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Etude des crédits du ministère des
Affaires culturelles
(Dix heures douze minutes)
Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous
plaît!
M. le ministre des Affaires culturelles, nous avons quorum, nous sommes
cinq avec moi. La commission des affaires culturelles est prête à
étudier les crédits budgétaires du ministère des
Affaires culturelles.
Sont membres de cette commission: M. Alfred (Papineau), M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Goldbloom (D'Arcy
McGee), M. Godin (Mercier), M. Guay (Taschereau), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie),
M. Le Moignan (Gaspé), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Nous allons débuter par la présentation, par M. le
ministre, de l'ensemble de son ministère. Nous passerons ensuite
à chacun des partis politiques reconnus.
M. Vaugeois: M. le Président, une première question
d'horaire. Est-ce que nous terminons à midi ou à 12 h 30?
Le Président (M. Jolivet): Nous terminons à 12 h
30.
Mme Lavoie-Roux: Et on recommence à 14 heures?
M. Vaugeois: Seriez-vous d'accord pour que nous terminions
à midi?
Mme Lavoie-Roux: Moi, je serais bien d'accord pour midi, pour ce
matin.
M. Le Moignan: Pour vous faire plaisir, M. le ministre...
Mme Lavoie-Roux: Moi, c'est pour nous faire plaisir.
M. Le Moignan: Vos désirs sont des ordres.
M. Vaugeois: Restez comme cela!
Mme Lavoie-Roux: Souvenez-vous de cela!
Le Président (M. Jolivet): D'accord. Cela va.
M. Le Moignan: Cela va pour ce matin.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
Exposé général du
ministre
M. Denis Vaugeois
M. Vaugeois: M. le Président, mes premières
remarques concernent le niveau de dépenses du ministère pour le
prochain exercice ainsi que la ventilation des dépenses par programme et
par supercatégorie.
On note tout d'abord que les crédits de l'exercice 1978/79 sont
de $64 224 200, soit une augmentation de 4,8% sur les crédits non
pas les dépenses réelles de 1977/78 et de 8,6% sur le
budget initialement prévu pour cette même année
1977/78.
Compte tenu des impératifs de rationalisation des dépenses
publiques auxquels est fatalement soumis le gouvernement, impératifs qui
découlent de la conjoncture économique du monde occidental tout
entier, il s'agit là d'une légère augmentation qui
témoigne tout de même de l'importance que nous accordons, par
définition, aux affaires culturelles.
On notera une légère augmentation des crédits
accordés aux programmes "Gestion interne et soutien" et "Livres et
autres imprimés", y compris, bien sûr, la forte augmentation de
l'aide financière aux bibliothèques locales. On remarquera une
stabilisation des programmes "Sauvegarde et mise en valeur des biens culturels"
et "Arts d'interprétation", ainsi qu'une légère diminution
de l'effort consenti au programme "Arts plastiques", lequel avait cependant
profité, en 1977/78, d'une augmentation substantielle de 98% par rapport
au niveau des crédits de l'exercice précédent.
L'augmentation du programme de gestion interne et soutien résulte
essentiellement de l'accroissement du financement des conseils régionaux
de la culture, lesquels, comme vous le savez, constituent un instrument
privilégié du ministère pour ses objectifs prioritaires de
régionalisation et d'animation. On notera, par ailleurs, au niveau des
supercatégories, une augmentation substantielle des crédits de
transfert, lesquels touchent directement nos clientèles, aux
dépens des crédits de capital et de fonctionnement. Cette
orientation est conforme aux objectifs que nous poursuivons et qui consistent
à privilégier d'abord le développement des initiatives
individuelles et collectives en matière de création et
d'interprétation ainsi que de sauvegarde, de restauration et surtout de
mise en valeur de notre patrimoine.
Néanmoins, il ressort de toutes ces considérations que,
tenant compte à la fois de la stabilisation de nos crédits ainsi
que de l'importance relative bien arrêtée de nos différents
programmes, des déplacements importants des centres de gravité
budgétaires étaient exclus pour l'exercice 1978/79. Ils seront
certainement possibles pour 1979/80 à la suite, bien entendu, de la
parution prochaine du livre blanc sur le développement culturel ainsi
que d'une réflexion approfondie que je viens de lancer au sein du
ministère sur l'adéquation de nos instruments par rapport aux
objectifs que nous poursuivons.
Dans ces circonstances, vous me permettrez d'abord de dire que je fais
miens les principes d'action que vous a exposés mon
prédécesseur l'an dernier ainsi que les six principaux fils
conducteurs dans le sens desquels seront axés, pour une
deuxième année consécutive, les politiques et les
programmes du ministère des Affaires culturelles. Il y a, au point de
départ, cette conviction qui ne surprendra personne et à laquelle
la majorité adhère d'ailleurs de plus en plus, à savoir
l'importance de mettre en valeur, sans détour ni ménagement, mais
avec le discernement que requiert notre responsabilité vis-à-vis
des fonds publics, toutes les actions pertinentes qui concourent à
développer et à animer l'identité et la solidarité
des Québécois. Dans la difficile "opé-rationnalisation" de
cet objectif large et généreux, j'estime devoir retenir les
points d'arrimage suivants avec notre réalité polymorphe.
D'abord décentraliser, pour les confier davantage aux citoyens,
les pouvoirs décisionnels en matière de développement
culturel. Nous comptons, d'ailleurs, accentuer à ce sujet notre
collaboration avec les municipalités qui constituent une sorte de
gouvernement naturel à l'échelle de I'homme. Ensuite, poursuivre
l'oeuvre de consolidation des institutions nationales que tout pays digne de ce
nom doit instituer et développer: les archives nationales, la
bibliothèque nationale et nos musées nationaux. Nous porterons,
ce faisant, une attention particulière à la
régionalisation des services d'archives, conscients que nous avons des
retards à combler sous ce rapport. Egalement, favoriser le plus possible
sur des bases réalistes et saines le développement des
équipements et des ressources financières indispensables à
l'éclosion et à la mise en valeur de l'expression artistique
régionale de façon à contrebalancer, sans pour autant
anéantir les standards qui en découlent, l'influence
prépondérante des grands centres. E-galement, stimuler, mais avec
discernement, compte tenu du souhaitable et des possibles, le désir de
l'excellence chez les créateurs et les diffuseurs de la culture,
notamment par le recours à des normes conçues intelligemment pour
l'octroi de subventions ainsi que par une meilleure définition de nos
objectifs d'animation et d'information. Egalement, soutenir les
activités, les initiatives qui tendent à éveiller et
à mobiliser les Québécois de toute origine autour de leur
histoire, de leur folklore et de leur vie collective. Je précise
à cet égard l'importance que prendra bientôt, au chapitre
de la restauration de nos biens culturels, le développement de sites
d'interprétation de notre passé. Egalement, dans cette
perspective, il nous faut accroître progressivement le support aux
organismes telles les sociétés d'histoire locales et
régionales dont la collaboration est essentielle à l'éveil
et au développement d'une conscience collective.
Enfin, accorder toute l'importance requise au développement des
industries culturelles et des formes d'activités ayant pour but la
création et la production de biens et de services. Au-delà de la
gestion d'un programme d'aide à l'industrie du spectacle, dont nous
pourrions avoir la responsabilité très prochainement, nous
songeons plus particulièrement et plus substantiellement à la
création d'une société de développement des
industries culturelles à laquelle le premier ministre a
déjà fait allusion. Nous nous emploierons, au cours de l'exercice
1978/79, à en définir la programmation.
Au total, au-delà de la poursuite de tous ces objectifs qui vous
sont déjà largement connus, je voudrais que vous reteniez
l'effort que nous avons déployé dès maintenant pour animer
les différents milieux, les rendre davantage conscients de leurs
besoins, ainsi que des contraintes qui en découlent, les amener à
s'impliquer également dans la formulation de leurs impératifs de
développement culturel, tout en nous efforçant, tâche
essentiellement délicate, de leur faire partager la difficile mais
nécessaire hiérarchisation des priorités.
De notre part, forts de l'expérience acquise dans la poursuite
d'oeuvres conjointes je pense, entre autres, au développement
important des bibliothèques locales qui se fait en liaison avec les
autorités locales nous nous efforcerons d'être à
l'écoute des régions, d'humaniser nos rapports avec les citoyens,
nos alliés dans le milieu, et d apprendre à faire accepter nos
points de vue lorsqu'ils sont éclairés et pertinents par des
plaidoyers qui ne reposent ni sur l'autorité d'un titre ou d'une
fonction, ni, non plus, sur la seule connaissance scientifique.
Il nous faudra, en dernier lieu, très rapidement, non pas
juxtaposer, mais articuler les interventions et responsabilités des
conseils régionaux de la culture, des bureaux régionaux du
ministère et des directions générales elles-mêmes,
tous organismes essentiels à l'oeuvre primordiale pour le Québec
d'aujourd'hui qu'est un développement culturel équilibré
et vigoureux. Seulement dix semaines d'exercice de ma fonction actuelle
m'auront permis de sentir une pression et des attentes inouïes du milieu,
pressions qui doivent agir sur nous à la façon d'un stimulant. Le
temps approche c'est du moins ce que j'espère où
les citoyens exigeront des musées, des salles de spectacle, des
bibliothèques publiques et une attention soutenue à la mise en
valeur de notre patrimoine, avec au moins autant d'insistance que des
autoroutes.
J'aurai l'occasion, lorsque nous aborderons l'étude des
crédits élément par élément, de vous
indiquer pour chacun des programmes les principales orientations des politiques
du ministère pour l'exercice 1978/79.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Remarques de l'Opposition Mme Thérèse
Lavoie-Roux
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Au moment
d'aborder l'étude des crédits du ministère des Affaires
culturelles, alors que le gouvernement actuel ne peut plus se cacher
derrière les soi-disant négligences des gouvernements qui l'ont
précédé, nous ne pouvons accorder beaucoup de
félicitations au ministère des Affaires culturelles pour ce qu'il
a accompli durant l'année qui vient de s'écouler.
Evidemment, les propos que je vais tenir ne sont pas à
l'égard du ministre actuellement en poste puisque, comme il l'a
signalé lui-même, il n'y est que depuis six semaines. Je veux bien
encore, à son égard, avoir beaucoup d'indulgence. Cependant,
cette indulgence est beaucoup moins grande lorsque j'examine ce dont le
gouvernement nous avait parlé durant l'étude des crédits
l'an dernier et ce que nous avons eu durant l'année qui s'est
écoulée.
Il y aurait peut-être une question préalable, qui ne peut
être une question formelle parce que je sais qu'il n'y a pas de question
de privilège ici, mais je voudrais quand même faire cette
parenthèse pour dire que nous trouvons un peu frustrant, pour ne pas
dire presque indécent, le fait que le livre blanc sur la culture
circule. Si bien qu'hier, dans un journal, il y avait quatre ou cinq pages
consacrées à des analyses des différents chapitres du
livre blanc alors que les principaux intéressés n'en ont
même pas pris connaissance. Ce livre blanc, de toute façon, avait
été promis pour octobre; nous sommes rendus au mois de mai et si
tout se passe bien et si les présondages qu'on fait avec ces fuites de
livre s'avèrent assez heureux, peut-être qu'on peut espérer
lavoir pour le 15 juin. De toute façon, je pense qu'il convient de faire
remarquer qu'un livre qui circule entre différents journaux et la radio
sans que nous ayons pris connaissance, c'est pour le moins surprenant, alors
que nous sommes quand même les premiers et les principaux
intéressés.
J'aimerais, au-delà du budget sur lequel je reviendrai tout
à l'heure, reposer certaines questions que j'avais posées l'an
dernier et auxquelles on n'a pas accordé de réponse en
dépit du fait que le ministre du temps je regrette qu'il ne soit
pas ici, on ne peut que faire l'analyse de l'année qui vient de
s'écouler à partir des réalisations du ministre qui a
été en poste durant cette année.
Ainsi, par exemple, nous avions posé des questions sur les
archives nationales et judiciaires quant à leur revalorisation et on
nous promettait, au moment de l'étude des crédits de l'an
dernier, une loi-cadre pour regrouper toutes les archives sous
I'autorité du minitère des Affaires culturelles. Normalement,
cette loi-cadre aurait dû être déposée avant
l'ajournement de la dernière session, soit avant l'été
dernier. Nous sommes maintenant rendus à l'été suivant et
il n'y a encore aucun signe que cette loi-cadre pour la protection et la
conservation des archives nationales soit adoptée ou, du moins, on n'en
entend pas parler.
Il y avait également un autre problème qui avait retenu
notre attention assez longtemps, celui d'une politique de lecture qui serait
ébauchée à la suite du dépôt de certains
rapports, qui, d'ailleurs, l'ont été, et dans lesquels il y avait
des recommandations intéressantes. Encore une fois, cela semble
être un certain immobilisme si on met à part cette campagne de
publicité à laquelle vous faites allusion dans ce rapport dont
j'ai très brièvement pris connaissance étant donné
qu'il nous est parvenu il y a à peu près 20 minutes, campagne de
publicité faite au moyen de la télévision messages
éclairs pour la population II sera peut-être
intéressant un peu plus tard de savoir quel en a été le
coût et quelle évaluation a-t-on pu en faire.
Il semble également, bien que la question ait été
soulevée l'an dernier à la fois par le député de
Gaspé et moi-même, que nous n'ayons pas fait de pas en avant dans
cette collaboration que tous souhaitaient tant du côté
ministériel que du côté des oppositions. C'est cette
collaboration, dis-je, qui devait s'établir entre le ministère de
l'Education et le ministère des Affaires culturelles concernant
l'enseignement des arts. Il semble, encore une fois, que ceci, à moins
qu'on nous fasse des révélations dans quelques instants, soit
passablement demeuré lettre morte.
Il y avait également une loi créant une commission des
musées qui devait être déposée avant l'ajournement
d'été. Je regrette, j'ai fait une erreur tout à l'heure en
parlant de l'ajournement d'été en le reliant aux archives
nationales et judiciaires; c'est une erreur et j'aimerais que ce soit
corrigé au journal des Débats. Il s'agissait, en fait, d'un
projet de loi pour la création d'une commission des musées et il
n'a pas été déposé.
J'aimerais également demander ce qu'il est advenu du rapport
Frégault sur la création d'un institut d'histoire et de
civilisation. Ce rapport Frégault est déjà entre les mains
du ministère des Affaires culturelles depuis plusieurs mois, tout
près d'un an me dit-on, et il semble encore qu'il ne se soit rien
passé.
Je voudrais quand même signaler au passage l'aide
financière que le ministère des Affaires culturelles a
accordée aux sociétés d'histoire durant l'année qui
vient de s'écouler, je pense pour un montant de $100 000. Même si
c'est un montant modeste, il reste quand même au moins que cela indique
un désir d'accorder aux sociétés d'histoire l'importance
qui doit leur revenir et de leur permettre de s'acquitter de leur fonction et
de leur rôle un peu mieux au Québec. Je pense d'ailleurs que c'est
là une préoccupation de l'actuel ministre des Affaires
culturelles.
Il y a un autre problème que nous avions soulevé, à
savoir celui de l'emploi artistique au Québec, les problèmes de
la situation syndicale des artistes et de l'accès des étrangers
aux orchestres symphoniques et aux différents organismes culturels au
Québec. Le ministre d'alors nous avait dit que c'était une
préoccupation qu'il avait, qu'il n'y avait malheureusement pas de
comité de travail sur pied pour étudier ces différents
problèmes mais qu'il les considérait une priorité et comme
étant des problèmes auxquels il fallait s'attaquer.
Je regrette également que le conseil national de la culture que
le ministre d'alors nous avait laissé entrevoir comme une
possibilité, même s'il avait été
référé pour étude plus approfondie au comité
de développement culturel, n'ait pas été
créé. Quand je vois dans les notes que nous remet aujourd'hui le
ministre actuel des Affaires culturelles son désir de
décentralisation, qui paraît comme sa première et
probablement plus importante intention soit de "décentraliser pour les
confier davantage aux citoyens les pouvoirs décisionnels en
matière de développement culturel ", je m'interroge
sérieusement, d'abord devant l'absence de
ce conseil national de la culture auquel on préfère,
semble-t-il, à moins qu'il ne soit retenu dans le livre blanc, conserver
l'autorité totale du ministère des Affaires culturelles sur tout
ce qui touche le domaine culturel. Il y a eu également la
création ou je dirais la continuation de la création des
comités régionaux de la culture qu'on a voulus uniquement
consultatifs, alors qu'on aurait fort bien pu leur donner certains pouvoirs
décisionnels. Il semble qu'il y aurait eu là un geste concret
à poser dans le sens d'une véritable décentralisation,
mais on en est resté, une fois de plus, au niveau de la consultation. En
réponse à des questions, le ministre aura probablement l'occasion
de nous dire plus tard comment il voit le travail qui se fait
présentement entre les bureaux régionaux et ces comités
régionaux de la culture, à savoir les responsabilités de
chacun. Chose certaine, encore une fois on a refusé cette occasion de
faire une véritable décentralisation. (10 h 30)
Sans doute, il y a un effort du côté des
municipalités, qui est prévu dans la loi 4 par une modification
apportée à la Commission des biens culturels, mais, encore une
fois nous aurons l'occasion d'en reparler au moment de l'étude du
projet de loi c'est un effort de décentralisation très
mitigé, puisque, finalement, tous les règlements devront
être approuvés par le ministre et que, somme toute, c'est le
ministère et le ministre qui auront le dernier mot dans ce domaine comme
ailleurs.
D'une part c'est assez intéressant de la part de ce
gouvernement on parle beaucoup de décentralisation. En fait, on
pose des gestes qui semblent être des gestes de décentralisation,
mais en retenant toujours, au niveau du gouvernement ou des différents
ministères, les pouvoirs de décision. Si je signale cette...
M. Vaugeois: Anomalie apparente?
Mme Lavoie-Roux: ... anomalie apparente, c'est que j'ai quand
même confiance qu'avec un nouveau ministre les intentions soient
réellement concrétisées dans de véritables gestes
de décentralisation et non seulement dans des espèces de "flirts"
avec ce qu'on pourrait appeler de la décentralisation.
Il y a une foule d'autres questions que je pourrais aborder. Si le
ministre est d'accord il pourra peut-être me répondre plus
tard je ferais une suggestion pour que nous laissions de
côté toute la question du patrimoine au moment de l'étude
des crédits, compte tenu qu'on pourrait peut-être y revenir, d'une
façon plus détaillée, au moment de l'étude de la
loi 4. C'est une suggestion. Je ne sais pas si nos règlements nous le
permettent. Non, ils ne nous le permettent pas.
M. Vaugeois: Nous y passerons rapidement. M. Guay: II faut
adopter le programme.
Mme Lavoie-Roux: Oe toute façon, j'ai appris que,
lorsqu'on n'adopte pas les programmes, ils sont adoptés automatiquement.
C'est un exercice un peu futile.
M. Guay: Là-dessus, M. le Président, si vous me le
permettez, c'est que la Loi modifiant la Loi sur les biens culturels devant
être étudiée article par article ne permet pas, dans la
mesure où on s'en tient à la pertinence du débat, de poser
des questions sur les initiatives du gouvernement ou du ministère en la
matière.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce la volonté du ministre ou du
député?
M. Vaugeois: De la députation ministérielle.
Mme Lavoie-Roux: De la députation ministérielle.
C'est bien. Nous l'examinerons à ce moment-ci.
Je voudrais simplement faire remarquer qu'encore une fois, il semble y
avoir des problèmes de relations entre la Commission des biens culturels
et la direction générale du patrimoine. Peut-être que la
suggestion que nous avions faite de donner plus de pouvoirs à la
Commission des biens culturels éviterait ces ambiguïtés qui,
parfois, conduisent même à certains désastres, comme on a
pu le voir dans le cas de certaines maisons qui ont été
détruites ou dont on ne s'est pas occupé à temps parce
qu'il semblait y avoir ce retard de la direction générale du
patrimoine à agir à l'égard de certaines recommandations
de la Commission des biens culturels. Enfin, nous aurons l'occasion d'y
revenir.
Pour ce qui est du budget, je pense que, cette année, la
députation ministérielle pour utiliser vos termes, M. le
Président ne fera pas d'objection au fait que nous
considérions extrêmement pauvre l'augmentation consentie au
ministère. Le ministre l'a admis lui-même en parlant d'une
augmentation de 4,8% sur les dépenses réelles. Il explique que
c'est quand même un noble effort, compte tenu de la conjoncture
économique.
J'aimerais quand même qu'il nous dise, ultérieurement
comment ces 4,8% se comparent à l'ensemble de l'augmentation consentie
dans les autres ministères. Je ne suis pas sûre qu'on ne se
retrouve encore les parents pauvres au ministère des Affaires
culturelles. D'ailleurs, le ministre des Finances a été assez
clair là-dessus. On peut lire, dans les renseignements
supplémentaires qu'il a déposés avec le budget, mise
à part la croissance normale des coûts d'administration des
organismes culturels qu'il subventionne, que le ministère des Affaires
culturelles aura sensiblement la même enveloppe budgétaire que
l'an dernier.
Je pense qu'il convient de signaler une diminution globale de l'ordre de
7,18% pour le programme IV consacré à la création,
à la recherche, à la conservation et à la diffusion des
arts plastiques. Je ne crois pas qu'il y ait eu ce que le ministre semble
vouloir qualifier de rattrapage de l'année antérieure. S'il y
avait un rattrapage à faire, c'est qu'il y avait des besoins. Qu
à ce moment-ci on consente à une diminution de 7% dans ce domaine
alors que les problèmes sont
aigus, qu'il y a beaucoup de recherches à faire, je pense que
c'est difficilement acceptable.
Au moment du message inaugural, le premier ministre a parlé de la
création d'industries ou, enfin, d'une priorité à accorder
à la création d'une société de développement
des industries culturel-les. Je pense que c'était là une
recommandation du livre vert sur l'évolution pour la politique
culturelle du ministre des Affaires culturelles de l'ancien gouvernement. Je
pense que c'est une initiative qui s'impose. J'aimerais quand même redire
ici ce que j'ai dit ailleurs. J'espère que dans le livre blanc où
il en sera probablement question, quoique ceci, si on doit prévoir une
société, viendra à l'Assemblée nationale sous forme
d'un projet particulier, je voudrais quand même rappeler au ministre que
j'ose espérer que le gouvernement n'aura pas la tentation de
marginaliser les industries culturelles mais qu'elles seront placées sur
le même pied que les autres industries et qu'elles s'appuieront vraiment
sur la structure industrielle, économique et commerciale de l'Etat. Cela
me semble important pour vraiment donner l'essor que l'on veut aux industries
culturelles.
Je termine ici mes remarques, M. le Président. Il y en a
peut-être une dernière que je voudrais faire. J'ai remarqué
que durant l'année budgétaire 1976/77, et là je le dis de
mémoire, il y avait eu près de $2 millions de
périmés. Cette année, si je m'en reporte aux
suppléments qui nous ont été remis par le ministre des
Finances, il semblerait, à moins que j'interprète mal les
chiffres, qu'il y aurait environ $6 millions de crédits qui auraient
été périmés.
Si, d'une part, on peut être tenté d'attribuer cela
à une bonne gestion, ce qui est une approche peut-être très
indulgente, d'autre part, devant des budgets aussi limités
affectés aux affaires culturelles, il est légitime de
s'interroger à savoir si cet argent qui n'est pas dépensé,
compte tenu des besoins qui existent, est peut-être dû aussi
à une gestion pas suffisamment efficace dans le ministère des
Affaires culturelles. De toute façon, c'est une question que je pose.
Ceci veut dire que, durant les deux dernières années, c'est
près de $8 millions affectés aux affaires culturelles qui
n'auraient pas été utilisés. Si je me trompe, je serais
très heureuse que le ministre nous donne une réponse à
cette question. J'arrête ici pour le moment, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole au
député de Gaspé, j'aimerais qu'on nomme un rapporteur, ce
qu'on a oublié de faire au début de la réunion.
M. Le Moignan: M. le député de Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: M. le député de Taschereau.
M. Guay: Lourd fardeau.
Mme Lavoie-Roux: Pour le faire tenir tranquille.
M. Guay: Non.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. Michel Le Moignan
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord
féliciter le député de Trois-Rivières, le nouveau
ministre des Affaires culturelles. Quand je me reporte à l'an dernier,
j'avais commis un lapsus, une soirée, en m'adressant à mon
excellent ami Pierre Boucher et, au lieu de dire sous-ministre par
intérim, j'avais parlé de M. O'Neill comme ministre par
intérim. Je m'aperçois que le temps m'a peut-être
donné raison. M. O'Neill était peut-être ministre par
intérim.
Mme Lavoie-Roux: Tout le monde était par intérim,
apparemment.
M. Le Moignan: Tout le monde est par intérim dans ce
gouvernement, c'est ce que vous voulez dire?
Mme Lavoie-Roux: Non, je parlais du ministère.
M. Le Moignan: Je suis bien content, M. le ministre, de vous voir
à cette table ce matin et j'aimerais connaître ces illustres
personnages qui vous entourent, dont deux ou trois sont tout à fait
nouveaux pour moi, ce matin.
M. Vaugeois: Voulez-vous qu'on le fasse tout de suite, M. le
Président? Je comptais le faire tout à l'heure.
M. Le Moignan: Pour éviter des lapsus.
M. Vaugeois: M. le Président, je profite de l'invitation
du député de Gaspé pour vous présenter M. Noël
Vallerand, qui est à ma droite et qui est le nouveau sous-ministre du
ministère des Affaires culturelles. Il est en fonction depuis une
semaine, une journée et quelques heures. Il a pris son poste lundi
dernier. M. Vallerand était auparavant vice-président à la
planification à l'Université du Québec. L'essentiel de sa
carrière s'est déroulé depuis le Collège
Sainte-Marie jusqu'à l'Université du Québec où il a
occupé diverses fonctions, notamment à cette époque, du
côté de l'histoire et de l'enseignement des arts. Vous connaissez
déjà M. Pierre Boucher qui a...
Mme Lavoie-Roux: II me fait plaisir de le revoir en passant.
M. Vaugeois:...su tenir brillamment le ministère pendant
un bon bout de temps. M. ClaudeTrudel, qui est également sous-ministre
adjoint; je pense que vous le connaissez, que vous le retrouvez. M. Georges
Cartier, qui est directeur général aux arts et aux lettres, qui
est une personne bien connue également, et Claude Archambault, qui est
derrière moi, qui est directeur général de
l'administration,
que vous devez reconnaître aussi, puisqu'il était en
fonction l'an dernier. Ce qui montre qu'il n'y a pas tellement
d'intérim. L'intérim, c'est moi. Je pense que pour le reste, vous
avez une permanence de qualité.
M. Le Moignan: Merci, M. le ministre.
Mme Lavoie-Roux: Vous n'êtes pas là par
intérim, quand même.
M. Le Moignan: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes là seulement par
intérim?
M. Vaugeois: Bien sûr, je suis le temporaire du
ministère, je suis un occasionnel.
M. Le Moignan: Vous êtes un occasionnel, comme nous, les
députés.
M. Vaugeois: Voilà.
M. Guay: Peut-être pas au même point que le
député de Gaspé.
M. le Moignan: Merci, M. le ministre. Je remarque au début
de votre magnifique cahier...
M. Le Moignan: Le député de Gaspé est
permanent, lui. Il a été élu en permanence.
Je vois, M. le ministre, au début de votre cahier...
M. Guay: ... sous la bannière de l'Union Nationale...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît.
M. Le Moignan: ... une remarque qui je pense, figurait aussi l'an
dernier, à savoir que le ministère des Affaires culturelles a
pour mission de favoriser I'épanouissement des arts et des lettres au
Québec et leur rayonnement à l'extérieur. Je suis
parfaitement d accord sur cela. Après avoir lu les journaux de fin de
semaine, il y a une citation, et Mme le député de L'Acadie l'a
rappelée, de ce livre blanc qui circule et que nous n'avons pas,
malheureusement, en main, qui m'a frappé. On dit: "La culture tout
entière est en effet un milieu de vie ''. Je me souviens très
bien que le ministre au développement culturel, M. Laurin, l'an dernier,
avait également mentionné la langue comme un milieu de vie. Je
sais qu'il y a une étroite relation entre la culture, la langue, le
patrimoine et tout ce qui est québécois. Et si on veut
compléter la remarque du ministre de l'an dernier, il nous avait dit que
l'une de ses priorités était la décentralisation, pour
confier plus de responsabilités aux citoyens et les soustraire aux
caprices de politiques partisanes et aussi leur confier des pouvoirs
décisionnels en matière culturelle.
Le nouveau ministre est parfaitement d'accord, je crois, sur cela. M.
O'Neill nous disait un peu plus loin dans son introduction de l'an dernier,
tellement convaincu de cette proposition: "Nous parvien- drons, j'en suis
convaincu, à dessiner les lignes de force de la décentralisation
culturelle chez nous. Nous le ferons en y associant étroitement les
ressources locales et régionales. Lorsque le temps sera venu, nous
concrétiserons cette volonté politique dans une
législation adaptée aux exigences de la démocratie
gouvernante et du développement culturel de notre collectivité.
Deuxième priorité, consolider les institutions nationales que
tout pays qui respecte son patrimoine culturel doit instituer et
développer; les archives nationales, la bibliothèque nationale,
les musées nationaux. Je sais qu'il y a beaucoup de travail à
accomplir encore dans ce sens". (10 h 45)
M. le ministre, il y a quelques semaines, à Pont-Viau, lors d'un
souper, vous avez insisté sur ces points. Si ma mémoire est
bonne, vous aviez dit que vous n'étiez pas un pompier. Je pense que
c'est ce que vous avez dit. A ce moment-là, vous vouliez associer tous
les Québécois. C'était à l'occasion du
congrès de la Fédération des sociétés
d'histoire locales. J'ai beaucoup apprécié vos remarques parce
que le ministre lui-même et les employés du ministère ne
peuvent pas être présents partout à la fois sur tout le
territoire québécois. L'invitation que vous avez lancée
à ce moment-là, par le biais de la Fédération des
sociétés d'histoire, devrait être davantage
répandue. Il faudrait une publicité beaucoup plus grande. Je sais
que nous avons la loi no 4 concernant le patrimoine et les biens culturels;
elle contient, entre autres, un projet qui touche les municipalités. On
pourra peut-être en discuter plus tard, quand nous arriverons aux points
de détail. Il y a des municipalités qui assument peut-être
très bien leur rôle, mais il y en a d'autres qui sont tout
à fait étrangères à la sauvegarde du
patrimoine.
M. O'Neill disait justement, l'an dernier aussi: "Mon ministère
sera encore plus vigilant qu'il ne l'a jamais été à
l'égard de la conservation et de la mise en valeur des biens culturels,
c'est-à-dire des oeuvres d'art, des monuments, des sites qui sont des
symboles de notre identité, qui marquent les étapes de notre
courte histoire, qui sont les points de repère de notre identité
nationale." On sait très bien que partout au Québec, que ce soit
des vieux moulins, que ce soit des sites, que ce soit des vieilles maisons,
nous avons des témoins du passé, des témoins qu'il nous
faut sauvegarder à tout prix quand on connaît le massacre et le
vandalisme qui se pratiquent encore. Très souvent, le ministère
est averti quand ce moulin, cette maison ou autre chose ont été
détruits; c'est cela qui est malheureux. Puisque nous travaillons tous
en parfaite harmonie pour permettre au ministère des Affaires
culturelles de jouer le rôle véritable qu'il doit remplir au
Québec, nous devons être unanimes pour cette sauvegarde du
passé.
Malheureusement, quand on visite les autres provinces, de Gaspé
à Vancouver, quand on voit les musées en Alberta, au Manitoba, en
Colombie-Britannique, on voit les efforts des gouvernements et cela
depuis de nombreuses années pour sauvegarder le patrimoine, alors
qu'ici le premier ministère des Affaires culturelles a été
établi en
1961, si ma mémoire est bonne! C'est donc dire que nous avons
perdu beaucoup de richesses dans le passé.
Je crois avoir mentionné l'an dernier ce problème; je
voudrais aussi attirer l'attention du ministre là-dessus. Il y a encore
des camions étrangers puisqu'on n'aime pas les étrangers
dans ce gouvernement américains ou anglophones de l'Ontario, qui
font le tour de la Gaspésie, de l'île d'Orléans, du
Lac-Saint-Jean pour acheter nos meubles, nos rouets, nos antiquités.
Comme les gens ne sont pas tellement prévenus, pour se
débarrasser de ces vieilleries, ils vont sacrifier une large partie du
patrimoine. Je ne peux pas blâmer les gens; il y a une éducation
à faire. Je crois que le ministre aura un coup de barre à donner,
peut-être cet été à l'occasion de la semaine du
patrimoine, pour sensibiliser la population du Québec afin que cela
cesse, en commençant par les conseils municipaux, les commissions
scolaires et j'oserais dire certains curés qui dilapident, qui vendent
des objets anciens pour nettoyer leur sacristie. J'en ai été
témoin il y a encore à peine un an ou deux, alors que ces
mêmes curés savaient très bien que dans notre région
nous avions une société historique qui existe depuis quinze ans
et qui essaie de sauver tout ce qui peut être
récupéré dans les choses du passé.
Il y a une semaine du patrimoine, comme il y a une semaine de la morue,
une semaine du poisson ou une semaine du hot dog. Il y a tellement de semaines
dans le Québec, à longueur d'année, qu'il faudrait
absolument qu'on mette un accent...
M. Guay: La semaine de l'Union Nationale, c'est quand?
M. Le Moignan: La semaine de l'Union Nationale, M. le
député de Taschereau, cela s'en vient. Cela va très bien,
cela fait des progrès. Les libéraux ont eu leur semaine
déjà, c'est pour cela qu'ils nous donnent une chance. Nous aurons
notre semaine, la semaine de l'avenir.
M. de Bellefeuille: Ah bon! Un congrès à la
chefferie se prépare?
M. Le Moignan: Non, non, non.
Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous, s'il vous
plaît, revenir au sujet?
M. Le Moignan: II ne faut pas mêler les choses, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Vous non plus.
M. Le Moignan: Mais je suis entraîné par le
député de Deux-Montagnes.
M. le Président, pour parler sérieusement, la politique
culturelle doit faire du ministère à la fois un agent
d'accessibilité aux biens culturels, un agent de développement
économique je ne détaille pas pour le moment et
aussi un agent de projection de l'identité québécoise. Je
crois que ces trois mots résument parfaitement le travail que votre
ministère doit accomplir de concert avec le ministère de
l'Education, le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux
sports et tous les autres ministères qui sont impliqués dans la
sauvegarde de notre identité québécoise. On parle donc de
sauvegarde, d'épanouissement et de projection de l'identité
propre des Québécois.
J'ai mentionné tout à l'heure que le ministre a
insisté, au congrès de la fédération, en demandant
aux gens de prendre en main leur responsabilité. Si nous voulons
réellement sauvegarder l'ensemble du patrimoine culturel
québécois et si nous voulons travailler à tous les
niveaux, dans la mesure des moyens de chacun, pour le développement et
la promotion des arts et la culture de la collectivité, je crois que
c'est le gouvernement du Québec qui a un immense rôle à
jouer. Il y a des mesures législatives, il y a aussi des mesures
administratives pour assurer aux citoyens cette accessibilité aux biens
culturels, de sorte que tous les Québécois, partout sur le
territoire du Québec, puissent voir et entendre l'expression de leur
culture et que la distribution des biens culturels en soit
généralisée.
L'an dernier, nous avions mentionné qu'il n'y a qu'une seule
culture qui doit être le reflet de la vie d'ici, de la vie du
Québec, de la vie de tous les Québécois, quelle que soit
leur langue, quelle que soit leur origine, et, en même temps qui soit la
manifestation de l'activité de chacun. Dans les bribes que nous avons
recueillies en fin de semaine dans les journaux malheureusement, nous
n'avons pas le texte complet il y a là certainement un document
de travail qui déborde le cadre des activités du ministère
actuel des Affaires culturelles. C'est un livre qui analyse dans sa
globalité tous les aspects, tout ce qui a trait à la vie
culturelle des Québécois, que ce soient les francophones ou les
autres.
On parle justement d'habitation, on parle de culture, on parle de sport,
on parle de beaucoup de choses. Je pense que ceci fait un tout. Dans le
passé, on a eu des rapports; on a eu le rapport Laporte, on a eu le
livre de M. L'Allier. Maintenant, on a le rapport commandé par M.
Laurin; on a cette diversité des classes sociales, des régions
que Mme le député vient de mentionner, des sectes et des
âges, le genre de vie, les équipements collectifs; industrie
culturelle, patrimoine, création artistique, enseignement et recherches
scientifiques. C'est donc dire que, même si votre budget n'est pas
tellement augmenté, il y a beaucoup de boulot sur la planche, il y a
beaucoup de travail à effectuer.
Quand on regarde les déclarations du ministre Laurin et celles du
premier ministre, on se demande s'ils sont sur la même longueur d'onde.
Il y a un très long débat, qui se poursuit depuis
déjà 18 mois en matière culturelle. Est-ce un projet
global? Est-ce qu'il y a une véritable philosophie gouvernementale en
matière culturelle? Est-ce que l'intervention de l'Etat doit travailler
au détriment de l'intervention privée ou est-ce que les deux
doivent travailler en étroite collaboration? On est toujours en
état de se poser des points d'interrogation. J'ai vu un type en fin de
semaine qui disait: Québec en quête d'un minimum vital culturel.
C'est donc dire que nous avons encore beaucoup de travail à
accomplir.
Ce sont les Québécois qui font la culture, ce n'est pas le
gouvernement. Vous l'avez déclaré à Montréal il y a
quelques semaines, M. le ministre, et ce sont les Québécois qui
sont invités à participer. Et le jour où nous
réussirons à intéresser tous les Québécois
à cette question de culture, de patrimoine, de sauvegarde de tous ces
témoins du passé, que ce soit des monuments, des livres, des
archives et le reste et le reste, je crois que nous allons accomplir un travail
immense. J'avais mentionné l'an dernier qu'il fallait dépolitiser
la culture et le ministre Laurin m'avait répondu que la culture, de soi,
est politique avec un P majuscule peut-être? mais je
parlais au sens général, afin que le gouvernement ne soit pas le
maître d'oeuvre exclusif dans ce domaine de la culture
québécoise. Si on veut bâtir une future
société québécoise idéale, si on veut
assurer le pain et la vie comme on le dit dans le livre blanc, il y a tout de
même un minimum vital culturel et matériel qui s'impose. Et on
doit maîtriser nos instruments d'identification. La langue, c'est
déjà réglé, on a connu ce long débat.
Heureusement, ici, en commission parlementaire, nous n'avons pas à
souffrir les agonies d'une guillotine, nous travaillons de façon plus
positive, mais il reste que le monde du travail, de l'économie, de
l'habitat, de l'environnement, du tourisme, des loisirs, des communications,
c'est beaucoup de choses qui touchent et qui concernent le ministère des
Affaires culturelles.
On a parlé, il y a quelque temps, de régionalisation. Le
ministre en avait parlé également l'an dernier. Il y a des
conseils régionaux de la culture, il y a des conseils des
communications, il y a des conseils régionaux de
Radio-Québec...
Mme Lavoie-Roux: II y en aura!
M. Le Moignan: Et il y en aura d'autres qui vont s'ajouter! Mais
il y a un travail de concertation qui doit s'effectuer. Quand nous regardons
nos sociétés d'histoire régionales et locales, je crois
que vous avez en main les meilleurs outils pour vous aider. Les outils
indispensables pour permettre au ministre des Affaires culturelles
d'élaborer des politiques concernant les différentes
régions, des politiques qui vont tenir compte des moeurs, de la
mentalité, du genre de vie, du passé de ces
régions-là. Il faut commencer un travail dans ce sens. Nous
l'avons déjà commencé en Gaspésie il y a
d'autres régions qui le font également avec une
bibliothèque gaspésienne, avec un musée qui est
très bien. Il y a d'autres musées aussi dans la province, votre
ministère va certainement essayer de propager cela, et vous avez
beaucoup de demandes dans ce sens. Si on veut sauvegarder cette identité
régionale, c'est par des musées, des bibliothèques, des
sociétés d'histoire locales, des media d'information, et de tout
ce qu'on veut.
Plus loin nous parlerons peut-être de l'Opéra du
Québec, nous allons parler des sites d'interprétation du
passé. Je termine ici mon intervention. Avant de commencer à
poser des questions précises, des questions de détail, je crois
qu'il y aura un tour de table où nous pourrons retoucher des thè-
mes généraux avant d'entrer dans des points peut-être plus
spécifiques.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres
personnes qui veulent prendre la parole? M. le ministre.
Réponse de M. le ministre
M. Vaugeois: J'aurais peu de choses à ajouter.
Peut-être une question assez technique au départ sur la
performance du ministère, l'an dernier, sur le plan budgétaire.
On m'a fourni les précisions suivantes. Les dépenses effectives
de 1977/78, d'après les derniers relevés en date du 4 mai,
seraient de l'ordre de $56 769 100. Il faut, je pense, situer ces $56 769 100
en regard des prévisions faites par le Conseil du trésor au
début de l'année 1978, qui avait prévu que les
dépenses du ministère et c'est dans la colonne
Dépenses probables seraient de l'ordre de $54 387 000. C'est donc
dire que, si on regarde ces deux seuls chiffres, la performance du
ministère a été supérieure à
l'évaluation faite par le Conseil du trésor au début de
l'année. Il reste quand même que par rapport... (11 heures)
Mme Lavoie-Roux: On est à la veille de...
