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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le vendredi 28 novembre 1997 - Vol. 35 N° 140

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Table des matières

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures deux minutes)

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes et MM. les députés, nous allons nous recueillir quelques instants.

Très bien, si vous voulez vous asseoir.


Affaires courantes

Alors, nous allons aborder immédiatement les affaires courantes.

Déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Prenez en considération l'article a.


Projet de loi n° 181

Le Président: À l'article a du feuilleton, M. le ministre de la Justice présente le projet de loi n° 181, Loi modifiant le Code civil et d'autres dispositions législatives relativement à la publicité des droits personnels et réels mobiliers et à la constitution d'hypothèques mobilières sans dépossession. M. le ministre de la Justice.


M. Serge Ménard

M. Ménard: Merci, M. le Président. Ce projet de loi modifie principalement les règles du Code civil relatives à la publicité des droits mobiliers et aux hypothèques mobilières sans dépossession.

Ainsi, en plus de lever la suspension de l'exigence de publication des réserves de propriété ou facultés de rachat affectant des biens acquis pour le service ou l'exploitation d'une entreprise, ce projet de loi étend l'exigence de publication de ces droits à toute réserve ou faculté portant sur des véhicules routiers ou d'autres biens meubles déterminés par règlement. Il atténue cependant cette exigence à l'égard des personnes qui exploitent une entreprise, de manière que les droits visés puissent, à certaines conditions, être publiés au moyen d'une inscription globale.

Ce projet de loi précise également les règles afférentes à l'exercice, par le vendeur, de son droit de reprise ou sa faculté de rachat, selon que la réserve ou faculté a été publiée ou non; il revoit aussi l'application, en matière de reprise du bien vendu, des règles de la prise en paiement énoncées au livre Des priorités des hypothèques, afin de permettre à celui qui exerce son droit de reprise de bénéficier aussi des autres droits hypothécaires énoncés à ce livre.

Ce projet de loi assujettit par ailleurs à l'exigence de publication tous les droits résultant d'un bail à long terme, dès lors que ce bail porte sur un véhicule routier ou un autre bien meuble déterminés par règlement ou encore sur tout bien meuble requis pour le service ou l'exploitation d'une entreprise, sous réserve, dans ce dernier cas, des biens exclus par règlement. Il introduit également la possibilité, pour un particulier, de consentir des hypothèques sans dépossession sur des véhicules routiers ou d'autres biens meubles déterminés par règlement, et ce, tant au moment de l'acquisition de ces biens qu'ultérieurement.

Ce projet de loi attribue désormais à un officier de la publicité autonome la garde et la gestion du registre des droits personnels et réels mobiliers et il reconnaît, à cette fin, l'existence d'un bureau de la publicité distinct des bureaux fonciers. Il apporte aussi un certain nombre d'autres modifications aux règles du Code civil relatives à la publicité des droits personnels et réels mobiliers.

Enfin, ce projet de loi contient des dispositions transitoires et de concordance.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Oui. Adopté.

Le Président: Adopté. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui. Veuillez prendre en considération l'article b, M. le Président.


Projet de loi n° 179

Le Président: À l'article b de notre feuilleton, M. le ministre de l'Environnement et de la Faune présente le projet de loi n° 179, Loi modifiant de nouveau la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune. M. le ministre de l'Environnement et de la Faune.


M. Paul Bégin

M. Bégin: M. le Président, ce projet de loi modifie de nouveau la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune afin principalement de permettre au ministre de reconnaître une personne morale sans but lucratif pour agir à titre de représentante de l'ensemble des organismes gestionnaires de zones d'exploitation contrôlée ou de l'ensemble de ceux d'entre eux qui gèrent une zone d'exploitation contrôlée appartenant à une ou plusieurs catégories de zones définies par règlement.

Ce projet de loi prévoit également que tout organisme gestionnaire d'une zone d'exploitation contrôlée, pour lequel cette personne morale agit à titre de représentante, doit lui verser, pour contribuer à son financement, une partie des droits qui lui sont dévolus en vertu de cette loi. Cette obligation est applicable pour une période de trois ans et peut être prolongée par le gouvernement. Les conditions et les modalités de versement des droits sont déterminées par règlement du gouvernement.

De plus, ce projet de loi permet au ministre, à des fins scientifiques, éducatives ou de gestion de la faune, de délivrer un permis autorisant une personne à passer outre à une disposition d'un règlement concernant l'aquaculture et le zonage piscicole. Il modifie aussi le pouvoir réglementaire du gouvernement à l'égard des zones d'exploitation contrôlée, des réserves fauniques et des refuges fauniques afin de permettre la variation des droits exigibles pour y circuler ou pour y pratiquer une activité selon la période ou selon la catégorie de permis.


Mise aux voix

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Adopté. M. le leader du gouvernement, à nouveau.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Veuillez prendre en considération l'article c.


Projet de loi n° 183

Le Président: À l'article c du feuilleton, M. le ministre des Affaires municipales présente le projet de loi n° 183, Loi concernant le budget de la Ville de Montréal.


M. Rémy Trudel

M. Trudel: M. le Président, ce projet de loi vise à autoriser la ville de Montréal à adopter, pour l'exercice financier de 1998, un budget dans lequel l'équilibre entre les revenus et les dépenses probables tient compte d'une augmentation anticipée des revenus et d'une diminution anticipée des dépenses, jusqu'à concurrence d'une somme globale de 125 000 000 $.

Si, au cours de cet exercice financier, l'équilibre ne se réalise pas de la manière prévue au budget ainsi adopté, la ville le modifie afin que cet équilibre soit réalisé, M. le Président.

Le Président: L'Assemblée accepte-t-elle d'être saisie de ce projet de loi? Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Oui, M. le Président, est-ce qu'il va y avoir des consultations sur le projet de loi de la mise en tutelle de la ville?

Le Président: M. le ministre.

M. Trudel: M. le Président, nous aurons les discussions habituelles avec l'opposition et nous rendrons notre décision plus tard.

Le Président: M. le leader de l'opposition.

M. Paradis: M. le Président, la question n'est pas tellement complexe, il n'y a pas d'article 69 qui s'applique. Est-ce qu'il va y avoir oui ou non des consultations? Est-ce que le gouvernement en souhaite ou le gouvernement n'en souhaite pas?

Le Président: M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, il n'est pas question pour le moment de faire de consultations autres que les discussions avec l'opposition.


Mise aux voix

Le Président: Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, Mme la ministre de l'Éducation et ministre de la Famille et de l'Enfance.


Rapports annuels du ministère de l'Éducation et de l'Université de Montréal

Mme Marois: Merci, M. le Président. Je dépose les rapports annuels 1996-1997 suivants: celui du ministère de l'Éducation et celui de l'Université de Montréal en trois volumes.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité et ministre responsable de la Condition féminine.


Rapports annuels du Secrétariat à la condition féminine et du ministère de la Sécurité du revenu

Mme Harel: Alors, M. le Président, je dépose les rapports annuels 1996-1997 suivants: le Secrétariat à la condition féminine et le ministère de la Sécurité du revenu.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.


Rapport annuel de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine

M. Rochon: M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine.

(10 h 10)

Le Président: Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission des affaires sociales pour examen

M. Jolivet: Oui, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que, conformément à l'article 392 de la Loi sur les services de santé et les services sociaux, le rapport annuel 1996-1997 de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine soit déféré à la commission des affaires sociales pour étude;

«Que le ministre de la Santé et des Services sociaux soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Président: Cette motion est-elle adoptée? Adoptée. M. le ministre de la Sécurité publique.


Rapport annuel du ministère de la Sécurité publique

M. Bélanger: Oui, M. le Président, je dépose le rapport annuel 1996-1997 du ministère de la Sécurité publique.

Le Président: Alors ce document est déposé.


Dépôt de rapports de commissions

Au dépôt de rapports de commission, Mme la présidente de la commission de l'aménagement du territoire et députée de Mégantic-Compton.


Consultations particulières et étude détaillée du projet de loi n° 160

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport de la commission de l'aménagement du territoire qui a siégé les 25 et 27 novembre 1997 afin de procéder à des consultations particulières ainsi qu'à l'étude détaillée du projet de loi n° 160, Loi modifiant la Loi sur la sécurité dans les sports et d'autres dispositions législatives. La commission a adopté le projet de loi avec amendements.

Le Président: Ce rapport est déposé.


Dépôt de pétitions

Au dépôt de pétitions, M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: Merci, M. le Président. Je demanderais le consentement de la Chambre pour pouvoir déposer une pétition.

Le Président: Alors, il y a consentement, M. le député.


Décréter un moratoire sur le projet d'agrandissement du Foyer de Châteauguay

M. Fournier: Merci beaucoup, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition signée par 1 598 pétitionnaires, citoyennes et citoyens du comté de Châteauguay et 28 dirigeantes et dirigeants représentant des organismes du comté de Châteauguay.

«L'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons au ministère de la Santé et des Services sociaux et à la Régie régionale de la santé et des services sociaux de décréter un moratoire sur le projet d'agrandissement du Foyer de Châteauguay et de tout mettre en oeuvre pour transformer la maison Christ-Roi de Châteauguay en centre d'accueil pour personnes âgées, en récupérant les fonds de 3 700 000 $ déjà accordés au CHSLD Trèfle d'Or, Foyer de Châteauguay.»

Je certifie que cet extrait est conforme au règlement et à l'original de la pétition.

Le Président: Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Cependant, je voudrais vous aviser qu'après la période de questions et de réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion de M. le ministre des Affaires municipales proposant que le principe du projet de loi n° 173, Loi instituant le fonds spécial de financement des activités locales et modifiant la Loi sur la fiscalité municipale, soit adopté.


Questions et réponses orales

Ce qui nous amène maintenant à la période de questions et de réponses orales. M. le député de Chomedey, en principale.


Mandat d'enquête confié à la Commission d'accès à l'information concernant la communication de renseignements personnels au cabinet du premier ministre

M. Mulcair: Merci, M. le Président. Hier, en cette Chambre, l'opposition a soulevé la question de l'effet des règles de silence des lois fiscales sur l'enquête putative de la Commission d'accès à l'information concernant la fuite de renseignements au bureau du premier ministre.

Aujourd'hui, fort de l'analyse des journalistes et de nombreux avis d'experts, on peut lire les titres suivants dans les journaux: dans Le Devoir , Le processus d'enquête pourrait être entravé ; dans La Presse , Renseignements fiscaux, le résultat de l'enquête restera confidentiel ; dans le Journal de Québec , La loi sur le revenu met des bâtons dans les roues ; et, dans Le Soleil , La loi du silence ; finalement, dans la Gazette , Infogate .

M. le Président, face à la loi, face à ces analyses et ces avis, est-ce que le premier ministre peut enfin nous dire s'il est sérieux quand il prétend qu'il veut faire toute la lumière sur cette histoire? Et, si oui, qu'est-ce qu'il attend pour ordonner une enquête policière ou pour convoquer une commission de l'Assemblée nationale?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on nous cite des titres de journaux comme étant des analyses juridiques sur lesquelles il faudrait se baser pour connaître l'état du droit dans cette question. Le gouvernement, en ce qui le concerne – et j'ai vérifié des choses moi-même, j'ai regardé les textes, etc. – considère que la Commission a pleine latitude pour procéder à l'enquête qui lui a été confiée.

Premièrement, l'article 69 ne fait aucunement obstacle à la juridiction de la Commission d'accès à l'information dans la conduite de ses enquêtes. La Cour d'appel en a décidé ainsi dans l'affaire Constantinescu, en 1990, à l'occasion d'un conflit qui avait eu lieu, soulevé par un contribuable. De plus, l'article sur lequel on se fonde pour lancer la paranoïa d'hier réfère à des cas de procédures judiciaires, ce qui n'est pas le cas ici. On n'est pas dans le contexte d'une procédure judiciaire; on est dans le contexte d'une enquête qui est faite sous la juridiction de la Commission d'accès, et c'est au coeur de ses propres pouvoirs, de sa propre latitude déterminée par sa propre loi que la Commission agira. Elle n'est pas liée par d'autres lois, M. le Président.

Ça ne veut pas dire qu'elle n'est pas astreinte, elle aussi, à protéger la vie privée et les renseignements personnels; ça veut dire ceci: la Commission est appelée à statuer sur la véracité d'allégations de comportements dérogatoires. Elle va entendre tous les témoins. Elle pourra assigner, tel qu'il se doit, en vertu de sa loi, la ministre du Revenu et les autres ministres du Revenu, les ministres concernés si jamais il y a matière à le faire, les fonctionnaires, les entendre, elle pourra avoir accès à tous les renseignements des dossiers confidentiels, et ensuite elle va se faire une opinion, cette Commission – c'est elle qui est la mieux placée pour le faire parce qu'elle a l'expertise – pour savoir s'il y a eu des comportements dérogatoires. S'il y en a eu, M. le Président, elle a pleine latitude – et c'est ce qu'elle fera, j'en suis convaincu, le cas échéant – pour identifier publiquement, et décrire publiquement les comportements dérogatoires, et publier également, diffuser publiquement l'identité des auteurs, dans ce cas échéant, de comportements dérogatoires, et même annoncer les pénalités ou reproches qu'elle pourrait vouloir adresser. Alors, c'est ça, l'état du droit.

Deuxièmement, je voudrais rectifier une affirmation vraiment qui a échappé au leader de l'opposition. Je suis convaincu que c'est parce qu'il n'avait pas analysé la loi, puisqu'il l'a affirmé de façon un peu rapide. Il était pressé de faire sa période de questions, M. le Président. Mais on nous a dit que, l'an dernier, au mois de juin, nous avions modifié l'article 69 de façon telle qu'il soit encore plus restreint pour empêcher la Commission de faire son travail. C'est le contraire. Les amendements qui ont été apportés à 69, en juin 1996, c'était pour les assouplir, c'était pour permettre à un arbitre de griefs de convoquer un fonctionnaire du Revenu dans le cas d'un conflit disciplinaire. C'était pour permettre à un contribuable d'avoir accès à son propre dossier pour ses propres renseignements.

Alors, M. le Président, de grâce, l'affaire est complexe, l'affaire est délicate. Je demanderais à l'opposition de cesser de susciter des analyses journalistiques sur le droit. Le fait est que j'affirme que les ministres concernés, moi-même, les fonctionnaires, s'ils sont assignés, vont aller témoigner. La Commission aura tous les pouvoirs pour aller au coeur des renseignements et elle pourra publiquement dévoiler s'il y a eu ou pas des comportements dérogatoires et identifier les gens. Voilà!

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Est-ce que le premier ministre peut nous expliquer comment il se fait qu'il y a non seulement les avis des très nombreux experts qui disent que l'article 69 s'applique et peut étouffer l'affaire, mais que, hier en Chambre, lui-même a expliqué que l'article 69 portait des limites à ce qui pouvait être rendu public, qu'en dehors de la Chambre, son Procureur général a dit la même chose et qu'ici, en Chambre, la ministre déléguée au Revenu, le ministère même qui est en question, a invoqué, a plaidé l'article 69 pour ne pas en parler en Chambre? Alors, comment ça se fait que, hier, l'article 69 était un empêchement au dire même de son gouvernement et qu'aujourd'hui ce n'est pas si grave que ça? Quand est-ce qu'il dit la vérité, le premier ministre?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, dans la mesure de mes lumières d'avocat, un peu anciennes maintenant, après avoir consulté également autour de moi, je viens de mentionner à la Chambre que la Cour d'appel s'est déjà penchée sur la question en 1990 et que l'examen de 69 et de cette jurisprudence indique clairement – c'est ce que pensent également les gens du ministère du Revenu, puis ils vont coopérer complètement à l'enquête – que la Commission d'accès à l'information est une instance qui a été investie de pouvoirs tout à fait spéciaux. C'est pour ça que nous l'avons nommée. C'est elle qui a le plus de pouvoirs pour aller au fond des choses, M. le Président, parce qu'elle peut se considérer non liée par 69; elle est liée par ses propres dispositions à elle, qui lui permettent de faire l'enquête.

Et puis on nous a cité des experts qui ne sont pas nommés. Je les respecte. Vous savez que j'ai pratiqué le droit pendant 22 ans. J'ai affronté tout le temps, chaque jour, des avocats qui pensaient le contraire de moi. Il y a autant d'opinions que d'avocats. Le gouvernement vient de faire son lit par rapport à cela, M. le Président. Il coopérera totalement à l'enquête. Les gens sauront si, oui ou non, il y a eu des comportements dérogatoires parce que tous les témoins idoines auront été interrogés sous serment. Ils sauront qui, le cas échéant. Voilà, M. le Président, il me semble que c'est clair.

Le Président: M. le député.

(10 h 20)

M. Mulcair: M. le Président, est-ce que le premier ministre est conscient qu'en invoquant les jugements de la Cour d'appel tout ce qu'il est en train de faire, c'est de confirmer que, dans le meilleur des cas, il faut s'attendre à une interminable chicane d'avocats? Et, par le fait même, n'est-il pas en train d'avouer que sa stratégie va avoir fonctionné et que la population ne saura jamais la vérité sur ce qui s'est passé à son bureau parce que l'affaire va être bloquée devant les tribunaux au moins jusqu'aux prochaines élections?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: C'est au moins ce qu'on appelle prêter des intentions, M. le Président. Mais pourquoi ne pas laisser à la Commission la possibilité d'entreprendre ses travaux immédiatement? Elle veut terminer pour les Fêtes, nous allons tous coopérer. Nous n'allons pas soulever ces questions d'avocasseries qu'on nous prête; nous allons respecter le grand principe de la latitude totale de la Commission d'accès à l'information de faire des enquêtes en protégeant la vie privée.

Est-ce que l'opposition est en train de nous dire qu'elle voudrait qu'il y ait une enquête qui dévoile sur la place publique tous les renseignements confidentiels des contribuables? Il n'en est pas question, M. le Président. Personne ne peut le faire. Il n'est du ressort de personne de faire cela. Nous avons l'article 3 du Code civil qu'on a adopté ici il y a quatre ans, nous avons les articles 4 et 5 de la Charte des droits, nous avons la loi d'accès à l'information, nous avons de multiples dispositions dans nos lois, adoptées par cette Assemblée même, qu'elle-même ne saurait violer. Il faut respecter le secret privé, il faut protéger la vie privée. Mais cependant nous avons le moyen tout à fait spécial déterminé par cette Commission qui a des pouvoirs tout à fait spécifiques qui lui permettent d'aller au fond des choses, de nous faire rapport, de nous dire ce qu'il en est.

Le Président: M. le député.

M. Mulcair: Est-ce que le premier ministre peut nous expliquer comment ça se fait que la vie privée et le secret fiscal deviennent des grands principes à défendre lorsque ça vient le temps de défendre ses ministres, ses fonctionnaires, ses sous-ministres et les gens de son cabinet, mais pas quand c'est le temps de protéger le contribuable, pour protéger le public? Pourquoi on protège plus les ministres et les fonctionnaires que les membres du public? Pourquoi leur secret est plus important que le secret de tout le monde, M. le Président?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on protège tout le monde. Ce qui est protégé là-dedans, ce n'est pas les ministres, puis les fonctionnaires, puis les gens dont les noms sont mentionnés; ce qui est protégé, c'est les renseignements privés que des contribuables ont confiés à l'État. Ça, c'est fondamental. Il n'est du ressort de personne ni même de cette Assemblée d'aller à l'encontre de ces dispositions de nos lois, c'est fondamental.

Pour le reste, nous avons une commission qui, elle, a non seulement la juridiction totale pour aller au fond des choses, mais qui en plus a l'expertise pour déterminer ce qui est de nature publique, ce qui est de nature privée et pour pouvoir ensuite nous dire: Oui ou non, il y a eu des comportements dérogatoires, c'est X ou Y qui en sont responsables. Elle pourra les blâmer, elle pourra proposer des pénalités, mais ce qui ne sera pas divulgué, ce sont les informations confidentielles qui auront fait l'objet de ces comportements dérogatoires. Et personne ne les veut, ces renseignements-là. Ce qu'on veut savoir, c'est: Est-ce qu'il y a eu ou non dérogation? On le saura. Et, si oui, par qui.

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, en principale.


Politique de recouvrement de factures impayées à Hydro-Québec

Mme Frulla: Merci, M. le Président. Après les coupures dans les hôpitaux, dans l'éducation, dans l'aide sociale, voilà qu'on coupe le courant. La famille Lachance réside dans le comté de Labelle. Elle a dû affronter le géant Hydro-Québec pour rembourser des arrérages de factures. Selon La Presse , la famille Lachance est pauvre, archi- pauvre. Ils vivent à cinq, père, mère et trois enfants, avec un revenu annuel de 15 072 $, soit 1 256 $ par mois. Oui, le père veut travailler, mais il ne trouve pas d'emploi. La mère, quant à elle, a été hospitalisée plusieurs mois suite à une opération pour un cancer. Véritablement harcelée, elle cherche de l'aide partout pour réussir à payer sa facture d'Hydro-Québec. Elle va jusqu'à téléphoner à son député, président du Conseil du trésor, qui, lui, ne retourne jamais l'appel.

Quant à Hydro-Québec, par la bouche de Mme Andrée Milord, chef du recouvrement, on lui dit d'aller à Jeunesse au soleil pour économiser sur la nourriture afin de payer sa dette. De l'aveu même du chef des plaintes et réclamations, M. René Boily, «Hydro-Québec a des critères de rentabilité à respecter, c'est une exigence de notre actionnaire unique, soit le gouvernement du Québec».

Question, M. le Président. Ma question au ministre responsable d'Hydro-Québec: Combien de familles vivant d'aide sociale ont été forcées d'accepter la proposition d'Hydro-Québec... Aïe! On parle de familles pauvres et démunies, ici, là.

Le Président: Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Ma question au ministre responsable d'Hydro-Québec: Combien de familles vivant d'aide sociale ont été forcées d'accepter la proposition d'Hydro-Québec, une société qui versera dans les cinq prochaines années au gouvernement des dividendes de l'ordre de 3 300 000 000 $, qui est en voie de réaliser cette année un bénéfice net de 760 000 000 $, combien de ces familles ont été obligées d'accepter la proposition de cette société sous la menace d'une coupure de courant?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, je m'attendais à cette question il y a à peu près 10 jours, puisque, le 17 novembre dernier, moi aussi, j'apprenais ce cas, ce cas pénible, puisque la famille Lachance a un solde fort important avec Hydro-Québec. Il y avait des ententes de paiement, et je ne veux pas déposer à la Chambre, cependant, ces renseignements-là, puisqu'il y a eu beaucoup de téléphones de faits de la part d'Hydro pour entrer en communication avec Mme Lachance; Malheureusement, ils ne se sont pas rejoints. J'ignore les motifs. Je peux vous donner les heures, les moments où Hydro-Québec a tenté vraiment, véritablement de rejoindre et négocier une nouvelle entente avec Mme Lachance.

Vous savez très, très bien que cette politique qu'applique Hydro-Québec est la politique qui a été mise de l'avant par le député de Laurier-Dorion au moment où il était ministre de l'Énergie. Depuis lors, elle n'a pas été modifiée. Hydro-Québec a des consignes, des directives précises, comme tenir compte des températures, du degré de pauvreté des couples, de la personne, et c'est ce qu'Hydro-Québec fait. Et, dans le cas de Mme Lachance, même si c'est sorti publiquement, je peux vous dire une chose, il me fera plaisir, moi, de vous remettre exactement ce qui avait été payé, comment ils s'étaient entendus et quels sont les téléphones qui ont été faits pour en arriver à une nouvelle entente. Mais je pense qu'Hydro-Québec agit de cette façon-ci, et ce, depuis au moins quatre ou cinq ans.

Le Président: Mme la députée.

Mme Frulla: Je reviens à ma question initiale, M. le Président: Combien de cas similaires de familles d'assistés sociaux ont été littéralement harcelées, dans certains cas, comme celui de Mme Lachance – ce qu'on lit, là, dans La Presse – par Hydro-Québec pour payer leurs factures? On parle aussi de frais; la moitié de la facture, ce sont des frais d'administration, d'ailleurs, d'Hydro-Québec, et non pas seulement des frais d'électricité. Il y en a combien, de cas, M. le Président, de ces familles qui sont harcelées par Hydro-Québec sous peine de se voir couper le courant? On sait qu'il ne fait pas chaud, là, ça fait que ce n'est drôle pour personne.

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, je ne comprends pas que la députée de Marguerite-Bourgeoys puisse dire qu'il y a harcèlement. Si elle a des preuves de harcèlement, qu'elle nous le dise au plus vite. Parce que c'est exactement la politique de son gouvernement que l'on applique et avec laquelle j'étais d'accord, d'ailleurs, à ce moment-là.

Je vous dirai cependant qu'il y a une entente de signée entre Mme Lachance, par exemple, puis le MSR, le ministère de la Sécurité du revenu, qui date du 2 mai 1994, entente qui n'a pas pu être respectée, et c'est pour ça qu'Hydro-Québec voulait à nouveau avoir une entente avec Mme Lachance, qu'ils n'ont pas pu rejoindre à ce moment-ci. Plutôt que de parler de harcèlement et porter un jugement qui généralise sur l'ensemble des employés d'Hydro-Québec, si on a un cas précis, qu'on nous le donne et on va y donner suite. Mais cessons de discréditer les 22 000 employés d'Hydro-Québec.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en principale.


Coupure de courant pour factures impayées à Hydro-Québec

M. Copeman: Merci, M. le Président. Un autre cas, semble-t-il, isolé, très pénible. En parlant de ces cas pénibles, une mère monoparentale désespérée et ses cinq enfants qui demeurent dans la région de Laval ont failli périr dans la nuit de mercredi à jeudi parce que la société d'État Hydro-Québec, qui, M. le Président, en passant, a fait des profits de 760 000 000 $, a coupé l'électricité à cette famille monoparentale.

(10 h 30)

Le premier ministre est-il conscient que, pour percevoir à peu près 1 000 $, le geste de la société Hydro-Québec a mis en danger la vie de Mme Hyppolite et de ses cinq enfants pendant que le ministère de la Santé a dépensé, lui, à peu près des milliers de dollars pour sauver leur vie? C'est complètement indécent, M. le Président.

Le Président: Mme la ministre d'État de l'Emploi et de la Solidarité.

Mme Harel: Alors, M. le Président, j'aimerais rappeler au député de Notre-Dame-de-Grâce et aux membres de cette Assemblée que c'est en 1990 qu'Hydro-Québec concluait avec le ministère de la Sécurité du revenu une entente par laquelle le ministère de la Sécurité du revenu déposait mensuellement dans un compte bancaire appartenant aux prestataires le montant de l'entente préalablement négociée avec Hydro-Québec. Alors, le versement mensuel était constitué à la fois de la consommation courante et d'un montant maximum de 56 $ applicable sur les arrérages accumulés, avec absence de frais d'administration. Voilà l'entente de départ, M. le Président.

En cas de défaut du prestataire de satisfaire cette entente, il y avait, à ce moment-là, dès 1990, interruption de service.

Je voudrais rappeler, d'abord, à l'égard de la famille dont nous a parlé la députée de Marguerite-Bourgeoys, que j'ai demandé au centre Travail-Québec de sa localité d'intervenir immédiatement pour évaluer comment il se fait que le compte courant mensuel est de 160 $ et pour en tenir compte, en vertu du pouvoir discrétionnaire qui m'est donné comme responsable de la sécurité du revenu, dans l'évaluation, dans le barème, de la portion logement. Je comprends, avec les informations que j'ai, que c'est déjà réalisé. Donc, cette famille bénéficie présentement d'une augmentation mensuelle du chèque d'aide sociale pour tenir compte justement du compte courant qui est vraiment trop élevé. Il y a un problème d'isolation, définitivement.

En ce qui concerne la famille dont le député de Notre-Dame-de-Grâce vient de nous parler, M. le Président, je vais prendre avis de la question. Je n'étais pas au courant.

Le Président: En principale, M. le député de Saint-Laurent.


Attitude d'Hydro-Québec à l'endroit des mauvais payeurs

M. Cherry: Oui, merci, M. le Président. Un autre cas à Laval. Selon le journaliste du journal La Presse , Michel Girard, les pages économiques, dans une entrevue à l'émission Bon matin , une famille vivant d'aide sociale avait, elle aussi, des problèmes avec Hydro-Québec. Elle a offert de majorer son arrérage de 50 $ par mois, alors que le revenu mensuel de cette famille est de 695 $ et que le loyer est de 395 $. Hydro-Québec exigeait, elle, une somme additionnelle de 146 $ par mois. Comme le couple se voit dans l'impossibilité d'accepter – il lui aurait resté 50 $ par mois pour s'habiller, pour vivre – Hydro-Québec a coupé l'électricité, et ce couple est demeuré un mois et demi sans électricité.

La propriétaire décide d'intervenir auprès d'Hydro-Québec, et, toujours selon le journaliste, Hydro-Québec répond, et je cite: «Si vous voulez qu'on rebranche l'appartement, vous allez mettre dehors le couple d'assistés sociaux.» La propriétaire refuse et, dans un geste de solidarité et de compassion, elle décide, avec une extension, de fournir de l'électricité pour qu'au moins le couple puisse brancher son frigo pour sauver la nourriture qui lui reste. Quand Hydro-Québec apprend cela, M. le Président, Hydro-Québec menace la propriétaire de lui couper, à elle, l'électricité. Le dépanneur du coin écrit une lettre au premier ministre lui rappelant les cas que je viens de citer, et ça ne donne rien.

Ma question au premier ministre – j'offre au premier ministre aujourd'hui de répondre à la question, ce qu'il n'a pas daigner faire par écrit: Qu'a à dire le premier ministre sur le système de menaces et de chantage qu'exerce Hydro-Québec?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, il n'y a personne qui ne réalise pas qu'il peut s'agir là d'un cas tout à fait émouvant et qui requiert certainement, en tout cas, une enquête. Je ne veux pas croire que les gens d'Hydro-Québec aient émis des menaces de cette nature. Mais nous allons vérifier, M. le Président, nous saurons ce qui en est, et le ministre va agir avec diligence et il reviendra rapidement avec des réponses.

Le Président: En principale, M. le député de Saint-Laurent.


Mandat d'initiative de la commission de l'économie et du travail afin d'étudier l'attitude d'Hydro-Québec à l'endroit des mauvais payeurs

M. Cherry: En principale M. le Président, oui. M. le Président, je siège en cette Chambre, je suis au début de ma neuvième année, et je pense pouvoir dire que je connais bien les hommes et les femmes qui la composent. Et je pense que je peux dire que je connais bien les gens qui siègent à la commission de l'économie et du travail, qui sont capables de compassion puis de solidarité.

Le premier ministre pourrait-il demander à ses députés qui siègent à cette commission d'abandonner la ligne de parti pour que nous puissions ensemble trouver une solution à ce problème criant afin que les familles et l'ensemble des Québécois, on puisse savoir que nous avons agi face à l'insensibilité, à la cruauté d'Hydro-Québec et que toute la population du Québec, ensemble, on puisse passer des fêtes en étant assurés, O.K., que, au Québec, il n'y a pas une famille qui va souffrir à cause de l'insensibilité d'Hydro-Québec? Est-ce que le premier ministre est capable de faire ce geste-là?

Le Président: M. le ministre d'État des Ressources naturelles.

M. Chevrette: M. le Président, tout d'abord, chaque commission parlementaire est complètement autonome, et elle peut très, très bien, sans aucune contrainte de quelque nature que ce soit, siéger et se pencher sur un problème particulier. Et jamais je ne m'y objecterai, puisque que j'étais à l'origine même de ce changement au niveau parlementaire.

