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Étude du projet de loi no 41
(Dix heures quatorze minutes)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires culturelles est réunie ce matin en vue
d'étudier article par article le projet de loi no 4, intitulé Loi
mofidiant. la Loi sur les biens culturels.
Il y a entente, avant d'entreprendre cette étude, pour faire
l'audition des représentants suivants: Les représentants de
l'île d'Orléans, les six maires; les représentants de la
ville de Québec; le Conseil des monuments et sites; la
Fédération des sociétés d'histoire et le Conseil
régional de la culture de Québec.
J'aimerais savoir s'il y a d'autres groupes qui veulent se faire
entendre et qui ne sont pas ici ce matin.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, probablement qu'ils
n'ont pas été convoqués. Ont-ils été
convoqués de la même façon que les gens sont officiellement
convoqués pour les commissions parlementaires?
M. Vaugeois: Voulez-vous reposer la question?
Mme Lavoie-Roux: Le président vient de demander s'il y en
a d'autres qui veulent se faire entendre.
M. Vaugeois: Qui auraient pu être présents.
Le Président (M. Jolivet): Qui auraient pu être
présents.
Mme Lavoie-Roux: Ordinairement, les gens sont appelés
à tour de rôle et quand ils ne sont pas là, ils perdent
leur tour.
Le Président (M. Jolivet): On les convoque.
Mme Lavoie-Roux: Mais cela ne s'appliquerait pas dans le cas
présent.
M. Vaugeois: Non, mais je pense qu'il n'y a pas d'autres groupes
qui ont manifesté leur désir de se faire entendre que ceux qu'on
vient de mentionner. Cependant, au cas où il y aurait eu des gens dans
la salle qui seraient venus, à la suite des renseignements reçus,
je voulais prendre cette précaution.
Le Président (M. Jolivet): Avant de continuer, parce que
je pense que nous avons de la difficulté à entendre, nous allons
nous approcher le plus possible des micros, s'il vous plaît.
Mme Lavoie-Roux: On ne peut pas travailler avec cela.
Le Président (M. Jolivet): Le bruit doit arrêter. On
a demandé de le faire arrêter le plus tôt possible.
M. Richard: J'ai donné des instructions, Mme le
député de L'Acadie, pour que le bruit cesse.
Mme Lavoie-Roux: Des soubresauts. Nous avons eu cela pendant
quinze jours, la semaine dernière et la semaine
précédente.
M. Vaugeois: C'est surtout pour faire accélérer les
travaux.
Le Président (M. Jolivet): Les membres de cette commission
sont: M. Alfred (Papineau), M. (Brassard (Lac-Saint-Jean), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes) remplacé par M. Richard (Montmorency), M. Godin
(Mercier), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), Mme Lavoie-Roux
(L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé), M. Vaugeois
(Trois-Rivières).
J'aimerais que vous me donniez... Oui, M. Le Moignan est remplacé
par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).
J'aimerais avoir un rapporteur, s'il vous plaît!
M. Guay: Le député de Papineau fera un excellent
rapporteur.
Le Président (M. Jolivet): M. le député Jean
Alfred de Papineau accepte-t-il d'être rapporteur de cette
commission?
M. Alfred: J'accepte, je n'ai pas le choix, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): Nous avons de dix heures
jusqu'à treize heures comme session. Voulez-vous partager votre temps ou
si vous laissez aux groupes présents le soin de présenter leurs
mémoires?
M. Vaugeois: Ce n'est pas nécessairement une
présentation de mémoires. Cela peut être oral.
Le Président (M. Jolivet): Donc, il n'y a pas de limite de
temps. Le premier groupe à se faire entendre...
Audition de témoins Les maires de l'île
d'Orléans
Le Président (M. Jolivet): Donc, il n'y a pas de limite de
temps. Le premier groupe à se faire entendre est celui des maires de
l'île d'Orléans. Y a-t-il un représentant?
M. Vaugeois: Ils peuvent parler chacun leur tour parce qu'il
s'agit de six municipalités et il y a six approches différentes
possiblement. C'est à eux d'en décider. M. le préfet est
là et il est en
même temps maire. Peut-être pourrait-il être le
premier à s'exprimer, mais tous les autres maires pourront, à mon
avis, exprimer leur point de vue.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce que vous pouvez vous
identifier pour qu'on puisse avoir vos noms?
M. Yvon Deblois, maire de Sainte-Famille
M. Deblois (Yvon): D'accord. Yvon Deblois, maire de
Sainte-Famille, île d'Orléans, préfet du comté de
Montmorency, no 2.
À la suite de la réunion du conseil de comté, les
maires de l'île...
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, pour les
besoins de l'entendement ici, voulez-vous répéter,
tranquillement...?
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, il faudrait attendre
cinq minutes, franchement.
M. Richard: ... Suspension de cinq minutes pour que les
instructions aient le temps de se rendre aux ouvriers.
Le Président (M. Jolivet): D'accord.
(Suspension de la séance à 10 h 18)
(Reprise de la séance à 10 h 22)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Nous sommes donc prêts à entendre les bruits
s'étant éteints la représentation qui avait
commencé tout à l'heure. Monsieur, voulez-vous recommencer?
M. Deblois: D'accord. Yvon Deblois, maire de Sainte-Famille de
l'île d'Orléans.
Je n'ai pas l'intention de me battre sur tout le contenu de la loi no 4.
Il y a trois articles en particulier, je pense, qui sont très
importants. Celui qui nous semble être important est d'abord l'article 14
qui modifie l'article 38 et qui dit: "Lorsqu'il s'agit de relevés sur un
terrain autre qu'une terre publique, le consentement écrit du
propriétaire n'est pas requis."
Au départ, je crois qu'on brime le droit des gens qui
possèdent des choses chez eux. Je pense que l'article
précédent qui prévoyait le consentement du
propriétaire était beaucoup plus adéquat que celui-ci. Je
pense que les autres principaux articles sont les articles 48 et 49. Depuis le
fameux moratoire de trois mois qui avait été donné
à l'île d'Orléans et à la suite duquel les gens de
Sainte-Famille s'attendaient à un relâchement progressif du
ministère des Affaires culturelles à l'île
d'Orléans, nous constatons que le projet no 4 n'est pas un
relâchement, au contraire, nous croyons que c'est une emprise encore plus
forte sur les droits des conseils municipaux et des citoyens de l'île
d'Orléans.
Quand on nous dit, par exemple, que les municipalités auront le
droit de se doter de règlements de zonage, de construction, etc., c'est
vrai que le règlement no 4 nous donne ce pouvoir, mais il reste qu'on
dit aussi que toutes les dispositions réglementaires devront être
approuvées par le ministre, c'est-à-dire que nous pouvons, pour
plusieurs semaines et plusieurs mois, effectuer un travail avec nos
concitoyens, préparer des règlements qui nous semblent valables
et la loi donne au ministre le pouvoir de changer ces règlements.
D'après moi, cela veut dire qu'on veut peut-être laisser
croire aux gens que ce sont les conseils municipaux et les gens des
municipalités qui font le règlement de zonage, mais il reste que
ce n'est pas nous qui avons le dernier mot. Je pense qu'il serait plus logique
que le ministère nous donne d'abord ses directives, nous dise
jusqu'où il est prêt à aller. Ensuite, nous travaillerons
nos règlements en tenant compte des directives du ministère. On
ferait un meilleur travail, parce que les gens sentiraient réellement
que ce sont nos décisions qui seront respectées. Dites-vous bien
une chose... Je pense que tout le monde peut comprendre que partout où
il y a des élus municipaux, provinciaux ou autres, c'est toujours
très difficile et inacceptable, parfois, de sentir que des paliers de
gouvernements supérieurs viennent s'interposer, viennent faire de
l'ingérence dans les dispositions, les projets de telle
municipalité.
Je parle pour ma paroisse de Sainte-Famille. Je pense que les gens en
ont soupé d'attendre continuellement, parce que cela fait des
années que le dossier traîne. Nous avons rencontré le
ministre. J'ai bien confiance en M. Vaugeois, là n'est pas la question.
Mais il reste qu'on se demande et je pense que nous avons le droit
d'être méfiants jusqu'où le ministre exercera ses
pouvoirs.
Si le projet de loi no 4 est adopté, naturellement, il nous
faudra porter un vote de confiance à 100% à l'endroit du
ministre. Je pense que les citoyens ne sont pas encore prêts, par manque
de connaissance peut-être, je l'avoue, à donner tous leurs
pouvoirs à quelqu'un.
Je ne m'étendrai pas plus longtemps que cela. C'est le point
principal. Les municipalités devraient avoir le dernier mot et non pas
le ministère.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: Très brièvement, je remercie M.
Deblois de son bref exposé. Je vais tout de suite, je pense, au moins
clarifier une question à sa satisfaction.
Compte tenu des représentations qui nous avaient
été faites par écrit ou à l'occasion de rencontres
isolées, nous avions jugé opportun de modifier la
rédaction de l'article 38, tel qu'introduit ici à l'article 14,
parce que la rédaction qui était là suggérait qu'on
avait une attitude différente et plus exigeante pour les terres
publiques que pour les terres privées. Ce n'était pas le sens de
l'article
et nous l'avons rédigé autrement pour bien montrer que
nous ne voulions pas avoir deux attitudes différentes.
À l'occasion de la rédaction finale que les experts sont
en train de mettre au point, il sera établi que pour les fouilles, il
faudra toujours une autorisation. Généralement, les
relevés feront également l'objet, en même temps que les
fouilles, de la demande d'un permis. Si le gouvernement s'aperçoit que
des relevés doivent être faits sur une terre publique, il
vérifiera si des règlements existent pour ces terres publiques
visées quant à la nécessité d'avoir une
autorisation spéciale. Il existe, parfois, chez certains
ministères c'est déjà prévu dans des lois ou
des règlements l'obligation d'avoir une autorisation
spéciale.
C'est ce que voulait dire ici l'ancienne rédaction. Mais en le
disant ainsi, cela suggérait que ce n'était que pour les terres
publiques qu'on prenait des précautions, et que n'importe qui pouvait
aller se promener sur les terres des particuliers. C'est modifié, et
votre remarque est fort opportune.
Je dois vous avouer que je dirais à peu près la même
chose, comme remarque opportune, sur les articles 48 et 49. Si on les lit assez
rapidement, et avec un certain nombre de préjugés tout à
fait inévitables nous avons tous notre façon de voir les
choses, nous avons tous notre expérience... Dans le cas des gens
l'île, il y a eu des interventions répétées de
plusieurs années, qui font que le ministère est perçu
comme quelqu'un qui empêche de faire ceci, qui impose des délais
à tel autre moment, etc., souvent, à part cela, sans plan
d'aménagement très précis, sans trop savor ce qu'il veut,
parce que ce n'est pas facile de prévoir un plan d'aménagement
pour un arrondissement historique de la taille de l'île d'Orléans.
Je pense que c'est l'un des plus grands au monde, sinon le plus grand. Donc,
c'est un défi de taille et les gouvernements précédents
n'ont pas réussi et le nôtre non plus à dire:
Voilà un plan d'aménagement qui met en valeur le patrimoine, qui
protège le sol arable, qui prévoit un développement
touristique, etc., qui tient compte des réserves d'eau, des
facilités routières, des capacités du pont, patati et
patata! Cela n'existe pas. (10 h 30)
Donc, partant d'un bon sentiment, les interventions du ministère
ont pu être perçues comme agaçantes. Or, l'article 48 nous
indique que le ministère pourrait avoir encore plus de matière
à interventions, parce que cela dit clairement on n'oublie rien
grosso modo, interventions au niveau de la construction, au niveau du
lotissement, au niveau du zonage. C'est cela, à mon avis, qui a surtout
provoqué les gens. Je pense que ces éléments sont
très utiles, parce que cela annonce l'article 49 et c'est là
qu'est la clé de l'affaire. L'article 49 n'est pas là pour la
frime, il est là pour déboucher sur des ententes, des vraies
ententes, des ententes complètes qui prévoient la question de
lotissement, la question du zonage, la question de la construction.
Au fond, quand les municipalités sont invitées à
soumettre des plans, on leur dit à l'article 48: Le terrain à
couvrir, pour ne plus qu'elles aient affaire à revenir aux affaires
culturelles, pour qu'elles puissent être vraiment mandatées par
les règlements qu'elles nous auront proposés et qui auront
été acceptés, pour intervenir dans tout ce qui est
susceptible de faire l'objet d'intervention des pouvoirs publics dans un lieu
comme l'île d'Orléans.
L'article 48 en prend plus large qu'avant, mais il propose aux
municipalités, partant de là, de faire des propositions au
ministre. Il y a une chose très importante qu'on ne dit pas,
après cela, et cela échappe un peu parce qu'on a à
l'esprit l'ancienne Commission des biens culturels. Cela dit bien que le
ministre n'agit pas de façon arbitraire, cela dit que le ministre prend
avis de la commission. Vous avez là une précaution de plus pour
les groupes qui auraient soumis, ou les groupes de pression de la
municipalité qui auraient soumis une proposition de règlement
d'aller également se faire entendre devant la Commission des biens
culturels. Parce qu'il faut revenir à d'autres articles
précédents où nous élargissons la composition de la
commission, nous l'étoffons, nous lui donnons la possibilité
d'avoir des comités. Cela n'est pas dans le texte que vous avez, c'est
dans les petits amendements qu'on va préciser au cours des études
article par article. Mais je peux vous dire tout de suite qu'à l'article
7f, nous allons proposer un petit amendement qui va bien indiquer que la
Commission des biens culturels pourra recevoir et entendre requêtes et
suggestions des individus et des groupes sur toute question visée par la
présente loi. Le règlement va nous préciser qu'il y aura
des heures d'ouverture, à des moments non ouvrables, de telle
façon que les groupes de citoyens pourront y aller librement, etc. Cela
sera une autre façon, au moment où le projet de règlement
va être étudié, pour les groupes, d'aller se faire entendre
à la Commission des biens culturels. Le ministre va finalement, à
mon avis, être dans une bonne situation pour rendre une bonne
décision, c'est-à-dire qu'il va avoir une proposition d'une
municipalité, donc des élus d'une collectivité
précise, et il y aura, à part cela, des gens qui auront un mandat
particulier de veiller sur le patrimoine et qui vont exprimer leur point de vue
au ministre. À mon avis, tout cela étant public en plus, on ne
peut pas aller beaucoup plus loin.
C'est clair que les gouvernements gouvernent un peu et que cela est un
peu achalant, mais on ne peut pas avoir des gouvernements qui ne gouvernent pas
du tout. Dans le cas présent, le ministre, évidemment, se gardera
la possibilité de dire: Votre projet, il me semble qu'il ne correspond
pas à l'esprit de la loi et à l'esprit de l'article 48. Mais ce
n'est pas pour cela qu'on l'a écrit, ce n'est pas pour dire non, c'est
pour pouvoir dire oui. Dans le cas qui vous concerne, je le dis tout de suite
parce que les autres maires vont me poser la question il vaut mieux le
dire tout de suite à partir de l'adoption de cette loi
jusqu'à nouvel ordre, c'est essentiellement ce que les gens veulent,
sauf qu'il fallait peut-être s'expliquer sur l'esprit de cette loi
lorsqu'elle sera approuvée, nous avons déjà pour cinq
municipalités sur six, en ce qui concerne l'île d'Orléans,
des propositions de plans
de développement; nous les avons déjà, pour la
plupart, étudiées, au niveau de nos fonctionnaires. Ce sera la
première chose que je ferai; nous allons procéder rapidement avec
ces plans.
Je sais je ne vous le cache pas qu'il y a des
contre-propositions qu'on vous exposera je pense que vous avez le droit
de les connaître nous ne les imposerons pas. La seule chose que je
demanderai, et je le dis tout de suite, c'est que si on ne s'entend pas sur les
contre-propositions, je souhaite pouvoir les expliquer dans des
assemblées publiques dans chacune de vos municipalités. Mais je
vous dis tout de suite que le dernier mot vous appartiendra. Quand j'aurai
été jusque là, quand j'aurai donné toute
l'information que ma fonction me permet d'avoir, quand j'aurai informé
tous les gens, mon intention est de faire confiance, vraiment, aux élus
des municipalités de l'île d'Orléans.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. M. Deblois, je
voudrais être certaine de bien vous comprendre. D'une part, vous dites:
On voudrait avoir des directives du ministère des Affaires culturelles
et, d'autre part, au début, vous vous êtes élevé
contre ce qui vous apparaît, et à bon droit je pense, sauf qu'il
s'agit d'un arrondissement historique, l'ingérence du ministère
des Affaires culturelles. Est-ce que je dois comprendre que vous souhaiteriez
que les règlements ou, enfin, que la réglementation soit faite
par le ministère des Affaires culturelles et qu'ensuite, vous
réagissiez à ce que le ministère des Affaires culturelles
vous proposerait? Il y a une chose certaine, c'est que je trouve un peu
difficile d'admettre, de la part du ministère des Affaires culturelles,
qu'on vous offre de faire des règlements et de prendre les choses en
main et qu'ensuite, ce soit soumis à la décision du
ministère des Affaires culturelles. Parce que, ce qui peut se produire,
si on prend le cas de l'île d'Orléans, où il y a six
municipalités... Il va se produire une chose ou l'autre. Il peut arriver
que les six municipalités ne présentent pas des plans semblables
et qu'à ce moment-là, le ministère des Affaires
culturelles dise: II faut normaliser pour l'ensemble. Ou il ne le fera pas et
il peut alors, je pense, créer des situations d'injustice, dans ce sens
qu'une municipalité aura certaines dispositions qui lui permettront des
lotissements différents, par exemple, ou un zonage différent,
tandis que, pour l'autre, ce sera peut-être moins favorable parce qu'elle
a voulu davantage mettre l'accent sur la protection de l'environnement ou du
patrimoine. Ma question précise est celle-ci: Est-ce que vous
préféreriez, puisque le ministère se garde un droit de
regard, un droit d'approbation des règlements finals, que la
première initiative vienne du ministère des Affaires culturelles
et que vous réagissiez à ce qu'il a à vous proposer comme
réglementation?
M. Deblois: Oui, c'est en plein cela. Depuis des années,
on ne connaît absolument pas jusqu'où le gouvernement veut aller
dans la protection de l'île d'Orléans. Nous voudrions avoir des
données de base, par exemple, sur lesquelles on pourrait travailler,
parce qu'on a déjà un projet de règlement qui est au
ministère des Affaires culturelles, qui a été fait. Il est
assez restrictif. Cela n'a pas été facile de le faire accepter
par la population, mais, avec plusieurs réunions publiques, on a quand
même réussi à faire comprendre aux gens qu'on avait quelque
chose de beau qu'on devait le protéger. Mais, aussitôt qu'on en
fait part à nos gens et qu'on leur dit: On travaille, d'accord, mais ce
n'est pas nous qui avons le dernier mot, les gens ne l'acceptent pas. Je pense
qu'au départ, si on avait des lignes de conduite, si on savait, par
exemple, jusqu'où le gouvernement est prêt à aller, je
pense qu'après cela, on pourrait travailler à élaborer nos
règlements qui pourraient peut-être rejoindre les idées du
gouvernement.
Parce qu'il reste que, dans plusieurs municipalités, les
idées du ministère et les idées des municipalités
sont à peu près identiques, à certaines choses
près, je crois. Mais il reste qu'aussi longtemps que ce sera le
gouvernement qui aura le dernier mot là-dedans, ce sera très
difficile de faire accepter une réglementation aux six
municipalités. Parce qu'on nous dit: Quand le projet de loi no 4 sera
accepté, on répondra à vos questions, on vous montrera ce
que le ministère a préparé pour vous. Nous nous disons:
Est-ce qu'il sera trop tard? Pourquoi ne pas le faire tout de suite, avant
qu'il se produise des choses qu'on ne peut pas changer? C'est sur cet aspect
que je pense que le gouvernement, depuis longtemps, aurait dû
élaborer ses règles du jeu, nous dire ce qu'il voulait
réellement et ensuite, nous aurions pu réagir à cette
situation-là.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: J'ai seulement deux remarques, au début de
cette réunion. Le ministre nous annonce des amendements à la loi.
Il y en a, en fait, deux d'annoncés jusqu'à maintenant. Je me
demande s'il ne serait pas normal qu'on puisse avoir les amendements, comme
cela se fait dans différentes autres commissions, plutôt que de
les annoncer comme cela, une à une, sans trop savoir où on s'en
va.
Ma deuxième remarque concerne ce que vous avez dit sur l'article
14. Vous dites que vous voulez qu'il y ait des autorisations ou des recherches
qui soient faites avant d'aller sur les terres publiques pour avoir des permis,
mais je ne pense pas que vous ayez parlé des propriétés
privées. Ce sur quoi le maire Deblois a requis votre attention, c'est le
fait que l'article 14 tel que proposé dit que le consentement
écrit du propriétaire n'est pas requis. Or, à mon sens, il
s'agit d'une négation pure et simple d'un droit de
propriété et il serait normal que ce consentement soit
plutôt requis pour aller sur les propriétés privées
quitte, par la suite, à
aménager certaines exceptions peut-être lorsqu'il faudra
absolument qu'on puisse y aller et que le propriétaire ne nous aura pas
donné ce consentement.
M. Vaugeois: On pourrait s'expliquer là-dessus. Je
m'excuse pour les amendements. Dès que la commission commencera ses
travaux de façon normale, soit l'étude article par article, je
vous remettrai les quelques modifications que nous avons l'intention de
soumettre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: M. le Président, j'ai écouté avec
beaucoup d'attention les propos du maire Deblois, mais j'avoue que je comprends
mal le fondement de son argumentation. Vous semblez désirer, si je
comprends bien, que les municipalités aient le dernier mot, c'est
d'ailleurs vous qui avez utilisé l'expression je ne sais pas si
je vous interprète correctement et qu'en dernière analyse,
dans un arrondissement historique qui existe en vertu d'une loi nationale, une
loi votée par l'Assemblée nationale, les municipalités
soient les ultimes interprètes, chacune d'entre elles, de la
façon dont cette loi s'appliquera chez elle. Cela me paraît un peu
curieux comme approche puisqu'en définitive il y a quand même une
responsabilité du gouvernement de voir à l'application d'une loi
qui a été votée par l'Assemblée nationale. En
dernière analyse, que l'élaboration de la réglementation
soit laissée aux municipalités parce qu'elles sont les plus
à même de connaître les conditions locales, c'est d'ailleurs
ce que propose le projet de loi, mais que le ministre se réserve le
droit de vérifier c'est, en tout cas, la façon dont je
comprends l'article 49 que le ministre se garde le droit de
vérifier en dernière analyse si cette réglementation est
bien conforme à la Loi sur les biens culturels, je pense que c'est la
responsabilité minimale que le gouvernement, quel qu'il soit, doit
conserver.
La démarche inverse qu'a semblé suggérer Mme le
député de L'Acadie est un peu celle qui a été faite
jusqu'à maintenant et tout le monde, en particulier à l'île
d'Orléans, s'en est plaint, c'est-à-dire que ce soit le
gouvernement qui élabore des choses et que les municipalités
réagissent ensuite.
Il est bien connu que le ministère des Affaires culturelles n'a
pas le personnel nécessaire pour voir à l'élaboration de
toute la réglementation requise, et dont on fait la nomenclature
à l'article 48, dans tous les arrondissements historiques existants ou
pouvant exister ainsi que les arrondissements culturels du Québec.
Si on attend après la direction générale du
patrimoine pour faire un travail qu'elle ne peut faire et qui, je pense, n'est
pas de son mandat, on risque précisément d'avoir les
délais qu'on a eus jusqu'à maintenant et dont les
municipalités de l'île d'Orléans se sont plaintes.
L'exemple qui me vient à l'esprit de façon plus
concrète pour illustrer ce que je dis, je prendrais, si vous voulez, non
pas l'île d'Orléans, mais tout près de chez vous, quand
même, la côte de Beaupré, qui n'est pas un arrondissement
historique mais qui devrait l'être à mon avis mais cela est
une autre question à cause de la concentration d'immeubles
à caractère patrimonial qu'on y trouve. Dans la
municipalité de Château-Richer pour ne nommer que celle-là,
il existe une quantité exceptionnelle de parcs de maisons-mobiles, cet
exemple audacieux d'architecture de demain, qui sont érigées
immédiatement à côté d'immeubles ou de maisons qui,
elles, datent du 17e siècle. Cela fait un mélange à tout
le moins assez curieux. On ne peut pas dire que le boulevard Sainte-Anne, qui
n'a jamais été reconnu pour être une merveille
d'esthétique, se soit amélioré de ce
côté-là. (10 h 45)
Si la Côte de Beaupré avait été un
arrondissement historique et si ce projet de loi avait déjà
été en vigueur, la municipalité de Château-Richer
aurait donc élaboré des règlements de la
façon dont je le comprends, en tout cas mais en
définitive, le ministre aurait dû juger de la conformité de
ces règlements avec les buts et la lettre de la Loi sur les biens
culturels.
On peut penser, à ce moment-là, que l'on se serait
épargné la présence, le long du boulevard Sainte-Anne et
tout près de la rue Royale, d'un aussi grand nombre ou même de
tout le parc des maisons mobiles dont le moins qu'on puisse dire est qu'il ne
contribue pas à rehausser le caractère historique de cette partie
du territoire québécois.
Mais c'est en définitive à la municipalité
d'élaborer ces règlements. Je pense que tout ce que le projet de
loi dit, au fond, est que c'est aux municipalités à faire le
travail. Le gouvernement se réserve le droit de s'assurer que ces
règlements ne vont pas à l'encontre de la Loi sur les biens
culturels qui définit déjà un cadre d'interventions ou le
cadre large, j'en conviens puisqu'on ne peut pas tout prévoir
dans une loi dans lequel cette réglementation doit s'effectuer
à l'intérieur d'un arrondissement historique. C'est pour cela que
je m'explique mal qu'une démarche qui n'a jamais fonctionné,
celle de voir le gouvernement préparer et les municipalités
réagir, soit de nouveau proposée, si j'ai bien saisi ce que le
député de L'Acadie disait, alors qu'à l'inverse ce qui
m'apparaît avoir été souhaité, c'est-à-dire
que les municipalités fassent leur travail c'est ce qui est
proposé on ait des réticences tout simplement parce que le
gouvernement doit quand même s'assurer qu'une loi qui a été
votée par l'Assemblée nationale doit être
respectée.
Je ne vois pas très bien en quoi on va à l'encontre du
fait que les municipalités aient le dernier mot là-dedans. On
s'assure tout simplement que les municipalités respectent les lois, ce
qui est normal.
M. Deblois: D'accord. Mais il reste quand même une chose,
monsieur. Je ne sais pas si vous connaissez les propositions du
ministère. Moi, je ne les connais pas. Vous me dites que vous ne les
connaissez pas non plus.
Jusqu'où le ministère est-il allé dans ses
propositions? On ne le sait pas du tout. Cela veut dire que si cela
continue de cette façon, nous sommes aussi bien de dire au
ministère: Faites un règlement, mais n'allez jamais dire à
personne que ce sont les municipalités qui l'ont adopté, par
exemple.
Si le ministère entend garder sa position, cela veut dire qu'il
pourrait arriver tout de suite aujourd'hui avec un règlement de zonage,
tout préparé, et nous dire: Voilà messieurs, vous allez
maintenant agir avec ces directives.
Je n'ai pas encore eu connaissance des contre-propositions du
ministère. Avec les données que je possède, je me dois
d'être méfiant, et je le suis encore.
M. Vaugeois: Est-ce que je pourrais apporter une précision
là-dessus, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Allez.
M. Vaugeois: II y a bien des choses qu'on pourrait dire, parce
que cela fait près d'un demi-siècle que le gouvernement du
Québec s'intéresse à l'île d'Orléans pour son
aspect général, culturel et patrimonial. C'est l'époque
où Pierre-Georges Roy lui consacrait un magnifique ouvrage qui a
été repris récemment. Il y a eu plusieurs interventions.
Celle qui a été la plus déterminante est évidemment
celle qui découle de la Loi des biens culturels en 1972.
Depuis cette époque, la commission des biens culturels est
revenue régulièrement à la charge avec des propositions
éventuelles d'aménagement de l'île. J'en ai vues à
la commission des biens culturels.
Mais c'est resté général. Ce n'était pas
assez avancé pour être traduit en plan de zonage ou en plan de
lotissement, ou en approche plus ou moins large de projets de construction. Les
gens du ministère eux-mêmes n'ont jamais eu le temps ni les moyens
de faire un plan je le disais au début parce que c'est
quand même quelque chose de tout à fait nouveau et de très
exigeant, et cela coïncide, hélas, avec un déplacement de
population qui a tendance à quitter les centres urbains bien
organisés pour les petites municipalités avoi-sinantes, avec les
conséquences fiscales et financières que nous connaissons
maintenant.
Il y a un phénomène d'étalement urbain qui est
extrêmement coûteux pour tout le monde et ce genre de
poussée, qui n'est pas vraiment une poussée démographique,
parce que c'est le même monde et il n'y en a pas beaucoup plus qu'avant,
mais le monde cherche à se déplacer, cela a empêché
également le ministère des Affaires culturelles et le
ministère des Affaires municipales d'établir une espèce
d'approche en toute quiétude avec les délais nécessaires.
Pour pallier cela, le ministère avait proposé au ministère
des Affaires municipales de soutenir financièrement les études
qui seraient faites par les municipalités même de l'île
d'Orléans et ces études, dans cinq municipalités sur six,
ont été faites, avec l'aide de firmes spécialisées
dont l'une est représentée ce matin ici. J'ai vu tout à
l'heure Pierre Bastien, de Pluram.
Ce sont des experts, ce sont des spécialistes qui ont
été engagés par les municipalités, choisis par les
municipalités, celles-ci recevant une aide raisonnable, je crois, du
ministère des Affaires municipales. On en est là. La plupart de
ces plans, sinon la totalité de ceux qui ont été
exécutés, sont actuellement entre les mains du ministère.
Mais avant d'amener... Disons-le franchement, le ministère, étant
donné son approche de protection du patrimoine qui s'oriente de plus en
plus vers la mise en valeur du patrimoine... Oui, le ministère a dans
ses tiroirs des contre-propositions, c'est évident. Là-dessus, je
suis conscient qu'on va avoir à s'en parler.
Ce que je voulais dire tout à l'heure, c'est que ce n'est pas le
dernier mot qu'on veut avoir, on veut s'entendre. On veut profiter d'une
ouverture que la loi nous donne et qui n'existait pas dans l'ancienne loi,
c'est là qu'est la différence. Dans l'ancienne loi, même si
on s'était entendu sur des plans d'aménagement, des plans de
lotissement ou des questions semblables, il fallait double recours, double
démarche, double permis, tandis que notre loi, notre nouveau projet de
loi, indique bien, à l'article 49, qu'à partir du moment
où le ministre notifie que les règlements qu'on lui a soumis
paraissent conformes aux exigences de la loi et à l'esprit de celle-ci,
à compter de la date prévue dans cette notification, dit
l'article 49, "une opération faisant l'objet d'une disposition
réglementaire approuvée par le ministre ne peut être
entreprise dans la totalité ou la partie de l'arrondissement historique
ou naturel, du site historique classé ou de l'aire de protection en
cause que selon cela devient donc la responsabilité de la
municipalité de faire observer cela les normes et conditions qui
y sont prévues dans cette réglementation. Une telle
opération, dans ce cas, ne requiert pas l'autorisation du ministre
c'est fini cela avec l'entente. Aucun permis ne peut toutefois
être émis par une corporation municipale, une corporation de
comté ou une communauté urbaine ou régionale si cette
opération n'est pas conforme aux dispositions réglementaires
approuvées par le ministre et soumises par la municipalité." Je
pense qu'on s'entend là-dessus. Ce qui est important ici, c'est la fin
du double permis, qui aurait été inévitable, ce qui serait
inévitable, si nous n'avions pas cette loi. Je pense qu'on ne s'en
sortirait pas plus qu'on s'en sortait avant.
M. Deblois: Est-ce qu'il nous restera de l'espace pour
émettre des permis?
M. Vaugeois: Oui.
M. Deblois: D'accord, mais ce que je veux dire, à la suite
des propositions du ministère, qui ne veut pas de développement
massif, qui ne veut pas de construction trop rapprochée sur le chemin
Royal, est-ce qu'il nous restera, même si on a le pouvoir de le faire,
encore des espaces où les gens pourront se bâtir et qu'on leur
donne le permis?
M. Vaugeois: Y a-t-il dans chacun de vos plans de
développement des espaces? C'est là qu'est le gros point. C'est
pour cela que je souhaite des assemblées publiques dans chacune de vos
municipalités. D'après ce que je sais des dossiers que j'ai vus,
des rencontres que j'ai eues avec vous, vous l'avez dit vous même tout
à l'heure, M. Deblois, il y a des maires à l'île
d'Orléans, qui sont très près de partager à peu
près à 100% les préoccupations actuelles du ministre des
Affaires culturelles qui, en cela, est fidèle à la position prise
par ses prédécesseurs, indépendamment des options
politiques. La loi que je défends finalement aujourd'hui, c'est une loi
approuvée sous un gouvernement libéral et j'y adhère
totalement et sans réserve. Maintenant, il y a moyen, avec les ans,
profitant de l'expérience acquise, d'améliorer les choses, c'est
ce que nous nous apprêtons à faire et là-dessus,
l'Opposition, jusqu'à maintenant, nous a suivis. Elle nous a même
accusés d'être un peu timides, sinon d'être trop timides.
Sur cette démarche, vous pouvez croire que si je pouvais gouverner
je m'excuse de ces mots, je ne me prends pas pour Louis XIV si je
pouvais agir dans l'abstrait, s'il n'y avait pas de monde directement
concerné ou si l'île appartenait au gouvernement, je vous le dis
franchement, il n'y aurait pas beaucoup de développement, parce que je
pense que ce n'est pas dans l'intérêt des résidents
actuels, ce n'est pas dans l'intérêt des gens de la ville de
Québec. De toute façon, il va falloir arrêter la
prolifération, l'étalement urbain. Il va falloir trouver des
moyens d'arrêter cela, il va falloir améliorer la qualité
de la vie dans la ville et il va falloir protéger les gens de la
campagne pour qu'à un moment donné ils puissent jouir de leurs
biens.
Vous connaissez le problème que les urbains posent très
souvent à la campagne. Souvent leur installation massive dans les
petites municipalités avoisinantes des grandes villes provoque
l'aménagement d'un certain nombre de services auxquels les ruraux ne
tiennent pas nécessairement ou encore dont ils n'ont pas besoin, compte
tenu de leur façon d'être distribués sur le sol. Mais
l'arrivée massive de ces urbains bouleverse cette situation. Je
pourrais, ce matin, donner des statistiques à faire frémir les
résidents de l'île d'Orléans sur ce qui se passe dans les
banlieues avoisinantes de Québec, les banlieues avoisinantes de
Montréal et les banlieues avoisinantes de Trois-Rivières. J'aime
donner l'exemple de certains villages, autour de Trois-Rivières,
où, il y a cinq ans, il n'y avait pas de taxe, tandis que l'année
dernière c'était à $0.40 des $100 et cette année
c'est passé à $1.14 et on sait que l'an prochain ce sera
passé à $2.25. Je tiens à rappeler ces choses aux gens de
l'île; je tiens aussi à rappeler aux cultivateurs
propriétaires de telle exploitation de ferme où là
ça sent mauvais à cause d'un tas de fumier quelque part
que les urbains qui s'installent de chaque côté peuvent se
plaindre de l'odeur du fumier...
Il faut s'entendre. La qualité de la vie qui fait que les gens de
l'île sont heureux à l'île, apprécient l'île et
que les urbains cherchent à s'y installer peut être compromise,
vous le savez comme moi, par l'arrivée massive des urbains. Je suis
assez confiant vis-à-vis de certains maires de l'île, je sais
qu'ils comprennent cela.
Hier, dans une manifestation publique, des gens me disaient: Nous avons
le plus bas niveau de taxes au Québec à l'île. Je
prétends, et je serais prêt à développer cela
publiquement, que c'est vrai grâce à la Loi des biens culturels et
que, malgré les emmerdements qu'elle vous a provoqués, elle vous
a finalement rendu le grand service de freiner une espèce de contagion
urbaine sur l'île et a rendu plus difficile l'installation des urbains
sur l'île qu'ailleurs dans la banlieue de Québec. Cela vous a
sauvé. Maintenant cela deviendra votre responsabilité de choisir
à quel rythme votre île recevra les urbains qui ne sont pas
confortables en ville, qui cherchent l'air pur, le beau décor et la
qualité de vie que vous avez à l'île.
Il y a aussi des responsabilités gouvernementales qu'on ne peut
pas passer sous silence. Ce serait bien gentil de dire: D'accord, on va
doubler, on va tripler, on va quadrupler la population, allons-y gaiement,
alors qu'on sait très bien qu'à certains endroits de l'île
il y a des problèmes d'eau; alors qu'on sait très bien que la
capacité de l'avenue Royale actuelle n'est pas illimitée; alors
qu'on sait très bien que les accès à l'île ne sont
pas prévus pour une population qui pourrait tripler ou quadrupler.
À moins que la population de l'île ne nous dise: Laissez-nous ces
problèmes, quand viendra le temps d'élargir l'avenue Royale
oublions l'aspect patrimonial et culturel on paiera pour; quand
viendra le temps d'aller chercher l'eau sur la côte de Beaupré, on
paiera pour; quand viendra le temps de faire un autre pont ou une jetée
pour venir à l'île d'Orléans, on paiera pour; quand viendra
le temps d'organiser des services d'égouts pour tous les gens de la
ville qui vont venir s'installer chez-nous, on paiera pour. Mais je sais que ce
n'est pas là le langage qu'ils tiennent et, à ce
moment-là, ils se fient un peu sur le gouvernement pour prendre ces
responsabilités qui sont de l'ordre que je viens de mentionner.
Le Président (M. Jolivet): Y a-t-il d'autres intervenants
parmi les gens de...
M. Alain Turgeon, maire de
Sainte-Pétronille
M. Turgeon (Alain): M. le Président, Mme Lavoie-Roux,
messieurs les membres de cette commission, je tiens, au nom du Conseil
municipal de Sainte-Pétronille, que je représente, à
remercier...
Le Président (M. Jolivet): Voulez-vous vous identifier,
s'il vous plaît!
M. Turgeon: Alain Turgeon. ... la commission de nous permettre,
de nous donner l'occasion d'exprimer, peut-être, certaines remarques,
certaines vexations et aussi de nous prononcer sur le projet de loi no 4.
Évidemment, le 13 mars 1970, l'île d'Orléans a
été décrétée arrondissement historique. En
1972, une loi abrogeant l'ancienne loi sur l'île d'Orléans,
la condition des biens et des monuments historiques, etc, était
adoptée.
Une orientation d'aménagement technocratique a été
élaborée, suite à l'adoption du projet de loi jusqu'en
1976 où, évidemment, on a peut-être réalisé
que l'impact du plan d'aménagement et de sauvegarde qui se
préparait coûterait très cher au gouvernement. On a
peut-être aussi réalisé qu'il s'agissait là de
l'expropriation déguisée. (11 heures)
En 1976, une nouvelle orientation est donnée où, suite
à des ententes avec le ministère des Affaires municipales, des
Affaires culturelles, des sommes sont votées pour l'élaboration
et l'adoption de plans d'aménagement. Allégresse chez les
conseils municipaux en février 1977. Mais que d'amertume, encore une
fois, en août 1977, quand, chacun des plans d'aménagement ayant
été proposé, on nous a dit, de la part du ministère
des Affaires culturelles: nous vous reviendrons sous peu. Il y a maintenant
neuf mois que le "sous peu" est dépassé.
Au niveau de l'île d'Orléans, le problème est
peut-être le suivant: on a un individu bicéphale, à deux
têtes, composé de six membres, qui, peut-être avec
l'approche que donne le ministère des Affaires culturelles, dans
l'application de sa loi, met cet individu dans l'eau bouillante, où
chacun des six membres réagit de façon différente,
à cause de sa composition sociologique. Je pense que le cas de
Sainte-Pétronille peut être différent de celui de
Sainte-Famille, qui lui-même peut être différent de celui de
Saint-François, quoique ces deux derniers peuvent se comparer
précisément. Dans le cas de Saint-Laurent et Saint-Pierre, ces
deux municipalités étant actuellement peuplées
d'agriculteurs et d'urbains réagissent différemment à
cause de leur situation économique, effectivement. Les gens de
Sainte-Pétronille vivent encore de la région de Québec
directement, contrairement à Saint-Pierre ou Saint-Laurent où on
commence à avoir un taux d'exploitation agricole beaucoup plus grand et
par rapport à Saint-Pierre, Saint-Jean et Sainte-Famille où
encore là, la grande majorité, toute proportion gardée
avec Saint-Pierre ou Saint-Laurent, vit d'exploitation agricole.
L'autre problème, du fait que les six membres réagissent
toujours de façon différente à cette eau bouillante, est
le taux de sensibilisation que ces gens ont du sens patrimonial, de
l'importance ou de l'existence de l'île d'Orléans quant à
sa valeur elle-même, quant à la qualité de la vie et quant
à son développement, quant à la croyance ou la confiance
que l'on a dans les études qui ont été
déposées par des fonctionnaires ou des ingénieurs de
différents ministères intéressés à tout ce
dossier.
L'autre problématique ou autre cause du problème, toujours
de la façon différente de réagir des conseils municipaux,
est cette sensibilisation face à l'utilisation des terres arables, de la
disposition des eaux usées et de l'approvisionnement en eau. Je pense
que c'est ce qui explique probablement les différentes façons et
l'absence de consen- sus fondamental au niveau des six conseils municipaux.
Le deuxième problème est sans doute la loi ou le chapitre
19 qui n'a peut-être pas été compris par les gens qui
vivent sur l'île d'Orléans. Effectivement, je pense qu'à ce
niveau, le ministre ou le ministère des Affaires culturelles comme tel,
a une responsabilité. La loi, très théorique,
prévoit que le ministre peut rédiger, prévoir des
réglementations, réglementations qui auraient peut-être pu
permettre aux gens de l'île d'Orléans de connaître les
règles du jeu. Je pense que cette réglementation est à peu
près inexistante. Il existe, évidemment, un embryon de
réglementation, mais peut-être pas celle qui devrait être
complétée, et je pense qu'au niveau des amendements on
élabore davantage ou on prévoit quand même le
mécanisme d'adoption d'une nouvelle réglementation.
L'absence de cette réglementation édictée par le
ministre a peut-être fait que l'application de la loi n'a pas permis aux
fonctionnaires de rendre des décisions appuyées sur des
argumentations ou des raisons fondamentales; dire: Nous refusons
l'émission de tel permis à cause de telle chose constitue
peut-être une mauvaise application de la loi et aussi une très
mauvaise publicité pour les gens qui ont à vivre cette loi.
On a déjà dit, au niveau des permis, qu'on ne les
émettait pas parce que ce n'était pas beau. Je pense qu'il
faudrait peut-être avoir des raisons plus sérieuses et qu'il
faudrait étaler la réglementation qui nous permettrait de dire:
On refuse l'émission du permis pour telle raison.
On a peut-être aussi donné, quant à l'application de
cette loi et de cette réglementation, trop d'importance à
certains détails, détails qui frappent évidemment la
population. Il faut quand même admettre que la population comme telle est
peut-être mal renseignée ou ne saisit peut-être pas toute
l'importance, non plus, de la loi 19 et de ses admendements, actuellement.
Ce qui vexe le citoyen qui doit vivre avec cette loi, c'est la porte
ronde qu'on lui refuse. On n'a peut-être pas renseigné les
citoyens sur l'importance de la mise en valeur, sur l'importance de
l'aménagement du territoire.
En somme, ce sont peut-être les deux grands problèmes qui
font qu'actuellement, la loi est si mai appréciée par les gens
qui vivent à l'île d'Orléans. Je parle des articles
concernant les arrondissements historiques. Je ne parle pas
intégralement de toute la Loi sur les biens culturels. C'est
peut-être une distinction qu'il faut apporter.
Pour les solutions aux problèmes que j'ai soulevés, il y
en a peut-être une première qui nous vient à l'esprit;
c'est que si le législateur a décidé que l'île
d'Orléans était un arrondissement historique, sans consulter la
population, qu'il en assume les conséquences. Malheureusement, cela
devrait aller jusqu'à l'abolition des conseils municipaux et à la
création d'une commission. Je pense que c'est tout à fait contre
la philosophie de l'actuel gouvernement. C'est une solution un peu
irréaliste, mais quand même. Elle a déjà
été mentionnée.
Quant à la deuxième solution, je pense que
c'est l'application actuelle de la loi et de ses amendements. Je dois
vous dire que nous serions favorables au projet de loi, cependant, en
établissant les réglementations que le ministre s'accorde le
droit de préciser et en permettant aux municipalités d'adopter
leurs règlements d'aménagement du territoire dans les plus brefs
délais, de quelle façon...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que M. Turgeon pourrait
répéter sa deuxième solution, s'il vous plaît? Il y
a deux volets et j'ai perdu le premier.
M. Turgeon: Oui. La première, disons que le ministre
précise les réglementations qui sont prévues dans
différents articles de loi, 48, 49, 50, 51, 52 et 53 et
deuxièmement, qu'on permette aux municipalités d'adopter leur
plan de zonage dans les plus brefs délais, de la façon suivante:
En dégelant les fonds qui ont déjà été
accordés par le ministère des Affaires municipales, en
collaboration ou en accord avec le ministre des Affaires culturelles.
Deuxièmement, qu'on fasse adopter ces réglementations par
la population des municipalités elle-même, mais aussi, qu'on mette
peut-être à la disposition des conseils municipaux une campagne
publicitaire pour sensibiliser les gens à l'importance de la
qualité de la vie, aux dangers d'une sururbanisation. Je pense que cela
doit se faire.
Actuellement, les conseils municipaux... Chez nous, nous avons un budget
de $100 000. Je vous assure que s'il y avait une campagne de publicité,
l'adoption d'un règlement de zonage, avec $100 000, quand le
déneigement en coûte $25 000, ce sont des choses qu'il faut quand
même apprécier.
Il faut aussi que le ministère, par une campagne d'information
orchestrée je pense qu'il y a quand même des
possibilités dans ce sens se fasse accepter par les citoyens de
l'île d'Orléans, comme autre moyen d'appliquer la
réglementation et de permettre ou de conclure des ententes, dans les
plus brefs délais, avec les conseils municipaux, tel que stipulé
à l'article 51f de la loi, pas de la loi comme du projet de loi,
où on dit: "Conclure, conformément à la loi, des ententes
avec tout gouvernement relativement aux biens culturels et conclure avec les
corporations municipales ou toute autre personne des ententes en vue de
l'application de la loi."
Je me demande si le ministère des Affaires culturelles ne devrait
pas mettre, effectivement, avec entente au niveau du ministère des
Affaires municipales, immédiatement, un inspecteur en bâtiments;
c'est une application très concrète de la loi qui permettrait
peut-être d'éviter encore certains gâchis. Encore là,
il y aurait peut-être lieu de faire intervenir une entente,
peut-être avec le ministre du Revenu, pour accorder aux gens qui vivent
dans des arrondissements historiques une exemption fiscale de sorte que ce soit
la responsabilité si le législateur décrète
l'île d'Orléans arrondissement historique, que ceux qui sont pris
avec des contraintes dans ce sens... Je comprends que des subventions sont
actuellement accordées. mais qu'on aille plus loin que ça, qu'on
accorde des exemptions fiscales aux gens qui y résident.
Enfin, comme autre solution au problème, c'est d'amener les
autres ministères concernés, comme l'Agriculture et je
pense qu'effectivement, un mémoire de l'Union des producteurs agricoles,
dont j'ai pris le reportage à Radio-Canada à 18 h 30, faisait
état de cette législation sur le zonage agricole qui serait
importante et qui, dans plusieurs municipalités de l'île
d'Orléans, réglerait le problème à un pourcentage
assez intéressant...
Je parlais tout à l'heure de l'inspecteur en bâtiments. Je
parlerais aussi peut-être d'avoir à la disposition des conseils
municipaux un consultant, un architecte ou un dessinateur qui, lorsqu'au niveau
des comités locaux d'aménagement on arrive avec un
problème d'esthétique, de construction, d'intégration des
bâtiments au décor ou au paysage, tant et aussi longtemps que les
normes ne seront pas clairement établies, nous permettrait
peut-être de solutionner sans gâcher des choses.
Je pense même qu'après les règlements
édictés sur l'affichage, sur les matériaux à
utiliser et tous ces points, il serait bon que ce consultant soit aussi
à notre disposition. Je pense que dans la pratique, actuellement, au
niveau des comités locaux d'aménagement, on aurait
apprécié l'existence d'un consultant du ministère des
Affaires culturelles dans ce sens.
Alors, ce sont des représentations, M. le Président, que
le conseil municipal de Sainte-Pétronille voulait faire, sur le projet
de loi et s'arroger l'occasion de faire d'autres remarques, je vous
remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: M. le Président, je pense que le maire qui
vient de s'exprimer a, par ailleurs, une démarche à l'endroit du
ministre qui, compte tenu de la qualité de ses propos, commence à
m'inquiéter un peu. Si vous manifestez autant d'intelligence dans
l'autre démarche que ce matin, je vais demander un autre
ministère.
M. Turgeon: M. le Président, je ne voudrais pas que le
ministre devienne paranoïaque.
M. Vaugeois: Si c'est réciproque...
Écoutez, deux minutes pour dire que les propos du maire Turgeon
me paraissent plein de bon sens, qu'ils débouchent sur des
préoccupations bien concrètes et sur lesquelles nous avons
déjà réfléchi et, pour une certaine partie,
auxquelles nous sommes prêts à donner des suites.
Déjà, le projet de loi que nous avons sous les yeux nous permet
non seulement de conclure des ententes qui éliminent les doubles permis
et les doubles démarches, mais nous permet aussi d'offrir des services,
voire même d'accorder des subventions. C'est à l'article 20, qui
réfère à l'article 51, et à d'autres endroits
aussi. Il est donc possible, éventuellement, de donner des services
techniques qui
pourraient correspondre à des services de consultants, pourquoi
pas à des inspecteurs en bâtiment, etc. C'est prévu et nous
voulons aller jusque là. (11 h 15)
Vous venez également, M. le maire, de faire allusion à des
exemptions, des privilèges fiscaux, qui pourraient venir avec la
définition de l'arrondissement historique, par exemple. Personnellement,
je vous rejoins là-dessus et j'ai déjà demandé aux
fonctionnaires du ministère d'en faire l'étude, de quantifier ce
que cela pourrait signifier pour les arrondissements existants, partant de
l'hypothèse qu'on pourrait faire une exemption de taxe foncière
de l'ordre de 25%, le ministère s'engageant, bien sûr, à
rembourser la municipalité pour ce qu'elle perd au niveau de ses
résidents. C'est déjà le genre d'étude que j'ai
demandé. Ma réflexion est toute simple et c'est probablement la
vôtre aussi. Je la vois d'abord comme défenseur du patrimoine.
À partir du moment où les gens auraient des avantages financiers
en compensation des petites lenteurs et des petits tracas qu'on leur
occasionne, ils deviendraient peut-être plus facilement promoteurs des
arrondissements et des plans de sauvegarde et de mise en valeur du patrimoine.
Il faut quand même les intéresser de façon très
concrète. Cela en serait une. Les municipalités n'y perdraient
rien et y gagneraient des électeurs plus sensibilisés, ce qui
faciliterait aussi la tâche des administrateurs municipaux.
Ce n'est pas tout de remettre le paquet aux administrateurs municipaux.
Même s'il y a des plans qui ont été prévus, il faut
quand même que la pression qui va s'exercer dans les municipalités
soit équilibrée et ne soit pas celle d'abord des
spéculateurs fonciers ou des développeurs déments. Vous
voyez à peu près ce que je veux dire. Je pense que vous
connaissez tout ce monde-là.
Il y a un certain nombre d'allusions dans votre présentation que
je pourrais relever. Vous avez ouvert vous-même une porte qui peut faire
réfléchir tout le monde. Vous avez fait allusion comme cela, en
passant, au coût du déneigement. Vous avez parlé, je pense,
de $27 000 sur un budget de $100 000. Vous avez le niveau de taxe le plus
élevé à l'île d'Orléans. Oui, à
Sainte-Pétronille les taxes sont trois fois plus élevées
que dans d'autres municipalités de l'île et elle s'est assez
développée avec des urbains. Je pense que seulement cela, c'est
déjà la réponse à bien des questions qui se posent
dans d'autres municipalités de l'île. On n'a même plus
besoin de sortir de l'île à un certain moment pour comprendre
certaines choses. On l'a sur l'île. C'est cela qu'on essaie de faire
comprendre. Au-delà de l'intérêt patrimonial qui est celui
du ministère, finalement il y a des intérêts
économiques majeurs qui sont en jeu.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci à M. Turgeon de son intervention.
Je voudrais d'abord lui demander... j'aurais pu le demander à M. Deblois
également, à l'un ou à l'autre. Vous avez eu, à un
moment donné, des subventions pour préparer vos plans
d'aménagement, chacune des municipalités de l'île
d'Orléans, et de fait j'ai cru comprendre que ceci avait
été envoyé au ministère. Est-ce que le
ministère a réagi à ces études que les
différentes municipalités de l'île d'Orléans avaient
faites?
M. Turgeon: Voici, madame. Je pense qu'au niveau de
l'élaboration de la réglementation des plans de zonage, il y a
une première étape qui est franchie, c'est-à-dire au
niveau du zonage comme tel des secteurs résidentiel, commercial et
agricole. Le ministère des Affaires culturelles n'a pas encore
retourné sa proposition ou ses remarques ou recommandations sur les
plans qui ont été déposés. Quant au niveau des
subventions, j'aimerais peut-être éclaircir le point suivant. Il y
a une tranche de $4000 qui a été versée sur un montant
total de $10 000. Nous attendons le ministère quant à ses
contre-propositions ou ses recommandations sur les plans qui ont
été déposés, et ce qui fait mettre en doute la
crédibilité du ministère, ce sont toujours les longueurs
et les lenteurs que les conseils municipaux et les citoyens doivent
supporter.
Mme Lavoie-Roux: Quant à ces plans de
réaménagement, les six municipalités ou cinq
municipalités en ont retourné cinq sur six?
M. Vaugeois: II y en a une qui ne s'est pas encore
prévalue de l'offre, Saint-François.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous vous êtes aussi,
j'imagine, concertés de la même façon que vous vous
êtes concertés pour vous opposer à l'adoption de la Loi sur
les biens culturels? Je comprends que tous les maires de l'île
d'Orléans ont voté contre l'adoption de cette Loi sur les biens
culturels. Oui, ou non, ils ont voté.
M. Turgeon: Oui, je pense qu'au niveau de la concertation, quant
à l'élaboration des règlements de zonage, il n'y a jamais
eu de concertation. Quant au niveau de la résolution, je pense qu'il
faut s'en remettre au contenu de la résolution et la prendre dans son
ensemble. Il y a un troisième paragraphe qui a son importance,
c'est-à-dire que l'adoption du projet de loi soit suspendue
jusqu'à ce que les règlements de zonage soient adoptés. Le
vote contre le projet de loi avait aussi pour but de provoquer ce pourquoi nous
sommes devant vous ce matin.
Mme Lavoie-Roux: Alors, en fait, on a voté contre le
projet de loi no 4, mais...
M. Turgeon: Je préciserais cependant que l'attitude que je
prends est une attitude personnelle. Je laisse les autres maires
entièrement libres d'expliquer les raisons pour lesquelles ils ont
voté contre. L'attitude que nous avons eue à
Sainte-Pétronille, c'est que nous voulions rencontrer et faire aboutir
les dossiers à quelque chose.
Mme Lavoie-Roux: Vous dites qu'au niveau de la préparation
des projets d'aménagement des cinq municipalités qui se sont
prévalues des subventions qui leur avaient été offertes,
il n'y a pas eu de concertation. Est-ce que vous pouvez nous dire vous
ou les autres maires s'il y a quand même des principes qui sont
retenus et qui sont identiques pour toutes les municipalités ou si, au
fond, on part d'options ou de choix très différents dans un
projet de règlement d'aménagement. Parce que s'il y a quand
même une certaine similarité ou certains principes selon lesquels
on se rend compte, je pense que cela peut être prometteur; mais si
vraiment les cinq la sixième, on ne la connaît pas
partent de principes très différents et ont retenu des solutions
très différentes, le problème prend des proportions
beaucoup plus grandes?
M. Turgeon: Cela me fait penser à cette question, à
savoir si on est contre la vertu. Je pense que tous les gens sont pour la
vertu. Quant à l'interprétation de la vertu et ce en quoi elle
consiste, cela peut être interprété de différentes
façons. Je pense que tous les maires et les conseils municipaux sont
peut-être d'accord pour sauvegarder l'île, mais dans quelles
proportions et suivant quels problèmes qui existent dans chacune des
municipalités? Il n'y a jamais eu de concertation. Nous sommes tous
favorables à la sauvegarde et à un plan d'aménagement.
C'est le principe général, mais quand on entre dans son
application, je pense qu'il n'y a peut-être pas nécessairement de
concertation et d'accord général quant à l'application de
ces plans de zonage.
Mme Lavoie-Roux: Alors, est-ce que je suis juste en
interprétant que, évidemment, tout le monde veut la protection du
patrimoine, veut la conservation de l'île, mais il y a des
différences assez fondamentales quant aux façons de
réaliser ces objectifs entre les diverses municipalités? Est-ce
assez juste comme interprétation?
M. Turgeon: Vous me parlez? J'aimerais que les autres maires
aient l'occasion de s'exprimer.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y en a d'autres qui voudraient
répondre?
Le Président (M. Jolivet): II y a M. Chabot. M.
Vaugeois: C'est juste avant...
Mme Lavoie-Roux: Je n'ai pas fini, j'ai 20 minutes; vous
n'êtes pas habitué d'observer les règlements!
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres
maires qui veulent s'exprimer, j'ai cru voir quelqu'un qui...
M. Chabot: Je pense qu'il y a beaucoup de différences
entre chaque municipalité. On est peut-être divisé en deux
ou trois groupes. Il y a certaines municipalités qui se rejoignent plus
facilement, tandis que d'autres sont plus éloignées.
Peut-être que les maires peuvent vous donner leur position
là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord, y en a-t-il d'autres qui veulent
s'exprimer?
M. Bonsaint: M. le Président, M. le ministre,
d'abord...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, voulez-vous vous
identifier, s'il vous plaît?
M. Roland Bonsaint, maire de Saint-Jean
M. Bonsaint: Roland Bonsaint, maire de Saint-Jean, île
d'Orléans.
Une voix: Voulez-vous rapprocher le micro, s'il vous
plaît?
M. Bonsaint: Est-ce que vous m'entendez?
M. Vaugeois: On ne veut rien manquer de vos paroles, M. le
maire.
Le Président (M. Jolivet): Ça va.
M. Bonsaint: Est-ce que vous m'entendez bien?
Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord.
M. Bonsaint: Tout d'abord, Saint-Jean, île
d'Orléans, la paroisse que je représente, est une paroisse un peu
différente des autres, parce que le tourisme a un oeil dessus, plus que
sur les autres paroisses. Je ne voudrais pas blesser mes confrères, les
autres maires. C'est parce que je veux vanter ma paroisse.
Mme Lavoie-Roux: II doit avoir la plus belle paroisse.
M. Bonsaint: Je ne voudrais pas fâcher les autres maires
parce que je veux vanter la paroisse de Saint-Jean qui est plus belle que les
autres. Mais c'est vrai qu'au niveau du tourisme, la paroisse de Saint-Jean est
la plus visée, étant donné que c'est la paroisse qui a la
plus belle vue sur le fleuve et le plus beau point de vue de l'île
d'Orléans.
