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Version finale

43e législature, 1re session
(début : 29 novembre 2022)

Le mercredi 22 février 2023 - Vol. 47 N° 19

Aller directement au contenu du Journal des débats

Table des matières

Affaires courantes

Déclarations de députés

Souligner le 65e anniversaire de l'Association pour l'intégration communautaire de
l'Outaouais

M. Mathieu Lévesque

Souligner la victoire de L'Intrépide de Gatineau au Tournoi international de hockey pee-wee
de Québec

M. André Fortin

Rendre hommage à Mme Sandrine Hébert, nommée Personnalité de l'année par le journal
Le Progrès de Coaticook

Mme Geneviève Hébert

Appuyer le mouvement citoyen visant à assurer la sécurité routière aux abords des écoles

M. Andrés Fontecilla

Souligner le succès du Sommet du mycotourisme

M. Mathieu Rivest

Rendre hommage à Mme Karine Joly pour ses 15 ans de service au sein du Centre
multi-ressources de Lachine

M. Enrico Ciccone

Souligner la création de la Maison des arts Le Renfort

M. Louis Lemieux

Rendre hommage à M. Vincent Géracitano, fondateur de la chaîne de télévision Avis de
recherche inc.

M. Ian Lafrenière

Souligner la visite à l'Assemblée nationale de membres du regroupement Partenaires neuro

Mme Sonia Bélanger

Souhaiter du succès aux athlètes de la circonscription de Châteauguay lors de la finale des
Jeux du Québec

Mme Marie-Belle Gendron

Souligner le 10e anniversaire de la Corporation Bénévoles d'expertise

M. Jonatan Julien

Souligner la tenue de la 10e Grande Journée des petits entrepreneurs

M. Eric Lefebvre

Présence de M. François Paradis, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale

Présentation de projets de loi

Projet de loi n° 13 — Loi concernant la ligne d'interconnexion Hertel-New York

M. Pierre Fitzgibbon

Mise aux voix

Dépôt de documents

Dépôt de pétitions

Mettre en place des mesures visant à accroître la sécurité piétonnière

Questions et réponses orales

Impact des priorités du gouvernement sur les jeunes générations

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. François Legault

Accès à la maternelle quatre ans

Mme Marwah Rizqy

M. Bernard Drainville

Mme Marwah Rizqy

M. Bernard Drainville

Mme Marwah Rizqy

M. Bernard Drainville

Document déposé

Rapport de la médiatrice sur l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont

M. André Fortin

M. Christian Dubé

M. André Fortin

M. Christian Dubé

M. André Fortin

M. Christian Dubé

Hausse du coût du logement

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. François Legault

Protection des droits des locataires aînés

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme France-Élaine Duranceau

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme France-Élaine Duranceau

Mme Christine Labrie

Mme France-Élaine Duranceau

Utilisation du Fonds des générations pour financer des baisses d'impôt

M. Frédéric Beauchemin

M. Eric Girard

Mme Madwa-Nika Cadet

M. Eric Girard

Mme Madwa-Nika Cadet

M. Eric Girard

Modifications au Régime de rentes du Québec

M. Haroun Bouazzi

M. Eric Girard

M. Haroun Bouazzi

M. Eric Girard

M. Haroun Bouazzi

M. Eric Girard

Réfection du pont de l'Île-aux-Tourtes

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Geneviève Guilbault

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Geneviève Guilbault

Motions sans préavis

Rendre hommage à Mme Nadine Girault, ex-parlementaire de l'Assemblée nationale, et
offrir des condoléances à sa famille et à ses proches

M. François Legault

M. Marc Tanguay

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Joël Arseneau

Mise aux voix

Avis touchant les travaux des commissions

Affaires du jour

Projet de loi n° 10 —    Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel
et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des
services sociaux

Adoption du principe

M. Christian Dubé

M. Monsef Derraji

M. Andrés Fontecilla

M. Joël Arseneau

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de maintenir l'intégralité des
versements au Fonds des générations ainsi que l'intégralité de son capital 

M. Frédéric Beauchemin

M. Gilles Bélanger

M. Haroun Bouazzi

M. Paul St-Pierre Plamondon

Mme Joëlle Boutin

Mme Madwa-Nika Cadet

M. Yves Montigny

M. Mathieu Lemay

M. Frédéric Beauchemin (réplique)

Vote reporté

Projet de loi n° 10 —  Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel
et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des
services sociaux

Reprise du débat sur l'adoption du principe

M. Joël Arseneau (suite)

Mme Linda Caron

Mme Madwa-Nika Cadet

M. André Fortin

Mise aux voix

Renvoi à la Commission de la santé et des services sociaux

Mise aux voix

Ajournement

Journal des débats

(Neuf heures quarante minutes)

12 213 Le Vice-Président (M. Lévesque) : Mmes et MM. les députés, bon matin. Je vous invite à vous asseoir, s'il vous plaît.

Affaires courantes

Déclarations de députés

Et nous en sommes à la rubrique Déclarations de députés. Et la première déclaration, ce matin, sera celle de M. le député de Chapleau. La parole est à vous, monsieur.

Souligner le 65e anniversaire de l'Association pour
l'intégration communautaire de l'Outaouais

M. Mathieu Lévesque

17 851 M. Lévesque (Chapleau) : Merci beaucoup, M. le Président. Aujourd'hui, j'aimerais souligner le 65e anniversaire d'un organisme important de Gatineau et de l'Outaouais, l'Association pour l'intégration communautaire de l'Outaouais, que tous connaissent sous le nom de l'APICO.

L'organisme a pour mission d'offrir des services aux personnes présentant une déficience intellectuelle et leurs familles afin de favoriser et de faciliter l'intégration communautaire, sociale et socioprofessionnelle.

Fondée en 1957, l'APICO apporte une aide concrète et adaptée aux besoins globaux des personnes ayant une déficience intellectuelle. Elle offre, entre autres, des services de répit, que ce soient les activités ponctuelles et structurées organisées par l'organisme ou de l'hébergement temporaire.

M. le Président, en terminant, j'aimerais, en mon nom et au nom de mes collègues députés de Papineau, de Gatineau et de Hull, prendre le temps de remercier et de féliciter M. Stéphane Viau, directeur général, et toute l'équipe de l'APICO pour leur excellent travail. Toutes mes félicitations et bon 65e anniversaire!

12 213 Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Chapleau. Et je cède maintenant la parole à M. le député de Pontiac.

Souligner la victoire de L'Intrépide de Gatineau au Tournoi
international de hockey pee-wee de Québec

M. André Fortin

15 383 M. Fortin : Merci, M. le Président. Je ne vous apprends rien, tout le monde à Québec le sait, la semaine dernière, c'était le tournoi international pee-wee de hockey de Québec. Mais cette année, M. le Président, c'est une édition, disons, encore meilleure qu'à l'habitude. Pourquoi? Parce qu'une équipe de l'Outaouais a remporté les grands honneurs.

L'Intrépide de l'Outaouais pee-wee AA élite a quitté Québec invaincu, six victoires, aucune défaite, 26 buts pour, quatre contre. 8 000 à 10 000 personnes dans les estrades par match, M. le Président. Pas grave, ils sont restés concentrés du début à la fin. Une équipe de New York? Pas de problème, victoire. Des équipes venues d'aussi loin que de la Suisse, M. le Président, victoire par-dessus victoire. Une finale contre le Collège français de Longueuil, ils étaient préparés, ils s'étaient outillés, ils sont restés de glace, gardé leur sang-froid. Résultat : 5 à 1 pour l'Outaouais. Ils sont champions du monde.

Bravo, M. le Président, à nos jeunes de L'Intrépide de l'Outaouais et à leur coach, Éric Dagenais. Toute la région est fière de vous.

12 213 Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Pontiac. Et je cède maintenant la parole à Mme la députée de Saint-François, pour votre déclaration.

Rendre hommage à Mme Sandrine Hébert, nommée Personnalité
de l'année par le journal Le Progrès de Coaticook

Mme Geneviève Hébert

17 877 Mme Hébert : M. le Président, Le Progrès de Coaticook a décerné le titre de Personnalité de l'année 2022 à une vedette de la chanson de ma circonscription, Sandrine Hébert. L'équipe du journal l'a choisie pour sa créativité artistique, son séjour à Star Académie et ses nombreuses participations à des événements de la région.

Dans ses prestations avec son conjoint, M. Denis Bastien, Sandrine met à profit son expérience acquise auprès des artistes qu'elle a rencontrés à la téléréalité musicale, notamment Marie Carmen, Laurence Jalbert, Kaïn et La Chicane. À Coaticook, deux de ses performances ont été particulièrement remarquées à la soirée artistique de la polyvalente La Frontalière et au spectacle de la Saint-Jean. Cet hiver, Mme Sandrine Hébert se concentre sur la composition de nouvelles chansons qui feront partie de ses prochaines sorties.

En plus de sa carrière musicale en duo avec son conjoint, elle s'implique à l'érablière qu'elle possède avec celui-ci à Saint-Isidore-de-Clifton.

À cette passionnée du country et aux produits de l'érable, je souhaite un super 45 tours en 2023. Merci, M. le Président.

12 213 Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Saint-François. Et je cède maintenant la parole à M. le député de Laurier-Dorion, pour votre déclaration.

Appuyer le mouvement citoyen visant à assurer la
sécurité routière aux abords des écoles

M. Andrés Fontecilla

17 953 M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Le 13 décembre dernier, le Québec était endeuillé par le décès de la petite Mariia, frappée par un automobiliste alors qu'elle se rendait à l'école de quartier à pied.

Aujourd'hui, j'aimerais rendre hommage à cette jeune fille et à l'ensemble des parents et membres du personnel scolaire mobilisés pour assurer la sécurité routière aux abords des écoles. Cette mobilisation s'est produite aussi dans mon comté, à Laurier-Dorion, traversé par d'importantes artères de circulation automobile.

Les solutions ne manquent pas pour apaiser la circulation : des bollards, des dos d'âne et des saillies de trottoir, un aménagement urbain qui favorise les déplacements à pied autour des écoles ou encore des radars de contrôle routier. Comme élus et comme parents, je nous invite à être à l'écoute des mesures proposées par celles et ceux qui vivent l'insécurité routière. Bien sûr, cette réflexion ne pourra se faire sans repenser fondamentalement l'omniprésence de la voiture dans nos vies et dans nos déplacements quotidiens. La mobilité durable peut sauver la planète mais aussi des vies. Merci, M. le Président.

12 213 Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Laurier-Dorion. Et la prochaine déclaration sera celle de M. le député de Côte-du-Sud.

Souligner le succès du Sommet du mycotourisme

M. Mathieu Rivest

19 299 M. Rivest : Merci, M. le Président. La région de Côte-du-Sud est une véritable fabrique d'innovations, et ça fait notre fierté.

Au Kamouraska, depuis une dizaine d'années, le secteur de la mycologie fait en sorte de jouer, entre autres, un rôle important et de développer des projets face au secteur des champignons forestiers. On peut penser aux recherches de Biopterre, au festival du Camp musical de Saint-Alexandre, aux outils d'autocueillette, aux restaurants qui utilisent les PFNL et le secteur des champignons forestiers et au rayonnement que ça amène à tout le Kamouraska de faire goûter pleurotes, chanterelles, lactaires à odeur d'érable.

La semaine dernière, notre milieu était l'hôte du deuxième sommet mycotouristique au Québec. Une centaine de personnes de partout à travers le Québec étaient présentes pour partager leur passion autour du secteur des champignons forestiers. Je tiens à féliciter le comité organisateur et, à sa tête, Pascale Malenfant, qui font un succès de cet événement mycotouristique. Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Côte-du-Sud. Et la prochaine déclaration sera celle de M. le député de Marquette.

Rendre hommage à Mme Karine Joly pour ses 15 ans de
service au sein du Centre multi-ressources de Lachine

M. Enrico Ciccone

M. Ciccone : Merci, M. le Président. Un sourire bienveillant, une présence qui illumine, voici quelques-uns des qualificatifs utilisés par les usagers du Centre multi-ressources de Lachine pour décrire Mme Karine Joly, qui est, depuis les 15 dernières années, adjointe administrative de cet organisme au coeur de la vie des Lachinois.

Nous le savons tous, une adjointe administrative est un membre incontournable de toute organisation. Et, dans le cas de cet organisme communautaire qui dessert les Lachinoises et les Lachinois de tous âges depuis 1982, Mme Joly est le visage, le regard et le sourire qui reçoit le personnel, les intervenants et les usagers du Centre multi-ressources de Lachine et qui les accompagne dans leurs démarches pour leur participation et leurs projets.

En ces temps de changement et de mouvements de personnel, je tiens à souligner l'engagement et la loyauté de Mme Joly, parce que sa présence et son travail, au cours de ces années, ont contribué à cimenter la raison d'être du Centre multi-ressources de Lachine dans sa mission de contribuer à l'autonomie et l'intégration des résidents. Un grand merci, Mme Joly. Je vous souhaite une excellente continuité.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Marquette. Et la prochaine déclaration sera celle de M. le député de Saint-Jean. La parole est à vous.

Souligner la création de la Maison des arts Le Renfort

M. Louis Lemieux

M. Lemieux : M. le Président, les travaux de rénovation sont en cours dans une vieille maison du vieux Saint-Jean pour en faire la Maison des arts de la Fondation Le Renfort.

Bon, commençons par Le Renfort. C'est un organisme de chez nous dont la mission est d'améliorer la qualité de vie des enfants et adultes présentant une déficience intellectuelle ou un trouble du spectre de l'autisme. La fondation soutient plus spécifiquement les familles à faibles revenus de ces personnes en leur offrant de l'aide financière directe pour des besoins et des activités liées à leur diagnostic.

Et la Maison des arts, c'est leur nouveau projet. Ce sera un centre d'activités à vocation artistique ayant pour objectif le développement de leurs jeunes et moins jeunes adultes, parce qu'au Québec il y a malheureusement peu de services offerts à cette clientèle de plus de 21 ans.

Vous dire combien je suis fier du Renfort et de cette initiative, c'est ce que je voulais faire aujourd'hui en vantant leurs mérites, et c'est tellement mérité. Bravo et merci au Renfort. Et vivement la Maison des arts de Saint-Jean-sur-Richelieu!

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Saint-Jean. Et la prochaine déclaration sera celle de M. le député de Vachon. La parole est à vous.

Rendre hommage à M. Vincent Géracitano, fondateur
de la chaîne de télévision Avis de recherche inc.

M. Ian Lafrenière

M. Lafrenière : Merci, M. le Président. On utilise souvent l'expression un homme ou une femme de coeur, et aujourd'hui il n'y a aucun mot qui va être plus fort pour décrire le fondateur et le président de la chaîne de télévision Avis de recherche.

Il y a près de 20 ans, j'ai rencontré Vincent Géracitano, alors qu'il m'a présenté la mission de sa chaîne. Celle-ci était consacrée à la prévention et à la sécurité publique 24 sur 24, sept sur sept. Le fondateur voulait assurer la sécurité et la protection des citoyens. Je dois vous avouer, M. le Président, comme policier j'ai eu un gros doute. Comment quelqu'un pouvait vouloir aider des gens sans arrière-pensée? Et je dois vous dire, M. le Président, après mon enquête, je vous confirme, c'est juste un bon gars. La chaîne représentait un espoir pour les familles d'enfants portés disparus, qui pouvaient voir leurs visages à l'écran.

En novembre dernier, le CRTC en a décidé autrement et a fermé cette chaîne de sécurité publique. Malgré cette issue, je remercie Vincent, qui est une des personnes les plus sincères, dévouées et honnêtes qu'il m'ait été possible de rencontrer dans ma carrière.

Vincent, tu es grand. Au nom des familles, au nom des policiers, en mon nom, merci. Merci, M. le Président.

• (9 h 50) •

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Vachon. Et la prochaine déclaration sera celle de Mme la députée de Prévost. Mme la députée.

Souligner la visite à l'Assemblée nationale de membres
du regroupement Partenaires neuro

Mme Sonia Bélanger

Mme Bélanger : M. le Président, aujourd'hui, je tiens à souligner la présence des membres de Partenaires neuro à l'Assemblée nationale.

Partenaires neuro, c'est un regroupement d'associations pour les maladies neurologiques évolutives qui rassemble cinq membres, soit la Société canadienne de la sclérose en plaques, division du Québec, la société de la sclérose latérale amyotrophique du Québec, Parkinson Québec, la Société Huntington du Québec ainsi que Dystrophie musculaire Canada. Ces associations représentent près de 200 000 Québécoises et Québécois touchés par une maladie neurologique évolutive. Ces personnes sont soit atteintes d'une maladie, soit proches aidantes d'une personne atteinte.

Depuis quelques années, les Partenaires neuro collaborent avec le gouvernement du Québec pour échanger avec nous sur le soutien à domicile, l'hébergement, la proche aidance et l'accès aux traitements novateurs.

J'aimerais saluer la présence aujourd'hui dans nos tribunes de Mmes Lynda Archambault, Nicole Destrempes, Éveline Gueppe, Marie-Claude Lépine ainsi que M. Mario Hudon. Merci d'être avec nous, et je remercie l'ensemble des partenaires. Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Prévost. Et je me permets de saluer l'ensemble des personnes ici présentes ce matin. Et je rappelle à l'ensemble des collègues que la prise de parole, la déclaration de député doit durer une minute.

Alors, la prochaine déclaration sera celle de Mme la députée de Châteauguay.

Souhaiter du succès aux athlètes de la circonscription de
Châteauguay lors de la finale des Jeux du Québec

Mme Marie-Belle Gendron

Mme Gendron : Merci, M. le Président. La semaine dernière, en compagnie de mes collègues des circonscriptions voisines, j'ai eu le plaisir de rencontrer les athlètes du Sud-Ouest qui se rendront aux finales des Jeux du Québec, à Rivière-du-Loup, dans les disciplines du hockey, gymnastique, judo, patinage de vitesse.

Bon succès aux jeunes athlètes de ma circonscription : Colin, Léo, Samuel, Julien, Camden, James, Kayla, Élodie, Angelo, Caddy, Youssef, Jenna, ainsi que Sera, Kaitlyn, Ève, Chloé, Jessie, Alyssia, Léa et Laurianne.

Par ailleurs, les circonstances ont fait en sorte que les Jeux du Québec se passent en même temps que les Jeux du Canada, cette année, donc plusieurs athlètes iront également faire rayonner le Québec aux Jeux du Canada, dont Mathis Falcon-Korb, un escrimeur que j'ai eu la chance de rencontrer.

Félicitations aux athlètes pour leur persévérance et tous leurs efforts, et bon succès lors des jeux! Merci.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, Mme la députée de Châteauguay. La prochaine déclaration sera celle de M. le député de Charlesbourg. M. le député.

Souligner le 10e anniversaire de la Corporation Bénévoles d'expertise

M. Jonatan Julien

M. Julien : Oui, merci beaucoup, M. le Président. J'aimerais rendre hommage, aujourd'hui, à l'organisme de Charlesbourg Bénévoles d'expertise, que vous connaissez bien, M. le Président, afin de souligner leur 10e anniversaire. Et je tiens à les saluer, ils sont ici avec nous aujourd'hui. Alors, félicitations!

Cet organisme, M. le Président, a pour mission d'offrir des services de soutien en gestion et en gouvernance par le bénévolat de compétences auprès, justement, d'OBNL qui viennent au service de la communauté. Alors, depuis les 10 dernières années, l'équipe de Mme Nancy St-Pierre, bénévole d'expertise, a soutenu 500 organismes. Avec 420 bénévoles, ils ont fait plus de 1 885 mandats qui, justement, visent à assurer la vitalité, la pérennité d'organismes qui viennent en soutien à la communauté de Québec, du grand Québec.

Félicitations! Bravo pour votre excellent travail! Et on est très fier de vous.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député de Charlesbourg. Et bienvenue aux gens de Bénévoles d'expertise à l'Assemblée nationale.

Pour la dernière déclaration et non la moindre, je cède la parole à M. le député d'Arthabaska.

Souligner la tenue de la 10e Grande Journée des petits entrepreneurs

M. Eric Lefebvre

M. Lefebvre : Merci, M. le Président. Vous avez bien raison, parce que j'ai participé, cette semaine, à une conférence de presse soulignant la 10e Grande Journée des petits entrepreneurs, qui se tiendra partout au Québec le 3 juin prochain, en regroupant des jeunes de 5 à 17 ans.

Pour l'occasion, j'ai pu échanger avec Ozalie et Hubert, de l'entreprise Hubert & Compagnie, de même qu'avec Laurianne, Emy-Rose et Léanne, de la compagnie La Cuisine rose. En tant qu'entrepreneur, M. le Président, ce fut tout simplement magique de voir les étoiles dans les yeux de ces jeunes entrepreneurs. Et que dire de l'engagement des parents!

Une telle activité est loin d'être banale, car elle développe nos entrepreneurs de demain. Je veux remercier la Chambre de commerce et d'industrie Bois-Francs—Érable, qui va offrir un mini-marché d'une vingtaine d'exposants pour nos jeunes entrepreneurs.

Alors, que ce soit en avant de vos résidences, j'invite les jeunes entrepreneurs à participer et j'invite les gens à aller les encourager, le 3 juin prochain. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Lévesque) : Merci beaucoup, M. le député d'Arthabaska. Et cela met fin à la rubrique Déclarations de députés.

Et je suspends nos travaux pour quelques instants.

(Suspension de la séance à 9 h 55)

(Reprise à 10 h 04)

La Présidente : Mmes et MM. les députés, bonjour, tout le monde. Nous allons nous recueillir quelques instants, je vous prie.

Merci à vous tous. Vous pouvez vous asseoir.

Présence de M. François Paradis, ex-parlementaire
de l'Assemblée nationale

J'ai le plaisir de souligner aujourd'hui la présence, dans les tribunes, du 46e président de l'Assemblée nationale, M. François Paradis, et des membres de sa famille.

Des voix : ...

La Présidente : Bon, bon, bon. Alors, M. Paradis est ici à l'occasion du dévoilement de sa photographie officielle, qui aura lieu à 11 h 30, cet avant-midi.

Nous allons poursuivre les affaires courantes.

Aujourd'hui, il n'y a pas de déclarations ministérielles.

Présentation de projets de loi

À la rubrique Présentation de projets de loi, M. le leader du gouvernement.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, je vous demande d'appeler l'article a du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 13

La Présidente : À l'article a du feuilleton, M. le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie présente le projet de loi n° 13, Loi concernant la ligne d'interconnexion Hertel-New York. M. le ministre.

M. Pierre Fitzgibbon

M. Fitzgibbon : Merci, Mme la Présidente. Le projet de loi a pour objet de conférer à Hydro-Québec un pouvoir de cession afin de faciliter son projet de fournir de l'électricité principalement à la ville de New York, lequel inclut la construction et l'exploitation d'installations destinées à transporter de l'électricité entre le poste Hertel, à La Prairie, et un point d'interconnexion dans la rivière Richelieu, à la frontière canado-américaine.

À cette fin, le projet de loi permet à Hydro-Québec de céder la propriété de ces installations de transport d'électricité en faveur d'une personne morale ou d'une société constituée par Hydro-Québec et par le Conseil mohawk de Kahnawake. Quant à cette personne morale ou cette société, le projet de loi détermine son objet et lui octroie les mêmes pouvoirs que détient Hydro-Québec dans l'exercice des activités de transport d'électricité.

De plus, le projet de loi prévoit une procédure d'expropriation allégée applicable aux acquisitions effectuées par Hydro-Québec et nécessaires à la construction de ces installations. Merci.

La Présidente : Est-ce que... Oui, je reconnais le leader de l'opposition officielle.

M. Derraji : Mme la Présidente, nous allons prendre, dans un premier temps, connaissance de ce projet de loi, et, le cas échéant, on va demander des consultations particulières. Merci, Mme la Présidente.

Mise aux voix

La Présidente : Parfait. Est-ce que l'Assemblée accepte d'être saisie de ce projet de loi?

Des voix : Adopté.

La Présidente : Adopté.

Dépôt de documents

À la rubrique Dépôt de documents, M. le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie.

M. Fitzgibbon : Mme la Présidente, permettez-moi de déposer le rapport annuel 2022 d'Hydro-Québec. Merci.

La Présidente : Ce document est déposé. M. le leader du gouvernement, la parole est à vous.

M. Jolin-Barrette : Oui, Mme la Présidente, je dépose la réponse du gouvernement à la question inscrite au feuilleton le 31 janvier 2023 par la députée de Mont-Royal—Outremont ainsi que la réponse du gouvernement à la question déposée en Chambre le 2 décembre 2022 par le député de Marquette.

La Présidente : Ces documents sont déposés.

Il n'y a pas de dépôt de rapports de commissions.

Dépôt de pétitions

À la rubrique Dépôt de pétitions, Mme la députée de Saint-Laurent, la parole est à vous.

Mettre en place des mesures visant à accroître la sécurité piétonnière

Mme Rizqy : Mme la Présidente, je dépose l'extrait d'une pétition adressée à l'Assemblée nationale, signée par 1 498 pétitionnaires. Désignation : citoyens et citoyennes du Québec.

«Les faits invoqués sont les suivants :

«Considérant les collisions fréquentes entre automobilistes et piétons et piétonnes;

«Considérant que chaque personne blessée ou tuée par un ou une automobiliste représente une tragédie qui aurait pu être évitée;

«Considérant l'augmentation de la circulation automobile dans les secteurs résidentiels et scolaires;

«Considérant l'autorité du ministère des Transports;

«Considérant l'importance du leadership et de l'effet de levier du gouvernement du Québec pour assurer que la sécurité piétonne soit une priorité à chaque palier gouvernemental;

«Et l'intervention réclamée se résume ainsi :

«Nous, signataires, demandons au gouvernement du Québec de :

«Reconnaître le danger auquel font face les piétons et les piétonnes à cause des automobilistes;

«Mettre immédiatement à l'étude différentes solutions, y compris en infrastructure, afin d'assurer la sécurité des piétons et des piétonnes;

«Veiller à augmenter les ressources affectées à l'incitation et à la sécurisation de la mobilité active et d'autres alternatives aux automobiles privées;

«Mettre en place des pénalités dissuasives plus sévères au Code de la sécurité routière pour les infractions en zone scolaire.»

Je certifie que cet extrait est conforme à l'original de la pétition.

La Présidente : Cet extrait de pétition est déposé.

Il n'y a pas de réponses orales aux pétitions ni d'interventions portant sur une violation de droit ou de privilège.

Questions et réponses orales

Nous en sommes maintenant à la période de questions et réponses orales, et je cède la parole, pour sa question principale, au chef de l'opposition officielle.

Impact des priorités du gouvernement sur les jeunes générations

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, Mme la Présidente. On l'a dit, ça fait plusieurs fois qu'on le dit, le premier ministre manque de vision. Il fait souvent des promesses qui n'ont pas suffisamment de réflexion et de fondement et qui ont des conséquences négatives majeures pour les générations futures.

Un exemple patent qu'on a vu hier, c'est la promesse de 2018 du premier ministre de lancer le Québec, et c'est ce qu'il a fait, dans les maternelles quatre ans. Et il disait, à l'époque, mettre son siège en jeu et il disait qu'il allait éliminer la liste d'attente des 50 000 jeunes qui attendent une place en service de garde, ça allait passer par les maternelles quatre ans. On a vu que ce qui était promis, c'étaient 5 000 classes à un coût de 122 000 $ dans leur cinquième année. C'est un échec : 1 600, pas 5 000, à un coût moyen de 1,2 million par classe. Pendant ce temps-là, le résultat net, Mme la Présidente, toujours 50 000 enfants d'inscrits sur la liste d'attente pour un service de garde.

Autre exemple d'un manque de vision, c'est de couper les versements du Fonds des générations pour payer les baisses d'impôt. Créé en 2006, le Fonds des générations a essentiellement deux objectifs : diminuer, de un, le poids de la dette aujourd'hui et, de deux, de permettre aux générations futures d'avoir les moyens d'avoir des services de qualité. Son efficacité est démontrée notamment par la Chaire de recherche en fiscalité de l'Université de Sherbrooke.

Le premier ministre peut-il aujourd'hui dire qu'il renonce à financer ses baisses d'impôt pour endetter les générations futures?

• (10 h 10) •

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, il y a comme deux grandes questions dans la question du chef de l'opposition officielle.

D'abord, les maternelles quatre ans. Je l'ai souvent dit, si j'avais à choisir une priorité, pourquoi je suis en politique, c'est la réussite de nos enfants. Pour y arriver, ce qu'on a besoin, c'est d'agir tôt. Ça veut dire quoi, ça? Puis je sais que le ministre délégué aux Services sociaux — pas délégué, il n'est plus délégué pantoute, là — le sait très bien, comme spécialiste, agir tôt, ça veut dire être capable de donner des services, entre autres, aux enfants qui ont des difficultés d'apprentissage. Au Québec, on a évalué qu'il y a 25 % des enfants qui sont ce qu'on appelle des EHDAA. Et de leur offrir la maternelle quatre ans, ça veut dire quoi? Ça veut dire être capable, dans une école primaire, d'avoir accès à des orthophonistes, des orthopédagogues, de multiplier les chances pour ces enfants de réussir, parce que la majorité ont le potentiel de réussir si on agit tôt. Donc, Mme la Présidente, pour moi, ça reste un objectif important, d'offrir à tous les enfants la maternelle quatre ans.

Maintenant, on est pragmatiques, on voit très bien, actuellement, qu'il y a une pénurie d'enseignants. Ça prend quatre ans, former un enseignant. Donc, au fur et à mesure qu'on aura des enseignants disponibles, on va compléter le réseau des maternelles quatre ans. Mais ce qu'il est important de dire, c'est que, dans beaucoup de régions, on a assez d'enseignants puis on continue d'ouvrir des maternelles quatre ans. Donc, on va y aller le plus vite possible.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Bien, sur les maternelles quatre ans, Mme la Présidente, il dit qu'il est pragmatique. Il était pragmatique, j'espère, en 2018, quand il faisait la promesse d'en créer 5 000 puis de libérer 50 000 places. On lui disait, à l'époque : Les coûts vont exploser. Et c'est ce qui est arrivé, dans les faits, et en plus on a pris des éducatrices du service de garde pour les envoyer aux maternelles quatre ans.

Ce que je constate... Le premier ministre dit, puis je suis d'accord avec lui : Il faut agir tôt. Mais la liste d'attente est toujours de 50 000 noms, puis il y a des enfants de 18 mois, deux ans, trois ans également qui n'ont pas de place en service de garde.

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, je trouve ça incroyable, là, d'entendre du Parti libéral, qui a déjà été un grand parti, de dire : Les coûts sont trop élevés pour la maternelle quatre ans, les coûts sont trop élevés pour bien s'occuper de nos enfants de quatre ans, pour leur donner tous les outils pour réussir. Je comprends qu'il y a un débat. Et ce qu'on veut, c'est d'offrir le choix entre des CPE, des garderies et des maternelles quatre ans, il y a des avantages des deux côtés. Mais moi, je pense que c'est important d'être capable d'offrir le choix, aux parents qui ont des enfants en difficulté, de la maternelle quatre ans, puis, pour moi, contrairement au Parti libéral, ça ne coûte pas trop cher.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Mme la Présidente, M. et Mme Tout-le-monde vont comprendre très bien, là. Il dit : Il faut être pragmatique, puis il dit : Parti libéral, ça coûte trop cher. Pour un 12 places de maternelle quatre ans, ça vous coûte 1,2 million; pour un CPE, 80 places, ça vous coûte 2 millions. Une fois que vous avez dit ça, tout le monde a compris, Mme la Présidente, là. 1,2 million pour 12 places, 2 millions pour 80 places. Oui, agir tôt, mais pour tous nos enfants, ceux qui ont 18 mois jusqu'à cinq ans également. C'est un échec. La liste est toujours de 50 000 noms sur la liste d'attente.

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, Mme la Présidente, une chance qu'on n'écoute pas le Parti libéral, parce qu'on est rendus... Actuellement, il y a 19 000 enfants, au Québec, qui ont accès à une maternelle quatre ans. Oui, il y a des services aussi qu'on doit compléter du côté des garderies. Je pense que c'est important d'offrir le choix aux deux. Puis, bon, j'ai réentendu le chef par intérim du Parti libéral dire que c'est trop cher, les maternelles quatre ans. Moi, je pense que ce n'est pas trop cher pour ce qu'on a de plus important, c'est-à-dire nos enfants.

La Présidente : Troisième complémentaire.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : J'aimerais entendre le premier ministre sur une autre décision, donc, qu'il s'apprête à prendre dans le prochain budget, à savoir de couper les versements au Fonds des générations. Lui, il veut couper de 40 %. Vous allez me dire qu'il est moins pire que Québec solidaire, qui veulent, eux, couper de 100 %, imaginez-vous donc, les versements dans le Fonds des générations puis hypothéquer davantage l'avenir de nos jeunes.

Le premier ministre peut-il s'engager, à la veille du budget, à ne pas couper dans les versements du Fonds des générations et faire en sorte, comme le dit le président de Force Jeunesse, qu'on ne met pas ça sur la carte de crédit de nos jeunes?

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, Mme la Présidente, je pense que c'est possible de faire les deux, c'est-à-dire de réduire les impôts... pour deux raisons : pour l'économie, pour mettre un incitatif au travail, et, deuxièmement, pour aider le portefeuille des Québécois.

Là, je note bien, là, puis je pense que les Québécois ont tous entendu, le Parti libéral est contre les baisses d'impôt. Mais ce qui est important, c'est de dire qu'on va bien financer les services. On ne fera pas, comme l'a dit Carlos Leitão, des coupures en éducation comme l'a fait le Parti libéral.

La Présidente : En question principale, je reconnais Mme la députée de Saint-Laurent.

Accès à la maternelle quatre ans

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Mme la Présidente, je suis quand même assez étonnée d'entendre le ministre de dire qu'il donne le choix aux parents. En ce moment, les parents n'ont pas le choix parce que la liste d'attente pour les CPE, elle a explosé, et, pour les maternelles quatre ans, bien, il n'y a juste pas de classes.

Et ce n'est pas parce que nous, on n'a pas essayé de prévenir ce gouvernement. À plusieurs reprises, je me suis levée pour leur dire : On n'a pas d'enseignants, et on n'a pas assez de classes, et on devrait prioriser, justement, des enfants en milieu défavorisé et qui n'ont pas eu accès à un service de garde. À chaque fois qu'on a fait cette proposition, ils l'ont refusée. On la réitère à nouveau, cette proposition.

Mais moi, j'ai eu la chance d'avoir un autre ministre qui m'a répondu : Il suffit de voir un peu plus grand, puis tout devient possible. Tel un coach de vie sur YouTube : Fermez vos yeux puis avancez.

Moi, aujourd'hui, je demande au premier ministre... je ne lui demande pas de se lever, je sais que son siège est en jeu, là, alors ça peut être risqué, si jamais il se lève, mais est-ce qu'il veut entendre raison puis, cette fois-ci, de prioriser ceux qui en ont le plus besoin : milieux défavorisés et ceux qui n'ont pas eu accès à un service de garde régi?

La Présidente : M. le...

Des voix : ...

La Présidente : S'il vous plaît! Pas de commentaire. M. le ministre de l'Éducation, la parole est à vous.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : D'abord, Mme la Présidente, le ton général de la question et des interventions, jusqu'à maintenant, c'est d'essayer de dépeindre les maternelles quatre ans comme si c'était quelque chose qui n'était pas bon puis comme si le fait d'avoir créé 926 classes de maternelle quatre ans, depuis quatre ans... comme si ça, ce n'était pas une bonne affaire.

C'est une excellente chose, Mme la Présidente, qu'on ait créé 926 classes de maternelle quatre ans, depuis quatre ans. Quand on est arrivés, il y en avait 660; aujourd'hui, on est tout près de 1 600. Et savez-vous quoi? On va continuer à en créer, des classes de maternelles quatre ans. Juste cette année, il y en aura une centaine de plus. Et on continue, pas parce qu'on est obnubilés, non, parce qu'on pense que c'est bon pour les enfants. D'amener des enfants, d'intégrer des enfants dans le réseau scolaire, c'est démontré, c'est bon pour la réussite éducative et c'est bon pour lutter contre le décrochage.

Alors, on est très fiers des maternelles quatre ans, on va continuer à en créer. On va se rendre à 2 600. Ça va juste prendre un petit peu plus de temps pour y arriver.

Des voix : ...

La Présidente : Oh! S'il vous plaît, pas de commentaire après les réponses ni après les questions. Mme la députée, première complémentaire.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Ça va juste prendre un peu plus de temps pour y arriver. Aux parents qui ont voté, en 2018, pour la maternelle quatre ans, pour la CAQ, votre enfant a le temps de se rendre à son bal des finissants avant d'avoir une place en maternelle quatre ans.

Alors, moi, je veux juste réitérer, là : Est-ce que vous entendez notre proposition, qui date depuis 2018, prioriser les enfants en milieu défavorisé et les enfants qui n'ont pas eu accès à un service de garde régi? Vous dites que vous n'êtes pas dogmatiques. Est-ce que, cette fois-ci, vous pouvez faire preuve réellement de pragmatisme, s'il vous plaît?

La Présidente : M. le ministre de l'Éducation.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Mme la Présidente, la députée de Saint-Laurent devrait lire la loi, la loi dit que ce sont les milieux défavorisés qui doivent être priorisés. Ce n'est pas pour rien, Mme la Présidente, que le deux tiers des maternelles quatre ans sont en milieu défavorisé. Visiblement, la députée n'était pas au courant de ces chiffres. Je l'en informe, ça me fait plaisir.

Par ailleurs, par ailleurs, Mme la Présidente, pendant la dernière campagne électorale : Les libéraux s'engagent à conserver les classes de maternelle quatre ans. Ça ne doit pas être si mauvais que ça, les classes de maternelle quatre ans, s'ils s'engageaient à les conserver.

Des voix : ...

La Présidente : Bon, s'il vous plaît! Mme la députée, deuxième complémentaire.

Mme Marwah Rizqy

Mme Rizqy : Je réitère, nous avons toujours dit que nous sommes pour les maternelles quatre ans, mais pas pour du mur-à-mur, pas pour du mur-à-mur, pour du sur-mesure...

Des voix : ...

La Présidente : Mme la députée, Mme la députée...

Des voix : ...

La Présidente : Retrouvez votre calme. C'était bien parti. M. le leader de l'opposition officielle, je vous écoute.

• (10 h 20) •

M. Derraji : Mme la Présidente, clairement, on assiste à la majorité des voix. C'est vrai, ils sont 90. Mais est-ce qu'on peut laisser la députée de Saint-Laurent poser sa question avec un peu de silence, s'il vous plaît, Mme la Présidente?

La Présidente : Et, M. le leader du gouvernement, c'est la raison pour laquelle je suis debout, on retrouve le silence et on laisse la députée terminer sa question. Merci.

Mme Rizqy : Je le sais, que vous êtes bon dans les tableaux de bord, je vous en ai préparé un parce qu'on veut vous aider à atteindre vos objectifs. Alors, pour 2030, on veut juste s'assurer que la réponse ne sera pas, dans quelques semaines, «on verra». Alors, je vous dépose le tableau de bord, Mme la Présidente, si possible.

Et je vous réitère aussi une chose. Quand vous dites que ce n'est pas dans les milieux défavorisés que vous l'avez fait, je m'excuse, vous avez ralenti des projets pour imposer vos maternelles quatre ans.

La Présidente : M. le ministre de l'Éducation, la réponse est à vous.

M. Bernard Drainville

M. Drainville : Mme la Présidente, tableau pour tableau : L'ex-ministre des Finances Carlos Leitão admet des regrets. Bien oui.

Des voix : ...

La Présidente : Bon, je suis debout. Vous perdez des précieuses secondes de période de questions. Et vous savez que les tableaux sont permis; les articles de journaux, c'est autre chose. M. le leader, c'est ce que vous voulez me dire?

M. Derraji : ...ce n'est pas la première fois que le ministre de l'Éducation vit dans le passé. Je tiens à lui rappeler que, quand il était avec Nicolas Marceau, il disait : On s'est trompés. Vous savez de combien? 2,5 milliards.

La Présidente : Nous pourrions revenir sur la question. M. le leader du gouvernement, oui.

M. Jolin-Barrette : Mme la Présidente, écoutez, je croyais que le collègue allait faire une question de règlement. Et je tiens à l'assurer que c'est un tableau didactique, lorsque l'ex-ministre des Finances Carlos Leitão admet ses regrets par rapport à avoir coupé. Alors, écoutez, c'est très didactique et c'est écrit noir sur blanc, c'est un tableau, c'est en carton.

La Présidente : Bon, nous sommes maintenant rendus à la réponse. Votre question était claire, nous attendons une réponse du ministre de l'Éducation. Et je vous demande le respect. On écoute les questions, on écoute les réponses.

M. Drainville : Mme la Présidente, la raison pour laquelle on est obligés de ralentir, c'est parce qu'il nous manque d'enseignants. Ils les ont foutus à la retraite avec leur austérité. C'est l'ancien ministre des Finances qui le dit lui-même et qui s'excuse. Et on attend toujours les excuses de l'aile parlementaire actuelle sur cette question. Le chef intérimaire s'est avancé là-dessus, mais la porte-parole en éducation, de Saint-Laurent, elle a déjà voulu s'excuser au nom de son parti pour le tort qu'elle a causé aux écoles et aux enfants. On attend toujours ses excuses en la matière.

Pendant ce temps, il y avait 4 700 élèves en maternelle quatre ans en 2018‑2019. Il y en a aujourd'hui...

Des voix : ...

La Présidente : Oui, M. le leader de l'opposition officielle. M. le leader.

M. Derraji : Moi, je l'invite à déposer le document qu'il vient de lire, Mme la Présidente, en Chambre, s'il vous plaît. S'il vous plaît, qu'il dépose le...

La Présidente : Si vous voulez le déposer. M. le leader.

M. Jolin-Barrette : On va envoyer une copie du tableau sans les notes personnelles du ministre, Mme la Présidente.

Document déposé

La Présidente : Parfait. Alors, en question principale, M. le député de Pontiac, la parole est à vous. On écoute la question.

Rapport de la médiatrice sur l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont

M. André Fortin

M. Fortin : Bel exemple du «on verra», Mme la Présidente. Mais, quand on parle de manque de vision du gouvernement de la CAQ, difficile de trouver mieux que l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont et les conditions de travail des infirmières.

Après la crise du mois dernier à l'hôpital, où, on se le rappelle tous, là, les infirmières ont refusé de travailler dans des conditions de travail toxiques et insécuritaires pour les patients, le ministre a mis le couvercle sur la marmite temporairement en nommant une médiatrice. Bien, voilà, son rapport est sorti. Et qu'est-ce qu'elle nous dit? Entre autres que l'achalandage est trop élevé pour la capacité des installations. En d'autres mots, là, ce qu'elle nous dit, c'est qu'il y a nettement trop de demande pour la capacité des installations. Pire, elle dit qu'à moins de régler la chose il va y avoir crise après crise, après crise. Ça, c'est clair.

Là où ça se gâte, Mme la Présidente, c'est que le ministre semble tenir mordicus à son plan et procéder en deux phases pour les travaux de Maisonneuve-Rosemont. Est-ce qu'il peut entendre l'appel de la médiatrice, abandonner son plan broche à foin et peser sur l'accélérateur?

