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Version finale

36e législature, 1re session
(2 mars 1999 au 9 mars 2001)

Le mardi 21 mars 2000 - Vol. 36 N° 85

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Table des matières

Affaires du jour

Affaires courantes

Affaires du jour


Journal des débats


(Dix heures une minute)

Le Vice-Président (M. Brouillet): Mmes et MM. les députés, nous allons prendre quelques minutes de recueillement.

Veuillez vous asseoir, s'il vous plaît.


Affaires du jour


Affaires prioritaires


Reprise du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure

À l'article 1 du feuilleton, aux affaires prioritaires, l'Assemblée reprend le débat ajourné le 16 mars dernier sur la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure présentées par Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, M. le député d'Outremont, M. le député de Verdun et Mme la députée de La Pinière.

Je vous informe qu'il y a 5 h 52 min d'écoulées à la première étape du débat. Il reste un total de 7 h 38 min réparties comme suit: 3 h 28 min au groupe parlementaire formant le gouvernement; 3 h 50 min au groupe parlementaire formant l'opposition officielle; et 20 minutes au député indépendant. Je vais maintenant céder la parole à M. le chef de l'opposition, qui a un droit de parole de 60 minutes. M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci beaucoup, M. le Président. Dans la vie d'un gouvernement, il y a des moments qui sont très importants, des moments qui définissent en quelque sorte l'action du gouvernement. Vous les connaissez bien, puisque vous êtes dans le fauteuil où vous êtes ce matin. Il y a évidemment une élection générale qui définit les enjeux et qui permet à la population de poser un choix, un choix qui n'est pas toujours reflété de manière équilibrée dans le résultat, mais néanmoins un choix.

Mais il y a, dans le mandat exécuté par un parti politique au gouvernement, deux autres moments très importants. Il y a ce qu'on appelle le discours inaugural, autrement connu sous le nom de discours du trône, où le gouvernement annonce des intentions, annonce un plan, annonce une perspective et un menu législatif qui vont venir articuler, exprimer en quelque sorte les intentions du gouvernement. L'autre moment très important dans la vie de tous les gouvernements, c'est son budget et l'annonce de son budget et de ses choix budgétaires. J'ajouterais, M. le Président, que c'est, il n'y a aucun doute, l'ensemble des décisions qui ont le plus d'impacts sur la vie des citoyens du Québec.

Ce gouvernement, qui a été élu pour la première fois en 1994, livrait le 14 mars dernier, la journée même de la rentrée parlementaire, un nouveau budget. Un nouveau budget qui va imposer des choix à la population du Québec, un budget que nous allons reprendre et débattre pendant encore plusieurs jours, mais c'est aussi un budget qu'il faut placer dans la perspective d'un gouvernement qui a été élu en 1994, qui a fait des choix, qui a géré les affaires du Québec et qui propose pour l'avenir un certain nombre de pistes qu'on voudra reprendre aujourd'hui.

Mais, M. le Président, avant de bien comprendre les choix que nous proposait le gouvernement le 14 mars dernier, il faut d'abord faire un constat d'où nous en sommes rendus au Québec aujourd'hui, de notre situation, là, non seulement dans l'ensemble canadien, mais aussi dans l'ensemble nord-américain et également dans le contexte d'une économie qui se mondialise. Les constats, il faut les regarder froidement, je pense qu'il faut les regarder honnêtement pour que nous puissions ensemble tirer les bonnes conclusions et opposer des choix que nous allons proposer aujourd'hui.

D'abord, M. le Président, il n'y a pas un élément qui touche la vie des citoyens du Québec plus directement que la situation de l'emploi, hein. C'est par l'emploi qu'on participe dans notre société. C'est quand une personne a l'occasion de travailler... Et là j'emploie à dessein une définition très large. Ce n'est pas juste l'emploi au sens plus traditionnel du terme, ça peut être du bénévolat, ça peut être un travail communautaire. Enfin, c'est par l'emploi que chacun, chacune réussit à participer, à contribuer, à assumer sa part de responsabilité bien sûr, mais c'est aussi une façon pour chacun, chacune de se réaliser.

Au niveau de l'emploi, M. le Président, ça revient à un test que le gouvernement s'est imposé à lui-même, c'est-à-dire de rattraper la moyenne canadienne de création d'emplois, un test qu'il s'était imposé en 1996. Et le gouvernement, à ce moment-là, lors d'un sommet économique, s'était donné trois ans pour atteindre l'objectif.

Or, M. le Président, le premier constat qu'on fait, c'est que sur ce plan, pour cet objectif, le gouvernement du Parti québécois a une fois de plus raté la cible. Depuis janvier 1996, soit la date de l'arrivée de l'actuel premier ministre, le retard du Québec est de 75 000 emplois par rapport à la croissance de l'emploi au Canada. Notre taux de chômage, au Québec, est de 21 % plus élevé que celui du Canada, soit la même moyenne, M. le Président, que les années les plus difficiles de notre économie.

Pour comparer, M. le Président, le taux de chômage est à peu près de 8,3 %, pour l'ensemble canadien, incluant le Québec, 6,8 %, si on compare avec le reste du Canada, 5,7 % en Ontario... c'est-à-dire, le 8,3 % est au Québec, pour être bien précis. En Alberta, en Saskatchewan, si on veut faire un peu le tour de ce qui se passe dans les économies qui sont chez nous, c'est 4,9 % et 4,6 % respectivement, M. le Président.

Au chapitre des investissements privés, le Québec ne réussit toujours pas à attirer sa part proportionnelle à la taille de son économie. Et, quand on compare à partir de la population, c'est quoi, 24 %, 25 % de l'ensemble canadien, ou 22 %, notre part de l'économie, on constate que, depuis que le Parti québécois est à la tête du gouvernement, le Québec attire en moyenne 17,8 % du total des investissements canadiens.

M. le Président, c'est en grande partie dû à ce déficit au chapitre des investissements privés que la part du Québec dans l'ensemble économique canadien diminue sans cesse. Les prévisions de Statistique Canada concernant les investissements privés au Québec pour l'année 2000 sont de 27,6 milliards. Pour le Canada dans son ensemble, c'est au-delà de 147 milliards de dollars. Le Québec n'ira donc chercher que 18,7 % des investissements privés au Canada. C'est donc dire, M. le Président, que l'absence d'investissements qui normalement devraient se faire chez nous se traduit également par un déficit au niveau de l'emploi.

Pour ce qui touche la croissance économique, si la tendance se maintient en 2000, le Québec va encore traîner de la patte d'à peu près 0,5 % par rapport au Canada. Pour cette année, la croissance économique prévue pour le Québec est de 3,2 %; au Canada, c'est 3,7 %; en Ontario, notre voisin immédiat, notre compétiteur, c'est de plus de 4 %, M. le Président.

Au niveau des taxes et des impôts, bien vous connaissez bien la situation, vous la vivez, vous voyez ça sur votre chèque de paie, M. le Président. Je vous vois déjà attristé par ce fait. Avant le budget, au Québec, nous étions les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord, et, après le budget, on est toujours les citoyens les plus taxés en Amérique du Nord.

(10 h 10)

Pourtant, M. le Président, je me permets de vous citer un document qui a été rendu public dernièrement, qui disait ceci, et je cite: «Le poids élevé de l'impôt des contribuables réduit la croissance de l'économie et freine la création d'emplois. Les effets négatifs d'un impôt trop lourd par rapport à nos principaux partenaires commerciaux se manifestent de diverses façons sur les ménages et les entreprises.» Fin de la citation. C'était dit noir sur blanc dans un document de consultation que ce gouvernement a rendu public, reconnaissant que les impôts élevés, les taxes étaient un frein à la croissance de l'emploi et surtout un frein à la croissance des revenus des citoyens du Québec.

M. le Président, je veux revenir là-dessus parce qu'on sent, on conclut qu'il y a un problème très important dans le gouvernement actuel sur cette question. Il y a une ambivalence - et là je suis généreux quand je dis «une ambivalence» - un manque de conviction sur cet enjeu qui est extrêmement important pour l'avenir de notre économie.

Pendant la campagne électorale, vous vous rappellerez que le chef du Parti québécois critiquait les baisses d'impôts qui étaient proposées par le Parti libéral du Québec. Eh bien, je me permets de citer le chef du Parti québécois, qui, pendant la campagne, disait ceci: «Je pense que, si quelqu'un nous dit qu'il va réduire sur cinq ans les impôts de 3 milliards, il faut bien qu'il nous dise comment il va faire pour maintenir le niveau des dépenses dans la santé et l'éducation, comment il va créer de l'emploi.» Ça, c'était le 11 septembre 1999, M. le Président. C'est pour vous dire, là, à quel point le gouvernement actuel, sur cette question, va de contradiction en contradiction et que ses opérations budgétaires ne reflètent aucune espèce de volonté, de ligne directrice ou de plan pour ce qui est de la question des impôts et des taxes.

M. le Président, on sent que le gouvernement change lentement d'idée. Sauf qu'il faudra lui rappeler pourquoi cette question des impôts et des taxes est si importante pour les citoyens du Québec. Ça a un impact direct sur les ménages des Québécois. Ça a un impact direct en diminuant le revenu disponible après impôts et, de ce fait, la consommation. Ça réduit les incitations au travail. En effet, les taux d'imposition marginaux élevés influencent les choix des travailleurs. Ça influence les choix entre le travail et le loisir, entre le travail rémunéré et le travail domestique, entre le travail officiel et le travail au noir. Et, en réduisant l'épargne, puisque les taux d'imposition élevés en diminuent le rendement pour le contribuable, on continue d'appauvrir davantage les citoyens du Québec.

M. le Président, pour comprendre les choix qui se posent devant nous, il est également important de faire des comparaisons avec l'ensemble canadien et avec l'Ontario. Le Québec était en arrière et tirait de la patte, ça, c'était évident. Au début de 1999 - il y a un an - l'écart entre l'Ontario et le Québec, sur le plan des impôts, c'était 5,8 milliards de dollars. Après le budget qui vient de nous être livré le 14 mars dernier, l'écart est maintenant de 5,7 milliards de dollars. Dans trois ans, l'écart serait de 5,3 milliards de dollars. Et à ce rythme-là ça prendrait une quarantaine d'années avant de rattraper notre principal compétiteur qui est l'Ontario, juste à côté de chez nous. Avouons qu'en termes d'efforts ce n'est pas reluisant.

M. le Président, il n'y a pas qu'au niveau des impôts et des taxes où tout ça se reflète. Il y a un élément dont on n'a pas parlé assez et dont j'aimerais parler aujourd'hui, c'est la question des salaires. Parce qu'il y a un lien de cause à effet entre la réduction des impôts, la création d'emplois, les revenus du gouvernement, mais également - c'est l'élément qu'il faut ajouter, dont on n'a pas suffisamment parlé - les salaires gagnés par les travailleurs du Québec. Les salaires au Québec sont de 5 % inférieurs à la moyenne canadienne et de 11 % inférieurs à l'Ontario, de 18 % inférieurs au États-Unis.

L'écart entre le Québec et l'Ontario, en regard des salaires moyens, a augmenté depuis 1997. Ça n'a pas baissé, là. On perd du terrain par rapport à notre principal compétiteur. L'écart était de près de 3 000 $ en 1997, c'est maintenant presque 3 500 $. Cela veut dire qu'en Ontario, au cours des deux dernières années, le salaire moyen a augmenté de 600 $ de plus qu'au Québec, M. le Président. En termes réels, pour le contribuable Québécois, pour les familles qui ont à payer les comptes d'épicerie, le loyer, bien, ça, c'est de l'argent net dans leurs poches et ça, c'est des décisions qui les affectent dans leur vie de tous les jours.

Comparé à l'Ontario, au Canada et au États-Unis, le produit intérieur brut par habitant au Québec est plus bas. Alors que, en Ontario, c'est plus de 30 000 $, au Canada, c'est plus de 28 000 $, au Québec, le montant, c'est 25 000 $, au États-Unis - si on le comptait en argent canadien - c'est 36 000 $. Pour vous dire à quel point l'écart est très, très important. On est vraiment les parents pauvres de l'économie nord-américaine. En 1998, le produit intérieur brut réel par habitant, si on le met en dollars constants de 1992, au Québec était de 23 % inférieur à celui de l'Ontario, presque 15 % inférieur à celui du Canada, 44 % inférieur à celui des États-Unis. Voilà un constat qui devrait faire appel à un plan d'urgence, à une volonté ferme de vouloir corriger la situation.

M. le Président, dans le constat que nous faisons, il y a évidemment ces chiffres qui nous racontent une histoire qui est peu reluisante. Mais je veux également relever les succès. Je veux également relever des éléments qui sont encourageants dans notre économie. Parce qu'il y a des succès, malgré tout. Et, dans le fond, le vrai succès de l'économie québécoise, c'est que, malgré ce gouvernement qui continue à taxer, qui continue à prendre des décisions qui sont improvisées, les citoyens du Québec, eux, sont capables quand même de tirer leur épingle du jeu, malgré leur gouvernement.

Mais je veux relever certains succès qui me semblent très, très importants pour nous. Et c'est important de le soulever pour la raison suivante, c'est qu'il faut aussi donner un espoir, il faut relever là où on réussit et s'inspirer justement de ces succès. Le ministre des Finances en a mentionné quelques-uns dans son budget, j'aimerais ajouter justement à ce qu'il a dit et rappeler pourquoi on a réussi dans certains domaines.

Je pense à l'aéronautique, M. le Président. L'aéronautique est, pour le Québec, une très grande source de fierté. Bombardier est devenu le troisième producteur mondial dans le domaine de l'aéronautique et c'est un des fleurons de l'économie du Québec. Or, regardons de plus près pourquoi l'aéronautique a si bien réussi pour le Québec. C'est parce que ça a fait l'objet d'un partenariat aussi avec l'autre niveau de gouvernement. C'est suite à la privatisation de Canadair dans les années quatre-vingt que Bombardier a pu prendre possession de cette compagnie et la rebâtir. C'est grâce aux politiques des deux niveaux de gouvernement qu'on a pu encourager et soutenir Bombardier, toujours en respectant les règles du commerce international, pour que cette compagnie puisse justement s'élever au rang où elle se trouve aujourd'hui. Alors, voilà, M. le Président, de quoi s'inspirer pour l'avenir.

La même chose est vraie dans le domaine de la pharmacologie, où le Québec et l'économie de Montréal, entre autres, se distinguent. Pourquoi, M. le Président? Parce que l'autre niveau de gouvernement a pu offrir un cadre législatif qui protégeait les brevets, qui permettait l'investissement. Les compagnies, en retour, s'étaient engagées à faire un certain nombre d'investissements. Elles ont respecté leur engagement. Il faut le dire. Je me rappelle très bien de ce débat. Et le gouvernement du Québec a agi également. Le gouvernement qui était aux affaires à ce moment-là a également offert un cadre législatif qui permettait des investissements, la création d'emplois et la création d'emplois dans un secteur d'avenir où les emplois et les salaires moyens sont élevés. Alors, voilà un domaine où on réussit bien.

J'en prends un troisième, M. le Président, dont on est très fier aussi: la bataille qu'on a menée au Québec pour qu'on puisse conclure un accord de libre-échange avec les États-Unis en 1989 et un accord de libre-échange incluant le Mexique en 1993, M. le Président. Des batailles qu'on a menées ici, à l'Assemblée nationale, partout au Québec et ailleurs au Canada.

Mais ce que je relève dans ces succès, M. le Président, c'est que ce sont des succès qui ont été rendus possibles grâce à un gouvernement libéral qui avait suffisamment de vision pour assumer le leadership québécois. C'est ça, la différence entre le vrai succès... le succès, en passant, qui est durable, pas momentané, là, pas le succès qui vient à coup de subventions à gauche puis à droite, mais le succès qui est directement attribuable à ce que doit être le rôle d'un gouvernement, c'est-à-dire fixer le cadre réglementaire, le cadre législatif qui permet les investissements et la création d'emplois durables dans les secteurs d'avenir.

(10 h 20)

M. le Président, ça m'amène à vous parler d'un autre élément dont on doit tenir compte dans les choix pour l'avenir du Québec, et ça, c'est le coût du gouvernement. Combien ça nous coûte, nous, nous administrer au Québec, si on inclut le gouvernement du Québec, les gouvernements municipaux, les commissions scolaires, tous les autres niveaux de gouvernement parapublics, combien ça nous coûte nous administrer quand on compare ça à d'autres économies? Bien, le coût de fonctionnement de nos gouvernements est de 25 % plus élevé ici qu'en Ontario. Il faut s'interroger sur cette situation parce qu'à un certain niveau, là, la croissance des dépenses et la place que prend le gouvernement dans notre économie deviennent davantage un obstacle à notre développement qu'un outil de développement.

Les économies qui ont réussi justement à créer de l'emploi sont sensibles à cet élément, à cette réalité qui vient, dans le fond, troubler, qui vient déranger, qui vient tasser le citoyen à la faveur de l'État, basé sur une prémisse que l'État est mieux placé pour prendre les décisions à la place des citoyens que les citoyens le sont eux-mêmes, M. le Président. Et ça, je constate que malheureusement c'est un réflexe inné dans le Parti québécois.

Il y a la question de la dette aussi, M. le Président. On n'en a pas beaucoup parlé pendant le budget. Mais pas besoin de revenir là-dessus très longtemps pour se rappeler que malheureusement le Québec demeure la province la plus endettée et que nous en payons le prix.

Voyons, M. le Président, de quelle façon on s'est administré dans les dernières années. Là, je veux comparer le Québec, l'Ontario, un peu avec le Canada. Et ce que je trouve important de dire, c'est à quel point les décisions de ce gouvernement ont eu un impact négatif sur le portefeuille des contribuables québécois.

Les revenus. Si on compare avec l'Ontario, un gouvernement élu en 1995 et qui s'était engagé à réduire les impôts, les revenus autonomes du gouvernement de l'Ontario, depuis 1994-1995, ont augmenté de plus de 40 %. Les transferts venant du palier fédéral, pour le gouvernement de l'Ontario toujours, ont baissé de presque 23 %. Au chapitre de l'impôt sur le revenu des particuliers, les revenus du gouvernement de l'Ontario ont augmenté de plus de 12 %. Mais ce qu'il faut ajouter, c'est que les revenus ont augmenté malgré une baisse d'impôts de 30 % en Ontario dans la même période.

Alors, si le revenu provenant des impôts des particuliers a augmenté en Ontario, ce n'est pas parce que le contribuable individuellement a payé davantage. Au contraire, il paie moins. C'est parce qu'il y a plus de contribuables qui travaillent et qui contribuent justement aux revenus du gouvernement, qui, en retour, est capable de se payer des services dans le domaine de la santé et de l'éducation. Les revenus de taxe de vente au détail, en Ontario, ont augmenté de 37 %. Ça vous donne un portrait de ce qui s'est passé. Parce que les gens ont plus d'argent dans leurs poches, ça leur permet justement de consommer davantage mais de faire aussi, il faut le dire, des choix individuels.

Dans le cas du Québec, il s'est passé quoi, à peu près, dans la même période? De 1994-1995 à 1999-2000, les transferts venant du gouvernement fédéral ont diminué de 8 %. Ça se compare bien avec le voisin. Il ne faut pas oublier qu'ici on bénéficie, on doit le dire, malheureusement de la péréquation. Ce n'est pas par bonheur qu'on reçoit de la péréquation. Il reste toujours que le Québec en bénéficie. En Ontario, ils se font couper de presque 23 %; même période de temps, nous, on se fait couper de 8 %. Difficile de crier à l'injustice, M. le Président, dans un contexte comme celui-là.

Mais les revenus autonomes du gouvernement du Québec, dans la même période, ont augmenté de 30 %. L'impôt sur le revenu des particuliers a augmenté de 24 %. Les Québécois payaient 12,4 milliards d'impôts en 1994-1995; aujourd'hui, ils paient 15 milliards. Les revenus tirés de la taxe de vente au détail ont également augmenté, pas parce que la consommation a augmenté radicalement, parce que le gouvernement a choisi d'augmenter la taxe de vente au détail. Les taxes à la consommation ont augmenté de 28 % au Québec, contre 37 % en Ontario, qui, lui, n'a pas augmenté sa taxe de vente au détail.

M. le Président, ça vous donne un portrait des conséquences des choix d'un et des autres. Dans un cas, on a choisi de redonner aux citoyens ce qui leur revenait de plein droit et ils en ont récolté les fruits. Ici, au Québec, on a toujours, avec ce gouvernement, de la difficulté à faire confiance aux citoyens. Au contraire, c'est l'État qui a toujours le premier pas. M. le Président, le gouvernement, ayant augmenté ses revenus autonomes de 30 % depuis 1994-1995, aura augmenté de près de 10 milliards de dollars en tout l'argent qui revenait dans les coffres en taxant davantage ses citoyens. Vous voyez, M. le Président, la différence entre faire confiance et, dans un autre cas, choisir l'intervention de l'État.

Ça s'est reflété également dans la façon dont le gouvernement a géré les affaires. Il faut en parler, M. le Président, parce qu'il y a les choix budgétaires, il y a les chiffres qui nous en disent très long sur ce qu'on vit actuellement au Québec, et il y a bien sûr l'administration des programmes. Je pense au système de soins de santé, au système d'éducation, aux régions du Québec.

Dans le cas de la santé, le gouvernement a coupé au-delà de 2 milliards de dollars dans la même période de temps, avec des conséquences désastreuses, et, M. le Président, je le dis parce que c'est ce qu'on nous raconte, c'est ce dont on est témoin chaque fois qu'on est en contact avec les gens dans le réseau de la santé. Et je tiens aujourd'hui à citer un rapport parce que, chaque fois qu'on en parle, nous, à l'Assemblée nationale, on se fait accuser, nous, d'être démagogues, hein? C'est devenu un mantra du côté du gouvernement. Chaque fois qu'on relève les problèmes qu'on vit dans le domaine de la santé, tous ceux qui par malheur oseraient critiquer ce qui se passe se font accuser de démagogie, M. le Président.

Mais le Collège des médecins, le 15 septembre 1998, rendait public un rapport dans lequel il faisait le constat suivant. Dans son rapport, le Collège des médecins énumère plusieurs lacunes: à commencer par l'allongement des listes d'attente, que ce soit pour les services d'imagerie médicale, pour les interventions en chirurgie cardiaque, en orthopédie, en ophtalmologie, en oncologie; la démotivation du personnel médical et paramédical; les déficiences importantes dans la planification des services désormais offerts par les hôpitaux; les départs trop nombreux dans le cadre des programmes de mise à la retraite; et le manque de consultation auprès des médecins.

Les auteurs écrivent que personne n'est plus dupe à l'endroit d'un discours officiel fait de demi-vérités quant aux compressions, avant d'ajouter qu'il est faux de dire que tout va bien et que d'affirmer qu'il y a suffisamment de médecins frise la désinformation. Le gouvernement, M. le Président, a coupé aveuglément, sans plan, sans prévoir les conséquences, et, pour la population du Québec et pour ses citoyens les plus vulnérables, les conséquences ont été désastreuses.

M. le Président, ce qu'il y a de remarquable là-dedans, c'est le peu de cas dont a fait le gouvernement face aux coupures qu'il recevait justement du gouvernement fédéral. Parce qu'il faut le dire, hein, il y a également une responsabilité venant du gouvernement fédéral, qui, lui, a choisi de réduire ses transferts en argent comptant de l'ordre de presque 40 % dans ses exercices budgétaires des dernières années. Il semble vouloir rectifier le tir, on ne trouve pas que c'est suffisant. Mais, M. le Président, rappelons-nous qu'au moment où le gouvernement fédéral choisissait justement de couper il avait l'approbation du gouvernement actuel. Le gouvernement actuel a approuvé, l'a encouragé à le faire.

Aujourd'hui, il aime bien le dénoncer, sauf que je me permets de citer le chef du gouvernement, le premier ministre, qui, au mois d'août 1998, disait ceci, et je cite: «Et, moi, j'ai été de ceux qui ont été assez silencieux vis-à-vis des coupures fédérales du côté des transferts parce que, moi aussi, je comprenais qu'il fallait que le fédéral supprime son déficit. Je le comprenais. Je pensais que c'était une politique qui était correcte.» Fin de la citation, M. le Président.

C'était à l'été 1998, ça. C'est difficile de comprendre aujourd'hui le discours du gouvernement actuel qui aimerait bien faire porter la responsabilité de ses propres décisions sur les épaules des autres alors que lui-même acceptait, encourageait les coupures qui venaient de l'État fédéral.

(10 h 30)

Ce qu'il faut dire dans le domaine de la santé, encore là, si on fait une comparaison... On parlait de l'Ontario tantôt qui réussit à réduire ses taxes de 30 %, augmente ses revenus autonomes mais qui, dans la même période de temps, dans le domaine de la santé, ajoute 3 milliards de dollars dans son système de soins de santé. Puis, bien sûr, en Ontario, ils ont des problèmes de santé. Ils en ont partout. Il y a des phénomènes qu'on connaît très bien. Le phénomène de vieillissement de la population, évidemment que ça nous affecte. En passant, ce n'est pas un phénomène nouveau, là, ça ne nous est pas arrivé, ça, du jour au lendemain. Thérèse Lavoie-Roux, qui était une ministre de l'Éducation dans un gouvernement libéral, le disait, le répétait. On le savait, que ça allait arriver, ça. Puis, en Ontario, bien oui, ils ont des problèmes aussi, puis ils en font, une réforme de la santé, aussi, à la différence près qu'ils ont ajouté 3 milliards de dollars dans le système pour faire la réforme, alors que chez nous, la réforme de la santé, bien, ça s'est transformé en opération comptable, en opération budgétaire, M. le Président.

Même chose dans le domaine de l'éducation. Le Québec est l'endroit où ce gouvernement a choisi de couper le plus: 21 % des budgets ont été coupés. En ce qui touche les commissions scolaires, les compressions ont eu un impact sur les activités éducatives, touchant directement les services aux élèves. Parce que c'est le trait commun aussi des coupures: on a coupé dans les services directs, et dans beaucoup de cas on a choisi de grossir les bureaucraties à la place.

Parallèlement à cette diminution de services professionnels dans nos écoles, on note en même temps une augmentation de la violence. Selon une étude faite par la CSDM, le nombre d'élèves qui présentent des troubles de comportement a plus que doublé en 10 ans et ces enfants manifestent leur agressivité de plus en plus tôt. C'est ce que relève une étude de la CSDM, M. le Président. C'est donc dire que, dans un contexte où, en plus, c'est difficile dans les écoles, on note qu'il y a des problèmes de comportement qui semblent être de plus en plus fréquents. Le gouvernement, lui, choisit de couper dans les services directs, d'alourdir la tâche des professeurs, mais aussi d'hypothéquer davantage l'enseignement de l'ensemble des élèves. Au Québec, en l'espace en quatre ans, les universités ont été privées de 400 millions de dollars en coupures de subventions de fonctionnement et de non-fonctionnement, en coûts de système.

M. le Président, ça vous donne un portrait, là, de ce qui se passe. Puis, si vous allez au-delà de ça, pour les commissions scolaires, si vous regardez le préscolaire, le primaire, le secondaire, la moyenne canadienne des dépenses de fonctionnement par élève en dollars courants est de 5 675 $, alors qu'aux États-Unis c'est presque 8 000 $. Plus précisément pour le Québec, cette dépense est de l'ordre de 5 472 $, alors qu'en Ontario, c'est 5 934 $. C'est pour vous dire à quel point on se compare de moins en moins et qu'on perd du terrain par rapport à nos voisins.

Prenons le cas particulier des universités. Si on tient compte des droits de scolarité dans le financement des institutions... Et je tiens à vous rappeler, M. le Président, que le gouvernement a beau nous donner les chiffres, nous, quand on rencontre les recteurs, quand on rencontre les gens qui sont les dirigeants des universités, quand je suis avec mon collègue de Kamouraska-Témiscouata, le porte-parole, puis qu'on fait un petit peu le tour de ce que vivent ces gens-là, les chiffres qu'ils nous donnent, c'est ceux-là. Pour eux, c'est leur base de référence, parce que la réalité, pour eux, se définit dans ce contexte-là.

Bien, voyons ce que ça donne. Si on tient compte des droits de scolarité dans le financement des institutions, le Québec accuse un retard de près de 21 % avec le reste du Canada, alors que, si on compare aux États-Unis, où la dépense de fonctionnement par étudiant est de presque 20 000 $, cette dépense est de 11 084 $ ici, au Québec. C'est une différence de 44 %. Ça vous donne une idée, M. le Président, du retard qu'on a pris dans un domaine, là, qui est névralgique pour notre développement.

Ce n'est pas nouveau, depuis la Révolution tranquille qu'on s'est mis à la tâche, qu'on s'est donné comme mission au Québec de former nos jeunes, de les éduquer, de les préparer pour l'avenir. Et ce patrimoine important que nos parents nous ont donné, pour lequel ils se sont dévoués et sacrifiés, aura malheureusement été dilapidé par six années de gouvernement du Parti québécois.

M. le Président, si on était les seuls à parler de tout ça, évidemment, on se ferait dire que l'opposition critique, que l'opposition n'a jamais rien de positif à dire. Puis je veux bien qu'on nous dise ça, je veux bien accepter la critique, mais, en même temps, on n'est pas seuls. Au contraire, le Vérificateur général du Québec et le Protecteur du citoyen, dans les dernières semaines de l'année 1999, rendaient publics des rapports. Dans le cas du Vérificateur général, il avait ceci à dire au sujet du Programme de départs volontaires, que «le coût pour le gouvernement a été plus élevé que prévu de quelque 1,4 milliard de dollars». À ce moment-là, vous vous rappellerez, le président du Conseil du trésor, lui, il disait qu'il était très fier de ce qu'il avait fait, que, s'il avait à le refaire, il le referait. Pas très encourageant.

Le Protecteur du citoyen, lui, disait ceci: «Depuis quelques années, les réformes gouvernementales se succèdent à un rythme accéléré. Si elles ont le mérite de vouloir généralement améliorer les programmes publics au bénéfice des citoyens, leur mise en oeuvre connaît souvent des départs ratés et plusieurs d'entre elles continuent d'afficher des dysfonctionnements majeurs.» On parle du gouvernement du Québec, là, et de ses réformes. Puis, la conclusion à laquelle en vient le Protecteur du citoyen: c'est un gouvernement qui souffre de dysfonctionnement majeur. Ça en dit long, M. le Président, sur ce qu'on a dû subir dans les dernières années.

Le Protecteur du citoyen reprenait - à regret - la réforme de l'assurance médicaments, M. le Président, qui a eu un effet dramatique sur des citoyens très vulnérables, une réforme que le Protecteur du citoyen conclut avoir été faite sans aucune étude sérieuse. Pour vous dire à quel point on a accepté de jouer avec la vie de ces gens-là sans tenir compte des conséquences. Il conclut son rapport, lui, en disant: «On peut donc conclure que, dans l'ensemble, la réforme n'a pas obéi et n'obéit pas encore à tous les principes de la bonne administration.» Eh bien, voilà, M. le Président, un constat qui aura coûté cher à plusieurs, plusieurs citoyens du Québec.

Dans le domaine du développement régional, M. le Président, le Vérificateur général faisait à peu près la même conclusion: panoplie de programmes, confusion, aucune mesure de ce que sont les performances, structures par-dessus structures. Et on le voit dans la philosophie du gouvernement, quand il a décidé de mettre en place des centres locaux de développement, les CLD, ça a été une politique imposée à partir de Québec dans les régions, alors que, s'il y a une chose dont on doit tenir compte dans le développement des régions - je le sais, moi, je viens d'une région, je viens des Cantons-de-l'Est - c'est qu'on doit permettre aux régions d'avoir les ressources dont elles ont besoin pour se développer, oui, ça, ça va de soi, mais, après ça, on doit laisser aux régions le soin de déterminer leurs structures à elles. On doit laisser aux régions leur spontanéité, la capacité des citoyens de faire émerger leur propre leadership. C'est primordial, M. le Président.

C'est une contradiction fondamentale que d'avoir un gouvernement qui, à partir d'une tour d'ivoire à Québec, essaie de dire à la région de la Gaspésie comment se gouverner, ou aux Cantons-de-l'Est, ou à la Mauricie, qui souffrent également, ou au Saguenay-Lac-Saint-Jean. Le principe est toujours le même, c'est facile à comprendre, il faut laisser aux citoyens de chacune des régions les ressources dont ils ont besoin pour leur donner les moyens, mais, après ça, il faut permettre à ces gens-là de construire comme eux veulent construire.

Un autre constat, M. le Président, ça a été Emploi-Québec, une saga qui n'a pas fini de faire couler de l'encre, saga que vous connaissez, malheureusement, qui aura été embarrassante pour tous les Québécois et Québécoises qui se seront battus sur une trentaine d'années pour qu'on puisse rapatrier ces pouvoirs-là. Puis les rapatrier, ces pouvoirs-là, pour une raison fort simple, M. le Président, c'est que la logique, le bon sens veut que ce type de service là soit mieux donné lorsqu'il se rapproche des citoyens. Ce n'est pas compliqué. C'est aussi simple que ça.

Et, d'ailleurs, le gouvernement en est davantage imputable. On pensait que ça allait être le cas. On s'en est réjoui, d'ailleurs. Pour tous ceux qui font des bilans du fédéralisme qui ne correspond pas à leurs aspirations, qui disent que ça n'avance pas, voilà justement un élément, voilà une preuve que le changement est possible dans la mesure où on a des idées claires puis une volonté ferme. Sauf que, dans le cas d'Emploi-Québec, le constat, c'est le suivant, c'est que le gouvernement s'est servi d'Emploi-Québec à la veille d'une élection générale pour ouvrir les robinets, créer des espoirs, entre autres chez les citoyens les plus vulnérables. Et, pendant l'été qu'on vient de passer, bien, la crise soudainement s'installe et le gouvernement est obligé de reculer parce que les espoirs qu'il a lui-même créés ne sont plus possibles, faute de fonds, M. le Président. Ce sera de toute évidence un des épisodes les plus tristes de l'administration publique du Québec.

Et l'argent qui était transféré a soudainement disparu. À ce jour, M. le Président, le gouvernement actuel n'est pas capable de nous dire où est passé l'argent. On sait très bien qu'ils en ont dépensé avant l'élection et que, tout de suite après l'élection, soudainement on annonce qu'il faut fermer le robinet.

(10 h 40)

Mais il y a pire que ça, M. le Président. Après avoir bafoué les espoirs de milliers de citoyens du Québec, ils sont venus frapper à nos portes. Il n'y a pas juste les députés de l'opposition qui ont reçu ces gens-là. Moi, j'ai trouvé ça déchirant, au mois de juillet, de recevoir chez nous des mères sur l'aide sociale, des travailleurs, des travailleuses, dans certains cas qui s'étaient fait encourager à quitter leur emploi. Je pense à un travailleur, que le député de Richmond connaît, qui travaillait à la HH Brown, à Richmond, qui s'était fait dire par quelqu'un chez Emploi-Québec: Oui, laissez votre emploi, parce qu'on va vous offrir une formation, ça va vous aider à trouver un emploi plus rémunérateur, et qui par la suite se fait couper, un père de famille avec des enfants.

Alors là le gouvernement nous annonce un grand virage à Emploi-Québec, on va remettre de l'ordre là-dedans. Résultat net, cette année, M. le Président, devinez quoi? Le gouvernement vient de périmer 30 millions de dollars à Emploi-Québec. Tous les besoins ont dû être comblés, hein? Il ne doit plus y avoir de chômage au Québec, tout le monde est heureux. Il n'y a pas de problème, on peut périmer 30 millions de dollars, incluant, dans ce 30 millions de dollars là, l'argent qu'on retourne au gouvernement fédéral. La péréquation à l'envers, M. le Président! Pour la première fois de l'histoire du Québec, l'État québécois est tellement riche qu'il est capable de renvoyer de l'argent au gouvernement fédéral, dans le domaine de la formation de la main-d'oeuvre.

L'autre élément qu'il faut relever, M. le Président, c'est les déficits puis les dettes dans le réseau public. Et là ce gouvernement-là a des comptes à rendre. Parce que, dans son annonce de budget, quand il parle de 2,7 milliards pour la santé, puis il parle de milliards pour l'éducation puis il dit: On va effacer les déficits puis les dettes dans les réseaux et de l'éducation et de la santé, ce qu'il ne dit pas tout haut puis qui reflète la réalité, c'est qu'ils sont en train de remplir les trous qu'ils ont eux-mêmes creusés. Parce qu'il n'y en avait pas, de dettes dans le réseau hospitalier, lorsqu'il est arrivé au pouvoir, ce gouvernement-là, en 1994, que son budget, son objectif de déficit zéro s'est fait sur le dos de ces établissements-là qui ont dû cumuler déficits et dettes et dettes pour pouvoir servir leur clientèle.

Parce qu'ils n'ont pas le choix. Dans le cas d'un hôpital, ils disent quoi aux patients qui arrivent aux urgences? On regrette, on n'a plus d'argent? Au contraire, M. le Président, ils ont été obligés, eux, d'assumer ces dettes-là à la place de l'État québécois qui, lui, se vantait. Le ministre des Finances, lui, il peut se lever à l'Assemblée nationale puis dire: Moi, j'ai atteint l'équilibre zéro. Dans son exercice comptable à lui. Mais, à côté de lui, derrière lui, tant dans les universités que dans les hôpitaux, ils ont été obligés, eux, de faire des déficits.

D'ailleurs, rappelez-vous, l'an dernier - c'est important de se rappeler de cela - le gouvernement nous avait annoncé en grande pompe qu'il réinvestissait finalement dans la santé, alors qu'une portion de cet argent-là allait, oui, aux coûts de système et également à effacer les dettes du réseau hospitalier. Conséquence nette, le deal, c'était le suivant, l'entente, on disait aux hôpitaux: Vous allez équilibrer vos budgets, ce qui veut donc dire que vous allez faire des compressions pour pouvoir atteindre l'équilibre budgétaire. Pas génial, M. le Président! Est-ce qu'ils ont réglé le problème l'an dernier? Ils ne l'ont pas réglé, le problème. La preuve, c'est que, cette année, ils sont obligés de revenir puis effacer à nouveau les dettes des hôpitaux, parce que, dans l'année qui a suivi, c'est plus de 400 millions de dollars de dettes qui se sont accumulées dans le système. Le problème n'a pas été réglé.

Alors, cette année, ils nous annoncent en grande pompe qu'ils vont réinvestir de l'argent qui couvre les coûts de système, qui couvre également les dettes qu'ils ont eux-mêmes creusées dans le système hospitalier. Puis il va en rester quoi après, il va rester quoi? À peu près 200 millions de dollars pour des nouveaux services, alors que les besoins sont criants.

Bien, juste pour vous le rappeler: pour les hôpitaux, les déficits étaient de 430 millions de dollars; commissions scolaires, 40 millions de dollars; les collèges, les cégeps, 10 millions de dollars; les universités, 100 millions de dollars. Vous avez là, M. le Président, tout le portrait.

Dans la période prébudgétaire, on s'attendait à ce que le gouvernement prépare le terrain pour les choix qui se présentent. Et là ils ont beaucoup de comptes à rendre. Avouons que la transparence, ce ne sera pas tout à fait une marque de commerce pour ce gouvernement.

Le gouvernement annonçait en grande pompe l'an dernier une consultation sur nos choix pour les impôts et les taxes. On convoque les gens à Québec, on les parade en commission parlementaire, on leur demande de faire des études, de venir réfléchir avec nous. Et, pendant ce temps-là, le gouvernement cache la réalité. À un point tel où, au mois de décembre, on nous annonçait, dans la synthèse des opérations financières qui remontait à septembre dernier, qu'il allait y avoir un surplus de 85 millions de dollars dans le budget. De 85 millions de dollars. On n'a pas parlé du 841 millions qui était à Toronto pendant ce temps-là. Ça, on oublie ça, on n'en parle pas, alors qu'il était déjà évident au mois de décembre que le gouvernement allait faire des surplus. Puis, n'appelons pas ça des «surplus», appelons ça des «trop-perçus». Parce que cet argent-là, ça vient d'où? Ça vient des poches des contribuables. À chaque fois que le gouvernement va chercher davantage d'argent, il va le chercher dans les poches des contribuables qui, eux, n'ont pas cet argent-là pour justement payer l'épicerie, payer le loyer, pouvoir s'offrir un petit peu de liberté.

Eh bien, M. le Président, ce même gouvernement nous disait au mois d'octobre, lorsque j'interrogeais le premier ministre, que, dans le domaine de la santé, il ne pouvait pas bouger, il ne pouvait pas agir parce qu'il n'avait pas d'argent. Il avait 841 millions de dollars de cachés dans un compte en banque à Toronto. Au mois de novembre dernier, le premier ministre disait, et je cite: «On est en train de se battre pour une civière de plus.» Fin de la citation. Pendant ce temps-là, l'argent dormait à Toronto.

Toujours, en novembre, le ministre des Finances parlait d'une gestion serrée. Il affirmait que les surplus seraient modestes. Pendant ce temps-là, l'argent dort dans un compte en banque à Toronto. Puis, en janvier dernier, le président du Conseil du trésor disait que l'équilibre serait difficile à faire. J'ai ici un article du Journal de Québec du 27 janvier 2000: «L'équilibre sera difficile à maintenir, admet Léonard, le président du Conseil du trésor.» Et je le cite: «Il faudra des efforts car il sera difficile de maintenir l'équilibre de nos finances - fin de la citation - a dit M. Léonard à son arrivée à la séance hebdomadaire du Conseil des ministres.»

Au Conseil des ministres, j'imagine qu'on devait discuter de ces choses-là, sauf avec Mme la ministre de la Santé qui, elle, après avoir appris qu'il y avait 841 millions de dollars dans un compte en banque à Toronto, a dit qu'elle ne le savait pas, elle. Elle n'était pas au courant.

Bien, M. le Président, vous admettrez avec moi que c'est un petit peu difficile aujourd'hui d'accepter les très longues explications du gouvernement lorsqu'il dit que cet argent-là est arrivé soudainement, comme si c'était tombé du ciel, là, un surplus de 1,9 milliard de dollars, 50 jours après que le président du Conseil du trésor - ce n'est pas un député ordinaire là, c'est celui qui gère les fonds publics - nous dise à peu près que ça va prendre tout son petit change pour équilibrer son budget. Cinquante jours plus tard: 1,9 milliard de surplus. L'effet net de ça, ça va loin, c'est que ça vient fausser tous les débats. La commission parlementaire, dans le fond, s'est faite sur de fausses prémisses.

Les municipalités, qui sont en discussion avec le gouvernement depuis très longtemps - «discussion», il faut le dire vite; dialogue; monologue; «monologue», c'est peut-être mieux - qui sont dans une dynamique de monologue avec le gouvernement sur sa taxe de 356 millions, bien, eux, ils font ce débat sur la base de fausses prémisses. Le Sommet du Québec et de la jeunesse, où on a mieux compris pourquoi le ministre des Finances était absent, ce Sommet où on devait discuter de l'avenir, des choix qui se posent, tout ça, bien, c'était un faux débat, parce que la réalité financière était différente.

Et il y a comme quelque chose de très malsain dans l'attitude du gouvernement, c'est comme si le gouvernement disait: Je ne peux pas vous dire la vérité parce que, si je vous dis la vérité, vous allez me forcer à faire des choses que je ne veux pas faire, puis, dans le fond, vous n'êtes peut-être pas assez matures pour comprendre ces enjeux-là. Il y a comme une espèce de désaveu de la population dans les gestes du gouvernement.

Et je veux bien, M. le Président, donner le bénéfice du doute au ministre. Que les ministres des Finances, dans les dernières années, sous-estiment leurs dépenses et cherchent à sous-estimer les revenus qu'ils vont faire et surestimer les dépenses, je veux bien que les ministres des Finances, partout, jouent ce jeu-là, mais il y a une limite entre faire une saine gestion, être très prudent et cacher la réalité à la population du Québec.

(10 h 50)

M. le Président, nos attentes, au budget, étaient clairement exprimées, puis ça reflète les attentes de la population. On s'attendait à ce que le gouvernement imite le gouvernement fédéral et qu'il indexe les tables d'impôts. Et, pour la première fois, je pense que la population a bien compris ce qui lui arrivait dans les dernières années. Avec l'indexation des tables d'impôts, des milliers de citoyens au Québec vivaient une augmentation d'impôts année après année. Quand les gouvernements indexent les tables d'impôts, M. le Président - ça aussi, il faut le dire clairement - ce n'est pas une réduction d'impôts. C'est faux, ça. Prétendre que c'est une réduction d'impôts, c'est faux. Ça veut juste dire que les gouvernements vont arrêter d'augmenter les impôts. C'est tout ce que ça veut dire.

