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Version finale

37e législature, 2e session
(14 mars 2006 au 21 février 2007)

Le mercredi 1 novembre 2006 - Vol. 39 N° 52

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Table des matières

Affaires du jour

Visites de contrôle de la qualité des soins dans les centres
d'hébergement et de soins de longue durée

Journal des débats

(Dix heures trois minutes)

La Vice-Présidente: Alors, bon matin, Mmes, MM. les députés. Si vous voulez bien, nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires du jour

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée exige
du gouvernement qu'il renonce à imposer aux
contribuables des hausses de taxes scolaires abusives

Alors, ce matin, à l'article 37 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, en vertu de l'article 97 du règlement, M. le député de Vachon présente la motion suivante, et cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives.»

À la suite d'une réunion tenue avec les leaders parlementaires afin de répartir le temps de parole pour le déroulement de ce débat, le partage a été établi de la façon suivante: l'auteur de la motion disposera d'un droit de réplique de 10 minutes, 10 minutes sont allouées à l'ensemble des députés indépendants, le reste du temps sera partagé également entre les deux groupes parlementaires. Dans ce cadre, le temps non utilisé par l'un des groupes pourra être utilisé par l'autre groupe, tandis que le temps non utilisé par les députés indépendants sera redistribué également entre les deux groupes parlementaires, étant entendu que cette répartition ne pourra être effectuée avant que le temps dévolu aux deux groupes parlementaires ne soit entièrement écoulé. Et les interventions, je vous le rappelle, ne seront soumises à aucune limite de temps.

Alors, je suis maintenant prête à reconnaître M. le député de Vachon.

M. Camil Bouchard

M. Bouchard (Vachon): Alors, merci, Mme la Présidente. Les contribuables québécois ont, durant les derniers mois, pris connaissance de l'augmentation ou d'augmentations extrêmement importantes de leurs comptes de taxes scolaires. Pour les uns, Mme la Présidente, ils auront été confrontés à des comptes de taxes sur lesquels ils étaient redevables immédiatement, parce que l'augmentation à laquelle ils font face avait déjà été prévue depuis l'an dernier, étant donné le nouveau rôle d'évaluation qui leur était imparti depuis 2006. Donc, ils ont déjà commencé à payer ces comptes de taxes. Pour les autres, ce sera l'année prochaine, c'est-à-dire au mois de juin 2007.

De fait, une très grande partie des contribuables québécois seront confrontés à des augmentations de taxes que nous qualifions d'excessives et d'abusives en ce que ces augmentations, Mme la Présidente, non seulement couvrent les frais administratifs des commissions scolaires, qui sont évalués, bon an, mal an, autour de 2 %, 3 % ou 4 %, mais dépassent très largement, très largement les besoins administratifs des commissions scolaires.

Le ministre de l'Éducation a déposé, la semaine dernière, un projet de loi, le projet de loi n° 43 ? c'était, je pense, mercredi passé ? suite à quoi il a tenu une conférence de presse qui ressemblait plutôt à un briefing technique sur ce que proposait sa loi n° 43. Ça ne fait pas tellement longtemps que je suis en politique, Mme la Présidente, mais, de mémoire de politiciens plus aguerris et plus expérimentés, on m'a dit que c'était une des conférences de presse les plus laborieuses et les plus pénibles qu'il ait été donné de voir par un ministre. C'était de toute beauté d'essayer de voir le ministre essayer de convaincre les médias que les hausses de taxes importantes, excessives et inéquitables, dans certains cas, auxquelles avaient droit les contribuables, étaient une bonne nouvelle. Alors, c'est difficile à expliquer. Évidemment que, lorsque vous recevez un compte de taxes qui augmente de 40 %, le ministre vient vous dire: Oui, mais j'atténue un peu le choc parce que je distribue ça sur trois ans, etc., c'est difficile de convaincre les journalistes qui sont là et la population que cela représente une bonne nouvelle.

Le projet de loi qui est devant nous, Mme la Présidente, vise à étaler les nouvelles hausses de taxes sur trois ans et à permettre... Bon, sur trois ans pour les contribuables, là, qui vont commencer à payer cette hausse en 2007, et sur deux ans, parce que le gouvernement s'est largement et très longuement traîné les pieds dans le dossier, depuis 2004 qu'il nous promettait quelque chose, et, ce quelque chose, on a connu ce que c'était la semaine dernière, et pour les contribuables donc qui ont déjà commencé à payer, parce qu'ils ont reçu leurs nouvelles évaluations foncières l'an dernier, ils commencent à payer leur hausse cette année, bien l'étalement ne sera que sur deux ans. Donc, trois ou deux ans d'étalement avec quelque part aussi la possibilité de payer en deux versements si le compte de taxes dépasse 300 $ par année.

En gros, là, Mme la Présidente, là, c'est ça que ça veut dire, le projet de loi n° 43, qui couvre une page et trois quarts, 11 articles. Deux ans de labeur intensif pour accoucher de cette souris préélectorale, Mme la Présidente, ce n'est pas fort. Il y a eu une réaction. Le leader parlementaire nous disait la semaine dernière, lorsque nous demandions des consultations particulières, qu'il n'y avait pas besoin, il y a eu consensus là-dessus, ça va bien. Pourquoi on discuterait de ça? Il y a déjà eu des consultations, puis le ministre est tout à fait à l'aise avec son projet de loi, puis ça va être bien accepté par les gens.

Eh bien, Mme la Présidente, ce n'est pas tout à fait ce qui se passe. Le Journal de Québec, jeudi 26 octobre, À pleines mains dans les poches des contribuables; De l'impôt déguisé ? là, c'était de mise pour l'Halloween, mais ce n'était pas la journée de l'Halloween ? De l'impôt déguisé; D'incorrigibles taxeurs, on parle du gouvernement du Parti libéral; Jean-Marc Salvet, Par la porte arrière, en voulant dire que, quelque part, on avait essayé de nous en passer une petite vite; L'astuce des taxes scolaires, autrement dit, comment on arrive à lever un nouvel impôt sans le dire; LeDroit: Occasion ratée; Journal de Québec: Les commissions scolaires ont les mains liées. Pas seulement les mains, elles étaient assises avec le ministre de l'Éducation en conférence de presse, et je conçois très bien que les commissions scolaires vont être mises à contribution lorsque les taxes, les comptes de taxes parviendront aux citoyens et que le ministre pourra se cacher derrière les commissions scolaires, Mme la Présidente. Mauvais rôle, Mauvais rôle, Luc Larochelle; Québec laisse faire, mais étale sur trois ans; Le Soleil: Les dirigeants municipaux préparent la bataille contre [le ministre de l'Éducation]; L'étalement des taxes scolaires survient trop tard pour l'Outaouais. Et encore, et encore, et encore.

n(10 h 10)n

Le consensus existe mais pas là où le prétend le gouvernement. Il existe, Mme la Présidente, parce que le gouvernement, un, a tardé à agir. Depuis 2004, nous avions alerté le gouvernement qu'il y aurait un choc foncier, que, quelque part, le gouvernement devait réagir et réagir de façon cohérente, de façon efficace et de façon respectueuse envers les contribuables. Nous avions eu à l'époque, à l'époque du prédécesseur du ministre actuel, une information à laquelle le gouvernement s'apprêtait, pour l'automne 2004, à déposer un projet ou d'atténuation ou d'étalement, mais un projet quelconque vis-à-vis de cette problématique, et soudainement ça a disparu de la carte, on n'en entend plus parler du tout jusqu'à ce que je demande au ministre, il y a quelques mois, au ministre de l'Éducation qu'est-ce qu'il entendait faire devant l'augmentation des taxes ou des évaluations foncières des propriétés sur les territoires de Lévis, de Gatineau et de Longueuil. Le ministre s'en souvient, nous étions dans cette Chambre. Je lui pose la question, puis il me regarde en disant: Est-ce que le député de l'opposition me propose de réduire l'évaluation foncière? C'était joli comme repartie. Je ne qualifierais pas ça autrement que de joli. Mais franchement, pour les contribuables, c'est un peu méprisant, et pour moi aussi, en passant. Mais, pour les contribuables, c'est un peu méprisant. Le ministre dit: Voulez-vous que je réduise l'évaluation foncière? Non, mais on n'a pas idée; autrement dit, regardez, là, ce n'est pas un problème, puis on ne s'occupe pas de ça.

Soudainement, il reçoit, je pense, quelque part une demande du premier ministre qui lui dit: Écoute, il faut régler ce problème-là et il faut faire quelque chose. Donc, création d'une table du ministère de l'Éducation et des commissions scolaires. Le ministre nous dira combien de fois ils se sont réunis durant les derniers mois pour accoucher du projet de loi n° 43.

Mais on arrive, au bout de ce long processus, à une situation où les citoyens et les citoyennes du Québec contribuables devront faire face à 100 % de la facture. Au lieu d'y faire face cette année à 100 %, ils vont faire face à 100 % des factures durant trois ans. Mais ceux et celles, là, dont les propriétés ont augmenté de 40 % en termes d'évaluation foncière vont être imposés sur l'augmentation totale de l'évaluation foncière d'ici trois ans. Le ministre nous annonce: Ah! 13 %, 26 %... 13 %... il nous annonce un tiers, deux tiers et 100 %. Mais à la fin, à la fin, il aura créé, il aura levé un impôt, un impôt, un nouvel impôt, qu'il n'aura pas de fait annoncé.

Et là, Mme la Présidente, je veux revenir sur le programme du Parti libéral en campagne électorale, qui nous annonce un cadre financier pour soutenir l'éducation au Québec et qui nous dit: Nous allons mettre en priorité la santé puis l'éducation, etc., et qui nous assure que son cadre financier est réaliste. Et, en cours de route, le gouvernement s'aperçoit bien que son cadre financier n'était pas sérieux, n'était pas rigoureux, qu'il donnait dans le surréalisme total. Alors, ô miracle, ô coïncidence heureuse pour le gouvernement, arrive une augmentation importante de l'évaluation foncière. Alors, au lieu de dire aux citoyens: Écoutez, on est mal pris, on n'a pas l'argent qu'on pensait, on a été téméraires dans notre annonce, dans notre cadre financier en indiquant que nous avions l'argent pour financer nos promesses électorales, et voilà que se présente une occasion de lever une nouvelle taxe, de lever un nouvel impôt, et nous vous informons que nous allons procéder de la sorte, nous vous informons qu'en vertu des engagements que nous avons pris et en vertu du fait que nous n'avons pas reçu malheureusement les transferts canadiens que nous escomptions pour notre cadre budgétaire, nous vous informons qu'étant donné l'apathie du gouvernement fédéral, son insensibilité aux besoins du Québec, que nous allons lever un nouvel impôt ou une nouvelle taxe de telle sorte à financer nos engagements. C'est ça qu'il est en train de faire.

Autrement dit, il est en train de nous dire: Je n'ai pas été capable de négocier correctement avec le fédéral et, étant donné que je veux protéger une doctrine à laquelle je tiens ? je suis obsédé par le fédéralisme, nous dit le gouvernement, je veux protéger cette doctrine ? je n'en ferai pas un plat avec le fédéral, je vais profiter du fait qu'il y a une évaluation foncière qui augmente considérablement puis je vais continuer à imposer de façon... je vais imposer de façon abusive les contribuables, mais je ne leur dirai pas mon problème. Je n'aurai pas le courage de mettre sur la table mon problème de financement, je vais aller le chercher en douce. Je vais aller le chercher en douce; autrement dit, je vais instaurer une taxe clandestine qui échappe au vu et au su de tout le monde. Sauf que, lorsque le ministre se voit obligé d'atténuer puis d'étaler la taxe, il est bien obligé de dire: Il y a une hausse vertigineuse des taxes scolaires. Il est bien obligé d'admettre que cette hausse n'est pas acceptable pour le contribuable. Il est bien obligé d'accoucher de quelque chose qui va atténuer la grogne plus que le compte de taxes chez les contribuables. Et là le problème est exposé dans toute sa clarté.

Mme la Présidente, il y a 62 commissions scolaires au Québec sur 69 qui ont une péréquation, et le ministre a tenté d'expliquer ça la semaine dernière, je pense qu'il a réussi un brin. Mais ce qu'il faut saisir, là, c'est que le ministre aurait pu, dans sa stratégie, dire: Écoutez, là, on revoit tout ça, la péréquation, on revoit l'environnement fiscal et le prélèvement fiscal des commissions scolaires, on examine l'ensemble de la situation. Parce que, manifestement, à chaque fois qu'il va arriver un problème comme celui-là, on va être obligés d'adopter des stratégies qui mécontentent tout le monde, qui mécontentent littéralement tout le monde, parce qu'on ne vient pas régler le problème fondamental des hausses qui sont excessives et qui sont abusives auprès du contribuable. Donc, nous allons travailler sur un cadre de réaménagement de l'espace fiscal des commissions scolaires, et nous allons, par exemple, permettre que les hausses de taxes scolaires soient à niveau de l'indice par exemple du prix à la consommation. Et, d'ailleurs, par la voix de son attachée de presse, le ministre a fait connaître, dans un article ? je pense, c'est au mois de mai dernier, mois de juin ? qu'il examinait cette alternative, cette avenue. Il l'a rejetée, il nous expliquera pourquoi. Mais quelque part, mon hypothèse, Mme la Présidente, c'est que ça lui permet d'aller chercher en douce un surplus qu'il dirige vers le fonds consolidé: 530 millions.

530 millions de revenu de taxes supplémentaire depuis l'arrivée du gouvernement libéral au pouvoir, et, avec ce 530 millions, un retour d'à peu près 200 quelque millions vers les commissions scolaires en termes de péréquation, en termes de péréquation et le reste, fonds consolidé. Le ministre tente de nous dire: Attention, attention, attention! avec ça, je finance des activités dans mon système d'éducation, mon 660 millions, ce n'est pas le vôtre, c'est le mien, mon 660 millions dans le système, toute l'affaire. Et, Mme la Présidente, il n'est pas capable de faire la démonstration de ça, le ministre. Il n'est pas capable, ça s'en va dans le fonds consolidé. D'ailleurs, je lui rappellerai que la présidente du Conseil du trésor, alors qu'elle tentait d'expliquer où s'en allait le solde de 80 quelque millions, en 2004, là, sur le budget du ministère de l'Éducation, nous a indiqué que ça allait partout sauf en éducation.

n(10 h 20)n

Alors, Mme la Présidente, le ministre, et ce gouvernement, a un sérieux problème de crédibilité dans le cas de la taxe scolaire. Un, il nous dit: Je vais continuer comme si de rien n'était, avec le même environnement fiscal, à prélever des taxes qui sont abusives en termes de la couverture des besoins administratifs des commissions scolaires. Depuis que ce gouvernement-là est en poste, les besoins administratifs cumulatifs des commissions scolaires tournent autour d'à peu près 9 %, cumulatifs, donc d'année en année. Les taxes scolaires prélevées tournent autour de 22 %, plus de deux fois. Alors, pourquoi, pourquoi, Mme la Présidente, ce gouvernement et ce ministre décident-ils de s'associer à une stratégie de prélèvement de taxes, une stratégie de prélèvement de taxes sans mettre les contribuables dans le coup? Pourquoi ce gouvernement n'a-t-il pas eu le courage de dire: Nous nous sommes trompés dans notre cadre financier, nous ne recevons pas les sommes de transfert du niveau fédéral qui nous permettent d'honorer nos engagements et, nous, nous avons décidé courageusement, devant toute la population, de prélever un impôt supplémentaire? Pourquoi n'a-t-il pas eu ce courage?

Alors, Mme la Présidente, ce n'est pas rien, là. Ce n'est pas rien parce que ces hausses de taxes là, à part d'être une astuce budgétaire qui permet au gouvernement d'aller ramasser des surplus puis de les empocher, à part cette astuce, ça frappe des gens, ça, puis ça frappe des gens d'une drôle de façon, de façon souvent très inéquitable.

Alors, par exemple, si vous avez, Mme la Présidente, quelqu'un qui a une maison à Beauport dont la valeur est à 150 000 $ en 2006, une autre personne qui a une maison d'une même valeur, en 2006, à Sainte-Foy, 150 000 $. Ces gens-là, à supposer que... prenons un cas fictif, leurs maisons augmentent respectivement, pour les deux, à 210 000 $. Bien, dans un cas, même avec la stratégie du ministre, il y a un contribuable, celui de Beauport, qui va payer 210 $ ou 206,33 $ d'augmentation de taxes, et celui de Sainte-Foy a 4,95 $ d'augmentation. Pour la même maison, dans la même région, dans la même ville, vous avez deux citoyens qui, dans la même situation, voient leurs comptes augmenter de 4,95 $ et l'autre, de 206,33 $. Cherchez l'erreur! L'erreur, c'est que le ministre ne permet pas... n'a pas changé les règles de taxation, n'a pas changé les règles de la péréquation si bien que, parce qu'à Beauport les gens sont taxés au maximum, c'est-à-dire à 0,35 $ du 100 $ d'évaluation, ils doivent débourser 206,33 $ parce que la commission scolaire a les mains liées, ils ne peuvent pas changer le taux.

Alors, Mme la Présidente, le ministre va rétorquer: Oui, mais, pour les deux prochaines années, ils vont pouvoir parce qu'il impose seulement sur un tiers puis ensuite sur deux tiers de l'augmentation. Mais le taux ne varie pas. Ce qui varie, c'est la portion de la valeur foncière sur laquelle le taux est imposé, mais la règle reste la même. Donc, 206 $ pour un, et l'autre, l'autre contribuable dont la résidence est de la même valeur, qui réside à Sainte-Foy, va, lui, payer 4,95 $ parce que sa commission scolaire ne reçoit pas de péréquation, donc peut jouer avec son taux d'imposition sans être pénalisée.

Le ministre est là, puis il est là devant moi, puis il sourit, puis il dit: Bien oui, c'est ça, qu'est-ce que tu veux? Mais oui, mais qu'est-ce que tu veux? On veut que le ministre se penche sérieusement sur la situation, et ça fait deux ans qu'ils la connaissent, la situation. Ils savent que l'augmentation de l'évaluation foncière est très, très, très... c'est une des plus importantes qu'on ait connue durant les 30 dernières années. Alors, Mme la Présidente, je voudrais bien... je voudrais bien me réjouir du fait que le ministre a bougé. Et le ministre a bougé, bien oui, il a bougé mais il n'a pas bougé beaucoup, il n'a pas bougé beaucoup. Et le pire dans tout ça, c'est qu'il est en train d'essayer de convaincre la population que la hausse à laquelle ils vont faire face est une économie, la hausse est une économie. Non, non, mais il faut le faire, Mme la Présidente.

Alors, moi, je veux bien, là, qu'on joue la joute, qu'on fasse la joute politique, là, mais pas au détriment de la crédibilité des politiciens dans la population. Le ministre aura beau faire tout ce qu'il veut, tout ce qu'il veut comme démonstration, il ne pourra pas convaincre les citoyens qu'une hausse qui dépasse de deux, trois, quatre, des fois cinq fois les besoins administratifs des commissions scolaires est une économie pour le contribuable. Il ne pourra pas aussi convaincre les contribuables que l'équité est au rendez-vous. Il ne pourra pas convaincre les personnes âgées qui ont investi dans un patrimoine leurs résidences, leurs maisons, il ne pourra pas convaincre les citoyens que c'est équitable pour ces personnes-là qui ont comme seule valeur patrimoniale leurs maisons et dont le revenu annuel est modeste. Il ne pourra pas les convaincre qu'une augmentation de 26 %, 30 % puis 40 % ça a de l'allure pour ces personnes-là qui ont un revenu modeste mais qui ont une propriété qui a pris de la valeur. Il ne les protège pas, mais il ne les protège pas, mais alors pas du tout, Mme la Présidente.

Alors, moi, j'invoque, j'invoque le bon sens. J'invoque la rationalité. J'invoque le courage. J'invoque la transparence. J'invoque du ministre qu'il revoie la situation, qu'il retourne à sa planche à dessin, qu'il revoie, avec les partenaires avec lesquels il a discuté jusqu'à maintenant ? et je suis persuadé que c'est toutes des personnes de bonne foi, là ? mais qu'il revoie, avec ces personnes-là, la solution à laquelle il est arrivé. Et, considérant les réactions notamment de l'Union des municipalités, de la Fédération des municipalités et d'autres associations pour lesquelles on ne soupçonnerait pas un avantage fiscal, un avantage fiscal qu'il pourrait souhaiter, qu'il revoie sa démarche, qu'il revoie les résultats de sa démarche, qu'il accepte qu'on en discute, Mme la Présidente, de façon ouverte.

Est-ce que le ministre est capable de nous dire, par exemple, ce matin, est-ce qu'il est capable de nous dire ce matin que les hausses de taxes qu'il continue de permettre, qui sont abusives, qui sont excessives... qu'il y a eu des études d'impact concernant les personnes propriétaires à revenus modestes, qu'il y a eu des études d'impact concernant pas son atténuation et son étalement... Je parle de la hausse, le ministre dit: Bien oui, mais j'atténue. Non. Les hausses qu'il permet, étant donné le système qu'il maintient, est-ce qu'il a fait faire des études d'impact là-dessus?

Mme la Présidente, le ministre a commandé, au mois de juin, une étude pour voir l'impact qu'aurait une augmentation de 0,35 $ à 0,50 $ du 100 $ d'évaluation sur la taxe scolaire. Pourquoi il a demandé ça, cette étude-là? Il demande une étude sur une augmentation possible de la taxe scolaire, alors que là il est vis-à-vis d'une situation réelle. Ce n'est pas un scénario. C'est réel. Les gens reçoivent des comptes de taxes. Ils doivent faire face à des augmentations abusives. Et je suis persuadé, je suis persuadé ? et j'aimerais bien les voir, s'il y en a ? qu'il n'y a pas d'études d'impact sur la capacité des personnes à revenus modestes et qui ont une propriété et sur la capacité aussi des locataires, qui recevront la facture indirectement, éventuellement, de supporter de telles augmentations de taxes, Mme la Présidente.

Donc, c'est donc en vertu de ces éléments que nous avons présenté la motion qui exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Merci, M. le député. Alors, je reconnais immédiatement le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. À vous la parole.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, Mme la Présidente. Bien, c'est un grand plaisir, pour moi, de débattre sur cette motion, ce matin, où le député de Vachon a tenté, par tous les moyens, d'essayer de faire croire qu'il s'agissait d'une nouvelle taxe qu'on imposait alors qu'essentiellement il s'agit de considérer une hausse de valeur moindre que celle qui existe présentement, et je vais en faire une certaine présentation en espérant que notre collègue ici puisse avoir le même respect que j'ai eu pour mon collègue tantôt et qu'elle puisse m'écouter. J'imagine que, tantôt, elle pourra, elle aussi, prendre la parole; avec beaucoup de plaisir, je l'écouterai.

D'abord, le projet de loi comme tel, Mme la Présidente, que fait-il? Est-ce qu'effectivement il décrète une nouvelle taxe? C'est ce que le député de Vachon tente de nous faire dire ce matin. Essentiellement, le projet de loi vise à faire de l'étalement des hausses de valeur. De l'étalement, ça veut dire quoi? Ça veut dire qu'aujourd'hui, la loi, telle qu'elle est faite ? je parlerai tantôt des projets de loi et des lois adoptés par le gouvernement précédent, mais; la loi, telle qu'elle est faite ? fait en sorte que, lorsqu'il y a un nouveau rôle d'évaluation, à la première année du nouveau rôle, il s'applique à 100 %. Alors, vous avez la hausse de 100 000 $; 100 % du 100 000 $ est considéré tout de suite. Ça, c'est la loi actuelle.

Ça, c'est la loi actuelle. Alors, si on ne bouge pas, c'est ça qui arrive: ton taux de taxes est plafonné. Juste pour vous rappeler, là, quand le Parti québécois est arrivé au pouvoir, 50 % des commissions scolaires étaient en dessous du plafond. Quand ils sont partis, 97 % étaient au-dessus des plafonds. Je vais vous expliquer tantôt pourquoi, mais essentiellement il faut juste se rappeler qu'elles sont liées effectivement au plafond parce que le gouvernement précédent a pelleté des factures dans le champ des commissions scolaires alors qu'il n'y avait pas de hausse d'évaluation. Le patrimoine ne s'enrichissait pas des citoyens, là. Rien du tout. Tout ce qu'il y avait, c'était du pelletage de factures et des coupures en même temps. J'y reviendrai aussi.

Mais essentiellement le système fonctionne de cette façon depuis très longtemps. C'est un équilibre entre les différents paliers ? municipal, scolaire ? et le gouvernement du Québec, mais il y a une hausse de l'évaluation et il est important de l'atténuer. Quel est le chemin que propose le projet de loi? C'est de dire non pas pour un rôle triennal, et je pense qu'il y a une erreur de la part du député de Vachon là-dessus: il prend pour acquis que ce projet de loi serait la copie du projet de loi n° 41 du député de Rousseau qu'il avait déposé, et j'en parlerai tantôt, qui avait fait un étalement pour une seule région et pour un seul rôle triennal. Alors là, évidemment, il y a une erreur parce qu'il n'était pas très généreux, le député de Rousseau, lorsqu'il était au pouvoir, et il abusait pas mal plus parce que, lui, il laissait aller tous les autres.

Dans ce cas-ci, ce que nous faisons pour tous les territoires du Québec, l'ensemble des territoires du Québec...

n(10 h 30)n

M. Bouchard (Vachon): ...Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Certainement. M. le député de Vachon, je vous écoute.

M. Bouchard (Vachon): Je vous demande de faire la différence entre une intervention qui dit qu'on a affaire à une taxe abusive et une intervention qui dit que le ministre abusait.

La Vice-Présidente: Je m'excuse, mais je ne pense pas que ce soit une question de règlement. Si vous voulez poursuivre, M. le ministre.

M. Fournier: Bien, c'était au moins une intervention. Maintenant qu'elle est terminée... Alors, à l'époque, ce qu'il y a eu avec le projet de loi n° 41 du député de Rousseau, c'était de limiter l'étalement à une seule région, l'île de Montréal, et en même temps... soit dit en passant, en même temps il augmentait le taux, c'était assez intéressant. Vous avez augmenté le taux de taxe, c'est assez fascinant. Et, de ce côté-là, nous, ce qu'on a fait... ce qu'on propose, nous, c'est d'aller beaucoup plus largement, dans l'ensemble du territoire québécois, et de faire en sorte qu'il y ait un étalement pas juste pour un rôle d'évaluation, Mme la Présidente et l'ensemble de nos collègues, pas juste pour un rôle d'évaluation, mais tous les rôles qui viennent. Il n'y a pas de fin à ce projet de loi là.

Alors, prenons un exemple: prenons 15 ans, une position sur 15 ans puisque ça va s'appliquer sur plusieurs rôles. Vous avez cinq rôles pendant cinq ans. La première année de chaque rôle, la hausse, on va la considérer à seulement 33 %, le tiers de cette hausse se verra imposé, le deux tiers ne se verra pas imposé. Aujourd'hui, là, le trois tiers se voit imposé. Aujourd'hui, le trois tiers se voit imposé. Cinq fois pendant 15 ans, il n'y aura qu'un tiers de la hausse; cinq fois, il n'y aura que le deux tiers de la hausse; et cinq fois, il y aura l'ensemble de la hausse à 100 %. Aujourd'hui, sans projet de loi, pendant 15 ans, les citoyens sont imposés à 100 % de la hausse du rôle. Eh bien, en moyenne, avec ce projet de loi, pendant 15 ans, ils seront imposés à 66 % de la hausse du rôle.

Alors, je vous pose la question: Est-ce qu'il s'agit d'une économie, oui ou non? Bien, c'est facile: si le projet de loi n'est pas adopté... Alors, je vois mes collègues... Je sais que l'opposition officielle souhaite voter contre le projet de loi. Si je suis leur position, eh bien, pendant 15 ans, ils vont être imposés à 100 % du rôle. Ça, c'est la proposition du Parti québécois. Je ne suis pas tellement étonné, c'est pas mal cohérent avec l'ensemble de la gouverne qu'ils ont faite. Mais le projet de loi, c'est celui-là, c'est celui qui permet, tout en... en voyant qu'à court terme, pour agir, on ne pouvait pas revoir tout l'équilibre des champs fonciers et des champs fiscaux entre le municipal, le scolaire et le gouvernement du Québec, mais qu'il fallait poser un geste pour éviter qu'il y ait un choc. Évidemment, je comprends, au niveau du Parti québécois, on aimerait mieux que la loi n'existe pas pour pouvoir dire que rien n'a été fait. Mais non, ça a été fait.

Maintenant, est-ce que c'était le bon geste? Le 19 mai 2005, l'ex-députée de Taillon, Pauline Marois, qui n'est plus des nôtres maintenant, me posait une question, et elle me disait ceci: «Je lui demande s'il accepte d'évaluer la possibilité de mettre en oeuvre un mécanisme pour étaler la hausse de taxes.» Mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce me rappelait justement cette intervention hier. La députée de Taillon qui était membre, puis je pense qu'elle est assez proche encore, là, de l'opposition officielle...

D'ailleurs, en fin de semaine, semble-t-il que le chef du Parti québécois disait ceci à propos de Mme Marois, il disait: «Pauline a toujours mis sa longue et riche expérience, sa compétence dans la gestion des affaires publiques, son énergie et sa connaissance de l'État au service des Québécoises et des Québécois. C'est une femme remarquable...» Enfin, un éloge à Mme Marois. Mme Marois disait quoi il y a un an? Elle demandait au gouvernement d'évaluer la possibilité de mettre en oeuvre un mécanisme pour étaler la hausse de taxes. Bien, on l'a évalué puis on le fait, bien ils ne sont pas contents. Ils le demandaient, mais, quand on le fait, ils ne sont pas contents. Si on ne l'avait pas fait, ils n'auraient pas été contents. L'important, c'est de ne pas être contents. Alors, on parle de crédibilité des gens en politique. Moi, je n'ai pas de misère de dire au député de Vachon: Bien, regardez-vous. Ce que nous faisons aujourd'hui répond à la demande de l'opposition officielle, c'est ce qu'ils demandaient, et, aujourd'hui, c'est ce que nous faisons.

Dans une même situation, lorsque vous étiez au pouvoir et vous étiez de ce côté-ci, vous aussi, quel contexte s'est-il présenté? Bien, il n'y avait pas de hausse d'évaluation. Mais ça ne veut pas dire qu'en revenu de taxe foncière ça n'augmentait pas. Là, vous allez me dire: Comment le revenu de taxe foncière du scolaire peut augmenter si l'évaluation n'augmente pas? Simple. Trouvaille du Parti québécois à l'époque: on va pelleter des factures dans le champ des commissions scolaires, ce qui les a amenées de passer de 55 % en dessous du plafond à 97 % au-dessus du plafond. Tout le monde a monté son taux à 0,35 $ pour payer des factures qui ont été pelletées à ce moment-là. Bon. Je reviendrai sur les effets réels de cette période de temps sur l'éducation, qui est quand même un sujet qui devrait nous interpeller.

Mais qu'est-ce que le Parti québécois a fait? Il y a eu un petit problème important. Vu qu'ils avaient pelleté des charges dans les commissions scolaires, les payeurs de taxes du Québec se sont fait prélever des taxes foncières scolaires par le gouvernement précédent à une hauteur bien plus grande que celle à laquelle on assiste et sans hausse du patrimoine de leur part, aucune hausse de leur patrimoine.

Qu'est-ce qui a suivi? Quelle a été la voie qu'a suivie le député de Rousseau lorsqu'il était dans les fonctions que j'occupe et qu'on assistait, à ce moment-là, à une problématique au niveau de la taxe scolaire, pas à cause de la hausse d'évaluation, à cause des charges qui avaient été pelletées? Bien, ils ont déposé... bien, déposé le 19 juin 2001 ? juste pour la suite des choses, c'est important de retenir les dates; le 19 juin 2001 ? et adopté le 21 juin 2001... Les consultations ont dû se faire, j'imagine, à l'extérieur de l'Assemblée nationale, n'est-ce pas? N'est-ce pas? J'imagine. Alors, le député de Vachon, il dit: Comme nous. Bien oui, comme nous, et on suivra probablement le même chemin que vous, et avec votre consentement bien sûr parce que c'est le chemin que vous avez tracé à cet égard.

Le 19 juin, ils ont déposé un projet de loi juste, juste pour le Conseil scolaire de l'île de Montréal et juste pour le rôle d'évaluation 2001-2002, 2002-2003. Je vous lis... En fait, il y avait deux articles. Le deuxième, c'est: La présente loi entre en vigueur le 21 juin. Donc, il y a un article, un article qui dit ceci: «Aux fins de l'imposition des taxes scolaires pour les années 2001-2002 et 2002-2003, la section [untel] de la Loi sur la fiscalité municipale s'applique, compte tenu des adaptations nécessaires, au Conseil scolaire de l'île de Montréal.»

Un conseil scolaire. Savez-vous quelles sont les dispositions qui s'appliquent? L'étalement qu'on retrouve dans le domaine municipal. C'est drôle, hein, ils n'ont pas brassé beaucoup, beaucoup de sujets sur les taux de taxes foncières, sur l'équilibre entre les différents champs, pas brassé beaucoup de choses, en plus limité à un seul secteur. Pourquoi? Pourquoi ne voir que le conseil scolaire? Pourquoi ne pas voir que les charges avaient été imposées à l'ensemble du territoire québécois? Pourquoi l'avoir fait juste sur un rôle?

Là, c'est intéressant aujourd'hui. Le député de Vachon vient... parce que, probablement, il n'était pas là dans ce temps-là, mais beaucoup de ses collègues ont voté ? on le reverra tantôt; beaucoup de ses collègues ont voté ? sur ce projet de loi. Là, il arrive ici en se drapant dans une toute nouvelle innocence et puis venir nous dire: Voyez-vous, c'est ce qu'il faut faire. Bien oui, mais pourquoi ne l'avez-vous pas fait? Pourquoi avez-vous fait pire que ça? Sans aucune hausse de l'évaluation foncière, vous avez pelleté des charges. Les gens sont allés au-delà du plafond, prenaient de l'argent dans leurs poches. Ils ont dit: Oui, on va étaler, nous autres aussi, c'est une bonne solution, mais juste pour un rôle puis juste pour un petit coin au Québec.

Je comprends qu'ils soient confus aujourd'hui puis qu'ils se disent: Ah, c'est juste électoral, c'est pour un an. Bien non, c'est pour tous les rôles à venir. J'ai donné une figure de 15 ans, je peux donner une figure de 30 ans si vous voulez. Dans ces rôles de trois ans, la première, c'est au tiers; la deuxième, c'est aux deux tiers; la troisième, c'est aux trois tiers. Quand tu es rendu à la quatrième, tu reviens à un tiers; cinquième, deux tiers; sixième, trois tiers; septième, un tiers, puis on recommence. C'est ça, le principe qui est dans ce projet de loi là, qui vise, sans rompre l'équilibre dans les champs fonciers partagés entre les différents niveaux d'administration, d'avoir un apaisement sur le compte de taxes de nos concitoyens, ce qui fait que, pour ceux qui ont eu leur premier rôle l'année passée, dans l'année où on est, il y aura effectivement, dans le prochain compte, un prix moins à payer que celui qu'ils viennent de payer. Bon, les gens du PQ sont contre, qu'est-ce que vous voulez que je vous dise? Moi, je ne peux pas y faire grand-chose.

Qu'est-ce qu'il disait, le député de Rousseau, quand il a déposé son projet de loi n° 41? «...nous avons [...] décidé d'amortir, sur trois ans, l'effet de l'augmentation de la valeur de chacune des bâtisses à Montréal. Donc, le projet de loi que nous avons déposé ? le projet de loi n° 41 ? va permettre au Conseil scolaire de l'île de Montréal d'étaler la variation des valeurs imposables sur trois ans, comme peuvent le faire les municipalités, parce qu'on voulait [ainsi] avoir une certaine cohérence avec ce qu'on fait dans les municipalités. Donc, ce projet de loi va permettre de limiter la hausse du compte de taxes des contribuables en étalant l'impact de l'augmentation de la valeur des bâtiments sur trois ans...»

n(10 h 40)n

C'est exactement ce qu'on fait, sauf qu'on le fait mieux. On ne limite pas ça à un seul rôle, à tous les rôles, puis pas juste à Montréal, mais à l'ensemble du Québec, puis ils sont contre. Honnêtement, honnêtement, là, ce n'est pas crédible, votre affaire, là. Ça n'a aucune allure. Lui, le député de Rousseau, il disait que ça faisait du bien aux citoyens, vous, vous dites que c'est effrayant. Je ne sais pas pourquoi il y aurait deux logiques, je ne sais pas pourquoi il faut absolument qu'il y ait deux logiques.

Là où c'était un petit peu grave, c'est que le député de Rousseau a envoyé une lettre en même temps; il dit: Je voudrais, par exemple, que la hausse du taux... Parce que, dans ce temps-là, il n'y avait pas juste l'étalement, ils permettaient la hausse du taux. Avez-vous vu ça, en quelque part dans le projet de loi, qu'on hausse le taux de taxation? Avez-vous vu ça? Non, vous me l'auriez dit, vous ne me l'avez pas dit, vous ne me l'avez pas dit. Mme la Présidente, personne ne me l'a dit, hein? Il n'y a pas de hausse de taux.

Bien, savez-vous quoi? Le député de Rousseau, lui, il avait prévu qu'il y avait une hausse de taux en même temps. Pas une baisse de taux, une hausse de taux de taxes. Mais, quand même, je dois le dire, il faut être transparent, il avait dit: Il y a une limite. Je vais leur écrire, je vais leur écrire pour ne pas aller à plus que 5 % dans la hausse du taux, hein? C'était bon. Nous, on ne fait pas de hausse de taux. Vous autres, vous en avez fait. Mais, pour être transparent, il faut le dire au complet, il avait dit: Pas plus que 5 %. Là, je vois que ça respire un peu mieux de l'autre côté. On n'avait peut-être pas fait les affaires correctes, mais au moins on n'était pas si pires.

Savez-vous quoi? Savez-vous quoi? À 5 %, là, ils montaient à 0,35 $, ils montaient au plafond. Aïe! c'était fin pas mal, ils n'avaient pas le droit d'aller plus haut. C'était toute une lettre qu'ils envoyaient à la commission scolaire: Si vous voulez, pensez-y, là, ne montez pas plus que 5 %. Je comprends, la loi m'empêche de le faire. Mais c'était une bonne communication, j'imagine, à l'époque.

Le fait net qu'on retient, c'est qu'à cette époque-là le député de Rousseau trouvait que l'étalement, c'était un bon moyen, et il trouvait que ce qu'il faisait avec le foncier, c'était quelque chose qu'il fallait faire. Il parlait même d'équité. Ça vaut la peine que vous alliez revoir ses propos, il parlait d'équité. Je lis ceci dans ses réponses.

La Vice-Présidente: Veuillez vous adresser à la présidence, s'il vous plaît.

M. Fournier: Je m'adresse à vous, certainement. Il disait ceci: «Il faut être équitable ? il y a un bon bout. Tous les contribuables québécois vont payer 0,35 $...» Je comprends, tu as pelleté toutes les charges, maintenant tout le monde va payer 0,35 $. Avant, il y en avait qui payaient 0,28 $, 0,29 $. Soyons équitables, payez tous 0,35 $ du 100 $ d'évaluation. Bien oui, l'équité par le haut qu'on appelle. C'est ça que vous avez fait. Ce qu'ils ont fait, Mme la Présidente. Alors: «Tous les contribuables [...] vont payer 0,35 $ du 100 $ d'évaluation. C'est leur contribution pour l'effort au financement du système d'éducation au Québec ? c'est leur contribution pour l'effort au financement du système d'éducation au Québec ? qui est payée via la taxe scolaire. C'est parfaitement équitable, parfaitement défendable.» C'est le député de Rousseau qui disait ça. Après ça, il donnait des exemples de hausse d'évaluation puis il disait: Si tu es plus riche, c'est normal que tu paies plus. Le député de Rousseau, pas moi, là, le député de Rousseau, il trouvait que c'était équitable, ça. Alors, je vous le laisse, je le leur laisse, Mme la Présidente, je le leur laisse pour réflexion. C'est quand même assez intéressant de voir ces propos sur l'équité dont le député de Rousseau parlait.

