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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le vendredi 17 mars 1978 - Vol. 20 N° 12

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Question avec débat - La politique agro-alimentaire du gouvernement


Journal des débats

 

Question avec débat

La politique agro-alimentaire

du gouvernement

(Dix heures quinze minutes)

Le Président (M. Cardinal): Nous commençons cette séance de la commission permanente élue de l'agriculture. Il s'agit, en vertu de l'article 162-A, de droit nouveau, d'une question avec débat, question posée par M. le député de Huntingdon, à ma gauche, et à laquelle répondra M. le ministre de l'Agriculture, qui est à ma droite.

Je souligne que je permets à des fonctionnaires de s'asseoir a cette table, mais que, lorsqu'ils s'exprimeront, j'aimerais que ce soit fait au nom du ministre ou au nom du député. Je n'ai aucune réserve, je vais leur permettre la parole, mais je voudrais bien qu'à l'enregistrement la responsabilité soit prise par le ministre responsable et par le député. Si l'un de vos fonctionnaires répond, il peut le faire à son micro, ce sera votre nom, c'est vous qui êtes élus et c'est vous qui êtes de l'Exécutif. C'est du droit parlementaire.

Oui, M. le député de Verchères.

M. Charbonneau: M. le Président, avant de commencer, je voudrais être certain de la procédure. Est-ce que vous pourriez nous indiquer dans quel ordre les députés de cette commission peuvent intervenir?

Le Président (M. Cardinal): D'accord, le règlement est à la fois clair et incomplet. Ce sont des choses qui arrivent lorsqu'il y a de nouveaux règlements. L'ordre prévu par le règlement veut ceci: Le député qui a donné avis de la question avec débat a droit d'être entendu le premier. Le ministre questionné peut lui répondre, s'il le désire, immédiatement après. Chacune de ces deux interventions — je parle de ces deux-là — ne doit pas dépasser 20 minutes. La règle est claire. Les autres députés peuvent prendre la parole aussi souvent qu'il leur plaît dans la limite du temps octroyé pour ce débat. Il faut qu'à 13 heures, c'est l'alinéa g) de l'article 162-A, le débat soit terminé, sans vote, sans amendement, sans motion, sans quorum, etc.

Personne ne doit parler plus de 20 minutes...

M. Garon: ... de la chicane...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre, s'il vous plaît! Oui, il peut y avoir de la "chicane" au sens où vous l'entendez, je le mets entre guillemets, nous sommes encore des parlementaires.

M. Baril: Sans rancune.

Le Président (M. Cardinal): Cela c'est comme vous le voudrez. Ces vingt minutes cependant ne s'appliquent ni au député qui a posé la question, une fois qu'il a fait son exposé, ni au ministre qui y répond.

M. le député de Verchères me demande une directive. Je ne voudrais pas aller trop loin dans cette directive au-delà de sa question. Aussitôt que le député de Huntingdon aura posé sa question et fait son exposé, que le ministre aura pu, selon le règlement, y répondre, suivant l'usage parlementaire qui encadre ce règlement nouveau, on devrait normalement reconnaître quelqu'un d'un autre parti reconnu. Et ensuite, au fur et à mesure, le règlement s'applique, c'est-à-dire que c'est celui qui demande à la présidence de s'exprimer dans la période que l'on appelle de questions qui a la parole.

Est-ce que ces informations répondent à votre question?

M. Charbonneau: Oui, M. le Président. Merci.

Le Président (M. Cardinal): Si vous le permettez, je vais continuer. Je ne veux pas prendre le temps de cette assemblée. Donc, la question avec débat aujourd'hui porte sur le sujet suivant: La politique agro-alimentaire du gouvernement. A moins qu'il n'y ait d'autres questions, je donnerai tout de suite la parole à M. le député de Huntingdon, en disant tout de suite au début, cependant, que je me ferai remplacer à cette commission — il en sera ainsi tous les vendredis — par un des présidents de commission. Aujourd'hui, ce sera M. le député de Laviolette.

M. le député de Huntingdon.

Exposé du sujet M. Claude Dubois

M. Dubois: Merci, M. le Président. Tout d'abord, je voudrais remercier le ministre de l'Agriculture qui semble avoir agréé très gentiment de participer à ce débat traitant du développement de l'agro-alimentaire au Québec. Je désire aussi saluer et remercier les hauts fonctionnaires qui l'accompagnent, sans oublier tous les députés participant à cette assemblée.

Je souhaite ardemment que le déroulement de cette séance se fasse sur un ton très serein et totalement dénué de partisanerie. Le but ultime qui m'a incité à inscrire au feuilleton cette motion de débat vient de l'intérêt que je porte aux dossiers agricoles et aux développements en aval de cette économie.

Sachant déjà que le ministre est lui aussi stimulé par le désir de voir s'améliorer l'économie agricole dans notre province...

M. Garon: ... êtes-vous intéressé?

M. Dubois: ... il me semble raisonnable de croire qu'une franche discussion, sans égard aux formations politiques représentées à cette tribune, puisse être engagée dans un domaine aussi important que celui que nous discuterons. Je formule donc le voeu qu'un respect mutuel soit rigidement maintenu tout au cours de ce débat.

Il est de notoriété publique que les revenus agricoles furent en régression au cours des an-

nées 1976 et 1977. Le pouvoir d'achat des producteurs agricoles a diminué. Je crois donc que tous les moyens dont dispose le ministre doivent être pris afin de renverser cette tendance démoralisante pour nos agriculteurs.

A l'avance, je veux assurer le ministre que mes propos ne seront pas acerbes et que je n'ai aucunement l'intention de soulever des critiques ou des reproches à son endroit, mais bien plutôt de travailler, d'une façon objective, dans un esprit de calme et de franche discussion.

Ce débat d'aujourd'hui est, pour les agriculteurs québécois, d'une importance majeure. Il pourrait porter fruit dans la mesure où, au préalable, une ouverture d'esprit existe depart et d'autre.

J'ai la ferme intention de continuer à accomplir mon rôle de député avec bonne foi et honnêteté. Il y a place, du moins je le crois, pour autre chose qu'une guerre ouverte continuelle entre le pouvoir et l'Opposition, s'il l'on veut être objectif et constructif.

Comme vous le savez, M. le Président, cette motion de débat me permet d'explorer un champ très vaste, en partant de l'agriculture primaire à la consommation et ce, en parcourant toutes les étapes comme la mise en marché et la transformation.

Je veux souligner tout de suite quelques points de gros bon sens qui devraient être mis en priorité, comme un zonage de production au Québec, afin que les efforts et les deniers publics soient investis avec une assurance de rentabilité éventuelle.

L'érosion constante des pouvoirs du MAQ est également un élément à déplorer, tout comme le retard de présenter la Loi sur le zonage des terres fertiles, tant promise depuis l'arrivée au pouvoir du Parti québécois.

Il n'y a plus de place pour l'improvisation dans ce domaine. Il faut que chaque geste posé ait une incidence marquée sur l'avenir économique de l'agriculture au Québec, afin de mieux attirer dans ce domaine une relève jeune et compétente.

Cela dit, M. le Président, je passe immédiatement à l'entrée en matière afin d'étaler les grandes lignes des points que je désire soulever. Suite aux répliques du ministre, j'interviendrai sur une foule de questions précises, toutes incidentes au développement des secteurs agricole et para-agricole.

Les thèmes sur lesquels je désire situer ce débat sont les suivants:

Premièrement, la répartition du lait industriel au Québec, selon les besoins de chaque usine de transformation, mériterait d'être étudiée. Il y aurait peut-être lieu d'envisager un pool de lait, tel qu'en Ontario, où le "marketing board", qu'on appelle le "Ontario milk marketing board", reçoit tout le lait et le revend aux usines.

L'on sait ici que l'administration des quotas de lait industriel et la disposition des stocks sont confiées aux coop qui sont elles-mêmes des transformateurs. Egalement, l'action gouvernementale sur la régionalisation des usines de transformation et de distribution des produits laitiers, qui va en s'accentuant, semble être assez incohérente avec les politiques de décentralisation que prêche le gouvernement dans d'autres secteurs.

L'empire coopératif dans la transformation du lait, tel qu'il se dessine et qui, vraisemblablement, est sur le point de constituer un vrai cartel, et ce, avec la bénédiction du gouvernement, provoque passablement d'inquiétude, d'une part, chez les producteurs et, d'autre part, chez l'entreprise privée. L'on peut seulement jeter un coup d'oeil sur le nombre de petites usines locales de transformation, qui faisaient autrefois partie du patrimoine et qui, aujourd'hui, sont presque totalement disparues.

M. Garon: La voiture à cheval aussi faisait partie du patrimoine.

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Dubois: J'aimerais bien que le ministre sache que je suis très favorable aux coopératives locales ou même régionales et qu'elles doivent même faire partie de notre société. Mais où je ne marche plus, c'est quand de grands principes qui motivaient à l'époque, les producteurs à se grouper sont totalement éteints. Dans le cadre d'un monstre, comme le sont certaines structures coopératives, le producteur a totalement perdu son identité et il n'est plus qu'un numéro vulnérable et souvent sous-estimé.

M. le ministre, serait-il possible qu'un jour, par exemple, tout le lait industriel soit régi ou contrôlé par la Coop de Granby? C'est une question que je me pose et que je vous pose. L'on pourrait peut-être s'inquiéter que les coop, ayant un jour consolidé un empire absolu, n'aient plus besoin de plan conjoint dans le marché du lait, puisqu'elles seraient rois et maîtres en plus d'être juges et parties dans ce domaine. Je pense qu'il y a là de quoi s'interroger vraiment. Elles administrent les plans conjoints de producteurs de lait industriel. Elles prennent les épreuves de lait et de gras. On peut franchement dire qu'elles ont en main des outils pour asseoir tout producteur rebelle ou insatisfait. Je ne crois pas que ce genre de contrôle absolu et indiscutable soit ce qu'attendent les producteurs en se groupant en coopérative. On ne peut également pas dire que c'est là de la vraie et pure démocratie sociale.

L'on pourrait aussi souligner les clauses coer-citives du contrat liant les coopérateurs aux coopératives. Vous êtes sans doute au courant qu'il y a actuellement des clauses en litige. J'aurai d'autres cas à soulever, en ce qui a trait à la régionalisation actuelle, au cours de ce débat.

Comme deuxième point, dans le cadre de la politique d'auto-suffisance en grains de provende et d'aide financière aux silos d'entreposage des fourrages et des grains, il faut, à mon avis, renverser les conséquences des politiques agricoles actuelles qui tendent à faire de l'agriculteur un assisté de l'Etat et proposer des politiques qui donneront à l'agriculteur la place dynamique qui lui revient dans la société québécoise.

Une des approches nouvelles que doit se donner le MAQ est de préciser et d'identifier au-

près des producteurs ce que le système de distribution et de transformation attend d'eux. Il faut arrêter de laisser l'agriculteur produire aveuglément, sans débouchés assurés. Dans trop de domaines encore, on ne s'interroge qu'après l'utilisation de la production. Le gros bon sens est un principe cher à nos agriculteurs et lé ministre devrait s'en inspirer plus régulièrement dans l'établissement de ses politiques. Dans ce sens, il me semble que la meilleure façon d'améliorer notre autosuffisance, à la fois en grains de provende et en viandes rouges ou boeuf de boucherie, est d'établir un programme où seuls les producteurs éleveurs, dans une opération intégrée, c'est-à-dire où l'éleveur produirait à la fois la nourriture nécessaire à son élevage et rendrait à terme son troupeau, seuls ces producteurs, dis-je, pourraient bénéficier des incitations financières prévues au programme.

Nous nous leurrons si nous pensons améliorer de beaucoup I'auto-suffisance en grains de provende si nous n'associons pas, sur la ferme même, l'élevage d'animaux. Une action audacieuse du ministre s'impose dans ce domaine. J'ai spécifié, et j'y tiens, qu'un éleveur ne pourrait bénéficier de l'aide financière du ministre que s'il rendait à terme son troupeau, c'est-à-dire prêt à l'abattage. Je veux ainsi dénoncer une lacune importante du programme d'assurance-stabilisation des revenus agricoles dans ce secteur. Il est présentement de pratique courante — et c'est connu de tous — que les acheteurs se regroupent au moment des encans, s'entendent et offrent des prix allant de $0.15 à $0.20 la livre en bas du prix du marché, puisqu'ils savent bien que le producteur recevra du ministre une compensation pour la différence entre le prix de vente et le coût de production. (10 h 30)

Le prix à obtenir par le producteur lors de l'encan est souvent son salaire annuel. Il faut que le MAQ s'assure que ce salaire n'est pas à la merci d'un cartel d'acheteurs et ce au détriment des taxes des citoyens du Québec. De plus, dans bien des cas, ces animaux sont exportés en Ontario pour y être engraissés et ramenés par la suite au Québec comme boeuf de l'Ouest.

Troisièmement, la transformation, la congélation, la déshydratation, les congelés à sec, une conserverie de tomates: voilà des sujets que j'ai soulevés souvent, et à maintes reprises, depuis plus d'un an. Je persiste à croire que le ministre de l'Agriculture devrait étudier sérieusement ce manque à transformer qui s'évalue à quelque $400 millions. Je verrais, M. le Président, le MAQ réunir les sept, huit ou neuf grands détaillants de l'alimentation et les intéresser à investir dans un tel complexe de transformation où, immédiatement, la mise en marché serait assurée.

Une liste quand même imposante de produits cultivés par nos agriculteurs et transformés ici trouveraient place sur les tablettes du détaillant. J'aimerais faire une énumération de ces produits dont nous sommes vraiment dépendants: les tomates en conserve sous toutes les formes, la pomme de terre frite congelée — là où une firme du Nouveau-Brunswick nous approvisionne presque totalement— la déshydratation des catégories d'oignon ou de carotte ou d'autres productions qui ne peuvent être vendues fraîches sur le marché comme produit numéro 1, le marché très vaste des soupes en sachet que tous connaissent et qui ne contiennent que du déshydraté, encore rien de produit au Québec dans ce domaine. La technique allemande de congélation à sec qui réduit de six fois le volume pourrait être très intéressante pour certains produits tels que les fraises, les framboises, les bleuets, et aussi pour une foule de légumes additionnels. Cette méthode ouvre des possibilités immenses à l'exportation. SOQUIA s'inscrirait très bien dans une telle initiative comme partenaire avec l'industrie privée et j'ai la certitude que le MEER y participerait largement aussi.

La pomme de terre au Québec, production qui se dégrade en autosuffisance d'une façon assez constante, devrait également faire l'objet d'une attention particulière. Outre les frais de transport pour la pomme de terre des Maritimes qui sont subventionnés, il n'en reste pas moins que la qualité de notre produit est souvent déficiente et la classification en pourrait être améliorée. Je sais aussi que la variété recherchée par les kiosques à frites, qui se servent en majorité de pommes de terre nature, ne se retrouve que très peu ici et doit malheureusement être achetée des Maritimes. La variété recherchée, en l'occurence, est la Sabago, mais non la Quénébec, qui constitue la majorité de notre production au Québec.

Quatrièmement, le marché central métropolitain, centre nerveux d'entrées de produits, légumes frais, doit être considéré comme un élément majeur dans le domaine de la production maraîchère.

L'année 1977 a connu un record d'assistance à ce marché, soit 48 000 entrées payées sans compter toutes les livraisons directes au terminal. Ce marché est un lieu indiscutable de prise de commandes pour des livraisons aux chaînes, aux grossistes ou aux acheteurs de l'extérieur de Montréal. Ce centre d'entrées de distribution et d'exportation est aussi le point stratégique où l'inspection des entrées et des sorties se fait. Je veux tout de suite insister à nouveau auprès du ministre pour qu'il ordonne une fois pour toutes à ses inspecteurs d'être aussi rigides et respectueux des producteurs québécois que l'est l'Ontario pour les siens. Je rappelle également au ministre un article de la Loi sur les produits agricoles et aliments, section IV, article 31, traitant de l'obligation de rapporter au ministre toutes les arrivées de l'extérieur du Québec. Je demande donc au ministre de bien vouloir faire appliquer rigidement ce règlement.

M. Garon: ...

Le Président (M. Cardinal): A l'ordre!

M. Dubois: Revenons un instant sur l'importance de conserver le marché central métropoli-

tain. Le ministre de l'Agriculture pourrait intercéder auprès de son collègue le ministre des Affaires municipales afin de régler une fois pour toutes le litige existant depuis des années sur la taxation de cet emplacement de 109 acres. Un simple amendement à la Loi sur l'évaluation foncière préconisant un maximum de taxation sur les marchés de cultivateurs assurerait, pour une fois, toute la survie et l'épanouissement de ce marché.

Cinquièmement, je veux maintenant traiter de la culture en serre, secteur qui m'intéresse particulièrement et qui est très important dans le cadre de notre volonté de tendre à l'autosuffisance. Ce n'est pas la première fois que j'en parle et ce n'est sûrement pas la dernière, M. le Président. Je crois qu'il est plus que temps que le ministre accepte les nombreuses suggestions que j'ai faites dans le passé et qu'il mette sur pied un programme d'aide financière à bas taux d'intérêt pour l'établissement de nouvelles serres, établissement de plus en plus coûteux pour les producteurs. La rentabilité des serres pour les légumes hors saison est prouvée et l'augmentation de leur superficie comporterait d'innombrables avantages pour l'économie agricole du Québec.

D'abord, si nous pouvions porter la superficie à 100 acres de culture en serre, nous pourrions espérer atteindre 65% d'autosuffisance dans la production de tomates et de concombres. De plus, en augmentant à plus de 100 acres la superficie de culture en serre, nous pourrions augmenter les autres productions, telles que le choux-fleur, la laitue, le piment, et il y a une foule d'autres productions possibles.

La serre demeure le seul moyen de triompher de l'hiver québécois et de nous assurer un approvisionnement de légumes québécois en période hors saison. L'effet d'entraînement économique d'une telle mesure serait très importante en création d'emplois et améliorerait notre balance commerciale déficitaire dans ce secteur. De plus, je suggère au ministre de l'Agriculture l'installation d'une serre expérimentale à chauffage à énergie solaire. Le programme de recherche doit être entrepris par le gouvernement afin d'établir un modèle utilisable pour les producteurs privés par la suite, et ceci, dans les plus brefs délais possible.

Enfin, M. le Président, j'aimerais savoir, suite à l'article paru hier dans le journal Le Devoir, si le ministre entend modifier l'aide technique actuellement accordée aux producteurs en serre et s'il a l'intention d'apporter une aide financière à ces mêmes producteurs pour la transformation du système de chauffage leur permettant d'utiliser de l'huile vidangée.

Sixièmement. D'autre part, de nombreuses représentations nous ont été faites par des propriétaires de petits abattoirs qui se plaignent de ne pas encore avoir reçu la loi et les règlements ré-aissant les petits abattoirs et ce, contrairement aux promesses que leur a fait le ministre. L'association a déjà retardé une fois son assemblée générale annuelle, où l'ordre du jour prévoit l'étude de la loi et de sa réglementation.

Vous comprendrez, M. le Président, que les propriétaires de petits abattoirs ne voudront...