Bien, le minimum, le minimum de justice pour les citoyens du Québec, c'est qu'on se serait attendu, compte tenu de la situation financière de l'État québécois, qu'il indexe les tables d'impôts dans le budget. On dit qu'on va le faire, oui, puis, dans les documents du budget... c'est toujours amusant de lire les documents, parce qu'on annonce l'indexation des impôts, puis on ne met pas de date. C'est typique. Ah oui! on va le faire en 2003. En 2003! Après que vous aurez payé quoi? Peut-être un autre 1,2 milliard de plus de vos poches en augmentation d'impôts. Il prétend réduire les impôts de 4,5 milliards sur trois ans, puis il va rechercher un autre 1,2 milliard. Alors, ils ont deux mains puis ils s'en servent, les deux, c'est le moins qu'on puisse dire: une main dans une poche puis l'autre dans l'autre!

L'autre attente, c'est fort simple, c'est qu'il y ait un effort de rattrapage. Je souligne «rattrapage», M. le Président, parce que, à l'étape où on se trouve, on ne se fait pas d'illusion, le premier coup de barre qu'on doit donner, c'est un rattrapage avec notre compétiteur. Pourquoi? Toujours pour créer de l'emploi. C'est avec l'Ontario qu'on fait compétition. Ceux qui investissent au Québec, leur choix se pose dans quel contexte? Ils peuvent aller à côté, en Ontario, ils peuvent aller au Nouveau-Brunswick. C'est comme ça que ça se pose. C'est ça, la réalité. On a beau comparer avec la Suède puis l'Europe, puis on peut comparer avec l'Amérique latine, il reste toujours que je ne connais pas beaucoup d'investisseurs, moi, une infime minorité pour qui le choix d'investissement se pose dans ce contexte-là, au contraire.

L'objectif, pour nous, était fort simple: sur une période de cinq ans, un rattrapage avec notre voisin. Un rattrapage. Ça ne veut pas dire qu'on devient plus compétitif, en passant. Soyons lucides, là! Pour une première étape, on se dit: Il faudrait au moins rattraper. Mais soyons lucides aussi, même en les rattrapant, M. le Président, ça ne nous amène pas au niveau où on peut les dépasser. On n'est pas rendu là. On va y arriver, on va y arriver, soyez sans crainte. Il y aura une élection générale à un moment donné, on va y arriver. Mais, M. le Président, le moins, le minimum à quoi on se serait attendu, c'est qu'il y ait un plan de réduction d'impôts.

D'ailleurs, on s'est demandé à quoi ça a servi, les consultations en commission parlementaire de la dernière année. Ça vient prouver que tout ça était bidon. Moi, je pensais que la consultation en commission parlementaire sur les impôts avait pour but de permettre au gouvernement du Québec de livrer, dans ce qui est son exercice essentiel, le budget, un plan de réduction d'impôts. Pas un mot! Pas un mot! Au contraire, on continue à jouer avec les chiffres. On dit à la population du Québec: C'est une réduction d'impôts de 4,5 milliards. L'année précédente, ils disaient: 1,3 milliard parce que c'était 1,3 milliard par année après la fin de l'exercice. C'était ça, la mesure. Cette année, on parle 4,5 milliards, mais, oh, oh, oh, oh, attention! on a appris à lire le texte: cumulatif, pas 4,5 milliards par année à la fin, par année. Pour nous, le plan et l'objectif doivent être très clairs, le rattrapage, ce qui veut donc dire 1 milliard par année, récurrent, pour qu'on puisse arriver à la fin à 5 milliards par année.

Je sais, M. le Président, on connaît la réponse, on va nous donner la même réponse que pendant la campagne électorale: Ça ne se peut pas, c'est impossible, on ne peut pas faire ça, au Québec. Hein, c'est toujours: On ne peut pas, nous autres, faire ça, au Québec. Vous autres, les libéraux, vous ne connaissez pas ça, vous n'avez pas les chiffres. Puis, après ça, le gouvernement finit par se rattraper, il est obligé de refaire son discours, le même gouvernement qui disait: Non, non, on ne peut pas réduire les impôts puis augmenter les revenus. Comment on va payer les services?

Je voyais le budget de l'Alberta l'autre jour. L'Alberta, c'est l'endroit au Canada où les taxes sont les moins élevées. Dans le dernier budget du gouvernement de l'Alberta, sur trois ans, ils augmentent les dépenses dans la santé de 21 %, M. le Président. Et, à l'endroit où les taxes sont les moins élevées au Canada, ils annoncent une réduction de taxes. Ils continuent dans la même direction. Pourquoi? Parce qu'ils veulent créer de l'emploi. Puis, au Québec, nous autres, pour une raison qui m'échappe - en tout cas, pour ce gouvernement-là, ce raisonnement-là lui échappe - eh bien, M. le Président, aucune espèce de plan de réduction d'impôts.

Rien non plus sur la dette. Puis là on peut avoir de vrais débats sur la dette. Moi, j'ai hâte qu'on ait un débat sur la dette. On a, nous, un point de vue là-dessus. Tout le monde s'entend sur le fait qu'il faut réduire le fardeau de la dette, personne ne conteste ça. Dans le fond, c'est comment allons-nous y arriver.

Dans le débat qu'on doit faire sur la dette, une des questions qu'on doit se poser, c'est: À quel niveau voulons-nous arriver, de la dette par rapport au PIB? On doit le baisser à quel niveau pour que ce soit à un niveau acceptable pour faire fonctionner l'économie du Québec? Il y a des instituts économiques qui ont fait des études là-dessus. Il y en a qui vous diront: C'est de 25 % à 30 %, le taux maximum d'endettement qui permet à l'économie de bien fonctionner. On pourrait en parler longtemps. D'autres vont vous dire: Bien, il ne faut pas y toucher, il faut laisser croître l'économie, ça va réduire la taille relative de la dette. Il y a cette école de pensée là. Puis il y en a d'autres qui vous diront, à la place: Non, dans le fond, ça prend un vrai plan de croissance économique qui permet à l'économie de grossir, mais ça prend aussi un effort particulier, dirigé, pour réduire la taille de la dette. Bien, M. le Président, il n'y a rien là-dessus dans le budget, aucune espèce d'objectif de fixé qui nous permettrait d'avoir encore plus de liberté. Alors, là-dessus, évidemment, on est très, très déçu.

Mais, dans le domaine de la santé également, on continue avec la même improvisation. Et ce n'est pas parce qu'on n'a pas fait des efforts. On a présenté, le 18 janvier dernier, au gouvernement un plan d'action pour la santé. On n'a pas juste critiqué, on a dit: Bon... Alors, je me suis entendu avec le premier ministre le 17 décembre dernier... Vous étiez ici, M. le Président, je pense?

Le Vice-Président (M. Brouillet): Oui.

M. Charest: Le dernier jour où on siégeait, le dernier jour du millénaire, le dernier jour du siècle, on s'est dit: Tiens, voilà une belle occasion; à titre de chef d'opposition officielle, je vais demander au premier ministre s'il s'entend avec nous que l'année 2000 doit être l'année de la santé. La réponse, évidemment, c'est oui, oui, puis on va avoir un plan. Puis on nous annonce sur le champ qu'il y aura une consultation. De toute évidence, il n'y en avait pas, de plan de préparé. Depuis ce temps-là, bon, on va d'improvisation en improvisation en improvisation, M. le Président. Au moins, dans le budget je me serais attendu à ce qu'on parle d'un plan pour la santé. Il n'y en a pas, même pour l'injection d'équipements neufs, pour le parc d'équipements qui est désuet au Québec. On parle de 200 millions de dollars qui va être, pour une raison qui nous échappe, pris sur la dette, mais j'aimerais bien qu'on me produise, moi, un plan pour le renouvellement du parc d'équipements médical au Québec, parce qu'on en a grandement besoin.

M. le Président, on continue de manquer de transparence dans ce gouvernement. Juste pour vous situer un petit peu, là, on nous annonce encore une fois, on a pris l'habitude, que - l'an dernier - bien, les surplus vont être modestes. Je mets en garde dès maintenant la population du Québec. Lorsque vous entendrez le ministre des Finances... Si l'économie roule toujours, en passant, parce qu'on ne sait pas quand ça va arrêter, cette période phénoménale de croissance économique qu'on connaît aux États-Unis et qui vient alimenter notre économie, mais, dans l'hypothèse où la croissance continue, les surplus seront beaucoup plus importants que ce que le gouvernement avait anticipé.

Ce sera peut-être une bonne nouvelle pour celui qui est ministre des Finances, mais ce sera également une mauvaise nouvelle pour tous les contribuables québécois qui auront payé directement de leurs poches pendant l'année, hein, en argent comptant ce qu'ils auraient dû garder pour eux et pour leur famille pour pouvoir se payer une maison, pouvoir planifier un peu leur propre vie.

M. le Président, ce qu'on relève de ce budget, c'est que, des surplus, 15 % seulement vont en réduction d'impôts, le reste en nouvelles dépenses, alors que le gouvernement s'était engagé pendant la campagne électorale à 50 % en réduction d'impôts. Il n'y a rien dans leur budget qui parle de revoir le rôle de l'État, et Dieu sait qu'on en a besoin. Au contraire. Je veux juste prendre le domaine de la santé, je sais qu'on en parle beaucoup - je peux vous dire une chose, c'est parce qu'on nous en parle. Dans le domaine de la santé, le gouvernement a trouvé une nouvelle astuce: on va présenter un projet de loi antidéficit aux établissements de santé, M. le Président. Ce gouvernement semble trouver dans la totalité des lois, dans l'absolu des lois les réponses aux problèmes que vivent les citoyens à tous les jours, comme si, ça, ça allait être la grande réponse. J'ai hâte de voir comment ça va fonctionner, ça, M. le Président.

(11 heures)

Ils vont dire quoi aux aînés qui, avec l'encouragement du gouvernement - parce qu'il faut le dire, ils l'approuvent - dans les CHSLD, ont des bains une fois par semaine? Mais le gouvernement trouve que, ça, c'est correct. Qu'est-ce qu'ils vont leur dire s'ils sont obligés de couper? Ils vont-u leur lire la loi sur leur lit? Les hôpitaux qui, eux, n'ont pas de revenus, ils ne taxent pas, ils vont-u se faire dire par un gouvernement qui décide seul de leur budget: Quand un patient traverse le seuil de la porte, s'il n'y a plus d'argent dans le système, allez afficher la loi dans la salle d'attente, il la lira en attendant qu'on vous renvoie de l'argent pour la prochaine année financière?

M. le Président, ça se reflète aussi dans l'absence de vision. Il n'y a rien sur les partenariats publics-privés. Depuis le temps qu'on en parle, les besoins d'infrastructures sont très grands. Je ne sais pas pourquoi le gouvernement attend pour agir; l'opposition les encourage en ce sens-là depuis très longtemps. Le partenariat public-privé, c'est plein de bon sens, ça nous permettrait de régler une foule de problèmes. Ce n'est pas la même solution pour tout le monde, en passant. Je ne dis pas qu'on va se mettre à installer des routes à payage dans toutes les régions du Québec. Ce n'est pas vrai, ça. Ça ne marche pas comme ça. Il y a des endroits où ça s'applique, à la condition d'avoir une politique-cadre qui nous permet justement d'arriver là.

M. le Président, dans le domaine de l'éducation aussi il y a beaucoup à faire. Ce qui m'inquiète le plus dans le domaine de l'éducation: on relève une volonté de vouloir effacer la dette qu'ils ont eux-mêmes créée dans le système, mais l'argent n'est pas récurrent. La question qu'il faudra se poser cette année pour l'éducation, c'est la même qu'on s'est posée l'an dernier pour l'éducation et la santé. S'il y avait un trou de 150 millions de dollars cette année dans les budgets puis on dit: Bon, on va boucher le trou une fois cette année, puis on continue avec le même système, logiquement on va se retrouver avec le même trou l'an prochain, et l'année d'après, puis l'année d'après. On aura réglé quoi dans le fond? Tout ça pourquoi? Parce qu'on ne veut pas s'occuper des vrais problèmes.

Au niveau des municipalités, M. le Président, bien là la saga continue. C'en est étourdissant, essayer de suivre la ministre des Affaires municipales. Les municipalités se sentent flouées. La ville de Québec, ce matin - on l'apprend dans les journaux - découvre soudainement que ce qui devait être un bon budget pour elle se transforme en trou de 600 000 $. Bien, M. le Président, là aussi, sur le plan des principes, il y a beaucoup à dire. N'oublions pas que ce gouvernement-là va chercher l'argent dans les poches des contribuables pour des taxes qui servent à administrer les municipalités, des taxes foncières. Bien, des taxes foncières, ce n'est pas des impôts puis des taxes pour le revenu consolidé du gouvernement du Québec, au contraire.

M. le Président, je vais conclure en vous disant que rien dans ce budget ne nous permet d'avoir de l'espoir pour le vrai changement que souhaite la population du Québec, sur le changement du rôle de l'État, sur l'espoir que nous avons que les Québécois et Québécoises pourront, eux, garder l'argent qu'ils gagnent très durement pour fonder des familles, pour acheter des maisons, pour s'occuper de leurs enfants.

On nous a fait un épilogue assez long sur la souveraineté, dans le budget. Ce que je relève à chaque fois que ce gouvernement-là parle du «nous», c'est que c'est un «nous» qui exclut. C'est un «nous» qui inclut une minorité. Mais ce n'est pas le «nous» qui inclut l'ensemble de la population du Québec, à défaut de quoi ce budget l'aurait reflété. Au lieu de parler cinq fois de souveraineté, j'aurais aimé qu'on parle davantage d'aînés. Il me semble que ça aurait été rendre justice à nos ancêtres, à nos parents, à ceux qui ont bâti le Québec. Et ça nous aurait servi, en tout cas ce budget aurait pu nous servir à préparer le terrain pour ceux qui nous suivront et qui, à leur tour, bâtiront le Québec.

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Brouillet): Alors, je vous remercie, M. le chef de l'opposition. Je vais maintenant céder la parole à M. le député de Rivière-du-Loup. M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Merci, M. le Président. Alors, à la lecture du budget qu'a présenté le ministre des Finances la semaine dernière, la première chose qui nous frappe, c'est que ça a sûrement dû être un budget un peu plus facile à faire que ceux des années précédentes parce que les chiffres sur l'économie du Québec, les baisses du chômage nous montrent que de façon générale les Québécois profitent enfin de cet élan considérable de croissance nord-américaine. Tant mieux. Tant mieux si aujourd'hui les Québécois profitent de cet élan de croissance nord-américaine.

Maintenant, on ne peut pas être particulièrement fiers qu'on soit les derniers à en profiter. On est comme les marathoniens qui arrivent au fil d'arrivée, fiers d'avoir quand même fini le marathon, puis tant mieux si on l'a fini, mais on arrive derniers, tout le monde est passé au fil avant nous autres.

Ça nous démontre aussi, le budget, qui inclut un certain nombre de bonnes nouvelles que le ministre pouvait annoncer, qu'une baisse d'un demi-point dans le taux de chômage - en fait, c'est 0,6 entre le chômage que le ministre avait prévu puis le chômage qui s'est vraiment déroulé durant l'année - ça lui a dégagé une marge de manoeuvre considérable. On voit qu'un demi-point de moins de chômage que prévu, ça a permis au ministre des Finances d'avoir de l'argent en milliards supplémentaires à pouvoir redistribuer sous forme de baisses d'impôts ou d'autres formes.

Alors, la question que ça doit nous poser comme société ou comme personnes responsables devant l'avenir, c'est: Imaginez, ce chômage artificiellement élevé... Parce que c'est comme ça que, nous, à l'ADQ, on le conçoit. On pense qu'une politique économique agressive, responsable, des changements à nos lois du travail qui auraient été faits depuis des années auraient amené le chômage à être bien plus bas, bien plus comparable à nos voisins.

Bien, imaginez, le chômage, s'il avait été à 7 %, 7,5 %, 6,5 %, au Québec, combien, dans les dernières années, on aurait eu cette facilité budgétaire, ces baisses d'impôts possibles, ces réinvestissements possibles, combien de plus on aurait pu faire. Et finalement, à cause des politiques économiques un peu enracinées dans le passé, à cause d'une espèce de paresse à imposer à l'économie québécoise des réformes qui ont donné des résultats partout ailleurs, bien, à cause de ça, on se retrouve à être les derniers à bénéficier de la croissance.

Puis la seule chose qu'on peut se dire, c'est: Oui, quand on considère les bénéfices marqués d'une baisse de 0,5 % du chômage, on aurait peut-être dû voir à baisser notre chômage avant, notre population aurait bien moins souffert. Et ça, je pense que, dans le bilan qu'on fait de l'ensemble de la gouverne du Parti québécois, c'est quelque chose qu'on doit nécessairement inclure et non pas s'arrêter à un budget qui s'est fait - Dieu merci, tout le monde en est heureux - dans une année un peu plus facile.

Je parlais de bonnes nouvelles qui sont annoncées. Il y en a une que je ne peux pas m'empêcher de souligner d'entrée de jeu, c'est le virage ou l'amorce d'un virage - ce serait un terme plus précis - du gouvernement par rapport au commerce électronique, par rapport à la compréhension de combien le commerce électronique, Internet, est en train de transformer l'économie mondiale et qu'à terme il y aura deux catégories: il y aura les États, les pays, les sociétés qui vont en sortir gagnants et il y aura ceux qui vont en sortir perdants, et que c'est dans l'amorce d'une grande révolution mondiale comme celle-là qu'on prend le virage ou qu'on ne le prend pas.

C'est bien évident que le gouvernement du Québec, le gouvernement du Parti québécois, était particulièrement en retard sur cette question-là. Et ce qui m'inquiétait le plus - et, là-dessus, il y a un virage, là-dessus, je leur concède qu'il y a un virage - c'est que, quand on posait des questions là-dessus, il y avait une négation du problème, donc non-compréhension des enjeux de la part des gens du gouvernement.

Encore cet automne, je me souviens d'avoir questionné le ministre responsable, qui nous disait: Non, le Québec n'a pas vraiment de retard là-dessus. Or, pourtant, dans le document Pour une société branchée , document qui a été déposé en annexe au budget, le mot «retard», le mot «rattrapage» sont partout. Les en-têtes de paragraphe: Faire le rattrapage , L'accès des familles à Internet , Le nécessaire rattrapage , Le retard dans le branchement des Québécois et des Québécoises , alors partout on reconnaît le retard. Et, moi, je n'ai pas une conviction infinie quant aux capacités d'action d'un gouvernement qui commence à être usé comme celui du Parti québécois, mais je me dis: Si au moins, dans la machine, il y a une impulsion qui est basée sur un constat réel de retard, peut-être qu'on a là l'amorce d'une solution ou d'un travail vers des solutions.

(11 h 10)

Dans les bonnes nouvelles, évidemment, que le gouvernement avait promis d'annoncer, avait le devoir d'annoncer à la société québécoise, où les contribuables de la classe moyenne avaient fait plus que deux fois leur part, il y avait des baisses d'impôts. Et, là-dessus, comme plusieurs analystes, comme plusieurs concitoyens, nous sommes extrêmement déçus du report de l'indexation.

En fait, quand je parle du report de l'indexation, je dois dire que, quand j'analyse un document gouvernemental comme un budget, toute mesure qui est inscrite après la prochaine élection, je la mets entre parenthèses parce que annoncer des choses qui vont se produire après une prochaine élection, c'est bien lointain, là. Il y a le temps de couler pas mal d'eau en dessous des ponts d'ici là.

Donc, pour le moment, ce dont on s'aperçoit, c'est que, malgré une volonté ou une annonce dans le discours de baisser les impôts de 4,5 milliards, les impôts ne baisseront pas de 4,5 milliards parce qu'il y a un mécanisme - surtout qu'on nous annonce une inflation qui risque d'être un petit peu en s'accroissant dans les années qui viennent - qui, à travers l'inflation, vient rechercher à même les poches des contribuables une partie des baisses d'impôts annoncées. Et ce, c'est une déception, évidemment, pour bon nombre de contribuables du Québec.

On se serait attendu à ce que, dans un budget qui initie un mouvement de réduction des impôts, on prenne comme première étape l'arrêt de ce mécanisme sournois de non-indexation des tables, qu'on dise: Étape 1, avant même de redonner un premier sou de baisse d'impôts, on va remettre nos tables d'impôts dans un mode normal, puis, à partir de ce moment-là, on va baisser les tables d'impôts, ce qui n'a pas été fait par le ministre des Finances.

Néanmoins et de façon générale, les contribuables du Québec... ça fait des années que nous, de l'ADQ, disons que donner un peu d'oxygène aux contribuables va générer dans l'immédiat une capacité de ces contribuables-là de dépenser davantage, va relancer la consommation, va donc avoir des impacts sur l'investissement, sur la croissance économique. Alors, tant mieux si on peut avoir ces impacts-là le plus rapidement possible.

Maintenant, le budget, quoiqu'il était fait, construit dans une période de notre histoire de marge de manoeuvre, dans une période de prospérité économique...

En passant, on est dans le 109e mois consécutif de croissance économique au niveau des États-Unis. Quand je disais d'entrée de jeu: Québec, on est les derniers à en profiter sur le plan gouvernemental, ça ne fait pas six mois, ça ne fait pas un an et demi, on est dans le 109e mois consécutif où les États-Unis d'Amérique connaissent une croissance économique sans un mois de relâche, là, des mois consécutifs. Or, ça nous a pris du temps, au Québec, avant que cette croissance économique, on puisse finalement en faire bénéficier nos contribuables - et ça, ça doit nous questionner grandement - alors qu'en Ontario ou ailleurs on en a bénéficié il y a trois ans, il y a quatre ans, il y a cinq ans. Alors, ça doit nous questionner sur nos politiques économiques.

Ça m'amène à des déceptions majeures dans ce budget, déceptions qui sont de trois ordres: déceptions d'abord quant à la vision économique qui malgré tout gouverne sous l'emprise du Parti québécois; deuxièmement, j'aurai des déceptions sur la relation de respect que le gouvernement est en train d'établir envers les citoyens du Québec; et finalement sur la vision à long terme. Donc, quand on analyse un budget, il me paraît important de conclure en regardant, pour les grandes questions, les grands enjeux de notre société, ça nous conduit où.

Alors, déception au niveau de la vision économique dans l'approche du budget, dans sa volonté de poser des gestes pour l'économie. Il est bien évident que le ministre des Finances est toujours de la même école, que le Parti québécois est toujours à la même école, c'est-à-dire: Nous, comme gouvernement, allons identifier dans l'ensemble de l'économie 93 ou 121 secteurs, projets de développement, des éléments qu'on identifie à gauche et à droite, là, de façon plus ou moins arbitraire parce qu'on a un chum qui nous en a parlé ou parce que dans tel ou tel domaine... et on arrive avec un budget économique de saupoudrage d'un ensemble de mesures dont plusieurs, quand on lit le budget, ne nous donnent aucune espèce de garantie de résultat. C'est-à-dire que ça part de la présomption que, quand le gouvernement dépense plus, nécessairement il va arriver des bonnes choses.

Il me semble que l'histoire nous a enseigné une leçon différente, c'est-à-dire que nombre de fois on a vu des gouvernements investir davantage, essayer de soigner leur image en disant: Ah! on a mis de l'argent ici, on a mis de l'argent là, on a mis de l'argent dans telle entreprise pour la rescaper puis ça devrait être correct, pour s'apercevoir, deux, trois ans après, que l'entreprise n'avait pas été rescapée, qu'on était au même point, qu'on n'avait pas eu de plan de relance, qu'une entreprise qui n'a pas de client, qui n'a pas de marché ou qui n'a pas de performance, bien, arrive toujours au même point, puis entre-temps tu as brûlé, tu as mis un allumette sur quelques piastres supplémentaires des contribuables.

Mais je prends pour exemple, si on voulait une mesure simple pour poser des gestes, pour relancer l'économie, la taxe sur l'essence. Ah! ça, ça pénalise une économie, le fait que notre taxe sur l'essence... Le ministre des Ressources naturelles fait toujours semblant de ne pas comprendre quand on lui parle de ça. Il mélange avec la taxe ascenseur. Non, il y a une réalité fondamentale: il y a un écart entre la moyenne des taxes, dans les provinces canadiennes, sur l'essence et la taxe qu'on a au Québec.

Là, oublions les pays producteurs de pétrole, oublions les pays arabes, oublions les taxes ascenseur qui ont existé il y a 15 ans. Oublions tout ça, là. La taxe présente du Québec est supérieure à la moyenne. Dans un contexte où le prix de l'essence est devenu hypersensible, bien, l'écart qu'on a au Québec, il fait d'autant plus mal, hein. Dans un contexte où on commence à avoir la peau mince avec les prix de l'essence, puis où nos entreprises de camionnage puis tout ce qui tourne autour de l'industrie du transport est très sensible au prix de l'essence, où on peut se demander est-ce qu'au niveau tourisme le prix de l'essence ne pourrait pas affecter, toutes ces questions-là se posent, bien, il me semble que ça aurait été judicieux.

Et ça, ça affecte l'ensemble de l'économie sans que ce soit le ministre des Finances qui ait à décider: Tel projet est bon, tel projet est moins bon, j'investis ici, j'investis moins là. Non. Une mesure qui aide l'ensemble des secteurs économiques qui sont reliés au transport, qui sont reliés au tourisme, à une baisse du prix de l'essence, on n'a pas vu ça dans le budget.

L'autre élément de vision économique sur lequel on a raison d'être déçu, c'est la réforme de la fiscalité. Je dois dire que le ministre avait entrepris cet automne une grande consultation, une supposée grande consultation sur la fiscalité, qui avait été reçue de deux manières. C'est-à-dire que, quand il l'avait présentée lui-même, il avait laissé entendre qu'il faisait une consultation quand même assez restreinte. Mais il y a des gens, et, nous, à l'ADQ, on en est, qui se sont dit: Bien, si le ministre des Finances prend la peine de prendre deux, trois mois de son temps pour consulter sur la fiscalité, il doit vouloir entamer une grande réforme, je veux dire, le ministre des Finances, pour décider s'il va baisser les impôts de 22 $ de plus à un puis de 30 $ de moins à l'autre, il ne prendrait pas deux mois de son temps. Et c'est ce dans quoi on s'est engagé, à proposer des éléments de réforme de la fiscalité. Plusieurs personnes, plusieurs éléments de la société québécoise se sont mobilisés pour proposer des réformes de la fiscalité, pour se retrouver dans un budget où il n'y a, en fait, rien là-dessus.

Pourtant, la fiscalité québécoise est malade. Je vous dirais en termes... M. le Président, la fiscalité québécoise, elle est perdue, au même titre que la fiscalité canadienne d'ailleurs. Parce qu'à une époque on a dit: On va aller vers une universalité des programmes et une progressivité de l'impôt. En autres termes, pour avoir droit aux programmes, tout le monde y a droit, riches, pauvres, allocations familiales, c'est un programme universel. Je prends l'exemple des allocations familiales, c'est un programme universel. On disait par contre, à l'autre bout du spectre: Les gens qui ont des plus gros revenus, les gens qui sont plus fortunés vont payer, par des taux d'imposition supérieurs, une plus grande partie.

Maintenant, la plupart des programmes ne sont plus universels. Je veux dire, on s'est attaqué à l'universalité des programmes, puis on a dit, dans la plupart des cas: Les gens vont recevoir une aide gouvernementale qui est en fonction de leurs revenus, ce que je peux comprendre et ce que je suis même tout à fait prêt à accepter. Par contre, en termes de fiscalité, il faut décider où on place sa progressivité. Et, lorsqu'on déplace la progressivité vers les programmes, vers l'accès aux programmes, on doit y repenser.

Je pense que le taux d'imposition uniforme est une des mesures qu'un gouvernement va nécessairement devoir regarder s'il décide de maintenir la progressivité au niveau d'une ouverture non universelle aux différents programmes. Et ce qui n'empêche pas que les personnes à faibles revenus... À travers un mécanisme d'impôt négatif, par exemple, d'un revenu minimum, on peut avoir un système qui est tout à fait aussi avantageux pour les plus démunis de notre société, et même plus avantageux en ce sens qu'il les incite au travail.

Je ne lancerai pas tout le débat là-dessus aujourd'hui. Il est bien évident que le gouvernement est à l'heure actuelle là-dedans dans un cul-de-sac, cul-de-sac où il est un petit peu moins serré parce qu'il a de la marge de manoeuvre sur le plan budgétaire, mais où ses programmes, sa fiscalité, son programme d'aide sociale sont tout aussi inadéquats dans le contexte économique nouveau.

Autre grande déception, autre grand champ de déception que j'ai mentionné, M. le Président, c'est la relation de respect avec les citoyens. Le ministère du Revenu du Québec est questionné par les citoyens, ses règles de base sont questionnées. Les citoyens nous en parlent dans nos bureaux de comté. À l'ADQ, on a proposé l'idée d'une charte de défense finalement des contribuables, une charte de respect des droits des contribuables, de base. L'opposition officielle, je sais, partage cette préoccupation-là, a fait des propositions dans le même sens. Mais je dirais que l'ensemble des députés, et même je suis convaincu au niveau ministériel, entendent dans leurs bureaux de comté qu'il y a un malaise avec la façon de fonctionner du ministère du Revenu.

(11 h 20)

On pouvait penser que, dans une période où chaque sou pour le gouvernement était difficile parce que c'était l'atteinte du déficit zéro, ce n'était pas le moment idéal de s'attaquer à une chose comme ça, mais là je pense qu'on arrive dans une période où il va falloir regarder d'une façon limpide, d'une façon honnête avec les citoyens du Québec, qui sont finalement les... C'est des citoyens qui doivent être les boss au gouvernement, là, ils ne doivent pas être les marionnettes du ministère du Revenu puis être coupables avant même d'avoir pu s'expliquer, et là ça, c'est quelque chose à quoi on va devoir s'attaquer.

Relation de respect avec les citoyens qui passe aussi par la relation de respect que le gouvernement du Québec doit établir avec les représentants des citoyens au niveau de la base, les municipalités. Et là-dessus je dois vous dire, M. le Président, que c'est devenu tout à fait inacceptable, ridicule que, depuis presque une décennie, les gouvernements du Québec jouent une espèce de partie de je ne sais pas quoi avec les élus municipaux de budget en budget, de mesure en mesure. C'est: Refile une facture, c'est... Dans ce cas-ci, dans le dernier budget, on dit: On va vous enlever la facture, mais on vous enlève en même temps une source de revenus. On ne règle pas les problèmes, on ne donne pas les outils aux élus municipaux qui sont nécessaires pour mieux gérer leur municipalité.

On semble être, dans le gouvernement, dans un complet oubli du fait que tout le monde est supposé travailler pour le même contribuable. Que ce soit au niveau municipal ou au niveau provincial, c'est toujours la même personne qui paie, c'est toujours le même portefeuille qui paie, puis les citoyens s'attendent à ce que ce monde-là travaille ensemble pour que, en bout de ligne, leurs services leur soient rendus par le meilleur niveau de gouvernement, puis que ça coûte le moins cher possible, puis que ce soit fait raisonnablement.

Puis les citoyens du Québec n'en peuvent plus de voir un gouvernement du Québec qui est incapable de développer le début d'une relation de respect avec ses élus municipaux. Et le gouvernement a voulu, dans ses discours, ses premiers discours en relation avec les affaires municipales dans le budget, essayer de faire semblant qu'on était en voie de réparer les affaires. Ce n'est pas le cas. Les élus municipaux, plus ils fouillent dans le budget, plus ils se rendent compte des impacts, plus ils se rendent compte des intentions réelles du gouvernement, plus ils sont furieux et plus ils s'aperçoivent qu'on va encore être dans une année où les discussions entre le gouvernement du Québec puis les gouvernements municipaux, ça va être des discussions sur qui paie quoi puis comment est-ce qu'on s'y prend, puis que personne, pendant ce temps-là, ne va discuter de qu'est-ce qui est le mieux pour les citoyens puis comment est-ce que ce monde-là pourrait travailler main dans la main pour offrir les meilleurs services possible à une population qui les demande.

Dernier élément sur lequel le gouvernement, à mon avis, a déçu beaucoup la population dans son budget, puis surtout quand on s'arrête pour y penser plus longuement, c'est au niveau de la vision à long terme. Parmi les grands enjeux - et je vais me contenter d'un, je pourrais parler de plusieurs, mais je vais me contenter d'un - de vision à long terme qui ont raison d'inquiéter la population du Québec, il y a la dénatalité, l'inversion de la pyramide des âges en général, le non-renouvellement de notre population.

Le Parti québécois a été particulièrement visé en matière de problèmes de politique familiale. En fait, le gouvernement du Parti québécois a aboli tous les éléments de politique familiale pour créer une politique de service unique en garderie. Dans son budget, il allume lui-même une lumière jaune, parce que, en donnant 29 millions en crédits d'impôt remboursables, il reconnaît le problème d'un service unique, du manque de diversité. Il reconnaît qu'il y a un problème avec le manque de diversité. Maintenant, les sommes qui y sont allouées, c'est tout à fait limité, et je pense que, face au problème de la dénatalité, qui s'accroît d'année en année sous la direction du Parti québécois, qui devrait lui prouver que ses politiques familiales sont un échec, il ne se fait rien.

Finalement, évidemment, M. le Président, vous comprendrez que le plus grand problème avec l'inversion de la pyramide des âges - et j'en ai parlé longuement dans les réactions au budget - c'est le non-remboursement de la dette, c'est le fait qu'on paie 7,5 milliards cette année en intérêts sur la dette et que le gouvernement n'a même pas une intention dans son budget.


Motion de censure

Là-dessus, M. le Président, je vais présenter une motion de censure à ce gouvernement qui n'a même pas, dans son budget, mentionné une volonté de se donner un plan de remboursement de la dette. Et la motion de censure se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale blâme sévèrement le gouvernement du Parti québécois pour avoir de nouveau légué une facture à la nouvelle génération de contribuables en ne prévoyant pas dans son budget 2000-2001 un plan de remboursement de la dette.»

Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le député de Rivière-du-Loup. Alors, la motion est déposée. Et je vais céder la parole à M. le ministre délégué à la Santé, aux Services sociaux et à la Protection de la Jeunesse, aussi ministre responsable des Loisirs, des Sports et du Plein air et député de Berthier. Alors, M. le député.


M. Gilles Baril

M. Baril (Berthier): Merci, M. le Président. Il me fait extrêmement plaisir d'intervenir sur le budget de notre collègue de Verchères et ministre des Finances, d'abord parce que, à mon point de vue, c'est sans aucun doute un des meilleurs budgets de l'histoire du Québec - première des choses - sur plusieurs aspects, et je vais m'expliquer.

La première des choses, je pense que, lors du dernier budget, les contribuables québécois, les citoyens et les citoyennes, sont davantage en mesure de voir, mais de saisir et de récolter, dans le fond, les sacrifices puis les efforts qu'on a demandés à la population pour mettre en place l'incontournable défi de l'atteinte du déficit zéro qui nous permet maintenant de réinvestir, d'abord de soulager et de donner davantage d'oxygène aux citoyens et aux citoyennes du Québec par une des baisses d'impôts les plus importantes depuis que l'ancien premier ministre du Québec feu Maurice Le Noblet Duplessis avait inventé l'impôt sur le revenu. Donc, on parle de réductions d'impôts des particuliers de 4,5 milliards de dollars au cours des trois prochaines années, dont 1 milliard de dollars rétroactifs à partir du 1er janvier de cette année, 1,5 milliard pour 2001-2002 et 2 milliards de dollars pour 2002-2003.

M. le Président, j'ai écouté avec beaucoup d'attention tantôt le discours du chef de l'opposition, mais particulièrement ce qui me frappe, c'est le visage de l'opposition officielle quand le collègue de Verchères et ministre des Finances a déposé son budget. Ce n'est pas parce que c'est Pâques qui s'en vient, mais on a l'impression que les gens étaient habités un peu par la face de mi-carême. Et j'écoutais tantôt le chef de l'opposition et député de Sherbrooke, et ce qui me frappait encore une fois, c'est que j'ai l'impression que les gens se disent de l'autre côté: On aurait donc dû avant 1994, on aurait donc dû. Et c'est ce qu'ils n'ont pas fait.

Moi, j'ai la conviction, M. le Président - et les Québécois et les Québécoises ont vu clair en 1994 et en 1998 - qu'on a été précédé par un des gouvernements les plus gaspilleux et dépensiers de l'histoire du Québec. Le fameux gouvernement qui connaissait - qui se disait, en tout cas, connaître - tous les rouages du développement économique a été sans aucun doute, malheureusement, un des gouvernements les plus irresponsables sur le plan budgétaire et financier.

Quelques exemples: chômage, 12,5 %, quand le gouvernement du Parti québécois est arrivé au pouvoir en 1994; dernier déficit qu'avait fait le ministre des Finances libéral de l'époque, le député M. Bourbeau, député de Laporte, déficit de 6 milliards de dollars; sans oublier le fait que les libéraux ont doublé la dette du Québec entre 1986 et 1994, ils l'ont fait passer de 35 milliards à 74 milliards de dollars.

Alors, nous, ce que nous avons fait depuis 1994 - et ça, c'est probablement la caractéristique de l'action qu'a menée le Parti québécois depuis son retour au pouvoir - d'abord, nous avons ramené le chômage du Québec à des chiffres inégalés depuis l'Expo 67, chômage à 8,3 %. Nous avons réduit le déficit du Québec à zéro. Nous avons réinjecté d'une façon ordonnée et responsable dans deux secteurs extrêmement importants pour l'avenir du Québec, c'est-à-dire l'éducation et la santé. Nous sommes en train de faire du Québec la grande plaque tournante en matière de développement du multimédia en Amérique. Montréal est en train de devenir le grand carrefour de l'économie de l'intangible. Donc, on voit, M. le Président, que, effectivement, le gouvernement du Parti québécois était animé par une vision et a procédé à des choix clairs qui sont bénéfiques pour l'ensemble des Québécois et des Québécoises.

(11 h 30)

Autre élément important, M. le président, du dernier budget, c'est, bien sûr, les suites des engagements qu'avait pris le premier ministre lors du Sommet des jeunes et du Québec: réinvestissement important en jeunesse, particulièrement dans le domaine de l'éducation, réinvestissement important de 2,7 milliards de dollars pour la santé, M. le Président.

Encore une fois, quand j'écoute les gens de l'autre côté, j'ai l'impression qu'on vit sur une planète complètement déconnectée de la réalité. La santé, par exemple, M. le Président. On aime bien ça, de l'autre côté, faire les fins finauds puis se comparer aux États-Unis d'Amérique. Je vais répéter encore une fois que, à l'heure où on se parle, il y a 40 millions d'Américains - c'est à peu près six fois la population du Québec - qui n'ont aucune couverture sociale dans le domaine de la santé. Quarante millions d'Américains et d'Américaines qui sont frappés par une non-couverture, justement, des soins de santé.

On aime beaucoup se comparer à l'Ontario; on va en parler. On va parler de Toronto. On dit: C'est toujours mieux ailleurs. Tout le monde sait qu'un logement à Toronto, quelqu'un qui veut se louer un appartement, ce n'est pas donné, hein. Quelqu'un qui veut s'acheter une maison à Toronto: trois, quatre fois le prix de la même maison de ville, du même bungalow à Brossard. Les taxes municipales à Toronto, c'est la même chose. Mais on ne parle jamais de ça. On compare toujours des pommes avec je ne sais pas quoi, ça finit en bouillabaisse, et c'est à peu près l'équation pour mieux définir le programme économique ou la vision du Parti libéral du Québec à l'heure actuelle.

M. le Président, très rapidement, je voudrais parler des annonces importantes qui ont été faites par le ministre des Finances pour répondre à l'appel des plus mal pris et des plus mal prises dans notre société. L'année passée, comme vous le savez, on a annoncé un plan d'action supporté par une injection de 27,5 millions d'argent neuf pour contrer les détresses au Québec, pour répondre à l'appel des plus mal pris, pour essayer d'endiguer davantage le problème du suicide dans notre société, pour faire reculer les problèmes d'alcoolisme et de toxicomanie, pour baisser les listes d'attente en protection de la jeunesse - qui, en passant, sont les plus basses depuis 20 ans au Québec, M. le Président. Le 27,5 millions, qui donnait, dans le fond, 80 millions pour l'année passée, cette année et l'année prochaine, a été injecté justement pour soulager et pour contrer les détresses dans notre société.

Et je peux dire à ce sujet-là... Parce que, encore une fois, c'est bon de se comparer avec ce qui se passe ailleurs. Ce qu'on est en train de faire en matière de prévention du suicide, sur le plan de la gamme de services, ça ne se fait pas ailleurs en Amérique. Ce qu'on a fait au niveau de l'alcoolisme et de la toxicomanie, le Québec va être à la fine pointe des services ultraspécialisés en matière de réadaptation en ce qui concerne les gens qui sont touchés par le problème, que ce soient des jeunes de 12 ans, que ce soient des gens d'une quarantaine d'années ou que ce soient des plus vieux, M. le Président. On est en train de développer au Québec des services spécialisés qui vont faire du Québec un chef de file en matière de réadaptation et de la prévention de différentes détresses dans notre société.

On a fait la même chose pour l'itinérance à Montréal: on a injecté un million de dollars pour répondre à l'appel des groupes qui oeuvrent et qui agissent justement pour apaiser la douleur des gens qui sont confrontés par ce problème. Le chantier de méthadone que nous avons mis en marche à Montréal l'année passée: 3 millions de dollars sur les deux prochaines années, avec l'année passée, pour venir en aide à ceux et celles qui sont frappés par le douloureux problème de l'héroïnomanie, à Montréal plus précisément.

M. le Président, le ministre des Finances et député de Verchères a annoncé des argents additionnels pour contrer les détresses, dans le dernier budget: 21 millions de dollars par année, récurrents, pour justement continuer notre action, pour essayer de faire reculer les frontières de la détresse humaine qui habite malheureusement un trop grand nombre de nos jeunes compatriotes dans notre société. Des argents qui vont nous permettre d'investir davantage pour soutenir tout le travail qui est fait par les maisons de jeunes au Québec, soutenir l'extraordinaire réseau des familles d'accueil au Québec, qui vient justement en aide auprès des jeunes les plus vulnérables de notre société. 21 millions de dollars aussi pour continuer notre offensive pour rendre plus accessibles les services auprès des jeunes les plus mal pris de notre société.

44 millions de dollars, pour les six prochaines années, pour contrer l'émergence de cette nouvelle détresse qui malheureusement touche de plus en plus un trop grand nombre de concitoyens et concitoyennes. C'est l'action qu'on veut mener pour traiter justement les joueurs compulsifs, le jeu pathologique - qui est devenu, en passant, aux États-Unis, le premier grand phénomène de codépendance. Alors, nous voulons, avec l'aide naturellement qui a été financée par Loto-Québec, mettre en place une gamme de services, faire appel à des experts pour être en mesure d'endiguer ce phénomène dans notre société.

Et, naturellement, M. le Président, l'autre bonne nouvelle... Et, là-dessus, je me serais attendu du chef de l'opposition et député de Sherbrooke, qui fut jadis, dans une autre époque, dans un autre gouvernement, ministre des Sports, et très bon ministre des Sports, d'ailleurs - je lui en ai parlé la semaine passée, parce que je suis allé à Beyrouth, à la Conférence des ministres de la Jeunesse et des Sports, la CONFEJES, et effectivement les gens avaient un excellent souvenir du chef de l'opposition actuel - j'aurais pensé qu'il nous aurait félicité pour les annonces qu'on a faites pour le développement et le soutien du sport amateur au Québec, une mesure fiscale sans précédent dans l'histoire, mesure fiscale qui avait d'ailleurs été recommandée depuis longtemps par beaucoup d'experts, dont Mme Laberge qui avait fait des études approfondies pour voir comment on pouvait à la fois soutenir davantage des parents puis venir donner un coup de pouce aux athlètes de haut niveau au Québec. Cinq millions, M. le Président.

Puis, pour faire juste une comparaison, hier, mon vis-à-vis, Denis Coderre, a fait une annonce dans le même sens à Ottawa. Tant mieux si l'intervention et l'action de Québec challengent le gouvernement fédéral pour réinvestir davantage auprès des athlètes de haut niveau. Alors, le fédéral a annoncé une mesure à peu près équivalente, mais pour l'ensemble du Canada, 5 millions pour l'ensemble du Canada.

Nous, 5 millions, M. le Président, pour strictement consolider le développement de l'excellence à la fois au niveau de la relève mais à la fois au niveau des athlètes. Il y a 2 000 athlètes qui vont être touchés par sa mesure. Donc, c'est un chèque entre 1 000 $ et 4 000 $ qui sera destiné à ces athlètes-là. Et, pour moi, c'est une mesure fort importante qui était attendue depuis longtemps par le milieu.

