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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 3 mai 1979 - Vol. 21 N° 67

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Affaires culturelles


Journal des débats

 

Etude des crédits du ministère des Affaires culturelles

(Quinze heures trente-six minutes)

Le Président (M. Blank): A l'ordre!

La commission permanente des affaires culturelles commence l'étude des crédits budgétaires du ministère des Affaires culturelles.

Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Godin (Mercier), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. le Moignan (Gaspé), M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville), M. Bertrand (Vanier), M. Brochu (Richmond), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laplante (Bourassa), M. Laurin (Bourget), M. Morin (Sauvé), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier).

Est-ce qu'on doit nommer un rapporteur de la commission? On suggérerait le député de...

M. Alfred: Deux-Montagnes.

Le Président (M. Blank): ... Deux-Montagnes. M. le ministre.

Remarques préliminaires M. Denis Vaugeois

M. Vaugeois: M. le Président, ce sera peut-être un peu inhabituel, mais j'espère que ça se fait. J'aimerais commencer par proposer officiellement aux membres de cette commission...

Mme Lavoie-Roux: D'adopter les crédits?

M. Vaugeois: ... un déplacement de la commission. Cela fait plusieurs fois qu'on en parle. A chaque fois qu'on se voit, on y fait allusion. Je sais que vous y avez fait allusion avant que j'arrive.

Mme Lavoie-Roux: Quand je vous ai vu arriver. Je pensais que vous vous étiez déplacé sans nous.

M. Vaugeois: J'ai failli le faire. Une Voix: A Toronto?

M. Vaugeois: Donc, on avait fait allusion, l'an dernier, à une visite de l'île d'Orléans à la suite de nos discussions, mais, cette fois-ci, j'aimerais officiellement proposer à la commission que les membres intéressés puissent se rendre à Toronto et à Washington, dans deux voyages successifs, bien sûr, pour fins d'évaluation d'équipement culturel de type bibliothèque, musée et également pour constater certains projets de restauration, de recyclage de bâtiments anciens et réinsertion dans les centre-ville, les quartiers et la vie normale d'aujourd'hui.

Cela a l'air certainement un peu curieux de faire une telle proposition, parce que, généralement, les services spécialisés font ce genre d'évaluation puis progressent. Mais il me semble que, dans le contexte actuel, il est souhaitable que des hommes politiques, qui sont confrontés avec ces problèmes également, puissent avoir l'occasion de se sensibiliser à des expériences qui se font, non pas à l'autre bout du monde, mais tout autour de nous et qui sont peut-être susceptibles de nous faire prendre conscience ensemble des défis qui se posent à nous tous, indépendamment des groupes politiques que nous représentons à l'Assemblée nationale.

Il y a des matières à divergence de vues, il y a probablement des matières à affrontement, il y en a aussi un certain nombre, dans une société comme la nôtre, qui sont des matières à consensus. Je pense que le développement des bibliothèques publiques, au Québec, le développement d'un réseau muséologique, des programmes de rénovation et de restauration sont parmi ces matières qui pourraient faire l'objet de consensus et de position commune de la part des membres de cette Assemblée. Il y aurait certainement matière, à un moment donné, à divergence dans le raffinement des questions, mais il y a un minimum qui m'apparaît pouvoir mériter une attention conjointe.

Il me plairait également que les membres d'une commission parlementaire puissent faire autre chose que d'étudier sèchement des crédits, mais qu'à l'occasion, ils puissent se sensibiliser à des dossiers tout à fait vivants.

Si mes partenaires de cette commission étaient d'accord, je pourrais expliquer davantage ce que nous pourrions faire à l'occasion de ces déplacements. Dans un premier temps, il me semble, M. le Président, que j'ai besoin de savoir si tout le monde est d'accord pour qu'on considère ces questions.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, même si vous ne m'avez pas donné la parole, je la prends.

Le Président (M. Blank): Vous avez la parole.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que la suggestion du ministre des Affaires culturelles est extrêmement intéressante. J'ai déjà visité une partie, peut-être pas dans un esprit aussi studieux et attentif que la commission ne saurait le faire, de ces équipements et de ces musées, tant à Washington qu'à Toronto. On a déjà dit autour de cette table que ce qui touche les problèmes des Affaires culturelles intéresse tout le monde, du moins les membres de cette commission, au-delà des allégeances politiques. C'est une chose, il m'apparaît, que tout le monde veut construire ensemble. Il y a peut-être certaines philosophies de base qui devraient être examinées de plus près; on aura peut-être l'occasion de le faire au cours de l'étude de ces crédits.

Il y a deux réticences que j'exprimerais, et je les exprimerais à n'importe quel ministre. La pre-

mière, c'est qu'on est quand même devant un budget — je ne voudrais pas que le ministre le prenne d'une façon péjorative, je lui dirai tantôt d'une façon plus critique...

M. Vaugeois: Plus péjorative?

Mme Lavoie-Roux: II reste qu'on est quand même devant un budget limité aux Affaires culturelles et je pense que le ministre en est aussi conscient que moi.

Le Président (M. Blank): Je voudrais ajouter à ce moment-ci que les frais de voyage des parlementaires ne viennent pas du ministère. Cela va à l'encontre de la Loi de la Législature. L'argent doit venir de l'Assemblée nationale.

Mme Lavoie-Roux: Parce que j'aurais détesté rogner sur le...

Le Président (M. Blank): Les fonctionnaires sont payés par le ministère, mais les parlementaires, selon la Loi de la Législature, peuvent voyager seulement aux frais de l'Assemblée nationale.

M. Vaugeois: Voilà pourquoi, d'ailleurs, il appartient à notre commission d'en traiter, dans un premier temps.

Mme Lavoie-Roux: Bon, d'accord, alors dans ces conditions cela enlève une partie des restrictions que j'avais. Les autres remarques que je voudrais faire sont peut-être davantage des souhaits.

D'abord, que cela se fasse, à un moment donné. Vous savez que l'Opposition a peut-être moins de disponibilité qu'un ministère, surtout quand arrive la fin de session. On doit être présents à d'autres commissions pour l'étude des crédits, il y a des projets de loi qui requièrent notre présence. On sait que le travail devient de plus en plus dense au fur et à mesure que les semaines avancent. C'est peut-être d'ailleurs la raison pour laquelle on ne s'est jamais rendus à l'île d'Orléans quand on examinait cela de plus près. Cela implique qu'une date soit choisie pour que nous puissions être disponibles, sans pénaliser tous nos collègues qui sont obligés de prendre la relève de nos dossiers, sans les avoir suivis d'aussi près.

Ma deuxième remarque, je pense que le ministre a certainement l'intention — il en a parlé — d'amener du personnel de son ministère. Je pense que cela serait tout à fait légitime et normal. Mais je souhaiterais également qu'il y ait de la place pour le personnel qui nous assiste et contribue aux interventions que nous faisons ici en commission parlementaire. Je profite de l'occasion pour lui rendre témoignage, en l'occurrence — l'Union Nationale aussi peut-être — comme le ministre l'a fait à l'égard des fonctionnaires qui l'assistent dans son ministère.

Ce sont mes premières réactions à la sugges- tion qui est faite par le ministre. J'aimerais quand même aussi, avant de dire un oui définitif, savoir dans quel esprit on va le faire, connaître les objectifs qu'on va poursuivre. Est-ce qu'on met l'accent sur un domaine particulier? Enfin, il y a tout le cadre d'un tel déplacement qui devrait être précisé avant qu'on dise: Oui, oui, on est d'accord avec cela. (15 h 45)

M. Le Moignan: Si M. le ministre me le permet, je souscris d'emblée à cette suggestion et je crois que l'idée d'aller à l'extérieur, surtout à Toronto, pour voir tout l'aspect canadien de nos musées, de ce qui peut nous intéresser, et ensuite une visite à Washington, je crois que chez les membres de la commission, ceux qui s'intéressent au domaine culturel, personne n'a de réelles objections. Mais j'ai lu quelque part dans un journal... Mme le député de L'Acadie a parlé de dossiers, de disponibilité. Je verrais cette commission parlementaire située en dehors de la période de la session, peut-être en septembre, quand il fait beau là-bas. Je ne crois pas que ce soit, d'ici au 22 juin, l'intention du ministre. Si telle est l'intention du ministre, il va nous le dire. Si c'est plus tard, ce serait peut-être bon qu'on le sache un peu d'avance pour planifier notre travail, soit en vacances, soit au cours du mois de septembre surtout, alors que nous avons plusieurs activités, dans le comté ou ailleurs.

Lorsque nous serons au courant de ces dates ou des intentions du ministre, et ensuite des objectifs qui vont expliquer ce voyage, je crois que tout le monde pourra en retirer beaucoup. C'est ce point qui m'intrigue et le ministre a déjà, en le regardant dans les yeux, des réponses tout à fait précises.

Le Président (M. Blank): Le ministre des Affaires culturelles.

M. Vaugeois: M. le Président...

M. Guay: ... l'Union nationale serait heureux.

Mme Lavoie-Roux: L'Union Nationale et le Parti québécois.

M. Guay: Je ne me souviens pas de ça. M. Vaugeois: De quoi on parle?

M. Le Moignan: Est-ce que vous voulez parler de politique?

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est le député de Taschereau qui tend les perches.

M. Vaugeois: Pour répondre aux questions du député de L'Acadie, bien sûr, chacun des groupes ici représentés pourrait se faire accompagner des gens qu'on jugerait nécessaire d'amener là-bas...

Mme Lavoie-Roux: Sans exagération.

M. Vaugeois: II conviendrait de s'entendre là-dessus, c'est une question de normes. Mais je pense que votre demande est très légitime. Quant aux dates, je pense que si, aujourd'hui, on s'entendait sur un principe, on pourrait adresser une demande formelle à la présidence et manifester le désir des membres de la commission, quitte à ce que, dans une circonstance moins officielle, on puisse se parler ensemble des gens qui devraient être de cette mission, du moment du départ, du moment du retour, et arrêter un programme plus précis. La proposition, au fond, c'est de partir un jeudi, à ce moment-ci, par exemple, après la période des questions, quitter pour Toronto et revenir le vendredi soir. Ce n'est pas très long, mais, en une journée et demie, si c'est bien organisé, on peut voir des choses suffisantes. Comme on serait accueilli par des gens qui sont d'ailleurs intéressés à nous montrer ce qu'ils ont, on peut apprendre beaucoup, on peut voir beaucoup en peu de temps.

Ma proposition, c'est qu'on pourrait ensemble regarder un certain nombre d'hypothèses d'utilisation du temps et dire: C'est cela, cela et cela qu'on va aller voir et c'est telle et telle personnes qu'on va rencontrer. On pourrait donc être à Toronto, en quittant à 3 h 30, à l'heure du souper. On pourra déjà avoir des premières séances d'information, faire une journée intensive le vendredi et rentrer en fin de journée le vendredi, ce qui nous demanderait peu de temps. Si on s'entendait sur un tel horaire... A Washington, cela pourrait peut-être être un peu plus long de quelques heures. Si on s'entendait sur un tel horaire, je vous proposerais de regarder ensemble, mais pas maintenant, dans les prochains jours, la possibilité d'un départ le jeudi 31 mai, pour utiliser la fin de semaine du 1er juin. Mais c'est seulement à titre d'hypothèse.

Le Président (M. Blank): Vous avez une conférence nationale.

M. Guay: ...

M. Vaugeois: Comment se fait-il que ce ne soit pas à mon agenda? On m'avait donné ces dates comme possibles.

Mme Lavoie-Roux: C'est peut-être que vous prenez vos distances.

M. Vaugeois: Toutes les interprétations sont permises, dans les circonstances.

M. Le Moignan: Cela tombe mal pour nous autres aussi.

M. Vaugeois: On envisage la possibilité, d'ici le 23 juin, de voir s'il y a une fin de semaine de ce type qui convient à chacun; sinon, on en retient le principe, et on manifeste notre intention à la présidence de prendre une telle initiative comme membres de la commission des affaires culturelles et, à un autre moment, on discutera d'une date et d'un programme plus précis.

M. Le Moignan: J'ai parlé de l'automne, parce que je pensais qu'on partait pour une ou deux semaines.

M. Vaugeois: Non. Cela dépend où on va. Est-ce qu'on pourrait dire, M. le Président, que nous sommes d'accord sur le principe?

Mme Lavoie-Roux: Oui. M. Le Moignan: Oui.

Le Président (M. Blank): D'après ce que je vois, il y a consensus.

M. Le Moignan: Tout le monde est d'accord.

Le Président (M. Blank): Maintenant, on va retourner à l'étude des crédits budgétaires. Le ministre a peut-être une déclaration à faire.

M. Vaugeois: Non. Etant donné qu'on a peu de temps à notre disposition, je pense que je vais tout de suite laisser à mes collègues le soin d'amorcer la discussion.

Le Président (M. Blank): Mme le député de L'Acadie.

Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, en remplacement de mon collègue de D'Arcy McGee qui a d'autres responsabilités à l'Assemblée nationale dans le moment, je voudrais simplement souligner mon étonnement de voir l'augmentation à peu près nulle des crédits du ministère des Affaires culturelles. Le budget de cette année augmente de $211 000, ou 0,31%. Compte tenu des déclaratibns et de l'importance que le gouvernement du Parti québécois dit attacher à la culture, en tout cas, cela ne se reflète pas dans les montants qu'il met à la disposition du ministère des Affaires culturelles.

La première question que je ne puis m'empê-cher de poser au ministre, c'est, d'une part, $211 000 d'augmentation, si on tient compte des augmentations d'ordre salarial qui sont prévues et des augmentations à cause de l'inflation, de l'indexation pour ce qui concerne les coûts d'entretien et évidemment des augmentations qui peuvent être consacrées à des programmes nouveaux, etc., on peut se demander, d'une part, quels seront les programmes nouveaux. S'il y en a, de quelle façon vont-ils aller rogner les programmes existants? Je ne puis m'empêcher d'être très inquiète quant à l'importance que le gouvernement actuel et, particulièrement cette année, accorde au ministère des Affaires culturelles.

Le ministre actuel n'était pas le ministre en titre des Affaires culturelles il y a deux ans quand nous avions étudié pour la première fois le budget des Affaires culturelles. Nous avions dit, à ce moment-là, que ce qu'il nous semblait un objectif à atteindre, c'était que le budget des Affaires culturelles représente au moins 1% du budget

général du gouvernement. Le ministre du temps — peut-être même que cela fut répété par le ministre, l'an dernier, je ne pourrais l'affirmer; ce serait certainement verifiable — disait qu'il s'agissait là d'un idéal et qu'il fallait s'y acheminer petit à petit. Je trouve qu'on prend beaucoup de temps à atteindre l'idéal et que c'est vraiment à pas de tortue, c'est certainement le petit pas des...

M. Vaugeois: A pas feutré.

Mme Lavoie-Roux: C'est pourquoi j'aimerais que, tout à l'heure, le ministre nous fasse la ventilation de cette augmentation, parce qu'on pourrait peut-être se retrouver finalement en valeur absolue avec une diminution de ce qu'on donne au ministère des Affaires culturelles quant aux services que l'on veut accorder et quant aux priorités que le ministère prétend retenir.

Je m'en voudrais de ne pas signaler, compte tenu des longues discussions que nous avons eues, l'an dernier, d'abord au moment de l'étude des crédits et également au moment de l'étude de la loi 4 qui a amendé la Loi sur les biens culturels, toutes les grandes déclarations que, de part et d'autre de cette table, on a faites de bonne foi, sur le patrimoine, la valeur du patrimoine, l'utilisation du patrimoine, vous vous en souviendrez, de sa mise en valeur, etc. Or, touchant la sauvegarde et la mise en valeur des biens culturels, on se retrouve avec une diminution de 15,94%, c'est pratiquement une diminution de 16%. Je voudrais au moins des explications là-dessus de la part du ministre.

J'aimerais également rappeler au ministre que je lui avais posé des questions quant aux intentions qui avaient été exprimées par celui qui l'avait précédé concernant la priorité qu'il accordait à la question des archives nationales, des archives judiciaires quant à leur revalorisation. A ce moment, une loi-cadre nous avait même été promise pour regrouper toutes les archives sous l'autorité du ministère des Affaires culturelles. En dépit de promesses qui nous avaient été faites il y a maintenant deux ans, dont on avait reparlé l'an dernier, on se retrouve encore devant l'absence d'une loi-cadre touchant tout le domaine des archives.

Il y avait aussi la fameuse politique du livre. Là-dessus, je pense qu'on aura peut-être l'occasion d'en reparler plus longuement quand on arrivera au programme qui y touche. Je ne connais pas le chemin chaotique que le ministre a dû parcourir concernant sa politique du livre. On a l'impression que ce sont des hauts et des bas, des appréciations, contestations, etc. Encore une fois, on est en face de l'absence d'une politique du livre qui, je crois, devait être accompagnée d'une loi quelconque. Nous sommes encore devant rien.

Je dois dire que, finalement, on a donné suite ou on est à la veille de donner suite au rapport Frégault, qui prévoyait la création de l'institut d'histoire et de civilisation et qui maintenant est transformé en un institut de recherche sur la culture. Au moins, cela est sur la table, c'est en discussion. Il devrait y avoir quelque chose d'adopté d'ici la fin de cette session.

Je ne voudrais pas moi non plus — compte tenu que le temps dont les partis ont convenu cette année pour l'étude des crédits des Affaires culturelles est passablement restreint par rapport au temps qu'on y avait consacré les années antérieures — m'allonger sur une énumération de plusieurs autres questions qui, selon moi, n'ont pas trouvé réponse au cours de l'année. Nous aurons l'occasion, au moment de l'étude programme par programme d'y revenir. Si j'avais un jugement à passer, le seul que je pourrais passer cette année qui se voudrait favorable, c'est qu'il semble qu'on a probablement dû bien administrer le ministère des Affaires culturelles, mais je ne peux quand même pas le féliciter pour ses initiatives nouvelles. Peut-être pourrais-je faire exception pour l'Orchestre symphonique des jeunes, quoique je ne suis pas certaine que ce ne soit pas l'année dernière que ceci s'est passé. Est-ce que cela a été concrétisé durant cette année ou l'année antérieure? L'année antérieure. Voyez-vous, j'étais prête à vous trouver de bons points, là, avec toute ma bonne foi, mais, même ça, ça ne réussit pas.

Je voudrais quand même que... Je sais que le ministre est foncièrement intéressé à tout le domaine des affaires culturelles là-dessus. Je ne mets pas ça en question. Je voudrais qu'il nous dise franchement quelle est la priorité que le gouvernement accorde, d'une façon concrète, à tout le domaine des affaires culturelles et, s'il trouve que le gouvernement pénalise le ministère des Affaires culturelles, qu'il nous le dise. Je comprends que ce n'est peut-être pas de bonne guerre, mais on est prêt à partir en voyage ensemble pour améliorer les affaires culturelles; on veut bien essayer de l'aider. Mais il n'y a rien, dans ce qu'il y a devant nous, qui démontre qu'on soit en voie de progression. Le ministre pourra me rétorquer qu'il y a eu la création de la Société des industries culturelles, mais, là encore, je ne suis même pas certaine — le ministre pourra nous le dire plus tard — que si le $1 000 000 de capital-actions qui est prévu pour cette année... Vous êtes rendu à $3 millions depuis... à $10 millions, c'est réparti sur un nombre X d'années, comme le ministre des Finances l'a dit, c'est $10 millions de capital-actions pour cette année?

M. Vaugeois: Selon les besoins. On en reparlera.

Mme Lavoie-Roux: Bon! On pourra faire préciser ça, si vous voulez, par le ministre des Finances en Chambre pour avoir une réponse claire et nette, mais je ne suis vraiment pas restée avec cette impression. D'abord, quand je lui ai posé la question, le lendemain du dépôt du budget, il ne savait à peu près pas ce dont je parlais. Il dit: Oui, elle va être adoptée, la loi. Elle avait été adoptée au mois de décembre. Je ne caricature pas, c'est exactement ce qui s'est passé. Je comprends qu'il ait pu avoir des distractions...

M. Vaugeois: II a trois ministères à diriger. Mme Lavoie-Roux: Pardon?

M. Vaugeois: II a trois ministères à diriger.

Mme Lavoie-Roux: Non, c'est ce que je dis. Je comprends qu'il ait pu avoir des distractions. Il a beaucoup de préoccupations, mais...

M. Vaugeois: Cela m'étonne quand même. Je ne suis pas sûr. Généralement, il n'a pas beaucoup de distractions.

Mme Lavoie-Roux: Non, je lui pardonnerais facilement, mais, en tout cas, une fois revenu sur terre, en contact avec le problème de la Société des industries culturelles, il nous a parlé de $1 million pour cette année. On pourra faire confirmer ça.

J'arrête ici mes remarques et, comme je le disais, nous reprendrons au fur et à mesure, à l'étude de chacun des programmes.

Le Président (M. Blank): M. le député de Gaspé. (16 heures)

M. Michel Le Moignan

M. Le Moignan: M. le Président, je vais essayer de me limiter à quelques très brèves remarques. J'avais constaté également que le budget est demeuré au statu quo. Il n'a pas tellement évolué depuis l'an dernier. Si on remonte au début des années 1960, on sait très bien que le ministère des Affaires culturelles était le parent pauvre, à ce moment-là; il a même provoqué la démission d'un ministre, qui est sorti en claquant les portes. Je pense que c'était en 1964, M. Lapalme...

M. Vaugeois: C'est une idée, ça. Il y a quelque chose là-dedans.

M. Le Moignan: II y a eu des progrès, parce qu'il y a eu l'inflation, le coût de la vie, donc, cela a augmenté tranquillement un petit peu tous les ans, pour finalement atteindre $65 millions depuis deux ans.

Evidemment, on ne peut pas le comparer aux ministères de l'Education et des Transports qui englobent des milliards de dollars, mais on sait très bien que, pour la vie d'un peuple, quand on sait que la culture est un peu l'expression des Québécois, de tout ce que ça peut comporter dans tous les domaines. Quand on sait que les domaines sont tellement vastes — Mme le député de L'Acadie en a mentionné quelques-uns — le livre, tout ce qui peut toucher au patrimoine, à la sauvegarde, aux musées, etc., à ce moment-là, on voit que votre ministère a encore beaucoup de travail à accomplir, d'abord pour protéger nos biens historiques et pour stimuler la création, dans tous les domaines possibles. Je sais que les demandes affluent au ministère des Affaires culturelles, chaque année, et ces demandes sont de plus en plus nombreuses.

Ce qui est important, c'est que le dynamisme de ce ministère se manifeste non seulement au point de vue administratif, mais au point de vue de la création, au point de vue de la conservation, au point de vue du rendement, au point de vue de l' évolution. Le ministre a fait allusion à un voyage à Toronto; je pense que ça peut être un stimulant, ça peut aiguiser notre appétit à exiger plus du ministre, après coup...

Mme Lavoie-Roux: ... des Finances.

M. Le Moignan: On pourrait peut-être appuyer le ministre des Affaires culturelles auprès du ministre des Finances. Quand on sait que, non seulement en Ontario, mais dans les provinces de l'Ouest, en Alberta, au Manitoba, en Saskatchewan, en Colombie-Britannique, les gouvernements ont dépensé des millions pour ériger là-bas certains musées que j'ai déjà eu l'occasion de visiter, je crois que c'est un peu gênant pour les Québécois, nous qui voulons essayer de bâtir et de manifester notre patrimoine, notre culture, de voir — et ce serait peut-être intéressant, en cours de route, à l'étude des crédits — les budgets des ministres des Affaires culturelles des autres provinces, quel que soit le titre qu'on leur donne; je suis assuré que le Québec n'est certainement pas à l'avant-garde dans ce domaine. Cela dure, comme je l'ai mentionné, depuis de nombreuses années.

Pour ne pas aborder trop de points, puisqu'il va en revenir dans les programmes et dans les éléments, à la suite de la mise sur pied de la Société de développement des industries culturelles, on peut certainement se poser des questions. Il y a un aspect commercial là-dedans, c'est vrai, mais le conseil administratif est certainement formé. Le ministre nous dira plus tard quelles sont les étapes qui, depuis le mois de décembre ou de janvier, ont été franchies et quels sont les secteurs qui préoccupent davantage le ministre en fonction de la SODIC qui a été mise sur pied. C'est beau, on peut se procurer les moyens de diffusion des produits culturels; quand on parle de produits culturels, au sens où on l'a déjà expliqué, cela comprend les études sur le marché, l'encouragement donné à nos artisans et cela, dans toute la province. Je pense qu'on va y revenir un peu plus tard et je ne veux pas insister beaucoup sur cet aspect. Le ministre pourra nous indiquer, en temps et lieu, si cette société qui était d'abord une société de prêts, si ma mémoire est bonne, va demeurer une société de prêts ou encore... Je pense qu'avec le temps, il y aura des subventions, un encouragement plus grand qui pourra être donné.

Je ne veux pas prolonger, M. le Président, comme nous sommes d'accord pour abréger l'introduction et consacrer quelques minutes de plus à chacun des éléments, je termine pour l'instant.

Le Président (M. Blank): M. le député de Papineau.

Discussion générale

M. Alfred: J'aurais pu poser ma question plus tard, mais je suis obligé de partir à 16 h 45 pour une urgence, je suis obligé de la poser maintenant au ministre des Affaires culturelles.

M. le ministre, il y a un petit problème peut-être qui existe dans le CRC de Lanaudière. Ma première question est celle-ci: Comment se fait-il qu'un CRC comme celui de Lanaudière est en bas du minimum requis pour son fonctionnement de CRC normal, quand le minimum requis pour le fonctionnement est de $95 000 par année?

Ma deuxième question est celle-ci: Dans la région de Laurentides-Lanaudière, le CRC et le CRDLL ont des budgets distincts et sont des identités administratives distinctes. Pourquoi est-ce différent pour le CRC de Lanaudière? Je voudrais que vous répondiez à ces deux questions seulement, qui sont d'ordre général dans le fonctionnement des CRC.

M. Vaugeois: Je peux peut-être commencer par ce détail assez technique. Je sais que les gens du CRC sont là et que mon collègue doit partir. L'approche des conseils régionaux a été prise par des prédécesseurs, j'en ai hérité. J'ai hérité également d'une donnée de base de ce qui était une région administrative, de ce qui était considéré comme région pour la formation d'un Conseil régional de la culture. La Beauce étant une partie de Québec, la Mauricie et les Bois-Francs étant une région, et je pourrais multiplier les exemples, à peu près toutes les régions du Québec, telles que définies par l'approche administrative ne correspondent pas à des régions naturelles. Toutes les régions du Québec ont accepté de jouer le jeu. Les régions Mauricie et Bois-Francs qui étaient historiquement et géographiquement séparées par le fleuve ont accepté, pour fins de fonctionnement, une approche de développement culturel régional, de former une région et de s'organiser avec l'approche proposée. La Beauce, pour fins de fonctionnement, a accepté de se considérer comme étant de Québec etc.

Pour des raisons qui m'échappent, mais que j'ai accepté de considérer, l'an dernier, les régions de Laurentides-Lanaudière ont résisté à la proposition du ministère. Mon point de vue là-dessus, c'est que ces deux régions sont beaucoup plus près l'une de l'autre que celles des exemples que j'ai donnés. Je pense que les différences sont beaucoup plus profondes entre la Beauce et Québec, entre la Mauricie et les Bois-Francs qu'elles ne peuvent l'être entre Laurentides et Lanaudière. Mais je n'ai pas voulu discuter cela. J'ai demandé à mes gens de trouver une solution de compromis dont j'ai donné moi-même les paramètres.

Puisque nous avions un budget pour dix Conseils régionaux de la culture, puisqu'en gros — j'arrondis — les budgets étaient de l'ordre de $100 000 par CRC, j'ai dit: Si les gens des deux régions ou des deux sous-régions concernées — je parle de sous-régions pour fins de compréhension — sont prêtes à se partager l'enveloppe qui était prévue pour un CRC et avec cette enveloppe se donner deux entités distinctes, avec une répartition aussi neutre que possible, j'ai demandé des critères objectifs qui laissaient de côté la force de la négociation, de la pression et de l'émotivité, par exemple, des critères d'ordre démographique... j'ai dit: Si les deux groupes réussissent à s'entendre avec des critères objectifs pour se partager ce qui normalement est réservé à un CRC et s'ils acceptent de fonctionner avec ce montant, mais avec deux entités distinctes, je vais demander à mes services de s'aligner là-dessus. C'est ce qui a été fait. Dans mon esprit, c'était la formule à retenir pour les années prochaines, puisque nous ne voulons pas remettre en question ce que toutes les autres régions du Québec ont accepté. Nous ne pouvons remettre en question, je pense, cette approche pour un endroit particulier.

Je suis sensible aux arguments qui sont manifestés, mais ils peuvent venir de toutes les autres régions du Québec. Il n'y en a aucune où la région administrative retenue colle à la réalité naturelle, à la réalité culturelle régionale. Je suis bien placé pour en parler parce que c'est le cas chez moi. Nous acceptons cette formule. Dans la mesure où les deux groupes de Laurentides-Lanaudière maintiennent l'entente du début, c'est-à-dire de fonctionner comme deux entités distinctes avec l'enveloppe normalement réservée à un CRC, nous maintenons notre position. Autrement, il va falloir rouvrir la question pour tout le monde, et je pense que cela n'est dans l'intérêt de personne.

J'aimerais revenir aux propos que vous avez tenus. Il y a bien des façons de réagir à ce que vous avez dit; je pourrais, à la limite, dire: C'est vrai, le budget du ministère des Affaires culturelles augmente fort peu et je devrais quasiment compter sur vous pour qu'il soit augmenté le plus tôt possible et presque vous rejoindre sur l'inquiétude que vous avez manifestée. Je ne sais pas si ce serait de bonne guerre, mais ce ne serait pas honnête, parce que j'ai eu l'occasion de discuter avec mes collègues, avec le ministre des Finances en particulier, des crédits qui sont ici et je vais vous expliquer dans quel esprit ils ont été mis au point. Je ne vous raconterai pas ma vie.

Je pense que ce n'est pas nécessaire d'insister très longuement pour vous expliquer que j'ai eu envie de faire ce que j'ai souvent proposé à d'autres de faire, à l'intérieur du gouvernement, une opération budget 0 et effectif 0. C'est ce que je suis en train de faire, je n'ai pas l'intention de prendre des années pour le faire. D'ailleurs, je n'ai pas des années devant moi pour faire ça. Je pense qu'on peut très rapidement faire une opération budget 0 et effectif 0. C'est extrêmement sain. Cela peut amener momentanément, dans certains services, des diminution d'effectif. J'ai demandé à mes gens au ministère de jouer ce jeu.

Il y aura effectivement des diminutions d'effectif qui seront peut-être significatives dans certains de nos services, qui voudront dire, à court terme, par ailleurs, des déplacements d'effectif vers des services qui avaient été démunis, qui n'avaient pas eu la cote d'amour, soit des ministres qui m'ont précédé, soit qui n'avaient pas été favorises par les circonstances. Du côté de l'effectif, c'est ce que nous faisons, nous nous faisons des ponctions internes pour déplacer ces gens à l'intérieur, nous avons des secteurs qui se

développent rapidement actuellement, qui ont besoin d'effectif. Nous cherchons à trouver ce personnel à l'intérieur de nos rangs.

Vous le verrez à l'occasion de l'étude de nos crédits, je peux vous dire que les résultats peuvent être assez étonnants. Nous sommes en train de développer les archives du Québec, comme cela n'a jamais été le cas auparavant. Nous viendrons avec une loi, nous avons physiquement des installations nouvelles qui sont les nôtres, nous développons des bureaux régionaux pour les archives nationales qui font l'envie des autres provinces et qui font l'objet d'études de gouvernements qui nous entourent. Il nous manque une loi importante, nous y arrivons maintenant. Elle est sur le point d'être présentée à l'Assemblée nationale. Nous réalisons ça pour l'instant avec notre effectif interne.