Le Président (M. Cardinal): Je m'excuse, si vous permettez, cela ne sera pas pris sur votre temps. J'ai donné des directives pour que I'on cesse ces petits travaux. Mais, avant que le messager ne rejoigne le bout de l'échelle, ça peut prendre cinq minutes.

M. Dubois: D'accord, merci. Vous comprendrez, M. le Président, que les propriétaires de petits abattoirs ne voudront pas respecter les dates limites que leur impose la loi, puisque, selon eux, le ministre ne leur a pas encore communiqué les informations pertinentes. De plus, je veux rappeler au ministre que l'Association des propriétaires de petits abattoirs lui a demandé ce que je lui avais suggéré lors de mon discours en troisième lecture du projet de loi 43, soit la création d'un comité conjoint de propriétaires de petits abattoirs et de fonctionnaires du MAQ afin de solutionner les différents problèmes qui surviendront suite à l'application de la loi. Ils attendent une réponse du ministre sur ce point particulier.

Je termine ce bref exposé; je m'excuse, j'ai des notes additionnelles.

Avant de terminer ce bref exposé, M. le Président, j'aimerais communiquer aux participants de ce débat un extrait du livre blanc sur la décentralisation au Québec dont doit discuter, en fin de semaine, le Conseil des ministres. Ces propos s'inscrivent très bien dans le message que je viens de communiquer. J'aimerais connaître immédiatement la perception du ministre sur cet extrait que voici. "Dans le domaine de l'agriculture, le Québec doit viser une plus grande autosuffisance. A cette fin, on devrait favoriser le transfert de la plaine de Montréal de certaines productions, comme le lait, nécessitant un nombre inférieur d'unités thermiques vers les bons sols agricoles des autres régions du Québec. Les sols ainsi récupérés dans la plaine de Montréal pourraient alors servir à l'horticulture, à la finition des bouvillons d'embouche et au maïs-grain.

Cette action pourrait entraîner une accélération du rôle de SOQUIA et des coopératives agroalimentaires dans la région de Montréal pour transformer cette production et la commercialiser. Les coopératives agro-alimentaires, ayant déjà un chiffre d'affaires de près de $1,5 milliard, constituent déjà une force économique. Toutefois, leur présence dans le domaine de la commercialisation est faible dans la région métropolitaine, sauf pour l'industrie du lait. La mise sur pied par le secteur coopératif d'un réseau de magasins d'alimentation coopératifs dans l'agglomération de Montréal serait un moyen de faire une percée sur ce marché.

De plus, le transfert de quotas de lait dans les régions avoisinantes de la région de Montréal stimulerait l'économie agricole dans ces milieux qui sont actuellement plafonnés par la limitation des quotas de lait.

Une politique de mise en place de culture et d'élevage spécialisés, accompagnés de l'identifi-

cation de variétés de plantes, aurait pour avantage de diversifier l'agriculture, de l'adapter aux conditions locales et, par le fait même, de la rendre plus forte et plus souple.

Considérant la courte période de végétation, il serait peut-être prioritaire d'encourager les méthodes culturales utilisant les abris de polythène et de verre, afin de prolonger la saison de production. Puisque la généralisation de l'exploitation des serres est freinée actuellement par les coûts élevés de l'énergie, il faudrait peut-être songer à l'utilisation de la chaleur dégagée de certaines usines ou encore d'autres combustibles.

Je termine donc ce bref exposé. Vous savez tous qu'il y aurait suffisamment de matière, dans ce secteur d'activité, pour des semaines de discussion. Ce n'est certes pas en trois heures qu'il sera possible de même effleurer tous les problèmes. J'aurai quand même ouvert cette discussion sur passablement de domaines importants que je ferai suivre, selon le progrès de nos travaux, par plusieurs questions additionnelles précises. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Cardinal): Merci, M. le député de Huntingdon. M. le ministre, vous aussi, vous avez vingt minutes.

Réponse du ministre

M. Jean Garon

M. Garon: M. le Président, j'écoutais le député de Huntingdon qui mentionnait que des problèmes, il peut y en avoir en agriculture. Je ne peux pas m'empêcher de penser qu'au cours des trente dernières années, l'Union Nationale a été au pouvoir pendant vingt ans, le Parti libéral pendant dix ans et le Parti québécois pendant un peu plus de un an. Si la situation est aussi désastreuse, s'il y a autant de problèmes qui n'ont pas été réglés, ce n'est sûrement pas à cause du Parti québécois, mais peut-être à cause de ceux qui, pendant les 20 ans qu'ils ont été au pouvoir, n'ont pas pris les actions qu'ils auraient dû prendre lorsqu'ils y étaient.

Tantôt le député de Huntingdon disait que le ministère de l'Agriculture était un ministère qui devrait s'orienter en fonction des marchés. C'est justement ce qui a été notre rôle quand on est arrivé au Parlement, de travailler le plus énergiquement possible pour orienter le ministère de l'Agriculture vers un ministère à vocation économique, plutôt qu'un ministère uniquement en fonction de la production. Nous croyons que le fait, au co.urs des années passées, d'avoir souvent encouragé soit les productions de cultivateurs dans des secteurs dont on ne s'était occupé d'aucune façon, développé les marchés ou la mise en marché, a amené... La F-l, par exemple, ou les céréales oui... On oubliait de bâtir des lieux d'entreposage, ce qui a été terriblement nuisible à l'agriculture et a découragé souvent l'agriculteur qui s'embarquait dans des programmes en ayant confiance aux politiques gouvernementales pour réaliser, au fond, que le gouvernement l'avait embarqué dans des culs-de-sac. (10 h 45)

Tout à l'heure, le député de Huntingdon disait qu'il déplorait l'érosion des pouvoirs du ministère de l'Agriculture du Québec. J'ai plutôt l'impression que, depuis un an, le ministère de l'Agriculture du Québec n'a jamais été aussi présent, n'a jamais été aussi actif, n'a jamais été aussi dynamique. En tout cas, les gens que je rencontre me disent régulièrement qu'ils commencent à se rendre compte de l'importance de l'agriculture au Québec et du secteur agro-alimentaire et qu'ils n'avaient pas perçu cela auparavant.

C'est justement peut-être à cause de ce dynamisme du ministère que les gens peuvent voir davantage l'importance du secteur agroalimentaire. Le député a parlé également du zonage des productions. Je pense que tout le monde y est favorable, parce que chacune des régions du Québec s'oriente vers des secteurs où chaque production est avantagée, mais, jusqu'à nouvelle information, on est dans un pays démocratique et je pense, en tout cas, que ce n'est pas la volonté du gouvernement actuel de forcer les cultivateurs à s'orienter obligatoirement dans tel type de production: c'est au contraire, de discuter avec eux ce que nous avons fait et ce que nous avons effectué au cours de l'année 1977. Nous avons eu huit programmes régionaux et, dans chacun de ces programmes les différentes régions ont indiqué par des discussions entre les agriculteurs de la région et le ministère de l'Agriculture, les secteurs dans lesquels ils voulaient s'orienter. Je vous donne, par exemple, l'Outaouais où on voulait des politiques qui inciteraient les agriculteurs à s'orienter, à se spécialiser dans l'élevage du boeuf.

On est en train de préparer également des programmes qui devront être prêts sous peu, pour l'Abitibi, où on veut également s'orienter plus particulièrement dans l'élevage du boeuf. Mais, de là à zoner les productions d'une façon obligatoire, je plains le gouvernement qui va essayer de faire cela avec les agriculteurs, parce que les agriculteurs n'ont pas l'habitude de se faire mener par le bout du nez par les gouvernements. Au contraire, ils veulent décider eux-mêmes des productions dans lesquelles ils vont s'orienter, mais on peut discuter ensemble des meilleures options selon le climat de la région dans laquelle ils font leur production.

Le député a parlé d'une foule de sujets. Evidemment, je n'aurai jamais le temps de répondre dans vingt minutes à toutes ces questions.

M. Cordeau: Allez-y, M. le ministre.

M. Dubois: Nous avons posé des questions; ce sont des réponses qu'on veut. Autrement, cela ne servirait à rien. Allez-y.

M. Cordeau: Prenez le temps qu'il vous faut.

M. Garon: Très bien, je peux me rendre jusqu'à 13 heures?

M. Dubois: On vous dira quand arrêter.

M. Garon: On n'est pas pressé, on va y aller.

M. Cordeau: II faut laisser parler le ministre, bien sûr.

M. Garon: Quant à la relève jeune et dynamique, compétente, selon le point qui est soulevé, il y a actuellement une relève assez importante au Québec, beaucoup plus qu'on est porté à le dire. Le président de l'Office du crédit agricole me disait récemment que, l'an dernier, le nombre des primes à l'établissement de jeunes cultivateurs sur des terres était de 1239, ce qui veut dire, si on tient compte du nombre d'agriculteurs au Québec, une relève quasi suffisante pour remplacer le nombre existant de cultivateurs. Le nombre de membres, de producteurs de l'UPA est de 39 000. La vie active d'un agriculteur est d'environ 30 ans; on peut dire 35 ans, mais disons une trentaine d'années. Ceci voudrait dire que de 1300 à 1400 agriculteurs doivent être remplacés chaque année pour maintenir à peu près le nombre actuel, ce qui veut dire, au point de vue relève, que nous ne sommes pas loin du nombre désiré.

Il est évident que si on regarde l'avenir, la relève ne se fera pas de la même façon. De plus en plus, au contraire, il va y avoir une concurrence entre les candidats à la profession d'agriculteur. Dans certains pays, pour obtenir du crédit agricole, pour obtenir les subventions gouvernementales, de l'aide gouvernementale, il faut avoir fait un cours d'agriculteur et avoir été apprenti agriculteur chez un agriculteur professionnel pendant un certain nombre d'années. Autrement, les subventions gouvernementales et les prêts agricoles ne sont pas accordés. J'ai l'impression qu'on s'oriente plutôt, pour l'avenir, vers quelque chose comme cela, puisque la concurrence pour devenir agriculteur deviendra beaucoup plus forte. Alors qu'on a dit jusqu'à maintenant qu'il manque une relève, cette relève manque de moins en moins. Je suis convaincu qu'avec les politiques dynamiques qu'est en train d'implanter le gouvernement actuel, ce sera la course à l'agriculture avant longtemps.

Il faut aussi considérer le nombre important d'étudiants en agriculture qu'on retrouve dans nos deux instituts, l'Institut de Saint-Hyacinthe et l'Institut de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. Il y a là plusieurs centaines d'étudiants. Je pense que, dans les deux instituts, il y en a 1200, à l'Institut de technologie agricole à Saint-Hyacinthe et à celui de Sainte-Anne-de-la-Pocatière. On a également à l'Université Laval environ 1000 étudiants en agronomie et en alimentation. Les professionnels de l'agriculture au Québec sont des gens de plus en plus qualifiés.

On a parlé également d'une répartition, d'un "pool" de lait. Tout le monde connaît les difficultés que connaissent les producteurs laitiers. J'ai voulu moi-même intervenir au mois d'avril 1977. Les dirigeants de l'Union des producteurs agricoles m'ont demandé de laisser les producteurs régler leurs problèmes eux-mêmes, qu'ils avaient des plans conjoints et qu'ils aimeraient pouvoir régler les problèmes eux-mêmes. Vous comprenez que quand des producteurs demandent au ministre de l'Agriculture de ne pas intervenir dans un problème parce qu'ils aimeraient mieux le régler eux-mêmes, il est assez difficile de s'immiscer dans le problème, alors que les agriculteurs veulent le régler.

J'ai toujours dit également que, dès que l'Union des producteurs agricoles me demandera d'intervenir dans le secteur du lait, à cause des difficultés qu'occasionnent deux secteurs laitiers au Québec, un secteur de lait de consommation et un secteur de lait industriel, immédiatement, nous interviendrions. Par ailleurs, je dois dire qu'au cours de l'année 1977, nous avons eu une politique, dans le domaine du lait, qui a été bénéfique. Elle n'a pas encore donné tous ses effets, mais on remarquera que la consommation de lait dans les écoles, par la distribution de lait dans les écoles — elle est gratuite dans les écoles — depuis le début de septembre 1977, en plus d'inculquer de bonnes habitudes alimentaires aux enfants, a occasionné, et je pense bien qu'on pourrait dire... En tout cas, constatons que les deux événements simultanés... La politique de distribution de lait dans les écoles a commencé en septembre et, en même temps, au cours du dernier trimestre de 1977, on a connu une augmentation de la consommation du lait au Québec, alors que, depuis des années, c'était une diminution constante de la consommation de lait au Québec. Dans le passé, les gouvernements en avaient parlé. J'ai vu des études nombreuses — c'est un peu comme dans l'amiante — la dernière datait de M. Courcy, elle avait presque deux pouces d'épaisseur: Comment devrait-on distribuer le lait dans les écoles? Comment le lait était bon pour les enfants! Mais on oubliait d'en distribuer. Alors, actuellement, il y a une distribution de lait dans les écoles, soit dans 700 écoles au Québec et, 27% des enfants de la maternelle et de l'élémentaire reçoivent un berlingot de lait par jour. J'ai visité quelques écoles moi-même pour me rendre compte des effets. Je dois dire que les enfants sont très contents. Il me semble qu'il y a seulement le Dr Goldbloom qui écrit des lettres au Collège des pédiatres pour essayer de faire condamner cela. Mais j'ai dit aux parents que ceux qui ne voulaient pas que leurs enfants boivent du lait, on ne les forcerait pas, on ne leur en donnerait pas. Alors, quand les parents ne veulent pas, parce qu'ils pensent que cela pourrait être dommageable pour les enfants, on ne leur en donnera pas. C'est un peu le même genre de spécialistes qui disent qu'il y a plus de cholestérol dans le lait de femme que dans le lait de vache. Je n'ai jamais pensé, voyez-vous, que le bon Dieu a donné des seins aux femmes pour qu'en allaitant leurs enfants, elles développent des maladies cardiaques chez ces derniers.

Je dois dire que c'est une mesure qui était attendue de la population, puisque le téléphone, dans les journées qui ont suivi l'annonce de la politique du lait dans les écoles, a sonné constamment pour solliciter de nouvelles demandes. Actuellement, les commissions scolaires votent des résolutions dans toute la province pour être du prochain groupe de commissions scolaires qui vont recevoir du lait. De sorte que nous allons pouvoir, l'automne prochain, mettre une condition

additionnelle qui est souhaitée des parents. Cela m'a paru évident lors de mes tournées dans la province. Comme on veut développer de bonnes habitudes alimentaires dans les écoles — c'est déjà fait sur l'Ile de Montréal, ce ne sera donc pas nécessaire sur l'Ile de Montréal — il y aura une condition. L'école qui voudra avoir du lait devra s'engager à enlever ses distributrices de boissons gazeuses. Car on ne peut pas avoir une bonne politique alimentaire d'un côté et la défaire de l'autre.

M. Dubois: C'est une de mes suggestions.

M. Garon: Si vous voulez. Nous ne suggérons pas, nous agissons.

M. Dubois: Je ne peux pas agir, mais je peux quand même faire des suggestions.

M. Garon: Vous avez été là 20 ans pour agir. Le Président (M. Jolivet): A Tordre! M. Dubois: Ne revenez pas sur le passé.

M. Garon: La régionalisation des usines laitières et la décentralisation, je ne vois pas d'incompatibilité avec cela. Quand on parle de nos traditions, c'est évident qu'on avait des traditions. On aurait pu garder la voiture à cheval pour maintenir nos traditions. Mais aujourd'hui on observe, dans tous les pays du monde, sans exception — je lisais récemment une brochure sur le Danemark, un pays des plus importants au point de vue de la production laitière dans le monde, il est spécialisé — la même concentration des usines laitières pour du lait de consommation et du lait de transformation. C'est un phénomène universel, celui de la technologie, on l'observe partout. De la même façon qu'on observe, dans le monde entier, l'accroissement de la grandeur des fermes. Pourquoi? Parce que, aujourd'hui, pour avoir un plus haut taux de productivité... Autrefois — je n'ai pas les chiffres par coeur — un cultivateur alimentait peut-être dix personnes, après, cela a été 50 personnes, puis 150 personnes. Ce nombre a augmenté très rapidement. Pourquoi? Parce qu'il y a une très grande mécanisation. On observe le même phénomène: la ferme est plus grande et plus importante.

Il y a évidemment une certaine concentration des usines, c'est là un phénomène normal; ce qui n'empêche pas une certaine décentralisation. Quant à savoir si la Coopérative de Granby va contrôler un jour tout le lait au Québec, je ne le sais pas. Je dois dire que je ne le pense pas non plus, parce qu'il y a aujourd'hui d'autres coopératives régionales qui sont assez fortes. Je pense à la coopérative de la Côte-Sud, à celles du Bas-Saint-Laurent et du Sud du Québec. Ce sont des coopératives très importantes. Je ne pense pas qu'on en vienne à une seule coopérative au Québec. Je serais très étonné. (11 heures)

Par ailleurs, les coopératives, je les aime pas seulement petites, je les aime quand elles prospèrent aussi. Quand on a un succès comme celui de la coopérative de Granby, au lieu de cracher dessus, on ferait mieux de féliciter les 9000 agriculteurs qui ont bâti cette entreprise qui, aujourd'hui, sert de modèle dans de nombreux pays. Plusieurs pays ont demandé aux gens de la Coopérative de Granby d'aller leur montrer comment bâtir un complexe comme celui de Granby. On devrait être fier que des coopérateurs, des agriculteurs aient pu bâtir une entreprise comme celle-là. Les plus grosses entreprises, les plus importantes entreprises québécoises contrôlées par des francophones sont des entreprises agricoles: ce sont la Coopérative fédérée et la Coopérative de Granby. On devrait être fier et les féliciter au lieu d'essayer de parler contre elles.

Aujourd'hui, la modernisation qu'opère Granby, en bâtissant un complexe de $22 millions, modernisant d'autres coopératives affiliées pour $6 millions, permettra de diminuer la production de beurre et de poudre puisque la consommation de beurre est passée de 19 livres autrefois à 12 livres alors que la consommation de fromage a augmenté, dans les dernières années, de 7,9 livres à 21 livres par tête. La Coopérative de Granby, en améliorant son plan, se dirigera vers la production de fromage de spécialité, dont une bonne partie était importée. Evidemment, si on veut conquérir les marchés extérieurs, il faudra bâtir des entreprises qui auront les reins assez forts pour bâtir ces marchés, avec l'aide du ministère de l'Agriculture.

La contribution du gouvernement a été de $4 583 750. J'ai été très fier que le gouvernement participe au développement de cette coopérative, de même qu'à d'autres fromageries comme celle de Corneville qui est en train de s'implanter à Saint-Hyacinthe. Elle est une filiale de la compagnie Anco, qui importait des fromages européens. Aujourd'hui, au lieu d'importer le brie et le camembert, ces deux types de fromage vont être fabriqués à Saint-Hyacinthe, au Québec, par une entreprise québécoise à l'implantation de laquelle a participé la Société québécoise d'initiatives agroalimentaires. Je pense qu'il y a tout lieu d'être fier de cela.