La Présidente : M. le ministre de la Santé, la réponse est à vous.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je pense qu'on n'a pas lu le même rapport, Mme la Présidente. Le rapport qui a été publié il y a quelques jours et qui été mis public, premièrement, moi, je suis très content de ce rapport-là, parce qu'on avait, justement, demandé deux choses. On avait demandé de fouiller qu'est-ce qu'il en était exactement avec le climat de travail qui se passait à Maisonneuve-Rosemont. Puis une des raisons... Puis on savait qu'il y avait un problème de climat de travail. Puis là je ne suis pas en train de dire est-ce que c'est du côté du syndicat, des gestionnaires, je dis juste qu'on savait qu'il y avait un problème important de climat de travail. On a demandé une médiatrice, grâce à mes collègues qui m'ont fait des suggestions, et cette dame-là, elle a fait un travail puis elle a réalisé non seulement qu'il y avait un problème de climat de travail, mais elle nous a dit : Il devrait y avoir une autre étape pour essayer, avec un expert, de trouver des solutions à ce climat de travail là, parce que, justement, on n'est pas capables de mettre en place les mêmes pratiques qu'on a mises ailleurs. Rappelez-vous, Mme la Présidente, que je disais : Y a-tu une raison pourquoi qu'à Maisonneuve-Rosemont ils ne sont pas capables de faire des meilleures pratiques comme on fait ailleurs, entre autres les gestions de travail... la gestion des horaires?

Alors, moi, je me dis, pas sûr que le député de Pontiac a lu le même rapport que moi, parce que moi, je suis très content des conclusions qu'on a eues.

La Présidente : Première complémentaire.

M. André Fortin

M. Fortin : Moi, je pense que le ministre a lu la page qu'il voulait dans le rapport, parce que la médiatrice, là, nommée par le gouvernement, ce qu'elle dit, c'est : Augmentez la capacité, sinon il va y avoir d'autres crises. Puis le ministre, lui, il ne change absolument rien dans son plan de match. Pire, il accepte encore de faire une partie des travaux à Maisonneuve-Rosemont, quitte à repousser aux calendes grecques la deuxième partie. Pourquoi? Pour prioriser son mini-hôpital privé.

Ça, là, c'est une promesse de faire passer son idéologie dogmatique avant les besoins du personnel. C'est un manque complet de vision.

La Présidente : M. le ministre.

M. Christian Dubé

M. Dubé : ...Mme la Présidente, mais je pense qu'encore une fois le député de Pontiac mêle deux choses. La deuxième étape dont on parle, ça n'a rien à voir avec la construction de l'hôpital, c'est que la médiatrice dit : Il doit y avoir une deuxième étape pour travailler le climat de travail, de trouver des solutions ensemble. Ça n'a rien à voir avec la construction de l'hôpital elle-même.

Alors, moi, je l'inviterais à relire le rapport, Mme la Présidente, parce que je ne pense pas du tout qu'on a la même interprétation d'un excellent travail de médiation qui a été fait, qu'ils doivent continuer. Puis moi, je crois qu'il va y avoir des solutions, parce que les employés, les gestionnaires se sont entendus pour continuer à travailler ensemble, ce qui était un peu plus difficile avant l'arrivée de la médiatrice.

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. André Fortin

M. Fortin : S'il veut parler des conditions de travail, on peut le faire. Le CIUSSS de la Mauricie a lancé, cette semaine, un nouveau pitch de recrutement en promettant le café gratuit à tous ses employés. Problème, Mme la Présidente : le café, comme les toasts, d'ailleurs, n'a jamais été gratuit pour tous les employés du réseau de la santé. Citation d'infirmière : «Ça fait sept ans que je travaille ici, je n'ai jamais eu ça, des cafés gratuits. Il faut encore que j'apporte mes propres capsules de café.»

Alors, est-ce que la promesse tient? Est-ce qu'il va y avoir café gratuit pour tous les employés du réseau? Si oui, bravo! Si non, on a apporté une capsule pour le ministre, ça va aller très bien avec ses petits caramels.

Des voix : ...

La Présidente : Bon, s'il vous plaît! Les commentaires, vous gardez vos commentaires pour vous. Et vous perdez du temps. M. le ministre, votre réponse.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Je suis en train de me chercher un petit caramel puis je n'en trouve pas.

Écoutez, Mme la Présidente, on vient de passer d'un rapport de médiation à Maisonneuve-Rosemont à du café gratuit. Est-ce que ça veut dire que le député s'est trompé dans sa question, Mme la Présidente? Je veux juste être sûr, là, parce que, moi, ça ne me fait rien de creuser ce qui va se passer avec le café. Mais je veux juste être certain, madame... je veux juste savoir, Mme la Présidente : Est-ce qu'il a terminé sa question sur Maisonneuve-Rosemont? C'est moi qui lui en pose une, question, là.

La Présidente : En question principale, je reconnais maintenant le chef du deuxième groupe d'opposition. La parole est à vous.

Hausse du coût du logement

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, Mme la Présidente. Sous la gouverne du premier ministre, le Québec est devenu la société des logements disparus. Il y a une nouvelle étude de l'Université McMaster, qui a paru hier, qui révèle des chiffres catastrophiques — tenez-vous bien, ça fesse : depuis cinq ans, le Québec a perdu, perdu 116 000 logements abordables. 90 000 logements abordables ont été balayés de la carte juste à Montréal. Ça, c'est 10 fois le nombre de logements construits ou financés bientôt, peut-être, si on est chanceux, dont parlait le premier ministre dans sa réponse confuse d'hier. Le vrai bilan, en logement, du premier ministre, là, c'est les pires hausses de loyer en 30 ans au Québec. C'est ça, son bilan.

Mme la Présidente, le temps passe vite. En 2021, là, le seul endroit au Québec où on trouvait des logements à 500 $, c'est dans l'imagination du premier ministre. Aujourd'hui, la seule place où on trouve ça, un logement abordable, c'est sur ses pancartes électorales dans Saint-Henri—Sainte-Anne.

Il y a 10 jours, la ministre de l'Habitation a été incapable de répondre à une question simple : 1 600 $, 1 700 $, comme loyer, là, est-ce que c'est trop cher? Elle n'a pas été capable de répondre.

Ça fait que je me tourne vers le premier ministre. Lui, là, 1 600 $, 1 700 $ comme loyer, en ce moment, à Montréal, est-ce qu'il trouve ça trop cher, oui ou non?

• (10 h 30) •

La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Mme la Présidente, durant la campagne électorale, Québec solidaire disait qu'il manquait 50 000 logements. Là, ils sont rendus à 116 000 logements. Bon, selon les spécialistes du ministère de l'Habitation, une fois qu'on va avoir terminé les 15 000 logements, il va manquer 11 700 logements au Québec. Donc, grand total, 26 700.

Ce qu'il est important de dire, Mme la Présidente, c'est que, sur les 15 000 logements qu'on a annoncés durant le dernier mandat, il y en a 9 000 qui sont soit construits ou en chantier. Je sais qu'il voulait avoir le détail : 5 400 finis, 5 400 finis; 3 600, planches, clous. Donc, au total, 9 000 qui vont être construits bientôt.

Mme la Présidente, il y a plusieurs façons d'aider les gens avec le logement. On se souvient que Québec solidaire était contre le 500 $ qu'on a donné aux gens, était contre le 600 $ qu'on a donné au mois de décembre. On se souvient ce que proposait Québec solidaire : des taxes orange. Je ne le sais pas, là. Je sais qu'ils ont eu un grand conseil national, puis il s'est excusé d'avoir proposé des taxes orange. Donc, j'aimerais qu'il nous tienne au courant, là. Est-il toujours d'accord pour proposer des taxes orange pour aider les Québécois avec leur logement?

12 187 La Présidente : Première complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

16 827 M. Nadeau-Dubois : Je pourrais commenter la confusion du premier ministre, je ne le ferai pas. Mais je l'invite à faire sa revue de presse. 100 000 logements abordables disparus, au Québec. 100 000 logements abordables disparus, au Québec, en cinq ans. Ça, c'est sous sa gouverne. Mais il vient de nous donner une nouvelle intéressante, il vient de nous confirmer 5 400 logements de construits. Il en avait promis 15 000, il en a livré 5 000.

En logements, là, la CAQ, ils ne font pas les choses à moitié, ils les font au tiers.

12 187 La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Bien, Mme la Présidente, là, ce que j'ai compris, c'est que, le chef de Québec solidaire, son département de recherche, c'est d'ouvrir le journal puis dire : Aïe! il manque 116 000 logements. Donc, lui-même, il s'est trompé, Mme la Présidente, parce que, pendant toute la campagne électorale, il disait qu'il manquait 50 000. Donc, il s'est trompé, hein? C'est le double, là, aujourd'hui, selon son nouveau département de recherche.

Mme la Présidente, c'est important de dire que la ministre de l'Habitation travaille. Entre autres, on a fait des annonces avec Desjardins, avec le Fonds de solidarité pour accélérer la construction parce que c'est trop long avec les OMH. Donc, je voudrais concrètement qu'il nous dise, là, parce que l'argent est là, il faut maintenant les bâtir, qu'est-ce qu'il propose concrètement.

12 187 La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

16 827 M. Nadeau-Dubois : C'est fascinant, Mme la Présidente. Le premier ministre saisit chaque occasion que je lui fournis pour étaler publiquement son incompréhension de la crise du logement au Québec. Il vient de démontrer qu'il ne sait même pas c'est quoi, la différence entre du logement social puis du logement abordable. Moi, je ne ferai pas de joke, parce que la crise du logement, ce n'est pas une joke. Il y a du monde à la rue, il y a du monde qui se font expulser, il y a du monde qui vivent dans la misère parce que leur loyer explose, puis le premier ministre, il ne fait rien.

Mais il doit être content. Il vient de dépasser l'Ontario. C'est lui, le champion canadien de la perte de logements abordables.

12 187 La Présidente : M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui. Mme la Présidente, c'est rendu Québec solidaire qui se compare avec l'Ontario. Donc, il y a peut-être des choses, là, qui avancent. Mais ce qu'il est important de savoir, c'est que l'Ontario a essayé de geler le prix des loyers. Ça a été un échec, un échec total.

Donc, Mme la Présidente, oui, il manque de logement social, de logements abordables. On est en train de les construire le plus vite possible. On a du rattrapage à faire avec ce qui avait été fait dans les années qui nous précédaient. Mais ce n'est pas sérieux, Mme la Présidente, un parti qui prétend vouloir gouverner, de dire qu'il manque 116 000 logements au Québec. Ça n'a juste pas d'allure. C'est une joke.

12 187 La Présidente : En question... je reconnais la députée de Verdun. À vous seule la parole, madame.

Protection des droits des locataires aînés

Mme Alejandra Zaga Mendez

19 263 Mme Zaga Mendez : Merci, Mme la Présidente. Le 16 décembre dernier, 12 locataires d'un immeuble à Verdun, ils ont reçu un cadeau de Noël digne de l'Halloween, ils ont reçu un avis d'éviction. Quatre personnes ont échappé à l'éviction. Pourquoi? Parce que ces personnes-là sont protégées par la loi Françoise David. L'une de ces personnes m'a même dit avoir pleuré quand elle a su qu'elle allait être protégée puis qu'elle allait pouvoir rester dans son logement.

Maintenant, qu'est-ce qu'on fait avec les autres personnes? Ce sont des personnes aînées, ce sont aussi des personnes vulnérables, souvent malades, mais ils ne rentrent pas dans les critères de la loi. M. Roger, il a 69 ans, il n'est pas protégé. Il vit avec 1 200 $ par mois. Il va s'en aller où?

On est dus pour une loi Françoise David 2.0. Ma collègue la députée de Sherbrooke a déposé un projet de loi hier.

Est-ce que le gouvernement va appeler le projet de loi?

La Présidente : Mme la ministre responsable de l'Habitation.

Mme France-Élaine Duranceau

Mme Duranceau : Merci, Mme la Présidente. Alors, comme je l'ai mentionné hier, on va prendre... on a pris connaissance du projet de loi, on regarde ça. Québec solidaire propose beaucoup de mesures, là, la clause F à revoir, la reprise du logement dans un cas de changement d'usage, puis là il y a des Airbnb, ça ne fonctionne pas, écoutez, éviction pour reprise du logement, pour agrandissement ou subdivision. J'ai tout entendu ça. Je lis les mêmes journaux que vous, j'entends les mêmes... comme vous, O.K.? Je l'ai dit, les situations que vous décrivez, chaque jour, ce sont des situations difficiles pour les gens qui les vivent. Je ne suis pas insensible à ça, je l'ai répété à de multiples reprises, à chaque semaine j'en parle. Et on agit là-dessus. Ma collègue députée de Labelle, au risque de me répéter, travaille sur toutes les règles qui régissent relations locataires-propriétaires.

Alors, tout ce dont vous avez parlé, on le regarde puis on va voir là où on peut agir. Et je tiens à mentionner qu'il y a le côté locataire, puis il y a le côté propriétaire, puis il faut un équilibre entre les deux. Et il y a le TAL qui est là en ce moment pour gérer cet équilibre-là.

La Présidente : Je vous rappelle que vous vous adressez à la présidence. Première complémentaire.

Mme Alejandra Zaga Mendez

Mme Zaga Mendez : ...beaucoup de solutions pour régler cette crise du logement. Puis je vous partage que cet été, quand je me promenais sur la rue Wellington, les gens nous arrêtaient pour nous remercier pour la loi Françoise David, parce que c'est grâce à cette loi-là que des aînés peuvent rester dans leur appartement, dans leur maison. Puis c'est le cas dans Verdun, c'est le cas dans tout le Sud-Ouest puis même partout au Québec.

Le premier ministre nous a promis de travailler avec les oppositions. La CAQ, vous l'avez dit, vous voulez protéger les... Ils veulent protéger les locataires. Alors, est-ce que les bottines vont suivre...

La Présidente : Mme la ministre.

Mme France-Élaine Duranceau

Mme Duranceau : ...répète, là on a besoin de quelques semaines, là, pour travailler avec vous. Ça fait que laissez-nous le temps, ça avance, O.K.? Et, l'autre chose, il ne faut pas oublier qu'il faut créer un environnement qui est propice aussi à l'investissement, là, puis que les gens aient des immeubles qui sont salubres, qui sont propres puis qui sont de bonne qualité.

Alors, l'équilibre, il faut le maintenir. Puis c'est l'objectif du travail de la députée de Labelle, c'est de maintenir cet équilibre-là tout en protégeant les personnes vulnérables, parce que c'est notre rôle, comme gouvernement, de s'assurer que ces gens-là, ils sont bien protégés par la loi. Et voilà, Mme la Présidente.

La Présidente : Deuxième complémentaire. Je reconnais la députée de Sherbrooke.

Mme Christine Labrie

Mme Labrie : Dans chacune de nos 125 circonscriptions, en ce moment, il y a des aînés qui sont en panique parce qu'ils en ont reçu un, avis d'éviction, puis ils savent très bien qu'avec les loyers sur le marché en ce moment ils ne sont pas capables de se reloger à ce prix-là. Les promesses de logements sociaux, la CAQ n'est pas capable de les livrer. Ils ne sont pas capables d'abolir la clause F. Le minimum, ce serait de protéger les aînés contre les évictions.

Qu'est-ce que les députés de la CAQ qui sont ici attendent pour mieux protéger les aînés? Pourquoi ils refusent d'agir rapidement pour mieux protéger les aînés de partout, dans toutes leurs circonscriptions?

La Présidente : La réponse de la ministre.

Mme France-Élaine Duranceau

Mme Duranceau : Oui, merci, Mme la Présidente. Alors, on a agi de différentes façons, là. On a agi avec le bouclier anti-inflation. Il y a de l'argent qui a été remis aux contribuables. Le crédit pour maintien à domicile a été haussé à 2 000 $ par personne pour les contribuables de 70 ans et plus. Alors, on a agi financièrement. Et là, au risque de me répéter encore, on va agir en matière de relations locataires-propriétaires puis intervenir là où il y a des cas qui n'ont pas de bon sens. Puis, s'il y a des propriétaires qui sont non... qui sont, quoi, non scrupuleux puis qui agissent...

Une voix : ...

Mme Duranceau : ...qui abusent, c'est ça, je m'excuse, on va intervenir. Alors...

• (10 h 40) •

La Présidente : ...je reconnais le député de — silence, je vous prie — Marguerite-Bourgeoys.

Utilisation du Fonds des générations pour financer des baisses d'impôt

M. Frédéric Beauchemin

M. Beauchemin : Mme la Présidente, utiliser 40 % des versements au Fonds des générations pour financer des baisses d'impôt, c'est ignoble, injuste et inéquitable.

Des voix : ...

La Présidente : M. le leader.

M. Jolin-Barrette : On peut dire les choses doucement comme le député de Margueite-Bourgeoys, mais ce n'est pas parce qu'on les dit doucement qu'elles sont plus acceptables. Ce sont des propos blessants. Et on demande au député de Marguerite-Bourgeoys d'agir et d'utiliser des paroles... retirer ses paroles. Mais, surtout, le ton de sa question, on l'aime beaucoup. On voudrait juste que, les mots aussi, on apprécie.

La Présidente : Bon, nous allons poursuivre. Faites attention au choix des mots, je vous prie. Poursuivez.

M. Beauchemin : Il n'y a pas de problème.

Ça, c'est comme payer son épicerie à même le compte d'épargne des enfants. Pire, ce que la CAQ fait, c'est se payer un party dans un bar, partir avant que la facture arrive, la laisser aux jeunes. C'est tout à fait incroyable.

Historiquement, le rendement au Fonds des générations est de 6,3 %. Historiquement, le taux d'emprunt moyen du gouvernement est de 3,1 %. Ça ne prend pas la tête à Papineau pour comprendre que c'est rentable de continuer à placer cet argent pour nos jeunes.

La Présidente : M. le leader, une question de règlement? Je vous prie.

M. Jolin-Barrette : ...l'article 35, on nous prête des intentions, les propos sont blessants. Je comprends que c'est le service de recherche du Parti libéral qui a écrit la question, mais le député a une responsabilité quand il la pose, sa question. Donc, un peu...

La Présidente : Bon. M. le leader de l'opposition officielle, brièvement.

M. Derraji : Bien, brièvement, je l'invite à consulter son service de la recherche. C'est une image, Mme la Présidente, c'est une image.

Une voix : ...

La Présidente : Bon. O.K. Je suis debout, M. le leader. Nous allons poursuivre, parce que le temps est précieux...

Des voix : ...

La Présidente : Je vous prie, silence! Je vous regarde et je vous vois, là, faire des signes. On va poursuivre. Faisons attention aux termes choisis. Et j'aimerais que la députée de Vaudreuil puisse poser sa question aussi, il y a une huitième. Alors, poursuivez.

M. Beauchemin : Bon, bien, je vais y aller directement, à la question. Comment le ministre des Finances peut-il regarder les jeunes et leur dire que prendre leur cash pour payer des baisses d'impôt, c'est bon pour eux?

La Présidente : La réponse du ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bon, bien, Mme la Présidente, tout est question d'équilibre. Et je pense qu'on a montré, dans le premier mandat — puis on va continuer — que nous faisions une gestion responsable et prudente des finances publiques.

Alors, première responsabilité : financer les principales missions de l'État adéquatement. Deuxième responsabilité : revenir à l'équilibre budgétaire. On a fait face à une pandémie, il y a eu une pandémie, il y a eu une récession, la pire récession depuis la Deuxième Guerre mondiale, ça a eu un impact sur les finances publiques. Troisième responsabilité : réduire le poids de la dette au Québec. Et nous avons ajouté le désir de réduire le fardeau fiscal des Québécois. C'est extrêmement important pour stimuler l'offre de travail, créer de la richesse, encourager l'innovation.

Alors, c'est un équilibre. On veut tout faire ça, Mme la Présidente, de la bonne façon. Ce que nous avons proposé, qui est extrêmement raisonnable, c'est de réduire le poids de la dette moins rapidement pour permettre une réduction du fardeau fiscal. C'est une proposition qui est équilibrée, responsable, prudente. Et il y a des consultations publiques, on écoute les avis de tout le monde.

La Présidente : Première complémentaire, Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Mme la Présidente, hier, dans le Journal de Montréal, on pouvait lire : «En diminuant les versements au Fonds des générations, le gouvernement souhaite hypothéquer l'avenir des prochaines générations pour remplir une promesse électorale à court terme.» Le ministre vient de nous parler de responsabilité, mais, plutôt, piger dans le Fonds des générations est une décision irresponsable.

Force jeunesse et plusieurs groupes sont ici présents et vous écoutent. Est-ce que le ministre des Finances est fier de sa baisse d'impôt au détriment de la jeunesse?

La Présidente : M. le ministre.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, je vais donner un peu d'information sur le Fonds des générations et notre loi sur la gestion de la dette et le Fonds des générations. L'unique objectif du Fonds des générations est de réduire le poids de la dette. Il a été créé en 2006, avec des versements de 600 millions de dollars la première année. Cette année, les versements avoisineront 3,2 milliards de dollars, Mme la Présidente. Et, si rien n'est fait, dans cinq ans ce sera plus de 5 milliards de dollars.

Ce que nous avons proposé, en campagne électorale, c'est de maintenir les versements autour de 3 milliards de dollars pour financer une réduction du fardeau fiscal. Ça, c'est au bénéfice de tous les Québécois. Puis c'est un équilibre : réduire le poids de la dette moins vite pour réduire le fardeau fiscal, tout en finançant les principales missions de l'État.

La Présidente : En deuxième complémentaire, Mme la députée.

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Mme la Présidente, j'ai rencontré des jeunes mobilisés par Force jeunesse, qui nous regardent en ce moment, et je peux vous garantir qu'ils s'attendent à ce que leurs élus défendent l'équité intergénérationnelle avec vigueur. Cette semaine, plusieurs d'entre eux se sont prononcés formellement contre la baisse d'impôt caquiste.

J'ai entendu le ministre des Finances, j'ai entendu à quel point le gouvernement manque de vision, veut piger dans leur fonds, le fonds de nos jeunes, puis leur léguer un État endetté. Est-ce que le ministre de la Jeunesse peut les regarder dans les yeux, se lever et leur dire qu'il est d'accord avec ça?

La Présidente : M. le...

Des voix : ...

La Présidente : Pas de commentaire, je vous prie. M. le ministre, la parole est à vous.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, je veux revenir sur le Fonds des générations. C'est une proposition qui a été faite en campagne électorale, qui a été discutée. Et puis nous sommes très heureux que Force Jeunesse participe au débat public. Il y a des consultations prébudgétaires.

Je rappelle qu'en campagne électorale l'opposition officielle préconisait des baisses d'impôt plus importantes que nous. Je rappelle qu'ils avaient des dépenses plus importantes que nous et que, malheureusement, les calculs n'étaient pas bons, ça ne balançait pas, Mme la Présidente.

Des voix : ...

La Présidente : S'il vous plaît! On se calme. S'il vous plaît! Je suis debout, je vous entends tous. Il n'y a qu'une personne qui aura la parole ici, c'est M. le député de Maurice-Richard, pour sa question principale.

Modifications au Régime de rentes du Québec

M. Haroun Bouazzi

M. Bouazzi : Merci, Mme la Présidente. Le principal débat entourant la réforme du RRQ a porté sur le rehaussement de l'âge d'admissibilité. Le ministre a dû être déçu de voir que la quasi-totalité des intervenants s'opposait à cette idée, Conseil du patronat et syndicats inclus. Plusieurs ont souligné que, pour certains, une rente retardée de deux ans ne permet pas de manger, entre 60 et 62 ans. L'Observatoire de la retraite a même contredit le principal argument du ministre en soulignant que, dans bien des cas, et je cite, «en prenant en compte la fiscalité ainsi que la mortalité différenciée [des] personnes seules, à faibles revenus ou à moyens revenus», il est financièrement bénéfique de prendre la retraite du RRQ dès 60 ans.

Le ministre a entendu tous ces arguments en commission, mais les a-t-il écoutés? Malgré son isolement, le ministre va-t-il vraiment aller de l'avant et hausser l'âge d'admissibilité à la retraite au-delà de 60 ans?

La Présidente : M. le ministre des Finances.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Merci, Mme la Présidente. En fait, les consultations publiques sur le RRQ, ça a été un grand succès. On est capables, au Québec, de poser des questions difficiles et d'en discuter. Et il y avait des propositions. On a une marge de manoeuvre qui avoisine 25 points de base, c'est-à-dire que les taux de cotisation sont plus élevés que le taux d'équilibre. Il y a des propositions qui ont été faites, c'est-à-dire que les cotisations soient facultatives à partir de 65 ans, augmenter l'âge d'admissibilité de la retraite, puis ça, ce serait transférer 200 millions du fonds vers les retraités. Mais on nous a avertis, en commission, qu'il faudrait avoir une attention particulière à ceux qui pourraient être des perdants, approximativement 10 %. Et, oui, on a entendu ça. Il y a eu des propositions sur la prestation de décès. Ça aussi, c'est extrêmement dispendieux. Alors, il faut prendre tout ça, Mme la Présidente, y réfléchir, agir de manière prudente et continuer le débat.

La Présidente : Première complémentaire.

M. Haroun Bouazzi

M. Bouazzi : Mme la Présidente, les Québécoises sont plus souvent celles qui sacrifient leur carrière pour prendre soin de leurs proches. Arrivées à la retraite, elles ont moins de revenus accumulés. Elles sont plus nombreuses que les hommes à devoir se prévaloir de leur RRQ à 60 ans, et 80 % d'entre elles survivent à leur époux et se retrouvent avec une prestation de décès insuffisante.

Le ministre s'engage-t-il à s'attaquer aux inégalités de genre du RRQ plutôt que de s'entêter sur l'admissibilité à 62 ans?

La Présidente : M. le ministre.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : Bien, Mme la Présidente, je ne comprends pas le ton de la question. On a une consultation publique avec des propositions puis on réfléchit collectivement à des décisions difficiles, des questions qui sont difficiles. Je ne sais pas qui parle de s'entêter.

Ce qui a été dit en commission parlementaire, c'est qu'on veut... Ce qui a été proposé, là, c'est de prendre 200 millions du régime collectif par année et de le donner aux retraités qui... Il y aurait... Si cette proposition-là était acceptée, il y aurait 90 % de gagnants et à peu près 10 % de perdants. Et ce qu'on nous a dit, en commission parlementaire, c'est : Faites très attention aux 10 % de perdants, parce que ce sont des gens qui sont défavorisés, et donc il faudrait, si nous acceptons cette proposition, porter...

La Présidente : Deuxième complémentaire.

M. Haroun Bouazzi

M. Bouazzi : Les centrales syndicales, le Conseil du statut de la femme, la Fédération de l'âge d'or du Québec, Force Jeunesse, l'Observatoire de la retraite, les experts du comité D'Amours, le Conseil du patronat, tous s'opposent au rehaussement de l'âge d'admissibilité du RRQ à 62 ans.

C'est vrai, M. le ministre, qu'il y a bien des questions difficiles qui entourent le RRQ, mais celle-là, elle est plutôt facile. Le ministre... M. le ministre, est-ce que tout ce beau monde a tort?

• (10 h 50) •

La Présidente : M. le ministre.

M. Eric Girard

M. Girard (Groulx) : C'est sûr que, si vous nommez seulement ceux qui sont contre, ça a l'air d'une unanimité, O.K., mais il y a plusieurs actuaires, les anciens actuaires en chef... Bien, je veux juste être clair, on parle du risque de longévité, qui est associé à l'accroissement de l'espérance de vie. Et, oui, l'actuariat, c'est une science, une branche des maths pures. Et puis ce qui est calculé, c'est que 90 % des gens seraient gagnants, mais qu'il y a 10 % de perdants, et donc qu'il faudrait porter une attention particulière à ces 10 % de perdants si nous faisions ce changement.

On a écouté, on a entendu, on poursuit la réflexion. Félicitations aux Québécois pour cet excellent débat!

La Présidente : En question principale, je reconnais la députée de Vaudreuil.

Réfection du pont de l'Île-aux-Tourtes

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Depuis l'incident du mois de mai 2021 où le pont de l'Île-aux-Tourtes a été complètement fermé à la circulation pendant deux semaines, les citoyens de Vaudreuil-Soulanges vivent l'horreur en raison des problèmes du pont. Sa structure, classée en fin de vie, devait être reconstruite en 2018, mais, à son arrivée au pouvoir, la CAQ a retardé les travaux : 2024, puis 2029.

Depuis décembre dernier, seulement deux voies sont ouvertes dans chaque direction, sans accotement, pour les 87 000 usagers quotidiens, comme le pont Jacques-Cartier. Il y a des congestions monstres aux heures de pointe, débordant sur les autoroutes 20, 40, dans les rues de la ville, même à proximité des écoles et des garderies.

Les élus de la région ont présenté des pistes de solution à la ministre, en commençant par retirer les voies fièrement installées par le MTQ pour les autobus, alors que nous n'avons aucun autobus qui traverse le pont.

Est-ce que la ministre peut s'engager à mettre en place les mesures suggérées par les élus de Vaudreuil-Soulanges et même venir en personne constater l'ampleur des dégâts?

La Présidente : Mme la ministre des Transports et de la Mobilité durable.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Oui, merci beaucoup, Mme la Présidente. Je suis heureuse d'avoir la question de la députée de Vaudreuil, parce que j'avoue que je suis un peu étonnée, des fois, de ses réactions dans la mesure où depuis que je suis ministre, depuis trois, quatre mois, avec ma collègue députée de Soulanges, on met énormément d'énergie, énormément d'énergie, elle en particulier, sur ce dossier-là pour informer les gens, pour les garder au courant des différentes étapes qui sont en train d'être franchies, pour répondre aux questions de tous les élus. Et la députée de Vaudreuil sait très bien que je l'ai invitée à un Teams avec ma collègue de Soulanges, avec tous les élus concernés, Saint-Lazare et compagnie, pour, justement, pouvoir recevoir les commentaires, les suggestions, les questions, et répondre du mieux qu'on pouvait, et, par la suite, organiser une autre rencontre avec mes équipes du ministère des Transports et de la Mobilité durable.

Donc, d'entrée de jeu, Mme la Présidente, sachez que ce dossier-là n'est pas un dossier partisan. C'est un dossier important, sur lequel, d'ailleurs, on met non seulement du temps, de l'énergie et des efforts de communication, mais aussi des investissements majeurs, parce que, quand on est arrivés, on est arrivés dans un contexte où ce pont-là, comme bien d'autres structures, infrastructures, chaussées et compagnie, était en déficit de maintien parce qu'il y a trop peu d'efforts qui ont été mis dans le maintien et l'entretien de nos structures et de nos infrastructures en général par le passé, Mme la Présidente. Donc, on est en train de mettre énormément d'argent pour reconstruire le pont de...

La Présidente : Première complémentaire.

Mme Marie-Claude Nichols

Mme Nichols : Mme la Présidente, je veux rappeler à la ministre que Vaudreuil-Soulanges sont enclavés. 2029, c'est encore six ans d'horreur pour la population. Pourtant, le projet de reconstruction faisait partie de la loi sur l'accélération des projets d'infrastructure adoptée d'urgence par le gouvernement de la CAQ pendant la pandémie.

Tommy Chouinard, de La Presse, ce matin, nous rappelle que le maintien, juste le maintien du pont, qui est en fin de vie, c'est 376 millions de dollars. Les plans, le tracé, le BAPE sont complétés. Pourquoi les travaux sont encore repoussés?

La Présidente : Mme la ministre.

Mme Geneviève Guilbault

Mme Guilbault : Bon, bien, Mme la Présidente, plus concrètement, je vois que la députée condamne en quelque sorte le fait qu'on a, oui, aménagé des voies spéciales pour que les services d'urgence puissent passer, s'ils ont besoin, qu'ils ne soient pas pris dans la congestion, et, oui, du transport en commun. En général, en 2023, les gens sont en faveur, mais, bon, si la députée de Vaudreuil s'y oppose, soit.

De toute façon, Mme la Présidente, dès la fonte des neiges, dès la fonte des neiges, on va être capable d'entreprendre des travaux pour aménager la voie supplémentaire qui, en ce moment, est momentanément hors d'usage à cause des conditions hivernales. Donc, d'ici le mois de mai, normalement, là, mai, maximum début juin, les gens vont pouvoir à nouveau emprunter ces voies-là pour circuler. Alors, ça va régler le problème auquel elle fait référence. Par ailleurs, on s'apprête à signer le contrat pour la reconstruction du pont.

Aors, les choses vont se faire dans l'ordre, Mme la Présidente, moyennant d'énormes investissements. Je reviens là-dessus, là, si le Parti libéral avait voulu...

La Présidente : ...terminé, Mme la ministre, c'est terminé.

Je vais faire ici une petite remarque importante. Il y a eu beaucoup d'échanges qui n'étaient pas toujours pertinents, ce qui fait que Mme la députée de Vaudreuil a perdu sa troisième question. Il faudra faire attention, à l'avenir, quand il y aura une huitième question.

Ceci dit, ça met fin à la période des questions orales.

Motions sans préavis

Et, comme il n'y a pas de votes reportés, nous allons passer à la rubrique Motions sans préavis. Et, pour ce faire, je vais céder la place au troisième vice-président. Merci à vous.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, à la rubrique des motions sans préavis, en fonction de nos règles et de l'ordre de présentation des motions sans préavis, je reconnais maintenant un membre du deuxième groupe d'opposition. Mme la députée de Mercier.

Mme Ghazal : Je vais présenter une motion. Il y a des gens qui étaient pour, qui étaient contre, je ne sais pas ce que ça va donner. Je vais la lire, ça va comme suit.

Je demande le consentement de cette Assemblée pour débattre de la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale affirme que tout ajustement de la rémunération des député-es, notamment l'indemnité de base, doit être déterminé par un processus indépendant exécutoire, sans ingérence des élu-es.» Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : Il n'y a pas de consentement, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Comme il n'y a pas de consentement, nous allons maintenant passer aux membres du troisième groupe d'opposition. M. le député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Arseneau : Merci, M. le Président. J'aimerais d'abord saluer les jeunes qui sont ici présents, ceux de Génération Climat notamment.

Et je sollicite le consentement des membres de cette Assemblée afin de présenter, conjointement avec la députée de Notre-Dame-de-Grâce, la députée de Verdun et la députée de Vaudreuil, la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale demande au gouvernement de créer un comité-conseil jeunesse permanent sur le climat;

«Qu'elle affirme la nécessité que ce comité soit indépendant et représentatif de la jeunesse québécoise, des jeunes de toutes les régions du Québec et des membres des Premières Nations et des Inuits du Québec;

«Qu'elle souligne l'importance de financer adéquatement ce comité et ses activités;

«Qu'elle affirme que la création de ce comité permettra un dialogue et une collaboration intergénérationnels sur les enjeux climatiques, de sorte que les points de vue des jeunes soient communiqués et entendus ainsi que les intérêts des prochaines générations pris en compte.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il n'y a pas de consentement. Donc, nous allons maintenant passer à un membre du groupe formant le gouvernement, et je cède la parole à M. le premier ministre.

Rendre hommage à Mme Nadine Girault, ex-parlementaire de l'Assemblée
nationale, et offrir des condoléances à sa famille et à ses proches

M. Legault : Oui, M. le Président, je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de débattre de la motion suivante conjointement avec le chef de l'opposition officielle, le chef du deuxième groupe d'opposition et le chef du troisième groupe d'opposition :

«Que l'Assemblée nationale offre ses sincères condoléances à la famille et aux proches de Madame Nadine Girault, décédée le 12 février dernier;

«Qu'elle lui rende hommage et [qu'elle] reconnaisse sa contribution à la société québécoise, notamment à titre de députée et de ministre;

«Qu'elle salue son engagement envers la population de la circonscription de Bertrand, des Laurentides et de tout le Québec; et

«Que l'Assemblée nationale observe une minute de silence en sa mémoire.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

M. Lévesque (Chapleau) : ...par intervenant dans l'ordre suivant : le premier ministre, le chef du troisième groupe d'opposition, le chef du deuxième groupe d'opposition et le député des Îles-de-la-Madeleine.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, je comprends qu'il y a consentement pour qu'il y ait quatre intervenants et que pour... la durée des interventions soit limitée à un maximum de deux minutes... trois minutes chacune. Alors, la parole est à, maintenant, M. le premier ministre.

M. François Legault

M. Legault : Oui, merci, M. le Président. Le 12 février dernier, notre collègue, notre amie, Nadine Girault, est décédée d'un cancer du poumon. C'est une nouvelle, je pense, qui a ému tous les membres de l'Assemblée nationale, en particulier ceux qui étaient là dans la dernière législature, qui l'ont connue. Tous ceux qui l'ont connue savent quelle femme exceptionnelle c'était, Nadine.

Je me rappellerai toujours la première fois que je l'ai rencontrée, elle était venue chez moi, avec mon épouse Isabelle, puis on avait jasé un peu de sa carrière. Puis, je me souviens, entre autres, elle m'avait raconté qu'elle avait passé quelques années au service des ressources humaines du service de police de Montréal. Vous pouvez vous imaginer. Elle était jeune. Elle n'était pas tout le temps prise au sérieux, au début. Elle a fait preuve de beaucoup de guts, elle a remis pas mal de policiers à leur place. Et puis les policiers de Montréal l'ont adoptée, ont demandé ses conseils.

• (11 heures) •

Ensuite, elle a eu une carrière dans le monde des affaires. Bon, Nadine avait un bac puis une maîtrise en administration. Elle a travaillé...

(Interruption)

M. Legault : C'est beau? Elle a travaillé au Fonds de solidarité de la FTQ, à la Banque de Montréal, chez Desjardins, à la Banque Royale, chez Jacob. Et elle a aussi siégé sur plusieurs conseils d'administration, entre autres Sports Montréal, c'était une grande sportive — des fois c'est un peu injuste quand on voit quelqu'un qui est aussi en forme recevoir un tel diagnostic — qui a été aussi sur le conseil d'administration de L'École supérieure de ballet de Québec. Elle a été sur le conseil d'administration d'Investissement Québec, sur le conseil d'administration de la Fondation de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont. Donc, on le voit, là, c'était une femme qui était impliquée, qui était un modèle pour beaucoup de femmes, autant en affaires qu'ensuite en politique.

Bien sûr, elle a été par la suite ministre des Relations internationales. Et, bon, compte tenu de son passé économique, j'avais convenu avec elle de faire un virage dans les délégations du Québec à l'étranger. Vous auriez dû voir ça, là, les délégués du Québec à l'étranger avaient tous ou toutes un objectif d'augmentation des exportations des entreprises québécoises vers le pays où ils étaient situés. C'est un virage qui existe, qui est encore là, qui est permanent et... Mais ce qui était, je pense, le plus sa fierté, c'est que Nadine, elle s'était donné comme objectif d'atteindre la parité dans les délégués du Québec à l'étranger, et elle a réussi, elle a réussi. Puis, je pense, c'est un beau legs qu'elle laisse, que, quand on regarde toutes nos délégations du Québec à l'étranger, maintenant, il y a autant de femmes que d'hommes.

Je me rappelle, l'année passée, elle a demandé à me voir chez moi, et on a passé quelques heures tous les deux ensemble. Puis là elle m'a appris pour sa santé, puis on a pleuré, tous les deux. Puis elle aurait tellement voulu continuer avec nous autres, avec notre famille.

Donc, Nadine, c'était une femme passionnée, qui était passionnée, déterminée, travaillante, autant pour son comté que comme ministre. C'était une femme, aussi — je regarde ceux qui étaient ici — attachante, hein, toujours de bonne humeur, malgré les difficultés. Je me rappelle encore, même, les dernières semaines avant qu'elle décède, elle nous écrivait, je vois la ministre du Tourisme, mais moi aussi, pour m'encourager, tu sais, comme si c'était nous autres qui avions besoin d'encouragements.

Donc, le 12 février, j'ai perdu une amie, on a perdu une amie. Puis je veux offrir mes plus sincères condoléances, bien, d'abord à Alain, son conjoint, puis à tous ses proches, toute sa famille. Nadine, on ne va jamais t'oublier. Merci.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le premier ministre. Je cède maintenant la parole au chef de l'opposition officielle.

M. Marc Tanguay

M. Tanguay : Merci beaucoup, M. le Président. C'est effectivement avec beaucoup de tristesse qu'on a appris le départ d'une collègue, Nadine Girault, qui était aimée, qui était respectée de ses collègues.

Et, en préparant mon intervention, j'ai appris des choses sur Nadine. J'ai appris qu'elle était née à Saint-Louis, dans le Missouri. Je ne le savais pas. Elle a fréquenté, après ça, l'école des Ursulines à Gaspé et elle s'est dirigée vers Montréal, au Collège Marie-de-France à Montréal. Après ça, elle a eu un bac des HEC à Montréal, maîtrise en administration des affaires à l'UQAM et une certification d'administratrice des sociétés de l'Université Laval. Alors, on peut voir qu'à travers son parcours elle avait réellement vu beaucoup du pays.

Avant de se lancer en politique, le premier ministre l'a mentionné, elle a occupé des postes de haute direction, entre autres dans le domaine bancaire, pour notamment avoir été vice-présidente du développement des affaires pour le Fonds de solidarité FTQ. Et évidemment le premier ministre a souligné son passage avec le corps policier du SPVM.

Elle a été élue, donc, députée de Bertrand en 2018, et c'est là où on a appris à la connaître, nous, comme collègue, parce que c'est ça, la vie politique, on ne se connaît pas, mais la politique a ceci, je dirais, de grand, de fabuleux : faire de la politique, c'est rencontrer des gens qu'en temps normal on n'aurait pas rencontrés. Et ça, je pense qu'on peut souligner l'importance qu'elle aura eue comme ministre des Relations internationales et de la Francophonie et aussi ministre de l'Immigration, de la Francisation et de l'Intégration.

J'aimerais qu'on se rappelle d'une de ses réalisations, c'est l'Institut de la diplomatie, qui vise à faire en sorte de monter à un niveau supérieur, je dirais, la qualité de nos femmes et de nos hommes qui s'inscrivent dans la diplomatie québécoise, parce que ça existe, et je pense que ce sera un de ses legs qui, pour moi, sera porteur de fruits tangibles pour la diplomatie québécoise.

Donc, on le disait, on a eu l'occasion de siéger avec elle. Moi, quand je pense à Nadine, je pense à une femme posée et respectueuse. On était capables d'avoir des débats, des divergences d'opinions, et ça faisait avancer le débat, ça élevait le débat de travailler avec Nadine. Elle aura été une élue déterminée à servir tous les Québécoises et Québécois et elle aura eu un engagement authentique à servir la population puis à améliorer le sort de nos concitoyennes et de nos concitoyens.

Et, bien évidemment, au nom de ma formation politique, je tiens à offrir nos plus sincères condoléances à la famille et aux proches de Nadine.

Puis vous allez me permettre, M. le Président, aussi, de façon particulière, à offrir mes condoléances à mes collègues du caucus de la Coalition avenir Québec, parce que je sais c'est quoi, perdre un collègue. Quand on est dans un caucus, on est dans une famille politique, on mène des combats ensemble, on fait face à l'adversité. On passe à travers des moments de très grande joie, puis parfois de tristesse, mais on passe à travers l'adversité, puis c'est ce qui donne tout son sens à l'expression «faire partie d'une famille politique». Alors, à votre famille politique aussi, j'aimerais vous offrir mes plus sincères condoléances. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le chef de l'opposition officielle. Je cède maintenant la parole au chef du deuxième groupe d'opposition.

M. Gabriel Nadeau-Dubois

M. Nadeau-Dubois : Merci, M. le Président. C'est toujours triste, bien sûr, lorsqu'un ou une collègue nous quitte, peu importe l'allégeance politique, peu importe le parti, mais c'est d'autant plus triste lorsqu'une collègue nous quitte dans la fleur de l'âge, emportée par la malédiction terrible du cancer.

Je veux joindre ma voix, bien sûr, à mes collègues des autres partis pour offrir nos condoléances solidaires à la famille de Mme Girault et, moi aussi, aux collègues parlementaires qui ont côtoyé sur les banquettes ministérielles Nadine Girault et qui ont, bien sûr, minimalement perdu une collègue de travail, mais sans doute, dans plusieurs cas, également une amie.

Bien sûr, pour le reste d'entre nous, pour les Québécois, les Québécoises, Nadine Girault, c'était surtout Mme la ministre des Relations internationales et de la Francophonie. La fonction qu'elle occupait est une fonction importante qui consiste ni plus ni moins qu'à incarner nos ambitions de nous représenter nous-mêmes à l'étranger. C'est une fonction qui mérite notre respect, et le service public qu'elle a rendu justifie amplement les honneurs qu'elle reçoit de toutes parts depuis qu'elle nous a quittés.