M. Vaugeois: On va changer de ministre plus vite qu'on
pensait.
Il reste quand même que, par rapport aux crédits, nous
avons environ $3 500 000 de crédits à dépenser. Cela
s'explique par plusieurs facteurs, entre autres, par les exigences que pose le
programme de la restauration. C'est le poste budgétaire qui s'est
gonflé le plus rapidement. Vous n'ignorez pas que, l'an dernier, le
ministère avait profité d'une augmentation de crédits
d'environ 30% par rapport à l'année précédente et
que des sommes importantes avaient été affectées à
la restauration. Or, la restauration suppose plusieurs exigences
préalables au niveau des relevés architecturaux et,
également, au niveau de l'histoire du bâtiment. Au moment de la
restauration, il faut faire un choix. On en est présentement à
vouloir restaurer les bâtiments en tenant compte de leur histoire,
c'est-à-dire de leur propre évolution. Au Québec, on a eu
tendance, dans les premières expériences de restauration,
à retourner au bâtiment original alors qu'aujourd'hui on est
conscient qu'on peut tenir compte de l'histoire que les bâtiments ont et
que les hommes leur ont donnée.
Egalement, il y a toute une préoccupation de mise en valeur.
Compte tenu des ressources limitées de tout gouvernement, on ne peut pas
restaurer pour restaurer. Il faut également se préoccuper de la
fonction. Il y a un travail d animation dans le milieu qui peut être
parfois rapide mais qui peut aussi prendre du temps. Divers facteurs comme
ceux-là vous ont justifiés à mon avis, c'est tout
à l'honneur du ministère de ne pas avoir
dépensé pour dépenser. Par ailleurs, le ministère a
senti l'urgence d'accélérer le travail d'inventaire ce qui
se fait d'ailleurs de développer un service d'animation, lequel
est en
place et qui travaille magnifiquement. Au total, la performance du
ministère, sur le plan budgétaire et à partir des
suggestions fournies par le député de L'Acadie, est fort
honorable.
Mme le député de L'Acadie a relevé un certain
nombre de points que nous aurons l'occasion d'aborder lors de l'étude
des crédits, élément par élément. Tout de
même, je lui dirai tout de suite que plusieurs des points qu'elle a
suggérés, par exemple, la commission des musées, un
institut d'histoire et des civilisations ou un conseil de la culture
elle s'en doute bien trouveront leurs réponses dans le livre
blanc.
Mme Lavoie-Roux: Quand aurons-nous le livre blanc, M. le
ministre?
M. Vaugeois: Je vais d'abord faire une parenthèse, Madame.
Quant à l'institut d'histoire et des civilisations, vous pouvez
être assurée de l'intérêt que le ministère lui
porte. Le nouveau sous-ministre a été du groupe de travail
responsable du rapport que nous avons entre les mains. Egalement, vous
n'ignorez pas les étroits rapports qui existaient, à mon niveau,
avec le groupe de travail en question. C'est évident que nous sommes
extrêmement sensibles aux recommandations de ce groupe de travail. C'est
de bon aloi que de situer notre réflexion dans la réflexion
d'ensemble du livre blanc.
On nous dit que le livre blanc pourra être rendu public en juin.
Je vous ferai un commentaire général là-dessus. Il est
possible qu'il vous tombe entre les mains une version...
Mme Lavoie-Roux: Pouvez-vous m en envoyer une, M. le
ministre?
M. Vaugeois: Puisque cela est arrivé pour certains
journalistes, j'imagine que cela peut arriver à d'autres niveaux. Je me
méfierais des documents qui traînent actuellement. Même si
vous mettiez la main sur un document qu'on vous présenterait comme la
dernière version, vous devriez le prendre comme une version provisoire.
Le travail n'est pas terminé. La version qui est sortie en fin de
semaine, en particulier, dans Le Devoir, est une version nettement
périmée. C'est un document de travail qui circulait au
début de l'année. Juste pour me situer par rapport à ce
document, je n'étais pas en fonction lorsque cette version a
circulé. Vous vous doutez bien que, depuis que je suis au
ministère des Affaires culturelles, j'ai eu l'occasion de m'associer au
travail de réflexion du gouvernement sur le livre blanc. Sans entrer
dans les détails, je pense qu'on perdrait notre temps à discuter
à partir de ce qui est sorti, puisqu'il y a un certain nombre de points
assez significatifs qui ont évolué, depuis.
Vous avez fait allusion aux pouvoirs de la Commission des biens
culturels et à un certain nombre de questions comme celle-là. Je
pense qu'on est mieux de reprendre cela au moment de l'étude des
éléments du budget. Peut-être un point qui ne reviendra pas
à l'occasion des éléments du budget, c'est cette fameuse
société de développement des industries culturelles. Le
premier ministre, au moment de mon assermentation, avait parlé de cette
société. Je pense que tout le monde aura compris qu'il en faisait
un peu une commande spéciale à mon endroit. Effectivement, nous
sommes sur le point de pouvoir donner publiquement l'état de nos travaux
à cet égard.
Je n'ai rien à annoncer ce matin, si ce n'est qu'il est à
prévoir que le ministère des Affaires culturelles interviendra
très prochainement dans le domaine des industries culturelles avec des
moyens nouveaux qui pourront être assimilables à ceux de la SDI,
la SDI ayant elle-même reconnu ses difficultés à
évaluer les demandes qui viennent des industries culturelles. Je pense
qu'il n'est pas possible d'évaluer les possibilités d'un produit
culturel tels le livre ou le disque au même titre que la production
industrielle normale. Il y a là des exigences particulières pour
lesquelles le ministère des Affaires culturelles est peut-être
assez bien équipé. C'est le défi que nous avons
l'intention de relever. Je pense bien que très prochainement nous
pourrons proposer quelque chose d'assez concret.
Le député de Gaspé, selon sa très bonne
habitude, a eu des propos très encourageants et d'appui total au
ministère des Affaires culturelles, ll a su dégager, comme il
l'avait fait l'an dernier, des préoccupations de base qu'il
résume par les mots accessibilité, action économique,
projection de l'identité nationale. Je ne l'étonnerai pasen lui
disant que je souscris totalement, sans réserve, à de telles
préoccupations.
Il s'est référé à la notion de culture que
véhiculent les bribes de livre blanc qui circulent actuellement, cette
version préliminaire et préhistorique du livre blanc qui circule
actuellement. Je pense qu'on peut se mettre d'accord là-dessus. C'est
évident que, pour le gouvernement actuel, la culture, ce n'est pas des
manifestations culturelles secondaires et occasionnelles. C'est évident
que cela réfère à quelque chose de beaucoup plus global.
C'est à mettre en parallèle avec la vie politique et la vie
économique. La vie culturelle trouve une place équivalente dans
nos préoccupations à la vie politique et à la vie
économique.
D'ailleurs, nous croyons que tout cela se tient. Nous croyons qu'un
progrès politique n'est possible qu'avec une vie culturelle soutenue,
une vie culturelle comprenant non seulement les manifestations artistiques,
mais également la recherche, l'enseignement. La même chose pour la
performance économique; la performance économique passe, je
pense, par un progrès culturel. Des études existent un peu
partout dans le monde sur l'impact, par exemple, des bibliothèques
publiques sur le niveau de performance économique d'une région.
Il a été démontré que, dans une région ou
dans un milieu où le taux de fréquentation des
bibliothèques, où le taux de lecture est élevé, la
créativité est plus grande, l'imagination des gens est plus
grande, la vie générale et le niveau de vie même des gens
est plus élevé.
Nous croyons qu'une intervention de type culturel est une excellente
façon d'améliorer la vie économique et aussi de donner
plus de consistance à la performance politique. Inversement, pour
soutenir l'activité culturelle, il nous faut également un
niveau économique raisonnable. Tout cela est interrelié. Un de
nos grands problèmes, actuellementcela, c'est le problèmede
tout gouvernement provincial, sauf que le gouvernement actuel le
reconnaît et le pose comme un prérequis c'est que
l'activité culturelle ne pourra devenir normale que dans la mesure
où l'activité politique sera également normale.
Actuellement, c'est bien évident que, comme nous avons un gouvernement
provincial, c'est-à-dire un gouvernement subordonné, un
gouvernement colonial, au sens strict des mots je réfère
au sens profond, au sens premier du terme provincial qui est, d'ailleurs
utilisé, non pas par hasard, mais, je pense, de façon très
délibérée par le gouvernement fédéral
un gouvernement provincial a des actions provinciales et au niveau de la
culture, cela veut dire une culture tronquée, cela veut dire, si vous
voulez, une vie collective incomplète. A cet égard, il y a des
étapes que nous ne pourrons franchir au niveau de l'activité
culturelle et du ministère des Affaires culturelles que le jour
où le statut politique du Québec se sera modifié. Je ne
veux pas en faire un débat politique à ce moment-ci. Si vous vou
lez débattre cela, je suis tout à fait disposé à le
faire, mais je pourrais dire la même chose au niveau descrédits.
Vous faites allusion au budget des Affaires culturelles. S'il y a un domaine
où le gouvernement fédéral intervient copieusement, c'est
bien celui des activités culturelles.
Et si on additionnait les montants, les millions que le
fédéral met au Québec dans les activités
culturelles, on arriverait à un budget fort respectable. Si ces sommes
pouvaient être additionnées aux sommes que les citoyens
québécois voient affecter par le gouvernement du Québec au
domaine culturel, nous aurions un budget des affaires culturelles comparable
à ceux des pays normaux et qui serait même au-dessus, je pense, de
la moyenne de 1% qu'on se fixe généralement ailleurs dans le
monde. Par ailleurs, nous ne pouvons l'additionner à notre budget, bien
entendu, puisque la coordination reste difficile et même, la
complémentarité des interventions n'est pas assurée.
Nous avons maints exemples d'interventions qui nous ont valu ici un
musée, ici un centre culturel et qui nous sont laissés sur les
bras une fois que la construction est terminée. Nous devons intervenir
au niveau du fonctionnement. Finalement, il n'y a ni coordination et le plus
souvent, hélas, ni même concertation. Tout cela ce sont des choses
qui évoluent, qui sont susceptibles d'évoluer encore plus
rapidement dans les prochains mois. Donc, je pense que nous pouvons envisager
que le jour n'est pas loin où le gouvernement du Québec pourrait
assumer une responsabilité réelle et complète dans le
domaine culturel.
M. Le Moignan: M. le ministre, est-ce que vous permettez, M. le
Président?
Le Président (M. Jolivet): Sur le global? Est-ce qu'on
pourrait passer aux programmes?
Mme Lavoie-Roux: Une question de règle- ment, M. le
Président. Il faudrait peut-être s'entendre sur la façon
dont on va procéder. On n'est pas beaucoup de monde. S'il ne s'en ajoute
pas beaucoup d'autres, on peut peut-être faire moins de
formalités. Mais s'il s'en ajoute d'autres, cela peut devenir un peu
plus compliqué. L'an dernier, la façon dont on avait
procédé, si ma mémoire est bonne, c'est qu'après
les exposés des différents partis, nous avions
procédé avec des questions d'ordre général pour
ensuite s'attaquer aux programmes en respectant l'ordre des partis. Je ne sais
pas de quelle façon on veut procéder.
Le Président (M. Jolivet): C'est de cette façon,
d'ailleurs, que je voulais procéder. Compte tenu que l'exposé
général est fait, on pourrait poser des questions sur l'ensemble
général, poser des questions selon l'ordre des partis de
façon à permettre de regarder tout l'ensemble des programmes et
revenir ensuite programme par programme. Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Si vous aviez une toute petite question à
laquelle vous voulez répondre, je n'ai pas d'objection.
M. Le Moignan: J'y reviendrai.
Mme Lavoie-Roux: M. le député de
Gaspé...
M. Le Moignan: Vous êtes bien bonne pour moi, vous. Allez-y
donc.
Le Président (M. Jolivet): Maintenant, j'aimerais
vérifier un point avec vous. Même si on est sur les questions
générales, on respecte aussi les 20 minutes de chacun, de
façon à pouvoir revenir une deuxième fois si vous en avez
besoin, mais pas plus.
Mme Lavoie-Roux: Ecoutez, une minute. On va s'entendre
là-dessus.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
Mme Lavoie-Roux: Si chacun des députés du
côté ministériel prend 20 minutes et tout à coup ils
se retrouvent huit, ce ne sera plus l'examen des crédits par les partis
de l'Opposition. Ordinairement, ce qu'on faisait, il y avait un ordre.
M. Vaugeois: L'élément 1?
Le Président (M. Jolivet): Non. Nous sommes sur le
général encore, M. le ministre.
Questions diverses
Mme Lavoie-Roux: Sur les questions d'ordre général,
je voulais demander au ministre s'il pouvait nous ventiler un peu
l'augmentation de ses crédits pour cette année. Il y a une
augmentation de $3 819 000. Quels sont ceux qui sont d'ordre salarial, d'ordre
administratif, enfin, ceux qui sont dus à l'inflation, etc., est-ce que
vous voulez nous ventiler ces crédits?
M. Vaugeois: Je pense que l'exposé que j'ai fait au
début vous en donne une assez bonne idée. Il n'y a pas beaucoup
à ajouter à cela. Disons que c'est peut-être "Livres et
autres imprimés ", qui comprend également le secteur des
bibliothèques, qui profite de la meilleure augmentation. Il y en a un
petit peu ailleurs également. Vous avez cela dans le cahier vert,
à la toute fin. Vous en avez un peu ailleurs également. On a
mentionné que peut-être aux Arts plastiques, cela avait eu
tendance à diminuer de quelques décimales, mais cela n'a pas
tellement de conséquence si on considère la grosse augmentation
qu'il y avait eu l'année précédente. De toute
façon, vous avez un tableau qui fait cette comparaison. (11 h 15)
Mme Lavoie-Roux: Ici, c'est par programme, l'augmentation, ou
enfin la partie qui est affectée à chacun des programmes; mais,
des $3 millions, combien sont affectés strictement à
l'augmentation des salaires?
M. Vaugeois: Je ne pourrais pas vous donner de chiffre
précis là-dessus, mais cela ne me paraît pas être
très lourd à porter. J'ai posé, moi aussi, ce genre de
question. Je pense qu'il n'y a pas là de gros problème pour nous.
Là où nous avons dégagé des sommes d'argent
très nettes, c'est $1 200 000 pour les bibliothèques, par
exemple. Là vous avez un effort particulier. Après, vous avez une
espèce de stabilisation que vous voyez à peu près partout,
si vous voulez, dans l'enveloppe budgétaire, qui tient compte de
l'inflation, de la hausse des coûts, de l'électricité, du
chauffage et des hausses salariales; donc, ce sont des ajustements en
conséquence, à peu près partout.
Mme Lavoie-Roux: A toutes fins pratiques, sauf pour ce qui est
prévu pour les bibliothèques et certaines sommes, je pense, qui
vont...
M. Vaugeois: Vous avez...
Mme Lavoie-Roux: ... à de la relance économique, le
reste, les budgets sont gelés.
M. Vaugeois: Ils sont stabilisés.
Mme Lavoie-Roux: On ne se chicanera pas. Maintenant, je vois,
dans le personnel affecté aux affaires culturelles, que vous êtes
passé de 886 à 893 employés permanents et de 104 à
76 employés à temps partiel. Est-ce que tous ces gens ont
été engagés par concours?
M. Vaugeois: Je ne peux pas le dire, parce que je n'étais
pas toujours là, mais je pense bien que, d'après ce que je vois
depuis que j'y suis, les règles de la fonction publique sont
observées. Comme vous le savez, au niveau des cadres supérieurs,
le recrutement d'un sous-ministre ne se fait pas par concours, mais autrement.
J'ai vu arriver, par exemple, le nouveau directeur général du
patrimoine qui était sorti d'un concours, j'ai vu arriver le directeur
du bureau régional de Montréal issu d'un concours. Je sais qu'il
se tient actuelle- ment un concours pour nommer le directeur des arts
d'interprétation. Je pense que c'est la façon normale de recruter
qui est suivie aux Affaires culturelles. Je n'ai pas à l'esprit
d'exemples où on aurait contourné cette façon de recruter.
D'ailleurs, ce n'est pas pour nous autres une contrainte, c'est la meilleure
façon d'aller chercher les meilleurs candidats que d'ouvrir un concours,
de le publiciser au maximum et d'évaluer le mieux possible les candidats
qui se présentent.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que ces concours comportent des examens
oraux et écrits?
M. Vaugeois: II y a l'étude des dossiers par la fonction
publique, comme d'habitude, qui est déjà consciente des exigences
minimales, de telle façon qu'il y a des candidats qui ne se rendent pas
plus loin que cette étape préliminaire de révision des
dossiers par la fonction publique, et les autres sont vus par des jurys
formés ad hoc.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a des gens qui ont
été remerciés à l'intérieur de votre
ministère?
M. Vaugeois: Je peux vous dire qu'il y a des gens qui ont
été reclassifiés récemment, et nous y arriverons,
si vous voulez, au moment de l'étude de la question des conservatoires.
Il y a eu là un effort d'affectation d'un certain nombre de personnes
qui avaient eu des fonctions administratives et qui voulaient revenir à
leurs charges de professeur. Pour le reste, je ne pense pas. C'est très
rare, d'ailleurs, qu'il se produit des licenciements. Est-ce qu'il y a eu des
licenciements dans l'année?
On pourra vérifier, il y en a peut-être eu un.
Ceux qui auraient pu être congédiés ne l'ont pas
été.
On parle de personnel permanent.
Mme Lavoie-Roux: Oui, oui. Je voyais dans l'exposé du
ministre qu'il semble vouloir accorder aux différents groupes ethniques
une place dans le cadre culturel québécois. Je vais faire comme
l'Union Nationale a l'habitude de le faire, c'est peut-être dû aux
questions très précises que nous avions posées
là-dessus, l'an dernier. L'Union Nationale s'attribue souvent les
mérites, alors je les imite en cela.
M. Le Moignan: Nous avons les mérites aussi.
Mme Lavoie-Roux: Ceci, c'est pour badiner. Je suis très
heureuse de voir que c'est une préoccupation du ministre.
M. Vaugeois: Et c'est très réel, Mme le
député. Nous considérons que le ministère des
Affaires culturelles n'est pas là pour une soi-disant majorité
issue de Jacques Cartier et de Samuel de Champlain, mais pour tous ceux qui
habitent le Québec, quelles que soient leurs origines.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez, tout à l'heure, parlé
de décentralisation dans votre exposé. Pour-
riez-vous me dire quels sont les gestes concrets que vous envisagez pour
une véritable décentralisation? Il faudrait peut-être
s'entendre d'abord sur ce que vous voulez dire par décentralisation et
sur la façon dont cela pourrait se concrétiser. La
décentralisation qui remonte toujours vers le haut...
M. Vaugeois: Je vous remercie de la question. Je ne
m'étendrai pas longuement sur le sujet; encore là, nous aurons
l'occasion d'y revenir. Je vais vous donner une vue générale
là-dessus. Le ministère avait déjà amorcé
une opération de décentralisation par les bureaux
régionaux. Dans un premier temps, les responsables des bureaux
régionaux, donc des gens qui se trouvaient en région, en venaient
naturellement à représenter le ministère dans la
région et, très rapidement, à s'identifier à la
région et à défendre ses intérêts
auprès du ministère.
Parallèlement à cette évolution, nous avons
amorcé la formation de conseils régionaux de la culture qui, soit
dit en passant, pourraient être une façon différente
d'appliquer un certain nombre d'éléments liés à des
préoccupations inscrites dans le livre vert en termes de conseil
national de la culture, qui supposait des commissions culturelles
régionales, etc. Je pense que nos conseils régionaux de la
culture peuvent remplir des fonctions qui rejoignent certaines des
préoccupations du livre vert, des préoccupations sur lesquelles
nous sommes d'accord.
Donc, la création des conseils régionaux de la culture
procède non pas d'une approche de décentralisation, mais d'une
approche de régionalisation. On voit déjà, par les
conseils qui ont été formés, que les groupes ainsi
constitués sont susceptibles c'est ce que nous souhaitons
de devenir des éléments aptes à coordonner et à
soutenir le dynamisme régional. Dans la mesure où les conseils
régionaux de la culture vont prendre leur vitesse de croisière et
leur rythme de travail, nous allons assister c'est déjà un
phénomène que nous observons à un rôle plus
clair des bureaux régionaux qui vont pouvoir vraiment jouer leur
rôle de représentants du ministère dans le milieu, donc
cette facette de la décentralisation, alors que la représentation
du milieu sera davantage assumée par les Conseils régionaux de la
culture.
J'espère que dans l'évolution très rapide des
Conseils régionaux de la culture ces conseils pourront, dans un premier
temps, nous conseiller sur nos programmes, sur nos interventions dans le
milieu, mais j'espère aussi que le plus tôt possible l'essentiel
de leurs activités je dis bien l'essentiel, c'est-à-dire
l'immense majorité de leurs activités pourra se
dérouler sans référence au ministère,
c'est-à-dire à partir du dynamisme et des ressources du milieu.
Dans tous les milieux, il y a des gens extraordinaires qui sont aptes à
créer, à produire et à intervenir en matière
culturelle; il y a un peu partout des infrastructures, des équipements
qui existent, qui sont parfois sous-utilisés. Je pense que les conseils
régionaux de la culture que nous avons créés pourront
contribuer à animer le milieu et à faire en sorte que dans une
région on puisse avoir une activité culturelle authentique qui
procéderait du dynamisme régional propre à la
région et qui pourrait se dérouler abstraction faite du
ministère. Cela, je pense que nous pouvons l'espérer, c'est une
évolution que nous sentons.
Au total, donc, vous aurez eu deux opérations parallèles
complémentaires. D'abord une opération de décentralisation
de la part du ministère, qui cherche à être plus
présent au milieu, aux régions, aux collectivités
régionales et aussi aux individus des régions. Nous pensons
qu'à bien des égards, le ministère a une
responsabilité de services. Par exemple, au niveau du patrimoine
nous y reviendrons il ne s'agit pas seulement de classer pour classer et
de donner des contraintes aux gens; il faut aussi, de temps en temps,
être apte à répondre à leurs questions, à
donner suite aussi rapidement que possible à leurs demandes, au moment,
par exemple, de travaux de réparation, s'ils sont dans une aire de
protection ou s'ils sont propriétaires d'un monument classé.
Donc, nous avons des services à rendre en région; c'est la
fonction des bureaux régionaux, c'est une opération de
décentralisation et de déconcentration.
Par ailleurs, la création des conseils régionaux de la
culture devrait permettre d'exprimer le dynamisme régional. Inutile
d'ajouter que, provenant moi-même d'une région, c'est un aspect du
rôle des Conseils de la culture auquel j'attache beaucoup
d'importance.
Mme Lavoie-Roux: Je suis contente de vous avoir entendu utiliser
le terme "déconcentrer". En effet, si on regarde l'expérience des
bureaux régionaux pour les différents ministères je
pourrais parler avec un peu plus de pertinence du ministère de
l'Education où il y a des bureaux régionaux c'est
uniquement de la déconcentration et une constante
référence au ministère de I'Education. Finalement, on ne
peut pas parler de décentralisation dans le sens où le milieu
lui-même prend plus de responsabilité. Je pense qu'il ne faut pas
s'illusionner quand on cite cela comme un exemple ou un geste de
décentralisation; c'est extrêmement limité.
M. Vaugeois: Pour avoir servi au ministère de I'Education
à l'époque de la formation des bureaux régionaux, je ne
les citerai jamais en exemple.
Mme Lavoie-Roux: Les vôtres vont être meilleurs.
M. Vaugeois: Ils seront certainement différents, en tout
cas. Ecoutez! Je pourrais dire tellement de choses sur cette activité;
à l'époque, j'étais fonctionnaire, mais
l'éthique...
Mme Lavoie-Roux: Vous me donnez raison.
M. Vaugeois:... de la fonction publique m'interdit de raconter
des expériences vécues à l'époque.
Mme Lavoie-Roux: Alors, cela confirme ce que j'avançais.
Pour ce qui est des conseils régionaux, je voudrais quand même que
vous m'expliquiez pourquoi vous ne leur avez donné aucun pouvoir de
décision, par exemple, quant à l'attribution de ressources, etc.
Vous dites qu'il y a là des gens formidables, des gens qui sont pleins
de qualités et, finalement, c'est au compte-gouttes. Vous espérez
qu'avec le temps ils vont évoluer, mais entre-temps vous avez quand
même refusé de leur donner des pouvoirs décisionnels.
M. Vaugeois: Ecoutez! Je pense qu'on serait dans l'imbroglio
total s'il fallait qu'on double nos structures existantes pour les mêmes
fonctions. D'ailleurs, il y a des choses qui peuvent encore se faire et on
n'est pas fixé indéfiniment. Ma perception à cet
égard, c'est que, si nous donnons aux Conseils régionaux de la
culture une fonction, disons, d'intervention sur les demandes qui sont faites
au ministère en termes de subventions ou je ne sais trop quoi, il peut
se produire un certain nombre de choses. On peut se donner des petits potentats
régionaux. On peut aussi se donner une structure qui ferait écran
entre le milieu et le ministère.
Je pense que les individus doivent toujours avoir le droit de
communiquer directement avec leur gouvernement, leur ministère. Je ne
souhaite pas une création de conseils régionaux de la culture qui
pourraient être amenés à faire écran entre le
ministère et le milieu. C'est une structure qui peut nous permettre, si
vous voulez, d'avoir des interlocuteurs précis auprès desquels
nous allons chercher de l'information, à qui nous soumettons un certain
nombre de programmes sur lesquels nous réfléchissons pour avoir
leur avis. Nous pouvons aussi leur demander leur avis sur des programmes en
cours; nous l'avons fait récemment avec un programme intéressant
d'accessibilité-scène qui rejoint une des préoccupations
du député de Gaspé. C'est un programme que le
ministère a mis au point, a lancé sur une base assez
expérimentale en invitant les conseils régionaux de la culture
à voir dans leur milieu les réactions qu'on avait à ce
programme.
En amenant les conseils régionaux, par exemple, à disposer
d'une enveloppe de subventions à je ne sais trop quoi, on pourrait se
retrouver avec une normalisation de certains programmes qui pourraient varier
passablement d'une région à l'autre et qui ferait que le
ministère s'assécherait. Or, le problème d'un
ministère, c'est toujours finalement de garder des contacts très
étroits avec le milieu.
Dans mon texte de présentation aujourd'hui, cette
préoccupation est affirmée quand je rappelle que nos points de
vue, aussi pertinents soient-ils, ne doivent pas être imposés au
milieu à partir d'un titre, d'une fonction ou d'une connaissance
scientifique, il faut prendre le temps de faire un bon échange, un bon
dialogue avec le milieu et vérifier leurs attentes. Pour arriver
à cela, il est nécessaire que les fonctionnaires du
ministère puissent, par le biais des programmes dont ils sont
responsables, garder des contacts directs avec l'ensemble du milieu.
Il y a aussi des ventilations régionales qui sont un peu
nouvelles et qui peuvent nous amener à chercher un équilibre
entre les régions au niveau des interventions du ministère. Il y
a toujours une question d'ajournement aux capacités immédiates
des régions, aux infrastructures existantes. Je pourrais ajouter
d'autres raisons aussi, mais la formule que le ministère a
adoptée me plaît assez. Je pense qu'on pourrait aussi
stériliser les conseils régionaux de la culture si on en faisait
des fonctionnaires régionaux qui en viendraient à étudier
des dossiers, des demandes, etc. J'aime beaucoup mieux qu'ils assument leur
mandat de consultation qui est dans le protocole que nous signons avec eux et
qu'ensuite, le plus tôt possible, ils s'emploient à animer le
milieu à partir des ressources et des équipements du milieu.
C'est le défi que nous leur posons, que nous nous posons avec eux.
Mme Lavoie-Roux: Ecoutez! Je veux bien accepter ce que le
ministre dit, si c'est sa politique, mais qu'il ne nous parle pas de
décentralisation.
M. Vaugeois: J'en parle quand nous parlons des bureaux
régionaux du ministère.
Mme Lavoie-Roux: On a fait l'analyse de ce que pouvait être
un bureau régional et vous-même avez admis que, à moins que
vous puissiez leur donner une orientation différente je vous
souhaite bonne chance vous nous dites qu'en fin de compte, il faut que
ce soit le ministère qui ait le dernier mot. (11 h 30)
Quand vous dites qu'un conseil régional pourrait être un
écran entre le ministère et la population, le problème est
que la population, globalement, est beaucoup trop loin du ministère. Et
c'est évident que chaque citoyen a un droit de recours à quelque
ministère que ce soit, c'est son gouvernement, alors là-dessus il
n'y a pas besoin de... Mais quand vous dites que vous voulez vous servir des
Conseils régionaux de la culture pour les consulter et pour leur donner
de l'information, je pense qu'il ne faut pas parler de décentralisation
et faire croire que l'on fait de la décentralisation.
M. Vaugeois: Ecoutez, M. le Président, je vais...
Mme Lavoie-Roux: Et vous allez même jusqu'à dire
qu'à un moment donné on pourrait créer des
différences d'une région à l'autre. Je pense que
l'objectif est justement d'avoir des comités régionaux de culture
parce que ce sera différent d'une région à l'autre et cela
devrait normalement être différent d'une région à
l'autre.
M. Vaugeois: Excusez-moi, M. le Président, je pense que je
vais être obligé de revenir très brièvement sur ce
que j'ai voulu suggérer par mes propos. Il faut vraiment distinguer deux
choses: la décentralisation ou la déconcentration passe par les
bureaux régionaux, les émanations du ministère, tandis que
le phénomène de régionalisation, s'il a des chances de se
produire et de s'articuler, ce sera par les conseils régionaux de la
culture. Je ne suggère pas que nous décentralisions par le
biais des conseils régionaux, je dis que nous
décentralisons par nos bureaux régionaux.
Mme Lavoie-Roux: Vous déconcentrez par vos bureaux
régionaux.
M. Vaugeois: Et nous déconcentrons, si vous voulez. Par
ailleurs, nous comptons sur les conseils régionaux de la culture pour
exprimer les différences régionales. Bien loin de moi le
désir de les escamoter, les conseils régionaux de la culture
devraient leur permettre de se développer, de se préciser, de
s'affiner etc. Et c'est la double approche que nous prenons.
Pour les bureaux régionaux, le défi est de taille.
D'autres ministères s'y sont cassé le nez par le passé.
J'ai une approche qui procède d'une expérience que j'ai prise aux
relations internationales. Nous avons, à l'étranger,
actuellement, près d'une vingtaine de bureaux, délégations
et délégations générales. Les
délégués généraux, dont le chef de mission,
représentent vraiment, dans le pays où ils sont affectés,
la totalité du gouvernement québécois. Je me dis que nous
sommes capables également de réussir un semblable fonctionnement
dans une région donnée, que le directeur du bureau
régional du ministère puisse représenter la
totalité du ministère, et de façon réelle et
efficace. Depuis que je suis au ministère, je me suis employé
à respecter leur présence dans le milieu. Dans bien des cas de
projets de restauration, j'ai demandé d'attendre parce que je tenais
à avoir l'avis et du service d'animation et du directeur du bureau
régional, pour que lui-même, partant de sa connaissance du milieu,
des consultations qu'il peut faire, entre autres auprès des
sociétés d'histoire, puisse être partie à
l'intervention du ministère dans chacune des régions. Il suffit
de se donner le mot, il suffit d'apprendre à travailler avec les bureaux
régionaux pour arriver à des résultats concrets, et je
crois que nous y arriverons.
Mme Lavoie-Roux: Une autre question d'ordre général
que je voulais poser. Je l'avais posée l'an dernier au ministre qui
était en poste. Est-ce que le ministère des Affaires culturelles
ou enfin le gouvernement ce serait peut-être plus juste
envisage de rapatrier le cinéma au ministère des Affaires
culturelles? Le cinéma est quand même vraiment une activité
culturelle. Quelles sont les intentions du gouvernement, davantage que le
ministère des Affaires culturelles?
M. Vaugeois: Je pense que les intentions du gouvernement,
à cet égard, vont s'exprimer prochainement. Il y a une
consultation qui se fait dans le milieu. Le premier ministre a d'ailleurs
reçu, la semaine dernière, des représentants du milieu
cinématographique et leur a posé lui-même la question que
vous venez de me poser. Mais je pense qu'une partie de la réponse
appartient aux gens du cinéma qui commencent à s'exprimer
là-dessus, c'est-à-dire qui précisent leurs opinions
là-dessus. Je serais bien mal placé, à ce moment-ci, pour
répondre davantage à votre question sans avoir l'air d'être
ou désintéressé du cinéma ou d'être
impérialiste. Comme je ne voudrais avoir l'air ni de l'un ni de l'autre,
je préfère que le gouvernement continue ses consultations et nous
donne des orientations. Mais la façon dont vous avez posé la
question me permet de vous dire que je l'aurais posée en vos termes.
Le Président (M. Jolivet): Madame.
Mme Lavoie-Roux: Dans le fond, ce que vous me dites comme
réponse je comprends votre position et c'est pourquoi je me suis
adressée au gouvernement au lieu de m'adresser à vous
c'est que le dossier n'est pas fermé, c'est une question qui est
présentement à l'étude.
M. Vaugeois: C'est évident que s'il y a une
société de développement des industries culturelles, elle
devra intervenir au niveau du cinéma au même titre qu'au niveau du
disque ou du livre etc. C'est évident. L'industrie culturelle
cinématographique ne devrait pas être à l'écart
d'interventions d'une société de développement des
industries culturelles.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Tout à l'heure, le ministre a parlé
de l'intervention du gouvernement fédéral, au Québec, en
matière culturelle. Il a même parlé en termes de
colonisation. Je voudrais demander au ministre qu'il explicite un peu davantage
de quelle façon les droits du Québec sont brimés par
l'action du fédéral. Vous avez mentionné un exemple, les
musées qui sont construits par le fédéral et qui sont
abandonnés à la province. Je me dis tant mieux si le
fédéral vient nous construire un musée. J'aimerais que
vous nous donniez une ventilation plus grande; vous avez mentionné, en
passant, comment votre action était un peu comprimée par le
fédéral dans ce domaine.
M. Vaugeois: M. le Président, le député de
Gaspé est un allié extraordinaire. Il me donne l'occasion
d'expliquer des choses, mais avec des termes qui ne sont pas les miens. Je n'ai
pas parlé de droits brimés ou de brimades.
M. Le Moignan: Cela ressemblait à cela un peu.
M. Vaugeois: Cela peut se ressembler, mais ce n'est pas cela. Ce
que j'ai dit et ce que j'aimerais répéter brièvement,
c'est que nous sommes un gouvernement provincial. Un gouvernement provincial,
si on se fie au mot, c'est un gouvernement qui est subordonné à
un autre. Historiquement, la province de Québec est une colonie. Elle
l'est restée à bien des égards. Aujourd'hui, je ne
voudrais pas entrer dans un gros débat là-dessus, mais c'est une
situation historique qui ne m'empêche pas de dormir, que je reconnais
volontiers et elle ne me brime pas. C'est une situa-
lion de fat. Il y a des interventions, dans le domaine culturel, qui
viennent du gouvernement fédéral. D'autres sont
l'émanation d'un gouvernement provincial, donc avec une intervention
provinciale, c'est-à-dire une intervention incomplète, une
inter-vention tronquée. Dans le domaine culturel, pour qu'une
collectivité puisse avoir une vie collective normale, il faut que son
gouvernement puisse soutenir cette vie collective de toutes les façons
et dans tous les domaines, ce qui n'est pas le cas pour un gouvernement
provincial. Remarquez que ce n'est pas grave. On peut continuer comme cela
encore longtemps, cela fait un bout de chemin qu'on fait comme cela. Mais il
faudra convenir, à ce moment, que nos interventions culturelles seront
tronquées, incomplètes et que notre vie collective ne sera pas
normale. C'est tout. Ce n'est pas de la persécution. Ce n'est pas de la
brimade. C'est une situation de fait et c'est lié au statut de province
qu'est la nôtre.
M. Le Moignan: Donnez-moi des exemples où le
fédéral...
M. Vaugeois: Ecoutez, on n'en finirait pas. M. Le Moignan:
Deux ou trois. Mme Lavoie-Roux: II n'est pas exigeant. M. Le
Moignan: Je pourrai déduire après.
M. Vaugeois: Prenez tous les centres culturels qui ont
essaimé sur le territoire québécois. J'en visitais un
à Shawinigan hier. Il est magnifique sauf qu'aujourd'hui le centre
culturel de Shawinigan est obligé de se débrouiller avec les
ressources du milieu parce que celui qui leur a "pitché " un centre
culturel n'a pas prévu aussi le soutien au fonctionnement. Je pourrais
prendre l'exemple du musée de Rivière-du-Loup que nous avons
encore comme dossier chaud. Le fédéral, dans un geste bien
généreux que je ne regrette pas en soi, a jeté
là-bas, dans le cadre de son programme, un musée assez bien
organisé et assez intéressant, mais dont la vocation avait
été un peu rapidement étudiée et dont surtout des
frais de fonctionnement n'ont pas été prévus. Ne m'amenez
pas à vous énumérer pendant des heures et des heures
toutes ces interventions.
M. Le Moignan: Dans ce cas, on peut se rendre à
Bonaventure et à Cap-Chat.
M. Vaugeois: C'est cela. On pourrait se rendre jusque chez
vous.
Au niveau des organismes culturels vous avez des troupes de
théâtre, des troupes de ballet, des groupes multiples les
soutiens financiers du fédéral cesseront soudainement.
Récemment, les Ballets Jazz se faisaient dire qu'ils ne rentraient plus
dans les catégories subventionnées par le Conseil des arts. A ce
moment, qu'est-ce qu'on fait nous? Est-ce qu'on compense pour le retrait du
Conseil des arts ou si on remet notre intervention en question? Le plus
souvent, on est un peu amené à des interventions non
planifiées par une arrivée massive d'argent de la part du Conseil
des arts ou encore par un retrait soudain du Conseil des arts.
Ceci étant dit je l'ai déjà dit publiquement
et je suis prêt à le répéter ce matin je n'ai
jamais voulu suggérer, par ces propos, que les interventions du Conseil
des arts étaient toujours maladroites, malhabiles et malvenues. J'ai dit
plutôt le contraire.
Les interventions de Parcs Canada, au Québec, sont souvent
très intéressantes, sauf qu'elles ne sont pas coordonnées
et elles ne sont pas complémentaires des nôtres. Ils sont venus,
avec nous, à Place Royale. On a à peu près 27 maisons sur
80 ou 90 qui sont restaurées. Ils sont partis. Maintenant, ils sont en
train de s'amuser au Parc de l'Artillerie. Ils y font quelque chose
d'admirable, sauf qu'ils ont commencé, avec nous, à Place Royale
et, maintenant, c'est par le biais d'ententes marginales qu'on réussit
à enterrer les fils ou qu'on réussit à organiser la
batterie royale, etc.
Pour l'essentiel de la restauration, qu'est-ce qu'on va faire
maintenant? On va casquer pendant combien d'années? C'est ce genre
d'intervention, à mon avis, qui fait qu'on peut au moins regretter une
absence de concertation étroite. En fait, malgré notre statut
provincial, je pense que le gouvernement fédéral aurait pu s'en
remettre au gouvernement local fût-il provincial pour
assumer la totalité des interventions dans le domaine culturel.
Je ne vois pas ce qui aurait pu rendre les gens d'Ottawa malheureux,
s'ils avaient dit qu'il convenait, en ces matières étant
donné les ressources limitées de s'en remettre à un
gouvernement local.
M. Le Moignan: A présent que tous ces crimes ont
été commis, est-ce que le gouvernement du Québec peut
faire une bonne utilisation de centres que je connais qui sont presque
désaffectés parce qu'on n'a pas les moyens de les faire
fonctionner? Le provincial peut-il, à ce moment-là, les utiliser
à d'autres vocations? Je pense à Bonaventure, je peux penser
à Cap-Chat, je peux penser à d'autres centres qui ont
été construits avec beaucoup d'argent du fédéral au
moment de la Confédération.
M. Vaugeois: Du centenaire de la Confédération.
M. Le Moignan: Du centenaire. Oui, excusez-moi, du centenaire.
Est-ce que le provincial se penche là-dessus, ou a-t-il
déjà regardé la possibilité de voir ce qu'on peut
faire avec ces centres?
M. Vaugeois: Les fonctionnaires se tuent, M. le
député, à ce genre de travail.
M. Le Moignan: Ils n'ont pourtant pas l'air malheureux.
M. Vaugeois: Eux, ils sont à un autre niveau!
M. Le Moignan: En parlant de vos fonctionnaires...
Mme Lavoie-Roux: Ils n'ont pas de problèmes, eux.
M. Vaugeois: Ils les ont tous, madame, et ils sont costauds.
M. Le Moignan: ... j'avais posé une question malhabile
l'an dernier. J'avais demandé combien de postes étaient
détenus par intérim. La liste s'était allongée. Ils
étaient tous par intérim. Donc, je ne la pose pas cette
année.