Mais le petit bout qui était intéressant dans ce qu'il disait, que je viens de lire, c'est, aïe, il disait... puis ça, je pense qu'il faut en parler, il dit: Écoutez, quand même, là, je vous charge plus cher, c'est vrai, que je vous ai augmenté, j'augmente même le taux ? lui, il l'augmentait, le taux ? mais c'est pour l'éducation, c'est pour financer les services.

Le débat qu'on pourrait avoir, ce serait intéressant de voir qu'est-ce qu'on fait pour l'éducation: Qu'en est-il du niveau de l'implication locale dans l'éducation, hein? Je comprends qu'au niveau de l'opposition officielle, à l'époque où ils sont au gouvernement, ils chargent plus au niveau local, et, quand ils sont dans l'opposition, ils veulent que ce soit dans les fonds généraux que l'argent serve pour payer les services scolaires. On y reviendra.

Mais, lorsqu'on regarde ce que l'on fait pour les services, l'argent qu'on prend pour les services, je vais vous lire un article du 19 juin 1996, Le Devoir: «Surprise de taille pour les contribuables montréalais, alors que le Conseil scolaire...» Ah! toujours le même conseil, regarde donc ça: «Surprise de taille pour les contribuables montréalais, alors que le Conseil scolaire ? de l'île de Montréal a adopté lundi [...] une proposition qui [entraîne] une hausse de 23,7 % de la taxe scolaire pour 1996-1997. [...]Cette hausse découle largement du dernier budget gouvernemental, alors que la ministre de l'Éducation Pauline Marois avait autorisé les commissions scolaires à hausser le compte de taxe pour compenser les compressions gouvernementales dans le secteur de l'éducation.»

Ah bien, là, par exemple, c'est une autre histoire! Ça, c'est une autre histoire. On prend plus d'argent au niveau local pour l'éducation et on enlève de l'argent en services en éducation. Ça, c'était leur gouvernement. C'est ce qu'ils ont fait. En fait, lorsqu'on regarde ce qui s'est passé en 1995-1996, lorsqu'on regarde, il y a eu 17 millions de moins.

Vous allez me dire: Bon, 17 millions, 17 millions de moins dans les services en éducation et 15 millions de plus en revenus de taxes qui sont arrivés. Bon, 1995-1996. 1996-1997, ils sont allés chercher 100 millions de plus dans la poche des gens, entre autres au Conseil scolaire. Pas de hausse de l'évaluation, là. Ils ne sont pas allés chercher des revenus de taxes parce que la maison de M. Tremblay ou de Mme Lambert a augmenté. Ils sont allés chercher 100 millions de plus de revenus de taxation scolaire parce qu'ils ont pelleté des nouvelles responsabilités dans les cours des commissions scolaires, 100 millions de plus.

De combien ont-ils augmenté les services cette année-là? Zéro augmenté. Mauvais choix de verbe. De combien ont-ils diminué les services cette année-là? 350 millions. En 1996-1997, le Parti québécois va chercher 100 millions dans la poche des contribuables et il va couper pour 350 millions de services en éducation.

Est-ce qu'ils ont pensé à faire de l'étalement l'année d'après? Est-ce qu'ils se sont dit: Là, je pense qu'on est allés un peu loin? Ah non! Au contraire, ils se sont dit: On a une bonne recette. On prend de l'argent, on coupe les services, puis personne ne s'en aperçoit. L'année d'après, ils sont allés chercher 150 millions par les revenus de la taxe, sans aucun enrichissement de patrimoine de personnes. On a encore pelleté des factures, 150 millions dans la poche des gens, et on a coupé, cette année-là, de 300 millions dans les services, 650 millions de coupures dans les services, en deux ans, alors qu'ils étaient allés chercher 250 millions dans la poche des gens.

Moi, je veux bien faire un débat avec eux, aucune difficulté, Mme la Présidente. Mais on ne viendra pas me dire, ici, qu'on hausse une taxe, alors qu'au contraire on étale la valeur et ça fait diminuer le compte. S'il n'y avait pas de loi, ils paieraient plus cher, mais en plus on le fait pour offrir plus de services, d'avoir une implication locale. Alors que, dans leur cas, ils ont décidé de couper dans les services en éducation, on est en train de redresser l'éducation, de redresser le Québec là où ils ont échoué. Ça prend toute une dose d'hypocrisie pour faire ce qu'ils font, Mme la Présidente.

Des voix: ...

La Vice-Présidente: Alors, M. le ministre, je pense bien que les derniers propos que vous avez prononcés sont antiparlementaires. Je vous demanderais de les retirer, s'il vous plaît.

M. Fournier: Je les retire. Je m'excuse de mon emportement, Mme la Présidente. On pourrait continuer. Vous savez que ce n'est pas les seules années où il y a eu des effets. En 1999, ce n'était qu'une tentative et elle a échoué, mais c'était une tentative quand même.

On lisait ceci: «Les municipalités refusent de diminuer leur taux de taxe pour permettre aux commissions scolaires d'augmenter proportionnellement le leur. La levée du plafond d'imposition des taxes scolaires marquerait la fin d'un pacte fiscal qui réservait aux municipalités la quasi totalité du champ d'impôt foncier.»

Vous savez, à l'époque, c'est la proposition que le gouvernement du Parti québécois faisait. C'était d'augmenter le taux de taxe scolaire. C'était dans ces eaux-là. Ça, c'était en 1999. On a vu, en 2001, qu'ils l'ont fait réellement. Ils ont eu la gentillesse de dire: On va les hausser mais pas plus que 5 %, considérant que cette hausse-là ne peut pas aller plus haut parce que vous êtes rendus au plafond. C'est ça, le net-net.

On fait de la politique, puis je veux bien que les gens disent: Non, non, moi, j'ai raison de mon côté, l'autre côté, il a tort, puis des choses comme jamais, quand on regarde le portrait global, hein, puis qu'on regarde tout ça... L'opposition officielle a demandé au gouvernement de déposer... en fait, d'évaluer la possibilité ? c'est ce qu'ils ont demandé ? d'étaler, on a évalué puis on le fait, et, aujourd'hui, ce n'est pas bon. C'était leur position, ce n'est plus bon. C'était leur position comme opposition officielle, c'était leur position comme gouvernement, parce qu'ils l'avaient fait une fois pour un seul rôle, plaidant l'équité à ce moment-là. Là, je pourrais vous poser la question, à l'opposition officielle: Pourquoi, quand vous avez adopté le projet de loi n° 41, pourquoi vous ne l'avez pas fait pour tout le Québec? Pourquoi c'était bon juste pour le Conseil scolaire de Montréal? Pourquoi c'était bon juste pour un rôle? Évidemment, si c'est bon juste pour un rôle, là le député de Vachon pourrait avoir raison, il dirait: Regardez, là, ce qu'il fait dans le fond, là, c'est qu'il leur donne une petite économie juste pour les élections, puis après ça c'est 100 % ? d'ailleurs ce qu'il a déclaré en conférence de presse.

Alors, deux choses, je retiens deux choses: Oui, une économie, oui, une économie, pas juste pour les élections, parce qu'à la différence du projet de loi n° 41 ce projet de loi ci n'a pas de date limite, un rôle et un autre, et un autre. À chaque rôle, c'est des rôles triennaux, des rôles de trois ans. À chaque première année de ce rôle, ce n'est pas 100 % de la hausse d'évaluation, comme c'est le cas aujourd'hui, qui sera chargé mais 33 %. À la deuxième année de chaque rôle, à chaque deuxième année, ce ne sera pas 100 %, comme c'est aujourd'hui, c'est 66 %. À la troisième année, c'est vrai, ce sera 100 % comme c'est aujourd'hui. Mais les première et deuxième années, est-ce qu'on ne peut pas constater que ce ne sera pas 100 % mais 33 % et 66 %. On peut le constater si on lit le projet de loi qui a été déposé. Et, si on l'adopte, non seulement on va le constater, on va le faire. On va permettre à nos contribuables d'avoir un choc moins grand.

n(10 h 50)n

Est-ce qu'on veut entreprendre un grand débat sur la place du foncier? Ça, c'est toute une autre question. Quel est le revenu tiré d'un champ foncier? Comment il affecte les gens... On peut entreprendre ce débat-là, mais on comprendra qu'à ce moment-là il faut aussi impliquer le monde municipal, qu'il faut aussi impliquer le monde scolaire, qu'il faut impliquer le gouvernement et se poser des questions plus profondes sur le rôle qu'on veut attribuer aux gens, chez eux, à l'égard de l'éducation chez eux. Moi, je suis de ceux qui pensent que les familles, les employeurs d'une région doivent se sentir interpellés par leur école, chez eux. Bien sûr par l'ensemble du système au Québec, il n'y a pas de doute, mais, chez eux aussi, ils doivent voir un lien: ils doivent considérer que le conseil d'établissement, c'est le leur; ils ont un rôle à y jouer, que la commission scolaire, chez eux, c'est la leur; elles ont un rôle à y jouer. Ce n'est pas en enlevant plus de pouvoirs au niveau local qu'on augmente les chances, c'est en leur permettant de jouer un rôle au niveau local.

On se gargarise tous de beaux discours sur la décentralisation, et, dès qu'on a une chance, de l'autre côté, de l'opposition officielle, on coupe les jambes aux régions. Pourquoi est-ce qu'on ne laisse pas les gens localement pouvoir faire des choix? Par rapport à l'Ontario, le niveau scolaire de taxation scolaire, en Ontario, permet de payer 37 % des coûts des commissions scolaires, en Ontario. Au Québec, le revenu scolaire permet de couvrir 15 % des coûts. Je ne dis pas qu'il faut monter à 37 %, je ne serais pas là. Mais, par exemple, je me dis: Pourquoi j'abaisserais ça à zéro, pour faire payer par le fonds général, pour que les gens se disent: L'éducation, ça ne me concerne pas, c'est l'édifice G à Québec? Non, non, non. Ça concerne chaque conseil d'établissement, chaque professeur, chaque directeur. On a un rôle à jouer là-dedans. Nos commissions scolaires, on a un rôle à jouer là-dedans.

Le député de Vachon a déjà fait des lignes sur les commissions scolaires, et, je sais, la même chose du côté de l'ADQ. Ils pensent que les commissions scolaires, c'est important. Ah oui, pourquoi leur couper les jambes? Pourquoi leur dire: Non, ne prenez pas de décision, on va aller ailleurs? Alors, c'est là qu'il faut regarder l'équilibre et qu'il faut se demander comment, raisonnablement, on peut apporter une solution pour le compte de taxes de nos concitoyens? C'est ça, la question. Et je m'étonne que le député de Vachon me dise aujourd'hui: Ce n'est pas ça qu'il fallait faire. Aïe! Aïe! C'est ça que vous avez demandé. Si ce n'est pas ça qu'il fallait faire, pourquoi vous l'avez demandé? Un petit peu de problème de cohérence là-dessus.

Maintenant, le coeur du sujet est le suivant: on s'attarde beaucoup en ce moment à se demander d'où vient l'argent; moi, je veux qu'on s'intéresse aussi sur ce que l'on fait avec l'argent. Dans l'année qui vient de passer, en termes de péréquation, ça a fait une économie de 46 millions au gouvernement du Québec, je ne l'ai jamais caché, sauf que, dans l'année qui vient de passer, cette économie de 46 millions, qu'est-ce qu'on a fait avec? Bien, on l'a ajoutée à 620 millions pour faire 660 millions qu'on a mis dans l'éducation cette année. Il y a 660 millions de plus dans les budgets de l'éducation cette année qu'il y en avait l'année passée.

Je sais que le député de Vachon n'aime pas beaucoup cette statistique parce qu'elle signifie un investissement majeur en éducation. Pourquoi ça signifie que c'est majeur? Parce que, pendant neuf ans du Parti québécois, ils ont investi, en neuf ans, 600 millions. Neuf ans, 600 millions. Ça, c'est pour faire une histoire courte, pour ne pas blesser personne. Parce que la vérité c'est, comme je l'ai dit tantôt, qu'il y a eu des coupures. Entre l'année un et l'année finale, il y a 600 millions de différence, mais il y a un trou, il y a un trou de 1,8 milliard là-dedans. Alors, oubliez les coûts de système, là, c'est en dessous. Je ne veux pas vous embêter avec ça, là, on va essayer de se rapprocher, comme gens de l'Assemblée nationale, on va se dire les choses les plus faciles. Entre l'année un et la dernière année, il y a eu 600 millions qui ont été mis...

Une voix: ...

M. Fournier: Merci. Il y a eu 600 millions qui ont été injectés pendant neuf ans. Moyenne annuelle, moyenne annuelle, moyenne annuelle: 66 millions annuellement. On en met 660 millions cette année. Oui.

Nous n'avons pas imprimé l'argent, mais nous avons fait des choix. Les gens pourraient dire: Comment est-ce qu'ils ont fait ça? Ils ont 660 millions par rapport à 66. Comment est-ce qu'ils ont fait ça? On a fait des choix. On n'a pas pris l'argent n'importe où. C'est tellement vrai que la cote de crédit du Québec a été haussée. Il faut croire qu'on a fait les bonnes priorités, les bons choix. On réussit d'être en équilibre; les marchés financiers nous regardent, considèrent qu'on fait bien ça. Mais on a choisi l'éducation comme étant une priorité.

Alors, moi, je me pose la question suivante: Si j'étais de l'autre côté et j'avais un bilan à 66 millions par année, et que je me lève souvent en Chambre pour dire: Moi, ma priorité, c'est l'éducation, et je vais mettre 1 milliard par année, je dirais: Bien, c'est parce que, ton bilan, tu étais à 6 % de ce montant-là. Tu mettais 66 millions par année en moyenne ? puis là j'oublie les trous ? puis tu veux passer de 66 millions par année à 1 milliard par année. J'ai deux questions: Comment tu veux que je te croie quand, lorsque tu es au pouvoir, tu vas à la hauteur de 6 % ? 6 %, en cote ou en note, là, c'est échec; 6 % ? du montant, 6 %? La deuxième, c'est: Le milliard, tu vas le prendre où? Juste pour savoir, là, tu vas le prendre où?

Parce que, maintenant, la proposition que vous avez et que vous allez tenir, c'est celle de dire qu'il y a réduction des taxes scolaires, et ça va être un engagement que vous allez prendre. Vous ne le prenez plus dans le foncier. Vous abandonnez le foncier au scolaire. Parfait. Le milliard, vous le prenez où? 1 milliard par année, c'est 1 % de TVQ par année. On est à 7,5. Votre engagement c'est 11,5? 11,5 de TVQ par année, c'est ça? C'est juste pour savoir, juste pour qu'on comprenne où vous vous en allez. Parce que c'est facile de se lever en Chambre et dire: Moi, je veux mettre 1 milliard de plus dans l'éducation, moi, je ne veux pas prendre d'argent dans la poche des gens. Parfait. Alors, tu vas faire des choix dans les autres équilibres. Je voudrais les connaître, Je voudrais savoir.

Nous, on l'a fait, ces choix-là. On a mis 660 millions cette année: en une année, plus que ce qu'ils ont fait en neuf ans. Ça nous a permis de donner plus de temps d'enseignement pour les jeunes à l'école. Les jeunes Québécois n'avaient pas le même nombre d'heures d'enseignement que dans les autres provinces et même dans la moyenne des pays de l'OCDE. Ça nous a permis de faire ça. Ça nous a permis de donner de l'aide aux élèves en difficulté. On a pris un engagement de 50 millions. On va mettre 120 millions pour accompagner les jeunes en difficulté, avec des professionnels.

On se souviendra que, dans les années... Je parlais de coupures de services tantôt, ce n'était pas juste de l'argent qui était de moins, là, il y avait moins de monde qui travaillait. Il y a eu 1 000 professionnels qui ont été mis à la retraite, qui s'occupaient des élèves en difficulté. Le député de Rousseau, toujours le même, a écrit un document, là, il y a quelques années, peut-être deux ans, où il disait que c'était un des pires gestes qui avait été posé, parce que c'est à l'égard des élèves en difficulté.

Bien, oui, forcément, il faut poser des gestes pour s'assurer que, l'éducation, on va l'améliorer, on va permettre qu'il y ait plus de services. On peut faire l'opposition, c'est correct, c'est des débats, je n'ai pas de problème avec ça, mais, cette année, avec le projet de loi, plutôt que d'avoir une économie en termes de péréquation qui aurait monté à 102 millions si on ne faisait pas la loi, l'économie ne sera que de 16 millions. Donc, juste pour exprimer que l'étalement est une mesure qui fonctionne, parce qu'elle ne va pas remplir les goussets de l'État au détriment d'un choc trop profond. Il y a une mesure de reconnaissance du rythme des citoyens de payer.

Cela étant, mon étonnement est complet quand je vois que la proposition de l'ex-députée de Taillon, en cette Chambre, n'est maintenant plus reçue par le caucus de l'opposition officielle. Je m'étonne quand la solution du député de Rousseau, toujours membre du caucus, qu'il défendait au nom de l'équité... Et, je vous en prie, relisez son discours. Je n'ose pas répéter tout ce qu'il a dit. Je vous le dis juste bien, bien franchement, ça vaut la peine d'aller le lire. C'était pour un rôle, c'était pour un territoire, et pourtant il en chantait les vertus. Je m'étonne aujourd'hui de la nouvelle position de l'opposition officielle.

Motion d'amendement

En conséquence, Mme la Présidente, si vous me le permettez, j'aimerais déposer un amendement à la motion qui est devant nous, qui se lirait ainsi:

Que la motion du député de Vachon soit amendée de la manière suivante: à la première ligne, remplacer les mots «exige du» par les mots «demande au» et, à la troisième ligne, après les mots «abusives», rajouter les mots «et qu'à cette fin, il permette aux commissions scolaires de mettre en oeuvre un mécanisme pour étaler la hausse de taxes, tel que le propose le projet de loi n° 43 et tel que le demandait l'ex-députée de Taillon le 19 mai 2005».

La motion telle qu'amendée se lirait ainsi:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables [...] des hausses de taxes scolaires abusives et qu'à cette fin, il permette aux commissions scolaires de mettre en oeuvre un mécanisme pour étaler la hausse de taxes, tel que le propose le projet de loi n° 43 et tel que le demandait l'ex-députée de Taillon le 19 mai 2005.»

n(11 heures)n

La Vice-Présidente: Alors, merci, M. le ministre. Votre amendement est déposé. Alors, nous allons maintenant poursuivre le débat sur la motion présentée par le député de Vachon et également sur la motion d'amendement présentée par le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport. Je vais laisser peut-être une dizaine de minutes pour vous permettre d'étudier la motion d'amendement du ministre et je serai prête à ce moment-là, au bout de 10 minutes, à écouter vos plaidoyers sur l'amendement proposé. Alors, maintenant, je reconnais un prochain intervenant. M. le député de Vanier.

M. Sylvain Légaré

M. Légaré: Merci, Mme la Présidente. Alors, ça fait deux ans que j'ai l'honneur d'être député de Vanier, d'être assis ici, à l'Assemblée nationale, et je veux revenir un petit peu dans le passé, parce que le dossier le plus impopulaire que j'avais eu à traiter dans ces deux années-là, évidemment ça avait été le dossier du zoo ici, à Québec, où une tonne d'appels, une tonne de courriels était rentrés à mon bureau de comté, une tonne de visites pour me parler de ce dossier-là. Bien, Mme la Présidente, je ne pensais jamais qu'on aurait pu battre ce dossier-là du zoo avec le dossier des taxes scolaires. Encore plus d'appels et plus de courriels de gens fâchés, de gens mécontents de cette structure-là.

Écoutez, le débat tournait toujours autour de l'augmentation des taxes, des impôts. Alors, c'est une suite d'événements qui fait que, dans les trois dernières années, on arrive avec cette augmentation-là, et c'est inacceptable, Mme la Présidente, de donner ça encore aux citoyens. On pourrait les énumérer, ils sont majeurs. Alors, c'est malheureusement le dossier le plus, je dirais, populaire à mon bureau de comté présentement. Et j'amène le débat dans les chaumières, les gens plus âgés, les gens retraités qui ont une rente, une petite rente, là, pour couvrir toutes leurs dépenses, qui ont fait le choix d'habiter leur demeure encore quelques années, et cette augmentation-là est majeure pour ces gens-là. La classe moyenne, la classe moyenne, je peux vous dire que, dans les trois dernières années, ils y ont goûté, que ce soit l'Hydro-Québec, que ce soient toutes les augmentations possibles. Imaginez, là, une famille qui a un revenu familial de 50 000 $, 60 000 $, avec une maison, une voiture, c'est majeur, cette augmentation-là. Et il faut ramener le débat évidemment dans les chaumières de Québec pour constater que c'est inacceptable, Mme la Présidente.

C'est une décision qui est indéfendable pour moi, et je ne sais pas comment que les députés du Parti libéral font, dans leurs comtés, pour défendre ça. On a eu le ministre, la semaine passée, lors d'un point de presse, qui expliquait par tous les gestes possibles, par toutes les... à un moment donné, couché sur le bureau, Mme la Présidente, pour essayer d'expliquer aux journalistes l'étalement, l'augmentation, la diminution. Personne ne comprenait. Puis là on recommençait avec les gestes. Je veux dire, il avait l'air d'une majorette, Mme la Présidente, à essayer d'expliquer tout ça, personne ne comprenait. Et je ne sais pas comment vous faites pour expliquer ça. Moi, je n'ai plus d'argument. Et l'indéfendable et l'inacceptable, que ce soit sur un ans ou sur trois ans, c'est toujours indéfendable et inacceptable.

Vous savez, Mme la Présidente, dans un budget, il y a deux colonnes, il y a revenus et dépenses. Et, dans les dernières années, bien on a tout le temps mis de l'argent dans la colonne des revenus, hein? Aussitôt qu'on avait besoin de plus de revenus, bien on allait dans les poches des contribuables, puis on allait dans les chaumières, puis on allait, par tout moyen déguisé, aller chercher cet argent-là dans les poches des contribuables.

En 2003, je vais vous ramener un dossier qu'on avait discuté, qui était en campagne électorale: la réingénierie de l'État. Plus personne ne se rappelle de ça, mais, en 2003, on discutait de ça. Et, si le Parti libéral avait fait une vraie réingénierie de l'État, sion s'était attaqué à la colonne dépenses à la place de toujours s'attaquer à la colonne revenus, probablement qu'on ne serait même pas ici en train de débattre le dossier aujourd'hui. Si on avait fait... Écoutez, on a eu un mandat de la population, pour le Parti libéral, et malheureusement, en 2006, on ne parle plus de ça, c'est terminé, c'est un dossier clos. Alors, je voulais vous remémorer la mémoire sur un dossier qui était important en 2003, la réingénierie de l'État.

Les municipalités, Mme la Présidente, et les villes. La FQM, l'UMQ se sont prononcées toutes les deux contre le projet de loi déposé par le ministre. Mme Boucher ici, à Québec, les maires, les mairesses de toutes les municipalités, contre ce projet de loi. Bernard Généreux, président de la FQM, a qualifié cet impôt déguisé de tout à fait inacceptable. Il a mentionné que l'adoption de ce projet de loi aura des impacts très négatifs, qu'il pourrait fragiliser la fiscalité municipale et briser l'équilibre fiscal entre le monde municipal et le monde scolaire.

Je continue. Président de l'UMQ, Jean Perrault, a jugé le projet de loi déraisonnable et contraire à l'intérêt des citoyens. Il a mentionné qu'il faut penser aux citoyens dans ce débat ? penser aux citoyens dans le débat, c'est incroyable ? et que rien n'indique que cette hausse de taxes aura des impacts positifs sur la qualité des services scolaires.

Mme Boucher. Il y a eu l'unanimité ici, à l'Hôtel de Ville, à Québec. Mme Bourget, Mme Boucher, unanimes là-dessus: c'est inacceptable.

Le monde municipal, il y a de cela quelques semaines, ont fait un gros effort, Mme la Présidente, pour essayer justement de ne pas mettre cette hausse-là... Évidemment, on le sait, la valeur des maisons a monté. Le municipal a fait un gros travail dans ce domaine-là pour essayer d'amoindrir, atténuer l'impact de la hausse. Et on voit que nos élus municipaux sont beaucoup plus respectueux de la qualité de payer des citoyens que le gouvernement libéral.

Alors, rapidement, en conclusion, j'aimerais que le gouvernement prenne ses responsabilités dans ce dossier-là, qu'il fasse comme les municipalités et qu'il essaie pour une fois, Mme la Présidente, pour une fois, de faire changement et de respecter les citoyens dans ce processus-là. Parce que, je le répète, l'inacceptable et l'indéfendable, sur un an ou sur trois ans, c'est toujours inacceptable et indéfendable.

Et rapidement une petite question au ministre. J'aimerais au moins avoir la certitude que cet argent-là, cet impôt déguisé là qu'on va aller chercher dans les poches des citoyens, il soit réinvesti au moins dans les classes, dans les classes de chaque école de nos comtés, ici. J'aimerais au moins avoir la certitude que ça va être fait parce que ces classes-là en ont grandement besoin. Et je peux vous dire qu'à mon bureau de comté, le téléphone ne dérougit pas, c'est un dossier pitoyable.

Et je trouve ça inacceptable de traiter les citoyens comme on les traite là, comme on a fait dans les trois dernières années, Mme la Présidente, avec une suite incroyable de hausses de toutes sortes. La classe moyenne, les gens plus âgés qui ont un budget équilibré, je peux vous dire que présentement ils y goûtent. Et c'est la goutte qui fait déborder le vase. Moi, dans mon comté, je peux vous le dire. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Je vous remercie, M. le député. Alors, je serais prête à reconnaître un prochain intervenant. M. le député de l'Acadie et adjoint parlementaire au ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport, à vous la parole.

M. Yvan Bordeleau

M. Bordeleau: Merci, Mme la Présidente. Écoutez, ça me fait plaisir d'intervenir, aujourd'hui, dans le cadre du projet de loi n° 43 parce que je sais que c'est un projet de loi qui est attendu par nos concitoyens. Évidemment, le projet de loi est très clair, il s'agit d'atténuer la hausse des taxes scolaires due à l'augmentation des valeurs foncières. Alors, on a ciblé deux mesures plus particulières qui permettraient d'atténuer le choc, et il s'agit, à ce moment-là, de l'étalement ? le ministre en a parlé tout à l'heure ? et de la possibilité de payer la taxe scolaire en deux versements dans certaines conditions.

Alors, Mme la Présidente, c'est évident qu'une hausse de taxes n'est pas nécessairement une bonne nouvelle, mais il y a toujours un corollaire à une hausse de taxes au niveau des impôts fonciers, c'est qu'il y a une augmentation des valeurs foncières. Alors, je ne pense pas qu'il y ait des citoyens du Québec qui se plaignent que la valeur de leur propriété a augmenté. Alors, évidemment, c'est un capital qui est acquis par les citoyens. Maintenant, évidemment, comme dans d'autres domaines, comme dans le domaine de l'impôt sur les revenus, quand les revenus augmentent, on paie plus d'impôt, quand les valeurs foncières augmentent, on paie plus de taxes, entre autres la taxe scolaire.

Alors, évidemment, la difficulté que les gens avaient, ce n'est pas, Mme la Présidente, de constater qu'on doit payer plus de taxes, le problème que les gens nous ont verbalisé, c'est le choc que ça représente d'avoir à faire face à une augmentation aussi subite ou peut-être aussi importante compte tenu de l'augmentation des valeurs foncières. Alors, le projet de loi vise essentiellement à apporter une réponse à cette préoccupation-là, avec les deux mesures qui sont très bien identifiées.

Alors, d'où vient le projet de loi, Mme la Présidente? Bon, d'une préoccupation que les citoyens nous ont manifestée mais aussi d'une réflexion qui a eu lieu à la Table Québec-Commissions scolaires. Juste rappeler, Mme la Présidente, que la table commissions scolaires a été créée au printemps dernier par le premier ministre et que le premier mandat qu'on a donné à la Table Québec-Commissions scolaires, ça a été de trouver une solution au problème des fortes variations du rôle foncier et également d'apporter une réflexion là-dessus, de trouver des solutions pour atténuer le choc. Et il est devenu évident, lors de ces discussions, que l'étalement était peut-être la meilleure solution à court terme parce que, vous savez, les nouveaux rôles d'évaluation vont entrer en vigueur en janvier 2007. Donc, il s'agissait de la solution qui était la plus réaliste et qui ralliait tout le monde, Mme la Présidente.

n(11 h 10)n

Alors, au niveau de la taxe scolaire, il faut peut-être tracer un peu la raison d'être de cette taxe-là. Évidemment, l'éducation, au Québec, que ce soit au niveau préscolaire, primaire ou secondaire, est en grande partie assumée par les impôts et les taxes que le gouvernement du Québec reçoit, et la taxe scolaire vient, à ce niveau-là, couvrir une partie seulement des dépenses des commissions scolaires. Ces dépenses-là, Mme la Présidente, sont plus particulièrement axées sur le financement, le fonctionnement des commissions scolaires, le conseil des commissaires, l'administration du siège social, le fonctionnement des écoles, chauffage, conciergerie, entretien, l'administration et le secrétariat des écoles ainsi qu'une partie du transport scolaire.

Le ministre mentionnait tout à l'heure que la taxe scolaire, au Québec, représente 15 % de l'ensemble des coûts de l'éducation préscolaire, primaire et secondaire. Alors, ça veut dire, Mme la Présidente, que, par le biais des impôts et des taxes, le gouvernement assume 85 %. Alors, on voit que... Et d'ailleurs c'est une chose peut-être qui a été signalée aussi tout à l'heure, c'est qu'au Québec la taxe scolaire finance au fond 15 %, alors qu'en Ontario c'est 37 %. Alors, je pense bien, de ce côté-là, que les données sont tout à fait significatives.

Alors, les nouveaux rôles d'évaluation, comme on l'a mentionné, ont amené évidemment des augmentations de la valeur foncière importantes, et ça a eu pour effet, comme on l'a mentionné, de faire grimper les taxes scolaires. Mais c'est un peu inévitable. Je pense qu'on ne peut pas penser qu'on peut agir sur les valeurs foncières. Les valeurs foncières, ce sont les valeurs du marché, alors la valeur que les propriétés ont sur le marché. Et l'évolution, à ce moment-là, des valeurs, évidemment ça doit se traduire au niveau des rôles d'évaluation et conséquemment au niveau des taxes.

Alors, au niveau, Mme la Présidente, du projet de loi, de façon plus précise, quand on parle de l'étalement, et on donne beaucoup de chiffres et on mélange beaucoup les choses, mais, de façon très simple, si, par exemple, la valeur foncière d'une propriété augmente de 30 000 $, ce qu'on va permettre, à ce moment-là, c'est qu'en 2007-2008 on paie la taxe foncière sur 10 000 $, en 2008-2009, sur... en 2007-2008, sur 20 000 $ et, en 2008-2009, sur 30 000 $. Alors, il y a un étalement qui se fait.

Au niveau du compte de taxes comme tel, qu'est-ce que ça veut dire? Ça veut dire que, la première année, si on pense avec un taux qui existe actuellement, il y aura 35 $ à payer la première année, alors 70 $ la deuxième année et 105 $ la troisième année. Alors, si on regarde la somme de ces trois années-là, on arrive à un total de 210 $ de taxes qui auront dû être payés par le citoyen, par rapport à trois fois 105 $, c'est-à-dire 315 $. Alors, il y a une économie évidente qui est là, c'est que le citoyen va payer 105 $ de moins qu'il aurait dû payer s'il n'y avait pas eu d'étalement. Alors, c'est une mesure, Mme la Présidente, qui est appréciable. On ne peut pas éviter la hausse de taxes, mais on peut faciliter la transition en atténuant le choc.

Alors, les données comparatives, vous savez, on a parlé de l'Ontario tout à l'heure, mais, si on regarde ce qui se passe au Québec... Et je veux toujours que vous reteniez, Mme la Présidente, qu'au-dessus du 15 % assumé par la taxe scolaire il y a le 85 % qui est assumé par le gouvernement. Alors, s'il n'y avait pas, par exemple, un plafond qui était fixé à 0,35 $ du 100 $ d'évaluation, de façon moyenne, sur l'ensemble du territoire québécois, ce serait 0,49 $ du 100 $ d'évaluation qu'on devrait charger, au niveau de la taxe scolaire, pour couvrir les coûts. Dans certaines régions où la population est moins dense et où on doit maintenir un réseau scolaire quand même qui est complet, on pourrait aller jusqu'à 1,45 $ du 100 $ d'évaluation.

Alors, ici, il s'est fait un arbitrage, vous savez, au moment où la taxe... sur tout l'espace de l'impôt foncier, il s'est fait un arbitrage entre les différents niveaux de gouvernement. Et j'écoutais, tout à l'heure, le député de Vachon qui voulait qu'on remette en cause ou qu'on reprenne l'ensemble de la discussion sur l'espace foncier ou tout le problème de la fiscalité municipale. Alors, Mme la Présidente, vous savez très bien, puis je pense que les gens d'en face sont assez réalistes pour savoir qu'ouvrir ce domaine-là, c'est un chantier qui est énorme, puisqu'on va remettre en cause au fond les revenus du gouvernement provincial, du gouvernement municipal, des gouvernements scolaires.

Et la preuve, Mme la Présidente ? je vais conclure là-dessus parce que le temps passe rapidement ? la preuve qu'il y a une économie, c'est que le gouvernement, à cause de la mesure d'étalement qui est dans le projet de loi n° 43 et la possibilité de payer en deux versements au lieu d'un seul versement à chaque année, quand le compte de taxes scolaires dépasse 300 $, alors ces deux mesures-là, Mme la Présidente, vont faire en sorte que le gouvernement du Québec va devoir combler la différence parce qu'il y a des pertes, à ce moment-là, pour les commissions scolaires directement par l'existence de ces deux mesures-là.

Alors, le montant que le gouvernement devra combler, c'est 93 millions de dollars que le gouvernement devra ajouter à ce qu'il donne actuellement ou à ce qu'il n'aurait pas eu à donner s'il n'y avait pas eu d'étalement ou de possibilité de payer en deux versements. Alors, 93 millions, 86 millions pour la mesure reliée à l'étalement et 7 millions pour la mesure qui implique les deux versements. Alors, Mme la Présidente, si le gouvernement du Québec est obligé d'ajouter 93 millions, c'est qu'il doit y avoir en quelque part quelqu'un qui sauve 93 millions. Et c'est le citoyen du Québec. Et c'est la raison, Mme la Présidente, pour laquelle les gens attendaient depuis longtemps ? ça, on en parle, les députés nous en ont parlé ? les gens attendaient qu'il y ait une mesure pour atténuer le choc, mais personne n'a pu croire que les taxes pouvaient disparaître comme telles alors que les valeurs foncières augmentaient.

Alors, dans ce sens-là, Mme la Présidente, je pense que c'est un projet de loi qui est excellent, qui va être apprécié par nos concitoyens parce que les gens vont réellement voir qu'il y a une économie pour chacun des citoyens du Québec. Merci.

Débat sur la recevabilité de l'amendement

La Vice-Présidente: Je vous remercie. Alors, avant que je délibère sur la recevabilité de la motion, je serais prête à écouter vos plaidoyers. Alors, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, Mme la Présidente. Je voudrais faire quelques remarques donc sur la recevabilité de la motion que je juge et, je crois, que vous devrez juger irrecevable, l'amendement donc qui est proposé par le ministre.

D'abord, premier motif, l'amendement constitue essentiellement de l'argumentation. Or, je pense qu'il y a plusieurs décisions, notamment une décision de 2004, à l'effet que la présidence a déjà défini le terme «argumentation» comme tout ce qui tend à appuyer la conclusion recherchée dans la motion. Or, quand on voit la formulation qui est proposée par cet amendement, on utilise les mots «tel que», «tel que le propose le projet de loi n° 43», «tel que le demandait l'ex-députée de Taillon», c'est de l'argumentation. Et je crois qu'il y a une règle assez claire à l'effet que les motions doivent éviter d'utiliser de l'argumentation.

Deuxième problème de cette motion. Vous avez vu que la motion que l'opposition officielle a présentée est une motion assez simple, très simple, qui se limite à une phrase: «Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives.» Or, l'amendement nous renvoie à d'autres solutions, notamment à celle autour de l'étalement, sachant qu'il y a d'autres solutions que l'étalement. Alors, il doit n'y avoir qu'un seul principe dans une motion. Et, deuxièmement, un amendement ne peut contrevenir au fondement du principe qui est appuyé et soulevé par une motion. Alors, à l'évidence, le libellé proposé par l'amendement ajoute des principes et va à l'encontre du principe même de la motion que nous avons proposée.

Troisième élément, je vous rappelle que la motion du mercredi est une motion qui est destinée à l'opposition et qu'en ce sens l'interprétation que la présidence doit avoir quant à la recevabilité d'un amendement doit être une interprétation restrictive, puisqu'il y a peu de moyens pour l'opposition d'interpeller le gouvernement. Et en ce sens, à l'évidence, le gouvernement, alors que le sens même de la motion est d'exiger quelque chose du gouvernement et de condamner donc un choix qui est fait par le gouvernement, l'amendement cherche à susciter un appui au choix que le gouvernement fait, alors qu'on est contre le projet de loi dont il est abondamment question depuis ce matin.

n(11 h 20)n

Et, quant à cet argument, je vous réfère à la décision du 18 octobre dernier, qui est récente et qui expose extrêmement clairement ce problème, où on indique, et je le cite: «Selon l'article 187 du règlement, un amendement doit concerner le même sujet que la motion et, d'aucune façon, ne peut aller à l'encontre de ce principe pour être jugé recevable. La jurisprudence a précisé ces critères, notamment en spécifiant que la motion d'amendement ne [peut] nier, dénaturer ou écarter la motion ou la quintessence de la motion principale. En l'espèce, le principe de la motion du chef de l'opposition [...] est la convocation d'urgence d'un sommet, alors que la motion d'amendement propose la mise en place d'un plan d'action.»

On est exactement dans la même dynamique. Nous, on dit: On exige que le gouvernement renonce à des hausses de taxes scolaires démesurées, et là, nous, il nous parle: Bien, on pourrait peut-être essayer d'organiser ça autour du plan d'action... du projet de loi n° 43, tel que le dit le projet de loi n° 43 et une autre déclaration d'une ex-députée. Alors, Mme la Présidente, pour ces motifs, je pense que cette motion doit être considérée irrecevable.

La Vice-Présidente: Je vous remercie. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Michèle Lamquin-Éthier

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Alors, j'aimerais également intervenir rapidement sur l'amendement présenté par le ministre de l'Éducation, du Sport et du Loisir et vous soumettre des éléments que je vous prierais de considérer de façon à juger l'amendement présenté par le ministre de l'Éducation, du Sport et du Loisir comme étant recevable.

Lorsque nous lisons la motion présentée par le député de Vachon, on peut dire que le principe a trait à exiger du gouvernement qu'il renonce aux hausses de taxes scolaires abusives. Le principe de la motion de fond, je le répète, est donc de demander au gouvernement de renoncer aux hausses de taxes scolaires abusives. Et l'amendement, tel que proposé par M. le ministre, maintient tout à fait intact ce principe qui encore une fois a trait au caractère abusif des taxes scolaires. Et l'amendement vise à permettre l'étalement.