C'est la raison pour laquelle j'aurais des choses à proposer. Il
n'y a pas beaucoup de construction dans le bas de la paroisse, sauf les maisons
des cultivateurs. Je désirerais que les propriétaires
cultivateurs, actuellement, gardent leur droit de vendre des terrains, du moins
à leurs enfants. Mais pour donner une chance aux touristes de voir le
beau point de vue que nous avons de Montmagny à Québec... Entre
le village Saint-Jean et les limites de Saint-François, il y a une
pointe qui avance, une des plus hautes de l'île d'Orléans, qui
pourrait se prêter à une halte routière, un arrêt
touristique, qui permettrait aux touristes de quitter la route pour pouvoir
admirer les beautés du sud
de l'île d'Orléans et faciliterait la circulation
routière. De l'île Reau, de l'île Madame, de Montmagny
jusqu'à Beaumont, on en a une vue comme nulle part ailleurs.
C'est la raison pour laquelle je demanderais à M. le ministre si
c'était possible d'aménager un arrêt touristique, une halte
routière, ce qui est la même chose pour que le
touriste puisse arrêter, se reposer et admirer les beautés qu'on a
chez nous. Dans le moment, étant donné que le touriste ne peut
pas arrêter nulle part, que l'île d'Orléans n'a qu'une route
de ceinture qui va toujours rester une route à deux voies, parce que ce
n'est pas une route qui va en Gaspésie ni sur la Côte-Nord, que
c'est un chemin de ceinture de 25 milles qui retourne à Québec,
il n'a pas de chance d'arrêter et de visiter les beautés qu'il y a
chez nous. Tous les gens qui voyagent, les livreurs, les vendeurs crient aux
touristes et veulent passer par-dessus. Je suis un des pires qui crie et essaie
de les faire quitter la route. S'il y avait un arrêt touristique, les
gens arrêteraient et admireraient les beautés de la nature chez
nous. Ils repartiraient très contents et diraient: On va revenir
à l'île d'Orléans.
C'est pour cette raison que je demande à M. le ministre s'il
serait possible de faire un amendement au règlement qu'on a
commencé à faire, dans l'intention de pouvoir construire quelques
maisons, à partir du village, en descendant aux limites de
Saint-François. Pour le haut du village ainsi que pour la paroisse, on
n'a pas besoin de penser à en construire d'autres; c'est
déjà construit à pleine capacité.
Pour ce qui est de la culture, du zonage agricole, je suis en faveur.
J'ai déjà été cultivateur; je ne le suis plus
depuis cinq ou six ans. J'ai vendu ma terre. Mais il y a 24 terres à
Saint-Jean de l'île d'Orléans qui sont vendues à des gens
de l'extérieur, à des classes de gens qui ont de l'argent, parce
que les terres se vendent beaucoup plus cher à l'île
d'Orléans. Il y en a qui gardent des chèvres, d'autres des
chevaux de course, d'autres des chevaux de selle, d'autres louent les plus
beaux morceaux qui sont cultivables, et le reste ne sert à rien.
Bientôt, ce ne sera plus cultivable. Le boisé fait son apparition
dans de la belle terre en culture. Je trouve cela déplorable, des terres
comme à l'île d'Orléans; ce sont les plus belles terres en
culture qu'il n'y a pas dans la province, près de la ville de
Québec, qui sont abandonnées.
Pour ce qui est du zonage agricole, s'il était possible de faire
quelque chose, étant donné que c'est si près de
Québec, si près des marchés, pour ne pas que les terres de
l'île d'Orléans soient abandonnées, comme cela l'est
actuellement. (11 h 30)
Une autre question que je demanderais à M. le ministre, c'est que
les terrains acquis il y a huit ou dix ans qui sont achetés, ou que des
cultivateurs qui ont vendu leur terre comme moi mais qui ont gardé des
terrains... C'est mon cas, j'ai vendu ma terre et j'ai gardé des
terrains pour revendre; ils sont subdivisés, ils sont au rôle
d'évaluation depuis huit ans. Il y en a de cinq ans, il y en a de deux
ans. Il y a des terrains qui ont été payés $10 000, $12
000. J'aimerais que, avant que le règlement soit adopté et soit
final, on ait le droit de vendre ces terrains avec le consentement du
ministère de l'environnement, que le permis du ministère de
l'environnement soit accordé pour qu'ils puissent être vendus
selon les normes du ministère. Nous, nous n'accordons aucun permis, chez
nous, dans la municipalité sans que le ministère de
l'environnement ne donne son permis comme quoi la fosse septique, le champ
d'épuration et le puits sont selon les normes du ministère.
J'aimerais savoir le plus vite possible, vu qu'on est en retard un peu et que
la saison est avancée et qu'il y a beaucoup de gens qui voudraient
construire parce que la paroisse de Saint-Jean est en retard comparativement
aux autres paroisses qui ont beaucoup construit depuis quelques années.
Moi, je ne sais pour quelle raison, j'ai eu peur, j'étais trop à
cheval sur les principes avec les règlements qui s'en venaient. On n'a
presque pas construit. Il y a des années où il n'y a eu que deux
constructions. Cela fait qu'il n'y a pas eu de construction à Saint-Jean
depuis cinq ou six ans.
M. Vaugeois: C'est ce qui vous vaut le plus faible niveau de taxe
à l'île d'Orléans. Votre prudence est louable et vous y
trouvez votre intérêt actuellement.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais poser une question au maire de
Sainte-Pétronille car je crois comprendre que votre municipalité
est plus urbanisée que les autres. À ce moment-là, quand
on examine le problème des autres municipalités, cela apporte
peut-être une optique différente. Est-ce que vous pourriez me
donner la proportion de terres agricoles à Sainte-Pétronille par
rapport... Il n'y en a pas du tout apparemment.
M. Vaugeois: II y en a une.
M. Turgeon: Non, non, il y a quelques terres agricoles. Il y en a
cinq. J'ai un territoire d'un mille carré. Effectivement, en plus des
cinq terres agricoles, il y a un terrain de golf. Je pense que...
Mme Lavoie-Roux: En admettant que ce serait une chose à
envisager, avez-vous encore de la place pour du développement à
Sainte-Pétronille?
M. Turgeon: Écoutez, Mme Lavoie-Roux, quand on parle de
développement tout dépend dans quelle proportion. Il faudrait
peut-être parler des chiffres. Il y a quand même des secteurs qui,
actuellement, sont existants. Il en est prévu dans notre
règlement d'aménagement, mais il n'y en a pas, quand même,
une quantité effarante.
Mme Lavoie-Roux: Le problème, dans ce sens, est assez
différent de celui des autres municipalités.
M. Turgeon: D'ailleurs, dans mon exposé je
vous précisais que la composition sociologique de la population
chez nous est très différente de celle de Saint-François
puisque la majorité des gens qui demeurent chez nous travaillent en
ville, ce sont des gens qui viennent de l'extérieur et qui se sont
installés à l'île d'Orléans. Sur 798 personnes qui
ont droit de vote, 255 sont originaires de l'île comme telle et le solde
est de l'extérieur. Or la proportion est quand même assez
importante. Cela représente 525, 535 sur...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministère des Affaires
culturelles vous a donné une idée sur la grandeur des lots dont
vous pourriez disposer?
M. Turgeon: Non, il n'y a pas eu d'étude, effectivement,
pour examiner le pourcentage de territoire sur lequel on pourrait avoir une
vocation résidentielle, on n'a pas eu de pourcentage en ce sens.
Mme Lavoie-Roux: De même dans les autres
municipalités il n'y a rien eu de la part du ministère à
cet effet. Dans le fond, ce que dit M. Deblois, et vous me corrigerez, M.
Deblois, c'est qu'on travaille un peu à l'aveuglette. Finalement, on a
déjà renvoyé un plan de réaménagement. Le
ministère n'y a pas réagi et s'il y réagit, comme c'est
nous qui avons la décision finale, c'est nous qui serons tenus
responsables des règlements qui seront adoptés alors que, dans le
fond, vous voudriez que ce soit le ministère qui se mouille davantage,
qui prenne davantage ses responsabilités. Est-ce que je vous
interprète bien? (11 h 30)
M. Deblois: Mme Lavoie-Roux, comme je l'ai dit tout à
l'heure, j'aime bien travailler pour la préservation de l'île
d'Orléans, mais j'aimerais aussi savoir pourquoi on travaille et
où on s'en va avec cela. Il reste que les propositions sont faites. Je
pense qu'on a fait le premier pas et on attend toujours. Comme Alain Turgeon le
disait tout à l'heure, nous attendons depuis neuf mois la
grossesse devrait être terminée que cela aboutisse. Nous
n'avons aucune contre-proposition, aucune ligne de conduite. Alors, nous
faisons notre travail au meilleur de notre connaissance, mais ce n'est pas
certain que nous allions rejoindre les optiques du ministère.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, puis-je vous poser une question?
Il y a quand même eu des montants d'argent qui ont été
consacrés, à l'intérieur du ministère, pour penser
à un plan de réaménagement de l'île
d'Orléans? Est-ce que je me trompe en disant cela?
M. Vaugeois: Comme on l'explique, par le biais du
ministère des Affaires municipales...
Mme Lavoie-Roux: Mais à l'intérieur du
ministère même, il n'y a pas eu d'études de faites
là-dessus?
M. Vaugeois: Oui, il y a eu des études de faites, c'est
sûr, mais cela ne débouche sur aucun plan d'aménagement.
Cela reste des hypothèses.
Mme Lavoie-Roux: Ces hypothèses ont-elles
été examinées, à un moment donné, avec les
municipalités concernées?
M. Vaugeois: Non, parce que, au départ, il y a une
espèce de hiatus irréconciliable. Généralement, ces
plans sont cogités, réfléchis, au niveau de la Commission
des biens culturels qui, soit dit en passant, a pris une attitude assez
rigoureuse. Vous pouvez le constater dans le rapport qu'elle a fait. Pour elle,
à chaque demande de permis, c'est: Non, en l'absence d'un plan qui
aurait de l'allure. Évidemment, c'est l'esprit de la commission et je ne
la blâme pas. Elle a des réserves majeures sur tout ce qu'on peut
appeler développement urbain.
Actuellement, les études du ministère ont plutôt
été tournées vers une protection de l'île, alors que
les maires de l'île ont subi la même pression que tous les maires
des municipalités environnantes, c'est-à-dire l'exode de l'urbain
et la spéculation foncière. Depuis deux mois et demi que je suis
là, j'ai fait une exception majeure pour toutes les demandes de permis
qui m'arrivaient pour des fils qui voulaient s'établir à
côté de leur père. Je suis conscient d'une chose. J'ai
libéré beaucoup de permis comme cela, mais je ne suis pas dupe.
Je sais très bien qu'un spéculateur un peu astucieux peut faire
demander le permis par le fils, il fait construire par le fils, et quand c'est
fini, c'est à vendre. Il y a toutes sortes de façons de
contourner un règlement. Si on devait dire que quand c'est
demandé par un fils d'une famille qui est là depuis quatorze
générations, c'est dans le sac, ce serait trop simple.
Tout cela pour vous dire que, actuellement, parmi toutes les
études faites sur l'île parce qu'il y en a eu, il y en a
qui guident nos fonctionnaires dans les demandes non seulement de permis de
construction, mais de réparation. Tout cela n'a pas
débouché sur un plan d'aménagement. Il existe deux
positions un peu inconciliables, c'était parce que cela
évolue actuellement à l'île il n'y a pas longtemps
encore, essentiellement on nous demandait de faire comme ailleurs dans les
banlieues de Québec. Alors que, pour la commission, il s'agissait
surtout de protéger la valeur patrimoniale de l'île. C'est donc
à peu près irréconciliable.
Actuellement, le ministère s'est fait à I'idée
je ne parle plus de la commission qu'il pourrait y avoir du
développement urbain, mais à partir de plans. C'est de là
qu'est venu le financement du ministère des Affaires municipales pour
permettre à chaque municipalité de faire des propositions de
plans de développement.
Je dois vous dire franchement que, quand c'est arrivé la
première fois, des gens ont eu peur parce qu'on tombait à plein
dans le développement pour le développement. Au ministère,
évidemment, on en voit les conséquences, à la fois pour la
valeur patrimoniale de l'île et en même temps pour les
résidents de l'île, parce que nous
savons ce qui se passe ailleurs. Je considère que mon rôle,
actuellement, est de sensibiliser autant que possible les gens de l'île,
et en cela, aider les maires de l'île dans leur travail, parce que je
découvre, actuellement, que plusieurs maires de l'île sont aussi
sensibles au patrimoine que nous le sommes c'est normal, ils vivent
à l'île... Hier soir, dans une manifestation qui a eu lieu
à l'île, les gens me disaient: Les gens de Montréal et d'un
peu partout dans la province voudraient se garder un petit espace vert pour
leurs fins de semaine, mais cela nous empêcherait de nous
développer et de vivre normalement. Cela fait un peu image, mais ce
n'est pas exactement celle qu'il faut donner. Nous sommes d'accord pour que les
gens de l'île puissent prendre un certain nombre de décisions qui
les concernent au premier chef, mais il y a quand même une certaine
information qui doit circuler de mieux en mieux. Je crois comprendre, dans les
attitudes qui m'ont été exprimées par les maires de
l'île, à l'occasion de conservations, surtout hier, que c'est
assez partagé, actuellement. Il y a une bonne moitié des maires
qui veut un développement minimal et le respect de la qualité de
la vie et du bien patrimonial que constitue leur municipalité. L'autre
moitié est plus hésitante à enfourcher ce cheval, soit
parce que, comme le dit le maire de Saint-Jean, elle a l'impression d'avoir
marqué du retard par rapport aux autres, quant au développement.
C'est une chose à apprécier ensemble.
Pendant que j'ai la parole, j'en profite pour dire que l'intervention
que vient de faire le maire de Saint-Jean me paraît excellente, en ce
sens que non seulement il nous demande de pouvoir faire un peu de
développement domiciliaire, mais il prévoit une façon de
mettre en valeur son village, sa municipalité. C'est ça qu'on
veut. Quand on demande des plans et des projets, ce n'est pas simplement pour
prévoir le maximum d'habitations; il s'agit surtout de suggérer
une façon à mettre en valeur chacune des localités de
l'île d'Orléans.
À cet égard, ce qu'a dit le maire Bonsaint tout à
l'heure, c'est excellent, à mon avis. Il a suggéré, de
façon concrète, un moyen de mettre en valeur sa
municipalité. C'est ça qu'on souhaite trouver dans les plans qui
nous sont soumis, pas seulement en termes de restrictions, de règlements
de zonage ou de choses comme ça, mais des façons de mettre en
valeur chacune des municipalités de l'île.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que le ministre me permettrait une autre
question? Dans votre esprit ou dans l'esprit du ministère, est-ce que
vous prévoyez, par exemple, en fonction des lotissements, des normes
semblables dans les six municipalités?
M. Vaugeois: Cela pourra varier. Mme Lavoie-Roux: Cela
pourrait varier. M. Vaugeois: Oui.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Vaugeois: C'est évident que ça ne peut pas
être la même chose dans Sainte-Pétronille...
Mme Lavoie-Roux: Oui, elle n'a plus de place, elle, mais je pense
aux autres municipalités.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Seulement une question, M. le
Président...
M. Bonsaint: J'aurais encore une question à poser à
M. le ministre, si vous me permettez.
M. Fontaine: Allez-y.
M. Bonsaint: C'est parce que ce soir ont lieu les
assemblées régulières dans chacune des paroisses de
l'île et il y a beaucoup de demandes de permis, rénovation,
peinture, réparation, ainsi de suite et même construction. J'ai un
terrain acquis, subdivisé depuis neuf ans, je trouve à le vendre,
on doit passer le contrat demain c'est un conseil que je vous demande
il a 15 000 pieds. Qu'est-ce que vous me conseillez de faire? Est-ce que
vous me permettez de le vendre, que le gars se construise, c'est mon voisin, il
a un fils, disons qu'il n'est plus cultivateur, mais son fils veut rester
près de son père et il n'a pas un terrain. Il voudrait acheter un
terrain chez nous pour rester près de son père à
l'île. Un deuxième cas: c'est le garçon qui demande un
emplacement pour loger le père, quand il sera plus vieux; un autre a
vendu ses terrains au bord de la mer, qui ont 40 000 pieds au moins à un
gars de la ville qui veut s'en venir rester là. C'est une question
délicate un peu que je vous pose, mais...
M. Vaugeois: M. le maire, cela nous conduirait à un
dialogue, parce que j'aurais besoin de savoir si ce terrain est situé
dans une zone où vous prévoyez du développement ou des
possibilités de construction. Voyez-vous, si c'est en dehors d'une zone
à construire, selon votre propre plan, la réponse, vous la donnez
vous-même, c'est non. Parce que, ce que vous nous proposez, c'est au
moins ce avec quoi vous êtes d'accord.
Écoutez, M. le maire, un point très important que je tiens
à vous dire à cet égard aussi, c'est que le projet de loi
que nous avons entre les mains a un effet rétroactif au moment de son
dépôt. Cela vaut sur des questions de lotissement, par exemple, ou
de subdivision. Je pense qu'il faut être prudent, il faut être
honnête à cet égard. Il y a un effet rétroactif au
dépôt de la loi, c'était inévitable, c'était
nécessaire, autrement, on aurait vécu une période
complètement affolante entre le dépôt et l'adoption de la
loi.
Autre chose aussi, c'est que devant des transactions qui auraient
été faites voilà quelques années, et qui
n'entreraient pas dans les plans qu'on va étudier ensemble et qu'on va
accepter
ensemble, je pense vraiment que la seule position que pourrait tenir le
gouvernement devant des espèces de droits acquis, ce serait
éventuellement de se porter acquéreur d'un espace où il y
aurait des droits acquis pour lesquels nous ne pourrions pas, d'un consentement
mutuel, faire d'octroi de permis, vous, en notre nom, puisque appliquant le
règlement qu'on aurait autorisé.
M. Bonsaint: Cela veut dire que les terrains, comme les miens ou
d'autres, à qui est-ce qu'on n'a pas le droit de les vendre?
M. Vaugeois: Je ne voudrais pas répondre de façon
générale à votre question, je pense qu'il faudrait
l'examiner. Tout à l'heure, quand on aura fini, on pourra en reparler si
vous voulez.
M. Bonsaint: C'est parce que c'est dans une zone chez nous
où il n'y a aucune vue sur le fleuve. C'est boisé...
M. Vaugeois: Est-ce que c'est dans la zone où vous
prévoyez construire?
M. Bonsaint: Oui. Il n'y a aucune visibilité, c'est du
bois, on ne voit rien vers le fleuve. On voit le mont Sainte-Anne, mais il est
assez haut qu'on peut le voir par-dessus les maisons.
M. Vaugeois: Voyez-vous, le ministère a été
très réticent à donner des permis, il ne faudrait quand
même pas qu'il commence à les donner à la volée
comme ça.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Après avoir entendu trois maires de
l'île, il me semble qu'il y a un certain consensus pour dire que chacun a
soumis un règlement pour approbation et que, de la part du
ministère, il ne semble pas y avoir eu d'étude faite sur ces
règlements soumis par les municipalités ou du moins, ils n'ont
pas eu de réponse. (11 h 45)
Face à la loi qu'on nous propose, est-ce qu'il n'y aurait pas
lieu, premièrement, du point de vue pratique, d'étudier ces
règlements qui ont été soumis, parce qu'il me semble que
les demandes de chaque municipalité semblent assez réalistes, du
moins jusqu'à maintenant? S'il y avait possibilité pour le
ministère d'étudier ces règlements et de leur dire qu'ils
seront acceptés ou refusés avant l'adoption de la loi, cela
réglerait peut-être le problème qu'ils nous ont
soulevé face à l'article 49.
M. Vaugeois: Mme le député de L'Acadie envisageait
ce matin qu'on puisse faire le tour de l'île d'Orléans.
Mme Lavoie-Roux: C'est une suggestion... M. Vaugeois:
Eventuellement, nous pourrions non seulement faire le tour de l'île
d'Orléans, mais avec comme...
M. Richard: Vous seriez les bienvenus dans Montmorency.
M. Vaugeois: ... cicérone notre député
bien-aimé de Montmorency. Nous poumons également, M. le
député, jeter un coup d'oeil sur les cinq propositions que nous
avons actuellement. Je pense que cela vous éclairerait aussi. Ce que je
retiens jusqu'à maintenant, c'est que les commentaires de l'Opposition
ont été sur la timidité du projet de loi no 4.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Montmorency.
M. Richard: Alors, M. le Président...
Mme Lavoie-Roux:... la timidité du ministre.
M. Vaugeois: Ou ministre?
M. Richard: M. le Président, je note avec satisfaction que
beaucoup de députés, beaucoup de monde s'intéresse, dans
une atmosphère de bon aloi, à la circonscription de Montmorency.
Je voudrais poser à chacun des maires et à M. Gosselin, qui
représente la municipalité de Saint-François, quatre
questions qui peuvent apparaître simplistes, mais qui, je pense, peuvent
guider la commission parlementaire dans ses travaux. Je vais m'adresser
à M. le maire de Sainte-Pétronille, M. Turgeon, et lui poser la
première question à savoir si à Sainte-Pétronille
on est d'accord pour continuer la confection d'un plan d'aménagement et
adopter des dispositions réglementaires en conséquence?
M. Turgeon (Alain): On est plus que d'accord. Nous supplions.
M. Richard: Très bien. Est-ce que vous êtes
d'accord, M. le maire, pour négocier avec le ministère des
Affaires culturelles ce plan d'aménagement qui serait
préparé par vos soins ou si vous pensez que le ministère
des Affaires culturelles n'a pas à intervenir d'aucune
manière?
M. Turgeon: Non, le ministère doit intervenir.
Négocier est un terme très large, mais nous avons hâte
d'avoir les contre-propositions et d'être en mesure d'en discuter.
M. Richard: Est-ce que je dois en déduire, M. le maire,
qu'il appartient au ministère des Affaires culturelles de fixer
étant donné l'absence de concertation au niveau de toute
l'île des balises, compte tenu des responsabilités
gouvernementales? Je pense aux responsabilités gouvernementales en
matière de système routier, de voie d'accès à
l'île d'Orléans, de pénurie d'eau, etc. Est-ce que vous
admettez que le ministère des Affaires culturelles puisse fixer ce que
j'appelle des balises?
M. Turgeon: C'est inévitable. D'ailleurs, le
député de Taschereau a fait une intervention qui est tout
à fait à point. Si effectivement le gouvernement a une Loi sur
les biens culturels à administrer, il est normal que le ministre dise
son mot. Je pense que les maires vont tous penser de la même
façon, mais ce que nous voulons, ce que nous souhaitons, c'est que ceci
se fasse dans les plus brefs délais et qu'on mette à la
disposition des conseils municipaux, tant par la réglementation qu'ils
veulent adopter que par un inspecteur en bâtiment, un consultant sur
l'architecture... Que ces dispositions soient prises dans les plus brefs
délais.
M. Richard: Très bien. Est-ce que et là je
connais votre réponse d'avance vous souhaitez que le double
permis soit aboli?
M. Turgeon: Est-ce qu'il est possible... Est-ce que des siamois
peuvent vivre?
M. Richard: M. Chabot, comme maire de Saint-Laurent, maintenant,
je voudrais formuler les mêmes questions. Êtes-vous d'accord pour
compléter votre plan d'aménagement et le négocier avec le
ministère des Affaires culturelles?
M. Chabot (Gatien): Je dois dire que je suis d'accord et
même je peux dire que je suis allé un peu plus loin. On a
recommencé à travailler depuis le mois de mars sur le plan
d'aménagement, considérant les changements qu'il y a eu au niveau
du Conseil municipal en novembre, comme je m'étais
présenté aux élections sous la bannière de la
conservation, nécessairement, on a réétudié le plan
d'aménagement pour essayer de le mettre le plus respectif possible et
d'allier toutes les positions de tous les citoyens dans la municipalité.
On s'apprête à le déposer, probablement, avant le 1er
juillet.
M. Richard: Merci. Est-ce que vous êtes d'accord pour
admettre le principe que le ministère des Affaires culturelles puisse,
le cas échéant, fixer des balises et, donc, parfois vous
interdire certaines formes de développement, dans le cadre d'un plan
d'ensemble de l'île d'Orléans, puisque, si je comprends bien, M.
Chabot, ce ne sont pas les mêmes firmes qui travaillent sur vos plans
d'aménagement et également, il n'y a pas de concertation,
à proprement parler, entre les différentes municipalités.
Admettez-vous le principe que le ministère des Affaires culturelles
puisse, le cas échéant, fixer des balises?
M. Chabot: J'admets le principe, en autant que le
ministère établira ses grandes lignes directrices,
peut-être par le biais d'un règlement d'appui à la loi.
M. Richard: Vous souhaitez, je suppose, comme tout le monde,
l'abolition du double permis.
M. Chabot: Oui.
M. Richard: Merci, M. Chabot. M. Deblois, je vous pose les
mêmes questions: Êtes-vous d'accord pour continuer la confection de
votre plan d'aménagement?
M. Deblois: Certainement, le plus vite possible.
M. Richard: Admettez-vous le principe que le ministère des
Affaires culturelles puisse fixer des balises?
M. Deblois: Disons que là, vous me demandez de faire un
acte de foi. Je pense qu'on n'a peut-être pas le choix; on va se fier
à ce que vous nous dites, mais disons que j'ai encore des
contraintes.
M. Richard: Vous souhaitez, vous aussi, l'abolition du double
permis?
M. Deblois: Certainement.
M. Richard: Merci, M. Deblois. M. Bonsaint, je vais vous formuler
les mêmes questions: Êtes-vous d'accord pour compléter votre
plan d'aménagement à la condition, bien sûr, que le solde
de la subvention qui vous revient vous soit je connais vos
préoccupations financières remis?
M. Bonsaint: Je suis d'accord et même, j'ai très
hâte.
M. Richard: Êtes-vous d'accord pour négocier un tel
plan d'aménagement avec le ministère des Affaires
culturelles?
M. Bonsaint: Oui.
M. Richard: Admettez-vous que, dans certains cas, le
ministère des Affaires culturelles puisse fixer des balises?
M. Bonsaint: J'aimerais avoir un peu plus de renseignements
là-dessus. Qu'est-ce que cela comprend, fixer des balises pour des blocs
à appartements, je suppose?
M. Richard: Admettons cela.
M. Bonsaint: Ou des rues en dehors de l'avenue Royale?
M. Richard: Oui, ou...
M. Bonsaint: Je ne suis pas d'accord avec cela. Je suis d'accord
avec le ministère des Affaires culturelles, pas de rues en dehors de
l'avenue Royale, pas de blocs à appartements. La loi en question, on
n'est pas entièrement contre. On est d'accord sur beaucoup de
points.
M. Richard: Pas d'usines polluantes.
M. Bonsaint: Non, on n'est pas d'accord avec cela, non plus.
M. Richard: J'aurais une question à vous poser, M.
Bonsaint. Est-ce que vous admettez que, si on construisait des maisons
côte à côte, tout autour de l'avenue Royale, à
l'île d'Orléans, cela poserait un sérieux problème
de circulation, tant au niveau des voies d'accès, c'est-à-dire du
pont de l'île, qu'au niveau même de l'avenue Royale?
M. Bonsaint: Non, je ne suis pas d'accord pour construire des
maisons à tous les 100 ou 150 pieds pour la raison que je vous ai
déjà dite: Si cela en vient là, les gens qui vont
travailler en ville, le matin, vont sortir de leur entrée au bout d'une
heure ou d'une heure et demie, il va continuellement passer des voitures.
M. Richard: Très bien, M. Bonsaint, c'est le genre de
balises auxquelles je songe.
M. Bonsaint: J'aimerais laisser des cultivateurs, que leurs
enfants... par exemple, une fille se marie à un gars de la ville et la
femme a toujours tendance à conduire, un peu, et elle ramène son
mari résider à l'île.
M. Richard: Vous souhaitez, vous aussi, M. Bonsaint, l'abolition
du double permis?
M. Bonsaint: Je ne comprends pas ce que cela veut dire.
Voulez-vous m'expliquer qu'est-ce qu'un double permis?
M. Richard: Vous savez que dans l'état actuel des choses,
un citoyen qui veut ériger une construction quelconque à
l'île d'Orléans doit obtenir un permis de la municipalité
et il doit, également, obtenir un permis du ministère des
Affaires culturelles. Ce qu'on vous propose, si je comprends bien, c'est
d'abolir le double permis, c'est-à-dire le permis du ministère
des Affaires culturelles. Seules les municipalités seraient
habilitées, dans le cadre d'un règlement d'aménagement,
à émettre un permis. Alors vos citoyens n'auraient plus à
venir frapper à la porte du ministère des Affaires culturelles
pour se voir refuser un permis qui aurait déjà été
accepté par les municipalités.
M. Bonsaint: Quand notre règlement sera approuvé,
avec le consentement de notre municipalité et le ministère des
Affaires culturelles disons les fonctionnaires par la suite,
j'aimerais qu'on émette les permis nous-mêmes, selon les exigences
du règlement qu'on aura préparé.
M. Richard: Merci...
M. Bonsaint: Mais actuellement, pour le moment, ce soir, on va
remplir des permis, mais on va en envoyer une copie au ministère des
Affaires culturelles. Le règlement n'est pas complet, il faut suivre la
loi.
M. Richard: Merci, M. Bonsaint. Maintenant, M. Gosselin,
permettez-moi de sauter par-dessus vous l'espace d'un moment et de vous garder
pour le dessert. Je voudrais adresser maintenant mes questions à M.
Ferland, de Saint-Pierre. M. Ferland, est-ce que vous êtes d'accord pour
compléter votre plan d'aménagement à Saint-Pierre?
M. Vaugeois: Prenez un micro, s'il vous plaît. On veut vous
enregistrer pour la postérité, M. Ferland.
M. Ferland (André): Oui, on est d'accord pour
compléter le plan d'aménagement.
M. Richard: Et vous êtes d'accord, M. Ferland, pour
négocier ce plan avec le ministère des Affaires culturelles?
M. Ferland: On est prêt à négocier.
M. Richard: Et vous admettez, comme je le disais tout à
l'heure à M. Bonsaint, que, le cas échéant, le
ministère des Affaires culturelles puisse imposer certaines restrictions
dans le cadre d'un plan d'ensemble de l'île d'Orléans?
M. Ferland: Vous parliez des balises tantôt... M.
Richard: Oui.
M. Ferland: ... mais on aimerait être là pour les
placer avec vous.
M. Richard: C'est ce que je vous disais
précédemment, et je suis d'accord avec cela.
M. Ferland: On ne voudrait pas que vous les placiez tout
seul.
M. Richard: On ne les placera pas tout seul, M. Ferland. Mais si
on les place avec vous, les balises, vous allez être d'accord?
M. Ferland: Oui, c'est sûr qu'on va en venir à une
entente.
M. Richard: Êtes-vous d'accord pour l'abolition du double
permis?
M. Ferland: Cela fait longtemps que cela aurait dû
être fait.
M. Richard: Alors, je vous remercie, M. Ferland, et je note avec
satisfaction et joie que ce qui s'apprêtait à être un
gâchis, notamment à Saint-Pierre de l'île d'Orléans,
mais vous n'étiez pas là à ce moment-là et vous ne
devez pas assumer cette responsabilité... Il y aura peut-être
moyen, en tout cas, d'empêcher que les dégâts deviennent
irrémédiables.
Maintenant, M. Gosselin, je sais que votre municipalité a
refusé de participer au programme des plans d'aménagement. Je
voudrais savoir aujourd'hui si la municipalité de Saint-François
serait disposée à entreprendre, non pas à continuer parce
qu'elle n'a pas encore entrepris, mais à entreprendre l'étude de
la confection d'un plan d'aménagement de son territoire, elle qui est
favorisée entre toutes parce que c'est encore
absolument intact en ce qui concerne Saint-François, ou à
peu près intact. C'est comme c'était au XVIe siècle.
M. Gosselin (Roland): Voici, M. le député. Je
viendrais en contradiction avec l'exposé que j'ai préparé
ici si je disais oui.
M. le maire Emmanuel Labbé a été contre ça
et je pense que ses idées, je suis convaincu que ses idées sont
encore les mêmes. Saint-François... Comme on l'a si bien dit tout
à l'heure, c'est six municipalités différentes, tout en
étant sur la même île, évidemment.
À Saint-François, on est à 95%, si on ne peut pas
dire plus, agricole. On est à peu près la seule paroisse
où les terres agricoles sont dans le village, tous les chalets sont sur
le bord du fleuve. On ne voit pas l'utilité d'un plan
d'aménagement, nous, si on parle de zonage, ou d'industries, ou de
maisons familiales, ou de ci ou ça.
En tant que construction, nous, on a à peu près deux
maisons par année. Cela va prendre 300 ans pour en avoir 600. Alors, on
va fêter notre tricentaire l'an prochain. La prochaine fois, ils auront
plus de maisons probablement, mais pas beaucoup plus.
Maintenant, on est encore contre ça. C'est la réponse que
je peux vous faire des autorités municipales, étant donné
qu'on ne semble pas avoir un besoin de ça à
Saint-François.
M. Richard: Et si je comprends bien, M. Gosselin, vous ne
souhaitez pas avoir aucun règlement empêchant tout
développement à Saint-François, île
d'Orléans?
M. Gosselin (Roland): II y a une différence qu'il faut
faire, parce que les autorités municipales sont contre les gratte-ciel.
D'ailleurs, on le prouve dans le moment, alors que la fabrique, si on peut la
nommer ainsi, veut vendre des terrains, et M. le maire Labbé ainsi que
son conseil travaillent avec acharnement pour empêcher que des gens
viennent bâtir là toutes sortes de choses. D'ailleurs, vous, M. le
député, vous êtes parfaitement d'accord avec nous à
ce sujet sur cet emplacement, qu'on veut conserver à l'île
d'Orléans les espaces verts, si on peut les appeler comme ça.
M. Richard: Mais, M. Gosselin, si vous n'avez pas de...
M. Gosselin (Roland): On peut faire quelque chose, mais tout en
se tenant dans les strictes limites de ça.
M. Richard: Mais si vous n'avez aucun règlement, M.
Gosselin, admettez-vous que vous serez incapable, éventuellement et
à brève échéance, de conserver la vocation agricole
de Saint-François, Île d'Orléans? Je sais quel
intérêt porte votre maire aux cultivateurs de l'endroit. (12
heures)
M. Gosselin (Roland): On voudrait que la municipalité ait
le droit et l'autorité de faire son propre règlement en ce qui
concerne cette affaire.
M. Richard: Êtes-vous disposé à entreprendre
et à faire un règlement?
M. Gosselin (Roland): Oui. On a commencé à le
préparer, M. le député.
M. Richard: Êtes-vous disposé à accepter une
subvention du ministère des Affaires municipales pour compléter
ce règlement que vous êtes sur le point d'amorcer?
M. Gosselin (Roland): Jusqu'à maintenant, on l'a
refusée. Je pense que M. le maire est de mon avis. Vous parlez de la
subvention de $10 000 qui a déjà été offerte?
M. Richard: Oui.
Mme Lavoie-Roux: ... la corde au cou.
M. Richard: Si je comprends bien votre raisonnement, M. Gosselin,
vous êtes d'avis que le ministère des Affaires culturelles ne peut
jamais fixer la moindre balise à l'île d'Orléans.
M. Gosselin (Roland): II peut suggérer aux
autorités municipales.
M. Richard: Et supposons, M. Gosselin, que
Sainte-Pétronille décide de s'urbaniser au maximum, que
Saint-Laurent, Île d'Orléans, décide de s'urbaniser au
maximum, que Sainte-Famille décide de s'urbaniser et que le gouvernement
soit obligé de construire une autoroute sur l'île d'Orléans
et de construire une jetée comme voie d'accès à
l'île d'Orléans. Est-ce que vous ne pensez pas que dans un tel
cas, il serait irresponsable de la part d'un gouvernement qui mérite de
porter ce nom de ne pas intervenir?
M. Gosselin (Roland): Je réponds à votre question
dans mon exposé, à savoir que nous prétendons que dans dix
ans, si les choses vont comme elles vont dans le moment, on sera une banlieue
de Québec. Il faut arrêter cela. Je donne les raisons, de
même que ce qu'il faut faire pour cela.
M. Richard: Vous êtes d'accord pour dire qu'il faut
empêcher que l'île d'Orléans devienne une banlieue de
Québec, que cela devienne un Beau-port?
M. Gosselin (Roland): Nous sommes parfaitement d'accord. Mais je
crois que chaque municipalité devrait avoir le droit de
réglementer ses propres règlements pour empêcher telle et
telle chose.
M. Richard: Et si une municipalité permet pour
utiliser une de vos expressions la construction d'un gratte-ciel, est-ce
que le gouvernement ne devrait pas intervenir?
M. Gosselin (Roland): II devrait intervenir si elle le fait
malgré tout. Dans ces choses-là.
M. Richard: Vous admettez que le gouvernement peut fixer des
balises dans certains cas, les cas les plus sérieux, les plus
graves?
M. Gosselin (Roland): Dans les cas graves, oui; des
édifices, par exemple.
M. Richard: Est-ce que vous souhaitez l'abolition du double
permis?
M. Gosselin (Roland): Oui, monsieur. Je voulais vous poser la
question, mais tout à l'heure, vous avez répondu...
M. Richard: Juste avant que vous puissiez faire votre
exposé, M. Gosselin, je me permettrais de poser une question au
ministre. Je remercie les maires d'avoir répondu aux questions.
M. Vaugeois: Aimeriez-vous que j'aille m'asseoir là-bas,
M. le député?
Mme Lavoie-Roux: Un interrogatoire.
M. Richard: M. le ministre des Affaires culturelles, maintenant,
j'ai une question à vous poser. Dans quels délais êtes-vous
disposé à entreprendre et à terminer les
négociations sur les plans d'aménagement?
M. Vaugeois: Si nous approuvons cette loi un vendredi, j'aimerais
qu'on puisse attendre au lundi suivant. Mais si c'est un lundi, je suis
prêt à commencer le mardi.
M. Richard: M. le ministre, je voudrais une réponse un peu
plus précise.
M. Vaugeois: Le lendemain matin du dépôt de...
M. Richard: Pour entreprendre les négociations, cela me
satisfait beaucoup. Mais je voudrais une date d'échéance pour
l'adoption de toute cette réglementation et pour la fixation, le cas
échéant, parce que tout le monde est d'accord, des balises dont
j'ai parlé.
M. Vaugeois: C'est la première fois que je me trouve dans
une telle situation et je ne peux pas évaluer les délais qu'il
nous faudra. Je pense qu'il va falloir discuter séparément avec
chacune des six municipalités. On ne pourra pas en faire deux en
même temps. On va les faire l'une après l'autre. Il y aura une
étape d'assemblée publique dans chaque cas je pense qu'on
va aller jusque là pour l'information des citoyens. Cela va
prendre quelques semaines. Si on y travaille sans relâche, je
prévois que ce sera une période de deux mois et on devrait
pouvoir s'entendre avec la majorité des municipalités, y compris
avec l'étape de l'assemblée publique.
J'ai un problème à cet égard, et je vous le dis. La
Commission des biens culturels, par le projet de loi, est modifiée, est
étoffée. Je suis embêté et je ne sais pas si mes
juristes pourraient me ren- seigner là-dessus. Nous ne pourrons pas
réformer la Commission des biens culturels dans une semaine. Il va nous
falloir à peu près deux mois pour réformer la Commission
des biens culturels. Est-ce que je pourrai, en attendant la CBC nouveau style,
prendre l'avis de la CBC actuelle, pour approuver éventuellement les
plans proposés par les maires de l'île.
Dans la mesure où nous pourrons recourir à la CBC, telle
qu'elle existe actuellement, je prévois que dans deux mois nous devrions
avoir franchi l'étape de l'approbation de la majorité des plans,
évidemment, dans la mesure où les plans sont prêts aussi.
Je veux bien travailler tout cela à l'intérieur de deux mois,
mais là où les plans ne sont pas prêts ou là
où les plans sont en cours de révision... Mais le maire Chabot me
dit que vers le 1er juillet, il viendra me proposer ses nouveaux plans, alors
je prendrai juillet et août et, en août, normalement on devrait
bien avoir terminé.
M. Richard: Très bien, M. le ministre, je vous remercie de
votre réponse, je pense qu'elle est très satisfaisante.
Je voudrais conclure en vous disant que j'ai constaté, non sans
un certain désarroi, depuis que je représente la circonscription
de Montmorency, que votre ministère des Affaires culturelles n'a pas la
faveur populaire à l'île d'Orléans. Je ne vous en impute
pas la responsabilité ni à qui que ce soit, cela date de 1935,
alors que la première loi a été adoptée en ce qui
concerne l'île d'Orléans elle s'appelait justement Loi
concernant l'île d'Orléans et elle impliquait un conseil du
tourisme dont les curés faisaient partie. On voit le changement survenu
depuis ce temps. Mais je voudrais exprimer une opinion, M. le ministre, mieux
vaut un tu le tiens que deux tu l'auras. Je pense qu'il nous sera impossible de
protéger l'île d'Orléans malgré ses citoyens; il
faut donc les mettre dans le coup par leur représentant dûment
élu et je souhaite ardemment que les plans soient poursuivis et
terminés le plus rapidement possible et que les négociations
soient amorcées. Je vous rappelle que, de part et d'autre, il faudra
sans doute mettre de l'eau dans son vin, mais je pense, encore une fois, que
mieux vaut un tu le tiens que deux tu l'auras; tout était en train de
nous échapper à l'île d'Orléans. Si on n'agit pas de
façon très expéditi-ve, de façon vigilante, il
faudra se rendre à l'évidence et permettre l'urbanisation de
l'Île d'Orléans. Merci.
M. Vaugeois: M. le Président, j'aimerais, si vous m'en
donnez la permission...
Le Président: Allez!
M. Vaugeois: ... remercier vivement le député de
Montmorency, d'abord d'avoir quitté sa situation, son statut de
président, pour condescendre à siéger à une
commission parlementaire. Il l'a fait avec beaucoup de brio nous avions
été bien préparés hier soir beaucoup de
clarté, et je pense que l'échange que vous venez d'avoir, M. le
député, avec les représentants de l'île, vont
m'éclairer énormément dans les démarches des
prochaines semaines et aussi jettent passablement de lumière sur la
signification réelle que prenait la résolution adoptée par
le conseil de comté. Je pense que cette position a été
éclairée de façon intéressante et rejoint je
crois ne pas faire de mauvaise interprétation essentiellement ce
qu'avait dit le maire de Sainte-Pétronille.
M. le Président, je vous ferai remarquer que M. Gosselin, qui
représente la municipalité de Saint-François, a fait
allusion, à plusieurs reprises, à des notes qu'il avait
préparées, je pense qu'il y aurait lieu de lui donner l'occasion
d'exprimer son point de vue.
Le Président (M. Jolivet): Avant de donner la parole au
député de D'Arcy McGee, qui a des questions à poser, il y
a M. Turgeon, qui avait un petit mot à ajouter à ce qui venait
d'être dit.
M. Turgeon: Est-ce que vous me donnez le droit de parole, M. le
Président?
J'ai peut-être trois questions; si je m'en suis fait poser quatre
par le député de Montmorency, j'en aurais peut-être trois
ou quatre à poser au ministre, mais peut-être après les
exposés de mes collègues qui ont encore des choses à
dire.
Le Président (M. Jolivet): II y a M. le
député de D'Arcy McGee qui veut poser des questions.
M. Goldbloom: M. le Président, tout à l'heure, le
député de Montmorency a dit quelque chose qui m'inquiète
un peu.
Je suis tout à fait d'accord avec lui sur la
nécessité, pour une société comme la nôtre,
de fonctionner sur une base démocratique, mais, depuis de nombreuses
années, chaque fois que l'une ou l'autre des commissions parlementaires
reçoit comme interlocutrice une ou des municipalités, nous avons
une tendance instinctive à dire: Nous devons respecter l'autonomie de la
municipalité, sauf que, depuis moins longtemps, nous intervenons
à divers titres afin de protéger certaines choses justement parce
que l'autonomie exercée par certaines municipalités n'a pas
réussi à protéger un bien commun, un élément
de patrimoine. L'on peut prendre le sol arable comme excellent exemple. Il y a
des pressions qui s'exercent, cela est évident, et nous avons
essentiellement ici, dans le cas qui nous préoccupe, quatre pressions:
deux qui s'exercent d'un côté, dans un sens, et deux qui
s'exercent dans l'autre sens.
Nous voulons, d'un côté, protéger le patrimoine et
protéger le sol arable. De l'autre côté, il y a une
pression qui s'exerce en faveur de l'achalandage touristique, avec les
conséquences que le député de Montmorency a
soulignées lui-même et la pression de l'urbanisation qui a
été mentionnée à plusieurs reprises au cours de
notre discussion, sans avoir été précisée; et c'est
peut-être une précision que je voudrais faire ressortir. Mais il
me semble que, justement, l'expérience nous enseigne que, même
s'il est toujours souhaitable, désirable que la démocratie joue
pleinement et que les autorités locales et la population locale s'expri-
ment et participent à la prise de décision, cette
expérience nous enseigne quand même qu'à certaines
occasions il faut qu'un gouvernement, un ministre, prenne ses
responsabilités pour protéger ce qui appartient à la
collectivité.
C'est peut-être une nuance que j'apporte à ce que disait
tout à l'heure le député de Montmorency, mais il me semble
que la conclusion que j'aimerais tirer de toute cette discussion est
effectivement que le ministre devrait prendre ses responsabilités et
voir à la protection des choses. La consultation, je suis
entièrement d'accord; la négociation même, s'il s'agit de
négociation. Mais il y a, dans tout cela, une autre chose qui me
préoccupe et m'inquiète, c'est que, si nous n'établissons
pas maintenant, une fois pour toutes, dans la mesure que cela est possible
ce n'est pas parfaitement possible, parce que tout gouvernement
ultérieur pourra venir modifier la loi adoptée par celui qui
occupe la fonction présentement, cela est vrai mais il me semble
que le fruit de ces consulations, de ces négociations, devra être
une prise de position de la part du gouvernement, une prise de position telle
que d'autres conseils municipaux, à l'avenir, soumis aux mêmes
pressions en faveur de l'achalandage touristique, en faveur de l'urbanisation,
ne seront pas en mesure de contrecarrer la volonté d'une
collectivité qui voit en l'Île d'Orléans un joyau et qui
veut la conserver dans cet état de joyau dans toute la mesure du
possible.
Pour que ma lanterne soit davantage éclairée, j'aimerais
poser une question. Je l'adresse à qui voudra répondre, que ce
soit du côté municipal, ou du côté
ministériel, ou que ce soit le député. Quand il s'agit
d'un développement possible, sur l'Île d'Orléans je
parle de développement domiciliaire, notamment parlons-nous du
genre de développement qui permettrait que les maisons en question
soient alimentées par des puits et que leurs eaux usées soient
traitées par des fosses septiques, ou parlons-nous nécessairement
et est-ce une question en litige de réseau d'aqueduc et
d'égouts? (12 h 15)
M. Richard: M. le Président, avec votre permission, je
peux répondre à cette question. Je pense que l'unanimité
est faite au sein des conseils municipaux de l'île d'Orléans sur
le fait de ne pas ériger de système d'aqueduc et d'égouts
à l'île d'Orléans. Là où il n'y a pas
unanimité, M. le député de D'Arcy McGee, c'est que les
experts du gouvernement prétendent qu'à brève
échéance, il y aura dans certaines municipalités, dans
certains coins de l'île d'Orléans, une pénurie d'eau.
Là où on n'en manque pas, on dit: Non, il n'y a pas de
problème, on saura bien où aller la chercher.
Le jour où il y aura vraiment pénurie d'eau sur toute
l'étendue de l'île d'Orléans, à ce moment, il n'y
aura qu'une façon, ce sera de construire un aqueduc sous le
Saint-Laurent, ou sur le Saint-Laurent pour aller chercher l'eau à
Montmorency ou à Beauport.
Mme Lavoie-Roux: Auront-ils, à ce moment,
la population pour assumer les coûts ou si ce sera le gouvernement
qui les assumera?
M. Richard: Personne ne serait disposé, je pense,
présentement à l'île d'Orléans, à assumer de
pareils coûts, compte tenu, encore une fois, du fait que les taxes
foncières de l'île d'Orléans sont parmi les plus basses
dans tout le Québec.
M. Goldbloom: Effectivement, c'est un élément du
problème. C'est-à-dire que la densité constitue un facteur
qui facilite le paiement des services l'aqueduc et des égouts, s'il y en
a, et d'autres services aussi: la protection policière, la protection
contre l'incendie.
M. Richard: Me permettriez-vous une question? M. le
député de D'Arcy McGee, n'est-ce pas là un
phénomène très trompeur et qui a joué de vilains
tours à beaucoup de municipalités au Québec? On a souvent
pensé que la densité permettrait, évidemment, de ventiler
les coûts, de diminuer les coûts, alors qu'on s'est rendu compte
trop tard souvent, en urbanisant, que cela augmentait les coûts.
M. Goldbloom: J'allais arriver à cette même
conclusion, sauf que, densité pour densité, il y a un facteur de
relativité. Si l'on veut faire payer des services par des gens qui
occupent des terrains très larges et qui, sur une distance
donnée, doivent être moins nombreux pour payer les services en
question, les services coûtent plus cher, mais là où le
député de Montmorency a tout à fait raison et la
démonstration a été faite, je pense, par le ministre, vers
le début de notre discussion c'est que le fait de permettre un
développement domiciliaire dans l'idée que le nombre accru de
contribuables permettra une baisse des taxes est une impression souvent
trompeuse.
La conclusion à laquelle je viens et celle que j'ai
exprimée vers le début de mes remarques, c'est que j'encouragerai
le ministre à poursuivre intensément les consultations, à
négocier de la façon la plus loyale possible, mais, à la
fin du processus, s'il croit, comme responsable de la protection de notre
patrimoine, qu'il doit agir, qu'il agisse et qu'il agisse de façon
permanente.
M. Fontaine: M. le Président, j'encouragerais le
député de Montmorency à faire part de ses remarques au
ministre des Affaires municipales, parce qu'il ne semble pas qu'il soit au
courant de cela.
M. Vaugeois: Le ministre des Affaires municipales est bien au
courant de cela.
Le Président (M. Jolivet): Une minute, je ne voudrais
pas... s'il vous plaît!
M. Guay: Au courant de quoi?
Le Président (M. Jolivet): C'est ce que je veux
savoir.
M. Fontaine: On demande aux municipalités d'avoir
certaines normes pour obtenir une subvention pour la construction d'un
réseau d'aqueduc et d'égouts, alors qu'on nous dit, ici, que si
on développe les municipalités en construisant les maisons les
plus rapprochées possible, en fait, cela augmente les dépenses
des municipalités au lieu de les aider. Je pense que le ministre des
Affaires municipales devrait changer ses normes.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Montmorency.
M. Richard: M. le Président, un peu pour répondre
à M. le député de D'Arcy McGee, je voudrais simplement
souligner que je me suis rendu compte des difficultés que pose la
fixation unilatérale par le ministère des Affaires culturelles de
certaines normes. Il n'y a pas de semaine où je ne suis pas
appelé par un cultivateur qui veut, effectivement, céder une
partie de son terrain à son fils pour s'y construire. Évidemment,
comme M. le ministre le disait tout à l'heure, les citoyens les plus
astucieux peuvent se servir de la permission qu'on accorde à un
cultivateur de céder une partie de terrain aux gens de sa famille, pour
acquérir et faire de la spéculation foncière.
Toutefois, la preuve n'est pas toujours facile à faire. Ce que je
voudrais, c'est qu'il n'y ait pas d'excès. C'est dans ce sens que je
voudrais que les premiers intéressés, qui sont les citoyens de
l'île, qui sont des habitants de l'île d'Orléans je
veux bien, M. le député de D'Arcy McGee, protéger le
domaine patrimonial, mais pas aux dépens des citoyens de l'île
d'Orléans, et je ne voudrais pas qu'ils soient les seuls à en
payer le coût soient les premiers consultés, en tant que
premiers intéressés.
Si on ne les consulte pas, si on ne leur laisse pas une certaine marge
de manoeuvre, on n'arrivera pas à protéger l'île
d'Orléans, et surtout, ce que je souhaite, en terminant, M. le
député de D'Arcy McGee, c'est de mettre un terme enfin à
toutes les tracasseries administratives dont sont victimes les citoyens de
l'île d'Orléans.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, un seul mot. Je crois bien
qu'il n'y a pas vraiment de désaccord entre celui qui vous parle et le
député de Montmorency. Peut-être que le fait d'avoir
vécu presque quatre années au ministère des Affaires
municipales m'a amené à reconnaître que, parfois, il faut
qu'un niveau supérieur de gouvernement prenne ses
responsabilités, parce que les préoccupations sont
différentes et il y a, effectivement, des pressions très fortes
qui s'exercent quand l'urbanisation s'étend et que la spéculation
s'enracine. Voilà que c'est extrêmement difficile d'amener les
gens qui sont localement intéressés à faire le
nécessaire pour protéger le patrimoine; je suis d'accord qu'ils
ne devraient pas être seuls à payer la note de cela, c'est
absolument injuste, notamment quand c'est la collectivité qui dit: II
faut
protéger le patrimoine. Ce problème se pose avec plus
d'acuité présentement, en ce qui concerne la protection du sol
arable, où un mécanisme de compensation n'a jamais
été inventé jusqu'à maintenant.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
M. Alfred: M. le Président, je partage d'emblée
l'argumentation du député de Montmorency, parce qu'une
intervention brutale de l'État sans l'accord des gens qui vivent sur
l'île d'Orléans serait une intervention gratuite. Il faut que les
gens de l'île d'Orléans eux-mêmes veuillent protéger
l'île d'Orléans. J'ai vu, dans le passé, des interventions
de l'État et ces interventions n'ont jamais été
bénéfiques, parce que cela prend au moins une décennie
avant d'arriver à guérir certaines plaies qui sont beaucoup plus
dommageables qu'une intervention brutale de l'État.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais demander au ministre qui, à
cette commission parlementaire, est quand même...
M. Guay: M. le Président, je m'excuse de soulever une
question de règlement, mais j'ai l'impression, en plus du bruit à
l'extérieur, que la séance de ce matin est en train d'être
détournée de ses fins. Il y a des gens qui comparaissent ce
matin, et que nous sommes censés entendre et, depuis un bon moment,
c'est devenu un débat fort civilisé et fort
intéressant, j'en conviens entre l'Opposition et le gouvernement,
ou le député de Montmorency, et pendant ce temps, il y a des gens
qui attendent pour dire ce qu'ils ont à dire, ou même prendre la
succession et venir dire à leur tour ce qu'ils ont à dire.
Il me semble que le débat entre l'Opposition et le ministre
devrait avoir sa place au début et pendant l'étude du projet de
loi article par article.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je peux demander aux
gens de poser la question au ministre. Je pense que les deux questions que je
m'apprêtais à poser peuvent les intéresser et expliquent
peut-être aussi en partie une certaine résistance ou une
hésitation de la part des municipalités à accepter
certaines interventions du gouvernement. La première est celle-ci: Tout
à l'heure, il était signalé par le député de
Montmorency...
Le Président (M. Jolivet): Je m'excuse, Mme le
député, je pensais, premièrement, que vous parliez sur la
question de règlement qui était mise sur la table, parce que
j'avais, tout à l'heure, accordé le droit de parole au
député de D'Arcy McGee en disant qu'on reviendrait aux personnes
en avant. Si c'est une question qui s'adresse au ministre, j'aimerais, si les
gens sont d'accord, que nous puissions entendre les personnes. Mais il y a un
autre phénomène qui s'est produit en cours de route. On pensait
que cela se terminait à midi à l'extérieur, et on a
recommencé à travailler sur les murs depuis ce temps, et le fait
d'aller les arrêter prendra les cinq minutes qui restent. Si vous voulez
continuer à siéger dans ce bruit, je n'ai pas d'objection,
puisqu'il reste encore cinq minutes de travail, ou, ce que nous pouvons faire,
c'est ajourner nos travaux sine die, en attendant l'ordre de la Chambre.
M. Vaugeois: M. le Président, ne pourrait-on pas
déborder légèrement pour libérer au moins les
maires de l'île d'Orléans? Je pense que cela ne serait pas
très long. Il y a M. Gosselin qui aurait quelque chose à dire. M.
Ferland voudra peut-être se faire un peu entendre, ou il a
peut-être dit l'essentiel de son intervention. Il y a M. Chabot
également qui aurait peut-être un commentaire
général à faire. Je pense que ce ne serait pas très
long et que cela libérerait les maires, mais je m'en remets à
votre décision, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Ce n'est pas moi qui
décide, c'est la commission, donc, je voudrais avoir le consentement
à ce niveau.
Une voix: Consentement, M. le Président.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais quand même demander si les
maires sont dans l'impossibilité de revenir cet après-midi, parce
que nous retournons en Chambre à quatorze heures, cela donne très
peu de temps.
Le Président (M. Jolivet): C'est cela.
Mme Lavoie-Roux: S'ils sont incapables de revenir, je veux bien
que ceux qui ne se sont pas exprimés s'expriment, mais je pense que nous
allons le faire à la course.
Maintenant, si c'est ce qu'ils préfèrent, nous pouvons
leur donner le choix, mais je pense que, rendus à 12 h 45, nous pouvons
difficilement dépasser cette heure, compte tenu qu'il y a d'autres
obligations auxquelles nous devons faire face.
Le Président (M. Jolivet): Je pense qu'il restait deux ou
trois personnes qui voulaient intervenir.
Une voix: On peut s'attendre à des interventions de cinq
minutes à peu près chacune.
M. Chabot (Gratien): Pour ma part, je pense que les
exposés de mes collègues résument beaucoup la situation et
la position que j'entendais prendre. En fait, tout le problème
découle peut-être du contexte antérieur et, du fait que
nous soyons directement reliés avec la population, c'était
simplement pour traiter plus largement du sujet, mais je pense que mes
confrères l'ont fait assez bien, et je me rallie à leur
position.
Le Président (M. Jolivet): II y avait M. Gosselin, ici, je
pense, qui avait une intervention.
M. Gosselin (Roland): Personnellement, je
préférerais revenir cet après-midi, parce que ma
journée est consacrée à cette commission. J'aimerais mieux
faire mon exposé plus tranquillement. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. Ferland.
M. Ferland (André): J'aimerais vous lire ce que nous avons
composé avec le conseil. On m'avait demandé de vous faire part de
cela, si je peux vous le lire j'aimerais ne pas revenir cet
après-midi.
Le Président (M. Jolivet): Vous pouvez revenir cet
après-midi?
M. Ferland: Non, je ne peux pas.
Le Président (M. Jolivet): Dans ce cas, je pense qu'on
pourrait vous entendre. Allez.
M. Ferland: M. le Président, M. le ministre, madame,
messieurs les députés.
C'est le texte que nous avons composé ensemble et on m'a
demandé de vous en faire part.
Dernièrement, nous avons pris connaissance du projet de loi no 4,
Loi modifiant la Loi sur les biens culturels. Après étude avec
les membres de notre conseil, nous avons constaté que le
ministère des Affaires culturelles, ainsi que les gens de la
municipalité de Saint-Pierre, désirent atteindre le même
but, soit un contrôle strict de notre évolution, mais avec des
moyens peut-être un peu différents.
Nous croyons que si cette loi est adoptée telle que
présentée, elle enlève à notre municipalité
tout pouvoir de contrôle sur le lotissement, le zonage et la
construction. Nous prévoyons de plus une réaction très
négative et nettement défavorable de la part de la population. Il
ne faut pas oublier que la municipalité de Saint-Pierre ainsi que les
trois autres municipalités de l'île d'Orléans
fêteront l'an prochain leur tricentenaire. Nous comprenons mal que tous
les pouvoirs que se donne cette loi ne tiennent pas compte des droits acquis
par ces familles tricentenaires, en nous enlevant complètement notre
autodétermination.
