Voilà un bel exemple de ce qu'un gouvernement peut faire. À partir de Québec, c'est évident, on en a fait la preuve, on est capables d'administrer les forêts, mais on ne peut pas tenir compte des caractéristiques de chaque région. Ce qu'on a voulu mettre sur pied, c'est sûrement à la suite de politiques par lesquelles le gouvernement du Parti québécois a pensé qu'on peut arriver à ces phénomènes-là, à ces politiques de décentralisation.

Dans les années 1978, on a parlé des municipalités régionales de comté, ce qui a fait l'objet de beaucoup de discussions avec les intervenants municipaux, puis avec les intervenants du milieu. Et on a appris aux gens à gérer leur territoire, à le planifier. Et ça, ça a amené une prise de conscience. Et, aujourd'hui, les régionaux, après avoir fait ce grand travail de concertation et de planification, nous disent: On veut faire autre chose. Nos régions sont en train de mourir, le chômage est dans un état endémique trop grand et on doit se reprendre en main.

La forêt dans laquelle on vit – parce que le Québécois et la Québécoise, par nature, sont dans la forêt, vivent dans la forêt – c'est notre amie. Puis, la députée de Kamouraska-Témiscouata vient d'en parler tout à l'heure, les municipalités sont tellement près les unes des autres que la forêt, c'est leur habitat naturel. Donc, la régionalisation ou le projet de loi qu'on a devant nous est de nature à ramener une activité, mais aussi une prise en main très rapide par des régionaux.

Qu'est-ce qui se passe sur le terrain? On sait bien que, actuellement, les compagnies forestières y trouvent leur compte. Et comment on l'a exploitée? C'est à partir des trajets les plus courts. On a commencé par prélever des ressources forestières le plus près des municipalités et, aujourd'hui, on est obligé de faire des grandes distances, on est obligé aussi non pas de la repeupler, mais de la reboiser, de faire de la replantation d'arbres et, encore là, on est dans des territoires connus et en partie inconnus. On sait qu'il peut se faire du reboisement naturel, puis il se fait du reboisement aussi par la volonté de l'homme ou de l'humain. Et ça se fait comme ça.

Par contre, il y a beaucoup de lots qui sont très près, actuellement, des milieux bâtis, donc des humains, qui ne sont pas exploités ou mal exploités. Par la planification ou le projet de loi qu'on a devant nous, le ministre dit: Je veux avoir des outils pour être capable de négocier avec des intervenants pour savoir la meilleure utilisation de la forêt. C'est le cas en Abitibi, qui a déjà passé des lois ou des règlements, ou des ententes avec le gouvernement, avec le ministère, et, actuellement, au Saguenay–Lac-Saint-Jean, les intervenants municipaux, par l'intermédiaire du CRCD, le Conseil régional de concertation et de développement, négocient entre eux comment on devrait gérer cette forêt-là.

Il y a deux façons de faire qu'on peut déceler actuellement. Au Lac-Saint-Jean, les municipalités voudraient que ce soient les municipalités régionales de comté qui fassent les ententes avec le gouvernement du Québec. Dans la région du Saguenay, les municipalités veulent être les maîtres d'oeuvre. Voilà un beau cas de non-mur-à-mur. On parle beaucoup d'activités ou de lois, d'ententes mur à mur. Ce qu'on dit actuellement, c'est: Voilà un beau cas; dans la même région, il pourrait y avoir une grande partie du territoire administré par des MRC et l'autre partie par des municipalités.

Actuellement, les intervenants sont en train de faire leurs devoirs, ils s'apprêtent à regarder comment on va gérer ça. Parce que là, chez nous comme ailleurs, il y a des lots qui sont un peu épars sur leur territoire. Il faut d'abord se trouver une vocation, comment on va les gérer. Il y a eu des lots intéressants, très riches qui, dans les dernières années, ont été cédés à des groupements, à des individus qui les ont complètement dilapidés. Comme je dis, pour revenir à mes premières paroles, ils ont agi comme des prédateurs de la forêt et ont rasé les lots à blanc. Comment on va les remettre en utilisation? Ça, c'est tout un travail.

(17 h 10)

Il y a beaucoup de gens qui pensent que la forêt, ça a juste une fonction, la fonction économique pour la coupe du bois, le traitement du bois, mais c'est beaucoup plus que ça. J'ai essayé d'énumérer, juste de mémoire, quelles sont les activités qu'on retrouve en forêt, et on voit que c'est vraiment important. C'est là qu'on voit toute l'importance de la forêt et comment on doit la traiter avec mesure. On parle de la chasse, on parle de la pêche, on parle des lots de villégiature, on parle de la récréation, on parle des gens qui sont près de la nature, qui, actuellement, de plus en plus, font des activités près de la nature, la circulation en forêt, les mines et aussi la nécessité qu'on a de renouveler l'air pur, parce qu'on est des pollueurs par nature. Donc, la forêt aussi renouvelle l'oxygène. Donc, c'est important qu'on la traite correctement au point de vue économique. Voilà un paquet d'activités qui se font.

Qu'est-ce que ça va permettre, ce projet de loi qu'on a devant nous? Ça va permettre au ministre des Ressources naturelles de négocier des ententes avec des intervenants pour être capables de la traiter avec mesure; aussi pour que les municipalités, ou les MRC, ou d'autres groupes puissent présenter des projets et des plans d'aménagement qu'on pourra examiner. Est-ce qu'on pourra en disposer, les aliéner, les vendre, les regrouper? Tout ça, pour moi, c'est ouvert. Il s'agit de laisser les intervenants du milieu présenter leurs plans.

Le ministre l'a dit: Je veux remettre en région des valeurs qui appartiennent à des régionaux. On veut que l'activité de la forêt serve plus et mieux à l'ensemble des intervenants sur le terrain. C'est ça, essentiellement, que le ministre demande. Il veut assouplir les lois, il veut se permettre, comme ministre, de pouvoir négocier et que les lois soient suffisamment souples pour qu'on puisse faire ces ententes. Parce que, actuellement, on peut faire des ententes avec des individus, avec des compagnies, mais, quand ça vient en groupes de municipalités, il semble que la loi actuelle ne le lui permette pas.

Donc, voilà un exemple d'une loi qui va permettre une meilleure utilisation, une meilleure rationalisation d'une richesse aussi importante dont on parle. Ça, c'est intéressant que ça se fasse et ça suscite beaucoup d'intérêt de la part des intervenants. On peut se dire, actuellement, que, chez nous, en tout cas, les intervenants sont prêts, se disent prêts. Est-ce qu'on a vu quels sont tous ces engagements qu'on va prendre concernant l'utilisation ou l'administration de la forêt? Je ne suis pas nécessairement convaincu. Il faut qu'on soit bien décidé à le faire; il faut aussi qu'on ait les moyens et qu'on se les donne.

Je voyais aussi qu'on a augmenté, par exemple, les droits de coupe, ce qui veut dire qu'on pourra retourner en région comment on pourra travailler mieux ces dossiers-là. Le ministre se donne encore un outil qui permet un meilleur développement. Et ces droits de coupe là vont aller en montant ou en descendant, dépendant des prix du marché; donc, la région pourra en profiter. Les intervenants ou ceux qui font les prélèvements dans la forêt n'ont pas toujours... Même s'ils avaient la volonté de retourner en région ces montants-là, je pense que ça prend un arbitre et, encore là, le projet de loi, même en décentralisant, même en permettant à des régionaux de travailler sur la forêt, permet au ministre d'agir encore, jusqu'à un certain point, comme arbitre, et c'est intéressant et c'est comme ça que ça doit se faire. Pas seulement dans la forêt, même au point de vue municipal, car il y a un autre projet de loi qu'on aura l'occasion possiblement d'étudier durant la soirée, on voit qu'il y a une préoccupation de la part du gouvernement non pas de se débarrasser de sa responsabilité, mais de la partager avec des intervenants. Et c'est ça, je pense, qui est la beauté, la caractéristique de ce projet de loi.

Et je comprends qu'on a beaucoup de questions à se poser. C'est normal qu'on le fasse à ce stade-ci. Mais il faut prendre en considération que le gouvernement du Parti québécois, le ministre des richesses naturelles a déjà comme préoccupation – parce que, provenant d'une région, il ne peut jamais l'oublier – que les régions ont besoin de respir. Les régions ont besoin d'oxygène pour se développer et Dieu sait si la forêt, qui était déjà un fabricant d'oxygène extraordinaire dans nos régions, pourrait être un modèle, déjà, à mettre en place.

C'est dans ce sens-là qu'on doit souscrire et apprécier les efforts que le gouvernement fait pour vraiment remettre aux régions ce qui leur appartient en propre, c'est-à-dire des ressources, et, en même temps, pour amener les régionaux à prendre conscience de leurs capacités en leur permettant de travailler sur ce qui est très près d'eux autres, ce qu'ils connaissent probablement le mieux et ce qui va leur permettre, non pas comme symbole, mais dans la réalité, de mieux administrer, certainement mieux que, nous, on peut le faire. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie, M. le député de Jonquière. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce projet de loi? Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le ministre des Ressources naturelles pour son droit de réplique, tout en vous rappelant, M. le ministre, que vous avez un droit de réplique de 20 minutes. À vous la parole.


M. François Gendron (réplique)

M. Gendron: Merci, M. le Président. Très rapidement, je veux remercier les collègues qui ont décidé d'intervenir sur ce projet de loi là, de même que la députée de Kamouraska-Témiscouata qui a fait un certain nombre de commentaires qui, selon moi, se veulent positifs. Elle a indiqué qu'elle a un certain nombre de questions. Elle en a soulevé quelques-unes. J'ai deux choix: ou bien on le fait tout de suite en réplique ou on le fait en commission parlementaire, article par article. Alors, moi, je préférerais – et je suis convaincu qu'elle va en convenir – qu'on puisse le faire dans une formule qui est plus souple et qui permet des échanges sur un certain nombre de questions qu'elle a posées, adéquatement, je pense.

Le projet de loi, comme je l'ai mentionné tantôt, a des objectifs de mise en valeur. Les outils que le gouvernement veut privilégier pour s'assurer qu'on atteindra davantage et mieux les objectifs poursuivis sont ceux qu'on a déposés dans le projet de loi, parce que, quand on adopte le principe d'un projet de loi, il y a également le dépôt de ce dernier. Et je suis convaincu d'être en mesure de répondre, je pense, adéquatement aux questions légitimes qui ont été soulevées par la députée de Kamouraska-Témiscouata concernant un certain nombre de précisions qui doivent être offertes à toutes celles et ceux qui seraient d'accord avec le gouvernement pour s'assurer que l'ensemble des règles que nous voulons modifier aux différents projets de loi, que ça soit celui des terres, que ça soit celui du ministère des Ressources, que ça soit celui du ministère des Affaires municipales, permette toujours l'atteinte de cet objectif d'avoir la capacité de donner suite à des demandes du milieu qui ont à peu près toujours le même objectif: générer plus d'activité économique par une mise en valeur ordonnée, responsable, significative, mais qui permet que le patrimoine collectif ne soit pas dilapidé au nom de la régionalisation ou de la décentralisation.

Je suis un régionaliste. Mon collègue, le député de Jonquière, l'a rappelé: je viens d'une région. Je connais la réalité des régions. Les intervenants de ces milieux veulent s'impliquer davantage dans une vraie mise en valeur significative pour leur communauté, pour leurs citoyens payeurs de taxes afin que ça génère davantage d'activités, mais il faut un minimum d'encadrement. Je ne crois pas qu'on serait responsables, et là sans partisanerie politique d'un côté ou de l'autre, comme parlementaires de ne pas s'assurer que le patrimoine sur lequel on veut que des locaux ou des régionaux agissent soit légué, puisque c'est un patrimoine collectif, sans aucune règle d'usage, sans aucune balise, de sorte que, dans quelques années, la seule différence qu'on constaterait probablement: Oui, il y a une plus-value; oui, il y a plus d'activités, mais on a délesté du patrimoine pour lequel les objectifs qu'une société doit conserver, axés sur le développement durable et la pérennité de la ressource, seraient difficilement retrouvables. Je ne pense pas que c'est à des choses comme ça que souscrit ma collègue.

Et on aura l'occasion, en commission parlementaire, M. le Président, de répondre adéquatement à chacune des questions qui sont soulevées. Et on prendra le temps de regarder si ce qui est mis en place pour réaliser les objectifs – et c'est ma conclusion – est là. Il me semble que l'ensemble des parlementaires va concourir à l'adoption de ce projet de loi et c'est pour ça que, à ce moment-ci, j'en propose l'adoption, M. le Président.

(17 h 20)


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, M. le ministre des Ressources naturelles. Le principe du projet de loi 66, Loi modifiant diverses dispositions législatives concernant les terres du domaine public, est-il adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'économie et du travail

M. Gendron: Oui. Je voudrais faire motion, M. le Président, pour que ce projet de loi soit déféré à la commission de l'économie et du travail pour étude article par article.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: À ce moment-ci, M. le Président, il y aurait lieu d'appeler l'article 1 de notre feuilleton.


Projet de loi 64


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, à l'article 1 du feuilleton, Mme la ministre de l'Emploi propose l'adoption du principe du projet de loi 64, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail. Alors, je vais céder la parole à Mme la ministre de l'Emploi, tout en vous rappelant, Mme la ministre, que vous avez un droit de parole maximal de 60 minutes. À vous, la parole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, il s'agit d'une loi qui modifie la Loi sur les normes du travail. Je vous rappelle que la Loi sur les normes du travail, en fait, est la convention collective des travailleurs non syndiqués au Québec, mais est également une loi d'ordre public, qui s'applique à l'ensemble des travailleurs et travailleuses, puisque cette loi, sauf quelques exceptions – et j'y reviendrai – prévues déjà dans la loi elle-même, sauf exception pour les conventions collectives qui y pourvoient déjà, est d'application générale.

Alors, donc, le projet qui est devant nous, c'est un projet très succinct; en fait, il s'agit, essentiellement, de quatre articles dont l'entrée en vigueur. Alors, il s'agit, essentiellement, M. le Président, d'un projet de loi qui modifie la Loi sur les normes afin de prévoir que le dimanche de Pâques est un jour férié pour les salariés travaillant dans un établissement habituellement ouvert le dimanche et dans lequel le public ne peut être admis le jour de Pâques en vertu de la Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux. Je reviendrai sur le fait qu'il s'agit, essentiellement, par cette disposition d'harmoniser à la fois la loi des normes et celle des heures et des jours d'admission dans les établissements commerciaux.