Vous savez, Mme la Présidente, que c'est l'article 197 du règlement de l'Assemblée nationale qui prévoit les conditions selon lesquelles un amendement est recevable. Il est dit que l'amendement doit concerner le même sujet que la motion principale, qu'il ne peut aller à l'encontre de son principe pour être jugé recevable. Et la jurisprudence a bel et bien établi ces critères, notamment en spécifiant que la motion d'amendement ne doit pas nier, dénaturer ou écarter la motion principale. Je porte à votre attention principalement la décision du 20 avril 2005, 197/38.

Pour revenir à l'amendement tel que proposé par le ministre de l'Éducation, il est question d'une mesure, dans la motion d'amendement, et cette mesure-là ne nie pas, ne dénature pas et ne contredit pas le principe de la motion principale, qui encore une fois a trait au caractère abusif des taxes scolaires.

Alors, ici, Mme la Présidente, j'aimerais porter à votre attention une jurisprudence récente, en date du 22 novembre 2000, soit 197/27. Alors, en ce sens, l'amendement proposé par le ministre n'est qu'un accessoire à la motion principale parce qu'il ne fait que modifier une modalité de celle-ci. Vous l'aurez compris, il ne fait que permettre l'étalement, et, en soi, il s'agit d'une mesure tout à fait raisonnable, pour reprendre les termes de mon collègue, pour éviter le choc évidemment aux contribuables.

Vous aurez compris qu'un amendement peut avoir pour effet de modifier certaines modalités ? et encore une fois il est bien question ici d'une modalité ? sans toutefois en changer le principe. Et ça, ça a bel et bien été établi par la procédure parlementaire au Québec. Notamment, j'aurai des éléments d'information à la page 215 du volume de procédures parlementaires.

Donc, en conséquence, Mme la Présidente, l'amendement proposé ne dénature aucunement la motion de fond encore une fois qui ne fait que concerner le caractère abusif des taxes scolaires. Il ne l'écarte en rien en effet parce qu'il ne fait que permettre l'étalement. Et je vous soumets respectueusement que vous devriez juger ledit amendement recevable parce qu'il demeure conforme au principe de la motion principale.

La Vice-Présidente: Je vous remercie.

Une voix: ...

La Vice-Présidente: Oui, soyez bref.

M. Stéphane Bédard

M. Bédard: Très courte réplique. Vous savez, normalement on remplace les mots lorsqu'on propose des amendements. Dans ce cas-ci, le gouvernement a décidé de garder les mots. Ce n'est pas parce qu'on garde les mêmes mots qu'on ne va pas à l'encontre du principe. Et d'ailleurs, je pense, dans son argumentaire, la leader l'a bien exprimé, nous souhaitons qu'il n'y ait pas de hausse de taxes, et le gouvernement souhaite son étalement, et c'est dit mot à mot, de bout en bout de la motion. Alors, ça fait en sorte que cette motion contrevient effectivement au principe et le nie carrément.

Reprise du débat sur la motion
principale et l'amendement

La Vice-Présidente: Je vous remercie. Alors, sur ce, le débat se poursuit et sur la motion d'amendement et sur la motion présentée par le député de Vachon. Je reconnais là-dessus le député de Drummond et porte-parole de l'opposition officielle en matière d'affaires municipales. À vous la parole.

M. Normand Jutras

M. Jutras: Alors, Mme la Présidente, j'interviens relativement à la motion qui est présentée aujourd'hui par l'opposition et qui demande au gouvernement de renoncer aux hausses de taxes scolaires abusives.

On sait que, Mme la Présidente, les Québécois présentement sont confrontés avec des hausses de taxes scolaires substantielles. Chez nous, à Drummondville, entre autres, là, il y a eu un nouveau rôle d'évaluation déposé cette année, en 2006, et, pour certains contribuables, ça représente une augmentation de la taxe scolaire de l'ordre de... ça va dans certains cas jusqu'à 50 %. Et évidemment ça a été dénoncé, et ça a été dénoncé, M. le Président, parce qu'imaginez-vous que, votre compte de taxes que vous recevez, là, on y voit une hausse à ce point, les gens sont assommés par cette hausse-là. Et c'est là qu'à partir de beaucoup de villes du Québec les gens ont dit: Bien, il faut que le gouvernement réagisse par rapport à ça.

Et là c'est là qu'on a vu le gouvernement réagir comme il l'a fait, mal réagir encore une fois et, comme le dit le député de Vachon, accoucher d'une souris, en disant: Mmes, MM. les Québécois, vous allez la payer, l'augmentation de la taxe scolaire, sauf qu'on l'étale sur trois ans. Mais, le résultat, M. le Président, l'augmentation, elle est là, les Québécois vont connaître une augmentation de leurs taxes scolaires de l'ordre de 40 %, 50 %, sauf qu'on permet un étalement sur trois ans.

J'ai écouté le ministre tantôt, le ministre de l'Éducation, défendre son projet de loi. Vous aurez remarqué qu'il en a peu parlé, de son projet de loi. Je le comprends parce qu'il serait appelé à défendre l'indéfendable. Et finalement le peu de temps qu'il en a parlé, il s'est emporté, comme il nous a dit, et ça a été d'insulter les députés de ce côté-ci de la Chambre. Mais, M. le Président, effectivement, quand on est obligé, pour défendre un projet de loi, de procéder par l'insulte, ça veut dire qu'on ne repose pas... qu'on ne dépend pas du solide.

Et je pense que, dans Le Journal de Québec, la semaine dernière, l'article de Jean-Jacques Samson résume bien ce qui se passe par rapport à ce projet de loi n° 43: D'incorrigibles taxeurs ? en parlant du gouvernement libéral. Encore une augmentation de taxes du gouvernement libéral, encore une autre augmentation de taxes du gouvernement libéral. M. Samson parle, concernant le ministre de l'Éducation, il parle d'une «preuve d'un cynisme peu commun», «d'un cynisme peu commun». Parce que l'augmentation, elle est là, et il a beau, là, nous tenir l'argumentation qu'il a tentée de tenir tantôt à l'effet que, non, il y a même une économie, écoutez, les gens ne sont pas dupes, là, les gens sont intelligents, ils sont capables de comprendre puis ils voient bien qu'il y a là une augmentation de taxes substantielle. C'est pour ça que M. Samson parle d'un cynisme peu commun. Et même M. Samson dit, en parlant du ministre: «Selon le ministre [de l'Éducation], il y aurait cependant matière à se réjouir de l'augmentation moyenne de 40 % des taxes scolaires sous prétexte que celles-ci pourraient être étalées sur trois ans!» Et ce que M. Samson dit, en parlant du ministre: «Il rit de nous!»«Il rit de nous!»

n(11 h 30)n

Alors, M. le Président, incorrigibles taxeurs, oui, il faut le dire, et il faut le dire à deux niveaux. La première chose, M. le Président, c'est quoi, l'engagement que le Parti libéral du Québec a pris lors de la dernière campagne électorale? C'était de diminuer le fardeau fiscal des Québécois. Et il l'a répété, le premier ministre l'a répété sur toutes les tribunes durant la campagne électorale et même avant la campagne électorale, il fallait baisser les impôts de l'ordre de 5 milliards de dollars à raison de 1 milliard par année. Alors, non seulement, M. le Président, cet engagement solennel pris par le premier ministre du Québec et pris par les libéraux n'a pas été respecté, non seulement il n'a pas été respecté, mais au contraire on a assisté à plusieurs augmentations de taxes, ce qui fait dire à M. Samson «d'incorrigibles taxeurs».

Puis là je fais référence seulement à quelques-unes. On a augmenté taxes et tarifs: les tarifs de garderie augmentés de 40 %; primes d'assurance médicaments qui ont été augmentées; tarifs d'électricité qui, en deux ans, ont été augmentés de 11 % ? et Hydro-Québec nous disait récemment, en commission parlementaire: elle prévoit des augmentations qui vont aller jusqu'à 20 % d'ici 2010 alors, et ça, c'est un minimum, M. le Président, parce que je ne serais pas étonné, moi, de voir Hydro-Québec arriver avec des augmentations plus substantielles; augmentation des tarifs de transport en commun.

Alors, qu'est-ce que nous avaient dit les libéraux? Ils avaient dit: C'est important que les Québécois se retrouvent avec plus d'argent dans leurs poches pour pouvoir favoriser la circulation des biens puis la consommation. Mais c'est le contraire qui se passe. Non seulement les impôts n'ont pas été réduits, mais on a assisté à une augmentation de tarifs et de taxes considérable, et là, M. le Président, c'est la cerise sur le sundae: une augmentation de la taxe scolaire de l'ordre de 40 % à 50 %. Et ce qu'il faut dire, et il ne faut pas être dupe de ce jeu-là, M. le Président, c'est une augmentation de taxes du gouvernement libéral. C'est sûr que, là, c'est les commissions scolaires qui portent l'odieux parce que c'est une augmentation de la taxe scolaire, mais en fait, là, c'est une augmentation de taxes par le gouvernement libéral qui aurait pu procéder autrement et permettre aux commissions scolaires d'éviter ces taxes-là. Mais il ne donne pas cette latitude-là aux commissions scolaires de sorte que c'est vraiment une décision du gouvernement libéral d'augmenter les taxes municipales. Ça, il faut le dire, c'est important. Il ne faut pas permettre ce camouflage derrière les commissions scolaires. C'est en fait une augmentation de taxes du gouvernement libéral. Et le corollaire à ça aussi, M. le Président, c'est: Qui va mettre l'argent dans sa poche? C'est le gouvernement libéral, et ça, sans qu'il y ait d'augmentation des services en matière d'éducation, M. le Président.

Alors donc, une augmentation de taxes qui vient du gouvernement libéral et sans qu'il y ait augmentation des services en matière d'éducation.

Et c'est sans compter... J'écoutais l'intervenant précédent, le député libéral de l'Acadie, qui disait: Un projet de loi qui est bien reçu par tout le monde. Bien là, là, il faudrait qu'il se connecte à la réalité parce que c'est un projet de loi qui au contraire est dénoncé par à peu près tout le monde et qui est dénoncé, entre autres, M. le Président, par les intervenants du monde municipal. Et je voudrais vous référer à la déclaration du président de l'UMQ, le maire de Sherbrooke, la semaine dernière, qui qualifiait la décision du gouvernement de déraisonnable et contraire à l'intérêt des citoyens contribuables. Et ce que M. Perrault, le président de l'UMQ, disait: «Dans tout ce débat du financement local de l'éducation au Québec, il faut penser au citoyen contribuable et c'est sur la base de cette préoccupation que l'UMQ non seulement s'opposait à toute augmentation du taux de la taxe scolaire, mais réclamait une diminution de plafond de 0,35 $ du 100 [...] d'évaluation.»

Et Bernard Généreux, le président de la Fédération québécoise des municipalités, lui aussi dénonce cette augmentation de taxes et exprime le désaccord maintes fois répété de la FQM et de l'ensemble du monde municipal: «Il doit maintenant s'attendre à faire face à une opposition farouche à ce sujet.» C'est ce que le président de la FQM dit: On va s'opposer farouchement à ce projet de loi: «Pour ce qui est de l'étalement des hausses de taxes scolaires sur trois ans, cette mesure ne change rien et ne peut avoir que pour seul objectif de faire mieux avaler la pilule aux contribuables. À terme, ces derniers sont toujours les grands perdants, car rien n'indique qu'une hausse de la taxe scolaire se traduira par une amélioration de la qualité des services d'éducation.»

Alors, les intervenants du monde municipal dénoncent cette augmentation de taxes, et ce sont ces mêmes intervenants que la ministre des Affaires municipales nous dit que ce sont des partenaires du gouvernement. Et elle dit que, ces partenaires, elle les traite, le gouvernement libéral les traite avec respect et avec confiance. Mais ça veut dire quoi, ces mots-là, M. le Président, pour la ministre des Affaires municipales, «respect», «confiance», «partenariat»? On voit bien, M. le Président, que ce ne sont que des mots. Et en fait, dans la vraie vie, dans la vraie vie, les intervenants municipaux sont laissés pour compte dans toute cette affaire, mais, en bout de piste, M. le Président, ce qu'il faut dénoncer, c'est que c'est encore une fois le gouvernement libéral qui va puiser dans la poche des contribuables québécois et qui leur impose une augmentation de taxes. Et ça, c'est certain, c'est certain, M. le Président, que de notre part il va y avoir une opposition et une opposition farouche à un tel projet de loi.

Je terminerai, M. le Président. Aussi, j'entendais le ministre de l'Éducation. Je me dis: Il faut le faire, hein? Ce qu'il oublie, lui, ce dont il ne parle jamais, c'est que le déficit record de l'histoire du Québec, c'est un gouvernement libéral, c'est en 1994. Et, nous, quand on a été élus en 1994, le déficit record de l'histoire du Québec, le doublement de la dette en l'espace de cinq ans, ça doit être imputé au gouvernement libéral de l'époque. Et, nous, il a fallu faire face à cette situation-là, et nous avons eu le courage, nous, de redresser les finances publiques de l'État, alors que les libéraux ont fui leurs responsabilités à cette époque-là. Et ce que Daniel Johnson disait: Vivre selon nos moyens, bien ils n'ont pas été capables de faire face à la musique. Et alors, quand j'entends le ministre de l'Éducation venir nous reprocher les mesures qu'on a été obligés d'adopter pour réparer leur gâchis, bien, je me dis, ça prend de l'effronterie.

Et je conclus en disant, M. le Président, qu'effectivement c'est un projet de loi dont les Québécois n'ont pas à être victimes encore une fois.

Le Vice-Président (M. Gendron): Avant de donner la parole à M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, je lui indique que vous avez trois minutes, et il ne restera que sept minutes à l'opposition officielle pour réserver la réplique.

Alors, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière, vous avez trois minutes.

M. Marc Picard

M. Picard: Merci, M. le Président. La semaine dernière, le Parti québécois n'a pas appuyé la proposition pour Kyoto, la coalition. Donc, le Parti québécois était le seul à avoir le pas. Aujourd'hui, le Parti libéral est le seul à croire que le projet de loi présenté par le ministre de l'Éducation est demandé par la population.

Feuilletons les journaux. Tantôt, le ministre feuilletait une vieille revue de presse. Mais, le 26 octobre: À pleines mains dans les poches du contribuable; le 26 octobre, dans Le Soleil: L'astuce des taxes scolaires. Donc, la solution proposée par le ministre de l'Éducation dénote une incompréhension complète vécue par les citoyens de la classe moyenne. En réalité, M. le Président, le grand gagnant est le ministre de l'Éducation qui empochera 125 millions à court terme et plus de 300 millions d'ici cinq à six ans. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est une fiscaliste de l'Union des municipalités du Québec.

J'entendais, la semaine dernière et ce matin, le ministre de l'Éducation qui nous parlait de l'autonomie. La semaine dernière, le ministre des Finances nous disait qu'il ne pouvait inclure les déficits des commissions scolaires dans le périmètre comptable du gouvernement parce qu'elles sont autonomes dans leur gestion. Je me demande de quel type d'autonomie elles profitent, les commissions scolaires, quand elles sont obligées de taxer au maximum au lieu de pouvoir manoeuvrer comme les villes pour diminuer le choc pour les citoyens. Ce que le gouvernement aurait dû faire, c'est de modifier la loi afin de permettre aux commissions scolaires de baisser le taux de taxation comme le feront les municipalités, et ce, pour respecter la capacité de payer des Québécois. Mais non, la réponse du ministre a été de dire aux citoyens: D'ici la prochaine élection générale, l'augmentation ne vous fera pas trop mal. Ça m'apparaît être plutôt une stratégie pour enterrer l'affaire plutôt qu'une solution à long terme pour régler un problème qui va nécessairement se répéter dans l'avenir. M. le Président, ça sent la fin de mandat, et le gouvernement agit pour masquer ses promesses non tenues.

Après le report des hausses de la Société d'assurance auto du Québec, ce sont les taxes scolaires que l'on glisse sous le tapis électoral. Je voterai donc pour cette motion et j'invite le gouvernement à travailler sur une solution durable à la surfacturation, surtaxation des Québécois.

Tout à l'heure, le ministre parlait de M. Lambert et de Mme Tremblay, que ce ne serait pas trop cher, ça va être amorti sur 15 ans, qu'il nous parlait, mais M. Lambert et Mme Tremblay, ils vont avoir moins d'argent dans leurs poches parce que le gouvernement libéral va venir leur siphonner de l'argent encore plus. Merci, M. le Président.

n(11 h 40)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, M. le député des Chutes-de-la-Chaudière. Et je cède la parole maintenant à Mme la députée de Taschereau pour le sept minutes restant à l'opposition officielle. Mme la députée.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Je joins ma voix au porte-parole de l'opposition officielle, député de Vachon, qui dépose une motion qui exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives. Le mot «abusives» est très important ici, et ce sont non seulement des taxes scolaires abusives, mais c'est même ? et là j'ai les mots exacts de la mairesse de la ville de Québec, de la mairesse Boucher, qui dit: impôts déguisés, impôts déguisés.

C'est toute l'argumentation que nous faisons valoir en ce moment. C'est que le gouvernement se croise les bras devant une situation qui est exceptionnelle, 40 % d'augmentation des taux d'évaluation des valeurs foncières des maisons sur le territoire de la ville de Québec, 40 % d'augmentation. Que dit le gouvernement? Je me croise les bras et j'attends que la pompe à fric m'amène l'argent qui va sortir des poches des contribuables, et, cette pompe à fric, en plus il n'y aura pas mon nom dessus. Je me cache derrière les commissions scolaires, je branche la pompe, j'étale sur trois ans, mais la réalité, c'est que, pendant trois ans, ça va monter comme les taxes scolaires ont augmenté régulièrement depuis l'arrivée au pouvoir du Parti libéral du Québec, comme ça grimpe comme ça. Ça va monter à une courbe encore plus haute, et en plus je m'en lave les mains. «Fatalité», a dit le député de Bordeleau. «Fatalité», a-t-il dit. La fatalité, c'est ce qui va frapper durement les familles de la région de Québec à 40 % d'augmentation des taxes scolaires. Comment vont réagir les familles des quartiers de banlieue qui vivent avec leur première hypothèque, qui ont un, qui ont deux enfants, qui viennent enfin de s'acheter une maison, qui sortent souvent de l'université, qui ont des prêts scolaires à rembourser, et tout ça, et qui n'ont pas prévu une telle hausse de taxes scolaires?

Comment vont réagir les personnes âgées, ces retraités qui ont des finances serrées, qui réussissent à s'en tirer et qui voient arriver une hausse des taxes scolaires de 40 %? La fatalité libérale va les frapper, M. le Président. Et les bras croisés du gouvernement libéral qui... Tout ce qu'il trouve à proposer, c'est d'ajuster le niveau de la pompe à fric pour qu'elle s'écoule de plus en plus vite sur trois ans, sans aucune autre solution que de dire: Fatalité, fatalité, que la fatalité frappe, je ramasse l'argent qui va venir des poches des contribuables. Les commissions scolaires n'ont pas le choix, M. le Président. Les commissions scolaires, d'après le projet de loi, doivent appliquer la taxe. Les villes, que vont-elles faire, elles qui viennent de voir grimper l'évaluation foncière de 40 %? Est-ce qu'elles vont augmenter les taxes? Normalement, elles devraient augmenter les taxes foncières, mais là le gouvernement s'est empressé de présenter ce projet de loi là en figeant, actuellement dans le ciment, le fait que les taxes scolaires vont augmenter de façon progressive bien sûr, mais elles vont augmenter quand même. Il n'y a pas eu des réévaluations de la façon de gérer le dossier de la fiscalité entre le gouvernement et les municipalités. Ça fait trois, quatre ans qu'on nous promet ça, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement libéral qu'on nous promet ça. Ce qui est arrivé, c'est qu'on dit: Fatalité, je me croise les bras, les villes géreront comme elles pourront. Ils se battront, sur le champ fiscal, avec les commissions scolaires.

C'est la guerre fiscale en ce moment, sur le territoire municipal, entre les commissions scolaires et les municipalités, et pendant ce temps le gouvernement empoche. Combien empoche le gouvernement actuellement? Bien, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement, en 2003, les taxes scolaires ont bondi de 530 millions de dollars. Et là-dessus il en est rentré combien au gouvernement, dans le fonds consolidé? 345 millions. Il y a 345 millions de dollars qui n'ont pas servi comme le devraient les taxes scolaires. Ils n'ont pas servi aux frais d'administration des commissions scolaires, transport, et tout ça, ça a servi à partir dans le fonds consolidé. «Taxes clandestines, impôts déguisés», dit la mairesse de Québec. La pompe à fric est ouverte depuis 2003. On s'en sert. On surtaxe les citoyens et on continue à les surtaxer les yeux fermés. Un projet de loi qui permet d'étaler sur trois ans une augmentation des taxes, ce n'est pas une économie, comme a essayé de le faire accroire le ministre de l'Éducation dans une conférence de presse qui va être mémorable, mémorable dans les annales des conférences de presse de l'Assemblée nationale.

Une autre chose que je veux soulever, Mme la Présidente: le gros problème d'iniquité fiscale qui se passe actuellement sur le territoire de la ville de Québec. Regardez les aberrations qu'amène le projet de loi actuel. La commission scolaire des Découvreurs qui couvre à peu près le territoire de Sainte-Foy, pour une maison d'une valeur d'à peu près 210 000 $, ce qui est à peu près la valeur moyenne, la variation de taxes sera de 1 %, 4,95 $, 4,95 $. Ça, c'est une commission scolaire, la même ville. La commission scolaire des Premières-Seigneuries, secteur Charlesbourg, Beauport, tout ça, la même valeur de maison, 210 000 $, variation de taxes: 40 %; augmentation de taxes: 210 $. Voilà l'iniquité sur le même territoire de la même ville: 4,95 $ pour quelqu'un qui habite là, 210 $ pour quelqu'un qui habite là.

C'est ça, la proposition du gouvernement. Ça n'a pas de sens, une proposition comme ça. Je comprends pourquoi les gens hurlent. Je comprends pourquoi les gens se chicanent. Non seulement il y a de l'iniquité, mais en plus les taxes vont grimper à toute vitesse. La valeur des maisons des gens vient de grimper. Qu'est-ce qui va arriver avec les gens qui, par exemple, sont sur l'aide sociale? La valeur des maisons, elle est calculée pour leur accès à l'aide sociale. Qu'est-ce qui va se passer? Où en est rendu le ministre des Affaires municipales? On n'a pas de nouvelle, aucune gestion de cette augmentation des valeurs foncières qui est arrivée, que tout le monde sait qui va arriver depuis trois, quatre ans. Ça fait trois, quatre ans qu'on sait que c'est ça qui va se passer, et, pendant ce trois, quatre ans, qu'a fait le gouvernement? Attendre le moment où il va pouvoir amasser cette taxe clandestine, cet impôt déguisé et continuer à vivre avec des hausses de tarifs, à faire vivre aux contribuables québécois, québécoises des hausses de tarifs constantes, accélérées, augmentées régulièrement.

Mme la Présidente, je trouve que la motion que présente le député de Vachon est essentielle pour l'équité fiscale au Québec. Merci.

Décision de la présidence sur la
recevabilité de l'amendement

La Vice-Présidente: Alors, je vous remercie, Mme la députée. Je vais maintenant rendre ma décision sur la recevabilité de l'amendement proposé par le ministre de l'Éducation à la motion du député de Vachon. Alors, je rappelle, cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives.»

L'amendement propose de remplacer les mots «exige du» par les mots «demande au» et d'ajouter, après le mot «abusives», les mots suivants: «et qu'à cette fin, il permette aux commissions scolaires de mettre en oeuvre un mécanisme pour étaler la hausse de taxes, tel que le propose le projet de loi n° 43 et tel que le demandait l'ex-députée de Taillon le 19 mai 2005».

La motion amendée se lirait donc comme suit:

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives et qu'à cette fin, il permette aux commissions scolaires de mettre en oeuvre un mécanisme pour étaler la hausse de taxes, tel que le propose le projet de loi n° 43 et tel que le demandait l'ex-députée de Taillon le 19 mai 2005.»

Selon l'article 197 du règlement, un amendement doit concerner le même sujet que la motion et ne peut aller à l'encontre de son principe pour être jugé recevable. La jurisprudence a par ailleurs précisé ces critères notamment en spécifiant que la motion d'amendement ne doit pas nier, dénaturer ou écarter la motion principale. De plus, il a été établi à plusieurs reprises qu'une motion d'amendement peut atténuer ou élargir la portée de la motion principale sans toutefois l'écarter ou la nier. En l'espèce, le principe de la motion principale est que le gouvernement renonce à imposer des hausses de taxes scolaires abusives. L'amendement propose quant à lui d'étaler les hausses de taxes scolaires dans le temps. Or, l'étalement proposé par l'amendement change les conditions dans lesquelles les hausses seront imposées sans forcément y renoncer. Il ne s'agit donc pas d'ajouter une simple modalité au renoncement des hausses de taxes mais plutôt d'un élément qui va à l'encontre du principe même de la motion principale, c'est pourquoi je le déclare irrecevable.

n(11 h 50)n

Et, vu ce qui précède, je n'ai pas à décider si l'amendement constitue de l'argumentation ou simplement d'un moyen de disposer des hausses de taxes scolaires.

Reprise du débat sur la motion principale

Je cède maintenant la parole au député de Vachon pour sa réplique de 10 minutes.

M. Camil Bouchard (réplique)

M. Bouchard (Vachon): Merci, Mme la Présidente. Permettez-moi, pour commencer, de réagir à un ou deux propos du ministre lorsqu'il est intervenu au sujet de cette motion.

Je veux tout simplement rétablir les faits. Le ministre invoque une déclaration de notre ex-collègue députée de Taillon à l'effet qu'elle aurait suggéré que le gouvernement considère l'étalement comme un moyen d'atténuer le choc foncier que nous anticipions à ce moment-là. Ce que le ministre ne dit pas, Mme la Présidente, c'est que la députée de Taillon mentionnait cette possibilité comme un moyen parmi un certain nombre de moyens, et je réfère à un communiqué qu'elle publiait le 17 mai, dans lequel elle évoque également la possibilité de revoir les calculs de péréquation associés à la taxe scolaire. Alors, je veux bien que le ministre puisse citer mes anciennes collègues ou mes anciens collègues, mais j'aimerais ça qu'il puisse les citer complètement, Mme la Présidente, et qu'il puisse rendre compte de la véritable portée des propositions que notre collègue a faites à l'époque. Elle a parlé d'étalement, elle a parlé aussi d'atténuation puis elle a parlé de revoir les règles de péréquation.

Je vous ferai remarquer, Mme la Présidente, que le ministre ne m'a pas répondu non plus à cet égard lorsque je lui ai fait la remarque qu'au mois de mai l'attachée de presse du ministre déclarait devant les journalistes que le ministre et la table qu'il formait avec les commissions scolaires pourraient éventuellement revoir cette idée de situer les augmentations de taxes scolaires à un niveau de l'indice des prix à la consommation. Le ministre n'a pas répondu à la question: Pourquoi il avait abandonné ce chemin-là? Pourquoi il avait abandonné cette hypothèse? Quel est son rationnel pour ne pas considérer cette hypothèse? Pourquoi elle aurait été rejetée? Quelles sont les raisons? Peut-être qu'il y a des raisons tout à fait valables de rejeter cette hypothèse-là, mais pourquoi ne fait-il pas la démonstration, devant cette Chambre des parlementaires, qu'il a sérieusement considéré cette option mais que, pour des raisons qu'il pourrait juger valables, et qu'il pourrait juger valides, et auxquelles peut-être on pourrait s'associer, je n'en sais rien, mais pour ces raisons il aurait renoncé à cette avenue?

Alors, Mme la Présidente, donc je pense que vous comprendrez que c'était très important que je puisse redresser les faits, que je puisse rétablir les faits et que je puisse, en l'absence de mon ex-collègue de Taillon, à tout le moins, lui rendre cette justice que nous devons et ce respect que nous devons mutuellement aux parlementaires, à savoir citer correctement et avec rigueur les déclarations, ou les propositions, ou les hypothèses qui auraient pu être évoquées à l'époque.

Deuxièmement, le ministre nous dit ? et ça a été évoqué par un collègue dans cette Chambre ? le ministre nous disait tout à l'heure qu'il faut faire confiance aux autorités locales, qu'il leur donne plus de pouvoirs, etc., puis que quelque part se décide plus, à l'intérieur des collectivités locales, ce qui devrait être éventuellement mis en vigueur dans le monde scolaire et dans le monde de l'éducation, etc. Mais en quoi le projet de loi n° 43 vient-il modifier ça? Le ministre ne modifie pas du tout la capacité des commissions scolaires de faire varier leurs taux dans le système de péréquation actuel. Alors, tout ce qu'il fait, c'est de dire: Vous pouvez étaler l'horreur, étalez l'horreur, on vous donne la permission d'étaler l'horreur durant 15 ans, durant 20 ans, mais étalez, étalez dans le temps. Alors ça, franchement, comme argument, je trouve ça relativement faible, Mme la Présidente, qu'un ministre vienne se présenter devant nous, qu'après deux ans qu'il ait été alerté d'un choc foncier éventuel, qu'il ait été alerté d'abord par les villes de Lévis, de Gatineau et de Longueuil... Je vous ferai remarquer qu'à Longueuil, là, les gens ont commencé à payer leurs comptes et qu'il n'y a pas de rétroactivité, là, sur le premier chèque qu'ils ont envoyé dans leurs comptes, là, pour payer leurs taxes. Il n'y en a pas, là.

Le ministre leur dit: Écoutez, là, on s'est traîné les pieds durant peut-être trop longtemps, là, on s'en excuse, là; c'est dommage, mais l'étalement va se faire sur deux ans et non pas sur trois, puis ce que je vous propose comme marché, là, c'est que vous allez payer 66 % de la facture la deuxième année. Mais, regardez, vous auriez payé seulement 33 %, là, selon mon projet de loi, là, la première année, mais on a décidé ça trop tard. Mon collègue, mon prédécesseur, avait dit que c'était nécessaire de le faire, là, en 2004, là, puis qu'on allait déposer quelque chose à l'automne 2004, mais finalement la pression a baissé. Enfin, on s'est laissé distraire par d'autre chose. Peut-être qu'on attendait un transfert du fédéral qui n'est jamais venu.

Mais toujours est-il qu'un an plus tard on arrive à cette solution à l'effet que certains contribuables, parce que le ministre s'est traîné les pieds, certains contribuables auront payé davantage que d'autres à propos des mêmes évaluations foncières qu'ils auront vécues au cours des dernières années. Alors, la valeur foncière augmente, oui, la richesse collective augmente à travers la valeur foncière, mais les contribuables ne sont pas traités de la même façon, dans ce projet de loi, tout simplement parce qu'il y a eu négligence, de la part du gouvernement, d'intervenir à propos, de façon opportune, de façon correcte pour atténuer le choc si l'objectif qu'il poursuivait était simplement celui-là.

Mme la Présidente, ce que le ministre nous dit, là, puis ce qu'il continue à défendre, l'indéfendable, c'est qu'il n'y a pas de hausse. Bien, voyons donc. Regardez, là, tout simplement: quelqu'un qui voit sa propriété augmenter de 100 000 $ à 140 000 $, il y a une hausse devant lui, là, de 40 % d'évaluation de sa valeur foncière, là, et le choc, là, il est sur la valeur foncière totale au bout de trois ans, d'après le projet du ministre. Au bout de trois ans, là, la facture s'applique sur 100 % de l'augmentation. Le ministre nous dit: Oui, mais, regardez, là, il aurait payé plus cher si je n'étais pas intervenu. Mais il aurait payé encore beaucoup moins cher s'il était intervenu correctement. S'il était intervenu, par exemple, en appliquant l'indice des prix à la consommation, c'est-à-dire une augmentation de 3 % à 4 % plutôt qu'une augmentation de 13 %, puis une augmentation de 26 %, puis une augmentation de 40 %, bien il aurait payé pas mal moins cher, pas mal moins cher. Au lieu de 280 $, on se serait peut-être retrouvé avec un compte de taxes qui oscille entre 48 $ et 60 $, si on avait appliqué cela.

Mais, si on avait eu le courage d'appliquer cela, on aurait dû aussi avoir le courage ? et c'est ça qui a bloqué le ministre ? de dire aux Québécois et Québécoises: On s'est fourvoyés dans notre cadre financier, dans notre cadre budgétaire, durant la campagne électorale. C'était un cadre financier surréaliste parce qu'on comptait sur des transferts du gouvernement fédéral pour pouvoir arriver dans notre budget. Excusez-nous, là, pourrait-il dire, on est dépendants du fédéral, puis ils n'ont pas livré la marchandise. Nous, en tant que fédéralistes croyants, on était sûrs, en tant que fédéralistes pratiquants, on était sûrs qu'ils allaient nous donner, qu'ils allaient nous livrer l'argent pour qu'on puisse respecter nos engagements. On n'a pas de récurrence dans le budget, vous nous en excuserez, là, parce que c'est le fédéral qui a le magot, mais on était sûrs qu'ils allaient nous le livrer parce qu'on est des bons amis puis on partage la même doctrine, la doctrine fédéraliste. On a la même obsession que nos amis à Ottawa. Alors, on est tellement obsédés par ça puis on est tellement investis de ça qu'on était sûrs qu'ils allaient livrer le transfert. Ils ne l'ont pas fait, alors on est pris, on est pris.

Et devant ça arrive, ô miracle, une augmentation des valeurs foncières. On ne dit pas un mot puis on va récupérer, sur 530 millions, depuis le début, depuis que ce gouvernement est en place, on va récupérer une augmentation de 530 millions de taxes scolaires. On en redistribue en péréquation puis on empoche 340 millions qu'on envoie dans le fonds consolidé. Et, Mme la Présidente, même si ce gouvernement arrivait à faire la démonstration qu'ils ont investi la totalité de ce 340 millions en éducation, ce qu'ils n'ont jamais eu le courage de faire, c'est de dire aux Québécoises et aux Québécois: Écoutez, vous ne nous avez pas élus pour ça, vous ne nous avez pas élus pour une augmentation d'impôt qui frise les 40 % dans certains cas ou qui frise les 50 % dans d'autres cas, mais, on vous le dit, là, on est mal pris, on a besoin de nouvel argent. Le fédéral ne livre pas, puis on est obligés de prélever un impôt supplémentaire parce que quelque part le système n'a pas fonctionné, et c'est vous qui allez payer désormais. Alors, c'est ça, la vérité, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente: Alors, je vais maintenant mettre aux voix la motion qui se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives.»

Est-ce que cette motion est adoptée? Mme la leader.

M. Bédard: Vote nominal.

La Vice-Présidente: Vote par appel nominal. Mme la leader adjointe du gouvernement.

Mme Lamquin-Éthier: Merci, Mme la Présidente. Alors, conformément à l'article 223 de notre règlement, je vous demanderais de reporter le vote à la période des affaires courantes de ce jour.

Vote reporté

La Vice-Présidente: Alors, je me rends à votre demande. Donc, le vote aura lieu à la période des affaires courantes, cet après-midi.

Je suspends donc les travaux jusqu'à 14 heures. Bon appétit!

(Suspension de la séance à 12 heures)

 

(Reprise à 14 h 8)

Le Président: Bon après-midi, Mmes, MM. les députés. Nous allons nous recueillir quelques instants.

Je vous remercie. Veuillez vous asseoir.

Affaires courantes

Aux affaires courantes, aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

Présentation de projets de loi. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Vous pourriez appeler l'article b du feuilleton, M. le Président?

Projet de loi n° 208

Le Président: Article b du feuilleton. J'ai reçu le rapport du directeur de la législation sur le projet de loi n° 208, Loi concernant la transformation de Sherbrooke-Vie, société de secours mutuels. Le directeur de la législation a constaté que les avis ont été faits et publiés conformément aux règles de fonctionnement des projets de loi d'intérêt privé. Je dépose ce rapport.

En conséquence, M. le député d'Orford propose que l'Assemblée soit saisie du projet de loi d'intérêt privé n° 208, Loi concernant la transformation de Sherbrooke-Vie, société de secours mutuels.

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée? Adopté. M. le leader du gouvernement.

Renvoi à la Commission des finances publiques

M. Dupuis: Oui. Je fais donc motion, M. le Président, pour que le projet de loi soit déféré à la Commission des finances publiques et pour que le ministre des Finances en soit membre.

Mise aux voix

Le Président: Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Président: Adopté.

Dépôt de documents

Dépôt de documents. M. le ministre de l'Éducation, du Sport et du Loisir.

Plan quinquennal d'investissements
universitaires pour la période du
1er juin 2006 au 31 mai 2011

M. Fournier: ...M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le plan quinquennal d'investissements universitaires pour la période du 1er juin 2006 au 31 mai 2011.

Le Président: Ce document est déposé. M. le ministre de la Justice et Procureur général.

Rapport annuel de la Direction de
l'indemnisation des victimes d'actes criminels

M. Marcoux: Alors, M. le Président, j'ai l'honneur de déposer le rapport annuel d'activité de la Commission de la santé et de la sécurité du travail concernant l'application de la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels et de la Loi visant à favoriser le civisme, pour l'année 2005.

Le Président: Ces documents sont déposés. Mme la ministre de la Culture et des Communications.

Rapports annuels de Bibliothèque et
Archives nationales, de certains musées
et du Centre de conservation

Mme Beauchamp: Merci. J'ai l'honneur de déposer les documents suivants: le rapport annuel 2005-2006 de Bibliothèque et Archives nationales du Québec; le rapport annuel 2005-2006 du Musée national des beaux-arts du Québec; le rapport annuel 2005-2006 du Musée d'art contemporain de Montréal; le rapport annuel 2005-2006 du Musée des beaux-arts de Montréal; le rapport annuel de gestion 2005-2006 du Centre de conservation du Québec; et le rapport annuel 2005-2006 du Musée de la civilisation.

n(14 h 10)n

Le Président: Ces documents sont déposés.

Dépôt de rapports de commissions

Dépôt de rapports de commissions. Mme la présidente de la Commission de l'administration publique et députée de Rosemont.

Audition du Vérificateur général dans le
cadre de l'examen de son rapport
annuel 2005-2006 et de la vérification
de ses engagements financiers

Mme Dionne-Marsolais: Merci, M. le Président. J'ai l'honneur de déposer le rapport de la Commission de l'administration publique qui a siégé le 5 septembre 2006 afin d'entendre le Vérificateur général du Québec sur son rapport annuel de gestion 2005-2006 et de procéder à la vérification de ses engagements financiers pour les mois d'avril 2005 à mars 2006. La commission a également tenu deux séances de travail le 5 septembre 2006.

Le Président: Alors, merci, Mme la présidente. Ce rapport est déposé.

Dépôt de pétitions

Dépôt de pétitions. M. le député de L'Assomption.

M. St-André: Alors, M. le Président, je demande le consentement de l'Assemblée pour présenter une pétition non conforme.

Le Président: Est-ce qu'il y a consentement? Consentement. M. le député de L'Assomption.

Appliquer la Loi visant à lutter contre
la pauvreté et l'exclusion sociale

M. St-André: Merci, M. le Président. Alors, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 240 pétitionnaires, citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Attendu que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale impose fondamentalement l'amélioration des conditions de vie des personnes en situation de pauvreté;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Nous demandons au premier ministre du Québec...»

Je pense que le premier ministre devrait écouter, M. le Président.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre! Alors, vous vous adressez toujours à la présidence. Lisez votre motion.

M. St-André:«Nous demandons au premier ministre du Québec que la Loi visant à lutter contre la pauvreté et l'exclusion sociale soit appliquée.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition. Merci, M. le Président.