Comme le soulevait dernièrement le président de la
Chambre, et député de Montmorency, Me Clément Richard,
certaines pressions ont été faites pour limiter ou arrêter
la construction. Nous serions curieux de savoir d'où viennent exactement
ces pressions et dans quel sens elles sont faites. Personnellement, depuis mon
arrivée au conseil, en novembre 1977, en aucun temps, lors de nos
assemblées mensuelles, un contribuable ou un groupe de contribuables n'a
manifesté ce désir, soit de faire des recommandations au
ministère des Affaires culturelles.
Nous nous permettons de penser, et ce, sans préjudice à
personne, que ces pressions ont pu venir de gens habitant à
l'extérieur de Saint-Pierre ou de l'île, ayant des
intérêts cachés. (12 h 30)
Nous avons cru déceler un manque d'information de la part du
ministre des Affaires culturelles. Lorsque celui-ci déclare, aux
nouvelles TVA, à 18 h 30, le 10 mai 1978, qu'il n'y avait pas de
contrôle de lotissement chez nous, nous tenons à vous souligner,
messieurs les membres de cette commission, que les gens de Saint-Pierre ont
compris depuis longtemps les problèmes soulevés par le
dépôt de cette loi, puisque, le 3 décembre 1973, les
règlements 50 pour le lotissement, 51 pour le zonage, et 52 pour la
construction ont été déposés et acceptés par
notre municipalité; ce qui donne force à notre
énoncé, que nous avons compris depuis longtemps l'importance de
la conservation du territoire, mais à l'intérieur du
règlement discuté, voté et contrôlé par les
gens concernés, c'est-à-dire la municipalité de
Saint-Pierre.
Nous avons aussi adopté le règlement 60 concernant la
construction et l'installation des fosses septiques, et aussi le
règlement 80 qui détermine les garanties que doit donner toute
personne à la corporation municipale de Saint-Pierre, avant que celle-ci
décrète l'exécution de travaux municipaux, pour la
réalisation de nouvelles constructions sur des terrains faisant l'objet
de la demande. Ce règlement a été adopté le 4 avril
1977.
Nous avons compris depuis longtemps qu'on ne devait pas penser à
ouvrir un parc industriel dans notre municipalité et qu'une
multinationale ne pourrait jamais s'y installer. Par contre, on ne doit pas
être soumis à quelques fantaisistes qui veulent faire de
l'île un futur parc de promenade ou d'espaces verts, où quelques
gens parvenus pourront y survivre.
Loin de nous l'idée de défendre les intérêts
de certains spéculateurs, comme certains s'apprêtent à le
dire, mais plutôt de permettre une évolution normale à
l'intérieur de règlements stricts, votés et
contrôlés par nous.
Le 1er juin 1978, on a mis à jour... l'an passé, le taux
de la taxe était de seulement $0.20 le $100. Apparemment, cela ne
dépend pas de nous, d'après ce que j'ai su hier soir. Nous
voulions démontrer que nous avons compris, depuis longtemps, ce que M.
le ministre semble nous faire découvrir.
En terminant, il serait bon de rappeler à nouveau que nous ne
pouvons accepter intégralement le contenu de cette loi qui nous
enlève tout pouvoir et nous oblige à nous débattre pour
des principes fondamentaux, soit la poursuite de notre destinée,
principes qui sont pourtant chèrement défendus, en ce moment, par
notre gouvernement, par rapport au gouvernement central.
Si ce projet est adopté tel que déposé, je vois mal
l'allure de nos prochaines assemblées mensuelles où nous
n'aurions plus qu'à discuter de la date et de l'heure de
l'enlèvement des vidanges, de l'éclairage et des heures
d'ouverture et de fermeture du terrain de jeu. Il ne faut pas oublier que
l'île d'Orléans est composée de six municipalités
ayant chacune son entité distincte et que les problèmes d'une
municipalité à l'autre ne sont pas nécessairement les
mêmes.
Soyez assurés que nous nous débattrons au plus fort de nos
énergies pour que des amendements majeurs soient adoptés à
cette future loi, afin de conserver notre liberté de manoeuvre, ayant
l'appui total de la population de Saint-Pierre dans cette initiative.
Tout ce que vous m'avez demandé tantôt, M. Richard,
c'était pour les balises... les placer avec vous pour qu'il n'y ait pas
d'accident. Je suis obligé de me rendre à leur demande et je vous
remercie de votre attention.
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Vaugeois: Est-ce que je pourrais poser une question à
M. Ferland? C'est une question méchante, je m'excuse d'avance. Vous
allez nous proposer un plan de développement, on va le regarder
ensemble. Je vous ai annoncé, tout à l'heure, que je respecterais
votre point de vue, mais que je tiendrais à faire valoir le mien,
éventuellement, dans une assemblée publique.
L'idée qui me vient à l'esprit, si, éventuellement,
on ne s'entendait pas, si je prévoyais des conséquences que vous
n'entrevoyez pas aux étapes où vous êtes, est-ce qu'on
pourrait lier à l'entente une espèce d'engagement de la
municipalité à payer la note des conséquences qui en
découleraient, soit au niveau de l'eau, soit au niveau routier, soit au
niveau des accès à l'île? Est-ce qu'on pourrait
prévoir une telle clause qui ferait que si un éclatement urbain,
banlieusard sur l'île, les habitants de l'île, anciens,
présents et futurs conviendraient, au départ, d'en assumer les
frais?
Je me dis que pour le ministre des Affaires culturelles, vous demandez
presque l'impossible. Vous demandez, éventuellement, qu'il renonce
à son rôle de protecteur du patrimoine, de responsable de sa mise
en valeur et en même temps, qu'il assume, au nom du gouvernement, des
frais inévitables qui découleront d'un développement qui
pourrait être sans balises.
Seriez-vous prêt à ajouter à notre entente, un
engagement de la population de Saint-Pierre et de ses autorités
municipales actuelles et à venir, d'assumer les frais des
conséquences de l'entente qui serait signée?
M. Ferland: Je pense qu'on pourrait prendre cette chance, mais
avec le règlement 80...
M. Vaugeois: Votre réponse tout de suite, M. le maire.
M. Ferland: Je vous dis que les constructeurs ont besoin de
s'atteler comme il faut avec tout ce qu'on leur impose. On n'est pas
d'accord... le développement qui est commencé depuis 1970, il va
arriver... il sera arrêté prochainement; il faut qu'il fasse son
champ d'épuration lui-même, sa fosse septique. Je doute de la
rentabilité d'un constructeur avec le règlement qu'on a. Il ne
peut fonctionner sur une grande échelle parce que, je pense, les
terrains peuvent revenir plus cher que dans Sainte-Foy avec tout ce qu'on va
lui deman- der. La municipalité n'est pas prête à payer
pour un développeur. On n'est pas du tout d'accord avec cela. S'il
respecte notre règlement et qu'il fait les services demandées et
qu'il fait tout, l'asphalte y compris, on ne peut pas lui refuser. Mais, est-ce
que ce sera rentable? Ce sera à lui d'en juger.
Je ne suis pas pour pénaliser les gens de l'avenue Royale pour
certains développements. Ceux qui veulent le faire le feront avec leurs
deniers. Vous pouvez être certains de cela, tant que je serai
là.
M. Vaugeois: Je peux vous dire, là-dessus, que dans
plusieurs municipalités, on a déjà des mesures dites
d'amélioration locale, des taxes supplémentaires qui essaient de
tenir compte de ce que signifie l'ouverture de la rue, l'établissement
d'un certain nombre de services, le déneigement l'hiver. Dans tous les
cas que je connais, la taxe d'amélioration locale qui s'ajoute à
la taxe foncière normale qui est la même pour tous les habitants
ne suffit pas, et loin de là, à compenser pour les frais
inhérents à ces développements; cela compense pour une
partie, cela ne compense jamais pour la totalité.
Là-dessus, je vous dis, M. le maire de Saint-Pierre, qu'hier
soir, l'idée m'est venue d'écrire au plus grand nombre de
résidents de l'île d'Orléans que je pourrai retracer, et ce
ne sera pas simplement une lettre. J'ai l'intention de leur envoyer un document
préparé avec soin, qui va essayer de dégager, une fois de
plus, l'intérêt patrimonial de l'île, les
caractéristiques de la qualité de la vie à l'île,
les conséquences, si vous voulez, d'un certain nombre de projets qui ne
comporteraient pas des balises suffisantes. J'ai l'intention, également,
le plus tôt possible, d'introduire certains éléments dans
cette loi, à partir de l'article 33 qui, déjà,
prévoit cette loi pour les propriétaires de biens classés,
de l'élargir aux habitants des arrondissements historiques, pour qu'on
trouve une compensation financière aux lenteurs, aux interventions
gouvernementales, soit à notre niveau, soit au niveau des
municipalités dans l'avenir.
Donc, je prévois un document qui sera adressé à vos
électeurs, à vos citoyens, les informant de notre approche, d'un
certain nombre de choses qu'ils savent déjà, j'en conviens, mais
de la conséquence possible, aussi, des décisions qui pourraient
être prises à partir des ententes que nous allons conclure. C'est
un travail d'information qui devrait, messieurs les maires, vous aider dans les
positions que vous prenez, parce que je sens, chez la majorité d'entre
vous, une préoccupation très réelle de ménager la
qualité de vie et l'intérêt de l'île actuel. J'ai
noté avec beaucoup de satisfaction, tout à l'heure, devant les
questions bien soutenues du député de Montmorency,
l'unanimité que vous faisiez sur l'essentiel de ce que véhicule
le projet de loi no 4 quand on le comprend, si vous voulez, à partir de
l'interprétation qu'en suggérait le député de
Montmorency; il en a dégagé des questions précises qui,
pour l'essentiel, m'ont semblé faire l'unanimité chez vous.
Tout cela m'amène à prendre mes responsabi-
lités, aussi, vis-à-vis de vos électeurs et les
informer le mieux possible pour, éventuellement, vous aider
vous-mêmes dans les décisions que vous aurez à prendre,
dans les propositions que vous aurez à nous faire. J'espère que
le document pourra être très explicite et très complet, et
j'essaierai, d'ailleurs, de donner des cas concrets puisque j'ai une marotte,
actuellement, c'est celle de la taxe foncière. J'essaierai,
là-dessus, de donner des exemples à faire dresser les cheveux sur
la tête.
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres
intervenants, je clos le débat sine die, en attendant l'ordre de la
Chambre en conséquence.
(Suspension de la séance à 12 h 41)
Reprise de la séance à 15 h 30
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente des affaires culturelles est de nouveau
réunie pour continuer l'étude du projet de loi no 4, article par
article, et pour entendre différents intervenants à cette
commission.
Les membres sont: M. Alfred (Papineau), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Godin (Mercier) remplacé par M.
Bertrand (Vanier); M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), Mme
Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan (Gaspé) remplacé par M.
Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Comme intervenant, M. Ciaccia (Mont-Royal) sera présent.
Nous allons continuer là où nous étions rendus ce
matin. Si je ne me trompe pas, c'était M. Gosselin qui devait
intervenir.
M. Vaugeois: Si vous me permettez, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Vaugeois: C'est simplement pour m'excuser auprès des
gens de la ville de Québec. Je leur avais dit que je m'arrangerais pour
qu'ils passent dès le début de la séance. Je ne savais pas
trop à ce moment ce qui arriverait. Je pense que nous sommes mieux de
terminer avec les gens de l'île d'Orléans. Je pense que ce sera
très bref. Je m'en excuse, j'avais annoncé une chose que je ne
tiens pas.
Le Président (M. Jolivet): M. Gosselin.
M. Roland Gosselin, secrétaire municipal de
Saint-François
M. Gosselin (Roland): Je suis Roland Gosse- lin,
secrétaire municipal de Saint-François, représentant de M.
le maire Emmanuel Labbé.
M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs les membres
de la commission.
Saint-François est un endroit où tous les gens aiment
venir faire une tournée et où ils aiment également
demeurer durant la saison estivale. Nous voulons bien honnêtement que ces
gens continuent à venir nous visiter et même à demeurer,
mais ce que nous voulons avant tout à Saint-François, c'est
conserver à nos gens et à nos cultivateurs leurs droits acquis
depuis au-delà de trois cents ans. C'est pour cette raison surtout que
les autorités municipales de Saint-François travaillent et
continueront à travailler avec acharnement pour leur conserver ces
droits que nous considérons comme sacrés et que personne, voire
un gouvernement supérieur, n'a le droit de leur enlever.
Ce sont les ancêtres qui ont bâti Saint-François. Ce
sont leurs descendants qui continuent à le faire et c'est à eux
seulement que l'on doit les beautés que nous avons actuellement. Nous
croyons fermement qu'ils peuvent conserver nos biens culturels sous,
évidemment, la surveillance des autorités municipales.
Nous voulons, bien sûr, conserver nos sols, afin qu'ils continuent
à être exploités de façon agricole, et nous voulons
aussi, de concert avec les autorités supérieures, assumer la
relève de l'agriculteur actuel qui, un jour ou l'autre, devra se
retirer. De la façon où vont les choses aujourd'hui, la
relève est impossible, parce que les jeunes quittent
Saint-François pour aller travailler en dehors où les salaires
sont plus attrayants. Personne ne peut les blâmer, car leurs parents ne
peuvent leur offrir des salaires aussi élevés. Ce qui explique
cette évasion des jeunes vers la ville, c'est que des gens de la ville
qui en ont les moyens offrent un prix très élevé pour
acquérir une ferme, laquelle deviendra, dans deux ou trois ans, ou plus
tard, non cultivable et, comme nous le disons communément, en
friche.
L'agriculteur ne peut être blâmé de vendre à
haut prix, car pour lui, c'est sa rente de retraite qu'il a ramassée
d'arrache-pied en travaillant d'un soleil à l'autre toute sa vie. C'est
un point sur lequel le gouvernement devrait se pencher très
sérieusement en premier lieu. Sinon nous croyons que dans dix ans nous
serons tous des citadins et l'île deviendra une banlieue de
Québec, ce qu'il faut éviter à tout prix.
En terminant, nous croyons que le gouvernement s'approprie des droits
qui appartiennent exclusivement aux autorités municipales. Continuons de
cette façon et il ne sera plus nécessaire d'avoir de conseils
municipaux. Nous voulons bien faire confiance au ministre, et nous
espérons qu'il nous aidera à conserver ces droits si durement
acquis, que les agriculteurs seront aidés et que la relève sera
assurée par les jeunes agriculteurs. De cette façon seulement,
l'île, en grande partie, demeurera agricole et belle. Cela prouve, je
crois que nous voulons conserver à Saint-François sa vocation
agricole et toute sa beauté. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: Je remercie M. Gosselin qui se fait le porte-parole
de la municipalité de Saint-François.
Pour ma part, je n'ai rien à ajouter. Je pense que ce matin nous
avons eu un certain nombre d'informations, en particulier à la suite des
interventions du député de Montmorency. Je remercie M. Gosselin.
Je pense que les dernières remarques portent, ses arguments sont bons.
Ses préoccupations sur l'essentiel sont les nôtres.
M. Gosselin (Roland): Pour conserver une autonomie.
M. Vaugeois: On se bat pour cela, pour le Québec.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. C'est toujours
plus facile de faire appliquer cela aux autres qu'à soi-même.
C'est l'histoire de tous les gouvernements, à quelque échelon
qu'ils soient.
M. Vaugeois: Vous croyez, madame?
Mme Lavoie-Roux: Le problème de l'autonomie, oui. Celui
qui est en haut veut toujours en avoir plus, et celui qui est en bas...
M. Vaugeois: II veut en lâcher le moins possible?
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
M. Vaugeois: Attendez notre programme de
décentralisation.
Mme Lavoie-Roux: On verra!
M. Guay: On a vu des gouvernements au centre qui acceptaient
allègrement d'en lâcher.
Mme Lavoie-Roux: Oui?
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
Mme Lavoie-Roux: Je ne sais de quoi vous parlez, de toute
façon...
M. Guay: Vous n'y étiez pas, je dois en convenir.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, vous n'êtes pas
l'invité, c'est M. Gosselin.
M. Guay: Le beau prétexte que voilà!
Mme Lavoie-Roux: M. Gosselin, ce matin vous faisiez allusion au
fait que votre conseil municipal avait commencé à préparer
un plan de réaménagement de la municipalité de Saint-Fran-
çois? Depuis quand ce plan est-il commencé? Quels délais
vous donnez-vous pour le compléter?
M. Gosselin (Roland): C'est un plan de contrôle sur la
construction plutôt, à Saint-François, premièrement,
pour savoir qui se construit, de quelle façon il se construit et, comme
le disait le maire de Saint-Pierre, et nous également, qu'il
réponde aux normes du ministère de l'environnement au point de
vue de fosses septiques, d'égouts et tout ce qui concerne cela.
Maintenant, le projet est en préparation. Je dois le soumettre au
conseil demain soir pour faire des corrections, s'il y a lieu. Notre
assemblée a lieu demain soir. Je ne sais pas s'il y aura des
corrections. Probablement qu'à la prochaine assemblée, celle du
mois de juillet, on pourra l'adopter.
Mme Lavoie-Roux: Je comprends que votre projet contiendra des
restrictions, vous l'avez mentionné ce matin, quant à la hauteur
des bâtiments, en particulier. Maintenant, y aura-t-il des restrictions
quant à la division du territoire, au lotissement?
M. Gosselin (Roland): Non, c'est là que nous voulons
conserver les droits des gens, qu'ils soient chez eux, s'ils décident de
bâtir, le règlement va imposer certaines choses. Nous ne voulons
pas avoir de cabanes. Nous voulons avoir quelque chose de propre,
évidemment, mais les laisser faire, autant que possible, à leur
goût, pour autant que leur goût sera acceptable. Il faudra qu'il
présentent leur plan au conseil municipal pour le faire approuver, en
premier lieu. De quelle façon, ils doivent bâtir leur maison, il
n'y aura rien dans le règlement qui le dira, c'est-à-dire s'ils
bâtissent à l'ouest, ou au sud.
Nous croyons que l'île d'Orléans est devenue belle,
Saint-François en particulier, pour ne parler que de cette paroisse,
parce qu'il y a cent ans, cent cinquante ans, les hommes discutaient le soir,
tout simplement, avec leurs femmes; ils disaient: Demain, on va se "granger".
Ils employaient ce terme. La grange était placée d'une
façon à leur goût. Elle pouvait avoir la facade sur le
fleuve, comme elle pouvait l'avoir vis-à-vis de la maison, au nord, au
sud, à l'est ou à l'ouest. C'est ce qui fait la différence
avec les villes, avec les autres endroits, et, à notre avis, c'est ce
que les gens aiment sur l'île d'Orléans, parce qu'ils voient des
choses qu'on ne voit pas ailleurs. Ils voient des maisons de travers, autrement
dit, et ils aiment cela.
Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, je suis tout à fait
d'accord avec vous, M. Gosselin. Je vous entendais dire...
M. Vaugeois: Je le suis peut-être moins là-dessus...
Pour les maisons de travers!
M. Gosselin (Roland): De travers, je veux dire...
M. Vaugeois: Nos ancêtres avaient l'art de
placer la maison et de la localiser. Ce n'était pas de
travers.
M. Gosselin (Roland): II faut s'entendre, M. le ministre.
Mme Lavoie-Roux: Cela dépend de ce qu'il voulait dire, M.
le ministre. J'ai pensé que c'était l'orientation de la grange
par rapport à l'orientation de la maison. C'est ce que j'ai compris.
M. Vaugeois: Tout cela était fort bien
étudié.
M. Gosselin (Roland): Ils n'avaient pas de plan de localisation
établi par des sous-ministres-conseils ou des architectes. Ils
plaçaient leur grange sur le terrain, là où cela faisait
leur affaire et de la façon que cela faisait leur affaire, pour qu'elle
soit accessible facilement.
M. Vaugeois: Absolument. Ce n'était pas des entrepreneurs,
non plus, qui décidaient cela, ni des spéculateurs.
M. Gosselin (Roland): C'est très bien bâti, parce
que les maisons existent depuis trois cents ans, et elles sont encore
debout.
M. Vaugeois: Chacun choisissait sa localisation.
Mme Lavoie-Roux: De toute façon, vous voulez que les gens,
particulièrement ceux qui ont vécu à l'île
d'Orléans, dans la municipalité de Saint-François, en
particulier, puissent conserver le droit de se bâtir là où
ils veulent et qu'on respecte les droits de ces personnes qui ont fait
l'île d'Orléans, j'en suis. Mais, d'un autre côté, et
cela me laisse un peu des doutes. Vous parlez du fait que, dans le fond, les
cultivateurs qui sont là parce qu'ils n'ont pas d'enfants ou que leurs
enfants se sont orientés ailleurs, ou enfin la tradition de cultiver la
terre finit avec une génération; vous dites que leur terre, c'est
quand même leur rente de retraite et il faudrait leur permettre de
pouvoir en profiter ou de pouvoir retirer cette fameuse rente. Mais est-ce que
ceci n'implique pas, d'une certaine façon, qu'un cultivateur,
d'après vous, pourrait décider que, pour recueillir cette rente
de retraite... Dans votre raisonnement, vous avez raison parce que, dans le
fond, ce qui pourrait suppléer à cela, c'est la question
d'indemnisation dans une loi de zonage agricole, mais, si on le laissait faire,
le cultivateur X dirait: Moi, je n'ai pas d'autre rente de retraite que de
vendre ma terre. À ce moment, il la subdivise, je ne sais pas en combien
de lots, cela dépend du nombre d'arpents qu'il a. À ce moment,
vous allez gâter la municipalité de Saint-François.
M. Gosselin: Ce n'est pas nécessairement ce qu'on a dans
l'esprit. Un homme arrive, une personne, quelle que soit la personne, offre
$100 000, comme exemple, pour une ferme; le voisin serait probablement
intéressé à acheter cette ferme, mais à $40 000,
à sa valeur marchande; il n'a pas les moyens d'aller à $100 000.
Alors, on ne peut pas pénaliser la personne qui peut vendre $100 000 et
on ne peut pas aider la personne qui serait capable de payer $40 000, mais les
autres $60 000, on ne peut pas les enlever au cultivateur qui peut les avoir
d'une autre personne. Ce qu'on aimerait, nous, c'est que le gouvernement puisse
entrer en action et aider le jeune, ou le frère, ou le voisin à
acheter cette ferme, pour que la personne qui se fie sur ses $100 000 ou ses
$50 000, peu importe, pour vivre le reste de ses jours, puisse prendre une
retraite bien méritée. On voudrait que le gouvernement
intervienne pour aider, à des intérêts très minimes,
même en bas des intérêts du crédit agricole qui sont
déjà trop élevés pour certains jeunes, pour partir
la ferme. Les millions ne sont pas en partant sur une ferme, les milliers de
dollars sont à la fin d'une vie d'un cultivateur. C'est là qu'il
arrive, il a travaillé jour et nuit, il a trait ses vaches le matin, le
soir, il n'a pas été capable de sortir, mais, à un moment
donné, il a 50, 60 ans; il va s'asseoir sur un petit montant d'argent
sur lequel il se base, il peut s'en aller au village et vivre; son fils va
être intéressé à prendre sa place ou à
acheter le voisin, parce qu'il va vouloir s'agrandir, mais il n'a pas non plus
les moyens de donner $100 000 au voisin. Alors, le gouvernement devrait
intervenir pour aider ce voisin à acheter. C'est tout simplement
cela.
On n'est pas intéressé à ce que ce cultivateur
subdivise ses terres, lotisse ses terres pour les vendre à des gens pour
en faire un petit village excusez-moi, je ne voudrais pas parler contre
le maire de Saint-Pierre, parce que ce n'est pas lui qui est responsable
comme celui qu'il y a en entrant, que je trouve affreux, personnellement. C'est
très laid, des maisons en ligne à 25 pieds du chemin ou à
50 pieds, toutes égales comme cela. Cela ne fait pas, ce n'est pas
l'île d'Orléans.
Mme Lavoie-Roux: Dans le fond, si le gouvernement acceptait de
prendre certaines responsabilités financières, d'abord
vis-à-vis d'une indemnisation au cultivateur et vis-à-vis de...
Ce matin, le problème était soulevé par le
député de Montmorency qui, éventuellement, même sans
grand développement... J'ai cru comprendre qu'il va y avoir un
problème d'aqueduc ou d'eau potable à certains endroits sur
l'île et que, d'autre part, il assumait aussi des responsabilités
pour mettre à la disposition des municipalités
aujourd'hui, on parle de l'île d'Orléans, mais cela pourrait
s'appliquer à d'autres municipalités de la province les
personnes-conseils ou les personnes-ressources dont M. Turgeon, je pense,
parlait ce matin. Est-ce qu'à ce moment, ce serait plus facile pour vous
de collaborer ou d'accepter que le gouvernement intervienne plus directement
dans ce projet d'aménagement du territoire?
M. Gosselin: C'est évident que, si on avait quelque chose
de concret, de précis, de sûr, on pourrait travailler d'une tout
autre façon. C'est évident. Mais là, dans le moment, on
n'a rien, sauf qu'on veut protéger le gars, protéger ses avoirs
gagnés péniblement durant toute une vie, et on veut aussi que
l'autre puisse acheter; on ne veut
pas empêcher que des gens de n'importe quelle profession
libérale viennent acheter à l'île d'Orléans. On est
heureux de les avoir, mais... (15 h 45)
J'en connais un qui fait une grosse culture cette année. Mais,
l'an prochain, ce gars ne cultivera plus. Il va probablement s'acheter, comme
il a été dit ce matin, des chevaux d'équitation ou quelque
chose du genre. Cette terre deviendra inculte, elle deviendra en friche,
incultivable dans quelques années. C'est pour cela, comme M. Bonsaint le
disait ce matin, qu'il a donné un certain nombre de terres vendues ou
non cultivées dans sa paroisse, dans sa municipalité. La
même chose s'en vient à Saint-François, parce qu'il n'y a
pas de relève d'abord, personne n'est intéressé, le jeune
s'en va travailler à $7 l'heure pour enlever des clous aux planches dans
un chantier de construction et, sa journée terminée, il s'en va
chez lui. Il n'y a pas de relève.
Alors, l'agriculture s'en va; où? on ne le sait pas. Mais je sais
que dans dix ou quinze ans au maximum on sera des urbains, des citadins et on
fera comme les autres à l'île d'Orléans.
Mme Lavoie-Roux: Dans tout ce qui vous préoccupe le plus,
ce sont les mesures compensatoires ou les indemnisations pour les cultivateurs
qui, à ce moment-là, ne peuvent pas disposer de leur terre soit
parce qu'ils sont devenus trop vieux ou pour une foule de raisons qu'on a
énumérées. Pour vous, cela vous apparaît la plus
grande objection à une réglementation plus serrée de votre
territoire.
M. Gosselin: C'est une augmentation majeure. Si ce
problème était réglé, je pense que la
municipalité de Saint-François serait probablement moins
difficile, moins dure et elle pourrait réglementer plus facilement.
Seulement, nous, de la municipalité c'est-à-dire
les autorités municipales travaillons pour conserver ces droits
afin que le gars puisse vivre, que personne ne soit pénalisé,
qu'il y ait une justice égale pour tout le monde.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie, M. Gosselin.
M. Gosselin: Je vous en prie madame.
Le Président (M. Jolivet): Est-ce qu'il y a d'autres
personnes qui ont des questions à poser à M. Gosselin? S'il n'y
en a pas d'autres, est-ce que, parmi les maires qui sont ici, il y a d'autres
interventions? Oui, monsieur.
M. Turgeon: M. le Président, j'aimerais d'abord savoir du
ministre des Affaires culturelles si la direction du patrimoine, par
l'entremise de son consultant Urbanex, a un plan d'aménagement global de
l'île d'Orléans? C'est une première question que je pose.
De sa réponse, vont découler deux autres questions.
C'est-à-dire avons-nous prévu globalement l'aménagement de
son territoire?
M. Vaugeois: Le directeur général me confirme ce
que j'avais entendu à. la commission des biens culturels. Il y a des
dossiers de connaissance, d'information, de relevé de l'île, mais
les fonctionnaires n'ont pas demandé à la firme de faire un plan
d'aménagement puisqu'ils s'en remettaient aux municipalités pour
proposer de tels plans d'aménagement.
M. Turgeon: Disons que la deuxième question est
peut-être plus ou moins pertinente, mais je la pose quand même
puisque c'est le temps. Lorsque vous parlez de négocier avec les
municipalités, doit-on comprendre ou doit-on tenir pour acquis que l'on
mettra de côté un aménagement global de l'île?
Va-t-on mettre de côté les certaines normes minimales quant
à la volumétrie, l'affichage, le lotissement et autres domaines
qu'on retrouve quand même dans un règlement de zonage de
construction et de lotissement aussi, normes minimales que le ministère
aurait peut-être voulu implanter dans toute l'île? Est-ce qu'on va
mettre tout cela de côté pour faire accepter ou négocier,
par exemple, si une telle municipalité accepterait telle grandeur de
terrain par rapport à telle autre qui se contenterait d'une plus grande
étendue de terrain?
M. Vaugeois: Je vais vous répondre de la façon
suivante. Nous allons, en étudiant vos plans, vos projets de
réglementation, faire intervenir tous les spécialistes possibles:
les gens de l'environnement pour les problèmes d'eau, les gens qui vont
évaluer la circulation routière, les possibilités
d'accès à l'île. J'en ai parlé tout à l'heure
au ministre des Affaires municipales qui, déjà, a convenu de me
prêter une couple de ses meilleurs spécialistes sur le plan de
l'aménagement des petites municipalités de l'île pour qu'on
aille rapidement. Parce que selon la procédure habituelle, si vous me
proposez quelque chose, je le fais étudier par mes services et ensuite
je prends le document et je l'envoie au ministère des Affaires
municipales, ensuite on l'envoie à l'environnement, après on
l'envoie au ministère des Terres et Forêts et je ne sais pas
où... C'est très long. Ce que j'essaie d'avoir, ce sont des
détachements d'experts pour une courte durée pour fins
d'études. Nos contrepropositions vont nous amener à vous signaler
des points, parfois en tenant compte de l'aspect patrimonial, qui est la
fonction des Affaires culturelles, parfois sans tenir compte de l'aspect
patrimonial, ce qui relèverait de la compétence des Affaires
municipales, par exemple. Comment voient-ils cela, eux, en soi,
indépendamment que cela se trouve dans l'île, etc.
Au fond, nous allons essayer de vous faire profiter de l'expertise
générale qui se trouve au gouvernement, indépendamment de
l'aspect patrimonial parce que le problème que pose M. Gosselin, par
exemple, c'est un problème qu'on trouve partout où il y a des
fermes à léguer, etc. Ce n'est pas un problème
spécifique à l'île. C'est cependant un problème
où la pression se fait davantage forte en périphérie des
grandes villes.
M. Turgeon: J'ai peut-être deux autres remarques: Si les
propositions ou les demandes, en ce qui a trait à l'inspecteur en
bâtiment et au consultant au point de vue architectural, vous paraissent
intéressantes, M. le ministre, dans quel délai pourrions-nous
escompter avoir les services de ces gens?
M. Vaugeois: Je vais vous poser une question de mon
côté: Est-ce que vous avez évalué ce que cela
pourrait représenter en termes de besoins par rapport à
l'ensemble des six municipalités de l'île? Est-ce que vous pensez
à un inspecteur ou à un par municipalité?
M. Turgeon: Non, non. Je pense qu'on doit envisager un inspecteur
en bâtiment pour l'île au complet. D'ailleurs, le ministère
des Affaires municipales avait déjà fait la proposition il y a
deux ans, je pense. Il s'agirait peut-être de relancer le dossier.
M. Vaugeois: C'est ce que je viens d'évoquer
également avec mon collègue des Affaires municipales, et il m'a
confirmé, encore une fois, qu'il était très
réceptif à cela.
M. Turgeon: Effectivement, je pense que lors de la proposition
par le ministère des Affaires municipales, le conseil de comté du
temps avait refusé parce qu'on demandait aux municipalités
d'assumer une partie du coût de l'inspecteur en bâtiment, de son
salaire qui était évalué à ce moment à $12
000, peut-être $1000 par municipalité, au prorata de la
population, de l'évaluation, etc.
Je pense qu'une des mesures qui seraient importantes et urgentes serait
peut-être ce fameux inspecteur en bâtiment autant quant aux normes
de construction que de l'installation de fosses septiques, que le respect
lui-même des plans proposés aux comités locaux
d'aménagement, aussi bien à la direction du patrimoine
qu'à la Commission des biens culturels.
M. Vaugeois: C'est vous qui le demandez.
M. Turgeon: II pourrait s'exercer une vigilance encore plus
grande, M. le ministre. Enfin, vous avez mentionné vous-même, ce
matin, la possibilité d'entrer en communication, par voie de courrier ou
de lettre aux citoyens de l'Île d'Orléans; je pense que ce serait
là une excellente initiative. Encore là, ceci devrait se faire le
plus rapidement afin de démystifier cette loi, ce ministère et ce
ministre un peu enquiquineur.
Aussi, je me demandais s'il ne serait pas possible peut-être de
faire un résumé des engagements qui ont été pris
par les différentes parties ici, lequel résumé serait
envoyé par le ministre des Affaires culturelles, à titre
d'information, aux citoyens de l'île d'Orléans.
M. Vaugeois: M. le Président, je remercie le maire de
Sainte-Pétronille. Est-ce que je pourrais, à mon tour, faire une
suggestion? Je pense qu'on est vraiment mûr, au niveau de vos
dernières interventions, pour agir. J'aimerais je pense que ce
serait dans les formes au niveau de votre conseil de comté et par
la voie de votre préfet, que vous puissiez nous confirmer votre
intérêt à disposer de services du genre d'un inspecteur en
bâtiment. Pourquoi ne pas faire allusion aussi aux questions de
ressources d'eau, aux questions architecturales, aux questions
patrimoniales.
C'est une idée qui circule au ministère, je ne m'en
attribue pas le mérite, loin de là, je l'ai trouvée dans
les dossiers. Entre autres, en étudiant le dossier de la maison Godbout,
à l'entrée de l'île, j'ai retrouvé là un
vieux projet de maison du patrimoine, à l'île d'Orléans,
qui aurait pu être la base de services fournis aux municipalités
et aux résidents de l'île. Ce projet a un peu été
écarté à cause du contentieux qui s'est ouvert dans le cas
Godbout. Je proposerais qu'on n'attende pas le règlement de cette
affaire mais, plutôt, qu'on ressuscite ce vieux projet, si c'est votre
désir. J'aimerais que vous me le confirmiez par la voie du préfet
de comté à la suite d'une assemblée; nous sommes tout
à fait prêts à recevoir ce genre de demande. C'est dans
l'esprit de la loi 4, d'ailleurs.
M. Chabot: Je voudrais savoir, M. le ministre, si vous avez
l'intention de développer ou de discuter avec les autres
ministères impliqués à l'île d'Orléans, le
ministère de l'Agriculture, le ministère des Affaires
municipales. Avez-vous l'intention d'intégrer ces ministères dans
tout le processus?
M. Vaugeois: Oui, j'ai déjà été
mandaté, par le Conseil des ministres, comme maître-d'oeuvre d'un
groupe interministériel qui comprend le ministère des Affaires
municipales, le ministère de l'Agriculture, le ministère de
l'environnement et celui du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche. Il y a
déjà un comité interministériel qui existe et dont
je suis responsable comme maître-d'oeuvre, étant donné
l'aspect patrimonial. Il ne faut pas en déduire que le ministère
des Affaires culturelles est plus concerné que les autres. Je pense que
tous les ministères que je viens de mentionner sont hautement
concernés par l'île d'Orléans. Comme le ministre des
Affaires culturelles a un instrument légal qui l'oblige à
intervenir, le Conseil des ministres lui a demandé d'assurer la
maîtrise d'oeuvre de ce comité qui, d'ailleurs, actuellement, est
saisi d'un certain nombre de travaux produits dans les différents
ministères, aux Affaires municipales, etc. Le ministre de l'Agriculture
vient de me montrer un certain nombre de mesures incitatives de soutien
à l'agriculture. Il y a des choses qui vont venir qui ne seront pas
spécifiques à l'île d'Orléans. Il y a des
études dans la machine. Il y a donc une coordination au niveau de
l'île.
M. Chabot: Est-ce que cela veut dire qu'il va incessamment
ressortir de ces comités de grandes lignes directrices ou est-ce
à long terme?
M. Vaugeois: Oui, je ne ferai pas de chantage, mais c'est
évident que les projets de réglementa-
tion que vous allez nous soumettre vont un peu nous conditionner. Si on
se rend vraiment compte, à l'étude des plans que vous nous
soumettez, que vous êtes aussi motivés que nous autres, vous
pouvez compter sur nous pour la mise en valeur de l'île d'Orléans.
Si on se rend compte, selon les plans de développement, que vous vous
considérez comme des banlieues de Québec, point, et que vous
acceptez le sort des villages environnants, là, qu'est-ce que vous
voulez, on ne sera plus justifiés de faire des efforts. On ne veut pas
imposer notre attitude, mais dans la mesure où vous êtes aussi
sensibles que nous normalement, vous devriez l'être davantage
nous, on est prêt à des interventions significatives.
M. Chabot: Pour ce qui a trait à la municipalité de
Saint-Laurent, on peut dire que sa vocation première est l'agriculture.
Elle détient quand même au moins 90% du territoire. On sait, de
par l'expérience, que l'agriculteur a toujours été un
conservateur. Je pense que les deux pourraient s'allier, le ministère de
l'Agriculture et le ministère des Affaires culturelles, et s'occuper de
la conservation de l'île.
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres
intervenants, Mme le député de L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: C'est seulement une question d'information. Je
suis déjà allée à l'île d'Orléans
à plus d'une reprise. La fois où j'y suis allée le plus
longtemps, je n'étais pas très haute, j'y ai passé un
été, mais ce que j'essaie de saisir et que je ne suis pas capable
d'évaluer aujourd'hui dans le contexte de 1978... Il semble qu'il y ait
à l'île d'Orléans une paroisse ou une municipalité
qui soit plus urbanisée. C'est le cas de Sainte-Pétronille.
Est-ce que je me trompe en disant que dans le cas cinq autres
municipalités, on a surtout affaire à des municipalités
qui sont plus grandes que Sainte-Pétronille et qui sont beaucoup moins
urbanisées, où la protection des terres agricoles constitue
encore la majorité du territoire? Est-ce une évaluation juste ou
fausse? J'aimerais que vous me corrigiez.
M. Chabot: Oui, c'est une juste évaluation. Dans ma
municipalité, je peux dire qu'il y a 68 cultivateurs qui
détiennent, justement, 90%...
Mme Lavoie-Roux: C'est le cas de Saint-Laurent.
M. Chabot: Le cas de Saint-Laurent, oui.
Mme Lavoie-Roux: Je sais qu'à Saint-François, il y
a beaucoup de terres agricoles aussi.
M. Gosselin: 95% des gens sont agriculteurs. Mme Lavoie-Roux:
Et dans Sainte-Famille?
M. Deblois: C'est la même chose. 90% agricole.
Mme Lavoie-Roux: II en manque une.
M. Richard: II manque Saint-Pierre qui est un peu à...
M. Vaugeois: Je pourrais vous donner un tableau
là-dessus.
Mme Lavoie-Roux: Oui, j'aimerais.
M. Richard: II vous manque Saint-Pierre, Mme le
député de L'Acadie, qui est après Sainte-Pétronille
la plus urbanisée des municipalités.
Mme Lavoie-Roux: Sainte-Pétronille serait urbanisée
dans quelle proportion? Vous avez dit qu'il y avait seulement quatre ou cinq
cultivateurs, ce matin.
M. Turgeon: Effectivement, je pense qu'il n'y a jamais eu
d'étude du territoire en pieds carrés utilisé par
résidence construite. Je pense qu'il n'y a jamais eu d'étude en
ce sens-là. Il y a certains secteurs qui sont fortement construits,
entre autres ce qu'on appelle la rue Orléans, la rue des Pins nord et
sud et Place-de-Condé, qui sont peut-être les derniers depuis 1970
où la construction a vraiment éclaté. Les autres secteurs,
ce qu'on appelle le noyau, le secteur historique ou homogène du village,
en somme, très peu de constructions y ont été faites
depuis plusieurs années à l'exception de bâtiments qui ont
été démolis et reconstruits. (16 heures)
Mme Lavoie-Roux: Je pose maintenant la question un peu à
tous les maires: Compte tenu de la différence qui existe au plan
d'urbanisation entre Sainte-Pétronille et jusqu'à un certain
point Saint-Pierre et les autres municipalités de l'île
d'Orléans, croyez-vous qu'une réglementation différente
serait normale?
M. Deblois: Moi, je pense que dans chaque municipalité,
peut-être que pour les mêmes secteurs, enfin des secteurs de
même genre, on devrait quand même avoir des normes identiques. Si
c'est une zone résidentielle, que ce soit à
Sainte-Pétronille, à Saint-Pierre, à Saint-François
ou peu importe, on devrait quand même avoir une uniformité
là-dessus pour les secteurs qui correspondent aux mêmes
normes.
Mme Lavoie-Roux: Si les mêmes normes n'étaient pas
retenues, est-ce que cela créerait des problèmes, par exemple de
concurrence entre les municipalités du point de vue de
l'établissement des gens et du développement des
municipalités?
M. Deblois: C'est sûr que ces choses... À
l'île d'Orléans, même s'il y a six paroisses, les gens sont
très près l'un de l'autre et c'est certain que si, par exemple,
à Sainte-Famille on demande 30 000 pieds, à Saint-Pierre on en
demande 15 000, à Saint-François, 20 000, c'est bien sûr
que cela va créer des petites frictions.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Vaugeois: Un petit commentaire bref. Cette question du
député de L'Acadie me suggère, compte tenu des
réponses faites, qu'à chaque fois que nous serons sur le point de
nous entendre sur un projet de réglementation, il serait peut-être
bon d'avoir le point de vue du préfet qui pourrait attirer notre
attention sur les choses qui auraient pu échapper à nos services
en termes de comptabilité ou de concurrence qui pourrait
s'établir. Peut-être, s'il y a lieu, il serait bon de provoquer
une réunion entre les maires avant de compléter une entente.
C'est un bon point que vous soulevez là.
Je suis certain que nos services vont avoir ce genre de vigilance, et
comme on veut remettre aux municipalités le plus grand nombre de
responsabilités possible, aussi bien que ce genre de remarques viennent
d'elles plutôt que de nos services.
M. Turgeon: M. le Président, c'est justement ce pourquoi
je demandais tout à l'heure si le fait pour le ministère ou le
ministre de négocier avec chacune des municipalités pouvait
impliquer que l'on accepte des normes différentes sur des points
identiques.
M. Vaugeois: Vous touchez un bon point. Mme Lavoie-Roux:
... ce matin.
M. Vaugeois: C'est cela. On va s'arranger pour qu'avant d'arriver
à la phase finale on ait une bonne concertation.
M. Turgeon: D'où il peut y avoir des pressions au
développement, à ce moment, sur une municipalité beaucoup
plus grande où on aurait 15 000 pieds alors qu'ailleurs on en a 30
000.
M. Vaugeois: C'est cela. Et à ce moment, on assistera au
phénomène selon lequel des maires qui ont revendiqué
l'autonomie pour leur municipalité veulent quand même se
mêler des affaires des autres municipalités.
Mme Lavoie-Roux: Cela pose à nouveau, M. le ministre, tout
le problème d'une des premières questions, au point qui a
été soulevé par le préfet de comté, à
savoir que ce serait peut-être plus facile de connaître les grandes
directives du ministère, quitte, à ce moment, à ce que
nous autres, on développe une réglementation qui s'en
approche.
M. Vaugeois: Là-dessus, il n'y a pas de secret, il n'y a
pas de recettes magiques. À la limite, on applique à l'île
les mêmes préoccupations, les mêmes réflexions, les
mêmes travaux d'experts que n'importe où ailleurs. On fait plus
attention à cet endroit, parce que la loi nous le permet et que c'est un
arrondissement historique. À mon avis, il n'y a pas de raison de faire
des choses spéciales à l'île et de ne pas les faire sur la
138, ne pas les faire sur la route 3, etc. L'attention qu'on manifes- te
à l'île d'Orléans, à mon avis, cela devrait nous
inspirer pour des interventions dans tout le Québec.
Vous le dites souvent, Mme le député de L'Acadie, on
gâche le paysage québécois, on détruit notre
potentiel agricole, on gaspille énormément en sous-utilisant des
services existants, en s'obligeant à en fournir de nouveaux. Il n'y a
pas de différences, si ce n'est que historiquement, on a reconnu
l'intérêt particulier de l'île, on l'a
décrétée arrondissement historique. La loi oblige le
gouvernement à un certain nombre d'interventions, mais il n'y a pas de
choses vraiment spéciales.
Par exemple, quand on est en face d'un beau bâtiment à
l'île, qu'on n'a pas classé bien culturel parce que l'ensemble est
classé arrondissement, ce qui nous inspire, c'est ce qu'on fait toujours
dans le cas d'une aire de protection autour d'un bien classé. Quand on
va étudier leur projet de règlement, on va tenir compte de cela.
On va, à un moment donné, s'arrêter au point de vue,
à la perspective sur des bâtiments de grande valeur historique et
patrimoniale, on va discuter de cela avec eux et on va appliquer, à ce
moment, les critères qu'on applique dans toutes les aires de protection.
Autrement dit, l'île d'Orléans, c'est une superposition d'aires de
protection. Il y en a dans tout le Québec, des aires de protection. Il
devrait y en avoir ailleurs cent fois plus.
Mme Lavoie-Roux: Sauf qu'elle l'est en totalité.
M. Vaugeois: Voilà. C'est sa chance. Mme Lavoie-Roux:
Ah, oui!
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres
interventions, je remercierais les membres qui sont venus devant nous, les
maires des six municipalités.
J'inviterais maintenant les représentants de la ville de
Québec à se présenter devant nous. La parole est à
vous.
M. Vaugeois: M. le Président, auparavant, je fais
distribuer aux membres présents de la commission un document
synthèse sur l'île d'Orléans, qui fournit de l'information
sur la population, sur l'évaluation. Sous le titre de
l'évaluation, on a une bonne idée de la répartition, de la
fonction de ce qui est évalué, terrains vacants,
résidences, fermes et boisés, chalets. Vous avez aussi une bonne
idée des taxes municipales et scolaires. Vous y constaterez le
très bas niveau de taxes municipales, par ailleurs, un niveau beaucoup
plus élevé de la taxe scolaire, parce que l'île est
assimilée à une région scolaire qui déborde son
domaine.
Ce sont des informations qui nous éclairent passablement et qui
nous montrent bien, je pense, la situation privilégiée de
l'île, à ce moment-ci.
Le Président (M. Jolivet): Je redonne la parole aux
représentants de la ville de Québec en leur demandant de bien
s'identifier.
M. Vaugeois: M. le Président, j'aimerais que le
commentaire du député du Lac Saint-Jean soit enregistré.
Il a déclaré l'île un paradis fiscal. Je pense que c'est la
plus belle conclusion qu'on peut avoir à l'évaluation du bilan de
l'île, c'est qu'en plus d'être un arrondissement historique et un
bien patrimonial, c'est également un paradis fiscal.
M. Bertrand: Est-ce qu'on peut dire de cette déclaration
que c'est un bien culturel?
Le Président (M. Jolivet): Allez-y, messieurs.
Ville de Québec
M. Blanchet (Jules): M. le Président, à ma gauche,
M. Denis Boutin, avocat, membre du contentieux de la ville de Québec, et
à ma droite, tout à l'heure, arrivera très probablement
l'urbaniste de la ville de Québec. Quant à moi, je suis Jules
Blanchet, avocat et président intérimaire du comité
exécutif de la ville de Québec.
Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, quel est le nom de
l'urbaniste?
M. Blanchet: M. Jean Rousseau.
Le Président (M. Jolivet): Merci.
M. Blanchet: M. le Président, M. le ministre, Mme
Lavoie-Roux, MM. les députés. Les autorités de la ville de
Québec doivent d'abord vous remercier de l'invitation que vous leur avez
faite de venir aujourd'hui vous transmettre leurs commentaires et
recommandations relativement à ce projet de loi qui aura pour effet de
modifier substantiellement la gestion des biens culturels.
Je passe à la page 3. Au cours des années, avant
même l'avènement de la Loi des monuments historiques ou de la Loi
sur les biens culturels, la ville de Québec s'est
préoccupée de préserver cette richesse avec les moyens
dont elle disposait tout en poursuivant simultanément ses objectifs
propres d'administration municipale.
À cette fin, la ville de Québec s'est adressée,
à de nombreuses reprises, par le passé, à la
Législature, pour demander et souvent obtenir des pouvoirs particuliers
afin de lui permettre de mieux protéger ce patrimoine dont elle se
considérait déjà gardienne.
Je souligne que nous avons une commission d'urbanisme qui est assez
unique à Québec, puisqu'elle a le pouvoir exclusif et
accordé par les tribunaux, de déclarer que telle ou telle maison,
ou telle ou telle réparation à telle maison, n'est pas
esthétique et c'est elle, en exclusivité, qui décide cela.
C'est déjà acquis pour nous.
Aujourd'hui, les autorités de la ville de Québec se
réjouissent bien de constater l'intention du gouvernement du
Québec et de son ministère des Affaires culturelles d'associer
les municipalités à la conservation et à la mise en valeur
des monuments, des sites et des arrondissements qui constituent notre
patrimoine national. Cette intention de décentralisation en faveur des
municipalités ne peut que réjouir la ville de Québec.
Cependant, nous constatons à regret que cette intention du
ministère des Affaires culturelles et du gouvernement n'est pas
clairement et valablement exprimée dans le projet de loi no 4
présentement à l'étude. Pourtant, cette intention
apparaissait clairement dans la lettre du ministre des Affaires culturelles
adressée à M. le maire de Québec le 23 mai dernier.
À notre avis, l'effet global de l'ensemble des modifications
apportées à la Loi sur les biens culturels par le projet de loi
no 4 n'est pas de décentraliser ou de confier aux collectivités
locales la gestion quotidienne des biens culturels et d'en faire ainsi les
premiers défenseurs du patrimoine local, mais bien plutôt
d'accroître les pouvoirs d'intervention directe du gouvernement de
même que du ministre des Affaires culturelles en matière de
contrôle des biens culturels.
Ce n'est que par un moyen détourné que les
municipalités seront appelées à jouer un rôle dans
l'application des règles de droit en matière de patrimoine et ce
rôle ne sera essentiellement qu'un rôle administratif. Il semble
que les municipalités ont été appelées à
mettre l'épaule à la roue uniquement pour faire disparaître
le double système de permis qui existe actuellement et dont la lourdeur
administrative n'a certes pas pour effet de réjouir les citoyens
propriétaires d'immeubles classés ou situés dans un
arrondissement historique ou naturel.
Je vais céder la parole à Me Boutin pour expliquer le
paragraphe c qui est l'augmentation du pouvoir de contrôle du ministre
des Affaires culturelles sur les biens culturels.
M. Boutin (Denis): Nous allons expliquer les raisons pour
lesquelles nous croyons que le projet de loi constitue une augmentation des
pouvoirs de contrôle plutôt qu'une décentralisation.
Cette augmentation des pouvoirs de contrôle se trouve
énoncée dans le nouvel article 48 de la loi tel que
proposé par l'article 19 du projet de loi. L'ancien article 48 de la loi
permettait au ministre de contrôler de façon absolue la
construction, la réparation, la transformation ou la démolition
d'immeubles situés dans un arrondissement historique ou naturel.
Le nouvel article 48, par contre, étend d'abord ce contrôle
aux sites historiques ainsi qu'aux aires de protection. De plus, cet article a
pour effet d'étendre considérablement le nombre
d'opérations qui seront maintenant assujetties au contrôle du
ministre. Toutes les opérations se rapportant à la division,
à la subdivision, à la redivision ou au morcellement d'un terrain
de même qu'à la modification de l'aménagement, à
l'implantation, à la destination ou à l'usage d'un immeuble, de
même que toutes les opérations de construction, de
réparation, de transformation ou de démolition impliquant soit
les dimensions, ou l'architecture, ou les matériaux, ou l'apparence
extérieure d'un immeuble devront dorénavant obtenir
l'autorisation préalable du ministre qui devra prendre l'avis de la
Commission des biens culturels du Québec.
Le paragraphe e) de l'article 53 de la loi est
également modifié en conséquence afin de confier au
lieutenant-gouverneur en conseil les pouvoirs d'adopter des règlements
relativement aux opérations que nous venons d'énumérer.
Nous tenons ici à attirer votre attention sur le fait que les pouvoirs
ainsi conférés au lieutenant-gouverneur en conseil sont
essentiellement des pouvoirs de règlement en matière de
lotissement, de construction et de zonage, trois pouvoirs et trois champs
d'activités qui sont traditionnellement de compétence
municipale.
L'article 50 de la loi de même que le paragraphe d) de l'article
53 de la loi sont également modifiés dans le même sens de
façon à permettre au ministre des Affaires culturelles de
contrôler l'affichage, la modification ou la démolition
d'enseignes et de panneaux-réclame et de façon à confier
au lieutenant-gouverneur en conseil le pouvoir de réglementer en cette
matière.
Vous conviendrez avec nous que ce ne sont certainement pas ces
modifications à la loi qui auront pour effet de décentraliser
l'administration du patrimoine et de faire des municipalités des
gardiennes des biens culturels. Ces modifications auront plutôt pour
effet de permettre au ministre des Affaires culturelles et au
lieutenant-gouverneur en conseil de poser des gestes dans des champs plus
vastes qui sont déjà de compétence municipale et dans
lesquels la ville de Québec ou les autres municipalités peuvent
avoir déjà exercé leur autorité.
Nous ne nions certes pas au ministre des Affaires culturelles ni au
lieutenant-gouverneur en conseil le droit d'intervenir dans ces champs
d'activités de façon à assurer que les objectifs de la Loi
sur les biens culturels sont atteints, mais nous croyons que les moyens choisis
par le projet de loi no 4, compte tenu de l'objectif de décentralisation
énoncé par le ministre ne sont pas adéquats. Nous
suggérerons un peu plus loin une façon de procéder qui,
à notre avis, permettrait pleinement à la fois aux
municipalités et au ministère des Affaires culturelles de jouer
leurs rôles respectifs de façon que les objectifs municipaux et
les objectifs de la Loi sur les biens culturels soient atteints.
Le moyen prévu par le projet de loi pour associer les
municipalités à la gestion du patrimoine est énoncé
à l'article 49 de la loi tel que proposé par l'article 19 du
projet de loi. Cet article, qui est de droit nouveau, vise essentiellement
à établir un moyen de supprimer le système des doubles
permis qui existe actuellement et qui pourra continuer à exister si le
projet de loi est adopté dans sa forme actuelle.
Dans l'état actuel des choses on l'a dit ce matin
d'ailleurs le citoyen qui désire réparer sa maison
située dans un arrondissement historique ou qui, plus tard,
désirera en changer l'usage ou l'occupation ou subdiviser son terrain si
l'article 48 est adopté sans modification, devra obtenir à la
fois un permis de la municipalité et une autorisation du ministre. Le
permis de la ville de Québec est nécessaire parce qu'elle a
déjà réglementé en matière de lotissement,
de zonage et de construction et que les opérations dans ces trois
domaines d'activités sont contrôlées par un
mécanisme d'émission de permis. Quant à l'autorisation du
ministre, elle est exigée par la loi et elle pourra être soit
discrétionnaire, après que le ministre aura pris l'avis de la
commission, ou encore basée sur les dispositions d'un règlement
visant le lotissement, le zonage et la construction, adopté par le
lieutenant-gouverneur en conseil. (16 h 15)
Ce que propose le projet de loi, afin d'éviter ce double
mécanisme de permis et d'autorisation, est simplement de demander aux
municipalités de soumettre au ministre pour approbation leur
règlement visant le lotissement, le zonage et la construction. Si ce
règlement, de l'avis du ministre, prévoit les normes et
conditions minimales requises pour la réalisation des objectifs de la
Loi sur les biens culturels, il pourra approuver ledit règlement.
Nous désirons ici attirer votre attention, d'une part, sur le
fait qu'aucun article de la Loi sur les biens culturels ne définit de
façon précise les objectifs de la loi, ce qui laisse une
très large discrétion au ministre dans l'interprétation de
ces mots, et, d'autre part, sur le fait que les objectifs d'une
municipalité, en adoptant un règlement de lotissement, de zonage
ou de construction, ne sont pas nécessairement les mêmes que ceux
poursuivis par la Loi sur les biens culturels.
Dans l'éventualité où un règlement a
été effectivement soumis par la municipalité et
approuvé par le ministre, la municipalité aura donc l'entier
contrôle de l'émission des permis en matière de
lotissement, de zonage et de construction. C'est ce que prévoit le
nouvel article 49 de la loi. Il est à remarquer que ce n'est pas
nouveau. La municipalité doit déjà agir ainsi pour faire
respecter ses propres règlements de lotissement, de zonage et de
construction. Le projet de loi a pour seul effet de permettre au ministre de ne
plus contrôler les opérations énumérées, si
la municipalité a adopté des règlements qui contiennent
des normes et conditions minimales requises pour la réalisation des
objectifs de la Loi sur les biens culturels. Cette modification proposée
semble donc avoir beaucoup plus pour effet de permettre au ministre de se
retirer du contrôle de la gestion des biens culturels, dans le cas
où les municipalités ont bien assumé leur rôle, que
d'inciter les corporations locales à agir ainsi et à devenir les
gardiennes du patrimoine.
M. Blanchet: Vous me permettrez, M. le ministre, de continuer en
proposant des solutions. La ville de Québec croit qu'une autre solution
pourrait être envisagée, en prenant en considération
l'objectif de décentralisation énoncé par le ministre
afin, d'une part, d'assurer une protection adéquate du patrimoine et,
d'autre part, de permettre à la fois au ministère des Affaires
culturelles et aux municipalités d'exercer librement leur juridiction
dans les champs de compétence qui leur sont propres.
Cette proposition première est basée sur
l'expérience de la ville de Québec relativement aux
problèmes de préservation et de mise en valeur
des biens culturels, même ceux qui n'ont pas encore attiré
l'attention du ministère des Affaires culturelles, de même que sur
l'expérience d'étroite collaboration avec le ministère des
Affaires culturelles vécue par la ville à l'occasion de
l'adoption du règlement de zonage concernant le Vieux-Québec, qui
incluait tout le territoire de l'arrondissement historique de
Québec.
Nous croyons que, même si les corporations locales ont, de
façon générale, le souci d'assurer la conservation et la
mise en valeur des biens culturels, il y a lieu de prévoir dans la loi
l'obligation pour les municipalités, qui doivent adopter des
règlements de lotissement, de zonage et de construction touchant les
arrondissements historiques, naturels ou les sites historiques ou les aires de
protection, d'insérer dans ces règlements des normes et
conditions suffisantes pour la réalisation des objectifs de la loi,
pourvu cependant que ces objectifs aient été préalablement
clairement définis. Je pense que c'est fondamental.
On peut même imaginer un mécanisme d'avis ou de directives
qui permettrait au ministre de demander à une corporation locale
d'adopter un règlement visant une opération particulière
avant une date déterminée ou encore de modifier les
règlements existants afin d'atteindre un objectif précis. Un
mécanisme semblable existe déjà dans la Loi de
l'évaluation foncière, en vertu duquel le ministre des Affaires
municipales peut, par ordonnance, ordonner à une municipalité
d'adopter un rôle d'évaluation conforme aux dispositions de la Loi
de l'évaluation foncière avant une date
déterminée.