M. Vaugeois: Posez-la donc, M. le député!
M. Le Moignan: Ils étaient tous par intérim. Cette
année, est-ce que c'est...
M. Vaugeois: Cette année, il y a le ministre qui est par
intérim.
M. Le Moignan: Le ministre seulement.
M. Vaugeois: A peu près.
M. Le Moignan: A peu près, oui.
M. Vaugeois: Effectivement, à peu près, je pense
qu'il n'y a pas d'autres fonctionnaires dans des postes de direction
actuellement qui sont par intérim. Il peut bien y en avoir un ou deux
ici et là mais, vraiment, il n'y en a pas beaucoup.
M. Le Moignan: Cette année, j'aurais dû commencer
par la base, cela aurait été simple.
M. Vaugeois: Non seulement ils ne sont plus par intérim,
mais ils sont de très bonne qualité.
M. Le Moignan: II n'y a pas de doute, quand on les regarde. M. le
ministre, je vous ai posé une question à l'Assemblée
nationale au sujet de l'Opéra du Québec. Je m'aperçois que
le Montreal Star du 5 mai se réfère à l'arrivée de
M. Vallerand. Depuis l'arrivée de M. Vallerand, on dit que c'est un
"knowledgeable music lover with a particular interest in opera". A ce
moment-là, êtes-vous plus informé, à la suite de
l'arrivée de M. Vallerand? Pouvez-vous me donner d'autres
explications?
M. Vaugeois: Je peux vous dire, M. le député, que
déjà ce genre de dossier a été fort bien
défendu par les hauts fonctionnaires du ministère. Il y avait et
il y a encore, dans le ministère, outre M. Vallerand, d'ardents
défenseurs du secteur de l'art lyrique en particulier. C'est certain que
le choix qui a été fait de M. Vallerand, connaissant
également son goût et son expérience dans ce domaine, a
été fait de façon consciente et
délibérée.
Mme Lavoie-Roux: C'est presque une réponse.
M. Vaugeois: Presque.
M. Le Moignan: Cela reviendra plus loin, peut- être, quand
on verra le détail, programme par programme. J'ai terminé pour le
moment.
Le Président (M. Jolivet): D'autres questions de la part
d'autres députés? Mme le député de L'Acadie, un
deuxième tour?
Mme Lavoie-Roux: Avec mon grand copain, je fais cela depuis
longtemps.
Le Président (M. Jolivet): II vous surprend?
Mme Lavoie-Roux: Du point de vue des relations
provinciales-fédérales, je suis d'accord. J'ai bien lu les propos
du ministre au moment où il a été nommé. Je m'en
suis réjouie dans ce sens que j'ai cru voir chez lui au moins une
ouverture pour essayer de s'asseoir à une table et peut-être de
faire cette concertation qu'il souhaite et qui, je pense, est souhaitable.
Est-ce que, déjà, vous avez eu l'occasion de discuter de certains
dossiers avec le fédéral? Je pense qu'il y a deux attitudes. Sans
vouloir médire de celui qui vous a précédé, j'avais
I'impression que le dialogue était pour le moins difficile, sinon
impossible. Enfin, je ne veux pas blâmer une partie plutôt que
l'autre, mais on ne semblait pas très ouvert, de toute façon. (11
h 45)
Je pense que, là-dessus, vous auriez le support des Oppositions
pour vous appuyer dans ce qui me semble raisonnable et souhaitable dans une
concertation pour la meilleure utilisation possible des ressources et surtout
pour en assurer la continuité. En effet, c'est bien beau de mettre des
équipements sur place, mais faut-il encore savoir ce qu'on va faire avec
et de quelle façon on va s'en servir. Avez-vous eu des pourparlers? La
même chose, par exemple, s'appliquerait, mais on y reviendra, dans le
domaine du patrimoine avec, par exemple, Héritage Canada qui aussi fait
un boulot, mais on va s'en tenir au gouvernement.
M. Vaugeois: Dès mon assermentation et mon arrivée
au ministère, un des premiers appels téléphoniques que
j'ai faits, était à l'endroit du secrétaire d'Etat
d'Ottawa, M. John Roberts. Je l'ai rencontré dans les jours qui ont
suivi à Montréal, mais à l'occasion d'une
réception. Donc, nous n'avons pas pu vraiment échanger à
fond, mais cela a été une bonne prise de contact. Je connaissais
déjà M. Roberts par ses déclarations publiques. Je l'avais
vu dans une longue entrevue à la télévision. J'avais
trouvé, d'ailleurs, ses propos extrêmement intéressants.
J'avais hâte, effectivement, de pouvoir parler plus longuement et
librement, de façon informelle, avec lui, de leurs interventions au
Québec dans le domaine culturel.
Malheureusement, les circonstances étant ce qu'elles sont
actuellement, les ministres fédéraux ne sont pas tellement
disponibles pour discuter de façon informelle et générale.
Donc, je suis obligé d'attendre, à cet égard, que la
situation politique se normalise à Ottawa. Par ailleurs, je n'ai quand
même pas voulu perdre mon temps à cet égard et je vous
ferai l'aveu et je n'irai pas chercher mes
exemples très loin que vendredi, j'ai passé mon
après-midi et une partie de la soirée au parc de l'Artillerie
où j'ai été fort bien reçu par le directeur
régional de Parcs Canada qui, soit dit en passant, a dans les creux de
vagues de l'année, trois fois plus de fonctionnaires pour s'occuper du
patrimoine au Québec que les effectifs totaux du ministère. Dans
la période de l'été, de 450, son effectif passera à
1500. C'est quand même phénoménal.
J'ai donc visité le parc de l'Artillerie de fond en comble avec
les spécialistes de Parcs Canada et, à la fin de la
journée, ils m'ont montré les maquettes de leur projet au site
des Vieilles Forges, qui se trouve dans mon comté. Je pense que cela
n'avait pas de relation directe avec ce fait. Au niveau des fonctionnaires, je
sens très nettement un désir de concertation et je sais, par
ailleurs, que les fonctionnaires des Affaires culturelles ont
déjà beaucoup de relations avec ceux de Parcs Canada en
particulier. Le problème tient au fait que les moyens en cause sont
disproportionnés. C'est vraiment quasi indécent de voir, si vous
voulez, la faiblesse de nos moyens par rapport à ceux que le
fédéral réussit à mettre dans ce domaine. Je pense
qu'on est dans l'excès, l'abus, étant donné nos
responsabilités en ce domaine. Mais pendant que Parcs Canada, en toute
quiétude, peut s'intéresser au site des Vieilles Forges, par
exemple, et faire là éventuellement quelque chose
d'extrêmement intéressant, il peut aussi développer le parc
de l'Artillerie en site d'interprétation, comme il est en train de le
faire. C'est un peu le sens que je veux donner au mot "pompier ". Je n'ai rien
contre les pompiers, mais nous, du Québec, nous en sommes un peu
réduits à quitter nos chantiers à tout bout de champ pour
répondre à la sonnerie que constitue le cri d'alarme d'une
société quelque part. Nous avons des effectifs tellement
réduits que chaque fois qu'on nous entraîne à visiter une
maison qui sera peut-être démolie ou qu'on nous invite à
une intervention de dernière minute, nous sommes distraits de
tâches majeures, nous sommes distraits d'un travail d'inventaire qui est
préalable. Au total, je pense que, et le gouvernement
fédéral dans ses préoccupations du patrimoine et le
gouvernement du Québec sont desservis par la situation actuelle. Les
effectifs ne devraient pas être d'abord à Parcs Canada, ils
devraient d'abord être aux Affaires culturelles, pour que l'inventaire
s'accélère et se complète pour que notre travail, qui sera
en relations étroites avec la Loi des biens culturels qui est due
à une administration libérale, puisse se faire.
Là, on est, je pense, dans une espèce d'impasse si on ne
nous laisse pas un peu de corde du côté d'Ottawa. Par ailleurs,
compte tenu de ce que paient les contribuables québécois, ce
serait malsain, à mon avis, que le gouvernement du Québec double
la mise fédérale. On serait, à mon avis, dans
l'excès. Il faut équilibrer les dépenses publiques. Les
dépenses publiques, qu'elles viennent d'Ottawa ou de Québec,
procèdent des mêmes contribuables. L'intervention
fédérale est telle que, pour que l'intervention dans le domaine
culturel reste normale, nous ne pouvons, hélas! faire davantage.
Mme Lavoie-Roux: Comme vous dites, vous attendez que le
fédéral se soit branché, à savoir s'il y aura
élection ou pas. Est-ce un dossier qui peut être ouvert avec le
fédéral? Il reste que je suis d'accord avec vous et que la
pression sur la direction générale du patrimoine va être de
plus en plus considérable. Au fur et à mesure que vous
éduquez, au fur et à mesure que vous présentez des lois,
je pense qu'avec les semaines du patrimoine etc. qui se succèdent depuis
quelques années, les reportages dans les journaux, un peu tout le monde
va vouloir faire classer sa maison je caricature peut-être un peu
dans ce sens que vous allez subir des pressions de plus en plus fortes.
Quand on voit, par exemple, que dans le domaine du patrimoine, à ma
connaissance, il n'y a pas eu d'augmentation du budget pour cette année,
cela va devenir un problème pour vous. C'est dans ce sens que je me
demande s'il y a une possibilité d'ouverture de dossier avec le
fédéral là-dessus. Il est trop tôt pour que vous me
répondiez, évidemment, c'est ce que je crois comprendre.
M. Vaugeois: Ecoutez, on n'a pas eu vraiment d'ouverture, ces
derniers temps. Au contraire, l'intervention fédérale se fait de
plus en plus lourde, pesante. Elle est souvent aussi de qualité, mais
c'est comme si on cherchait à se faire plaisir dans un petit coin qu'on
clôture, et là on fait des choses merveilleuses. Je le dis bien,
on fait des choses merveilleuses, mais qui ne sont peut-être pas une
priorité pour le Québec et qui ne procèdent pas de cet
éveil de l'intérêt de la population pour le patrimoine. Je
fais une parenthèse là-dessus pour dire qu'on dit parfois un peu
de mal des municipalités, et pour la loi 4, justement, on
s'inquiète que nous songions à remettre aux municipalités
un certain nombre de responsabilités. Ce matin, on m'a alerté,
par exemple, sur des biens qui allaient être vendus à l'encan,
etc. et c'est la municipalité qui est intervenue pour indiquer qu'on
s'apprêtait à faire une vente à l'encan de biens que les
gens de la municipalité considèrent comme une richesse
patrimoniale importante. Tous les conseils municipaux ne sont pas toujours au
moyen âge à cet égard. Plusieurs sont maintenant non
seulement aptes à intervenir, mais nous bousculent pour que nous
intervenions à partir des lois existantes.
Mme Lavoie-Roux: Ces reproches ne vous sont pas venus de
l'Opposition officielle; si on vous en a fait un, c'était pour savoir
quels sont les moyens que vous mettrez à la disposition des
municipalités pour qu'elles puissent...
M. Vaugeois: Voilà, c'est l'autre question,
effectivement.
Mme Lavoie-Roux: ... s'acquitter de leur tâche.
M. Vaugeois: Nous y reviendrons pour la loi 4.
Mme Lavoie-Roux: Bon.
M. Vaugeois: M. le Président, pouvons-nous terminer le
tour général? On avait convenu de terminer à midi.
Mme Lavoie-Roux: J'avais une dernière question à
vous poser.
M. Vaugeois: Oui.
Mme Lavoie-Roux: Je vous l'ai posée tout à l'heure
dans mes notes préliminaires. Quelles sont les relations que vous avez
établies entre le ministère de l'Education et celui des Affaires
culturelles du point de vue de l'enseignement des arts?
M. Vaugeois: Bon, écoutez...
Mme Lavoie-Roux: Ne me dites pas qu'on attend le résultat
du livre vert, parce qu'il pourrait y avoir le livre blanc, etc.
M. Vaugeois: II y aura effectivement des livres verts sur la
recherche, etc., mais concrètement, le CMPDC, le lieu de coordination
des ministères à vocation culturelle, nous a permis un certain
nombre d'évaluations et d'études conjointes. De façon plus
concrète, depuis l'arrivée de mon sous-ministre et vous
verrez qu'on n'a pas perdu de temps il y a eu communications entre le
sous-ministre de l'Education et celui des Affaires culturelles pour convenir de
faire fonctionner un groupe de travail restreint je pense qu'il y a sept
personnes pour se pencher de façon précise sur
l'enseignement des arts. Cela ne veut pas dire qu'on commence maintenant, mais
cela veut dire que cela prend une forme encore plus précise. M.
Val-lerand et M. Martin se sont écrit ces jours derniers à ce
sujet.
Mme Lavoie-Roux: Quand vous dites que cela ne veut pas dire qu'on
commence maintenant, mais que cela prend une forme plus précise, vous
voulez dire que ce n'est pas commencé et que cela ne commencera
pas...
M. Vaugeois: Non, je veux dire qu'on a d'abord abordé la
question au niveau du conseil des ministres à vocation culturelle et
maintenant vous avez un comité au plus haut niveau des fonctionnaires
qui se met au travail.
Mme Lavoie-Roux: Et, du côté de la lecture, il y a
certainement des préoccupations qui doivent joindre les deux
ministères.
M. Vaugeois: Oui, certainement.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela aussi est en marche?
M. Vaugeois: Si vous voulez on y reviendra au moment des
bibliothèques et de la question du livre, aux éléments 1
et 2 du premier paragraphe?
Mme Lavoie-Roux: Maintenant, en relation avec les autres
ministères c'est une question que j'avais posée l'an
dernier au ministère des Transports, on avait constaté un
certain progrès. Il y avait aussi le ministère des Affaires
municipales. Quelle est la coordination qui se fait? Il peut y avoir beaucoup
de réunions mais, d'une façon concrète, cela
débouche où?
M. Vaugeois: J'aurai des choses à dire là-dessus
à l'occasion des différents éléments du budget. Je
vous dirai, à titre indicatif, que nous avons un groupe de travail
spécial sur l'île d'Orléans, que nous en avons un autre sur
l'archipel Mingan, par exemple, où le ministère des Affaires
culturelles travaille étroitement avec le ministère d'Etat
à l'aménagement, avec le ministère des Affaires
municipales, avec le ministère de l'Agriculture, avec le
ministère de la protection de l'environnement. Actuellement, on a des
groupes de travail très précis qui ont établi leurs
responsabilités au niveau des ministères intervenants. J'aurai
des choses à vous dire là-dessus au moment de l'étude de
nos crédits.
Mme Lavoie-Roux: II est midi, on peut suspendre.
Le Président (M. Jolivet): Compte tenu de l'entente, nous
ajournons nos travaux sine die. Quand nous reprendrons, nous serons à
l'étude du programme 1.
(Suspension de la séance à 11 h 55)
Reprise de la séance à 15 h 58
Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s il vous
plaît!
La commission des affaires culturelles se réunit pour
étudier les crédits budgétaires du ministère des
Affaires culturelles.
A cette assemblée sont présents: M. Alfred (Papineau), M.
Brassad (Lac-Saint-Jean), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Goldbloom (D
Arcy McGee), M. Godin (Mercier), M. Guay (Taschereau), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Le rapporteur est M. Guay (Taschereau).
Au moment de l'arrêt, à midi, nous en étions
à I'étude du programme no 1.
Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je ne sais si je puis
dire que c'est une question de règlement vous
l'interpréterez comme vous voudrez lorsque je vous aurai posé la
question mais si nous décidons de passer au programme 1, il reste
qu'il y a des questions d'ordre général qui n'ont pas
été posées. C'est un souhait que j'exprime,
j'espère qu on sera assez large. Je vais essayer de les entrer le plus
possible dans chacun des program-
mes. Il y a des fois où ce sera un peu difficile à
modifier, mais j'ose espérer qu'on pourra compter sur votre indulgence
pour permettre ces questions au moment des programmes, parce qu'on perd
peut-être moins de temps finalement quand on intervient au moment des
programmes que dans une discussion générale qui dure trop
longtemps au départ.
Le Président (M. Jolivet): Je pense que c'est la coutume d
ailleurs de faire un débat assez large, de façon à
accélérer le processus d'adoption. Si cela permet cette
possibilité, je n'ai aucune difficulté à l'accepter.
Le programme 1, M. le ministre.
Aide à la publication et à la vente des
livres
M. Vaugeois: L'élément 1 du programme 1 porte le
titre: Aide à la publication et à la vente de livres. Parmi les
activités que recouvre cet élément 1, vous avez une
assistance à la création littéraire, à
l'édition de livres et de périodiques, à la promotion et
à la diffusion, l'objectif général étant de
concevoir, développer et appliquer une politique du livre, pour
l'instant, celle qui existe, qui a été mise en place au
début des années 1970. Donc, nos interventions, nos moyens
prennent forme tant par une aide à l'édition de livres et de
périodiques que par un effort au niveau de la promotion.
Récemment, nous avons fait l'expérience d'un programme de
promotion de la lecture. Il y a une évaluation qui se fait actuellement;
il est déjà prévisible que cet effort de promotion de la
lecture aura des suites cette année, mais avec des modalités qui
pourront être un peu différentes et qui prendront sans doute appui
sur les libraires et bibliothécaires. Nous pensons, de plus en plus,
qu'il est plus normal de faire une politique d'incitation à la lecture
en impliquant les professionnels du livre que constituent ceux qui sont en
contact direct avec les lecteurs. Il s'agit donc des bibliothécaires et
des libraires.
A cet égard, j'ai déjà eu l'occasion de
m'adres-ser, la semaine dernière, à l'Association des
bibliothécaires du Québec et c'est essentiellement le message que
je leur ai livré en les invitant à nous faire des suggestions
concrètes pour que les 900 membres que compte leur association se
fassent les alliés du gouvernement dans une politique de promotion de la
lecture. Je pense que, du côté des libraires, il y a
déjà eu un travail très important d'amorcé qui
s'est, encore une fois, illustré par le programme du mois d'avril. Les
libraires n'attendent que de nouvelles occasions pour contribuer à cette
politique du gouvernement.
Il y a beaucoup de choses à dire au titre de l'aide à la
publication et à la vente de livres. Vous comprendrez qu'en cours de
discussion, si discussion il y a ce n'est pas nécessaire
mais mon collègue de Mercier qui vient, comme moi, du milieu du livre et
de l'édition, et qui a eu une expérience assez complète
à la fois comme auteur et comme éditeur...
Mme Lavoie-Roux: Nous sommes flattés de l'avoir avec
nous.
M. Vaugeois: Vous avez, devant vous, les deux plus grands
ex-éditeurs du Québec. On va se recycler et,
éventuellement, on y retournera. Le député de Mercier aura
très certainement, avec moi, l'occasion d'échanger sur cet
élément 1 du programme 1 qui véhicule des sommes d'argent
assez importantes et qui retient l'attention des services du
ministère.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais demander au ministre ce qu'il compte
faire avec le rapport qui a été produit par le Comité
consultatif du livre qui a été déposé à
l'Assemblée nationale, je pense, en juin dernier et qui contenait des
recommandations intéressantes justement pour arriver à
établir une politique du livre qui tienne compte des besoins, d'abord,
de motivation, d'incitation à la lecture, de la question de la diffusion
du livre, et de toute la commercialisation. Enfin, il y avait une foule de
recommandations que je ne vous lirai pas je suis sûre que vous
avez lu le rapport que j'ai ici en résumé concernant
l'aide à la création, l'édition, la distribution, les
librairies, les bibliothèques, etc.
M. Vaugeois: A quoi faites-vous allusion, là?
Mme Lavoie-Roux: Au rapport qui a été
déposé par le Comité consultatif du livre à
l'Assemblée nationale. Qu'est-ce que vous... enfin, il semble et
là, ce n'est pas un reproche au gouvernement actuel que tous les
gouvernements qui se sont succédé sont très
généreux quant aux études qu'ils commandent et sont
peut-être moins généreux quant à la mise en
application de certaines des recommandations qui en émanent. Evidemment,
on ne retient pas toujours toutes les recommandations, ou on peut les modifier,
quelle que soit la formule que l'on retienne.
Ce que vous nous dites, M. le ministre, c'est que vous avez dit aux
bibliothécaires de collaborer; tout cela est très beau et
très louable. Vous accordez des fonds pour la création et
l'édition mais est-ce que, finalement, on fait, à un moment
donné, le point sur où on en est? Les problèmes semblent
toujours être chroniques. J'aimerais connaître vos idées
précises, à part du fait que vous nous avez ventilé cette
page des éléments 1 et 2 du programme 1. Dans les faits concrets,
comment ceci va-t-il améliorer une situation qui existe depuis
très longtemps?
M. Vaugeois: Remarquez qu'il y a des choses qu'on ne peut pas
changer. On ne peut pas changer la réalité, on ne peut pas
changer le réservoir maximal de l'Etat québécois. Tous les
gens s'accordent à dire que, compte tenu du marché qu'il y a ici,
cela sera toujours difficile d'y faire de l'édition et de vivre du
commerce du livre
ou d'essayer de vivre de sa plume. Encore qu'il n'est pas dit qu'un
certain nombre, avec un minimum d'aide, ne pourrait pas s'en tirer assez bien.
Au cours des dernières années on a vu se développer, au
Québec, des professionnels du livre, comme on n'en avait jamais
eues.
L'édition a fait, d'ailleurs, des bonds et les éditeurs se
sont fait plus nombreux et plus professionnels. Les librairies,
également, ont eu un moment de développement qui semble
s'être arrêté depuis quelque temps et même, je pense,
qu'on recule actuellement. Le Comité consultatif du livre, comme vous le
savez, a comme mandat de conseiller le ministre sur l'agrément des
librairies. Il arrive que le comité se penche sur l'ensemble des
questions du livre, de sa propre initiative ou à la demande du ministre
et traditionnellement une tradition de courte durée depuis
deux ou trois ministres, l'habitude a été prise de demander au
Comité consultatif d'y aller de commentaires plus
généraux.
Je vous rappellerai, soit dit en passant, que j'ai été
président de ce comité pendant un certain nombre de mois. J'ai
donc travaillé à ce genre de rédaction. Il y a eu une
nouvelle étude faite, il y a quelques années, appelée
Drouin et Paquin...
Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est ce qu'on...
M. Vaugeois: ... qui a amené beaucoup d'information et qui
a provoqué le Comité consultatif à faire des commentaires.
Cela ne m'apparaîtrait pas très utile d'entrer dans une longue
discussion là-dessus encore que moi, cela me passionnerait et je
m'excuse de faire référence à cela, mais que voulez-vous,
c'est comme cela parce que vous allez trouver dans le livre blanc un
chapitre très précis, avec une articulation assez significative
du type d'intervention que nous nous apprêtons à proposer,
à recommander, à préconiser dans le domaine du livre. Sans
vous en donner une primeur, je vous dirai qu'il y aura un virage assez
important de pris et que nous allons nous écarter un peu de ce qui fonde
le mémoire du Comité consultatif du livre, parce que ce
mémoire-là fait référence à la politique
actuelle du livre. On l'a vraiment expérimentée dans toutes ses
facettes et un des objets, c'était de développer le réseau
de librairies. On se rend compte, après un certain nombre
d'années, que le réseau cesse de se développer et
même qu'il y a un peu de recul. On se rend compte également que la
petite librairie devient fort vulnérable et nous avons vu naître
des grands dans le domaine de la librairie. Nous voyons naître au
Québec et se développer des réseaux. Cette importance que
prennent les réseaux, d'autant plus qu'ils sont souvent de
propriété étrangère, en partie, nous a amené
à nous poser des questions sur la propriété, sur
l'importance que prenaient les réseaux et sur le recul du vrai libraire
que nous souhaitions voir se développer avec la politique du livre,
telle qu'elle avait été énoncée.
Si on voulait référer au niveau de l'édition, les
éditeurs ont fait l'objet de programmes d'aide assez importants ou,
d'ailleurs, le Conseil des arts et le ministère des Affaires
culturelles, à un moment donné, se disputent les faveurs d'une
intervention monétaire. Nous nous sommes demandé si on en
n'était pas à subventionner, finalement, les livres qui avaient
le moins de chance de se vendre et les livres qui étaient les moins
attendus du public. Partant de là, nous aurons des recommandations assez
innovatrices de ce côté. Egalement, nous allons reconnaître
le besoin de spécialiser le libraire et revaloriser le libraire
non-réseau.
Essentiellement, notre effort va porter sur une intervention
gouvernementale au niveau de la demande.
Une Voix: Je m'excuse, mais si vous voulez faire une
conférence...
M. Vaugeois: Donc, nous aimerions pouvoir intervenir au niveau de
la demande. Nous pensons que la meilleure façon, finalement, d'aider
I'auteur, d aider l'éditeur et d'aider le libraire, c'est de faire en
sorte que les gens lisent plus et aient davantage besoin d'ouvrages qui devront
être aussi accessibles que possible.
Nous allons donc avoir des interventions gouvernementales qui auront
comme préoccupation de jouer au niveau de la demande. Nous rejoignons
là, d'ailleurs, une préoccupation du livre vert de M. L'Allier
qui voulait développer et miser surtout sur une politique de la lecture.
Sauf, que nous allons un peu plus loin, nous pensons qu on ne peut pas
sensibiliser dans le vague les gens à la lecture. Il faut les inciter et
pour les inciter, nous croyons à l'intervention du professionnel du
livre qui a des chances d'être en contact avec le lecteur. Vous trouvez
là un peu les préoccupations qui vont justifier notre approche
dans le livre blanc.
Je dirais encore une chose; nous regrettons beaucoup et ce n'est
pas dans le livre blanc, mais je prépare une intervention publique
là-dessus que je voudrais bien orchestrée et nous sommes
conscients, actuellement, que les media, en général, ne
soutiennent pas suffisamment la promotion du livre. Si nous pouvions
réussir à faire en sorte que la radio et la
télévision, en particulier, portent plus d'intérêt,
plus d'attention à la production littéraire, on pense que le pas
le plus important serait franchi.
Si on fait un parallèle entre le commerce du disque et le
commerce du livre, le succès qu'obtient le disque tient beaucoup du fait
que le disque est davantage présent dans les media électroniques;
c'est un phénomène qui ne joue pas en faveur du livre. Or, quand
on fait la promotion du livre, au niveau de l'écrit, on est un peu dans
un cercle vicieux, parce que les gens qui ne lisent pas, ne lisent pas de toute
façon, et même si on leur dit de lire dans des écrits, on
ne les rejoint pas. Tandis que le phénomène au niveau du disque
est assez révélateur. Les gens n'ont pas besoin de lire pour
être incités à acheter un disque, ils l'entendent à
la radio, ils voient la vedette à la télévision. Si nous
pouvions réussir, au niveau du livre, à rendre le livre
présent dans
les media électroniques, on pense qu'on aurait atteint un
objectif important qui pourrait jouer en faveur du développement du
commerce.
Autrement dit, plutôt que d'avoir des mesures d'intervention pour
soutenir l'auteur, soutenir l'éditeur, soutenir le libraire, si on
était capable d'animer le commerce du livre en jouant sur la demande, le
lecteur décidant lui-même de ce qu'il a envie de lire et
également de l'endroit où il a envie d'acheter ses livres... On
pense que c'est un domaine où la liberté doit être totale,
mais on pense aussi que la lecture est importante en termes de loisir et en
termes de formation et qu'il est de devoir d'état de faire en sorte
qu'elle se développe.
Notre intervention ne cessera pas au niveau de l'auteur, de
l'éditeur et du libraire, mais elle se situera, de façon
peut-être plus neuve, au niveau de la demande, par des interventions en
particulier dans les media.
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais pas si le ministre est conscient et
dans quelle mesure il a eu des échanges avec le ministre de l'Education,
le ministre des Finances ou d'autres ministres, sur le fait, par exemple, qu'au
moment où vous faites une intervention auprès des
bibliothécaires, dont je ne veux pas mettre la sincérité
en doute... J'ai vu le communiqué qui est sorti et dans lequel vous leur
demandiez d'être des promoteurs de la lecture, ou un message comme
celui-là. Les bibliothécaires se retrouvent quand même en
assez grand nombre dans les bibliothèques scolaires et les normes non
indexées du ministère de l'Education font que, d'une part, parmi
les premiers professionnels qu'on met à l'écart, ce sont les
bibliothécaires parce que, vous le savez, cela fait trois ans que les
normes n'ont pas été indexées au ministère de
l'Education, parce que cela tombe dans l'enveloppe de l'équipement
général ou des parapédagogiques.
L'autre chose, c'est qu'avec la politique de l'accréditation des
libraires... Je voyais justement ce communiqué qu'on a reçu il y
a quelques jours: Modification du règlement d'aide au libraire
agréé", qui vient de modifier le tableau des tarifs auxquels
doivent se conformer les libraires, compte tenu de l'inflation, j'imagine, et
de la dépréciation de la monnaie. Le Service de commercialisation
du livre du ministère des Affaires culturelles a fait parvenir aux
établissements concernés le tableau des prix que doivent
désormais payer les établissements subventionnés.
J'imagine qu'on fait référence aux commissions scolaires, aux
universités, etc. qui achètent des libraires
accrédités. Pour eux, le prix des livres monte, leurs subventions
ne sont pas indexées, ce qui fait que, à un moment donné,
on va se retrouver... Je ne voudrais pas dresser une image absolument sombre,
mais les commissions scolaires achètent de moins en moins de livres
parce que les coûts montent de plus en plus. Vous admettez qu'elles
doivent recevoir davantage, là-dessus, je suis d'accord avec vous, mais
par contre, devant la non-indexation des ressources des principaux
organismes... (16 h 15)
Au fond, ce sont ces grands organismes qui finalement subventionnent le
plus les librairies parce que leurs achats sont beaucoup plus
considérables et d'une façon indirecte on subventionne les autres
livres. C'est pour cela que je me dis, on peut parler longtemps sur
l'incitation des gens à la lecture, mais si vous laissez vos
bibliothèques scolaires se démoder jusqu'à un certain
point et que, tout à coup, cela devient hors de prix pour les
écoles, j'ai l'impression qu'on tourne en rond. C'est un problème
que je soumets à votre attention parce que votre modification des normes
pour les libraires subventionnés part d'une réalité que
j'admets fort bien, mais qui, par contre, peut avoir un effet tout à
fait opposé, dans le sens que ceux qu'on veut éduquer, c'est
quand même ceux qui commencent à lire; et vous avez le même
phénomène concernant les bibliothécaires dans les
écoles.
Je me dis: Est-ce que ceci devrait faire l'objet d'une attention
particulière de la part du ministère de l'Education ou en
collaboration avec le groupe? Le problème est là.
M. Vaugeois: Vous avez parfaitement raison de souligner cet
aspect de la question. J'aimerais distinguer les bibliothèques
scolaires, les acheteurs de manuels scolaires et les bibliothèques
publiques.
Pour ce qui est des bibliothèques publiques, elles
relèvent du ministère des Affaires culturelles, et les
subventions s'accroissent de façon très significative depuis deux
ans.
Dans le cas des livres scolaires, on ne réussit pas à
avoir de statistiques très précises. Cela fait plusieurs fois que
je demande au ministère de l'Education, depuis que je suis là, de
me fournir des statistiques sur les sommes d'argent consacrées à
l'achat de manuels scolaires. Je ne réussis pas à en avoir, cela
me semble être dans un espèce de poste divers, avec la photocopie,
et je ne sais trop quoi.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. L'audio-visuel et tout le
pataclan.
M. Vaugeois: C'est cela. Je pense qu'on touche un point
très important parce que les gens du secteur scolaire prétendent,
à tort ou à raison, on ne peut pas le savoir, qu'ils font les
frais de la politique du livre.
Mme Lavoie-Roux: Ils le font, je peux vous l'assurer.
M. Vaugeois: Nous y reviendrons, si vous voulez. On n'est pas
capable de quantifier cela. Ils nous disent qu'on les oblige à donner
quelque chose comme 15% aux libraires sur le manuel scolaire et que, s'ils
pouvaient aller en soumission, comme c'était le cas autrefois, ils
feraient des économies.
La pression des libraires c'est de nous dire que le 15% n'est pas une
marge suffisante et qu'il faudrait absolument l'augmenter.
A côté de cela, vous avez les achats des
bibliothèques d'enseignement et des bibliothèques
scolaires. Si je tente un parallèle, je ne sais pas dans quelle mesure
leurs budgets s'accroissent, ne s'accroissent pas ou sont indexés... Je
sais une chose, ce que je peux voir dans mon milieu, c'est que les
bibliothèques d'institutions d'enseignement me semblent être mieux
pourvues que les bibliothèques publiques. Les locaux, en
général, sont plus spacieux, le personnel est plus complet...
Mme Lavoie-Roux: Absolument.
M. Vaugeois: Les budgets d'acquisition me semblent être
plus importants. Vous me direz sans doute qu'ils ont aussi des exigences de
service qui sont de taille, puisqu'il faut tantôt servir une
université, tantôt servir un CEGEP, tantôt servir une
polyvalente. Il reste quand même que, si je fais une comparaison entre la
situation dans laquelle se trouvent les bibliothèques publiques qui sont
au service de tout le monde, sans exclure les gens qui sont étudiants
inscrits au CEGEP ou à l'université, il me semble que nous avons
encore un bon bout de chemin à faire pour rattraper un minimum de ce
côté.
Que les bibliothèques scolaires, par la règle des achats,
contribuent au soutien de notre politique du livre, c'est indéniable.
Est-ce que notre politique du livre les oblige à des
déboursés beaucoup plus considérables au niveau des
bibliothèques? Je pense qu'il faut l'admettre. Je suis prêt
à admettre que notre politique du livre fait que le pouvoir d'achat des
bibliothèques publiques et des bibliothèques scolaires s'en
trouve affecté.
Je ne dirais pas la même chose pour le livre scolaire. Je
prétends que...
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, il y a un autre problème,
c'est qu'à ce moment-là, tout va aller du côté du
livre scolaire parce que c'est plus important de donner des livres aux enfants
pour qu'ils apprennent leur grammaire que pour lire.
Cela peut sembler plus important dans l'immédiat on peut
se tromper, remarquez bien, dans ce cas-ci mais ce à quoi je
faisais allusion c'était aux bibliothèques scolaires et aux
bibliothèques publiques.
M. Vaugeois: Je vous donne raison à ce niveau quoique les
services que rendent les libraires compensent probablement, ou presque, pour
les frais qu'auraient à faire les bibliothèques si elles
commandaient, comme elles l'ont souvent fait traditionnellement, directement
chez l'éditeur, ou directement en Europe.
Il faut quand même comprendre qu'avant de placer une commande chez
un certain nombre d'éditeurs, il faut d'abord repérer
l'éditeur, savoir comment il fonctionne, s'il a un distributeur ou s'il
vend lui-même, et il y a un va-et-vient de commandes. Souvent les gens
cherchent à commander en Europe. Cela suppose finalement qu'il faut
connaître cela; c'est très exigeant et cela demande du
personnel.
Quand les livres arrivent, il faut vérifier la caisse, il faut
vérifier en regard de la commande, cela coûte de l'argent.
Actuellement, puisque le bibliothécaire peut compter sur un libraire, il
prend le paquet de commandes qui peuvent concerner 28 éditeurs
différents, 28 fournisseurs différents et c'est le libraire qui
repère le fournisseur, qui traite avec le fournisseur, et ainsi de
suite, de telle façon que la bibliothèque ne traite qu'avec un
intermédiaire qui est le libraire. Je pense que la marge que garde le
libraire, dans ce cas, est pleinement justifiée en regard des services
qu'il rend à la bibliothèque, mais on pourrait discuter longtemps
là-dessus. Là où je suis encore plus sûr, c'est au
niveau du manuel scolaire, à ce point, d'ailleurs, que je serais
prêt à ce qu'on évalue cela; je suis de ceux qui
prétendent que la marge de 15% ne correspond pas aux frais réels
encourus par le libraire dans son intervention sur le manuel scolaire.
Je suis convaincu que si les commissions scolaires s'organisaient pour
faire les achats directement chez les fournisseurs, éditeurs ou autres,
cela coûterait rapidement beaucoup plus cher aux institutions
d'enseignement et j'essaie de m'imagi-ner, d'ailleurs, comment cela
fonctionnerait. Elles ont de la difficulté à nous dire
actuellement quelles seront leurs clientèles scolaires en septembre. Les
CEGEP ne savent pas très bien le dire, les polyvalentes ont de la
difficulté à le dire. Comment pensez-vous qu'ils pourraient dire
le nombre exact de livres dont ils auront besoin quand ils ne savent même
pas très bien le nombre de professeurs qu'ils auront?
Mme Lavoie-Roux: Je regrette, ces prévisions sont faites
au mois de mars, avril.
M. Vaugeois: Sauf que quand ce sont des livres, madame, le
libraire reprend actuellement les livres. Est-ce que le diffuseur aurait la
même gentillesse de prendre des retours ou de compléter des
commandes?
Mme Lavoie-Roux: Dans tous les cas, M. le ministre, M. le
Président, j'aimerais suggérer au ministre qu'il
s'enquière auprès de ceux qui ont dû appliquer cette
politique. Je ne suis pas contre, je pense que c'est une façon de
soutenir le libraire, mais ce qu'il faut voir c'est qu'en même temps
qu'on veut aider quelqu'un, il ne faut pas travailler au détriment de
l'autre et c'est ce qui s'est produit, surtout quand, je vous le
répète, au point d'où je suis partie, c'est la
non-indexation des normes là-dessus.
Je pense que dans une plus petite commission scolaire ou dans une
bibliothèque municipale d'une ville de je ne sais pas
7000, 8000, ou 15 000 habitants, vous avez tout-à-fait raison, c'est
probablement le libraire qui, finalement, encourt les frais de manipulation et
de commandes, etc. Mais lorsque vous arrivez dans des organismes scolaires
beaucoup plus considérables, je pense que ce n'est pas la même
chose. De toute façon, cette organisation existait mais j'en suis sur le
fait que, finalement, il faudrait peut-être une coordina-
tion pour que, justement, les objectifs qu'on veut atteindre soient
vraiment atteints. Une autre question.
M. Vaugeois: Vous ne parlez pas des écoles
élémentaires; ce qui me préoccupe beaucoup dans cette
question, c'est la présence de bibliothèques dans les
écoles élémentaires. Je pense que les habitudes de lecture
se prennent vraiment à l'élémentaire et nos
bibliothèques pour jeunes se font rares. Quand les municipalités
équipent leur bibliothèque, souvent il y a une section pour les
jeunes, mais cela va rarement plus loin que cela. Traditionnellement, il y
avait des écoles élémentaires qui étaient bien
équipées pour fournir les services de bibliothèque aux
jeunes. De plus en plus, il me semble que les bibliothèques
d'écoles élémentaires, qui restent ouvertes
l'été ou qui sont accessibles en dehors des heures de cours, se
font rares et c'est un autre aspect de la question qui, pour moi, est
très important, parce que l'on y investit beaucoup d'argent. Il y a des
locaux et il y a des livres et il y a des bons livres et c'est souvent à
proximité de la résidence d'un certain nombre de jeunes et je
suis très préoccupé par la façon de rendre ces
bibliothèques accessibles.
Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'on revient, on refait et je
ne vous en fais pas reproche les mêmes discussions qu'on a faites
l'an dernier. C'est tout le problème. Quand j'entends le ministre
délégué au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux
loisirs et aux sports dire que les équipements ne servent pas, tout le
monde s'entend là-dessus. Tous les citoyens s'entendent
là-dessus, mais il reste ce problème: D'où vont venir les
ressources, par exemple, pour tenir votre petite bibliothèque ouverte
je suis tout à fait d'accord qu'elle devrait rester ouverte
alors qu'il n'y a plus de personnel dans l'école durant
l'été? Il faut quand même que quelqu'un assume ces frais.
C'est évidemment un manque de coordination et de ressources qui fait
que, par exemple, dans la région de Montréal, le problème
est moins aigu, du moins pour les équipements sportifs où il y a
des ententes signées, où la ville assume les
responsabilités après quatre heures, ou après six heures,
peu importe, mais ces mêmes ententes ne sont pas faites partout.
A un moment donné, on dessinait les plans des écoles pour
que la bibliothèque soit facile d'accès sans que la population
soit obligée d'envahir toute l'école en dehors des heures de
cours. Il y a des écoles où c'est fait, où la ville
l'accepte, l'école Evangéline, par exemple, a une
bibliothèque, en fait, une bibliothèque de quartier. Je pourrais
vous en nommer d'autres, mais là encore c'est une question de
coordination et la ville de Montréal, qui voit cela comme une de ses
responsabilités a peut-être, plus les moyens que d'autres
municipalités de le faire. Ce n'est pas dans le manque de conviction des
gens que réside le problème, c'est vraiment dans le manque de
ressources des municipalités.
M. Vaugeois: Si vous me le permettez. Ce n'est pas à vous
que je le fais remarquer, c'est de façon générale. Les
milieux concernés posent le problème de leur contribution
indirecte à la politique du livre, mais si on voulait regarder les
immobilisations faites dans ces équipements et dans les acquisitions
faites à longueur d'année, alors que, pendant plusieurs mois,
cela cesse de servir, à mon avis, c'est aussi grave que de contribuer
indirectement à la politique du livre. Je trouve qu'on ne met pas le
doigt sur le vrai gaspillage, si gaspillage il y avait quelque part, c'est
celui d'avoir des bibliothèques qui ne servent pas pendant plusieurs
mois.