Quant à l'opération budget 0, je pourrais vous en raconter des bonnes, mais vous avez de bons recherchistes, vous êtes très sensibles à ce qui se passe dans les gouvernements, certains membres de l'Opposition ont été membres de gouvernements, ils savent fort bien qu'il se prend des habitudes à l'intérieur des gouvernements. Il y a des sommes qui sont engagées année après année sur lesquelles on ne se pose plus de questions. Il y a des groupes qui ont des subventions par habitude, tant qu'ils existeront, ils auront une subvention et même, parfois, on a le culot de les indexer, systématiquement, sans trop se demander s'ils correspondent toujours à des besoins ou à des priorités, parce qu'à certains moments, il faut analyser ces choses en termes de priorités.

Tout ne peut pas être retenu. Personne, autour de cette table, ne souhaite, je pense, des augmentations de taxes et d'impôts à l'infini. Nous voulons que l'argent des contribuables serve là où c'est vraiment important, quand il n'y a pas d'autres façons de faire.

Pour nous autres, nous sommes engagés dans une opération budget 0, ce qui nous amène à remettre en question à peu près tout ce qui existe au ministère des Affaires culturelles. Cela ne veut pas dire que nous paralysons le ministère immédiatement; ça veut dire que nous en sommes à cette étape. Nous dégageons des sommes d'argent de certains endroits. Nous aurons l'occasion, avec l'étude des crédits, point par point, de vous donner des exemples concrets. Parfois, ce sont des choses qui vont disparaître, parfois, c'est une nouvelle façon de faire que nous allons avoir.

Un exemple. Quand nous faisons de la restauration de monuments, de bâtiments de grande importance, c'est une opération qui nous coûte très cher et on avait pris l'habitude de la faire d'abord dans une démarche de protection du bâtiment. On a eu tendance à donner au bâtiment l'allure qu'il avait déjà eue, mais sans trop se préoccuper de sa fonction éventuelle, de sa réinsertion dans la vie d'aujourd'hui. (16 h 15)

Tous les pays, tous les gouvernements du monde sont confrontés par ce genre de problème. On s'interroge partout dans le monde, et, à peu près partout dans le monde, on chemine de la même façon actuellement. Il y a des idées nouvelles qui viennent, comme celle-ci, qu'il ne faut pas prendre au pied de la lettre, mais qui consistent à dire: "Le patrimoine doit gagner sa vie." C'est une idée excessive, mais je pense quand même qu'elle nous donne une avenue qu'il faut explorer. Je suis maintenant convaincu qu'avec $1 million du côté de la restauration, nous pouvons faire beaucoup plus que nous ne faisions traditionnellement, si nous modifions un peu notre approche.

Nous avons également pris l'habitude, au Québec, de mettre les institutions culturelles à la charge de l'Etat. Le but de la mission que je propose n'est pas uniquement d'aller voir de belles bibliothèques à l'extérieur du Québec. C'est de se rendre compte aussi comment elles ont été financées. Une magnifique bibliothèque comme celle de Toronto a été construite par des contributions municipales. Ce sont les municipalités, les six municipalités qui composent le Toronto métropolitain, qui ont financé la construction de cette bibliothèque qui est la plus belle que j'aie vue. Au niveau du fonctionnement, le ministère du gouvernement ontarien intervient, à peu près sur la base de nos programmes à nous.

J'étais à Boston il y a quelques jours — je ne raconterai pas en détail ce que j'ai vu là-bas — j'y ai visité des institutions de type bibliothèque et de type musée, que la collectivité locale, que la collectivité même reconnaît comme ses institutions, avec une participation extrêmement importante. Ce sont des modèles que nous n'avons vraiment pas développés au Québec.

La réforme de la fiscalité municipale dégage vers les municipalités des sommes d'argent importantes. Il faut compter sur le milieu pour que nos gouvernements locaux fassent des choix qui ne sont pas toujours dans le sens des égouts, des aqueducs, de l'ouverture ou de l'élargissement de boulevards. (A cet égard, je reviendrai à la question de mon collègue de Papineau tout à l'heure.) Pour nous, les conseils de la culture sont très importants, justement parce qu'ils peuvent avoir une action locale, et ce ne sont pas des organismes qui devraient normalement coûter cher à l'Etat, ils devraient rapporter à l'Etat, en termes de dynamisme local et régional et également en termes d'animation du milieu pour une contribution du milieu aux institutions du milieu.

C'est un peu ce genre de préoccupation qui nous anime à ce moment-ci. Nous examinons nos programmes, nous examinons nos budgets, avec l'approche que je viens d'expliquer. Mais, plus techniquement, je vais vous rassurer sur les chiffres que vous avez sous les yeux, qui s'expliquent par ce que je viens de dire et qui s'expliquent aussi par un certain nombre de technicités budgétaires que j'ai tenu à vous présenter sans aucune émotivité, très froidement, aux pages 55 et 56 du document que vous avez entre les mains. J'attire votre attention sur les pages 55 et 56.

Quand vous dites que le budget du ministère a augmenté de $211 000, il y a une petite présentation qui est trompeuse...

M. Guay: Les membres de l'Opposition ont en main un document que nous aimerions bien avoir.

M. Alfred: Que le pouvoir n'a pas. Mme Lavoie-Roux: Cela vous surprend? M. Alfred: On avantage l'Opposition. M. Le Moignan: Discrimination.

M. Vaugeois: J'ai toujours pensé qu'on avantageait l'Opposition dans le gouvernement. Plusieurs de nos politiques favorisent l'Opposition. On l'a vu d'ailleurs récemment.

Mme Lavoie-Roux: C'est pour cela qu'on a gagné les élections.

M. Vaugeois: La différence de $211 000 découle principalement du fait qu'on a mis côte à côte le budget de la fin de l'exercice 19781/79 avec le budget du début de l'exercice 1979/80. Si on prenait le budget du début de l'exercice, avec ce budget du début d'exercice, l'augmentation est plutôt de l'ordre de $10 millions.

Je veux vous dire franchement que l'aboutissement de l'opération que nous menons actuellement au ministère va nous amener non pas à retourner des crédits à l'administration, mais à avoir de meilleurs arguments, de meilleures approches et non pas à court terme, mais des approches à moyen et à long terme pour une augmentation de crédits. Je le pense. Je ne pense pas que nous puissions faire tout ce que nous voulons faire sans bouger au niveau des crédits, sans améliorer notre situation budgétaire; je crois que nous serons amenés à le faire en cours d'année, à peu près selon ce que nous avons fait l'an dernier.

L'an dernier, à plusieurs reprises en cours d'année, nous avons amélioré notre position budgétaire, principalement avec le programme OSE, au moment du budget supplémentaire, avec un programme spécial pour le disque et le spectacle, avec des sommes importantes dégagées du côté de la restauration. On peut prévoir déjà que le même phénomène va se produire pendant l'exercice budgétaire 1979/80, mais, pour l'instant et pour autant que nous complétons notre révision d'effectifs et de budgets, nous pensons pouvoir commencer l'année et faire un bout de chemin avec ce que vous avez sous les yeux.

Pour être honnête, donc, je vous demanderais de comparer le budget avec lequel nous démarrons cette année avec le budget avec lequel nous avons démarré l'an dernier. Si vous voulez porter la discussion sur les augmentations de crédits: les crédits que nous aurons en fin de cette année, 1979/80, je pense, auront à peu près la progression de ce qui s'est passé durant l'année qui s'est terminée en mars 1979.

La création de la SODIC, ce n'est pas une fiction. En décembre, la loi a été votée. En janvier, on s'est mis au travail, on a fait des consultations. Cela a été peut-être un peu plus long que je l'avais espéré, mais cela a donné des résultats extrêmement heureux dont je suis très fier. Les membres sont là, le président et le vice-président. Le président prend ses fonctions actuellement. Le vice-président rentrera de l'étranger dans quelques jours et il va également assumer ses fonctions. Il s'agit de M. Guy Morin et de M. John Goodwin.

Je veux attirer votre attention sur le fait que les neuf membres du conseil d'administration viennent tous du secteur privé, qu'ils ont tous réussi en affaires, qu'ils ont tous réussi dans le secteur des affaires culturelles ou des industries culturelles, ce qui est de bon augure, ce qui démontre en passant que si c'est un secteur ingrat, qui nécessite beaucoup d'énergie, qui nécessite beaucoup de travail, qui nécessite beaucoup de talent, la réussite n'est pas impossible. Ces gens feront profiter la collectivité de leur expérience personnelle d'hommes d'affaires qui ont investi dans le secteur culturel.

L'entente que nous avons avec le ministre des Finances est la suivante: C'est que le budget de la SODIC est de l'ordre de $10 millions, pour l'instant, sauf que je n'ai pas l'intention de demander au ministre des Finances de nous remettre $10 millions dès cette année. Nous ne sommes pas une caisse ou une banque. Nous n'avons pas besoin d'argent du gouvernement pour nous faire des petits et grossir un peu notre budget. Nous aurons cet argent au fur et à mesure de nos besoins.

De la même façon que nous ne demandons pas les $10 millions tout de suite, de la même façon nous n'entendons pas nous arrêter à $10 millions. C'est un premier montant, une première indication qui a été donnée, parce que, pour le gouvernement et pour les gouvernements, quels qu'ils soient, je suis persuadé que ces $10 millions seront un excellent placement. J'ai toujours dit que l'argent que nous investissions dans le domaine culturel était le meilleur placement que nous ne puissions faire en termes économiques et en termes de développement et de progrès social. Je ne veux pas reprendre ces propos-là avec vous, vous êtes des gens convaincus à l'avance. Mais c'est peut-être bon de rappeler que l'argent que la collectivité dans son ensemble met dans le secteur culturel est de l'argent qui produit d'abord de l'activité économique, et peut-être parmi la plus intéressante, la moins polluante et qui, en même temps, assure un progrès social et un développement collectif auxquels on aspire tous, je crois.

Dans les propos qui ont été tenus, il y aurait d'autres points que je pourrais, à ce moment-ci, relever. Je pense que ce n'est pas le moment. Je vais terminer avec deux petits points. Je ne crois pas qu'il faille évaluer et je vous demanderais de ne pas chercher à évaluer le rendement des services, le rendement des ministères, le rendement d'un gouvernement par ses bonds budgétaires. Il me semble que c'est une mauvaise approche. Le gouvernement qui dépense le plus et qui augmente le plus les dépenses publiques ne devrait pas être jugé comme le meilleur gouver-

nement. Le ministère qui arrive avec les plus grosses augmentations budgétaires ne devrait pas être considéré comme le plus dynamique. Il me semble que tout ne doit pas se calculer en termes de piastres. Il y a des réévaluations intérieures, il y a des réorientations, il y a des participations des autres qu'on peut aller chercher qui devraient être beaucoup plus significatives que des augmentations en termes de pourcentage.

Notre ministère depuis plusieurs mois, cherche à amener d'autres ministères à reconnaître la dimension culturelle. Là-dessus, il y a une collaboration que je veux souligner publiquement. Il y a des ministères qui, traditionnellement, ne se préoccupaient pas tellement de la question culturelle. Le ministère des Transports a été souvent identifié comme un ennemi du patrimoine, comme un prédateur. Au ministère des Transports, actuellement, il y a une réévaluation, une révision des attitudes qui est extraordinaire. Le ministre des Transports a accepté de prendre la parole comme invité d'honneur à un colloque sur l'archéologie. Cela ne s'était jamais vu. Je pense que c'est beaucoup plus significatif en termes de développement culturel... Ecoutez, vous avez beau chercher dans vos archives, vous ne trouverez jamais un tel précédent. Je pense que c'est beaucoup plus significatif d'avoir un ministre des Transports qui dit que son ministère va se préoccuper de l'archéologie que de grossir le budget du service d'archéologie.

Quand l'Hydro-Québec, quand la Société d'énergie de la Baie James reconnaissent cette dimension et reconnaissent que dans ses études d'impact, l'approche archéologique doit être considérée, cela ne grossit pas nos budgets. Cela grossit, cependant, le budget des fouilles archéologiques au Québec. Tout n'a pas besoin d'être dans le budget d'un ministère. Tout n'a pas besoin d'être dans les dépenses publiques d'un gouvernement. Si les partenaires de ce gouvernement ou de ce ministère reconnaissent l'importance du secteur qui est concerné, je pense qu'on a marqué des points beaucoup plus importants.

Je voudrais en terminant, faire une comparaison. Il y a des gouvernements un peu partout dans le monde qui avaient eu la bonne idée — je pense que c'était une bonne idée — d'amener les pouvoirs publics à réserver 1% dans la construction de bâtiments pour la dimension dite esthétique ou culturelle. Cela a été pratiqué par des gouvernements antérieurs au Québec, et c'est encore quelque part dans nos règlements, sauf qu'une évaluation faite en Europe a démontré que la politique du 1% avait des limites assez surprenantes. Souvent, les ingénieurs et architectes responsables de la construction d'un bâtiment important en sont venus, semble-t-il, à se dire qu'à partir du moment où il y a 1% pour la beauté, le reste peut être laid.

Je viens d'avoir un rapport que nous avons commandé sur les résultats de ce 1% au Québec. C'est assez frappant de constater que le 1% n'a pas toujours eu l'effet recherché. Il a parfois amené les responsables de travaux publics à se dire: Ce 1%, c'est de la tapisserie, c'est une murale, allez-y, le reste, on l'expédie. Finalement, les sommes qui correspondaient à 1% étaient mal intégrées dans le bâtiment.

Je me dis que le parallèle qu'on peut faire entre le 1% et le budget des Affaires culturelles est intéressant. Si nous en étions à 1% du budget du gouvernement du Québec, nous n'aurions rien gagné, pas plus que nous n'avons gagné quand nous avons obtenu au Centre des congrès de Montréal, de réserver 1% pour les artistes ou les créateurs, parce que le risque est encore là, que tout le reste soit médiocrité, soit oubli de l'esthétique, oubli de ce qui nous est cher.

J'aimerais, puisque vous avez fait allusion vous-même à 1% du budget, faire le parallèle avec le 1% que nous avons eu tendance à réserver pour les édifices publics. Il n'y a aucune assurance qui découle du 1%. A mon avis, il y a beaucoup plus une pénétration à faire au niveau des mentalités-La culture n'est pas quelque chose qui s'isole, autrement dit. La beauté d'un bâtiment ne peut pas se résumer à une tapisserie ou une murale. Le développement culturel d'une société ne peut pas se résumer à un budget du ministère des Affaires culturelles. J'aurais eu la tentation et j'aurais succombé à la tentation, pendant cette première année de mandat, de me gruger un gros budget, que je n'aurais rien fait dont je pourrais être fier. J'ai employé mon temps à travailler avec mes fonctionnaires à réviser nos effectifs et nos budgets et à sensibiliser mes partenaires du gouvernement à faire que chacun se considère concerné par la question culturelle. Je pense que c'est là qu'est l'avenir du développement culturel du Québec.

Le Président (M. Blank): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: Evidemment, le rôle du ministre des Affaires culturelles, c'est de défendre la politique de son gouvernement. Le fait n'en demeure pas moins que c'est un pourcentage minime que ce gouvernement est prêt à accorder à toute la question du développement de la culture. Quand il dit: Plus on dépense, cela ne veut pas dire qu'on administre mieux. Là-dessus, je suis totalement d'accord. Je suis sûre qu'un gouvernement pourrait avoir un budget... Au Québec, on est près d'un budget de $15 milliards, mais on pourrait peut-être avoir un budget de $14 milliards et être un aussi bon gouvernement. Là-dessus, je le concède facilement au ministre. (16 h 30)

II reste que le pourcentage qu'un gouvernement accorde à l'intérieur de son budget, qu'il soit de $8 milliards, $9 milliards, $10 milliards, $11 milliards ou $12 milliards, aux Affaires culturelles est quand même un peu le baromètre de l'importance qu'un gouvernement accorde au développement de toute la vie culturelle et des ressources au plan de la vie culturelle.

Le ministre lui-même est le premier — d'ailleurs, j'ai vu des comptes rendus dans les jour-

naux — à déplorer le fait qu'on soit extrêmement — si j'exagère, le ministre pourra me corriger, mais je pense que je n'exagère pas; il ne l'a peut-être pas dit dans ces termes, mais je pense qu'il le pense — pauvre du point de vue des bibliothèques ou du point de vue des musées, du point de vue, enfin, d'une foule de choses et ça, qu'on le veuille ou non, ça demande des investissements.

Je suis d'accord avec le ministre qu'une des fonctions importantes de son ministère, c'est vraiment la sensibilisation non seulement des autres ministères, mais également de la population, des autres niveaux de gouvernement. Je lui dis: D'accord, allez-y. Mais il reste que je ne peux pas m'empêcher... Je le fais de bonne foi. Je ne le fais pas parce que je suis dans l'Opposition et que je dis: II faut que je tape sur le gouvernement. Je pense que je n'exagère jamais dans ce sens-là. Il reste qu'il y a des limites dans ce que vous allez pouvoir développer du point de vue du manque de ressources dans le domaine culturel, compte tenu du budget que vous avez.

Que vous fassiez tous les efforts pour rationaliser votre administration, j'en suis, mais déjà, je me pose quelques questions quand je vois que, compte tenu de ce que vous avez dit, en 1978/79, vous ayez 896 employés permanents. Vous me parlez de cette grande rationalisation, effectif 0 et budget 0, on se retrouve avec... Je comprends que ce n'est pas très grand, mais il faut tenir compte aussi... On se retrouve quand même avec une augmentation d'effectif. Là, je sais que vous avez eu la directive du ministre des Finances, à savoir qu'il vous faut diminuer, je pense, de 2,5%, ou quelque chose comme ça. Alors, la fin de l'année ne se conclura peut-être pas avec une augmentation de personnel. Mais il reste quand même que quand vous avez préparé vos budgets, alors que vous disiez: On veut effectif 0, on veut budget 0 et c'est la grande rationalisation, etc., vous aviez déjà une augmentation de personnel.

M. Vaugeois: Est-ce que... Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: ... vous permettez? C'est assez important, ces notions.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: L'opération effectif 0, budget 0, ce n'est pas de ramener l'effectif à zéro ou le budget à zéro.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: C'est une réévaluation interne où nous remettons en question tous les postes budgétaires...

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est ça.

M. Vaugeois:... et tous les services, comme si nous avions à les constituer aujourd'hui avec les données d'ensemble.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: Cela veut dire qu'on ramène tout à zéro momentanément...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois:... pour fins de discussion, mais pas dans la réalité.

Mme Lavoie-Roux: Bon! D'accord!

Mais, tout ceci dit, le fait demeure que, même avec un budget qui a presque une croissance zéro — il faut bien le réaliser, c'est de ,031 — forcément, ça vous oblige à réexaminer l'utilisation de votre effectif humain, de vos priorités. Cela, c'est bon. C'est bon pour n'importe quelle administration publique. Mais, compte tenu des carences que j'ai signalées, ce sur quoi le ministre est d'accord, encore du côté des besoins de la création, du développement des arts d'interprétation, etc., ça reste minime et on ne peut pas s'empêcher de le déplorer. Je reconnais que le ministre, de bonne guerre, dit: Ecoutez... Il essaie de justifier ça. Mais il ose espérer, par exemple, que les municipalités vont prendre la relève, compte tenu du transfert de l'impôt foncier scolaire du côté des municipalités. Là, je vous assure et j'espère que son rôle d'animation et de sensibilisation qu'il devra faire auprès des municipalités, il va le faire avec énergie. Il y a des municipalités qui vont s'en acquitter. Il y a des municipalités qui s'en acquittent déjà, il y a des municipalités qui ont d'excellentes bibliothèques. Je prends, par exemple, la bibliothèque de Montréal; vous avez des villes comme Westmount. Il y a aussi une question d'éducation, parce qu'on retrouve dans presque toutes les petites municipalités anglophones, avec une population insignifiante, que vous alliez à Beebe, qui a quoi comme population? Je ne sais pas, peut-être 1000 âmes? On a sa petite bibliothèque municipale. Alors, il y a une question...

M. Vaugeois: Les meilleures bibliothèques au Québec sont dans les municipalités où la population anglophone est importante.

Mme Lavoie-Roux: C'est ça. Alors, il y a une question de ressources, à un moment donné, et aussi une question d'éducation. Mais il reste que ce n'est pas sûr que ça puisse, même avec ce transfert de l'impôt foncier et ces ressources additionnelles dont une grande partie vont devoir forcément — j'aimerais avoir les réactions de mon collègue qui a été ministre des Affaires municipales à ceci — être affectées, comme vous disiez tout à l'heure — vous espériez que ça n'irait pas seulement à cela — à des travaux d'aqueduc, des travaux de voirie, etc. Je souhaite bien qu'il puisse prendre la relève du gouvernement qui, cette année, dit: Je ne peux pas mettre d'argent de ce côté-là. C'est comme cela que je vois le problème.

M. Vaugeois: Est-ce que je peux tout de suite réagir à cela, M. le Président? On s'entend, sinon sur la façon de dire les choses.

Parlons des bibliothèques et des musées. On m'aurait donné, à ce moment-ci, quelques millions, comme je les avais d'ailleurs demandés momentanément, pour développer les bibliothèques publiques, mais je suis obligé de constater une chose: on n'a pas de plans, finalement, c'est cela. On ne sait pas comment faire parce que, ces dernières années, le ministère a développé — et je pense qu'on a atteint un bon niveau — des programmes pour aider les bibliothèques existantes à fonctionner. Ce programme est bon, et il s'est bien amélioré; depuis trois ans, le budget a doublé du côté des bibliothèques publiques. Nous allons terminer cette année l'installation des BCP. C'est quand même assez extraordinaire, on aura ouvert, en trois ans, plus de BCP qu'il ne s'en était ouvert depuis 1962. On couvre le territoire, actuellement.

Au niveau des BCP, le modèle est là, on le réalise. Au niveau des bibliothèques municipales qui existent, notre programme est bon, on les aide à fonctionner. Pour les 50 municipalités au Québec de 5000 habitants et plus qui n'ont pas de bibliothèque publique, qui n'ont pas de plans pour s'en donner, même si je leur disais, demain matin: Cela va vous coûter $1 million pour le genre de bibliothèque qu'il vous faut; vous, ça va vous coûter $5 millions, si je leur donnais de l'argent, elles ne seraient pas prêtes à construire, elles ne sauraient pas où la mettre et elles ne sauraient pas la construire ni comment l'organi-ser.

On a d'abord besoin, à ce moment-ci, que les gens considèrent que c'est important, parce que ça ne peut pas être uniquement une responsabilité de l'Etat central ou du gouvernement du Québec, en l'occurrence. Il faut que ce soit une responsabilité locale, il faut que, dans les choix que font les administrateurs locaux, ça compte pour quelque chose d'important. Nous avons besoin d'un plan de développement de bibliothèques publiques. C'est vers cela que nous nous orientons et à cela que nous travaillons.

C'est la même chose pour les musées. Nous avons actuellement $20 millions en réserve et qui n'apparaissent pas dans nos chiffres pour le Musée du Québec. Le problème, pour nous, c'est d'avoir des plans. On ne fait pas un musée comme cela, on n'agrandit pas un musée comme cela, c'est très compliqué. Les grands musées de ce monde ont mis 8, 10, 12 ans à se faire. On en reparlera probablement tout à l'heure, ou à l'occasion de l'étude des crédits là-dessus. Il faut des plans. Cela n'a jamais été considéré comme très important; de temps en temps, on en avait, on en héritait, on s'en occupait et, après cela, silence! On constate aujourd'hui un déficit fantastique du Québec sur le plan de ces équipements. Ce sont des équipements, à mon avis, qui sont essentiels pour justifier les milliards que nous mettons dans l'éducation. Je prétends que ça ne vaut pas grand-chose d'investir autant d'argent dans l'éducation, si l'éducation arrête quand l'école se termine.

Mme Lavoie-Roux: Vous arrivez à un autre problème, la collaboration entre vos deux ministères, c'est joliment important.

M. Vaugeois: On en reparlera. Pour justifier les sommes considérables que nous investissons dans l'éducation, il faut des moyens, des institutions d'éducation permanente. Pour moi, l'éducation permanente n'est pas le retour à l'école, ce sont des institutions comme les bibliothèques et comme les musées. Du côté du patrimoine, je fais souvent allusion, moi-même, aux égouts et aux aqueducs. On a avec nous un ancien ministre des Affaires municipales qui va drôlement comprendre ce que je vais dire.

L'important, est-ce que c'est de sauver une vieille maison, de sauver un bâtiment intéressant et de laisser se dégrader le quartier, de laisser partir les gens et de laisser briser en même temps l'ensemble rural? Le scénario des dernières années, c'est la dégradation du milieu urbain et cette dégradation est elle-même cause de la dégradation du milieu rural. Nos ensembles ruraux se dégradent et nos ensembles urbains également. Tout cela veut dire des investissements toujours plus considérables pour rejoindre la ville qui s'éloigne de la ville.

Ce que nous proposons pendant que tout cela se passe, c'est de dire: Cette maison, on va la restaurer et on va se la remettre sous les yeux comme elle était au XVIIIe siècle. La seule fonction qu'on avait trouvée, ces dernières années, à la restauration du patrimoine, c'était la fonction de contemplation ou l'ampleur des musées. Vous serez d'accord pour qu'on s'interroge là-dessus et que, comme ministère des Affaires culturelles, on travaille avec le ministère des Affaires municipales, avec le ministère de l'Agriculture, le ministère des Travaux publics, etc., pour que le gouvernement ait des politiques de localisation, par exemple, des édifices publics, pour que la ville recommence à se construire en ville, et que notre bâtiment restauré ne soit pas isolé dans un quartier qui se dégrade.

Ecoutez, je ne veux pas allonger là-dessus, mais c'est comme cela que nous voyons notre fonction actuellement et non pas dans l'autosatisfaction, le plaisir qu'on se donne à restaurer une maison du XVIIIe siècle qu'on a trouvée quelque part dans un quartier que tout le monde fuyait.

Mme Lavoie-Roux: Je suis d'accord avec cela, M. le ministre, mais il reste qu'on entre dans l'approche que votre ministère veut prendre et, comme vous le dites, on s'entend. Mais il reste que cela ne répond pas à la question de base: Comment développe-t-on ces services? Quelles sont les ressources que l'on met à leur disposition? Parce que cela demande des ressources; on peut les rationaliser, les rendre les plus fructueuses possible, mais il y a quand même au départ un besoin de ressources.

M. Vaugeois: Sur le patrimoine, par exemple, sauf un monument exceptionnel, il y a bien sûr quelques monuments exceptionnels, quelques bâ-

timents très importants qui échappent à cette approche et pour lesquels il faut garder des budgets pour les restaurer comme on le faisait ces dernières années. Mais la vraie façon de sauver l'essentiel de notre patrimoine bâti, c'est de lui redonner une raison d'être aujourd'hui, une fonction, compte tenu de nos besoins d'aujourd'hui. La meilleure façon de condamner le patrimoine, c'est de le réserver à la contemplation et de le mettre un peu en sursis de mort. Nous prétendons actuellement que la façon de sauver le patrimoine, c'est de le réinsérer dans la vie quotidienne, lui redonner une fonction pour les hommes d'aujourd'hui et ceux de demain. C'est ce que nous cherchons à faire et non pas avec des budgets comme ceux qu'on dégage au ministère des Affaires culturelles. Ce sont des fonctions qui justifient le réaménagement des lieux, le recyclage etc. A Boston et à Toronto, ces derniers temps, j'ai vu des exemples concrets de ce que je dis là.

Mme Lavoie-Roux: Boston...

M. Vaugeois: A Boston en particulier. On a inventé un mot nouveau. On ne parle plus de restauration, on parle de recyclage. On rend à la vie d'aujourd'hui des bâtiments anciens. On réhabilite la ville. Il y a des expériences extraordinaires qui se font autour de nous, je pense qu'il est grand temps qu'on sache les regarder et s'en inspirer.

Le Président (M. Blank): M. le député de D'Arcy McGee.

Mme Lavoie-Roux: Mais cela leur coûte des sous de les recycler.

Le Président (M. Blank): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, je dois réagir — d'ailleurs, le ministre m'a invité à le faire — en ce qui concerne le rôle des municipalités dans ce grand portrait. Je dois réagir parce que le ministre se défend comme il le peut contre les attaques de l'Opposition, et c'est son rôle de le faire. Il n'est pas ici pour ne pas se défendre.

Il nous dit: II y a des explications qui ne paraissent pas, qui ne sont pas nécessairement très claires quand on examine les chiffres. Il faut regarder à travers les chiffres et il faut voir comment la culture recevra son appui pour que la population puisse en bénéficier. En nous disant cela, il nous dit: II faudra que le milieu assume ses responsabilités.

S'il s'était contenté de dire cela, il aurait été difficile d'aller plus loin dans le débat. Mais il a choisi d'impliquer précisément les municipalités. Il a dit: Les municipalités jouiront dorénavant de ressources additionnelles avec le transfert de l'assiette de la taxe foncière scolaire. Pour cette raison, il ne faudra pas nécessairement trouver aux crédits du ministère des Affaires culturelles les ressources qui seront affectées aux activités culturelles. Je voudrais avancer deux hypothèses et demander au ministre comment il agirait si ces hypothèses devaient se confirmer dans les faits. (16 h 45)

Posons d'abord l'hypothèse que la ville de Montréal continue d'exploiter la bibliothèque en face du parc Lafontaine et qu'il y ait des bibliothèques municipales dans Pointe-aux-Trembles, Montréal-Est, Saint-Léonard, Anjou, Montréal-Nord. Il est inconcevable que nous ayons six bibliothèques identiques avec des ressources identiques. Il serait à prévoir que celle de Montréal continue d'être la plus importante et d'avoir le plus grand nombre de livres. Le citoyen de Pointe-aux-Trembles, par exemple, devrait, dans toute la mesure du possible, avoir accès à toutes les ressources des bibliothèques du Québec. On devrait donc avancer l'hypothèse que le citoyen de Pointe-aux-Trembles, ne trouvant pas à la bibliothèque municipale de sa ville, le livre qu'il cherche, mais apprenant que ce livre se trouve dans la collection de la bibliothèque de Montréal, puisse l'obtenir au moyen d'une communication structurée.

Comment déterminerait-on la responsabilité financière de Pointe-aux-Trembles par rapport au fait que Montréal devrait quand même payer des locaux plus importants, un plus vaste personnel, une protection plus serrée contre l'incendie, une protection policière plus élaborée, et tout cela?

S'il n'y avait pas entente entre les villes, comment le ministre agirait-il, si, à un moment donné, la ville de Montréal — cela pourrait se produire un peu n'importe où à Québec, cela s'est déjà produit au Québec — disait: Nous sommes fatigués de fournir des services culturels, des services de loisirs et autres aux municipalités environnantes sans recevoir de compensation. Il y a des municipalités qui ont émis des cartes d'identité à leurs citoyens et ont refusé de prêter des livres aux citoyens des municipalités avoisinantes qui ne détenaient pas une telle carte.

Deuxième hypothèse, M. le Président, en corollaire. Sur l'île de Montréal, il y a des ressources culturelles importantes et tous les citoyens de l'agglomération, y compris la ville de Laval, la rive sud, l'Est et l'Ouest, tous ces citoyens profitent de l'existence de la Place des Arts, des grandes bibliothèques, des musées. Tant et aussi longtemps que c'est le ministère des Affaires culturelles qui fait figurer parmi ses crédits l'appui financier nécessaire pour que fonctionnent et continuent d'exister ces ressources, le problème ne se pose pas. Mais si le ministre dit aux municipalités qu'elles doivent contribuer et si, sur les 29 municipalités de l'île de Montréal, il y en a 15 qui acceptent de contribuer et 14 qui refusent, comment le ministre agirait-il? Est-ce qu'il dirait, le cas échéant: Les citoyens des 14 municipalités qui ont refusé seront exclus de la Place des Arts, des musées et des bibliothèques?

M. le Président, il me semble qu'il y a un danger de fonctionnement boiteux, si les municipalités sont chargées de cette responsabilité au nom d'une collectivité qui doit nécessairement, dans le cas des grandes villes, dépasser leur frontière.

Le Président (M. Blank): Le député de...