En tant que ministre, elle a notamment piloté la création de l'Institut de la diplomatie du Québec, je voulais également le souligner, dont la première cohorte, d'ailleurs, a été diplômée en juin dernier. C'est un institut qui offre une formation à nos diplomates pour leur donner tous les outils dignes d'une diplomatie d'envergure nationale. Et je pense que cet élément-là est déjà en voie de devenir une très belle partie de l'héritage politique de Nadine Girault. C'est toute une génération de futurs diplomates québécois qui vont lui devoir une fière chandelle.

Nadine Girault avait encore beaucoup à donner au Québec. Elle s'est battue jusqu'au bout contre une maladie profondément injuste qui emporte encore trop de Québécois, trop de Québécoises beaucoup trop tôt.

Je joins donc ma voix à celles de mes collègues pour offrir à nouveau mes condoléances les plus sincères et pour souligner le souvenir d'une Québécoise d'exception, d'une Québécoise engagée, et l'héritage d'une grande amoureuse du Québec. Merci.

• (11 h 10) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le chef du deuxième groupe d'opposition. Je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci, M. le Président. Alors, au nom de ma formation politique, je tiens à souligner à mon tour la contribution pour le Québec d'une femme courageuse, intelligente et élégante, Mme Nadine Girault, malheureusement décédée à l'âge de 63 ans le 12 février dernier.

Nadine Girault a choisi le service public auprès des citoyens de la circonscription de Bertrand, en tant que députée, de 2018 à 2022, en plus de s'impliquer de nombreuses années dans le domaine des affaires, M. le premier ministre en faisait mention, tant pour le Fonds de solidarité FTQ qu'à la Banque de Montréal, notamment.

Elle est née à Saint-Louis, au Missouri, comme l'a révélé tout à l'heure le chef de l'opposition, mais elle a aussi grandi à Gaspé. D'ailleurs, dans l'une de ses dernières entrevues, je me souviens que Mme Girault parlait de l'enfance heureuse qu'elle a eue à Gaspé, la Gaspésie était une région qu'elle affectionnait tout particulièrement. Elle avait aussi des racines haïtiennes dont elle était particulièrement fière.

Nadine Girault avait une fine connaissance des enjeux du Québec et de ses défis. On a eu l'occasion de discuter à l'occasion, en commission parlementaire, de relations internationales, et elle parlait souvent de la diplomatie d'influence que le Québec devait jouer. Elle aura eu sa propre influence sur le ministère des Relations internationales. Nous lui devons notamment la création de l'Institut de la diplomatie du Québec.

Ceux et celles qui l'ont côtoyée sont unanimes, Nadine Girault était passionnée par son travail. Malgré son diagnostic de cancer du poumon, en 2019, elle a poursuivi son engagement pour le Québec avec constance et avec détermination. La maladie s'est amenée dans sa vie de manière insidieuse, ce qui a bouleversé, évidemment, son quotidien et celui de ses proches. Toutefois, on se souviendra d'une femme courageuse, forte et qui est demeurée présente et attentive pour servir la population du Québec.

Au nom du Parti québécois, j'adresse mes plus sincères condoléances à ses proches, à tous ceux ici présents et ailleurs qui ont eu le privilège de travailler avec elle ou de la côtoyer. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : M. le leader adjoint, oui?

M. Lévesque (Chapleau) : ...Vaudreuil est également conjointe sur cette motion.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement? Consentement.

Mise aux voix

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté. Nous allons maintenant observer une minute de silence à la mémoire de notre collègue, Mme Nadine Girault.

• (11 h 13 — 11 h 14) •

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Je vous remercie. Nous allons poursuivre, toujours à la rubrique des motions sans préavis. Et je cède maintenant la parole à un membre du groupe formant l'opposition officielle. M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Beauchemin : Merci, M. le Président. Je sollicite le consentement de cette Assemblée afin de présenter la motion suivante conjointement avec le chef du troisième groupe d'opposition et la députée de Vaudreuil :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que la prestation de décès du Régime [des] rentes du Québec n'a pas connu d'indexation depuis 1998;

«Qu'elle déclare qu'il est souhaitable que cette prestation soit bonifiée et indexée afin de refléter l'augmentation des coûts des services funéraires;

«Qu'enfin, elle demande au gouvernement caquiste de retirer le caractère imposable de cette prestation afin d'en bonifier les sommes octroyées sans affecter la santé financière du Régime [des] rentes du Québec.»

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce qu'il y a consentement pour débattre de cette motion?

Une voix : ...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Il n'y a pas de consentement. Donc, nous allons poursuivre.

Avis touchant les travaux des commissions

À la rubrique des avis touchant les travaux des commissions, M. le leader.

M. Lévesque (Chapleau) : ...à la salle Louis-Joseph-Papineau;

La Commission des institutions poursuivra l'étude détaillée du projet de loi n° 8, Loi visant à améliorer l'efficacité et l'accessibilité de la justice, notamment en favorisant la médiation et l'arbitrage et en simplifiant la procédure civile à la Cour du Québec, aujourd'hui, après les affaires courantes jusqu'à 13 heures et de 15 heures à 18 h 30, à la salle Pauline-Marois.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, pour ma part, je vous avise que la Commission de la culture et de l'éducation se réunira en séance publique aujourd'hui, après les avis touchant les travaux des commissions, vers 11 h 15, jusqu'à 13 heures, et de 15 heures à 17 h 25, à la salle Marie-Claire-Kirkland, afin de procéder aux auditions publiques et consultations particulières concernant le mandat d'initiative portant sur les révélations de violence lors des initiations dans le milieu du hockey junior et la possible situation dans d'autres sports, et en séance de travail le jeudi 23 février 2023, de 7 h 30 à 9 heures, à la salle Louis-Hippolyte-La Fontaine, afin de donner suite au mandat d'initiative portant sur les révélations de violence lors des initiations dans le milieu du hockey junior et la possible situation dans d'autres sports.

De plus, la Commission de la santé et des services sociaux se réunira en séance de travail le jeudi 23 février 2023, de 8 heures à 8 h 30, à la salle Louis-Joseph-Papineau, afin de statuer sur la possibilité que la commission se saisisse d'un mandat d'initiative portant sur la santé mentale des jeunes.

Affaires du jour

La période des affaires courantes étant terminée, nous allons maintenant passer aux affaires du jour. M. le leader.

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, M. le Président. Donc, nous sommes maintenant aux affaires du jour, et je vous demanderais de bien vouloir appeler l'article 2 du feuilleton, s'il vous plaît.

Projet de loi n° 10

Adoption du principe

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, à l'article 2, M. le ministre de la Santé propose l'adoption du principe du projet de loi n° 10, Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux. Y a-t-il des interventions? M. le ministre de la Santé.

M. Christian Dubé

M. Dubé : Alors, oui, M. le Président, merci beaucoup pour cette opportunité. Alors, le projet de loi sur la main-d'oeuvre indépendante ou ce qu'on appelle aussi les agences, le projet de loi n° 10.

On le sait, M. le Président, qu'il y a vraiment urgence d'agir pour améliorer notre réseau de santé, et particulièrement pour changer la culture dans notre réseau. Tout le monde sait que les conditions de travail dans notre réseau ne sont pas faciles présentement, notamment avec la pandémie que l'on a connue dans les trois dernières années. C'est un projet de loi excessivement important qu'on a donné la semaine dernière et qui n'a rien à voir avec le nombre d'articles qu'il y a dans le projet de loi.

En fait, ce que ça vient faire, M. le Président, puis, pour moi, c'est très important, c'est que ça vient de concrétiser un de nos engagements majeurs qu'on a pris lorsqu'on a déposé notre plan de santé il y a environ un an, c'est d'avoir, justement, un meilleur encadrement sur les agences de placement ou ce qu'on appelle le recours à la MOI, la main-d'oeuvre indépendante. En fait, la main-d'oeuvre indépendante, comme on l'appelle, est devenue, avec les années, malheureusement, beaucoup plus un mode de gestion qu'un mode d'exception, et particulièrement durant la pandémie. Les chiffres qui ont été expliqués au cours des dernières semaines sont vraiment révélateurs. Donc, avec le projet de loi qu'on dépose aujourd'hui, M. le Président, on vise, justement, à effectuer un changement de culture dans le réseau pour se libérer de la dépendance aux agences privées.

Maintenant, j'aimerais expliquer et souligner que ce projet de loi donne suite, en fait, à des présentations que nous avons faites, des commentaires que nous avons eus de l'opposition, qui souscrivent à ce principe-là. Et on a même eu des fédérations syndicales qui nous l'ont demandé. Donc, je crois, M. le Président, sans prendre pour acquis comment va se dérouler l'étude plus détaillée du projet de loi, mais je pense qu'on devrait avoir plusieurs partenaires, autant des partis de l'opposition que des parties prenantes qui viendront s'exprimer, qui sont favorables à la position que l'on prend.

• (11 h 20) •

Je rappellerais aussi que... Puis j'ai expliqué que c'est un projet de loi qui est assez simple, très, très peu d'articles, mais, en même temps, qui va nous permettre d'agir par règlement. Puis une des raisons pour lesquelles, M. le Président, on va travailler par règlement, c'est qu'il faudra avoir une certaine flexibilité. Puis je vais donner quelques exemples de ce qu'on veut faire par règlement pour que mes collègues, autant qui seront avec moi sur la Commission de la santé que de l'opposition, comprennent bien pourquoi c'est important de faire certains ajustements par règlement. Et je m'explique. Par exemple, sur l'approche en trois phases qu'on veut faire, sur l'approche en trois phases, ce que ça veut dire, c'est que notre intention d'arrêter le recours aux agences privées, on doit le faire, tout d'abord, dans nos milieux urbains. Première phase serait dans les milieux urbains. Ce que ça veut dire : nos grands centres, Montréal, Québec, etc., parce que c'est là qu'on en est le plus capables, plus en mesure de se libérer des agences, ensuite, on irait dans les secteurs mitoyens, pour 2025, et dans nos régions ou nos secteurs plus éloignés, en 2026.

Et je le rappelle, pourquoi c'est important d'aller par règlement, parce que, si on voyait que le retour des infirmières pouvait se faire plus rapidement, bien, par règlement, on n'a pas besoin de revenir ici, au salon bleu, pour voter des modifications à la loi, on peut ajuster les dates d'application de ces étapes-là. C'en est un, exemple. Ce qui est important pour nous, c'est de s'assurer qu'il n'y aura pas de bris de service. Alors, si on est capables d'ajuster nos dates dans les règlements, on le fera.

Il y a aussi, dans les règlements, quelque chose, pour moi, qui sera très important, c'est la question des tarifs maximums. On le sait, durant la crise de la pandémie, on avait des décrets pour travailler avec les agences parce qu'on était dans l'urgence d'agir. On a mis des tarifs maximums. Mais, malheureusement, M. le Président, ces tarifs-là n'ont pas toujours été suivis. C'est malheureux. Je ne dis pas que toutes les agences ne les ont pas suivis, mais il y en a plusieurs qui ont exagéré. Alors, dans les règlements, on va être très clair, on va mettre... un peu sur le principe qu'on avait dans les décrets, nous allons mettre des tarifs maximums mais qui vont aussi varier par région. Alors, vous comprendrez que, de la même façon, aller mettre ça dans un projet de loi... on peut dire qu'il va y avoir des pénalités, mais on pourra avoir une certaine flexibilité par région pour les tarifs maximums.

Et, puisque je parle de pénalités, je veux être très clair aujourd'hui, M. le Président, qu'il y a un des éléments du projet de loi qui aura des pénalités. On n'avait pas ces pénalités-là lors du décret, durant la pandémie, et, pour moi, s'il y a des agences qui ne respectent pas les règles de tarifs maximums qu'on va mettre dans le projet de loi, il y aura des amendes et des amendes très salées. Et j'aurai l'occasion d'en discuter avec les députés qui seront en commission avec nous.

En fait, M. le Président, je l'ai dit, c'est un petit projet de loi, mais c'est un projet de loi qui est excessivement important. Et le geste qu'on pose aujourd'hui, il est encore plus important, parce qu'on a dit qu'on voulait être un employeur de choix, puis, pour être un employeur de choix, c'est une question d'honnêteté avec nos employés qui ont gardé le fort pendant tant d'années, d'être capable d'être protégés pour les horaires favorables qu'ils ont et de donner, par exemple, aux agences... dans la période de transition dont je viens de parler, que les horaires défavorables soient aux agences qui viennent nous aider de façon temporaire, et pas le contraire. Et c'est là, je pense, qu'il y a eu beaucoup d'insatisfaction de la part de nos employés du public qui voyaient, des fois, des horaires de travail favorables être alloués aux agences et eux être pris avec des horaires défavorables, ce qui est complètement injuste. Alors, moi, je pense que c'est important de remettre le compteur à zéro, de faire ce projet de loi là. C'est une question d'honnêteté.

J'aimerais, pour les personnes qui nous écoutent aujourd'hui, aussi mettre les chiffres en perspective, juste quelques statistiques. Vous savez que j'aime les statistiques, alors je vais vous en donner quelques-unes.

J'ai beaucoup entendu le fait que, oui, mais ce n'est pas de mettre un projet de loi sur la MOI qui va ramener les 2 500 infirmières qui sont en ce moment dans les agences. Je suis tout à fait d'accord avec ça. Si les infirmières, environ 2 500, qui nous ont quittés au cours des dernières années, et je l'ai dit souvent, à raison, les infirmières qui nous ont quittés pour des agences, c'est souvent que les conditions de travail qu'elles avaient au gouvernement, qu'elles avaient dans notre réseau, ne les satisfaisaient pas, ne leur permettaient pas d'avoir un équilibre travail-famille, il y a plusieurs raisons, être capables d'avoir des vacances au moment où ils voulaient en profiter, jamais je n'irai reprocher à ces infirmières-là de nous avoir quittés, ils l'ont fait pour des bonnes raisons, la plupart du temps des raisons personnelles.

Ce qu'il faut s'assurer, pour être capable d'avoir une chance de récupérer ces gens-là puis qu'ils aient le goût de revenir... Est-ce que ce sera... quel nombre ce sera, en ce moment, il est difficile pour moi de le dire, mais ce qui est important, c'est de mettre en place les conditions pour qu'elles aient eu le goût de revenir, d'accord? Et là, à ce moment-là, M. le Président, je pense que ce sera une question pour elles et pour eux de décider de revenir avec nous, mais on doit le faire en parallèle.

Deuxième statistique, M. le Président. Je vous ai parlé des 2 500 qui sont dans une agence, mais j'aimerais vous dire que nos besoins de personnel en santé, ils sont titanesques. Et, on prévoit, parce que, maintenant, on planifie beaucoup mieux ce qu'on a besoin en termes de ressources, ressources humaines, c'est environ 125 000 personnes qu'on a besoin pour les cinq prochaines années. C'est énorme, ça, M. le Président. Ce n'est pas toutes des infirmières, mais c'est des préposées aux bénéficiaires, c'est des inhalothérapeutes, c'est les gens qui travaillent ensemble, souvent, dans un hôpital.

Parlons de besoins d'à peu près 125 000 personnes. Sur les 125 000 personnes, il y a peut-être, à peu près, 50 000 infirmières. Alors, vous allez me dire : Oh! ce n'est pas juste de récupérer les 2 500 infirmières, c'est d'attirer les 50 000 infirmières, 50 000, 60 000 infirmières qu'on a besoin dans les cinq prochaines années. Donc, ce n'est pas uniquement d'aller chercher celles qui sont dans les agences, mais d'être attractif pour ceux qu'on a besoin pour les prochaines années. Mais il y a un truc. On a un truc, puis je vais vous le dire, M. le Président. J'espère que ça ne restera pas entre nous. Sur les personnes qu'on a besoin, je vous ai dit à peu près de 25 000 à 30 000 par année, savez-vous que, bon an mal an, il y a à peu près 10 000 personnes sur nos 350 000 employés qui quittent pour la retraite, O.K.? Donc, à peu près 10 000 personnes. Puis ça, c'est un taux de rétention qui est normal dans l'industrie.

Prenez un employeur qui a 10 000 employés : 3 %, il va y avoir à peu près 300 personnes qui vont prendre leur retraite. Nous, on a 300 000... 350 000 employés. Donc, à 3 %, c'est 10 000. Mais je vous ai dit, tout à l'heure, qu'on en cherchait 25 000. C'est quoi, la différence entre le 10 000 que je viens de vous dire, qui est la prise de retraite, et le 15 000 de plus qu'on a besoin? C'est parce que les gens ne restent pas quand ils viennent chez nous. Ils viennent, ils regardent les conditions puis ils s'en vont, ils s'en vont ailleurs, pas nécessairement dans des cliniques privées, ils s'en vont ailleurs. Et là est notre problème : c'est qu'on a bien plus un problème de ce qu'on appelle de rétention qu'un problème d'attraction, parce qu'on les attire à venir dans notre réseau, on les forme, on leur donne des bourses, mais malheureusement... Et c'est notre responsabilité, M. le Président, c'est de les retenir. Et qu'est-ce qu'on doit faire pour les retenir, M. le Président? On doit leur donner des bonnes conditions.

Alors, qu'est-ce qu'on fait en ce moment? Ma collègue la présidente du Conseil du trésor fait un travail titanesque pour aller, justement, leur donner... au cours des prochaines semaines, de discuter avec eux quelles sont les conditions qui vont faire qu'autant les infirmières qui sont en agence mais surtout celles qui sont rentrées dans le réseau aient le goût de rester avec nous. Et les syndicats nous l'ont dit, ce n'est pas juste une question de salaire, c'est une question de conditions de travail.

Alors, M. le Président, ce que j'aimerais vous dire aujourd'hui, en conclusion, on sait c'est quoi, le problème, on la connaît, la recette. On sait qu'il y a des infirmières qui ont le goût de venir travailler avec nous, des inhalothérapeutes, des PAB, des préposés aux bénéficiaires, parce qu'on l'a vu, lorsqu'on les interroge... Il y a souvent un besoin d'ajustement salarial, ça, je peux le comprendre, mais ce n'est pas ça, le gros enjeu, c'est les conditions de travail.

Alors, moi, j'inviterais, et je l'ai fait plusieurs fois dans les dernières semaines, j'inviterais les différents représentants syndicaux à venir à nos forums de discussion, qui ont été demandés par la présidente du Conseil du trésor. Je crois que c'est votre rôle pour vos employés de venir écouter les propositions que l'on a pour justement donner des bonnes conditions, non seulement pour récupérer des gens qui sont partis, mais pour encourager ceux qui sont restés. Il n'y a aucune raison, lorsqu'on a un potentiel de 350 000 emplois, qu'on ne soit pas capables de retenir nos gens.

• (11 h 30) •

Alors, je pense qu'il était important, M. le Président, puis je vais terminer là-dessus, de mettre en contexte le projet de loi qu'on a aujourd'hui, petit projet qui s'affaire à mettre, je dirais, de l'équité dans notre réseau pour ceux qui sont restés, s'assurer que les agences, pendant la période de transition, c'est-à-dire les trois prochaines années... On a été raisonnables, là, on a dit : On ne fera pas un sevrage du jour au lendemain, on n'est pas capables de le faire. Mais on dit très bien aux gens : C'est fini, les agences. Donnons-nous une période de transition qui va s'échelonner sur quelques années, dans les régions où c'est plus facile au début, etc., et, pendant ce temps-là, travaillons sur nos conditions de travail pour être capables non seulement d'attirer, retenir plus de personnes. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le ministre. Je cède maintenant la parole au leader de l'opposition officielle.

M. Monsef Derraji

M. Derraji : Merci, M. le Président. Très heureux de prendre la parole aujourd'hui dans ce projet de loi. Ça me rappelle un beau souvenir, quand j'étais porte-parole de notre formation politique en matière de santé et services sociaux. Mon collègue, il est dans une autre commission, qu'il préside, sur ce qui se passe au niveau du hockey. Et très heureux de prendre la parole aujourd'hui, parce que j'ai eu l'occasion quand même, la dernière année, à avoir des discussions avec le ministre sur plusieurs enjeux. Notamment, à l'époque, je me rappelle, il y avait la fameuse... en fait, l'état d'urgence sanitaire, avec beaucoup de projets de loi, notamment le projet de loi n° 10, n° 19, qu'on n'a pas fait, mais, mais, mais, je dis bien, il a mentionné les décrets. Moi, je pense que c'est un mode de gestion que le ministre apprécie. Je peux le dire, parce que ça a été pas mal utilisé lors des deux dernières années, et il y en a pas mal d'écrits, et je sais que le ministre lit beaucoup. Il y a des médecins qui ont dit que ce mode de gestion, par décret, ce n'est pas la réalité du réseau.

Pourquoi je commence par ça, M. le Président? Parce que je vais essayer, dans le temps que j'ai, de dresser un portrait, le contexte, l'état de situation avant de dire pourquoi le ministre de la Santé arrive aujourd'hui avec le projet de loi n° 10. C'est très important. On va reculer un peu, refaire un peu l'histoire, M. le Président.

Le ministre, depuis qu'il était... qu'il a été nommé pour remplacer l'ancienne ministre de la Santé, on était en pleine crise sanitaire. En pleine crise sanitaire, le mode de gestion de ce gouvernement caquiste était basé sur les décrets. C'est très important, M. le Président, le contexte, et il y a des écrits qui ont analysé ce mode de gestion, et après je vais vous dire le danger de ce virage.

Parce qu'il l'a très bien dit, c'est un petit projet de loi. Moi, de toute façon, je ne qualifierai jamais un projet de loi de petit, ou grand, ou moyen, je ne sais pas pourquoi on dit : C'est petit. Il n'y a pas de degré de petit, moyen, grand dans un projet de loi. Quand on dépose un projet de loi, en tant que législateur, c'est pour régler un problème, un problème de fond. Et ce problème est un problème de fond. J'en suis sûr et certain, M. le Président, dans votre circonscription, il y a beaucoup d'infirmières qui vous parlent de leurs conditions de travail. Ce n'est pas petit, ce n'est pas rien.

Alors, je vais revenir à l'état d'urgence sanitaire. Pendant presque deux ans, le gouvernement caquiste a utilisé la loi de l'état d'urgence sanitaire en utilisant un article qui leur donnait le pouvoir de renouveler l'état d'urgence d'une manière hebdomadaire. Le Conseil des ministres se réunissait chaque mercredi et il renouvelait, hein... souvenez-vous, M. le Président — je ne sais pas si... j'en suis sûr, vous avez une bonne mémoire — on a fait même une motion du mercredi pour souligner et fêter le 100e décret utilisé par ce gouvernement pour renouveler l'état d'urgence sanitaire. Mais, les gens, ce qu'ils ont oublié, c'est que le renouvellement de l'état d'urgence venait avec quelque chose que le ministre vient de dire, il vient de le dire : les décrets, d-é-c-r-e-t-s, les décrets. Mais ces décrets édictaient les conditions de travail de nos infirmières.

Et, je me rappelle, M. le Président, lors de nos échanges sur le fameux projet de loi sur l'état d'urgence, que disait le gouvernement? On va arrêter l'état d'urgence, parce que l'élection s'en venait. On ne peut pas aller en élection avec l'état d'urgence, serrer les mains et dire aux Québécois qu'on était en état d'urgence. C'est très important, ce débat, M. le Président, avant d'aller au projet de loi n° 10. Le contexte, il est très important.

Là, j'en suis sûr et certain, les infirmières qui nous écoutent, elles vont comprendre, parce que c'est elles-mêmes qui sont venues en commission parlementaire nous dire la chose suivante : Nos droits sont bafoués. Pourquoi? Parce que le ministre gérait avec un mode de gestion qui n'est pas habituel. Ce n'est pas l'entreprise privée. Le secteur public est géré par des conventions collectives, avec des règles. C'est une négociation. C'est une négociation où il y a la partie gouvernementale, l'employeur, et l'autre partie, c'est les travailleurs et les représentantes et représentants des travailleuses et des travailleurs du Québec. C'est ça, un État de droit, M. le Président. Et, ça a été mentionné, l'État de droit, on respecte l'interlocuteur. On ne l'invite pas uniquement à assister à des forums pour voir comment les choses évoluent en termes de ressources humaines. C'est ce que la conseillère... la présidente du Conseil du trésor leur propose : Venez à nos forums.

Et, M. le Président, tout cela m'amène à la conclusion suivante. La conclusion est la suivante : vous savez, quand on s'habitue à un mode de gestion, ça devient la norme. Bien là, je ne veux pas faire une thèse de doctorat sur la norme, mais ce gouvernement s'est habitué à une norme, et la norme est la suivante, c'est gérer par décret. Malheureusement, vu la pression populaire, vu l'élection, il n'y a plus de renouvellement de l'état d'urgence. On ne peut plus continuer à travailler avec les anciennes méthodes suite à l'état d'urgence avec la pandémie. On revient à la normalité. Et ce retour à la normalité exige, du ministre, du travail dans un nouveau contexte où il doit dealer avec les conventions collectives, le renouvellement des conventions collectives, la gestion d'horaires, le temps supplémentaire obligatoire, etc., M. le Président.

Donc, maintenant on revient à l'état normal. Il y a des enjeux. Et, avant d'aller... Je veux juste rappeler un fait très important, parce que, pour moi, ce n'est pas un petit projet de loi, c'est très important : la main-d'oeuvre indépendante, en chiffres, c'est 11 278 travailleurs, dans le réseau, équivalents à temps plein, dont 2 894 infirmières, 14,8 millions d'heures travaillées. 14,8 millions d'heures travaillées en 2021 et 2022. Ça, c'est le gouvernement caquiste. Là, on vient nous dire aujourd'hui : On va régler un problème. Mais pourquoi vous avez ramené le réseau à une explosion d'utilisation au recours à la main-d'oeuvre? Pourquoi nous sommes rendus là, M. le Président? C'est une augmentation, retenez très bien le chiffre, de 208 % depuis 2016, une augmentation de 208 % depuis 2016. Mais maintenant je vais partager un chiffre, c'est presque 1 milliard de dépenses de l'État en 2021-2022. Vous savez combien ça nous coûte, le réseau de la santé? 54, 55 milliards. 52 semaines, c'est 1 milliard par semaine. Dans une semaine, c'est presque le coût de la main-d'oeuvre indépendante, pour être précis, 960 millions, en dépenses pour l'État québécois.

Donc, M. le Président, devant ce contexte, il n'y a plus de décret. Le ministre ne peut pas imposer une gestion d'horaires. Une fuite... Écoutez, rappelez-vous les primes qu'on donnait, qu'on offrait aux infirmières pour qu'elles reviennent au réseau. Donc, quand je vous dis qu'il y a une suite logique, on ne peut pas venir aujourd'hui et dire : Écoute, moi, j'ai déposé un plan il y a trois, quatre mois avant l'élection, maintenant ça, ça s'inscrit dans le plan en attendant l'agence. Non, non, non, il faut revoir le contexte, les conditions de travail. Et, j'en suis sûr et certain, la plupart des collègues, vous êtes tous interpelés par rapport aux conditions de travail des infirmières, et pas uniquement des infirmières, les autres professionnels de la santé.

• (11 h 40) •

Et les écrits, ils sont là. Et, M. le Président, quand je vois que le projet de loi manque de mordant, ce n'est pas moi... ce sont les propos de plusieurs groupes, c'est vrai, parce que ce projet de loi, avant même qu'on rencontre les groupes... Vous avez vu presque... C'est très beau, le concept, je tiens à le donner... j'ai donné le crédit au gouvernement, parce que je vais juste vous lire le titre, je vais vous lire le titre, et vous allez comprendre ce que je vais mentionner par la suite : Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel — c'est très beau, on veut tous que nos infirmières travaillent à l'intérieur du réseau, pourquoi on doit aller chercher des agences de placement, sachant que ce gouvernement gouverne depuis cinq ans, les frais sont explosés, le recours aux agences a explosé aussi? — et à la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux. Si je prends uniquement le titre, je peux lui donner le prix du... je ne sais pas si on a un classement de titres au niveau des projets de loi, mais ça mérite un prix. Parce que c'est très beau, le concept, il n'y a personne, personne qui peut être contre. Mais le ministre lui-même, il dit : Écoute, c'est un petit projet de loi, quelques articles avec un échéancier. J'avais l'impression d'être en face de quelqu'un qui parle d'un tableau de bord. Bon, vous savez, le ministre aime ça, les tableaux de bord.

Mais, le fond du problème, M. le Président, qu'est-ce qu'il veut réaliser avec ce projet de loi? Ramener les infirmières dans le réseau, hein, sommes-nous d'accord? Qu'est-ce qu'il vient de leur dire? Je vous invite à écouter ma collègue ministre du Conseil du trésor, et venez à ses forums. M. le Président, depuis quand on crée une relation «win-win» avec les partenaires? C'est nos infirmières qui vont nous aider à ne pas avoir recours à la main-d'oeuvre indépendante. Si on dépose un projet de loi, et les mêmes personnes, les représentantes de la FIQ... Écoute, elles l'ont dit à plusieurs reprises : Abolir le recours aux agences privées en santé, on s'entend, d'ici 2026, ça veut dire d'ici la prochaine élection, c'est un beau concept, mais comment? Et c'est là, le comment, et c'est là, le comment, que nous, au Parti libéral du Québec, on va le suivre tout au long des échanges, que ce soit en consultations avec les groupes qui vont venir mais aussi à l'étude détaillée, article par article.

Mais, M. le Président, quand on dit que les dépenses d'établissements de santé pour les travailleurs d'agences de placement privées, en 2016-2017... retenez très bien ce chiffre, 170 millions de dollars, 170 millions de dollars, 2016-2017, la dernière année budgétaire, 1 milliard, ça ne prend pas un doctorat en mathématiques pour dire qu'il y a un problème quelque part. Et le problème, il est beaucoup plus profond que le qualificatif que le ministre de la Santé vient de donner à son projet de loi, qu'il est petit. 1 milliard de dollars en dépenses pour les agences de placement privées, ça, c'est le syndrome d'un problème profond où les gestionnaires dans le réseau de la santé sont démunis.

Je peux vous donner plusieurs exemples. La région de l'Outaouais, on a la concurrence avec l'Ontario. Il a parlé de la rétention. Sans projet de loi, il n'y a aucun moyen pour la rétention. Donc, je reviens au titre, Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux. Mais pourquoi on ne parle pas de la rétention? Il l'a dit, on arrive à les ramener, mais, une fois qu'ils sont dedans, à l'intérieur de la machine, ils quittent. Grand point d'interrogation. Donc, le problème aujourd'hui, est-ce que c'est un problème d'attraction, de rétention, ou un petit projet de loi avec un nom?

En six ans, en six ans, M. le Président, en six ans, le ministère a dépensé 3 milliards de dollars dans les agences privées, 3 milliards. Vous savez, c'est un poste budgétaire qui est très important, donc. Vous savez, je peux utiliser le langage business du ministre où il était, l'environnement où il était et où j'étais. Quand j'ai une dépense énorme dans mon budget, avant de commencer à mettre des mesures, je dois comprendre la problématique. Et c'est là où je m'inquiète. Et je rejoins ma voix à mon collègue porte-parole en santé, mais à l'ensemble des groupes : Est-ce que nous ne sommes pas en train de faire fausse route, que le problème, il est là, et la solution, elle est là? Parce que je le dis très bien, et la plupart des groupes l'ont très bien mentionné, c'est un très beau titre pour un projet de loi, mais il ne règle pas le problème, le problème de fond, qui est la rétention, qui est comprendre les réalités au niveau régional, Sept-Îles, la Côte-Nord. Quand je vois les dépenses, M. le Président, c'est énorme.

Maintenant, parce que le ministre veut parler des solutions et l'attractivité, la rétention, pourquoi il ne règle pas le problème du temps supplémentaire obligatoire? Où en sommes-nous par rapport à l'utilisation des ratios? Souvenez-vous, notre collègue porte-parole de la santé et député de Pontiac, c'est la deuxième fois qu'il dépose notre projet de loi par rapport aux ratios.

Donc, aujourd'hui, on s'adresse aux gestionnaires du réseau. Moi, je me mets dans la peau des gestionnaires. Vous savez, quand j'étais porte-parole en santé, j'ai reçu des e-mails où des gestionnaires demandaient de l'aide, au secours, aux agences de placement privées : Si je n'ai pas une infirmière qui rentre ce soir, j'ai un problème sur mon étage, j'ai zéro infirmière disponible pour faire ces horaires. Et on les payait au gros prix, prix très élevé.

Là, maintenant, quel message on envoie? Je le dis encore une fois, le concept, quand on l'analyse de loin, il n'y a personne qui va dire aujourd'hui qu'il est contre, mais ces agences existent, fournissent de la main-d'oeuvre. Et ces infirmières qui travaillent à l'intérieur des agences, il n'y a personne qui les a obligées de travailler avec les agences. Par contre, on les a poussées, vu les conditions de travail à l'intérieur du réseau public, à aller travailler au niveau des agences.

Donc, encore une fois, c'est ça qui m'inquiète. Ça nous inquiète, M. le Président. Parce qu'au bout de la ligne on va prendre notre temps, on va écouter les groupes, on va analyser le projet de loi, on va amender ce qu'on peut, le gouvernement a la majorité, le projet de loi risque de passer et devenir loi, mais est-ce qu'on a amélioré l'état de notre réseau de la santé? C'est ça, la question, maintenant.

Pour bientôt, ça va être huit ans de ce gouvernement caquiste à la tête de cette mission de l'État, à savoir fournir des soins de qualité à la population. Après huit ans au pouvoir, dans quelques années, est-ce qu'ils vont avoir le courage de dire : Nous avons réussi à retenir nos infirmières? On voit la fuite des infirmières vers le privé, vers les agences, parce qu'elles veulent d'autres conditions de travail.

Maintenant, M. le Président, les infirmières et les préposés aux bénéficiaires, quand on leur parle, ils sont très mécontents de leurs conditions de travail, et c'est pour cela qu'ils quittent le réseau public vers le réseau privé. Et je l'ai mentionné, j'en suis sûr et certain, que, dans votre comté, il y a des infirmières qui vous partagent conciliation travail-famille, l'absence de ratios sécuritaires. Vous savez, l'absence de ratios sécuritaires, là, c'est un fardeau et c'est ça qui nuit à notre réseau. Parce qu'encore une fois la pénurie de personnel, surtout les soignants, les préposés aux bénéficiaires, les infirmières, ça frappe le réseau de la santé.

Donc, quand tu analyses la situation, ce projet de loi ne répond pas aux ratios, n'améliore pas la conciliation travail-famille, ne règle pas le temps supplémentaire obligatoire, mais attention, attention, on veut qu'ils reviennent au public. Je veux juste comprendre. On veut qu'ils reviennent au public en empêchant les agences privées de diminuer sur un échéancier, mais j'aurais aimé voir un échéancier que, la première année, du moment qu'on diminue, on améliore les conditions de travail. «Non, non, non, je vous invite à aller voir les forums de ma collègue présidente du Conseil du trésor.» Mais c'est lui, le ministre de la Santé, c'est quel message il envoie à ces infirmières pour leur donner le goût, pour leur donner le goût pour revenir travailler à l'intérieur du réseau?

• (11 h 50) •

Et, M. le Président, je vais... je vous ai promis que je vais vous partager des chiffres. Là, je vais prendre quelques secondes pour bien vous partager les chiffres et je vais baser mon intervention au niveau de la région de la Côte-Nord, que j'aime beaucoup — j'ai eu l'occasion d'aller au moins six ou sept fois, très belle région, très, très belle région : 102 millions de dollars aux agences privées, dernier budget, 2021-2022. Est-ce que vous savez combien ça représente, cette dépense, dans le budget global? 102 millions de dollars, c'est 17 % du budget global des dépenses dans la région. Il est utilisé par qui? Les agences privées de placement des infirmières. Mais là vous allez me dire que, oui, le budget, c'est ça, mais combien de personnes? Vous êtes à la tête de ce réseau. 90 %, 90 % proviennent des agences. Ça veut dire quoi? Votre hôpital, demain l'agence n'existe pas, fermé. Votre CLSC, fermé. Donc, la plupart des infirmières viennent de... 90 %, le personnel vient des agences. Maintenant, on comprend très bien la région. Il y a le phénomène de «fly-in/fly-out». C'est un phénomène dans la région.

Donc, j'ai un ministre de la Santé qui envoie un message que... Écoutez, conciliation famille-travail, TSO, absence de ratios sécuritaires professionnels en soins-patients, aucun message, aucun message. Souvenez-vous que le ministre voulait, l'année dernière, avant l'élection, être l'employeur de quoi? De choix, le choix... l'employeur numéro un, hein, expérience client, expérience patient. Mais, M. le Président, je vous ai partagé un exemple, la Côte-Nord, où 90 % de la main-d'oeuvre provient des agences privées. Demain, vous voulez qu'ils reviennent. Si on suit l'échéancier de ce projet de loi, si on suit l'échéancier de ce projet de loi, on veut que ces infirmières reviennent au réseau. Comment? Je suis une infirmière, je vais vous poser la question : Est-ce que vous avez amélioré la conciliation famille-travail? Est-ce que vous avez amélioré les ratios? Est-ce que je vais me ramasser avec 30, 40 patients par étage? Est-ce que le temps supplémentaire obligatoire est la norme? J'ai huit heures, mais je me ramasse à faire 16 heures parce qu'il y a quelqu'un qui est absent. J'aurais aimé, j'aurais aimé, M. le Président, qu'aujourd'hui, au lieu de parler d'un tableau de bord avec un échéancier, parler des êtres humains qui se lèvent chaque jour pour prendre soin de nos patients. Je pense que c'est ça, l'urgence.

Et on n'a pas arrêté de le dire et de le mentionner, M. le Président, que les travailleurs et les travailleuses de la santé... Souvenez-vous aussi des anges gardiens, que je tiens à saluer, ces hommes... ces femmes et ces hommes qui ont donné de leur temps pendant la pandémie, pendant les pires moments de notre nation, où beaucoup de gens, soit ils ont payé cher... Nous avons eu des décès. Les professionnels de la santé ont travaillé très fort pendant la pandémie, ils ont donné de leur temps. C'est quoi, le premier message que ce gouvernement envoie après la fin de l'état d'urgence? C'est qu'on vous invite à la table de négociation avec la présidente du Conseil du trésor, mais on ne va pas parler des conditions de travail.

Un récent sondage, M. le Président... Le ministre aime ça, les sondages, il aime ça, les tableaux de bord. Je pense que ce chiffre, c'est à prendre en considération. Un récent sondage, auprès de 2 000 travailleurs, démontre, très important, que les travailleurs d'agence sont peu tentés par un retour dans le réseau public. 2 000 travailleurs démontrent que les travailleurs d'agence sont peu tentés par un retour dans le réseau public. Dans la logique du ministre, M. le Président, pourquoi il a déposé ce petit projet de loi? C'est parce qu'il veut baisser le recours aux agences pour permettre le retour de ces infirmières, qui travaillent dans les agences, dans le public et mettre des pénalités aux agences, qui paient un prix exorbitant. Bien, déjà, 2 000 ne veulent presque rien savoir. Pour huit travailleurs de la santé, à peu près 10 %... huit travailleurs sur 10, 81 %, il est peu probable de retourner au public d'ici la retraite.

Mais, maintenant, on parle beaucoup des infirmières, parlons un peu maintenant des infirmières auxiliaires. 84 % des infirmières et 90 % des infirmières auxiliaires, c'est peu probable retourner dans le réseau public. Bon, je dépose un projet de loi, je le qualifie de petit. Je ne règle pas le problème de la rétention, et il l'a très bien dit, il veut régler le problème de la rétention. Parce qu'il a dit qu'on les ramène. C'est vrai. Souvenez-vous les campagnes que nous avons lancées pour recruter nos infirmières, même demander aux anges gardiens. Et après, vous savez, hein, vous avez vécu ça, après, les anges gardiens, on les laisse, hein, se débrouiller avec leurs permis, avec leur résidence permanente, avec leurs CSQ. Mais, quand on avait besoin, la porte, elle était grande ouverte. Mais, quand eux, ils avaient besoin du gouvernement, la porte, elle est fermée. Je ne veux pas revenir sur ce débat, ça fait mal, M. le Président.

Mais ça envoie des messages. Ça envoie des messages, M. le Président. Ça envoie des messages. Parce que je suis allé travailler au CHSLD, alors j'ai vu c'est qui, ces préposés aux bénéficiaires, j'ai vu c'est qui, ces préposés à l'entretien ménager. La plupart, c'est des nouveaux arrivants. Et il y avait des réfugiés, il y avait des demandeurs d'asile, aussi, qui ont levé la main pour nous aider et travailler à l'intérieur de nos établissements de soins. Mais, quand c'est le moment d'agir sur leurs conditions de travail, non, on dépose un petit projet de loi pour se donner un échéancier qui ne parle pas de leurs conditions de travail. Mais je ne parle pas de vos conditions de travail, mais je veux que vous reveniez à l'intérieur du réseau. Quelle recette magique.

Donc, M. le Président, notre temps, il est précieux. Ce gouvernement, il est à sa cinquième année. Un budget s'en vient. Quel message on envoie à nos professionnels de la santé pour les retenir? Parce qu'on est capables de les ramener, mais on ne les retient pas, le ministre vient de l'avouer. Mais comment on va les retenir?

Alors, M. le Président, j'invite la CAQ, j'invite vraiment les caquistes, parce que je sais qu'à l'intérieur il y a des gens professionnels qui ont travaillé dans le réseau de la santé, à se poser des questions. Et, quand on dit «se poser des questions», c'est qu'au courant... Au cours des cinq dernières années, pourquoi la CAQ a permis que le recours aux agences privées explose? C'est devenu presque un mode de gestion. Et là on veut changer une culture organisationnelle où... encore une fois mettez-vous dans la peau d'un gestionnaire qui a des lits, qui a des patients lourds et que, vu les conditions de travail qui ne sont pas à la hauteur, il y a des gens qui, pour x raisons, maladie, ou autres, ne viennent pas travailler. Mais ce gestionnaire...

Et, je vous le dis, M. le Président, j'ai cherché l'e-mail, malheureusement je ne l'ai pas trouvé. Je l'ai lu... J'ai lu l'échange entre la direction d'un établissement de soins en santé adressé à une agence. Vous savez, ce genre d'appel ou de message, ça me rappelait l'appel du Titanic, en plein naufrage, qui demandait de l'aide. J'essaie de donner une image parce que, parfois, l'appel au secours et à l'aide dépasse les limites. Mais c'est exactement ce qui est arrivé lors d'un échange entre un établissement de soins et l'agence. Et je me suis entretenu avec des propriétaires d'agence qui voulaient travailler la main dans la main avec le gouvernement. Ils me disent : Écoute, est-ce qu'on répond aux besoins de la population dans telle région? On ne répond pas. Je vous dis, il existe des échanges entre les gestionnaires qui sont sous la responsabilité du ministre de la Santé, ils sont sous la responsabilité du ministre de la Santé, qui lancent des appels à l'aide, et l'image que j'avais en tête, c'est comme l'appel au secours du Titanic en plein naufrage. Et ce n'est pas uniquement une région.

• (12 heures) •

Je vous ai dit, j'ai parlé avec des infirmières qui ont choisi, qui ont choisi, c'est un choix, d'aller travailler avec ces agences privées. Ils disent : Écoute, moi, de toute façon, je ne vais pas revenir au public. J'en ai... Hein, vous pouvez choisir le mot que vous voulez, M. le Président. Je respecte l'institution, mais je vous partage ce qu'ils m'ont partagé. Elles me disent : Écoute, vu les conditions de travail, je me tape Montréal—Rivière-du-Loup, je suis payé à temps énorme, mais je suis la responsable de mon temps et de mes conditions. Et là ça crée des frustrations. Eh bien, comprenez maintenant un peu, sur le même étage, des infirmières qui proviennent des agences privées, des infirmières du public, une qui peut avoir ses week-ends, l'autre ne peut pas avoir ses week-ends. C'est une vraie problématique.

