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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le mercredi 19 novembre 1997 - Vol. 35 N° 135

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures quatre minutes)

Le Vice-Président (M. Pinard): Mmes et MM. les députés, veuillez vous asseoir.


Affaires du jour


Affaires inscrites par les députés de l'opposition


Motion proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il retire du projet de loi n° 161 les articles qui imposent une hausse de taxes et d'impôts pour les contribuables

Nous débutons ce matin les affaires du jour par les affaires inscrites par les députés de l'opposition. À l'article 56 de votre feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 de votre règlement, M. le député de Nelligan présente la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Parti québécois qu'il retire du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, les articles qui imposent une hausse de taxes et d'impôts pour les contribuables québécois.»

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, avec le consentement de notre collègue le député de Nelligan et le consentement de mon collègue et ami le whip en chef de l'opposition officielle et député des Îles-de-la-Madeleine, j'aimerais vous dire très succinctement mais très sincèrement, en mon nom et sans aucun doute au nom de tous les collègues, le plaisir que nous avons de vous voir de retour à l'Assemblée nationale. Nous savons, M. le Président, que malheureusement vous avez eu de petits ennuis de santé et qui se sont fort bien résorbés et nous vous voyons en pleine forme, donc nous sommes très heureux de vous retrouver au Parlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le whip en chef de l'opposition.

M. Farrah: Tout simplement, M. le Président, je fais miens les propos du leader adjoint du gouvernement, et, au nom de l'opposition officielle également, nous sommes très heureux de vous voir parmi nous et en bonne santé. Alors, bienvenue.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci beaucoup, merci à vous tous. Alors, vous me prenez quelque peu par surprise. Nous allons redébuter nos travaux en cette Assemblée, et j'ai vraiment hâte également de nouveau de chausser les patins pour aider mes collègues et confrères à batailler ferme devant notamment l'équipe des journalistes.

Alors, nous revenons à nos travaux. Avant le début de cette séance, nous avons tenu une réunion avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat. Le partage du temps a été établi de la façon suivante: l'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes; cinq minutes sont allouées à chacun des députés indépendants; 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant le gouvernement et 50 % du temps restant est alloué au groupe parlementaire formant l'opposition officielle. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes s'ajoutera à celui de l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé pour les députés indépendants pourra être redistribué entre les groupes parlementaires. Prenez note que les interventions ne seront soumises à aucune limite.

Alors, je suis maintenant prêt à entendre le premier intervenant, M. le député de Nelligan. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Ça va être un débat assez important pour la population québécoise parce que nous avons devant nous le projet de loi n° 161 qui va alourdir le fardeau fiscal des contribuables de plus de 1 000 000 000 $; un projet de loi, M. le Président, de 500 pages, 756 articles, 26 projets de loi. Ils arrivent à la toute dernière minute et, juste avant Noël, quand tout le monde est en train de réfléchir à d'autres choses, ils veulent passer tous ces articles de loi. Parce que, pendant les derniers six mois, le gouvernement a essayé de convaincre la population québécoise que c'était une bonne affaire, que c'était une loi qui répond à leurs besoins. Mais c'est faux, M. le Président. Les chiffres ne mentent pas. Les chiffres sont assez clairs qu'il y a une augmentation du fardeau fiscal pour les contribuables québécois.

J'ai vu la sortie du ministre des Finances. On peut faire un débat des chiffres, des milliards, M. le Président, mais le vrai monde, M. et Mme Tout-le-Monde, sait que, dans nos poches, nous avons moins d'argent avec ce gouvernement. Nous avons perdu notre revenu disponible, et je vais prouver ça un peu plus tard, M. le Président.

L'impact financier de ce projet de loi, du projet de loi n° 161, est grave. Pendant les prochains trois ans, nous sommes convaincus, avec les chiffres fournis par le ministère, que nous allons avoir une augmentation du fardeau fiscal des contribuables de plus de 1 000 000 000 $. Laissez-moi vous expliquer, M. le Président, je pense que vous allez aussi être convaincu.

(10 h 10)

L'augmentation de l'immatriculation, de la taxe sur le véhicule: 2 000 000 $; taxe sur le tabac: 19 000 000 $ d'augmentation. Nous avons caché aussi, dans plusieurs articles, toute l'obligation de pourboires qu'à la toute dernière minute la ministre est en train de négocier parce qu'elle n'a rien fait, absolument rien, pendant les derniers 12 mois. Ils ont eu les recommandations de l'Association des restaurateurs avant Noël l'année passée. Maintenant, ils sont en train de négocier à toute vitesse pour avoir quelque chose d'implanté le 1er janvier. Ça n'a pas de bon sens, M. le Président.

Il y a aussi beaucoup d'autres augmentations: 15 000 000 $ dans le cinéma. Mais la chose la plus frappante, c'est l'augmentation de la TVQ: 1 %. Oui, effectivement, ils ont parlé de ça le 25 mars, mais ils n'ont rien dit depuis ce temps-là. M. le Président, est-ce que vous êtes au courant de combien ça coûte, l'augmentation de la TVQ, l'augmentation de 1 %; 6,5 % jusqu'à 7,5 %? Ça coûtera, l'année prochaine, 675 000 000 $. Les chiffres du ministère: 675 000 000 $. Avec ça, oui, il y a quelques crédits d'impôt, mais les crédits d'impôt sont beaucoup moins important que l'augmentation du fardeau fiscal. En bout de ligne, c'est assez clair: pendant trois ans, il y a une augmentation du fardeau fiscal. Dans le budget et dans 161, on peut aussi trouver l'abolition du remboursement partiel de la TVQ accordé aux municipalités. Un autre 88 000 000 $ dans le budget que nous avons vu, 88 000 000 $. Et, M. le Président, je ne parle pas du pelletage qu'ils sont en train de faire de 500 000 000 $. Je n'en suis pas là, c'est au-dessus de ça.

M. le Président, avec ça, j'ai de la misère à voir comment ce gouvernement peut nous dire que nous allons sortir gagnants. Ils sont en train de taxer tout ce qui bouge. Ils sont en train de cacher les dépenses. Ils sont en train de couper aveuglément dans la santé et les services sociaux. Ils sont en train de nous taxer d'une façon illimitée. Avec ça, qu'est-ce que nous avons comme bilan de ce gouvernement? Plus de taxes, moins de services, et l'avenir, le futur hypothéqué. Ce n'est pas un bon bilan, M. le Président. Ils doivent avoir honte de ça, M. le Président. Ils doivent avoir aussi honte qu'hier quand nous avons sorti l'information sur le marché noir de l'information confidentielle au ministère du Revenu.

M. le Président, effectivement, c'est clair. Juste dans mes brefs commentaires, ici, je mentionne déjà une augmentation de taxes. J'ai dressé une liste; je peux continuer. Je peux continuer avec l'augmentation des taxes scolaires, et je peux continuer avec tous les frais des usagers dans... Je peux parler de la taxe-médicaments. Moi, j'ai parlé juste des choses que nous avons trouvées dans 161. Là, si on veut faire un autre débat, mettre toutes les cartes sur la table, où sont les augmentations de taxes, nous allons tous être aussi au courant que c'est un gouvernement qui nous taxe d'une façon illimitée. Ils vont mettre le monde en faillite.

Maintenant, quel consultant, quel gourou financier, fiscal a dit que la bonne chose pour l'économie québécoise, c'est d'augmenter les taxes? Ça n'a pas de bon sens. Tout le monde a demandé un système fiscal plus honnête, plus transparent, plus équitable. Mais maintenant il fait exactement le contraire. Il est en train de taxer, comme j'ai dit, tout ce qui bouge.

M. le Président, je suis convaincu, avec les notes préparées par les fonctionnaires pour la ministre, qu'elle va dire que ça va être bon pour les familles. Il y a les impôts qui vont le traduire, mais, dans l'annexe A du budget, dans les documents qu'on peut trouver qui touchent 161, page 60, c'est clair qu'une famille, avec ce fameux rapport, avec 25 000 $ de revenus de travail, va sortir avec, dans la fameuse réforme, après la hausse de la TVQ... Parce que n'oubliez pas que vous pouvez enlever les impôts ici, mais vous êtes en train d'augmenter les impôts ailleurs. Le «bottom line» – page 20 du budget – d'une famille de deux enfants, 25 000 $ de revenus, ils vont perdre 6 $ avec cette grande réforme. Ce n'est rien de spécial, ici. Une famille avec 20 000 $, ils vont ajouter 4 $, selon eux. M. le Président, ce n'est pas correct comme façon de faire. Dans les autres cas, quand ils prétendent qu'il y a une baisse pour eux, c'est clair. Avec toutes les autres taxes, l'augmentation des taxes municipales, l'augmentation des taxes scolaires, ils vont perdre tous les bénéfices. Avec ça, en bout de ligne, M. le Président, la famille avec 25 000 $ de revenus perd.

Pour la famille avec 30 000 $, il y a les taxes municipales, il y a les taxes scolaires et, comme je l'ai mentionné... Je ne sais pas si vous avez des enfants à l'école. Dans nos écoles, maintenant ils nous chargent 160 $ pour garder nos enfants pendant l'heure du lunch parce que ça a été tout coupé. Avec ça, indirectement partout, le gouvernement est en train de nous taxer, de s'assurer que la population québécoise, les contribuables aient moins d'argent dans leurs poches. Oubliez les débats de milliards et de milliards, ils ont moins d'argent dans leurs poches.

Le Bureau de la statistique du Québec – ça, ce n'est pas quelque chose que le Parti libéral a arrangé – dit que nous avons eu une baisse de revenu disponible cette année de 2,1 %. C'est 2,1 % de moins d'argent dans nos poches. M. le Président, je sais qu'elle va dire: Ah! ça va mal partout. Le reste du Canada, effectivement, ils ont eu une légère baisse aussi de 0,4 %. Le Québec est cinq fois plus haut que le reste du Canada. Où est l'équité? Nous avons une baisse du revenu disponible.

L'autre chose assez importante. Encore une fois, le Bureau de la statistique du Québec, qui est une instance assez importante ici, au Québec, a dressé une liste de 28 indicateurs économiques, 28. Est-ce que vous savez de combien le Québec est sous la moyenne canadienne? Je ne suis pas fier de dire ça, mais c'est à cause du gouvernement péquiste: 25 des 28 indicateurs économiques, en comparaison avec le reste du Canada, nous sommes plus bas que la moyenne. C'est embarrassant, oui, je vois, c'est assez embarrassant, M. le Président. Parce que, avec cette façon de travailler, cette façon de taxer, nous sommes en train d'assurer que les familles québécoises aient exactement le contraire de ce qu'elles ont demandé. Elles ont demandé d'avoir un gouvernement compétent, transparent, avec un bon service; elles ont demandé d'avoir un système équitable; elles ont demandé d'avoir un bon service pour leurs impôts. Mais maintenant nous avons vu une augmentation d'impôts, une réduction des services et une augmentation de leur fardeau prolongée par les astuces, les fonds spéciaux.

M. le Président, je pense que le chiffre le plus important, et c'est assez clair, selon le Bureau de la statistique du Québec, c'est 2,1 % de moins pour le revenu personnel disponible. Nous avons, à cause de ce gouvernement, moins d'argent dans notre poche. M. le Président, c'est évident que la population québécoise a perdu confiance en cette ministre et en ce gouvernement. Elle est en train de laisser une augmentation du fardeau fiscal. C'était clair, hier, qu'il n'y a aucun contrôle sur l'information confidentielle dans son ministère. Comment la population peut accepter ça?

Je pense que la chose la plus claire est qu'au moins... refaire ce projet de loi, qu'on le fasse d'une façon qui respecte les demandes, qui respecte les besoins économiques. Et, c'est certain, il n'y a personne ici, dans tout le Québec, parmi les 7 000 000 de personnes du Québec, qui a demandé d'avoir une augmentation du fardeau fiscal. C'est irresponsable, M. le Président, et nous allons prouver que ce gouvernement est complètement incapable de gérer l'économie québécoise. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Nelligan. Nous cédons maintenant la parole à Mme la ministre déléguée au Revenu et députée de Rosemont. Mme la ministre.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. Le moins que l'on puisse dire après avoir entendu le député de Nelligan, c'est qu'il se réveille, parce que, quand on regarde les présentations que le ministre des Finances a faites lors du dépôt du budget au mois de mars dernier, il a été très exhaustif dans la présentation d'une réforme importante de la fiscalité québécoise, une réforme qui était basée sur trois objectifs: la simplification, la compétitivité et l'équité. Quand on regarde le projet de loi n° 161, c'est exactement ce qu'il contient. Et, loin d'alourdir le fardeau fiscal des contribuables, le budget l'allège et le rend plus équitable. Il faut s'étonner, M. le Président, que ce parti de l'opposition, qui a haussé ses impôts et les taxes des Québécois, en cinq ans, de 10 700 000 000 $, se réveille aujourd'hui et nous accuse d'augmenter le fardeau fiscal sans considération, ce qui est faux.

(10 h 20)

Pourquoi c'est faux? Parce que, d'une part, la réduction globale de l'impôt des particuliers est de 850 000 000 $, M. le Président. Elle représente une baisse d'impôts de 15 % pour les ménages qui gagnent moins de 50 000 $; elle représente une baisse d'impôts de 3 % pour les ménages qui gagnent plus de 50 000 $. Dans les faits, ça se traduira par une élimination de l'impôt à payer pour 200 000 contribuables à faibles revenus du Québec. La classe moyenne sera favorisée par cette réforme fiscale et le niveau de vie des ménages à faibles revenus va être amélioré. C'est une réforme fondamentale. Elle modernise, cette réforme, la structure de l'impôt sur le revenu du Québec et réduit de cinq à trois le nombre de taux d'imposition.

En fait, le nouveau régime simplifié qui est présenté dans ce projet de loi là va favoriser 80 % de l'ensemble des contribuables, soit ceux qui utilisent peu les déductions et les crédits d'impôt. Or, ceux qui utilisent peu les déductions et les crédits d'impôt, M. le Président, ce sont généralement les gens à revenus moyens. Il y aura une nette amélioration de la fiscalité des travailleurs à faibles revenus, ce qui permettra, nous croyons, de conserver une plus grande partie de leurs gains de travail et ce qui va poursuivre la relance économique que nous vivons en ce moment au Québec.

Cette relance économique, M. le Président, elle repose aussi sur un certain nombre de mesures qui ont été annoncées dans le budget pour garder justement une compétitivité de notre économie. On nous compare toujours avec l'Ontario, et c'est important de se comparer régulièrement aussi avec nos voisins, parce que, en fait, même si – et on ne le dira jamais assez, on ne le répétera jamais assez parce qu'il semble que l'opposition ne s'en souvient jamais – on n'a que 19 % de notre production intérieure brute qui est vendue à nos voisins canadiens contre 35 % qui est vendue à nos voisins internationaux, nos partenaires internationaux, néanmoins il est important sur le plan de la promotion de l'investissement de garder une compétitivité et une harmonie avec nos concurrents ontariens. Effectivement, nous avons fait une baisse de 6 % pour garder cette compétitivité. Je crois que notre réforme, c'est un premier pas pour maintenir notre compétitivité, garder l'avantage et surtout garder la confiance des consommateurs.

Dans notre projet de loi, et c'est vrai qu'il y a beaucoup de choses dans ce projet de loi n° 161... Mais il faut bien se rendre compte aussi que notre projet de loi vise à garder l'équité dans notre société pour continuer à consolider la solidarité sociale. Et je dois vous dire que l'action du gouvernement précédent n'a fait, pendant 10 ans, qu'éroder cette solidarité sociale en liguant les riches contre les pauvres. Et aujourd'hui ce qu'on essaie de faire avec nos réformes, en simplifiant tout ça, c'est peut-être d'en accorder un petit peu plus à ceux qui en ont besoin et puis de demander à ceux qui ont un peu plus d'argent d'assumer, pour le moment, une plus grande responsabilité fiscale et un plus grand paiement des services publics.

Je ne peux pas nier, M. le Président, que l'impact de la loi n° 161 va avoir une incidence importante sur les revenus du gouvernement. Bien sûr. On retrouve non pas 1 000 000 000 $, mais 938 000 000 $ qui vont effectivement s'ajouter aux revenus de l'État, lorsqu'on exclut de ces impacts les mesures qui visent à assurer la perception de tous les impôts, les taxes au gouvernement.

Ce qu'on veut dire par là, c'est que vous savez qu'il y a à peu près 440 000 000 $ de plus cette année que nous allons récupérer de manière fiscale par une lutte sérieuse contre l'évasion fiscale et le travail au noir. Cet effort de tous les instants – auquel j'aimerais beaucoup, d'ailleurs, que l'opposition souscrive et qu'elle nous aide à réaliser ces objectifs – c'est une étape additionnelle. Parce que, quand on regarde la structure de nos revenus, on se rend compte que, seulement en 1997 et 1998, M. le Président, par une vérification des rapports d'impôts de gens qui réclament des crédits d'impôt ou qui oublient de déclarer des revenus de placements qui viennent d'un peu partout, c'est 50 000 000 $ que l'on va récupérer strictement en appliquant de manière rigoureuse une analyse aux données qui sont fournies par le ministère du Revenu. Quand je parle d'équité, c'est de ça que je parle, parce que les crédits d'impôt et les crédits de placement, généralement, sont le fruit de gens qui ont des revenus importants.

Il y a aussi dans notre réforme un élément très important, et c'est cette nouvelle table d'imposition qui se combine avec un montant forfaitaire de 2 350 $ par contribuable et une hausse de 20 % à 23 % du taux de transformation des crédits d'impôt non remboursables. L'ensemble de ces mesures vont rendre le régime d'imposition beaucoup plus progressif qu'actuellement. Et, encore là, c'est une caractéristique très importante de cette réforme, la progression des revenus. Au Québec, on a le droit de faire de l'argent, c'est bon qu'on fasse de l'argent, mais, quand on fait de l'argent, il faut que l'on paie tous ses impôts et toutes ses taxes. Si on fait beaucoup d'argent, c'est normal qu'on paie un peu plus d'impôt que ceux qui en font un peu moins. Alors, le seuil des revenus à partir duquel les contribuables du Québec vont payer un impôt va être haussé de manière importante. C'est pour ça qu'on aura 200 000 contribuables qui n'auront plus à payer d'impôts, parce qu'on augmente le seuil et on augmente un peu l'imposition de ces revenus plus élevés.

J'aimerais peut-être donner un exemple ici, parce que je pense que ça a son importance. Les exemples, c'est toujours plus facile à comprendre. Si on prend le seuil d'imposition d'un couple qui aurait deux enfants et qui disposerait de deux revenus de travail, son seuil serait porté de 29 295 $ comme seuil d'imposition, ce qu'il est en ce moment, à 30 786 $ avec la réforme qu'on fait. Donc, il passe le cap des 30 000 $. Évidemment, la limite des revenus sera 50 000 $. En bas de 50 000 $, ils auront donc une baisse de 15 % et, au-dessus de 50 000 $, une baisse de 3 %.

L'essentiel de l'impact du projet de loi n° 161 ne constitue pas vraiment, dans les faits, une hausse du fardeau fiscal. C'est plutôt un report des baisses d'impôts qui étaient prévues aux entreprises. C'est vrai. Il provient du maintien des restrictions au remboursement de la TVQ sur les intrants des grandes entreprises. C'est vrai qu'on demande un effort additionnel aux grandes entreprises, mais nous pensons que cet effort-là sera largement compensé par l'augmentation de l'activité économique et le maintien de la compétitivité de nos entreprises.

Il y a beaucoup de gens qui se demandent quel est l'avantage d'une déclaration conjointe, parce qu'à partir de janvier 1998 ce sera possible de faire une déclaration conjointe. En fait, c'est une mesure qui vise, encore là, à simplifier et qui avait été proposée par la Commission sur la fiscalité et le financement des services publics. En utilisant le formulaire conjointement, les couples vont pouvoir établir beaucoup plus facilement, sans se référer à une grille un peu plus complexe, qui est généralement annexée au guide, les montants de crédits qui peuvent se transférer lorsque ces montants ne peuvent réduire l'impôt de l'un ou de l'autre des conjoints. Ce calcul va donc se faire automatiquement en établissant l'impôt à payer de chacun. Donc, il y a des avantages pour certains conjoints à faire une déclaration conjointe. Il va leur être plus facile aussi d'établir le montant qu'ils vont pouvoir réclamer au titre des crédits d'impôt basés sur le revenu, puisque toute l'information nécessaire va alors être consignée dans le même formulaire. Et, en fait, il sera plus facile d'établir la partie du remboursement de l'un des conjoints qui pourra être appliquée contre le solde de l'autre conjoint, le cas échéant.

(10 h 30)

Maintenant, comment est-ce que le contribuable va effectuer ce choix-là? Il y aura trois outils qui vont être placés à sa disposition pour qu'il puisse vraiment faire un choix entre le régime général ou un régime plus simplifié. Il y aura une grille d'évaluation qui permettra d'établir si le contribuable a avantage à utiliser le nouveau régime simplifié qui sera dans le guide de sa déclaration de revenus pour 1998. Dans le cas où un contribuable va se prévaloir du régime général, notre ministère, le ministère du Revenu, va effectuer une vérification pour établir s'il peut y avoir un avantage à utiliser un régime simplifié. De cette façon, le gouvernement va s'assurer que tous ceux qui le peuvent vont profiter du nouveau régime. Et enfin, le ministère du Revenu va indiquer au contribuable, à l'envoi de sa déclaration de revenus, s'il y a un avantage à utiliser le régime simplifié l'année précédente... s'il y aurait eu avantage l'an passé, compte tenu de ses caractéristiques, et un contribuable dont la situation demeure la même pourra, s'il le souhaite, suivre cet avis.

En résumé, avec le nouveau régime simplifié, les déclarations des deux conjoints vont pouvoir tenir sur le même formulaire, et les contribuables n'auront plus à se référer à une annexe pour calculer l'impôt. La table d'impôt à trois taux va être intégrée à la déclaration des revenus. Je ne sais pas si on se rend compte de l'importance de ça, de l'impact que ça va avoir. Souvenons-nous de ce que ça a l'air de remplir notre déclaration de revenus: la complexité, l'envergure, la quantité de documents. Nous croyons que 80 % des contribuables vont avoir un intérêt à utiliser le nouveau formulaire de régime simplifié et nous pensons que c'est nettement supérieur au taux d'utilisation de l'actuel formulaire que l'on qualifie de simplifié qui n'est que de 35 % à 40 %.

Je m'en voudrais de ne pas mentionner dans les réformes importantes du budget ce que nous avons proposé dans le projet et que nous matérialisons par le projet de loi n° 161 concernant les personnes âgées. On sait que – je l'ai mentionné au début – en plus de la simplification, l'équité et la compétitivité sont deux éléments qui ont guidé la réforme fiscale. En matière d'équité, on sait aussi que les gens âgés dans notre société sont, je pense, un groupe de la société fragile, qui a beaucoup travaillé pour l'avenir du Québec et qui aujourd'hui se repose et pour lequel nous prenons la relève. Les ménages qui comprennent des personnes âgées vont avoir un gain important de 161 000 000 $; c'est en fait presque 20 % du gain total de 841 000 000 $ dont j'ai parlé au début. Actuellement, les personnes âgées contribuent pour 11 % au titre de l'impôt. La réforme va profiter, bien sûr, aux personnes âgées, plus celles dont le revenu est de 50 000 $ ou moins puisqu'elles vont s'inscrire dans cette grande majorité; elle va améliorer leurs conditions de vie et leur sécurité financière.

Il y a deux éléments en particulier qui expliquent ces gains pour les personnes âgées: le nouveau montant forfaitaire de 2 350 $ par contribuable, dont j'ai parlé tout à l'heure, et la transférabilité de ce montant entre les conjoints. C'est particulièrement important pour les couples âgés, et on sait qu'à cet âge-là souvent on intègre, on associe nos finances de manière plus intime pour profiter d'une meilleure qualité de vie. Le deuxième élément, c'est le maintien, dans le nouveau régime simplifié, d'imposition des crédits d'impôt pour la raison d'âge et pour revenus de retraite dont, on le sait, bénéficient les personnes âgées à faibles et moyens revenus.

Je m'en voudrais de ne pas terminer ma présentation sans référer à un sujet dont le député de Nelligan a parlé tout à l'heure: la question des pourboires. M. le Président, dans notre société, tous les employés doivent déclarer leurs revenus, de quelque provenance que ce soit. Nous proposons, dans le projet de loi n° 161, une formule dont l'impact le plus important est d'assurer une couverture sociale aux employés à pourboire. Ça ne s'est jamais vu, M. le Président. Je rencontre les employés à pourboire et c'est extrêmement important pour eux. Ça veut dire qu'ils auront maintenant des paies de vacances, des congés fériés, de l'assurance-emploi. Et nous avons heureusement eu la collaboration du gouvernement fédéral pour pouvoir réaliser cette application, cette couverture sociale.

L'impact de cette facilitation pour déclarer les pourboires va être important quant à l'ensemble du manque à gagner de l'État. Parce qu'on sait qu'il est difficile aujourd'hui non seulement pour les employés à pourboire, mais pour leurs employeurs aussi, de récupérer tous les revenus qui viennent de ce secteur-là. Il faut se rappeler qu'il y a 39 % du manque à gagner, donc de l'évasion fiscale ou de l'économie au noir, pour l'État qui vient du secteur de l'alimentation et de l'hébergement, et c'est un total de 500 000 000 $ strictement pour la restauration.

Alors, j'ose croire, M. le Président, que les modifications que nous proposons dans le projet de loi n° 161 vont pouvoir justement améliorer l'équité dans notre société, simplifier les rapports d'impôts et rendre la société plus compétitive et plus responsable. Je termine, M. le Président, en disant que toutes ces réformes dont je viens de parler, toutes ces modifications, ça nécessite d'être rédigé clairement et exhaustivement. La Loi sur les impôts, c'est vrai que c'est une des lois les plus volumineuses, et le projet de loi n° 161, qui est un premier pas vers la réforme de l'impôt, bien, il traduit, bien sûr, les modifications à la loi de l'impôt. Et la loi de l'impôt, elle fait, vous le savez, presque quatre pouces d'épais. Alors, pour changer des articles, il faut en couper, il faut en modifier, et ce projet de loi, qui a l'air très volumineux, indique justement ça, ce qu'on enlève, ce qu'on ajoute, ce qu'on modifie.

J'espère qu'il ne fera pas peur à l'opposition qui, dans sa compétence de lecture de documents légaux, va sûrement travailler avec nous de manière très responsable pour que nous puissions réussir à alléger le fardeau fiscal des Québécois en toute équité et en toute responsabilité. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. Nous cédons maintenant la parole au député de Shefford. M. le député.


M. Bernard Brodeur

M. Brodeur: Merci, M. le Président. D'ailleurs, pour répondre à la ministre – on a vu que le projet de loi n° 161 est très volumineux: Si on est ici et si on fait cette intervention-là, c'est que, de ce côté-ci, on les lit, nos projets de loi.

Juste quelques notes que j'ai prises en écoutant l'intervention de la ministre. Je dois vous dire que je suis resté surpris à plusieurs occasions. J'ai d'ailleurs quelques citations. Puis je me demande si les citoyens qui nous écoutent présentement à la maison ont sursauté, eux aussi, lorsque j'ai entendu que, à ce qu'il paraît, nos impôts vont baisser, que ça va aider la classe moyenne, que ça va maintenir notre compétitivité, conserver la solidarité sociale. Quand on paie nos impôts, on se sent tous solidaires un peu plus, j'imagine.

Elle a dit que les libéraux avaient ligué les riches contre les pauvres. Maintenant, on s'arrange, M. le Président: on fait tous des pauvres au Québec, j'imagine, à partir de ce projet de loi là. Elle nous a dit aussi que les employés à pourboire étaient contents, les employeurs des employés à pourboire sont aussi contents. Donc, M. le Président, je pense qu'on ne vit pas sur la même planète que la ministre. Puis les gens qui nous écoutent à la maison sont sûrement très, très surpris.

Je trouve malheureux, M. le Président... Vous vous souvenez, il y a quelques années, lorsque j'étais porte-parole en matière agricole, j'étais souvent debout ici. On avait toutes sortes de projets de loi, on débattait. Le chef m'appelle à un moment donné, il dit: Veux-tu aller aux PME? ça va être intéressant, tu sais, les débats économiques. Mais, depuis ce temps-là, M. le Président, des projets de loi, on n'en a pas débattu tellement. Il n'y a rien qui a été déposé sur la table. Ce qu'on fait, naturellement, c'est voir qu'on est le wagon de queue dans l'économie canadienne, et il n'y a rien qui a été fait de façon tangible pour aider à solutionner les problèmes économiques. Naturellement, il y avait un agriculteur chez nous qui me disait: Ça bougeait beaucoup en agriculture, mais c'est aussi bien comme ça en économie parce que ça a bougé en agriculture, mais pas sur le bon bord. Ça fait que c'est aussi bien d'être moins pire, comme ça, peut-être, ils n'ont rien touché. Ils n'ont touché absolument à rien. Ça me fait penser aussi lorsque je dis à mes enfants: Si vous n'aidez pas, au moins ne nuisez pas. Mais, dans le cas actuel, je pense que le gouvernement nuit beaucoup plus à l'économie qu'il nous donne un coup de main.

(10 h 40)

En parlant de nuire à l'économie, M. le Président, on a un projet de loi épais comme ça, qui, en fin de compte, frappe sur tout le monde. On se souvient qu'un ami du gouvernement, M. Bourgault, disait il y a un an que le premier ministre se lève le matin et se demande sur qui il va frapper aujourd'hui. Mais là, avec ce projet de loi là, il ne se trompe pas, il a frappé tout le monde.

Donc, M. le Président, vous savez que je m'intéresse principalement aux petites et moyennes entreprises et il y a un tas de choses dans ce projet de loi là qui affecte directement la compétitivité et puis, en fin de compte, le rendement de ces entreprises-là. De façon anodine, on pense que 1 % sur la taxe de vente, ça touche tous les citoyens, absolument tous les citoyens. Je me souviens, moi, j'étais dans l'entreprise privée lorsque sont arrivées toutes ces taxes-là. Les augmentations de taxes d'il y a quelques années, ça nous touche continuellement. Et là, 1 % de plus, c'est vraiment la goutte qui fait déborder le vase. Lorsque vous opérez une petite entreprise – dans mon comté, j'en ai énormément, des petites entreprises; juste dans le parc industriel, chez nous, j'en ai 300 environ – une taxe de 1 %, ça veut dire que le citoyen, que le consommateur, sa capacité d'acheter est beaucoup moins grande. Il faut savoir, M. le Président, que même si, par chance, nos petites et moyennes entreprises exportent énormément, la très grande majorité des biens qui sont vendus l'est au Québec. Si on enlève le pouvoir d'achat à nos consommateurs, c'est directement nos petites et moyennes entreprises qui vont être touchées par ces taxes-là.

Il n'y a pas juste la taxe de 1 %. Lorsqu'on pellette aux municipalités des taxes municipales, aux commissions scolaires des taxes scolaires, ces taxes-là sont retournées aux citoyens par le biais des taxes foncières. Ceux qui ont déjà eu des entreprises, qui ont eu des bâtisses, etc., ils savent très bien que les comptes qu'ils vont recevoir vont être d'autant augmentés. Donc, ça va toucher encore à la petite et moyenne entreprise.

Je n'ai rien entendu, dans le projet de loi, pour au moins, d'un autre côté, alléger le fardeau administratif de nos entreprises, parce qu'on a pas encore touché à la réglementation. On se souvient, dans les discours du ministre de l'Économie et des Finances, des deux premiers ministres qui ont été à la tête de ce gouvernement-là, que, oui, on était pour réduire la réglementation pour aider au moins l'entreprise à respirer. Pendant qu'on les taxe de 1 % sur la masse salariale, puis une taxe par ci, puis une taxe par là, puis qu'on reporte une exemption à plus tard, comme on a dit tantôt, on ne fait absolument rien pour alléger la réglementation. Donc, dans la plupart de nos entreprises, à chaque six employés qu'on a, il faut engager une autre personne pour remplir la paperasse. On aurait pu au moins, tant qu'à y être, dans un projet, comme je dis, épais comme ça, faciliter la tâche des entreprises.

Vous savez aussi, M. le Président, vous faites du bureau de comté – je sais que vous avez été en convalescence pendant un certain temps, mais, habituellement, vous êtes un fervent des bureaux de comté – vous avez sûrement des dirigeants d'entreprise qui vous appellent puis qui vous disent: Écoutez, M. le député, j'ai l'impôt qui vient de m'envoyer une facture de tant, puis là on a engagé du monde, en fin de compte, pour nous mettre au pied du mur. Je comprends, M. le Président, qu'il faut absolument collecter les impôts qui sont dus, sauf qu'il y a un grand principe: si vous pouviez donner un peu de temps à certaines entreprises qui ont quand même passé la crise, et ensuite on peut quand même établir des normes pour que ces gens-là puissent s'en sortir, plutôt que les égorger. Donc, là-dedans, il n'y a aucune mesure qui permette à une entreprise d'avoir un délai, ou une mesure qui va faciliter ses paiements. Absolument rien. Donc, M. le Président, pendant ce temps-là, comme je vous disais tantôt, on taxe.

On a entendu la ministre nous dire que les employés à pourboire étaient contents, que les employeurs aussi étaient contents. M. le Président, dans mon comté en tout cas, puis, je pense, dans votre comté aussi et pour la plupart des gens qui sont ici, moi, je n'ai pas entendu ça, qu'ils étaient contents. Donc, ça va toucher encore les petites entreprises, parce que c'est un nombre impressionnant de personnes qui reçoivent des pourboires, ça va toucher ces gens-là, ça va ajouter de la paperasse encore aux PME, et donc, ça va ne faire que nuire à l'économie pour les montants qui seront ramassés par le gouvernement.