Nous avons participé également à l'implantation de deux autres fromageries: une à Amqui, qui était une autre usine laitière qui fabriquait de la poudre et maintenant on va y fabriquer du fromage. Pour la poudre, il manquait des marchés et, pour le fromage, maintenant il y a davantage de marchés.

Nous pourrons aussi exporter des fromages. La politique dans le domaine du développement des produits laitiers au Québec sera dynamique. Il ne s'agira pas seulement de conquérir le marché québécois pour qu'on vende nos fromages au Québec, mais notre politique va viser à conquérir des marchés extérieurs.

Nous sommes allés au Japon en septembre afin d'étudier les habitudes alimentaires, qui sont différentes d'un pays à l'autre. En allant au Japon en septembre, notre mission s'est rendu compte

que le Japonais aime mieux des portions plus petites, il aime mieux des empaquetages faits différemment. On ne fera pas cela en restant assis chez nous, en regardant baisser la lune le soir. Il faudra aller dans les pays étrangers comme le Japon, qui est un importateur de nourriture, et essayer de connaître leur marché. Nous retournerons au Japon au printemps; c'est un des pays importateurs et nous allons continuer à y aller, de même que dans d'autres pays pour exporter nos produits laitiers.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, je ne voudrais pas vous arrêter, mais j'ai besoin de l'accord des gens. J'ai pu comprendre tout à l'heure qu'il y avait un consensus à l'effet de vous permettre de terminer même si vos 20 minutes sont écoulées.

M. Garon: Oui.

M. Dubois: Quelques minutes additionnelles. Le Président (M. Jolivet): Quelques minutes. M. Garon: J'ai encore beaucoup de sujets...

M. Cordeau: Allez-vous au Japon, M. le ministre?

M. Garon: Non, je n'y vais pas. Demandez des rapports à ceux qui y vont.

M. Charbonneau: Quand il y va, l'Opposition l'accuse de ne pas être en Chambre.

M. Cordeau: On pourra l'accompagner. M. Charbonneau: Pour vous éviter de...

M. Garon: Je devais aller en France, mais à cause des élections je n'y suis pas allé.

M. Cordeau: C'est positif.

M. Garon: En ce qui concerne la stabilisation des revenus pour les producteurs de boeuf dont a parlé le député de Huntingdon, nous croyons également que ce programme est mal adapté. Il devrait être reformulé. Vous ne pouvez pas m'accuser pour ce programme, ce n'est pas nous qui l'avons fait, il était institué quand nous sommes arrivés et il venait d'être institué. Il avait été institué à la suite de discussions entre le ministère de l'Agriculture et les producteurs agricoles. Actuellement, nous sommes à travailler à ce programme, de même que nous avons créé un comité pour étudier toute la question de l'élevage du boeuf au sujet de laquelle, je vous le dirai franchement, il n'y a pas beaucoup d'experts au Québec. Tous ceux que j'ai rencontrés, les gens qui connaissent le plus le boeuf, se posent des questions et se demandent exactement de quelle façon développer cette production au Québec. Il y a beaucoup d'interrogations. Actuellement, nous regroupons les gens qui connaissent le secteur pour essayer d'avoir une politique. Peut-être pas une politique globale, mais une politique qui va commencer en étant cohérente au moins, pas une politique dont les différentes facettes se détruisent l'une l'autre. Cela serait déjà considérable, parce que vous avez raison. Le programme, tel qu'établi, encourage les producteurs à vendre leurs animaux alors qu'ils n'ont pas fini de les élever, et c'est souvent le producteur ontarien qui finit ces animaux qui en bénéficie.

Quand le député de Huntingdon a parlé de la pomme de terre, je dois dire que là il était vraiment dans les patates.

M. Dubois: Racontez-moi cela.

M. Garon: Quand vous dites que les vendeurs de patates frites utilisent surtout de la pomme de terre fraîche...

M. Dubois: J'ai dit les kiosques. M. Garon: ... les kiosques, oui...

M. Dubois: Vérifiez vous-même et vous allez voir.

M. Garon: ... plutôt que de la pomme de terre congelée, là vous n'y êtes pas du tout. C'était peut-être vrai il y a 20 ans...

M. Dubois: Les restaurants prennent de la pomme de terre congelée, mais pas les kiosques.

M. Garon: ... il y a dix ans et il y a cinq ans, mais ce n'est plus vrai aujourd'hui.

M. Dubois: Faites une tournée, M. le ministre, vous allez voir.

M. Garon: Je ne ferai pas une tournée. Il y a des données statistiques là-dessus. Je n'ai pas besoin de faire une tournée. Nous n'y allons pas au pif, nous y allons avec des études méthodiques qui nous révèlent cela.

M. Dubois: Les restaurants, d'accord, mais pas les kiosques. J'en ai vérifié plusieurs.

M. Garon: C'est évidemment un secteur dans lequel nous avons eu des activités cette année puisqu'il y a eu un régime d'assurance-stabilisation du revenu des producteurs de pommes de terre devant être instauré au cours de l'été. C'est drôle, vous ne dites pas la même chose que d'autres gens dans le secteur des pommes de terre. Ils ont peur que nos programmes instaurés cette année nous amènent à un surplus de patates. Vous, vous avez peur qu'on n'en produise pas assez. Je ne sais pas, mais j'ai l'impression qu'il y a là une contradiction.

Nous avons eu aussi un programme pour le problème que vous avez soulevé, à savoir que la pomme de terre du Québec n'était pas présentée d'une façon aussi attrayante aux consommateurs et aux consommatrices que les pommes de terre

importées des Maritimes. Par exemple, nous avions un sac brun fermé et on ne voyait pas les pommes de terre, de sorte que les gens étaient moins attirés par les pommes de terre du Québec alors qu'on voyait les pommes de terre des Maritimes par une petite fenêtre. Les pommes de terre étaient lavées, classifiées. On voyait les pommes de terre dedans.

M. Dubois: J'ai parlé de la classification.

M. Garon: Vous avez parlé de la classification, oui. Nous avons établi un programme cette année qui a justement aidé les producteurs à organiser cette classification de la pomme de terre et aujourd'hui vous avez remarqué que l'écart entre les prix des pommes de terre du Québec et des Maritimes a été réduit. Mais il y a une chose qu'il faut dire aussi. L'Union Nationale devrait le dire. C'est qu'il y a une politique très dommageable, malgré tous les efforts qu'on fera au Québec, une politique fédérale qui nuit aux producteurs de pommes de terre. Si vous regardez une carte du déplacement des producteurs de pomme de terre au Québec, depuis 30 ans, vous allez voir que les producteurs de pomme de terre étaient concentrés dans l'est du Québec, il y a une trentaine d'années, mais que, graduellement, ils se sont déplacés pour s'en aller de plus en plus autour de Montréal. Pourquoi? Parce que le fédéral subventionnait le transport par chemin de fer et, depuis quelques années par camion, au début à 40%, maintenant à 50%. Il subventionne le transport des patates et d'autres produits, près de 200 produits, des Maritimes vers le marché de Montréal. C'est un des mauvais effets de la Confédération, un des effets les plus importants sur le plan économique. Les politiques de transport du gouvernement fédéral ont eu pour effet de donner le marché de Montréal à l'ensemble du Canada au détriment des producteurs québécois, tandis qu'on ne nous a donné aucun marché. Souvent des camionneurs vont apporter des patates des Maritimes, pas pour apporter des patates, mais pour avoir une charge de retour, parce qu'elle est subventionnée. A ce moment-là, on crée une distorsion économique terrible. Ce n'est pas pour rien qu'on a dit dans des études récentes que le Bas-du-Fleuve était la région du Canada qui avait le niveau de vie le plus bas. C'est là l'effet direct des politiques de subvention de transport du gouvernement fédéral qui font crever les gens du Bas-du-Fleuve à l'avantage des gens des Maritimes. Les gens du Bas-du-Fleuve paient pour ça, alors que c'est une population qui est déjà non avantagée.

Il faut le dire ouvertement, qu'on soit fédéraliste, néo-fédéraliste, séparatiste, terroriste, n'importe quoi, ces politiques sont nuisibles aux producteurs québécois. Je l'ai dit à plusieurs reprises et je vais continuer à le dire. Quant à dire que les inspecteurs devraient être plus sévères pour empêcher les importations, qu'est-ce que vous voulez? Les gars nous disent parfois: Les gars de l'Ontario nous envoient des carottes croches, ne les faites pas entrer. Nos inspecteurs inspectent les produits qui viennent d'ailleurs et c'est évident que nous, comme les gens d'ailleurs, quand on exporte nos produits, on essaie habituellement d'exporter ce qu'on a de meilleur.

On ne pourra pas contrôler les frontières uniquement par l'inspection. Vous pouvez être convaincus que les inspecteurs du ministère de l'Agriculture qui inspectent les produits importés n'ont pas la directive de les laisser passer les yeux fermés. Mais on ne peut pas non plus empêcher la pénétration, dans l'état actuel des choses, des produits de première qualité qui viennent de l'étranger. Vous n'avez qu'à aller dans les épiceries, quand vous voyez la laitue des Etats Unis et les autres produits américains sur le marché, ce ne sont pas des produits qu'on devrait jeter à la poubelle, ce sont des produits de première qualité.

A ce moment-là, si on ne veut pas se faire faire la même chose, les représailles économiques, cela existe, il faut traiter les gens comme ils nous traitent. C'est-à-dire qu'à ce moment-là il faut avoir un service d'inspection énergique, mais en même temps réaliste. On ne contrôlera pas les frontières uniquement avec un service d'inspection. Cela, c'est leurrer la population que de prétendre cela.

Quant aux cultures en serre, nous avons commandé une étude — qui doit nous parvenir dans deux mois environ — à savoir quelle est la serre la plus rentable, la plus économique qui existe dans le monde entier. Il y a une étude qui est faite actuellement pour voir tout ce qu'il y a de serres dans le monde, que ce soit en Finlande, en France, en Russie, au Danemark, dans n'importe quel pays, partout, pour savoir quelle est la meilleure.

Avant de s'embarquer dans un programme de serres, alors que tout le monde sait que les serres, actuellement, ont des pertes d'énergie, on voudrait savoir quelle est la meilleure serre. Deuxièmement il y a aussi des travaux qui se font au ministère pour développer un type de fournaise qui pourrait utiliser différents types de combustibles. Cela peut être de la vieille huile, du vieux bois, du bran de scie, ça peut être 56 affaires, mais différents types de combustibles. Il y a des travaux qui se font là-dessus. Nous avons aussi discuté du développement éventuel d'un prototype. Là-dedans, sont incluses les possibilités de l'énergie solaire, comme un des moyens de réduire les coûts d'énergie en huile, mais l'énergie solaire ne peut pas remplacer le chauffage à 100%, dans l'état actuel des connaissances.

Là-dedans aussi, et, en plus, nous allons inaugurer au printemps, je crois, à Saint-Hyacinthe, un réseau de serres expérimentales.

M. Dubois: II faut pousser.

M. Garon: Vous voyez, je ne comprends pas que le député de Huntingdon et le député de Saint-Hyacinthe, qui sont du même parti, ne se soient pas raconté cela.

M. Dubois: Expérimentales dans les grains, c'est pour la production de grains, ce n'est pas pour les légumes.

M. Garon: Non, non, les deux. Les grains, mais aussi — ce sont des serres de recherche — également pour la production horticole. Pardon?

M. Dubois: Sont-elles prêtes?

M. Garon: Non, les serres ne sont pas encore construites complètement. (11 h 15)

M. Dubois: II faut pousser; c'est ce que j'ai demandé, de pousser.

M. Garon: J'ai pris la décision au mois de février 1977, au sujet des serres. Vous ne pouvez pas dire que j'ai tardé beaucoup.

M. Dubois: Cela ne prend pas un an, construire une serre.

M. Garon: Quant aux serres, tout le monde sait qu'il y a un problème de combustible. Le combustible a augmenté considérablement. On veut aller dans un programme important de développement des serres. Vous seriez étonné du nombre de projets sur lesquels on travaille actuellement. Faites bien attention de trop parler, parce que vous pourriez avoir le souffle coupé par les projets vers lesquels on va s'orienter d'ici deux ans, dans le domaine des serres.

M. Dubois: M. le ministre, vous posez des questions. Ce sont des réponses qu'on veut avoir.

M. Garon: Dans le cas des petits abattoirs...

M. Baril: J'espère que ce ne sera pas tout dans le comté de Saint-Hyacinthe cette fois-là.

M. Garon: II faut dire qu'il ne pleut pas de spécialistes dans les serres au Québec. Evidemment, il y a des gens qui s'improvisent experts en serres. Mais il n'y a pas beaucoup de spécialistes. Il y en a un à l'Université Laval, il y en a un au ministère de l'Agriculture. Ce n'est pas par hasard qu'on a seulement 43 acres de culture en serre. Il y a quelques années, il n'y en avait que dix. Avant cela, il n'y en avait pas du tout. Il n'y a pas beaucoup de connaissances au Québec et les spécialistes en ce domaine ne pleuvent pas. C'est évident qu'avant de s'embarquer dans un programme "à la planche" pour dire qu'on va mettre des centaines d'acres en serres au Québec, il faut former des gens qui connaissent cela, il faut connaître les types de serres et il faut connaître le problème du combustible qui est important.

Si, dans les années passées, les gouvernements antérieurs s'étaient préoccupés de ces problèmes, on n'aurait pas à commencer à zéro aujourd'hui. Dans le cas des petits abattoirs, cela a été pareil. Je parlais justement à un député de l'Opposition hier qui me disait: Vous savez, M. Garon, c'est un problème qui remonte à 1962. Cette année, on dira ce qu'on voudra, dans le domaine des petits abattoirs, je pense qu'on a trouvé la solution. Il faut remercier la Providence de nous avoir donné des lumières pour trouver la solution à ce problème. Je dois dire que je pense que c'est une solution qui a reçu l'assentiment de tout le monde. Aujourd'hui — je ne sais pas quelle information vous avez — nous avons remis une compensation rétroactive pour les propriétaires de petits abattoirs qui s'étaient retirés au cours des deux dernières années. Nous avons actuellement une soixantaine de petits abattoirs qui veulent être indemnisés pour se retirer. Ils ne se retirent pas du domaine de la viande, à ce qu'on me dit, parce que les rapports sont que plusieurs d'entre eux veulent, au contraire, se bâtir une boucherie ou un comptoir de viande. C'est excellent, c'est exactement ce qu'on souhaitait. Ceux qui ne veulent pas rester dans le domaine de l'abattage, qui connaissent la viande et qui veulent se construire un comptoir de boucherie pourront développer des débouchés pour les abattoirs qui vont se moderniser.

Actuellement, au ministère, il y a une quarantaine de demandes de modernisation d'abattoirs. Au cours de l'année écoulée, il y a eu 23 entreprises qui ont profité du programme de rationalisation dans le secteur des viandes et qui ont bénéficié de subventions versées par le ministère de l'Agriculture, pour un montant de $1 421 473.91. Tout ceci pour dire que c'est un dossier actif et, au cours de ces années 1978 et 1979, il va y avoir de nombreuses constructions d'abattoirs et de charcuteries et, à la fin de 1979, quand la période transitoire sera écoulée, le Québec sera sans doute un Etat où nous aurons un des meilleurs réseaux de commercialisation de la viande dans le monde entier, au point de vue de la modernisation, en tenant compte, évidemment, qu'on produit seulement 20% du boeuf qu'on consomme. Et on ne pourra pas augmenter cela du jour au lendemain. Mais ce sera un réseau, à l'intérieur du Québec, qui répondra aux besoins des consommateurs et des producteurs. Je dois vous dire que c'est un élément de fierté important, parce que vous savez quel était le problème dans ce secteur. Ce n'est pas un problème facile. Des réseaux de commercialisation dans le secteur de la viande, c'est un problème complexe. C'est pour cette raison que je dis que ce n'est pas sans fierté que nous pensons avoir trouvé, au ministère, une solution à ce problème. Il nous semble, en tout cas, que les gens des abattoirs au Québec sont assez contents.

Concernant les règlements, ils ont été publiés dans la Gazette officielle, le 25 janvier dernier. Les services d'inspection du ministère de l'Agriculture diffusent l'information aux propriétaires d'abattoirs. J'ai signé, la semaine dernière, de nombreuses lettres justement concernant des subventions pour ceux qui veulent se prévaloir des programmes. Je suis étonné que vous me disiez qu'il y en a qui ne sont pas au courant des règlements.

M. Dubois: Ils n'ont pas les règlements en main.

M. Garon: Ils ont été publiés.

M. Dubois: Oui, d'accord, dans la Gazette officielle, mais...

M. Garon: Oui.

M. Dubois: Vous aviez déjà dit à l'association que vous lui feriez part de la réglementation. Elle l'attend.

M. Garon: Oui. Mes renseignements indiquent — j'ai donné une conférence de presse au début de février annonçant le déclenchement d'une campagne d'information — que 60 000 documents seront distribués dans le secteur des viandes au Québec. Notre service d'inspection va rencontrer tous les gens des abattoirs et leur donner les documents dont ils ont besoin.

M. Dubois: C'est ce que je vous dis, ils ne les ont pas encore en main.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse...

M. Garon: Je suis étonné de cela. Le règlement a quasiment un pouce d'épaisseur. Selon la formule qui a été prise, les gens de notre service d'inspection rencontrent les propriétaires d'abattoirs individuellement. Il y a un tas de documents qui sont distribués, mais nos gens rencontrent les intéressés individuellement. Pourquoi leur arriver avec un règlement épais comme cela? J'ai lu le règlement, plusieurs fois. Je pourrais m'ouvrir une boucherie aujourd'hui. Il y a des...

M. Cordeau: Serait-ce plus payant?

M. Garon: Ce serait moins fatigant. J'ai lu le règlement à plusieurs reprises. C'est évident que cela prend des explications, même pour quelqu'un qui connaît le secteur, à plus forte raison pour celui qui connaît bien le secteur. Ce dernier doit poser des questions en lisant le règlement.

C'est pour cette raison qu'on a voulu que nos inspecteurs rencontrent les propriétaires d'abattoirs pour pouvoir discuter et leur expliquer le règlement, plus particulièrement les points importants du règlement.

Le Président (M. Jolivet): Maintenant que nous avons dépassé l'étape concernant d'abord l'interpellant et l'interpellé, je dois vous rappeler que chacun des députés a maintenant un droit de parole, incluant les questions et réponses, de vingt minutes.

Je reconnais, au nom du Parti libéral, M. Picotte (Maskinongé). Avant de vous donner cette spécification, je dois vous rappeler que le but de la rencontre "question avec débat" en commission parlementaire, est de poser des questions et de donner les réponses. Je vous inviterais à être brefs dans vos questions et, aussi, en même temps, brefs dans les réponses, de façon à pouvoir, au cours du temps qu'il nous reste actuellement, poser le plus de questions possible.

Je dois aussi vous faire remarquer que l'interpellant a un droit de parole privilégié, mais non exclusif, de telle sorte qu'il a le droit d'intervenir au niveau du débat maintenant, sans tenir compte des vingt minutes, quant à lui, ainsi que pour le ministre.