En outre, le projet de loi apporte une précision quant aux conditions de fractionnement du congé annuel à la demande d'un salarié en cas de fermeture de l'établissement pour les périodes de congé annuel. Il établit, de plus, qu'une convention collective ou un décret de convention collective pourra prévoir la possibilité de fractionnement d'un congé annuel en deux périodes ou plus, ou prévoir l'impossibilité de fractionnement.

Donc, essentiellement, deux choses; la première étant le congé de Pâques. Alors, la problématique est la suivante. C'est que, dans la loi des normes du travail, la loi actuelle, le Vendredi saint ou le lundi de Pâques, au choix de l'employeur, sont des jours fériés et chômés. Et, actuellement, le dimanche de Pâques comme tel n'est pas un jour férié et chômé au sens de la loi. En fait, c'est le Vendredi saint ou le lundi de Pâques qui l'est.

En décembre 1992, la Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux – en fait, plus communément appelée la loi sur les ouvertures de commerces le dimanche, n'est-ce pas? – était modifiée pour permettre l'ouverture de certains établissements commerciaux le dimanche. De plus, la loi remplaçait le lundi de Pâques par le dimanche de Pâques comme jour au cours duquel le public ne pouvait être admis dans un établissement commercial. Donc, dans la loi des normes, ça reste le Vendredi saint ou le lundi de Pâques qui est férié et chômé – donc, congé payé – et puis, dans la loi sur les heures d'ouverture des commerces le dimanche, c'est donc le dimanche de Pâques qui peut remplacer le lundi, lorsque le dimanche, habituellement, dans ces établissements commerciaux, est une journée où il y a ouverture de l'établissement.

Alors, comme la concordance n'avait pas été faite, en 1993, en 1994, le congé de Pâques avait occasionné une perte de salaire pour les travailleurs et travailleuses pour qui le dimanche de Pâques ne faisait pas partie des jours fériés et chômés au sens de la loi des normes, puisque, au sens de la loi sur l'ouverture des commerces, c'était le dimanche qui remplaçait le lundi, mais, au sens de la loi des normes, ça n'avait pas été modifié. Donc, les salariés, durant ces deux années-là, ont perdu du salaire du fait d'avoir leur congé le dimanche de Pâques, du fait que c'était un dimanche et, donc, qu'il n'était pas férié et chômé.

Alors, il y a eu beaucoup de plaintes à cet effet et puis, M. le Président, la volonté, en fait, je pense bien, du Parlement avait toujours été qu'aucun salarié ne perde du salaire lors d'un jour férié et chômé, dans la mesure où cette journée est un jour ouvrable pour le salarié. Alors, dans la mesure où c'est un jour ouvrable, ce qui est déjà prévu dans la loi des normes, il ne doit pas y avoir perte de salaire si, durant ce jour ouvrable, il y a une fête qui est fériée et chômée. Ainsi, les salariés d'un établissement commercial qui travaillent habituellement le dimanche perdent une journée de salaire lorsque leur établissement est obligé de fermer le dimanche en vertu de la loi d'ouverture des commerces, et puis ça n'était pas compensé par la loi des normes.

Par ailleurs, si l'on remplaçait le Vendredi saint ou le lundi de Pâques par le dimanche de Pâques, cette façon de faire ferait perdre des droits aux salariés qui travaillent dans les établissements qui n'opèrent habituellement pas le dimanche puisque, pour ceux-là, il ne s'agit pas d'une journée ouvrable. Alors, donc, pour ceux qui ne travaillent habituellement pas le dimanche, la situation doit demeurer inchangée, tandis que, pour les personnes qui travaillent dans un établissement qui est toujours ouvert le dimanche, même le dimanche de Pâques, il faut donc qu'une solution soit apportée.

Alors, il s'agit donc de l'article 1 du projet de loi 64 et la solution va modifier l'article 60 de la loi des normes, qui porte sur les jours fériés et chômés, de façon à ce que, pour les salariés travaillant dans un établissement commercial au sens de la Loi sur les heures et les jours d'admission dans les établissements commerciaux, donc ceux qui travaillent dans des commerces qui sont ouverts le dimanche, obligés de fermer le dimanche de Pâques, cette journée-là soit un jour férié et chômé afin de leur permettre de bénéficier, eux aussi, d'un jour de congé payé ou d'une indemnité compensatrice lorsque le public est habituellement admis le dimanche dans cet établissement. Donc, ça peut continuer d'être ouvert le dimanche de Pâques, mais les personnes qui y travaillent auront une indemnité pour travailler étant donné que ce sera un jour férié et chômé. Voilà l'essentiel, d'abord, de l'article 1.

Quant à l'article 2, il s'agit de la continuité des semaines de congé annuel. Alors, M. le Président, en décembre 1990, de mémoire – puisque j'avais, à ce moment-là, pour l'opposition, la responsabilité du dossier des normes du travail – des modifications étaient apportées à la loi des normes par le gouvernement de l'époque, lesquelles modifications prévoyaient un allongement de la période des congés annuels. Alors, rappelons qu'avant le 1er janvier 1991, donc avant l'examen et l'adoption ici même, en décembre 1990, de ces modifications à la loi des normes, l'article 69 de la loi des normes ne garantissait que deux semaines continues de congé aux salariés, travailleurs et travailleuses ayant droit à trois semaines de congé annuel. Donc, ils pouvaient avoir droit à trois semaines, ils pouvaient avoir droit à quatre semaines, ils pouvaient avoir droit à cinq semaines, dépendamment, évidemment, de la durée de travail au sein de l'entreprise ou de l'établissement.

(17 h 30)

Après 20 ans, souvent, de travail continu, il y a habituellement quatre à cinq semaines de congé annuel qui se retrouvent dans les conventions collectives, mais il ne s'agissait pas pour autant d'un congé continu. Il s'agissait donc, simplement, dans la loi, d'une garantie de deux semaines de congé continu. Il y avait donc, à ce moment-là, concordance entre la disposition prévoyant les deux semaines de congé continu et puis la pratique de plusieurs établissements d'interrompre leur activité pour une période de deux semaines pendant la période estivale, le fameux congé de la construction, n'est-ce pas, celui des deux dernières semaines de juillet. Cela a fait que, en plus des travailleurs de la construction, ce qui gravite autour de la construction, au fil des années, a, comme pratique, fermé les opérations également, les activités pour ces deux semaines-là, et ça a eu un effet d'entraînement, ce qui fait que, au Québec, cette période de deux semaines de congé de juillet est devenue pratique courante.

Donc, avant le 1er janvier 1991, les deux semaines garanties de congé continu correspondaient, grosso modo, concordaient à la période de deux semaines de la période estivale. Ainsi, l'employeur pouvait compter sur la présence de son personnel lors de la reprise de sa production ou de ses activités. Pour les salariés bénéficiant de trois semaines de congé ou plus, le choix du moment de la troisième semaine de congé devant être autorisé par l'employeur, cette prérogative lui permettait de gérer les absences tout en maintenant les opérations, donc, en maintenant les activités de l'entreprise.

Depuis 1991, depuis le 1er janvier, depuis les modifications introduites, l'article 69 de la loi des normes ne limite plus le droit à uniquement deux semaines continues de congé annuel pour un salarié qui peut avoir droit à plus – trois, quatre ou plus. Par contre, le droit du salarié à trois semaines continues de congé a été ainsi formulé qu'il y a eu une sorte d'impossibilité de fractionner le congé annuel en deux périodes, mais uniquement dans les cas de fermeture de l'établissement pour la période des congés annuels. Alors, en d'autres termes, c'est comme si, la façon dont ça a été rédigé, il fallait que l'entreprise ferme trois semaines, à défaut de quoi il ne pouvait pas y avoir un fractionnement, puisque ça devait être une période continue.

Alors, je comprends, M. le Président, que, pour les entreprises qui fermaient déjà et pour qui ça représentait vraiment un irritant majeur... Le libellé, en plus de ça, à l'article 71, permettait des exceptions au fait qu'il devait y avoir trois semaines continues, mais ces exceptions étaient soit à la demande du salarié lui-même, en fait à la demande du travailleur ou de la travailleuse, de ne pas bénéficier de cette continuité de trois semaines, l'autre exception était une disposition d'une convention collective ou d'un décret, qui pouvait prévoir le fractionnement en trois périodes ou plus, mais pas en deux.

Vous savez, des fois, le législateur se fourvoie, et je pense qu'il s'est fourvoyé – de bonne foi, en l'occurrence, là – et c'est une question sûrement de rédaction, parce que, finalement, le principe était de permettre au salarié de décider s'il voulait en profiter ou pas, de ce congé de trois semaines continues – ça, c'était la première exception – et puis le principe était que ça pouvait être négocié autrement dans une convention collective ou un décret, et puis que cette négociation-là devait primer sur la disposition législative pour que l'intention des parties, à la fois patronale et syndicale, prime, finalement, sur la disposition de la loi. C'était entendu que, dans une convention collective ou un décret, si tant est qu'une des parties qui représentent les salariés choisit finalement d'utiliser l'exception prévue pour ne pas maintenir les trois semaines continues, c'est peut-être parce que, en échange, elles auront eu autre chose qui les intéresse plus.

Mais la loi finalement ne permettait pas le fractionnement en deux. Alors, si, dans une convention collective ou un décret, il y avait, de part et d'autre... Parce que c'est souvent à la demande de l'employeur, évidemment, que l'établissement ne ferme pas pendant trois semaines continues, parce que c'est évidemment un coût, ça représente un coût, M. le Président. D'autant plus que, présentement, un bon nombre d'entreprises du Québec comptent une majorité de travailleurs et de travailleuses qui ont plus de cinq années de services à leur emploi. Parce que, cette disposition de trois semaines de congé annuel continu, c'est après cinq ans à l'emploi du même employeur qu'on peut en profiter.

Auparavant, il y avait beaucoup plus de mobilité, mais, avec les périodes de récession qu'on a connues, avec le taux de chômage qu'on a connu durant les dernières années, il y a eu un maintien à l'emploi beaucoup, beaucoup plus important que dans les années antérieures. Cela fait que, très fréquemment, des entreprises se retrouvent avec une très grande majorité de leurs employés qui ont plus de cinq ans à leur emploi et qui ont droit à ces trois semaines continues, ce qui les amènerait à devoir fermer pour pouvoir satisfaire à cette obligation de trois semaines continues.

Alors, donc, cette façon de faire amène très souvent l'entreprise à privilégier, dans la convention collective ou dans le décret, une autre façon de faire. C'est ce qu'on appelle communément, n'est-ce pas, de la négociation. Il y a un mot anglais, «give-and-take», pour dire que chacun des partenaires patronaux ou syndicaux trouve finalement une façon de faire qui peut les rendre gagnants tous les deux, mais la loi ne le permettait pas si c'était un fractionnement en deux.

Alors, la disposition prévue à l'article 2 se lit comme suit: «Le congé annuel peut être fractionné en deux périodes si le salarié en fait la demande.» Donc, c'est toujours l'exception qui permet à l'employé de le décider pour lui-même. «Cependant, l'employeur peut refuser cette demande s'il ferme son établissement pour une période égale ou supérieure à celle du congé annuel du salarié.» En d'autres termes, s'il y a une très forte majorité qui ont droit à ce congé, puis, si l'entreprise est obligée de fermer, alors là, à ce moment-là, il faut que tout le monde profite du congé continu en même temps. D'autre part, à l'article 3, on introduit également une disposition qui prévoit que, dans les conventions collectives ou les décrets, on peut prévoir le fractionnement du congé annuel en deux périodes ou plus, ou l'interdire. Alors, ce sera donc les parties qui auront à en convenir. C'est l'essentiel du projet de loi 64, M. le Président.

Plusieurs représentations nous ont été faites depuis que ce projet de loi est mis en discussion. En tant que ministre de l'Emploi et responsable des relations de travail, finalement, j'ai pris l'engagement, devant les membres de la commission consultative travail, main-d'oeuvre – sur laquelle commission consultative travail, main-d'oeuvre siègent tous les partenaires patronaux et syndicaux depuis 25 ans maintenant – j'ai pris l'engagement, dans toute la mesure du possible, que je souhaite évidemment respecter – sauf vraiment exception exceptionnelle, si tant est qu'il y avait urgence d'agir – à chaque fois qu'il y a une législation qui concerne le travail, qui concerne et les patrons et les syndicats, de demander un avis de ceux qui auront à l'appliquer. Ce qui a été fait dans le cas présent.

(17 h 40)

Alors, l'avant-avant-projet de loi, en fait, a été mis à la consultation des parties, et de nombreuses représentations ont suivi à l'effet que, présentement, des entreprises fermaient leur établissement pour la période de congé annuel, qui était une période de deux semaines, et que ça les desservirait énormément si cette période de deux semaines devait s'allonger d'une troisième semaine, étant entendu que cette période de deux semaines est déjà, finalement, assez coûteuse dans leurs opérations. Étant donné que l'employeur fermait déjà son établissement pour la période de congé annuel, il était sans doute plus utile de prévoir un fractionnement lorsque l'entreprise fermait déjà.

Il y a eu d'autres représentations aussi pour ouvrir ça très largement, c'est-à-dire de faire en sorte que ce congé continu ne le soit plus, en définitive, étant entendu que ce serait, finalement, simplement laissé à la décision de l'employeur. Alors, si cela était, évidemment, la difficulté que ça peut présenter, c'est donc la suivante: c'est que, lors d'une diminution d'activité ou d'opérations, l'employeur peut décider, à n'importe quel moment de l'année, qu'il va fermer pour un court laps de temps et que ça va correspondre à ce qu'il va considérer être le congé annuel. Je ne pense pas que ce soit là l'intention des parties; ça ne sera définitivement pas l'intention du législateur. C'est pourquoi je souhaiterais que, à l'occasion de l'étude article par article du projet de loi 64, nous examinions différentes formulations qui pourraient permettre, sans élargir ces exceptions, n'est-ce pas, à ce qui me semble être un acquis important pour les travailleuses et travailleurs québécois, qui est celui d'un congé annuel continu après cinq ans à l'emploi du même employeur, il me semble donc qu'on pourrait, lors de l'étude article par article du projet de loi 64, examiner possiblement une modification à être apportée pour que, dans les établissements qui fermaient déjà, de façon à ce qu'on s'assure, cependant, qu'il ne s'agit pas d'un incitatif pour que les établissements, dorénavant, ferment, mais que dans les établissements qui fermaient déjà il puisse être possible de fractionner en deux périodes ce congé annuel de trois semaines.

Alors, c'est l'essentiel, M. le Président. Je comprends que nous aurons l'occasion d'examiner plus à fond cette question en commission parlementaire. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, je vous remercie, Mme la ministre de l'Emploi. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Saint-François, porte-parole de l'opposition en matière d'emploi...