Injection de 12 millions de dollars d'argent récurrent, soit une hausse de 27 %, justement pour soutenir le développement du sport et du loisir au Québec. Injection de 11 millions de dollars justement, M. le Président, pour la mise en place et l'amélioration d'immobilisations sportives et de loisirs à travers le Québec, particulièrement justement pour soutenir le travail et les efforts qui sont faits par les athlètes de moyen et de haut niveau en consolidant des centres uni ou multisports à travers le Québec.

Alors, M. le Président, en terminant, je dois vous dire que les Québécois l'ont démontré le lendemain du budget par l'entremise d'un sondage dans le Journal de Montréal , 80 % de la population était très satisfaite du budget. Et, encore une fois, je pense que, si l'opposition officielle peut être en mesure, dans un avenir malheureusement qui ne sera pas rapproché, de revenir sur ce côté-ci de la Chambre, on doit attendre d'elle... il faut que l'opposition passe le stade des critiques et propose une vision claire, une vision plus précise de ce qu'elle veut faire avec le Québec. Alors, encore une fois, en terminant, M. le Président, on est loin de la pensée politique de Georges-Émile Lapalme ou de Jean Lesage.

Encore une fois, M. le Président, le budget, tout ce qu'il permet, en conclusion, il permet au Québec d'être mieux préparé, d'avoir plus confiance en lui-même, plus sûr de lui-même pour affronter les grands défis du XXIe siècle. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, M. le ministre et député de Berthier. Je vais céder la parole à Mme la députée de Beauce-Sud. Mme la députée.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Merci, M. le Président. Alors, nous sommes appelés aujourd'hui à commenter les mesures budgétaires du gouvernement, c'est-à-dire le premier budget de l'an 2000. Comment qualifier ce budget, M. le Président, autrement que par le budget des cachettes ou encore le budget du manque de transparence? Budget des cachettes parce que, en plus d'avoir caché 841 millions de dollars dans une banque à Toronto, le ministre des Finances a réussi à nous cacher tout au long de l'année que d'importants surplus garnissaient les coffres du gouvernement. Et on ne parle pas de petits surplus, M. le Président, on parle de près de 2 milliards de dollars que notre ministre des Finances a perçus en trop dans vos poches, dans les miennes, dans celles de toutes les familles du Québec. Or, nous l'avions prédit, la critique libérale en matière de finances et députée de Marguerite-Bourgeoys l'avait prédit et de nombreux experts économistes avaient aussi prédit ce scénario. Seul le ministre des Finances du Québec ne voyait pas ces surplus-là.

(11 h 40)

Alors, pendant que notre ministre des Finances prétendait que les surplus seraient nuls ou tout au plus de 89 millions au dernier trimestre, le Mouvement Desjardins, lui, prévoyait un surplus d'au moins 500 millions de dollars, la Banque Royale, elle, prévoyait un surplus de 700 millions de dollars et de 15 milliards au bout de cinq ans; et, pour sa part, la Banque Laurentienne s'attendait plutôt à un surplus de 1,3 milliard de dollars. Depuis plusieurs mois, donc, le parti libéral du Québec savait que les surplus du gouvernement seraient beaucoup plus élevés que ne voulaient l'affirmer le premier ministre, le ministre des Finances, le président du Conseil du trésor et enfin la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Cela démontre clairement, M. le Président, que ces derniers ont volontairement sous-estimé et camouflé les revenus de l'État afin probablement de se constituer une bonne réserve en vue des prochaines élections ou encore de se constituer un fonds de réserve en vue d'un éventuel référendum. Et, parlant de réserve, le Parti libéral du Québec n'a rien contre la constitution d'un fonds de réserve, au contraire, mais nous souhaiterions, nous aurions souhaité qu'il soit inscrit au livre du gouvernement, transparent, comme c'est le cas à Ottawa pour le budget de Paul Martin.

Pour en revenir aux mauvaises prévisions de notre ministre des Finances, c'est une honte que d'avoir agi ainsi, puisque pendant toute l'année le gouvernement a privé la population de cet argent à dépenser et, en même temps, il a bien pris soin de camoufler ces surplus afin de ne pas être obligé de les réinvestir en santé et en éducation. Combien de gens sur les listes d'attente auraient pu obtenir la chirurgie cardiaque ou le traitement en radio-oncologie dont ils ont été privés si le ministre avait eu la décence de réinjecter immédiatement ces sommes qu'il nous annonce aujourd'hui? Combien d'enfants ont été privés des services de professionnels en éducation pour les aider avec leurs problèmes d'apprentissage? Combien d'enfants vivent la détresse, qui sont aux prises avec d'importants problèmes familiaux ou qui sombrent dans l'alcoolisme ou la toxicomanie? Combien de ceux-ci auraient pu recevoir de l'aide dont ils avaient désespérément besoin si le ministre des Finances avait fait preuve d'une plus grande compassion?

Je n'ai pas la réponse, mais j'ai la certitude que plusieurs de mes concitoyens au Québec ont souffert de l'incompétence de ce gouvernement. Cette négligence dont le gouvernement du Parti québécois a fait preuve a même probablement fait mourir quelques-uns de nos concitoyens. Ce budget, c'est aussi le budget du manque de transparence. M. le Président, puisque, à l'instar du ministre fédéral Paul Martin, le ministre des Finances aurait très bien pu indexer les tables d'impôts. Or, il a choisi de ne pas le faire. Pourquoi? Bien, tout simplement parce que c'est beaucoup plus spectaculaire d'annoncer des baisses d'impôts amplifiées de 4,5 milliards que d'annoncer une indexation des tables d'impôts, vous l'aurez compris, indexation qu'on a prévue seulement dans trois ans, c'est-à-dire pour l'année financière 2002-2003.

Or, ce 4,5 milliards de dollars, c'est un gros ballon qui va vite se dégonfler et qui a réussi même à se dégonfler, je dirais, depuis la semaine dernière, puisque 2,2 milliards de cette somme-là avaient déjà été annoncés dans le budget de l'an dernier et que, si on y soustrait de plus les hausses de taxes que devront payer les contribuables du Québec parce que le ministre des Finances a choisi de ne pas indexer les tables d'impôts, eh bien, la réduction réelle d'impôts annoncée dans le budget du 14 mars 2000 n'est plus que d'environ 1,3 milliard de dollars, cumulatifs sur trois ans. Au total, en 2002-2003, les contribuables du Québec paieront 700 millions de moins d'impôts que les 1,3 milliard de dollars annoncés l'année dernière.

Une fois que les contribuables auront calculé, compris, réalisé qu'ils paient des taxes sur l'essence de plus en plus importantes, alors ils vont s'apercevoir qu'ils sont bien loin des milliards de réduction d'impôts annoncés en grande pompe la semaine dernière par le ministre des Finances. Encore hier et aujourd'hui, le prix de l'essence a grimpé dans plusieurs régions du Québec, ce qui donne un dur coup à plusieurs industries, comme l'agriculture, le transport ou encore le tourisme. Et, d'ailleurs, je constate que malheureusement, en l'an 2000, la population du Québec sera la seule au pays à ne pas profiter de cette indexation des tables d'impôts.

Or, au cours des six dernières années, soit depuis que le Parti québécois est au pouvoir, les Québécois et les Québécoises paient plus en impôts et en taxes de toutes sortes, et ces différentes hausses de taxes proviennent de diverses sources. Alors, notre ministre des Finances aime ça, nous servir une litanie de hausses d'impôts que supposément le Parti libéral a faites dans son dernier mandat. Eh bien, je vais lui en citer à mon tour: transferts de factures aux municipalités; hausses de la TVQ de 6,5 % à 7,5 % - c'est une augmentation de 15 %, ça, M. le Président, des recettes du gouvernement au chapitre de la TVQ; hausse de la taxe sur les produits du tabac; financement des investissements routiers par une hausse des frais d'immatriculation; taxes sur les pneus neufs; taxes sur les véhicules de luxe; taxes sur l'essence; taxes sur les forfaits touristiques et nuitées à l'hôtel; taxes sur le Fonds de lutte contre la pauvreté; introduction du revenu familial net, qui fait en sorte de faire perdre de nombreux crédits d'impôt parce qu'on récupère ces crédits à partir d'un revenu familial net de 26 000 $; et enfin, mais non la moindre, vous l'aurez compris, la non-indexation des tables d'impôts et des transferts aux particuliers, qui représente au bas mot un effort de 167 millions par pourcentage d'inflation, dans les poches des contribuables.

Alors, seulement au niveau de l'impôt sur le revenu des particuliers, les Québécois paient 3,4 milliards de dollars de plus qu'en 1994-1995, lorsque le Parti libéral du Québec a quitté le pouvoir, en partie, il faut le reconnaître, dû à la croissance économique, bien sûr, mais surtout grâce à cette non-indexation des tables d'impôts et à l'augmentation de toutes les taxes que je vous ai nommées il y a quelques secondes.

La fiscalité des particuliers, malgré ce budget, reste à améliorer parce qu'elle est peu compétitive par rapport à nos voisins et à nos principaux partenaires commerciaux. Alors, selon Alain Dubuc, de La Presse , les baisses d'impôts, aussi impressionnantes soient-elles, ne réussiront qu'à réduire du tiers l'écart entre le Québec et les autres provinces canadiennes. De plus, notre fiscalité va continuer de freiner notre croissance économique. Pour atteindre un niveau comparable à celui de la moyenne canadienne, l'impôt des particuliers du Québec aurait dû être diminué de 20 % par rapport au Nouveau-Brunswick et de 37 % par rapport à l'Ontario, qui est quand même notre principal partenaire économique.

Donc, pour atteindre la parité avec l'Ontario, il nous aurait fallu réduire nos impôts de 5,8 milliards de dollars. À la place, le ministre nous annonce des réductions de 2 milliards pour l'année 2003. Par rapport au Nouveau-Brunswick, notre fardeau fiscal excédentaire s'élève à 2,6 milliards, tandis que, par rapport à l'ensemble canadien, la moyenne, si on veut parler ainsi, ça nous coûte, au Québec, 3,1 milliards de plus que la moyenne des Canadiens.

Alain Dubuc écrivait dans La Presse le jour même du budget que «la réalité plus crue, c'est que, au rythme où vont les choses, le ministre Landry ne sera jamais capable de combler le retard du Québec par rapport au reste du Canada». Or, on le sait, le ministre nous annonce une réduction de 2 milliards pour l'année 2003. En fait, il nous a annoncé en grande pompe que les impôts seraient diminués de 1,3 milliard de dollars, cumulatif, de plus qu'il avait annoncé l'année dernière, soit une augmentation, finalement, de 700 millions au bout de trois ans.

À quel feu d'artifice avons-nous eu droit pour finalement se rendre compte que la réduction annoncée dans ce budget-ci pour 2003 est de 700 millions de dollars seulement! 700 millions de dollars qui vont alléger, si vous voulez, le fardeau des contribuables du Québec. 700 millions de dollars, moins les coûts reliés à la non-indexation, c'est-à-dire environ 300 millions de dollars, moins les coûts de l'inflation qui montent en flèche, bien, finalement, il va rester très peu d'argent dans les poches des contribuables en 2002-2003.

Et, pour vous donner un exemple, si on prend 1 milliard de réduction d'impôts en l'année 2000-2001, divisé par 3 millions de contribuables, bien, ça représente 333 $ par personne par année, soit environ 6 $ par semaine. Alors, une fois que vous aurez payé les augmentations du prix de l'essence à la pompe, lorsque vous aurez fait votre plein d'essence, finalement il ne vous restera plus rien, moins que rien, même.

(11 h 50)

Bien entendu, les baisses d'impôts annoncées par ce budget font suite aux consultations sur la réduction de l'impôt des particuliers qui ont duré plus d'un mois à l'Assemblée nationale l'automne dernier. Et je vous rappelle que ces consultations-là avaient pour but de rendre notre fiscalité plus compétitive. Le grand constat de cette consultation qui a été fait par le président de la commission et député de Richelieu était qu'il fallait corriger la fiscalité, plus particulièrement pour la classe moyenne, et la ramener à la moyenne canadienne, ce qui supposait des baisses d'impôts de 3,4 milliards de dollars sur quatre ans. Or, M. le Président, on a siégé de très longues heures pour pas grand-chose. La classe moyenne, même après le budget de mardi dernier, est toujours celle qui écope. Et les baisses d'impôts annoncées de 2 milliards de dollars au lieu des 3,4 milliards de dollars souhaités, c'est encore trop peu.

Qu'est-ce que ça veut dire pour le pauvre contribuable du Québec? Bien, ça ne veut pas dire grand-chose. D'abord, on n'a pas corrigé les lacunes causées par les taux implicites d'impôts. Donc, au fur et à mesure, on le sait, que son salaire augmente, le contribuable paie plus d'impôts et perd une partie de ses crédits et autres transferts sociaux. Alors, c'est ce qui s'appelle se faire manger de tous bords tous côtés. Il y en a d'autres qui diraient: Donne d'une main puis prends de l'autre.

Alors donc, on n'a pas réglé cette question en ce qui concerne les contribuables de la classe moyenne. Ils sont ceux qui profiteront le moins de la réduction des tables d'impôts, puisque leur taux passera de 23 % à 22 % en 2003, soit une diminution de 1 %, alors que la diminution est de 3 % pour les contribuables gagnant moins de 25 000 $ et de 2 % pour les contribuables gagnant plus de 50 000 $. En clair, M. le Président, la diminution des impôts annoncée par ce gouvernement pour l'année en cours représente 492 $ par année pour un couple ayant deux enfants et qui a un revenu de 75 000 $. Je suis certaine qu'il y en a plusieurs qui vont se retrouver dans ce scénario-là. Donc, dans ce cas, ça représente 9 $ par semaine pour cette famille de quatre personnes. Or, ce même couple québécois qui a deux enfants et qui gagne 75 000 $ par année devra encore payer 2 728 $ de plus d'impôts que s'il habitait en Ontario, après le budget de Landry de l'an 2000 mais avant la réduction d'impôts prévue pour cette année en Ontario.

Ces différences entre la fiscalité québécoise et ontarienne nous coûtent cher. Nos taux élevés d'imposition contribuent, on le sait, de façon importante au travail au noir. Ces taux élevés d'impôts constituent également un frein pour les employeurs qui cherchent à recruter du personnel ou encore pour l'employeur qui voudrait faire travailler ses employés en temps supplémentaire. Mais, plus dramatique encore, ces taux élevés font en sorte d'augmenter la pauvreté au Québec.

Parlons maintenant des mesures budgétaires qui touchent les municipalités. Alors, dans ce budget, on parle des municipalités, on parle de la fameuse facture de 356 millions de dollars. Et, bien sûr, le gouvernement nous annonce comme bonne nouvelle que cette facture n'aura plus à être payée. Cela, je vous le rappelle, M. le Président, seulement à partir de l'an 2001. Bien oui, cette facture va disparaître. Mais, en contrepartie, les municipalités vont perdre les revenus de la taxe sur les télécommunications, le gaz et l'électricité, ce qu'on appelle communément la TGE.

Alors, selon le président de l'Union des municipalités du Québec, M. Mario Laframboise, et je le cite: «Le budget Landry est la plus mauvaise nouvelle qu'ont reçue les municipalités depuis très longtemps.» M. Laframboise fait surtout référence ici à la perte de revenus liée à cette taxe qui est pour lui un détournement de fonds de 307 millions de dollars par année de la part du gouvernement. De plus, M. Laframboise ajoute que «pendant les trois prochaines années, les municipalités se verront privées au minimum de revenus totalisant 970 millions de dollars. Que les municipalités se sentent trahies est la moindre des choses», conclut-il.

Le président de la Fédération québécoise des municipalités, M. Florian Saint-Onge, pour sa part, dit que «cette coupure de revenus a soulevé le spectre d'une hausse de taxes municipales». Il mentionne qu'«il faut s'attendre à une augmentation des taxes municipales au fil des ans puisque le gouvernement va continuer à faire subir autrement aux municipalités cette fameuse facture de 356 millions de dollars».

M. le Président, c'est scandaleux. Comment le ministre des Finances peut-il dire que c'est le meilleur budget de sa vie quand, pour les municipalités, ce budget est une trahison, quand il donne d'une main et reprend de l'autre, quand une facture qui était là au départ pour aider à atteindre le déficit zéro devient maintenant perpétuelle, comme le mentionne le président de l'Union des municipalités de banlieue sur l'île de Montréal, M. Georges Bossé?

Ce gouvernement n'a pas de raison d'être fier de ses actions, car, au bout du compte, ce sont les contribuables qui vont en payer le prix. Nous, au Parti libéral du Québec, nous ne croyons pas que la perte de revenus liée à cette taxe est une bonne nouvelle pour les municipalités. Dans les faits, comme par les années passées, les municipalités devront composer avec des revenus moindres, ce qui représente conséquemment moins de services et moins d'investissements.

Dans le budget Landry, on retrouve aussi une annonce de 175 millions de dollars que le gouvernement met à la disposition des municipalités pour la réfection des infrastructures en l'an 2000. Pour le président de l'UMQ, et je le cite: «Il n'est pas clair que le Québec suivra Ottawa dans un programme à hauteur de 500 millions de dollars sur six ans, car le gouvernement s'est contenté d'une annonce de 175 millions sur une seule année. De plus, ajoute-t-il, il faut faire attention avant de présenter ce 175 millions de dollars comme un cadeau aux municipalités. Rappelons-nous que, pour chaque dollar qui sera payé par Québec, les municipalités devront en mettre aussi et que le gouvernement du Québec récupérera rapidement 70 % de sa mise via les retombées fiscales du programme, ce qui ne sera pas le cas pour les municipalités.»

M. le Président, si vous perdez deux manches sur deux, vous n'êtes pas le gagnant de la partie mais le perdant. Voilà comment se sentent aujourd'hui les dirigeants municipaux. Voilà pourquoi le président de l'UMQ a mentionné, et je le répète: «Les municipalités se sentent trahies par ce budget. Ce budget va provoquer un profond sentiment de déception et de colère chez la plupart des élus municipaux.» Et je peux vous dire que c'est le cas chez nous; la grogne, je la sens. «Encore une fois, le gouvernement poursuit la triste tradition qui consiste à prélever ses nouveaux revenus dans le champ foncier municipal», conclut M. Laframboise.

Alors, pour conclure, M. le Président, je vous dirais qu'encore une fois le gouvernement a manqué à ses engagements envers les citoyennes et citoyens du Québec. En campagne électorale, le premier ministre s'était engagé à utiliser 50 % de sa marge de manoeuvre aux réductions d'impôts. Or, il n'en est rien. Pour l'année 2000-2001, c'est 15 % qui est consacré à la réduction des impôts, par rapport à 85 % à l'augmentation des dépenses. Or, dans ces nouvelles dépenses, il y en a une qui m'a sauté aux yeux, c'est la somme de 3,2 millions de dollars que le gouvernement consacrera à gérer les missions du premier ministre à l'étranger. C'est à peu près, M. le Président, la somme que ce gouvernement consacrera au programme de diversification de l'économie dans la région Chaudière-Appalaches.

Encore une fois, le gouvernement a oublié le citoyen pour se consacrer à sa mission souverainiste. Je vous le redis, M. le Président, on se rappellera de ce budget Landry 2000 comme un budget de cachettes et de manque de transparence, comme je vous l'ai démontré tout au long de cette allocution. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Brouillet): Je vous remercie, Mme la députée de Beauce-Sud.

Alors, étant donné l'heure, nous allons suspendre nos travaux jusqu'à cet après-midi, 14 heures.

(Suspension de la séance à 11 h 59)

(Reprise à 14 h 4)

Le Président: Alors, Mmes, MM. les députés, nous allons d'abord nous recueillir un moment.

Très bien, veuillez vous asseoir.

Alors, avant de débuter les affaires courantes, à l'occasion de la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, je voudrais signaler la présence dans nos tribunes de plusieurs personnalités québécoises que nous honorerons d'une façon particulière plus tard dans la séance, à l'occasion des motions sans préavis. Alors, néanmoins, ils sont ici avec nous. Plus tard, le ministre des Relations avec les citoyens présentera nos concitoyens et concitoyennes qui se sont mérité les honneurs de cette journée.


Affaires courantes

Alors, nous débutons les affaires courantes.

Il n'y a pas de déclarations ministérielles.


Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, je vous réfère, M. le Président, à l'article a.


Projet de loi n° 100

Le Président: Alors, à cet article de notre feuilleton, M. le ministre de l'Éducation et de la Jeunesse présente le projet de loi n° 100, Loi modifiant la Loi sur les fondations universitaires. M. le ministre.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. Ce projet de loi modifie la Loi sur les fondations universitaires afin de permettre aux administrateurs d'une fondation universitaire, si tous y consentent, de participer à une réunion du conseil d'administration à l'aide de moyens permettant à tous les participants de communiquer oralement entre eux.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Alors, est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté. M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: Alors, l'article b, maintenant, M. le Président.


Projet de loi n° 105

Le Président: Alors, à cet article, M. le ministre des Ressources naturelles présente le projet de loi n° 105, Loi régissant les activités d'aménagement forestier de bénéficiaires de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier pour les années 2000-2001 et 2001-2002. Alors, M. le ministre.


M. Jacques Brassard

M. Brassard: M. le Président, ce projet de loi a pour objet d'établir des règles particulières régissant la planification des activités d'aménagement forestier de bénéficiaires de contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier pour les années 2000-2001 et 2001-2002. Il a également pour objet d'établir des règles concernant la révision des contrats d'approvisionnement et d'aménagement forestier.

Ces règles prévalent sur toute disposition inconciliable de la Loi sur les forêts.

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Après avoir refusé une enquête publique sur le sujet, après avoir reporté à plusieurs reprises la tenue d'une commission parlementaire qu'il s'était engagé à tenir, est-ce que le ministre peut s'engager à ce que ce projet de loi ne procède pas sans que les principaux intéressés soient entendus?

Le Président: M. le ministre.

M. Brassard: M. le Président, ce projet de loi a un caractère d'urgence. Pour ce qui est de la loi révisant l'ensemble du régime forestier qui viendra plus tard à cette session, celle-là sera soumise à une consultation générale en commission parlementaire, mais pas celle-là.


Mise aux voix

Le Président: Bien. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie du projet de loi? Adopté.


Dépôt de documents

Au dépôt de documents, M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances.


Message du lieutenant-gouverneur

M. Landry: M. le Président, j'ai un message du lieutenant-gouverneur.

Le Président: Alors, Mmes, MM. les...

M. Landry: Et il est signé de sa main. Ha, ha, ha!


Crédits supplémentaires n° 1 pour l'année financière 1999-2000

Le Président: ...députés, veuillez vous lever, s'il vous plaît.

Alors, chers collègues, «le lieutenant-gouverneur transmet à l'Assemblée nationale les crédits supplémentaires n° 1 pour l'année financière se terminant le 31 mars 2000, conformément aux dispositions de l'article 54 de la Loi constitutionnelle de 1867, et recommande ces crédits à la considération de l'Assemblée».

Et c'est signé: L'honorable Lise Thibault.

Alors, veuillez vous asseoir. Je viens de le lire, M. le vice-premier ministre. Alors, vous avez des documents à déposer, je crois. Ha, ha, ha!

M. Landry: Alors, M. le Président, c'est pour donner suite au message, dont je vous ai parlé tout à l'heure, de Son Honneur le lieutenant-gouverneur.

Le Président: Je pense que vous déposez les crédits supplémentaires.

M. Landry: Eh oui, les crédits supplémentaires n° 1 pour l'exercice financier se terminant le 31 mars 2000.

Le Président: Très bien. Alors, ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement.


Renvoi à la commission plénière

M. Brassard: Alors, je voudrais faire motion pour déférer les crédits supplémentaires 1999-2000 en commission plénière afin que l'Assemblée les étudie et les adopte conformément à l'article 289 du règlement.

(14 h 10)

Le Président: Bien. Alors, cette motion est-elle adoptée? Adopté.

Au dépôt de documents, M. le ministre de la Sécurité publique.


Entente concernant l'établissement et le maintien d'un corps de police dans les réserves de Uashat Mak Mani-Utenam

M. Ménard: M. le Président, je dépose une entente concernant l'établissement et le maintien d'un corps de police dans les réserves de Uashat Mak Mani-Utenam.

Le Président: Alors, ce document est déposé. Mme la ministre de la Justice.


Réponse du gouvernement au Comité de la rémunération des juges relativement au régime de retraite des juges de la Cour du Québec et des cours municipales de Laval, de Montréal et de Québec

Mme Goupil: Alors, M. le Président, je dépose la réponse du gouvernement au Comité de la rémunération des juges relativement au régime de retraite des juges de la Cour du Québec et des cours municipales de Laval, de Montréal et de Québec.

Le Président: Bien. Ce document est déposé. Je crois que vous avez d'autres documents, Mme la ministre?


Rapports annuels de divers ordres professionnels

Mme Goupil: Oui. Également, M. le Président, je dépose les rapports annuels des ordres professionnels suivants: Conseillers en relations industrielles du Québec, pour les années 1996-1997, 1997-1998 et 1998-1999, ainsi que celui de l'Ordre professionnel des médecins vétérinaires du Québec pour 1998-1999.

Le Président: Alors, ces documents sont déposés. M. le leader du gouvernement. On m'indiquait, M. le leader que vous aviez... Non? Ça va? Très bien.


Préavis d'une motion des députés de l'opposition

Alors, en ce qui me concerne, j'ai reçu dans les délais prescrits préavis d'une motion qui sera inscrite dans le feuilleton de demain, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Alors, conformément à l'article 97.1 de notre règlement, je dépose copie du texte de ce préavis.


Rapport de l'assemblée annuelle du Council of State Governments

Et, au dépôt de rapports de missions, il me fait plaisir de déposer le rapport de notre délégation de l'Assemblée à l'assemblée annuelle du Council of State Governments que nous avons eu l'honneur d'accueillir à Québec du 3 au 7 décembre dernier.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Au dépôt de pétitions, maintenant, M. le député de Vaudreuil qui...


Questions et réponses orales

Alors, si notre collègue ne peut pas déposer maintenant, il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège, nous allons donc aborder immédiatement la période de questions et de réponses orales, et je cède la parole au chef de l'opposition officielle pour une première question principale.


Qualité des soins et des services prodigués aux personnes âgées en centre d'hébergement


M. Jean J. Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Depuis quelque temps maintenant, il se présente une situation troublante pour l'ensemble de notre société qui a été soulevée publiquement par la Commission des droits de la personne, il s'agit du sort réservé aux citoyens les plus âgés du Québec, des gens qui - tout le monde en conviendra - méritent certainement notre respect et un peu de dignité, surtout à ce moment-là dans leur vie. Des porte-parole très sérieux sont intervenus devant la commission, entre autres l'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec, l'Association des CLSC et CHSLD, et le Protecteur du citoyen du Québec s'est également prononcé là-dessus.

L'Ordre des infirmières et infirmiers du Québec a fait le constat suivant: l'insuffisance de soins, le manque de respect de la vie privée et de la dignité des personnes, la violence physique et verbale. On parle, de plus, M. le Président, de privation de soins nécessaires à leur santé et à leur bien-être.

L'Association des CLSC et CHSLD également, M. le Président, est intervenue. Ils ont dit que la situation actuelle ne permet pas de répondre à plus de 68 % des besoins et d'assistance des personnes qui y vivent. Et là je cite: «Le déficit en soins infirmiers auquel elles, les personnes les plus vulnérables de notre société, doivent faire face n'est pas sans conséquences. Il se traduit par une utilisation trop répandue des contraintes physiques et un manque de mesures de prévention des lésions de pression, pour ne mentionner que ces exemples.»

Le Protecteur du citoyen est intervenu la semaine dernière également, M. le Président. Il a déposé un rapport dans lequel il dit ceci: «Les bouleversements des dernières années dans les programmes gouvernementaux offrent de nombreux exemples où des droits fondamentaux des aînés ont pu ou peuvent encore être menacés, les rendant d'autant plus vulnérables à toute forme d'exploitation.» Le Protecteur du citoyen, lui, en vient à la conclusion qu'une enquête de la Commission des droits de la personne sur la baisse des services dans des CHSLD est nécessaire pour pouvoir aller au fond des choses.

Compte tenu de ce que ces intervenants ont dit, compte tenu des réactions que ces groupes-là ont eues également - je pense aux CHSLD, au budget - est-ce que le premier ministre ne convient pas qu'il y a amplement de raisons, de preuves, de faits et d'interventions qui justifient qu'une telle enquête ait lieu?

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, le gouvernement est très sensible à la situation des personnes âgées qui vivent dans les CHSLD, et nous en avons fait la démonstration, parce que, depuis 1994, par exemple, nous avons investi 314 millions de dollars pour construire et rénover des centres existants afin de mieux loger nos aînés. Et l'opération 2 000 lits de longue durée pour ajouter des lits et ajouter aux heures-soins a fait en sorte que, depuis maintenant 1994, nous avons créé 2 100 lits à longue durée de plus alors que les libéraux, durant leur dernier mandat, en ont créé moins de la moitié. Alors, je pense que nous sommes tous conscients que c'est quelque chose de très important, qu'il y a des efforts à faire. Nous allons continuer d'en faire.

Depuis 1994, nous avons alloué 555 millions en services à domicile; je parle des soins infirmiers, ergothérapie, aide domestique et aide personnelle, soutien aux proches et soutien communautaire. Nous avons, cette année, dans le budget qui va entrer en vigueur le 1er avril, pourvu de façon récurrente la base budgétaire de 58 millions de dollars, 59 millions de dollars au titre des soins de longue durée. Nous allons donc appliquer ces mesures.

Nous allons apporter un soin très attentif à la vérification des allégations qui ont été faites. Nous sommes très conscients que c'est une responsabilité de société que de s'occuper des personnes âgées. Ce sont les gens qui ont construit le Québec et qui ont permis d'avoir le Québec que nous avons aujourd'hui, c'est donc une obligation fondamentale et collective que nous avons et dont nous devons nous acquitter, et nous le ferons, M. le Président.

Le Président: M. le chef de l'opposition officielle.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, l'évaluation qu'en fait le premier ministre n'est pas partagée, certainement pas, par l'Association des CHSLD qui a décrit l'initiative du gouvernement suite au dernier budget comme étant, et je cite, «dérisoire». Et je rappellerai au premier ministre que ça fait six ans que son gouvernement est en place et que les besoins sont très grands.

Et la même Association disait ceci, M. le Président, et je cite: «On va continuer à être forcé à faire des choix déchirants: est-ce qu'on donne un seul bain par semaine, qu'on aide les gens à marcher, qu'on diminue les contentions? À chaque fois qu'on fait un choix, on en abandonne d'autres», dit Jacques Lemire, président de cette Association qui regroupe 137 centres de soins de longue durée et 146 CLSC, M. le Président.

Mais il n'est pas le seul à en parler. Ce n'est pas comme s'il y avait un seul intervenant, un représentant, un seul groupe qui intervient là-dessus; les infirmiers et infirmières sont intervenus, M. le Président, et le Protecteur du citoyen est également intervenu, lui qui est un officier de l'Assemblée nationale. Dans le même rapport du Protecteur du citoyen, il disait ceci: «Traduit au quotidien, le déficit de services peut très bien signifier la contention ou la surmédication plutôt que l'attention, la plaie de lit qui s'installe, de moins en moins d'exercices de mobilisation, des vêtements souillés plus souvent ou le recours plus fréquent aux culottes d'incontinence, des repas qui attendent ou sont mangés trop vite ou parfois froids.»

Eh bien, M. le Président, pourquoi le gouvernement ne fait-il pas le minimum en permettant l'enquête recommandée par le Protecteur du citoyen? Ça enlève quoi au gouvernement? S'il est, comme il vient de le dire, très fier de ce qu'il fait pour les aînés, s'il est content et satisfait de ce qui se passe actuellement, le gouvernement aura l'occasion de le dire. Pourquoi aurait-il peur d'une enquête qui va mettre à jour exactement ce qui se passe et les correctifs qu'on doit y apporter?

Des voix: Bravo!

Le Président: M. le premier ministre.


M. Lucien Bouchard

M. Bouchard: M. le Président, nous sommes conscients que l'alourdissement des clientèles dans les centres d'accueil pour personnes âgées requiert de plus en plus de ressources, et c'est la raison pour laquelle nous en avons ajouté dans les années antérieures et c'est aussi la raison pour laquelle nous avons ajouté une somme très considérable. On ne nous dira pas que c'est dérisoire que de parler d'un montant de près 60 millions de dollars par année ajouté uniquement à un type de soins.

(14 h 20)

Et, si ce n'est pas suffisant, M. le Président, nous verrons ce que nous pourrons faire pour en ajouter, mais n'oublions pas que, dans tout le secteur de la santé, le budget, qui va entrer en vigueur le 1er avril, pourvoie de près de 3 milliards de dollars de plus les fonds déjà alloués. Donc, on n'est pas en face d'une société qui ne se préoccupe pas des personnes malades, d'une société qui serait insensible aux personnes âgées. Au contraire, nous faisons déjà des efforts considérables. Nous allons les accroître cette année. Et nous allons tout faire pour combler les lacunes qui pourraient subsister.

Le Président: M. le chef de l'opposition.


M. Jean J. Charest

M. Charest: M. le Président, je pense qu'on peut s'entendre là-dessus, la société québécoise n'est certainement pas insensible à ce qui se passe pour les personnes âgées, les aînés. La question qu'on se pose, c'est: Est-ce que son gouvernement est insensible à ce qui se passe pour les aînés et les personnes qui sont, entre autres, en CHSLD? Parce que ce qu'on nous décrit, ce qu'on a entendu, ce qu'on a vu, venant de plusieurs intervenants... Ce n'est pas juste un seul intervenant quand les infirmiers et infirmières le disent, quand les directeurs des centres le disent, quand le Protecteur du citoyen intervient. Quand on entend le gouvernement dire à l'Assemblée nationale qu'un bain par semaine, c'est assez, on a plusieurs raisons de s'inquiéter.

Et le premier ministre a dit, hier, là, c'est cité dans les journaux: M. Bouchard a soutenu que les ressources additionnelles prévues au budget suffiront à combler les lacunes décelées dans les soins aux personnes âgées. De quelles lacunes il parlait? Et est-ce qu'il pense sincèrement aujourd'hui que ce qu'il y a de prévu dans le budget va combler les lacunes qui ont été décrites dans ces rapports-là? Est-ce qu'il peut dire, là, en toute sincérité, que le problème va être réglé? Et, sinon, pourquoi ne pas au moins permettre à la commission d'entendre les parties, d'écouter les témoins et d'entendre les aînés du Québec, qui, eux, ont des choses à dire, M. le Président?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci, M. le Président. Notre gouvernement a été, est, et demeurera sensible aux problèmes que vivent les personnes âgées. C'est vrai qu'il y a un certain nombre de difficultés qui sont vécues dans certains centres. Certaines de ces difficultés sont liées à des ressources insuffisantes. Nous en ajoutons une somme considérable cette année, c'est 30 % de tout le budget de développement qui ira vers les personnes âgées, majoritairement dans les centres d'hébergement, et l'autre partie ira vers de l'aide et des soins à domicile. Quand on regarde l'ensemble de nos institutions, je pense que les gens y reçoivent des services de grande qualité, par des personnes profondément engagées à l'égard des personnes âgées. Il y a cependant, dans certains centres en particulier, des difficultés plus grandes. C'est pour cette raison d'ailleurs, M. le Président, que nous allons adopter, dans les prochains mois, une politique qui va concerner les personnes âgées, le type d'aide qui doit leur être apporté, le type de support qui doit être apporté aux professionnels qui interviennent auprès d'eux et auprès d'elles, M. le Président, et, dans la mesure où la commission nous fera un certain nombre de recommandations, nous pourrions, avec cet éclairage, compléter les actions que nous comptons mener à l'égard des personnes âgées.

De vouloir mettre dans le même... je dirais, d'identifier tous les centres présentant les mêmes niveaux de difficulté, c'est injuste aussi à l'égard du réseau. On sait qu'il y a certains centres où c'est plus difficile. Il s'agit de voir comment aider en particulier ces centres-là, mais je pense que ce ne serait pas rendre justice à ce qui se fait de grande qualité à l'égard des personnes âgées au Québec, M. le Président.

Le Président: M. le député de Limoilou, en question principale.


Délais pour l'admission des personnes âgées à la résidence Christ-Roy, à Québec


M. Michel Després

M. Després: Merci beaucoup, M. le Président. Dans la région de Québec, 400 personnes âgées sont en attente d'hébergement, Mme la ministre. Les délais vont jusqu'à un an et demi. Et, au centre d'hébergement du Christ-Roi, les budgets se font attendre depuis maintenant quatre ans, M. le Président. Le centre ne répond qu'à 60 % des besoins de la clientèle.

Et on citait dans Le Journal de Québec du 26 février, selon Michel Giroux du Regroupement des centres d'hébergement: «Que nos personnes âgées soient lavées une fois la semaine [...] cela fait moins de bruit que les encombrements dans les urgences, soulève M. Giroux. Il semble que la Régie retarde les projets d'immobilisations parce que le gouvernement n'a pas d'argent.» Ça, M. le Président, c'était avant le budget.

Ma question: Comme le gouvernement a finalement rendu publique sa cagnotte, M. le Président, parce que le gouvernement qui n'avait pas d'argent avant le budget et qui, maintenant, a de l'argent... La ministre s'engage-t-elle aujourd'hui à régler la situation du Christ-Roi?

Le Président: Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Peut-être, M. le Président, que, si nous n'avions pas eu à rattraper le retard que nous avait laissé l'opposition lorsqu'elle était au pouvoir, nous ne serions pas dans cet état aujourd'hui. C'est très facile, M. le Président, de se lever ici et de blâmer le gouvernement qui a dû réparer les pots cassés à tous égards.

Il y a des ressources actuellement disponibles qui seront réparties sur l'ensemble du territoire, en priorité là où les urgences sont les plus grandes, M. le Président, ça va de soi, bien sûr, qu'il s'agisse de ce centre ou d'autres centres.

Je veux corriger une chose qui est dite depuis le début, ici, et on fait des gorges chaudes à chaque fois qu'on utilise cette expression-là. Je ne sais pas si vous savez ce que c'est que de vivre avec une personne très âgée qui a des problèmes cognitifs. Quand on dit: Elles n'ont qu'un bain par semaine, cela ne veut pas dire... Et c'est là que vous jetez, à mon point de vue, un regard sur cette situation qui est inadéquat et vous blâmez ainsi des gens qui font correctement leur travail. Une personne peut avoir un bain par semaine, être très bien soignée, avoir des conditions d'hygiène très correctes parce qu'elle continuera d'être lavée, n'est-ce pas, tous les jours, par les préposés, par le personnel auxiliaire. Ça peut même être, dans certains cas, traumatisant pour certaines personnes âgées qui sont dans des situations de détérioration très sérieuse au plan physique et au plan cognitif, M. le Président.

Oui, les ressources seront réparties adéquatement. On tiendra compte des priorités, M. le Président, et Christ-Roi sera traité au même titre que d'autres établissements si ceux-ci sont considérés comme prioritaires.

Le Président: M. le député.


M. Michel Després

M. Després: M. le Président, la ministre vient de nous démontrer qu'elle ne connaît pas le dossier. Dans la région de Québec, en 1994, il y avait 4 987 lits; il y en a maintenant 4 483. Ça fait quatre ans qu'on attend, dans la région de Québec. On a coupé 500 lits sous leur régime; il y en a 400 en attente. Oui ou non, va-t-elle régler le projet de Christ-Roi?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: C'est vrai, M. le Président, qu'il y a eu du réaménagement du nombre de lits. Pourquoi l'avons-nous fait? Parce que certains établissements étaient dans un état inacceptable et qu'il fallait donc rehausser la qualité des espaces occupés par les personnes âgées. Et ça, là, on a géré essentiellement votre héritage.

Alors, maintenant, à partir de cette première correction que nous avons faite - et c'était l'opération 2 000 lits, M. le Président - nous réallouons progressivement des places, au fur et à mesure que les sommes deviennent disponibles. Et nous traiterons correctement Christ-Roi, comme tous les autres cas qui sont dans une telle situation, M. le Président.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Beauce-Sud.


Aide aux centres d'hébergement et de soins de longue durée de la région Chaudière-Appalaches


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: En principale, M. le Président. Alors, la situation qui prévaut dans les centres hospitaliers de soins de longue durée est qualifiée de très inquiétante par le Regroupement des CLSC, CHSLD de Chaudière-Appalaches.

En effet, 10 établissements - 10 centres d'hébergement sur 19 - ne peuvent répondre aux besoins fondamentaux de leur clientèle hébergée. Et, quand je parle de besoins fondamentaux, je parle de l'aide à se laver, à se nourrir, à se vêtir, etc.

Alors, M. le Président, est-ce que la ministre de la Santé et des Services sociaux est en mesure de nous dire aujourd'hui, après le dépôt du budget de la semaine dernière, quelle somme elle prévoit investir dans les CLSC, CHSLD de la région Chaudière-Appalaches?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: J'ai justement rencontré, M. le Président, il y a quelques semaines à peine, le président de même que le directeur régional de la Régie régionale de la santé et des services sociaux de Chaudière-Appalaches. Ceux-ci m'ont fait état des difficultés qui étaient rencontrées dans la région.

On sait que les régions périphériques aux grandes régions urbaines - je pense à Chaudière-Appalaches, je pense à Montérégie, Laurentides, Lanaudière, Laval - ont moins de ressources que leur population en exigerait parce qu'ils se sont développés dans un deuxième temps alors que les ressources étaient déjà installées partout ailleurs à travers le Québec. Je suis justement à travailler à cette opération, M. le Président, pour départager le budget de telle sorte qu'on tienne compte du fait qu'il y a un manque de ressources plus grand dans certaines régions et que c'est en priorité là qu'on accordera les ressources, autant au plan des soins aux personnes âgées que des soins aux jeunes ou que d'autres types d'interventions prioritaires, M. le Président.

Le Président: Mme la députée de Beauce-Sud.


Mme Diane Leblanc

Mme Leblanc: Alors, M. le Président, puisque la ministre a reconnu la situation préoccupante chez nous, qu'il fallait accorder une priorité à la région Chaudière-Appalaches, est-ce qu'elle est en mesure de répondre aujourd'hui, de garantir à l'association, au regroupement des CLSC, CHSLD de Chaudière-Appalaches qu'elle va injecter les 4,5 millions de dollars nécessaires pour être capable de donner une minimum de dignité à la population hébergée en Chaudière-Appalaches?

(14 h 30)

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Je vais répondre aux besoins des gens à travers le Québec, M. le Président, en étant équitable et en corrigeant là où les situations méritent de l'être davantage qu'ailleurs parce qu'il y a un plus grand retard. Ce sera fait, et, en ce sens, je peux l'assurer que les budgets seront partagés de façon équitable, en fonction des principes que j'ai déjà énoncés, M. le Président.

Le Président: M. le député Rivière-du-Loup, en question principale.


Incidence du discours sur le budget sur la fiscalité municipale


M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui, merci, M. le Président. Nos concitoyens s'attendent toujours à ce que leurs gouvernements, qu'ils soient le gouvernement du Québec ou les gouvernements municipaux, travaillent pour eux, pour offrir les meilleurs services possible au moindre coût, et que ces gens-là travaillent main dans la main. Qu'au fil des événements des accrochages puissent survenir, des conflits de personnalités, les gens sont capables de comprendre ça, mais, au Québec, depuis près d'une décennie, c'est sans relâche, entre le monde municipal et le gouvernement, des conflits, des tiraillements, des factures qui sont passées d'un à l'autre. Les relations sont tendues, la confiance est ébranlée, les élus municipaux sont tannés et essoufflés de cette situation-là. Encore dans l'analyse du dernier budget, plusieurs maires ont été extrêmement sévères pour ce qui est de l'aspect municipal. Un éditorialiste résumait bien les choses dans Le Droit , la semaine dernière, en disant: «Que lui répondront les villes qui devront taxer davantage leurs citoyens pour maintenir le même niveau de services? Des taxes foncières plus hautes rendront moins intéressants les gains réalisés aux dépens de Revenu Québec.»

Alors, ma question est relativement simple au premier ministre. Le premier ministre a entendu comme moi son ministre des Finances qui disait: «Il fallait conserver, l'an dernier aussi, leur contribution de 356 millions de dollars joliment baptisée "la facture".» Mais est-ce que le premier ministre est conscient que le dernier budget de son ministre des Finances est train d'être joliment baptisé «la fracture» par le monde municipal? Et qu'est-ce que le premier ministre va faire pour rétablir ces liens essentiels à la confiance de nos concitoyens?

Le Président: Mme la ministre d'État aux Affaires municipales et à la Métropole.


Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, M. le Président, dois-je rappeler au député de Rivière-du-Loup et aux membres de cette Assemblée nationale que nous avons, l'automne dernier, à l'occasion d'une trentaine de séances de négociations avec les deux grandes unions municipales, cherché justement à faire en sorte qu'il y ait un nouveau pacte fiscal qui intervienne dans les relations entre le gouvernement et les municipalités. Vous le savez, M. le Président, puisque nous en avons beaucoup parlé à cette assemblée, chacune des deux grandes unions avait sa façon de penser qui divergeait, pour ne pas dire qui se contredisait, et nous n'avons pu malheureusement obtenir les garanties formelles que nous recherchions du monde municipal, que, à la proposition mise sur la table d'un déplafonnement de la taxe scolaire, allait suivre conséquemment une diminution de la taxe municipale. Alors, dans les circonstances, M. le Président, je crois que le budget vient certainement mettre sur la table un ensemble de moyens à la disposition du monde municipal - je pense aux 175 millions en matière d'infrastructures, aux 150 millions en matière d'aide additionnelle - et je comprends que cela nous permettra de reprendre les discussions.

Le Président: M. le député de Rivière-du-Loup.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce que la ministre, qui nous parle de négociations avec les municipalités quand on sait que c'est avec un couteau sur la gorge, une facture au-dessus de la tête, peut nous expliquer comment son gouvernement, qui reproche continuellement au gouvernement fédéral une relation entre gouvernements qui est conflictuelle... Comment elle peut nous expliquer qu'elle et son gouvernement, depuis qu'ils ont été élus en 1994, n'ont jamais agi autrement avec leurs municipalités que de la façon dont eux se plaignent d'être traités par un gouvernement supérieur?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, dois-je rappeler que ces négociations se sont tenues sous l'égide d'une entente qui était intervenue en 1997 et qui prévoyait la mise en place d'un groupe de travail qui s'est appelé la commission Bédard et qui prévoyait un transfert de responsabilités aux municipalités en contrepartie, n'est-ce pas, de l'annulation de la contribution, alors, de 356 millions? Alors, on comprend que cette entente à l'article 5.3, d'ailleurs, pour être plus précise encore, prévoyait donc qu'il devait y avoir transfert de responsabilités.

Et dois-je rappeler au député de Rivière-du-Loup qu'il y a au Québec présentement 85 % des municipalités qui comptent moins de 5 000 habitants? Nous avons actuellement le même nombre de municipalités qu'il y a 50 ans, comme si la Révolution tranquille était en quelque part passée à côté de l'organisation municipale. Il est difficile, effectivement, de transférer des responsabilités lorsque les municipalités qui les reçoivent n'ont pas les structures adéquates pour les accueillir.

Le Président: M. le député.


M. Mario Dumont

M. Dumont: Est-ce que la ministre des Affaires municipales sait que son collègue des Finances, qui était à Sherbrooke vendredi dernier, disait, expliquait: J'avais besoin de cet argent pour équilibrer le budget de la prochaine année, autrement je n'aurais pas pu baisser autant les impôts? En d'autres termes, est-ce qu'elle est consciente que son ministre des Finances se vante lui-même que c'est en augmentant les taxes des municipalités qu'il va permettre de financer ses baisses d'impôts pour l'ensemble des contribuables?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Louise Harel

Mme Harel: D'abord, soyons clairs, M. le Président, tous les députés dans cette Chambre, nous avons contribué pour l'équivalent de 6 % de réduction de notre salaire à l'atteinte du déficit zéro. Est-ce que maintenant nous allons réclamer d'être remboursés ou si nous allons dorénavant dire au gouvernement de compenser? Alors, voilà, nous y avons contribué pour 1 million de dollars depuis que cette mesure est en vigueur. Le rapport est très simple, le rapport est le suivant: si chacun de nous, dans cette société, qui a contribué à l'atteinte du déficit zéro demande maintenant d'être compensé, bien, on va revenir aux 6 milliards de déficit d'avant.

Le Président: En question principale, Mme la députée de La Pinière, maintenant.


Décès de deux personnes dans une maison d'hébergement en santé mentale de Longueuil


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, en novembre 1999, la maison de chambres Chez Lise, une résidence pour personnes âgées et malades mentaux, avait défrayé les manchettes: Une maison de chambres de Longueuil sur la sellette . Le Collectif de défense des droits de la Montérégie avait alors dénoncé l'inaction de ce gouvernement, suite à la désinstitutionnalisation, qui a littéralement abandonné les résidents de cette maison de chambres à eux-mêmes. Paul Morin, coordonnateur du Collectif, avait clairement sonné l'alarme en déclarant, dans La Presse du 30 novembre dernier, que la maison Chez Lise, et je cite, «est un lieu abusif et non intégrateur où plus de 70 personnes avec des problèmes très sévères de santé mentale vivent littéralement en circuit fermé». La situation ne s'est guère améliorée depuis quatre mois; au contraire, on apprend aujourd'hui même que deux personnes respectivement âgées de 51 et de 69 ans y sont décédées en l'espace des deux dernières semaines dans des conditions pour le moins nébuleuses.

M. le Président, qu'attend la ministre de la Santé pour instituer une enquête sur les conditions d'hébergement dans la maison de chambres Chez Lise? Et qu'attend-elle pour combler le déficit de 65 millions de dollars dont souffre la Montérégie au seul chapitre du financement en santé mentale?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.

Mme Marois: Je suis...

Des voix: ...

Le Président: Bien. Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je reconnais que les problèmes reliés à la santé mentale nous interpellent d'une façon toute particulière et que nous devons mieux soutenir et mieux aider les personnes qui sont aux prises avec de telles difficultés. Dans le cas qui nous concerne, la maison Chez Lise en particulier, effectivement, a fait l'objet à quelques reprises de commentaires, de remarques de la part du Curateur public aussi à cet égard, et on sait qu'elle est utilisée comme une forme de ressource alternative, si on veut, compte tenu du fait que nous manquons de ressources au niveau de la santé mentale, particulièrement en Montérégie. D'ailleurs, le nouveau budget devrait nous permettre de corriger une partie de ces problèmes.

(14 h 40)

Cependant, dans le cas particulier qui nous occupe, on sait qu'à l'automne dernier la Régie avait mandaté une personne afin d'évaluer, avec les gens de la maison Chez Lise, quelles étaient les solutions qu'on pouvait apporter, au moins temporairement, pour soutenir et aider les personnes qui se trouvent dans cette maison d'hébergement, et, dans les faits, il y a eu une rencontre le 17 mars dernier - donc, il y a quelques jours à peine - entre des représentants de la Régie et les gens de la maison Chez Lise, la propriétaire de la maison Chez Lise, et nous avons entendu... En fait, il a été entendu, dans cette rencontre, que des services seraient rendus disponibles pour les personnes qui en ont besoin - elles n'en ont pas toutes besoin, actuellement, mais, pour les personnes qui en ont besoin - soit, entre autres, que des soins soient prodigués aux personnes concernées, que des infirmières du CLSC de Longueuil-Ouest procèdent d'abord à une évaluation, bien sûr, des bénéficiaires, leur offrent les services requis par leur état. Il a aussi été prévu d'accompagner des bénéficiaires, entre autres, à leur rendez-vous médical. On sait qu'une des difficultés que vivent les personnes qui ont des problèmes de santé mentale, c'est le fait qu'elles ne suivent pas, généralement, leur médication, pour toutes espèces de situations qui ne sont pas dues à leur volonté ou...

Le Président: Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, est-ce que la ministre comprend qu'il s'agit de vie ou de mort? On parle ici de deux personnes qui viennent de décéder en l'espace de deux semaines. Où est la compassion de la ministre de la Santé pour une maison qui se trouve en marge de son comté, à Longueuil? Elle ne peut pas ignorer, ne pas savoir ce qui se passe. Elle me parle de mesures temporaires. Combien de personnes faut-il qu'il meure pour qu'elle réalise que la situation est urgente et qu'il faut agir?

Des voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: La députée de La Pinière devrait mesurer un peu la portée des propos qu'elle tient aujourd'hui, M. le Président. Je pense que c'est complètement inadmissible que de tels propos soient tenus ici. Il y a des gens qui sont en situation difficile, où elle se base sur un article de journal. Je parle aux gens et il y a des échanges avec les personnes responsables.

Ce que je viens de dire à la députée de La Pinière, ce n'est pas que je ne connaissais pas le dossier et que je ne savais pas de quoi il s'agissait; ce que je viens de dire à la députée de La Pinière, c'est qu'il y a des services concrets qui vont être rendus auprès des personnes qui en ont besoin et qui sont actuellement hébergées à la maison Chez Lise, M. le Président. On va le faire de la façon la plus consciencieuse possible, je n'ai aucun doute, connaissant le personnel qui oeuvre dans le CLSC de Longueuil-Ouest en particulier.

Je mentionnais tout à l'heure l'évaluation des personnes qui sont là, l'aide à la prise de médicaments, l'accompagnement pour voir son médecin et pour assurer le suivi. Ce sont des recommandations qui nous sont faites par tous les comités qui sont préoccupés des questions de santé mentale, M. le Président, et nous suivons leurs recommandations.

Le Président: Mme la députée.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: M. le Président, est-ce que la ministre peut arrêter de parler dans le vide et répondre à deux questions précises? Premièrement, est-ce qu'elle va instituer une enquête dans la maison de chambres Chez Lise pour les deux personnes qui sont décédées en l'espace de deux semaines? Deuxièmement, puisqu'elle parle aux gens sur le terrain, est-ce qu'elle sait que les gens sur le terrain lui disent, comme ils me disent, qu'ils ont besoin de 65 millions de dollars pour combler le déficit en matière de services de santé, particulièrement en santé mentale? Est-ce qu'elle peut répondre à ces deux questions?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: M. le Président, s'il y avait matière à intervention, c'est d'abord un coroner qui devrait faire une enquête, cela va de soi. Et, en tout état de cause, c'est toujours respecté, on se comprend bien, si cela est justifié, et je ne pense pas que c'est à moi, à ce moment-ci, de justifier ou pas cette intervention. Elle est demandée, et le coroner évalue s'il fait enquête ou pas.

Dans un deuxième temps, j'ai répondu à la députée quant aux interventions précises auxquelles nous allons procéder - en fait, auxquelles le CLSC de même que les autres intervenants de la région vont procéder. L'hôpital Pierre-Boucher et l'hôpital Charles-Lemoyne seront aussi mis à profit dans cette intervention, M. le Président.

À ce moment-ci, nous croyons qu'il est préférable d'essayer d'aider les personnes qui sont là plutôt que d'essayer de blâmer et de trouver des coupables. Ça m'apparaît une attitude plus correcte et plus saine, M. le Président. Ça fait des années qu'on travaille, dans le cas de la maison chez Lise, justement pour nous assurer d'interventions adéquates à cet égard. Et, quant aux ressources, dès qu'elles auront été ventilées, nous les rendrons disponibles.

Le Président: En question principale, maintenant, Mme la députée de Mégantic-Compton.


Budget alloué aux soins spécialisés pour personnes âgées


Mme Madeleine Bélanger

Mme Bélanger: M. le Président, j'ai écouté les questions de mes collègues sur les besoins essentiels de nos aînés à peu près dans toutes les régions du Québec, j'ai aussi écouté les réponses de la ministre depuis quelques minutes, et force est de constater...

Des voix: ...

Le Président: Alors, peut-on laisser à la députée de Mégantic-Compton le soin de poser sereinement sa question? Mme la députée.

Mme Bélanger: Dans le respect et la dignité des personnes âgées.

Une voix: Bravo!

Mme Bélanger: Et je suis forcée de constater que la ministre vit sûrement sur une autre planète, sinon elle reconnaîtrait que les personnes âgées sont des êtres humains ayant droit au plus grand respect et à une dignité qui est fondamentale pour une société comme la nôtre. La seule manière de reconnaître les personnes âgées qui ont bâti notre société, comme vient de le reconnaître le premier ministre tout à l'heure, ce serait d'injecter les sommes d'argent nécessaires pour leur donner les besoins auxquels ils ont droit.

M. le Président, est-ce que la ministre de la Santé réalise que le budget déposé par le ministre des Finances la semaine dernière est complètement insuffisant en regard des personnes âgées? Et quand va-t-elle agir, au lieu de faire semblant que tout va bien, et mettre les priorités là où elles doivent être et enfin admettre que les personnes en perte d'autonomie sont laissées à elles-mêmes et qu'elles souffrent dans leur dignité?

Le Président: Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Alors, merci, M. le Président. Je pense que la députée de Mégantic-Compton, pour laquelle j'ai le plus grand respect, devrait porter attention et, j'imagine, aurait dû normalement entendre les propos que j'ai tenus jusqu'à maintenant, compte tenu qu'elle est probablement la cinquième à se lever en cette Assemblée pour poser exactement la même question. Alors, je vais donc évidemment lui répondre les mêmes choses, hein, et elle ne s'en étonnera pas, n'est-ce pas?

D'abord, oui, j'ai du respect pour les personnes âgées, oui, je sais ce qu'elles ont fait pour nous et ce qu'elles nous laissent en héritage, et, oui, je connais leurs besoins, et, oui, je sais que ce n'est pas facile dans certains établissements de soins de longue durée. Mais, à force de critiquer et de tirer à boulets rouges sur tout ce qui bouge, on est en train d'essayer de démolir actuellement ce qui se fait de mieux, ce qui se fait de bien à l'égard des personnes âgées. Celles-ci, de façon générale, ont accès à des services de qualité dans une atmosphère correcte qui respecte leur intégrité et qui respecte ce qu'elles sont, M. le Président, et c'est en ce sens-là que je n'admets pas que, sans arrêt, on tente de décrier, en donnant un exemple ici et là, des situations, oui, difficiles qui existent mais qui ne sont pas une généralité.

Cependant, comme j'admets avec elle, avec ses collègues, avec mes collègues, oui, qu'il y en a, des problèmes, oui, qu'il faut réinvestir, je n'ai pas attendu ce budget-ci, d'ailleurs, M. le Président, puisque nous avons déjà, dans le budget précédent, réinvesti auprès des personnes âgées d'abord par l'aide à domicile, en même temps que nous avons réinvesti pour améliorer leurs conditions générales de vie, compte tenu que les locaux dans lesquels parfois ces personnes se trouvaient étaient inadéquats.

(14 h 50)

Cette année - et j'en avais fait une priorité - 30 % du budget de développement ira aux personnes âgées strictement, plus d'autres aspects du budget, bien sûr, mais 30 %, dont une partie servira à améliorer les services offerts aux personnes âgées en centre d'hébergement et de soins de longue durée.

Le Président: En question principale, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


Incidence de la modification de l'allocation familiale dans le dernier budget fédéral sur les prestations familiales provinciales


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, le récent budget fédéral prévoit une nouvelle bonification de la Prestation nationale pour enfants, communément appelée les «allocations familiales». Pour les familles québécoises, cela signifiera environ 600 millions de dollars en quatre ans.

Est-ce que la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance peut confirmer aux parents du Québec que son gouvernement va maintenir sa tradition de faire main basse sur l'augmentation accordée par le gouvernement du Canada, destinée à quelque 200 000 familles québécoises à moyens et bas revenus?

Le Président: Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Oui, M. le Président. L'intention du gouvernement est de faire en sorte que les familles à revenus plus modestes soient aidées et soutenues, évidemment. Alors, on va maintenir cette orientation en préservant les enfants, les familles et leurs besoins. Nous évaluons présentement l'ensemble des nouvelles mesures que le fédéral a annoncées dernièrement. Il n'y a pas de décision prise à cet effet, mais notre intention est de maintenir cette orientation pour les familles.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, s'il n'y a pas de décision prise à ce moment, comment est-ce que la ministre déléguée peut réconcilier ses propos avec le projet de loi n° 101, la Loi n° 1 sur les crédits de 2000-2001, qui prévoit, lui, une baisse d'à peu près 150 millions de dollars dans le volet des allocations familiales au Québec? Il y a quelque chose qui accroche. Soit le projet de loi n'est pas exact ou la ministre vient d'induire la Chambre en erreur.

Une voix: Bravo!

Le Président: Mme la ministre.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: D'abord, M. le Président, ce sont des mesures, que le député annonce, de l'année dernière. Il est important de préciser que, l'allocation familiale, anciennement on y versait le même montant à toutes les familles du Québec, c'est-à-dire 131 $ par année à toutes les familles. Avec la nouvelle politique familiale du gouvernement du Québec, l'allocation familiale a été modifiée en fonction du revenu familial. Alors, cela avantage maintenant davantage les familles à faibles revenus, qui se retrouvent actuellement avec une allocation familiale de 1 000 $, 1 500 $, 2 000 $, 2 500 $ par année. Alors, l'intention du gouvernement, je reprécise, comme je le disais précédemment, c'est d'évaluer l'impact des nouvelles mesures que le fédéral a annoncées, et nous prendrons les orientations précises à ce moment-là.

Le Président: M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.


M. Russell Copeman

M. Copeman: M. le Président, manifestement, la ministre s'est trompée de carton. Il s'agit du projet de loi n° 101, Loi sur les crédits 2000-2001, l'année financière qui s'en vient. Il y a une baisse, dans l'enveloppe des allocations familiales, prévue de 150 millions de dollars. Qu'est-ce qui se passe au ministère de la Famille et de l'Enfance pour expliquer cette baisse-là?

Le Président: Mme la ministre.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: M. le Président, j'aimerais quand même dire qu'encore une fois le gouvernement fédéral vient brouiller les cartes, hein? Le Québec avait mis de l'avant un programme novateur, qui est la politique familiale...

Des voix: ...

Le Président: J'ai remarqué que le député de Kamouraska-Témiscouata avait une question additionnelle ou une question principale de plus à poser. Si on veut lui permettre de le faire, il faudrait que la Chambre retrouve un certain calme pour permettre d'abord à la ministre de répondre à la question posée par le député de Notre-Dame-de-Grâce. Mme la ministre.

Mme Léger: M. le Président, ce que le député nous apporte, ce sont les réajustements de l'an dernier. Alors, même s'il ne veut pas l'entendre, c'est les réajustements de l'an dernier. Nous sommes en train d'évaluer... Parce que, le budget fédéral, on l'a entendu voilà trois semaines, ce budget-là. Alors, nous sommes en train de réévaluer l'impact que ça fait pour les familles québécoises, et des décisions seront prises en temps et lieu.

Le Président: Alors, en question principale, M. le député de Kamouraska-Témiscouata.


Mise en place de la réforme de l'éducation


M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui, M. le Président. Beaucoup de gens sont inquiets en ce qui a trait à la mise en place de la nouvelle réforme de l'éducation. En effet, il semble qu'on est incapable de dire aujourd'hui combien il y a d'enseignants qui ont été formés, et il semble qu'à six mois de la mise en place de la réforme il n'y a rien ou à peu près rien qui a été amorcé. Dans la revue de la Fédération des commissions scolaires, la revue Savoir , il est indiqué que tout laisse entendre qu'il faudra prévoir que tout le matériel de base actuel devra être remplacé. À l'autre paragraphe, on indique: «Mais personne n'est encore en mesure de dire que le nouveau matériel sera disponible en septembre 2000. Donc, on jette le vieux matériel, mais on n'en a pas d'autre à offrir.»

M. le Président, est-ce que le ministre de l'Éducation peut nous dire pourquoi sa réforme cafouille, que, après l'avoir retardé d'un an, il est toujours incapable de remettre cette réforme-là sur les rails et que, s'il poursuit dans la même veine, il y a des grandes chances que cette réforme-là de l'éducation, si importante pour le Québec, finisse de la même façon que celle d'Emploi-Québec, c'est-à-dire dans le cafouillage et dans l'incompétence?

Le Président: M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. D'abord, je suis content qu'on parle un petit peu d'éducation, c'est parfait. La réforme de l'éducation, c'est effectivement une réforme qui est majeure, et tous nos programmes d'études seront donc modifiés, les stratégies et les approches pédagogiques aussi seront modifiées. On a commencé à faire de la formation depuis un an dans nos écoles. Il y a eu des écoles cibles, je suis allé en visiter. Les enseignants sont très enthousiastes. Encore hier, j'étais avec des enseignants dans une école à Sainte-Julienne. Les enseignants me disent qu'ils sont prêts à mettre en place la réforme.

C'est certain qu'à certains endroits - on sait ce qui est arrivé l'automne dernier - avec certains moyens de pression, il y a des formations qui n'ont pas été données, mais la réforme sera mise en place dès septembre. J'ai confiance que le personnel scolaire va appuyer cette réforme qui est très importante, M. le Président, et j'aimerais que l'opposition aussi appuie cette réforme qui est importante pour augmenter les taux de réussite, s'assurer qu'on ait plus de jeunes qui soient qualifiés, s'assurer qu'on ait, au Québec, des bons résultats dans chacune de nos écoles, et c'est ce qu'on va avoir avec la réforme de l'éducation.


Dépôt d'une lettre du premier ministre demandant que l'Assemblée se réunisse d'urgence

Le Président: Alors, je m'excuse, M. le député de Kamouraska-Témiscouata, la période de questions et de réponses orales est terminée et je voudrais - à l'ordre, s'il vous plaît! - profiter de la présence de la plupart des membres de l'Assemblée pour vous communiquer la lettre que j'ai reçue, durant la période de questions et de réponses, de la part du premier ministre. Alors: «M. le Président, conformément au règlement de l'Assemblée nationale, je vous prie de prendre les dispositions pour que l'Assemblée se réunisse d'urgence en séance extraordinaire à compter de 20 h 30, aujourd'hui, le mardi 21 mars 2000, selon le calendrier et l'horaire qui seront déterminés par l'Assemblée, afin de procéder, conformément à l'article 246.44 de la Loi sur les tribunaux judiciaires, à la présentation, au débat et à l'adoption d'une motion portant sur le rapport du Comité de la rémunération des juges de la Cour du Québec et des cours municipales, rapport de la formation ayant trait aux juges de la Cour du Québec et des cours municipales de Laval, de Montréal et de Québec, déposé à l'Assemblée nationale le 28 octobre 1999, afin d'en approuver certaines recommandations et d'en modifier d'autres.

«Je vous prie d'agréer, M. le Président, l'assurance de ma considération respectueuse.»

Et c'est signé de la part du premier ministre.

M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui. Strictement sur la procédure, M. le Président, est-ce qu'on doit comprendre que cette convocation extraordinaire de l'Assemblée nationale par le premier ministre découle du fait que le ministre des Finances a choisi de présenter son budget la première journée de la session de façon à faire oublier à la population le 841 millions, le magot à la Toronto-Dominion?

(15 heures)

Le Président: Alors, en réplique, M. le leader du gouvernement.

M. Brassard: M. le Président, non, ça découle du fait que je n'ai pas réussi à obtenir le consentement de l'opposition pour qu'on puisse suspendre le débat sur le discours du budget et adopter cette motion cet après-midi. L'opposition a refusé son consentement, donc la seule possibilité, c'est une séance extraordinaire.

Des voix: ...

Le Président: Peut-on, à ce moment-ci, laisser aux leaders des deux groupes parlementaires reconnus la possibilité d'intervenir? M. le leader de l'opposition officielle.

M. Paradis: Oui, M. le Président. Je veux bien, là, qu'on accorde beaucoup d'importance à l'opposition en cette Assemblée nationale. Maintenant, ça fait six mois, là, que le rapport est connu, qu'il aurait pu être déposé. Sept mois, qu'on m'indique. À ce moment-là, le leader comptait le déposer en début de session, il s'est fait prendre de court par son ministre des Finances qui, lui, a tenté de camoufler son 841 millions par un dépôt de budget, M. le Président.

Le Président: Je regrette, M. le vice-premier ministre, ce n'est pas la période de questions et de réponses orales. À ce moment-ci, je permettrais plutôt au leader du gouvernement de répliquer à son vis-à-vis, et cela mettra fin à ces réactions sur la lettre qui a été envoyée de façon réglementaire par le premier ministre.

M. Brassard: M. le Président, alors je vais dire ce que le ministre des Finances aurait voulu dire, c'est qu'à partir de maintenant on sait que ce qui se cachait à Toronto, ce n'est pas de l'argent...

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Brassard: ...ce ne sont pas des ressources.

Le Président: Alors, je vous indique qu'en conséquence... À l'ordre, s'il vous plaît! Donc, pour faire suite à la lettre de M. le premier ministre, l'Assemblée est donc convoquée en séance extraordinaire aujourd'hui, à 20 h 30, et le nécessaire sera fait pour, à ce moment-là, procéder selon les dispositions de notre règlement.


Motions sans préavis

Nous allons maintenant aller aux motions sans préavis. Je vous ai indiqué d'entrée de jeu, cet après-midi, que c'était la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale et que le ministre des Relations avec les citoyens et de l'Immigration avait une motion pour nous présenter, entre autres, quelques-uns de nos concitoyens et concitoyennes qui se sont honorés. Alors, je laisse la parole au ministre.


Souligner la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale

M. Perreault: Merci, M. le Président. Alors, je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale du Québec souligne la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale.»

Le Président: Alors, il y a consentement, semble-t-il, pour débattre de la motion. Une intervention de chaque côté?

Une voix: ...

Le Président: Alors, M. le ministre d'abord.


M. Robert Perreault

M. Perreault: Oui, merci, M. le Président. Alors, cette Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale, journée proclamée par l'ONU, constitue pour les Québécoises et Québécois une occasion de réaffirmer leur attachement à des valeurs fondamentales parmi lesquelles arrivent au tout premier rang l'égalité des personnes, l'ouverture aux autres et le respect des différences.

Au cours de son histoire, le Québec s'est doté, on le sait, d'institutions et de lois qui témoignent de notre détermination collective à proscrire les manifestations de racisme et d'intolérance. La Charte des droits et libertés de la personne du Québec, adoptée par l'Assemblée nationale il y a 25 ans cette année d'ailleurs, constitue justement le symbole de ces valeurs.

Alors, il me fait plaisir, M. le Président, en ce premier 21 mars de ce millénaire, d'accueillir à l'Assemblée nationale des Québécoises et Québécois qui, parfois avec courage, toujours avec détermination, ont été les premiers à exercer dans leurs domaines professionnels respectifs. Ils constituent des modèles pour la population en général et sûrement pour tous les jeunes du Québec, et notamment les jeunes des minorités visibles en particulier.

Alors, au nom du gouvernement, M. le Président, je réaffirme aujourd'hui notre volonté de promouvoir l'égalité des citoyens et des citoyennes en réduisant les obstacles qui ont pour effet de limiter leur participation à l'exercice de leur pleine citoyenneté, parce que - et faut-il malheureusement le rappeler - notre société, sans toutefois être la pire sur cette terre, n'est pas pour autant, toutefois, malheureusement exempte de situations de discrimination systémique, d'exclusion dans l'accès de certains groupes, notamment, au marché du travail.

J'avais ainsi l'occasion, ce matin, à Montréal, de rencontrer une centaine de collaborateurs du ministère avec lesquels je travaille dans divers organismes qui s'intéressent à ces questions, et deux chiffres nous sont rappelés avec insistance. Deux chiffres, à mon avis, suffisent à illustrer l'ampleur du défi qui est le nôtre. Le premier de ces chiffres, c'est qu'encore aujourd'hui moins de 3 % des employés de la fonction publique québécoise sont issus des groupes concernés. Et le deuxième de ces chiffres, M. le Président, c'est que près de 30 % des jeunes Noirs du Québec sont victimes du chômage, soit deux fois plus que les autres jeunes du Québec.

Nous avons, il est vrai, récemment donné un coup de barre pour que la fonction publique québécoise devienne plus représentative de la diversité du Québec moderne. On peut rendre compte de certains résultats obtenus par le gouvernement. À pareille date, l'an dernier, vous vous rappelez, nous nous étions engagés à ce que plus de 25 % des emplois d'été soient réservés dans la fonction publique à des jeunes issus des diverses minorités qui composent notre société. L'objectif a été atteint. Nous entendons reconduire cette expérience cette année. J'ai déjà eu l'occasion de dire que, lorsqu'une société fait un tel pas, elle ne peut plus, M. le Président, reculer, retourner en arrière.

Et, depuis l'automne dernier, cette Assemblée a également adopté une loi et s'est fixé comme objectif de faire en sorte que 25 % de l'ensemble des nouveaux postes qui seront créés dans la fonction publique québécoise soient réservés également à des personnes issues de ces diverses communautés. M. le Président, cette loi est maintenant en vigueur, nous aurons bientôt l'occasion d'en voir les effets.

Enfin et en dernier lieu, lors du Sommet sur le Québec et la jeunesse, un fonds de 240 millions de dollars a été avancé, annoncé, pour faire en sorte d'offrir aux jeunes du Québec, à tous les jeunes du Québec, des opportunités de stage, notamment en emploi. Et il a été clairement affirmé, d'ailleurs le ministre des Finances lui-même l'a redit dans le discours du budget, qu'une part significative de ces fonds serait justement réservée aux jeunes issus des minorités, M. le Président, notamment des minorités visibles.

Alors, permettez-moi d'assurer cette Assemblée et ces jeunes que le gouvernement est déterminé à poursuivre son action afin de changer la situation que j'ai décrite précédemment. Et je comprends l'impatience de ces jeunes; je partage également, M. le Président, leur sentiment d'urgence.

Je voudrais dire, en terminant, à nos invités la fierté qu'ils et qu'elles inspirent, et qu'ils nous inspirent, et les raisons qu'ils nous donnent de nous dépasser et en quelque sorte d'être toujours meilleurs, M. le Président. Nous aimons tous, je pense, en cette enceinte, le Québec. Nous souhaitons tous que notre patrie soit, sur cette planète, une terre fraternelle, une terre exemplaire. M. le Président, c'est ce à quoi je nous convoque tous à travailler. Je vous remercie.

Le Président: Alors, sur la même motion, Mme la députée de Saint-Henri-Sainte-Anne maintenant.


Mme Nicole Loiselle

Mme Loiselle: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, en mon nom personnel et au nom de l'opposition officielle, d'appuyer la motion afin de souligner la Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale.

Il y a 40 ans aujourd'hui, 69 étudiants sud-africains furent tués à Sharpeville alors qu'ils manifestaient pacifiquement contre l'apartheid. En mémoire de ce triste événement, l'Organisation des Nations unies proclamait, en 1966, le 21 mars Journée internationale pour l'élimination de la discrimination raciale. Au Québec, au Canada et ailleurs à travers le monde, des gens s'unissent aujourd'hui pour manifester, manifester leur engagement à éliminer le racisme sous toutes ses formes.

M. le Président, nous sommes souvent tentés de croire que le racisme n'existe pas chez nous, au Québec. Bien que nous pouvons certes nous réjouir du fait que le Québec soit une terre d'accueil où ouverture et liberté individuelle s'inscrivent parmi les valeurs fondamentales, il nous faut toutefois avoir l'honnêteté d'admettre que la discrimination raciale fait encore, malheureusement, partie du paysage québécois.

Dans une société comme la nôtre, le racisme prend souvent un visage plus sournois, mais il est aussi dommageable pour ceux et celles qui y font face. Quand on pense, M. le Président, par exemple, que le Conseil des relations interculturelles a constaté que, dans la politique jeunesse du gouvernement du Québec, intitulée Jeunesse Québec - Plan d'action gouvernemental 1998-2001 , il n'y a qu'une mesure visant spécifiquement les jeunes des minorités visibles; quand on pense, M. le Président, que les minorités visibles, dans la région du Grand Montréal, ont un taux de chômage plus élevé que celui de l'ensemble de la population; quand on pense, M. le Président, que des propriétaires d'immeubles refusent toujours de louer un logement à des immigrants, qu'à peine 2 % des employés de la fonction publique québécoise sont issus des minorité visibles, on constate donc que le racisme prend des formes différentes que dans d'autres pays, mais qui sont tout aussi condamnables et contre lesquelles nous devons maintenir une opposition de tous les instants.

(15 h 10)

À cet effet, M. le Président, le Québec peut être fier de souscrire à la Convention internationale sur l'élimination de la discrimination raciale de l'ONU. Le Québec marqua, par ailleurs, un grand pas lorsqu'il adopta, en 1975, la Charte québécoise des droits et libertés qui prévaut sur toute autre loi ou règlement au Québec et qui précise entre autres, et je cite: «Toute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur [...] la religion [...] la langue, l'origine ethnique ou nationale...»

M. le Président, il nous faut donc demeurer fiers du chemin accompli, mais il est essentiel de consacrer nos énergies à faire de l'élimination de la discrimination raciale une priorité. À cet égard, je profite de l'occasion pour féliciter les organisateurs de la première édition de la Semaine d'action contre le racisme qui se déroule du 20 au 26 mars. Je tiens aussi à féliciter toutes les Québécoises et tous les Québécois qui chaque jour, par leurs gestes individuels, font en sorte que le racisme fait place au pluralisme et à l'égalité. Merci, M. le Président.

Des voix: Bravo!


Mise aux voix

Le Président: Alors, je comprends que la motion de M. le ministre est adoptée à l'unanimité. Très bien.


Avis touchant les travaux des commissions

Alors, s'il n'y a pas d'autres motions sans préavis, nous allons aller aux avis touchant les travaux des commissions. M. le leader adjoint du gouvernement.

M. Boulerice: Oui, M. le Président. J'avise cette Assemblée que la commission des institutions poursuivra les consultations générales sur le projet de loi n° 99, Loi sur l'exercice des droits fondamentaux et des prérogatives du peuple québécois et de l'État du Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 18 heures, ainsi que demain, le mercredi 22 mars 2000, de 9 h 30 à 11 heures, à la salle du Conseil législatif.

J'avise également que la commission des affaires sociales poursuivra les consultations générales portant sur le rapport d'évaluation du régime général d'assurance médicaments aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 17 h 45, à la salle Louis-Hippolyte-LaFontaine.

En terminant, M. le Président, je vous informe que la commission des transports et de l'environnement poursuivra les consultations générales portant sur le livre vert intitulé La sécurité routière au Québec: un défi collectif aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 17 heures, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le leader adjoint du gouvernement.

Pour ma part, je vous avise que la commission de la culture se réunira en séance de travail demain, le mercredi 22 mars 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 3.31 de l'hôtel du Parlement. L'objet de cette séance est de préparer le rapport final de la commission dans le cadre du mandat de surveillance d'organismes portant sur le Conseil des arts et des lettres du Québec et la Société de développement des entreprises culturelles du Québec.

Je vous avise également que la commission de l'administration publique se réunira en séance de travail demain, le mercredi 22 mars 2000, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle 1.38 de l'édifice Pamphile-Le May. L'objet de cette séance de travail est de préparer l'audition du sous-ministre de la Santé et des Services sociaux lors de la séance du 29 mars prochain.


Renseignements sur les travaux de l'Assemblée

La rubrique renseignements sur les travaux de l'Assemblée. Alors, je vous informe que demain matin, lors de la période habituellement consacrée aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, sera débattue la motion inscrite par Mme la députée de Bonaventure. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement péquiste qu'il cesse de profiter des consommateurs du Québec en maintenant les taxes sur l'essence les plus élevées au Canada et en Amérique du Nord.»

(Consultation)

Le Vice-Président (M. Pinard): Vous savez que le débat sur le budget est prioritaire. Sous réserve qu'il n'y a plus d'intervenants et que le débat du discours du ministre des Finances soit suspendu à l'Assemblée, alors, à ce moment-là, la motion pourrait être débattue si le budget est réglé. Ceci termine les affaires courantes.

Avant de procéder aux affaires du jour, je vous avise immédiatement que, ce soir, il y aura trois débats de fin de séance. Le premier débat aura lieu entre Mme la députée de La Pinière et Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant une enquête sur les conditions d'hébergement de la maison Chez Lise.

Le second débat aura lieu entre le député de Notre-Dame-de-Grâce et Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance concernant la volonté du gouvernement du Québec de faire main basse sur les augmentations aux allocations familiales accordées par le gouvernement fédéral, et le troisième débat de fin de séance aura lieu entre le député de Kamouraska-Témiscouata et M. le ministre de l'Éducation concernant la réforme de l'éducation au Québec.


Affaires du jour


Affaires prioritaires


Reprise du débat sur la motion du ministre des Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure

Alors, nous passons maintenant aux affaires du jour, aux affaires prioritaires, bien entendu. À l'article 1 du feuilleton, l'Assemblée poursuit le débat sur la motion de M. le vice-premier ministre et ministre d'État à l'Économie et aux Finances proposant que l'Assemblée approuve la politique budgétaire du gouvernement et sur les motions de censure présentées par Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, M. le député d'Outremont, M. le député de Verdun, Mme la députée de La Pinière, ainsi que M. le député de Rivière-du-Loup.

Je vous informe qu'il y a actuellement 7 h 45 min d'écoulées à la première étape du débat. Il reste donc un total de 5 h 45 min, qui doit être réparti comme suit: 3 h 15 min au groupe parlementaire formant le gouvernement et 2 h 30 min au groupe parlementaire formant l'opposition officielle.

Le dernier intervenant était Mme la députée de Beauce-Sud et Mme la députée avait terminé son intervention. Je cède maintenant la parole à Mme la députée de Rosemont. Mme la députée.


Mme Rita Dionne-Marsolais

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président, et je suis très heureuse, cet après-midi, d'apporter mon appui au budget déposé par notre collègue le ministre des Finances pour l'année 2000-2001.

Je vais le citer quand il a dit qu'il n'était pas satisfait du budget, mais qu'il était content du budget, et je pense que c'est un peu la position de tous les Québécois. C'est un budget de transition qui, je crois, fait honte à nos collègues d'en face. C'est un bon budget.

D'abord, bien sûr, vous me permettrez de dire: C'est un bon budget pour les Rosemontois et les Rosemontoises, puisqu'il y a dans ce budget deux mesures importantes pour eux, qui les concernent personnellement. Et c'est un bon budget pour les Montréalais parce qu'il y a un ensemble de mesures qui vont assurer non seulement l'harmonie à l'intérieur de la métropole, mais aussi des moyens concrets de poursuivre son développement économique, dont on voit tous les jours d'ailleurs les résultats. Et c'est un bon budget pour les Québécois et les Québécoises de tout le Québec, M. le Président. Pourquoi? Parce qu'il nous donne un peu d'espace pour respirer, pour consommer un peu plus et, finalement, pour prendre soin des nôtres aussi qui sont plus faibles.

(15 h 20)

J'aimerais peut-être faire un petit rappel historique par rapport à pourquoi je pense - et nous le pensons tous de ce côté-ci de la Chambre - que c'est un bon budget. Rappelons-nous l'élection de notre parti au gouvernement, en 1994, où nous avions constaté le terrible désordre dans lequel se trouvait le Québec autant sur le plan humain que sur le plan financier. Et nous nous étions engagés à ce moment-là à une réforme pour remettre le Québec face à une vision moderne, bien intégrée au sein des Amériques, autant sur le plan culturel que sur le plan financier, et en harmonie aussi avec ses voisins.

En 1996, nous avons pris l'engagement de reprendre le contrôle de nos affaires, et bien sûr le contrôle de nos affaires commence toujours par les finances. Et, pour reprendre le contrôle de nos affaires, nous avons engagé derrière le gouvernement un effort magistral, partagé collectivement par tous les intervenants de notre société, pour ramener le Québec à l'intérieur d'un équilibre budgétaire constructif à partir duquel nous pourrions avoir un peu les mains libres - pas complètement détachées, mais un peu plus libres - pour entrevoir les moyens de bâtir notre avenir.

En 1998, nous nous sommes fait réélire dans une dynamique exigeante où nous avons effectivement livré la marchandise. Ce budget de l'an 2000-2001, c'est un budget qui nous permet non seulement de recevoir le fruit de nos efforts - et je pense que c'est un fait - mais c'est aussi un budget qui nous permet d'envisager pour l'avenir les axes de notre développement futur. Qu'est-ce que je veux dire par là? Eh bien, on remet les finances en ordre, on partage les surplus entre des baisses d'impôts dont chacun de nous va bénéficier, mais dont ceux qui sont les plus fragiles dans notre société, ceux qui ont le plus de difficultés au niveau de la gestion de leurs affaires courantes parce qu'ils ont des revenus modestes et des dépenses familiales exigeantes... donc des surplus qui seront plus favorables à des baisses d'impôts pour cette catégorie de gens.

Et nous avons quand même pu investir davantage dans la santé, surtout - et je tiens à le dire - pour aider la population vieillissante, investir aussi dans l'éducation, pour aider nos jeunes à devenir encore plus aguerris que nous le sommes, et investir dans nos services publics. En bref - et je pense que c'est important de le rappeler - notre gouvernement a réduit les impôts de 4,5 milliards au cours des trois prochaines années, ce n'est pas rien. Si on tient compte de la production intérieure brute du Québec, si on tient compte du budget du Québec et, en particulier, de ses revenus autonomes, c'est énorme.

Nous avons aussi engagé le gouvernement à respecter tous les engagements du Sommet de la jeunesse, et ce budget, M. le Président, il consacrera 1 milliard de dollars pour les jeunes et l'éducation. Nous avons réussi aussi à investir 2,7 milliards de dollars pour la santé. Ce n'est pas rien, 2,7 milliards de dollars, c'est énorme. La ministre nous a fait connaître depuis ce qu'elle entendait faire avec ces montants additionnels, nous avons tous des parents qui vont bénéficier de ces dépenses additionnelles. Certains d'entre nous ont même des enfants qui vont en bénéficier. Je crois que c'est extrêmement constructif.

En plus, le ministre des Finances a réussi à consacrer 675 millions de dollars dans des initiatives de dépenses pour le développement économique du Québec. Ces initiatives-là, elles concernent le positionnement du Québec à l'intérieur de la dynamique de ce que l'on appelle aujourd'hui les économies du savoir au rang des économies modernes.

Et, enfin, on a pu réserver 430 millions de dollars pour les municipalités.

Je vais dire un mot de chacune de ces mesures, en particulier celles qui nous touchent spécifiquement. Quand je parle de nous toucher, je ne parle pas des baisses d'impôts, contrairement à ce qu'on pourrait penser, je pense surtout aux dépenses pour l'avenir. Or, l'avenir, M. le Président, on le sait, ce sont nos jeunes. Consacrer 1 milliard de dollars pour la jeunesse de demain - enfin, la jeunesse d'aujourd'hui qui sera la jeunesse de demain et les décideurs de demain - c'est un effort important.

Les réseaux vont bénéficier de ces montants additionnels dès l'an 2000 et 2001, et ça se poursuivra pour trois ans. On parle de 200 millions pour 2000-2001, 300 millions pour 2001-2002 et 500 millions par la suite. On parle d'une allocation de 100 millions de dollars pour les universités, 40 millions aux commissions scolaires, 10 millions aux cégeps. Ces fonds-là viseront essentiellement non seulement à mieux éduquer nos jeunes en leur donnant une éducation de qualité, mais il y aura aussi un souci de favoriser l'excellence.

Et, mesure imaginative, on a prévu non seulement des bourses pour des étudiants à la maîtrise, au doctorat et au postdoctorat, mais on a aussi prévu un support financier particulier pour les athlètes de haut niveau. Et on sait, M. le Président - on n'a qu'à s'en convaincre en pensant à la jeune Mélanie Turgeon la semaine dernière - que les Québécoises et Québécois se font remarquer dans le sport international, et c'est tout à notre honneur. Vous savez, travailler pour l'avenir du Québec et son positionnement international, c'est une chose, mais voir ces jeunes qui, tous les jours, travaillent personnellement avec une discipline quelquefois très exigeante - en fait, on sait, souvent, toujours très exigeante dans le sport de compétition - eux, de manière plus forte encore, ils assurent la reconnaissance du Québec aux tribunes internationales bien particulières mais à haute diffusion, et je crois que c'est important de les encourager. Puisqu'ils veulent réussir en se comparant aux meilleurs du monde, il faut que nous puissions leur donner un petit coup de pouce pour ce faire. Et je trouve que c'est une initiative extrêmement constructive d'avoir pensé à ça, ainsi évidemment qu'à l'encouragement de la pratique du sport amateur. Le ministre des Finances y consacre 10 millions par année. Le sport amateur, c'est important, et je crois que, dans nos communautés immédiates, on s'en rend compte. Surtout comme députés, on va souvent à ces activités, on sait combien les jeunes s'y donnent, s'y dévouent, et, sur le lot, quelques-uns ressortent aussi du nombre.

Ces mesures au niveau de la jeunesse visent aussi à favoriser l'initiative. Ce n'est pas seulement un mot, on veut encourager les jeunes à un peu plus d'audace. Et, quand on regarde le fonds jeunesse de 240 millions qui sera créé, je crois que cela permettra d'encourager nos jeunes à avoir un peu plus d'audace. Et toutes les autres mesures qui visent à favoriser l'initiative vont venir consolider le potentiel mais surtout le talent que nos jeunes ont de réaliser ce potentiel. Alors, pour les jeunes, ce budget est extrêmement important. Il était extrêmement stratégique, si j'ose dire.