Cette obligation pour les municipalités de tenir compte des
objectifs de la Loi sur les biens culturels étant imposée par la
loi, la municipalité pourrait, en collaboration avec le ministère
des Affaires culturelles, comme cela s'est fait dans le cas du zonage du
Vieux-Québec, élaborer un règlement qui pourrait
satisfaire à la fois la municipalité et le ministère des
Affaires culturelles. Nous considérons qu'il est important que ces
règlements soient élaborés par les municipalités
plutôt que par le lieutenant-gouverneur en conseil, parce que les
municipalités doivent exercer ces pouvoirs de réglementation en
fonction de préoccupations et d'objectifs qui sont proprement
municipaux. Lorsqu'il s'agit de parcelles de territoires dans lesquels sont
situés des biens culturels, une préoccupation ou un objectif
additionnel doit s'imposer à la municipalité. Cependant, ce
dernier objectif ne doit pas faire oublier les objectifs premiers de la
municipalité. Le règlement de lotissement, de zonage et de
construction qui en résultera sera essentiellement un compromis qui
permettra de réaliser les deux objectifs sans handicaper ou tronquer
aucun des deux.
Encore une fois, l'expérience du zonage dans le
Vieux-Québec nous a démontré qu'il était possible
d'en arriver à un tel compromis satisfaisant pour les deux parties. Si
ces règlements étaient faits par le ministre des Affaires
culturelles, celui-ci, n'ayant pas comme devoir d'atteindre les objectifs
municipaux, la ville de Québec craint que ces derniers soient
oubliés dans la rédaction des règlements de lotissement,
de zonage et de construction qui viseraient à atteindre les objectifs de
la Loi sur les biens culturels et ce, même si, par leur nature, les
règlements de lotissement, de zonage et de construction sont
traditionnellement et essentiellement des outils confiés aux
municipalités afin d'atteindre leurs objectifs propres.
Notre proposition est donc essentiellement de laisser oeuvrer les
municipalités dans un champ de compétence qui leur est propre, en
leur donnant comme obligation, dans l'exercice de leur juridiction, de
réglementer de façon que les objectifs de la Loi sur les biens
culturels soient atteints. Si on parle ainsi de décentralisation, il ne
faudrait cependant pas oublier, d'une part, de confier aux municipalités
les pouvoirs nécessaires pour que soient atteints les objectifs de la
loi et, d'autre part, de leur donner les moyens financiers nécessaires
pour assumer cette fonction de gardiennes du patrimoine. Aussi il y aurait
lieu, à notre avis, de s'assurer que toutes les municipalités
possèdent les pouvoirs de réglementation qui sont prévus
à l'article 53 de la loi, tel que modifié par le projet de loi,
et de donner aux municipalités qui ne les possèdent pas tous les
pouvoirs qui leur manquent.
Il y aurait également lieu de prévoir le versement de
sommes d'argent aux municipalités qui assument ainsi ce rôle de
gardiennes du patrimoine en collaboration avec le ministère des Affaires
culturelles de façon à tenir compte des dépenses
supplémentaires entraînées par ce nouveau rôle que
l'on désire faire jouer aux municipalités.
Dans ce même ordre d'idées, il y aurait lieu de confier aux
municipalités les pouvoirs accordés au ministre par le projet de
loi, d'imposer de fortes amendes et de s'adresser à la Cour
supérieure afin de faire corriger des situations de fait qui se seraient
établies sans qu'une autorisation soit demandée ou en
contravention d'une autorisation donnée. S'il est
considéré que de tels recours ou sanctions sont
nécessaires pour assurer le respect de la loi et des règlements,
ces mêmes sanctions et recours devraient pouvoir être
exercés par la municipalité pour faire respecter ses
règlements puisque ceux-ci auraient pour objet de faire respecter les
objectifs de la même loi.
Contrôle du ministère à l'intérieur de la
solution proposée. Comme nous l'avons mentionné
précédemment, nous ne nions pas au ministre ou au
lieutenant-gouverneur en conseil le droit d'intervenir pour que les objectifs
de la loi soient atteints. Nous proposons que le pouvoir d'intervention puisse
s'exercer à trois niveaux, ou, si vous voulez, de trois façons.
Un premier niveau incitatif, un deuxième coercitif et un
troisième correctif.
Pour ce qui est du pouvoir incitatif, nous en avons déjà
parlé, il s'agirait de confier au ministre le pouvoir de demander
à une corporation locale d'adopter un règlement concernant une ou
plusieurs opérations qu'il désire voir réglementer avant
une date déterminée ou encore de donner des directives à
une corporation locale pour qu'elle modifie un règlement
déjà existant afin d'atteindre tel ou tel objectif particulier de
la loi.
Si la municipalité n'agit pas conformément aux demandes et
directives du ministre, le contrôle d'ordre coercitif pourrait être
exercé. Dans une telle éventualité, le
lieutenant-gouverneur en conseil pourrait utiliser son pouvoir de
réglementation et adopter, au lieu et place de la municipalité,
un règlement qui rendrait inopérante toute disposition
inconciliable d'un règlement subséquent de la municipalité
en cette matière. En agissant de cette façon,
l'intégralité de la juridiction de la municipalité serait
respectée puisque, dans cette éventualité, c'est la
municipalité elle-même qui aurait décidé de ne pas
réglementer. Le champ de juridiction de la municipalité ayant
été laissé inoccupé, le lieutenant-gouverneur en
conseil pourrait exercer à son tour sa juridiction.
Dans l'éventualité où la municipalité aurait
effectivement exercé ses pouvoirs de réglementation, mais d'une
façon qui ne permettrait pas d'atteindre les objectifs de la loi, il y
aurait lieu à ce moment d'exercer le contrôle correctif. Il
s'agirait, à ce moment, pour le lieutenant-gouverneur en conseil, de
désavouer, en totalité ou en partie, le règlement ainsi
adopté par la municipalité et par la suite soit de demander
à la municipalité d'adopter un nouveau règlement, soit de
le faire à sa place.
Vous avez sans doute remarqué que nous avons parlé de
désaveu du règlement adopté par la municipalité et
non pas d'un mécanisme d'approbation des règlements par le
ministre ou le lieutenant-gouverneur en conseil. Nous considérons cette
nuance comme très importante. Le procédé, en effet, est
très différent. La ville de Québec considère que la
présomption de droit qui veut que tout règlement adopté
par une municipalité soit considéré comme bon et valable
tant qu'il n'a pas été déclaré nul par un tribunal
s'applique également à cette matière. Nous ne voyons pas
pourquoi les municipalités ne pourraient pas bénéficier
d'une présomption selon laquelle elles se sont acquittées du
devoir qui leur est imposé par la loi et que le règlement
contient, effectivement, les normes suffisantes afin d'assurer la
réalisation des objectifs de la loi. Pourquoi devrait-on, à
l'inverse, présumer que la municipalité n'a pas respecté
ses obligations et assujettir l'entrée en vigueur du règlement
municipal à l'approbation par le ministre ou par le
lieutenant-gouverneur en conseil?
Nous considérons que ces règlements de lotissement de
zonage et de construction doivent, comme tous les autres règlements
municipaux, entrer en vigueur dès leur adoption par le conseil
municipal, celui de Québec, sous réserve toutefois du pouvoir du
lieutenant-gouverneur en conseil de les désavouer s'ils ne respectent
pas les objectifs de la loi: le pouvoir de contrôler les décisions
de la municipalité.
La Loi sur les biens culturels, tant dans sa forme actuelle que suivant
les modifications proposées, donne au ministre des Affaires culturelles
des pouvoirs considérables qui peuvent mettre en échec la
volonté d'un conseil municipal exprimée dans ses
règlements de lotissement, de zonage et de construction. À titre
d'exemple: par le mécanisme d'autorisation prévu pour un
très grand nombre d'opérations, le ministre peut, dans la
poursuite des objectifs de la loi sur les biens culturels, rendre
inopérant le règlement adopté par la
municipalité.
Ainsi, un acte posé par les élus municipaux à
l'avantage de tous les citoyens d'une ville et qui a été
posé dans la poursuite d'objectifs purement municipaux serait mis de
côté par le ministre qui exercerait sa discrétion dans la
poursuite du seul objectif qui lui est imposé par sa loi.
La ville de Québec croit que toute forme de contrôle d'un
règlement adopté par les élus d'une municipalité
dans la poursuite de leurs objectifs municipaux ne devrait pas se faire de
façon discrétionnaire par le ministre seul dans la poursuite
d'objectifs qui lui sont propres, mais bien plutôt par le
lieutenant-gouverneur en conseil.
En effet, au sein du Conseil des ministres se retrouvent, en plus du
ministre des Affaires culturelles, le ministre des Affaires municipales, le
ministre responsable de la qualité de l'environnement, le ministre des
Transports, bref, les représentants de tous les secteurs
d'activités qui touchent les municipalités. L'ensemble de ces
intervenants, compte tenu de leurs préoccupations respectives, pourront
mieux juger du bien-fondé ou non des règlements municipaux en
tenant compte de tous les objectifs que doivent poursuivre les
municipalités dans leur administration, et non pas en tenant compte
uniquement d'un objectif particulier qui serait, dans le cas qui nous
intéresse, la protection du patrimoine.
La ville de Québec croit qu'une telle façon de
procéder serait plus compatible avec le fait que la protection du
patrimoine doit s'insérer dans la vie des citoyens de la ville de
Québec au milieu d'autres préoccupations quotidiennes et non pas
être considérée comme une chose statique,
indépendante de la vie de tous les jours.
La ville de Québec croit qu'une décision prise par les
élus municipaux ne devrait pas être mise de côté par
une décision discrétionnaire du ministre qui prendra l'avis de
ses fonctionnaires et de la Commission des biens culturels du Québec.
Une telle décision ne devrait pouvoir être mise de
côté que par une décision du Conseil des ministres qui,
lui, est composé d'élus ayant des préoccupations plus
diverses et plus proches des préoccupations municipales que le ministre
des Affaires culturelles seul. (16 h 30)
En plus des remarques qui précèdent, et qui portaient sur
les modifications que la ville de Québec juge les plus substantielles
dans le projet de loi, nous désirons vous apporter quelques brefs
commentaires sur certaines autres modifications apportées à la
loi. Nous regrettons que la modification de l'article 3 de la loi
proposée par l'article 1 du projet de loi puisse avoir pour effet que la
ville de Québec n'accueille plus un jour ou l'autre, sur son territoire,
le siège social de la Commission des biens culturels du Québec.
Tant parce qu'elle est la capitale de la province et parce qu'elle renferme
dans ses limites une très grande concen-
tration de biens culturels, nous croyons que la ville de Québec
devrait continuer d'accueillir le siège social de la commission. Nest-ce
pas M. le ministre?
Nous constatons également avec regret que la modification de
l'article 4 de la loi proposée par l'article 2 du projet de loi a pour
effet de faire disparaître la publication annuelle refondue de la liste
des immeubles reconnus ou classés. En l'absence de cette publication
générale, les municipalités devront se constituer leur
propre liste à partir des avis qui leur sont transmis
évidemment vous enverriez des avis augmentant ainsi les risques
d'erreurs. La ville de Québec se réjouit cependant de la
possibilité qui lui est maintenant donnée par le nouveau texte
proposé de l'article 25 de la loi de faire des représentations
auprès de la Commision des biens culturels pour s'opposer ou pour
appuyer un classement.
La ville de Québec s'étonne également du pouvoir
conféré au lieutenant-gouverneur en conseil par le nouveau
paragraphe f) de l'article 53 de la loi. Le paragraphe f) permet au
lieutenant-gouverneur en conseil de déterminer par règlement les
opérations visées au paragraphe e) qui ne requièrent pas
d'approbation du ministre. Les opérations visées au paragraphe e)
sont celles énumérées à l'article 49 de la loi
comme nécessitant l'approbation du ministre. Le lieutenant-gouverneur en
conseil peut donc, par règlement, soustraire de l'approbation du
ministre, qui doit normalement prendre l'avis de la commission, certaines
opérations dont la loi, à son article 48, exige l'approbation. Ce
mécanisme, à notre avis, permet, par règlement, de
tronquer un mécanisme de contrôle prévu par la loi.
La ville de Québec aimerait également que soit
précisé le texte du paragraphe g) de l'article 51 de la loi qui
permet au ministre de conclure des ententes avec les corporations locales en
vue de l'application de la loi de façon que les fonds nécessaires
puissent être versés aux municipalités qui agiraient ainsi
comme gardiennes du patrimoine afin de compenser pour les
déboursés encourus à cause de cette responsabilité
additionnelle. Dans l'éventualité où la solution
proposée par la ville de Québec ne serait pas retenue, nous
désirons prier cette commission de conserver aux municipalités la
faculté de ne pas soumettre au ministre pour approbation le
règlement de lotissement, de zonage et de construction de façon
à leur laisser la liberté d'exercer leur pleine juridiction dans
la poursuite de leurs objectifs municipaux. De plus, nous désirons
rappeler que dans l'éventualité où le
lieutenant-gouverneur en conseil devrait exercer les nouveaux pouvoirs qui lui
sont accordés par la loi, il devra le faire avec une extrême
prudence de façon à ne pas amputer les municipalités des
outils de contrôle qu'elles possèdent afin d'assurer le bien de
leurs citoyens.
Nous désirons finalement vous remercier, M. le Président,
M. le ministre, madame, messieurs les membres de la commission, de l'attention
que vous avez bien voulu nous prêter et les autorités de la ville
de Québec vous assurent qu'elles conti- nueront à
considérer parmi leurs principales priorités la conservation et
la mise en valeur du patrimoine dont elles sont les gardiennes.
La ville de Québec désire enfin assurer à nouveau
le gouvernement du Québec et le ministre des Affaires culturelles de sa
plus étroite collaboration dans la poursuite des objectifs de la Loi sur
les biens culturels. Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: M. le Président, je remercie les porte-parole
de la ville de Québec de ce mémoire fort bien
rédigé et fort bien présenté. Je commencerai par la
fin. Je vous avoue qu'il y a pas mal de matière la-dedans et comme j'en
prends connaissance au moment de cette lecture, je ne pourrai pas aller aussi
loin que je le voudrais dans mes commentaires, mais je vais commencer par la
fin parce que c'est plus facile, en tout cas, pour au moins une question. Le
fait d'avoir ouvert la porte à un déménagement du
siège social ne présume pas qu'il sera
déménagé. La possibilité existe, je l'avoue, et je
me suis inquiété comme vous de cette question.
Quant à la publication annuelle refondue de la liste des
immeubles reconnus ou classés, nous reviendrons là-dessus au
moment de l'étude article par article, mais je veux vous rassurer tout
de suite en vous disant que nous avons commencé cette année la
publication d'un répertoire des biens classés et reconnus. Nous
avons l'intention d'en faire une publication annuelle, dans la mesure du
possible, ce qui veut dire qu'on vous donnerait encore beaucoup plus que
l'outil traditionnel, mais on vous donnerait un outil qui serait
vulgarisé et qui comprendrait des photos et beaucoup plus
d'explications.
Par ailleurs, nous maintiendrions la publication officielle, mais au
fond, on miserait sur un nouvel instrument qui serait beaucoup plus accessible
et beaucoup plus facile à utiliser. Je pense que vous connaissez le
cahier no 10 des Cahiers du patrimoine; alors, c'est un peu sur ce
modèle. Ce numéro est en train de s'épuiser très
rapidement, nous pensons à une refonte qui irait jusqu'au 1er janvier
1978 et qui comprendrait même d'ailleurs, non seulement les biens
classés, mais également les biens qui appartiennent à
l'État, aux pouvoirs publics, et qui n'ont pas été
classés, parce qu'on a considéré que, comme ils
appartenaient à l'État, il n'était pas nécessaire
d'entreprendre une procédure de classement. On les ajouterait même
au répertoire, pour donner une bonne vue générale.
Je me réserve la possibilité d'intervenir tout à
l'heure sur les paragraphes f) et e) que vous avez indiqués quant
à l'article 53. Je vous avoue qu'à la lecture, je ne comprends
pas très bien ce que ça veut dire. Tout à l'heure, pendant
que l'Opposition parlera, j'essaierai de me faire une idée
là-dessus et d'y revenir.
Vous faites allusion aussi à la possibilité de fonds
nécessaires qui pourraient être versés aux
municipalités qui agiraient comme gardiens du
patrimoine. C'est effectivement une ouverture que donne le projet de loi
et dont j'ai bien l'intention de me prévaloir, pour assurer la mise en
valeur du patrimoine, et d'intervenir auprès des municipalités,
avec des fonds ad hoc. Je pense que vous étiez là ce matin; j'ai
même évoqué une étude que j'avais demandée
sur l'ancien article 33 qui, je pense, reste toujours l'article 33
sur les possibilités de faire profiter les propriétaires
résidents non seulement de biens classés mais d'arrondissements
historisques, d'avantages fiscaux au niveau de la taxe foncière
municipale qui seraient compensés directement à la
municipalité qui pourrait d'ailleurs recevoir une bonification à
ce moment-là.
Le point principal de votre mémoire, si je le comprends bien,
finalement, porte sur l'élargissement de la loi qui introduit les
questions de lotissement surtout et peut-être un peu de zonage. À
cet égard, vous avez vraiment raison, parce que je pense que dans le
projet de loi no 4, on n'a pas oublié grand-chose; tous les mots y sont,
toutes les façons possibles de voir la question sont introduites
là-dedans.
Je suis d'accord avec vous qu'a priori nous avons là une
responsabilité des autorités municipales. Vous reconnaissez
vous-même dans votre mémoire qu'il y a des objectifs qui sont
propres à la Loi des biens culturels et que c'est là la
responsabilité du ministre. Le fait d'avoir introduit dans l'article 48
un rappel aussi clair est beaucoup plus complet que dans la Loi des biens
culturels de ce qu'il faut surveiller, de ce qu'il faut avoir à
l'esprit, de ce qu'il faut réglementer pour bien protéger et bien
mettre en valeur. Ce n'est pas, d'abord, pour l'usage du ministre; c'est
vraiment pour donner du contenu à l'article 49. C'est du moins ainsi que
je le vois.
Dans l'invitation qui est faite aux corporations municipales de
comté et autres de nous faire des propositions de réglementation,
nous souhaitons que ces propositions englobent, ce que sont les trois secteurs
clefs à notre avis, pour que tout ça soit bon; les secteurs clefs
étant le lotissement, le zonage et la construction. Là,
évidemment, la ville de Québec est dans une situation
peut-être un peu spéciale, c'est une grande municipalité.
Vous avez un arrondissement historique de qualité particulière,
vous vous en êtes occupé avec beaucoup de soin au cours des
dernières années, vous avez développé une expertise
de ce côté, vous avez des règlements qui touchent à
peu près tous ces points. Ce n'est pas le cas vous l'avez vu ce
matin, par exemple de toutes les municipalités qui sont
concernées par des arrondissements historiques, ou des aires de
protection, ou des biens classés.
La loi, évidemment, a une portée générale et
n'est pas faite à l'intention de la ville de Québec en
particulier. En ce qui vous concerne, je pense qu'on serait peut-être
très près de l'étape de l'étude de propositions de
réglementation.
Vous souhaiteriez qu'on en fasse une espèce d'obligation aux
municipalités. J'aimerais mieux, à ce moment-là, que vous
parliez au ministre des
Finances d'abord, parce que ce que vous me proposez supposerait,
à peu près, dix fois nos effectifs actuels; parce qu'il nous
faudrait fournir une assistance technique extrêmement poussée
à un grand nombre de municipalités, ce qui, à mon avis,
n'est pas possible. Je m'étonne d'ailleurs, du ton que vous prenez,
parce que vous nous proposez d'exiger des choses, alors que le ton que nous
prenons est incitatif. Nous suggérons aux municipalités de nous
présenter au rythme ou elles le peuvent, avec l'aide que nous pourrons
leur fournir, un certain nombre de propositions de réglementation. Notre
intention n'est pas tout simplement d'éviter des doubles permis, mais
c'est de motiver les municipalités à réfléchir sur
les trois points majeurs sur l'intervention qu'elles devraient avoir pour
assurer une protection convenable, adéquate de leurs arrondissements
historiques ou de leurs aires de protection ou de leurs sites historiques.
Je pense que les énoncés très clairs très
explicites, complets au point que cela en fait sursauter certains
de l'article 48 sont là justement pour suggérer aux
municipalités de réfléchir à cet ensemble de
questions. Notre intention c'est ce pourquoi nous proposons la loi 4
est donc une concertation avec les municipalités pour arriver
à ce genre d'ententes, non pas seulement, encore une fois, pour
éliminer le double permis, mais essentiellement pour que la
municipalité prenne bien conscience de ses responsabilités
à cet égard. Comme nous sommes prêts à lui
déléguer un certain nombre d'objectifs qui s'ajoutent aux
objectifs habituels de responsabilités d'un conseil municipal et, que
là, nous déléguons éventuellement des obligations
qui sont les nôtres, vous comprendrez qu'on s'assure qu'il y ait une
rencontre, qu'il y ait un équilibre d'ailleurs, ces mots se
retrouvent dans votre mémoire entre les objectifs de la Loi des
biens culturels et les objectifs poursuivis par un conseil municipal, compte
tenu du mandat qu'il reçoit de sa population.
Je pense que la démarche, qui est inscrite dans le projet de loi,
correspond à l'essentiel de vos préoccupations. Si je retenais
votre proposition première, j'aurais l'impression de jouer un peu au
caporal et de demander des choses que je ne suis pas capable de soutenir par
les services que nous avons actuellement, par les experts dont nous pouvons
disposer. Vous avez certaines questions qui relèvent du
lieutenant-gouverneur en conseil plutôt que du ministre des Affaires
culturelles. Comme un ministre passe rapidement dans un ministère, je ne
le prends pas comme une référence personnelle. Je vous dirai en
passant que, comme référence personnelle, vous avez actuellement
un ministre des Affaires culturelles qui est finalement peut-être plus
préoccupé, encore à ce moment-ci, de questions municipales
que de questions culturelles. Je suis député d'une ville, j'ai
siégé pendant de nombreuses années au sein d'une
commission d'urbanisme et j'ai gardé depuis toujours finalement, depuis
l'âge de raison, de grandes préoccupations urbaines. Si vous
étiez
là, ce matin, vous avez suivi mes interventions, vous êtes
peut-être, même, un peu étonnés de voir que plusieurs
de mes interventions portaient beaucoup plus sur la question municipale que sur
la question patrimoniale. Ce n'est pas une garantie pour l'avenir, ma
carrière aux Affaires municipales étant
éphémère...
Une voix: ... aux Affaires culturelles...
M. Vaugeois: ... aux Affaires culturelles étant
éphémère, j'ai peut-être annoncé quelque
chose...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous deviendrez maire de
Trois-Rivières?
M. Bertrand: Pas de journaliste dans la salle, s'il vous
plaît!
M. Blanchet: Vous aviez affaire à des gens
éminemment...
M. Vaugeois: Cela étant dit, permettez-moi une
dernière remarque. Il existe, déjà, dans notre structure
gouvernementale... vous voulez partir tout de suite?
M. Blanchet: Écoutez, j'ai donné mon titre tout
à l'heure, je suis président intérimaire du comité
exécutif et, comme le maire est à Edmonton et que j'ai un conseil
municipal à 5 h, je devrais quitter. Je demande à M. le
Président de pouvoir quitter, je laisserai l'urbaniste de la ville
discuter avec vous, de même que M. Boutin qui s'entendent très
bien... D'ailleurs si j'ai des bonnes idées, c'est peut-être
grâce à eux.
M. Vaugeois: Est-ce que je pourrais, pendant que vous faites vos
valises, vous dire encore une chose, quand même, qui est importante,
compte tenu de la démarche que vous faites? Vous souhaiteriez à
certains moments qu'on déplace vers le lieutenant-gouverneur en conseil
des interventions du ministre des Affaires culturelles et vous avez raison de
le souligner, compte tenu du fait qu'il y a des implications municipales, des
implications d'environnement, etc. Je vous rassurerai à cet
égard; chaque fois qu'une décision d'un ministre implique
d'autres ministères, nous avons des structures
interministérielles maintenant, grâce au ministère
d'État en particulier et chaque fois que c'est nécessaire, nous
créons une structure interministérielle ad hoc. Or, j'ai bien
l'intention de ne pas approuver de projets de réglementation cela
va de soi, à mon avis sans un comité formel auquel
participeront les ministères concernés
M. Blanchet: C'est très bien, M. le ministre, alors
écrivez-le. Merci.
M. Vaugeois: Merci, monsieur.
Le Président (Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier la ville de Québec
d'avoir quand même, dans des délais très courts,
présenté un mémoire qui est intéressant à
plusieurs égards. Je pense qu'il y a peut-être lieu de regretter
que nous n'ayons pas prévu, pour l'étude de ce projet de loi,
d'entendre plus de mémoires. Je pense que c'est presque accidentellement
et à cause de votre vigilance là-dessus, je dois vous
féliciter que nous pouvons aujourd'hui vous entendre. Cela aurait
peut-être été une occasion assez intéressante de
sensibiliser une plus grande partie de la population à ce
problème de la protection des biens culturels. Je ne sais pas si, dans
le passé, il y a eu des commissions parlementaires sur le sujet, pas
à ma connaissance en tous les cas...
M. Bertrand: Cela ne fait pas tellement longtemps qu'on est ici
nous-mêmes, madame.
M. Guay: C'est à vous qu'il faudrait le demander.
M. Bertrand: On pourrait demander au député de
Mont-Royal...
M. Guay: Peut-être que le député de D'Arcy
McGee pourrait nous renseigner: Est-ce que la loi 2, à l'époque,
avait fait l'objet d'une commission parlementaire? C'est une question comme
cela, c'est parce que le député de...
Mme Lavoie-Roux: La question que je posais, M. le ministre, c'est
si, dans le passé...
M. Guay: La Loi sur les biens culturels.
Mme Lavoie-Roux: ... il y a eu une commission
parlementaire...
M. Guay: En 1972.
Mme Lavoie-Roux: Ce n'est pas une menace, cela.
M. Vaugeois: ... les problèmes.
Mme Lavoie-Roux: Ceux-là ne sont pas trop difficiles
à régler, M. le ministre.
M. Guay: Ces fauteuils vont devenir patrimoniaux
bientôt.
M. Fontaine: On sait que vous allez perdre votre
siège.
Mme Lavoie-Roux: La remarque que je faisais, M. le ministre, ou
la question que je posais, c'était pour savoir s'il y avait
déjà eu une commission parlementaire pour étudier...
D'abord, la première fois que le projet de loi sur les biens culturels
avait été adopté, je regrette qu'aujourd'hui on n'en ait
pas prévu une parce qu'on voit que, même sans invitation formelle,
un groupe comme la ville de Québec je pense au conseil
des Chutes qui va venir par la suite cela aurait
été une occasion, je pense, de sensibiliser les
municipalités qui vont voir arriver le ministère des Affaires
culturelles sans peut-être en avoir beaucoup entendu parler. Mais, enfin,
tout ceci est maintenat du passé.
M. Vaugeois: Est-ce que je pourrais quand même dire
là-dessus que, d'abord, ce n'est pas par hasard que ces gens sont ici.
Il y a eu envoi de plusieurs documents et, dès le dépôt en
Chambre, dans la journée, j'avais prévu la chose, nous avons
adressé des lettres à tous les maires qui pouvaient être
concernés, et tout cela fait suite. Écoutez, je pense que...
Mme Lavoie-Roux: Vous ne les avez pas invités à
venir à la commission parlementaire?
M. Vaugeois: Non, je les ai invités à nous faire
part de leurs observations sur le mémoire. Soit dit en passant, tout
cela n'est pas improvisé; la loi 4 est fondée sur une
expérience de plusieurs années sur des relations avec des
municipalités. Ce n'est pas de l'improvisation, c'est fondé sur
l'expérience qu'a donnée l'application de la Loi sur les biens
culturels.
Mme Lavoie-Roux: Je pense que le ministre est susceptible. Je ne
l'ai pas accusé d'improvisation. J'ai simplement regretté qu'on
n'ait peut-être pas...
M. Vaugeois: Je m'excuse d'être susceptible.
Mme Lavoie-Roux: ... d'une façon plus formelle,
invité les municipalités; la ville de Québec,
évidemment, est très sensible à ce problème, mais
il n'aurait peut-être pas été mauvais que la ville de
Montréal vienne. Souvent, à moins qu'une commission soit
annoncée d'une façon formelle, les gens se disent: On ne
présentera pas de mémoire. C'était le sens de ma remarque,
M. le Président.
Pour revenir, finalement, à ce qui est peut-être le
problème principal que vous soulevez, à savoir si le ministre ne
retient pas trop de pouvoirs dans l'élaboration des règlements,
selon vous, peut-être que davantage de pouvoirs devraient être
laissés aux municipalités puisque chaque règlement devra
être approuvé par le ministre. Est-ce que je vous
interprète bien en pensant que, selon vous, le ministère des
Affaires culturelles devrait peut-être édicter certaines normes de
base, minimales, dans le domaine du lotissement, du zonage et de la
construction et, après cela, qu'on laisse aux municipalités le
soin d'édicter la réglementation finale et de voir à son
application. Finalement, est-ce le sens de la partie principale de votre
mémoire?
M. Boutin: Ce à quoi nous nous référons, le
rôle du ministre des Affaires municipales en face des
municipalités, du moins dans les propositions que nous vous soumettons,
c'est que le ministre pourrait nous donner des objectifs à
atteindre.
Notre raisonnement est basé sur la prémisse suivante: au
cours des années, la ville de Québec, on le croit du moins, s'est
préoccupée de préserver les biens qui étaient
situés dans ses murs. La ville de Québec n'a pas attendu pour
réglementer en matière de lotissement, de zonage et de
construction et protéger le patrimoine dont elle était
gardienne.
Ceci étant dit, comme nous nous sommes déjà
acquittés de notre devoir, tout ce que nous souhaitons, c'est de
continuer de nous acquitter de notre devoir; cependant, si le ministre a des
objectifs à nous imposer, ou des guides à nous dicter, qu'il nous
le dise, et nous allons nous empresser, à l'intérieur de notre
juridiction, en tenant compte des objectifs proprement municipaux qui sont
nôtres, d'édicter des règlements dans ces trois
matières.
On a fait un parallèle avec le zonage du Vieux-Québec de
l'été dernier, où s'est passé, effectivement, ce
mécanisme que l'on propose. Le ministre est intervenu pour nous demander
d'intervenir de façon particulière sur la multiplication des
débits d'alcool dans le Vieux-Québec, à la suite de
discussions avec le ministère, avec les citoyens, on s'est penché
sur le zonage, on a révisé notre zonage et on a sorti un
règlement de zonage qui, je pense bien, satisfait tout le monde.
Cependant, c'est la municipalité qui l'a rédigé, tenant
compte de ses objectifs proprement municipaux, et, comme je l'ai dit
tantôt, également en tenant compte de l'objectif de la protection
du patrimoine. Cependant, de la rencontre de ces objectifs, il ne peut
résulter qu'un compromis qui satisfasse à la fois l'un et
l'autre.
Nous disons que, compte tenu du fait que nous avons une
municipalité qui a ses objectifs municipaux et qui a également
comme objectif de protéger le patrimoine qui est à
l'intérieur de notre territoire, nous l'avons fait sans que cette
obligation ne nous soit faite par la loi. Si on nous le donne par la loi, nous
allons continuer à le faire. Compte tenu du fait que nous avons ces deux
objectifs à rencontrer, nous croyons que les municipalités sont
mieux placées pour réglementer en matière de construction,
de zonage et de lotissement pour créer ce compromis, qui doit être
à l'avantage de tous les citoyens de la municipalité et à
l'avantage de tous les citoyens de la province, compte tenu du patrimoine, que
le ministre, qui a un objectif qui lui est donné par la loi, celui de la
protection du patrimoine.
Je suis bien conscient que le ministre peut personnellement avoir des
préoccupations d'ordre municipal et de la qualité de
l'environnement, mais, comme le disait M. Blanchet tantôt, ce n'est pas
une garantie pour l'avenir. Nous aimerions bien que ce soit écrit dans
la loi. On verrait ce contrôle passer par le Conseil des ministres,
plutôt que par le ministre des Affaires culturelles.
Mme Lavoie-Roux: En admettant, par exemple, que le
ministère établisse des objectifs généraux, il faut
quand même se rappeler que la ville de Québec a une tradition,
qu'elle est reconnue
comme possédant, au plan du patrimoine, des richesses
peut-être plus que toute autre ville du Québec, si on en fait la
somme. Vous vous êtes sensibilisés, au cours des années, et
je dirais même des générations, à cette richesse.
À votre avis, est-ce que ce serait le cas des municipalités moins
grandes ou qui ont une moins longue tradition que la ville de Québec n'a
dans ce domaine?
M. Boutin: Ce n'est peut-être pas le cas. Je ne nie pas que
certaines municipalités sont moins bien organisées au point de
vue des services d'urbanisme ou commencent simplement à s'articuler des
règlements, ce qui semble être le cas pour l'île
d'Orléans, ce matin. C'est pour cette raison que nous avons, dans notre
proposition, donné au mécanisme des moyens de contrôle sur
ces municipalités, où il pourra se substituer aux
municipalités, si celles-ci ne font pas leur devoir. Mais on ne
désirerait pas que le geste, que l'initiation ou que le règlement
premier soit l'oeuvre du ministre des Affaires culturelles, mais bien celle de
la municipalité. Si la municipalité ne veut pas intervenir dans
son champ de compétence et veut laisser le ministre des Affaires
culturelles réglementer ces trois champs d'activités, qui sont le
lotissement, le zonage et la construction, qui, à notre avis, sont les
trois outils indispensables pour que les municipalités puissent
gérer le bien de leurs contribuables, si une municipalité se
retire de ce champ, si elle prend la décision de ne pas
réglementer dans ce domaine, le ministre, qui a le devoir, de par la
loi, de protéger le patrimoine, interviendra dans ces trois domaines
d'activités.
Cependant, comme ce sont trois domaines d'activité purement
municipaux et les outils de base avec lesquels on doit travailler, on doit agir
avec une très grande prudence lorsqu'on agit aux lieu et place des
municipalités. On devrait, comme principe, laisser les
municipalités agir là-dedans.
Mme Lavoie-Roux: Quels sont, selon vous, les moyens qui devraient
être mis à la disposition des municipalités pour
s'acquitter des nouvelles responsabilités qui leur seront
données, même si vous éprouvez un certain désaccord
quant à la façon dont le ministère veut exercer son
jugement ou sa critique, à l'égard des règlements des
municipalités? Qu'est-ce qui semble être le minimum?
Évidemment, cela peut varier d'une municipalité à l'autre.
Mais quel est le minimum pour qu'une municipalité puisse être
sensibilisée à cette dimension du patrimoine et ensuite
établir une réglementation dans un domaine qui, dans bien des
cas, peut lui être très peu familier, sinon presque totalement
inconnu?
M. Boutin: Je veux juste faire un commentaire, avant de laisser
M. Rousseau répondre là-dessus. Quand vous dites un domaine qui
lui est très peu familier, je vais apporter un petit commentaire.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Boutin: Lotissement, zonage et construc- tion sont des
domaines proprement municipaux. C'est un objectif supplémentaire avec
lequel...
Mme Lavoie-Roux: Mais par rapport à la préservation
du patrimoine.
M. Boutin: II y a seulement l'objectif supplémentaire avec
lequel elles ne sont peut-être pas familières et elles ont besoin
d'aide. Je laisserai M. Rousseau répondre à cela.
M. Rousseau (Jean): Je pense qu'en premier lieu, on doit
attendre, effectivement, et la loi doit en faire état, les objectifs du
gouvernement du Québec en matière de sauvegarde, de
préservation, de mise en valeur. Je pense que c'est une
prérogative du gouvernement du Québec. Dans d'autres
matières, le gouvernement agit de cette façon, en matière
d'évaluation, on en fait état dans notre mémoire, comme en
matière d'environnement. Il y a des normes minimales qui sont
fixées, il y a des plans d'action qui sont développés.
Mais cela n'a pas pour effet, nécessairement, de court-circuiter les
municipalités là où elles ont déjà des
pouvoirs traditionnels établis.
En deuxième lieu, on en fait également mention dans le
mémoire, il s'agit certainement, dans la mesure où on redonne aux
municipalités l'administration du permis, par exemple, et des autres
matières sous considération, je pense qu'on peut attendre un
appui financier minimum. Dans une optique de décentralisation, on croit
que cette approche est très saine. Il est évident que, même
dans le cas de Québec, il y a plusieurs dizaines de permis qui sont
étudiés par semaine. Il y a des expertises additionnelles qu'on
devra conduire. Nous sommes prêts à faire cela, mais dans la
mesure, encore une fois, où on pourra compter sur un support statutaire
et certainement où on pourra compter également sur la
collaboration qui nous est déjà acquise des effectifs du
gouvernement.
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voudrais
simplement, à mon tour, remercier et féliciter les
représentants de la ville de Québec pour la présentation
de leur mémoire. Je pense que cela leur prend quand même un
certain courage pour venir dire au gouvernement du Parti
québécois qu'il est centralisateur, qu'il s'ingère dans
les champs de compétence municipale. Je pense que les
municipalités sont quand même jalouses de leurs pouvoirs et elles
ont le droit de donner leur opinion à ce sujet.
Je pense que les critiques que ces gens formulent rejoignent, entre
autres, certaines critiques qui ont été faites ce matin par les
maires de l'île d'Orléans, sauf peut-être une
municipalité, lorsque les maires nous disaient: Laissez-nous
adopter des réglementations et on va s'occuper de notre
affaire.
Je pense que c'est un peu ce que nous dit la ville de Québec
aujourd'hui, ce qu'elle dit au gouvernement. Ces représentants sont
prêts à adopter des règlements et se demandent pourquoi ce
serait le ministre qui leur dirait quel règlement adopter, et de quelle
façon procéder. Tout ce qu'ils veulent, c'est avoir des objectifs
à atteindre et ils sont prêts à les atteindre.
Peut-être qu'il y a une différence avec la ville de
Québec, parce que celle-ci a quand même un patrimoine et est bien
organisée, de ce côté-là, depuis plusieurs
années. Mais ce que je voudrais savoir du ministre, c'est s'il n'y
aurait pas lieu de songer à faire certaines exceptions dans la loi pour
des villes organisées comme la ville de Québec; ces villes
pourraient adopter leur propre réglementation sans avoir une
autorisation préalable du ministre, en vertu des articles 48 ou 49. (17
heures)
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: C'est ça qu'on va faire. C'est ça que
va permettre la loi. Les municipalités qui sont prêtes à
nous proposer des dispositions réglementaires vont le faire dans les
semaines qui viennent et on va signer des ententes. J'ai le pouvoir de signer
des ententes et compte tenu des remarques qu'on a faites, j'ai également
le pouvoir de suivre avec de l'aide financière. C'est exactement ce que
nous allons faire. C'est clair qu'il va s'établir dans les faits des
différences. Il y a des municipalités qui ne sont pas
prêtes encore, à mon avis, à venir. Il y en a d'autres qui
le sont particulièrement et, à cet égard, je pense que la
ville de Québec devrait être l'une des premières, compte
tenu de son expérience et du travail qu'elle a déjà fait.
C'est une ville qui est bien dotée de services d'urbanisme, en
particulier.
M. Fontaine: Mais je ne pense pas, à moins que je ne me
trompe, que ce soit l'objectif de la ville de Québec. Ce qu'elle veut,
elle, c'est...
M. Vaugeois: C'est elle...
M. Fontaine: ... avoir des objectifs à atteindre...
M. Vaugeois: Oui.
M. Fontaine: ... et adopter ses propres règlements sans
être chapeautée par le ministère des Affaires culturelles.
C'est dans ce sens-là que...
M. Vaugeois: Que voulez-vous? La Loi des biens culturels existe
et elle oblige déjà le ministre à un certain nombre de
choses. Je suis assez d'accord avec la remarque qui est faite. L'idéal,
ce serait qu'on ait, dans le passé... J'aimerais hériter de
ça, moi, d'une belle définition des objectifs de la Loi des biens
culturels. C'est un fait que la loi, là-dessus, n'est pas très
volubile. Je me suis fait raconter d'ailleurs que c'est l'honorable Jean
Lesage, à l'époque, qui avait résumé tout
ça dans l'article 30 qui dit, grosso modo, qu'il faut conserver les
biens classés en bon état. Finalement, c'est peut-être
l'article 30 qui résume la préoccupation de base.
Vous aurez noté, si vous avez suivi mes interventions des
dernières semaines, que j'essaie, chaque fois que l'occasion m'en est
donnée, d'associer l'idée de protection, qui est dans l'article
30, à celle de la mise en valeur. Là-dessus, je crois que nous
allons maintenant entrer dans une phase où les façons
d'intervenir dans la protection et la mise en valeur du patrimoine vont se
préciser. Ce sont des préoccupations assez nouvelles au
Québec. On a vu naître, d'ailleurs, au Québec, comme au
Canada, ces toutes dernières années, beaucoup d'organismes
nouveaux et même beaucoup d'experts nouveaux pour travailler en ces
matières. C'est quelque chose d'assez nouveau sur le continent
nord-américain. Il y a une tradition en Europe, dans certains pays, que
nous n'avons pas. Je suis convaincu, moi, que la rencontre de cette
réflexion de plusieurs experts à plusieurs paliers devrait nous
amener à mieux cerner les objectifs que nous poursuivons. Puisque j'ai
devant moi deux experts, je vais leur faire une petite réflexion sur
l'arrondissement historique de Québec.
On ne peut pas dissocier, je crois, le problème ou les
problèmes auxquels nous avons à faire face dans la protection de
cet arrondissement historique de ceux auxquels la ville a à faire face
dans son ensemble. C'est le phénomène de nos vieilles villes. Le
premier problème qu'on a dans l'arrondissement historique, c'est celui
que pose la vie, la vitalité du centre-ville. Ça déborde
même l'approche patrimoniale. On a à faire face ce n'est
pas facile à une animation et à un soutien d'une
activité normale pour un centre-ville. Si on joint ça à
des objectifs patrimoniaux, on se rend compte de la complexité de la
question. Mais à la limite... Si les urbanistes et ceux qui les
conseillent, ceux avec qui ils travaillent, avaient réussi, ces
dernières années, à maintenir un bon niveau de vie,
d'animation, de densité des centre-ville, on n'aurait même pas
besoin de parler de ces choses. C'est parce qu'il y a eu ce
phénomène de l'étalement urbain, du développement
anarchique en banlieue que, finalement, le problème d'un arrondissement
historique, qui coïncide souvent avec un centre-ville normal, se pose.
Avant même de poser le problème, de rejeter la balle aux
spécialistes du patrimoine, je pense qu'il y a fondamentalement un
problème d'urbanisme.
Là-dessus, le directeur du service d'urbanisme ne devrait pas
être loin de penser un peu comme moi.
M. Rousseau: Oui, je suis d'accord, M. le ministre. Si vous me
permettez de vous sensibiliser à notre inquiétude, cependant, qui
demeure. En 1972, je crois, la Loi des biens culturels a été
amendée pour qu'on y ajoute des modalités concernant le
contrôle de l'affectation du sol. En 1978, on propose carrément de
doter le ministre
de pouvoirs en matière de zonage, lotissement, etc. Est-ce qu'on
ne peut pas croire que, tout à l'heure, le ministre jugera bon ou
le gouvernement de se donner des pouvoirs, également, des
juridictions en matière de circulation, transport, espaces verts, etc?
Parce que ce sont également des éléments qui sont
intimement reliés au zonage et à l'affectation du sol, etc.
Le problème fondamental qu'on pose, cet après-midi,
consiste à savoir si vraiment c'est la façon de faire que
d'enlever aux municipalités, en quelque sorte, leurs pouvoirs pour
créer un pouvoir éminent au ministre, alors qu'on pourrait, de
différentes façons, comme c'est déjà possible par
nombre de lois provinciales, inciter les municipalités à une
action. Ce qui a manqué je reviens là-dessus, ce n'est pas
une marotte ce sont certainement des objectifs. J'ai tendu l'oreille, ce
matin, à différentes remarques des maires, et celles-ci mettaient
en évidence, également, cette incertitude dans laquelle on se
trouve. Je ne veux pas, non plus, jeter de pierre à personne; c'est
très difficile de s'arrêter définitivement sur le plan
d'opération, mais je pense que les efforts doivent aller beaucoup plus
dans ce sens que dans la création de pouvoirs et de superpouvoirs, quand
les outils, réellement, ne sont pas là, ou quand il n'y a pas un
consensus de base sur ce qu'on veut entendre.
On a fait, dans les arrondissements, à ma connaissance, beaucoup
de gestion à la pièce et je pense que tout le monde veut sortir
de cela. C'est pourquoi on réclame des objectifs. C'est fondamental et
je pense que quand la population sera informée de ces objectifs, quand
tout le monde y souscrira, les aspects mécaniques sur lesquels on
discute passeront au second rang, et on aura une assurance qu'on va vers
quelque chose.
Encore une fois je ne veux pas revenir là-dessus
à chaque génération de fonctionnaires aux Affaires
culturelles peut-être que cela a été plus mouvant
qu'à la ville de Québec on s'est fait une nouvelle
définition du plan de sauvegarde. Aujourd'hui, je serais bien curieux de
savoir s'il y en a une qui existe, effectivement. On est associé
à nombre de comités pour nous dire: Voilà, on commence le
plan de sauvegarde, il y aura du financement pour le plan de sauvegarde;
c'était comme cela en 1975, en 1976, en 1977, en 1978. Maintenant,
qu'est-ce qu'on se fait comme idée du plan de sauvegarde? Tous les
gouvernements ont eu ce problème, mais je pense qu'il faut
énoncer des choses claires pour sortir, justement, de l'arbitraire et de
la menace, toujours, d'intervention quand on dérogera. On
dérogera à quoi, en réalité, puisque ce n'est pas
énoncé, ce qu'on veut atteindre. De façon très
générale, je pense qu'il y a un consensus; tout le monde
s'entend, tout le monde veut préserver le patrimoine. Quand on traduit
cela dans des plans d'action, il faut que ce soit plus précis. C'est
là, seulement, en second lieu, que pourraient ressortir les outils. Il
me semble qu'on met un peu la charrue devant les boeufs en évitant
d'attaquer le problème de fond et de s'entendre, encore une fois, sur
ces objectifs fondamentaux que la loi doit peut-être ne pas
énoncer, mais permettre, quand même, d'articuler.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: Au sujet de ces commentaires. Je trouve les propos
que tient le directeur du service d'urbanisme extrêmement
intéressnts. Cela pourrait, d'ailleurs, nous amener dans des
considérations nombreuses. Si, à un moment donné, le
législateur juge bon de revenir à la charge ou de préciser
la portée d'une toi existante, c'est probablement je reviens
là-dessus à la suite d'une observation et d'une
expérience.
On ne peut pas lancer la balle à quelqu'un en particulier. La
faute n'est pas facile à départager, mais il y a eu, depuis
à peu près quinze ans, au Québec et dans la plupart des
villes nord-américaines, une espèce d'inconscience ou de
distraction quant aux effets de certains gestes posés, parfois
même par les gouvernements. Je ne veux pas rentrer dans des litanies que
j'ai développées, un peu, au moment de la défense de mes
crédits, mais c'est clair qu'on a laissé s'installer, en
périphérie des villes, des services essentiels comme les
écoles, par exemple, sans trop se rendre compte de ce que cela pourrait
avoir comme effet; on a laissé se détériorer la ville.
Vous qui êtes urbaniste, vous devez lire toute cette
littérature quasi mondiale, maintenant, sur, quasiment, la mort lente de
certaines de nos villes; vous avez peut-être lu cet excellent roman de
Didier Decoin, John l'Enfer qui raconte le drame de New York. Nous, on est
à une autre échelle, mais on observe un phénomène,
ici, de fuite de la ville.
Je pense qu'on est obligé, tous ensemble, d'intervenir et de
s'imposer un certain nombre d'interventions précises. Les
réflexions du législateur sont peut-être susceptibles,
effectivement, de faire prendre conscience aux administrateurs municipaux d'un
certain nombre de responsabilités qui sont les leurs, face à la
vie de la ville. Je pense que tout le monde ici va admettre que nos villes sont
malades et que l'urbain réagit tout simplement en réglant son
problème individuellement, en s'en allant un peu plus loin pour
éviter la pollution, pour éviter le bruit, pour éviter la
dégradation de son milieu de vie. En même temps, il dégrade
un autre milieu de vie et on a ainsi assisté à une espèce
de massacre de nos valeurs patrimoniales les plus authentiques. C'est le devoir
des gouvernements, à tous les niveaux, d'intervenir.
C'est peut-être agaçant, j'en conviens, qu'un gouvernement
rappelle à des autorités municipales qu'il y a lieu de faire
attention à telle chose, à telle chose, à telle chose.
L'objectif de la loi que nous discutons à ce moment-ci n'est pas, pour
le gouvernement, d'assumer ses responsabilités; c'est de les rappeler et
d'inciter les autorités municipales à se doter de
règlements pour intervenir en ces matières. J'admets avec vous
qu'on n'a pas oublié grand-chose cette fois-ci. Mais c'est
l'expérience des dernières années qui nous montre
qu'il n'est pas suffisant de parler de protection du patrimoine; effectivement,
il faut préciser la nature d'un certain nombre de secteurs de vigilance.
Vous le dites fort éloquemment, ça passe d'une intervention au
niveau du lotissement, au niveau du zonage, au niveau de la construction et
sans doute qu'il y aura d'autres secteurs qu'il conviendra d'étudier
avec soin.
Les responsabilités des autorités municipales
évoluent rapidement à ce moment-ci. L'intention du gouvernement
n'est pas de les assumer à leur place, mais peut-être de les bien
pointer, de les bien identifier pour que les municipalités soient
finalement placées en face de leurs responsabilités à cet
égard. Je prétends qu'on a démoli en dix ans un certain
nombre de nos villes. Je me dis que ce n'est peut-être pas mauvais de se
donner encore dix ans pour essayer de les réanimer et de les
soigner.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais poser une
question au ministre, s'il me le permet. Les objectifs que les
représentants de la ville de Québec souhaitent, est-ce que
demain, on peut espérer les retrouver dans le livre blanc sur la
culture?
M. Guay: Mardi, madame, mardi. Mme Lavoie-Roux: C'est
demain. M. Vaugeois: C'est demain.
Mme Lavoie-Roux: C'est demain, mardi. Ils seront dedans?
M. Vaugeois: Ils ne seront pas dedans comme les gens nous
l'expriment. Cela devrait être un complément au chapitre sur le
patrimoine, mais effectivement, il y a des idées générales
qu'on va trouver dans le chapitre sur le patrimoine. Mais le point de vue
qu'ils expriment est très intéressant...
Mme Lavoie-Roux: Oui, je...
M. Vaugeois: ... et j'en retiens, si vous voulez, une
espèce de commande urgente pour nous, celle peut-être de faire un
effort exceptionnel pour cerner les objectifs que nous poursuivons et que nous
avons tous vaguement à l'esprit. Je ne doute pas d'ailleurs que les
organismes qui vont suivre et qui sont eux-même nettement
identifiés à la défense, à la protection, à
la mise en valeur du patrimoine, pourront nous apporter des points de vue
éclairants là-dessus dont nous ferons notre profit.
On en est là, et c'est une réflexion commune.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: J'avoue ne pas avoir trouvé très
convaincant le plaidoyer de la ville de Québec, même si je
reconnais qu'il est bien fait. Pas très convaincant, parce que je pense
qu'il y a méprise quant au but de la loi et, en particulier, quant aux
articles 48 et 49. Si on prend le mémoire de la ville, page par page, on
s'aperçoit que la plupart des pouvoirs que le mémoire
énonce comme étant des pouvoirs qui sont conférés
au ministre par la nouvelle loi ou par le projet de loi sont des pouvoirs qui,
de toute façon, existent déjà, que le gouvernement
possède déjà, puisque de toute façon le
gouvernement, par la Loi sur les biens culturels, a le pouvoir et le devoir de
s'assurer de la sauvegarde et de la mise en valeur des arrondissements
historiques et des biens culturels.
Ce que vise le projet de loi qui est devant nous à l'heure
actuelle, c'est beaucoup plus de faire en sorte qu'on associe les
municipalités, étant donné les responsabilités qui
devraient être les leurs également, dans ce domaine.
On nous a dit, vous me permettrez de ne pas partager tout à fait
votre opinion, que la ville de Québec s'était, jusqu'à
maintenant, si bien acquittée de sa tâche dans ce domaine, qu'elle
ne voyait vraiment pas de raison pour que le gouvernement intervienne de
façon autoritaire, ce qui n'est pas le cas, à mon avis, lorsqu'on
lit le projet de loi comme il faut. Mais je dirai, à ce sujet, que la
façon dont la ville de Québec s'est acquittée de la
sauvegarde, de la protection, de la mise en valeur de son patrimoine, serait
déjà une bonne raison, si la Loi sur les biens culturels
n'existait pas, pour la créer. Parce qu'en définitive, qu'est-ce
que la ville de Québec a tant sauvé? (17 h 15)
En dehors de l'arrondissement historique du Vieux-Québec, juste
à côté de l'arrondissement historique du
Vieux-Québec, la ville de Québec avait la possibilité,
dans une partie de son territoire qui n'était pas protégée
par la Loi sur les biens culturels, où elle avait donc toute latitude de
manifester son souci de préserver son patrimoine, un patrimoine
passé de tous les Québécois. À se promener sur la
colline parlementaire aujourd'hui, on voit le résultat. Bien sûr,
les gouvernements antérieurs aussi ont eu leur large part des
responsabilités. Aujourd'hui, maintenant que tout ce qui a
été fait est devenu fort impopulaire, il est de bon ton de faire
passer la responsabilité aux anciens gouvernements qui n'existent
plus.
Il ne faut pas remonter bien loin dans le temps pour savoir que la ville
de Québec était entièrement d'accord avec cette
façon de voir les choses. Cette célèbre phrase de celui
qui est maintenant ministre des Postes à Ottawa: "le béton est le
patrimoine de demain" en dit long sur l'approche que pouvait avoir la ville de
Québec en la matière, si bien qu'en dehors de l'arrondissement
historique du Vieux-Québec, on ne peut pas dire que la ville de
Québec ait manifesté un souci particulièrement
éloquent de sauvegarde du patrimoine. À l'intérieur
même de l'arrondissement historique du Vieux-Québec, là
où elle a quand même un pouvoir de réglementation, il a
fallu, dans le cas de la prolifération anarchique des bars, des
restaurants, des auberges, dans tous les sens, dans toutes les directions, que
ce soit le gouvernement
actuel qui décide, à un moment donné, d'intervenir
pour que la ville emboîte le pas. Fort heureusement, elle l'a fait et
elle l'a fait de façon fort convenable, puisqu'elle est même
allée au-delà du premier projet, et qu'on a gelé pour deux
ans, ou à peu près deux ans, l'expansion des commerces dans le
Vieux-Québec. Enfin, la ville de Québec aurait pu le faire il y a
cinq ans, et cela n'a pas été fait, au contraire. Si bien que la
performance des autorités municipales de la ville de Québec
et je ne veux pas refaire, une fois de plus, l'histoire de ce triste
passé sous l'ancienne administration municipale n'a vraiment pas
de quoi rassurer qui que ce soit lorsque la municipalité réclame
quasiment un pouvoir absolu de sauvegarde et de mise en valeur du
patrimoine.
Quoi qu'il en soit, là où je ne partage pas, de
façon plus spécifique, l'opinion des autorités municipales
de la ville de Québec sur le projet de loi actuel, c'est lorsque l'on
fait état des solutions proposées. Le projet de loi tel que je
l'ai lu, en tout cas, aux articles 48 et 49 en particulier, me semble viser non
pas à faire, comme on dit, des autorités municipales une
espèce de pouvoir administratif et purement administratif pour
administrer, au fond, les politiques du gouvernement sans que la ville n'y soit
partie. Bien au contraire, j'ai l'impression que lorsqu'on parle de la simple
élimination du double permis, on escamote assez rapidement ce que cela
implique, parce que le double permis, finalement, impliquait aussi deux
séries de réglementations, parfois complémentaires, mais
parfois pas nécessairement. Il y avait les réglementations
municipales qui pouvaient exister. Il y avait les réglementations qui
pouvaient exister en vertu de la Loi sur les biens culturels, et là, on
disait aux gens: Maintenant, pour tel aspect des choses, vous vous adressez
à la municipalité, et pour tel autre aspect, vous vous adressez
au gouvernement. C'était beaucoup plus que la simple démarche
administrative d'aller chercher deux permis consécutifs. C'est aussi
l'existence de deux séries de réglementations qui crée
auprès du citoyen, non seulement un fardeau dans le sens d'aller
chercher deux permis, mais aussi une confusion singulière qu'entretient
cette situation de double ou de complémentarité de
juridiction.
Si la ville de Québec affirme, contrairement à ce que je
crois avoir constaté, qu'elle est dans une excellente situation pour
protéger elle-même son patrimoine, rien ne l'empêche de se
prévaloir des dispositions de l'article 49, d'élaborer ces
règlements de zonage en fonction de ce qu'on appelle les objectifs de
conservation du patrimoine et aussi les objectifs municipaux. À ce
sujet, je poserais tout de suite une question: Qu'est-ce qu'un objectif
municipal dans cette optique, dans le cas d'un arrondissement historique? Quels
sont dans l'arrondissement historique du Vieux-Québec, pour prendre le
cas qui est le plus connu, les objectifs purement municipaux?
M. Rousseau: Cela pourrait être en matière
commerciale, en matière de fourniture de certains équipements, de
certains services qui ne seraient peut-être pas compatibles avec
l'utilisation que le ministère voudrait faire de certains immeubles, la
restauration, etc. Je pense qu'on pourrait, pour illustrer la situation, penser
à la Place Royale où, à mon avis, il y a des objectifs
absolument introvertis au départ qui sont poursuivis. Je ne vais pas
faire le procès de la Place Royale, mais je pense qu'il y a une
concertation essentielle à beaucoup d'égards et on pourrait
étendre cela à beaucoup d'autres choses, comme en matière
de circulation, j'ai mentionné le secteur de détente, les espaces
verts, etc., en matière d'habitation.
M. Guay: Oui, ils sont tous à l'intérieur d'un
arrondissement historique dans la mesure où la protection des biens
culturels n'a pas pour but uniquement de protéger des monuments anciens,
mais d'assurer que ces monuments aient une vie. Il existe une vie à
l'intérieur de ce cadre-là, ce qui implique, dans la mesure du
possible, des espaces verts, ce qui implique un certain contrôle de la
circulation, ce qui implique un tas de choses. Je ne vois pas très bien
en quoi il peut exister des objectifs purement municipaux au point que leur
vérification parce que c'est bien ce dont il s'agit dans mon
esprit, en tout cas, le projet de loi vise à vérifier ou à
faire vérifier par le gouvernement si les règlements municipaux
sont conformes au but poursuivi et à la Loi sur les biens culturels.
Dans ce contexte-là, je vois mal ce qu'il y a de si purement municipal
que cela choque à ce point-là les autorités municipales
que de permettre, d'autoriser une telle vérification.
M. Rousseau: Effectivement, je pense qu'il n'y a pas
nécessairement une tradition de dialogue à l'égard de
certaines opérations, mais quelles sont les intentions du
ministère au-delà de la Place Royale, dans l'optique d'un plan de
sauvegarde, etc., je pense qu'on peut avoir cette inquiétude-là.
La situation est complexe, on le voit, elle est dénoncée à
certains moments au niveau des initiatives du gouvernement
fédéral. La ville de Québec doit vivre avec ces situations
complexes et s'assurer que son territoire évolue dans le plus grand
intérêt de la collectivité du Vieux-Québec, des
premiers utilisateurs. Par exemple, sur le plan touristique, on peut bien
imaginer un scénario où la fonction touristique prendrait une
ampleur telle que cela soit au détriment de la population locale. Je
pense que ce sont des soucis que la ville peut avoir et que vous
reconnaîtrez.