Le Président: Merci, M. le député. Cette pétition est déposée. M. le député de Montmagny-L'Islet.

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour déposer une pétition non conforme.

Le Président: Il y a consentement? Consentement. M. le député de Montmagny-L'Islet.

Hausser l'aide financière accordée
à l'organisme Aide aux travailleurs
accidentés, de Saint-Jean-Port-Joli

M. Morin (Montmagny-L'Islet): Merci, M. le Président. Je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 601 pétitionnaires. Désignation: citoyennes et citoyens du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants:

«Considérant que l'organisme Aide aux travailleurs accidentés, de Saint-Jean-Port-Joli, est établi depuis 1987;

«Considérant que l'organisme a développé une expertise reconnue: les références viennent autant des membres que des médecins et des intervenants des CLSC ou des organismes gouvernementaux;

«Considérant que les services offerts par l'ATA sont spécifiques: les interventions visent à solutionner les problèmes d'une façon globale. Tous les aspects de la problématique sont concernés: aspects médicaux, juridiques, psychosociaux, économiques;

«Considérant la hausse croissante de la clientèle: le membership est passé de 114 membres en 1998 à 385 membres au 31 mars 2005[...];

«Considérant le partenariat développé par l'ATA: médecins, avocats, travailleurs sociaux, autres associations en défense collective des droits[...];

«Considérant que la clientèle de l'ATA est composée majoritairement d'hommes peu scolarisés ayant de la difficulté à se réintégrer au marché du travail;

«Considérant que les accidents de travail ont un impact familial et social important[...];

«Considérant que l'Agence des services [...] santé et [...] sociaux, suite à des démarches répétées, réfère l'ATA au SACA;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi:

«Demander aux députés de notre territoire de bien vouloir appuyer la demande de rehaussement financier de l'Aide aux travailleurs accidentés auprès du SACA, au montant de 175 000 $, et de la déposer à l'Assemblée nationale.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

Le Président: Merci, M. le député. Cette pétition est déposée.

Il n'y a pas d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Je vous avise qu'après la période des questions et réponses orales sera tenu le vote reporté sur la motion du député de Vachon débattue ce matin, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période des questions et réponses orales, et je reconnais, en question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Respect des engagements électoraux
en matière de baisses d'impôt

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, s'il y a un souvenir qu'il nous reste de la dernière campagne électorale, c'est l'engagement que le premier ministre a pris de façon claire, de façon formelle, signé de sa main, de baisser les impôts, au Québec, de 5 milliards de dollars. Quand le premier ministre, en pleine campagne électorale, annonce cet engagement, on a senti un vent souffler sur le Québec. On l'a vu dans le porte-à-porte qu'on faisait. Nous autres, on se promenait, du Parti québécois, puis on disait: Des baisses d'impôt, on est d'accord, mais on ne peut pas en faire une grande priorité. On connaissait la réalité des finances publiques. Puis on a vu...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît, Mme la députée. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Boisclair: Dès le moment où le plan du premier ministre est présenté, le député de Rousseau, l'ancien député de Verchères, nous faisons entendre au premier ministre que ce plan n'a pas de bon sens, qu'il est irréaliste, d'autant plus que nous sommes dans une situation difficile dans nos rapports avec le gouvernement fédéral. Le Parti libéral du Québec prend le pouvoir avec cet engagement clé dans ses mains, celui de baisses d'impôt.

Aujourd'hui, qu'est-ce qu'on voit, M. le Président? Plus de trois ans et demi après l'élection, on s'aperçoit que le gouvernement n'a pas bougé d'un iota sur la question du fardeau fiscal et que, par la décision qu'il vient de prendre par le biais de son ministre de l'Éducation, il vient de faire en sorte, juste sur la question des taxes scolaires, qu'au Québec les Québécois puis les Québécoises vont payer, aujourd'hui, par rapport à 2003, plus de 350 millions de dollars d'argent neuf en taxes. Et, pire, c'est 1 milliard d'argent additionnel qu'on ira piger dans la poche du monde pour les taxes scolaires.

Comment, M. le Président, le premier ministre peut, alors qu'il a signé de sa main un engagement de baisses d'impôt de 5 milliards de dollars, venir confirmer qu'aujourd'hui, si on compare au moment où il prend le pouvoir, les Québécois vont payer 350 millions de plus qu'ils ne payaient et puis que, pour les trois prochaines années, c'est 1 milliard d'argent neuf qu'il ira chercher dans la poche des gens? Comment le premier ministre peut-il réconcilier cette réalité, les faits, avec ses engagements qu'il a pris en campagne électorale?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Le chef de l'opposition officielle a touché à beaucoup de sujets dans sa question puis dans son préambule, et je ne pourrai pas, dans le court temps que vous m'accordez, répondre à toutes ces questions. Alors, j'espère qu'il y aura des questions supplémentaires. Mais on va commencer avec la première chose qu'il a dite, c'est-à-dire l'aveu. Il a été candide aujourd'hui. Il a avoué qu'il était au gouvernement et que son gouvernement était dans une situation financière qu'il n'avait pas annoncée aux Québécois. En ce sens, il corrobore une déclaration faite par Pauline Marois. Je cite un article du journal Le Soleil du 21 juin 2003: Marois avait prévenu le caucus de l'impasse de 3,4 milliards de dollars. C'est donc dire que le chef de l'opposition officielle savait pendant la campagne électorale que le gouvernement, dont il faisait partie, allait laisser un déficit de plusieurs milliards de dollars à notre gouvernement, M. le Président, et qu'ils ont caché cette information à la population du Québec.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre, je vous demanderais de retirer...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre! M. le premier ministre, je vous demanderais de retirer ces derniers propos.

M. Charest: Ils ont donc omis...

Le Président: Vous les retirez?

M. Charest: Je les retire, M. le Président.

Le Président: Très bien. M. le premier ministre.

M. Charest: Ils ont donc omis de dire aux Québécois la vérité, comme Pauline Marois l'a donc avoué, puisqu'elle avait informé... Dans cet article-là, ce que nous apprenons, c'est qu'elle avait informé ses collègues, donc le chef de l'opposition officielle, de la situation réelle des finances publiques. Depuis ce temps-là, notre gouvernement a fait des efforts courageux pour mettre...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! La question a été posée dans l'ordre...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! La réponse doit être dans le même ordre. Je vous demande votre collaboration. M. le premier ministre.

M. Charest: M. le Président, M. le Président, la députée de Taillon, Pauline Marois, avait donc informé ses collègues. Depuis ce temps-là, on a fait des efforts courageux qui nous ont permis de réinvestir en santé et en éducation mais également de retourner aux contribuables québécois 2,9 milliards de dollars, d'augmenter le revenu disponible des citoyens du Québec. Et je vais lui donner un exemple en chiffres. Au net, après l'impôt et l'inflation, le gain pour les familles, pour un couple qui a deux enfants, deux revenus de travail, de 2003 à 2006, pour un revenu familial de 100 000 $, ils ont 4 460 $ de plus, dans leurs poches, de revenus.

Une voix: ...

M. Charest: M. le Président, si le député de Rousseau veut nous donner ses chiffres...

Des voix: ...

n(14 h 20)n

Le Président: S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: M. le député de Berthier, s'il vous plaît! La question, je l'ai dit, elle a été posée dans l'ordre, la réponse a droit aux mêmes considérations. M. le premier ministre.

M. Charest: Merci, M. le Président. D'ailleurs, si le député... Je vais donner des chiffres et j'espère que le député de Rousseau va donner ses chiffres à lui, comme il a promis de le faire. Pour une famille qui a un revenu familial de 100 000 $, deux enfants, deux parents, 4 460 $ de plus dans leurs poches; pour un revenu familial de 75 000 $, 4 267 $ de plus dans leurs poches; 50 000 $, 3 273 $; et, justement pour les familles à bas revenus, 25 000 $, 5 404 $ de plus dans leurs poches, M. le Président. L'écart entre l'Ontario...

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, est-ce que le premier ministre réalise que son argumentation ne tient pas la route? Parce que, s'il va aux comptes publics, ce qu'il va voir pour la dernière année où on a été au pouvoir, il y a inscrit 350 millions, puis 350 millions, essentiellement c'est des «write-off» de la SGF. Son argumentaire ne tient pas.

Ce que les Québécois veulent savoir aujourd'hui, c'est comment il peut expliquer, lui qui s'est payé des publicités à pleines pages dans les journaux, Voici le prochain budget du Parti libéral du Québec, dans lequel on nous annonce des baisses d'impôt de 1 milliard de dollars par année pendant cinq ans... Comment peut-il, alors qu'il a signé de sa main ces engagements, comment peut-il expliquer aux Québécois qu'il va, par ses décisions, pour les trois prochaines années, augmenter les taxes scolaires de 1 milliard puis que ce milliard va s'ajouter aux 350 millions qu'ils paient depuis son élection? En somme, M. le Président, s'il y a une chose que le gouvernement pourrait faire, c'est peut-être de créer un office de protection des électeurs, puis, s'il y avait un office de protection des électeurs, ça ferait longtemps que ce gouvernement aurait été trouvé coupable puis qu'il serait passé à l'amende.

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Bien, M. le Président, le chef de l'opposition officielle a admis aujourd'hui, là, ce que Pauline Marois lui avait dit avant l'élection générale, c'est-à-dire qu'il y avait une impasse budgétaire de 3,4 milliards de dollars, et je remarque qu'il ne nie pas ça aujourd'hui, qu'il y avait une impasse de 3,4 milliards de dollars.

Mais, parlant de réalité puis de ce qui tient la route et ce qui ne tient pas la route, là-dessus le chef de l'opposition officielle a sans doute de bonnes explications à nous donner, parce qu'il dit que sa première priorité, à part du fait que son gouvernement ne fera que de la souveraineté, ce serait l'éducation. La même personne, M. le Président, confirmé par le député de Rousseau, dit aux Québécois ceci: On va mettre 4 milliards de dollars de plus uniquement en éducation. C'est ce que le chef de l'opposition officielle promet.

Une voix: ...

M. Charest: Je vois le député de Rousseau qui dit: Voyons donc! Le 5 octobre dernier, dans...

Une voix: ...

Le Président: M. le leader... S'il vous plaît! La parole est au premier ministre.

M. Charest: Le député de Rousseau dit non, M. le Président. Le 5 octobre dernier, il disait: L'éducation: plus important que les viaducs et les hôpitaux. Il disait, et je cite... «En entrevue au journal L'Action, le député a rappelé que le chef du Parti québécois [...] a promis que son gouvernement injecterait 1 milliard de dollars d'argent neuf par année en éducation.» C'est exactement ce qu'il a dit.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Augmentation de la taxe scolaire

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, est-ce que le premier ministre peut arrêter de jouer au fin finaud? Il est au pouvoir.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît!

Des voix: ...

Le Président: Le retirer? Ça va. Ça va. Les propos ont été retirés. M. le chef de l'opposition officielle.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît!

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le leader, il les a retirés. M. le chef de l'opposition officielle.

M. Boisclair: M. le premier ministre, M. le Président, je comprends et j'entends le premier ministre dans ses arguments. Là, il y a des Québécois qui le regardent, il y a des Québécois qui ont cru dans son projet. Comment le premier ministre peut-il se cacher de la façon dont il le fait puis éviter de répondre à une question que les Québécois se posent? Pourquoi, alors qu'il a promis une baisse d'impôt de 5 milliards de dollars, signée de sa main, que les Québécois l'ont cru, qu'ils ont signé le contrat avec lui, qui l'ont porté au pouvoir, comment peut-il, M. le Président, déchirer ce contrat aujourd'hui en faisant en sorte de permettre au ministre de l'Éducation d'augmenter les taxes scolaires de 1 milliard de dollars, ce milliard qui s'ajoute aux 350 millions qu'il a imposés depuis qu'il est au pouvoir? Pourquoi le premier ministre ne respecte-t-il pas sa promesse? Pourquoi a-t-il, sans vergogne, sans avoir peur, sans mettre aucun mot d'excuse, déchiré le contrat que la population a signé avec lui?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, je pense que le chef de l'opposition officielle, il devra faire preuve d'un peu plus de cohérence dans ses déclarations, d'abord parce qu'on connaît le bilan du gouvernement du Parti québécois, le désastre qu'ils ont laissé derrière eux, en 2003, dans le domaine...

Des voix: ...

M. Charest: ... ? oui, je sais que vous trouvez ça drôle; vous avez sans doute trouvé ça très drôle quand vous étiez au gouvernement ? dans le domaine de la santé, dans le domaine de l'éducation. Mais je vais vous donner un exemple: vous avez coupé 1,8 milliard de dollars en éducation quand vous étiez au gouvernement.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, M. le premier ministre, tout en vous adressant à la présidence.

M. Charest: Merci. Alors, ils ont coupé 1,8 milliard de dollars dans l'éducation. Dans la dernière année seulement, notre gouvernement a réinvesti 660 millions de dollars en éducation. C'est plus que ce qu'un gouvernement péquiste a fait en neuf ans, que ce que le chef de l'opposition...

Là, le chef de l'opposition officielle nous dit: On va remettre 4 milliards en éducation, et en plus il va couper les frais de scolarité au Québec. À quel endroit allez-vous prendre l'argent?

Et, M. le Président, permettez-moi de conclure sur une chose. Il dit qu'on a des choses à cacher? Au mois d'août dernier, le chef de l'opposition officielle avait pris l'engagement solennel que le député de Rousseau allait livrer son budget de l'an 1. Il avait même déclaré que ça allait être dans les prochaines semaines. Qu'est-ce que vous avez à cacher?

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. Boisclair: En question principale, M. le Président.

Le Président: Question principale? Troisième question principale. Question principale.

Motifs justifiant l'augmentation
de la taxe scolaire

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, je vois le premier ministre, là, non seulement sortir de ses gonds, mais sortir de son siège, puis il va dans l'allée, puis il s'approche, il s'approche. Il s'approche de l'opposition. On voit ça. On voit ça. Ce ne sera pas long, il va y arriver, dans la chaise, ici, avec des réponses comme celle-là.

La réalité, la réalité, M. le Président, c'est que le premier ministre a beau, aujourd'hui, évoquer des choses du passé, nous avons été sanctionnés par la population, nous sommes dans l'opposition et vous êtes au pouvoir. Ça fait que le premier ministre voudra bien reprendre le débat de la campagne électorale, la réalité, là, il l'a gagnée, la campagne électorale, il est premier ministre puis on est dans l'opposition, les Québécois ont tranché.

Ceci étant, alors que lui est au pouvoir, alors que lui a signé un contrat avec la population, alors qu'il s'est engagé à baisser les impôts de 5 milliards de dollars, peut-il, 30 secondes, parler aux Québécois, là, qui regardent leurs débats puis nous parler, 30 secondes, de taxes scolaires? Le mot, là, il est simple, parler de taxes scolaires. Il y a du monde qui vont recevoir ce compte de taxes ? plusieurs l'ont reçu, puis il y en a d'autres qui vont entrer dans les prochaines semaines ? du monde, des familles de Vanier qui s'inquiètent parce qu'ils n'ont pas des grands moyens, puis qu'ils ont une première maison, puis qu'ils paient des grosses hypothèques. Il y a des personnes âgées qui n'ont pas vu leurs revenus augmenter bien, bien, ces dernières semaines puis ces dernières années, qui vont s'inquiéter de la situation aussi. Il y a du monde qui reçoivent ce compte de taxe et se disent: Comment je vais faire?, alors que leur salaire ne croît pas au rythme de l'imposition du gouvernement.

Qu'est-ce que le premier ministre dit à ce monde-là? Il peut-u, 30 secondes, là, oublier la joute partisane puis parler aux Québécois, là? Il peut-u dire aux Québécois pourquoi il augmente les taxes scolaires au-delà de l'inflation, alors qu'il s'était engagé de sa main, de sa main, à baisser les impôts de 5 milliards de dollars? Qu'est-ce qu'il dit au monde? Oubliez-nous ici, là. Qu'est-ce qu'il dit au monde, aux Québécois? Pourquoi un geste comme celui-là, M. le Président?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: Merci, M. le Président. Le chef de l'opposition officielle, aujourd'hui, avoue que son gouvernement n'avait pas dit aux Québécois qu'il y avait un déficit substantiel qu'ils nous ont laissé. Pauline Marois l'avait informé qu'il y aurait une impasse d'au moins 3,4 milliards de dollars.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! La parole est au premier ministre. La question a été posée dans l'ordre. Je vous demande votre collaboration. M. le premier ministre.

n(14 h 30)n

M. Charest: Le chef de l'opposition officielle me pose une question, je vais lui donner la réponse, parce que, s'il veut connaître les raisons qui ont motivé le gouvernement dans ses décisions, il doit tenir compte du fait que, les finances publiques, dans l'état où ils nous ont laissé les finances publiques, le gouvernement a bien dû assumer ses responsabilités. Malgré cela, on a réduit... on a retourné 2,9 milliards de dollars aux Québécois. On a augmenté le revenu disponible pour les familles, là, si on prend une famille qui gagne 50 000 $ ? ce n'est pas beaucoup ? de 3 273 $. On a priorisé les familles à faibles revenus.

Et, dans le domaine de l'éducation, M. le Président, le Parti québécois encore une fois nous avait demandé de faire de l'étalement. Moi, je veux bien qu'il soit constant. Mais, le 19 mai 2005, à l'Assemblée nationale, la députée de Taillon s'est levée puis nous a demandé de faire de l'étalement. C'est exactement ce qu'on a fait.

Mais je veux rappeler aux députés du Parti québécois pourquoi ils ont été sanctionnés. Le chef de l'opposition officielle, dans une entrevue qu'il donnait au début de septembre, disait ceci: L'équipe à laquelle j'appartenais n'a pas accordé suffisamment d'importance aux questions d'éducation. C'est l'aveu que vous avez formulé au mois de septembre dernier. Expliquez-nous...

Une voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît, M. le chef de l'opposition. Vous avez eu le temps de poser votre question, la parole est maintenant au premier ministre. M. le premier ministre.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! Si ça continue, vous allez aller dîner ensemble ce soir.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. M. le premier ministre.

M. Charest: M. le Président, je veux juste demander au chef de l'opposition officielle qu'il nous explique comment il va faire, parce qu'il a parlé de sanction. Il y aura éventuellement une élection générale au Québec. Comment il va faire... C'est sa responsabilité, comme chef de parti, d'expliquer aux Québécois où il va trouver 4 milliards de dollars de fonds additionnels en baissant les taxes scolaires puis en éliminant les frais de scolarité ? ça, c'est ce qu'on appelle de la magie ? à moins que ce soit dans le budget du député de Rousseau, le budget de l'an 1 que vous avez promis depuis plusieurs semaines et que vous n'êtes pas capables de livrer, à moins que le député de Rousseau et le chef de l'opposition officielle essaient de cacher quelque chose aux Québécois.

Le Président: M. le premier ministre, je vous demanderais de retirer les derniers propos que vous avez utilisés. Dans ce sens, je vous demanderais votre collaboration. Vous les retirez? Très bien. En question complémentaire, Mme la députée de Taschereau.

Mme Agnès Maltais

Mme Maltais: Qu'est-ce que le ministre responsable de la Capitale-Nationale répond à la mairesse de Québec qui a qualifié d'impôt déguisé les hausses de taxes scolaires? Et qu'est-ce qu'il va dire effectivement, qu'est-ce qu'il va dire aux jeunes familles des banlieues de Québec, là, qui ont des hausses de 40 %? Aux retraités de Beauport qui ont un patrimoine chèrement acquis et qui vont voir, une fois de plus, leurs budgets amputés par les hausses de taxes abusives de son gouvernement? Notre monde, il la veut, la réponse. Qu'est-ce que vous allez leur dire?

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! M. le ministre de l'Éducation, du Loisir et du Sport.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Merci, M. le Président. Bien d'abord rappeler qu'il ne faut pas dénaturer, non plus, les projets de loi qui sont déposés, un projet de loi d'ailleurs qui fait suite à, il faut bien le dire, Pauline Marois qui avait posé ici la question, qui demandait un étalement. Le député de Rousseau, qui est étonné maintenant que l'engagement de son parti, c'est 4 milliards ? on a vu son changement de position ? mais il a déposé un projet de loi sur l'étalement où il chantait les vertus de l'équité, sur un étalement de trois ans, pour une seule commission scolaire. On pourra en revenir. Je vous conseille d'aller voir ça.

Mais ce qu'il faut savoir, c'est que le projet de loi qui est déposé présentement n'est pas juste pour un rôle de trois ans, il est pour une très longue période. Imaginez sur 15 ans. Alors, à chaque année... la première année du rôle, c'est 33 % de la hausse ? pas 100 %, 33 % de la hausse ? sur lequel on impose. La deuxième année, M. le Président, c'est 66 %. La troisième année, c'est 100 %. La moyenne, c'est 66 % de la hausse sur lequel on impose, plutôt que 100 % qui est la situation actuelle. Autrement dit, il y a une diminution à l'égard du tiers de cette hausse-là. Vous pouvez...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! Alors, je vous invite, M. le ministre, à conclure rapidement.

M. Fournier: Aujourd'hui, M. le Président, grâce à leur gestion, à chaque fois qu'il y a une hausse, elle est chargée à 100 %. Avec le projet de loi, en moyenne, ça va être à 66 %. C'est moins que 100, d'après moi.

Le Président: En question complémentaire, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: M. le Président, est-ce que le ministre de l'Éducation se rend compte qu'il n'y a personne qui peut croire ça, là, que des hausses, c'est des économies puis une baisse d'impôt?

Mais, ceci étant dit, est-ce que le leader du gouvernement qui, la semaine dernière, au moment du dépôt du projet de loi qui consacrait ces augmentations faramineuses de taxes scolaires, nous indiquait qu'il n'avait pas l'intention de tenir des consultations particulières parce qu'il y avait, semble-t-il, selon ses dires, un consensus... Et il l'a dit sans rire, M. le Président. Alors à l'évidence il n'y a pas de consensus: À pleines mains dans les poches [des contribuables], De l'impôt déguisé, Par la porte arrière, L'astuce des taxes scolaires, D'incorrigibles taxeurs. M. le Président, peut-il convenir qu'il n'y a pas de consensus et qu'il serait plus sage de tenir des consultations? Plusieurs groupes ont manifesté leur intérêt à le faire. Nous pouvons en discuter correctement dans ce Parlement. Il n'y a qu'une seule réponse à dire, c'est: Oui à des consultations.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation, des Loisirs et du Sport.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Commençons par rappeler, M. le Président, que le député de Rousseau, sans aucune consultation, par bâillon, a fait adopter un projet de loi qui permettait l'étalement pour une seule période pour une commission scolaire. Et je reviendrai sur l'explication. Il la connaît, l'explication de l'étalement.

Par ailleurs, le projet de loi a un effet sur le compte de taxes des commissions scolaires et a l'effet de réduire par rapport à la situation d'aujourd'hui. S'il n'y avait pas de loi, le compte serait plus cher pour le monde. Avec la loi, il va être moins cher. On a consulté qui? Les commissions scolaires. Ça n'a pas d'impact sur les autres, sur les commissions scolaires. Moi, je suis dans le camp de vouloir éviter... Mais je n'ai plus la parole.

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je m'excuse. À l'ordre, s'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le ministre.

M. Fournier: M. le Président, ce n'est pas compliqué. Lorsque vous avez, sur le foncier, une hausse de valeur, le 0,35 $ qui est le plafond que vous avez évidemment amené toutes les commissions scolaires à atteindre parce que vous avez pelleté des factures... Lorsque tu es au plafond, la hausse arrive, et là ça frappe tout le monde. On veut éviter que ça les frappe, alors on dit: On va créer de l'étalement pour faire en sorte qu'on n'impose pas sur la pleine valeur. Ce n'est pas compliqué: on va économiser le tiers de cette hausse-là si on adopte le projet de loi. Mais, avec l'opposition officielle, et je termine, M. le Président, et je termine, avec l'opposition officielle, on ferait payer plus les contribuables. On n'est pas comme eux autres: on veut éviter le choc, nous autres.

Le Président: En dernière question complémentaire, Mme la leader de l'opposition officielle.

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre!

Des voix: ...

Le Président: Parlez-vous, là, encore plus, parlez, parlez, parlez! En dernière question complémentaire, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Diane Lemieux

Mme Lemieux: Merci, M. le Président. M. le Président, est-ce que le ministre se rend compte qu'on lui rend un grand, grand service en lui offrant une commission parlementaire? Parce que visiblement il aurait besoin d'un peu plus de temps pour expliquer cette théorie fantastique à l'effet qu'une hausse est finalement une économie.

Sérieusement, M. le Président, est-ce qu'il peut accepter cette offre d'expliquer aux locataires, aux municipalités, aux personnes âgées, aux jeunes ménages qui vont vivre cette hausse de taxes scolaires... Qu'il prenne donc le temps d'expliquer sa théorie, peut-être qu'il va finir par gagner son point de vue, parce que, là, il n'y arrive pas, M. le Président. Qu'il saisisse donc cette occasion.

Le Président: M. le ministre de l'Éducation.

M. Jean-Marc Fournier

M. Fournier: Ces mêmes personnes là, dans Vanier comme ailleurs, aujourd'hui, s'il n'y a pas de loi, aujourd'hui... C'est difficile de parler...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Mme la leader, s'il vous plaît, vous avez posé votre question... S'il vous plaît! S'il vous plaît! Je demanderais aux deux leaders, s'il vous plaît, votre collaboration. La seule personne qui a la parole actuellement, c'est M. le ministre. Allez-y, M. le ministre.

M. Fournier: Pourtant, ça me semble simple, M. le Président: si le projet de loi n'est pas adopté, les gens de Vanier, tous les contribuables vont devoir assumer une charge sur 100 % d'une hausse de valeur; avec le projet de loi, on vient réduire cela à 66 %. 66, c'est moins que 100. Ils ne sont peut-être pas au courant, là, c'est moins, c'est moins que 100. Et donc, pour le contribuable, ce projet de loi là devient pour eux un gain et non pas une charge à 100 %. C'est aussi simple que ça.

D'ailleurs, Pauline Marois le comprenait et elle le demandait. Elle l'a demandé quatre fois, et le député de Rousseau l'a fait une petite fois, pour deux ans, parce qu'il ne voulait pas trop, trop aider les gens. Nous, on le fait pour une longue période, on le fait pour l'ensemble du Québec, ça va aider tout le monde, et ça se fait dans le respect du partage des champs fiscaux de l'ensemble des administrations.

Le Président: En question principale, M. le député de Rivière-du-Loup.

Visites de contrôle de la qualité des
soins dans les centres d'hébergement
et de soins de longue durée

M. Mario Dumont

M. Dumont: Merci, M. le Président. Lorsqu'elle était dans l'opposition, la députée de Saint-Henri?Sainte-Anne, parlant des conditions de vie des personnes âgées en centre d'hébergement, avait utilisé à l'endroit du premier ministre les termes suivants: «honte nationale», «scandaleuse négligence», «exploitation». Les personnes âgées du Québec s'ennuient de sa voix aujourd'hui, maintenant qu'elle est du côté du pouvoir.

n(14 h 40)n

Sur la question du traitement des personnes âgées, la présidente de l'association québécoise de défense des retraités disait hier: «Des cas d'abus et de violence envers les aînés, il y en aura de plus en plus au cours des prochaines années.» Elle disait que, «sur plusieurs points, on est déjà bien en retard», et le temps passe, «on l'oublie, et rien ne change».

Le ministre actuel de la Santé a fait reposer toute sa stratégie sur des visites annoncées 24 ou 48 heures à l'avance. On sait tous que, dans les restaurants, si on annonçait les visites 24 heures à l'avance, on n'aurait jamais condamné personne pour insalubrité, tous les restaurants du Québec auraient toujours eu la note de passage.

Le Président: Votre question, M. le député.

M. Dumont: Alors, ma question au ministre: Est-ce que, face à la perte de confiance évidente qu'on entend dans le Québec, il ne doit pas revoir sa stratégie des visites annoncées à l'avance?

Et est-ce que cette stratégie des visites annoncées à l'avance ne visait pas tout simplement à dire: On annonce à l'avance la visite; on se présente, tout est beau; on fait rapport, tout est beau; puis ensuite on se paie des publicités dans le journal pour dire que tout va bien?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, il y a un point sur lequel certainement on va tous être d'accord ici, à l'Assemblée, c'est l'absence totale de tolérance pour des gestes comme ceux qui ont été rapportés, qui sont survenus il y a quelques années dans les CHSLD de la région de la Beauce. Il faut noter cependant qu'à l'occasion de ces événements inacceptables des sanctions ont été prises immédiatement par l'établissement et que les actions se sont poursuivies depuis.

Sur la question fondamentale que soulève le député de Rivière-du-Loup, je dirais qu'il y a actuellement eu 140 commissions d'enquête, dans 140 CHSLD du Québec, où les usagers et les personnes de leur famille ont pu s'exprimer en toute liberté non pas avec des gens du ministère de la Santé, avec des gens du Conseil de la protection des malades et Table régionale de concertation des aînés.

Et, justement, s'il faut leur donner 24 heures ? puis, en 24 heures, on ne cache pas des problèmes dans les CHSLD, M. le Président ? c'est de leur permettre d'être là, ces familles, ces proches, pour parler en toute liberté, en toute confidentialité, aux équipes qui font les visites, dont les rapports sont entièrement publics, je le répète.

Le Président: En question complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce que le ministre peut nous expliquer pourquoi des éléments de condition de vie, jugés inacceptables à l'époque où son parti était dans l'opposition...

Je me souviens lorsqu'on avait annoncé la diminution du nombre de bains à un bain par semaine, les cas de nourriture en purée pour des gens qui n'en auraient pas besoin, le coucher, là, à peine après l'heure du souper, on ferme toutes les lumières puis on couche les personnes, la contention physique et chimique. Pourquoi toutes ces conditions de vie, qui étaient inacceptables lorsque c'étaient les coupures de l'ancien gouvernement, sont devenues acceptables maintenant qu'ils sont au pouvoir?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Il y a un mot qui me viendrait à l'esprit pour qualifier la question de notre collègue, mais je ne l'utiliserai pas, M. le Président.

Ce n'est pas plus acceptable que c'était. D'ailleurs, dans chacun de ces rapports de visites... Et je sais bien que le député de Rivière-du-Loup a rarement le temps d'approfondir les sujets dont il discute, mais il pourrait aller consulter ces rapports de visites d'appréciation et justement consulter chacun des éléments dont il nous parle. Et il constatera ? et c'est important de le mentionner, M. le Président ? qu'on pourra retrouver ainsi deux établissements dans la même région... dans deux régions, avec les mêmes budgets, les mêmes ressources, qui donnent des services complètement différents en termes de niveau de satisfaction et de niveau de dignité pour les aînés.

Alors, le système actuellement, le réseau de santé des CHSLD s'améliore progressivement, et c'est documenté et suivi à la trace, et c'est beaucoup plus efficace. Et je sais que le député de Rivière-du-Loup revient constamment sur son idée d'une commission d'enquête où, à distance, ici, dans une salle à Québec, on va discuter de ce qui se passe dans une chambre de CHSLD. C'est beaucoup plus utile d'aller sur place rencontrer les personnes, leurs familles, savoir ce qui se passe, puis corriger les problèmes au moment où on les découvre.

Le Président: En dernière question complémentaire, M. le député de Rivière-du-Loup.

M. Mario Dumont

M. Dumont: Oui. Est-ce qu'au-delà des cas de traitements inacceptables, est-ce que j'entends du ministre ? et je le mets au défi de nous dire ici, à l'Assemblée nationale, que ça n'existe plus, le un bain par semaine, que ça n'existe plus, le coucher à peine après l'heure du souper, que ça n'existe plus, la nourriture en purée lorsqu'elle est non nécessaire ? que ce qui n'est pas simplement arrivé dans le cas des CHSLD aujourd'hui, c'est que le ministre a fait exactement la même chose dans le cas des délais d'attente, hein, il nous dit que les listes d'attente sont moins longues, hors délai, parce qu'il a changé la façon de mesurer, il a changé les délais médicalement requis, et que, dans ce cas-ci, il a transformé ce qui était inacceptable sous un gouvernement du PQ en quelque chose qui est acceptable sous sa gouverne, qui lui permet de se payer des belles publicités dans le journal pour se dire que tout va bien?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: M. le Président, jamais celui qui vous parle, ni le premier ministre, ni aucun membre du gouvernement n'ont dit que tout allait bien dans le système de santé. Ça va mieux. Ça va mieux, puis on peut le démontrer, et en particulier dans le cas des personnes âgées. Effectivement, M. le Président, le gouvernement a investi un total de 262 millions de dollars pour améliorer les services aux aînés en perte d'autonomie, a augmenté de plusieurs milliers les personnes qui sont servies en soins à domicile, a rehaussé les budgets des établissements.

Mais il faut également que les façons de faire se corrigent et s'améliorent en même temps que les investissements se font, il faut qu'on obtienne des services accrus en fonction des ressources qu'on donne, qui sont beaucoup plus importantes qu'elles ne l'ont été dans le passé. Et la meilleure façon de le faire, c'est d'aller sur place, d'écouter les personnes âgées, d'écouter leurs familles en toute confidentialité, avec des gens auxquels ils font confiance, du Conseil de la protection des malades, des tables régionales de concertation des aînés, et d'agir de façon à améliorer continuellement le service. Ce qu'on dit, M. le Président, ce n'est pas que ça va bien, ce n'est pas que c'est parfait, c'est que ça va mieux, qu'il n'y a aucun doute que ça va mieux et qu'on veut continuer.

Le Président: En question principale, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Encadrement de certaines activités
de dépistage de masse en matière de santé

Mme Louise Harel

Mme Harel: Merci, M. le Président. Le problème, M. le Président, c'est que le ministre et son gouvernement avaient promis que ce serait parfait, et c'est en cela que la population se sent trompée, M. le Président.

Alors, à Thetford Mines, plus d'une centaine de personnes et leur proches ont connu un affolement et une angoisse à cause de l'attente dans laquelle ils sont. Est-ce qu'ils ont ou non été contaminés lors d'un dépistage de masse qui a été effectué dans un supermarché par des bénévoles de bonne foi mais avec un appareil défectueux et une traduction française déficiente?

Alors, M. le Président, pour maintenir la confiance de la population dans ces prélèvements de masse, le ministre a-t-il l'intention, comme le lui a recommandé la Direction régionale de la santé publique de Chaudière-Appalaches, d'encadrer de façon beaucoup plus stricte les conditions de sécurité et de prévention des milliers de dépistages de masse qui se déroulent chaque année au Québec?

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Alors, M. le Président, effectivement nous avions dit aux Québécois que nous ferions de la santé notre priorité et nous allions améliorer le système de santé. Il va mieux, le système de santé. Il y a encore beaucoup de travail à faire. Il s'agit pour la population de décider à qui on fait confiance pour continuer de l'améliorer: à ceux qui l'ont démoli pendant neuf ans ou ceux qui agissent depuis 2003.

Pour ce qui est de l'incident qui s'est produit à l'extérieur, on le sait, du réseau hospitalier, dans un cadre de programme de dépistage qui est bon en général ? il est bon que ces programmes de dépistage soient faits ? effectivement nous prenons en compte les conseils de la Santé publique: des contacts sont établis dès maintenant avec l'Ordre des infirmières auxiliaires, l'institut d'enseignement qui est concerné, de façon à ce que la situation ne se reproduise pas. Il n'est clairement pas acceptable d'utiliser la même aiguille pour plus d'une personne, et c'est évident que ça ne doit pas être fait.

Ce qui également doit être mentionné, et je suis content que la députée d'Hochelaga-Maisonneuve l'ait mentionné dans son introduction, c'est que les experts de Santé publique nous disent que le risque de contamination est extrêmement faible. Cependant, nous ne prendrons aucune chance, nous allons retracer chaque personne qui a subi le test cette journée-là, et elle aura les tests requis pour son état de santé.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mme Louise Harel

Mme Harel: M. le Président, est-ce que le ministre entend rendre publiques les recommandations du Dr Morin, Diane Morin, la coordonnatrice à la Direction de la santé publique de Chaudière-Appalaches, lesquelles recommandations lui demandent d'encadrer les organismes qui font du dépistage? Quelles suites il entend donner? Il me semble que c'est assez urgent, avant que la population délaisse ces dépistages de masse qui sont utiles.

Le Président: M. le ministre de la Santé et des Services sociaux.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Bien, M. le Président, c'est effectivement, je crois, la bonne façon de présenter la chose. Ces programmes de dépistage sont utiles. Il faut certainement faire en sorte de maintenir la confiance de la population à leur endroit. Alors, oui, ce document de la Santé publique, je crois, est accessible, sauf erreur, il l'est. Et de toute façon nous allons suivre les recommandations qui y sont faites parce que clairement il est question de santé publique, de sécurité, et, là-dessus, il n'y a pas de compromis à faire.

Le Président: En question principale, Mme la députée de Taillon.

Débat sur une motion déposée proposant que
l'Assemblée approuve le Protocole de Kyoto

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: M. le Président, le gouvernement du Québec refuse d'approuver le Protocole de Kyoto. Pour que le Québec soit légalement lié au Protocole de Kyoto, il faudrait que le gouvernement adopte un décret en vertu des articles 20 à 22.4 de la Loi sur le ministère des Relations internationales. Avant que le gouvernement adopte ce décret, il faut absolument que notre Assemblée nationale approuve le Protocole. La ministre des Relations internationales le sait fort bien puisque, le 15 mars dernier, elle déposait la motion suivante:

«Que, conformément à l'article 22.3 de la Loi sur le ministère des Relations internationales, l'Assemblée nationale approuve le Protocole de Kyoto...»

Nous aurions pu le faire depuis le 25 mars, il ne s'est toujours rien passé. Ma question est fort simple, est la suivante: Pourquoi le gouvernement refuse-t-il de souscrire légalement au Protocole de Kyoto?

n(14 h 50)n

Le Président: M. le ministre du Développement durable, de l'Environnement et des Parcs.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. M. le Président, écoutez, je veux bien entendre la question de la députée de Taillon. mais probablement que la députée de Taillon et le Parti québécois sont les seuls au Québec à pouvoir penser que le gouvernement actuel n'appuie pas le Protocole de Kyoto. Non seulement on a eu quatre motions à l'Assemblée nationale, non seulement on a quatre motions, on a déposé un plan que le chef de l'opposition... auquel le chef de l'opposition, pas plus tard qu'hier, reconnaissait des vertus. Il était d'accord avec notre plan. Nous avons le meilleur plan au Canada pour lutter contre les changements climatiques et appuyer le Protocole de Kyoto. Ce n'est pas nous qui n'appuyons pas Kyoto, c'est vous. Si vous étiez venus à la réunion la semaine passée, si vous aviez participé avec nous, avec l'ADQ, avec différents groupes, à la coalition, vous auriez la chance, vous aussi, de faire comme nous, de pouvoir parler d'une seule voix avec différents groupes et de démontrer non seulement aux Québécois, non seulement aux Canadiens, non seulement en Amérique du Nord, mais, comme on va le démontrer prochainement, au monde entier que le Québec appuie Kyoto, qu'il a un plan pour se rendre à Kyoto, et qu'on va atteindre les objectifs de Kyoto.

Le Président: En question complémentaire, Mme la députée de Taillon.

Mme Marie Malavoy

Mme Malavoy: M. le Président, la ministre des Relations internationales pourrait-elle expliquer à son collègue ministre du Développement durable et de l'Environnement que, tant que l'Assemblée nationale n'a pas approuvé ce protocole, ses paroles restent des paroles en l'air et ses voeux restent des voeux pieux?

Le Président: M. le ministre de l'Environnement, la parole est à vous.