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bélanger): ...tout en vous rappelant, Mme la députée, que vous avez un droit de parole maximal de 60 minutes.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Mon intervention sera très brève, M. le Président, parce que nous sommes tout à fait d'accord qu'il faut apporter des assouplissements à la Loi sur les normes du travail pour régler certains conflits.

À la lumière du projet de loi, je me suis rendu compte, bien sûr, que ça ne réglait pas toutes les difficultés, d'autant plus, comme le mentionnait la ministre, qu'il y a certaines interventions qui nous ont été faites. Entre autres, il y en a une qui m'a été faite par General Motors. Mais j'ai compris, finalement, l'ouverture de la part de la ministre de vouloir apporter des modifications, de bonifier cedit projet de loi qui ne contient que quatre articles, mais qui est quand même très important. Alors, j'ai compris que la ministre était prête à apporter un amendement à cet effet-là, ou des amendements à cet effet-là.

Donc, à ce moment-là, bien sûr que si tel est le cas, M. le Président, nous serons d'accord avec le principe de ce projet de loi. Parce que, comme je le mentionnais, il est important de trouver des aménagements législatifs pour éviter le plus possible des conflits entre la Loi sur les normes du travail et les conventions collectives qui sont librement négociées en vertu du Code du travail, aussi bien, par exemple, pour les travailleurs syndiqués que les travailleurs non syndiqués.

Alors, M. le Président, je suis prête à apporter toute ma collaboration à la ministre pour bonifier ledit projet de loi lorsque nous l'étudierons article par article. Et nous sommes d'accord avec le principe.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée de Saint-François. Est-ce qu'il y a d'autres intervenants sur ce projet de loi? Je vous remercie.

Alors, pour le droit de réplique, Mme la ministre? Est-ce que vous... Mme la ministre de l'Emploi.


Mme Louise Harel (réplique)

Mme Harel: Oui. Alors, M. le Président, peut-être, rapidement, mais, mentionner l'importance, finalement, de cette mesure, puisque la durée du service continu qui était exigée pour pouvoir bénéficier de trois semaines de congé annuel a été réduite de façon progressive durant les années antérieures.

C'était à 10 ans. Je rappelle que c'était après 10 années à l'emploi du même employeur qu'on pouvait avoir droit à trois semaines continues. C'est passé à huit ans le 1er janvier 1992; et puis à sept ans le 1er janvier 1993; et puis à six ans le 1er janvier 1994; et ça va s'établir à cinq ans à compter du 1er janvier 1995. Alors, ça explique pourquoi c'est important, présentement, qu'on examine la situation des entreprises qui fermaient deux semaines seulement. Parce que c'est cette progression-là, durant les cinq dernières années, qui a fait que ce sera la première fois cette année que la loi des normes prévoira qu'après cinq ans à l'emploi du même employeur on a un droit à trois semaines continues.

C'est donc un accroissement important, là, du nombre de personnes, d'employés qui auront le droit à ces trois semaines de congé annuel. Et c'est la raison pour laquelle il faut, maintenant, avant que la période estivale ne vienne – et ça viendra, malgré la neige, aujourd'hui, n'est-ce pas? – mais il faut vraiment, maintenant, pouvoir statuer sur ces questions-là, parce que c'est très souvent à ce moment-ci que les congés s'établissent dans les entreprises, c'est à ce moment-ci que l'été se planifie. Je vous remercie.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la ministre. Alors, est-ce que le principe du projet de loi 64, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail, est adopté?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: Oui. À ce moment-ci, M. le Président, je ferais motion pour que le projet de loi que nous venons d'adopter soit déféré à la commission plénière pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, cette motion est-elle adoptée?

Une voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: Oui. Compte tenu de l'heure, cependant, M. le Président, je solliciterais le consentement de cette Chambre pour proposer la suspension de nos travaux jusqu'à 20 heures.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Alors, est-ce que je comprends qu'il y a consentement de la part des membres de cette Chambre pour qu'on suspende jusqu'à 20 heures?

Une voix: Certainement.

Le Vice-Président (M. Bélanger): Nous allons donc suspendre les travaux de cette Chambre jusqu'à 20 heures ce soir.

(Suspension de la séance à 17 h 48)

(Reprise à 20 h 4)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir. M. le leader du gouvernement.

M. Gendron: Oui, M. le Président. À ce moment-ci, je fais motion pour que l'Assemblée se constitue en commission plénière afin de procéder à l'étude détaillée du projet de loi que j'ai déféré ce soir en commission plénière, c'est-à-dire la loi sur les normes minimales du travail.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, en conséquence, l'Assemblée va se constituer en commission plénière pour l'étude détaillée du projet de loi 64, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail.

Je vais suspendre les travaux quelques instants afin de permettre à l'Assemblée de se constituer en commission plénière.

(Suspension de la séance à 20 h 5)

(Reprise à 20 h 11)


Commission plénière

M. Brouillet (président de la commission plénière): Conformément à la motion qui vient d'être adoptée, nous sommes réunis en commission plénière pour étudier en détail le projet de loi 64, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail.

Nous allons donc entreprendre nos travaux par les remarques préliminaires, tout d'abord de Mme la ministre de l'Emploi et de Mme la députée de Saint-François, comme porte-parole de son groupe parlementaire. Alors, Mme la ministre, je vous cède la parole.


Étude détaillée


Jours fériés chômés et payés

Mme Harel: Alors, Merci, M. le Président. M. le Président, nous avons, cet après-midi, adopté le principe du projet de loi 64, en fait la Loi modifiant la Loi sur les normes du travail, et, comme je le signalais à l'Assemblée, M. le Président, il s'agit d'une loi qui comporte quatre articles seulement, dont deux significatifs, l'un portant sur le congé de Pâques et garantissant au travailleur ou à la travailleuse qui, en vertu de la loi d'ouverture des commerces le dimanche, doit travailler habituellement le dimanche et, donc, se voit en congé à cause de Pâques d'être compensée, ce qui n'était pas le cas depuis 1992, depuis la mise en vigueur de la loi sur l'ouverture des commerces le dimanche, puisqu'il n'y avait pas eu de concordance entre cette loi et celle des normes du travail.

Les normes prévoient que c'est le Vendredi saint ou le lundi de Pâques, au choix de l'employeur. Alors, la loi d'ouverture des commerces le dimanche prévoit que le lundi de Pâques peut être repris le dimanche, plutôt. Alors, il s'agit donc, simplement, de s'assurer qu'il n'y a pas de perte de salaire parce qu'une personne salariée, employée d'une établissement, prend son congé de Pâques le jour où habituellement elle travaillerait, puisque la loi d'ouverture des commerces prévoit que son établissement peut être en activité. Alors, ça, c'est pour ce qui est de l'article 1.

Et, quant à l'article 2, M. le Président...

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre, nous allons procéder article par article.

Mme Harel: Très bien.

Le Président (M. Brouillet): Nous devons les adopter... Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Alors, si je comprends bien, justement, à l'article 60, selon la Loi sur les normes du travail, on remarque sept exceptions, c'est-à-dire que les jours suivants sont non des exceptions, mais des jours fériés et chômés, c'est-à-dire qu'il y avait le 1er janvier, il y avait le Vendredi saint ou le lundi de Pâques, au choix de l'employeur – je pense que c'est ça qui était important – le lundi qui précède le 25 mai, le 1er juillet ou, si cette date tombe un dimanche, le 2 juillet, le premier lundi de septembre, le deuxième lundi d'octobre et le 25 décembre.

Donc, si je comprends bien, comme la ministre le mentionnait, puisqu'on a modifié la loi sur les heures d'ouverture permettant, justement, l'ouverture des commerces le jour de Pâques, à ce moment-là, je pense qu'il est important que l'on modifie, finalement, la Loi sur les normes du travail pour que le jour de Pâques soit un jour férié et ne pas laisser ce choix, tel que mentionné. Je n'ai pas de difficultés, M. le Président, sur cet article.

Le Président (M. Brouillet): L'article 1 est-il adopté?

Des voix: Adopté.


Congés annuels payés

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, l'article 2. Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, quant à l'article 2, il s'agit du congé annuel. Alors, comme je le signalais cet après-midi, le congé annuel a été modifié en 1991 et, depuis lors, l'obligation de durée à l'emploi du même employeur pour avoir droit à un congé annuel continu est passée de 10 ans qu'elle était en 1991 à sept ans en 1992, à six ans en 1994 et, depuis le 1er janvier cette année, c'est après cinq ans d'emploi continu pour le même employeur qu'on peut bénéficier d'un congé annuel de trois semaines continues. Alors, on voit que l'intention du législateur, ça a vraiment été de garantir un congé annuel continu.

Auparavant, M. le Président, la loi des normes prévoyait un congé de deux semaines continues seulement. Et je crois que, pendant des décennies, le congé annuel continu a été de deux semaines, ce qui fait qu'il y a une pratique qui s'est implantée dans les entreprises du Québec, qui est celle de fermer à l'occasion de ces deux semaines de congé annuel continu. Alors, cette modification-là qui a été introduite, donc, d'une longue tradition de deux semaines de congé annuel continu, cette modification qui a été introduite l'a été graduellement. Et c'est la première fois cette année, depuis sûrement des décennies, M. le Président – je ne sais depuis combien de temps, mais je sais que ça fait déjà depuis très longtemps – ce sera la première fois que le congé annuel continu sera de trois semaines pour les travailleurs et travailleuses du Québec, comme l'a souhaité le gouvernement précédent, parce que c'est à l'occasion de la modification à la loi des normes, en 1991, qu'était finalement introduite cette amélioration dans la condition générale de vie des travailleurs et travailleuses québécois. Et je dois dire, M. le Président, que ça a été avec l'appui de l'opposition de l'époque que nous avons donc réduit de 10 années de service pour le même employeur à cinq années de service pour avoir droit aux trois semaines continues.

Alors, on comprend qu'il y a cependant un très grand nombre d'établissements qui, depuis 30 ans et plus, fermaient deux semaines. Alors, ces entreprises ont fait beaucoup de représentations à l'effet qu'elles auraient à ajouter une troisième semaine de fermeture parce que la majorité de leurs employés étaient des employés qui avaient déjà complété leurs cinq années de service et que cette fermeture de production totale, durant les trois semaines, allait coûter vraiment un coût important, qui allait se répercuter aussi, évidemment, dans la compétitivité, dans le cadre de la concurrence féroce que l'on connaît présentement.

Alors, la proposition que nous allons introduire, c'est une proposition d'amendement. J'aimerais peut-être vous la distribuer, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Oui, s'il vous plaît, oui, si vous voulez nous la distribuer. Est-ce que Mme la députée de Saint-François en a une copie? Oui.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci.

Mme Harel: Alors, M. le Président, cette proposition d'amendement se lit comme suit: L'article 2 de ce projet de loi est modifié par:

1° l'insertion, après le paragraphe 1°, du suivant:

1.1 par l'insertion, après le premier alinéa, du suivant:

«Malgré l'article 69, pour l'employeur qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, fermait son établissement pour la période de congés annuels, le congé annuel d'un salarié visé à cet article peut être fractionné par l'employeur en deux périodes dont l'une est celle de cette période de fermeture. L'une de ces périodes doit toutefois être d'une durée minimale de deux semaines continues.»

(20 h 20)

Et, 2°, le remplacement, dans le paragraphe 2°, des mots «du troisième» par les mots «de l'avant-dernier».

Alors, cet amendement a l'objectif suivant: d'une part, M. le Président, de s'assurer, par le dernier membre de phrase de l'amendement, qu'il y ait maintien d'une durée minimale de deux semaines continues et, quant à la troisième semaine, dans le cas des employeurs qui fermaient leur établissement pour la période de congé annuel, dans ce cas précis là, que le congé annuel d'un salarié puisse être fractionné pour équivaloir à la période de fermeture, si c'est deux semaines ou trois semaines, dépendamment de ce à quoi il a droit comme congé annuel, mais jamais, évidemment, d'une durée de moins de deux semaines continues, si tant est qu'il y avait droit, pour maintenir le statu quo quant aux deux semaines continues. Alors, M. le Président, l'objectif, c'est que l'intention du législateur demeure, à savoir qu'après cinq années de service à l'emploi de son employeur on puisse avoir droit à trois semaines continues.

Il y a dans la loi, déjà, des exceptions. C'est à l'article 71 qu'on les retrouve. Ces exceptions prévoient notamment que le congé peut être fractionné en plus de deux périodes si le salarié, l'employé lui-même y consent. Ça, c'en est une exception aux trois semaines continues. Et il y a de nombreuses occasions où l'employé préfère, par exemple, fractionner pour pouvoir utiliser une semaine dans le temps de la chasse ou de la pêche, avec ses deux semaines continues pendant l'été, ou utiliser, par exemple, une semaine à l'occasion des vacances scolaires des enfants. Alors, c'est de plus en plus fréquemment que le salarié lui-même non seulement y consent, mais, d'une certaine façon, le réclame à cause de ses responsabilités familiales. Donc, ça, c'est une des exceptions que la loi prévoit déjà à l'article 71 pour permettre de fractionner les trois semaines continues. Cette exception, elle est maintenue dans le projet de loi 64 et elle se lira dorénavant de la façon suivante: «Le congé annuel peut être fractionné en deux périodes si le salarié en fait la demande. Cependant, l'employeur peut refuser cette demande s'il ferme son établissement pour une période égale ou supérieure à celle du congé annuel du salarié.»

Alors, donc, c'est au salarié, finalement... Le principe général, il a trois semaines continues; l'exception, c'est qu'il peut demander de les fractionner. L'employeur peut refuser seulement s'il ferme pour une période, si vous voulez, égale ou supérieure, c'est-à-dire de trois ou quatre semaines ou plus, là, s'il ferme à l'occasion du congé annuel.

Il y a une deuxième exception qui est prévue dans la loi, qui est la suivante, qui permet le fractionnement des trois semaines continues, s'il y a déjà, dans la convention collective ou dans le décret de convention collective, une disposition particulière qui prévoit le fractionnement du congé de trois semaines. Alors, on a toujours convenu que les parties patronale et syndicale pouvaient toujours s'entendre pour qu'il en soit autrement et que leur volonté allait prévaloir sur celle, si vous voulez, que la législation contient. Ça demeure.

Il y a une disposition, par ailleurs, dans le projet de loi 64, qui facilite cette exception qui peut se retrouver dans une convention collective ou un décret. Parce que c'était mal rédigé, et le fait que ça ait été mal rédigé, ça a donné lieu à toutes sortes d'interprétations, à l'effet que le fractionnement n'était possible que s'il était supérieur à deux périodes. Parce que ça se lisait comme suit dans la loi actuelle qu'on veut modifier: «Une disposition particulière d'une convention collective ou d'un décret peut prévoir le fractionnement du congé annuel en plus de deux périodes...»