Deuxième chose, cependant, M. le Président. Je ne voudrais quand même pas aujourd'hui, devant un cas pathétique, je n'en disconviens pas, qu'on généralise à l'ensemble d'Hydro-Québec parce que, annuellement, il y a des gestes de compassion, précisément, pour ces gens-là. On radie annuellement pour 30 000 000 $ de comptes d'électricité. Il ne faut tout de même pas dire qu'il y a des choses farfelues qui se font partout! Si, chaque année, Hydro-Québec, donc l'ensemble des Québécois et des Québécoises, consent à radier des sommes de l'ordre de 30 000 000 $, c'est parce qu'il y a de la compassion à quelque part, M. le Président.

Le Président: M. le député de Nelligan, en principale.


Indemnisation des victimes du sang contaminé

M. Williams: Merci, M. le Président. Le rapport Krever a été rendu public récemment. C'est un rapport qui touche plusieurs milliers de victimes. Notre société compatit avec ces victimes. Le rapport Krever fait plusieurs recommandations, spécifiquement pour les victimes du sang contaminé. Le rapport Krever parle particulièrement de l'indemnisation des victimes. Il parle aussi d'un système intégré pancanadien, parce que nous n'avons pas le droit de faire la même erreur que dans le passé. Le rapport Krever recommande aussi la vérification indépendante pour s'assurer que le système marche bien. Il demande aussi d'avoir assez de ressources pour s'assurer que le système marche bien et aussi que le système est bel et bien protégé. M. le Président, c'est un rapport tellement substantiel. Mais nous avons appris que le ministre de la Santé a décidé de ne pas indemniser les victimes.

La question, M. le Président, est pour le premier ministre: Est-ce que le premier ministre endosse la réaction technocratique et légaliste de son ministre de la Santé envers les victimes?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, la façon dont la question est posée est complètement inexacte, pour dire le moins, par rapport à la situation. En ce qui regarde l'indemnisation des victimes, il y a trois situations. Les gens qui ont été contaminés par le virus du sida, dans toutes les provinces, sont présentement indemnisées. Les provinces ont convenu, il y a quelques années, d'un fonds d'indemnisation, et il y a plusieurs millions de dollars par année qui y sont consacrés dans chacune des provinces, et les gens sont tous indemnisés.

(10 h 40)

Les gens qui ont contracté l'hépatite C, la question a été déjà soulevée à une conférence entre les ministres des provinces il y a entre six mois et un an, et c'est une question que l'ensemble des ministres ont convenu d'examiner. Il y a déjà, au ministère de la Santé et des Services sociaux, une équipe qui la regarde, parce que la situation est différente quant aux possibilités et aux façons de retrouver les gens qui peuvent avoir eu une contamination et avoir aussi développé une maladie.

Alors, il y a déjà des gens qui travaillent là-dessus pour voir comment, dans le cas de l'hépatite C, un régime d'indemnisation de ceux qui auraient été contaminés et qui auraient déclenché une hépatite... comment ils pourraient être indemnisés. On va voir où ça va nous mener pour voir s'il y a une possibilité. Parce que, dans ces deux cas-là, ce qui est accepté et compris de tout le monde, c'est que des gens qui ont eu des services de santé et qui, en ayant des services de santé... il y a un incident qui a créé un autre problème, ça nous interpelle directement, ça ne peut laisser personne indifférent et on ne peut pas laisser ces gens-là à eux-mêmes. Il faut trouver un moyen de voir comment ils peuvent être aidés dans cette situation-là. Donc, ça, c'est en cours. Et on a, au contraire, plutôt dit toujours qu'il faut trouver une solution à ça.

Le dernier élément dans les questions qui ont été posées, c'est, et le juge Krever mentionne cette question-là: Est-ce qu'on devra aller vers un système de responsabilité sans faute pour les problèmes qui sont posés quand des gens ont des problèmes de santé? Et le juge Krever dit lui-même dans son rapport qu'il soulève cette question, qu'il réalise qu'il y a beaucoup d'implications pour lesquelles il n'a pas mandat d'aller plus loin et d'examiner. Et notre réaction là-dessus, c'est que c'est quelque chose que, ça aussi, on va regarder pour voir: Qu'est-ce que ça a comme implications? Et est-ce que c'est une évolution dans l'avenir qu'il faudrait considérer? Voilà les faits, M. le Président, tels qu'ils sont vraiment. Merci.

Le Président: En complémentaire, M. le député.

M. Williams: Les victimes veulent avoir une réponse, pas une réponse de technocrate.

Ma question est fort simple et c'est au premier ministre: Est-ce que vous allez indemniser les victimes directement ou indirectement touchées par le sang contaminé? Est-ce que vous allez donner des compensations? Je ne veux pas avoir une réponse de technocrate. Oui ou non, est-ce que vous allez donner une indemnisation aux victimes? S'il vous plaît, une réponse. Oui ou non? Oui ou non?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, je crois qu'il faudrait souhaiter que, traitant de cette question si pathétique, si tragique, parce qu'il y a une tragédie là pour des milliers et des milliers de familles et d'individus, on adopte le ton qu'on vient d'adopter. Le ministre a donné une réponse très sensible, je dirais, très humaniste. Il a répondu que le gouvernement déjà avait mis en place des processus d'indemnisation mais qu'il allait envisager d'en mettre d'autres en place, qu'il fallait analyser ça avec prudence, avec sérieux. Nous sommes prêts à le regarder. Nous sommes prêts même à consulter l'opposition sur une motion, parce que je sais que le chef de l'opposition lui-même m'a informé qu'il souhaitait en présenter une. Je lui ai dit que j'étais d'accord sur le principe qu'on fasse une motion. Il s'agirait de s'entendre dans sa formulation pour qu'elle s'aligne en gros sur ce que vient de dire le ministre.

Donc, au plan des principes, nous sommes tout à fait disposés. Et ce gouvernement est aussi sensible que l'opposition à la question, et celui qui vous parle également. Quelqu'un qui a eu son sang changé deux fois et qui doit sa vie à cela est conscient de ces questions.

Le Président: Mme la députée de Bourassa, en principale.


Décès d'une personne âgée dans une maison d'hébergement privée

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, le 15 août 1995, les quatre filles de Mme Jeannette Allard Levert dénonçaient au ministre de la Santé les circonstances épouvantables entourant le décès de leur mère qui était hébergée dans un foyer pour personnes autonomes et qui est décédée avec d'énormes plaies ulcérées allant jusqu'à l'os. Et, avec la permission de la famille, j'aimerais déposer la photocopie des photographies des plaies de Mme Allard.

M. le Président, au terme d'une rencontre d'une heure et demie avec le ministre, les filles de Mme Levert l'imploraient d'agir pour éviter et s'assurer qu'il n'y ait plus d'autres victimes d'un manque de soins comme Mme Levert. M. le Président, le ministre de la Santé avait alors assuré la famille qu'il accorderait au dossier des ressources d'hébergement qui opèrent dans l'illégalité sans permis toute l'attention que ce dossier méritait. Plus de deux ans après, soit le 28 octobre 1997, encore une fois, la famille Levert le relançait, car il n'a toujours pas agi dans ce dossier ni même donné de réponse à la famille Levert.

Question: M. le Président, le ministre peut-il dire à cette Chambre, à la famille Levert et surtout à toute la population québécoise si son inaction repose sur sa conviction profonde qu'il n'y a plus de foyers clandestins et que des cas comme celui de Mme Levert, il n'y en a plus au Québec?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Rochon: Alors, M. le Président, je me rappelle très bien de cette rencontre et de l'échange que j'avais eu avec les filles de Mme Levert, et c'était effectivement une situation très pathétique et un ensemble de circonstances qui avaient été très malheureuses pour leur mère et pour toute la famille. Mais, depuis ce temps-là, il s'est passé pas mal de choses.

La principale voie d'action jusqu'à maintenant qui a été prise par le ministère et dans toutes les régions, ça a été de créer un lien beaucoup plus direct entre les CLSC, qui sont responsables du programme de maintien à domicile, et dans beaucoup d'endroits avec une étroite collaboration avec les municipalités qui donnent des permis pour des résidences privées – c'est de ça qu'il s'agit – qui veulent offrir du logement et de l'hébergement à des gens... Et le lien étant fait, les CLSC connaissent où sont les gens sur leur territoire et offrent partout des services de maintien à domicile pour s'assurer que, si les gens dans ces résidences ont besoin de soins, ils les aient et que, si l'état d'une personne en arrive à un moment à un point où on ne peut plus continuer à donner des soins à domicile, le CLSC, qui est maintenant responsable partout des soins de longue durée, quant à leur admission, voit à la continuité des soins dans un établissement de longue durée. Et ça, ça se fait de plus en plus, de façon partout au Québec.

Et d'ailleurs, c'est assez remarquable de voir qu'on n'est jamais à l'abri de quelque chose, d'une situation qui pourrait passer à travers les mailles d'un filet de sécurité. On n'est jamais à l'abri de ça. Mais il reste que la situation s'est assez améliorée partout, c'est ce que j'en ai, et c'est un peu pourquoi... On ne ramène pas une situation qui se présente présentement, mais on est obligé, pour maintenir cette petite approche d'insécurisation un peu démagogique, de ressortir un cas, une situation qui s'est présentée il y a deux ans. Il y a deux ans, M. le Président, on est intervenu, on a travaillé avec la famille, on est intervenu sur le terrain, et il y a une bonne amélioration depuis ce temps-là. Alors, c'est faux de dire que rien ne s'est fait. Je pense que ça devient un peu terrible qu'on ressorte des situations malheureuses, qu'on exhibe, d'il y a deux ans, sans tenir compte de tout ce qui s'est fait depuis ce temps-là. Et on en voit beaucoup moins, de toute façon, pas d'aussi graves qui se sont présentées depuis tout ce temps-là, M. le Président. On...

Le Président: Mme la députée.

Mme Lamquin-Éthier: M. le Président, le ministre de la Santé peut-il répondre à ma question? Peut-il nous dire si son inaction repose sur sa conviction profonde qu'il n'y a plus aujourd'hui de foyers clandestins et que des cas comme celui de Mme Levert n'existent plus ou n'existeront plus au Québec?

Le Président: M. le ministre.

M. Rochon: Je ne sais pas ce que la députée veut dire par des foyers clandestins. Est-ce que quelqu'un qui offre des places en résidence privée, avec un permis qu'il obtient de la municipalité, et qui reçoit des gens et leur offre le logement, le gîte et le couvert, qui se tient en lien avec le CLSC parce que c'est la responsabilisation de ces gens-là... Est-ce qu'on peut appeler ça un foyer clandestin? Il faudrait que la députée nous définisse ce qu'elle veut dire par des foyers clandestins. Et, si elle en connaît, un type de foyer comme ça, ça aurait peut-être été bon qu'elle nous en parle puis qu'elle nous aide un peu à voir comment on peut corriger cette situation-là.

(10 h 50)

Moi, ce que je vous dis, c'est que globalement, dans le maintien à domicile, il y a eu une augmentation d'à peu près 20 % des budgets qu'on met là-dedans, que les CLSC sont beaucoup plus présents et que dans toute la mesure du possible, avec la collaboration de la communauté, peu importe où habitent les gens – peu importe où ils habitent – ils ont les soins dont ils ont besoin à domicile. Et, quand ils ne peuvent plus les avoir là de façon satisfaisante à cause de leur état de santé, les listes d'attente sont de moins en moins longues pour que le transfert de la personne se fasse dans un établissement de soins de longue durée. C'est ça qui est la situation, M. le Président.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, en principale.


Indexation des prestations de la sécurité du revenu

M. Copeman: M. le Président, depuis trois ans, tous les Québécois constatent la progression, de façon très frappante, de la pauvreté au Québec. Rappelons que 20 % de la population québécoise vit sous le seuil de faibles revenus, dont plusieurs centaines de milliers dans la misère. Rappelons également, M. le Président, l'augmentation foudroyante de l'utilisation des banques alimentaires ou des repas communautaires partout au Québec.

À la veille d'un conseil national d'un parti soi-disant social-démocrate, est-ce que le président du Parti québécois peut nous dire si son gouvernement a l'intention d'indexer les prestations d'aide sociale à tous les prestataires de la sécurité du revenu à partir du 1er janvier prochain?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, en effet, notre grand parti tiendra un conseil national en fin de semaine. Et je voudrais dire aux libéraux que le Parti québécois n'a jamais attendu les libéraux pour être social-démocrate, pour faire des choses correctes pour les gens qui ont des besoins au Québec. Et, M. le Président, en effet, il y a des résolutions de compassion qui sont présentées au conseil national. Nous en débattrons. Le gouvernement va écouter d'une oreille attentive et positive les remarques qui lui seront adressées et les propositions qui lui seront faites.

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le député.

M. Copeman: M. le Président, semble-t-il que le premier ministre a oublié la différence entre...

Le Président: Et je pense que vous avez oublié les dispositions du règlement qui ne vous permettent pas de faire cela. M. le député.

M. Copeman: M. le Président, est-ce que le premier ministre a au moins l'intention de tenir sa promesse – sa promesse à lui, de son gouvernement; pas de son parti, là, de son gouvernement – et son engagement pris lors du dernier Sommet socioéconomique concernant la clause d'appauvrissement zéro et d'accorder l'indexation aux 106 000 ménages prestataires de soutien financier en date du 1er janvier prochain? Ça, c'est un engagement, M. le Président.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: On nous demande si le gouvernement va tenir cet engagement particulier? Oui, M. le Président, comme tous ceux qu'il prend.

Le Président: M. le député.

M. Copeman: M. le Président, en additionnelle, est-ce que le premier ministre, qui, semble-t-il, va tenir cet engagement, peut nous dire la date du décret? Il faut passer un décret, là. J'apprends quelque chose au premier ministre, là. Mais il faut adopter un décret.

Deuxièmement, M. le Président, vu l'urgence de la situation de la pauvreté au Québec, est-ce que le premier ministre va accepter de rencontrer la Coalition nationale sur l'aide sociale avant le dépôt du projet de loi sur la réforme de l'aide sociale?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Bouchard: M. le Président, on nous demande à quelle date va entrer en vigueur la mesure dont on parle et qui a fait l'objet de l'engagement. Elle va entrer en vigueur à la date qui a fait l'objet de l'engagement, le 1er janvier.

Le Président: M. le député de Marquette, en principale.


Opposition de militants souverainistes à l'apprentissage de l'anglais à l'école primaire

M. Ouimet: En principale, M. le Président. Des succursales du Parti québécois, dont la Société Saint-Jean-Baptiste, veulent empêcher... Je vais répéter pour le bénéfice du premier ministre. Des succursales du Parti québécois, dont la Société Saint-Jean-Baptiste, veulent empêcher nos jeunes Québécois et Québécoises d'apprendre l'anglais au primaire, et ce, au nom de la cause souverainiste. Le débat aura lieu au Conseil national du Parti québécois en fin de semaine. Pourtant, tous reconnaissent, sauf des factions du Parti québécois, que l'enfant en bas âge a le plus de facilité pour apprendre une langue seconde. D'ailleurs, dans son propre énoncé de politique éducative, la ministre de l'Éducation affirme, et je la cite, à la page 16: «Il est de plus en plus reconnu que l'étude d'une autre langue permet d'acquérir une meilleure maîtrise de sa propre langue française.»

Question à la ministre de l'Éducation: La ministre de l'Éducation et le gouvernement du Parti québécois vont-ils céder aux pressions des amis de la souveraineté, nuire aux intérêts des Québécois et des Québécoises, ou va-t-elle aller au micro en fin de semaine pour défendre les intérêts des enfants?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation et de la Famille.

Mme Marois: Il y a toujours de la place pour les observateurs au Conseil, peut-être que mon collègue pourra venir.

M. Cherry: ...

Le Président: M. le député de Saint-Laurent, vous ne trouvez pas que ça allait relativement bien, ce matin? Alors, Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: M. le Président, non seulement nos enfants apprendront une langue seconde, qui est dans le cas présent évidemment l'anglais, mais ils seront invités à apprendre une troisième langue, puisque cela est prévu. Par ailleurs, pour nous assurer qu'effectivement nos enfants possèdent bien leur langue maternelle – et je pense que cela est fondamental – la réforme prévoit que nous ajoutons deux heures d'enseignement par semaine dès le niveau primaire pour que l'enseignement du français soit assuré, que nos enfants sortent de nos écoles en sachant bien parler, écrire et s'exprimer.

Le Président: M. le député.

M. Ouimet: Si j'ai bien compris la ministre, elle dira non en fin de semaine.

Le Président: Vous savez, ce n'est pas à la présidence à mettre les points d'interrogation, c'est au député qui formule la question de la formuler de telle sorte que c'est une question et non pas un commentaire appelant un commentaire.

M. Ouimet: Alors, M. le Président, ai-je bien compris, de la ministre de l'Éducation, qu'elle va aller au micro, sur le plancher du Conseil national du Parti québécois, pour dire non à Guy Bouthillier et aux autres militants du Parti québécois qui veulent faire reculer les intérêts des enfants au Québec?

Le Président: Mme la ministre de l'Éducation.

Mme Marois: Je pense que notre collègue de Marquette devrait vraiment venir au Conseil national du Parti québécois, il connaîtrait bien les propositions qui y sont, et il n'y en a pas qui vont dans ce sens-là, M. le Président. D'ailleurs, il aurait aussi à ce moment-là sûrement une très bonne leçon de démocratie, puisque, au parti, effectivement nous débattons longuement, nous avons des convictions profondes que nous faisons valoir, nous les faisons valoir sainement. Parfois, c'est un peu difficile, je n'en disconviens pas...

M. Bouchard: Non, non, on aime ça, on aime ça.

Mme Marois: ...on aime ça, comme dit le premier ministre. Mais cela étant, je pense que c'est notre...

Le Président: Je comprends cette convivialité un peu musclée, mais néanmoins je vous inviterais à respecter le règlement. En terminant, Mme la ministre.

Mme Marois: Écoutez, M. le Président, notre orientation est très claire à cet égard. Cela n'empêche pas qu'il puisse y avoir des échanges, des discussions, certaines mises en garde, parce que c'est évident qu'il faudra toujours se préoccuper, d'une part, de la qualité de la langue commune que nous partageons au Québec, compte tenu de notre situation géopolitique, cela va de soi, mais en même temps il est très clair qu'il faut que nos jeunes puissent acquérir non seulement – comme je le mentionnais – la langue seconde, mais une troisième langue et bien posséder leur langue maternelle bien sûr.

(11 heures)

Le Président: Alors, cela met fin à la période des questions et des réponses orales.


Votes reportés


Adoption du principe du projet de loi n° 173

Nous allons procéder immédiatement aux votes reportés. Alors, nous allons maintenant procéder au vote sur la motion de M. le ministre des Affaires municipales proposant que le principe du projet de loi n° 173, Loi instituant le fonds spécial de financement des activités locales et modifiant la Loi sur la fiscalité municipale, soit adopté.

Alors, que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Bouchard (Jonquière), M. Jolivet (Laviolette), M. Landry (Verchères), M. Chevrette (Joliette), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), M. Ménard (Laval-des-Rapides), M. Léonard (Labelle), Mme Marois (Taillon), M. Perreault (Mercier), M. Trudel (Rouyn-Noranda–Témiscamingue), M. Campeau (Crémazie), M. Gendron (Abitibi-Ouest), M. Bégin (Louis-Hébert), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), M. Simard (Richelieu), M. Rochon (Charlesbourg), Mme Doyer (Matapédia), M. Boucher (Johnson), M. Cliche (Vimont), M. Bélanger (Anjou), Mme Beaudoin (Chambly), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), Mme Caron (Terrebonne), M. Boisclair (Gouin), M. Rioux (Matane), M. Payne (Vachon), Mme Robert (Deux-Montagnes), M. Blais (Masson), Mme Malavoy (Sherbrooke), M. Baril (Berthier), M. Facal (Fabre), M. Boulerice (Sainte-Marie–Saint-Jacques), M. Paré (Lotbinière), M. Bertrand (Charlevoix), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pelletier (Abitibi-Est), Mme Leduc (Mille-Îles), M. Morin (Dubuc), Mme Charest (Rimouski), M. Landry (Bonaventure), M. Paquin (Saint-Jean), M. Baril (Arthabaska)...

Le Président: Un instant! Un instant, s'il vous plaît. Est-ce que je pourrais vous rappeler que, pendant le vote, le travail le plus difficile, c'est celui qui a à demander à chacun des députés de se lever, donc un travail de mémoire évident. Je vous demanderais qu'on lui permette de le faire de façon concentrée, s'il vous plaît.

Le Secrétaire adjoint: M. Laurin (Bourget), M. Garon (Lévis), M. Côté (La Peltrie), M. Deslières (Salaberry-Soulanges), Mme Signori (Blainville), M. Beaulne (Marguerite-D'Youville), M. Beaumier (Champlain), M. St-André (L'Assomption), M. Lachance (Bellechasse), M. Laprise (Roberval), M. Jutras (Drummond), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Létourneau (Ungava), M. Lelièvre (Gaspé), M. Kieffer (Groulx), Mme Léger (Pointe-aux-Trembles), M. Gaulin (Taschereau), M. Gagnon (Saguenay), Mme Papineau (Prévost), M. Désilets (Maskinongé), M. Brien (Rousseau), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Duguay (Duplessis).

Le Président: Que les députés contre cette motion veuillent bien se lever, maintenant.

Le Secrétaire adjoint: M. Paradis (Brome-Missisquoi), M. Middlemiss (Pontiac), Mme Frulla (Marguerite-Bourgeoys), M. Cusano (Viau), M. Maciocia (Viger), M. Gobé (LaFontaine), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Vaive (Chapleau), M. Parent (Sauvé), Mme Bélanger (Mégantic-Compton), M. Bissonnet (Jeanne-Mance), M. Williams (Nelligan), M. Fournier (Châteauguay), M. Sirros (Laurier-Dorion), Mme Delisle (Jean-Talon), M. Bordeleau (Acadie), M. Beaudet (Argenteuil), M. LeSage (Hull), M. Poulin (Beauce-Nord), M. Chenail (Beauharnois-Huntingdon), M. Bergman (D'Arcy-McGee), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Ouimet (Marquette), M. Lefebvre (Frontenac), M. Cherry (Saint-Laurent), Mme Leblanc (Beauce-Sud), M. Mulcair (Chomedey), M. MacMillan (Papineau), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), M. Chalifoux (Bertrand), Mme Lamquin-Éthier (Bourassa), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata).

M. Dumont (Rivière-du-Loup). M. Filion (Montmorency).

Le Président: Y a-t-il des abstentions?

Le Secrétaire: Pour:65

Contre:34

Abstentions:0

Le Président: Alors, la motion est adoptée et, en conséquence, le principe du projet de loi n° 173 est adopté. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission de l'aménagement du territoire

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Je fais motion pour que le projet de loi soit déféré à la commission de l'aménagement du territoire pour étude détaillée.

Le Président: Cette motion est-elle adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.


Motions sans préavis

Aux motions sans préavis, M. le député de Groulx.


Souligner le 30e anniversaire de la mort de Lionel Groulx

M. Kieffer: M. le Président, en tant que député du comté de Groulx et au nom des citoyens et des citoyennes que je représente, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne le 30e anniversaire de la mort de Lionel Groulx, cet historien qui a contribué à l'évolution de la conscience nationale du Québec, et rappelle du même coup le 60e anniversaire de son affirmation célèbre, et je cite, Notre État français, nous l'aurons .» Merci.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour...

Une voix: Consentement, sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Sans débat. Alors, la motion est adoptée sans débat.

M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.


Souligner la Journée mondiale du sida

M. Boulerice: M. le Président, je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée mondiale du sida, ayant pour thème, cette année, Les enfants dans un monde marqué par le sida

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de la motion? Il y a consentement pour débattre de la motion?

Des voix: Sans débat.


Mise aux voix

Le Président: Sans débat. Alors, la motion est adoptée sans débat. Est-ce qu'il y a d'autres motions sans préavis?


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, aux avis touchant les travaux des commissions, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président, j'avise cette Assemblée que la commission des affaires sociales procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 39, Loi sur la protection des personnes atteintes de maladie mentale et modifiant diverses dispositions législatives, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures, de 15 heures à 18 heures et, si nécessaire, de 20 heures à minuit, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine; que la commission de l'éducation procédera à l'étude détaillée du projet de loi n° 166, Loi modifiant la Loi sur les collèges d'enseignement général et professionnel et d'autres dispositions législatives, aujourd'hui, de 15 heures à 18 heures et de 20 heures à minuit, à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Ça va? Alors, en ce qui me concerne, nous allons passer aux renseignements sur les travaux de l'Assemblée.


Affaires du jour

S'il n'y a pas de questions particulières, nous allons aborder immédiatement les affaires du jour. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: M. le Président, je m'excuse, il y a un petit problème de papier. M. le Président, je vous demanderais de bien vouloir considérer l'article 31 de notre feuilleton. Je m'excuse, j'ai été légèrement dissipé par le député de Papineau.

Le Président: Pour une fois qu'il ne disait rien!

Des voix: Ha, ha, ha!


Projet de loi n° 174


Adoption

Le Président: Alors, M. le ministre de la Sécurité publique propose l'adoption du projet de loi n° 174, Loi modifiant la Loi sur les explosifs. M. le ministre de la Sécurité publique.


M. Pierre Bélanger

M. Bélanger: M. le Président, le 12 novembre dernier, j'ai présenté devant cette Assemblée le projet de loi n° 174, Loi modifiant la Loi sur les explosifs. Ce projet de loi a franchi rapidement les étapes préalables au débat sur la motion d'adoption car il a recueilli l'accord des députés de l'Assemblée nationale qui en ont reconnu à la fois l'intérêt et toute la pertinence. Je tiens d'ailleurs à souligner la collaboration de l'opposition à cet égard.

(11 h 10)

Ce projet de loi, je le rappelle, s'inscrit dans la foulée des initiatives prises au cours du printemps dernier par le gouvernement du Québec afin de prévenir la criminalité et d'assurer la sécurité publique sur son territoire. Les modifications qu'il propose à la Loi sur les explosifs visent à bonifier quelques-unes des dispositions adoptées ce printemps, et ce, dans le double but de les rendre plus équitables pour les personnes et les entreprises qui leur sont assujetties et d'en rendre l'application plus efficace par les organismes gouvernementaux concernés, plus particulièrement par la Sûreté du Québec.

Essentiellement, ces modifications sont de deux ordres. Elles portent sur les modalités de délivrance par la Sûreté du Québec et éventuellement par le ministre de la Sécurité publique des permis d'explosifs et concernent les amendes imposables à l'issue d'infractions à la loi québécoise sur les explosifs ou à son règlement d'application. Actuellement, un permis d'explosifs ne peut être délivré à une personne qui a été, au cours des cinq dernières années précédant sa demande, déclarée coupable d'une infraction aux lois fédérale ou québécoise sur les explosifs ou aux règlements pris en vertu de celles-ci. Nous souhaitons notamment, par le présent projet de loi, accorder aux personnes et aux institutions responsables de la délivrance des permis d'explosifs le pouvoir de refuser ou de retirer un permis lorsque le demandeur ou le titulaire a été déclaré coupable de certaines infractions, en prenant en considération un certain nombre de critères dans le processus d'évaluation d'une demande de permis ou dans l'examen de son retrait possible, particulièrement lorsque les actes reprochés au demandeur ou au titulaire ne sont pas de nature criminelle mais constituent des manquements, parfois d'ordre purement administratif, aux lois fédérale ou québécoise sur les explosifs.

Cette mesure, qui introduit une certaine souplesse dans la loi, n'est pas unique en son genre. On retrouve en effet de nombreux exemples ou le personnel ou les autorités des ministères ou organismes gouvernementaux disposent d'une discrétion dans l'application des lois adoptées par l'Assemblée nationale de manière à ce que l'administration puisse juger des circonstances ou des conditions particulières des différents dossiers qui lui sont soumis. Dans le cas qui nous préoccupe, il s'avère d'autant plus important de confier un tel pouvoir aux institutions concernées, en l'occurrence la Sûreté du Québec et le ministre de la Sécurité publique, que la poursuite des activités légales d'individus ou d'entreprises pourrait s'en trouver mise en cause, voire compromise.

Cela dit, il apparaît certainement souhaitable – et nous sommes d'accord, là-dessus, avec les commentaires formulés par le représentant de l'opposition – qu'un tel pouvoir fasse l'objet d'une certaine forme d'encadrement – et à cet effet là, je partageais tout à fait la préoccupation du député de Frontenac – afin d'éviter que la discrétion accordée aux membres de la Sûreté du Québec cède à l'arbitraire, l'agent émetteur pouvant être conduit tantôt à délivrer un permis, tantôt à le refuser sur la base d'une même infraction. Nous proposons donc d'insérer dans la loi des critères qui devront obligatoirement servir de balises à l'exercice de cette discrétion.

Je rappelle les critères: premièrement, la nature, la gravité et la fréquence de l'infraction; le préjudice causé ou qui aurait pu être causé par l'infraction; le risque de préjudice grave que présenterait l'exercice par le demandeur ou le titulaire du permis d'une activité autorisée par le permis, compte tenu de l'attitude dénotée par l'infraction commise; le fait que le demandeur ou le titulaire du permis fréquente des personnes qu'il sait être de réputation criminelle ou fraternise avec de telles personnes sans justification.

Cet ajout, M. le Président, constitue une nette amélioration par rapport à la situation qui existe présentement ou à celle qui prévalait avant les modifications apportées le printemps dernier par la loi n° 125. Si l'on fait abstraction des infractions au Code criminel, à la Loi sur les aliments et drogues et à la loi sur les stupéfiants qui impliquent le refus ou le retrait systématique, selon le cas, du permis d'explosifs, les seuls critères contenus dans les dispositions actuelles et qui peuvent motiver le refus d'émettre un permis concernent en effet une éventuelle atteinte à la sécurité publique ou le fait qu'une demande puisse être effectuée au bénéfice d'une autre personne.

Encore là, les critères retenus dans le présent projet de loi ne sont pas tout à fait inusités. On peut donc présumer que leur application ne posera pas de difficulté. On retrouve en effet, parmi les dispositions actuellement applicables dans les domaines couverts par la Régie du bâtiment et par la Commission municipale, ainsi que dans le Code des professions ou dans le cadre de réglementations relatives au système de déontologie policière, des critères ayant trait – comme nous le suggérons ici – à la nature, à la gravité ou à la fréquence des infractions, au préjudice causé ou encore au fait qu'une personne fréquente des individus qu'elle sait être de réputation criminelle ou fraternise avec eux sans justification.

De plus, le recours à de tels éléments dans l'exercice de pouvoirs consentis à des organismes gouvernementaux ou à des membres de la fonction publique comporte des conséquences qui, pour certaines personnes ou entreprises, peuvent être tout aussi importantes que celles que pourraient avoir à assumer, dans le cas qui nous intéresse, des demandeurs ou des titulaires de permis d'explosifs, et cela, sans compter le fait que nous sommes en présence, avec la Loi sur les explosifs, de situations ou de phénomènes susceptibles – ne l'oublions pas – de mettre en péril la sécurité du public.

Le second volet de ce projet de loi consiste dans la majoration des amendes imposables à l'issue d'infractions à la Loi sur les explosifs ou aux règlements pris en vertu de celle-ci. L'objectif ainsi poursuivi est clair; il vise à responsabiliser les gens du milieu des explosifs par rapport aux obligations et aux privilèges que confèrent l'octroi et le maintien d'un permis.

Dans la mesure où certains manquements d'ordre administratif à la Loi sur les explosifs ne se traduiront plus nécessairement par le retrait du permis, il y a lieu de s'assurer que cette situation ne puisse être interprétée, chez les personnes ou les entreprises détentrices de permis d'explosifs, comme un sauf-conduit les autorisant à faire preuve impunément d'un certain degré de laxisme, voire de négligence, qui serait socialement et légalement inacceptable. C'est pourquoi le présent projet de loi contient des dispositions visant à majorer de façon significative les amendes imposées à l'issue d'infractions de quelque nature qu'elles soient à la Loi sur les explosifs.