M. le député de Maskinongé.

Autre intervention M. Yvon Picotte

M. Picotte: M. le Président, tel qu'entendu en début de semaine entre vous-même, le député de Huntingdon et moi-même, je reconnais la motion privilégiée du député de Huntingdon. Vous me permettrez uniquement, comme je l'ai mentionné, d'intervenir durant quelques minutes pour donner une idée générale de ce que nous pensons, nous de l'Opposition officielle, concernant l'agro-alimentaire.

Par la suite, j'aurai, comme tous mes autres collègues, ici autour de cette table, à revenir sur des questions. Je sais que le député de Huntingdon a hâte de poser des questions à la suite de la réplique du ministre de l'Agriculture. Je pense qu'on respectera cela, M. le Président.

En 1971, le ministère de l'Agriculture présentait au Conseil des ministres un plan directeur dans lequel la philosophie et les grandes orientations de la politique agricole québécoise étaient définies. On établissait ainsi les principes de base d'une stratégie qui visait, premièrement, à réaliser une agriculture efficace et dynamique en mettant l'accent sur l'importance de la fonction de commercialisation des produits; deuxièmement, à assurer la mise en valeur des régions rurales par le biais de la réallocation des ressources.

En 1973, le gouvernement du Québec élargissait le cadre juridique du ministère de l'Agriculture, explicitant le rôle du ministère en ce qui concerne les activités de production et de transformation, de distribution et de commercialisation et aussi d'utilisation des produits agricoles. Ce nouveau cadre permettait en outre, au ministère de l'Agriculture, d'accorder des garanties d'emprunt ou des avances à toute corporation exerçant des activités similaires à celles des sociétés coopératives.

En 1974, le ministère de l'Agriculture présentait une esquisse préliminaire intitulée "vers un développement intégré". En 1975, le gouvernement, par la loi 22 — pas celle qui a fait tant de bruit — créait la Société québécoise d'initiatives agro-alimentaires, soit la SOQUIA. Vous avez donc, M. le ministre...

M. Garon: ...

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Picotte: Je me permets de vous le rappeler bien amicalement quand même. Cela peut vous indiquer que ce que vous avez dit au début de votre intervention n'était peut-être pas tout à fait exact. Grâce au gouvernement libéral des années soixante-dix par ces politiques que je viens de vous énoncer...

M. Garon: ... pas fonctionné beaucoup.

M. Picotte: ... tous les éléments nécessaires pour doter le Québec d'une véritable industrie agro-alimentaire. Vous admettrez quand même que, si vous n'aviez pas déjà ces éléments nécessaires, vous auriez beaucoup de travail de déblaiement à faire, ce que vous n'avez pas. Il vous reste maintenant à agir. Cette industrie, l'agro-alimentaire, est le pivot moteur de l'ensemble industriel québécois, l'élément majeur du développement régional. Dans plusieurs régions, cette industrie se présente comme la première ou la deuxième industrie d'importance. Dans les régions de Montréal et de Québec, entre autres, elle se situe au premier rang pour, premièrement, le nombre d'établissements, le nombre d'emplois créés et le nombre d'emplois qui gravitent autour de cette industrie, les salaires, aussi les achats et les expéditions. La préservation et le maintien du dynamisme régional devra s'ancrer — et vous en êtes sans doute conscient — autour de cette industrie agro-alimentaire.

Le député de Huntingdon, précédemment, a touché quelque peu aux coopératives agricoles. Les coopératives agricoles ont, certes, un rôle très important et essentiel à jouer dans ce secteur particulier. Nous en convenons, mais il faudrait, M. le ministre, que ces coopératives demeurent et ne deviennent pas si immenses que les coopérateurs eux-mêmes qui font partie de cette coopérative n'aient plus le contrôle de leur coopérative. Je me permettrai de vous donner un exemple que je trouve curieux dans les circonstances. Il m'a été rapporté tout dernièrement le cas d'un producteur qui fabrique du fromage; son fromage Cheddar, entre autres, a été médaillé et a reçu les plus hauts grades de plusieurs pays, plusieurs provinces comme qualité. Il s'agit de M. Albert Perron, de Saint-Prime, dans le comté de Roberval. Aussi paradoxal que cela puisse paraître, malgré le degré d'autosuffisance et d'auto-approvisionnement en lait, au Québec, que nous possédons présentement, qui se situe à 143%, croyez-moi, ce monsieur vient de perdre des commandes énormes parce qu'il ne peut pas s'approvisionner en lait. Alors, on dépasse de 43% la production, on a un surplus. Malgré tout cela, même si le fromage est de qualité rare et supérieure, et c'est reconnu, même si les demandes en Europe sont très fortes, ce même monsieur m'a mentionné que, dernièrement, il a dû refuser des contrats avec...

M. Garon: Du fromage exporté? Du fromage en Europe?

M. Picotte: Oui, cela se produit. M. Garon: Où cela?

M. Picotte: Le fromage Cheddar, en Angleterre, entre autres. (11 h 30)

M. Garon: Oui, avant l'entrée de l'Angleterre dans le Marché commun; cela a plutôt baissé depuis ce temps.

M. Picotte: Mais il reste quand même que cette compagnie, ce personnage pourrait avoir des contrats additionnels pour rien, fabriquer encore davantage, mais il ne peut pas tout simplement s'approvisionner en lait, alors que tout le monde connaît le problème des producteurs de lait au Québec. C'est un exemple entre autres.

M. Garon: Si vous permettez, je vais vous donner l'assurance d'une chose. S'il y a quelqu'un au Québec qui a des marchés pour du fromage Cheddar et qui manque de fromage pour en exporter, qu'il m'appelle, on va s'occuper de lui en fournir.

M. Picotte: II manque de lait pour en produire. Il ne manque pas de marchés, il en a amplement, je vous l'ai dit tantôt. Il a perdu des contrats, un de $1 million, entre autres, dernièrement, parce qu'il manque de lait. Et on a un surplus de lait. On a un surplus de lait... Bon, le député de Verchères, je viens de vous réveiller?

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Picotte: C'est intéressant mon affaire!

M. Charbonneau: Je pose une question. C est un débat.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé, . le député de Verchères.

M. Garon: C'est un débat...

M. Picotte: Je pense que c'est un cas entre autres. On doit mentionner jusqu'à quel point il peut y avoir certains malaises, certaines difficultés chez les petites et les moyennes entreprises ici même au Québec dans le développement régional agricole. Je pense que c'est important. Cela fait suite à ce que je disais au sujet du développement agro-alimentaire au niveau régional, qui est quand même primordial. De plus, SOQUIA aurait un rôle essentiel à jouer à la condition, cependant, que le présent gouvernement incite cette société à investir dans des secteurs nouveaux. Pourquoi SOQUIA ne se pencherait-elle pas sur les problèmes des propriétaires de serres? Vous en avez déjà parlé tantôt, mais cela fait huit mois que le ministre, selon les renseignements que nous avons obtenus du président, a un rapport d'experts sur le secteur des serres en particulier.

M. Garon: ... davantage.

M. Picotte: Le 15 novembre dernier, le ministre a dit qu'il n'avait pas encore reçu ce rapport ou en tout cas qu'il ne savait rien de ce que pouvait contenir ce rapport, qui, pourtant lui aurait été remis au mois d'août. J'espère que le ministre a trouvé son rapport depuis ce temps et que cela progresse pour tâcher de régler le problème le plus rapidement possible.

J'ai eu l'occasion de relire, à un moment donné, dans certains journaux, des déclarations de ministres lors de certaines tournées qu'ils font

en province, et je demanderais au ministre de l'Agriculture, au lieu de dire aux producteurs, comme il l'a fait dans le comté de Portneuf, que l'UPA ne s'est jamais préoccupée de l'agro-alimentaire...

M. Garon: Qui vous a dit cela?

M. Picotte: Je vous enverrai la copie du journal à votre bureau. Vous auriez avantage à lire les rapports que vous envoient les producteurs agricoles et à y donner suite.

M. Garon: Si vous lisez Tarzan, croyez-vous à cela? C'est dans le journal, Tarzan!

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.

M. Picotte: Une autre chose que le ministre pourrait faire, d'autant plus qu'il a de nombreux collaborateurs à son bureau, ce serait de ressortir le rapport du ministère des Communications concernant la grande tournée ministérielle, et vous allez retrouver cela à l'intérieur. C'est là qu'on l'a pris.

Cette industrie agro-alimentaire recourt au service des agriculteurs, des manufacturiers et des commerçants parce que cette industrie regroupe l'ensemble des activités impliquées dans la production alimentaire depuis la ferme et ses intrants jusqu'à la consommation. Lors du mini-sommet agro-alimentaire — j'espère que ce mini-sommet va donner des suites beaucoup plus heureuses que le mini-sommet économique que nous avons connu à la Malbaie et qu'il va produire davantage...

M. Garon: Ce ne sera pas un mini-sommet, cela va être un sommet.

M. Picotte: Cela va être un sommet? M. Garon: Ah oui!

M. Picotte: Eh bien! vous en avez perdu parce que l'année dernière, aux crédits, vous parliez des états généraux; à un moment donné on a parlé de mini-sommet et là on est au sommet. Ce n'est pas pire, on va être au centre finalement.

M. Garon: Cela va durer trois jours, il y aura plus de 200 personnes.

Le Président (M. Jolivet): Souvenez-vous de ce que vous avez dit tout à l'heure. Posez des questions.

M. Picotte: On m'interpelle, M. le Président et comme c'est là, je me demande si ce n'est pas moi qui dois répondre.

Le Président (M. Jolivet): Vous allez dépasser vos 20 minutes, ça ne sera pas long.

M. Picotte: Le ministre m'interroge continuellement.

M. Garon: Depuis le changement de gouvernement, il n'y a jamais rien de "mini" dans l'agriculture maintenant.

M. Picotte: Lors du mini-sommet agroalimentaire — et je termine là-dessus, encore quelques minutes — il vous faudra amener les agriculteurs, les manufacturiers, les commerçants à oeuvrer ensemble au développement de notre industrie agro-alimentaire, mais pour les convaincre, le gouvernement péquiste devra prouver à ces catégories d'individus — agriculteurs, manufacturiers et commerçants — qu'il veut une telle industrie. Pour cela, M. le Président, vous devez préserver, premièrement, le potentiel des sols arables québécois — pas seulement le dire, mais agir dans ce domaine.

M. Garon: C'est ce qu'on fait.

M. Picotte: Deuxièmement, optimiser l'utilisation de ces sols et maximiser leur rendement; troisièmement, inscrire au premier rang des priorités de l'Etat québécois le développement de la production agro-alimentaire. En d'autres mots, en réalité, au lieu de mettre tout sur le dos du fédéral, sur le dos des anciens gouvernements — c'est maintenant vous qui êtes là — vous devez agir le plus rapidement possible; vous avez les outils pour le faire et je vous l'ai souligné au début. Encore une fois, ne perdez jamais de vue que vous devez — comme je l'ai mentionné tantôt — préserver nos sols arables par une loi de zonage agricole et ce le plus rapidement possible, optimiser l'utilisation de ces sols et maximiser leur rendement...

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. Picotte: ... et troisièmement, encore une fois, inscrire au premier rang des priorités de l'Etat québécois le développement de la production agro-alimentaire. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): M. le ministre a des réponses à apporter à ces commentaires.

M. Garon: M. le député de l'Opposition officielle, je me demande si l'Opposition officielle, quand on va légiférer dans le domaine de la protection des terres agricoles, aura la même grandeur d'âme que l'Opposition officielle a eue en Colombie-Britannique en ne combattant pas le gouvernement, mais en appuyant sa politique de protection des terres.

M. Picotte: C'est garanti, M. le ministre, quand cela sera déposé, mais commencez par le déposer.

M. Charbonneau: Cela ne dépassera pas six mois.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Garon: Quant au rapport sur les serres, vous vous référez à un article que vous avez vu

dans le journal hier. On parle d'une association de formation récente — cela commence bien mal, elle ferait bien mieux d'écrire au ministère que de faire de grands "sparages ". Je vous dirai ceci: Le rapport dont on parle se résume en gros à faire d'autres études et former des gens qui connaissent les serres pour qu'il y ait davantage d'instructions, de cours, de recherches dans le domaine des serres au Québec. Ce sont à peu près les 40 conclusions de ce rapport.

M. Picotte: Je suis bien prêt à prendre la parole du ministre, M. le Président...

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Picotte: ... mais est-ce que le ministre accepterait de déposer ce rapport en Chambre?

M. Garon: On peut le déposer, je suppose.

M. Picotte: La semaine prochaine?

M. Garon: Oui.

M. Picotte: D'accord.

M. Garon: Je vais vous en envoyer une copie, si vous voulez.

M. Picotte: Parfait.

M. Garon: Ce n'est pas un rapport qui va faire une révolution dans le domaine des serres, demain matin, mais cela se comprend — je le disais tantôt — on n'a pas une grande expérience dans ce domaine. Quant au sommet agro-alimentaire, je vous dirai qu'il doit avoir lieu bientôt, soit les 10, 11 et 12 avril. Ce sommet permettra, pour la première fois, de réunir des gens de différents milieux impliqués dans l'agro-alimentaire. Contrairement à ce qu'on a pu laisser entendre, un journaliste me montrait, hier, un article qui disait qu'on n'inviterait pas un tel et un tel, cela n'est pas vrai, c'est tout le monde qui est impliqué dans le secteur agro-alimentaire et tout le monde sera invité. J'espère qu'on n'a pas fait d'oubli. La seule chose, c'est que les gens qu'on aurait pu inviter auraient pu être dix fois plus nombreux, mais il fallait limiter le nombre et cela a été un sacrifice ou un effort, parce qu'il n'était pas facile de déterminer des listes de personnes pour en arriver à ce sommet et pour assurer la représentativité la plus équitable possible du secteur agro-alimentaire. C'est cela que je vous dis, il y a plusieurs personnes qui travailleront sur ce sujet et cela n'est pas facile.

Quant aux instruments dont vous avez parlé — et surtout un instrument dont vous avez parlé — SOQUIA, la Société québécoise des initiatives agro-alimentaires, c'est vrai qu'elle existait, mais le gouvernement antérieur n'a pu s'entendre sur la lettre de directives à lui donner, et qui était prescrite dans la loi qu'il avait votée. SOQUIA existait bien depuis le printemps 1975. Elle n'avait rien fait, sauf recevoir des demandes d'entreprises, mais elle n'a pas pu agir parce qu'elle ne savait pas comment le gouvernement voulait qu'elle agisse. Heureusement, pendant ces temps d'inactivité du régime libéral, elle a accumulé des fonds, de sorte que les fonds qu'elle a accumulés pendant ces trois années, nous avons pu les investir tous en 1977, ce qui nous a permis d'aller plus rapidement parce qu'il y avait des fonds que le gouvernement antérieur n'avait pas utilisés qui étaient là, qui dormaient et que nous avons pu investir.

M. Picotte: Vous multipliez les années par deux.

M. Garon: 1975/76, 1976/77, 1977/78. Cela fait trois ans. $3,5 millions par année. Une année de $3 millions, deux années de $3,5 millions, cela fait $10 millions.

M. Picotte: C'est encore beau que...

M. Garon: Même à cela, elle a manqué d'argent, il a fallu qu'elle emprunte.

M. Picotte: C'est encore beau que vous acceptiez cela. Il y a des députés du gouvernement qui viennent de le réaliser, qui pensaient que cela avait été fait à la dernière session.

M. Gagnon: Chacun son tour.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé, je tiens à vous faire remarquer qu'avec les interventions que vous faites et les réponses du ministre, votre temps est écoulé.

M. Picotte: Je suis l'exemple du ministre, M. le Président. Je m'excuse, le mauvais exemple entraîne.

M. Garon: De petites interdictions de temps en temps, M. le Président, cela ne me dérange pas beaucoup.

Le Président (M. Jolivet): Sauf qu'on est en train de faire un peu de droit nouveau, M. le ministre, et qu'il est important de s'en tenir à cela.

M. Garon: Oui, mais vous savez, quand on passe des dizaines d'heures ensemble par semaine, si on ne peut pas se faire une petite blague une fois de temps en temps, on va avoir l'impression d'être à l'école. On va avoir l'impression que vous êtes un genre de maîtresse d'école. Avant d'être au Parlement, je pensais que cela pouvait être guindé terriblement, mais je pense que cela ne peut pas toujours être guindé parce qu'on passe des heures ensemble et, si on n'est pas capable de lancer une blague de temps en temps, le monde va vivre un peu malheureux.

Le Président (M. Jolivet): A la suite de cette interruption, je remets la parole au député de Huntingdon et ensuite je reconnaîtrai les députés de Verchères, Champlain, Arthabaska ainsi que Saint-Hyacinthe.

M. Dubois: Je voudrais tout de suite indiquer au ministre...

M. Charbonneau: Une question de règlement. Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Charbonneau: M. le Président, j'avais pris la peine de demander au président qui vous a précédé une directive au début de la séance et on m'avait très bien indiqué qu'après l'intervention du député de Huntingdon qui parlait le premier et qui avait 20 minutes, et, par la suite, une réplique du ministre, l'autre parti de l'Opposition avait un droit de parole et ensuite les intervenants, selon la demande. Je pense que j'avais manifesté mon intention d'intervenir avant même que vous soyez assis à ce siège. Je me demande comment on procède, parce que, finalement, cela sert à quoi que des députés soient ici? C'est aussi bien d'aller travailler dans nos bureaux et de laisser trois ou quatre gars faire le "show".

M. Picotte: M. le Président, une question de règlement.

M. Cordeau: Le député de Verchères veut participer au "show".

M. Charbonneau: Oui, certainement.

M. Picotte: Je pense bien qu'il ne faudrait pas commencer...

M. Cordeau: Premièrement, ce n'est pas un "show".

M. Gagnon: On a des choses à dire, des faits à...

M. Garon: M. le Président, est-ce que je...

M. Gagnon: On a des questions intelligentes à poser.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Picotte: Une question de règlement, M. le Président.

M. Garon: Je pourrais continuer ma réponse tout simplement.

Le Président (M. Jolivet): Je pense que je suis, quant à moi, assez apte à décider. Je ne sais pas ce que vous voulez donner comme question de règlement, si c'est à la suite de cela.

M. Picotte: M. le Président, je ne veux pas qu'on commence à faire de la procédurite. Cela s'est passé dans d'autres commissions parlementaires et on a vu le résultat que cela a donné. J'ai cru comprendre la décision du président ce matin. Il est exact que chacun des députés, il l'a mentionné, a le droit d'intervenir, mais je pense que la motion du député n'est pas privilégiée; cela ne lui donne pas un droit exclusif. Mais je pense qu'après son intervention de tantôt et celle du ministre, à prime abord, cela devrait être celui qui a présenté la motion qui a les premières questions à poser en ce domaine. Par la suite, M. le Président, chacun des intervenants qui, à l'intérieur de ce débat, voudra poser des questions, pourra le faire à tour de rôle, comme cela se fait. En premier lieu, j'ai nettement...

Le Président (M. Jolivet): Bien.