Alors, ce n'est définitivement pas l'intention qu'avait le législateur, certainement pas l'intention d'empêcher un fractionnement en deux périodes. Le fractionnement en deux périodes, c'est, comme je le signalais tantôt, par exemple, un employé qui dit: Alors, je prends mon congé annuel de deux semaines cet été et j'en garde une pour les vacances scolaires ou j'en garde une pour les vacances de Noël. En fait, quel que soit le motif, c'est un fractionnement en deux. Et ça, imaginez-vous que la loi empêchait, telle que rédigée, que ça soit possible à l'intérieur d'une convention collective ou d'un décret. Alors, là, c'est comme une disposition réparatrice, et ça sera étudié au moment où nous arriverons à l'article 3.

Alors, pour ce qui est de l'amendement à l'article 2, c'est de laisser le principe général de trois semaines continues après cinq ans, c'est de laisser les exceptions qui sont le fait que le salarié y consente, le fait que ce soit dans une convention collective, et puis c'est d'en ajouter, dans le fond, une troisième, qui est que, lorsque la tradition était que l'entreprise fermait l'établissement pour un congé annuel et que ce congé annuel était de deux semaines continues, il puisse y avoir, à ce moment-là, un fractionnement par l'employeur en deux périodes, l'une de ces périodes devant toutefois être d'une durée minimale de deux semaines continues.

Alors, ce que l'on croit, M. le Président, c'est que ça va à la fois satisfaire les représentations qui ont été faites par un certain nombre d'entreprises... Mme la députée de Saint-François a d'ailleurs fait part à la Chambre, cet après-midi, de représentations que la compagnie GM de Sainte-Thérèse avait faites. Et c'est le cas si on prend l'exemple de cette entreprise qui, depuis longtemps, fermait deux semaines l'été, qui a à son service une majorité d'employés qui comptent plus de cinq ans et qui serait obligée de fermer trois semaines si ce n'était pas modifié. Voilà, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Très bien. Alors, je vous rappelle que nous revenons à l'amendement. Vous avez débordé un petit peu pour mieux en faire saisir le sens. Je vais demander à Mme la députée de Saint-François si elle a des commentaires, et puis nous reviendrons sur l'amendement, tôt ou tard, pour en disposer, avant de revenir à l'article.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Je conviens avec la ministre qu'il est important d'apporter des modifications, un peu plus de souplesse à la Loi sur les normes du travail. On sait que, cette loi, elle est d'ordre public. Elle touche plus ou moins 110 000 travailleurs; 110 000 travailleurs y sont assujettis. C'est un peu la convention collective de base, finalement, au Québec, pour l'ensemble de ces travailleurs. Et je pense que ce qui faisait problème, finalement, ou ce qui est important, c'est le fractionnement. Et ce sont les employeurs qui en font la demande, qui sont intervenus pour qu'on puisse fractionner.

Maintenant, bien sûr, je mentionnais à la ministre cet après-midi, lors de l'adoption du principe, je lui disais qu'à la lecture même du projet de loi ça semblait faire problème parce que ça semblait être beaucoup trop restrictif. La ministre nous a proposé un amendement. Cependant, c'est que j'avais eu l'occasion de prendre connaissance d'un amendement que le bureau de la ministre nous avait fait parvenir au début de la journée, et ça semblait répondre davantage à l'avis du Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre, c'était plus large, finalement, alors que, là, maintenant, cette modification s'applique aux entreprises existantes, mais, dans le futur, ne s'appliquera pas pour les entreprises. Dans le futur, elles devront la négocier soit par convention collective ou par décret. Mais les employés ne sont pas tous syndiqués, non plus.

La raison pour laquelle je m'inquiète un peu, c'est parce que je me dis que le problème actuellement des entreprises, ce n'est pas d'empêcher le fractionnement, c'est de le permettre à l'initiative de l'employeur lorsqu'il y a une fermeture de deux semaines. On sait aussi qu'on a et aura de plus en plus de nouvelles petites entreprises – je vois le ministre de l'Industrie qui va favoriser, j'en suis persuadée, l'ouverture de petites et moyennes entreprises – et surtout avec toutes les nouvelles technologies, la qualité totale encore, la production, on veut une production parfois juste à temps et on est obligé de prendre des mesures. Ça va demander de la souplesse, aussi bien dans l'intérêt des employeurs que des travailleurs.

(20 h 30)

Donc, ce que je me demandais, c'est pourquoi limiter la solution aux seules entreprises qui fermaient leur établissement et pourquoi ne pas permettre également, pourquoi ne pas conserver l'amendement qui avait été soumis, qui assujettit finalement l'ensemble des entreprises. Parce que là j'ai peur, quand même, que ça limite davantage et surtout pour les petites et moyennes entreprises dont les travailleurs ne sont pas syndiqués aussi. Je ne sais pas si la ministre peut répondre à cette question.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Harel: Oui, alors, M. le Président, disons d'abord que le Conseil consultatif du travail et de la main-d'oeuvre n'a jamais émis un avis unanime sur cette question. Les parties, l'ai-je compris, là, sont divisées sur cette question. Donc, il n'y a pas d'avis du Conseil consultatif que l'on pourrait plaider à ce moment-ci, par exemple, pour nous assurer que les partenaires sont tous du même côté. C'est donc dire qu'il y a eu une consultation auprès du Conseil, mais cette consultation a révélé qu'il y avait divergence d'opinions, d'une part.

D'autre part, l'intention du législateur, en 1991, était certainement d'accorder, après cinq années de service, trois semaines continues, parce que, déjà, il y avait trois semaines de congé annuel possibles. Ce qui était introduit comme nouveauté, c'était que ces trois semaines puissent être continues.

Alors, comment, à la fois, si vous voulez – c'est un peu l'équilibre qu'essaie, en tout cas, de rechercher l'amendement – satisfaire cette amélioration, je crois, qui a été applaudie à l'époque, des conditions de travail des employés québécois qui, dorénavant auront droit à trois semaines continues et puis, en même temps, satisfaire la difficulté d'application dans les entreprises qui fermaient déjà?

Celles qui ne fermaient pas, par exemple les nouvelles entreprises, vous voyez, elles n'auront pas le problème immédiatement pour deux raisons, la première étant qu'avant qu'il se pose ces nouvelles entreprises auront finalement passé sous les cinq prochaines années. Parce que, pour avoir droit à ces trois semaines continues, il faut avoir été au service de l'employeur pendant cinq ans. Donc, il n'y a pas de nouvelle entreprise qui aura cette difficulté et qui aura, si vous voulez, à la résoudre immédiatement.

D'autre part, à l'article 3, on vient bonifier l'exception qui prévoit que, dans les décrets ou dans les conventions collectives, le fractionnement sera possible. Alors, il y aura dorénavant une ouverture à la négociation, qui permet, comme vous le savez, toujours de bonifier ce que... La loi des normes, c'est la loi des normes minimales. Alors, les conventions collectives, les décrets, les ententes quelles qu'elles soient, qu'elles portent le nom de «convention» ou autre, les ententes, ou même les contrats individuels, peuvent toujours aller au-delà. Simplement, elles ne peuvent pas être en deçà.

Alors, c'est donc dire que, pour être respectueux, d'une certaine façon, de l'intention du législateur d'assurer les trois semaines de congé annuel continu, il ne faut pas que l'exception soit, si vous voulez, plus large que la règle d'application. Alors, si on dit, d'un côté de la bouche, si vous voulez: Les trois semaines de congé continu, et, de l'autre côté, on dit que l'employeur peut fractionner comme il veut, à ce moment-là, il vaut mieux dire qu'il n'y a pas trois semaines continues.

Mme Gagnon-Tremblay: Mais...

Le Président (M. Brouillet): Mme la députée.

Mme Gagnon-Tremblay: Je pense, M. le Président, que ce n'est pas sur ça que j'en ai. Je pense que l'amendement de la ministre, pour les industries, les entreprises qui existent actuellement, c'est sûr que c'est une amélioration, je n'ai rien contre ça, là.

C'est davantage pour les nouvelles entreprises. Et, comme la ministre le mentionnait dans ses propos, elle disait qu'il n'y a pas de problème immédiatement. Mais ça veut dire que, dans cinq ans, il pourrait y en avoir. Est-ce qu'on va devoir légiférer à nouveau, dans cinq ans, pour les nouvelles entreprises, qui, finalement, ne sont pas assujetties présentement parce qu'elles n'ont pas cinq ans d'existence? Est-ce qu'on va devoir revenir dans cinq ans? Alors, c'est pour ça que je me disais que le terme, lorsqu'on emploie le terme, par exemple, «pour l'employeur qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, fermait son établissement» au lieu de dire «pour l'employeur qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi...» C'est-à-dire, attendez une petite minute. Où est ma première version? Ma première version est où? La première version... On mentionnait que... Voyons, elle est partie avec. Je m'excuse, M. le Président, elle est partie avec... O.K.

Alors, on disait que, si l'employeur ferme son établissement pour la période de congé annuel, le congé annuel d'un salarié visé à cet article peut être fractionné par l'employeur en deux périodes – exactement la même chose qu'on retrouve actuellement dans l'amendement – sauf que, lorsqu'on mentionne «si l'employeur ferme», ça comprend non seulement les entreprises existantes, mais ça comprend en plus les entreprises pour le futur. Donc, ça veut dire qu'on n'aurait pas ces problèmes dans le futur pour ces entreprises qui auraient cinq ans d'existence par la suite. Tandis que, là, avec l'amendement qui est proposé, on mentionne: «...pour l'employeur qui, à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, fermait son établissement...», donc l'amendement s'applique uniquement aux entreprises existantes au moment où on se parle, qui avaient l'habitude de fermer. Donc, à ce moment-là, je me dis: Pourquoi restreindre la portée de l'amendement, étant donné que ça peut causer des problèmes, peut-être pas immédiatement, mais dans le futur pour les autres entreprises? Et je pense toujours, à ce moment-ci, aussi aux petites et moyennes entreprises dont les salariés ne seraient pas syndiqués, entre autres.

Et, comme je le répète encore, c'est que la raison d'être de l'amendement, c'est-à-dire de la modification à la Loi sur les normes du travail – c'est parce que ça fait suite aux problèmes des entreprises – ce n'est pas d'empêcher le fractionnement, mais de le permettre à l'initiative de l'employeur lorsqu'il y a une fermeture de deux semaines. Donc, je reviens encore à ma question: Pourquoi ne pas le laisser de façon plus large pour englober non pas uniquement les entreprises existantes, mais les entreprises futures? Finalement, on pourrait faire confiance aussi bien à l'employeur qu'à l'employé, quant aux congés, par exemple, annuels, leur faire confiance et inclure ces nouvelles entreprises également.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Harel: M. le Président, la Loi sur les normes du travail est une loi que ne s'applique pas qu'aux travailleurs au salaire minimum. C'est une loi qui, en plus des 110 000 travailleurs – on devrait dire «travailleuses» parce que les deux tiers des travailleurs au salaire minimum sont des travailleuses – s'applique aux 1 200 000 travailleurs québécois, et un certain nombre, si vous voulez, sont couverts par des conventions collectives ou des décrets de conventions collectives. Mais, finalement, la loi des normes doit certainement, M. le Président, ne pas inciter à certaines pratiques.

Alors, jusqu'à maintenant, on peut dire que, avec l'amendement qui est introduit, on règle les problèmes qui ont été portés à notre connaissance. Vous savez, avant de régler des problèmes qui n'existent pas encore, moi, je demande à faire vraiment attention, là, de ne pas anticiper que les problèmes surgiront. Pour quelle raison? C'est que, en les réglant, il se trouve souvent qu'on en occasionne d'autres. Il y a d'ailleurs un livre extraordinaire qui a été écrit là-dessus, M. le Président, pas un monsieur qui s'appelle John Saul, et ça s'intitule «Les bâtards de Voltaire...», Voltaire étant le rationaliste que l'on connaît, et qui décrit bien ce que les sociétés industrielles avancées connaissent comme problèmes quand, pour en résoudre certains, elles en créent de nombreux autres. Alors, là, on a des problèmes réels d'entreprises qui fermaient, de par l'habitude, là, depuis longtemps, l'été, et on va, avec l'amendement, remédier à leurs difficultés.

(20 h 40)

Mme la députée de Saint-François me dit: Pourquoi on n'en profiterait pas, au cas où des problèmes se poseraient, pour les régler de façon, disons, anticipée? Moi, je lui dis: À ce moment-là, faisons attention de ne pas en produire d'autres. Pourquoi on n'en profiterait pas pour les régler? Parce que, d'une part, je comprendrais que, à ce moment-là, on permettrait à des entreprises qui ne fermaient pas jusqu'à maintenant d'utiliser la fermeture de leur établissement de façon à pouvoir satisfaire leurs obligations et de façon à pouvoir fractionner le congé annuel continu. Elles ne l'ont pas fait jusqu'à maintenant, elles ne l'ont pas fait dans leurs activités régulières. Elles ne l'ont pas fait, même pour deux semaines de congé continu. Elles ne trouvaient pas nécessaire de le faire. Alors, imaginez, M. le Président, si, plutôt que de régler un problème, on ouvrait, finalement, la possibilité de fractionner les trois semaines que le législateur a voulu garantir à l'ensemble des travailleurs et travailleuses du Québec après cinq années de service. Là, en permettant le fractionnement, en l'élargissant, chaque fois qu'il y a fermeture de l'établissement, le danger, M. le Président, c'est que, à ce moment-là, on provoque, finalement, des situations où il y aura une façon de faire qui n'a pas été jusqu'à maintenant.

Je disais tantôt que, d'autre part, la loi 64 améliore le fractionnement possible. Dans la convention collective et le décret, il n'était pas possible à cause de la manière dont c'était rédigé avant. Il va l'être maintenant, donc, si le salarié y consent.

Je reviens aux petites entreprises. Alors, les petites entreprises qui sont souvent des entreprises familiales, ou de deux, ou de trois salariés, il y a comme un ajustement, l'exception étant que le salarié non seulement peut y consentir, mais peut même le réclamer, peut même le demander, peut même souhaiter le fractionnement. Et là on dit dans la loi que l'employeur peut refuser le fractionnement si tant est qu'il ferme.

Alors, c'est toute l'économie générale de la loi qui repose sur le principe de trois semaines continues, avec des exceptions: si le salarié y consent; si, dans la convention collective, c'est différent – et là on ajoute une nouvelle exception – si l'entreprise fermait déjà. Vivons avec ça. Dans le fond, c'est ça, finalement, qu'on propose au Parlement; vivons avec ça.