Mais ce gouvernement veut corriger son erreur. Je vous ai partagé les chiffres : 1 milliard, la dernière année. Donc, quand ton système est malade ou il y a un cancer, une tumeur à l'intérieur de ton système, tu ne vas pas faire des mesures palliatives pour uniquement toucher. Il faut s'attaquer au problème. Et, quand je dis que c'est cosmétique, ce que ce gouvernement est en train de faire... parce qu'on ne s'attaque pas aux conditions de travail des infirmières, et c'est ce que les infirmières reprochent à ce gouvernement aujourd'hui. Ce que ces infirmières et le personnel soignant reprochent, c'est que c'était un beau slogan, c'est un beau titre de projet de loi, mais... et là où je suis d'accord avec le ministre, il est petit, il n'y a pas grand-chose, à part un échéancier, encore une fois, et un tableau de bord.

Le noeud du problème, qu'on doit tous garder en tête, ce sont les conditions de travail des infirmières, qui sont déplorables. Je vous ai partagé les chiffres, M. le Président. Quand tu gères une business, et 90 % de ta main-d'oeuvre dépend d'une autre agence, bien, en quelque sorte, ça ne prend pas une énorme analyse, tu es dépendant de cette main-d'oeuvre. C'est ce qui se passe dans plusieurs régions.

En Outaouais, par exemple, à plusieurs reprises, nous avons demandé un statut particulier. J'ai moi-même fait des interventions par rapport à la Côte-Nord. Faire abstraction, aujourd'hui, au phénomène — les collègues qui sont sur la Côte-Nord vont le comprendre — du «fly-in/fly-out», ça fait mal à la région. Je ne vais même pas parler du vieillissement de la population. Et, vous le savez très bien, le pic, c'est entre 2030 et 2035, ça va nécessiter des ratios sécuritaires. On ne peut pas dire à une infirmière de s'occuper de 10, 15, 20 personnes sur un étage, ça prend des ratios sécuritaires. C'est une demande primordiale.

Pourquoi on n'a pas mis ça en place? J'aurais aimé, avant d'attaquer à 100 % les agences, bien, de travailler, en parallèle, les conditions de travail de ces infirmières. Mais je vous ai dit, nous avons déposé un projet de loi sur les ratios, nous avons redéposé le projet de loi au mois de décembre dernier. Pourquoi le gouvernement n'appelle pas ce projet de loi? Pourquoi, aujourd'hui, on ne veut pas envoyer un message très clair à nos infirmières que les ratios, ça n'a aucun bon sens, les ratios patients-soins qu'on a au niveau de notre structure? Ça, c'est un beau message.

Donc, quand je dis, M. le Président, un projet de loi trop vague pour redonner confiance aux infirmières... Ce n'est pas uniquement de nous redonner confiance, nous, en tant que législateurs. Au bout de la ligne, qu'est-ce qu'on veut tous, en tant que représentants du peuple? Ce qu'on veut, c'est améliorer la qualité des soins, offrir des soins, des soins sécuritaires. Mais on ne peut pas les faire, nous, on joue notre rôle de législateur. Mais les infirmières et les infirmières auxiliaires, le personnel soignant, eux, ils nous demandent des actions.

Alors, je vous ai dit que je vais faire un aperçu, l'état de situation : un ministre qui s'est habitué à un mode de gestion à la semaine, avec les décrets. Je vous dis, les décrets, c'est fabuleux. Je me rappelle un échange avec mon collègue Gaétan Barrette, que je tiens à saluer. Je vais faire une blague, M. le Président, je vais me permettre, il est au courant, parce que ça a été notre discussion, au dernier mandat. Mettez-vous à la place, une seule fois, dans la peau de mon collègue Gaétan, où il avait la possibilité de gérer le système de santé avec décrets. Salutations, Gaétan.

Quand je vous dis que, le décret, on peut mettre tout... Et on utilise la Loi sur la santé publique. Vous savez, M. le Président, ils ont tout mis dedans. Ce mode de gestion, c'est fabuleux. Parce que les mots que les infirmières, elles ont utilisés, quand elles sont venues en commission parlementaire, je n'ai jamais entendu ces mots, en commission parlementaire, «autoritaire», «bafoue nos droits». C'est fort. Vous avez participé à plusieurs commissions, M. le Président. Quand des interlocuteurs du terrain viennent te dire que ça bafoue les droits des travailleurs et travailleuses... Ça, ce sont les représentants de ces travailleurs.

Donc, c'est là, je ne vais pas revenir aux propos de la collègue, que j'apprécie beaucoup, mais ils sont publics, ses propos, et elle sait très bien que je les apprécie, parce que c'est vrai, vous avez raison, vous étiez sur le terrain, vous avez vu le mode de gestion caquiste de la pandémie, vous avez soulevé des problématiques, et vous êtes venue en politique pour aider... et être la porte-voix de ces infirmières...

Le Vice-Président (M. Benjamin) : M. le député...

M. Derraji : Oui, oui. Oui, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : ...présidence.

M. Derraji : ...être la porte-voix des infirmières, 20 ans d'expérience, et les écrits sont toujours là. Quand je vous ai dit, M. le Président, que la situation est très difficile, ça sort de la bouche d'une ex-infirmière qui est maintenant collègue à l'intérieur de cette Assemblée. Et j'espère que le ministre va l'écouter et mettre en application ce qu'il disait quand il était sur le terrain, parce que ce qu'il disait, c'est la réalité que j'ai entendue quand j'étais porte-parole, partagée par plusieurs de ses collègues.

Alors, M. le Président, au-delà des slogans, vous savez, les Québécois s'attendent à des résultats et ils sont en train de watcher, de surveiller ce gouvernement. Parce que, je tiens à le dire, ce gouvernement, il est fort dans la communication. Ils sont très forts. Le ministre a déposé un plan l'année dernière. Est-ce que le temps d'attente au niveau des urgences a été amélioré? Non. Le nombre de chirurgies en attente a explosé. Le pire, et du jamais-vu au Québec, le nombre de chirurgies oncologiques est arrivé à un niveau record. Je ne parle même pas de la première ligne, M. le Président.

(12 h 10)

Donc, je tiens à rappeler que le noeud du problème demeure les conditions de travail des infirmières, qui sont déplorables. Et vous savez pourquoi elles sont déplorables? Parce que ce gouvernement, il peut se cacher derrière la pandémie. Il peut... Aujourd'hui, il n'y a plus de pandémie, ils n'ont plus de décret, ils ne peuvent plus imposer quoi que ce soit. Ça prend une négociation, et je vois le ministre aller. Est-ce qu'on a réglé le problème de la première ligne? Pas encore. Est-ce qu'on a amélioré les indicateurs du moment qu'il aime les tableaux de bord? Non. Malheureusement, non.

Mais ce qui m'inquiète, ce qui m'inquiète, M. le Président, c'est qu'on ne peut pas voir l'amélioration de l'état de notre réseau de santé sans l'appui de nos infirmières et de notre personnel soignant, nos infirmières auxiliaires et nos préposés aux bénéficiaires. Et je ne sais pas... Est-ce que vraiment ce bras de fer va nous aider à quelque chose? Moi, j'ai vu les déclarations. Il y a des gens qui vont me dire que je cite un syndicat, mais, écoutez, comme je le dis encore une fois, la collègue députée de Marie-Victorin, elle était impliquée à l'intérieur de la FIQ. Et, si on cite aujourd'hui la FIQ, je vous le dis, écoute, il y a tellement... La revue de presse, il y a tellement d'articles, M. le Président, que je me perds dans les chiffres, dans les feuilles, mais ils ne voient pas de solution par rapport à ce projet de loi en lien avec les conditions de travail. Alors, quand on dit : Les conditions de travail, c'est le noeud du problème... Et le noeud du problème, au lieu de le régler... Au lieu de régler le noeud du problème, on s'attaque à un autre problème.

Donc, aujourd'hui, le ministre arrive avec un échéancier. Il dit qu'il a pris en considération les doléances des régions, mais je me dis, en bon gestionnaire, quand tu dépends à 90 %... que ta main-d'oeuvre dépend, dans ton mode de gestion, de la main-d'oeuvre indépendante, je me pose la question : Comment on va faire pour continuer à offrir des soins? Souvenez-vous de ce qui s'est passé à Senneterre, la fermeture du CLSC. Souvenez-vous, M. le Président, qu'il y a des ambulanciers... où parfois il y a l'appel qui est lancé, mais il n'y a pas d'ambulance. Souvenez-vous que, pour les cinq prochaines années, c'est de la bouche des intervenantes, au ministère de la Santé, on a besoin de 25 000 professionnels pour régler le TSO, le temps supplémentaire obligatoire. J'ai moi-même posé la question à la responsable des ressources humaines au niveau du ministère. Elle m'a dit, c'est 5 000. 5 000.

Donc, le projet de loi risque de passer parce que c'est un gouvernement majoritaire. Mais, M. le Président, est-ce que le but, c'est envoyer des slogans, faire des campagnes marketing que nous sommes en train de régler un problème ou de régler le problème? Ce gouvernement, il est à son deuxième mandat, les indicateurs de santé n'étaient jamais aussi rouges que sous leur gouverne. Et là je vais vous étonner. C'est le tableau de bord du ministre qui le dit, ce n'est pas le député de Nelligan qui le dit aujourd'hui, et j'utilise son tableau de bord parce qu'à chaque fois, quand on nous mentionne des chiffres, bien, c'est... c'est grâce à nous qu'on vous a donné... Non, non, mais c'est des données qui existent. On doit être transparent avec les Québécois. C'est le tableau de bord du ministre qui dit qu'il est dans le rouge partout. Ça ne s'améliore nulle part.

Et, quand tu as une lumière rouge pendant longtemps, tu te poses des vraies questions : Est-ce que je suis en train d'agir sur le fond du problème ou d'une manière cosmétique sur un problème? Donc, à part, M. le Président, la complexité, à part la complexité de régler la situation dans certaines régions... Et, quand je vous ai mentionné la Côte-Nord, quand je vous ai mentionné Rouyn-Noranda, quand je vous ai mentionné l'Outaouais, M. le Président, c'est des régions où la situation est très problématique. Soit le phénomène de «fly-in/fly-out», soit la concurrence avec l'Ontario, soit vraiment la région... on n'arrive pas à trouver la main-d'oeuvre parce qu'il y a d'autres secteurs où même, avec les programmes de requalification de ce gouvernement, les gens cherchent autre chose, vont aller faire autre chose, M. le Président.

Et donc je m'inquiète, je m'inquiète vraiment. Est-ce que nous ne sommes pas en train de rater le temps précieux qu'on a entre nous, en commission parlementaire, de dire comment on peut travailler ensemble avec les infirmières, et nos infirmières, et le personnel soignant? Est-ce qu'au lieu d'appeler ou de déposer le projet de loi n° 10, on aurait dû plutôt appeler le projet de loi de mon collègue député de Pontiac et de s'attaquer aux ratios? Qu'est-ce que je vous ai mentionné tout à l'heure? Les infirmières nous demandent d'agir sur le temps supplémentaire obligatoire, sur le ratio.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : M. le député de Nelligan, je sais que c'est un débat qui peut être passionnant. Cependant, je vous demanderais, en intervenant, de ne pas cogner sur le pupitre. Poursuivez.

M. Derraji : M. le Président, vous m'avez donné le temps de prendre un petit souffle. Et, s'il vous plaît, est-ce que je peux avoir un verre d'eau? Merci beaucoup. Vous m'avez compris.

Une voix : ...

M. Derraji : Ah oui! Merci, M. le leader adjoint. Mais, vous savez, M. le Président, c'est un débat que j'aime, qui m'anime. J'ai à coeur, M. le Président, l'état de notre réseau de la santé. J'ai passé moi-même plusieurs années et je vous dis... C'est pour cela que je vous dis que j'aime les propos de ma collègue la députée de Marie-Victorin, parce que c'est vrai, on doit tous être préoccupés par la situation de notre personnel soignant. Vous êtes tous des élus ou vous avez des infirmières dans votre comté. Et j'en suis sûr et certain, vous serez interpelés sous peu parce que la fédération et les infirmières font un bon travail. Ils veulent sensibiliser les élus. Ils font partie de notre société. Merci beaucoup. Ils font partie de notre société. (Interruption) Ce n'est pas moi, c'est le verre, M. le Président. Ils font partie de notre société. Ils veulent aussi agir avec nous. J'en suis sûr et certain que vous avez des proches qui travaillent dans le réseau. Vous voyez l'autre passion, hein, avec laquelle elles travaillent dans le réseau, et c'est ça que je veux. C'est ça que je veux aujourd'hui.

Je m'adresse aux élus caquistes parce que... Écoutez, ils ont toute la majorité dans ce Parlement. Je leur dis : Écoutez, pouvez-vous parler avec le ministre au lieu d'appeler le projet n° 10? Est-ce qu'on peut faire un travail de collaboration? Agissons sur les ratios, hein? N'est-ce pas, chers collègues? Agissons sur les ratios. Agissons ensemble sur les ratios. Là, on va envoyer un premier message positif du gouvernement de la CAQ. Écoutez, ils peuvent prendre le crédit. Ils peuvent prendre le crédit, M. le Président. Même si c'est un projet de loi de mon collègue député de Pontiac, on leur donne ce crédit. Après ce projet de loi, régler les problèmes de problèmes de ratios, car on envoie un message. Là, les infirmières qui travaillent dans les agences vont voir notre message. Ah! il y a quelque chose qui se passe, le gouvernement est en train de régler les projets ratios. En réglant les projets ratios, on commence sur la bonne voie de dire aux infirmières que nous sommes préoccupés en tant que législateurs de vos conditions de travail.

(12 h 20)

C'est une bonne chose, M. le Président. Je ne vais pas demander si vous êtes d'accord. Je respecte votre neutralité, mais vous savez que j'ai le droit juste à vous interpeler. Si vous me laissez, j'aurais pu faire l'échange avec ma collègue députée de Marie-Victorin. Je vous le dis, malheureux que cette Assemblée ne nous permette pas d'avoir cet échange... ou avec mon collègue que j'apprécie beaucoup, le député de Saint-Jérôme, qui travaille sur deux mini-hôpitaux privés. Je brûle, M. le Président, d'avoir cet échange avec lui. Il le sait très bien, parce que je sais que lui aussi cherche des solutions. Ou bien, la collègue députée de Labelle, qui travaille par rapport à la condition des aînés. J'aurais aimé, dans une future réforme, d'avoir ce genre d'échange, parce que, probablement, on va faire changer le point de vue du ministre de la Santé. C'est comme ça qu'on va améliorer les conditions de nos travailleurs et travailleuses dans le réseau de la santé. Ce sont des vrais enjeux, et vous ne pouvez pas dire le contraire, quand une infirmière... (Interruption) C'est la dernière fois, je vous promets. C'est une tendance à taper sur la table, c'est une très mauvaise tendance. Je vais arrêter, M. le Président. Mais c'est une chose formidable que, tous ensemble, quand on va recevoir des infirmières dans le bureau de comté, on va leur dire : Écoutez, on travaille avec l'opposition. Le député de Pontiac a déposé un bon projet de loi qui s'attaque aux projets ratios, et, pourquoi pas, ma collègue députée de Marie-Victorin dépose un projet de loi pour s'attaquer au TSO d'une manière concrète. C'est ça, la collaboration entre l'opposition et le gouvernement. Et le ministre peut avoir son agenda, mais les collègues aussi peuvent avoir leur agenda. Et le collègue avait son agenda dans un autre domaine, au niveau de l'innovation. C'est comme ça qu'on travaille ensemble. C'est ça, le fruit d'un travail parlementaire du législateur.

Donc, M. le Président, j'aimerais bien que, tous ensemble, on prenne un moment et dire qu'est-ce qu'on a appris de la pandémie. On a été tous interpelés, dans nos bureaux de comté, par les effets néfastes de la pandémie sur le personnel soignant. On était tous touchés parce que ça a été terrible, ça a été des moments difficiles pour l'ensemble des Québécois. Ils ont suivi.

Mais, s'il vous plaît, prenons un moment, prenez un moment pour se poser les vraies questions. Est-ce qu'avec ce projet de loi le ministre est en train d'agir sur les conditions de travail des infirmières? La réponse est non. Et ce qui est déplorable, c'est que ceux et celles avec qui on veut collaborer, ils le disent. Ils seront là, en commission parlementaire, ils vont le dire. Vous savez qu'on peut vouloir changer les choses, et avoir des échéanciers, et dire que c'est un petit projet de loi, mais ça ne sert à rien, en tant que législateur, si mon projet de loi ou la pièce, la pièce que j'utilise pour changer la loi n'a pas d'impact. J'ai perdu mon temps en tant que législateur. Et donc le législateur, par la définition, à part contrôler l'action du gouvernement, à part avoir de l'impact, mais avoir aussi des solutions et ramener des solutions, c'est un temps précieux.

Et là le gouvernement a le choix. Ils ont choisi le projet de loi n° 10, qui est un beau titre, versus un projet de loi qui s'attaque aux vrais problèmes. Quand on dit «projet ratio», j'en suis sûr et certain, prochaines discussions que vous allez avoir avec une infirmière, dans votre propre comté, dites : Est-ce que... J'aimerais bien avoir votre avis par rapport au projet ratio. Qu'est-ce que vous en pensez? Ah! vous allez avoir un doctorat de projet ratio, et il va vous expliquer que les projets ratios nuisent à la qualité des soins, nuisent à la qualité de vie de notre personnel soignant. Et c'est pour cela qu'ils quittent le réseau, c'est parce que c'est insoutenable.

Moi, j'ai un exemple, M. le Président, pour vous. J'ai un exemple, mais un exemple... un camionneur. Est-ce qu'on accepte qu'un camionneur dépasse un nombre d'heures précis en faisant la livraison de marchandises d'un point a à un point b? La réponse est non. Donc, on accepte qu'un camionneur ne dépasse pas le nombre d'heures prescrites dans la loi pour respecter, hein, conditions de route et son état, mais on accepte qu'une infirmière qui nous soigne le dépasse. Et c'est là le noeud du problème. C'est le noeud du problème qui n'est pas réglé par ce projet de loi. C'est pour cela que vous avez vu que les infirmières, malgré ce qu'on peut dire sur le syndicat... mais les infirmières, d'une manière générale, étaient unanimes : c'est bien beau, dire que c'est l'employeur de choix, bienvenue, on arrive à vous ramener dans le réseau, parfois on met un coup de 5 000, un coup de 4 000, mais pourquoi ils ne restent pas dans le réseau?

Donc, je vous ai dit, M. le Président, que le problème qu'on a, c'est un problème de ratio. Vous allez me permettre de prendre un peu d'eau, s'il vous plaît. Le problème de ratio, il n'est pas réglé. L'autre problème, M. le Président, c'est la conciliation famille-travail. Et, bien entendu, le fléau dans le réseau, c'est le temps supplémentaire obligatoire. Et, M. le Président, quand on dit le temps supplémentaire obligatoire, c'est devenu presque un mode de gestion, parce que mettez-vous dans la peau d'un gestionnaire, et ce gestionnaire, il est devant une situation très délicate... Il a des patients qui ont besoin de soins, qui ont besoin d'accompagnement, qui ont besoin, je dirais, d'une attention particulière, et malheureusement il n'y a pas de monde. Il n'y a pas de monde, M. le Président, parce qu'on n'arrive pas à retenir les gens.

Quand je vois des missions de recrutement à l'international, on demande 200 infirmières et on revient au Québec avec cinq infirmières, c'est très désolant, très désolant parce qu'on n'arrive pas à combler les besoins même à l'international, parce qu'on n'est pas les seuls et on pense qu'on est les seuls à avoir à lancer des appels pour des infirmières.

Je tiens encore une fois à le mentionner que, pendant la pandémie, ceux et celles, les premières personnes qui ont levé la main, ce sont nos anges gardiens. Ce sont nos anges gardiens à qui... Écoute, ça a été tellement difficile, convaincre le gouvernement de leur donner des CSQ. Pourtant, ils ont levé la main. Ils ne travaillent pas dans des agences privées. Ils voulaient aider le Québec avec leur coeur, quitte à laisser leur peau, et il y en a. Il y en a, M. le Président, qu'on a perdus, malheureusement. Une pensée pour eux et à leurs familles aujourd'hui.

Quand je vois le personnel d'entretien ménager, quand je vois le personnel soignant, préposés aux bénéficiaires, dans une majorité de CHSLD, quand je vois la pénurie de personnel dans les maisons des aînés, moi, je pense, M. le Président, le temps est venu de lancer une vraie alerte ou un vrai... Je n'aime pas le mot «plan», parce que, parfois, le plan... tellement il y a de plans, tellement il y a de tableaux de bord que c'est devenu non significatif, avoir ce genre d'appellation.

Mais ce qui est inquiétant, c'est que, quand je vois les besoins dans le réseau... Et vous avez vu ma collègue de D'Arcy-McGee, la semaine dernière, se lever pour parler des services en orthopédago. Vous avez vu les demandes pour des populations vulnérables. Et, quand je vois que, maintenant, on est en train de faire du patchage en changeant le personnel soignant d'un établissement à un autre et essayer de trouver des solutions, je me dis : Où on s'en va?

Quand je vois des collègues qui viennent me parler qu'ils prennent leur billet d'avion pour aller en Turquie, ou en Afrique du Nord, ou dans leur pays d'origine pour rencontrer leur médecin spécialiste en moins de 24 heures, c'est des contribuables québécois. Les exemples ne manquent pas, M. le Président. C'est plus facile, maintenant, avoir un rendez-vous avec un spécialiste à l'extérieur du Québec qu'au Québec. Je peux vous donner plusieurs cas que j'ai reçus. Ça coûte 60 $ à 100 $ la consultation, un billet d'avion de 800 $. C'est la réalité de notre réseau de santé qui nous coûte 1 milliard de dollars par semaine, un réseau de santé qu'on paie tous, presque la moitié du budget, de notre budget.

Les belles promesses de la CAQ, quatre, cinq ans plus tard, rien ne s'améliore. Mais mettez-vous à la place de ces citoyens québécois qui voient aujourd'hui le projet de loi n° 10 et se demandent vraiment comment ce projet de loi va aider leur état de santé. Ils n'ont pas toujours accès à un médecin de famille parce qu'ils doivent toujours refaire la même chose : s'inscrire dans une liste pour un bobo et revenir s'inscrire. S'ils ont une chirurgie, ça dépend... 170 000 chirurgies en attente, du jamais-vu, un record au mois de janvier. Et, pour les personnes qui souffrent d'un cancer, je pense à eux fortement, parce que le gouvernement a changé les règles, une liste qui s'allonge. C'est presque le double en un an.

Vous savez, vous conduisez, vous avez les lumières rouges partout. Et vous avez besoin de ce personnel soignant, vous avez besoin de ces personnes. Mais qu'est-ce qu'on fait? Malheureusement, rien. Et je vous le dis, ce n'est pas la première fois qu'on va se lever par rapport à ce dossier, parce que la santé, c'est un enjeu important. La santé de nos jeunes, c'est important. La santé des plus vulnérables, c'est important. La santé des aînés, c'est important, et on va toujours le dire. Vous savez, M. le Président, si on recule, même 10 ans en arrière, on n'a jamais eu, jamais eu des lumières très rouges par rapport à l'état de santé actuel.

Mais ce qui m'inquiète aujourd'hui, au-delà des paramètres du ministre... parce qu'il aime ça, son tableau de bord. Je lui laisse. De temps en temps, ça m'intéresse, par curiosité, je cherche un indicateur ou deux. Mais depuis longtemps, ils sont rouges, je ne les consulte plus, M. le Président. Mais ce qui m'inquiète aujourd'hui... Vous savez, vous ne pouvez plus bâtir ni construire quelque chose de solide sans les bras de ceux et celles qui tiennent notre réseau de santé. Et c'est à eux que je m'adresse aujourd'hui. Au Parti libéral, on croit... c'est grâce à vous, grâce à l'amélioration de vos conditions de travail, grâce à la... Vous savez, M. le Président, j'ai tellement mal que je me dis : Est-ce qu'on ne rate pas la cible? Je me demande : Est-ce qu'on ne rate pas la cible encore une fois?

(12 h 30)

Vous savez, j'étais porte-parole en santé. J'ai vu les projets de loi défiler devant moi. Et j'ai mal parce que je me dis, mon temps qui est précieux aussi... en tant que législateur à l'intérieur de ce Parlement, j'aurais aimé améliorer les conditions de travail de ces infirmières qui nous écoutent, à qui on dit aujourd'hui qu'il n'y aura pas de solution pour les projets ratios, il n'y aura pas de solution pour le TSO, il n'y aura pas de solution pour la conciliation travail-famille. Mais qu'est-ce qu'on leur propose? Ce que le gouvernement leur propose : venez à des forums. Venez à des forums, on va jaser. Jaser de quoi? Que leurs conditions sont pitoyables? Ils le savent déjà, que leurs conditions ne sont pas bonnes, et qu'ils nous demandent de l'aide, et qu'ils nous demandent des actions.

Mais je tiens à leur dire : Notre porte-parole en santé, nous-mêmes, l'équipe libérale, on va se battre. On va se battre jusqu'au bout, parce que, oui, c'est vrai, nous avons déposé un projet de loi pour régler le problème des ratios, mais on va continuer à se battre à l'intérieur de ce projet de loi pour avoir des réponses qui comptent par rapport à vos conditions de travail. Parce qu'on veut tous, à l'intérieur de ce Parlement, des meilleures conditions de travail pour les infirmières et les infirmiers, mais on veut qu'ils reviennent. On veut que le public, le réseau public devienne un réseau de choix, hein? C'est ça, notre volonté, et, j'en suis sûr et certain, votre volonté aussi, M. le Président. Et malheureusement, le projet de loi, je tiens à lui décerner le prix du meilleur titre, mais malheureusement, le mauvais contenu.

Et d'ailleurs le ministre l'a dit : un petit projet de loi. Je ne savais pas qu'à l'intérieur de ce Parlement on peut qualifier les projets de loi de petits, moyens ou grands. Le ministre lui-même a utilisé ce qualificatif à son projet de loi. C'est son choix. J'utilise juste ses propos, c'est un petit projet de loi, c'est vrai. C'est un petit projet de loi, qui ne règle pas les vrais problèmes, les vrais problèmes que je tiens à répéter. Je les ai répétés depuis presque une heure.

Alors, M. le Président, je vais saisir les deux prochaines minutes pour dire qu'au Parti libéral du Québec les conditions de travail de nos infirmières est une condition sine qua non, si on veut régler les maux de ce réseau. Les conditions de travail de notre personnel soignant, infirmières, préposés aux bénéficiaires, infirmières auxiliaires, c'est un enjeu majeur, c'est un enjeu de société, si on ne veut plus avoir recours aux agences privées. Au-delà des slogans prononcés par ce gouvernement, il n'y a pas d'action. Et, au Parti libéral du Québec, on va veiller à ce que les actions suivent, parce que c'est très important pour l'avenir de notre nation, pour l'avenir des soins qu'on doit offrir à la population. Ils méritent des soins de qualité, mais aussi un personnel soignant qu'on respecte. Qu'on respecte ce personnel soignant qui nous écoute, nous demande du respect, nous demande des conditions de travail optimales, M. le Président.

Alors, M. le Président, merci pour votre patience. Désolé si j'ai utilisé pas mal de fois... ou je me suis emporté en tapant sur la table, mais vous savez la passion que j'ai pour notre réseau de la santé. C'est quelque chose que j'aime, que je vais toujours partager, parce que j'ai travaillé avec du personnel soignant. Et je tiens à vous dire qu'on a le meilleur personnel soignant au monde. Ils sont fiers, ils sont fiers de donner des soins de qualité, mais ils veulent, M. le Président, un peu de considération. Malheureusement, ce projet de loi rate la cible, n'améliore pas les conditions de travail de nos infirmières, et, pour moi, c'est un échec de ce gouvernement. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Nelligan. Maintenant, je cède donc la parole au député de Laurier-Dorion.

M. Andrés Fontecilla

M. Fontecilla : Merci, M. le Président. Donc, je suis très heureux de participer à l'étape de l'adoption du principe du projet de loi n° 10, donc, Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux, un problème lancinant et récurrent dans le système de santé du Québec, là, depuis quelques années. Ça a déjà été dit par plusieurs intervenants et même par le ministre de la Santé. Et c'est un projet de loi qui vise à atténuer, et j'utilise le verbe «atténuer» parce qu'il ne réglera pas le fond du problème, là, une problématique grave au sein du système de santé, qui coûte extrêmement cher, soit dit en passant aussi.

Mais c'est un problème que je pourrais qualifier d'épiphénomène. Épiphénomène pourquoi? Parce que c'est un problème qui découle d'un autre problème, là. Et ça a été affirmé et confirmé à plusieurs reprises et par le ministre et par un ensemble des intervenants ici, au salon bleu, et à l'extérieur.

C'est quoi, le problème principal? C'est les conditions de travail du personnel infirmier et plus largement de l'ensemble du personnel dans notre système de santé, conditions de travail qui sont, on va se le dire, déplorables. Déplorables, oui, dans la partie très importante, la partie de la rémunération, mais aussi, et ça a été dit à plusieurs reprises par les représentants et représentantes du monde syndical, aussi déplorables sur le thème général des conditions de travail. C'est un fait, les infirmières quittent le système de santé parce qu'elles trouvent que, d'une part, oui, l'aspect salarial est insatisfaisant, mais surtout, surtout, parce que les conditions de travail, là, ne leur permettent pas d'avoir un niveau de vie, d'avoir des conditions et une qualité de vie acceptables.

Premier problème, et ça a été amplement documenté, là, la question de la capacité de prévoir ses horaires est très limitée dans les services de santé publics, là. Et le travail supplémentaire obligatoire, tristement célèbre au Québec, là, le TSO, est un véritable fléau qui éloigne le personnel infirmier du système public, là. L'incapacité de pouvoir prendre, comme on dit, là, des chiffres, des horaires pendant la journée, pendant la semaine ou encore pendant la fin de semaine pour passer du temps avec sa famille, là, font en sorte que l'ensemble de ces facteurs font carrément fuir les infirmières et les infirmiers du système public, là, et pas uniquement cette catégorie de personnel, mais aussi l'ensemble des salariés du système de santé.

Donc, il y a un problème de fond qui doit être réglé, et ce n'est pas par le projet de loi n° 10, présenté par le ministre de la Santé, qu'il va être réglé. Il va être réglé ailleurs. Ça va être réglé dans les négociations, dans les négociations... dans la table de négociation avec le monde... avec les représentants syndicaux des infirmiers, des infirmières et de l'ensemble du personnel qui travaille dans le système de santé. C'est là que le gouvernement doit mettre tous ses efforts, là, pour discuter et négocier de bonne foi afin de régler sur le fond ces problèmes-là qui affectent de façon récurrente le système de santé au Québec.

On le sait, les agences de santé sont un fléau qui affecte le système de santé depuis des années. Le recours à la main-d'oeuvre indépendante, et ça passe principalement par l'utilisation des agences de placement, a coûté 960 millions au réseau public en 2022. 960 millions, presque 1 milliard de dollars, là. Et cela constitue une augmentation de 380 % depuis 2016, selon les données du ministère de la Santé. Donc, ça nous coûte non seulement... ça coûte non seulement extrêmement cher, mais le coût de cette facture-là va... s'accroît à travers le temps, et rien ne nous empêche de croire qu'elle va continuer à s'accroître. Donc, c'est urgent de s'attaquer non seulement à la conséquence... l'utilisation des agences de placement, mais aussi au fond du problème.

Le phénomène du recours à la main-d'oeuvre indépendante représente 14,8 millions d'heures travaillées, alors qu'il en représentait 4,8 millions il y a six ans. Ça, c'est un signe clair, là, que le personnel infirmier en particulier, là, éprouve un malaise grandissant à travailler dans le système public. Elles préfèrent — parce que, pour la plupart, il s'agit de femmes, là — aller travailler pour les agences de placement, qui leur assurent au moins une meilleure qualité de vie. Selon les données de la Fédération des travailleurs du Québec, de 2016 à 2022, le recours aux agences a coûté plus de 3 milliards de dollars aux contribuables québécois, là. C'est un problème grave. Ça coûte extrêmement cher. Je vous donne un exemple tiré de la région du Bas-Saint-Laurent : avec 44,6 millions, en 2021‑2022, les coûts engendrés par l'embauche du personnel issu des agences privées ont été près de 30 fois plus élevés qu'il y a cinq ans, toujours dans le Bas-Saint-Laurent. Donc, ça fait longtemps... Excusez-moi de donner des coups sur — je m'entends moi-même, là — le pupitre. Ça fait longtemps que le monde sur le terrain réclame un combo idéal dont l'un ne va pas sans l'autre : tout d'abord, un plan respect du personnel, de leur dignité et de leurs conditions de travail, et suivi... et, de façon concomitante, accompagné de la décision de finalement abolir les agences, à tout le moins les encadrer très sévèrement.

Donc, dans l'ensemble du réseau de la santé et de la société québécoise, qui est très préoccupée par cette situation-là, les attentes étaient très élevées par rapport au projet de loi présenté par le ministre de la Santé, mais, voilà, il nous présente un projet de loi relatif... très restreint, qui suscite beaucoup de déception.

Grosso modo, on va dire que ce n'est pas un projet de loi qui vise à encadrer et mieux encadrer les agences de placement et l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante, mais c'est un chèque en blanc qu'on est en train de signer au ministre de la Santé, un ministre que je n'ai pas de misère à croire à sa compétence, mais c'est quand même un chèque en blanc. On donne le pouvoir de décider beaucoup de choses concernant le recours à la main-d'oeuvre indépendante au ministre de la Santé. On va... Avec ce projet de loi là, on donne la capacité au ministre de la Santé, tenez-vous bien, M. le Président, de naviguer à vue, c'est-à-dire on lui donne les clés de la maison et on lui dit : Mais faites-en ce que vous voulez. On ne sait pas ce que vous allez faire, mais faites-en ce que vous voulez, là. Parce que le projet de loi est très clair là-dessus, là, la grande majorité des décisions fondamentales concernant le recours à la main-d'oeuvre indépendante va être décidée par règlement qui va être décidé ultérieurement. Et, si... En quelque sorte, on nous demande à nous, partis d'opposition, de voter sur des décisions qu'on ne connaît pas à l'avance, là, et c'est relativement... c'est préoccupant comme situation parce qu'il en va de la démocratie, de la capacité de débattre ici ensemble, au salon bleu, de la teneur des différents projets de loi, de l'efficacité du parlementarisme, de la saine gouvernance du système de santé.

• (12 h 40) •

Ce projet de loi, M. le Président, est aussi insuffisant, et je vais vous donner un exemple, parce que les agences de placement qui gèrent l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante s'en réjouissent, et qui ne voient dans ce projet de loi qu'un coup d'épée dans l'eau. Je vous cite des déclarations d'un propriétaire de l'Agence Nomade, une agence de placement, là, et son propriétaire, Aymeric Côté-Gadoua, se réjouit du projet de loi n° 10 parce qu'il pense que c'est une très bonne nouvelle : «"On ne change pas notre mission. Quand le gouvernement avait plafonné le tarif horaire à près de 72 $ — jusqu'au 31 décembre 2022 — ça n'avait pas influencé notre offre qui était très semblable aux limites imposées. Si le gouvernement cherche à revenir à ces limites, ça ne va rien changer pour nous", précise-t-il.» Aymeric Côté-Gadoua est le propriétaire de l'agence de placement Nomade.

Donc, voilà, les agences de placement, on le voit, là, sont très préoccupées, et je le dis de façon ironique, là, par ce projet de loi, parce que, de toute évidence, ils pourront continuer à faire affaire avec le système public sans que pas grand-chose change.

Il est très important, et on va travailler avec mes collègues, avec le député de Rosemont, là, dans ce sens-là, il est très important de définir, dans ce projet de loi, ce qu'on entend par «agence de placement» et ce qu'on entend par «main-d'oeuvre indépendante», ce qu'on entend par utilisation de cette main-d'oeuvre indépendante, parce que, vous le savez, M. le Président, les termes sont... il est nécessaire de les définir.

Ce projet de loi aurait pu s'appeler projet de loi qui permet l'utilisation des agences dans certaines conditions, au loisir du ministre et aussi longtemps qu'on sera dans le trou. C'est ça, véritablement, l'objet de ce projet de loi. En effet, le projet de loi dit que les CISSS, ou les CIUSSS, ou les résidences pour personnes aînées, ou les ressources intermédiaires — merci beaucoup — ou les ressources de type familial ne peuvent recourir aux agences, sauf dans la mesure prévue par le règlement, qu'on va connaître plus tard, après l'adoption du projet de loi, là.

Il y a d'autres mots clés dans ce projet de loi là : «le ministre peut recourir», «le ministre peut établir toute autre condition ou modalité», «le ministre peut accorder une autorisation», «le ministre peut continuer à recourir aux agences», «le ministre peut octroyer des autorisations», «le ministre peut octroyer des renouvellements». Tout revient dans les mains du ministre sans autres limitations.

Cela nous amène à dire que ce projet de loi est trop vague. On ne peut fonctionner avec un projet de loi aussi général, parce qu'on ne sait pas si on va atteindre l'objectif visé, qui est celui de diminuer de façon draconienne l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante par le biais des agences de placement. Il est impératif que le ministre définisse mieux c'est quoi, le plafond auquel il pense. C'est un plafond de la rémunération, c'est la rémunération à l'heure, que peuvent facturer les agences de placement. Cela est essentiel, comme données, pour pouvoir savoir de quoi l'on parle. Et, même si l'on plafonne, l'intervenante qui utilise les agences de placement peut encore gagner pas mal plus d'argent que si elle était rémunérée directement par le système public.

La question des dépôts des contrats est essentielle pour pouvoir avoir une idée claire et avoir toute l'information, là, pour pouvoir débattre de ce sujet-là. Il est impératif que le ministre de la Santé dépose les contrats conclus entre les CISSS et CIUSSS et les agences de placement. Cela doit inclure les taux horaires et les marges bénéficiaires, que je soupçonne juteuses, et ça va aider, ces informations-là vont aider tout le monde. Ça va nous permettre de voir clairement à quel point, là, on se fait abuser par les agences de placement et surtout démontrer que tout cet argent-là qu'on met dans les poches des patrons des agences de placement, là, pourrait servir à autre chose. Par exemple, par exemple, suggestion comme ça, M. le Président, améliorer les conditions de travail des infirmières et des infirmiers du Québec.

Ce projet de loi, d'autre part, est centralisateur. Le ministre dit fuir la microgestion et qu'il ne veut pas passer son temps à éteindre des feux. Éteindre des feux, ça ne l'intéresse pas, mais pourtant il se donne tous les pouvoirs pour décider tout seul c'est quoi, une agence de placement, et pour décider tout seul comment il va... quand, à quel moment, dans quelles régions, pendant quelle durée il va faire affaire avec les agences de placement. Donc, il va passer son temps à faire de la microgestion et à éteindre des feux.

Donc, d'un côté, il dit qu'il ne veut pas faire quelque chose, mais il se donne les moyens, justement, pour pouvoir le faire, par exemple, de fixer tout seul la période de temps durant laquelle un CISSS, un CIUSSS, une résidence pour personnes aînées, ou une ressource intermédiaire, ou une ressource de type familial peut utiliser une agence et accorder tout seul une autorisation exceptionnelle à un organisme de continuer à utiliser une agence. Il se donne même un échéancier pour chaque région administrative, sans tenir compte, par exemple, du fait que, dans Chaudière-Appalaches, par exemple, la situation peut être très différente à une autre région, comme Thetford versus Lévis.

D'autre part, le ministre se donne une feuille de route très longue pour arriver à ses objectifs. Ça va lui prendre, selon le projet de loi, jusqu'en 2026. Et même, il se donne le pouvoir de faire perdurer cette situation-là partout où il y a... où il ressent qu'il y a un besoin, là.

Par contre, il y a beaucoup d'endroits où il va être très difficile de se débarrasser de l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante de façon durable. Comment il va faire? On se pose la question. Est-ce que ça va dépasser 2026, là? Ça va être quoi, son arme secrète? Il nous en parlait tantôt, là, au début de l'adoption du principe du projet de loi, là. Ça va être quoi, son arme secrète, là, pour faire en sorte qu'il va se débarrasser de façon définitive de l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante?

D'autre part, ce projet de loi ne contient que des mesures contraignantes, sans mesure de soutien pour le monde sur le terrain — je le rappelle au public, là, le projet de loi n° 10 — et comporte des amendes pour des infractions, des amendes, jusqu'à 25 000 $ pour une personne et jusqu'à 75 000 $ pour une organisation, et elles seront portées au double s'il y a récidive. Je vous rappelle ici qu'il n'y a pas nécessairement un crime, hein? Il y a l'utilisation de la main-d'oeuvre indépendante. Donc, une personne, un gestionnaire peut être puni de 25 000 $ ou, une organisation, de 75 000 $ si elle utilise un peu, un peu trop au goût du ministre, la main-d'oeuvre indépendante, alors qu'on en a besoin.

Et, vous savez, il y a une petite ressource intermédiaire, une RI qu'on appelle, dont les employés ont des salaires de misère parce que les dernières ententes ne prévoient pas assez de financement pour les salaires du personnel, et qui se retrouve en pénurie, et qui n'a pas le choix d'utiliser des agences, doit... Cet organisme-là, qui n'est pas nécessairement un très gros organisme, doit travailler, en plus, avec le stress d'avoir une épée de Damoclès au-dessus de leur tête en attendant d'avoir une autorisation spéciale du ministre pour utiliser les agences, sinon, il peut y avoir une amende de 25 000 $ pour le directeur, la directrice, ou de 75 000 $ pour l'organisation.

• (12 h 50) •

Ce n'est pas une façon de travailler, ça, M. le Président, là. Les organisations ne peuvent pas travailler sous la menace, là. En fait, il faut prendre le problème à l'envers. Et on voit très mal comment le ministre peut infliger d'aussi lourdes amendes à des organisations qui ne font que travailler avec ce dont elles ont sous la main. C'est vraiment une mesure qui nous paraît hautement questionnable, sinon inutile.

Quant à nous, à ma formation politique, Québec solidaire, nous proposons une autre voie, pour dire le moins, qui doit être fondée sur quelque chose de fondamental et que l'on oublie trop souvent, là, lorsqu'on est en situation de direction, de pouvoir en haut de la hiérarchie, là, tout simplement la capacité d'écoute, écouter ce que les autres... écouter ce que les employés ont à dire, écouter les éducatrices, écouter les infirmiers et les infirmières, écouter du personnel dont on n'entend pas beaucoup souvent parler, là, les agents de sécurité, les travailleuses sociales, les préposés aux bénéficiaires. Et tous ces gens-là ont des solutions à proposer, parce qu'évidemment c'est eux, les premiers, comme on dit, à voter avec leurs pieds. Ils disent : Mes conditions de travail sont déplorables, en plus je ne suis pas très bien payé, bien, je vote avec mes pieds. Je m'en vais à une agence de placement et, demain matin, je vais revenir au même poste, mais mieux payé et à l'horaire qui me convient, là.

Il faudrait peut-être s'inspirer de l'exemple du CIUSSS—Estrie. Un employé qui quitte le réseau de la santé public estrien ne peut pas y revenir tant que la main-d'oeuvre indépendante... en tant que main-d'oeuvre indépendante pendant une période d'une année. Il s'agirait du délai le plus long du Québec. Pour votre information, M. le Président, la part de la main-d'oeuvre indépendante par rapport à la masse salariale totale du CIUSSS—Estrie était de 1,1 % lors de la dernière année financière, l'un des taux les plus bas au Québec.

On pourrait aussi penser à une loi sur les ratios. On pourrait... Et il faut absolument songer à mettre fin au temps supplémentaire obligatoire, le TSO, qui suscite tant de problèmes dans nos établissements de la santé, là. Et, par exemple, on pourrait aussi... oui, à un moment donné, il faut mettre la main dans la poche, là, augmenter les primes pour le travail en région éloignée, là où il y a une pénurie assez grave d'infirmières.