Pour le comté de Rosemont, il y a deux mesures qui nous intéressent particulièrement. Oh! Je vois que le temps file, c'est ce que vous me dites. Bon. Alors, je vais donc terminer en faisant un mot, si vous me le permettez, sur les critiques que l'on a faites de ce budget.

Les principales critiques, c'est que les baisses d'impôts n'étaient pas suffisantes. Eh bien, je pense que c'est certainement plus que ce que les Québécois ont eu depuis 15 ans, et je crois que c'est important de le dire. Comme l'a dit le ministre des Finances, ce n'est pas satisfaisant, mais on est très content de les avoir à cette étape-ci.

On a parlé de trop d'avantages pour les entreprises. Vous savez, quand le Québec s'inspire de ce qui se fait dans une petite république comme celle de l'Irlande, il faudrait lui donner au moins le crédit d'avoir utilisé ce qui se fait de mieux ailleurs et qui a fonctionné et qui fonctionne. Si ça fonctionne ailleurs, pourquoi ne pas nous en servir, nous, pour mettre en valeur les compétences du Québec, autant humaines que techniques?

Le chef de l'opposition a dit qu'il n'y avait pas assez d'emplois. Bien, je pense qu'il a mal lu ses chiffres et je me permets de le contredire là-dessus. Au Québec, nous avons créé, sous notre gouvernement, un redressement économique qui a entraîné une création d'emplois parmi les plus fortes depuis plus de pratiquement 15 ans.

Je termine en disant que nous avons dans ce budget une image de ce que nous voulons devenir et nous croyons qu'une première mesure sur laquelle l'opposition pourrait nous aider, si elle veut vraiment aider à redresser les finances publiques, c'est d'éliminer une des deux fonctions publiques, et elle se trouve à Ottawa, M. le Président. Merci.

(15 h 30)

Des voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, Mme la députée de Rosemont. Nous allons maintenant céder la parole au député de Robert-Baldwin et critique officiel en matière d'emploi. M. le député.


M. Pierre Marsan

M. Marsan: Je vous remercie, M. le Président. Je voudrais, avant de commencer le discours sur le budget, simplement rappeler que, au lendemain du budget, j'avais le privilège d'aller au royaume du Saguenay, et, en rentrant à Chicoutimi, j'ai vu une station-service qui affichait un prix vraiment élevé au niveau de la gazoline, c'était 0,799 $. Je me disais en moi-même: Comment se fait-il que les gens de Chicoutimi doivent payer si cher? J'avais eu la chance de remplir le réservoir de ma voiture ici, à Québec, autour de 0,74 $. Alors, comment il se fait qu'il fallait pénaliser ces gens-là? On était au lendemain d'un budget, un budget qui était censé être le budget de la vie du ministre des Finances. Eh bien, absolument rien concernant ces baisses d'essence, absolument rien pour ceux qui ont à voyager beaucoup.

M. le Président, dans le budget, qui est un peu un budget donne puis dédonne - on en donne un petit peu puis on en enlève tout de suite après - eh bien, on annonçait en grande pompe des diminutions d'impôts, alors que, dans les faits, lorsqu'on regarde de très près quelles seront ces diminutions d'impôts, on s'aperçoit que c'est l'équivalent d'à peu près 6 $ par semaine. Certains disent qu'on peut acheter, avec ça, deux trios de McDonald's. À cela, il faut ajouter la non-indexation des tables d'impôts, et ça, ça représente 300 millions qu'on va continuer d'aller chercher dans les poches de tous les contribuables. Sur trois ans - parce que c'est ça qu'il nous annonce, le ministre des Finances, les tables d'impôts seront indexées dans trois ans - il aura encore récupéré son milliard de dollars dans les poches des contribuables, et ça, on est la seule province - il ne l'a pas dit dans son budget quand il faisait la comparaison avec le fédéral - on est la dernière des provinces à ne pas indexer les tables d'impôts.

M. le Président, il faudrait peut-être rappeler aussi l'ensemble des taxes qui ont été imposées par le gouvernement du Parti québécois. Dans les principales, il faut se souvenir qu'il y a eu une augmentation de taxe de la TVQ, taxe de vente au détail, de 1 %. Ça remonte à plus de deux ans maintenant. Les taxes sur l'essence, bien, on sait qu'elles augmentent au fur et à mesure que le prix de l'essence augmente. Les hausses des taxes scolaires, vous vous souvenez, tous les comptes de taxes scolaires des contribuables ont presque doublé. Les transferts aux municipalités, ce qu'il est convenu d'appeler maintenant la «facture», eh bien, c'est 350 millions d'argent que les municipalités doivent remettre à Québec, alors qu'on sait que ces argents-là proviennent des contribuables, des municipalités et qu'ils ont déjà payé de l'impôt sur ces revenus-là. C'est une double taxation qui est faite par le gouvernement du Parti québécois.

Au moment où on faisait des coupures dans les dossiers les plus importants du Québec, dans la santé, dans les centres d'hébergement, dans les hôpitaux, dans les CLSC, dans les soins à domicile, dans des dossiers comme les dossiers d'emploi, où on a coupé à des groupes communautaires comme jamais on n'a été capable de le faire dans l'histoire du Québec, eh bien, il y avait des argents cachés. Ces argents-là étaient en Ontario, étaient à Toronto, plus précisément, dans des comptes en banque, semble-t-il, et les contribuables ne pouvaient en bénéficier, les patients ne pouvaient en bénéficier et ceux qui étaient en recherche d'emploi et en formation ne pouvaient également en bénéficier. Alors, M. le Président, c'est toujours le même championnat malheureux qui nous accapare, nous, les Québécois et toutes les Québécoises, le championnat des taxes. Toujours la dernière province, celle qui paie le plus de taxes, celle qui paie le plus de tarifs, celle qui paie le plus de frais. Ça va prendre, au rythme où on va dans le budget, au moins 10 ans pour atteindre la moyenne canadienne et 38 ans pour rejoindre les comparaisons de l'Ontario.

J'aimerais vous parler rapidement des principaux chapitres de ce budget, notamment celui de la santé. J'écoutais le premier ministre en période de questions qui parlait de 3 milliards d'investis dans la santé. Une façon de gonfler les chiffres: d'abord, le chiffre qui est avancé dans le budget, c'est 2,7 milliards, et ensuite ce n'est pas de l'argent neuf, et c'est facile à comprendre. Un premier montant de, je pourrais dire, 1 milliard pour gonfler les chiffres, mais c'est 862 millions, de façon exacte. C'est pour combler les déficits des hôpitaux qui n'apparaissent pas aux comptes publics du gouvernement, et c'est la deuxième année qu'on va procéder au remboursement des déficits.

Quel est le message qu'on envoie aux administrateurs des établissements de santé? Faites des déficits, le gouvernement du Parti québécois va les combler l'année prochaine. C'est ça, le message qui est envoyé. Et la ministre, dans sa grande candeur, je pense, elle souhaite présenter ici même, à l'Assemblée nationale, une loi qui va empêcher les hôpitaux de faire des déficits, quand on sait que les établissements de santé ont très peu de contrôle sur la demande de soins, quand on sait que le gouvernement du Parti québécois n'honore même pas ses obligations, qu'il ne donne pas suffisamment d'argent aux établissements de santé, il l'a montré depuis qu'il est au pouvoir, depuis presque bientôt six ans. Eh bien, c'est vraiment une farce, ce projet de loi, et nous avons bien hâte de lire quelles seront les obligations du gouvernement, M. le Président.

Alors, un premier montant de 862 millions qui sert à éponger le sous-financement chronique des établissements de santé, un deuxième montant - 877 millions, cette fois-là, presque un autre milliard - qui est l'augmentation des coûts de conventions collectives. On sait aussi que les médecins sont en négociation actuellement, et il y a eu des augmentations, pour l'ensemble des employés, de 9 % sur une période de quatre ans. C'est le montant qui est identifié cette année, pour l'année qui va commencer au 1er avril. Eh bien, M. le Président, il n'y a pas d'argent nouveau là-dedans, il n'y aura pas de nouveaux services avec ce 877 millions là. Ce sont des augmentations de salaire que les gens du réseau vont recevoir avec beaucoup de mérite, mais il n'y a rien de neuf, il n'y aura pas un service de plus qui va être donné aux patients.

On parle de 747 millions dont un quart seulement pourrait servir à réduire les listes d'attente. C'est beaucoup trop peu, M. le Président, et c'est trop tard. Ça n'empêchera pas les patients d'aller se faire soigner aux États-Unis, ça n'empêchera pas les listes d'attente de continuer d'augmenter, et on parle du reste pour éponger certains déficits, notamment ceux d'Héma-Québec et les victimes de l'hépatite C. Eh bien, ça fait longtemps qu'on l'attend. On a bien hâte de voir les résultats.

Il semble qu'il y aura un 200 millions pour acheter des nouveaux équipements. J'espère que c'est vrai, mais j'en doute, M. le Président. Comme à l'habitude, il y a toujours des astuces dans ce budget-là. Moi, je crois que ce sont des équipements qui ont déjà été autorisés il y a quelques années. On sait que ça prend quelques années pour acheter certains équipements. On peut penser à des accélérateurs linéaires pour la cancérologie, les traitements du cancer, on peut penser aux équipements d'hémodynamie. Eh bien, d'après moi, c'est pour payer des factures qui arrivent déjà et non pas pour ajouter au réseau de la santé.

Et enfin il faut voir ce qui s'en vient avec tout le dossier de l'assurance médicaments. On nous avait tellement promis que ça devrait soulager les Québécois et les Québécoises. Eh bien, moi, j'aimerais tout simplement rappeler que, dans le temps des libéraux, ça coûtait, pour les personnes aînées, 2 $ par prescription jusqu'à un maximum de 100 $. Je me souviens que, ici, au parlement, les amis des députés péquistes garrochaient des 2 $ parce qu'ils étaient contre cette augmentation des tarifs des médicaments. Aujourd'hui, vous savez ce que ça coûte, M. le Président. Ça peut aller jusqu'à 750 $ pour une personne; un couple, ça fait 1 500 $. Eh bien, c'est le résultat de la gouverne du Parti québécois.

M. le Président, je vois que le temps passe assez rapidement. Je pourrais continuer dans le dossier de la santé mentale dans les centres d'hébergement, ce sont les oubliés du budget. Mais il faut aussi que je vous parle de l'éducation. Rapidement, on nous annonce, là aussi, des investissements d'argent neuf, 200 millions la première année, 300 la deuxième et 500 la troisième, alors qu'on sait que tout le réseau de l'éducation est actuellement très sous-financé. On parle d'investissements, dès cette année, d'au moins 150 millions, et ça peut aller à plus que ça. Les gens sont unanimes dans le réseau scolaire. Le président de la Fédération des commissions scolaires: Ce n'est pas assez. Le président de la Fédération des cégeps: On est encore bien loin de toutes les coupures qu'il y a eu dans les cégeps. Et, à la Conférence des recteurs, le représentant, M. Tavenas, mentionne qu'il va en manquer.

Les municipalités: Un véritable cadeau de dupes, et je pense qu'on peut simplement lire une petite phrase dans le budget: Le produit de la taxe TGE - c'est la taxe sur les télécommunications, le gaz et l'électricité - sera désormais conservé par le gouvernement, qui va garder les revenus des municipalités. Puis, en contrepartie, on va abolir la facture, et on sait que c'est à peu près les mêmes montants. Les municipalités n'y gagneront absolument pas au change.

(15 h 40)

M. le Président, il y avait une page, ou quelques lignes, sur les régions. On dit que le gouvernement du Parti québécois, qui se targue d'avoir un discours extraordinaire pour les régions... Eh bien, l'investissement: 50 millions. On a une douzaine de régions au Québec, ça veut dire 4 millions par région, et c'est très, très peu entre le discours du gouvernement péquiste et le résultat. Ça demeure le budget des oubliés: rien sur la taxe d'essence, rien pour les personnes aînées, rien pour combattre la pauvreté, rien sur la dette, et je pense à mes commettants dans mon comté.

And, for my constituents in Robert-Baldwin, riding which includes the cities of Roxboro, Dollard-des-Ormeaux and part of Pierrefonds, there is nothing in the budget for a tax relief. We still have the championship of the tax increase in North America. No money for the poor, no money for those who have to travel by car, by truck, no decrease of the sales tax on fuel, gasoline, no indexation on the income tax and not enough money for the education, not enough money for the health network. And at the same time we're still hiding 841 millions somewhere in a bank account in Toronto.

M. le Président, pour nous, ça demeure un mauvais budget, ça demeure un budget truffé d'astuces, qui est fait pour la parade, et vous pouvez être sûr que, notre formation politique, et particulièrement le député de Robert-Baldwin, nous allons voter contre ce budget. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Robert-Baldwin et critique officiel de l'opposition en matière d'emploi. Nous allons maintenant céder la parole au député de La Prairie. M. le député.


M. Serge Geoffrion

M. Geoffrion: Merci, M. le Président. «Rendons donc à César ce qui revient à César», écrit l'éditorialiste du quotidien La Presse , saluant ainsi à sa façon les baisses d'impôts comme l'élément-clé de ce budget marquant l'aboutissement d'une démarche claire et ferme de notre ministre d'État à l'Économie et aux Finances. Ce dernier, poursuit Alain Dubuc, «s'est attaqué sans dévier à l'élimination du déficit et [...] à la réduction du fardeau fiscal. Il y a, dans cette démarche en deux temps, une détermination et une cohérence qu'il faut saluer», de souligner M. Dubuc dans un éditorial intitulé Joie et déception .

La déception pour l'éditorialiste réside essentiellement dans le fait que ces baisses d'impôts, bien qu'impressionnantes, précise-t-il, ne réussissent qu'à réduire du tiers l'écart qui sépare le Québec en cette matière des autres provinces canadiennes. Cette déception est bien sûr partagée par l'opposition officielle. Par la voix de sa porte-parole, la députée de Marguerite-Bourgeoys, l'opposition s'est donc attardée longuement à cet aspect du budget, comme si cette question, intéressante en soi, était au centre des vraies et quotidiennes préoccupations des Québécois et Québécoises. Cela en est presque une obsession. À preuve, pas moins de 21 références directes à l'Ontario dans la réplique d'une heure de la porte-parole de l'opposition officielle. Pensez-y un peu, M. le Président, c'est d'abord en comparant notre régime fiscal avec l'Ontario à 21 reprises que l'opposition officielle a développé tout son argumentaire en réplique au budget.

Pour ma part, ce matin, j'aimerais vous entretenir non pas des frustrations de l'opposition officielle, qui n'a pas su trouver une seule mesure positive dans ce budget, ne serait-ce que de reconnaître celles s'adressant aux jeunes du Québec, mais vous rappeler justement celles - et elles sont nombreuses - qui s'adressent à la jeunesse québécoise. Non seulement nous avons cessé d'endetter les jeunes, a dit le ministre des Finances, mais nous les appuyons solidairement, avec de puissants moyens, afin qu'ils puissent réussir leur vie plus facilement que ne l'ont fait leurs devanciers. Voici qui aurait pu trouver grâce, à tout le moins, aux yeux de l'opposition.

Quant aux propos tenus ce matin même par le député de Rivière-du-Loup, de deux choses l'une, ou bien la cause des jeunes ne l'intéresse pas vraiment - il n'a pas cru bon d'en parler, ce matin du moins - ou bien les mesures annoncées pour les jeunes sont telles qu'il s'en réjouit et qu'il ne trouve rien à en redire. Je penche plutôt pour la deuxième option.

Ayant le privilège de représenter une circonscription où les jeunes constituent la principale ressource naturelle - vous le savez, la circonscription de La Prairie étant la plus jeune de la grande Montérégie - c'est d'abord à eux que je pense, aujourd'hui. Je rappelle donc quelques mesures proposées pour nos jeunes dans ce budget. Il y a bien sûr l'investissement de 1 milliard de dollars dans le secteur de l'éducation, tel qu'annoncé au Sommet du Québec et de la jeunesse, mais aussi la création du Fonds jeunesse pour favoriser de nouveaux emplois, et ce, en partenariat avec le secteur privé, un fonds totalisant 240 millions de dollars. Au total, avec ces nouveaux investissements, c'est plus de 25 % du budget de notre État national qui est consacré à la plus exaltante mission d'un gouvernement, soit celle d'offrir aux jeunes une éducation de qualité, accessible à tous, de la maternelle à l'université.

À cela s'ajoutent de plus petites mesures mais combien importantes pour nos jeunes. Ce sont pour moi ces petites victoires qui, concrètement, tout de suite, améliorent la qualité de vie de milliers de jeunes Québécois et Québécoises. Je pense aux sommes affectées aux services à la jeunesse, notamment en faveur des maisons de jeunes, des familles d'accueil et des organismes communautaires qui oeuvrent dans le domaine de la prévention du suicide et de la toxicomanie, je pense aux sommes, dans les mêmes ordres de grandeur, afin d'augmenter les bourses favorisant les études universitaires supérieures, je pense aux mesures pour nos 2 000 athlètes de haut niveau et à celles pour favoriser la pratique du sport amateur, je pense aux fonds supplémentaires pour soutenir des équipes de recherche, je pense au Programme pour le démarrage d'une entreprise, je pense aux étudiants et étudiantes du Québec qui pourront bénéficier de l'accès à Internet, une mesure éducative, bien sûr, mais également une mesure sociale par le souci de favoriser les familles moins fortunées et de leur permettre ainsi d'évoluer à armes égales, sans égard à la fortune, comme l'a sincèrement exprimé le ministre des Finances. Je pense, finalement, aux 28 000 emplois créés chez les jeunes de moins de 24 ans au cours de la dernière année, une performance digne de mention, en plus de celle nous indiquant que nous avons terminé la décennie avec le taux de chômage le plus bas depuis 1976. Voilà une donnée proche du quotidien des citoyens et citoyennes du Québec, voilà une donnée qui reflète l'état de santé économique et le dynamisme du Québec.

J'ai le sentiment, malgré les propos défaitistes tenus jusqu'ici par les députés de l'opposition officielle, qu'il s'en trouvera, des jeunes à Châteauguay, à Brossard ou à LaSalle, pour apprécier ces mesures. Ces jeunes, comme partout sur le territoire, pourront savourer, eux autres aussi, malgré les dires de leur député, ces petites victoires qui ont comme objectif de permettre aux jeunes d'affronter le défis d'un monde nouveau. M. le Président, la société qui a un avenir est celle qui encourage ses jeunes à entreprendre, à innover et qui canalise leur dynamisme et leur potentiel, ce à quoi nous sommes tous interpellés comme élus et comme citoyens.

Malgré tous ces efforts et ces nombreux pas dans la bonne direction, il y a une situation que l'on ne saurait tolérer, soit celle de la pauvreté, notamment celle qui touche les jeunes familles et, conséquemment, de trop jeunes enfants, de trop nombreux enfants. Je suis pourtant optimiste que les politiques budgétaires présentées par le ministre des Finances, orientées vers la croissance, donc vers l'emploi, auront des impacts positifs pour assurer une meilleure justice et une plus grande équité. Je pense que nous devrions tous, dans cette Assemblée, réfléchir sur cette pensée du sociologue Primo Levi: Le degré de civilisation d'un pays se mesure à l'efficacité avec laquelle ses lois empêchent les faibles de trop s'affaiblir et les puissants de devenir trop puissants.

À cet égard, je tiens à dire quelques mots sur la nouvelle politique du ministre de la Solidarité sociale, le programme Solidarité jeunesse qui vise justement à limiter, voire enrayer, l'appauvrissement des jeunes. Cette initiative constitue un nouvel appui à tous les jeunes de moins de 21 ans qui présentent une demande à la sécurité du revenu. Sur une base volontaire, ceux-ci auront la possibilité, avec l'aide du formidable réseau des carrefours jeunesse-emploi, de participer à une démarche personnalisée vers un emploi ou un retour aux études, et ainsi cela permettra à plus de 10 000 jeunes de briser le cercle vicieux de la dépendance à l'aide sociale.

(15 h 50)

Je suis également heureux que nous ayons reconduit le Fonds de lutte à la pauvreté pour les trois prochaines années. Mais il y a tellement encore à faire, et nous n'avons pas l'intention de rester les bras croisés, malgré les succès obtenus, notamment avec l'élimination du déficit et la baisse remarquable du taux de chômage. J'invite donc tous les députés dans cette Chambre à prendre le relais du Sommet du Québec et de la jeunesse. J'invite tout particulièrement le député de Châteauguay à se joindre à moi pour faire encore plus de place aux jeunes de la MRC de Roussillon sur laquelle nos deux circonscriptions cohabitent.

Le 15 avril, notre communauté organise un colloque-jeunesse où près de 300 jeunes sont attendus pour l'après-Sommet afin que les jeunes de notre région profitent de cet élan pour prendre en main leur avenir avec confiance. Ce n'est donc pas seulement en comparant le régime fiscal du Québec avec nos voisins que nous y arriverons, je pense que c'est davantage en mettant nos énergies et talents au service de nos jeunes qui sont appelés sinon condamnés à être meilleurs que nous tous. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Merci, M. le député de La Prairie. Nous allons maintenant céder la parole au député de Jacques-Cartier, président de la commission de l'administration publique et également responsable des dossiers autochtones et du Grand Nord. M. le député.


M. Geoffrey Kelley

M. Kelley: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai déjà préparé une entrée qui tomberait bien, parce que j'ai bien écouté les paroles du député de La Prairie qui dit que l'opposition n'a pas trouvé les bonnes nouvelles dans le budget. Alors, je vais briser la tradition. Moi, je pense qu'il faut être cohérent, et c'est notre devoir, comme opposition, de critiquer, c'est notre devoir à l'Assemblée nationale, mais il faut être reconnaissant.

J'ai trois exemples pour l'entrée de jeu de mon discours qui était déjà préparé avant le discours du député de La Prairie. De notre côté de la Chambre, nous plaidons depuis des années qu'il faut réinvestir dans la santé, qu'il faut réinvestir dans l'éducation, et le fait qu'on ait créé des déficits dans nos établissements, dans les deux réseaux, est quelque chose qu'il faut corriger. Alors, pour être cohérent avec nous autres, le fait qu'on soit en train de faire ça avec le budget aujourd'hui, je pense que c'est une bonne nouvelle, parce que avoir un déficit zéro ici, à Québec, et 700 millions de dollars accumulés dans les réseaux, ce n'est pas un véritable déficit zéro.

Alors, le fait que, dans les crédits supplémentaires qui viennent d'être déposés, on voie 700 millions de dollars pour l'effacement des déficits accumulés et les dettes accumulées des établissements, de notre côté de la Chambre, nous plaidons pour ça depuis des années. On peut avoir un long débat. Est-ce qu'ils auraient dû faire ça il y a six mois, il y a un an? Mais, en anglais, on dit: Better late than never. On a aujourd'hui un effacement, on a...

Hier soir même, j'ai parlé à une infirmière qui a dit: À notre hôpital, on manque de couvre-lits. Alors, on ne parle pas de grand équipement très, très sophistiqué, mais on manque de linge dans nos hôpitaux. Alors, avec l'ajout des budgets, si on peut réussir à combler ces besoins, tant mieux! Ça, c'est une chose que nous avons plaidée, de notre côté de la Chambre. On le trouve dans le budget, alors tant mieux!

Deuxième des choses, nous avons plaidé, de notre côté de la Chambre, pour une plus grande flexibilité des frais de garde pour les familles qui ont des besoins autres que les besoins qu'on peut combler avec une garderie. Une garderie, c'est un service destiné aux familles qui travaillent de neuf à cinq. Mais, on m'a dit, la moitié des mères-parents au Québec qui travaillent à l'extérieur de la maison ne fait pas du neuf à cinq. Alors, elles ont besoin d'embaucher des gardiennes, elles ont des besoins autres. Alors, enfin, parce que, si le monde se rappelle, il y a quatre ans, ce gouvernement a proposé d'abolir tous les crédits d'impôt remboursables pour les frais de garde. Ça, c'était la proposition, en 1996, de ce gouvernement. Maintenant qu'on trouve dans le budget enfin la reconnaissance que les besoins des familles québécoises sont variables, qu'il faut avoir une plus grande flexibilité, qu'on trouve une reconnaissance dans ce budget, bonne nouvelle! Nous avons plaidé pour ça de ce côté de la Chambre. Alors, c'est une bonne nouvelle qu'on retrouve aujourd'hui.

Troisièmement, malgré le fait que l'opposition officielle ait questionné le ministre récemment sur le fait que les Québécois sont sous-branchés sur l'Internet, pour les facteurs linguistiques, entre autres, c'est évident que, sur l'Internet, il y a beaucoup d'anglais. Alors, peut-être que c'est plus difficile d'avoir un accès pour les familles au Québec que pour les autres familles dans les États-Unis et le reste du Canada. Mais une mesure fort intéressante. On va voir si ça va fonctionner ou non. Mais le fait que le gouvernement ait reconnu enfin qu'il y a un problème sur le branchement sur l'Internet... Il va mettre les choses en place pour permettre aux familles à moyens modestes et à revenus faibles au Québec de se brancher. On verra, mais je pense que, en soi, c'est une belle initiative, et je vais applaudir le gouvernement pour ce faire.

Mais la chose que, moi, je trouve regrettable, c'est que ce gouvernement, qui se vante sur l'imputabilité puis la gestion par résultats, la transparence, n'est pas capable, dans ce budget, de mettre une vue d'ensemble où il veut amener le budget québécois à venir. On peut longuement critiquer le gouvernement fédéral, mais qu'est-ce que le gouvernement fédéral a dit? On a les trois priorités: il faut réinvestir dans nos programmes, il faut baisser les impôts et il faut réduire la dette. Alors, ça, c'est les trois grands enjeux. Le gouvernement fédéral a fait certains choix sur la priorité de l'un contre l'autre. Alors, ils ont misé beaucoup sur baisser les impôts, ils ont mis un objectif de 50 % pour baisser les impôts, ils ont mis un objectif de 25 % pour dépenser le surplus sur la question de réinvestir dans les programmes et un 25 % pour réduire la dette. On peut avoir un long débat, on est élus pour faire les débats. Mais, au moins, ils ont mis les choses sur la table. C'est vers ça qu'on va aller pour dépenser le surplus.

Ils ont également fait un estimé sur l'ampleur du surplus d'ici cinq ans. On parle de 95 milliards de dollars, plus ou moins. On verra, c'est un estimé. Au moins, ils ont eu la franchise avec la population: C'est ça, les données; alors, que pensez-vous de notre approche de donner la plus grande priorité pour baisser nos impôts, en deuxième lieu, pour réinvestir dans les programmes, en troisième lieu, pour réduire la dette? On peut avoir un débat, mais les cartes sont sur la table, M. le Président.

Mais ce ministre, c'est quoi, son plan? Il a consulté tout le monde. On avait des commissions parlementaires, à l'automne - une soixantaine de groupes - mais le ministre des Finances ne veut même pas indiquer c'est quoi, les surplus anticipés pour les années à venir. Je pense qu'au ministère des Finances, ici, à Québec, comme à Ottawa, ils ont des ordinateurs, ils sont capables de mettre les mêmes données à l'intérieur de l'ordinateur et d'arriver avec un estimé.

An educated guess, Mr. Speaker. Because this Government which goes on and on about transparency, about openness, about democratic debate won't even share with the population what it thinks the budgetary surpluses are going to be for the next five years, doesn't share with us its priorities, doesn't think: Half of the surplus should go to lowering our taxes or half of our surplus should go towards reinvesting in our programs. We can have a long debate over the various priorities, but I think what we should be able to find in a budgetary document is how the Government rates its priorities and what emphasis they're going to put on the various... Because this is the three big challenges, Mr. Speaker. It's not rocket science, making a budget. You're trying to lower taxes, you're trying to reinvest in Government programs and you're trying to reduce the debt. But we have no idea what this Government intends to do over the next five years on those three central challenges.

Je trouve, M. le Président, pour un gouvernement qui se vante de l'imputabilité, de la transparence dans la gestion des fonds publics, que c'est très regrettable qu'on ne trouve pas, à travers tous ces documents qui sont le budget du Québec de l'an 2000-2001, la vue d'ensemble. La dette? Il avait des larmes de crocodile, le ministre des Finances, quand il a été questionné la semaine passée: Ah oui, c'est un fardeau pour nos jeunes, blablabla. Mais il n'y a rien sur la dette. La proposition pour l'année à venir, c'est: On ne va rien faire. Et, pour baisser les impôts, qui est le deuxième grand défi, le gouvernement se vante, sur les 4,5 milliards de dollars, qu'il va baisser nos impôts d'ici trois ans. Mais le fait qu'ils n'ont pas décidé de réindexer les tableaux d'imposition - 1 milliard - sort du portrait tout de suite, «dreaded bracket creep». Je n'ai pas trouvé de mots en français, l'équivalent de l'anglais qui est formidable, «bracket creep».

(16 heures)

Juste le fait de l'inflation, d'ici trois ans, les Québécois, sans rien changer, sans rien toucher, vont payer 1 milliard de plus d'impôts. Alors, sur notre 4,5 milliards de baisse d'impôts, on peut éliminer 1 milliard. C'est vraiment 3,5 milliards de dollars, argent de plus dans les poches des Québécois, sans rien faire.

Et, pour faire ça, c'est un effort modeste en comparaison avec nos voisins. Parce que, c'est évident, tout le monde va être toujours contre les impôts. Il n'y a pas grand monde qui va mettre sur son dépliant pour une réélection: Votez pour untel parce que je veux augmenter vos impôts. Je pense que ça, c'est le candidat qu'on ne trouve pas trop souvent dans cette Chambre. Mais je pense quand même qu'il faut garder un régime d'imposition comparable à nos voisins. C'est ça qui est l'essentiel, parce que c'est très important - je vois le ministre de la Recherche, de l'autre côté - pour le recrutement des personnes ici, c'est un des facteurs.

Ce n'est pas le seul, mais une des choses que les chercheurs vont regarder avant de venir s'installer à Québec, ou à Montréal, ou dans nos autres universités, c'est le régime d'imposition. C'est quelque chose qui est très important pour une compagnie qui veut investir ou agrandir. Il va regarder... Pour mon monde qui va travailler ici, dans la région de Montréal... C'est une gamme de facteurs. Je conviens, ce n'est pas uniquement les impôts à payer, mais c'est important de voir dans l'ensemble des facteurs, oui, notre régime d'imposition est important.

Alors, c'est pourquoi la comparaison avec l'Ontario est importante, parce que c'est notre concurrent, un des plus importants. Et, aujourd'hui, it's always very depressing, with these new software packages, Mr. Speaker, you can figure out your taxes you would pay in Ontario. There's one called, I believe, Quicken, you can put in all of your own taxes to pay, your Québec taxes, and you can just press a little button and see what your bill would be if you were living in Ontario. And that's discouraging enough, but I don't recommend doing it for Alberta, because it's even lower. My neighbor across the street did it, and, for a father of five, a large family, it would've been a $5 000 tax difference if he lived on the other side of the Ontario border.

But it's very important, because we have to compete with Ontario, and the plan that has been put into place, or the absence of a plan, means that Quebeckers pay far more taxes than Ontario. Et, à terme, l'écart, aujourd'hui, c'est 5,8 milliards entre... Si on applique le système d'imposition en Ontario au Québec, les Québécois paieront 5,8 milliards de moins aujourd'hui. Alors, à terme, après l'énorme effort que ce gouvernement a fait pour baisser nos impôts, ça va être 5,3 milliards de dollars. Alors, dans trois ans, malgré ces efforts que, moi, je trouve toujours trop modestes, nous serons encore une fois les champions au niveau de la taxation en Amérique du Nord, et ça nuit.

Il y a d'autres facteurs, et j'en conviens: la valeur des maisons, nos hivers, que tout le monde aime pelleter la neige, des choses comme ça, qui sont d'autres facteurs pour attirer le monde à participer au développement de l'ère du savoir, et tout ça. Mais c'est un empêchement, et le gouvernement n'a pas fait assez pour baisser nos impôts en comparaison avec nos voisins. Et c'est toujours ça qui est mon point de référence: comparer ça avec nos voisins. Et, pour chaque dollar qu'ils ont baissé nos impôts, ils en ont dépensé quatre. Alors, le ratio, c'est 80 % réinvestir, 20 % baisser des impôts. Et moi, je pense qu'il y a un débat qui s'impose. On fait zéro pour la dette, 20 % pour baisser les impôts, 80 % pour réinvestir dans les dépenses du gouvernement; est-ce que c'est ça, l'équilibre?

Et, quand je regarde le programme du parti qui fait le gouvernement, je vois qu'eux autres ont proposé un équilibre de 50-50: moitié pour baisser les impôts, moitié pour réinvestir dans nos programmes gouvernementaux. Alors, même, ils ne sont pas fidèles à la plateforme du gouvernement du Parti québécois, le Parti québécois qui exige au moins un équilibre. Mais qu'est-ce qu'on trouve dans le budget aujourd'hui? C'est 80 % dépenser, 20 % baisser les impôts. On va, d'une certaine façon, à contre-courant avec les autres provinces et les États américains, et le résultat, c'est qu'on est obligé de payer des impôts qui sont nettement plus importants.

En terminant, je ne peux pas passer sous silence qu'est-ce que ce gouvernement a fait envers nos municipalités. Parce que, encore une fois, c'est un gouvernement dont le discours est toujours très beau, mais c'est dans les gestes qu'on voit la vraie nature de la personne. Et on nomme un mandataire pour Montréal, M. Bernard, qui va discuter d'un nouveau pacte fiscal avec nos partenaires municipaux. Tous ces mots sont florissants comme ça, mais, dans les vrais gestes, on décide dès le départ, un champ de taxation fort intéressant, c'est-à-dire la taxe sur les télécommunications, le gaz et l'électricité, on va la prendre unilatéralement. Alors, malgré Louis Bernard, malgré toutes nos discussions avec nos partenaires, ça, c'est une décision qui est prise unilatéralement.

Alors, c'est bien beau, pour ce gouvernement, de dire qu'il faut trouver les moyens pour diversifier les champs de taxation pour les municipalités, mais, en prenant les décisions arbitraires comme ça, unilatérales comme ça, tous ces beaux mots sur le partenariat sonnent faux, encore une fois.

In conclusion, Mr. Speaker, one of the things that this Government goes on and on about is that they have to find new ways to have a diverse tax base for our municipalities. The Minister, the Member for Hochelaga-Maisonneuve, has set into place Mr Louis Bernard consulting all the mayors of the region of Montreal to come up with a new financial pact, but she didn't obviously have the support of her Minister of Finance because he decided, quite arbitrarily and unilaterally: Well, I want the $330 million of the tax on telecommunications, gas and electricity and I'm going to take it, and I'm going to say to the mayors: Well, it's in a trade for this other bill of $356 million that this Government also imposed unilaterally on the municipalities. So, they're being traded one bit of bad news for another bit of bad news.

But, at the end of the day, Mr. Speaker, it makes all of the wonderful speeches this Government gives about partnership, about respecting our municipal partners... What a crock, Mr. Speaker! Because, at the end of the day, they decide that they impose their solutions, the municipalities do not have a chance to participate in a debate in a true partnership with this Government, they do what they're told.

Pour ces raisons, M. le Président, je vais joindre ma voix à celle de mes collègues pour voter contre ce budget. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le député de Jacques-Cartier et également président de la commission de l'administration publique.

Nous allons maintenant céder la parole au député de Charlesbourg et ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie. Alors, M. le ministre.


M. Jean Rochon

M. Rochon: M. le Président, ce débat sur le discours du budget est une occasion, quant à moi, d'examiner, pendant les quelques minutes qui suivent, un peu plus en détail des mesures du budget pour le domaine de la recherche, de la science et de la technologie.

Ce sur quoi je voudrais insister, avant de voir ces mesures, c'est de bien se rappeler que le développement d'une politique scientifique, qui est l'objectif premier du ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, de redonner au Québec une politique scientifique et de la mettre en oeuvre, dans les temps modernes, ce n'est pas simplement, et même surtout, un document.

C'est une dynamique, une dynamique de développement, de recherche et d'innovation et une dynamique d'interaction entre les milieux de la recherche: les universités, les cégeps, les instituts, les centres de recherche et les entreprises, les entreprises qui ont des activités de recherche et de développement et les entreprises qui sont reliées à différents réseaux et qui doivent constamment innover et trouver une valeur ajoutée à leurs produits et une capacité d'interaction sur les marchés internationaux. C'est cette dynamique qu'il faut mettre en place, qu'il faut entretenir, maintenir et faire évoluer, en ayant comme objectif ultime le développement socioéconomique du Québec, de la société, de la population du Québec, en lui assurant une prospérité et un meilleur partage de cette richesse qu'on se redonne, en utilisant au mieux tous les moyens qui sont les nôtres.

Pour déclencher une dynamique comme ça, il faut une continuité dans nos actions, il faut une constance, il faut maintenir un rythme et il faut une cohérence. Il faut que chacune des étapes vienne renforcer celle qui précède et préparer celle qui viendra. Alors, il faut voir les mesures, donc, du budget de cette année en continuité avec le budget de l'an dernier qui a lancé cette dynamique, et on se rappellera que ce budget était un effort de plus de 400 millions, répartis en mesures fiscales, d'une part, de l'ordre d'à peu près 170 millions, en interventions spécifiques d'innovation, de recherche ciblant le soutien aux chercheurs pour leurs travaux de recherche, pour soutenir la carrière de nouveaux chercheurs, des débuts de carrière, et le maintien de carrière de chercheurs qui sont déjà en piste et un effort pour valoriser plus facilement les produits de la recherche en mettant en meilleure interaction des universités, des investisseurs et les entreprises - il y en avait pour 175 millions - et une série d'autres mesures qui, au total, nous donnaient un effort d'au-dessus de 400 millions.

(16 h 10)

Le budget de cette année, en continuité, vient rajouter un effort du même niveau cette fois-ci pour continuer à préparer le terrain pour la politique scientifique qui viendra dans les prochains mois. Ces mesures, cette année, sont de deux ordres: il y en a qui sont spécifiques, plus directement, aux domaines de la recherche, de la science et de la technologie; et d'autres mesures, comme c'était le cas pour l'an passé, sont des mesures, des actions dans d'autres secteurs de l'action gouvernementale où le ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie, par sa mission de coordination transversale, verra à pouvoir aller chercher des renforcements à l'action dans le domaine de la recherche et du développement technologique.

Les mesures spécifiques, il y en a pour un total de près de 190 millions qui se répartissent en trois grands volets. Un premier, c'est un investissement très important de 120 millions qui est redonné à Valorisation-Recherche Québec, une société qui a été créée l'an dernier pour insuffler des ressources dans la valorisation des connaissances et dans la recherche intersectorielle entre les universités, les instituts et les entreprises. Cette année, Valorisation-Recherche Québec aura un mandat additionnel, avec 120 millions pour réaliser trois objectifs de plus: d'abord, de pouvoir venir en soutien aux ministères sectoriels de l'Éducation, de la Santé et des Services sociaux, quant à l'utilisation de leur budget d'investissement, pour pouvoir ajouter des argents soit d'investissements d'équipements de recherche soit de budgets de fonctionnement et d'installations de démarrage de nouveaux équipements de recherche, afin que le Québec puisse choisir ses priorités et agir avec un effet de levier, par cet argent, pour aller chercher des fonds fédéraux soit de la Fondation canadienne de l'innovation, soit des instituts canadiens de santé qui seront mis sur pied au cours de la prochaine année, soit du programme des centres d'excellence et des autres initiatives qui sont prises par le fédéral, pour qu'on aille chercher là, en équipements et en investissements, la part qui doit nous revenir au Québec. On sait que, si nos chercheurs sont très compétitifs, parce que les investissements du Québec leur ont permis d'atteindre un niveau de grande performance quant aux subventions de recherche, les investissements fédéraux en infrastructures, au Québec, ont été très en-deçà de ce à quoi on peut s'attendre. On se réfère souvent aux 24 %, 25 % de la population qu'on représente, et c'est à peu près 14 % de l'ensemble des investissements fédéraux qui sont faits au Québec. Alors, il y a donc un effet de levier qu'on veut avoir pour aller chercher plus d'argent, soutenir les ministères sectoriels et les milieux de recherche.

Le deuxième objectif supplémentaire qu'on confie à Valorisation-Recherche Québec est celui de pouvoir travailler avec le ministère et les intervenants, les chercheurs sur le terrain, les institutions de recherche pour préparer la politique scientifique, en ciblant le départ de grands projets qui viendront nous permettre de renforcer les axes de recherche où on est très fort actuellement. On aura donc une possibilité d'agir dès les prochains mois et au cours de la prochaine année.

Finalement, parmi ces grands projets, il y a un troisième objectif déjà spécifique qui est celui du génome. On est en train de mettre sur pied, avec l'ensemble des universités, un véritable consortium pour s'assurer, avec tous les secteurs et les ministères impliqués, que ça soit dans le domaine de la médecine, de la santé, que ça soit dans le domaine agricole, que ça soit dans le secteur de la production animale, l'environnement, le pharmaceutique, les biotechnologies, qu'il y ait un regroupement de centres de recherche, d'entreprises qui devrait nous permettre - au cours des prochaines semaines, probablement - grâce à un investissement initial, mais qu'on veut être capable de soutenir, disons, comme objectif, à la hauteur de l'effort que fait l'Ontario présentement qui est à la hauteur d'à peu près 50 millions, au cours des prochaines années, qu'on puisse profiter, là aussi, au maximum de notre part du 160 millions que le budget fédéral a annoncés pour le développement de la recherche en génomique, qui est l'avenir de tout le secteur des biotechnologies, un secteur où le Québec est déjà très fort. Donc, un premier montant de 190 millions, avec trois objectifs précis, qui vient renforcer l'action entreprise l'an passé.

Deuxièmement, l'an passé, on avait fait un effort pour aider les jeunes chercheurs et les continuations de carrière en recherche. Cette année, avec le même esprit de soutenir la base humaine de la recherche, on fait un effort pour améliorer la situation des étudiants aux cycles supérieurs, soit en maîtrise, au doctorat ou ceux qui font des stages et des études postdoctorales. Et les bourses de ces étudiants, bourses au mérite qui sont vraiment données sur le mérite de leur travail et des objectifs qu'ils se sont donnés, étaient intouchées depuis à peu près six ou sept ans au moins. Alors, voilà la bonification qu'on en fait.

Les bourses de maîtrise, qui étaient de l'ordre de 11 000 $ par année, passent à 15 000 $. Les bourses de doctorat, qui étaient de 13 000 $, passent à 20 000 $. Et les études postdoctorales, qui étaient soutenues par une bourse de 22 000 $ par année, seront au niveau de 30 000 $. Et, qui plus est, ces bourses sont exemptes d'impôts. Alors là on pense qu'on fait vraiment un pas pour aider... l'an passé, les jeunes chercheurs, maintenant la relève, ceux qui auront une carrière soit de chercheur ou soit qui s'en iront vers des entreprises, dans des carrières technologiques, mais où il le faut une formation semblable à ceux qui poursuivent une carrière de recherche.

Troisièmement, dans des mesures spécifiques, en plus du 190 millions, le total de ces bourses représente à peu près 24 millions au cours des trois prochaines années. On fait un autre effort auprès des organismes subventionnaires. On a le Fonds d'aide à la recherche et d'actions concertées, le Fonds de recherche en santé du Québec et le Conseil québécois de la recherche sociale où, l'an passé, on a pu leur donner des budgets qui ont relevé le soutien aux chercheurs de l'ordre d'à peu près 30 % des subventions qu'ils avaient déjà. Le total de l'argent qu'on investit régulièrement, si on prend le budget de l'année dernière, c'est de l'ordre de 130 millions dans ces trois grands fonds de recherche, et cette année on rajoute, au cours des trois prochaines années, 40 millions qui vont s'échelonner sur les trois prochaines années aux 130 millions que les conseils ont déjà pour les rendre capables de consolider les réseaux de recherche au Québec et s'assurer que l'organisation de la recherche assure des masses critiques et des réseaux qui utilisent au maximum les ressources que l'on a dans l'ensemble du Québec avec des noyaux très forts et rendre nos chercheurs vraiment de plus en plus compétitifs pour que le 190 millions qu'on aura investi par la valorisation en recherche du Québec nous permette d'avoir des équipes de recherche consolidées, très fortes, qui vont chercher des fonds additionnels ailleurs au Canada ou même, de plus en plus, ailleurs en Amérique du Nord.