On regarde le chômage aussi. M. le Président, vous me dites qu'il reste trois minutes; j'en aurais encore pour une heure facilement. Donc, on sait qu'au Québec, déjà, les citoyens sont taxés, les entreprises sont taxées, et on est toujours le wagon de queue en matière de chômage. Vous savez qu'on a 30 % des chômeurs au Canada alors qu'on représente 22 % de l'économie canadienne. Donc, le problème de ce gouvernement-là, c'est qu'il ne crée pas une économie qui fait en sorte que les fonds rentrent dans les poches du gouvernement. Mais tout ce qu'on fait, c'est taxer tout le monde, puis on ne voit absolument pas à relancer l'économie qui est toujours le wagon de queue.

On entend souvent le ministre de l'Économie et des Finances comparer l'année 1990 aux années quarante, aux années vingt. Il me fait penser un peu à un de mes voisins qui dit: Moi, je suis allé en Floride, puis il a fait beau; toi, tu es allé, il mouillait, comme s'il s'attribuait le fait que la belle température était due à son passage. Donc, ce qu'il faut retenir de ça, c'est que, lorsqu'un gouvernement est là... Présentement, on est le wagon de queue. Il faut se comparer avec l'ensemble de l'Amérique. On est le wagon de queue en matière d'économie et c'est ça qu'il faut corriger plutôt que de dire: Vois-tu? on est là, c'est moins pire que c'était. Ce n'est pas ça, M. le Président. Le gouvernement a un parapluie sur la tête, puis il pleut tout le tour. Là, il faudrait qu'il se rende compte que, présentement, on a besoin de relancer cette économie-là puis, pour relancer l'économie, c'est de détaxer vraiment ceux qui génèrent des emplois, ceux qui génèrent une effervescence dans l'économie.

Donc, il y a toutes sortes de choses. On rencontre dans nos comtés des gens d'affaires, des gens d'affaires qui se plaignent, naturellement, des taxes, de la réglementation. Il y a d'ailleurs un dossier que je dirige ici, du côté de l'opposition, qu'on appelle le plan Paillé et qui a été créé par le gouvernement. On avait la chance, peut-être, de relancer l'économie en créant un plan, un plan qu'on aurait pu penser autrement pour relancer l'économie. Ce qui est arrivé, on a lancé dans l'économie québécoise 300 000 000 $ et quelques, sans normes, sans rien. En fin de compte, les gens se plaignent à nos bureaux, puis vous savez, M. le Président, qu'on a créé de la compétition déloyale. Prenez chez nous, à Granby, des restaurants, il y en a plein la rue principale puis plein les rues adjacentes. On en a parti d'autres avec les employés des anciens restaurants. Il y en a plus qui ont fait faillite l'année passée. D'ailleurs, au Québec, on détient encore les records de faillites au Canada. Donc, c'est les seules choses qu'on a pu lancer sur le marché. Et aujourd'hui on perd 7 000 000 $ par mois. Ce matin, depuis qu'on est entrés au bureau, le gouvernement a encore perdu 233 000 $ dans ce plan-là. C'est des argents qui auraient pu servir à autre chose, entre autres, à moins taxer les gens, à moins taxer les entreprises puis à peut-être trouver des solutions intelligentes pour relancer l'économie québécoise.

Donc, M. le Président, je sais que mon temps est écoulé, sauf qu'on se doit de réagir à ça et surtout aux propos de la ministre, tantôt, qui nous disait, en fin de compte, que tout va bien. Elle nous disait que c'est bon pour la classe moyenne, c'est bon pour la solidarité. Donc, lorsqu'elle disait au député de Nelligan, en partant, qu'il se réveille, on constate qu'elle puis le gouvernement, ils dorment encore. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Shefford. Nous cédons maintenant la parole à Mme la députée de Saint-François. Mme la députée.


Mme Monique Gagnon-Tremblay

Mme Gagnon-Tremblay: Oui, merci, M. le Président. Ce gouvernement nous a démontré au cours des trois dernières années son incapacité à faire fonctionner l'économie, son incapacité à créer des emplois et son absence complète de leadership en cette matière. Mais il y a une chose cependant qu'il sait bien faire, c'est nous taxer.

Il est décevant de constater que, depuis l'assermentation du premier ministre actuel, il s'est créé au Québec 25 000 emplois alors qu'en Ontario il s'en est créé 183 000. Le Québec n'a réussi qu'à créer 6 % seulement des emplois au Canada malgré le fait que le Québec représente 25 % de la population canadienne. Vous savez, le gouvernement a beau se vanter qu'il s'est créé au cours des derniers mois plus d'emplois au Québec que partout ailleurs au Canada, mais c'est pour nous faire oublier sa piètre performance de l'an dernier alors qu'au Québec il s'est créé 9 000 emplois et qu'il s'en est créé 163 000 en Ontario.

(10 h 50)

Le ministre des Finances, dans son discours sur le budget de mai 1995, il y a presque trois ans, nous disait que les Québécois ne pouvaient plus tolérer le taux de chômage qui était à l'époque de 11,4 %. Trois ans après, le taux de chômage est au même niveau. Rien pour pavoiser. Il faudrait demander aux chômeurs si la situation s'est améliorée, les nombreux chômeurs qui se cherchent de l'emploi actuellement au Québec. Le Québec a le pied sur les freins. La population du Québec a besoin de gestes concrets, la population n'a pas besoin de manoeuvres machiavéliques pour masquer le déficit, masquer la réalité. Je parle du déficit zéro, le déficit virtuel. Il faut créer un climat favorable aux investissements, redonner confiance aux consommateurs, et ce n'est pas en les taxant davantage qu'on va y arriver. Il faut plutôt éliminer les irritants et mettre un terme à l'instabilité politique. Il faut reconnaître que le pire ennemi de l'économie au Québec, c'est le premier ministre, c'est le gouvernement péquiste actuel.

Et je ne suis pas la seule à le dire, M. le Président, puisque, dans le journal Le Devoir du 1er octobre 1997, tout récemment, un militant péquiste disait, et je cite: «L'unique problème au Québec, c'est sa direction politique et gouvernementale.» Il disait: «On se sert de tire-pois pour relancer l'économie, les réformes du gouvernement sont faites à l'aveuglette, on gaspille des ressources humaines comme du jamais vu et on appauvrit la population.» Fin de la citation. On se sert de tire-pois pour relancer l'économie. Mais quelle bonne analyse, M. le Président! On ne cesse de le dire depuis trois ans. Qu'a-t-on fait réellement pour relancer l'économie à part deux référendums, des consultations, des sommets, des colloques de toutes sortes, des structures, création de structures? Qu'a-t-on fait à part inonder les contribuables de taxes, à part augmenter les taxes sur la masse salariale des entrepreneurs?

Jean-Robert Sansfaçon disait, dans Le Devoir du 13 août 1997, et je cite: «Plusieurs moyens existent pour redonner confiance au contribuable: celui de l'annulation de l'augmentation de la taxe de vente québécoise prévue pour janvier, au même moment où entrera en vigueur une nouvelle hausse des cotisations au Régime de rentes du Québec, et une réforme de l'impôt dont on ne percevra les effets positifs sur le revenu qu'à la fin de l'année, soit beaucoup trop tard pour stimuler la confiance des consommateurs. C'est tout de suite que le Québec doit prendre le train de l'expansion. Demain, il sera trop tard.» Fin de la citation.

Et selon les perspectives de Desjardins en 1997, le taux d'endettement à la consommation battra son triste record pour culminer à 23,2 %. Donc, les faillites personnelles fileront allégrement vers un nouveau sommet de 27 300, en hausse de 9,6 % par rapport à 1996. Ça, c'est la réalité, M. le Président. Les Québécois s'appauvrissent. Le taux d'épargne personnelle est passé – écoutez bien, M. le Président – de 7,6 % qu'il était en 1994 à 0,7 % en 1997, et les prévisions pour 1998 ne sont guère meilleures, on annonce environ 1,4 %. Vous vous imaginez, ça, c'est le taux d'épargne personnelle, et on continue à les étouffer avec des nouvelles taxes.

Et le gouvernement continue à taxer. Les taxes, on le sait, tuent l'emploi. La hausse de la taxe de vente provinciale de 1 % en janvier prochain risque de ralentir les ardeurs des consommateurs. Et j'entendais le ministre des Finances qui nous disait: Mais ce n'est pas nouveau, on l'a annoncé dans le budget; pourquoi, maintenant, les libéraux, vous pensez que c'est quelque chose de nouveau, cette taxe de vente? Mais, M. le Président, ça a passé dans le budget; il n'y a pas un contribuable qui l'a vu. Je dirais qu'il y a à peu près le quart de la population de mon comté qui est au fait qu'il y aura une nouvelle hausse de taxe de vente de 1 % à compter de janvier. Personne d'autre n'est au courant de ça, M. le Président.

Les consommateurs, on le sait, tardent à faire des achats, et, même s'il y a une hausse des ventes au détail actuellement, dans cette croissance, elle n'est pas généralisée. Elle est due au secteur lié à l'automobile. La hausse des ventes au détail est attribuable, pour 60 %, aux concessionnaires d'automobiles et de véhicules de loisir. Sans eux, la hausse n'aurait atteint que 4,8 % pour les sept premiers mois de l'année 1997. Toujours selon Desjardins, M. le Président, les secteurs qui ont subi une diminution de leurs ventes par rapport à l'an dernier sont les pharmacies, les magasins de chaussures, de vêtements, moins 7,6 %, et d'accessoires d'ameublement, moins 8,1 %. Qu'est-ce que ça veut dire, ça, pour les entreprises? Et on pense aussi aux stations-service. La liste est plutôt longue. Ce qui incite à croire que, malgré des chiffres impressionnants des ventes au détail, dus entre autres au commerce de l'automobile, la consommation de biens est très fragile.

Et en quoi la hausse de la taxe de vente de 1 % à compter du 1er janvier prochain incitera la consommation et incitera les consommateurs à acheter de nouveaux biens? En quoi la hausse de taxe de vente de 1 % créera des emplois? Tous les économistes le disent, que les taxes ont un effet dévastateur sur l'emploi, sur la consommation, sur l'appauvrissement et sur les faillites. On sait fort bien, M. le Président, que, si les gens ont moins d'argent pour acheter, pour consommer, la demande sera moins forte. Donc, les entreprises diminueront leur production de biens. Et ce qui risque de se produire, ce sont des mises à pied, en plus de freiner, bien sûr, la création d'emplois.

Le gouvernement du Parti québécois doit enfin réaliser que, en taxant toujours davantage les Québécois, en leur imposant toujours de nouveaux tarifs, il diminue leur pouvoir d'achat. Il met un frein à la consommation, un moteur très important de notre économie. Il y a de moins en moins de contribuables qui paient et le gouvernement les étouffe littéralement sous le poids des taxes additionnelles imposées.

Après avoir augmenté la facture d'électricité des contribuables pour 58 000 000 $, après avoir imposé l'assurance-médicaments qui rapportera 300 000 000 $ dans les coffres de l'État, après avoir augmenté les permis de conduire et d'immatriculation pour 20 000 000 $ et soustrait 325 000 000 $ dans les poches des personnes âgées, le gouvernement augmentera la taxe de vente de 1 % à compter du 1er janvier prochain. Ce n'est pas non plus en coupant les services à la population d'un côté et en taxant davantage les contribuables de l'autre que l'économie reprendra de la vigueur. M. le Président, le gouvernement péquiste est incapable de créer la richesse, de créer des emplois, mais il est capable, il est très rapide pour imposer des nouvelles taxes.

Pourquoi sommes-nous toujours dans le wagon de queue, M. le Président? Il y a un prix à payer pour notre sport national: des référendums à répétition. Il y a un prix à payer aussi pour nos chicanes: chicanes avec le fédéral, chicanes avec les municipalités, divisions, divisions pour régner. Deux économistes, Guénard et Hinton, écrivaient ceci dans La Presse du 10 octobre 1997, et je cite: «D'élection de gouvernement du Parti québécois en référendum sur l'avenir constitutionnel, la saga de notre introspection nationale rejoint à un moment donné le portefeuille des investisseurs nationaux et transnationaux. Là-dessus, il n'y a aucun doute possible: beaucoup d'industriels du Québec ont les yeux fixés sur la 401, mais ce sont des retardataires. Les autres sont déjà partis.» Fin de la citation.

En effet, M. le Président, les Québécois les plus mobiles sont partis, plusieurs sièges sociaux sont déménagés et d'autres y songent, mais sans faire de bruit. Cette incertitude dure et produit des effets depuis 30 ans. Je pense qu'il faudrait se poser la question: Qu'est-ce qui serait arrivé si on n'avait pas eu cette idée, si on n'avait pas eu ces référendums à répétition depuis de nombreuses années? Le premier ministre nous disait, dans son discours lors de son assermentation, qu'il ne fallait pas imposer de nouvelles taxes, qu'il ne fallait pas non plus imposer, faire des impôts, étant donné que les contribuables étaient déjà suffisamment taxés, qu'il fallait leur donner un peu d'oxygène. Mais, M. le Président, le premier ministre actuellement a le pied sur le tube d'oxygène.

Les hommes et les femmes qui campent actuellement devant le parlement n'ont plus d'oxygène. Ils sont étouffés. Sont-ils plus riches ou moins riches, sont-ils plus pauvres ou moins pauvres depuis le discours du premier ministre? M. le Président, la mémoire politique est courte, mais les victimes ont la mémoire longue. Je me souviens . Ils sauront faire la différence entre un gouvernement qui les appauvrit sur la base d'un déficit zéro fictif au nom de l'option et un gouvernement qui crée la richesse pour mieux la redistribuer, M. le Président.

(11 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la députée de Saint-François. Nous cédons maintenant la parole au député de Drummond. Alors, M. le député.


M. Normand Jutras

M. Jutras: M. le Président, j'interviens aujourd'hui relativement à la motion qui est présentée par l'opposition libérale et qui dénonce le projet de loi n° 161 qui a été présenté par la ministre déléguée au Revenu. Alors, M. le Président, entre autres, l'opposition libérale prétend que ce projet de loi représente une augmentation du fardeau fiscal pour les Québécois de l'ordre de 1 000 000 000 $. Je pense qu'il faut vraiment resituer les choses dans leur contexte et je vous ferai la démonstration que cela est faux.

Il est vrai que l'on retrouve dans ce projet de loi une augmentation de la taxe de vente de l'ordre de 1 %. Premièrement, cela n'est pas nouveau, ça a été annoncé dans le budget qui a été présenté par le député de Verchères et vice-premier ministre au printemps dernier. Cependant, même s'il est vrai qu'il y a une augmentation de la taxe de vente de 1 % au 1er janvier prochain, à la même date les contribuables québécois vont vivre une baisse d'impôts – et ça, c'est une excellente nouvelle – de sorte que, quand on compare l'augmentation de la taxe de vente de 1 % avec cette baisse d'impôts que vont vivre les Québécois, les contribuables québécois vont quand même vivre un avantage net de l'ordre de 280 000 000 $. Quand on soupèse de part et d'autre l'augmentation de la taxe versus la baisse des impôts, c'est quand même un avantage net de l'ordre de 280 000 000 $ pour les contribuables québécois.

Alors, si on regarde les bonnes nouvelles qu'il y a dans ce projet de loi là, je vous disais «une baisse des impôts» – j'y reviendrai pour dire exactement ce que ça représente pour les contribuables québécois – on va assister aussi, à compter du 1er janvier prochain, à une simplification de notre régime fiscal. Entre autres, on va assister à la réduction du nombre de paliers d'impôt. On sait présentement qu'il y en a cinq, on aura désormais trois paliers d'impôt. On va assister aussi – et je ne vous donne que quelques mesures – à une augmentation de 20 % à 23 % du taux des crédits d'impôt qui sont non remboursables. Alors, c'est une bonification, ça, pour les contribuables québécois, qui est de l'ordre de 3 %. Et on va assister aussi à une augmentation du barème du crédit d'impôt remboursable pour la taxe de vente. Depuis longtemps, c'est réclamé, que notre système d'impôt, que notre régime fiscal soit simplifié, alors on livre la marchandise, et ça entre en vigueur au 1er janvier prochain.

Alors, si on regarde, dans un premier temps, la baisse des impôts, ce qu'elle représente pour les contribuables québécois: au 1er janvier – c'est très bientôt, ça, M. le Président, c'est dans un mois et demi – pour les contribuables, les ménages qui, au Québec, gagnent moins de 50 000 $, la baisse d'impôts sera de l'ordre de 15 % et, pour les contribuables – les ménages, j'entends – qui gagnent, eux, plus que 50 000 $, la baisse d'impôts sera de l'ordre de 3 %.

Ça veut dire que, au 1er janvier prochain, dans moins d'un mois et demi, ce sont tous les contribuables québécois qui verront leur fardeau fiscal réduit, qui verront de façon notable, sur leur chèque de paie, une baisse de leurs impôts. Et là je vous ai parlé des ménages qui gagnent moins de 50 000 $ et des ménages aussi qui gagnent plus de 50 000 $. Dans un cas, une baisse de 15 %; dans l'autre cas, une baisse de 3 %. Aussi, ce que nous verrons à compter du 1er janvier prochain, c'est, pour 200 000 contribuables québécois à faibles revenus, aucun impôt à payer à compter du 1er janvier prochain, en plus qu'on améliore substantiellement l'aide fiscale en faveur des travailleurs à faibles revenus – et ça, j'y viendrai – entre autres sur les crédits d'impôt en remboursement pour la taxe de vente que ces gens-là seront appelés à payer et la simplification de la fiscalité.

La simplification de la fiscalité. Alors, nous savons tous que, effectivement, notre régime fiscal, il est compliqué et nous savons tous aussi pour combien de Québécois c'est pesant, au printemps, de remplir leur déclaration d'impôts, de compléter leur déclaration d'impôts. Alors, pour 80 % des Québécois, pour la prochaine année, ce régime-là sera simplifié. Entre autres, pour 80 % des Québécois, leur déclaration d'impôts pourra être contenue sur deux pages. En plus d'une simplification, de sorte que les gens auront moins de difficultés à remplir leur déclaration d'impôts, on assiste à des allégements fiscaux à l'intérieur de cette simplification.

Je vous donne différents exemples. Dans notre régime fiscal, présentement, les gens peuvent se prévaloir de plusieurs déductions et ils peuvent se prévaloir de plusieurs crédits d'impôt. Évidemment, M. le Président, c'est un peu complexe; évidemment, il faut avoir les preuves à l'effet qu'on peut se prévaloir de ces crédits d'impôt ou de ces déductions. Alors, ce que l'on fait, à partir du 1er janvier, les gens auront le choix: soit qu'ils pourront continuer de se prévaloir de toutes les déductions possibles ou de tous les crédits d'impôt possibles ou encore la personne pourra purement et simplement se contenter d'un montant forfaitaire de 2 350 $ de crédit d'impôt.

Alors, autrement dit, la personne, plutôt que de faire tous les calculs et de se prévaloir de toutes les déductions, pourra dire: Bon, bien, moi, c'est plus simple, je prends tout simplement le montant forfaitaire de 2 350 $, et c'est de ça que je me prévaux. Alors, c'est un exemple au niveau de la simplification de notre régime fiscal.

Simplification aussi au niveau de la table d'imposition. Nous savons que présentement nous avons cinq taux d'imposition. À compter du 1er janvier, M. le Président, nous réduisons à trois taux d'imposition. En plus de ça, il y a une bonification pour les contribuables québécois, à savoir: alors qu'auparavant les crédits d'impôt étaient fixés sur un taux de 20 %, on augmente ça – et ça, ça représente une bonification pour les contribuables québécois – à un taux de 23 %. Il y a aussi un accroissement de l'aide fiscale aux ménages à faibles revenus, c'est-à-dire les familles qui gagnent moins de 26 000 $ par année. Alors, c'est donc une baisse d'impôts qui est intéressante pour les contribuables québécois, et, en plus de ça, c'est une simplification de notre fiscalité.

Cependant, il fallait la financer, parce que nous sommes présentement, au Québec, dans une opération de redressement de nos finances publiques et d'assainissement de nos finances publiques. Et, tant que nous n'aurons pas atteint le déficit zéro, il nous faut donc trouver des moyens de financer ce que nous mettons de l'avant. Et la façon de le financer, c'est avec, dans le cas présent, une augmentation de la taxe de vente de l'ordre de 1 %. Mais je le répète, même si on a une augmentation de la taxe de vente de l'ordre de 1 %, les Québécois au total vont y gagner, puisque ça représente quand même pour eux un avantage net de l'ordre de 285 000 000 $ d'ici l'atteinte du déficit zéro. Alors, ça, il ne faut pas le perdre de vue et il faut voir finalement que, dans un cas, oui, il y a une baisse d'impôts, dans l'autre cas, oui, il y a une augmentation de la taxe de vente, mais cependant les Québécois de toute façon y gagnent quand même et pour un montant substantiel au-dessus de 250 000 000 $, 285 000 000 $, M. le Président.

Alors, les choix que nous avons dû faire, évidemment ça vient d'une situation qui nous a été léguée par le gouvernement précédent. Quand nous aurons atteint le déficit zéro, des mesures comme celle que nous annonçons aujourd'hui, une baisse d'impôts, on pourra en annoncer davantage et on pourra en annoncer des meilleures aussi. Cependant, on vit dans une situation, dans un contexte budgétaire difficile, et ça, il faut le rappeler. Les libéraux, durant les deux mandats qui nous ont précédés, en sont venus à nous laisser – et ça, il faut le rappeler constamment – la dernière année de leur mandat, un déficit record de l'ordre de 6 000 000 000 $. Six milliards de dollars, ce n'est pas rien, M. le Président. Et là présentement on travaille, nous, à réparer ces dégâts-là.

(11 h 10)

Durant les cinq dernières années aussi de leur mandat, les libéraux ont en quelque sorte doublé la dette du Québec. En 1990-1991, cette dette-là, elle était de 45 000 000 000 $. Lorsqu'ils ont laissé le pouvoir, la dette était rendue à 74 000 000 000 $. Alors, de 1990-1991, on passe d'une dette qui est de 45 000 000 000 $ à, en 1994-1995, 74 000 000 000 $. En plus que le gouvernement précédent, entre autres durant les cinq dernières années, n'est jamais entré dans sa cible budgétaire. Alors qu'ils prévoyaient un déficit de l'ordre de 3 000 000 000 $, bien, le déficit qu'ils atteignaient était de l'ordre de 4 000 000 000 $. Ils en prévoyaient un de 2 800 000 000 $, ils le dépassaient, encore là, de l'ordre de 20 % à 25 %.

Et ça, ça a été constant, M. le Président, durant les cinq dernières années de leur mandat, de sorte que ça a fait, ça, en bout de piste, que le Québec, quand ils ont laissé le pouvoir, à ce moment-là était la province la plus endettée au Canada et ça a fait aussi que nous avons accumulé un retard par rapport à l'assainissement de nos finances publiques. Alors que les autres gouvernements avaient commencé à améliorer leur sort, avaient commencé à assainir leurs finances publiques, ici, au Québec, ce n'est pas ce qui se passait; au contraire, les dépenses de programmes du gouvernement libéral continuaient d'augmenter à chaque année. Alors que, dans les autres provinces, on réduisait ces dépenses de programmes là, ici on les augmentait. Alors, ça faisait quoi? Ça faisait que ça augmentait la dette du Québec, de sorte qu'on en est venu à cet autre record peu enviable que nous sommes la province la plus endettée au Canada.

Mais ça a aussi, M. le Président, une autre conséquence. C'est que, présentement, cette année, au Canada, il y a sept provinces sur 10 qui ont atteint l'équilibre budgétaire, et certaines, entre autres, ont des surplus de l'ordre de 2 000 000 000 $. Je pense à l'Alberta, avec son premier ministre, qui annonce des surplus de l'ordre de 2 000 000 000 $. Alors, ça entraîne quoi, ça? Ça veut dire que ces gouvernements provinciaux, qui sont voisins de nous, peuvent annoncer des réductions d'impôts et peuvent promettre certains avantages que, nous, on peut difficilement faire parce qu'on est encore à rattraper un retard que les libéraux ont accumulé durant 10 années. Alors, c'est pour ça, cette réforme-là et cette simplification de la fiscalité que nous proposons aux Québécois. Mais cependant on est obligés de dire: Oui, on baisse les impôts; cependant, oui, on augmente la taxe de vente parce qu'il nous faut rester compétitifs avec nos voisins.

Ça, les libéraux, pendant tout le temps qu'ils ont été là, c'était le cadet de leurs soucis. Ils ne se sont jamais occupés de ça, ils ont mal administré, ils ont connu des déficits records, ils n'ont pas commencé le ménage, et, nous, M. le Président, nous sommes en train de le faire, ce ménage-là. C'est difficile, c'est une situation qui est souvent périlleuse parce qu'il nous faut constamment avoir les chiffres en tête et voir à respecter nos objectifs. Mais cependant, contrairement aux libéraux qui nous ont précédés, depuis que nous sommes là, nous avons respecté nos objectifs. La première année, on s'est dit: 3 900 000 000 $ de déficit, on est rentré dans la cible. La deuxième année: 3 200 000 000 $, on est rentré dans la cible. Cette année, c'est 2 200 000 000 $, et encore là on va rentrer dans la cible.

Mais ça, ça a un énorme avantage aussi. Non seulement on est en train d'assainir nos finances publiques, mais en plus l'avantage que ça a, c'est que les citoyens, les Québécois vont reprendre confiance dans leurs politiciens. On pouvait comprendre qu'ils aient perdu cette confiance-là parce que, depuis qu'ils étaient là, entre autres les cinq dernières années qu'ils étaient au pouvoir, en aucun moment ils ne sont entrés dans la cible, de sorte que les gens se disent: Bien, comment peut-on avoir confiance dans notre gouvernement, il n'est jamais capable de respecter ses engagements budgétaires? Ce que, nous, nous faisons depuis que nous sommes là.

M. le Président, je veux, entre autres, vous référer au budget parce que ce n'est pas nouveau, ces mesures-là dont on parle aussi aujourd'hui. J'entendais ma collègue la députée de Saint-François disant que les gens ont oublié cette taxe-là de 1 % qui apparaît sur la TVQ. Mais, comme je dis aussi, effectivement les gens ont oublié qu'au 1er janvier qui s'en vient il y a une baisse d'impôts de 15 % pour les ménages qui gagnent moins de 50 000 $ et de 3 % pour ceux qui gagnent plus. Alors, les gens aussi ont oublié ça, mais il faut le leur rappeler, il faut le leur dire. Et c'est une excellente mesure.

Maintenant, M. le Président, je vous disais que cette mesure-là, il faut la financer. Alors, de la façon dont on va la financer... Et là je veux vous référer à un extrait du budget du ministre Landry lorsqu'il a présenté le budget, en mai dernier: «Ce déplacement du fardeau fiscal vers la taxe de vente permettra au Québec de mieux contrer l'impact des réductions d'impôts sur le revenu annoncées en Ontario et accroîtra la compétitivité de notre économie.» Parce que c'est ça que je vous disais. Étant donné qu'eux sont plus avancés dans leur ménage des finances publiques – et je pense, comme autre exemple, à l'Alberta – à ce moment-là eux en font, des réductions d'impôts. Alors, nous, il faut donc suivre le train.

En effet, le poids de l'impôt sur le revenu tend à alourdir les coûts de main-d'oeuvre des entreprises. La taxe de vente est beaucoup moins dommageable pour la compétitivité de notre économie, puisqu'elle est soustraite du prix des produits exportés. Elle est aussi plus respectueuse de la liberté de choix des contribuables qui utilisent leurs revenus disponibles comme ils l'entendent. Ce rééquilibrage de notre système fiscal est conforme à notre stratégie budgétaire qui consiste à éliminer le déficit avant de réduire globalement les impôts et les taxes. Le relèvement du taux de la taxe de vente permet en effet d'autofinancer entièrement la réforme de l'impôt sur le revenu des particuliers au cours des deux prochaines années. L'année suivante, le déficit zéro sera atteint. La réforme se traduira alors, pour les contribuables, par une baisse nette de leur fardeau fiscal global de l'ordre de 280 000 000 $.

Là, évidemment, M. le Président, on va dire: Oui, mais là les gens vont payer cette taxe de vente là, et, entre autres, qu'est-ce qui arrive des ménages à faibles revenus? Encore là, nous protégeons le pouvoir d'achat des ménages à faibles revenus en ce que le crédit pour taxe de vente est augmenté à 515 000 000 $. Ça veut dire quoi? C'est que cette hausse du crédit pour taxe de vente, conjuguée aux mesures qui sont décrites concernant l'aide fiscale aux ménages à faibles revenus, injectera 285 000 000 $ de plus dans cet instrument de redistribution dont le coût total sera ainsi porté à 515 000 000 $ en 1998. Grâce à cette importante mesure, la totalité de la taxe additionnelle qui découlera de la hausse du taux de la taxe de vente sera remboursée à tous les ménages à faibles revenus. Mieux encore, cette bonification du crédit d'impôt pour taxe de vente fera complètement disparaître le fardeau de cette taxe pour les personnes dont le revenu est inférieur à 10 000 $. Alors – j'arrivais pour dire Votre Seigneurie, ha, ha, ha! ça va me suivre toute ma vie – M. le Président, ça veut donc dire que les contribuables québécois y gagnent.

En terminant, il faut quand même dire que c'est assez étrange d'entendre l'opposition libérale nous reprocher notre façon de faire quand on sait qu'au cours des cinq dernières années de leur administration ils ont augmenté les impôts et les taxes de 10 700 000 000 $. Ça, je vous réfère aux chiffres année par année: en 1990-1991, c'est de l'ordre de 960 000 000 $; en 1991-1992, c'est 1 880 000 000 $; 1992-1993, 2 200 000 000 $; 1993-1994, 3 300 000 000 $; 1994-1995, 2 400 000 000 $.

De sorte que, M. le Président, sur les cinq dernières années de leur administration, du côté des libéraux, l'augmentation des impôts et des taxes a été de l'ordre de 10 723 000 000 $. Ça, c'est en plus qu'ils n'entraient jamais dans la cible budgétaire et qu'ils défonçaient toujours leurs prévisions budgétaires. Alors, non seulement ils augmentaient les impôts et les taxes, mais, en plus de ça, à chaque année ils augmentaient le déficit du Québec et ils augmentaient la dette du Québec.

Alors, je pense que, s'il y en a qui ne sont pas placés pour nous faire la leçon, ce sont bien nos amis libéraux. Je comprends qu'ils n'aiment pas ça qu'on leur rappelle ça. Quand on leur rappelle ces faits-là, on voit qu'ils prennent une attitude un peu de désinvolture, de dire: Ah! ça y est, vous nous mettez ça encore sur le dos. Mais, M. le Président, on vit, dans notre société, avec un principe qui est tout à fait juste, à savoir qu'on vit avec les conséquences des gestes qu'on pose. Finalement, la situation que l'on vit, c'est qu'ils ont cassé le pot; on est en train de le recoller. Là, eux autres: Ah non! Ne tenez pas compte du fait qu'on a cassé le pot.

(11 h 20)

Bien, M. le Président, on vit avec cette situation-là. On tente de l'améliorer. On est obligé de même prendre les bouchées doubles parce que eux n'ont rien fait. Au contraire, ils ont continuellement laissé la situation se détériorer. Alors, c'est ce que nous sommes en train de faire présentement. Nous sommes en train d'assainir les finances publiques du Québec. Nous allons vers un déficit zéro d'ici l'an 2000, ce qui les fatigue énormément, on le comprend, parce que eux n'ont jamais eu le courage de se lancer dans cette opération-là. Alors qu'on redresse les finances publiques, alors qu'on s'en va vers un déficit zéro, en plus dans un contexte qui est aussi difficile, on trouve le moyen d'alléger le fardeau fiscal des Québécois et de baisser l'impôt sur le revenu des Québécois en plus de simplifier la fiscalité chez les Québécois, qui, on le sait, malheureusement, est trop compliquée. On est en train de simplifier ça.

Alors, ce sont d'heureuses nouvelles que l'on retrouve dans ce projet de loi n° 161, et je vous soumets qu'effectivement c'est à l'avantage des contribuables du Québec et que ce projet de loi, il faut l'appuyer parce que, dans le contexte dans lequel on vit, au total, les contribuables québécois y gagnent. Ils y gagnent une baisse de la fiscalité. Et, même si par ailleurs on vit une augmentation de la taxe de vente, ils sont encore regagnants de l'ordre de 285 000 000 $. Alors, ça m'apparaît être une excellente mesure. C'est pourquoi, nous, du parti ministériel, nous allons appuyer ce projet de loi et battre la motion qui est présentée par l'opposition libérale.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Drummond. Je vais maintenant céder la parole à M. le député d'Orford.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. J'aimerais parler quelques instants sur la motion qui fut déposée par le député de Nelligan, la motion sur la loi n° 161. Qu'est-ce que c'est, la loi n° 161, pour les gens qui nous écoutent ce matin? Bien, c'est un projet de loi qui a cette épaisseur-là. Il y a plus de 756 articles. Et tout ça, c'est pour taxer un peu plus les citoyens, les corporations, les individus, les professionnels, les ménages, les villes au Québec.