On va être bon joueur. On veut se débarrasser des agences de placement. On veut limiter la voracité de ces agences-là. On est tous et toutes d'accord. On veut limiter les factures gargantuesques et on veut tenir compte des réalités régionales. Mais il y a deux façons d'arracher un pansement : tirer d'un coup, et ça fait mal moins longtemps, ou y aller très lentement, et ça fait mal longtemps. C'est la voie choisie par le ministre.

J'aimerais rappeler ce qui se passe en ce moment pour rappeler l'urgence. Une infirmière de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont s'est fait demander de former une infirmière d'agence qui arrive sur le quart du jour, et celle qui gagne trois fois son salaire, tout en ayant un quart de travail de jour à la place des infirmières du public. Ça n'a pas de sens. Et viser... Le projet de loi devrait viser à ce qu'on atteigne l'abolition des agences, et nous allons travailler dans ce sens-là. Et il faut rendre les conditions de travail humaines, il faut humaniser, il faut respecter les travailleuses et les travailleurs de notre système de santé, même si la partie ne sera pas facile.

Mais M. Dubé... le ministre de la Santé, excusez-moi, M. le Président, devrait travailler à ce qui est vraiment le nerf de la guerre, là, c'est de convaincre les travailleurs et travailleuses qui ont quitté le système public d'y revenir et de retenir les gens qui sont tentés de partir avec des bonnes conditions de travail, là. Et, encore une fois, cela se fait, oui, par un projet de loi comme celui-là, mais cela se fait surtout à l'extérieur, en négociant de bonne foi avec les travailleuses et les travailleurs du système de santé pour améliorer les conditions de travail.

Nous, à Québec solidaire, nous sommes prêts à collaborer, à avancer dans cette voie-là, et, dans ce sens-là, nous sommes prêts à faire le débat avec le ministre de la Santé, là, sur le projet de loi n° 10, là, et nous allons voter en faveur de l'adoption de principe du projet de loi n° 10. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député. Donc, je cède maintenant la parole au député des Îles-de-la-Madeleine.

M. Joël Arseneau

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Mise en contexte. Évidemment, on a une grande pénurie de main-d'oeuvre dans différents secteurs de la société au Québec, et dans, évidemment, le système public, et dans le système public de santé. Pour avoir le moyen, les moyens de soigner les gens, on fait appel à des agences privées qui offrent des services payés au double et au triple de ce qu'on paierait normalement si ces employés étaient tout simplement des employés de l'État. Ce qui est absolument extraordinaire, c'est que, dans la majorité des cas, sinon la presque totalité, en fait, ce sont en fait des anciennes employées de l'État qui, n'en pouvant plus devant les conditions de travail inhumaines, ont quitté le navire pour sauver leur santé, sauver leur couple, leur famille, leur peau, essentiellement, et se sont retrouvées dans des agences où elles peuvent choisir quand elles travaillent, de jour, nuit, exclure les fins de semaine, dans quelle région elles travaillent et avec un salaire largement supérieur à ce que l'on offre dans le secteur public.

Alors, d'entrée de jeu, je veux dire que le choix qu'elles ont fait, ces infirmières, ou les préposés aux bénéficiaires, ou autre personnel soignant, il est absolument et totalement logique. En fait, sur le plan personnel, c'est la façon qu'elles ont trouvé de pouvoir continuer à contribuer à soigner les gens, à exercer leur profession qu'elles avaient choisie. C'est l'avenue qui est pour elles la façon de s'en sortir.

Pour les gestionnaires du service public, pour l'État, et pour les patients, et surtout pour les contribuables, en fait, c'est la catastrophe. Et cette catastrophe-là, on l'a dénoncée depuis nombre d'années, et nous désespérions de voir le gouvernement enfin agir pour cesser l'hémorragie, l'exode des travailleuses et des travailleurs, et corriger le tir, changer le cap, finalement, cesser d'être dépendant d'une machine, donc d'une entreprise que l'on fait vivre, au surplus, et qui nous cannibalise sur le plan à la fois des ressources financières et des ressources humaines.

Alors, nous attendions donc le projet de loi avec beaucoup d'enthousiasme. Et nul besoin de vous dire qu'on est déçus dans la mesure où le projet de loi ne comporte que six articles. Il est mince et ne révèle absolument rien sur les façons et les moyens que mettra en place le ministre pour arriver à ses objectifs. Nous, ce qu'on veut, c'est que le gouvernement obtienne des résultats. On veut collaborer, on veut sauver, essentiellement, le système de santé. Alors, évidemment, on est d'accord sur le principe. Le principe du projet de loi, c'est de cesser de recourir aux agences.

Le problème, c'est le «sauf que». Et alors les «sauf que» se multiplient d'article en article. On n'aura plus recours aux agences de placement de personnel ou à la main-d'oeuvre indépendante, sauf dans la mesure prévue par règlement. Donc, le secret, c'est dans les règlements. C'est là qu'on apprendra véritablement là où le gouvernement veut aller. Donc, il est difficile pour nous de se prononcer sur les chances de réussite du gouvernement à l'heure actuelle, compte tenu qu'on ne connaît pas la teneur des règlements.

Mais le projet de loi, il dit aussi que le gouvernement a le pouvoir de déterminer la période, là, où on pourrait accorder des sauf-conduits, des passe-droits aux gestionnaires et aux différents organismes du domaine de la santé. Donc, encore une fois, on ne sait pas, ce sera déterminé par règlement.

Le ministre s'accorde aussi un pouvoir discrétionnaire de ne pas respecter les objectifs qu'il fixe lui-même dans les règlements. Alors, évidemment, c'est absolument contradictoire avec le voeu exprimé maintes fois par le même ministre de la Santé sur cette idée de décentralisation, de responsabiliser les gens sur le terrain et de leur donner le pouvoir sur leur façon de livrer des services à la population, l'autre élément étant évidemment qu'on se donne toute la marge de manoeuvre pour étendre dans le temps ce processus-là, là, de se sevrer des agences, si on voit que les objectifs ne sont pas atteints. Alors, évidemment qu'on aura à débattre des règlements, de la teneur des règlements.

Et j'y reviendrai, M. le Président, puisque mon temps, à l'heure actuelle, est limité.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Est-ce que vous avez complété votre intervention?

M. Arseneau : Non, j'allais compléter mon introduction.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Vous aurez, à ce moment-là, le loisir de pouvoir le compléter lors de la reprise du débat sur l'adoption du principe de ce projet de loi.

Alors, compte tenu de l'heure et afin de permettre le débat sur les affaires inscrites par les députés de l'opposition cet après-midi, le présent débat sur l'adoption de principe du projet de loi n° 10 est ajourné.

Les travaux sont suspendus jusqu'à 15 heures.

(Suspension de la séance à 13 heures)

(Reprise à 15 heures)

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Vous pouvez vous asseoir. Alors, nous poursuivons nos travaux aux affaires du jour.

Affaires inscrites par les députés de l'opposition

Motion proposant que l'Assemblée demande au gouvernement de
maintenir l'intégralité des versements au Fonds des générations
ainsi que l'intégralité de son capital 

À l'article 16 du feuilleton, aux affaires inscrites par les députés de l'opposition, M. le député de Marguerite-Bourgeoys présente la motion suivante :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que le gouvernement caquiste a proposé de financer une baisse d'impôts à même les sommes versées au Fonds des générations;

«Qu'elle déclare qu'une telle proposition aurait un impact négatif sur l'équité entre les générations et aurait un impact important en perte de revenus potentiels dans le Fonds des générations sur un horizon à long terme;

«Qu'elle rappelle la nécessité de poursuivre les efforts à long terme afin de réduire le ratio d'endettement du Québec;

«Qu'elle déclare que toute modification aux versements et au fonctionnement du fonds doit [être] l'objet préalable d'une vaste consultation nationale auprès de la jeunesse du Québec;

«Qu'en conséquence, elle demande au gouvernement caquiste de maintenir l'intégralité du capital et des versements au Fonds des générations.»

Je vous informe que la répartition du temps de parole pour les débats restreints sur la motion inscrite par M. le député de Marguerite-Bourgeoys s'effectuera comme suit : 10 minutes sont réservées à l'auteur de la motion pour sa réplique, 54 min 15 s sont allouées au groupe parlementaire formant le gouvernement, 30 min 34 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, 17 min 34 s sont allouées au groupe parlementaire formant l'opposition officielle, et 17 min 42 s sont allouées au deuxième groupe d'opposition, six minutes sont allouées au troisième groupe d'opposition, et 1 min 30 s sont allouées à la députée indépendante. Dans le cadre de ce débat, le temps non utilisé par la députée indépendante ou par l'un des groupes parlementaires sera redistribué entre les groupes parlementaires selon la proportion établie précédemment. Mis à part ces consignes, les interventions ne sont soumises à aucune limite de temps. Enfin, je rappelle à la députée indépendante que, si elle souhaite intervenir au cours du débat, elle a 10 minutes à partir de maintenant pour en aviser la présidence.

Je cède maintenant la parole à M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Frédéric Beauchemin

M. Beauchemin : Merci, Mme la Présidente. Le Fonds des générations est un véhicule qui permet à l'ensemble du Québec de prendre soin des prochaines générations. Le Fonds des générations nous permet de mettre de côté des sommes accumulées qui, année après année, font grossir le Fonds des générations pour en venir à un niveau où est-ce que maintenant on peut quand même envisager que, d'ici à peu près 13 à 14, 15 ans, on pourra avoir un Fonds des générations qui sera dans les alentours de 100 milliards de dollars.

Pour nous, pour moi personnellement, le Fonds des générations, et donc le concept qui va avec le Fonds des générations, c'est-à-dire d'aider les prochaines générations, va dans ce que j'appelle le développement durable. Notre rôle en tant que parlementaires, c'est de prendre soin des citoyens dans leur ensemble, mais aussi on doit être visionnaires et prendre soin des prochaines générations. Les prochaines générations, ça sous-entend évidemment les jeunes qui ne sont aujourd'hui pas encore présents parmi nous.

Je veux juste donner l'exemple que d'ici... en 2041, un jeune qui naît aujourd'hui aura donc seulement 18 ans. Pour nous, c'est important de prendre soin de l'ensemble des citoyens et des citoyens à venir pour leur assurer dans la pérennité des services publics, les services offerts par l'État et de nous assurer que ces services-là sont donc équitables pour tous de génération en génération.

La raison initiale de la mise en place, au début des années 2000... en fait, 2006‑2007, mais ça a été discuté quelques années au préalable, de la mise en place du Fonds des générations était pour faire face à ce qui commençait à être un déficit structurel et une dette qui commençait à être définitivement enflammée pour la province du Québec. Et cette dette était tellement inquiétante que les agences de crédit regardaient ce qui se passait au Québec d'un mauvais oeil. La conséquence de ça, c'est qu'il y a eu effectivement des pourparlers, des échanges entre les agences de crédit de l'époque et le ministre des Finances de l'époque, et, lorsque le ministre de 2006... des Finances du Parti libéral de 2006‑2007 a mis en place le Fonds des générations, la première réaction des agences de crédit était un soupir de soulagement, parce qu'il fallait définitivement mettre en place quelque chose qui allait faire en sorte qu'on puisse équilibrer, si vous voulez, le déséquilibre qui se créait avec l'endettement que la province avait de façon annuelle, et donc ça a permis de pouvoir faire en sorte que les assises allaient être mises en place et qu'on allait mettre par la suite tous les efforts pour s'assurer une bonne croissance du Fonds des générations. Donc, ça, c'était la prémisse de base, à l'époque. À l'époque, on ne regardait pas non plus d'autres facteurs plus importants que ce que les agences de crédit avaient mis comme pression sur le gouvernement pour en arriver à faire de cette initiative-là un succès.

Cependant, avec le temps, on a tous réalisé, avec une consternation qu'on peut remarquer un petit peu tout partout à travers les pays développés — des pays qui est un petit peu moins développé, il y des pays qui ont des politiques encore plus restreintes — que la nature de la progression de notre population a été faite de façon naturelle. Je vais m'expliquer. C'est un peu compliqué, ce que j'essaie de dire là.

On n'a pas eu une croissance de la population permettant d'avoir un équilibre entre les gens qui vieillissaient et puis les vagues de jeunes qui suivaient. En d'autres mots, on a eu un problème qui s'est traduit en une inversion de notre courbe démographique. Et donc plus ça avançait dans le temps, plus ces conversations-là ont eu lieu dans le temps, plus, dans les récentes années, c'est devenu une question frontispice, à savoir comment allons-nous permettre aux prochaines générations d'avoir le même service d'État que nous, on a maintenant. Et donc c'est devenu de plus en plus important de mettre en place une réflexion, à savoir qu'allons-nous faire pour justement faire... se battre contre cette courbe, qui permet maintenant de me dire... de dire, en fait, que la génération actuelle a la pire courbe démographique de l'histoire récente du Québec. Et, en fait, par rapport au reste du Canada, la courbe démographique de la génération actuelle au Québec est la pire courbe.

Donc, on a un profil de la population ici qui peut nous amener à considérer que, dans une dizaine d'années, la distribution, si on peut dire, de retraités, dans notre population, va être de plus en plus significative, ce qui ressemble bizarrement aujourd'hui à la distribution de la population de la Colombie-Britannique, qui est une province, on le sait tous, un peu plus de retraités. Bizarrement, la Colombie-Britannique est aussi la province dont le ratio dette nette, PIB est le plus bas au Canada. Donc, la Colombie-Britannique a, dans ses cartons, la capacité de pouvoir faire face à des éventuels chocs financiers, mais aussi l'inversion de leur courbe démographique aussi, qui est un peu moindre que la nôtre. Mais leur courbe démographique va faire en sorte qu'ils vont pouvoir, ils vont faire face au même problème, mais leur endettement leur permet de pouvoir en faire face.

• (15 h 10) •

Donc, ça, c'est vraiment la grande motivation aujourd'hui pour pouvoir se dire que notre objectif qu'on devrait se fixer comme province, c'est d'obtenir un Fonds des générations capitalisé jusqu'à la hauteur de 100 milliards de dollars. Pour ce faire, on propose de continuer les pleines contributions au Fonds des générations. Puis là, pour cet aspect-là, je veux juste simplement vous dire que, lorsqu'on parle de couper, comme le gouvernement le propose, de 40 % les fonds qui vont au Fonds des générations, il y a dans l'ensemble des versements des redevances hydroélectriques d'Hydro-Québec, des redevances hydroélectriques provenant de producteurs privés, de l'indexation du prix de l'électricité sur le patrimoine, le bloc patrimonial, la contribution additionnelle d'Hydro-Québec, les revenus miniers, les taxes spécifiques sur les boissons alcooliques et des biens non réclamés. Ça, c'est, ce qu'on peut dire, ce qui a été initialement conceptualisé pour pouvoir faire partie des versements au Fonds des générations. À ça, s'ajoutent les revenus de placement, parce que les fonds s'accumulent, les fonds qui sont placés sont gérés par la Caisse de dépôt. La Caisse de dépôt dégage un rendement sur ces fonds-là. Donc, l'année suivante, la première année, après le premier anniversaire, il y a eu des revenus de placement qui ont commencé à s'ajouter à tout ça. Bien, c'est simplement pour vous dire qu'à part la taxe spécifique sur les boissons alcooliques tout le reste sont des... Ils ont un concept de l'intergénérationnel. Les redevances hydroélectriques, les redevances sur l'indexation du prix de l'électricité, contributions additionnelles d'Hydro-Québec, les revenus miniers, tout ça, c'est dans le concept de l'équité intergénérationnelle pour permettre justement à la génération qui va nous suivre de pouvoir profiter d'avoir au moins, au minimum, les mêmes services de l'État.

Nous, on est chanceux... Bien, peut-être que je suis un petit peu plus âgé que vous, Mme la Présidente, mais nous, on est chanceux, que la majorité des jeunes qui vont nous suivre, pour la simple et unique raison, chers collègues... Nous vivons aujourd'hui... Nous avons été chanceux de vivre dans la période du dividende de la paix. Nous avons été aussi chanceux de vivre dans la période de l'insouciance climatique. Au début des années 80, lorsque les chansons étaient tout à fait différentes sur les radios qu'elles le sont aujourd'hui, les enjeux climatiques, ce n'était pas du tout sur notre radar. Et puis le mur de Berlin allait tomber. Et, lorsque le mur de Berlin est tombé, on a vécu le dividende de la paix, c'est-à-dire cette explosion de la globalisation qui a, donc, changé totalement les paradigmes de l'économie. Et donc il y a eu une croissance exceptionnelle et des revenus qui ont rempli les coffres de l'État par la suite.

Ces deux éléments-là, O.K., font en sorte que, quand on regarde ça aujourd'hui avec les lentilles qu'on porte sur la situation mondiale actuelle, on n'a pas le même dividende de la paix, on s'entend tous. On va célébrer malheureusement le premier anniversaire de la guerre, une invasion de la Russie en Ukraine, ce vendredi, et puis, évidemment, bien, la crise environnementale qui est tout partout, et il faut qu'on agisse là-dessus.

Donc, en tant que financiers, on peut penser à certains mécanismes pour aider les jeunes. En tant que spécialistes des climats, on peut avoir aussi certaines idées, comme comment les aider, évidemment. Mais la chose que nous, on peut faire, puis que moi, je peux apporter, c'est mon expérience de marché des capitaux, de 30 ans travaillés en finance, pour pouvoir apporter support à l'idée que le Fonds des générations est la meilleure idée, le meilleur véhicule pour aider les prochaines générations à avoir le moyen de leurs ambitions. Par la suite, on pourrait discuter pour faire en sorte d'optimiser la structure financière des coûts qui sont associés au Fonds des générations.

J'ai jusqu'à...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...34 secondes qui sont allouées à votre groupe. Ça fait que vous pouvez prendre tout le temps que vous voulez, jusqu'à 30 minutes.

M. Beauchemin : O.K. D'accord. Le 10 minutes, c'est après, hein, c'est ça?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, c'est pour votre réplique.

M. Beauchemin : D'accord. Donc, alors, quand on regarde, donc, ce que je mentionnais au niveau du dividende de la paix puis qu'on regarde le niveau du changement climatique, ce n'est pas les mêmes variables que la génération actuelle et les générations futures auront à faire face. On se doit donc, en tant que personnes responsables, en tant que bons pères de famille, en tant que personnes d'expérience en finance, d'aider les prochaines générations, et c'est la raison principale de mon action politique, d'aider les prochaines générations.

Donc, nous avons modélisé et nous avons discuté avec certains experts pour regarder ce que l'avenir... Puis je pourrais peut-être partager ce document au besoin, mais nous avons regardé les prévisions que le gouvernement faisait à même la révision budgétaire du mois de décembre et le budget de mars 2022 et nous avons adapté nos prévisions aussi pour notre modèle.

Quand on regarde tout ça, on a pris l'hypothèse suivante. Historiquement, le Fonds des générations a eu un rendement de 6,3 % et le coût moyen de la dette du Québec, le coût d'emprunt moyen de la dette du Québec, historiquement, a été de 3,1 %. Et juste pour qu'on soit clairs, là, ce n'est pas une ligne droite. Il y a des moments où est-ce que ça va aller plus vite. Il y a des moments où ça va aller moins vite. Il y a des moments où est-ce qu'il va y avoir du recul. C'est normal. C'est deux classes d'actifs totalement différents.

Le marché obligataire, c'est un marché à un risque beaucoup moindre que le marché des placements, où est-ce qu'il y a justement des véhicules dans lesquels la Caisse de dépôt investit les sommes du Fonds des générations, deux classes d'actifs avec des profils différents, ce qui permet, donc, d'avoir justement cette valeur ajoutée, ce 3,2 % que je mentionnais indirectement quand je parlais de ce qui se passait dans le Fonds des générations. Et donc ce 3,2 % là va faire des petits année après année. Dans l'énoncé gouvernemental, l'hypothèse sur la croissance du Fonds des générations est à 4,89 %. Pour la suite des choses, donc, à partir de 2024, 2024, dans le tableau que nous avons utilisé, nous avons amélioré la performance de la proposition gouvernementale de 4,89 % à 6 %. Nous nous sommes servis du même 6 % pour nos chiffres à nous.

Nous avons aussi fait la supposition suivante : tous les items que je vous ai mentionnés tantôt pour ce qui est des contributions au Fonds des générations, c'est-à-dire les redevances hydroélectriques, les producteurs privés, l'indexation du prix de l'électricité et la contribution annuelle en plus additionnelle d'Hydro-Québec, les revenus miniers, la taxe sur les boissons alcooliques, les biens non réclamés, nous avons pris la supposition suivante qu'à partir de 2024 ces chiffres-là restaient stables, dans l'avenir, et donc il n'y avait aucune augmentation naturelle des revenus miniers, aucune augmentation naturelle des redevances hydroélectriques. On prenait l'année 2024 comme étant la dernière année où est-ce qu'il allait y avoir une potentielle augmentation, pour notre estimé. La même chose a été faite pour l'estimé que nous avons pris pour le gouvernement, mais c'est évidemment avec le concept que le gouvernement voulait retrancher 40 % des contributions au Fonds des générations pour se payer des baisses d'impôt.

Et donc, quand on met ces deux facteurs-là... J'avoue que, quand je peux parler juste de chiffres comme ça, je vais endormir tout le monde, là. Mais quand on parle de juste ces deux facteurs là, à la fin, là, O.K., quand on regarde ce que ça donne en 2040, bien, le gouvernement sous-performe la proposition du Parti libéral par 47,2 milliards de dollars. Ça, Mme la Présidente, là, ce n'est pas de la petite monnaie. 47,2 milliards de dollars, là, O.K., c'est probablement assez d'argent pour régler les problèmes dans le système de santé, c'est probablement assez d'argent pour éduquer les Québécois pour plusieurs décennies. C'est, en tout cas, assez d'argent, tellement assez d'argent que c'est à se demander pourquoi cette décision-là est prise.

Comme j'expliquais au préalable, le Fonds des générations génère un rendement supérieur au coût de la dette du Québec. Dans ce cas-là, comment ça se fait qu'on peut prendre la décision de ne pas mettre de l'argent dans le Fonds des générations, quand on peut simplement financer tous les projets qu'on veut avec la dette? Pourquoi payer 6,3 % pour emprunter de l'argent, quand on peut emprunter de l'argent à 3,1 %? La question m'apparaît ultrasimple. La réponse est évidente, c'est clairement emprunter de l'argent à 3,1 %, que le gouvernement devrait faire, jour après jour.

Évidemment, ici, je parle de projets d'infrastructure. On est pour des projets d'infrastructure. Ça peut être des projets pour protéger l'environnement. On est pour des projets pour protéger l'environnement, il n'y a aucun souci. Nous, au Parti libéral, on veut un développement durable, donc ça va en ligne droite avec ce qu'on pense. On pense que financer des baisses d'impôt à même le Fonds des générations, c'est la pire idée du siècle. Mais, si on veut faire des baisses d'impôt, parce que les Québécois, somme toute, sont très taxés, nous, on avait la vision de dire : Bon, correct, après l'élection, on a corrigé notre tir, on a dit : On va aller faire seulement le premier palier. Mais, si vous voulez faire les baisses d'impôt proposées par le gouvernement, la question est de savoir : Pourquoi financer ces baisses d'impôts là à 6,3 %, quand vous pouvez les financer à 3,1 %? Ça, c'est de l'argent jeté, ça, c'est de l'argent aux poubelles. C'est inconcevable, ça ne s'explique pas. Aucun étudiant, premier trimestre universitaire aux HEC, va regarder cette décision-là et va dire : Bien, bravo! c'est une très bonne décision. Au contraire, ils vont tous se poser la même question : Pourquoi faire ça? Ce n'est que pour des fins politiques, ce n'est que pour une campagne... des promesses électorales, les remplir, d'une certaine façon.

• (15 h 20) •

Quand on fait une erreur, on peut reculer. Moi, je crois qu'actuellement on est face à cette situation-là où est-ce que c'est inexplicable d'aller utiliser le Fonds des générations pour... d'autant plus qu'en bout de piste, selon nos estimés, d'ici 2036, l'objectif de 100 milliards va être atteint. Bien, si l'objectif de 100 milliards va être atteint en 2036, par rapport au jour 1, en 2007, quand on a mis les premiers sous dans le Fonds des générations, bien, entre aujourd'hui puis le jour 1, il y a 55 % du temps qui a été écoulé, puis, entre aujourd'hui puis le jour où est-ce qu'on va être rendu à 100 milliards, il va rester 45 % du temps à être écoulé. On a fait plus que la moitié du chemin, chers collègues. Pourquoi nous ne voulons pas juste continuer, avec un peu moins que la moitié du chemin pour arriver à l'objectif de 100 milliards?

Je vais vous dire la bonne nouvelle. À 100 milliards de dollars, Mme la Présidente, c'est plusieurs milliards de dollars qui vont aller au fonds consolidé de l'État pour les services de l'État. En 2036 — j'ai besoin de mes lunettes parce que ce n'est pas écrit gros — en 2036, c'est 8,7 milliards de dollars qui vont, à partir de ce moment-là, retourner dans les coffres de l'État. Parce qu'à partir du moment où on a atteint notre objectif de 100 milliards de dollars, la réalité, là, O.K., c'est que le Fonds des générations ne devient plus un endroit où le gouvernement se doit de mettre des sous. Le Fonds des générations va devenir, à partir de ce moment-là, un endroit où le gouvernement pourra en retirer, des sous.

Les bénéfices du Fonds des générations pourront rentrer dans les poches du gouvernement, année après année, et ce sera à la prochaine génération à prendre la décision de l'utilisation de ces fonds-là, est-ce qu'on veut mettre des sous en éducation, on veut les mettre en santé, on veut les mettre en n'importe quoi que le gouvernement va être impliqué. Les prochaines générations auront les moyens de leurs ambitions, auront un véhicule qui va générer cet argent-là. Puis je suis sérieux quand je vous dis ça, O.K.? C'est probablement la plus belle machine et le plus beau legs qu'on peut leur laisser, parce que ça va leur permettre, au minimum, de maintenir les services actuels que nous, on prend pour acquis, mais, à cause de l'arbre démographique actuel, tout indique que les enfants qu'on va avoir, qui vont avoir 18 ans en 2041, là, ne pourront pas avoir les mêmes services à l'État, si on n'agit pas maintenant, si on n'agit pas maintenant avec un objectif grand d'être à 100 milliards de dollars sur le Fonds des générations.

Donc, moi, je vous le dis en toute sincérité, c'est un objectif de société, c'est un objectif qui est noble, c'est un objectif de parent qui regarde ses enfants, c'est un objectif de grand-parent qui regarde ses petits-enfants. C'est quelque chose qu'on pourrait laisser à nos enfants pour le reste de l'existence. C'est un 100 milliards de dollars. Plus de la moitié de l'exercice pour s'y rendre est déjà fait. Tout ce qu'on a à faire, c'est tout simplement continuer dans la direction actuelle. Et, sur ce, Mme la Présidente, je vais passer la parole à ma collègue. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, je suis prête à céder la parole à un membre du gouvernement. Et ce sera M. le député d'Orford.

M. Gilles Bélanger

M. Bélanger : Merci, Mme la Présidente. Je suis très heureux de remplacer mon collègue ministre des Finances, député de Groulx. Je vous confirme par contre que je vais le remplacer uniquement au cours des prochaines minutes, pas pour le reste de la session.

Mme la Présidente, le collègue de Marguerite-Bourgeoys nous a conviés pour discuter d'un sujet important, mais qui fait partie d'un ensemble beaucoup plus large et maintes fois présenté aux membres de cette Chambre comme aux Québécois et aux Québécoises.

Avant d'aller dans le vif du sujet, vous me permettrez d'abord de revenir sur le contexte économique de l'année en cours, afin que les Québécois comprennent mieux les gestes que notre gouvernement a posés récemment. Dans les derniers mois, Mme la Présidente, la reprise économique postpandémique, combinée à la guerre en Ukraine et aux perturbations dans les chaînes d'approvisionnement, a entraîné une flambée de l'inflation. Au Québec, la hausse de l'inflation a eu des conséquences principalement sur deux fronts simultanément. D'abord, la hausse de l'inflation a augmenté les revenus de l'État. C'est une bonne chose. Ensuite, la conséquence qui a le plus d'impact sur la vie des Québécois est l'importante hausse du coût de la vie. Puis cette inflation a mis une pression significative sur les finances de nombreux ménages. Même si le pic de l'inflation est déjà derrière nous, la hausse du coût de la vie a encore un impact palpable dans la vie des Québécois, en particulier à ceux à faibles revenus et surtout les aînés.

Cet automne, notre gouvernement a fait le choix de redonner aux Québécois une partie de ces revenus additionnels générés par l'inflation. Cet argent, c'est l'argent des Québécois, c'est leur argent. On l'a fait de façon responsable et organisée par la mise en place d'un bouclier anti-inflation qui totalise, Mme la Présidente, plus de 13 milliards de dollars sur cinq ans afin de protéger le pouvoir d'achat des Québécois. Devant l'impact du coût de la vie, le gouvernement s'est engagé à agir rapidement pour venir en aide aux Québécois, et c'est ce que nous avons déjà fait depuis le début de notre deuxième mandat.

La première mesure de notre Bouclier anti-inflation concerne le versement d'un montant ponctuel atteignant 600 $ pour les personnes qui gagnent 50 000 $ ou moins, ou 400 $ pour celles qui gagnent 50 000 $ à 100 000 $. Et ce versement... avec ce versement, on est venus alléger la pression financière des ménages, qui peuvent utiliser cette somme à leur discrétion, que ce soit pour l'alimentation, les vêtements, le loyer ou les sports. Je rappelle que plus de 70 % des bénéficiaires de cette aide recevront le montant maximal de 600 $. Ça montre bien que notre soutien était nécessaire, Mme la Présidente.

Je rappelle aussi que tous les Québécois admissibles ont pu recevoir l'un de ces montants même s'ils ont une dette envers l'État. Le montant a été versé automatiquement, si vous avez plus de 18 ans et que vous avez produit une déclaration de revenus pour 2020-2021.

Vous me permettrez, Mme la Présidente, de faire une parenthèse ici au sujet des risques de fraude. On doit rappeler aux gens d'être extrêmement vigilants face aux tentatives d'hameçonnage qui ont d'ailleurs été nombreuses au cours des derniers mois. Revenu Québec, ou le gouvernement, ne vous enverra jamais de communications vous invitant à cliquer sur un lien ou vous demandant vos renseignements personnels.

La deuxième mesure du Bouclier anti-inflation concerne le plafonnement de plusieurs tarifs gouvernementaux à un maximum de 3 % pour les quatre prochaines années. De façon générale, les tarifs, tels que les immatriculations ou la facture d'Hydro-Québec, augmentent annuellement au rythme de l'inflation. Or, sans l'intervention du gouvernement, la forte inflation aurait fait en sorte que les tarifs augmenteraient à près de 6,5 %. Mais le gouvernement a décidé d'intervenir dans l'indexation des tarifs pour nous assurer que les citoyens ne subissent pas de choc tarifaire en payant leurs factures.

Pour cela, Mme la Présidente, mon collègue le ministre des Finances a fait adopter cet automne le premier projet de loi de la nouvelle législature du Parlement du Québec pour limiter l'indexation de plusieurs tarifs gouvernementaux à un maximum de 3 % pour les quatre prochaines années. La loi n° 1 a permis d'appliquer ce plafonnement de l'indexation jusqu'en 2026 et de l'étendre à plusieurs autres tarifs gouvernementaux touchant les citoyens, dont la contribution réduite des services de garde éducatifs à l'enfance, les droits de scolarité universitaires, les droits exigibles en lien avec la présentation d'une demande de sélection pour ceux et celles qui souhaitent immigrer au Québec. Le gouvernement s'est également engagé à plafonner l'indexation des tarifs d'Hydro-Québec. Un projet de loi distinct a été déposé par mon collègue cette semaine, le ministre de l'Économie, de l'Innovation et de l'Énergie, et j'en passe, dès la reprise parlementaire, cet hiver, et adopté récemment. Cette initiative très globale a permis de préserver le pouvoir d'achat des Québécois.

• (15 h 30) •

Par ailleurs, je rappelle rapidement aussi que nous avons déjà franchi une première étape le 16 novembre dernier en modifiant certains règlements pour limiter à un maximum de 3 % l'augmentation de plusieurs tarifs qui sont indexés au 1er janvier 2023. On parle ici des relatifs au permis de conduire et à l'immatriculation, à la contribution payée dans les centres d'hébergement et de soins de longue durée, les CHSLD, et à la contribution pour une chambre privée ou semi-privée dans un centre hospitalier de soins de courte durée. Avec cette deuxième mesure du bouclier, on en est venus s'assurer que les Québécois ne subissent pas de choc tarifaire pour l'année 2023, et ce, jusqu'en 2026.

Par ailleurs, je rappelle un autre geste qui aidera les Québécois à plus faibles revenus. Les principaux paramètres du régime fiscal des particuliers et des programmes d'assistance sociale ont été indexés à 6,44 % le 1er janvier 2023. Ça représente, Mme la Présidente, à titre d'exemple, une bonification de l'ordre de 500 $ de l'allocation familiale pour un ménage avec deux enfants et dont le revenu familial n'excède pas 100 000 $.

La troisième mesure-phare du bouclier anti-inflation, qui va toucher particulièrement les aînés de 70 ans et plus, il s'agit de la bonification de 8 milliards de dollars du montant pour le soutien des aînés sur un horizon de cinq ans. Le montant maximal de ce crédit d'impôt passera ainsi de 411 $ à 2 000 $, et ce, dès la production de la déclaration de revenus de 2022. Ça signifie donc, Mme la Présidente, que près de 400 000 aînés supplémentaires bénéficieront de cette bonification, pour un total de 1,1 million d'aînés de 70 ans et plus. Et 65 % de l'aide ira aux aînés ayant un revenu annuel de moins de 25 000 $.

En somme, les mesures prises, mises en place, du bouclier anti-inflation, en 2022, pour aider les Québécois à faire face à la hausse du coût de la vie représentent une aide fiscale qui peut atteindre 2 200 $ pour un couple et 3 100 $ pour un aîné seul de 70 ans et plus. C'est significatif.

Ces trois mesures du bouclier auront un impact très positif dans le portefeuille des Québécois et les aideront à mieux protéger leur pouvoir d'achat. Je rappelle aussi que nous avions confirmé plus tôt, en 2022, des investissements de 445 millions de dollars qui ont aussi aidé les citoyens à faibles revenus à se loger, dont 395 millions de dollars pour réaliser 3 000 nouveaux logements sociaux et abordables et 50 millions de dollars pour bonifier le programme Allocation-logement.

Enfin, Mme la Présidente, comme nous l'avons évoqué en campagne électorale, nous investissons 253 millions de dollars pour renforcer la sécurité à Montréal en ajoutant 225 policiers et des intervenants psychosociaux. Toutes ces mesures aident à protéger les Québécois financièrement et dans leur quotidien. On le sait, Mme la Présidente, la croissance économique du Québec ralentit.

Je veux maintenant vous parler des perspectives économiques du Québec et de notre cadre financier qui est prudent et rigoureux, sans rigueur budgétaire ni austérité. La première bonne nouvelle, Mme la Présidente, c'est que le sommet de l'inflation semble derrière nous. L'autre excellente nouvelle, c'est le rattrapage de l'écart de richesse avec l'Ontario. Mais le contexte économique plus difficile, l'écart s'est encore rétréci... malgré ce contexte économique difficile en 2022. En quatre ans, il est donc passé de 16,4 % à 12,8 %. Nous sommes déterminés de poursuivre nos efforts pour continuer à rétrécir notre écart avec l'Ontario.

Cela dit, on sait que la croissance économique a déjà commencé à ralentir, et c'est exactement ce qu'on observe aussi dans d'autres économies. Lorsqu'on regarde les indicateurs économiques, on constate qu'ils sont déjà à la baisse. Au Québec, la progression de l'activité économique devrait passer de 3,1 %, en 2022, à 0,7 % en 2023. Dans le budget de mars dernier, nous avions plutôt prévu une croissance de 2 %. Nous anticipons également que la création d'emplois connaîtra un léger ralentissement l'an prochain, avec un creux annuel historique en 2022. Le taux de chômage remontera pour se situer à une moyenne de 5 % en 2023. Nous anticipons une croissance de 3,7 % de l'indice des prix à la consommation pour 2023.

Malgré ces indicateurs à la baisse, notre cadre financier prévoit de continuer à financer adéquatement les missions de l'État, comme l'éducation et la santé. Vous savez, Mme la Présidente, notre ministre des Finances est un homme très responsable, et rigoureux et, je rajouterais, courageux. D'ailleurs, devant la plus grande incertitude économique qui guette le Québec et l'économie mondiale, le ministre des Finances avait prévu, à la mise à jour économique de décembre dernier, une provision de 8 milliards sur cinq ans pour faire face aux risques économiques. Cette provision montre bien que le Québec bénéficie de la marge de manoeuvre nécessaire pour faire face à tout type de conjoncture économique qui nous attend dans les prochains mois.

Un déficit moins important prévu de 2022 à 2023. Le dernier aspect de la situation financière que je veux aborder aujourd'hui, c'est le déficit budgétaire. D'abord, le ministre des Finances a déjà confirmé que nous prévoyons toujours un retour à l'équilibre budgétaire d'ici 2027-2028. Depuis le budget de mars 2022, le déficit a diminué par rapport à la prévision du budget de mars 2022, passant de près de 6,5 milliards de dollars à 5,2 milliards de dollars. Aussi, le cadre financier, le cadre financier prévoit un déficit de 2,9 milliards de dollars en 2026-2027, après versement des revenus consacrés au Fonds des générations.

Maintenant, en ce qui a trait au Fonds des générations, vous savez tous que la réduction du poids de la dette demeure une priorité pour notre gouvernement et pour notre ministre des Finances. Ça favorise une meilleure équité intergénérationnelle, en plus de contribuer positivement à la croissance économique. Au Québec, on s'est d'ailleurs doté d'une loi sur la réduction de la dette en instituant le Fonds des générations. En date du 31 mars 2023, le poids de la dette s'établira à 40,4 % du produit intérieur brut, ce qui est sous l'objectif de 40,5 % prévu par la loi. Au prochain budget, le ministre des Finances présentera aux Québécois de nouvelles cibles de réduction du poids de la dette afin de poursuivre cette tendance à la baisse. Pour nous, c'est non seulement une question d'équité envers les générations qui nous suivront, mais c'est aussi une responsabilité du gouvernement envers les futures générations.

Dans les prochaines semaines, le ministre des Finances va vous présenter le budget 2023-2024 du Québec. Je lui laisserai le soin d'expliquer à tous, à ce moment, comment nous entendons poursuivre notre soutien auprès des Québécois. J'ai confiance que ce sera un budget rigoureux et responsable, mais aussi un budget qui va nous permettre de continuer de soutenir l'ensemble des Québécois.

J'aimerais maintenant, M. le Président, revenir... Mme la Présidente, revenir sur les grandes réalisations de mon gouvernement au cours du dernier mandat, car on doit juger de ce que nous promettons pour l'avenir à ce que nous avons livré dans le passé. Ça fait peut-être drôle de dire, Mme la Présidente, mais nous, contrairement à plusieurs gouvernements précédents, on tient nos promesses. En remportant les élections de 2018, la CAQ a marqué l'histoire en mettant fin à 50 années d'alternance, au gouvernement, entre le Parti libéral et le Parti québécois. Les électeurs ont alors fait le choix de tourner le dos aux affrontements qui ont marqué toute une génération. Notre gouvernement est parvenu à réaliser presque tous ses engagements électoraux, alors même qu'une pandémie a mis le Québec à rude épreuve. Nous avons réussi à concrétiser une proportion plus élevée d'engagements que les gouvernements précédents.

• (15 h 40) •

Nous avons, par exemple, grâce à notre bonne gestion du trésor public et de l'économie, déjà redonné aux Québécoises et aux Québécois plus de 3 milliards de dollars par année. Cet argent a augmenté la qualité de vie et le pouvoir d'achat. Je vous ai parlé, Mme la Présidente, précédemment, du bouclier anti-inflation et des chèques que nous avons transmis aux Québécois et aux Québécoises. Mais il ne faut surtout pas oublier ce qu'on a fait pour alléger leur portefeuille de façon pérenne. On a baissé les taxes scolaires, Mme la Présidente, qui, après avoir augmenté de 112 % sur 15 ans, ont été ramenées à un niveau plus acceptable. Notre gouvernement a aussi éliminé la taxe famille instaurée par le gouvernement libéral, qui privait les gens de la classe moyenne de milliers de dollars en raison des tarifs en garderie exorbitants. Pour simplifier la vie des patients et de leurs proches, le gouvernement de la CAQ leur a offert, dès 2019, le stationnement sans frais pour les deux premières heures dans tous les hôpitaux et les institutions de santé gouvernementales du Québec. Il a également grandement diminué le coût de stationnement pour une journée complète. Ces frais varient désormais de 7 $ à 10 $ selon les régions du Québec. Le gouvernement de la CAQ a aussi aidé les familles à financer l'achat de lunettes et de lentilles cornéennes pour leurs enfants de moins de 18 ans. À notre arrivée au pouvoir, nous avons mis en place le programme Mieux voir pour réussir, qui permet de rembourser 250 $ par période de 24 mois pour l'achat de lunettes ou de lentilles, donnant ainsi un coup de pouce important aux familles.

Mme la Présidente, la baisse des impôts que paient les Québécois et Québécoises est un engagement important de mon gouvernement, mais je tiens à rappeler qu'il fait partie d'une série de 16 autres promesses à saveur économique que nous avons réalisées au cours de ce mandat. On veut bonifier l'aide aux aînés dès la première année du mandat. On a promis de plafonner la hausse des tarifs d'Hydro-Québec et autres tarifs gouvernementaux, et on l'a fait. On veut continuer à favoriser le Fabriqué au Québec et l'achat local à travers des politiques gouvernementales. La diplomation professionnelle dans les secteurs stratégiques sera favorisée par nos interventions. On va continuer à créer des zones d'innovation partout au Québec. Nous allons assurer le dynamisme des économies locales, des villes et villages. On va réduire le fardeau bureaucratique pour les Québécois. L'accès aux services gouvernementaux sera complètement numérisé. On va développer le potentiel économique des régions éloignées. On va bonifier les investissements pour l'aménagement durable de nos forêts, poursuivre les investissements records dédiés à l'autonomie alimentaire, bonifier l'aide pour la pratique agroenvironnementale, soutenir la relève agricole. Et enfin, Mme la Présidente, je vais personnellement m'assurer de compléter la connectivité du Québec.

Il me reste du temps, Mme la Présidente, donc je vais parler de connectivité au Québec. Connectivité, c'est la quatrième révolution industrielle qui s'en vient. C'est 4 milliards par année d'impact sur le produit intérieur brut. C'est significatif, c'est plus de 1 % d'augmentation du produit intérieur brut. Je voudrais rappeler, Mme la Présidente, qu'en 24 mois nous sommes passés de derniers de classe au Canada à premiers de classe au Canada. L'ISDEC définit le Québec ayant une couverture à 100 % au niveau d'Internet haute vitesse. Rappelez-vous, Mme la Présidente, que les télécommunications sont de juridiction et de compétence fédérales. C'est une belle démonstration de leadership du Québec.

Mme la Présidente, je veux vous rappeler le budget que nous avions à ce moment-là, 1,3 milliard, pour mettre en place Internet haute vitesse partout au Québec, avec des solutions filaires, satellitaires et sans fil. Le coût net du projet, Mme la Présidente, sur 1,3 milliard? 700 millions. C'est le coût net du Québec.

(Applaudissements)

M. Bélanger : Donc, Mme la Présidente...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Juste un instant, M. le député. Mme la leader de l'opposition officielle, oui, vous avez une question de règlement?