Et, finalement, à ces trois mesures spécifiques, il s'en rajoute une. J'ai dit trois, en fait il y en a une quatrième qui est importante à voir et qui est une innovation qu'on veut poursuivre par deux projets-pilotes en région, dans deux régions pour commencer, le Saguenay-Lac-Saint-Jean et l'Abitibi-Témiscamingue, où on veut reprendre l'expérience d'Inno-Centre. Inno-Centre a commencé à fonctionner depuis une douzaine d'années - en 1987, je pense - à Montréal, et c'est un organisme qui accompagne les entreprises où la recherche et l'innovation leur permettent de développer de nouveaux produits et d'atteindre une capacité de commercialisation et d'exportation. Et la formule - on n'a pas le temps de la détailler présentement - d'Inno-Centre a été un grand succès parce que, des 122 entreprises qu'ils ont accompagnées, 115 existent toujours aujourd'hui après 12, 13 ans et sont un succès.

Maintenant, c'est une formule qui a été développée dans l'environnement de la grande métropole, et on veut voir comment cette formule peut être exportée en région par deux projets-pilotes pour les soutenir. On a bien dit qu'une politique scientifique, ça vise les grands centres de recherche et de développement, mais ça implique les régions selon, chacune, leurs particularités, et c'est ce qu'on veut commencer à faire, s'assurer que la recherche et le développement permettent le développement et viennent aider au développement économique des régions. Alors, on a donc, je pense, des mesures spécifiques, comme j'ai tenté de le démontrer rapidement, qui viennent, à une hauteur à peu près égale à l'an dernier, soutenir avec beaucoup de continuité et de constance l'effort qui a été investi l'an dernier.

Avant de terminer, si on regarde les autres secteurs de l'effort gouvernemental qui sont en lien et où le travail d'un ministère de la Recherche, de la Science et de la Technologie est aussi d'appuyer le développement et de collaborer avec le développement d'autres secteurs, mentionnons qu'il y a des mesures importantes qui sont gérées par différents autres ministères pour la formation et la disponibilité d'une main-d'oeuvre qualifiée par différents programmes. Il y en a pour à peu près 20 millions. Il y a des mesures qui sont faites cette année, un effort important du côté des technologies de l'information pour rendre nos PME plus à jour sur le commerce électronique et pour développer nos inforoutes, qui sont une structure de base pour l'innovation dans les entreprises. Il y en a pour à peu près 170 millions dans le budget présentement.

(16 h 20)

Et, enfin, il y a des mesures aussi qui veulent, dans les différentes régions - toujours cette cohérence d'impliquer l'ensemble du Québec - permettre l'innovation et le développement d'entreprises qui peuvent avoir une valeur ajoutée, qui peuvent mettre une valeur ajoutée à leurs produits. Et ça, c'est dans des secteurs très diversifiés comme l'environnement, l'aluminium, la Cité de l'optique, et là on a un autre effort de 90 millions qui est fait. Alors, si on additionne tout ça, on a cette année encore un effort qui est fait de l'ordre de plus de 400 millions, comparativement à celui qu'on a fait l'an passé.

Et le ministre des Finances, dans la présentation de ce budget, a déjà annoncé la prochaine étape - je vous le dis, c'est une dynamique qui se déroule - et la prochaine étape, c'est celle qui verra la publication de la politique dans quelques mois. Et je cite mon collègue qui a dit que cette politique disposera des moyens requis pour que le Québec demeure à l'avant-garde en matière de savoir et de technologies nouvelles.

Alors, la table est mise. Dans les prochains mois, on aura plus une coloration de ce qui nous est servi. Je pense qu'on aura vraiment, cette année et l'an passé, mis le Québec à un niveau de très grande performance sur le plan scientifique et technologique, et on va s'assurer que ça continue pendant les prochaines année. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Pinard): Alors, merci, M. le ministre de la Recherche, de la Science et de la Technologie et également député de Charlesbourg. Nous allons maintenant céder la parole au député de Nelligan et également vice-président de la commission des finances publiques et responsable des dossiers des services sociaux. M. le député.


M. Russell Williams

M. Williams: Merci beaucoup, M. le Président. Je voudrais appuyer mes collègues, de ce côté de la Chambre, de critiquer le gouvernement et le budget parce que la population québécoise est très, très déçue par...

Une voix: ...

M. Williams: Peut-être que vous pouvez visiter votre bureau de comté et entendre qu'est-ce que la population québécoise dit.

Je ne suis pas un fiscaliste, je voudrais être assez simple. Lundi passé, nous étions, j'étais parmi la population la plus taxée en Amérique du Nord. C'était avant le budget, M. le Président. Après ce budget de sa vie, je suis encore, avec tous les frais que je paie et les taxes que je paie, le plus taxé en Amérique du Nord. Avant le budget, les Québécois étaient les plus taxés en Amérique du Nord, et, après le budget, nous sommes les plus taxés en Amérique du Nord. Mais ça, il me semble, M. le Président, que c'est assez évident, c'est un budget mal fait. C'est une opportunité manquée.

C'est assez clair que le gouvernement péquiste a décidé de mettre son option avant la population québécoise parce que partout en Amérique du Nord, partout au Canada les gouvernements sont en train de baisser les taxes d'une façon substantielle. Mais, au rythme qu'on voit, à la vitesse que ce gouvernement est en train de supposer baisser les taxes, ça va prendre 38 ans pour être égal avec l'Ontario, 38 ans pour être juste égal avec l'Ontario, si l'Ontario ne baisse pas encore les taxes. Et le premier ministre a déjà mentionné qu'ils vont baisser encore les taxes. Trente-huit ans. J'aurai 85 ans à cette époque-là. Franchement, j'ai pensé qu'on peut avoir une baisse des impôts beaucoup plus substantielle.

Mais ils ne sont pas sérieux, M. le Président. Juste sur la première question: Est-ce qu'ils vont vraiment baisser les taxes? Non, ils ont retardé, par exemple, l'indexation jusqu'à 2003. 2003, c'est quoi, ça, 2003? Juste avant une autre élection. Est-ce que c'est encore une fois une astuce électorale de cacher de l'argent comme ils ont caché les 841 millions de dollars à Toronto? Oui, oui, je sais que les députés devant moi sont d'accord avec moi qu'ils ont caché de l'argent à Toronto. Et c'est pourquoi nous avons eu le geste extraordinaire, la même journée qu'entrait le budget, de voir s'il y a une autre astuce de cacher l'information. Et c'est ça qu'ils ont fait, ils ont caché de l'argent dans le même temps qu'ils ont dit à tout le monde qu'il n'y a pas assez d'argent pour les services.

Est-ce qu'ils sont sérieux avec la réduction des impôts? Non. Avec la fameuse annonce de 4,5 millions pendant trois ans, enlève 1 milliard de dollars parce qu'il y a une non-indexation. Juste là, on perd 1 milliard de dollars.

M. le Président, aussi sur les dépenses, est-ce qu'ils sont sérieux sur les dépenses, sur les dossiers importants comme la santé? Chaque Québécois et Québécoise a demandé d'avoir un peu d'air frais dans la santé et encore une fois dans l'éducation. Est-ce que nous avons trouvé une vraie augmentation de budget après qu'on ait payé les déficits, les déficits que le gouvernement a transférés sur le dos des hôpitaux, des centres d'enfants, des centres de protection jeunesse, des cégeps, des commissions scolaires, des universités? Après ils soient tous payés et les coûts du système, est-ce qu'il y a vraiment de l'argent nouveau? Il y en a un peu, mais pas au niveau que tout le monde a pensé.

M. le Président, est-ce que vous trouvez un plan de service de dette, comment il va payer la dette? Non. Avec ça, le temps d'un budget, c'est le temps de choix gouvernemental, et nous avons vu que le choix de ce gouvernement, c'était de n'être pas sérieux. Ils ont choisi de n'être pas sérieux avec la réduction des impôts. Ils ont décidé de ne pas vraiment augmenter les dépenses dans la santé et l'éducation. Ils ont décidé de ne pas attaquer la dette. M. le Président, le gouvernement de l'Ontario, il a baissé les taxes pour 30 %, mais, selon mon information, il a eu une augmentation de 9 % de revenus au coffre provincial.

M. le Président, le gouvernement essaie de nous convaincre que l'économie québécoise marche bien malgré que nous avons juste 18 % des investissements privés, malgré que nous sommes 25 % de la population. La croissance économique... je sais que le gouvernement péquiste essaie de mettre des frontières, des murs au Québec pour s'assurer que le reste des Québécois ne comprend pas qu'est-ce qui se passe dans le reste du Canada ou de l'Amérique du Nord, mais nous sommes en arrière des autres provinces. L'accroissement économique à Québec, c'est 3,2 %. Au Canada, c'est 3,7 %. En Ontario, notre voisin, c'est 4 %. Nous sommes en arrière des autres provinces. Est-ce que c'est mieux que l'année passée? Il y a quelques secteurs... Je peux parler de ça un peu, mais ce n'est pas à cause du Parti québécois. It's in spite of the PQ.

M. le Président, ce gouvernement, il a systématiquement caché de l'argent, mais il a caché ses surplus parce qu'il ne veut pas montrer à la population qu'il peut baisser encore de l'argent. Il n'a pas voulu faire ça, il veut retarder ça pour des fins électorales. Comment le gouvernement peut être crédible après qu'il ait caché de l'argent, le 841 millions de dollars, à Toronto? Comment il peut être crédible quand il refuse de donner un plan de dépenses et revenus pour les prochains cinq ans? Il me semble que c'est le minimum.

Mais l'opposition officielle a recommandé une baisse des impôts beaucoup plus substantielle que ça. Ils n'ont pas fait ça. M. le Président, le gouvernement devant nous, le gouvernement péquiste, il a trouvé tous les mots pour dire comment il peut fouiller dans les poches des Québécois sans dire le mot «taxe». Il y a des mots qui me frappent: franchise, prime, copaiement. Et ça peut continuer avec: frais de l'utilisateur. Il y a: contribution des citoyens, participation des citoyens, frais de permis, ticket modérateur, frais d'usager. Ça peut continuer. C'est une façon de nous taxer indirectement. Nous avons eu une avalanche d'augmentations des frais, et, malheureusement, ce gouvernement n'a pas fait assez de baisser les impôts.

Juste sur la question des taxes sur l'essence, le Québec est la province la plus taxée au Canada sur l'essence. Est-ce que le gouvernement a décidé de faire quelque chose pour la population? Non. Avec une moyenne de 6 $ par semaine que le gouvernement a timidement coupés, nous allons perdre plus... à peu près la même chose avec l'augmentation qu'on paie à cause de l'augmentation du prix de l'essence, parce que le gouvernement n'a pas baissé les taxes sur l'essence.

Avec ça, M. le Président, je demande: Est-ce qu'ils sont sérieux sur toutes les questions des impôts? Mais je demande aussi: Est-ce qu'ils sont sérieux dans les programmes? J'essaie de trouver. Malgré que le Vérificateur général, en décembre 1998, ait mentionné les problèmes dans les services préhospitaliers d'urgence, est-ce qu'ils ont fait un plan pour ces services-là? Non. Encore une fois, c'est le gouvernement de comités qui a créé un comité qui va faire un rapport en septembre prochain. Est-ce qu'ils vont faire quelque chose de sérieux? Je ne le sais pas.

(16 h 30)

M. le Président, aussi dans quelques-uns de mes dossiers, ils ont parlé de quelques millions pour le secteur jeunesse, mais ils ont coupé, pendant cinq ans avant, 55 millions de dollars. Ils ont coupé 25 % des travailleurs sociaux dans nos écoles. Ils ont donné une augmentation... Je ne sais pas, M. le Président, mais je présume que vous avez eu des appels à votre bureau de comté pour les familles d'accueil. Ceux et celles qui aident nos jeunes, ils ont eu une augmentation cette année pour le per diem, le montant à chaque jour qu'ils reçoivent pour aider nos jeunes, 0,01 $ de l'heure, 0,24 $ par jour. M. le Président, c'est pitoyable comme augmentation. Est-ce que c'est dans le budget? C'est ça que tout le monde a pensé qu'il y aurait. Je demande: Dans tous les programmes, est-ce qu'ils sont sérieux pour investir dans les programmes importants, la santé, l'éducation? La réponse, je pense, est non.

Dans les questions, j'ai poussé le ministre, juste avant Noël - et j'avais écrit quelques lettres au ministre des Finances sur ça - sur le Programme de soutien en traitement des joueurs pathologiques. Le ministre n'a pas discuté de ça. Nous avons demandé qu'on puisse utiliser le mandat de l'Ontario pour avoir au moins 2 % des profits de Loto-Québec ou 10 millions minimum. Est-ce qu'ils ont fait ça, cette année? Non, M. le Président. Ils ont fait une annonce de cinq ans, six ans, actuellement, mais c'est juste après trois ans encore, pas maintenant. Ils vont donner l'argent, le minimum de 10 millions, plus tard pour ces services-là. Pourquoi? Parce qu'ils ne sont pas sérieux dans ces démarches.

M. le Président, je pense qu'une des choses les plus flagrantes dans le budget, c'est la façon dont ils ont traité nos élus et les contribuables qui paient les taxes municipales. Le 350 millions, ils ont dit qu'ils... Il rentre de l'argent dans une poche, maintenant ils vont prendre ça dans une autre poche parce qu'ils ont unilatéralement décidé de prendre la taxe sur les télécommunications, le gaz et l'électricité. Ce n'est pas une façon de gérer les choses. Il n'y a aucun gain pour les contribuables et les personnes qui paient les taxes municipales. C'est un non-respect pour nos élus. Il me semble que, encore une fois, le gouvernement est loin d'être sérieux dans sa stratégie économique.

Mr. Speaker, the population of Québec is greatly deceived and disappointed by this budget. We started the week the most taxed in North America, we ended the week the most taxed in North America. We didn't see a serious plan of tax reduction. Indexation, the only province that is not indexing. The famous bracket creep won't be implemented until 2003. A lot of the tax gain will be just lost without that. Is the Government serious about that reduction? No. Is the Government serious at all at investing in health and social services, in education? No. And we have seen in other provinces governments that have the courage to go farther, to boldly deal with these issues, have been able to, one, reduce taxes because people need those extra resources, but also invest in those fundamental services of health care and education.

Mr. Speaker, the Government has disappointed the population of Québec. They have chosen to put their option of separation above the interest of the people of Québec. What citizen in your riding, what resident in your riding has come up to you and said: Don't decrease my taxes in a substantial way? What people wanted was a substantial, courageous action plan for economic recovery of this province which started first and foremost with real tax reduction. They didn't get it. They wanted to see a plan that also dealt with those important services because this Government has mercilessly cut in health care and underfunded education in a terrible way.

But, Mr. Speaker, you know that they always have money when they want to for their option. $1 million for publicity on bill 99. $1 million. You've all seen the announcements in the papers. They have come up with $8 million for the Museum on Alcohol. You have seen the publicity in terms of what they think about the Federal Government. And, of course, don't forget, we started the last session with the $842 000 for the renovation of the minister of Health's offices and toilets. That shows that the Government is poorly placing its priorities. What I hope to do today is to underline some of the problems.

M. le Président, j'ai voulu, dans les quelques minutes qui sont accordées à nous, mentionner que c'est un budget timide qui a manqué une opportunité de vraiment aider l'économie québécoise. Malheureusement, c'est assez clair. Et, comme je l'ai mentionné, je ne suis pas un fiscaliste mais je pense que tout le monde peut comprendre ça assez facilement. Avant le budget, nous étions les plus taxés en Amérique du Nord - pas juste au Canada, en Amérique du Nord - et, après le budget, avec le niveau de taxes, et tous les permis et les frais d'usagers, nous sommes encore les plus taxés. Il me semble que la population québécoise mérite beaucoup plus que ça. Merci beaucoup.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, M. le député de Nelligan, de votre intervention. Nous en sommes sur le débat sur la politique budgétaire du gouvernement, et je vais reconnaître maintenant le prochain intervenant, M. le président du caucus du parti du gouvernement et député d'Abitibi-Ouest. M. le député, la parole est à vous.


M. François Gendron

M. Gendron: Oui. Merci, M. le Président. Alors, dans le peu de temps qui m'est imparti, je tenais absolument à parler sur le discours du budget parce que c'est une pièce majeure de l'action du gouvernement. Mes premiers commentaires, bien sûr, c'est à peu près toujours les mêmes, même si ça fait plusieurs années que je les fais.

Dans le discours du budget, il ne faut pas tellement porter d'attention à ce qu'on entend, entre autres, de l'autre côté, puis je dirai pourquoi.

Une voix: ...

M. Gendron: Oui, je l'ai déjà fait. Mais, dans les budgets, ce qui est important, c'est de regarder ce que celles et ceux qui vont bénéficier de la politique budgétaire, ils en pensent, il me semble que ça donne plus de hauteur et de crédibilité aux débats.

Rapidement, quand je regarde les réactions de celles et ceux qui ont le nez un peu moins près de la vitre pour ce qui est du discours du budget, que ce soit M. Ponton qui disait: Ce budget est très bon pour les manufacturiers à cause de telle affaire, M. Legault, président de la Chambre de commerce: Ce budget est très bon dans son ensemble parce qu'il donne suite aux engagements puis à la parole donnée, les présidents de centrale syndicale, que ce soit M. Massé, M. Laviolette ou Monique Richard, ils ont tous dit: Enfin, on renoue avec la restauration des réseaux de la santé et de l'éducation. Que ce soit M. Pierre Cléroux... Et j'aime bien mieux le jugement d'un Pierre Cléroux, objectivement, que ce que je viens d'entendre du député qui nous marmonne à peu près toujours la même chanson: Il n'y a pas ci, il n'y a pas ça, il n'y a pas ça. Puis ils ont fait la liste d'épicerie comme d'habitude, et je vous parlerai de leur grande cohérence. D'ailleurs, c'est le problème, pourquoi ils ont tant de difficultés, et ce n'est pas pour rien qu'une péquiste aussi chevronnée que Mme Lysiane Gagnon écrivait récemment: C'est quoi, le problème du PLQ? Je vais vous en parler tantôt, c'est quoi, le problème du PLQ. Moi, j'ai une bonne idée, après 24 ans d'expérience politique, du problème du PLQ.

Mais est-ce que les gens qui auront à vivre avec le budget, globalement ils disent que c'est un bon budget? C'est évident que la réponse, c'est oui, M. le Président, et ça, ça paraît pas mal plus crédible que le marmonnage qu'on va entendre de part et d'autre. C'est un bon budget parce que, un, est-ce qu'il y a une réduction d'impôts réelle? La réponse, c'est oui, elle est significative, puis elle ne s'applique pas mañana, mañana, elle s'applique le 1er mai prochain, là, il y a une baisse des impôts.

J'écoutais la critique de l'opposition officielle, une charmante dame avec qui j'ai l'occasion de travailler à la commission des finances publiques. J'y étais, d'ailleurs, à cette même commission. On a entendu toutes sortes de représentants qui sont venus nous donner les orientations qu'ils souhaitaient pour le prochain budget. Qu'ont-ils dit, M. le Président, principalement? Ils ont dit: Au Québec, au niveau de l'impôt des particuliers, il y a urgence qu'il y ait une correction significative. 2,5 milliards - ils essaient de caricaturer ça - c'est des pinottes, ça donne 1 $ par heure. Écoutez, ce n'est pas ça, la réalité, là. La réalité, c'est que c'est des milliards de moins en baisse des impôts. Ça, je l'ai entendu à satiété. Est-ce qu'on l'a fait? La réponse, c'est oui.

Deuxièmement - parce que le temps presse - ils ont dit: On veut un réinvestissement majeur en santé. Bien, est-ce qu'on a mis pas mal d'argent dans la santé? Ça ne me tente pas de refaire le budget, il y a eu le discours du budget, je ne le referai pas, mais tout le monde est unanime pour dire: Oui, il y a un investissement, ou un réinvestissement, majeur dans la santé. Est-ce que, les gens ont dit, en éducation, il n'y avait pas lieu et le moment n'était pas venu de redonner un peu plus de souffle à nos universités aux niveaux primaire, secondaire et collégial? C'est évident que la réponse est oui parce que ces gens-là ont fait énormément de sacrifices. Et je n'essaie pas de cacher quoi que ce soit, moi. Oui, c'est vrai que cet argent-là dont on dispose, c'est parce que l'économie va bien.

Je viens d'entendre - puis là je ne le qualifierai pas - le député qui vient de parler, puis il disait: Ils essaient de faire accroire que l'économie va bien. Tous les économistes, tous les gens intéressés par ces questions-là - puis ils savent de quoi ils parlent - ils nous disent... Le député de Rivière-du-Loup, j'ai du respect pour le député de Rivière-du-Loup. Il disait: Ça fait 30 mois et quelques que l'économie performe. Ça ne prend pas un grand clerc, pas besoin de fiscaliste, là, M. le Président. N'importe qui va dire: Oui, l'économie est en santé, ça va bien, on atteint des niveaux records. Je regarde juste le chômage, que ce soit pour l'ensemble du Québec ou dans les régions, moi, je n'ai pas vu ça depuis bien longtemps, un taux de chômage à 8 %. Je n'ai pas vu ça, ça fait très longtemps. Le taux de chômage québécois est à 8 %. Est-ce que ça signifie que ça va aussi mal que ces gens-là le laissent croire? La réponse, c'est non. Je ne peux être très long, je fais juste vous dire que j'aime bien mieux ça.

(16 h 40)

Puis, en conclusion, y avait-u de quoi de plus significatif que le lendemain du sondage, surtout quand ça a été repris par des chroniqueurs qui ont de l'expérience, qui ont l'habitude des débats ici, en cette Chambre? J'en cite un, Michel David. Il disait: «La très grande majorité des Québécois, 81 %, ont aimé le budget, selon le sondage éclair», bon, ainsi de suite. Ça ne dit pas tout, je le sais, mais ça dit d'une façon assez significative rapidement c'est quoi, le pouls, c'est quoi, le pouls de l'opinion publique. Pas le pouls du Parti libéral qui a des problèmes internes, là. Ça donne quoi exactement dans l'opinion publique? Ça donne que les gens, globalement, sont satisfaits.

Est-ce que tout a été couvert? Je les entendais les uns après les autres: Vous avez oublié à telle place un 2 $, un 10 $ à telle place. Bien, c'est évident, là. Je n'essaie pas de dire qu'il n'y a pas eu des omissions, mais pas d'une façon significative. C'est un budget qui rejoint à peu près l'ensemble des chroniqueurs, des gens qui connaissent ça, que ce soit Picher, Dubuc, Décarie, Samson, Paul Roy, Michel David, puis ça traduit ce que je viens de vous dire, un taux de satisfaction de 81 %, des gens qui disent: Enfin, un budget qui a de l'allure. Donc, ils repasseront, ces gens-là, pour constamment débâtir le budget.

Si je le regardais plus, cependant - toujours pour des raisons de temps - au chapitre de choses qui m'intéressent, je voudrais au moins faire quelques phrases sur les régions. Est-ce que, moi, là, j'aurais été très déçu s'il n'y avait pas eu un effort un peu plus fort dans ce budget-là pour montrer que, nous autres, le souci des régions du Québec, on l'a encore? Je le dis comme je le pense. Oui, j'aurais été déçu. Mais je lis ça, là, mesures en Gaspésie, mesures aux Îles-de-la-Madeleine, mesures en Abitibi, mesures à Sorel-Tracy, mesures au Saguenay-Lac-Saint-Jean, aide à l'industrie de la forêt. Forêt, ce n'est pas Montréal, ça. Puis je n'ai rien contre Montréal, en passant. Tant mieux si elle va bien, là. Ça, c'est dans les régions, la forêt. Les mines, c'est dans les régions. Aide aux milieux ruraux, je rencontrais des gens il n'y a pas longtemps. Est-ce que la politique de soutien avec des agents de développement ruraux va demeurer? J'étais capable de répondre oui, parce que c'était dans le budget.

Quand je vois, par exemple, un programme de diversification économique des régions de 50 millions, 50 millions de diversification, c'est important parce que, quand il arrive un coup dur comme l'Abitibi en vit un présentement... Parce que, nous, on a trois bonnes économies: forêt, mines, agriculture. Oups! les mines, ça va mal. Ça va mal parce que, nous, on ne les supporte pas. On les supporte bien plus que ceux qui défendent... Avant le budget de M. Martin, qui était supposé être un budget extraordinaire, je me rappelle, le député libéral qu'il nous reste - parce qu'on en a échappé un, là, il nous en reste un encore - alors, lui, le député libéral, il disait: Vous allez voir, vous allez voir que, dans le budget, nous, on comprend ça, la nécessité de supporter le développement minier. Pas un clou, pas un rond, avec des surplus de 95 milliards. C'est ça, les fédéraux. C'est de même qu'ils aident le Québec. Pas une cenne pour le support à l'industrie minière. Est-ce que, moi, dans mon budget, je n'ai pas une cenne? La réponse, c'est non, j'ai une quinzaine de millions. Puis là je n'ai pas le temps de le détailler, d'autres le feront, mais il y a du support à l'industrie minière pour l'Abitibi-Témiscamingue.

D'ailleurs, M. Landry, ministre d'État à l'Économie et aux Finances était justement en Abitibi-Témiscamingue hier avec les décideurs régionaux, puis les décideurs régionaux lui ont dit: On est conscients que ce n'est jamais facile, compte tenu de notre situation, pour toutes sortes d'autres raisons: ce qu'on a hérité, l'équilibre budgétaire. Mais ces gens-là voulaient le remercier puis le féliciter, parce qu'ils disaient: Globalement, il y a là des mesures intéressantes, puis il y en a pour les jeunes, puis il y en a pour l'éducation, puis il y en a pour la santé. Il me semble que ça traduisait ce que j'appelle l'«effet de la parole donnée». Moi, ça m'intéresse toujours qu'un gouvernement, par le biais de sa politique budgétaire, donne suite à des engagements qu'il a pris, puis, dans les engagements qu'on avait pris, nous, on avait dit: Il faut réinvestir: santé, éducation, jeunesse, puis diversification économique, et les régions. On l'a fait. Donc, globalement, le budget, il est bon.

Deuxièmement, je vous ai dit que je vous parlerais un peu des problèmes du chef du Parti libéral. Je n'ai pas le choix parce que j'entendais sa réplique, ce matin, et là je cite: Nos voisins de l'Ontario sont mieux que nous autres, puis on perd du terrain par rapport à l'Ontario. Il faudrait mettre plus d'argent dans la santé, plus dans l'éducation, il faudrait baisser davantage les impôts parce que votre baisse est insignifiante, il faudrait mettre de l'argent sur la dette, il faudrait baisser l'essence, puis ça continuait. Ça n'a pas de bon sens. Qu'est-ce que c'est que ça traduit? Ça traduit toujours deux choses, M. le Président. Après deux ans à la tête du Parti libéral, le chef actuel, le chef de l'opposition, n'a pas réussi à démontrer qu'il avait la moindre idée de la direction qu'il voudrait imprimer au Québec, s'il avait jamais, par malheur, les cordeaux de la direction du Québec. Pas un poil après deux ans. Ce n'est pas d'hier, là. Ça paraît, d'ailleurs, qu'il ne connaît pas le Québec.

Imagine-toi, la ministre de la Santé, anciennement, à matin, était à l'Éducation. Ça vous donne une idée, là. Même à l'intérieur de ses rangs, il ne se rappelait pas de ça, qu'elle n'était pas ministre de l'Éducation, qu'elle était ministre de la Santé, Mme Lavoie-Roux. Puis il la citait, ce matin. Donc, ça amenait la conclusion de M. Michel David qui disait: «Il semble très clair que le chef de l'opposition ne semble pas capable de faire de la politique avec un grand P.» Ce n'est pas compliqué, ça, pour de la petite politique, il est très habile, mais, pour faire de la politique avec un grand P, il a un problème. Et ce n'est pas pour rien qu'il se faisait dire par ce monde-là - puis c'est encore revenu ce matin dans les journaux: Le Parti libéral n'a pas encore compris l'appel du président de sa Commission politique, Marc-André Blanchard, qui disait, en octobre, que, pour être crédible en politique, ça prend un minimum de cohérence.

Pensez-vous que j'ai des exemples de cohérence? J'ai écouté religieusement ces répondeurs automatiques. Ils arrivent avec leurs discours, puis toujours la même liste d'épicerie: Vous avez oublié ça, vous avez oublié ça, ça prendrait plus d'argent ici, plus d'argent pour les jeunes, plus d'argent pour les régions, plus d'argent en éducation puis une baisse d'impôts à la hauteur de 6 puis 7 milliards. Ça ne marche pas, M. le Président. Et le point le plus fondamental, avec la critique, pour laquelle j'ai beaucoup de respect, c'est l'Ontario «all the way», en latin. C'est toujours l'Ontario. Je me demande qu'est-ce qu'ils font ici. Ça, c'est de tromper et d'induire les citoyens et les citoyennes du Québec en erreur. Jamais, jamais le Québec, avec toutes sortes de mesures, d'efforts, ne pourra égaler l'Ontario, puis il y a des raisons très simples. Moi, je n'ai pas le Pacte de l'automobile avec 95 % des automobiles produites dans le Canada, elles sont produites en Ontario. C'était vrai quand j'étais étudiant à l'école normale, c'est vrai depuis 24 ans que je suis en politique puis ça va être vrai dans une dizaine d'années.

Je pourrais vous faire l'autre liste qu'on connaît. Est-ce qu'on a un budget de recherche du gouvernement fédéral, nous, à la même hauteur que l'Ontario? La réponse, c'est non. Est-ce qu'on a ce que j'appellerais le même développement de l'industrie secondaire forte qu'en Ontario, avec beaucoup d'argent du fédéral, au Québec? La réponse, c'est non. Ils voudraient qu'on crève, les fédéraux, ils voudraient que, nous, on n'existe pas. Puis ce n'est pas une question de chicane, c'est une question de réalité.

J'étais professeur de mathématiques. Je me rappelle, je disais: Une équation, parfois il faut que ça marche. Une équation, là, il faut que ça marche...

Une voix: Il faut que ça balance.

M. Gendron: ...il faut que ça balance. Alors, comment voulez-vous croire ces gens-là qui sont d'accord avec le déficit zéro? Et ils le disent, qu'ils sont d'accord. Écoute, j'ai des profondes inquiétudes. Mais, moi, je sais une chose, la population est d'accord avec le déficit zéro. Comment voulez-vous, M. le Président, très sérieusement, avoir l'objectif de maintenir des finances saines, avoir l'objectif de retourner aux contribuables une partie des nombreux efforts qu'ils ont faits? Ça, ça voulait dire la hauteur des investissements qu'on a à nouveau faits en éducation, en santé, pour les jeunes, les régions, ainsi de suite, une baisse d'impôts parce que la fiscalité des particuliers, effectivement, était disproportionnée par rapport à celle des gens de l'Ontario. On ne peut pas tout prêcher ça, puis en rajouter, puis en rajouter, puis en rajouter, puis être crédible. Bon, ça fait le problème qu'ils vivent, ça fait le problème. M. Charest, un petit peu de cohérence, ça ne ferait pas tort, un peu de rigueur, ça ne ferait pas tort. C'est ça qu'on lit.

Le chef de l'opposition, avant que le budget sorte, il a dit: Ça va être un budget balloune, trompe-l'oeil - toutes sortes de qualificatifs que je ne prends pas - où on va cacher des sommes, puis ainsi de suite. On l'a félicité pour la transparence des chiffres. Tous les chroniqueurs puis ceux qui connaissent ça l'ont félicité qu'enfin les chiffres soient à la bonne place puis qu'on soit capable de comprendre exactement de quoi il s'agit. Alors, ça s'appelle quoi, ça, quand on réagit toujours pour avoir de la réaction vitrine, que j'appelle, sans aucune direction, sans aucune profondeur? Bien, ça fait le problème de fond qu'ils ont. Où s'en vont-ils? Je ne suis pas capable de les suivre, moi, et j'ai assez d'expérience pour être en mesure de croire que les citoyens et les citoyennes du Québec, après avoir fait de nombreux efforts - parce qu'ils en ont fait - ils s'attendaient qu'on ait un budget rigoureux, qu'on ait un budget très précis, très clair, mais qui permette de redonner du souffle, avec également quelques modérations, parce que, quand on est dans une période de croissance depuis moult années, il se peut - je ne le souhaite pas, mais il se peut - que le rythme ne soit pas nécessairement le même. Donc, il faut être sage, il faut être prudent. C'est ce qu'il a fait.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Abitibi-Ouest. Nous poursuivons le débat sur la politique budgétaire du gouvernement, et je vais céder la parole maintenant au porte-parole de l'opposition officielle en matière d'environnement et député d'Orford. M. le député, je vous cède la parole.


M. Robert Benoit

M. Benoit: Merci, M. le Président. C'est avec grand intérêt que j'ai écouté le député avant moi. Un célèbre écrivain disait que tout ce qui était exagéré était insignifiant. Alors, je pense que ça s'applique très bien à ce que je viens d'entendre comme discours. C'était nettement exagéré, et, par le fait même, vous comprendrez que ce n'était pas très fort.

(16 h 50)

M. le Président, il nous dit que l'économie va bien. J'en suis. Ce qu'il nous dit, c'est que, depuis 117 mois, effectivement, l'économie nord-américaine est sur une lancée, qu'il n'y a pas de comparable. Je vous donne des chiffres: 1958 à 1960, 24 mois; 1970 à 1973, 45 mois, 60 mois; 93 mois entre 1982 et 1990. Nous avons 117 mois de croissance sans arrêt, du jamais vu dans l'histoire de l'Amérique. Le Québec, pendant cette période-là, aurait dû faire, tout au moins, un peu bien. Si on se compare à d'autres, aux États-Unis, il dit: On ne veut pas se comparer à l'Ontario. Bien, très bien, on ne se comparera pas à l'Ontario, on va se comparer à notre autre voisin, on va se comparer aux États-Unis. Croissance année après année: 4,5 %, 4,3 %, 4,1 %. Le Québec: 2,3 %.

Le taux de chômage. Nous avons encore, en terre d'Amérique, le plus haut taux de chômage, et ça, c'est sans parler des centaines de jeunes Québécois qui sont en ce moment à travailler à Whistler parce qu'ils ne se trouvent pas de job au Québec, des centaines de jeunes francophones qui travaillent à Lake Louise, en Colombie-Britannique, en Alberta, au Manitoba, dans tous ces centres de ski. Et, quand on leur parle, là-bas, ils nous disent: On ne se trouve pas d'emploi, il n'y a pas d'emploi chez nous, alors on a quitté.

Ça, c'est sans vous parler des deux jeunes de mon village. François Soucy, qui est rendu à Boston après avoir fait une Maîtrise en chimie payée par les Québécois parce qu'il ne se trouve pas de travail au Québec, il est rendu à Boston. Il est après se mettre millionnaire, là-bas, vice-président de l'entreprise. Ça, c'est sans parler de l'autre jeune de mon village qui s'appelle Jean Trottier, qui, lui, est rendu à Vancouver. Lui, il est avec une Maîtrise de l'Université McGill en architecture. Lui non plus ne s'est pas trouvé une job vraiment intéressante. Quand je regarde ce qu'il gagne maintenant à Vancouver... Ils sont tout jeunes, ces jeunes-là, ils ont entre 26 et 30 ans. Ça, c'est l'exode des jeunes qui ont quitté le Québec. On me dit que ça va très bien. Bien sûr que ça va mieux qu'en 1976, mais comparons-nous. Ces gens-là, ils ont une peur épouvantable de se comparer, M. le Président, et pourtant le village, il est global.

Je me souviens, au dernier référendum, j'avais été au cégep avec ma consoeur de Saint-François, et, comme de coutume, le PQ avait bien paqueté la première rangée. On comparait le Québec à d'autres pays, à d'autres provinces, à d'autres États, et ces jeunes, en avant, nous ont dit: Oui, mais arrêtez donc de vous comparer aux autres; nous autres, au Québec, on est différents. J'en suis, que nous sommes différents, et j'en suis fier, de cette différence, mais, M. le Président, les plus forts doivent se comparer, et, nous, du Parti libéral, même si le député qui vient de parler n'aime pas qu'on se compare, bien, on va se comparer parce qu'on va regarder ce qui se fait ailleurs et comment, nous, on fait mieux ou qu'on fait moins bien.

M. le Président, il nous dit: Ça va si bien, au Québec. Bien, d'abord, si ça allait si bien que ça, le chômage ne serait pas au niveau où il est. En ce moment, au Vermont, au Maine, juste à côté de la barrière de mon comté, là-bas, il y a tellement peu de chômeurs que les restaurants sont obligés de fermer, des industries complètes. Et j'invite le député qui vient de parler à lire la revue Newsweek de la semaine dernière, il y a une étude complète sur le taux de manque de main-d'oeuvre en ce moment dans les provinces et dans les États nord-américains. Ce n'est certainement pas le problème du Québec de manquer de main-d'oeuvre.

Il nous dit: Ça va très bien. Je l'invite à regarder dans le document du ministre à la page 12, les épargnes des ménages du Québec. Je sais que c'est un député qui est près de ses gens. Quand on lui parle d'un cas de comté, il est au courant. J'ai eu affaire avec lui, il est courant de ce qui se passe dans son comté, et je l'en félicite. Mais soyons un peu au courant aussi de la difficulté des ménages du Québec d'arriver à la fin du mois. Alors, à la page 12, regardez, les gens qui nous regardent. Il n'y a plus d'économies, les Québécois n'ont plus les moyens de mettre de l'argent de côté. Pourquoi? Parce que l'économie du Québec ne fonctionne pas. L'épargne des Québécois n'est pas là, l'économie ne fonctionne pas. Rien, à comparer avec ce qui se passe sur le continent en ce moment. Les Québécois se sont appauvris.

Il y a quatre grandes causes à cet appauvrissement. D'abord, nous sommes et nous demeurons les plus taxés en terre d'Amérique. Ça veut dire quoi, ça? Ça veut dire que les gens qui sont venus me voir à mon bureau de comté vendredi... Ce père de famille, avec son épouse et ses deux enfants, quand il se compare à peu importe quel Canadien, à la fin du mois, il lui reste moins d'argent dans ses poches pour se payer cette petite lecture, pour se payer ce collège un peu mieux pour son enfant, pour se payer un peu de sport.

M. le Président, il y a des retombées à tous les jours. L'économie du Québec ne fonctionne pas, et, deuxièmement, nous sommes les plus taxés. Mais avons-nous plus de services pour ces plus grandes taxes? Eh bien, non. Nos écoles ne fonctionnent pas mieux, nos hôpitaux ne fonctionnent pas mieux, nos universités ne fonctionnent certainement pas mieux. Et là je vous parle des taxes, mais je vais aussi vous parler de tous ces frais indirects.

Il y a quelques mois, on a appris qu'il y aurait 3 $ par pneu. Ça a l'air de rien, on nous a passé ça entre Noël puis le jour de l'An, un petit 3 $. Je viens de mettre la main sur un décret gouvernemental, parce que, oui, les gens qui iront se promener dans les parcs du député qui vient de parler avant moi vont maintenant payer 4 $ par jour pour aller respirer le bon air du parc, regarder les petits oiseaux. Oui, M. le Président. Ils n'ont pas fait de grosse annonce là-dessus, ils n'ont pas dépensé 1 million pour le mettre dans le journal. En passant, les gens auront jusqu'au 22 avril pour dire ce qu'ils en pensent au gouvernement, parce que, oui, c'est dans la Gazette officielle , il y aura un 4 $ de plus par jour. Le bon père de famille qui paie déjà le plus d'impôts en terre d'Amérique, eh bien, là, le dimanche, quand il voudra venir se promener à Mégantic, dans le parc, ou au parc du Mont-Orford, ou dans le comté du ministre,là, il devra payer 4 $ par personne pour aller respirer l'air puis regarder les petits oiseaux.

Alors, il nous parlait de M. Claude Picher, tantôt. Qu'est-ce qu'il a dit, M. Claude Picher? Parce que, oui, M. Claude Picher, il vous a aussi rappelé à l'ordre. Il vous a dit qu'effectivement, pour régler le problème du Québec, vous aviez augmenté les frais de l'État, les dépenses de l'État, de 5 milliards depuis que vous êtes là, 5 milliards. Et il vous a rappelé aussi que vous êtes venus chercher dans nos poches, nous, simples citoyens, pour régler vos problèmes, 8 milliards année après année pour régler vos problèmes. Alors, nous sommes les plus endettés, nous sommes les plus taxés et nous ne voyons pas l'heure où nous allons nous en sortir.

M. le Président, un citoyen du Québec qui nous regarde ce soir doit se demander: Jusqu'à quel jour de l'année je travaille pour payer mes impôts? Bien, si vous me dites: Le 28 mai, je travaille jusqu'au 28 mai pour payer mes impôts, eh bien, là vous vivez à Terre-Neuve. Si vous me dites: Bien, je pense que je travaille à peu près jusqu'au 10 juin pour payer mes impôts, vous êtes à l'Île-du-Prince-Édouard. Si vous me dites: Le 18 juin, je vais vous dire: Vous êtes au Nouveau-Brunswick, vous payez des impôts, vous travaillez jusqu'au 18 juin pour ne payer que vos impôts, après ça vous commencez à travailler pour vous. C'est ce qu'on appelle le «tax freedom day». Si vous payez vos impôts jusqu'au 28 juin, vous êtes au Nouveau-Brunswick; le 29 juin, en Ontario; en Colombie-Britannique, jusqu'au 1er juillet. Si vous êtes au Québec, la semaine de la construction va commencer quand vous allez commencer à travailler pour vous. Oui, cette année, vous allez travailler, au Québec, jusqu'au 13 juillet, les plus éloignés de tous les citoyens de la terre d'Amérique. Le 13 juillet, quand vous allez mettre vos bagages dans votre voiture pour partir en vacances avec vos enfants, cette journée-là, vous allez commencer à travailler pour vous, le 13 juillet. Et notre confrère du gouvernement nous rappelle que ça va très bien au Québec. Bien oui, on travaille jusqu'au 13 juillet pour payer nos impôts.

La taille de l'État. Eh bien, M. le Président, quand on lit les programmes du PQ, quand on lit les budgets du PQ, qu'est-ce qu'on fait? On ajoute des structures, on ajoute toutes sortes de patentes qui finalement ne créent pas la richesse. Je ne veux pas aller trop loin là-dessus parce que ça prendrait trop de temps, mais bien d'autres l'ont dit, et des grands professeurs, des confrères d'université, au ministre de l'Économie. Le professeur Jean-Luc Migué, combien de fois il a rappelé à ce gouvernement que, quand le PIB est rendu à tout près de 52 % - c'est ça, 52 % qui vient directement de l'État - ça a un effet néfaste sur l'économie d'une province et d'un pays?

Des études ont été menées. J'en ai ici, j'en ai par Fraser. Il y en a eu de menées sur 100 années, 100 années par le Fonds monétaire, M. le Président, sur 17 pays, et, à chaque fois que la taille de l'État dépasse 30 % de l'économie générale, on voit l'économie chuter mois après mois. Eh bien, nous, au Québec, avant ce budget, nous étions à 52 %, direct ou indirect. Les CRD, les CLD, les régies régionales, c'est toutes sortes de structures qui ne créent pas la richesse, ni individuelle ni collective, et c'est la deuxième cause pour laquelle les Québécois sont les plus taxés.

(17 heures)

La troisième cause, les États sont des mauvais investisseurs. Eh bien, oui, croyez-le ou non, ce gouvernement vient de nous annoncer un autre plan Paillé - à la page 29, il y a un chaînon manquant, etc. - et on mettra là-dedans jusqu'à 100 000 $ par projet, garantis à 80 % par la banque ou la caisse. Qu'est-ce qui s'est passé la dernière fois qu'on a eu un plan Paillé, M. le Président? Même le Vérificateur général du Québec - j'ai ses écrits ici, j'ai son rapport - disait comment le plan Paillé avait été une totale désillusion pour les citoyens du Québec.

Je vous rappelle que, dans le plan Paillé numéro 1, il y avait eu 300 millions. Il s'est perdu 148 millions; il s'est créé très peu d'emplois. Le plan Paillé, et le Vérificateur général disait même dans un rapport - j'ai des notes ici - quand il parlait de la restauration, M. le Président: «Le Bureau de la statistique du Québec, les emplois prévus s'écartent largement de l'objectif, selon la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante.» Les restaurants, au moment où on a créé le plan Paillé, il y avait 12 000 emplois. Il dira: En 1995, il y en aura 16 000. L'augmentation de 31... le chiffre d'affaires a baissé, lui, de 21 % dans les restaurants, et l'emploi va passer de 110 000 à 103 000. M. le Président, le plan Paillé a été un fiasco sur toute la ligne. Ça a coûté des deniers épouvantables. Ce n'est pas moi qui le dit, c'est le Vérificateur général. Et voilà qu'on nous revient avec ça.