M. Picotte: ... l'impression que c'est cela et c'est dans ce sens que j'ai compris, ce matin, la décision du président.

Le Président (M. Jolivet): Si vous voulez faire de la procédure pour écouler le temps, vous allez perdre votre droit de parler. J'ai dit qu'après le député de Huntingdon, je reconnaîtrais les députés de Verchères, Champlain, Arthabaska et Saint-Hyacinthe.

M. Charbonneau: II a eu 20 minutes pour poser des questions et il n'en a pas posé une. Qu'est-ce que cela donne?

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, M. le député de Verchères, le règlement est clair sur cela.

M. Charbonneau: Je m'en vais travailler dans mon bureau, je n'ai pas de temps à perdre.

Le Président (M. Jolivet): D'accord, vous avez ce droit. M. le député de Huntingdon.

Période de questions

M. Dubois: Merci, M. le Président. Tout à l'heure, j'ai discuté de zonage des productions. Quand j'ai parlé de zonage de production, dans ma première intervention, je n'ai pas parlé d'une intervention forcée du ministère, mais bien incitative. C'est dans ce sens-là que je le vois, mais, quand même, je pense que ce serait charrier que de vouloir m'imputer des paroles que je n'ai pas dites. (11 h 45)

M. Garon: C'est une tendance quasiment vers le communisme que de forcer du zonage sur les productions.

M. Dubois: Je n'ai pas dit forcer, j'ai parlé de mesures incitatives de la part du ministère. Je pense qu'il va falloir arriver à ça un jour, quand même. C'est important.

M. Garon: Oui, oui.

M. Dubois: M. le ministre, j'aimerais vous lire un passage publié par la Société coopérative agricole québécoise des producteurs de lait nature. C'est sur ce feuillet; vous l'avez peut-être.

M. Baril: Question de règlement. On a bien dit tout à l'heure que le député de Huntingdon avait

droit à une question. Il a commencé par le zonage et il est rendu à une question de lait. C'est une question principale à deux ou trois volets. Cela ne marche plus.

M. Dubois: Mon premier thème...

M. Baril: II n'est pas question de premier thème. Vous aviez droit à une première question. Vous l'avez posée, vous avez parlé de zonage. Vous n'avez pas laissé le temps au ministre de répondre, vous avez tout de suite enchaîné une autre conversation...

M. Dubois: Non, c'était à lui de répondre. M. Baril: ... sur le problème du lait.

M. Dubois: C'était strictement une réponse au ministre, tout à l'heure, ça.

M. Baril: Vous posez deux questions.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d Arthabaska, je dois vous dire, au départ, que vous allez avoir le droit de parler; sauf que le problème qui va résulter de cette "procédurite " sera que vous n'aurez pas la chance de parler, si ça continue ainsi.

M. le député de Huntingdon a le droit de parole, il pose des questions auxquelles il a droit, en termes privilégiés, je ne peux pas lui enlever ce droit, sauf que vous n'aurez pas le droit de parole par la suite.

M. Baril: II va en rester?

Le Président (M. Jolivet): II va en rester.

M. Dubois: A l'intérieur du premier thème que j'ai développé tout à l'heure, j'aimerais lire un passage qui m'amène à une foule de questions, suite à la distribution et à la répartition des quotas de lait. L'objectif général vise à développer le marché du lait de consommation et des produits laitiers, au Québec. Alors, je vous lis le texte comme tel: "Avant de penser à développer un marché, on doit se préoccuper de maintenir en place les usines existantes." C'est dit par la Coopérative de lait du Québec. "Pour ce faire, la Société coopérative agricole a acheté des usines et préconise la formation d'une structure provinciale nouvelle pour encourager le maintien et le progrès des usines régionales existantes".

Alors, on reste quand même dans le cadre de conserver ce qui existe aujourd'hui, donc maintenir un équilibre concurrentiel sur le marché du lait de consommation. Si je vais plus loin: Favoriser le maintien d'usines régionales en vue de diminuer les frais de transport. En plus, on explique ici que l'expérience vécue a prouvé que les coopératives, actuellement, tentent d'acheter les usines régionales et à les fermer pour obtenir des subventions gouvernementales.

Notre approche est différente, puisqu'on encourage le maintien et la formation d'entreprises régionales. Alors, si, dans l'esprit du gouvernement, on s'en va vers une centralisation — on l'explique bien ici — un jour, il faudra payer pour décentraliser. C'est ce qui peut être l'erreur du gouvernement, actuellement. Je voulais justement le spécifier.

M. Garon: J'aimerais vous poser une question. A quelle date a été faite votre citation?

M. Dubois: Elle n'est pas datée, mais ça ne fait pas longtemps, je l'ai reçue il y a seulement une semaine.

M. Garon: C'est assez important.

M. Dubois: Ecoutez, je vais trouver la date et je vous en ferai part. Mais dans le cadre...

M. Garon: Vous savez que, depuis ce temps, on a évolué considérablement dans le domaine du lait nature. Etes-vous au courant?

M. Dubois: C'est sorti il y a une semaine. M. Garon: Hein?

M. Dubois: II y a une semaine que c'est sorti. M. Garon: Ce n'est pas possible.

M. Dubois: Oui. Dans ce cas-là, je vais trouver la date exacte et je vais vous la donner. Je ne l'ai pas inscrite là-dessus.

Dans ce cadre-là, M. le ministre, je voudrais connaître les raisons qui ont amené le ministère à favoriser l'achat de la laiterie Laval par la Coopérative du Bas-Saint-Laurent, à l'aide d'une subvention de $417 000.

M. Garon: Ce n'est pas une subvention du ministère de l'Agriculture.

M. Dubois: Enfin, c'est subventionné par la Régie des marchés agricoles ou quoi?

M. Garon: Je l'ai appris par les journaux, comme vous, par la Société de développement industriel; j'ai vu cet article dans les journaux, mais ce n'est pas le ministère de l'Agriculture.

M. Dubois: Cela veut dire que c'est de l'érosion encore du ministère de l'Agriculture.

M. Garon: Non.

M. Dubois: Quand je parlais d'érosion tout à l'heure...

M. Garon: Pas l'érosion...

M. Dubois: ... quand on dit achat...

M. Garon: ... c'est la responsabilité, c'est à cause de votre directive entre 1966 et 1970, la décision qui s'est prise sous l'Union Nationale à ce

moment-là, a été de dire: Le ministère de l'Agriculture est uniquement un ministère de la production. Tout ce qui concerne la commercialisation et les entreprises dans le domaine alimentaire s'en va au ministère de l'Industrie et du Commerce. Ne venez pas me blâmer des conséquences de vos politiques. On essaie de réparer.

M. Dubois: Ecoutez, je n'étais pas là. On regarde vers le futur. On ne regarde pas le passé. Mais il reste qu'il y a un manque de cohérence dans les gestes, de part et d'autre.

M. Garon: On essaie que le ministère de l'Agriculture devienne de plus en plus le maître d'oeuvre. Mais je vous dis franchement que vous n'avez pas contribué dans ce sens-là au cours des années passées.

M. Dubois: Mais, M. le ministre, on pourrait quand même prouver que les $417 000 qui ont été versés n'amènent pas d'économies additionnelles dans ce secteur. Ils ne permettent pas de création d'emplois.

M. Garon: Ils se sont prévalus d'un programme qui existe à la Société de développement industriel qui dit que, dans des regroupements d'entreprises, il y a des possibilités de recourir à la Société de développement industriel. Cette coopérative s'en est prévalue. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise?

Il faudrait peut-être que vous vous disiez une chose. Quand des compagnies comme cela se vendent à des coopératives, habituellement, ce n'est pas parce que les profits sont mirobolants. Souvent, la coopérative qui achète l'usine vient rationaliser un secteur et souvent —je ne dis pas que c'est le cas de la laiterie Laval — vient empêcher une faillite, vous savez.

M. Dubois: Ce n'est pas le cas actuellement. Il y a plusieurs producteurs qui sont malheureux du fait que les coûts de transport dans le domaine du lait ont augmenté, parce que le lait vient d'une distance plus grande.

M. Garon: Cela a augmenté partout. L'essence a augmenté.

M. Dubois: Strictement à cause de ce geste, présentement.

M. Garon: Le prix de l'essence a augmenté.

M. Dubois: En plus, c'est qu'on participe à une disparité régionale accrue. C'est une autre cause. En plus, M. le ministre, tout à l'heure, vous avez parlé des petits abattoirs. Tout ce qui m'intéresse là-dedans, c'est qu'il y ait un comité conjoint de fonctionnaires et de membres de l'Association des petits abattoirs du Québec afin que dans le futur on puisse régler nos problèmes, et cela, rapidement. Je pense que cela pourrait être une promesse que vous pourriez faire pour les petits abat- toirs du Québec. Je ne sais pas si vous l'entendez de cette façon, mais je l'avais demandé lors de l'étude du projet de loi 43, en troisième lecture. Je ne sais pas si vous pouvez répondre favorablement à cela. Je pense que cela aiderait les petits abattoirs du Québec.

En plus, M. le ministre, j'ai commenté brièvement l'extrait du livre blanc sur la décentralisation. J'aimerais avoir des commentaires additionnels là-dessus, parce que cela touche l'agriculture quand même. On parle de décentralisation, d'une part; d'autre part, on centralise, si on regarde l'industrie laitière.

M. Garon: Je suis un peu étonné que cela vienne du livre blanc, ce que vous avez lu.

M. Dubois: C'est un extrait du livre blanc.

Cela vous touche. Vous allez avoir une rencontre des ministres demain ou après-demain là-dessus. Face au document de décentralisation, vous allez avoir une position à prendre au Conseil des ministres, j'imagine.

M. Garon: Habituellement, ma position au Conseil des ministres, je ne la dis pas dans les commissions parlementaires.

M. Dubois: Non, mais vous allez avoir une position à prendre quand même. D'accord?

M. Garon: Oui.

M. Dubois: Si vous prêchez la centralisation et que le livre blanc prêche la décentralisation, je me demande où cela va.

M. Garon: Vous savez que notre position a toujours été d'aller vers une plus grande décentralisation. Nous l'avons fait, dans les mois passés, depuis un an. Vous allez vous rendre compte dans les mois qui s'en viennent à quel point cela va devenir une réalité; même la décentralisation qu'on va faire au niveau des bureaux locaux et des bureaux régionaux. Et on n'attendra même pas le livre blanc. C'est déjà commencé.

M. Dubois: Je ne peux pas vous forcer à commenter le livre blanc, je suis d'accord. Mais on s'aperçoit qu'il y a des points de vue bien différents, si on prend le livre blanc, d'une part, et les politiques actuelles du MAQ.

Il y a un autre aspect qui serait pas mal intéressant, M. le ministre, si on regarde le cartel évident des coopératives. Je pense que le service de la mise en marché devrait déclarer la coopérative acheteuse de lait au même titre que l'entreprise privée. Je pense que cela réglerait beaucoup de problèmes au niveau de la distribution du lait. Je ne sais pas quel est votre point de vue là-dedans.

M. Garon: Je pense que le lait, c'est un problème d'ensemble. Il n'y a pas seulement une solution au problème. C'est un problème d'ensemble. Maintenant, qu'on parle de cartel des coopé-

ratives, vous savez, je connais cela un peu, j'ai enseigné le droit des coopératives, à l'Université Laval.

C'est la formule la plus démocratique qui puisse exister, puisque les coopératives sont formées de tous les membres qui sont des agriculteurs eux-mêmes. Evidemment, dans certains cas, parfois, il y a un leadership peut-être plus fort. Il peut y avoir moins de participation ou plus de participation, mais quand les coopératives se développent et qu'elles grossissent, c'est évident qu'elles ne peuvent pas fonctionner de la même façon que pour une coopérative qui vient de se former avec douze personnes et où tout le monde participe aux décisions. C'est clair.

Le mouvement coopératif, actuellement, c'est un succès. La Coopérative de Granby, je ne sais pas si vous connaissez le réseau d'animation qui existe là-dedans, mais je vous dis franchement qu'on ne peut pas parler d'une coopérative, à mon avis, où les membres n'ont rien à dire. Au contraire, il y a tout un réseau de participation, d'animation où les gens se rencontrent assez régulièrement. C'est évident que c'est une grosse entreprise. Dans une grosse entreprise, chaque fois qu'on achète un crayon, on ne demande pas la permission ni l'avis des membres. De la place pour l'amélioration, il y en a toujours.

M. Dubois: La raison pour laquelle je vous demande cela, M. le ministre, c'est que, tout à l'heure, j'avais suggéré un mode d'administration comme celui de l'Ontario dans le "Marketing board " sur le lait.

On s'aperçoit quand même que...

M. Garon: Ce n'est pas la même situation en Ontario.

M. Dubois: C'est peut-être moins gros, le lait industriel, je suis d'accord avec vous.

M. Garon: Oui.

M. Dubois: II reste que la coopérative, présentement, ici, au Québec, administre le plan conjoint de lait industriel. D'accord?

M. Garon: Je vais vous poser une question. Si vous voulez, on peut se poser des questions tous les deux.

M. Dubois: Oui, d'accord.

M. Garon: Que pensez-vous du fait que l'Union des producteurs agricoles m'ait demandé de ne pas intervenir dans le problème du lait parce qu'elle aimerait que les producteurs règlent cela entre eux? Pensez-vous que je devrais dire que l'Union des producteurs agricoles n'est pas importante et régler cela moi-même en leur disant de se "tasser" parce que je vais régler cela?

M. Dubois: Je pense qu'il y a quand même, jusqu'à un certain point, une autorité à avoir au niveau du ministère de l'Agriculture. Cela regarde quand même les producteurs du Québec. Quand un cartel ou un empire administre le plan conjoint, prend les tests de qualité, prend les tests de gras, est juge et partie dans tous les domaines, je pense que ce sont des pouvoirs passablement excessifs. En tout cas, je le vois de cette façon. On a souvent l'impression que le gouvernement veut combattre les multinationales, mais cela devient une multinationale intégrée au Québec quand même, et ses pouvoirs sont réellement excessifs. On entend souvent des plaintes de producteurs à cet effet.

J'imagine qu'un jour le ministre aura quand même à prendre une décision, parce que cela ne se fera pas tout seul.

M. Garon: Non, mais ce que je vous ai dit tout à l'heure, c'est ceci: Dès que l'Union des producteurs agricoles, qui regroupe tous les producteurs agricoles au Québec, demandera au ministre, au gouvernement d'intervenir, nous interviendrons. Mais, actuellement, la dernière demande de l'Union des producteurs agricoles au gouvernement est de ne pas intervenir.

M. Dubois: Vous parlez de l'unification des deux laits.

M. Garon: Je parle de l'unification des deux laits.

M. Dubois: Ce que je touche n'a rien à voir avec l'unification des deux laits quand même, parce que je touche à l'empire qui existe au niveau de la coopérative, en ce sens qu'elle a tous les contrôles absolus dans tous les domaines.

M. Garon: Dans le domaine du lait de transformation, le mouvement coopératif exerce un contrôle par différentes coopératives — c'est-à-dire que ce n'est pas la même coopérative, mais plusieurs coopératives — de sorte que 85% du lait de transformation passent par l'entremise des coopératives. Dans le domaine du lait de consommation, c'est environ 50%.

Je remarque une chose. Si la situation n'était pas comme cela, si cela appartenait à des compagnies étrangères ou à des multinationales, on dirait: Comme ce serait beau si cela appartenait aux coopératives. Là, cela appartient aux coopératives.

M. Dubois: Je ne suis pas contre les coopératives. C'est seulement aux pouvoirs excessifs des coopératives auxquels je m'en prends. Comme je l'ai dit tout à l'heure...

M. Garon: ... et on dit: C'est terrible...

M. Dubois: ... l'administration du plan conjoint est exercée par les coopératives. Le plan conjoint du lait industriel, c'est la coopérative qui l'administre.

M. Garon: Quand il y a un protocole d'entente entre la Fédération des producteurs de lait industriel et les coopératives, c'est...

M. Dubois: Quand c'est rendu à être juge et partie dans le même domaine, c'est quand même... C'est cela quand même, n'est-ce pas?

M. Garon: Non pas juge et partie. C'est que si on forme une coopérative ensemble, c'est notre organisme, c'est à nous autres la coopérative. La coopérative appartient à ses membres.

M. Dubois: Au niveau de l'entreprise privée, c'est la Régie des marchés agricoles qui prend les tests de qualité et de gras du lait.

M. Garon: Dans le lait nature, oui. Dans le lait industriel, c'est la coopérative. (12 heures)

M. Dubois: Je suis d'accord. C'est à ce moment qu'il fallait exercer des pouvoirs excessifs sur les producteurs. Si un producteur est un peu rebelle, on va dire: Place-toi, parce que c'est nous qui contrôlons ton test.

M. Garon: C'est une question qu'on regarde. Les producteurs nous ont parlé.

M. Dubois: C'est quand même intéressant. Je voudrais faire remarquer aux membres de la commission...

M. Garon: Pardon?

M. Cordeau: Vous avez été sensibilisé au problème?

M. Garon: Oui, on a un dossier là-dessus, sur la question des tests, pas un dossier où les gens disent d'une façon... à l'épouvante... Ils pensent que cela devrait être fait par le gouvernement. On remarque un souhait des producteurs. Nous ne sommes pas rébarbatifs à l'idée. C'est une question qu'on regarde actuellement. Qu'il y ait une inspection gouvernementale pour les tests de gras, soit, mais ce n'est pas un dossier actuellement où les gens se sentent avec un revolver sous la tempe.

M. Dubois: Ce n'est pas loin. Tout à l'heure, vous avez demandé la date de ce dossier, c'est le 6 janvier 1978. Vous pouvez en prendre note. En tout cas, cela fait quelques semaines, mais je ne l'ai reçu que la semaine passée. De toute façon, c'est de 1978, ce n'est tout de même pas de 1975, ni 1974, ni 1973.

M. Garon: Etes-yous au courant des derniers développements dans le domaine du lait au Québec?

NI. Dubois: Ecoutez, le 6 janvier, ce n'est pas loin du moins de...

M. Cordeau: Les producteurs de lait nature... M. Garon: Oui?

M. Cordeau: ... qui veulent acheter des laiteries?

M. Garon: Oui.

M. Cordeau: Probablement qu'ils vont avoir des subventions eux aussi pour les achats.

M. Dubois: Je vais laisser le temps aux autres membres de la commission de se souvenir... Il me reste un article à passer, et, après cela, je reviendrai.