Mme Dufour : Oui, j'aimerais rappeler... Les applaudissements, Mme la Présidente?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Les applaudissements sont permis pendant les motions. C'est seulement pendant la période de questions qu'ils ne sont pas permis, Mme la leader.

Mme Dufour : Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...

M. Bélanger : Merci, Mme la Présidente. Je vous invite tous à applaudir lorsque c'est intéressant.

Donc, Mme la Présidente, je reviens à l'impact de la connectivité au niveau du produit intérieur brut. Pour des régions comme l'Abitibi et Lanaudière, c'est plus de 3 % d'augmentation au niveau du produit intérieur brut.

Nos engagements pour les prochaines années, en termes de connectivité : faire passer la fibre optique. Actuellement, il y a 4,3 millions de foyers au Québec, 45 % des foyers au Québec ont la fibre optique. On veut faire passer ça à 90 %. Donc, actuellement, il y a 55 % des foyers qui sont soit par cuivre, une ancienne technologie, ou sans-fil. La fibre optique, c'est la technologie que nous avons choisie. C'est la technologie qui va être la plus pérenne et qui va nous permettre d'être capables de faire de la télémédecine, de la formation à distance. La couverture mobilité, Mme la Présidente, sera complétée d'ici 2026. Nos tarifs, par exemple, Mme la Présidente, les tarifs au Québec, si on les compare par rapport à l'Australie, pour un gigaoctet de données, on est sept fois plus cher que l'Australie, 25 fois plus cher que la Finlande et 1 000 fois plus cher que l'Irlande.

Pour nos régions, pour nos régions, Mme la Présidente, l'impact au niveau économique sera significatif. Je reviens au niveau de la télémédecine, formation à distance, agriculture et télétravail. La connectivité, Mme la Présidente, va être le plus grand levier de développement économique au Québec sur les prochaines années. Et, en plus, l'impact au niveau de la réduction des gaz à effet de serre sera près de 20 % d'ici 2030. Merci, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je suis prête à entendre, oui, un membre du deuxième groupe d'opposition. Ce sera M. le député de Marguerite-Bourgeoys... excusez-moi, de Maurice-Richard. Excusez-moi.

M. Haroun Bouazzi

M. Bouazzi : Merci, Mme la Présidente. Je suis très content d'être ici. On va donc parler de dette et de Fonds des générations. Et je vais commencer... Et d'ailleurs je suis très content de le faire avec et le gouvernement, donc les représentants de la CAQ, et le Parti libéral, car, malgré les désaccords qu'on peut retrouver dans la motion qui nous a été présentée, en fin de compte, je vais probablement vous démontrer que c'est deux facettes de la même médaille.

Je vais commencer par casser un mythe qui, probablement, rendrait d'accord les deux formations politiques, qui consiste à dire que, si nous nous endettons, c'est parce que nos services coûtent trop cher. Dans les faits, si la dette augmente au Québec, c'est bien parce qu'il y a des baisses d'impôt qui s'accumulent et que les baisses d'impôt, d'ailleurs, sont une... et les dettes, pardon, sont une magnifique manière de transférer de la richesse, mais du bas de l'échelle vers le haut, et j'y reviendrai.

Donc, un petit rappel historique : en 2008, donc, une baisse d'impôt, du temps des libéraux, de 950 millions, 1,3 milliard de dollars; en 2017, baisse de 270 millions de dollars, donc 313 millions de dollars en dollars d'aujourd'hui; en novembre 2017, baisse des taux minimaux d'imposition de 16 % à 15 %, 970 millions de dollars, 1,1 milliard en dollars d'aujourd'hui; la taxe scolaire, en 2017, sous les libéraux, nivellement au plus bas taux régional de la taxe scolaire, 600 millions de dollars, 700 millions de dollars d'aujourd'hui; en 2018, c'est au tour du gouvernement Legault d'uniformiser à la grandeur du Québec, 900 millions de dollars, 1 milliard en dollars d'aujourd'hui.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...M. le député. M. le leader, vous avez une question de règlement?

M. Lévesque (Chapleau) : Merci. Simplement rappeler le règlement qu'on doit évidemment, là, s'adresser aux différents collègues par leur titre et non pas par leur nom propre, dans cette Chambre. Merci.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : C'est un petit rappel au règlement, M. le député. Merci.

M. Bouazzi : Très bon rappel. Donc, M. le premier ministre du Québec, du gouvernement de la CAQ, uniformisation, en 2018, à la grandeur du Québec, de 900 millions de dollars à l'époque, 1 milliard de dollars en dollars d'aujourd'hui.

Du côté des sociétés, ce n'est évidemment pas mieux. Au début des années 2000, elles représentaient environ 11 % des revenus autonomes de l'État, tandis qu'en moyenne, dans les cinq dernières années, elles n'en représentaient que 9 %. Cette différence de 2 % représente 2,8 milliards de dollars de revenus annuels dans la fiscalité des sociétés en 2022-2023.

• (15 h 50) •

Depuis 2016, l'impôt des entreprises a diminué de 1/10 de point par année, pour passer de 11,9 % à 11,5 %. En 2011, le gouvernement de Jean Charest, du premier ministre de l'époque, a complètement éliminé la taxe sur le capital des entreprises, un des trois piliers du système de taxation des entreprises, 370 millions de dollars en dollars d'aujourd'hui. Évidemment, les entreprises, comme les particuliers, voient seulement 50 % de leurs gains en capitaux être imposés. Ça fait beaucoup, beaucoup de milliards de dollars qu'on enlève aux revenus de l'État.

De l'autre côté, il y a aussi tout l'argent qu'on ne va pas chercher là où il est. Je rappellerai que, sur les questions du capital et sur les questions de l'héritage, on est une des rares juridictions des pays de l'OCDE qui ne taxent pas l'héritage. Pour vous donner un ordre de grandeur, les deux premiers quintiles, c'est-à-dire 40 % des Québécois, 3 millions de personnes accumulent, en tout, un peu plus que 50 milliards, ce qui représente 2,5 % de la somme de tout ce qui est propriété au Québec, 40 %, 2,5 %. Le 20 % du haut accumule 88 % de ce qui est achetable au Québec.

Et ça pourrait donner une mauvaise idée de la réalité, en se limitant à dire que le 20 % le mieux nantis a 26 fois plus de choses qui lui appartiennent que le 40 % le moins nanti, car il y a 12 milliardaires, pour les nommer, au Québec, qui accumulent 30 milliards de dollars, en 2022, 30 000 millions, 300 000 fois 100 000 $. C'est-à-dire que, pour pouvoir accumuler cet argent-là, il faudrait gagner 100 000 $ par an pendant 300 000 ans, pour pouvoir avoir ce que ces 12 personnes ont. C'est-à-dire que l'homme de Neandertal... J'ai fait des recherches pour voir c'est lequel qui pouvait travailler pendant aussi longtemps, pendant... et gagner 100 000 $ par an pour accumuler ce que ces 12 personnes ont. Combien paient ces personnes sur le capital? Zéro. Combien nous allons ponctuer sur l'héritage? Zéro. On entend souvent et le Parti libéral et la CAQ parler du mérite du travail, mais le parti du travail, c'est nous, et on ne pense pas qu'être né de la bonne ovule et du bon spermatozoïde consiste à être un mérite, consiste à avoir ce que l'homme de Neandertal doit accumuler pendant 150 000 ans pour avoir la même quantité d'argent.

Ceci étant dit, il y a, d'ailleurs j'en profite pour le dire, une taxe sur le capital, au Québec, et elle s'appelle taxe municipale. C'est une taxe spécialement injuste qui touche seulement la classe moyenne, car c'est le principal avoir de la classe moyenne, c'est leur maison. C'est une taxe qui ne s'applique pas sur l'avoir net, mais bien sûr... qui prend en compte, donc... qui ne prend pas en compte les dettes. Et donc on pense que les personnes qui ont des dettes sur les maisons paient quand même une taxe sur la valeur de la maison au complet. Et, bien sûr, les personnes qui sont vraiment riches n'ont pas comme principal avoir une maison mais ont, bien sûr, des actions et des options en bourse, qui, elles, n'ont aucune taxe sur le capital.

Donc, on voit, d'un côté, on s'appauvrit à travers des baisses d'impôt, les unes après les autres, très aimées par le Parti libéral et par la CAQ, et, de l'autre côté, il y a une accumulation de richesse qui permet, entre autres, d'ailleurs, dans une économie financiarisée, de prêter à l'État et donc, à travers ces dettes, à se faire de l'argent. On remplace concrètement des impôts des riches par des dettes qui rapportent, donc une dette de l'État qui rapporte de l'argent aux gens qui investissent.

Qu'est-ce que ça fait, ces baisses d'impôt? Elles nous rentrent dans un cycle, le cycle infernal de l'austérité, des baisses d'impôt, un déficit public, des compressions, un sous-financement, un rééquilibrage budgétaire. Et, une fois qu'on est rendu là, on recommence le cycle, qui est un cycle vraiment idéologique. Rappelons aussi que, dans les moments de compressions, il y a aussi le fait qu'on se départit, l'État se départit d'un certain nombre de ses fonctions, et c'est des bons moments, pour les affairistes, pour acheter les démembrements des différentes sociétés d'État. Évidemment, il y a plein d'exemples dans le monde. Il y a aussi le fait qu'il y a de plus en plus de privé dans la santé, dans la production d'énergie au Québec, dans le transport en commun, etc.

Donc, de quelles baisses d'impôt on parle aujourd'hui? On parle de celles au goût du jour, celles de la CAQ, qui représentent 2 milliards de dollars, par année, de pertes. C'est une taxe spécialement injuste, étant donné que, pour donner un exemple, d'abord, il y a... 100 % du 1 % le plus riche va y avoir droit, alors que le 30 % le moins nanti n'aura rien. Pour vous donner un exemple, une caissière, par exemple, qui gagne 30 000 $ par an aura 138 $ de retour d'impôt par cette baisse, quand le P.D.G. millionnaire en aura 810 $.

Ce serait aussi injuste de se limiter à dire qu'il n'y a pas des taxes qui ont été rajoutées par la CAQ. Je rappelle qu'il y a seulement quelques jours ici, à l'Assemblée nationale, dans le salon bleu, nous avons adopté le projet de loi sur les tarifs d'Hydro-Québec. Et je rappelle que les tarifs d'Hydro-Québec, aujourd'hui, pour les particuliers, sont vendus plus cher que ce que ça coûte à Hydro-Québec de produire de l'électricité. Et donc, en fait, Hydro-Québec se transforme en taxe cachée. À chaque fois qu'on paie de l'électricité, il y a de l'argent qui part des poches des Québécois pour aller vers l'État. Mais c'est qui qui paie le plus, le plus cher, son électricité? C'est les moins nantis, c'est eux qui vivent dans des maisons qui sont moins bien isolées, c'est eux qui paient une plus grosse proportion de leurs revenus en électricité. Donc, c'est une taxe spécialement régressive qu'on a mise là et qui rapporte, bon an, mal an... cette année, probablement même plus que le 1,3 milliard de l'année dernière. Et, de l'autre côté, il y a donc cette baisse d'impôt qui est spécialement régressive. Donc, il y a un transfert d'argent, encore une fois, des moins nantis vers les mieux nantis à travers cette combinaison assez intéressante des choses.

Il y a pourtant d'autres mécanismes pour redistribuer de l'argent. Il y a le crédit d'impôt pour solidarité qui est un mécanisme intéressant. Je rappelle qu'une partie de ce crédit est en fait un retour de TVQ mais qui touche avant tout, évidemment, les moins nantis et, en fait, une bonne partie de la classe moyenne, étant donné qu'on parle de 3 millions de foyers au Québec.

Pourquoi le gouvernement de la CAQ préfère des baisses d'impôt qui, encore une fois, ne vont servir à rien pour le 30 %, les moins nantis, et vont... Et le 1 % le plus riche au Québec va absolument, au complet, y avoir droit. Pourquoi préférer des mécanismes comme ceux-là plutôt que le crédit d'impôt pour solidarité? C'est une très bonne question, et, dans les prochains jours, j'espère qu'on va nous expliquer pourquoi un système aussi injuste est si important pour notre économie.

Rappelons que les voix qui s'opposent à cette baisse d'impôt sont quand même nombreuses. Il y a eu une lettre, la semaine dernière, signée par 53 économistes, qui rappelait tous les besoins que nous avons dans nos services publics. Le gouvernement dit qu'il ne baissera pas le financement des services, mais les services craquent de partout : les urgences ferment, les écoles sont moisies, les jeunes ont besoin d'avoir accès à un psychologue gratuitement. Ça coûte de l'argent. Est-ce qu'il y a de l'argent neuf pour ça? Non, il n'y en aura pas. Et ça, c'est la réalité. C'est : il y a un saccage de nos services publics et aucune volonté de corriger la situation.

On a vu une association de jeunes comme Force Jeunesse sortir, la semaine dernière ou en début de cette semaine, expliquer, pareil, qu'eux, la question la plus importante pour eux, c'est avoir accès à des services de l'État et de lutter contre la crise climatique.

J'en viens d'ailleurs au Fonds des générations, qui est un des points les plus importants qui est dans la motion du PLQ aujourd'hui. Je reprendrai peut-être les... Je rappellerai les propos du premier ministre Legault en 2006, quand il était avec le Parti québécois et qu'il traitait ce fonds de fonds des illusions à l'époque. C'est un fonds assez intéressant. Il permet d'abord de maquiller des questions comptables, c'est-à-dire de maquiller des périodes de surplus en dette. Il est même calculé comme une dépense. Il faut le faire, là! Contrairement à toute règle minimale de comptabilité, il est calculé comme une dépense. Et l'argent qu'on y met, évidemment, ne cesse d'augmenter.

• (16 heures) •

Aujourd'hui, le Parti libéral nous dit : Oui, mais, pour nos jeunes, c'est vraiment important, il faut absolument, la dette, etc. Et, du parti... du côté du gouvernement de la CAQ, on a décidé d'utiliser l'argent qui va là pour le distribuer en baisses d'impôt. Je ne sais pas, vous, Mme la Présidente, mais moi, je n'ai pas vu un seul jeune avec une pancarte nous dire : Attention, mon Fonds des générations, je veux absolument, la dette, qu'elle soit repayée. Il faudrait, à un moment, les écouter, ces jeunes. Et ils nous disent : Investissez dans l'avenir de la lutte à la crise climatique. La plus grosse dette que nous avons ici, au Québec, est une dette climatique, et c'est là où l'argent, où l'effort de l'État doit aller, pas dans des baisses d'impôt qui nous appauvrissent ensemble et pas dans une approche dogmatique et comptable que nous avons vue trop longtemps, du temps des libéraux, et qui nous ont d'ailleurs fait vivre une austérité terriblement douloureuse, car nous avons besoin d'investir dans notre avenir, nous avons besoin d'investir dans le transport en commun, dans un système de santé public de qualité, nous avons besoin de prendre soin de nos aînés, nous avons besoin d'avoir accès à des psychologues pour nos jeunes.

Il y a deux visions, Mme la Présidente, qui s'affrontent, ici. Il y a la vision qui croit aux droits communs d'une pleine citoyenneté, du droit à la dignité, et ça, ça passe par l'éducation, ça passe par la santé, ça passe par le droit des futures générations à vivre dans un monde qui est vivable. Et il y a un autre côté qui s'accommode des inégalités qui augmentent, qui n'a aucune volonté de corriger un système public qui craque de partout et qui, en plus, à travers des explications comptables plus ou moins sophistiquées, en fin de compte, fait des transferts de richesse des classes les plus défavorisées, de la classe moyenne vers les classes les plus riches. Nous, dans cette approche, entre le droit collectif à la vie digne, à la pleine citoyenneté ou à la croissance des inégalités et au saccage de nos services publics, nous avons choisi notre camp, et nous laisserons et le gouvernement et le Parti libéral se débattre dans leurs dogmes. Merci beaucoup, Mme la Présidente.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député. Maintenant, je suis prête à céder la parole à M. le chef du troisième groupe d'opposition.

M. Paul St-Pierre Plamondon

M. St-Pierre Plamondon : Merci, Mme la Présidente. Aujourd'hui, un débat sur une motion qui touche à des sujets fondamentaux pour notre avenir, parce qu'il s'agit essentiellement des services publics. En effet, nos services publics sont financés par nos impôts, et, lorsqu'on prend la décision de diminuer l'assiette fiscale, on fait un peu la sourde oreille vis-à-vis de réels problèmes dans la majorité de nos systèmes publics. On voit des systèmes qui craquent de partout et, simultanément, on voudrait nous faire croire que la bonne décision, c'est de limiter le financement de ces services.

Et pourquoi c'est important, au Parti québécois? C'est qu'on considère que, sur le plan humain, tout le monde au Québec a droit à un système d'éducation de qualité, que quelqu'un de malade, peu importe dans quelle région ou dans quel âge, a le droit d'être servi et de trouver des soins de qualité et rapidement, et le constat, c'est qu'en ce moment on n'y arrive pas. Et non seulement, sur le plan humain, ce n'est pas acceptable, sur le plan économique, si on coupe dans nos services publics, bien, on coupe dans le capital humain des Québécois, on coupe dans notre économie en termes de compétitivité, de capacité de rivaliser avec d'autres sociétés qui feront de meilleurs choix que de s'octroyer des baisses d'impôts en sachant qu'il y aura un impact important sur la population.

On nous propose — et on l'a dit combien de fois en campagne — essentiellement un aller simple vers plus d'austérité alors qu'on vient tout juste de sortir d'un cycle, un cycle libéral, rappelons-le, d'austérité. Et, pire, l'approche du gouvernement, elle est encore moins défendable dans la mesure où on s'apprête à prendre les sommes de cette baisse d'impôt dans le Fonds des générations, ce qui est un symbole extrêmement fort de la place ou plutôt de l'absence d'espace pour la notion d'avenir dans les décisions actuelles du gouvernement, un gouvernement qui est vraisemblablement très préoccupé par ses sondages et qui fait des calculs politiques basés sur ces sondages-là en ne se préoccupant pas des prochaines générations, en se contentant d'un calcul politique à court terme.

Je m'en voudrais de parler seulement du gouvernement, parce qu'il s'agit d'une motion du Parti libéral du Québec, et je suis obligé de rappeler que c'est ce parti-là qui est responsable de la réingénierie de l'État, qui ensuite a donné l'austérité, et qui, en campagne, voulait des baisses d'impôts plus importantes que ce que le gouvernement de la CAQ s'est engagé à faire. Donc, il y a des limites, le tout respectueusement soumis, à renverser ce qu'on a dit il y à peine quelques mois et à aujourd'hui se plaindre d'une politique qu'on voulait encore plus aggravante il y a quelques mois à peine.

Lorsqu'on parle de dette, on parle souvent de dette financière, mais on vous soumet, Mme la Présidente, que la dette climatique est aussi, sinon plus importante pour les prochaines générations que la dette financière. Et ça, ça veut dire qu'on peut difficilement accepter, dans la motion initiée par le Parti libéral, une notion uniquement financière de la dette. Nous croyons qu'une partie du Fonds des générations pourrait et devrait être utilisée pour la transition climatique parce que, lorsqu'on calcule les sommes que devront payer les prochaines générations en raison de notre inaction sur le plan climatique, bien, c'est un fardeau financier plus important que le service de la dette.

Donc, oui, on doit considérer la dette, mais on doit surtout considérer la dette climatique, et c'est pourquoi on s'est engagés à rendre disponible 1 milliard du Fonds des générations en versements pour un fonds de transition juste, un fonds, donc, qui permet la transition vers une nouvelle économie, notamment en accompagnement... en accompagnant, pardon, les travailleurs. Et pour arriver à cette conclusion-là, bien, on a fait ce que le gouvernement se refuse à faire, c'est-à-dire consulter les jeunes. On les a consultés, on est allés chercher, notamment, l'appui de Force Jeunesse, qui est d'accord avec notre idée de prendre une portion du Fonds des générations et de régler la dette climatique, tout en étant responsables au niveau des fonds publics, et donc en étant en désaccord avec une baisse d'impôt.

On s'est engagés à doubler l'offre de transport collectif, à mettre en place une place une passe climat, à encourager les entreprises québécoises qui ont une dimension environnementale. Et nous, au Parti québécois, on pense que c'est ça, avoir de l'ambition pour le Québec. Avoir de l'ambition pour le Québec, ce n'est pas de regarder le sondage du jour et de se dire : Ça, ce serait peut-être un avantage politique à court terme, mais c'est de penser à nos enfants et à nos petits-enfants pour que le Québec soit le plus prospère possible.

Et c'est pourquoi je dépose deux amendements à la motion du député de Marguerite-Bourgeoys, donc, en ajoutant, d'abord, après le troisième alinéa, l'extrait suivant :

«Qu'elle réitère que les efforts actuels consacrés à la lutte aux changements climatiques contribuent à l'équité intergénérationnelle en réduisant le fardeau de la dette environnementale que les générations futures devront assumer.»

Et, deuxièmement, en remplaçant le dernier alinéa de la motion par l'extrait suivant :

«Qu'en conséquence, elle demande au gouvernement caquiste de renoncer à [sa] baisse d'impôts annoncée et de maintenir l'intégralité du capital et des versements du Fonds des générations, sauf pour [la question de] la lutte aux changements climatiques.» Merci.

• (16 h 10) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Votre amendement est déposé, sous réserve de la permission de l'auteur de la motion.

Alors, je suis prête à entendre un autre intervenant. Mme la députée de Jean-Talon, la parole est à vous.

Mme Joëlle Boutin

Mme Boutin : Merci beaucoup, Mme la Présidente. Écoutez, beaucoup de choses se sont dites, dans les dernières interventions, et c'était très intéressant, mais j'aimerais ça rectifier le tir quand même, là. Le député de Maurice-Richard, quand il dit qu'on a pris... que notre gouvernement prend tout l'argent du Fonds des générations pour financer une baisse d'impôt, ce n'est pas vrai, parce que, ce matin, lors de la période de questions, le ministre des Finances l'a bien mentionné, on continue de contribuer à hauteur de 3 milliards de dollars par année. Ce sont des montants quand même substantiels.

On est tous d'accord que le Fonds des générations, c'est quelque chose d'important, mais, comme l'a si bien dit mon collègue député d'Orford, nous sommes un gouvernement qui tient ses promesses, et, en campagne électorale, nous avons pris la promesse et l'engagement de faire une diminution des impôts, donc nous allons tenir notre promesse. Et c'est surprenant, parce que le Parti libéral, lui, a décidé qu'il changeait de cap soudainement, alors qu'en campagne électorale il promettait des baisses d'impôt supérieures aux nôtres. Donc, je tenais à le préciser.

Puis c'est quand même surprenant que... bien, surprenant... ce n'est pas si surprenant que ça que le Parti libéral change de cap comme ça, parce que ce n'est pas la première fois qu'il l'a fait. Je me souviens, en 2015, il y avait beaucoup de promesses sur la table, et, lorsqu'ils ont été élus, première chose qui s'est passée : rupture des promesses. Un exemple qui m'a touchée personnellement, moi, comme mère, à ce moment-là, qui avait des enfants en garderie, c'était le fait de revenir sur leur promesse de garder un taux fixe pour les frais de garde. Alors, non seulement ils sont revenus sur leur promesse, mais ils ont fait une hausse rétroactive, donc, sur toute l'année, qui était payable au moment même. Je me souviens, on était, là, au printemps 2015, et on était plusieurs parents à avoir... recevoir une facture de 3 000 $ et 5 000 $, remboursable immédiatement, juste avant les vacances d'été. Je vais m'en souvenir toute ma vie, Mme la Présidente, parce que, pour moi, c'était une promesse qui a été complètement bafouée, alors je voulais mentionner cela.

Mais le Parti libéral ne s'était pas arrêté là. Le collègue, le chef de troisième opposition l'a mentionné, l'austérité libérale a fait très, très mal au Québec. Quand je les entends dire qu'on doit continuer à subventionner, à financer les jeunes, que c'est important, il ne faut pas couper dans les services pour la jeunesse, c'est surprenant de voir qu'ils ont fait tout à fait l'inverse avec leurs mesures d'austérité. Et je dois vous avouer, Mme la Présidente, que j'ai eu un petit baume sur le coeur quand j'ai entendu les mea culpa des anciens ministres libéraux, l'ancien ministre des Finances du gouvernement libéral Carlos Leitão et l'ancien ministre de la Santé, quand ils ont fait leur mea culpa public très récemment à la radio. Et je vais citer Gaétan Barrette, l'ancien ministre des Finances, qui a dit à la radio, en entrevue : «"Je suis content qu'il l'ait dit, Carlos, parce qu'il a raison. On est allés trop vite, on aurait dû aller lentement, réajuster le tir", a-t-il ajouté. "Nous, les ministres, jamais [...] on n'a eu une seule indication pendant le mandat qu'on avait des surplus. Comment tu penses qu'on s'est sentis quand on réclamait des budgets et qu'on a appris, une semaine après l'élection de 2018, qu'il y avait [soudainement] des surplus de 7,6 milliards de dollars?"»

Mais, en petit aparté, on n'est pas si surpris quand on a vu... quand, dans la dernière campagne électorale, il y avait des erreurs de 12 milliards de dollars dans leur cadre budgétaire. Et je continue de citer Gaétan Barrette, ancien ministre de la Santé : «Le moment de la politique qui est gravé le plus fermement dans ma mémoire[...], c'est quand je me suis présenté, après le budget, devant le secrétaire du Conseil du trésor et Martin Coiteux — qui était président du Conseil du trésor à ce moment-là — et [...] je leur ai dit : "Je ne peux pas, avec ce budget, reconduire l'année prochaine les services qu'on a donnés l'année dernière, ce n'est juste pas possible." La réponse que j'ai eue de Martin Coiteux, c'est : "C'est un autre débat, ça coûte trop cher, c'est ça, ton budget", a raconté l'ancien ministre.»

Ça fesse quand même, là, c'est assez puissant, parce que, là, on parle ici des services aux plus vulnérables, là, aux enfants, aux personnes aînées, aux gens qui sont malades, des services en santé, en éducation, Mme la Présidente, et c'est eux qui en ont... Bien, tu sais, c'est eux qui ont vécu ça. Et, aujourd'hui encore, quand on parle de pénurie de main-d'oeuvre en éducation, pénurie de main-d'oeuvre en santé, c'est quelque chose qu'on aurait pu prévoir il y a 15 ans, Mme la Présidente. Et le gouvernement qui nous a précédés en avait conscience. En tout cas, j'ose croire qu'ils en avaient conscience, parce qu'il y a également la fonction publique qui était là, et ils ont quand même décidé de faire des ponctions budgétaires à la hauteur de 2 % à 3 % par ministère et organisme, sans égard à la mission et aux priorités. Ça, ça a fait mal.

Si on regarde, en gros, là, les coupures qui ont été faites — moi, j'aime les chiffres, là, le monde le sait, donc on me donne souvent des chiffres — le précédent gouvernement, lors de l'austérité... au nom de l'austérité budgétaire, a coupé, dans les commissions scolaires, 130 millions de dollars, dont 90 millions dans l'aide à la réussite scolaire, 10 millions pour l'adaptation scolaire, 30 millions dans les allocations dites supplémentaires. C'est des coupures en éducation qui font mal. Et, je me souviens, quand on est arrivés au pouvoir, on avait des... moi, j'étais directrice de cabinet, la première année, puis on se présentait un peu toutes nos priorités, et je me souviens qu'en santé et en éducation les chefs de cabinet ont dit : On a une pénurie de main-d'oeuvre hallucinante, on n'a plus d'orthopédagogues, il manque de... il va manquer d'enseignants, il nous manque 30 000 préposés aux bénéficiaires sur cinq ans. Et ça, c'était dû aux coupures budgétaires qu'on avait subies au nom... pour revenir vers l'équilibre budgétaire, qui aurait été fait... qui aurait pu être fait plus doucement sur plusieurs années. Et je me souviens que je me suis dit : Mon Dieu! Où est-ce qu'on va trouver ces gens-là?

Et, aujourd'hui encore, malgré qu'on mette toutes les mesures en place pour encourager un retour vers l'emploi du personnel soignant... Je vous le dis, il n'y a rien qu'on ne fait pas, Mme la Présidente, là. Il y a des bourses de 1 500 $ par session pour le cégep, des bourses de 2 500 $ par session pour ceux qui vont à l'université dans plusieurs secteurs où il y a une pénurie de main-d'oeuvre. En éducation, notamment, là, c'est sans précédent, ça ne s'est jamais fait à date, on est en rattrapage, un rattrapage monumental, et tout ça, c'est pour offrir des services à nos jeunes, à nos jeunes enfants, qui sont le futur de notre société. Mais le précédent gouvernement a décidé de couper et, aujourd'hui, il nous critique de ne rien... ils nous disent qu'on ne fait rien pour l'avenir de nos jeunes. Alors, je m'excuse, moi, je me permets d'être un peu insultée, parce que je suis mère de deux enfants de 10 et 14 ans, je sais que c'est important, ils sont... Puis je vois... il y a plusieurs parents aussi ici, là.

Je continue dans les compressions. Il y a eu également plusieurs compressions, mais le tarif des services de garde, je l'ai dit tout à l'heure, on s'est dit : Bon, bien, finalement, ça coûte trop cher, on l'a promis, mais ils vont oublier. Mais on n'a toujours pas oublié après toutes ces années. Alors, quand on est arrivés au pouvoir, on a ramené ça à 8 $ et quelques de l'heure puis on a décidé qu'on allait compléter le réseau. Oui, c'est beaucoup d'argent, convertir les garderies, oui, c'est que ça coûte de l'argent, créer des places, mais on est en pénurie de main-d'oeuvre, on n'a pas le choix de le faire. On s'est engagés à le faire, et c'est ce qu'on est en train de faire. C'est fondamental pour la société, surtout que c'est souvent des femmes, là, qui paient puis qui restent à la maison quand ils n'ont pas de place à la garderie. Donc, on ne peut pas se permettre, on est en rattrapage. Encore là, les bourses de tout à l'heure, que je mentionnais, les personnes qui veulent devenir éducatrices en services de garde y ont également droit, puis ça a son effet. C'est sûr qu'on ne règle pas tout en quelques semaines, ça prend quelques années pour régler cette situation-là, mais on est en marche, et c'est ce qu'on fait.

Ils ont également compressé dans les... Encore en éducation, là, on parle souvent de réussite scolaire, puis une partie de la réussite scolaire, c'est d'avoir des ratios équilibrés dans les classes. Mais les libéraux ont également fait des compressions à ce niveau-là puis ils ont décidé d'augmenter les ratios et d'avoir plusieurs élèves, là, justement, les années... les quatre, cinq, sixième année, et les professeurs trouvent ça très difficile, ils en ont déjà beaucoup sur les épaules. Donc, déjà qu'ils n'avaient plus d'orthopédagogues, qu'on est en train d'en rembaucher 200, 300 dans le système parce qu'ils sont partis, ils se sont trouvés... ils se sont reconvertis, on est en pénurie de main-d'oeuvre — reformer des orthopédagogues, ça prend plusieurs années — mais là les classes sont encore plus lourdes, c'est plus difficile à gérer. C'est ça qu'ils ont fait, les libéraux.

Sans compter toutes les coupures qu'il y a eu en santé. Si on s'entend qu'il y a un endroit où il ne faut pas couper en ce moment, bien, c'est en santé. La population est vieillissante, on va avoir beaucoup de pression sur notre système de santé pendant les 20 prochaines années, probablement. Donc, tout le monde le sait, on est au rendez-vous. Il y a un plan santé qui veut restructurer, moderniser le système de santé, redonner une meilleure flexibilité, justement, aux infirmières pour les garder au travail. C'est fondamental pour nous, c'est les plus vulnérables. L'éducation, c'est... on travaille sur notre futur, futur de la société, les jeunes, mais, quand on investit sur le système de santé, on aide les plus vulnérables. On ne peut pas se permettre, au Québec, surtout que c'est un contrat social qu'on a avec la population, de couper en santé, et nous, on ne le fera pas.

Mais on est capables, quand même, d'accorder des baisses d'impôt parce que nos finances publiques sont saines. On a un très bon ministre des Finances qui a toujours une approche équilibrée. Il ne nous dit pas toujours oui, là, Mme la Présidente, là. J'ai des collègues qui sont ici, on veut... nous autres, on veut toujours plus, c'est certain, mais on a une approche équilibrée.

Alors, c'est ce qu'on a fait à notre arrivée, on s'est dit qu'on allait redresser la situation. On a réinvesti massivement en santé, en éducation, on continue à le faire, c'est des montants, là, phénoménaux. On parle, ici, de près de 8,9 milliards de dollars supplémentaires d'ici 2026-2027 en santé, soit 5,2 milliards de dollars pour rétablir le système de santé et services sociaux, 3,7 milliards de dollars pour rehausser les soins et les services à la population. En éducation, c'est près de 2,8 milliards supplémentaires additionnels sur cinq ans pour réinvestir en éducation et en enseignement supérieur, 1,6 milliard pour la réussite et la persévérance scolaire. On le sait, c'est un défi. Ce n'est pas parfait, mais c'est possible de le faire.

Alors, en conclusion, je comprends, là, qu'il y a des préoccupations, puis on entend toutes sortes de choses dans les journaux, on se dit : Ah! ils vont couper dans le Fonds des générations, il n'y aura plus rien pour les jeunes dans le futur. Mais il y a plusieurs manières de gérer, justement, les finances de l'État. Le Fonds des générations, il est là pour rester, on continue d'y contribuer de manière significative, mais il faut investir et... Nous, c'est ce qu'on a fait, on a réinvesti en santé, en éducation. On a conscience des défis pour la persévérance scolaire, pour s'assurer d'avoir un système de santé qui va tenir la route, là, qui va avoir les reins solides dans les prochaines années, puis c'est difficile, on investit, puis ça prend du temps avant que les choses se placent, on a conscience de ça, parce que les jeunes, c'est le futur du Québec. Et moi, personnellement, j'ai confiance en notre ministre des Finances et j'ai confiance qu'on va respecter tous nos engagements électoraux et qu'on va continuer de prendre soin de notre Québec. Alors, merci, Mme la Présidente.

• (16 h 20) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, Mme la députée. Alors, je suis prête à reconnaître un membre de l'opposition officielle. Et j'en profite, en même temps, pour vous rappeler qu'il reste à votre parti 9 min 10 s.

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Merci, Mme la Présidente. Et merci de me permettre de m'exprimer aujourd'hui dans cette Chambre afin d'aborder un sujet extrêmement sérieux pour la jeunesse québécoise, soit celui de l'avenir du Fonds des générations.

Dans le contexte où le ministre des Finances, avec le soutien de l'ensemble du gouvernement caquiste, souhaite diminuer de 40 % les versements au Fonds des générations. Nous ne pouvons garder le silence, nous ne devons pas garder le silence, et c'est pour cette raison que nous avons déposé cette motion aujourd'hui.

Il faut le rappeler, Mme la Présidente, la Loi sur la réduction de la dette et instituant le Fonds des générations a été adoptée le 15 juin 2006 sous un gouvernement libéral, fièrement, avec l'objectif de réduire le fardeau de la dette du Québec. Le Fonds des générations est un fonds affecté exclusivement au remboursement de la dette du Québec pour réduire le fardeau des générations futures.

Pour financer le fonds, et c'est important de revenir à la genèse, Mme la Présidente, pour financer le Fonds des générations, notre ressource collective renouvelable la plus importante est mise à contribution : l'eau, l'or bleu du Québec. Le Fonds des générations est donc alimenté par des revenus dédiés, des sources de revenus consacrées au remboursement de la dette, est constitué notamment de redevances hydrauliques provenant d'Hydro-Québec et de producteurs privés d'hydroélectricité. Le fonds bénéficie aussi de sommes relatives à l'indexation du prix de l'électricité patrimoniale, à une contribution additionnelle d'Hydro-Québec, aux revenus miniers, à la taxe spécifique sur les boissons alcooliques et à la liquidation des biens non réclamés administrés par Revenu Québec.

C'est un fonds qui a été bien monté, comme vous venez de l'entendre, Mme la Présidente, qui a été pensé précisément pour l'avenir de notre jeunesse québécoise. Les sommes consacrées au Fonds des générations sont aussi gérées par... sont aussi, bon, déposés à la Caisse de dépôt et placement du Québec et sont administrés, donc, suivant la politique de placement du ministre, en collaboration avec les responsables de la caisse. Donc, vous le voyez, tout a été fait, tout a été monté pour que le Fonds des générations soit géré de façon responsable pour qu'on puisse s'acquitter de cette dette, pour qu'on puisse répondre à cet objectif d'équité intergénérationnelle de la façon la plus encadrée possible, de la manière la plus efficace possible pour que la génération future n'ait pas à porter le fardeau des décisions du passé, Mme la Présidente.

Aujourd'hui, compte tenu des versements effectués depuis la création du fonds et de ceux qui sont prévus, la valeur comptable du Fonds des générations est établie à environ 19 milliards de dollars. C'est un trésor, un trésor national. C'est pour cette raison... et le site même du ministère des Finances l'indique, c'est pourquoi le gouvernement maintient ses versements, parce que les versements au Fonds des générations contribuent à la réduction de la dette et, par le fait même, à l'amélioration de l'équité intergénérationnelle. Ce n'est pas moi qui le dis, c'est le ministère des Finances qui l'indique. C'est pour cette raison que le gouvernement maintient ses versements.

Dans cette perspective, Mme la Présidente, sur 15 ans, le Fonds des générations a généré en moyenne un rendement de 6,3 % et un taux de dette de 3,1 % sur les sommes empruntées, pour un rendement net de 3,2 %. Je le répète, sur 15 ans, le Fonds des générations a généré un rendement de 6,3 %, alors que le taux d'emprunt était de 3,1 %. On le voit donc, le Fonds des générations, ce n'est pas seulement un outil utile pour maintenir une bonne cote de crédit ou un outil qui ne sert qu'à maintenir une crédibilité... oui, intergénérationnelle... — pardonnez-moi le lapsus, parce que c'est tellement important — une crédibilité internationale en accumulant des versements, c'est aussi un outil qui génère des rendements pour la prochaine génération. C'est un outil qui est extrêmement utile dans cette perspective, parce que ce n'est pas juste le Trésor qui nous... le capital qui est important pour la prochaine génération, ce sont aussi ses rendements. Et tous les experts le disent, le Fonds des générations continuera de générer des rendements intéressants pour s'attaquer au poids des déficits.

J'ajouterais donc ceci, donc, on l'a vu, donc le site du ministère des Finances nous indique : Pour maintenir l'équité intergénérationnelle, maintenir les versements est primordial. Donc, c'est pour cette raison qu'on les maintient. J'ajouterai qu'en raison de ses rendements, c'est exactement pourquoi, à notre sens, le gouvernement doit maintenir les versements. Se priver de plusieurs milliards de dollars en rendement au bénéfice des prochaines générations, c'est faire preuve d'irresponsabilité. D'ailleurs, le gouvernement le sait tellement, que c'est irresponsable, que la députée de Jean-Talon qui vient de s'exprimer avant moi n'a pas été en mesure de justifier la décision et a digressé pendant neuf minutes sur le passé. Elle s'est mis d'accord avec nous que la pénurie de main-d'oeuvre, ce n'est pas une bonne nouvelle, et elle a passé son temps à énumérer les programmes caquistes de requalification qui sont montés à l'aveugle, qui ne fonctionnent pas parce que la CAQ ne veut pas écouter le milieu.

Donc, disais-je, Mme la Présidente, c'est encore pertinent, de maintenir les versements intégraux au Fonds des générations aujourd'hui, et nous, libéraux, nous n'adoptons pas une position qui est dogmatique à ce sujet. Les jeunes générations, ma génération et celles qui suivent, nous sommes confrontés au vieillissement de la population. Donc, l'objectif de maintenir les versements dans leur intégralité, ce n'est pas de dire : Nous ne touchons pas au Fonds des générations parce que c'est une religion, parce que c'est un dogme, nous disons : Nous ne touchons pas au Fonds des générations aujourd'hui, en 2023, parce que c'est encore rentable pour les prochaines générations de maintenir l'intégralité des versements. C'est rentable pour ma génération, pour celles qui suivent, de nous assurer que nous ayons ce trésor, ce trésor national, pour nous donner une liberté.

Nous sommes confrontés à un vieillissement de la population qui s'accélère. Je n'apprends rien à qui que ce soit, la pyramide des âges s'inverse. Et, dans ce contexte, notre génération sera confrontée à un défi démographique immense, dans le contexte où notre fardeau financier sera déjà plus élevé que celui des générations précédentes. On ne peut pas se permettre d'alourdir ce fardeau.

Mme la Présidente, au 31 mars 2023, la dette nette du Québec s'établira à 200 milliards de dollars, soit 36 % du PIB. Le Fonds des générations ne doit donc en aucun temps être considéré comme une enveloppe où on peut piger ici et là pour financer des promesses électorales. Le faire, Mme la Présidente, c'est manquer de vision, c'est faire preuve de cynisme, c'est dire à la prochaine génération...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader.

M. Lévesque (Chapleau) : ...laissé passer quelques-unes, là, mais j'aimerais que vous puissiez rappeler à la collègue que ce sont des propos blessants, d'être prudente dans ses propos. Et certains propos prêtaient des intentions, également, au gouvernement et à la collègue. Donc, simplement rappeler à l'ordre, s'il vous plaît, la collègue.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le leader. Vous pouvez poursuivre votre intervention, Mme la députée, avec prudence.

Mme Cadet : Merci, Mme la Présidente. J'essaierai de mesurer mes propos.

Donc, dans cette perspective, étant donné le fardeau auquel notre génération est confrontée, étant donné tout ce qui sera mis sur les épaules des générations futures, non seulement ces versements, en ce moment, aujourd'hui, pour des motifs qui sont raisonnables, pour des motifs qui sont responsables, devront demeurer dans leur intégralité, nous sommes aussi visionnaires, Mme la Présidente, nous disons : Le ministre, le gouvernement, en ce moment, nous donne, nous octroie la possibilité de réfléchir, de réfléchir à l'avenir, de voir exactement comment nous souhaitons orienter le Fonds des générations pour l'avenir.

Donc, aujourd'hui, Mme la Présidente, avec cette motion, nous nous opposons à ces baisses d'impôt financées à même le Fonds des générations, mais d'autant plus nous disons : Faisons preuve de proactivité. 100 milliards, 100 milliards de dollars, c'est l'objectif que nous nous donnons pour atteindre cette liberté. C'est l'objectif que nous nous donnons pour nous assurer que la prochaine génération, comme elle le souhaite, puisse disposer de toute la latitude nécessaire pour faire ses choix. Nous leur disons : Investissez dans les choix de société qui vous conviennent, propres à votre conjoncture, en vous consultant. Merci, Mme la Présidente.

• (16 h 30) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, Mme la députée. Alors, je suis prête à reconnaître un membre du gouvernement. M. le député de René-Lévesque, la parole est à vous.

M. Yves Montigny

M. Montigny : Bonjour, Mme la Présidente. Ça fait plaisir de prendre la parole, aujourd'hui, sur un sujet aussi important que celui-ci, le Fonds des générations, ainsi que... en fait, je dirais aussi, toutes nos décisions qu'on prend, comme gouvernement, qui sont alignées sur les bonnes places, sur les besoins des Québécois.

Alors, j'aimerais simplement commencer par un élément que je vais vous lire, Mme la Présidente. En mars 2018, le budget 2018‑2019, le gouvernement de Philippe Couillard annonçait puiser 2 milliards de dollars par année, pendant cinq ans, dans le Fonds des générations pour ramener la dette publique du Québec à 45 %. Alors, si on regarde maintenant, au 31 mars 2022, Mme la Présidente, on voyait qu'on tombait sous la barre des 43 %. Mais, sérieusement, ça me surprend tout le temps, d'entendre l'opposition officielle se mêler dans ses paroles, de dire, à quelque part, que, ces idées qui étaient défendues à l'époque, ça se peut de dire aujourd'hui le contraire. Alors, c'est tout le temps un peu surprenant, Mme la Présidente.