M. Guay: Ce sont également des soucis, à ce
moment-là, qu'aurait...
M. Rousseau: Également oui, mais je ne vois pas pourquoi
la ville ne les mettrait pas en évidence et ne s'en soucierait pas au
premier chef.
M. Guay: Mais j'espère bien que la ville s'en soucie.
M. Rousseau: Voilà.
M. Guay: S'il y a quelque chose, jusqu'à maintenant, c'est
qu'on lui a reproché de ne pas s'en soucier.
M. Rousseau: Oui, je pense que personne n'est sans
péché. On peut faire longtemps l'analyse des erreurs de tout le
monde.
M. Guay: Je suis bien d'accord avec vous, mais ce que je cherche
c'est en quoi il y a une si forte contradiction entre les deux. À mon
avis, je n'en vois pas. J'ai beau en chercher. Peut-être qu'il y en a,
mais les exemples que vous donnez, avec lesquels je suis parfaitement d'accord,
ne m'apparaissent pas indiquer qu'il y a contradiction entre les objectifs
municipaux, ou que vous qualifiez de municipaux à l'intérieur de
l'arrondissement historique, et les objectifs généraux de
protection et de mise en valeur du patrimoine.
M. Boutin: Si vous me permettez là-dessus, nous ne nions
pas qu'à l'intérieur des objectifs de gestion de patrimoine ou de
protection du patrimoine le ministre ou le ministère ne doit pas
considérer les questions de circulation, espaces verts, habitation,
services aux habitants. Ce n'est pas cela que nous nions. Ce que nous
constatons uniquement, c'est que le ministre se donne le pouvoir d'intervenir
dans ce champ de compétence, un champ de compétence qui est
déjà de juridiction municipale, alors il y a double juridiction
là-dedans, la question est de savoir qui sera le premier gestionnaire ou
le premier administrateur de ce territoire. Est-ce que ce sera la
municipalité surveillée par le ministre des Affaires culturelles
pour s'assurer que les objectifs de sa loi sont remplis ou est-ce que ce sera
le ministre des Affaires culturelles qui prendra la place de la
municipalité et la municipalité va se retirer? C'est cela qu'il
s'agit de déterminer.
M. Guay: Je pense que...
M. Boutin: Si vous me permettez, la crainte de la ville de
Québec, ou ce que la ville de Québec souhaite, c'est qu'elle
continue à administrer son territoire tout en étant
surveillée par le ministre.
M. Guay: Ce que je ne comprends pas c'est qu'en lisant les
articles 48 et 49 vous n'ayez pas vu que c'est précisément
là le but de cette loi.
M. Boutin: Je vais revenir là-dessus c'était
mon intention tantôt je pense que tout le monde s'entend sur les
objectifs que doit poursuivre la loi, que doivent poursuivre les
municipalités quant à la gestion du patrimoine, quant à la
protection et à la mise en valeur des biens qui sont dans notre
territoire. Cependant, on croit que ce n'est pas le but atteint par le projet
de loi 4. Dans un premier temps, au projet de loi 4, on dit, à son
article 48: Le ministre acquiert des pouvoirs en matière de je ne
répéterai pas l'énumération lotissement,
construction, zonage, il étend ses pouvoirs. Il y en a une partie qu'il
avait déjà...
M. Guay: C'est discutable cela.
M. Boutin: Vous ne nierez pas que le ministre n'avait pas le
pouvoir en matière de zonage auparavant.
M. Guay: Je m'excuse, mais là on peut faire un long
débat juridique. Il y a un article de la Loi sur les biens culturels, la
loi 2, qui, interprété littéralement en tout cas, pouvait
lui donner ce pouvoir.
M. Boutin: Je m'interroge sur la raison pour laquelle le
législateur s'est donné la peine de modifier la loi si tout
était là.
M. Guay: Parce qu'il pouvait y avoir ambiguïté.
M. Boutin: De toute façon! Le ministre se donne des
pouvoirs pour pouvoir gérer ou intervenir à l'intérieur
des arrondissements historiques ou naturels des sites, etc.
Dans un deuxième temps, on prévoit un mécanisme de
la loi pour faire disparaître une double administration, l'administration
des permis municipaux et l'administration des permis au sens de la Loi sur les
biens culturels. C'est tout ce qu'on dit. On ne demande pas aux
municipalités d'intervenir en matière de protection du
patrimoine. C'est tout ce qu'on dit. Je me donne des pouvoirs d'intervenir et
je dis aux municipalités: Si vous voulez bien, lorsque vous aurez
adopté un règlement qui satisfera les objectifs de ma loi, je
vous remettrai l'administration de mes permis.
Ce que la ville de Québec propose, c'est que les
municipalités continuent d'oeuvrer en matière de lotissement, de
construction et de zonage, ce dont on discutait tantôt. À travers
un champ de compétences municipales de gestion de territoire, qu'elles
demeurent le gestionnaire premier de leur territoire avec des pouvoirs du
ministre d'intervenir pour faire en sorte que les objectifs de la loi soient
bien respectés. Cela ne semble pas être le but atteint par le
projet de loi 4.
M. Guay: Au contraire, cela me semble tout à fait le but,
c'est assez curieux. Vous dites que la loi n'oblige pas les
municipalités à faire des règlements. C'est exact. Je ne
sais pas si vous faites le parallèle, mais lorsque vous évoquez,
à la page 16 de votre mémoire, l'hypothèse d'un
mécanisme comme celui de la Loi sur l'évaluation foncière
selon laquelle le ministre des Affaires municipales peut, par ordonnance,
ordonner à une municipalité d'adopter un rôle
d'évaluation conforme aux dispositions, etc., il m'apparaît
implicite, dans les articles 48 et 49, que sinon une telle obligation, qu'une
telle incitation soit faite aux municipalités. Ce n'est pas
nécessaire de leur dire de façon générale de faire
des règlements pour couvrir l'ensemble de ces activités, mais il
est bien certain que les municipalités qui tiennent à leur
autonomie et qui tiennent à assumer leurs responsabilités, comme
la ville de Québec en
manifeste le désir dans le domaine de la conservation du
patrimoine, plutôt que de s'en remettre au gouvernement, vont
préférer, j'imagine, faire des règlements
nécessaires. C'est aussi de permettre aux municipalités, non
seulement de les inciter, mais de leur permettre de faire ces
règlements. Non seulement ce n'est pas restreindre l'autonomie des
municipalités, c'est même l'accroître dans la mesure
où, jusqu'à maintenant, il pouvait y avoir ambiguïté
et des domaines pouvaient être réservés exclusivement au
gouvernement et d'autres exclusivement aux municipalités avec les
résultats qu'on avait que ce système chinois de double permis, de
double juridiction et de confusion pour ce qui est des citoyens qui, au bout du
compte, habitent dans l'arrondissement historique en question.
On ne peut pas non plus, du jour au lendemain, dire à des
municipalités qui ne sont pas équipées pour le faire: Vous
avez un an pour adopter toute la série de réglementations visant
à protéger votre arrondissement historique.
Par contre, pour ce qui est des municipalités qui peuvent le
faire la loi est souple en cela, elle est donc, je pense, plus sage
il y a une incitation très forte qui est faite et qui devrait
normalement, je pense, dans le cas de la ville de Québec, entre autres,
inciter la ville de Québec à compléter sa série de
réglementations, ce qui permet, par contre, au gouvernement de cesser de
jouer aux pompiers.
Sur le but, je pense qu'on s'entend. Vous dites que ce devrait
être les municipalités qui fassent cela et que ce soit le ministre
qui surveille cela. Je suis parfaitement d'accord avec cela et c'est de cette
façon que je lis les articles 48 et 49. Mais, sur les modalités
que vous proposez, j'ai l'impression qu'on arrive exactement à
l'inverse. Ce que j'ai l'impression que vous proposez au fond, quand vous dites
que le ministre ordonne aux municipalités dans un délai de X
temps de faire un règlement sur telle chose et qu'ensuite, dans un
délai de trois mois ou six mois, il ordonne de faire un règlement
sur telle chose, cela implique que c'est d'abord le ministère qui doit
faire en quelque sorte l'inventaire de la situation réglementaire de
toutes les municipalités qui sont dans les arrondissements historiques
ou dans lesquelles il y a un arrondissement historique; donc l'inventaire
réglementaire de ce qui existe comme règlement dans cet
arrondissement historique, le garder constamment à jour et voir à
ce que partout sur l'ensemble du territoire, à son incitation, il y ait
des correctifs apportés. (17 h 30)
C'est sûr que, de toute façon, l'inventaire doit être
plus ou moins existant à la direction générale du
patrimoine. Mais n'est-il pas plus simple, plutôt que d'attendre que cela
vienne d'en haut et qu'on dise: Faites cela et vous avez six mois pour le
faire, n'est-il pas plus simple d'inciter, comme le fait l'article 49, les
municipalités à le faire et à en faire vérifier la
nature, la conformité par le ministre, permettant ainsi au ministre de
jouer son rôle que vous lui reconnaissez de vérifier
et permettant aussi aux municipalités de jouer pleinement leur
rôle qui est précisément d'adopter les règlements
nécessaires.
Sinon, j'ai l'impression qu'on va continuer à jouer au pompier
comme on a joué jusqu'à maintenant. On va se promener à
travers le Québec à éteindre les feux avec un personnel
insuffisant, qui n'est pas sur place, qui n'a pas comme fonction
première de faire cela, qui, de par la nouvelle loi, le ferait de
façon suppléante mais en espérant que, le plus rapidement
possible, les municipalités assumeront cette tâche, comme le
projet de loi les y incite. De cette façon, plutôt que de jouer au
pompier comme le ministère l'a fait jusqu'à maintenant, le
ministère pourra vraiment jouer pleinement son rôle
c'est-à-dire voir à ce que la Loi sur les biens culturels soit
respectée, et les municipalités assumeraient le leur qui est
aussi de faire leur part dans la sauvegarde de la mise en valeur du
patrimoine.
Je comprends mal la démarche que vous voulez que l'on fasse, ce
triptyque incitatif, coerci-tif, correctif...
M. Rousseau: Le ministère va être obligé de
continuer à jouer au pompier pendant un bout de temps parce qu'il n'a
pas plus les outils... Cela a été dit ce matin, encore. Vous
semblez présumer qu'il va y avoir un rythme effarant de mises en action;
ce n'est possible ni par le ministère, ni par les municipalités.
Ce qu'on conteste, ce sont les pouvoirs extraordinaires qui sont donnés
au ministre des Affaires culturelles quand il y a déjà un pouvoir
de désaveu général qui existe au niveau des
réglementations municipales. Pourquoi donner au ministre ces pouvoirs,
c'est ce que nous disons.
M. Guay: Pourquoi voulez-vous qu'on attende après le coup?
En d'autres mots, ce qu'on vise à faire, il me semble, par ce projet de
loi, c'est de la prévention.
M. Rousseau: II y a beaucoup de choses qui manquent, notamment,
le gouvernement a choisi de ne jamais réglementer. Depuis 1972, il avait
les pouvoirs de réglementer et il ne l'a jamais fait. Ce n'est pas parce
qu'il peut, à nouveau, réglementer qu'il va pouvoir faire
davantage. Il avait ces pouvoirs de réglementer.
M. Guay: Vous parlez de réglementer quoi?
M. Vaugeois: Là-dessus, M. le Président, j'aimerais
apporter une précision. Ce que j'ai aimé, entre autres, dans les
éléments qu'on apporte dans le projet de loi parce que,
comme vous le savez, j'en ai hérité; l'essentiel de ce projet de
loi avait été préparé par mon
prédécesseur, je l'ai fait mien rapidement et j'y ai
travaillé passablement donc il y a plusieurs points qui me
plaisent particulièrement. Entre autres, quant aux aires de protection,
on était un peu face au pouvoir discrétionnaire du ministre et
tel que nous le présentons maintenant, normalement, on pourrait
reprocher au ministre de ne pas avoir précisé, par
règlement, sa façon d'aborder une aire de protection parce que
sans s'en faire une obligation totale, il reste qu'on introduit cette
préoccupation et si on ne le fait pas, on pourra nous le reprocher.
Pour les gens qui sont dans une aire de protection ou dans un
arrondissement historique, mais principalement dans une aire de protection, ils
sauront davantage à quoi s'en tenir, et l'intervention du ministre sera
beaucoup moins discrétionnaire, beaucoup moins arbitraire. Il y a un
certain nombre d'éléments comme cela dans le projet de loi,
à mon avis, qui obligent le ministère à être plus
précis, à avoir plus de points de référence,
etc.
Le Président (M. Jolivet): Excusez-moi, M. le
député, les 20 minutes qui vous étaient accordées
sont dépassées déjà de deux minutes. C'est au
député de Mont-Royal à prendre la parole.
M. Ciaccia: M. le Président, je voudrais féliciter
les représentants de la ville de Québec de leur mémoire.
Je crois que le mémoire apporte des recommandations au niveau pratique
et au niveau de la juridiction des administrations municipales. Je ne partage
pas la critique du député de Taschereau quant à
l'administration de la ville de Québec. C'est trop facile de dire que
vous n'avez pas pris vos responsabilités. Si j'ai bien compris le
député de Taschereau, je pense qu'il a été un peu
trop dur dans la critique de votre administration. J'ai l'impression qu'il ne
juge pas la forêt par les arbres. S'il regardait d'autres villes au
Québec, au Canada, il verrait la différence dans
l'atmosphère, dans le genre de décisions municipales qui ont
été prises à Québec et qui ont été
prises dans d'autres villes. Je ne dis pas qu'il n'y a pas de décisions
qui peuvent être critiquées, il n'y a personne parfait mais, je
pense que la critique du député de Taschereau est allée un
peu trop loin. Il ne prend pas en considération vraiment ce qui s'est
passé dans les autres villes où il y a eu beaucoup de
dégât et beaucoup moins de préservation, beaucoup moins de
souci de l'environnement de la ville, de l'architecture, du patrimoine de la
ville.
M. Guay: Ce n'est pas parce que les autres sont pires qu'il faut
s'en féliciter.
M. Ciaccia: Je crois que ce que la ville de Québec... Si
on comparait la ville de Québec avec les autres villes, on verrait bien
qu'elle a pris ses responsabilités beaucoup plus que d'autres villes du
Canada...
M. Guay: ... mince consolation...
M. Ciaccia: Le point que vous touchez je voudrais vous
poser en premier lieu, quelques questions, après cela je voudrais faire
quelques commentaires sur votre mémoire sur l'administration
locale, je crois que c'est extrêmement important. Je sais qu'on
étudie le projet de loi 4, mais cela semble faire partie d'une
philosophie du gouvernement...
M. Alfred: Voilà, voilà, il a commencé!
M. Bertrand: Je pensais bien qu'on y arriverait!
M. Alfred: ... des fascistes, des communistes, des
hitlériens...
M. Ciaccia: On ne peut pas critiquer le gouvernement ici; cela ne
se peut pas, parce qu'il détient toute la vérité. On n'a
pas le droit de donner nos opinions. Mais, vous l'avez dans ce projet de
loi-ci...
Mme Lavoie-Roux: Vous pourriez, au moins, laisser les autres
s'exprimer.
M. Ciaccia: ... il vous donne l'illusion de décentraliser,
mais il ne décentralise pas; il prend le pouvoir.
Mme Lavoie-Roux: ... c'est vous qui le dites!
M. Alfred: ...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît, M. le
député!
M. Ciaccia: ... pour éviter la question de deux permis,
parce que cela n'était pas bon d'avoir deux permis auparavant. C'est
vrai; c'était pas bon. Il y avait une incertitude. Alors on a dit: on va
enlever les deux permis, on va vous enlever totalement le droit de donner des
permis.
M. Guay: Au contraire, au contraire.
M. Ciaccia: ... non, regardez l'article 48, je ne sais pas si
vous savez lire...
M. Guay: 49, mais il compte... allez au-delà de 48
M. Ciaccia: ... on prend toute la discrétion on prend tous
les pouvoirs et on vous enlève les pouvoirs, c'est vrai. On peut vous en
redonner si le ministre décide par la suite de vous en donner. Ce n'est
pas ce qu'une administration locale doit avoir. Une administration locale, une
municipalité doit avoir certains pouvoirs que vous soulignez et il doit
y avoir une certaine protection s'il y a un abus de ces pouvoirs; il doit y
avoir une certaine marge d'activités par le ministre des Affaires
culturelles afin de protéger le patrimoine, mais sans vous enlever
à vous l'administration, la juridiction municipale. C'est ce que ce
projet de loi fait ici, je pense que c'est cela que vous soulignez. Ce n'est
pas que vous ne voulez pas prendre vos responsabilités. Peut-être
que dans le passé, il y a eu certaines erreurs dans certaines
administrations. Maintenant, je ne sais pas si ce projet de loi est visé
pour corriger une certaine situation sur l'île d'Orléans je
ne suis pas assez au courant de tous les faits et peut-être que
vous généralisez cela et que vous appliquez une situation locale
à l'ensemble de toute la province. En ce faisant, vous enlevez certains
pouvoirs qui sont assez importants au
niveau local, au niveau de la municipalité, et vous vous les
accaparez.
Je crois que le mémoire et les commentaires...
M. Vaugeois: Je ne peux dire cela. Cela ne donne rien.
M. Ciaccia: ... de nos invités, ont soulevé le
problème que le ministre des Affaires municipales a déjà
un certain pouvoir de réglementation, comme la commission des Affaires
municipales, par exemple; ils ont déjà un certain pouvoir
d'approbation pour les règlements.
C'est ce genre d'approbation, ce genre de réglementation qui
peut-être... Vous auriez dû vous inspirer de cette approche;
prendre les suggestions que la ville de Québec vous fait. Par exemple,
aujourd'hui, lorsque quelqu'un achète une propriété dans
la zone de 500 pieds du site historique, quelle protection a-t-il, cet
acquéreur? Comment le sait-il qu'il est dans la zone du 500 pieds?
Est-ce que la zone du 500 pieds...
M. Vaugeois: ... et même, M. le député...
M. Ciaccia:... est inscrite au bureau d'enregistrement; je vous
le demande comme information?
M. Vaugeois: M. le député, nous allons plus loin
encore parce que la loi nous oblige dorénavant à signifier au
greffier, au secrétaire trésorier des municipalités tout
ce genre de transactions ou de gestes. Quand nous classons ou émettons
des avis d'intention de classement, nous nous obligeons par la loi à en
informer les conseils municipaux. On va très loin.
M. Ciaccia: Est-ce que vous dites d'après cette loi que
pour toutes les propriétés dans l'aire de 500 pieds du site
historique il y a dépôt d'actes au bureau d'enregistrement
informant l'acquéreur qu'il se trouve dans... Parce que dans le
passé... et je pense que le projet de loi détériore la
situation, parce qu'il semble y avoir des incertitudes. Quand il y a des
incertitudes dans cette zone...
M. Vaugeois: M. le député, sur tout ce que vous
dites depuis...
M. Ciaccia: ... non...
M. Vaugeois: ... tout à l'heure, je pourrais dire: Non, ce
n'est pas cela. Non, ce n'est pas cela. C'est exactement le contraire.
Renversez tout ce que vous dites, et vous aurez la vérité.
M. Ciaccia: Non.
M. Guay: Vous avez de bons recherchistes.
M. Ciaccia: Je vais vous donner des exemples. Vous avez un
pouvoir absolu, à l'article 48, ce qui veut dire que la ville ne peut
pas faire ses règlements.
M. Vaugeois: Lisez l'article 49. M. Guay: II ne l'a pas
encore lu.
M. Ciaccia: À l'article 48 aussi, et à l'article
49, les deux, vous avez un pouvoir absolu, qui est assez
discrétionnaire.
M. Vaugeois: Le but de la Loi des biens culturels c'est de
protéger les biens culturels. On essaie de ne rien oublier.
M. Ciaccia: Je comprends. L'objectif de nos commentaires c'est de
ne pas aller à l'encontre de cette protection. C'est la façon
dont vous le faites, M. le ministre.
M. Vaugeois: Profitons de la présence des gens de la ville
de Québec.
Mme Lavoie-Roux: Votre rôle de président, je pensais
que c'était à l'autre bout de la table. Au moins, tâchez de
rester neutre!
M. Ciaccia: Je vais vous donner un exemple.
M. Vaugeois: Bien, M. le député, nous allons en
discuter.
M. Ciaccia: Je vais vous donner un exemple démontrant
pourquoi il y a une incertitude dans les articles 48 et 49. S'il y a des
incertitudes à ces endroits, cela va promouvoir de plus une
dégradation de ces districts. Je me mets au plan pratique. Si j'acquiers
une propriété aux environs d'un site historique, à cinq ou
six cents pieds et que je ne peux pas me fier à la municipalité,
à un règlement tel que la municipalité vient de
suggérer, un règlement sujet à l'approbation du ministre,
avec les articles 48 et 49 il m'est totalement interdit de faire une
subdivision, un changement, une amélioration, une réparation.
M. Vaugeois: On n'a rien oublié.
M. Ciaccia: Vous n'avez rien oublié, c'est exact, et vous
avez augmenté l'incertitude qui existe dans ces endroits.
M. Vaugeois: Au contraire, vous lirez les articles 51 et
53...
M. Ciaccia: Je suis soumis à la discrétion du
ministère.
M. Vaugeois: ... qui suggèrent fortement de faire des
règlements.
M. Ciaccia: Exactement, c'est lui qui suggère de faire des
règlements. Mais ce que la ville de Québec suggère
et peut-être est-ce difficile de vous le faire comprendre, parce que vous
semblez totalement convaincus de votre approche c'est que ce n'est pas
votre ministère qui va compren-
dre, qui va pouvoir accepter et donner effet aux besoins particuliers de
toutes les municipalités au Québec.
M. Vaugeois: Le premier paragraphe.
M. Ciaccia: Non, l'article 49 vous donne seulement le
pouvoir.
M. Vaugeois: Non, il ne donne pas le pouvoir, il les invite
à se donner des dispositions réglementaires.
M. Ciaccia: Cela vous donne un pouvoir. C'est encore sujet
à l'approbation du ministre, qui prend encore l'avis de la
commission.
M. Vaugeois: Bien sûr, parce que c'est le ministre qui est
responsable de la loi.
M. Guay: C'est bien normal.
M. Vaugeois: Que voulez-vous faire?
M. Ciaccia: C'est ce que nous critiquons. Vous enlevez le pouvoir
à la municipalité.
M. Vaugeois: Je ne l'enlève pas, je l'ai, et je propose de
le déléguer.
M. Ciaccia: Vous enlevez le pouvoir à la
municipalité.
M. Guay: Par la loi 2 sur les biens culturels, adoptée par
l'ancien gouvernement, on a déjà le pouvoir.
Mme Lavoie-Roux: On vous accueille avec plaisir, M. le
Président.
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Vaugeois: On propose de le déléguer, et on
décentralise.
M. Guay: C'est le gouvernement Bourassa qui t'a
adoptée.
Mme Lavoie-Roux: De cela, il faudrait s'en reparler. On fait
semblant de décentraliser.
Le Président (M. Jolivet): Je voudrais que, selon le
règlement... Mme le député, seulement une minute je
comprends que chacun voudrait intervenir dans un débat comme
celui-là.
M. Vaugeois: II faut profiter de la présence de ces gens,
et il y en a d'autres qui attendent. Nous aurons tout le temps pour discuter de
cela.
Le Président (M. Jolivet): C'est pour cela que je demande
de respecter... M. le ministre.
Mme Lavoie-Roux: Oui, mais laissez parler le
député, vous l'interrompez continuellement.
M. Vaugeois: Non, il faut qu'il dise le contraire de ce qu'il
dit. Que voulez-vous que je vous dise?
Mme Lavoie-Roux: Vous rétablirez les faits quand nous
étudierons le projet de loi article par article.
M. Ciaccia: Cela ne fait pas votre affaire, mais je vais le dire
quand même, même si cela ne fait pas votre affaire, voyons!
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: Je n'aime pas cela. Vous allez passer à
l'histoire pour quelqu'un qui n'a pas lu la loi.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre!
M. Ciaccia: J'ai lu la loi. J'ai écouté la lecture
du mémoire de la ville de Québec.
M. Guay: II ne connaît pas son dossier. Lisez-le.
M. Alfred: Avez-vous lu le projet de loi?
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
Mme Lavoie-Roux: Vous voyez, ce sont eux qui créent la
discorde, ramenez-les à l'ordre.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
M. Guay: II est rouge de colère, le député
de Papineau.
M. Alfred: C'est vrai.
Le Président (M. Jolivet): Je vourais que, selon le
règlement, on permette au député de s'exprimer. Si vous
avez autre chose à dire, votre droit de parole existe toujours, vous
avez le droit de le prendre ensuite.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. C'est bien fait. Le
Président (M. Jolivet): M. le député.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Nous y sommes
habitués; je dois vous dire que chaque fois que nous soulevons des
points qui ne font pas l'affaire du gouvernement, il y a des interruptions
complètes.
M. Bertrand: Surtout quand vous êtes là.
M. Ciaccia: Totalement, si cela ne fait pas leur affaire, ils
essaient d'interrompre parce qu'ils ne veulent pas qu'on appuie les soumissions
qui nous sont présentées ici.
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, à
l'ordre!
M. Alfred: Laissez parler Mme Lavoie-Roux.
Une voix: M. le Président, dites au député
de parler sur le projet de loi.
M. Ciaccia: Si on les critique, si on fait ce que le
député de Taschereau a fait, soit essayer de descendre les
invités, on n'aura pas d'interruption.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, je vous ai donné le droit de parole, mais, s'il vous
plaît, utilisez-le aux fins pour lesquelles je vous l'ai donné, de
façon à éviter que, de chaque côté de la
table, on s'interrompe.
Mme Lavoie-Roux: Mais il parle de la loi 4, M. le
Président.
M. Ciaccia: Je parle de la loi 4, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Allez. Mais sachez que vous
avez avantage à poser des questions aux gens d'en face. Nous aurons la
chance de continuer ce débat entre nous plus tard. (17 h 45)
M. Ciaccia: Merci, M le Président. Vous avez entendu le
ministre qui vous a dit qu'il vous donne les pouvoirs, qu'il vous
décentralise. Je sais que dans votre mémoire vous avez
démontré que ce n'est pas une décentralisation parce que
c'est le ministre qui prend tous ces pouvoirs dans les articles 48 et 49.
Est-ce que, brièvement, vous pourriez encore répéter, pour
le bénéfice du ministre, la différence que vous
suggérez et qui serait le contrôle de l'ouvrage par la
municipalité et les pouvoirs que le gouvernement a dans les articles 48
et 49? Brièvement, pourriez-vous faire cette distinction?
M. Vaugeois: Et dites toute la vérité!
M. Boutin: Je ne peux que répéter brièvement
et peut-être plus clairement ce qu'il y a dans notre mémoire. Tout
ce qu'on veut dire au sujet du projet de loi, c'est que nos objectifs sont les
suivants: On est d'accord avec les objectifs de décentralisation et on
est prêt à assumer nos responsabilités, et de un...
M. Ciaccia: Excusez si je vous interromps. Est-ce que le projet
de loi vous décentralise et vous donne les pouvoirs ou est-ce que le
projet de loi retient tous les pouvoirs pour le ministre?
M. Boutin: J'y arrive.
Un, on est prêt à assumer nos responsabilités. La
proposition que nous avons faite, c'est d'insérer dans la loi,
premièrement, une obligation pour les municipalités de tenir
compte de la protection du patrimoine dans la rédaction de leurs
règlements de construction, de lotissement et de zonage. Obligation qui
n'est pas dans la loi; on incite les municipalités, mais cette
obligation, pour les municipalités, n'est pas là pour tenir
compte de la protection du patrimoine dans la rédaction de leurs
règlements. Cependant, nous considérons que l'objectif du
ministre de décentraliser cette protection du patrimoine vers les
municipalités est souhaitable, louable et on l'endosse. Nous
considérons que les pouvoirs accordés au ministre ne sont pas
ceux qui étaient dans la loi 2, à l'origine; nous croyons qu'il
s'agit d'une augmentation de pouvoirs donnés au ministre et nous croyons
que l'objectif de décentralisation énoncé par le ministre
n'a pas été atteint par le projt de loi...
M. Ciaccia: Est-ce que le ministre écoute?
M. Vaugeois: J'écoute et je comprends; vous,
comprenez-vous ce qu'il dit?
M. Ciaccia: Je comprends, absolument! M. Vaugeois:
Très bien, cela va être fini.
M. Boutin: Nous croyons que l'objectif de décentralisation
visé par le ministre n'est pas atteint par le projet de loi, parce que,
d'abord, les municipalités n'ont pas l'obligation de tenir compte de la
loi dans la rédaction de leurs règlements.
M. Vaugeois: Est-ce que je peux vous interrompre pour demander si
le député voudrait qu'on oblige les municipalités...
M. Ciaccia: À tenir compte des...
M. Vaugeois: Voudriez-vous qu'on soit capo-raliste, dirigiste,
est-ce cela que vous voulez?
M. Ciaccia: Vous l'êtes caporaliste avec les articles 48 et
49.
M. Vaugeois: Non. Excusez, Me Boutin.
M. Boutin: Tout ce qu'il y a, dans le projet de loi, à
l'article 49, c'est la faculté, pour une municipalité qui veut
assurer le bien-être de ses citoyens et supprimer le mécanisme des
doubles permis qui est achalant pour tout le monde, de faire approuver son
règlement par le ministre. À partir de ce moment il y aura un
seul mécanisme d'approbation et la municipalité va diriger le
tout.
Ce que I'on dit, c'est qu'on ne devrait pas fonctionner de cette
façon. C'est que la municipalité devrait être souveraine
dans son champ de juridiction: zonage, construction, lotissement. Que la
municipalité, compte tenu d'un objectif qui lui serait donné par
la loi, objectif qui pourrait être précisé, point par
point, par le ministre. La municipalité de Québec est intervenue
sur la prolifération des débits d'alcool; la municipalité
de Saint-François de l'île d'Orléans est intervenue sur la
question de lotissement. Sous le titre: "From time to time , de temps à
autre, qui pourrait être précisé par le ministre, laissons
les municipalités agir dans leur champ de compétence et donnons
au ministre le pouvoir de les surveiller. Si elles n'exercent pas leurs
pouvoirs de façon à atteindre les
objectifs de la loi, qu'il intervienne. Mais on ne pense pas que les
articles 48 et 49 lui permettent de faire cela. Simple exemple, si
Saint-François de l'île d'Orléans ou la ville de
Québec ou quelque autre municipalité, ayant exercé ses
pouvoirs de lotissement, construction et zonage, ne soumet pas au ministre,
pour approbation, son règlement, on demeure avec le mécanisme des
doubles permis, le ministre qui devra intervenir en matière de
protection du patrimoine et adopter ses propres règlements. On n'a rien
changé sur la loi antérieure. Si, par l'article 49, on donne
l'obligation aux municipalités d'adopter un règlement à la
satisfaction du ministre on a parlé dans les journaux des
dernières semaines, de tutelle on approche peut-être de
cela.
Mme Lavoie-Roux: Dans le fond, vous prétendez
décentraliser et vous ne décentralisez pas vraiment. C'est ce
qu'il dit.
M. Ciaccia: C'est ce que j'ai dit.
M. Boutin: Si on vous oblige...
Mme Lavoie-Roux: D'ailleurs, je vous l'ai dit', en discours de
deuxième lecture, M. le ministre.
M. Boutin: J'admets que c'est compliqué.
M. Ciaccia: Je vous ai dit la même chose.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, non, non.
Le Président (M. Jolivet): Ne recommencez pas...
Mme Lavoie-Roux: II ne faut quand même pas essayer de faire
de l'ironie.
Le Président (M. Jolivet): Madame...
Mme Lavoie-Roux: Quand on oblige que tous les règlements
soient soumis et que...
Le Président (M. Jolivet): Mme le
député...
Mme Lavoie-Roux: ... finalement, ils le seront selon le bon
vouloir du ministre...
Le Président (M. Jolivet): Mme le
député...
Mme Lavoie-Roux: ... cela ne s'appelle pas de la véritable
décentralisation, je m'excuse.
M. Alfred: Madame, nous avons bien compris l'argumentation du
monsieur.
Le Président (M. Jolivet): M. le député,
s'il vous plaît!
M. Alfred: C'est logique.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal, c'est encore à vous, la parole, pour quelques instants.
Mme Lavoie-Roux: Votre logique, là...
M. Ciaccia: Je réitère...
Le Président (M. Jolivet): S'il vous plaît!
M. Alfred: On a compris.
M. Ciaccia: Je réitère ce que j'ai dit
tantôt, après les explications de nos invités: C'est encore
un contrôle total du ministère. C'est un moyen d'enlever certains
pouvoirs aux municipalités qu'elles devraient avoir et qu'elles
devraient exercer.
M. Guay: Elles ne les ont pas à l'heure actuelle.
M. Ciaccia: Donnez-leur, faites donc une bonne loi. Ne faites pas
une loi qui va empirer la situation.
M. Alfred: II y a la loi 22.
M. Ciaccia: II y avait certaines failles dans la loi actuelle.
Est-ce que c'est ce que vous vouliez que je vous dise? Je vous le dis.
D'accord?
Mme Lavoie-Roux: II y avait lieu qu'elle soit
révisée.
M. Ciaccia: Bonifiez-la, ne la faites pas pire qu'elle ne
l'est.
M. Guay: M. le Président...
M. Ciaccia: C'est ce que vous faites maintenant, vous la faites
pire qu'elle ne l'est.
M. Guay: M. le Président...
M. Ciaccia: C'est ce que ces gens viennent vous dire.
M. Guay: J'ai bien compris.
M. Ciaccia: Ils viennent nous dire: Laissez-nous nos
responsabilités; nous connaissons les besoins locaux, nous connaissons
la réglementation. Nous sommes prêts à nous faire imposer
des devoirs, des responsabilités dans le domaine du patrimoine mais nous
ne voulons pas, par le biais des articles 48, 49 et 53 vous m'avez
cité un autre article que tous ces pouvoirs soient
complètement entre les mains du ministre, totalement
discrétionnaires. Vous laissez les municipalités encore à
la merci du ministre et vous leur enlevez cette juridiction. C'est simple comme
cela.
M. Guay: M. le Président, est-ce que le
député...
M. Ciaccia: C'est ce que nos invités viennent nous
dire.
M. Guay: ... me permet une question? Est-ce qu'il admet que
certaines municipalités ne prenons pas la ville de Québec
qui est une grosse municipalité, prenons la municipalité de
Saint-François de l'île d'Orléans ou d'autres, dans des
arrondissements historiques n'ont pas nécessairement tous les
instruments juridiques, l'expérience et l'expertise nécessaires
pour adopter tout le train réglementaire qui pourrait être requis
pour assumer seules, à l'exclusion du gouvernement, la sauvegarde et la
mise en valeur d'un arrondissement historique ou d'une partie d'un
arrondissement historique?
M. Ciaccia: Si vous jugez que dans certains endroits il y a des
difficultés, ne procédez pas de cette façon, en enlevant
des droits à toutes les municipalités parce que vous voyez un
problème à certains endroits.
M. Guay: Cela ne répond pas à ma question.
M. Ciaccia: L'autre réponse que je serais tenté de
vous donner: je suis toujours méfiant de ceux qui veulent me dicter
comment je dois vivre et c'est ce que vous semblez faire. Vous dites: II y a
certaines municipalités qui ne savent pas quoi faire et ne savent pas
comment elles doivent agir. On va leur imposer d'une certaine
façon...
M. Guay: Ce n'est pas cela, ce n'est pas cela.
M. Ciaccia: Bien oui, c'est cela la question du
député de Taschereau.
M. Vaugeois: L'article 48 prévoit... M. Guay: Ce
n'est pas du tout...
M. Ciaccia: Vous n'avez pas aimé l'administration de la
ville de Québec.
M. Vaugeois: À part cela, M. le député...
M. Ciaccia: Vous n'aimez pas...
M. Vaugeois: ... regardez comme il faut la loi. On parle des
arrondissements historiques, des arrondissements naturels, des sites
historiques classés et des aires de protection. On ne parle pas des
municipalités.
M. Ciaccia: Ce sont elles qui sont affectées par cela.
M. Vaugeois: On s'occupe de nos affaires. M. Ciaccia: Ce
sont elles qui sont affectées.
M. Vaugeois: On s'occupe des arrondissements historiques, des
arrondissements naturels, des sites historiques classés, des aires de
protection. C'est une obligation que l'Assemblée nationale m'a
donnée, Jupiter! C'est la Loi sur les biens culturels. On se donne les
moyens d'exécuter correctement un mandat que l'Assemblée
nationale a déjà donné. D'accord? On
l'améliore.
M. Ciaccia: Si vous...
M. Vaugeois: Sauf qu'on ne veut pas tout garder.
M. Ciaccia: Vous ne vous souciez pas des juridictions
municipales.
M. Vaugeois: On ne veut pas tout garder et on ne se pense pas
capable, non plus, d'obliger, à ce moment-ci, toutes les
municipalités à se doter d'un règlement. Cette suggestion,
je la ferais mienne; mais nous n'avons pas les moyens pour établir cette
politique à ce moment-ci. Il y a une minorité de
municipalités qui seraient prêtes à présenter leur
règlement. Comment voulez-vous obliger tout le monde à faire une
chose que tout le monde n'est pas capable de faire à brève
échéance. Que voulez-vous!
M. Ciaccia: Excusez-moi, si je comprends bien leur suggestion,
les municipalités qui ne peuvent pas le faire...
M. Vaugeois: Si vous voulez, je peux bien faire un amendement
à la loi et obliger la ville de Québec à présenter
ses projets.
M. Ciaccia: Non, non, les...
M. Vaugeois: Je peux le faire, si vous voulez.
M. Ciaccia: Si je comprends...
M. Vaugeois: On peut l'y obliger, si c'est ce que vous
voulez.
M. Ciaccia: Si je comprends bien...
M. Vaugeois: Elle n'a pas besoin d'y être obligée,
elle est prête à le faire.
M. Ciaccia: Si je comprends bien leur suggestion, s'il y a des
municipalités qui ne veulent pas prendre leurs responsabilités,
d'après leurs recommandations, vous pourriez agir. Mais, vous
laisseriez, au début, la responsabilité, la juridiction dans ces
matières à la municipalité. Ce sont des matières
qui tombent proprement sous la juridiction municipale.
M. Vaugeois: Expliquez-moi comment vous allez
protéger...
M. Ciaccia: De plus en plus, vous accaparez, vous centralisez au
Québec.
M. Vaugeois: En tout cas.
M. Ciaccia: Ce n'est pas seulement dans cette loi; regardez la
loi 44, on va en discuter tantôt. Dans toutes les autres lois...
M. Bertrand: À l'ordre! M. Guay: Hors d'ordre.
M. Alfred: Parlez donc du projet de loi 4.
M. Ciaccia: Vous donnez l'illusion de la consultation populaire
mais c'est vous qui allez prendre les décisions.
M. Vaugeois: M. le Président...
M. Ciaccia: C'est vous qui allez tout faire.
M. Vaugeois: ... est-ce que...
M. Ciaccia: On vous fait des suggestions pour éviter cela
si vous êtes sincères et on se fait hurler des
insultes.
M. Vaugeois: M. le député, est-ce que vous allez
rester pour les autres mémoires? Cela pourrait peut-être vous
éclairer.
M. Ciaccia: Oui, je vais rester, si cela vous fait plaisir.
Le Président (M. Jolivet): Votre droit de parole
étant maintenant écoulé. M. le député de
Vanier a demandé le droit de parole.
Mme Lavoie-Roux: II n'a pas eu ses 20 minutes, parce qu'il s'est
fait interrompre pendant au moins dix minutes, M. le Président.
Le Président: Je m'excuse, mais si vous regardez, j'ai
donné...
Mme Lavoie-Roux: Je n'exagère pas, au moins dix minutes,
n'est-ce pas?
M. Guay: Mme le député de L'Acadie, il a
commencé à 17 h20.
Mme Lavoie-Roux: Non, je regrette, il a commencé à
17 h 40.
Le Président (M. Jolivet): Non, à 17 h 30.
M. Ciaccia: Ce n'est pas grave!
Le Président (M. Jolivet): N'allez pas à
l'extrême, c'est à 17 h 30.
Mme Lavoie-Roux: Mais moi, je n'ai pas épuisé mon
temps, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): C'est vrai, vous avez
raison.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais poser une question pour essayer
d'éclairer cette affaire.
Le Président (M. Jolivet): Excusez, mais est-ce que le
député accepte, de la part de M. le député de
Vanier, une question?
M. Bertrand: Je voudrais demander au député de
Mont-Royal on va entrer bientôt à l'étude article
par article de ce projet de loi s'il est prêt à reprendre,
à son compte, la suggestion de la ville de Québec, la formuler
sous forme d'amendement et soutenir le point de vue selon lequel il faut
effectivement obliger les villes à procéder à l'adoption
de certains règlements et, par la suite, les soumettre au
ministère des Affaires culturelles?
M. Ciaccia: On verra dans l'étude du projet de loi. Je
trouve la recommandation très bonne pour la ville de Québec.
M. Bertrand: Vous seriez prêt à être plus
coercitif, en partant, que ne l'est le projet de loi actuel?
M. Ciaccia: Je crois que, s'il faut faire un choix entre enlever
des pouvoirs, en étant... Premièrement, ce n'est pas coercitif,
c'est une obligation qu'elles prennent. Il y a trois étapes dans leurs
recommandations...
M. Bertrand: Obligations qu'on leur ferait.
M. Ciaccia: Non, attendez, dans leurs recommandations, si vous
lisez bien, c'est un premier niveau incitatif, un deuxième coercitif et
un troisième correctif. Alors, cela ne commence pas avec la coercition,
cela commence avec une incitation mais ce sont leurs recommandations:
incitation, coercition...
M. Guay: M. le Président, en vertu de l'article 100.
Le Président (M. Jolivet): J'avais l'intention de donner,
avant la question posée, la parole à Mme le député
de L'Acadie; il lui restait encore sept minutes.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, à un moment
donné, on a interrompu M. Boutin, qui, sur certains principes de base,
était d'accord avec le projet de loi. Je ne voudrais pas qu'il revienne
là-dessus, mais il a dit: Nous pensons qu'il n'y a pas de
décentralisation pour telle ou telle raison, il n'y a pas une
véritable décentralisation pour telle ou telle raison. Est-ce que
vous pourriez nous indiquer ces raisons? Il y a des principes sur lesquels vous
êtes d'accord, vous les avez énoncés. Qu'est-ce qui,
à votre point de vue, ne représente pas une véritable
décentralisation, mais que vous interprétez comme plus de
pouvoirs remis entre les mains du ministre.
M. Boutin: Je ne reviens pas sur la nouvelle formulation de
l'article 48 qui, à mon avis, avec un vocabulaire beaucoup plus
étendu, augmente les pouvoirs du ministre. Pour ce qui est de l'aspect
selon lequel, à notre avis, il n'y a pas de décentralisation dans
le projet de loi, c'est que l'intention du ministre, c'est de faire des
municipalités les gardiennes du patrimoine, d'en faire les
gestionnaires quotidiens des biens culturels situés dans leur
territoire respectif. Or, si on prend le projet de loi dans sa forme actuelle
et s'il est adopté dans sa forme actuelle, il n'y a aucune espèce
de changement apporté à l'esprit de la Loi sur les biens
culturels.
Actuellement, à la ville de Québec, si on se
préoccupe de la protection du patrimoine, c'est volontairement. On
considère qu'à cause des immeubles et de l'arrondissement
historique qui sont situés dans notre territoire et à cause du
bien-être de nos citoyens, on doit protéger ce qu'on a.
Actuellement, la Loi sur les biens culturels donne cette obligation au
ministre. Si le ministre a l'intention ou le désir de
décentraliser vers les municipalités ce souci de
réglementer pour protéger le patrimoine il me semble logique que
cela devrait apparaître dans le projet de loi que les
municipalités, lorsqu'elles touchent des domaines qui sont susceptibles
d'atteindre la gestion des biens culturels, soit le zonage, le lotissement et
la construction, tiennent compte des objectifs énoncés dans la
loi. À ce moment on aurait probablement une décentralisation,
c'est-à-dire un objectif nouveau donné à des organismes
régionaux ou à des collectivités locales. Ce qui n'existe
pas dans le projet de loi no 4, tel qu'il existe présentement. En ce
sens, il y a peut-être une incitation dans la loi, bien qu'on ne trouve
pas le mot inciter" nulle part, mais dans ce sens, je ne pense pas qu'il y ait
effectivement décentralisation dans le projet de loi no 4. (18
heures)
Mme Lavoie-Roux: D'accord, je vous remercie.
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres
intervenants, s'il n'y a pas d'autres questions, je vous remercie d'être
venus.
M. le député de Vanier.
M. Bertrand: Est-ce que la ville de Québec sera de retour
ce soir à vingt heures ou si on considère que c'est
terminé?
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres
questions, je considère que c'est terminé. Il n'y a pas d'autres
intervenants?
M. Vaugeois: Je voudrais remercier M. Blanchet, qui était
là précédemment, l'avocat qui s'est exprimé, et le
directeur du service de l'urbanisme qui est présent. Je voudrais les
assurer, de toute façon, d'une étroite collaboration, quelle que
soit l'issue qui intervienne après l'étude de ce projet de loi.
La ville de Québec a la responsabilité d'une partie
extrêmement importante de notre héritage patrimonial. À cet
égard, c'est certainement un des premiers alliés du
ministère dans la poursuite générale des objectifs que
nous donne la Loi sur les biens culturels. J'espère que cette loi pourra
être adoptée de telle façon que nous pourrons intervenir
d'une façon peut-être plus intéressante pour les
municipalités que par le passé.
Le Président (M. Jolivet): Merci. Nous suspendons nos
travaux jusqu'à 20 heures ce soir pour les terminer ensuite à 24
heures.
(Suspension de la séance à 18 h 2)
(Reprise de la séance à 20 h 11)
Le Président (M. Jolivet): À l'ordre, madame et
messieurs!
M. Vaugeoi: Nous sommes cinq. Nous sommes corrects.
Le Président (M. Jolivet): La commission des affaires
culturelles est de nouveau réunie pour entendre des personnes qui
viennent faire des recommandations au ministre et à l'Assemblée
nationale sur le projet de loi no 4 qu'on étudie article par
article.
Ce soir, le premier groupe à se faire entendre est le Conseil des
monuments et sites. Je demande à la personne responsable du groupe de
s'identifier et d'identifier les deux autres personnes qui sont avec elle.
Conseil des monuments et sites
M. Robitaille (André): André Robitaille,
président du Conseil des monuments et sites, architecte-urbaniste.
André Sirois, vice-président du conseil, avocat, et Serge Viau,
architecte, trésorier du conseil qui a été responsable du
comité qui a étudié le projet de loi no 4.
M. Vaugeois: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. le ministre.
M. Vaugeois: Me permettriez-vous une mise au point en
débutant? Je ne sais pas ce qu'on fait dans ces cas-là, mais je
suis membre du Conseil des monuments et sites depuis la fondation de
l'organisme. Est-ce que je dois me retirer?
Mme Lavoie-Roux: Retirez-vous, oui. M. Bertrand: II y a
conflit d'intérêts. Mme Lavoie-Roux: II y a conflit
d'intérêts. M. Bertrand: Restez avec nous, M. le ministre.
M. Fontaine: Allez siéger...
Mme Lavoie-Roux: C'est là qu'on va pouvoir juger de votre
objectivité.
M. Vaugeois: Je vous autorise à parler en mon nom et je
parlerai moi-même en mon nom.
Le Président (M. Jolivet): Allez, M. Robitaille.
M. Robitaille: M. le Président, Madame, M. le ministre,
Messieurs les membres de la commission. Le présent mémoire
contient les commentaires et les recommandations du Conseil concernant le
projet de loi no 4 amendant la Loi sur les biens culturels. Le conseil s'est
réjoui de la pertinence des amendements proposés. Ils
améliorent considérablement la loi actuelle en la rendant plus
efficace tout en permettant une décentralisation susceptible de soulever
l'intérêt des administrations locales. Cependant, nous voulons
apporter quelques suggestions et recommandations de manière à
clarifier certains articles et certaines procédures. Par ailleurs, nos
commentaires les plus importants, ceux que nous considérons comme
recommandations formelles, visent à assurer davantage la participation
du citoyen à la protection de son patrimoine. C'est ainsi que nous
recommandons de rendre publiques certaines des activités de la
Commission des biens culturels et d'élargir le droit de poursuite contre
les contrevenants à tout citoyen ou tout groupe qui désire le
faire. Nous voulons, de plus, souligner l'importance de l'intervention de
l'État dans la protection du patrimoine qui doit continuer de veiller
à ce que les objectifs généraux soient
préservés et que les critères de conservation soient
maintenus et conservent un certain degré d'efficacité et
d'uniformité.
Nous croyons que la formule de participation municipale telle que
proposée dans le projet est de nature à assurer une telle
garantie en même temps qu'elle favorise la prise de conscience locale et
préserve son autonomie. Nous insistons aussi sur la pertinence de
certaines mesures du projet de loi qui visent à assurer un
caractère plus global à la protection du patrimoine en dirigeant
de façon plus coordonnée la subdivision des terrains et
l'utilisation du sol dans les arrondissements, les sites naturels, les sites
historiques et les aires de protection et en donnant la possibilité de
réglementer tous les aspects de l'aménagement de ces zones.
De manière à faciliter la lecture en conjonction avec le
projet de loi, nous faisons l'analyse article par article et nous n'avons,
évidemment, retenu que les articles sur lesquels portaient nos
commentaires. Plusieurs de ces commentaires étaient déjà
contenus dans le mémoire sur le livre vert que nous avons soumis et dont
nous annexons copie vous l'avez d'ailleurs. Le cas
échéant, il nous a semblé bon de les reprendre ici,
c'est-à-dire que certaines recommandations que nous faisions alors ont
été reprises dans le présent mémoire.
À l'article no 1 du projet de loi no 4, au paragraphe 7c qui
concerne la Commission des biens culturels, il y aura lieu de mieux
définir ce qu'est un intérêt personnel. Nous souhaiterions
que cet article s'applique même si cet intérêt personnel
peut survenir indirectement par l'intermédiaire du conjoint ou des
proches parents. Peut-être serait-il possible d'appliquer à ces
membres certaines des règles administratives régissant les
membres du gouvernement et les hauts fonc- tionnaires. D'autre part, toute
décision rendue par la commission lorsqu'un intérêt
personnel aura été en jeu devra être annulée.
Article 7e: Le souci d'efficacité constitue l'intention de base
de cet article et nous reconnaissons le bien-fondé de cette intention.
La formation de comités. Ceci est assez important. Cependant, le second
paragraphe soulève ce qui pourrait se révéler un
problème de cohésion au sein des membres de la commission. Ainsi,
après avoir conféré un certain nombre de pouvoirs et de
fonctions articles 31, 32, 35, 48 et 51 à la Commission
des biens culturels, le projet de loi les lui retire pour les confier à
un comité de trois personnes agissant en son nom. Qu'arrive-t-il si des
décisions de ce comité ne sont pas des décisions
majoritaires de la commission? Cela ne risque-t-il pas de
désintéresser les autres membres de la commission? D'autant plus
qu'il s'agit de fonctions importantes de la commission. Nous souhaiterions que
ce transfert de fonctions se fasse par une décision volontaire de la
commission, de manière à préserver son
intégrité. C'est la raison pour laquelle nous suggérons
que le texte de la première phrase de ce paragraphe se lise comme suit:
"Les fonctions attribuées à la commission par les articles 31,
32, 35, 48 et 51 peuvent être exercées, en son nom, par un
comité constitué de trois personnes désignées par
la commission. Ainsi, serait maintenu un certain lien de dépendance
entre le comité et la commission elle-même. De même, elle
pourrait avoir la liberté de varier la composition de ce comité
en fonction de la nature des problèmes à traiter ou même
selon les fonctions à remplir.
En somme, il s'agit de rendre concordant ce paragraphe de l'article 7e
avec le paragraphe B de l'article 7i. De même, il nous semblerait
indiqué que tout membre de la commission qui le désire puisse
participer aux travaux de ce comité.
Nous regrettons vivement que ce projet de loi ne prévoie aucune
ouverture quant à la possibilité pour le public en
général de faire des représentations publiques, tant
auprès de la commission que du ministre. Bien que, par essence, la
commission soit un organisme consultatif auprès du ministre, il y aura
lieu, à notre avis, de rendre plus transparentes les activités de
la commission. Elle devrait autant que possible, tenir des audiences publiques
avec ordre du jour publié à l'avance. Elle devrait aussi avoir la
possibilité de publier ses décisions et résolutions
autrement que dans son seul rapport annuel qui souvent est déposé
à l'Assemblée nationale longtemps après qu'une question
traitée a perdu de son acuité. Peut-être pourrions-nous
nous inspirer des règles qui régissent le comité
consultatif sur l'environnement. Nous croyons que, ce faisant, on assainirait
le débat au sujet de la commission, on impliquerait davantage celle-ci
et on lui permettrait de mieux saisir les problèmes par l'exercice de la
pression publique. Tout groupement de plus de cinq personnes devrait pouvoir
demander une audience publique et demander qu'on inscrive à l'ordre du
jour de ces audiences tout sujet qui les concerne.
Article 7k: Rapport annuel. Dans la même veine, souhaiterions-nous
de plus que les décisions, résolutions ou recommandations de la
commission soient nécessairement consignées au rapport annuel. On
évitera ainsi le danger que le rapport annuel ne contienne que des
énoncés généraux sur la protection du
patrimoine.
Article 2 du projet de loi en remplacement de l'article 14, publication
trimestrielle des classements. Nous ne pouvons saisir les raisons qui ont
milité en faveur de la publication annuelle plutôt que
trimestrielle de la liste des biens culturels reconnus et classés. Nous
restons convaincus que cette publication procéderait d'un souci
d'information du public et qu'une telle information doit être la plus
rapprochée possible dans le temps. En conséquence, nous demandons
de maintenir l'obligation actuelle de publication trimestrielle. En cela, nous
nous approchons de la demande de la ville de Québec.
Article 12 en remplacement de l'article 31: La formulation de cet aticle
nous paraît ambiguë. L'expression "à l'exclusion d'un site
historique " semble indiquer qu'un tel site est exclu des obligations de la
loi. Pour une plus grande clarté, il faudrait éliminer cette
expression du paragraphe et y ajouter, à la fin de celui-ci, la phrase
suivante: Toutefois, un site historique classé n'est pas régi par
cet article mais par la section IV de la loi". D'autre part, il est absolument
nécessaire de mettre en place un mécanisme pour empêcher et
contrôler ce qu'il est convenu d'appeler la démolition par
négligence, ou la démolition en vitesse, en fin de semaine. Sans
qu'il ne s'agisse d'une opération formelle et ponctuelle de
démolition, beaucoup de propriétaires, surtout après un
incendie, laissent aux intempéries et aux vandales la tâche de
démolition. Après un certain temps, la
détérioration devient telle que la seule solution possible reste
la démolition. Cette stratégie est très courante; il
n'existe aucun recours.
L'article 53e permet au lieutenant-gouverneur de réglementer ou
prohiber la démolition des biens historiques. Mais il faudrait que cette
notion de démolition par négligence soit spécifiquement
reconnue, de manière que soit permise toute action visant à la
protection des biens qui sont déclassés, délaissés
par leur propriétaire, volontairement ou involontairement.
Article 14 en remplacement de l'article 35: Pourquoi la
propriété publique n'est-elle pas mise sur le même pied que
toute propriété privée? Pourquoi faut-il demander le
consentement écrit du propriétaire de ces terres publiques
lorsqu'on veut faire des relevés archéologiques? Il nous semble
que ce qui est vrai et logique dans un cas l'est aussi dans l'autre.
Article 19. Cet article remplace l'article 48, concernant en
général la division de terrains. Les amendements proposés
sont excellents mais, ici aussi, notre commentaire sur la démolition par
négligence s'applique. En remplacement de l'article 49: Nous
apprécions grandement cette possibilité de confier aux
administrations municipales ou régionales la tâche de
l'administration de la loi, si elles le désirent. Cependant, nos
commentaires porteront sur deux points spécifiques: la formulation du
texte et les moyens de contrôle. Le premier paragraphe de l'article 49
modifié est rédigé de façon ambiguë, trop
synthétique pour qu'il ne soulève pas des problèmes graves
d'interprétation. Il faudrait d'abord dire que ces administrations, si
elles le désirent, "doivent" soumettre leur règlement à
l'approbation du ministre plutôt que peuvent ". D'autre part, la
possibilité de soumettre, après leur entrée en vigueur,
soulève des difficultés inhérentes aux procédures
actuelles d'amendement telles que prévues dans la Loi des cités
et villes et le Code municipal. Il serait beaucoup plus aisé de demander
qu'elles le soumettent avant leur entrée en vigueur; à ce moment,
elles ne seraient pas obligées d'amender leur règlement s'il
advient que le ministre demande des modifications ou des ajouts. Cela
éviterait aussi des situations conflictuelles.
Cette remarque est d'autant plus pertinente que toute opération
de zonage, lotissement ou construction effectuée depuis le 22 mars, qui
pourrait être couverte par la présente loi et qui n'a pas
été autorisée par le ministre, est rendue caduque par le
dépôt du projet de loi. Par ailleurs, toute municipalité
qui aura déjà adopté un tel règlement, avant
l'entrée en vigueur de la loi, le 22 mars 1978, pourrait avoir le droit
de soumettre ce règlement à l'approbation du ministre. Enfin, la
loi devrait obliger la municipalité qui n'a pas de règlement
approuvé par le ministre à indiquer, de façon très
visible et très claire, sur le permis émis par elle, que le
propriétaire doit aussi demander un permis du ministère dans les
cas de biens culturels classés, d'arrondissements historiques ou
naturels, de sites historiques classés ou d'aires de protection.
M. Viau (Serge): Par ailleurs, il est absolument indispensable
que ces modifications à la loi contiennent des droits de recours.
Premièrement, un droit de recours du ministre auprès d'une
municipalité qui ne respecterait pas tel règlement
approuvé par le ministre. Bien que les deux derniers paragraphes
impliquent le devoir d'une corporation municipale, d'une corporation de
comté ou d'une communauté urbaine ou régionale de
respecter tel règlement, il n'y est prévu aucune procédure
de sanction. Nous favoriserions la possibilité pour le ministre de
retirer à toute telle administration, dans le cas d'un manquement
et cela se voit parfois les pouvoirs délégués que
la loi leur a confiés.
Deuxièmement, un droit pour quiconque de contester pour
quiconque, nous disons bien auprès du ministre une
décision rendue ou un permis émis. À ce moment, le
ministre agirait comme un tribunal d'appel.
Troisièmement, un droit pour quiconque toujours de s'adresser
à la Cour supérieure pour faire respecter les dispositions de la
Loi des biens culturels. Le projet de loi ne donne ce droit qu'au ministre. Il
nous semble que, de plus en plus, les meilleurs gardiens de notre patrimoine
sont les
citoyens eux-mêmes. Il devrait donc être possible pour tous
ceux qui veulent que le patrimoine soit protégé, même pour
ceux qui n'ont pas d'intérêts personnels à la cause, de
réclamer que des actions soient entreprises contre les contrevenants.
Cette possibilité est déjà en vigueur dans plusieurs
États américains. Même ici, le ministre Léger songe
à une telle éventualité pour la Loi sur
l'environnement.