M. Cordeau: Cela va être une société...

M. Dubois: J'aimerais seulement faire valoir au ministre la priorité que s'est acquise la productivité dans tout domaine au Québec. Je pense que c'est là qu'il va falloir attaquer l'agriculture. Je vais vous citer quelques chiffres comparatifs entre la production québécoise, dans chaque secteur donné, comparativement à celle du Canada, en moyenne, livres et acres. Cela touche tous les fruits et légumes. Si on prend la pomme de terre, dont on parlait tout à l'heure, le Québec a une moyenne de 13 300 livres à l'acre de production, quand la moyenne canadienne est de 18 510 livres. Si on va en Ontario, c'est 18 542 livres. Si on va en Colombie-Britannique, c'est 22 000 livres à l'acre. Si on prend les pois, on a 1643 livres, comparativement à la moyenne canadienne de 2561. Pour le maïs sucré, on a 5415 livres, comparativement à la moyenne canadienne de 17 384; pour les tomates, on a 6286 à l'acre, comparativement à 28 818, qui est la moyenne canadienne; pour les haricots, on a 3641 livres à comparer à 3961 ; pour les carottes, c'est 14 000 livres contre 22 000; pour le céleri, 25 000 contre 42 000; la laitue, 8000 contre 12 000; les oignons, 18 000 contre 23 000, et je pourrais continuer comme cela; c'est ainsi d'un bout à l'autre.

M. Baril: C'est parce qu'on ne force pas pour produire, parce qu'on n'a jamais eu de débouché pour ces produits.

M. Dubois: Oui, mais cela n'a rien à voir avec la productivité des sols. Je pense qu'en priorité, M. le ministre...

M. Garon: Vous allez être obligé de rajuster vos chiffres, parce que vous sous-estimez nos producteurs agricoles. Dans le domaine des patates, vous venez de dire que la production est de 18 510 livres. J'aimerais vous dire que...

M. Dubois: Pour le Québec, c'est 13 300 de moyenne.

M. Garon: 13 300? Je pense que ce sont des chiffres qui datent du temps de l'Union Nationale. Je vais vous donner la moyenne de production pour les producteurs assurés avec l'assurance-stabilisation du revenu, 250 quintaux; en multipliant par 100 livres au quintal, cela veut dire 25 000 livres à l'acre. C'est ce qu'on me dit. Je ne suis pas un spécialiste dans les poids et mesures.

M. Dubois: Cela vient de Statistique Canada, ce n'est pas des chiffres que j'entendais...

M. Garon: Je vous dis, et c'est l'assurance qu'on a, qu'il y a eu des tests, dans chacun des champs des producteurs. C'était une moyenne de 250 quintaux à l'acre.

M. Baril: Le Canada, c'est quand même les mêmes statistiques qu'au Québec.

M. Garon: Cela tait 25 000 livres à l'acre.

M. Dubois: Le Québec va chercher ses statistiques à Ottawa.

M. Garon: C'est vrai que, depuis qu'il y a eu un changement de gouvernement, les cultivateurs sont peut-être plus encouragés.

M. Dubois: Je veux seulement vous faire part...

M. Cordeau: II n'y a pas de problème en agriculture! C'est ce que vous voulez dire, qu'il n'y a pas de problème en agriculture?

M. Garon: Non, je ne dis pas cela. Je dis que les rendements ont été assez bons cette année, qu'il y a eu des incitatifs dans le programme d'assurance-stabilisation. La moyenne qui avait été prévue au programme, c'était de 170 quintaux. Cela veut dire 17 000 livres. Le rendement, en 1978, était de 250 quintaux.

M. Dubois: En tout cas, ce que je vous cite, c'est un document quand même officiel. Il est là et il existe à Statistique Canada. Je ne veux pas soulever trop de points là-dessus, mais je pense qu'il y a lieu de s'attaquer premièrement à la productivité.

M. Garon: On est d'accord avec vous à 100%.

M. Dubois: ... parce que c'est notre problème au Québec.

M. Garon: Je vais vous donner seulement quelques exemples.

M. Dubois: Si on n'est pas en concurrence pour la productivité, on ne peut pas s'attendre à pénétrer les autres marchés.

M. Garon: C'est ce qu'on fait.

M. Dubois: Je pense qu'il faut s'attaquer à la productivité.

M. Garon: Quand vous parlez de productivité, prenez le drainage cette année, on a posé près de 77 millions de pieds de drain, c'est deux fois et demie plus que pendant les vingt ans que l'Union Nationale a été au pouvoir. Seulement dans une année.

M. Dubois: Ecoutez, M. le ministre. Je vais réfuter vos arguments. Je le sais, en pieds, je suis d'accord. Mais reculez il y a 20 ans; premièrement, il y avait cinq ou six machines, propriété du ministère, qui posaient environ 200 000 ou 300 000 pieds chacune par année. Il n'y avait pas d'industries privées impliquées dans le drainage des fermes. En 1968, ce fut la première implication de l'entreprise privée dans le drainage. Trois ans après sont arrivées ce qu'on appelle les taupes, qui posent environ 2 millions ou 3 millions de pieds chacune par année. Il ne faut pas imputer à l'ancien gouvernement le fait qu'il n'y a pas eu beaucoup de pieds. Il n'y avait pas d'outillage, il n'y avait pas d'entreprises privées.

M. Garon: Cela se faisait en Ontario. On est 20 ans en arrière de l'Ontario.

M. Dubois: II reste, M. le ministre, que l'outillage que nous avons aujourd'hui n'existait pas il y a dix ans. Alors...

M. Garon: Non, il n'y avait pas d'outillage...

M. Dubois: C'est l'entreprise privée, quand même, qui a poussé...

M. Garon: Mais il y en avait en Ontario. M. Dubois: ... qui a incité...

M. Gagnon: N'oubliez pas que l'Ontario est drainé...

M. Garon: Pourquoi l'Ontario était-elle 20 ans en avant de nous?

Le Président (M. Jolivet): ... après.

M. Dubois: Les producteurs payaient eux-mêmes en Ontario tandis qu'ici, on était subventionné et ce sont les producteurs qui ne le demandaient pas. Si les producteurs l'avaient demandé, ils l'auraient eu!

M. Garon: Non, parce qu'on les amusait dans les heures de "bull" à ce moment-là.

M. Dubois: Ne charriez pas là-dessus. Mais, quand même, il reste que c'est facile aujourd'hui de poser 90 millions de pieds. C'était impossible il y a 20 ans.

M. Garon: Je vais vous donner des exemples pour vous montrer la modernisation dans le domaine agricole. Cette année, on a aidé une entreprise, au niveau de la production, pour faire le prérefroidissement des fruits et légumes par le procédé à l'eau, c'est une subvention. Il y a eu, dans l'aide à l'implantation de postes de conditionnement, sept subventions, quatre dans les pommes de terre, trois dans les piments et concombres. Au programme d'implantation de chaînes de froid, il y a eu douze entreprises, douze subventions. Programme spécial d'entreposage pour les fruits et légumes, il y a eu six subventions, alors, six entreprises se sont modernisées; et nous avons eu 18 subventions pour 18 programmes différents de

promotion de produits agricoles québécois, en association avec les producteurs concernés.

Evidemment, il ne faut pas penser que, dans un an, on va réformer toute l'agriculture au Québec, mais vous pouvez être certains que, dans le sens de ce que vous dites, pour augmenter la productivité, on s'y dirige d'une façon inéluctable. Cette année, nous envisageons, par exemple, dans le drainage, 90 millions de pieds, et cela veut dire que c'est autant de drainage qu'il y a eu dans l'histoire du Québec, depuis 1900 à 1973. C'est la plus grosse année. Alors, s'orienter dans le sens de la productivité, c'est exactement ce qu'on veut faire; pas ce qu'on veut faire, ce qu'on est en train de faire.

Le Président (M. Jolivet): Une dernière question avant de passer au député de Champlain.

M. Dubois: Une question que j'avais posée tout à l'heure. Au niveau des usines de transformation, je suggère depuis longtemps, dans la région de Montréal, parce que la production maraîchère se fait là, j'ai parlé de déshydratation, de congélation, congelé à sec, on parle de "cannage" de tomates, j'ai parlé des sept ou huit projets d'alimentation qui pourraient s'implanter avec SOQUIA. Est-ce que cela vous intéresse, quand même, ce projet-là?

M. Garon: Cela m'intéresse, mais, dans le domaine des tomates, on produit à peu près 5% de ce qu'on consomme.

M. Dubois: C'est pour inciter à la production de tomates. On n'a pas de conserveries de tomates ici au Québec. Vous le savez!

M. Garon: On ne produit quasiment pas de tomates. Il va falloir développer la culture en serres pour arriver aux tomates. Il ne faut pas mettre la charrue devant les boeufs.

M. Dubois: Je ne parle pas de tomates fraîches.

M. Garon: Si on établit des conserveries dans le domaine des tomates, elles vont manquer de tomates.

M. Dubois: Je ne parle pas de tomates fraîches, je parle de tomates à plein champ. Les tomates fraîches, en serres, hors saison, c'est un domaine. Mais il y a une production de tomates dans le champ. On a des belles terres de libres dans le sud de Montréal. Il y aura même des terres drainées, cette année, qui ne seront pas cultivées parce qu'il n'y a pas de rentabilité à semer du blé ou de l'avoine ou de l'orge. Alors, les gens devraient aller vers d'autres cultures. Il y a une possibilité de $300 millions de chiffres d'affaires au Québec dans la tomate transformée: jus de tomate, tomate en pâte, tomate en pièces. On ne fait rien là-dedans. Zéro. Je n'accuse pas, mais je pense qu'on pourrait quand même avoir un programme incitatif.Il y a un problème de mise en marché qui s'additionne à cela. C'est là qu'on pourrait intégrer les sept ou huit projets d'alimentation, il y aurait une mise en marché tout de suite.

M. Garon: Ce que nous sommes en train de faire actuellement, on est en train de construire un programme de conserveries. Il va y avoir différentes phases. Actuellement, le programme est à peu près terminé. J'ai eu la première version sur mon bureau récemment et on a regardé, avec le sous-ministre, les parties qu'on devrait améliorer dans ce programme; on en a discuté ensemble et la version finale doit être préparée; ce sera la première phase en vue d'en d'arriver à une modernisation et à un développement des conserveries au Québec. Mais, à ce moment-là, nous sommes dans un domaine fragile. Ce ne sont pas des domaines où on peut faire une révolution en 24 heures. Il faut...

M. Dubois: II faut commencer.

M. Garon: Oui et le problème, c'est que, si nous avions eu toutes les études, si on était arrivé là et que toutes les études dans tous les domaines dont on a besoin avaient été faites, on n'aurait eu qu'à les appliquer. Pas de problème. Mais ce n'est pas le cas. La première chose qu'on doit se demander, c'est: Où se dirige-t-on exactement dans cela? Comme il n'y a pas d'étude, souvent il manquait d'expertise. C'est cela qu'il faut développer. C'est plus lent. Dans les domaines où on sait exactement ce qui en est et où on a l'expertise, quand les données sont là, on y va immédiatement. Mais dans ce domaine, je suis d'accord qu'il faut y aller le plus rapidement possible. Dans le domaine maraîcher, soit la plaine de Montréal, où il y a des vocations pour ce développement, il faudra y aller au maximun, mais il y a des étapes qu'on ne peut pas sauter.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Merci beaucoup, M. le Président. La dernière conversation que le député de Huntingdon a eue avec le ministre me fait penser que, dans le passé, chaque fois qu'on avait un problème agricole et qu'on rencontrait les autorités des gouvernements précédents, on nous parlait de la productivité, d'améliorer la productivité. Cela a été à peu près la façon dont on évitait les problèmes agricoles. Je suis entièrement d'accord avec l'amélioration de la productivité; c'est bien évident qu'il faut être compétitif. Mais, au fur et à mesure qu'on augmente la productivité de certaines spécialités agricoles, il faut aussi penser à avoir les débouchés et développer en même temps les marchés. Le problème qui est survenu, c'est que, aujourd'hui, la classe agricole ne croit plus trop à cet argument d'amélioration de la productivité; on n'a qu'à se rappeler le programme F-l qui avait été mis de l'avant en 1970 ou 1972. Pourtant, on s'est avéré tellement productif que, quand le temps est

venu de vendre le boeuf, on n'avait pas de marché pour le vendre. Je me souviens qu'il y a eu une réunion d'urgence à Drummondville, organisée par I UPA, pour essayer de venir en aide aux producteurs de F-l, un sous-ministre du temps avait dit: Malheureusement, probablement que nos fonctionnaires ont été trop bons vendeurs. Vous avez trop acheté le programme et vous avez été trop productifs; on est pris avec le boeuf. Mais ceux qui ont payé pour ont été les producteurs agricoles, si vous vous souvenez bien.

Je m'opposerais à ce qu'on parle uniquement de productivité sans parler d'un programme d'ensemble en même temps qu'on améliore la productivité; il faut penser au marché et penser à la mise en marché de ces produits.

Le représentant de Parti libéral a énuméré tantôt une nomenclature d'une série de belles lois et de cadres juridiques et de toutes sortes de lois qui ont été passées au cours de leur mandat de six années. Il a oublié de mentionner que ces lois ont été adoptées, probablement, mais elles n'ont à peu près jamais été mises en application. Il a oublié également la loi 44, dite de stabilisation des revenus. Vous vous souvenez que, lors des manifestations de 1974, alors que la classe agricole n'en pouvait plus et achevait de crever — parce que lorsque la classe agricole décide de descendre dans la rue, c'est parce que cela va passablement mal—l'ancien gouvernement avait adopté une façon de calmer les producteurs agricoles, soit de promettre une loi de stabilisation des revenus. C'était un des points. Cette loi a été promise en 1974; elle a été votée en juin 1975 et, comme par hasard, elle a été mise en application le 10 novembre 1976. Quand on dit au ministre d'aller plus vite, à cet égard, je suis d'accord pour dire que les malaises agricoles sont grands et qu'il faut se dépêcher. Il y a des choses à faire, on a énormément de retard à rattraper.

On n'a certainement pas de leçon à donner, par exemple, sur la vitesse à corriger le problème agricole de la part des anciens gouvernements. On vient de parler de drainage et on dit qu'au Québec, c'est un fait, on n'a certainement pas notre place et nos sols ne sont certainement pas assez drainés actuellement pour faire face à la compétition, entre autres, de l'Ontario. On a dit que c'était la faute des machines et la faute d'une foule de choses. A mon avis et tenant compte du temps et de l'expérience que j'ai eue à travailler avec les agriculteurs, la faute vient de la volonté politique des anciens gouvernements, parce que les mêmes machines qui existaient au Québec, existaient aussi en Ontario. Si je ne m'abuse, je crois que l'Ontario est drainé à presque 90% de son sol arable. Est-ce exact?

M. Garon: Les raisons sont autres que politiques...

M. Dubois: ...

M. Gagnon: De toute façon, le rendement vient aussi après le drainage. Une des raisons était la volonté politique de le faire. Je pense qu'on a démontré depuis un an, qu'on a cette volonté politique; mais encore là, il y a énormément de rattrapage à faire.

M. Picotte: ...

M. Gagnon: Oui. C'est pour cette raison que vous êtes disparus assez vite.

M. Picotte: Votre tour s'en vient, cela ne sera pas bien long, ne vous fatiguez pas avec cela.

(12 h 15)

M. Gagnon: Parce que vous avez montré uniquement de la bonne volonté, mais jamais d'action.

M. Picotte: Votre tour s'en vient, ce ne sera pas bien long, ne vous fatiguez pas avec cela.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Gagnon: Je peux en parler en connaissance de cause, M. le député de Maskinongé, parce qu'à ce moment-là j'étais...

M. Picotte: Faites donc au ministre les mêmes demandes que vous aviez faites à l'UPA, à Trois-Rivières quand vous trouviez que ce n'était pas assez...

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Cordeau: M. le Président, une directive.

Le Président (M. Jolivet): Oui.

M. Cordeau: Je crois que le but de cette réunion est de poser des questions au ministre sur l'agro-alimentaire; ce n'est pas de...

M. Gagnon: C'est exactement ce que je veux faire, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): II y a une question de directive.

M. Cordeau: Je crois que c'est bâti de façon que le parti qui pose les questions puisse s'exprimer, l'autre parti aussi, ensuite c'est le ministre qui répond. Mais je crois que cela ne doit pas dégénérer en discours du parti au pouvoir pour défendre le ministre. Je crois que le ministre est assez âgé pour répondre lui-même aux questions et défendre ses politiques.

M. Picotte: Ce n'est pas une question de règlement, c'est une directive qu'il vous demande.

Le Président (M. Jolivet): J'ai dit tout à l'heure, et je le répète, pour répondre à votre question de directive, M. le député de Saint-Hyacinthe, que l'on pose des questions et qu'on évite de trop argumenter pour permettre aussi des réponses et des questions rapides.

M. Gagnon: Je vous remercie, M. le Président, et je suis tout disposé à suivre vos directives, excepté qu'on me permettra, moi aussi, un bref préambule.

M. Cordeau: Cela fait six minutes. Cela fait un préambule de six minutes, M. le Président.

M. Gagnon: Ecoutez, est-ce que j'ai 20 minutes, M. le Président?

M. Cordeau: Non. Vous posez des questions, ce n'est pas 20 minutes de discours.

M. Gagnon: Je pense aussi que j'ai le droit, comme les autres, de rétablir des faits.

M. Cordeau: Le ministre est là pour rétablir les faits.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Gagnon: Un instant, ce n'est pas à vous de me montrer comment parler; je vais dire ce que j'ai à dire.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre! M. le député de Champlain.

M. Picotte: Une question de règlement, M. le Président.

Le Président (M. Jolivet): Une question de règlement, M. le député.

M. Picotte: Je regrette, M. le Président, mais depuis le début, on l'a souligné, nous étions dans un climat peu favorable. Je pense que vous ne pouvez reprocher à personne autour de cette table...

M. Gagnon: C'est ce climat qui persiste.

M. Picotte: Si le député de Champlain, comme il est parti là, veut charrier sur ce qui s'est fait dans le passé et dire des choses qui ne sont même pas exactes, M. le Président, on peut poser des questions de règlement, on peut poser des questions de privilège, on peut vous demander des directives; on peut faire cela jusqu'à 13 heures. Si c'est cela que vous voulez avoir, on va le faire; si ce n'est pas cela que vous voulez avoir, venez en à vos questions et posez des questions.

M. Cordeau: On veut poser des questions... Ce ne sont pas des discours.

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre!

M. Picotte: Si vous vous embarquez là-dedans, on est capable...

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre! M. le député de Champlain.

M. Gagnon: Je pense que...

Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, M. le député de Champlain! On va prendre un petit répit pour pouvoir calmer les esprits. C'était bien parti jusqu'à maintenant. Je pense qu'il est bon de pouvoir continuer et je répète ce que j'ai dit au début. J'aimerais que l'on pose des questions brèves et qu'on ait aussi des réponses brèves.

M. Gagnon: C'est ce que je veux faire, mais vous me permettrez, comme je l'ai dit tantôt, un préambule pour relever certains points. Ce n'est pas pour taquiner personne... Oui, c'est cela, je m'en viens à mes questions, un instant.

M. Cordeau: J'ai des questions à poser.

M. Gagnon: On a dit tantôt que c'étaient des faussetés, la loi 44, cependant je peux vous dire, M. le Président, qu'à ce moment-là j'étais dans le syndicalisme agricole. Pour montrer que je ne parle pas à travers mon chapeau, j'ai eu à négocier certaines clauses.