Pire que ça, pour ceux qui ont lu aujourd'hui le journal Les Affaires : «La part des PME grimpe partout au Canada, sauf au Québec.» Ce sont des experts. Martin Jolicoeur, qui reprend une étude faite par les Hautes études commerciales: Partout au Canada, la part des PME grimpe, sauf au Québec. Et on veut nous revenir avec le plan Paillé qui a déjà été démontré comme étant un fiasco total de a à z et coûtant très cher.

M. le Président, la quatrième cause pourquoi nous sommes les plus taxés, pourquoi on ne peut même plus se comparer aux autres provinces, que ce soit au niveau de la croissance, du chômage, de l'emploi, une société qui définit mal ses missions, une société qui est jalouse des missions des autres... La moitié de son discours, il l'a faite contre le Parti libéral, et l'autre moitié, contre le fédéral, M. le Président, sur un discours d'une quinzaine de minutes. J'ai pris ça en note, là. Alors, quand il n'agressait pas le Parti libéral, il agressait le fédéral. Si j'étais un député du gouvernement, j'aurais vanté les bienfaits du budget, j'aurais dit comment mon ministre a apporté des mesures précises. Mais, non, il a agressé tout le monde.

Alors, ce gouvernement-là, encore une fois, définit mal ses missions, M. le Président. Ils sont partout en même temps, petit voyage ici, petite subvention à gauche, et ils n'arrivent à rien. Et, devant ça, quand on voit des missions économiques aux États-Unis tellement bien ciblées, quand on voit comment l'Ontario avec Mike Harris a ciblé son programme, comment ils ont décidé de mettre plus d'argent dans la santé, comment ils ont décidé de prendre de front le monde municipal et de régler les problèmes, pas faire ce qu'on est après faire au Québec, de laisser perdurer des situations où les maires s'en vont en désobéissance, M. le Président... Dans mon propre comté, des maires ont décidé d'aller en désobéissance. C'est du rarement vu. Vous n'avez pas vu ça en Ontario, M. le Président, parce qu'ils ont pris leurs responsabilités.

M. le Président, je finirai en citant John F. Kennedy. John F. Kennedy disait qu'un gouvernement devait bien cibler et il disait: «Never before has man had such a capacity to control his own environment, to end thirst and hunger, to conquer poverty and disease.» Ce que Kennedy disait, c'est: Jamais on n'a été plus capable de régler les problème de faim et de soif, de pauvreté et de maladie et de bannir la misère, M. le Président. C'est ça, cibler la mission d'un gouvernement. Eh bien, je m'excuse, ce gouvernement... je n'ai jamais vu tant de gens couchés dans les rues, je n'ai jamais vu tant d'oeuvres de la soupe s'ouvrir, je n'ai jamais vu tant de malades si peu soignés, je n'ai jamais vu dans mon bureau tant de gens âgés nous demandant des soins à domicile parce qu'on ne leur en donne pas.

John F. Kennedy avait raison, M. le Président, la soif et la faim, la pauvreté et la maladie et bannir la misère, ce gouvernement n'y est pas arrivé après six ans. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député d'Orford, de votre intervention. Nous en sommes toujours sur le débat sur la politique budgétaire du gouvernement, et je vais céder la parole à la vice-présidente de la commission de l'aménagement du territoire et députée de Deux-Montagnes. Mme la députée, je vous écoute attentivement.


Mme Hélène Robert

Mme Robert: Merci, M. le Président. Je ne peux pas m'empêcher, d'entrée de jeu, de souligner l'attitude du député qui m'a précédée en Chambre sur le budget. Je crois au rôle de l'opposition de mettre en lumière les inquiétudes, le questionnement des populations vis-à-vis du travail de l'aile parlementaire, mais vous savez que, quand on en met trop, on en met trop, on devient beaucoup moins crédible. Et c'est un peu dommage, mais c'est l'image que ça me donne. Et ça enlève de l'impact à une bonne critique constructrice.

Alors, M. le Président, de l'avis général, le ministre des Finances du Québec, M. Bernard Landry, vient de déposer un budget qui fait déjà histoire. Ainsi, nous avons tous noté avec satisfaction que, pour la première fois en 40 ans, il y a baisse d'impôts pour le contribuable. Je félicite donc le ministre des Finances du Québec pour la sagesse, la rigueur, mais aussi l'imagination dont il a fait preuve dans la préparation de son budget 2000-2001. Il s'est montré un chef d'orchestre remarquable devant l'ampleur de la tâche.

M. le Président, il faut reconnaître que la population du Québec a été mise fortement à contribution ces dernières années. Elle a en effet fourni plus que sa large part dans la lutte au déficit, une lutte chaudement menée et qui, aujourd'hui, porte ses fruits évidents. Après avoir été sollicités, comme le furent aussi les municipalités et tout le milieu économique, après cela, donc, nos concitoyennes et concitoyens voient aujourd'hui le résultat concret et positif des efforts qui leur ont été demandés.

Bien sûr, dans le concert d'éloges qui a entouré la livraison du budget du Québec, des voix discordantes se sont fait entendre, et c'est de bonne guerre, le sain exercice de la démocratie le voulant ainsi. Toutefois, demeurons positifs et constructifs et considérons d'abord l'immense contribution du budget Landry aux familles, citoyennes et citoyens qui attendaient avec raison un juste retour des choses. C'est maintenant chose faite avec une réduction majeure d'impôts, soit quelque 4,5 milliards de dollars sur quatre ans.

Nos amis d'en face, M. le Président, noteront avec intérêt que c'est deux fois plus que ce qu'a consenti Ottawa dans la petitesse du budget Martin, et ce, malgré les faramineux surplus qu'il a dégagés, notamment sur le dos des travailleurs et des travailleuses. Le budget 2000 du Québec est taillé sur mesure pour une société qui regarde et qui marche droit devant, fière de ses acquis et de ses projets, une société encore mieux équipée pour continuer de bâtir l'avenir.

Au cours des quelque 18 derniers mois, M. le Président, notre gouvernement a saisi maintes fois l'occasion de réaliser les engagements qu'il avait pris pendant la campagne électorale. Je pense ici, entre autres, aux places en garderie à 5 $ et au dossier de la politique d'adaptation scolaire. Eh bien, je le dis avec fierté aujourd'hui devant ce remarquable budget, quand nous avons dit: J'ai confiance, nous avons eu raison.

Voilà en effet que le réseau de la santé se voit octroyer une massive contribution nouvelle de 2,7 milliards de dollars pour permettre aux Québécoises et Québécois de continuer d'avoir accès à des services de santé de qualité. Permettez-moi de relever le sérieux de la démarche du gouvernement dans l'exigence qu'il pose dorénavant aux institutions de santé de ne plus commettre de déficits. De plus, s'il permet le financement et l'équilibre budgétaire de ces établissements, le budget prévoit des investissements dans l'acquisition de nouveaux équipements en radio-oncologie et en hémodynamique. Tous les intéressés, des patients au personnel médical et soignant, en passant par les administrateurs, n'ont qu'à se féliciter des ressources significatives dégagées en santé par le budget Landry. Nous voulons tous une gestion optimale de cet argent investi, et tous, j'en suis convaincue, M. le Président, nous allons faire notre devoir en ce sens.

(17 h 10)

À titre de représentante de la circonscription de Deux-Montagnes, je suis particulièrement sensible à la saine administration qui a prévalu au Centre hospitalier Saint-Eustache, au centre local de services communautaires Olivier-Chénier, et aussi dans les CHSLD. Je souhaite - et je vais travailler en conséquence - qu'ils reçoivent la juste part de ces dollars additionnels. Nous répondons, dans Deux-Montagnes, aux besoins d'une population croissante qui prend de plus en plus l'habitude de consommer ses services de santé dans la région et non plus à Montréal, et donc la pression est de plus en plus forte.

Cette même circonscription de Deux-Montagnes compte une forte proportion de jeunes, clientèle cible du dernier budget du Québec. Plus de 1 milliard de dollars vont être consacrés aux jeunes, à l'échelle du Québec, par le biais de diverses mesures concrètes. Si elles sont ainsi, c'est que, pour un bon nombre d'entre elles, elles s'inscrivent directement du récent Sommet du Québec et de la jeunesse. J'y étais, à ce Sommet. Je sais le message que les jeunes y ont fait entendre et je constate avec plaisir que le gouvernement répond avec empressement aux aspirations, besoins et attentes exprimés alors.

Encore une fois, M. le Président, nous avons su écouter. Nous avons confiance en eux et savons qu'ils sont capables du meilleur. Nos mesures favorisent donc l'excellence. Une série d'investissements leur sera consacrée, visant à l'amélioration de la qualité de l'enseignement. Il y aura embauche de professeurs et accélération du renouvellement des manuels scolaires. Des exemptions et crédits d'impôt sont aussi prévus parmi certaines mesures.

M. le Président, j'ai toujours entretenu une grande confiance dans les jeunes. Leur énergie et leur créativité sont la meilleure garantie que ce milliard de dollars à leur endroit constitue un investissement non seulement nécessaire, mais judicieux. M. Landry leur dit: Nous avons confiance en vous et nous allons vous le prouver de manière éloquente. Nous allons fournir des bases solides à votre plein épanouissement.

Ayant parlé, en début d'intervention, M. le Président, d'un budget tourné vers un demain souriant et solide, je faisais entre autres allusion à l'important virage Internet que le gouvernement du Québec permettra à des familles et à des PME de prendre. Il consentira aux unes une aide pouvant aller jusqu'à 75 % des coûts reliés à un abonnement et à la location des équipements requis, et aux autres, un crédit d'impôt égal à 40 % du coût de développement.

La critique, M. le Président, fera bien valoir qu'il n'y a, à ses yeux, que rattrapage. Qui niera le retard estimé à deux ans que le Québec branché accuse? Cette constatation faite, l'opposition est-elle plus avancée? Ce qu'il faut souligner, au contraire, c'est le geste concret posé par le gouvernement pour apporter les correctifs qui s'imposent en cette matière. Les mesures annoncées par M. Landry favoriseront ce mouvement devenu incontournable, nous le reconnaissons tous, vers l'Internet, à la grandeur du Québec.

Que dire aussi, M. le Président, de cette injection de plus de 675 millions de dollars liée au développement économique? Si nous sommes devant un tel budget stimulant et prometteur, c'est que l'économie a bien roulé. Il convenait donc de tirer parti de cette conjoncture favorable en appuyant massivement les efforts de ce secteur d'activité. Le budget Landry, M. le Président, dégage une somme importante destinée à lui permettre d'évoluer et de se faire plus compétitif. Il consent des montants spécifiques au titre des infrastructures dont il n'est plus besoin de rappeler la pertinence.

Par diverses mesures, municipalités et régions, M. le Président, se voient accorder de l'argent neuf au chapitre, en particulier, de la création d'emplois durables. Bien sûr, l'on pourra entendre que ce n'est pas encore assez. J'ai pu comprendre les besoins et attentes des municipalités et des régions, mais je sais surtout combien grands sont leur sens de l'initiative et leur créativité. Je les sais capables de bien performer avec les sommes dégagées pour elles dans le budget non pas pour montrer que c'était suffisant, mais bien pour démontrer tout ce dont elles seront capables avec un peu plus au prochain budget.

Je suis convaincue que les mesures Landry pour les municipalités et les régions seront utilisées avec imagination.

Il est un dernier point que je veux aborder, celui auquel peut-être le plus de gens, de contribuables sont sensibles, je parle ici des excellentes nouvelles que réserve le budget Landry au chapitre de l'impôt des particuliers. Deux constats majeurs: pour un, la baisse très importante qui leur est consentie répond à une promesse faite dans le cadre de la lutte au déficit; et, d'autre part, elle résulte aussi de l'écoute du gouvernement aux besoins et attentes exprimés de maintes sources en faveur d'un allégement notable du fardeau fiscal des contribuables québécois.

Eh bien, M. le Président, c'est maintenant chose faite et c'est deux fois plus que ce qu'Ottawa avait consenti à ce même chapitre il y a peu de temps. Le budget Landry donne le signal d'un nouveau départ fondé sur une base dorénavant plus solide. Il indique que rigueur et imagination peuvent aller de pair en finances publiques et illustre à merveille que, quand on veut, on peut. On l'a dit, mais répétons-le parce que c'est fondamental: Le budget que vient de nous donner le ministre des Finances du Québec constitue un juste retour des choses.

Ne tardons pas, M. le Président, à nous mettre toutes et tous au travail et continuons à bâtir un Québec plus compétitif, un Québec branché, un Québec tourné vers ses jeunes et vers une population qui entend continuer de participer à l'effort collectif largement engagé et dont elle a déjà pu, avec ce budget 2000, mesurer les retombées positives. Je vous remercie de votre attention.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Deux-Montagnes. Nous en sommes à l'étape du débat sur la proposition budgétaire du gouvernement, et je cède la parole maintenant à la porte-parole officielle de l'opposition en matière de tourisme et députée de Jean-Talon. Mme la députée, je vous écoute avec attention.


Mme Margaret F. Delisle

Mme Delisle: Merci, M. le Président. Alors, comme il est de coutume, de tradition, j'interviens à mon tour sur le budget qui a été déposé la semaine dernière par le ministre des Finances. Alors, la présentation du budget annuel du gouvernement est toujours un moment fort dans la vie des parlementaires et celle de tous les citoyens et les citoyennes du Québec. C'est le moment où chacun des secteurs d'activité de notre société est informé concrètement des choix qui sont faits par leur gouvernement quant à leur importance stratégique pour son développement collectif et informé également des ressources que celui-ci compte mettre à leur disposition au cours de la prochaine année pour assurer la progression de ces programmes-là.

(17 h 20)

Le Parti québécois, M. le Président, est passé maître dans le discours et dans la mise en scène théâtrale de cet événement, ce qui lui permet de maquiller ses faiblesses ainsi que ses préjugés favorables envers certains secteurs d'activité en leur accordant, pour certains, des crédits d'impôt et, pour d'autres, des avantages fiscaux sans que d'autres en bénéficient aussi largement. Par exemple, il est vrai, il faut le reconnaître, que la performance économique du Québec s'est améliorée sensiblement au cours de la dernière année et a permis de dégager des surplus de 2 milliards de dollars. Toutefois, il est faux de prétendre que la pauvreté est en voie de disparition parce qu'un bon nombre de citoyens ont pu intégrer le marché du travail. On a qu'à se promener, M. le Président, sur la rue Sainte-Catherine à Montréal, dans certains quartiers du Vieux-Québec et ailleurs au Québec pour s'apercevoir que, oui, il y a des gens qui ont pu réintégrer le marché du travail, mais il y a de plus en plus de jeunes et de gens qui non seulement sont sans travail, mais qui sont sans logis et sans nourriture. Et ça, c'est un scandale, quand on considère que, dans une région comme la mienne, il y a des gens, encore aujourd'hui, qui ont froid et qui ont faim. On n'a pas réglé ce problème-là, on l'a mis de côté.

Le seul fait qu'il faudra encore trois ans aux plus bas salariés du Québec pour que leur taux d'imposition passe de 20 % à 17 % constitue une pression encore trop lourde sur les épaules de ces gens. Ainsi, malgré une présentation des plus convaincantes, et même si ce gouvernement se dit social-démocrate, il est clair que ce n'est pas avec 6 $ de plus dans leurs poches pour cette année que M. et Mme Tout-le-monde pourront désormais dépenser librement et sans compter. C'est ce que la députée de Deux-Montagnes nous rappelait tout à l'heure lorsqu'elle disait que c'était un juste retour des choses que ce budget du ministre des Finances.

En fait, au-delà des belles paroles du ministre des Finances, les contribuables québécois demeurent, encore aujourd'hui, les contribuables les plus taxés en Amérique du Nord et ces surplus budgétaires lui viennent essentiellement des trop-perçus chez les payeurs de taxes. En effet, depuis les cinq dernières années, les revenus autonomes du parti au pouvoir, donc du Parti québécois, proviennent pour l'essentiel des poches des contribuables. Ces revenus sont passés de 29,5 milliards à 38,3 milliards de dollars, soit une hausse de 8,8 milliards de dollars. Un bond, M. le Président, qui frise les 30 %. Alors, lorsque le député d'Abitibi-Ouest nous dit qu'on chante la même rengaine, bien c'est une rengaine qu'il faut que les gens, les contribuables qu'on représente, et qu'il représente, sachent. De plus, la non-indexation des tables d'impôts avant janvier 2003 fait en sorte que les Québécois continueront d'assumer des hausses d'impôts déguisées de plus de 300 millions de dollars par année, soit près de 1 milliard de dollars au bout de trois ans. Voilà, encore une fois, pour la transparence et la social-démocratie. Si vous permettez, M. le Président, on repassera.

Et que penser du fait que, pendant que les 3 millions de payeurs de taxes du Québec subissaient des ponctions excessives, pendant que le gouvernement accumulait des surplus, pendant que les hôpitaux, les institutions scolaires devaient assumer les intérêts liés à des déficits causés par leur sous-financement, aujourd'hui, le premier ministre déclare sans sourciller, sans sourciller, qu'en santé, il faudra un resserrement, je le cite, là, «un resserrement de la gestion budgétaire pour l'améliorer»? Quel exemple ce gouvernement a-t-il donné jusqu'à présent aux contribuables du Québec? Et j'aimerais, si vous me le permettez, M. le Président, rappeler à mes collègues et aux gens qui nous écoutent que les déficits dans les établissements scolaires, dans les établissements de santé, vous le savez, ça, c'est la marque de commerce du Parti québécois. Lorsque le Parti libéral du Québec a repris le pouvoir en 1985, ce gouvernement, l'autre côté, là, est celui qui a laissé une dette et des déficits de l'ordre de - juste dans le réseau de la santé - 300 millions de dollars. Et j'en passe pour le réseau de l'éducation. Donc, ça leur ressemble énormément.

On se souviendra également que le déficit zéro, ce gouvernement-là l'a atteint en transférant ses factures aux municipalités, des taxes supplémentaires aux contribuables, des baisses de salaire à ses employés sous la menace d'une loi spéciale. À ce que je sache, les hôpitaux n'ont pas de pouvoir de taxation ni de pouvoir leur permettant d'imposer leurs conditions de travail à leur personnel. Ils n'ont pas non plus la possibilité de transférer certaines dépenses dans des fonds spéciaux qu'on retrouve un petit peu à gauche et à droite pour éviter qu'elles n'apparaissent à leurs états financiers.

Vous me permettez, M. le Président, de rappeler au député d'Abitibi-Ouest que le Parti libéral du Québec, en 1994, en campagne électorale, avait promis de réduire en cinq ans le déficit de la province. On n'a pas pris le pouvoir. C'est le Parti québécois qui a pris le pouvoir et a passé la première année à dépenser, à dépenser et à dépenser en fonction du référendum. Et ça leur a pris deux ans avant d'entendre l'opposition officielle, dont je fais partie, pour accepter d'aller vers l'atteinte d'un déficit zéro. Alors, je vous dis bien franchement, je suis très fière qu'on ait intégré ça dans notre programme. Et, quand le député d'Abitibi-Ouest nous dit qu'on ne sait pas où on s'en va, nous, on le sait où on s'en va, M. le Président, on s'en va de l'autre bord, puis eux autres s'en viennent de ce côté-ci.

Qu'on veuille encadrer les besoins en santé qu'on qualifie de presque inépuisables, je veux bien, mais, quand, sur les 2,7 milliards de dollars, on prend 200 millions pour les dépassements de coût de l'assurance médicaments alors qu'on avait prévu dégager une autonomie financière lors de sa création et qu'il ne reste que 200 millions de dollars afin de réduire les listes d'attente et d'améliorer l'accessibilité aux services pour les malades, on peut demeurer sceptiques quant aux résultats escomptés. Et le gouvernement n'a pas de leçons de morale à donner aux gestionnaires des milieux de la santé et de l'éducation.

On se rappellera que, lorsque ce gouvernement nous répète qu'il investit 2,7 milliards de dollars en santé, il y a déjà 1,7 milliard qui s'en va pour payer les déficits des hôpitaux, les coûts de système, les augmentations salariales, 339 millions pour Héma-Québec et des services d'indemnisation des victimes de l'hépatite C, et il ne reste que 200 millions pour du développement en santé. Ce n'est pas 2,7 milliards de dollars qu'on investit; le nouvel argent, c'est pour payer les dettes de l'année qu'on vient de passer.

Qu'est-ce qu'il restera pour les personnes âgées, les soins et le maintien à domicile, les centres hospitaliers et les soins de longue durée? On rapportait, la semaine dernière, dans un quotidien, les propos du Protecteur du citoyen qui déclarait, et je le cite: «Les personnes âgées institutionnalisées sont en train de devenir des victimes de plus en plus abandonnées, marginalisées et carrément martyrisées.» Fin de la citation. Il ajoutait également, et je le cite, qu'«une large part de la responsabilité de cette situation revenait au ministère de la Santé et des Services sociaux qui avait coupé dans les budgets des aînés.»

Oui, M. le Président, l'équilibre budgétaire du gouvernement, les personnes âgées y ont grandement contribué et, pour beaucoup d'entre elles, au détriment de leur propre planification financière. Et il n'est pas exagéré de dire que plusieurs d'entre elles l'ont fait au détriment de leur santé. Il n'est pas rare non plus d'apprendre que, dans les centres d'hébergement pour personnes âgées, un préposé à lui seul est responsable du bain de 18 patients. Qu'est-il advenu de l'empathie naturelle de ce gouvernement pour la population et de son sens humanitaire?

Sur le plan communautaire, la situation n'est guère reluisante. Le sous-financement des organismes est chronique. Dans la seule région de Québec, une bonne majorité des 272 organismes crie famine. Malgré cela, le présent budget ne prévoit pas d'argent pour ce milieu qui dispense des services essentiels à la communauté à des coûts moindres, comme l'ont expliqué à plusieurs occasions les travailleurs du milieu, sans parler de la contribution gratuite d'une armée de bénévoles qui, tous milieux confondus, sauvent des milliards de dollars en services pour lesquels il faudrait payer autrement.

À l'automne dernier, les organismes communautaires nous faisaient part de l'épuisement de leur personnel et de leurs bénévoles. Ils lançaient un cri d'alarme quant à la survie de plusieurs d'entre eux. Pour leur part, les régies régionales de la santé et des services sociaux, dont l'avenir est constamment remis en question, n'arrivent plus à suffire à la demande. Comment le gouvernement peut-il justifier son silence dans un secteur aussi crucial d'activité sociale, et qu'attend-il pour développer une politique de l'action communautaire doublée de ressources adéquates?

Il ne faudrait pas oublier, M. le Président, de parler des municipalités et du développement des régions. Malgré l'atteinte du déficit zéro depuis un an, le gouvernement a décidé de maintenir la facture de 356 millions aux municipalités. Cette facture a déjà entraîné soit, dans certains cas, une hausse d'impôts, soit, dans la plupart des cas, le report de travaux de réfection, d'entretien ou de développement d'infrastructures, ou les deux à la fois.

(17 h 30)

Quant à la réforme de la fiscalité qui devait encourager et stimuler l'effort fait par les municipalités pour l'atteinte du déficit zéro, celle-ci devait déboucher sur la diversification de sources de revenus pour les municipalités. Trois ans plus tard, toujours rien. Dans le contexte agité qui prévaut actuellement, le maintien de cette facture ainsi que l'appropriation du gouvernement des revenus de la TGE pour des raisons plus ou moins nébuleuses en disent long sur le respect de celui-ci à l'endroit des autres élus et de leurs contribuables qui, sans vouloir l'oublier, sont les mêmes citoyens qui lui paient des taxes et impôts. Pas content de leur vider les poches, il vient chercher le porte-monnaie avec.

Certaines municipalités, on le sait, ont décidé de contester devant les tribunaux cette troisième facture. Malgré tout, les municipalités qui ont accepté cette charge fiscale auraient souhaité pouvoir investir cet argent dans le développement économique de leur région, développement dont le gouvernement leur a confié la responsabilité et pour lequel il a mis en place les CLD. Le gouvernement aurait certainement pu faire preuve de créativité. Plutôt que d'empocher le 356 millions, il aurait pu le remettre aux municipalités ou aux régions pour qu'elles puissent s'occuper elles-mêmes de leur développement.

M. le Président, le temps file. J'aimerais dire quelques mots sur un secteur d'activité qui me tient à coeur, celui du tourisme. Depuis 10 ans, les entreprises touristiques québécoises, quels que soient leur taille ou leurs produits, font des efforts soutenus pour offrir une qualité de service et de produits de niveau international. Tous s'entendent - les gouvernements comme les travailleurs de l'industrie - sur la nécessité de se doter d'outils nécessaires permettant d'améliorer et de diversifier l'offre québécoise. Tourisme Québec a beau développer un plan d'action, établir des stratégies de promotion ou investir dans un système électronique d'information et de réservations, comment le gouvernement actuel peut-il expliquer la faiblesse des budgets alloués à ce secteur d'activité? Comment le premier ministre peut-il justifier le rétrécissement progressif du champ d'action de Tourisme Québec, la difficulté persistante pour les entreprises dans ce secteur d'activité d'obtenir du financement pour leurs installations et leurs équipements? Comment peut-il expliquer encore que le gouvernement veuille faire du mur-à-mur, que ce soit au niveau de la promotion, des regroupements régionaux qui, dans les faits - le caractère particulier, la spécificité géographique, architecturale et patrimoniale de certaines régions - sont en soi leurs atouts touristiques les plus forts et que leur dilution dans l'ensemble nuit à leur rentabilité?

En fait, M. le Président, la question qu'il faut se poser à ce moment-ci est la suivante: Qu'attend la gouvernement pour reconnaître l'industrie touristique comme une véritable activité économique et pour lui accorder l'aide et l'appui dont elle a besoin, au même titre qu'il le fait pour les entreprises issues de la nouvelle économie, les secteurs industriels, manufacturiers ou autres?

M. le Président, j'en aurais encore bien long à dire, je sais que mon temps est écoulé. Alors, permettez-moi de vous dire que je me vois dans l'obligation de voter contre le budget déposé la semaine dernière par le gouvernement du Québec.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la députée de Jean-Talon, de votre intervention. Nous poursuivons le débat sur la politique budgétaire du gouvernement, et je vais céder la parole au ministre de la Solidarité sociale et député de Gouin. M. le ministre, la parole est à vous.


M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, s'il avait fallu s'en remettre au chef de l'opposition, la lutte à la pauvreté aurait été complètement écartée du dernier budget. Nous avons tous pu constater, lorsque le Parti libéral du Québec a fait connaître ses priorités budgétaires, qu'il ne faisait pas grand cas des plus démunis de notre société. Si le chef de l'opposition avait été à la place du ministre des Finances, la lutte à la pauvreté, le sort des assistés sociaux n'auraient pas figuré au tableau du dernier budget. D'ailleurs, ce qui en fait foi, c'est le communiqué de presse émis par le chef de l'opposition quelques jours avant le budget. Sa grande préoccupation était alors de comparer notre baisse d'impôts avec celle de l'Ontario.

Cela, M. le Président, n'est pas le cas pour notre gouvernement. Si l'allégement du fardeau fiscal figure bien haut au niveau des priorités du gouvernement, nous avons bien marqué, depuis notre arrivée au pouvoir, que cet allégement passait d'abord et avant tout par une fiscalité responsable et généreuse avec les citoyens et citoyennes à bas revenus. À nouveau, cette tendance lourde qui est celle de la lutte à la pauvreté continue de guider notre gouvernement. Le budget d'ailleurs déposé par mon collègue vice-premier ministre et ministre des Finances, M. Bernard Landry, pose en ce sens différents gestes qui augmenteront, d'une part, le pouvoir d'achat de milliers de personnes à bas revenus et, d'autre part, des mesures qui amélioreront les services publics qui leur sont destinés.

Commençons par la fiscalité, sujet de prédilection de l'opposition. Le gouvernement vient de faire en sorte que le nombre de contribuables qui ne paient pas d'impôts en raison de leurs bas revenus - une population qui comprend 40 % des contribuables - sera augmenté de 130 000 contribuables. À ce choix qui est le nôtre - un choix nettement social-démocrate - s'oppose celui des Chrétien et des Paul Martin. Malgré les 11 milliards de surplus dont il dispose cette année, le fédéral se retient bien de s'engager aussi à fond que le Québec dans le soutien aux familles à faibles revenus.

Et, concrètement, M. le Président, au Québec, une famille qui a deux revenus et deux enfants commence à payer de l'impôt à partir de 34 800 $ de revenu annuel. Mais cette même famille commence à payer de l'impôt au fédéral dès que son revenu atteint 14 900 $. C'est tout un monde de différence. On parle d'un écart de revenus de l'ordre de 20 000 $; ce n'est pas rien.

L'engagement de lutte à la pauvreté qu'a pris notre gouvernement, et ce, au fil des cinq derniers budgets, en est un en faveur de milliers de familles à bas revenus. Il s'agit d'un engagement sérieux, à long terme, afin de rendre plus équitable le système d'imposition. Il s'agit de mesures bien concrètes pour réduire la pauvreté. À côté des gestes significatifs déjà posés par le gouvernement du Québec, et ce, faut-il le reconnaître, en période de lutte au déficit, le gouvernement fédéral s'enorgueillit cette année, et ce, jusqu'en 2002, de réduire d'un maigre 57 $ l'impôt que doit payer un couple avec deux enfants et un revenu de moins de 20 000 $.

Pendant ce temps, M. le Président, le Québec n'en continue pas moins d'agir avec détermination sur le front de la lutte à la pauvreté. Ainsi, aux mesures reliées à la fiscalité que je viens de mentionner, le budget a-t-il ajouté environ 530 millions de dollars de plus pour venir directement en aide aux familles à faibles revenus au cours des trois prochaines années. Par ce budget, nous maintenons le cap sur la lutte à la pauvreté de différentes façons. J'attire votre attention sur quatre d'entre elles.

Premièrement, nous répondons à une des principales requêtes des organismes de défense de droits des assistés sociaux. Par l'abolition de la réduction de prestations pour partage de logement, notre gouvernement corrige aujourd'hui une décision prise par un gouvernement libéral, en 1989, et qui avait un effet direct sur le pouvoir d'achat des prestataires de l'aide sociale. Concrètement, cela veut dire que 60 000 prestataires de la sécurité du revenu, auparavant touchés par une mesure de réduction pour partage de logement, verront leur chèque mensuel augmenter d'environ 50 $ en juin et un autre 50 $ d'ici la fin de notre mandat. Deux prestataires partageant un même logement pourront, à compter du 1er juin prochain, compter chacun sur 600 $ de plus pour boucler l'année et sur 1 200 $ de plus d'ici la fin de notre mandat. Ces augmentations représentent environ 80 millions en retombées directes dans les poches des prestataires sur une période de trois ans.

En abolissant la réduction de 100 $ imposée par le gouvernement libéral aux personnes qui font preuve de débrouillardise et d'appui mutuel en partageant un loyer, le régime de sécurité du revenu met fin, du même coup, à toute une série de dispositions visant à débusquer les personnes dans cette situation et à recouvrer les sommes que certaines d'entre elles avaient injustement perçues en contrevenant à la loi. Il s'agit donc d'un geste déterminant sous l'angle de la préservation d'un barème plancher à l'aide sociale et du respect du libre choix de vie des prestataires.

L'ajustement des prestations des assistés sociaux aptes au travail est un deuxième geste significatif posé par le gouvernement du Québec et repris dans le budget. Encore là, ces 77 millions sur trois ans sont directement destinés aux prestataires. Ainsi, les personnes qu'on nomme «sans contrainte sévère à l'emploi» - ce sont les gens qui se retrouvent à la sécurité du revenu et qui peuvent travailler - recevront, dès le 1er juin prochain, 8 $ à 15 $ de plus par mois, dépendant de leur situation familiale, soit un montant annuel de 96 $ à 180 $ par ménage. Ce montant vise à aider les prestataires à faire face à la hausse des prix estimée à 1,6 % en 1999.

Nous savons tous, M. le Président, que l'aide de dernier recours, dans le cas des personnes aptes au travail, n'est qu'une façon de soulager la pauvreté. L'important, l'essentiel, c'est de lutter de façon énergique contre l'appauvrissement. Encore là, le choix du gouvernement du Québec est sans équivoque: la véritable lutte à la pauvreté passe par la création d'emplois. Et, sur ce terrain, le choix qu'a fait le gouvernement du Québec porte des fruits. Avec un taux de chômage de 8,1 % qu'affichait le Québec en décembre dernier, le plus bas taux de chômage depuis 23 ans, depuis les Jeux olympiques, il est clair, M. le Président, que, sous notre gouverne, le Québec est rentré sur la voie de la prospérité, sur la voie de la relance. En 1999, 79 900 emplois ont été créés.

(17 h 40)

Et la question qui se pose, c'est: À qui profite cette relance? Et, comme ministre de la Solidarité sociale, je peux vous dire qu'elle profite aux assistés sociaux. Le taux de sortie du régime de la sécurité du revenu est un indicateur qui, d'ailleurs, ne ment pas. Pour la première fois depuis 1991, le taux d'assistance sociale est passé sous la barre des 400 000 ménages. À chaque mois, des milliers de personnes retournent sur le marché du travail. Au cours de la dernière année, ils sont 41 400 concitoyens et concitoyennes à avoir quitté la sécurité du revenu pour le marché de l'emploi, et, devant ces chiffres, M. le Président, de façon sans équivoque, tous les membres de ce côté-ci de la Chambre se réjouissent.

Et ce sont des chiffres qui sont révélateurs de deux réalités: la première, c'est que la reprise profite aux plus démunis de notre société et leur permet de façon très, très concrète d'améliorer leur sort; la deuxième, c'est qu'une forte proportion de prestataires de la sécurité du revenu sont, en fait, des chômeurs, des personnes qui souhaitent aller sur le marché du travail, qui ont du potentiel, qui ont du talent à mettre au profit des entreprises et des autres employeurs. Au premier signe d'une reprise, elles saisissent l'opportunité de sortir de la sécurité du revenu, de retrouver leur autonomie financière et de meilleures possibilités d'améliorer leur situation personnelle. M. le Président, plusieurs mesures du budget auront, encore cette année, une incidence positive sur la création d'emplois, mais je laisse le soin à d'autres de présenter la liste complète.

J'aimerais maintenant parler du Fonds de lutte à la pauvreté par la réinsertion au travail et de l'expérience-pilote Solidarité jeunesse qui vise à aider des jeunes en situation précaire à trouver des alternatives à l'aide sociale. À l'issue du Sommet du Québec et de la jeunesse, il y a lieu de saluer la reconduction du Fonds de lutte contre la pauvreté par la réinsertion au travail qui totalisera 160 millions de plus sur trois ans. Il s'agit de la troisième mesure bien concrète du budget Landry pour continuer à aider les personnes plus éloignées du marché du travail à développer leurs compétences.

Tous les députés de cette assemblée, qu'ils soient libéraux ou péquistes, ont déjà pu mesurer les effets bénéfiques du Fonds de lutte contre la pauvreté dans chacun de leurs comtés, dans chacun de leurs milieux. La grande majorité ont d'ailleurs contribué au développement de projets issus d'organismes communautaires et d'entreprises de leur localité. La reconduction du Fonds permet aux régions, permet aux communautés locales de continuer à innover pour mieux aider les personnes en situation précaire à améliorer leurs perspectives d'emploi. Le Fonds de lutte incarne éloquemment une nouvelle vision structurante de l'aide à l'insertion sociale et professionnelle, une vision moderne de lutte contre la pauvreté et l'exclusion.

Je pourrais longuement aussi vous parler du projet Solidarité jeunesse. L'ensemble des députés ont reçu récemment de l'information sur cette question, il me fera plaisir d'en reparler.

Mais je voudrais, M. le Président, en concluant, rappeler que, de toute évidence, les choix du gouvernement sont des choix progressistes, sont des choix qui respectent un objectif que nous avons en tête qui est celui de faire en sorte que tous et toutes puissent travailler à bâtir le Québec; faire ce choix de l'exclusion zéro, ça a été confirmé, plus de 530 millions d'argent neuf en appui à ceux et celles, les plus démunis qui sont à la recherche d'emploi...

M. le Président, je remarque le silence de l'opposition sur ces questions, dans les communications officielles, dans les discours tenus ici, un silence frappant, marquant, désolant sur les questions de pauvreté. À ce silence nous répondons par des gestes, par des actions concrètes, et que ceux et celles de cette Assemblée qui ont encore des doutes retournent dans leur comté voir ce qu'a fait le Fonds de lutte à la pauvreté, voir ce que Solidarité jeunesse a fait, voir ce que les groupes de défense d'assistés sociaux disent au sujet de l'indexation et de la coupure de partage du logement, et j'ai confiance que, avec cette étude terrain, cette connaissance du milieu, ils comprendront très bien, comme 84 % des Québécois et Québécoises, la force, la vision contenue au budget du ministre des Finances. Je vous remercie.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Nous poursuivons sur la politique budgétaire du gouvernement, et je vais céder la parole à la porte-parole de l'opposition officielle en matière de ressources naturelles et députée de Bonaventure. Mme la députée, je vous écoute avec attention.


Mme Nathalie Normandeau

Mme Normandeau: Merci, M. le Président. Je vois que le ministre responsable de la Solidarité sociale m'interpelle, mais j'aurai peut-être quelques réponses à lui fournir en regard de l'intervention qu'il vient de faire.

M. le Président, j'ai l'opportunité aujourd'hui, pendant plus de 10 minutes, de vous livrer les commentaires et de vous livrer la perception des Gaspésiens et des Gaspésiennes en regard de ce fameux budget tant attendu par les gens de chez nous. Évidemment, c'est un budget qui était attendu parce que plusieurs comptaient sur le budget Landry et sur les diminutions d'impôts pour s'assurer que notre région puisse être relancée sur le plan économique.

Alors, lorsqu'on a reçu le budget, je me suis empressée de le lire très attentivement et pour y découvrir, malheureusement, qu'il y avait loin de la coupe aux lèvres par rapport aux mesures qui ont été annoncées. Et je m'explique, M. le Président.

Les Gaspésiens et les Gaspésiennes nourrissaient énormément d'attentes à l'endroit de ce budget-là, et la raison en est fort simple. Tous croyaient qu'avec un budget comme celui-là, on allait enfin - enfin - pouvoir relancer l'économie de la région, remettre notre économie régionale sur les rails de la croissance, M. le Président.

Alors, lorsqu'on regarde le budget d'un peu plus près, on constate que le budget Landry nous a fait des annonces de l'ordre de 26 millions pour la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine dans toutes sortes de secteurs d'activité: les forêts, l'agriculture, le tourisme, le transport, les ressources naturelles. M. le Président, 26 millions qui viennent s'ajouter évidemment aux 23 millions qui ont été annoncés à l'automne dernier, total 49 millions de dollars, c'est un montant important. Et, lorsqu'on regarde le budget, on est en mesure et en droit de se dire: la Gaspésie et les Îles-de-la-Madeleine, sur la base des autres régions de Québec, ont été sûrement très favorisées - très favorisées - compte tenu qu'on parle de 49 millions au total.

Évidemment, lorsqu'on feuillette le budget plus en détail, il y a une chose qui m'a frappée: le gouvernement péquiste a choisi d'investir 61 millions de dollars dans la réfection de deux infrastructures majeures pour le Québec - on parle de l'École nationale de police, également de l'Institut de tourisme et d'hôtellerie - 61 millions de dollars pour procéder à la rénovation de deux bâtiments, 61 millions par rapport à 49 millions pour venir en aide à une économie régionale qui affiche de très grandes difficultés sur le plan économique.

Chez nous, il y a plus de 20 % de taux de chômage. Les gens quittent la région, et ce mouvement d'exode est accéléré depuis que la Gaspésia de Chandler - dossier, évidemment, dont on a fait mention ici à plusieurs reprises - les gens quittent depuis que cette usine d'importance est fermée.

Alors, le gouvernement, le ministre des Finances et donc l'ensemble de ses collègues ministériels avaient une occasion en or d'envoyer un message clair aux Gaspésiens et aux Gaspésiennes, que le gouvernement péquiste avait l'intention de prendre le taureau par les cornes et de s'attaquer à la racine du problème et de faire en sorte qu'on puisse relancer notre économie. Il n'y a pas seulement que moi, comme députée évidemment, qui a décrié le fait que les 49 millions qui ont été annoncés sont nettement insuffisants.

Un journaliste me soulignait: Mme Normandeau, vous ne pensez pas qu'il manquait un zéro après le 49 millions? Oui, effectivement, M. le Président, il manquait un zéro. Et il en manque peut-être plus qu'un, zéro, pour s'assurer que les mesures qui ont été annoncées puissent nous permettre de retrouver la prospérité en Gaspésie, parce que c'est le voeu, je pense, que tous les Gaspésiens et les Gaspésiennes formulent. Et je pense que c'est le voeu que tous les députés ici formulent, de s'assurer que la Gaspésie puisse réellement participer au développement économique de l'ensemble de la province. M. le Président, pour toutes sortes de raisons sur lesquelles on n'a pas de contrôle, la Gaspésie ne peut malheureusement pas participer à cet effort collectif et faire en sorte que la Gaspésie puisse retrouver le chemin de la croissance.

Alors, 49 millions qui ont été annoncés, c'est nettement insuffisant. Il n'y a pas que moi, comme députée, qui l'ait décrié. L'ensemble, la très grande majorité des intervenants socioéconomiques et politiques ont souligné justement l'absence de volonté du gouvernement actuel de s'attaquer à la racine et au coeur du problème. La plupart de ces intervenants ont souligné leur déception face au budget qui a été annoncé, soit les 49 millions. Et il y a même le ministre des Finances qui a admis que l'argent qui était annoncé pour la Gaspésie, les sommes qui ont été annoncées allaient créer des emplois temporaires. Alors, évidemment, en créant des emplois temporaires, on ne règle par le problème à sa source. D'une année à l'autre, M. le Président, la région, les intervenants auront à se battre pour obtenir les deniers dont nous avons besoin pour relancer notre économie.

(17 h 50)

Et le gouvernement, en ce moment, cherche, à travers ses grandes théories économiques, à relancer notre région. Mais le problème, je vous dirais qu'il n'est pas tellement compliqué: quand on aura réussi à rouvrir la Gaspésia, quand on aura réussi à annoncer le démarrage de la cimenterie de Port-Daniel, lorsqu'on aura réussi à redémarrer les activités de l'usine de transformation de poisson de Newport, lorsqu'on aura réussi à relancer ces trois entreprises majeures pour la Gaspésie, M. le Président, on aura réglé 50 % et plus de notre problème. Le gouvernement, devant son incapacité, donc, de relancer des projets comme ceux-là, nous annonce des mesures tape l'oeil. Il y a une vaste opération de marketing qui a été annoncée, M. le Président, pour nous convaincre du bien-fondé des mesures qui ont été annoncées.

Si on va plus en détail, M. le Président, je prends un exemple très précis, soit le 800 000 $ qui a été annoncé pour évaluer la ressource éolienne en Gaspésie. On sait tous, M. le Président, que la région de la Gaspésie-Îles-de-la-Madeleine, notamment, a un potentiel immense au niveau de la fabrication d'énergie éolienne. Évidemment, il y a les vents qui nous sont favorables. Cependant... Et j'ai questionné le ministre des Finances, lorsqu'il est venu à Carleton, vendredi dernier, sur le programme qui était annoncé. Le ministre nous dit: Écoutez, oui, l'énergie éolienne, c'est un secteur d'activité important en Gaspésie et ça pourrait peut-être devenir un des secteurs, donc, d'importance pour la Gaspésie, qui vous permettrait de vous démarquer à la fois à travers tout le Québec, tout le Canada, mais, pourquoi pas, en Amérique du Nord. Parfait, M. le ministre. On est tous d'accord avec ça. Mais, par rapport à ce qui a été annoncé, le ministre a oublié un élément important: Hydro-Québec, qui est un joueur de première importance dans le secteur de l'énergie éolienne, ne veut absolument rien savoir d'acheter, à l'heure actuelle, de l'énergie éolienne. Alors, c'est bien beau de fabriquer de l'énergie éolienne, M. le Président, en Gaspésie, mais, s'il n'y a personne pour l'acheter, on fait quoi?

Alors, le ministre, de toute évidence, ne connaissait pas tous les tenants et aboutissants, donc, d'un dossier comme celui-là, mais on a dû le ramener à l'ordre un peu et lui expliquer les vraies choses de la vie. On a eu l'occasion d'avoir le président d'Hydro-Québec en commission parlementaire deux jours, et, de toute évidence, ce qu'on constate, c'est que le président d'Hydro-Québec est davantage attiré par le gaz naturel que par l'énergie éolienne.