M. Vaugeois: J'aimerais réagir à ce que vient de dire le député de D'Arcy McGee. Sur le premier point, vous avez posé un problème très concret et je pense que vous avez raison, il se pose. Avant que vous arriviez, M. le député, nous avons retenu le principe d'une mission à Toronto, pour les membres de cette commission. A Toronto, ma surprise fut grande quand on m'a donné comme premier exemple d'une véritable collaboration intermunicipale pour les six municipalités qui composent l'agglomération de Toronto, celui de la bibliothèque métropolitaine de Toronto.

Les six municipalités concernées se sont entendues pour se doter collectivement de cette magnifique institution de plus de 364 000 pieds carrés. C'est quelque chose de phénoménal. Cela veut donc dire que la collaboration intermunicipale peut exister pour de grands projets comme celui-là. Actuellement, à Montréal, nous sommes à étudier un projet de regroupement de la Bibliothèque municipale de Montréal, la principale, avec la Bibliothèque nationale du Québec. Nous espérons d'ailleurs, dans les prochains mois, progresser assez bien avec ce projet.

Et je reviens à Toronto. En même temps que vous avez cette magnifique bibliothèque centrale, il existe à peu près 80 bibliothèques, soit de quartier, soit de petite municipalité, dans l'agglomération torontoise. C'est quand même quelque chose! Et la grande bibliothèque est une bibliothèque de référence pour ses usagers et une bibliothèque de prêt pour les 80 bibliothèques de l'agglomération. Nous pouvons penser, à Montréal, à un modèle semblable, c'est-à-dire une grande bibliothèque et un réseau de bibliothèques de petite municipalité ou de bibliothèques de quartier pour Montréal même.

Pour progresser vers un tel objectif, nous avons, cette année, au grand étonnement de plusieurs représentants de Montréal, d'ailleurs, repris une vieille demande des bibliothèques de l'agglomération montréalaise, qui cherchaient depuis longtemps à se raccorder les unes aux autres. Et nous avons autorisé un petit budget qui leur permet actuellement d'être raccordées par télex et de favoriser le prêt interbibliothèque.

Et là-dessus, les bibliothécaires ne sont pas mesquins, de même que les conseils municipaux. Ils savent qu'au total, cela profite finalement à tout le monde et que cela ne doit pas se calculer à l'unité.

Il existe donc actuellement des modèles qui nous permettent de croire que de tels défis ne sont pas impossibles à relever. Pour autant, cela ne veut pas dire que le problème que vous avez soulevé n'est pas réel, parce que nous avons énormément d'exemples de municipalités, où une municipalité de banlieue, ou une municipalité voisine de la principale, prend l'habitude de se fier sur la principale pour offrir les services. C'est un phénomène qui tient même au phénomène de la ville de banlieue. La ville de banlieue, par définition, c'est souvent un lieu d'évasion fiscale, un lieu où on échappe aux problèmes, aux coûts des services, mais, en même temps, on rentre dans la grande ville pour aller chercher les services. Il y a quelque chose d'assez fantastique dans ce phénomène, en plus de tous les effets que j'ai signalés tout à l'heure trop rapidement sur la dégradation de la ville même et la dégradation du milieu rural en parallèle.

C'est un défi qui se pose au ministère. On développe actuellement des modèles pour y faire face. Exemple: Dans une municipalité, il y a un centre culturel. La municipalité nous dit: Nous ne sommes plus capables de supporter ce centre culturel seuls, d'autant plus que nous savons maintenant que 61% des usagers de ce centre culturel viennent de l'extérieur de notre municipalité. J'ai un cas concret, je n'invente rien. Je cite un cas concret actuellement, dans un coin du Québec.

Réponse: Nous travaillons avec les municipalités qui fournissent les 61%, pour leur faire prendre conscience de cela. Et là, on est en train de progresser. Les municipalités signent avec nous des accords, actuellement, qui prévoient un cheminement d'à peu près cinq années pendant lesquelles nous contribuerons d'une façon plus significative au titre de telle municipalité qui n'avait jamais contribué, puis elle fait une première apparition. Puis, pendant cinq ans, nous allons nous retirer et ces municipalités vont participer. Du jour au lendemain, nous ne pouvons pas leur demander de payer ce que cela coûte. Elles avaient pris l'habitude de s'abstraire de ce genre de problème.

Mais à partir du moment où on discute avec les municipalités, on fait prendre conscience aux gens de la réalité et la pression s'exerce aussi de la part des citoyens qui apprécient ces services. C'est faux de penser que les citoyens n'apprécient pas les services culturels, les équipements culturels. Ils en profitent et, finalement, quand ils considèrent tout, ils sont prêts à faire leur part. Nous ne désespérons absolument pas de progresser de ce côté-là. Cela ne veut pas dire qu'il n'y aura pas de difficulté. Comme nous sommes conscients que, du jour au lendemain, les choses ne peuvent pas se faire, du côté des bibliothèques, par exemple, nous allons maintenir un des rares programmes qui va amener un ministère à traiter avec une municipalité, malgré la révision de la fiscalité municipale. Par exemple, notre programme pour les bibliothèques publiques va être maintenu, parce que, du jour au lendemain, on ne s'attendrait pas à ce que les municipalités reconnaissent avoir hérité de sommes qui nous dispenseraient de rester présents.

Nous signons actuellement des ententes avec les municipalités qui sont concernées par des arrondissements historiques. Je le fais en tout cas avec enthousiasme. Je peux vous dire que les préjugés qu'on entretient contre les maires et les conseils municipaux me paraissent sans fondement. Les maires et les conseils municipaux ont été soumis ces dernières années à la pression de ce qu'on a appelé les "développeurs" et à une mode qui a amené les gens vers la banlieue. Ils ont

cédé à cette mode et ils ont suivi avec les coûts, avec les investissements qui étaient nécessaires pour raccorder ces gens à la ville et aux services existant dans la ville. Je pense que la pression, maintenant, va s'estomper et qu'on va à nouveau chercher à défendre la qualité de la vie dans la ville.

Je pense que les maires et les conseillers municipaux sont là pour donner aux citoyens ce que les citoyens demandent. C'est notre rôle, comme gouvernement, non pas de nous substituer à l'action des citoyens ou des conseils municipaux, mais de diminuer la pression qui s'exerçait depuis quelques années sur les conseils municipaux, pour assurer le service de la police, pour faire des égouts et des aqueducs, pour assurer le déneigement, etc. C'est le rôle des budgets des municipalités, mais les maires sont comme nous, les conseillers municipaux sont comme nous, ils veulent donner aux citoyens ce que les citoyens attendent et parfois les citoyens sont, pour une question de mode, soumis aux pressions comme en ce qui a trait au développement en banlieue, amenés à peut-être oublier des choses importantes, cela. C'est une question d'éducation populaire et de dialogue, et, là-dessus, je ne suis pas optimiste pour demain matin, mais optimiste dans un avenir raisonnable.

M. Goldbloom: M. le Président, je me permets un seul et bref commentaire en réponse à ce que le ministre vient de dire. Je suis certain qu'en disant que des personnes peuvent avoir des préjugés à l'endroit des maires et conseillers des municipalités, il ne visait pas celui qui vous parle et qui, après tout, a travaillé avec ces élus locaux pendant de nombreuses années. Le fait demeure que, dans la mesure où le ministre dit: L'appui financier à la culture ne doit pas nécessairement se retrouver dans les crédits de mon ministère, mais devrait se trouver dans les budgets des municipalités, il substitue dans cette même mesure entre 1500 et 1600 centres de décision à un seul centre. Et si l'on accorde aux élus municipaux le droit de choisir, d'appuyer financièrement la culture, on leur accorde également la liberté de dire non.

Le dernier élément de mon commentaire, c'est que, dans la réforme de la fiscalité municipale, les élus municipaux ont réclamé des ressources additionnelles, mais ce n'était pas nécessairement pour assumer des responsabilités additionnelles. Leurs protestations, depuis des années, ont été: Les taxes foncières sont trop élevées, nous avons besoin de ressources additionnelles afin de pouvoir diminuer le fardeau supporté par le contribuable foncier. Si l'on dit: Oui, la réforme de la fiscalité est maintenant chose faite avec le budget de cette année, mais si l'on ajoute, si chaque ministère ajoute, en invoquant cette réforme de la fiscalité, des fardeaux additionnels, les municipalités vont refuser quelque part. Elles n'accepteront pas tous les fardeaux additionnels. Le résultat sera que les citoyens seront moins bien servis.

Le Président (M. Blank): Je pense que...

M. Vaugeois: M. le Président, juste là-dessus, ce ne sera pas long.

Le Président (M. Blank): On va mettre un terme à ce débat, sinon...

M. Vaugeois: Les programmes que nous avions avec les municipalités, nous les maintenons, nous ne les transférons pas aux municipalités; cela, il faut que ce soit bien clair. Pour le reste, nous espérons, avec nos actions, faire en sorte que les dépenses qui étaient celles des dernières années, qui ont gonflé les budgets des municipalités, qui ont consisté en travaux, qui ont étiré les villes, qui les ont étendues, qui leur ont enlevé leur caractère urbain, le caractère qui convient à une ville, dans la mesure où on va contribuer à cela, je pense qu'ils vont retrouver à l'intérieur de leur budget actuel des sommes nouvelles.

Je parle à l'ancien ministre des Affaires municipales, je n'ai pas besoin de faire de grands dessins, je tiens à donner un exemple concret. Une ville comme celle que j'habite, Trois-Rivières, qui a perdu une partie de sa population ces dernières années, a aujourd'hui une surface équipée de services trois fois plus grande qu'il y a quinze ans; c'est cela qui a coûté cher aux municipalités, ce n'est pas le secteur des Affaires culturelles. (17 heures)

La ville de Montréal fait face au même phénomène. Ce n'est pas la Place des Arts qui coûte cher à la ville de Montréal. C'est le fait que Montréal est trois fois trop grand pour la population qui y est encore. Il faut freiner cette espèce d'étalement urbain qui ,a miné les finances de nos villes. On s'entend donc sur le premier point. Nous ne transférons pas des responsabilités aux municipalités à partir de ce que nous faisons déjà.

Le Président (M. Blank): M. le député de Gaspé, sur ce débat général.

M. Le Moignan: Oui, dans ce débat général, cela m'évitera de reprendre cette question dans le particulier. On pourra peut-être épargner du temps. J'écoutais avec beaucoup d'intérêt un dialogue entre le ministre et l'ancien ministre des Affaires municipales. Evidemment, vous avez abordé le problème des grands centres et des grandes villes. Je n'ai pas l'intention de reprendre tout le problème rural. Je vais peut-être faire certaines petites suggestions en passant.

Vous avez parlé des centres anglophones. C'est vrai qu'ils ont des bibliothèques. Vous l'avez remarqué peut-être au Québec comme en Ontario et ailleurs. Etant donné que le ministre a dit que, dans son budget, il fallait l'action des citoyens, l'action des municipalités... On sait que, si on sort des grands centres, les municipalités actuellement ne sont même pas capables de bâtir de systèmes

d'égouts et d'aqueduc. Elles n'embarqueront pas dans un système de bibliothèques. Il y a un fait. Si vous voulez intéresser le citoyen... Il se fait beaucoup de publicité au gouvernement. Peut-être que votre ministère n'en a pas abusé, je ne sais pas. Il y a une éducation à faire — on le verra en cours de route — du côté de la culture, du livre, des bibliothèques et le reste. On peut inviter les gens à patiner, à aller jouer dehors, les inviter à rester à l'intérieur, à lire un roman et à lire d'autres choses du genre.

Maintenant, vous avez remarqué, chez les anglophones, pourquoi ils ont tellement de belles bibliothèques et de beaux musées. C'est qu'il y a beaucoup de fondations: la fondation Rockefeller et le reste. A Montréal, vous avez la fondation Stewart McDonald, la fondation Jean-Louis Léves-que. Est-ce que c'est le rôle des citoyens de faire appel à beaucoup de grandes compagnies québécoises, qu'elles soient anglophones ou francophones? Je pense, à ce moment, que ces compagnies qui dépensent tellement pour le sport, que ce soit Molson, Labatt ou O'Keefe, ces mêmes compagnies n'ont peut-être jamais été invitées à détourner quelques millions dans le domaine culturel, au lieu simplement d'annoncer. On pourrait le faire tout en diminuant la publicité du côté culturel si celle-ci provient de Molson ou d'une compagnie du genre. Je pense que ce serait une idée à retenir.

M. Vaugeois: Ce que je peux vous dire là-dessus, et l'occasion se présente pour moi de le dire publiquement, c'est que nous avons demandé à M. Guy Beaulne, qui rentrait d'un poste de conseiller culturel à Paris, qui est l'ancien directeur du Grand Théâtre, d'essayer de relever un défi tout à fait nouveau chez nous, celui d'explorer le genre de questions que vous venez d'indiquer et de prendre contact avec la grande entreprise, les grandes fondations pour essayer de les intéresser aux activités culturelles. Guy Beaulne a accepté, en relation avec la Direction générale des arts et des lettres, de se consacrer à ce genre d'activités pendant plusieurs mois pour essayer de voir quelle pourrait être la contribution chez nous des entreprises et des milieux d'affaires au soutien de nos entreprises culturelles, dans l'esprit de ce que nous avons discuté tout à l'heure.

Guy Beaulne a pris du service à ce titre depuis à peu près un mois. Je l'ai rencontré hier soir au Grand Théâtre et il me soulignait que ses premiers contacts sont encourageants. Les gens sont un peu étonnés, parce que ce n'est pas dans notre mentalité de le faire. Nous avons autour de nous des modèles à cet égard. Vous avez fait allusion vous-même à ce qui se passait aux Etats-Unis ou en Ontario. J'ai posé des questions, par exemple, sur le début des bibliothèques publiques en Ontario, et il y a un grand philanthrope, dont malheureusement j'oublie le nom, mais j'aimerais le rappeler aujourd'hui. C'est un philanthrope ontarien qui a, à un moment donné, dans sa vie, décidé de consacrer une partie de sa fortune à la construction de bibliothèques publiques, ce qui fait qu'il y en a 80 dans l'agglomération de Toronto aujourd'hui. Une majorité de ces bibliothèques viennent de l'époque de cet homme qui y a consacré une partie de sa fortune. Je ne dis pas qu'il faut que l'Etat s'en lave les mains et se retire de ce genre de plan, mais, d'un autre côté, associer le milieu d'affaires à nos projets, je pense que c'est nécessaire. D'ailleurs, les gens en viennent à demander tout au gouvernement et n'apprécient plus rien de toute façon.

Je tiens à dire deux petites choses pendant que je les ai à l'esprit. Vous savez que, quand les bibliothèques sont là, quand elles sont relativement bien organisées, elles ont beaucoup de succès. Le taux de progression de fréquentation de nos bibliothèques publiques, moyennement organisées, est de l'ordre de 20%, même plus près de 24% actuellement. Cela étonne tout le monde. Les maires des municipalités n'en reviennent pas de la popularité qu'acquiert leur bibliothèque.

Je ne l'ai pas dit tout à l'heure, mais vous m'en donnez l'occasion maintenant. Nous n'avons pas vraiment de budget de publicité au ministère. Nous avons coupé ce genre de chose. Nous n'avons pas de revue que nous finançons au ministère. Il y avait un projet quand je suis arrivé. Nous continuons de l'étudier. Nous n'y avons pas donné suite. Nous avons coupé énormément dans nos budgets de publication. Vous n'avez pas souligné l'allure fort simple du rapport annuel que j'ai eu l'occasion de déposer, mais je lui ai donné l'allure la plus simple possible et, l'an prochain, on appliquera une formule encore plus modeste. Seulement sur des points comme ça, nous avons récupéré des sommes significatives. Nous avions des budgets de publication assez élevés, nous considérons que ce n'est pas au ministère à faire ce genre de travail et nous retournons à l'entreprise privée les manuscrits que nous avons, qui sortent de nos services, en leur disant: C'est votre métier d'éditer, éditez; le ministère n'a pas à se substituer à votre travail à cet égard. Nous devons permettre aux éditeurs de se développer, nous n'avons pas à nous substituer à l'activité des éditeurs. C'est étonnant ce qu'on peut récupérer comme sommes d'argent dans de petits gestes comme ceux-là, ici et là. Je ne vous dis pas que nous allons retrouver là toute la marge de manoeuvre dont nous avons besoin pour prendre l'expansion que nous souhaitons, mais il fallait d'abord commencer par là je crois.

M. Le Moignan: J'apporte un dernier point, M. le Président. On parle de bibliothèques, de régions éloignées. J'ai déjà exprimé ce désir en commission parlementaire, et de l'éducation et des affaires culturelles, d'utiliser les bibliothèques de CEGEP, dans les endroits où il n'y a pas de bibliothèque municipale. Je me demande si le problème a déjà été étudié à fond. Quand je pense à la ville de Gaspé — pour vous donner un exemple concret — il y a une très belle bibliothèque au CEGEP et il n'y a pas de bibliothèque municipale. A deux reprises j'ai attiré l'attention, soit du ministre des Affaires culturelles ou de celui de l'Educa-

tion. Il y aurait certainement un travail à faire là-dedans. Je ne sais pas si le ministre des Affaires culturelles, qui a déclaré dernièrement qu'on avait payé $100 millions en valiums...

M. Vaugeois: C'est-à-dire $100 millions en pilules et $16 millions en valiums; ça, je ne le prends pas!

M. Le Moignan: En tout cas, il y avait les $100 millions. Vous avez peut-être déploré le fait qu'il n'y avait pas assez d'argent qui allait dans le domaine...

Mme La voie-Roux: On va être méchant; c'est l'inquiétude de la population vis-à-vis du gouvernement.

M. Vaugeois: Est-ce que cette phrase a été enregistrée?

M. Le Moignan: Je reviens sur ce dernier point. Si on peut faire des ententes avec les collèges, avec les polyvalentes pour les équipements sportifs, pourquoi n'en ferait-on pas pour les bibliothèques?

M. Vaugeois: C'est exact. Mme Lavoie-Roux: ...

M. Le Moignan: Les contribuables seraient prêts à verser un abonnement annuel ou mensuel au collège pour développer davantage la bibliothèque — je sais que, dans notre milieu, les gens seraient prêts — pour avoir un service sur place.

Quand vous avez parlé de patrimoine, de recycler... d'accord, parce que je sais que cela se fait à la Maison Le Boutillier où, au lieu de laisser un monument là, les organismes locaux l'emploient — peut-être pas à cent pour cent dans le moment — je sais que c'est en complète organisation.

Le Président (M. Blank): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: C'est une question qui a été posée l'an dernier au ministre des Affaires culturelles et qui peut s'associer à la suggestion du député de Gaspé. Quand on discutait des musées, on avait parlé de la possibilité d'une déduction sur le plan fiscal pour les dons qui seraient faits aux musées. La même chose pourrait valoir pour les bibliothèques. Je ne me souviens pas qu'il ait été question de ce propos au moment du discours du budget. Je pense que c'est au moins la troisième année qu'on en parle; si on en parle maintenant, M. le Président, vous verrez qu'on n'en parlera pas tantôt, parce que cela revient chaque année.

Où en êtes-vous là-dedans? Je regarde les tout petits musées — je ne discute pas de la valeur du musée en soi — si vous allez dans les Cantons de l'Est, si vous allez à Stanstead, si vous allez à

Beebe, les citoyens ont leur musée et, finalement, ce sont ces derniers qui ont donné. Nous semblons avoir la mentalité qu'il faut tout léguer à nos enfants, quand on n'en aura plus, peut-être léguerons-nous aux musées. Mais il y a une mentalité à créer et peut-être qu'une incitation pourrait être faite sur le plan fiscal. C'est la troisième année que j'apporte cette suggestion; je voudrais savoir où on en est au gouvernement dans cette réflexion. Cela ne coûterait peut-être pas tellement cher au gouvernement; je comprends qu'il va peut-être moins retirer sur le plan des successions, mais...

M. Vaugeois: Madame, deux choses. D'abord, à force d'étudier cette question, je découvre qu'il y a des choses qui se font déjà. Il y a un programme qui se fait par les musées, sauf que la définition du musée est assez étroite; il faut que le musée soit associé aux musées nationaux, ce qui fait que le Musée du Québec, par exemple, a ce statut de musée qui peut émettre des reçus pour des oeuvres qui lui sont données. Le Musée d'art contemporain, à Montréal, a également ce statut pour fins d'impôt, et probablement le Musée des Beaux-Arts.

C'est bien loin de ce que vous venez de proposer. Je vais peut-être vous amuser un peu en vous disant que si vous vouliez, aujourd'hui, me reprocher de ne pas avoir abouti dans mes démarches d'utilisation de moyens fiscaux pour soutenir certains secteurs culturels, ça pourrait être vrai pour la restauration de maisons classées, par exemple. Il me semble qu'on pourrait inciter les gens, comme ça se fait en France, entre autres, à prendre des bâtiments intéressants — on appelle cela des monuments — et à les restaurer pour fins de logement avec possibilité de déductions d'impôt. On ferait un bon coup. Si vous voulez me reprocher cela aujourd'hui, je suis prêt à le prendre. Je regrette de ne pas avoir progressé suffisamment.

J'ai eu l'occasion d'en discuter avec le ministre des Finances. Vous vous souviendrez que, lors du sommet sur les industries culturelles, il avait, au moment de sa conférence, évoqué quatre façons d'intervenir dans le secteur culturel. Il y avait son saupoudrage, ses "giddy-giddy", comme il disait. Après cela, il y avait les moyens d'évasion fiscale. Il a semblé lui-même les retenir avec intérêt, à ce moment-là. Nous étions en décembre. Je n'ai pas eu le temps, parce que les budgets su préparent quand même de longue main, je n'ai pas pu réussir vraiment de ce côté-là. Je ne dis pas que je vais réussir, mais je peux vous dire que j'ai eu de la part du ministre des Finances une écoute attentive à ce genre de proposition. Lui-même l'a évoqué publiquement et, aujourd'hui, je confesse que je n'ai pas progressé comme je l'aurais voulu.

Autant, tout à l'heure, je me suis défendu sur la progression budgétaire, parce que le but de ma vie n'est pas de grossir le budget des Affaires culturelles sans me poser de questions, autant j'aimerais bien, rapidement, arriver à utiliser...

Mme Lavoie-Roux: Qu'on pose la question au ministre, en Chambre.

M. Vaugeois: En passant, il n'y a pas grand-chose qui vous inquiète aux Affaires culturelles, si j'en juge par les questions que vous posez à la semaine longue à l'Assemblée nationale. Cela me satisfait, ça me démontre que l'administration de ce ministère est entre bonnes mains.

Le Président (M. Blank): Je n'ai pas le droit d'intervenir, mais je pose une question.

Mme Lavoie-Roux: On n'a pas eu une réponse satisfaisante au mont Saint-Louis, mais ça ne fait rien, on y reviendra.

M. Vaugeois: Remarquez que si nous n'avons pas abouti du côté des moyens d'évasion fiscale, la question a été étudiée, j'ai réussi à provoquer la formation d'un comité mixte avec le ministère du Revenu, plus exactement, qui m'a remis un rapport que j'ai lu dernièrement, où on a réussi à compiler à peu près tout ce qui se fait ailleurs, à compiler des petites choses qui se font ici, mais, là-dessus, on n'a pas donné un rapport dont j'aie été satisfait. Je dois reprendre cette question avec mon collègue du Revenu et des Finances parce que je crois que c'est un moyen important. Je crois davantage à ce moyen qu'à celui des subventions.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que je vais reposer la question l'an prochain, M. le ministre?

M. Vaugeois: Remarquez qu'il y a deux... Comme je veux quand même ménager l'avenir, si on joue les subventions, on ne peut pas tout jouer en même temps. Il est possible que, l'an prochain, on se soit rendu compte que c'est encore mieux de jouer les subventions. Mais si on ne joue pas les subventions, il faut avoir autre chose et l'autre chose, c'est l'abri fiscal.

Le Président (M. Blank): J'appelle maintenant le programme 1, Livres et autres imprimés. Elément 1, Aide à la fabrication et à la vente de livres.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je m'excuse auprès de mon collègue, je n'ai pas fini la première page sur le budget, la page générale. Est-ce que vous me permettez encore quelques questions?

Est-ce que M. le ministre pourrait nous ventiler dans l'augmentation du budget, ce qui est d'ordre salarial, ce qui est d'ordre administratif, ce qui est attribuable à l'inflation et à l'indexation et ce qui peut être consacré à des programmes nouveaux et quels sont ces programmes?

M. Vaugeois: Est-ce qu'on a cela entre les mains?

Une Voix: Si vous nous donnez cinq minutes, on va vous... (17 h 15)

Mme Lavoie-Roux: Bon. Je vais lui poser une autre question en attendant. Il apparaît que le ministère aurait périmé $1 987 800 — cela ressemble à mes questions de l'an dernier, M. le ministre. De ce montant, environ $500 000, ou peut-être plus près de $400 000, auraient été périmés à la rubrique "Aide à la création de bibliothèques municipales". Avec la limite des budgets que vous avez, ou enfin les budgets limités que vous avez, est-ce qu'on pourrait essayer de nous ventiler — j'en ai un pour les bibliothèques municipales — où ces montants ont été périmés. L'explication...

M. Vaugeois: De mémoire, je pourrais vous donner des éléments d'explication, mais vous vous doutez bien que cela a été surveillé d'ailleurs, puisque vous aimez faire des comparaisons, vous pourriez déjà comparer les données de cette année avec les crédits périmés du ministère les années précédentes.

Mme Lavoie-Roux: C'était aussi $2 millions, je pense...

M. Vaugeois: C'était $5,5 millions l'année précédente.

Mme Lavoie-Roux: On vous avait averti que vous en périmiez trop pour...

M. Vaugeois: Oui, là-dessus, j'aurais apprécié...

Mme Lavoie-Roux: ... un ministère pauvre.

M. Vaugeois:... comme premier commentaire, avant la question, un petit coup de chapeau.

Mme Lavoie-Roux: Un petit coup de chapeau, M. le ministre.

M. Vaugeois: Je prends le coup de chapeau et je peux vous dire...

Mme Lavoie-Roux: Quelqu'un suggère que ce soit une tuque.

M. Vaugeois: Une tuque? Non, une casquette, mes petites filles aiment mieux les casquettes, les calottes, comme disent mes filles.

Un de mes collaborateurs va vous donner plus de précisions tout à l'heure, mais il y a des explications assez extraordinaires. Ainsi, on arrive en fin d'exercice budgétaire avec un projet de restauration. Il y a une maison que je ne nommerai pas et qu'on veut restaurer. Tout le monde a envie de se faire plaisir en restaurant cette maison, qui est très belle. C'est $325 000 dollars. Alors, le CT, comme on dit en jargon administratif, se promène et se retrouve au Conseil du trésor à la fin de février. Les questions sont posées et il arrive à la fin de mars. Finalement, le Conseil du trésor nous dit avec beaucoup d'à propos: On est d'accord, mais versez donc ce montant au rythme des travaux qui se feront. On vient de périmer $325 000. A la fin, on a périmé des montants assez

importants pour des raisons comme celle-là, des choses qui ont été autorisées au Conseil du trésor dans les derniers jours de mars, mais avec une approche différente que je ne conteste pas, je suis d'accord avec ce genre de commentaires. Je n'ai pas été assez averti quand cela m'a passé entre les mains, je n'avais pas prévu ce genre de situation, on apprend, mais il est à peu près impossible d'arriver à tout dépenser. En fait, il ne faudrait plus rien engager en janvier, février et mars, pour ne pas avoir de crédits périmés. C'est qu'à un moment donné, on engage des montants qui s'avèrent trop élevés, compte tenu de ce qui serait effectivement dépensé. On me dit d'ailleurs que nos chiffres donnent $1 600 000 et j'aimerais demander à M. Rivest de nous donner sa ventilation. Cela m'intéresse autant que vous.

M. de Bellefeuille: Son nom vous rassurera sûrement.

Mme Lavoie-Roux: Bonjour, M. Rivest.

M. Vaugeois: On a plein de libéraux au ministère. Même le ministre a l'esprit libéral.

Je n'ai malheureusement pas la répartition des crédits périmés de 1978/79 pour tous les éléments et tous les programmes. Mais, au total, c'est $1 650 000, composés à peu près du tiers de crédits vraiment pas engagés et des deux tiers des crédits non liquidés, c'est-à-dire de contrats qui se sont déroulés à un rythme plus lent que prévu, qu'on n'a donc pas pu liquider. Selon les secteurs, cela représente $350 000 au patrimoine, c'est surtout là la question des contrats...

Mme Lavoie-Roux: Oui, ce que vous avez apporté.

M. Vaugeois: $500 000 aux arts d'interprétation, au programme 5, c'est-à-dire tout le programme. Une grosse partie venait des salaires dans les conservatoires, encore une fois, où on préfère prendre des réserves plus optimistes, généreuses ou conservatrices, et $800 000 dans le reste du ministère. Si on compare cela à l'année dernière, on avait $5 500 000 en 1977/78. Je pense donc qu'on peut dire qu'on a un certain progrès et surtout...

Mme Lavoie-Roux: Cela doit être le résultat de vos efforts de rationalisation administrative, M. le ministre.

M. Vaugeois: Je voudrais le croire, madame.

Mme Lavoie-Roux: Je suis prête à vous le concéder. Mais il est quand même inquiétant.

Il y a un crédit, à la page 35. Le budget pour l'aide à la création de bibliothèques municipales était de $700 000. Il y a un surplus, des crédits périmés pour $415 000. Tout à l'heure, le ministre a dit: "On n'a pas de plan de développement de bibliothèques." Est-ce parce que vous n'avez pas eu de demandes ou...

M. Vaugeois: On a même eu des retours d'argent, croyez-le ou non. Il y a une municipalité en particulier, qui me revient à l'esprit, qui nous a retourné sa subvention parce que nos subventions sont assorties d'un certain nombre de conditions et la municipalité a dit: Nous ne sommes pas capables de suivre actuellement. Il y a des municipalités qui se retrouvent dans toutes sortes de situations que je ne veux pas décrire, mais qui font que, momentanément, elles ne peuvent pas remplir les obligations liées à une subvention. Alors, on a eu des retours.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous seriez capable...

M. Vaugeois: Mais mon sous-ministre... On ne nommera pas les municipalités, mais...

Mme Lavoie-Roux:... de mémoire de dire quel est le type de conditions que les municipalités ont des difficultés à accepter dans ces cas-là?

M. Vaugeois: Dans ce cas précis, je ne pourrais pas vous dire. Je l'ai déjà su, mais la réalité que vous portez à notre attention s'explique facilement et ça nous a permis de vérifier l'insuffisance du caractère incitatif de notre programme. En réalité, on contribue pour à peu près 20% à 25% au coût de fonctionnement des bibliothèques publiques. On est arrivé à croire, d'après les témoignages qui nous sont rendus par les administrateurs de ces bibliothèques publiques, que c'est insuffisant. On pense qu'il va falloir hausser substantiellement la proportion de notre contribution à leurs dépenses totales de fonctionnement.

D'autre part, les $700 000 qui étaient au budget pour des dépenses réelles de $300 000 n'ont pas été perdus ou versés au fonds consolidé de l'Etat. On a su bien avant que l'année fiscale soit terminée que l'effet incitatif de notre programme ne trouverait pas preneur au degré qu'on avait espéré; donc, cela a été viré. On l'a utilisé à d'autres fins en cours d'année.

J'ajoute encore que, d'après ce que j'ai pu observer par rapport à mon point de comparaison qui est l'Ontario, nous sommes à peu près au même niveau de participation, de contribution, de la part du gouvernement du Québec, quant à l'effort demandé aux municipalités. C'est, en fait, aux alentours de 23% et c'est comparable à l'effort fait par les municipalités en Ontario.

Là où la différence est considérable, c'est dans les dépenses d'immobilisation et c'est là qu'il va falloir trouver des solutions.

Mme Lavoie-Roux: II y a probablement une moins longue tradition aussi...

M. Vaugeois: Oui.

Mme Lavoie-Roux: L'autre ventilation pour...