À sortir de plus de deux ans de pandémie, où tous et chacun ont traversé la tempête ensemble, notre gouvernement a aidé les Québécois et Québécoises, par plusieurs mesures, pour pallier à une hausse rapide de l'inflation et aider avec la hausse du coût de la vie. Nous étions engagés, dès 2018, à alléger le portefeuille des contribuables. Chose promise, chose due. Nous avons pris l'engagement, en campagne électorale, de réduire les impôts des Québécois et, oui, on respecte nos engagements. Eh oui! peut-être que d'autres partis politiques, pour eux, ne pas respecter leurs engagements, ça fait partie d'une vision, mais ce n'est pas la nôtre. Les engagements pris par notre formation politique, Mme la Présidente, sont défendus ici, à l'Assemblée nationale, et seront respectés, et on va les faire. On fait ce qu'on a dit.

Alors, comparé aux autres provinces du Canada, la pression fiscale, au Québec, est au premier rang, tout comme l'importance en pourcentage du PIB du poids des impôts sur le revenu des particuliers, des cotisations sociales, des impôts sur les bénéfices des sociétés et des impôts sur les salaires, Mme la Présidente. En 2022, la comparaison du barème d'imposition combinée fédéral-provincial sur les revenus des particuliers du Québec et de l'Ontario montre des taux marginaux plus élevés au Québec, sauf pour les revenus imposables très bas, ceux qui gagnent moins de 16 000 $ par année, ou ceux qui sont élevés, à 222 000 $ par année. Les écarts atteignent 7,5 points de pourcentage lorsque les revenus imposables se situent entre 20 000 $ et 80 000 $, Mme la Présidente. Alors, bien évidemment, dans ce contexte-là, le Québec se positionne en queue de peloton en ce qui a trait aux impôts sur le revenu des particuliers, sur les salaires, sur les bénéfices des sociétés parmi les 30 pays membres de l'OCDE.

Alors, évidemment, quand on entend d'autres partis politiques nous dire que c'est une mauvaise idée d'avoir en regard la question des impôts, quand on regarde les autres formations politiques nous dire qu'on ne doit pas tenir compte de cette vision de laisser tomber de la pression sur les épaules des contribuables, ça me surprend tout le temps. C'est ça, notre réalité. Les Québécois ont besoin de ces baisses d'impôt, et il faut aller dans cette voie-là. On l'a dit en campagne puis on va continuer à le faire.

Maintenant, c'est une mesure contrôlée et responsable qu'on met en place comme gouvernement, à l'image de notre gestion des quatre dernières années, Mme la Présidente. Les Québécois travaillent très, très fort. On se doit de leur donner vraiment un peu de valorisation et surtout on doit valoriser le travail, Mme la Présidente. Alors, ce n'est pas la seule mesure que nous avons proposée depuis l'élection du gouvernement, en 2018. On a mis en place un plafonnement de la hausse de plusieurs tarifs gouvernementaux, 3 %, Mme la Présidente, diminution des frais de stationnement dans les hôpitaux, l'harmonisation des taxes scolaires au plus bas taux du Québec, bonification des allocations... en fait, c'est la bonification des allocations pour les familles, le soutien aux aînés aussi, Mme la Présidente, l'augmentation du salaire minimum de 27 % en quatre ans, Mme la Présidente. On est là pour les gens qui en ont besoin puis on va continuer à le faire. Nous sommes passés de 12 $ de l'heure en 2018 à 15,25 $ en 2023. Cette hausse a été plus importante que l'inflation malgré la pandémie, Mme la Présidente. Elle a permis d'augmenter le pouvoir d'achat des Québécois et, bien sûr, leurs salaires.

Je veux aller tout de suite pour vous parler maintenant de... Lors de sa création, en 2006, les contributions au Fonds des générations étaient de quelques centaines de millions. Cette année, nous ajoutons 3 milliards de dollars, Mme la Présidente. En continuant dans cette lignée, l'augmentation serait de plus de 5 milliards en 2026 et 2027, Mme la Présidente. Alors, quand j'entends, des fois, d'autres formations politiques dire qu'on veut couper dans le Fonds des générations, bien, vous pouvez tirer vos conclusions, Mme la Présidente. Je veux vous dire que la valeur comptable du Fonds des générations, en 2022, a atteint 15,7 milliards. Ce n'est pas rien.

Contrairement à certaines formations politiques, Mme la Présidente, il y en a pour souhaiter... c'est surprenant, mais il y a des formations politiques qui souhaitent la suspension complète des versements au Fonds des générations. Je me questionne, moi, si c'est sérieux comme proposition, Mme la Présidente. Nous, nous avons les yeux bien alignés sur le tableau de bord de l'évolution de la dette brute au Québec. Je l'ai juste ici, devant moi, l'évolution de la dette brute au Québec. On regarde le PIB en fonction du pourcentage du PIB au 31 mars 2022. Elle est estimée en bas de 43 %, Mme la Présidente.

Alors, je trouve que, quand on regarde tout ça en fonction de la dette, puis quand on regarde que le Fonds des générations... la valeur comptable qu'a atteint le Fonds des générations, en 2022, à 15,7 milliards, puis quand on regardait les prévisions qui sont toujours au-dessus de 3 milliards, bien, on fait bien. On est exactement dans la bonne direction, Mme la Présidente. Je vous le dis, les citoyens du Québec ont besoin d'un peu moins de pression par rapport à leurs impôts, puis les conditions sont bien placées pour être capables de mettre en place ce qu'on veut faire, Mme la Présidente. Je vous le répète, les versements du Fonds des générations ont toujours été maintenus au-delà de 3 milliards, et on a actuellement 15,7 milliards en 2022 pour le Fonds des générations. Puis on a un tableau aussi qui nous démontre très bien qu'on est en bas de 43 % en pourcentage du PIB. Alors, c'est des chiffres qui parlent, Mme la Présidente.

Nous faisons une gestion responsable et prudente des finances publiques, comme le disait aujourd'hui le ministre des Finances.

La première responsabilité : financer les principales missions de l'État adéquatement. Nous avons une équipe forte au gouvernement et très compétente. Nous travaillons extrêmement fort pour réussir à trouver l'équilibre nécessaire.

Deuxième responsabilité, Mme la Présidente : revenir à l'équilibre budgétaire. On a fait face à une pandémie, et il y a eu une pandémie, il y a eu une récession, la pire récession, comme le disait le ministre aujourd'hui, depuis la Deuxième Guerre mondiale. Ça a eu un impact sur les finances publiques, c'est certain.

La troisième responsabilité qu'on a, c'est de réduire le poids de la dette au Québec, le Fonds des générations. Je vous ai parlé tantôt, en fonction du graphique, que, là, on le voit très, très bien qu'on a descendu puis qu'on se situe autour de 43 %.

Maintenant, nous avons ajouté le désir de réduire le fardeau fiscal des Québécois. C'est extrêmement important pour stimuler l'offre de travail, créer de la richesse puis encourager l'innovation, Mme la Présidente.

Maintenant, nous maintenons toujours l'objectif de retourner à l'équilibre budgétaire d'ici 2027‑2028. Rappelons que ce retour à l'équilibre sera bénéfique non seulement pour les Québécois actuels, mais pour ceux des générations futures, Mme la Présidente. De saines finances publiques bénéficient à l'ensemble de la population, aujourd'hui et demain.

À ce stade-ci, Mme la Présidente, j'aimerais ça rappeler respectueusement à mes collègues de l'opposition officielle, qui semblaient très fiers, en campagne électorale, de repousser le retour au déficit zéro de sept ans, ce qui augmenterait la dette de quelque chose comme 15 milliards de dollars. Pour l'opposition officielle, à ce moment-ci, est-ce que, selon leur logique d'aujourd'hui... est-ce que c'est la dette à long terme qui va payer pour des baisses d'impôt à court terme, Mme la Présidente? De plus, j'aimerais vous rappeler que leurs calculs n'étaient même pas bons, ça ne balançait même pas, Mme la Présidente, leurs calculs pendant la période électorale.

En conclusion, j'aimerais... laissez-moi juste conclure de cette façon-là. Laissez-moi nous remettre à l'esprit que nous avons promis, comme gouvernement, de remettre de l'argent dans le portefeuille des Québécois. C'est ça qu'on va faire, parce que nous autres, on tient nos promesses, Mme la Présidente. Merci beaucoup.

• (16 h 40) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député. Maintenant, je cède la parole à M. le député de Masson. Et je vous informe qu'il reste huit minutes de temps de parole pour votre groupe parlementaire.

M. Mathieu Lemay

M. Lemay : Alors, merci, Mme la Présidente. À mon tour d'intervenir aujourd'hui en Chambre sur ce sujet de la motion du mercredi du député de Marguerite-Bourgeoys. Et je tiens à saluer mes collègues qui sont ici présents pour cette intervention.

Alors, vous savez, premièrement, Mme la Présidente, vous devez savoir que je vais exprimer une intervention en désaccord avec la motion du député de Marguerite-Bourgeoys, parce que je suis contre, là, sa motion. Vous savez, lorsqu'on parle du Fonds des générations, puis mes collègues l'ont mentionné précédemment, il a quand même été constitué en 2006 par le gouvernement du Québec afin de garantir une pérennité des finances publiques à long terme et il a donc pour objectif de réduire le fardeau de la dette publique en capitalisant une partie des surplus budgétaires de l'État et en les investissant dans des projets productifs.

Alors, Mme la Présidente, chaque année, une partie des excédents budgétaires sont transférés au Fonds des générations. Et d'ailleurs, si on se réfère à l'année 2020‑2021, le gouvernement du Québec a effectué un versement de 2,5 milliards au Fonds des générations. Mais, si on se compare au tout début, mon collègue l'a dit tout à l'heure, quelques centaines de millions... c'était 600 millions, en 2006, qui étaient versés. Cette année, Mme la Présidente, est-ce que vous savez ce serait quoi, le versement au Fonds des générations? Ce sera 3,2 milliards de dollars qui seront versés. C'est quand même énorme, Mme la Présidente. Ça fait qu'avant de dire qu'il y a des coupures ou que les fonds ne sont pas versés, je pense qu'on devrait prendre ça en considération, qu'il y a eu une progression linéaire vers une augmentation du versement au Fonds des générations.

Alors, ce que vous devez savoir aussi, Mme la Présidente, c'est que le Fonds des générations est géré de manière indépendante par la Caisse de dépôt et des placements du Québec, qui a pour mandat de maximiser le rendement des investissements tout en respectant les critères d'investissement éthiques et responsables. Le Fonds des générations a aussi pour mission, Mme la Présidente, de contribuer à la réduction de la dette publique, de soutenir le financement des dépenses en santé et en éducation et de maintenir un niveau de service public adéquat.

Donc, les bénéfices du Fonds des générations sont réinvestis dans les services publics plutôt que d'être utilisés au remboursement de la dette publique. Donc, lorsqu'on comprend ça, Mme la Présidente, là, on sait que le Fonds des générations, c'est une mesure importante pour la gestion à long terme des finances publiques du Québec. Ça vise à garantir une pérennité de l'économie et à assurer une qualité de vie élevée pour les générations futures. Alors, par conséquent, Mme la Présidente, là, il est indéniable que ce fonds constitue une mesure importante pour la gestion à long terme des finances publiques de notre province.

Cependant, il est également important de considérer les enjeux actuels qui nécessitent une action urgente. Je ne sais pas si vous le savez, Mme la Présidente, là, mais on est confrontés à une situation économique préoccupante, là. Premièrement, on a été exacerbés par la pandémie de COVID-19. Il y a des milliers de Québécois qui ont perdu leur emploi. Il y a des entreprises qui ont subi des pertes importantes. Puis, dans ce contexte, on doit agir rapidement pour stimuler l'économie et soutenir les travailleurs et les entreprises.

Vous savez, moi, je suis conscient que le Fonds des générations, c'est quand même d'une importance capitale pour la gestion à long terme de nos finances, mais je suis aussi d'avis, comme je viens de le dire, qu'il y a urgence d'agir. Puis pourquoi? Parce qu'en plus des défis économiques auxquels on est confrontés, Mme la Présidente, bien, il me semble que toute modification au fonctionnement du fonds, ça n'a pas nécessairement besoin de faire l'objet d'une vaste consultation nationale auprès de la jeunesse du Québec. C'est ce que demande le député de Marguerite-Bourgeoys. Bien sûr, c'est important de prendre en compte l'opinion de la population, puis des jeunes en particulier, mais il ne faut pas pour autant freiner l'action gouvernementale.

Donc, c'est important, je veux le rappeler ici, Mme la Présidente, que, quand on a fondé, quand on a créé le Fonds des générations pour garantir la pérennité de nos finances publiques, bien, ça impliquait des choix difficiles puis des choix qui sont parfois impopulaires. Mais, dans le contexte actuel de la crise économique puis de la pandémie, on doit prendre des mesures pour stimuler l'économie, on doit s'assurer de créer des emplois, on doit s'assurer d'avoir un niveau de service public adéquat.

Puis pour compléter, au sujet de la consultation que le député demande, là, bien, vous savez que... on sait tous que l'opinion des jeunes, comme d'autres classes de citoyens, est prise en compte à chacun des stages, des actions et des décisions gouvernementales. Donc, je le répète, Mme la Présidente, dans le contexte actuel, il est urgent d'agir pour stimuler l'économie, créer des emplois, maintenir des services publics adéquats. Alors, je crois qu'une consultation retarderait cette prise de décision, ça ralentirait nos efforts pour relancer notre économie. Et c'est pourquoi que je crois que cette consultation n'est pas nécessaire.

Mme la Présidente, le député de Marguerite-Bourgeoys, il mentionne aussi l'importance de réduire le ratio d'endettement du Québec. Mais, pour votre information, le ratio d'endettement du Québec, il mesure quoi? Il mesure la dette totale du gouvernement québécois en proportion de son produit intérieur brut. Ceux qui ne le savent pas, là, le PIB, ça représente la valeur totale des biens et services produits dans l'économie québécoise. Mais, plus précisément, le ratio d'endettement du Québec correspond au montant de la dette brute, qui inclut notamment la dette publique, les déficits accumulés, les engagements de retraite du gouvernement, divisé par le PIB. Puis ça, ça permet d'assurer une mesure, là, de soutenabilité de la dette du Québec, d'évaluer la capacité du Québec de rembourser sa dette.

Et ce que vous devez savoir, c'est qu'en 2020 ce ratio, il était d'environ 46 %. Ça, ça représentait une augmentation par rapport à 2019, en raison des impacts économiques liés à la pandémie de la COVID-19. Mais sachez qu'au 31 mars 2023 ce ratio-là retombe à 40,4 % du PIB, qui est un résultat inférieur à l'objectif de 45 % qu'on s'est fixé, qui est un résultat qui demeure en deçà de la moyenne canadienne et de la moyenne internationale. Donc, je crois qu'en ce terme-là le Québec, on fait une excellente figure.

De plus, ce que vous devez savoir aussi, c'est que le gouvernement du Québec a mis en place diverses mesures pour réduire le ratio d'endettement, notamment en réduisant les dépenses publiques, en augmentant les revenus fiscaux et en améliorant l'efficacité des programmes gouvernementaux. Donc, le maintien du Fonds des générations, ça constitue également une mesure importante pour la gestion à long terme des finances publiques.

Là, j'aurais quelques statistiques que je pourrais vous donner, Mme la Présidente. Je ne sais pas si le député de Marguerite-Bourgeoys... Vous dites qu'il restait huit minutes, non?

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, il vous reste...

M. Lemay : C'est bon. Bien, vous savez, on a fait face à une inflation. Je ne sais pas s'il y en a qui ne le savent pas. Mais bref, quand on additionne les hausses des coûts de la vie, là, notamment dans les transports, 10,6 %, dans les aliments, plus 8,9 %, dans le logement, plus 6,9 %, c'est toutes des hausses fortes qu'on a eues, Mme la Présidente. Quand on ajoute à ça, nous autres, on a fait des mesures... en sorte de supporter les Québécois et les Québécoises. On constate, comme tout le monde, que l'inflation est élevée. On est particulièrement sensible à la hausse des prix qui affecte les ménages à faibles revenus ainsi que nos aînés. C'est pour ça que nous avons déployé le bouclier anti-inflation, afin de redonner les sommes supplémentaires dans les coffres de l'État, en raison, notamment, de l'inflation. Puis ça, on veut le faire pour nos Québécois.

Alors, en conclusion, Mme la Présidente, je crois qu'il est temps de faire preuve de pragmatisme et de penser de cette façon pour répondre aux enjeux économiques actuels. Le gouvernement doit être en mesure de prendre des décisions éclairées tout en tenant compte des préoccupations à plus long terme. Nous devons aussi travailler ensemble pour sortir de cette crise et bâtir un avenir meilleur pour tous les Québécois. Et, par conséquent, Mme la Présidente, je serai contre la motion proposée par le député de Marguerite-Bourgeoys. Merci, chers collègues.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Merci, M. le député de Masson. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, avant de vous céder la parole pour votre réplique, je vous invite à nous indiquer votre intention quant à l'amendement que le chef du troisième groupe d'opposition a déposé. Merci.

M. Frédéric Beauchemin (réplique)

M. Beauchemin : Merci, Mme la Présidente. Bien, en ce qui a trait... Il y a deux paragraphes. Le premier paragraphe, on serait en accord, mais, le deuxième paragraphe, on n'est pas en accord. Donc, par conséquent, on va refuser l'amendement, qui inclut les deux paragraphes de façon combinée.

Écoutez, on en a entendu pas mal, pas tout, évidemment, à propos, là, du Fonds des générations. C'est correct, je comprends la joute parlementaire, ça fait partie du jeu. Si je peux résumer, j'ai entendu Québec solidaire dire : Taxer, taxer, taxer tout et aussi prendre le Fonds des générations pour des projets. J'ai entendu le Parti québécois dire aussi la même chose, de décaisser le Fonds des générations. Puis évidemment la CAQ reste sur sa position de réduire les contributions au Fonds des générations.

• (16 h 50) •

Si je peux me permettre, juste peut-être pour expliquer, là, finances 101, là, décaisser le Fonds des générations est l'équivalent d'emprunter de l'argent. La question, ce n'est pas si on veut faire des projets d'infrastructure, si on veut faire des projets pour sauver l'environnement. Ce n'est pas ça, la question. La question, c'est : Comment financer ces projets-là de façon optimale? Prendre l'argent du Fonds des générations, quand on a une dette totale, comme le député l'a mentionné, d'approximativement 200 millions de dollars et que le Fonds des générations, somme toute, disons un chiffre, est à, disons, 20 millions de dollars... 20 milliards de dollars et puis qu'on prend le 20 milliards de dollars pour faire des projets, bien, la dette nette remonte à 200 milliards. Elle était à 180 milliards, là, elle va remonter à 200 milliards. Donc, l'équivalent, O.K., prendre l'argent dans le Fonds des générations, c'est emprunter.

Maintenant, si on comprend ça, qui est finances 101... maintenant qu'on comprend ça, emprunter au Fonds des générations, dont le rendement est à 6,3 % ou emprunter sur le marché obligataire, historiquement, pour la province du Québec, qui était à 3,1 %, la réponse est simple, Mme la Présidente, on ne va pas emprunter l'argent dans le Fonds des générations. Donc, ça, c'est juste simplement, là, pour l'argumentaire «décaissons les pantalons de nos enfants», là.

En passant, juste avant de poursuivre là-dessus, j'ai bel et bien entendu la députée de Jean-Talon, je crois, nous dire que la pénurie de main-d'oeuvre était atroce lors de l'arrivée de la CAQ au gouvernement, que les services de l'État étaient menacés, mais le gouvernement n'en parlait pas publiquement à l'époque. Au contraire, ce qu'on entendait, c'est que... de la part du premier ministre, que c'était une mosus de bonne nouvelle. On ne reconnaissait pas, justement, le problème de pénurie de main-d'oeuvre. Donc, si je comprends bien, on se disait une chose à l'intérieur du caucus, mais l'inverse dans le salon bleu et l'inverse quand on parle aux citoyens. Juste pour qu'on soit clairs là-dessus, là, nous, depuis plusieurs années, même avant le début du mandat de la CAQ, on était en train de parler de la pénurie de main-d'oeuvre. On a amplifié le message parce qu'évidemment la pénurie de main-d'oeuvre s'amplifiait et on avait silence radio de la part du gouvernement. Maintenant, on entend qu'à l'intérieur, dans les coulisses du pouvoir, c'était effectivement un sujet qui faisait trembler les murs. Intéressant. Fin de la parenthèse.

Donc, si je peux revenir sur le sujet de l'approche qu'on veut avoir sur le Fonds des générations, on est tous pleins de bonnes intentions pour ce qui est de nos enfants. Puis ça, je vous le donne à tous, là. On est tous pareils, on les aime puis on veut le meilleur pour eux autres, c'est certain. Mais ici, on est en train de discuter d'un développement durable. Ici, on est en train de parler de comment s'assurer qu'on puisse prendre soin de nos citoyens actuellement sans hypothéquer l'avenir de nos enfants. C'est la raison principale pour laquelle nous sommes en Chambre aujourd'hui, pour discuter du Fonds de générations, discuter de notre proposition, de notre objectif de 100 milliards de dollars, parce qu'on est capables de marcher et mâcher de la gomme en même temps. On est capables de faire en sorte qu'on puisse contribuer les pleines contributions au Fonds des générations et prendre soin de nos services, prendre soin de l'ensemble des services de l'État.

Je crois que la politique déficit zéro mentionnée à plusieurs reprises par notre député là-bas, je ne me souviens plus des circonscriptions, l'ancien maire de Baie-Comeau, d'accord, de René-Lévesque, l'ancien maire de... D'accord. Alors, la politique de déficit zéro, malheureusement, je dois juste combiner ce commentaire-là avec le commentaire que le ratio dette-PIB continue à descendre. Donc, évidemment que si le PIB ou la variance de PIB pour une année est supérieur à un déficit quelconque, il y aura réduction du ratio dette nette-PIB. Et donc on peut continuer à avoir des petits déficits, si la croissance du PIB annuelle en est supérieure année après année. Et, si on continue comme ça, on va avoir une réduction du ratio dette-PIB et donc on va continuer à devenir de plus en plus riche en tant que société.

Et donc d'absolument vouloir se rendre à un déficit zéro, ça se traduit dans une seule chose, Mme la Présidente, ça se traduit de la façon suivante... pour deux raisons. Il y a deux ministères, dans l'ensemble de toute la patente, là, que ça s'appelle le gouvernement, là, il y a deux ministères qui, à chaque année, doivent avoir une augmentation pour des raisons fonctionnelles, pour des raisons historiques, des raisons que... je ne suis pas l'expert pour vous l'expliquer, mais que c'est un statut qu'on remarque : Santé et Éducation ont des besoins d'augmentation de budget annuel de 2 % à 4 %, de 3 %. Annuellement, ça a besoin d'être augmenté, ces enveloppes-là. Donc, de forcer le déficit zéro, comme le suggère la CAQ, avoir un objectif absolument essentiel d'avoir zéro à la fin de l'année, ça veut dire qu'on coupe ailleurs.

Donc là, il faudrait avoir quand même une certaine transparence puis dire c'est où qu'on va aller couper. Parce que moi, ce que j'entends ici, là, O.K., c'est : des coupures non déterminées s'en viennent. Et c'est pour ça que je parle du développement durable et que je parle, justement, de prendre soin des générations présentes et futures. Mais, si ça, ça sous-entend un déficit et, je vais réexpliquer, qu'il se trouve être moins élevé que la croissance de notre produit intérieur brut année après année, et que ce phénomène simple continue de façon relativement stable, dans le futur, Mme la Présidente, le ratio dette nette-PIB va se réduire.

Et donc, dans le contexte actuel, nous sommes capables, nous avons les moyens de nos ambitions, nous pouvons considérer qu'on peut augmenter les dépenses en éducation, augmenter les dépenses en santé, être au service des citoyens, se servir de toutes les connaissances de tous les intervenants pour s'assurer qu'il n'y ait pas aucun Québécois qu'on laisse en arrière et, en même temps, investir les pleines contributions dans le Fonds des générations pour s'assurer que, de façon durable, les jeunes, plus tard, auront les mêmes services.

Donc, la dogmatique d'être à zéro déficit absolument, ça date d'une autre époque, ça date d'une époque moyenâgeuse, quasiment, parce que ne pas réaliser... C'est l'exemple d'une maison qu'on achète à 200 000 $, qu'on met une hypothèque de 100 000 $ dessus. Cinq ans plus tard, la maison en vaut 300 000 $. Puis, maintenant que vous avez décidé d'à chaque année emprunter 4 000 $ de plus sur votre maison, un déficit de 4 000 $ par année, vous êtes rendu avec une hypothèque de 120 000 $, et là votre ratio dette nette est de 40 %. Il y a cinq ans, vous étiez à 50 %. Vous êtes plus riches. O.K.? Donc, c'est ça qu'il faut qu'on regarde, quand on regarde l'ensemble des finances publiques, parce que le faire autrement, c'est étouffer l'éducation, c'est étouffer la santé puis c'est surtout faire mal aux prochaines générations.

Je considère, Mme la Présidente, que notre proposition de prendre soin des prochaines générations, à l'instar d'un objectif du Fonds des générations de 100 milliards de dollars, est ce qu'il y a de plus merveilleux pour l'ensemble des provinces et la province du Québec.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Je vous remercie, M. le député. Alors, ceci met fin au débat.

Je vais maintenant mettre aux voix la motion de M. le député de Marguerite-Bourgeoys, qui se lit comme suit... Oui, Mme la députée.

Mme Cadet : ...je vais demander le vote par appel...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Oui, mais laissez-moi le temps d'être rendue à cette étape-là, et vous pourrez le demander. Alors, je vais... bon, qui se lit comme suit, en fait :

«Que l'Assemblée nationale prenne acte que le gouvernement caquiste a proposé de financer une baisse d'impôts à même les sommes versées au Fonds des générations;

«Qu'elle déclare qu'une telle proposition aurait un impact négatif sur l'équité entre les générations et aurait un impact important en perte de revenus potentiels dans le Fonds des générations sur un horizon à long terme;

«Qu'elle rappelle la nécessité de poursuivre les efforts à long terme afin de réduire le ratio d'endettement du Québec;

«Qu'elle déclare que toute modification aux versements et au fonctionnement du fonds doit faire l'objet préalable d'une vaste consultation nationale auprès de la jeunesse du Québec;

«Qu'en conséquence, elle demande au gouvernement caquiste de maintenir l'intégralité du capital et des versements au Fonds des générations.»

Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : ...

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : ...

Mme Cadet : Je demande le vote par appel nominal, Mme la Présidente.

• (17 heures) •

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : M. le leader du gouvernement.

M. Lévesque (Chapleau) : ...Mme la Présidente, je vais vous demander de bien vouloir reporter le vote à la prochaine période des affaires courantes, s'il vous plaît.

Vote reporté

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, conformément à la demande du leader du gouvernement, le vote de la motion de M. le député de Marguerite-Bourgeoys sera tenu à la prochaine période des affaires courantes, demain.

M. le leader du gouvernement, pouvez-vous nous indiquer la suite des travaux?

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, Mme la Présidente. Pour la suite des travaux, je vous demanderais d'appeler l'article 2 du feuilleton, s'il vous plaît.

La Vice-Présidente (Mme Soucy) : Alors, je vais faire ça. Je vais vous faire patienter quelques instants et je vais céder ma place au troisième vice-président.

Projet de loi n° 10

Reprise du débat sur l'adoption du principe

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, pour la suite des affaires du jour, nous sommes à l'article 2 du feuilleton, l'Assemblée reprend le débat ajourné plus tôt aujourd'hui sur l'adoption du principe du projet de loi n° 10, Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux.

Lors de ce débat, nous étions arrivés à l'intervention de M. le député des Îles-de-la-Madeleine, qui avait utilisé 4 min 55 s de son temps de parole. Alors, je comprends, M. le député des Îles-de-la-Madeleine, que vous voulez poursuivre.

M. Joël Arseneau (suite)

M. Arseneau : Merci beaucoup, M. le Président. Oui, avec plaisir, je vais poursuivre mon intervention sur le projet de loi n° 10, donc la Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement, une loi qu'on accueillait avec plaisir, en fait, qu'on attendait avec, je dirais, beaucoup d'enthousiasme, parce qu'on la réclamait quand même depuis plusieurs années. On souhaitait que le gouvernement agisse parce qu'effectivement, à l'heure actuelle, ce qu'on voit, c'est un exode de plus en plus grand et massif vers des conditions de travail qui sont meilleures par le personnel de la santé, et ils le font essentiellement, ces gens du secteur public, le saut, pas de gaieté de coeur, mais parce qu'ils veulent améliorer leur sort.

Et ce qu'on voit dans le projet de loi, c'est une intention qui apparaît louable, donc, un objectif à atteindre, mais avec des moyens qui sont, à l'heure actuelle, absents parce qu'on réfère à des règlements qui ne font pas partie actuellement de la documentation qui est livrée avec le projet de loi et qui seront adoptés par la suite par le gouvernement. On voit déjà que le ministre s'arroge des pouvoirs discrétionnaires exorbitants, et ça, évidemment, ça nous inquiète. On voit que le ministre et le gouvernement de la CAQ ont pris la mauvaise habitude de gouverner par décret. Alors, évidemment, l'urgence sanitaire étant derrière nous maintenant, la façon de gouverner sans avoir un débat public sur les moyens qui sont mis en place ou les ressources qui sont déployées, c'est de le faire par décret... non, pas par décret, mais par règlement.

Donc, la loi est une coquille vide à laquelle on va greffer une série de règlements qui seront publiés dans la Gazette officielle, qu'on pourra constater, qu'on pourra lire. On pourra en prendre connaissance, mais, essentiellement, la décision aura été prise. Le gouvernement aura 30 jours de consultations, mais il n'a aucun compte à rendre. Il n'a pas à répondre aux commentaires qui peuvent être fournis suite au dépôt de ce règlement-là. On n'est pas les seuls, évidemment, à avoir eu la même réaction de déception face à ce projet de loi et on souhaite pouvoir en discuter avec le ministre en commission parlementaire pour qu'il nous dise essentiellement quelle sera l'orientation du ministre pour arriver à ses fins.

Lorsqu'il dit, par exemple, qu'il souhaite, au bout d'un an, pouvoir cesser le recours aux agences dans les milieux urbains, par exemple Montréal, Québec, et ainsi de suite, là où on est beaucoup moins dépendants aux agences de placement et à la main-d'oeuvre indépendante qu'ailleurs, comment on pourra agir pour la deuxième étape, donc, dans une deuxième année, pour les milieux intermédiaires, les régions du Québec périphériques aux grands centres, pour ensuite s'attaquer, pour la troisième année d'opération ou d'application de ce projet de loi, aux régions les plus éloignées? On pense à la Basse-Côte-Nord. On pense également à l'Abitibi-Témiscamingue ou à la Gaspésie et aux Îles-de-la-Madeleine.

Et les chiffres, à l'heure actuelle, sont absolument ahurissants. Dans une séance de breffage qu'on a pu obtenir avec des représentants du ministère pour montrer à quel point la situation est devenue hors de contrôle, on voit que les chiffres de l'augmentation de la main-d'oeuvre indépendante ont été multipliés, dans certains cas, là, de façon exponentielle sur six ans. On parle d'une augmentation de l'ordre de 450 %, dans certaines régions, jusqu'à 1 270 % d'augmentation du recours à la main-d'oeuvre indépendante. Alors, c'est dire à quel point il est important et urgent que le gouvernement agisse, que le ministre se saisisse de cet enjeu-là et qu'il agisse de façon résolue et rapide. Mais, sur les trois ans, nous, on n'a rien à redire dans la mesure où on sait très bien qu'il n'y a pas de baguette magique dans le système de santé et qu'on ne peut pas régler les problèmes, là, en un claquement de doigts. Mais on doit quand même avoir un plan, une feuille de route, un certain nombre de moyens, des ressources. Et, à l'heure actuelle, bien, on n'a absolument aucune indication sur les moyens qui vont être mis en place. Ce qu'on peut lire dans le projet de loi, par contre, c'est que le gouvernement, le ministre, s'il juge qu'il doit prolonger ce délai d'un an, de deux ans ou de trois ans, mais il peut le faire à sa convenance. Donc, il met déjà, dans le projet de loi, les conditions pour que les objectifs ne soient pas respectés. C'est comme s'il devinait déjà qu'il n'aura pas les moyens de ses ambitions.

Alors, ça, ça nous inquiète. On posera les questions lors des travaux en commission parlementaire là-dessus. Et on espère que le gouvernement, que le ministre, en l'occurrence, aura des réponses pour nous, mais surtout et avant tout pour les personnes qui sont actuellement sur le terrain, qui portent le système de santé à bout de bras et qui, elles, ont décidé de continuer de croire que le système de santé public, universel et gratuit doit être maintenu, et elles y travaillent malgré des conditions de travail qui sont exceptionnellement difficiles.

La crise dans les urgences, elle est maintenant perpétuelle. Il y a des gens qui vont nous dire : Bien oui, mais ça, ça date d'il y a 20, 30 ans. Bien entendu qu'on avait des crises ponctuelles, qu'il y avait des manchettes, dans les journaux et dans les bulletins télévisés, sur des situations de crise dans les urgences. Par exemple, l'hiver, lorsqu'on avait des périodes d'influenza qui étaient particulièrement sévères, eh bien, les urgences débordaient. On avait des taux d'occupation de 100 %, de 125 %, de 150 %. Ça se résorbait au bout de quelques semaines. Et là, évidemment, il y avait eu un très grand débat, puis on disait : Ça n'a pas de bon sens, et il faudra agir, il faut corriger le système, et ainsi de suite. Là, maintenant, on est rendus dans une phase où il est tout simplement banal et normalisé de voir que toutes les urgences ont des taux de 125 %, de 150 % ou 200 % à tous les jours de la semaine, à toutes les semaines du mois et à tous les mois de l'année. Et ça, ce n'est pas, là, la pandémie qui peut être invoquée là-dessus, c'est l'absence de moyens déployés par le gouvernement pendant et dans les derniers mois suivants la période de pandémie. Donc, on a repoussé les moyens et les solutions à plus tard, avec la situation qu'on voit aujourd'hui.

Mais je veux revenir à la question des conditions de travail, parce qu'il faut voir le problème dans son ensemble. Si, aujourd'hui, la main-d'oeuvre indépendante ou les agences de placement sont vues comme un problème, c'est parce qu'elles coûtent, d'une part, extrêmement cher et que sa main-d'oeuvre provient essentiellement du secteur public. Donc, on a déjà décrit la situation. Je me souviens très bien de l'expression qu'on utilisait, du serpent qui mange sa queue. Essentiellement, c'est que le gouvernement investit dans la main-d'oeuvre indépendante pour aller requérir ses services à coups de milliards de dollars. Les chiffres qui sont sortis récemment parlent de 3 milliards de dollars les six dernières années. Donc, le gouvernement nourrit la bête qui vient ensuite lui manger ses ressources sous son nez en lui offrant de meilleures conditions.

• (17 h 10) •

Donc, bien évidemment, si on dit qu'on veut cesser le recours... Puis là je veux faire une différence entre abolir le recours aux agences et abolir les agences. Évidemment que le gouvernement ne va pas empêcher une entreprise privée d'opérer, mais il peut éviter de la payer pour aller chercher ses propres ressources et lui offrir des services. Donc, on ne parle pas, évidemment, d'abolir les agences. On veut abolir le recours aux agences. Et la meilleure façon de le faire, c'est de rapatrier dans le secteur public les ressources qui nous ont quittés et c'est d'offrir des meilleures conditions de travail. Et, de ce point de vue là actuellement, mais on ne voit pas encore les solutions qui peuvent être mises en place par le gouvernement dans le plan qui nous a été déposé jusqu'à présent. On sait quels sont les moyens qui doivent être déployés, mais on ne voit pas la volonté actuelle du gouvernement d'agir de façon résolue, avec une stratégie, disons, claire, précise, des moyens financiers, notamment, pour pouvoir s'assurer, par exemple, en même temps qu'on dit : Les agences, on n'aura plus recours à leurs services, mais qu'on n'ait pas à imposer du temps supplémentaire obligatoire aux ressources qui sont présentes sur le terrain, sur le plancher. Et donc une solution globale doit être envisagée.

Quel est, donc, le moyen de se sevrer des agences si on n'a pas nos ressources? Bien, c'est de pouvoir les rapatrier dans un cadre de travail qui soit adéquat, et qui soit attrayant, et qui permette aussi la rétention, évidemment, des ressources. Donc, il est clair que, tant qu'on n'agira pas à la fois sur le temps supplémentaire obligatoire et sur les autres conditions de travail, notamment la question des ratios sécuritaires qu'on offre ou qu'on n'offre pas, à l'heure actuelle, aux employés de la santé, bien, on va toujours offrir des conditions qui sont sous le standard par rapport à ce que les agences offrent. Donc, on ne pourra pas résoudre le problème d'attraction, d'attractivité de la profession et de rétention. Et il est clair que le ministre va devoir utiliser son pouvoir discrétionnaire et prolonger les délais, parce que les infirmières ne reviendront pas au bercail.

Et ce qui est un peu désespérant, M. le Président, c'est de voir qu'on a une occasion historique de pouvoir corriger la situation dans le domaine de la santé et d'intervenir de façon importante pour améliorer les conditions de travail alors que des négociations sont présentement entamées avec le secteur public. Et il est difficile de comprendre l'attitude du gouvernement, du ministre et de son premier ministre lorsque, plutôt que de tendre la main à ces anges gardiens, dont on a tant vanté les mérites pendant les années de pandémie, qu'on voit aujourd'hui une attitude, au contraire, qui est celle de faire porter le fardeau de la négociation et de la réussite éventuelle des pourparlers pour une entente négociée, une entente qui va dicter, évidemment, une entente qui va dicter les conditions de travail, donc, de faire porter ce fardeau-là sur les épaules des employés de l'État. On les voit être convoqués à des forums de discussion sur des enjeux dont on a déjà, évidemment, fait le tour et pour lesquels, à l'heure actuelle, les employés jugent que c'est superflu. Parce que ce qu'on veut, c'est avoir des séances de négociation. Puis on ne veut pas, ici, se mêler de négociations dans le secteur public de façon directe. Moi, ce que je veux simplement dire, c'est qu'il y a des procédures qui sont en place depuis déjà longtemps, qui permettent au gouvernement de donner des conditions de travail adéquates, qui permettent d'augmenter la mise, qui permet un rattrapage par rapport à d'autres provinces canadiennes. Le premier ministre aime bien se comparer à l'Ontario sur tous les plans, mais, sur le plan des conditions de travail des employés de la santé et en particulier des infirmières, lorsqu'on commence en première année de travail pour le secteur public puis qu'on a une différence de traitement salarial de l'ordre de 20 %, évidemment, inférieure à ce qui est donné en Ontario ou au Nouveau-Brunswick, et Dieu sait que le Nouveau-Brunswick, ce n'est pas une province qui a des moyens plus importants que le Québec, alors on peut se poser la question à savoir si nos salaires sont compétitifs et s'ils représentent justement le juste traitement pour ces employés dont on a tellement besoin.

L'autre élément, c'est de voir, par exemple, qu'il y a certaines conditions qui sont offertes actuellement à des infirmières bachelières qui peuvent commencer leur carrière avec justement une compensation ou une augmentation, si on veut, de leurs échelons salariaux en prenant en compte leur formation et que le gouvernement, justement, au moment où on entreprend les négociations, dit : Bien, cet article-là, cette provision-là, on va l'abolir, on va l'éliminer, on va la retirer. Comment motiver le personnel à rester ou à revenir ou encore comment, dans ce cas-là bien précis, pour celles qu'on veut attirer dans la profession, comment les convaincre de poursuivre leur parcours scolaire, leur parcours académique, soit au cégep ou à l'université, lorsqu'on annonce déjà que les conditions de travail et les conditions salariales ne s'amélioreront pas ou, dans certains cas, les avantages qu'elles ont déjà vont être éliminés?

Alors, cette espèce de contradiction, ce double discours nous inquiète parce qu'on ne voit pas comment on va s'en sortir si on veut véritablement avoir cet... atteindre cet objectif-là d'être l'employeur de choix, le meilleur employeur. Donc, le gouvernement, le système public, c'est ce vers quoi il doit tendre, c'est ce vers quoi on aspire et c'est l'engagement qu'a pris le ministre de la Santé. Bien, évidemment, au premier chef, les conditions de travail, les conditions salariales doivent être à la hauteur de ce qu'on demande à ce personnel-là qu'on veut convaincre de continuer ou de se joindre à l'équipe.

L'autre élément qui nous paraît particulièrement problématique dans la démarche gouvernementale actuelle, c'est toute la question de la cohérence sur la question de la décentralisation. J'en ai parlé tout à l'heure dans ma mise en contexte, il y a un axe qui nous semble fondamental dans la façon d'améliorer les soins de santé au Québec, qui est celui de la décentralisation, de la gestion de proximité et de la valorisation du travail des employés, qui se dévouent corps et âme au quotidien pour soigner les Québécoises et les Québécois. Alors, le gouvernement, le ministre de la Santé semblent adhérer, en principe, à cette nouvelle vision des choses, que ce ne soit pas de Québec, que ce soit du bureau du ministère, ou du bureau des fonctionnaires, ou dans quelque partie de l'organigramme monstre du ministère, que l'on prenne toutes les décisions puis qu'on réclame des redditions de comptes, là, à des gens qui devraient plutôt être au service des patients et de leur communauté. Alors, on semble dire que ça fait partie des axes privilégiés du gouvernement en ce qui concerne la refonte du système de santé.

Je ne me souviens plus très bien, là, quel est le dernier mot de vocabulaire qu'on utilise comme euphémisme pour ne pas dire que ça prend une réforme, mais, dans le plan santé du gouvernement de la Coalition avenir Québec, il est question d'un plan de décentralisation. Or, comment se fait-il que le projet de loi n° 10 soit déposé en ayant comme principal axe celui du rapatriement de tous les pouvoirs entre les mains du ministre de la Santé au point où, plutôt que de dire : Mes gestionnaires locaux doivent collaborer avec moi et être imputables de leurs décisions et respecter l'orientation qui est maintenant donnée de ne plus avoir recours aux services de la main-d'oeuvre indépendante et des agences privées de placement, que le ministre, dans son projet de loi, dise : Je serai maintenant maître du jeu et je vais non seulement vous demander des comptes, mais je vais même inclure des pénalités ou des mesures administratives et des mesures pénales, même, à certains des membres de l'administration de la santé à travers le Québec, dans les CIUSSS et dans les CISSS, qui n'obéiront pas aux règles que je fixerai dans mes règlements? Alors, il me semble que c'est aussi un très mauvais message à lancer à tout le personnel administratif et notamment aux P.D.G. des agences... plutôt des CISSS et des CIUSSS, qui ont été nommés par le ministre lui-même.

• (17 h 20) •

Alors, quel genre de culture institutionnelle veut-on mettre en oeuvre si on ne peut pas miser sur la collaboration et sur cette espèce d'effort collectif que l'on doit mettre pour non seulement se débarrasser des agences, mais créer un climat de travail et des conditions de travail qui deviennent attrayantes pour le personnel de la santé? Alors, ça, c'est, pour nous, c'est une orientation qui nous semble contradictoire et contre-productive aussi, sur laquelle on reviendra sans aucun doute avec le ministre. C'est l'espèce d'absence de confiance en la gestion locale et la gestion de proximité pour s'assurer que les orientations soient implantées, soient respectées.

Ce qui m'amène à dire que, ces dernières années, sans sanction aucune, sans mesure administrative aucune, bien, on a vu non seulement les administrations locales ou les directeurs d'établissement y aller à fond la caisse pour aller chercher des employés et signer des contrats avec les agences de placement, mais des employés de la main-d'oeuvre indépendante, mais, en bout de ligne, qui a assumé les frais exorbitants, les 3 milliards de dollars dont on parlait tout à l'heure? Bien, c'est l'État du Québec.