Je peux me permettre de lire un paragraphe d'un article du Devoir qui
dit: "C'est pourquoi M. Léger a annoncé que son ministère
a proposé un projet de réforme qui étendrait ce droit de
poursuite à tous les citoyens. Un tel droit de poursuite, même de
la part d'un citoyen qui ne peut pas mettre en preuve des dommages qu'il aurait
lui-même subis, serait nouveau au Canada, a reconnu M. Léger, mais
il existe déjà dans plusieurs États
américains."
La protection du patrimoine n'est-elle pas elle-même un secteur de
la protection de l'environnement et ne devrait-elle pas avoir les mêmes
prérogatives? Cette demande avait déjà été
faite dans notre précédent mémoire sur le livre vert, et
nous regrettons qu'il n'en ait pas été tenu compte, d'autant plus
qu'un autre ministère, pour des situations analogues, s'apprête
à proposer une telle procédure.
Article 20 du projet de loi no 4 en remplacement des articles 51 d) et
e): Nous apprécions grandement le fait que les contributions et les
subventions s'appliquent aussi aux bâtiments compris dans les aires de
protection, puisqu'ils subissent les mêmes contraintes. Ce n'est que
juste équilibre.
Article 21 du projet de loi no 4 en remplacement de l'article 53 e):
Nous voulons noter notre appréciation concernant le contenu de cet
article. Cependant, il y aurait lieu de vérifier la
constitutionnalité du pouvoir de prohiber, tel que donné par le
projet de loi. Ne s'agit-il pas là, en fait, d'un pouvoir
d'expropriation sans indemnisation? La jurisprudence est extrêmement
sévère à ce sujet, et nous nous demandons jusqu'où
un tel pouvoir de prohiber peut aller.
Article 23 du projet de loi no 4: Nous demandons que le droit de recours
devant la Cour supérieure c'est pour être
conséquents avec ce que nous avons déjà dit dans les
paragraphes précédents soit étendu à tout
citoyen et à tout groupe. Dans ce sens, nous demandons avec insistance
que cet article soit modifié pour inscrire que le recours peut
être exercé sur requête du ministre, ou de toute personne
physique ou morale. De plus, un pouvoir d'injonction et nous en faisons
une demande extrêmement importante devrait être
ajouté à cet article. Ainsi, la Cour supérieure pourrait
émettre une injonction pour ordonner la cessation ou suspendre tous
travaux faits présumément en contravention de la loi et des
règlements; ceci, dans le but d'éviter l'irréparable. On a
parlé tantôt de démolition rapide ou des choses comme
cela.
Article 25 du projet de loi no 4: II faudrait prévoir, si le
recours d'un individu est permis, que le contrevenant devra être en plus
condamné aux frais. Cette spécification aura pour effet
d'éviter que, par simple vengeance contre tel individu, les grandes
corporations ou autres personnes fortu-nuées n'entraînent, par
divers appels successifs ou des moyens visant à étirer les
débats, des frais exorbitants que le requérant ne pourrait pas
supporter, forçant ainsi l'abandon de la cause. (20 h 30)
Enfin, l'article 26 du projet de loi, élément 62, nous
souhaiterions, concernant le délai d'amortissement des enseignes, que ce
délai soit ramené à cinq ans. La période
d'amortissement de ces enseignes est de plus en plus courte, aujourd'hui, car
elles deviennent désuètes plus rapidement. On pourrait ainsi
obtenir une action d'embellissement un peu plus rapide.
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois: Je remercie les représentants du Conseil des
monuments et sites. Ils ont, je pense, fait un travail extrêmement
sérieux; ils ont lu la loi avec beaucoup de soin; ils ont su formuler
des recommandations extrêmement pertinentes. Je peux vous dire, de
façon générale que la plupart des recommandations que vous
formulez ont déjà inspiré certains amendements, ou ont
rejoint certains amendements que nous avions déjà
nous-mêmes apportés à notre projet de loi, ou encore
provoquent une étude qui est nécessaire avant que nous
introduisions vos recommandations dans un éventuel projet de loi.
Par exemple, sur le recours pour chaque individu, le ministre
Léger a, effectivement, semble-t-il, fait une déclaration
publique à ce sujet mais, pour notre part, nous préférons,
pour l'instant, évaluer la portée d'une telle recommandation. A
priori, nous la trouvons saine, nous la trouvons pertinente, mais nous voulons
être certains des implications que cela peut comporter. Des études
très précises se poursuivent à cet égard.
Il y a donc trois catégories de réactions: la
première, c'est que cela rejoint des amendements que nous apportions; la
deuxième, c'est que cela a provoqué des amendements auxquels nous
n'avions pas pensé; et la troisième, cela a provoqué des
études rigoureuses d'éléments nouveaux ou
d'éléments qui avaient déjà été
considérés, mais qui n'avaient pas été retenus. Il
reste peut-être un certain nombre de points sur lesquels il y a une
petite divergence, mais ils sont assez rares.
Étant donné les remarques du député de
Nicolet-Yamaska, aujourd'hui, je ne voudrais pas commencer à
énoncer, comme cela, les quelques amendements que je vais vous soumettre
tout à l'heure. Si la question vous intéresse au point de
souffrir un peu une participation à nos débats, vous verrez,
dès la fin des discussions que nous avons avec les représentants
de groupes, que le premier geste que je vais faire sera de déposer un
certain nombre d'amendements. Vous verrez qu'ils rejoignent plusieurs de vos
points de vue.
Je vais quand même vous en donner un avant-goût et vous
souligner que et c'est dans un article concernant la Commission des
biens cultu-
rels nous prévoyons, par la loi, la formation d'un
comité pour intervenir sur plusieurs choses; les articles 31, 32, 35, 48
à 51. Je pense que c'est une des remarques très importantes que
vous avez formulées. On a étudié ce point de vue et on
s'est rendu compte qu'effectivement il y avait peut-être
inconvénient à diriger autant de matières vers ce
comité qui n'est pas une émanation voulue, décidée
librement par la commission, mais imposée par la loi. Compte tenu de ce
point de vue, nous avons modifié le mandat de ce comité qui est
prévu dans la loi, pour ne lui laisser, comme matières
d'intervention, que des choses coutumières et quotidiennes qui sont
susceptibles de gruger le temps de la commission et l'empêcher de faire
les choses les plus essentielles qui lui conviennent.
Vous insistez aussi sur les représentations publiques. Je l'ai
souligné ce matin, cela a rejoint je vous le dis, non pas pour
vous enlever du mérite; mais que les bons esprits se rencontrent, cela
n'est pas un défaut un amendement qu'on ajoutait
déjà à l'article 7f, parce que, en plus de cela, cela se
fait souvent ou habituellement dans les comités consultatifs ou les
commissions à être crées.
Un certain nombre de choses que vous suggérez vont se retrouver
dans les règlements qui suivront le projet de loi. Vous regrettez que
nous renoncions à la publication trimestrielle pour se porter
plutôt vers la publication annuelle. Moi non plus je ne pourrais pas vous
expliquer très savamment les difficultés administratives que cela
pose; on me les a expliquées et je les ai acceptées. Je pense
plus important, finalement, d'y compenser par un certain nombre de
dispositions. Par exemple, nous allons avoir de l'information beaucoup plus
systématique sur tous nos avis d'intention, nos avis de reconnaissance,
nos avis de classement de façon très large. Nous pourrions,
d'ailleurs, mettre systématiquement sur nos listes d'envoi le Conseil
des monuments et sites. Autrement dit, plutôt que de publier cela dans la
Gazette officielle, ce qui risque d'échapper à l'attention, quand
même, finalement, de beaucoup de monde, on l'enverrait
systématiquement au greffier, au secrétaire-trésorier des
corporations. On le fait circuler beaucoup plus largement et en compensation,
si vous voulez, de ce délai annuel. Nous nous obligeons à une
publication annuelle très substantielle et très accessible, un
peu sur le modèle du cahier no. 10 des Cahiers du patrimoine de cette
année, mais améliorée encore. C'est-à-dire, en
intégrant, en étant plus à jour qu'on ne l'a
été cette fois-ci, cela va être facile, parce qu'on n'aura
pas besoin de recommencer toute la compilation et, également, on pourra
y inclure les biens de l'État qui seraient susceptibles d'être
classés, s'ils n'étaient pas biens de l'État.
Un point important que vous soulevez et qui est à l'étude,
c'est une notion assez nouvelle et qui est assez difficile à cerner dans
un projet de loi: c'est la démolition par négligence. Je pense
que déjà, le projet de loi tel que rédigé
nous permettrait éventuellement d'intervenir ou le per- mettrait
à des municipalités, mais cela n'est pas clairement
exprimé et vous avez raison de le souligner. C'est une
préoccupation normale que vous manifestez, mais on préfère
se donner un peu de temps avant de l'introduire dans le projet de loi pour
essayer d'évaluer, sous tous ses angles, la signification que cela
pourrait prendre. Sur l'article 14 qui réfère à l'article
35, nous vous donnerons satisfaction. Il y a le "avant" ou le "après";
c'est intéressant ce que vous dites. Le point de vue qu'on a eu
jusqu'à maintenant, c'est qu'on ne sait pas très bien dans quelle
mesure il n'y a pas un certain nombre de règlements qui existent
déjà dans certaines municipalités et qui pourraient nous
convenir assez bien. Ainsi, si cela a été préparé
avant et cela nous convient, pourquoi les obliger à retourner devant
leur conseil pour en discuter à nouveau etc.; c'est peut-être le
cas je ne sais pas, je ne suis pas un expert là-dedans du
règlement que la ville de Québec a passé concernant les
débits de boisson. Ce règlement existe, il existait avant la loi,
on pourrait peut-être le considérer. Je pense que là, on
est dans les subtilités et ce qui est important pour moi, avant ou
après, de toute façon, il y aura étude conjointe du projet
de réglementation et échange de points de vue. On se mettra
d'accord. Alors, que ce projet de règlement ait été mis au
point après la Loi 4, ou avant, cela ne m'importe peu. Peut-être,
qu'il y a des choses qui m'échappent il doit y en avoir beaucoup
mais en tout cas. sur ce point-là, je voudrais ménager, en
fait, la possibilité de considérer des réglementations qui
auraient déjà été mises au point et qui seraient
valables.
Par exemple, vous dites à la page 4: "Cette remarque est d'autant
plus pertinente que toute opération de zonage, de lotissement ou
construction effectuée depuis le 22 mars qui pourrait être
couverte par la présente loi et qui n'a pas été
autorisée par le ministre est rendue caduque par le dépôt
du projet de loi". Cela me paraît un peu ambigu. Il y a effectivement
dans un certain nombre d'articles du projet de loi des effets
rétroactifs, mais il me semble qu'on ne rend pas caduc,
nécessairement, tout ce que vous mentionnez. Mais, cela mérite
peut-être d'être évalué et reconnu.
Sur l'article 20 qui réfère à 51d et 51e, on a des
éléments nouveaux qui vont probablement vous faire plaisir, en
termes de liens hypothécaires en particulier. Sur la question du pouvoir
de prohiber, on m'avait déjà prévenu de la remarque que
vous alliez formuler. On me dit que pour que ce pouvoir soit réel, il
faut qu'il soit inscrit dans la loi. Ce que nous faisons. S'il n'était
inscrit spécifiquement dans la loi et que nous voulions y recourir,
là, il pourrait être contestable et on me réfère
à l'article 407 du Code civil. Mais là, vous me perdez. Au point
suivant, quant au pouvoir d'injonction, il semble qu'il n'est pas
nécessaire de l'inscrire dans la loi, que ce pouvoir, nous l'avons de
toute façon.
Le point suivant serait valable si nous pouvions retenir, dès
maintenant, le recours possible
pour un individu; comme nous ne pouvons le retenir maintenant non
pas que nous ne soyons pas d'accord avec votre recommandation, mais nous avons
l'obligation de l'évaluer ce sera pour une prochaine
étape. Alors, voilà, si vous voulez, quelques remarques
générales sur votre mémoire et si, encore une fois, vous
êtes des nôtres dans une heure, peut-être le temps de
discuter correctement avec vous et d'entendre la Fédération des
sociétés d'histoire j'aurai l'occasion de déposer
un certain nombre d'amendements qui, je crois et je ne blague pas, ce
n'est pas pour écourter la discussion vont rejoindre plusieurs
des points de vue que vous avez avancés dans votre mémoire ce qui
prouve, en tout cas puisque nous, on a consacré pas mal de temps
sur ce projet et qu'on l'a étudié avec soin que vous avez
fait un travail semblable de votre côté, ce dont je vous
félicite.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie. À moins, que vous ne vouliez ajouter quelque chose?
M. Robitaille: Oui, avant de continuer, je voudrais ajouter
quelque chose. Il y a deux articles principaux que nous trouvons primordiaux,
c'est d'abord la délégation de pouvoir aux municipalités
et, deuxièmement, la participation publique à la conservation des
biens culturels. Cet après-midi nous avons entendu les deux
extrêmes: les grandes et les petites municipalités. Cela biaise un
peu le problème, parce que beaucoup de municipalités ont des
arrondissements historiques et ne sont pas dans ces positions extrêmes.
Seulement, nous approuvons d'une manière générale
la législation qui est présentée ici,
c'est-à-dire, transférer aux municipalités des pouvoirs,
même ceux qui sont ajoutés actuellement, comme ceux concernant la
subdivision des terrains. Nous aprou-vons le fait que le ministre ait ces
pouvoirs et puisse les transmettre aux municipalités. Ce n'est,
peut-être, pas une décentralisation, mais c'est un effort pour
ramener au niveau des municipalités c'est-à-dire, plus
proche de l'individu les problèmes qui se posent et qui sont
réels à ce niveau.
Évidemment, en transférant aux municipalités de
tels pouvoirs, on a des avantages tels qu'une connaissance plus exacte des
problèmes de conservation et de mise en valeur, mais aussi les
inconvénients de régimes municipaux qui changent parfois
rapidement et les inconvénients également des influences indues
qui sont plus faciles à un niveau plus près de la
municipalité.
C'est pour cela que nous insistons sur le fait que si le gouvernement,
si le ministère délègue à des municipalités
ces pouvoirs, qu'il en garde le contrôle et la surveillance. Ceci peut se
faire de différentes manières qui ne sont pas prévues dans
le projet de loi actuel. Il pourrait l'être; peut-être cela peut-il
être fait par règlement. Nous aurions aimé que cela soit
fait dans la loi elle-même. Par exemple, obliger les municipalités
à avoir des commissions du patrimoine, avoir un représentant
permanent du ministère dans les municipalités, comme cela se fait
dans les professions libérales. Ce sont des moyens, il y en a d'autres,
pour arriver à ce que le pouvoir délégué à
une municipalité soit respecté, parce qu'il peut arriver qu'un
changement d'administration amène rapidement un abandon total des
politiques déjà acceptées par le ministère. Et si
le ministère n'a pas un contrôle complet sur les pouvoirs qu'il a
laissés, cela peut amener des catastrophes. L'autre point c'est la
démocratisation de la Commission des biens culturels...
M. Vaugeois: Est-ce que je peux vous interrompre?
Là-dessus le projet de loi ne vous donne pas d'inquiétude, par
exemple.
M. Robitaille: II nous donne une inquiétude dans le sens
qu'on a, un peu, l'impression que le ministère pourrait abandonner aux
municipalités ses pouvoirs et s'en débarrasser, si on veut, sans
tenir le bout de la corde continuellement. (20 h 45)
M. Vaugeois: M. le Président, M. le Président
puisqu'il y a deux présidents à ce sujet si on
regarde bien la loi, je pense qu'on sera d'accord pour reconnaître que,
si une municipalité faisait défaut d'appliquer ces
règlements, elle contreviendrait à la loi et, à ce moment,
les sanctions prévues dans la loi s'appliqueraient également pour
la municipalité. On ne peut pas aller plus loin que cela.
M. Robitaille: Mais la ville de Québec a proposé,
cet après-midi, un système compliqué du
lieutenant-gouverneur en conseil et...
M. Vaugeois: Oui, mais c'est parce qu'elle ne faisait pas
confiance au ministre des Affaires culturelles, ce en quoi elle a bien raison,
vous savez!
M. Bertrand: C'est son successeur qui l'inquiète.
M. Vaugeois: C'est qu'on ne sait pas qui va me
succéder.
M. Sirois (André): Si vous le permettez, M. le
Président, j'aurais aimé dire quelques mots à ce
sujet.
C'est qu'on se réjouit beaucoup de ce qui se trouve dans ce
projet de loi en ce moment. Cependant, cela ne nous apparaît pas
suffisant; l'idée de décentralisation ou qu'on l'appelle
comme on le voudra est une très bonne chose en soi. Par ailleurs,
cela peut ne pas être suffisant pour garantir la préservation de
biens culturels. L'idée de faire un transfert de responsabilités
administratives, d'un palier de gouvernement à un autre, peut être
très bonne. Par ailleurs, il faut voir qu'en ce moment, plusieurs
administrations locales n'ont pas les moyens et les effectifs permettant de le
faire; deuxièmement, elles n'ont pas toujours la volonté
politique de le faire on en voit des exemples tous les jours et,
troisièmement, l'adoption d'un règlement, au niveau local,
n'est
pas, à elle seule, une garantie de son application. C'est
pourquoi il nous semble très important d'encadrer cette action de deux
façons: avoir, d'un côté, le ministère des Affaires
culturelles qui garde la responsabilité de l'État dans la
préservation des biens culturels. Je crois qu'il faut être
très clair à ce sujet; à notre avis, il ne s'agit pas de
morceler ou de faire, de façon parcellaire, la préservation du
patrimoine collectif d'une part. D'autre part, nous nous demandons si
l'intervention de citoyens et de groupes parce qu'on n'a qu'à
référer à ce qu'on vit depuis plusieurs années, les
gens qui ont lutté pour le patrimoine du Québec, dans une grande
majorité des cas, ne font pas partie des administrations locales, ils
sont de groupements de préservation historique et des individus qui ont
fait une grande partie de la préservation historique, souvent à
leurs frais. C'est pourquoi nous avons demandé que ces gens, qui sont
dans les faits, les gardiens du patrimoine, aient le pouvoir d'intervenir au
niveau de l'application de la loi. Nous ne sommes pas les seuls à avoir
demandé cela, j'aimerais mentionner, simplement à titre
d'information, qu'il y a quelques jours, à l'assemblée annuelle
de la Société historique, quelqu'un ayant vu l'idée dans
notre mémoire a fait une proposition, pour nous appuyer, qui a
été adoptée à l'unanimité. Le Conseil de la
culture de la région de Québec a aussi repris la même
idée. Il est grand temps qu'on donne ce pouvoir aux gens qui, depuis
longtemps, luttent pour la préservation du patrimoine et qui doivent
limiter, restreindre leur lutte à des voeux pieux ou à des
récriminations.
Le simple fait d'avoir ce pouvoir dans la loi on a des exemples
de ce qui se fait à Seattle peut servir à dissuader
beaucoup de vandalisme, beaucoup de projets qui tiennent du vandalisme; c'est
pourquoi il est très important, à notre avis, de mettre ce
pouvoir dans la loi et de permettre une telle action éventuellement.
L'idée, encore une fois, ce n'est pas d'organiser des chasses
dans les rues, c'est simplement de dissuader et le pouvoir de dissuasion, dans
ce cas, peut être très grand.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
M. Vaugeois: Si vous permettez, M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui.
M. Vaugeois: Comme c'est dans le mémoire, j'avais
préparé une réponse à cela. Une fois qu'une entente
est arrêtée avec une municipalité, corporation municipale
ou autre et qu'on a approuvé un certain nombre de projets de
réglementation, cette municipalité ne peut se dégager de
ses responsabilités, vu l'article 19 du projet de loi, qui stipule en
amendement à l'article 49: "Aucun permis ne peut toutefois être
émis par une corporation municipale si cette opération n'est pas
conforme aux dispositions réglementaires approu- vées par le
ministre. Il est du devoir d'une corporation municipale... et là
je saute quelques mots de faire l'application sur son territoire des
dispositions réglementaires approuvées par le ministre ".
La corporation n'a donc pas d'alternative et elle doit appliquer cette
disposition réglementaire. Certes, il n'existe pas, dans le projet de
loi, de pénalité directe contre ladite corporation, mais il est
entendu que l'omission de la municipalité peut faire encourir contre
elle l'émission d'un bref de mandamus par le ministre. Donc intervention
du ministre si les conditions de l'approbation ministérielle ne sont pas
respectées, avec éventuellement, désapprobation, comme il
y a eu approbation, et application, après la désapprobation, du
pouvoir discrétionnaire qui est prévu à l'article 48, ou
adoption de règlements tel que prévu au deuxième
paragraphe de l'article 48 et l'application de l'article 57 où le
ministre conserve le pouvoir de faire prononcer la nullité de tout acte
juridique fait en contravention de l'article 49.
Évidemment, on pourrait en mettre encore plus, mais vraiment le
fait de déléguer à des municipalités un certain
nombre de responsabilités implique un minimum de confiance et je suis
obligé d'admettre, à mon corps défendant, que la loi ne
fait pas totalement confiance aux municipalités puisqu'elle
prévoit toutes sortes de mécanismes d'intervention, de
rapatriement du règlement, pénalités, sanctions, amendes,
etc. Même, cela me gêne de le dire, parce que ma démarche
est essentiellement fondée sur une confiance dans les corporations
municipales, mais les rédacteurs du projet de loi ont prévu,
également, que cette confiance pourrait ne pas être
méritée.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier et féliciter le
Conseil des monuments et sites du Québec pour son mémoire. Je
rejoins les commentaires du ministre à l'effet que vous avez
soigneusement étudié le projet de loi.
Je dois vous dire également que certaines de vos recommandations
rejoignent apparemment, on va peut-être finir par se rencontrer
celles du côté ministériel et celles de
l'Opposition, après nos divergences de cet après-midi... parce
qu'il y a certains amendements que nous devons proposer et cela va
peut-être rendre les choses plus rapides; on va peut-être
finalement se rencontrer. Par exemple, entre autres, votre désir que les
opérations de la commission soient plus transparentes et que les gens
puissent plus facilement y avoir recours, que des avis publics soient
donnés pour que vraiment ce ne soit pas une chose... Le grand public est
un peu ignorant de ce que fait présentement la Commission des biens
culturels. Dans ce sens, je pense qu'il y a lieu d'informer dans le sens
où vous le dites.
Vous faites aussi certaines remarques qui sont peut-être des
remarques de clarification, comme
par exemple l'article 12. Je ne sais pas ce que le ministre en fera
c'est peut-être un détail mais ne pas exclure les
sites historiques, mais plutôt dire qu'ils relèvent d'une autre
partie de la loi, je trouve que cela est intéressant pace que je l'avais
interprété comme vous l'avez fait. Je pense que, pour le commun
des mortels, c'est ce qui risque d'arriver.
Également, je suis d'accord avec vous quand vous dites qu'il faut
prendre toutes les mesures possibles pour éviter le vandalisme, pour
permettre que les organismes ou les groupes de citoyens qui, jusqu'à
maintenant, sont intéressés à la préservation du
patrimoine, aient facilement accès à la commission pour faire des
représentations, etc. Par contre, je sens peut-être moins le souci
aussi de préserver les droits du citoyen individuel qui lui, à
tort ou à raison, peut se sentir lésé dans toute cette
opération du patrimoine. Dans toute la loi on retrouve, à
l'article 45, dans la Loi des biens culturels, un seul article qui traite de
ceci. En tout cas à ma connaissance, à moins que le ministre
puisse m'en signaler d'autres.
M. Vaugeois: Signaler quoi?
Mme Lavoie-Roux: Les droits de recours de l'individu qui... Il
n'y en a pas.
M. Vaugeois: II y en a presque!
Mme Lavoie-Roux: On dit à l'article 43: "Toute personne
peut obtenir du ministre une indemnité pour les dommages qu'elle a subis
en raison de l'application des articles 41 et 42". Je retrouve cela là,
mais je pense que tous ici, j'ai l'impression, partagent un principe de base
qui est celui que toute cette action de concertation pour la
préservation du patrimoine et sa mise en valeur doit reposer sur ce que
le ministre a appelé, dans son discours de deuxième lecture, la
connivence de tout le monde. Cette connivence doit autant toucher ceux qui
s'intéressent à la préservation que ceux qui sont
touchés par cette préservation et qui, eux aussi, peuvent fort
bien s'intéresser à cette préservation mais à qui
on doit accorder les meilleures possibilités de recours et de protection
comme individus. Il m'apparaît que vous avez peut-être moins retenu
cet aspect; je pense que cela fait partie de cette grande concertation de tout
le monde et de cette collaboration qu'on veut s'assurer de tout le monde.
C'est pour cela que cela m'étonne peut-être, le voyant dans
cette perspective si j'interprète bien votre suggestion de
l'article 35 remplacé par l'article 13. Personnellement, je trouvais que
le fait de ne pas requérir le consentement écrit des individus
quand on procédait à des fouilles sur leur terrain... Vous
semblez vouloir aller même plus loin et dire qu'on ne devrait même
pas le requérir pour la propriété publique. Il se peut que
je vous interprète mal mais je serais allée dans le sens
opposé, c'est-à-dire la même mesure pour les deux mais dans
le sens d'obtenir le consentement de chacun, des deux personnes ou des deux
organismes concernés, dans un tel cas.
Évidemment, on pourrait faire un autre long débat. Je suis
quand même contente de l'admission, à son corps défendant,
du ministre qui vient d'avouer enfin, avouer, il ne faut quand
même pas amplifier les termes ce qui est demeuré un point
d'interrogation pour nous. C'est vrai qu'il y a, dans le projet de loi, un
désir de décentraliser, de donner plus de pouvoirs localement,
dans le sens d'intéresser plus de monde localement; cela, je pense que
c'est un bon principe. Mais cette délégation de pouvoirs qu'on
fait est tempérée par tellement de contraintes, par exemple, la
contrainte de soumettre les règlements et tous les autres points, que,
finalement, cela dilue le désir de décentralisation du ministre,
dans les faits. Mais peut-être que, comme mesure transitoire...
M. Alfred: ...
Mme Lavoie-Roux: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): J'ai compris.
Mme Lavoie-Roux: Bon, je ne pense pas, enfin, ce n'est pas
à moi de juger ce que je dis mais si vous avez une intervention valable
à faire, vous aurez le droit de la faire après. C'est difficile
de discuter sérieusement quand il y en a toujours un qui jappe ou qui
miaule. Je m'excuse de l'interruption, M. le Président.
Peut-être que, dans une période transitoire, c'est un
tremplin d'essai et voir quels seront les résultats, quitte,
ultérieurement... Moi, mon désir serait qu'on puisse amender la
loi et la rendre encore plus libérale. Les gens prendront leurs
responsabilités de mieux en mieux, dans ce domaine. Mises à part
les difficultés techniques que cela peut présenter et sur
lesquelles on reviendra au moment de la discussion article par article, je
pense qu'il faut peut-être ce que je considère dans une
période transitoire accepter qu'il y ait cette sorte de
demi-mesure entre ce qui pourrait être une plus grande
décentralisation et une centralisation encore plus grande de la part du
ministre qui, quand même il doit bien le reconnaître
se conserve quelques petits pouvoirs.
M. Vaugeois: Est-ce que je pourrais poser une question à
ce moment-ci à Mme le député?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Vaugeois: J'ai lu les journaux aujourd'hui et j'ai
été très frappé par un référendum qui
se tient en Californie actuellement. Je n'ai pas assez de renseignements pour
être certain du fond du problème mais je connais l'État de
la Californie comme un État qui est un des plus beaux exemples aux
États-Unis de richesse et d'étalement. La richesse a
été telle qu'il n'y a pas de ville avec une bonne densité.
Vous avez des villes d'une étendue invraisemblable, avec des charges
invraisemblables aussi. Il vient un moment où il n'y a plus moyen de
faire face aux charges que cela implique.
Je pense que les gouvernements se sont fiés, si vous voulez,
à l'espace, à la richesse, au faible
coût du carburant, etc., et ont négligé de
développer des villes bien ordonnées, de telle façon qu'un
bon jour, ils se retrouvent en face de leurs contribuables qui se
considèrent comme pris à la gorge et qui contestent la perception
faite par l'État, au point que si le référendum passe en
Californie, on se demande ce qui va arriver parce que 57% des revenus de
l'État de la Californie vont être perdus, suite à ce
référendum. Je pense que les gouvernements doivent assumer un
certain nombre de responsabilités, qui momentanément ont l'air de
limiter les droits individuels, qui tendent à protéger les droits
et les libertés d'une collectivité. (21 heures)
Là-dessus, on peut quand même tirer un certain nombre de
leçons de l'ordre qui a régné en Europe sur ce plan et par
des mesures qui sont plus rigoureuses que les nôtres. Ce qui, ici, peut
sembler s'éloigner d'une forme de libéralisme, en Hollande, par
exemple, deviendrait de l'anarchie. Dans des pays moins grands, avec des gens
dont les revenus ont été momentanément moins
élevés que les nôtres, on en a fait
bénéficier de ces difficultés par des interventions
gouvernementales plus appropriées.
Ici, il ne faudrait pas se conter d'histoires. L'espace n'est pas infini
et notre richesse n'est pas infinie. Je pense que les gouvernements ont la
responsabilité d'intervenir pour régler des développements
harmonieux, équilibrés, de l'occupation du territoire.
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec le ministre, mais je pense
qu'à ce moment-ci, il étend peut-être le débat
à tout le problème de réaménagement de territoire
et moins à la question des biens culturels. Là-dessus, je suis
pleinement d'accord et je pourrai peut-être même lui envoyer une
résolution que j'ai déjà fait passer, qui a
été envoyée au gouvernement du Québec à
plusieurs ministères et qui n'a jamais eu de suite, et qui, justement,
visait, compte tenu des ressources limitées, par exemple, du terrain
urbain, de tout ce qu'il y avait comme terrain disponible dans les mains du
secteur public ou parapublic à Montréal j'avais
parlé de Montréal et non pas de l'île, quoique cela aurait
pu s'étendre à l'île de Montréal à
prévoir des moyens de le conserver au secteur public, quitte à
modifier des vocations en cours de route. Ceci n'a pas encore été
repris; je vous enverrai cela, M. le ministre.
Sur ce point, je partage votre opinion, quant à cette
espèce...
M. Ciaccia: Me permettriez-vous une brève
interruption?
M. Vaugeois: Restez-en là, autant que possible, par
exemple.
Le Président (M. Jolivet): M. le député, je
ne voudrais pas que ce soit un moyen détourné pour prendre la
parole avant...
M. Ciaccia: Non, c'était seulement sur les propos que vous
avez soulevés, je voulais seulement vous demander ceci: Vous avez
soulevé un point assez important, et vous avez donné comme
exemple la Californie et l'étendue des terrains et du
développement. Vous preniez cela comme exemple pour justifier un peu
l'intervention de l'État et sa responsabilité.
M. Vaugeois: La responsabilité des gouvernements.
M. Ciaccia: La seule question que je voulais vous poser, pour
qu'on puisse tirer une conclusion sur vos remarques à l'effet que c'est
seulement parce qu'il n'y a pas eu un développement
contrôlé par l'État. Ne pensez-vous pas que, dans le cas de
la Californie, la raison de ce référendum et des revenus
attachés aux taxes foncières est que, premièrement, il y a
beaucoup de demandes faites par les individus pour des services quant aux
municipalités et quant à l'État, l'équivalent de la
province? Deuxièmement, parce que dans les revenus fonciers, non
seulement la municipalité, mais l'État aussi y participe. Ce
n'est pas seulement parce qu'il y a eu des développements
étendus, non contrôlés, mais c'est parce qu'il y a une
limite au nombre d'organismes gouvernementaux qui peuvent piger à
même ces taxes et il y a aussi une limite sur les genres de services,
parce que le standard de vie des individus en Californie et le nombre de
services qu'ils obtiennent de l'État sont considérables.
Mme Lavoie-Roux: C'étaient des commentaires
généraux que je voulais faire au conseil. Je ne sais pas s'ils
ont des réactions.
Le Président (M. Jolivet): C'est M. Sirois, je pense, qui
a réagi.
M. Sirois: J'aurais peut-être une remarque à faire,
madame, sur ce que vous venez de dire, au sujet du fait que les gens vont
prendre de mieux en mieux leurs responsabilités. C'est un fait,
j'espère bien. Cependant, on doit garder à l'esprit que la loi
des biens culturels, qui est une loi de préservation et de mise en
valeur, est faite pour mettre en valeur les biens culturels, mais aussi pour
les préserver et pour les préserver non pas contre vous et moi
qui n'allons pas ravager un quartier ou ravager des biens culturels, mais
contre des promoteurs, contre des gens qui vont menacer et qui seront,
espérons-le, de plus en plus minoritaires mais qui risquent toujours de
menacer notre patrimoine collectif.
Je crois qu'il faut mettre dans la loi, évidemment, les
sauvegardes, les protections qu'il faut pour préserver ce patrimoine et
on doit garder cela à l'esprit. Ce n'est pas simplement en se disant que
tout le monde devrait être beau et bon qu'on va faire une loi vraiment
efficace et correspondante à ces buts. Il faut aussi tenir compte du
fait que, malheureusement, il y a des gens et il y aura sans doute toujours des
gens qui ne partageront pas ces objectifs, qui auront d'autres
priorités
que ce bien collectif qu'on tente de défendre en ce moment.
Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec vous mais vous avez
montré ce souci par certains recours supplémentaires que vous
voulez donner, soit au gouvernement, soit aux organismes qui s'occupent de
préservation, aux groupes de citoyens, etc. Il y a aussi la
contrepartie; si vous voulez mettre tous les citoyens dans le coup, les gens se
sentiront, au plan individuel, ceux qui sont touchés parce que leur
maison est classée, reconnue, ou qu'elle se retrouve dans un
arrondissement historique ou autre... Que ceux-là aussi puissent, tout
autant, se faire entendre tant de la commission que d'autres types de recours
qui pourraient être prévus d'une façon plus
détaillée que ce ne l'est présentement dans la Loi sur les
biens culturels. Peut-être que par le truchement des règlements,
le gouvernement le fera.
Par exemple et je pense que le ministre lui-même l'avait
signalé à un moment donné, peut-être au moment de
l'étude des crédits du ministère des Affaires culturelles
je ne sais pas jusqu'à quel point on n'est pas encore à
l'époque où on signalait aux gens que leur maison était
classée, par une lettre du huissier, par une lettre absolument
autoritaire, si je ne m'abuse. Cela indispose les gens pour différentes
raisons et cela ne contribue pas, justement, à motiver et à
éduquer des gens dans ce sens positif.
Sur l'autre point je suis d'accord avec votre point de vue
il y a cette contrepartie dont il faut aussi tenir compte.
M. Vaugeois: Là-dessus, madame, nous allons être
tous les deux très heureux tout à l'heure parce que j'ai
gagné mon point.
Mme Lavoie-Roux: D'accord; d'après moi, on va pouvoir
adopter le projet à minuit, M. le ministre.
M. Vaugeois: ... contre la tradition, l'habitude et un point de
vue juridique qui m'a été présenté, qui m'a
été représenté, qui a été
défendu et qui a dû, finalement, retraiter.
Une voix: ...
M. Vaugeois: Vous verrez cela tout à l'heure, M. le
député.
M. Bertrand: Ce que la politique peut faire quand elle a de la
volonté.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: M. le Président, je voudrais en
commençant féliciter les représentants qui nous ont
présenté ce mémoire. Comme le ministre l'a dit tout
à l'heure, je pense que vous avez fait un excellent travail de recherche
et les recommandations que vous faites sur plusieurs articles vont
sûrement être retenues par la commission. Vous avez touché
plusieurs bons points. Il y en a un sur lequel je voudrais insister en tout
premier lieu, c'est celui où vous demandez que le recours soit
étendu aux citoyens, c'est-à-dire que tout citoyen puisse exercer
un recours pour faire appliquer la loi. J'aimerais que vous développiez
un peu plus cet élément et que vous donniez les raisons pour
lesquelles vous voudriez voir adopter cette situation. Il me semble, à
première vue, que cela pourrait permettre un nombre assez
considérable de poursuites, peut-être même des tracasseries
et des acharnements contre des citoyens, d'un citoyen à un autre. Je
pense qu'il y aurait lieu, avant d'adopter une telle mesure, de se pencher plus
longuement sur ce problème. Est-ce que vous avez des
réactions?
M. Sirois: Est-ce que vous voulez que je réponde à
cela immédiatement?
M. Fontaine: Oui, s'il vous plaît.
M. Sirois: Je comprends vos préoccupations. Je voudrais
simplement vous dire que ce droit existe en Angleterre depuis 300 ans
déjà. Il existe aux États-Unis, dans la plupart des
États américains, depuis fort longtemps, dans bien des cas. Ici,
cela n'existe pas; cela n'existe pas, en grande partie, parce qu'un juge a
pensé comme vous en 1920, en 1922 peut-être, et il a
répondu que si on permettait ce recours, les cours seraient
inondées...
M. Fontaine: Peut-il y avoir une question de privilège
ici, M. le Président?
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vous ferai remarquer
qu'on travaille quand même ici à la conservation du...
M. Bertrand: Du patrimoine.
Mme Lavoie-Roux: ... Du patrimoine et il y en a qui
méritent d'être conservés.
M. Vaugeois: Oui.
Le Président (M. Jolivet): Revenons au vif du sujet.
M. Sirois: Donc, ce juge en question...
Mme Lavoie-Roux: II y en a qui ont renié leur patrimoine
évidemment, comme le député de Vanier.
M. Fontaine: Cela a été repensé depuis
plusieurs années, bien après 1920.
M. Sirois: Donc, ce juge, en 1920, a craint que les cours soient
inondées de poursuites. Or, on peut voir en Angleterre que ce n'est pas
ce qui se produit, aux États-Unis non plus. Il y a un avocat qui
s'occupe de questions de patrimoine, à Otta-
wa, qui s'appelle Marc Denhez, qui travaille pour Héritage Canada
et qui a préparé un volumineux dossier là-dessus pour
montrer que c'était, non seulement souhaitable, mais essentiel si on
veut faire vraiment de la préservation de patrimoine.
L'une des raisons pour lesquelles cela nous semble important, c'est que
la connivence dont M. Vaugeois a parlé peut se faire dans deux sens,
cela peut se faire dans un bon sens et dans un mauvais sens. Il peut arriver
et nous l'avons vécu déjà que cette
connivence se fasse entre le ministère des Affaires culturelles et
certaines administrations municipales, pour ne pas agir. Qu'est-ce qui se
passe, à ce moment, au niveau de préservation de patrimoine?
Rien, si vous n'avez pas une tierce partie, si vous n'avez pas un groupement,
si vous n'avez pas un individu qui, devant certains abus flagrants, a le
pouvoir d'agir. Pour ce qui est des querelles personnelles que vous craignez,
il y a un recours qu'on utilise en "common law" qui s'appelle abus de droit,
c'est-à-dire que si on poursuit sans raison, on peut être
poursuivi, en retour, pour abus de droit. Cela se fait, il y a une cause encore
récente, exactement de ce type d'ailleurs, en Ontario. C'est peu
utilisé ici, mais enfin c'est le recours qui existe.
Je veux revenir à ce que j'ai dit plus tôt. Il faut bien
voir que ce n'est pas le bâton que l'on va utiliser tous les jours, qu'on
ne doit pas avoir à utiliser ce bâton; c'est simplement un moyen
de dissuasion, cela existe ailleurs. Je reviens encore à Seattle, parce
qu'à Seattle, on a un moyen comme celui-là. Quand j'étais
là-bas, on venait d'adopter un tel moyen, au niveau municipal, et j'ai
fait part aux gens que je voyais et qui étaient responsables de cela des
craintes qu'on avait ici, au niveau municipal, et qu'on pouvait avoir les
craintes que vous exprimez. J'ai demandé: Enfin, qu'est-ce qui se passe?
Est-ce que la population prend bien cela? Est-ce qu'il n'y a pas des gens qui
craignent ou qui s'offusquent? On m'a répondu tout simplement: On ne le
sait pas, parce que, depuis que c'est dans la loi, on n'a pas eu besoin
d'utiliser ce pouvoir; personne n'a eu à s'en servir étant
donné que le moyen de dissuasion était assez fort qu'on s'en est
tenu au respect de la loi, de façon générale; en tout cas,
il n'y a pas eu d'abus assez flagrant pour qu'on soit obligé
d'intervenir. Je pense que c'est ainsi qu'il faut voir ce moyen, vous
l'utilisez dans un cas exceptionnel. Les pouvoirs que l'on met dans les lois ne
sont pas tous utilisés tous les jours, bien entendu; heureusement,
autrement on jetterait tout le monde en prison, c'est certain.
M. Fontaine: Je suis d'accord, mais on fait actuellement
l'expérience avec la loi de l'environnement. C'est vous-même qui y
avez fait allusion. Je pense qu'on voit actuellement qu'il y a beaucoup de
plaintes qui sont portées. On peut prendre l'exemple des agriculteurs
contre les gens de la ville qui vont s'installer à la campagne je
pense même que le ministre y a fait allusion aujourd'hui et qui
vont formuler une plainte au ministère de l'environnement parce que le
cultiva- teur voisin a un tas de fumier à l'extérieur. Si on se
réfère à cet exemple, à venir jusqu'à ce
jour, je ne trouve pas que c'est une expérience tellement concluante au
Québec.
M. Sirois: Bien sûr, tout cela s'ajoute à de
l'éducation populaire, à de l'information qui se fait au niveau
de la loi, enfin, encore une fois, il ne s'agit pas de demander d'inclure ce
pouvoir afin de permettre des vendettas personnelles ou de permettre à
des gens de faire la police dans leur quartier ou dans leur village. C'est tout
simplement qu'il est nécessaire que ces pouvoirs soient dans la loi le
cas échéant et cela doit être mis maintenant, si on est
prêt à amender la loi.
Je vous réfère encore une fois au dossier
préparé par Marc Denhez, si ces sujets vous intéressent,
parce qu'il a fait une recherche très volumineuse, très
concluante et très convaincante à ce sujet. (21 h 15)
M. Fontaine: D'accord, j'essaierai d'y jeter un coup d'oeil. Je
voudrais revenir sur la question de la propriété privée et
de la propriété publique. Mme le député de L'Acadie
y est revenue tout à l'heure mais nous n'avons pas eu de réponse.
Je ne sais pas si son interprétation était juste mais il me
semble, également, que vous suggérez, tant pour la
propriété publique que pour la propriété
privée, qu'on n'ait pas besoin d'obtenir de permission pour faire des
fouilles, des relevés archéologiques. Est-ce que vous
recommandez?
M. Sirois: Voudrais-tu répondre, s'il te plaît?
M. Viau: C'est exactement ce qu'on dit. Le projet de loi
prévoit que pour effectuer des relevés sur la
propriété privée, on n'a pas besoin de demander
l'autorisation du propriétaire pour des relevés, pas des
fouilles alors qu'on a besoin de la demander dans le cas d'une
propriété publique. On se posait tout simplement la question:
Pourquoi ce qui est valable pour la propriété privée ne le
serait pas pour la propriété publique? C'est une
propriété publique. C'est l'ambiguïté qui
subsistait.
M. Vaugeois: M. le Président, on va revenir
là-dessus, je ne veux pas dévoiler mon amendement.
Mme Lavoie-Roux: ... ce matin.
M. Vaugeois: J'ai une nouvelle rédaction qui va clarifier
ce point.
M. Viau: D'accord.
M. Fontaine: Un dernier point que je voudrais souligner, c'est
peut-être à connotation personnelle pour mon comté. Vous
parlez de détérioration par suite d'intempéries. Je
voudrais souligner au ministre que si la recommandation qu'on nous fait
était adoptée, on pourrait peut-être poursuivre le ministre
des Affaires...
M. Vaugeois: De la Justice.
M. Fontaine: Non, non. Le ministre des Affaires culturelles, le
ministre de la Justice et le ministre des Travaux publics concernant le Petit
séminaire de Nicolet qui est en train de se
détériorer.
M. Vaugeois: Le ministre de la Justice.
M. Fontaine: Les trois sont impliqués dans le dossier, je
pense.
M. Vaugeois: Le ministre des Affaires culturelles n'est pas
concerné.
M. Fontaine: Vous n'êtes pas concerné et vous
êtes allé à Nicolet la semaine passée pour faire des
déclarations là-dessus?
M. Vaugeois: Je m'intéresse un peu à tout le
patrimoine mais...
Mme Lavoie-Roux: II n'a fait que regarder.
M. Sirois: Donc, pas de poursuites. Le ministre pourrait
intervenir.
M. Viau: Si vous me permettez, M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. Viau.
M. Viau: ... je voudrais qu'on revienne à cette notion de
démolition par négligence, on est passé vite tout à
l'heure. Je pense qu'il s'agit d'un véritable fléau, si on
regarde le Vieux Québec ou même certaines parties du Vieux
Montréal. On n'a pas de moyens efficaces pour se préserver de ce
fléau. Il y a énormément d'édifices qui tombent en
ruine par suite du délaissement de la part de leur propriétaire
et on ne sait pas comment intervenir pour obliger le propriétaire
à barricader ou à protéger son toit, ou à
reconstruire un toit temporaire de manière que l'hiver ou le gel ne
détruisent pas la structure intérieure ou les murs de
maçonnerie, en attendant que les problèmes de succession,
d'assurance ou de quoi que ce soit se règlent. Cela peut être
très long, bien sûr. Il faut admettre ce délai mais il faut
aussi se donner les moyens, dès un incendie c'est surtout le cas
des incendies qui est assez grave pour obliger le propriétaire
à barricader et à protéger sa structure. On aurait ainsi
pu éviter de nombreuses démolition de bâtiments qui sont
extrêmement valables pour le patrimoine.
Ce qu'on voulait dire, c'est que dans le projet de loi, on devrait
éclaircir un peu la notion de démolition par négligence
et, peut-être, ouvrir la porte à une réglementation un peu
plus spécifique qui obligerait les propriétaires à
protéger leurs bâtiments incendiés ou leurs ruines.
M. Fontaine: M. le Président, si je peux ajouter quelque
chose, je pense qu'on a du chemin à faire avant de demander à des
propriétaires privés de protéger leurs
propriétés classées. Quand on voit un cas comme celui du
Petit séminaire de
Nicolet où il y a eu un feu il y a quatre ans et il n'y a pas de
toit encore sur cet immeuble et c'est un immeuble qui appartient au
gouvernement, je pense qu'on est loin d'arriver aux solutions proposées
ici.
Le Président (M. Jolivet): Le député de
Vanier.
M. Bertrand: M. Viau parlait justement de ces maisons
incendiées dans le Vieux Québec. Je veux simplement faire
remarquer qu'on a commencé à bouger un peu de ce
côté, effectivement, par l'octroi d'une subvention de l'ordre de
$1 million pris à même les fonds de la Société
Auto-Parc, si ma mémoire est bonne, pour permettre justement de pallier
cette négligence qui a occasionné un certain nombre de
problèmes dans le Vieux Québec particulièrement. J'aurais
tout simplement une question à vous poser pour libérer mon esprit
inquiet des propos tenus par le député de Mont-Royal.
M. Vaugeois: Ne recommence pas la chicane.
M. Ciaccia: ... demandait une question, je n'ai pas entendu.
M. Bertrand: Remarquez le ton sur lequel je le fais, c'est
dénué de toute partisanerie...
Mme Lavoie-Roux: On veut avoir la suite, allez-y!
M. Bertrand: Vous verrez cela à la fin, Madame.
M. Ciaccia: J'ai des difficultés à croire cela,
mais...
M. Bertrand: ... non, tout simplement parce que j'ai eu une
discussion fort intéressante après le témoignage que nous
ont apporté les représentants de la ville de Québec, cet
après-midi. On discutait de cette notion de décentralisation.
Vous allez me dire que je tombe un peu dans un débat théorique,
mais puisque ces notions sont dans l'air, aussi bien en parler, et dans le cas
présent avec cette loi sur les biens culturels. La ville de
Québec indiquait dans son mémoire, à toutes fins
pratiques, que ce que le gouvernement atteignait comme but ultime,
c'était davantage de centralisation. On enlevait certains pouvoirs aux
municipalités, on les obligeait jusqu'à un certain point à
se soumettre à des réglementations qui étaient
décidées par le ministre des Affaires culturelles, etc. Et vous,
dans votre mémoire, vous avez un ton tout à fait contraire
à cela. Je lis deux phrases en particulier; en introduction, vous dites:
"Nous croyons que la formule de participation municipale telle que
proposée dans le projet est de nature à assurer une telle
garantie, celle de l'efficacité, de l'uniformité etc.. en
même temps qu'elle favorise la prise de conscience locale et
préserve son autonomie ". Plus loin, parlant de l'article 49, enfin,
l'article 19 du nouveau projet de loi, mais référant
à l'article 49 de l'autre projet, vous dites: "Nous apprécions
grandement cette possibilité de confier aux administrations municipales
ou régionales la tâche de l'administration de la loi si elles le
désirent". Même vous nous demandez, jusqu'à un certain
point, s'il ne serait pas possible d'aller beaucoup plus loin dans je ne
dirai pas, enfin, disons-le comme cela, mais en comprenant ce que cela veut
dire dans le jargon qui nous caractérise le contrôle du
ministère sur les projets de réglementation des
municipalités. Je voudrais comprendre, savoir pourquoi vous avez
interprété le projet de loi no 4 comme étant respectueux
de la juridiction municipale, comme n'empêchant pas les
municipalités de préparer leur projet de réglementation
comme elles le conçoivent et au fond, l'intervention du ministère
comme n'étant pas une intervention qui a pour but de brimer l'exercice
des responsabilités municipales, mais uniquement de permettre au
gouvernement, par la voie de son ministère des Affaires culturelles de
s'assurer que la Loi sur les biens culturels, elle, est respectée.
Est-ce que vous pourriez un peu expliquer la façon dont vous avez
perçu l'intervention du ministère là-dedans et le respect
de la juridiction municipale?
M. Robitaille: Quand j'ai écouté l'intervention de
la ville de Québec à ce sujet, je n'ai réellement pas
compris ce qu'elle voulait dire. Que les maires de l'île d'Orléans
viennent dire la même chose, on peut voir les raisons, mais que la ville
de Québec amène un argument semblable, cela ne tient pas debout.
En réalité, les pouvoirs... Mettons de côté les
nouveaux pouvoirs que le ministre se donne, pouvoirs de contrôle sur le
lotissement, mais le reste, cela existe déjà, ce sont les
pouvoirs du ministre et le ministre, dans la pratique, délaisse ces
pouvoirs et les passe à la municipalité, évidemment en
gardant le contrôle final s'il y a abandon du pouvoir, mais quand
même, c'est une délégation totale de pouvoirs aux
municipalités. Personnellement, je le vis à la ville de Sillery
où je m'occupe de la commission d'urbanisme. Notre plan de zonage est en
voie d'être réalisé et la collaboration des employés
du patrimoine est excellente et cela a aidé énormément la
ville. On se prépare à prendre ces pouvoirs et à
suggérer une réglementation au ministère et c'est la ville
qui va l'administrer. C'est une chose qui enfin devient normale. Il me semble
qu'on ne peut pas faire mieux que cette chose-là, que le
ministère, s'il voit que les municipalités sont capables de
prendre leurs responsabilités, leur transmette les pouvoirs et qu'elles
les exercent. Je ne vois pas comment la ville de Québec peut comprendre
qu'on lui ôte des pouvoirs.
Évidemment, ces pouvoirs de lotissement, d'abord, il ne reste pas
beaucoup de terrains libres dans la ville de Québec et
deuxièmement, cela ne concerne pas tellement en dehors de
l'arrondissement historique, sauf pour les zones de protection mais, dans le
Vieux Québec, cela n'existe pas. Alors, je ne vois pas ce que la ville
de Québec perd finalement avec ce projet de loi.
M. Viau: Moi, je pense que ce qui est important de voir
là-dedans, bien sûr, il y a une espèce d'accaparement de
pouvoirs quand on parle du lotissement ou du pouvoir de prohiber un certain
nombre d'usages ou le lotissement comme tel, mais il faut aussi le voir dans
une perspective globale d'aménagement. Les expériences qui ont
été vécues jusqu'à ce jour sont un petit peu
boiteuses parce que, effectivement, quand on fait un plan de sauvegarde d'un
territoire historique, de sauvegarde du patrimoine, ce n'est pas simplement un
plan de préservation des façades historiques, c'est aussi un plan
d'aménagement qui renferme tous les aspects de l'aménagement.
Il est nécessaire, quand on prépare ce plan, que les
pouvoirs qui sont conséquents à tous les aspects de
l'aménagement existent. Je pense que, ce faisant, le ministère,
à la fois se donne les pouvoirs de réglementer globalement tous
les aspects de l'aménagement d'un territoire historique et, en
même temps, cède ces pouvoirs ou les pouvoirs d'administration de
ces règlements à la municipalité. C'est une façon
de procéder que j'estime très logique et aussi très
intéressante pour les municipalités.
Il faut dire aussi que, d'une part, il y a des objectifs nationaux qu'il
faut préserver dans la protection du patrimoine que les administrations
locales n'ont pas toujours à vue et qu'il est du devoir du
ministère de préserver et, d'autre part, que certaines
municipalités ce ne sont pas toutes les villes de Québec
n'ont pas toujours tous les moyens financiers et les moyens en
ressources humaines nécessaires pour s'occuper, de façon
parfaitement autonome, de ce problème.
Donc, je pense que ce que nous voulons dire ici, c'est que c'est une
espèce de compréhension globale du problème et une
façon de préparer un plan d'aménagement ou un plan de
préservation historique que je trouve extrêmement
intéressante.
M. Bertrand: Une dernière question, M. le
Président, excusez-moi. Cet après-midi, lors de la
présentation du mémoire de la ville de Québec
sentez-vous bien à l'aise, je ne fais pas mon intervention pour demander
de juger le mémoire de la ville de Québec mais surtout pour
m'éclairer quant à ses concepts celle-ci a fait valoir que
non seulement la loi no 4 mais aussi la loi initiée par l'ancien
gouvernement en 1972, la loi no 2, si ma mémoire est bonne, ne
définissait pas de façon très explicite les objectifs qui
devaient être poursuivis par une loi sur les biens culturels. Le ministre
faisait même référence à l'article 30 qui
était on ne peut plus vague sur la question. Est-ce que la Commission
des sites et monuments historiques, là-dessus, a quelque chose à
reprocher à la loi en termes de définition des objectifs qui
devraient être ceux auxquels se sentiraient liées les
administrations municipales dans la préparation de leur projet de
réglementation? Est-ce que vous avez le sentiment que la loi est muette
à ce sujet ou si vous avez le sentiment qu'à l'heure actuelle les
expertises qui existent dans le domaine du patrimoine sont suffisamment larges,
suffi-
samment étendues pour que les administrations municipales sachent
à quoi elles doivent se référer quand vient le temps de
décider, par exemple pour des sites historiques, des arrondissements
historiques et autres, du genre de réglementation à
établir? Ou bien si vous avez le sentiment que le pouvoir d'intervention
du ministère est un pouvoir qui serait exercé de façon un
peu discrétionnaire en l'absence de définitions précises
d'objectifs?
M. Robitaille: Je crois que les objectifs que le ministère
pourrait émettre actuellement sont une chose réellement
difficile, bien que le Québec soit quand même, de toutes les
provinces du Canada ou même de l'Amérique du Nord, la province qui
a eu une loi du patrimoine importante dès 1925. Notre expérience
n'est pas très considérable dans le domaine de la mise en valeur
et de la protection du patrimoine, si on veut comparer à l'Angleterre ou
à la France qui ont une longue tradition, où les objectifs de
préservation sont établis et surtout, où il y a un
brassage des idées contemporaines qui se fait continuellement. Nous, on
est un peu loin malheureusement de ces mouvements d'idées, et nos
objectifs, nous sommes obligés de les remettre à jour très
rapidement nous-mêmes, comme les gens du ministère aussi,
conjointement. (21 h 30)
Ce n'est pas une chose facile à éclaircir à savoir
pourquoi on doit conserver telle bâtisse, quels critères on doit
adopter. On n'a pas de critère. Certains pays ont des critères de
classement, nous, on ne les a pas encore. Cela se comprend; on n'a pas
réussi à se définir totalement encore dans le domaine de
la préservation et surtout de la mise en valeur. C'est pour cela qu'on
n'a pas insisté sur cet aspect, dire aux municipalités: Vous
allez faire telle ou telle chose, préserver telle bâtisse
plutôt que telle autre. C'est qu'en fait, il serait
prématuré d'essayer d'établir des politiques globales de
préservation actuellement.
M. Sirois: L'énoncé politique dont vous parlez n'a
peut-être pas sa place dans une loi non plus. C'est quelque chose qui est
souhaitable, mais cela ne devrait pas nous handicaper ou nous empêcher de
faire quoi que ce soit pour préserver le patrimoine, tant que
l'énoncé de politique idéale n'a pas été
trouvé.
Vous avez parlé de la ville de Québec; je pense qu'on doit
voir aussi que la ville de Québec, comme d'autres municipalités
sans doute, se découvre subitement, ou presque subitement, une
volonté politique très forte de préserver le patrimoine,
si j'en juge par le mémoire qui a été lu cet
après-midi. Je pense qu'il faut regarder également ce qui a
été fait véritablement et ce qui a été
défait véritablement depuis de nombreuses années à
Québec, pour bien juger du mémoire qui vous a été
lu cet après-midi. Il y a sans doute d'autres municipalités qui,
aussi, pourraient venir dire qu'elles ont une volonté politique
très forte, aujourd'hui, de défendre ce patrimoine. Est-ce que ce
sera la même chose demain? C'est une autre chose. C'est pourquoi il est
essentiel que le gouvernement du Québec ait une volonté
nationale, exprime une volonté politique nationale de défendre un
patrimoine national, pour rejoindre ce que Serge Viau disait tout à
l'heure.
M. Vaugeois: Oui, je peux répondre à cela.
Le Président (M. Jolivet): C'est que le
député de Mont-Royal m'avait demandé la parole.
M. Vaugeois: Ce ne sera pas long. Le Président (M.
Jolivet): D'accord.
M. Vaugeois: Le nouveau projet de loi incite ou suggère en
tout cas à l'article 53 c'est-à-dire 21 pour 53 que
nous établissions un certain nombre de règlements, entre autres
pour les aires de protection. Cela va être l'occasion, pour la
première fois, d'essayer de formuler, d'articuler nos critères.
On a vécu, ces dernières années, des expériences
concrètes à l'intérieur des aires de protection, alors
qu'on a eu à accorder des permis, à en refuser ou à
intervenir pour faire modifier certains plans. On a dégagé, entre
autres, des préoccupations de perspectives visuelles. On est conscient
qu'une maison qui est derrière un gratte-ciel et qui est
séparée du bien classé par le gratte-ciel ne doit pas
faire l'objet de la même sorte d'intervention qu'une maison qui serait
dans une perspective visuelle importante, etc. Alors, on a
dégagé, à l'expérience, un certain nombre de
critères. On sent un peu mieux les préoccupations, on n'est pas
loin d'articuler les objectifs, et je pense que dans l'effort que nous nous
imposons, par la loi, de réglementer et de se donner des critères
pour le ministère et aussi pour le gouvernement cela sera
peut-être la première tentative concrète, pour nous,
d'annoncer ou de décrire des objectifs.
Je reviens à une question que le député de L'Acadie
m'a posée, sur un ton un peu sarcasti-que, je l'ai
interprétée comme cela, peut-être n'était-ce pas le
cas...
Mme Lavoie-Roux: Je vous le dirai.
M. Vaugeois: Oui. Vous avez référé au livre
blanc en disant: Est-ce qu'on va trouver cela dans le livre blanc?
Mme Lavoie-Roux: Elle était semi-sérieuse,
semi-sarcastique.