M. Vaugeois: On a un tableau complet qui donne la répartition des traitements, autres rému-

nérations, autres dépenses, capital, transfert, par programme et par élément. Je peux vous dire que l'indexation des traitements a été de 8% et que celle des autres rémunérations a été de 6,5%; au total, on pourrait établir une médiane à peu près à 7%. Autrement dit, les chiffres qui apparaissent au chapitre "traitements et autres rémunérations" sont indexés de 7% par rapport à ceux de l'an dernier et représentent donc une augmentation fictive de 7% dans le budget du ministère.

Si vous voulez avoir une idée de ce que cela répercute sur l'ensemble, les traitements et autres rémunérations représentent 32,7% du budget du ministère pour l'année qui vient. Il y a donc 7% de ces 32,7% qui s'y retrouve au chapitre de l'indexation des traitements et autres rémunérations.

Mme Lavoie-Roux: C'est beaucoup plus que les $211 000 d'augmentation du budget.

M. Vaugeois: Les $211 000 d'augmentation du budget résultent d'une lecture comptable qui ne traduit pas la réalité de deux choses qui sont absolument identiques. On prenait en compte, dans le premier élément de comparaison, des sommes non récurrentes ou des sommes qui ont été ajoutées en cours d'année au titre de crédits additionnels.

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Vaugeois: En réalité, la marge de manoeuvre est de beaucoup supérieure à $211 000.

Mme Lavoie-Roux: Oui, parce que vous en avez des sommes qui...

M. Vaugeois: Parce qu'il y a du non récurrent dans l'enveloppe de...

Mme Lavoie-Roux: Oui, absolument.

M. Vaugeois: ... base de 1977/78 qui ne revient pas à ce titre, mais qui revient au titre de l'amélioration de programmes, tant et si bien que les fins pour lesquelles le non récurrent de 1977/78 avait été affecté, n'étant pas reconduites en 1978/79 on se retrouve avec une marge de manoeuvre quand même considérable.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous pouvez nous dire à ce moment, quel est ce montant qui devient presque de l'argent neuf, parce que ce n'est pas affecté à des dépenses...

M. Vaugeois: II est à peu près de l'ordre de $6 millions.

Mme Lavoie-Roux: A peu près de l'ordre de $6 millions. A quel programme...

M. Vaugeois: Prioritairement, nous l'avons affecté à la direction des arrondissements de la Direction générale du patrimoine. C'est le volet incitatif, auprès des municipalités. On l'a affecté également à l'indexation de l'enveloppe de base du Musée des Beaux-Arts de Montréal. On l'a affecté à l'accroissement de nos activités art d'interprétation, mais dans l'optique de la régionalisation, c'est-à-dire en faisant abstraction des grands organismes culturels que l'on subventionne quasi par abonnement. On l'a affecté également à l'aide aux bibliothèques publiques. On retrouve, dans notre enveloppe de base 1979/80, $1 300 000 de plus que dans l'enveloppe de base 1977/78.

D'autre part, on retrouve également au titre des provisions qui vont découler de la Loi du livre, aide aux libraires et à l'école des métiers d'art, qui représente, d'ailleurs, un montant substantiel, $300 000, et l'aide à la création.

Mme Lavoie-Roux: Vous avez parlé d'une indexation du Musée des Beaux-Arts. Est-ce que vous avez prévu une indexation qui, je suis certaine, représenterait moins de dollars, pour les autres musées? Ou est-ce strictement... par exemple, le Musée d'art contemporain; c'est un autre grand. Prenons les plus petits, prenons les petits musées dans les... est-ce qu'il y a de l'indexation prévue?

M. Vaugeois: II y a l'indexation de notre contribution aux coûts de fonctionnement des musées privés, dans l'ensemble. Mais, évidemment...

Mme Lavoie-Roux: De l'ordre de combien?

M. Vaugeois: Exactement ce que je vous disais pour les traitements et autres rémunérations, 8%...

Mme Lavoie-Roux: Une moyenne de 7%?

M. Vaugeois: Une moyenne de 7% à peu près. Mme Lavoie-Roux: Pour tous les musées?

M. Vaugeois: Pour tous les musées privés, pas les nôtres. C'est-à-dire quant aux nôtres, les musées d'Etat, les traitements et autres rémunérations s'appliquent parce que les gens sont fonctionnaires.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais du point de vue de l'entretien, des nouvelles acquisitions, il n'y a rien?

M. Vaugeois: On préférerait y revenir tout à l'heure, si vous voulez.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, je vous laisse faire. Merci.

M. Vaugeois: Mais là, j'ai identifié les points majeurs qui correspondent, au fond, à des programmes importants nouveaux, ou intensification d'activité.

Mme La voie-Roux: D'accord. Je ne parle plus.

Livres et autres imprimés

Le Président (M. Blank): Programme 1, élément 1 : Aide à la publication et à la vente du livre.

M. Goldbloom: M. le Président, un des éléments du programme du ministère en ce qui concerne l'encouragement à la vente du livre et à la lecture a été une subvention de 50% à la publicité faite dans les hebdomadaires régionaux du Québec pour la vente du livre québécois. Cette subvention existe-t-elle toujours?

M. Vaugeois: Une subvention aux libraires, avez-vous dit?

M. Goldbloom: Une subvention à la publicité faite dans les hebdos régionaux en faveur de la vente du livre québécois.

M. Vaugeois: Je vais demander à un de mes collaborateurs de me renseigner là-dessus. Je ne croirais pas que le programme comme tel... on a un autre programme sur la commercialisation. Cela m'étonnerait qu'il ait été maintenu comme il existait l'an dernier, parce que l'on a cherché à développer plutôt un programme par lequel l'éditeur, ou le libraire, était libre des moyens de publicité. Alors, je sais que le Conseil des arts a gardé un programme par lequel il paie une partie des annonces parues dans certains journaux. J'ai beau regarder, je ne trouve rien. (17 h 30)

En réalité, on ajoute 10% à notre masse d'intervention, aide à la promotion, sans être obligés de l'utiliser d'une façon ou de l'autre, une indexation de 10% de notre pouvoir d'intervention.

La question du député de D'Arcy McGee est plus précise que cela. Il veut savoir si le programme de publicité que nous avions, qui paraissait dans les hebdos, a été maintenu. Oui, on avait cela l'an dernier. Il avait une sous-question à cela, parce qu'il y a un libraire de Québec qui avait annoncé dans un journal du PQ.

M. Goldbloom: Voilà! Quelle honte! Mme Lavoie-Roux: ...

M. Vaugeois: En tout cas, vous admettrez une chose, ce n'est pas un programme qu'on surveille de très près, parce que tous ceux qui sont ici se posent la question, avant de vous dire non. Dans mon esprit, ce programme a été...

Il fait partie d'un programme plus général, plus global, non spécifié en matière de modalité.

Le directeur général des arts et des lettres me confirme que tout nous porte à croire que ce programme n'a pas survécu, parce qu'il était lié à une opération de promotion à la lecture. La subvention, je vous le rappellerai, avait été versée à l'Association des libraires, qui administrait le programme pour nous.

M. Goldbloom: II n'y a pas longtemps, le ministre a été l'invité d'honneur au Salon international du livre et il a fait miroiter dans son discours de nouveaux programmes d'aide à la librairie et à la distribution. Le ministre est-il prêt aujourd'hui à expliciter...

M. Vaugeois: Ce que nous avons à l'esprit actuellement se trouve dans le livre blanc sur le développement culturel. Essentiellement, cela procède des préoccupations suivantes: essayer d'abolir la distance, par exemple. Comment faire pour abolir la distance? C'est une subvention au transport, ou encore une subvention qui compense pour la communication téléphonique dans les régions excentriques. Cela devrait normalement donner des petites subventions qui vont se localiser à ce titre pour compenser pour la distance. L'idée était la suivante: le libraire de Chicoutimi, par exemple, ne devrait pas avoir à faire des frais plus élevés pour commander ses livres que celui de Montréal et, de la même façon, ne devrait pas avoir non plus des frais plus élevés pour recevoir ses livres. Alors, il y a des formules d'incitation au groupage. On n'est pas satisfait. On a un problème plus global de ce côté, c'est celui de la distribution en général. On est à étudier les formules qui se sont développées dans d'autres pays, comme en France, par exemple, avec les messageries, parce qu'un territoire grand comme le nôtre nous oblige vraiment à trouver des formules où on pourrait regrouper ce qui doit être distribué. Les lois actuelles nous empêchent de faire cela. Par exemple — je vais parler très clairement — les camions de l'Agence de distribution populaire ne peuvent amener à Chicoutimi ou dans les différentes régions du Québec autre chose que le produit du propriétaire du camion. Elle a un excellent réseau de distribution mais on ne peut pas l'utiliser, parce que les lois font qu'on n'a pas le droit de faire cela. En même temps qu'on a introduit des petits programmes de subventions au transport et à la communication, on cherche à réévaluer tout le problème des messageries.

M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais faire un commentaire d'ordre personnel. Le seul avantage et le seul plaisir de siéger dans l'Opposition, c'est que l'on a le temps de lire, ce que l'on n'a pas quand on assume les responsabilités d'un ministère. A cause de ce temps relativement libre, je me trouve assez souvent dans les librairies de Montréal, notamment. Je suis frappé par les prix élevés des livres.

Sans vouloir introduire un élément linguistique trop important dans cette discussion, j'ai l'impression que l'on paie un peu moins cher les livres comparables en anglais. Je me demande, M. le Président, dans quelle mesure le ministre croit pouvoir faire diminuer les prix pour justement rendre le livre plus accessible.

Il est évident que l'on peut acheter certains livres dans une reliure très modeste, qui ne coûte pas très cher, mais il y a quand même des livres d'une qualité particulière et d'un intérêt particulier

qui ne peuvent être reproduits sous cette forme et à de tels prix. Il me semble que l'on ne devrait pas se limiter, on ne devrait pas agir de façon à limiter les gens à revenu moyen à des livres qui sont reliés modestement et qui ne comportent pas la qualité d'illustrations et de dessins que l'on peut trouver dans des livres qui coûtent beaucoup plus cher.

M. Vaugeois: Un commentaire général, si vous me le permettez, sur la question du prix des livres. Il semble bien — je n'ai pas d'étude — que les livres, finalement, coûtent moins cher qu'à peu près tout ce qu'on peut consommer du côté culturel ou du côté sportif. Si on regarde, par exemple, le prix d'admission au cinéma, au spectacle, à la joute de hockey ou de baseball. Finalement, on peut établir aussi le prix que nous coûte une heure de télévision — c'est difficile à calculer, mais il y a des gens qui l'ont calculé. Même si vous ne regardez jamais la télévision, l'heure de télévision vous coûte quelque chose, si c'est le réseau d'Etat, vous savez pourquoi, si c'est la télévision privée, vous savez qu'on finit par la payer, par le prix des objets qu'on consomme, qui tient compte des budgets de publicité et la publicité à la télévision en particulier, cela a monté en flèche. Cela nous coûte très cher, qu'on regarde la télévision ou qu'on ne la regarde pas. Au moins, dans le cas des livres, il y a une consolation, c'est qu'on ne paie que les livres qu'on achète.

Si on compare l'augmentation du prix des livres avec l'augmentation du prix des entrées au spectacle, des entrées aux joutes sportives, des entrées partout, du temps de la télévision, finalement, ce serait ce qui a le moins augmenté ces dernières années.

Ce qui nous trompe un peu, à ce moment-ci, c'est que le livre français — le livre importé de France — a subi une hausse qui est beaucoup plus attribuable à l'évolution des taux de changes qu'à l'augmentation du prix réel du livre. En même temps que le dollar canadien avait tendance à fléchir, le franc, lui, se portait assez bien, de telle façon que, seulement au niveau du taux de change, la tabelle pratiquée actuellement par les distributeurs a pu passer de 28 à 38, ce qui, tout de suite, explique une bonne partie de l'augmentation, peut-être temporaire, si les taux de change se corrigeaient.

Nos éditeurs, ici, se demandent s'ils ne devraient pas réagir et faire ce qu'on a fait pendant la guerre, par exemple, c'est-à-dire rééditer au Québec des ouvrages, plutôt que de les importer. Il n'est pas dit que ce ne serait pas avantageux de le faire.

Vous avez raison, par ailleurs, de souligner — indépendamment de ce que je viens d'expliquer — que, en général, le livre anglais est moins cher que le livre français et ça...

M. Goldbloom: Question de l'importance du marché?

M. Vaugeois: Question de l'importance du marché, et il y a aussi un phénomène de dumping qui joue au Québec, comme ça joue d'ailleurs dans les grandes capitales américaines. A New York, on trouve énormément de soldes. C'est une façon de faire des éditeurs américains, le gros tirage, on essaie la vente, si ça marche bien, on réimprime, si ça ne marche pas, on solde. Il y a énormément de livres qui arrivent dans nos librairies à partir de ce phénomène, qui est plus fort aux Etats-Unis qu'en France.

Il y a l'autre phénomène aussi, c'est que, aux Etats-Unis, dès qu'un livre de première édition, dans une édition assez luxueuse, marche, on le met tout de suite en livre de poche, en "paperback", alors qu'en France, on mettrait des années avant de le mettre dans une collection de poche. Encore que, actuellement, on assiste à une prolifération de collections de poche en Europe. La plupart des maisons d'édition européennes, maintenant, ont leur collection de poche, tous les titres imaginables s'y trouvent. Cela contribue à réduire le prix du livre. Il nous arrive dans une forme moins sophistiquée, mais tout aussi convenable.

Est-ce que je peux ajouter que, malgré les hausses du prix du livre, ce qui est indéniable, le chiffre d'affaires des libraires est en progression à peu près comparable à ce que j'ai donné comme chiffres tout à l'heure pour les bibliothèques?

La lecture est un phénomène qui se généralise, qui se développe au Québec, comme, d'ailleurs, dans plusieurs autres pays du monde occidental.

M. Goldbloom: M. le Président, il y a un élément de la réponse du ministre que je trouve moins convaincant que les autres et c'est le tout premier. Il a tracé, en quelque sorte, les courbes d'augmentation du prix d'un événement sportif, d'un livre, d'un film et il a dit: Le livre n'a pas augmenté plus rapidement que les autres divertissements que l'on peut trouver. Le fait demeure, M. le Président, qu'en termes du montant à dépenser, si l'on veut aller au cinéma, c'est $3.75; deux personnes, $7.50. Si, par exemple, on va — je prends au hasard un exemple pertinent — voir le film Moulin Rouge avec José Ferrer et ayant vu le film, ayant payé $7.50 — et, peut-être, parce que c'est un vieux film, on peut trouver un théâtre où le prix d'entrée n'est que $2.25 — si l'on prend goût aux oeuvres de Toulouse-Lautrec, on se dirige vers une librairie et veut acheter un recueil des oeuvres de Toulouse-Lautrec, on n'en trouvera pas en bas de $50 et peut-être, dans certains cas, à près de $100.

Il me semble que, si l'on veut ouvrir la culture à une clientèle plus grande, plus nombreuse, c'est un découragement, parce que l'on voit le film, on se le rappelle un certain temps; deux ou trois années plus tard, on a de la difficulté à se rappeler ce que l'on a vu. Mais si l'on a un livre à la maison que l'on peut feuilleter à volonté, bien, Toulouse-Lautrec est là, dans la maison, et c'est un investissement qui, sur le plan culturel, vaut certainement plus que le fait d'avoir vu le film une fois. L'obstacle du prix demeure. Je sais que le ministre

n'est pas en mesure de manipuler une baguette magique et de faire tomber les prix des livres, mais je voulais souligner le problème qui existe, quant à la dissémination véritable de la culture.

Le Président (M. Blank): M. le député des Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Seulement une toute petite phrase pour proposer au député de D'Arcy McGee d'aller à la bibliothèque consulter des albums où on trouve des reproductions des oeuvres de Toulouse-Lautrec. Cela ne coûte rien.

Le Président (M. Blank): Le député de Gaspé.

M. Le Moignan: M. le Président, je ne sais si ma question est prématurée, mais, face à ce malaise général, à cette situation un peu endémique dans laquelle se trouve le livre au Québec, est-ce qu'il est prématuré de demander au ministre si son projet de loi sur le livre est en évolution? Est-ce qu'il est prêt? Est-ce qu'il va être déposé bientôt?

M. Vaugeois: II est prêt. Je souligne d'ailleurs la présence dans cette salle d'un des responsables de ce projet de loi, Me Roussel, qui a fort bien travaillé dans des conditions pas toujours faciles, parce qu'il a beaucoup de choses à faire, et là, il se cache, il est modeste. Notre problème, actuellement, est finalement d'ordre administratif et il y a des étapes à franchir qu'il faut respecter. Dans le milieu, on est allé chercher ce qui m'est apparu comme un consensus raisonnable. (17 h 45)

Je vous avouerai que, sans dévoiler trop de choses, il y a un point qui demeure très important et qui serait peut-être le seul à nous retarder un peu, c'est l'avenir du manuel scolaire. Vous avez vu dans les documents du ministre de l'Education la place qu'on voudrait donner au manuel scolaire à l'avenir. On a parlé d'un manuel au moins par discipline et par niveau. C'est donc dire que l'avenir du manuel scolaire peut être assez important et on ne peut pas isoler l'avenir de l'éditeur tout court ou du domaine du livre en général de ce qui va se passer du côté du manuel scolaire.

Or, l'approche que nous avons développée — vous l'avez vu par les journaux — je ne vous dévoile rien à ce moment-ci, cela a été dit très nettement dans les consultations avec les milieux du livre, toute notre politique du livre concerne les livres à l'exception des manuels scolaires. Nous avons sorti de la politique du livre le manuel scolaire. Vous connaissez la politique actuelle, vous savez que le manuel scolaire ne peut se vendre aux institutions, que par le biais du libraire agréé. Alors, notre projet cette année, a été de libéraliser la vente du manuel scolaire. On croit que notre approche se défend et le milieu en général l'accepte. Mais la question se pose: Quel avenir réserve-t-on au manuel scolaire? Je vous avoue que ce sont les derniers points que nous avons évalués avec le ministère de l'Education, qui fait que nous retenons peut-être certaines étapes actuellement, parce qu'on est à peu près prêt à aller jusqu'à la fin des étapes à prévoir.

Je ne suis pas allé au Conseil des ministres encore, mais nous l'avons abondamment étudié au comité ministériel de développement culturel.

M. Le Moignan: Sans vouloir entrer dans tous vos secrets, vous avez parlé d'isolement de l'éditeur. Est-il question de la protection de l'auteur dans ce projet sur le livre?

M. Vaugeois: On a étudié mille et une façons de protéger l'auteur. Celle que l'on va probablement retenir, ce sera de donner les moyens à l'Union des écrivains de défendre les intérêts de ses membres. Je pense que c'est davantage leur responsabilité... Il y a deux partenaires à un contrat d'édition et je pense que la meilleure façon c'est de donner à chacun des deux partenaires les moyens de faire respecter son contrat. Après avoir pensé à toutes sortes de formules, celle qu'on va sans doute retenir, c'est de donner les moyens à l'association qui regroupe les auteurs de faire respecter les droits de ses membres.

M. Le Moignan: Le député de D'Arcy McGee a mentionné le coût prohibitif dans certains cas, non seulement des livres français, mais même des livres québécois. On est un peu surpris parfois à cet égard. Certains livres atteignent un tirage très élevé, qui se vendent très cher. Par contre, à côté, on se demande pourquoi un autre livre qui est peut-être spécialisé, va se vendre, je ne veux pas discuter ce point, mais je voudrais toucher cet aspect. Est-ce que votre ministère prévoit des subventions pour la traduction? Je sais qu'il y a des livres québécois qui ont connu ici une grande publicité et qui ont été traduits soit en anglais, soit en d'autres langues. Est-ce fait par les éditeurs ou est-ce que le gouvernement a une politique pour encourager la diffusion d'un roman, par exemple, québécois, qui décrit très bien un aspect de notre vie?

M. Vaugeois: Pendant des années on s'est tenu à l'écart des programmes de traduction et le Conseil des arts avait des budgets importants pour aider à la traduction du français à l'anglais ou de l'anglais au français.

Cela nous a tenus un peu à l'écart de ce genre de programme, mais on s'est rendu compte qu'on se privait d'intervenir peut-être dans un secteur important. A la suggestion de l'ancien président de l'UNEQ en particulier, Jacques Godbout, et de quelques autres, on s'est mis à étudier la possibilité de traduire certains de nos ouvrages dans des langues autres que l'anglais. Cela aurait d'ailleurs le double avantage si on traduisait "II n'y a pas de pays sans grand-père", de Roch Carrier, roman que j'ai beaucoup aimé en italien et en différentes autres langues qui sont d'ailleurs celles de groupes culturels québécois, ça pourrait en même temps nous permettre de leur donner dans leur langue d'origine des ouvrages québécois et

également ça nous préparerait peut-être à des opérations d'exportation intéressantes. C'est actuellement à l'étude au ministère.

M. Le Moignan: J'aurais une dernière question. On a mentionné tout à l'heure le fait d'essayer de stimuler la population à la lecture. Est-ce dans l'intention du ministre d'amorcer ou d'organiser une politique de promotion provinciale, par exemple? Vous avez dit avoir dépensé très peu pour la publicité, vous avez peut-être discontinué, mais n'y aurait-il pas un effort à faire dans ce sens-là ou est-ce prévu chez vous, non seulement dans les écoles, ça irait évidemment dans les écoles avec le ministère de l'Education?

M. Vaugeois: D'abord, au niveau des éditeurs, on a des programmes qui amènent l'éditeur à trouver des moyens nouveaux de publicité, ça finit par jouer sur la lecture. On a également des programmes avec les bibliothèques publiques pour toutes sortes de formules de promotion de la lecture, d'incitation à la lecture. On veut vraiment retenir tout ce qu'on pourrait appeler la publicité à la télévision et à la radio. On voudrait jouer davantage cette carte-là.

Vous vous souviendrez peut-être que, l'an dernier, je m'étais donné comme tâche d'essayer de convaincre les média électroniques de faire davantage de place à la lecture. Cela reste extrêmement difficile; j'en ai discuté avec bien des gens à une réunion des ministres de la culture en Alberta. On en a établi une espèce de front commun. On a essayé une offensive vis-à-vis des grandes sociétés responsables. L'idée fait son chemin et je continue à espérer qu'on pourra réussir à obtenir de la part de la télévision en particulier, qu'elle s'intéresse davantage aux livres. Je considère que le phénomène de la lecture est extrêmement important pour le progrès d'une société et on sait que, quand la télévision joue son rôle à cet égard, les effets sont importants, mais c'est une entreprise de longue haleine.

En 1979, nous allons faire un effort particulier sur la littérature de jeunesse, en termes de publicité. Nous aurons des budgets au niveau des bibliothèques et des éditeurs pour les aider à faire la promotion du livre pour enfants.

M. Le Moignan: Les stations privées de radio et de télévision qui passent une émission, soit une fois par semaine où on fait une espèce de... est-ce qu'ils reçoivent des subventions du gouvernement ou est-ce qu'ils le font suivant leur initiative personnelle?

M. Vaugeois: II y a un programme du Conseil des arts pour des pages qui sont préparées pour les hebdos et les stations de radio. On ne parle pas de pages dans le cas des postes de radio, ce sont des entrevues qui sont préparées, qui sont envoyées sous forme de cassette à des postes de radio. Je m'explique mieux: le Conseil des arts subventionne un groupe actuellement qui prépare des recensions de livres québécois. Ces recen- sions sont préparées sous forme de pages montées ou de cassettes et sont envoyées aux hebdos ou aux postes de radio qui veulent participer au programme.

M. Le Moignan: Je crois que les maisons d'édition — j'ai un cas en tête — envoient directement les dernières publications aux stations de TV et c'est l'animateur qui, lui-même...

M. Vaugeois: Les deux se font.

M. Le Moignan: J'aurais une dernière question: c'est une recommandation du Conseil du statut de la femme. Je pourrais vous la lire pour avoir votre opinion.

M. Vaugeois: Allez-y donc.

Mme Lavoie-Roux: Vous me volez ma question.

M. Le Moignan: "Que le ministère de l'Education, le ministère des Affaires culturelles et le Haut-Commissariat à la Jeunesse, aux Loisirs et aux Sports — les trois — subventionnent et soutiennent les actions, c'est-à-dire recherche et production de livres pour enfants, de théâtres, de disques et de jouets et le reste, qui visent à présenter des modèles et à fournir des instruments d'apprentissage qui désexisent les rôles sociaux". C'était votre question, Mme le député?

Mme Lavoie-Roux: Cela faisait partie de... je trouvais que j'avais assez d'ouvrage à faire avec le ministre de l'Education à ce sujet.

M. Le Moignan: Cela serait bon d'avoir la réaction du ministre des Affaires culturelles à ce moment.

M. Vaugeois: Je vais vous répondre bien franchement et je ne voudrais pas avoir l'air de parler du fond de la question. Quand nous avons étudié, avec soin d'ailleurs, les recommandations du Conseil du statut de la femme, nous nous sommes arrêtés à cette recommandation. J'ai demandé qu'on ne la retienne pas au ministère, pour une raison toute simple, c'est que nous avons mis des années à nous sortir d'une évaluation subjective des manuscrits et des activités d'édition. Pour moi, le meilleur des motifs ne devrait pas nous ramener en arrière à cet égard. Le contenu des oeuvres publiées, des programmes d'édition ne nous concerne pas. Cela concerne les éditeurs et les auteurs. Je ne voudrais pas que, pour la meilleure des causes, nous revenions à des programmes discrétionnaires. J'ai discuté de cela avec les représentants du Conseil du statut de la femme qui se sont rapidement ralliés à cet argument. La meilleure des causes ne devrait pas ramener des gouvernements à des interventions dans des contenus et je sais que l'Opposition est très sensible à tout ce que nous faisons du côté de l'information. J'espère que cette fois, elle

reconnaîtra que nous avons cherché à être prudents et à évoluer dans le sens de programmes plus normalisés, plus objectifs et qui n'ouvrent pas la porte à une intervention sur les contenus quels qu'ils soient.

M. Le Moignan: J'ai terminé, M. le Président.

Le Président (M. Blank): Dans ce cas-là, nous allons suspendre notre séance. L'horloge n'est pas exacte. Il est présentement 17 heures. Nous suspendons nos travaux jusqu'à 20 heures.

Suspension de la séance à 17 h 56

Reprise de la séance à 20 h 05

Le Président (M. Blank): A l'ordre, s'il vous plaît! Nous allons continuer le travail de la commission des affaires culturelles qui étudie les crédits budgétaires de ce ministère. Nous sommes rendus... M. le député de Gaspé, est-ce que vous avez quelque chose à dire?

M. Goldbloom: Je peux reprendre là où nous étions. Le ministre est probablement au courant de certaines objections formulées par des écrivains en ce qui concerne l'appui financier du gouvernement à la Foire internationale du livre de Montréal et au Salon international du livre de Québec. Il y a cinq écrivains qui ont rendu public leur point de vue et qui ont dit que ces salons du livre constituent, je cite leur propre phrase, ce n'est pas la mienne: "un lobbying économique". Ils ont recommandé au ministre de substituer, à l'appui financier du ministère à ces salons, un appui à un organisme comme Radio-Québec, par exemple, afin qu'il y ait des émissions d'information littéraire. Le ministre est-il disposé à commenter le point de vue de ces écrivains?

M. Vaugeois: Est-ce que je pourrais vous demander d'être plus précis? Parce que vous parlez de quelque chose qui est nouveau pour moi.

M. Goldbloom: C'est un article du Soleil du vendredi 27 avril intitulé: Les écrivains veulent plus d'une émission littéraire à la télé que du salon annuel.

M. Vaugeois: Remarquez que je n'avais pas lu cela et que c'est nouveau pour moi. Mais je pense que je serais assez d'accord avec une partie du point de vue que vous venez de résumer. Nous aussi, on pense que la meilleure façon de rejoindre les lecteurs, c'est d'utiliser la télévision. Nous sommes prêts, à ce moment-ci, à mettre un effort financier sur une publicité qui utilise la télévision. Je pense qu'il n'est pas nécessaire de rayer l'un pour faire l'autre.

Le Salon du livre de Québec, comme les salons du livre régionaux sont d'excellents véhi- cules, à notre avis, pour rejoindre les gens; les éditeurs sont là, ils sont en contact, pour la seule fois de leur vie avec les gens qui s'intéressent à leurs livres. L'éditeur, normalement, n'est pas en contact direct avec sa clientèle, il est en contact avec un distributeur, ce qui est assez froid, alors, à l'occasion du salon, il sent davantage les lecteurs, leur intérêt et inversement pour les lecteurs, ils sont en contact avec celui qui fabrique les livres, celui qui les conçoit, celui qui fait produire les auteurs.

Les auteurs sont là également, il y a des activités d'animation intéressante. Les salons deviennent des événements, avec un petit budget; parce que notre subvention au Salon du livre de Québec est de l'ordre de $80 000. Si on voulait prendre ce montant et lui demander de donner autant d'effets en allant à la télévision, on n'aurait pas grand-chose. Pour avoir un impact à la télévision, il faut utiliser des sommes beaucoup plus considérables. Or, la tenue d'un salon, il faut dire que les salons régionaux nous coûtent de $8000 à $10 000, fait que la radio et la télévision régionales couvrent l'événement, elles reviennent à la charge, la presse en fait écho, des milliers de gens se déplacent.

Il faut quand même reconnaître que quand 100 000 personnes se déplacent pour un événement, c'est parce que ça correspond à un certain intérêt. Un événement comme celui-là qui déplace 100 000 personnes, ça correspond à quelque chose. Cela rejoint une des préoccupations des auteurs qui sont là. Mais quand ils disent qu'ils veulent plus d'une émission littéraire que d'un salon annuel, j'aurais envie de dire comme eux; moi aussi, j'aimerais mieux, si j'avais à choisir, une émission littéraire qu'un salon annuel. Mais je ne gagne rien en faisant disparaître le salon annuel. Ce n'est pas l'un ou l'autre que j'ai à choisir.' L'émission littéraire, on ne la contrôle pas. Je vous rappelais cet après-midi que j'ai bien essayé, tout au cours de l'année, de convaincre nos interlocuteurs fédéraux surtout, y compris le secrétaire d'Etat, M. Roberts, que j'avais vu, et il était d'accord, en principe. Cela n'a rien donné. Je suis revenu à la charge à Edmonton avec les ministres de la culture, on a adopté une résolution unanime là-dessus.

C'est une idée qui fait son bonhomme de chemin, elle est maintenant rendue chez les auteurs.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais passer à une autre question. Le ministre se rappellera peut-être d'avoir reçu une lettre de la part d'un militant péquiste du nom de Jean-Claude Lapierre. La seule façon que j'ai de savoir que c'est un militant péquiste, c'est qu'il signe sa lettre, Jean-Claude Lapierre, un libraire péquiste de Verdun. Ce n'est pas cela qui est important, parce que le contenu de sa lettre soulève deux problèmes qui me paraissent très réels.

Il dit, en somme, qu'il y a, au Québec, une loi sur les heures d'ouverture et de fermeture des magasins. Cette loi ne fait que très peu d'excep-

tions. Il y a les petites entreprises familiales qui peuvent dépasser les heures d'ouverture et de fermeture imposées par la loi, mais tel n'est pas le cas pour les libraires, les librairies.

Le deuxième problème qu'il soulève, c'est la concurrence entre les librairies et les tabagies, les magasins de toutes sortes qui ont des rayons de livres, livres format de poche, normalement.

Il dit, en somme: Si vous voulez encourager la lecture, il faudra songer à permettre aux librairies d'avoir des heures d'ouverture plus longues et il faudra songer à privilégier les librairies en ce qui concerne la vente des livres.

M. le Président, je n'ai aucune idée de la proportion du chiffre d'affaires d'une tabagie qui peut être représentée par la vente des livres. J'ai l'impression — et ce n'est qu'une impression personnelle — que cette proportion ne doit pas être très importante. Je ne veux pas être injuste à l'endroit des tabagies, mais il me semble que le bien commun exige de la part du ministre — il en a parlé lui-même d'ailleurs — une politique de la lecture et que cette politique de la lecture devrait privilégier les librairies en ce qui concerne la vente des livres.