J'écoutais le très honorable député de Drummond, et à aucun moment dans son discours il n'a parlé, à toutes fins pratiques, du projet de loi n° 161. Pendant 15 minutes, il a parlé d'un autre gouvernement qui était là. Je vous garantis qu'ils ne sont pas très convaincus du bien-fondé de ce projet de loi. Je me rappelle de l'époque où j'étais au gouvernement, c'est avec pas mal plus de vigueur qu'on défendait nos projets de loi. Là, je l'ai écouté pendant 20 minutes nous parler d'il y a trois ans et demi. Parce que c'est ça qu'on oublie, ces gens-là sont au pouvoir depuis trois ans et demi. Ils auront beau nous rabâter n'importe quoi, l'électeur a décidé il y a trois ans et demi que les libéraux ne seraient pas réélus. C'est correct, ça, M. le Président. Eux ont pris les commandes de l'État et là ils sont là qui essaient de dire...

Ce qu'ils oublient de nous dire, d'autre part, c'est que, dans la première année, plutôt que de référender, plutôt que de se promener avec le drapeau, plutôt que de faire des beaux grands discours, plutôt que d'essayer de dire à la France comment elle devrait se comporter, plutôt que de dire à la Caisse de dépôt comment se faire un petit compte de côté de 20 000 000 000 $ avec nos économies, ils auraient peut-être dû commencer à parler d'économie, à parler, comme l'a si bien fait la députée de Saint-François qui est avec nous, d'emplois, à parler, avec le député de Nelligan, de taxation intelligente des entreprises et des individus. Ce n'est pas ça qu'on a fait, M. le Président. On s'est gargarisé pendant une grosse année et demie avec le drapeau à la grandeur du Québec et on en paie maintenant, trois ans et demi après, trois ans et demi qu'ils sont au pouvoir... Les élections s'en viennent puis ils sont là...

Dans un projet de loi de cette ampleur-là, il n'a pas une seule fois parlé du projet de loi; a parlé d'à peu près tout et de rien, sauf du projet de loi. Bien, moi, je vais vous en parler, du projet de loi, parce que 756 articles, M. le Président, d'ici un mois, nous devrons passer à travers ça. Oui, la session, pour les gens qui nous écoutent, normalement doit se terminer le 19 décembre, et nous siégeons quatre jours semaine à partir de mardi prochain. Donc, on va siéger à peu près 20 jours d'ici le 19 décembre et on devra faire 756 articles d'une technicalité et d'une complexité dont... Même la ministre, si elle n'avait pas sa batterie d'experts alentour d'elle, ne serait jamais capable de répondre à trois des questions qu'on lui poserait, j'en suis convaincu.

Alors, c'est ça, M. le Président, le projet de loi n° 161, qui est à frapper de front, égorger de front le même citoyen au Québec qui nous dit: On n'est plus capable, on est taxé de tout bord et de tout côté. Je vais le démontrer tantôt, qu'on est les pires, au Québec. Parce que le très honorable député de Drummond nous a parlé de comment, à partir du 15 janvier, il y aura quelques petites réductions; moi, je voudrais lui parler de comment, quand ils sont arrivés au pouvoir, il y a trois ans et demi, les citoyens du Québec payaient moins d'impôts que les voisins des autres provinces. Oui, parce que, quand nous sommes arrivés, en 1985, tous les citoyens du Québec payaient plus d'impôts que toutes les autres provinces, et M. Bourassa arrivera, mois après mois, à nous mettre en équivalence avec les autres provinces canadiennes, M. le Président.

Eh bien, après trois ans et demi, qu'est-ce qui est arrivé? Regardons ici une table d'impôts. Celle-là, elle vient de chez Samson, Bélair, Deloitte et Touche. C'est une des cinq ou six grandes firmes de comptables au monde qui est impliquée au Québec. Une table d'impôts, pour les gens qui ont déjà vu ça, on a le nom des provinces en haut. Alors, il y a 10 provinces, les territoires, le Yukon, et ici on a les niveaux d'imposition. Dans celle-là, ça va de 8 000 $ à 100 000 $. Ça fait 284 petits carrés, ça, qu'on compare d'une province à l'autre, du fédéral, etc.

Alors, en préparant ce petit discours ici, aujourd'hui, je me suis mis à comparer ces chiffres-là hier soir, et quelle ne fut pas ma grande surprise quand j'ai regardé ces 284 carreaux. Et j'espère que le député de Drummond m'écoute, M. le Président, parce que ça, c'est leur oeuvre depuis trois ans. Dans tous les carreaux sans exception, sauf trois, quatre en haut, en bas de 8 000 $, tous les carreaux avec toutes les provinces, avec tous les niveaux d'imposition, nous sommes les plus taxés au Canada. Non seulement nous sommes les plus taxés au Canada, mais nous sommes aussi les plus taxés en terre d'Amérique, société distincte oblige. Alors, il nous parle du 15 janvier. Bien, les gens qui commencent à regarder leur rapport d'impôts, qui vont faire leur rapport d'impôts à partir du 1er janvier, eux vont le faire sur cette table d'imposition actuelle, et cette table d'imposition actuelle, c'est celle où ils sont les plus taxés en terre d'Amérique. Ce n'est pas rien, ça.

Là, au sort, je vais me fermer les deux yeux et je vais choisir n'importe quel chiffre ici. Alors, je me ferme les deux yeux et je choisis un chiffre. Bon. Alors, au Nouveau-Brunswick, à 40 000 $, un individu, là-bas, paie 11 000 $ d'impôts; au Québec, 12 000 $. Si je me referme les yeux et j'en choisis un autre, n'importe quel territoire, n'importe quelle province... Celle-là ici, bon, Terre-Neuve. À 31 000 $ de revenus, à Terre-Neuve... C'est-à-dire, à 80 000 $ de revenus, à Terre-Neuve, l'individu va payer 31 000 $; eh bien, s'il est au Québec, il va en payer 33 000. Et je peux continuer. Il y a 284 possibilités selon Samson, Bélair, et, dans tous les cas, sauf trois ou quatre en haut en bas de 8 000 $, dans tous les cas, les Québécois et les Québécoises sont les plus taxés.

On pensait qu'on en avait assez, des taxes, M. le Président, on ne pensait pas que ça nous prenait un projet de loi de 756 articles pour nous en mettre un peu plus. Et là qu'est-ce que ça a pour effet, toutes ces taxes? Bien, là, ça a pour effet d'appauvrir les citoyens du Québec. Eh bien, le ministre des Finances nous produit toutes sortes de gros rapports à tout bout de champ, il s'agit de les lire un peu. Alors, ici, j'ai le taux d'endettement des citoyens du Québec. Regardez ce petit graphique qui va à la hausse, là. Eh bien, oui, j'espère que le distingué député de Drummond regarde ça parce que le taux d'endettement des Québécois n'a jamais été si haut dans toute l'histoire du Canada. Les Québécois sont après s'endetter comme jamais dans leur histoire.

Le taux d'épargne, ici – j'espère que c'est assez gros à la télévision – ça va en baissant. Ce sont des chiffres qui viennent du ministre des Finances. Ce n'est pas vraiment questionnable. Alors, le taux d'épargne, jamais... Regardez-le, M. le Président. Sous les libéraux, les gens épargnaient, les gens avaient confiance en l'avenir. On parlait de 100 000 emplois, on parlait de la Baie-James, on parlait des grappes industrielles. On ne parlait pas du drapeau, on ne parlait pas de la langue, on ne parlait pas de la souveraineté, nous, on parlait de création d'emplois. Regardez le programme électoral du Parti libéral à la dernière élection: l'emploi, l'emploi et l'emploi. On voulait que nos jeunes travaillent. On voulait que nos gens âgés travaillent. C'est ça qu'était le programme du Parti libéral.

(11 h 30)

Alors, un taux d'endettement comme jamais nous n'en avons connu et un taux d'épargne comme jamais nous n'en avons connu. D'ailleurs, le mouvement Desjardins reprend ces mêmes chiffres. Si on n'a pas confiance aux chiffres du ministère, ici, Desjardins reprend ces mêmes chiffres. Mais, lui, il y ajoute un troisième graphique dans le bas. Savez-vous ce que c'est, M. le Président, ce troisième graphique? Tellement l'épargne est basse en ce moment au Québec, eh bien, c'est le niveau de faillites personnelles chez les individus au Québec. Et, je ne sais pas si c'est assez gros pour le voir à la télévision, jamais dans toute l'histoire du Québec, les taux de faillite chez les individus n'ont été aussi élevés. Et je pourrais parler de celles des corporations aussi, mais je ne vais que parler de celles des individus.

Plus haut taux de taxation, plus haut taux d'endettement, plus bas taux d'épargne et le plus haut taux de faillites personnelles. Quelles sont les économies que les Québécois ont? Ils ont des RER, ils ont des REA, ils ont un petit bas de laine sur le côté, mais la grande économie des Québécois, c'est leur résidence. Eh bien, le journal Les Affaires de cette semaine nous fait une grande révélation, oui, M. le Président, à cause de toutes ces taxes, à cause du projet de loi n° 161 avec 756 articles de nouvelles taxes de tout acabit, de nouveaux coûts un peu partout cachés, alors le journal Les Affaires nous dit: Est-ce que votre maison a pris de la valeur dans les dernières années? Vous avez hâte d'entendre la réponse, M. le Président. Eh bien, oui, moi aussi, j'avais hâte de voir la réponse à ça. Eh bien, la réponse, c'est: L'évaluation municipale, l'assiette des municipalités se vide; les nouveaux rôles reflètent une baisse généralisée de la valeur des propriétés.

M. le Président, alors que le reste de l'Amérique est après s'enrichir, alors que les gens sont après engranger dans leurs corporations des profits, qu'est-ce qui se passe au Québec? Notre peuple est après s'appauvrir, notre peuple est après s'endetter, et le seul actif qu'il avait vraiment, sa résidence, son bungalow, son petit condo, le deuxième petit chalet à quelque part, eh bien, l'assiette des municipalités se vide; le nouveau rôle reflète une baisse générale de la valeur des propriétés. Et là on en a une série ici: à Beaconsfield, moins 8 % de variation; à Hampstead, moins 16 %; Repentigny, un milieu très francophone, moins 8 %; dans la région de Québec, 22 % des loyers commerciaux ne sont pas loués en ce moment; moins d'avions que jamais, dans toute l'histoire des aéroports, arrêtent à la ville de Montréal.

Ça, ce sont des indices économiques qui ne mentent pas. Le peuple québécois, à cause de ces coquins-là de l'autre bord, est après s'appauvrir, et c'est dramatique, M. le Président. Nous ne sommes plus compétitifs au niveau des impôts, nous ne sommes plus compétitifs au niveau des argents que nous gardons de côté, nous ne sommes plus compétitifs au niveau de l'immeuble. Le peuple québécois s'appauvrit. Pourquoi, M. le Président? Bien sûr que nous sommes trop taxés, mais l'autre raison... Quand j'entendais le ministre des Finances nous dire, il y a quelques jours: C'est dans la structure. Ma grand-mère me disait ça, moi: La recette est secrète. Lui nous répond: C'est dans la structure. La recette est secrète.

La vraie raison pour laquelle nous sommes si mal en point économiquement au Québec, elle est bien simple, c'est que ces sociaux-démocrates, ils ont le nez dans tout, M. le Président. Au Québec, en ce moment, 52 % de la taille de l'État, du produit intérieur, 52 % vient de l'activité économique directement liée à l'État, toutes ses sociétés d'État, 141 qu'on décompte. Il est démontré par le fonds mondial qu'au moment où on atteint plus d'une trentaine de pour cent de l'économie qui vient, elle, de l'économie du gouvernement, ça a un effet ralentissant, ça a un effet de frein, et c'est ce qu'on connaît au Québec. L'État québécois est comme une pieuvre. Il est partout dans nos poches, il est partout dans les villes, il est partout dans tous les secteurs. Et, quand on dit à ce gouvernement: Désengagez-vous, laissez de la place à l'entreprise privée, ah non, il y a toujours à quelque part quelqu'un qui dit: Il faut aider le gars de la CSN. On ne peut pas faire ça, M. le Président, il ne faut pas faire ça. Alors, on demeure à 52 % avec la taille de l'économie qui vient directement de l'État, et on sait que c'est non producteur à partir de 30 %. Les études sont claires et nettes dans toutes les universités à cet égard-là.

M. le Président, j'arrête ici pour laisser la chance à des confrères et consoeurs de continuer. On est trop taxé et le Québec, à cause de ces taxes, à cause de la loi n° 161, est après s'appauvrir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député. Il reste 10 minutes au parti ministériel et deux minutes à l'opposition avant la réplique. Alors, je vais céder la parole à M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Il reste 10 minutes à votre formation.


M. André Boulerice

M. Boulerice: Oui. Je vous remercie, M. le Président. Malheureusement, M. le député d'Orford se prépare de très tristes fêtes de Noël avec son attaque aussi inconsidérée envers la CSN. Il risque sans doute de blesser certains membres de sa famille qui ont des liens tout à fait privilégiés et particuliers avec la CSN. Je trouve ça dommage qu'il insulte à ce point-là le beau-père de sa jolie jeune fille.

Il nous disait tantôt que, lorsqu'il était au gouvernement... Lorsqu'il était au gouvernement, j'aimerais savoir quel était le ministère dont il était titulaire, à l'époque. C'était sans aucun doute le ministère du silence, puisque, à l'époque où M. le député d'Orford était membre du parti ministériel, jamais on ne l'a entendu critiquer ses collègues quant aux dépenses inconsidérées qu'ils ont faites, au Québec. Il nous a livré un salmigondis avec un discours mais véritablement dans une dérive frauduleuse, M. le Président, jusqu'en accusant l'actuel gouvernement et la situation québécoise telle que cela était la cause du nombre d'atterrissages moins élevé dans les aéroports de Montréal.

J'admets que l'à-plat-ventrisme fédéraliste peut sans aucun doute pousser à bien des excès, sauf que cet à-plat-ventrisme fédéraliste devrait quand même protéger un certain minimum d'intelligence et surtout de reconnaissance des faits. Je demande beaucoup au député d'Orford quand je fais ce postulat, mais je suis toujours d'un éternel optimisme. Je persiste à croire qu'il peut être intelligent. S'il y a moins de vols dans les aéroports de Montréal, et c'est très connu, c'est que le gouvernement fédéral a donné aux compagnies d'aviation étrangères des droits d'atterrissage à Toronto, faisant de Toronto la porte d'entrée au Canada, alors que c'était Montréal, point, c'est tout. Ça s'explique comme ça. C'est une autre belle action, et j'ose espérer que lui qui passe son temps à adorer le veau d'or fédéral se mettra à genoux tantôt de nouveau et remerciera le fédéral de cette action si structurante pour le Québec, c'est-à-dire d'avoir distribué et multiplié les droits d'atterrissage à Toronto alors qu'il était entendu que c'était Montréal qui était la porte d'entrée pour le Canada, porte d'entrée au niveau des vols aériens.

Mais je ne reviendrai pas sur chacun de ses arguments au départ, l'emphase et l'exagération qui ont été mises. Tout le monde le sait, tout ce qui est exagéré devient facilement insignifiant. Donc, je pense que celles et ceux qui nous ont écoutés ne sont pas dupes de ce portrait-charge qu'il a livré, mélangeant les navets avec les raves, et faisant un discours qui ne s'applique qu'à un discours atrocement partisan, moralisateur fédéraliste et surtout méprisant envers la moitié de la population du Québec qui ne partage pas son option et qui a le droit de la défendre, et disant que cette option est vraiment génératrice de tous les maux dont le Québec souffre. Les maux dont le Québec souffre au point de vue économique, M. le Président, vous le savez comme moi, ils sont beaucoup plus anciens que l'option que je défends.

(11 h 40)

J'écoutais également la députée de Saint-François ici, à l'Assemblée nationale, femme charmante, d'ailleurs. Mais, malheureusement, lorsqu'elle se lève, elle est beaucoup plus libérale que charmante. Cela n'enlève quand même pas une certaine affection que je peux avoir pour elle. Mais j'entendais sa critique, et à ce moment-là je me disais: Oui, mais comment peut-on réagir de cette façon? N'a-t-elle pas été présidente du Conseil du trésor, donc cocomplice, M. le Président, de l'ancien président du Conseil du trésor qui est devenu premier ministre du Québec, et je fais allusion au gouvernement de M. Daniel Johnson qui nous a laissé cet héritage empoisonné de 6 000 000 000 $, 6 000 000 000 $ de déficit? J'ose espérer qu'elle regrette ce mauvais compagnonnage et qu'elle pourra encore de nombreuses années profiter des vertus salvatrices et rédemptrices de l'opposition et faire son mea culpa quant à la gestion des finances publiques au Québec.

Je ne sais pas si dans la circonscription électorale de Saint-François, qui est sans aucun doute une belle circonscription, M. le Président, la députée fait du bureau de comté et reçoit les gens à son bureau le lundi et le vendredi. Ça m'étonnerait. Dans l'ensemble, les députés, il faut être honnête en cette Assemblée nationale, les députés le font. Mais, moi, je peux vous dire que dans la circonscription de Sainte-Marie–Saint-Jacques je pourrais très facilement vous énumérer au moins 2 000 à 3 000 personnes qui rêvent de payer des impôts et qui aimeraient en payer davantage. Des gens qui rêvent, M. le Président, de payer des taxes et qui aimeraient en payer davantage, des taxes. Savez-vous pourquoi ils aimeraient ça payer des impôts et payer des taxes? Pour l'excellente raison que ça signifierait qu'ils ont un emploi. Et actuellement ils n'ont pas d'emploi.

On a parlé d'emploi tantôt. L'ineffable député d'Orford, qui tantôt, je vous le répète, a décidé de bousiller sa réunion familiale de Noël et du Nouvel An en attaquant la belle-famille de sa fille, parlait d'emploi: les emplois de feu M. Bourassa et les emplois de ci et les emplois de ça. Mais, justement, M. le Président, quand on regarde le projet de loi que nous a déposé notre collègue et amie, députée de Rosemont et ministre déléguée au Revenu, que va-t-il arriver? Eh bien, en modifiant cette loi, nous pouvons donner des crédits d'impôt à des compagnies allant jusqu'à 1 200 $ qui vont permettre – et j'essaie de trouver la citation exacte – la création d'emplois. On s'attend de cette retombée, on s'attend de ce 1 200 $ de déduction pour création d'emplois, on s'attend à des retombées économiques.

Voici, je retrouve cette feuille que je cherchais. Alors, on dit: «Des mesures fiscales favorisant l'investissement et l'emploi. Le discours sur le budget prévoit en outre plusieurs baisses d'impôt pour les entreprises qui visent à stimuler l'investissement et à favoriser la création d'emplois. Parmi celles-ci – je m'excuse, mais je pense que mon chronomètre diffère un peu du vôtre – un crédit d'impôt de 1 200 $ pour chaque nouvel emploi créé est instauré à compter de 1997.» Si je lis bien, au total toutes ces mesures permettront la réalisation d'investissements privés totalisant 4 200 000 000 $. Mais la véritable création d'emplois, elle se fait ici. Nous, on fait des lois et des politiques et, entre parenthèses, quand il vient gloser qu'il y a 500 articles dans ce projet de loi, ce n'est quand même pas la fin du monde. S'il est trop paresseux pour effectuer son travail de député, à ce moment-là il peut toujours se retirer de l'Assemblée nationale. On est ici pour siéger et adopter les lois, alors ce n'est pas 500 pages qui rebutent, en tout cas, les députés du parti ministériel.

Mais, au lieu de donner au Québec 6 000 000 000 $ de déficit comme l'ont fait le député... – de quelle circonscription est-il, d'ailleurs? – le chef de l'opposition et la députée de Saint-François, eh bien, nous, nous allons laisser probablement plus de 4 200 000 000 $ uniquement cette année en investissement – et, en investissement étranger, ce sera encore davantage – au lieu de laisser un déficit de 6 000 000 000 $, un déficit qu'ils ont creusé. Et ils ont eu l'outrecuidance de vouloir voter une loi qui interdit à un gouvernement de faire des déficits. Et là ils sont là, béats, nous reprochant de vouloir corriger les erreurs qu'ils ont faites. Alors, je pense que la population du Québec est une population très intelligente. J'ai toujours fait confiance à l'intelligence de mes concitoyens et concitoyennes et je pense qu'ils ne sont pas dupes du discours mais vraiment pharisien que nous livre l'opposition officielle actuellement. Leur passé est connu, leur avenir est fort douteux. Nous allons corriger les choses et nous réglerons tous les problèmes une fois en décidant que les 29 000 000 000 $ que nous envoyons à Ottawa resteront ici, au Québec, et nous les investirons là où c'est utile pour nos concitoyens. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata pour trois minutes.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Ça me fait extrêmement plaisir d'intervenir aujourd'hui sur la motion de mon collègue de Nelligan parce que finalement ce projet de loi là, c'est, en vrai, le paquet de taxes qu'on envoie aux citoyens du Québec. Il est là.

C'est la deuxième semaine que j'ai l'occasion de parler après le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, et vous me permettrez de le citer. Il disait tantôt que ce qui est exagéré est insignifiant. Suite à son intervention, sans vouloir l'insulter, vous serez d'accord avec moi que ça fait longtemps qu'il est tombé dans l'exagération. Il disait la semaine passée que j'avais raté mon entrée, que je réussirais ma sortie. Bien, moi, un petit avertissement que je tiens à lui dire cette semaine, c'est que, s'il continue à défendre des projets de loi comme celui-là, il y a une chose qui est certaine, c'est que dans un an je vais être là, le jour de sa sortie, parce que les gens n'acceptent pas ça. Ils n'acceptent pas ça, ils ne sont pas d'accord avec ça.

Je l'entendais aussi parler, comme c'est la nouvelle cassette, sur le déficit que les libéraux ont laissé. C'est épouvantable! Mais lui qui a eu – oui, il applaudit – et qui a encore certainement un idéalisme de siéger au Conseil des ministres, bien, je l'invite à lire le livre de son ex-collègue député d'Iberville; il verrait exactement comment ça se gonfle, un déficit, et comment ça se prépare, un référendum. À ce moment-là, il aurait peut-être une vision plus éclairée de la réalité.

Pour revenir au projet de loi n° 161, moi, ce que je tenais à dénoncer dans les quelques minutes qui me sont offertes aujourd'hui, c'est qu'il y a une réalité avec ces taxes-là qui sont envoyées aux gens, la taxe sur, par exemple, les produits du tabac. Tout le mécanisme d'attribution des pourboires, là, ce n'est pas clair, on ne sait pas où on s'en va avec ça, surtout l'augmentation de la taxe de vente de 6,5 % à 7,5 %, 1 % de plus. Les impacts de ça, c'est que, dans les régions, si on ajoute à ça en plus le retour de la TVQ qui a été coupé aux municipalités, ça laisse moins d'argent dans les poches des gens, ça réduit l'économie locale, ça réduit la création d'emplois, ça tue le développement économique local et régional.

Moi, s'il y a une chose que je souhaite cet après-midi, c'est que, quand les gens vont nous regarder voter sur la motion de mon collègue de Nelligan, ils vont voir clairement d'un côté les gens qui sont opposés aux hausses de taxes, aux cachettes, aux fonds dédiés à tout ce qu'on fait pour essayer de cacher le déficit... Puis, si ça continue de même, ils vont sûrement dégager un surplus tellement ils en cachent. Bien, d'un côté, on va voir les gens qui sont pour la clarté, la transparence, qui sont contre les hausses de taxes et, de l'autre côté, on va voir les gens se lever les uns après les autres, ceux qui sont les complices de l'augmentation des taxes, ceux qui sont les complices des cachettes qu'on fait au niveau du budget et surtout ceux qui sont pour qu'on endette de plus en plus les jeunes et les autres générations qui nous suivent. Et, moi, ça va me faire plaisir de voter pour la motion de mon collègue parce qu'on dénonce ça. On ne peut pas être d'accord avec ça, ça tue l'économie du Québec puis ça endette les générations futures. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Kamouraska-Témiscouata. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Nelligan pour sa réplique de 10 minutes.


M. Russell Williams (réplique)

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Nous avons eu une chance, pendant les deux dernières heures, d'essayer de convaincre le gouvernement que le n° 161, c'est un très mauvais projet de loi. Le budget, effectivement, c'est un très mauvais budget. Je pense que, de plus en plus, les Québécois et les Québécoises sont au courant de ça. C'est clair, M. le Président, nous avons utilisé un règlement différent que d'habitude pour faire une motion du mercredi sur un projet de loi, mais nous avons pensé que c'est aussi important pour les contribuables québécois d'assurer que, malgré l'astuce de ce gouvernement, malgré ses petits trucs de passer ça à toute vitesse, une brique de 500 pages, 756 articles qui touchent 26 lois... Nous avons pensé que ça va être aussi important pour la population québécoise de savoir ce que ça veut dire dans ce projet de loi, et c'est pourquoi nous avons insisté pour faire cette motion du mercredi.

(11 h 50)

M. le Président, les autres, ceux et celles qui ont décidé qu'ils n'étaient pas bâillonnés par eux-mêmes, qui ont décidé de parler, ils ont dit deux choses. Ils ont utilisé les cassettes écrites par les fonctionnaires et, deux, ils ont plaidé... Je trouve ça intéressant que les députés décident qu'ils doivent discuter de leur obsession sur la séparation encore une fois. Je trouve ça assez bizarre, nous sommes dans un débat fiscal, et ils veulent discuter de leur obsession de séparation, alors que, par deux fois, les Québécois ont rejeté cette option.

M. le Président, une taxe, c'est une taxe. C'est assez clair, nous avons assez essayé de sortir les grands chiffres de ce projet de loi. C'est assez difficile, 500 pages, mais juste une page, c'est assez clair. Nous avons mis – ce n'est pas juste un débat partisan – les choses qui peuvent, sans avoir les autres, aider les familles québécoises. Mais en bout de ligne – je pense que tout le monde sait que c'est la chose la plus importante – en bout de ligne, pendant les prochains trois ans, avec le projet de loi n° 161, nous allons payer 1 000 000 000 $ de taxes de plus. Nous allons avoir moins d'argent dans nos poches. Dites ça comme vous voulez, cachez ça comme vous voulez, essayez de changer les mots, essayez de sortir les nuances de quelque chose, mais M. et Mme Tout-le-Monde savent qu'il y a une augmentation du fardeau fiscal, ils savent que, jour après jour, ce gouvernement arrive avec une augmentation de taxes.

Le Bureau de la statistique du Québec, M. le Président... J'espère que le côté ministériel va comprendre; ce n'est pas les chiffres du Parti libéral, ce n'est pas juste un chiffre que nous avons pris dans l'air, au Bureau de la statistique du Québec, ils ont dit que le revenu personnel disponible, l'argent disponible pour acheter les choses, disponible pour dépenser, disponible pour réactiver l'économie québécoise, a chuté de 2,1 %, cinq fois plus que dans le reste du Canada, cinq fois plus. C'est quoi, la réaction de ce gouvernement-là? Qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont taxer plus. C'est assez bizarre.

Le monde dit que nous avons moins d'argent pour dépenser les choses, mais maintenant, avec ce fameux projet de loi n° 161, 1er janvier 1998, TVQ, 1 % de plus. Vous savez la valeur de ça, M. le Président? Peut-être que les autres ne suivent pas le débat. C'est 675 000 000 $, de nos poches. Avec ça, il n'y a aucune économie pour la famille québécoise. Incluant dans les documents fournis par le ministère, ils ont dit que c'est plus ou moins 500 000 000 $ pour les familles en crédits d'impôt qui baissent, 675 000 000 $ de TVQ. Comment on peut dire que les familles québécoises sont gagnantes? Comment on peut dire ça? On ne peut pas dire ça. Les chiffres ne mentent pas. Au moins, les chiffres ne mentent pas. Ici, on doit parler de vérité. C'est pourquoi nous avons essayé de convaincre ce gouvernement de nous écouter.

Je pense que vous avez tous lu Le Devoir aujourd'hui, l'éditorial de Gilles Lesage. Il a parlé de...

Une voix: «C'est-u» un libéral?

M. Williams: Il n'est pas nécessairement connu comme ça et c'est un éditorialiste avec une très haute connaissance. Il dit que la loi n° 161 est particulièrement lourde et indigeste. Il dit que c'est absolument... Je ne veux pas lire tout l'éditorial, mais ça dit que ce n'est pas une bonne façon de procéder, ça dit que ça inclut beaucoup de choses, incluant... Nous n'avons pas discuté beaucoup de pouvoirs accrus décisionnels qui peuvent toucher la population québécoise. Aujourd'hui, on parle des taxes.

Le projet de loi n° 161, si c'est implanté tel quel, si on ne peut pas convaincre le gouvernement de changer 161, ça va faire mal aux familles québécoises. M. le Président, c'est clair, et j'espère que... Peut-être que vous n'avez pas lu ça. Peut-être que vous avez eu tous vos briefings du ministre des Finances ou de son adjoint parlementaire qui ont dit: Lis le document. Vote pour ça. T'as pas le droit, là... Vous êtes tous pris par la ligne de parti. Mais peut-être qu'après ce débat ils peuvent tous sortir et lire, un, le projet de loi n° 161 et le budget. Ça vient du budget, ces chiffres-là.

Ça fait mal, cette loi, à nos familles. Ce sont vos propres chiffres. Il est dit que, pour une famille avec un revenu de travail de 25 000 $, deux enfants, avec le beau geste de la baisse des impôts mais la hausse de la TVQ, ils vont sortir perdants de 6 $. Quelle grande réforme. Voyons donc! Vous avez besoin d'être embarrassés par ça. M. le Président, la population est tannée de ce gouvernement. Ils sont taxés jusqu'ici. Le gouvernement est en train d'arriver avec un projet de loi qui encore augmente le fardeau fiscal de la population québécoise.

Ça va mal dans notre économie. La façon de corriger l'économie, ce n'est pas d'augmenter encore le fardeau fiscal. Il y a 28 indicateurs économiques qui viennent du Bureau de la statistique du Québec, 28 – je peux les déposer s'ils ne sont pas au courant de ça – 25 des 28, vous êtes plus bas que la moyenne canadienne, 25 des 28. Il y en a juste trois... Peut-être que la ministre va faire un discours sur les trois. Mais, 25 sur 28, vous êtes moins que la moyenne canadienne. Ça va mal ici à cause de ce gouvernement. Surtout l'emploi, comme la députée de Saint-François l'a dit. Ça va mal dans les PME, l'économie québécoise, comme les députés de Shefford et Orford l'ont dit. Ils ont clairement dit que ce gouvernement, qui est interventionniste jusqu'à la fin, prend plus que 50 % de l'économie québécoise. M. le Président, ça fait mal. Et c'est ça que nous sommes en train de dire à ce gouvernement.

Mr. Speaker, Bill 161 is an increase of the financial burden, tax burden, on the backs of Quebeckers. It's an increase. I don't care what they say, that they've already tried to wrap it up and make it look different. There is tax, after tax, after tax, after tax. The bottom line, add it up yourself – get your calculators out if you want – is over 1 000 000 000 $ more of taxes out of the pockets of Quebeckers than before. And I haven't even started to talk about the «pelletage», the dumping on municipalities, the increase of our «taxes scolaires», of school taxes. This family of 25 000 $ I talked about has to deal with increased «taxes foncières», increased «taxes scolaires». This hurts our community, our economy. Mr. Speaker, clearly the people of Québec are asking for a government that, one, doesn't daily increase taxes, two, daily reduce services and three, daily mortgage our future with creation of special funds. It is completely irresponsible, what this government is doing. And today, the liberals are defending the people of Québec.

J'espère que le côté ministériel, malgré la ligne de parti, après ce bon débat que nous avons ici, à l'Assemblée nationale, ils vont être tous convaincus que le projet de loi n° 161 tel que proposé est un mauvais projet de loi, qu'effectivement c'est une augmentation du fardeau fiscal. Les familles québécoises vont sortir perdantes comme d'habitude avec ce gouvernement. C'est inacceptable qu'il soit en train de cacher une avalanche de taxes dans ce projet de loi.

M. le Président, j'espère que, quand on appellera le vote, nous allons avoir un vote unanime dans cette Chambre parce que, si on veut vraiment aider l'économie québécoise, aider les familles québécoises, nous allons dire: La loi n° 161 est un mauvais projet de loi, mal fait. C'est pourquoi j'ai proposé la motion d'aujourd'hui. Merci beaucoup.

Des voix: Bravo!


Vote reporté

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Nelligan. Alors, je vais mettre aux voix maintenant la motion du député de Nelligan:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Parti québécois qu'il retire du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, les articles qui imposent une hausse de taxes et d'impôts pour les contribuables québécois.»

Une voix: Vote nominal.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, vote par appel nominal.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. De façon à permettre à un plus grand nombre de nos collègues de voter, je fais la motion, en vertu de l'article 223 de notre règlement, que le vote soit reporté à la fin de la période des affaires courantes de cet après-midi.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, le vote par appel nominal est reporté à la fin de la période des affaires courantes de cet après-midi. Nous allons suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures.

(Suspension de la séance à 12 heures)

(Reprise à 14 h 3)

Le Président: Mmes, MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants, d'abord.

Très bien, si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous entreprenons les affaires courantes.

Déclarations ministérielles. Il n'y en a pas.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Article a.


Projet de loi n° 198

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le député de Roberval présente le projet de loi n° 198, Loi concernant la Municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine. M. le député de Roberval. M. le leader du gouvernement.


M. Jean-Pierre Jolivet

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Ce projet de loi donne le pouvoir à la municipalité régionale de comté de Maria-Chapdelaine d'accorder un crédit de taxes réparti sur trois ans à la compagnie Ressources Orléans inc.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.