M. Picotte: Oui, mais répétez tout ce que vous avez dit à ce moment-là, ne dites pas une demi-vérité. J'étais présent.

M. Gagnon: Je peux vous dire qu'en 1974...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Maskinongé, M. le député de Saint-Hyacinthe, je pense qu'on vous a laissé la chance, tout à l'heure, de parler; laissez la chance maintenant au député de Champlain de s'exprimer. Il a droit à 20 minutes. Je lui demande cependant de poser des questions.

M. Gagnon: Je veux tout simplement vous dire, M. le Président, qu'en 1974 — et j'ai le droit de le faire parce que j'ai payé pour cela — j'étais dans la production des oeufs...

M. Cordeau: II ne parlera pas sur le message inaugural. C'est le temps de le dire sur le message inaugural ce que vous dites là.

M. Gagnon: ... et à ce moment-là le ministre de l'Agriculture du temps nous avait promis que la...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe, je vais vous rappeler à l'ordre et je pourrais faire plus. Je vous demande de vous conformer aux règlements, s'il vous plaît.

M. Cordeau: Oui, mais c'est une question de directive, M. le Président.

M. Garon: Voyons, un garçon de votre âge.

M. Cordeau: Est-ce que celui qui parle doit respecter vos directives?

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe...

M. Baril: Avec tout ce que vous avez eu dans votre comté, parler d'une façon semblable, c'est honteux, M. le député de Saint-Hyacinthe.

Le Président (M. Jolivet): Messieurs les députés, je tiens à vous le rappeler; je pense que c'est important parce qu'on est en train de faire, actuellement, depuis quelque temps, du droit nouveau. Si vous voulez avoir la chance vraiment que ces commissions fonctionnent, je vous demanderais, s'il vous plaît, d'arrêter, je ne dirai pas des engueulades, parce que ce ne serait pas acceptable au niveau parlementaire. Mais je vous demande, s'il vous plaît, de laisser parler la personne qui est là et je lui demande de poser ses questions.

M. Baril: Une question de règlement, M. le Président. Au début, tout à l'heure, quand le député de Huntingdon a pris la parole une deuxième fois, on s'est opposé d'une certaine façon. Vous avez donné une directive à savoir, qu'il avait droit à ses 20 minutes et que c'est lui qui avait la priorité. Calmement, tout en souriant, on l'a laissé parler. Maintenant que c'est notre tour, si l'Opposition veut être sage et ne pas s'énerver, il me semble que ce serait notre droit, en tant que parlementaires, de pouvoir nous exprimer. Des questions, on va en poser nous aussi. Je suis certain que plusieurs de ces questions vont renseigner considérablement les députés de l'Opposition.

M. Picotte: A condition que ce soient des questions.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska, je vous remercie beaucoup de votre intervention, c'est exactement ce que je demande depuis le début de cette dispute.

M. Gagnon: Simplement pour montrer que je n'allais pas à rencontre du règlement, n'est-il pas vrai que la dernière discussion qui a eu lieu entre le député de Huntingdon et le ministre touchait à la productivité? Alors, j'y ai touché au début pour montrer que ce n'est pas tout de penser en termes de productivité.

M. Dubois: Je l'ai spécifié d'ailleurs dans mon intervention.

M. Gagnon: D'accord. N'est-il pas vrai aussi que le député de Maskinongé a énuméré quantité de lois que son parti avait mises de l'avant pour aider la classe agricole? Je parle simplement de ces lois pour en arriver à poser les questions que j ai à poser au ministre. Je pense que j'en ai le droit. Je veux simplement terminer en disant que je parlais de syndicalisme agricole. J'étais producteur d'oeufs. Le ministre de l'Agriculture du temps, face à un marasme épouvantable — personnellement, j'avais perdu $35 000 avec ma ferme, et c'était $6 millions pour l'ensemble des producteurs d'oeufs québécois — avait dit: Tout cela va se corriger par la loi 44. Mais la loi 44 est venue tellement tard qu'on a perdu ce qu'on avait, et le gouvernement n'a jamais remboursé. C'était là où je voulais en venir.

De toute façon, voici ma première question au ministre. Tout à l'heure, il a dit que ça allait bien dans la relève agricole. J'en suis très heureux. Il a mentionné aussi que cette relève serait d'autant mieux préparée que nous avons maintenant, dans les écoles d'agriculture, quasiment la quantité d'étudiants voulue pour prendre la relève, et qu'on aurait véritablement des professionnels agricoles. Je voudrais simplement demander au ministre si le problème de la relève agricole, ce ne serait pas seulement un problème de volonté de faire de l'agriculture, mais un problème de possibilité d'en faire.

Je me demande si on songe actuellement à améliorer les lois de l'Office du crédit agricole, de façon à permettre aux jeunes de s'établir dans l'agriculture et si, à l'intérieur de ça, on songe à un certain financement qu'on pourrait accorder aux quotas de production.

M. Garon: Parmi les lois annoncées pour 1978, il y a justement des mesures qui vont favoriser davantage les jeunes qui veulent s'installer sur une ferme. Si, dans mon esprit, on prend les mesures qui vont permettre aux jeunes de s'installer sur une ferme et faciliter leur établissement, on va pouvoir prendre non seulement ceux qui veulent s'installer sur une ferme, mais il va y avoir une sélection. Ce sont seulement les meilleurs qui vont pouvoir acquérir une ferme. C'est vers ça qu'on s'en va, il ne faut pas se faire d'illusion. Aujourd'hui, au Québec, le nombre d'agriculteurs n'est plus ce qu'il était auparavant. On voit tranquillement les fermes marginales qui sont consolidées et on va en arriver très rapidement à des fermes organisées pour faire vivre leur homme. C'est évident que ces fermes coûtent cher.

La moyenne des actifs d'un emprunteur au crédit agricole, en 1977, est de $128 000. C'est évident qu'un gars de 23, 24 ou 25 ans qui veut s'établir sur une ferme n'a pas beaucoup d'argent. C'est pour ça qu'il faut absolument trouver des mécanismes. Il y en a dans les lois qui vont être présentées au cours de cette année. Si l'Opposition ne retarde pas trop l'étude des projets de loi, on va pouvoir agir plus rapidement. A ce moment-là, on verra des mesures importantes pour faciliter l'établissement sur une ferme.

Il y avait un deuxième volet à votre question?

M. Gagnon: C'était... Oui...

M. Garon: La deuxième partie était...

M. Gagnon: Actuellement, le problème qu'on rencontre, compte tenu du phénomène du quota de production qu'on a dans tous les domaines, c'est que ce quota a pris une valeur commerciale. Qu'on le veuille ou non, le quota vaut autant, quelquefois, que la ferme elle-même. On remarque que, dans certaines spécialités, si on prend le domaine des oeufs, du poulet, on peut énumérer pas mal de spécialités, ceux qui ont la possibilité ac-

tuellement d'acheter une ferme, ce sont souvent les compagnies ou ce sont des individus qui se font financer les quotas par l'entreprise d'une compagnie, par exemple, un fournisseur de denrées alimentaires animales.

Je trouve qu'il y a là une lacune. Si on pouvait, par l'entremise de l'Office du crédit agricole, financer au moins une partie de ces quotas, on permettrait à l'entreprise agricole familiale de rester entre les mains de l'entreprise agricole familiale. C'est ma demande, est-ce qu'on songe actuellement à financer une partie de ces quotas?

M. Garon: Le crédit agricole prête sur l'achat de quotas actuellement. Je dirais que le problème va encore plus loin que cela. On a accepté de participer à un comité qui regroupe les gens de toutes les provinces, pour étudier la question du coût des quotas. C'est le résultat de la conférence des ministres et des sous-ministres de l'Agriculture qui a eu lieu à Victoria au mois de juillet. Toutes les provinces s'inquiètent du prix des quotas et du prix de vente pour la période des quotas, parce qu'il est payé par les producteurs et entre dans le coût de production, même si, pour fins de stabilisation des revenus, le coût des quotas n'est pas comptabilisé. Il y a des gens qui n'ont jamais voulu... En fait, les quotas sont la suite de la mise en marché par plans conjoints, qui limitent la production. A ce moment-là, le droit de produire acquiert un certain prix. Personne n'a voulu un prix de quota, au fond. Ce qui a été voulu, à l'origine, c'est une mise en marché ordonnée des produits. A la suite de cette mise en marché plus ordonnée des produits, il y a eu un prix au quota.

Ce qu'on constate — et ce n'est pas seulement au Québec, mais partout au Canada, c'est le même problème — c'est que les gouvernements, au fond, réalisent que, par le fait d'une politique de mise en marché, ils en arrivent à un prix au quota. Si c'était la volonté de tout le monde de réduire ce prix au quota qui va créer un problème, par rapport aux Américains qui n'ont pas cette formule, à ce moment-là, comme vous le dites, si le prix du quota... Remarquez bien qu'il faut pousser les recherches là-dessus, parce que, si on calcule le prix de la ferme et le prix au quota, et si, comme vous le dites, le prix du quota est aussi élevé que le prix de la ferme, on parle de $100 000 pour le prix de la ferme, $100 000 pour le prix du quota, cela fait $200 000 pour s'installer et produire ce type de production.

Si, aux Etats-Unis, il n'y a pas de quota, mais que le prix de la ferme est de $200 000, c'est l'équivalent. Si, par ailleurs, il n'y a pas de prix de quota, mais que la ferme vaut $100 000 comme ici, à ce moment-là, évidemment, le producteur, au Canada, est défavorisé par ce prix de quota. Il faut avoir des données, des discussions entre les économistes. Il y a un comité qui a été formé suite à la conférence fédérale-provinciale du mois de juillet, justement pour étudier cette question, qui est fondamentale.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Champlain, il vous reste deux minutes.

M. Gagnon: Déjà?

Le Président (M. Jolivet): Déjà.

M. Gagnon: Vous avez mentionné que, depuis qu'on a commencé à distribuer le lait sur une base expérimentale dans les écoles, on a même fait augmenter la consommation du lait. On songe, je pense bien, à aller plus loin dans cette politique de distribution de lait dans les écoles. Est-ce qu'on peut actuellement établir des chiffres pour savoir si on en distribue deux ou trois fois plus et jusqu'à quel point la consommation pourrait augmenter? C'est le premier volet.

Il y a autre chose. Je sais qu'il existe au ministère de l'Agriculture quantité d'études sur la vocation des sols. A un moment donné, on a dit qu'on ne pouvait pas obliger un cultivateur ou une région à adopter certaines formes de cultures. Est-ce que vous songez à une politique incitative pour que, dans une région donnée, par exemple, on essaie de s'orienter plus vers certains types de culture ou d'élevage que dans d'autres? (12 h 30)

M. Garon: Oui. J'ai parlé tout à l'heure des programmes régionaux. Il y a des programmes régionaux qui ont été établis l'an dernier. Il y en a un dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean, un sur la Côte-Nord, un aux Iles-de-la-Madeleine, un dans la Gaspésie, un à Basque-Neigettes, la continuation d'un autre qu'il y avait au CHAL, un dans l'Outaouais, un qui est à peu près... Quand je dis un programme, en fait, il a plusieurs volets, il n'y a pas seulement un programme. Evidemment, il y a plusieurs facettes, il y a plusieurs volets au programme. Par ces programmes qui ont été préparés, au niveau régional, entre les producteurs et le ministère de l'Agriculture, à ce moment-là, il a fallu faire un certain plan de développement, non pas une planification très rigide, mais des axes de développement, si on veut, au niveau régional. A ce moment-là, dans certaines régions, par exemple, cela a été très précis. Dans d'autres, cela a été moins précis. Je pense que c'est une orientation vers le zonage des productions qui se fait à l'intérieur même des régions, c'est ce qui est assez intéressant. A l'intérieur, par exemple, du Saguenay-Lac-Saint-Jean, on a divisé la région en deux grandes zones, une zone où la vocation serait l'élevage des animaux pour la viande, comme l'élevage du boeuf, l'élevage du mouton ou de l'agneau et, dans l'autre zone, ce serait plutôt le lait.

Evidemment, cela va rationaliser les routes laitières, cela va aider au point de vue économique. Je suis persuadé qu'il faut que cela se fasse de cette façon-là, il n'y a pas d'autres façons. A mon avis, c'est la consultation entre les gens du ministère et les cultivateurs dans les régions qui va préciser cela graduellement. On ne peut pas brusquer les gens dans des affaires comme cela.

A la deuxième question que vous avez posée au sujet du lait, en fait, c'est un délai très court, une période de temps très courte puisque la distribution du lait dans les écoles vient de commencer. En septembre, cela a commencé par 20% des

enfants. Cela a augmenté. C'est rendu à 27%, actuellement. Il va y avoir une augmentation assez importante, en septembre prochain, qu'on pourra voir par le discours du budget. A ce moment-là, c'était une des promesses, non pas des vingt promesses dont on a déjà parlé; il y avait sept promesses, au cours de la campagne électorale, et je pense bien qu'au rythme où nous allons actuellement, notre promesse sera entièrement réalisée d'ici aux prochaines élections, c'est-à-dire que la distribution gratuite du lait dans les écoles sera généralisée dans tout le Québec.

Le Président (M. Jolivet): M. le député d'Arthabaska.

M. Baril: Voilà, enfin! M. le Président, tout à l'heure, on parlait de relève agricole et de crédit ou d'aide à la relève agricole. Depuis plusieurs années, on a fait toutes sortes d'enquêtes sur la raison des ventes de fermes, des encans, etc.

Je parlais tout dernièrement avec un représentant de la laiterie Lactancia qui prévoyait, encore cette année, une vente par encan d'au moins 5000 fermes, dans la prochaine année. Souvent, le problème qu'il y a... Pourquoi le propriétaire vend-il? Parce qu'aujourd'hui, le prix de la ferme est rendu... Souvent, le nouveau propriétaire ne peut pas emprunter, parce que l'office se fie toujours a la capacité de remboursement du cultivateur ou du producteur. J'aimerais savoir si l'office a déjà envisagé une façon d'aider les nouveaux producteurs. Au lieu de répartir le coût de l'emprunt sur un nombre d'années donné, si, au début de l'entreprise, le propriétaire pouvait rembourser moins dans les premières années, puis augmenter, parce que c'est toujours au début qu'un agriculteur a de la peine à arriver, parce qu'il faut qu'il capitalise. Même s'il achète une ferme en très bonne condition, il y a toujours un changement d'administration, un changement aussi dans la façon de produire et, souvent, ce même propriétaire est pris et ne peut capitaliser; souvent, on a vu des prêts refusés parce que le mode de remboursement était trop élevé dans les premières années.

Ce n'est pas rare de voir les fermes se vendre à des étrangers qui arrivent avec un capital dans leurs poches et que nos jeunes du Québec, la jeune relève, ne peuvent acheter ces fermes parce qu'il n'ont aucun dépôt.

Encore là, on voit cela surtout quand c'est la ferme paternelle, le père est souvent obligé de sacrifier un montant d'argent pour que son fils puisse acheter cette même ferme, tandis qu'il pourrait avoir, selon l'importance de la ferme, un prix beaucoup plus élevé s'il vendait à des étrangers. Donc, cela fait longtemps qu'il y a une injustice, si on peut dire, à ce niveau. J'aimerais savoir, de votre part, s'il y a de nouvelles formes d'envisagées pour prêter à la relève, parce que quand on dit qu'il n'y a pas de relève au Québec, il y en a une, ce n'est pas possible. C'est surtout son pouvoir d'achat qui est plutôt mince. Il y a peut-être une autre formule sur laquelle j'aimerais avoir votre opinion. Si on compare cela au niveau de l'In- dustrie et du Commerce, ils ont des programmes pour les petites, les moyennes et les grosses entreprises, tandis qu'au niveau de l'Office du crédit, si mes renseignements sont bons, vous avez seulement un programme. Que le gars vaille $100 000 ou rien du tout, il n'a pas plus de chance d'obtenir un prêt qu'un autre, et souvent, c'est celui qui n'a pas un cent, qui aurait besoin d'avoir un prêt, mais il n'est pas capable de l'avoir.

A-t-on envisagé aussi une façon d'avoir un programme pour les nouveaux agriculteurs? De même pour les agriculteurs qui voudraient progresser, et ceux qui sont déjà en production depuis plusieurs années, comme...

M. Picotte: Est-ce le député d'Iberville qui remercie le conférencier?

M. Baril: M. le député de Maskinongé...

Le Président (M. Jolivet): Continuez, vous allez perdre du temps.

M. Baril: Ce sont toujours des questions que je pose, remarquez bien.

Le Président (M. Jolivet): J'ai compris, mais c'est parce que vous allez perdre du temps. Vous avez vingt minutes, comme tout le monde. Allez!

M. Baril: Je parle aussi. J'aimerais savoir si ces différentes façons sont envisagées pour aider la classe agricole, les jeunes agriculteurs surtout. Le député de Maskinongé m'a fait perdre un peu mon discours...

Une Voix: Cela ne devait pas être important, s'il vous l'a fait perdre si vite.

M. Baril: Je vais laisser le ministre répondre et je reviendrai après.

M. Garon: L'Office du crédit agricole administre les lois telles qu'elles sont faites actuellement. La loi dit à quelles conditions il peut prêter. L'Office du crédit agricole administre ces lois. Maintenant, vous parliez aussi, dans l'année qui s'en vient, des projets importants de modification des lois qui vont permettre des formules variées pour l'établissement sur des fermes; je ne voudrais pas entrer dans le détail aujourd'hui, mais plutôt attendre de déposer des lois devant l'Assemblée nationale. A ce moment, cela ve permettre au crédit agricole de faire des choses... Le crédit agricole est blâmé souvent pour des choses dont il n'est pas responsable et blâmé de ne pas accorder certains genres de prêts; mais il n'a pas les pouvoirs. La loi est faite de telle façon et il administre la loi telle qu'elle est. Parfois, il encaisse et on encaisse des blâmes pour des choses qu'il ne peut pas faire parce que la loi ne lui permet pas de les faire. Les modifications qu'on va apporter, au cours de l'année, vont permettre à l'Office du crédit agricole de jouer un rôle... Selon les modifications qui vont être apportées à l'Office du crédit agricole cette

année et l'an prochain, on va pouvoir dire que l'Office du crédit agricole connaît une renaissance ou une deuxième source de vie, au fond. C'est un des instruments les plus importants pour le développement de l'agriculture, c'est évident.

M. Baril: Je suis bien heureux de vous l'entendre dire, mais je précise que je ne blâmais pas l'office. Je sais qu'il a une loi et un mandat à respecter. Il faut qu'il s'en tienne à l'intérieur de cela. C'est bien à nous, le gouvernement, si ces lois ne sont pas adéquates, de les améliorer.

M. Garon: C'est un exemple concret. Cette année, quand est arrivée la situation des producteurs d'urine de jument gravite, à cause de la décision d'une entreprise, ils ont cessé les achats d'urine de jugement gravite. L'Office du crédit agricole aurait aimé pouvoir se prévaloir de la loi sur le crédit spécial dans des situations de sini-tres, mais ce qui est prévu, comme situations désastreuses et ce qui est prévu comme désastres, ce sont les ouragans ou des choses comme cela. Mais le cas d'une production qui arrête n'est pas prévu dans la loi. Là, on peut faire un crédit spécial, sans intérêt par exemple, à un producteur pour le remettre en forme dans une autre production. Ce serait l'idéal. On a regardé cela sur tous les bords et sur tous les côtés, on ne peut pas. Alors, il faut amender les lois existantes pour pouvoir faire ce genre de crédits.