M. Vaugeois: C'est un vieux problème qui est posé, avec la concurrence des tabagies et des librairies. Disons que quand on le pose sous l'angle des heures d'ouverture et de fermeture, tout le monde comprendra les griefs du libraire. C'est quand même un peu choquant d'avoir à côté de soi un tabagiste qui peut rester ouvert jusqu'à 11 heures le soir, si ce n'est pas toute la nuit, et ouvrir le dimanche, alors que le libraire est généralement tenu, par la nature de son commerce, de respecter les heures d'ouverture et de fermeture réglementaires de la ville où il se trouve.

Est-ce que cela affecte vraiment le libraire? Est-ce que le fait de vendre des livres en tabagie, y compris à des heures où le libraire n'est pas ouvert, cela affecte vraiment le libraire? C'est une question qui n'a jamais été résolue et beaucoup de gens pensent que la vente rapide et courte qui se fait en tabagie profite finalement au libraire, parce que souvent un livre part bien grâce au fait qu'il est présent partout et, de toute façon, le tabaconiste ne le gardera pas longtemps. Le tabaconiste ne le garde que pour la première vente. Après, d'autres nouveautés arrivent et les livres de quelques semaines disparaissent de la tabagie. Si le livre est bien parti, après, il profite au libraire, mais il reste qu'il peut y avoir des libraires qui voudraient profiter d'heures d'ouverture plus souples. (20 h 15)

II y a deux façons pour eux d'y arriver, c'est ou bien de vendre des cigarettes, M. le Président, ou encore d'espérer une nouvelle réglementation. Plusieurs ont choisi de vendre des cigarettes et, de cette façon, la loi leur permet d'être à la fois un tabagie et une librairie. Mais, nous, au ministère, nous avons considéré qu'il y avait peut-être lieu de soutenir le point de vue d'un libraire comme celui auquel vous avez fait référence. Nous avons communiqué avec le ministère de l'Industrie et du Commerce à cet égard pour essayer de provoquer une révision de cette réglementation.

La réponse que je viens de vous faire vous montre que nous ne croyons pas à des modifications très prochaines. Nous avons voulu alerter encore une fois le ministère de l'Industrie et du Commerce à ce sujet. Nous ne pensons pas que l'avenir de la librairie soit lié à cette question. Même à certains moments, on pense que le fait de trouver les livres en librairie profite à l'ensemble du livre. Cela m'étonnerait que, de la part de l'Opposition, on nous suggère de restreindre la vente des livres aux librairies agréées, ce qui serait vraiment, je pense, une façon un peu bizarre d'essayer de rendre le livre plus accessible, si on voulait l'interdire à peu près à 1000 postes de vente au Québec. Je le sais, ce n'était pas là le propos du député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Non, à condition, M. le Président, que le libraire puisse gagner sa vie...

M. Vaugeois: C'est cela, mais ce sera toujours difficile.

M. Goldbloom: ... malgré la concurrence. Ce qui m'amène à une autre question.

Le ministre est sûrement au courant du désir de certains libraires, surtout ceux qui ont de petits magasins dans les diverses régions du Québec, de pouvoir vendre les manuels scolaires aux commissions scolaires.

Il a, par contre, été question à un certain moment de permettre aux commissions scolaires de faire affaires directement avec les éditeurs, ce qui enlèverait aux libraires un certain potentiel de marché. Le ministre est-il en mesure de prendre position là-dessus? A-t-il décidé de quelle façon il voudrait voir se faire la vente des manuels scolaires?

M. Vaugeois: L'hypothèse que nous retenons actuellement, c'est — je ne sais pas s'il faut dire "libérer" ou "libéraliser" — de rendre libre la vente des manuels scolaires, ce qui voudrait dire que les commissions scolaires pourraient s'approvisionner chez le libraire, agréé ou non, ou directement chez le distributeur ou l'éditeur. C'est notre hypothèse actuelle, ce qui enlève un marché important à certains libraires, mais nous offrons aux libraires agréés une compensation en leur réservant le marché des bibliothèques publiques comme celui des bibliothèques qui sont en milieu d'enseignement et nous ramenons la pratique du prix payé au prix marqué, ce qui remet aux libraires une marge intéressante. Comme nous nous apprêtons également... C'est parce que les éléments se tiennent. Si nous allons dans ce sens, il y aura également la dimension de la propriété québécoise, ce qui veut dire que les libraires auxquels vous avez fait référence retrouveraient là un marché fort important. Il n'est pas dit qu'ils perdraient nécessairement le marché du manuel scolaire, mais ils en retrouveraient un d'une bonne importance. C'est notre hypothèse actuelle.

M. Goldbloom: M. le Président, quant à moi, j'ai épuisé les questions que je voulais poser sur le premier élément du premier programme. Il se peut quand même que ma collègue de L'Acadie veuille en poser à ce sujet. Par la suite, j'en aurai une ou deux sur l'élément 2.

M. Vaugeois: Est-ce que je peux en profiter, sur cet élément, pour faire part d'une précision que mes collaborateurs me signalaient tout à l'heure?

Quand on a été interrogé sur le budget des bibliothèques et le faible montant qui avait été dépensé, premièrement, nous avons précisé que cela avait été affecté ailleurs, mais ailleurs, c'est le plus souvent les BCP. Nous en avons profité pour accélérer le programme d'implantation des BCP et améliorer le budget d'acquisition de celles qui existent.

M. Goldbloom: M. le Président, je profite de ce complément de réponse de la part du ministre pour lui poser justement une question sur les BCP. Pourrait-il nous indiquer combien il y en a actuellement au Québec?

M. Vaugeois: Je pense qu'il y en a huit et la neuvième va ouvrir d'ici la fin de l'année 1979.

M. Goldbloom: Serait-il en mesure de nous fournir, pas nécessairement...

M. Vaugeois: Oui.

M. Goldbloom: ... séance tenante, une liste avec le budget de chacune?

M. Vaugeois: D'accord. M. Goldbloom: Merci.

Le Président (M. Blank): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: C'est simplement une observation, M. le Président. Dans les régions où les libraires sont aussi rares que les mouches en janvier, je crois que les tabagies nous rendent un immense service, parce qu'il n'y aurait pas moyen de nous procurer des livres autrement. Maintenant, pour ce qui concerne l'élément no 1 du programme, je crois avoir gratté le fond de mes casseroles avant le dîner. Je n'ai rien à ajouter.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais essayer d'être très brève dans mes questions. Je veux d'abord soulever le problème de la bibliothèque de la Législature. Je l'avais soulevé l'an dernier et nous compatissions tous les deux, mais j'ai l'impression qu'il n'y a absolument rien eu de fait, on continue d'éparpiller la bibliothèque et je ne suis pas sûre que la situation ne se détériore pas au lieu de s'améliorer. Alors, si mon sentiment est faux, qu'on me rassure. Sinon, qu'est-ce qu'on entend faire?

M. Vaugeois: C'est bien celle de la Législature dont vous parlez? Je pense que notre embarras tient lieu de réponse. Comme elle relève de l'Assemblée nationale, pour l'instant...

Mme Lavoie-Roux: Bon! De toute façon, si vous pouviez conjuguer vos réflexions, parce que j'ai l'impression que ça fait partie du patrimoine, ne serait-ce qu'à ce titre, même si l'on fait abstraction à sa valeur de bibliothèque comme telle.

M. de Bellefeuille: M. le Président...

Le Président (M. Blank): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: ... tout en rappelant, comme le ministre vient de le faire, que la question relève du président de l'Assemblée nationale, je voudrais me déclarer tout à fait solidaire du député de L'Acadie. Je pense qu'il y a là un problème réel. Il y a des éléments patrimoniaux, il y a de vieilles collections, auxquelles on ne porte peut-être pas le soin qu'elles méritent et, dans le lieu qui convient, la commission de l'Assemblée nationale ou quelqu'autre instance de l'Assemblée nationale, j'épaulerai volontiers les efforts du député de L'Acadie pour trouver une solution à ces problèmes.

Mme Lavoie-Roux: Je dois vous faire part que j'avais communiqué par écrit, officiellement, avec le conservateur de la bibliothèque qui m'a dit: Si jamais on décidait de faire quelque chose, je vous avertirai parce qu'on peut vouloir faire quelque chose, mais qu'est-ce qu'on fera, c'est une autre question. A tout événement, je n'ai pas eu d'autres nouvelles, alors j'ai conclu que tout était au point mort.

Une deuxième question touchant les bibliothèques — c'est une vieille obsession que j'ai — qu'arrive-t-il à la bibliothèque, pour la nième fois, de la CECM? Egalement, c'est ma nième, nième, nième...

M. Vaugeois: C'est votre question annuelle.

Mme Lavoie-Roux: Quand il se sera passé quelque chose, je ne la poserai plus. Il faudrait peut-être une réponse nouvelle, M. le ministre.

M. de Bellefeuille: Vous ne voulez pas retourner devant le public?

Mme Lavoie-Roux: Non, maintenant, je suis recyclée.

M. Vaugeois: Nous nous en sommes occupés pendant de nombreux mois, en particulier avec les autorités de la ville de Montréal et, en particulier, de la bibliothèque de la ville de Montréal et, également, même l'UQAM, de telle sorte qu'on arrive à trouver des solutions pour cette bibliothèque, toutes les hypothèses ont été émises, mais il y avait l'implication des autorités de la ville de

Montréal dans le dossier. Pour l'instant, je ne peux pas dire où elles en sont avec ce dossier.

Mme Lavoie-Roux: Je sais que M. Cartier est très sensible à ce problème, mais il reste que c'est encore au point mort depuis le temps où j'ai fait un mini-débat sur la question en 1976.

Mon autre question — si elle a été posée, dites-moi simplement qu'elle l'a été et je lirai le journal des Débats — touche la politique de lecture. L'an dernier, on avait dépensé un certain montant en publicité pour faire de la sensibilisation. D'abord, quel a été le montant dépensé? A-ton fait une évaluation de l'opération? Une deuxième question se rattachant au même sujet: Cette année, dans un des communiqués des affaires culturelles, j'ai vu qu'on avait de nouveau alloué un certain montant de l'ordre — là, je peux me tromper — de $25 000 sous une autre forme, mais pour les mêmes fins; cette fois, je pense que c'était à l'intérieur des bibliothèques municipales elles-mêmes. Je voudrais savoir si, dans le premier cas, il y a eu une évaluation de l'opération? Est-ce que ça donne quelque chose? Pour la deuxième opération, j'imagine que c'est trop tôt pour faire une semblable évaluation.

On peut continuer de mettre des sous, mais avec les inquiétudes et les préoccupations du ministre qui veut tout bien rationaliser, est-ce qu'il évalue ces opérations?

M. Vaugeois: La première fois, on a engagé un montant global d'environ $100 000, à quelques dollars près. Il y a eu une évaluation, elle a été faite immédiatement, d'ailleurs, dans les semaines qui ont suivi. Elle devait être portée par écrit, je ne sais pas si cela a été fait, mais je sais que dans les semaines qui ont suivi, la décision a été prise de ne pas répéter l'expérience sous la même forme. Je pense que j'avais fait allusion à cela, d'ailleurs, l'an dernier au moment de l'étude des crédits.

Mme Lavoie-Roux: L'évaluation n'avait pas été faite à ce moment-là.

M. Vaugeois: Non, mais j'avais déjà le sentiment que nous ne reprendrions pas de la même façon. Ce que nous retenons, pour l'instant, c'est l'animation par les bibliothèques, et je pense que c'est une somme de $50 000 qui est réservée...

Mme Lavoie-Roux: C'était plus modeste.

M. Vaugeois:... pour les activités d'animation en bibliothèque.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce qu'il y aurait moyen d'avoir copie de la première évaluation qui a été faite?

M. Vaugeois: Est-ce qu'elle a été portée par écrit? Je sais qu'on a eu une bonne séance de travail, j'y participais, sur les premiers $100 000. Mais comme on n'a pas jugé bon de le reconduire, de toute façon, peut-être que les gens n'ont pas jugé utile de le noter par écrit. Le directeur général me fait signe qu'à sa connaissance, il n'y a pas eu d'évaluation écrite.

Mme Lavoie-Roux: Et sur ces nouvelles sommes qu'on investit pour de la sensibilisation et de l'animation, est-ce qu'il y aura une évaluation de faite?

M. Vaugeois: L'an dernier, ce programme d'animation a commencé très tard, ce qui fait qu'il y a un peu plus de vingt bibliothèques qui s'en sont prévalues. Cette année, on intègre cette possibilité à leur budget et l'opération devrait être beaucoup plus large à travers le Québec, puisqu'elle va pouvoir se dérouler sur douze mois et non pas sur les derniers mois de l'année comme c'est arrivé l'an dernier.

Mme Lavoie-Roux: Ce que vous proposez, c'est sur une année complète? Je comprends qu'il y a eu un ordre peut-être de se restreindre à quelques mois d'opération, mais est-ce qu'on peut espérer qu'au budget de l'an prochain on aura une évaluation de ce type d'opération?

M. Vaugeois: On doit l'avoir actuellement, on pourrait même vous fournir la liste des projets qui ont été réalisés l'an dernier par les bibliothèques au niveau de l'animation et de la lecture.

Mme Lavoie-Roux: De nouveau, je voudrais demander au ministre quels efforts conjoints sont faits entre son ministère et le ministère de l'Education pour tout ce problème de sensibilisation des jeunes à la lecture et d'animation? Vous y avez peut-être répondu, je ne le sais pas.

M. Vaugeois: Oui, mais M. Cartier pourrait être plus explicite, parce qu'on a un nombre exceptionnel de programmes actuellement, à cause de l'année de l'enfant. Mais des opérations de long terme...

Mme Lavoie-Roux: II n'y en a pas.

M. Vaugeois: Non, il y en a. Mais cela arrive à l'occasion d'événements particuliers. Je vais donner un exemple qu'on a traité ces derniers jours. Il y a une bibliothèque municipale qui a passé au feu, il y a quelques semaines. On a trouvé un nouveau local et nous allons utiliser, pour la période d'été, des livres qui viennent des bibliothèques scolaires. Cela sera peut-être le début d'une collaboration entre les bibliothèques scolaires et les bibliothèques municipales. Il y a du cas par cas comme cela. Il y a dans le nord de Montréal, dans le comté de Bourassa, une expérience d'utilisation, d'ouverture de bibliothèques scolaires aux jeunes durant l'été. Il y a le CEGEP de Trois-Rivières également qui vient de voir sa surface agrandie à 35 000 pieds carrés: et qui va s'ouvrir officiellement à la population, également.

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse de vous interrompre, c'est pour ne pas prendre trop de temps. Ce genre d'expérience existe déjà et depuis un

certain nombre d'années. Je pense que l'école Evangéline à Montréal, etc.

M. Vaugeois: Oui, mais cela ne devient pas...

Mme La voie-Roux: Oui, mais je veux dire du point de vue de...

M. Vaugeois: ... l'incitation à la lecture. Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: M. Cartier, pourriez-vous donner une idée des programmes qu'on a?

Madame posait la question avec le ministère de l'Education, il y a une chose, par exemple, qui se fait, c'est un concours à travers toutes les écoles, concours de création littéraire ou de critique de textes à un niveau assez peu élevé. Nous travaillons en coopération avec le ministère de l'Education à l'élaboration de ces programmes conjoints du ministère de l'Education et du ministère des Affaires culturelles. Il y a également toute l'opération actuelle qui se poursuit, que vous avez peut-être vue à la télévision pour favoriser et développer la lecture chez les jeunes, à l'occasion de l'année internationale de l'enfant. Nous sommes impliqués, il y a des troupes de théâtre, il y a de l'affichage. Ces troupes vont dans les écoles illustrer par des pièces de théâtre et des personnages les personnages mêmes de notre littérature québécoise pour enfants. C'est une très vaste opération. En plus, il y a une diffusion massive à travers toutes les bibliothèques de livres québécois pour la jeunesse.

Mme Lavoie-Roux: Dernière remarque, j'avais soulevé l'an dernier la question des libraires agréés et je pense que la politique n'a pas été modifiée quant à l'achat par les commissions scolaires des livres, tant manuels scolaires que livres de bibliothèque. J'avais souligné que ceci pénalisait budgétairement les institutions scolaires. Je pense que cela a été prouvé, hors de tout doute, depuis déjà... Cela aussi, c'est une question de 1976, mais vous n'y étiez pas. (20 h 30)

Je veux de nouveau lui faire remarquer que la non-indexation des dépenses du ministère de l'Education, la hausse et l'inflation du coût des livres ont comme résultat que les efforts que votre ministère peut déployer sont, d'une certaine façon, je ne dirais pas annulés, mais ne sont pas appuyés d'une façon adéquate par les institutions scolaires.

J'attire de nouveau votre attention là-dessus, je comprends que le ministre des Finances dit: Le chauffage monte et je ne m'en occupe pas et l'électricité monte et je fais comme si ça n'existait pas. Il y a aussi le prix des livres qui monte et, finalement, c'est une situation qui dure depuis plusieurs années. Peut-être que ce que vous faites d'une main a beaucoup moins de valeur parce que, de l'autre main, on n'y met pas les mêmes efforts.

M. Vaugeois: On a abordé un peu cette question tout à l'heure, Mme le député, en votre absence; je reviendrai sur l'essentiel. L'hypothèse sur laquelle nous travaillons actuellement, dans le cadre de la révision de la politique du livre, rendrait libre l'acquisition des manuels scolaires par les institutions, les commissions scolaires par exemple. Donc, ce que vous déplorez n'existerait plus. Les commissions scolaires pourraient acheter leurs livres directement du distributeur ou de l'éditeur.

Par ailleurs, pour maintenir aux libraires un marché qui leur permet de survivre, dans le sens de la préoccupation du député de D'Arcy McGee, on leur réserve le marché des bibliothèques, non seulement des bibliothèques publiques, mais des biliothèques scolaires, des bibliothèques d'institution, en invitant tout le monde à pratiquer le prix régulier, alors qu'actuellement, il y a une remise de 15%. Cela amènerait le ministère des Affaires culturelles à intervenir dans les budgets d'acquisition des bibliothèques scolaires comme des bibliothèques municipales, parce que nous voudrions maintenir leur pouvoir d'achat.

Là, on a fait une petite découverte. Ce n'était pas une découverte pour tout le monde, mais, pour nous, c'en était une. C'était la diminution progressive, mais sûre des budgets d'acquisition des bibliothèques des institutions. C'est assez extraordinaire de voir que de bonnes bibliothèques, bien équipées, avec un bon personnel, voient baisser leur budget d'acquisition année après année.

Mme Lavoie-Roux: Je suis contente que vous vous en soyez aperçu; je vous l'avais signalé l'an dernier, il y a deux ans aussi.

M. Vaugeois: Là, on s'en est aperçu avec des chiffres bien concrets et des chiffres qui frisent le ridicule, dans bien' des cas. C'est un effet que nous n'avions pas prévu dans notre révision de la politique du livre, mais ça pourrait nous amener à cerner cette déficience et, comme ministère des Affaires culturelles, malgré notre petitesse, d'intervenir auprès des budgets d'acquisition.

Ceci étant dit, je ne veux pas faire un débat avec ça et je viens de vous dire quelle est notre approche avec la nouvelle politique du livre et on vient de rejoindre une de vos préoccupations majeures que vous avez rappelée encore cette année. Mais je me permets, je me dois, je me sens obligé de dire que, d'après nous au ministère des Affaires culturelles, nous sommes prêts à le faire mais que d'après nous, le retrait du manuel scoiaire de l'ensemble de la politique du livre signifiera rapidement des manuels plus chers pour les institutions. Parce qu'il y a une situation de monopole qui peut en découler. C'est ce que nous disons actuellement au ministère de l'Education: Voyez attentivement les effets possibles. On est prêt à se retirer, c'est notre hypothèse de travail. Donc, on n'est plus intéressé par ça, sauf qu'on pense qu'on se doit d'alerter les institutions et le ministère de l'Education sur des conséquences

qui n'ont jamais été prévues par les commissions scolaires, parce que la seule chose qu'elles notaient, c'était les 15% qu'elles devaient donner aux libraires.

Mme Lavoie-Roux: II y avait aussi la possibilité de procéder par soumission, ce qu'elles n'avaient plus.

M. Vaugeois: Sauf que, dans le manuel scolaire, c'est souvent un produit unique. La soumission, ça ne veut rien dire.

Mme Lavoie-Roux: En tout cas...

M. Vaugeois: Le libraire pouvait soumissionner, mais l'éditeur est à l'origine d'un produit unique, il vend au prix qu'il veut.

Mme Lavoie-Roux: II y avait de la concurrence quand même. En tout cas, merci.

Le Président (M. Blank): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, avant de me prévaloir de mon droit de parole, je voudrais vous demander une directive, parce que le député de Saint-Louis a présenté à l'Assemblée nationale un projet de loi visant à interdire de fumer dans lès endroits publics et la directive que je vous demande, M. le Président, c'est à savoir si le salon rouge est un endroit public.

Le Président (M. Blank): Je vais vous donner ma définition. De l'autre côté de la table, c'est public; ici, c'est réservé aux députés et aux fonctionnaires, c'est un endroit privé.

M. Vaugeois: Est-ce que je peux vous demander de transmettre...

M. de Bellefeuille: Cela dit...

Mme Lavoie-Roux: Et surtout avec vos cigares.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je voudrais revenir sur cette question à laquelle le député de l'Acadie a fait allusion: la question des programmes d'animation dans les bibliothèques. Comme chaque député, je suppose que je ne fais pas exception à la règle, je suis porté à m'en référer à ce qui se passe dans mon comté. Je constate, par exemple, qu'à Saint-Eustache, qui est la ville principale de mon comté, il y a une bibliothèque publique, qui est une excellente bibliothèque publique, à laquelle la municipalité fait une contribution qu'on pourrait considérer comme une contribution modèle. C'est une bibliothèque bien montée, à laquelle la municipalité fait comme je l'ai dit, une contribution importante, ce qui lui donne droit à des subventions appréciables de la part du ministère des Affaires culturelles.

Mais l'observation assez commune qui a été faite à Saint-Eustache, par les citoyens et aussi par les journalistes locaux, c'est qu'il y a beaucoup d'activités dans cette bibliothèque, autour de la section des enfants. Et il y a de l'animation qui se fait, à l'initiative des enseignants.

Mais pour ce qui est des jeunes et des adultes, il se passe fort peu de choses du point de vue de l'animation de la bibliothèque. Le ministre nous a habitués, depuis déjà quelques mois, à nous comparer à des modèles extérieurs, comme le modèle ontarien. Et étant moi-même franco-onta-rien de naissance, je me souviens fort bien de ce que sont, à Ottawa, les bibliothèques municipales, enfin la bibliothèque municipale partagée en plusieurs succursales, où il y avait déjà, quand j'étais écolier et jeune homme, des programmes d'animation. Et je constate qu'aujourd'hui, à Saint-Eustache, pour les adultes, il n'y a pas de programme d'animation. Et je crains qu'il soit extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, pour la bibliothèque de Saint-Eustache, d'inventer à elle seule un programme d'animation. Il me semble qu'un programme d'animation, à la bibliothèque de Saint-Eustache, pourrait se développer si cela existait dns un certain nombre d'autres bibliothèques, s'il y avait un réseau, s'il y avait des expositions itinérantes, s'il y avait toutes sortes de choses qui faisaient le circuit des bibliothèques publiques.

Ces choses-là n'existent guère que je sache. Et quant à l'existence de ce type de programme d'animation des bibliothèques publiques, je m'interroge aussi, M. le Président — et j'espère que M. le ministre écoute aussi — sur le rôle de la bibliothèque nationale, par rapport à ces programmes d'animation. La bibliothèque nationale elle-même, à Montréal, a un programme d'animation. Mais il m'apparaîtrait... D'abord, je ne suis pas sûr si ce programme d'animation de la bibliothèque nationale est en expansion ou en contraction. Je l'ignore. Mais je n'ai pas l'impression, de toute façon, que ce programme d'animation de la bibliothèque nationale a des retombées dans les bibliothèques locales.

Je demande au ministre si on ne pourrait pas concevoir un développement des programmes d'animation des bibliothèques, qui reposerait, en bonne partie, sur des initiatives qui seraient prises par la bibliothèque nationale, qui concevrait des éléments importants de ce programme et qui pourrait en faire profiter, à tour de rôle, un grand nombre de bibliothèques locales comme celle de Saint-Eustache, où il y a beaucoup d'enfants, mais malheureusement, beaucoup trop peu d'adultes.

M. Vaugeois: Le propos que vient de développer le député de Deux-Montagnes m'intéressait au point d'ailleurs que je sondais, séance tenante, le directeur général des arts et des lettres qui, comme tout le monde le sait, est un bibliothécaire de grande réputation. J'étais curieux de lui demander carrément sa position vis-à-vis de l'animation pour adultes, parce qu'assez curieusement, j'ai rencontré à cet égard de la résistance chez certains bibliothécaires professionnels qui

me diront: Attention! ne confondons pas les rôles, une bibliothèque, ce n'est pas ce que vous pensez. Ils sont prêts à faire des concessions pour les jeunes, mais ils ne sont pas prêts à avoir la même attitude pour les adultes. A la Bibliothèque nationale, j'ai parfois eu ce genre de réflexion-là. Malgré cela, je pense que le sentiment qui prévaut à la BN, c'est que l'animation est importante et qu'elle prend une place toujours plus grande. Est-ce que cela pourrait aller jusqu'à devenir le coeur d'activités qui pourraient devenir des occasions d'animation dans les bibliothèques ailleurs au Québec? Cela peut être étudié. C'est une chose que nous notons. Nous savons, par ailleurs, qu'il y a des bibliothèques où l'animation est extraordinaire: à Brossard, je pense que c'est aussi le cas à Verdun, à Saint-Léonard, ici à Sainte-Foy. Il y a des bibliothèques qui font des choses étonnantes. Il y en a qui ne le font pas et, parfois, je me demande si ce n'est pas un peu fondé sur les préjugés et les attitudes du bibliothécaire, du directeur de la bibliothèque, parce que j'ai le sentiment qu'il y en a qui n'aiment pas beaucoup développer cet aspect-là.

Au ministère, nous croyons que la bibliothèque, c'est le lieu de réunion par excellence, c'est le lieu d'activités culturelles par excellence, ce sera le seul qui se trouve dans une petite municipalité. Ce qui est souhaitable, au fond, c'est que l'animation culturelle soit spontanée, qu'elle ne soit pas toujours provoquée par des éléments extérieurs. Justement, à Toronto, j'étais toujours ravi de voir le lieu de réunion naturel que peut devenir la bibliothèque. Tout en étant favorable à des choses provoquées, je trouve que ce qui est encore mieux, c'est ce qui sort du milieu et qui vient naturellement et les gens se sentent chez eux dans leur bibliothèque.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je retiens ce que vient de dire le ministre que, de la part des bibliothécaires, il peut y avoir une certaine résistance. Or, cette résistance peut justement avoir pour effet pratique de bloquer ce qui pourrait exister comme initiatives locales, alors que s'il y avait un programme d'ensemble, un programme qui serait mis sur pied, encouragé par le gouvernement, à ce moment-là, le ou la bibliothécaire, au plan local, aurait beaucoup plus de chances d'être pris dans le mouvement. A ce moment-là, les portes de la bibliothèque étant ouvertes à des activités d'animation qui soient autre chose que de permettre aux gens de venir emprunter des livres, cela ouvrirait en même temps la porte à des activités d'inspiration locale. Autrement dit, il me semble qu'un programme mis sur pied par le ministère pourrait surmonter, mieux que toute autre chose, les réticences des bibliothécaires dont le ministre a parlé.

M. Vaugeois: C'est très juste et nous en faisons notre profit, mais il faut se rappeler l'image de la bibliothèque où on garde le silence, où ne parle jamais, où on avance sur la pointe des pieds, où on chuchote sa question au comptoir, etc. Il faut quand même admettre que, pour certains bibliothécaires, c'est un drôle de changement que de parler dans la bibliothèque ou même d'amener un ensemble musical, mais on en est là et le changement de mentalité se fait.

M. de Bellefeuille: M. le Président, est-ce que je pourrais profiter du fait que vous m'avez accordé la parole pour aborder une autre question à propos des bibliothèques? Il s'agit d'une question particulière, il s'agit de la Bibliothèque polonaise de Montréal. Il existe, à Montréal, un grand nombre de bibliothèques dont des bibliothèques que, dans notre parlé courant, nous serions portés à appeler ethniques. Ma femme est d'origine polonaise et, par conséquent, elle est très au courant de ce qui se passe dans la collectivité polonaise de la région de Montréal et elle me tient au courant. (20 h 45)

Alors, la bibliothèque polonaise de Montréal vit grâce à un financement, pour revenir à notre parler populaire, du type broche à foin. Elle reçoit des subventions indirectes de l'Université McGill, en ce sens que l'Université McGill la loge. Elle reçoit des subventions du Congrès polonais canadien. Elle reçoit peut-être, je n'en suis pas sûr, une certaine aide de la part de la ville de Montréal. En grapillant à droite et à gauche, elle a réussi à se constituer, au fil des années, et à survivre. Vu les augmentations de coût, vu toutes sortes de circonstances, elle se trouve aujourd'hui dans une situation assez critique où elle a besoin d'aide à court terme. Jusqu'à maintenant, elle s'est passée de l'aide directe du gouvernement du Québec. Ce problème a été présenté, M. le ministre, à vos fonctionnaires. Ceux-ci ont évoqué la possibilité de la création à Montréal d'une bibliothèque interethnique à laquelle cette bibliothèque polonaise, avec un certain nombre d'autres, pourrait être rattachée.

Je n'ai pas du tout l'intention de m'opposer à ce projet d'une bibliothèque interethnique à Montréal, qui a peut-être une grande valeur, mais je crois constater que la mise de l'avant de ce projet ne peut pas dans l'immédiat répondre aux problèmes immédiats de la bibliothèque polonaise de Montréal. Je sais que l'actuel gouvernement veut systématiser les subventions, veut les astreindre à des normes, que l'actuel gouvernement n'aime pas faire des subventions discrétionnaires — je sais tout cela — mais, quoi qu'il en soit, nos lois prévoient toujours pour un certain nombre de ministres une certaine marge de discrétion qui existe toujours. A l'intérieur de cette marge de discrétion, je voudrais demander au ministre s'il ne lui serait pas possible — vu que les besoins dont il s'agit sont minimaux, ils se chiffrent seulement à quelques milliers de dollars — de se prévaloir de ce qui lui reste de pouvoirs discrétionnaires pour venir en aide à la bibliothèque polonaise de Montréal dans la période intermédiaire entre la situation actuelle et une solution globale qui viendra plus tard, mais qui n'est pas immédiate.

M. Vaugeois: La réponse, c'est oui. Nous sommes d'ailleurs déjà en contact avec les gens qui sont les porte-parole de cette bibliothèque. Effectivement, l'essentiel de nos efforts se porte vers une solution de long terme. A cet égard — j'ai l'air de me répéter — ce que j'ai vu à Toronto me paraît être la façon de faire. Au dernier étage, à Toronto, il y a toute une section réservée à des livres dans d'autres langues que la langue anglaise. C'est la seule section d'ailleurs où il y a des prêts directs. La bibliothèque de Toronto, la grande bibliothèque métropolitaine, c'est une bibliothèque de référence pour consultation sur place ou encore pour prêts inter-bibliothèques, sauf pour la section en langue étrangère, où, là, l'accès direct est possible et où le prêt est possible Cela me paraît être un bon modèle. J'ai retrouvé une formule semblable à Boston. A Montréal, nous allons vers une formule qui ressemble à celle-là. Nous allons même jusqu'à songer à l'intégration de la BN ou de la BM dans un même complexe, avec une section importante pour des livres dans d'autres langues. Vous avez raison, M. le député, de vous inquiéter d'ici là du sort de la bibliothèque polonaise. C'est un problème auquel nous portons attention et de façon fort sympathique.

Le directeur général des arts et des lettres m'a passé un petit bout de papier qui m'amène à faire une remarque sur une question antérieure, qui vous intéressait, M. le député de Deux-Montagnes. Nous organisons actuellement des stages à l'intention des bibliothécaires dans le but de les sensibiliser à des formules comme celle que vous avez suggérée et de créer parmi eux une émulation en les amenant à s'échanger les expériences faites par les uns et par les autres.