Et puis la loi des normes, M. le Président, à ce que je sache, c'est une loi évolutive, comme d'ailleurs la situation du marché du travail, comme la situation de l'économie elle-même, comme la situation de l'entreprise. C'est une loi qui, à ma connaissance, est examinée chaque année, ici, devant l'Assemblée. Et, effectivement, si dans cinq ans il y a des problèmes qui se posent, je suis convaincue que nous saurons comment les régler.

Le Président (M. Brouillet): Merci, Mme la ministre. Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Merci, M. le Président. Je reviens encore à la charge, M. le Président, parce que, actuellement, les entreprises qui ont décidé ou qui décident de fermer deux semaines, bon, c'est pour des raisons... Premièrement, on sait que ça a toujours été, bien sûr, pour des vacances, parce que souvent les fournisseurs ferment à peu près au même moment, et, pour l'économie des différentes entreprises, c'est généralement plus facile de fermer pendant deux semaines, d'arrêter la production pendant deux semaines et de la repartir par la suite. Je ne pense pas que ce soit un caprice, finalement, et je ne pense pas qu'il y ait une entreprise qui déciderait, par caprice, de fermer à tout moment en dehors, par exemple, des périodes de vacances qu'on connaît habituellement. Je ne pense pas qu'une entreprise pourrait profiter, par exemple, à mon avis, décider de fermer soudainement ou, si elle le fait, par un manque de travail. Mais, si elle le fait, c'est sûrement parce qu'il y aurait des raisons importantes de le faire, sinon l'entreprise ne le ferait pas. Alors, je me dis: Pourquoi ne pas laisser à l'entreprise, finalement, aussi bien qu'aux employés, le choix de le faire, la possibilité de le faire, autant pour les nouvelles entreprises que les entreprise existantes qui avaient l'habitude de fermer.

Et, comme je le mentionnais, je comprends que le problème n'existe peut-être pas actuellement pour les entreprises qui n'existent pas, puisqu'on sait très bien que ce problème arrivera après cinq années, compte tenu des trois semaines de vacances qui sont allouées, mais c'est quand même un problème qui pourrait exister, bon, pour certaines entreprises. Et je me dis: quelle est la différence entre «fermait son établissement» et l'autre formulation de l'amendement où l'on dit «si l'employeur ferme son établissement»? À ce moment-là, on peut fractionner au lieu de le limiter seulement aux entreprises qui avaient l'habitude de fermer.

Il y a peut-être des entreprises aussi qui n'avaient pas cette habitude, n'avaient pas fermé autrefois, qui existent depuis cinq ans et qui auraient avantage à fermer. Mais là on limite, finalement. Pour une entreprise qui n'avait pas cette habitude, peut-être, de fermer, mais qui, disons l'an prochain, décidait de fermer, on vient limiter, par l'amendement, le fractionnement pour cette entreprise. Alors, c'est ça, je me demande: Pourquoi le faire, alors que c'est si facile d'avoir une formulation qui est plus large?

Je pense qu'on s'entend sur une bonne partie de l'amendement. C'est peut-être au niveau de la formulation où on est plus restrictif dans l'amendement proposé par la ministre que celui, finalement, que j'avais ce matin.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre.

Mme Harel: Alors, M. le Président, on comprend que, chaque fois que l'entreprise peut fermer l'établissement pour la période de congé annuel, c'est qu'elle le fait pour pouvoir fractionner les trois semaines de congé continu. Alors, plus on élargit la possibilité de la fermeture pour fractionner et plus on réduit le droit à trois semaines de congé continu. C'est un choix.

Mme la députée de Saint-François semble me dire que, contrairement au député de Laporte, son collègue qui était à l'époque ministre de la Main-d'oeuvre, de la Sécurité du revenu et de la Formation professionnelle et qui a lui-même introduit la disposition de trois semaines de congé continu sans les exceptions qu'on a introduites aujourd'hui, là, ce qu'elle souhaite, c'est qu'il y ait moins de travailleurs qui aient droit aux trois semaines de congé continu parce qu'il va y avoir plus d'établissements qui vont pouvoir fermer pour pouvoir fractionner. C'est son choix, mais, à ce moment-là, ce n'est pas celui du gouvernement avec l'amendement que l'on dépose.

Alors, je pense, M. le Président, qu'on va devoir disposer de l'amendement. Je ne sais pas, à moins que Mme la députée de Saint-François veuille présenter un sous-amendement ou un amendement. Mais il y a un choix, c'est très, très clair: plus on permet la fermeture d'un établissement pour la période de congé annuel pour pouvoir fractionner... Parce qu'il peut toujours fermer, l'établissement, là. C'est son droit en tout temps, là, ce n'est pas de ça qu'il s'agit; c'est de le faire pour fractionner les trois semaines continues. Alors, plus on permet de fractionner les trois semaines continues, moins de travailleurs qui sont à l'emploi de leur entreprise depuis plus de cinq ans vont avoir droit aux trois semaines de congé continu.

Le Président (M. Brouillet): Mme la députée de Saint-François.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, M. le Président. Mes propos ne sont pas du tout en contradiction avec la politique de mon collègue. Je pense qu'on ne se comprend pas. Ce que la ministre semble dire, c'est que les semaines où on ferme, finalement, ce serait uniquement pour des vacances. Il peut y avoir d'autres motifs. Le marché, par exemple, peut l'exiger. Et on peut avoir des avantages à fractionner pour d'autres raisons aussi, supposons qu'on ferme. Alors là, finalement, si je comprends bien, c'est que, pour la ministre, le fractionnement, pour elle, se fait uniquement dans des cas de vacances.

(20 h 50)

Mme Harel: M. le Président, c'est d'ailleurs ce que dit explicitement la loi. C'est la fermeture d'un établissement pour la période de congé annuel. L'établissement, dans une année, peut fermer pour toutes sortes de raisons. Il peut y avoir un ralentissement d'activité, il peut y avoir une foule de raisons, par exemple ne pas être approvisionné par des fournisseurs, il peut y avoir des commandes qui, finalement, sont annulées. Il peut y avoir une foule de raisons. Mais là ce n'est pas la question. On est simplement, pour tout de suite, dans un article d'une loi qui dit: Si l'employeur ferme pour la période de congé annuel... C'est uniquement dans ce cas-là. Donc, la fermeture, c'est simplement pour fractionner le congé annuel.

Le Président (M. Brouillet): Encore Mme la députée de Saint-François, si vous avez quelque...

Mme Gagnon-Tremblay: Je ne parlerai pas non plus sur cet amendement. J'aurais souhaité que l'amendement puisse être formulé de façon plus large, pour englober non pas uniquement les entreprises qui avaient l'habitude de fermer... Parce que, comme je le mentionnais, il peut arriver qu'il y ait des grandes entreprises aussi, qui n'avaient peut-être pas l'habitude de fermer pendant deux semaines, qui pourraient, par contre, décider de le faire maintenant et pouvoir fractionner. Alors, quand même, on limite, parce que l'amendement concerne uniquement les entreprises qui avaient l'habitude de le faire. À moins que la ministre m'explique que je n'ai pas bien compris l'amendement.

Le Président (M. Brouillet): Mme la ministre, encore pour une...

Mme Harel: M. le Président, il faut bien comprendre que l'entreprise peut fermer pour une semaine, pour deux semaines, pour trois semaines, même pour des fins de congé annuel; ça, elle peut le faire. Ce qu'elle ne peut pas faire – depuis toujours, ça, par exemple – c'est obliger le travailleur à son service à ne pas prendre au moins deux semaines continues. Puis elle peut fermer; mais là elle ne pourra pas, si tant est qu'elle ne le faisait pas jusqu'à maintenant. La fermeture pour les congés, elle ne pourra pas commencer à la faire à partir de maintenant parce qu'ils ont trois semaines. Parce que, dans le fond, ce serait pour le fractionner, le congé, étant donné qu'elle ne le faisait pas jusqu'à maintenant.

Mme Gagnon-Tremblay: C'est là qu'est mon inquiétude: c'est parce que ce n'est pas uniquement pour les nouvelles entreprises. C'est là qu'est mon inquiétude, parce que cette entreprise pourrait, pour toutes sortes de raisons, à un moment donné, décider qu'il est important d'avoir, par exemple, deux semaines continues de congé annuel, alors qu'elle ne le faisait pas auparavant, et de pouvoir fractionner. C'est la raison pour laquelle je disais tout à l'heure que la formulation... qu'on restreignait, finalement, aux entreprises qui avaient l'habitude de ces deux semaines de congé annuel.

Mme Harel: Non, parce que, M. le Président, celles qui avaient l'habitude, elles, maintenant, continueront.

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, je comprends, sauf que les autres existantes, qui n'avaient pas cette habitude, mais qui pourraient découvrir un avantage – étant donné que, maintenant, on peut fractionner en plus – ne pourront pas s'en prévaloir.

Mme Harel: ...autrement que par convention collective, décret ou avec le consentement de leurs employés.

Mme Gagnon-Tremblay: Je trouve un peu déplorable de voir qu'on restreint, étant donné qu'on pourrait également permettre à ces entreprises qui ne le faisaient pas la possibilité de le faire. Là, ça n'inclut pas uniquement les nouvelles entreprises, mais des entreprises existantes qui pourraient s'en prévaloir, alors qu'elles ne pourront pas le faire à moins de le négocier soit par convention collective ou par décret. Alors, c'est restrictif.

Bien sûr que je ne ferai pas une bataille, mais bien sûr que, quant à moi, j'aurais souhaité et je souhaiterais que la ministre puisse revenir à l'amendement, au premier, c'est-à-dire celui qui n'a pas été déposé, bien sûr, mais qui englobait davantage, pour moi, les préoccupations des entreprises du Québec.

Le Président (M. Brouillet): Bon. Alors, il y a l'amendement. Je peux le soumettre aux voix immédiatement, à moins qu'il n'y ait un sous-amendement. S'il n'y en a pas, je crois que vous êtes prêts à voter. Alors, est-ce que l'amendement à l'article 2 est adopté?

Mme Gagnon-Tremblay: Division, M. le Président.

Le Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Est-ce que l'article 2, tel qu'amendé, est adopté? Adopté sur division.

Alors, je mets aux voix maintenant... Mettre aux voix... c'est-à-dire en délibération. Vous pouvez encore intervenir, si vous le désirez, sur l'article 3.

Mme Harel: M. le Président, j'ai déjà expliqué que l'article 3 consistait en une mesure réparatrice, si vous me permettez l'expression, pour corriger une rédaction un peu fautive qui, dans le fond, interdisait le fractionnement de plus de deux périodes du congé. Alors, là, ce sera possible en deux, en trois, mais en maintenant toujours, cependant, la période de deux semaines continues, si le travailleur y a droit, et à son choix.

Le Président (M. Brouillet): Alors, Mme la députée de Saint-François, à l'article 3.

Mme Gagnon-Tremblay: Ça va, M. le Président, pour l'article 3.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 3 est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, nous passons maintenant à l'article 4. L'article 4 est-il adopté?

Mme Harel: M. le Président, c'est une simple disposition de mise en vigueur de la loi à la date de sa sanction.

Le Président (M. Brouillet): Alors, l'article 4 est adopté?

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Est-ce que le titre du projet de loi est adopté, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail? Il faut adopter le titre aussi.

Des voix: Adopté.

Le Président (M. Brouillet): Adopté. Alors, en conséquence, la commission plénière met fin à ses travaux, et je remercie tous ceux et celles qui y ont participé. J'inviterais ceux qui ont à quitter cette auguste enceinte à le faire immédiatement pour nous permettre de nous reconvertir en assemblée plénière... en Assemblée nationale, c'est ça.

(Suspension de la séance à 20 h 56)

(Reprise à 20 h 58)

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'ordre, s'il vous plaît! Veuillez vous asseoir. M. le Président de la commission plénière.

M. Gaulin (président de la commission plénière): M. le Président, j'ai l'honneur de faire rapport que la commission plénière a étudié en détail le projet de loi 64, Loi modifiant la Loi sur les normes du travail, et qu'elle l'a adopté avec un amendement.


Mise aux voix du rapport de la commission

Le Vice-Président (M. Brouillet): Ce rapport est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Gendron: À ce moment-ci, M. le Président, je solliciterais le consentement de l'opposition officielle pour que nous puissions procéder immédiatement à l'adoption en troisième lecture dudit projet de loi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Y a-t-il des intervenants sur le projet de loi?

M. Gendron: Il n'y a pas d'intervenant.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, il y a consentement pour que nous procédions à l'adoption du projet de loi, malgré l'article 200 et quelque chose, 230, je crois? Alors, s'il y a consentement, je vais...

M. Gendron: En conséquence, M. le Président, je propose l'adoption en troisième lecture du projet de loi, puisqu'il y a consentement.


Adoption

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, donc, on propose l'adoption du projet de loi 64. Nous allons bien l'énoncer à nouveau: Loi modifiant la Loi sur les normes du travail. Alors, ce projet de loi est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté. M. le leader adjoint du gouvernement.

(21 heures)

M. Gendron: Oui. À ce moment-ci, M. le Président, j'appellerais l'article 4 du feuilleton.


Projet de loi 68


Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Brouillet): À l'article 4, M. le ministre des Affaires municipales propose l'adoption du principe du projet de loi 68, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives. Alors, je vais céder la parole à M. le ministre des Affaires municipales. Vous avez, M. le ministre, comme vous le savez, un temps de parole de 60 minutes. M. le ministre.


M. Guy Chevrette

M. Chevrette: C'est à peu près le temps qui reste, M. le Président, à l'Assemblée. Donc, M. le Président, j'ai eu l'honneur de déposer, la semaine dernière, le projet de loi 68 représentant les premiers résultats concrets de nos discussions avec l'Union des municipalités du Québec et l'Union des municipalités régionales de comté et des municipalités locales du Québec. Je dois vous dire qu'à la Table Québec-municipalités ça a travaillé fort et rapidement concernant les allégements dans le monde municipal.

Ce projet, qui modifie la Loi sur les cités et villes, qui modifie aussi le Code municipal du Québec ainsi que d'autres lois, marque le tout début d'une série de changements issus des travaux sur la décentralisation. C'est donc – pardon, M. le Président, j'ai dû courir dans les escaliers pour arriver à l'heure – avec grande fierté que je le soumets respectueusement aux membres de cette Assemblée. J'aimerais d'ailleurs remercier devant cette Chambre les dirigeants des deux unions qui, par leur collaboration, nous auront permis de déposer ce projet de loi dans un si court laps de temps.

M. le Président, depuis les années soixante, l'administration gouvernementale s'est développée afin de répondre aux besoins de la société québécoise. Que ce soit en matière de santé publique, d'éducation, de transport en commun, de développement de nos ressources naturelles et d'environnement, l'État a multiplié ses champs d'intervention. Ce qui est convenu d'appeler la Révolution tranquille a entraîné une présence importante de l'État dans tous les secteurs de notre société et, par le fait même, une forte centralisation des pouvoirs.