Deuxièmement, je trouve aussi étonnant qu'en certains
milieux on s'offusque du prix des livres ou du pourcentage que les
professionnels du livre vont chercher sur leurs livres ce qui me
paraît très modeste sans qu'on se préoccupe au
même titre des coûts de la photocopie, par exemple. Tout le monde
sait qu'il y a des ouvrages actuellement qui coûtent moins cher d'achat
que de coûts de photocopie, mais les budgets d'acquisition sont vite
épuisés pour les achats et les budgets de photocopie ont l'air de
se perdre dans les budgets généraux. J'insiste beaucoup,
actuellement, pour qu'on me dise ce qui passe en pho-tocophie et ce qui passe
en achat de livres. J'ai hâte de voir ce genre de chiffres. Je fais un
pari. J'ai assez vécu dans ce milieu pour croire que, dans bien des cas,
on met plus d'argent, finalement, dans la photocopie que dans l'achat des
livres. A ce moment, on empêche les professionnels du livre et les
auteurs de vivre décemment. Je pense qu'il y a une bonne partie de nos
problèmes qui commence là. Je ne me fais pas d'illusion. Il ne
sera pas facile d'intervenir au niveau de cet abus.
Il reste que nos budgets sont ainsi faits, qu'on encourage la
photocopie. C'est la même chose pour les gens de l'audio-visuel. S'ils
ont à créer du matériel, il faut qu'ils travaillent. S'ils
photographient des livres d'art, par exemple, on dirait qu'ils ont
trouvé le travail à faire, et ils font une série de
diapositives à partir de deux ou trois bouquins qu'ils ont
photographiés. Ils donnent cela aux professeurs, alors qu'ils existent,
il me semble, pour créer du matériel et non pas pour copier des
livres, fussent-ils de couleur.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre, sans vous
enlever votre droit de parole, vous pourrez revenir tout à l'heure. Les
20 minutes sont écoulées afin de permettre à d'autres
d'intervenir.
M. Vaugeois: Peut-on suspendre une séance comme cela deux
minutes? J'ai un appel des plus urgents.
Le Président (M. Jolivet): Si on est tous d'accord.
Mme Lavoie-Roux: Oui. M. Le Moignan: Oui.
Le Président (M. Jolivet): La séance est suspendue
pour quelques minutes.
(Suspension de la séance à 16 h 28)
Reprise de la séance à 16 h 33
Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: Puisque le ministre est de nouveau confirmé
dans son mandat...
Mme Lavoie-Roux: On va continuer. M. Le Moignan: Vous
êtes soulagé.
M. Vaugeois: C'est toujours par intérim, j'insiste
là-dessus, je refuse toute permanence.
M. le Moignan: M. le ministre, vous avez fait allusion au livre
blanc à différentes reprises. En somme, pour tout ce qu'on
regarde ici, il y a des solutions dans le livre blanc, je crois.
Déjà on dirait que vous avez peur d'anticiper. Quand on regarde
votre budget...
M. Vaugeois: Puis-je vous dire, M. le député, que
j'ai peur de cacher ma grande satisfaction devant les propositions que contient
le livre blanc?
M. Le Moignan: Alors, ne soyez pas trop discret et levez certains
coins du voile. Je pense que cela va nous aider.
Vous avez un budget d'environ $13 millions pour livres et
imprimés, dont $2 millions pour l'aide à la publication et
à la vente du livre. Maintenant, vous avez parlé de la
publicité pour les disques. On sait que les disques se vendent beaucoup
et que la publicité rapporte évidemment. Avez-vous pensé
à inventer un système électronique, soit radio ou
télévision, pour amener les gens à lire, pour leur
proposer des ouvrages, de façon générale? Pace qu'on sait
que le prix du livre, au Québec, est assez exorbitant et de plus en plus
le moindre petit livre coûte cher. Alors, est-ce que quelque chose est
prévu à votre ministère pour amener les gens à
lire, comme les compagnies de disques le font?
M. Vaugeois: Oui, nous prévoyons... Il y a
déjà beaucoup de choses qui se font et là-dessus... On
pourra revenir à la question précise que vous venez de poser,
mais je vais peut-être vous étonner en vous donnant une
constatation que je fais actuellement que vous avez peut-être
déjà faite, je n'en sais rien on insiste beaucoup sur le
fait qu'à peu près la moitié des Québécois
ne lit pas, et qu'à peu près la moitié n'aurait jamais lu
un livre.
Par ailleurs, nos bibliothécaires des bibliothèques
publiques observent un accroissement des lecteurs, depuis deux ans, en
particulier, qui est remarquable. La bibliothèque municipale de
Trois-Rivières, actuellement, compte à peu près 25 000
abonnés sur une population de 52 000 ou 53 000 habitants. La circulation
des livres, cette année, pourrait être de l'ordre de 200 000
volumes...
Je pense que l'on se retrouve devant un phénomène...
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Vaugeois: Je suis confirmé mais je ne suis pas
sûr de survivre.
M. Goldbloom: Heureusement que ce n'est pas lenvironnement que
nous examinons.
M. Vaugeois: Je vais combattre avec mon cigare.
Mme Lavoie-Roux: C'est nous qui allons nous plaindre.
M. Vaugeois: II y a donc le phénomène... M.
Alfred: Si cela continue de même, nous...
M. Vaugeois: ... de l'élargissement du réseau des
bibliothèques. Cela va très bien... Je dois reconnaître que
le ministère, ces dernières années, a marqué des
points de ce côté. Dans les bibliothèques, le personnel, en
général, est dynamique, très dévoué, les
bibliothécaires sont des gens convaincus et la réponse de la
population est étonnante. On n'insiste pas assez là-dessus.
Le problème, c'est de sortir d'une espèce de cercle
d'initiés. C'est pour cela qu'il faut inventer des moyens qui vont
au-delà de l'écrit. Je compte beaucoup sur les deux types de
professionnels que sont le libraire et le bibliothécaire parce que le
premier livre, souvent, est suggéré par une incitation directe.
J'aurais envie de vous dire, par exemple, aujourd'hui mais vous, vous
lisez beaucoup Avez-vous lu "Les grandes marées" de Jacques
Poulin? Je l'ai terminé dimanche.
Disons que vous ne lisez jamais. Je vous parle d un roman en
particulier; je me fais convaincant. Je vous connais assez pour savoir que
c'est le genre de roman, bien que vous n'ayez pas l'habitude de la lecture, qui
vous donnerait le goût d'en lire un autre. Mais pour l'autre, vous allez
revenir me voir et vous allez me demander: Avez-vous un autre livre à me
suggérer, du même ordre que le premier? C'est ce qui se passe tous
les jours dans les bibliothèques et les librairies. Cela va tellement
loin, d'ailleurs, que lorsqu'on entre dans une bibliothèque publique, si
on ne trouve pas le bibliothécaire qui nous conseille
généralement les livres qu'on aime, bien, on hésite, on
flâne et finalement, on sort parfois sans livre.
A mon avis, le rôle du bibliothécaire et du libraire est
fondamental; c'est ce que moi, en tout cas, je reconnais. Ces gens ne peuvent
pas, par des gestes individuels, aller chercher constamment de nouveaux
lecteurs. Donc, il faut aller les
chercher je le répète par l'utilisation, le
recours à la radio, en particulier, et à la
télévision. Sans entrer dans les détails, j'envisage une
grande offensive je ne sais pas si c'est illusoire qui
amènerait nos media électroniques, en particulier, à faire
un bulletin de nouvelles, entre les nouvelles générales et les
nouvelles sportives, qui toucherait la vie artistique. Je trouve cela
scandaleux qu'au moment, par exemple, de la remise du prix du gouverneur
général, la seule nouvelle qui a été retenue au
bulletin de nouvelles de Radio-Canada, fut pour souligner qu'un des
récipiendaires avait refusé le prix. Les autres et vous
vous étonnerez peut-être de m'entendre parler ainsi qui
avaient accepté un prix prestigieux n'ont pas été
mentionnés. C'est quand même le bout du monde. Pour faire la
Manchette à Radio-Canada, quand tu reçois un prix important comme
celui-là, il faut le refuser. Je dis que c'est rendu au bout.
Alors, qu'on tourne en rond au niveau des professionnels du livre et de
ceux qui lisent déjà, je veux bien; qu'on améliore la
performance à l'intérieur du cercle des initiés et des
mordus, c'est ce qu'on fait actuellement, mais il faut briser ce cercle. On ne
le brisera pas si les media électroniques n'entrent pas dans le jeu.
Entre autres choses, je ne vois pas pourquoi on n'aurait pas, avant les
nouvelles sportives, des nouvelles artistiques et littéraires qui
pourraient être brèves mais qui pourraient rendre compte, non
seulement de ceux qui ont posé des gestes un peu étonnants ou qui
ont un auteur...
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Vaugeois: Voilà! Je pense que j'ai dit...
M. Le Moignan: M. le ministre, je pourrais peut-être vous
signaler une bonne initiative du poste CHAU-TV de Carleton qui donne, au moins
une fois par semaine: Le livre en quelques mots. A cette occasion, ce sont les
libraires ou les éditeurs qui envoient au poste... On passe certainement
de dix à quinze romans ou nouvelles, ou livres d'histoires. Cela a un
très bon effet parce que, personnellement, je me suis procuré des
livres après cette brève analyse qu'on en faisait.
M. Vaugeois: C'est cela.
M. Le Moignan: Vous avez aussi...
M. Vaugeois: Ecoutez, cela pourrait aller aussi loin qu'un
dialogue à la radio, de la même façon qu'on écoute
un extrait de disque; pourquoi, de temps en temps, ne pourrait-on pas
écouter un extrait de roman qui nous donnerait l'envie de le lire? Je
pense qu'il va falloir aller de ce côté.
D'ailleurs, on fait des expériences, actuellement,
d'enregistrement de livres pour les aveugles et les semi-voyants, ou pour les
handicapés qui sont paralysés, ainsi de suite. C'est une
expérience qui se développe; la plupart de nos
bibliothèques publiques, actuellement, sont en train de se donner des
services quand elles ne les avaient pas déjà
d'enregistrement pour cette catégorie de clients.
Mais cela pourrait aller plus loin et, encore, être accessible par
la radio. Je pense que tout le monde est prêt à cela. Ce que je
trouve un peu irritant, c'est que ces gens-là, souvent, reprocheront aux
libraires d'avoir l'esprit mercantile, reprocheront aux bibliothécaires
de faire ceci ou de faire cela. Je pense que les gens de nos media devraient
regarder un peu leurs responsabilités lorsqu'ils lancent la pierre du
côté des professionnels du livre, alors qu'eux-mêmes,
à mon avis, sont l'élément-clé.
J'ai un exemple à l'esprit: II y a un livre de
Léméac "Au-delà des massacres" qui est resté sur
toutes les tablettes des libraires pendant six mois, à un tel point que
les libraires songeaient à le retourner. Un bon soir, Wilfrid Lemoine,
à Radio-Canada, a fait une entrevue avec l'auteur qui est un type
remarquable. Le lendemain, Léméac a été
inondé d'appels; les rayons des libraires se sont vidés. C'est
comme cela. Le phénomène de la lecture passe maintenant par
l'incitation que peuvent suggérer la radio et la
télévision.
Puisqu'on n'a pas de programme qui va de ce côté-là,
il faut faire plus qu'on a fait cette année. Cette année, on a
pratiqué une opération de sensibilisation. C'est bien, mais cela
n'aura probablement pas fait lire un livre de plus. Maintenant, il faut se
lancer dans une campagne d'incitation; c'est ce qu'on s'apprête à
faire.
M. Le Moignan: Parce qu'actuellement vous avez un réseau
de bibliothèques municipales...
M. Vaugeois: Qui se développe bien.
M. Le Moignan:... qui de développe parce que ce
réseau représente peut-être seulement une centaine de
bibliothèques dans la province, ou plus?
M. Vaugeois: Quatre-vingt-quatorze, me dit-on.
M. Le Moignan: Maintenant, est-ce que vous...
M. Vaugeois: Cela dépend, si on comptait les BCP. Les BCP,
eux, ont une pénétration fantastique.
M. Le Moignan: Est-ce que vous songez à utiliser
davantage, comme on l'a mentionné tout à l'heure, une
bibliothèque de CEGEP? Je prends un milieu comme Gaspé où
ils ont fait des efforts pour essayer d'en arriver à une
bibliothèque municipale qui, je crois, n'existe pas. C'est un
exemple.
M. Grenier: Egalement à Lac Mégantic, on va avoir
de l'appui maintenant; cela va aller mieux pour une bibliothèque
municipale à Lac Mégantic.
M. Vaugeois: Vous pensez que le régionalisme du
sous-ministre va aller jusque là?
M. Grenier: Cela devrait. Il devrait commencer par là.
Mme Lavoie-Roux: ... sous-ministre...
M. Vaugeois: Tout passe par Trois-Rivières. C'est
officiel.
M. Le Moignan: Est-ce qu'il y a des obstacles à
l'ouverture de bibliothèques ou d'annexes dans un collège, un
CEGEP? Est-ce que cela existe à certains endroits?
M. Vaugeois: Mme le député de L'Acadie a
souligné qu'au niveau des équipements sportifs le même
problème s'était posé, et je pense qu'un peu partout dans
tout le Québec les choses évoluent rapidement. A cet
égard, la fermeté du ministre aura contribué, je crois,
à accélérer certains protocoles d'utilisation des
équipements sportifs des commissions scolaires, des polyvalentes ou des
CEGEP, etc. Il faudra peut-être arriver avec la même attitude du
côté culturel, mais il faudra aussi arriver avec des sous.
Je pense que les commissions scolaires, maintenant, et les
administrations de CEGEP sont bien conscientes qu'il faut ouvrir et rendre
accessibles leurs équipements culturels au même titre que les
équipements sportifs. D'ailleurs, j'ai déjà sur mon bureau
un certain nombre de demandes; un CEGEP de l'Outaouais, par exemple, nous dit:
On va être obligé de fermer notre salle, en dehors de l'usage des
Cégépiens, parce qu'on n'a plus les budgets pour garder cette
salle ouverte à la population.
Le problème se pose. Il faut savoir y faire face et nous avons un
certain nombre de mesures, actuellement, qui vont nous permettre d'y faire
face. Déjà, le ministère a lancé, au début
de l'année, un programme d'accessibilité qui intervient avec un
financement équilibrant le déficit d'une programmation qui aurait
été soumise à l'attention du ministère et qui a
été acceptée.
Il y a déjà un certain nombre de moyens qui sont mis en
oeuvre. Il va falloir aller plus loin et probablement arriver avec de l'argent
qui va justifier les administrateurs scolaires de rendre leurs
équipements culturels accessibles.
M. Le Moignan: Si les municipalités, je pense, avaient
plus d'argent, elles pourraient contribuer, à ce moment-là, au
réseau... à l'accroissement du nombre de volumes dans les CEGEP
en particulier.
Au sujet de vos bibliothèques publiques, quelle proportion du
peuple Québécois peut être desservie par cela? Est-ce que
vous avez des statistiques sur vos bibliothèques... le réseau de
bibliothèques publiques? Quelle proportion de personnes cela
touche-t-il?
M. Vaugeois: Je prends une note là-dessus. Voulez-vous que
je vous remette un document? J'ai un très bon document
là-dessus.
M. Le Moignan: Oui, d'accord.
M. Vaugeois: Toutes les questions que je me suis posées
ont trouvé leurs réponses dans les heures qui ont suivi, comme
quoi les services du ministère sont très compétents. Je
vais vous remettre cela. Vous ne pouvez pas avoir à l'esprit beaucoup
plus de questions que j'en ai eu moi-même, avec l'appréhension que
créait chez moi la défense des crédits. Alors je vous
offre cela, volontiers. Vous en aurez plus que pour votre argent.
M. Le Moignan: On pourra reposer toutes ces questions. (16 h
45)
M. Vaugeois: Est-ce que mon collègue de Mercier aurait des
commentaires à faire?
M. Godin: Mon tour est inscrit.
M. Le Moignan: Maintenant, dans le développement d'un
réseau, de quelle façon entendez-vous procéder pour
activer?
M. Vaugeois: Voulez-vous aussi que je vous donne un autre
document?
M. Le Moignan: Est-ce que c'est la réponse...
M. Vaugeois: Je pourrais vous donner un autre document qui est
très intéressant mais très complexe. Ce sont les
protocoles... ce sont les protocoles qui sont suggérés aux
municipalités pour développer des bibliothèques publiques.
C'est très compliqué parce que cela tient compte de
l'évaluation foncière, de la population et, en gros, pour le
résumer, c'est dans la mesure où la municipalité fait un
effort que le ministère s'oblige à faire un effort qui sera
généralement de l'ordre de 30%, encore que dans certains cas,
quand l'évaluation foncière est bonne, que la population est
assez élevée, la proportion peut baisser; dans le cas de
Trois-Rivières par exemple, je pense que c'est 25%. C'est la plus faible
que nous ayons, parce que la situation de la ville la justifie à notre
avis de faire un effort plus considérable.
Mais ce programme du ministère a beaucoup de succès
actuellement et je peux même vous faire un aveu; si tout le monde
répondait à la proposition qui est faite au milieu, aux
autorités municipales, d'investir dans des bibliothèques
publiques, nous manquerions de crédits. Nous avons évalué
à environ $1 million la somme qui nous manquerait si toutes les
municipalités marchaient dans notre proposition, suivaient notre
proposition. Il est possible d'ailleurs qu'on ait un problème, mais on
sera alors justifié, je pense, d'aller chercher des crédits
supplémentaires. Déjà le Conseil des ministres a reconnu
l'importance de ce développement, a reconnu l'intérêt des
normes que nous avons établies et il nous a donné une ouverture
de crédits importante à cet élément. Nous l'avons
souligné ce matin. C'était de l'ordre
de $1 200 000 et je souhaite que nous manquions d'argent, bien
sûr. C'est pour dire que le réseau des bibliothèques
publiques s'étend raisonnablement et l'approche prise par le
ministère provoque de bonnes réactions dans le milieu.
Sans compter, encore une fois, les BCP qui continuent de pousser leurs
ramifications dans le milieu. Autrement dit, il y a une réponse de la
population et les administrateurs municipaux se rendent compte que les gens
veulent aussi ce genre de service. C'est là que cela commence. Mais le
gouvernement peut toujours mettre un petit peu d'argent dans l'affaire, si les
administrateurs municipaux ne sentent pas qu'ils peuvent marquer des points en
donnant des services de cette nature, ils ne feront rien.
Mais les gens en demandent et les administrations municipales, de plus
en plus, sont ouvertes à donner ce genre de service.
M. Le Moignan: Je vois que dans l'aide à la publication,
vous avez au-delà de $2 millions. Est-ce que c'est pour encourager les
écrivains, les éditeurs, les libraires, de quelle façon
cela peut-il se répartir?
M. Vaugeois: Vous appelez cela comment?
M. Le Moignan: "L'aide à la publication et à la
vente du livre", le premier élément.
M. Vaugeois: Je vais vous le ventiler, si vous voulez; d'abord il
y a les frais généraux d'administration de la politique du livre,
entre autres, le Comité consultatif du livre, etc. Vous avez
après cela une assistance financière à la création.
Vous avez de l'aide aux créateurs, après cela vous avez de l'aide
à l'édition et vous avez de l'aide à l'édition de
périodiques et puis vous avez également un budget de promotion et
de diffusion. Si cela vous intéresse, la plupart de ces programmes sont
normalisés. Je pourrais vous donner les critères qui jouent
lorsqu'on donne une subvention à l'édition ou des choses comme
cela. Je pourrais vous donner les critères, ils existent. Voulez-vous ce
genre de documents?
M. Le Moignan: Non.
M. Vaugeois: C'est intéressant, vous savez.
M. Le Moignan: Tout ce que vous avez comme document, en cours de
route vous pourrez nous les donner.
Mme Lavoie-Roux: ... donner.
M. Vaugeois: Est-ce qu'on peut prévoir de réunir
les trois ou quatre jeux de normes qui s'appliquent à l'aide à la
publication? Vous verrez l'effort fait par le ministère pour normaliser
ces subventions, éviter l'arbitraire et le discrétionnaire qui
est toujours le danger dans ce genre de jugement qui est porté sur des
manuscrits ou sur des propositions d'auteurs. L'approche prise, c'est vraiment
celle de la liberté.
M. Le Moignan: Alors c'est dans ce budget que viendrait, par
exemple, l'aide que vous offrez aux sociétés d'histoire.
M. Vaugeois: Non! Pour ça on a des petites surprises pour
vous dans le patrimoine et ailleurs.
M. Le Moignan: Dans le patrimoine. Une bibliothèque
nationale, la plupart des livres québécois...
M. Vaugeois: Si vous me le permettez, c'est un autre
élément, c'est l'élément 3.
M. Le Moignan: L'élément 3, d'accord.
M. Vaugeois: On peut le régler tout de suite, si vous le
voulez.
M. Le Moignan: Non, je reviendrai. J'ai terminé pour le
moment.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Merci, M. le Président. D'abord, je me retrouve
ici avec un collègue de l'Association des éditeurs. On a
été expulsés en même temps tous les deux de cette
association. Il y a un aspect du domaine du livre dont le ministre n'a pas
encore parlé. Il paraît qu'il va noter cela dans le livre blanc,
mais je vais évoluer un peu autour du problème du livre dans son
ensemble, M. le ministre, si vous me le permettez.
Pour parler, en particulier, d'un problème qui me tient
très à coeur... Je dirais qu'il y a un étage du livre qui
est l'étage culturel et qui est la librairie dans laquelle se rendent
les lecteurs qui ont l'habitude d'acheter des livres et de lire
régulièrement et il y a 150 librairies accréditées
au Québec. Mais il y a un autre aspect du domaine du livre qui est
très révélateur de l'ampleur du marché du livre, de
l'imprimerie et du magazine au Québec, c'est le kiosque, le point de
vente, le terminus d'autobus et même les pharmacies; c'est là que
la principale activité concernant le livre se situe, c'est là
qu'est le marché le plus important, par rapport à l'autre; je
pense que c'est de l'ordre de un à cinq. Cet aspect de la
réalité culturelle québécoise montre que les
Québécois, contrairement à ce qu'on pense... Parce que
malheureusement on ne se limite généralement qu'à la
partie librairie culturelle, si vous voulez, et non pas à la librairie
dite populaire: kiosques, points de vente, le marchand de jour-
naux du coin, le magasin de variétés sont également
des libraires, à certains égards, ils vendent des livres de poche
français ou américains, un peu de livres québécois,
malheureusement moins de québécois qu'autre chose. Si vous
additionnez les deux activités, vous vous rendrez compte que, per
capita, les Québécois lisent autant, sinon plus que les
Français, par exemple, en montant consacré.
J'espère que le ministère va je n'avais pas averti
le ministre de mes remarques au préalable être
sensibilisé à cet aspect de la question. Je pense que ces
kiosques à journaux et magasins de livres sont vraiment ceux qui ont le
contact le plus direct avec la masse des citoyens et des lecteurs. Une
intervention au moyen des media électroniques pour rejoindre le lecteur
et établir le pont entre le lecteur et le livre n'est pas à
dédaigner, mais je pense qu'il y a déjà tout un
réseau qui existe, toute une gamme d'habitudes de citoyen qui va acheter
ses cigarettes et, en même temps, prend un livre dans le même
magasin. Je souhaite que le ministère soit sensibilisé à
cet aspect. Je me demande si la solution ne serait pas que le livre
québécois passe par ces librairies et occupe une place de choix
dans ces librairies de façon que le livre québécois soit
le premier vers lequel le citoyen tend la main après avoir acheté
son paquet de cigarettes. Je pense qu'il y a un débouché
relativement énorme pour un livre québécois populaire,
dans sa facture aussi bien que par son prix, dans ce secteur.
Maintenant, j'aimerais citer ici un proverbe chinois qui dit:
"L'éditeur est un homme qui fait circuler quelques idées et qui
meurt ruiné. " Je pense qu'il est de commune et historique
notoriété que l'éditeur, effectivement, n'est pas
là pour faire de l'argent. Il y a des oeuvres qui ne sont
appréciées que 50 ans après; même Stendhal le disait
dans son journal: "Je serai lu en 1932", c'était 80 ans après sa
mort ou à peu près, et, effectivement, c'est ce qui s'est
passé, il est devenu un classique longtemps après sa mort.
Je sais que ce n'est pas facile et il est possible que le livre blanc,
sur le plan culturel, modifie un peu la plomberie ou, si l'on veut, le
mécanisme de la lecture au Québec, par des interventions
ponctuelles dans ce secteur. Mais je dis que ce n'est pas facile, dans la
mesure où les programmes... Quand un nouveau gouvernement arrive au
pouvoir, les programmes sont là, la machine marche, le personnel la fait
marcher et c'est souvent le minimum de l'activité requise qui se
produit; on continue certaines foulées, en fait, même avec ces
programmes que je vois ici, une certaine foulée qui ne fait que se
poursuivre, qui est essentielle, remarquez bien. Mais j'aimerais que le livre
blanc, pour l'avenir, nous fasse faire un bond en avant et nous ouvre des
horizons vers les petits vendeurs de livres. Je peux vous dire que, à
Trois-Rivières, la librairie qui, pour moi, est la plus importante
s'appelait le Royaume des oiseaux, c'était un vendeur de poissons et
d'oiseaux, un "aquarium" qui vendait également des livres. Cette
librairie était fréquentée par des gens qui
n'étaient pas des intellectuels, qui achetaient beaucoup de livres, qui
étaient peut-être les principaux acheteurs de livres à
Trois-Rivières. Elle ne serait pas classée...
Mme Lavoie-Roux: C'est une mafia.
M. Godin: Elle ne serait peut-être classée, M. le
Président, en vertu des normes actuelles, comme une librairie
agréée, cette librairie. Cela me fait poser la question au
gouvernement dont je fais partie, sur l'adaptation de ces normes à la
réalité culturelle de la masse québécoise qui est
cultivée, malgré que cela ne réponde pas au critère
de la culture de Madame de Pompadour ou autres beaux esprits, mais la
consommation de livre dans l'autobus ou dans le métro de Montréal
est considérable, on le voit. Dans chaque rame de métro que je
prends, il y a des gens qui lisent des livres de poche malheureusement,
comme je disais au début français.
Il y a des expériences qui ont été faites dans
certains pays, par l'Etat, et je me demande si cette expérience ne
devrait pas être tentée à cet égard. Un livre de
poche à prix extrêmement bas on pourrait prendre quatre ou
cinq titres dans une année, les imprimer à 50 milles exemplaires,
cela pourrait être fait par la Bibliothèque nationale ou
l'éditeur officiel du Québec, cela pourrait être des
classiques, pas nécessairement des oeuvres québécoises,
mais j'aimerais qu'il y en ait quelques-unes dedans... A titre
d'expérience pilote, que l'Etat s'occupe de vérifier s'il y
aurait un marché pour un livre de poche québécois,
à prix populaire et à facture populaire. Je souhaite que le futur
livre blanc aborde ces questions.
Le marché est là, d'après moi. Ce qui me frappe,
c'est que, si vous allez chez Giguère ici, à Québec, qui
est un libraire, vendeur de cigarettes et de tabac aussi, mais qui est un
libraire, tout à côté d'une librairie qui s'appelle
Garneau, il y a probablement plus de gens non liseurs qui vont chez
Giguère, mais ils achètent autant de livres per capita, j'ai
l'impression, ou autant d'imprimés en tout cas. Si vous entrez chez
Giguère, vous allez voir du livre de poche de la collection "J'ai lu",
"Folio" et des magazines américains, etc., et une part
extrêmement..., la peau de chagrin en fait, qu'on pourrait ainsi
qualifier de territoire réservé aux productions
québécoises dans les kiosques à journaux.
Je pense que le gouvernement du Québec devrait je pense
qu'il va d'ailleurs le faire bientôt, d'après mes renseignements
prendre en considération cet aspect de la diffusion. C'est par
là que cela serait le plus facile et le moins coûteux pour faire
en sorte que le public lecteur et l'édition québécoise, le
livre québécois, se rejoignent largement.
D'autre part, je vois, dans le premier paragraphe du programme 1.1 que
les prêts garantis aux éditeurs n'ont été consentis
qu'à quatre éditeurs et un libraire. Et la raison je l'ai
d'ailleurs exprimée dans des documents au gouvernement une des
raisons était que, contrairement, à ce qui se passe en Ontario
où une telle politique existe, l'Ontario paie l'intérêt
c'est une mesure,
par conséquent, d'aide directe sur les prêts
consentis aux libraires et éditeurs. J'ai demandé plusieurs fois
au gouvernement que nous copions l'Ontario puisque nous avons des
velléités de souveraineté culturelle, dont votre ancien
chef était friand. La souveraineté culturelle devrait s'incarner,
pour nous, dans des mesures très précises, puisque nous
prétendons en avoir, ce que l'Ontarien ne prétend même pas;
mais n'ayant pas les devises, elle a la politique et les crédits qu'elle
affecte à cela. C'est un exemple à suivre. Je pense que, pour
quelque temps on devrait "s'onta-rienniser" je ne sais pas si cela se
dit et aller dans la même direction, parce qu'au fond je
vais me faire critique du gouvernement, temporairement, contrairement à
mes habitudes ce que la SDI fait dans le domaine du livre et des
libraires, c'est le rôle d'une banque, au fond. Ils appliquent,
malheureusement, à peu près les mêmes critères que
les banques. Je puis vous dire, en tant qu'éditeur, que devoir $50 000
à cinq libraires, c'est-à-dire à cinq imprimeurs
$10 000 à chacun me semblait à moi, en tant qu'homme
d'affaires, moins dangereux que de devoir $50 000 à la SDI ne
devoir qu'une dette, à ce moment-là il peut m'étrangler
plus facilement. Je trouvais, par conséquent, que cette
mesure-là, même si elle partait d'un bon sentiment et d'un bon
naturel n'allait pas suffisamment loin dans une sensibilité aux
problèmes réels des libraires, des éditeurs et imprimeurs
aussi, parce que, au fond, les plus grands artisans de la politique du livre au
Québec, ce sont les imprimeurs, pas le gouvernement. La masse de
crédit que supportent les imprimeurs au Québec, pour les
éditeurs, c'est fantastique. C'est plus, peut-être que tout le
budget du ministère des Affaires culturelles, du moins en ce qui
concerne les bibliothèques et le livre. (17 heures)
Donc, il y a un problème extrêmement important. Pas plus
tard qu'il y a deux jours, un imprimeur me disait qu'il était
menacé de faillite, parce qu'il n'y a plus de marché, il n'y a
plus rien. Il est temps, par conséquent, qu'il se passe quelque chose de
concret dans ce domaine. Après avoir parlé de souveraineté
culturelle nous avons pris le même flambeau, remarquez bien
il faut qu'on fasse des choses concrètes dans ces secteurs. J'ai
confiance que le ministre, vu son passé et sa connaissance du secteur et
des problèmes du secteur c'est un secteur où il y a
beaucoup plus de problèmes qu'autre chose développe des
politiques à venir qui iront dans la bonne direction.
A l'élément 3 du programme 1, je vois que le
ministère aide la publication de douze périodiques. Ces douze
périodiques, s'ils ne disposent pas, dans les kiosques à
journaux, d'une place privilégiée, à mon avis, c'est en
partie de l'argent jeté à l'eau. Le rapport De Grandpré,
qui est un chef-d'oeuvre du genre, montrait fort bien que cet espace culturel,
au Québec, est occupé par des publications
étrangères et que la place du Québec est absolument nulle,
ou à peu près, avec l'exception d'une nouvelle
génération de publications qui s'appellent Nous, Le Mois, etc.,
enfin, publications peut-être bonnes dans leur secteur. Mais s'il y avait
un moyen peut-être en consultation avec les vendeurs de journaux
eux-mêmes, les kiosques, avec la profession, autrement dit je me
demande si on ne pourrait pas arriver à tailler, pour les publications
québécoises, une place aussi bien pour le magazine, revue, que
pour le livre, une place qui permettrait vraiment de vérifier si les
Québécois en veulent ou n'en veulent pas. Un exemple que j'ai
déjà donné lors d'un colloque auquel je participais avec
le prédécesseur de M. Vaugeois, M. L'Allier: Si vous ne vendez
que des tomates de Californie chez un marchand de légumes
québécois, vous pourrez dire, après dix ans que les
Québécois ne mangent pas de tomates québécoises.
Evidemment, il n'y en a pas là où les gens vont acheter les
tomates. Dans le domaine du livre et de la revue, c'est le même
problème. J'en étais à souhaiter, dès ce
moment-là, qu'on s'occupe... j'estime, effectivement, que les
bibliothèques et les librairies a-gréées sont les piliers,
si l'on veut, de la culture et du livre. Mais il faut s'en occuper; c'est ce
qui se fait, et cela se développe, et c'est tant mieux. Les bibliobus,
par exemple, et la fréquentation de la bibliothèque municipale de
Montréal que je fréquente régulièrement
montrent qu'effectivement ce sont les temples de la culture, très
populaires et très fréquentés.
Mais il serait temps qu'on se rapproche des petites chapelles de la
culture, qui seraient les kiosques à journaux, qu'on sorte des gros
édifices de style gréco-romain, à Montréal, que
vous connaissez. Les petites chapelles, là où il y a
peut-être comme je le disais au début le plus
d'activité, vraiment en quantité. Je pense que le
ministère devrait se pencher là-dessus. Egalement sur le
problème qui est relié à cela, le problème de la
diffusion. Je sais que le ministère sera bientôt saisi d'une
demande de subvention pour étudier la possibilité d'une
coopérative de petits éditeurs de revues et de livres, surtout de
revues, pour organiser une agence coopérative de distribution de
magazines qui puisse consentir des meilleurs marges de profit... Les choses qui
sont essentielles aussi, comme l'Agence de distribution populaire, mais qui
sont très coûteuses parce qu'elles fonctionnent par ordinateur,
elles fonctionnent par camion. Donc, d'après moi, l'artisanat doit
être encouragé également dans ce secteur.
J'espère qu'on donnera un coup de main à ces gens qui
veulent explorer les possibilités d'établir une mini-agence de
distribution, sur le modèle coopératif, de façon à
leur assurer un meilleur contrôle. Car, la distribution, c'est comme un
piano. Il y a de grandes agences qui jouent du piano mécanique. Elles
n'ont pas la sensibilité. Elles mettent deux exemplaires de la
même revue dans 500 points de vente, alors que dans un, elles en
vendraient 40 et que dans l'autre elles n'en vendraient aucun; elles en mettent
deux partout, de sorte qu'il en manque dans 20% des points et il en reste dans
les autres 40%.
II va falloir faire, au fond, un retour à l'imagination et
revenir à un encouragement à des entreprises artisanales, au
départ, en tout cas, quitte à ce qu'elles deviennent plus
importantes après cela, mais il va falloir qu'on n'hésite pas,
à mon avis, à faire des expériences pilotes dans ce
secteur pour vraiment vérifier s'il y a place dans cette jungle
car cela en est une des kiosques à journaux où c'est
là que cela se passe, pour une percée des produits
québécois et des entreprises québécoises.
J'ai terminé, M. le ministre.
M. Vaugeois: M. le Président, me permettriez-vous de
commenter très rapidement ce que vient de dire mon collègue de
Mercier?
Le Président (M. Jolivet): Vous en avez tout le loisir, M.
le ministre.
Mme Lavoie-Roux: II est généreux, vous avez tout le
loisir de traverser du côté de l'Opposition.
Le Président (M. Jolivet): Dans la défense de ses
crédits, le ministre a tout le temps voulu, selon le
règlement.
M. Vaugeois: Je pense qu'il ne sera pas nécessaire de
changer de côté de table. Vous pouvez vous sentir tout à
fait confortable de ce côté-ci, parce que j'allais souscrire
entièrement à ce que vous venez de dire, M. le
député, avec quelques petites précisions.
Une de mes préoccupations des premières semaines a
été de demander au service concerné une réflexion
sur les normes d'agrément. Assez bizarrement, après avoir
agréé beaucoup de librairies, on entrait dans une phase de
"désagréement", si je puis m'exprimer ainsi, parce qu'il y a des
librairies qui ne pouvaient plus supporter les exigences de la loi ou des
règlements pour toutes sortes de raisons techniques: il n'y avait pas
tel catalogue exigé par le règlement, il n'y avait pas telle
quantité d'ouvrages neufs de telle sorte, etc. J'essaie actuellement de
laisser délibérément traîner un certain nombre de
dossiers, parce que je trouvais cela vraiment invraisemblable qu'on amorce une
opération de "désagrément", parce que nos normes sont
peut-être un peu rigides ou pas suffisamment adaptées à la
réalité de toutes les sortes de librairie dont nous avons
besoin.
J'ai déjà entendu le plaidoyer du député de
Mercier pour les postes de vente qu'il a mentionmés et qu'il
connaît bien pour avoir profité des services d'un distributeur
dont l'essentiel du travail se faisait, justement, dans les quelque mille
postes de vente que le Québec peut compter. Il a fait allusion
également au genre de livre qui entre dans ces postes de vente. Nous
étudions actuellement un projet de collection de livres de poche qui
pourrait réunir plusieurs éditeurs. Actuellement, plusieurs
éditeurs québécois ont eu des expériences plus ou
moins réussies du côté du livre de poche. Je ne les
nommerai pas aujourd'hui. Un le fait avec relativement de succès, parce
qu'il joue toujours sur des titres sûrs qui, généralement,
ont fait l'objet d'inscription sur des listes d'ouvrages agréés
par le ministère de l'Education. C'est à peu près le seul
qui s'en tire honorablement. A mon avis, une collection de livres de poche
devrait être beaucoup plus large que de retenir les titres d'ouvrages qui
sont sur des listes de manuels ou d'ouvrages approuvés par le
ministère de l'Education.
Nous devrons arriver avec des propositions assez alléchantes pour
que tous les éditeurs acceptent de mettre dans ce fonds commun de livres
de poche québécois leurs meilleurs titres, un peu comme cela se
pratique maintenant en Europe, parce que le problème du prix des livres
est au moins atlantique. C'est un problème que tous les pays du monde
atlantique ont actuellement. Je dirai sur cela que le livre n'est pas plus cher
que le reste, mais comme c'est un produit plus de luxe que la nourriture
terrestre, c'est peut-être ce qu'or met de côté quand on est
un peu serré.
Pour compenser, les éditeurs européens ont
développé beaucoup de collections de livres de poche. Ici,
malheureusement, nos éditeurs n'ont souvent pas la taille qui leur
permettrait, individuellement et séparément, de faire ce travail.
Nous voulons leur proposer une collection commune, peut-être par une
approche coopérative, qui permettrait une large diffusion dans les
postes de vente aussi simples que le kiosque à journaux ou la tabagie et
qui permettrait également un effort d'exportation. Si on pouvait
travailler à un fonds de livres de poche québécois de cent
titres, par exemple, on pourrait faire des progrès intéressants,
en Europe en particulier.
Pour l'instant, d'avoir douze titres à un endroit, trois titres
à l'autre, 22 titres à l'autre, il n'y a pas moyen de travailler,
et nos efforts sur l'exportation ont toujours été assez modestes,
à l'exception d'une maison, les Editions de l'homme, qui, parce qu'elle
a un fonds populaire et de grande vente, a réussi des opérations
intéressantes en Europe. Nous avons donc ce genre de
préoccupation.
Le député a également souligné, et j'aime
insister là-dessus, la contribution que les imprimeurs ont
apportée. On ne le dira jamais assez, ceux qui ont fait le plus pour
l'édition au Québec, finalement, ce sont les imprimeurs. Et sans
le dire vraiment! En supportant simplement des comptes importants, ils ont
permis à des éditeurs de vivre. Tous les éditeurs que je
connais doivent toujours beaucoup d'argent, mais ils ont tout simplement la
pratique suivante: Lorsqu'un imprimeur commence à se faire tirer
l'oreille pour imprimer un nouveau titre, ils vont voir un autre imprimeur.
C'est la loyauté que les éditeurs sont forcés de
manifester à l'endroit des imprimeurs. Je pense que cela est anormal et,
effectivement, la SDI a mis bien du mal à s'ajuster au domaine du livre
avec la Loi du prêt garanti. J'étais de ceux, d'ailleurs, qui
n'ont jamais accepté la pratique du taux d'intérêt
bancaire. J'ai toujours prétendu que c'est un taux
d'intérêt qui était prohibitif; je me suis toujours tenu
loin de cela et j'ai recommandé à mes collègues
d'éviter systématiquement com-
me la peste ce genre d'opération. C'est la meilleure façon
de mettre les éditeurs sur la paille. Les imprimeurs, eux, ont
supporté les éditeurs sans intérêt. Je n'ai jamais
vu un imprimeur exiger de l'intérêt sur... sauf peut-être
dans certains cas d'abus incidents, mais c'était vraiment
l'exception.