Le Président (M. Blank): On va entendre la bibliothèque de Sherbrooke maintenant.

M. Gosselin: Pas précisément, sauf pour signaler qu'on a une BCP qui a démarré, il y a déjà quelques mois, les résultats sont très intéressants et l'animation auprès des municipalités dans les Cantons de l'Est se fait et de plus en plus de municipalités s'y joignent. Mais je voudrais raccrocher mon intervention à la discussion de tout à l'heure sur l'animation pour les adultes dans les bibliothèques publiques.

D'une part, je suis ravi de constater, dans certaines bibliothèques, tout le travail d'animation qui se fait au niveau des enfants et je trouve que c'est déjà une excellente approche pour amener les parents, d'une manière plus régulière, à la bibliothèque. Je le fais moi-même et, pour la famille, c'est devenu dorénavant un rituel. C'est une excellente habitude que je n'avais pas, ni mon épouse, et qu'on prend de plus en plus.

Il y a un champ d'intérêt, je pense, qui mériterait particulièrement d'être développé dans les bibliothèques publiques pour adultes. Ce sont toutes les questions rattachées à l'éducation des enfants et toute les publications qui s'adressent particulièrement à la population féminine, la clientèle de la ménagère, de l'éducatrice au foyer.

Je remarque qu'il y a énormément d'échange et qu'il y a un intérêt de plus en plus soutenu, un peu dans tous les milieux, par la naissance de groupes féminins organisés et aussi par des lieux d'échange de plus en plus nombreux qui se multiplient sur la question de l'éducation des enfants, diverses publications sur les relations humaines ou autres qui font partie du courant d'épanouissement féminin qu'on connaît actuellement.

Je voudrais presque en faire une suggestion, si ce n'est pas un lieu marqué, parce que je suis certain que, dans la plupart des milieux et notamment chez moi, à Sherbrooke, ça susciterait sûrement, de la part des organismes familiaux et de la part des regroupements féminins, un intérêt très vif si on leur demandait de collaborer à un plan d'animation pour les adultes dans les bibliothèques, notamment rattaché à la clientèle féminine.

Mme Lavoie-Roux: Cela se fait déjà dans les musées.

Le Président (M. Blank): Merci. Est-ce que le programme 1 est adopté?

Mme Lavoie-Roux: Adopté.

Le Président (M. Blank): Adopté. Programme 2, sauvegarde et mise en valeur des biens culturels.

Sauvegarde et mise en valeur des biens culturels

M. Goldbloom: M. le Président, à l'élément 1, je voudrais demander au ministre où il en est dans la préparation d'une loi-cadre sur les archives.

M. Vaugeois: J'ai actuellement un projet de loi qui est prêt, mais que je me dois d'étudier avec certains organismes centraux parce que nous posons le problème du préarchivage, et donc des archives qui se trouvent dans les différents ministères. En gros, les dossiers s'accumulent. A un moment donné, on les envoie dans les entrepôts. Puis, on veut nettoyer les entrepôts. Là, il s'agit de savoir ce qu'on peut jeter et ce qu'on doit garder et, ces derniers temps, il s'était développé une préoccupation au Conseil du trésor qui avait amené la formation d'un groupe de travail rattaché au Conseil du trésor qui se préoccupait du préarchivage. Or, notre projet de loi avance des solutions pour le préarchivage et on est à discuter tout ça avec le Trésor et aussi avec les Travaux publics qui fournissent les espaces, qui fournissaient une certaine expertise. Ce n'est pas l'aspect le plus important du projet de loi, mais c'est un des aspects qui nous obligent actuellement à discuter avec certains organismes au gouvernement. Mais pour l'essentiel, notre projet de loi est prêt à être étudié par le Conseil des ministres. Nous attendons donc les avis techniques de ces organismes. Il a déjà été vu par le comité ministériel de développement culturel. Je pense qu'il a soulevé beaucoup d'intérêt auprès de mes collègues. C'est

une démarche importante qu'il est maintenant urgent de faire.

M. Goldbloom: M. le Président, outre les archives publiques, il y a certaines archives privées. Le projet de loi touchera-t-il les ressources privées également?

M. Vaugeois: Oui. Nous allons nous préoccuper des archives privées, mais dans le respect de leur caractère privé, c'est-à-dire que nous allons offrir un certain nombre d'avantages aux gens qui ont des archives privées, mais il n'y aura pas d'intervention législative qui va viser ou limiter les droits des propriétaires, à l'exception, bien sûr, d'une intervention par la Loi des biens culturels.

Si la Loi des biens culturels nous amenait à classer un fonds privé, alors là, les mécanismes prévus jouent. Je ne le dis pas gratuitement, parce que, nous venons de créer un précédent ces jours derniers en envoyant deux avis d'intention de classer des fonds privés. L'un concerne la famille Boucher, vous connaissez Pierre Boucher, le gouverneur de Trois-Rivières dont la descendance a fourni au Québec des premiers ministres, des évê-ques, des fondatrices de communautés religieuses, c'est une des plus belles familles au Québec. Nous avons également un avis d'intention de classer le fonds Hart, le fonds de la famille Hart; c'est, pour moi, le fonds le plus riche en Amérique du Nord pour l'histoire des Juifs nord-américains. Ce fonds est conservé aux archives Pierre Boucher — c'est assez curieux qu'il en soit ainsi — de Trois-Rivières. Nous pensons que même si ce fonds a un caractère privé, qu'il appartient à une institution privée, il est d'un intérêt tel que nous nous devons de le protéger. Nous voulons poser ce geste pour protéger le fonds Hart et, en même temps, cela nous permet d'aider l'institution à en prendre soin, à améliorer l'index, les inventaires, la protection sur microfilm, ainsi de suite.

M. Goldbloom: M. le Président, j'ai une dernière question à ce sujet. L'automne dernier, le conservateur des archives nationales faisait une tournée de consultation. J'aimerais savoir si cette tournée est terminée et s'il y a des documents qui peuvent être rendus publics ou mis à la disposition des membres de cette commission parlementaire.

M. Vaugeois: M. le député, cette tournée avait surtout comme objectif de faire connaître, d'une part, les dispositions de la Loi sur les biens culturels en ce qui concerne les archives privées, justement, et également de faire connaître l'intention du ministère de commencer une action en vue de la mise en application de cette loi dans le domaine des archives. C'est dans le cadre de cette opération que nous avons procédé à une tournée de sept régions à travers le Québec, au cours de laquelle il nous a été donné de rencontrer plusieurs propriétaires d'archives, soit des individus, des organismes, des municipalités, des institu- tions religieuses et des institutions d'enseignement.

Au cours de cette tournée, nous avons distribué un document schématique que je pourrai vous transmettre qui présente les dispositions de la Loi sur les biens culturels.

M. Goldbloom: M. le Président, je n'ai pas d'autre question sur l'élément 1.

Le Président (M. Blank): M. le député de Gaspé. (21 heures)

M. Le Moignan: Sur le même sujet, M. le Président, et en relation avec ce que monsieur vient de dire, je ne sais pas si vous faites allusion à un programme de recherche qui a été effectué il y a trois ou quatre ans par l'Université du Québec à Rimouski. Cela n'est peut-être pas dans le cadre du gouvernement du Québec. Je sais qu'on a reçu une subvention et qu'on a fait une inspection, une vérification sommaire des archives, par exemple, de la Société historique de la Gaspésie. Le but était de se rendre compte de la richesse des archives qu'on ne voulait pas rapatrier à Rimouski et de couvrir la province avec le temps. Je pense que c'est un organisme qui relève...

M. Vaugeois: C'est cela, c'est le projet qui est relié à la mise en application de la loi. En vue de mettre en oeuvre des mesures de protection, il nous faut d'abord procéder à un inventaire le plus systématique possible de l'ensemble des fonds d'archives qui se trouvent sur le territoire québécois. Au cours de l'année qui vient de s'achever, grâce à des subventions accordées à des organismes dans les régions, grâce également à la mise en oeuvre de projets subventionnés par le gouvernement fédéral par "Canada au travail" ou "Jeunesse Canada au travail", nous avons pu mettre à l'oeuvre 34 hommes-année de travail dans ce secteur et nous avons procédé à l'inventaire d'au-delà de 6800 fonds d'archives à travers le Québec. C'est un programme qui va s'échelonner sur plusieurs années, mais le travail est déjà en fort bonne marche, comme vous le constatez.

M. Le Moignan: J'imagine que cela va prendre des dizaines et des dizaines d'années, mais est-ce que c'est possible de rêver ou d'entrevoir un fichier central qui un jour serait à Québec? Supposons les archives de la Société historique du Saguenay qui sont très riches, comme vous le savez. On peut conserver là-bas des documents qui concernent la Beauce, la Mauricie ou le Saguenay. On peut avoir à Gaspé des documents très importants qu'on peut considérer également et qu'il n'en existe qu'une copie, qu'un manuscrit. Est-ce que c'est un peu cela votre intention? Si un chercheur veut trouver quelque chose, il dit: Va à Gaspé, va à Trois-Rivières, va à Chicoutimi et tu vas trouver là telle ou telle chose. C'est un peu dans le sens...

M. Vaugeois: C'est cela. Notre plan de développement prévoit cette année l'utilisation de l'informatique aux archives nationales. C'est un début. Cet outil nous servira, non pas seulement à dresser l'inventaire des collections et des fonds d'archives qui se trouvent aux archives nationales dans nos différents centres régionaux, mais on veut y inclure également tout ce qui aura été inventorié dans chacune des régions.

M. Le Moignan: En parlant d'archives, les anciens journaux du Québec, cela fait partie de vos archives.

M. Vaugeois: C'est plutôt le domaine de la bibliothèque nationale.

M. Le Moignan: La bibliothèque nationale, qui relève de l'Assemblée nationale.

M. Vaugeois: Elle relève de notre ministère.

M. Le Moignan: Je me demande si vous avez tous les journaux. Il n'y avait pas de loi anciennement qui obligeait comme aujourd'hui les éditeurs, les auteurs à déposer deux copies. Mais est-ce qu'il y a des collections de journaux d'il y a cinquante ans qui dorment chez les imprimeurs, que vous n'auriez pas? Est-ce que vous travaillez dans ce sens là?

M. Vaugeois: Je sais que la bibliothèque nationale travaille dans ce sens en faisant des acquisitions rétrospectives lorsque des originaux sont disponibles, mais elle procède aussi au microfilmage de certaines collections et peut ainsi tâcher de compléter la collection de journaux qu'elle possède déjà.

M. Le Moignan: Dernière question, il y a un nommé Raymond Denault, je crois, de Montréal que j'ai rencontré à quelques reprises qui fait beaucoup de microfilmage. Est-ce qu'il travaille en relation avec le ministère? C'est une société indépendante.

M. Vaugeois: II arrive parfois qu'il travaille, mais dans ce domaine nous procédons par soumission et lorsqu'il soumissionne il arrive parfois qu'il obtienne un contrat. Dans d'autres cas, ce sont d'autres soumissionnaires, évidemment.

M. Le Moignan: Mais je sais...

M. Vaugeois: C'est une entreprise privée.

M. Le Moignan: Dans bien des cas, il le fait à ses frais personnels quand il sait qu'il y a une collection dans tel ou tel endroit et peut-être qu'il vous informe après coup qu'il a fait des découvertes.

M. Vaugeois: Oui.

Le Président (M. Blank): Elément 1, adopté? Elément 2?

Mme Lavoie-Roux: M. le Président...

Sites et biens historiques et archéologiques

Le Président (M. Blank): Conservation des sites et des biens historiques et archéologiques.

Mme Lavoie-Roux: Cela va être très bref. J'aimerais que le ministre nous dépose ce que l'on retrouve en page 53, toute la liste des programmes qui ont été couverts par OSE. Là, on l'a d'une façon très générale, quatre bibliothèques centrales de prêts, sept musées, etc. Est-ce qu'on pourrait avoir la liste complète avec les montants? Où se trouvent ces bibliothèques et musées? Je voudrais aussi faire lecture d'un petit paragraphe...

M. Vaugeois: Je m'excuse, vous voulez les détails...

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: ... des huit bibliothèques, des sept musées et centres d'exposition...

Mme Lavoie-Roux: Et le montant pour chacun.

M. Vaugeois: ... des 46 monuments et des 26 immeubles...

Mme Lavoie-Roux: Et le nombre d'emplois créés pour chacun.

M. Vaugeois: Est-ce que monsieur le directeur général est capable de donner cela? Y compris les emplois créés? Oui, d'accord.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais simplement lire un petit paragraphe d'un article paru dans le Soleil, qui faisait allusion à la dernière tranche des subventions accordées par le ministère des Affaires culturelles dans le cadre du programme OSE. Il est de Martine Corriveault ce commentaire: ... "déjà la liste publiée à la fin de novembre dernier suscitait des interrogations. On pouvait se demander dans quelle mesure un tour de chant de Michel Louvain au Mexique pouvait amener une relance économique ou créer des emplois au Québec. Cela pouvait peut-être permettre au bureau d'impresarios ou à l'agence responsable de tels spectacles de se payer une secrétaire ou un bureau."

Enfin, est-ce qu'il y a une explication au choix qui a été fait? D'abord, est-ce que c'est exact? Est-ce qu'il y a de l'argent qui a été affecté à des spectacles pour des artistes, individuellement, dans le programme OSE?

M. Vaugeois: C'est bien compliqué. Ce qui est arrivé, c'est qu'on avait un programme spécial qui nous permettait d'intervenir au niveau du disque et du spectacle pour la production et la diffusion. Parmi les projets de diffusion qui nous ont été

proposés, il y en a un certain nombre qui comportaient la tournée de spectacles à l'extérieur du Québec.

Mme Lavoie-Roux: Et même en Europe aussi, paraît-il.

M. Vaugeois: Et même en Europe. Or, nous avions un jury qui a été constitué avec les gens du milieu et qui a retenu un certain nombre de projets de tournées. Les gens du milieu ont été d'accord, mais il y a des critiques, comme Mme Corriveault, qui ont été étonnés de l'octroi de telles subventions. Je dois dire que nous avons travaillé avec les gens du milieu, ils ont apprécié ce programme et on n'a pas eu vraiment de critiques du milieu. Il y a une journaliste comme elle qui était étonnée un peu de voir qu'il y avait disons $26 000 pour permettre à tel artiste, ce n'est peut-être pas Ginette Reno, mais cela aurait pu être Ginette Reno...

Mme Lavoie-Roux: II y a apparemment Michel Louvain qui est allé au Mexique.

M. Vaugeois: C'est toujours le même principe. J'ai eu un jour à défendre sur les ondes de la radio, à Montréal, un voyage qui avait été payé à Diane Dufresne en Europe. On ne se demande même pas si on aime ou si on n'aime pas Diane Dufresne. La question n'est pas là. Ne me demandez pas si j'aime ou si je n'aime pas Michel Louvain. Ce qui est important, c'est que c'est un spectacle, c'est une entreprise et quant à nous, nous traitons la demande à ce titre. Je peux vous assurer, entre autres, que la tournée que Diane Dufresne a faite en Europe a été un grand succès. Pour être bête et méchant, c'était un bon placement. Je n'aime pas dire des choses comme celles-là, il ne s'agit pas de porter un jugement sur l'artiste, c'est une affaire. Les disques de nos interprètes et de nos compositeurs québécois se vendent bien actuellement et se vendent bien à la suite de la réussite de ces spectacles. Cela a l'air curieux de le dire, mais il faut le dire, parce que les gens n'ont pas l'air de le comprendre, ça crée des emplois au Québec, parce que tous les gens qui entourent ces artistes, y compris ceux qui fabriquent leurs disques et qui servent aux enregistrements, ce sont des Québécois qui travaillent.

On est en train de faire une percée actuellement du côté du monde du disque et du spectacle, on a un trou dans la structure, c'est le pressage du disque, et ça va être une des premières commandes qu'on va donner à la SDIC, mais, pour le reste, nos gens travaillent dans ce milieu. Quand on permet à des artistes de faire des percées à l'étranger, ça se répercute sur la situation de l'emploi chez nous.

Mme Lavoie-Roux: On va avoir tous ces chiffres dans la liste que vous allez nous remettre...

M. Vaugeois: On va vous donner tout ça. Pour un détail complémentaire, je me souviens qu'un des critères que le jury avait retenus aux fins de distribution de subventions pour la promotion hors Québec était que pour les artistes en tournée, leur tournée devait être liée à la production récente d'un disque ou d'une vidéocassette.

Mme Lavoie-Roux: Des questions très brèves. Qu'advient-il du couvent des soeurs de la Congrégation de Notre-Dame, à Sainte-Anne-de-la-Péra-de, qui doit être vendu, selon un article du Nouvelliste en date du 7 avril 1979? Je suis sûr que le ministre lit ça. Qu'arrive-t-il des représentations qui ont été faites au sujet de la vente ou de la transformation de ce couvent en hôtel?

M. Vaugeois: De quel couvent s'agit-il?

Mme Lavoie-Roux: Le couvent des soeurs de la Congrégation, à Notre-Dame-de-la-Pérade.

M. Vaugeois: Ah, à Sainte-Anne-de-la-Pérade. Ecoutez, le député de Champlain est justement là. Je vais lui demander de faire un commentaire, mais, dans le cas de Sainte-Anne-de-la-Pérade, assez curieusement, notre macro-inventaire du patrimoine bâti n'a pas encore été fait, de telle façon que Sainte-Anne-de-la-Pérade, qui regorge de maisons intéressantes, n'en a pas de classées actuellement.

Nous sommes à étudier un contrat avec la société d'histoire locale, pour faire le macro-inventaire de Sainte-Anne et de la région immédiate. Ce n'est pas parce que le macro-inventaire n'est pas fait, qu'il n'y a pas de classement de fait que nous ne nous intéressons pas aux bâtiments qui sont là. Le couvent est un des bâtiments qui nous intéressent. Mais il appartient aux religieuses et il y a des rumeurs qui veulent qu'il soit vendu. Je demanderais au député de Champlain de nous livrer ses commentaires.

M. Gagnon: Vous avez fait le point. C'est un fait qu'il y a des rumeurs qui veulent que le couvent doit être vendu. Mais il y a aussi la société historique, comme l'a mentionné le ministre, qui fait un travail pour essayer de conserver le couvent. Cela fait partie de tout le patrimoine de Sainte-Anne et on a un projet qui devrait avoir à protéger ces maisons.

Mme Lavoie-Roux: M. le ministre, est-ce que le ministère des Affaires culturelles n'a pas la responsabilité de faire l'inventaire du patrimoine?

M. Vaugeois: Oui, absolument, mais, curieusement... Je ne recommencerai pas l'histoire de l'inventaire, vous savez un peu comment cela fonctionne, on ne peut pas le faire partout en même temps. Une région qui a été totalement ignorée, jusqu'à maintenant, c'est la région du comté de Champlain. On n'a pas touché du tout le comté de Champlain. Et plutôt que d'arriver avec la façon traditionnelle, nous allons, autant que possible, utiliser les sociétés locales. C'est une nouvelle approche que nous prenons, soit dit en passant. Nous diminuons les subventions, mais

nous multiplions les contrats avec les sociétés locales.

Mme Lavoie-Roux: D'accord, M. le Président. Mais je voudrais rappeler au ministre que je veux bien que ce soit une participation de la société d'histoire locale, mais...

M. Vaugeois: Elle est très dynamique, n'est-ce pas?

Mme Lavoie-Roux: Je suis bien d'accord sur son dynamisme. Mais il était aussi censé y en avoir à Montréal pour le Mont Saint-Louis, du dynamisme. Et, dans la nuit de vendredi à samedi dernier, on n'a pas démoli la partie qui chambranlait, qui était dangereuse, mais on a démoli une partie de l'édifice principal, alors qu'on en avait averti le ministre lui-même, en Chambre, le mercredi précédent. Et on complétait cette démolition le vendredi. Est-ce qu'il y a eu un autre geste de posé? Est-ce qu'il est présentement classé?

M. Vaugeois: Tout ce qui se fait au Mont Saint-Louis a été fait en concertation avec les différents partenaires concernés, y compris des gens de chez nous.

Mme Lavoie-Roux: Même la démolition de la nuit de vendredi dernier?

M. Vaugeois: Oui. Nos gens du bureau de Montréal ont été au courant de toutes ces péripéties. Ce sont des questions techniques, mais vous connaissez la situation du mur de soutènement qui menaçait le CEGEP à l'arrière.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais cela, c'était à l'arrière.

M. Vaugeois: Apparemment, on avait le même genre de pression qui s'exerçait sur le mur du côté de la rue et on ne pouvait conserver l'aile est sans faire des frais très élevés, qui étaient disproportionnés par rapport à l'intérêt de l'aile est. Nos gens ont convenu qu'il valait mieux procéder à cette démolition, pour sauver le corps principal du bâtiment qui retient notre attention.

Maintenant que tout cela a été fait, ce que nous attendons, ce que j'attends pour agir, c'est que les deux groupes qui me donnent des avis en ces matières, c'est-à-dire la Direction générale du patrimoine et la Commission des biens culturels, se mettent d'accord. Il y a actuellement une diver-qence de vues à l'intérieur de la commission puis entre la commission et la DGP. Je vous dis cela en deux minutes.

On m'a recommandé, d'une part, de procéder au classement. J'hésite à le faire. Là-dessus, j'ai eu de bons éclairages de mes gens de la DGP. Nous n'avons pas d'intérêt à classer un monument qui appartient à des pouvoirs publics. Il suffit de procéder par acte de reconnaissance. Il semble qu'actuellement, pour la Commission des biens culturels, comme il y a beaucoup de nouveaux membres, ce serait une situation qui leur est un peu nouvelle. Pour protéger le bâtiment, il n'est pas nécessaire d'aller au classement, la reconnaissance suffit. Si nous allons au classement, c'est que le ministère s'oblige à faire des frais qui ne sont pas nécessaires lorsqu'un autre organisme public est impliqué. On serait quand même un peu bête de procéder de cette façon.

Mme Lavoie-Roux: Souvent, on ne s'entend pas; les choses se démolissent entre deux, en attendant qu'on s'entende.

Ma dernière question, M. le Président, parce qu'on a convenu qu'on irait rapidement. A la page 40 de votre rapport, vous parlez...

M. Gagnon: Juste un instant. Vous avez parlé du vieux couvent de Sainte-Anne-de-la-Pérade...

Mme Lavoie-Roux: Je voulais m'assurer que, pendant tout le temps de la concertation, on ne démolisse pas.

M. Gagnon: Je voudrais juste ajouter à ce que M. le ministre a dit, lorsqu'il a mentionné que rien n'avait été fait dans le comté de Champlain. Je pense qu'il a voulu parler des années antérieures. Actuellement, il y a beaucoup de dossiers, dans le comté de Champlain, qui font l'objet d'étude. (21 h 15)

Je voudrais soulever un dossier sur lequel on a travaillé extrêmement fort, c'est, par exemple, le vieux presbytère de Batiscan qui, actuellement, est meublé avec les meubles d'antan, etc. Il y a beaucoup de travail qui a été fait. Seulement, c'est un comté qui a assurément été négligé sur le plan du patrimoine et il y a beaucoup de dossiers actuellement qui vont de l'avant. C'était presque une question de priyilège que je voulais soulever pour replacer les faits pour que les gens ne croient pas que je n'avais rien fait dans le comté pour ces maisons historiques.

Mme Lavoie-Roux: Dernière question, page 40. Vous signalez que, suite à l'adoption de la loi no 4, il y a des préparations de réglementation en vertu desquelles des ententes ont été conclues entre les municipalités. Pourriez-vous déposer cette réglementation?

M. Vaugeois: Excusez-moi, le député de D'Arcy McGee vient de m'envoyer une note invraisemblable.

Mme Lavoie-Roux: Qu'est-ce qu'elle dit?

M. Vaugeois: Incroyable.

M. Goldbloom: Je vais la lire.

M. Vaugeois: Suis-je autorisé à la lire.

Mme Lavoie-Roux: On pourrait demander de ne pas l'enregistrer.

M. Vaugeois: Je vais la faire circuler, cela vous suffira. Elle vaut, je pense, un coup d'oeil. Vous voulez avoir le texte des ententes?

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: D'accord. Je vous remercie, Mme le député, d'attirer notre attention sur cette partie du document que nous vous avons remis. Là, on a l'exemple de quelque chose qui ne coûte pas cher et qui aura pour effet, je pense, de multiplier les partenaires dans la sauvegarde du patrimoine. Nous sommes en train de conclure des ententes avec toutes les municipalités concernées par un arrondissement historique. Soit qu'elles ont sur leur territoire un arrondissement, soit qu'elles soient elles-mêmes, comme municipalité, partie d'un arrondissement, comme à l'île d'Orléans. Nous pouvons déposer toutes ces ententes qui ont été signées et nous pouvons également, au fur et à mesure que les autres seront signées, vous les acheminer.

Mme Lavoie-Roux: Merci. Dernière toute petite question. Au château de Ramesay, apparemment, on a vendu une collection de médailles. Je ne sais pas si elles étaient militaires ou d'autre nature. Elles sont parties pour Ottawa. Sans aucun doute qu'elles vont être bien gardées et on dit qu'elles reviendront se promener au Québec. Mais, cela m'a fort étonnée. C'est un entrefilet que j'ai vu dans les journaux la semaine dernière ou il y a dix jours. Est-ce que vous êtes au courant? Comment se fait-il que... Le château de Ramesay a un statut privé, je suppose?

M. Vaugeois: Oui, mais il appartient à la municipalité.

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous avez vu cela dans les journaux? C'est extraordinaire.

M. Vaugeois: Mais nous ne sommes pas nerveux, vous savez. Quand Ottawa s'intéresse à certaines pièces de nos collections, on est assez ravi.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: On trouve d'ailleurs qu'il pourrait venir en chercher un peu plus.

Le Président (M. Blank): Le député de Deux-Montagnes.

Mme Lavoie-Roux: Non, mais, sérieusement, je pense... Pourriez-vous vérifier à votre ministère, pour voir exactement ce qui s'est passé? J'ai la coupure quelque part, je peux vous l'envoyer même. J'aime bien que cela aille se promener à Ottawa, mais ce qui est au Québec, il faudrait au moins le garder ici.

M. Vaugeois: Etes-vous si sûre que cela? Vous faites référence à une mainmise des musées nationaux sur la collection du Château de Ramesay.

Mme Lavoie-Roux: Oui et c'est une collection de médailles. J'ai dit: Est-ce que ce sont des médailles militaires ou d'autre nature? Mais elles sont du château de Ramesay.

M. Vaugeois: En tout cas, on pourra débattre cela à un autre moment.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je pensais que vous étiez au courant, que vous étiez pour me donner de longues explications. Merci, M. le ministre.

M. Vaugeois: Ah non!

Le Président (M. Blank): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je voulais dire au ministre qu'en ce qui concerne le comté de Deux-Montagnes, du point de vue des biens patrimoniaux, les questions se présentent bien. Il y a, par exemple, le cas de l'église de Saint-Eustache dont le caractère historique est bien connu où l'on a fait déjà certains travaux de réparation urgente avec l'aide du ministère, une aide technique et financière, mais où des travaux beaucoup plus importants sont indispensables, mais je n'ai aucune demande particulière à faire au ministre à ce sujet, sauf que de lui demander de s'assurer que le dossier continue de cheminer normalement, comme je crois que c'est le cas à l'heure actuelle. Les demandes voulues ont été faites, je crois qu'elles cheminent normalement.

Il y a, par ailleurs, les bois polychromes du calvaire d'Oka sur lesquels, pour faire écho à ce que disait Mme le député de L'Acadie, le gouvernement d'Ottawa a fait main basse, peut-être en toute légalité, mais il a quand même fait main basse dessus. Le ministère a accordé une subvention à un groupe local de Saint-Eustache pour faire des copies fidèles de ces bois polychromes, mais j'espère que le ministre garde à l'esprit la possibilité, à la fois de récupérer ces bois polychromes un jour et d'améliorer la protection dont jouissent les chapelles du calvaire d'Oka où ces bois polychromes, à l'origine, étaient situés. Puisque la protection, à l'heure actuelle, est insuffisante, il y a eu, au cours des années, de nombreux incidents de vandalisme. Malheureusement, cela continue. Il y a encore eu récemment des actes de vandalisme portés contre ces chapelles qui sont très anciennes — elles sont du XVIIIe siècle — et qui sont un élément important non seulement du patrimoine du comté, mais du patrimoine de l'ensemble du Québec.

Par ailleurs, j'ai demandé à la Société d'histoire de Deux-Montagnes de s'occuper de demander au ministre de classer un certain nombre de monuments du comté de Deux-Montagnes qui ne sont pas encore classés, depuis la maison des Sulpiciens qui est située à l'entrée du monastère

des Cisterciens, généralement connu comme la trappe d'Oka, en passant par la trappe d'Oka elle-même jusqu'à la maison Basile-Routhier à Saint-Placide, y compris un certain nombre d'autres maisons historiques. J'informe le ministre qu'il va, dans des délais assez courts, j'espère, recevoir cette demande de la Société d'histoire de Deux-Montagnes pour le classement de ces bâtiments et maisons.

M. Vaugeois: Je suis ravi de ce que j'entends. Est-ce que je peux demander au député d'inciter la société, si ce n'est déjà fait, à nous fournir un maximum de renseignements, sinon, nous sommes prêts à faire avec la Société historique la recherche nécessaire, parce que ce qui arrive actuellement, c'est que le macro-inventaire, M. le député D'Arcy McGee,...

Mme Lavoie-Roux: ... le député de D'Arcy McGee, je ne le savais pas...

M. Vaugeois: II le savait?

Mme Lavoie-Roux: ... avec son français impeccable.

M. Vaugeois: Le macro-inventaire n'a pas touché non plus votre région. Nous cherchons actuellement, pour accélérer le rythme du travail, à impliquer des groupes locaux. Ce que j'ai dit tout à l'heure pour Sainte-Anne-de-la-Pérade peut être aussi vrai pour votre région.

Mme Lavoie-Roux: Mais le...

M. de Bellefeuille: Finalement, avec votre permission, je voudrais poser au ministre une question que le député de Kamouraska-Témiscouata m'a prié de poser. Je ne connais pas le dossier, mais c'est mon collègue, le député de Kamouraska-Témiscouata, qui m'a prié de demander au ministre s'il y a des crédits qui ont été réservés pour réparer le presbytère de la Rivière Ouelle, qui est un monument récemment classé. On m'informe que Mgr Lévesque, qui est l'évêque de La Pocatière, est d'accord avec le projet de rendre à ce presbytère sa vocation initiale. On peut considérer que c'est une forme de recyclage, puisque le recyclage peut tout aussi bien consister à revenir à la vocation initiale qui a trouvé une autre vocation. Si ce presbytère trouve une vocation qui, en l'occurrence, serait celle d'être presbytère, est-ce que le ministre pourrait réserver des crédits pour la réparation de ce presbytère? Deuxième question: Est-ce que les travaux procèdent pour l'établissement de l'aire de protection de 500 pieds autour de ce monument récemment classé?

M. Vaugeois: La réponse, c'est oui, deux fois, sauf que, pour les aires de protection, on a un retard, qu'on rattrape progressivement. On ne peut pas commencer par faire les aires de protection des derniers édifices qu'on a classés. On essaie de se rattraper dans un calendrier très lent. Mais ça s'améliore beaucoup, d'ailleurs.

Le Président (M. Blank): M. le député de Sherbrooke.