Il n'y a pas de dépôt de documents ni de dépôt de rapports de commissions.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, Mme la députée de Pointe-aux-Trembles.

Mme Léger: Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme, s'il vous plaît.

Le Président: Il y a consentement, Mme la députée.


Réaliser l'intégration tarifaire entre les organismes de transport en commun du Grand Montréal

Mme Léger: Je dépose l'extrait d'une pétition de 1 057 pétitionnaires, citoyens et citoyennes de la région de Montréal.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Depuis 1996, nous, les usagers du transport en commun, demandons avec insistance l'intégration tarifaire avec les trois sociétés de transport en commun du Grand Montréal. L'absence d'intégration tarifaire entre les conseils intermunicipaux de transport et les trois sociétés constitue une lacune importante pour nous, les usagers du transport en commun dans la région métropolitaine.

«Le but de cette pétition est de confirmer notre volonté de vouloir profiter de l'intégration tarifaire dès le 1er janvier 1998.

«Nous vous demandons respectueusement, M. le ministre de la Métropole, de prendre tous les moyens qui sont mis à votre disposition pour rendre en vigueur l'intégration tarifaire entre les différents conseils intermunicipaux de transport et les trois grandes sociétés de transport en commun du Grand Montréal pour le 1er janvier 1998.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée. M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le député.


Reformuler l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique

M. Béchard: M. le Président, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale par 292 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du comté de Kamouraska-Témiscouata et du comté de Rivière-du-Loup oeuvrant dans l'enseignement.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Parce que l'avant-projet de loi modifiant la Loi sur l'instruction publique confirme l'abandon des responsabilités de l'État en éducation;

«Parce que, en permettant la prolifération d'écoles sélectives, il compromet la fréquentation par tous les jeunes de l'école de village ou de quartier;

«Parce qu'il favorise la privatisation et la sous-traitance des services éducatifs, provoquant ainsi des pertes d'emplois particulièrement chez le personnel professionnel et de soutien;

«Parce qu'il attaque l'autonomie professionnelle du personnel et les conventions collectives;

«Parce qu'il permet de déroger au programme d'études national, menaçant ainsi la formation équivalente de tous les jeunes;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons à la ministre de l'Éducation de mettre de côté ce mauvais brouillon et de reprendre l'exercice de réforme de la Loi sur l'instruction publique avec l'objectif de la modifier partout où elle fait obstacle à l'égalité des chances ainsi qu'à l'école commune laïque et gratuite.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Très bien. Cette pétition est également déposée.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

Alors, puisqu'il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, je vous avise à ce moment-ci qu'après la période des questions et des réponses orales seront tenus les votes reportés suivants: sur la motion de M. le ministre des Transports proposant que le principe du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant, soit adopté, et sur la motion de M. le député de Nelligan présentée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.


Questions et réponses orales

Alors, nous en arrivons à la période des questions et des réponses orales. M. le chef de l'opposition officielle, en principale.


État du système de santé

M. Johnson: Hier, dès son retour en Chambre, le premier ministre s'est empressé de se porter à la défense du ministre des Finances, dont pas seulement nous, là, mais beaucoup de commentateurs mettent en doute la justesse des décisions quant au déficit, quant à la façon de cacher des dépenses, quant à la façon de reporter même des salaires dans l'avenir. Et, quand je dis «certains commentateurs», là, je ne parle pas seulement du Vérificateur général, je parle d'autres gens qui connaissent ça, qui témoignent de ces faits-là et qui n'embarquent pas du tout dans le train du ministre des Finances pour cacher le déficit et cacher des dépenses.

Le premier ministre continue également à se porter à la défense tous azimuts à temps plein de son ministre de la Santé, dont on dit que le premier ministre chante les louanges. Tu sais, à un moment donné... Non, mais trop, c'est trop, là! Chante les louanges! Les louanges, on ne sait trop pourquoi, lorsqu'on voit tous les jours les symptômes d'un véritable mal qui touche le réseau de la santé se répandre, se multiplier. Il y a des symptômes – encore aujourd'hui on en fait état dans les médias – de ce qui ne va pas dans le système de santé québécois.

Ce que je demande au premier ministre, c'est: Quand dira-t-il à la population où il va en matière de services de santé, lui qui nous a dit que seuls les machines, les appareils, les structures seraient touchés par les décisions du gouvernement? À quel moment le gouvernement et le premier ministre va-t-il poser des gestes constructifs? Quand va-t-il rassurer les Québécois sur la qualité du réseau de la santé?

(14 h 10)

Je ne demande pas au premier ministre de nous faire une saynète, une pièce de théâtre, je lui demande de ne pas blâmer le fédéral, je lui demande de ne pas blâmer ses prédécesseurs, je lui demande de ne pas blâmer la régie régionale, je lui demande s'il est capable de ne pas blâmer des collaborateurs anonymes à droite et à gauche, je lui demande de ne pas blâmer les travailleurs de la santé ni les médecins, ni les administrateurs, surtout pas de blâmer les patients, je demande au premier ministre, qui est en poste depuis maintenant deux ans, de prendre la responsabilité de ses décisions à lui, depuis 24 mois, de nous dire ce que lui entend faire pour rassurer les québécois et cesser de scraper et affaiblir le système de santé québécois.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en dépit de la démagogie de l'opposition, je suis convaincu que le gouvernement est dans la bonne voie, que c'est une des grandes contributions que nous apportons à la qualité des services publics que de moderniser notre régime de santé qui a été laissé dans un état déplorable par le régime libéral auparavant. Nous sommes en train de le transformer, d'en faire un régime moderne, un système moderne, nous sommes en train d'améliorer la qualité des soins, nous avons même amélioré le financement, cette année et l'an prochain; nous sommes en train de construire un régime de santé qui satisfait aux meilleures exigences du monde occidental.

Les québécois sont très fiers de ce patrimoine, et qu'on consulte ceux qui utilisent les soins de santé, M. le Président, on verra qu'à 90 % ils sont satisfaits. Alors, c'est pas parce qu'il y a une opposition qui est en mal de critiques vis-à-vis d'un gouvernement qui assume ses responsabilités et qui essaie de faire mal paraître les efforts que nous faisons... Nous sommes convaincus que c'est la bonne direction. Nous savons que les québécois nous appuient, nous savons qu'ils ont hâte que les efforts que nous consentons solidairement pour arriver à l'assainissement des finances publiques arrivent à leur aboutissement heureux. Ce sera fait, M. le Président, d'ici très peu de temps.

En ce qui concerne la santé, le gros de l'effort est fait. Nous avons un ministre qui met un courage, une sensibilité sans précédent au redressement de la situation qui nous a été laissée. Je dis au chef de l'opposition que nous gardons le cap.

Le Président: M. le chef de l'opposition.

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre se rend compte qu'il a blâmé les autres encore une fois, qu'il a blâmé ses prédécesseurs d'avoir laissé le système de santé dans un état déplorable parce que...

Des voix: Bravo!

M. Johnson: Le premier ministre s'applaudit lui-même de prétendre... Est-ce que le premier ministre se rend compte, en s'applaudissant lui-même comme il vient de le faire, qu'il a blâmé ses prédécesseurs en disant que c'était déplorable parce que les hôpitaux étaient ouverts, que c'était déplorable parce que les urgences étaient accessibles, que c'était déplorable parce que les lits étaient disponibles, que c'était déplorable parce que les gens n'étaient pas inquiets puis que les listes d'attente étaient plus courtes? Voyons donc! Déplorable! Déplorable!

Des voix: Bravo!

M. Johnson: Est-ce que le premier ministre, qui nous a dit solennellement – ce qu'il s'apprête à nous répéter encore une fois – que ce sont les machines, les structures, les appareils qui sont touchés par ses décisions... Ou est-ce qu'il ne se rend pas compte qu'il ne prend pas des bonnes décisions, que les priorités, c'est la santé des Québécois, et que ce sont les décisions du premier ministre et du gouvernement qui est là depuis deux ans? Ça ne fait pas deux minutes qu'il est là, ça fait deux ans qu'il est là, puis il a promis qu'il réglerait le problème. Qu'est-ce qu'il attend pour le régler?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, je pense que le chef de l'opposition souffre d'amnésie...

Des voix: ...

Le Président: Bien. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Oui, d'amnésie, M. le Président, parce que c'est bien beau de dire: Il ne faut pas blâmer le fédéral, les trois quarts des compressions qu'on a faites pendant trois ans sont dues aux coupures des transferts fédéraux. On ne le blâmera pas! Ils ont réglé leur déficit sur notre dos, mais on va les remercier de ça! Bon. Bien oui. Tant qu'à y être, tant qu'à être gentil, on pourrait remercier l'ancien gouvernement. Il a laissé, effectivement, la situation pourrir. Il n'y avait pas de problèmes dans les urgences avec l'ancien gouvernement! 10 % des gens attendaient plus de 48 heures; c'est rendu à 3 %, ça s'est amélioré par un facteur de... Il n'y avait pas de problème dans ce temps-là! Amnésie, amnésie! La situation...

Le Président: Alors, MM. les députés de Papineau et de Joliette, je pense que le dialogue, c'est...

M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Maintenant, le diagnostic est plus sérieux que ça, M. le Président. Amnésie et cécité. Cécité. Qu'est-ce que le gouvernement va faire? Mais il faudrait commencer par voir ce que le gouvernement a fait jusqu'ici. Au lieu de ne rien faire pendant 10 ans, depuis trois ans, le gouvernement a mis en marche une réorganisation des services de santé que tous les autres pays avaient commencée avant, toutes les autres provinces canadiennes, et on est prêt de terminer.

Il y a un mois à peu près, le premier ministre a annoncé qu'on avait terminé la phase des compressions et qu'on pouvait se concentrer sur finir la transformation. Le chef de l'opposition était où? Je ne sais pas où il était, où il regardait, il n'a pas vu ça. Alors, il revoit juste un passé nébuleux qu'il imagine beau puis il ne voit pas ce qui se passe autour de nous, qui est une amélioration effectivement de ce qui se passe. Cécité, M. le Président. S'il regardait juste ce qui se passe aussi autour dans le monde; dans les journaux du matin, ils en parlent encore, s'il regardait juste les rapports qui sont produits ailleurs au Canada et qui nous comparent aux autres, on reste dans le peloton de tête.

Il y a beaucoup de choses à améliorer, il s'en est amélioré beaucoup depuis trois ans, alors il faudrait juste guérir, j'espère que ce n'est pas trop chronique, on peut guérir le chef de l'opposition puis il pourra peut-être nous aider en attaquant la source de nos vrais problèmes. Qu'il nous coupe nos dépenses à Ottawa plutôt que de se battre contre le Québec, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, en principale.


Charge de travail des employés du secteur de la santé

M. Paradis: Oui, M. le Président. Pendant que le premier ministre et les autres ténors péquistes applaudissent le ministre de la Santé qui s'en prend au chef de l'opposition plutôt que de défendre les malades et les gens qui donnent des services en santé, un représentant des travailleurs du secteur de la santé s'exprime comme suit, et je le cite au texte: Tous dans le réseau, médecins, employés, associations patronales, déplorent la détérioration des services à la population. Il semble y avoir une seule personne qui détient la vérité absolue, et c'est le ministre de la Santé. C'est nous qui sommes des plaignards ou est-ce le ministre qui est un menteur?

À minuit hier soir...

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, vous savez très bien que notre règlement... Et il y a eu plusieurs décisions de la présidence, de plusieurs présidents, d'ailleurs, qui ne nous permettent pas de faire indirectement ce que le règlement ne nous permet pas de faire directement.

M. Paradis: Je ne peux pas retirer...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, un événement comme ça s'est produit hier; vous avez simplement demandé de reformuler la question. Je demanderais qu'à ce moment-ci, compte tenu de l'utilisation qu'on peut en faire dans des journaux ou à la radio ou à la télévision, il retire ses paroles de «menteur», même si c'est fait de façon indirecte.

(14 h 20)

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, vous vouliez intervenir sur la question de règlement? M. le leader du gouvernement, j'ai vu comme vous l'utilisation qui est faite de propos que la présidence n'accepte pas. En trois semaines, à ma connaissance, c'est la deuxième fois que ça se produit. Dans ce contexte-là, ce n'est pas parce que des titres de journaux sont faits à partir de propos qui sont refusés par la présidence ou qui sont retirés... Ce que je constate, c'est qu'à chaque fois que les propos sont dits, même si l'intervention de contrôle vient par la suite, ils sont dits et ils sont dits peut-être, dans certains cas, justement parce que les médias les récupèrent par la suite.

Ceci étant dit, je ne peux pas appliquer le règlement en fonction des titres de journaux. À ce moment-ci, M. le leader de l'opposition officielle, je vous ai indiqué – et ce n'est pas la première fois que je le fais, ni à vous, ni à d'autres collègues – qu'on ne peut pas faire indirectement ce qu'on ne peut pas faire directement. Et, dans ce contexte-ci, je sais bien que ce n'est pas vos propos que vous avez prononcés, mais une citation, sauf que, en l'occurrence, je vous demanderais de ne plus refaire ce procédé-là.

M. Paradis: Pour aller plus loin, M. le Président, je vais, sur le plan parlementaire, les retirer parce qu'ils ne sont pas permis en cette Chambre. Maintenant, je vous dirai que j'avais d'autres citations qui allaient dans le même sens. Ce n'est pas le coeur de l'intervention, M. le Président.

Au moment où le premier ministre et les péquistes applaudissent le ministre de la Santé, les travailleurs et travailleuses de la santé de l'hôpital Notre-Dame, à Montréal, ont décidé qu'ils en avaient assez de la fermeture des lits et de la coupure des services, qu'ils en avaient assez des urgences qui débordaient, qu'ils en avaient assez de voir que le bloc opératoire, qui compte 29 salles d'opération, ne soit pas fonctionnel – il y en a 10 qui ont été fermées par le ministre de la Santé – qu'ils en avaient assez de voir que la liste d'attente s'allonge de plus de 4 000 patients, à l'hôpital Notre-Dame, qui attendent d'être opérés.

Et ils n'ont pas débrayé, M. le Président, vous en conviendrez – c'est peut-être une première au Québec – pour avoir des augmentations de salaires, ils ont débrayé pour que le ministre de la Santé leur donne les outils nécessaires pour qu'ils puissent soigner leurs patients et leurs malades. Ils veulent la réouverture du bloc opératoire; ils veulent que le personnel qui a été mis à la porte au bloc opératoire soit remplacé; ils veulent que les salles d'urgence fonctionnent adéquatement; ils veulent raccourcir les listes d'attente; ils veulent soigner les malades. Qu'est-ce que le ministre de la Santé attend pour prendre la défense et des malades et des travailleurs qui veulent avoir un système de santé qui fonctionne correctement au Québec?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: On va d'abord préciser et établir les faits, M. le Président. Le débrayage qui a eu lieu au pavillon Notre-Dame du CHUM aujourd'hui pour 24 heures n'est pas relié à toute la kyrielle de raisons qu'a énumérées le député de Brome-Missisquoi, il l'est à une raison très précise. Ce que le syndicat réclame, c'est l'affichage, à partir du 1er septembre, des postes vacants. C'est la raison qui est invoquée par les syndicats, et cette grève, elle est illégale. Il y a une entente présentement qui prévoit les mécanismes et les façons de combler les postes vacants. Il y a un délai, c'est vrai, du 1er septembre, à partir duquel les postes, selon l'entente, doivent être comblés, mais l'entente prévoit aussi qu'il peut y avoir des accommodements locaux s'il y a des situations qui rendent difficile, voire impossible de combler immédiatement les postes.

Or, on sait très bien que le CHUM est un établissement qui est en réorganisation importante et que c'est un établissement issu de la fusion de trois grands hôpitaux de Montréal qui est essentiel pour le réseau de la santé, qu'il essentiel pour la vie sociale et économique de Montréal que cet hôpital devienne vraiment un de nos plus grands hôpitaux, et ça sera même un des plus grands hôpitaux nord-américains sur le plan des soins, de l'enseignement et de la recherche. Mais, ça, il y a un travail énorme de réorganisation qui est en cours présentement et c'est pour ça que ce n'est pas possible de remplacer rapidement, pour l'hôpital, tous les postes à partir du 1er septembre.

Ce à quoi j'appelle les parties, c'est d'abord de respecter la loi et les conventions. Les services essentiels sont présentement assurés parce que c'est des services qui sont couverts par la loi des services assurés. Et j'en appelle les parties à s'asseoir et à travailler ensemble. Les syndicats sont d'ailleurs représentés au conseil d'administration du CHUM. On a tout en main, si le monde travaille ensemble, pour régler les problèmes, pour bâtir un CHUM dont on a besoin, qui rend déjà et qui va rendre encore plus de services à la population. Et je pense que ce n'est pas correct de s'en tenir de façon rigide à un délai qui a été prévu il y a quatre ou cinq mois et qu'il faudrait ajuster par ententes locales, comme le prévoit la convention, compte tenu du défi important que tout le monde doit faire ensemble. Alors, j'en appelle à la collaboration de tout le monde, M. le Président.

Le Président: En complémentaire, M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Quand le ministre de la Santé en appelle à la collaboration de tout le monde et qu'il invoque la responsabilité des parties, est-ce qu'il conviendra qu'il est, lui, une des parties, sinon la partie responsable de ce qui se produit présentement, qu'il a fermé à Montréal sept hôpitaux, 1 500 lits, qu'il s'apprête à fermer 500 autres lits? Et ce que les travailleurs réclament, c'est la réouverture des salles d'opération, c'est les problèmes technocratiques d'affichage de postes. Il nous avait dit que tout avait été planifié dans le moindre détail. Pourquoi aujourd'hui...

Le Président: Encore une fois, il n'y a pas 50 présidents à l'Assemblée nationale; il y en a un. C'est à la présidence d'apprécier si, oui ou non, les questions sont au niveau du règlement. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, je ne pensais pas que... Ça dépend des causes. Je n'avais pas appris que la cécité était contagieuse, mais ça a l'air que c'est quelque chose qui se propage. Alors, à Montréal...

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, à Montréal comme ailleurs au Québec, ce qui se passe du côté de la santé et des services sociaux, c'est un système qui se rebâtit et un système moderne pour l'avenir. C'est ça qui se fait. Quand il y a des hôpitaux qui ont été fermés, c'est parce que c'étaient des hôpitaux qui contenaient des lits de courte durée en trop. Ça a permis jusqu'à maintenant, par exemple à Montréal, de développer plus de 2 200 lits de soins de longue durée, qui demandent trois à quatre, cinq heures de traitements, de soins par jour, que les patients n'avaient pas. Ça a permis d'augmenter, sur l'ensemble des services de première ligne, les budgets de l'ordre d'à peu près 12 %. Ça a permis de généraliser Info-Santé dans tous les CLSC de l'île. Ça a permis l'amélioration, déjà, de beaucoup de services en transformant ce qu'on avait en trop pour développer plus ce dont on avait besoin.

C'est ça qui se passe dans nos services de santé. C'est dérangeant, ça incommode beaucoup de monde pendant qu'on fait le ménage et qu'on fait la reconstruction. C'est évident. Ça a dû être fait à un rythme très rapide, dans des conditions très difficiles sur le plan budgétaire. On en a déjà parlé, puis on sait de qui ça dépend. C'est un fait que le personnel a trouvé ça difficile – je l'ai vu pendant la tournée que j'ai faite de toutes les régions et y compris à Montréal au mois d'octobre – mais c'est des gens qui nous disent: On est contents que ça soit fini, que ça soit derrière nous, cette compression-là; on est fatigués, mais on est fiers de ce qu'on a fait et on est prêts à la finir, la transformation. C'est ça que les gens disent. C'est difficile, mais ils ont du courage. Ils sont prêts à continuer parce qu'ils prennent fondamentalement l'intérêt des patients qu'on doit desservir, M. le Président.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Paradis: Comment, M. le Président, le ministre de la Santé peut-il continuer à prétendre que tout va bien quand, hier, à Chicoutimi, le représentant des travailleurs et des travailleuses de la santé nous a fait état des cas de burnout qui affectent 25 % des travailleurs et des travailleuses, qu'il a fait état de 18 personnes dans le secteur...

M. Cherry: Le premier ministre, il dit que ce n'est pas grave.

M. Paradis: Le premier ministre dit que ce n'est pas grave, là, mais 18 personnes qui, dans le secteur de la santé...

Des voix: ...

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, on n'a pas le droit d'imputer des motifs à des personnes, qui d'ailleurs n'ont jamais parlé, et le député de Saint-Laurent a imputé des motifs que le leader de l'opposition a transférés alors que le premier ministre, qui est à côté de moi, n'a jamais dit ces choses.

M. Bouchard: Je n'ai pas dit un mot, moi.

Le Président: M. le député.

(14 h 30)

M. Paradis: S'il veut dire le contraire, il a eu toute l'opportunité tantôt puis il va l'avoir encore un peu plus tard pour dénoncer son ministre de la Santé. Tant qu'il l'applaudit, on comprend qu'il le supporte.

Des voix: Bravo!

Le Président: Alors, M. le député de Brome-Missisquoi, votre question, s'il vous plaît.

M. Paradis: M. le Président, je reprends la question: Comment le premier ministre et le ministre de la Santé peuvent-ils considérer que tout va bien, que les malades sont bien soignés et que le personnel est heureux quand, hier, à Jonquière ou à Chicoutimi, le représentant des travailleurs et travailleuses du secteur de la santé dénonçait le fait que 25 % de ces travailleurs et travailleuses souffrent présentement de burnout dans le secteur de la santé? Est-ce que c'est à cause de votre problème technocratique? Il ajoutait même – et j'entends rire de l'autre côté, là – que 18 personnes...

Des voix: ...

Le Président: En terminant, M. le député.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Nous en étions au fait que le représentant des travailleurs et travailleuses dénonçait le fait que 25 % des gens qui oeuvraient dans le secteur de la santé souffraient présentement de burnout, que 18 personnes se sont enlevé la vie, se sont suicidées, des gens qui oeuvraient dans le secteur de la santé, au cours des deux dernières années.

Comment le ministre de la Santé peut-il refuser de donner aux travailleurs et aux travailleuses les outils dont ils ont besoin pour bien soigner les malades au Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: M. le Président, c'est assez décevant qu'en cette Chambre on doive avoir des démonstrations de démagogie cynique comme ce qui se passe devant nous. Mais c'est ça qu'on fait. On sait très bien que c'est vrai. Je l'ai dit, je n'ai jamais dit que tout allait bien; on a eu des difficultés énormes. Ce que je dis et ce que les gens me disent quand je leur parle sur le terrain, c'est: Ça a été difficile, on est fatigués, on est essoufflés. Mais, oui, on arrive au bout du tunnel et on a la volonté de s'en sortir parce qu'on connaît trop l'importance de ce système-là pour la population.

C'est vrai qu'on retrouve dans le système de santé présentement, comme dans toutes les grandes entreprises qui doivent faire une transformation importante, des symptômes, de la fatigue, un taux d'absentéisme qui est plus grand, et toutes les entreprises en réorganisation ont connu ça. Où on devient cynique, c'est quand on tire en l'air des chiffres, comme des chiffres sur le suicide, alors que, j'ai vérifié les chiffres, il n'y a pas de haut taux de suicide, c'est même plus bas dans le réseau de la santé que dans la population en général. On sort des chiffres hors de leur contexte, on ne leur donne pas d'échelle de temps du tout et on laisse croire n'importe quoi avec ça. C'est ça qui est cynique, c'est ça qui est démagogique et c'est un manque de respect. C'est un manque de respect fondamental pour tous ceux dans le réseau qui ont subi les conséquences de ce qui n'a jamais été fait quand ça aurait dû être fait, qui se sont imposé ces années-là pour ne pas baisser les bras comme le gouvernement l'avait fait avant devant la difficulté, qui ont été les victimes de ce que ce gouvernement-là n'a pas fait. Ce n'est pas à cette heure qu'ils s'en sont sortis qu'on va les blâmer, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Président: M. le chef de L'opposition, en principale.


Conséquences des décisions du premier ministre sur le système de santé

M. Johnson: En présumant qu'il ne souscrit pas à l'approche de son ministre, qui est d'accuser ses détracteurs de souffrir soit d'amnésie, soit d'être aveugles, est-ce que le premier ministre, lui comme moi, n'entend pas – parce que c'est ça qui est en cause, c'est ce qu'on entend – l'ensemble de nos concitoyens exiger des décisions constructives, qui correspondent aux engagements du premier ministre de ne toucher que les structures, les appareils, les machines et de ne pas laisser s'allonger les listes d'attente? Est-ce que le premier ministre ne peut pas... Je serais surpris qu'il souscrive à l'approche technocratique du ministre de la Santé qui nous dit que c'est comme n'importe quelle grande entreprise qui est en train de se rationaliser: le monde est essoufflé. Mais les entreprises qui sont en train de se rationaliser, de se réorganiser, elles n'arrêtent pas de fonctionner, elles n'arrêtent pas de vendre leurs choses aux consommateurs, elles n'arrêtent pas de rendre des services. C'est exactement ce que vous êtes en train de faire.

Le premier ministre se rend-il compte que les décisions qu'il a prises, d'abord, sont à l'encontre des engagements qu'il a formulés et, deuxièmement, que ces décisions sont en train de faire s'affaiblir et de scraper le régime de santé tel qu'on le connaît au Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, ce que j'entends, ce que nous entendons du milieu de la santé, c'est que les soins s'améliorent, que nous sommes en train de construire un système moderne, que nous sortons de cette espèce de marécage où nous avaient plongés l'inertie, l'irresponsabilité du gouvernement qui nous a précédés, que nous avons un ministre remarquable, soutenu par un gouvernement courageux. Et ce que les gens savent aussi, c'est que nous devons une fière chandelle au personnel qui travaille dans les hôpitaux. Nous savons que nous leur devons beaucoup, que c'est beaucoup qui leur est demandé présentement que de procéder si rapidement à une transformation aussi fondamentale, mais nous savons aussi qu'ils sont très fiers de le faire, qu'ils ont conscience de contribuer puissamment à l'avenir du Québec, à l'avenir du système. Et tout le monde comprend aussi que le Québec est doté d'un ministre remarquable dénoncé injustement par l'opposition démagogique comme il n'y en a jamais eue.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député de Frontenac, en principale.


Fermeture de l'hôpital psychiatrique Saint-Julien, à Bernierville

M. Lefebvre: M. le Président, le ministre de la Santé puis son premier ministre, on en a encore un exemple cet après-midi, répètent depuis plusieurs mois: Il n'y a plus de coupures dans la santé. Le ministre Rochon a même dit, il y a quelques mois: Autres hôpitaux fermés, c'est terminé; terminé, on ne ferme plus d'hôpitaux.

Pourtant, la semaine dernière la direction de l'hôpital Saint-Julien, à Bernierville, dans mon comté, le comté de Frontenac, a appris que le gouvernement du Québec et son ministre de la santé fermaient cet hôpital spécialisé, vieux de 125 ans, sans même prévenir la curatrice, la curatelle publique, Mme Bailly. L'hôpital Saint-Julien prend soin de 542 personnes qui présentent des troubles de déficience intellectuelle et des problèmes de santé mentale; 50 % d'entre eux souffrent de pathologies multiples lourdes.

Ma question au ministre de la Santé: Pourquoi le ministre de la Santé fait-il encore une fois le contraire de ce qu'il dit? Pourquoi frappe-t-il cette fois les plus démunis, les plus faibles de notre société, alors même que le groupe tactique d'intervention – le ministre sait de qui je parle – ses propres experts, qui, eux, sont venus à Bernierville, recommandent de garder ouvert l'hôpital Saint-Julien pour prendre soin des 250 patients – c'est les experts qui parlent, M. le Président, oui – qui souffrent de pathologies multiples et qui ne peuvent être désinstitutionnalisés, qui ne peuvent être retournés dans la communauté?

Une voix: C'est ça, la question.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: M. le Président, ce qui se passe à Saint-Julien correspond parfaitement à ce qu'avais en fait dit, que ce qu'il y avait à faire comme transformations importantes était déjà ou fait ou en train de se faire ou prévu déjà dans les plans de transformations des régions.

Des voix: ...

M. Rochon: Ah oui! c'est ça que j'avais dit. M. le Président, Saint-Julien, il a commencé à être question de transformer et de transférer les patients de cette institution, qui est une institution comme on en avait une à peu près dans toutes nos régions, qui vient de notre passé, période où on avait des asiles pour les gens qui avaient des problèmes de déficiences intellectuelles et de maladies psychiatriques graves... Il fut une période au Québec, comme dans les autres pays, où les gens étaient amenés dans un milieu asilaire parce qu'à l'époque on n'avait pas de traitements, on n'avait pas d'interventions pour mieux s'occuper de ces gens-là. Depuis ce temps-là, il y a des médicaments, il y a des interventions dans la communauté qui ont beaucoup progressé, et on sait que depuis 15 ans tous les pays ont amené de plus en plus ces patients à vivre dans la communauté, à être traités autrement et qu'on a évité d'en amener d'autres dans un asile. C'était ça, le passé de Saint-Julien; d'ailleurs, sur les patients qui sont là, il y en a plus des deux-tiers, plus de 400, qui sont des gens qui ont un problème de déficience intellectuelle, à Saint-Julien.

(14 h 40)

Dès le début des années quatre-vingt-dix, il était déjà question de faire ce qui se passe aujourd'hui. Évidemment, pour ça comme pour le reste, le gouvernement du temps n'a pas eu le courage de procéder parce c'est difficile. Ben oui! C'est depuis ce temps-là qu'il en est question, ce n'est pas depuis hier. En 1996, en juin, c'était dans le plan...

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, s'il vous plaît! M. le ministre.

M. Rochon: Alors, en juin 1996, évidemment la régie régionale a intégré ce projet dans le plan de transformation, a commencé à travailler depuis ce moment-là avec l'établissement. En juin dernier, l'établissement a soumis un premier plan pour la désinstitutionnalisation des patients qui sont à Saint-Julien. Il y a quelques semaines, le conseil d'administration de la régie régionale a pris la décision d'aller de l'avant avec ce plan-là et a demandé à l'établissement de préparer, d'ici juin 1998 – on prend le temps de faire les choses correctement – un plan plus complet qui va tenir compte et s'assurer que les ressources alternatives sont bien développées, qui va s'assurer d'avoir la collaboration des patients ou de leur famille et des deux, la collaboration du personnel pour que le transfert se fasse bien.

Même le comité qui a été mis en place pour la relance de Saint-Julien est d'accord pour la désinstitutionnalisation. Ce dont il s'agit, c'est de voir quel est l'impact sur la communauté, sur le village et comment un établissement, une bâtisse comme ça peut être utilisée dans l'avenir. Mais l'avenir, pour les patients, à peu près tout le monde est d'accord. C'était relativement calme jusqu'à temps que le député de Frontenac aille se promener là puis qu'il essaie de mettre le trouble dans la place, M. le Président.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, au ministre technocrate qui a oublié son passé de médecin, là...

Le Président: En complémentaire, de façon réglementaire, M. le député.

M. Lefebvre: Comment le ministre peut-il oser soutenir que les experts qu'il a mandatés recommandent la fermeture de l'hôpital alors que j'ai ici sous les yeux, M. le Président, le rapport... Il sait de qui je parle, lui, pas ceux et celles qui l'entourent. Le Dr Jacques Brunet, ancien sous-ministre à la Santé, le Dr Pierre Tétrault, psychiatre, chef de département de psychiatrie à l'hôpital Pierre-Boucher, avec deux ou trois autres personnes, disent dans un rapport que j'ai ici: On ne peut pas désinstitutionnaliser plus de 250 patients dans cet hôpital. Et ils recommandent au ministre – puis je lui demande pourquoi il met de côté l'opinion des experts – de garder l'institution ouverte. Pourquoi le ministre rejette-t-il du revers de la main, sinon pour de vulgaires questions de piastres, l'opinion de ses propres experts, M. le Président?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Alors, M. le Président, les informations que j'ai à ma disposition, les études qui ont été faites autant par les citoyens, les cliniciens, ceux qui s'occupent des patients, pas seulement les experts, sont à l'effet qu'au cours des prochaines années graduellement les patients qui sont à Saint-Julien peuvent être transférés soit dans des foyers de groupe, dans des familles d'accueil ou, s'il y en a qui doivent demeurer en établissement, qu'ils peuvent être dans d'autres établissements autour dans la région, qu'on n'a pas besoin de garder ce qui était un établissement de soins psychiatriques et qui faisait partie encore, comme je le disais tout à l'heure, de notre période asilaire au Québec. Ça, c'est très clair.

Dire comment on peut s'occuper des gens avec ce qu'on a comme possibilité de donner des services dans une communauté, c'est une chose, et décider ce qu'on fait avec une bâtisse qui a abrité un établissement auparavant, c'est de ça dont il est question présentement. Et là on a, sur l'objectif visé et sur les grandes orientations, un consensus. Il reste à s'arranger, à s'assurer avec le syndicat que les transferts du personnel aussi vont être respectés selon les règles de la convention collective. Et c'est ça qui est après se passer.

Pourquoi on ne laisserait pas ce monde-là – qui est une situation très locale dont les gens s'occupent correctement, qui sont bien appuyés par la régie régionale – tranquille pour régler quelque chose qu'ils sont après régler eux-mêmes plutôt que de perturber quelque chose qui va bien? Ne brisez pas ce que vous n'avez même pas pu réparer avant; laissez-le se corriger, s'il vous plaît.

Le Président: M. le député.

M. Lefebvre: M. le Président, est-ce que le ministre peut venir chez nous, à Saint-Ferdinand, Bernierville, pas comme ministre, comme docteur, s'il a encore un peu de compassion...