Il y a, à partir de ce que vient de dire le député
de Mercier, une réflexion qui me vient à l'esprit. Une des
grandes lacunes de la loi du livre, de la politique du livre, dont nous
héritons, vient de la liberté et dans son mauvais sens, de la
liberté abusive qui a été laissée aux
distributeurs. Vous savez sans doute que notre politique actuelle du livre
établit que le libraire vend avec une remise officielle à
l'institution subventionnée, et que le prix du livre importé est
fixé sur la tabelle pratiquée par le distributeur. Or, les
distributeurs, à mon avis, n'ont pas généralement
abusé, sauf qu'ils sont allés chercher la marge nécessaire
pour faire une promotion très poussée, ce qui leur a donné
la marge nécessaire par exemple, pour annoncer largement dans nos
journaux, faire même des je m'excuse de nouveau des "spots"
publicitaires à la télévision, ce que peu de nos
éditeurs ne peuvent faire parce qu'ils ne contrôlent pas une marge
suffisante.
Je pense que nous touchons une lacune grave de notre politique du livre,
et c'est un aspect qui nous préoccupe, non pas de réglementer en
terme de tabelle unique et obligatoire, mais d'intervenir pour donner au moins
des chances égales à l'éditeur québécois
afin qu'il puisse également trouver quelque part une marge de profit qui
lui permettrait de concurrencer l'avantage qui est ainsi donné aux
éditeurs français. Nous avons, d'ailleurs, mis au point au
ministère un programme d'aide à la promotion qui essaie de
permettre à l'éditeur québécois d'y aller à
arme un peu moins inégale par rapport à son collègue
français. C'est un programme qui en est un peu à ses
balbutiements, mais je pense qu'il est essentiel, parce qu'il faut vraiment
donner à l'éditeur québécois les moyens d'annoncer
ses livres et de faire parler de ses livres.
Vous savez comment cela se présente, les grosses maisons
françaises je n'ai rien contre mais à cause de la
marge qu'on leur laisse, en toute liberté, établir au niveau de
la distribution, peuvent se payer des représentants qui parcourent le
Québec, qui font les librairies, qui font les postes de vente à
la semaine longue, à l'année longue. Ils ont plusieurs
représentants, souvent de très haut niveau, de grande
qualité qui lorsqu'un auteur étranger est présent au
Québec, vont prendre contact avec les media, la
télévision, la radio, les media d'information en
général, pour leur dire: L'auteur un tel est au Québec,
voulez-vous faire une entrevue, etc.
Quelquefois, on se scandalise de voir beaucoup d'auteurs
étrangers invités à nos postes de radio et de
télévision et prendre une place importante dans nos journaux. La
faute n'est pas vraiment aux journalistes à ce moment. En fait, les
maisons d'édition québécoises n'ont pas ce genre de moyens
et jouent à armes inégales, et la personne qui s'occupe de telle
émission de télévision s'est fait proposer un auteur par
la maison française et nous, nous n'avons pas les moyens, ici, comme
éditeurs québécois, d'arriver avec le même
personnel, si vous voulez. Il y a donc une intervention de notre part qui est
nécessaire, et cela me fait plaisir de vous indiquer que, dans les
efforts que fait le ministère actuellement, il y a un petit programme
qui pourrait compenser.
Je dois dire aussi que le Conseil des arts du Canada, qui a fait des
efforts remarquables dans le domaine de l'édition au cours des
dernières années, avait également reconnu ce
problème, il a toujours, je crois, un programme qui l'amène
à rembourser une partie des frais engagés par les éditeurs
dans la publicité. Il faut jouer à ce niveau. Autrement, en
parcourant le Devoir, le samedi, vous voyez 90% des espaces occupés par
la promotion de livres étrangers. Nous n'avons rien contre ces livres,
une bonne partie des livres que je lis sont de la production
étrangère, mais nos éditeurs doivent avoir la
possibilité d'arriver avec un espace publicitaire équivalent. (17
h 15)
Mme Lavoie-Roux: Puisque vous faites référence
à la question des maisons d'édition étrangères,
j'aurais une question précise à vous poser. Est-ce que votre
ministère s'est intéressé, peut-être pas
directement, mais au moins indirectement à la transaction entre Hachette
et la librairie Dussault? A ce moment-là, il y avait eu des rumeurs
à l'effet que, finalement, c'était Hachette qui, une fois de
plus, prenait le contrôle d'une autre librairie, une maison
d'édition québécoise.
Je pense qu'il serait peut-être de l'intérêt de tous
de savoir exactement ce qui s'est passé. J'imagine que le
ministère a dû s'intéresser à cette transaction qui
s'est faite il doit y avoir six à huit mois.
M. Vaugeois: Cela s'est donc fait avant que je n'arrive au
ministère. Je l'ai suivie, un peu comme tout le monde. Vous connaissez
la situation maintenant. Vous faites face à un réseau de
librairies très important qui réunit deux types de librairies:
des librairies de grandes surfaces, de centre d'achats, qui viennent surtout du
réseau Garneau, et des librairies surtout tournées vers le
marché scolaire, qui viennent du réseau Dussault et actuellement,
nous sommes entrés dans les détails...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que la majorité est
restée...?
M. Vaugeois: La majorité est restée entre les mains
de...
Mme Lavoie-Roux: Des Québécois?
M. Vaugeois:... de la librairie Dussault, j'allais dire de
André Dussault, mais en fait, il y a des associés dans la
librairie Dussault. La librairie Dussault est majoritaire, selon les exigences
de la loi actuelle. Donc, on s'est conformé à nos exigences
actuelles, et si le gouvernement veut revenir sur la
propriété, ce que les gouvernements
précédents n'ont jamais osé faire je le dis sans
malice, vous connaissez très bien le dossier, je crois... Si nous en
arrivons à des mesures de cette nature, il devra y avoir, je pense, une
période d'adaptation qui ménagera les intérêts
privés qui sont engagés là-dedans, lesquels sont
importants.
J'ajouterai à cela que l'existence d'un réseau de la force
du réseau Garneau-Dussault n'a pas que des effets regrettables. Un des
problèmes auxquels nous faisons face c'est la faible présence du
livre francophone dans les grandes surfaces et dans les centres d'achat.
Il est bien connu que dans la région de Montréal, en
particulier, il est difficile pour le petit entrepreneur
québécois de rencontrer les exigences, les conditions qui sont
posées par les locateurs des surfaces dans les centres d'achat, à
ce point que les espaces, de plus en plus, étaient occupés par
des maisons que je ne nommerai pas, mais que vous connaissez; elles sont
partout maintenant, elles ont vingt à trente librairies
différentes.
Or, Garneau-Dussault était le seul à pouvoir accepter les
conditions de bail de la Place Desjardins, cela va aussi loin que cela. Pour
nous, c'est important qu'un réseau semblable existe pour la promotion du
livre de langue française et puisse, de temps en temps, contrer une
offensive, parce que l'autre véhicule surtout des livres anglais, ces
autres réseaux, dont trois en particulier, sont très
présents dans la région montréalaise.
Vous connaissez aussi des mésaventures. La SDI a
été, à mon avis, coupable dans les retards mis à
intervenir dans le cas du réseau Daignault Plus Scorpion; vous avez eu
une maison plus ou moins étrangère qui a
récupéré cinq ou six bons postes de vente. Là le
problème c'est que le livre français est présent, mais le
livre québécois est moins présent.
Notre objectif est, qu'en même temps que nous faisons en sorte de
soutenir la force d'un tel réseau, nous puissions revenir effectivement,
à l'esprit de la politique du livre, laquelle, à son origine,
souhaitait de vrais libraires individuels à vocation culturelle sur le
territoire. Un des défauts de la politique du livre a été,
finalement, d'amener des gens à développer des réseaux, et
le réseau, à mon avis, n'a pas la fonction, en régions,
qu'aura la librairie individuelle. Nos ajustements politiques vont en tenir
compte. Nous allons revenir à des éléments de politique
qui vont favoriser la présence de la librairie bien
personnalisée.
On n'invente rien, vous savez. En France, c'est comme cela, il n'y a pas
vraiment de réseaux de librairies, les librairies sont très
identifiées au milieu, très personnalisées et cela va avec
le type de commerce en question.
L'autre chose, c'est ce dont a parlé éloquem-ment le
député de Mercier, c'est-à-dire être conscient de
l'importance que représente... Il faut aller chercher de nouveaux
lecteurs pour un certain type de livres...
M. Lavoie-Roux: Une organisation entre les...
M. Vaugeois: Oui. Le kiosque et le point de vente rapide.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais poser au
ministre une question, qui découle un peu de la discussion des toutes
dernières minutes et je ne veux pas en faire un drame, mais le ministre
a peut-être pris connaissance de l'intention d'un auteur bien connu au
Canada, M. Pierre Burton, de provoquer un incident au Québec.
Selon l'interprétation que donne M. Burton à la loi 101,
il serait défendu à une librairie, au Québec, d'annoncer,
en anglais, un livre écrit en langue anglaise. Egalement, a-t-il dit:
"Si je veux venir au Québec signer des autographes, si je suis
invité à le faire, il serait défendu à la librairie
d'annoncer, en anglais, ma venue". J'aimerais savoir du ministre si c'est la
façon dont son ministère interprète la loi en question?
Dans les rapports du ministère avec les librairies, est-ce que le
gouvernement a effectivement l'intention d'appliquer la loi de cette
façon et jusqu'à ce point?
M. Vaugeois: Cela m'étonnerait que le problème se
pose à notre niveau; je ne vois pas comment il pourrait nous parvenir
parce que le genre de librairie en question, généralement, ne
traite pas avec nous, mais encore que je serais assez embarrassé...
M. Godin: Je me suis informé, j'ai une lettre de mes
ex-collègues de l'Association des éditeurs canadiens de Toronto.
La loi dit que la publicité doit être en français, la loi
dit ce que la librairie doit faire, mais la loi ne dit pas: La publicité
ne doit pas être en anglais ou en toute autre langue. Par
conséquent, une librairie comme Classic, par exemple, sur
Sainte-Catherine, doit avoir de la publicité en français dans sa
librairie, mais il n'y a aucune interdiction à ce qu'il y ait de la
publicité en anglais.
M. Goldbloom: M. le Président, je reconnais que...
M. Godin: C'est l'interprétation, du moins, que certaines
personnes consultées verbalement, m'ont donnée. Maintenant, cela
peut effectivement créer des problèmes si jamais il y avait une
plainte portée contre le fait qu'il y aurait tant d'affiches anglaises
par rapport aux affiches françaises. Effectivement, peut-être que
des éclaircissements seraient utiles du côté de l'Office de
la langue française; on pourrait lui demander quelle serait son attitude
face à une telle situation.
Mme Lavoie-Roux: Cela va soulever une polémique M.
Burton mis à part sur la question de toute la
publicité.
M. Godin: Là et ailleurs. Je connais d'autres cas
où...
M. Vaugeois: Cela peut aller très loin. Je pense à
Rodai qui vend du livre hébreu sur Van Horne. Je ne le vois pas,
à certains moments, pour vendre certains livres, être tenu
à...
M. Goldbloom: Justement, M. le Président. Je remercie, par
votre intermédiaire, le député de Mercier de
l'éclaircissement qu'il a donné, tout en reconnaissant, comme
lui, que ce n'est pas absolument un avis juridique qu'il vient de nous donner
mais...
M. Godin: Je peux vous dire, entre parenthèses, en
réponse à cette lettre, que j'aurai plus de renseignements
à fournir à mes ex-collègues et je vous donnerai copie de
la lettre que je leur enverrai, si vous voulez.
M. Goldbloom: Je remercie le député parce que,
comme vous le savez, M. le Président, il y a beaucoup de
Québécois des deux langues, et de toutes les origines, qui
cherchent à vivre ensemble et à éviter les
polémiques inutiles. C'était surtout dans ce sens que j'ai
soulevé la question.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que c'est un soutien à la
culture, qu'elle soit de langue anglaise ou de langue française. Tant et
aussi longtemps que l'on reconnaît qu'il y a des citoyens de langue
anglaise, je pense qu'ils ont droit, eux aussi... Quoiqu'ils aient
peut-être un peu moins de rattrapage à faire, mais en tout
cas.
M. Goldbloom: Comme vient de le dire le ministre, il y a d'autres
groupements aussi qui peuvent être identifiés. Cet
après-midi, en Chambre, nous avons parlé de la communauté
italienne qui dépasse maintenant 300 000 âmes et qu'il y ait une
annonce en italien, d'un livre écrit en italien, cela...
M. Vaugeois: Et non disponible en français.
M. Goldbloom: C'est cela. Cela ne devrait pas scandaliser qui que
ce soit, à mon sens.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres
questions sur l'élément 1?
M. Le Moignan: Oui. Le ministre a mentionné le Conseil des
arts du Canada en termes très élo-gieux. Est-ce que le Conseil
des arts du Canada serait disposé à faire des cadeaux au
gouvernement du Québec pour nous aider dans ce domaine des
bibliothèques?
M. Vaugeois: Des bibliothèques? Je ne crois pas. Il
n'intervient pas. Le Conseil des arts du Canada intervient dans l'aide à
l'édition.
M. Le Moignan: Indirectement.
M. Vaugeois: Remarquez que cela pose d'autres sortes de
problèmes. Je veux bien être élogieux et gentil pour le
Conseil des arts du Canada mais il reste que, là aussi, la coordination
est difficile. A certains moments, on se retrouve avec toutes sortes de
problèmes. Nous y reviendrons tout à l'heure avec les grandes
éditions, ou c'est peut-être le temps d'en parler. Le Conseil des
arts a subventionné certains projets, des grands travaux
d'édition et, tout d'un coup, pour des raisons x, il se sort du portrait
et laisse en plan des équipes. Ce fut le cas pour le Dictionnaire des
oeuvres du Québec; nous avons été obligés de venir
à leur rescousse. Ils avaient eu les moyens de démarrer et tout
à coup ils n'avaient plus les moyens de continuer. Il y a toutes sortes
de problèmes qui se posent.
Au total, je reconnais que l'activité du Conseil des arts, depuis
six ou sept ans, dans le domaine de l'édition au Québec, a
été bénéfique. Je tiens même à ajouter
qu'elle s'est faite sans jugement porté sur les orientations politiques
des maisons d'édition.
M. Le Moignan: J'aurais une autre question, M. le ministre.
Si je compare les chiffres de l'Ontario par rapport à ceux du
Québec, on a beaucoup de rattrapage à faire pour essayer de les
rejoindre.
M. Vaugeois: Je suis content que vous posiez la question, M. le
député. Je connaissais la réponse. On pose
généralement les questions dont on connaît les
réponses. Au cas où la discussion viendrait sur cela, je voulais
être prêt à faire la comparaison. Ce n'est pas plus
reluisant que cela. Mais, ces derniers temps, le ministère a
amorcé un rattrapage remarquable du côté des
bibliothèques publiques.
Le Président (M. Jolivet): On vous le promet, on passe
à l'élément 2.
Toujours sur l'élément 1, cependant, Mme le
député de L'Acadie a une question.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais demander ceci au ministre: En
novembre 1977, le ministère des Affaires culturelles a signé des
contrats pour la réalisation d'un magazine d'actualités
culturelles avec M. Jean-Eudes Landry et M. Michel Pelletier. Est-ce que ce
magazine a été publié? Il semble que non.
M. Vaugeois: Je vais vous répondre à cela. Je vais
en profiter d'abord pour répondre à des questions qui ont
été posées ce matin et sur lesquelles je n'ai pas
été très explicite. On me confirme qu'il n'y a pas eu de
fonctionnaires permanents congédiés au ministère en
1977/78.
Mme Lavoie-Roux: J'ai eu les chiffres depuis ce temps, et il y en
a trois.
M. Vaugeois: Pour ne rien vous cacher, il y en a au moins deux
qui ont été suspendus.
Mme Lavoie-Roux: Oui, peut-être.
M. Vaugeois: A moins que vous n'insistiez, j'aimerais mieux ne
pas donner les noms publiquement.
Mme Lavoie-Roux: Non.
M. Vaugeois: Mais il y a un cas qui s'est réglé, ou
qui se règle actuellement hors cour; l'autre qui fait l'objet d'une
démarche devant un tribunal, je ne sais pas lequel. Quant aux postes par
intérim cela préoccupait le député de
Gaspé dans l'effectif interne du ministère, il semble bien
on a beau chercher qu'il n'y a pas de poste qui soit entre les
mains d'un intérimaire. Il y a une couple de postes vacants pour
lesquels il y a des concours très avancés; les jurys ont eu lieu.
Dans les conservatoires, il y a un certain nombre de responsabilités
assumées de façon intérimaire, c'est le seul endroit.
D'ailleurs, c'est là qu'on a un peu de problèmes d'ajustement de
personnel actuellement.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse, M. le ministre, ce n'est pas pour
vous contredire, ce ne sera pas une grosse contradiction...
M. Vaugeois: Vous en avez trois.
Mme Lavoie-Roux: ... ceci est dans une réponse qui avait
été donnée au député de Rouyn-Noranda qui
avait fait inscrire une question au feuilleton de l'Assemblée nationale,
et les chiffres que j'ai démontrent qu'il y avait eu trois personnes
congédiées au ministère des Affaires culturelles. Les
autres chiffres ont moins d'intérêt, mais il y avait eu trois
personnes congédiées et non pas suspendues.
M. Vaugeois: Au cours de 1977/78.
Mme Lavoie-Roux: Du 25 novembre 1976 au 31 mars 1977.
M. Vaugeois: Au 25 novembre 1976, on change d'année; c'est
la raison pour laquelle cela ne coïncide peut-être pas. Voulez-vous
qu'on creuse cela, madame?
Mme Lavoie-Roux: J'espère que vous les congédiez
pour de bonnes raisons. C'est ma seule inquiétude. Le reste...
M. Vaugeois: Vous savez, c'est plus difficile de congédier
un fonctionnaire que d'en engager un.
Mme Lavoie-Roux: D'une certaine façon oui.
M. Vaugeois: De plusieurs façons.
Mme Lavoie-Roux: Mais parfois les motifs invoqués... je
n'ai pas de raison de croire que les motifs n'étaient pas bons. Je vous
pose la question parce que je pense qu'il faut toujours se soucier que justice
soit faite à chacun. C'est dans ce sens.
M. Vaugeois: On n'insiste pas là-dessus?
Mme Lavoie-Roux: Non, si vous dormez en paix avec votre
conscience, tant mieux!
M. Vaugeois: Depuis que je suis là, je n'ai pas eu
d'exemple et je n'ai pas encore eu envie de congédier personne.
Mme Lavoie-Roux: C'est rassurant pour ceux qui sont encore
là. (17 h 30)
M. Vaugeois: Par ailleurs, sur la question que vous aviez
posée pour la revue, c'est un projet de revue qui s'appelle "Espace",
sur lequel on a attiré mon attention à mon arrivée au
ministère, et vous le comprendrez, sur tout ce qui m'a été
proposé j'ai eu le réflexe de poser des questions et parfois de
faire des consultations. Or, sur le magazine Espace, mes consultations m'ont
amené, entre autres, à entrer en contact avec des
représentants des conseils régionaux de la culture qui ont
manifesté d'importantes réserves sur ce projet. Ils ont
allégué qu'ils souhaitaient peut-être animer
eux-mêmes leur propre publication et on invoquait la possibilité
que ce soit une publication interrégionale. De toute façon, ces
consultations ont ajouté aux hésitations des services
concernés à l'intérieur même du ministère
où il y avait deux tendances face à ce projet de magazine
culturel.
Vous savez sans doute que le ministère a déjà fait
une expérience d'un magazine culturel, de bonne qualité
d'ailleurs Culture vivante a existé pendant plusieurs années; il
état de très bonne qualité, mais avait été
critiqué dans le milieu. Des gens disaient: Qu'ils nous donnent l'argent
pour faire ce genre de magazine et on va le faire, cela ne doit pas venir du
gouvernement. Le projet Espace était différent mais
l'unanimité n'était pas faite à l'intérieur du
ministère et encore moins dans le milieu. Pour l'instant, nous en sommes
à une réflexion sur ce projet.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y a eu des contrats accordés
aux deux personnes que j'ai nommées? Alors comment allez-vous vous en
tirer s'il y a eu des contrats d'accordés?
M. Vaugeois: On me dit que les deux personnes ont
été engagées pour travailler sur le projet, non pas sur la
réalisation, Elles peuvent toujours travailler sur le projet, cela ne
veut pas dire qu'on accepte tous les projets qui nous sont soumis.
Mme Lavoie-Roux: De quel montant s'agissait-il?
M. Vaugeois: Je ne le sais pas. Voyez-vous, de toute
façon, on va y revenir dans le programmes.
Mme Lavoie-Roux: Si vous me répondez, je n'y reviendrai
pas au programme 3.
M. Vaugeois: D'accord. Donnez-nous du temps, quand j'aurai la
réponse, je vous la donnerai. Mais là-dessus, vous savez, je vous
parlais de Parc Canada, vendredi, qui m'a montré cinq projets de mise en
valeur du site des Vieilles Forges et c'est le cinquième actuellement
qui est retenu. Ce ne serait pas étonnant que le ministère fasse
préparer, un, deux, trois projets de magazine culturel avant d'en
choisir un et de s'engager dans un projet. On me dit d'ailleurs que ces gens
ont été engagés comme contractuels, donc ce n'est pas une
firme de l'extérieur à laquelle on aurait donné un contrat
auquel on ne donnerait pas la suite. Ce sont des gens qui ont été
engagés, qui sont payés pour travailler sur le projet. Le pire
qui peut leur arriver c'est qu'on ne donne pas suite à leur proposition
et ils ne perdront rien, si ce n'est le regret de ne pas voir leur proposition
réalisée.
Ce qui est toujours ennuyeux, mais moins coûteux que de faire un
truc qui ne rallierait pas les intéressés.
Mme Lavoie-Roux: Une dernière question qui est une
question d'usage...
M. Vaugeois: Vous en avez plusieurs dernières.
Mme Lavoie-Roux: ... pour un membre de l'Opposition
officielle.
M. Godin: Antépénultième.
Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas une lectrice assidue des journaux
du Parti québécois, mais...
M. Godin: II ne faut pas dire cela. On vous a vu plusieurs fois
dire cela.
Mme Lavoie-Roux: ... il y a ici une annonce qui provient du
ministère des Affaires culturelles. Direction générale des
arts et lettres: Livrez-vous à la lecture. C'est tout à fait bien
et on annonce tel ou tel livre, "Un pays à bâtir", L'avion
à la conquête de la Côte-Nord", "Le développement du
langage", "Elément de métrologie ", Venez bouquiner à la
librairie Laliberté, Sainte-Foy. Est-ce que cela vous apparaît
normal que le ministère des Affaires culturelles fasse de la promotion?
Je ne les connais pas, à la librairie Laliberté, ce sont
peut-être des gens...
M. Vaugeois: Moi je les connais.
Mme Lavoie-Roux: ... mais ceci a sans doute été
payé par le ministre des Affaires culturelles pour faire la promotion
d'une librairie en particulier.
M. Vaugeois: Je suis content que vous soyez allée jusqu'au
bout de la question, parce que vous venez de me donner la clé de la
réponse. Ce ne sont pas les services du ministère qui ont pris
ces décisions et qui ont fait les choix. C'est un programme
spécial de notre programme de promotion de la lecture d'il y a deux
mois, à peu près, programme par lequel on remettait de l'argent
aux associations professionnelles, à l'Union des écrivains pour
faire tourner les écrivains au Québec, à l'Association des
éditeurs pour faire des achats et des dons, etc. Il y avait
également dans le programme une proposition faite aux libraires de faire
de la publicité qui serait remboursée en partie par le
ministère.
On n'a pas dit au libraires: Annoncez dans tel genre de journal ou dans
tel genre de poste de radio; les libraires avaient le choix des media où
ils voulaient annoncer et je pense qu'on n'a pas porté de jugement sur
les media choisis par les libraires et nous les avons remboursés. Ce
n'étaient pas des grosses sommes, mais est-ce à peu près
ce qui est arrivé pour l'administration du programme au niveau du
libraire? C'est le libraire qui faisait le choix, et on lui suggérait de
faire cela justement dans des journaux régionaux, étant entendu
que nous faisions l'effort au niveau...
Mme Lavoie-Roux: Vous appelez cela un journal
régional!
M. Vaugeois: Oui, parce que ce doit être local à
Québec? De Louis-Hébert. C'est même local, dans ce
cas-là, madame.
M. Le Moignan: Vous l'avez envoyé au Temps aussi?
M. Vaugeois: Pardon?
M. Le Moignan: Vous ne l'avez pas envoyé au Temps? Le
Temps, de l'Union Nationale? Vous n'avez pas reçu... On accepterait des
annonces comme celles-là.
M. Vaugeois: Ce serait aux libraires à décider
d'annoncer dans le Temps.
Cela vous donne une idée, d'ailleurs, sur l'attitude
générale du ministère. Beaucoup de programmes...
D'ailleurs... Nos budgets de transfert pour revenir à des
questions posées ce matin sont maintenus; ce sont les budgets de
fonctionnement et de capital qui ont eu certains resserrements. Le budget de
transfert reste important et, le plus souvent, ils font confiance aux
intéressés.
Mme Lavoie-Roux: Je trouve quand même un peu surprenant
que...
M. Vaugeois: Auriez-vous voulu qu'on dise au libraire...
Mme Lavoie-Roux: ... ce soit fait dans des journaux partisans et
politiques. La même chose serait arrivée dans un journal
libéral cela me semble être un journal d'association de
comté, si je ne m'abuse.
M. Vaugeois: C'est possible. Une Voix: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Bon. Je ne suis pas sûre qu'au point de
vue éthique, cela m'apparaisse tout à fait correct. Qu'on le
fasse dans tous les journaux régionaux mais qui ne sont pas à
caractère partisan politique, cela me semblerait
préférable. Cela pourrait peut-être être une des
conditions ou, enfin, des exigences que vous ayez. Parce que, dans le fond,
vous subventionnez à même le ministère les journaux de
politique partisane.
M. Vaugeois: Mais, est-ce que vous allez jusqu'à nous
demander, dans un programme comme celui-là, d'exclure une
publicité dans tout journal qui serait partisan?
Mme Lavoie-Roux: Quand c'est un journal d'association de
comté...
M. Vaugeois: Ecoutez, dites-le et j'en prendrai note.
Mme Lavoie-Roux: Au point de vue de l'éthique, cela me
semble demandez à vos gens de réfléchir à
cela un peu de mauvais goût, disons.
M. Vaugeois: J'en prends bonne note et je vous dis, encore une
fois, que je connais bien ce programme; je l'ai vu mettre en application.
Mme Lavoie-Roux: Votre initiative est bonne mais je ne suis pas
sûre...
M. Vaugeois: Nous avons laissé la liberté au
libraire d'annoncer où il voulait et nous avons convenu avec lui qu'on
rembourserait une partie des frais qu'il encourrait dans la publicité,
dans le cadre de notre politique de la lecture. D'ailleurs, la réponse
n'a pas été plus forte que cela.
Ce que j'aimerais savoir, c'est: Est-ce que ce libraire a l'habitude
d'annoncer lui-même, de toute façon, à ses frais, dans ce
genre de journal? Je pense qu'il serait intéressant de le savoir.
Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas contre le fait que vous
subventionniez des librairies dans le sens que vous venez d'en parler mais je
pense que cela ne doit pas, indirectement, servir à soutenir les
journaux qui sont vraiment d'un parti politique.
M. Alfred: M. le Président, je pense que le libraire en
paie la moitié.
Mme Lavoie-Roux: Oui mais, peu importe, cela m'est
égal.
M. Alfred: II paie la moitié. Est-ce qu'on peut lui
demander de publier cela ailleurs?
Mme Lavoie-Roux: II doit y en avoir un autre journal, dans
Louis-Hébert, un journal régional? Je ne le connais pas
mais...
Une Voix: Le Rond-Point.
Mme Lavoie-Roux: ... le Rond-Point, ou le Carrefour.
M. Alfred: Et si cela me plaît, à moi, de publier
dans ce journal?
Mme Lavoie-Roux: II aurait pu annoncer dans le Carrefour.
M. Vaugeois: On m'apporte une précision qui n'est pas
négligeable. Nous avions une subvention globale à l'Association
des libraires; c'est l'Association des libraires qui a géré le
programme avec ses membres ou avec les libraires intéressés
à participer au programme. Il aurait donc fallu, nous-mêmes, dire
à l'Association des libraires: Dans la publicité que vous ferez,
demandez à vos membres d'éviter autant que possible, ou
d'éviter totalement de faire de la publicité dans des journaux
qui auraient une allure partisane.
C'est le genre de chose qu'on peut faire, d'ailleurs. Je prends bonne
note de votre réaction à cet égard mais je tiens à
bien indiquer que les fonctionnaires, là-dessus, ne sont vraiment pas
responsables; ils ont fait, comme d'habitude, confiance à l'association
professionnelle concernée.
M. Goldbloom: M. le Président, on pourra demander au
ministre de consulter ses six collègues qui étaient là
pendant le dernier mandat gouvernemental, pour leur demander surtout ce qu'ils
auraient dit pendant que les rôles étaient intervertis.
M. Vaugeois: Je vais faire cette consultation, M. le
député.
Le Président (M. Jolivet): L'élément 1 du
programme 1 est-il adopté?
Mme Lavoie-Roux: Oui. M. Le Moignan: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Elément 2.
Développement d'un réseau de
bibliothèques publiques
M. Vaugeois: Je pense qu'on a largement, déjà,
abordé la question de l'élément 2. Je le résume:
L'objectif général est de doter toutes les régions et
toutes les municipalités urbaines du Québec d'un service public
et gratuit de lecture. Ce programme passe par une intervention au niveau des
bibliothèques municipales; nous avons, dans nos crédits, cette
année, des sommes importantes, avec une augmentation de 122%, pour la
création de nouvelles bibliothèques et nous pensons, par ce
biais, aider environ seize municipalités actuellement dépourvues
de bibliothèque à en créer une au cours de 1978/79, ce qui
touchera environ 250 000 habitants.
Nous avons également, dans cet élément de
programme, une aide financière aux bibliothèques existantes qui
sera de l'ordre de $4 542 000. C'est un programme qui existe déjà
depuis quatre années et qui comporte, comme je l'expliquais tout
à l'heure, des mesures incitatives à l'égard des
municipalités qui, pour se prévaloir de l'aide financière
du MAC, doivent également faire leur large part puisqu'elles sont
invitées à assumer à peu près 70% des
coûts.
Egalement, nous avons des sommes d'argent qui sont susceptibles de
favoriser des activités d'animation dans les bibliothèques et
d'acquisition d'ouvrages. Le programme comprend en outre un effort dans le sens
des BCP, et il est prévu la création d'une huitième BCP et
un soutien à deux BCP qui sont en train de naître et de se
développer: une dans L'Estrie et l'autre dans la région de
Québec qui ont été créés au cours de
1977-78.
Aussi, il y a une aide au fonctionnement des cinq BCP qui existent
déjà.
Nous essaierons d'améliorer leurs critères de
fonctionnement et de subvention, que je vous résume: Leur assurer un
développement régulier et rationnel tout en tenant compte des
capacités budgétaires du principal pourvoyeur de fonds, le
ministère des Affaires culturelles; leur garantir un équilibre
entre leurs revenus et leurs dépenses; résoudre le
problème des déficits accumulés, pour celles qui en ont;
assurer la diffusion du livre québécois par les BCP qui devront,
désormais, acheter un minimum de 300 titres québécois par
année; favoriser la mise en commun de certaines de leurs ressources et,
du fait même, concerter leurs actions entre elles et avec le
ministère; aussi, un effort particulier sera fait pour que le nombre de
municipalités rurales affiliées au BCP augmente sensiblement
d'année en année.
En conclusion, on peut constater que les deux
sous-éléments de l'élément 2 de ce programme
comprennent des mesures aux objectifs convergents: Stimuler la création
et l'édition à prix raisonnable, d'une part, et rendre
accessibles ces produits culturels dans des services publics et gratuits de
bibliothèque, d'autre part.
Je pense que nous avons largement abordé, déjà, la
question des bibliothèques dans notre première discussion. Je
vous ai remis un document qui, pour moi en tout cas, m'avait donné
beaucoup de satisfaction, qui montre l'effort fait, qui montre aussi que nous
sommes loin d'avoir atteint un niveau qui pourrait nous amener à
l'autosatisfaction totale mais le travail amorcé est important.
Je profite de l'occasion pour rendre un hommage tout particulier au
travail qui se fait au ministère. C'est un service bien oganisé,
entre les mains de gens responsables, qui est extrêmement dynamique et
qui a su mettre au point des programmes qui provoquent de bonnes
réponses du milieu. Le rattrapage à faire est important; l'effort
fourni est de taille et en proportion du défi.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Deux questions. Parfois, j'en trouve une
troisième après mais, pour le moment, deux dont la
première, qui ne- vous concerne peut-être pas directement mais que
je voudrais quand même soumettre à votre attention, est celle de
la Bibliothèque de la Législature, ici, à
l'Assemblée nationale. Apparemment, compte tenu du fait qu'on doive en
utiliser une partie pour ranger les équipements de la
télédiffusion des débats, etc., on songe à la
diviser et à en déménager une partie, par exemple, au
complexe G. Je me demande, à divers points de vue, s'il ne serait pas
sage que cette bibliothèque soit conservée d'une façon
intégrale et non pas dispersée comme on se propose de le faire
à ce moment-ci.
M. Vaugeois: Je vous dirai là-dessus, d'abord c'est
évidemment une bibliothèque...
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas de votre ressort.
M. Vaugeois: ...qui ne me concerne pas comme ministre mais, comme
parlementaire, oui et, comme utilisateur, oui, parce que je fréquente
cette excellente bibliothèque depuis des années et je profite de
ses services. Votre point de vue est intéressant, je pense, et, à
titre de parlementaire, je vais m'intéresser à cette question.
Mais, comme ministre, je ne suis absolument pas concerné. Mais, mon
collègue de Taschereau a peut-être quelque chose...
M. Guay: Je me demandais simplement où pas
où parce que cela ne me regarde pas, mais...
M. Vaugeois: C'est dans votre comté?
M. Guay: Cela va l'être aux prochaines élections,
enfin, si le projet de refonte de la carte se matérialise. Je n'ai
jamais entendu parler, pour ma part, que les équipements de
télévision allaient forcer un déplacement de la
bibliothèque. Si on vide une partie du troisième
étage...
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. (17 h 45)
M. Guay: Ah! bon, c'est ce que vous avez dit. Je croyais que
c'était la partie publique, si l'on veut, de la bibliothèque. Ce
dont il a été question je ne sais pas où c'en est
rendu parce que ces choses-là évoluent au fil des années
c'est que la bibliothèque au complet soit
déménagée dans l'édifice D ou l'édifice E.
C'était dans l'hypothèse où le Parlementaire
lui-même, qui se...
Mme Lavoie-Roux: Cela fait partie du patrimoine; on ne va pas
tout déménager.
M. Guay: Non, dans les édifices parlementaires. C'est dans
l'hypothèse où le Parlementaire lui-même devrait
déménager dans les locaux occupés par la
bibliothèque, et qu'une nouvelle Assemblée nationale serait
aménagée dans la cour intérieure de l'édifice A.
C'est une hypothèse qui est dans
l'air et qui circule depuis bon nombre d'années, tant sous
l'ancien gouvernement que sous l'actuel, étant donné que
l'assemblée actuelle, toute belle qu'elle puisse être, est quand
même fort petite et au fur et à mesure qu'il y aura un
accroissement des députés, il n'y aura pas de place pour les
mettre.
Il en a été question, je ne sais pas où c'en est
rendu. Dans cette hypothèse, les restaurants seraient
déménagés dans les locaux de la bibliothèque et la
bibliothèque serait déménagée dans l'édifice
D ou l'édifice E.
Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, je ne suis pas tellement
d'accord avec le député de Taschereau et j'aimerais avoir une
réaction du ministre; il n'est pas obligé de prendre des
décisions et ce n'est peut-être pas lui qui aura à les
prendre, mais je me demande si la bibliothèque de la législature
ne constitue pas, jusqu'à un certain point, un bien culturel.. De penser
qu'on peut la déménager, comme cela, dans l'édifice D, G,
H ou I, ce n'est pas prendre les choses à la légère?
La bibliothèque de la législature a quand même une
histoire et je vous pose la question, je serais un peu moins à l'aise
que vous pour dire: On la transportera pour s'accommoder le mieux possible. Il
y a bien des choses...
M. Guay: C'est pour que les députés soient à
l'aise.
Mme Lavoie-Roux: Si je vous l'apporte à titre de bien
culturel, il faudra que vous vous en occupiez.
M. Vaugeois: On pourrait toujours étudier la
possibilité de classer, classer la Bibliothèque de la
Législature! Je prends bonne note de votre question. Vous allez trouver
en moi une personne très préoccupée par ce que vous venez
de souligner.
Mme Lavoie-Roux: La deuxième chose, c'est un
problème de l'an dernier, et à ce moment-là, il y avait un
sous-ministre qui avait répondu au nom du ministre. J'avais
apporté le problème de la bibliothèque de la Commission
des écoles catholiques de Montréal, et on avait fait une
suggestion pour que soit créé là, le noyau d'une
bibliothèque pédagogique en France, ils en ont une dont
j'ai oublié le nom et on discutait, à ce moment-là,
la question du Musée des sciences naturelles. J'ai dit: Je vous avertis,
avant que celui-là arrive et qu'on le perde parce que le
Musée s'en allait dans la rivière, quoique vous l'ayez
récupéré depuis ce temps...
M. Vaugeois: Hier soir.
Mme Lavoie-Roux: Sérieusement ou à la blague?
M. Vaugeois: Sérieusement, nous avons reçu, hier
soir, un mémoire intéressant de l'Association des biologistes du
Québec qui, comme il se doit, préconise un Musée
d'histoire naturelle.
Mme Lavoie-Roux: J'en suis fort aise. Sérieusement,
à ce moment-là, on avait dit: Non, cela n'arrivera pas à
cette bibliothèque. Je voyais justement un compte rendu d'une
réunion de la Commission des écoles catholiques de
Montréal qui finance la bibliothèque; c'en est presque risible:
on est allé chercher $10 000 dans tel fonds périmé, $1500
à un autre endroit et on fait cela à la pièce, de mois en
mois et de semaine en semaine, pratiquement. Je voudrais savoir si on avait de
bonnes intentions, si le ministre qui vous a précédé avait
de bonnes intentions, si le problème vous intéresse, et quelle
suite le ministère compte y donner.
M. Vaugeois: C'est un problème, je pense, qui... On m'a
alerté sur cette question. Ce n'était pas nécessaire, je
dois vous dire qu'il y a environ vingt ans, le bibliothécaire
responsable de cette bibliothèque était un de mes bons amis, un
type de Trois-Rivières, comme toujours... Ce n'est pas par hasard, d
ailleurs, qu'il y a autant de gens de Trois-Rivières qui sont dans le
domaine du livre, c'est que nous avons eu, à Trois-Rivières, de
bons libraires qui vendaient des poissons et des oiseaux, nous avons eu aussi
de très bons bibliothécaires qui ont su je suis
sérieux qui ont su développer dans le milieu trifluvien un
goût particulier pour la lecture, l'édition, le travail de
bibliothèque. Ce n'est pas par hasard, par exemple, qu'un Trifluvien est
conservateur à la bibliothèque municipale de Montréal et
qu'un autre Trifluvien joue le même rôle à la
bibliothèque de Québec, ainsi de suite.
C'est là qu'on touche l'importance d'avoir, dans le milieu de
bonnes bibliothèques, de bons bibliothécaires et de bons
libraires. Ceci étant dit...
Mme Lavoie-Roux: II y a eu de bons bibliothécaires
à la CECM aussi.
M. Vaugeois: Nous avons donc eu, également, un responsable
de la bibliothèque de la CECM qui venait de chez nous, Luc-André
Biron. J'avais donc été alerté dès cette
époque.
Mme Lavoie-Roux: Je vois que c'est une image parfaite. Il
était peut-être bon, remarquez bien.
M. Vaugeois: Je pensais, évidemment, à quelqu'un de
Trois-Rivières. Je n'ai pas besoin d'insister, vous devinez qu'il y a
des gens qui continuent, dans le ministère, de bien connaître
cette bibliothèque et de s'en faire les défenseurs.
C'est un problème qui, au départ, ne nous touche pas,
c'est-à-dire qui ne nous concerne pas immédiatement.
Eventuellement, nous pourrions en venir à la rescousse par des
propositions. Nous avons déjà fait des propositions, mais qui
impliqueraient que le fonds qui a été réuni au cours des
ans serait brisé. Et c est cela, c'est contre cette solution que les
gens de la CECM s'opposent et je les comprends.
Mme Lavoie-Roux: A l'extérieur de la CECM.
M. Vaugeois: Oui, vous avez raison, également, et on entre
dans un problème de taille qui ne peut pas se régler, à
mon avis, en dehors du ministère de l'Education, parce que la nature
même de la bibliothèque et la vocation qu'on voudrait lui garder
obligent à traiter avec le ministère de l'Education, et je ne
sais pas s'il y a un groupe de travail, là-dessus actuellement, qui
traite avec l'Education.