Les municipalités n'ont pas échappé à ce mouvement, la mise en place de l'État-providence ayant eu sa contrepartie de normes, d'obligations et de contrôles auxquels elles sont toujours assujetties.

Toutefois, la présence de l'État n'a pas été que contraignante. Par exemple, des interventions en matière d'assainissement des finances municipales, d'aménagement du territoire et de fiscalité auront favorisé l'émergence d'une administration municipale plus responsable et mieux outillée. Les administrations municipales sont donc capables de se voir confier des responsabilités accrues et de participer à l'amélioration des services publics aux citoyens.

Notre gouvernement a affirmé sa volonté de procéder à une importante décentralisation de pouvoirs vers les régions et vers les unions municipales, qui, quant à elles, se sont montrées ouvertes à des discussions, et, en contrepartie, le gouvernement faisait preuve, lui aussi, d'une grande ouverture.

Comme le présent gouvernement est formé d'une équipe qui a toujours réalisé ses engagements et que nous nous sommes engagés à ce que tout transfert de pouvoirs et de responsabilités soit accompagné de ressources correspondantes, les unions municipales ont compris le sérieux de notre démarche. Elles ont compris que le temps du pelletage de factures était terminé.

Vous me permettrez de rappeler, M. le Président, que le gouvernement que les Québécois et les Québécoises ont élu le 12 septembre dernier a placé au coeur de ses priorités le thème de la décentralisation. Il s'agit d'une opération de très grande envergure que le premier ministre, lors du discours inaugural de la Trente-cinquième Législature, le 26 novembre 1994, a présentée comme l'un des grands chantiers du Québec.

Redonner confiance et espoir aux citoyens, permettre aux communautés de se prendre en main, de développer leur coin de pays selon leurs priorités et leurs besoins, mettre fin au mur-à-mur, voilà quelques-uns des leitmotiv de notre action. Nous voulons revoir nos façons de faire. Qui peut mieux prévoir les besoins d'une communauté que ses propres membres? Qui peut mieux gérer un service local qu'une autorité locale? M. le Président, le gouvernement du Québec est convaincu que nous devons changer notre façon de gérer l'État, qu'il faut décentraliser, et ce projet de loi en représente le point de départ.

Depuis notre élection, j'ai beaucoup discuté de décentralisation avec le monde municipal. En effet, M. le Président, dès la mi-octobre, j'ai débuté une tournée des régions où il m'a été permis de rencontrer les maires, les conseillers et les préfets des communautés qui travaillent à bâtir notre société. Lors de cette tournée, j'ai également rencontré les conseils régionaux de développement, avec lesquels j'ai aussi discuté de ce sujet. Un constat s'impose à la suite de cette tournée: la décentralisation est souhaitée vivement, et on attendait avec impatience la venue d'un gouvernement qui s'engagerait dans cette voie. En effet, les régions réclament plus que jamais la décentralisation des pouvoirs. La première véritable expression de ce souhait, et certainement la plus importante, fut la commission Bélanger-Campeau. Ceux qui, comme moi, ont été commissaires, se souviennent encore de la tournée régionale de la commission et se souviennent encore également des messages qu'ils ont entendus. Ce fut un grand moment de notre histoire. Il y a eu également les états généraux, bien sûr, du monde rural, il y a eu le Forum national sur la décentralisation, qui ont ajouté à cette revendication.

J'affirmais plus tôt, M. le Président, que les régions attendaient un gouvernement sincère en ce domaine. Par le message que nous leur avons livré, les régions ont compris que nous voulons vraiment décentraliser. Échaudées par neuf années d'un régime libéral caractérisé par des pelletages de factures, les régions ont vu le sérieux de la démarche de notre formation politique et de notre engagement envers la décentralisation et le développement des régions.

Nous avons, en effet, participé activement à Bélanger-Campeau. Nous n'avons pas joué à la chaise vide... ou au jeu de la chaise vide que pratiquent nos amis d'en face présentement. Notre formation a aussi organisé un important colloque à l'automne 1993, à Rivière-du-Loup, sur l'avenir des régions. La décentralisation y fut au coeur des débats. Notre dernier congrès, en août 1993, fut également marqué par ce sujet, et sans parler de la dernière campagne électorale qui, pour nous, a constitué une véritable profession de foi en nos régions.

Les élus municipaux ont donc compris, M. le Président, que nous représentons le changement et qu'avec nous les choses vont changer. M. le Président, j'ai le plaisir d'informer cette Chambre que les échanges que nous avons eus jusqu'à ce jour avec les deux unions municipales, dans le cadre de la Table Québec-municipalités, se sont tenus dans un esprit tout à fait différent de celui qui aura caractérisé la triste réforme de 1991, la triste réforme de M. Claude Ryan. Souvenez-vous de l'indignation et de la révolte des maires à l'époque. Du jamais vu! Même Mme la députée de Jean-Talon, à l'époque mairesse de Sillery, s'était fermement opposée à cette réforme. J'en profite d'ailleurs pour la féliciter aujourd'hui devant cette Chambre pour la vive lutte qu'elle a menée. Les choses ont bien changé, cependant, M. le Président. Nous avons amorcé un dialogue ouvert et transparent avec les représentants municipaux et nous allons conjointement définir un projet de décentralisation acceptable pour tous.

La Table Québec-municipalités a donc décidé de créer quatre groupes de travail pour l'aider à cheminer dans ce dossier de la décentralisation. L'un de ces groupes est chargé d'examiner l'ensemble des lois, règlements et directives qui affectent le milieu municipal afin de proposer des assouplissements pour améliorer la gestion municipale et les services à la population, pour faciliter les interactions entre les institutions gouvernementales et municipales et pour réaliser, si possible, des économies, tant pour le gouvernement que pour les municipalités. Ce projet de loi est le résultat de travaux de ce groupe, M. le Président.

Le temps d'obliger toutes les municipalités du Québec à répondre aux mêmes normes ou à remplir les mêmes obligations est révolu. Je crois, en effet, M. le Président, qu'il est plus que temps de créer un environnement législatif, réglementaire et financier propice au dynamisme des municipalités. Toutefois, je ne suis pas de ceux qui veulent alléger pour alléger. Il nous faut des balises pour guider notre intervention, et, à cet égard, le groupe sur l'allégement des contrôles appuie ses réflexions sur les principes suivants.

Tout d'abord, les élus doivent pouvoir jouir d'une grande autonomie dans la gestion des affaires de leur municipalité et continuer d'être imputables de leurs décisions devant leur population. Ensuite, les citoyens doivent pouvoir intervenir, en cours de mandat, par rapport à certaines décisions de leur conseil. Et le troisième principe, M. le Président, c'est que le ministère des Affaires municipales doit conserver certains pouvoirs d'intervention pour s'assurer de la bonne gestion municipale et de la santé financière des institutions municipales.

(21 h 10)

Ainsi, les allégements des normes et des contrôles qui ont déjà été identifiés et qui résulteront de ce comité sont et seront toujours le résultat d'un compromis entre l'autonomie des municipalités, le droit des citoyens et les responsabilités de l'État.

M. le Président, comme je l'ai mentionné précédemment, ce projet de loi est le premier d'une série issue des travaux sur la décentralisation. Il vise à modifier la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et diverses autres dispositions législatives. On y propose, entre autres, de supprimer plusieurs approbations et autorisations du ministre des Affaires municipales et de modifier les normes ou exigences qui contraignent la gestion municipale.

Il est à noter que ces allégements concernent des lois qui sont sous la responsabilité de mon ministère. À titre de ministre des Affaires municipales, j'ai aussi voulu faire la preuve de la volonté qui m'anime en commençant par l'examen de nos activités. Une fois cette opération terminée, j'inviterai mes collègues ministres à examiner leurs activités pouvant causer problème à l'action des municipalités. J'aimerais d'ailleurs, ici, ce soir, M. le Président, remercier mon collègue, le ministre de l'Environnement et de la Faune, pour sa collaboration récente dans le dossier de l'entretien des cours d'eau. Je peux vous dire une chose: quand on veut régionaliser, décentraliser, alléger, il est possible de le faire pour le plus grand bien de nos concitoyens.

Même si ce projet de loi ne traite pas, M. le Président, directement de cette question, je suis fier d'informer cette Chambre, en effet, que ce problème a été réglé à la grande satisfaction du gouvernement et des unions municipales, la question de l'entretien des cours d'eau. Ces dernières avaient réclamé une solution à ce dossier dès la première Table Québec-municipalités, qui s'est tenue le 16 décembre dernier. En un mois, nous avons donc trouvé une solution à un problème qui occasionnait des coûts très importants aux municipalités, ce que l'ancien gouvernement n'avait pas pu faire en un an. Je remercie, encore une fois, mon collègue de la Faune et de l'Environnement pour sa collaboration.

Ainsi, M. le Président, seulement quelques mois après notre entrée en fonction, nous nous attaquions avec ardeur à ce que l'ancien gouvernement aurait dû faire. Cela démontre hors de tout doute notre volonté ferme d'améliorer le système municipal en collaboration et en partenariat avec les principaux intéressés.

À mon arrivée au ministère des Affaires municipales, je fus étonné par le nombre de décisions prises par les conseils municipaux que je devais approuver ou autoriser. Des allégements doivent être apportés, mais, au-delà de cette première constatation, il est important d'étudier les raisons qui avaient guidé ces mesures afin d'arrêter les bons choix. Par exemple, le système de contrôle des opérations financières des municipalités a été mis en place, à l'origine, pour les aider à contrôler leur endettement et éviter de mettre en péril leur situation financière. Aujourd'hui, nous devons modifier le système de financement municipal, mais nous avons convenu avec les représentants municipaux de l'importance de maintenir la confiance des marchés financiers à l'égard de sa qualité et de ne pas toucher à ses éléments fondamentaux.

En effet, il est important de souligner, M. le Président, que ce système jouit d'une réputation enviable et que nous devons en préserver les acquis. C'est pourquoi les allégements proposés dans ce secteur d'activité répondent à un objectif très précis, soit distinguer les opérations de financement des activités courantes des municipalités des éléments fondamentaux reliés à l'endettement municipal.

Ainsi, si l'Assemblée nationale consent à adopter ce projet de loi, M. le Président, bon nombre de décisions de nature locale pourront être prises sans être l'objet d'une intervention ministérielle. De cette façon, tout en conservant la crédibilité du système de financement municipal auprès des acheteurs de titres locaux, l'autonomie des municipalités sera renforcée. Pour ce faire, le gouvernement propose donc qu'une municipalité puisse engager son crédit pendant cinq ans sans devoir obtenir l'autorisation du ministre des Affaires municipales et puisse également, en fonction de critères qui tiennent compte du montant de la caution et de sa population, ne plus avoir à faire autoriser la majorité des cautionnements. Il s'agit d'une nette amélioration, si l'on considère que le ministre des Affaires municipales autorise actuellement tous les cautionnements et approuve les engagements de crédits de plus de trois ans.

Le projet de loi modifie aussi la règle d'approbation du ministre concernant les emprunts par billet. Ces titres pourront être souscrits sans approbation lorsque le montant du billet est inférieur à 100 000 $. De plus, nous proposons de supprimer l'obligation faite aux municipalités de faire approuver par le ministre les conditions des billets effectués par soumission publique lorsqu'elles retiennent l'offre la plus avantageuse.

Nous proposons, en cela, M. le Président, d'étendre aux billets la procédure déjà appliquée aux obligations faites par soumission publique. Contrairement à l'ancien gouvernement, qui ne s'est jamais préoccupé de cette question durant ses deux mandats, dès la première année de notre premier mandat, nous aurons donc répondu positivement aux demandes maintes fois répétées et exprimées par les municipalités. En effet, l'adoption de ce projet de loi permettra à ce que 95 % des actes de financement municipal sur le marché domestique s'opèrent sans contrôle inutile de la part du ministère des Affaires municipales. Le rôle du ministère n'est plus de contrôler mais de soutenir les municipalités qui demandent de l'aide. Par ce projet de loi, M. le Président, c'est une nouvelle culture qui animera mon ministère en matière de financement municipal. Nous livrons donc la marchandise.

Ce projet de loi, également, contient une réduction des approbations et des autorisations dans divers autres domaines de l'administration municipale. Ainsi, les tarifs fixés par une municipalité en matière d'entraide municipale contre les incendies et les ententes entre une municipalité locale et une municipalité régionale de comté sur un fonds de pension ne seront plus approuvées par le ministre des Affaires municipales. Les municipalités pourront ainsi, sans l'autorisation du ministre, conserver au-delà d'une année après l'expiration du délai de rachat un immeuble acheté lors d'une vente pour défaut de paiement de taxes. Voilà une autre amélioration, M. le Président.

Par ailleurs, une municipalité régionale de comté pourra, sans l'approbation du ministre, fixer une autre date pour la vente des immeubles par défaut de paiement des taxes. Finalement, également, ce projet de loi permettra aux municipalités de reporter la date d'adoption de leur budget et la date d'expédition des avis d'évaluation et des comptes de taxes sans devoir obtenir préalablement mon accord. Surtout les années d'élection, M. le Président, le ministre doit signer des approbations de report inutiles à chaque fois. Elles devront, cependant, donner un avis public de ce changement et m'en transmettre une copie et non pas attendre une approbation. Ces allégements constituent donc un gain important pour les gestionnaires locaux qui cherchent de la flexibilité dans leur administration. L'ex-mairesse de Sillery, d'ailleurs, pourra me le confirmer tantôt lorsqu'elle se lèvera.

Outre la suppression ou la diminution des approbations et des autorisations du ministre des Affaires municipales que je viens d'énumérer, ce projet de loi propose des modifications qui accorderont plus de marge de manoeuvre aux conseils municipaux dans la gestion financière et administrative de leur municipalité. En effet, le projet de loi permettra à une municipalité de rembourser à son fonds général, à même le montant d'un emprunt, toutes les sommes qu'elle aura puisées, jusqu'à concurrence de 5 % du montant emprunté, pour des dépenses reliées à l'objet de l'emprunt. Le projet de loi permet également à une municipalité de confier à un tiers la tenue du registre relatif aux obligations qu'elle émet au Québec et de déléguer à son trésorier le pouvoir d'accepter l'offre la plus avantageuse lors de soumissions publiques portant sur des obligations ou des billets.