M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, les gens d'en face, vous avez abandonné les Québécois, vous avez laissé une chaise vide, vous avez refusé de participer. Depuis ce temps-là, vous êtes en opération de rattrapage. Vous êtes probablement les seuls sur votre île. Vous me faites penser...

Une voix: ...

M. Béchard: Je pense que c'est à gauche, M. le Président.

Le Président: S'il vous plaît! Adressez-vous à la présidence, à la présidence, s'il vous plaît.

M. Béchard: D'accord. M. le Président, ils sont probablement les seuls sur leur île, là. Je les regarde, ils me font penser à l'île de Gilligan, là. Ils sont les seuls sur leur île puis ils s'imaginent que ça va bien puis qu'on n'est pas pour Kyoto. Vous êtes les seuls à penser ça. Les Canadiens au grand complet reconnaissent que le Québec est un leader, reconnaissent que notre plan est le meilleur. Oui, on a adopté Kyoto, oui, on va le réadopter à l'Assemblée nationale et on va surtout faire en sorte que le Québec atteigne les objectifs de Kyoto.

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Ratification de l'appui de
l'Assemblée au Protocole de Kyoto

M. André Boisclair

M. Boisclair: M. le Président, est-ce que le premier ministre, qui, alors que le ministre de l'Environnement faisait une bande dessinée, s'entretenait avec la ministre des Relations internationales ? on l'a tous vu ici, là ? la ministre des Relations internationales qui, elle, connaît les obligations de la loi, ayant elle-même déjà introduit une motion à l'Assemblée, est-ce que le premier ministre peut nous dire pourquoi il refuse que cette Assemblée nationale puisse officiellement, légalement, au sens de la loi, ratifier le Protocole de Kyoto? Pourquoi n'a-t-il pas donné suite à la motion qu'a pourtant introduite la ministre des Relations internationales? Qu'attend-il pour agir? Qu'attend-il pour faire en sorte de donner à son gouvernement un appui clair, en fonction de la Loi du ministère des Relations internationales, sur la mise en oeuvre et la ratification du Protocole de Kyoto? Pourquoi attend-il?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, pour comprendre le sens du débat, dans notre système fédéral, on est souverain dans nos domaines de compétence, et, lorsqu'il s'agit de la mise en oeuvre d'un plan de réduction de gaz à effet de serre, il y a des sujets qui relèvent donc de nos compétences, et c'est à nous à agir là-dessus. Il y a des compétences partagées avec le gouvernement fédéral, il y a des compétences fédérales, et, dans ce débat, on a toujours interpellé le gouvernement fédéral pour qu'il fasse sa part dans la mise en oeuvre du Protocole de Kyoto.

Maintenant, la question de l'opposition est intrigante, parce que pour eux la forme semble être plus importante que le fond. On a livré un plan puis on pose des gestes, on a commencé la mise en oeuvre du plan. Alors, la réalité, c'est ça. Oui, il y a un dépôt puis, oui, il y aura une ratification légale, mais êtes-vous en train de nous dire qu'on devrait attendre une ratification de l'Assemblée nationale pour mettre en oeuvre notre plan de réduction de gaz à effet de serre? Parce que, si c'est ça que vous dites, vous êtes encore plus isolés que je le pensais.

Le Président: En question principale, M. le chef de l'opposition officielle.

Mise en oeuvre de la procédure de ratification
du Protocole de Kyoto par l'Assemblée

M. André Boisclair

M. Boisclair: Nous venons, M. le Président, par les paroles du premier ministre, d'assister à une abdication totale et complète des pouvoirs de cette Assemblée. Quels sont les faits? Le Protocole de Kyoto a été ratifié par la Chambre des communes. Cette décision de la Chambre des communes a permis au gouvernement fédéral de prendre un décret favorable à la ratification. D'ailleurs, M. le Président, c'est nous de cette Assemblée nationale qui avions invité le gouvernement fédéral de l'époque de ratifier le protocole, et c'est pour cette raison qu'il y a eu un débat à la Chambre des communes. Nous avons une loi au Québec. Cette loi prévoit, parce que nous avons, nous, des compétences qui sont en cause, qu'au nom de la doctrine Gérin-Lajoie, lorsqu'un protocole ou qu'un traité international a des conséquences sur le Québec, qu'il doit être ratifié ici, par notre Assemblée nationale, parce que nous avons, nous, des compétences sur la scène internationale dans les domaines de compétence qui sont les nôtres, que la Constitution nous accorde. Une loi a été votée à cet effet. La ministre des Relations internationales a introduit déjà un préavis de motion.

Pourquoi le premier ministre abdique à ces compétences? Pourquoi le premier ministre ne fait qu'évoquer la compétence du fédéral sans parler de la nôtre et sans parler de celle de cette Assemblée, ici? Pourquoi est-ce que le premier ministre refuse que l'Assemblée nationale du Québec ratifie le Protocole de Kyoto, comme sa ministre des Relations internationales s'était pourtant engagée à le faire? Pourquoi tant de délais? Pourquoi le premier ministre n'est pas capable de répondre à cette question si simple?

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, là, on a une belle démonstration de discours creux, vide, un discours qui ne veut rien dire. Le chef de l'opposition officielle est en train...

Des voix: ...

Le Président: À l'ordre, s'il vous plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Charest: M. le Président, je ne suis pas étonné qu'ils aient des débats qui durent toute une fin de semaine sur le vent, c'est leur domaine de spécialité. Le chef de l'opposition vient de nous le prouver. Le gouvernement...

Une voix: ...

M. Charest: Oui, le chef de l'opposition officielle a harnaché le vent, ça, c'est vrai. M. le Président, le gouvernement...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Charest: M. le Président, le gouvernement a déposé un plan de réduction de gaz à effet de serre qui va respecter les engagements de Kyoto sur le plan légal. Autrement, on va respecter le plan de Kyoto. On n'est pas numéro trois au Canada, on n'est pas numéro deux, on est les leaders canadiens pour le plan de réduction de gaz à effet de serre, une chose que le chef de l'opposition n'a jamais faite, même quand il était ministre de l'Environnement. Et je ne suis pas étonné qu'il se trompe, M. le Président. Il se trompe souvent quand il pose des questions, comme sa leader, dans son discours d'introduction, disait qu'il aurait voulu être là, qu'au moment de Kyoto il a fait la promotion de l'entente. La vérité, c'est qu'il n'était pas chef de l'opposition et pas ministre de l'Environnement quand Kyoto a été adopté, en 1996, Mme la leader.

Le Président: En question complémentaire, M. le chef de l'opposition officielle.

M. André Boisclair

M. Boisclair: Le chat sort du sac, M. le Président. Est-ce que le premier ministre est en train de nous dire qu'il ne veut pas indisposer ses amis du fédéral, sa gang d'amis conservateurs, puis qu'il n'a même pas le courage de donner suite à la motion qu'a déposée sa ministre des Relations internationales? Pourquoi est-ce qu'il refuse que l'Assemblée nationale du Québec ratifie ce protocole? Pourquoi refuse-t-il de passer de la parole au geste? M. le Président, si c'est ça, la défense des intérêts du Québec, bien, moi, je vais vous dire une chose: J'ai hâte aux élections parce qu'on va le sanctionner en maudit!

n(15 heures)n

Le Président: M. le premier ministre.

M. Jean Charest

M. Charest: M. le Président, le chef de l'opposition officielle a beau crier, s'époumoner à l'Assemblée nationale, il reste toujours que, la semaine dernière, à un moment où les Québécois se réunissaient autour d'un... Écoutez, oui, je sais bien, il envoie... sauf que c'était le moment d'être présent, là, au lieu de faire de la partisanerie sur un enjeu qui, de toute évidence, est important pour nos enfants et nos petits-enfants, M. le Président.

Cela étant dit, il a...

Des voix: ...

Le Président: S'il vous plaît! Je vous demande votre collaboration. S'il vous plaît! S'il vous plaît! M. le premier ministre.

M. Charest: On ne demande pas grand-chose au chef de l'opposition officielle, M. le Président. L'Action démocratique était présent à ce moment-là, ils ont été bien capables, eux, de se joindre à nous. Quand le chef de l'opposition officielle fera preuve d'un peu plus de maturité, il sera pris un peu plus au sérieux par les Québécois.

Le Président: Alors, ceci met fin à la période de questions et réponses orales.

Votes reportés

Motion proposant que l'Assemblée
exige du gouvernement qu'il renonce à
imposer aux contribuables des hausses
de taxes scolaires abusives

Tel qu'annoncé précédemment, nous allons maintenant procéder au vote reporté sur la motion du député de Vachon débattue ce matin, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition. Cette motion se lit comme suit:

«Que l'Assemblée nationale exige du gouvernement libéral qu'il renonce à imposer aux contribuables québécois des hausses de taxes scolaires abusives.»

Que les députés en faveur de cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Boisclair (Pointe-aux-Trembles), Mme Lemieux (Bourget), Mme Harel (Hochelaga-Maisonneuve), Mme Dionne-Marsolais (Rosemont), Mme Caron (Terrebonne), M. Pinard (Saint-Maurice), M. Legault (Rousseau), M. Arseneau (Îles-de-la-Madeleine), M. Létourneau (Ungava), M. Boucher (Johnson), M. St-André (L'Assomption), Mme Malavoy (Taillon), Mme Robert (Deux-Montagnes), Mme Papineau (Prévost), M. Jutras (Drummond), Mme Vermette (Marie-Victorin), M. Pagé (Labelle), M. Dion (Saint-Hyacinthe), M. Cousineau (Bertrand), M. Valois (Joliette), M. Bouchard (Vachon), M. Girard (Gouin), M. Bédard (Chicoutimi), M. Morin (Nicolet-Yamaska), M. Simard (Richelieu), M. Deslières (Beauharnois), Mme Charest (Rimouski), M. Dufour (René-Lévesque), Mme Beaudoin (Mirabel), Mme Lefebvre (Laurier-Dorion), M. Bourdeau (Berthier), M. Turp (Mercier), M. Côté (Dubuc), Mme Maltais (Taschereau), Mme Doyer (Matapédia), M. Lelièvre (Gaspé), M. Thériault (Masson), M. Tremblay (Lac-Saint-Jean), Mme Champagne (Champlain), M. Bergeron (Verchères), M. Lemay (Sainte-Marie?Saint-Jacques).

M. Dumont (Rivière-du-Loup), M. Picard (Chutes-de-la-Chaudière), M. Grondin (Beauce-Nord), Mme Roy (Lotbinière), M. Légaré (Vanier).

Le Président: Que les députés qui sont contre cette motion veuillent bien se lever.

Le Secrétaire adjoint: M. Charest (Sherbrooke), M. Dupuis (Saint-Laurent), Mme Gagnon-Tremblay (Saint-François), M. Audet (Laporte), M. Després (Jean-Lesage), Mme Courchesne (Fabre), M. Couillard (Mont-Royal), M. Fournier (Châteauguay), M. Bachand (Outremont), M. Vallières (Richmond), Mme Thériault (Anjou), M. Hamad (Louis-Hébert), M. Kelley (Jacques-Cartier), Mme Boulet (Laviolette), M. Pelletier (Chapleau), M. Bergman (D'Arcy-McGee), M. Ouimet (Marquette), M. Marsan (Robert-Baldwin), Mme Gauthier (Jonquière), M. Corbeil (Abitibi-Est), Mme Normandeau (Bonaventure), Mme Beauchamp (Bourassa-Sauvé), M. Béchard (Kamouraska-Témiscouata), M. MacMillan (Papineau), Mme Jérôme-Forget (Marguerite-Bourgeoys), M. Marcoux (Vaudreuil), M. Lessard (Frontenac), M. Gautrin (Verdun), Mme Loiselle (Saint-Henri?Sainte-Anne), M. Chagnon (Westmount? Saint-Louis), M. Bordeleau (Acadie), M. Whissell (Argenteuil), Mme Lamquin-Éthier (Crémazie), Mme Théberge (Lévis), M. Copeman (Notre-Dame-de-Grâce), Mme Houda-Pepin (La Pinière), M. Brodeur (Shefford), M. Mulcair (Chomedey), M. Chenail (Huntingdon), M. Reid (Orford), M. Bachand (Arthabaska), M. Bernard (Rouyn-Noranda?Témiscamingue), M. Bernier (Montmorency), M. Blackburn (Roberval), Mme Charlebois (Soulanges), Mme Hamel (La Peltrie), M. Dubuc (La Prairie), M. Descoteaux (Groulx), M. Clermont (Mille-Îles), M. Auclair (Vimont), Mme Charest (Matane), M. Gabias (Trois-Rivières), Mme L'Écuyer (Pontiac), M. Morin (Montmagny-L'Islet), M. Paquet (Laval-des-Rapides), M. Paquin (Saint-Jean), M. Tomassi (LaFontaine), M. Soucy (Portneuf), M. Rioux (Iberville), Mme Perreault (Chauveau), Mme Vien (Bellechasse), Mme James (Nelligan).

Le Président: Est-ce qu'il y a des abstentions? Aucune abstention. M. le secrétaire général.

Le Secrétaire: Pour: 46

Contre: 62

Abstentions: 0

Le Président: Alors, la motion est rejetée.

Nous sommes maintenant aux motions sans préavis.

Avis touchant les travaux des commissions

Est-ce qu'il y a consentement pour présenter un avis? Consentement. Il y a consentement. M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Alors, j'avise donc l'Assemblée, M. le Président, que la Commission des affaires sociales poursuivra et complétera les consultations particulières dans le cadre du projet de loi n° 30, Loi modifiant la Loi sur les régimes complémentaires de retraite, notamment en matière de financement et d'administration, aujourd'hui, après le présent avis jusqu'à 17 h 30, et à la salle Louis-Joseph-Papineau;

Que d'autre part la Commission des finances publiques poursuivra les consultations particulières dans le cadre de l'énoncé politique intitulé Moderniser la gouvernance des sociétés d'État aujourd'hui, après ce présent avis jusqu'à 16 h 45, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, ainsi que demain, le jeudi 2 novembre, de 9 h 30 à 11 h 45, à la salle du Conseil législatif; et

Que finalement la Commission de la culture poursuivra et complétera la consultation générale dans le cadre du document intitulé Vers une politique gouvernementale de lutte contre le racisme et la discrimination aujourd'hui, après ce présent avis jusqu'à 16 h 30, et à la salle du Conseil législatif.

Le Président: Alors, ces avis sont déposés.

Motions sans préavis

Décision de la présidence sur la demande
de directive soulevée le 31 octobre 2006
concernant les règles entourant la tenue
d'un débat sur une motion sans préavis

Nous en sommes aux motions sans préavis. Je vais répondre à la question de directive soulevée hier par la leader de l'opposition officielle à la suite de la décision rendue par la présidence concernant la présentation d'une motion sans préavis.

La décision rendue hier ne change rien à la façon de procéder lorsque nous sommes à l'étape des motions sans préavis. Lorsqu'un député présente une motion à cette étape de nos travaux, la présidence doit s'assurer que tous les membres présents de l'Assemblée consentent unanimement à ce qu'elle soit débattue. Dès qu'un seul député indique qu'il ne consent pas à la tenue du débat, ce débat ne peut avoir lieu.

Cela dit, lorsque la présidence demande s'il y a consentement pour débattre d'une motion, il importe de faire les distinctions qui s'imposent selon la situation qui se présente. La première situation concerne le cas où les députés consentent purement et simplement au débat lorsque la présidence demande s'il y a consentement. Dans ce cas, la motion sera débattue, et ni le débat ni les temps de parole individuels ne seront limités autrement que par les dispositions prévues au règlement.

La deuxième situation concerne le cas d'un député qui, au moment de donner son consentement, indique qu'il ne consent à la tenue d'un débat que sous certaines conditions relatives, par exemple, au nombre d'intervenants, à la durée des interventions ou la durée totale du débat. Le président doit alors s'assurer que tous les députés sont d'accord avec chacune de ces conditions. Lorsque le président constate que tous les députés consentent aux conditions proposées pour la tenue du débat, le débat doit alors se dérouler selon ces conditions. Dans le cas contraire, le débat ne peut avoir lieu.

La troisième situation est celle où les leaders s'entendent entre eux sur les conditions entourant la tenue d'un débat et que l'Assemblée n'est pas informée de cette entente. Dans un tel contexte, la présidence ne peut imposer ces conditions aux autres députés, puisque les conditions doivent être connues de l'ensemble des députés présents, et chacun d'eux doit y avoir consenti pour lier l'Assemblée.

Par ailleurs, il importe de rappeler que ce sont les députés qui donnent leur consentement et non les groupes parlementaires. Ce n'est donc pas parce qu'une motion est présentée par un député appartenant à un groupe parlementaire que tous les membres de ce groupe sont présumés consentir purement et simplement au débat. Un député appartenant au même groupe que l'auteur de la motion peut, lui aussi, se prononcer lorsque la présidence demande s'il y a consentement pour débattre de la motion et, s'il le juge opportun, assortir son consentement de conditions.

n(15 h 10)n

Enfin, puisqu'il a été fait mention d'un cas qui s'est produit le 24 octobre dernier, j'aimerais revenir sur ce qui s'est alors produit. Dans ce cas, un consentement unanime, pur et simple, avait été constaté par la présidence. Un débat a donc pu avoir lieu. Or, en cours de ce débat, la présidence a dû préciser que le débat n'était pas limité, puisqu'aucune condition n'avait été proposée à l'Assemblée au moment où le consentement avait été demandé et constaté par la présidence.

Cette dernière a aussi précisé, comme je viens de le faire, que les ententes entre les leaders ne lient l'Assemblée que dans la mesure où elles ont été formellement communiquées à l'Assemblée et font l'objet d'un consentement de tous les membres présents.

Nous en sommes maintenant aux motions sans préavis.

Une voix: ...

Le Président: Oui, Mme la leader de l'opposition officielle.

Mme Lemieux: Je voudrais vous signifier, à ce moment-ci, et, bien entendu, nous allons prendre connaissance dans le détail de la directive que vous venez d'émettre, je veux tout de même signifier, à la compréhension que j'ai de ce que vous venez de dire, que vous avez identifié trois situations différentes, je crois qu'hier nous étions dans le deuxième cas, et que je déplore formellement l'interprétation que la présidence a eue, et c'est encore plus vrai quand on entend la directive que vous émettez des événements d'hier. Et je considère ? et je tiens à le signifier ? que la présidence a mal interprété les événements d'hier, surtout lorsqu'on entend votre directive d'aujourd'hui.

Je n'ai pas de demande particulière, je veux vous le dire formellement: hier, il y a eu deux décisions, vous le savez, en un délai très court, deux décisions contradictoires. Les événements ont eu, quant à moi, une mauvaise interprétation, et la deuxième décision n'est pas une décision que je peux qualifier de précédent, mais c'est une mauvaise décision. Et je tiens, au nom de l'aile parlementaire et de l'opposition officielle, à le signifier formellement, M. le Président.

Il s'agit ici des droits des parlementaires, donc des droits des élus du peuple dont il a été question, et il y a eu un jeu, hier, avec ces règles parlementaires, avec les événements, avec l'interprétation de notre règlement, en fonction des événements, et je le déplore profondément, M. le Président. Je tiens à vous le dire formellement.

Une voix: ...

Le Président: Oui, M. le leader du gouvernement.

M. Dupuis: Sur cette intervention, M. le Président, je suis en profond désaccord avec les représentations que la leader de l'opposition officielle vient de vous faire. Il n'y a pas eu de jeu.

Des voix: ...

M. Dupuis: Il n'y a pas eu de jeu. Il y avait un président qui siégeait, qui siégeait sur votre fauteuil, qui a exercé l'autorité qu'il est en droit d'exercer en vertu du règlement qui nous commande. Ce président a estimé... Et, quand j'écoute votre décision aujourd'hui, je conclus que c'était une bonne décision, celle qu'il a rendue hier: il a estimé qu'il n'y avait pas de consentement à un débat et il a rendu une bonne décision. Simplement, je veux simplement dire que je suis en total désaccord avec ce que la leader de l'opposition officielle vient de prétendre. Et, M. le Président, ce qu'elle vient de prétendre, c'est à la limite, à la limite d'une remise en question de la confiance qu'on doit avoir à l'égard du président.

Le Président: Alors, c'est pour ça que j'ai répondu personnellement à cette directive. Et la décision a été prise hier, il faut la respecter. Et je tiens à vous dire que je suis solidaire de cette décision de la présidence, hier.

Et nous sommes maintenant aux motions sans préavis. M. le ministre des Transports.

M. Després: Merci, M. le Président. Je voudrais déposer la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale réitère l'importance que soit complété le parachèvement de l'autoroute 25 entre Montréal et Laval.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Mme Lemieux: Alors, M. le Président, il y a actuellement, devant la Cour supérieure, une demande d'injonction qui vise l'arrêt total du projet du pont de la 25. Cette motion-là serait donc une intervention directe dans un processus judiciaire. Je suis bien étonnée que le ministre de la Justice n'ait pas eu la prudence de stopper cette motion-là.

On met en collision frontale une éventuelle décision entre le Parlement et le...

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, mais c'est...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! À ce moment-ci, c'est ça, il y a consentement ou pas, et on ne débat pas pour expliquer qu'il n'y a pas consentement. Donc, il n'y a pas consentement.

Toujours aux motions sans préavis, Mme la députée de Pontiac.

Mme L'Écuyer: ...de l'Assemblée pour déposer une motion sans préavis.

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, c'est... Alors, allez, présentez votre texte, le texte de la motion.

Souligner le Mois de l'adoption

Mme L'Écuyer: Je sollicite le consentement de cette Assemblée pour que soit débattue la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le Mois de l'adoption.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je répète, s'il vous plaît: Y a-t-il consentement pour débattre de cette motion, en sachant qu'il y a un intervenant de chaque côté, plus les indépendants, et pas plus de cinq minutes? Donc, le temps est limité. Mme la députée, allez pour votre motion.

Mme Charlotte L'Écuyer

Mme L'Écuyer: Merci, M. le Président. Quand on parle d'adoption, que ce soit au Québec ou sur le plan international, il est question en priorité du bien-être d'enfants qui n'ont pas la chance de grandir au sein d'une famille qui leur donne l'amour et la présence dont ils ont besoin. Il s'agit d'une mesure de protection sociale qui assure un projet de vie permanent à l'enfant dont le retour vers la famille d'origine n'est pas envisageable. Elle permet à l'enfant de développer ses qualités dans un milieu sain. La science nous enseigne par ailleurs qu'un enfant maximise dès un jeune âge ses chances de développement lorsqu'il a l'opportunité de créer un lien significatif en compagnie des adultes qui l'entourent.

L'adoption, telle que pratiquée au Québec, a connu des transformations majeures au fil du temps. Encore récemment, elle a fait l'objet de modifications dans le but de permettre l'adoption par des conjoints du même sexe et pour tenir compte, en adoption internationale, de la mise en oeuvre, au Québec, de la Convention sur la protection des enfants et la coopération en matière d'adoption internationale. On constate donc que le régime québécois d'adoption est en constante évolution afin de refléter les nouvelles tendances sociales.

En juin dernier, M. le Président, l'Assemblée nationale a adopté le projet de loi n° 125 modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et d'autres dispositions législatives. D'importantes modifications ont été apportées à la loi afin d'assurer une meilleure stabilité à l'enfant. Dans le cadre de l'examen du projet de loi n° 125, le régime québécois d'adoption a suscité de nombreux commentaires. Les observateurs présents durant l'ensemble de la commission savent qu'un consensus s'est dégagé sur la nécessité de réviser en profondeur les dispositions sur l'adoption prévues au Code civil du Québec. Notre gouvernement a été sensible à ces demandes et a pris les moyens nécessaires d'y répondre.

Pour réaliser cette révision complexe avec la délicatesse requise, en mai dernier, nous avons constitué un groupe de travail chargé d'évaluer le régime à la lumière des réalités sociales actuelles. Ce groupe de travail, sous la responsabilité du ministère de la Justice, est composé de représentants des milieux de la justice et des services sociaux. Nous connaîtrons leurs recommandations au terme des travaux, ce qui nous permettra de prendre des décisions éclairées à l'égard du régime québécois d'adoption. Une question aussi importante, M. le Président, doit faire l'objet d'une étude approfondie. Certains détracteurs diront que nous ne devons pas regarder ce domaine dans son ensemble. Pour eux, les solutions de modernisation de notre système d'adoption passe par le règlement de certaines questions sans penser aux conséquences que celles-ci auront sur le domaine de l'adoption dans sa totalité. De notre côté, nous croyons qu'il est important de se poser les bonnes questions et de prévoir, en concertation avec tous les acteurs du milieu, les meilleures solutions qui permettront d'établir des règles claires et précises.

M. le Président, tant au Québec que sur le plan international, notre gouvernement tient à ce que chaque projet d'adoption soit réalisé dans le plus grand respect des droits des enfants et de ceux des adultes concernés. Les nouvelles dispositions législatives visent à renforcer la garantie dont notre système dispose déjà. Sachez que, pour nous, la famille biologique demeure toujours la première responsable de l'enfant et qu'une adoption, ce n'est pas la solution pour tous les enfants. Toutefois, lorsque la sécurité de l'enfant est compromise à long terme, ce geste d'une grande générosité permettra à certains d'entre eux de mieux se développer.

En terminant, je tiens à souligner le travail de nombreuses associations travaillant dans ce domaine pour le moins sensible. Aux associations de parents, au Secrétariat à l'adoption internationale du ministère de la Santé et des Services sociaux, aux organismes agréés travaillant à l'étranger, aux centres jeunesse, au Mouvement Retrouvailles et à tous les intervenants, psychologues et autres professionnels, qui oeuvrent de près ou de loin dans le domaine de l'adoption au Québec, sachez que notre gouvernement apprécie le travail que vous effectuez quotidiennement. Je vous remercie, M. le Président.

n(15 h 20)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Rimouski. Mme la députée de Rimouski, à vous.

Mme Solange Charest

Mme Charest (Rimouski): Merci, M. le Président. À titre de porte-parole de l'opposition officielle en matière de services sociaux, il me fait particulièrement plaisir de souligner le Mois de l'adoption.

Adopter un enfant, c'est probablement l'un des plus beaux gestes d'amour que l'on puisse poser. Les parents qui décident de s'engager dans un processus d'adoption prennent un engagement pour la vie. Une fois la décision d'adopter prise, les parents amorcent un long parcours, souvent juché d'obstacles et d'interminables délais, qui, nous le savons, est complexe, pour ne pas dire compliqué.

Je veux prendre un moment pour rendre hommage à tous ces parents pour qui l'amour d'un enfant et le désir de fonder une famille sont plus forts que la somme de toutes ces difficultés. Je veux aussi prendre un moment, un instant afin de rappeler que malheureusement, encore aujourd'hui, les parents adoptants et les parents biologiques ne sont pas égaux devant la loi, notamment en ce qui concerne les congés parentaux, même si les parents adoptants et leurs enfants nous prouvent tous les jours que l'attachement véritable et le développement de liens profonds, de liens significatifs ne peuvent être réduits au seul lien biologique. Les parents adoptants sont des parents, point à la ligne. Qu'on se le dise une fois pour toutes.

Par ailleurs, l'adoption a toujours joué un rôle prépondérant dans l'histoire des familles du Québec. Aujourd'hui, elle semble bien loin, l'époque des crèches, où celles qu'on appelait un peu honteusement filles-mères y laissaient leur enfant, convaincues que c'était pour l'enfant la meilleure chose à faire.

Mais cette époque est encore bien présente dans le coeur de milliers d'enfants adoptés à qui l'on refuse le droit de connaître l'identité de leurs parents biologiques. En effet, le Québec a toujours privilégié l'adoption plénière, qui rompt le lien biologique entre le parent et l'enfant, à l'adoption simple, qui permet à l'enfant de connaître l'identité de ses parents biologiques.

L'an dernier, lors de l'étude du projet de loi sur la protection de la jeunesse, cette importante question a maintes fois été soulevée en commission parlementaire. La ministre déléguée à la Protection de la jeunesse et à la Réadaptation s'était engagée, en son nom personnel et aussi au nom du ministre de la Justice, à revoir la Loi sur l'adoption. Depuis, le gouvernement avait mis sur pied un comité de travail. Or, nous apprenions, le 28 octobre dernier, que le gouvernement reporte au 31 mars 2007 la remise du rapport du groupe de travail chargé du régime d'adoption au Québec, prévue initialement le 1er novembre 2006.

Au printemps dernier, M. le Président, l'Assemblée nationale a adopté la nouvelle Loi sur la protection de la jeunesse. Cette nouvelle loi vient confirmer la préséance du droit des enfants sur celui des parents. Cette préséance s'applique-t-elle aussi aux enfants adoptés? La question est posée. L'opposition officielle croit que oui et demande aujourd'hui au gouvernement de faire preuve de cohérence en reconnaissant aux enfants adoptés le droit de connaître leur véritable identité. Plusieurs raisons motivent cette demande, notamment des raisons d'ordre médical, mais nous demandons au gouvernement d'acquiescer à notre demande d'abord et avant tout pour des raisons humanitaires. Au Québec, nous avons fait le choix des enfants d'abord, sans distinction de classe ou d'origine: assumons ce choix jusqu'au bout. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Rimouski. Et, toujours sur cette même motion, je reconnais maintenant Mme la députée de Lotbinière.

Mme Sylvie Roy

Mme Roy: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir, au nom de l'Action démocratique, de prendre la parole sur cette motion. J'ai moi-même abordé cette question à plusieurs reprises, la question des recherches d'identité des personnes adoptées. Et vous voyez, devant cette Chambre, l'erreur que nous faisons trop souvent, c'est de concevoir que les personnes adoptées sont des enfants, même si elles ont passé le cap de l'âge de 18 ans. Voyez-vous, M. le Président, on les considère souvent comme des personnes qui ne sont pas responsables parce que, le fait qu'ils soient adoptés, le fait qu'ils soient adoptés, c'est un tiers qui garde le secret, et ce tiers-là peut décider de le dire ou de ne pas le dire à la personne adoptée.

M. le Président, cette façon de faire de notre Code civil, qui date de l'époque Duplessis, ce n'est pas vrai qu'il y a eu des bouleversements. On adopte toujours de la même façon, au Québec, depuis cette époque-là, toujours de la même façon, depuis les filles-mères qu'on a relatées, et ça n'a plus sa place. Continuer à cautionner un régime qui ne permet pas qu'une personne adoptée le sache à l'âge de 14 ans ou à l'âge 18 ans, ça n'a pas de sens sous le Québec moderne, M. le Président.

On a parlé des conventions internationales. Malheureusement, les conventions internationales, qui est la Convention de La Haye, concernent les enfants. C'est les seules conventions qui parlent d'adoption. Qu'est-ce qu'on dit dans cette convention-là? Que l'enfant adopté, mais l'adulte également, a le droit à son identité. On a pris la loi au Canada, on l'a soumise à cette convention-là à l'ONU. Puis qu'est-ce qu'on a dit? On était «borderline». Depuis ce temps-là, plusieurs provinces, plusieurs provinces ont fait de nouvelles moutures de leurs façons d'adopter au Québec, et pas nous, M. le Président. Ça urge.

J'entendais la députée de Pontiac dire qu'elle était contente du travail du Mouvement Retrouvailles. Je peux vous dire que, pour avoir plusieurs contacts avec les membres de cet organisme-là, qui sont, soit dit en passant, 14 000 personnes, ils ne sont pas contents du gouvernement du Québec, ils ne sont pas contents d'avoir encore à subir des délais. Déjà, ils trouvaient que ça ne bougeait pas, déjà ils trouvaient que c'était trop loin, le 1er novembre 2006, pour avoir un début de solution à un rapport qui a déjà été fait il y a des années. Maintenant, on leur reporte ça en mars. Je peux vous dire que ça a provoqué beaucoup, beaucoup d'insatisfaction.

La semaine dernière, on parlait de l'adoption traditionnelle au Forum socioéconomique des premières nations. Les autochtones n'adoptent pas de façon plénière. Ils adoptent de façon traditionnelle, c'est-à-dire sans rompre tous les liens comme nous le faisons au Québec. Il est urgent qu'on tienne un débat sur cette question. Voyez-vous, la Loi de la protection de la jeunesse s'applique. Au bout de deux ans, un enfant pourrait être soumis à l'adoption. Les peuples autochtones, on compte 10 000 placements pour 11 000 enfants de zéro à 18 ans, et on n'aura pas le début de la solution avant mars 2007, soit près de plus d'une année après l'adoption du projet de loi qui sanctionne qu'au bout de deux ans de placement il y aura une adoption. Moi, je vois qu'il y a péril en la demeure, et qu'il faut vraiment accélérer le travail sur ce sujet, et enfin faire preuve de courage, et de discuter ici, à l'Assemblée nationale, la façon dont on adopte au Québec.

M. le ministre de la Santé reconnaîtra qu'il est important de connaître ses origines au niveau médical, et on n'a pas le droit de priver toutes ces personnes-là par des délais qui font qu'on n'est pas au travail puis qu'on n'est pas en train de régler ces dossiers-là, M. le Président. Je demande donc au ministre de la Justice, au ministre de la Santé d'accélérer ce processus et de travailler ici, à l'Assemblée nationale, pour modifier la façon dont on adopte au Québec. Merci.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Lotbinière.

Mise aux voix

Est-ce que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Le Vice-Président (M. Gendron): Adopté.

Toujours aux motions sans préavis, je reconnais maintenant Mme la députée d'Hochelaga-Maisonneuve pour sa motion. Mme la députée.

Souligner le Mois de l'hémophilie

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. M. le Président, je demande le consentement de cette Assemblée pour présenter la motion suivante:

«Que l'Assemblée nationale souligne le Mois de l'hémophilie.»

Le Vice-Président (M. Gendron): Y a-t-il consentement pour débattre de ce cette motion?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Mais c'est indiqué, là, cinq minutes, depuis le début.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Ça va. Merci. Il y a consentement. Allez, Mme la députée.

Mme Louise Harel

Mme Harel: Alors, merci, M. le Président. Je disais donc que c'est le début, aujourd'hui, en ce 1er novembre, du Mois de l'hémophilie, et il me semblait important, M. le Président, de marquer ce début du mois de novembre par cette motion qui va nous permettre d'aborder les défis qui se posent à ceux de nos concitoyens qui ont été victimes du sang contaminé par le VIH et qui réclament, depuis quelques années déjà, l'indexation de l'indemnisation qui leur est versée.

n(15 h 30)n

D'abord, M. le Président, je voudrais saluer la section Québec de la Société canadienne de l'hémophilie et rendre hommage au travail qui est accompli par cette section Québec. Je voudrais particulièrement saluer Mme Mylène D'Fana, la présidente, de même que la directrice générale, Mme Aline Ostrowski, et leur dire combien est apprécié le journal qui est distribué parmi les membres de la section Québec de la Société canadienne d'hémophilie, qui s'intitule L'Écho du facteur, et leur dire qu'il est, je pense, extrêmement important que l'information puisse circuler de manière à favoriser la solidarité entre ceux et celles qui sont aux prises avec ces problèmes de sang mais aussi ceux et celles qui sont leurs proches, leurs amis qui les accompagnent dans cette épreuve. C'est une épreuve, M. le Président. Je pense qu'il faut se le rappeler. Est-ce que c'est possible d'imaginer combien ça peut être handicapant et affligeant, combien ça peut affecter la qualité de vie?

Je recevais, il y a quelques semaines de cela, une lettre d'une jeune personne hémophile, victime du sang contaminé, de Trois-Rivières, la même lettre d'ailleurs était transmise au chef de l'opposition officielle. Je vous en lirai juste un paragraphe, M. le Président. Je pense que cela suffira à nous faire bien comprendre quelle épreuve ça peut être.

Ce jeune homme disait ceci: «Est-il utile de dire combien handicapant et affligeant ce virus peut être? J'ai pour ma part appris qu'il m'avait infecté il y a 20 ans, à l'âge de 10 ans, et plus que jamais je prête flanc à ses terribles assauts de même qu'aux préjugés et à la discrimination qui l'entourent toujours et qui me font encore craindre de sortir de l'anonymat, comme je le fais en signant cette lettre ? c'est la raison pour laquelle je ne mentionne pas le nom de l'auteur de cette lettre. J'ai dû renoncer à la vie active et productive que je voulais mener, à la famille que je voulais fonder. J'en ai perdu la capacité de me projeter avec optimisme et enthousiasme dans l'avenir. D'autres y ont laissé plus précieux encore, des proches qu'ils ont eux-mêmes infectés sans le savoir ou même la vie, carrément. Malgré les progrès de la médecine et la qualité des soins qui sont prodigués diligemment par le système de santé québécois, il ne reste actuellement que 87 des 310 personnes ayant bénéficié du programme québécois d'aide aux personnes éligibles ? au sang contaminé ? une cohorte décimée dont les revendications apparaissent d'autant plus modestes. Moins de 1 million de dollars suffiraient à les satisfaire. Dans ce contexte, y rester sourd ou multiplier les atermoiements prend l'allure d'un calcul funeste, tout juste bon à réaliser des économies de bout de chandelle.»

Il terminait sa lettre en disant: «En espérant que mon plaidoyer vous ralliera à ma cause qui est aussi celle de la section Québec de la Société canadienne d'hémophilie et de toutes les victimes du sang contaminé.» Et les salutations suivaient.

Quand le chef de l'opposition a reçu cette lettre, M. le Président, il m'a demandé d'intervenir avec fermeté, auprès du ministre de la Santé et des Services sociaux, pour qu'il revoie la décision de refuser, de dire non, qu'il revoie la décision de refuser l'indexation de l'indemnisation du programme provincial, d'autant que le refus motivé par le ministre était l'argument selon lequel un accord multilatéral devait être adopté par toutes les provinces concernées, alors que, M. le Président...

Le Vice-Président (M. Gendron): Excusez-moi, c'est parce qu'on avait bien convenu, là. Moi, comme président, là, on m'a dit cinq. Bon. On peut tout faire ce qu'on veut de consentement. Alors, s'il y a consentement pour poursuivre... Mais il ne faudrait pas, par équité envers les autres motions... C'est ça, si vous pouviez conclure dans pas grand temps.

Mme Harel: Alors, je terminerai, M. le Président, en signalant que, ces dernières années, l'Ontario, le Manitoba, l'Île-du-Prince-Édouard, Terre-Neuve, le Labrador ont accordé l'indexation du montant annuel d'indemnisation VIH aux personnes, là, aux victimes du sang contaminé. En fait, M. le Président, je pense que et je terminerai en vous disant que ces personnes qui voient le même montant leur être alloué depuis maintenant 1993, sans indexation, je pense, demandent par compassion que nous puissions nous assurer qu'elles ne soient pas aussi victimes de notre négligence. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Gendron): Je vous remercie, Mme la députée. Toujours sur cette même motion, je cède maintenant la parole à M. le ministre.

M. Philippe Couillard

M. Couillard: Merci, M. le Président. Nous voudrions bien sûr souscrire et nous associer à cette motion de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve, parler d'abord de cette maladie et des troubles de coagulation, l'hémophilie qui en est une. Il y a d'autres troubles de coagulation qui y sont associés, qui ont des conséquences très graves, des complications, des hémorragies, et parfois même, malheureusement, elles peuvent entraîner le décès. Il faut donc que ces Québécoises et ces Québécois qui ont le malheur d'être atteints, d'être frappés par ces maladies adoptent des habitudes de vie particulières, une foule de petits trucs quotidiens pour éviter les blessures les plus banales qui pour nous sont inoffensives mais qui pour eux et pour elles peuvent prendre une allure très, très menaçante.