Dans les régions comme l'Abitibi-Témiscamingue, ou encore la Basse-Côte-Nord, ou la Gaspésie—Îles-de-la-Madeleine, il y en a d'autres, qui sont devenues extrêmement dépendantes de la main-d'oeuvre indépendante, la main-d'oeuvre est indépendante mais les CISSS ne le sont plus, nos régions ne le sont plus, indépendantes, sur le plan du personnel, mais elles ne le sont pas sur le plan financier non plus. Alors, on a cautionné le recours abusif à la main-d'oeuvre indépendante parce que les conditions de travail étaient insoutenables pour le personnel et on les a non seulement cautionnées, ces décisions-là, mais on a financé, à travers, évidemment, la résorption des déficits des établissements un peu partout à travers la province, et aujourd'hui, bien, on dit : Maintenant, changement de cap, et, si vous ne respectez pas la nouvelle orientation et la nouvelle loi, bien, vous serez sanctionnés sur le plan pénal, même, s'il le faut.

Alors, évidemment, ça, c'est un élément qui nous trouble un peu, j'allais dire qui nous perturbe, mais, du moins, qui nous préoccupe, à savoir si c'est la façon d'agir correctement. Et, étant donné qu'on n'a pas actuellement d'indication bien précise sur ce que le gouvernement et ce que le ministre veut véritablement faire, on connaît le pourquoi, on pourrait encore s'étendre là-dessus, pourquoi il faut agir, on le plaide depuis trois ans, on sait le quoi, ne plus avoir recours aux agences de placement, mais on ne connaît pas le comment, et ça, c'est fondamental, alors évidemment qu'on va collaborer à la discussion. Évidemment qu'on va appuyer le principe du projet de loi à ce stade-ci, M. le Président. Et on va vouloir que le ministre collabore aussi en nous disant véritablement ce qu'il a en tête pour atteindre les objectifs, que l'on partage avec lui, de redonner un nouveau souffle au système de santé public, de redorer le blason du système public et peut-être même le convaincre que c'est à travers le système de santé public qu'on va pouvoir mieux servir les Québécois et d'abandonner non seulement le recours à la main-d'oeuvre indépendante et aux agences privées de placement, mais également ce projet qui vient encore miner le moral des troupes au secteur public, ce projet de développer des mini-hôpitaux privés qui agissent encore aujourd'hui, là, comme une espèce de bouée, en fait, qu'on présente comme une espèce de bouée de sauvetage pour le secteur public, alors qu'au contraire ce qu'on va créer, c'est ce qu'on essaie d'éradiquer avec l'élimination du recours aux agences privées de placement. Imaginez combien de personnel on va avoir besoin pour doter de nouveaux hôpitaux, mini-hôpitaux, de quelle ampleur, ça reste à déterminer, mais, peu importe, ces structures-là devront être dotées de personnel compétent. Où pensez-vous, M. le Président, qu'on va aller les chercher, les membres de ce personnel de nouveaux hôpitaux privés? Mais on recommence à aller piger dans les ressources du public.

Alors, est-ce qu'on va essayer de créer un nouvel exode, une nouvelle façon d'améliorer le sort du personnel de la santé au Québec en créant des établissements où les conditions sont différentes, vraisemblablement meilleures, avec des locaux qui seront tout juste construits par l'entreprise privée avec la collaboration du gouvernement, et puis, essentiellement, recréer un problème, alors qu'on souhaitait, à travers le projet de loi n° 10, plutôt le régler?

C'est là-dessus, M. le Président, que je terminerai mon allocution, en ayant... évidemment, encore une fois, réitérant notre appui au principe, en attendant de savoir quels seront les moyens qui seront déployés. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député. Je reconnais maintenant la députée de La Pinière.

Mme Linda Caron

Mme Caron : Merci, M. le Président. Alors, j'ai deux très grandes préoccupations vis-à-vis du projet de loi n° 10.

Premièrement, j'ai sursauté devant les chiffres qui ont été rendus publics, les chiffres de la région de la Côte-Nord. 2021‑2022, on a versé 102 millions de dollars aux agences privées, soit plus de 17 % du budget annuel, bien entendu, et 90 % des ressources dans cette région-là proviennent du privé, pas 25 %, pas 50 %, 90 %. Alors là, on n'est plus dans le rattrapage ou dans le dépannage pour venir aider le secteur public, on est dans le courant. C'est chaque jour. 90 % du personnel dans la région de la Côte-Nord provient des agences privées. C'est une véritable explosion du recours au personnel d'agences privées depuis que la CAQ est au pouvoir. De 170 millions de dollars en 2016‑2017, on est passé à près de 1 milliard en 2021‑2022.

Et la question que je me pose, c'est : Où s'en va notre régime d'assurance maladie public et universel? Comment le gouvernement va-t-il en assurer la pérennité? Ce n'est sûrement pas avec le projet de loi n° 10. Pourquoi je me permets de dire ça? Parce qu'un sondage réalisé auprès de 2 000 travailleurs de la santé a révélé que huit sur 10 n'étaient pas prêts à retourner dans le réseau. C'est 81 % plus exactement, et le taux atteint 84 % quand il s'agit des infirmières et 90 % pour les infirmières auxiliaires.

Je pense qu'on peut reconnaître que les infirmières, les infirmières auxiliaires, les préposés aux bénéficiaires et bien d'autres professionnels de la santé ont tout donné ce qu'ils avaient au plus fort de la pandémie et dans les années de pandémie qui ont suivi. Elles n'en peuvent plus. Ce n'est pas une question d'argent. Elles n'en peuvent plus de faire du travail... du temps supplémentaire obligatoire. Elles n'en peuvent plus de travailler dans des conditions où les ratios ne sont pas toujours respectés, on s'entend, de ratio de personnel soignant à nombre de patients. Elles veulent juste travailler et avoir une vie familiale normale, comme la majorité des citoyens et citoyennes du Québec. Le noeud du problème, ce sont les conditions de travail, ce n'est pas l'argent.

• (17 h 30) •

Ma deuxième grande préoccupation, vous l'aurez peut-être devinée, ce sont les soins et l'hébergement pour les aînés. Alors, on assiste, depuis peu, au début du déploiement des maisons des aînés. 5 726 travailleurs qu'il faudra recruter d'ici 2025 juste pour les maisons des aînés. La ministre des Aînés a confirmé que la majorité des personnes recrutées pour combler ces 5 726 postes, la majorité, proviennent du réseau. Alors, bien entendu, on assiste à des ouvertures graduelles des maisons des aînés parce qu'on ne peut pas offrir toutes les places qu'on prévoit dans chacune des maisons au fur et à mesure qu'elles sont prêtes parce qu'on n'a pas suffisamment de personnel. Et le personnel qu'on réussit à recruter vient du réseau.

Par exemple, les maisons des aînés Sainte-Foy et Lebourgneuf dans la capitale nationale, 95 % des 160 postes comblés par des personnes qui viennent du réseau. Dans la maison des aînés de Rimouski, c'est 90 % des postes qui sont comblés par des personnes qui viennent du réseau. Au CISSS de Laval, 60 % des postes comblés pour les maisons des aînés proviennent de personnes... sont remplis par des personnes qui proviennent du réseau. Ces personnes-là travaillaient dans le réseau, offraient des services et des soins à la population avant. Alors, on va chercher du personnel dans les CHSLD, dans les hôpitaux, ailleurs dans le réseau pour pourvoir les maisons des aînés. Et là on ne parle pas non plus de certains CHSLD vétustes, qui... lorsque la maison des aînés de leur région sera prête, va recevoir à la fois les aînés et le personnel du CHSLD. Alors, combien de nouvelles places aurons-nous créées dans ces cas-là? Zéro.

On ajoute à cela les conversions de RPA, résidences privées pour aînés, les fermetures, plus de 300 fermetures depuis 2021, de petites, et moyennes, et, même, grandes résidences pour aînés, et puis la pénurie de logements, qui fait que les personnes qui vivent dans les RPA et qui seraient encore... qui auraient encore, toujours leur autonomie auraient bien du mal à retourner dans un appartement ordinaire.

La Maison des aînés de Sherbrooke, 48 des 120 places sont ouvertes pour les raisons que je viens de vous énumérer, c'est-à-dire manque de personnel pour combler tous les postes. La moitié des effectifs ont été embauchés à la Maison des aînés de Sherbrooke, puis déjà il y en a 13 qui sont partis, notamment parce que les ratios personnel soignant et résidents n'étaient pas toujours et même très peu souvent respectés.

Et la philosophie des maisons des aînés, le concept a-t-il bien été expliqué aux personnes qui vont y travailler? Par exemple, vous avez peut-être vu comme moi de belles images de cuisines modernes avec des tabourets. Bien entendu que ce ne sont pas les résidents de ces maisons qui vont pouvoir s'en servir puisqu'ils ont souvent besoin de soins au même niveau que dans un CHSLD. Alors, ce sera pour peut-être les proches aidants qui vont venir les visiter, je pense que c'était ça, l'objectif, au départ. Mais les infirmières qui vont y travailler, savaient-elles qu'elles n'auraient pas de bureau dans les maisons des aînés? Leurs ordinateurs se trouvent dans une garde-robe : ouvre la garde-robe, travaille un peu debout, toujours debout, referme la garde-robe. Est-ce que c'est aussi une belle condition de travail pour une infirmière? La question que se pose.

Je pense que je viens de faire la démonstration que, les maisons des aînés, pour l'instant, on souhaite que ça s'améliore, bien entendu, mais c'est un véritable cas de déshabiller Pierre pour habiller Paul. On va chercher le personnel dans le réseau pour l'amener dans les maisons des aînés. En marketing, il y a un terme pour ça, ça s'appelle la cannibalisation. Alors, ma grande préoccupation, ma deuxième grande préoccupation, vous l'aurez deviné, c'est vraiment que je crains le pire pour les CHSLD et les autres établissements ou ressources du réseau. Quels soins pourront être prodigués à nos aînés, dans quelles conditions, si les postes disparaissent, en fait, si les postes sont... les membres du personnel soignant partent et vont dans les maisons des aînés plutôt que de rester dans le réseau?

Le ministre de la Santé nous dit vouloir être un employeur de choix, et je souscris complètement à cet objectif, le gouvernement devrait être un employeur de choix dans toutes ses sphères d'activité. Mais j'ai l'impression qu'il regarde un peu le problème à l'envers avec le projet de loi n° 10. Être un employeur de choix, ça passe par les conditions de travail. Pourquoi les infirmières, les infirmières auxiliaires et d'autres personnels soignants vont-ils travailler pour les agences? Pas pour l'argent. Pour les conditions de travail, parce qu'elles peuvent avoir une vie normale, travailler à temps plein mais avoir une vie de famille, une vie de couple, être capables de concilier le travail avec leur vie personnelle et puis ne pas tomber non plus dans la dépression. Alors, pourquoi ne pas commencer par regarder cela sérieusement, cela, les conditions de travail?

J'invite le ministre à bien cerner les causes de l'exode des infirmières et autres membres du personnel soignant vers les agences et à travailler sur ces causes, plutôt que d'interdire d'aller vers les agences. Bien entendu, on veut réduire ça, mais travaillons sur les causes dans le réseau pour que les travailleurs aient le goût de rester dans le réseau, aient le goût de continuer dans le réseau et qu'ils soient capables... avec toutes les autres mesures qui sont déjà en place ou prévues pour attirer les jeunes dans le milieu, par la formation, les bourses, et tout ça, eh bien qu'ils puissent avoir le goût de travailler, de continuer leurs études et de travailler dans le réseau de la santé. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Mme la députée de Bourassa-Sauvé.

Mme Madwa-Nika Cadet

Mme Cadet : Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, en ce qui a trait au projet de loi n° 10, j'aimerais exprimer que notre formation politique est en faveur de l'adoption du principe de ce projet de loi. En effet, il convient de le rappeler, donc, le projet de loi vise à réduire et, à terme, éliminer pratiquement tout recours aux services des agences privées en santé, et des agences de placement de personnel, et à la main-d'oeuvre indépendante d'ici 2026 pour les régions éloignées, 2025 pour les villes d'envergure moyenne et 2024 pour les secteurs urbains, et nous sommes favorables à cet objectif.

Comme ma collègue vient de l'exprimer, j'ai été consternée par les chiffres du recours à la main-d'oeuvre indépendante sur tout le territoire québécois, parce qu'au cours des dernières années les chiffres qui nous sont parvenus nous indiquent que les dépenses des établissements de santé pour les travailleurs d'agences de placement privées sont passées de 170 millions de dollars, en 2016-2017, à près de 1 milliard de dollars en 2021-2022. Il s'agit d'une explosion, littéralement, des coûts qui nous semble exorbitante, M. le Président. Dans les derniers six ans, et le gouvernement caquiste est dans sa cinquième année, je le rappelle, le ministère de la Santé et des Services sociaux a dépensé 3 milliards de dollars dans les agences privées de santé.

Il y a certainement une situation qui demande à ce qu'on agisse, qui demande à ce qu'on encadre le recours à ces agences de placement de personnel. Parce que, bon, les agences en tant que telles peuvent bien exister quand elles viennent répondre de façon ponctuelle à des besoins dans nos communautés, dans nos collectivités, quand elles peuvent servir à répondre à la demande pour mieux servir des patients, mais, quand on voit ces chiffres, quand on voit cette explosion, on voit un système que le gouvernement actuel n'est pas en mesure de contrôler, on voit une situation qui, malheureusement, n'est pas sous contrôle. Et donc nous saluons cet objectif du ministre de la Santé de vouloir agir, de vouloir encadrer ce recours aux agences indépendantes... à la main-d'oeuvre indépendante, plutôt, pour nous assurer, d'une part, de limiter les coûts exorbitants, et de valoriser la profession.

• (17 h 40) •

Je donne d'autres chiffres. La part de la main-d'oeuvre indépendante, par rapport à la masse salariale totale, a augmenté dans plusieurs des établissements du Québec pour ces périodes, 2016-2017 à 2021-2022. À la Baie-James, on parle de 3,9 % à 18,5 % pour ces périodes. Au CISSS de l'Abitibi-Témiscamingue, on parle d'un taux de 2,3 % de recours à la main-d'oeuvre indépendante, il y a cinq, six ans, à 16,2 % aujourd'hui. En Côte-Nord — et ma collègue vient également de mentionner ces chiffres — pour l'année qui vient de se terminer, la région a versé 102 millions de dollars aux agences privées. Ça représente plus de 17 % du budget annuel.

Donc, quand je parle de coûts exorbitants, quand je parle de montants qui explosent, quand je parle de manque de contrôle face à cette situation, ce sont de ces chiffres-là que je parle. Quand près de 90 % des ressources en Côte-Nord proviennent des agences, il y a certainement une problématique qu'il faut adresser. Et c'est pour ces motifs que nous appuyons l'adoption de principe puis nous appuyons le principe du projet de loi n° 10. La situation n'est absolument pas soutenable.

Ceci dit, le projet de loi, dans sa mouture, ne vient pas résoudre la problématique en tant que telle. Nous appuyons le principe, certes, et je le répète, mais nous aurons besoin de viande autour de l'os, M. le Président. C'est difficile de voir comment le projet de loi permet de répondre à l'objectif parce que, plusieurs l'ont exprimé dans cette Chambre, le phénomène d'attrition des infirmières québécoises vers les agences est un phénomène qui existe, c'est un phénomène qui est hors de contrôle parce que les agences privées offrent des conditions de travail qui répondent aux attentes des travailleurs et des travailleuses. Et c'est important de le mentionner, M. le Président, parce que, tant qu'on n'aura pas compris cet élément fort là, tant qu'on n'aura pas agi sur les conditions de travail de toutes les travailleuses, de tous les travailleurs du secteur de santé de notre réseau public, nous ne serons pas en mesure de véritablement atteindre l'objectif visé par le projet de loi n° 10.

La proposition du ministre, en ce moment, ne convaincra pas les infirmières de revenir dans le réseau public. 84 % des infirmières et 90 % des infirmières auxiliaires ne souhaitent pas revenir dans le secteur public. Il s'agit de chiffres énormes. Il s'agit de chiffres importants, qui démontrent à quel point les infirmières, les infirmières auxiliaires, toutes les travailleuses du secteur de la santé, celles qui sont en première ligne pour soigner nos patients, pour soigner nos parents, nos enfants, ne se sentent pas valorisées. Ces chiffres démontrent qu'elles veulent plus de liberté et qu'elles veulent plus de flexibilité, qu'elles veulent des conditions de travail qui répondent à leurs attentes, qui démontrent à quel point nous soutenons le travail qu'elles font au quotidien et que nous souhaitons qu'elles puissent le faire dans une perspective qui soit valorisante, dans une perspective qui soit représentative de la dignité qu'elles méritent.

On a beaucoup parlé, évidemment... Donc, quand on parle de ces conditions-là, oui, bon, il y a l'aspect salarial, évidemment, M. le Président, où est-ce que les chiffres en agence sont bien plus... les opportunités salariales en agence sont bien plus élevées que celles qu'on peut voir dans le réseau public, mais on parle également du temps supplémentaire obligatoire. Qui voudrait rentrer au travail le matin sans savoir à quelle heure il rentrerait le soir à la maison? Personne, pas même nous qui sommes ici, dans cette pièce, avec des horaires extrêmement chargés. Ce contrôle sur l'horaire et le fait de se sentir un peu forcées... Au travail, il y a des infirmières, des infirmières auxiliaires... Les préposées sont dévouées, M. le Président. Elles ont le coeur à l'ouvrage. Elles sont heureuses de pouvoir exercer leur profession. Elles sont heureuses de pouvoir rendre un service essentiel à la population, mais elles se sentent prises en otages, M. le Président, avec ce temps supplémentaire obligatoire.

On parle également de l'absence de ratios sécuritaires professionnelles en soins-patients, qui doit être déroutant pour des professionnelles qui souhaitent offrir des services, qui souhaitent pouvoir le faire dans un contexte qui soit sécuritaire pour les patients, pour leurs patients qu'elles ont à coeur, mais qui ne sont pas capables de pouvoir livrer ces services-là dans ce contexte-là.

On parle aussi d'une autogestion des horaires. J'ai notamment pu rencontrer des infirmières, donc, qui se sont mises dans une association pour pouvoir parler aux politiques et qui nous disent : Nous voulons cette flexibilité-là. Nous voulons pouvoir prendre un rendez-vous au CLSC pour notre enfant quand il est malade et ne pas avoir un... ne pas se dire : O.K., si moi, je ne travaille pas à Noël, bien, mon congé, ça va être le 3 avril puis... ne pas être capable de pouvoir décider ça. Et c'est insoutenable que, dans certains de nos établissements, des infirmières soient en mesure de le faire de façon arbitraire, qu'elles soient capables de s'arranger entre elles, mais qu'on n'ait pas un système, un système informatisé, un système qui soit à la grandeur du Québec, qui permette cette autogestion des horaires. Les infirmières, les infirmières auxiliaires, les préposées, ce ne sont pas des enfants, ce sont des femmes, des hommes, aussi, ce sont des adultes, ce sont des personnes qui sont dévouées, qui veulent rendre ces services, mais on leur dit : Non, non, nous, à la discrétion du gestionnaire, on va vous gérer, on va faire ça pour vous. À notre, sens, ça n'a pas de bon sens, ça, M. le Président. Et il va falloir qu'on revoie certaines de ces pratiques-là parmi les conditions de travail des professionnels de la santé.

Les infirmières nous disent aussi que, quand elles veulent continuer leur parcours, quand elles veulent se perfectionner dans leur domaine d'études, oui, les conventions collectives leur permettent, par exemple, donc, si elles entrent, ce sont des infirmières auxiliaires, de pouvoir continuer des études universitaires, mais que c'est à la discrétion de leur gestionnaire de, littéralement, pouvoir le faire. Donc, à tout moment, un gestionnaire, en fait, peut dire... et c'est ce qui, en fait, arrive sur le terrain, les gestionnaires disent à ces professionnels : Non, vous voulez devenir de meilleurs professionnels, démissionnez, démissionnez, allez en agence, puis ensuite revenez.

Il y a un aspect de cette culture-là qu'il va falloir revoir, M. le Président. Parce que ces femmes, ces hommes, ces personnes qui nous soignent méritent une meilleure conciliation travail-famille, méritent d'être traités en adultes, méritent de pouvoir avancer, s'épanouir, se perfectionner, tout en restant dans le réseau, tout en octroyant ces soins aux patients. Pendant ce temps-là, on demande aux infirmières de faire preuve de plus de flexibilité dans la négociation de ces conventions.

Donc, en conclusion, M. le Président, c'est incongru que les agences, en ce moment, offrent des meilleures conditions de travail, qui répondent aux attentes des infirmières. C'est incongru que, dans l'organisation du réseau actuel, on ne permette pas aux infirmières de s'épanouir, au point où elles décident d'aller ailleurs pour être en mesure de continuer à faire leur travail avec professionnalisme. Il va falloir que le projet de loi n° 10 nous donne des réponses, que le projet de loi, de façon granulaire, puisse apporter ces différents points sur la table pour que nous puissions véritablement atteindre cet objectif de réduire l'utilisation, le recours aux agences privées de placement. Le flou artistique actuel nous laisse sur notre faim, mais nous voterons pour l'adoption du principe du projet de loi n° 10. Merci, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, Mme la députée de Bourassa-Sauvé. Donc, je reconnais maintenant le député de Pontiac.

M. André Fortin

M. Fortin : Je vous remercie, M. le Président. D'entrée de jeu, je veux remercier mes collègues qui ont pris la parole sur le projet de loi n° 10 alors que j'étais en commission, notamment les collègues qui sont ici aujourd'hui, la députée de La Pinière et la députée de...

Une voix : ...

M. Fortin : ...Bourassa-Sauvé, merci, également le député de Nelligan, qui a pris le temps qui m'était alloué comme porte-parole et qui l'a utilisé, bien, quasiment au complet, dans une envolée passionnée et qui va très certainement faire les annales de l'Assemblée nationale.

M. le Président, je veux vous parler... je vais vous parler du projet de loi n° 10, là. Je vais y aller en trois morceaux, là, mais en commençant par le projet de loi lui-même. Parce que le fait que le gouvernement arrive avec un projet de loi sur les agences aujourd'hui, là, vous avez entendu la députée de Bourassa-Sauvé le dire, c'est une bonne chose. Le principe de la chose, là, si on regarde le titre du projet de loi, là, qui, essentiellement, dit qu'on veut limiter le recours aux agences, c'est une bonne affaire. Tout le monde, ici, va être d'accord là-dessus, limiter le recours aux agences, là.

• (17 h 50) •

Quand on regarde des chiffres comme ceux que mes collègues viennent de présenter, c'est-à-dire que, par exemple, dans une région comme la Côte-Nord, où il y a, je vous le rappelle, M. le Président, 92 000 résidents, on dépense 100 millions de dollars, cette année, en agence... 100 millions de dollars en main-d'oeuvre indépendante, en santé, pour 92 000 résidents, s'il fallait que ça se produise partout au Québec, M. le Président, on n'aurait pas assez d'argent dans les fonds publics pour couvrir tout ça. Ça coûte une beurrée, ça coûte une fortune, ça ne fait aucun sens, ce qui se passe sur la Côte-Nord.

Et, quand ma collègue dit que ça a explosé, elle a raison. Au cours des quatre dernières années, là, ça a augmenté de 1 664 % sur la Côte-Nord, 1 664 %. Ça n'a pas augmenté de 20 %, 30 %, 40 %, ça a augmenté, sous la gouverne de la Coalition avenir Québec, de 1 664 %. Ce qui devait être un recours exceptionnel aux urgences... aux agences est devenu la norme dans certaines régions, la norme. C'est-à-dire que la très, très, très grande majorité des infirmières, des préposés, des agents de sécurité et d'autres corps de métier proviennent des agences et qu'il n'y a presque plus personne qui travaille directement à l'emploi de notre réseau public. C'est un grave problème.

Alors, sur le titre, sur l'intention, sur le principe, on est d'accord, tout le monde, ici, est d'accord. Pas mal sûr que ça va être voté, sur le principe, de façon unanime. Sur le projet de loi comme tel, j'espère que les députés, ici, ont pris le temps de lire le projet de loi, ont pris le temps de le regarder, puis, s'ils ne l'ont pas fait, vont prendre le temps de le lire puis de le regarder avant de procéder au premier vote, sur le principe du projet de loi, et très certainement avant le deuxième vote, sur le fond du projet de loi. Parce qu'outre nous dire publiquement que, d'ici quelques années, nous aimerions ne plus avoir recours aux agences, il n'y a absolument rien dans ce projet de loi là.

Est-ce qu'on nous dit, dans le projet de loi, que, d'ici à ce moment-là, qui n'est pas inscrit dans le projet de loi, d'ici à ce moment-là, il va y avoir un tarif maximal qu'on est prêts à payer? Non, M. le Président. Aujourd'hui, là, il y a des infirmières qui, elles, ne sont pas payées 450 $ de l'heure, mais il y a des contrats avec des agences pour lesquels le gouvernement du Québec paie 450 $ de l'heure pour avoir une infirmière.

Est-ce que, dans son projet de loi, le ministre nous dit : Wo! je vais mettre un montant maximal? Il ne fait pas ça. Est-ce que, dans son projet de loi, il met des dates pour nous dire : À partir de telle date, c'est fini? Non, M. le Président. Est-ce qu'il nous dit, dans son projet de loi, comment il va y arriver, comment il va faire en sorte qu'on puisse collectivement se priver de la main-d'oeuvre indépendante à la santé? Parce que, vous le savez comme moi, M. le Président, c'est pareil dans votre région, c'est pareil dans la région de la ministre qui est devant moi, c'est pareil dans la région de l'ensemble des députés ici, on ne peut pas se priver d'un seul travailleur de la santé ces jours-ci. Lorsqu'un travailleur de la santé ne se présente pas au travail, lorsqu'un travailleur de la santé prend sa retraite et n'est pas remplacé, lorsqu'un travailleur de la santé démissionne, bien, c'est toutes sortes de services qui ne se donnent pas pour les citoyens. Nous ne pouvons pas nous permettre de perdre un seul travailleur.

Alors, dans son projet de loi, est-ce que le ministre nous détaille un plan de match, à savoir comment on va faire cette transition-là? Non, M. le Président. Est-ce qu'il nous dit : Pour une telle région, voici mon plan? Pour la région, par exemple, de la Côte-Nord, parce que c'est celle que tout le monde utilise, avec raison, comme exemple ces jours-ci, voici comment je vais opérer cette transition? Non, M. le Président, il ne le fait pas. Est-ce qu'il regarde une région comme, je ne sais pas, l'Estrie, et ce qu'il nous dit, bien, est-ce qu'il a fait une analyse? Parce que... Même si je sors du cadre direct du projet de loi, est-ce que le ministre nous a présenté une analyse jusqu'à maintenant d'où viennent les infirmières d'agences en Estrie? Est-ce qu'elles viennent de l'Estrie? Est-ce qu'elles viennent de Montréal? Est-ce qu'elles viennent de Laval? Est-ce que, si elles ne peuvent plus travailler en agence en Estrie, elles vont retourner à Montréal, à Laval?

Je vous le dis, M. le Président, moi, dans ma région, dans la région du Pontiac, ça arrive souvent, quand il y a de l'hébergement disponible, qu'on fait affaire avec des agences de placement de Montréal, et ces infirmières-là, elles viennent pour une semaine, deux semaines, quelques semaines à la fois. Mais, si, demain matin, là, elles ne peuvent plus travailler en agence, elles ne peuvent plus avoir les conditions de travail meilleures, on va se le dire, là, meilleures, dont bénéficient les travailleuses d'agences, bien, qu'est-ce qu'elles vont faire? Pourquoi elles viendraient en Outaouais, pourquoi elles viendraient dans le Pontiac? Elles vont rester à Montréal. Tant qu'à avoir les mêmes conditions de travail, je suis aussi bien de le faire avec ma famille, je suis aussi bien de coucher chez nous le soir, je suis aussi bien de ne pas m'exiler de ma région.

Alors, est-ce qu'on a mesuré... est-ce que quelqu'un au gouvernement a mesuré l'impact, région par région, de dire : «That's it», ça suffit, il n'y en a plus? M. le Président, moi, je n'ai pas entendu ça.

Est-ce qu'il y a un risque à ce que propose le ministre de la Santé? Il y a un très grand risque. Est-ce qu'il y a une récompense possible? Il y a une très grande récompense possible. Mais il me semble que la moindre des choses quand on dépose un projet de loi comme celui-là, c'est de nous dire : Parlementaires, on a fait l'analyse nécessaire avant d'en arriver là. Parce que, sinon, M. le Président, ça a l'air bric-à-brac, ça a l'air broche à foin, ça a l'air d'avoir été fait sur un coin de table.

Puis je vais vous dire l'autre chose, M. le Président, qui fait en sorte que ça a l'air bric-à-brac, broche à foin puis d'avoir été fait sur un coin de table : C'est le fait que ce n'est même pas le premier plan du ministre de la Santé. Savez-vous ce qu'il disait par rapport aux agences le 21 octobre 2021? Ça ne fait pas si longtemps que ça, M. le Président, là. Le ministre, ça faisait à peu près un an qu'il a été nommé. Il a eu le temps de regarder ce qui se passait dans le réseau, il a eu le temps de voir, il a eu le temps d'analyser, il a eu le temps de dire : O.K., je suis en train de me faire un plan de match, là, puis voici ce que moi, je pense qu'il faut faire avec les agences. Le ministre de la Santé révèle sa stratégie pour affranchir le Québec des agences privées. Ça, ça vient du Soleil. Citation : «On ne veut plus dépendre des agences de placement privées. On doit avoir notre propre réseau d'agences de placement.» Il ne voulait pas que les gens nécessairement reviennent dans le réseau public uniquement, il voulait se faire sa propre agence, il voulait avoir quelque chose de complètement différent. Qu'est-ce qu'il a fait quelques mois plus tard? Il est arrivé avec une proposition pour dire : Ah! moi, je vais m'assurer... les agences vont rester, mais je vais m'assurer que, dans le réseau public, ce sont elles qui ont priorité pour avoir des meilleurs quarts de travail, ce qui est un peu l'inverse de ce qui se passe en ce moment. Donc là, en trois ans, M. le Président, il nous a présenté trois stratégies différentes. Qu'est-ce qui nous dit que celle-là, celle qu'il a présentée, c'est celle qui va fonctionner le mieux?

La seule chose qu'il y a dans son projet de loi, c'est qu'il se donne le pouvoir, à lui et uniquement à lui, hein, pour un gouvernement qui se dit décentralisateur, là... il prend tous les pouvoirs que tous les P.D.G. de CISSS et de CIUSSS ont en ce moment, de donner un contrat à une agence parce qu'ils ont un tel besoin à un tel moment dans tel secteur, et il se les donne à lui. Alors là, il dit : C'est moi qui vais décider de ça. Je ne fais plus confiance aux P.D.G. de CISSS et de CIUSSS, c'est moi qui vais le décider, c'est moi qui vais signer les contrats, c'est moi qui vais donner les approbations. Puis, si jamais il y a un P.D.G. de CISSS et de CIUSSS qui signe un contrat avec une agence, hé! je peux lui donner une amende.

C'est la seule, la seule précision concrète dans le projet de loi, c'est de dire que le ministre peut donner une amende aux P.D.G. d'établissement. Le contribuable, là, il est bien plus avancé là-dedans. Le gouvernement veut voter un projet de loi pour que le gouvernement donne une amende au gouvernement quand le gouvernement contrevient aux règles du gouvernement, M. le Président. Ça ne fait aucun bon sens expliqué comme c'est là. Est-ce que le ministre a pris le temps d'expliquer pourquoi lui et seulement lui devait avoir ce pouvoir-là? Est-ce que le ministre, lors de sa présentation, a pris le temps d'expliquer pourquoi il enlevait ce pouvoir-là aux P.D.G. des CISSS et des CIUSSS pour se les approprier directement? Moi, je n'ai pas entendu ça, M. le Président. Moi, je n'ai absolument rien entendu là-dessus.

Mais le pire, là, M. le Président, c'est que, comme le disait ma collègue tantôt, il y a 80 % des travailleurs d'agences, en ce moment — ça, ce sont des hommes et des femmes, surtout des femmes, qui ont quitté le réseau public au cours des dernières années — qui travaillaient pour le réseau public, et, dans les quatre dernières années, elles ont dit : Oui, sais-tu, je regarde les conditions de travail de ma collègue en agence, je regarde les miennes, son horaire est pas mal meilleur que le mien, sa paie est pas mal meilleure que la mienne, sa conciliation travail-famille est pas mal meilleure que la mienne, je vais faire le saut, je vais aller en agence. Ce n'est pas ce que je veux faire. Moi, j'aime ça, travailler dans le réseau public. Quand je me suis imaginé, petite fille, petit gars, travailler comme infirmier, infirmière, comme préposé, je me suis dit : Ça va être dans le réseau public, parce que c'était ça, le modèle. Mais là, aujourd'hui, ça ne fonctionne pas, les conditions ne sont pas au rendez-vous, alors elles ont fait le saut.

Le ministre pense que, demain matin, là, elles vont toutes dire : Ah! ça me tente bien gros d'aller travailler dans le réseau public. Mais pourquoi, M. le Président, quelqu'un qui vient de faire ce choix-là reviendrait nécessairement vers le réseau public? Poser la question, c'est y répondre. Il y a 80 %, 80 % des travailleuses d'agence qui disent : Moi je n'y retournerais pas parce que les conditions ne sont pas au rendez-vous. Les conditions de travail ne sont pas là.

• (18 heures) •

Puis, quand je regarde aujourd'hui, là, l'accueil que réservent les différents syndicats aux offres gouvernementales qui sont supposées bonifier les conditions de travail des infirmières, quand je lis, comme titre... je n'ai même pas eu le temps de regarder l'article, M. le Président, encore, je n'ai même pas eu le temps d'entendre leurs réactions, juste à lire le titre : Accueil glacial des dernières offres de Québec. Ça, là, vous, vous êtes infirmière en agence, vous voyez ça dans le journal demain matin, «accueil glacial», vous vous dites : Eh boy! On est loin des conditions de travail qui vont me ramener dans le réseau public. Là, vous avez ça dans le journal demain matin.

En Mauricie, vous avez 500 infirmières qui pensent à soumettre... à donner au gouvernement leurs lettres de démission parce qu'elles vont être obligées de travailler la fin de semaine. C'est la seule région au Québec, là, nulle part ailleurs c'est comme ça, mais, en Mauricie, toutes les infirmières vont être obligées de travailler la fin de semaine. Tous les autres réseaux de la santé sont capables de s'organiser autrement. En Mauricie : pas de même que ça marche. Ici : tout le monde la fin de semaine. Puis le ministre est d'accord avec ça. Alors là, elles vont voir un article qui dit : Accueil glacial des nouvelles conditions de travail proposées par le gouvernement. Ça ne donne pas le goût de retourner. En Mauricie, ils sont en train de dire : Ouf! Je pense démissionner tellement on m'impose des conditions de travail ridicules. Il y a des articles absolument ridicules de CISSS et de CIUSSS qui disent... qui vont dans les foires d'emploi puis qui disent : Aïe! Venez travailler pour nous autres, vous allez avoir du café gratuit. Café gratuit. Puis après ils sont obligés de reculer, ils sont obligés de reculer parce qu'ils ne peuvent pas faire ça, M. le Président. On en est là, là. Ça, ça vous donne-tu le goût d'aller travailler dans le réseau public si vous venez de le quitter?

La base de tout, c'est de dire : On va donner des meilleures conditions de travail. Est-ce qu'on peut le dire tout le monde ensemble? On va donner des meilleures conditions de travail. Si vous voulez que les infirmières puis les préposées soient intéressées par le réseau de la santé, qu'elles reviennent, on ne peut pas juste dire : On va prendre vos bonnes conditions de travail, on va les couper, puis vous allez rentrer dans le rang comme tout le monde. Ça, ça ne donne pas le goût à personne.

Mais, si le gouvernement est sérieux dans sa démarche, qu'il arrive avec des meilleures conditions de travail. Parce que... Je vais prendre un exemple bien simple. Puis là je pourrais faire le tour des régions, mais je vois le député de Chapleau en avant de moi, je le sais, qu'il va comprendre ce que je veux dire. Si, demain matin, on adopte le projet de loi tel quel du ministre de la Santé et qu'il n'y a pas une bonification évidente des conditions de travail, qu'est-ce qu'il pense que les infirmières dans notre région vont faire, celles qui travaillent en agence en ce moment? Il y en a qui viennent de Montréal, il y en a qui sont de la région. Elles ont quitté, travaillent en agence, continuent de travailler dans nos hôpitaux, dans nos cliniques, dans nos CHSLD. Qu'est-ce qu'elles vont faire? Vous avez des conditions x, on vous dit : Vous pouvez revenir dans le réseau public à condition y ou... disons, appelons ça x moins cinq, ou je peux aller travailler en Ontario à des conditions x. M. le Président, on ne peut pas se permettre, dans ma région, en Outaouais, de perdre davantage d'infirmières. On ne peut pas se permettre de perdre davantage de préposées. On ne peut pas se permettre de perdre davantage de professionnels de la santé, point, qui que ce soit. Parce que, je vous le dis, là, le réseau, chez nous, là, il est à la veille de briser. On est à la veille de perdre service, après service, après service, s'il n'y a rien qui est fait.

Alors, dans un contexte comme celui-là... Puis on n'est pas la seule région. On est peut-être pire qu'ailleurs, mais on n'est pas la seule région où il y a une immense précarité dans le réseau de la santé en ce moment. S'il y a 500 infirmières qui quittent en Mauricie demain matin, bien, je vous le dis tout de suite, M. le Président, il va y avoir bien du monde qui n'auront pas de service.

Dans ce contexte-là, plutôt que de simplement dire : On coupe les agences, on ne sait pas comment, on ne sait pas quand, on ne sait pas ça va être quoi, la période de transition, on ne sait pas comment on va gérer la période de transition, on ne sait pas les conditions de travail qui vont être offertes au monde dans le réseau public, mais on coupe les agences, pourquoi on n'a pas de stratégie claire à présenter à tous ces gens-là, ces 2 500 travailleurs là, pour dire : Voici ce qu'on va faire pour vous intéresser davantage au réseau public, voici ce qu'on va changer à l'interne? Ce n'est pas à elles de changer, M. le Président. Ce n'est pas aux infirmières de changer. C'est à l'employeur de modifier son climat de travail, ses conditions de travail. C'est à l'employeur à s'adapter aux besoins de ses employés.

C'est exactement ce qu'au fil du temps les agences ont fait. Pourquoi elles sont si intéressantes que ça, les agences? Parce qu'il y a des meilleurs horaires, parce qu'il y a des meilleures conditions salariales, meilleure conciliation travail-famille. Mais, même ça, ce n'était pas assez. Savez-vous ce que les agences font en ce moment? Ils donnent... certaines agences, certaines agences, pas toutes, elles ne sont pas toutes rendues là, offrent des régimes de retraite à leurs employés. Ça, c'était le gros avantage du régime public, le gros avantage. Mais, maintenant, les agences se sont adaptées parce qu'ils ont bien vu que ce qui gardait certaines infirmières dans le réseau public, c'était, justement, cette opportunité-là d'avoir un régime de retraite. Mais, M. le Président, elles se sont adaptées, les agences.

Pourquoi, nous, comme réseau public, on n'est pas capable de s'adapter, on n'est pas capable de voir que ça ne fonctionne pas? Pourquoi nous... Pourquoi, en fait... Pourquoi le gouvernement de la CAQ, en ce moment, dit aux infirmières : Il faut que vous soyez plus flexibles? Pourquoi lui n'est pas plus flexible? Les autres provinces le sont. L'Ontario vient dans notre région, M. le Président, offre des salaires... des bonis à la signature de 10 000 $ pour une infirmière. Ça, c'est flexible. Est-ce que nous, on répond? Pantoute. Impossible, il n'y a pas de réponse à ça. Le Nouveau-Brunswick ouvre un bureau à Montréal pour recruter nos professionnels de la santé. Ils ne l'ont pas ouvert à Dégelis, là, ils ne se sont pas concentrés sur la Baie-des-Chaleurs. Ils ont dit : On va aller direct à Montréal, puis on va convaincre le monde de venir au Nouveau-Brunswick, puis on va leur dire que nos conditions de travail sont bien meilleures. Ça, c'est de la flexibilité. Est-ce que nous, on fait ça? On a-tu ouvert un bureau, nous autres, à Toronto, à Moncton, ou ailleurs, pour leur dire : Aïe! Venez au Québec? Non, M. le Président. Ce n'est pas notre approche. Mais c'est celle dont on a besoin.

Alors, au lieu de demander tout le temps aux infirmières de s'adapter, est-ce qu'on peut, nous, s'adapter, nous, se rendre compte que le réseau public, en ce moment, ne répond pas à leurs besoins? Je vous le dis, M. le Président, le projet de loi, parce qu'il vise à encadrer et, éventuellement, à abolir les agences, sur le principe, on va être d'accord, mais, si le ministre veut s'assurer qu'on travaille tous ensemble dans la même direction, il va falloir qu'il arrive avec des données probantes, il va falloir qu'il arrive en nous dévoilant une stratégie claire, il va falloir qu'il nous dise où il s'en va avec ça, dans quelles régions il y a des risques pas mal plus grands que d'autres, dans quelles régions il pense que tout va aller comme sur des roulettes, comment il va opérer cette transition-là. Parce que, M. le Président, quand on regarde son projet de loi lui-même, là, il a beau y avoir du bon dans son projet de loi, O.K., par exemple, l'intention, mais il manque de substance, puis c'est pour ça que les réactions qu'il s'attendait à voir ne sont pas au rendez-vous. Parce qu'il a raison quand il dit : Les syndicats voulaient ça, un projet de loi comme ça, mais ils ne voulaient pas un projet de loi où, selon la FTQ, ça et rien, c'est du pareil au même. Ils ne voulaient pas un projet de loi où, selon la FTQ, c'est de la pensée magique. Ils voulaient un projet de loi clair, qui met des balises, qui explique comment on va se rendre à destination, puis qui laisse entrevoir qu'il va y avoir une amélioration des conditions de travail. Là, on n'a rien de tout ça.

Tant qu'on n'aura pas des conditions de travail au rendez-vous, M. le Président, ça va être incroyablement difficile de ramener ces 2 500 infirmières là dans notre réseau, infirmières et préposés dans notre réseau public, puis ça va être encore plus compliqué d'aller chercher les 122 000 employés du réseau de la santé dont on a besoin dans les cinq prochaines années, M. le Président. 122 000 employés, cinq prochaines années, sans indication claire qu'il va y avoir amélioration des conditions de travail, c'est impensable. Je vous remercie, M. le Président.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Merci, M. le député de Pontiac. Est-ce qu'il y a d'autres interventions? Alors... Oui, M. le leader?

Une voix : ...

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Le principe du projet de loi n° 10, la Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux, est-il adopté?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté. M. le leader.

Renvoi à la Commission de la santé et des services sociaux

M. Lévesque (Chapleau) : Oui, M. le Président. Conformément à l'article 243 de notre règlement, je fais motion afin que le projet de loi n° 10, la Loi limitant le recours aux services d'une agence de placement de personnel et à de la main-d'oeuvre indépendante dans le secteur de la santé et des services sociaux, soit déféré à la Commission de la santé et des services sociaux pour son étude détaillée et que le ministre de la Santé soit membre de ladite commission pour la durée du mandat.

Mise aux voix

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Adopté. M. le leader.

Ajournement

M. Lévesque (Chapleau) : ...stade-ci de la journée, je ferais motion afin d'ajourner nos travaux au 23 février, 9 h 40, s'il vous plaît.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Cette motion est-elle adoptée?

Des voix : Adopté.

Le Vice-Président (M. Benjamin) : Alors, en conséquence, nous ajournons nos travaux à demain, jeudi le 23 février 2023, à 9 h 40.

(Fin de la séance à 18 h 10)