Aussi, M. le Président, ce projet de loi réduira certains frais que doivent débourser les municipalités. À titre d'exemple, les coûts de publication des municipalités seront réduits avec l'abrogation de l'obligation de faire paraître à la Gazette officielle du Québec un avis concernant la vente d'un immeuble pour défaut de paiement de taxes. De plus, ce projet de loi accroîtra la marge de manoeuvre des élus municipaux en leur permettant d'aliéner sans formalité, mais toujours à titre onéreux, des biens meubles et immeubles dont la valeur ne dépasse pas 10 000 $. Les municipalités pourront également disposer comme bon leur semble des sommes provenant d'un immeuble acquis dans le cadre d'un programme particulier d'urbanisme.

(21 h 20)

Enfin, M. le Président, vous me permettrez de porter à votre attention quelques mesures contenues dans ce projet de loi qui n'auront pas l'ampleur des précédentes mais qui illustrent très bien le virage que j'entends effectuer au ministère des Affaires municipales. Ainsi, les municipalités ne seront plus obligées de transmettre au ministère une copie de leur programme triennal de dépenses en immobilisations, d'aviser le ministre de la location ou de la cession d'un immeuble à certains organismes du réseau de la santé ou à des établissements de garderie et d'indiquer annuellement au ministre l'identité de son vérificateur et que le secrétaire trésorier a fourni le cautionnement prévu par la loi. Dans ce dernier cas, il est même proposé de supprimer toute obligation faite aux employés municipaux, dans la Loi des cités et villes, et au secrétaire trésorier, dans le Code municipal du Québec, de fournir un cautionnement.

Voilà, M. le Président, les allégements que nous voulons apporter dans plusieurs secteurs de l'activité municipale et qui constituent le premier projet de loi issu des travaux de la Table Québec-municipalités sur la décentralisation. Ces modifications sont le fruit, je le rappelle, d'un consensus entre les représentants municipaux et les gens de mon ministère. Elles répondent à des besoins que nous préciserons lors de l'étude des articles de ce projet de loi en commission parlementaire et vont dans le sens de la volonté gouvernementale de faciliter la prise en charge par les institutions municipales de leurs responsabilités actuelles et futures.

M. le Président, c'est avec beaucoup de fierté que j'ai déposé ce projet de loi la semaine dernière et que j'en livre les grandes lignes ce soir. C'est aussi avec fierté et hâte que j'aurai à étudier, article par article, ce projet de loi avec mes collègues de l'Assemblée nationale.

M. le Président, nous avions promis de réduire la paperasse, nous avions promis de réduire les contrôles inutiles et onéreux, nous avions promis l'allégement dans la gestion municipale. Quand c'est rendu qu'on doit aviser les ministres à propos de tout et de rien, qu'on ne permet même pas à une municipalité d'emprunter des sommes aussi banales que 5 000 $ à 10 000 $, par exemple, sans venir quémander un règlement d'emprunt et une autorisation à Québec, bien, on déresponsabilise les gens.

Ces allégements-là, bien sûr, sont loin de vouloir soustraire les élus municipaux à une rigueur de gestion. Au contraire, on leur dit: Les économies d'échelle que vous ferez, le temps que vous sauverez, l'argent qui sera économisé à cause de ces nombreuses paperasses, de ces nombreux contrôles, futiles et onéreux dans bien des cas, eh bien, vous pourrez les mettre à profit au profit de vos concitoyens.

Et c'est dans un objectif, M. le Président, de responsabilisation que le gouvernement actuel, que l'équipe ministérielle actuelle est heureuse de déposer ce projet de loi là, d'inviter aussi les gens de l'autre côté de la Chambre de se joindre à nous, parce que, j'en suis convaincu, ils auront beaucoup de fierté à procéder à une telle opération. Et je vous dis tout de suite: Ce n'est qu'un début. Le comité de travail continue, et, dès l'automne, dès que j'aurai une autre série d'allégements, je la déposerai dans cette Chambre avec encore beaucoup de fierté, M. le Président, et ça sera l'amorce, je crois, d'un nouveau pacte avec le monde municipal, quand nous en serons rendus, très prochainement, je le souhaite et je l'espère, à pouvoir déléguer des pans de mur de responsabilités en les assurant d'ores et déjà que, pour nous, ce ne sera pas du pelletage mais un transfert de responsabilités accompagné des ressources financières pour les réaliser.

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie M. le ministre des Affaires municipales. Je vais maintenant céder la parole à Mme la députée de Jean-Talon. Madame la députée.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, à titre de critique officielle des Affaires municipales, il me fait plaisir de m'adresser à cette Chambre ce soir sur le projet de loi 68, projet de loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal, la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, la Loi sur les dettes et les emprunts municipaux, la Loi sur l'entraide municipale contre les incendies et la Loi sur la fiscalité municipale.

Le gouvernement précédent avait pris l'initiative, avec le projet de loi 29, d'alléger et de supprimer plusieurs contrôles ministériels qui causaient de nombreuses tracasseries et, surtout, d'interminables délais pour les gouvernements locaux. Nous pourrions qualifier ce projet de loi 68 de phase II dans cette grande volonté exprimée depuis fort longtemps par le monde municipal par le biais, évidemment, des deux unions que sont l'Union des municipalités du Québec et l'UMRCQ.

Combien de fois un conseil municipal a-t-il dû attendre après l'approbation du ministre des Affaires municipales, alors que toutes les étapes conduisant à la concrétisation d'un projet ou d'une décision avaient été franchies, tel que prévu par la loi? Il faut, il est vrai, améliorer l'autonomie de gestion des gouvernements locaux. Il faut leur donner des outils qui leur permettent justement de dispenser aux citoyens qu'ils représentent des services de qualité avec rapidité et, surtout, avec souplesse.

Le projet de loi 68 vise à supprimer ou à restreindre les contrôles ministériels sur les décisions prises par les élus municipaux et à simplifier l'application de certaines règles administratives. Cette loi a un impact sur le financement municipal, c'est-à-dire qu'elle permet à une municipalité d'engager son crédit pendant cinq ans au lieu de trois sans devoir obtenir au préalable l'approbation du ministre des Affaires municipales.

Le projet de loi prévoit aussi plusieurs assouplissements, notamment à l'égard des emprunts par billet pour obligations et des emprunts à l'étranger ou en monnaies étrangères. En ce qui a trait aux budgets des municipalités, le projet de loi permet à une municipalité d'en reporter la date d'adoption sans devoir obtenir l'accord du ministre des Affaires municipales; celui-ci peut cependant demander à une municipalité les raisons qui expliquent ce retard.

Ce projet de loi introduit aussi, M. le Président, des allégements dans divers domaines de l'administration municipale et permet notamment aux municipalités de conserver des immeubles acquis par défaut de paiement de taxes, alors qu'avant les municipalités devaient informer le ministre de leur intention de conserver les édifices ainsi acquis. Il leur permet aussi d'aliéner sans formalité, mais toujours à titre onéreux, tout bien dont la valeur n'excède pas 10 000 $.

Le projet de loi 68 amène aussi certaines modifications au niveau des formalités applicables au processus conduisant à l'adoption du règlement municipal et à la transmission de ce règlement à la MRC. Je n'ai pas l'intention de reprendre l'ensemble des articles, mais je vais plutôt expliciter certains des articles qui m'apparaissent importants.

L'article 1 détermine ce que doit contenir l'avis émis mensuellement pour indiquer les biens de moins de 10 000 $ qui ont été aliénés par la municipalité. Ce projet indique qu'une municipalité peut se porter caution et surtout détermine à partir de quel nombre d'habitants, plus ou moins 50 000, une municipalité doit obtenir l'autorisation du ministre des Affaires municipales et à partir de quel montant de caution une municipalité doit obtenir une telle autorisation, 50 000 $ ou 100 000 $.

L'article 2 lève la possibilité d'intervention du ministre sur la décision d'une municipalité d'aliéner les immeubles acquis selon la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme si elle le fait selon le principe d'aliénation habituel. Il lève aussi l'obligation que la municipalité avait d'utiliser le montant de la vente dans un programme spécifique d'urbanisme et d'aménagement. Elle pourra alors utiliser cet argent dans d'autres programmes et à d'autres fins.

L'article 3 lève l'obligation que le greffier d'une municipalité avait de transmettre l'avis d'aliénation mentionné plus haut au ministre des Affaires municipales. Cette transmission ne permettait pas au ministre d'intervenir pour empêcher cette vente puisqu'elle se faisait une fois que tout était vendu ou aliéné. Elle servait toutefois d'élément de dissuasion et d'information.

L'article 4 permet à une municipalité de prendre des engagements de crédit de cinq ans sans autorisation du ministre. À partir du moment où elle décide de conclure un bail ou tout autre acte qui engage son crédit pour plus de cinq ans, la municipalité doit recevoir l'approbation du ministre des Affaires municipales. Il faut noter que, par le passé, cette autorisation devait être requise à tout crédit qui découlait d'un engagement supérieur à un an, puis à trois ans.

L'article 5 lève la possibilité que le conseil municipal avait d'exiger des personnes qu'il emploie le cautionnement nécessaire pour assurer la parfaite et fidèle exécution des devoirs qui leur incombaient. Je connais très peu d'employés qui avaient cette obligation.

L'article 6 lève l'obligation d'une municipalité d'indiquer au ministre des Affaires municipales le nom du vérificateur de la municipalité si celui-ci est le même que l'année précédente.

L'article 7 a la même portée que l'article 1 au niveau des avis portant sur les biens d'une valeur supérieure à 10 000 $, mais il s'applique ici aux régies intermunicipales.

(21 h 30)

L'article 8 lève l'obligation de la municipalité de transmettre au ministre des Affaires municipales le programme d'immobilisations de la municipalité, ce qui n'avait aucune implication directe sur ce programme. Il faut souligner que le ministre peut quand même demander aux municipalités de transmettre ce programme d'immobilisations dans certains cas, comme pour les infrastructures, s'il en a besoin.

L'article 9 permet à une municipalité de repousser l'adoption de son budget sans l'autorisation du ministre. Auparavant, il fallait que la municipalité apporte des preuves suffisantes qu'elle était dans l'impossibilité de faire préparer, d'adopter et de mettre en vigueur son budget dans les délais prévus. Le ministre accordait ce délai additionnel que lui-même pouvait fixer. Cette demande sur le report du budget a été apportée à la suite de la demande des deux unions municipales, qui voulaient une plus grande autonomie des municipalités. Il faut noter aussi que, s'il y a abus, le ministre peut demander tout document ou vérifier les budgets municipaux à la suite d'une plainte d'un citoyen ou d'un intervenant. Il faut souligner également qu'une municipalité qui reporte son budget à chaque mois fonctionne sur le budget de l'année précédente.

L'article 10 lève l'obligation de publier dans la Gazette officielle du Québec un avis qui mentionne dans quel journal et à quelles dates avaient été faites les publications lors de la vente de biens aliénés par la municipalité. C'est le Code civil, ici, qui s'applique, et il n'est pas nécessaire de spécifier ces modalités dans les lois municipales.

L'article 11 donne la possibilité, à une municipalité qui fait l'acquisition d'un bien en défaut de paiement de taxes, de garder cet édifice le temps qu'elle le veut sans qu'elle n'ait besoin de l'autorisation du ministre des Affaires municipales. Dans les faits, encore une fois, il n'est pas arrivé que le ministre des Affaires municipales refuse à une municipalité la possibilité de garder un bien ou un immeuble acquis de cette façon.

L'article 12 donne la possibilité à une municipalité d'utiliser seulement 5 % du montant d'un règlement d'emprunt qui pourrait être destiné à rembourser le fonds général d'une municipalité pour des sommes qui ont été engagées avant l'adoption d'un règlement d'emprunt. Cela peut être fait, par exemple, dans le cas d'une étude qui nécessitera plus tard des travaux. Ainsi, les sommes engagées pour faire l'étude ne peuvent être remboursées pour plus de 5 % du montant du règlement d'emprunt total nécessaire pour la réalisation des travaux.

L'article 13 est relatif à la vente d'obligations, qui pourra dorénavant être faite par soumission écrite, et autorise le conseil municipal à déléguer le pouvoir d'accorder le contrat au nom de la municipalité à une personne ou à un courtier qui pourra émettre ces obligations le plus rapidement possible. Cet amendement est proposé pour augmenter la rapidité avec laquelle peuvent être émises des actions municipales, mais il faut mentionner que cela doit être fait selon un processus décrit à l'article 554, qui encadre très bien la mise en marché ou la vente d'obligations des municipalités. Cet article indique aussi, M. le Président, qu'une municipalité qui emprunte par billet peut choisir le prêteur en tenant compte des adaptations nécessaires à la procédure d'appel d'offres prévue dans la loi actuelle.

L'article 14 indique que le ministre des Affaires municipales doit approuver les conditions des emprunts faits par les municipalités qui veulent émettre des obligations. Cependant, cette approbation des conditions d'emprunt n'est pas requise pour un emprunt par billet à la suite de l'application de la procédure d'appel d'offres prévue à l'article 554 ou par un emprunt par billet dont le montant est inférieur à 100 000 $. Les articles 15 à 36 sont une répétition des articles 1 à 14, mais s'appliquent au Code municipal du Québec. Il s'agit donc de la même réflexion, avec les ajustements, vous conviendrez, qui sont nécessaires au Code municipal.

L'article 36 vient modifier la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et vise à alléger l'administration municipale et celle des MRC de certains contrôles ministériels. Cet article vise à lever l'obligation de la ville de transmettre à la MRC une copie des projets de travaux qu'elle a pour recevoir l'avis de conformité de la MRC. Il y a d'autres mesures de contrôle, dans la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme, qui viennent régler les cas où les modifications apportées au plan d'urbanisme ou au zonage ne sont pas conformes au schéma d'aménagement.

Les articles 37, 38, 39 et 40 visent à éliminer la transmission de certains documents qui ne sont pas des copies finales de projets à la Commission municipale. À l'avenir, les corporations municipales, ou encore les MRC, n'auront que la copie finale certifiée à transmettre à la Commission municipale.

L'article 42 a la même signification que l'article 36 sur l'avis, mais concerne cette fois le contrôle intérimaire qui s'applique dans le processus de mise en application du schéma d'aménagement. Quant aux articles 45, 46 et 47, ils sont de concordance par rapport aux communautés urbaines de Québec, de Montréal et de l'Outaouais. L'article 47 amène des modifications à la Loi sur les dettes et les emprunts municipaux, entre autres, au titre de la loi. L'article 48 lève l'obligation de voir sur les obligations des municipalités le sceau du ministère des Affaires municipales.