Donc, la vigilance est constante pour les personnes hémophiles. Il n'y a pas encore de solution pour guérir l'hémophilie. On sait cependant que, depuis les années soixante, les personnes hémophiles peuvent bénéficier de remplacement par des facteurs de coagulation. Ces traitements leur permettent d'avoir un meilleur contrôle sur la maladie, et d'améliorer leur qualité de vie, et de pouvoir également se joindre à des activités les plus normales possible. D'ailleurs, mon collègue le député de Portneuf me faisait remarquer qu'il existe, dans sa circonscription, un camp de vacances spécial pour les enfants atteints d'hémophilie et qu'ils reçoivent, chaque été, des enfants de partout qui ont cette maladie et qui bien sûr doivent avoir un encadrement spécifique dans un milieu de camp de vacances, compte tenu de ce danger qui plane toujours au-dessus de leurs têtes.

La recherche médicale et les avancées technologiques bien sûr, nous l'espérons, pourront dans l'avenir offrir des traitements de plus en plus efficaces et même, qui sait, peut-être, un jour, la guérison. Et d'ici là il faut continuer, dans le réseau de la santé, à offrir des services de grande qualité par l'intermédiaire de cliniques de soins spécialisés pour l'hémophilie et les autres maladies de la coagulation. On sait que nous avons désigné avec Héma-Québec un groupe de centres dont le personnel est très qualifié, très spécialisé, qui exerce un suivi rigoureux tout au long de l'évolution de la maladie. Bien sûr, nous saluons également l'action de la Société canadienne de l'hémophilie, section Québec, qui est très active auprès des personnes qui sont atteintes d'hémophilie et d'autres désordres de la coagulation. Elle leur fournit donc des informations qui sont utiles pour mieux contrôler leur maladie et améliorer leur qualité de vie. Et je suis sensible à la remarque qu'a faite la députée d'Hochelaga-Maisonneuve sur la question de l'indexation. D'ailleurs, c'était une politique qui avait été continue depuis l'époque, à travers les changements de gouvernements, qui était de ne pas souscrire à l'idée de l'indexation en attendant que ceci fasse l'objet d'un consensus pancanadien.

Il est clair que cependant des provinces ? et plus d'une; en fait, la députée en a donné la liste il y a quelques minutes; plus d'une ? ont décidé d'agir de façon unilatérale. Je peux vous dire que cette question est à l'examen. La décision n'est pas prise encore bien sûr et, le cas échéant, elle serait certainement annoncée, mais nous devons maintenant regarder la situation dans un contexte différent, compte tenu du fait effectivement que d'autres provinces canadiennes ont décidé d'intervenir de leur propre chef. Il faut bien sûr en évaluer les impacts par rapport aux programmes qui sont déjà en place, les coûts, la disponibilité financière. On ne parle pas, comme l'a dit la députée, d'un montant énorme par rapport au budget de l'État, au budget de la santé. Il faut s'assurer également que c'est fait de façon équitable pour les autres personnes qui sont atteintes de maladies transmissibles malheureusement faisant suite à des accidents, ou plutôt des erreurs, ou des non-dépistages de germes dans des transfusions sanguines.

Je vous remercie donc, M. le Président, et je suis heureux de m'associer à cette motion de la députée d'Hochelaga-Maisonneuve.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le ministre de la Santé et des Services sociaux, pour votre intervention. Est-ce à dire que cette motion est adoptée?

Des voix: Adopté.

Avis touchant les travaux des commissions

Le Vice-Président (M. Gendron): Adopté. M. le leader, est-ce que vous avez d'autres avis concernant les travaux?

M. Béchard: M. le Président, j'avise cette Assemblée que la Commission des institutions entreprendra l'étude détaillée du projet de loi n° 25, Loi modifiant la Loi sur l'indemnisation des victimes d'actes criminels et d'autres dispositions législatives, demain, le jeudi 2 novembre, de 9 h 30 à 12 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau.

Le Vice-Président (M. Gendron): Merci, M. le leader. Pour ma part, je vous avise que la Commission de l'économie et du travail se réunira en séance de travail demain, jeudi le 2 novembre 2006, de 8 heures à 9 h 30, à la salle RC.161 de l'hôpital... oh, excusez, de l'hôtel du Parlement.

Des voix: ...

n(15 h 40)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Non, je ne vous conterai pas pourquoi la présidence ne maîtrise pas à 100 % son élocution. Alors, je reprends: à la salle RC.161 de l'hôtel du Parlement afin de déterminer les suites à donner aux consultations sur le Bureau d'évaluation médicale.

Y a-t-il des renseignements sur les travaux de cette Assemblée? Ah, il n'y a pas de renseignements.

Affaires du jour

Donc, la période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. Et, M. le leader du gouvernement, voulez-vous nous indiquer les affaires du jour que vous appelez?

M. Béchard: Oui, M. le Président, j'appelle l'article 5 de notre feuilleton.

Projet de loi n° 33

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Gendron): À l'article 5 de notre feuilleton d'aujourd'hui, l'Assemblée reprend le débat, ajourné le 31 octobre 2006, sur l'adoption du principe du projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives.

Et je suis prêt à entendre les premières interventions et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Taschereau.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Avant de continuer mon allocution, j'aimerais que vous vérifiiez s'il y a quand même un quorum qui me permette d'intervenir plus efficacement.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, votre question m'apparaît perspicace pour le moment, et effectivement il n'y a pas quorum. Alors, que l'on appelle les députés.

n(15 h 41 ? 15 h 45)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, nous avons maintenant quorum, et je suis en mesure de céder la parole à Mme la députée de Taschereau. Je voulais vous indiquer cependant qu'il vous restait à votre intervention, parce qu'elle avait commencé... sur votre 20 minutes, il vous reste huit minutes d'intervention. Et je vous cède la parole pour que vous poursuiviez votre intervention sur le projet de loi n° 33. Merci.

Mme Agnès Maltais (suite)

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, je vais donc continuer à intervenir sur le projet de loi n° 33, loi modifiant la loi du ministère de la Santé et des services sociaux.

Je reprends effectivement, après une intervention qui s'est terminée hier midi, et il s'est passé depuis un 24 heures assez important dans cette Assemblée nationale, un 24 heures assez imposant. Il faut toujours permettre aux gens de comprendre la situation. En 24 heures, le gouvernement a refusé un débat sur le développement de l'énergie éolienne. Là, en 24 heures, dans ce même 24 heures, le gouvernement a refusé de déposer ici le Protocole de Kyoto et de le faire ratifier par l'Assemblée nationale. Et, dans ce même 24 heures, le gouvernement n'a pas accepté la motion qui empêchait ces hausses de taxes abusives du gouvernement, les taxes scolaires. Donc, un 24 heures assez chargé dans cette Assemblée nationale. Et donc ça ne m'étonne pas de voir que les députés libéraux ont de la misère à emplir ce salon bleu et à tenir le quorum. Peut-être qu'ils sont un peu mal à l'aise avec ce qui se passe dans le salon bleu. Je n'ai jamais vu depuis longtemps prendre tant de temps à remplir le salon bleu et à pouvoir nous permettre de continuer les débats.

Alors, ce projet de loi n° 33, j'y reviens, proposait quatre choses: la possibilité d'avoir des contrats d'assurance privée duplicative; la création des centres médicaux spécialisés; la création des cliniques médicales associées; et un mécanisme central de gestion de l'accès. Si on peut discuter et peut-être dans certains cas, de façon positive, comme dans le cas du mécanisme central de gestion de l'accès ou des cliniques médicales associées, j'ai quand même pris le temps de centrer mon intervention sur le principal problème, la possibilité d'avoir des contrats d'assurance privée duplicative. Qu'est-ce que cela? C'est que ce sont donc des soins déjà couverts par le régime actuel, régime public, qui pourront être couverts eux aussi par un régime privé. Comprenez bien qu'actuellement, quand il y a des régimes privés, ils sont sur des services qui ne sont pas assurés par l'assurance maladie. La proposition est à l'effet de...

Des voix: ...

Mme Maltais: Moi, M. le Président, j'essaie de parler. Pourriez-vous me permettre d'intervenir un peu mieux, d'avoir un peu de décorum? Ça placote partout. J'apprécierais, merci.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, un instant. Effectivement, là, je veux dire, c'est un privilège du parlementaire. S'il prétend qu'il n'y a pas le décorum requis, la présidence est obligée d'en appeler.

Alors, ce que j'ai entendu, c'est un appel au décorum. Ça signifie que les gens qui ne sont pas à leur banquette, ils peuvent causer mais très discrètement pour éviter de déranger la personne qui a le droit de parole. Et c'est la députée de Taschereau qui présentement a le droit de parole, personne d'autre. Alors, à vous la parole pour poursuivre votre intervention.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors donc, une assurance pour des soins qui sont déjà couverts par l'assurance médicaments qui est notre assurance publique.

En faisant cela, ce qu'on permet, c'est que des gens sautent la file et, parce qu'ils ont plus de moyens financiers, puissent traverser la file, la couper et se retrouver à l'avant. Et je réfère à une promesse électorale du premier ministre qui était alors chef de l'opposition officielle, qui, en campagne électorale, brandissait sa carte d'assurance médicaments et sa carte de crédit, et il disait: Je choisis la carte d'assurance médicaments. Ce projet de loi nous fait penser qu'il y a un choix qui a été fait, et c'est de choisir la carte de crédit. Donc, une volte-face, non seulement une promesse reniée, mais une volte-face par rapport à la promesse électorale. Pourquoi cette volte-face? Bien, parce que le ministre de la Santé n'a pas été capable de contrôler le système de santé, parce qu'il a prouvé son incapacité à régler les problèmes qu'il avait dit devoir régler, c'est-à-dire les listes d'attente, urgences, et tout ça.

J'ai longuement parlé des problèmes dans Portneuf. J'ai longuement parlé des listes d'attente dans les urgences à Québec, des gens sur civière, dans les dans les corridors, hier matin. J'ai nommé les chiffres. J'ai longuement parlé aussi de Portneuf, les urgences, la loi n° 37, où on a des sérieux problèmes. La loi n° 137, on l'a de travers. Un médecin spécialiste de la région de la Capitale-Nationale qui dit qu'il a fait parvenir une lettre au ministre de la Santé, Philippe Couillard, dans laquelle il pourfend l'annonce ministérielle d'augmenter...

n(15 h 50)n

Le Vice-Président (M. Gendron): Mme la députée.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): S'il vous plaît! Je sais, je sais. Elle le sait, la députée. On doit toujours traiter les parlementaires avec le titre qu'ils ont ou leur circonscription. Alors, Mme Maltais, veuillez vous conformer à la réglementation.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. La députée de Taschereau va se conformer à la réglementation. Alors donc, le ministre, sans avoir au préalable consulté les orthopédistes et s'être assuré de la disponibilité de ressources humaines et matérielles. Et que dit-il, ce médecin? C'est une annonce électoraliste qui manque de sérieux. Alors, c'est ça qui se passe actuellement. Dans tous les domaines de la santé qui peuvent poser des problèmes, on nous a proposé, depuis l'arrivée au pouvoir du gouvernement actuel, des réformes administratives, mais peu de gestes concrets ont permis de régler les véritables problèmes du système de santé.

Un autre exemple: Journal de Québec, 24 octobre, Les infections sont à la hausse dans les hôpitaux. Ça fait longtemps qu'on sait qu'il y a un problème avec la C. difficile. Le ministre de la Santé a été interpellé régulièrement sur ce problème des hôpitaux à cause des infections associées au C. difficile. Qu'est-ce qu'il y avait hier? Les infections liées au C. difficile ont augmenté de 40 % à l'hôpital Saint-François-d'Assise, un taux de 18,27 % par 10 000 jours-présence. La situation s'est détériorée en chirurgie de la rétine: en septembre 2005, 16 patients; aujourd'hui, 73 patients. Les séjours en civière. Enfin, les problèmes en santé mentale dans la région de la Capitale-Nationale, où les urgences débordent. Au CHUL, on le sait, il y a des gens qui attendent depuis 48 et 72 heures. Donc, une incapacité de l'actuel gouvernement et du ministre de la Santé et des Services sociaux qui en est le mandataire à régler les problèmes, un projet de loi qui donc vient dire: Puisqu'on n'est pas capables de régler des problèmes, on va s'en remettre au privé, on va doubler les assurances actuelles. Et, en faisant ça, qu'est-ce qu'on fait? Bien, on va augmenter les dépenses globales de notre société en santé parce qu'en plus d'avoir des dépenses pour un régime public on va avoir des dépenses pour un régime privé. On n'augmentera pas l'offre de service pendant ce temps-là et on n'augmentera pas le personnel.

Qu'est-ce qu'on fait si ça coûte plus cher, d'ailleurs plus cher en frais d'administration ? c'est prouvé régulièrement ? des frais d'administration? Par exemple, aux États-Unis, qui sont le modèle gouvernemental, 31 % des frais d'administration en santé; au Canada, c'est 16 %. Il doit toujours bien avoir des vertus au régime public, puisque ses frais d'administration sont de moitié moindres que les frais d'administration du privé. Donc, on va augmenter les dépenses en santé mais les dépenses directement de la poche des contribuables.

Le ministre de l'Éducation me regarde. Il comprend ce que je veux dire, puisque c'est ce qu'il fait avec les taxes scolaires. On n'augmentera pas l'offre de service, pas le personnel, donc.

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, merci, Mme la députée de Taschereau. Et, toujours sur la poursuite du principe du projet de loi n° 33, je reconnais maintenant M. le député de Johnson.

M. le député de Johnson, à vous la parole.

M. Claude Boucher

M. Boucher: Merci beaucoup, M. le Président. Je suis très heureux d'intervenir aujourd'hui sur le projet de loi n° 33, loi qui modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux. Je suis d'autant plus heureux d'intervenir, M. le Président, que ce projet de loi là est le symbole du cafouillage, de l'improvisation, des promesses reniées et des volte-face de ce gouvernement depuis trois ans et demi. C'est une autre preuve, une fois de plus ? et nous n'avons pas à les faire, les preuves, M. le Président, ils les font eux-mêmes ? c'est une autre preuve que les libéraux n'étaient pas prêts, ne sont toujours pas prêts et ne le seront jamais.

M. le Président, il y a une grande diplomate française qui préfaçait un livre sur la situation au Moyen-Orient, parlant de l'Iran, disait ceci: «L'Iran dit le contraire de ce qu'il pense, fait le contraire de ce qu'il dit, ce qui ne veut pas nécessairement dire qu'il ne fait pas ce qu'il pense.»

En lisant cette préface et parcourant ce livre qui traite de la situation en Iran, en Irak et au Moyen-Orient, j'ai tout de suite pensé, M. le Président, à notre premier ministre. Notre premier ministre, M. le Président, dit le contraire de ce qu'il pense. Il fait le contraire de ce qu'il dit, mais ce qui ne veut pas nécessairement dire, M. le Président, ce qui ne veut pas nécessairement dire, M. le Président, qu'il ne fait pas en réalité ce qu'il pense. Et, si les Québécois avaient su en 2003, avant l'élection, qu'il ferait ce qu'il pense et non pas ce qu'il dit, jamais les libéraux n'auraient pris le pouvoir, M. le Président. Et le projet de loi devant lequel nous sommes aujourd'hui est le symbole justement de cette préface de cette grande diplomate française qui parlait de l'Iran et qui nous fait penser justement au premier ministre.

Nous allons donc, au cours de cette intervention, M. le Président, démontrer que voter pour ce projet de loi, c'est introduire, dans le réseau de la santé, un élément de déséquilibre que les plus démunis subiront dans notre société. M. le Président, à ce projet de loi il y a eu beaucoup de réactions. D'abord, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec a dit ceci: Les mesures qui sont proposées pour donner suite au jugement Chaoulli sont insuffisantes, sinon carrément inacceptables. «En matière d'accessibilité, rien n'est prévu pour améliorer l'accès aux services de première ligne, aux examens diagnostiques ou encore à un médecin spécialiste.» La Fédération des médecins spécialistes du Québec dit ceci: «Nulle part dans le projet de loi [...] peut-on constater l'engagement du gouvernement à rendre les services médicaux spécialisés accessibles à la population dans des délais spécifiques et à donner aux établissements les ressources nécessaires à cette fin.» La Fédération des médecins spécialistes du Québec est d'avis que ce projet de loi pourrait entraîner une politisation des listes d'attente.

Vous voyez déjà, M. le Président, ce qui se passe quand l'ami d'un ministre appelle puis dit: Bien, regarde, ma femme a besoin d'une intervention chirurgicale. Vous voyez déjà, là, les pressions qui seront exercées, M. le Président. Vous voyez déjà les pressions qui vont être exercées, là, sur ces listes d'attente, là, pressions sur lesquelles les plus démunis de la société n'auront pas accès. Et c'est ça, le drame de ce projet de loi. Et ce drame est dénoncé par les médecins eux-mêmes, qui sont certainement plus crédibles, M. le Président, que les députés et ministres.

La Fédération des infirmières et infirmiers du Québec nous dit: «[Des cliniques médicales spécialisées et l'assurance privée duplicative] mettent en péril jusqu'à un certain point le système public de santé et de services sociaux.» L'Association québécoise des établissements de santé et de services sociaux demande au gouvernement de retirer de la loi le concept de clinique médicale associée. Enfin, bref, M. le Président, on pourrait citer un nombre indéterminé d'intervenants dans la société québécoise qui s'objectent à ce projet de loi parce que ce projet de loi va à l'encontre d'une grande tradition québécoise, une grande tradition d'accès universel égal à tout citoyen et toute citoyenne du Québec.

Dès le dépôt du projet de loi, l'opposition officielle s'est objectée, et c'est le député de Borduas, qui est toujours député de Borduas, M. le Président, qui s'est dit surpris et choqué que le projet de loi n° 33 n'était pas du tout conforme aux promesses et aux engagements maintes fois répétés par le ministre de la Santé au cours des derniers mois. En effet, le ministre avait promis à plusieurs reprises qu'une ouverture plus grande au privé pour d'autres soins devrait absolument être débattue par la voie législative, ce qui n'est pas le cas, M. le Président. Notre parti non seulement a critiqué le projet de loi, mais a fait des propositions. Et ce que nous proposons maintenant, M. le Président, c'est que les députés de l'Assemblée nationale votent contre le projet de loi, qui est tout à fait inacceptable.

n(16 heures)n

M. le Président, l'introduction de l'assurance privée duplicative au Québec rompt avec une longue tradition de services de santé universels et gratuits pour les Québécois, où tout le monde est égal devant la loi, tout le monde est égal devant les services sociaux et les services de santé.

L'Assemblée nationale du Québec a adopté, en 1960, sous le gouvernement Lesage, M. le Président, la Loi sur l'assurance-hospitalisation qui jusqu'ici interdit l'assurance privée duplicative, et ce, depuis 46 ans, M. le Président. L'Assemblée nationale a également adopté, en 1970, la Loi sur l'assurance maladie qui interdit jusqu'ici l'assurance duplicative, et ce, depuis 36 ans, M. le Président. L'histoire, M. le Président, va retenir que c'est un gouvernement libéral qui a rompu avec la tradition libérale et qui ouvre une brèche dans laquelle va s'engouffrer un système de santé à deux vitesses au Québec. Combien de fois j'ai entendu, M. le Président, et à l'Assemblée nationale et en dehors de l'Assemblée nationale, le premier ministre dire: Jamais le Parti libéral n'acceptera une médecine à deux vitesses. Jamais. Je l'ai dit au début, M. le Président, le premier ministre a l'habitude de dire le contraire de ce qu'il pense. C'en est un autre exemple, M. le Président.

Ce qui est grave d'ailleurs, M. le Président, dans la suite du jugement Chaoulli, c'est qu'on utilise ce jugement-là pour introduire cet élément-là dans le système, alors que le jugement Chaoulli disait: Ce n'est qu'en présence de délais d'attente raisonnables que la prohibition de l'assurance privée duplicative est valide. En d'autres mots, on peut introduire, selon le jugement Chaoulli, une assurance privée duplicative à la condition qu'on ne soit pas en présence de délais d'attente raisonnables.

Comment il se fait aujourd'hui, M. le Président, qu'on se retrouve devant une situation où le ministre de la Santé, et le premier ministre, et tout le gouvernement, et tout le Parti libéral disent: On se retrouve devant une situation où les délais d'attente ne sont pas raisonnables? Cela était confirmé d'ailleurs par l'Institut Fraser qui disait que le temps d'attente, depuis l'an passé, a augmenté au Québec, alors que le ministre dit: Nous, nous avons fait ci. Vous, vous avez détruit le système. Nous, nous avons fait ci. Il dit ça, mais en même temps, dans la réalité, les Québécoises et les Québécois, là, de ma circonscription qui vont au centre hospitalier universitaire puis qui s'assoient dans la salle d'attente à l'Hôtel-Dieu ou l'ancien Hôtel-Dieu ou qui s'assoient au... Fleurimont et qui attendent plus qu'avant, qu'est-ce que vous pensez qu'ils pensent du gouvernement? Qu'est-ce que vous pensez qu'ils pensent des engagements du premier ministre en campagne électorale?

Les délais d'attente raisonnables, dit le gouvernement, justifient une interdiction de l'assurance privée duplicative. Donc, on devrait se retrouver devant une situation où l'assurance privée duplicative est interdite puisque, si on se fie aux promesses des libéraux, ça devrait être le cas présentement. Comme ils n'ont pas pu réaliser leurs promesses, ils changent le système. Alors, M. le Président, dans ce contexte, en ouvrant la porte à l'assurance privée duplicative, le gouvernement libéral avoue clairement qu'il abdique, qu'il abandonne son engagement d'éliminer l'attente hors délais médicalement acceptables. Autre promesse reniée, M. le Président.

M. le Président, ce n'est pas la première fois que j'utilise un communiqué du Parti libéral qui a été fait, qui faisait de la santé sa priorité numéro un. «Nous allons combattre l'attente ? signé par le premier ministre, qui était chef de l'opposition officielle, à ce moment-là; Nous allons combattre l'attente ? sous toutes ses formes. Nous allons répondre aux besoins de tous les Québécois, à toute heure du jour et de la nuit, dans toutes les régions du Québec. [C'est] notre mission.» M. le Président, le temps d'attente a augmenté. Est-ce que vous réalisez, là, qu'est-ce que ça signifie quand un gouvernement s'engage à réduire le temps d'attente et se fait élire, et se fait élire grâce à cette promesse? Eh bien, voilà, on se retrouve dans une situation où le temps d'attente a augmenté.

Dans la cause Chaoulli, M. le Président, les procureurs du gouvernement, les procureurs du gouvernement actuel, qu'est-ce qu'ils disaient, les procureurs du gouvernement actuel? Ils disaient ceci: «Un régime à payeur unique est celui qui est le plus à même d'assurer que tous aient accès aux meilleurs soins que la richesse collective de la société peut offrir à la population.»

C'est les procureurs du gouvernement qui disaient ça. «Par ailleurs, il ne fait pas de doute que la possibilité de contracter une assurance privée dans le contexte que revendiquent les appelants engendrerait de nombreux effets néfastes sur le système de santé québécois et entraverait la réalisation des objectifs que poursuit le législateur.»

M. le Président, l'ouverture à l'assurance privée. Il s'agit donc d'un nouveau volte-face de la part de ce gouvernement. Il s'agit également d'une autre promesse reniée, M. le Président.

Autre promesse reniée est celle du ministre de la Santé et des Services sociaux. Il avait dit: Jamais nous n'élargirons l'assurance privée, par simple décret, à d'autres chirurgies que la hanche, le genou et les cataractes; jamais nous ne ferons ça.

Le 30 mai 2006: «...pour ce qui est de l'accès à l'assurance privée, ça se ferait par voie législative et non pas par voie réglementaire.»

C'est le ministre qui se lève souvent, en Chambre, pour dire qu'il est, lui, le grand sauveur du système de santé. C'est lui qui a remis sur pied un système ? il y a rien que lui qui le pense et son gouvernement, mais enfin il l'a dit. Et ce ministre maintenant renie ce qu'il a dit le 30 mai 2006. Il renie aussi ce qu'il a dit le 1er juin 2006. Qu'est-ce qu'il a dit le 1er juin 2006? «...nous avons maintenant établi clairement que ce ne serait pas le cas, que nous ne changerions pas, sinon par voie législative.»

M. le Président, le projet de loi que nous avons devant les yeux dit et fait le contraire de ce que nous a dit le ministre. Le projet de loi n° 33 prévoit que l'ouverture à l'assurance privée duplicative pourrait se faire par règlement. Toute la chirurgie mineure à l'assurance privée duplicative pourrait être introduite, M. le Président, par règlement, sans que les députés ici, à l'Assemblée nationale, ne soient saisis de cette modification qui est extrêmement importante pour l'avenir de la santé et des services sociaux au Québec. Il s'agit donc, M. le Président, d'une autre volte-face, d'un autre volte-face du ministre et de son gouvernement qui ne respectent pas un engagement pris en commission parlementaire.

M. le Président, le gouvernement précédent a... On avait déposé, au gouvernement précédent, le rapport Gobeil. Bon. Le premier ministre, lors de la campagne électorale, a indiqué clairement qu'il n'y aurait qu'un seul agent payeur et que jamais on n'introduirait un financement autre que celui des impôts qui dans le fond permet l'égalité des chances dans notre société. Ça, c'est le premier ministre qui nous disait ça.

Voici ce qu'on retrouve, M. le Président, dans un document du Parti libéral, Briller parmi les pires... non, ce n'est pas ça, Briller parmi les meilleurs ? je m'excuse ?Partenaires pour la santé. Qu'est-ce qu'on retrouve? «Les "partenaires de la santé" feront des opérations et des traitements divers, sans aucun frais pour les usagers...» Engagement solennel dans le programme du Parti libéral. «Le réseau public demeurera le maître d'oeuvre [des] services de santé assurables.» Voilà ce qui est dit dans ce document, Partenaires pour la santé, du Parti libéral.

Dans un communiqué de presse, pour donner suite à l'engagement du Parti libéral: «Dans un délai de un an, les cliniques médicales privées feront des opérations et des traitements sans qu'il en coûte un sou au patient.» Autre engagement, M. le Président, du Parti libéral.

M. le Président, pourtant, le Parti libéral avait rejeté du revers de la main le rapport Gobeil qui, lui, disait qu'il était favorable à la privatisation de certains centres hospitaliers, à l'imposition d'un ticket modérateur, à des approches très favorables à un système privé parallèle au système public de santé. Un des quatre signataires d'ailleurs de ce rapport, M. le Président, est le ministre de la Justice et procureur du Québec actuel.

n(16 h 10)n

Qu'est-ce qui est arrivé avec le rapport Gobeil, M. le Président? Le premier ministre, M. Bourassa, s'est tenu debout devant cette volonté de privatiser le système, s'est tenu debout, a été un fier Québécois qui a compris qu'en introduisant un élément qui permettait aux plus riches d'avoir des services plus rapides qu'aux plus pauvres... M. Bourassa, dont étaient si fiers, la semaine passée, les députés d'en face et le premier ministre, M. Bourassa a dit non au rapport Gobeil, hein? Il y a 20 ans donc, le premier ministre avait écarté des éléments de cette nature-là, de privatisation, et le projet de loi n° 33 réintroduit, vous voyez, par la bande, en prétextant que la Cour suprême finalement le demandait... Ce qui est faux, ce qui est faux, compte tenu des promesses qu'ont faites les libéraux.

Le ministre de la Santé a même eu le culot, M. le Président, de dire que ? je ne sais pas comment il peut dire une chose et son contraire en même temps, il a eu le culot de dire que ? c'était un droit fondamental d'introduire cet élément de privatisation. Alors, lors de la dernière campagne électorale, le premier ministre avait bien dit ne jamais vouloir créer un système à deux vitesses, lorsqu'il se promenait, dans une main, vous savez, avec une carte de crédit. Vous savez, M. le Président, je l'ai vu à la télévision. Il avait sa carte. Mais, moi, j'ai une Visa Desjardins, là; lui, ça devait être une American Express, j'imagine. Moi, j'ai une Visa Desjardins. Comprenez-vous, M. le Président, il se promenait...

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Gendron): Oui, je ne dis pas que c'est antiparlementaire, mais c'est évident qu'il y a un danger, là, de prêter des intentions. Alors, tenez-vous-en aux faits puis à vos propos. C'est sûr que n'importe quel opinant est obligé de dire des choses. Alors, il dit des choses, mais il y a une fragilité, là, il y a une fragilité quand on porte des jugements. Alors, faites attention aux propos.

M. Boucher: Peu importe, M. le Président, avec quelle compagnie fait affaire le premier ministre. J'aurais des commentaires qui me viennent, mais je ne les dirai pas évidemment. M. le Président, il se promenait avec sa carte de crédit, là, puis il disait: Jamais! Jamais! Jamais les Québécois ne devront utiliser une carte de crédit pour avoir des services sociaux et de santé. Puis là il brandissait sa carte d'assurance maladie, là, puis il disait: C'est l'un ou l'autre. Pour nous, le choix est clair, c'est celle-là. M. le Président, là, il vient de dire: Ce sont les deux, et celle-là, comme ce sont les plus riches qui peuvent l'utiliser, bien il donne aux riches de la société québécoise l'opportunité d'avoir des services de santé, des services sociaux que d'autres, les plus démunis, ne pourront pas avoir. C'est ça, M. le Président, ce gouvernement, hein, ce gouvernement qui dit une chose et fait le contraire, ce gouvernement qui fait miroiter, par des symboles à la population québécoise, des espoirs et puis qui les tuent par la suite dans son action concrète. C'est ça, ce gouvernement. M. le Président, nous en sommes rendus, au Québec, à la carte de crédit. Imaginez-vous, nous en sommes rendus à la carte de crédit.

M. le Président, autre chose qu'avait promis le Parti libéral en campagne électorale, c'était la garantie d'accès, hein, une garantie d'accès. Le Parti libéral avait promis la garantie d'accès. On se retrouve avec quoi, là? On se retrouve avec une garantie d'accès, M. le Président, pour qui? Une garantie d'accès pour les plus riches de notre société. M. le Président, ce gouvernement et ce ministre ont réussi à conquérir le titre le moins enviable...

Le Vice-Président (M. Gendron): Alors, je vous remercie, M. le député de Johnson, pour votre intervention, mais les interventions sont de 20 minutes, et c'est connu de tous les parlementaires. Donc, il faut fonctionner dans ce cadre-là.

Je suis prêt à entendre le prochain intervenant, toujours sur l'adoption du principe, et je reconnais maintenant M. le député de Berthier. M. le député de Berthier, à vous la parole.

M. Alexandre Bourdeau

M. Bourdeau: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'intervenir aujourd'hui, sur le projet de loi n° 33, et je trouve ça important, M. le Président. Vous le savez, notre formation politique, cette formation-ci, celle du Parti québécois, a comme priorité l'éducation. Ça ne veut pas dire, M. le Président, comme parfois, des fois, les députés d'en face, les ministres laissent entendre, que ce n'est pas vrai que ça fait en sorte que la santé n'est pas un sujet aussi important qu'on doit débattre. Et surtout, dans ce cas-ci, M. le Président, il s'agit d'un enjeu majeur d'avenir, à savoir comment on va articuler le réseau de la santé pour justement donner accès à des soins le plus rapidement possible, à des soins que les citoyens et les citoyennes ont le droit? Que ça parte de la première ligne à la deuxième ligne, à la troisième ligne, M. le Président, nous nous devons de se poser cette question: Comment on va faire pour donner le meilleur service possible?

Le débat, M. le Président, entre le public et le privé, en santé, ça ne date pas d'aujourd'hui, ça date de beaucoup plus longtemps. Je pense qu'un peu partout dans le monde les différentes administrations publiques se sont posé cette question: Comment je pourrais faire pour donner le meilleur service possible? Bien évidemment, différentes hypothèses ont été mises sur la table, dont celui de la participation du privé. Ici, au Québec, le choix par rapport à l'assurance privée duplicative, le choix de ne pas avoir le recours à cette assurance duplicative a été fait depuis longtemps, M. le Président.

Le ministre, supposément pour répondre au rapport... au jugement plutôt Chaoulli, a déposé le projet de loi n° 33. Je pense, M. le Président, vous l'avez bien vu, et mes collègues qui ont passé avant moi vous ont quand même bien démontré que c'est une réponse qui ne va pas dans le sens du jugement Chaoulli. Je pense, M. le Président, pour nos travaux, il est important, M. le Président, que je vous lise un extrait du jugement de la Cour suprême pour mieux vous expliquer pourquoi, aujourd'hui, au nom de mes citoyens et mes citoyennes, je m'oppose à ce projet de loi n° 33.

Dans le jugement de la Cour suprême, à l'extrait du paragraphe 158, M. le Président, on peut lire: «Somme toute, bien qu'elle ? lorsqu'on parle de la prohibition de l'assurance privée ? puisse être constitutionnelle dans des circonstances où les services de santé sont raisonnables tant sur le plan de la qualité que sur celui de l'accès en temps opportun, l'interdiction de souscrire une assurance maladie privée ne l'est pas lorsque le système public n'offre pas des services raisonnables», que ce soit, comme qu'on lit, M. le Président, tant au niveau de la qualité, de la quantité... Je ne pense pas que la qualité ici est remise en cause, mais plutôt sur le côté plus d'accès en temps opportun. En d'autres termes, M. le Président, les délais d'attente raisonnables justifient une interdiction de l'assurance privée duplicative, comme ça a toujours été fait au Québec.

Dans ce contexte, M. le Président, lorsque je regarde le projet de loi n° 33 et le fait que le ministre ouvre la porte à l'assurance privée duplicative, force est de constater, M. le Président, que le ministre, et son gouvernement, abandonne son engagement électoral de donner... et d'éliminer les délais d'attente. M. le Président, je vais revenir, tout à l'heure, là-dessus, sur les promesses du Parti libéral en campagne électorale. Ils avaient promis, M. le Président, et c'est l'image que les Québécois ont retenue, au-delà des détails de cette promesse, ils ont promis que, le lendemain de l'élection du Parti libéral au pouvoir, il n'y aurait plus d'attente au Québec. C'est une promesse formelle que le premier ministre a prise, c'est un contrat, en fin de compte, que le premier ministre actuel a pris avec la population, qu'il renie par ce projet de loi là. Il abandonne parce que bien évidemment sa promesse a été irréalisable, il abandonne son engagement d'éliminer l'attente hors délai médicalement acceptable.

En plus de ça, M. le Président, pour vous expliquer un peu que ce projet de loi là est une volte-face aussi de la position à la fois du ministre, lorsqu'il n'était pas ministre ? et je vous ai expliqué tout à l'heure... Je vais vous lire une partie d'un article... d'un texte plutôt qu'il a fait paraître dans le journal La Presse, avant d'être même candidat du Parti libéral, mais, même en tant que ministre, le ministre a défendu le système public par la voix des procureurs du gouvernement du Québec. Et je vous cite, M. le Président, une partie de ce que des procureurs ont défendu. On peut lire: «La preuve révèle que les ressources existantes, tant chez les médecins que les autres professionnels de la santé (les infirmières et les techniciens notamment) se déplaceraient du régime public vers le régime privé, augmentant ainsi les listes d'attente dans le système public.» Vous voyez, M. le Président, le ministre de la Santé, par la voix des procureurs du gouvernement du Québec, expliquait que, si on laissait la chance au privé d'entrer au niveau du système de santé, on risquait, M. le Président, d'avoir un déplacement de nos ressources vers le privé.

n(16 h 20)n

On connaît la réalité des choses, M. le Président. Je vais vous expliquer un peu la mienne. Chez nous à Lanaudière, on est les pires, ce n'est pas le fun à dire, mais on est 0,8 médecin par 1 000 habitants; c'est le ratio le plus bas, monsieur, au Québec. Et ça, c'est pour la région de Lanaudière au complet. On peut supposer que, pour le nord de Lanaudière, le Centre de santé et de services sociaux du Nord-de-Lanaudière, la situation est encore pire parce qu'étant donné que... Lorsqu'on descend plus vers le sud de la région, il est vrai qu'il y a plus de population, mais il y a un peu plus de proximité avec Montréal, et parfois c'est beaucoup plus facile de trouver des médecins pour une région comme le sud de Lanaudière que pour le nord, le nord lanaudois, qui a des données sociodémographiques, socioéconomiques semblables à des régions qu'on qualifie de régions éloignées.

La réalité, c'est que, dans Lanaudière, il manque entre 40 et 50 médecins, M. le Président. La réalité, c'est qu'il y a quelque chose qu'on n'avait pas prévu dans le nord, c'est 200 naissances qui amènent une pression encore supplémentaire au niveau des médecins, entre autres au niveau de la pédiatrie, dans le nord lanaudois, que le fait d'ouvrir le privé, d'ouvrir la possibilité à ce qu'il y ait un déplacement de ressources du public vers le privé, M. le Président, c'est-à-dire surtout des régions vers les grands centres parce que le privé ira rarement s'installer dans les coins où il y a moins de population, il va aller s'installer dans les coins où il y a plus de population, puis je pense que c'est une hypothèse qui est valable, ça risque, M. le Président, chez nous de faire en sorte qu'il y ait encore moins de services donnés directement aux citoyens et aux citoyennes.

Je parlais, M. le Président, tout à l'heure, de la position du ministre lorsqu'il n'était pas ministre de la Santé. Et je pense que c'est important de le redire et de parler de cette position-là parce que j'espère, M. le Président, une chose: lorsqu'on entre en politique, j'espère qu'on garde les mêmes convictions qu'on avait auparavant.

Vous savez, M. le Président, avant d'être député à l'Assemblée nationale, je faisais de la représentation, j'étais au niveau des fédérations étudiantes. J'ai énormément défendu le dossier de l'éducation sur différents aspects et je suis fier, aujourd'hui, de voir que le Parti québécois a adopté cette position première qu'est l'éducation. Je pense que le travail que j'ai fait avec d'autres collègues ici, députés, qui ont travaillé énormément sur cette question d'éducation là... Je ne pense pas, aujourd'hui, M. le Président, vous dire que j'ai perdu mes convictions que j'avais à la base: que l'éducation devrait être la priorité au Québec.

Mais le ministre, lorsque je regarde le projet de loi, avec l'ouverture qu'il fait au privé, je me demande où ses convictions d'antan sont rendues. Dans un article... Et ce n'est pas un article d'un journaliste, mais c'est vraiment une lettre que le ministre lui-même a écrite, que normalement ce qu'il a écrit, c'est ce qu'il pense. Dans La Presse du jeudi 3 octobre 2002, le ministre parle du mirage adéquiste. Il dit: «Ne commettons pas l'erreur d'affaiblir notre système de santé gratuit et universel au profit de l'entreprise privée.» Il était à cette époque, M. le Président, neurochirurgien, professeur à la Faculté de médecine de l'Université de Sherbrooke et directeur du département de chirurgie au centre hospitalier de l'Université de Sherbrooke.

Dans son texte, on peut lire, M. le Président: «L'ADQ fait la même erreur logique que d'autres avant lui, avec comme résultat prévisible de voir le traitement proposé entraîner le décès du malade: parce que notre système gratuit et universel est en difficulté, la seule solution est d'y introduire les mécanismes du marché. En clair, permettre que les personnes mieux nanties de notre société aient accès de façon prioritaire aux soins, dans un plus grand confort, générant ainsi des profits pour les assureurs et une source de revenu supplémentaire pour ceux qui les traiteront. La récompense prévisible pour cette entorse au principe d'égalité devant la maladie étant la promesse d'une accessibilité augmentée pour le reste de la population et, littéralement, le sauvetage de notre régime [d'assurance] public.» M. le Président, le ministre, en 2002, critiquait exactement le projet de loi qu'il a déposé à l'Assemblée nationale.

Si on continue dans le texte, M. le Président, le ministre parle des deux visions qui sont radicalement différentes, qui sont opposées au niveau de la vision de la société, ce que j'expliquais tout à l'heure, hein? Partout dans le monde, on s'est posé cette question-là: Public versus privé, de la façon qu'on pouvait agencer ça, est-ce que le public était capable de faire un meilleur travail que le privé, etc.? Il parle justement, dans cet article, de cette vision différente de la société.