Cette modification, ai-je besoin de le signaler, s'inscrit dans le sens des actions posées ce printemps afin d'assurer la sécurité du public. En prévenant les cas de négligence qui, au sein de l'industrie, peuvent faciliter la tâche des criminels qui désirent se procurer des substances explosives, en augmentant considérablement le tarif des amendes qui leur seront imposées, nous faisons le pari que les entreprises se donneront des règles plus strictes de sécurité dans la manipulation, le transport et l'entreposage d'explosifs et qu'elles veilleront à ce que leur personnel les suive avec assiduité.

En terminant, M. le Président, permettez moi d'exprimer ma conviction que les quelques mesures contenues dans ce projet de loi sont de nature à nous aider à mieux prévenir la criminalité, tout en nous assurant d'un traitement juste et équitable à l'endroit des personnes et des entreprises qui oeuvrent légalement dans le secteur des explosifs. C'est pourquoi je recommande à cette Assemblée l'adoption du projet de loi modifiant la Loi sur les explosifs. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Nous céderons maintenant la parole au critique officiel de l'opposition en matière de sécurité publique et député de Frontenac. M. le député.


M. Roger Lefebvre

M. Lefebvre: Merci, M. le Président. Le projet de loi n° 174 propose des moyens additionnels de contrôler la fabrication, la vente, l'utilisation des explosifs. Je dis «moyens additionnels» parce que, au printemps dernier – puis le ministre y a fait allusion en terminant son intervention – à l'occasion de l'adoption du projet de loi n° 125 qui visait essentiellement à donner des pouvoirs additionnels aux municipalités, à la Régie des alcools et aussi à resserrer l'utilisation des explosifs, ce projet de loi n° 125 avait comme objectif de mettre en place des moyens additionnels pour réprimer autant que possible ce qu'on vivait, à l'époque, d'une façon absolument alarmante et dramatique, la guerre des motards criminalisés. C'était ce drame-là qu'on vivait puis qui est toujours pendant, en suspens et inquiétant, parce qu'on n'aura jamais la certitude absolue – je sais que le ministre est d'accord avec moi – que cette guerre-là ne reprendra pas vie. Alors, c'était ça, 125.

Le 174 ajoute, vient resserrer encore plus le contrôle des explosifs, et l'opposition, dans ce sens-là, ne peut pas faire autrement que concourir à l'adoption du projet de loi. Jamais, M. le Président, jamais on n'ira assez loin dans le contrôle des explosifs, tant au niveau de la fabrication que de la vente et de l'utilisation. Je suggère au ministre, à son gouvernement d'évaluer s'il n'y a pas encore moyen d'aller plus loin, c'est-à-dire d'aller aussi loin que possible, sans évidemment contrer l'utilisation légale et correcte de ces matières dangereuses. C'est l'objectif que doit viser le ministre de la Sécurité publique, aller aussi loin que possible. Aller aussi loin que possible, c'est s'arrêter où l'activité légale serait embêtée par les législations du gouvernement.

(11 h 20)

J'ai dit, au moment de l'adoption du principe, que le gouvernement fédéral, en regard des activités criminelles auxquelles j'ai fait référence tout à l'heure, avait posé des gestes qui sont reconnus maintenant comme ayant beaucoup participé à la répression de la guerre des motards criminalisés, et j'en veux comme preuve, M. le Président, l'opération qui a été mise en place par la Sûreté du Québec la semaine dernière dans la municipalité de Saint-Nicolas pour, à toute fins pratiques, éliminer le bunker propriété d'un groupe criminel, les Hell's Angels. C'est le maire de Saint-Nicolas qui a compris que c'est grâce à des nouvelles dispositions prévues au Code criminel qu'on a pu procéder comme on l'a fait.

Vous savez, M. le Président, la guerre des motards criminalisés, je l'ai dit tout à l'heure, est une inquiétude qu'on doit toujours avoir à l'esprit, dans le sens qu'on doit toujours imaginer tous les moyens – je parle du côté du gouvernement du Québec, même chose du cote du gouvernement fédéral – pour éviter que ça se reproduise. Et il y a malheureusement des indices qui nous laissent croire qu'on n'est peut-être pas au bout de nos peines. Le ministre comprendra que je fais référence à l'arrivée d'une autre bande de motards criminalisés, qui s'appelle les Bandidos, qui est en train de s'installer au Québec au vu et au su de tous les Québécois et toutes les Québécoises, M. le Président.

Tous les observateurs... Et on en fait même très régulièrement des bulletins de nouvelles, autant dans les médias électroniques que dans la presse écrite. C'est devenu un problème de société extrêmement préoccupant. On est conscient qu'un groupe de criminels prend feu et lieu chez nous, au Québec, et la société, par son gouvernement, par son ministre de la Sécurité publique, apparaît comme étant incapable de modifier le cours des choses, d'éviter que ces criminels-là s'installent au Québec. C'est préoccupant. Je ne veux pas, là, M. le Président, aller plus loin. Je ne veux pas que le ministre tire la conclusion qu'on pense, de ce côté-ci de la Chambre, qu'il n'est pas préoccupé. Je suis convaincu que le ministre est inquiet et préoccupé, avec son gouvernement, de cette situation-là.

M. le Président, mon collègue de Marquette qui est ici avec moi ce matin – qui va intervenir tout à l'heure sur un autre projet de loi – l'a vécu dans son comté, avec sa population, et je me souviens qu'il avait soulevé le cas. En pleine guerre des motards criminalisés, le député de Marquette avait demandé au ministre de la Sécurité publique de l'époque de faire l'impossible pour protéger sa population, la population de son comté, dans ce qu'il y a de plus précieux, ses enfants. On se souviendra qu'une bombe, des explosifs avaient éclaté en plein coeur du comté de Marquette, dans un édifice qui était avoisinant d'une garderie. Et les questions qu'il avait posées à l'époque, le député de Marquette, allaient dans le même sens que celles que j'avais adressées au député de Mercier, alors ministre de la Sécurité publique: Est-ce que les forces policières nécessaires pour surveiller ces criminels, protéger la population du Québec, autant au niveau de la Sûreté du Québec que la force policière municipale, sont suffisantes?

On avait eu à l'époque des réponses plus ou moins claires, plus ou moins confuses. Et j'ai vérifié avec mon collègue de Marquette. Ce qu'il me dit, c'est qu'au niveau du corps de police municipal qui a la responsabilité de protéger les citoyens de Marquette, dans cette municipalité, M. le Président, où l'incident dont j'ai parlé tout à l'heure s'était produit, il n'y a pas eu d'amélioration, c'est le statu quo. La municipalité dont on parle, c'est la municipalité de Lachine, M. le Président.

J'ai questionné le ministre de la Sécurité publique la semaine dernière sur l'état des forces policières quant aux escouades Carcajou Montréal et Carcajou Québec. Le ministre m'a rassuré qu'à tout le moins on maintenait le statu quo, c'est-à-dire qu'il n'y aura pas moins de policiers, il n'y aura pas moins d'effectifs, il n'y aura pas moins d'argent mis à la disposition de Carcajou Montréal, Carcajou Québec. Bien, c'est rassurant, mais pas totalement rassurant.

Je suggère au ministre – et j'aurai l'occasion de le questionner éventuellement, au cours des prochains mois, lorsqu'on débattra des crédits Sécurité publique et Sûreté du Québec – d'évaluer la possibilité non seulement de maintenir, mais d'améliorer les effectifs, M. le Président. Ce serait, quant à moi, un signal extrêmement positif qu'on enverrait à la population du Québec.

Si je reviens au projet de loi n° 174, M. le Président, j'ai indiqué au ministre, au moment où on faisait l'étude détaillée du projet de loi en plénière, que je souhaiterais que la loi prévoie le même mécanisme en regard d'un permis refusé. Lorsqu'un permis est refusé à un citoyen qui a appliqué auprès d'un agent de la Sûreté du Québec habilité à émettre le permis mais également, évidemment, nécessairement, habilité à dire non, la loi prévoit que le demandeur de permis peut en appeler auprès du ministre.

L'inverse n'est pas vrai. Si, par hypothèse, un agent de la Sûreté du Québec, après avoir fait enquête, accepte d'émettre un permis à une personne x et qu'un tiers considère que cette discussion-là est erronée, incorrecte, pour des raisons que le tiers pourrait connaître, la loi ne prévoit pas de processus précis au même titre que lorsqu'il y a refus, la loi ne prévoit pas qu'on puisse, comme tiers intéressé, intervenir auprès du ministre pour en appeler de cette décision-là. Et j'aurais souhaité que le ministre – et je lui avais indiqué, dans ce sens-là, que je collaborerais en donnant tous les consentements requis – introduise dans sa loi le même mécanisme pour permettre une surveillance additionnelle de l'émission des permis.

Vous savez, si le permis est refusé, on ne court pas grand risque. Il n'y a pas de risque, M. le Président. Si on se trompe, on refuse d'émettre un permis, bien, il peut y avoir un tiers, c'est-à-dire que le demandeur peut être brimé dans ses droits, mais il a la paix. Mais on n'a sûrement pas fait d'erreur qui aura des conséquences. Cependant, si on émet un permis à une personne qui s'avère plus tard être quelqu'un à qui on aurait dû dire non, puis qu'un tiers au courant de certains faits que la Sûreté du Québec ignorait au moment de l'émission du permis... bien, on aura malheureusement pris une décision, dans certaines circonstances, tragique.

Alors, j'aurais souhaité que le ministre introduise cette disposition-là. Puis si c'est déjà fait pour 50 %, le mécanisme existe pour quelqu'un qui considère avoir été brimé, qui considère avoir vécu une décision incorrecte. Pourquoi, M. le Président, ne pas mettre en place le même processus pour celui qui a reçu son permis, pour celui à qui on a dit oui pour l'émission d'un permis? Mais, aux yeux de certaines personnes intéressées, ça aurait été une décision malheureuse, et on ne peut pas s'en plaindre de façon précise, on ne le prévoit pas dans la loi.

Ceci étant dit, je l'ai non seulement indiqué, que je le souhaitais, lors de l'étude article par article, mais j'ai même refusé de collaborer à l'adoption de cette étape du rapport en commission plénière. Cependant, dans le but que le ministre comprenne bien, M. le Président, que l'opposition collabore, il y a une amélioration, il y a un resserrement additionnel. Le ministre nous indique, par cette décision de resserrer encore plus l'utilisation, la fabrication et la vente des explosifs, qu'il est préoccupé, inquiet. Il a vu, comme tous les Québécois, ce qui se passait dans le dossier de l'entreprise BioChem Pharma. Alors, parce qu'on veut indiquer au ministre qu'on va collaborer, parce que je veux que le ministre me croie lorsque je lui dis que si, la semaine prochaine, il arrivait avec une proposition allant encore plus loin, assurant encore plus de protection aux citoyennes et citoyens du Québec, même si j'ai certaines réserves, je vais donner mon accord et indiquer au ministre et à son gouvernement que, à l'appel du vote tout à l'heure, on indiquera qu'on est d'accord avec les dispositions prévues dans le projet de loi n° 174. Merci.

(11 h 30)

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Frontenac. Alors, M. le ministre, vous avez un droit de réplique de 20 minutes. Alors, M. le ministre.


M. Pierre Bélanger (réplique)

M. Bélanger: Je vous remercie, M. le Président. Alors, juste pour répondre aux préoccupations du député de Frontenac, le député de Frontenac a raison, comme ministre de la Sécurité publique, je pense qu'on ne peut pas être insensible ou ne pas être inquiet relativement à ce qu'on voit relativement à ce qu'on appelle la lutte au crime organisé et aussi aux activités de motards, de gangs de motards criminalisés. Évidemment, c'est très préoccupant et c'est préoccupant pour l'ensemble des gens qui ont à prendre des décisions, autant au niveau municipal, autant au niveau fédéral, on le sait, autant au niveau provincial. C'est toujours rassurant pour la population, évidemment, quand on annonce le fait que de nouveaux policiers seront embauchés, que les effectifs seront renforcés à tel endroit, et tout ça, mais ce que j'ai constaté déjà, depuis que je suis ministre de la Sécurité publique, c'est que le nombre n'est pas suffisant. Le nombre en lui-même, parfois, même, peut ne rien vouloir dire.

On l'appelle «crime organisé» pour une bonne raison, c'est que le crime est très bien organisé au niveau des groupes criminels organisés. Et il profite de la moindre désorganisation de nos services policiers, et ce que je constate, qui doit être la préoccupation de tout ministre de la Sécurité publique, c'est d'améliorer, de parfaire l'organisation policière sur le territoire du Québec. On a des situations qui sont problématiques encore au moment où on se parle dans certaines régions où la collaboration, où les enquêtes qui sont menées d'une municipalité à l'autre, le suivi n'est peut-être pas fait d'une façon aussi rapide qu'on voudrait le faire, parce qu'on a justement des groupes qui organisent sur des terrains qui sont grands, qui sont organisés, qui ne connaissent pas les frontières.

Alors, c'est pour ça que je me suis donné comme premier engagement, première priorité d'améliorer le plus rapidement possible l'organisation policière, et le député de Frontenac le sait, puisqu'il suit le dossier depuis... Bon, c'est le troisième ministre dont il est le critique, alors il a pu suivre l'évolution des différents dossiers au niveau des services spécialisés au Québec, les escouades spécialisées. Et on sait que ça englobe un vaste éventail de services. On a un travail considérable à faire à ce niveau-là, au niveau de faire en sorte que certaines régions ou certaines municipalités, peut-être, remettent en question, améliorent, bonifient ou partagent certaines expériences au niveau de l'organisation des services spécialisés. Dès cet hiver, on va aller encore un pas plus loin relativement à cette réflexion au niveau de tout ce débat sur les services spécialisés. C'est très important. C'est très important, et je crois que c'est encore plus important à court terme que juste le fait d'annoncer qu'il y aurait des effectifs supplémentaires.

Pour ce qui est de la demande du député de Frontenac qui a été formulée hier en commission plénière, évidemment, je crois qu'il faut permettre, à ce moment-là, une certaine façon pour quelqu'un de pouvoir porter à l'attention du ministre son opposition ou le fait que l'émission d'un permis n'aurait pas dû être autorisée. Mais ça existe déjà, comme je l'ai mentionné au député de Frontenac. Le ministre de la Sécurité publique, quand il est mis au courant de faits qui, normalement, ne devraient pas permettre l'obtention d'un permis, peut révoquer le permis, mais il est vrai que ce n'est pas balisé d'une façon aussi complète que dans le cas d'un refus qui prévoit, par l'envoi d'une lettre, automatiquement, une révision. Mais ma crainte, M. le Président, si on balisait d'une façon presque automatique, finalement, ce mode de révision, même dans le cas de délivrance de permis, ça serait d'alourdir une procédure, et, quant à moi, ça ne servirait pas les intérêts du projet de loi. Il faut juste réaliser que c'est 5 000 permis ou demandes de permis qui sont gérés annuellement par la Sûreté du Québec. Donc, le fait de prévoir ainsi un mécanisme, presque, de révision, qui pourrait être fait automatiquement même dans le cas de délivrance de permis, quant à moi, ça alourdirait la procédure d'une façon injustifiée. Et, de toute façon, les tiers qui veulent se plaindre peuvent toujours aviser le ministre de situations qui feraient en sorte que le permis devrait être révoqué. Donc, la procédure existe.

Le député de Frontenac a raison: en matière de sécurité publique, en matière de Loi sur les explosifs, il faut garder à l'esprit que tout est perfectible. Si, à un moment donné, on se rend compte qu'on peut encore améliorer, qu'on peut se doter de nouveaux outils encore plus efficaces pour la lutte à la criminalité, il faut avoir l'esprit ouvert, il ne faut pas avoir peur, à ce moment-là, de présenter de nouveaux projets de loi. Je sais, à ce moment-là, que l'opposition, comme elle l'a fait pour l'adoption du projet de loi n° 125 et pour ce projet de loi, est capable de faire et fera, comme elle l'a fait, un débat qui, je crois, pour la société en général, se doit d'être dénué de partisanerie. Quand il est question de sécurité publique, de lutte au crime organisé, les parlementaires, je crois, prennent leurs responsabilités et font en sorte que les projets de loi soient adoptés.


Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le ministre de la Sécurité publique. Comme il n'y a plus d'intervenants, le projet de loi n° 174, Loi modifiant la Loi sur les explosifs, est-il adopté?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui. M. le Président, je vous demanderais de porter attention au libellé de l'article 53 de notre feuilleton.


Motions du gouvernement


Motion proposant que la commission de l'éducation procède à des consultations particulières sur le projet de loi n° 180

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 53 de votre feuilleton, M. le leader du gouvernement propose la motion qui suit:

«Que la commission de l'éducation procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives, les 4 et 5 décembre 1997 et qu'à cette fin elle entende les groupes suivants: l'Association des cadres scolaires du Québec; l'Association des directeurs d'école de Montréal conjointement avec l'Association québécoise du personnel de direction des écoles et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement; l'Association des directeurs généraux des commissions scolaires du Québec; l'Association des services de garde en milieu scolaire; l'Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec; l'Association québécoise des commissions scolaires; la Centrale de l'enseignement du Québec; la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; la Confédération des syndicats nationaux; la Fédération des comités de parents de la province de Québec; la Fédération des commissions scolaires du Québec;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la ministre de l'Éducation soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Avant que le débat sur cette motion ne s'engage, je vous rappelle que cette motion ne peut être amendée et fait l'objet d'un débat restreint d'au plus une heure, conformément à l'article 146 de notre règlement.

Comme vous le savez, j'ai tenu une réunion avec les leaders concernant la répartition du temps de parole. Voici donc cette répartition: une réplique de cinq minutes est accordée à l'auteur de la motion; cinq minutes sont allouées à l'ensemble des députés indépendants; le reste du temps sera partagé également entre les deux groupes parlementaires, soit 25 minutes chacun. Dans ce cadre, les interventions ne seront pas limitées.

Alors, je cède maintenant la parole à M. le leader adjoint du gouvernement. M. le leader adjoint. Excusez-moi...

M. Boulerice: C'est Mme la ministre de l'Éducation qui interviendra en premier. J'aurai le plaisir d'intervenir en deuxième.

Le Vice-Président (M. Pinard): Excusez-moi, M. le leader adjoint. Vous avez présenté un amendement à la motion, à l'annexe C.

M. Boulerice: M. le Président, si vous le permettez, Mme la ministre de l'Éducation interviendra et, après son intervention, j'aurai l'honneur de vous proposer un amendement.

M. le Président, si vous le souhaitez...

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Bien, si vous le permettez, M. le Président, histoire de clarifier les choses, nous pourrions peut-être suspendre deux, trois minutes, à votre discrétion. Je vous en fais l'offre.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous allons suspendre quelques minutes pour regarder la question de l'amendement.

(Suspension de la séance à 11 h 40)

(Reprise à 11 h 42)

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'ordre! Nous reprenons nos débats, et immédiatement je cède la parole à Mme la ministre de l'Éducation. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Nous prenons une heure de notre précieux temps ce matin pour discuter quand même une chose importante, je n'en disconviens pas, que nous aurions pu peut-être régler autrement, par entente avec l'opposition. En fait, essentiellement, le débat de ce matin, c'est sur le fait que nous recevions des groupes à l'occasion de l'étude du projet de loi n° 180 portant modification à la Loi sur l'instruction publique. Évidemment, c'est une loi majeure, c'est une loi importante, j'en suis tout à fait convaincue. Elle est une des pièces maîtresses de la réforme de l'éducation, pas la seule, je le répète, et c'est important de le dire parce que, si on voulait en faire la seule pièce maîtresse de la réforme de l'éducation, on serait bien déçus, puisqu'elle est une partie d'un ensemble.

Cette loi, elle, fait en sorte que les écoles retrouvent plus de liberté, plus de pouvoirs. Et, avec les écoles, bien sûr, puisqu'une école, ce sont les personnes qui la font, hein, les personnes qui font l'école dans l'école mais aussi les personnes qui l'animent, les parents dont les enfants la fréquentent, les jeunes eux-mêmes lorsqu'il s'agit d'une école secondaire... Alors, notre projet de loi, essentiellement, propose que les responsabilités et pouvoirs soient partagés autrement entre la commission scolaire et les écoles, entre le ministère de l'Éducation et les commissions scolaires de telle sorte que les écoles retrouvent un plus grand espace de liberté en termes de capacité d'orienter le projet éducatif de l'école.

Donc, en synthèse, je vous dirais: C'est ce que fait le projet. Mais évidemment c'est un peu plus compliqué que ça parce que ça exige que d'abord on redéfinisse les rôles et responsabilités du personnel enseignant, à qui on reconnaît d'ailleurs l'autonomie professionnelle, cela exige que l'on redéfinisse les rôles et responsabilités de nos directions d'école, de la commission scolaire et que l'on forme un conseil d'établissement, au sein d'ailleurs maintenant de trois types d'établissements différents, et ça, c'est intéressant, et la loi fait ça aussi.

La loi va permettre que l'on crée des conseils d'établissement pour les écoles primaires et les écoles secondaires, des conseils d'établissement qui seront composés à parité de parents et de représentants des gens qui font l'école, des enseignants, des personnels professionnels, des personnels de soutien, des personnels des services de garde. Puis, dans le cas du secondaire, on croit qu'il est important que des élèves du niveau secondaire, qui sont déjà des adolescents quand même plus responsables, plus conscients de tout ce qui les concerne, puissent être membres aussi de ce conseil d'établissement. À ce moment-là, la parité se retrouve, si on veut, entre les parents et les élèves versus les personnes qui viennent du milieu de l'école proprement dit. Alors, l'établissement primaire-secondaire, l'établissement d'éducation des adultes et un établissement qui consistera dans les centres de formation professionnelle, et ça, c'est important parce que, dans le fond, on revient avec cette institution qu'on avait un peu mise de côté à une certaine époque, qui était ces fameux milieux de formation aux métiers, hein?

Les centres de métiers et les centres de formation professionnelle, ce seront en soi des établissements qui devront offrir évidemment les formations de base, mais qui formeront aux métiers et à toute espèce de fonction reliée à une formation de niveau secondaire, soit au niveau du Diplôme d'études professionnelles ou d'une attestation spécialisée qui est beaucoup plus que ce que reçoit un jeune qui finit son secondaire, même s'il finit avec un métier. Alors, la loi, c'est ce qu'elle fait.

Évidemment, comme je le mentionnais, pour faire ça, ça nous oblige à amender la loi actuelle, à redéfinir des choses, à camper des concepts, etc. Donc, c'est une des pièces majeures de la réforme, mais ce n'est pas la seule. Et il y a, bien sûr, ce qui est le plus important à mon point de vue – honnêtement, il faut se le dire ensemble, ici – il faut qu'on définisse ce que nos enfants vont apprendre à l'école, ce que nos jeunes vont aller apprendre dans nos écoles secondaires, dans nos écoles primaires, ce que nos jeunes adultes vont apprendre à la formation professionnelle, ce que nos adultes vont apprendre dans nos centres d'éducation des adultes. Et cela, ça se retrouve ailleurs que dans la loi, puisque ça se retrouve dans le programme ou le curriculum national. Et c'est là, d'ailleurs, qu'on a dit aux gens, et que la population a pu l'entendre à diverses reprises, comment on allait maintenant par exemple enseigner l'histoire à tous les niveaux du secondaire, qu'on allait enseigner plus longuement le français, qu'on allait enseigner plus longuement les mathématiques, y mettre plus de temps, que certaines matières, oui, disparaîtraient pour que justement on accorde plus de temps à ces matières essentielles et de base.

C'est là qu'on dit aussi qu'il y a des compétences qu'un jeune doit acquérir dans toutes les matières: apprendre à travailler, à faire un plan de travail, à développer une idée logiquement, à résoudre un problème dans un ordre logique. C'est ce qu'on appelle le programme des programmes, ou le programme transversal, celui qu'on devra acquérir dans toutes les matières. Parler bien son français, c'est aussi important qu'on le fasse au cours de français que dans son cours d'histoire, que dans son cours de sciences, que dans son cours d'économie.

Alors, il y a comme ça un certain nombre de compétences que nous voulons que nos jeunes acquièrent et qui devront être transmises, ces compétences, par tous les professeurs de l'école. Alors, ça implique évidemment des changements assez significatifs. Nous devrons former nos gens à cela, préparer les outils de travail pour cela. Utiliser mieux ses compétences intellectuelles, ça peut vouloir dire aussi faire travailler un peu plus sa mémoire. Ce n'est pas si mauvais, vous savez, d'apprendre des textes par coeur, hein. Ça oblige sa mémoire à retenir des choses et, éventuellement, dans la vie au quotidien, ça nous arrive, et on en a besoin de notre mémoire. Alors, il y a des choses comme ça qu'on réintroduira au niveau de l'école.

Et surtout, je vous dirais, ce que j'aimerais qu'on réintroduise avec cela, c'est de la rigueur et de l'exigence. C'est difficile, l'école. Ça peut être très agréable. Et il peut y avoir une satisfaction exceptionnelle à apprendre. Et on peut y trouver du plaisir à apprendre. Mais ça ne veut pas dire que, parce qu'on y a du plaisir, ce n'est pas exigeant et qu'on ne doit pas être rigoureux à l'égard de ce qu'on attend de nos enfants et de ce qu'on attend de nos enseignantes et de nos enseignants. Il faut qu'il y ait une forme de discipline intellectuelle qui fasse en sorte, oui, que l'on ait parfois des devoirs et des leçons, que l'on puisse travailler chez soi des matières qu'on nous a enseignées à l'école. Et donc c'est exigeant, l'école. Je pense que ce serait incorrect de dire à nos enfants: C'est facile, c'est comme quand on écoute la télé, puis qu'on pèse sur son bouton, puis qu'on veut changer de poste, puis qu'on choisit son menu. Ce n'est pas comme ça, l'école. Ça exige qu'on apprenne, qu'on intègre des informations, qu'on travaille sur nos textes, que ce soit par des dictées, par des analyses dans nos grammaires, par de la mathématique ou autrement. Alors donc, c'est un projet de réforme qui est majeur.

(11 h 50)

Il y a d'autres pièces dont on a peu parlé maintenant, mais qui ont fait l'objet de longues discussions en juin dernier. Toute la réforme des commissions scolaires pour que celles-ci deviennent organisées sur une base linguistique, soit francophone ou anglophone. Mais ce sont des pièces qui sont en appui à la réforme de la Loi sur l'instruction publique, et le véritable élément de fond, cela reste l'énoncé de politique éducative et ce qu'on enseigne à nos enfants.

Alors, revenons maintenant à la loi pour vous dire comment nous avons conçu cette loi-là, comment nous l'avons écrite, cette loi. D'abord, on n'a pas commencé hier matin. Je pense que vous en conviendrez, M. le Président, que ça aurait été assez prétentieux de notre part que de décider en quelques jours qu'on modifiait ce qui se passait dans nos écoles sans par ailleurs d'autres réflexions. Donc, depuis que nous sommes au gouvernement, d'abord par le ministre de l'Éducation qui m'a précédée à cette fonction, on a mis en place la Commission des états généraux qui a eu comme mandat d'identifier ce qui faisait consensus au sein de nos écoles québécoises, en élargissant très largement le débat. Ça n'a pas été un débat que de spécialistes, on est allé voir les parents, on est allé voir les groupes communautaires, on est allé voir les milieux d'affaires, on a fait le tour du Québec, et il y a des milliers de personnes qui sont venues témoigner à la Commission des états généraux.

Cette Commission nous a remis un rapport, il y a un an maintenant. Ça ne fait pas très longtemps, mais je pense qu'on a été assez vigilant pour être efficace et rapidement répondre aux besoins qui avaient été exprimés. Parce que je pense aussi que c'est ce qui fait la crédibilité du processus dans lequel on est engagé, il y a des problèmes d'identifiés, il y a des solutions potentielles, rapidement nous nous adressons à ces problèmes, et nous appliquons les solutions que nous pouvons mettre en oeuvre maintenant.

Donc, la Commission des états généraux nous fait rapport, nous retenons l'essentiel de ses recommandations, à quelques recommandations près, et s'engage tout le processus de préparation de ce qui nous amène à l'étape actuelle. Donc, cela fait presque trois ans dans le fond que c'est engagé, mettons deux ans et demi parce que la Commission des états généraux n'a quand même pas démarré immédiatement au moment où nous sommes arrivés au gouvernement. Alors, cette commission a donc siégé, a donc fait des recommandations, et ce qu'on retrouve dans la loi va dans le sens de ce qui nous a été recommandé.

Évidemment, la Commission ne pouvait pas elle-même écrire la loi, ça va de soi, ce n'est pas son rôle, ce n'était pas sa responsabilité. Mais la Commission nous a fait un certain nombre de suggestions, entre autres, les responsabilités nouvelles à confier à l'école pour en faire une véritable communauté éducative qui va mettre à profit son milieu, qui va engager les parents dans l'ensemble de cette dynamique; ça vient essentiellement des états généraux. Il faut le voir. Mais ce n'étaient pas les seuls qui avaient fait cette réflexion et qui nous proposaient cela. Quand on fait le tour de tout ce que nous avons comme documents, comme avis au ministère de l'Éducation, on en a épais comme ça. Il s'agissait d'avoir, je dirais, le sens suffisamment pratique pour aller en faire la synthèse et retenir l'essentiel de ce qui nous était proposé.

Cette commission des états généraux a siégé, nous avons eu des avis du Conseil supérieur de l'éducation. Vous savez que, bon an mal an, il publie quatre, cinq ou six avis; d'ailleurs, il y en a un qu'il vient de rendre public – j'en profite pour le mentionner – qui est fort intéressant, c'est leur rapport annuel. Ils font toujours état à ce moment-là des besoins de l'éducation relativement à certains secteurs, et ils abordent ici L'insertion sociale et professionnelle: une responsabilité à partager , et je pense que cela mérite d'être consulté et lu. Mais ils nous produisent comme ça plusieurs rapports.

M. Ouimet: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Marquette, sur une question de règlement.

M. Ouimet: En m'excusant auprès de la ministre de l'Éducation de l'interrompre, mais j'aimerais peut-être la ramener à la pertinence de la motion. La question qui est devant nous, c'est: Pourquoi la ministre de l'Éducation tient-elle à écarter des groupes du processus de consultation? Alors, je sais qu'elle a fait un grand tour de piste, mais j'espère qu'elle va arriver à l'essentiel de la motion pour nous dire pourquoi elle écarte des groupes du processus de consultation.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, Mme la ministre de l'Éducation, je vous inviterais à poursuivre, et je suis persuadé que tout ça va se rattacher pour faire en sorte que l'ensemble des parlementaires voient bien la pertinence de vos propos.

Mme Marois: Alors, je vous remercie, M. le Président. Le député n'a pas à s'inquiéter, nous y arrivons. Et d'ailleurs, il fallait quand même qu'on se mette dans le contexte pour expliquer. Je pense que le député va convenir avec moi qu'il fallait qu'on explique ce qu'on allait étudier et ce qu'on avait fait pour arriver à cette loi que, là, maintenant, on va adopter, j'espère, bien sûr, avec la collaboration de tous les membres de la commission et de l'Assemblée nationale, d'ici Noël.

Alors, ce que je voulais démontrer d'abord, c'est le contenu de ce sur quoi nous travaillons et le situer dans l'ensemble des autres mesures que nous appliquons. Je ne parle pas de toutes les autres mesures, je n'ai parlé que de deux ou trois éléments de la réforme. Si elle concerne les universités et les cégeps, je n'y reviens pas. Je démontrais, par la Commission des états généraux, par les avis du Conseil supérieur de l'éducation, puis là je pourrais compléter par le rapport Corbo qui nous a parlé des questions scolaires, par le rapport Inchauspé, par la consultation générale que nous avons tenue en commission parlementaire sur le projet de loi n° 109, le printemps dernier, qui concernait une pièce de la réforme, mais aussi par la consultation générale à laquelle nous avons procédé sur l'avant-projet de loi concernant la répartition des pouvoirs... À ce moment-là, M. le Président, nous avons consulté et reçu 49 groupes ou personnes. Ce n'est pas rien, hein? Alors, il faut faire le cercle au grand complet, de la Commission des états généraux en passant par tous les groupes qui nous ont donné des avis, qui étaient autorisés à le faire et auxquels on avait demandé de le faire. D'ailleurs, on a ajouté une consultation générale où à peu près tous les groupes engagés ou participant d'une façon quelconque à une activité liée au projet de loi, et même de très loin, dans certains cas, ont pu venir nous présenter leur point de vue.