Le Président: Je voudrais profiter de l'occasion, M. le député de Frontenac, pour rappeler à tout le monde que je veux bien que le débat, depuis le début de la période de questions, soit vigoureux, mais il y a toujours l'article 35.7 qui doit aussi prévaloir. Même si les débats peuvent être vigoureux, et ce n'est pas le choix de la présidence, on ne peut pas se servir d'un langage violent, injurieux ou blessant à l'adresse de qui que ce soit. Alors, je vous inviterais les uns et les autres à faire en sorte que la vigueur s'inscrive aussi dans le cadre du règlement. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Est-ce que le ministre peut démontrer un petit peu de courage puis de compassion, faire comme ses propres experts et venir rencontrer les patients, rencontrer la direction de l'hôpital, saluer les employés, les parents de ces patients-là, M. le Président? Est-ce qu'il peut s'engager aujourd'hui à faire cette démarche-là? Je suis convaincu que son passé de médecin va prendre le dessus, s'il vient chez nous, puis qu'il va renverser la décision, ordonner que cet hôpital-là ne ferme pas.

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: C'est non seulement de la compassion, mais, quand on voit avec comment d'incompréhension et de manque de respect pour les gens sur le terrain on intervient de ce côté-là de la Chambre, c'est de la désolation que ça nous inspire.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, vous avez probablement entendu comme moi, parce qu'il n'y avait pas de bruit à ce moment-là, le ministre parlait correctement, mais on a entendu, directement de la part du député de Frontenac, le mot «menteur».

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je veux et je vous demande de demander... Je m'excuse, le député n'était ni au micro, ni à la télévision, le président était debout, je demande qu'il retire effectivement le mot «menteur».

Le Président: Alors, à chaque fois qu'un député intervient, qu'il n'a pas la parole et qu'il utilise son droit de parole qui est non autorisé pour en plus enfreindre le règlement, on se retrouve à créer un climat qui est intenable à l'Assemblée nationale. M. le député de Frontenac, si vous avez effectivement utilisé ce propos que vous prête le leader du gouvernement, je vous demanderais de retirer...

M. Lefebvre: M. le Président, le temps court, alors je retire ce qui pourrait être antiparlementaire dans tous les propos que j'ai tenus.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, je dirais deux choses pour...

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Effectivement, si tout ce qui était antiparlementaire a été retiré, il ne reste pas grand-chose à quoi répondre.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Rochon: Mais, je dirais deux choses, M. le Président. Premièrement, les gens, localement et au niveau de la région, travaillent très bien dans cette situation, ils travaillent très bien ensemble, il y a beaucoup de concertation. Il y a des discussions, il va y en avoir encore, ça, c'est sûr. C'est des décisions difficiles à prendre, c'est des décisions difficiles à mettre en pratique, mais il y a un accord sur l'objectif et une volonté d'y arriver, et je fais confiance à ces gens. Je suis en collaboration et en lien continu avec toutes les régions et, si je dois de nouveau rencontrer des gens dans la région ou à Saint-Julien, je suis toujours disponible, mais je le ferai à leur invitation, je n'ai pas besoin du député de Frontenac pour me transmettre ce genre d'invitation là.

(14 h 50)

Le Président: En principale, M. le député de Nelligan.


Mesures pour remédier à la divulgation de renseignements personnels au ministère du Revenu

M. Williams: Après de multiples tentatives pour connaître la vérité, c'est seulement à 18 heures hier que nous avons appris que l'enquête de la Sûreté était terminée dans le dossier de trafic de renseignements personnels. De plus, seulement à 20 heures, toujours hier, nous avons appris que non pas un mais huit fonctionnaires ont été congédiés au ministère du Revenu. Or, on apprenait ce midi sur TVA que, même si l'enquête de la Sûreté est terminée, le réseau de trafic de renseignements existe et qu'on peut facilement, facilement obtenir des informations confidentielles encore aujourd'hui.

La question est fort simple: Qu'est-ce que la ministre déléguée va faire concrètement aujourd'hui pour protéger les informations confidentielles des contribuables québécois?

Le Président: Mme la ministre déléguée au Revenu.

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, ce que nous allons faire pour continuer à protéger les informations confidentielles des contribuables québécois, c'est continuer à faire avec vigilance ce que nous avons fait. Et je tiens à préciser...

Des voix: ...

Le Président: Mme la ministre.

Mme Dionne-Marsolais: Comme je l'ai expliqué hier en débat de fin de séance, il y a un employé au ministère du Revenu qui a été congédié pour des raisons de commerce d'information, M. le Président. Quant aux sept autres employés auxquels réfère le député de Nelligan, ce sont des congédiements dans le cadre de leur travail, mais pas pour des raisons de trafic de renseignements.

Alors, pour ce qui est de la sécurité des renseignements au ministère du Revenu, j'aimerais souligner au président de l'Assemblée et à l'opposition que notre gouvernement a mis sur pied la commission parlementaire des finances publiques qui ce matin entendait la sous-ministre responsable de la gestion administrative du ministère du Revenu, à la demande d'ailleurs du député de Nelligan. S'il avait assisté à la commission, il aurait eu des réponses à des questions et un document qu'elle a déposé, M. le Président.

Le Président: Dernière question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Johnson: Au premier ministre, qui pourrait nous surprendre en nous disant qu'il est satisfait d'une réponse comme celle-là: Pour les citoyens dont les renseignements confidentiels, dont l'intimité, pourrions-nous dire, a été violée dans le cadre de l'exercice de leurs fonctions par des employés du ministère du Revenu, est-ce que le premier ministre, à l'endroit de ces personnes-là – on ne sait pas lesquelles, puis je ne veux pas savoir lesquelles – pourrait nous indiquer, par ailleurs, combien de Québécois et de Québécoises ont vu leurs renseignements ainsi distribués contre rémunération par des employés du gouvernement, des gens qui se demandent probablement aujourd'hui comment ça se fait qu'ils n'ont pas eu telle job, comment ça se fait qu'ils n'ont pas été capables d'avoir tel prêt d'une caisse populaire, qui se demandent comment ça se fait qu'un dossier, tout d'un coup, a foiré, probablement parce que quelqu'un s'est procuré illégalement des renseignements personnels qui ne concernent qu'eux et le ministère?

Qu'est-ce que le premier ministre entend faire à l'endroit de ces véritables victimes, au-delà des gens qui ont été congédiés, avec raison, et qui devraient probablement payer pas mal plus cher que ça? Est-ce que le premier ministre entend poser des gestes concrets, d'abord pour que ça ne se reproduise plus, pour qu'il y ait, à la limite, des sanctions exemplaires et non pas des simples congédiements comme ça pour des gens qui se sont mis de l'argent dans les poches, qui n'ont pas dû le déclarer d'ailleurs au ministère du Revenu?

À l'endroit surtout des citoyens dont la confidentialité des renseignements a été brisée par des employés du ministère, qu'est-ce que le premier ministre va faire pour les assurer que leurs renseignements et que les informations qui ont été transmis ne les lésaient pas? Et, s'ils les lésaient, comment il va faire pour les aider?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement considère cette chose sérieuse, puisqu'il s'agit du secret fiscal qui participe de l'intégrité de l'État. Mais il a agi avec beaucoup de vigilance, le gouvernement. C'est parce qu'il y a trois choses différentes qu'il ne faut pas mêler. Premièrement, il y a eu cette allégation, en mars dernier, d'un commissaire de la Commission d'accès à l'information qui siégeait ici, à une commission parlementaire, et qui a fait référence à du trafic d'information. Nous avons immédiatement, dans les heures qui ont suivi, demandé à la Sûreté du Québec de déclencher une enquête policière sur ces allégations. Cette enquête, elle est pratiquement terminée. On m'informe que le rapport est en voie de rédaction et qu'il sera incessamment remis au substitut du Procureur général.

Deuxièmement, il y a eu – nous l'avons appris hier durant la période des questions – au ministère du Revenu, le cas d'une personne qui a été prise en flagrant délit de vente d'informations, qui l'a avoué et qui a été congédiée. Troisièmement, dans le courant, je ne dirais pas normal, mais dans le courant de la gestion du ministère du Revenu, l'an dernier, relativement à différents manquements de nature disciplinaire, mais, d'après ce que le ministre vient de nous dire – qui a accès au dossier; nous, nous n'y avons pas accès, puis c'est normal – il ne s'agit pas de vente d'informations, d'autres cas de différents types de manquements, dans la gestion normale du personnel, le ministère a sévi et imposé sept congédiements.

Donc, ne mêlons pas les choses. Le gouvernement attend le rapport de police qui sera déposé incessamment et il agira en fonction de ces choses. En outre, j'ajouterai que la ministre du Revenu a décidé de transmettre au Procureur général les dossiers des personnes qui ont été congédiées, dans la mesure où le Procureur général pourrait évaluer qu'il y a matière à plus amples recours.

Le Président: M. le leader de l'opposition officielle, la période des questions et des réponses est terminée.

Une voix: ...

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Un instant.

Sur une question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Compte tenu de l'importance du sujet qui a été abordé entre le chef de l'opposition et le premier ministre, compte tenu que la question du chef de l'opposition traitait du sort réservé aux victimes et que le premier ministre a omis – et je ne le blâme pas – de répondre quant à l'essentiel de la question, est-ce qu'il y aurait consentement pour que le premier ministre puisse répondre à cette question du chef de l'opposition en ce qui concerne le sort réservé aux victimes, M. le Président?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il y aura des réponses qui seront données s'ils ont la chance de poser la première question demain sur cette question.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui. Je n'ai pas voulu arrêter, puisqu'il a souvent été arrêté, le temps de la période de questions. Je sais que le député de Frontenac n'est pas un ministre. Il a cependant fait lecture d'un document d'experts. S'il a la gentilhommerie de le déposer... Je lui demanderais, par votre intermédiaire, s'il peut déposer le rapport d'experts dont il a fait mention.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, tout en soulignant – et je ne l'ai pas soulevé tantôt parce qu'on était pendant période de questions – que le député de Nelligan était à la commission parlementaire ce matin, c'est la ministre qui était absente. Il y aura effectivement dépôt du document du député de Frontenac.

Des voix: ...

Le Président: M. le député de Papineau, s'il vous plaît. Mme la ministre déléguée au Revenu.

(15 heures)

Mme Dionne-Marsolais: M. le Président, question de fait. J'aimerais préciser que le député de Nelligan a fait office de présence à la commission parlementaire...

Des voix: ...

Le Président: Bon. Est-ce qu'on peut continuer?

Bien. Nous allons maintenant passer au vote. Il y a eu une réponse, M. le leader du gouvernement. M. le leader du gouvernement, on m'a indiqué que ça se ferait. Est-ce qu'à ce moment-ci vous voulez... M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: Le député de Laviolette se demande si je consens ou pas. Moi, j'ai un leader, puis il répond à ma place. Un très bon avocat, alors c'est à lui de décider.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, tout ce que je demande, c'est qu'il soit effectivement déposé, mais, à ce moment-ci, normalement, il y a quelqu'un qui va le chercher et qui l'amène au secrétaire général. Il n'a pas été déposé.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Moi, ça me ferait...

Le Président: Non. Vraiment, là... À l'ordre, s'il vous plaît! Vraiment, ça dépasse les bornes cet après-midi. Alors, M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Est-ce que je dois comprendre de l'intervention du leader du gouvernement qu'il souhaite le dépôt le plus rapidement possible et qu'il demande une suspension de nos débats de façon à ce que nous puissions procéder au dépôt avant de procéder aux votes? Si c'est le cas, ça me fera plaisir de l'accommoder, M. le Président.

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, devant vous, devant moi, devant tout le monde, il lisait un document nommément devant lui. Il devrait l'avoir, le document! Normalement, quand un ministre vous demande un dépôt, on va le donner immédiatement. Je veux savoir: Est-ce qu'ils vont traficoter le document ou bien s'il l'a devant lui?

Des voix: Oh!

Le Président: M. le leader du gouvernement... Alors, nous allons suspendre la séance quelques instants.

(Suspension de la séance à 15 h 4)

(Reprise à 15 h 19)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Je voudrais faire remarquer aux députés qu'à partir du moment où il y a eu claquement il y a le minimum de décorum qui doit être respecté. À ce moment-ci, nous sommes en ondes devant nos concitoyens et nos concitoyennes qui ne comprennent pas, encore une fois, ce qui se passe.

Alors, veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Question de règlement, M. le Président. Le leader du gouvernement a imputé au député de Frontenac des motifs indignes. Lorsqu'il a mentionné que le député de Frontenac pourrait traficoter – j'utilise le terme qu'il a utilisé – un document, il a contrevenu au règlement de l'Assemblée nationale. De toute façon, ça va être facile à vérifier. Moi, je serais surpris que le ministre de la Santé n'ait pas en sa possession un document qui émane de son propre groupe aviseur. Dans les circonstances, je vous demande de demander au leader du gouvernement de retirer ses propos.

(15 h 20)

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, je les retire. J'ai peut-être dit un mot qui est antiparlementaire, mais ce que je voulais simplement dire, c'est qu'il y avait un document qui devait être déposé. Au moment où le document – maintenant, ça, je comprends – allait être déposé, je comprenais facilement qu'on aurait pu me répondre qu'on enlevait les notes personnelles ou le numéro de fax, mais c'est dans ce sens-là que j'avais voulu...

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, je comprends que, au-delà des explications, les propos non convenables ont été retirés, d'une part, et je voudrais vous indiquer que la présidence, à partir du moment où il y avait consentement du leader de l'opposition officielle sur le dépôt, n'a pas l'obligation d'obliger le dépôt immédiat.

Par ailleurs, les précédents font en sorte que, dans le passé, il y a déjà eu des situations semblables, mais qui s'appliquaient en vertu de l'article 214 du règlement, et à ce moment-là le ministre qui était concerné – en l'occurrence, je ne me rappelle pas lequel – lui, il avait été obligé de faire en sorte que ce dépôt se fasse immédiatement. Il y avait, encore là, des notes personnelles, et d'une façon courtoise les gens avaient accepté que ces notes-là puissent être retirées. Alors, je pense que l'incident est clos. M. le député de Frontenac.

M. Lefebvre: M. le Président, je vais effectivement déposer le document auquel j'ai fait référence tout à l'heure pour l'information du ministre qui, de toute évidence, ne l'a jamais consulté.

Le Président: M. le député de Frontenac, à ce moment-ci il y a dépôt sans commentaires, sans débat, sans discussion.

M. Lefebvre: M. le Président.

Le Président: Alors, le dépôt.

M. Lefebvre: M. le Président, je ne peux pas déposer un document...

Le Président: Je comprends votre ancienneté, donc votre habileté parlementaire, M. le député de Frontenac. Ceci étant dit, un dépôt sans commentaires.

M. Lefebvre: Ce n'est pas facile.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: Alors, je demanderais à ce qu'on aille chercher le document. Obligez-moi pas à aller le chercher!


Document déposé

Merci. Alors, maintenant...

Bien. Alors, j'espère que ce moment de répit nous a tous fait du bien.


Votes reportés


Adoption du principe du projet de loi n° 159

Nous allons passer maintenant à un moment important, un vote. Alors, le vote reporté. Il y en a deux. Le premier, nous allons procéder au vote sur la motion de M. le ministre des Transports proposant que le principe du projet de loi n° 159, Loi modifiant la Loi sur le ministère des Transports afin d'instituer le Fonds de gestion de l'équipement roulant, soit adopté.

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Désilets (Maskinongé), M. Duguay (Duplessis).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Laporte (Outremont), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup). M. Filion (Montmorency), M. Le Hir (Iberville).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:61

Contre:39

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion étant adoptée, le principe du projet de loi n° 159 est adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui. M. le Président, est-ce qu'on peut, dans le vote, faire un vote inversé?

Le Président: M. le leader du gouvernement, on est rendu à l'étape où vous devez faire une motion pour que soit déféré le projet de loi.

M. Jolivet: Oui, c'est vrai. Vous avez raison, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi...

Le Président: M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des transports et de l'environnement

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission des transports et de l'environnement pour étude détaillée.

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?


Motion proposant que l'Assemblée exige du gouvernement qu'il retire du projet de loi n° 161 les articles qui imposent une hausse de taxes et d'impôts pour les contribuables

Alors, nous allons maintenant procéder au vote sur la motion de M. le député de Nelligan. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement du Parti québécois qu'il retire du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, les articles qui imposent une hausse de taxes et d'impôts pour les contribuables québécois.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Bourbeau (Laporte), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Ciaccia (Mont-Royal), M. Middlemiss (Pontiac), M. Vallières (Richmond), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Gobé (LaFontaine), M. Lafrenière (Gatineau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Brodeur (Shefford), M. Benoit (Orford), M. Williams (Nelligan), M. Gautrin (Verdun), M. Chagnon (Westmount–Saint-Louis), M. Farrah (Îles-de-la-Madeleine), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), Mme Loiselle (Saint-Henri–Sainte-Anne), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup). M. Filion (Montmorency), M. Le Hir (Iberville).

(15 h 30)

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever.

La Secrétaire adjointe: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), Mme Blackburn (Chicoutimi), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), M. Boucher (Johnson), M. Julien (Trois-Rivières), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Bertrand (Portneuf), Mme Carrier-Perreault (Chutes-de-la-Chaudière), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Baril (Arthabaska), M. Laurin (Bourget), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaumier (Champlain), Mme Barbeau (Vanier), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Désilets (Maskinongé), M. Duguay (Duplessis).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:39

Contre:61

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est rejetée.


Motions sans préavis

Nous allons maintenant aller aux motions sans préavis. M. le député de Berthier.

M. Baril (Berthier): Alors, M. le Président, je sollicite...

Le Président: M. le député de Berthier, je vous demanderais d'attendre quelques instants. Alors, que les membres de l'Assemblée qui doivent travailler à l'extérieur de l'enceinte du salon bleu quittent rapidement, s'il vous plaît.

M. le député de Berthier.

M. Baril (Berthier): M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante...

M. Paradis: M. le Président...

Le Président: Je m'excuse, M. le député. Une question de règlement, M. le leader de l'opposition officielle?

M. Paradis: Oui. Simplement une question d'information. Le contenu, dont nous avons été prévenus, de la motion du député de Berthier, c'est un sujet qui touche un domaine de compétence qui relève du ministre de la Santé. Est-ce que le leader du gouvernement pourrait prévenir le ministre de la Santé?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Je ferai le nécessaire.

Le Président: M. le député de Berthier.


Souligner la Semaine de la prévention de la toxicomanie

M. Baril (Berthier): La troisième fois, M. le Président. M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Semaine nationale de la prévention de la toxicomanie qui a pour thème cette année Mêle-toi de tes affaires: ose parler

Le Président: Alors, est-ce qu'il y a consentement? Il y a consentement. Alors, M. le député de Berthier.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): M. le Président, la semaine du 16 au 22 novembre 1997 est désignée à titre de semaine annuelle de prévention de la toxicomanie. Comme d'habitude, depuis plus de 10 ans, le gouvernement entend apporter son appui afin de sensibiliser la population du Québec aux attitudes à adopter face à la toxicomanie, et ce, de deux manières: par les jeunes et aussi par les adultes dans leur milieu de travail.

Gardons le contact avec les jeunes afin de les soutenir à cette période où ils terminent le primaire et entreprennent le secondaire, voilà un prérequis au développement de saines habitudes de vie. Les transitions vécues par les jeunes de 11-13 ans sont majeures: vulnérabilité, instabilité, situations nouvelles. Les jeunes sont confrontés à plusieurs adaptations simultanées en raison naturellement de l'étape de vie. Le contact d'un adulte significatif, parent ou éducateur, permet de les informer, de les supporter et de les guider à travers le cheminement. Cet adulte significatif joue plusieurs rôles. Il est parent très souvent, mais aussi collègue de travail et ami. C'est pourquoi les adultes seront aussi rejoints cette année dans leur milieu de travail grâce à une collaboration avec les milieux de travail.

Mêle-toi de tes affaires: ose en parler est le slogan qui donne le ton à la semaine pour prévenir la toxicomanie. Il faut s'en parler, le message que véhiculera Jean-Michel Anctil, humoriste bien connu et porte-parole de cette semaine. À cette fin, il fera plusieurs apparitions à la télévision et à la radio. Et je tiens à souligner, M. le Président, que, dans chacune des régions du Québec, de nombreuses activités sont organisées par les régies régionales en partenariat avec les ressources locales et régionales pour sensibiliser la population et faire connaître les services.

M. le Président, comme vous le savez, malheureusement le problème de l'alcoolisme, de la toxicomanie et de la pharmacodépendance est un problème qui, de plus en plus, touche et ronge notre société. Et on se rend compte que ce cancer de cette fin de siècle atteint de plus en plus d'individus et touche de plus en plus de personnes.

Et, comme on l'a vu en fin de semaine dans un sondage dans La Presse , on se rend compte qu'il y a à peu près 23 % de la population au Québec qui est préoccupée, affectée ou dérangée par des personnes de leur entourage aux prises avec des problèmes de consommation abusive d'alcool, de drogues et de médicaments. Alors, on se rend compte que ces problèmes sont vécus d'abord et avant tout dans leur propre famille, au niveau du cercle d'amis, dans leur milieu de travail, dans leur voisinage. On se rend compte aussi que malheureusement ce problème touche de plus en plus des jeunes en bas âge, et je ne peux qu'évoquer une statistique. On sait qu'il y a cinq ans, j'ai fondé un centre de réhabilitation pour jeunes aux prises avec des problèmes de drogue, un centre qui s'adressait particulièrement aux jeunes de 12 à 17 ans; après cinq ans de fréquentation, on se rend compte que la moyenne d'âge de fréquentation est malheureusement de 12 ans et demi à 13 ans. Donc, on se rend compte que c'est un problème qui de plus en plus pèse lourd dans notre société.

On se rend compte qu'on ne peut pas fermer les yeux sur ce problème parce que fermer les yeux sur ce problème, c'est fermer les yeux sur une foule d'autres problèmes qui en découlent. Particulièrement, on évalue à peu près à 600 000 000 $ qui sont perdus chaque année à cause de la productivité au travail reliée aux problèmes d'alcool et de drogue en milieu de travail, l'absence au travail, les problèmes de violence conjugale – c'est un problème qui encore une fois écrase trop souvent notre société et particulièrement les femmes – les problèmes d'abus sexuels, par exemple, le problème d'éclatement de familles. Combien de femmes se sont retrouvées malheureusement seules avec des enfants sur les bras, cela relié à des problèmes justement de consommation excessive d'un mari alcoolique ou toxicomane et parfois trop violent?

Fermer les yeux sur ce problème, c'est fermer les yeux aussi sur le phénoménal problème de décrochage que nous avons au niveau des écoles au Québec. Et là-dessus l'ancien ministre libéral Michel Pagé avait amorcé une démarche pour essayer de fouiller un peu plus ça, et on se rend qu'effectivement le problème de décrochage est malheureusement très, très relié au problème de consommation chez les jeunes, particulièrement consommation d'alcool et de drogue.

On peut aussi parler des problèmes d'individus, des problèmes carcéraux. On se rend compte qu'à Montréal l'année passée les problèmes de criminalité qui ont été posés sur l'île de Montréal à 80 % sont reliés à des problèmes de drogue ou à des gens qui consommaient de la drogue qui ont commis des délits justement. Alors, c'est vraiment un fléau qui sape les fondements mêmes de notre société et de notre existence, comme des notions d'amour, de générosité, de tolérance, de confiance, d'entraide et de responsabilité.

(15 h 40)

Alors, M. le Président, on ne peut pas non plus passer sous silence le mal que ça fait; ce n'est pas mesurable, la détresse humaine, la souffrance humaine, la solitude qui habite ces gens-là. On parle de 600 000 alcooliques et toxicomanes qui vivent ce problème-là au Québec aujourd'hui; il y en a qui sont réhabilités, il y en a qui sont en voie de réhabilitation. Alors, on a de la difficulté à comprendre que nous vivons, sans aucun doute pour une première fois de l'histoire de la civilisation humaine, dans une société qui s'est donné à peu près tous les outils de communication, mais qui... On voit que cette maladie-là est caractérisée profondément par le problème d'un mal de vivre qui est celui de la solitude, des individus qui s'isolent par rapport à leur famille, par rapport à leur milieu de travail, et on devient un peu désemparé avec ça. Et les parents qui m'écoutent, les parents qui observent actuellement et qui ont eu à vivre ça se demandent comment il se fait que, dans un monde aussi avancé, aussi civilisé, on devient totalement désemparé face à quelqu'un qu'on découvre dans notre famille qui... Du jour au lendemain, on découvre que c'est un jeune homme ou une jeune femme qui a vraiment des problèmes de consommation, qui a commis des délits sans qu'on le sache, alors on est désemparé avec ça, désemparé comme parent parce qu'on est souffrant à l'intérieur de soi de voir souffrir son fils ou sa fille.

Alors, ce que je dis, c'est que la première des choses qu'il faut faire, c'est d'en parler, de ne pas avoir peur d'en parler. Et on peut compter... Et c'est ça qui est extraordinaire au Québec, ça s'est fait aussi – et ça, il faut les en féliciter aujourd'hui – un peu en-dehors du réseau de l'intervention gouvernementale. C'est des formidables mouvements d'entraide qui sont nés il y a au-delà de 40 ou 50 ans, une cinquantaine d'années, aux États-Unis, plus particulièrement à Akron, Ohio, avec ce qu'on appelle le mouvement de la fraternité des Alcooliques anonymes. Alors, ces gens-là sont regroupés dans différents réseaux à travers le Québec et viennent en aide, justement, aux gens qui sont aux prises avec des problèmes d'alcool et de drogue. Et ça a été, dans un certain sens, une réponse extraordinaire à la douleur de ces gens-là qui sont confrontés au problème ou à ceux et celles qui vivent dans l'entourage de celui ou celle qui connaît des problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie.

Alors, aujourd'hui, je veux rendre hommage, naturellement, à tous ces groupes communautaires, toutes ces fraternités installées, implantées, enracinées dans toutes nos communautés au Québec. Que ce soit à Chibougamau, que ce soit à Berthierville, que ce soit à Rouyn ou dans des petits villages inimaginables du Québec, on peut compter sur ces mouvements d'entraide caractérisés par une solidarité comme ce n'est pas possible. Et, moi, je peux toujours dire que la semaine de la toxicomanie, ça m'interpelle personnellement parce que c'est justement lors d'une semaine de la toxicomanie, il y a 11 ans, que j'ai connu la sobriété. Demeuré engagé auprès de cette cause-là depuis ces années, j'ai toujours été quelqu'un qui a ouvert son coeur et sa porte à ceux et celles qui ont été touchés, de près ou de loin, par ce problème.

Alors, aujourd'hui, je veux rendre hommage, naturellement, à ces fraternités, à ces groupes communautaires, à tous ceux et celles qui travaillent sur le front, en première ligne: les thérapeutes, les intervenants, ceux qui travaillent dans les CLSC, les travailleurs sociaux, entre autres, au niveau des réseaux jeunesse à travers le Québec, ceux et celles qui travaillent au niveau des programmes d'aide aux employés au niveau des entreprises au Québec. Alors, que ce soient les policiers, que ce soient les juges... Parce que, de plus en plus, il y a une grande compréhension de la société québécoise. On est plus tolérant, on est plus ouvert et, naturellement, on a tendance à traiter ça davantage, aujourd'hui, comme un problème de fond, comme un problème de société.

Alors, M. le Président, en terminant, je veux tout simplement, encore une fois, exprimer l'importance de cette semaine de l'alcoolisme et de la toxicomanie et dire qu'il est important qu'on s'arrête, chez nous, dans notre milieu, en milieu de travail ou ailleurs, pour s'interroger puis regarder, porter un regard autour de nous et essayer de voir comment, en tant qu'individu, on pourrait être en mesure de venir en aide puis de tendre la main avec beaucoup d'amour. C'est quelque chose qui ne coûte pas cher, mais qui peut être une réponse extraordinaire à ceux et celles qui vivent ces problèmes qui, malheureusement, sont trop dramatiques quelquefois. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député de Berthier. M. le député de Papineau, maintenant.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, au nom de ma formation politique, de pouvoir témoigner aujourd'hui sur la semaine de la toxicomanie. Je suis un des parents qui a pu passer à travers, si vous voulez, d'un garçon qui a eu un problème de drogue. Et, en passant, grâce à l'aide du député de Berthier, grâce à lui, mon fils, aujourd'hui, est devenu un intervenant en toxicomanie, est devenu un travailleur de rue, si vous voulez. Il passe 35 heures par semaine dans la maison des jeunes dans notre région.

Comme vous savez, ça touche vraiment beaucoup de gens dans nos familles. Les statistiques pour la toxicomanie: 60 % des gens qui ont un problème de drogue ou d'alcool sont dans nos familles proches. Il y a sûrement des gens ici, alentour de moi, qui ont ces problèmes-là. 42 %, c'est des amis personnels, 19 %, c'est des collègues de travail, qui ont un problème soit de drogue ou soit d'alcool. Le fléau, ça touche tout le monde.

Moi, quand on me dit: Mêle-toi de ses affaires ou de tes affaires puis ose en parler, je pense que c'est le secret. Il faut en parler. Quand c'est arrivé chez nous, on se demandait: Comment on réagit? Heureusement, j'avais acheté le livre de mon collègue, et je vous dis ça, là, sincèrement. On avait acheté le livre, chez nous, il y a une dizaine d'années passées ou je ne sais pas, peut-être moins que ça. Quand le livre était sorti, j'avais acheté le livre de mon collègue de Berthier, et, quand mon fils nous a demandé de l'aide, on a sorti ce livre-là. Je vous le dis sincèrement. On a sorti le livre de mon collègue de Berthier, et c'est avec ça qu'on a pu aider mon gars, Martin.

Suite à ça, avec le livre – on a passé la nuit avec – nous avons pu vraiment aider un gars de 22, 23 ans qui était pris avec une maladie. Une maladie. Il ne faut pas se cacher de ça, là, c'est une maladie, la toxicomanie. Moi, je ne croyais pas ça. Je vous le dis honnêtement, quand les gens sont venus l'aider, ce soir-là, quand on a appelé au téléphone pour avoir de l'aide, je ne croyais pas vraiment que c'était une maladie. Alors, quand mon fils a passé 28 jours au Pavillon du nouveau point de vue, à Lachenaie, dans le comté de Berthierville, on a demandé aux parents, suite à ça, de passer deux jours – moi, j'ai appelé ça une retraite fermée – à discuter des problèmes que ces jeunes-là... Ce n'est pas seulement les jeunes, il y a des adultes aussi de 25, 30 ans qui ont ces problèmes-là, et on m'a prouvé, cette fin de semaine là, que, quand vraiment la personne qui a un problème de drogue ou d'alcool apprend que c'est une maladie, c'est la première journée, d'après moi, là... Je ne suis pas un expert, je n'y ai pas passé 28 jours, pas encore, en tout cas. Si on réalise cette journée-là que vraiment la maladie est acceptée, c'est cette journée-là qu'on peut commencer à guérir et à demander de l'aide. Ça, c'est la meilleure que j'ai vue.

Alors, j'ai demandé à mon fils, suite à mon collègue le leader de l'opposition, de faire un témoignage aujourd'hui, suite à la Semaine de la toxicomanie, et c'est comme ça:

«La semaine de la prévention de la toxicomanie touche tout le monde, car qui, de loin ou de près, n'a jamais été en contact avec un alcoolique ou un toxicomane? C'est un problème de société devant lequel nous avons tendance malheureusement à nous fermer les yeux et à réagir lorsque nous sommes acculés au pied du mur. Peu de gens ont la connaissance des ressources disponibles en ce domaine, surtout le principal intéressé, l'alcoolique ou le toxicomane.

«La prévention a pour but d'informer la population sur les dangers de la surconsommation et de l'abus des alcools et drogues. Prévenir, c'est aussi éviter l'apparition du problème et de ses symptômes, de même qu'informer la population sur les ressources disponibles dans leur milieu. Travaillant moi-même – mon fils, Martin – avec les adolescents, je remarque que peu d'entre eux ont une connaissance des ressources qui les entourent de même que des dangers de l'abus de drogue et d'alcool.

«Il faut aussi démystifier les drogues. La marge entre l'expérimentation et l'abus est énorme. Informer les parents sur les drogues et alcools est une tâche primordiale, car la prévention commence à la maison. Durant cette semaine, plusieurs activités sont faites, et nous avons le devoir de toucher le plus de monde possible. Cependant, le travail doit être amplifié, car les surconsommateurs, souvent isolés dans leur problématique, ne peuvent être rejoints par les ressources ou les institutions.

(15 h 50)

«Nous avons la responsabilité de continuer ce travail, et ce, dans notre quotidien. Ensemble, nous devons agir, en parler, ouvrir les portes à celui qui se croit seul et incapable de vivre sans consommer, redonner à celui-ci l'espoir de vivre une vie heureuse et la dignité à laquelle toute personne a droit.»


Document déposé

Alors, pour terminer j'aimerais, en l'honneur de mon fils qui a écrit ça, avoir la chance de le déposer ici, à l'Assemblée nationale. Et, pour terminer, je devrais dire aux parents: Donnez de l'amour à votre enfant dans cette maladie-là et vous allez réussir. Merci.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Président: Alors, je comprends que la motion est adoptée à l'unanimité. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, nous allons passer maintenant aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Après ces deux témoignages très émouvants, c'est un peu difficile de revenir dans la réalité de l'agenda de notre Assemblée nationale.