Il pose des questions qui, je crois, sont justes: «Voulons-nous partager collectivement ou non les risques et les coûts associés à la maladie? Acceptons-nous que le niveau de notre richesse personnelle détermine la rapidité avec laquelle les soins nous seront donnés?» M. le Président, vous comprendrez que ma réponse à la première question, à savoir si on voulait partager collectivement ou non les risques des coûts associés à la maladie, la réponse, dans mon cas et dans ma formation politique, c'est oui. C'est par nos taxes, nos impôts que nous donnons un service collectivement à des gens qui en ont besoin, M. le Président. Et ça, je pense que c'est important de garder cette solidarité à la fois entre les générations et aussi entre les différents citoyens et citoyennes.

L'autre question, qui était au niveau: Est-ce qu'on devrait faire en sorte que le niveau de richesse personnelle détermine le fait qu'on ait accès ou non plus rapidement à des soins?, la réponse, M. le Président, de notre côté, elle est non. Le ministre posait cette question-là en 2002, mais, aujourd'hui, si on regarde encore une fois le projet de loi qui est déposé, il a changé sa vision parce que sa première réponse, le ministre, qu'il nous donne à: Est-ce qu'on veut, de façon collective, partager les risques?, il dit non. Et: Est-ce qu'on accepte que le niveau de richesse personnelle détermine la rapidité des soins?, il dit oui maintenant. J'ai de la difficulté à suivre le ministre qui, une fois qu'il est responsable d'un département de chirurgie, il dit quelque chose et, lorsqu'il arrive en politicien, il change sa vision de la société. Et ça, M. le Président, je ne pense pas qu'on peut accepter ça.

Il dit par la suite: «En clair: Voulons-nous une société basée sur la justice sociale et l'égalité devant la maladie, ou le règne du chacun pour soi?» Le ministre a choisi, par le dépôt de ce projet de loi, le règne du chacun pour soi, M. le Président. Et il est clair, de notre côté, que, non, nous n'accepterons jamais cette décision et que nous allons nous opposer à ce projet de loi. Dans le texte, M. le Président ? et je vais continuer parce que c'est important pour qu'on comprenne que le ministre a complètement changé de façon de voir les choses, de façon de voir la société ? il dit: «Le paiement direct et l'assurance partagent un paradoxe confirmé dans tous les pays où ces régimes sont disponibles: la population économiquement défavorisée, celle qui a le plus besoin des services, devient le groupe le moins susceptible de recevoir des soins. [...]Toujours chez nos voisins du Sud, d'où proviendront nos assureurs éventuels, 26 % des familles américaines n'ont pas pu suivre un traitement médicalement requis au cours de la dernière année en raison du coût prohibitif des soins. Pour la même raison, 250 000 personnes abandonnent, chaque année, leurs assurances, et plus de 40 millions d'Américains n'ont aucune protection. Ces chiffres sont bien connus, mais ils méritent qu'on les répète.» Tiens, M. le Président, le ministre avait raison, et je pense que c'est pour ça aussi que je le répète aujourd'hui. Ça a le mérite d'être répété, M. le Président. Encore une fois, si on regarde le projet de loi versus ce que le ministre disait en 2002, il fait complètement le contraire de ce qu'il disait en 2002, de ce qu'il croyait en 2002.

On continue dans le texte, M. le Président: «Or, personne n'a jamais pu démontrer un quelconque effet d'une telle solution sur l'accessibilité aux soins assurés par le régime public. Au contraire, la demande de soins payés par l'État et les listes d'attente ne sont pas modifiées de façon significative par un tel arrangement.» Pourquoi d'abord déposer un projet de loi qui fait exactement le contraire de ce que le ministre disait en 2002? Pourquoi déposer un projet de loi qui n'aura aucun, au mieux, aucun effet puis, au pire, aura des effets désastreux sur notre système de santé? Le ministre disait même que ça pourrait être un régime... pas un régime, mais des soins qui tueraient le malade, M. le Président. Pourquoi faire ça? J'espère que le ministre pourra nous répondre.

On continue dans le texte en disant que: «Penser que l'introduction d'un régime privé parallèle ait un quelconque effet sur [les] facteurs relève de la pensée magique. [...]Au contraire, le fait d'attirer cette main-d'oeuvre spécialisée vers les verts pâturages du privé ne fera qu'accentuer le [problème]. [...]Le nécessaire allégement des listes d'attente peut être réalisé à l'intérieur de notre système public.» Pourquoi, M. le Président, déposer le projet de loi n° 33 si notre système public peut être une réponse à cette problématique qui, convenons-le, M. le Président, est inacceptable? Mais pourquoi déposer un projet de loi n° 33 qui ouvre la brèche au privé et risquer justement de nuire à ces délais d'attente qui sont inacceptables?

Et il termine en disant, et ça, je pense c'est la meilleure partie du texte: «Ne commettons pas l'erreur d'affaiblir notre système de santé gratuit et universel au profit de l'entreprise privée qui s'est avérée incapable, partout où on lui en a donné l'occasion, d'offrir des services aussi accessibles et peu coûteux qu'un régime basé sur la taxation universelle. Les obstacles à l'horizon sont connus et constituent en fait une raison supplémentaire de nous protéger collectivement contre la maladie. Notre système public doit au contraire être renforcé, mieux financé, mieux intégré et véritablement décentralisé. Si une place doit être aménagée à l'entreprise privée, ce sera dans tous les secteurs qui ne sont pas directement impliqués dans la prestation de soins.»

n(16 h 30)n

Pourquoi, M. le Président, aujourd'hui, le ministre tente de nous faire avaler une couleuvre en nous disant que le projet de loi n° 33 va régler les problématiques quand lui-même, en 2002, disait complètement le contraire, M. le Président? Peut-être parce que justement le ministre répond à une commande du bureau du premier ministre. Parce que, M. le Président, c'est le fun des fois de revenir dans l'histoire, de voir qu'est-ce qui s'est passé avant. Vous étiez présent, vous, à l'Assemblée nationale, lorsqu'on a eu ces discussions-là. Je n'ai pas eu la chance d'être présent, mais j'ai fait un retour historique, toujours important, sur qu'est-ce qui s'est passé, pour ne pas répéter les mêmes erreurs. Mais, si on se rappelle, M. le Président, qu'en 1986 il y a un groupe de travail qui était présidé par le ministre, dans le temps, M. Paul Gobeil, qui recommandait la privatisation de certains centres hospitaliers, l'imposition d'un ticket modérateur et des approches très favorables à un système privé parallèle au système public de santé. Puis d'ailleurs, M. le Président, un des quatre signataires de ce rapport, communément appelé le rapport Gobeil, est actuellement le ministre de la Justice et Procureur général du Québec. C'est-à-dire, M. le Président, qu'il reste encore énormément de gens, à l'intérieur de ce gouvernement-là, qui étaient présents en 1986, qui étaient soit à l'Assemblée nationale ou qui gravitaient alentour du Parti libéral, qui étaient d'accord avec cette position-là qui était défendue en 1986. Mais il y a une personne au moins qui avait un tant soit peu de vision, qui était le premier ministre de l'époque, M. Bourassa, qui s'était opposé, M. le Président, à faire en sorte que ces recommandations voient le jour.

Mais on revient, M. le Président, 20 ans plus tard, avec la même affaire, mais ce coup-là on a un premier ministre pas de vision parce qu'en fin de compte il fait en sorte qu'on dépose un projet de loi à l'Assemblée nationale, le projet de loi n° 33, qui ouvrira la porte au privé, comme le ministre de l'époque, M. Gobeil, avait demandé.

J'aimerais ça, M. le Président, vous expliquer un peu aussi la réalité, comme je l'ai dit tout à l'heure, du nord lanaudois. Je vais vous expliquer qu'est-ce qu'on a besoin chez nous. Chez nous, ce n'est pas du privé dans la santé qu'on a besoin, c'est une meilleure répartition des effectifs médicaux. On travaille actuellement avec l'agence et le Centre de santé et de services sociaux du nord lanaudois à essayer d'attirer le plus de médecins possible dans le nord. On aura des propositions à faire prochainement au ministre justement pour améliorer la vision qu'ont les médecins de la région de Lanaudière pour tenter de les accueillir chez nous.

Premièrement, il faudrait que le ministre de la Santé arrête de renier l'évidence et qu'il inscrive sur le site du ministère de la Santé que, oui, la région de Lanaudière est en déficit de médecins, ce qui n'est pas fait à l'heure actuellement, M. le Président. Toutes les régions qui sont réellement en grand déficit de médecins sont sur le site Internet, sauf la région de Lanaudière. Peut-être parce que la région est un petit peu trop bleue pour lui. Mais je lui rappellerai que, lorsqu'on est ministre, lorsqu'on est député à l'Assemblée nationale, on doit travailler pour l'intérêt collectif et non pour des intérêts particuliers, et que, dans ce cas-ci, ne pas mettre la région de Lanaudière sur la mappe pour interpeller les médecins en disant que justement on a un manque criant ? je vous le rappelle, 0,8 médecin par 1 000 habitants ? c'est, M. le Président, inacceptable. Mais, au-delà du site Internet, il y aura des choses qui devront être faites par le ministre, et j'espère que le ministre répondra positivement à nos demandes. J'aurai la chance, en commission parlementaire, de lui en parler.

Mais j'aimerais ça, M. le Président, vous expliquer une autre réalité qu'on a du nord lanaudois. Parce que, quand on parle du privé, on parle automatiquement du financement. Le ministre de la Santé, en campagne électorale, avec le premier ministre, est venu à Berthier et à Joliette annoncer qu'il allait nous donner 87 millions ? à la région de Lanaudière ? pour le financement, pour régler le problème d'équité. Nous, lorsqu'on était au pouvoir, en 2002, mon collègue le député de Rousseau avait mis en place un plan qui ciblait le problème d'équité à 32 millions sur trois ans. En 2002-2003, Lanaudière a reçu 5,1 millions, et, si on avait réussi à être réélus, à continuer ce plan, on aurait à terme, trois ans plus tard, eu ce 32 millions là. Mais, dans le but d'essayer de gagner un comté dans Lanaudière, on nous avait promis 87 millions. Dans la réalité, M. le Président, le lendemain de l'élection...

Parce que normalement le ministre de la Santé nous avait dit: Lanaudière a un besoin criant de ressources financières et techniques, et nous allons nous assurer que le sous-financement soit corrigé dès les premiers mois du prochain gouvernement libéral. Quelle a été la réalité, M. le Président? 2003-2004, on nous promettait 6 millions sur le 87 qu'on était supposés avoir; 2004-2005, on nous disait que l'équité, en fin de compte, c'était rendu à 17 millions. On est passés de 87 millions à 6 millions à 17 millions. En 2005-2006, on disait: Ce n'est plus 17 millions, c'est 12 millions. La réalité, M. le Président, c'est qu'à l'heure d'aujourd'hui on a eu 563 824 $. J'espère que, les 86,5 autres millions, j'espère que le chèque est dans la malle parce que les élections s'en viennent. C'est peut-être ça que le ministre attend pour donner ce qui nous est dû, M. le Président. Mais, à l'heure actuelle, force est de constater que...

Le Vice-Président (M. Cusano): Excusez, M. le député de Berthier, votre temps étant écoulé, alors je vous remercie de votre intervention. Je reconnais maintenant Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: Alors, je vous remercie, M. le Président. Alors, avant de commencer, M. le Président, je demanderais le quorum, parce que je vois que... J'ai des choses importantes et intéressantes à dire, je suis convaincue qu'il y a des collègues qui vont être intéressés à écouter, alors...

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, vous demandez qu'on constate s'il y a quorum. Alors, qu'on appelle les députés.

n(16 h 35 ? 16 h 37)n

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, Mme la députée de Marie-Victorin, vous pouvez poursuivre votre intervention.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Je vous remercie beaucoup, M. le Président. Alors, M. le Président, vous savez que, lorsque l'on parle de la santé, c'est un dossier qui est tout de même un dossier très impliquant pour l'ensemble des parlementaires. La preuve, j'en ai pour, c'est: toutes les élections pratiquement, au cours des 20 dernières années, se sont faites sur le dos en fait de notre système hospitalier. J'ai moi-même étudié en administration hospitalière, pour vous dire que, tout ce que j'ai appris il y a au moins 25 ans, je peux dire qu'aujourd'hui on n'a pas avancé tant que ça, M. le Président. Ce sont toujours les mêmes discussions qui reviennent, on remet toujours en question les mêmes façons de fonctionner, et mon Dieu! que je n'en reviens pas qu'on n'ait pas encore trouvé certaines solutions.

Il y a 25 ans, on disait que le vieillissement de la population serait à nos portes, il faudrait le planifier d'avance, il faudrait vérifier l'ensemble du mécanisme, qu'il y aurait plus besoin de services, il faudrait former plus de gens. Et nous voilà confrontés à la situation dans un genre de chaos total, puisqu'on s'aperçoit que, d'année en année, c'est toujours aussi compliqué et aussi difficile de recevoir en fait des soins de santé d'une part parce que je pense qu'on en a fait un enjeu électoral, ce qui n'aurait pas dû être le cas, en fait. Un système de santé ne devrait jamais faire l'objet d'un enjeu électoral, d'une part. On aurait dû s'asseoir convenablement, regarder l'évolution de notre système de santé, apporter, selon en fait les différentes problématiques, des solutions qui permettaient d'envisager l'avenir avec une qualité et à moindre coût, M. le Président.

Malheureusement, ça ne s'est pas passé de cette façon-là. On en a fait un enjeu électoral et finalement on a fait aussi accroire à la population, le fait qu'on en faisait un enjeu électoral, qu'on pouvait s'offrir des soins de santé quasiment avec une baguette magique, en disant: Écoutez, vous avez besoin du système de santé, l'autre gouvernement n'était pas bon, mais, nous, on va être meilleurs et on va vous donner ce qui vous manque en termes de soins curatifs de santé. Et malheureusement la population, elle était habituée à cette surenchère en fait que l'on fait durant nos campagnes électorales, ce qui fait que la population, quand on arrive puis on leur dit: Écoutez, on ne peut plus continuer comme on est là, il faut envisager de nouvelles solutions, de nouvelles façons de faire, la population nous croit plus ou moins, ne nous croit pratiquement pas, parce qu'on a toujours trouvé moyen, d'une façon ou d'une autre, de faire des promesses et de leur faire miroiter que le meilleur était à venir ou en tout cas il s'agissait simplement de changer de gouvernement pour apporter les meilleures solutions.

n(16 h 40)n

Et, aujourd'hui, bien, la population se sent un petit peu piégée dans cette ronde-là d'alternance d'enjeux électoraux par rapport au système de santé. Et ça, je trouve ça excessivement malheureux, parce que je pense qu'il est important, il est prioritaire qu'on regarde correctement l'évolution, les coûts de notre système de santé pour y apporter des correctifs non pas à court terme, non pas le temps d'une campagne électorale, mais à long terme, M. le Président. Et c'est pour l'ensemble et le mieux-être de l'ensemble de nos concitoyens, concitoyennes parce que dans le fond c'est des coûts astronomiques que les coûts de santé, on le sait, ça augmente, et il y a aussi la consommation des médicaments aussi qui augmente en même temps qu'on augmente les coûts de santé. Les nouvelles technologies en fait dans le domaine médical, toute la biomédicale aussi fait qu'en sorte que ça prend des proportions exponentielles.

Alors, qu'est-ce qu'on trouve comme solution, à l'heure actuelle? On avait un ministre qui, en pleine campagne électorale, nous disait: Écoutez, j'ai pratiquement toutes les solutions aux problèmes de la population. Avec nous autres, le lendemain, on va s'asseoir, comme gouvernement... Puis il n'y aurait plus de problème de listes d'attente, il n'y aurait plus de problème, en fin de compte les problèmes de cataracte, les problèmes des hanches, les problèmes en fait qui étaient litigieux au moment où la campagne électorale s'est déclenchée. Et le gouvernement disait: Écoutez, si, nous, on est au gouvernement, vous allez voir, il n'y aura plus de liste d'attente; demain matin ou presque, les gens, vous allez vous faire opérer.

Et je le sais, je faisais du porte-à-porte, et les gens me disaient: Je vote libéral, à ce moment-là, parce que, on me disait, moi, je suis sur une liste d'attente pour un genou, puis là ça fait tellement longtemps que j'attends que, là, là, moi, je prends le risque de changer de gouvernement parce que je vais me faire opérer. Bien, ces mêmes personnes là, ça leur a pris beaucoup de temps et encore une fois sont sur des listes d'attente, puis ce n'est pas nécessairement... leur réalité, ce n'est pas celle qu'ils attendaient.

Alors, on s'attendait qu'avec le gouvernement il pourrait y avoir des changements puisqu'on a mis un médecin à la tête de ce ministère-là, qui avait une connaissance du système autant d'une façon intrinsèque dans sa façon de fonctionner que d'une façon en fait en relation avec les citoyens. Et, M. le Président, je suis excessivement déçue de voir que, comme on n'était pas capables de juguler en fait cette problématique-là, de trouver des réponses à ces problèmes, on a essayé de trouver un prétexte pour faire en sorte qu'on pourrait revenir de l'arrière par rapport à tous les engagements ou par rapport à toutes les promesses qu'on avait mis de l'avant. Et quel est ce prétexte ou quel est...

C'est arrivé, il arrive, vous savez, en politique... C'est toujours ce qu'on ne s'attend pas qui fait toute la différence. Dans le fond, on fait des belles planifications, mais qu'est-ce qui chambarde l'ensemble de notre planification? C'est toujours l'élément qui fait qu'en sorte que personne ne pouvait prévoir. Et on a eu en fait Chaoulli, le médecin, le Dr Chaoulli qui, lui, prétendait que les gens devaient avoir des droits de santé et que finalement les délais d'attente étaient déraisonnables. Il est parti, il a fait campagne, il a fait avancer sa cause et il est monté jusqu'à la Cour suprême. Puis on s'est prononcé, en fait il y a eu un jugement. Et le jugement de la Cour suprême disait en fait... Et je vais le dire, c'était qu'on disait que ce qui est grave, c'est cette idée que l'arrêt de la Cour suprême dans l'affaire Chaoulli obligerait à introduire l'assurance privée duplicative. Ce que dit clairement le juge, c'est qu'en présence de délais d'attente raisonnables l'interdiction de l'assurance privée duplicative est valide.

Alors, on s'attendait à, si on ouvre une porte vers une assurance duplicative, c'est-à-dire une assurance privée qui permettrait d'avoir accès plus rapidement à des services de santé... Bien, en fait, si les temps d'attente étaient déraisonnables, on pouvait, dans ce cas-ci, se prévaloir d'une assurance privée pour avoir accès à des services plus rapides. Mais, M. le Président, dans la loi qui nous est proposée, on ne sait pas c'est quoi, un délai raisonnable. C'est quoi, un délai qui dépasse l'entendement, pour une personne? Vous savez, dans certains cas, ça va bien; dans d'autres cas, ça va mal. Une journée, tu penses que tu es super bien... Il y a même des gens qui vont dans des urgences, et puis on pense que c'est un cas bénin, puis on arrive, puis c'est épouvantable, c'est grave, puis ils peuvent mourir dans les heures qui suivent, en fin de compte, leur admission à l'hôpital. Donc, effectivement, il faudrait bien avoir une certaine définition pour avoir des balises, pour savoir dans quel contexte...

Mais on se souviendra aussi, M. le Président, que le gouvernement s'attendait à recevoir beaucoup plus d'argent qu'il devait en recevoir du fédéral et que bon, en fait, ils sont obligés de composer avec ce qu'on leur donne, avec l'argent qu'on envoie dans le système de redistribution entre le fédéral et le provincial. Alors, M. le Président, c'est sûr qu'on ne peut pas offrir toutes les promesses que ce gouvernement-là a tenues durant les campagnes électorales de l'époque, en 2003, c'est inévitable. Mais on essaie toujours de trouver c'est quoi, la brèche qui fait qu'en sorte on ne perdra pas trop la face puis que finalement on va pouvoir jouer avec certains concepts, avec certaines lois ou en tout cas certaines opportunités et ce qui nous permettrait finalement de faire en sorte qu'on donne l'illusion aux gens que, nous, on s'occupe bien d'eux, de leur santé, mais qu'en réalité finalement c'est autre chose.

Ça va leur coûter un bras, pour ceux qui vont être capables de se payer des assurances privées. Et notamment, M. le Président, en fin de compte, ce qu'il est important de dire, c'est que, dans cette assurance privée là pour les temps déraisonnables, c'est surtout en fait dans les domaines qui touchent justement... pour les chirurgies de la hanche, du genou et aussi de la cataracte. Alors, vous savez très bien que ça touche particulièrement, ce genre de problèmes, des personnes plutôt âgées, du troisième âge, en général ? ça peut arriver à d'autres, plus jeunes, mais en général. Et, quand on reconnaît actuellement, en fait, la condition économique des gens en fait de cet âge-là, on sait très bien que la moyenne de ces gens-là...

On a eu, la semaine dernière, à la télévision... je ne suis pas sûre si c'est le programme Enjeux, ou autre, mais on démontrait que les personnes avaient moins de 20 000 $, la majorité des gens de plus de 60 ans gagnaient à peine, à peine 20 000 $. C'était particulièrement 80 % des gens. Ils se situaient entre 20 000 $ et 15 000 $. Alors, ces gens-là qui ont des problèmes de genou, de cataracte ou... en fait, ce n'est pas ces gens-là qui vont utiliser l'assurance privée et ce n'est pas dans cette catégorie de patients là qu'on va accélérer les listes d'attente, M. le Président, bien au contraire.

Ça, ce n'est qu'un élément en fait de mon indignation par rapport au projet de loi n° 33 parce qu'en fait on ne vise pas tout à fait les bonnes choses, on ne vise pas tout à fait les bonnes choses, et d'autant plus que c'était une promesse formelle, au moment de la campagne électorale, de ne pas toucher à l'universalité des soins de santé. C'était une promesse formelle. C'était, en fin de compte, une des choses les plus importantes sur lesquelles le parti, en fait, à ce moment-là, le Parti libéral clamait haut et fort pendant leur campagne électorale. Et je vais vous donner en fait une des phrases qui revenait dans un des communiqués qu'ils avaient fait le 27 février 2003. Là, on disait: «Nous voulons donner aux Québécois et aux Québécoises un réseau pleinement intégré de services de santé et de services sociaux traitant avec un souci égal la santé et le mieux-être de l'individu. Attendre, quand on a besoin d'aide, n'est pas plus acceptable que d'attendre quand on est malade.»

Alors, M. le Président, on s'aperçoit bien que pour... À ce moment-là, je ne sais pas pourquoi, en cours de route, au moment où on arrive avec ce problème-là du Dr Chaoulli, qui voulait vraiment faire passer les délais d'attente déraisonnables pour obtenir une chirurgie, ça a été l'occasion pour introduire la loi n° 33. Et, dans cette loi n° 33 là, c'est d'introduire, en fin de compte, la possibilité d'avoir des contrats d'assurance privée duplicative.

Donc, qu'est-ce que c'est, l'assurance privée duplicative, M. le Président? En fait, c'est une assurance qui ne sera permise que pour les chirurgies de la hanche, du genou, de la cataracte pratiquées uniquement par des médecins non partisans au régime public d'assurance maladie, dans un centre médical spécialisé.

n(16 h 50)n

Donc, parlons-en, des médecins spécialisés, M. le Président, au niveau du Québec. On a de la misère à fournir les hôpitaux que nous avons à l'heure actuelle. Il manque, dans certains hôpitaux, des anesthésistes, il manque des neurochirurgiens, il manque des cardiologues, il manque en fait énormément des gens qualifiés et des gens spécialisés. Donc, ceux qui sont, à l'heure actuelle, déjà engagés dans un système public, dans nos hôpitaux, et qui donnent de très bons soins, vous savez, c'est tellement compliqué, à l'heure actuelle, pour ces chirurgiens, non pas d'opérer, parce que ça, je pense qu'ils ont la capacité de le faire, mais parce qu'il leur manque des lits, parce qu'il leur manque du temps opératoire, parce qu'il n'y a pas nécessairement tout le personnel nécessaire pour faire face à tout ce bloc opératoire qui nécessite en fait leur activité et les soins de santé. Ils ne peuvent pas opérer, ils ne peuvent pas. Alors, ce sont des gens qui ont fait des études, souvent, des études, cinq ans d'années de médecine plus des fois quatre ans de spécialité, puis certains ont des fellows. Alors, vous considérez, ils ont 10 ans peut-être de scolarité, et là on leur dit: Écoutez, vous pouvez opérer mais à certaines conditions, puis finalement c'est surtout en fait pas trop souvent parce que, là, là, on ne peut pas remplir les conditions qui sont exigées, en fin de compte, pour faire ça d'une façon très sécuritaire.

Donc, M. le Président, on a un sérieux problème. Puis là, au lieu de régler ce problème-là sur les effectifs médicaux, sur la formation professionnelle des infirmières... Là, on a des infirmières, superinfirmières. On en a formé 17; en Ontario, ils en ont formé 81. Alors, on est loin du compte pour répondre aux besoins de notre population, à l'heure actuelle. Puis on y va à la graine, comme ça, de même. Puis là, au lieu de se concentrer sur la problématique actuelle et de regarder exactement ce qu'il faut faire à l'heure actuelle, bien non, bien non, on dit: Ah non! on va changer le système, on va faire du privé. Mais là, écoutez, ça ne règle rien, là, cette façon de vouloir faire les choses, on ne règle absolument, mais absolument rien dans les listes d'attente puis dans les temps d'attente. Bien sûr, on va les gérer. On va savoir qu'à tel hôpital il y a tant de cas puis il y a tant de temps d'attente. Tu sais, on pourrait dire à une personne, peut-être: Vous restez à Montréal, vous avez un problème de genou, vous avez un certaine âge, mais ici, à Montréal, vous ne pouvez pas vous faire opérer, vous irez peut-être à Drummondville, peut-être, vous pourrez aller à Trois-Rivières vous faire opérer. Et, bon, hein, c'est un peu, en fin de compte, dans des cliniques privées.

Mais, M. le Président, il va nous manquer, à un moment donné, des effectifs pour donner des services autant dans nos hôpitaux publics que dans les hôpitaux privés. On va les prendre où, les effectifs? Comment on va répondre aux problèmes qui perdurent depuis des années et des années dans nos régions? On n'a pas de réponse à ça. Ce qu'on nous dit ? la trouvaille du siècle: On va aller vers le privé. Bien, voyons donc, le privé, là, ça n'existe pas par enchantement, ce n'est pas parce qu'on dit que c'est privé que tout est mieux, M. le Président. Ce n'est pas vrai. Il faut qu'on règle actuellement notre système de santé dans sa façon, dans son ensemble, avec toutes les contraintes qu'on connaît et aussi avec les problématiques que l'on connaît: le vieillissement de population, avec une augmentation des coûts des médicaments et puis avec les nouvelles technologies.

Puis il faudrait peut-être aussi être cohérent. Parce qu'en fait la meilleure façon de donner des soins de santé, c'est de répondre correctement aux soins de première ligne. Et actuellement est-ce qu'on a corrigé les problèmes des soins de première ligne? Est-ce qu'on a corrigé la possibilité d'avoir un médecin de famille? M. le Président, essayez d'avoir un médecin de famille si vous n'en avez pas ou si vous n'avez pas une référence. Il y a des gens qui attendent, des semaines, et des semaines, et des semaines pour avoir un médecin de famille. Puis, pour avoir des soins, il faut que tu sois référé par un médecin de famille, à moins de passer par l'urgence. Donc, on ne règle pas nos problèmes, parce qu'on en revient toujours à l'urgence, on aboutit toujours au même endroit, et là ça bloque de partout. Puis là on va dire: Bien là, vous arrivez à l'urgence, bien on va faire un système privé parce que finalement on n'est capables de regarder... de gérer l'ensemble de notre problématique au niveau des systèmes de santé.

Ça n'a pas d'allure de gouverner de cette façon-là, M. le Président. Et, moi, j'estime, à l'heure actuelle, que, peu importe, ce que nous devons faire à l'heure actuelle... Bien sûr, on a fait des ententes avec des cliniques privées associées avec des hôpitaux, où on pouvait justement répondre à certains besoins des hôpitaux mais toujours dans un système d'universalité des soins, pas en disant: Bien, ceux qui peuvent payer peuvent passer plus vite, et les autres... Oui, il y a des brèches dans notre système, oui, au niveau des laboratoires, des rayons X, c'est plus facile de passer si tu as des assurances, on en a, oui, mais c'est toujours dans un contexte, en fin de compte, où on ne touche pas à l'universalité des soins quand ça devient des soins curatifs.

Et, moi, ça, ce que je vous dis, à l'heure actuelle, c'est excessivement... en tout cas, ça regarde très mal pour l'avenir. C'est complètement changer la philosophie du Parti libéral, en fait. Parce que même Robert Bourassa à l'époque, à un moment donné où un certain ministre qui s'appelait Paul Gobeil, qui, pour lui, tout, il fallait privatiser... C'était le mot, hein, le mot magique, le mot d'or, la clé d'or de tous les problèmes, bien on disait toujours: Bien, oui, on va privatiser. Je vous le dis, même Robert Bourassa de l'époque n'était pas capable d'accepter une telle orientation pour son propre parti. Et là on vient nous dire que c'est la solution qu'on vient de trouver pour régler les problèmes, l'ensemble des problèmes de santé des Québécois et des Québécoises, et qu'on va donner une meilleure qualité parce que... plus rapide aussi, plus facile d'accès parce qu'on va développer un système privé parallèle au système que nous connaissons.

Moi, M. le Président, je vous le dis, moi, chez nous, notamment à l'Hôpital Charles-LeMoyne, je connais énormément de médecins, je participe avec toutes leurs activités, et, je peux vous dire, le regret qu'ont les médecins à l'heure actuelle, c'est qu'ils ne sont pas entendus de la part du ministre à l'heure actuelle et que ce serait tout à son avantage d'écouter l'ensemble de la population et aussi les médecins concernés.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci, Mme la députée de Marie-Victorin. Je suis prêt à reconnaître la prochaine intervenante, Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, M. le Président. Est-ce que nous avons toujours quorum?

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, vous nous demandez de...

Alors, qu'on appelle les députés.

n(16 h 57 ? 16 h 59)n

Le Vice-Président (M. Cusano): À l'ordre, s'il vous plaît! Alors, Mme la députée de Deux-Montagnes, vous pouvez poursuivre votre intervention.

Mme Hélène Robert

Mme Robert: Merci, M. le Président. J'ai le privilège de représenter la population de la circonscription de Deux-Montagnes depuis maintenant 12 ans. La santé a toujours été au coeur de mon action et de mes interventions, aussi bien sur le terrain qu'au sein de cette Assemblée. Il faut savoir que la circonscription de Deux-Montagnes a l'avantage de compter sur son territoire le Centre hospitalier Saint-Eustache, le CLSC Jean-Olivier-Chenier et de nombreuses cliniques et polycliniques médicales.

n(17 heures)n

Permettez que je la situe brièvement dans son contexte socioéconomique. Elle appartient à la grande région des Laurentides, où l'on dénombre pas moins de huit MRC. On y note des différences significatives, telles une population relativement jeune mais qui vieillit vite, une donne socioéconomique très diversifiée selon les territoires et avec un écart de financement démontré. Son dénominateur commun réside toutefois dans la très nette progression démographique, la plus forte en fait du Québec, avec un taux de croissance de 28,8 %. Actuellement, la population de la région des Laurentides est évaluée à 512 539 habitants résidant sur un territoire de quelque 21 554 km².

Dans le cas qui nous occupe, la circonscription de Deux-Montagnes abrite les villes de Saint-Eustache, 43 000 de population, et de Deux-Montagnes, qui compte environ 18 000 habitants. Fait désarmant, la région connaît un haut taux de décrochage et une faible diplomation. En matière de diverses données de santé, nous noterons avec une certaine satisfaction une baisse sensible du tabagisme et une certaine stabilité en regard de l'obésité.

C'est au nom de la population de Deux-Montagnes en particulier que je m'interroge sérieusement sur les tenants et les aboutissants de ce projet de loi n° 33. Confinant au financement privé, hypothéquée par de lourdes structures et ouvrant sur l'arbitraire, cette réponse obligée au jugement Chaoulli inquiète à plus d'un titre. Le projet de loi n° 33 se veut en effet une réponse à la décision de la Cour suprême du Canada rendue le 9 juin 2005 dans l'affaire Chaoulli. En vertu de cette décision, la Cour suprême stipulait que le Québec n'a pas le droit d'interdire à ses citoyens de contracter une assurance privée pour les services médicaux et hospitaliers, indiquant que l'interdiction de souscrire une telle assurance brimait le droit d'obtenir des soins dans la mesure où de longues listes d'attente peuvent porter atteinte à la santé, voire la vie.

En appuyant le principe de ce projet de loi, nous acceptons que l'Assemblée nationale soit subordonnée à cette décision de la Cour suprême, et ce, pourtant dans un champ de compétence exclusive au Québec. De l'avis de plusieurs, il n'est ni plus ni moins qu'une imposture politique qui, derrière des apparences rassurantes, introduit malheureusement un système de santé très lourd. Il vient modifier en profondeur certains principes de base de notre système de santé qui permettaient jusqu'à maintenant d'appliquer le maximum de ressources humaines et financières à l'ensemble de la population.

Je noterai toutefois un élément positif à la décharge du projet de loi, c'est-à-dire une gestion centralisée des listes d'attente pour les services spécialisés et surspécialisés, fait très intéressant et important.

Pour ma part, j'estime que le projet de loi n° 33 ne vient en rien régler le véritable problème qui est celui de la médecine de première ligne. Et je donnerai pour simple exemple que ni les soins à domicile ni le dossier des médecins de famille n'y trouvent quelque trace de solution. Pour peu qu'il y ait trois groupes de médecine familiale déjà implantés dans les Laurentides, aucun n'est annoncé pour chez nous. Il n'est pas non plus question de la délicate équité interrégionale.

Attachons-nous à quelques éléments de ce projet de loi qui prévoit notamment les éléments suivants: L'assurance privée duplicative. Elle ne sera permise que pour les chirurgies de la hanche, du genou et de la cataracte pratiquées uniquement par des médecins non participants au régime public d'assurance maladie dans un centre médical spécialisé. Mais on sait qu'on pourrait rajouter à cette liste simplement par règlement et non en revenant devant la population.

En deuxième, deux types de centres médicaux spécialisés ou autrement appelés hôpitaux privés à but lucratif. Et l'on parle alors, selon les termes mêmes de Mme Prémont, Mme Prémont, de McGill, de délégation contractuelle de services publics à des sociétés à capital privé. Ces centres médicaux spécialisés comprennent d'abord un centre médical spécialisé avec médecins non participants et, en b, avec médecins participants. Ces centres pourraient faire l'objet d'une couverture d'assurance par cette loi n° 33 là. Et cette couverture d'assurance pourrait être permise pour le volet médical et le volet hébergement.

Troisièmement, des cliniques médicales associées. Elles peuvent être un cabinet privé de professionnels, un laboratoire médical ou un centre médical spécialisé qui devront avoir signé une entente avec un établissement hospitalier afin d'y faire dispenser certains services.

En quatrième, mécanisme central de gestion de la liste d'attente. Il comprendra des règles à respecter pour inscrire un usager sur une liste d'attente de même que la transmission de la date prévue à laquelle l'usager pourra obtenir ces services. Alors, voilà, cela est un bon point en faveur de la loi.

Alors, telles étant les intentions de ce projet de loi, considérons maintenant les enjeux que cela soulève: les services spécialisés et surspécialisés. En réalité, loin d'accorder une garantie d'accès aux services de santé, ce projet de loi ne prévoit qu'un mécanisme de gestion de l'attente hors délai médicalement acceptable. De plus, il n'améliore en rien l'accès à la première ligne, notamment dans le cas des médecins de famille, alors qu'il est souvent, voire absolument nécessaire de passer par la première ligne pour avoir accès à ces services de santé dits spécialisés et surspécialisés. En tout cas, pour l'avoir vécu personnellement dernièrement, chez nous, si on veut simplement voir un médecin pour avoir un examen en neurologie, c'est minimum six mois avant qu'on puisse leur parler. Alors, on n'est même pas encore entrés dans le système.

Alors, l'assurance privée et duplicative, chirurgie de la hanche, du genou et de la cataracte ou d'autres traitements déterminés par règlement, nous y voyons, c'est certain, tous une brèche faisant craindre qu'un gouvernement puisse assujettir toute la chirurgie mineure à l'assurance privée duplicative, une brèche dans laquelle va littéralement s'installer un système de santé à deux vitesses au Québec. Or, le financement de ces mêmes chirurgies sera pris à même le budget des établissements, et, dans le contexte actuel de la pénurie de main-d'oeuvre, on peut prévoir un déplacement vers le privé.

Alors, je voudrais maintenant vous proposer quelques éléments de réflexion sur la situation de la santé dans la région des Laurentides et plus particulièrement dans la circonscription de Deux-Montagnes. Alors, commençons par le dossier de l'agrandissement du Centre hospitalier Saint-Eustache. Il n'avance qu'à pas de tortue malgré les nombreuses démarches que j'ai faites personnellement depuis des années, auxquelles s'ajoute la toute récente intervention de l'ancien président du conseil d'administration de l'établissement, M. Jules Théorêt.

n(17 h 10)n

Dans un communiqué que j'ai émis le 28 août dernier relativement à l'annonce de l'octroi d'une somme de 2,2 millions de dollars, je déclarais: «Il s'agit d'une annonce trompe-l'oeil qui se situe bien en deçà des besoins réels de notre hôpital.» En effet, on venait d'annoncer une salle d'opération, mais, dans les conditions actuelles où l'agrandissement est attendu depuis de nombreuses années, cette annonce qui, en soi, s'accueillait... mais c'était bien, bien, bien en deçà de ce à quoi la population de la région doit s'attendre. Alors, aux côtés de M. Théorêt, je dénonce vivement ici les délais de réalisation de l'agrandissement de notre hôpital, dont le processus remonte à 1998.

À l'échelle du Québec, selon certaines données de l'Institut canadien d'information sur la santé, on dénote que, malgré les milliards injectés, l'attente est toujours aussi longue dans le système médical. Rien n'indique en effet que les sommes consacrées à la santé ces dernières années ont effectivement permis d'abréger l'attente pour les patients. Ainsi, par exemple, en déficience intellectuelle, l'attente pour un premier service est passée de 1 559 à 2 153 personnes, soit une augmentation de 594 personnes. D'autre part, le nombre de jours d'attente pour un premier service est de 461 jours, soit une croissance moyenne de 12,52 %. Reconnaissons toutefois une nette augmentation de la clientèle pour ces mêmes services, d'où justement urgence d'agir.

Au chapitre de l'absence de services, on notait récemment que la région des Laurentides n'offrait aucun service en déficience auditive pour la clientèle adulte et aînée. En déficience de langage, aucun service n'est consenti pour les enfants de plus de six ans dans le sud des Laurentides et pour les plus de 13 ans dans le centre des Laurentides, tandis que, pour les adultes et aînés, il n'y a ni service de réadaptation ni de programme d'aide à la communication, il n'y a rien en matière de déficience visuelle. Et, dans le cas de la déficience motrice, aucun service n'est disponible pour les enfants de plus de six ans dans le sud des Laurentides, et pour les plus de 13 ans non plus que pour les adultes et aînés.

Dans une lettre que j'ai reçue de l'organisme Le Bouclier, on y fait le constat.... Et je cite: «Malgré ces efforts, les listes d'attente en déficience du langage continuent de s'allonger.» Sa directrice générale parle même de l'ampleur de trous de services en déficience auditive adulte. Je juge cette situation des plus regrettable.