D'ailleurs, à cet égard, notre gouvernement a une fiche assez remarquable. Je pense que, par comparaison avec ce qui s'est fait dans le passé, une année, entre autres, où je siégeais comme député de l'opposition, qui avait été faste, au moment où on recevait les groupes du domaine de la santé, on avait reçu 450 groupes, parce qu'on faisait une grande commission parlementaire sur la santé et les services sociaux. Et, cette année, en 1996-1997, on aura reçu 898 groupes et personnes, 828 groupes et 70 personnes. On ne peut pas dire qu'on refuse de consulter, non. C'est la tradition, maintenant, qui est en train de s'établir, qui n'existait pas, d'ailleurs, il y a quelques années – c'est récent – qui a commencé à s'établir, où, une fois qu'on a fait une très grande consultation, on en refait une autre lorsqu'on revient avec soit un projet de loi, lorsqu'il s'agissait d'un avant-projet, ou soit lorsque le projet que l'on représente est relativement amendé. À ce moment-là, évidemment, on ne refait pas la même consultation. On retient les groupes qui, dans chacun de leur secteur, vont nous apporter un éclairage sur les amendements que nous avons faits quant à l'avant-projet qui avait été déposé et, d'ailleurs, que j'ai eu l'occasion de largement publiciser depuis quelques semaines.

Alors, on revient aux groupes qui représentent toutes les composantes du système d'éducation et même plus que cela, parce qu'on va recevoir, entre autres, la Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, qui n'est pas directement liée à ce projet mais qui était venue, nous avait donné des avis et avait souhaité revenir. Mais, quand on regarde, on reçoit les parents, on reçoit les enseignants et les autres personnels de l'enseignement – ils sont dans les centrales que l'on va recevoir –, on reçoit ceux qui dirigent les institutions, les cadres scolaires, les directeurs et directrices d'école, on reçoit les fédérations de commissions scolaires, autant du côté protestant que du côté catholique – évidemment, selon l'ancienne dénomination qui changera bientôt – la Fédération des commissions scolaires et l'Association québécoise des commissions scolaires, et, en plus, l'Association des services de garde en milieu scolaire. On fera un amendement pour recevoir aussi une autre organisation qui est plus liée aux droits de la personne, comme l'est la Commission des droits.

(12 heures)

Alors, je me dis, avec ces personnes-là, qui sont les plus avisées, qui sont les plus concernées, on croit qu'on est capable de refaire le point correctement. Ah, c'est sûr qu'on aurait pu recevoir plusieurs autres comités de parents, par rapport à la Fédération des comités de parents. Mais on pense qu'ils sont suffisamment représentatifs pour aller chercher les avis de leurs parents et nous faire valoir leur point de vue. On aurait pu inviter des commissions scolaires de la CECM, la Commission des écoles catholiques de Québec, la Commission des écoles protestantes du Grand Montréal, la commission Baldwin-Cartier. On aurait pu recevoir la commission scolaire Jacques-Cartier, la commission scolaire de Taillon, mais on pense que leurs fédérations, la Fédération des commissions scolaires, pour ce qui est plutôt des francophones et l'association québécoise qui représente les commissions scolaires protestantes mais davantage anglophones, sont suffisamment avisées pour aller chercher les points de vue de leurs membres et les représenter et même se faire accompagner de l'une ou l'autre des commissions scolaires si elles croient utile de le faire.

Alors, avec la liste des personnes et des organismes, surtout, que nous recevrons, nous croyons que nous pourrons faire le point correctement quant aux changements qu'il y a eu entre l'avant-projet de loi et le projet de loi. Maintenant, que certaines de ces organisations, avec les changements que nous avons apportés, continuent d'être en désaccord avec certains aspects de la loi, moi, j'accepte ça. J'accepte ça, je comprends ça, je respecte ça et je suis d'accord. Mais j'ai une responsabilité, moi, comme ministre de l'Éducation. Notre gouvernement a une responsabilité une fois qu'il a entendu les points de vue, et il les a entendus très largement – en fait, c'était la démonstration, tout à l'heure, que je faisais de l'entonnoir. Et progressivement on a travaillé, on a travaillé, on a précisé les concepts, les mesures, puis là on arrive à un point de décision une fois qu'on a entendu les gens, une fois qu'on a fait les correctifs, qu'on a précisé des choses.

Je vais vous dire, avec mes fonctionnaires, on s'est fait la réflexion suivante à la fin de la commission, et je l'ai dit... Oh! je veux laisser un peu de place à mon collègue, alors je vais terminer rapidement. D'accord. Vous me dites que mon collègue a quelques minutes après, que je peux utiliser tout mon temps? D'accord.

On s'est fait la réflexion suivante après la commission et après tout ce travail, on s'est dit: Jamais une commission, pour nous, n'aura été aussi utile en termes d'éclairage, en termes d'apport. Et on a corrigé, réorienté beaucoup des éléments qu'on nous suggérait de préciser, de confirmer, de mieux définir. En ce sens, je pense qu'on répond beaucoup et à beaucoup des attentes qui nous ont été présentées. Pas à toutes, et certains de ces groupes vont venir nous le dire. Évidemment, vous comprendrez qu'une ministre de l'Éducation un peu responsable n'attend pas que les groupes viennent le lui dire en commission. Je les ai déjà entendus un peu, j'ai déjà, par mes conseillers ou autrement, communiqué avec ces groupes. Je sais quelles sont encore leurs craintes, leurs peurs, leurs inquiétudes.

Mais – et c'est avec cela que je veux terminer, M. le Président – il reste qu'un gouvernement, il a une responsabilité, c'est de gérer, d'assurer la livraison des services, peu importent les secteurs où ils se trouvent, et de décider. Décider, dans une société démocratique, ça ne veut pas dire avoir l'unanimité des personnes concernées. Ce ne serait pas possible. Ça, les sociétés à modèle dictatorial s'en chargent. On leur laisse ça, ce n'est pas notre cas. La démocratie, ce n'est pas l'unanimité, c'est, cependant, la recherche de consensus, la recherche de la majorité.

Je crois que, avec le projet qui est devant nous, on viendra nous dire encore... et nous faire certaines remarques. On pourra, en ce sens, sûrement peut-être apporter quelques modifications par amendement. Avec le travail que je ferai avec mes collègues de la commission, autant ceux de l'opposition que ceux de la majorité, nous bonifierons sans doute encore le projet. Les commentaires que nous feront les associations et représentants des différents groupes qui viendront nous seront très utiles en ce sens. Mais je pense que ceux-ci sont suffisamment représentatifs, sont suffisamment crédibles pour porter le point de vue de leurs membres, pour nous indiquer les écueils que l'on pourrait encore éviter lors de l'adoption du projet de loi. Et je crois que nous aurons ainsi accompli notre devoir de parlementaires qui est d'être à l'écoute de nos concitoyens et de nos concitoyennes, mais qui est aussi de les rassurer quant à la décision que nous allons prendre et sur le fait que nous allons en prendre. Et nous allons les prendre au nom et pour l'intérêt pas d'un groupe ou de l'autre, essentiellement pour les jeunes qui fréquentent les écoles du Québec, M. le Président. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre de l'Éducation. Nous allons maintenant céder la parole au critique officiel de l'opposition en matière d'éducation et député de Marquette. M. le député, je tiens à vous mentionner que vous avez un temps de parole de 25 minutes et je pourrai également, lors de votre allocution, vous mentionner possiblement un deux minutes et demie additionnel. Alors, M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Fidèle à ses habitudes et malheureusement, la ministre de l'Éducation soulève de nouveaux débats. Ce qui est en cause ici, ce n'est pas de refaire la consultation que nous avons faite l'automne dernier, au mois de septembre dernier. La ministre disait: On aurait pu inviter la CEPGM, la commission scolaire Baldwin-Cartier, la commission scolaire Jacques-Cartier, la commission scolaire de l'île de Montréal. Elle sait comme moi que ces organismes-là, ces commissions scolaires là n'ont pas demandé à être entendues.

Il y a des groupes cependant qui ont demandé à être entendus, particulièrement des groupes de parents. La question qui est soulevée, c'est: Pourquoi la ministre de l'Éducation veut-elle éviter d'entendre le point de vue de parents qui peuvent avoir un point de vue différent de la Fédération des comités de parents de la province de Québec et qui voudraient faire entendre les particularités régionales de l'endroit où sont situées les écoles du Québec, d'une part. Et, d'autre part, il y a d'autres organismes qui ont des expertises que, par exemple, la Fédération des commissions scolaires n'a pas. Je pense, entre autres, à la Commission des écoles catholiques de Montréal. J'ai échangé avec quelques personnes de la Fédération des commissions scolaires qui me disaient que ça serait véritablement un drame si la CECM n'était pas consultée, à cause de l'expertise pédagogique qu'elle a développée au cours des années.

Alors, qu'est-ce que ça serait, Mme la ministre, d'accorder deux heures de plus pour entendre des groupes qui ont des points de vue à faire valoir? Lorsqu'on regarde la liste, on se rend compte, au niveau des parents, qu'ils auront un douzième. Ils représentent un douzième du poids que la ministre veut accorder à tous les autres groupes. C'est ça, le poids qu'accorde la ministre de l'Éducation aux parents dans sa consultation: un organisme sur 12 organismes qui représente des parents, une heure sur 12 heures. Et pourtant les parents qui ont été consultés ont été consultés sur un projet x. Le projet a complètement changé suite à la consultation qui avait été menée au mois de septembre dernier. C'est un nouveau projet de loi que la ministre de l'Éducation a mis sur la table, qui ne fait pas l'affaire des parents, mais là pas du tout.

Et la ministre dit: Ah! on les a tous entendus au mois de septembre dernier. Ils sont venus nous dire ce qu'ils avaient à dire. Oui, mais là vous venez de changer les règles du jeu de façon importante. Le peu de poids que vous accordez aux parents dans les faits, dans les gestes que vous posez... Et, encore ce matin, c'est un geste concret. On va inviter, au niveau de la consultation particulière, 12 organismes, et un seul représente les parents. Alors qu'on dit, on tient un discours qu'on veut favoriser une plus grande participation des parents, on veut leur faire plus de place dans notre système scolaire, le premier geste qui est posé par la ministre de l'Éducation, c'est de refuser d'entendre des parents qui veulent être entendus.

(12 h 10)

Pour le bénéfice du député de Masson, je vais lui lire la lettre que j'ai reçue ce matin, le 28 novembre 1997, adressée à la ministre de l'Éducation et signée par l'Association des comités de parents de la région de Québec, signée par Mme Anne Bureau. Voici ce que Mme Bureau disait: «Vous aviez vous-même souligné l'importance des parents dans le système scolaire et la maturité qu'ils avaient acquise au fil des ans. De plus, vous nous disiez que les parents étaient de réels partenaires en éducation et qu'il fallait qu'ils continuent à prendre leur place. Cependant, le projet de loi n° 180, selon nous, ne reflète pas votre commentaire du mois de septembre dernier.» Et là c'est le même leitmotiv du double discours gouvernemental. On prétend, d'un côté, vouloir faire plus de place aux parents; dans les gestes concrets, dans les décisions qu'on prend, on les écarte complètement.

Mme Bureau disait ceci: «Il nous apparaît essentiel de prendre notre place comme parents et de vous faire part de nos commentaires sur le projet de loi, et ce, malgré le peu de temps dont nous disposons pour consulter l'ensemble de nos membres. Pour ce faire – j'espère que le député de Masson écoute – nous aimerions être invités, tout comme la Fédération des comités de parents de la province, à venir vous expliquer nos opinions lors de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 180.»

Les parents qui parlent, là, pourtant le système scolaire devrait leur faire une place. Ils disent ceci: «Il nous semble important de vous décrire nos réalités régionales. Des points majeurs sont à discuter. Et il y va de l'avenir de nos enfants – pas les enfants de la ministre de l'Éducation; les enfants des parents qui veulent être consultés en commission parlementaire – il y va de l'intérêt et de l'avenir de nos enfants, puisque le but ultime de tout le système en éducation est l'enfant, qui est le coeur du système scolaire.»

La ministre leur répond: On ne veut pas vous entendre, on ne vous trouve pas assez importants pour vous faire une place, M. le Président. Et on comprend très bien pourquoi la ministre refuse de les entendre. Parce que les parents viendraient dire à la ministre de l'Éducation le sentiment qu'ils ont eu après le dépôt du projet de loi qui allait complètement, mais là complètement à l'encontre de ce que la ministre disait en commission parlementaire lorsqu'elle voulait les rassurer, lorsqu'elle tentait de vouloir les amadouer, de leur dire: Inquiétez-vous pas, on veut vous faire beaucoup de place dans notre système scolaire, vous êtes importants, puis je vous fais confiance, puis vous avez acquis une certaine maturité.

Eh bien, M. le Président, dans La Presse , voici le titre, Les parents ont été trahis par la ministre de l'Éducation , M. le Président. La Fédération des comités de parents insatisfaite de l'avant-projet de loi . Le projet de la ministre de l'Éducation sème l'inquiétude chez les parents . Ce serait intéressant de pouvoir les entendre, voir en quoi ils sentent qu'ils ont été trahis, en quoi le projet de loi ne leur fait pas de place. Et on connaît les réponses, parce que j'ai passé au peigne fin le projet de loi, tout comme l'ont fait les différents parents de la province, puis ils se disent: Ça n'a pas de bon sens, on est en train de s'en faire passer une petite vite par le gouvernement et on veut être entendus en commission parlementaire, on veut faire valoir notre point de vue. La ministre dit non.

Ce n'est pas pour rien que nous sommes en train de débattre d'une motion d'une heure. L'opposition veut entendre le point de vue des parents. Ils ont demandé à être entendus. Puis ce n'est pas un douzième, ce n'est pas un groupe sur 12, là. Il y a d'autres parents qui veulent être entendus, il y a d'autres parents qui vivent beaucoup d'inquiétudes et d'incertitudes. Parce que la ministre leur a tenu un discours au mois de septembre, mais, lorsque les gestes sont posés, lorsque le projet de loi est arrêté, lorsque la ministre a pris ses décisions, elle les a complètement mis à l'écart.

Les parents occupaient tous les postes au niveau du comité d'école. La ministre décide: Ce comité-là, je le fais disparaître. Le conseil d'orientation, où les parents devaient être à tout le moins à parité avec les autres membres du personnel et, dans les faits, dans la réalité, les parents étaient toujours majoritaires, la ministre fait disparaître ce comité-là. Elle le remplace par un conseil d'établissement où, au niveau primaire, les parents ne sont pas majoritaires et où, au niveau secondaire, les parents sont minoritaires. Minoritaires! Et la ministre dit: Oui, mais le conseil d'établissement va avoir plus de pouvoirs. Mais les vrais pouvoirs dans le projet de loi... La ministre le sait parce que les article 82, 83, 87, 96.10 donnent des pouvoirs aux enseignants, aux membres du personnel, à la direction d'école. Le rôle des parents, il va se limiter à estampiller les décisions qu'auront prises ces personnes-là.

Les parents l'ont vu pareil comme l'opposition, et c'est pour ça qu'ils veulent être entendus, et c'est pour ça qu'ils ont le sentiment d'avoir été trahis, d'avoir été bernés par le gouvernement et par la ministre de l'Éducation. C'est la raison pour laquelle la ministre ne veut pas entendre leur point de vue en commission parlementaire. Elle va noyauter le point de vue d'un groupe de parents en invitant 11 autres groupes pour noyauter l'affaire. C'est ça qui est en train de se passer. Plus de place pour la CSN que pour les parents dans notre système scolaire. C'est ça qui est la vérité. C'est ça, le choix qu'a fait la ministre de l'Éducation.

Et, moi, je lui dis: De grâce, acceptez donc d'entendre d'autres groupes de parents avant qu'il soit trop tard. Avant qu'il soit trop tard, on aurait leur éclairage. On saurait, là, en quoi les parents vivent de l'inquiétude, parce qu'ils viennent de se rendre compte, M. le Président, en lisant le projet de loi, en voyant les dispositions qu'a choisies la ministre au détriment des parents, qu'ils n'ont pas de pouvoirs. Ils n'ont rien à dire. Ils n'ont à peu près rien à dire, sauf la demande que va leur faire la ministre de l'Éducation de solliciter des fonds en vendant des barres de chocolat et en vendant des gratteux. C'est ça, le rôle des parents que prévoit la ministre de l'Éducation dans notre système scolaire.

Les parents, vous êtes bons pour faire des levées de fonds, puis on va prévoir des articles dans le projet de loi qui vont vous permettre de faire ça. Mais, sur les autres pouvoirs dans le projet de loi, la ministre dit aux parents: Vous n'êtes pas compétents. Vous n'êtes pas compétents, vous n'avez pas un mot à dire dans ces affaires-là. Ces affaires-là, on va les confier aux membres du personnel, on va les confier aux membres du personnel enseignant. Eux autres, ils vont s'entendre, puis par la suite ils vont demander au directeur d'école: Êtes-vous d'accord avec ça, M. le directeur d'école, Mme la directrice d'école? Si le directeur ou la directrice d'école répond oui, bien, là, les choses sont attachées. Là, les choses sont attachées.

Les pauvres parents qui vont aller siéger au conseil d'établissement n'auront pas un seul mot à dire parce que l'affaire est tout attachée. Ils montent au conseil d'établissement pour décision; bien, là, si le directeur d'école, la directrice d'école est en accord avec les membres du personnel puis avec le personnel enseignant, qu'est-ce que vous pensez qu'ils vont faire? Ils vont demander aux parents: Approuvez ça. Dites oui à ce que nous avons conçu, à ce que nous avons élaboré sans tenir compte de vos préoccupations.

M. le Président, c'est ce système scolaire là que préconise la ministre de l'Éducation. Nous, on dit: Les parents sont les premiers éducateurs de leurs enfants. Ils ont un mot à dire dans notre système scolaire. La loi 107, qui avait été votée sous un régime libéral, leur faisait cette place-là. On leur donnait deux comités avec des pouvoirs pour élaborer le projet éducatif de l'école. Il n'y a personne d'autre qui venait se mêler de ça, les autres étaient à titre consultatif. Là, la ministre est en train de dire: Les parents, vous n'avez pas votre mot à dire dans ce qui se passe à l'école.

Si c'était juste l'opposition qui disait ça, M. le Président, je pourrais comprendre les réactions de la ministre, mais ça vient de tous les groupes de parents que j'ai consultés, y compris le président de la Fédération des comités de parents de la province de Québec. Puis ce n'est pas pour rien qu'il a fait une sortie en point de presse. Dès qu'il a eu terminé son analyse du projet de loi, il s'est dit: Bien, on est en train de se faire avoir. Noël est passé bien tôt pour la CEQ. Voilà les réactions de M. Stronach, président de la Fédération des comités de parents. Il constate que Noël est arrivé bien tôt, cette année, pour la CEQ. Mais, dans le bas de laine des parents, il n'y a rien. Il n'y a rien dans le bas de laine des parents de la part de la ministre de l'Éducation.

Il disait ceci dans Le Soleil du 21 novembre, la semaine passée. Jour pour jour, il y a une semaine, les parents disaient ceci: «Après l'examen du projet de loi, la Fédération constate que les pouvoirs confiés au conseil d'établissement sont loin d'être le reflet de l'avant-projet» de loi. On disait ceci: La Fédération «s'inquiète également des services que les parents devront financer par des campagnes de souscription» et des levées de fonds.

(12 h 20)

On a dit aux parents: Vous n'avez pas un mot à dire au niveau de l'école, sauf une chose: vous allez vendre des barres de chocolat pour nous, vous allez vendre des gratteux, vous allez solliciter des fonds. L'État est en train de se désengager de l'éducation, mais on demande aux parents de prendre le relais. Puis on le voit constamment à tous les jours. Plus ça va, plus les parents doivent piger dans leurs poches, sortir, mettre de l'argent sur la table pour répondre aux intérêts et aux besoins de leurs enfants à cause des compressions budgétaires brutales et sans précédent imposées par le gouvernement du Parti québécois.

On demande juste, M. le Président, à ce que les parents puissent être entendus en commission parlementaire. Ils ont un mot à dire, ils veulent prendre de la place. Ils veulent pouvoir être consultés sur des enjeux aussi importants que l'évaluation des apprentissages, le bulletin scolaire, le choix du manuel, parce que trop souvent les manuels scolaires qui auront été approuvés par le personnel enseignant et par les directions d'école vont faire en sorte qu'il n'y aura pas d'exercices dans ce manuel-là, c'est déjà le problème que nous vivons actuellement. Et puis par la suite les parents, on leur demande d'acheter des cahiers d'exercices, et dans certains cas les cahiers d'exercices au primaire remplacent les manuels scolaires. Les parents veulent avoir leur mot à dire dans le choix de ces manuels-là parce qu'ils savent que ça leur coûte de l'argent à chaque année, à chaque session. Mais la ministre est en train de dire: Vous n'avez rien à dire, vous, les parents, là-dessus; le discours que je tenais au mois de septembre, ça, c'était pour vous faire plaisir.

Mais, quand on regarde les faits véritables, là... J'invite le député de Masson, qui trouve ça drôle, à consulter les parents dans son comté, qu'il aille voir les parents qui siègent présentement aux comités d'école et aux conseils d'orientation. Les parents vont lui dire exactement ce qu'ils pensent de l'avant-projet de loi et du projet de loi. Ils aimeraient être entendus, ces parents-là, parce que la place qu'ils avaient dans notre système scolaire, elle disparaît au profit des employés, des centrales syndicales. Et qu'est-ce que ça va être au niveau du conseil d'établissement? Vingt personnes qui vont siéger autour de la table avec les délégués syndicaux.

Oui, ils ont à coeur les intérêts de nos enfants, mais ils sont un petit peu en conflit d'intérêts, ils ont également à coeur leurs propres intérêts comme travailleurs. Ça, c'est légitime, M. le Président, il est légitime que les travailleurs aient à coeur leurs propres intérêts comme travailleurs. Mais comment est-ce qu'on va prendre des décisions quand il va y avoir conflit entre leurs intérêts comme travailleurs puis les responsabilités que nous avons à l'égard de nos enfants? Quel sera le contrepoids au conseil d'établissement, puisque les parents n'auront absolument rien à dire ou à peu près?

C'est ça qui est scandaleux, et la ministre est bien consciente de tout ça. Elle lit les journaux, pareil comme moi. Elle est consciente que les parents sont en fusil contre elle, elle est consciente que les parents ont la nette impression de s'en être fait passer une petite vite par la ministre de l'Éducation. Et là les parents disent: On veut être entendus, on veut vous dire notre façon de penser, Mme la ministre. Pas de place. Puis ils écrivaient... On sait que les parents ont peu de moyens à leur disposition.

Bien, les parents de la région de Québec veulent être entendus. Ils ont pris la peine d'écrire une lettre à la ministre de l'Éducation ce matin, après avoir consulté leurs membres, et je répète ce qu'ils disaient: «Vous aviez, Mme la ministre, souligné l'importance des parents dans le système scolaire et la maturité qu'ils avaient acquise au fil des ans. Vous nous disiez que les parents étaient de réels partenaires en éducation et qu'il fallait qu'ils continuent de prendre leur place.» Là, les parents répondent: «Il nous apparaît essentiel de prendre notre place comme parents et de vous faire part de nos commentaires sur le projet de loi, et ce, malgré le peu de temps qu'on a pour la consultation. Nous aimerions être invités à venir vous expliquer nos opinions lors de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 180. Il nous semble important de vous décrire nos réalités régionales.» La ministre répond non.

Les commissions scolaires aussi, M. le Président. Sur le plan des écoles ayant des projets à vocation particulière, des écoles internationales, la ministre a tenu un beau discours lors du dépôt du projet de loi: J'ai réussi à trouver l'équilibre, j'ai réussi à ménager la chèvre et le chou. Pourtant, ça ne résiste pas à l'analyse.

Le Vice-Président (M. Pinard): S'il vous plaît, est-ce trop demander de vous asseoir? Merci. Voulez-vous continuer, s'il vous plaît.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Ça ne résiste pas à l'analyse. Ça va être à peu près inapplicable. La ministre a installé des dispositions dans la loi qui vont faire en sorte que, à moyen et à long terme, les projets d'école internationale vont disparaître. La ministre le sait. Avec la règle de l'obligation de prendre les enfants qui viennent des écoles de quartier, vous le savez, le mécanisme que vous avez installé dans la loi va faire en sorte que ces projets éducatifs là vont disparaître à moyen et à long terme. Pour toutes les nouvelles écoles, la ministre dit: Ça va être un pouvoir exceptionnel que je vais exercer. Et je vous dis, d'ores et déjà, que la réponse sera non, par la ministre de l'Éducation.

Par rapport aux projets à vocation particulière, les parents n'ont plus leur mot à dire parce que ce pouvoir-là relève des enseignants. La ministre ne le sait pas? Je l'invite à lire l'article 96.10. L'enrichissement, l'adaptation des programmes locaux d'éducation sur lesquels les parents veulent avoir leur mot à dire, ils ont des idées aussi, ils ont des intérêts qu'ils voudraient mettre de l'avant, ils n'ont pas leur mot à dire là-dessus. Puis on le dit bien dans la loi, sur le projet éducatif pour des besoins particuliers des élèves, tout ça échappe aux parents. Ils n'ont pas un mot à dire. C'est le personnel enseignant, puis on connaît leur position...

Mme Marois: Question de règlement.

Le Vice-Président (M. Pinard): Mme la ministre.

Mme Marois: Est-ce qu'on peut juste rétablir un fait?

Le Vice-Président (M. Pinard): Immédiatement après.

Mme Marois: Immédiatement après? Très bien, M. le Président. On rétablira les faits.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Oui, la ministre aimerait rétablir les faits avec son interprétation. Son interprétation, là. Mais l'interprétation des parents puis l'interprétation d'autres observateurs, dont des professeurs d'université, n'est pas du tout la même. Et l'interprétation de la ministre de l'Éducation, c'est qu'on étire l'élastique, c'est qu'on fait accroire aux parents: Inquiétez-vous pas, tout est là. Mais, même les chroniqueurs en éducation... Je pourrais lire des chroniques d'éducation que nous avons entendues en région qui ne sont pas du tout à cet effet-là. Puis c'est la vieille stratégie, M. le Président, on laisse accroire... En répétant quelque chose tellement souvent, on pense que les gens vont nous croire. Mais ça ne résiste pas à l'analyse.

Il y a une commission scolaire qui existe depuis 1867, qui était le ministère de l'Éducation jusqu'en 1964, qui a une expertise que d'autres commissions scolaires n'ont pas, par sa taille, par ses fonctionnaires, par tout ce qu'elle a fait dans le passé. Cette commission scolaire là souhaite être entendue. Elle a demandé d'être entendue sur la question des projets éducatifs à vocation particulière, parce que cette commission scolaire là ne partage pas les déclarations de la ministre de l'Éducation. Cette commission scolaire là pense que ses projets éducatifs, même au niveau des écoles internationales, pourraient disparaître de la façon dont le projet de loi est libellé, et ça, à moyen et à long terme.

La ministre est au courant, la ministre le sait, ce que la commission scolaire veut venir lui dire, mais ça ne fait pas son affaire parce que ça contredit son discours. Donc, quelle est la décision qu'elle prend? On ne les entendra pas en commission parlementaire. On ne les entendra pas en commission parlementaire parce que, riches de leur expertise pédagogique, ils vont venir défendre un point de vue qui est contraire au discours que tient la ministre de l'Éducation.

(12 h 30)

Alors, nous, ce qu'on demande, comme opposition... Puis je rappelle, M. le Président, que n'eût été de mon intervention auprès de la ministre de l'Éducation, les enfants ayant des difficultés d'adaptation ou d'apprentissage, des enfants handicapés n'auraient pas été entendus. Et c'est la raison pour laquelle, dans quelques minutes, le leader adjoint du gouvernement va se lever pour déposer un amendement pour entendre l'Office des personnes handicapées du Québec. La ministre ne voulait pas les entendre, eux non plus, parce qu'ils ont des choses à dire qui vont à l'encontre des promesses qu'a tenues la ministre de l'Éducation en commission parlementaire au mois de septembre dernier. Ce n'est qu'in extremis que la motion d'amendement sera déposée par le leader de l'opposition. La ministre ne voulait pas les entendre. J'ai dit: Ça n'a pas de sacré bon sens; il y a des personnes ayant des difficultés d'adaptation et d'apprentissage, des personnes handicapées, vous n'entendrez même pas leur point de vue en commission parlementaire alors que votre projet de loi vient à l'encontre de leurs intérêts. Ils veulent venir vous le dire.

Heureusement, M. le Président, la ministre a reconnu une lacune importante. Heureusement, il y aura un amendement apporté par le leader adjoint du gouvernement. Moi, je souhaiterais que la ministre de l'Éducation et le leader adjoint puissent accepter d'autres amendements, qu'il puisse les suggérer lui-même, ces amendements-là, pour entendre les parents qui veulent être entendus en commission parlementaire, et qu'ils veuillent entendre la plus grosse commission scolaire du Québec, qui existe depuis 1867, qui a une expertise en matière de projets à vocation particulière que nulle autre commission scolaire n'a. Ces deux groupes veulent être entendus. C'est quoi, Mme la ministre, dans votre horaire, d'ajouter deux heures, deux heures de temps?

Parce que le fond du problème, c'est que cet important projet de loi là, la ministre va le liquider en moins de deux semaines. Je me demande si on va avoir le temps d'étudier chacun des articles en commission parlementaire. M. Ryan, grand démocrate, lui, avait entendu tous les groupes et on avait fait l'étude de chaque article du projet de loi, et l'opposition de l'époque, le Parti québécois, avait eu tout le temps pour faire valoir tous les points de vue. Malheureusement, un gouvernement qui se dit démocrate ne respecte pas ces mêmes intentions. Pourtant, ça va avoir un effet important dans nos écoles et pour l'avenir de nos enfants. Et la ministre est en train de dire: Moi, je veux passer à travers ça rapidement puis je ne veux pas entendre ce que les parents ont à dire.

Moi, je pense, M. le Président, que c'est très malheureux, surtout que l'opposition a offert toute sa collaboration à la ministre pour pouvoir améliorer les choses de façon constructive, faire des débats sur des articles qui nous opposent au niveau de la philosophie. Mais, les autres, qu'on prenne le temps pour bien évaluer les impacts. Par la suite, vous avez votre majorité, vous allez voter en faveur; nous voterons contre, à certains égards, sur ces articles-là. Donnons-nous le temps de bien faire les choses et d'entendre le point de vue des personnes qui sont directement touchées par le projet de loi. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette. Avant de céder la parole... Mme la ministre, concernant...

Mme Marois: M. le Président, en vertu de 212...

Le Vice-Président (M. Pinard): Exactement.

Mme Marois: ...on a interprété mes propos, puisque, dans les faits, les parents sont les premiers consultés, sur tous les projets, pour des écoles dédiées et à vocation particulière.


Avis de sanction

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre. Avant de céder la parole au leader du gouvernement, je vous avise qu'il y aura sanction du projet de loi n° 174, Loi modifiant la Loi sur les explosifs, au cabinet de Son Excellence le lieutenant-gouverneur, cet après-midi, à 14 heures.