M. Bertrand: Equilibrée comme toujours!
M. Vaugeois: J'y ai repensé en soupant et, effectivement,
je ne peux que vous inviter à lire attentivement le livre blanc comme un
document assez neutre, un document des Québécois pour les
Québécois.
En le repassant dans mon esprit, je me rends compte que, dans la
première partie du livre blanc parce que j'y ai
référé pour répondre au chapitre sur le patrimoine
si on veut bien relire
la première partie du livre blanc, en particulier les trois
premiers chapitres, on va y trouver une espèce de réflexion
générale et généreuse sur la société
québécoise. Je pense que c'est là qu'on va trouver ce qui
fonde notre préoccupation commune de protéger et de mettre en
valeur l'héritage québécois.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Mont-Royal.
M. Ciaccia: Merci, M. le Président. Moi aussi, je voudrais
féliciter nos invités pour le mémoire qu'ils nous ont
présenté.
Je voudrais vous poser une question, concernant la déclaration,
par exemple, du gouvernement concernant la désignation d'un site
historique. Premièrement, je veux vous dire que, de ce
côté-ci de la table, nous sommes autant concernés par la
protection et la préservation du patrimoine, même si nous
différons d'opinion sur les modalités. Quant à la
désignation, je ne discute pas du tout le droit, et même, je
devrais dire que le gouvernement a plus que le droit de le faire, il a la
responsabilité de le faire. Cependant, de la façon que la loi est
rédigée présentement, si, par exemple, un site est
désigné comme site historique, cela veut dire que l'aire de
protection est de 500 pieds autour de ce site. La question que je me pose, pour
rejoindre la protection des droits individuels, est celle-ci: Croyez-vous que
le projet de loi devrait prévoir une certaine protection, une certaine
compensation, ou certains droits pour ceux qui seront affectés par cette
aire de protection?
Premièrement, pensez-vous que c'est nécessaire de garder
l'aire de protection à 500 pieds? Je peux vous donner des exemples comme
le boulevard Dorchester ou la rue Sherbrooke où vous avez un grand
boulevard et, vraiment, un côté de la rue n'a rien à voir
avec l'autre; c'est un endroit totalement à part du site historique,
mais les 500 pieds vont affecter le Northern Electric Building, face à
la propriété des Soeurs Grises. Ce n'est pas vraiment cela la
protection du patrimoine, mais vous affectez les droits du propriétaire
de l'autre côté de la rue, qui, vraiment, n'a rien à
voir.
Je voudrais avoir votre réaction, premièrement, sur la
question des 500 pieds, à savoir si c'est nécessaire, ou bien si
chaque site devrait être jugé par lui-même.
Deuxièmement, s'il y a d'autres propriétaires qui sont
affectés, le projet de loi ne devrait-il pas prévoir quelques
mesures ou quelques droits pour eux? Je le répète, et je veux que
cela soit clairement compris sans affecter le droit du gouvernement de
désigner un site; il doit avoir tous les droits que ce projet de loi lui
donne de le déclarer site historique que faites-vous des droits
des autres propriétairs?
M. Robitaille: Voulez-vous, nous allons répondre, d'abord
comme architectes, et ensuite comme légistes, parce qu'il y a deux
aspects à cette question? D'abord, on pense que la zone de protection
est essentielle à la mise en valeur d'un bâtiment ancien et de
valeur. La question des 500 pieds, c'est un chiffre qui a été mis
là il y a quelques années, et qui devrait être
détaillé à présent, parce que, d'un
côté, le champ de visibilité d'un édifice peut
être de 500 pieds, de l'autre côté, il peut être de 20
pieds, et en arrière de 800 pieds. En fait, c'est une étude de la
visibilité sur un édifice qui est importante et ces 500 pieds
sont le symbole d'une protection qui devrait être plus nuancée. Si
on n'a pas cette zone de protection, l'édifice peut être
complètement saboté, détruit par un environnement
immédiat qui coupe la vue, ou même pire, qui le détruit
physiquement ou par ambiance.
M. Ciaccia: Tout en acceptant le principe d'une aire de
protection, croyez-vous qu'elle devrait être fixée à 500
pieds ou si la loi devrait prévoir que chaque site soit
déterminé selon ses propres mérites?
M. Robitaille: C'est cela, oui. Chaque édifice devrait
avoir son aire de protection propre, différente de celle du voisin,
parce qu'il n'y a pas deux environnements qui soient semblables pour deux
édifices donnés.
M. Viau: Nous avions déjà fait cette
recommandation, d'ailleurs, dans le précédent mémoire sur
le livre vert.
Mme Lavoie-Roux: Malheureusement, le ministère des
Affaires culturelles n'a jamais voulu nous remettre vos mémoires.
M. Viau: Nous nous ferons un plaisir de vous en faire parvenir
une copie.
M. Robitaille: On pourra vous en faire parvenir.
Mme Lavoie-Roux: Merci, on l'apprécierait beaucoup.
M. Viau: Pour répondre à l'autre question
concernant la compensation, je pense que le projet de loi prévoit cette
chose. Je ne veux pas commenter le projet de loi comme tel mais nous avons
nous-mêmes fait cette observation, à la page 7 de notre
mémoire, où à l'article 51, d) et e) il est prévu
dans le projet de loi de: "accorder des subventions dans le but de conserver et
de mettre en valeur des biens culturels ou des biens situés dans un
arrondissement historique ou naturel, dans un site historique classé ou
une aire de protection." Ce qui veut dire, à ce moment-là, que
les bâtiments qui se retrouvent qui ne sont pas
nécessairement historiques eux-mêmes dans une aire de
protection auraient les mêmes privilèges que les bâtiments
classés. C'est à cet article que nous disions que ce
n'était que juste équilibre.
M. Ciaccia: Cet article donne seulement le droit au gouvernement
de contribuer, il ne crée
pas un droit pour celui qui est touché de demander cette
contribution. Ne trouvez-vous pas que... Faisant partie du conseil des sites
historiques et des monuments nationaux, je comprends votre préoccupation
qui est la préservation. C'est votre priorité. Vous n'avez pas la
même priorité que la ville de Québec qui a peut-être
d'autres intérêts en plus de la préservation des sites.
Quand on parle des droits individuels, les droits de l'un cessent quand les
droits de l'autre commencent. Ne trouvez-vous pas que ce projet de loi ignore
totalement les droits individuels des gens concernés?
Le fait de dire, à l'article 51, que la commission peut
contribuer à l'entretien, etc. ne donne pas de droit, à celui qui
est concerné. Même plus que cela, cet après-midi, j'ai
posé une question quant à l'enregistrement du site historique et
l'enregistrement des propriétés dans l'aire de 500 pieds. Tout le
monde s'est empressé de dire que c'est inscrit au bureau
d'enregistrement. Ce ne l'est pas. Si un site est déclaré
historique, l'aire de 500 pieds, quelquefois le propriétaire n'en est
pas avisé et celui qui acquiert une propriété sise dans
les 500 pieds n'est pas informé non plus, au bureau d'enregistrement,
que c'est une servitude. Le ministre pourra répondre mais je voudrais
avoir les commentaires de nos invités sur les droits de ces individus
qui sont touchés. Ils ne contestent pas le droit de faire
déclarer un site historique mais quels sont leurs droits?
M. Sirois: Je pense que vous soulevez un problème
intéressant. Il y a probablement enfin, le ministre pourra
compléter si mes informations sont insuffisantes moyen
d'articuler davantage cet aspect. Le problème est double,
c'est-à-dire que c'est certain que les gens qui se trouvent dans une
aire de protection ne devraient pas être lésés de certains
droits parce qu'ils sont dans une aire de protection d'un bien culturel, d'une
part. D'autre part, il est certain aussi qu'il ne faudrait pas créer une
mentalité telle que chaque personne qui se trouve dans une aire de
protection, subitement, vienne décrocher le gros lot si vous me
permettez l'expression et tout de suite passe à la caisse pour
réclamer de l'argent.
Il y a des mécanismes qui se développent ailleurs, aux
États-Unis et un peu au Canada anglais, qu'on a intérêt
à examiner ici, je pense bien. Je ne pourrais pas vous apporter une
réponse plus précise ce soir parce que, comme André l'a
mentionné, on est à des étapes préliminaires au
niveau de la préservation. On a encore beaucoup de choses à
apprendre; il faut aller ailleurs chercher des expériences
intéressantes. Je pourrais vous donner quelques références
comme cela, à vue de nez, sur le type de solutions qui a
été envisagé aux États-Unis mais je ne pense pas
qu'on puisse... en tout cas, je me sentirais incapable de trancher cela ou de
vous donner une réponse claire et nette, ce soir.
Encore une fois, je pense que c'est important d'insister
là-dessus, tout en respectant, tout en faisant bien attention de
respecter les droits des individus, droits auxquels Mme Lavoie-Roux fai- sait
allusion. Il est essentiel aussi d'éviter de créer une
mentalité où on attacherait strictement une valeur
matérielle à du patrimoine et que dès qu'on aurait une
vieille pierre dans sa cour, on passerait à la caisse aux Affaires
culturelles. (21 h 45)
M. Ciaccia: Non, ce n'est ni mon intention d'aller à cette
extrémité et de dire que si quelqu'un est affecté, il va
frapper, comme vous le dites si bien, le "jackpot", ni d'aller à l'autre
extrême où il n'y a aucun recours. Je crois qu'il devrait y avoir
un juste milieu. Pour répondre au problème que le
député de Vanier a soulevé, je vais vous donner un exemple
concret où, si les propositions de la ville de Québec
étaient adoptées dans le contexte de réglementations
sujettes à un désaveu par le lieutenant-gouverneur en conseil,
peut-être que l'exemple que je vais vous donner n'aurait pas causé
autant de problèmes. Il y a quelques années, sur la rue
Sherbrooke, il y avait un édifice du Collège de Montréal
qui avait été déclaré site historique; de l'autre
côté de la rue, c'était une série de maisons
d'appartements, il y en avait plus hautes que d'autres, mais elles
étaient toutes affectées. Le propriétaire de l'une de ces
maisons d'appartements qui, à l'origine, voulait démolir pour
construire en hauteur, n'a pas pu le faire. Ensuite, il voulait seulement
rénover et faire d'autres améliorations...
M. Sirois: Vous parlez du Haddon Hall?
M. Ciaccia: À côté du Haddon Hall, le
Somerset Apartments, je pense. En tout cas, dans ce cas précis, je pense
que les objectifs municipaux dont la ville de Québec parlait
étaient de ne pas laisser cet édifice dans un état de
semi-démolition à l'intérieur, pendant plusieurs
années. La ville n'en retirait pas de bénéfices; ce
n'était pas une attraction pour ceux qui pasaient là ou qui
vivaient dans le voisinage. Si la ville avait eu le droit de procéder,
par ses réglementations, sujettes à un désaveu,
connaissant les besoins de ce quartier, elle aurait pu émettre un permis
pour faire certaines rénovations afin de permettre d'utiliser la
propriété à d'autres fins, tout en respectant le
caractère de l'endroit. Ce que je crains du projet de loi, c'est qu'on
va donner ce pouvoir au ministère et, ce n'est pas une critique de ce
ministère, mais, en général, quand vous centralisez ces
décisions, les gens, au bureau central, ne connaissent pas vraiment
autant les besoins locaux. Alors, tout en protégeant le site historique,
un des édifices du Collège de Montréal, on aurait bien pu
donner le pouvoir d'émettre un permis et les décisions, sujettes
à un désaveu du lieutenant-gouverneur, à la ville et cela
aurait peut-être évité beaucoup de problèmes pour la
ville et pour le propriétaire de cet édifice. Peut-être cet
exemple pourrait-il illustrer ce que la ville de Québec veut dire par
ses recommandations et les difficultés qui peuvent survenir en donnant
tous les pouvoirs discrétionnaires, toutes les décisions,
l'application et même la rédaction des décisions sur ces
règlements, cas par cas, au ministère. Est-ce que je pourrais
avoir vos...
M. Sirois: II ne m'appartient peut-être pas de
défendre le projet de loi à la place du ministre, mais je vous
dirai tout simplement que, à la lecture du projet de loi no 4, je crois
que le problème que vous soulevez est résolu par ce qu'on trouve
dans le projet de loi, tel qu'il est en ce moment. Je vous dis cela tout
simplement, j'imagine que...
Mme Lavoie-Roux: II ne l'est pas pour l'aire de protection.
M. Bertrand: Sauf pour l'aire de protection, M. le
député de Mont-Royal. J'ajouterai qu'il me semble avoir entendu
le ministre dire, cet après-midi, que lorsque son ministère
dont ce sera la responsabilité devra accepter les projets
de réglementation qui seront présentés par les
municipalités, il aura à coeur si ma mémoire est
bonne de demander que ce pouvoir soit détaché de certains
ministères qui ont un mot à dire sur l'acceptation de tels
projets, parce que, justement comme vous le soulignez, il ne faut pas avoir une
loi des biens culturels qui soit "bébête" et qui dise uniquement:
500 pieds, et, après cela, tu ne peux rien faire, tu ne peux pas
aménager le territoire ou de dire: Voilà un site historique
à préserver; parce qu'il y a un site historique à
préserver, on va donc laisser tomber, laisser de côté
toutes sortes de services qui doivent être offerts à la
population. On ne tiendra pas compte des besoins en termes d'environnement, on
ne tiendra pas compte du transport en commun, etc.; mais si les gens
dont cela sera la responsabilité qui doivent accepter ces projets
de réglementation sont des gens qui proviennent de différents
ministères qui sont concernés par un tel type
d'aménagement, je pense que, là, vous venez d'enlever à la
loi le caractère un petit peu "bébête" qu'elle pourrait
avoir, si c'était uniquement l'aspect culturel qui ressortait au moment
où l'on doit accepter un projet de réglementation. Mais vous ne
pouvez pas nier que le ministère des Affaires culturelles, dont c'est la
responsabilité de voir que cette loi soit respectée, doit bien
à un moment donné amener la municipalité, d'une
façon ou d'une autre, à tenir compte des impératifs de la
loi.
M. Ciaccia: Non, je ne nie pas cela, mais c'est
l'inégalité...
Mme Lavoie-Roux: C'est bien beau, M. le député de
Vanier, mais l'aire de protection est restée telle quelle dans la loi.
Ce sont les inquiétudes du député de Mont-Royal...
M. Bertrand: Je le disais au député de Mont-Royal,
indépendamment de ce problème de l'aire de protection, je serais
bien prêt à discuter avec vous. Vous parliez en deuxième
lieu de toute la question des incidences...
M. Ciaccia: Bien oui, c'était relié principalement
à l'aire de protection.
M. Vaugeois: On va revenir là-dessus tout à
l'heure. Ils en viennent aux articles.
M. Ciaccia: II n'y a aucune amélioration quant à
l'aire de protection. Vous avez toute la discrétion...
M. Vaugeois: Je vous promets beaucoup de points qui vont
vous...
Mme Lavoie-Roux: ... d'assouplissement...
M. Vaugeois: Non, M. le député vous allez voir,
vous allez être ravis.
M. Ciaccia: Dans ces endroits, est-ce qu'il y a un autre
problème qui peut survenir?
Mme Lavoie-Roux: ... nous en sommes ravis.
M. Ciaccia: Quand il y a un site historique un lieu
déclaré site historique et que l'aire de 500 pieds autour
est vraiment gelée, les gens ne savent pas les droits qu'ils ont. C'est
assujetti à la discrétion du ministre. Est-ce que cela
n'amoindrit pas cet environnement autour de ce site?
Il me semble que s'il y a une réglementation et que les gens
savent ce qu'ils peuvent faire, qu'ils connaissent leurs droits, qu'ils savent
jusqu'à quel point ils peuvent entreprendre des améliorations, de
la rénovation ou l'utilisation de leur propriété, il y
aurait de l'activité dans ces endroits. Autrement, est-ce que cela ne
risque pas de détériorer les environs de ces sites historiques?
Il y a des districts qui ont subi des détériorations. Les gens
partent, ils ne font pas d'amélioration. Vous ne pensez pas que si le
projet de loi était plus définitif, quant aux droits qu'il
accorderait au propriétaire dans ces environnements, cela pourrait aider
à maintenir ces endroits?
M. Viau: Je pense que le projet de loi prévoit la
possibilité de traiter, si vous voulez, les gens qui résident
dans les aires de protection, de la même façon que ceux qui sont
propriétaires de bâtiments historiques. Bien sûr, j'ai
hâte, avec vous, de voir la réglementation qui va être
conséquente au projet de loi pour, peut-être, discuter de ce
problème. Effectivement, c'est un problème de
réglementation: comment les subventions seraient accordées,
comment les aires de protection seraient décidées, comment elles
seraient réglementées, etc. Cela fait partie de la
réglementation qui devrait venir subséquemment au projet de loi.
Mais, le projet de loi dans notre esprit, en tout cas, tel que nous l'avons
compris, ramenait un juste équilibre, en ce sens qu'il accordait les
mêmes privilèges aux bâtiments contenus dans les aires de
protection qu'aux bâtiments historiques eux-mêmes.
Le Président (M. Jolivet): M. le député
de...
M. Vaugeois:... je peux me permettre de vous dire que vous avez
fort bien compris, et, en fait,
avec les amendements qu'on apporte, qui sont de l'esprit du projet de
loi, la section IV s'élargit et comprend, dorénavant, les
arrondissements historiques, les arrondissements naturels soit dit en
passant, il n'y a pas de sites naturels les sites historiques
classés et aires de protection. Si vous allez à l'article 53e, on
retrouve le point suivant: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut, sur la
recommandation du ministre qui prend l'avis de la Commission, faire des
règlements pour..." et là, vous avez le genre de règlement
qu'on peut faire, et c'est clairement dit "les aires de protection". C'est
clairement dit à l'article 53e.
Le Président (M. Jolivet): ... rapidement.
M. Ciaccia: Juste une autre brève question. Quand vous
avez parlé des compensations aux individus, que penseriez-vous d'une
inclusion dans le projet de loi pour la protection de l'aire de 500 pieds, qui
prévoirait que ceux qui sont affectés aient droit à une
compensation ou aient droit, s'ils ne peuvent pas utiliser, faire de leur
propriété ce qu'ils auraient pu faire avant que le site en
question soit déclaré historique?... Autrement dit, j'ai une
propriété sise dans les 500 pieds; avant que le site soit
déclaré historique, j'avais le droit de faire certaines
améliorations, certaines rénovations; vous m'avez enlevé
certains droits en déclarant le site historique. Il ne faut pas que je
frappe le gros lot, comme vous dites, mais il ne faut pas que j'aie moins de
droits qu'avant. Vous avez référé à certaines
formules, est-ce que c'est une des formules qui peuvent être
prévues?
M. Viau: Je vois, par exemple, le projet de protection des biens
culturels exactement comme n'importe quelle autre forme de zonage municipal.
Vous devriez avoir exactement la même préoccupation quand une
municipalité décide de zoner son territoire et de limiter les
usages à certaines zones; elle fait exactement ce que vous reprochez,
c'est-à-dire qu'elle diminue ou elle élargit un certain nombre de
droits individuels. Si on décide qu'une propriété est
zonée résidentielle...
M. Ciaccia: II n'y a pas de "spot zoning" et elle respecte les
droits acquis.
M. Viau: Non, je veux dire que même dans un
découpage municipal, un zonage normal, la Loi des cités et villes
ou le Code municipal accorde aux municipalités... Celles-ci ont
exactement ce pouvoir de réglementer les droits privés, d'une
certaine façon; en zonant une propriété "habitation"
plutôt que "commerce", elles limitent l'usage de certains droits
privés et, en réglementant les types de clôtures, la
grandeur de la maison, etc., elles le font de la même façon.
M. Ciaccia: Elles limitent mais elles n'enlèvent pas.
M. Vaugeois: M. le Président, vous allez me permettre
d'ajouter une chose. Je suis sensible au point de vue du député.
On réfléchit là-dessus et je pense qu'on va en venir
à un certain nombre de mesures de compensation. Mais déjà,
l'expérience nous démontre que les interventions du
ministère ou des municipalités qui s'associent à nous pour
ces aires de protection en particulier ne font pas qu'embêter les
propriétaires, elles leur rendent aussi des services. Ce n'est pas la
place ici, mais je pourrais vous faire témoigner des
propriétaires d'immeubles dans des aires de protection qui se
félicitent des avis qu'ils ont reçus des experts du
ministère. Les experts du ministère les ont empêchés
de faire des erreurs, purement et simplement, dans la restauration et la
réparation de leurs maisons.
Les exigences qu'on a ne sont pas sur une base d'emmerdements
généralisés; c'est dans l'esprit de ménager la
qualité du milieu. Le fait de se trouver dans une aire de protection
offre un certain nombre de garanties. Je suis dans une aire de protection
à Trois-Rivières et j'aurais aimé que cette aire de
protection soit établie il y a quinze ans parce que mon deuxième
voisin a restauré sa maison de façon complètement idiote.
S'il y avait eu...
M. Ciaccia: ... Son goût à lui ou son goût
à vous?
Mme Lavoie-Roux: Votre voisin de droite ou votre voisin de
gauche?
M. Vaugeois: II est mort. Il est décédé.
M. Ciaccia: Vous allez imposer vos goûts!
M. Vaugeois: Mais j'aurais bien aimé que l'aire de
protection soit délimitée...
Mme Lavoie-Roux: ...
M. Vaugeois: Écoutez, je vous invite à la maison,
vous viendrez voir cela, c'est regrettable. Cela gâche tout
l'environnement du manoir de Niverville et cela gâche l'allure de la rue
Bonaventure qui est une très belle rue. Ce propriétaire, croyant
bien faire, a mis une brique qui n'est pas belle, a mis du fer forgé qui
n'est pas beau, etc., alors que si je voulais faire la même erreur, je ne
pourrais pas.
M. Ciaccia: Est-ce que le goût de la brique sera
mentionné dans le livre blanc?
M. Vaugeois: M. le député, je vous fais assez
confiance...
M. Ciaccia: Les opinions, les couleurs et tout cela?
M. Vaugeois: Non. Je vous fais assez confiance pour que vous
puissiez apprécier ces choses, vous aussi, et vous êtes le
bienvenu à Trois-Rivières.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
M. Ciaccia: Non mais, vous me dites de quelle couleur doit
être la brique sur ma maison... (22 heures)
M. Sirois: J'aurais un début de réponse pour
monsieur, si vous le permettez?
Le Président (M. Jolivet): Oui, M. Sirois.
M. Sirois: J'ai un début de réponse, je dis bien.
Il faut faire la différence, tout de suite, dans le cas de l'aire de
protection et c'est la même chose pour le zonage entre un
projet qui est déjà précisé, qui est
déjà déterminé et pour lequel le
propriétaire a déjà fait des démarches et un projet
qui serait strictement aléatoire. Il pourrait très bien arriver
qu'on décrète une aire de protection et que, du jour au
lendemain, un propriétaire d'une maison de deux étages vienne
vous apprendre qu'il avait projeté, depuis déjà
très longtemps, de construire un 20 étages qui lui aurait
rapporté beaucoup d'argent. À ce moment, on s'expose à
cela effectivement. Alors, je pense bien que le barème auquel on doit
référer, c'est le même barème que dans le cas de
zonage, c'est-à-dire que si la demande de permis a été
faite ou si le propriétaire peut établir qu'il avait
effectivement un projet d'engagé concrètement, peut-être
pourrait-il avoir droit à une certaine forme de dédommagement.
C'est peut-être à envisager.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Papineau.
M. Alfred: Je ne serai pas long. Je vous remercie du
mémoire que vous nous avez présenté. Je vous assure que je
me sens maintenant prêt à étudier, article par article, le
projet de loi, parce que j'y vois plus clair et que vous m'éclairez
davantage.
Dans le mémoire que vous nous avez présenté vous
avez, bien sûr, fait état des trois objectifs: objectifs
nationaux, objectifs municipaux, dont on a parlé tout à l'heure
avec la ville de Québec, et on a fait mention également de
l'objectif individuel.
Bien sûr, nous devons tenir compte de tout cela. Quand le projet
de loi a été présenté, on a vu par exemple que
certains ont découvert tout de suite une nouvelle vocation. On avait vu
la même chose, lors d'un autre projet de loi, que les courtiers
d'assurance s'étaient découvert une vocation d'informateurs, ce
qu'on n'avait pas vu avant, mais passons... De même qu'on en voit
d'autres qui se découvrent tout de suite protecteurs du patrimoine;
c'est encore vrai aussi. Mais si, par exemple, on se rend compte le
passé est là que l'objectif national entre en conflit avec
les objectifs municipaux et les intérêts individuels, nous pensons
si on doit être juste envers l'objectif municipal et envers
l'intérêt individuel qu'il n'en est pas moins vrai que
celui qui a la responsabilité première et totale, c'est
l'État, l'objectif national. Si l'État n'intervient pas et laisse
faire le gâchis, on viendra par la suite dire: Vous n'avez rien fait.
D'où, avec beaucoup de souplesse, nous pensons et là je
vous rejoins que, tout en préservant les intérêts
individuels, nous devons prendre en main l'objectif national. Bien sûr,
pour des raisons, peut-être inavouées, on peut s'éterniser
sur des objectifs municipaux, sur des intérêts individuels, mais,
au fond, quand on lit le projet de loi à tête reposée, on
se rend compte qu'effectivement l'argumentation qui s'est passée
là. c'est ce que nous voulons faire.
Cependant, j'admets que l'intervention de l'Opposition, surtout celle de
Mme le député de L'Acadie, nous permet de faire le point et
d'être plus équilibrés dans notre affaire. Dans ce sens, je
pense que l'intervention de Mme le député de L'Acadie
était à point. Merci.
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autre
intervenant, j'aimerais... Mme le député de L'Acadie, je
m'excuse, il vous reste encore deux minutes.
Mme Lavoie-Roux: C'est une seule question à M. Viau. Tout
à l'heure, quand vous discutiez de la protection du patrimoine que pour
contrer les actes de vandalisme, vous disiez, il faudrait inciter les gens
à barricader leur maison s'ils ne l'occupent pas ou ne peuvent pas la
restaurer immédiatement, etc., qu'on ait des recours contre ces
personnes, je vous ferai remarquer qu'en théorie, c'est peut-être
plus facile qu'en pratique. Parce que si vous voyez justement des maisons qui
ont été barricadées, soit parce que le propriétaire
ne peut pas en disposer, n'a pas les moyens de la restaurer, ne peut pas la
vendre ou pour une foule de raisons, ce n'est pas nécessairement le
propriétaire qui est l'agent du vandalisme. Bien souvent il y a de
véritables vandales qui viennent.
Je suis allée, il n'y a pas longtemps, dans la forêt de
Saraguay, où il y a ce qu'on appelle le château Ogilvie, qui a
été barricadé par les propriétaires. Les barricades
sont arrachées, tout ce qu'il y avait dedans a été
volé. Je pense que même si on veut prendre toutes les mesures,
tous les recours contre les personnes, il y en a qui prennent des mesures de
protection, surtout pour des maisons barricadées dans des forêts,
c'est peut-être particulièrement vulnérable. Je pense qu'il
ne faudrait pas nécessairement accuser les gens qui sont
propriétaires de ces maisons de ne pas avoir rempli leurs
responsabilités. Je pense qu'il y a aussi toute l'éducation
populaire, ne serait-ce que le respect du bien d'autrui, et, à plus
forte raison, quand il s'agit de sites ou de résidences ou de
propriétés qui ont un intérêt particulier au plan
historique.
C'était seulement parce que je trouvais que vous alliez
peut-être un peu loin en...
M. Viau: II ne s'agissait pas de généraliser
à l'ensemble des bâtiments qui étaient en
détérioration ou quoi que ce soit. C'était simplement pour
signaler le fait que cela se produit dans plusieurs cas, et on en a eu
connaissance très souvent. Par contre, je suis d'accord avec vous que
des mécanismes comme ceux-là ne peuvent pas être
indépendants d'autres mécanismes d'incitation à la
restauration, de subventions, etc. Tout cela doit constituer un tout, si
on veut protéger le patrimoine. Il doit y avoir des mécanismes de
contrôle, de protection, de surveillance, etc., et des mécanismes
de pénalité, bien sûr, mais aussi des mécanismes
d'incitation. Je pense que les trois genres de mécanismes doivent se
retrouver complémentaires dans un ensemble d'une loi de
conservation.
M. Vaugeois: M. le Président, vous me permettez de
remercier chaleureusement les représentants du Conseil des monuments et
sites. Je les invite à rester avec nous, si le coeur leur en dit, pour
prendre connaissance, dans peu de temps, je crois il nous reste un
groupe à entendre des amendements que nous apportons au projet de
loi, dont un certain nombre répondent à leurs
préoccupations.
M. Sirois: J'aurais peut-être un dernier commentaire, si
vous le permettez, parce que nous allons nous trouver maintenant avec une Loi
sur les biens culturels amendée. La suggestion que nous ferions et qui
ne se rapporte pas immédiatement à la loi elle-même, c'est
que, une fois adoptée, ce serait sans doute une bonne idée d'en
faire une bonne vulgarisation, autant auprès d'organismes qui s'occupent
de préservation historique qu'auprès des fonctionnaires du
ministère.
J'ai déjà demandé il y a plusieurs années
qu'on vulgarise clairement la loi auprès des fonctionnaires du
ministère, pour éviter des interprétations fantaisistes et
souvent contradictoires qui sont données dans certains cas ou qui
étaient données à ce moment. Je crois que ce voeu demeure
encore permanent, encore valable.
Je peux vous dire aussi, en terminant, que je peux changer de chapeau au
Comité des citoyens du Vieux Québec, qu'on a pris connaissance de
cela, et qu'on appuie le Conseil des monuments et sites. Nous n'avons pas fait
de mémoire, nous nous sommes dit que cela allait dans le bon sens.
Le Président (M. Jolivet): Avez-vous autre chose à
ajouter?
Mme Lavoie-Roux: Non, je veux les remercier de leur contribution,
tout simplement.
Le Président (M. Jolivet): Merci, est-ce que la
Fédération des sociétés d'histoire veut bien se
présenter en avant?
Fédération des sociétés
d'histoire
M. Dagneau (G.-H.): M. le Président, madame,
messieurs.
Permettez-moi de vous présenter Marc Beau-doin. C'est le
trésorier de la fédération. C'est la première fois
que la fédération a deux officiers dans la même ville, une
ville qui ne soit pas Montréal.
Mme Lavoie-Roux: Cela commence bien! M. Dagneau: Mon nom
est Dagneau. Je suis président de cette fédération.
J'aurais probablement plus de succès si j'entonnais Ô Carillon, ou
un hymne comme cela, que de vous lire 20 pages bien tassées. Si vous
permettez, je résume à larges traits, bénéficiant
de l'approbation muette mais visible de plusieurs et je vous dis que si notre
fédération a peut-être adopté un ton un peu
pleurnichard, c'est que nous avons nos difficultés de croissance, comme,
d'ailleurs, la direction générale du patrimoine.
Je suis entré au ministère des Affaires culturelles en
1963, à Montréal. À ce moment, il y avait M. Gouin, il y
avait Fernand Boisseau. Cela faisait deux personnes à Montréal,
et à Québec, il y avait Sylvio Dumas et une autre personne, cela
faisait deux. Jean-Pierre me disait tantôt: II y a $14 millions au
budget, sans compter les salaires, plus 200 personnes. Nous avons des
difficultés, nous aussi, et c'est pour vous les dire... c'est pour cela
que nous avons écrit ce qu'il y a là, sans aucune acrimonie, mais
dans un esprit de constatation et pour dire: Si vous voulez, nous allons nous
parler un peu plus et nous nous chicanerons un peu moins et nous irons
peut-être plus loin.
Comme deuxième point, c'est la coordination. La coordination se
place à deux niveaux. C'est sans prétention, mais je
prétends quand même que la coordination devrait être plus
grande entre les Affaires culturelles et le Haut-Commissariat à la
jeunesse, aux loisirs et aux sports; cela nous éviterait certaines
difficultés comme, par exemple, de devoir nous présenter devant
deux séries d'organismes. Si vous saisissez bien ce qu'est une
fédération comme la nôtre, c'est une
fédération qui regroupe de petites sociétés
d'histoire, des sociétés locales. Ce sont des gens qui sont
amateurs; l'histoire les intéresse et le signe de l'histoire aussi, qui
est le patrimoine, sauf qu'il n'y a pas de patrimoine sans histoire et une
histoire qui n'a pas de patrimoine, cela peut être joliment abstrait.
Donc, nous occupant des deux, et l'histoire ayant été
considérée par le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux
loisirs et aux sports comme un loisir, nous bénéficions de la
douce situation d'avoir à nous occuper des deux organismes. Alors, si
les deux s'entendent, cela nous facilitera la tâche.
Maintenant, il y a une autre coordination au niveau des mouvements qui
s'intéressent aux deux aspects de ce binôme que je qualifie
d'indissociable, l'histoire et le patrimoine. Il y a en archéologie, en
archivistique, en généalogie, en histoire, en muséologie,
au patrimoine, des organismes qui s'occupent de tout cela. Nous ne nous
connaissons pas et nous avons tous, à notre niveau, à notre
façon, des besoins, et il nous semble que ce serait un effet de la
magnificence présente et future du ministère des Affaires
culturelles que de convoquer tout ce monde dans une rencontre, à partir
de délégués, et non pas une grande rencontre
générale. J'aurais un peu trop peur d'une grande rencontre qui
pourrait facilement prendre l'aspect pardonnez-moi l'expression
d'un "free for all". Mais si on a un ordre du jour bien bâti et si on
convoque des mouvements
délégués, des personnes dûment
mandatées, on peut avancer plus vite. Une des choses qu'on pourrait
atteindre, ce serait ce que nous demandons en premier, et, en ce moment,
j'arrive au projet de loi no 4. Nous demandons que cette rencontre permette de
désigner des candidats, parmi lesquels le ministre des Affaires
culturelles choisirait un sujet qu'il recommanderait au gouvernement pour le
nommer membre de la Commission des biens culturels.
C'est une des choses que nous demandons et nous la demandons pour la
raison suivante: Nous sommes ici, très heureux, très fiers,
très contents, j'ai travaillé comme un nègre pour
préparer ce mémoire et cela me faisait plaisir. Mais j'arrive ici
comme un simple pékin; je n'ai pas d'outil, je n'ai pas
d'équipement. Je suis un simple contribuable. Or, vous voulez mon
opinion, j'en suis très flatté. Mais, pour vous la donner, il
faudrait que je sois un peu mieux équipé. C'est là-dessus
que je dis: Si je fais partie d'un groupe, de mouvements qui sont
représentés, à ce moment-là, peut-être qu'au
lieu d'être comme le lecteur du journal qui bénéficie des
communiqués et qui peut lire les rapports, j'aurais peut-être un
peu plus de renseignements, je serais mieux situé.
Une autre chose que nous demandons et cela se rapporte à une
résolution qui a été adoptée à
l'unanimité on y a fait allusion tout à l'heure, à
la Société historique de Québec c'est que la loi
prévoie qu'individus ou groupes pourraient prendre action en vertu de la
Loi sur les biens culturels et que le ministère disposât
j'emploie le subjonctif imparfait une fois par année d'un fonds
permettant de défrayer le coût des frais judiciaires
inhérents à toute poursuite.
Une autre chose que nous demandons il faut que je me
réfère à mon texte, la fatigue se fait sentir
à notre congrès auquel nous avons eu l'honneur d'avoir le
ministre comme conférencier, il a, avec son dynamisme habituel, offert
la parole aux congressistes. Alors, il y en a un qui s'en est prévalu
pour faire une suggestion relative justement à cette question des aires
de protection. (21 h 15)
Le ministre a paru intéressé sur le moment. Ce monsieur,
qui s'appelle Marc Bouchard, qui est architecte, a écrit et, à ce
moment, je pense que c'est une chose que nous aurions intérêt
à étudier davantage, précisément pour adoucir,
assouplir, interpréter l'application de cette question des aires de
protection. En ce moment, si je ne m'abuse, je ne suis pas avocat, mais quand
même j'ai quelques petites lueurs de ce côté et, par rapport
à ce problème qu'on évoquait tout à l'heure au
sujet du droit de propriété et de l'affectation qu'il subit par
rapport aux aires de protection, je ne crois pas que la Loi sur les biens
culturels ait à donner des droits à un individu. Je crois qu'il
les a déjà en vertu du Code civil; le droit de
propriété fait partie de notre système de lois. Je pense
que l'ancienne Loi sur les biens culturels ne mentionnait rien, en sorte que,
lorsqu'il y avait une réclamation, en vertu du droit de
propriété, la Loi sur les biens culturels ne donnait pas
ouverture au ministre pour faire droit à ces réclamations. Je
crois que la nouvelle loi, avec son amendement, permet au ministre de faire
droit aux réclamations qui viendraient de quelqu'un qui se
prétend lésé dans l'exercice de son droit de
propriété, et, à ce moment, après l'étude du
cas, que ce soit accepté ou rejeté, il y a une ouverture dans la
loi. Si je ne me trompe, c'est un jugement qui s'est rendu jusqu'en Cour
d'appel. Il y a eu des notes là-dessus qui disaient: Le droit de
propriété est quelque chose qui est dans le Code civil, vous ne
pouvez pas y toucher. C'est mon interprétation, elle vaut ce qu'elle
vaut, si je me suis mis le cou sur le bûcher, laissez tomber la
hache.
Autre point, on parle beaucoup de patrimoine et on parle surtout du
patrimoine bâti, et c'est une priorité. À mon avis cela
provoque un certain déséquilibre, en ce sens que l'histoire
devient un outil du patrimoine. Remarquez qu'il n'y a probablement pas moyen de
faire autrement et qu'il faut probablement être heureux qu'il en soit
ainsi, parce qu'il y a une question de rattrapage à faire. Seulement, je
crois que l'histoire doit quand même avoir une sorte de situation
quelconque, que ce soit aux Archives nationales ou que ce soit sous forme
d'institut qu'on créerait enfin, ou une réponse qu'on trouvera
peut-être après-demain dans le livre blanc de M. Laurin, je ne le
sais pas. À mon avis, à l'heure actuelle, s'il y a quelqu'un qui
s'occupe d'histoire, il est, par la force des choses et remarquez que je
ne critique pas, je crois que c'est nécessaire porté
à penser de même. En ce moment, à la DGP, on utilise
l'histoire, et à bon escient, pour appuyer toute cette question du
patrimoine bâti. Mais j'ai des gens dans des municipalités qui
disent: Que voulez-vous, Dagneau, on habite dans un coin où il n'y a pas
de patrimoine bâti, mais l'histoire nous intéresse quand
même. Ces gens veulent trouver quand même une sorte d'écho,
une sorte de réponse à leurs préoccupations au
ministère des Affaires culturelles. C'est le point de vue que
j'évoque.
Autre point de vue que j'évoque aussi: la carte
d'identité. C'est une question qui est déjà
évoquée avec la direction des Archives nationales. C'est une
question qui nous intéresse. Les gens de la généalogie
sont particulièrement intéressés à cela, parce que
vous savez comment se présente le problème? Pour faire de la
généalogie, si vous voulez partir d'il y a cent ans jusqu'au
début, il n'y a pas de problème, vous allez aux archives et cela
va, à condition d'être identifié et de respecter leurs
exigences. Mais si vous voulez consulter les actes de l'état civil des
cent dernières années toute famille a quand même une
existence, cent ans avant l'existence du sujet actuel il faut aller au
greffe de la Cour supérieure. Or, à l'heure actuelle, il y a un
ukase du ministère de la Justice qui dit: Pas de consultation. Pourquoi
pas de consultation? Il y a eu des déprédations, il faut bien
l'admettre. Comment faire pour éviter les déprédations? On
a procédé, comme on le fait souvent en droit, on a
éliminé les risques. Alors il n'y a plus personne, c'est radical.
Il s'agit maintenant d'assouplir; la carte d'identité est l'un de ces
moyens et cela nous intéresse.
Régionalisation? Oui. Vous savez qu'il y a des
conseils régionaux des loisirs, mais nous n'avons pas de contact
avec eux. Nous avons un contact avec la Fédération
québécoise des loisirs scientifiques, mais encore faudrait-il que
le Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports consente
à s'apercevoir que cette fédération a quand même
besoin d'un budget. Je ne vais pas plus loin dans ce domaine, mais là il
y a quelque chose qui ne marche pas, c'est évident. En tout cas, la
Fédération des sociétés d'histoire appartient
à la Fédération québécoise des loisirs
scientifiques; il y a une assemblée générale samedi, nous
y allons et nous verrons ce que cela va donner.
Moyens de communication. Nous faisons des suggestions là-dessus.
J'en profite pour dire qu'il y a la très sérieuse Revue de
l'Histoire de l'Amérique française à laquelle les
historiens chevronnés comme M. le ministre pourraient collaborer et
à laquelle nous, pauvres "pékins ", nous n'avons accès que
comme simples lecteurs.
Il y a aussi le bulletin du Conseil des monuments et sites du
Québec que je tiens à reconnaître comme un bulletin
très bien fait. J'en félicite le conseil et je suppose que,
puisqu'il fait bien, personne d'autre n'ira essayer de faire double emploi.
Nous croyons à la fédération qu'il y aura place
pour un bulletin à périodicité assez élevée,
destiné à rejoindre la base et à mettre en contact des
gens entre eux d'abord, entre eux et leur mouvement, ensuite.
Si vous me permettez, j'arrêterais là, après avoir,
si le président me le permet, offert à mon trésorier la
possibilité d'exprimer un point de vue s'il trouve que j'en ai
oublié, ce qui est très possible, ayant résumé
à très larges traits un travail assez compliqué. Merci
beaucoup de votre attention.
Le Président (M. Jolivet): M. Beaudoin.
M. Beaudoin (Marc): Je penserais avoir plutôt une
période de questions, je pense que...
Le Président (M. Jolivet): Cela va. M. le ministre.
M. Vaugeois: Je vous remercie, M. Dagneau. J'ai pris connaissance
de votre mémoire. Vous l'avez fort bien résumé, de
façon d'ailleurs éloquente et vivante, ce qui est dans votre
habitude.
Moi aussi, je vais m'en tenir à quelques remarques
générales. Une référence au départ à
l'évolution et à la croissance rapide de la direction
générale du patrimoine. C'est réel, mais cette croissance
nous paraît encore trop timide et trop lente, compte tenu des
défis que nous rencontrons. Je voudrais seulement prendre comme point de
référence l'importance de l'effectif et des budgets de
Parc-Canada, au Québec, qui sont de l'ordre d'à peu près
le triple de notre propre effectif, alors qu'il affecte ces troupes
considérables à quelques projets bien circonscrits, tandis que le
gouvernement du Québec garde la responsabilité de veiller
à l'ensemble du patrimoine québécois. Nos moyens sont
totalement disproportionnés en termes d'effectif et de budget.
Vous avez fait référence à l'invitation qu'on vous
avait faite de commenter notre projet de loi. Vous avez souligné le
défi que cela comportait pour vous, étant donné votre
structure, d'arriver avec un point de vue vraiment représentatif des
sociétés-membres de la fédération. C'est un point
de vue auquel nous sommes extrêmement sensibles. Il me fait plaisir de
vous confirmer que nous étudions actuellement la possibilité de
faire peut-être deux ou trois exceptions à notre programme de
subventions, lequel exclut, en principe, les subventions de fonctionnement. Je
pense que, là-dessus, tout le monde sera assez d'accord, mais nous
croyons, par ailleurs, que, dans le cas d'organismes à caractère
fédératif comme le vôtre, l'existence d'un
secrétariat va de soi et est indispensable.
Déjà, la direction du patrimoine...
M. Dagneau: Je vous dis merci tout de suite.
M. Vaugeois: Vous n'avez pas à nous remercier, parce que
c'est nous qui aurons à nous féliciter, je pense, des
conséquences de ce geste.
Vous avez fait également référence à un
point de vue exprimé par M. Bouchard, lors d'une réunion à
la ville de Laval. Ce point de vue nous a été transmis par
lettre. Nous l'avons retenu, en revoyant notre projet de loi. Tout à
l'heure, quand nous le reprendrons article par article, j'aurai l'occasion
d'expliquer peut-être une utilisation que nous faisons de cette
suggestion.
Vous avez débordé un peu la portée du projet de
loi, en faisant allusion aux difficultés de consultation des registres
d'état civil. Je vous signale, pour votre information, que j'ai une
correspondance avec le ministre de la Justice à cet égard et
qu'on peut prévoir des assouplissements, mais un maintien de
contrôle quand même avec des possibilités. Vous
évoquez que l'un de ces moyens puisse être la carte
d'identité. Déjà, le ministère de la Justice est
prêt à considérer toute demande sérieuse et à
donner les autorisations nécessaires, moyennant encore un certain nombre
de restrictions quant aux documents qu'on peut consulter, mais avec des
prescriptions tout à fait raisonnables.
Un dernier commentaire. Vous ne l'avez pas évoqué comme
tel, mais nous le trouvons dans votre mémoire, vous avez fait allusion,
par exemple, au véhicule que constitue la Revue d'Histoire de
l'Amérique française. Je suis d'accord avec vous, le
comité de rédaction de cette revue est très exigeant et
demande des textes qui, à toutes fins pratiques, ne peuvent venir que de
chercheurs universitaires, alors que nous savons fort bien que, dans nos
sociétés d'histoire et chez de multiples amateurs d'histoire, se
poursuivent des recherches fort intéressantes qui ne sont pas
diffusées, faute de véhicule de diffusion. C'est également
une des préoccupations de la direction générale du
patrimoine.
Nous avions au ministère un projet de revue, qui s'appelait
"Espace", projet sur lequel nous avons été interrogés,
d'ailleurs, au moment de la défense des crédits. Je peux vous
dire que nous
envisageons la possibilité, advenant le cas où la revue
Espace ne devrait pas voir le jour, selon sa forme prévue, d'affecter
ces crédits possiblement à un Québec-Histoire qui
viendrait jumeler le Québec-Science, qui est une revue bien faite et
dont le siège social se situe actuellement à l'Université
du Québec. C'est une hypothèse à laquelle nous
travaillons. Nous avons tous regretté, je pense, le décès,
la disparition de Québec-Histoire, qui était due à
l'initiative d'un homme héroïque de Montmagny. Il est regrettable
que cette revue soit demeurée silencieuse. C'était un
véhicule plus souple et de vulgarisation plus large que la Revue
d'histoire de l'Amérique française. À défaut de
retenir cette hypothèse, nous sommes conscients du problème. Nous
sommes préoccupés d'assurer une bonne diffusion à tout
travail de recherche, fût-il imputable à d'honnêtes
amateurs.
Le Président (M. Jolivet): Mme le député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je veux également remercier la
Fédération des sociétés d'histoire du Québec
pour son mémoire. Je pense que je vois votre démarche comme en
étant une d'appui au projet de loi 4 sur la modification de la Loi sur
les biens culturels, et l'autre, comme une occasion de venir interpréter
au ministre et aux membres de l'Assemblée nationale certaines des
difficultés de fonctionnement que vous cause le manque de ressources
mises à votre disposition. En tout cas, c'est comme cela que
j'interprète votre mémoire. J'aimerais vous poser quelques
questions. Combien y a-t-il de sociétés d'histoire au
Québec? Est-ce que vous pourriez me dire le nombre?
M. Dagneau: En 1977, en hiver, avec la collaboration ae la DGP,
on a fait un questionnaire qui a été envoyé un peu
partout. On a récolté des indices et des preuves de l'existence
d'un peu plus de 90 sociétés qu'on pouvait assimiler à des
sociétés d'histoire.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'elles sont toutes membres de la
fédération?
M. Dagneau: Non, madame. À ce moment, nous en avions
à peu près 45. Nous avons progressé. Nous sommes à
peu près entre 55 et 60.
Mme Lavoie-Roux: Qui font partie de la fédération.
Maintenant, vous avez fait état de difficultés financières
ou de subventions non suffisantes. Qu'est-ce que vous recevez comme subventions
et d'où proviennent-elles?
M. Dagneau: Deux réponses. D'abord, nous avons eu une
subvention de la DGP, de l'ordre de $7500. Comme je le dis dans le
mémoire, c'est la première fois, depuis qu'elle existe, que la
fédération a un budget qui dépasse $2000, grâce
à cette subvention. Nous avons aussi eu, à cause d'une sorte de
mauvais coup du sort, une démission inopinée du secrétaire
qui a fait que, ou bien nous contremandions notre congrès, ou bien nous
prenions des mesures d'urgence pour le tenir quand même. C'était
vraiment un cas. Aux Archives nationales, on nous a dépannés.
C'était vraiment du dépannage. Nous étions coincés.
Ce sont les deux subventions que nous avons eues. Avant cela, on ne peut pas
dire qu'il n'y a pas eu de subventions, mais on ne peut pas dire non plus qu'il
y en ait eu beaucoup. Nous vivions à même nos cotisations, ce qui
représentait à peu près $1000, et, en plus,
l'intérêt d'un capital de $10 000 versé par la Fondation
MacDonald Stewart.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je me trompe, M. le ministre, mais il
me semble que durant l'année... Vous n'avez pas accordé des
subventions de $30 000 aux différentes sociétés
d'histoire?
M. Dagneau: C'est un des problèmes de coordination dont
j'ai parlé. C'est qu'il y a un budget pour les sociétés
individuelles, mais ce n'est pas la fédération qui l'administre.
Ce sont les directions qui...
Mme Lavoie-Roux: II me semble que c'était un montant de
$30 000 qui a été versé aux sociétés
d'histoire. On en a parlé au moment de l'étude des
crédits. (22 h 30)
M. Vaugeois: Je ne sais pas si on peut parler de subventions. Je
pense que c'est une question assez ambiguë. Il faut définir les
termes. Effectivement, si on voulait relever tout ce que nous avons
donné à des sociétés d'histoire, le directeur
général du patrimoine m'informe que, pour l'an dernier, ça
irait chercher $345 000. Mais ça comprend très souvent des
commandes, il y a des contrats. J'en ai un à l'esprit pour la
Société historique de Lotbinière, par exemple, mais on ne
lui donne pas un budget de fonctionnement. On lui demande, avec cet argent, de
faire des travaux. Nous aurons peut-être une subvention assez importante
pour la Société historique de Deschambault, par exemple, et nous
avons annoncé, ces jours derniers, une extension d'un programme
d'intervention avec les sociétés d'histoire qui prend l'allure de
ce que nous appelons des programmes conjoints par lesquels nous nous engageons
à fournir un peu d'argent et de ressources, et ladite
société s'engage à nous fournir tel travail, mais ce
programme de subventions exclut des subventions de fonctionnement proprement
dites pour le soutien d'un secrétariat, par exemple. Mais ce sont des
choses sur lesquelles nous réfléchissons, de façon
à assouplir peut-être cette norme et à permettre à
une fédération de profiter d'un soutien financier.
D'ailleurs, j'aimerais demander à M. Dagneau si les $7000 que
vous avez eus, vous les avez eus pour une fin précise?
M. Daigneau: On avait fait un certain nombre de programmes...
M. Vaugeois: D'activités.
M. Dagneau: ... d'activités. M. Vaugeois:
Voilà!
M. Dagneau: C'était dans le budget de l'animation. C'est
pour ça qu'il n'était pas question de subventionner un
secrétariat ou de payer des frais de voyage, parce que c'est tout un
problème de réunir nos membres. Si on continue comme ça,
il faudrait que tous nos membres soient de Montréal.
M. Vaugeois: Dans le programme que je viens d'annoncer, j'avais
parlé, quand je vous avais rencontré à Laval, non
officiellement, de quelque chose comme $100 000. Compte tenu de
l'intérêt que peut susciter ce programme, on a fait un effort
pour... Je pense qu'on a une possibilité budgétaire de l'ordre de
$160 000, mais c'est très spécifique et ça ne comprend pas
la subvention pour fins de fonctionnement ou de déplacement. C'est dans
la direction de l'animation, ça, de la direction générale
du patrimoine.
Mme Lavoie-Roux: Je voyais que vous faisiez allusion au
Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports, qui donne
des subventions pour des fins récréatives, des activités
sportives ou culturelles. Est-ce que c'est dans ce sens-là que vous n'en
avez jamais eu de subvention?
M. Dagneau: On ne peut pas dire qu'on a des subventions directes
de la Fédération québécoise du loisir scientifique.
Seulement, la fédération imprime notre bulletin trimestriel, Le
Patrimoine, à un coût, évidemment, qui est au prix de
revient, et il n'y a pas de profit dans ça, c'est clair.
Deuxièmement, elle vient d'obtenir une subvention pour quatre ou
cinq projets pilotes pour publier un petit bulletin, mais, une fois-là,
dans ces cinq régions, ça se montait à $5000. On ne va pas
très loin pour couvrir un territoire de l'envergure de celui du
Québec, dans cinq régions, mais on ne pouvait pas y dire non, non
plus.
Mme Lavoie-Roux: En page 12 de votre mémoire, vous faites
une suggestion pour que les services des sociétés historiques
soient utilisés comme des mandataires du ministère des Affaires
culturelles dans le respect des aires de protection des monuments
classés. Le rôle de ces mandataires serait d'agir auprès
des populations locales, d'assouplir les relations, d'expliquer les exigences
de la loi et d'amortir le caractère parfois rigoureux de l'application
de cette loi.
Est-ce que c'est une recommandation que vous réitérez au
ministre, aujourd'hui?
M. Dagneau: Oui, c'est exactement celle de M. Marc
Bouchard...
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Dagneau: ... dans la lettre dont M. le ministre a
parlé. Alors, je l'ai résumée plutôt rapidement, de
mémoire. S'il y a des termes qui ne sont pas exactement les mêmes
que ceux de la lettre de M. Bouchard, ne vous en prenez qu'à moi et non
pas à la lettre.
Mme Lavoie-Roux: Vous faites également allusion, dans le
paragraphe suivant, en parlant des municipalités, au fait que vous
pourriez agir auprès des municipalités, compte tenu du manque
d'expérience des municipalités; que vous vouliez que les
sociétés d'histoire, dans le fond, puissent agir comme animateurs
auprès des municipalités. Est-ce que je comprends bien?
M. Dagneau: Animateurs, voici: C'est sûr que, dans les
milieux ruraux, il y a des sociétés d'histoire qui ont beaucoup
plus d'influence que cela ne paraît. Il y a là un actif à
utiliser. Dans les grandes villes, nous pouvons certainement agir, aussi; ici,
à Québec, j'ai l'exemple de la Société historique
de Québec, que je connais bien, qui a obtenu quelque chose. Il faut le
demander pendant trois ou quatre ans, au minimun, mais, avec un peu de
patience, on finit par s'entendre.
J'ai été complètement effaré d'entendre dire
qu'on reprochait à la loi de ne pas avoir d'objectifs et exprimer la
crainte qu'on reproche à des municipalités de l'enfreindre. On
disait: Enfreindre quoi, puisqu'il n'y a pas d'objectifs qui ont
été exprimés dans la loi? À ce moment-là, je
suis complètement renversé qu'une municipalité ne puisse
pas montrer le dynamisme voulu pour que le patrimoine fasse partie des
objectifs qu'elle se fixe elle-même. Je rejoins ce qui a
été exprimé, tout à l'heure, par le Conseil des
monuments et sites, cela me paraît une chose invraisemblable.
Quel que soit le contenu juridique ou constitutionnel de la nation qui
vit dans un contexte, elle a quand même, de toute façon, une
histoire et un patrimoine et cela ne peut pas ne pas engendrer des objectifs.
Quand on dit que, la loi ne les exprimant pas, on ne sait pas quand il y aura
dérogation ou pas, à ce moment-là, je ne comprends plus
rien.
Mme Lavoie-Roux: Ce rôle d'animateur ou de
personne-ressource pour les municipalités que les sociétés
d'histoire ont probablement déjà joué, mais que vous
voudriez voir s'amplifier, j'aimerais vous demander si vous l'exercez aussi
auprès des écoles ou des commissions scolaires de vos
régions, parce que, vous savez, tout cela commence à
l'école.
M. Dagneau: Très pertinente question. Nous avons
été parmi ceux qui ont réclamé le retour de
l'enseignement obligatoire de l'histoire dans les écoles. Nous sommes,
en ce moment, en contact avec l'Association des professeurs d'histoire locale,
et nous avons des contacts avec la direction des sciences humaines, pour autant
que je sache. Nous croyons qu'un programme d'histoire locale ou
régionale utiliserait certainement avec profit des textes que nos
chercheurs ont mis au point par rapport à l'histoire locale ou
régionale.
Là-dessus, l'éducation nous dit: Oui, mais il faut
inventorier et évaluer. On veut bien, mais cela a été
demandé en janvier dernier et on a eu un accusé de
réception, on a eu une réponse. On sait qu'il se fait quelque
chose, mais on ne sait pas quoi. Alors, on espère qu'on le saura
bientôt. Il faut avoir de la patience.
Par rapport aux commissions scolaires, vous touchez un autre point. Je
ne peux pas dire que nous avons... à brûle-pourpoint comme cela,
il ne me vient rien à la mémoire, rien de concret, de
précis. À moins que mon ami Marc en ait.
M. Beaudoin: En ce qui concerne certaines commissions scolaires
de la région de Québec, entre autres, et quelques-unes de la
région de Montréal, il y a une étroire collaboration avec
l'Association des professeurs d'histoire locale. Je sais, entre autres,
qu'à Montréal, malheureusement, la CECM n'a jamais voulu
embarquer dans le projet, et, de ce côté-là, la CECM qui,
souvent, jouait un rôle moteur dans l'éducation, ne le joue pas du
tout. C'est malheureux.
Du côté des professeurs d'histoire locale, il y a un
travail très dynamique qui se fait et qui permet à
l'étudiant, dès les premières années du primaire,
de se servir, à la fois de l'histoire locale, par le biais de documents
d'archives et de tout cela; donc, faire vraiment comprendre à l'enfant
que le patrimoine, ce n'est pas seulement des buildings, mais que ce sont ausi
de vieux documents, de vieilles photos, que c'est aussi de la
généalogie, c'est aussi apprendre à connaître le
milieu dans lequel il vit et à l'apprécier.
Mme Lavoie-Roux: Je trouve intéressante votre remarque sur
le fait que la CECM ne se montre pas très ouverte. Il reste que, quand
même, ce genre de contact s'établit avec des professeurs
d'histoire, j'imagine, ou les coordinateurs de l'enseignement de l'histoire
dans les commissions scolaires. Je trouve étrange que vous n'ayez pu
établir cette collaboration, parce que cela ne s'établit pas avec
les administrateurs, à moins qu'il y ait...
M. Beaudoin: Évidemment, en tant que
Fédération des sociétés d'histoire, on n'a pas eu
à faire les contacts. C'est l'Association des professeurs d'histoire
locale qui a fait les démarches auprès des différentes
commissions scolaires. Je ne sais pas trop par quel biais ils ont
procédé, mais le résultat est qu'à Montréal,
malheureusement, la CECM n'a pas cru bon d'embarquer dans le projet.
Mme Lavoie-Roux: Mais dans les autres commissions scolaires, cela
fonctionne?
M. Beaudoin: Dans plusieurs autres commissions scolaires cela
fonctionne. Je ne sais pas si c'est une question de volume. Malheureusement, je
n'ai pas de chiffres à l'appui, mais il semblerait que, dans les
commissions scolaires moins urbanisées, ce soit plus facile.
Mme Lavoie-Roux: À la page 12, vous faites allusion au
numéro 4, dans une énumération, vous faites des mises en
garde. La première, c'est une mise en garde entre le patrimoine
immobilier et le patrimoine mobilier. Et vous ajoutez: Autant la chose semble
normale en ce qui concerne l'immobilier, autant on se méfierait de voir
les villes s'occuper du mobilier, d'abord parce qu'elles n'ont pas
d'expérience et ensuite parce qu'elles ne semblent pas
adéquatement équipées du côté de l'histoire.