M. Cartier va vous fournir quelques explications additionnelles.
Je me permets seulement de vous informer que c'est à la suite de
toute l'action qui a été entreprise pour "sauver cette
bibliothèque". Quand je suis entré au gouvernement du
Québec, j'ai eu des rencontres avec mes collègues, certains de
mes collègues de l'Education, parce que, comme le dit le ministre, c'est
fondamentalement un problème d'abord et avant tout de l'Education. Par
la suite, c'est sûr que le ministère qui s'est impliqué, je
dirais, devrait probablement continuer à s'en préoccuper, mais
pour la partie québécoise de cette collection,
c'est-à-dire la partie la plus riche, je crois qu'il appartiendrait
à la bibliothèque nationale du Québec peut-être
d'absorber cette partie. Mais tout cela de concert avec le ministère de
l'Education. Pour l'instant, il y a eu des rencontres, comme je vous le dis,
entre fonctionnaires, l'Education et le ministère des Affaires
culturelles, mais je ne sais plus, au moment où je vous parle, où
en est le dossier à l'Education.
Mme Lavoie-Roux: Si je le resignale cette année, c'est
à vous autres de prendre les décisions, mais c'est simplement un
peu resonner la cloche d'alarme, parce que, comme dans d'autres domaines
on aura l'occasion de parler de l'orfèvrerie peut-être plus tard
il ne faudrait pas que ceci soit dilapidé, parce que tout le
monde en était conscient mais finalement personne n'a pris le dossier et
ne l'a rendu à bout. C'est vraiment la seule raison de mon intervention,
à ce moment-ci.
M. Vaugeois: J'en prends bonne note, madame.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé, pas de questions?
M. Vaugeois: II y a également le cas de la BN, mais je
pense qu'on vient de toucher indirectement le cas de la BN, qui est
l'élément 3; est-ce qu'on pourrait du même souffle...
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez, madame le
député de L'Acadie.
M. Vaugeois: Cela nous permettrait de terminer à six
heures avec le programme 1, ce qui serait une performance exceptionnelle
grâce à la collaboration des représentants de
l'Opposition.
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas beaucoup de petits journaux à
sortir, vous allez voir. Il avait été question l'an dernier de la
relocalisation de la bibliothèque nationale. Est-ce qu'il y a des
développements de ce côté?
M. Vaugeois: Les développements ont trait aux glissements
de terrain. C'est un problème sur lequel nous travaillons, que nous
étudions, c'est-à-dire avec le ministère des Travaux
publics. Il y a eu des espoirs, à un moment donné, un
édifice rue Saint-Denis qui paraissait libre, l'Institut des
sourds-muets, et je me suis rendu compte qu'il y avait déjà
quelqu'un qui l'avait convoité, qui allait s'y installer. On l'avait
visité. Il reste l'hypothèse du Mont-Saint-Louis, mais vous
connaissez probablement les problèmes de terrain, les coûts assez
inquiétants qu'il faudrait rencontrer juste pour stabiliser le mur; on
en est donc à la recherche d'une solution. Il y a un problème de
localisation de la bibliothèque nationale, de son expansion
actuellement, Son fonctionnement même est un peu gêné par
son installation actuelle.
Je pense que le ministère, là-dessus il faut dire
les choses a fait la preuve qu'il pouvait trouver des solutions à
ce genre de problème; la solution trouvée pour les archives
nationales à Québec le montre bien. Les travaux qui se font
actuellement au Musée du Québec montrent que de bonnes solutions
peuvent être trouvées. Je pense que le troisième
défi que nous avons à ren- contrer, c'est celui de la
bibliothèque nationale. D'ailleurs, cela nous oblige cette année
à avoir des crédits modestes pour la BN puisque, même si on
le voulait, il n'y a pas d'expansion possible, dans le contexte actuel.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que...
M. Vaugeois: C'est quand même une bibliothèque qui
nous fait honneur, grâce à son personnel de qualité,
grâce à une présence de plus en plus grande dans le milieu
par une animation culturelle intéressante, mais son développement
est handicapé par ses installations matérielles. Nous en sommes
bien conscients.
Mme Lavoie-Roux: II y avait eu une suggestion faite, à
savoir que le mât du stade olympique soit utilisé, à la
fois pour le Musée d'art contemporain et...
M. Vaugeois: J'ai vu cela dans les Débats de l'an dernier,
oui.
Mme Lavoie-Roux: ... s'il se construit, cela ne vous sourit
pas.
M. Vaugeois: S'il se construit! Je vais vous avouer que la
localisation actuelle de la bibliothèque nationale me plaît
beaucoup. Il y a une possibilité d'entraînement culturel sur un
milieu qui a repris de la vie. Nous sommes sur les lieux de la vieille
université, une nouvelle s'y installe, elle est au centre-ville; c'est
en plein ce que j'aime d'une université, elle va avoir une fonction
réelle dans le milieu.
Ce serait un peu désolant qu'on soit obligé de
s'éloigner de ce milieu avec la bibliothèque na-
tionale. S'il y avait moyen de se loger dans ce coin-là... J'ai
même demandé qu'on étudie très sérieusement
les possibilités d'agrandissement à partir du noyau actuel; tout
cela est actuellement à l'étude.
Mme Lavoie-Roux: Ce ne serait pas très sympathique.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que le
député de Gaspé aurait une question à poser?
M. Le Moignan: Cette bibliothèque nationale, M. le
ministre, répond aux besoins actuels, mais en prévision des
années et du nombre de volumes, de revues et de périodiques, tout
est centralisé à la bibliothèque nationale, tout ce qui
est publié au Québec...
M. Vaugeois: C'est cela. Il y a le dépôt
légal qui l'amène à acquérir... C'est-à-dire
la loi lui permet d'acquérir, par le jeu du dépôt
légal, tout ce qui se publie au Québec. Il y a aussi le bulletin
qui est la conséquence du dépôt légal.
Il y a une performance qu'on essaie d'améliorer. Il y a un
problème de catalogue dans nos bibliothèques. Ce qui coûte
très cher dans nos bibliothèques, c'est le catalogue et on essaie
d'étudier des possibilités de solution au niveau de la
bibliothèque nationale, laquelle pourrait, d'ailleurs, faire le
catalogue pour l'éditeur. L'éditeur pourrait inscrire dans la
page du copyright la fiche de catalogue. Cela se fait déjà au
Canada anglais, à Toronto les éditeurs le font presque tous,
même s'ils n'ont pas les experts, dans leur maison d'édition, pour
faire la fiche. La BN pourrait donner ces services aux éditeurs; on
l'étudie actuellement.
Quant aux acquisitions, elles sont un peu restreintes. J'attache
beaucoup d'importance à cela. Il n'est pas dit qu'on ne fera pas, en
cours d'année, un petit virement de crédits pour permettre
à la bibliothèque nationale de garder sa qualité au niveau
de ses fonds.
Si le budget actuel limitait les possibilités d'acquisition des
choses essentielles par la BN, nous sommes prêts à intervenir.
M. Le Moignan: Toute publication québécoise est
déposée gratuitement? Vous n'avez pas à les...
M. Vaugeois: II y a une exception pour les livres d'art où
la BN peut payer une partie.
M. Le Moignan: Pour les autres, non.
M. Vaugeois: Cela vaut seulement pour l'édition
québécoise. Vous, de l'Opposition officielle, qui êtes
toujours intéressés à ce qui se passe à la grandeur
du Canada, la BN a aussi une responsabilité vis-à-vis de
l'édition canadienne dans son ensemble. Le dépôt
légal ne joue pas pour l'édition québécoise.
Donc, c'est un problème d'acquisition pour l'édition
canadienne en général. Bien sûr, les ouvrages, les grands
ouvrages qui sont publiés dans le monde entier ne peuvent pas ne pas
être dans une bibliothèque nationale.
M. Le Moignan: Si cela a été publié au
Canada français, à la grandeur du Canada, vous êtes
intéressé...
M. Vaugeois: Bien sûr. Pourquoi pas de l'Amérique
française?
M. Le Moignan: Nous sommes toujours en Amérique
française, dans le Canada français.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mercier.
M. Godin: Est-ce que le ministre a visité l'édifice
Grothé qui est au coin de Saint-Laurent et Ontario, je pense? Il a
été classé d'ailleurs.
M. Vaugeois: Remarquez que c'est moins le ministère que
celui des Travaux publics qui a ce mandat. Il travaille avec nous... On
confirme que cela a été une hypothèse de localisation.
M. Godin: Un des problèmes, c'est que si, effectivement,
la localisation de l'ancienne Saint-Sulpice, pleine de charmes et qui est dans
un quartier où il y a beaucoup d'activités plus ou moins
culturelles culturelles et paraculturelles il reste que la
dissémination des services en trois lieux au moins, sinon plus, pose de
méchants problèmes pour n'importe qui voulant faire des
recherches, soit un député qui veut fouiller dans les textes de
M. Ryan ou autre document semblable, on ne sait jamais où s'adresser. Il
y en a un bout à Longueuil, il y en a un bout qui est dans
l'ancienne...
M. Vaugeois: bibliothèque juive de la rue de
l'Esplanade.
M. Godin: Oui.
M. Goldbloom: Qui n'est plus là d'ailleurs.
M. Vaugeois: Mais nous, on est encore là. Mais votre
bibliothèque...
M. Godin: Elle est d'ailleurs, je pense, M. Goldbloom, la
principale bibliothèque juive du continent, encore maintenant.
M. Vaugeois: Non, la principale est à Cincinnati.
M. Godin: Elle a été longtemps la principale.
Mme Lavoie-Roux: Au Canada. M. Godin: S'il y avait moyen
de...
M. Goldbloom: En matière de bibliothèque, je n'ai
pas l'expérience du ministre.
M. Godin: Mon autre question, est-ce qu'on me dit que c'est une
hypothèse qui a été envisagée, l'édifice
Grothé? Oui, bon. Ma dernière question était sur
l'animation culturelle. Pour avoir fréquenté beaucoup ces lieux,
j'ai vu défiler un certain nombre de personnes qui ont changé
d'affectation ou de poste dans ce secteur.
Je me suis posé la question, comme observateur: Est-ce qu'il y
avait des problèmes je ne sais pas de quel ordre il peut y en
avoir qui expliquaient cette espèce de marque de
continuité dans le personnel qui s'occupait d'animation culturelle? Il y
avait une espèce de renouvellement forcé du personnel qui fait
que les contacts ne sont plus les mêmes et que les troupes ou les groupes
qui veulent exposer là, ou avoir des activités là, ont
à recommencer perpétuellement.
D'autre part, il y a eu également la loge qui était
derrière l'auditorium, dont une partie a été
sacrifiée, ce qui peut affecter la salle elle-même. Comme vous
n'êtes pas sans le savoir, M. le ministre, il n'y a pas beaucoup de
salles pour les jeunes troupes, dans le centre de Montréal comme,
d'ailleurs, dans plusieurs grandes villes au Québec. La salle de la BN
est devenue, avec les années, une salle que les gens fréquentent
très facilement et le pli est pris. Il ne faudrait pas, au moment
où le pli est pris, mettre le frein.
J'aimerais savoir quelle est la politique du ministère à
cet égard.
M. Vaugeois: Vous soulevez là une question que j'ai
déjà abordée avec le conservateur, M. Jean Rémi
Brault. J'ai bien connu, avec lui, les difficultés actuelles de la BN
à cause de l'exiguïté des locaux mais il a convenu
également, avec nous, que l'activité d'animation culturelle qui
s'est développée à la BN devait demeurer malgré
tout. Il reste que cela ne se fait pas dans un climat idéal, dans des
conditions idéales. M. Brault m'a fait part, là-dessus, de ses
difficultés. Je pense que cela pourrait peut-être expliquer une
certaine rotation de personnel; c'est que, à un moment donné,
c'est un peu démoralisant de travailler dans de telles conditions.
M. Godin: Donc, l'aspect d'animation culturelle de la BN est
là pour rester.
M. Vaugeois: Oui, oui. Cela, nous en avons convenu avec M.
Brault. Encore que, on vient de m'informer qu'un groupe de travail interne
essaie d'évaluer les difficultés qui se présentent. Je
peux même ajouter, d'ailleurs, qu'au niveau du budget, certains services
du ministère sont intervenus ad hoc pour permettre des activités
comme l'hommage à Hubert Aquin, par exemple, qui n'était
guère possible avec le budget régulier de la BN. A ce
moment-là, on vient à la rescousse parce qu'on y tient beaucoup.
On tient beaucoup à ce rôle, à cette fonction qu'a
développée la BN.
Le Président (M. Jolivet): Deux petites questions rapides,
d'abord, Mme le député de L'Acadie et, ensuite, M. le
député de Deux-Montagnes.
Mme Lavoie-Roux: C'est simplement pour demander au ministre s'il
accepterait de déposer les normes d'attribution des subventions aux
bibliothèques municipales, même si le dossier est complexe?
M. Vaugeois: Oui, oui.
Mme Lavoie-Roux: Ce serait intéressant qu'on ait ce
document.
M. Vaugeois: Absolument, c'est très intéressant
comme document.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Je voudrais tout simplement, en quelques
mots, vu l'heure, abonder dans le même sens que mon collègue de
Mercier et exprimer l'avis que le programme d'animation culturelle à la
bibliothèque nationale devrait non seulement être maintenu mais
devrait être développé considérablement. J'estime
que le ministère devrait voir dans quelle mesure ce programme
d'animation de la bibliothèque nationale pourrait avoir des
prolongements dans les bibliothèques publiques à travers le
Québec, de sorte que la bibliothèque nationale soit
l'inspiratrice de programmes d'animation culturelle qui auraient lieu dans de
nombreux autres centres culturels. On peut imaginer, par exemple, une
exposition qui serait montée à la bibliothèque nationale
et qui deviendrait, ensuite, itinérante. On peut imaginer des
échanges, on peut imaginer d'autres bibliothèques publiques du
Québec préparant des événements culturels qui
seraient également itinérants et qui passeraient notamment
à la bibliothèque nationale, de sorte que les échanges se
feraient dans tous les sens.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: C'est simplement, M. le Président, on parle
beaucoup du rôle de la bibliothèque nationale et de son
emplacement dans la métropole, et j'en suis. Est-ce qu'on a
déjà songé ou est-ce qu'il y aurait moyen de songer
à ce que le service de la bibliothèque nationale soit
également disponible ailleurs, dans les dix régions du
Québec, en ce sens que si on fait un dépôt légal,
quitte à ce que ça ne soit pas gratuit mais qu'il faille se
porter acquérir, mais qu'on crée presque autant d'exemplaires de
la bibliothèque nationale qu'il y a de régions, de façon
que la contribution de la bibliothèque nationale au dynamisme culturel
d'une région et à la consolidation du patrimoine culturel d'une
région ne se fasse pas uniquement dans la métropole et qu'on
évite ce syndrome parisien auquel on assiste de plus en plus au
Québec. Il y a, dans les régions, de plus en plus
d'universités, de CEGEP, il y a des institutions, il y a une vie
régionale qui se manifeste de façon de plus en plus
marquée mais l'absence de services comme
la bibliothèque nationale, et autres d'ailleurs, m'apparaît
singulièrement compromettre l'essor culturel de chacune des
régions. Est-ce qu'on a songé à quelque chose de ce
côté-là, et si oui, quand?
M. Vaugeois: Je ne pense pas que de telles hypothèses
existent actuellement, mais les propos que vient de tenir le
député de Taschereau seront soumis à l'attention des
services concernés. Cela me fait plaisir de voir que le
député de la capitale ou d'une partie de la capitale a des
préoccupations régionales.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'on peut
considérer comme adoptés l'élément 2 et
l'élément 3 du programme 1? Donc le programme 1 adopté au
complet?
Une Voix: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Suspension des travaux
jusqu'à 20 heures ce soir.
(Séance ajournée à 18 h 6)
Reprise de la séance à 20 h 14
Le Président (M. Jolivet): A l'ordre, s'il vous
plaît!
Avec le programme 2, M. le ministre.
Les membres de la commission sont les mêmes que lorsque nous nous
sommes quittés, à la réunion précédente,
avant le souper. Je ne les nommerai pas, ce sont les mêmes.
Conservation et utilisation des archives
M. Vaugeois: Pour le programme 2, élément 1, nous
parlerons de la conservation et de l'utilisation des archives. Cet
élément vise la conservation des archives de la Nouvelle-France
et celles du Québec qui sont restées sous la garde du
gouvernement du Québec, l'acquisition et l'inventaire des archives
privées importantes pour notre histoire, en vue de mettre ces archives
à la disposition du public.
Le budget de fonctionnement, qui exclut la masse salariale, est de
l'ordre de $460 400. Les hypothèses de travail actuel:
Accélérer l'inventaire des archives privées au
Québec. Il s'agit de voir à posséder la connaissance la
plus complète possible de tous les fonds d'archives, de façon
à rendre la recherche historique plus accessible et à
préserver ces fonds de la destruction, de leur vente à
l'extérieur du Québec, ou de leur déperdition. Egalement,
un programme de régionalisation des archives nationales est maintenu en
vue de fournir une documentation locale aux chercheurs locaux, avec le concours
de ministères tel celui des Travaux publics, en particulier. Deux
nouveaux centres, l'un à Rimouski, l'autre à Sherbrooke, seront
ouverts très prochainement. De plus, des travaux d'aménagement du
grand séminaire s'effectuent à bon train et on prévoit
pouvoir y déménager à l'été 1979.
Enfin, la diffusion des connaissances en archi-vistique: avec I'aide de
trois personnes, les archives nationales publieront un bulletin mensuel
d'information intitulé: Archives en tête, dès 1978, afin de
préparer des bibliographies thématiques pour diffuser des
informations sur les documents d'archives inventoriés.
Voilà en bref les activités ou les objectifs poursuivis
par les archives du Québec. Vous me permettrez d'ajouter tout simplement
qu'à ce moment-ci les archives à Québec vivent de l'espoir
d'un déménagement prochain. Je pense que nous avons une solution
extrêmement intéressante. Cela convient à tous
égards. Pour ne rien vous cacher, la situation est moins rose à
Montréal; elle est liée à l'avenir de la
bibliothèque nationale. Le problème se pose également en
termes de locaux.
Dans les régions en général le départ est
bien pris. On se rend compte que la régionalisation des archives du
Québec correspondait à un besoin exceptionnel et le
problème de nos sections régionales est de suffire à la
pression du milieu. Dans bien des endroits, on confie aux archives nationales
présentes en région les fonds qu'autrement on aurait
hésité à confier aux archives nationales.
Je prends un exemple dans mon comté, la municipalité qui
est une des plus vieilles au Québec, comme vous le savez, a
confié ses vieux fonds d'archives aux Archives nationales du
Québec. On peut faire l'hypothèse qu'elle aurait
hésité à les envoyer à Québec, mais
là, ils sont présents à Trois-Rivières, donc
présents pour les chercheurs. Cela pose au ministère et à
la division des archives en particulier, un problème fantastique pour
répondre à la demande. Nous n'avions pas prévu une telle
demande.
Donc, dès que l'étape du déménagement sera
faite ici à Québec, il faudra être à même de
faire également un effort au titre du fonctionnement. Vous aurez
noté aussi que les archives maintiennent un programme d'acquisition qui
se veut un centre de documentation et pas seulement un centre de conservation.
Ils sont donc là en fonction de la recherche. Je pense que ce rôle
des archives est de mieux en mieux joué. Il complète d'ailleurs
très bien les autres activités du ministère au niveau
patrimonial. Nous aurons l'occasion d'y revenir.
Je pourrais ajouter une petite chose. Si on fait un parallèle
avec les archives publiques du Canada, il reste que là aussi nous tirons
passablement de l'arrière, mais nous sommes en train, au moins à
Québec, de nous rattraper un peu. Il reste que les inventaires que le
fédéral a pu faire au Québec sont heureusement les seuls
que nous ayons vraiment parce que les Archives du Québec, jusqu'à
maintenant, n'ont pas encore pu se lancer là-dedans.
Le député de L'Acadie a souligné ce matin la
question d'une loi des archives. Je ne l'étonnerai pas en lui disant ce
soir que c'est une des premières questions que j'ai posées au
ministère: Est-ce que nous avons un projet de loi des archives?
Où
est-ce que cela en est rendu? J'ai eu, dans les jours qui ont suivi, une
brique remarquable. Il existe effectivement un projet de loi des archives qui a
été fait avec beaucoup de rigueur, en s'inspirant des normes de
l'UNESCO.
Vous devinerez que ce ne sera pas à cette session-ci que nous
allons le présenter. Je me donnerai comme objectif de soumettre ce
projet de loi à l'Assemblée nationale à l'automne, quitte
à ce que nous prenions un bon bout de temps pour l'étudier parce
qu'il va très loin. Le rôle prévu des archives nous
amènera à intervenir dans à peu près toute la
documentation publique, et nous avons bien des niveaux publics, de même
que dans les fonds privés. Je pense que c'est une question
délicate qui va au-delà des partis politiques. Je souhaite que
nous puissions commencer à étudier collectivement cette question
cette année. Il existe donc un projet.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse si je pose de nouveau au ministre
des questions auxquelles il a déjà répondu. Vous avez sans
doute parlé des inventaires des archives. Où en êtes-vous
rendu exactement dans cet inventaire? Autant les archives scolaires,
judiciaires, de tous ordres.
M. Vaugeois: Effectivement, je l'ai suggéré un
petit peu dans ma première intervention. C'est assez variable. Là
où il y a des sections régionales, en général, les
ententes avec le ministère de la Justice ont bien fonctionné. Le
ministère de la Justice a confié carrément à nos
sections régionales ses fonds d'archives. Les municipalités ont
imité le geste.
Nous avons à Québec, actuellement, un archiviste à
temps partiel, pour les fonds d'archives d'entreprises. Soit dit en passant, il
est bien reçu, il fait le tour des entreprises susceptibles d'avoir des
archives importantes. Dans un premier temps, c'est l'inventaire, si vous
voulez. L'inventaire se poursuit à ce niveau parce que c'était
peut-être là que l'inventaire fait par les archives publique du
Canada avait le plus de lacunes.
Comme on est à court de moyens, on fait ce que le
fédéral n'avait pas fait encore. Etant donné aussi ce qui
est à la mode, au niveau de la recherche actuellement, c'est
peut-être davantage l'histoire économique et sociale, je pense que
nos archives avaient du retard à rattraper de ce
côté-là.
Mme Lavoie-Roux: La seule autre question et je pense que
vous y aviez répondu lorsque vous avez dit qu'en ce qui avait trait
à la ville de Québec, le problème de la relocalisation des
archives était réglé, mais que, à
Montréal...
M. Vaugeois: Le problème reste entier. Ce sont les
mêmes hypothèses que pour la bibliothèque nationale puisque
nous cherchons une solution qui conviendrait aux deux. D'ailleurs, cela
régle- rait, vous vous en doutez bien, un certain nombre d'autres
questions. Vous avez dû, comme tout le monde, voir dans les journaux,
qu'il y avait, de temps en temps, des protocoles qui se discutaient entre la
Bibliothèque nationale et les Archives nationales. Les deux étant
distinctes actuellement, cherchent à avoir un service de restauration
des documents. Si elles étaient voisines, elles pourraient avoir un
service commun.
Il y a eu également des questions qui ont été
soulevées au niveau des acquisitions, par exemple, les manuscrits des
écrivains. La Bibliothèque nationale a revendiqué ces
fonds, les archives les ont revendiqués aussi. Nous, on pense
qu'à bien des égards, la Bibliothèque nationale et les
Archives nationales pourraient faire bon ménage et que cela nous
permettrait une économie de services. On cherche donc une solution qui
conviendrait aux deux.
Mme Lavoie-Roux: Du point de vue budgétaire, est-ce que le
fait que l'augmentation pour la conservation et l'utilisation des archives soit
uniquement de 2%, est-ce que ceci veut dire une diminution des ressources?
M. Vaugeois: Je vais vous dire cela tout de suite. La
réponse est oui.
Mme Lavoie-Roux: Et cela va toucher quels aspects?
M. Vaugeois: Cela ralentit les travaux d'inventaire, en
particulier. Mais disons que cela ralentit aussi le processus de
régionalisation des archives.
Mme Lavoie-Roux: Oui. Mais ne trouvez-vous pas qu'il y a un
inconvénient à ralentir la régionalisation je la
souhaite bien mais surtout l'inventaire, parce que les choses vont
disparaître?
M. Vaugeois: Absolument.
Mme Lavoie-Roux: Sur quels critères, sur quels facteurs
vous êtes-vous basés pour décider que c'était
là que vous opériez, enfin, une coupure?
M. Vaugeois: Ce n'est pas moi qui ai fait la coupure. Vous savez
comment fonctionnent les budgets. Dans les prochaines semaines, je dois
étudier, avec le nouveau sous-ministre, les possibilités de
s'ajuster, par un virement à l'intérieur du même programme.
Il est possible que le programme de conservation au niveau du patrimoine, ou de
restauration, n'aille pas à la vitesse prévue. A ce
moment-là, il y aura peut-être virement, ou budget
supplémentaire aussi. Je vous avoue, étant donné ma
formation personnelle, que c'est l'une des inquiétudes que j'ai eues en
prenant connaissance du budget. Je vous l'avoue bien franchement, il y a
effectivement une diminution significative aux archives, si on exclut les
salaires, au titre du fonctionnement.
Mme Lavoie-Roux: Mais le 2% ne couvre pas l'augmentation des
salaires et des frais inhérents à l'entreprise. Cela veut dire
que...
M. Vaugeois: Remarquez que nous ne sommes pas passifs. Par
exemple, lorsque je suis arrivé au ministère, le trésor
avait refusé, je ne sais trop pourquoi, des engagements
d'étudiants pour l'été prochain. C'est une des questions
que j'ai reprises avec la Direction générale de l'administration.
On a même offert de payer les salaires de ces étudiants. On a
finalement été autorisés à 40 hommes/année,
ce qui va nous permettre d'engager maintenant 160 étudiants pour la
période d'été. Entre autres tâches auxquelles vont
être affectés ces étudiants, il y aura des tâches
d'inventaire, bien encadrées par nos archivistes.
Cela aura l'avantage aussi de permettre du recrutement en région
et de donner du travail à des étudiants en région, dans
leur domaine. C'est évident que les emplois d'été pour les
étudiants de sciences humaines, ne sont pas innombrables. Je pense que
de cette façon, on réglait, en partie, un de nos
problèmes, et on rendait service aux éudiants.
C'est une mesure de court terme que nous avons prise cet
été. On va s'ajuster. On va voir comment. Il est certain qu'il y
a deux contraintes qui ont justifié cette espèce de baisse dans
les budgets de fonctionnement, c'est que les archives à Québec
sont dans l'attente d'un déménagement, les archives de
Montréal aussi, finalement. Donc, il y a un ralentissement
d'activités.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que... Ce fait existe peut-être ou
s'il n'existe pas, est-ce que ce serait une possibilité, au moins
auprès des organismes publics, que ce soient des municipalités,
des commissions scolaires, qu'il y ait une espèce de moratoire, pour
qu'on conserve les archives jusqu'à ce que vous ayez eu le temps...
Est-ce que c'est une possibilité?
M. Vaugeois: C'est acquis pour celles qui sont
inventoriées.
Mme Lavoie-Roux: Pour celles qui sont à inventorier.
M. Vaugeois: Qui sont inventoriées.
Mme Lavoie-Roux: Non, pas celles qui sont inventoriées,
pour celles que vous connaissez, c'est moins grave que pour celles que vous ne
connaissez pas.
M. Vaugeois: Je ne pourrais pas vous dire s'il y a eu
effectivement correspondance. Ecoutez, je pense que depuis plusieurs
années j'ai été témoin de ça
les archives du Québec ont visité à peu près tout
ce qu'il y a comme municipalités, tout ce qu'il y a comme institutions.
Le milieu est alerté maintenant. On va hésiter davantage à
détruire des vieux documents qu'on va hésiter à
démolir une maison pour faire un stationnement...
Mme Lavoie-Roux: Tout le monde tient à ses vieux
papiers.
M. Vaugeois: Le papier inspire encore plus de respect que le
bâtiment. Le problème que nous rencontrons, effectivement, c'est
que dès qu'on se pointe dans une région, les gens ne demandent
pas mieux que de nous confier leurs fonds d'archives.
Mme Lavoie-Roux: Je dis ça parce que je pense, par
exemple, à des régions où la petite foire peut
disparaître finalement, par exemple dans les Cantons-de-l'Est, les
archives municipales ce n'est pas une question de Loi 101, c'est une
question de changement où on passe d'une municipalité
à majorité anglaise à une majorité française
ou à totalité française. Alors, cela constitue quand
même une partie intéressante de l'histoire de toute cette
région du Québec. Peut-être que la même chose peut
survenir dans d'autres régions, la Gaspésie. Je vous dis que j'en
ai eu connaissance, parce que j'ai essayé, dans le cas d'une maison
particulière, de relever justement, chez le notaire, tous les
propriétaires de la maison, pour faire l'histoire de la maison, obtenir
les titres, et finalement, à un moment donné, il m'a dit:
Là, ça fait trois fois qu'elle se vend, ou quatre fois qu'elle se
vend, le reste ne nous intéresse plus. C'étaient quand même
des loyalistes qui étaient arrivés là. C'est pour
ça que je me dis...
M. Vaugeois: Effectivement, on est moins avancé dans la
région de l'Estrie qu'ailleurs au Québec, compte tenu des
sections qu'on a pu ouvrir. Par ailleurs, dans le cas de l'Estrie, comme dans
certaines autres régions du Québec, on peut profiter du travail
fait par les Sociétés d'histoire là-bas; je pense à
Mgr O'Brady, par exemple, qui a été un animateur important dans
la région de Sherbrooke et, grâce à ces initiatives, il y a
eu une sensibilisation auprès des autorités locales.
Pour nous autres, il y a un certain caractère d'urgence à
toucher cette région, au plan institutionnel...
Mme Lavoie-Roux: Au plan historique, c'est peut-être une
région qui a beaucoup évolué, qui a beaucoup
changé...
M. Vaugeois: Une histoire très spéciale.
Mme Lavoie-Roux:... une histoire très spéciale. Si
jamais vous avez un Québec souverain, vous serez peut-être content
de montrer ça.
M. Guay: Pas seulement nous, vous aussi, vous allez l'avoir.
M. Vaugeois: Je vous signale en passant que vous n'avez pas
besoin d'aller dans les Cantons-de-l'Est pour avoir des archives en
anglais.
Mme Lavoie-Roux: Non, je sais, toute la région de la
Gaspésie, la péninsule...
M. Vaugeois: Cela s'explique par les naufrages pour eux.
Mme Lavoie-Roux: Non, ils ont eu des... Ecossais et tout ce
monde-là...
M. Le Moignan: Vous parlez de... des écoles...
M. Vaugeois: Des îles Jersey et Guernesey.
Mme Lavoie-Roux: II y a même des régions en
arrière...
M. Le Moignan: Surtout l'île de Jersey.
Mme Lavoie-Roux: II y a quand même des régions
près de Québec, un village qui s'appelle Armagh, entre
autres.
M. Vaugeois: Trois-Rivières a été dans ce
cas-là, Trois-Rivières a eu des registres tenus en anglais
pendant plusieurs années alors que tout le monde parlait
français, ou presque.
Le Président (M. Jolivet): Le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Oui, M. le Président. Si on fait une revue
rapide des centres d'archives, vous aviez Montréal, Québec,
Trois-Rivières, ensuite on a ajouté Chicoutimi et Hull et, cette
année, on parle de Rimouski et Sherbrooke.
M. Vaugeois: Voilà.
M. Le Moignan: C'est donc dire qu'à ce moment-là,
la province va être passablement reliée par de grands centres.
L'an dernier, en commission parlementaire, le ministre avait fait allusion
justement à cet inventaire national fait par le gouvernement du Canada,
avec l'ambition d'en arriver un jour, je crois que c'est votre intention aussi,
à avoir un inventaire national des archives du Québec. (20 h
30)
Maintenant, il s'est fait un certain travail à
l'Université du Québec à Rimouski, financé, je
crois, par un groupe ou par le gouvernement du Canada, je ne sais trop,
peut-être par une fondation spéciale. La société
historique est venue en Gaspésie et on a essayé... on faisait le
travail et on laissait les archives sur place... mais avoir un genre de
"cardex" ou de centre où, si je suis intéressé à
telle et telle paroisse, on peut me dire un jour qu'à
Trois-Rivières, par exemple, un missionnaire, à l'époque,
avait vécu 20 ans ou 30 ans sur la Côte de Gaspé, qu'il a
rapporté un journal personnel ou quelque chose... On retrouve les
mêmes choses à Chicoutimi. A ce moment-là, je pense que
votre centre d'archives nationales, avec toutes les coordonnées qui
pourraient être offertes, où on pourrait s'adresser, soit à
Québec, soit à Montréal ou ailleurs, faciliterait beaucoup
l'accès aux chercheurs.
L'an dernier, on a mentionné qu'il y avait $100 000 placés
à la disposition des sociétés d'histoire locale pour les
aider dans cette recherche archivistique. Je ne sais pas si l'argent a
été dépensé ou si les sociétés
d'histoire étaient plus ou moins averties de ce geste.
M. Vaugeois: Vous étiez à la conférence que
j'ai faite à Laval, il y a quelques jours. Quand j'ai proposé aux
sociétés d'histoire des plans conjoints, des programmes
conjoints, de s'associer au ministère pour un certain nombre de travaux,
je référais encore à cette enveloppe. On m'informe que
l'an dernier, effectivement, on a dépensé une somme de $125 000.
Cette année, je n'ai pas voulu annoncer de montant parce que c'est
vraiment... parce qu'à certains moments, le montant qu'on identifierait
ne serait pas nécessairement valable, parce qu'une société
d'histoire, d'après moi, pourrait éventuellement devenir
l'équivalent contractuel dont nous pouvons avoir besoin pour un
relevé historique de tel monument qu'on va restaurer. Alors, cela peut
être un contrat qu'on donne à un individu, cela pourrait
être des contrats qu'on donnerait de plus en plus à des
sociétés d'histoire. A ce moment-là, le montant de $100
000 pourrait être largement dépassé, à partir d'un
autre poste du budget. On pourrait aller chercher de l'argent un peu partout si
la recherche historique se situe dans le cadre d'autres programmes du
ministère. Donc, il n'y a pas de limite pratiquement à cela.
Le problème, vous le savez comme moi, c'est que les
sociétés d'histoire n'ont pas toutes la même organisation,
le même effectif, les mêmes capacités. Et si tantôt on
peut travailler avec la société historique de Lotbinière
qui est très dynamique, on peut être obligé d'attendre une
relève pour travailler avec telle société historique de
tel autre endroit, parce que momentanément les gens qui en sont
responsables ne sont pas aptes ou n'ont pas le temps d'engager des
travaux...
Je vais vous dire une autre chose vous ne m'interrogez pas
là-dessus mais j'ai été très occupé
par ce que m'a dit le président de la Fédération des
sociétés d'histoire ce soir-là. Le ministère a une
règle qui veut que nous ne subventionnons pas les secrétariats.
Je pense que c'est une bonne règle. C'est toujours dangereux de fournir
simplement des budgets de secrétariat à gauche et à
droite. On est mieux d'intervenir, de subventionner aux titres de
fonctionnement ou d'activités, mais j'aurais envie,
éventuellement, de faire une exception pour la fédération.
C'est une des choses que nous allons regarder si le budget nous permet de faire
un spécial pour la fédération.
M. Le Moignan: Oui, parce que dans le moment, je crois que le
rôle de la fédération... La fédération ne
remplit pas son rôle parce qu'elle manque d'argent. Elle pourrait devenir
très efficace. Il y a peut-être une soixantaine de
sociétés d'histoire dans la province, à peu
près?
M. Vaugeois: Qui sont regroupées à la
fédération.
M. Le Moignan: Elles ne sont pas toutes actives, mais si la
fédération avait le moyen de les aider, je crois qu'à ce
moment-là on aurait de très bons coopérants culturels aves
des sociétés locales d'histoire qui pourraient travailler de
concert avec les municipalités.
M. Vaugeois: C'est cela.
M. Le Moignan: C'est pour alerter tout ce monde-là. Cela
fait quinze ans qu'on essaie chez nous dans notre milieu. Pourtant on a
utilisé la presse, la TV, la radio et on n'a pas réussi. Il se
perd, il se détruit beaucoup de choses, non seulement des papiers, mais
même des sites, des maisons ou des choses anciennes. Je pense qu'il y a
un immmense travail pour relancer... un travail de publicité, comme on
le mentionnait aujourd'hui pour les livres.
M. Vaugeois: De l'animation. M. Le Moignan: De
l'animation.
M. Vaugeois: Vous me faites plaisir quand vous faites une
référence aux municipalités parce
qu'éventuellement, avec notre projet de loi no 4, le renvoi aux
municipalités ou la remise aux municipalités d'un certain nombre
de responsabilités devrait s'accompagner moins de règlements
très précis que d'interventions, au niveau des
municipalités, de représentants de nos sociétés
d'histoire. Je pense que ce serait encore cela la meilleure garantie de la
qualité des interventions et de l'exercice des responsabilités
par les autorités municipales.
M. Le Moignan: J'avais scandalisé les membres de cette
commission, l'an dernier, surtout Mme le député de
L'Acadie...
M. Vaugeois: Ah bon! Comment?
M. Le Moignan: ... quand j'ai dit que j'étais allé
dans une municipalité, il y a environ sept ou huit ans où il y
avait un camion de vidanges à la porte d'une grande salle. On avait
étalé les livres, les documents. J'ai dit: Qu'est-ce que vous
faites là? Etes-vous en train de faire de la classification? Ils ont
dit: Non, regarde le camion qui est à la porte. Madame avait dit que
cela ne se faisait pas à Montréal, mais je l'ai vu dans ma
région. C'est un officier du ministère ou une dame, dans le
temps... Je ne vous dis pas quel ministère, je ne m'en souviens pas.
Mme Lavoie-Roux: Une dame en passant...
M. Le Moignan: Les Affaires municipales, on m'a dit que
c'était une dame. On leur avait dit: Tous les documents qui
dépassent trente ans, il faut les détruire. Imaginez-vous les
livres des minutes, par exemple, qui remontaient à 1840 ou 1850. Ils
avaient détruit le premier, j'ai sauvé le deuxième...
Mme Lavoie-Roux: Toute spéciale...
M. Le Moignan: ... parce que la municipalité à ce
moment-là c'était un vrai gouvernement. Elle avait beaucoup plus
de pouvoirs qu'aujourd'hui. Le provincial tranquillement est allé gruger
comme le fédéral l'a fait vis-à-vis du provincial. Le
provincial s'est revengé en enlevant les pouvoirs des
municipalités.
M. Vaugeois: C'est conforme à l'histoire, puisqu'en
créant la province de Québec, on avait créé une
municipalité un peu plus grande que les autres.
M. Le Moignan: Vous avez déjà écrit cela,
oui. C'est vrai, je crois qu'il y a un immense travail à faire pour
alerter l'opinion publique, un travail d'animation. Si on ne commence pas par
là... je pense qu'on en perd encore et il faut essayer de
récupérer. Il y a beaucoup d'archives de compagnies. Je ne sais
pas si vous avez la même politique que le fédéral. Il a
toujours quelqu'un sur la route qui essaie de dépister, soit en Europe,
soit aux Etats-Unis, soit au Canada, des fonds d'archives.
M. Vaugeois: On a quelqu'un sur la route au Québec
actuellement à mi-temps, parce qu'il donne le reste de son temps aux
archives à l'intérieur. En Europe, nous avons eu à
plusieurs reprises des représentants. J'en ai connu quelques-uns. Je
pense qu'actuellement il n'y en a pas, mais nous avons, par ailleurs, des
ententes avec le gouvernement français au titre de relations entre les
Archives nationales de France et les Archives nationales du Québec. Nous
sommes en rapport avec le directeur Jean Favier. On a des stages
d'archivisti-que là-bas. Je pense que le milieu français est
maintenant beaucoup plus sensible à l'intérêt que peuvent
représenter pour nous les archives de la période coloniale
française.
Là-dessus, on a plus de collaboration du gouvernement
français qu'on en avait autrefois. J'ai l'impression, d'après ce
que j'ai vu, qu'il y a plus de présence quasi permanente, mais les
missions sont fréquentes au niveau des deux archives nationales.
M. Le Moignan: Ici, aux Archives nationales du Canada,
probablement...
M. Vaugeois: Oui, il y a le père Beaudry, entre autres,
qui fut en permanence à Paris pendant des années. C'est
maintenant Mme L'Italien qui occupe le poste au Centre culturel canadien.
M. Le Moignan: A Paris, oui.
M.Vaugeois: Nous avons eu Eric Labignette un bout de temps. Il y
a madame Deschènes qui a écrit: Marchands et Habitants de
Montréal et qui a été longtemps, quatre ans à
Paris, je crois, pour les archives du Québec, mais, à ce
moment-ci, on ne m'a pas signalé la présence à Paris
d'un
archiviste des archives du Québec, mais je sais qu'il y a des
ententes importantes avec les Archives nationales de France. Je sais que Jean
Favier qui est le directeur des Archives nationales de France, qui est
d'ailleurs un grand ami du Québec, suit de très près les
travaux qui se font dans ses archives et qui sont susceptibles de nous
intéresser.