Dans un autre ordre d'idées, je présente ici un extrait d'une correspondance entre le laboratoire vasculaire du CSS de Saint-Jérôme et un patient qui est venu à mon bureau. Cela va ainsi: «Malgré nos demandes répétées ? indique un responsable du laboratoire de physiologie vasculaire ? et malgré que nous avons informé à de multiples reprises les autorités hospitalières des conséquences de notre liste d'attente, il a été impossible d'obtenir les ressources supplémentaires pour maintenir le service auquel vous avez droit et qui est essentiel dans votre condition. Actuellement, près de 1 000 patients comme vous sont en attente d'examens. Nous commençons déjà à voir les effets néfastes de tous ces examens qui n'ont pas été faits et nous sommes très inquiets pour le sort de nos patients. Il n'est pas normal de vous faire subir un risque injustifié. Nous continuons de faire des représentations pressantes auprès des autorités hospitalières et vous suggérons de réclamer le service qui a été prescrit et auquel vous avez droit.» Alors, fin de la citation.

Toujours au chapitre des attentes, qui se voit du reste compliqué par le renoncement récent du ministre de la Santé à éliminer les listes d'attente hors délai, la situation à l'Hôpital Saint-Eustache veut qu'un total de 118 patients soient en attente pour une chirurgie d'un jour, 191 en chirurgie générale, 171 en chirurgie orthopédique, 43 en gynécologie, 59, ORL et 153, urologie.

Sur le territoire du CSS du Lac-des-Deux-Montagnes, le volet soutien à domicile comporte une liste d'attente de 49 personnes. Heureusement, de grands progrès ont été faits dans les derniers mois dans ce domaine, mais je dois saluer le travail inlassable des gens qui donnent ces services dans des conditions parfois questionnables. En fait, ces gens-là sont soumis, si vous voulez, à des pressions énormes face à la demande.

Le projet de loi n° 33 prévoit de cesser la prohibition d'assurance privée dans le cas de trois chirurgies: du genou, de la cataracte et de la hanche. Pour répondre à la décision de la Cour suprême, le moyen utilisé par le gouvernement, soit la mise en place d'un mécanisme central de gestion de l'accès, était suffisant. De plus, cela répondait en fait au jugement de cour à l'effet qu'il fallait mettre fin à l'existence de délais raisonnables. Mais en aucun cas le gouvernement ou le ministre de la Santé ne peut invoquer la décision de la Cour suprême pour justifier des orientations qui en définitive ne sont que des orientations politiques en faveur de la libéralisation du secteur de la santé et des services sociaux et le développement d'un secteur dit marchand. Au fond, ce qu'introduit le projet de loi n° 33, c'est une manière déguisée de faire de l'ambulatoire plutôt que de consacrer les ressources publiques à développer les services aux malades. La médecine ambulatoire, les chirurgies mineures, les chirurgies d'un jour, c'est très clairement un choix politique qui a été fait.

Plusieurs critiques s'élèvent déjà contre le projet de loi n° 33. Ainsi, par exemple, selon la Centrale des syndicats du Québec, le projet institutionnalise le secteur privé pour la prestation de services chirurgicaux. Il pose sournoisement les balises d'un système de santé privé parallèle, ce qui est absolument inacceptable. De son côté, la Fédération des médecins omnipraticiens du Québec se dit totalement insatisfaite, constatant dans une déclaration publique que, si les objectifs poursuivis sont louables, les moyens retenus, eux, sont inappropriés. Elle ajoute ne rien voir dans ce projet de loi visant à améliorer l'accès aux services de première ligne, aux examens diagnostiques ou encore à un médecin spécialiste. Multipliant les procédures et les règlements au lieu de privilégier des moyens et des ressources pour obtenir des résultats concrets, la proposition globale du projet de loi n° 33 sème la confusion.

Comme chez de nombreux autres observateurs, il m'apparaîtrait opportun que plusieurs des mesures suivantes soient mises de l'avant: augmenter la flexibilité des GMF et permettre ? les groupes de médecine familiale, pardon; et permettre ? l'émergence d'un plus grand nombre d'entre eux, en particulier sur le territoire de la circonscription de Deux-Montagnes; améliorer toute la première ligne et l'augmentation du nombre de médecins de famille.

En conclusion et en accord avec mes collègues de l'opposition officielle, je considère que les problèmes de notre système de santé ne se régleront pas seulement par l'application des mesures mises de l'avant par le projet de loi, tant que ne sera pas réglé le problème du sous-financement du système public de santé, qui demeure, de l'avis général, le talon d'Achille. Le premier ministre et le ministre de la Santé doivent s'attaquer au règlement du déséquilibre fiscal et au rehaussement de la contribution fédérale pour les soins de santé. Alors, je voterai donc contre le projet de loi n° 33. Alors, merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, merci, Mme la députée de Deux-Montagnes. Je reconnais maintenant Mme la députée de Prévost.

Mme Lucie Papineau

Mme Papineau: Je vous remercie, M. le Président. M. le Président, j'interviens aujourd'hui sur l'adoption de principe du projet de loi n° 33, qui modifie la Loi sur les services de santé et les services sociaux, et aussi sur d'autres dispositions législatives.

Comme le disait si bien ma collègue d'Hochelaga-Maisonneuve, c'est difficile de se retrouver dans ce projet de loi, car il y a du bon, mais il y a aussi du pire. M. le Président, ce projet de loi a fait l'objet d'une consultation en commission parlementaire, et on pourrait compter seulement sur les cinq doigts d'une main les mémoires qui ont été présentés et qui sont d'accord avec ce projet de loi. C'est très peu et c'est très significatif. C'est que ce projet de loi cause problème.

n(17 h 20)n

La Fédération des médecins omnipraticiens du Québec disait que les mesures proposées pour garantir l'accès aux soins de santé et répondre au jugement Chaoulli sont insuffisantes, sinon carrément inacceptables. La Fédération des médecins spécialistes ajoutait que nulle part dans le projet de loi ne peut-on constater l'engagement du gouvernement à rendre des services médicaux spécialisés accessibles à la population dans les délais spécifiques et à donner aux établissements les ressources nécessaires à cette fin. La Fédération des infirmières et infirmiers du Québec se dit quant à elle préoccupée par un projet de loi qui tranche en faveur d'un système de santé privé. Même, M. le Président, l'Association canadienne des compagnies d'assurance de personnes se déclarait insatisfaite de ce projet de loi.

Pour ce qui est du bon, il y a effectivement l'encadrement des activités médicales en clinique privée, l'affichage des frais accessoires exigés des patients, le mécanisme centralisé de gestion des listes d'attente dans les hôpitaux. Ce qu'il y a cependant, je dirais, de pire, M. le Président, dans ce projet de loi, c'est l'introduction de l'assurance privée duplicative. Qu'est-ce que ça veut dire, «duplicative»? Ça signifie que le ministre introduit dans le projet de loi n° 33 ce qui est interdit par deux lois: par la loi québécoise, adoptée il y a 46 ans par le gouvernement Lesage, qui est la Loi sur l'assurance-hospitalisation, et également interdit dans la Loi de l'assurance maladie du gouvernement Bourassa, adoptée il y a 36 ans. C'est-à-dire, M. le Président, il y avait interdiction d'une assurance privée qui vient dédoubler pour les mêmes services de l'assurance maladie du Québec.

Dans son projet de loi, le ministre introduit donc la possibilité d'un contrat d'assurance privée plus la carte d'assurance maladie, ce que justement le premier ministre, en campagne électorale, disait ne jamais vouloir faire. Et je le cite, M. le Président: «La position que je défends aujourd'hui est celle qu'a défendue le Parti libéral du Québec et qui en fait s'incarne dans notre histoire, puisque c'est un gouvernement libéral qui l'a mis en place, ce système de soins de santé. C'est fondé sur notre volonté d'offrir à la population du Québec un système de soins de santé accessible, public, à l'intérieur duquel le privé peut jouer un rôle.» Il l'a répété, M. le Président, deux fois plutôt qu'une. On s'en souviendra, il se promenait en campagne électorale, il y a de ça trois ans et demi, avec dans une main une carte de crédit et dans l'autre main une carte de l'assurance maladie, en disant encore une fois que jamais l'une et l'autre ne serviraient en les confondant. Il disait également, alors qu'il était chef de l'opposition officielle, que c'était là un système qu'il récusait et qu'il entendait ne jamais voir appliquer au Québec. Seule la carte d'assurance maladie serait suffisante, au Québec, pour obtenir les soins requis pour son état de santé, disait-il. Le premier ministre avait pourtant pris l'engagement lors de la campagne électorale qu'il n'y aurait qu'un agent payeur et que jamais on n'introduirait un financement autre que celui des impôts, qui au fond permet l'égalité des chances dans notre société.

Bien, M. le Président, il faut constater que le discours a changé. C'est exactement ce que le projet de loi n° 33 introduit. Il introduit un contrat d'assurance privée plus la carte d'assurance maladie, et ça s'appelle un système de santé à deux vitesses: celui de l'assurance maladie du Québec dans l'ensemble du réseau public et celui couvert par l'assurance privée duplicative dans le cadre de centres médicaux spécialisés privés que crée le projet de loi n° 33.

Le gouvernement se retire derrière le jugement de la Cour suprême dans l'arrêt Chaoulli pour invoquer, comme tente de faire le ministre de la Santé, l'introduction de l'assurance privée. Mais il n'y a aucun constitutionnaliste ni aucun juriste qui a publiquement ou de quelque manière que ce soit pris position pour prétendre que le jugement dans le dossier Chaoulli exigeait d'ouvrir à l'assurance privée. En fait, M. le Président, ce que le jugement Chaoulli a déclaré, c'est qu'en présence de délais d'attente raisonnables la prohibition de l'assurance privée duplicative est valide, ce qui veut dire, dans des mots simples, que les délais d'attente raisonnables justifient une interdiction ? une interdiction ? de l'assurance privée duplicative. C'est le coeur du jugement. Ça veut donc dire que, lorsque l'attente est raisonnable, l'interdiction de l'assurance privée duplicative est raisonnable. C'est la situation que nous vivons depuis l'adoption par un gouvernement libéral de l'assurance hospitalisation et depuis l'adoption, toujours par un gouvernement libéral, de l'assurance maladie du Québec. Et, malheureusement, M. le Président, l'histoire retiendra que c'est un gouvernement libéral qui ouvre une brèche dans laquelle va s'engouffrer un système de santé à deux vitesses.

Bien sûr, le gouvernement plaide que, pour tout de suite, c'est un phénomène qui se limite à trois types de chirurgie: les hanches, les genoux et les cataractes, mais la liste, M. le Président, pourra s'allonger par simple règlement du ministre de la Santé et des Services sociaux, et ces services, lorsqu'ils seront pratiqués dans des hôpitaux privés avec des médecins non participants, vont pouvoir faire l'objet d'une couverture d'assurance, comme le projet de loi n° 33 va désormais le permettre, autant pour la dimension médicale et, imaginez-vous, aussi pour la dimension de ce qu'ils appellent l'hébergement. Parce que, M. le Président, ils appellent ça de l'hébergement, mais en fait, de l'hébergement dans une clinique après s'être fait opéré, n'est-ce pas de l'hospitalisation?

Lors de la commission parlementaire sur le projet de loi n° 33, des dizaines d'intervenants sont venus nous exprimer leur déception. Il faut savoir que, dans le document de consultation, on laissait entendre, par son titre d'abord, Garantir l'accès, qu'il y aurait une garantie d'accès aux soins. Le titre et le message du premier ministre, dans ce document, laissent entendre que le gouvernement va aller de l'avant avec une garantie d'accès. En fait, M. le Président, ce que contient ce projet de loi, c'est un mécanisme de gestion centralisée des listes d'attente. Mais, la garantie d'accès, d'abord il faut savoir qu'elle est complètement inopérante au niveau de ce que la population réclame, qui consiste en fait à avoir un accès à des soins de première ligne. 85 % des services requis par la population en matière de santé consiste à pouvoir avoir un médecin de famille, à pouvoir avoir accès à un service qu'on appelle de première ligne. C'est bien simple, M. le Président, les gens veulent avoir un médecin de famille. Depuis l'arrivée des libéraux, seulement trois groupes de médecine familiale ont été constitués dans les Laurentides. Toutefois, nous devions en avoir sept dans la seule MRC de Thérèse-De Blainville et 22 dans l'ensemble des Laurentides. Nous n'en possédons actuellement que sept.

n(17 h 30)n

Selon Statistique Canada, un indicateur de la santé, en juin 2006, dans les Laurentides, non loin de 120 000 personnes de 12 ans et plus n'ont pas de médecin de famille. Il ne se passe pas une semaine, M. le Président, sans que je reçoive à mes bureaux, à Saint-Jérôme, des citoyens qui me demandent de l'aide pour leur trouver un médecin de famille. Il ne se passe pas non plus une semaine sans que l'on constate à quel point, dans les Laurentides, il y a un manque de financement. Et c'est flagrant, et le ministère reconnaît lui-même un manque de financement de l'ordre de 40 millions. Au cours des dernières années, plusieurs études sont venues démontrer que la région des Laurentides avait besoin d'investissement nouveau afin d'être en mesure d'offrir à ses citoyens un accès aux services comparable à la moyenne du Québec. Cette situation, comme je le disais, est reconnue par le ministère de la Santé et des Services sociaux. Et, bien, je l'avoue, M. le Président, que la région ait commencé à recevoir de nouveaux crédits en vue de remédier à cette situation, ce rattrapage est loin d'être complété.

Dans leur version la plus récente, les travaux menés par le ministère relativement à l'équité interrégionale placent la région des Laurentides à l'avant-dernier rang des régions, ce qui représente, comme je le disais, un manque à gagner de 40 millions, soit plus de 6 % des budgets actuellement consentis à la région. Pourtant, M. le Président, la région des Laurentides est la région qui présente la progression démographique la plus importante au Québec. En effet, en 15 ans, la population des Laurentides s'est accrue presque quatre fois plus rapidement que celle de l'ensemble du Québec, ce qui fait d'elle dorénavant la quatrième plus grosse région au Québec.

M. le Président, vous me permettrez ici d'attirer l'attention du ministre sur un dossier particulièrement important dans toute la région des Laurentides, celui du centre de radio-oncologie. Je le sais, il y a d'autres régions qui voudraient bien l'avoir, Montréal et Laval, pour ne pas les nommer. Il y a déjà près d'une dizaine d'années que toute la région est mobilisée pour que ce centre de radio-oncologie soit installé à Saint-Jérôme. Nous avons, au Centre hospitalier de Saint-Jérôme, un excellent département d'oncologie. Je pourrais vous en parler des heures. Et, vous le savez, M. le Président, mon mari y a été traité pendant plusieurs années, trois ans, en fait, avant qu'il nous quitte. Ce sont des médecins, des infirmières et des intervenants extraordinaires, d'une compétence et d'une compassion inégalées. Mais il leur manque un outil essentiel, le département de radio-onco.

Combien de fois ai-je accompagné mon mari pour ses traitements à Montréal? Combien de fois avons-nous quitté notre résidence des heures d'avance, des heures plus tôt pour éviter les heures de pointe, que malheureusement nous attrapions de toute façon? Ça commençait à Blainville. Je ne pourrai jamais vous décrire les circonstances auxquelles Robert a dû faire face. Oui, M. le Président, je vais vous parler de ce que Robert a vécu parce que je veux dire au ministre de la Santé que je sais de quoi je parle. Un jour, à l'hôpital, à Montréal, il y avait quelqu'un qui venait de Sainte-Véronique. Vous savez c'est où, Sainte-Véronique, M. le Président? Près de Mont-Laurier. Pour lui, ça avait été moins long, partir de Sainte-Véronique à Saint-Jérôme, que de Saint-Jérôme à Montréal, tellement il y avait de la circulation pour traverser à Montréal, pour recevoir ses soins. Nous avons une population vieillissante, M. le Président, et une région qui malheureusement a un taux élevé de personnes atteintes de cette maudite maladie. Elles ont droit, elles aussi, à l'accès à des soins de proximité, à ne pas être obligées de se taper des heures de route, des heures de trafic pour recevoir les soins appropriés.

Vous savez, à chaque fois qu'il me sera donné de parler sur la santé, sur un dossier de santé, quel qu'il soit, toujours j'aborderai ce projet du centre de radio-onco pour Saint-Jérôme. Vous comprendrez que j'y ai travaillé avec toute mon âme et tout mon coeur, car je sais, je sais ce que c'est d'être en auto avec un être cher qui souffre et qui doit passer des heures en auto pour recevoir quelques minutes de traitement. Nous avons le droit, en région, de recevoir les soins, surtout que déjà, à l'Hôtel-Dieu de Saint-Jérôme, nous avons un département d'onco. Il ne nous manque donc que la radio. Je plaide ce dossier ici, mais je sais que j'ai derrière moi toute une région qui attend une décision du ministre. Si vous saviez tous les besoins que nous avons, tous les besoins en santé que nous avons dans la région des Laurentides.

Je pourrais aussi vous parler des places en hébergement de longue durée. On apprend que, depuis que le gouvernement libéral est en fonction, il y a 1 361 lits d'hébergement de longue durée de moins au Québec. Qu'est-ce que ça veut dire, M. le Président? Pourtant, le gouvernement actuel avait fait la promesse à la population, pendant la campagne électorale, d'augmenter le nombre de lits de longue durée. Mais il semble que ce gouvernement demande à nos agences, semble-t-il, de donner priorité à la mise en place de ressources non institutionnelles avant d'envisager tout développement en places en CHSLD. J'aimerais que le ministre vienne dans mon comté visiter les centres d'hébergement de longue durée. Encore une fois, je vous le dis, j'ai été à même de constater qu'il y a du personnel d'une compétence extraordinaire. Cependant, depuis plusieurs années, on parle d'une relocalisation de deux CHSLD dans un nouveau bâtiment. C'est une priorité chez nous.

M. le Président, la population du Québec se rappellera certainement que l'opinion publique a été alertée par l'état inquiétant du système de santé il y a à peine deux ans, au moment des forums régionaux mis en place par l'actuel gouvernement et d'un forum des générations qui a eu lieu à l'automne 2004. Alors, on disait à l'époque que le financement du système de santé était dans une telle impasse qu'il fallait mettre en place une commission d'étude, ce qui fut fait, la commission Ménard. Il y a eu des rapports considérables sur cette question. On a parlé d'une impasse financière liée au secteur de la santé et des services sociaux. On a rappelé que, si ça continuait, ça menaçait gravement l'équilibre budgétaire, et on a fait peur à la population. Le ministre de la Santé disait que l'heure était grave, qu'il y avait impasse sur le financement. En 2004 également, même le premier ministre disait: Au rythme où ça va, il ne va rester qu'un ministère dans 15 ans: celui de la santé.

Alors, il y a eu des consultations à travers le Québec. Il y a à peine quelques semaines, du jour au lendemain, le ministre de la Santé nous dit: On s'est inquiétés pour rien. Franchement, M. le Président, ces gens-là ne semblent pas savoir où ils vont. Un jour, c'est la catastrophe et, le lendemain, on s'est inquiété pour rien. Le ministre n'a convaincu personne avec son virage à 180 degrés sur le financement du système de santé. Les politiciens qui évoquent le droit de changer d'idée la veille des élections sont rarement crus. Quelqu'un a déjà dit: Quand on n'est pas cru, on est cuit.

En conclusion, M. le Président ? je terminerai parce que je vois que mon temps de parole se termine dans quelques secondes ? dans ce projet de loi, le ministre de la Santé et des Services sociaux introduit l'assurance privée duplicative pour les chirurgies du genou, de la hanche et de la cataracte, et je rappelle à cette Assemblée... Et ce qui est pire que pire dans ce projet de loi, c'est que le ministre se donne le droit de rallonger la liste de chirurgies sans passer par la législation mais tout simplement par réglementation. Il ne faut pas se surprendre que ce projet de loi soit inquiétant pour toute la société québécoise. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Je vous remercie, Mme la députée de Prévost. Oui, Mme la députée de...

Mme Maltais: Taschereau. M. le Président, en vertu de l'article 213, j'apprécierais poser une question à la députée de Prévost qui vient de faire un témoignage assez puissant. Alors, est-ce qu'elle accepte de répondre à une question?

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, oui. Mme la députée de Prévost, la députée vous demande si vous acceptez une question.

Mme Papineau: Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, vous acceptez la demande d'une question. Je vous rappelle, Mme la députée, que la question doit être brève, et la réponse aussi.

Mme Maltais: Merci, M. le Président. Alors, la députée de Prévost vient de nous dire que, par simple règlement, le ministre pourra ajouter des chirurgies sur la liste. Est-ce qu'elle est au courant que le ministre, en commission parlementaire, avait juré que ce serait par législation que cela se ferait? Et qu'est-ce qu'elle pense de la volte-face qu'a faite le ministre?

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, brièvement, Mme la députée de Prévost.

Mme Papineau: Effectivement, M. le Président, le ministre s'était engagé à ce que ce soit par législation, en commission parlementaire, et dernièrement ce qu'il a dit, c'est que c'était par règlement, qu'il le ferait par règlement, et je pense que c'est pour ça que ça inquiète aussi la société québécoise. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Cusano): Merci. Je reconnais maintenant le prochain intervenant. Pour une intervention ou pour...

n(17 h 40)n

M. Côté: Non, pour une question à ma collègue la députée de Papineau en vertu de l'article 213.

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, il y a une demande, Mme la députée de Prévost, d'une autre question de la part du député de Dubuc. Est-ce que vous acceptez une question de la part du député de Dubuc?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Oui? Alors, M. le député de Dubuc, allez-y.

M. Côté: Oui. Alors, j'aimerais savoir. La députée de Papineau a mentionné que les groupes de médecine...

Une voix: Prévost, Prévost.

M. Côté: La députée de Prévost a mentionné que, les groupes de médecine familiale, dans sa région, il y en avait trois qui avaient été institués. J'aimerais qu'elle nous... Pour informer sa population, est-ce que, cette année ou l'an prochain, il y a des prévisions que d'autres groupes, d'autres GMF vont être en force, mis en force par le gouvernement?

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, Mme la députée de Prévost, votre réponse.

Mme Papineau: Comme je vous l'ai dit tantôt, M. le Président, en fin de compte, c'est 22 groupes de médecine familiale qu'on devrait avoir dans les Laurentides. Il devait y en avoir sept juste dans la région de Blainville, mais malheureusement, dans toute la région des Laurentides ? en fait, c'est de Mont-Laurier à Rosemère ? il n'y en a eu, je pense, que trois seulement qui ont été faits depuis les trois dernières années. Alors, sur 22, je vais vous dire que ce n'est pas beaucoup.

Le Vice-Président (M. Cusano): Je vous remercie, Mme la députée de Prévost. M. le député de Dubuc, pour votre intervention? Oui? Alors, je vous reconnais.

M. Jacques Côté

M. Côté: Merci. Merci, M. le Président. Alors, j'interviens sur le projet de loi n° 33, Loi modifiant la Loi sur les services de santé et les services sociaux et d'autres dispositions législatives, parce qu'il m'apparaît d'une importance capitale, puisque ce projet de loi vient complètement changer la philosophie qui existe depuis une quarantaine d'années concernant les soins de santé au Québec. En effet, le ministre de la Santé nous présente ce projet de loi comme une garantie d'accès à des soins de santé. Le projet de loi prévoit en effet que, s'il y a impossibilité d'obtenir un service médical à l'intérieur de délais jugés raisonnables par le ministre, une offre alternative doit être proposée à l'usager afin qu'il puisse obtenir le service requis.

D'ailleurs, M. le Président, j'aimerais justement vous faire part de l'article 16 de ce projet de loi, qui dit que la Loi sur les services de santé est modifiée par l'insertion, après l'article 431.1, du suivant:

«431.2. Lorsque le ministre estime, compte tenu des standards d'accès généralement reconnus, que le temps d'attente pour obtenir un service médical spécialisé dans l'ensemble du Québec ou dans l'une de ses régions est déraisonnable ou sur le point de le devenir, il peut, après avoir obtenu l'autorisation du gouvernement, prendre toute mesure nécessaire pour que soient mis en place, conformément à ses directives, des mécanismes particuliers d'accès permettant de rendre le service visé autrement accessible à l'intérieur du délai [que lui seul] juge raisonnable.

«Les directives du ministre peuvent comprendre l'obligation pour tout établissement concerné par la dispensation du service médical spécialisé visé d'ajuster en conséquence les modalités de fonctionnement de son mécanisme central de gestion de l'accès à ce service de même que la nécessité pour les agences, en collaboration avec les réseaux universitaires intégrés de santé, de revoir les corridors de services de manière à faciliter autrement l'accès au service médical spécialisé visé.»

Le projet de loi comporte cependant, M. le Président, malgré des bonnes intentions, des lacunes importantes, puisque nulle part on n'y prévoit un délai maximal d'attente. Où donc est passé ce fameux délai de six mois qui était mentionné dans le document de réflexion Garantir l'accès? On ne le trouve nulle part à l'intérieur de la loi.

De plus, M. le Président, l'autre charnière importante de ce projet de loi, et c'est là que le bât blesse, c'est l'assurance privée duplicative qui vient dédoubler, pour les mêmes services, l'assurance maladie du Québec. Pourtant, le premier ministre s'était engagé, en campagne électorale, en se moquant du chef de l'Action démocratique du Québec et il avait juré que la carte d'assurance maladie ne ferait jamais ménage avec une carte de crédit quelconque. Aujourd'hui, bien, on voit bien, avec le projet de loi qui nous est présenté, que ce ne sera pas le cas.

Il avait même affirmé, le premier ministre, durant cette même campagne, vous vous souvenez, que, «dans les heures qui suivront mon élection, les blocs opératoires vont fonctionner à plein régime, les listes d'attente vont disparaître». Autrement dit le ciel va devenir sans nuage et d'un bleu éclatant. Malheureusement, M. le Président, on connaît la suite: la situation actuelle, au Québec, est loin d'être rose, encore moins bleu ciel. Je n'ai qu'à prendre l'exemple de ma région, le Saguenay? Lac-Saint-Jean, et je vous donne ici certaines statistiques qui sont très significatives de la situation actuelle. Et, ces statistiques, les dernières que j'ai datent justement du 24 octobre 2006, ça ne fait pas tellement longtemps, à peine quelques jours, et elles sont disponibles sur le site Internet du ministère de la Santé et des Services sociaux.

En matière de listes d'attente, le tableau qui nous est présenté nous dit qu'en matière de chirurgie cardiaque ? et là je vous parle du Saguenay?Lac-Saint-Jean ? il y a une liste d'attente de 18 personnes; en angioplastie et en hémodynamie, 33; en cataracte, 759 en attente et 25 hors délai; en arthroplastie du genou, 119 en attente; autres chirurgies d'un jour, 2 117 en attente, 591 hors délai; autres chirurgies avec hospitalisation, 1 074 en attente et 315 hors délai. Et, si on compare, M. le Président, avec les mêmes statistiques du 12 avril 2005, c'est-à-dire il y a presque un an et demi, bien, si je prends les taux de chirurgie avec hospitalisation, il y en avait, à ce moment-là, dans la même région du Saguenay? Lac-Saint-Jean, 328 en attente et 1 000... 1 084 en attente, plutôt, et 328 hors délai. Aujourd'hui, c'est 1 074. Un an et demi plus tard, on a le même nombre... on a 10 de différence, c'est-à-dire qu'on a presque le même nombre. Hors délai, nous en avions 328 l'an passé et, cette année, 315. Alors, la situation ne s'est pas améliorée au Saguenay?Lac-Saint-Jean, contrairement à ce que le ministre nous dit.

Même chose pour les autres chirurgies d'un jour: en 2006, 2 117 en attente; 2005, 2 400 en attente. Une petite différence, une diminution. Par contre, 799 hors délai versus 681. Alors, l'amélioration, M. le Président, elle est très, très, très peu sensible.

Je continue mes remarques sur ce projet de loi. Le gouvernement nous dit qu'il nous dépose ce projet de loi pour se conformer au jugement de la Cour suprême du Canada. En effet, M. le Président, dans les faits, il introduit un système de santé à deux vitesses en disant: C'est parce que la Cour suprême me le demande. Or, nulle part dans le jugement de la Cour suprême on ne demande au gouvernement du Québec d'introduire de l'assurance privée, et c'est pourtant ce que fait le projet de loi en introduisant ce qu'on appelle l'assurance privée duplicative. D'ailleurs, l'Ordre des infirmières et infirmiers auxiliaires du Québec affirme, dans son mémoire qu'il a présenté lors des audiences sur ce même projet de loi, l'ordre affirme ceci, et je vous lis deux paragraphes, deux ou trois paragraphes de ce que l'Ordre des infirmiers et infirmières disait à la commission.

«Au même titre que plusieurs personnes qui ont [...] comparu à l'étape précédente devant la présente commission, nous nous questionnons encore sur l'obligation du gouvernement du Québec de faire une ouverture même partielle en autorisant la souscription d'une assurance privée pour certaines chirurgies[...], et ce, afin de se conformer [...] au jugement rendu par la Cour suprême dans l'affaire Chaoulli[...].

«Nous soumettons encore bien humblement que, du strict point de vue juridique, l'introduction d'une garantie d'accès, selon des modalités que nous commenterons un peu plus loin dans notre mémoire, est suffisante pour se conformer aux exigences imposées par la décision du plus haut tribunal du pays.

«Même si certains en doutent, nous partageons l'avis de ceux qui soutiennent que l'ouverture même limitée aux assurances privées n'était pas nécessaire pour en arriver à une conformité. En effet, nous demeurons convaincus qu'une proposition gouvernementale d'amélioration de l'accès aux services afin de réduire les délais d'attente est et pourrait [...] être une avenue tout à fait acceptable.»

n(17 h 50)n

Alors, voilà, M. le Président, je pense que c'est clair. C'est que, selon la plupart de... d'autres personnes également, c'est que nous n'avions pas besoin de cette assurance duplicative, cette assurance santé duplicative pour nous conformer au jugement de la Cour suprême. Le simple fait de faire un projet de loi pour garantir l'accès aux soins, diminuer les listes d'attente aurait suffi.

Je crois, M. le Président, que ce gouvernement est en train d'ouvrir une brèche importante dans laquelle on aura un système de santé à deux vitesses, un système qu'on pourrait appeler peut-être bicéphale, à deux têtes. Pourquoi prendre prétexte de l'arrêt Chaoulli pour permettre l'assurance privée? Là est toute la question. Il semble que le gouvernement ait fait la sourde oreille à tous ceux et celles qui se sont exprimés en commission parlementaire et qui ont mis le gouvernement en garde à cet effet. Avec son projet de loi, le ministre va même à l'encontre de ce que ses propres procureurs, les procureurs du gouvernement, ont plaidé devant la Cour suprême. La députée d'Hochelaga-Maisonneuve a d'ailleurs soulevé ce fait dans son intervention du début de cette adoption de principe, et elle l'a fait de façon très, très à propos. Ce qui est plus grave encore, c'est que le projet de loi n° 33 permet que soit extensionnée à d'autres chirurgies l'assurance privée, et ce, sur simple examen en commission parlementaire, comme l'a dit, tout à l'heure, la députée de Prévost, et non pas par législation. Ce n'est pourtant pas ce que le ministre avait promis. Le ministre aurait-il déjà d'autres projets en tête, M. le Président? Je pense que le fait de l'ouvrir à certaines chirurgies justement va permettre d'ouvrir beaucoup plus grand l'assurance duplicative à d'autres chirurgies.

Marie-Claude Prémont, qui est vice-doyenne aux études supérieures, qui est professeure également à la Faculté de droit de l'Université McGill, professeure-chercheure, concluait aussi, dans un article, sa réflexion sur l'avenir du système de santé. Elle avait fait une remarque sur justement le projet de loi et elle l'avait intitulé Un projet de loi qui n'a rien d'anodin. Et elle disait, Mme Prémont: «Le gouvernement voudra bien mettre l'accent sur les éléments du projet de loi qui limitent, pour l'heure, l'étendue de l'ouverture à l'assurance privée duplicative et à l'interfinancement entre le réseau public et un réseau privé à mettre en place. L'argument ne saurait convaincre, puisque ce type de réorientation majeure du réseau public de santé ne peut de toute façon que se faire graduellement. Le projet de loi n° 33 présentement en discussion pose clairement les premières pierres sur lesquelles pourra s'appuyer une croissance graduelle d'un système de santé à deux vitesses. Rappelons qu'est également contestable l'argument voulant que le Québec ne dispose d'autre choix suite à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Chaoulli. Cet argument confond les rôles respectifs des parlements et des tribunaux, ce qui, tout comme le projet de loi n° 33, n'a rien d'anodin.»

Alors, c'est confirmé, M. le Président, cette crainte d'extension d'une ouverture, une plus grande ouverture, c'est confirmé par des ordres professionnels, c'est confirmé par des chercheurs, des professeurs-chercheurs, des spécialistes, des juristes également. Alors, je pense qu'il faut absolument que le gouvernement révise ses positions à ce sujet.

Pendant que nous étudions ce projet de loi, M. le Président, qui va changer complètement, comme je le disais au début, la philosophie de notre système de santé, on est pris, dans nos régions, avec des problèmes importants que le ministre, que le gouvernement ne règle pas. J'aimerais parler ici de la problématique des services préhospitaliers d'urgence à ville de La Baie, dans mon comté, le comté de Dubuc, au Saguenay?Lac-Saint-Jean. Le service ambulancier actuel pourrait être beaucoup plus efficace s'il y avait des horaires à l'heure. On abolirait ainsi les horaires de faction et on offrirait les mêmes services de qualité que dans toutes les villes du Saguenay. Je me dois de m'arrêter quelques instants sur cette problématique, puisqu'elle touche ma population et qu'il s'agit d'un dossier d'une importance capitale.

Cet horaire à l'heure pour les services ambulanciers a été instauré en 1989. Le ministère avait décidé de stabiliser la main-d'oeuvre ambulancière en créant différents types d'horaire de travail. Pour les grands centres comme Montréal et Québec, on instaura des horaires à l'heure et, pour le reste du Québec, on avait instauré ce qu'on appelait des horaires de faction, c'est-à-dire des horaires temporaires, notamment 14-21 pour les zones rurales et 7-14 pour les secteurs urbains. Depuis 1999, à ville de Saguenay, les ambulanciers maintenant de Chicoutimi, de Jonquière, de Laterrière, de Chicoutimi-Nord travaillent avec les horaires à l'heure, ce qui leur permet d'intervenir immédiatement lorsqu'ils reçoivent un appel de la centrale de répartition, la centrale du 9-1-1. À La Baie, les techniciens ambulanciers doivent toujours composer avec un horaire de faction qui comprend six jours consécutifs de travail, 24 heures sur 24, et suivis de huit jours de repos. Il est évident, M. le Président, qu'avec un tel horaire personne ne peut demeurer 24 heures sur 24, pendant six jours, dans le véhicule ambulancier et être prêt à intervenir. Les périodes de faction obligent les ambulanciers à demeurer alors dans leurs domiciles pour attendre leurs affectations.

Et cet horaire ajoute un délai moyen de 10 minutes sur le temps d'intervention. Le technicien qui est à la maison doit résider dans un rayon de cinq minutes du trajet. De plus, durant la nuit, bien, naturellement, il doit se lever, s'habiller, déblayer la voiture, durant l'hiver, s'adapter aux conditions climatiques avant d'arriver au véhicule ambulancier. Et, rendu à la caserne, il doit sortir le véhicule, prendre les coordonnées par radio, confirmer l'appel et partir pour justement aller vers la personne qui a demandé des soins. Évidemment, M. le Président, ce temps indéterminé pourrait être éliminé par l'amélioration des horaires de travail.

Pire, M. le Président, les ambulanciers, à La Baie, se font sans cesse reprocher leur arrivée tardive sur les lieux, et les citoyens de La Baie ne comprennent pas pourquoi ils n'auraient pas les mêmes services que le reste de la municipalité. Souvent, il est fréquent que les ambulanciers arrivent après les policiers et les pompiers, même des fois la remorque. Le gouvernement avait promis, en 2005, de régler le problème, il avait promis que ça se réglerait à l'automne 2005. Cela n'a pas été le cas, et on a donné comme raison un manque d'argent. Pourtant, il ne faudrait que quelques milliers de dollars pour régler ce problème.

Moi, je me pose la question: Une vie humaine vaut-elle plus à Chicoutimi qu'à Jonquière ou qu'à ville de La Baie? Si c'est la qualité qui entre en ligne de compte, je pense que les ambulanciers de ville de La Baie sont aussi qualifiés, même autant qualifiés que tous les autres. Je crois plutôt qu'il s'agit d'un manque de volonté politique.

Je voudrais ici, M. le Président, vous faire part d'une lettre, une lettre qui a été envoyée au ministre de la Santé et des Services sociaux dernièrement, le 17 octobre 2006. Je vous ferai grâce des noms, mais je voudrais vous montrer comment ce système peut être grave pour une population.

«Le 8 septembre 2006, j'ai eu recours au service des ambulanciers sur le territoire de Saguenay, arrondissement de La Baie, pour mon père, et, à ma grande surprise, le temps d'intervention des ambulanciers fut de 29 minutes ? 29 minutes. Ma première démarche a été le 9-1-1. Je croyais qu'ils resteraient en ligne pour me donner tout le support avant l'arrivée des ambulanciers. Cependant, après les vérifications d'usage, la communication a coupé en disant qu'une ambulance serait dirigée sur les lieux. Malheureusement, comme La Baie ne fait pas partie du déploiement dynamique, le temps d'intervention des ambulanciers fut trop long et mon père est décédé.

«Je suis en attente des rapports médicaux avant d'entreprendre des procédures légales et, aujourd'hui, je veux vous sensibiliser afin que vous puissiez agir le plus rapidement possible pour sauver des enfants, des hommes, des femmes qui étaient appréciés et heureux de vivre. Pourquoi une ville comme ville de La Baie ne fait pas partie du déploiement dynamique? Pourquoi les ambulanciers ont pris 29 minutes à se rendre sur les lieux? Je veux savoir, car mon père, 68 ans, avait droit au secours des ambulanciers plus rapidement. À mon avis, c'est criminel de jouer avec la vie des gens, si c'est une question d'économie.

«En attendant, je vous demande de prendre en considération ma lettre et de répondre à mes interrogations afin que je puisse poursuivre mes procédures légales auprès des autorités concernées. Malgré ma grande déception envers les services de santé, je souhaite, M. le ministre, que vous n'ayez jamais à vivre une telle situation.»

Alors, M. le Président, des situations comme celle-là, on en vit presque régulièrement. Ça ne va pas toujours jusqu'au décès, mais ça vous prouve qu'on aurait droit au même service que les autres personnes au sein de la ville de La Baie. Et le gouvernement, qui nous dit qu'il agit en matière de santé, qu'il est proactif, bien, écoutez, dans ce cas-là, dans le cas des services préhospitaliers d'urgence, ce n'est pas le cas.

Le Vice-Président (M. Cusano): Excusez-moi. M. le député, nous sommes rendus à 18 heures. Alors, je dois, à ce moment-ci...

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Oui. Est-ce que... Il y a une question?

n(18 heures)n

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Alors, pour pouvoir terminer, il va falloir demander un consentement pour dépasser le 18 heures.

Des voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Pardon?

Une voix: ...

Le Vice-Président (M. Cusano): Non, non. Il faut demander... Excusez-moi, là, il faut demander un consentement d'abord des membres de cette Assemblée pour poursuivre au-delà de 18 heures.

Des voix: ...

Ajournement

Le Vice-Président (M. Cusano): Bon. Alors, compte tenu de l'heure, nos travaux sont ajournés à demain, 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 1)