M. Gosselin: Oui, M. le ministre, tandis qu'on est à ce volet, je dois signaler que la région des Cantons de l'Est se distingue des autres régions en regard du patrimoine d'une manière telle qu'il est difficile d'appliquer les mêmes critères intégralement que pour l'ensemble du patrimoine québécois. Notre patrimoine est très typique d'une époque toute récente et est unique dans ce sens-là au Québec. Parfois, on se plaint — j'ignore jusqu'à quel point c'est fondé — qu'il y a moins d'attention au ministère des Affaires culturelles sur le classement de monuments historiques typiques à la région des Cantons de l'Est témoignant notamment de toute la culture anglaise de l'époque coloniale, du passage des Loyalistes et notamment, il y a certains villages typiques comme Georgeville, qui mériterait d'être classé lui-même comme village. Je remercie le ministre d'avoir communiqué à tous les députés l'année dernière ou il y a quelques mois, je pense, cet automne, les Cahiers du patrimoine. J'ai trouvé cette revue très intéressante, très stimulante. Je me suis permis de la communiquer à une dizaine de regroupements de ma région, les sociétés d'histoire, de regroupement touristique et autres, pour les amener à prendre conscience, avec moi, parce que j'en ai déjà pris conscience, du volume comparatif de monuments classés historiques dans la région des Cantons de l'Est par rapport aux autres régions.

Effectivement, c'est assez mince, et j'ignore jusqu'à quel point il n'y aurait pas une attention toute spéciale à apporter à l'inventaire du patrimoine régional dans les Cantons de l'Est, en regard de l'héritage vraiment unique et vraiment intéressant qui est là et qui est tout à fait ignoré, je regrette de le dire. On a, dans le coin de Barnston, en partant de Stanstead, Rock Island, qui étaient les voies de transit principalement empruntées par les populations migrantes, d'anciens relais de diligences, d'anciennes maisons qui servaient de relais de diligences et qui faisaient la route jusqu'à Barnston, et c'est ignoré. Même le voisinage ignore ces emplacements et, souvent, il y a là des richesses patrimoniales qui s'effritent, qui se détériorent. Je pense qu'il faudrait une attention toute particulière, sous forme d'une commandite spéciale ou autre, pour faire le point sur le patrimoine régional des Cantons de l'Est et on pourrait compter là-dessus sur une excellente collaboration des groupes préoccupés d'histoire régionale. Il y a notamment, un certain nombre de sociétés anglophones, il y a, autour de l'Université Bishop actuellement, un grand courant de préoccupation sur la revigoration du patrimoine régional. D'ailleurs, vous avez reçu, M. le ministre, une invitation à participer à un événement quelque part en juin. Je regrette que vous ne puissiez en être. J'espère qu'on pourra quand même amener un représentant du gouvernement. Donc, il y a la "Heritage Foundation", notamment, à l'Université Bishop, qui se préoccupe de ces questions, la Société d'histoire de Sherbrooke, le Conseil de la culture et, également, les mouvements orientés sur le tou-

risme régional, parce qu'on sent vraiment qu'il y a là une mine, mal exploitée, qui mérite d'être beaucoup mieux utilisée.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, pour rejoindre l'intervention du député de Sherbrooke, est-ce que vous examinez la possibilité de conserver — apparemment, il en restait neuf au Québec; j'en ai vu une qui s'est écroulée, il doit en rester huit et il y en a une autre qui est en train de s'écrouler, il va en rester sept — les granges circulaires qui étaient originaires, je pense, de la région de Philadelphie... Elles n'étaient pas originaires, mais c'était un modèle qui avait été importé de la région de Philadelphie et qui, enfin... Je vous dis qu'il en reste cinq ou six, c'est tout. Il faudrait au moins en conserver une. (21 h 30)

M. Gosselin: D'ailleurs, il y a eu une recherche effectuée par le ministère des Affaires culturelles, l'année dernière, sur les granges rondes, et c'est vraiment fantastique, surtout dans le bout de Barnston.

Mme Lavoie-Roux: C'est cela, mais elle s'est écroulée, celle près de Barnston.

M. Gosselin: II en reste quelques-unes, il faudrait les sauver.

M. Vaugeois: Je me rends compte qu'il y a des députés de l'Opposition qui pourront se recycler facilement vers les Affaires culturelles.

Le Président (M. Blank): ...

M. Vaugeois: II y a beaucoup de choses dans ce que vient de dire le député de Sherbrooke; on a pris bonne note de ses propos. Dans le cas de sa région, le macro-inventaire est fait et il nous a amenés à découvrir des choses qui avaient été oubliées jusqu'à maintenant. C'est certain que des avis d'intention pourront suivre, encore que les résultats que nous donne cette démarche d'inventaire nous amènent à constater qu'il y a peut-être deux types de bâtiments, au départ: il y a un bâtiment d'intérêt national et un bâtiment d'intérêt régional.

Nous envisageons, à ce moment-ci, de rejoindre encore là des experts ailleurs, et d'amener des gouvernements locaux ou régionaux à nous suivre sur la voie du classement, de la reconnaissance ou de la désignation et à prendre en charge, éventuellement, des bâtiments qui ont un intérêt important, mais davantage sur un plan régional. Je me permets, pendant que le député de Sherbrooke est là, d'ajouter qu'il y a un autre genre de dossier qui se présente et il y a un beau cas dans le comté de Sherbrooke, c'est la Paton qui est une usine désaffectée et qui pourrait devenir un excellent exemple de recyclage et de nouvelle utilisation.

Je pense qu'il faut maintenant savoir jouer, grosso modo, à ces trois niveaux: un cas de recyclage pur et simple, comme il convient avec un entrepôt ou une usine; un cas de classement avec une approche régionale; ou un cas de classement, de reconnaissance avec une approche nationale. Dans les trois cas, il ne faut pas dissocier la conservation de la fonction. On l'entend un peu partout dans le monde, maintenant: C'est la fonction qui sauve le bâtiment, qui sauve le patrimoine.

Le Président (M. Blank): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: M. le Président, cela va être très bref, je ne voudrais pas parler de tous les macro-inventaires.

Mme Lavoie-Roux: ... Gaspésie.

M. Le Moignan: En Gaspésie. Je ne voudrais pas m'arrêter à des cas spécifiques. J'ai un doute, M. le Président, et je crois que le ministre pourrait me répondre. Je crois que le ministre est allé à Paspébiac, l'an dernier; vous n'auriez pas déclaré les établissements Robin, qui datent peut-être de 200, 250 ans et plus, monuments historiques?

Mme Lavoie-Roux: II est allé là au moment de la campagne de financement du Parti québécois.

M. Le Moignan: Cela n'a pas coïncidé avec...

Mme Lavoie-Roux: Cela ne devrait pas coïncider.

M. Le Moignan: Est-ce que les Etablissements Robin sont classés monuments historiques? Vous étiez là en même temps?

M. Vaugeois: Merci, M. le député. Je vois qu'on a des alliés qui ne se manifestent pas toujours. J'avais l'occasion d'aller dans le comté de Bonaventure, effectivement, pendant la campagne de financement. Je n'y suis pas allé, mais j'irai avant la fin du mois de mai, comme je compte également aller dans le comté de Gaspé. Il semble qu'il y ait des difficultés pour prévoir au même moment la visite dans le comté de Gaspé, mais mon voyage dans le comté de Bonaventure reste au programme et ce sera très prochainement; je pense que ce sera dans deux ou trois semaines. Entre autres, j'y vais pour considérer tout le dossier de Paspébiac. J'avais eu l'avis des membres de la commission qui sont allés pendant la campagne de financement. Je tiens à le répéter aujourd'hui, je n'y suis pas allé, je n'ai fait ni l'un ni l'autre en même temps, je n'ai fait aucune des deux activités qui ont fait beaucoup de bruit.

J'ajoute encore, d'ailleurs, que les journalistes, parfois, nous jouent des tours. C'est vrai — je le sais maintenant — que tout le monde n'avait pas été prévenu du report de ma mission là-bas, mais les principaux organisateurs avaient été prévenus. Malheureusement, tout le monde ne l'avait pas été et cela a créé une espèce d'imbroglio. Là-dessus, j'aimerais bien qu'on le note, je n'ai pas fait les deux activités en même temps, je n'en a fait aucune.

M. Le Moignan: Ce que je voulais savoir, c'est si votre ministère est intéressé aux établissements de Paspébiac qui sont à peu près les plus vieux de la Gaspésie.

M. Vaugeois: Absolument.

M. Le Moignan: Ma deuxième question. Je vois, au niveau de la conservation des sites et biens historiques et archéologiques, une diminution de $3 200 000 à peu près. Est-ce à dire qu'il y a moins de sites à classer ou avez-vous fait du rattrapage?

M. Vaugeois: On a fait du rattrapage effectivement durant l'année. Cela a été l'année la plus intense au titre de la restauration. Je pense qu'on en a peut-être fait plus durant l'année que depuis le début de l'existence de ce ministère. Mais cette année, nous sentons le besoin de porter nos soins surtout vers les arrondissements. Cela rejoint les propos que je tenais cet après-midi. On se rend compte que c'est bien gentil de restaurer un moulin, un bâtiment, un manoir ou autre, mais il ne faut pas négliger l'ensemble. Or, nous faisons porter nos efforts actuellement sur les ententes avec les municipalités qui ont des arrondissements et nous avons déplacé plus de $1 million. Malgré tout, voyez-vous, on récupère de l'argent à des endroits, on a déplacé $1 million vers les arrondissements. Cela va nous permettre de faire des actions très significatives sur des ensembles.

Le Président (M. Blank): Le député de Taschereau.

M. Guay: M. le Président, le ministre a parlé des arrondissements historiques, or le premier de tous les arrondissements historiques du Québec, celui du Vieux-Québec, se trouve dans la circonscription de Taschereau. J'aurais un certain nombre de questions à lui poser.

Mais avant de traiter de l'arrondissement historique du Vieux-Québec si on peut déborder un peu à l'extérieur provisoirement, il y a deux immeubles qui posent un problème, l'un, quant à son état, et l'autre, quant à sa vocation. J'aimerais savoir du ministre où en sont rendus ces dossiers. L'un est la maison Krieghoff située tout près d'ici, sur la Grande-Allée, qui est classée monument historique et qui est en état de dégradation sinon avancée, en tout cas qui se dégrade à coup sûr. Il s'agit de passer devant pour le constater. D'ailleurs le Soleil a souligné la chose fort pertinemment l'autre jour. La galerie est en train de disparaître. La maison est fermée depuis un très grand nombre d'années. Je me demandais si on avait des projets afin de faire en sorte qu'un monument historique ne devienne pas une ruine, pour des fins archéologiques, un bon matin.

M. Vaugeois: Cela fait un bon bout de temps que les gens du ministère se préoccupent du sort de la maison Krieghoff et, suite à l'article paru dans le journal, je me suis inquiété moi-même de l'état du dossier. Il semble que les propriétaires de la maison aient refusé de vendre à des acheteurs possibles qui ont été dénichés par les services du ministère et qui auraient été prêts à faire non seulement une restauration, mais une mise en valeur de la maison Krieghoff. Donc les propriétaires ont refusé de vendre, refusent de louer et refusent, en fait, toute proposition.

M. Guay: II s'agit de St-Brigid's Home, si je ne m'abuse.

M. Vaugeois: Oui. Bien je crois que c'est une espèce de communauté...

M. Guay: Qui est à côté là?

M. Vaugeois: Oui, oui qui est à côté. J'ai demandé que l'on reprenne les démarches. Les propriétaires ne veulent pas vendre à ceux qui auraient voulu acheter, ils ne veulent pas louer. Ecoutez, ils sont quand même propriétaires. A la limite, bien sûr, on peut aller jusqu'à l'expropriation. Mais avant d'aller aussi loin, on essaie de s'entendre avec les propriétaires. J'ai demandé à nos services de reprendre les discussions et d'essayer de voir pourquoi ils refusent toute proposition. La vérité, c'est qu'ils auraient peut-être voulu démolir purement et simplement.

M. Guay: Mais si jamais, au bout des discussions, il s'avérait que la position des propriétaires demeure la même et qu'on aurait un monument historique qui s'en va à l'abandon, est-ce que le ministre a l'intention de laisser les propriétaires se prévaloir du droit absolu de propriété, ou si l'intérêt historique l'emporterait?

M. Vaugeois: Ecoutez, j'hérite de cette maison classée. Je ne remets pas en question le classement. Il faut aller dans la logique du geste posé et la logique, à défaut de s'entendre, c'est d'acquérir en recourant à la loi.

M. Guay: L'autre immeuble qui est devenu la propriété des Affaires culturelles, on se demande encore à quoi il va servir. C'est le manoir Catara-qui, à Sillery. Je me demandais si le ministre avait des précisions à nous donner quant à l'avenir de cet immeuble et du parc qui l'entoure, qui est immense et qui ne sert guère à des fins publiques à l'heure actuelle.

M. Vaugeois: II ne m'appartient pas de dévoiler certains projets, je peux vous dire que le ministère des Travaux publics a maintenant des projets précis pour le domaine de Cataraqui. Nous en sommes propriétaires, nous venons d'ailleurs de débourser des sommes importantes pour compléter l'acquisition. Nous avions également, de notre côté, des projets intéressants qui tournent autour de l'idée d'un centre d'animation scientifique et il y a eu beaucoup de pourparlers ces derniers mois avec les organismes concernés, la ville de Sillery est intéressée à la formule, les or-

ganismes de loisir scientifique sont intéressés. En fait, on allait vers un certain consensus de ces divers partenaires, mais, parallèlement, le ministère des Travaux publics avait son projet. Nos fonctionnaires sont en train de comparer les deux projets. Je ne sais pas encore ce que ça va donner. Je pense que les deux projets, de toute façon, vont assurer au domaine de Cataraqui un avenir intéressant. Je ne peux pas dire, à ce moment-ci, lequel des deux projets va l'emporter et il ne m'appartient pas non plus de dévoiler le projet des Travaux publics, qui est fort intéressant.

M. Guay: Pour revenir à l'arrondissement historique du Vieux-Québec, je n'ai pas constaté, depuis un an, de changement marqué, du moins il ne m'en vient pas à l'esprit quant à l'état de l'arrondissement historique, quant à l'avancement du dossier dans l'arrondissement concerné. En d'autres mots, le moins qu'on puisse dire, c'est que les choses semblent stagner, à l'exception peut-être de l' évolution des griefs des locataires de la Place Royale, que j'ai rencontrés à maintes reprises avec les fonctionnaires des Affaires culturelles et les représentants du cabinet du ministre. A ce sujet, je vais quand même signaler la disponibilité des fonctionnaires du ministère pour tenter de régler des problèmes très concrets posés par des constructions parfois de qualité douteuse faites sous d'autres gouvernements, mais qui semblent être en voie de règlement par recours juridique.

Pour le reste de l'arrondissement, j'avoue que je ne peux pas dire que les choses ont avancé dans ce quartier de ma circonscription, comme elles ont peut-être avancé dans d'autres, qui ne sont pas des arrondissements historiques. Plus précisément, on me dit, je ne sais si c'est exact, que dans l'arrondissement historique de Trois-Rivières, on est en train de confectionner un plan directeur. Il est, depuis fort longtemps, question de quelque chose dans l'arrondissement du Vieux-Québec, est-ce que ce sera un plan directeur, un plan de sauvegarde et de mise en valeur, un schéma d'aménagement, appellons-le comme on voudra, sauf que ça fait au moins huit ou neuf ans qu'il en est question. Il n'y a toujours rien.

Je me demandais si le ministre, étant donné sa récente déclaration à savoir que, dorénavant, on allait porter plus d'attention aux arrondissements historiques, quels étaient les projets qu'il avait en ce qui a trait au Vieux-Québec?

M. Vaugeois: II y a une entente qui est prête avec la ville de Québec, disons que le Conseil du trésor m'a suggéré un certain nombre d'éléments qui obligent la ville de Québec à voter une résolution, ce qui a peut-être été fait ces jours derniers, mais j'attends que la ville ait posé le geste officiel qui va le rendre apte à la signature du protocole. Ce protocole va prévoir justement l'engagement d'un personnel spécifique à l'Hôtel de ville de Québec pour l'ensemble de la question patrimoniale et de l'arrondissement en particulier.

Il va se passer à peu près le même cheminement que vous venez de donner pour Trois-Riviè- res. C'est plus avancé à Québec qu'à Trois-Rivières, soit dit en passant. Mais il arrive à Trois-Rivières qu'une firme d'urbanistes avait beaucoup étudié la question du port et que les deux soient assez reliées. Donc, cela va se faire assez rapidement.

Dans le cas de la ville de Québec, je ne voudrais pas enlever au maire de Québec certaines primeurs; la signature du protocole, c'est dans une semaine ou deux, j'attends le signal de sa part. La démarche va se préciser et le rôle de la ville de Québec va se préciser grâce à ce protocole. (21 h 45)

Mais, plus concrètement, et pour la partie dont nous sommes propriétaires, c'est-à-dire la Place Royale et ses limites immédiates, nous avons prévu nous rendre sur le terrain. C'est prévu pour la semaine prochaine, je pense. Nous avions l'intention de vous inviter, M. le député de Taschereau, à vous joindre à nous, parce que nous comptons, séance tenante, prendre un certain nombre de décisions qui vont découler du colloque sur la Place Royale. Nous sommes prêts maintenant, nous avons des choses précises à proposer sur tel et tel bâtiments. Je pense que les choses vont repartir. Cela va être pour les bâtiments dont nous sommes propriétaires. Pour l'ensemble de l'arrondissement, la ville de Québec va avoir les moyens de se donner des règlements et un plan qui correspondraient à ses préoccupations et aux nôtres. Tout cela, c'est dans le sens de la Loi sur les biens culturels.

M. Guay: II y a également un immeuble qui est depuis longtemps barricadé — ce n'est pas un reproche que je veux faire au ministère des Affaires culturelles, on peut le faire aussi au ministère des Travaux publics, on peut le faire sous tous les gouvernements, cela semble être inévitable aux gouvernements que lorsqu'on se porte acquéreur d'un immeuble, il faut d'abord le barricader avant de pouvoir le réutiliser, la réutilisation, le recyclage ou l'idée même d'en arriver à une idée précise de ce qu'on va en faire prend du temps.

Mais, celui-là, je pense qu'il date du début des années soixante. C'est une maison dont j'ignore le nom, mais qui est rue Saint-Pierre.

M. Vaugeois: C'est la maison Estèbe.

M. Guay: C'est celle-là, exactement. Elle est là, elle est immense, par ses volumes extérieurs. On a un problème de logement dans le centre-ville. Il y a des terrains vacants dans l'endroit qui a subi un bombardement et il ne se passe rien depuis.

M. Vaugeois: On vient de régler cela. C'est une très vieille histoire qui traînait depuis des années. Un architecte qui avait été engagé, contestait les honoraires qu'il avait eus et, aussi longtemps qu'on n'avait pas réglé cela, il tenait ses plans, etc. On vient de régler cela et les choses vont repartir pour la maison Estèbe. Les idées ont

changé. Et, pour ma part, je ne suis pas partisan de la restauration de la maison Estèbe comme on l'a fait à la Place Royale.

M. Guay: Non, bien sûr.

M. Vaugeois: Je veux qu'on l'utilise et qu'on l'utilise en fonction du plan d'ensemble que nous sommes à mettre au point avec la ville de Québec. Vous avez raison de souligner que le vide s'est fait autour de cette maison et qu'il ne faut pas laisser cela comme cela.

M. Guay: L'initiative, pour ce qui est de boucher le vide...

M. Vaugeois: C'est à la ville de Québec.

M. Guay: Les terrains aux alentours appartiennent à la ville?

M. Vaugeois: Les terrains appartiennent à la ville de Québec.

M. Guay: Et pour ce qui est de la maison Estèbe, est-ce qu'on trouve...

M. Vaugeois: Elle nous appartient.

M. Guay: ... sans faire de la restauration du type Place Poyale, je suis entièrement d'accord avec vous.

M. Vaugeois: C'est drôle que vous me posiez cette question, parce que j'ai suggéré au groupe de travail qui s'intéresse au domaine Cataraqui de regarder pour voir si la proposition des travaux publics pour Cataraqui ne pourrait pas mieux s'appliquer à la maison Estèbe.

Le Président (M. Blank): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais faire un commentaire sur le déroulement de nos travaux et je veux faire en même temps une offre de collaboration. Si nous sommes ici les seuls députés à travailler ce soir, c'est parce que nous sommes sincèrement intéressés aux affaires culturelles et à notre patrimoine. Nous connaissons tous des immeubles intéressants au sujet desquels nous aimerions poser des questions au ministre et, pour vider ces nombreux dossiers, il nous faudrait deux ou trois jours, probablement, de séances. Pourtant, je suis informé qu'il y a des membres de cette commission qui seront dans l'impossibilité d'être ici demain.

Je voudrais vous suggérer ceci, M. le Président: Quant à nous, de l'Opposition officielle, nous serions disposés à nous limiter à cinq questions seulement, deux de la part du député de L'Acadie et trois de ma part, de façon à permettre que nous terminions l'étude des crédits dans les prochaines minutes.

M. Guay: M. le Président, j'avais seulement une dernière question à poser au ministre, si le député n'a pas d'objection, parce que, connaissant le comté de D'Arcy McGee, je sais qu'il y a moins d'immeubles patrimoniaux dans ce comté que dans celui de Taschereau; si le député permet... Cela n'enlève rien à sa beauté, absolument rien.

M. Goldbloom: Le ministre classera-t-il la maison natale de chacun des membres de l'Assemblée nationale?

M. Guay: M. le Président, cela risquerait d'être long, c'est compliqué à trouver dans certains cas.

Mme Lavoie-Roux: La mienne a 225 ans.

M. Guay: Non, tout simplement une dernière question. Il s'agit de ce projet qui a parfois fonctionné, qui a été retiré et qui semble être réactualisé, le Morrin College dans le Vieux-Québec, la vieille prison.

Mme Lavoie-Roux: Oui, on a posé cela, il y a deux ans, ces questions-là.

M. Guay: C'est que, sous l'ancien gouvernement...

M. Goldbloom: Ne commencez pas, ne commencez pas.

M. Guay: Non.

Mme Lavoie-Roux: Cela fait trois ans qu'on les pose.

M. Guay: Ce n'est pas une critique. Mme Lavoie-Roux: ...

M. Guay: Pour une fois que je parle de l'ancien gouvernement sans le critiquer, laissez-moi faire.

Mme Lavoie-Roux: Oui, on devrait souligner cela.

M. Guay: C'est parce que cela ne passe pas souvent et cela risque de ne pas repasser. Mais il avait été question d'acheter le Morrin College qui est à vendre depuis fort longtemps.

Mme Lavoie-Roux: On pourrait...

M. Guay: Cela va vous coûter cher, semble-t-il. Après cela, le projet a été retiré, parce qu'apparemment, on ne savait pas très bien ce qu'on en ferait. Là, le projet serait, semble-t-il, réactualisé, mais je ne suis pas certain qu'avec les crédits du ministère pour cette année, on trouve le financement nécessaire et je me demandais si, par le fait même, on avait une idée de ce qu'on en ferait, le cas échéant.

M. Vaugeois: Nous ne manquons pas d'argent, mais d'idées. Les idées venant, l'argent va venir. C'est une parenthèse. Pour le Morrin College, ce n'est pas une question d'argent, sérieusement. Nous avons demandé aux Travaux publics de reconsidérer les décisions prises jadis et notre intention, ce serait de suggérer une acquisition et un recyclage par une société non gouvernementale. Nous avons un modèle à l'esprit. Nous avons pris contact — en fait, je pense que je peux le dire — avec la Société historique de Québec qui songe à se doter d'une société immobilière ou d'une fondation qui pourrait recevoir le bâtiment et en assurer la restauration. On a des idées extraordinaires pour l'avenir du Morrin College qui tournent autour de la question patrimoniale et de l'animation historique. Je fais seulement le mentionner à titre d'indice. Les gens qui acquièrent de vieilles maisons, qui font de la restauration sont toujours à la recherche de maquettes, de travaux, d'études qui ont pu être faits sur la restauration et qui les guideraient dans leurs propres travaux de restauration.

Alors, le Morrin College pourrait devenir un lieu de regroupement de sociétés historiques, sociétés de généalogie, etc., et en même temps, devenir une espèce d'institut du patrimoine, regroupant ces sociétés et, en même temps, offrant aux gens qui ont des maisons et qui les restaurent un lieu de consultation et de référence. Mais ce n'est pas le gouvernement, ni les Travaux publics qui restaureraient, ce serait cette société immobilière, création de la Société historique de Québec. Il y a là tout un modèle nouveau qui se met en place. Le fait qu'on ait plus ou moins de crédit ne joue absolument pas. Nous jouons avec les partenaires gouvernementaux que nous avons. Il y a des crédits pour les bonnes idées.

Le Président (M. Blank): Mme le député de L'Acadie.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Je vais sauter un programme. Est-ce qu'on adopte le programme 2?

M. Vaugeois: On l'adopte.

Le Président (M. Blank): On l'adopte. Programme 2, adopté.

M. Vaugeois: C'est un bon programme.

Gestion interne et soutien

Mme Lavoie-Roux: En tout cas, je ne sais pas si je vais aller du 3 au 4, mais mes questions seront brèves. M. le ministre peut-il nous dire ou nous donner une autre liste, cela va faire quelques listes à préparer pour les fonctionnaires? On sait que dans son cabinet, il y a deux femmes qui sont secrétaires particulières adjointes. Elles brillent par leur absence.

M. Vaugeois: Elles brillent, madame!

Mme Lavoie-Roux: Pourrait-on nous donner une liste des directeurs de service et du personnel de cadre au ministère et nous donner la proportion des femmes qui s'y trouvent?

M. Vaugeois: Oui, on peut vous donner ces listes, mais j'aime autant vous le dire tout de suite. L'héritage n'était pas très intéressant pour les femmes. Les dernières nominations ont eu tendance... J'aimerais quand même insister là-dessus, parce que toutes nos dernières nominations — c'est un hasard, en fait, mais un hasard heureux, parce que cela peut nous amener vers un équilibre que nous recherchons — nous ont permis de nommer des femmes à la direction des communications, de la danse et l'aide à la création. Il arrive que nos dernières nominations permettent à des femmes d'accéder à des postes de direction.

Mme Lavoie-Roux: Oui. Tant mieux, je me souviens de celle qui a été nommée responsable de la danse. Il semble que les femmes soient bonnes dans les communications. Je vois que cela semble être la tendance de ce gouvernement.

M. Vaugeois: C'était la première que nous nommions.

Mme Lavoie-Roux: A tout événement, l'excuse du ministre, à savoir qu'il y avait eu un héritage douloureux, il faut quand même qu'il reconnaisse qu'il y a eu passablement de nominations depuis le changement de gouvernement au ministère des Affaires culturelles et qu'on n'y avait pas accordé une place...

M. Vaugeois: C'est vrai. On me donne un autre exemple. A la Commission des biens culturels, je pense qu'il y a un nombre à peu près égal d'hommes et de femmes; il y a la vice-présidente... Il y a une préoccupation au ministère...

Mme Lavoie-Roux: D'accord.

M. Vaugeois:... d'égalité des chances, c'est-à-dire autant pour les hommes que pour les femmes.

Arts d'interprétation

Mme Lavoie-Roux: L'autre question quej'avais, c'est un problème un peu plus délicat. Je l'ai abordé à l'Assemblée nationale. C'est le contenu québécois ou les directives — directives est peut-être un mot fort — en tout cas l'incitation, peut-être un peu trop incitative — je m'excuse de la redondance — que l'on fait auprès, par exemple... Le meilleur exemple que j'ai en tête, c'est celui du spectacle d'Eddy Toussaint, où on a dit que le contenu québécois, qui venait comme directive — je l'ai cité en Chambre, je m'excuse auprès des fonctionnaires — des bonzes du minis-

tère qui, depuis 1976, finalement, semblaient parfois soumettre la qualité des spectacles à la question du contenu québécois des programmes... On l'a eu à l'occasion... On l'a eu dernièrement pour les ballets canadiens. On l'a eu pour... Ces remarques reviennent de plus en plus fréquemment et je voudrais savoir quelle est la politique du ministre touchant ce contenu québécois et jusqu'à quel point il peut être utilisé, par exemple, comme critère, pour accorder ou ne pas accorder une assistance financière quelconque ou une subvention quelconque, parce que je pense que là, c'est un problème qui est soulevé par le monde artistique qui se dit: Jusqu'à quel point, le gouvernement va-t-il aller dans ce domaine? C'est tout ce problème que je voudrais aborder avec le ministre. On n'a pas le temps d'y aller en profondeur, mais on peut au moins signaler ce danger ou cette tendance, peut-être plus qu'un danger, qui parfois ne semble pas justifiée ou appropriée et qui, apparemment, viendrait de certaines directives de votre ministère.

M. Vaugeois: Ecoutez, effectivement, c'est une question qui serait assez longue...

Mme La voie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: ... et ce serait important, je pense, qu'on en discute à un moment donné. Je vais vous donner rapidement trois cas différents. Dans les orchestres symphoniques, l'Orchestre symphonique de Montréal et celui de Québec, c'est vrai que nous demandons aux orchestres d'avoir un recrutement qui tienne davantage compte des ressources québécoises. On n'est pas allé jusqu'au contingentement, mais on a forcé, par des groupes de travail, les responsables du recrutement à tenir davantage compte des jeunes qui sortent de nos institutions, de nos conservatoires, d'autant plus maintenant qu'il y a l'Orchestre des jeunes et que ceux-ci ont cette chance d'acquérir de l'expérience symphonique et tout. C'est un premier cas où il peut y avoir une forme de contingentement qui amène nos institutions à tenir compte de nos jeunes. Le cas auquel vous faites peut-être davantage référence...

Mme Lavoie-Roux: C'est le contenu des programmes.

M. Vaugeois:... c'est le cas du théâtre. Notre programme de subventions tient compte du nombre de créations de pièces, je ne sais pas, d'ailleurs, si on dit québécoises ou canadiennes...

Mme Lavoie-Roux: Québécoises.

M. Vaugeois: Québécoises. Je sais que la compagnie Jean Duceppe, l'an dernier, a pu présenter une traduction. L'idée, c'est de la création. C'est un débat en soi. D'abord, les exigences ne sont pas les mêmes, si on joue une pièce qui a déjà été montée tant de fois ou si on joue une pièce qui est nouvelle, où il y a un effort de création à soutenir. Les subventions en tiennent compte; je pense que ce sont des critères objectifs.

Quand on privilégie la création québécoise, évidemment, on sert les intérêts des créateurs et des auteurs québécois. C'est quand même payant de voir une de ses pièces jouée et si nos auteurs ne sont jamais joués, il y a un manque à gagner pour eux. On pense que nos subventions doivent essayer de rejoindre le plus grand nombre possible. Si la subvention à la troupe de théâtre peut servir en même temps à l'auteur, tant mieux, parce qu'il ne faut pas oublier que la troupe qui joue un auteur parisien paie des droits à l'auteur parisien. S'il y a moyen de les amener à jouer des auteurs québécois, il y a des retombées pour nos créateurs et nos auteurs, c'est vrai non seulement pour l'auteur, mais pour les metteurs en scène, pour les gens des décors, etc. Est-ce qu'on va trop loin dans ces normes? Elles sont mathématiques, elles sont objectives, elles ont été surtout développées du côté du théâtre.

Mme Lavoie-Roux: Et de la danse, apparemment.

M. Vaugeois: Du côté de la danse, ce n'est pas développé comme du côté du théâtre. C'est un peu du cas par cas qu'on a fait et, dans l'appréciation d'une troupe, on tenait compte d'un certain nombre d'éléments comme, entre autres, les créations québécoises. Je vous rejoins parfaitement dans le cas de la danse. Autant le cas du théâtre se défend, dans le cas de la danse, ça demande à être articulé, ce n'est pas clair actuellement. Cela a joué en faveur d'Eddy Toussaint, mais ça a joué contre les Ballets Jazz. Je suis le premier à m'en inquiéter. (22 heures)

Mme Lavoie-Roux: C'est surtout de la façon dont ça peut... Je suis avec vous. Il faut qu'on encourage les Québécois, la créativité, nos créateurs. Là-dessus, pas de chicane. D'un autre côté, il ne faut pas que cela devienne une condition sine qua non et absolue qui soit une entrave à la création. Je vais faire une comparaison et les gens vont s'imaginer que je veux faire une chasse aux sorcières, ce n'est pas du tout mon idée, mais c'est parce que je l'ai vécu ou que je l'ai vu. Si vous regardez, par exemple, en Chine, après la l' évolution culturelle, on a imposé aux gens un type absolu du côté de la danse, du côté du théâtre, du côté du spectacle. Finalement, vous avez tué la création artistique ou la qualité de la création artistique. Cela n'est pas du tout... Je vois que le député de Taschereau sourit. Vous trouvez la comparaison, mais...