J'avise cette Assemblée que la commission de la culture terminera les consultations particulières sur le rapport du Comité sur le développement d'une très grande bibliothèque intitulé Une grande bibliothèque pour le Québec aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle du Conseil législatif;

Également que la commission des institutions procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 163, Loi modifiant la Loi sur le curateur public et d'autres dispositions législatives relativement aux biens soumis à l'administration provisoire du curateur public, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, et, si nécessaire, demain, le jeudi 20 novembre 1997, de 9 heures à 12 heures, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine;

Que la commission de l'économie et du travail, finalement, poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 149, Loi portant réforme du régime de rentes du Québec et modifiant diverses dispositions législatives, demain, le jeudi 20 novembre 1997, de 9 heures à 12 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Président: Très bien. Pour ma part, je vous avise que la commission de l'administration publique se réunira aujourd'hui, le mercredi 19 novembre, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère des Transports pour les mois de décembre 1996 à mars 1997.

Je vous avise aussi que la commission de l'administration publique se réunira demain, de 9 heures à midi, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May, et l'objet de cette séance est de procéder à la vérification des engagements financiers du ministère de la Sécurité publique pour les mois de novembre 1995 à mars 1997.

Aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.

Alors, nous allons passer à ce moment-ci aux affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.


Affaires du jour

M. Boulerice: Oui, M. le Président. Je vous prierais de vous référer à l'article 7 du feuilleton.


Projet de loi n° 166


Adoption du principe

Le Président: Alors, à l'article 7, Mme la ministre de l'Éducation propose l'adoption du principe du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives. Mme la ministre de l'Éducation.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. J'ai le plaisir d'engager aujourd'hui devant l'Assemblée nationale le débat sur le projet de loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel. Les modifications proposées vont constituer une nouvelle étape, un pas de plus dans la mise en oeuvre de la réforme de l'éducation amorcée par notre gouvernement en février dernier. Je vous rappelle que, par cette réforme, nous voulons prendre le virage du succès et passer de l'accès du plus grand nombre au succès du plus grand nombre. Cet objectif est devenu un projet national, ce n'est plus seulement le projet de la ministre de l'Éducation. Maintenant, il appartient également aux établissements, à celles et à ceux qui font l'école, les élèves, le personnel enseignant, la direction et les parents. Aujourd'hui, en introduisant des modifications à la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel, nous voulons donner aux cégeps de nouveaux outils qui accroîtront leur marge de manoeuvre et faciliteront la concertation déjà amorcée entre eux.

D'abord, les responsabilités liées aux activités éducatives des cégeps seront élargies. Ces derniers seront désormais autorisés à offrir des programmes menant à une attestation d'études collégiales dans tous les domaines de formation technique. Ensuite, les pouvoirs administratifs des cégeps seront accrus. En outre, dans une perspective d'assouplissement, nous proposons que des modifications en matière de gestion administrative soient apportées, particulièrement en ce qui concerne la réglementation des projets d'immobilisation. Enfin, le cégep régional de Lanaudière sera créé.

Par ailleurs, comme c'est le cas dans toute démarche de révision, je vous signale que le projet de loi contient quelques ajustements mineurs qui nous ont été demandés; et qui nous ont été demandés, pour l'essentiel, par les cégeps eux-mêmes. Sont également prévues bien sûr quelques dispositions dites de concordance. Les modifications proposées ne sont évidemment pas toutes de même nature ni de même portée. Mais, si vous le voulez bien, je vais maintenant vous donner des précisions sur les éléments que l'on trouve dans chacune des trois grandes catégories de modifications précédemment définies.

La première catégorie de modifications concerne l'accroissement des responsabilités liées aux activités éducatives des cégeps. L'autonomie des établissements, qui est au coeur de la réforme en cours, doit se traduire par la décentralisation des décisions et par un nouveau partage des pouvoirs et des fonctions. Ce qu'il faut viser en bout de ligne, c'est de donner plus de marge de manoeuvre aux établissements et de laisser davantage de place à l'initiative locale. Le ministère de l'Éducation a la responsabilité de s'assurer que les jeunes et les adultes puissent trouver, le plus possible dans leur région, une réponse à leurs besoins en matière de formation de base; il détermine la mission des centres et des établissements d'enseignement et voit à leur bon fonctionnement.

Toutefois, lorsque vient le temps de répondre aux besoins ponctuels de formation, de recyclage et de perfectionnement des personnes qui occupent un emploi ou qui sont sans emploi, il revient aux établissements de prendre le relais du ministère. En effet, répondre adéquatement à ces besoins exige une grande complicité entre les partenaires, que ceux-ci soient privés ou publics. Les cégeps ont compris qu'ils avaient un rôle déterminant à jouer pour satisfaire à cette exigence. Depuis leur création, ils ont cherché à se rapprocher du milieu des affaires pour contribuer, particulièrement par la formation bien sûr et par le transfert technologique, au développement et au succès des entreprises.

Il est reconnu, M. le Président, qu'une main-d'oeuvre hautement qualifiée est l'une des conditions essentielles à la croissance des entreprises. Déjà, notre gouvernement s'est doté d'un outil extrêmement important pour favoriser la formation des travailleuses et des travailleurs, soit la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre. Cette loi exige d'ailleurs des entreprises qu'elles consacrent 1 % de leur masse salariale au perfectionnement et à la formation de leur personnel. J'annonce avec fierté aujourd'hui que les cégeps auront toute la marge de manoeuvre désirée pour continuer à apporter leur contribution à cet effort collectif qui vise à doter le Québec d'une main-d'oeuvre qualifiée.

À cet effet, tous les cégeps pourront élaborer et mettre en oeuvre un programme menant à une attestation d'études collégiales dans tout domaine où il existe déjà un programme conduisant à un diplôme d'études collégiales. L'autorisation du ministère ne sera plus requise. Grâce à ce nouveau pouvoir, les cégeps seront en mesure d'offrir un plus grand choix de programmes pour répondre aux besoins des entreprises, bien sûr aidés en cela par la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre. Cette approche permettra une plus grande adéquation entre l'offre de formation et les besoins de la main-d'oeuvre dans les entreprises. Les institutions collégiales seront en mesure de répondre particulièrement aux secteurs de pointe de l'économie, ceux qui sont entre autres en constante mutation.

En effet, on peut facilement imaginer que par la conjugaison de ces deux moyens plus de personnes vont accéder à la formation collégiale. En outre, comme des droits de scolarité pourront être exigés de toute personne s'inscrivant à un programme menant à une attestation d'études collégiales qui n'est pas financée de façon particulière par les règles budgétaires, l'offre de formation sera plus largement accessible.

(16 heures)

Je veux que l'on se comprenne bien, M. le Président: ce qui était jusqu'à maintenant gratuit le sera encore demain. Les élèves qui s'inscriront à temps plein à des programmes menant à une Attestation d'études collégiales faisant l'objet d'un soutien financier du ministère de l'Éducation en vertu des règles budgétaires continueront à bénéficier de la gratuité scolaire. Donc, les élèves n'ont pas à être inquiets.

Il en va de même pour la gratuité scolaire dans tous les programmes d'études menant à un Diplôme d'études collégiales. Je crois, M. le Président, qu'il est important d'apporter ces précisions parce qu'un certain nombre d'interprétations avaient laissé entendre qu'il n'y avait plus de gratuité au niveau collégial ni au niveau des attestations d'études collégiales. Celles qui sont reconnues et supportées financièrement par le ministère continueront essentiellement d'être accessibles aux mêmes conditions que maintenant, donc sans frais de scolarité.

C'était là la première catégorie de modifications. La seconde catégorie concerne l'accroissement du pouvoir administratif des cégeps. Pour faciliter l'action des cégeps, il faut assouplir l'encadrement administratif. L'objectif n'est évidemment pas de déréglementer pour déréglementer. L'État ne doit pas renoncer à ses responsabilités pour suivre une mode ou un courant de pensée. Ce qu'il faut viser ultimement, c'est une gestion plus efficace et plus efficiente. Le projet de loi déposé, donc, nous donnera les moyens de mieux tenir compte de la réalité qui est souvent différente d'un cégep à un autre. À cette fin, la ministre pourra établir, je pourrai établir des règles budgétaires à caractère non universel qui vont permettre ainsi de répondre à des besoins diversifiés et quelquefois tout à fait particuliers et propres à certaines réalités régionales ou à certaines institutions, M. le Président.

Présentement, en vertu de la loi, l'allocation d'une subvention prévue aux règles budgétaires peut être générale ou particulière à un cégep. Ainsi, une même activité peut être financée différemment d'un établissement à l'autre. Cette souplesse permet de tenir compte de situations variées. Toutefois, il y a une exception, et elle est majeure: les subventions de fonctionnement des programmes menant au Diplôme d'études collégiales doivent être uniformes. Le nouveau projet de loi lève cette obligation. Conséquemment, le financement des programmes menant à un Diplôme d'études collégiales pourra, au besoin, s'adapter à la situation particulière d'un cégep.

Malgré le caractère discrétionnaire de cette approche, il faut bien reconnaître que celui-ci est largement compensé par le caractère public des décisions ministérielles. Je vous rappelle en effet que la ministre est doublement imputable de ses décisions en matière de règles budgétaires. Elle doit d'abord et avant tout en répondre à la population et au milieu visé et, bien sûr, aux organismes internes de notre gouvernement, entre autres le Conseil du trésor et l'Assemblée nationale, cela va de soi, M. le Président.

D'autres contrôles prévus par la loi actuelle nous semblent inutilement lourds. Je veux parler notamment des limites financières devant être fixées par règlement et au-delà desquelles tout projet d'acquisition, de construction, d'agrandissement, de transformation ou d'aliénation d'un immeuble doit recevoir l'autorisation du gouvernement.

La programmation budgétaire du ministère de l'Éducation, qui comprend les plans d'équipement du réseau des cégeps, est soumise chaque année au Conseil du trésor où elle est l'objet d'une analyse détaillée. Dans ce contexte, nous proposons que la procédure actuelle soit allégée et que l'approbation par décret du gouvernement ne soit plus requise pour les cas particuliers d'acquisition, de construction, d'agrandissement et de transformation d'un immeuble. Il nous semble que toute la démarche entourant l'acceptation et le suivi des plans d'équipement comporte suffisamment de contrôles. Pour ce qui est de l'aliénation des biens immeubles, le gouvernement continuera d'encadrer le pouvoir d'un cégep lorsque ce dernier souhaitera se départir de biens capitalisables financés par le service de dette à long terme.

Une autre disposition prévue dans le projet de loi contribuera, elle aussi, à élargir la marge de manoeuvre des administratrices et des administrateurs de cégep. Selon cette disposition, un cégep pourra désormais viser la réalisation d'un bénéfice en participant à l'une ou l'autre des activités prévues dans la loi, telles des activités de formation de la main-d'oeuvre, de recherche appliquée, d'aide technique à l'entreprise ou de coopération internationale. Ce changement a pour but, et vous l'aurez deviné, M. le Président, de soutenir l'initiative, de favoriser les partenariats, en somme de viser sur la diversité locale et la satisfaction des besoins des différents milieux.

Enfin, quelques modifications visent à simplifier le libellé de certains articles de la loi et de rendre le texte plus conforme à la pratique. Par exemple, le texte actuel laisse croire que le cégep adopte son budget de service de la dette à long terme. Or, nous savons tous que cette opération est régie par le ministère de l'Éducation et le ministère des Finances.

Tous ces changements à la loi peuvent sembler de nature différente si on les considère un à un. Pourtant, ils sont d'une certaine manière plus ou moins liés. En effet, la diversité des éléments que j'ai abordés témoigne de la complexité de la gestion d'un cégep. Notre but n'est pas d'en rajouter, mais, au contraire, nous voulons simplifier les procédures, assouplir les façons de faire, soutenir l'initiative. Bref, il s'agit encore et toujours d'accroître l'autonomie de l'établissement.

Nous avons aussi donné suite à des demandes d'amendements qui nous ont été formulées par certains groupes. L'élection des représentants et des représentantes des parents au conseil d'administration du cégep est actuellement régie par les règles du cégep. À la demande des parents, une précision sera introduite dans la loi afin qu'ils aient la responsabilité de définir la procédure de nomination de leurs membres au conseil d'administration. Lorsque viendra le temps de procéder à cette élection, le directeur général ou la directrice générale de l'établissement convoquera les parents à une réunion qui sera présidée par le président ou la présidente de l'association représentant le plus grand nombre de parents.

Par ailleurs, parmi les représentants et représentantes des membres du personnel au conseil d'administration, c'est seulement le directeur général ou la directrice générale qui peut participer aux délibérations et voter sur les questions relatives à la rémunération, aux avantages sociaux et aux autres conditions de travail des catégories d'employés autres, bien sûr, que la sienne. Les directions des cégeps ont demandé qu'il puisse en être de même pour le directeur ou la directrice des études. Ils ont souhaité aussi que ces personnes puissent se prononcer sur leurs conditions de travail respectives. Cette façon de faire devrait introduire plus de transparence dans l'établissement et la gestion des conditions de travail du personnel hors cadre.

Enfin, la nature exclusivement pédagogique de la Commission des études est réaffirmée. Aussi, la prescription de droits d'admission ou d'inscription aux services d'enseignement ou d'autres droits de même nature sera dorénavant clairement exclue de son champ de compétence. Ce faisant, le mandat de la Commission sera nettement centré sur les questions d'ordre pédagogique.

La troisième catégorie de modifications, et non la moindre, a pour but de créer le cégep régional de Lanaudière. M. le Président, à l'automne 1996, les représentants et les représentantes de la population de Lanaudière ont exigé une réponse à une demande légitime, à savoir l'amélioration de l'accessibilité à l'enseignement collégial public dans leur région. Très rapidement, nous avons constaté que les outils dont disposait le ministère pour acquiescer à leur demande ne suffisaient pas. La solution la plus simple aurait été de construire un nouveau cégep qui serait venu s'additionner aux établissements du réseau collégial. Cette solution aurait été certainement la plus facile, la moins exigeante, mais ce n'est pas celle que j'ai retenue.

La situation dans Lanaudière nous offrait une chance d'explorer un nouveau modèle, d'adopter une nouvelle façon de faire. La création d'un cégep régional dans Lanaudière nous a semblé tout à fait appropriée puisqu'elle permettait d'assurer une offre de formation diversifiée et concertée en réponse, bien sûr, aux besoins de la région, sans toutefois avoir à consentir des investissements trop importants et sans alourdir inutilement la structure administrative.

(16 h 10)

Compte tenu de ces considérations, j'ai demandé aux gens de Lanaudière de me proposer un modèle de fonctionnement inédit de ce que l'on a appelé dès le début «le cégep régional de Lanaudière». En mai dernier, à la suite d'une vaste consultation, on m'a soumis une proposition que j'ai acceptée. Il était alors acquis que le nouvel établissement serait formé d'une entité régionale, au sens juridique et administratif du terme, et de trois constituantes. Vous avez bien compris, M. le Président, pas de trois campus, de trois constituantes.

En termes simples, les services administratifs seraient centralisés et la mission de formation largement décentralisée. D'ores et déjà, il était établi que les constituantes seraient autonomes pour la mise en oeuvre de la formation, le choix des stratégies pédagogiques, l'organisation des services périphériques à la formation et la vie étudiante. Quant au centre administratif, c'est-à-dire la direction générale, il assumerait – le centre administratif, bien sûr – les responsabilités suivantes: voir au développement du nouvel établissement, assurer un accès à la formation sur l'ensemble du territoire, répartir les programmes d'enseignement et les ressources, promouvoir les activités et le rayonnement du collège et planifier les interventions en matière de formation continue. En d'autres mots, le centre administratif aurait le mandat premier d'assurer une réponse aux besoins de la population et de soutenir l'action éducative des constituantes.

Le nouveau modèle de collège régional proposé par la population de Lanaudière exigeait évidemment des aménagements législatifs. Ceux-ci, bien qu'ils aient été instaurés pour permettre la création du cégep régional de Lanaudière, pourront s'adapter à d'éventuelles demandes des milieux. Je tiens à rassurer la population: actuellement, il n'est pas dans mon intention d'imposer des fusions de cégeps. De façon générale, le projet de loi établit les règles qui président à la création, à l'implantation et au fonctionnement du cégep régional de Lanaudière.

Trois groupes d'éléments méritent d'être signalés, M. le Président. D'abord, le projet de loi comporte un ensemble de dispositions qui permettent au gouvernement, sur recommandation de la ministre de l'Éducation, de créer le cégep régional formé d'une ou de plusieurs constituantes. Le projet de loi comporte en outre un ensemble de dispositions établissant entre le cégep régional et ses constituantes le partage des rôles habituellement confiés à un cégep traditionnel. Cette répartition vise essentiellement à confier les responsabilités administratives au collège régional tout en décentralisant l'offre de services de formation dans ses constituantes.

La naissance du cégep régional de Lanaudière marquera une étape importante dans l'évolution de l'enseignement collégial. Il ne faudrait cependant pas voir dans ce modèle la formule obligée pour l'avenir. Nous n'en sommes plus à l'époque du modèle unique, M. le Président. La variété des situations réelles invite plutôt à miser sur l'adaptation et sur la diversité, et cela, de façon constante. D'ailleurs, plusieurs établissements d'enseignement collégial ont déjà amorcé une réflexion sur leurs pratiques administratives. Dans certains cas, elle pourrait mener à l'extension de nouveaux services grâce à une plus grande concertation entre les établissements. Dans d'autres cas, elle pourrait conduire à des regroupements de services administratifs.

Finalement, le projet de loi contient quelques dispositions dites de concordance; je pense, par exemple, à la notion de «résident du Québec». Je vous rappelle qu'au printemps 1997 le gouvernement a adopté un règlement en vertu de la loi de l'instruction publique, à son article 455, pour définir cette notion au primaire et au secondaire, cette notion qui est déjà utilisée à l'enseignement universitaire. Logiquement, elle doit maintenant être incluse dans la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel en remplacement du concept d'«étudiant venant de l'extérieur du Québec».

Voilà donc l'essentiel des changements législatifs que je propose pour permettre aux cégeps d'exercer pleinement leurs responsabilités comme établissements appartenant à l'enseignement supérieur. M. le Président, je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Éducation. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Verdun. M. le député.


M. Henri-François Gautrin

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Alors, on a devant nous un projet de loi qui est multifacettes, qui comporte plusieurs facettes, et on va essayer, dans l'heure qui m'est impartie, d'en analyser chacune des composantes. Brièvement, pour se résumer, M. le Président, ce projet de loi va certainement toucher une question concernant l'accroissement de l'autonomie des établissements, mais je voudrais rappeler que, si ça semble intéressant à première vue, ce n'est pas sans créer un certain nombre de problèmes.

Deuxièmement, M. le Président, on verra qu'il y a ici un accroissement des pouvoirs administratifs, et, encore là, vous me permettrez, M. le Président, de soulever un certain nombre de questions.

J'aborderai aussi, dans les minutes qui me sont imparties, cette question qui est reliée à ce nouveau modèle. Il faut réfléchir un peu. Ce n'est pas parce que c'est nouveau que c'est automatiquement bon, ce nouveau modèle qui est mis de l'avant pour créer le cégep régional dans la région du whip en chef du gouvernement. M. le Président, vous savez qu'il y avait eu de nombreuses études qui avaient été faites sur la question. Vous connaissez comme moi les effets de débordement. On aura la chance de pouvoir aborder ces questions, particulièrement dans le cadre d'une enveloppe fermée, les préoccupations que les collègues de la région de Joliette avaient quant à un tel projet, même si la députée de Terrebonne en avait fait la promotion très fortement.

Un dernier point qui nous inquiète aussi dans le projet de loi, c'est la brèche, pour la première fois, qui est faite à la gratuité dans l'enseignement collégial, et ceci n'est pas sans nous poser un certain nombre d'inquiétudes.

Alors, M. le Président, revenons tranquillement sur ces questions et reprenons dès le départ le premier élément, qui touche l'autonomie, la question des attestations d'études collégiales. Alors, le projet de loi va donner, en respectant, bien sûr, la carte des enseignements techniques, la possibilité à des collèges de créer des A.E.C. Probablement des gens qui nous écoutent ne savent pas ce que c'est que ce nouveau monstre qu'on crée qui s'appelle A.E.C., qui est, dans le langage, après un D.E.P. et un D.E.C. Alors, qu'est-ce que c'est, d'abord, qu'une A.E.C.? Une A.E.C., c'est une Attestation d'études collégiales, particulièrement dans un secteur technique, qui est formée par un programme de 30 crédits, qui a, dans certaines techniques, un objectif de permettre ou d'améliorer la compétence des gens qui sont déjà sur le marché du travail.

(16 h 20)

Les réactions à ce nouveau projet sont multiples. Il y a des personnes qui m'ont fait valoir – et je voudrais réellement qu'on ait la chance de pouvoir soupeser les différents éléments dans cette question-là – que, en offrant cette formation courte, dans les cégeps, d'une Attestation d'études collégiales on l'obtient, à ce moment-là, sur une période d'une année, alors qu'un D.E.C. collégial est obtenu sur une période de trois ans. Si on va dans cette direction-là, on a peut-être tendance de dévaloriser un peu le diplôme de D.E.C. et de peut-être avoir... Il y a une interrogation, du moins, qui a été faite de la part de certaines personnes de la CEQ, de dévaloriser, après le Diplôme d'études professionnelles... Alors, d'études professionnelles, c'est l'étude qui se trouve au secondaire, le D.E.P. D'articuler un D.E.P. sur une A.E.C., je m'excuse encore, ça devient un règlement technique, mais, enfin, ça veut dire qu'un étudiant serait au secondaire, finirait avec un secondaire technique et, après, voudrait aller dans une formation collégiale, l'aurait à rabais en une année. Je sais que ce n'est pas l'intention initiale qui avait été mise de l'avant, mais ça peut être un effet pervers du projet de loi. Il y a lieu de mieux baliser ou de s'assurer que ces questions-là soient bien balisées dans le projet de loi.

Deuxième élément, sur la question qui touche toujours ces diplômes d'une année. C'est la situation des collèges privés non subventionnés. Vous savez, M. le Président, qu'il y a un certain nombre d'institutions qui sont extrêmement actives, qui arrivent à avoir du succès et qui ont eu du succès, dans ces 20 dernières années, particulièrement dans les secteurs de la mode, de la bureautique, de l'infographie, de l'informatique. Ces collèges privés non subventionnés ont réussi à former des gens qui sont tout de suite disponibles et peuvent aller sur le marché du travail. Il y a, dans ces secteurs-là, une crainte que, en ouvrant des A.E.C., tel que proposé actuellement dans le projet de loi, il y ait là une concurrence déloyale de la part du gouvernement sur ce qui se fait déjà et avec beaucoup de succès depuis plus de 20 ans dans certains secteurs par ces collèges privés non subventionnés mais reconnus par le ministère de l'Éducation. Comprenons-nous bien, il s'agit d'institutions qui sont reconnues par le ministère de l'Éducation mais qui ne reçoivent aucune subvention, qui donnent une formation souvent de pointe, formation de pointe qu'ils peuvent assumer en demandant des frais de scolarité souvent importants.

La question qui se pose à ce moment-là, c'est: Y a-t-il ou non une concurrence déloyale par la création de ces nouvelles A.E.C. dans le réseau collégial? M. le Président, nous allons, bien sûr, lorsque nous allons étudier la loi article par article, nous attacher à voir et à analyser la portée réelle de cette nouvelle modification. Je dois dire à cet effet qu'il serait intéressant d'entendre en commission ce qu'ont à nous dire le Conseil des collèges non subventionnés de même que la Fédération des enseignants des collèges, la Fédération autonome du collégial et la Fédération nationale des enseignants, qui ont à s'exprimer sur ces questions-là. Et je souhaiterais qu'on puisse, M. le Président, les entendre lorsqu'on étudiera le projet de loi article par article.

Alors, sur ce qui touche tout à fait spécifiquement la possibilité pour les collèges d'ouvrir ou de dispenser, en fonction de leur carte de techniques qui est déjà la carte de techniques qu'ils ont, ces nouveaux diplômes, nous attendons avant de voir quelle est exactement la réaction du milieu et, particulièrement, la portée réelle de cette modification sur des établissements comme les collèges privés non subventionnés et, particulièrement aussi, l'articulation qu'il y aura entre ces A.E.C. et les diplômes d'études professionnelles du secondaire.

Deuxième élément – il faut bien comprendre parce qu'il y a beaucoup de choses dans ce projet de loi, M. le Président – les attestations d'études collégiales pourront être, si on lit bien le projet de loi, soumises, dans certains cas, à des contributions ou à des frais de scolarité. Alors, je reconnais... Et, d'ailleurs, le projet de loi le dit dans son article... qui est l'article 17, si je ne m'abuse, ou 16: «Un collège ne peut exiger – mais comprenez-moi bien, quand on dit quelque chose, qu'on le précise, ça veut dire que dans les autres cas on pourrait – d'un étudiant à temps plein qui est résident du Québec le paiement de droits de scolarité pour l'enseignement qu'il dispense, dans le cas d'un programme conduisant au Diplôme d'études collégiales.» Et vous voyez aussi un peu plus loin qu'il y a une possibilité pour les étudiants qui sont dans le cadre de ces nouvelles A.E.C., et la possibilité pour les collèges, dans certains cas, de demander des droits de scolarité.

Alors là vous touchez, M. le Président, un point qui est un point important, qui est la brèche qui est faite sur un principe, un principal général, tel que nous l'ont fait valoir la Fédération étudiante collégiale et la Fédération des enseignants, qui disent: L'enseignement collégial quel qu'il soit et quelle que soit sa nature, quel que soit son type, quel que soit le type d'étudiants qui y assistent, doit être gratuit. Alors, je comprends que, si on remet en question ce principe.... C'est un principe qu'on peut remettre en question.

Comprenez-moi bien, ce n'est pas dans une loi aussi vaste et aussi disparate que cette loi-là qu'on devrait remettre un tel principe en question. Le principe de la gratuité de l'enseignement au collégial doit, à mon sens, rester total. Commencer à le fractionner, c'est-à-dire, oui, il va rester gratuit, mais, pour certains types d'enseignement, il pourrait ne pas être totalement gratuit, il y a dans cette approche une inquiétude de notre part qui est aussi partagée par les fédérations étudiantes du collégial, et par les fédérations autonomes des enseignants des collèges, et la Fédération nationale des enseignants du Québec. Je ne dis pas qu'il y a une brèche majeure, je dis: Pour la première fois, on va ne pas respecter dans l'intégralité ce principe de la gratuité de l'enseignement collégial. Alors, le mettre, ce principe, en question sur une seule petite partie, c'est déjà remettre en question ce principe, et il y a danger.

M. le Président, je comprends que les collèges sont en difficultés financières, je comprends, à l'heure actuelle, qu'on s'apprête à leur couper 80 000 000 $ de plus dans leur budget. Je sais et j'ai vu hier la réaction de l'ensemble des cégeps, qui nous disent: Avec cette compression, nous ne pourrons plus assumer notre mandat éducatif et nous allons être obligés d'abandonner un certain nombre de missions ou de services qui étaient les nôtres. Et c'est exactement l'annonce que vient de nous dire ce gouvernement, à moins que la ministre leur dise: Oui, vous allez pouvoir faire des déficits. Dans ces conditions-là, ce serait une manière pour ce gouvernement de cacher dans les cégeps une partie de son déficit.

Mais le crime d'alarme qui a été donné hier par la Fédération des cégeps est le suivant: Si vous nous transmettez, si vous nous imposez cette compression de 80 000 000 $ tel que vous vous apprêtez à le faire, nous ne pourrons plus continuer à assurer notre mandat éducatif. S'ils ne peuvent plus le faire, il y a deux choix: ou bien on les autorise à faire un déficit ou bien des grands pans de notre système vont tomber par terre. Une des solutions pour rechercher un équilibre financier avait été proposée ou avait été envisagée par certains directeurs de collège, pouvoir utiliser cette mécanique des éventuels frais de scolarité dans les attestations d'études collégiales pour pouvoir avoir des revenus dits revenus autonomes, c'est-à-dire revenus qu'ils pourraient générer eux-mêmes.

(16 h 30)

M. le Président, il y a peut-être là une voie intéressante à explorer. Mais, avant de l'explorer, il est bien important de ne pas le faire les yeux fermés et de bien rappeler que, pour nous, il y avait un principe établi qui était celui de la gratuité de l'enseignement collégial et que, même si on le fait dans un champ restreint, un champ limité, le fait qu'on remette en question ce principe est un élément qui ne peut pas ne pas soulever chez nous une certaine inquiétude, M. le Président, et nous allons vouloir l'étudier dans toute la portée que cela a.

Situation qui est encore beaucoup plus questionnable, parce qu'elle va... Et là, je vais vous signaler que nous allons être totalement en désaccord sur ce point-là dans le projet de loi, dans cet article 24, dans cette possibilité de gratuité de l'enseignement collégial, rajouter, dans l'article 24, qui se lisait jusqu'à maintenant, et je peux vous lire l'article 24, M. le Président... Jusqu'à maintenant, il se lisait de la manière suivante, c'est l'article 24 de la loi actuelle:

«24. Un collège ne peut exiger de droits de scolarité pour l'enseignement qu'il dispense, dans le cadre d'un programme d'études collégiales, à l'étudiant à plein temps dans un tel programme.»

On parlait réellement dans un geste de générosité, d'ouverture, de l'étudiant à plein temps. Maintenant on rajoute, si vous me permettez, M. le Président, «qui est résident au Québec». Au lieu d'avoir l'ouverture qui traditionnellement au Québec s'était fortifiée en ayant des étudiants qui venaient de l'étranger, qui étaient en mesure de pouvoir bénéficier de l'enseignement qui était dispensé dans les cégeps, d'une part – ou bien, par exemple, les étudiants qui venaient du Nouveau-Brunswick ou de l'Ontario, des francophones acadiens ou des Franco-Ontariens qui venaient étudier dans les cégeps du Québec et qui bénéficiaient à ce moment-là, parce que dans le fond ils étaient des citoyens canadiens, du principe général qui était celui de tous ici, de la gratuité de l'enseignement dans les cégeps – à partir de maintenant, si vous n'êtes plus un résident – et je pourrais rentrer avec vous, M. le Président, sur le règlement qui définit le concept de résidence – du Québec, vous allez perdre ce principe de gratuité de l'enseignement collégial.

Traditionnellement – et j'en appelle par exemple au ministre des Relations internationales parce qu'il connaît parfaitement cette question et je sais qu'il y a été sensible dans ses vies antérieures – le Québec a eu une position de leadership auprès des communautés canadiennes françaises hors Québec. On avait la possibilité à ce moment-là d'offrir aux jeunes Acadiens, aux jeunes Franco-Manitobains et aux jeunes Franco-Ontariens un enseignement collégial au Québec et de leur permettre de le faire comme à tous les petits Québécois ici sans avoir à payer de frais de scolarité, M. le Président.

Le projet de loi, malheureusement – et je reconnais que c'est un petit article qui est introduit actuellement dans le projet de loi – va remettre en question, va ouvrir une brèche par rapport à ce principe traditionnel, ce principe de générosité, d'ouverture et de responsabilité que le gouvernement du Québec avait toujours reconnu comme étant le gouvernement francophone dans l'ensemble canadien. Il s'était reconnu une responsabilité par rapport à l'ensemble des communautés francophones. L'article 24, M. le Président, vient dire qu'un collège ne peut exiger d'un étudiant à temps plein, mais on rajoute aujourd'hui, par l'amendement, «qui est résident du Québec», c'est-à-dire qu'il va falloir être résident du Québec... Puis on définit le concept de «résident», c'est-à-dire que vos parents habitent ici ou que vos tuteurs habitent ici, etc., c'est-à-dire au Québec. On vient de briser par cet article une tradition de générosité et d'ouverture envers les communautés francophones hors Québec que le Québec traditionnellement avait eu comme responsabilité.

Je trouve grave aujourd'hui, M. le Président, pour sauver... Et franchement les sommes que l'on sauve avec ça, les quelques frais de scolarité qu'on leur imposera, il s'agit de sommes véritablement minimes. Et on va à l'heure actuelle par ce projet de loi oublier nos concitoyens des autres provinces canadiennes, qui pour quelques-uns bénéficient de l'enseignement collégial ici au Québec. Je regrette très fortement qu'un esprit mesquin ait pu en arriver... Un esprit mesquin parce que je crois qu'il a la mesquinerie dans ce sens-là, M. le Président; il y avait une tradition de générosité de la part du Québec envers les populations francophones acadiennes, franco-ontariennes et franco-manitobaines. On oublie cette tradition de générosité envers les francophones hors Québec avec ce projet de loi, et je le regrette, M. le Président. Et ne dites pas non. Actuellement, je sais que c'est une partie mineure du projet de loi, mais ce qui est inclus, à l'heure actuelle, dans l'article 24... M. le ministre, si vous voulez le lire, c'est exactement ce qui est dans l'article 24 actuellement.

M. le Président, je vais toucher les autres volets du projet de loi, parce que c'est un projet multiple, multifacette, et il est important de pouvoir l'aborder. La deuxième facette de ce projet de loi va accroître les pouvoirs administratifs des cégeps. Alors, encore là, il faut regarder, il faut réfléchir sur ce qui est mis dans le projet de loi.