Reprise du débat sur la motion

Alors, M. le leader du gouvernement, il vous reste un temps de parole de 9 min 30 s.


M. André Boulerice

M. Boulerice: M. le Président, on a souvent dit du député de Marquette qu'il pouvait être soporifique dans ses propos, mais je m'aperçois qu'il est également amnésique. Il nous parle de démocratie. Eh bien, M. le Président, j'aimerais lui rappeler que nous avons reçu, en 1996-1997, et 1997 n'est pas encore complétée, au-delà de 900 groupes en commission parlementaire, c'est-à-dire plus du double que ce que ses petits copains, avant qu'il arrive, ont fait en cette Assemblée nationale. Ce serait peut-être intéressant aussi de lui dire qu'il y a eu, en termes de nombre d'heures d'audience, session et hors session, 1 703 heures de consultation, alors que le «peak» – si vous me permettez cette expression vulgaire – dans leur cas, a été d'environ 936 heures, donc plus du double, M. le Président. Alors, quand il vient, drapé d'une espèce de manteau de virginité, nous parler de démocratie, je pense qu'il aurait avantage à regarder ce que sa formation politique a fait lorsqu'elle était au gouvernement. Quand on épouse une famille, on prend l'héritage. Il y a peut-être des bijoux, mais il y a des vieux meubles qui ont été passablement amochés. Qu'il fasse un examen de l'héritage qu'il a reçu de sa formation politique, et là il pourra peut-être venir donner des leçons en cette Assemblée.

Amnésique, M. le Président, puisque, au début des années quatre-vingt, le député de Bourget, qui était ministre de l'Éducation, avait proposé une réforme de l'enseignement où il donnait une place importante aux parents. C'était le projet de loi 40, qui est devenu le projet de loi 3. Que faisait le député de Marquette? Eh bien, le député de Marquette s'y opposait en disant que cela donnait trop de place aux parents. Alors, écoutez, autres temps, autres moeurs. O tempora! O mores! Il n'était peut-être pas président de la CECM, mais il était dans le circuit que l'on connaît bien et qui a fait de la CECM une entrave à l'intégration et au développement du système d'éducation au Québec.

Ce n'est pas pour rien, M. le Président, que ma formation politique et votre humble serviteur ont appuyé un parti politique – si je peux me permettre l'expression «parti politique» – voué aux intérêts des parents et des enfants qui s'appelle le MEMO, Mouvement pour une école moderne et ouverte. Et il se plaint encore une fois, M. le Président, oubliant... Double amnésie, c'est un diagnostic qu'on doit poser et qui pourrait être corroboré par un éminent membre de l'Assemblée nationale qui a un doctorat en médecine et en psychiatrie. Double amnésie, M. le Président. Il se plaint que les parents ne sont pas entendus, il a fait des représentations auprès de la ministre de l'éducation pour entendre des groupes et il a demandé non pas des comités de parents, non, il a demandé l'Association québécoise pour l'intégration sociale et son alma mater, la Commission des écoles catholiques de Montréal, qui deviendra la Commission des écoles du Centre de Montréal prochainement, nous l'espérons. Alors, comment peut-il se plaindre qu'on ne reçoive pas de parents, alors que, au départ, il n'en demande pas?

Je ne sais pas, là, il y a une contradiction dans son discours, et j'aimerais bien qu'il essaie de nous expliquer comment il va le faire. Mais là il plaide, M. le Président, sur la présence des parents avec la foi du charbonnier, alors que, autrefois, c'était quantité négligeable. Ce l'est d'ailleurs toujours pour lui, puisqu'il n'a pas demandé... Je vous le répète, l'Association québécoise pour l'intégration sociale et la CECM, M. le Président. Bien, je ne sais pas, moi, la CECM, c'est quoi, c'est un comité de parents? L'Association québécoise pour l'intégration sociale, c'est une formation de comités de parents? C'est quoi? Je peux vous en parler, des comités de parents. Quand j'étais à la commission scolaire régionale de Chambly, j'étais secrétaire du comité de parents. La direction générale de la commission scolaire régionale de Chambly, d'ailleurs, elle, croyait à l'existence des parents et elle avait permis à un de ses employés d'être secrétaire permanent du comité de parents, et c'est moi qui avais à la fois le bonheur et le plaisir de faire cet ouvrage avec les parents, et, mon Dieu, que c'était donc stimulant. La CECM ne faisait pas cela à ce moment-là. Voyez-vous, il s'agissait tout simplement de traverser le fleuve Saint-Laurent via deux, trois ponts ou un tunnel et peut-être s'inspirer.

(12 h 40)

M. le Président, je regarde attentivement aussi... Enfin, je regarde... J'essaie de me remémorer la pléthore de mots qu'il a lancés, mais, M. le Président – pléthore de mots dans un désert d'idées, il va de soi – il dit: Les parents n'auront aucun pouvoir. Bien oui, mais la ministre a été très claire là-dessus... Le président est un parent, n'est-ce pas, Mme la ministre – je vais me permettre de vous interroger même si nous ne sommes pas en période de questions – et le président, de surcroît, a un vote prépondérant, c'est-à-dire que, s'il y a impasse, le président, qui est d'abord et avant tout un parent, peut à ce moment-là exercer un droit de vote prépondérant, c'est-à-dire agir en son âme et conscience de façon à ce que les enfants, c'est-à-dire les élèves et les étudiants, soient les mieux servis. Pour employer une expression qui est propre aux juristes, il pourra agir en bon père de famille ou en bonne mère de famille, puisque j'ose espérer que les femmes seront présentes. Bien, enfin, les femmes seront sans aucun doute présentes, c'est toujours un petit peu plus difficile d'avoir les pères à l'école. Mais, ça, ça viendra.

Deuxièmement, les parents, eh bien, si les députés du Parti libéral se sont amusés à aller rencontrer les maires, m-a-i-r-e-s, de façon à contrer une réforme importante au Québec, les députés du Parti québécois, quant à eux, sont allés rencontrer des parents. Ils ont rencontré des parents. J'ai rencontré des comités de parents dans ma circonscription et je leur ai demandé comment ils voyaient la réforme proposée par la ministre. Bien, moi, je peux vous parler d'enthousiasme dans le centre-sud. J'ai même demandé à rencontrer les pasteurs des paroisses et les animateurs de pastorale pour leur dire: Mais vous avez vu le document de la ministre, vous l'avez lu, vous, contrairement à l'opposition officielle; qu'en pensez-vous? J'aimerais avoir votre rétroaction de façon à ce que je puisse aller livrer le message à la ministre. Eh bien, Mme la ministre, j'ai le plaisir de vous dire, à travers le président de notre Assemblée nationale, que les pasteurs des paroisses de ma circonscription, les animateurs de pastorale qui étaient là ont dit: M. le député, voulez-vous, s'il vous plaît, dire à la ministre que nous sommes satisfaits de cette réforme? Nous sommes contents du calendrier et surtout du cursus qui va être intégré à l'intérieur de la nouvelle réglementation scolaire. C'est un retour aux valeurs de base que les jeunes francophones connaissent mieux leur langue maternelle, le français, que les jeunes anglophones connaissent mieux leur langue maternelle, l'anglais, que les deux maîtrisent la langue seconde et qu'éventuellement, effectivement, nous allions vers une troisième et possiblement une quatrième langue, que nous ne soyons pas comme les Américains, qui souffrent de myopie culturelle, comme le disait le sénateur Jacob Javits il n'y a pas tellement d'années.

Alors, M. le Président, soporifique, amnésique, amnésie totale, oubli de son passé, mais je pense que c'est peut-être légitime de vouloir faire oublier son passé quand on est le député de Marquette et qu'on connaît les actions qu'il a faites lorsqu'il était à la présidence d'une commission scolaire ou qu'il gravitait alentour de la fédération, du comité – je ne me souviens plus comment il s'appelait, mais enfin – dont on connaît d'ailleurs l'instinct extrêmement progressiste qui l'animait, hein?

Et, quand il parle de coupures, je me souviendrai toujours, ça coïncidait avec ma première campagne électorale. Eh bien, la CECM louait d'immenses panneaux-réclame pour combattre la réforme que le Dr Laurin, ministre de l'Éducation à l'époque, faisait, au lieu de donner de l'argent aux comités de parents et au lieu de donner de l'argent aux comités d'étudiants qui essayaient d'organiser des activités dans leurs écoles. J'en ai souvenir, M. le Président.


Motion d'amendement

Mon temps s'écoule. Je sais que je devrai conclure en vous présentant, M. le Président, une motion d'amendement qui se lit ainsi – vous me permettrez de le faire:

«Que la motion en discussion soit amendée par l'ajout, dans la liste des groupes, de l'organisme suivant: Office des personnes handicapées.»

La motion, donc, telle qu'amendée se lirait:

«Que la commission de l'éducation procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives, les 4 et 5 décembre 1997 et qu'à cette fin elle entende les groupes suivants: Association des cadres scolaires du Québec – dont plusieurs sont des parents; Association des directeurs d'école de Montréal – dont plusieurs sont des parents – conjointement avec l'Association québécoise du personnel de direction des écoles – dont plusieurs sont parents – et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissement d'enseignement – dont plusieurs sont parents; Association des directeurs généraux des commissions scolaires du Québec – dont plusieurs risquent d'être parents; Association des services de garde en milieu scolaire; Association provinciale des enseignants et enseignantes protestants du Québec – qui risquent d'être des parents; Association québécoise des commissions scolaires; Centrale de l'enseignement du Québec; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; Confédération des syndicats nationaux – les travailleurs et les travailleuses sont des parents dans ce pays; Fédération des comités de parents de la province de Québec; Fédération des commissions scolaires du Québec; Office des personnes handicapées;

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant – ce que nous appelons – l'opposition;

«Que la ministre de l'Éducation soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce qu'il y a consentement pour déroger à l'article 146 du règlement qui stipule qu'une telle motion ne peut être amendée?

M. Ouimet: ...à ce que la motion d'amendement présentée par le leader adjoint ne puisse être amendée?

Le Vice-Président (M. Pinard): En vertu de l'article 146, il ne peut y avoir d'amendement à une motion. Alors, je vous demande si vous êtes d'accord pour qu'on déroge à l'article 146 afin d'introduire l'amendement qui est soumis par le leader adjoint du gouvernement.

M. Ouimet: La réponse, c'est oui, M. le Président. Mais, avant d'aller plus loin, j'invoque l'article 212 du règlement pour pouvoir clarifier des choses dites par le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques. Il a dit que l'opposition avait soumis une liste qui ne contenait pas de groupes de parents. J'aimerais rectifier les choses, M. le Président. Et, s'il m'accuse de souffrir d'amnésie, je dirais qu'il est aveugle. Je vais lire la liste qu'a déposée l'opposition: Association des comités de parents Québec-Chaudières–Appalaches; Comité central de parents de la CECM; Comité de parents de la commission scolaire catholique de Sherbrooke; Comité de parents de la commission scolaire Chaudière-Etchemin; Comité d'école de l'école secondaire de Rochebelle; Comité de parents de la CECQ; Comité de stratégie des parents de l'École d'éducation internationale de Saint-Hubert; Fédération des comités de parents de la Montérégie; Fédération des comités parents de l'île de Montréal. M. le Président, il aurait intérêt à mieux s'informer avant de faire des accusations mal fondées.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Marquette.

M. Boulerice: En vertu du même article, est-ce que je pourrais rajouter...

Le Vice-Président (M. Pinard): Non.

M. Boulerice: ...

Le Vice-Président (M. Pinard): En vertu de notre règlement, l'article 212 donne le droit et le privilège à l'opposition de s'expliquer sur des faits que vous avez mentionnés dans votre allocution. Si je maintenais la position que vous voulez que je prenne, à ce moment-ci, je suis persuadé qu'on va se diriger vers un 18 heures, avec l'article 212 qui va se promener de part et d'autre de la Chambre.

Alors, à ce stade-ci, il y a eu consentement pour déroger à l'article 146. Alors, l'amendement est maintenant déposé? Vous êtes en possession de l'amendement? O.K. Alors, cela met fin au débat. Nous allons maintenant procéder à la mise aux voix de l'amendement, puis à la mise aux voix de la motion amendée.

L'amendement proposé par M. le leader adjoint du gouvernement, à savoir que la motion en discussion soit amendée par l'ajout, dans la liste des groupes, de l'organisme suivant «Office des personnes handicapées», est-il adopté?

La motion ainsi amendée se lirait comme suit:

«Que la commission de l'éducation procède à des consultations particulières et tienne des auditions publiques sur le projet de loi n° 180, Loi modifiant la Loi sur l'instruction publique et diverses dispositions législatives, les 4 et 5 décembre 1997 et qu'à cette fin elle entende les groupes suivants: Association des cadres scolaires du Québec; Association des directeurs d'école de Montréal conjointement avec l'Association québécoise du personnel de direction des écoles et la Fédération québécoise des directeurs et directrices d'établissements d'enseignement; Association des directeurs généraux des commissions scolaires du Québec; Association des services de garde en milieu scolaire; Association provinciale des enseignantes et enseignants protestants du Québec; Association québécoise des commissions scolaires; Centrale de l'enseignement du Québec; Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse; Confédération des syndicats nationaux; Fédération des comités de parents de la province de Québec; Fédération des commissions scolaires du Québec et Office des personnes handicapées;

(12 h 50)

«Que la durée maximale de l'exposé de chaque organisme soit de 20 minutes et l'échange avec les membres de la commission soit d'une durée maximale de 40 minutes partagées également entre les membres du groupe parlementaire formant le gouvernement et les députés formant l'opposition;

«Que la ministre de l'Éducation soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.»


Mise aux voix de la motion d'amendement

Est-ce que cette motion est adoptée?

Une voix: Sur division.

Le Vice-Président (M. Pinard): Sur division. Donc, l'amendement est adopté.


Mise aux voix de la motion amendée

La motion dûment amendée est adoptée? Adopté sur division. M. le député de Marquette.

M. Ouimet: L'opposition a voté en faveur de l'amendement, parce que vous avez dit l'amendement... nous étions en faveur. C'est sur division au niveau de l'ensemble de la motion.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, nous résumons. L'amendement a été adopté unanimement et la motion dûment amendée, sur division. Alors, M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président, je vous demanderais de considérer l'article 6 de notre feuilleton.


Projet de loi n° 161


Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Pinard): À l'article 6 de votre feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 27 novembre 1997 sur l'adoption du principe du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Y a-t-il des interventions? Alors, M. le leader adjoint de l'opposition.


M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Je suis bien conscient qu'il ne me reste pas beaucoup de temps avant la pause de 13 h 00. Je vais essayer d'aller au coeur du sujet très rapidement.

D'abord, rappeler, et je vais prendre ici les propos de Gilles Lesage, à quelle sorte de projet de loi on a affaire. Il disait ceci, c'était dans Le Devoir du 19 novembre: «Parmi l'avalanche de projets de loi présentés à l'Assemblée nationale la semaine dernière en vue de leur adoption avant la fin de l'année, il y en a au moins un qui est particulièrement lourd et indigeste, c'est le traditionnel bill omnibus consécutif au budget du printemps précédent [...]. Un pavé de 500 pages! Ça fait une grosse salade de 756 articles, un cocktail étrange, aux ingrédients insolites, affectant 26 lois.» Et là on nous parle, dans cet éditorial de Gilles Lesage: «Table d'hôte avec pas moins de 14 "services", allant de la Loi sur les biens culturels à la taxe sur les carburants, en passant par les véhicules de luxe, les droits sur les mines, les impôts, les pourboires, la SDI, la taxe de vente et une demi-douzaine d'autres plats aussi rébarbatifs. Le point commun de ces services, bien sûr, c'est qu'ils relèvent tous, à n'en pas douter, de taxes et d'impôts, de piastres et de millions, de milliards même.»

M. le Président, ce projet de loi, ce n'est rien d'autre que d'aller chercher des revenus. Comme le gouvernement du Parti québécois n'est pas capable de permettre du développement économique, la création de la richesse par de l'activité économique, il ne lui reste donc que cette autre voie qu'on appelle l'augmentation des taxes, et il s'y adonne de façon professionnelle. Ça, M. le Président, on peut regarder le bilan de ce gouvernement. On aura à le faire très bientôt, lorsque les électeurs auront à choisir une alternative à ce gouvernement «taxeux».

On regarde 14 mesures fiscales, M. le Président, ici. Je n'insisterai pas trop longtemps sur la taxe sur les produits du tabac qui, on sait, provoque évidemment des problèmes de contrebande. Évidemment, pour vous autres... M. le Président, ici, il y a plein de députés qui ont la mémoire tellement courte qu'ils ne se souviennent pas des difficultés que ça pose pour la société québécoise, ces problèmes de contrebande. Et on ne peut pas dire que c'est avec le ministre de la Sécurité publique qu'on a aujourd'hui qu'on va pouvoir penser avoir une voix influente au sein du Conseil des ministres pour éviter ces problèmes.

Il y a évidemment cette hausse de la TVQ, M. le Président, qui va amener des recettes de plus au gouvernement, ce 1 %. Vous vous souviendrez, lorsque le premier ministre actuel est devenu premier ministre, la seule chose qu'il demandait à la ministre des Finances de l'époque, qui sévit maintenant à l'Éducation, il avait dit: Non, non, il ne faut pas hausser la TVQ. Il ne faut pas la hausser de 1 %. Alors, là, M. le Président, on s'aperçoit que la hausse arrive. On n'est pas capable de développer l'économie, aucune politique de développement économique, hausse de taxes.

Il y en a sur le remboursement des intrants, c'est à la hauteur de 500 000 000 $ par année. En tout et pour tout, M. le Président, ce sont des milliards de revenus que l'État québécois, géré par le Parti québécois, va chercher dans la poche des contribuables non pas à partir d'un renouvellement de l'économie, d'un départ de l'économie, d'une création de richesse qui, avec des taux de taxation maintenus et même diminués, permettrait d'avoir les revenus suffisants pour l'État, mais avec une augmentation de l'activité économique. Mais ce n'est pas le cas, ce n'est pas la préoccupation principale de ce gouvernement.

Il y a un point majeur sur lequel je veux m'arrêter – comme je n'ai pas beaucoup de temps – et je veux me faire l'écho des travailleurs à pourboire de la région de Châteauguay, M. le Président, qui sont aux prises avec le ministère du Revenu depuis déjà un bon bout de temps. Le ministère du Revenu – et je fais une histoire courte, je brosse le tableau suivant – qui a présumé des revenus de pourboire sur les trois dernières années et qui s'en vient voir les travailleurs à pourboire et leur dit: On sait que vous auriez dû recevoir 10 %, 11 % de vos ventes en termes de pourboire. Donc, on vous impose là-dessus. Mais on dirait que le gouvernement n'a pas pensé longtemps sur la notion de pourboire. Qu'est-ce que c'est, un pourboire? Et qu'est-ce qui arrive si ces travailleurs à pourboire ont eu 7 %, 6 %? Ce sont les gens qui me le disent. Quand un client, dans leur restaurant, leur laisse 5 % de pourboire, pensez-vous que le travailleur à pourboire s'en va dire au client: Il t'en manque 3 %, 5 %, pour que je paie mes impôts, parce que le gouvernement du Québec a présumé que j'en avais 10 %. Puis là on les voit, ils disent oui, ils veulent que les travailleurs à pourboire, qui ont des bas revenus, prennent de leur revenu un impôt de plus sur un pourboire qu'ils n'ont jamais reçu. Parce que c'est ça qu'il fait, le ministère du Revenu; c'est ce qu'il fait.

Et ce qui va se passer, M. le Président, avec ce projet de loi dont on essaie de laisser croire qu'il va régler le problème, il ne réglera rien. Ce que je veux dire, c'est que, lorsque ce projet de loi sera adopté, on va présumer un minimum de 8 %. Dans trois ans, est-ce que le Revenu va revenir faire le coup qu'il était en train de faire? Mettre en faillite des gens en présumant un pourboire qu'ils n'ont jamais reçu? En les imposant sur ce pourboire sans aucune retenue, sans aucune compréhension des difficultés que peuvent vivre les familles de ces travailleurs-là? Pour une habitude qui existait à l'époque, pour un pourboire qui n'est en aucun temps une somme due suite à un contrat, il n'est pas possible pour le travailleur à pourboire de poursuivre le client pour lui dire: Donne-moi mon 8 %, mon 10 %. Impossible. Le pourboire, c'est donné par le client selon sa bonne volonté. Le ministère du Revenu l'impose peu importe ce que le client fait.

Et le projet de loi actuel – je mets de côté toutes les nouvelles taxes – un des éléments importants, c'est le fait que les travailleurs à pourboire risquent d'être aux prises encore une fois avec les habitudes du ministère du Revenu, qui sont d'inventer des revenus. Imaginez-nous, ils n'en ont pas assez de hausser les taxes; là, ils vont même hausser les revenus de façon présumée!

M. le Président, il y a des gens de l'autre côté qui disent: Oui, oui, on hausse les revenus. Mais, comme ils ne sont pas capables de les hausser, les revenus, par l'activité économique, ils les inventent. Ils inventent! Ils mettent de l'argent dans la poche des contribuables en présumant, en inventant. C'est de l'argent virtuel. Et là ils vont les imposer. Moi, j'aurais honte. J'aurais honte d'être de ce côté-là de la Chambre qui hausse les taxes parce qu'il n'est pas capable de développer l'économie pour aller chercher de l'argent de plus dans les poches. Et non seulement il ne se contente pas de ça, il s'en va même inventer des pourboires pour ensuite pouvoir aller les chercher. Et ce n'est pas rien quand on pense que ça, ça a mis du monde en faillite. Ça, ça a mis du monde en faillite, ça a brisé des familles. Ça s'est passé dans mon comté. Les gens viennent me voir, puis j'espère qu'ils vont en voir d'autres, de l'autre bord, pour savoir s'ils ont un petit peu de compassion là-dessus.

Mais quand t'as des habitudes comme ça où t'inventes des revenus, puis sans aucune retenue, sans aucune compassion, où tu mets le monde dans la rue, bien, M. le Président, je pense qu'on devrait avoir honte de nous déposer des projets de loi où on mêle un peu tout ça, où on se dit: Ah, on va le régler, le problème des pourboires. On ne règle rien. On ne règle rien avec ce projet de loi, parce que la situation qui a été vécue par les travailleurs à pourboire dans mon comté – et ça s'est passé ailleurs aussi – ce qui a été vécu là peut se reproduire à nouveau parce que le projet de loi ne règle pas cela. Il ne s'intéresse pas à la notion de pourboire.

Est-ce un contrat? Est-ce dû? Est-ce une donation? Quel est le montant auquel les travailleurs doivent s'attendre? Est-ce qu'ils doivent s'attendre à ce que le ministère du Revenu vienne leur dire: On a fait une étude des pourboires dans la région de Chibougamau, ça a l'air que, là-bas, le monde, il donne 15 %; ça fait que chez vous, à Châteauguay, vous allez payer 15 %, même s'ils en ont reçu seulement 8 %, M. le Président? Et ça, c'est inadmissible, d'aller imposer...

(13 heures)

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député de Châteauguay et leader adjoint de l'opposition, je vous rappelle que vous avez droit à un temps de parole de 20 minutes. Toutefois, je vous mentionne que, compte tenu de l'heure, je me dois maintenant de suspendre nos travaux. Est-ce que vous désirez vous prévaloir de la continuation de votre droit de parole cet après-midi ou si vous avez suffisamment de 15 secondes pour conclure? Alors, M. le député de Châteauguay.

M. Fournier: En espérant que nos collègues vont pouvoir profiter de ces 15 secondes pour au moins se rappeler une chose. Lorsque le ministère du Revenu agit de la façon dont il le fait... Et là je ne suis pas dans le dossier des renseignements confidentiels, je suis dans le dossier d'un peu de compassion, s'il vous plaît, à l'égard des gens qui ont des revenus. Il ne s'agit pas d'en inventer, d'autres revenus. Il s'agit de dire, pour ces contribuables-là, qu'il va y avoir un peu de compassion et qu'on va éviter de mettre du monde à la faillite. Il faut viser le progrès et non pas mettre le monde dans la rue. J'interpelle mes collègues d'en face pour qu'ils fassent au moins preuve d'un peu de compassion et qu'il puissent, dans ce projet de loi, faire les corrections nécessaires pour que la situation qui existe ne se répète pas à l'avenir. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Châteauguay. Alors, nous suspendons maintenant les travaux à cet après-midi, 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 h 2)

(Reprise à 15 h 4)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.

Alors, nous reprenons nos débats aux affaires du jour.

Débat sur l'adoption du principe du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. M. le député de Châteauguay avait terminé son intervention. Je serais prêt à céder la parole à un prochain... M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, je vous cède la parole.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Je tiens à vous remercier et à remercier le leader du gouvernement pour m'avoir donné très aimablement l'occasion de faire mon discours aujourd'hui dans le cadre de nos travaux sur le projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, Bill 161, An Act to again amend the Taxation Act, the Act respecting the Québec sales tax and other legislative provisions.

Je dois avouer une certaine hésitation à prendre la parole sur ce projet de loi qui donne effet à des mesures budgétaires annoncées par le ministre des Finances, la ministre déléguée au Revenu, il y a quelques mois. Mon hésitation est fondée largement sur la complexité du projet de loi. Je sais que beaucoup de mes collègues en ont parlé. Avant d'entrer dans le coeur de mon intervention, je vais vous donner un exemple de cette hésitation, de cette complexité. Peut-être que la ministre déléguée au Revenu, à la fin de mon discours, pourrait répondre à ma question, essayer d'expliquer l'article 622 du projet de loi qui se lit comme suit:

L'article 370.0.2 de cette loi, édicté par l'article 318 du chapitre 1 des lois de 1995, est modifié:

2° par le remplacement du paragraphe 2° du premier alinéa par le suivant:

«2° dans le cas où la juste valeur marchande visée au paragraphe 3° de l'article 370.0.1 est supérieure à 201 294 $ mais est inférieure à 230 050 $, au montant déterminé selon la formule suivante – et c'est la formule:

«...[(230 050 $ - C/28 756 $)]} + (7,5 % X B);».

Peut-être que la ministre aura l'amabilité de m'expliquer cette formule à la fin de mon intervention, elle m'apparaît un peu complexe. J'ai fait un peu le tour de certains députés et ministres, hier, de l'autre côté de la Chambre pour tenter d'avoir certaines clarifications. Je n'en ai pas, malheureusement, trouvé de la satisfaction, M. le Président. Mais peut-être que la ministre est capable de nous expliquer ce que ça veut dire. J'imagine que, chez les députés ministériels, on en a parlé au caucus, dans leur caucus. Ils doivent le savoir tous. Alors, j'imagine qu'ils peuvent tous nous renseigner là-dessus.

M. le Président, le projet de loi n° 161, entre autres, donne effet, comme je l'ai dit tantôt, à plusieurs annonces dans le budget déposé par le ministre des Finances. Entre autres, il y a une augmentation de la taxe de vente du Québec de 1 % le 1er janvier 1998. J'aimerais concentrer, en quelque sorte, un peu mon intervention sur l'impact de cette augmentation de la TVQ de 1 %.

Le moins qu'on puisse dire, M. le Président, certaines choses sont claires dans mon esprit. Les députés d'en face seront peut-être surpris, mais certaines choses sont claires: que l'augmentation de 1 % de la taxe de vente du Québec décrétée par ce gouvernement va coûter aux Québécois, selon les chiffres mêmes du gouvernement du Québec, 675 000 000 $ par année.

Une voix: ...

(15 h 10)

M. Copeman: Dans les chiffres que j'ai, en tout cas, 675 000 000 $. On peut peut-être discuter pour 10 000 000 $, mais ce n'est pas le député de Masson qui va me faire changer d'idée nécessairement. Si j'ai bien lu mes chiffres, c'est 675 000 000 $ par année qu'on va payer, comme Québécois, de plus de taxe de vente du Québec sur l'année, à chaque année.

Là, le gouvernement nous arrive avec, semble-t-il, un engagement, une promesse, une démonstration, si les chiffres sont exacts, M. le Président, que cette augmentation dans la taxe de vente du Québec de 1 %, que tout le monde paie, M. le Président, peu importe le revenu, va être compensée largement par une diminution dans le taux d'imposition, je pense, si, encore une fois, les chiffres du gouvernement sont exacts, pour 90 % des Québécois. À 90 %, je pense.

Moi, j'ai une certaine misère à vraiment accepter ces chiffres-là, M. le Président. Mais, ça, on ne le saura pas. Ce n'est pas parce que c'est publié par le ministère des Finances que ça va nécessairement s'avérer exact, hein. Même le ministère des Finances peut se tromper de temps en temps dans ses prévisions.

M. le Président, en principe, cette augmentation de la TVQ, de l'ordre de 675 000 000 $, va être compensée par une diminution dans l'impôt des particuliers. On va examiner cette question. Je ne suis pas fiscaliste, mais je travaille avec le Discours sur le budget, un document du gouvernement, et on va prendre le premier morceau qui est: La hausse de la TVQ, de la taxe de vente du Québec.

La préoccupation majeure que j'ai, M. le Président, évidemment, en tant que porte-parole de l'opposition officielle en matière de sécurité du revenu, c'est pour la clientèle de l'aide sociale: 550 000 adultes, grosso modo, qui vivent de l'aide sociale au Québec, qui seront frappés par l'augmentation de la taxe de vente du Québec. Oui, la ministre, si elle était présente, elle me dirait: Il y a une bonification du crédit d'impôt remboursable pour les familles à faibles revenus, n'est-ce pas. C'est la réplique, j'imagine, de la ministre déléguée au Revenu. Je suis d'accord.

Si on se fie aux chiffres du gouvernement du Québec, dans l'annexe A, page 28, du Discours sur le budget, effectivement, on voit que, pour une famille monoparentale ayant un enfant, qui vit de l'aide sociale, qui n'a essentiellement aucun revenu de travail, la hausse de la TVQ représente des dépenses additionnelles, pour cette famille, de 46 $ par année. Puis il y a une bonification de 100 $ du crédit d'impôt remboursable pour la taxe de vente. Alors, même si les gens d'en face étaient attentifs, ils me diraient: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous êtes dans les patates, parce que ça coûte 46 $ de plus mais on donne un crédit d'impôt de 100 $. Alors, la famille à très faibles revenus, comme sur l'aide sociale, sort gagnante de 54 $. C'est ça que les gens d'en face devraient me dire, M. le Président, s'ils m'écoutaient. Ça veut dire que les gens sur l'aide sociale sortent gagnant de 54 $, si on se fie au tableau dans le Discours du budget.

Une petite observation, M. le Président. Avec ce réaménagement fiscal, la famille sur l'aide sociale, semble-t-il, sort gagnante de 56 $; ça ne rattrape pas le fait que le crédit d'impôt de 10 $ par mois pour les impôts fonciers a été enlevé à partir du 1er septembre. Ça totalise 120 $ à l'année longue que ce gouvernement a enlevé dans les barèmes de tout le monde. Le député d'Abitibi-Ouest avait dit, à un moment donné pendant le discours, alors que je disais que le gouvernement en place avait baissé les barèmes de base: Non, on n'a jamais fait ça dans l'aide sociale. Ce que je disais à ce moment au député d'Abitibi-Ouest, c'est que les barèmes de base, à 500 $, n'étaient peut-être pas touchés, sauf par le biais du crédit d'impôt foncier remboursable qui a été éliminé, qui fait en sorte que le barème de base pour une personne sur l'aide sociale tombe du minimum de 500 $ à 490 $.