Alors, ça veut dire quoi, dans les faits, M. le Président? Ça veut dire que la Gaspésie pourrait très, très bien perdre sa place, en termes de futur producteur d'énergie éolienne, mais pourrait très bien perdre une opportunité en or pour ce qui est de la fabrication, évidemment, de tout ce qui concerne le matériel qui est destiné à la fabrication des éoliennes. On sait qu'en ce moment il y a une entreprise de Boucherville qui a fermé ses portes parce que le gouvernement n'a pas donné suite au fameux avis de la Régie de l'énergie autorisant ou suggérant au gouvernement - à Hydro-Québec, donc - d'y aller d'une production totale de 50 MW pour l'énergie éolienne.

Alors, M. le Président, je pense que, là, le ministre des Finances parle des deux côtés de la bouche en même temps. Oui, la Gaspésie peut devenir le futur lieu au Québec où on produit de l'énergie éolienne, où on peut fabriquer, par exemple, des pales pour les éoliennes, mais, en même temps, on nous dit: Écoutez, Hydro-Québec est un joueur important, mais, nous, on se déresponsabilise. On n'est pas sûr qu'on puisse convaincre Hydro-Québec, donc, d'acheter de l'énergie comme celle-là.

Il y a des programmes au niveau forestier qui ont été annoncés, M. le Président. Évidemment, il y a des joueurs, dans le domaine forestier, qui se réjouissent de la nouvelle. C'est 4 millions de dollars. Mais, encore une fois, M. le Président, c'est des mesures temporaires. Quand le ministre des Finances nous dit que ça va nous permettre, donc - les mesures qui ont été annoncées au niveau de la forêt - de structurer notre économie, bien, il ne faut pas oublier que c'est encore des emplois temporaires qui sont créés, M. le Président, et, à chaque année, la région devra se battre, donc, pour aller chercher la part qui lui revient au niveau de la forêt.

Ce que les intervenants souhaitaient voir annoncer de la part du ministre des Finances, c'est des mesures fiscales particulières pour la Gaspésie, M. le Président. On le réclame depuis plusieurs mois, depuis plus d'un an. Ce qu'on aurait souhaité, dans le contexte actuel, c'est de donner à la Gaspésie un avantage concurrentiel par rapport aux autres régions du Québec, un avantage concurrentiel qui nous permettrait, une fois pour toutes, de reprendre la voie de la prospérité.

Parce que vous savez, M. le Président, en ce moment, il y a beaucoup de Gaspésiens et de Gaspésiennes qui sont découragés. Il y a des gens qui quittent à chaque jour, il y a des familles qui sont obligées de quitter la région qui les a vu naître. Et je dois vous dire que dans une région, par exemple, comme Chandler, c'est dramatique, ce qui se passe, M. le Président. Et je ne suis pas sûre que le gouvernement, même si, par la voix du ministre des Finances, par la voix du premier ministre... Quand on nous dit qu'on est sensible à la Gaspésie, je ne suis pas certaine, M. le Président, qu'on est conscient de tout ce que ça peut impliquer en termes d'impact sur le plan social, sur le plan humain, sur le plan économique.

Ce qu'on doit comprendre, c'est que la Gaspésie - et ce n'est pas moi qui ai utilisé l'expression - plusieurs intervenants socioéconomiques ont parlé d'une région sinistrée. Alors, sur la base des mesures qui ont été annoncées - on parle de 49 millions - pour une région qui est dite sinistrée, on doit se demander, M. le Président, si c'est suffisant. La réponse, pour moi, c'est non. Et je me suis demandée, M. le Président, sur la base des annonces qui ont été faites: Est-ce que le 49 millions est suffisant pour permettre à la Gaspésie, à l'économie régionale, d'être relancée? Est-ce que les mesures sont suffisamment structurantes? Malheureusement, on doit répondre non, M. le Président. Et, je le redis, c'est le ministre des Finances qui nous l'a même reconfirmé en admettant effectivement que les mesures annoncées allaient permettre la création d'emplois temporaires.

M. le Président, il y a des intervenants depuis plusieurs mois qui ont envoyé au gouvernement un véritable cri du coeur. Il y a des gens qui souffrent quotidiennement en Gaspésie, dans notre région, et, de toute évidence, on devra encore se battre pour que le gouvernement puisse nous entendre. Tout à l'heure, j'entendais le ministre responsable de la Solidarité sociale nous dire que quotidiennement, comme ministre responsable, évidemment, il s'assurait, par des mesures que lui-même a proposées, donc, de lutter contre la pauvreté. Mais j'aimerais lui dire que la pauvreté en Gaspésie, elle se vit quotidiennement et qu'il y a des gens à chaque jour qui tentent de mettre du pain puis du beurre sur leur table, et les annonces qui ont été faites, elles ne sont pas suffisantes. Je pense que, à un moment donné, il va falloir qu'on parle chinois pour se faire comprendre. C'est nettement insuffisant. Si j'étais la seule à le dire, M. le Président, le gouvernement pourrait m'accuser, évidemment, de me diriger un peu vers la démagogie ou vers la partisanerie. Ça, je le comprendrais. Mais pas dans le contexte actuel, M. le Président. Les maires de la MRC du Rocher-Percé ont décrié le budget, même le CRCD a émis des réserves sur le budget qui a été déposé. Il y a des Gaspésiens qui sont déçus par rapport à ce budget-là.

Un autre élément aussi que le ministre des Finances a omis dans son budget, c'est la fameuse diminution des taxes sur l'essence. De ce côté-ci de la Chambre, on a demandé à plusieurs reprises au ministre des Ressources naturelles de baisser les taxes sur l'essence. Dans une région comme la Gaspésie où notre territoire est immense, les Gaspésiens paient les frais, évidemment, de cette augmentation des prix de l'essence. On paie les frais, je vous dirais, doublement parce que, évidemment, les distances sont immenses à parcourir. Et, en ce moment, les Gaspésiens qui veulent se déplacer ne peuvent pas réduire leur consommation d'essence. Alors, dans cette optique-là, le ministre des Finances aurait très bien pu annoncer une baisse de taxes qui aurait profité à l'ensemble des consommateurs au Québec, mais également aux consommateurs de la région de la Gaspésie et, donc, qui aurait profité aux Gaspésiens et aux Gaspésiennes.

Alors, M. le Président, mon temps, déjà, s'écoule quand même très rapidement, mais ce que j'aimerais vous dire en terminant, c'est qu'on s'attendait, avec le budget qui a été présenté, à des mesures beaucoup musclées pour la Gaspésie. Et ce qui me déçoit, c'est qu'on devra encore livrer des combats. On devra encore livrer des combats épiques, évidemment, pour se faire entendre. Et, lorsque le ministre des Régions, qui s'apprête à déposer sa fameuse politique sur la ruralité, nous parle de l'importance des régions au Québec, je pense qu'il parle des deux côtés de la bouche, parce qu'on ne peut pas, d'un côté, dire que le développement des régions au Québec, c'est important et, du même coup, cautionner l'annonce qui a été faite et annoncer 50 millions pour diversifier les donc, de 12 régions au Québec, ce qui représente à peu près 4,17 millions par région. Alors, comment voulez-vous qu'on puisse diversifier une économie régionale avec à peu près 4,17 millions? Ça, c'est le 50 millions qui a été annoncé évidemment pour les régions du Québec, et j'exclus la Gaspésie et les Îles parce que le ministre responsable de la région gesticule un peu et me fait des grimaces un peu.

Donc, M. le Président, le gouvernement actuel aurait donc eu une chance inespérée d'envoyer un message clair aux Gaspésiens, aux Gaspésiennes: que le gouvernement actuel était prêt à s'attaquer à la racine du problème. Mais le gouvernement a choisi d'autres solutions, a choisi de présenter des mesures temporaires qui témoignent probablement du manque d'imagination du gouvernement qui est en face de nous, donc, pour s'attaquer à un problème d'importance comme celui de l'économie de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine. Et, je le réitère, les Gaspésiens et les Gaspésiennes attendent des réponses claires.

On se souviendra que l'usine de transformation de Newport, on a annoncé la réouverture 14 fois, et, depuis que le gouvernement péquiste est au pouvoir, on n'a aucune annonce concernant l'usine de transformation Newport qui, rappelons-le, a utilisé à une certaine époque presque 550 personnes.

L'usine de Tourelle, dont je n'ai pas parlé tout à l'heure, une petite municipalité de moins de 1 000 habitants qui a une usine de transformation de poisson et qui embauchait 150 personnes, toutes proportions gardées, la fermeture de cette usine-là a provoqué vraiment une catastrophe, donc, dans l'économie de Tourelle.

(18 heures)

Évidemment, la cimenterie de Port-Daniel et la Gaspésia... L'inquiétude est à son plus haut point dans la région, et j'espère que le gouvernement, par la voix de son ministre des Finances, pourra donc annoncer au cours des prochains mois des mesures s'attaquant véritablement aux problèmes qu'on vit. Et le ministre nous a fait l'engagement suivant, qu'il n'hésiterait pas à se lever au cours des prochaines semaines, au cours des prochains mois pour annoncer d'autres mesures permettant à notre économie de reprendre le chemin de la croissance. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée de Bonaventure, de votre intervention.

Je vais suspendre les travaux pour quelques instants. Nous avons trois débats de fin de séance que nous allons entreprendre dans quelques minutes. Merci.

(Suspension de la séance à 18 h 1)

(Reprise à 18 h 5)

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Si vous voulez prendre place. Merci.


Débats de fin de séance


Décès de deux personnes dans une maison d'hébergement en santé mentale de Longueuil

Alors, nous entreprenons trois débats de fin de séance. Le premier a été demandé par Mme la députée de La Pinière, suite à une question qu'elle a posée aujourd'hui à la ministre de la Santé et des Services sociaux concernant une enquête sur les conditions d'hébergement de la maison Chez Lise.

Je vous rappelle les temps de parole pour les débats de fin de séance: cinq minutes par la députée qui a demandé le débat de fin de séance, cinq minutes par la ministre qui assiste au débat de fin de séance - ou le ministre - et deux minutes de réplique à la députée ou au député qui a demandé le débat de fin de séance.

Alors, Mme la députée de La Pinière, je vous reconnais pour cinq minutes.


Mme Fatima Houda-Pepin

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, aujourd'hui j'interpelle la ministre de la Santé et des Services sociaux dans un débat de fin de séance, suite à la question que je lui ai posée en période de questions, en début d'après-midi, où elle m'a déçue par ses réponses alambiquées.

De quoi s'agit-il? On se rappellera que ce gouvernement nous a imposé une réforme, une soi-disant réforme de la santé et, avec elle, M. le Président, on nous avait dit que tout a été planifié dans les moindres détails. Dans les moindres détails, ce virage ambulatoire devait nous amener vers le virage milieu où les malades sont soignés dans leurs familles, dans leurs communautés, avec des ressources appropriées.

Ce virage, M. le Président, nous a amenés aussi à la désinstitutionnalisation, où des malades graves, notamment des malades mentaux, qui étaient entre les mains des établissements ont été renvoyés littéralement chez eux. Certains, pour la plupart, retournent dans les urgences quasiment à tous les jours tellement ils sont abandonnés à eux-mêmes. Les familles sont débordées, les ressources externes n'ont pas de ressources financières suffisantes pour porter à bout de bras ce grand défi. Les groupes communautaires crient famine et la ministre n'arrête pas de nous dire que tout est beau dans le meilleur des mondes, qu'il n'y a pas de raison pour l'opposition officielle de s'inquiéter. On ne doit même pas poser de questions en cette Chambre.

Or, M. le Président, la désinstitutionnalisation, dans les faits, a conduit à un phénomène que, dans le milieu, on appelle le tourniquet, c'est-à-dire que le malade mental s'en vient à l'urgence, à l'urgence on n'a pas le temps pour lui et on le retourne chez lui. Et tout ça fait en sorte que des malades aboutissent dans des maisons d'hébergement privées, sans aucun contrôle et surtout avec un manque flagrant de soins.

Encore une fois, la maison de chambres de Longueuil - la maison Chez Lise - a fait les manchettes. Elle a fait la manchette le 30 novembre 1999 et, dans cette manchette publiée dans La Presse , les gens, les milieux communautaires ont dénoncé cette situation. Ils ont appelé la ministre à ses responsabilités. Ils lui ont dit qu'il fallait intervenir.

Permettez-moi de vous citer ce que la ministre disait, le 30 novembre 1999: «Mme Marois - on la cite - a reconnu que la Montérégie est sous-financée dans le secteur de la santé mentale, le gros des budgets ayant historiquement été consacré aux hôpitaux de Montréal.» Et c'est elle qui parle: «Évidemment, oui, il faut débloquer des ressources pour venir en aide à ces gens qui souffrent de problèmes de santé mentale assez profonds et persistants.»

C'est le même discours, M. le Président, qu'elle a tenu aujourd'hui. Entre le 30 novembre et aujourd'hui, il y a eu le dépôt du budget, et savez-vous combien d'argent le gouvernement a débloqué pour la santé mentale? Huit millions de dollars, des grenailles. Parce que, en Montérégie seulement, le déficit est estimé à 65 millions de dollars de manque à gagner au niveau du déficit pour la région.

Alors, si les maisons comme la maison Chez Lise se retrouvent aujourd'hui sur la sellette, c'est parce que le gouvernement a placé les personnes malades, les personnes vulnérables devant cette situation. Et je trouve cela déplorable, M. le Président, parce qu'il s'agit ici de 70 personnes malades. Certaines d'entre elles sont des personnes âgées, d'autres très âgées, démunies, abandonnées à elles-mêmes.

(18 h 10)

Deux personnes de 51 ans et 69 ans sont décédées dans les deux dernières semaines. J'ai communiqué avec les gens et on m'a appris, M. le Président, que, depuis 1998, 10 personnes sont décédées dans la maison de chambres Chez Lise, six dans la maison même et quatre dans les jours qui ont suivi leur départ de cette maison. Le dossier est connu et archi-connu par la ministre, qui a demandé à la Régie régionale de lui faire un état de la situation. Le problème est diagnostiqué correctement: on a un manque urgent de ressources, et la ministre refuse de donner suite aux propos qu'elle a elle-même tenus publiquement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Alors, je reconnais maintenant Mme la ministre d'État à la Santé et aux Services sociaux. Mme la ministre, la parole est à vous.


Mme Pauline Marois

Mme Marois: Merci beaucoup, M. le Président. La députée conviendra - puisqu'elle m'a citée elle-même en disant que je reconnaissais qu'il y avait des problèmes - donc qu'elle ne peut pas en même temps dire que je nie qu'il y a des problèmes, me citer en disant que je reconnaissais qu'il y avait des problèmes, première chose.

Deuxième, elle reconnaîtra aussi que je suis cohérente. J'ai reconnu qu'il y avait des difficultés, qu'il y avait des problèmes en santé mentale. J'ai indiqué que cela ferait partie de nos priorités pour l'année 2000-2001, comme c'est le cas pour les personnes âgées, comme c'est le cas pour les jeunes et les adultes - mais particulièrement les jeunes - qui souffrent de déficiences physiques et qui ont besoin de réadaptation.

Parole tenue, M. le Président. J'ai fait valoir, la semaine dernière, quelles étaient les sommes qui allaient être allouées pour aider ces personnes en difficulté. Ce n'est pas tout ce que je voudrais pouvoir investir, bien sûr, mais je crois que c'est un pas dans une très bonne direction qui va aider à soutenir les gens qui sont préoccupés de ces questions de santé mentale.

D'ailleurs, M. le Président, j'ai tenu, à l'automne dernier, une rencontre, un sommet impliquant toutes les ressources, autant institutionnelles, alternatives, communautaires, les représentants de médecins, de spécialistes pour identifier un plan de travail qu'assume actuellement un groupe d'appui à la transformation des services en santé mentale. Donc, non seulement des investissements à consentir, ça va de soi, et l'ajout de ressources, mais aussi pousser un petit peu plus loin le support à ce qui se fait sur le terrain.

Parce que ce qu'il faut savoir, c'est que, depuis quelques décennies maintenant, l'ensemble des sociétés occidentales ont travaillé à ce qu'on a appelé la désinstitutionnalisation. C'est-à-dire, avec tous les moyens et les découvertes modernes qui sont maintenant disponibles, on peut, soit par des médicaments ou soit par des interventions au plan psychiatrique, soutenir des gens qui, autrement, ne pouvaient être intégrés dans leur société. Et c'est ce à quoi on travaille, je dirais, assidûment, dans les faits.

Donc, toutes ces organisations communautaires, toutes ces institutions publiques travaillent dans le même sens, de telle sorte que des personnes avec des lourds problèmes au niveau de la santé mentale puissent quand même participer à leur société, à la hauteur des moyens qu'ils ont et qui leur permettent de vivre ainsi plus normalement, si on veut.

Il y a, dans certaines régions du Québec, des situations plus difficiles parce que, effectivement, la croissance de population dans ces régions, l'augmentation des problématiques est apparue après qu'on eut fourni l'ensemble des services dans les régions qui étaient plus urbanisées ou qui avaient évidemment une plus longue histoire. Or, des régions qui voient leur population croître, comme la Montérégie - celle que je représente - comme Laval, comme Laurentides, comme Lanaudière, comme Chaudière-Appalaches, doivent recevoir des sommes supplémentaires pour procéder à du rattrapage.

Dans le cas de la Montérégie, c'est évident que c'est une des avenues qui sont envisagées. D'une part, dans l'allocation des sommes en santé mentale, il y en aura évidemment pour la Montérégie, ça va de soi. Mais j'ai réservé une somme particulière, de l'ordre de 20 millions de dollars, pour corriger certaines inéquités à cet égard, et là la Régie régionale pourra décider d'investir davantage de sommes à l'égard de la santé mentale.

Pour ce qui est du cas particulier de cette maison qui, depuis nombre d'années... D'ailleurs, c'était la réalité aussi, sous les libéraux, M. le Président, puisque cette maison reçoit des personnes qui ont des difficultés en santé mentale depuis 1982. Alors, cette maison, qui est une maison de chambres, il faut bien en convenir, reçoit un nombre important de personnes qui ont des problèmes en santé mentale. Alors, plutôt que de se cacher les yeux et de dire: Ça n'existe pas, sachant que cela est un fait, nous avons plutôt tenté... Et c'est la Régie régionale qui, à cet égard, a assumé sa responsabilité. La Régie régionale a évalué la possibilité de soutenir les gens qui sont dans cette même maison avant qu'on ne puisse trouver d'autres types de ressources qui soient plus adéquates, plus adaptées, et donc réorienter ces personnes.

Alors, on me dit que, dès le début avril - nous sommes à la fin mars - des infirmières seront disponibles pour évaluer la situation de chacune de ces personnes, assurer un accompagnement médical, assurer un suivi pour ce qui est de la prise des médicaments qui souvent vient atténuer de beaucoup les problèmes vécus par ces personnes en difficulté. C'est un pas dans la bonne direction, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la ministre. Je cède maintenant le droit de parole à Mme la députée de La Pinière pour son droit de réplique. Mme la députée, je vous écoute.


Mme Fatima Houda-Pepin (réplique)

Mme Houda-Pepin: Merci beaucoup, M. le Président. J'ai écouté attentivement la ministre de la Santé. Plus elle parle, plus elle empire. Elle empire. Elle parle de cohérence. Quelle cohérence que de dire: Oui, le problème est là, je suis la ministre de la Santé, mais je ne suis pas capable de le régler! C'est de la cohérence, ça? Elle dit que la santé mentale, c'est une priorité pour elle et pour son gouvernement: 8 millions de dollars à l'échelle du Québec et il nous manque 65 millions à l'échelle d'une région!

La ministre est en train de chercher des échappatoires en parlant de la démographie. La Montérégie a toujours été la deuxième région en importance sur le plan démographique, M. le Président, ce n'est pas une révélation qu'elle vient de nous faire. Et, quand elle a pris ce dossier, elle savait qu'il y avait des besoins. Elle s'était engagée à donner les ressources et elle ne les a pas livrées.

La désinstitutionnalisation dans les pays industrialisés, oui, c'est une tendance dans les pays industrialisés, mais ils n'ont pas fait le virage que ce gouvernement a pris, où ils ont mis les malades et les malades mentaux en dehors des hôpitaux et des établissements et les ont abandonnés à eux-mêmes.

Les deux infirmières, M. le Président, elles ne sont pas en place. Alors que la Régie régionale devait allouer 150 000 $ pour le CLSC de Longueuil-Ouest justement pour offrir ces services, ce n'est toujours pas mis sur pied. La ministre parle des deux côtés de la bouche. Il y a les priorités en général, les grands discours, le grand flafla. Mais, quand vient le temps de faire preuve de compassion, de mettre la main sur le coeur et de dire: On va aider les gens, on va les outiller puis on va surtout s'occuper de nos malades, elle n'est jamais là et elle cherche toujours les faux-fuyants, comme elle l'a toujours fait, dans des discours vaseux, vides de sens, parce que cette ministre, c'est le temps qu'elle aille se reposer parce qu'elle n'est pas capable d'assumer ses responsabilités comme il faut. Merci, M. le Président.

Une voix: Bravo!

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, Mme la députée. Ceci met fin à ce débat de fin de séance.


Incidence de la modification de l'allocation familiale dans le dernier budget fédéral sur les prestations familiales provinciales

Un débat de fin de séance a été demandé par M. le député de Notre-Dame-de-Grâce suite à une question qu'il a posée, aujourd'hui, à Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance concernant la volonté du gouvernement de faire main basse sur les augmentations aux allocations familiales accordées par le gouvernement fédéral. Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, je vous cède la parole.

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Je m'excuse. M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, la parole est à vous.


M. Russell Copeman

M. Copeman: Merci, M. le Président. Peut-être que les membres de ce côté de la Chambre, je l'espère bien, vont être de l'autre côté un jour, mais ce n'est pas pour le cas d'aujourd'hui. Bientôt, mais pas aujourd'hui.

M. le Président, cet après-midi, j'ai demandé une question assez simple à la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, une question qui concerne la politique du gouvernement à l'égard des augmentations des prestations nationales pour les enfants, communément appelées les allocations familiales au fédéral. Le gouvernement du Canada, M. le Président, depuis plusieurs années maintenant, augmente ou a augmenté à quelques occasions, même deux fois par année, les allocations familiales de toutes les familles canadiennes qui reçoivent des allocations. Ils l'ont fait à plusieurs reprises.

(18 h 20)

À chaque fois, jusqu'à cette année, le gouvernement du Québec a décidé - c'est à eux de décider évidemment, M. le Président - de baisser presque dollar pour dollar les allocations familiales du Québec pour essentiellement arriver au même niveau pour toutes les familles québécoises. C'est-à-dire, à chaque fois que le fédéral a augmenté les allocations familiales fédérales, le Québec a diminué les nôtres. Alors, il n'y avait aucun gain pour les familles qui reçoivent les allocations familiales au Québec, M. le Président.

Cette année, le budget du gouvernement fédéral annonce une autre bonification, une nouvelle bonification. Ça a peut-être pris la ministre déléguée de court, mais cette bonification a été annoncée et va entrer en vigueur cette année. Je lui ai demandé simplement si le gouvernement avait l'intention de continuer dans sa tradition de mettre main basse sur ces augmentations et de priver quelque 200 000 familles québécoises des augmentations de l'allocation familiale fédérale, et elle m'a répondu essentiellement qu'il n'y a pas de décision prise, qu'ils sont en train d'étudier.

M. le Président, j'ai peut-être des nouvelles pour la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance, mais, quant à nous, il nous semble que la décision est déjà prise par le ministre des Finances qui, dans son projet de loi n° 101 qui est déjà adopté, M. le Président, qui a été adopté le 15 mars de cette année, la semaine passée, qui indique très clairement... Quand on fait des calculs mathématiques très simples - M. le Président, je suis convaincu que même mon fils aîné à l'école secondaire pourrait le faire - ça indique une baisse de l'ordre de 150 millions de dollars dans l'enveloppe des allocations familiales au Québec, dans toute l'enveloppe.

M. le Président, cette baisse appréhendée est, quant à nous, réelle, et d'ailleurs c'est partagé par beaucoup d'autres intervenants sur la scène québécoise. Un article dans la Gazette du 4 mars, Feds give, Québec takes : «Ottawa increases family allowance, but Province will cut.» Dans La Presse , Québec exhorté à faire profiter les familles des prestations pour enfants : «La Fédération des femmes du Québec exhorte le gouvernement à ne pas faire comme l'an dernier et faire profiter les parents de l'augmentation des prestations fiscales pour enfants annoncées dans le budget fédéral.»

M. le Président, je continue, La hausse de l'allocation fédérale aux parents pourrait servir à d'autres fins , La Presse du 3 février: «Québec songe en effet à appliquer la loi des vases communicants et à réduire ses propres chèques d'allocations familiales.» Et je cite la ministre en titre de la Famille et de l'Enfance, la ministre de la Santé: «"C'est possible que les chèques soient rajustés à la baisse", a affirmé hier la ministre de la Famille. On a établi des critères de base, on ne va pas en rajouter par-dessus, ça n'a pas de bon sens", a-t-elle ajouté.»

Et, dernièrement, les mères à la maison rouspètent, des mères qui viennent d'apprendre que les augmentations d'allocations familiales promises, lundi, par le gouvernement fédéral ne leur profiteront pas. Toutes les indications sont là que le gouvernement du Parti québécois s'apprête à faire comme il a fait dans les années antérieures, c'est-à-dire de baisser des allocations familiales québécoises pour priver 200 000 familles à faibles revenus et à moyens revenus et prestataires d'aide sociale d'à peu près 600 millions de dollars sur quatre ans. Et c'est honteux, M. le Président! Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce. Je reconnais maintenant Mme la ministre déléguée à la Famille et à l'Enfance. Mme la ministre, vous avez la parole.


Mme Nicole Léger

Mme Léger: Oui. Merci, M. le Président. Alors, on va faire un peu d'historique pour permettre au député de Notre-Dame-de-Grâce de bien comprendre l'allocation familiale du Québec.

D'abord, en 1997, le Québec crée un nouveau régime d'allocations familiales qui vise à couvrir la totalité des besoins essentiels des enfants, particulièrement ceux provenant des familles à faibles revenus. Comme principe, l'allocation familiale québécoise comble le manque entre les besoins essentiels et la prestation fiscale canadienne pour enfants pour permettre à la famille de satisfaire totalement les besoins des enfants. Donc, les besoins essentiels sont couverts, M. le Président.

Dès 1998, le fédéral a réinvesti dans la prestation nationale, ce qui nous a forcés à réajuster les montants d'allocations familiales que le Québec versait. Le fédéral décide comme ça, là, d'envahir nos compétences. En 1999, lors de son budget, le fédéral a annoncé deux autres investissements dans la prestation fédérale: l'une de 425 millions pour juillet 1999 et l'autre de 725 millions pour juillet 2000. Ces investissements nous ont encore forcés à nous réajuster, et c'est ce dont le député de Notre-Dame-de-Grâce nous parle aujourd'hui.

Les économies ainsi dégagées nous ont permis d'augmenter les services auprès des familles, d'augmenter le nombre de places en services de garde, d'accélérer l'implantation - on veut des places, M. le Président, on en crée, des places - et de bonifier l'allocation familiale, particulièrement pour les familles monoparentales et les familles nombreuses. En l'an 2000, dernièrement, dans le dernier budget, le fédéral a annoncé de nouveaux réinvestissements: l'un de 500 millions en 2000, l'autre d'un autre 500 millions en 2001, en plus des investissements de 1,5 milliard entre 2002 et 2005.

Alors, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que les besoins essentiels sont toujours couverts, au Québec. Les familles reçoivent leurs allocations familiales. Si elles recevaient 2 000 $ par année cette année, elles recevront encore 2 000 $ par année. Alors, ce qui est clair, c'est qu'année après année le gouvernement du Québec investit de plus en plus chez les familles québécoises. À preuve, le budget du ministère de la Famille et de l'Enfance est en hausse constante depuis 1997. Les budgets québécois, particulièrement celui que nous avons déposé la semaine dernière, combinent une foule de mesures fiscales qui profitent aussi directement aux familles.

Alors, le fédéral, un, s'ingère dans nos compétences. Il aurait été préférable qu'il nous transfère les sommes chez nous, que nous puissions les investir selon nos priorités chez les familles québécoises. Deuxièmement, il tente de nous sortir du champ d'allocations familiales. La hauteur des investissements du fédéral, dans la prestation fédérale, ne laisse aucun doute à cet égard. Troisièmement, il est en train de dénaturer la nature même du programme d'allocations familiales qui est de couvrir les besoins essentiels des familles québécoises.

Alors, le projet de loi n° 101 est pour nous permettre de payer les prestations aux familles entre le 1er avril et l'adoption des crédits, M. le Président. C'est un projet de loi pour autoriser le gouvernement à payer sur le fonds consolidé du revenu. Alors, la décision du fédéral nous force donc à nous demander où nous allons investir les économies ainsi réalisées, et c'est ce que le Conseil des ministres décidera prochainement, M. le Président.

Il est cependant clair que ces économies seront réinvesties dans l'aide aux familles québécoises, comme cela l'a été par le passé. Elles seront réinvesties de façon cohérente, c'est-à-dire en gardant à l'esprit les impacts de toutes les mesures d'aide aux familles, que ce soit les mesures fiscales comprises dans le dernier budget comme la baisse d'impôts des familles, M. le Président, les allocations familiales qui couvrent les besoins essentiels et les enfants, particulièrement à faibles revenus. Les services de garde à 5 $, ça fait partie de toute la politique familiale et de l'aide qu'on donne aux familles. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Alors, merci, Mme la ministre. Je cède maintenant la parole à M. le député de Notre-Dame-de-Grâce pour son droit de réplique. M. le député, la parole est à vous.


M. Russell Copeman (réplique)

M. Copeman: M. le Président, le chat est sorti du sac. La ministre déléguée vient de dire qu'une famille qui recevait 2 000 $ l'année passée va recevoir 2 000 $ pour l'année qui s'en vient. C'est-à-dire, la ministre vient de confirmer l'intention du gouvernement du Québec de s'accaparer de ces augmentations et de les mettre ailleurs, oui, potentiellement dans les services aux familles. Elle dit non, mais c'est ça qu'elle a dit. Elle a dit: Une famille qui a reçu 2 000 $ l'année passée va recevoir 2 000 $ l'année qui s'en vient, et on sait que le fédéral va bonifier le programme. Le chat est sorti du sac. Peut-être involontairement, M. le Président, mais toute la question est là.

La ministre a changé de carton depuis la période des questions où elle a dit, en période des questions: La décision n'est pas prise. Là, elle nous dit: La décision est prise. Essentiellement, elle va peut-être aller le valider auprès du Conseil des ministres, mais la décision est prise de priver 200 000 familles québécoises des augmentations qui pourraient les servir comme de l'oxygène, M. le Président. C'est ça qui est en cause.

Il y a un problème d'équité dans le geste posé par le gouvernement. Il est possible que ces économies-là vont générer des places en services de garde, M. le Président; ça, tout le monde le sait. Mais les places en services de garde ne bénéficient qu'à 100 000 enfants québécois et juste pendant cinq ans de leur vie. Tandis que les allocations familiales, M. le Président, touchent 200 000 familles québécoises pendant 17 ans de leur vie, parce que ça va de zéro jusqu'à l'âge de 18 ans, tandis que ce gouvernement met le paquet sur les enfants préscolaires.

(18 h 30)

Il y a un problème d'équité dans l'approche et, de plus en plus, M. le Président, les familles québécoises réalisent qu'il y a ce problème d'équité. Le gouvernement s'accapare des augmentations qui sont dues aux familles québécoises réalisent qu'il y a ce problème d'équité. Le gouvernement s'accapare des augmentations qui sont dues aux familles québécoises les plus démunies, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Ceci met fin à ce débat de fin de séance.


Mise en place de la réforme de l'éducation

Un débat de fin de séance a été demandé également par M. le député de Kamouraska-Témiscouata suite à une question qu'il posait au ministre de l'Éducation aujourd'hui concernant le cafouillage de la réforme de l'éducation au Québec. Je cède maintenant la parole à M. le député de Kamouraska-Témiscouata. M. le député, la parole est à vous.


M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Ce débat de fin de séance est l'occasion de terminer ce que nous avions commencé cet après-midi. Et, quand j'entends le ministre de l'Éducation se plaindre un peu partout que finalement l'Assemblée, ce n'est que de faire du temps, eh bien, je lui soulignerais qu'il en a fait cet après-midi à la période de questions pour s'assurer que je n'aie pas le temps de lui poser de questions additionnelles.

Donc, on revient à la charge ce soir. Un des éléments, je vous dirais, à la base de ça est que finalement on est à mettre en place une réforme de l'éducation au Québec, et, moi, je lui demandais cet après-midi: Comment ça que la réforme n'est pas prête? Qu'est-ce qui arrive pour qu'on la retarde? Et le ministre, cet après-midi, répondait que l'une des raisons, c'était peut-être qu'avec - c'est ce qui est arrivé l'automne dernier - certains moyens de pression il y a des formations qui n'ont pas été données.

Et ça, il reprend le même discours qu'il tenait l'automne dernier quand il blâmait les enseignants, il était un petit peu parti en guerre avec les enseignants sur le temps que ceux-ci travaillaient, où il mentionnait finalement que... Ces documents qu'il déposait disaient que c'est hors de question que le ministère paie les enseignants pour lire des revues, assister à des activités culturelles, améliorer leurs connaissances chez eux durant leur temps libre. Du même élan, il disait: «Quant aux lectures du soir et à la fréquentation des musées et des théâtres, ce n'est pas à l'État à payer pour ça, tous les professionnels font une mise à jour.»

Donc, M. le Président, le ministre de l'Éducation reprend là où il a laissé, c'est-à-dire qu'il blâme encore une fois les enseignants pour le retard dans la réforme. Bien, c'est de leur faute. Cependant, il faut se souvenir qu'il y a un an, le même ministre de l'Éducation, le premier geste qu'il a posé comme ministre de l'Éducation, c'est justement de retarder encore une fois d'un an la mise en place de la réforme de l'éducation. Et, à ce moment-là, il disait qu'il avait l'intention de mettre les bouchées doubles en 2000 de manière à ce que le premier cycle soit complété comme prévu en 2001. Donc, l'année passée, il avouait qu'il y avait un certain retard. Il disait: On va essayer de faire en sorte que ça n'ait pas d'impact, surtout pour l'avenir.

Bien, on se retrouve aujourd'hui, un an plus tard, et on est exactement dans la même situation. Le retard est là, et il y a des gens qui songent sérieusement à lui demander de remettre peut-être à plus tard la réforme de l'éducation, à être prêt. Il y a des gens qui disent: Nous ne sommes pas prêts. Et, là-dessus, je citerais, entre autres, la Commission d'évaluation des programmes d'études qui disait, pour le programme actuel, la première partie de la réforme qu'il est à mettre en place, au niveau du programme d'éducation préscolaire - et ça, c'était en novembre - qu'il ne constitue pas, dans son état actuel, un bon outil de planification pour l'enseignement ni un instrument utile pour la coordination pédagogique. Donc, quand on regarde ça, ce n'était pas la faute des enseignants, c'est la faute des documents et de la préparation des documents. Plus loin, on indiquait qu'il va y avoir des corrections à apporter à ce niveau-là. Et, finalement, on se rend compte que l'ensemble des nouveaux critères qui sont déposés ne seront finalement analysés que dans les prochaines semaines.

Donc, les documents qui seront terminés, qui pourront être distribués, n'ont même pas encore reçu l'aval de la Commission d'évaluation de programmes, et on veut les déposer à l'automne pour les enseignants. Et on tente de nous faire croire que les enseignants sont prêts, alors qu'ils n'ont pas eu la formation encore de façon complète, de façon totale, et surtout une formation avec les documents qu'il vont avoir dans les mains l'automne prochain pour enseigner.

Et je tiens à rappeler que c'est dans un document, même un spécial de la revue Savoir , fait par la Fédération des commissions scolaires du Québec, des gens qui seront au coeur de la réforme, où on indique clairement, à plusieurs points, mais je vais vous en lire quelques-uns: «Le processus d'évaluation du matériel didactique ne pourra pas être enclenché avant que l'éditeur ne produise une version complète de son matériel.» L'éditeur n'a même pas encore reçu les commandes, je dirais, du ministère de l'Éducation pour savoir qu'est-ce qu'il va y avoir dans les fameux documents que vous voulez. Plus loin, on dit: «Personne n'est en mesure de dire si le nouveau matériel sera disponible en septembre 2000.» Il y a une réforme qui s'en vient, et on ne sait même pas si le matériel va être là. Et on dit même plus loin que «le matériel actuel - il manquait déjà des volumes - ne pourra pas être utilisé à partir de l'an prochain».

Donc, on va se ramasser dans une espèce de réforme à deux vitesses, où il y a une partie des jeunes qui vont avoir le nouveau programme, d'autres l'ancien, des enseignants formés, d'autres non. Et, pour le ministre de l'Éducation qui dit qu'il vient en Chambre souvent et qu'il perd son temps, on va essayer de faire un petit test ensemble. Moi, j'ai une série de questions pour lui et j'ai hâte de voir s'il est capable d'y répondre comme ça ou s'il va finalement lire ce qu'on lui a dit de lire.

Qu'est-ce qui a provoqué l'an passé le retard dans la réforme de l'éducation, surtout qu'on a dit qu'on mettrait les bouchées doubles? Quel est l'impact du retard de cette année sur l'année prochaine? Comment on va pouvoir travailler avec du matériel qui n'est pas encore approuvé? Combien d'enseignants sont prêts et ont été formés? Et, finalement, M. le Président, comment peut-on mettre en place une réforme progressive où il y aura des étudiants qui seront dans le nouveau cadre et d'autres dans...

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Alors, je reconnais maintenant M. le ministre d'État à l'Éducation et à la Jeunesse. M. le député et M. le ministre, la parole est à vous.


M. François Legault

M. Legault: Oui, M. le Président. Je comprends la frustration du député de Kamouraska-Témiscouata. Le député souhaiterait que les relations entre le ministre de l'Éducation et les enseignants et les enseignantes ne soient pas bonnes, mais il sait très bien que les relations sont excellentes. S'il s'est promené un petit peu sur le terrain, s'il est allé dans des écoles au cours des dernières semaines, des derniers mois, il devrait savoir qu'on a dans nos écoles un climat exceptionnel actuellement. Les enseignants et les enseignantes sont contents de la dernière négociation de la convention collective. Les enseignants et les enseignantes sont fiers et prêts à mettre en place la réforme, la grande réforme de l'éducation.

C'est vrai que c'est une réforme, il faut l'avouer, qui est majeure. Donc, quand c'est majeur, ça veut dire des grands changements. On va changer nos façons de faire. On va maintenant avoir des cycles plutôt que des années. On va changer notre grille matières. On va changer nos façons d'enseigner. Et, quand on fait des changements, bien sûr ça veut dire de l'incertitude mais de l'incertitude surtout de la part des députés d'en face parce qu'ils ne sont pas habitués de travailler, justement, avec le changement.

Donc, pour faire face, M. le Président, à ces incertitudes, on a eu, au cours des derniers mois, toute une série de rencontres avec les enseignants, les enseignantes, les commissions scolaires, les directions d'école, les éditeurs scolaires aussi pour commencer à préparer les nouveaux volumes. Et il y a un tas de rencontres aussi qui sont prévues au cours des prochains mois, donc d'ici le mois de septembre.

Le député, aussi, de Kamouraska-Témiscouata doit bien savoir que, dès cette année, donc depuis le mois de septembre dernier, on a 16 écoles cibles qui ont expérimenté la réforme, donc, du curriculum, qui ont commencé à mettre en place toute la réforme de l'éducation au préscolaire et au premier cycle du primaire. J'ai visité certaines de ces écoles, M. le Président, et les enseignants et les enseignantes sont enthousiastes face à la réforme de l'éducation. Ils me disent une chose: Gardez le cap, M. le ministre, on est prêts pour septembre 2000.

M. le Président, je suis conscient que, d'un milieu à l'autre, il y a des degrés de préparation qui sont différents. Je suis conscient aussi qu'il y a des ajustements à faire à certains endroits. On travaille avec du monde, M. le Président, pas avec des machines. Donc, c'est normal qu'il y ait des ajustements à mettre en place. Je suis convaincu, à ce moment-ci, que je peux compter sur tout le personnel scolaire, et je souhaiterais que le député de l'opposition aussi fasse confiance justement au milieu scolaire pour réaliser ces grandes choses en éducation.

Donc, en conclusion, je dirais ceci. M. le Président, dans nos écoles au Québec - on a 2 800 écoles - il y a des hommes, des femmes qui travaillent fort, qui travaillent sur le terrain. Il y a des gens aussi à mon ministère qui travaillent sur cette grande réforme de l'éducation. Il y a du personnel dans les commissions scolaires qui travaille sur cette réforme. Il y a des directions d'école qui travaillent avec les enseignants et les enseignantes sur cette réforme. Tous les gens que j'ai rencontrés y croient, à cette réforme. Donc, tous ces gens mettent des énergies, fournissent des efforts pour implanter cette réforme et faire en sorte que l'on réussisse. Et, oui, cette réforme sera implantée dès septembre 2000 avec souplesse, mais il n'y aura pas de délai.

Donc, M. le Président, je ne laisserai pas l'opposition continuer à faire de la démagogie, de la petite politique comme ils l'ont fait encore... On en a eu un échantillon cet après-midi encore sur la santé. Je ne les laisserai pas faire. Oui, on sait où on s'en va. Oui, la réforme va être mise en place, et elle va être mise en place avec tout le personnel dans toutes les écoles. Et, oui, j'ai confiance, et je suggérerais au député de Kamouraska-Témiscouata, lui aussi, d'avoir confiance au personnel qu'on a dans nos écoles.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au député de Kamouraska-Témiscouata pour son droit de réplique. M. le député, je vous écoute.


M. Claude Béchard (réplique)

M. Béchard: Oui, merci, M. le Président. Je vous dirais, premièrement, en ce qui a trait aux relations entre le ministre et les enseignants, il n'a pas besoin de l'opposition pour les dégrader, parce que c'est lui qui a dit l'automne dernier - on a ça partout, dans plein de galées, dans plein de revues de presse - que les enseignants voulaient être payés pour lire des revues, et que le perfectionnement des enseignants, c'était de lire des revues, d'aller au théâtre, et que ce n'était pas au ministère de l'Éducation de payer pour ça. C'est ce qu'il a dit, en toutes lettres, dans sa fameuse stratégie de négociation.

(18 h 40)

Deuxièmement, s'il croit que sa réforme va très bien, que tout est prêt, pourquoi lui-même est le premier à dire: Il faut y aller avec souplesse, que finalement ce n'est pas à tous les niveaux qu'on est prêt en même temps? Et je vous dirais que ce n'est pas uniquement l'opposition qui dit ça par souci de suivre les dossiers comme il faut. Je vous dirais que la Fédération des commissions scolaires, dans un texte qui a été préparé, un texte qui est tiré d'une entrevue réalisée avec M. Michel Monette, président du Comité d'évaluation de ressources didactiques d'une commission scolaire... Il doit savoir un peu de ce qu'il parle lui aussi. Il dit: «Personne n'est encore en mesure de dire que le nouveau matériel sera disponible en 2000.»

C'est donc dire, M. le Président, qu'on va avoir, oui, théoriquement, ici, en Chambre, un discours du ministre qui va dire qu'il y a une réforme, mais, dans les faits, dans la réalité, dans les classes, les enseignants ne seront pas formés. Et je tiens à vous souligner que, dans la série de questions que je lui ai soulevées, il n'a pas répondu à une seule. Ça me rappelle un vendredi matin du mois de novembre où il est sorti en déchirant sa chemise, où il n'a répondu à aucune question. S'il répondait aux questions, je pense que le temps serait beaucoup mieux utilisé pour tout le monde ici.

Et je vous dirais, en bout de ligne: Est-ce qu'on ne devrait pas faire attention, au niveau du ministre de l'Éducation, pour faire en sorte qu'on ne crée pas un autre cafouillis exactement marqué par une compétence comparable à ce qui s'est passé à Emploi-Québec? Parce que, dans son cas, M. le Président, il faudrait peut-être que le ministre de l'Éducation se rende compte que ce qu'il est en train de faire, ce n'est plus de vendre des voyages, il est en train de gérer l'avenir des enfants du Québec, et ça, ça mérite d'être planifié dans les moindres détails. Merci.

Le Vice-Président (M. Bissonnet): Merci, M. le député. Ceci met fin à ce débat de fin de séance. Suite à la demande du premier ministre au président de l'Assemblée nationale, je vais ajourner les travaux de cette Assemblée jusqu'à 20 h 30, ce soir, pour la tenue d'une séance extraordinaire. Bon appétit à tous.

(Fin de la séance à 18 h 42)