Il y a, d'un côté, l'assouplissement – et je dois dire que sur ça, il n'y aura pas de contestation de notre part – des règles qui actuellement forcent toute demande d'acquisition, de modification, de transformation strictement du patrimoine immobilier de chacun de nos cégeps à être autorisée par la ministre. Il y a là actuellement une délégation de pouvoirs vers les établissements, bien sûr, dans le cadre des normes budgétaires qui, à mon sens, est saine et va dans l'assouplissement du fonctionnement. Il est clair néanmoins que, puisque le gouvernement donne une garantie lorsque l'institution, le cégep va aller sur les marchés pour emprunter pour construire, rénover, améliorer son parc immobilier, il ne pourrait le faire sans l'autorisation gouvernementale puisque le gouvernement va donner une garantie d'emprunt lorsqu'une institution ira sur les marchés financiers. Donc, cette tendance à la décentralisation, à l'assouplissement du mode de fonctionnement, je crois que, de notre côté, elle reçoit notre aval.

J'ai de l'inquiétude, M. le Président, sur le deuxième élément qui touche l'uniformité de la subvention de fonctionnement des programmes conduisant au D.E.C. pour tous les cégeps. Vous n'êtes peut-être pas au courant, M. le Président – je vois ici, dans cette salle, un certain nombre de gens qui ont déjà enseigné dans les cégeps – de ce qu'on appelle la formule FABES. La formule FABES, c'est une formule qui, après de longs échanges, a permis d'établir comment on établit entre chacun des collèges la subvention gouvernementale, avec une partie qui est fixe, une partie pour les bâtiments, le «e» pour les enseignants, le «s» pour les fonds spéciaux, pour les activités. M. le Président, c'est une formule qui est assez normalisée, mais qui a le mérite d'être acceptée par l'ensemble des collèges généraux d'enseignement professionnel et d'être perçue comme étant juste.

Dans le cadre d'une enveloppe fermée, si, à l'heure actuelle, la ministre peut dorénavant adapter sa subvention de fonctionnement à la situation particulière d'un, ou de deux, ou de plusieurs cégeps, vous voyez, M. le Président, là, à l'heure actuelle, on est en train de mettre, pour la première fois, une brèche, on remet en question la manière de financer le réseau, c'est-à-dire la manière de partager les subventions entre chacun des établissements.

(16 h 40)

La formule FABES, M. le Président, n'a vraiment pas – et j'ai participé à cela – été facile à être acceptée et à avoir un consensus autour de cette formule de financement. La remettre en question pour retomber dans l'arbitraire, parce que c'est un peu ce qu'on dit... Ça a l'air bien, au début. On va dire: Bon, il y aura plus de souplesse, la ministre pourra aider les collèges en difficulté en ayant quasiment une subvention particulière qui pourra être attribuée. À première vue, ça a l'air intéressant, mais la réalité d'une enveloppe fermée... Il faut bien comprendre, nous fonctionnons à l'heure actuelle dans des enveloppes fermées. Et c'est la ministre de l'Éducation, à l'époque où elle était présidente du Conseil du trésor, qui s'était faite l'avocate des enveloppes fermées. Donc, lorsqu'on fonctionne dans une enveloppe fermée – et l'enveloppe va être fermée pour l'ensemble du collégial – ça veut dire que, si vous avez une partie où vous pouvez donner une subvention sur une base discrétionnaire pour corriger une situation particulière, elle sera prise à quelqu'un d'autre parce que l'enveloppe est fermée. Vous comprenez bien ça, M. le Président?

Ça veut dire qu'on remet en question l'équité qu'il y a entre les différents établissements par la mécanique de la formule FABES qui tient compte des variations de clientèle étudiante, qui tient compte du fixe, des fixes, qui tient compte du nombre de pieds carrés que vous avez à l'intérieur de l'établissement, qui tient compte du vieillissement relatif des différents bâtiments, qui tient compte des activités spéciales que vous pouvez avoir dans tel et tel collège. Alors, si vous remettez en question cette formule, attention, M. le Président, attention. L'équilibre, qui a été très difficile à atteindre, l'équilibre qui existe actuellement dans le réseau collégial, on ne peut pas le remettre en question sans grand danger. Alors, M. le Président, soyez sûr que, de la part de l'opposition, nous allons surveiller avec beaucoup de précision cette question. Je dois dire qu'à première vue ce qui pourrait être une augmentation de la souplesse m'apparaît dangereux par le fait qu'elle remet en question l'équité entre les différents établissements.

Troisième élément, dans ce projet de loi, M. le Président, le concept nouveau du cégep régional. Je ne voudrais pas faire un long exposé sur ça. Il faut vous rappeler – et on va essayer de comprendre – qu'il s'agit d'un modèle qu'on met ici sur le tapis, qui peut répondre éventuellement à la situation particulière de la région de Terrebonne – et encore, je n'en suis pas tout à fait sûr, mais enfin on peut regarder ça – mais qui peut être dangereux s'il force des fusions entre établissements.

La ministre, dans son intervention, a dit: Oh! je n'ai pas du tout l'intention de forcer les fusions. C'est gentil de dire ça. Par contre, je m'excuse, M. le Président, elle dit: Je n'ai pas l'intention, mais elle se donne le pouvoir de le forcer. Autrement dit, elle a dit: «Le gouvernement – c'est l'article 30 – peut, sur la recommandation du ministre, après consultation du Conseil supérieur de l'éducation, fusionner, par lettres patentes sous le grand sceau, des collèges pour former un nouveau collège.» C'est un peu bizarre, si vous permettez, que, pour justifier, à l'heure actuelle, la création du collège de Terrebonne – et je vais revenir sur la situation particulière de Terrebonne dans un instant et après on pourra regarder comment ça fonctionne – on est en train, dans la loi, de donner au gouvernement la possibilité de fusionner des collèges. Alors, la ministre me dit: Je n'ai pas l'intention de fusionner des collèges, sauf qu'elle se donne ce pouvoir-là. Elle se le donne, ce pouvoir-là. Elle va pouvoir, le cas échéant...

Je vous signalerai, si vous me permettez, M. le Président, pour des raisons budgétaires, par exemple, qu'il ne faut pas parler qu'il y a des problèmes de fusion, etc. Il y a eu seulement à Terrebonne... Tout le monde qui connaît un peu le réseau sait que le collège de Rosemont, le collège de Maisonneuve et le Collège du Vieux-Montréal ont envisagé, peut-être pour ça, une fusion, et, après étude – et j'ai le rapport quelque part actuellement – la conclusion qui a été amenée, c'est que, même si on fusionnait ces trois établissements pour faire un gros maxi-établissement, les économies qui pourraient être générées seraient tout à fait marginales. Ceci étant dit, donc, crainte de notre part sur ce pouvoir que se donne actuellement le gouvernement de pouvoir fusionner des institutions. Actuellement, si vous voulez fusionner deux collèges, si vous voulez créer un nouveau collège, si vous voulez en fermer, on doit revenir ici par voie législative. Là, le gouvernement, par cet article 30, se donne ce pouvoir de fusionner, donc, pour nous, questions, interrogations. Je suis de plus en plus perplexe alors que la ministre, dans son intervention, il y a quelques minutes, nous disait: Je tiens à vous rassurer, je n'ai aucunement l'intention de fusionner des établissements, je n'ai aucunement l'intention d'en faire un avec quelques-uns, mais, faites attention, je me donne ce pouvoir et je me le donne spécifiquement par l'article 30. Comprenez, M. le Président...

M. Ouimet: Question de règlement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Marquette, question de règlement.

M. Ouimet: M. le Président, on constate, depuis le début de l'intervention du député de Verdun, que le ministre de la Santé est en train de régler les problèmes d'ordre financier...

Le Vice-Président (M. Brouillet): On n'a pas à désigner des personnes parce que, s'il fallait qu'on le fasse, de part et d'autre, on n'en finirait plus, vous savez. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à ne...

M. Bélanger: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le ministre de la Sécurité publique.

M. Bélanger: M. le Président, est-ce que le député de Marquette pourrait peut-être convier quelques-uns de ses députés à venir écouter le député de Verdun?

Le Vice-Président (M. Brouillet): C'est le genre de remarque... Vous savez, il y a une entente... On peut demander l'application d'un règlement sans désigner des personnes, et c'est sur ce point-là que j'en suis. Alors, j'inviterais, s'il vous plaît, ceux qui ont des discussions et des ententes à pouvoir, peut-être, se retirer un peu plus à l'écart pour pouvoir discuter. Alors, j'inviterais peut-être Mme la whip du gouvernement à voir à se retirer un peu pour discuter.

Alors, il y a une certaine tolérance au niveau du règlement, mais, quand quelqu'un demande d'appliquer le règlement plus à la lettre, j'inviterais... M. le député de Marquette a demandé... Je vous inviterais, s'il vous plaît, à procéder. Quel règlement, monsieur?

M. Boulerice: M. le Président, justement sur celui de l'Assemblée nationale. Je ne sais pas quel article fait le mieux votre affaire, mais soyez assuré que je vais vous en trouver un. Il s'agit effectivement de l'article 32 au sujet du décorum. M. le Président, il y a plusieurs députés ministériels qui aimeraient beaucoup entendre les propos sages et sensés du député de Verdun, alors que, malheureusement, le seul auditeur qu'il a de sa formation politique l'interrompt dans son discours.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Boulerice: Alors, je crois que ce serait opportun...

(16 h 50)

M. Ouimet: Quel article du règlement est-ce que le leader adjoint invoque?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bon. S'il vous plaît. Ça va, j'en ai assez entendu, là. S'il vous plaît. Alors, écoutez, là, tout député peut, à tout moment, se lever sur une question de règlement, même quand c'est son collègue qui parle, premièrement. Deuxièmement, il y a un règlement qui dit que chaque député doit être à sa place et écouter celui qui parle. Il y a une certaine tolérance, mais il est de coutume que, quand un député se lève sur ce règlement-là, on fasse appel aux gens pour le respecter. Alors, c'est ce qui s'est passé. C'est pour ça que j'ai invité les gens à bien vouloir se conformer, si vous voulez, à cet aspect du règlement.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Vous aimeriez entendre M. le député de Verdun, alors il ne faudrait pas que vous tardiez trop, M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, il est clairement indiqué dans le troisième paragraphe qu'ils doivent s'abstenir de tout ce qui peut nuire à l'expression d'autrui, et je crois que le député de Verdun...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Verdun, je vous cède la parole.

M. Gautrin: Merci, M. le Président. Alors, j'en étais toujours, après être rentré, sur ce qui touchait la question de la crainte que nous pouvions avoir, de ce côté-ci, du pouvoir que la ministre se donnait de fusionner des établissements tout en affirmant devant cette Chambre qu'elle n'avait pas l'intention de fusionner. Je trouve que la meilleure manière, si elle n'a pas l'intention de fusionner des établissements, c'est de ne pas se donner le pouvoir de les fusionner. C'est un peu bizarre, si vous me permettez, M. le Président, que, d'un côté, on dise: Je vous garantis que nous ne fusionnerons pas et que ce n'est pas mon intention de fusionner des établissements, mais je me donne ce pouvoir que je n'ai pas actuellement, par la loi, de pouvoir les fusionner. Ce serait tellement plus simple, si c'est son intention, de ne pas mettre ça dans la loi. Ça réglerait tellement plus facilement les craintes que d'aucuns peuvent avoir.

Ceci étant dit, M. le Président, nous en arrivons à la région de Terrebonne. La région de Terrebonne, il faut le reconnaître, particulièrement dans ce qui touche la région de Lachenaie, Terrebonne, Mascouche, a connu une croissance démographique importante ces dernières années. Alors, comme chaque fois qu'il y a une croissance démographique importante, le milieu... Et on pourra rentrer après sur tout le débat, mais je pense que ce n'est pas la place, ici, pour parler des mouvements de population dans les couronnes. Ça, c'est un autre débat que connaît bien le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques qui est dans un comté semblable au mien. Mais il appert que, dans la couronne, donc, et dans les régions de Terrebonne, Lachenaie et Mascouche, on a assisté à une très forte croissance démographique, et la députée de Terrebonne a plaidé pendant de nombreuses années sur la nécessité de créer un vrai cégep dans la région de Terrebonne.

Voilà, M. le Président, il y a eu à ce moment-là un avis du Conseil supérieur de l'éducation qui s'inquiétait de ce qu'on appelle dans notre langage «les effets de débordement», c'est-à-dire que les clientèles, qui sont les clientèles des cégeps de Joliette, de l'Assomption, qui est un collège privé – je vais revenir sur l'Assomption dans un instant – de Montmorency, de Lionel-Groulx et de Saint-Jérôme, qui étaient les cégeps aux alentours de cette région en forte croissance démographique qu'était la région de Terrebonne, disaient: Attention, nous allons avoir une baisse de clientèle si vous créez un nouveau cégep à Terrebonne. Et, dans le fond, comme vous faites ça dans un cadre d'enveloppes fermées, vous allez déshabiller l'un pour créer et répondre aux problèmes des autres.

Sur ça s'est greffée la situation particulière du collège privé de l'Assomption qui faisait face à des problèmes budgétaires certains et qui a été amené à envisager une étatisation, le contraire d'une privatisation, c'est-à-dire que le collège de l'Assomption, que vous connaissez très bien, M. le Président, qui était un collège privé jusqu'à maintenant, il était envisagé qu'il puisse redevenir un collège public, comme, d'ailleurs, ça s'est fait dans d'autres parties, lorsque par exemple le collège Marie-Victorin, qui était un collège privé, est devenu un collège public parce que les Frères des écoles chrétiennes n'étaient plus capables, à ce moment-là, d'assumer les frais.

Donc, face à ça, vous avez donc ces effets de débordement possible parce que la crainte qu'il y a dans le milieu, particulièrement des gens du cégep de Joliette qui desservent aussi la population de la région de Berthier... Vous connaissez bien la région, M. le Président. Vous voyez, la région de Berthier, etc., qui était attirée, au point de vue cégep, vers le cégep de Joliette. L'étatisation, c'est-à-dire qu'on rend public ou qu'on transforme en collège public le cégep de l'Assomption, pourrait avoir ou pourrait créer des craintes quant aux effets de débordement possible sur le collège de Joliette.

Alors, c'était dans cet ensemble de problématiques que se trouve la région, une croissance démographique réelle, et je pense que personne ici ne va contester la croissance démographique dans la région de Mascouche, Terrebonne, Lachenaie, une croissance démographique réelle, mais une crainte parce que le nombre de places de cégep dans les collèges environnants – et je rappelle donc: Montmorency, Lionel-Groulx, Saint-Jérôme, Joliette et l'Assomption – une crainte, à ce moment-là, qu'il y ait des baisses de clientèle et que, dans le fond, on soit amené à reconstruire un nouveau béton en déshabillant les collèges avoisinants.

Nous avons devant nous un projet qui est le collège régional de Lanaudière. Alors, à première vue, ce qui est mis de l'avant, c'est que nous ne créerons pas un collège, un cégep à Terrebonne, mais que nous allons, en quelque sorte, fusionner ou amener les trois cégeps: c'est-à-dire l'antenne qu'il y a à Terrebonne du collège de Joliette serait montée, en quelque sorte, obtiendrait le statut de cégep, ce cégep de l'Assomption qui vient d'être rendu public, si vous me permettez, et le cégep de Joliette, dans une grande entité, qui aurait une vision régionale.

Alors, à première vue, on pourrait se dire: Si on va dans ce projet-là, on minimise les effets de débordement. Il faut comprendre, peut-être que des gens ne comprennent pas, dans notre langage, ce qu'on appelle les effets de débordement. Vous comprenez bien que, une partie du financement des cégeps étant basée sur les clientèles étudiantes, les étudiants ne se génèrent pas par génération spontanée et, s'ils vont à un établissement plus proche de leur domicile, ils ne vont pas à un autre établissement où on a déjà fait les investissements en termes de bâtisses, en termes de laboratoires, en termes de bibliothèques. C'est ça qui est craint par les cégeps avoisinants.

Alors, d'une part, pour minimiser, on a dit: Bien, on va considérer tout ça dans un grand ensemble qui serait un cégep régional où on ne modifierait pas la formule de financement, mais on adapterait la formule de financement sur toutes ces trois entités et on répartirait à l'intérieur les étudiants et les différents enseignements.

(17 heures)

Alors, M. le Président, trois choses doivent être regardées quant au modèle qui est mis de l'avant. D'abord, au point de vue organisationnel, le modèle qui, au début, au minimum, a le mérite de devoir être regardé. Je pense qu'on ne peut pas dire qu'on ne veut pas le regarder, il doit être regardé. La première crainte, c'est que le modèle qui est proposé devienne un modèle relativement lourd où vous allez maintenir à la fois au niveau, dans ce qui serait cette nouvelle – parce que vous créez une nouvelle structure – dans cette nouvelle structure que vous allez appeler le cégep régional, avec un directeur, avec un conseil d'administration, mais vous créez aussi, vous maintenez dans chacune des composantes des conseils d'administration propres qui ont des responsabilités pédagogiques. Alors, de voir l'équilibre entre ces différentes questions n'est pas une chose facile.

Deuxièmement – il faut bien être conscients – il n'existe pas... Et vous le savez pertinemment, M. le Président, parce que vous êtes un enseignant universitaire, ce n'est pas un cégep ou une université, ce n'est pas des bâtisses, ce n'est pas du béton, c'est d'abord et avant tout un corps professoral. C'est ça, un corps professoral, qui fait la force d'une université, c'est un corps professoral aussi qui fait la force d'un collège. Alors, dans le cas qui est le nôtre, les intégrations, les mécanismes d'intégration entre le corps professoral du collège de Joliette, le corps professoral ou la partie du corps professoral du collège de l'Assomption et le corps professoral du nouveau collège qui peut être créé à Terrebonne, il n'y a pas à l'heure actuelle dans le projet de loi de mécanisme d'intégration.

Pour faciliter, avec un point d'ironie, M. le Président, pour faciliter la chose, il y a deux types, deux fédérations syndicales qui représentent différentes... celle qui représente les enseignants du collège de l'Assomption n'est pas la même fédération que celle qui représente le collège de Joliette. Dans ce cadre-là, il me semble absolument impérieux que nous rencontrions en commission les différentes fédérations représentant les professeurs pour pouvoir comprendre un peu mieux comment les choses vont se passer.

De surcroît, M. le Président, si on règle – excusez le terme – en quelque sorte le problème est de Terrebonne, on ne règle pas le problème ouest de Terrebonne, c'est-à-dire l'effet de débordement qui était prévisible sur l'Assomption et sur Joliette. Il y a aussi dans la région de Terrebonne un effet de débordement possible sur le cégep Lionel-Groulx, sur le cégep Montmorency et sur le cégep Saint-Jérôme. Ça veut dire quoi? C'est-à-dire qu'une partie de ces étudiants qui étaient dans cette région à forte croissance démographique va aller au cégep dans la direction de Laval, dans la direction de Lionel-Groulx et dans la direction de Saint-Jérôme. Il me semble important, si on crée un cégep régional qui englobe bien sûr une partie des cégeps de la région mais pas la totalité des cégeps, de voir comment les relations entre Lionel-Groulx, entre Montmorency et entre Saint-Jérôme vont s'établir avec cette nouvelle structure de cégep régional. Alors, il me semble important que nous recevions en commission à la fois les représentants du cégep Lionel-Groulx, du cégep Montmorency et du cégep de Saint-Jérôme.

Je dois dire que cette question, si elle règle peut-être un problème budgétaire, je ne suis pas convaincu que ce soit un modèle qu'il faille exporter dans beaucoup d'autres endroits. Je ne suis pas convaincu à l'heure actuelle que le développement du collégial doive se faire par des superstructures régionales. J'ai des craintes, M. le Président, que le projet de loi, qui a un caractère extrêmement général – comme tout à l'heure pour la fusion, il donne des pouvoirs extrêmement généraux à la ministre – on puisse avoir ou on puisse y voir, dans ce projet de loi, une stratégie de développement du réseau collégial maintenant axée sur ces, en quelque sorte, supercégeps, qui sont des supercégeps régionaux. Structures qui m'inquiéteraient énormément, car on pourrait voir des grands centres de décision, et ça ne serait pas sans poser des problèmes, surtout que les fusions ne semblent pas générer les économies budgétaires auxquelles, à première vue, on pourrait s'attendre.

M. le Président, je crois qu'il est important que nous recevions en commission, d'abord dans le cas tout à fait spécifique de la région de Terrebonne, les dirigeants des cégeps concernés, soit concernés parce qu'ils sont inclus dans ce nouveau cégep régional, soit concernés parce qu'ils font partie de ce que j'ai défini tout à l'heure, la zone de débordement partiel de la population de la région de Terrebonne. Ça serait important que nous puissions les rencontrer en commission. Il me semble important aussi que nous rencontrions les fédérations d'enseignants, qui ont des craintes et qui soulèvent des craintes quant à ce modèle ou à la généralisation du modèle dans différentes régions. Je ne crois pas que, si tant est que ce modèle puisse avoir un sens dans le cas particulier de la région de Terrebonne, il puisse être exportable facilement dans d'autres régions et je crains toujours que, pour régler un problème tout à fait spécifique et particulier, on s'en aille modifier la loi non pas en spécifiant ce pour quoi on veut régler le problème, mais en introduisant des paramètres importants et généraux.

Il me semble important aussi que la Fédération des étudiants du collégial et la Fédération des associations de parents des cégeps du Québec puissent être entendues. Dans le fond, il ne faut pas oublier non plus, M. le Président, que, s'il existe des institutions d'enseignement collégial, c'est d'abord et avant tout pour les étudiants, et pouvoir les entendre ou voir comment ils réagissent face à ce projet, ou à cette fusion, ou à cette intégration – je pense qu'il est mieux d'utiliser le terme «intégration» que «fusion» – à l'intérieur d'un collégial régional est une question qui les préoccupe au premier chef et qui doit être abordée. Il est important, comme je le rappelais, de rencontrer aussi les fédérations syndicales, parce que vous comprenez bien qu'il va y avoir de sérieux problèmes au point de vue syndical si on intègre deux corps professoraux qui ont la même convention collective, quoiqu'il puisse y avoir des variations locales, des traditions différentes, particulièrement en ce qui touche l'ancienneté ou des questions comme cela.

Alors, M. le Président, dans le cadre du projet de loi n° 166, nous nous réservons notre jugement sur le concept de cégep régional. Je veux d'abord bien comprendre les implications que cela a sur l'ensemble des cégeps avoisinants, premièrement. Deuxièmement, je veux bien comprendre la portée ou les intentions, en ayant toujours beaucoup de craintes qu'on crée quelque chose avec une portée générale. Disons, on veut seulement l'appliquer pour ces gens-là, mais ensuite, bien, petit à petit, par le phénomène du temps et des compressions, etc., ça devient quelque chose qui prend un phénomène de pérennité. Donc, danger à ce niveau-là.

Il me semble important que la Fédération des cégeps soit entendue. On ne peut pas jouer sur quelque chose qui touche cinq cégeps, on ne peut pas jouer sur quelque chose qui touche aussi profondément la vie de nos collèges – et là je pense aussi en particulier et aux réformes administratives et aux questions de l'A.E.C. – on ne peut pas jouer sur cela sans nécessairement avoir l'avis et le point de vue de la Fédération des cégeps, donc il serait important qu'elle puisse être entendue ici, en commission.

(17 h 10)

En résumé, M. le Président, la position, comme je vois, par rapport à ce projet de loi est la suivante, parce qu'il y a beaucoup de points dans le projet de loi: sur la question qui touche les cégeps régionaux, ouverture quant à la possibilité que ça règle le problème de Terrebonne, inquiétude quant aux effets sur les cégeps avoisinants et inquiétude quant à la possibilité d'étendre ce modèle à l'ensemble du Québec.

Sur la question des attestations d'études collégiales, opposition ou énorme inquiétude en ce qui touche la question du bris du principe général de la gratuité de l'enseignement collégial. Inquiétude et opposition farouche à l'absence de générosité, qui est un point mineur dans le projet de loi, mais à l'absence de générosité envers les communautés francophones hors Québec en faisant en sorte que les étudiants des communautés francophones hors Québec soient obligés de payer des frais de scolarité lorsqu'ils vont venir étudier dans les cégeps du Québec. Il y aura là de notre part une opposition farouche. On ne peut pas accepter... ce qui est un point mineur dans le projet de loi, mais c'est quelque chose que nous ne pouvons pas, en aucune manière, accepter.

Troisième point, M. le Président, en ce qui touche les assouplissements des pouvoirs administratifs, aucun problème en ce qui touche l'assouplissement des pouvoirs administratifs pour faciliter les constructions, les réparations, etc. Inquiétude lorsqu'on remet en question la formule dite formule FABES. Je crois que cette formule a été un équilibre durement atteint entre les différentes institutions. Vouloir, par ce projet de loi, donner plus de souplesse à la ministre pour pouvoir corriger des effets locaux, ça va venir remettre en question la formule de financement FABES qui permet de partager l'enveloppe fermée, donc inquiétude de notre part sur ces questions-là.

Vous le comprenez, M. le Président, il y a un point sur lequel nous allons nous battre farouchement, c'est celui de cette perte de générosité envers les communautés francophones hors Québec. Ça, c'est un point sur lequel nous ne pourrons jamais suivre ce gouvernement, sur ces questions-là. Sur le reste, nous avons d'énormes questionnements sur les effets, aussi, sur les collèges privés non subventionnés. Il y aura des questionnements qu'on aura de ce côté-là et il est important qu'on puisse les recevoir. Nous avons des questionnements quant à la viabilité du projet de cégep régional et surtout des craintes à l'exportation de ce modèle dans d'autres régions.

Alors, M. le Président, nous allons voir et avoir... Nous souhaitons que la ministre accède à notre demande de pouvoir entendre la Fédération nationale des enseignants du Québec, la Fédération des enseignants des collèges, la Fédération autonome du collégial, c'est-à-dire les trois fédérations de professeurs, pour pouvoir éclairer sur ce qui se passe, comment le corps professoral voit cette question-là. La Fédération des cégeps parce qu'elle est concernée au premier titre; les fédérations étudiantes du collégial et la Fédération des associations de parents des cégeps parce que, somme toute, les cégeps, ça doit d'abord être pour les étudiants – vous me permettrez de terminer rapidement, M. le Président, je vais conclure – le Conseil des collèges subventionnés, il me semble que c'est un «must» qu'on les reçoive; la Fédération des associations d'enseignement privé, ce serait un éclairage utile; et, en plus, les directions des cinq cégeps concernés dans le projet dit projet régional de Terrebonne, à savoir le cégep de L'Assomption, le cégep de Joliette, le cégep de Lionel-Groulx, le cégep de Montmorency et le cégep de Saint-Jérôme. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Verdun. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Lotbinière. M. le député.


M. Jean-Guy Paré

M. Paré: Merci, M. le Président. J'aimerais à mon tour intervenir sur cette adoption de principe, c'est-à-dire l'adoption du principe de la loi n° 166 modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives. Je souhaiterais le faire de façon pointue et très précise. Mon intervention portera sur la possibilité, à l'adoption de cette loi, pour un collège d'enseignement général et professionnel d'offrir à sa communauté des cours menant à l'accréditation d'une Attestation d'études collégiales, communément appelée A.E.C., que M. le député de Verdun tout à l'heure nous a expliquée abondamment.

Dorénavant, les besoins de la main-d'oeuvre pour une formation pointue ou pour un recyclage, ou pour un perfectionnement de la main-d'oeuvre, pourront être comblés par les collèges d'enseignement professionnel et technique selon les besoins de leur région. De plus, cette nouvelle possibilité donnera aux cégeps l'opportunité de répondre aux besoins en main-d'oeuvre d'une entreprise ou d'un groupe d'entreprises. Cette approche permettra une plus grande adéquation entre l'offre de formation et les besoins de la main-d'oeuvre des entreprises. Dès lors, les institutions collégiales seront en mesure de répondre particulièrement aux secteurs de pointe de l'économie en changement constant. Ce projet de loi permettra aux cégeps une plus grande adéquation entre l'offre de formation et les besoins de la main-d'oeuvre des entreprises.

Le député de Verdun s'inquiète des frais de scolarité que les cégeps percevront pour ces activités de formation et il ajoute qu'il voit là une brèche dans la gratuité scolaire. Je dois rappeler que ces cours seront autofinancés, c'est-à-dire que les entreprises ou le client, c'est-à-dire un travailleur en emploi, devront défrayer les frais de scolarité. Vous savez aussi, M. le Président, que les entreprises ont l'obligation, par la loi que notre gouvernement a adoptée, soit la Loi favorisant le développement de la formation de la main-d'oeuvre, de consacrer 1 % de leur masse salariale au perfectionnement et à la formation de leur personnel. Donc, les entreprises pourront inscrire ces frais pour rencontrer leur obligation.

En même temps, les travailleurs auront – et ce n'était pas le cas auparavant – une reconnaissance d'Attestation d'études collégiales, c'est-à-dire un diplôme dans leur domaine d'études. Mais un élève inscrit à temps plein à des programmes menant à une Attestation d'études collégiales faisant l'objet d'un soutien financier du ministère de l'Éducation en vertu des règles budgétaires que nous connaissons continuera à bénéficier de la gratuité scolaire. Donc, fallait apporter cet éclairage. Je vous remercie, M. le Président, de votre attention.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Lotbinière. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives... Il est important de rappeler le processus des états généraux de l'éducation que le gouvernement d'en face avait mis en branle, qui a duré assez longtemps, pas loin d'un an et demi. On se rappelle de tout le processus des consultations générales, des consultations particulières, régionales, par la suite sur le plan national. Je me rappelle fort bien des propos du député de Lévis et de la députée de Taillon, l'actuelle ministre de l'Éducation, qui disaient – et on peut retrouver ces textes à cet égard-là – que la réforme de l'éducation, que ce soit au niveau primaire, secondaire ou postsecondaire, n'aurait pas comme objectif d'être une réforme des structures. Je ne sais pas si la ministre se rappelle de ça. Ça, c'était, comme d'habitude, le discours, hein? La ministre voulait, semble-t-il, s'attaquer aux vraies affaires.

Cependant, lorsqu'on regarde son bilan, son bilan depuis qu'elle est ministre de l'Éducation, lorsqu'on regarde les différents projets de loi qu'elle a déposés ici, à l'Assemblée nationale, on ne parle pas d'autre chose que des structures scolaires. Brassage de structures. C'était vrai dans le cadre du projet de loi n° 109. C'était un processus de fusion de commissions scolaires et d'implantation de commissions scolaires linguistiques. On s'en rappelle. Or, dans le projet de loi n° 109, qui a mobilisé beaucoup l'attention des différents partenaires, on a parlé strictement de structures, de territoires, de béton, de services administratifs, de ressources matérielles, de ressources financières, de ressources humaines, des différents partages qu'on ferait à l'intérieur du projet de loi qui avait été déposé par la ministre.

Cette année, rien n'a changé. Dans le projet de loi n° 180 qui a été déposé la semaine passée, bien, là, on parle à nouveau d'un brassage de structures entre le ministère de l'Éducation, les commissions scolaires et les écoles. On fait une nouvelle répartition des pouvoirs entre les différents partenaires qui agissent à l'intérieur des différents réseaux scolaires.

(17 h 20)

Le projet de loi n° 166, c'est la même chose. C'est la même chose. On parle de structures du début à la fin: on parle de mettre sur pied des nouveaux collèges, un collège régional; on parle de la composition du collège; on parle des différents pouvoirs qu'il aura, ce collège-là; par la suite, on parle de fusionner, la ministre se donne des pouvoirs de fusion. J'aurai l'occasion de regarder ces détails ultérieurement.

Mais qu'est-ce qu'on retient de l'oeuvre de la ministre de l'Éducation et ancienne présidente du Conseil du trésor? C'est son obsession par rapport aux structures scolaires. C'est vrai au primaire, c'est vrai au secondaire et c'est vrai au collégial, dans le cadre des cégeps. Et pourtant – je vous rappelle ce que je vous disais un peu plus tôt, M. le Président – après tout ce grand débat des états généraux de l'éducation où on a mobilisé, semble-t-il, des milliers et des milliers de personnes qui sont venues dire au gouvernement, qui sont venues dire à l'actuelle ministre de l'Éducation et l'ancien député de Lévis: On espère que ça ne sera pas une réforme de structures, qu'avons-nous devant les yeux depuis le dépôt des états généraux de l'éducation? Des réformes de structures: primaire, secondaire et collégial.

Et je comprends mieux maintenant la décision de l'actuel premier ministre de prendre la députée de Taillon, qui était présidente du Conseil du trésor, et de lui dire: Maintenant, tu t'en vas à l'Éducation. Elle avait l'expérience, au niveau du Conseil du trésor, des compressions budgétaires, des enveloppes fermées.

M. Boulerice: M. le Président, question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader adjoint du gouvernement, question de règlement.

M. Boulerice: M. le Président, est-ce que vous pourriez rappeler à M. le député de Marquette, qui est quand même ici depuis trois ans, qu'une des règles fondamentales quand on devient député, c'est de lire le règlement? Qu'il puisse l'apprendre par coeur, à défaut, la ministre lui fera écrire 100 fois l'article 211 qui dit: «Tout discours doit porter sur le sujet en discussion.» Nous avons un projet de loi devant nous qui ne concerne absolument en rien le ministère du Conseil du trésor, mais bien le ministère de l'Éducation.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, c'est, bien sûr, le ministère de l'Éducation, mais il est de coutume qu'on peut faire certains détours des fois pour aborder le sujet. Dans la mesure où on ne s'appuie pas trop longtemps sur le détour, j'inviterais M. le député de Marquette à poursuivre.

M. Gobé: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, M. le député de LaFontaine.

M. Gobé: J'aimerais intervenir suite à l'intervention du...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, ça prendrait un point de règlement. Sur quel point de règlement?

M. Gobé: M. le Président, sur le point soulevé à l'article 216 par notre collègue le député...

Des voix: Article 212.