On peut avoir une divergence d'opinions: est-ce qu'il s'agit vraiment d'une baisse dans les barèmes de base? Mais le fait, M. le Président, est très réel. Tous les récipiendaires de l'aide sociale ont vu leur chèque amputé d'un minimum de 10 $ à partir du 1er septembre passé. Ça veut dire qu'à l'année longue ils vont perdre 120 $ de base et, s'ils ont des enfants, ça peut être 11 $, 12 $ ou 13 $ par mois. Alors, ces prestataires d'aide sociale, les plus pauvres parmi les pauvres au Québec, ne rattraperont jamais, même avec la bonification du crédit, ce qu'ils ont perdu aux mains de ce gouvernement. C'est un peu la stratégie de dire: On va vous couper 100 $. Tout le monde chiale contre ça, je les comprends. Puis ils arrivent en disant: Ce n'est pas vrai, on vous coupe juste de 90 $. Là, semble-t-il, aux yeux du gouvernement, tout le monde est content. Ils n'ont pas perdu 100 $ par mois, ils ont juste perdu 90 $ par mois. C'est un peu le même jeu de vases communicants que font les gens d'en face, M. le Président. La hausse de la TVQ, pour une famille monoparentale avec un enfant, va coûter 46 $ de plus à quelqu'un sur l'aide sociale, si on se fie aux chiffres du ministère des Finances. Ils vont recevoir une bonification du crédit d'impôt remboursable pour la taxe de vente de 100 $, un gain net de 45 $, sauf que – oups – on a oublié de dire qu'on vous a coupés de 1 220 000 $ cette année. Alors, ce n'est pas un gain, c'est une perte totale. Au bout de l'année, c'est une perte pour une famille sur l'aide sociale.

M. le Président, c'est à peu près la même chose pour un couple ayant deux enfants. Et je ne veux pas tomber dans des choses trop techniques, là, mais il y a une autre chose qui m'intéresse beaucoup. Peut-être que le ministre pourrait répliquer à ça aussi. Dans ce tableau de l'annexe A, page 28, sur le discours du budget, il établit ces chiffres-là selon un profil de consommation moyenne par situation familiale. Et on nous dit qu'une famille monoparentale avec un enfant doit payer 46 $ de plus, avec la hausse de la TVQ. Ça veut dire deux personnes dans le ménage. J'ai bien compris le français: «monoparentale», une personne avec un enfant, ça fait deux personnes dans le ménage. Ils vont payer 46 $ de plus à cause de cette augmentation de taxe à la consommation.

Mais dans le même tableau, M. le Président, on dit: Un couple ayant deux enfants. Là on est monté à quatre personnes, si j'ai bien compris le français, là. Un couple ayant deux enfants: deux personnes plus deux enfants, ça fait quatre dans la famille au lieu de deux. Même niveau de revenu, c'est-à-dire aucun revenu de travail. Même ligne sur le tableau. On nous dit que la hausse de la TVQ va représenter... Cette famille va perdre 55 $. Bien, là, je dois avouer que je ne comprends plus rien. Et ça va à l'encontre de tout bon sens dans le monde que de dire qu'une famille de deux personnes, un adulte, un enfant, va dépenser 46 $ de plus à cause de cette augmentation, mais qu'une famille de quatre personnes – là, on parle toujours de la consommation, des choses qu'on achète, qui est applicable sur tout sauf la nourriture, généralement, M. le Président, tout vêtement, tout divertissement, ça s'applique sur tous les biens et services quasiment, au Québec... Là, on passe de deux personnes, ça va coûter 46 $ de plus, selon les tableaux du ministère des Finances, à quatre personnes, ça va juste coûter 55 $ de plus. Mais là, encore une fois, M. le Président, je regrette, ça m'échappe complètement comment le ministère des Finances peut sortir de tels chiffres.

Là, si on croit ces chiffres-là, ça veut dire que la présence d'un autre adulte et la présence d'un deuxième enfant dans une famille occasionnent, avec une hausse de la taxe de vente du Québec de 1 %, des dépenses de 9 $ de plus par année dans la consommation. Mais ça n'a pas de sens! N'importe qui qui est père de famille ou mère de famille... Il faut savoir très clairement que de passer de un adulte, un enfant, à deux adultes, deux enfants va occasionner plus de dépenses que 9 $ par année, dans l'augmentation de la TVQ. Ce n'est pas possible, selon moi.

(15 h 20)

Je comprends, je ne suis pas fiscaliste, je n'ai pas toutes les ressources du ministère des Finances, mais intuitivement, M. le Président, vous, qui êtes père de famille... Vous êtes père de famille, M. le Président, pensez-y comme il faut, là. Présence d'un adulte, un enfant, ça va coûter 46 $ de plus; présence de deux adultes, deux enfants, ça va coûter 56 $ de plus, cette augmentation de 1 %. Ça n'a pas de bon sens de dire, de prétendre qu'une augmentation de 1 % sur tout ce qui est consommation, ici, au Québec, pour un adulte de plus, un enfant de plus, va occasionner des dépenses supérieures de seulement 9 $ par année. Par année, M. le Président! Ça n'a aucun bon sens, intuitivement. Ça me fait penser que peut-être, dans des chiffres proposés par le ministère des Finances, on sous-estime certaines choses, on surestime d'autres choses. Les faits réels vont être beaucoup plus graves que ça.

J'aimerais aborder un dernier volet de cette augmentation de la taxe de vente du Québec, cette notion de crédit d'impôt remboursable. La taxe de vente du Québec va augmenter le 1er janvier. Alors, pour les familles de l'aide sociale, il va falloir qu'elles commencent à payer plus de leurs poches immédiatement, 1 % de plus sur tout. Ils achètent des bottes pour les petits. Ça coûte cher, des bottes – j'en ai acheté pour ma fille – ça peut coûter entre 30 $ jusqu'à 60 $ facilement, des bottes d'hiver. À 30 $, on s'en sort très, très, très difficilement. À peine. Zellers, à peine à 30 $. Alors, le 1 % sur ça, c'est un débours immédiat que toutes les familles sur l'aide sociale vont être obligées de faire sur tout.

Le crédit d'impôt remboursable, qui est augmenté de 100 %, n'est payable que deux fois par année, au mois d'août et au mois de décembre. Ça veut dire, M. le Président, que les mois de janvier, février, mars, avril, mai, juin, juillet, pour les sept premiers mois de 1998, sept mois de temps, les personnes assistées sociales au Québec vont être obligées de débourser, à cause de l'augmentation de 1 %, sans avoir aucun crédit jusqu'au mois d'août. Sept mois avec aucune compensation fiscale du gouvernement du Québec, sept mois!

M. le Président, pour les gens dont un chèque mensuel est tellement maigre qu'on me dit: À la fin du mois, on n'en a pas assez pour manger, on ne peut pas acheter des vêtements, je ne peux pas acheter des mitaines pour mes enfants, de leur demander de traîner pendant sept mois une augmentation de 1 % dans la taxe de vente du Québec sans aucune compensation dans le crédit d'impôt remboursable jusqu'au mois d'août est complètement indécent. Ça n'a pas de bon sens. Si la ministre déléguée au Revenu était le moindrement consciente des difficultés que ces personnes ont à boucler, à la fin du mois, leur chèque, leurs revenus et leurs dépenses, elle ne ferait pas ça, elle le ferait d'une façon d'avancer mensuellement pour tenter de compenser pour quelque chose qui n'a pas de sens. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Le prochain intervenant, M. le député de Bertrand. M. le député.


M. Denis Chalifoux

M. Chalifoux: Merci, M. le Président. Il semble qu'il est conforme ou plutôt habituel en cette Chambre de déposer des projets de loi omnibus. Néanmoins, je me permettrai d'intervenir sur certains aspects de ce projet de loi qui est, à mon avis, un peu trompeur pour la population.

Il est, M. le Président, pour le moins bizarre que l'on tente, et même de façon subtile, de nous faire avaler une brique de 500 pages touchant plusieurs lois à la dernière minute. Cette brique de 500 pages est tellement volumineuse que j'ai eu peine à la sortir du cartable, ici, qu'on a en dessous de nos pupitres.

M. le Président, à la dernière minute, un paquet de modifications à la loi me semblent un peu bizarres, mais ce gouvernement nous a habitués à l'ambiguïté et à une transparence on ne peut plus douteuse. En fait, ce que l'on tente de faire, c'est de rendre les projets de loi tellement lourds que l'on peut passer, à travers ces écrits, ce qu'on appelle communément et dans le langage populaire «des petites vites».

Lors de l'élection, en septembre 1994, le Parti québécois avait promis à la population qu'il atteindrait le déficit zéro sans augmenter les taxes des contribuables. Quel changement de cap! Vous me permettrez de rappeler certains faits saillants. Commençons, si vous le voulez bien, avec l'assurance-médicaments, qui fait en sorte aujourd'hui que certains citoyens parmi les plus mal pris, et ce, en termes de besoins, là, paient 20 fois plus cher aujourd'hui qu'avant: l'augmentation des taxes scolaires, l'augmentation probable des taxes municipales, et j'en passe. Et on nous dit que le déficit baisse. Bien que mon collègue et député de Laporte ait fait la démonstration en cette Chambre, et de façon très habile, du contraire, le gouvernement s'entête à le déguiser.

Tout récemment, M. le Président, et ce, pas plus tard qu'avant-hier, le Vérificateur général confirmait notre inquiétude et estimait que le ministre des Finances a sous-estimé son déficit d'au moins 1 500 000 000 $ l'an dernier, et déplorait l'absence d'états financiers consolidés, comme il se passe partout dans les provinces au Canada. Il a de plus manifesté la même inquiétude que nous devant la prolifération de fonds spéciaux.

Au déficit officiel de 3 200 000 000 $, il faut ajouter une somme de 1 500 000 000 $ pour tenir compte des 500 000 000 $ de fonds spéciaux, du 1 000 000 000 $ qui est inhérent, en fait, aux 30 000 départs à la retraite dans le secteur public et des 225 000 000 $ que représentent les intérêts sur les 10 000 000 000 $ du fonds de retraite que le ministre des Finances ne veut pas inscrire aux livres. Cela chiffre le vrai déficit à 4 700 000 000 $, et ce, malgré le fait que, de 30 600 000 000 $ qu'ils étaient l'an passé, les impôts, les taxes, les droits et les permis versés au gouvernement du Québec passeront cette année à 32 200 000 000 $, soit 1 600 000 000 $ de taxes de plus. Pour un gouvernement qui avait promis de ne pas augmenter les taxes, vous conviendrez, M. le Président, que c'est assez contradictoire.

M. le Président, le projet de loi n° 161 est un bill omnibus consécutif au budget du printemps dernier. Le gouvernement prend prétexte, par des annonces-fleuves de mars dernier, pour clamer qu'il n'y a rien là de surprenant et que l'opposition est bien mal avisée de s'en offusquer. Eh bien, il y a matière à rouspéter, et deux fois plutôt qu'une, autant sur la forme et la manière que sur le fond. Un livre de 500 pages affectant 26 lois, ça prend une mémoire à la fois excellente et irréprochable pour s'y retrouver, d'autant plus qu'il y a déjà huit mois que les déclarations officielles du ministre ont été faites avec toute l'éloquence qu'on lui connaît mais que, depuis, il y a eu d'innombrables bulletins périodiques émis par les ministères des Finances et du Revenu.

(15 h 30)

Ça prend une santé robuste pour absorber, on peut le figurer, cette table d'hôte avec pas moins de 14 services allant de la Loi sur les biens culturels à la taxe sur les carburants, en passant par les véhicules de luxe, les droits sur les mines, les impôts, les pourboires, la SDI et la taxe de vente. Ce que je déplore, c'est que l'insertion de changements aussi différents dans le même projet devient un exercice très périlleux.

Je conviendrai que les nouveaux pouvoirs de la Commission des biens culturels n'ont rien d'anodin mais ne comportent rien de comparable avec la hausse de taxe de vente, qui passera de 6,5 % à 7,5 %, et encore moins avec l'harmonisation de la TVQ, de la TPS et de la taxe de vente dite «harmonieuse». Autant la disposition relative aux biens culturels mérite d'être examinée à son mérite, autant il importe d'étudier, quand ça fait son affaire, les vertus bénéfiques des initiatives fédérales. Il est étonnant de voir comment ce gouvernement s'entend avec Ottawa comme larrons en foire quand vient le temps de récupérer ou d'augmenter certaines taxes et que l'on joue avec le fric des contribuables.

La taxe de vente n'est d'ailleurs pas la seule mesure qui mériterait un examen approfondi et spécifique. La réforme de la fiscalité des particuliers, visant à simplifier l'application et à en améliorer l'équité, en mériterait tout autant, mais le gouvernement invoque que c'est la coutume pour justifier ce que j'appellerais ce gros bill. On nous reproche nos cris concernant une telle pratique, mais on oublie qu'il y a moins de quatre ans c'étaient les péquistes qui les proféraient. En effet, on nous reprochait à l'époque que seuls les fiscalistes et les autres experts pouvaient se retrouver dans ce genre de projet de loi, et aujourd'hui on fait la même chose.

Encore une fois, je redis que la réforme de l'impôt sur le revenu et la hausse de la TVQ auraient dû faire à elles seules l'objet de deux projets de loi distincts et auraient mérité plus d'attention des parlementaires de cette Chambre, voire même des corrections essentielles. Malheureusement, on semble pressé d'en finir, quitte à corriger les erreurs un peu plus tard. Dommage, M. le Président.

La baisse d'impôts est une bonne idée, mais il ne faut pas omettre de dire à la population comment elle sera financée. Dans les faits, les charges fiscales des Québécois et des Québécoises ne seront pas réduites en 1998, et, comme l'Ontario a sensiblement allégé le fardeau fiscal de ses contribuables, imitée en cela, mais dans une moindre mesure, par les autres provinces, l'écart entre le Québec et le reste du Canada ne fait que s'accentuer, et je m'explique, M. le Président.

L'effet de cette réforme sera de réduire de 15 %, en moyenne, l'impôt sur le revenu des ménages qui gagnent moins de 50 000 $. Pour ceux dont le revenu est supérieur à 50 000 $, la baisse sera de 3 %. Cependant – et c'est ce qui est le plus important de l'argumentation – cette réforme est totalement financée par une hausse de taxe de vente qui passe de 6,5 % à 7,5 % le 1er janvier prochain, qui annule pratiquement les réductions d'impôts consenties pour la majorité des contribuables. L'effet de cette réforme est complètement neutralisé sur le plan budgétaire. Pour l'exercice financier 1998-1999, les réductions d'impôts coûteront 495 000 000 $ au gouvernement, mais la hausse de la TVQ lui procurera des recettes supplémentaires de 494 000 000 $. C'est ce que l'on appelle «changer quatre trente-sous pour une piastre».

Autre fait que je déplore, M. le Président, c'est que ce projet de loi n° 161 n'a pas eu pour effet d'alléger le fardeau fiscal de la classe moyenne et que, si l'on tient compte de la hausse décrétée des cotisations de la Régie des rentes et de l'augmentation des taxes scolaires, les charges fiscales vont croître pour la majorité des contribuables en 1998. De plus, il faut préciser que les familles de classe moyenne n'auront plus droit aux allocations familiales. Or, on continuera de vivre un phénomène qui n'est pas souhaitable pour une société, soit l'appauvrissement des pauvres et l'enrichissement des riches. En outre, l'écart de compétitivité fiscale avec le reste du Canada, que le Québec doit corriger, clamait le ministre des Finances, n'est pas non plus réduit. On peut même penser qu'il va en s'élargissant.

Donc, M. le Président, plutôt que de se tirailler et de déposer en toute hâte un projet de loi omnibus lourd de conséquences, j'aurais préféré que ce projet de loi soit scindé afin qu'on puisse en faire un examen plus sérieux. Mais, plus le projet est lourd, plus le projet est complexe, comme celui-ci, plus il est ardu de l'étudier et plus il est facile, comme je le disais tantôt, d'en passer des petites vites.

On aurait souhaité, M. le Président, de la part du gouvernement, que l'on escamote une bonne partie du projet et que nous l'adoptions les yeux fermés et le nez pincé. Malheureusement, ce ne sera pas le cas. Je m'opposerai à voter pour des projets de loi aussi épars que celui-ci. Et j'oserai dire qu'en fin de mandat ce n'est pas très glorieux et reluisant pour un gouvernement, surtout de la part d'un ministériel, que de déposer pour adoption un projet de loi semblable. Surtout que ce gouvernement a fait miroiter à la population une réforme parlementaire en profondeur et qu'on utilise la bousculade parlementaire, faite de subterfuges et de camouflage, pour nous faire avaler un projet de loi...

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: M. le Président, j'aimerais que le député retire les mots qu'il a utilisés, d'autant plus que vous avez demandé vous-même de ne point les utiliser.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous inviterais... Le mot «camouflage», j'ai expliqué hier soir à deux reprises que dans certaines circonstances on pouvait l'accepter, dans la mesure où on n'attribuait pas une intention au gouvernement. Maintenant, je vous inviterais à employer un autre terme, s'il vous plaît, pour éviter cette possible interprétation.

M. Chalifoux: Alors, on peut garder ce terme? M. le Président.

M. Jolivet: M. le Président, vous avez demandé d'utiliser un autre terme. Excusez, je vais attendre que...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, si vous voulez, s'il vous plaît, utiliser un autre terme. Parce que, dans le contexte, c'était un peu... Ce n'était pas très clair si ça impliquait des motifs qu'on pouvait attribuer au gouvernement, dans le contexte dans lequel vous avez utilisé l'expression. Alors, s'il vous plaît. M. le député.

M. Chalifoux: M. le Président, je recommencerai ma phrase. Surtout que ce gouvernement a fait miroiter à la population une réforme parlementaire en profondeur et qu'on utilise la bousculade parlementaire, faite de subterfuges, pour nous faire avaler un projet de loi indigeste, avec tellement d'ingrédients insolites que même un ogre ne pourrait l'absorber. Est-ce que ça vous va?

(15 h 40)

Cela dit, M. le Président, et au risque de me répéter, je trouve déplorable le fait que ceux qui profiterons le moins de la réforme concernant l'impôt sur le revenu sont les familles de la classe moyenne avec des enfants et dont les deux conjoints gagnent entre 40 000 $ et 80 000 $ par année. Dans leur cas, non seulement la baisse d'impôts sera marginale, mais radicalement annulée par la hausse de la TVQ. Je voterai donc contre le projet. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le député de Bertrand. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Beauce-Nord. M. le député.


M. Normand Poulin

M. Poulin: Merci, M. le Président. Nous avons devant nous le projet de loi n° 161, la Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives. Il est ironique de constater que dans le titre on souligne déjà l'augmentation constante du fardeau fiscal que l'on impose aux Québécoises et aux Québécois. Je vous répète le titre: Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts. Et j'insiste sur les mots «de nouveau» parce qu'il semble que, à chaque fois que le gouvernement fait une déclaration ministérielle ou dépose un budget, il alourdit considérablement le fardeau fiscal des Québécois et Québécoises.

Je ne pouvais me permettre de laisser passer sous silence ce genre de projet de loi qui vient réduire considérablement le revenu disponible des citoyens, d'autres taxes imposées aux Québécois et Québécoises. Le revenu disponible, vous savez, c'est le revenu qui reste dans nos poches après impôts. Une fois que le gouvernement est passé, combien d'argent me reste-t-il dans les poches? De moins en moins, constatent plusieurs familles québécoises.

Une autre raison explique l'ampleur de ce projet de loi. Je ne vous apprends rien en vous disant que ce projet de loi modifie 26 lois. C'est un projet de loi qui est composé de 500 pages, de 756 articles. Il n'est pas évident de s'y retrouver, et c'est excessivement technique. Par contre, en tant que parlementaire, je considère que c'est mon devoir de commenter la législation, qui est apportée par le gouvernement, qui vient affecter le quotidien de nos citoyens.

Dans les notes explicatives, on peut lire, à la première page, que ce projet de loi modifie la Loi sur les impôts afin d'y modifier et d'y introduire plusieurs mesures fiscales propres au Québec. Une des principales mesures concerne la réforme de la fiscalité des particuliers, dont le but est de simplifier l'application du régime fiscal et d'en améliorer l'équité. Je comprends que le gouvernement, ou du moins le ministre, veuille insister sur cette section du projet de loi, puisque c'est un des endroits où il y a un impact positif sur le contribuable.

Par contre, si on poursuit notre lecture de ces mêmes notes explicatives, on peut retrouver un peu plus loin une section qui se lit comme suit: Il modifie – donc, le projet de loi – la Loi sur la taxe de vente du Québec afin d'y insérer des mesures propres au régime fiscal du Québec ainsi que pour y apporter des modifications visant l'harmonisation du régime de taxe de vente du Québec à celui de la taxe sur les produits et services. C'est une façon discrète de vous dire que le gouvernement va augmenter la taxe de vente. La taxe de vente passera de 6,5 % à 7,5 %, et ce, à compter du 1er janvier 1998. En chiffres, ça représente 675 000 000 $ par année. Cette mesure contribuera à accentuer la consommation au noir.

Vous comprendrez, M. le Président, que 675 000 000 $, c'est beaucoup d'argent et c'est de l'argent qui ne roule plus dans l'économie. C'est de l'argent qui n'encouragera définitivement pas la création d'emplois. C'est de l'argent qu'on va chercher dans les poches des consommateurs, des Québécois et des Québécoises. Vous savez tout comme moi que la consommation est le moteur de l'économie, et, en retirant des poches de nos concitoyens 675 000 000 $, il est évident que l'on ne fait que ralentir l'activité économique. Bref, la stratégie est simple: on impose de nouvelles taxes, on appauvrit tout le monde.

Un exemple qui illustre bien cette stratégie se retrouve à l'annexe A du budget. Vous savez que ce projet de loi donne principalement suite au budget de mars dernier, et, à la page 60 de l'annexe A, on retrouve un exemple où on nous indique que, pour une famille ayant deux enfants, avec un revenu annuel de 25 000 $, le gain de la réforme fiscale est de 100 $. Donc, la famille se retrouve, suite à cette réforme, avec 100 $ de plus dans ses poches. Le seul problème, M. le Président, c'est que la hausse de la TVQ arrache 106 $ des poches de cette même famille. Donc, l'impact final est une perte de 6 $. Bref, pour cette famille, le gain n'est tout simplement pas là.

Nous ne sommes pas les seuls à s'inquiéter, M. le Président. Je lisais dans Le Devoir un article de Jean-Robert Sansfaçon intitulé Sacrée classe moyenne! où on peut lire: «Les familles au revenu de 35 000 $ à 80 000 $ profiteront le moins de la réforme Landry.» Alors, si une famille ayant un revenu de 25 000 $ perd 6 $ suite à la réforme et à la hausse de la TVQ, imaginez les pertes pour une famille de classe moyenne. C'est drôlement inquiétant, c'est de l'appauvrissement collectif. Évidemment, on va vous dire: Oui, mais il y a la bonification du crédit d'impôt pour taxe de vente. C'est peut-être vrai, sauf qu'on pourra constater, un peu plus loin dans ce même projet de loi, qu'une série de petites mesures viennent réduire considérablement le revenu disponible des familles, et, en bout de ligne, les familles se retrouvent avec moins d'argent dans leurs poches.

Je suis convaincu, M. le Président, qu'en m'écoutant la ministre et les députés ministériels vont se dire: Encore un autre discours partisan. Mais, sans vouloir les désappointer, je vous invite à regarder quelques statistiques de plus près. Si vous croyez que mon discours est partisan, alors je vous encourage donc à aller voir au Bureau de la statistique du Québec. Je vous cite des chiffres qui proviennent des principaux indicateurs économiques comptabilisés par le Bureau.

Dans la rangée Revenu personnel disponible , on peut voir qu'au Québec, en 1996, les familles, en fait tous les contribuables ont connu une baisse de revenus de 1,3 %. Ça veut dire qu'en 1996 les gens avaient dans leurs poches moins d'argent qu'en 1995, une fois que le ministère du Revenu était passé. Ce n'était pas une bonne nouvelle, mais ce qui est encore pire, c'est qu'en 1997 les statistiques montrent que, jusqu'à aujourd'hui, le revenu disponible est encore en baisse de 2,1 %. Donc, nous sommes partis, en 1995, avec un montant quelconque, donc, dans nos poches. Un an plus tard, on se retrouve avec 1,3 % de moins; deux ans plus tard, on vient enlever un autre 2,1 %. Les poches sont vides, M. le Président. Alors, vous comprendrez que c'est loin d'être un discours partisan.

Systématiquement, depuis que ce gouvernement est en place, les gens s'appauvrissent. C'est la spirale de l'appauvrissement. Nous n'avons pas besoin d'analyser très longtemps les différents budgets pour comprendre pourquoi nos concitoyens se retrouvent dans une telle situation. Prenez, par exemple, la liste des taxes et impôts qu'on nous impose depuis les dernières années. Prenons l'assurance-médicaments comme exemple. Une famille de quatre, ça coûte aux alentours de 700 $ par année. C'est 700 $ de moins pour consommer, pour dépenser, pour soutenir la consommation ou pour encourager la création d'emplois.

On peut regarder aussi du côté des désengagements du gouvernement comme les diminutions de transfert aux municipalités. Ces diminutions de transfert affectent directement nos comptes de taxes municipales. Alors, en plus d'enlever de l'argent aux familles, le gouvernement refile aux municipalités l'odieux d'augmenter les taxes. Même chose du côté des commissions scolaires. En tout, c'est près de 1 000 000 000 $ qui ont été imposés aux municipalités au cours des deux derniers exercices. On pourrait aussi parler de la hausse des tarifs d'Hydro-Québec. Il y a deux ans, c'était 2,5 %; l'an dernier, c'était 1,5 %; cette année, on nous indique que c'est peut-être 1,8 %; ce sera probablement la même chose l'an prochain.

(15 h 50)

Vous comprendrez qu'il est difficile pour moi de me réjouir d'une modification de loi de l'impôt quand, en bout de ligne, je constate que mes concitoyens s'appauvriront encore plus. Dans son ensemble, l'impact financier net du projet de loi n° 161 représente approximativement 1 100 000 000 $ en taxes et impôts. Évidemment, une partie de cette augmentation est refilée aux entreprises. Comme vous le savez, M. le Président, on refuse aux grandes entreprises de leur rembourser la taxe sur les intrants. Bref, ils doivent absorber un coût additionnel de 517 000 000 $ par année. Le gouvernement se défend en disant: Écoutez, nous n'attaquons pas le contribuable, mais nous attaquons la grande entreprise. Le seul problème avec cette théorie, c'est que l'entreprise privée crée de l'emploi, et plus on augmente les charges fiscales des entreprises, moins on encourage la création d'emplois. Ça a pour conséquence: moins d'investissements au Québec.

Laissez-moi vous rappeler que dans le budget Campeau on avait augmenté la contribution de l'employeur au Fonds des services de santé en promettant aux entrepreneurs que plus tard on leur rembourserait les intrants pour compenser les entreprises. Les entreprises attendent toujours la réalisation de cette promesse non tenue. Pour simplifier, cela signifie que plus vous avez d'employés, plus vous payez de taxes. Conclusion: moins d'emplois, moins de revenus, plus de pauvreté.

L'acharnement de ce gouvernement à taxer les Québécois et à leur soutirer des argents pour atteindre le déficit zéro est le résultat d'une politique pourrie qui effraie les investisseurs, la création d'emplois, qui affecte la rentrée de revenus suffisants à équilibrer ses dépenses sans taxer les citoyens. De plus, le gouvernement multiplie les pirouettes, astuces et stratégies pour camoufler son déficit, et ce n'est pas que nous qui le disons. Le Vérificateur général dénonce les pratiques du gouvernement qui, par un jeu d'écritures comptables, soustrait 1 500 000 000 $ dans son exercice 1996-1997 et 1997-1998.

Vous comprendrez donc, M. le Président, que je ne pourrai faire autrement que de voter contre le projet de loi qui, en bout de ligne, arrache des poches de nos concitoyens des revenus qu'ils ont gagnés durement, à la sueur de leur front. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Beauce-Nord. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Jeanne-Mance. M. le député.


M. Michel Bissonnet

M. Bissonnet: Merci, M. le Président. La maxime que vous connaissez tous, mes chers collègues, Nul n'est censé ignorer la loi , hein? Tous les Québécois et Québécoises ne doivent pas ignorer la loi.

Moi, j'ai fait mon cours de droit en 1973 et je tiens à vous dire que, à voir une brique comme ça... Et puis je me demande si tous les députés, ici, dans cette Assemblée, du côté ministériel comme du côté de l'opposition, connaissent exactement ce qu'il y a dans cette brique-là. C'est plus compliqué, c'est plus difficile que le Recueil des décisions de l'Assemblée nationale et que le Règlement de l'Assemblée nationale.

J'ai lu cet article de façon très attentive, M. le Président – et le journaliste qui l'a écrit est un journaliste qui suit la scène politique, autant au niveau provincial que municipal, depuis plus de 20, 25 ans, M. Gilles Lesage – dans un journal que les gens – nul n'est censé ignorer la loi – lisent bien, Le Devoir , le 19 novembre 1997. Je vais en lire quelques extraits parce qu'on fait des réformes parlementaires, on ajoute des commissions parlementaires, mais on se retrouve, là, avec une brique le 28 novembre, puis il faut adopter ça avant la fin de la session.

Alors, il appelle ça, M. Lesage, Ingrédients indigestes , et je le cite: «Parmi l'avalanche de projets de loi présentés à l'Assemblée nationale la semaine dernière – au début de novembre – en vue de leur adoption avant la fin de l'année, il y en a au moins un qui est particulièrement lourd et indigeste.» Ceux qui écoutent cet après-midi vont comprendre, quand j'aurai terminé la lecture de cet article, que c'est lourd puis que c'est plus qu'indigeste: c'est bien dur, M. le Président.

«C'est le traditionnel "bill omnibus" – quand les députés ministériels étaient dans l'opposition, ils ne voulaient plus de bills omnibus; quand ça change, les revendications sont souvent les mêmes, mais, une fois pour toutes, qu'on arrête de faire des bills omnibus! – consécutif au budget du printemps précédent. Le gouvernement prend d'ailleurs prétexte des annonces-fleuves de mars dernier pour clamer qu'il n'y a rien là de surprenant et que l'opposition est bien mal avisée de s'en offusquer.

«Il y a pourtant ample matière à rouspéter. Et deux fois plutôt qu'une, autant sur la forme et sur la manière – objet de notre examen critique – que sur le fonds, multiple, qu'évoquera demain le confrère – de M. Lesage – Sansfaçon.

«Le titre même et les notes explicatives du projet de loi n° 161, "modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives", met déjà la puce à l'oreille [...].

«Un pavé de 500 pages! Ça fait une grosse salade de 756 articles, un cocktail étrange, aux ingrédients insolites, affectant 26 lois. Pour s'y retrouver, il faut non seulement se rappeler, dans leurs moindres détails – n'oubliez pas, nul n'est censé ignorer la loi – de la vaste et éloquente fresque du ministre des Finances il y a huit mois, mais également de ses déclarations officielles depuis lors, des bulletins périodiques des Finances et du Revenu. Il faut même avoir en tête, "de manière accessoire" il est vrai, "certaines mesures" prévues au budget de l'an dernier, il y a donc... 18 mois. Il faut surtout, doit-on ajouter, avoir une mémoire à la fois excellente et irréprochable.» Nul n'est censé ignorer la loi.

«Et une santé robuste à toute épreuve, pour absorber cette table d'hôte, avec pas moins de 14 "services", allant de la Loi sur les biens culturels à la taxe sur les carburants, en passant par les véhicules de luxe, les droits sur les mines, les impôts, les pourboires, la SDI, la taxe de vente et une demi-douzaine d'autres plats aussi rébarbatifs. Le point commun de ces services, bien sûr, c'est qu'ils relèvent tous, à n'en pas douter, de taxes et d'impôts, de piastres et de millions, de milliards même [...]. Les arguments que les péquistes alignaient contre les "bills omnibus"...»

Je me rappelle, M. le Président, j'étais à votre place. Mais j'étais comme vous, j'écoutais, je ne pouvais pas parler. La seule chose que je pouvais faire, c'était de me lever quand on avait des propos antiparlementaires, et je n'en aurai pas, cet après-midi. Donc, je m'imagine que vous allez être assis tout le temps que je vais parler.