M. Le Moignan: Les Archives nationales du Canada ont-elles en
main beaucoup d'archives que le Québec ne possède pas ou est-ce
que le Québec peut se les procurer sur microfilms ou sur
reproduction?
M. Vaugeois: Ah oui! Quant aux fonds conservés aux
Archives publiques du Canada, la plupart des fonds importants ont
été microfilmés. Les microfilms sont disponibles à
Québec.
M. Le Moignan: Je pense, aux fonds...
M. Vaugeois: Vous savez, cela bouge tout le temps. Si le
fédéral s'est enrichi de nouvelles collections récemment,
je ne sais pas. Là-dessus, c'est un réflexe de
spécialiste, ce n'est pas une question politique. Les
spécialistes font ce genre d'échange. Les gens d'Ottawa sont
intéressés à avoir des copies de ce qui est
conservé ici et les gens d'ici sont intéressés à ce
qu'il existe des copies, parce qu'un conservateur, par définition, a
toujours peur de perdre ce dont il a la responsabilité.
Ici au Canada, si vous me permettez, nous n'avons pas tout à fait
le même réflexe qu'en Europe. En Europe, les conservateurs
résistent toujours au microfilmage de leurs fonds, parce qu'ils ont
l'impression que si leurs fonds sont microfilmés, ils ont des chances
d'être disponibles pour la consultation ailleurs et leur achalandage va
diminuer. Pour eux, leurs crédits sont souvent en fonction de la
popularité et de l'achalandage de leur institution, alors qu'en
Amérique, on microfilme volontiers et on multiplie les microfilms
partout où c'est possible.
Mme Lavoie-Roux: On est moins possessifs.
M. Le Moignan: J'ai acheté, il y a quelques années,
à Toronto, une collection très précieuse sur les
procès qui se tenaient dans le temps, au début des années
1800, à New Carlisle, à Percé ou à Douglastown.
Certains volumes ont été abimés par l'eau. Je crois que
vous avez ici des procédés de traitement. On pourrait vous
apporter ces volumes...
Mme Lavoie-Roux: ... je pensais que vous vouliez les
léguer, moi...
M. de Bellefeuille: Que vous en fassiez don aux Archives
nationales.
Mme Lavoie-Roux: Bien oui, et ils seront mis en
sûreté.
M. Le Moignan: Les Archives nationales, à ce
moment-là, pourraient nous donner une photocopie, parce que certaines
pages sont illisibles. Il y a un procédé pour les rendre
lisibles.
M. Vaugeois: Oui, on a à Montréal une
spécialiste qui est extraordinaire en restauration, et je pense qu'il
n'y a pas grand-chose qui échappe... On a eu des exemples d'inondations
ici, dans les caves du gouvernement; elle a fait un travail admirable. Elle
avait mis les documents au réfrigérateur, d'ailleurs, pendant un
bout de temps. On a de nouveaux procédés de restauration.
Remarquez que, pour les exemples que vous donnez, dans la mesure où les
documents que vous nous confiez sont accessibles aux chercheurs, vous pouvez
les garder.
M. Le Moignan: Parce que les nôtres, c'est malheureux que
ça se détériore.
M. Vaugeois: II n'y a pas de tentative de tout centraliser.
M. Le Moignan: Non, mais ça se détériore.
S'il y avait un procédé ici pour les restaurer...
M. Vaugeois: Oui.
M. Le Moignan: ... si la société y est consentante,
moi, je ferais un échange...
M. Vaugeois: Ce ne serait pas pour demain, par exemple, parce
qu'on a...
M. Le Moignan: Non.
M. Vaugeois: ... un petit service de rien, mais il est
très compétent.
M. Le Moignan: Alors, avec le temps, vous pouvez y penser...
M. Vaugeois: Oui.
M. Le Moignan: ... ce sera un enrichissement pour la province,
pour les archives, il n'y a pas de doute. Cela remonte déjà
à presque deux cents ans. Si on a une copie chez nous...
M. Vaugeois: Surtout si ce sont des procès de la
Gaspésie, ça nous intéresse.
M. Le Moignan: II y a des procès qui sont très
cocasses. Il y en a de toutes les sortes. C'est très bon. Il suffit de
lire ça.
Oui, j'avais seulement une petite question. Comment rendre accessibles,
avec le temps, toutes ces archives aux chercheurs, par exemple? Est-ce que
ça va devenir facile? Actuellement, c'est compliqué, parce que la
classification n'est pas terminée dans beaucoup de vos archives.
M. Vaugeois: Non, la...
M. Le Moignan: Ce qu'il y a ici, à Québec, tout
ça, c'est classifié?
M. Vaugeois: Dans Is archives régionales aussi, mais les
heures d'ouverture sont malheureusement, pour l'instant, celles de la
journée normale, mais l'objectif est partout d'avoir des archives
accessibles 24 heures par jour, 365 jours par année. Aux Archives du
Québec, ici, je ne sais pas si les horaires ont changé
récemment, on avait un horaire qui permettait la consultation
jusqu'à 11 heures le soir. Les archivistes ont cette habitude, de
chercher à aménager les lieux, de telle façon que le
chercheur puisse y travailler sans interruption.
Actuellement, les inventaires sont toujours à perfectionner, les
fichiers sont toujours à développer, mais il reste que le
personnel compense souvent pour le caractère incomplet des inventaires,
des répertoires ou des index.
M. Le Moignan: Les registres de l'état civil, ce n'est pas
de votre juridiction?
M. Vaugeois: C'est-à-dire qu'il y en a plusieurs qui nous
sont confiés maintenant par le ministère de la Justice.
M. Le Moignan: Mais cette loi qui dit qu'on ne peut pas
consulter, postérieurement à 1875...
M. Vaugeois: Oui.
M. Le Moignan: ... est-ce que ça relève d'un autre
ministère?
M. Vaugeois: Oui, ça relève du ministère de
la Justice, mais nous sommes à étudier cela avec le
ministère de la Justice. Déjà, le ministre de la Justice
m'a accordé, avant qu'on arrive à des conclusions, que tout
chercheur dit sérieux sera autorisé à aller les consulter,
mais avec une permission spéciale. En attendant qu'on arrive à
des règlements plus formels, actuellement, les registres d'état
civil ne sont pas inaccessibles aux chercheurs. Il n'y a pas de solution
définitive de trouvée, mais il y a des accommodements possibles.
J'ai une lettre récente du ministre de la Justice là-dessus.
M. Le Moignan: Actuellement, on est obligé de verser $2
pour chaque extrait. C'est très compliqué pour ceux qui font de
la recherche, surtout en généalogie.
Dans le projet de loi, si je l'ai bien compris, on ne mentionne pas les
registres qui sont tenus dans les paroisses. On mentionne simplement ceux tenus
aux bureaux des protonotaires, aux palais de justice. A ce moment-là,
est-ce que n'importe qui peut aller dans une paroisse et...
M. Vaugeois: Si le curé le veut bien. En
général, c'est ce qui se produit.
M. Le Moignan: Oui, si le curé le veut, mais pourquoi
est-ce qu'on l'a interdit? Est-ce parce qu'on veut garder une certaine
confidentialité. De l'autre côté, on laisserait libre
l'accès des presbytères?
M. Vaugeois: Les curés, M. le député, en
général, jugent du sérieux des chercheurs qui se
présentent. Il y a toujours une petite résistance à
vaincre quand tu entres dans un presbytère pour consulter les registres.
Il faut que tu mettes le curé en confiance sur le sérieux de ta
recherche. C'est après ça qu'on a accès aux documents.
Mme Lavoie-Roux: C'est comme ça que ça se passe, M.
le député de Gaspé?
M. Le Moignan: Oui, ça se passait comme ça, mais
moi, je sais qu'il y a un point là-dedans, et c'est vrai. Quelqu'un a
voulu faire de la recherche une journée, et je me suis douté;
j'ai cherché à sa place et je ne lui ai pas donné la
réponse, parce qu'il aurait certainement trouvé ce qu'il
cherchait. Je ne voulais pas qu'il soit mis au courant. C'est pour ça
peut-être qu'il y a une certaine sagesse à aller au moins à
50 ans ou...
M. Vaugeois: Là, on est rendu plus exigeant que le
Vatican. Le Vatican, je pense, c'est 90 ans. Nous autres, c'est 100 ans. On n'a
quand même pas plus de choses à cacher que l'Eglise. (20 h 45)
M. Le Moignan: Cela va être 111 ans avant longtemps parce
que c'est en 1875 et vous ajoutez des années. Cela va être aussi
vieux que la Confédération. J'ai terminé, M. le
ministre.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que
l'élément 1 est adopté?
M. Le Moignan: Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Adopté. Elément
2.
Conservation des sites et des biens historiques et
archéologiques
M. Vaugeois: Je vous propose d'aborder un peu de front, le 2 et
le 3; en tout cas, on verra bien. Donc, l'élément 2 s'intitule:
conservation des sites et des biens historiques et archéologiques. Cet
élément vise la conservation, l'animation, la mise en valeur,
l'exploitation des objets, oeuvres d'art, meubles, immeubles et ensembles
présentant un intérêt historique, archéologique,
esthétique ou pittoresque pour le Québec. Un budget de $12 019
800 est affecté, est prévu. La poursuite d'une façon
accélérée du macro-inventaire en vue de proposer un cadre
opérationnel à toutes les actions en matière de biens
patrimoniaux est considérée comme très importante. Nous
utilisons l'avion, entre autres, pour procéder à ce
macro-inventaire. Nous pourrons vous donner plus d'explications si vous le
souhaitez.
En deuxième lieu, un thème de notre intervention est
l'implication, la collaboration, la con-
sultation de la population qui devient préalable à tout
projet de restauration de monuments historiques classés ou non. Par le
biais des conseils régionaux de la culture et du service d'animation du
ministère, des concepts d'utilisation sont fournis aux responsables des
projets. Il y a aussi une implication du ministère auprès des
municipalités et de la Société d'habitation du
Québec en vue de préparer, conjointement, des programmes de
restauration à l'intérieur des arrondissements historiques. Comme
moyens, nous pouvons, éventuellement, subventionner les
municipalités pour défrayer le coût des travaux
jugés utiles pour préserver l'unité architecturale des
arrondissements. Egalement, nous prévoyons la signature d'ententes avec
les municipalités et parfois la Société d'habitation du
Québec pour établir une stratégie d'intervention en vue de
solutionner les problèmes de circulation, de logement et de
rentabilité sociale à l'intérieur des arrondissements. Il
y a même des cas où nous traitons avec la SAQ, la
Société des alcools, qui est susceptible de s'intéresser
à la mise en valeur de monuments, de vieilles maisons et, à ce
moment-là, le bail qu'est prête à signer la SAQ permet au
propriétaire, autant que possible un pouvoir public, de faire les
travaux importants de restauration.
Enfin, il y a aussi la poursuite de travaux de sauvetage de sites
archéologiques dans les régions sujettes à des travaux
majeurs mon texte me dit ici: de génie, mais j'hésite
à le prononcer par exemple à la baie James ou dans
certains autres endroits qui sont susceptibles d'être modifiés par
la main de l'homme ou encore dans les environs des villes, étant
donné le développement des villes. Voilà, en gros, si vous
voulez. Cela nous a amenés à certaines interventions à
l'île d'Orléans, à l'île Bonaventure, dans l'archipel
des îles Mingan en particulier. Il y a aussi sur la
Basse-Côte-Nord, entre Sept-lles et Havre-Saint-Pierre, où nous
faisons des efforts de sauvetage et, évidemment, encore une fois,
à la baie James.
Enfin, il y a des déplacements fréquents au
Nouveau-Québec en vue de s'assurer la collaboration des conseils de
village, en vue d'effectuer des études de reconnaissance du potentiel
des sites amérindiens devant faire l'objet de fouilles. Ce qui nous a
mis également en contact, bien sûr, avec les Inuit.
Je termine cette introduction générale à cet
élément 2 en disant que j'ai eu le plaisir de rencontrer les
membres de la Coopérative du Nouveau-Québec et de discuter avec
des représentants de villages inuit. Nous avons convenu qu'une de mes
marottes pourrait peut-être être appliquée dans un premier
temps avec eux, c'est-à-dire de procéder à un retour de
biens culturels vers les régions d'où elles proviennent. Cela est
une idée générale. Je souhaite que, de plus en plus, on
cherche à retourner vers les régions les biens, les objets les
artefacts. Et nous espérons commencer éventuellement avec les
Inuit. Ce qui serait quand même assez fantastique. Ils me disaient au
moment de cette rencontre: C'est rendu que, quand nous parlons à nos
fils de notre façon de nous déplacer, il y a quelques
années, de notre façon de pêcher, il y a quelques
années, il faut quasiment les amener à Montréal pour leur
montrer les objets dont nous leur parlons. Il n'en reste plus chez nous, et la
première demande qu'ils m'ont formulée, c'est de pouvoir
éventuellement ravoir chez eux certains de ces objets. Inutile de vous
dire que je me suis engagé séance tenante à donner suite
à cette demande et nous avons, d'ailleurs, pour très
prochainement, un projet d'exposition. Nous irons en terre inuit, nous irons
dans le Nord, nous, gens du Sud, pour, dans un premier temps, faire une
exposition et éventuellement leur laisser chez eux plusieurs de ces
objets qui ont été amenés dans le sud pour fins
d'études.
Mme Lavoie-Roux: Supposément! M. Vaugeois:
Supposément.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Ma première question concerne la Semaine
du patrimoine. Je comprends qu'il y a une partie des crédits qui
relèvent du Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux
sports, mais il reste que vous avez participé, je pense...
M. Guay: Là-dessus, si je peux me permettre seulement une
remarque...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Guay: ... je n'ai pas d'objection personnellement, mais si
cela concerne le programme de la Semaine du patrimoine, je pense que cela
relève du programme suivant: Gestion interne et soutien. Je ne veux pas
faire de chichi.
M. Vaugeois: Ah! Si on peut avancer l'étude des
crédits de cette façon.
M. Guay: Je pense qu'on ne peut pour autant passer outre.
Mme Lavoie-Roux: Si vous voulez...
M. Vaugeois: Allez-y donc pour la Semaine du patrimoine. Cela
sera fait.
Semaine du patrimoine
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Le gouvernement du Québec a
accordé une enveloppe globale de $2 400 000, dont une part importante
servira au financement des manifestations de la Semaine du patrimoine et de la
Fête nationale. C'est dans un communiqué il n'y a pas de
date sur le communiqué; il doit y en avoir une certain 20 avril
1978
Dans un autre communiqué du 27 avril 1978 on dit: "Les organismes
participants pourront également se prévaloir du programme d'aide
financier
du gouvernement du Québec. Un budget de $1 750 000 sera
consacré à cette fin".
Je voudrais savoir si le $1 750 000 s'ajoute aux $2 400 000.
M. Vaugeois: Le $1 750 000, si je comprends bien je n'ai
pas les documents sous les yeux c'est une partie des $2 400 000...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Vaugeois: ... confiée à tel organisme, à
tel endroit, l'autre partie du budget servant soit à du fonctionnement,
soit à de la publicité. Il reste, à un certain moment, $1
750 000 pour les activités proprement dites. Je pense que c'est ainsi
qu'il faut comprendre les deux communiqués que vous avez entre les
mains.
Mme Lavoie-Roux: D'accord. Ceci ne comprend pas les Fêtes
du 370ième anniversaire de Québec.
M. Vaugeois: Non.
Mme Lavoie-Roux: Et c'est un montant de combien?
M. Vaugeois: Cela ne relève pas de moi, mais je peux vous
dire...
Mme Lavoie-Roux: $800 000 à peu près, si ma
mémoire est bonne.
M. Vaugeois: Je pense que c'est $800 000 au total, mais je le dis
sous toute réserve. C'est une corporation spéciale qui a
été formée...
Mme Lavoie-Roux: Une municipalité... les Affaires
municipales...
M. Vaugeois: ... avec la ville de Québec et des gens du
gouvernement. Nous avons un sous-ministre adjoint qui fait partie de cette
corporation, Pierre Boucher...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Vaugeois: ... mais le ministère comme tel n'est pas
concerné. C'est une corporation spécifique qui a
été formée pour l'organisation des fêtes du retour
aux sources.
Mme Lavoie-Roux: Les $2 400 000 couvrent-ils toute la Fête
nationale et la Semaine du patrimoine? Y a-t-il d'autres sommes qui ont
été affectées à...?
M. Vaugeois: Pour cela? Oui. Il est question d'une somme de $100
000 à $150 000 de la part du ministère des Affaires culturelles
qui s'ajouterait aux $2 400 000.
Je vais vous résumer cela rapidement. Comme les $2 400 000
avaient, dans un premier temps, été annoncés pour
l'organisation de la Fête nationale et que, dans un deuxième
temps, il y a eu arrimage des dates de la Fête nationale et de la Semaine
du patrimoine, la Fête nationale devenant le premier jour de la Semaine
du patrimoine, tout le monde a trouvé logique que les organismes qui
allaient se rendre responsables de l'affectation de l'enveloppe de $2 400
000... donc, tout le monde a trouvé raisonnable que ces sommes servent,
éventuellement, non seulement à financer la Fête nationale,
mais également les activités de la Semaine du patrimoine,
d'autant plus que le ministère n'avait pas de budget spécifique
pour les activités de la Semaine du patrimoine. Compte tenu que les $2
400 000 avaient d'abord été identifiés pour la Fête
nationale seulement, notre ministère a convenu d'arrondir la somme et
d'ajouter un peu pour faire sa part, pour ne pas avoir l'air de devenir des
pique-assiettes et de gruger à partir de l'enveloppe qui avait
été initialement prévue pour la Fête nationale.
Concrètement, actuellement, il y a $2 400 000 qui ont
été ventilés. Chaque région sait à peu
près de combien d'argent elle dispose et nous venons arrondir ce
montant.
Mme Lavoie-Roux: Ce qui veut dire que pour les fêtes, que
cela soit la Semaine du patrimoine, ou la Fête nationale, ou le
370ième anniversaire de la ville de Québec, on va se rendre
à un montant de près de $3 500 000.
M. Vaugeois: Alors, attention, il y a quand même...
Mme Lavoie-Roux: ... qui ne relèvent pas tous du
même budget mais il reste quand même que ce sont tous des
événements qui vous intéressent.
M. Vaugeois: Oui, mais je vais faire des petites distinctions.
D'abord, pour la Fête nationale et la Semaine du patrimoine, il n'y a que
les $2 400 000 qui sont autorisés pour l'instant, l'autre montant, c'est
une hypothèse. L'arrondissement de ces enveloppes d'un montant entre
$100 000 et $150 000, c'est une hypothèse. Nous n'avons pas encore les
autorisations.
Mme Lavoie-Roux: C'est quand même prévu. J'ai un
article ici: Cette somme ne serait pas comprise dans le budget de $2 400
000.
M. Vaugeois: C'est cela, mais on n'a pas encore l'accord du
Conseil du trésor. Par ailleurs, j'ai parlé de $800 000 c'est
peut-être $500 000, remarquez, pour le 3 juillet, et peu importe. Ce
qu'il faut savoir, c'est qu'une bonne partie de ces montants sert à une
publicité à caractère touristique. Il s'agit de profiter
de cet événement qui s'inscrit dans le Festival
d'été, qui est le premier jour du Festival d'été
qui va suivre.
Mme Lavoie-Roux: Qui va suivre? Il y a combien d'argent qui a
été accordé au Festival d'été?
M. Vaugeois: Je suis incapable de vous le dire.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que cela vient du Haut-Commissariat
également, une partie j'imagine, n'est-ce pas?
M. Vaugeois: Je ne le sais pas du tout.
Mme Lavoie-Roux: Le monsieur en arrière a l'air d'avoir
une idée.
M. Vaugeois: On me dit que l'an dernier, cela venait du
Haut-Commissariat, et ce ne sont pas des sommes très
élevées, rendu là, parce que la ville de Québec est
responsable du Festival d'été, elle met sa part, mais
l'idée, c'est que c'est une activité touristique en un sens
où les sites... On a trouvé, par le biais de la fête du 3
juillet, une occasion de suggérer aux franco-américains et aux
franco-canadiens de venir nous visiter. C'est une activité, c'est un
budget à caractère touristique dans une large mesure, mais
n'étant pas responsable de cela, je ne peux pas vous en dire davantage.
Vous avez l'air de suggérer que tout cela mis ensemble, cela fait
beaucoup. C'est une activité, ce sont des investissements qu'on essaie
de faire.
Une Voix: II y a assez de touristes aux Etats-Unis.
M. Vaugeois: C'est cela, il y a de l'argent pour le 3 juillet; je
vous présente, soit dit en passant, Gaston Harvey, qui est mon nouveau
directeur de cabinet et puisque nous en sommes aux présentations,
Jean-Pierre Montesinos, qui est le directeur général du
patrimoine, qui est nouvellement nommé; c'est une des premières
nominations que j'ai eu le plaisir de faire, c'est un concours qui était
en marche, remarquez. il y avait déjà un budget de
publicité aux Etats-Unis pour inciter les Américains à
venir nous visiter et il faut quand même leur donner des motifs pour
venir nous visiter. On a pris celui du retour aux sources. Nous ne sommes pas
les seuls à faire cela, il y a plusieurs compagnies d'aviation
d'ailleurs qui ont commencé aux Etats-Unis une publicité qui dit
à peu près ceci: Les Etats-Unis ont été
peuplés par des gens d'un peu partout; vous, vous venez de la Hollande,
alors on vous propose de retourner en Hollande, le pays d'où viennent
vos ancêtres, etc. On joue un peu dans ce jeu, c'est un peu le
thème de Roots, qui est très populaire aux Etats-Unis
actuellement; Roots, pour un certain nombre d'Américains, c'est le
Québec. Nous, on a pensé opportun de leur suggérer aussi
d'aller peut-être en Hollande pour certains, peut-être en Allemagne
pour d'autres, mais pourquoi pas aussi au Québec pour un certain
nombre?
Mme Lavoie-Roux: C'est une question...
M. Vaugeois: Ce n'est donc pas de l'argent nouveau.
Mme Lavoie-Roux: C'est une question que je poserai au feuilleton,
de toute façon. Je pense qu'ils pourront me répondre plus en
détail à savoir d'où viennent...
M. Vaugeois: En tout cas, ils vont vous répondre beaucoup
mieux.
Mme Lavoie-Roux: Non, ce n'était pas dans ce sens que je
le disais. D'où viennent tous les fonds qui sont affectés
à ces fêtes? Je pense que c'est légitime qu'on se pose la
question, parce que quand on regarde comment, dans d'autres domaines on
parlait tout à l'heure de l'inventaire des archives, cela vous
inquiétait qu'on touche à $3 500 000 facilement et
peut-être davantage, il reste que c'est quand même une
période de trois semaines.
Maintenant, du point de vue... C'est une question, ce n'est pas
tellement l'argent en soi, c'est-à-dire c'est $2 400 000, mais est-ce
que $2 400 000 plus possiblement $200 000, $300 000 venant des Affaires
culturelles, est-ce que vous trouvez que c'est une formule de financement
quand cela atteint cet ordre de grandeur qui va finalement,
à long terme, atteindre les objectifs que l'on veut dans le sens que
finalement, tout le monde s'attend à avoir une petite subvention,
à droite et à gauche? Je ne sais pas dans quelle mesure on ne
tarit pas les initiatives spontanées et volontaires des gens. Qu'il y
ait certains frais qui soient encourus, d'accord, mais quand on entre dans cet
ordre de grandeur, je me dis qu'il faut être prudent, parce que
finalement il reste qu'une partie de la créativité, une partie du
sentiment national et tout cela, il faut quand même que cela soit
spontané, qu'on ne soit pas toujours à percevoir les quelques
sous qu'une organisation ou que le gouvernement peut nous donner. Dans ce sens,
cela me fait penser un peu aux projets PIL, ces histoires-là; ce ne sont
pas les mêmes objectifs qu'on poursuit mais, finalement, les gens ne font
plus rien s'ils n'ont pas la possibilité d'une subvention au bout de la
ligne. Je ne suis pas sûre que ce soit une formule rentable, pas dans le
sens économique mais dans le sens de la motivation des citoyens, que de
l'utiliser sur une échelle qui me semble devenir de plus en plus
considérable. (21 heures)
M. Vaugeois: C'est un point de vue intéressant que vous
soulevez là. Je peux vous dire qu'au niveau de la Semaine du patrimoine,
nous en sommes à notre troisième expérience. La
première année, il n'y avait pas de budget pour les
activités; il y a eu quand même beaucoup d'activités qui se
sont organisées spontanément, bénévolement. La
deuxième année, cela a été la même chose,
encore que, dans certains cas, les gens de la Corporation de la fête
nationale sont venus à la rescousse de certains projets pour un montant
de $75 000 ou $80 000.
L'approche du ministère, cette année, c'était de ne
pas avoir d'argent pour les activités. Pour être complet je
l'ai oublié tout à l'heure nous avons, au niveau du
ministère, un budget d'envi-
ron $200 000 pour la Semaine du patrimoine. Là, je ne parle pas
de financement d'activités...
Mme Lavoie-Roux: C'est pour la publicité.
M. Vaugeois: ... c'est pour le thème, la publicité,
etc. Nous avons à peu près $150 000 en contrats de
publicité qui a été donné à
Intercommunications, après toutes les règles nouvelles de
procédure pour aller chercher ce genre de contrat, et il y a à
peu près $50 000 de prévus pour des contractuels ou des gens qui
travaillent, si vous voulez, à l'organisation de la Semaine du
patrimoine, dans son ensemble.
C'est un peu l'exemple de ce qui se faisait autour de nous qui nous a
amené, nous aussi, à prévoir des petites sommes pour
soutenir des activités qui allaient être proposées dans le
cadre de la Semaine du patrimoine. Finalement, quand on regarde la ventilation
de l'enveloppe et qu'on voit cela par régions, c'est quand même
assez intéressant parce que, traditionnellement, il y avait beaucoup
d'argent qui allait à Montréal et, finalement, il y a quelques
artistes...
Mme Lavoie-Roux: II y en a trop qui est allé à
Montréal, aussi.
M. Vaugeois: ... qui s'en tiraient avec de gros cachets. Oui;
alors, là, il y a un effort de décentralisation de ce
côté. Si vous regardez les enveloppes régionales, cela ne
donne pas de gros montants. Cela donne des montants de $50 000 ou $60 000 pour
une multiplicité d'activités qui sont proposées.
Chaque activité, finalement, reçoit des sommes assez
minimes. Je peux vous dire qu'au niveau de la Semaine du patrimoine, il y a une
semaine, quand on m'a fait rapport, il y avait à peu près 300
activités qui nous étaient proposées et on a
débordé cela largement. Plusieurs activités nous sont tout
simplement signalées; elles s'organisent spontanément et
bénévolement. Quelques-unes nécessitent, si vous voulez,
un petit coup de pouce financier mais c'est un petit coup de pouce
financier.
Je suis d'accord avec vous que cette intervention monétaire ne
devrait pas enlever à ces activités de la fête nationale et
de la Semaine du patrimoine, dans la mesure où cela se fait dans un
quartier, dans les villages et en régions, leur caractère
spontané et bénévole. Je suis d'accord avec vous
là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, je pense que si vous regardez les
remarques qui étaient faites dans le bilan de la Semaine du patrimoine,
on souhaitait qu'on n'ait pas à être mobilisé de
façon indue pour subventionner des organismes locaux.
M. Vaugeois: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: Disant que: "Cela mobilisait, de façon
indue, une grande partie de leurs énergies et ce, pour des
résultats peu concluants en regard de l'ensemble du dossier et de la
nature des activités ainsi subventionnées, qui sont loin
d'être les plus représentatives de l'ensemble des activités
inscrites au programme."
Cela est tiré du bilan de la Semaine du patrimoine, 1977.
M. Vaugeois: C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: C'est une recommandation qui vient des gens qui
en étaient responsables et je ne suis pas sûre cela,
c'était pour la Semaine du patrimoine dans quelle mesure cela ne
s'adresse pas aussi aux fêtes nationales, même si cela ne
relève pas directement de vous. Cette année, vous combinez les
deux, de toute façon. L'autre...
M. Vaugeois: Nous combinons les deux mais il y a deux ministres
différents qui en sont responsables, comme vous le savez.
Mme Lavoie-Roux: Oui, vous faites partie d'un même
cabinet.
M. Vaugeois: Nous faisons partie du même cabinet.
Mme Lavoie-Roux: Oui. L'autre remarque que je voulais faire, je
trouve regrettable que, finalement, la Semaine du patrimoine arrive avec la fin
des classes; en la faisant coïncider avec la fête nationale, vous
enlevez toute la préparation scolaire, là où il reste
encore de la motivation aux enseignants, à ce moment-là de
l'année, ou même aux étudiants. Il reste que, quand
même, c'est une activité à la fois pédagogique et
parapédagogique qui peut utilement occuper les loisirs de la
dernière semaine d'école et qui, au plan de l'éducation,
est irremplaçable. Cela ne coûte rien et il faudra peut-être
je ne sais pas si vous êtes d'accord avec moi
réfléchir à cela une autre année.
M. Vaugeois: Oui, je suis d'accord avec vous, Madame.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Gaspé.
Mme Lavoie-Roux: C'est déjà fini?
Le Président (M. Jolivet): Ah! excusez. Je pensais que
vous aviez terminé.
Mme Lavoie-Roux: Non, allez. J'y reviendrai.
Le Président (M. Jolivet): II vous reste encore quatre
minutes. M. le député de Gaspé.
M. Le Moignan: II me reste cinq minutes?
Une Voix: II ne vous reste que cinq minutes, quant à
nous.
M. Le Moignan: C'est parce qu'on avait conclu un marché,
tous les deux.
Le Président (M. Jolivet): Vous avez conclu un
marché?
M. de Bellefeuille: J'accepte volontiers, oui.
Le Président (M. Jolivet): Le député de
Deux-Montagnes, dans ce cas. Marché conclu.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président, et je remercie
M. le député de Gaspé de me céder son tour de
parole; il ne cède pas son droit de parole, c'est seulement le tour.
Je voulais revenir à l'élément 2 du programme 2
pour faire quelques remarques de portée générale et, en
quelque sorte, exprimer une inquiétude. Avant d'exprimer cette
inquiétude en termes généraux et théoriques, je
vais chercher à l'illustrer par un fait. Ce fait, c'est une coupure de
journal que vous pouvez regarder, qui montre une vieille maison
québécoise en pierres et en flammes. Une maison
québécoise en pierres qui brûle, qui est livrée au
feu destructeur.
C'est tiré d'un hebdomadaire d'un comté voisin du mien;
l'hebdomadaire s'appelle L'Argenteuil. C'est le numéro qui porte la date
du 26 avril 1978. Cela fait à peu près deux semaines. Je vais
vous lire la légende qui porte un titre: "Un incendie
prémédité". "Un groupe d'étudiants de
l'école Saint-Maxime de Ville de Laval était en visite à
Lachute afin de s'exercer au métier de pompier dont ils viennent de
terminer deux années d'études. Ces deux années ont
porté sur la théorie des incendies et, la semaine
dernière, dix-neuf étudiants étaient à Lachute pour
appliquer cette théorie. Ils ont reçu une formation pendant
quatre jours à Lachute, alors qu'ils incendiaient une maison
située rue Bétanie, près du centre commercial. Le
responsable de ce groupe d'étudiants était M. Pierre Damico et
des pompiers de Laval s'étaient rendus sur les lieux pour livrer
quelques conseils aux futurs pompiers. La dernière pratique des
étudiants se rapprochait dangereusement de la réalité,
alors qu'après avoir incendié la maison et fermé toutes
les issues, les étudiants ont dû combattre seuls les flammes sous
l'oeil vigilant de leur instructeur". "Cette maison, de style
québécois, avait appartenu longtemps à la famille Donat
Filion. (Photo, Thérèse Parisien)".
Dans ce texte, que je trouve absolument remarquable pour moi,
c'est une pièce d'anthologie je relève en particulier deux
choses: c'est que cette maison, que l'on punit, que l'on châtie, que l'on
détruit délibérément, de quel crime est-elle
accusée dans ce texte? Tout ce que je peux voir, c'est qu'elle
était située tout près du centre commercial. Cela me
trouble beaucoup parce que s il y a une maison québécoise
ancienne qui est située près d'un centre commercial, j'ai
nettement l'impression qu'elle était là avant; ce n'est pas la
maison qui a tort d'être là, c'est le centre commercial qui a tort
d'être à côté de cette maison qui la dépare
peut-être et qui lui porte l'affront définitif si, à cause
de ce voisinage, on décide que la maison doit disparaître.
Je signale, en second lieu, que l'auteur de cette remarquable
légende conclut par une phrase qui est tout un poème: "Cette
maison, de style québécois, avait appartenu longtemps à la
famille Donat Filion".
Non seulement on indique que cette maison est ancienne, qu'elle est de
style québécois, on indique qu'on en connaît l'histoire et
le fait d'en connaître l'histoire, que la maison ait appartenu longtemps
à la famille Donat Filion, est mentionné là pour son
intérêt documentaire, comme si personne ne se rendait compte
qu'une maison, ainsi identifiée à une famille de l'endroit, c'est
un bien patrimonial.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas un signe de protestation, votre
photo...
M. de Bellefeuille: Cela resterait à voir.
Mme Lavoie-Roux: Je l'interprète comme cela.
M. de Bellefeuille: Cela resterait à voir, madame. Moi, en
tout cas, pour passer à des considérations de portée plus
générale, comme vous le savez tous, je pense, comme vous le
savez, M. le Président, puisque c'est à vous que je dois
m'a-dresser, j'ai passé un peu plus d'un an comme adjoint parlementaire
aux Affaires culturelles et une question sur laquelle je suis souvent revenu
dans des conversations avec le ministre et avec les fonctionnaires et les
membres du cabinet du ministre, c'était la question des moyens mis en
oeuvre pour assurer la préservation de notre patrimoine bâti, en
particulier. On m'a fait, généralement, des réponses qui
indiquaient, d'une part, l'insuffisance des moyens mis à la disposition
de la direction générale du patrimoine.
On m'informait, d'autre part, des projets du ministère quant
à la régionalisation et à la décentralisation. On
me disait qu'on allait de plus en plus se fier aux municipalités, mais
durant nos délibérations de ces jours-ci, nous avons reconnu
qu'il ne serait pas exact de prétendre que dans tous les cas l'attitude
des municipalités soit telle que nous puissions dès maintenant
nous fier à elles. On m'a répondu: II appartient aux gens
d'assurer la défense de leur patrimoine et de signaler au
ministère les bâtiments qui sont en danger. Là je viens de
vous signaler un bâtiment qui est hors de danger.
Mme Lavoie-Roux: Qui n'est plus en danger.
M. de Bellefeuille: Son affaire est réglée. Il est
dommage que personne n'ait signalé cela plus tôt au
ministère, mais tout ceci pour dire qu'après un peu plus d'un an
passé comme adjoint parlementaire aux Affaires culturelles, j'en suis
resté avec un doute profond. J'en suis resté avec la conviction
qu'effectivement, les moyens mis en oeuvre pour assurer la sauvegarde de notre
patrimoine bâti sont insuffisants et que rien dans ce qui m'a
été répondu quand j'ai exprimé cette
inquiétude ne nous donne des garanties suffisantes. Je de-
mande au ministre par quels moyens nous pourrions mieux garantir la
conservation de notre patrimoine bâti? Je pense que c'est une
espèce de question d'urgence. Je pense que ce cas que je viens de vous
citer n'est pas rare. Je pense que dans toutes les régions du
Québec, et on n'a qu'à lire par exemple les écrits de M.
Alain Duhamel ou d'autres journalistes pour se rendre compte qu'il y a
continuellement, fréquemment des cas où des
éléments du patrimoine bâti disparaissent.
Je me demande s'il n'y a pas une espèce de passivité
devant cette urgence. S'il y a une espèce de passivité devant
cette urgence, je voudrais que le ministre m'assure que le ministère va
secouer cette passivité. Bien sûr, je reconnais qu'il n'est pas
seul au tableau. Je reconnais qu'il ne lui appartient pas à lui seul de
secouer cette passivité. Mais c'est quand même à lui, il me
semble, d'accrocher le grelot. C'est quand même lui qui porte l'ultime
responsabilité. Il me paraît insuffisant de dire qu'il appartient
à tous les citoyens de s en préoccuper. Il m'apparaît
insuffisant de dire qu'on va se fier aux municipalités. Je sais qu'on
veut se fier aussi aux sociétés d'histoire. Je sais que dans
certains cas, les sociétés d'histoire peuvent jouer un
rôle.
Mais ayant participé aux travaux d'une société
d'histoire et aux travaux de la Fédération des
sociétés d'histoire, je suis d'avis que dans la majorité
des cas, les sociétés d'histoire ne sont pas munies des moyens
voulus, ne sont même pas prêtes, disposées psychologiquement
à aborder de front ce problème. Par ailleurs, j'ai l'impression
qu'au plan administratif et là je m'aventure sur une glace mince,
parce que je ne voudrais pas que mes propos paraissent constituer une critique
injustifiée la Direction générale du patrimoine
devrait être plus mobile qu'elle ne l'est. Je ne dis pas qu elle ne l'est
pas. Je sais qu'il y a dans cette direction générale une assez
remarquable mobilité à certains moments, mais une fois qu'on a
signalé le danger, il me semble qu'il faudrait en venir à une
situation où il y aurait une plus grande mobilité de la part de
la direction générale et de la part du ministère, qui soit
plus spontanée, qui consiste à exercer une action plus
poussée sur le terrain afin de susciter les collaborations voulues pour
parcourir les étapes nécessaires. Cela exige des inventaires,
cela exige qu'on remplisse des fiches, qu'on fasse des demandes au ministre
pour qu'il puisse, selon les dispositions de la loi, émettre des avis
d'intention et prendre d'autres mesures. Mais cela exige un programme, une
mobilité, une conscience du danger et la volonté d'augmenter les
moyens; cela ne me paraît pas assuré. C'est la série de
questions que je voulais poser au ministre. (21 h 15)
M. Vaugeois: M. le Président, un seul mot pour souscrire
à l'essentiel de ce que le député de Deux-Montagnes vient
de dire. Il m'avait d'ailleurs montré le document dont il a fait
état ce soir. Pour nous, le problème reste entier, encore que le
travail que nous faisons de macro-inventaire devrait nous permettre de cesser
d'être toujours comme un pompier qui répond à la sonnerie
et de connaître un peu le patrimoine bâti. Actuellement, le rythme
du macro-inventaire, le rythme espéré du macro-inventaire est de
vingt comtés municipaux par année; c'est un rythme qui est
difficile à tenir, mais nous comptions donc, à l'intérieur
de cinq ans, faire le tour du Québec de cette façon,
photographier et inventorier à peu près tout ce qui est
intéressant au Québec.
Mais même si nous avions un inventaire complet et à point,
ce que nous nous efforçons de nous donner comme instrument, il restera
toujours que le problème de la conservation du patrimoine bâti se
posera. En gros, vous pouvez toujours dire à un propriétaire
qu'il ne peut pas le démolir, qu'il ne peut pas le sacrifier, on ne peut
pas arriver uniquement avec des contraintes ou des restrictions. Il faut aussi
arriver avec des programmes de mise en valeur, ce qui nécessite des
budgets.
Compte tenu du fait que le gouvernement du Québec vient de
s'ouvrir à ces questions, je pense qu'en peu de temps nous avons fait du
bon travail je parle pour les dernières années sans faire
référence à un gouvernement en particulier. On sent que ce
travail a animé le milieu et que les besoins se font de plus en plus
criants. Il y a dix ans, peu de personnes auraient protesté; aujour-d
hui, Dieu merci, on sait protester. Notre préoccupation d'associer les
municipalités à ce travail de protection et de mise en valeur du
patrimoine procède justement des lacunes de notre inventaire. Et
même si on avait un inventaire, il faudrait, encore là, pouvoir
être vigilant. Ce n'est pas possible d'être vigilant à
partir d'un petit noyau de fonctionnaires à Québec.
Nous avons fait un effort de décentralisation sur Montréal
pour la direction générale du patrimoine. Actuellement, nous
avons une excellente équipe qui est très active, très
disponible, qui répond rapidement et qui fait un travail d'animation et
de sensibilisation. Je crois que, malgré les réserves qu on
exprime dans certains milieux, les municipalités, sous l'action des
citoyens, peuvent devenir des alliés extrêmement précieux
dans la mise en valeur du patrimoine et dans sa protection. Actuellement, nous
préparons un nouveau programme qui inciterait les municipalités
à se porter acquéreur de tout monument d'intérêt
patrimonial. Nous sommes à la veille de proposer au Conseil du
trésor une intervention conjointe Affaires culturelles et
municipalités nous en avons discuté justement encore ce
soir qui amènerait le ministère à souscrire pour
environ 60%, invitant la municipalité à souscrire pour la
différence.