M. Gobé: Article 212, je m'excuse. Si on peut avoir la tranquillité pour parler, peut-être que je vais pouvoir expliquer pour les téléspectateurs. M. le Président, il est vrai que notre collègue est là depuis trois ans, il est vrai qu'il connaît très bien le règlement. Et je dois dire, pour avoir été ici, moi, depuis bientôt 13 ans, que j'ai toujours vu, lorsqu'on fait un discours sur un projet de loi comme celui...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Excusez-moi, mais vous avez appelé l'article du règlement. Alors, je l'ai justement interprété, cet article du règlement. J'ai dit qu'il y a une certaine tolérance finalement quant à l'application de cet article, et je l'ai souligné. Maintenant, on invite chaque personne, dans la mesure du possible, à se rapporter au sujet. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, je dirais ceci, et pas méchamment, mais je tiens à le dire quand même: Si le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques voyageait moins à l'extérieur et regardait ce qui se passe au Québec...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. S'il vous plaît. On n'est pas pour...

M. Boulerice: ...l'article 211 qui dit: «Tout discours doit porter sur le sujet en discussion.» Le sujet en discussion n'est pas les missions que...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, on a deux beaux exemples de non-pertinence.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Alors, M. le Président, je vais revenir au sujet, parce que je comprends que le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques n'ait peut-être pas suivi avec autant d'attention que moi par rapport aux états généraux sur l'éducation, mais il y a quand même une réforme en cours. Ça, c'est une pièce de la réforme, hein, et elle découle des états généraux sur l'éducation. Et, dans le cadre des états généraux sur l'éducation et dans le cadre des discours tenus par la ministre de l'Éducation, elle avait pris l'engagement que ça ne soit pas une réforme de structures. Or, force est de constater que l'ensemble des projets de loi qui ont été déposés par la ministre de l'Éducation suite aux états généraux sur l'éducation sont des réformes de structures, ni plus ni moins.

Comme le soulignait avec beaucoup d'à-propos le député de Verdun, on constate également les dangers, les pièges contenus dans ce projet de loi, en particulier le danger qui existe par rapport au principe de la gratuité scolaire. Et peut-être le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques pourrait lire avec moi la page 6 du projet de loi n° 166. À l'article 16, qui vient modifier l'article 24 de la loi, on dit ceci: «Un collège ne peut exiger d'un étudiant à temps plein qui est résident du Québec le paiement des droits de scolarité pour l'enseignement qu'il dispense dans le cadre d'un programme conduisant au Diplôme d'études collégiales.» Lorsqu'on fait la lecture des dispositions qui existent actuellement, on constate que la ministre de l'Éducation est en train, à nouveau, de se dégager une marge de manoeuvre pour pouvoir taxer davantage les étudiants du cégep, pour pouvoir aller chercher davantage d'argent dans leurs poches, et c'est inscrit carrément dans le projet de loi n° 166. Il me semble que ça mérite d'être souligné, parce qu'on constate que ni la ministre de l'Éducation ni le député de Lotbinière n'en ont fait mention dans leur allocution.

Il y a d'autres pièges dans l'avant-projet de loi, et le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques, s'il lit la page 15, les articles 57 et 58, comprendra que le même stratagème qui a été préconisé par la ministre de l'Éducation dans le cadre de la loi n° 180, eh bien, elle l'utilise dans le cadre de la présente loi, la loi n° 166, c'est-à-dire de faire en sorte que les institutions scolaires vont devenir presque des organismes de charité qui vont devoir aller quémander de l'argent pour pouvoir financer les activités éducatives qui se déroulent à l'intérieur des murs de ces institutions-là.

Je vais lire l'article 58, qui dit ceci: «Le conseil d'établissement peut [...] solliciter toute somme d'argent par dons, legs, subventions ou autres contributions bénévoles de toute personne ou de tout organisme public ou privé désirant aider à la réalisation des orientations du collège constituant.» Et on dit, à l'article 59: «Le budget approuvé du collège constituant forme des crédits distincts au sein du budget du collège régional et les dépenses pour ce collège constituant sont imputées à ces crédits.»

(17 h 30)

On comprendra assez rapidement que, tant dans le cadre des écoles primaires que des écoles secondaires, que des cégeps, tout va dépendre de l'endroit géographique où est situé le cégep et qu'on risque de faire en sorte qu'il va y avoir des institutions scolaires qui vont être mieux nanties que d'autres institutions scolaires, alors que c'est de la mission du ministère de l'Éducation de s'assurer d'une certaine équité entre la répartition des ressources financières parmi toutes les institutions scolaires indépendamment de l'endroit où elles sont situées. Alors, M. le Président, il y a un danger dans cette pratique préconisée par l'ancienne présidente du Conseil du trésor, qui était habituée à trouver toutes sortes de mécanismes, toutes sortes de formules pour faire en sorte que l'État se désengage progressivement du financement des services publics. On sait le reproche qui lui est fait par l'ensemble des partenaires scolaires, dont les partenaires privilégiés de l'actuel gouvernement, les centrales syndicales, qui sont en train de dire au gouvernement: Vous êtes en train de créer des PME avec nos institutions scolaires, avec nos services publics.

Par ailleurs, M. le Président, et je ne voudrais pas que ça passe inaperçu, parce que la ministre est en train de se donner les pouvoirs également pour fermer éventuellement des cégeps. Elle se donne le pouvoir, dans ce projet de loi n° 166, de fermer éventuellement des cégeps. On lit, à la page 7 – et le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques pourrait lire la page 7 avec moi – à l'article 24 qui vient modifier l'article 30, on dit ceci: «Le gouvernement peut, sur la recommandation du ministre, après consultation du Conseil supérieur de l'éducation, fusionner, par lettres patentes sous le grand sceau, des collèges pour former un nouveau collège.» Ça, ça va. Mais, lorsqu'on lie cette disposition-là avec l'article 59 du même projet de loi, à la page 16 – et j'invite le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques à lire la page 16 avec moi – on dit ceci: «En cas – écoutez bien, M. le Président – de fermeture du collège constituant – ah, en cas de fermeture, on parle bien de fermeture – ses surplus ou déficits, le cas échéant, deviennent ceux du collège régional.» Or, par le processus de fusion, par le processus de collège régional, par le processus également anticipé et prévu par la ministre de l'Éducation et son gouvernement dans le projet de loi n° 166, on envisage de fermer des cégeps, comme on envisage également de fermer des écoles primaires et secondaires au Québec en refusant les recommandations qui sont faites par plusieurs partenaires pour éviter ce genre de chose-là.

M. le Président, ça, et on l'a vu trop souvent par le passé, le gouvernement qui n'annonce pas clairement ses intentions, qui se donne des pouvoirs à l'intérieur du projet de loi et puis qu'ultérieurement le gouvernement va se servir des pouvoirs qu'il s'est donnés à l'intérieur du projet de loi pour en arriver à ses fins. Et ça, on fait toujours ça de façon tranquille, sans trop afficher les couleurs, sans trop énerver la population, sans trop dire les vraies choses. Alors, comme l'indiquait le député de Verdun, ce sont des articles auxquels le député de Verdun va s'opposer à cause des dangers, à moins qu'il y ait des mécanismes et des engagements formels pris par l'actuelle ministre de l'Éducation au nom de son gouvernement pour éviter ce genre de chose là. Mais on ne voit pas comment la ministre de l'Éducation pourrait prendre de tels engagements alors que par la porte d'en arrière, dans un projet de loi, on se donne des pouvoirs pour fusionner des cégeps et pour éventuellement fermer certains cégeps. On sait le rôle pivot, le rôle important que peut jouer un cégep dans une région éloignée. Le cégep a un mandat qui dépasse largement son simple mandat de transmettre des connaissances aux étudiants qui fréquentent le cégep.

Par ailleurs, M. le Président, la ministre, aux articles 57 et 58 du projet de loi, à la page 15, est en train de permettre d'accorder des pouvoirs bien précis en matière budgétaire au niveau des cégeps. Et on dit ceci, à l'article 57, alinéa 2: «Les revenus produits par la fourniture des biens et services visés à l'article 56 sont imputés aux crédits attribués au collège constituant.» On annonce déjà le désengagement du gouvernement du Parti québécois par rapport au financement des services publics.

Comment est-ce qu'on fait ça? On est en train de dire que toutes les sommes d'argent qui seront recueillies par les cégeps, dans ce cas-ci, ou par les institutions scolaires aux niveaux primaire et secondaire dans d'autres cas, le gouvernement va en tenir compte lorsque va venir le temps d'accorder du financement. Donc, à une école ou à un cégep qui aura réussi à aller chercher quelques milliers de dollars, des dizaines de milliers, des centaines de milliers, des millions de dollars dans certains cas, eh bien, le gouvernement va regarder les états financiers du cégep et va dire: Tiens, vous avez bien travaillé dans votre milieu, vous avez énormément sollicité l'ensemble des contribuables, vous êtes allé chercher des sommes d'argent importantes, et, dans ce cadre-là, compte tenu que vous bénéficiez de cette nouvelle marge de manoeuvre là, nous allons réduire notre financement.

C'est à ça que sont conviés l'ensemble des cégeps au Québec, et ce n'est pas étonnant, M. le Président, parce que la plupart sinon l'ensemble des mesures législatives préconisées par le gouvernement sont des mesures, dans le fond, pour aller chercher du financement additionnel. Et qui, pensez-vous, va payer pour ces services publics là? Le gouvernement se désengage, demande aux partenaires locaux de s'impliquer au niveau du financement des services publics, avec les inéquités et les inégalités qui vont probablement en résulter, et puis, par la suite, ça permet au gouvernement de se désengager du financement des services publics. Pourtant, ce n'est pas à ça que nous avait conviés le Parti québécois dans l'ensemble de ses engagements électoraux en 1994. Force est de constater cependant que les gestes n'ont pas été conformes aux engagements pris par le gouvernement. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Il y a d'autres intervenants? M. le député de LaFontaine, je vous cède la parole.


M. Jean-Claude Gobé

M. Gobé: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 166 est certainement un projet de loi très important parce qu'il touche un domaine qui est particulièrement sensible, à notre époque, celui de l'instruction des jeunes et, bien sûr, aussi des moins jeunes lorsqu'il arrive qu'ils fréquentent encore, pour des raisons de retour aux études, les institutions québécoises d'enseignement, et en particulier on parlera d'enseignement collégial.

M. le Président, ce projet, un peu comme tous les projets apportés par ce gouvernement, nous indique une première chose, c'est qu'on veut aller chercher de l'argent. En effet, on se rend compte qu'une fois encore, sous couvert de moderniser ou de changer les règles, on se prépare à permettre une taxation ou une tarification. En effet, lorsque l'on prend le projet de loi n° 166, que j'ai ici, et qu'on lit les notes explicatives, on y trouve la chose suivante: ce projet de loi prévoit, par ailleurs, que le droit à la gratuité scolaire ne s'appliquera dorénavant qu'aux programmes conduisant au Diplôme d'études collégiales. Les collèges pourront ainsi exiger des droits de scolarité pour les programmes conduisant à une Attestation d'études collégiales.

Et là, M. le Président, moi, j'ai beaucoup de difficultés avec ça et j'aimerais entendre les intéressés là-dessus avant de pouvoir voter sur ce projet de loi là. Pourquoi? Parce que l'on sait que les attestations d'études collégiales sont un programme court des études par rapport au Diplôme d'études collégiales qui, lui, est le D.E.C. Or, si ce programme court existe, c'est pour permettre certainement à des gens, à des jeunes ou à des moins jeunes, de retourner aux études et d'y acquérir une formation peut-être moins poussée que s'ils étaient allés au D.E.C., parce que c'est un enseignement plus court. Alors, vu que c'est, semble-t-il, une mesure qui a pour but de faciliter ou d'ouvrir un peu plus encore l'accès aux études des Québécois et des Québécoises, je me pose la question à savoir pourquoi on va mettre une tarification.

(17 h 40)

Ça me rappelle, M. le Président, lorsque... Prenons, en France, un exemple, sensiblement le même, qui s'est produit. Il y avait, dans la formation professionnelle, au niveau des métiers... Et je lisais un article dans une revue il y a quelques semaines, lors d'une rencontre avec des collègues députés, M. le Président, il y avait double système. Il y avait un système qui amenait les jeunes au Certificat d'aptitude professionnelle, ce qu'on appelle un C.A.P. Après trois années d'études, les jeunes obtenaient un diplôme de qualification professionnelle et pouvaient, après un stage, aller travailler comme ouvriers qualifiés dans une entreprise ou chez un employeur de leur domaine. C'était trois ans. Mais, vu que tout le monde... Pour tous les jeunes Français et les moins jeunes aussi qui n'avaient pas le temps de faire ces trois années-là ou alors n'avaient pas la formation de base, académique, nécessaire pour aller prendre un programme long en profondeur au niveau académique, ils ont créé ce qu'on appelle le programme F.P.A., le programme de formation professionnelle des adultes, qui est un programme qui enseigne le même métier en six mois que ce que les autres vont apprendre en trois ans.

C'est évident, M. le Président, qu'il n'y a là, bien sûr, pas le même critère en termes académiques, mais, quand même, ça permettait à des gens qui, sans cela, n'auraient pas fait ces études d'aller acquérir une formation professionnelle et d'aller travailler par la suite peut-être pas au même niveau que leurs collègues qui font trois ans, mais, quand même, de se placer sur le marché du travail. C'est là quelque chose d'extrêmement fondamental que de permettre par des programmes plus courts, au niveau de l'enseignement professionnel en particulier mais ça peut être aussi en enseignement plus général, à des jeunes et des moins jeunes d'aller acquérir une habilité, une formation et des connaissances pour leur permettre d'aller travailler.

Alors, là, le but, c'est de les réintégrer au travail. Le but, ce n'est pas de distribuer ou de créer ces attestations d'études collégiales, M. le Président, juste pour avoir un bout de papier dans sa chambre ou dans sa maison, c'est pour permettre d'acquérir des habilités, des connaissances pour intégrer le marché du travail, car je crois que c'est là, bien entendu, le but principal de toute réforme, et en particulier de l'enseignement professionnel au Québec et de l'enseignement général. M. le Président, on va là décourager peut-être les gens qui n'auront pas les moyens ou seront en difficulté pour pouvoir acquitter ces frais.

Alors, ce qu'on ne veut pas faire avec les étudiants au cycle régulier, au D.E.C., pour des raisons politiques ou autres, des raisons de clientèle, c'est-à-dire imposer un droit de scolarité, on va le faire avec une autre clientèle à côté. C'est exactement ça qu'on est en train de faire, M. le Président. Peut-être que la ministre a des arguments, peut-être pourra-t-elle justifier ça devant ses militants dans un conseil général ou dans un conseil de son parti, peut-être dans l'opinion publique aussi, mais, moi, comme député qui a dans sa circonscription des jeunes électeurs, des parents, des adultes qui ont besoin de retourner faire des attestations d'études collégiales pour pouvoir continuer à travailler ou retrouver un emploi, bien, je ne pense pas que ça soit tout à fait une bonne chose et je ne vois, là encore, qu'une manière d'aller tarifer.

C'est quoi, la prochaine tarification? La prochaine tarification, M. le Président, ils ne nous la mettront pas maintenant parce que les élections vont arriver dans une année et que ce n'est pas le temps, comme l'a dit le premier ministre, d'aller bouleverser les choses. La prochaine tarification, ce qu'ils font à moitié, là, en tarifant les A.E.C., attestations d'études collégiales, ça sera la prochaine élection. Heureusement, j'espère que la population ne les mettra pas là, parce que, sinon ils vont, bien sûr, tarifer les frais de scolarité au cégep. C'est ça, la prochaine étape. Et, s'ils pouvaient le faire maintenant sans risque électoral, ils le feraient.

C'est un gouvernement qui tarife tout, partout. On ne peut plus, au Québec, se livrer à quelque activité que ce soit sans avoir une tarification quelque part. Je vois que ça rejoint maintenant l'éducation collégiale. C'est quelque chose qui a toujours été respecté par les gouvernements successifs ici, M. le Président, et ça fait bientôt 13 ans que je suis dans cette Chambre; la semaine prochaine, nous fêterons en effet le 13e anniversaire de l'élection, un certain nombre de députés ici. Eh bien, j'ai toujours cru ou compris qu'il ne fallait pas, ici, au Québec, tarifer l'enseignement collégial, parce que c'était l'enseignement minimum, de base, auquel on devait monter nos jeunes Québécois pour les rendre plus aptes justement à prendre leur place dans la société et à trouver du travail.

Certes, ça a déjà été, mais ça n'est plus, et je crains donc pour l'avenir, car on sait que ce gouvernement – on le voit avec le projet de loi qu'il vient de déposer, il y a même presque 1 000 000 000 $ de nouvelles taxes, un projet de loi de 750 pages, ou 760 pages, des taxes plus ou moins camouflées, la taxe de vente qui réaugmente au 1er janvier; c'est un gouvernement de taxation. Et je crains donc pour l'avenir que nous nous dirigions avec ce gouvernement d'une manière insidieuse – et c'est le moins que je puisse dire, pour rester parlementaire dans mes propos – vers une tarification et des frais de scolarité au niveau collégial. Et ça, je ne pense pas que ça soit le but souhaité par l'ensemble des familles québécoises, et aussi des jeunes Québécois et des jeunes étudiants et étudiantes.

M. le Président, il y a plusieurs autres principes qu'on retrouve dans ce projet de loi. On sait que la ministre, le gouvernement... On dit «la ministre», malgré tout, elle est seulement la thuriféraire de son gouvernement; elle fait ce que ses collègues lui disent, elle n'a pas toujours les épaules assez fortes peut-être pour dire non; peut-être aimerait-elle dire non, mais elle ne dit pas. En tout cas, ce qu'il ressort, c'est qu'il y a des coupures de 80 000 000 $ dans les cégeps qui vont être opérées. Donc, ça veut dire qu'il va y avoir encore là...

Non seulement on cherche à tarifer, on cherche de l'argent quelque part, mais on va couper 80 000 000 $. On va donc devoir assister à une baisse des services ou du nombre d'encadrements ou du nombre de cours qui sont donnés à nos élèves actuellement. C'est évident que, si l'on coupe 80 000 000 $ comme ils ont décidé de le faire, il va falloir que quelque chose arrête. Dans les hôpitaux, on voit les gens qui attendent dans les urgences pendant des journées et des week-ends complets parce qu'ils ont coupé puis qu'il n'y a pas personne pour les soigner. Dans les cégeps, qu'est-ce que ça va être? Est-ce qu'on va commencer à avoir des gens qui vont se faire refuser le droit aux études? Est-ce que ce grand principe qui au Québec a fait l'évolution, qui a contribué à tout ce dynamisme que nous connaissons ici, qui est l'instruction gratuite et l'accès quasiment libre, à tout le monde qui voulait y aller, à l'éducation collégiale et au cégep, va être remis en question? Certes, je me pose la question et je pense que les gens ont le droit de se la poser, cette question-là, parce qu'on ne peut pas couper 80 000 000 $ impunément dans ce réseau-là... Ou alors on va couper le salaire des professeurs, mais ça n'a pas l'air, les conventions collectives sont là. On va couper quoi?

Moi, je sais que dans certains cégeps on charge maintenant, les gens vont payer pour les parkings, ils vont payer, enfin, pour toutes sortes de choses comme ça. C'est une manière de tarifer, une manière peut-être de récupérer des argents, mais ce n'est pas le 80 000 000 $ qu'ils vont récupérer. De toute façon, ils l'ont déjà fait.

Une autre question que je me pose. La ministre se prépare à créer ce qu'on appelle un cégep régional avec 16 représentants – enfin, il y a une espèce d'organigramme supplémentaire – et la question qu'on se pose, c'est: Pour permettre le cégep de Lanaudière... Le cégep de Lanaudière, vous savez qu'il y a des gens dans le comté de L'Assomption, ce comté de M. Parizeau, d'ailleurs, qui faisaient campagne depuis de nombreuses années pour obtenir une succursale du cégep de Joliette. Il y avait, de l'autre côté de l'île, à 2,5 km de là, 3 km, même pas, d'autres gens, dont le député de LaFontaine, qui faisaient campagne pour que le collège Marie-Victorin, qui était un collège privé et qui était malheureusement, à cause de la situation économique et du manque de fréquentation des élèves, en fâcheuse posture, pour que ce collège devienne un cégep public, ce qui a été réalisé par le premier ministre M. Bourassa, et il me fait plaisir de laisser ça à son héritage.

En 1993, le 15 janvier, nous avons annoncé la création du cégep Marie-Victorin et mis les fonds nécessaires pour qu'il soit un collège public, et, de 700 élèves, il est maintenant passé à pas loin de 3 000 élèves la journée et, avec l'éducation permanente et tout ce qui gravite autour comme éducation, presque 5 000 élèves supplémentaires le soir, en plus de devenir un des phares du Québec au niveau de la mode, du design, et ceci, même à un niveau international, M. le Président. Bon, ça, c'est une chose qui a été faite, mais il y a d'autres domaines aussi qui sont enseignés au cégep Marie-Victorin. On a même signé des ententes internationales avec d'autres pays, avec la francophonie, entre autres, où nos professeurs, Marie-Victorin, vont dispenser de l'enseignement.

Et, moi, je me dis, M. le Président: Pourquoi allons-nous dépenser de l'argent à deux, trois, quatre, cinq, six et même 10 km de là, dans Lanaudière, pour un cégep qui serait une annexe de Joliette, qui est à 80 km de là, alors qu'on a le cégep Marie-Victorin qui est à côté. En plus, la majorité des gens qui résident dans cette région-là sont des gens, pour ceux qui vont sur le bord de l'autoroute 40 le soir ou le matin, qui résident là mais travaillent dans la région de Montréal, donc passent devant le cégep Marie-Victorin ou à un kilomètre et demi. Donc, si les parents ou les gens sont capables de passer là pour aller travailler, avec les transports en commun, je ne vois pas pourquoi la clientèle qui est dans cette région ne pourrait pas simplement être associée avec le cégep Marie-Victorin. Je pense que ce serait plus logique. On ne serait même pas dans la même région administrative, hein, et, dans la région de Montréal, la grande région, même si elle est décriée par certains, l'autre va être dans la région de Joliette. Totalement différent comme société, comme population, comme organisation, comme rapports et relations entre les différents groupes quels qu'ils soient.

(17 h 50)

Alors, M. le Président, moi, je déplore que, avec ce projet de loi là, de manière, encore là, insidieuse, on se prépare à faire cette opération qui n'est pas dans le meilleur des intérêts ni des gens de Lanaudière, de Repentigny, de Le Gardeur et encore moins des gens de Montréal, puis pas du Québec tout entier. Parce que, pour les collègues qui nous écoutent et pour nos compatriotes québécois qui sont devant leur poste de télévision ce soir, j'aimerais leur dire aussi qu'une grande partie des élèves et des gens qui sont dans Le Gardeur, Lanaudière, dans cette région-là, viennent à Montréal aussi pour étudier. Ils vont y aller, à l'université, tout à l'heure. Ils vont aller aussi dans les collèges, comme Saint-Jean-Vianney, qui sont situés à Rivière-des-Prairies. Donc, si les parents envoient leurs enfants dans un collège privé, qui est Saint-Jean-Vianney, par autobus, plusieurs centaines par jour du côté de Montréal, pourquoi aller créer ce cégep qui serait rattaché à Joliette, à 80 km de là? C'est une aberration totale. C'est l'exemple parfait de l'aveuglement politique et du clientélisme au détriment d'une meilleure utilisation des fonds publics et du meilleur intérêt des collectivités locales et des citoyens du Québec, et ça, c'est la marque de commerce de Mme la ministre.

Je suis certain que, si elle prenait le temps de venir se promener dans Rivière-des-Prairies, dans cette région-là et dans Pointe-aux-Trembles, elle comprendrait ce que je dis, parce que généralement lorsqu'elle voit les choses, Mme la ministre, elle finit par admettre. Par contre, c'est sûr que la limousine, elle passe vite sur la 40 lorsqu'elle la ramène de Québec à Montréal. Ou sur la 20, peut-être même pas la 40. Elle prend l'autoroute 20 pour rejoindre sa circonscription qui est de l'autre bord. Mais, si elle venait dans notre coin et rencontrait le député de LaFontaine et les intervenants locaux – Chambre de commerce de l'est de Montréal, Chambre de commerce de Pointe-aux-Trembles, des gens du cégep Marie-Victorin, les commissions scolaires, Jérôme-Le Royer, la nouvelle commission scolaire, qu'elle a créée, d'ailleurs, de l'est de Montréal, avec laquelle je collabore très bien – peut-être qu'elle comprendrait cette décision. Malheureusement, elle ne le fait pas, et je dois donc déplorer ça au nom des concitoyens et au nom d'une bonne administration publique.

Un autre point, c'est l'imposition des frais de scolarité aux résidents étrangers. Il me reste encore un peu de temps, et je pense qu'il y a des députés ici qui vont me comprendre. Le Québec, traditionnellement parlant, depuis de nombreuses décennies, est reconnu dans la francophonie comme un endroit de haute qualité ou un endroit intéressant pour un grand nombre d'étudiants de pays francophones moins développés ou en voie de développement, par rapport au Québec, pour venir étudier et y envoyer des jeunes, des enfants, pour venir faire leur éducation, ceci au niveau universitaire et maintenant au niveau collégial, et je pense que c'est là une des façons de mettre le Québec – et je vais faire un raccourci linguistique – sur la mappe, parce que, à ces jeunes qui viennent chez nous, deux choses arrivent. Premièrement, nous prenons notre place dans la francophonie, avec ça, dans le monde. Nous sommes un gouvernement, une province qui accueille d'autres personnes et leur permet d'étudier chez nous. C'est de la coopération puis c'est de l'entraide humanitaire, et ça, M. le Président, c'est primordial pour une société comme la nôtre, si elle veut continuer à se développer au niveau international, d'avoir ce genre d'action là. On n'a pas les budgets que notre gouvernement fédéral a pour faire de la coopération, mais on a au moins cet outil-là qui est de faire venir des gens et des jeunes pour qu'ils étudient chez nous, premièrement.

Deuxièmement, M. le Président, lorsque ces jeunes ont étudié, lorsqu'ils ont passé deux ans, trois ans ici, au collège, ils vont, après ça, à l'université, dans la majorité des cas. Lorsqu'ils ont fini leurs études universitaires au Québec et qu'ils retournent chez eux... Une bonne partie y retourne. Certes, certains vont rester, mais, ma foi, pourquoi pas? Mais d'autres retournent chez eux et deviennent les futurs dirigeants de ces pays-là au niveau économique, au niveau social, au niveau culturel, au niveau politique, et c'est là les meilleurs gages de reconnaissance et de respect pour l'avenir du Québec. Lorsque vous avez étudié quelque part, lorsque vous avez été accueilli par un pays ou une province comme le Québec et qu'il vous a permis d'étudier, arrivé d'un pays en voie de développement ou un pays pauvre, eh bien, vous avez une reconnaissance pour longtemps, et ça, c'est bon non seulement pour notre place politique, mais notre place économique dans le monde.

Je vois qu'avec ça la ministre va certainement faire en sorte que des centaines de jeunes qui sont dans des pays pauvres ne pourront plus venir étudier ici à cause de ces frais. Alors, nous demandons, M. le Président, l'opposition officielle demande à la ministre de tenir des audiences publiques sur le projet de loi n° 166. Nous n'avons pas eu réponse, bien sûr. Peut-être va-t-elle répondre plus tard. Moi, j'ai vu, dans d'autres projets de loi, un ministre dire, un beau jour alors qu'on demandait des audiences publiques: Les seuls qui sont contre le projet de loi sont ceux qui ne l'ont pas lu. À la fin, il a fini par accepter des audiences publiques, puis il y a 70 groupes qui sont venus, puis tous les groupes qui étaient intéressés, soi-disant, étaient ceux qui ne l'avaient pas lu.

C'est la même chose pour la ministre. Elle nous dit qu'elle a fait des états généraux, elle va nous dire toutes sortes de choses comme cela. Moi, je lui demande simplement: Tenez donc des audiences publiques ou des audiences restreintes; invitez les groupes qui sont intéressés, les associations étudiantes, les professeurs, les associations d'étudiants étrangers; consultons aussi à l'étranger nos amis de la francophonie pour voir si ça fait leur affaire. M. le Président. Après ça, elle se rendra compte que, là encore, elle peut bonifier son projet, le rendre plus apte. Consultons aussi les gens de l'est de Montréal pour le cégep de Lanaudière et celui de Marie-Victorin, et on verra que la ministre va faire un très bon projet après, si elle les écoute, et ça sera bon pour le Québec, bon pour les finances, bon pour les citoyens. À ce moment-là, M. le Président, nous voterons pour et nous l'accepterons. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de LaFontaine. Mme la ministre de l'Éducation, il vous reste trois minutes, si vous voulez les utiliser pour votre réplique.


Mme Pauline Marois (réplique)

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je suis très consciente qu'il me reste très peu de temps à ce moment-ci, mais évidemment que nous aurons quand même tout le temps nécessaire en commission parlementaire, ce qui me permettra de reprendre une à une certaines des interrogations ou certaines des objections aussi de nos collègues de l'opposition. Mais très brièvement, M. le Président.

D'abord, sur les dernières interventions de nos collègues d'en face, il faut être prudent. Nous avons beaucoup d'ententes, avec une cinquantaine de pays étrangers, des ententes de réciprocité sur les frais de scolarité, et même avec la francophonie, particulièrement au niveau universitaire, et la France, entre autres, où il y a absence de frais de scolarité qui sont payés par les étudiants français qui viennent ici, de la même façon que les étudiants québécois qui vont en France, étant entendu par ailleurs que, chez eux, évidemment, en fait, il n'y a pas de frais de scolarité réellement, mais il reste que nous avons la réciprocité en ce sens qu'il n'y en a pas non plus pour eux. Alors, attention.

Et, par ailleurs, le député de Verdun a souligné le fait que des francophones hors Québec pourraient souhaiter être inscrits dans nos institutions. Attention là encore. Il y a une entente avec le Nouveau-Brunswick, entre autres, où, dans des cours ou des formations qui ne sont pas disponibles au Nouveau-Brunswick lui-même, on peut accueillir, à la hauteur des frais de scolarité, évidemment, qui sont chargés ici et qui sont, de toute façon, je le rappelle à tout le monde, les plus bas par rapport à ce qui se passe ailleurs au Canada... Au Québec, nous avons les frais de scolarité les plus bas au niveau universitaire et, au niveau collégial, qui est considéré de l'enseignement supérieur, ce sont des frais afférents de 110 $ par année. Alors là, je ne sais pas de quoi on parle, évidemment. Donc, je pense que, à cet égard, il faut être de bon compte. Et, si l'Ontario souhaitait avoir une telle entente, j'ouvre la porte sans problème et je suis prête à ce que nous en débattions. Un autre élément que je ne peux passer sous silence. Donc, sur ça, là, je dirais: Un peu d'objectivité et qu'on regarde au moins les faits tels qu'ils sont et à leur face même.

Le deuxième élément, qui est plus majeur à mon point de vue, c'est la question des attestations d'études collégiales, pour lesquelles on pourra charger des frais. Attention. Nous offrons la possibilité aux cégeps de bâtir pour des entreprises, pour des travailleurs et des travailleuses qui voudraient avoir du recyclage dans le cadre, entre autres, de la loi de formation de la main-d'oeuvre, où on doit assurer que 1 % de la masse salariale va être consacré à la formation et au recyclage de sa main-d'oeuvre, nous voulons permettre que des cégeps puissent bâtir sur mesure des attestations d'études collégiales, c'est-à-dire des programmes, dans le fond, qui vont répondre aux besoins de ces personnes, mais, en plus, ces personnes sortiront avec un diplôme.

Cependant, évidemment, on chargera pour ce faire à l'entreprise, ça va de soi. Et l'idée n'est pas de remettre en question ce qui est gratuit actuellement, dans le cas des attestations d'études collégiales, selon les règles déjà établies. On verra ça d'ailleurs d'une façon très précise en commission parlementaire, et je serai très heureuse de recevoir un certain nombre de groupes. Nous verrons à nous entendre sur une liste en ce sens. Merci, M. le Président.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la ministre de l'Éducation. Le principe du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

(18 heures)

Des voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Adopté sur division. Alors, sur ce, nous allons ajourner nos travaux. Excusez-moi une petite minute. Alors, M. le leader, si vous voulez faire une autre proposition, je vous le permets.


Renvoi à la commission de l'éducation

M. Boulerice: Oui. Je vous fais motion que le projet de loi soit déféré à la commission de l'éducation pour étude détaillée.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

M. Gautrin: M. le Président, je pense que normalement, implicitement dans la motion, il était inclus que la ministre fasse partie de la commission pour l'étude détaillée. Je pense qu'il serait souhaitable que cette motion inclue aussi la députée de Terrebonne comme membre pour pouvoir participer...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Gautrin: Non, non. Je suis très sérieux, parce que la députée de Terrebonne étant maintenant membre du Comité exécutif, elle ne peut pas participer à une commission parlementaire sans qu'il y ait un ordre de la Chambre dans ce sens-là. Alors, je suggérerais, M. le Président, que l'ordre de la Chambre inclue et la ministre de l'Éducation et la whip en chef du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Rapidement, M. le leader du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, nous n'allons pas mélanger politique et amour, mais je comprends qu'on ne peut empêcher un coeur d'aimer. Nous ferons tout en notre pouvoir de façon à ce que la whip du gouvernement et députée de Terrebonne soit présente à cette commission pour le bon aise de M. le député de Verdun.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, la motion est donc adoptée, et, sur ce, nous ajournons nos travaux à demain matin, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 2)