Alors: «Plus la périodes des fêtes approche, plus les députés sont tiraillés et ont hâte de disposer de nombreux projets soumis à leur examen. Mais plus ces projets sont lourds et complexes, plus il est ardu de les étudier comme il se doit.»

Et j'écoutais tantôt le député de NDG. On s'en va à l'article 622, M. le Président. L'article 622, je vais vous le lire. Vous allez voir ça, que nul n'est censé ignorer la loi. Les étudiants de droit, ils auraient de la difficulté à comprendre ce que je vais leur dire, mais ça, il faut savoir tout ça parce qu'il faut l'adopter, puis tous les députés doivent être conscients de ce qu'il y a dans ce projet de loi omnibus qui modifie déjà 16 projets de loi.

Alors, l'article 370.0.2 de cette loi, édicté par l'article 318 du chapitre 1 des lois de 1995, est modifié:

1° par le remplacement du paragraphe 1° du premier alinéa par le suivant:

«1° dans le cas où la juste valeur marchande visée au paragraphe 3° de l'article 370.0.1 est de 201 294 $ ou moins, un montant déterminé selon la formule suivante:

«[2,46 % X (A - B)] + (7,5 % X B);»;

2° par le remplacement du paragraphe 2° du premier alinéa par le suivant:

«2° dans le cas où la juste valeur marchande visée au paragraphe 3° de l'article 370.0.1 est supérieure à 201 294 $ mais est inférieure à 230 050 $...» Là, il y a un problème compliqué, M. le Président, c'est la méthode:

«{[2,46 % X (A - B)] X [(230 050 $ - C/28 756 $)]} + (7,5 % X B).»

Alors, c'est ça, M. le Président. Je ne sais pas s'il y a des députés qui ont étudié cette formule-là et qui la connaissent très bien. En tout cas, moi, je peux vous dire une chose, que les bills omnibus, ça devrait cesser.

Ce matin, à l'Assemblée, M. le Président, le député de Notre-Dame-de-Grâce posait une question au premier ministre, et je vais vous lire la question et la réponse. Le député de Notre-Dame-de-Grâce, ce sont les galées de ce matin que j'ai.

«M. le Président, est-ce que le premier ministre a au moins l'intention de tenir sa promesse – sa promesse à lui, de son gouvernement; pas de son parti, là, de son gouvernement – et son engagement pris lors du dernier Sommet socioéconomique concernant la clause d'appauvrissement zéro et d'accorder une indexation aux 106 000 ménages prestataires de soutien financier en date du 1er janvier prochain? Ça, c'est un engagement», dit M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Le premier ministre: «On nous demande si le gouvernement va tenir cet engagement particulier? Oui, M. le Président, comme tous ceux qu'il prend.»

(16 heures)

M. le Président, après avoir entendu le premier ministre, ce matin, qui nous dit que, lorsque le gouvernement prend un engagement, il le respecte, j'ai été immédiatement chercher le discours d'assermentation prononcé par M. le premier ministre du Québec le 29 janvier 1996. Et, dans son discours, il disait: «Et de toutes nos forces nous tenterons de le faire sans augmenter les contribuables et sans augmenter la taxe de vente au Québec, car notre objectif, dit M. le premier ministre, n'est pas de ralentir l'économie, de nuire aux affaires et à l'emploi, d'aggraver le sort des démunis, d'alourdir le fardeau des consommateurs, mais, au contraire, de leur donner une bouffée d'oxygène.»

M. le Président, après avoir entendu l'engagement solennel du premier ministre du Québec lors de son assermentation, ça ne pouvait pas être un engagement plus fort, il est écrit, M. le Président, et je vais vous demander, à la fin de mon exposé, de vous déposer l'extrait de son discours lors de son assermentation pour que les députés du côté ministériel puissent bien lire: «Nous tenterons de le faire sans augmenter la taxe de vente au Québec.» Si ce n'était pas un engagement, pourquoi est-ce qu'il a dit ça?

Alors, dans ce projet de loi, dans cette grande brique, M. le Président, de 500 et quelques articles, on retrouve une augmentation du taux de la taxe de vente de 7,5 %, alors qu'elle est de 6,5 %, et ça, ça va rapporter, cette augmentation de la taxe de vente, 169 000 000 $ pour 1997-1998; 675 000 000 $, 1998-1999; 675 000 000 $, 1999-2000. Pourquoi, M. le Président, le premier ministre, qui n'a pas été élu, qui, lors de sa première déclaration publique comme premier ministre, informait la population pour leur dire: La taxe de vente ne sera pas augmentée... Alors, vous avez un conseil général en fin de semaine. J'aimerais bien ça qu'un des porte-parole du gouvernement, un député puisse poser la question: Comment est-ce qu'il se fait, suite au discours du premier ministre, à son discours inaugural qui s'engageait à ne pas augmenter la taxe de vente, qu'il le fait présentement? Question d'actualité, c'est le 1er janvier, M. le Président. Les engagements, vous savez, il faut les respecter.

Il y a aussi, dans cette brique, M. le Président... Passez ça aux étudiants en première année de droit, ça va aider beaucoup, ça. Ceux qui font la codification des lois administratives, M. le Président, ils ont beaucoup de travail avec ce projet de loi-là. Il faut qu'ils amendent les 16 lois, ce n'est pas fini. Alors, dans ce même budget, M. le Président, il y a le report et la suppression des restrictions à l'obtention du RTI aux grandes entreprises, et ça, c'est 517 000 000 $ par année. Je me suis informé, M. le Président, parce qu'un RTI, avant de vous adresser la parole, j'ai bien vérifié ce que c'était. Alors, j'ai vu tantôt le député de Crémazie qui était ministre des Finances à l'époque, qui, en 1995-1996, avait augmenté la contribution des employeurs au Fonds des services de santé; en 1997-1998, une augmentation de 609 000 000 $; 1996-1997, 575 000 000 $. Alors, il a dit, à ce moment-là, le ministre des Finances, de ne pas s'inquiéter, qu'il était pour rembourser les petites et moyennes entreprises des intrants. Alors, pour nos électeurs qui nous écoutent, les intrants, c'est quelqu'un, par exemple, qui a une petite entreprise qui fabrique des pots en céramique. Il doit s'acheter de la glaise pour fabriquer ses pots. Il doit payer une taxe de vente sur la taxe de glaise, mais il se fait remettre par le gouvernement ces intrants qu'il a payés sur la taxe de glaise. C'est ça qu'on appelle les intrants.

Alors, pour les petites et moyennes entreprises, ça a été fait, mais, comme le premier ministre s'était engagé lors de son assermentation, le 29 janvier 1996, on s'était engagé à ce que les intrants pour les grandes entreprises soient terminés vers la fin d'octobre 1996. Un engagement formel, M. le Président. Et vous savez que les taxes sur la masse salariale pour les grandes entreprises, 517 000 000 $, ça pourrait créer davantage d'emplois.

Alors, on se retrouve avec ce projet de loi qui va augmenter le fardeau fiscal des Québécois et Québécoises de plus de 1 100 000 000 $ en trois ans. Et je vous rappelle que, dans le discours de M. le premier ministre, il nous a dit aussi: Vous savez, la taxe de vente, on n'y touche pas. Il disait: «De toutes nos forces, nous tenterons de le faire sans augmenter les impôts des contribuables.» Les impôts des contribuables.

Tous les contribuables dans la circonscription où je me situe, dans l'île de Montréal, ont été frappés en plein front, au mois de juin dernier, par une augmentation de taxes scolaires de l'ordre de 45 % après avoir eu une augmentation de l'ordre de 30 % l'année dernière, et il y aura une augmentation encore l'année prochaine. C'est les propriétaires qui ont été taxés, qui ont été frappés de front, mais, au mois de juillet prochain, les locataires vont avoir leur contrepartie à payer. Les députés de l'île de Montréal qui sont ici – je reconnais le député de Gouin, la députée de Rosemont – est-ce que vous n'avez pas eu de téléphones quand les gens ont reçu leurs taxes scolaires? Parce que le premier ministre, dans son discours d'acceptation, d'inauguration, il a dit: «De toutes nos forces, nous tenterons de le faire sans augmenter l'impôt des contribuables.»

Un contribuable, lorsqu'il est augmenté de 2,5 % pour son Hydro-Québec, qu'il y a une augmentation de la TVQ puis de la TPS sur le 2,5 %, qu'il va y en avoir une autre de 1,8 % dans un avenir rapproché, est-ce que ces contribuables-là... On dit: C'est des tarifs. C'est des tarifs. Mais, M. le Président, quand un contribuable, un citoyen du Québec est obligé d'aller dans ses goussets alors que le revenu disponible est diminué de 2,3 % pour l'année 1997, est-ce que, là, il va dans ses poches pour payer un tarif? Appelez ça un tarif, ou une taxe, ou quoi que ce soit, c'est de l'impôt pour lui.

Donc, on a promis qu'on ne toucherait pas aux consommateurs. Il ne faut pas alourdir le fardeau des consommateurs. Les citoyens puis les citoyennes du Québec, avec ce projet de loi, avec le pelletage des taxes scolaires aux commissions scolaires, avec un pelletage aux municipalités... Il y a des municipalités qui vont avoir des augmentations de taxes, il y a des municipalités où les services vont être réduits. Alors, lorsqu'on ne veut pas alourdir le fardeau des consommateurs, lorsqu'on s'engage, lorsqu'on promet, il faut tenir ses engagements. Et ça me fait de la peine aujourd'hui de dire que le premier ministre qui avait répondu ce matin qu'il avait pris un engagement qu'il va respecter le 1er janvier, tant mieux, c'est bon, mais l'autre engagement qu'il a pris pour la taxe de vente, il ne le respecte pas. Et, là-dessus, la population jugera lors de la prochaine élection, puis je vais vous dire une chose, on va surprendre. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Jeanne-Mance. Alors, je vais maintenant céder la parole à M. le député de Marquette. M. le député.


M. François Ouimet

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Comme le disait mon collègue le député de Jeanne-Mance avec beaucoup d'éloquence, beaucoup d'à-propos, le premier ministre du Québec, encore une fois, n'a pas tenu parole. Il a dit une chose dans le cadre de son discours d'assermentation. Il devenait premier ministre du Québec. Vous comprenez, là il prenait des engagements. On voit deux ans plus tard qu'il ne respecte pas son engagement au niveau d'un sujet extrêmement important: le fardeau fiscal des citoyens et des citoyennes du Québec.

(16 h 10)

Pourtant, il y a une députée fédérale qui avait manqué à sa parole, ministre du Patrimoine, Mme Sheila Copps. Elle a eu au moins la décence de démissionner. Elle a démissionné de son poste parce qu'elle avait floué ses électeurs. Elle a démissionné de son poste. Elle avait dit que la TPS, on la scraperait. Pourtant, son gouvernement ne l'a pas fait. Lui, le premier ministre, devant tous les Québécois et toutes les Québécoises, il a pris un engagement solennel, la main sur le coeur, en disant: On n'augmentera pas la TVQ. Le ministre des Finances a tenté de camoufler l'affaire dans un projet de loi de plus de 500 pages. Jamais vu ça!

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît, on essaie de corriger le tir depuis quelques jours. Il faut faire attention dans les expressions qui prêtent des intentions indignes aux membres de cette Assemblée. Alors, il faut être prudent, parce qu'on a eu un glissement depuis quelque temps. Essayons d'éviter ces propos qui assignent des motifs indignes. Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Je vois qu'on ne peut pas se servir de certains termes. Quand même, ce qui est indécent, c'est de donner sa parole et par la suite de ne pas la respecter. L'impact de tout ça, c'est l'augmentation du fardeau fiscal des Québécois et des Québécoises de plus de 1 100 000 000 $. En augmentant la TVQ de 1 %, ce seul chiffre là va générer dans les coffres du ministre des Finances 675 000 000 $ par année, à tout le moins les deux prochaines années.

Pourtant, le premier ministre... M. le Président, il ne s'agit pas de n'importe qui, il s'agit du premier ministre de la province de Québec, celui qui nous demande de le croire dans certains dossiers. On a vu récemment une tentative du ministre des Finances... Là, je ne sais pas si vous allez m'arrêter, mais on a parlé de tentative de cacher le déficit gouvernemental; ça a été dénoncé par le Vérificateur général de la province cette semaine. Le Vérificateur général de la province, cette semaine, a dit: Le gouvernement est en train de cacher son déficit aux Québécois et aux Québécoises. Lui, le premier ministre – et je reprends ses mêmes propos qu'il tenait le 29 janvier 1996 – il disait ceci: «Et de toutes nos forces nous tenterons de le faire sans augmenter les impôts des contribuables et sans augmenter la taxe de vente du Québec.»

Les impôts des contribuables ont augmenté de façon systématique depuis que le député de Jonquière, premier ministre, occupe ce fauteuil. On a vu un projet de loi, qui a été présenté hier par le ministre des Affaires municipales, qui crée un fonds dans lequel les contribuables devront verser d'une autre poche plus de 500 000 000 $ annuellement. Et là ce qui s'en vient, si le projet de loi est adopté, c'est une augmentation de la taxe de vente du Québec de 1 %. On a vu ce qui s'est passé sur le plan scolaire, ça a été au cours des deux dernières années une augmentation de 200 000 000 $.

Pourtant, M. le Président, les gens qui nous écoutent, les contribuables qui nous écoutent doivent se poser la question: Comment pouvons-nous faire confiance à un tel premier ministre qui, à chaque occasion, manque à sa parole? Il donne sa parole, le député de Jonquière, et, dans les gestes qu'il demande à ses ministres de poser, ça vient à l'encontre de la parole qu'il donne. Et lui, comme premier ministre, il leur donne l'autorisation de le faire manquer à sa parole. Comment est-ce que les Québécois et les Québécoises peuvent faire confiance à un tel homme, à une telle personne qui dit: Moi, je ne ferai pas ça, et, par la suite, à l'Assemblée nationale du Québec, on se rend compte – les éditorialistes, les journalistes, les observateurs, les contribuables se rendent compte – que cet homme-là, premier ministre du Québec, manque à sa parole.

M. le Président, il faut espérer...

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Vous avez bien compris les paroles qu'a utilisées le député.

Une voix: ...

M. Jolivet: Non, mais je crois qu'on n'a pas le droit de dire les choses qu'il a dites, telles qu'il les a dites, M. le Président, et j'aimerais que vous lui demandiez de retirer ce qu'il a interprété comme étant que le premier ministre manquait à sa parole.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Écoutez, il ne faut quand même pas... Il a décrit une situation, et pour lui il n'y a pas de correspondance entre l'engagement que le premier ministre a pu prendre...

M. Jolivet: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, non, non.

M. Jolivet: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non, non. Non, non. Ça ne signifie pas la même chose. Parce que, autrement, là, on peut... Il faut qu'on puisse permettre ici, si vous voulez, dans le débat, de dire: Bien, il a dit telle chose puis il n'a pas fait ce qu'il a dit. Et c'est à la population de juger la portée de cet écart. On ne peut pas, quand même, interdire l'écart entre ce qu'il a dit et puis ce qu'on croit qu'il a fait ou n'a pas fait. Écoutez, on est quand même dans l'ordre des débats et puis des différences d'opinions sur la façon de juger les actions ou les gestes. C'est une chose que de prêter des intentions indignes. C'est différent.

Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président, de votre intervention, parce que, pour quelques minutes, là, je pensais qu'on était rendus en Chine communiste ou en Russie. Pour ne pas pouvoir parler en Chambre...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Brouillet): Non. S'il vous plaît, ça ne donne rien de jeter de l'huile sur le feu. Je suis intervenu pour essayer de donner mon interprétation et vous permettre de poursuivre. Alors, je vous inviterais, s'il vous plaît, à vous conformer, à ce moment-là, et puis à ne pas non plus porter des jugements en dehors du débat dont il est question présentement. Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, quand même, là, il est important de remarquer que je disais que le premier ministre a manqué à sa parole. Il a pris un engagement qu'il n'a pas respecté. Et, au même moment où je tiens ces propos-là, le leader du gouvernement se lève pour dire: Le député de Marquette n'a pas le droit de dire ça. Heureusement, vous le rappelez à l'ordre. Si on n'a pas le droit de dire ça dans une démocratie, je me demande ce qu'on fait ici. Comme opposition, si on n'a pas le droit de dire qu'un premier ministre ne respecte pas les engagements qu'il prend, je me demande...

Le Vice-Président (M. Brouillet): S'il vous plaît! Je vous comprends très bien, là, mais, écoutez, j'ai statué sur la situation, alors je vous inviterais, s'il vous plaît, à en tenir compte et à poursuivre votre exposé.

M. Ouimet: Merci, M. le Président, mais ça démontre et ça dénote quand même comment...

M. Jolivet: ...

M. Ouimet: Oui, je vais continuer. J'ai une liberté, comme parlementaire, de dire les choses telles qu'elles sont et je ne me ferai pas bâillonner par le leader du gouvernement, ce n'est pas vrai.

M. Jolivet: M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: J'ai le droit, comme parlementaire, de faire valoir un point de vue. Vous avez pris une décision; le député, s'il s'y conforme, devrait continuer son discours et ne pas essayer de m'imputer quelque motif que ce soit, d'autant plus que c'est mon droit de vous le demander et de prendre, de votre part, une décision que vous avez prise et que j'accepte, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, c'est pour ça que je vous ai demandé, autant que possible, de ne pas revenir sur ça. Un député peut faire appel à une question de règlement. Maintenant, il se peut très bien que le point qu'il soulève ne soit pas retenu par le président, et le président doit statuer et clarifier les choses; c'est ce que j'ai fait. Alors, que voulez-vous, chacun peut soulever une question de règlement, et je ne peux pas interdire aux gens de soulever une question de règlement.

M. Jolivet: M. le Président, sur la même question de règlement, j'aimerais vous rappeler ce pour quoi je l'ai fait. C'est que nous avons des règlements qui datent de la démocratie du Parlement, ici, et je prends, dans le Geoffrion qui nous gouverne aussi encore, vous le savez très bien, à l'article 285.20°, 1: «Il est irrégulier et non parlementaire...» Et, dans le texte, vous allez voir que ce que je disais était exactement ce que je croyais être mon devoir de faire, parce que, à l'intérieur, on dit: «a intentionnellement trompé la Chambre; a fourni des chiffres truqués», etc. Et on en arrive à la considération telle que je vous l'ai dite et qui nous indiquait qu'il n'était, quant à moi, pas correct et pas parlementaire d'utiliser la façon dont le député le faisait. C'est pour ça que je dis «ne croit pas ce qu'il affirme ou affirmer ce qu'il sait ne pas être exact», dans la mesure où le député imputait au premier ministre des choses que je crois, moi, à mon avis, non valables. Et, dans ce contexte-là, vous avez pris votre décision, je l'accepte.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je ne commenterai pas le texte de Geoffrion, là, parce que ça n'infirme pas du tout mon interprétation, au contraire. Alors, je vous cède la parole, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: M. le Président, la population comprendra ce qui vient de se dérouler également et la population pourra juger en temps et lieu.

(16 h 20)

M. le Président, il s'agit, juste au niveau du projet de loi n° 161... Et je mets de côté d'autres projets de loi, les crédits budgétaires qui ont été déposés au cours des deux dernières années. On parle uniquement de choses qui découlent du projet de loi n° 161. Ça va constituer, au cours des trois prochaines années, une augmentation du fardeau fiscal des contribuables de plus de 1 100 000 000 $. C'est 1 100 000 000 $ de moins que les contribuables auront dans leurs proches, et ça, c'est le gouvernement qui va chercher ça directement dans les poches de tous les contribuables. Nous avions déposé un tableau qui démontrait... Parce que, malgré le fait qu'on tente dans une brique de 500 pages de dissimuler certaines choses, on a quand même fait nos devoirs, on a quand même fait le calcul, ça veut dire combien d'argent de moins dans les poches des contribuables québécois et québécoises? Et on en arrive au calcul suivant: 1 100 000 000 $. D'ailleurs, ça a fait les manchettes des journaux.

Alors, M. le Président, ça démontre quoi? Ça démontre que nous avons des engagements solennels qui sont pris par un premier ministre, ça démontre que les projets de loi qui sont déposés en Chambre par ce même premier ministre et par les membres de son gouvernement ne sont pas respectés, ça démontre l'incapacité du gouvernement de créer des emplois pour aller chercher les revenus dont l'État a besoin pour pouvoir financer nos services publics. À la lumière de cela, M. le Président, le gouvernement étant incapable... Et c'est la marque de commerce d'un gouvernement issu du Parti québécois, son incapacité de créer de la richesse; la seule chose dont le gouvernement est capable, c'est de répartir la pauvreté, de créer des obligations additionnelles pour des organismes publics, parapublics et le secteur privé et par la suite de couper les budgets des services publics, avec les résultats que nous avons.

Les gens qui nous écoutent, qui passent par le système hospitalier constatent dans quelle situation le premier ministre du Québec a plongé le Québec. Ce matin, en me dirigeant vers le parlement, j'entendais une émission de Paul Arcand qui interviewait une personne qui a le cancer et qui attend sur une liste d'attente dans un hôpital des Laurentides pour se faire opérer. Il en va de sa vie, M. le Président. La personne pleurait au bout de la ligne et la personne disait: À chaque jour que j'attends de me faire opérer – et ils sont 14 personnes atteintes du cancer qui attendent de se faire opérer sur une liste d'attente – je pleure, je me demande quand je vais mourir si je ne suis pas opéré à temps.

Au début, il y a un an, un an et demi, on se rappelle du discours du ministre de la Santé qui disait que tout avait été planifié dans les moindres détails, que les compressions du réseau de la santé ne découlaient pas de mesures budgétaires, que ce n'était pas pour aller chercher de l'argent. Ils ont changé de discours pas longtemps après quand on a commencé à démontrer que le système de santé est en train d'éclater partout à travers la province. Nous avions un système qui fonctionnait jusqu'en 1994. Un système qui fonctionnait bien, où des gens qui devaient se faire opérer se faisaient opérer, où des gens qui devaient recevoir des traitements recevaient les traitements médicaux. Aujourd'hui, depuis l'arrivée au pouvoir de ce gouvernement, de ce premier ministre, c'est la catastrophe dans le réseau hospitalier avec des personnes qui ont malheureusement dû payer de leur vie, de leur propre vie l'incompétence du gouvernement.

C'est la cerise sur le sundae quand on constate qu'en plus de ça le gouvernement persiste à tenir un discours qui ne se confirme pas dans les faits. Un premier ministre qui ne tient pas parole, moi, je me demande combien de temps encore les Québécois et les Québécoises vont tolérer un tel premier ministre.

M. Jolivet: M. le Président, je m'excuse auprès du député.

Le Vice-Président (M. Brouillet): M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Vous avez bien entendu ce que j'ai dit, et je le répète. Geoffrion, c'est quand même quelque chose qui gouverne nos destinées, M. le Président, et dans le texte, toujours à l'article 285.20°, dans le c, on indique qu'il est irrégulier et non parlementaire de dire qu'un député n'a pas tenu sa parole.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, écoutez. Là, vous allez être obligés de me faire intervenir un peu plus longuement. Dites-vous bien une chose, que nous avons un règlement qui a été adopté en 1982 et nous nous disons toujours que Geoffrion peut éventuellement nous servir de guide quand le règlement actuel ne nous permet pas de décider d'une situation. Donc, il ne faut pas surutiliser Geoffrion. Il a eu sa gloire en son temps, il a sa valeur, on peut s'y référer quand on juge à propos que ça peut nous être utile.

Ceci dit, trois phrases sorties d'un texte, en soi, peuvent prendre des significations très différentes à partir des contextes et, dans le contexte de tantôt, il faut voir que ce qui avait été précédé de l'expression, c'est qu'il y a deux ans le premier ministre aurait dit qu'il tenterait de faire ça et que, deux ans après, une décision ne correspond pas à ce qu'il a dit qu'il ferait, et c'est dans ce contexte-là, c'est pour désigner ça qu'il a dit qu'il n'a pas tenu sa parole.

Alors, je maintiens la décision que j'ai rendue tantôt et elle est tout à fait fondée. Ce n'est pas prêter des intentions indignes dans le contexte.

M. Jolivet: Je voudrais juste poser une question de directive, d'abord, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui, monsieur...

M. Ouimet: M. le Président, sur la question de règlement. Sur la question de règlement.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Une directive d'abord, puis on verra.

M. Jolivet: Oui, je voulais juste vous demander, en regard justement de Geoffrion qui nous sert de guide dans certaines circonstances, en tenant compte des règlements actuels: Comment peut-on concilier ce que vous me dites avec l'article du règlement actuel qui nous dit qu'il faut prendre la parole de celui qui a parlé?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Bien, justement, vous sortez ça du contexte que je viens de mentionner. Il n'est pas question de ne pas prendre la parole. On dit qu'on constate une chose. Si on n'est pas d'accord, on dit: Non, ce n'est pas ça. Il y a correspondance entre ce qu'il a dit il y a deux ans puis ce qu'il a fait. Bon, c'est de l'ordre des interprétations des faits et gestes. Écoutez, ce n'est absolument pas ce que vous venez de dire, M. le leader du gouvernement.

Alors, M. le député de Marquette.

M. Ouimet: Merci, M. le Président. Et en constatant, là, que chaque fois qu'on veut dénoncer des choses, le leader du gouvernement se lève. Il devrait consacrer ses énergies à tenter de convaincre le premier ministre de respecter ses engagements. Ça lui éviterait de m'interrompre constamment. Ça lui éviterait de m'interrompre constamment, d'une part et, d'autre part, je me demande s'il va se lever aussi souvent demain et après-demain au Conseil national du Parti québécois. Il y a sûrement des gens dans ce parti-là qui vont s'élever contre ce que fait le premier ministre. Ils ont l'air de suivre ce qu'ils vont faire, M. le Président...

Une voix: Vous êtes invités.

M. Ouimet: Oui, on est invités. On va suivre ça de près. Il y a quand même des gens qui sont issus du même parti, qui ont voté certains engagements au niveau de votre formation politique qui vont rappeler à l'ordre le gouvernement.

Alors, M. le Président, je disais bien, là, ça fait 1 100 000 000 $ de moins que les contribuables québécois et québécoises auront dans leurs poches. Et on sait qu'un des moteurs de l'économie, c'est la consommation. Et quand la consommation repart, quand les Québécois et les Québécoises se mettent à consommer des biens et des services, ça a un effet d'entraînement au niveau de l'économie. Mais, lorsque les Québécois et les Québécoises ont moins d'argent dans leurs poches pour dépenser, et donc il va y avoir moins de consommation, ça occasionne un ralentissement économique. Et lorsque le gouvernement, de surcroît, ne réussit pas à créer des emplois, et lorsque le gouvernement en est réduit à couper les services publics ou à jouer dans les chiffres, dans la comptabilité officielle du gouvernement du Québec pour tenter, je vais reprendre l'expression du Vérificateur général de la province, de cacher son déficit, à un moment donné les Québécois et les Québécoises vont bien dire: Assez, c'est assez! Combien de temps vont-ils tolérer ce premier ministre là et ce gouvernement-là? Et je dirais, M. le Président, combien de temps encore certains militants et militantes du Parti québécois vont continuer de le tolérer, le député de Jonquière?

Alors, M. le Président, justice sera rendue et on a hâte aux prochaines élections. Merci.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Marquette. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de D'Arcy-McGee. M. le député.


M. Lawrence S. Bergman

M. Bergman: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir de me prononcer en cette Chambre sur le projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives.

(16 h 30)

M. le Président, ce projet de loi qui nous est présenté par la ministre déléguée au Revenu affectera négativement chaque famille du Québec et, conséquemment, aura un effet dévastateur sur l'économie québécoise. Ce projet de loi réduira le pouvoir d'achat de tous les Québécois, affectant sévèrement le marché de la vente au détail, ce qui aura ainsi pour effet d'affecter également tous les domaines de notre économie, pour finalement affecter le marché du travail et augmenter le taux de chômage.

Ne vous demandez pas pourquoi le marché du travail est aussi insécure et a un effet désastreux sur les ventes au détail alors qu'on approche du temps des fêtes. Vous avez seulement à regarder ce projet de loi omnibus de 500 pages qui, page après page, crée un fardeau additionnel sur les contribuables. Il y a dans ce projet de loi 756 articles qui touchent 26 lois différentes, dont les effets sont énormes sur les contribuables québécois qui sont déjà surtaxés. C'est le cadeau de Noël du gouvernement du Parti québécois.

For instance, article 353 of Bill 161 amends the Consumer Protection Act by inserting, after section 227, the section 227.1 concerning the representation on duties payable under a federal or provincial statute. Section 227.1 is so worded as to exert an unnecessary control over the merchants with respect of the advertising of a product.

M. le Président, je suis convaincu que les délégués au Conseil général du Parti québécois, qui se tiendra cette fin de semaine, voudront sûrement remercier personnellement le premier ministre pour ce cadeau de Noël. Ce parti qui se qualifie lui-même de social-démocrate doit être très heureux du fardeau supplémentaire imposé aux Québécois et qui, en plus, réduit leur pouvoir d'achat. Ce projet de loi qui entrera en vigueur le 1er janvier 1998 devrait permettre à la fiscalité québécoise d'augmenter sa compétitivité et d'alléger le fardeau fiscal de la population. Mais il n'atteindra pas cet objectif, parce que c'est justement le contraire qui va se produire.

This bill reduces by 15 % the average income tax which will be paid by households earning less than 50 000 $ and by 3 % for households earning more than 50 000 $. But what the Parti québécois Government is doing is giving with one hand and it is taking away with the other by the increase of the sales tax, the PST, from 6,5 % to 7,5 %, commencing January 1st, 1998. This is an increase of a little over 15 % of the PST on January 1st, 1998. Every Quebecker, no matter what he or she earns, makes purchases from his income and therefore will be affected by this increase of the PST.

En conséquence, l'augmentation de la TVQ annule la réduction d'impôts. C'est un autre exemple flagrant de la duplicité du gouvernement du Parti québécois qui cherche par tous les moyens à tromper les Québécois. Il sous-estime cependant la capacité de la population à se rendre compte du double langage utilisé par ce gouvernement. M. le Président, il a été estimé que ces réductions d'impôts vont coûter au gouvernement près de 495 000 000 $ mais que l'augmentation de la taxe de vente devrait lui permettre de récupérer le même montant. En fin de compte, cela équivaut à changer quatre trente-sous pour un dollar.

M. le Président, la duplicité du gouvernement du Parti québécois est une préoccupation essentielle de l'opposition officielle, et les inquiétudes que nous avons exprimées ont été répétées dans le rapport de l'année financière 1996-1997 du Vérificateur général, tel qu'indiqué dans son étude et subséquemment lors de sa conférence de presse. Il s'agit de matières sérieuses et urgentes qui sont soulevées ici et qui prouvent que le gouvernement du Parti québécois a outrepassé ses pouvoirs. Lorsqu'il a été demandé au Vérificateur général s'il signera les états financiers du gouvernement de cette année, il n'a pas répondu affirmativement qu'il le ferait.

Mr. Speaker, this is very serious. Put yourself in the hands of any bank manager who receives an application from a client for a loan, and the client's auditor says that he might not sign the client's financial statements, the bank surely will refuse that loan. And, certainly, on the basis of anomalies presented to us by the Auditor General and certainly by the fact that he is threatening not to sign the financial statements of this province, we are faced with very, very serious problems created by this Government.

Firstly, there is the question of more than 15 special funds which have been created since April 1st, 1996. These special funds allow the PQ Government to hide expenses incurred by it in a particular year by amortizing theses expenses over the next 10 years. These special funds are being created in order to artificially reduce this deficit and therefore fool the people as to the PQ Government's deficit zero program, which, in my opinion, is a hoax and a fraud.