Je prends cela tel que c'est écrit. De votre côté, vous
demandez à qui il revient de s'occuper du patrimoine mobilier. Je
demanderais peut-être au ministre comment il réagit à cette
réflexion-là. Est-ce que vous pourriez nous donner des
exemples?
M. Dagneau: Pour Montréal et Québec, il y a des
départements d'archives. Tout ce qui est mobilier se ramasse le plus
souvent dans les archives, sinon dans les archives, du moins dans les
musées. Cela va. Sans doute à Trois-Rivières et
peut-être Sherbrooke, peut-être Chicoutimi, peut-être
Rimouski, mais il y a une immensité de petites villes où tout ce
qui s'appelle documents, tout ce qui s'appelle collection, tout ce qui
s'appelle souvenirs, s'il faut laisser cela entre les mains des
municipalités, il y aura certainement, à mon avis, une lacune,
premièrement dans les connaissances, deuxièmement dans
l'évaluation, troisièmement dans le choix des solutions.
Voilà le problème que j'ai évoqué en laissant
soigneusement aux autorités le soin de formuler des suggestions.
À mon avis, c'est un aspect d'une question qui se pose en ce moment.
C'est tout ce que j'ai voulu dire.
M. Beaudoin: Est-ce que je peux ajouter quelque chose?
M. Vaugeois: Je peux vous dire que j'aurai un mémoire au
Conseil des ministres à ce sujet, dans un proche avenir.
Mme Lavoie-Roux: Alors, c'est une question qui semble
pertinente.
M. Vaugeois: Cela devrait donner des résultats que vous
pourrez apprécier à l'automne.
Le Président (M. Jolivet): M. Beaudoin, vous voulez
intervenir sur la réponse?
M. Beaudoin: Je voulais ajouter quelque chose en tant
qu'archiviste. Il existe malheureusement dans les municipalités, comme
à beaucoup d'autres endroits, malgré la loi des
municipalités qui les oblige à conserver leurs archives, un fort
taux de manque d'intérêt face aux archives et face à la
conservation du patrimoine de ce côté-là. Je pense que
c'est assez symptomatique. Si les municipalités ont de la
difficulté à conserver adéquatement les documents
d'archives qui les concernent, qu'est-ce que cela va être avec le
patrimoine immobilier?
Mme Lavoie-Roux: Ma dernière question est: Dans cette
même page, la page 12, vous faites allusion au fait que le public ou
certaines personnes dans le public, les gens que la question des biens
culturels intéresse, le fait que le ministère implique ou les
modifications à la loi impliqueraient les municipalités, ceci est
interprété comme étant possiblement une diminution que la
Direction générale du patrimoine peut avoir avec le public. Sur
quoi est fondée cette assertion, parce que c'est la première fois
que je l'entends.
M. Dagneau: C'est fondé, madame, j'en ai donné
l'exemple tout à l'heure, j'ai été complètement
effaré d'entendre ce que j'ai entendu cet après-midi.
Québec est la ville où il y a le plus de patrimoine, et on se
demande quel est l'objectif. Je trouve qu'il ne faut absolument pas, à
ce moment-là, qu'il y ait d'éloignement de la part du DGP par
rapport à des municipalités.
Mme Lavoie-Roux: Vous aviez quand même écrit cela
avant d'entendre la ville de Québec.
M. Dagneau: J'avais une certaine expérience.
M. Vaugeois: Disons que, dans les témoignages qu'on a
reçus, il se manifeste une inquiétude assez
générale vis-à-vis des municipalités. On
considère qu'en général les municipalités ont mal
assumé ce rôle de protection du patrimoine. Peut-être que,
par le passé, ce fut vrai. Nous pensons qu'il y a un éveil
suffisant et que cela nous justifie d'introduire je le dis lentement
pour être bien compris les dispositions de l'article 49 qui sont
fondées essentiellement sur la confiance que nous portons à des
corporations municipales. (22 h 45)
Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie de votre mémoire.
Le Président (M. Jolivet): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Merci, M. le Président. Je voudrais vous
remercier, messieurs, de votre mémoire, qui nous apporte un
éclairage nouveau. J'ai remarqué sur la question des
consultations et documents civils, et ça m'a surpris, que vous me disiez
qu'on vous pose des difficultés pour la consultation de ces documents,
parce qu'il m'apparaît que ce sont des documents publics, et je ne vois
pas pourquoi on pourrait vous empêcher, en vertu de quel principe on
pourrait vous empêcher de les consulter.
M. Vaugeois: C'est une prescription de cent ans,
actuellement.
M. Beaudoin: Prescription de cent ans sur tous les registres de
l'état civil.
M. Fontaine: Oui? Ah bon! J'ai compris que le ministre avait
l'intention de proposer des modifications à cet état de
choses.
M. Vaugeois: C'est-à-dire que je trouve qu'on est plus
exigeant que le Vatican, le Vatican parle de 90 ans. On a moins de choses
à cacher, à mon avis.
Alors, le ministre de la Justice nous a déjà
assurés que toute demande sérieuse était
considérée. Encore faut-il faire la preuve qu'on est
véritablement un chercheur et non pas un fureteur en mal de sensations
ou de scandales.
M. Fontaine: Vous êtes revenu un peu à la question
des poursuites individuelles et vous êtes même allé un peu
plus loin en formulant l'idée de la création d'un fonds pour les
frais judiciaires. À la suite des discussions que vous avez entendues
tout à l'heure, est-ce que vous pourriez nous donner votre opinion sur
ce sujet?
M. Dagneau: D'abord, l'idée n'est pas de moi, je l'ai tout
simplement empruntée, tant au Conseil des monuments et sites du
Québec qu'à la Société historique du Québec,
où il en a été question. À ce moment-là,
j'avais dit au jeune avocat qui exposait ce point de vue: En fait, à
quelle sorte de fonds faut-il faire allusion pour qu'on sache si le
gouvernement donne suite ou non à l'idée, si, par hasard, il
décide de le faire? À ce moment-là, je dois avouer que je
n'avais pas eu plus de renseignements, sauf que j'ai l'impression qu'il s'agit
d'un fonds qui est assez semblable à celui en tout cas s'il n'est
pas semblable, il serait moindre, je ne crois pas qu'il puisse être plus
considérable qui, dit-on, est disponible en vertu de la Loi de la
protection des consommateurs, pour protéger le consommateur qui a
à se plaindre et qui veut prendre action en vertu de la Loi de la
protection des consommateurs.
M. Fontaine: Le ministre a sûrement entendu ce que monsieur
vient de dire au sujet du fonds qui pourrait être constitué en vue
d'exercer des poursuites judiciaires, si la loi no 4 permettait de telles
poursuites par des particuliers. Est-ce que le ministre a été
sensible à ce témoignage?
M. Vaugeois: Comme je l'ai dit à un autre moment
aujourd'hui, c'est le genre de chose qu'on évalue, mais vous-même,
vous aviez des réticences tout à l'heure, et ces
réticences entrent en ligne de compte dans notre étude
générale des conséquence que pourrait avoir une telle
ouverture. Pour l'instant, le ministre a des pouvoirs d'intervention assez
grands, si sa réglementation ou celle des corporations municipales ou de
corporations de comté n'est pas respectée, le citoyen peut
toujours demander au ministre de le faire et le prier de le faire. Mais il ne
peut pas effectivement le faire lui-même.
M. Fontaine: Je ne vous dis pas que je serais contre, mais,
à première vue, j'aimerais vous faire part de mes
appréhensions quant à l'utilisation de fonds publics pour
défendre des intérêts privés. En tout cas, on
pourrait discuter longtemps sur le sujet, mais j'aimerais que le ministre
prenne toutes ces considérations en délibéré.
II y a une remarque que je voudrais vous faire. À la page 17 de
votre mémoire, je pense que vous avez, au paragraphe c), quelque chose
d'intéressant. Vous parlez de récompense, et on retouche ici fa
sensibilisation qu'on veut faire vis-à-vis des municipalités. On
nous dit: "Le succès des municipalités dans la sauvegarde et la
mise en valeur du patrimoine ne devrait-il pas faire l'objet d'une distinction
quelconque, voire même une récompense?" Je pense que cette
recommandation serait peut-être un moyen d'inculquer aux
municipalités cette idée de la protection du patrimoine. On la
prend pour ce qu'elle vaut, mais je pense que cette remarque serait
intéressante à mettre en application.
Il y a également l'article d), où vous parlez des banques
de données. Je ne pense pas que cela existe actuellement, mais...
M. Dagneau: Là-dessus, si vous le permettez, M. le
Président, je ferais une distinction. La banque de données,
à mon avis, ce n'est pas une banque pour fournir un scénario de
"pageant" ou, comme disent nos amis les Anglais, des "reenactments". Ce serait
plutôt une banque pour fournir des idées. Ici, au Québec
c'est une opinion toute personnelle, mais je suis assez heureux de cela
on donne à nos festivals, à nos carnavals, une allure de
réjouissance populaire assez ouverte. Mais encore faut-il que ce soit
axé sur certaines légendes, sur certains faits historiques. Cela
est important.
Autrement, lorsqu'on revient aux "reenactments", j'en ai vu un, pour ma
part, où il y a eu énormément de dépenses faites en
temps, en talent et en argent, et un petit détail infinitésimal
peut rendre votre affaire à peu près ridicule, à cause
d'un événement climatique que vous n'avez pas prévu.
Lorsque, au contraire, vous visez à la réjouissance
populaire, le climat fait partie de la réjouissance. Froid ou chaud,
c'est moins risqué, â mon avis.
M. Fontaine: Ce que vous proposez, en fait, c'est que votre
organisme puisse posséder cette banque de données et la mettre au
service de la population.
M. Dagneau: C'est entendu que nous pourrions y collaborer, mais
il y a déjà une fédération québécoise
du loisir littéraire qui fait une recherche, en ce moment, sur les
légendes. Voici un aspect qui pourrait servir d'inspiration à des
festivals, à des réjouissances populaires, dans certaines
régions, parce que, à tel endroit, c'est telle légende, et
à tel autre, c'est telle autre légende. On veut en faire une
cueillette et rien n'empêche une région de changer sa
légende avec celle d'une autre.
M. Fontaine: Mais cela pourrait être également un
fait historique qu'on pourrait...
M. Dagneau: Cela peut être aussi un fait historique, c'est
sûr.
M. Fontaine: Cette banque n'existe pas actuellement chez
vous?
M. Dagneau: Pas à ma connaissance.
M. Fontaine: Cela regrouperait un peu l'idée de votre
financement que vous avez évoquée tout à l'heure?
M. Dagneau: Oui, si on en a les moyens, on pourra peut-être
travailler là-dessus; c'est sûr.
M. Fontaine: II y a deux autres aspects également que vous
avez mentionnés aux pages 18 et 19, concernant les guides, les
itinéraires et le tourisme culturel. En deuxième lecture, bien
que je ne sois pas un spécialiste dans le domaine, je me rappelle avoir
fait allusion à ce genre de choses. Je pense que vous touchez de bons
points au point de vue touristique. Ce serait très intéressant
d'avoir des itinéraires historiques. Il y en a déjà qui
existent, mais on pourrait peut-être les multiplier.
M. Dagneau: II y en a déjà et c'est à
développer. La vallée du Richelieu a fait pas mal
déjà et c'est à développer. L'Institut de tourisme
et d'hôtellerie fait une cueillette de recettes gastronomiques pour une
régionalisation et il semble que ce soit très bien.
M. Beaudoin: D'ailleurs, il ne faudrait pas voir seulement des
itinéraires historiques, mais aussi des itinéraires à la
fois géographiques, morphologiques, même par systèmes de
transport, qu'on utilise: le train, l'autoroute, ou simplement la route
secondaire. Souvent, c'est intéressant, pas tellement pour le chauffeur,
mais pour le passager, de pouvoir identifier ce qu'il voit. Ce serait aussi
intéressant d'avoir des itinéraires dans ce sens-là.
M. Fontaine: Ce serait également intéressant que
les sites soient identifiés.
M. Beaudoin: Évidemment. Souvent, il y a malheureusement
des monuments historiques... Je me suis amusé, pas plus tard que
dimanche dernier, à faire l'itinéraire jusqu'à
Saint-Jean-Port-Joli et il y a malheureusement des monuments classés
qu'on n'a pas réussi à retrouver. C'est malheureux, il n'y a pas
à dire, c'est juste à côté.
M. Fontaine: Si on peut donner l'exemple de la visite que j'ai
faite en Ontario, on ne manque pas une occasion de nous indiquer un site
à visiter à tel endroit. Je pense que nous, au Québec,
aurions intérêt à mettre un peu plus en valeur nos sites
historiques.
M. Bertrand: Marquer nos sites. M. Fontaine: Oui.
M. Beaudoin: D'ailleurs, dans le cahier no 10 du patrimoine que
M. le ministre soulignait à deux ou trois reprises avec fierté
je le reconnais,
d'ailleurs il y aura peut-être là plus de
détails précis indiquant exactement où cela se trouve.
M. Fontaine: Merci beaucoup, messieurs.
Le Président (M. Jolivet): S'il n'y a pas d'autres
questions, M. le député de Mont-Royal.
M. Ciaccia: Est-ce que vous voyez un rôle
spécifique, pour votre société ou pour votre
fédération de sociétés, dans la préservation
ou l'identification du patrimoine?
M. Dagneau: Premièrement, plutôt du
côté de l'histoire et, secondairement, du côté du
patrimoine. La raison est bien simple. C'est que, historiquement, nos
sociétés qu'on a déjà qualifiées de vraiment
historiques se sont occupées d'abord de cela, de l'histoire. Avec le
temps, le patrimoine est devenu une chose non seulement reconnue mais je dirais
même en vogue, ce qui n'est pas sans péril mais, enfin, il faut en
profiter. Nos amis du Conseil des monuments et sites historiques s'occupent du
patrimoine. Ils sont, pour la plupart, des spécialistes, des
ingénieurs, des architectes, des avocats, et des choses comme cela.
Alors, c'est une question de collaboration pour nous plutôt que d'aller
essayer de faire double emploi avec eux, ce qui, à mon avis,
n'arriverait pas. Nous perdrions notre temps.
M. Ciaccia: Dans le patrimoine local, dans vos
sociétés locales, est-ce un rôle de mettre en valeur le
patrimoine?
M. Dagneau: Une fois l'identification faite, il y a des projets,
en ce moment, où une société pourrait exploiter une
maison, par exemple, y avoir son local et, à l'aide des revenus de
l'exploitation, pouvoir vivre au moins en partie. Il y a des projets qui sont
déjà en marche, en ce moment. Il pourrait certainement y en avoir
plus. Le rôle de la fédération, c'est d'être une
agence de service à la disposition des sociétés locales
pour les aider à trouver des points, comme cela, à en faire
l'identification. Le patrimoine, cela couvre bien des choses. La maison d'un
premier ministre fait partie du patrimoine; seulement il y a des premiers
ministres depuis assez longtemps et, sur le plan historique qu'est-ce
que vous voulez? Le public n'attache pas la même importance il
faut quand même la garder parce que cela deviendra plus
intéressant que ce ne l'est présentement.
M. Beaudoin: C'est sûr que les sociétés
locales sont souvent impliquées dans des dossiers de défense de
patrimoine immobilier. On peut penser facilement, dans la région de
Montréal, à la Société de Boucherville, à la
Société de Longueuil ou d'autres, même celles de
Montréal ou de l'île Jésus qui ont aidé souvent
à mettre en valeur certaines maisons qui risquaient tout simplement de
passer sous le pic du démolisseur ou tout simplement d'être
gâchées irrémédiablement. Je pense que cela fait
partie, en fait, du rôle local d'une société. C'est un peu
pour cela qu'on propose, dans notre mémoire, que les
sociétés locales puissent participer un peu à l'animation
dans la région pour expliquer ce qu'est le patrimoine et ce que cela
apporte aux gens, dans la région, d'avoir un monument historique ou un
site historique.
Il y a aussi l'aspect que les sociétés locales ont plus de
chances d'avoir de l'influence auprès du conseil municipal parce que
l'historien local fait souvent partie de la société. À
l'occasion d'un centenaire, d'un bicentenaire ou d'un tricentenaire, c'est
très intéressant pour la municipalité de faire appel
à ces personnes.
M. Ciaccia: Croyez-vous que c'est un rôle que le ministre
devrait confier à vos sociétés, à votre
fédération, la mise en valeur du patrimoine local? Est-ce que le
ministre ou le ministère utilise vos services?
M. Beaudoin: En fait, c'est un rôle qu'on trouverait
logique. D'ailleurs, lorsqu'on a appuyé, dans notre mémoire, la
proposition du Conseil des monuments et sites ainsi que de la
Société historique de Québec, à savoir que les
individus puissent agir, je pense que c'était un peu pour permettre
cela, pouvoir entreprendre des démarches judiciaires pour empêcher
qu'un propriétaire fasse un mauvais parti au patrimoine collectif. Je
pense que c'est un peu le rôle des sociétés d'histoire
locale d'avoir ce rôle de chien de garde. (23 heures)
M. Ciaccia: Mais dans le moment est-ce que...
M. Beaudoin: Dans le moment, plusieurs le font d'une façon
plus ou moins...
M. Ciaccia: Mais pas d'une façon...
M. Beaudoin: ... selon leurs possibilités, leur retraite,
etc.
M. Ciaccia: Est-ce que votre fédération inclut des
sociétés autres que celles de langue française?
M. Beaudoin: Oui, nous en avons plusieurs dans les Cantons de
l'est. Nous publions souvent même un article anglais dans notre
revue.
M. Ciaccia: À titre d'information, est-ce que d'autres
minorités qui font partie du Québec aussi...
M. Beaudoin: Non. C'est nouveau et c'est une chose qui
m'intéresse.
M. Ciaccia: Dans l'avenir. Premièrement, c'est assez
récent, la contribution de quelques-unes de ces minorités.
M. Beaudoin: Oui.
Le Président (M. Jolivet): Cela va?
M. Ciaccia: Cela va.
Le Président (M. Jolivet): II n'y a pas d'autres
questions.
M. Dagneau: On pourrait commencer par la minorité
irlandaise.
Le Président (M. Jolivet): Je remercie la
Fédération des sociétés d'histoire d'être
venue devant la commission. On vous libère. Il y avait un autre
organisme qui devait se présenter et qui a fait parvenir un document qui
vous a été distribué tout à l'heure et c'est le
Conseil régional de la culture de Québec. Les gens ne se
présenteront pas devant la commission, mais je pense qu'il serait de bon
aloi de suggérer que ce document soit mis en annexe au journal des
Débats. (voir annexe)
Une voix: Très bien.
Étude du projet de loi
Le Président (M. Jolivet): Nous en arrivons à
l'étude article par article du projet de loi no 4.
M. Vaugeois: M. le Président...
Le Président (M. Jolivet): M. le ministre.
M. Vaugeois:... je m'excuse, mais les gens de la
fédération sont partis pendant que j'étais en conciliabule
avec le député de L'Acadie qui me prépare une surprise
à ce que je vois. Je ne voulais quand même pas laisser passer
cette présentation sans les remerciements non seulement habituels, mais
combien sincères et je tenais à féliciter le groupe qui
vient de se faire entendre et je pense que j'ai au moins un collègue, le
député de Papineau, qui peut comprendre l'effort que vous avez
fourni puisque vous avez dit que vous aviez travaillé...
Une voix: Comme un nègre!
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je voudrais adjoindre
mes remerciements à ceux du ministre. Je pense que votre mémoire
était intéressant, en tout cas, pour moi en particulier, de
devenir un peu plus familière avec votre fonctionnement, cela
m'intéressait beaucoup.
Le Président (M. Jolivet): Maintenant, M. le ministre,
vous aviez annoncé que vous aviez des amendements. M. le ministre.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président.
Le Président (M. Jolivet): Oui, Mme le
député.
Mme Lavoie-Roux: J'aurais une suggestion à faire au
ministre. Je voudrais quand même faire cela pour qu'on ne perde pas de
temps. M. le ministre a annoncé, il a même, pas prié, mais
suggéré aux personnes qui ont présenté des
mémoires de rester une heure de plus et qu'il leur ferait
connaître certains amendements. Ce que je proposerais au ministre, c'est
que s'il voulait déposer ces amendements, au lieu d'en discuter ce soir,
cela nous donnerait le temps d'en prendre connais- sance. Il est 23 heures, la
Chambre est ajournée. Nous pourrions ajourner après le
dépôt des amendements du ministre. Maintenant, je sais qu'il est
inquiet parce que je lui ai dit que j'avais des motions préliminaires et
j'ai déjà vu le député de Vanier sursauter et dire:
C'est le "filibuster" qui s'en vient. Je veux rassurer le ministre d'abord
qu'il n'est pas question de "filibuster" à cette commission.
M. Bertrand: Pour d'autres commissions? Mme Lavoie-Roux:
Pardon?
M. Ciaccia: Pour d'autres projets de loi à venir, oui,
c'est possible.
M. Brassard: Municipal?
M. Ciaccia: Oui, c'est possible parce que les projets de loi ne
sont pas...
Mme Lavoie-Roux: Je vais vous dire: Je suis seulement responsable
de celui-ci et du projet de loi 9, et je peux vous annoncer qu'il n'y aura pas
de "filibuster".
M. Brassard: M. le député de Mont-Royal est
là uniquement pour...
M. Ciaccia: ... faciliter les travaux de la commission.
M. Bertrand: C'est le travail du député de
L'Acadie.
Mme Lavoie-Roux: Je peux assurer M. le ministre que les motions
préliminaires que je présenterai demain matin sont des motions
tout à fait inoffensives auxquelles il va certainement donner son
adhésion et même s'il les refusait, je n'en discuterai pas 20
minutes et mon collègue de Mont-Royal 20 minutes pour que cela fasse 40
minutes. J'aimerais bien qu'en retour...
M. Brassard: Vous parlez au nom de votre collègue de
Mont-Royal, j'espère.
M. Ciaccia: Nous sommes solidaires.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais bien qu'en retour de cette bonne
collaboration, une fois ses amendements déposés parce
qu'il ne faut pas qu'il oublie que je pourrais proposer une motion
d'ajournement qui serait débattable et qui nous rendrait jusqu'à
minuit... J'ai appris cela depuis que je suis à l'Assemblée
nationale.
M. Ciaccia: On pourrait faire un amendement.
Une voix: On collaborerait avec vous.
M. Ciaccia: Je pourrais faire des amendements.
Mme Lavoie-Roux: Tout cela serait une perte de temps, alors, pour
ne pas retarder les choses,
au lieu de passer par cette stratégie, je voudrais proposer au
ministre qu'il dépose ses amendements, puisque cela peut
intéresser les personnes qui ont présenté des
mémoires. Il n'y a pas de piège là-dedans, M. le
Président.
M. Vaugeois: Un piège, il faudrait qu'il soit bien gros
pour que je tombe dedans.
Mme Lavoie-Roux: Je ne vous ferais pas cela.
M. Vaugeois: Je vais vous faire une proposition, moi aussi, par
l'intermédiaire du président.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Vaugeois: Si elles sont prêtes, vos motions
préliminaires, pourquoi ne pourrait-on pas en prendre connaissance
maintenant? Vous m'intriguez d'abord, j'ai une curiosité quasi
féminine et puisque j'ai cru comprendre que cela allait m'inviter
à poser des gestes, j'aime autant les poser le plus rapidement
possible.
Mme Lavoie-Roux: Je vais vous montrer ma bonne foi, M. le
Président, par votre intermédiaire.
M. Bertrand: J'ai apporté des violons, M. le
Président, cela commence à sentir la sérénade.
M. Vaugeois: On a un Stradivarius qui est classé.
Mme Lavoie-Roux: Je suis prête à déposer mes
motions préliminaires à la condition que nous n'en discutions pas
ce soir, parce que si tel était le cas, je prendrais le temps qu'il faut
sur la première, jusqu'à minuit.
M. Vaugeois: Qu'arrivera-t-il si on les accepte toutes dans
l'ordre, s'il n'y a pas de discussion?
Mme Lavoie-Roux: II n'y aura pas de discussion, ce sera
très simple.
M. Vaugeois: Essayez donc, pour voir.
Mme Lavoie-Roux: Mais demain matin, je me réserve le
droit... Mais il faudrait que je demande au président, je ne veux pas
perdre le droit de discuter de mes motions demain matin.
M. Vaugeois: On peut vous jouer le tour de les accepter, vos
motions.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, vous savez, je ne suis
pas très familière avec ce genre de...
Le Président (M. Jolivet): Si vous présentez des
motions préliminaires et que les motions sont acceptées,
peut-être que cela vous empêchera de faire des discours de 20
minutes, comme vous le disiez tout à l'heure.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Le Président (M. Jolivet): À ce moment, cela vous
donnera la possibilité...
Mme Lavoie-Roux: Ce que je ferais...
M. Fontaine: Je pense que si on dépose une motion, il faut
savoir si la première est acceptée, et si elle n'est pas
acceptée, il faut la discuter.
On ne peut pas déposer une série de motions ensemble.
Mme Lavoie-Roux: Les amendements sont pour tout le projet de
loi.
Le Président (M. Jolivet): D'accord, une par une.
M. Bertrand: On peut attendre article par article parce qu'on
appelle d'abord l'article 1.
Mme Lavoie-Roux: Quant à moi c'était pour... M.
Bertrand: Nous aussi. M. Vaugeois: On va se montrer bons joueurs.
M. Bertrand: Mettons nos affaires sur la table.
M. Vaugeois: Essayez votre première motion, puis on va
voir.
M. Alfred: Cartes sur table.
Mme Lavoie-Roux: Je ne suis pas sûre si je ne
préfère pas, à ce moment, compte tenu de toutes ces
restrictions, discuter d'une motion d'ajournement.
M. Bertrand: Mais non, ne vous laissez pas restreindre par le
président.
M. Vaugeois: Vous ne risquez rien à présenter la
première, si elle est acceptée, allez à la
deuxième, si elle est acceptée, vous irez à la
troisième, si elle est acceptée vous irez à la
quatrième et je m'excuserai de ne pas vous avoir donné l'occasion
de parler longuement.
M. Ciaccia: M. le Président, sur le même sujet, si
vous me permettez, une question de règlement.
Le Président (M. Jolivet): Question de
règlement.
M. Ciaccia: Le but de l'intervention, je crois, du
député de L'Acadie, c'est d'essayer de faciliter les
travaux...
Mme Lavoie-Roux: C'est vrai. M. Ciaccia: ... les
discussions. M. Bertrand: Moi, je n'en doutais pas.
M. Ciaccia: Je voudrais appuyer les propos du
député de L'Acadie.
M. Vaugeois: Et les miens.
M. Ciaccia: Les vôtres, je ne sais pas exactement. Je vais
commencer par appuyer ceux de mon collègue. Si on pouvait avoir ce soir
les amendements... Premièrement si vous voulez déposer...
M. Vaugeois: Oui, vous allez les avoir.
M. Ciaccia: Cela permettrait aux gens à qui vous avez
demandé de rester... Si on pouvait ajourner à ce moment pour
avoir l'occasion d'examiner les amendements. Je pourrais vous assurer de notre
entière collaboration, dès demain, après, et je pourrais
vous assurer qu'on ne ferait pas... Quant à moi, ce n'est pas une
question de faire des motions dilatoires et de prendre le temps de la
commission, nous sommes aussi intéressés que vous à
terminer les travaux aussi vite que possible, compte tenu de l'étude des
articles de ce projet de loi.
M. Vaugeois: M. le Président, je suis tout à fait
d'accord pour déposer les amendements. Je vais vous déposer les
amendements au complet; je vais prendre deux ou trois minutes pour vous les
présenter, parce que, souvent, il y a plusieurs amendements pour la
même correction, si vous voulez...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Vaugeois: Cela va vous aider peut-être à les
situer. Si vous voulez faire vos motions préliminaires ou en faire une
ou deux, j'en devine un peu la nature et je pense que nous pourrions
peut-être déjà donner des suites. Déjà, vous
m'avez annoncé votre quatrième et je suis tout à fait
disposé à y donner suite, si c'est celle que je pense, sauf qu'il
faut organiser les choses.
Mme Lavoie-Roux: Allez-y, M. le ministre, et après on
suivra.
M. Vaugeois: Moi, je vous fais confiance à ce point.
M. Ciaccia: On va être ici jusqu'à minuit.
Mme Lavoie-Roux: Je ne vois pas pourquoi vous vous
méfieriez de toute façon.
Je ne suis pas sûre qu'on soit tout à fait selon les
règlements, mais on va s'accommoder de cela.
Le Président (M. Jolivet): Pourvu qu'au bout de la
course...
Mme Lavoie-Roux: N'oubliez pas qu'on n'a pas fait notre motion
d'ajournement, c'est là qu'est le premier geste de conciliation, M. le
député...
Le Président (M. Jolivet): Pourvu qu'au bout de la course
on s'entende sur l'ensemble.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Ciaccia: Le but de l'exercice n'était pas de faire
adopter toutes nos motions avant minuit. Le but de l'exercice, c'est de partir
maintenant. S'il faut commencer à parler des motions, je retire ma
coopération et je vais prendre le temps voulu sur chaque motion.
Mme Lavoie-Roux: Faites bien attention. M. Ciaccia: Je
veux aller me coucher.
M. Bertrand: Tout le monde a bien compris que le ministre voulait
seulement prendre trois minutes pour présenter ses amendements.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Bertrand: II a été assez gentil pour les
déposer, il faudrait lui donner au moins trois minutes pour en
parler.
M. Vaugeois: Vous me permettez, M. le Président?
Le Président (M. Jolivet): Oui, allez-y.
Amendements présentés par le
ministre
M. Vaugeois: Tout le monde a le document?
Je m'aperçois que dans la dernière présentation...
Cela a été refait très précipitamment cet
après-midi, parce que dans une première version, il y avait un
certain nombre d'explications et d'options. Il faut comprendre, à la
page 1 pour article 1, et ensuite article 5 de l'article 1, si vous voulez.
Alors, vous êtes à la première page et je vous distribue
celui-là. L'article 5 de l'article 1 si vous me permettez de
m'exprimer ainsi au troisième alinéa dit: "Le
renouvellement du mandat des autres membres de la commission ne peut avoir lieu
qu'une seule fois, sauf si l'un deux est nommé président ou
vice-président." Vous voyez déjà le ton de certains
amendements. Régulièrement, nous précisons des choses
parce que la question peut se poser. Nous voulons un projet de loi qui parle
par lui-même et qui ne soit pas hermétique et
réservé à la seule compréhension des
spécialistes.
À l'article 7...
Une voix: De l'article 1.
M. Vaugeois: Oui. À l'article 7 de l'article 1, le mandat
du président et du vice-président est une fonction à temps
plein. C'est une rédaction différente pour dire à peu
près la même chose.
L'amendement à 7-1 est très important. Vous noterez que
les fonctions qui sont attribuées au comité qui est prévu
dans la loi, un comité de trois personnes dont deux sont des membres
réguliers de la commission, vont concerner dorénavant non pas les
articles 31, 32, 35, 48, 49, 50, 51, mais les articles 31, 32, 35, 48 et le
premier alinéa de l'article 50. Le deuxième alinéa de
l'article 50 redevient la responsabilité de la Commission des
biens culturels de même que les articles 49 et 51. Donc, on a
diminué les responsabilités de ce comité un peu dans
l'esprit de plusieurs remarques qui nous ont été faites dans des
mémoires.
M. Fontaine: Deux de ces personnes sont choisies parmi les
président et vice-présidents.
M. Vaugeois: Oui.
M. Fontaine: Cela veut dire qu'automatiquement le
président et "le" vice-président font partie de...
M. Vaugeois: II y a deux vice-présidents. M. Fontaine:
D'accord.
M. Vaugeois: L'article 7f est également intéressant
parce que nous ajoutons au texte qui était déjà là
la phrase suivante: "La commission peut recevoir et entendre les requêtes
et suggestions des individus et des groupes sur toute question visée par
la présente loi." Ce qui ouvre la porte à des audiences publiques
et ce qui va nous permettre, dans nos règlements, de prévoir
même des heures de réunion en dehors des heures ouvrables. Je
pense que, par cette seule phrase, on donne satisfaction à plusieurs
remarques qui nous ont été faites.
L'article 7i: c'est plutôt une question de rédaction
nouvelle. J'avais tiqué un peu sur le dernier paragraphe qui disait:
"... ceux prévus au paragraphe a) du premier alinéa entrent en
vigueur lors de cette approbation et ceux prévus au paragraphe b) du
premier alinéa entrent en vigueur à la date de leur publication."
Les juristes ont l'habitude d'utiliser les termes "alinéa" et
"paragraphe" dans le sens contraire de la langue française. C'est mon
point de vue. J'ai voulu éviter cette ambiguïté. Cela a
donné lieu à une nouvelle rédaction et, en même
temps, vous remarquerez qu'au lieu de pourvoir à l'organisation interne
de sa régie interne, la commission peut, par règlement, pourvoir
à sa régie interne comme telle. (23 h 15)
L'article 3 du projet de loi, et cela est très important, cela va
revenir un peu partout... Le mot "signifié", d'après les
interprétations légales c'est le Code de procédure
civile? d'après le Code de procédure civile, quand on
utilise le terme "signifié", cela veut dire par huissier. C'est ce que
j'évoquais aujourd'hui. On a regardé cela sous tous ses angles et
nous remplaçons partout dans la loi le mot "signifié" par le mot
"adressé" et le mot "signification" par le mot "transmission", ce qui va
nous permettre de signifier je m'excuse, dans mon vocabulaire à
moi soit par courrier recommandé, soit idéalement, et nous
le ferons chaque fois que ce sera possible, par la démarche d'un
fonctionnaire de la direction du patrimoine ou d'un bureau régional qui
va aller porter l'avis d'intention ou l'avis de classement et qui va en
profiter pour expliquer au propriétaire de quoi il s'agit. De toute
façon, on invite les gens qui reçoivent cet avis à
communiquer avec quel- qu'un au ministère et, finalement, puisqu'ils
communiquent toujours, aussi bien faire la démarche nous-mêmes,
aller porter cet avis et fournir des explications aux gens. Je pense qu'on leur
doit cela. S'ils ont le droit de savoir exactement ce que signifient ces
documents, il me semble que c'est plus sympathique que d'avoir... je n'ai rien
contre les huissiers, mais...
M. Ciaccia: Que vous disiez la correction à ces...
Mme Lavoie-Roux: Ne pose pas de question...
M. Vaugeois: On me signale que vous allez voir à un
endroit que le mot signifié demeure. Si le ministre utilise son droit de
préemption, à ce moment-là, "ma" décision de me
prévaloir de ce droit sera signifiée. C'est le seul cas où
le mot va demeurer.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
M. Vaugeois: Oui, la décision du ministre de se
prévaloir du droit de préemption. Ce n'était pas bien ce
que j'ai dit?
M. Fontaine: Vous avez dit "ma décision ". C'est possible
que vous ne soyez pas toujours là.
M. Vaugeois: C'est cela. Je le sais bien et je fais attention
à cela d'habitude.
Mme Lavoie-Roux: II a de grands espoirs.
M. Vaugeois: Bien non, voyons donc! L'article 6...
Mme Lavoie-Roux: Je vous ai insulté, M. le ministre?
M. Vaugeois: Vous ne m'insultez pas, vous me faites plaisir. Je
suis un gars qui vit essentiellement d'espoir et d'optimisme d'ailleurs. Je
crois, par exemple, à l'indépendance du Québec.
Mme Lavoie-Roux: On devrait peut-être faire un débat
jusqu'à minuit.
M. Bertrand: Jusqu'à minuit là-dessus. Une voix:
Consentement.
M. Vaugeois: L'article 6 qui modifie l'ancien article 21 de la
vraie loi, c'est-à-dire la Loi sur les biens culturels, c'est une
remarque qui va revenir régulièrement aussi... Nous ajoutons
à la fin du texte qui est là, "et dans le cas d'un immeuble en
transmettre copie au greffier ou secrétaire-trésorier de la
municipalité où il est situé." C'était presque
toujours ajouté. On ne l'avait pas ajouté, parce que là
c'était la personne qui devenait propriétaire. On n'avait pas
pensé à l'inviter, elle, à avertir le greffier ou le
secrétaire-trésorier. Nous l'avons ajouté pour être
certains de n'avoir oublié personne.
L'article 9...
Mme Lavoie-Roux: C'est la même chose.
M. Vaugeois: C'est la même chose, les mots
"signifié", "transmission"... L'article 10, la même chose.
Mme Lavoie-Roux: L'article 11...
M. Vaugeois: C'est la même chose.
Mme Lavoie-Roux: Cela va bien, article 12.
M. Vaugeois: L'article 12, oui, je me trompe tout le temps.
M. Fontaine: Article 31.
M. Vaugeois: L'article 12 pour 31, c'est cela. Voyez-vous, c'est
l'autre genre de correction à laquelle je référais au
début, où on cherche à clarifier. Avec un lecture de
profane comme celle que je suis capable de faire, je lisais: "Nonobstant toute
autorisation conférée par une loi de la Législature aucun
bien classé, à l'exclusion d'un site historique "... On a l'air
de dire que pour les sites historiques, il n'y a pas de problème, alors
que l'idée de la loi c'est que les sites historiques fassent l'objet
d'une section spéciale.
Alors, nous l'avons écrit. C'est le genre de correction que j'ai
demandé moi-même, parce que, n'étant pas
spécialiste, j'aime bien défendre des projets de loi que je suis
capable de comprendre à la première lecture.
M. Bertrand: Comme cela, on pourra se passer d'avocats comme
députés.
M. Vaugeois: Oui, c'est notre objectif. M. Fontaine: C'est
une grave erreur.
Mme Lavoie-Roux: On pourra se passer de quoi? Ah oui.
M. Vaugeois: Écoutez, moi, je suis obligé, je suis
tiraillé parce que j'ai...
M. Bertrand: Excusez, je voudrais m'excuser auprès du
député de Nicolet-Yamaska...
Mme Lavoie-Roux: Le député de Mont-Royal.
M. Bertrand: Je ne voulais pas user d'un langage
antiparlementaire.
M. Vaugeois: Et moi, je vais être obligé de
m'excuser vis-à-vis des légistes qui ont préparé ce
projet de loi, parce qu'il est exceptionnel.
Une voix: II n'y a pas de consentement à donner.
M. Fontaine: Cela ne vaut même pas la peine de
répondre à cela!
M. Vaugeois: L'article 14 qui corrige l'article 38, cela reprend
cette histoire de fouilles et de relevés qui embêtait bien du
monde et qui, moi aussi, m'avait attrapé à la première
lecture. On y lit: "Lorsqu'il s'agit de relevés sur un terrain autre
qu'une terre publique, que le consentement écrit du propriétaire
n'est pas requis." On avait l'air d'avoir deux poids, deux mesures. Quand
c'était pour les terres publiques, on avait des exigences et on n'en
avait plus pour les résidences privées. Là, on l'a
rédigé autrement, et je pense que cela devient clair.
L'article 20. Pour 51d. Vous allez trouver cela très bon! C'est
vrai que c'est bon. Je vais le lire pour que cela soit
compréhensible.
Mme Lavoie-Roux: Pour que ce soit encore meilleur.
M. Vaugeois: Vous allez le trouver encore meilleur. Le ministre
peut, après avoir pris l'avis de la commission, contribuer à
l'entretien, à la restauration, à la transformation le
député de Mont-Royal va être fier de cela ou au
transport d'un bien culturel classé ou d'un bien situé dans un
arrondissement historique ou naturel, dans un site historique ou
archéologique classé ou dans une aire de protection, ainsi
qu'à la reconstitution d'un édifice sur un immeuble classé
immeuble référant, à ce moment-là, au
terrain et là on a ajouté et détenir sur les
biens faisant l'objet d'une contribution toute charge, droit réel ou
hypothécaire qu'il juge approprié. Ce qui va permettre au
ministre d'être un peu plus généreux ou un peu plus
à l'aise pour contribuer financièrement, puisqu'il va pouvoir
assortir sa contribution financière de ce qu'on appelle vulgairement un
lien hypothécaire, de telle façon que si le propriétaire
veut aliéner son bien après avoir profité d'une
contribution du ministre...
Des voix: Ah! Ah!
M. Vaugeois: On s'expliquera là-dessus demain, je pensais
que vous seriez fiers de cela!
M. Ciaccia: Non, je ne suis pas fier de cela. Je vous expliquerai
demain pourquoi je ne suis pas fier de cela. Cela l'empêche
d'hypothéquer pour d'autres raisons, vous venez juste d'ajouter aux
dommages que le propriétaire a subis.
M. Vaugeois: Vous voulez qu'on contribue...
Mme Lavoie-Roux: Non, non! Demain, demain!
M. Ciaccia: Demain.
M. Vaugeois: Vous voulez qu'on contribue... Je trouve cela
extraordinaire, parce que je pensais lui faire plaisir. Aujourd'hui, il a
parlé longuement sur la limitation du droit de propriété.
On est conscient de cela. On dit qu'on va pouvoir compenser pour les exigences
qu'on pose, sauf que cela ne peut pas être l'occasion, pour un
proprié-
taire, de profiter des derniers publics pour ajouter une plus-value qui
lui permettrait de spéculer le lendemain sur un immeuble auquel on
aurait contribué au niveau de la restauration. C'est simplement une
protection!
M. Ciaccia: On n'ira pas sur le fond, on va s'en reparler
demain.
M. Vaugeois: Je suis certain qu'avec quelques explications le
député de Mont-Royal va me féliciter! En tout cas, vous
aurez la nuit pour vous préparer.
L'article 21. Il y a 53f, ce sont de petites fautes il ne faut
pas dire cela mais on améliore le français avec "d'un site
historique" ou "d'une aire de protection" et dans le paragraphe suivant, pour
53 toujours, on corrige l'ancien texte avec les mots "préparé" et
"adopté". Il y avait eu une curieuse rédaction.
M. Bertrand: Cette loi est un bien culturel!
M. Vaugeois: C'est génial!
L'article 23 du projet de loi est modifié par l'addition dans la
sixième ligne du premier alinéa, après les chiffres 31, 48
ou 50, des mots suivants: "Ou par une corporation municipale ou corporation de
comté, ou une communauté urbaine ou régionale, en vertu de
l'article 49 ou 50.
M. Fontaine: C'est bien, c'est bien.
M. Vaugeois: C'est important. C'est en référence
à l'article 49, qui prendra charge des ententes avec les
municipalités.
C'est une précision au niveau de la rédaction pour bien
montrer que les pouvoirs du ministre s'appliquent aussi pour le respect de la
réglementation des corporations.
L'article 27 du projet de loi, qui vous était soumis, a
été soustrait...
M. Alfred: Annulé.
Mme Lavoie-Roux: ... amendement.
M. Vaugeois: II a été retiré parce que nous
considérons que les membres de la commission qui seront à temps
plein ne seront pas nécessairement des fonctionnaires, qu'il n'y aura
pas lieu de les obliger à contribuer à un régime de
retraite.
Mme Lavoie-Roux: Un amendement annulé. Il y en a toujours,
mais je ne vois pas...
Une voix: II a été retiré.
M. Bertrand: ... motions préliminaires.
M. Alfred: Des motions préliminaires, il n'y en a
plus.
Mme Lavoie-Roux: Ah oui, il y en a toujours. Là, je vais
marchander. On ne va pas plus loin que 23 h 30, sans cela on va s'être
fait jouer.
Motions de l'Opposition
M. le Président, la première motion, si vous me permettez
de la lire, je ne vous ferez même pas de préambule. Je pourrais
prendre dix-neuf minutes pour le préambule et une minute pour la motion.
"Que cette commission invite le ministre des Affaires culturelles à
distribuer, avant le début c'est fort approprié de
l'étude article par article du projet de loi no 4, aux membres et
intervenants de cette commission, le projet de loi ou document de travail
concernant les modifications à la Loi sur les biens culturels remis au
ministre des Affaires culturelles par la Commission des biens culturels."
M. Vaugeois: Voulez-vous répéter?
Mme Lavoie-Roux: Je vais aller vous chercher cela ici. Bien oui,
distribuez-la, on travaille toujours bien nous autres.
M. Vaugeois: Relisez-le moi.
Mme Lavoie-Roux: "Que cette commission invite le ministre des
Affaires culturelles à distribuer, avant le début de
l'étude article par article du projet de loi no 4, aux membres et
intervenants de cette commission, le projet de loi ou document de travail
concernant les modifications à la Loi sur les biens culturels remis au
ministre des Affaires culturelles par la Commission des biens culturels".
M. Vaugeois: Écoutez, madame, est-ce qu'on peut faire cela
pour demain matin? J'espère, d'ailleurs, que vous vous en servirez et
surtout le député de Mont-Royal.
Mme Lavoie-Roux: Vous êtes d'accord?
M. Vaugeois: Je comprends. Vous en ferez votre profit,
j'espère.
M. Alfred: Adopté.
M. Vaugeois: J'espère surtout que le député
de Mont-Royal le lira attentivement.
M. Ciaccia: Si vous me laissez partir, je serai en meilleure
mesure de pouvoir lire demain matin.
M. Alfred: Adopté. Adopté.
Le Président (M. Jolivet): Pour les besoins du journal des
Débats, je reçois la motion et je la considère comme
adoptée.
M. Vaugeois: Très bien.
Mme Lavoie-Roux: Bon. M. le Président, je voudrais faire
motion que cette commission invite le ministre des Affaires culturelles
à distribuer je vous ai dit que c'étaient des motions
inoffensives avant le début de l'étude article par article
du projet de loi no 4, aux membres et intervenants de cette commission, le
rapport du comité ministé-
riel spécial chargé de préciser concrètement
les interventions souhaitables des divers ministères à
l'égard de l'île d'Orléans et de formuler des propositions
en matière d'aménagement du territoire pour les
municipalités concernées.
M. Vaugeois: Je vais la relire aussi. "Que cette commission
invite le ministre des Affaires culturelles à distribuer, avant le
début de l'étude article par article du projet de loi no 4, aux
membres et intervenants de cette commission, le rapport du comité
ministériel spécial chargé de préciser
concrètement les interventions souhaitables des divers ministères
à l'égard de l'île d'Orléans et de formuler des
propositions en matière d'aménagement...
Une voix: Le rapport...
M. Vaugeois: Le rapport chargé: 1) de préciser et
2) de formuler des propositions. Là, je vais vous dire ce qui en
est.
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, pour les
besoins du journal des Débats, je vous arrête. La motion est
reçue. Maintenant...
Une voix: Débattons-la.
M. Vaugeois: Non, on ne la débattra pas. Il faut quand
même savoir de quoi on parle. Il y a eu un mandat de donné au
ministre des Affaires culturelles de présider un comité
spécial et ce comité n'a pas encore eu de réunion
formelle, il avait deux mois pour préparer des documents sectoriels. Il
n'y a pas à ce moment-ci de rapport d'un comité spécial.
Il y a un comité de formé. Ce que je pourrais vous donner, c'est
le mandat du comité spécial. Cela tient en quelques lignes, mais
il n'y a pas encore de rapport, le comité ne s'étant pas encore
réuni on est à la cueillette des rapports des ministères
sectoriels.
Mme Lavoie-Roux: Le ministre peut-il nous dire quand ce
comité a été formé?
M. Vaugeois: Oui, cela fait à peu près deux
mois.
Mme Lavoie-Roux: Alors il ne s'est pas réuni.
C'était seulement une lettre d'apaisement aux gens de l'île
d'Orléans.
M. Vaugeois: Bien non. Que voulez-vous dire par une lettre
d'apaisement?
Mme Lavoie-Roux: C'est une lettre que j'ai ici, signée par
M. Tardif.
M. Fontaine: M. le Président, est-ce qu'on débat la
motion présentement?
Le Président (M. Jolivet): Oui.
Mme Lavoie-Roux: On avait dit qu'on n'entrait pas dans le
débat ce soir.
M. Bertrand: Alors, laissons-la en suspens.
Mme Lavoie-Roux: Si vous ne l'acceptez pas telle quelle on va la
laisser en suspens.
M. Vaugeois: Non, mais moi je vous dis... Écoutez, je ne
peux pas...
M. Ciaccia: C'est un esprit de coopération. Nous, on
aurait pu, M. le Président...
M. Brassard: D'une part, vous prenez connaissance des amendements
et d'autre part vous prenez connaissance des motions.
Le Président (M. Jolivet): Seulement un instant, s'il vous
plaît!
M. Brassard: Bien, c'est cela l'entente.
Une voix: Cela va bien là.
Le Président (M. Jolivet): Cela allait bien là.
Mme Lavoie-Roux: Non, non, on a dit que dès que cela
bloquerait on ne continuerait pas les motions.
M. Brassard: On prenait connaissance des amendements et on
prenait connaissance des motions.
Mme Lavoie-Roux: Non, non.
Une voix: Non, non. Ce n'était pas cela, l'entente.
Mme Lavoie-Roux: Non, on ne peut pas le faire du point de vue de
la procédure.
M. Brassard: On prend connaissance des motions.
Le Président (M. Jolivet): Le problème qu'on a au
niveau des amendements, c'est que le ministre peut déposer des
amendements, donner les explications générales dans le projet de
loi et au niveau des motions, il faut les débattre une par une.
Mme Lavoie-Roux: II faut les débattre.
Le Président (M. Jolivet): J'ai cru comprendre que tant et
aussi longtemps qu'il n'y avait pas de difficulté on continuait.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela! (23 h 30)
Le Président (M. Jolivet): Et je ne pense pas...
Mme Lavoie-Roux: C'est vraiment l'interprétation que
j'avais comprise.
M. Bertrand: Pourquoi n'avez-vous pas présenté les
deux autres avant?
Mme Lavoie-Roux: Je les ai prises comme...
M. Ciaccia: C'est dans cet esprit là que lorsque les
amendements ont été déposés il y a en quelques-uns
auxquels vraiment on pourrait s'opposer...
M. Vaugeois: Si je comprends bien, au fond, ce que vous me
demandez, vous ne le voulez pas.
M. Ciaccia: II y en a quelques-uns dont on pourrait s'opposer
à la recevabilité.
M. Vaugeois: Si vous me demandez cela, juste avant de commencer
l'étude article par article, moi, je vais refuser parce que je veux
commencer l'étude article par article. Écoutez, mes poches ne
sont pas bourrées de documents, moi.
Une voix: La motion est déposée.
M. Ciaccia: Oui, mais on a des demandes...
M. Vaugeois: Je ne peux pas, si vous me demandez cela au moment
de commencer l'étude du projet de loi article par article, vous sortir
le document de ma poche.
M. Fontaine: Ils peuvent la retirer. Mme Lavoie-Roux: Non,
M. le ministre... M. Fontaine: Ils peuvent la retirer.
M. Vaugeois: Les voulez-vous les rapports que vous demandez ou si
ne vous les voulez pas?
Demandez-les si vous les voulez. Je vais vous donner tout ce que
j'ai.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre... M. Grégoire: On
n'a rien à cacher. M. Alfred: Rien à cacher.
M. Vaugeois: Si vous voulez même travailler au
ministère, venez demain matin. J'ai du travail en masse, on manque de
monde.
Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, ne vous emportez point.
M. Vaugeois: Je n'ai pas promis un salaire, j'ai promis de
l'ouvrage.
Mme Lavoie-Roux: Non, ce qui arrive, c'est que quand la motion
est acceptée, on accepte un certain délai pour la remise de
documents. Alors, ne vous inquiétez pas.
M. Vaugeois: Ce n'est pas cela que ça dit. Cela dit
"avant".
M. Bertrand: C'est une formule de style.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je propose l'ajournement
à demain matin.
M. Bertrand: Très bien. M. Alfred: Adopté.
(Fin de la séance à 23 h 32)
ANNEXE Mémoire du Conseil régional de la
culture de Québec
Québec, le 10 mai 1978
Monsieur Denis Vaugeois, Ministre des Affaires culturelles, 955, chemin
Ste-Foy, Québec, Que.
Monsieur le ministre,
Le Conseil régional de la culture de Québec a
étudié avec intérêt le projet de loi 4 amendant la
Loi des biens culturels.
Le CRCQ a jugé bon de se prononcer sur quelques volets de ce
projet de loi, notamment sur la participation des paliers locaux de
décision à l'application des règlements, sur la Commission
des biens culturels et sur quelques autres points plus particuliers.
Participation des paliers locaux
Le projet de loi 4 procède d'un désir d'impliquer
davantage les citoyens dans la préservation du patrimoine et de ne plus
laisser cette responsabilité à la discrétion du ministre
seul. Il s'agit là d'un souci que nous partageons tous et nous ne
pouvons donc que nous réjouir de l'esprit de ce projet de loi.
Il est en effet de la plus grande importance que la préservation
du patrimoine québécois se fasse en impliquant le plus possible
de citoyens et de groupes.
Nous nous réjouissons comme beaucoup d'autres de
l'intérêt sans précédent qui se manifeste autour du
patrimoine québécois et nous appuyons votre intention "de poser
et de raffiner les bases législatives et réglementaires requises
sur lesquelles pourront s'appuyer les efforts des citoyens et des groupes de
citoyens"
Cependant, à notre avis, cela ne doit pas et ne peut pas se faire
par un simple transfert de responsabilités administratives d'un palier
de gouvernement à un autre.
D'abord, parce que les administrations locales n'ont pas toujours les
moyens et les effectifs pour assurer la préservation du patrimoine; ou
encore, parce que, trop souvent malheureusement, elles n'ont pas la
volonté politique de le faire; enfin, parce que l'adoption d'un
règlement au niveau local n'est pas, à elle seule, une garantie
de son application.
La décentralisation visée par le projet de loi 4 ne doit
pas faire oublier la responsabilité première du gouvernement
québécois en matière de préservation du patrimoine.
Il ne faudrait pas qu'elle corresponde à un désistement du
gouvernement central du Québec face à des pouvoirs locaux qui,
parfois et dans certains cas trop souvent, ont fait preuve d'une
négligence déplorable envers notre patrimoine collectif.
Il n'est pas inutile de rappeler que l'intérêt qui se
manifeste pour la préservation du patrimoine n'est pas venu, sauf
exception, des pouvoirs locaux mais bien plutôt du travail d'individus et
de groupes qui ont tenté de pallier à un certain
désintéressement de leurs administrateurs.
S'il y avait décentralisation, tel que suggéré dans
le projet de loi 4, il faudrait à notre avis: donner aux citoyens
et aux groupes le pouvoir d'intervenir pour faire appliquer la loi et les
règlements locaux reconnus par le ministre; assurer au ministre
des Affaires culturelles un rôle de tribunal d'appel de décisions
qui pourraient être prises par ses fonctionnaires ou par des
fonctionnaires des pouvoirs locaux; s'assurer que les amendements
nécessaires soient apportés au Code municipal, à la Loi
des cités et villes et aux diverses chartes municipales afin que
l'adoption et l'application des règlements locaux reconnus par le
ministre se fassent vraiment publiquement (par exemple, que les conseils de
ville et les commissions d'urbanisme publient ordres du jour et
procès-verbaux, et siègent publiquement à des heures
non-ouvrables, ce qui n'est pas le cas à Québec). et
veiller à ce que toute concertation utile soit faite au niveau des
différents ministères impliqués, notamment le
ministère des Affaires municipales et le ministère des Affaires
culturelles.
De quelques points particuliers
On devrait incorporer à l'article 31 comme à l'article 48
le concept de "démolition par négligence' . Une grande partie de
la dilapidation de notre patrimoine immobilier se fait davantage par
"démolition, par négligence ou abandon " que par destruction
systématique et illégale. Or, il était
toujours difficile d'intervenir dans ces cas car la loi actuelle ne le
permettait pas. Il serait donc important d'incorporer à la Loi ce
concept reconnu depuis longtemps par des cours américaines. Nous
suggérons de plus que l'article 49 soit reformulé de façon
plus ferme.
On devrait notamment: exiger que, dorénavant, les
municipalités soumettent le règlement qu'elles désirent
voir reconnu par le ministre, avant son adoption et non pas après. Ceci,
afin d'éviter de nombreux conflits tant entre le MAC et les
municipalités qu'entre les administrés et les
municipalités ou le MAC; prévoir que, lorsqu'un
règlement lui est soumis pour approbation, le ministre doit faire
connaître sa décision dans un délai précis (30
jours, par exemple); prévoir pour les municipalités qui
n'ont pas de règlement reconnu par le ministre mais qui ont un
arrondissement historique, un site historique classé et une aire de
protection, l'obligation d'indiquer clairement sur les permis qu'elles
émettent la nécessité d'obtenir un permis du MAC;
prévoir des recours et le droit pour quiconque de contester
auprès du ministre une décision rendue.
Enfin, il serait sans doute opportun de rappeler en complément de
l'article 57 le droit à l'injonction pour faire cesser des travaux et de
prévoir que tout individu ou tout groupe peut s'adresser à la
Cour supérieure pour obtenir une telle injonction.
Il faudrait aussi prévoir à cet article que tout individu
ou tout groupe peut s'adresser à la Cour supérieure, et non
seulement le ministre.
Rappelons que ce droit existe déjà ailleurs, qu'il est
question de l'incorporer à la Loi sur l'environnement et que le
même esprit d'implication des citoyens et de préservation
véritable devrait prévaloir dans ces deux lois.
La commission des biens culturels
On semble avoir décidé de conserver la Commission des
biens culturels et de lui donner les moyens de fonctionner plus efficacement.
Si l'on écarte de prime abord l'idée d'une Régie du
patrimoine, cette solution peut être heureuse. Cependant, il est
important que la Commission tienne des audiences publiques dans tous les cas
où ses décisions peuvent affecter des groupes ou des
catégories d'individus ou lorsque, à son avis,
l'intérêt public l'exige. De plus, les audiences publiques
devraient constituer la règle et non l'exception.
La Commission devrait permettre à tous les citoyens d'assister
à ses audiences et, s'ils le désirent, de faire connaître
leurs points de vue par les moyens et les procédures les plus simples.
Dans tous les cas où ses décisions sont susceptibles d'affecter
les droits des tiers, elle devrait être tenue de les aviser
préalablement et de les inviter à assister à l'audition
et, éventuellement, à intervenir. Lorsqu'elle tient ses audiences
publiques, la Régie devrait autant que possible siéger dans les
régions où se posent les problèmes à régler
et permettre, par avis publics, à tous les citoyens de la région
d'y assister et, le cas échéant, de s'y faire entendre.
L'ensemble des procédures d'audiences devrait se faire à
des heures non-ouvrables, à tout le moins lorsqu'il s'agit d'une
requête contestée. Il est injuste de demander à des
citoyens qui veulent s'impliquer dans la préservation du patrimoine de
perdre des journées de travail pour le faire et il n'est certainement
pas excessif de demander à quelques fonctionnaires de l'État de
siéger le soir comme cela se fait ailleurs.
Toute l'information de base devrait être facilement accessible.
L'objet des requêtes devrait être préalablement
publié, comme c'est le cas à la Commission de contrôle des
permis d'alcool. Il ne devrait pas y avoir de dossiers confidentiels, puisqu'il
s'agit là de la préservation du patrimoine de tous les
Québécois.
On devrait aussi permettre à tout citoyen ou tout groupe de
demander à la Commission d'inscrire à l'ordre du jour d'une de
ses réunions tout problème concernant le patrimoine et
d'être entendu à ce sujet.
La Commission devrait être tenue de publier ses avis
motivés, dans tous les cas où il y a eu audience publique et,
dans le cas des autres avis, en indiquer la liste et la nature, pour
consultation au secrétariat de la Commission.
En permettant ainsi une participation réelle des citoyens,
l'esprit de cette nouvelle loi serait mieux respectée. Voilà,
Monsieur le ministre, les quelques réflexions que nous a
inspirées ce projet de loi et que nous tenions à vous
communiquer.
Nous vous prions d'agréer l'expression de nos sentiments
distingués.
Conseil régional de la culture de Québec
Bernard Dagenais Président