Si le bâtiment reste entre les mains d'un particulier, on est dans
une espèce d'impasse. On ne peut pas obliger le particulier à
faire des frais, on ne peut pas I empêcher de jouir de sa
propriété. Il faut donc avoir quelque chose à proposer. On
pense que les municipalités peuvent généralement se
montrer intéressées à ces bâtiments et ensemble on
peut trouver des vocations. De plus en plus, nous avons des idées sur
les fonctions possibles de ces bâtiments; je veux parler des maisons
d'artisanat, des maisons des vins etc. On pensait traditionnellement aux
musées, mais il y a encore des maisons où des gens peuvent
habiter. C'est ce que nous faisons à la Place Royale, par exemple,
actuellement. C'est devenu du logement à bon prix à la Place
Royale. Si on pouvait compléter dans un délai raisonnable nos
travaux de restauration, on aurait contribué, par le biais de la
restauration, à loger probablement au total plus d'une centaine de
familles.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
vous reprenez votre tour.
M. Le Moignan: Oui, je reprends mon tour. Ce ne sera pas
tellement long. Dans le livre blanc, le chapitre 13ième que je n'ai pas
lu est consacré au patrimoine et la Presse de ce matin attire notre
attention sur le fait que le patrimoine doit être une affaire
provinciale. Je crois rejoindre la question que je vous ai posée ce
matin, au sujet du Conseil des arts du Canada. Je n'avais pas lu cet article
à ce moment, mais si on revendique des pouvoirs beaucoup plus grands, si
on parle de ces agacements face aux interventions fédérales, on
dit qu'à cause des taxes que l'on paie, des sites des musées
nationaux, etc., le fédéral devrait verser un peu plus d'argent
au Québec.
C'était cela ma préoccupation ce matin, je la retrouve ici
et je me pose certaines questions face à l'avenir, face à
l'indépendance du Québec que vous prônez. Supposons que
cela se réalise un jour, il y a beaucoup de choses au Musée
national, au musée d'Ottawa, qui sont des trésors, des biens
québécois. Pensez-vous qu'un jour le fédéral vous
céderait ces choses qui font partie de notre patrimoine?
M. Vaugeois: II y a beaucoup de distinction qu'on pourrait faire.
D'abord il y a des objets importants dans notre histoire qui sont au Royal
Ontario Museum par exemple à Toronto. Je cherche le nom de ce
musée dans la région de Toronto qui a la plus belle collection de
Clarence Gagnon. Au moins, ces musées sont bien organisés et ils
mettent en valeur ces biens culturels. C'est déjà quelque
chose.
Quant à l'intervention du gouvernement fédéral,
vous savez sans doute que, actuellement, quand le gouvernement
fédéral intervient sur un site québécois, les
objets restent au Québec. Le gouvernement fédéral s'est
corrigé lui-même d'ailleurs dans ses interventions au
Québec. Par exemple, à la gare maritime Champlain, ici, vous avez
une salle très importante où on étudie les artefacts et on
laisse maintenant les objets au Québec. Encore qu'il arrivera que des
objets iront à Ottawa pour fins d'étude plus
spécialisée, mais ils reviendront au Québec. Au site des
Vieilles Forges où les fouilles ont été importantes, les
objets qui ont été trouvés y seront conservés.
C'est maintenant la politique adoptée par Parcs Canada en
particulier.
M. Le Moignan: Oui, ils ont fait la même chose pour le
Marquis de Malauze dans la région de
Restigouche, un des derniers bateaux français qui a
été coulé vers 1759 ou 1760.
Maintenat, dans le même chapitre de protection, quand on parle de
recherche archéologique, la recherche sous-marine, juridiction
provinciale ou fédérale, est-ce que, si on fait des recherches,
des trouvailles, cela demeure encore au Québec, même si les
travaux sont faits par le fédéral?
M. Vaugeois: Je ne peux pas vous répondre. Je sais que
notre ministère a été à peu près absent
d'ailleurs de cet aspect de fouilles archéologiques. Je pense qu'on
vient d'engager un contractuel pour être présent dans le secteur
de la fouille sous-marine ou sub-marine. Je ne sais pas ce qu'on a conclu sur
la question de la propriété des biens trouvés.
Le problème est de taille parce qu'il y a des Américains
récemment qui ont trouvé des choses de très grande valeur
sur nos côtes. Là, il y a la loi canadienne d'exportation des
biens culturels qui intervient et, je pense que le gouvernement
fédéral a empêché, dans ce cas, ces
Américains de faire un coup d'argent fantastique. Mais je ne saurais
répondre à la question telle que vous la formulez. Je ne sais pas
si...
Là, ma prudence tient peut-être de mon passage aux Affaires
intergouvernementales. Je me demande ce qui arriverait si on faisait une
trouvaille dans le golfe du Saint-Laurent, par exemple. Il y a des
spécialistes derrière l'équipe libérale, je vois
Jean-Claude Rivest qui considère que le problème ne se pose pas.
Peut-être qu'il se pose pour le pétrole et qu'il ne se pose pas
pour les biens culturels, mais la loi 2, la Loi sur les biens culturels
prévoit déjà que nous pouvons classer ces sites au
même titre que les biens mobiliers ou...
M. Le Moignan: Parce que le problème va se poser de plus
en plus.
M. Vaugeois: J'hésite surtout, parce que
généralement, ces sites sont dans des territoires où les
propriétés sont discutées. C'est assez nouveau pour moi
comme question.
M. Le Moignan: Je sais que cela commence, il y a beaucoup de
jeunes qui s'intéressent à la plongée sous-marine, qui
font la découverte de sites intéressants, d'objets anciens ou de
bateaux. Avec le temps, peut-être le problème se posera-t-il pour
le Québec. De quelle façon allons-nous y voir?
M. Vaugeois: C'est un beau problème. On m'informe que dans
le cas de la rivière Richelieu là, on est vraiment chez
nous on accorde des permis pour des fouilles ou des recherches dans la
rivière au même titre que les sites archéologiques
terrestres. Le problème, à mon avis, se pose différemment
quand on est dans le golfe et quand les équipes sont
fédérales. A notre connaissance, on ne nous demande pas encore de
permis.
M. Le Moignan: Même pour la recherche archéologique
des sites découverts, des sites anciens qui nous rappellent les
Amérindiens...
M. Vaugeois: Oui.
M. Le Moignan: ... quand c'est découvert par accident sur
un terrain privé ou encore, comme le cas s'est produit, en
traçant une route, qu est-ce qui survient?
M. Vaugeois: Nous intervenons. Nous avons d'ailleurs un excellent
service d'archéologie qui intervient, qui détache des groupes
d'experts. On peut dire que ce service fonctionne bien. En plus, ce service a
maintenant la responsabilité d'émettre des permis et de
contrôler les fouilles qui se font un peu partout au Québec.
Je vous signale d'ailleurs que l'équipe du service
archéologique vient de contribuer à un numéro des cahiers
d'Archéologie, publiés en France, qui a été
consacré aux travaux faits ici. On a une excellente équipe et
c'est l'une des premières, d'ailleurs, qui s'est constituée
autour de la direction générale du patrimoine à partir, en
particulier, des travaux de la Place Royale et ceux des forges du
Saint-Maurice. C'est un peu l'embryon de la direction générale du
patrimoine que vous trouvez là. Quand on va à la Place Royale,
à Québec, on se rend compte que le seul effort
d'interprétation est de type archéologique; là où
nous marquons du retard, c'est dans l'interprétation historique.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Pour donner suite aux préoccupations du
député de Deux-Montagnes, que je partage entièrement,
j'aimerais m'entretenir, par votre intermédiaire, M. le
Président, avec le ministre au sujet d'un arrondissement historique bien
particulier, celui que je représente à l'Assemblée
nationale, qui est situé à deux pas de cet édifice et qui
connaît des problèmes depuis toujours, sans doute, mais le fait
qu'il soit un arrondissement historique ne semble pas contribuer à
résoudre ces problèmes. Je suis d'ailleurs heureux de voir qu'un
de mes électeurs est justement là, M. Rivest; j'espère
qu'il trouvera que son député défend bien ses
intérêts et qu'aux prochaines élections il aura la bonne
idée de voter pour le bon parti, cette fois-ci.
Toujours est-il qu'au moment où nous avons pris le pouvoir, il se
posait, comme cela se pose depuis que le quartier existe sous forme
d'arrondissement, le problème du plan de sauvegarde et de mise en valeur
de l'arrondissement, document longtemps attendu mais jamais
détaillé à ma connaissance. Le prédécesseur
du ministre, le député de Chauveau, a donc pris l'initiative,
à m'a demande, de mettre sur pied un projet de règlement, dans un
premier temps, parce que c'était la fonction qui posait le plus de
problèmes dans l'immédiat, concernant l'hébergement, la
restaura- tion et le divertissement dans l'arrondissement historique du Vieux
Québec parce que le Vieux Québec est en train de devenir un
endroit privilégié pour les touristes mais fort peu
privilégié pour les résidents qui y demeurent encore.
Ce projet de règlement ayant été mis sur pied, la
ville de Québec a emboîté le pas avec le résultat
que. de concert avec le ministère des Affaires culturelles, avec
l'autorisation du ministre, c'est la ville de Québec qui a donc, en
définitive, décidé d'en assumer la responsabilité
et de décréter un gel de deux ans sur toute expansion commerciale
quelle qu'elle soit dans l'arrondissement historique du Vieux Québec.
Ceci est fort bien, mais cela ne constitue qu'une étape de ce que
pourrait être un plan de sauvegarde et de mise en valeur de
l'arrondissement puisqu'une fois qu'on a réglé, au moins de
façon provisoire, la question de l'expansion commerciale, il reste la
fonction administrative dans le Vieux Québec, la fonction
résidentielle, qui pose un sérieux problème, la
circulation automobile et ainsi de suite. Je me demandais si, du
côté du ministère, on avait commencé à mettre
en branle des équipes de travail pour en arriver le plus rapidement
possible et, autant que possible, en parallèle et non pas de
façon simultanée ou de façon consécutive
plutôt, à des projets de règlement dont l'ensemble
pourrait, à la rigueur, constituer une première ébauche de
ce que pourrait être effectivement un plan de sauvegarde et de mise en
valeur de l'arrondissement. (21 h 30)
M. Vaugeois: Rapidement, là-dessus, on m'informe que,
effectivement, on a une équipe spéciale pour l'arrondissement
historique du Vieux Québec. Le ministère, pour l'instant,
travaille moins à la mise au point de plans qu'à la
définition d objectifs avec les autorités municipales, la
deuxième étape étant de définir avec les
autorités municipales des moyens et des outils auxquels on peut recourir
pour réaliser les objectifs.
Si le député me permettait un commentaire un peu personnel
sur le défi qui se pose autant au ministère qu'aux citoyens du
Vieux-Québec et de Québec en général, je pense que
le gros défi du Vieux-Québec est de récupérer une
population normale. Je crois que la population du Vieux-Québec est
tombée à quelque chose comme 4000 habitants alors que son seuil
minimal devrait probablement être de 7500. A partir du moment où
un corps est malade, où un arrondissement historique est malade, un
signe de maladie c'est le départ des gens. On peut toujours intervenir
avec toutes sortes de médicaments; le malade est malade et la maladie
n'est pas enrayée facilement par la médecine seulement. Si on
pouvait réussir à ramener la population du Vieux-Québec
à un niveau minimal normal, je pense que le Vieux-Québec pourrait
se défendre lui-même. Il y a beaucoup de problèmes qui se
posent en termes de détérioration de bâtiments, d'incendies
plus ou moins provoqués, avec des objectifs assez mesquins, qui
pourraient se trouver résolus. A partir du moment où des gens
habitent une maison, l'entretiennent, les problèmes se posent
différemment.
Ce qui se pose comme problème pour l'arrondissement historique du
Vieux-Québec est en gros le problème qu'on rencontre dans le
Vieux Montréal, le Vieux Trois-Rivières ou l'arrondissement de
Lachine, celui d'y garder une population qui assurera la santé du
quartier historique. Dans nos approches actuellement, nous évitons
justement de plus en plus de déloger les gens pour fins de restauration
ou je ne sais trop quoi, comme on l'a fait à Place Royale dans le temps.
On essaie de ménager d'abord la population parce qu'on pense que c'est
la meilleure garantie, la meilleure façon d'empêcher la maladie de
s'y mettre et la dégradation du milieu de suivre.
Je me dis donc que l'objectif premier pour le Vieux-Québec
serait, par tous les moyens possibles, d'y ramener une population normale.
M. Guay: Merci, M. le Président. Je pense bien que tout le
monde est d'accord, et pour citer une phrase célèbre du
prédécesseur de l'actuel député de
Trois-Rivières, celui qui fut premier ministre du Québec pendant
si longtemps, qui disait que la meilleure assurance contre la maladie c'est la
santé, il est certain que s'il y avait une population de 8000
habitants...
M. Vaugeois: Comme quoi les députés de
Trois-Rivières se suivent et se ressemblent!
M. Guay: Oui, mais enfin! Bonne chance. Mme Lavoie-Roux:
Vous l'avez réhabilité. Une Voix: II n'est pas
convaincu. Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas vous?
M. Guay: Pour ramener la population dans le centre-ville et dans
l'arrondissement historique, comment va-t-on s'y prendre? Elle ne va pas
revenir toute seule s'il n'y a pas de mesures incitatives, soit à
caractère fiscal pour faire en sorte que les loyers reviennent à
des niveaux normaux, s'il n'y a pas des services qui naissent au lieu de
disparaître, alors qu'on a encore vu que le seul cordonnier du
Vieux-Québec est disparu. On sait qu'il y a un tas de services dans le
Vieux-Québec qui n'existent pas ou alors qui existent à un prix
tel que personne n'a envie d'y habiter. La circulation automobile est telle
qu'on n'a pas envie d'avoir des enfants dans le Vieux-Québec, ou d'y
élever des enfants. Il n'y a plus d'écoles publiques dans le
Vieux-Québec et j'ai écrit à ce sujet-là à
la CECQ pour leur signaler qu'il y a un quartier où il n y a pas une
école à l'heure actuelle.
Enfin, c'est bien beau de parler d'objectifs, mais je m'inquiète
singulièrement de cette démarche de la direction
générale du patrimoine parce qu'il m'a semblé, qu'avec le
règlement sur les commerces dans le Vieux-Québec, on avait
marqué là un pas concret, qui devait, me semble-t-il, être
suivi d'autres pas concrets, dans d'autres domaines de l'activité de
l'arrondissement historique. A partir du moment où on dit: Tout compte
fait, on a fait cela, mais là, on va parler d'objectifs avec la ville de
Québec. Vous savez qu'avec la Ville de Québec, on peut parler
d'objectifs très longtemps, parce que cela fait longtemps que
l'arrondissement historique est dans son territoire et cela fait longtemps que
l'administration de Québec ne se préoccupe pas outre mesure de
cet arrondissement historique.
Bien sûr, si c'était un simple quartier de la ville de
Québec, on pourrait dire que c'est de la faute de l'administration
municipale. C'est vrai jusqu'à un certain point, mais le fait que le
gouvernement ou l'Etat, à un moment donné, a
décrété que ce territoire était un arrondissement
historique, implique que lui aussi, il a ses responsabilités dans
l'avenir de l'arrondissement. Il faut, à un moment donné, trouver
des mesures qui m'apparaissent être autres que des discussions fort
longues sur des objectifs qui me semblent aller de soi. Le ministre a
énoncé en trois ou cinq minutes ce qu'étaient ces
objectifs. Je ne vois pas pourquoi il faut prendre des mois pour discuter avec
la ville de Québec de choses qui peuvent s'énoncer clairement et,
somme toute, assez simplement parce que c'est l'évidence même.
Au-delà de cela, que peut faire la direction du patrimoine pour faire en
sorte qu'on sorte de ce cercle vicieux qui est la poule et l'oeuf? On dit qu'il
n'y a pas assez de population, donc il y a des problèmes. Il faudrait
qu'il y ait de la population pour qu'il n'y ait pas de problèmes.
M. Vaugeois: Je vais continuer dans la lignée des
députés de Trois-Rivières. Et faire un plaidoyer pour la
santé. Il faut reconnaître une chose. Le problème du
Vieux-Québec se pose, par accident, au niveau d'un arrondissement
historique. Mais c'est d'abord un problème classique de centre-ville. Ce
ne serait pas un arrondissement historique que le problème serait le
même. Le drame que signale le député de Taschereau s'ajoute
au fait de la valeur patrimoniale de ce centre-ville qui se trouve être
un arrondissement historique. Arrondissement ou pas, le problème est
là et c'est un problème de centre-ville. C'est un problème
d'étalement urbain avec tout le scénario et toute la litanie que
tout le monde connaît.
Autrement dit, les solutions ne peuvent pas être, comme le
député le pose, au ministère des Affaires culturelles. Les
interventions du ministère des Affaires culturelles, c'est de limiter
les dégâts, de retarder des échéances. Si on ne
trouve pas une façon je m'excuse d'avoir l'air aussi simple
de ramener du monde dans nos centres-villes, quels qu'ils soient,
arrondissements historiques ou autres, si on ne trouve pas des façons de
stopper l'étalement urbain, de stopper la spéculation en banlieue
de nos villes, d'offrir aux gens du logement intéressant en ville alors
que les promoteurs n'en n'offrent que dans les banlieues, il n'y a rien
à faire. Les problèmes se posent en termes qui concernent tout
autant la Société d'habitation du Québec, qui concernent,
au premier chef, le ministère des Affaires municipales et à
certain moment, qui concernent le ministère de l'Agricul-
ture qui a à intervenir au niveau des terres arables, le
ministère de l'Education à un autre titre... etc. C'est de plus
en plus rapproche que nous allons prendre vis-à-vis de l'île
d'Orléans. Nous aurons l'occasion d'en reparler. Pour l'arrondissement
historique de Québec, j'aurais donc envie qu'on pose le problème
en termes de centre-ville. Qu'est-ce qu'on fait pour empêcher les
centre-ville de mourir? S'il se trouve en plus être un arrondissement
historique, c'est une dimension de plus, mais ce n'est pas la première
dimension. C'est une dimension qui s'ajoute à d'autres. Ce à quoi
on assiste actuellement, c'est la mort de nos villes. Les villes sont malades.
Elles sont blessées.
J'étais étonné de constater, il y a une couple
d'années, le nombre d'ouvrages qui se publiaient sur les villes, un peu
partout dans le monde et la popularité de ces ouvrages. Mes travaux
depuis un an et demi, comme député d'une vieille ville, me font
assister à la mort lente d'une vieille ville, arrondissement ou pas.
Shawinigan, c'est une ville assez neuve. Elle n'a pas d'arrondissement
historique. C'est une ville qui perd sa population comme Trois-Rivières
perd sa population, comme le coeur de la ville de Québec perd sa
population et comme Montréal perd sa population. Pourquoi? Parce qu'on
n'a pas su résister à l'attraction de la banlieue. On n'a pas su
contrer l'intervention strictement mercantile d'un grand nombre de
spéculateurs fonciers et immobiliers. On a choisi la voie de la
facilité. Comme la voiture faisait partie de notre monde et qu'elle
permettait le déplacement rapide à faible coût, on a tout
oublié. Sur l'ensemble de ces questions, transport en commun, etc., le
programme du Parti québécois est plein de préoccupations
extrêmement saines. Le genre d'intervention que je suis en train de faire
suggère essentiellement que nous devons poser les problèmes de
façon beaucoup plus globale que celui du patrimoine ou de la protection
du patrimoine. A la limite, si nous ne faisons pas d'interventions à
d'autres titres, qu'on le veuille ou non, si les gens s'en vont, cela deviendra
du Disney Land. Il n'y a pas d'autres façons, à mon avis, que
d'avoir une approche de densifica-tion urbaine. Il faut absolument avoir une
approche de densification urbaine pour que l'école trouve sa raison
d'être et pour que les services habituels des gens se justifient
toujours. Autrement, l'Etat n'est plus justifié de maintenir des
écoles s'il n'y a plus de monde.
M. Guay: M. le Président, je voudrais simplement, si vous
me le permettez, dire que l'argumentation que développe le ministre est
irréprochable. Je pense bien que, pour ma part, j'y souscris. Je suis
certain que tous les députés de ce côté-ci de la
table y souscrivent également. Je veux simplement attirer l'attention du
ministre sur le fait suivant: II est exact que le centre-ville de
Québec, comme le centre-ville d'autres municipalités,
connaît une certaine décadence. C'est vrai dans Saint-Roch, c'est
vrai dans Saint-Jean-Baptiste, c'est vrai dans le Vieux Québec et c'est
vrai, à un degré légèrement moindre, dans
Saint-Sauveur.
Il y a à cela de multiples causes, notamment les actions des
gouvernements depuis dix ans qui ont à peu près tout fait pour
faire en sorte que le centre-ville de Québec soit massacré. La
colline parlementaire et l'autoroute Dufferin sont de nobles monuments à
la bêtise humaine ou à la bêtise des gouvernements, quand
ils s'y mettent, ce qui inclut la bêtise de l'administration
municipale.
Il y a des projets maintenant qui, lentement mais sûrement
on cherche à ranimer les centre-ville sont dans l'air. C'est
difficile, bien sûr, d'arriver à les concrétiser, dans bien
des cas. Il y a des plans de rénovation de quartiers qui existent dans
Saint-Sauveur, il y en a qui s'en viennent, le plus rapidement possible, je
l'espère, dans Saint-Jean-Baptiste. Il y a une orientation
différente qui va être donnée au développement de la
colline parlementaire. Il n'en demeure pas moins que pour ce qui est du Vieux
Québec, il existe la possibilité de restauration dans le Vieux
Québec. Elle existe déjà. On n'a pas besoin d'avoir un
programme de la SHQ pour cela. Elle existe du fait que le ministère des
Affaires culturelles a une responsabilité, par la Loi des biens
culturels, sur l'arrondissement. C est sous cet angle qu'il m'apparaît
important en ce qui a trait à l'arrondissement historique du
Vieux Québec que l'on poursuive non pas l'étude
d'objectifs, parce que je pense qu'il y a une unanimité spontanée
sur les objectifs, mais sur les mesures concrètes que le
ministère peut prendre ou qu'il peut prendre de concert avec la ville ou
qu'il peut suggérer à la ville de prendre. Comment va-t-on faire
pour ramener l'habitation dans l'arrondissement historique, quitte à ce
que le ministère des Affaires municipales se préoccupe des trois
autres quartiers environnants, ou quitte à ce qu'il soit
également mis dans le coup dans le cas de l'arrondissement historique,
je n'ai aucune espèce d'objection? Bien sûr, plus il y en a, plus
cela risque de compliquer les règlements. Quand on sait que plusieurs
ministères interviennent à la fois, généralement,
cela ralentit le règlement. Quand même, en ce qui a trait à
la fonction d'habitation dans le Quartier latin ou dans le Vieux Québec,
en ce qui a trait à la fonction administrative, en ce qui a trait
à la circulation automobile, il y a autant d'actions que la direction
générale du patrimoine peut prendre ou, en tout cas, autant de
directions quelle peut indiquer et que la ville de Québec peut ensuite
décider de prendre. Au moins il se fait quelque chose, il se fait une
pression sur la ville de Québec pour qu'elle agisse. On a vu tout
récemment comment cette pression a pu être utile puisque, en ce
qui a trait au commerce, il y a eu au moins un gel de deux ans.
Je souhaiterais que cette démarche soit poursuivie plutôt
que l'on se retranche derrière ce que Ion a toujours fait pour ce qui
est du Vieux Québec, c'est-à-dire essayer de définir des
objectifs. Les objectifs, cela ne règle rien, si on passe son temps
à essayer de les définir. D'autant plus qu'ils (n'apparaissent,
comme je l'ai dit, spontanément évidents, ces objectifs. Il
s'agit de trouver les moyens. Le ministère n'a pas tous les moyens mais
il a certains moyens d'agir sur l'arrondisse-
ment historique du Vieux Québec. J'aimerais beaucoup avoir
l'assurance du ministre qu'avec la ville de Québec on va se pencher le
plus rapidement possible sur les autres éléments que je
soulignais: circulation, fonction administrative, fonction
résidentielle, impôts fonciers qui jouent énormément
dans un arrondissement comme celui-là. Evidemment, chaque fois qu'on
restaure une maison, selon les normes de l'art, telles que définies par
le patrimoine, cela coûte les yeux de la tête, cela augmente la
valeur de l'immeuble, cela augmente l'impôt foncier payable sur
l'immeuble. Conséquemment, cela augmente les loyers. Résultat,
cela fait fuir les gens.
C'est une espèce de cercle vicieux qu'il va falloir casser,
à un moment donné, de concert avec la ville de Québec.
C'est certain qu'il va falloir qu'elle assume sa part du fardeau. Quand on a un
arrondissement historique, il faut en assumer les coûts. C'est ce qu'on a
fait en Europe, dans bien des cas. C'est ce qu'il faut faire ici. Il faut
cesser de s'imaginer qu'un arrondissement historique comme le Vieux
Québec, c'est un quartier au même titre que Les Saules,
Charlesbourg ou ville Mont-Royal. Ce n'est pas du tout la même chose. Il
va falloir qu'il y ait un effort collectif qui soit fait tant par le
gouvernement que par la ville de Québec. Je m'excuse pour ville
Mont-Royal, je ne voulais surtout pas faire référence au
député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: C'est historique aussi, ville Mont-Royal. Je vais
vous demander d'intervenir.
Mme Lavoie-Roux: Ne l'attaquez pas!
Il a assez hâte de nous transformer en monuments historiques. (21
h 45)
M. Guay: Je ne voulais surtout pas qu'il se sente impliqué
par l'aspect monument historique de la question. Je signale ces choses parce
que je pense que le ministère a quand même son rôle à
jouer, qui n'est pas exclusif, mais je souhaiterais quand même qu'on
accélère les choses et qu'on ait l'impression que, effectivement,
non seulement on s'en va dans la bonne direction, mais qu'on y va, que les
étapes se franchissent.
M. Vaugeois: C'est cela. Je rejoins parfaitement les propos que
tient le député de Taschereau. Il faut faire revivre nos villes.
Il faut s'occuper des centre-ville. C'est un problème quasi occidental.
Pour nous, il se pose de façon bien concrète à
Québec. Nous en sommes conscients. Ce qu'il me plaît de souligner,
pour montrer que ce problème est senti vraiment au ministère,
c'est que ce n'est pas par hasard que le nouveau directeur
général du patrimoine a une formation d'urbaniste. Je pense que
le problème de l'arrondissement historique se pose en termes
d'urbanisme, en termes de vie municipale, en termes d'aménagement. Un de
nos objectifs est très concrètement d'avoir plus de logements qui
seront susceptibles d'amener plus de gens et de valoriser la fonction
résidentielle qui, à mon avis, est la première fonction.
C'est un lieu commun que de le dire, mais je le répète. C'est la
première fonction, c'est celle qu'il faut vraiment défendre.
Maintenant, dans les moyens que le ministère songe à
proposer dans les prochains mois, il y en a de bien concrets qui tiennent aux
questions amenées par le député de Taschereau, en termes
de fiscalité municipale. Nous aimerions pouvoir convenir avec les villes
de tenir compte de la restauration, des investissements faits dans la
restauration des vieilles maisons pour du logement, au moment de
l'évaluation foncière.
Nous songeons également je suis amené à le
dire ce soir peut-être prématurément à avoir
des mesures fiscales qui inciteraient les gens à investir dans la
restauration de maisons anciennes. Ce ne serait pas une innovation, c'est un
genre de pratiques qui se trouvent dans plusieurs pays. En Europe, en
particulier, les grandes familles ont souvent trouvé des moyens
d'évasion fiscale par l'investissement dans des grandes demeures
anciennes. Nous pourrions penser à toutes sortes de moyens comme
ceux-là pour amener les gens à investir dans la restauration de
maisons à vocation de logement. Malheureusement, jusqu'à
présent, nos efforts de restauration ont très souvent
porté sur des fonctions communautaires, à l'exception,
peut-être, de la Place Royale, où nous avons tenu compte de la
fonction résidentielle. Mais c'est clair que, dans le Vieux
Québec, tout moyen qui pourrait inciter les gens à offrir du
logement est considéré comme un moyen prioritaire, puisque notre
diagnostic se situe à ce niveau.
M. Guay: Je remercie le ministre de ses propos. J'aimerais lui
poser deux ou trois autres questions qui ne portent pas spécifiquement
sur...
Le Président (M. Jolivet): M. le député, il
vous reste deux minutes.
M. Guay: Alors, rapidement. Je constate et je pense que c'est un
souci du ministre, également, pour avoir eu l'occasion de lire la copie
d'une lettre qu'il avait rédigée jadis, alors qu'il
n'était pas ministre.
Les routes à caractère historique, je pense au chemin du
Roy, je pense à la route qui fait le pendant, sur la rive sud,
l'ancienne route 3, et je pense à l'avenue Royale qui part de la
banlieue de Québec pour se rendre jusqu'au Cap Tourmente. Ces routes
comportent des maisons historiques certaines sont d'ailleurs
classés mais elles sont en train d'être
littéralement massacrées par ce qu'on y construit. Je passais
encore dimanche dernier sur le boulevard Sainte-Anne et je remarquais une
très belle enseigne annonçant fièrement qu'entre le
boulevard Sainte-Anne et la rue Royale, à Château-Richer, on
allait maintenant avoir un très beau parc de maisons mobiles, ce qui va
sans doute rehausser le caractère historique de l'endroit!
M. Vaugeois: Et régler le problème du Vieux
Québec. C'est cela, l'étalement urbain, mon vieux, c'est
cela!
M. Guay: Je me demandais si, du côté du
ministère, on songeait à prendre des mesures pour faire soit des
arrondissements historiques linéaires ou quoi, mais faire en sorte que
le massacre de ces routes historiques au Québec cesse.
Mme Lavoie-Roux: Historiques ou pas, il devrait y faire
attention. Elles sont toutes massacrées.
M. Guay: Je suis d'accord avec vous, Mme le député
de L Acadie, qu'on devrait faire attention à toutes les routes, mais je
dis que celles qui ont une valeur patrimoniale toute particulière
devraient être surveillées en priorité.
Mme Lavoie-Roux: D'accord, c'est un massacre dans la
province.
M. Guay: Vous avez parfaitement raison. Je me demandais si on a
des moyens de faire quelque chose. Est-ce qu'on compte, effectivement, prendre
ces moyens? Je pense, en particulier, au cas très concret qui m'a
frappé encore une fois dimanche dernier, la rue Royale. Bientôt,
cette rue sera un véritable massacre, et j'aimerais bien qu'on puisse la
conserver avant que cela ne devienne le cas.
M. Vaugeois: Oui, le député touche à une
corde sensible; absolument, j'ai déjà envoyé d'ailleurs au
ministre des Finances un certain nombre de recommandations sur la question des
maisons mobiles. C'est une question qu'on va reprendre, il ne s'agit pas
d'être contre les maisons mobiles, mais il s'agit d'inciter les
municipalités à les regrouper, d'ailleurs c'est dans
l'intérêt des résidents eux-mêmes. Le massacre que le
ministère des Transports a fait le long de nos vieilles routes est d'une
gravité invraisemblable. J'interviens actuellement pour ménager
le chemin du Roy, à la hauteur de Baie-Jolie, où le
ministère des Transports a actuellement des plans de quatre voies, alors
que la route 40 existe, à double voies, à quatre voies, alors que
le chemin Sainte-Marguerite est là. On veut faire du vieux chemin du
Roy, c'est-à-dire la 138, une route à quatre voies, pour une
population locale. C'est de l'inconséquence totale. Quand on intervient,
partout, on bouscule les gens parce que les gens veulent des autoroutes. C'est
un réflexe. Pour rentrer chez eux le soir, rentrer par une autoroute,
cela donne l'impression d'alle'r plus vite.
On a beaucoup de chemin à faire, mais si les partis d'opposition,
là-dessus ce n'est pas un jeu de mots que je faisais
souscrivent à nos préoccupations, il me semble qu'on devrait
arrêter de faire de la démagogie là-dessus et se donner le
mot pour faire de l'éducation populaire. Le ministère a les
moyens juridiques actuellement de classer. Je ne nommerai pas les endroits pour
ne pas faire peur aux gens qui ont des projets de développement
domiciliaire; on a identifié un certain nombre de rangs où sont
regroupées, par exemple, de très belles maisons. On a, pas
très loin de Québec, ici, une section de la côte qui est
assez remarquable, qui est facile à identifier et qui pourrait
constituer possiblement un arrondissement historique ou un site historique,
plus facile d'ailleurs à mettre en valeur que l'île
d'Orléans qui est très étendue.
Le ministère est conscient de cela; le problème, c'est
peut-être qu'il ne suffit pas de classer, mais il faut avoir les moyens
de suivre une fois le classement fait. Tout cela est une question de
degré et j'ai signalé ce matin que pour un gouvernement
provincial les moyens étaient de nature provinciale.
M. Guay: Mais au moins si je peux me permettre, M. le
Président quand on classe, on peut intervenir ensuite si, par
exemple, il y a un parc de maisons mobiles qui s'érige dans un endroit
où il n'a pas d'affaire. On peut au moins l'enlever de là si
l'endroit est protégé. S'il ne l'est pas évidemment, c'est
difficile à faire.
M. Vaugeois: Si on avait suivi ma recommandation on n'aurait pas
ces problèmes.
Mme Lavoie-Roux: Quelle était votre recommandation?
M. Vaugeois: Elle est assez simple; nous avons enlevé la
taxe de vente sur les maisons mobiles. J'ai proposé que pour être
exempté de la taxe de vente, on ait l'obligation de présenter un
certificat de localisation. C'est sur présentation d'un certificat de
localisation que les gens auraient été exemptés et les
municipalités auraient été chargées
d'émettre les certificats de localisation et le ministère des
Affaires municipales aurait vérifié le projet de localisation
avant d'autoriser la ville à émettre des permis. C'était
simple comme bonjour et à mon avis, on aurait eu des maisons mobiles
à des endroits prévus à cette fin, les gens auraient
profité de leur détaxe de la même façon. Mais ce
sont des propositions trop simples, très souvent, pour être
retenues, mais je n'abandonne pas.
Mme Lavoie-Roux: On ne vous a pas écouté?
M. Vaugeois: On ne m'a pas écouté, madame et ce
n'est pas le seul cas.
M. Guay: On était trop près de l'ancien
gouvernement à ce moment-là.
M. Ciaccia: Dites-nous le et on va poser des questions en
Chambre.
Mme Lavoie-Roux: Cela commence à faire longtemps.
M. Ciaccia: Passez-nous cela et on posera les questions en
Chambre au ministre des Finances.
Mme Lavoie-Roux: Voulez-vous qu'on lui pose des questions?
M. Vaugeois: ... Parlez-lui de la taxe de vente.
M. Ciaccia: Si vous ne pouvez pas le faire, nous autres, on peut
le faire.
M. Vaugeois: ... c'est le sujet qu'il préfère.
Le Président (M. Jolivet): J'ai eu l'accord pour continuer
jusqu'à dix heures en terminant avec vous, de telle sorte que demain
matin, nous reprendrons avec le député de L'Acadie, avec les
questions qui lui reste à poser.
Mme Lavoie-Roux: J'en ai pour une demi-heure.
M. Guay: Juste une suggestion au ministre; j'ai lu avec
intérêt le dernier cahier du patrimoine, sur les immeubles
classés au Québec. J'en ai trouvé beaucoup plus que je ne
le soupçonnais et je trouve cela fort heureux à maints
égards. J'ai trouvé que la concentration, par moment,
était curieuse, il y a des endroits où on fait plus de
zèle, des endroits où on a fait moins de zèle, mais enfin
peu importe.
M. Vaugeois: Si vous me le permettez, M. le député,
cela dépend des massacres des Anglais pendant la guerre de Sept ans. Ils
en ont brûlé d'avantage dans certains coins que dans d'autres.
Mme Lavoie-Roux: ... je n'ai pas entendu.
M. Guay: Mon propos, M. le Président, a pour but de
suggérer au ministre, de concert avec le ministère des Transports
qui a tant fait justement, pour massacrer le paysage
québécois peut-être pour faire amende honorable
d'une certaine façon et faire un peu plus pour indiquer ces monuments.
Il m'est arrivé très souvent de passer devant des monuments
historiques, j'ai appris dans le livre que c'étaient des monuments
historiques, mais ce n'est pas indiqué. Il y en a quelques-uns ici et
là, où on voit "monument historique " quelque par par là.
De façon générale, il me semble que cela pourrait
contribuer à cette éducation populaire que nous souhaitons tous,
qu'on multiplie l'identification de ces monuments historiques et qu'on explique
davantage, une fois sur place, en quoi ce document est historique, pourquoi il
est historique, ce qu'il a de particulier.
Il y a cet aspect des choses, mais aussi l'aspect animation. Il y a des
édifices qui appartiennent au ministère des Affaires culturelles
qui sont des monuments historiques ou qui sont dans des arrondissements
historiques et qui sont vides. On cherche en vain la vocation et il me semble
qu'on devrait peut-être faire un effort d'imagination du
côté de l'animation de ces monuments. Après les avoir
restaurés, souvent à grands frais, c'est dommage de les voir
ensuite barricadés.
M. Vaugeois: M. le Président, je dirai, pour ne pas
charger indéfiniment contre le ministère des Transports...
M. Ciaccia: C'est un message pour le député de
Taschereau.
M. Vaugeois: ..., que nous avons, actuellement, avec le
ministère des Transports, des arrangements qui prévoient une
signalisation dans le sens que vient d'indiquer le député de
Taschereau.
Cet été, sur les grands axes routiers, il y aura une
signalisation appropriée. Ensuite, il faut s'occuper des voies
secondaires. Cela me plairait, également, de souligner la collaboration
reçue du ministère du Tourisme qui, dans ses brochures
régionales, attache depuis d'ailleurs fort longtemps beaucoup
d'attention aux sites à visiter et qui met bien en relief notre richesse
patrimoniale.
Je terminerai sur une préoccupation qu'on retrouve actuellement
dans le propos que j'ai tenus au début et dans certains textes qui
sortent de la Direction générale du patrimoine. Depuis deux mois,
l'essentiel de mes interventions au patrimoine a été de donner
deux grandes directions, que j'ai appelées "les deux mamelles du
patrimoine": l'animation et l'interprétation.
M. Ciaccia: ... vous, le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est une image tout à fait
maternelle.
M. Vaugeois: C'est un classique, en langue française, M.
le député.
Mme Lavoie-Roux: Cela va être productif.
M. Vaugeois: II y a donc, à la direction
générale du patrimoine, deux grandes préoccupations que
nous convenons de retenir: celle de l'animation et celle de
l'interprétation. Là-dessus, on a beaucoup de travail à
faire parce qu'il n'y a à peu près pas d'interprétation
historique qui s'est faite sur nos sites et dans nos arrondissements. Nous
arrivions à cette étape.
Ce qu'a souligné le député de Taschereau est
très juste, aussi. Il y a un effort d'animation; nous avons un service
tout nouveau à la direction générale du patrimoine qui se
développe actuellement et qui fait un très beau travail à
cet égard.
Je vous invite, si vous voulez avoir un cas concret de résultat,
à l'Ile-au-Moulin, à Terrebonne, qui, je pense, va être une
réalisation intéressante de la Direction générale
du patrimoine. Vous allez vous rendre compte des efforts, du travail des
architectes de la restauration et, également, de l'équipe
d'animation.
Il nous reste à franchir une autre étape: celle de
l'interprétation. Les gens doivent savoir où ils sont.
C'était ce que je voulais suggérer dans mon discours, en
deuxième lecture lorsque je disais: "II ne suffit pas de contempler, il
faut comprendre!" pour que les gens comprennent, il faut leur expliquer. Il
faut interpréter le lieu où ils sont.
Mme Lavoie-Roux: Je vais vous poser une dernière
question.
Dans ces endroits historiques où vous voulez que le tourisme
s'ouvre, est-ce que vous allez avoir des explications en français et en
anglais? Si vous allez en Chine, vous les avez en chinois et en anglais.
M. de Bellefeuille: Vous vous trompez de question...
Le Président (M. Jolivet): Pas de débat, s'il vous
plaît.
M. Ciaccia: En Italie, vous avez anglais et français.
Mme Lavoie-Roux: Non, c'est sérieusement que je le
pose...
M. Guay: Le député de Mont-Royal est dans l'erreur.
En Italie, vous avez l'italien, l'anglais et le français.
Mme Lavoie-Roux: ... on a quand même un grand nombre de
touristes américains, si vous voulez vraiment... à part d'avoir
un nom et une date...
M. Vaugeois: Je pense, Madame, que je peux vous donner
l'assurance qu'il y aura des indications en français... et en d'autres
langues.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît...
M. Ciaccia: Pas les musées...
Mme Lavoie-Roux: II n'y a pas de doute.
Le Président (M. Jolivet): Pas de débat.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas un débat, c'est une...
Le Président (M. Jolivet): C'est parce qu'il y en a
d'autres qui, pendant que vous discutiez avec le ministre, commençaient
un débat.
M. Vaugeois: II n'y a pas de discipline de votre
côté.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas nous qui avons pris le temps, ce
soir.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que vous
répondez, ou...
M. Vaugeois: J'ai répondu.
Le Président (M. Jolivet): Comme on a répondu,
avant d'aller trop loin, il est 22 heures...
Mme Lavoie-Roux: Lui, a répondu.
Le Président (M. Jolivet): Nous ajournons à demain
matin, 10 heures, en la même salle.
(Fin de la séance à 22 heures)