Mais ce qui est encore plus sérieux, c'est que le Vérificateur général n'a pas été autorisé à vérifier ces fonds spéciaux. Questionné à ce sujet lors de la conférence de presse du 26 novembre 1997, le Vérificateur général a répondu, et je cite: «Ce fonds spécial est dans un "no man's land" entre ce qu'on appelle les fonds publics, actuellement, et ceux qu'on appelle, nous, les fonds consolidés, c'est-à-dire des états financiers qui représenteraient toutes les opérations du gouvernement. Maintenant, c'est rendu dans ce brouillard, et c'est incomplet.»

M. le Président, on se croirait dans une république de bananes. Les allégations prononcées par le Vérificateur général sont sérieuses et doivent recevoir toute l'attention des citoyens du Québec, parce que, lors de cette même conférence de presse, celui-ci a ajouté, et je cite: «En date d'aujourd'hui, de la façon que cela se présente, il manque dans les comptes publics qui seront publiés prochainement la valeur de ces fonds spéciaux qui sont à l'extérieur de la comptabilité. Cette valeur, cela représente approximativement 500 000 000 $ et plus.»

M. le Président, avez-vous bien compris ce que le Vérificateur général a dit? Il a dit «et plus». Dans son allocution, il a indiqué 500 000 000 $, mais qui peut nous dire combien cela peut être? Il s'agit du premier montant d'argent caché qui est découvert, mais le Vérificateur général a encore identifié un autre 1 000 000 000 $, lequel ne sera pas mentionné aux états financiers du Québec et qui représente les montant payés pour les employés de la fonction publique qui se sont prévalus des programmes de préretraite du gouvernement péquiste. Ces montants payés ont été amortis sur une période de 15 ans – imaginez un peu la duplicité des péquistes! – quand ces montants ont déjà été payés. Le Vérificateur général a dit, et je cite: «Encore une fois, le gouvernement devrait reconnaître son obligation au moment où il prend sa décision et non pas reconnaître son obligation amortie sur 15 ans.»

(16 h 40)

Finally, and to make matters worse, the PQ Government is not permitting the Auditor General to audit these special funds that it is creating. This is intolerable in an open and democratic society. This is an injustice to all of the population of Québec. The Premier said clearly in this National Assembly that he is not above the law and its system. Then let him answer why his PQ Government is not permitting these special funds to be audited. The Auditor General said, and I quote: «I repeat that there is now two accounting systems. I'm asked to audit the first one, and the second one I cannot audit because it is not recognized.» The Auditor General goes on to say: «The government has full authority for its accounting system, and if it wants to develop an accounting system for which I cannot find the equivalent anywhere, it has the right to do so.» He goes on to say: «On the other hand, I am a chartered accountant and I'm hired as an auditor, and my criteria is to use accountancy that is used by most governments in the world at large. If I cannot find the equivalent elsewhere, I have to say that I do not agree.» Those are his words. Those are not my words.

M. le Président, assez c'est assez! Le projet de loi n° 161 ne sera sûrement pas un projet de loi pour stimuler cette économie déjà stagnante qui nous a été imposée par l'option du Parti québécois. Économiste après économiste, groupe après groupe nous ont produit des preuves concluantes à cet effet, de diverses natures, ainsi que des chiffres et statistiques qui ont été examinés et réexaminés.

Your option, the PQ option, is retarding our economy and lowering the quality of life for all of our citizens. The brain drain, the loss of private investments, the loss of head offices, the loss of industries, the demoralization of our population put this Parti québécois Government in an unforgivable position of responsibility. You are accountable to the population. Mr. Speaker, I will join my colleagues in voting against Bill 161. I thank you.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de D'Arcy-McGee. Nous céderons maintenant la parole au député de Papineau. M. le député.


M. Norman MacMillan

M. MacMillan: Merci, M. le Président. Il me fait encore plaisir de pouvoir intervenir dans cette Assemblée nationale pour la deuxième ou troisième fois cette semaine pour encore discuter sur différentes lois qui sont déposées par le gouvernement, mais de lois qui nous amènent toujours à la même chose. Le projet de loi n° 161, qui modifie de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, ce projet de loi modifie diverses lois afin de donner suite principalement au Discours sur le budget du ministre des Finances du 25 mars 1997, à ses déclarations ministérielles du 28 novembre 1996, du 12 décembre 1996, du 19 décembre 1996 ainsi qu'aux bulletins d'information – sept, huit dates que je ne mentionnerai pas, M. le Président – émis par le ministère des Finances respectivement le 26 janvier 1996, 24 avril, le 3 juillet et le 16 octobre 1997. Il donne suite à certaines mesures prévues dans le Discours sur le budget du ministre des Finances du 9 mai 1996.

Ce projet de loi modifie en premier lieu la Loi sur les biens culturels afin, d'une part, d'accorder explicitement à la Commission des biens culturels le pouvoir de fixer la juste valeur marchande d'un bien culturel au moment du don d'un tel bien en faveur d'un centre d'archives agréé, d'un musée accrédité et, d'autre part, de prévoir un droit d'appel de la décision rendue par la Commission des biens culturels à cet égard.

Il modifie, M. le Président, en deuxième lieu, le Code de la sécurité routière pour y intégrer une mesure relative à l'imposition d'un droit d'immatriculation additionnel à l'égard des véhicules de luxe. Une autre taxe, M. le Président. Je vais y revenir tantôt.

Il modifie, en troisième lieu, la Loi concernant les droits sur les mines pour y introduire une nouvelle allocation supplémentaire pour amortissement dans le calcul du profit annuel aux fins de déterminer les droits miniers qu'un exploitant minier québécois doit payer en vertu de cette loi.

Il modifie, en quatrième lieu... concernant l'impôt sur le tabac afin de hausser les taux de la taxe sur les produits de tabac, ce qui va créer sûrement, M. le Président, de la vente de tabac au noir, ou appelez ça comme vous voulez.

M. le Président, Noël s'en vient. C'est le cadeau de Noël, je pense, du gouvernement qui, par cette loi, de la part du gouvernement, va avoir au-delà de 1 100 000 000 $ de nouvelles taxes que les Québécois et Québécoises vont être obligés de payer, indirectement – ce n'est pas une taxe d'impôt sur leur salaire, c'est une taxe... Pour votre bénéfice, M. le Président, et sûrement que des collègues ont pu mentionner tantôt l'impact financier du projet de loi n° 161, un aperçu des principales mesures, en millions de dollars, M. le Président, et, comme je vous connais, je suis sûr que vous allez porter une attention très particulière pour pouvoir en discuter honnêtement en fin de semaine avec tous les gens qui vont participer au Conseil général de votre parti.

C'est important de dire aux gens toutes les taxes, les nouvelles taxes que le Parti québécois, le gouvernement actuel a déposées pour Noël. C'est une brique, on l'a dit, 756 articles qui modifient 26 lois, en résumé, si vous voulez, et que ces gens-là, je pense, n'ont pas réellement vue. Et j'espère que, au moment où on se parle, les gens du Parti québécois qui sont arrivés ici, à Québec, qui sont dans leur chambre, vont écouter l'opinion de l'autre côté de la Chambre et voir les taxes qui sont cachées, pour ne pas dire ça, mais les taxes dans cette loi qui a été déposée en cette Chambre pour le temps des Fêtes. Parce que les gens, durant le temps des Fêtes, sûrement, à part des gens qui sont peut-être ici en fin de semaine, n'ont vraiment pas le temps, à cause de l'ambiance des Fêtes qui est déjà commencée, avec les tempêtes de neige, les décorations, n'ont pas le temps de vraiment vérifier toutes les taxes qui sont déposées en cette Chambre pour l'année qui s'en vient.

Je vais vous en mentionner une couple, M. le Président. L'immatriculation à l'égard d'un véhicule de luxe; de 1997 à l'an 2000, 2 000 000 $ sur trois ans. Une hausse du taux de taxe sur les produits du tabac, 19 000 000 $ par année pour les trois prochaines années, ce qui va créer vraiment, d'après moi, cette augmentation de taxe là, le marché au noir qu'on a déjà eu et que, quand M. Johnson, le député de Vaudreuil, est devenu premier ministre, avait baissée pour contrer le travail au noir. Il y a eu une modification, il faut le dire, à la Loi sur les impôts des particuliers, de moins 756 000 000 $, sur trois ans, pour le bénéfice des Québécois et des Québécoises.

Le mécanisme d'attribution des pourboires, que nous avons discuté en cette Chambre lors d'une interpellation avec Mme la ministre déléguée au Revenu, et, finalement, le message que le Parti libéral a pu laisser ce matin-là... je pense que, avec l'entente qu'il y a eu avec le gouvernement fédéral – pour une fois, ce n'est pas la faute du fédéral – on est venu à bout d'avoir une entente, et tant mieux, pour les gens à pourboire, M. le Président, ces gens-là qui travaillent à des salaires minimums. Ayant l'expérience, étant propriétaire, déjà, d'un hôtel, maintenant un bar, une taverne, ces gens-là qui travaillent à des salaires minimums, c'est avec leurs pourboires qu'ils ont la chance de gagner leur vie honnêtement, et gagner leur vie en déclarant les impôts, et c'est important de le mentionner. Et je suis fier et j'espère que c'est vrai, ce qu'on lit dans les journaux, que cette entente est signée entre la province de Québec et le gouvernement fédéral, et Mme la ministre déléguée au Revenu me fait signe que oui. Tant mieux. Parce que, quand Mme la ministre était déléguée au Tourisme et que j'étais critique au Tourisme, ou porte-parole, on avait discuté de ça. C'est important.

Ces gens-là – c'est 150 000 jobs au Québec – travaillent à des salaires pas comme ceux des gens qui travaillent dans les pâtes et papiers ou qui travaillent comme fonctionnaires, ou les cadres, les professionnels, qui travaillent à des salaires minimums. Et tant mieux s'il y a eu une entente. Tant mieux si on peut laisser ces gens-là déclarer personnellement, eux-mêmes, à leurs employeurs – je pense que c'est comme ça que ça va se faire – à toutes les semaines un montant d'argent, pour les aider aussi, pas seulement s'ils perdent leur emploi ou dans les moments tranquilles dans les régions qui sont touristiques, lorsqu'ils sont obligés d'aller à l'assurance-emploi, comme on l'appelle aujourd'hui... Tant mieux. Ces gens-là qui travaillent à des salaires minimums plus leurs pourboires ont une protection, une certaine protection si, en cas de maladie, avec l'assurance-emploi... maintenant, ils vont pouvoir avoir une certaine protection qu'ils n'avaient pas.

(16 h 50)

Alors, je suis satisfait des négociations et je pense, et j'espère aussi, et je vous le dis honnêtement, j'espère aussi que les crédits d'impôt pour les personnes, ça va continuer pour les trois prochaines années, parce que c'est un fardeau d'augmentation pour ces gens-là. Et tant mieux pour ces gens-là.

M. le Président, aussi, on a aboli la taxe sur le capital pour les nouveaux investissements, c'est-à-dire, pour trois ans, moins 61 000 000 $. Tant mieux aussi. Il faut le dire, il y a des bonnes choses. Il ne faut pas se cacher, il faut le mentionner aussi.

Aussi, la TVQ. On va augmenter le taux de la TVQ de 1 % le 1er janvier 1998, ce qui va donner un revenu de 675 000 000 $ au gouvernement provincial. Et c'est une augmentation directe, parce qu'on peut baisser les impôts aux gens... Hier, j'ai fait une erreur, j'ai dit que les gens qui font moins de 50 000 $ ont 3 % ou 4 % de réduction d'impôt, 15 %. Alors, j'ai fait une erreur. Mais tant mieux si ces gens-là paient moins d'impôts. Mais, si on compare avec l'Ontario, aujourd'hui, on est, au minimum, 8 % ou 9 % toujours, plus 15 %, de moins d'impôts en arrière d'eux. Et on se compare toujours avec l'Ontario. Cette taxe, c'est tout le monde qui va la payer, c'est la consommation, ce 1 % là, ce 675 000 000 $ là que les Québécois vont être obligés de payer à chaque achat. C'est une augmentation directe, c'est une taxe d'impôts complètement directe que les Québécois, encore une fois, vont être obligés de subir à cause de cette loi qui est déposée, sur le budget qui a été déposé.

Hier, on avait un autre projet de loi, le projet de loi n° 173 sur les municipalités, M. le Président. Vous étiez, hier, dans cette enceinte, comme président, au moment où on se parlait. Je le répète, on demande aux Québécois et aux Québécoises de sacrifier ou de payer plus d'impôts, plus de taxes, plus de tout ça, et le gouvernement, lui, ne fait pas sa part. Il y a les députés qui ont fait leur part, pour un montant de 360 000 $. Le gouvernement actuel du Parti québécois, le gouvernement Bouchard, lui, a un budget de 40 250 000 000 $. Eh oui, si vous retournez dans les galées d'hier, je me répète, mais 250 000 000 $ d'augmentation sur le budget pour 1997, une augmentation de 0,06 %. Et, ce 250 000 000 $, 90 % de ces argents sont retransmis à différents ministères: le Conseil exécutif, tout le monde connaît le Conseil exécutif, c'est le «bunker», le Conseil exécutif, c'est le ministère du premier ministre du Québec; le ministère des Finances, qui contrôle le budget total du gouvernement du Québec; le Trésor, le député de Labelle, comme je disais hier, l'argentier, si vous voulez, des dépenses du gouvernement du Québec; et le ministère du Revenu, Mme la ministre déléguée au Revenu est ici avec nous cet après-midi. Ils ont pris 90 % de ce 250 000 000 $ et ils les ont transférés dans leur ministère.

En retour, on a baissé de 0,3 % dans la santé, on a baissé dans le budget total de l'éducation, 5 %, on a augmenté l'impôt ou la taxe de vente de 1 %, pour 675 000 000 $, 400 $ par famille, l'assurance-médicaments. Et, avec toutes les coupures en santé, c'est même dangereux, les gens ont peur, vraiment, d'être malades, M. le Président. Vous avez connu dernièrement, vous-même, une maladie. Je suis content de vous revoir ici, dans cette Assemblée. Je vois mon collègue de Jeanne-Mance, lui aussi, qui, malheureusement, pendant trois ou quatre semaines, n'était pas présent avec nous à cause de différentes maladies. Ces gens-là...

Une voix: ...

M. MacMillan: Il ne faudrait pas mentionner les maladies, non. C'est important de vous dire que les gens – puis c'est vrai, ça, pour être sérieux – les Québécois et les Québécoises, présentement, à cause des coupures dans la santé, ont peur d'être malades. Les personnes âgées, les personnes âgées, au Québec...

Des voix: ...

M. MacMillan: On trouve ça drôle! Il y a des gens que je connais personnellement qui ont peur d'être malades parce que, quand on va à l'hôpital, on est obligé de passer... Puis j'ai un cas particulier, un ami personnel, un missionnaire du Brésil, cancer, qui est venu ici, à Québec, à l'hôpital Laval, qui a passé trois jours – pour être exact – dans le corridor pour se faire dire après trois jours que dans peu de temps il ne serait plus de ce beau monde-là. Alors, c'est difficile pour ces gens-là qui sont malades, à cause des coupures qu'ils ont eues à la Santé, qui sont obligés de passer ces trois jours-là dans un corridor puis se faire dire que, au bout du temps, dans peu de temps, ce monsieur-là ne serait plus présent avec nous. Puis on comprend que la maladie, ce n'est pas à cause des coupures, mais le service aux malades n'est pas là comme il était antérieurement, M. le Président.

En éducation, c'est la même chose. On parle de déficit zéro, on dit que, dans l'année 2000, on va avoir un déficit zéro. C'est faux, M. le Président. On l'a prouvé, le Vérificateur général, cette semaine, l'a prouvé carrément: 1 500 000 000 $ d'argent qui est ajouté sur le déficit, qui ne sera pas déclaré dans les avenirs qu'on va avoir, M. le Président, dans les futurs budgets. Ça, c'est la vérité. Pendant six ou sept mois, ici, en cette Chambre, nous, du Parti libéral, avons posé des questions au ministre des Finances, au ministère du Revenu et à beaucoup d'autres ministères leur disant que les fonds, c'est un moyen, vraiment, de cacher le déficit des deux, trois prochaines années. C'est beaucoup d'argent, 1 500 000 000 $, qui sont cachés carrément.

On est d'accord, nous autres, de ce côté-ci de cette Chambre, de pouvoir avoir un déficit zéro, on est tous d'accord avec ça. Nous l'avions dans notre programme électoral, nous l'avons passé ici, en cette Chambre, unanimement, et on veut que le déficit zéro se réalise. Même, de notre côté de la Chambre, du côté de l'opposition, on veut absolument atteindre le déficit zéro pour les Québécois et pour les Québécoises. Tout le monde est d'accord avec ça, mais il faut conter la vérité, il faut mettre les vrais chiffres, il faut que les comptables... Je me rappelle une réponse du président du Conseil du trésor qui a dit que c'était devenu la comptabilité moderne de créer des fonds. Comptabilité moderne pour créer des fonds. C'est comme moi, dans mon commerce, qui dirais: Je fais un profit de 50 000 $, mais j'ai décidé, je ne sais pas, de faire de l'amélioration et de l'immobilisation et de mettre ça sur 10, 15 ans et que ce n'est pas dans mon budget, pas du tout, que ce n'est pas dans mon bilan. C'est ça qu'on fait, là. C'est l'exemple, c'est de la comptabilité moderne, voilà.

Le gouvernement ne marche pas comme ça, on paie cash. On paie cash, le gouvernement. Merci, M. le Président. On va faire des routes, on va faire du recouvrement, on va faire... Pas des trottoirs, c'est aux municipalités, et on a donné... 30 000 fonctionnaires qui ont décidé de prendre leur retraite, on va financer ça sur 16 ans ou sur 15 ans. On finance des salaires, maintenant!

(17 heures)

Alors, M. le Président, je ne pense pas qu'on devrait laisser aux Québécois, aux Québécoises le fardeau de cette réforme-là, la réforme de l'impôt sur les revenus des particuliers qui va entrer en vigueur le 1er janvier qui s'en vient. On a eu beaucoup d'articles de journaux suite au dépôt de la Loi n° 161: de La Presse du 21 novembre 1997 qui disait: Un lourd fardeau , par M. Philippe Dubuisson; Ingrédients indigestes , Gilles Lesage. Et on sait tous que Gilles Lesage... Je ne pense pas que, au bout de son crayon, c'est de l'encre rouge qui sort de là. Jamais, en tout cas, depuis neuf ans, je ne pense pas qu'il y ait de l'encre rouge qui sorte au bout de son crayon. Il y a un petit peu plus de bleu que d'encre rouge qui sort de là. Regardez, il dit: «Ingrédients indigestes». Ça veut dire qu'il a eu de la misère, qu'il a eu vraiment de la misère à voir ce dépôt de loi là. On trouve ça drôle, on peut trouver ça bien drôle. Peut-être que les mots dont, moi, je me sers... Mais, en tout cas, il y a des gens qui comprennent quand on parle ici, quand même. Le message qu'on veut laisser, là, les messages sur notre bord, ici, là... On est d'accord avec un déficit zéro.

Des voix: Bravo!

M. MacMillan: M. le Président, ça me fait plaisir, c'est la première fois que... Bien non, ce n'est pas vrai. C'est la deuxième fois depuis une semaine que les gens du gouvernement m'applaudissent, et j'espère que...

Des voix: Bravo!

M. MacMillan: ...les gens du Parti québécois dans le comté de Papineau regardent ça parce que, si vous êtes satisfaits avec moi en Chambre, ça veut dire que les gens du Parti québécois de mon comté vont voter pour moi la prochaine fois et ils vont avoir moins de problèmes.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. MacMillan: Pour terminer, M. le Président, pour répéter, nous sommes d'accord avec un déficit zéro. Notre chef, M. Johnson, a été un des premiers à le dire. C'était dans notre programme électoral. Nous l'avons suggéré ici, à l'Assemblée nationale, nous avons voté pour, mais nous avons voté pour un déficit zéro réel, un vrai déficit zéro, pas du pelletage sur les municipalités. Alors, vous direz ça à vos maires. Mais il n'y a pas trop, trop de maires qui sont péquistes, quand même. Mais vous direz ça à vos gens dans votre comté. Dites ça à vos gens dans vos comtés quand ils vont recevoir, M. le Président... Quand ces gens-là vont recevoir leur compte de taxes municipales, quand ces gens-là, au mois de janvier, vont acheter, ou qu'ils vont aller au restaurant, ou qu'ils vont aller dans les hôtels, ou qu'ils vont aller dans les magasins et qu'ils vont payer 1 % de plus sur la taxe, vous leur demanderez s'ils sont satisfaits, si c'est vraiment la manière qu'on devrait avoir un déficit zéro. C'est en coupant dans nos propres dépenses au gouvernement qu'on devrait couper les dépenses pour arriver à un déficit zéro, pas en envoyant ça sur le dos de tous les Québécois et les Québécoises, et c'est ça que le Parti québécois, le gouvernement...

Et pour finir, M. le Président, parce que j'ai été coupé souvent, je vais vous lire quelque chose, ça va prendre 30 secondes: «M. le premier ministre a déclaré que le déficit zéro est le moyen le plus sûr pour arriver à faire du Québec le premier État indépendant de l'an 2000.» C'est son premier objectif. Le premier objectif du gouvernement, ce n'est pas d'assainir les finances publiques, pas non plus le fardeau fiscal des contribuables, mais de se servir de l'idée du déficit pour vendre l'option de la séparation du Québec. C'est ça qu'ils veulent faire, M. le Président. Merci.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de Papineau. Y a-t-il d'autres intervenants sur l'adoption du principe du projet de loi?

Une voix: Il n'y en a plus.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, comme il n'y a pas d'autres intervenants, Mme la ministre déléguée au Revenu, vous avez droit à un temps de réplique de 20 minutes. Mme la ministre.

Des voix: Bravo!


Mme Rita Dionne-Marsolais (réplique)

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. On a eu droit dans ces dernières heures à une démonstration d'un manque de compréhension assez significatif de la transformation du régime fiscal qui s'opère actuellement au Québec. C'est clair qu'au niveau de l'opposition, au moment où le ministre des Finances a présenté son budget au printemps dernier, on n'en a pas beaucoup discuté, on n'a pas consacré beaucoup de temps à l'étude de ce budget-là, et on se retrouve aujourd'hui avec un projet de loi dont l'objectif est d'assurer non seulement la rédaction en loi des changements qu'il faut apporter à notre législation, mais aussi à l'implantation de l'ensemble de ces mesures du budget.

On a entendu aussi beaucoup de commentaires, pas toujours très obligeants d'ailleurs, sur l'envergure, la caractéristique omnibus de ce projet de loi, puis on a toujours cité le même article du Devoir , celui de Gilles Lesage, et on a oublié de mentionner deux petites phrases un peu anodines. On dit: «C'est le traditionnel bill omnibus consécutif au budget du printemps précédent.» Traditionnel, ce n'est pas nouveau. Ensuite, on dit aussi dans l'article de Lesage: «Il est vrai que la pratique d'un tel expédient n'est pas inédite.» Donc, on a beau se révolter, crier à la bousculade, à la densité du projet de loi, un projet de loi qui suit un budget est toujours présenté dans un contexte de bill omnibus. Et notre projet de loi n'est pas beaucoup différent des projets de loi que l'opposition a présentés dans son volume. Et j'en veux pour preuve: au mois de mai 1991, on avait présenté à l'opposition un projet de loi – nous, je le rappelle, on l'a présenté au mois de mars – et on a adopté ce projet de loi là au mois de décembre, le 18 décembre suivant. C'était un projet de loi qui avait 688 articles. On crie à la complexité de ce projet de loi. J'avoue que c'est vrai que c'est un projet de loi qui est complexe, parce qu'une application des mesures budgétaires c'est toujours complexe. Mais, dans ce projet de loi, il y a 756 articles, et il y en avait pratiquement 700 dans celui de 1991. Donc, on fait un peu de spectacle sur le dos de ce projet de loi, c'est un petit peu excessif.

Mais qu'est-ce qu'on a entendu dans ces propos et ces commentaires nombreux, pas très diversifiés de l'opposition? D'abord, le premier commentaire qu'on a entendu, le principal, bien sûr, c'est sur la question des pourboires. Et c'est vrai que ce projet de loi là va présenter une mesure innovatrice que nous allons ajuster, puisque, en fait, on a pu s'entendre avec le gouvernement fédéral. Et je sais que ça fait bien plaisir à l'opposition, et ça nous fait plaisir à nous aussi, M. le Président, parce que, dans ce dossier-là, ça fait depuis le mois de mars qu'on essaie de s'entendre avec le gouvernement fédéral. Et je dois dire que l'appui de l'opposition, dans ça, aurait été appréciée peut-être plus tôt pour qu'on puisse convaincre nos collègues du fédéral d'apporter l'ajustement aux mesures qu'ils exigeaient des employeurs et des employés. Et, donc, c'est grâce, je dirais, à la bonne entente entre le ministre des Finances fédéral et celui du Québec que nous allons avoir une modalité plus flexible, plus efficace.

Mais qui est-ce qui a fait le sacrifice, dans cette bonne entente, pour qu'elle ait lieu? Encore une fois, c'est le Québec. Parce que, dans l'entente que le fédéral nous a proposée, on passe après la retenue à la source fédérale, on passe après la contribution à l'assurance-emploi fédérale, et toutes les autres dépenses du Québec vont suivre au niveau de la retenue de l'employeur. Encore une fois, c'est le Québec qui a dit: Si c'est ça que ça prend pour acheter la paix, on va l'acheter. Alors, quand j'entends les commentaires de l'opposition sur ce projet de loi, je peux dire que notre gouvernement a fait preuve d'imagination, de modernité, de responsabilité dans ce projet de loi et de bonne volonté avec le gouvernement fédéral pour qu'on puisse effectivement, dans le cas du dossier des pourboires, répondre à la protection sociale à laquelle ces travailleurs à pourboire ont droit et répondre aussi aux difficultés d'administration que les employeurs nous ont soulevées.

(17 h 10)

L'autre chose dont on a beaucoup parlé dans l'opposition, pendant cette discussion, c'est le remboursement des revenus sur les intrants, la taxe sur les intrants. On nous reproche de ne pas rembourser aux grandes entreprises la taxe sur les intrants. Mais, encore là, on donne juste une partie de l'information. C'est toujours la même chose avec l'opposition, on parle juste d'une partie de l'information, on retient le reste qui ne fait pas notre affaire. La réalité, c'est quoi? C'est que le fédéral ne nous rembourse pas nos coûts d'harmonisation. Il les a remboursés à tous les voisins, mais il ne les rembourse pas au Québec. Et, le ministre des Finances l'a dit, quand le fédéral nous renverra notre 2 000 000 000 $ qu'il nous doit, on le remboursera, on le retournera aux grandes entreprises. Alors, peut-être que l'opposition libérale pourrait gentiment faire le même effort qu'elle prétend avoir fait avec les pourboires et forcer nos collègues du fédéral, leur forcer la main et la bourse pour de l'argent qui nous revient, qui nous appartient, en fait.

L'opposition nous dit – je fais la synthèse – que le projet est trop volumineux? En 1991, ça se ressemblait. On nous dit qu'on prend des engagements qu'on ne respecte pas? Au contraire, ce projet de loi démontre, par les réformes de l'impôt, que nous allons enfin pouvoir amorcer un changement de notre structure fiscale et que nous allons pouvoir respecter nos objectifs de revenus avec la même vigilance que nous mettons pour respecter nos objectifs, nos budgets, nos objectifs de dépenses. Alors, un gouvernement responsable, c'est ça. On s'engage pour des revenus et des dépenses et on prend les moyens, dans les deux cas, de rencontrer les engagements.

Quand on regarde aussi pourquoi ces quelques ajustements qui vont apporter, notamment au niveau de la taxe de vente... C'est vrai qu'on va augmenter la taxe de vente, mais tout de suite on oublie de dire que notre réforme de l'impôt va quand même permettre de retourner dans la population... Au moment où elle aura atteint son rythme de croisière, ça va nous coûter net, juste pour cette année, 1997-1998, 14 000 000 $ de plus. Donc, on va recevoir d'une taxe de vente, mais notre réforme coûte plus cher que la dépense de taxe de vente. Cette année, c'est 14 000 000 $, puis c'est quasiment 300 000 000 $ pour 1999-2000. Donc, on amorce un changement qui va engager le gouvernement pour une réforme un peu plus équilibrée de la fiscalité.

Dans tout ce qu'on a entendu aujourd'hui, personne dans l'opposition n'a parlé de la réduction des transferts fédéraux au Québec. Parce que, si on fait ce changement, cette réforme et cette discipline budgétaire, à laquelle nous nous astreignons depuis deux ans – je pense qu'il est important de le souligner à l'opposition et à ceux qui nous écoutent – c'est parce que, en 1984, par exemple, le Québec recevait 28,9 % de ses revenus budgétaires de la part de transferts financiers fédéraux; aujourd'hui, M. le Président, c'est autour de 18 % à 19 %. Ça fait une grosse différence, ça. Alors, cet argent-là, ça ne pousse pas dans les arbres. Et, en parallèle, je souligne, M. le Président, à cette Assemblée que nos impôts, au fédéral, n'ont pas baissé. On paie toujours autant d'impôts, puis c'est presque toujours ajusté à l'inflation.

Quand l'opposition nous dit qu'elle n'est pas d'accord puis qu'elle se révolte contre ce projet de loi, qu'est-ce qu'elle nous dit? Elle nous dit toujours qu'elle est d'accord pour dire que les Québécois sont nés pour un petit pain: Qu'on reste tranquille, qu'on ne s'énerve pas puis qu'on attende donc que le fédéral s'occupe de nous. Bien, le fédéral, il ne s'occupe pas de nous, puis il nous coupe les vivres continuellement, puis il demande à tous les citoyens du Québec de payer davantage.

Alors, en conséquence, nous, qu'est-ce qu'on fait par ce projet de loi là? On assume nos responsabilités. On s'engage derrière des engagements que nous avons pris au budget et que nous matérialisons dans ce projet de loi n° 161. On bâtit, avec ce projet de loi, une réforme qui va peut-être amener un peu de fierté au sein du peuple québécois et une ambition de travailler ensemble à réaliser un État moderne. Et c'est pour ça, M. le Président, que je recommande l'adoption du principe du projet de loi n° 161, la première étape vers une restructuration dans notre fiscalité au bénéfice des Québécois, et seulement des Québécois.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, Mme la ministre déléguée au Revenu. Le principe du projet de loi n° 161, Loi modifiant de nouveau la Loi sur les impôts, la Loi sur la taxe de vente du Québec et d'autres dispositions législatives, est-il adopté? M. le député de Kamouraska-Témiscouata.

M. Béchard: Étant donné que nous sommes cinq députés, je demanderais le vote enregistré.

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous demandez le vote enregistré? Veuillez appeler les députés, s'il vous plaît. M. le leader du gouvernement.


Vote reporté

M. Jolivet: Non, M. le Président. Je vous demande, en vertu de l'article 223, de reporter le vote aux affaires courantes du mardi 2 décembre 1997.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, conformément à l'article 223, le vote est reporté au mardi 2 décembre, après les affaires courantes. Alors, M. le leader du gouvernement.

M. Jolivet: Oui, M. le Président. Comme nous avons très bien travaillé et que les commissions parlementaires se continuent, je vais libérer les députés en faisant motion pour que nous ajournions nos travaux à ce mardi 2 décembre 1997, à 10 heures.

Le Vice-Président (M. Pinard): Est-ce que la motion est adoptée? M. le leader de l'opposition, vous désirez débattre la motion?

M. Bissonnet: Non, non, adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, dois-je comprendre que la motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Pinard): M. le député.

M. Bissonnet: À nos collègues du côté ministériel, un bon conseil général en fin de semaine.

(Fin de la séance à 17 h 16)