M. Gagnon: ...

M. Garon: Cela dépend un peu de l'Opposition. Si l'Opposition adopte les lois plus rapidement, cela va être adopté...

M. Picotte: Je suis content. Pour une fois que ce n'est pas la faute du fédéral!

M. Baril: On verra dans les semaines ou les mois qui viendront. On comparera les positions que les députés de l'Opposition ont prises à ce débat et, quand viendra le temps de voter les lois on verra s'ils vont demander encore des reports de six mois en six mois.

M. Picotte: ... présentez-nous en des bonnes. On vous le dit d'avance. Dans les intérêts des agriculteurs.

M. Gagnon: M. le député de Maskinongé, votre droit de parole est écoulé.

M. Garon: Je devrais dire, pour être de bonne guerre, que dans le secteur agricole, jusqu'à présent, les lois ont été adoptées rapidement, sauf une que je pensais qu'on aurait adoptée dans dix minutes, la loi sur les mauvaises herbes, qui a pris quatre ou cinq heures. C'est une loi qui ne changeait pas grand-chose mais je sais que c'était une question de stratégie pour l'Opposition. Je devrais dire que, d'une façon générale, on a eu la collaboration, au Parlement, de tous les partis pour adop- ter nos lois. C'est sur d'autres lois qui passent qu'ils discutent longuement.

M. Picotte: Bravo.

M. Baril: Dans la loi des mauvaises herbes, il y avait jusqu'à l'ex-ministre des Transports qui s'inquiétait des consommateurs qui se couchaient sur le bord des routes, dans l'herbe à puces.

Le Président (M. Jolivet): Revenons au débat.

M. Garon: II s'inquiétait des villégiateurs qui attraperaient l'herbe à puces.

M. Baril: II se trompait de ministère, je pense.

M. Garon: C'est cela que j'ai dit. Il devrait plutôt en parler au ministre de la santé.

Le Président (M. Jolivet): Revenez au débat, parce que vous perdez du temps sur votre propre temps.

M. Baril: Oui, c'est vrai. Maintenant, il y a un problème — on l'a abordé tout à l'heure — au niveau du lait que nous connaissons actuellement. On sait que les producteurs, la semaine dernière ou au début de cette semaine, ont reçu l'avis du gouvernement fédéral qu'il retenait les subventions du mois de janvier tant qu'un certain problème entre les fédérations ne serait pas réglé. Je sais qu'il y a plusieurs cultivateurs qui vivaient, à peu près depuis le mois de novembre — j'en connais — seulement avec ces subventions. Ils ne reçoivent plus de paie autrement parce que les quotas sont défoncés. Si on leur retient leurs subsides maintenant, que va-t-il se produire? Je ne voudrais pas vous amener à dire que c'est la faute du fédéral ou quoi que ce soit, ce sont quand même des producteurs laitiers du Québec. Nous faisons face à ce problème laitier qui n'a jamais été envisagé d'une façon sérieuse pour pouvoir le solutionner. J'aimerais connaître un peu votre position face à ce problème. Et aussi, tout à l'heure, vous avez abordé la possibilité de la fusion des deux laits, que cela relevait des fédérations ou du syndicalisme agricole.

Croyez-vous que si un jour... Attendez-vous plutôt d'avoir un mandat formel des producteurs ou de l'Union des producteurs agricoles pour enfin statuer sur cette fameuse question des deux laits, qui est la source de plusieurs problèmes au niveau des producteurs laitiers?

M. Dubois: II y a presque trois millions de livres supplémentaires au quota produites par la région de Sherbrooke.

Une Voix: Supplémentaires au quota.

M. Garon: Je vais vous donner ma réponse à ce sujet. Je suis terriblement déçu que les producteurs, qui ont les pouvoirs, qui demandent les pouvoirs par les plans conjoints de réglementer la

production, n'aient pu, jusqu'à maintenant, s'entendre entre eux à ce sujet. Que deux fédérations produisent le même quota qui entraîne des surplus, c est anormal. Depuis des semaines et des mois, des efforts ont été faits pour en venir à une entente. La Régie des marchés agricoles doit rencontrer la semaine prochaine, le 20 mars, les fédérations. (12 h 45)

Habituellement, dans toute fonction, dans toute affaire dans la vie, quand on a des pouvoirs et des avantages, il y a aussi des responsabilités. Dans ce cas, les producteurs qui ont eu des pouvoirs par les plans conjoints devraient être capables de régler entre eux, ces problèmes. Jusqu'à maintenant, on a essayé de suggérer un médiateur. Tout le monde s'entend sur le médiateur mais ne s'entend pas sur le mandat du médiateur. Je pense que si les deux fédérations de lait, lait industriel et lait nature, ne peuvent s'entendre comme syndicats qui ont des plans conjoints tous les deux, il va être difficile pour l'Union des producteurs agricoles, dans l'avenir, de dire que les plans conjoints règlent tous les problèmes de mise en marché. Je pense qu'à ce moment-ci l'UPA, qui a l'autorité morale et qui a des mandats de son assemblée générale — je ne le dis pas d'une façon agressive, pour narguer ou quoi que ce soit, je crois que c'est un problème difficile — qui a des avantages considérables, la formule Rand pour les cotisations, des plans conjoints, a aussi des pouvoirs. Or, avec les pouvoirs vont les responsabilités, et elle doit prendre la responsabilité de régler ces différends à l'avantage des producteurs. Autrement, si c'est le gouvernement qui doit les régler, je pense bien que les producteurs se rappelleront toujours que le syndicalisme n'a pu régler ces problèmes.

Je le dis aussi franchement que je peux le dire. Je pense que c'est une question très importante pour l'Union des producteurs agricoles parce que les producteurs laitiers représentent 50% des producteurs agricoles au Québec.

Le Président (M. Jolivet): Une dernière question.

M. Baril: J'aimerais continuer dans le même domaine, mais je vais changer. Au niveau de votre politique d'entreposage des grains, soit à la ferme ou au niveau régional, on sait que cette politique se met en branle peut-être lentement, mais dans le but de laisser le temps aux usines, aux compagnies, de fabriquer le matériel nécessaire. Est-ce qu'actuellement vous pouvez nous dire si les compagnies ont commencé à fabriquer de tels séchoirs, entrepôts, silos ici au Québec ou décidé de le faire?

M. Garon: Les entreprises ont été averties depuis plusieurs mois, depuis l'automne dernier; les gens ont préparé des programmes dans ce sens et je lance un avertissement important aujourd'hui. Nous avons demandé aux producteurs, pour ce qui est d'avoir des subventions, d'avoir du contenu québécois. Si les entreprises québécoises en profitent pour augmenter les prix, parce qu'on demande d'encourager les entreprises québécoises, je vais vous dire qu'on va agir, qu'on va agir rapidement et qu'on ne laissera pas faire cela. Si les entreprises québécoises ont l'intention de profiter des cultivateurs parce qu'on veut les aider en demandant aux cultivateurs de prendre des produits québécois, on va sauter dans le paquet et gare à ceux qui vont jouer ce jeu-là.

M. Baril: Mais, actuellement, avez-vous des compagnies qui ont commencé à fabriquer le matériel nécessaire?

M. Garon: Oui, plusieurs entreprises. Si j'ai fait la mise en garde que je viens de faire, c'est parce qu'il y a eu certaines rumeurs, il y a eu certaines inquiétudes qui m'ont été exprimées, mais je dois dire que plusieurs entreprises savent qu'il va y avoir un développement dans ce secteur au cours du printemps. On les a averties l'automne dernier, pour qu'elles se préparent en conséquence parce qu'il va y avoir énormément d'investissements qui vont être faits au cours des cinq prochaines années dans l'entreprosage à la ferme, soit de silos pour les céréales, soit de silos pour les fourrages, et également pour des séchoirs. Il y a un autre programme qui s'en vient, qu'on veut annoncer un peu plus tard, parce qu'on est en train de regarder différentes conditions justement pour ne pas suréquiper les cultivateurs québécois. Vous savez qu'en 1977, la cause principale de la diminution du revenu des agriculteurs québécois a été la surcapitalisation des agriculteurs québécois. La principale dépense, l'augmentation de dépenses des agriculteurs, cela a été l'augmentation du taux de dépréciation, qui a été de 8,7% de plus du taux d'amortissement. Au cours de l'année écoulée, la province du Canada qui a acheté le plus d'équipement, de machinerie, d'équipement agricole, c'est la province de Québec. J'ai été mis au courant, j'ai vu ces données et, au cours des prochaines semaines, des prochains mois, nous allons nous interroger, parce que nous ne permettrons pas qu'on incite des agriculteurs à se mécaniser au-delà de leurs besoins. A ce moment-là, les marchands qui vivent de l'agriculture, on va les mettre en garde, on va intervenir fermement pour leur dire que s'ils veulent vivre de l'agriculture, parfait, mais sans exploiter l'agriculteur en lui vendant des équipements dont il n'a pas besoin, en le suréquipant, parce que la principale cause de sa diminution de revenus en 1977, c'est une capitalisation importante dans la machinerie, qui a fait que l'amortissement a été très élevé.

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe, un dernier...

M. Baril: Excusez, vu l'importance de la question, avec le consentement de l'Opposition.

Le Président (M. Jolivet): Non, je m'excuse...

M. Dubois: II n'y a pas de consentement de l'Opposition.

Le Président (M. Jolivet): I! reste huit minutes, justement, pour les deux membres de l'Opposition.

M. Baril: Je me suis essayé, en tout cas.

M. Cordeau: Merci, M. le Président, j'ai des questions...

M. Baril: J'espère que le député de Huntingdon...

M. Cordeau: ... brèves à poser au ministre. Premièrement, est-ce que le ministère de l'Agriculture va mettre encore à la disposition des municipalités la politique pour les chemins municipaux à vocation agricole en 1978? Deuxièmement...

M. Garon: ...

M. Cordeau: C'est qu'il y en a qui ne s'en sont pas prévalues l'an passé et elles veulent s'en prévaloir cette année. Deuxièmement, est-ce que le ministre est au courant que le fédéral subventionne peut-être les transports pour la pomme de terre; par contre, le gouvernement provincial subventionne le transport pour des produits, des engrais chimiques venant du Nouveau-Brunswick, au détriment de nos producteurs d'engrais chimiques du Québec, par l'entremise de la Coopérative fédérée? Ce serait une question intéressante pour le ministre.

Premièrement, je tiens à vous féliciter...

M. Garon: Ne me posez pas trois questions en même temps, parce que je ne me les rappellerai plus.

M. Cordeau: C'est parce que je n'ai pas grand temps. Questions rapides, réponses rapides.

M. Garon: Vous allez avoir seulement le temps de les poser, je n'aurai pas le temps d'y répondre.

M. Cordeau: On va vous le permettre. M. Garon: II est 13 heures.

M. Cordeau: Je tiens à vous féliciter pour l'entente signée avec Ottawa concernant l'autosuffi-sance du Québec pour le secteur des aliments, pour le bétail.

M. Garon: C'est planifié.

M. Cordeau: Un instant, je pose des questions, M. le ministre.

M. Garon: C'est le montant qu'on est allé chercher à Ottawa.

M. Cordeau: Vous allez répondre à ma question, M. le ministre, par la suite. Dans...

M. Garon: Vous êtes rendu à trois questions.

M. Cordeau: Dans votre communiqué du 17 février, vous mentionnez quatre programmes concernant cette entente. Actuellement, vous avez déjà deux programmes écrits dont j'ai des copies, dont un concerne l'aide à l'amélioration de la conservation des fourrages et l'autre concerne l'aide à l'entreposage des grains sur la ferme. Quels sont les deux autres programmes que vous avez l'intention d'appliquer, d'après cette entente? Si vous voulez répondre à ces questions, s'il vous plaît,

M. Garon: Bon. On a voulu annoncer seulement ces deux-là...

M. Cordeau: Avec ma permission.

M. Dubois: Je veux poser une autre question.

Le Président (M. Jolivet): Oui, vous pourrez le faire après. Allez-y.

M. Garon: Je ne me rappellerai plus vos questions si vous m'en posez trop en même temps. Posez-les une par une.

M. Cordeau: Les chemins municipaux.

M. Garon: Pour les chemins municipaux, la réponse est oui. Quelle est la deuxième?

M. Cordeau: Que le Québec subventionne l'importation de produits du Nouveau-Brunswick au Québec pour les engrais chimiques, par la Coopérative fédérée...

M. Garon: J'aimerais que vous me montriez cela, parce que...

M. Cordeau: Je peux vous préparer une entrevue tout à l'heure avec quelqu'un concerné qui est dans la salle.

M. Garon: Je suis en train de regarder ces programmes, mais ce n'est pas nous qui les avons institués...

M. Cordeau: Non.

M. Garon: Mais on est en train de les regarder.

M. Cordeau: II ne faut pas toujours blâmer le fédéral, il y a des politiques quelquefois... et Québec fait la même chose.

M. Garon: Non. Mais je suppose que cela faisait partie du fédéralisme rentable de subventionner les importations.

M. Cordeau: C'est correct. Les deux autres programmes.

Le Président (M. Jolivet): Les deux autres programmes, M. le ministre.

M. Garon: Les deux autres programmes, on n'a pas voulu les annoncer immédiatement, juste-

ment par prudence. Je pense à un programme en particulier, le troisième qu'on va annoncer, c'est un programme qui ne s'appliquera peut-être pas à la grandeur du Québec. Il y a des besoins qui sont inégaux dans le Québec et on veut faire toutes les consultations nécessaires avant d'appliquer...

Une Voix: Saint-Hyacinthe n'en a pas besoin.

M. Garon: Non, Saint-Hyacinthe n'aurait peut-être pas besoin de celui-là.

M. Cordeau: Pour une fois, on va pâtir.

M. Garon: On veut être très prudent là-dedans, justement pour ne pas contribuer à suréquiper les agriculteurs québécois. On voudrait que le programme s'applique, comme cela va être un programme de cinq ans, de toute façon, en commençant, la première année, par les régions qui en ont le plus besoin. On ajustera, en cours de route, plutôt que de commencer trop rapidement et suréquiper les agriculteurs. On veut être prudent, de la même façon qu'on a été prudent l'an dernier au point de vue du drainage, en augmentant considérablement la quantité posée, en agissant de telle sorte que le prix n'augmente pas. On a été très heureux l'an dernier, car le prix du drain, non seulement n'a pas augmenté, mais il a même diminué. C'est le même genre de prudence dans ces programmes.

M. Cordeau: J'aurais bien d'autres questions sur tous les programmes que vous avez énumérés, Dorchester et tout cela...

Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous laisser la chance au député de Huntingdon de poser des questions.

M. Garon: Je sais que vous n'avez pas assez de trois heures pour poser les questions sur tous les programmes nouveaux qu'on implante.

M. Cordeau: II y a eu trop de questions posées par les membres de votre parti.

M. Garon: J'avais rien qu'une...

Le Président (M. Jolivet): M. le député de Saint-Hyacinthe, M. le ministre, à l'ordre! M. le député de Saint-Hyacinthe, je pense qu'il y a eu une entente entre les partis impliqués de façon à permettre justement qu'on essaie, et c'est ce que vous avez eu de façon offusquée tout à l'heure, qu'il y ait quand même une possibilité de voir de quelle façon on peut ajuster le règlement du vendredi matin.

Je ne pense pas vous avoir lésé jusqu'à maintenant, quant à vos questions. M. le député de Huntingdon.

M. Dubois: Merci, M. le Président. M. le ministre, il y a un sujet que j'ai soulevé tout à l'heure, qui me préoccupe beaucoup, c'est celui du Mar- ché central métropolitain, de Montréal. Le problème se situe au niveau taxation. Je pense que vous en êtes au courant. L'évaluation est d'environ $13 millions et on paie $900 000 de taxes annuellement, ce qui est plus que les revenus de ce marché. Je pense que la seule solution possible dans ce cas, je vais vous la suggérer, ce serait de demander à votre ministre des Affaires municipales d'amender sa loi de taxation foncière, ce qui permettrait à ce Marché central métropolitain de survivre et de s'améliorer en équipement.

J'aimerais aussi indiquer au ministre qu'on a déjà amendé la Loi sur l'évaluation foncière pour les clubs de golf. Je me demande pourquoi on ne pourrait pas l'amender pour les marchés de cultivateurs au Québec.

Ce Marché central répond aux besoins des agriculteurs de la région de Montréal, des jardiniers maraîchers. Je pense que c'est passablement important que vous vous attaquiez à ce sujet.

M. Garon: On l'a attaqué ce sujet. On a eu de nombreuses rencontres à ce sujet. Une partie du problème vient du fait qu'il y a seulement une partie du marché qui est utilisée par les agriculteurs. Aussi, comme vous dites, pour en arriver à un taux de taxation différent, il faudrait amender la loi pour ajouter cet article.

C'est un dossier qui est chaud, ce n'est pas un dossier qui est sur la glace. On essaie de trouver une solution. On a étudié cette question beaucoup. Il faut dire qu'on a remarqué, en étudiant ce dossier, que beaucoup de terrain n'est pas utilisé pour les fins du marché des agriculteurs. Si ce terrain n'était pas là ou n'était pas comptabilisé dans la taxation, la situation du Marché central métropolitain serait bien différente. Il y a un tas de voies ferrées...

M. Dubois: Elles sont nécessaires dans l'infrastructure du Marché central. On ne peut pas nier cela.

M. Garon: Les voies ferrées, de moins en moins. Elles peuvent le devenir à nouveau.

M. Dubois: En tout cas, les routes, les accès, l'infrastructure, l'égouttement, le sous-sol, il fallait que ce soit là. L'évaluation est basée sur tout cela. Finalement, une construction coûte 11,3% de taxation les $100 d'évaluation. Il n'y a plus personne dans le domaine agricole et para-agricole qui est intéressé d'avoir une construction sur les terrains du Marché central, à cause de cette autre taxation. On s'aperçoit que les compagnies, les distributeurs de fruits et légumes vont se bâtir à l'extérieur, comme à Anjou, au lieu de bâtir sur les 109 acres du terrain qui est réservé pour le Marché central.

En plus, c'est qu'il y a des restrictions. Quand ils ont acheté ces terrains de la ville de Montréal les restrictions étaient dans le sens que strictement des constructions à but agricole et para-agricole devraient être faites.

Je pense qu'étant donné les restrictions et le haut taux de taxation il y a quand même un geste gouvernemental qui devrait être posé. Je pense que, la seule manière, c'est d'amender la Loi sur l'évaluation foncière. Seriez-vous d'accord à pousser le dossier le plus tôt possible pour permettre le développement de ces jardiniers de la région de Montréal?

M. Garon: Oui, c'est ce qu'on fait actuellement.

Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse auprès de chacun des députés. Je vous remercie d'avoir participé aux travaux de cette commission auxquels je mets fin dès maintenant. Merci.

(Fin de la séance à 13 h 1)

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