L'article 49 dit que, dans le cadre d'un billet dont le montant est de 100 000 $ et plus ou d'un billet qui a été émis à la suite d'un appel d'offres, ce billet peut être revêtu du certificat du ministre des Affaires municipales. L'article 50 en est un de concordance, tout comme l'article 51. L'article 52 lève l'autorisation que doit donner le ministre des Affaires municipales aux corporations municipales qui ont des ententes de services au niveau des incendies. Les articles 53 à 56 sont des outils de concordance qui viennent amender la Loi sur la fiscalité municipale avec les articles précédemment adoptés, et qui permettent de retarder le dépôt du budget et d'adopter des modalités relatives aux plaintes déposées dans le cadre du budget.

Cependant, M. le Président, même si le ministre est très fier de son projet de loi, vous conviendrez avec moi qu'il ne reflète aucune nouvelle vision de la part de ce gouvernement, puisqu'il se situe dans la continuité d'un mouvement d'allégement par le gouvernement libéral, au printemps dernier. Si le ministre des Affaires municipales se réjouit ce soir du dépôt de son projet de loi, permettez-moi, M. le Président, d'affirmer devant cette Chambre que c'est un projet minceur. Alors que les unions municipales réclament depuis longtemps des centaines d'allégements, le ministre n'a pu nous déposer que des miettes. Vérification faite, il aurait fallu trouver près d'une soixantaine d'autres modifications d'allégement dans ce projet de loi.

Vous me permettrez, M. le Président, d'exprimer ce soir mon étonnement et ma déception de ne pas retrouver dans ce projet de loi 68 les propositions de modification obtenues par de difficiles consensus et compromis à la Table Québec-municipalités. Le ministre des Affaires municipales a créé, à la Table Québec-municipalités, un groupe de travail chargé spécifiquement d'allégements de contrôle législatif. Six réunions d'une journée complète chacune se sont tenues depuis le 20 janvier 1995. Après consensus, une trentaine de modifications à la Loi sur l'aménagement et l'urbanisme et une vingtaine d'autres à la Loi sur les élections et les référendums avaient été convenues. Comment se fait-il qu'aucune de ces modifications ne se retrouve dans le projet de loi 68?

M. le Président, c'est du maquillage, c'est de la cosmétique. Est-ce que c'est ça, la nouvelle façon de gouverner? Tout est sur la table. Il faut décentraliser, nous dit le ministre des Affaires municipales. Éliminons la paperasse, éliminons les tracasseries. Si le ministre, ce soir, est fier, s'il se félicite de son projet de loi, je l'inviterais à aller jusqu'au bout de sa volonté, de cette volonté dont il nous parlait tout à l'heure, qui l'anime, et d'avoir le courage de nous présenter très prochainement – pas à l'automne prochain, comme il nous l'a mentionné tout à l'heure – dès cette session-ci, un nouveau projet de loi traitant, cette fois-ci, des consensus et des compromis obtenus à la Table Québec-municipalités depuis le 20 janvier dernier.

(21 h 40)

M. le Président, vous me permettrez de mettre en doute la bonne volonté du ministre des Affaires municipales qui, d'un côté de la bouche, dit à cette Assemblée nationale qu'il va assouplir les règles qui régissent le monde municipal, et qui, de l'autre côté de la bouche, veut forcer – oui, je dis bien «forcer» – les municipalités à intervenir dans le cadre du projet de loi 46. J'aimerais vous citer ici l'extrait d'une entrevue accordée par le ministre des Affaires municipales à la revue Construire , édition février-mars 1995: «Avec le projet de loi 46, nous envisageons aussi de forcer les municipalités à transmettre au ministre du Revenu les informations qu'elles détiennent sur les entrepreneurs actifs sur leur territoire pour que ce ministère puisse effectuer des vérifications et faire payer les taxes dues à l'État.»

Alors, M. le Président, je pose la question au ministre des Affaires municipales: Que veut-il vraiment, l'assouplissement des règles ou leur renforcement? Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Jean-Talon. Y a-t-il d'autres intervenants? M. le député d'Abitibi-Est, je vous cède la parole.


M. André Pelletier

M. Pelletier: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir d'intervenir sur le projet de loi 68, qui vise à alléger certaines procédures administratives des gouvernements locaux, spécialement des municipalités. Ce projet de loi vise surtout à faire confiance aux municipalités, à ses échevins, à ses maires, à ses dirigeants. Je reviendrai sur cette notion de confiance.

Avant d'être député d'Abitibi-Est, avant d'être adjoint parlementaire au ministre des Affaires municipales, M. Guy Chevrette, j'ai été, pendant 16 années, membre d'un conseil municipal. J'ai été membre du conseil municipal de la ville de Val-d'Or; échevin, de 1976 à 1980, et trois termes à la mairie, c'est-à-dire 1980 à 1992. J'ai eu le plaisir de participer à la naissance d'une MRC, celle de la Vallée-de-l'Or. J'ai travaillé à une commission sur les affaires municipales, sur le fonctionnement municipal, avec notre premier ministre, M. Jacques Parizeau. J'ai aussi eu le plaisir de siéger à l'Union des municipalités.

Je vous dis ces choses pour bien faire comprendre que le monde municipal, de 1976 à 1995, a passé par plusieurs niveaux d'appréciation. Dans les années 1976-1980, nous avons connu, sous le gouvernement du Parti québécois, la réforme fiscale, au début de 1980. Le monde municipal, à ce moment-là, était vraiment plein d'espoir. Nous avons connu, avec cette réforme fiscale, qui avait donné des moyens financiers aux municipalités, des années d'espoir et aussi des années d'effervescence au niveau du développement des municipalités, avec tout ce qu'on a connu au niveau des MRC, des plans d'aménagement et aussi du développement de la structure et des équipements municipaux.

Vinrent ensuite les années noires, les neuf années du gouvernement libéral, de 1985 à 1994. Le climat de confiance que le Parti québécois avait établi avec le monde municipal, au début des années quatre-vingt, a pris toute une débarque avec la venue de la tristement célèbre réforme Ryan. Nous étions maires de municipalité, ma collègue, Mme la députée de Jean-Talon, l'était aussi. On n'était peut-être pas nécessairement de même allégeance, mais on avait tous en commun, les 1 600 maires du Québec, on était tous écrasés par la réforme Ryan.

Cette réforme a eu lieu sans aucune consultation, sans avertissement. Je me rappelle la première information qu'on a eue de la réforme Ryan, c'était un petit papier informatique qui nous disait combien on perdait. Dans mon cas, dans ma municipalité, on perdait d'un coup, juste avant de faire nos budgets annuels, un demi- million, 500 000 $. Plus tard, sans consultation encore, et souvent d'une manière où on avait l'impression, le monde municipal, d'être rapetissé, on nous a coupé toute la question de la voirie rurale, ou on nous a remis la voirie rurale, encore là sans avertissement, sans préparation.

Chaque année, pendant les années 1985 à 1992, les années du pouvoir du Parti libéral, chaque année, on nous annonçait des mesures qui faisaient en sorte qu'on diminuait la confiance du monde municipal. On recevait tous les coups bas des dépenses, on n'avait jamais les revenus pour y faire face. On était un peu les mercenaires du gouvernement d'alors.

Lorsqu'on est dans une municipalité, que ce soit à Malartic, en Abitibi, une municipalité de campagne en Estrie ou dans la grande ville de Montréal, l'effet destructeur du monde municipal a fait son oeuvre. Le Parti québécois, dès son élection, le 12 septembre, s'est rapidement mis à la tâche de rebâtir les ponts avec le monde municipal, de recréer cette confiance. Et ce projet de loi en est un exemple.

Mais, bien avant ce projet de loi, le ministre des Affaires municipales, M. Chevrette, avait déjà posé des gestes très forts, très importants. Je pense ici à tout le Programme d'assainissement des eaux. M. Chevrette et notre gouvernement, nous avons remis sur les rails ce programme, mais on l'a remis dans un sens de partenariat avec le monde municipal, dans un sens de confiance. On l'a remis avec un niveau de financement adéquat, mais aussi on l'a remis en disant aux municipalités: Vous allez être les maîtres d'oeuvre. Vous allez, avec le gouvernement, être les responsables de 500 000 000 $ de travaux. Vous allez être les responsables de terminer ce grand dossier qu'est l'assainissement des eaux. C'est tout un nouveau monde que de dire aux municipalités: Voilà 500 000 000 $, et c'est vous autres qui allez les gérer. Vous allez faire les travaux, vous allez être les maîtres d'oeuvre.

Tantôt, notre collègue, députée de Jean-Talon, mentionnait, entre autres, que le gouvernement libéral avait déposé le projet de loi 29. Le projet de loi 29, c'est exact que le gouvernement libéral l'avait déposé, mais dans les derniers mois d'une administration de neuf années. Après avoir bafoué le monde municipal pendant neuf ans, voilà que, juste avant les élections, quelques mois avant les élections, l'ancien gouvernement arrive avec une loi pour essayer de s'excuser, de se rapprocher du monde municipal. Je pense que l'ensemble des citoyens du Québec a donné la réponse qu'il fallait.

L'autre manière de gouverner, c'est vraiment une manière très différente, une manière rapide. Nous, on dépose ce projet de loi – le ministre des Affaires municipales, M. Chevrette, dépose ce projet de loi – moins de six mois après notre arrivée au pouvoir. Eux, le projet de loi qu'ils ont mentionné, ils l'ont déposé après plus de huit années de pouvoir. La nouvelle façon de gouverner, c'est de faire en sorte que le monde municipal non seulement reprenne confiance, mais que le monde municipal devienne aussi un partenaire du gouvernement; que le Québec soit de plus en plus géré par les élus à l'Assemblée nationale et par les élus au niveau local parce que les élus au niveau local sont, de loin, les plus près du citoyen. Ils sont les élus de première ligne, comme on dit en termes de santé. Et cette confiance dans les élus municipaux, c'est par cette loi-là, et, comme l'a dit le ministre tantôt, il y aura plusieurs autres lois qui vont arriver au cours de l'année pour renforcer ce partenariat et cette confiance envers les élus municipaux parce que le Québec aura besoin, dans l'avenir, plus que jamais de ce partenariat, de cette aide, de cette confiance mutuelle à travers tous les Québécois, spécialement entre les élus à l'Assemblée nationale et les élus du monde municipal. Merci, M. le Président.

(21 h 50)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je remercie M. le député d'Abitibi-Est. Est-ce que, M. le ministre, vous voulez exercer votre droit de réplique quelques minutes?

M. Chevrette: M. le Président, avec plaisir, oui, si vous me le permettez.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, je vous cède la parole.


M. Guy Chevrette (réplique)

M. Chevrette: M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention la députée de Jean-Talon, critique en matière d'affaires municipales, ainsi que mon collègue d'Abitibi-Est, et, M. le Président, je voudrais rétorquer à certaines allégations de la députée de Jean-Talon. M. le Président, normalement, l'étude article par article se fait en commission parlementaire. J'aurais aimé entendre des jugements de valeur sur les différents articles qu'elle a énumérés parce qu'on aurait pu se rendre à 33 – il y avait 33 articles, M. le Président.

Ceci dit, la députée de Jean-Talon, ex-mairesse de Sillery, nous dit qu'on veut forcer les municipalités en ce qui regarde la lutte contre le travail au noir. Elle trouve ça scandaleux qu'un gouvernement veuille faire la lutte à l'économie au noir. Je m'excuse, M. le Président, mais je ne trouve pas ça scandaleux, je trouve que c'est la responsabilité d'un gouvernement, moi, de lutter contre une économie au noir. Et, si le gouvernement libéral n'avait pas laissé, pendant neuf ans, s'instaurer cette économie au noir, on n'aurait pas à prendre des mesures radicales, aujourd'hui. Tout ce que j'ai demandé aux municipalités, M. le Président, au-delà du vocabulaire utilisé, c'est qu'elles collaborent avec nous à enrayer cette économie au noir, M. le Président. C'est plus de 400 000 000 $, me dit-on, dans l'industrie de la construction, l'économie au noir. Est-ce qu'on ne doit pas unir nos efforts, autant ceux du monde municipal que les parlementaires, ici, pour lutter contre cette économie au noir au lieu d'être contraints de faire des ponctions majeures dans certains domaines, dans des programmes que nous avons?

Cette même équipe qui voulait nous faire voter une loi pour arrêter les déficits, cette même équipe qui, pendant neuf ans, a triplé le déficit québécois, cette même équipe qui n'a absolument rien fait pour enrayer le noir dans la construction – au contraire, ils avaient passé la loi 142 pour accélérer le travail au noir – cette même équipe qui a laissé aller la contrebande des cigarettes à un point tel qu'ils ont été obligés d'enlever toutes taxes sur les cigarettes... Et je pourrais continuer, M. le Président. Il faut avoir du culot pour n'avoir rien fait pendant neuf ans. Tout ce qu'ils ont fait pendant neuf ans, c'est de trouver le moyen de pelleter la facture de la police dans la cour des municipalités, et donc dans les poches des citoyens, de confier la voirie tertiaire, avec quelques petits sous, pour trois ans, mais après ça, dire: Bye-bye, payez, vous autres, les citoyens; transmettre un paquet de ponts en état délabré à des municipalités qui ne seront jamais capables de payer pour la réfection, de toute façon, et en disant: Le transport en commun, vous vous débrouillerez avec. C'est ça qu'ils ont fait pendant neuf ans. Ils n'ont pas apporté un allégement, et elle est scandalisée ce soir, cette dame, du fait qu'on arrive avec une trentaine d'allégements. M. le Président, moi, je respecte les gens qui ont du culot, qui ont de l'audace, mais j'ai peu de respect quand ça frise l'inconscience.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le ministre, nous vous remercions. Je vais mettre aux voix maintenant le principe du projet de loi. Le principe du projet de loi 68, Loi modifiant la Loi sur les cités et villes, le Code municipal du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté? Alors, donc, est-ce que c'est le vote par appel nominal? Très bien. Vous voulez parler, alors, vous pouvez vous lever.

M. Chevrette: M. le Président, quand j'étais dans l'opposition, on m'a toujours dit que ça prenait cinq députés pour appeler un vote nominal. Mais, dans les circonstances, M. le Président, ça me fera plaisir de le reporter quand même, parce que c'est mon vis-à-vis dans une autre matière. Donc, il me fera plaisir, mardi, de procéder au vote nominal sur ce très bon projet de loi.

Des voix: Ha, ha, ha!


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vote reporté.

Maintenant, M. le leader du gouvernement.

M. Chevrette: Compte tenu de l'heure, mon cher Président, je propose l'ajournement de nos travaux à mardi, 14 heures.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, nous allons lever la séance et nous allons... Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Ah oui! Ah oui!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, oui, elle est adoptée par tout le monde, hein? Alors, nous allons lever la séance et ajourner l'Assemblée à mardi prochain, 14 heures.

Une voix: D'accord.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bonsoir et bonne fin de semaine.

(Fin de la séance à 21 h 56)


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