M. Guay: De l'Ouganda jusqu'à la Chine, cela commence à être pas mal exagéré, il me semble, comme parallèle.

Mme Lavoie-Roux: Ecoutez, ce que je veux dire, c'est qu'à un moment donné, on peut, avec un peu trop de dirigisme ou d'insistance, com-

promettre la qualité de la créativité. C'est ce que je veux dire. J'admets avec vous que je ne voulais pas faire une comparaison d'égal à égal, mais c'est le genre de choses qui peut se produire. Je pense qu'il faut être extrêmement prudent. Autant il faut accorder de l'appui et encourager la création de nos artistes, autant il faut être prudent et mesurer le genre d'exigences qu'on a, pour ne pas arriver à un moment où la qualité devient soumise à ce genre d'exigences. C'est le point que je veux faire.

M. Guay: Si le député me le permet, sans vouloir faire de débat. C'est parce qu'il y a une différence fondamentale entre le dirigisme imposé, pour des raisons idéologiques en plus de cela, et le fait de stimuler la créativité. La créativité, par définition, est le contraire du dirigisme.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais si la mesure est trop excessive, c'est à ce moment que cela n'est plus un objectif louable en soi; on peut, sans même en être conscient, tomber dans une espèce de dirigisme ou dans quelque chose qui peut ressembler à du dirigisme.

M. Vaugeois: C'est pour le théâtre qu'on s'entend et, d'ailleurs, on demande à une troupe subventionnée d'avoir une création sur quatre ou cinq productions pendant l'année. Du côté de la danse, ce ne sont pas des critères arrêtés. L'imbroglio vient du fait que le Conseil des arts, vis-à-vis de la danse, a des programmes dont on ne saisit pas très bien les paramètres et cela nous amène à réagir. Parce que souvent, nos subventions perdent leur signification si le Conseil des arts se retire. Je reconnais qu'il y a, dans le domaine de la danse, une certaine confusion. Entre autres arguments, on a évoqué celui des créations québécoises pour dire: Eux, on les subventionne et eux, on ne peut pas les subventionner. Mme Renauld qui vient d'arriver au ministère a comme mandat de nous proposer, dans les prochains mois, une politique de la danse. Puisque l'on discute de crédits, nous avons convenu que, pour la danse, nous irions en budget supplémentaire, dès qu'on aurait des éléments de politique suffisamment clairs. Le budget de la danse, pour l'instant, ne bouge à peu près pas. Il bouge d'à peu près $30 000, je pense. On part de $590 000 à $620 000, en arrondissant les chiffres. C'est temporaire et, au moment des crédits supplémentaires, j'ai déjà convenu avec... D'ailleurs, cela n'est pas vrai seulement pour la danse. Au fur et à mesure que notre évaluation actuelle va progresser, il y a plusieurs secteurs qui devraient, au moment des crédits supplémentaires, profiter du travail qu'on s'est imposé nous-mêmes à ce moment et qui ne devrait pas pénaliser les artistes, les troupes, les créateurs, etc.

Mme Lavoie-Roux: Merci.

Le Président (M. Blank): Le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, puisque nous parlions, il y a quelques instants, de l'Orchestre symphonique de Montréal, j'aimerais poser une question à trois volets. Le ministre a parlé du recrutement, du désir collectif d'encourager les Québécois à devenir membre d'un orchestre de cette qualité. Je voudrais d'abord lui demander si cette notion dont on entend parler depuis quelque temps, de la création d'un comité pour faire les auditions des aspirants musiciens, comité dont le directeur artistique de l'orchestre serait membre, mais serait un seul membre avec une seule voix sur un total de neuf, est une politique gouvernementale ou si ce n'est qu'une idée qui a été lancée et qui pourrait peut-être faire l'objet de discussions patronales-ouvrières.

Deuxièmement, je voudrais lui demander si cette politique pourrait mettre en danger les emplois de ceux qui sont aujourd'hui membres de l'orchestre.

Troisièmement, je voudrais qu'il dise quelques mots sur la situation financière de l'Orchestre symphonique de Montréal.

M. Vaugeois: Je pense que le mieux, c'est de demander à M. Vallerand de faire le point surtout sur la question du comité. Il y a des éléments assez techniques.

Il y a eu, au cours du printemps et de l'été dernier, des négociations entre les membres du service de la musique et la direction de l'Orchestre symphonique de Montréal, aux termes desquelles l'Orchestre symphonique de Montréal a proposé lui-même un plan d'intégration de musiciens québécois en son sein.

Cela pourrait paraître étonnant, mais nous n'avons jamais réagi officiellement au plan qui nous a été proposé par l'Orchestre symphonique de Montréal; officieusement, oui; officiellement, non. Nous préférions, en un premier temps, ne pas avoir à engager des pourparlers sur ce qu'on appelait tout à l'heure des quotas. Il nous semblait que c'était un peu inapproprié. Vous faites allusion à des comités d'audition. Il y a des comités d'audition, et, actuellement les comités d'audition fonctionnent de la façon suivante. Il y a d'abord un concours local, un concours national et un concours international.

Si les candidats qui se présentent, en provenance de Montréal ou du Québec, sont jugés compétents dès cette première étape, il n'y a pas de concours national au sens canadien du terme. M est gelé. Le candidat est retenu immédiatement. Si les candidats du Québec ne sont pas retenus, ils peuvent quand même se représenter au concours national qui est alors ouvert à tous les musiciens du Canada. Et si aucun candidat n'est jugé compétent à cette deuxième étape, il y a un concours international auquel les jeunes Américains, diplômés des écoles de musique et des conservatoires américains ont accès, ainsi que des Européens.

Et, encore là, les étudiants qui sortent de nos conservatoires peuvent encore se présenter une troisième fois au concours international, on dépit

du fait qu'ils aient été éliminés ou qu'ils aient pu être éliminés aux deux étapes précédentes.

Si ma mémoire est fidèle, le concours a lieu derrière rideau, c'est-à-dire que les juges ne voient pas les candidats, ils les entendent seulement. Je crois que le président du jury a droit de veto sur les avis de ses collègues, le président étant, au fond, le directeur artistique de l'orchestre, c'est-à-dire le chef d'orchestre.

Je ne sais pas si c'est écrit de cette façon, mais je sais qu'en pratique, cela pourrait être le cas. Nous n'avons pas exigé que l'orchestre révise cette façon de procéder. Nous nous sommes simplement entendus avec eux sur un objectif de moyen terme, c'est-à-dire que, d'ici cinq ans, on obtienne une proportion qui soit l'équivalent d'à peu près 50% de jeunes finissants — ils peuvent ne pas être très jeunes non plus — de nos conservatoires et de nos écoles de musique, et 50% qui viennent des écoles du Canada, des Etats-Unis ou d'Europe.

C'est à peu près la moyenne, d'ailleurs, que l'orchestre a respectée au cours des derniers 18 mois, de sorte qu'il ne nous est pas paru nécessaire de hausser le ton ou de s'engager dans une polémique extrêmement délicate. Les dirigeants de l'orchestre nous ont assurés et nous ont convaincus, d'ailleurs, de leurs bonnes intentions, du sérieux de leurs intentions à cet égard.

Nous n'avons jamais demandé, que je sache — et M. Cartier pourrait peut-être infirmer la chose si tel était le cas — à l'Orchestre symphonique de Montréal d'anéantir le pouvoir dont dispose le directeur artistique quant au jugement à porter sur la performance de chacun des candidats. Je ne me souviens pas qu'on ait jamais demandé cela. Enfin, cela m'étonnerait énormément. Les choses en sont là.

Autrement dit, je crois qu'on peut le dire, nous nous sommes entendus pour l'instant officieusement avec les responsables de l'Orchestre symphonique de Montréal pour faire l'expérience de poursuivre des objectifs communs. Les dirigeants de l'orchestre comprennent le point de vue du ministère de faire en sorte que cet orchestre soit davantage représentatif de nos talents locaux. Ils ne remettent pas en cause cet objectif et, de notre côté, nous n'avons pas l'intention et nous n'avions pas l'intention de leur imposer une façon de procéder qui les lierait à jamais sur chaque cas particulier, parce que nous sommes parfaitement conscients que, d'abord, la planification des besoins de l'orchestre ne peut pas se faire rationnellement, les départs sont imprévisibles. Il y a un taux de roulement des musiciens de l'orchestre qui est prévisible en valeur absolue, mais on ne peut pas identifier à l'avance si ce sera un violoniste, si ce sera un corniste, si ce sera un trompettiste, c'est la vie de chaque année qui le révèle à toutes fins utiles.

Etant donné l'inégalité des forces, par ailleurs, de nos secteurs dans les écoles de musique professionnelle, il était très difficile de fixer des quotas comme, par exemple de dire: Vous allez recruter 75% de vos besoins en cordes ici et 25% de vos besoins en vents ailleurs, même si, en pratique, il peut y avoir des disparités dans les niveaux de formation ou dans la qualité de la formation dans nos écoles d'ici, il reste que, à toutes fins utiles, il n'est pas possible de prévoir, dans un délai de cinq ans, de quel type d'instrumentistes nous aurons besoin. C'est une sorte de "gentlemen's agreement" qui semble porter fruit parce qu'effectivement, si on se réfère aux postes qui ont été comblés au cours des 18 derniers mois, il y a 50% de Québécois qui ont obtenu ces postes.

Quant à votre question sur l'état des finances de l'OSM, à ma connaissance, les finances sont en un très bon état, mieux que jamais auparavant. La campagne de souscription en cours présentement rapporte des dividendes au-delà des espoirs de ceux qui l'ont orgaisée. Ils n'ont pas de déficit de fonctionnement substantiel pour l'année qui vient de se terminer. Nous avons convenu avec eux, comme pour l'Orchestre symphonique de Québec, que nous allions procéder à une indexation des traitements qui ne couvre pas cependant la totalité de ce qu'ils ont consenti au syndicat lors des dernières négociations.

Je ne veux pas dire par là que la situation financière de l'Orchestre symphonique de Montréal est tout à fait réjouissante, mais, si on la compare à celle qui prévalait il y a trois ans et il y a quatre ans, je crois que ces gens affichent une sérénité qui est tout autre.

Mme La voie-Roux: Est-ce qu'il n'est pas question que, justement, à cause des difficultés qu'ils éprouvent, les matinées symphoniques soient menacées de disparaître?

M. Vaugeois: On ne m'a pas avisé de cela.

Mme Lavoie-Roux: J'aimerais, en tout cas... Si cela peut vous intéresser, je ne sais pas si le député de D'Arcy McGee avait eu vent de cela, je m'excuse, mais je pense que cela vaudrait la peine de s'informer, parce que les matinées symphoniques me semblent...

M. Vaugeois: Elles restent dans leur programmation 1979/1980; dans celle qui a été rendue publique, il y a un mois, on les retrouve.

Mme Lavoie-Roux: Peut-être. Je pense que c'est extrêmement difficile pour eux.

M. Goldbloom: On a déjà vu des engagements annulés après avoir été annoncés quelques mois auparavant. Et je ne parle pas nécessairement de l'Orchestre symphonique de Montréal en disant cela, mais divers orchestres, à cause de difficultés financières, ont été obligés de décommander des engagements donnés. La réponse de M. Vallerand est élaborée et je vais m'en contenter.

J'aimerais maintenant que le ministre nous parle brièvement de la situation financière du Musée des Beaux-Arts de Montréal.

Musée des Beaux-Arts

M. Vaugeois: Cela va être moins élaboré. Je pense qu'après des efforts de résorption du déficit, après avoir un peu clarifié la situation avec d'autres partenaires, comme le gouvernement fédéral, après l'effort que les membres du musée pouvaient faire, on est arrivé à un niveau de subventions qui est bon. Je pense que c'est très exactement $1 900 000, ou $1 907 000, ou quelque chose comme cela. Cela frise les $2 millions. J'ai lu dans les journaux des commentaires du directeur du Musée des Beaux-Arts qui se dit très heureux de l'effort financier que consent le ministère. On vient de m'indiquer le dernier montant qui a été arrêté; il est de l'ordre de $2 165 000. C'est donc un peu plus de $2 millions. (21 h 15)

Jean Trudel, le directeur du musée, se dit heureux de cet effort du ministère qui est absolument incomparable avec les contributions qui viennent d'ailleurs. C'est une masse d'argent importante. Je pense que c'est susceptible de permettre au musée de se développer correctement. Vous avez vu par les journaux qu'il existe, malgré cela, une certaine tension actuellement à l'intérieur du musée.

Mme Lavoie-Roux: Oui.

M. Vaugeois: Nous nous refusons à intervenir dans la gestion et le fonctionnement de ce musée. C'est un musée privé. Bien sûr, nous le soutenons financièrement de façon très importante. Il a plus d'argent, d'ailleurs, que nos propres musées d'Etat, mais il est d'une autre importance et nous reconnaissons cette importance. Nous lui reconnaissons son caractère privé et nous n'entendons pas modifier ce caractère, parce que ça permet à ce musée de se bien développer à ce moment-ci et nous pensons que la structure en place doit se manifester et prendre les décisions qu'elle juge appropriées. Le conseil d'administration est là.

Nous sommes sur le point de nommer douze nouveaux membres, parce que d'après les ententes, le gouvernement désigne douze membres et l'assemblée générale des membres du musée désigne quatorze membres. Ils sont donc en majorité. Nos membres sont bien avertis qu'ils ne sont pas là pour représenter le gouvernement, défendre notre point de vue ou quoi que ce soit. Ils sont là pour composer avec les autres membres du conseil d'administration et prendre les intérêts du musée. Nous pensons qu'une institution de cette nature doit respecter ses cadres supérieurs. Le directeur du musée doit avoir la confiance du conseil d'administration et plusieurs décisions lui appartiennent. Je ne vois pas le ministre des Affaires culturelles intervenir au niveau du choix des expositions et intervenir au niveau du comité des acquisitions, etc.

Que les membres du conseil d'administration manifestent leur point de vue, bien sûr, mais je pense que ça doit se jouer à l'intérieur de l'institution et nous nous refusons à aller plus loin à ce moment-ci, encore que, par ailleurs, nous sommes conscients que nous avons des responsabilités quant à la complémentarité des orientations que se donnent nos grands musées et, à cet égard, nous avons un groupe de travail qui réunit des gens du Musée des Beaux-Arts, des gens du Musée d'art contemporain, du Musée du Québec et des musées privés et ces gens-là se concertent maintenant de plus en plus quant à leurs plans de développement, quant à leurs programmes d'acquisition. Je peux vous dire que je compte rendre public d'ici l'automne un document portant sur le plan de développement des musées du Québec. Nous travaillons là-dessus et j'espère pouvoir rendre public un tel document d'ici l'automne et, d'ici quelques jours, je rendrai public un document de réflexion sur le développement du Musée du Québec.

Le Président (M. Blank): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, sur cette question du Musée des Beaux-Arts de Montréal, je ne peux que féliciter le ministre de sa magnanime prudence et de la sobriété de ses propos.

N'étant que député, je ne suis peut-être pas tenu aux mêmes exigences. Il s'agit d'un dossier auquel j'ai été mêlé à l'époque où j'étais adjoint parlementaire du ministre des Affaires culturelles au moment où le titulaire de ce ministère était le député de Chauveau. Il y a eu, récemment, au sein du conseil d'administration du Musée des Beaux-Arts de Montréal, quatre démissions, celles de Mme Hélène Pelletier-Baillargeon, de M. Léo Dorais, de Mme Marcelle Ferron et de M. Gilles Hénault, qui sont quatre personnalités importantes hautement reconnues pour leur compétence sous plusieurs aspects des arts.

Ces démissions ont été motivées principalement par ce qui semblait être un manque d'autorité réel du conseil d'administration sur la conduite des affaires du musée. Or, il y a deux ans, au moment où ces personnes ont été nommées au sein du conseil d'administration, c'était là le principal problème. Ce conseil d'administration, dirigé par une clique à laquelle je reprocherais une espèce de sirupeuse arrogance, ne fonctionnait pas comme un véritable conseil d'administration. Les réunions avaient lieu à peu près sans ordre du jour, on n'en tenait pas de procès-verbal sérieux; à ce moment-là, le ministre des Affaires culturelles, par le choix prudent, judicieux qu'il a fait des personnes qu'il nommait au sein de ce conseil, a voulu faire en sorte que ce genre de problème interne puisse se régler.

Or, les quatre démissions dont je viens de faire état tendent à montrer que ces problèmes essentiels ne sont à peu près pas réglés. Cela me paraît grave. Je ne demande pas au ministre d'appuyer mes propos. Je les prends tout à fait à mon compte, mais cela me paraît grave.

Le ministre a parlé d'un effort de coordination entre les rôles de plusieurs musées. Dans sa prudence, le ministre n'a pas expliqué pourquoi cet

effort de coordination est nécessaire; moi, beaucoup plus imprudent, je vais affirmer qu'une des raisons pour lesquelles cet effort de coordination est nécessaire, c'est que la clique dirigeante du Musée des Beaux-Arts de Montréal pratique une politique qui vise en particulier à faire une concurrence absolument indue au Musée d'art contemporain, profitant en partie du fait que le Musée d'art contemporain est situé dans un secteur de Montréal qui a été très négligé dans le plan d'urbanisme, d'ailleurs inexistant, de la ville de Montréal: la Cité du havre. Le Musée d'art contemporain a du mal à établir une clientèle, à maintenir une clientèle et le Musée des Beaux-Arts profite de cette situation pour lui faire une concurrence indue.

On pourrait en dire beaucoup plus long sur le Musée des Beaux-Arts de Montréal. Je n'ai pas l'intention d'en dire beaucoup plus long. Je me contenterai de dire que les dirigeants de ce musée n'ont pas fait la preuve qu'ils méritent notre confiance.

Par exemple, ils ont fait, à grands frais, une rénovation du musée dont deux des effets prévus ont été, premièrement, de réduire les surfaces d'exposition; deuxièmement, de condamner la grande porte, qui était un des charmes de ce musée. Je pense que ces gens n'ont pas mérité notre confiance. Je veux bien accepter la proposition du ministre qui nous dit que c'est à eux de régler les problèmes. Mais je tiens à marquer mon scepticisme. Je tiens à dire que ces gens, s'ils comptent continuer de recevoir plus d'argent que tout autre musée au Québec, devront en toute conscience modifier fondamentalement leur comportement et s'inscrire dans une politique d'ensemble qui ne soit pas fondée sur une conception étriquée du rôle du Musée des Beaux-Arts de Montréal, sur une concurrence injuste et indue envers le Musée d'art contemporain, mais qui accepte que désormais le Musée des Beaux-Arts de Montréal soit dirigé non pas par une clique mais dirigé effectivement par son conseil d'administration.

M. Vaugeois: Ecoutez, je ne voudrais pas être long, on a convenu d'accélérer nos travaux, mais...

Le Président (M. Blank): On est dans l'illégalité depuis vingt ou vingt-cinq minutes.

M. Vaugeois: Oui, mais je pense que l'on est maître de notre temps. On n'en fera pas une polémique. Le député a soulevé des points qui sont très importants. Je dois dire, pour rassurer les gens ici présents, que j'ai rencontré les gens de l'ancienne administration. J'ai rencontré le groupe des démissionnaires. J'ai contacté des tas de gens qui accepteront un mandat au Musée des Beaux-Arts. J'ai rencontré des membres du personnel du musée. Je dois dire que techniquement, en tout cas, plutôt qu'une démission, les quatre personnes n'ont pas souhaité un renouvellement de mandat. Au moment où elles ont démissionné elles n'étaient plus membres... leur mandat était expiré. Je respecte leur point de vue. On pourrait débattre longuement.

Je vais vous dire l'essentiel. Le grand reproche qu'on fait à des conservateurs du Musée des Beaux-Arts, c'est d'avoir un mauvais choix d'exposition, on a dénoncé une exposition en particulier. Bien! Je ne me prononce pas là-dessus. On dit que le Musée des Beaux-Arts fait une concurrence déloyale au Musée d'art contemporain, c'est plus important. D'autant plus que, malgré la faiblesse de nos crédits que vous souleviez, Mme le député de L'Acadie, vous reconnaîtrez que, de temps en temps, on a réussi à trouver pas mal d'argent. Dans le cas du Musée des Beaux-Arts, pour la première fois depuis bien longtemps, il a une somme qui correspond à ses besoins qui a été évaluée avec ses représentants; à toutes fins utiles, on a doublé la subvention. Elle est passée de $1 million à peu près à $2 millions et plus. On a donc vraiment fait le ménage chez nous, parce que même si, comme vous le disiez au début, on a augmenté de $211 000, il reste qu'on dégage des millions, on les a quand même pris quelque part.

Là, on a trouvé $1 million de plus pour le Musée des Beaux-Arts. Je suis d'accord avec le député de Deux-Montagnes, nous ne pourrions accepter qu'avec notre argent, ce musée fasse une concurrence déloyale à nos institutions. Or, il arrive que la directrice du Musée d'art contemporain me dise, pour sa part, qu'elle a d'excellents rapports avec son homologue du Musée des Beaux-Arts, qu'ils s'entendent quant à la coordination de leurs expositions, qu'ils s'entendent quant à leur programme d'acquisition.

Le problème du Musée d'art contemporain est essentiellement sa localisation et vous avez eu raison de le souligner. Alors, je pense que la solution est à notre niveau, ce que nous devons envisager le plus vite possible est une relocalisation du Musée d'art contemporain.

Mme Lavoie-Roux: Je suis donc contente. On avait eu un petit argument là-dessus l'an dernier, vous n'étiez pas d'accord avec moi.

M. Vaugeois: Oui, nous avons maintenant un plan prêt, je le rendrai public, il est maintenant prêt. Je peux même vous le dire ce soir, on est presque entre nous à cette heure-ci, notre plan prévoit sa relocalisation sur le quadrilatère de la Place des Arts. Ce serait toujours dans votre comté, M. le Président...

M. Le Moignan: C'est pour ça qu'il a la présidence.

M. Vaugeois: Oui, c'est pour ça qu'il a la présidence de la commission des affaires culturelles, tout est dans son comté. Alors, ce serait à l'angle des rues...

Le Président (M. Blank): Jeanne-Mance et Sainte-Catherine.

M. Vaugeois: Non, pas Sainte-Catherine, mais Maisonneuve...

Le Président (M. Blank): Maisonneuve et Jeanne-Mance.

M. Vaugeois: On a un document là-dessus. Ecoutez, ce qui est important, c'est quand même le témoignage de la directrice du Musée d'art contemporain. Les gens disent: Attention, le Musée des Beaux-Arts fait une concurrence déloyale, elle est directrice de son musée et dit: Non, ça va, on s'entend, on se parle, on se concerte. Sur le choix des artistes pour les expositions, ça... Je pense que ce n'est pas de la responsabilité d'un conseil d'administration. Je pense qu'un conseil d'administration désigne les conservateurs, désigne le conservateur en chef d'un musée et, après ça, il faut respecter le mandat qu'on lui confie. Si on n'est pas content de sa façon de faire, c'est à l'expiration de son mandat qu'il doit rendre des comptes. On ne peut pas demander à quelqu'un qu'on place à la tête d'une institution de rendre quotidiennement des comptes à un conseil d'administration, surtout dans ces matières qui sont si délicates.

Je respecte les propos du député de Deux-Montagnes, je respecte le point de vue des administrateurs qui ont fait cette lettre. Je dis seulement qu'il me semble qu'un ministre des Affaires culturelles ne doit pas s'ingérer dans ces matières et doit s'efforcer plutôt de mettre autour de la table les personnes concernées. C'est ce que nous faisons. Ces personnes se réunissent et semblent s'entendre. De toute façon, nous reconnaissons notre responsabilité. C'est à nous à améliorer la situation du Musée d'art contemporain. Et c'est un peu comme tout à l'heure, on n'aura pas des émissions de télévision, si on fait sauter le Salon du livre de Québec.

On n'améliorera pas le sort du Musée d'art contemporain en réduisant les activités du musée des Beaux-Arts. Notre problème à nous, c'est de maintenir cette institution de qualité à un niveau raisonnable et faire en sorte que nos propres institutions puissent se rattraper. C'est le sens de la proposition du début. Il faut une opération de sensibilisation de nos gens pour que les musées aient une autre image et que les deniers publics puissent, dans quelques années, être disponibles pour nos musées.

Mais, pour l'instant, ce n'est pas un problème de budget. On n'a pas de plans, on n'a rien. On a quelques vagues idées. On a un héritage, du côté des musées, qui est regrettable, et personne autour de la table n'est responsable de cela. On a été à l'écart des grands courants du développement muséologique. Et on n'a rien de comparable ici à ce qu'on retrouve chez les provinces voisines. C'est la situation. C'est un défi que nous devons relever ensemble et nous mettre à l'ouvrage. Je dis que les querelles entre les musées qui existent ne régleront rien. Ce qu'il faut, c'est que la collectivité et l'Etat prennent leurs responsabilités à cet égard et donnent à chacune de nos institutions les moyens de se développer.

Le Président (M. Blank): M. le député de D'Arcy McGee. (22 h 30)

M. Goldbloom: M. le Président, je suis heureux que le ministre ait fourni au député de Deux-Montagnes la réponse qu'il vient de faire, parce que, malgré l'heure tardive, je ne me sens pas capable de laisser passer les remarques du député de Deux-Montagnes sans réagir.

Il a parlé essentiellement de trois éléments. Il a parlé de certaines politiques administratives qui pourraient inclure une apparence de concurrence déloyale à l'endroit notamment du Musée d'art contemporain. Je pense que le ministre a fourni une réponse à ce point de vue.

Il a condamné en quelque sorte la rénovation effectuée. Il trouve que le jugement appliqué à cette rénovation a laissé à désirer. Il n'est pas d'accord; il n'est pas seul.

Certains critiques qui ont visité le musée le soir de sa réouverture ont écrit des choses qui n'étaient pas positives. Il ne me semble pas, cependant, que l'on doive porter sur l'effort des membres du conseil d'administration un jugement sévère, simplement parce que l'on est en désaccord avec certaines décisions d'ordre architectural ou même artistique.

Là où je trouve ses remarques graves, c'est là où il parle d'une clique qui, à toutes fins utiles — c'est le sens même du mot — exclurait la majorité des membres du conseil d'administration de la prise des décisions et effectuerait cette prise de décisions par le moyen de caucus et par le moyen d'assemblées du conseil mal dirigées, avec une mauvaise tenue des procès-verbaux, etc.

Je n'oserais pas dire que je connais les membres du conseil sortant, mais j'en connais quelques-uns. Je connais leur sincérité et leur dévouement. Sans les nommer individuellement, il me semble que je dois quand même les défendre contre cette condamnation globale faite par le député de Deux-Montagnes et dire que je suis convaincu qu'il y a, parmi les membres du conseil sortant, des gens qui n'ont pas eu d'autres pensées que le bien du musée et le bien de la culture au Québec.

Je pense que le ministre, par une réponse pondérée, a remis les choses à leur place et que le fait que nous aurons très bientôt, si je comprends bien, un nouveau conseil d'administration, avec douze membres triés sur le volet et nommés par le ministre et quatorze qui seront nommés par les membres, l'assemblée des membres, devra nous mener à une nouvelle ère où les problèmes ne se présenteront pas.

Je dis en terminant, M. le Président, que, même si je trouve difficilement acceptable l'intensité, le globalisme de la condamnation du député de Deux-Montagnes, je pense que le fait qu'il se soit exprimé de cette façon constituera une mise en garde pour nous qui devons surveiller de l'extérieur les actions de ce conseil d'adminis-

tration et pour les nouveaux membres qui, d'ici peu de temps, en assumeront la responsabilité.

M. Vaugeois: M. le Président, j'aimerais dire deux choses. Avant de réviser les subventions à la hausse, comme nous l'avons fait, nous avons suivi l'administration du Musée des Beaux-Arts de très près pendant plus d'un an. Effectivement, il y avait un certain nombre de choses à corriger, ce qui est normal, mais nous avons eu un administrateur délégué sur place pendant un bon bout de temps. Il y a eu un programme de résorption du déficit et nous avons lieu de croire, à ce moment, que l'administration sera plus rigoureuse et davantage respectueuse d'un certain nombre de critères, parce qu'autant notre effort est grand à ce moment, autant notre position pourrait changer si les engagements pris ne sont pas respectés.

Le député de Deux-Montagnes a souligné des problèmes architecturaux. Ils sont réels. Dans les nominations que nous nous apprêtons à faire, d'ailleurs, nous avons tenu compte de ce défi qui se pose aux administrateurs du Musée des Beaux-Arts. Malheureusement, dans l'agrandissement de ce musée, il y a un certain nombre de précautions qui n'ont pas été prises, il faut le dire. Je le dis d'autant plus sincèrement que c'est le genre de problème que j'ai actuellement avec le Musée du Québec. Je me rends compte que ce n'est pas facile de passer à l'action dans l'agrandissement d'un musée. Il nous faut un programme scientifique et un programme architectural très précis, sinon les architectes font des choses intéressantes, mais lorsqu'il s'agit de ramener les collections à l'intérieur du musée et les expositions, on se rend compte qu'on ne s'était pas compris et il arrive des choses aussi saugrenues que la porte principale ne peut plus servir au Musée des Beaux-Arts.

C'est fantastique. Cet exemple que le député vient de donner, amènera sans doute l'indulgence des gens autour de cette table, leur indulgence à l'endroit de nos délais quant à l'agrandissement du Musée du Québec. C'est le même genre de problème qui se pose pour nous. Nous ne voulons pas répéter ce genre d'erreurs, il faut donc y mettre le temps. Là-bas, on n'a peut-être pas mis suffisamment de temps.

Le Président (M. Blank): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: M. le Président, je voudrais rendre hommage à ma dévouée collaboratrice de gauche, qui s'est évertuée à faire des recherches...

Mme Lavoie-Roux:... à Washington.

M. Le Moignan: ... très sérieuses, à tel point qu'elle m'a préparé des questions pour les deux prochaines années à venir.

M. Goldbloom: Y aurait-il des gens de gauche dans l'Union Nationale?

M. Le Moignan: II y a des gens de gauche, comme des gens de droite.

Je ne voudrais pas épuiser toutes les questions que j'ai ce soir, il m'en resterait une dizaine de pages, mais je sais qu'on va siéger au moins deux autres années sous ce gouvernement.

Mme Lavoie-Roux: Une seule autre!

M. Le Moignan: Non, je sais, de très bonne source, que ça va aller en 1981.

Mme Lavoie-Roux: C'est vrai que vous avez formé une...

M. Goldbloom: Au rythme où vont les élections partielles, ils ne dureront pas longtemps.

Mme Lavoie-Roux: ... coalition depuis les élections de lundi soir dernier.

M. Le Moignan: Non, ne mêlez pas la politique...

Le Président (M. Blank): ... question! M. Le Moignan: ... avec la culture.

Mme Lavoie-Roux: C'est vous qui parlez d'élections.

M. Le Moignan: Non, vous m'avez poussé jusque là.

Le Président (M. Blank): A l'ordre, monsieur et madame!

M. Le Moignan: Je voudrais poser une question au ministre. J'avais tout ce problème du Musée des Beaux-Arts qui a été abordé. Je n'ai pas besoin d'y toucher, l'an prochain, ce ne sera pas réglé, on y reviendra.

Conseils régionaux de la culture

Maintenant, une question qui m'intéresse, c'est au sujet des bureaux régionaux de la culture. Je ne voudrais pas que le ministre me fasse une longue dissertation. Quel est leur rôle, un peu dans le concret, dans la pratique, leurs responsabilités, par exemple, au niveau des décisions? Est-ce que ça existe ou est-ce qu'ils sont là simplement par apparat, ou bien est-ce que ces bureaux régionaux jouent un rôle?

M. Vaugeois: Est-ce que vous parlez des bureaux ou des conseils?

M. Le Moignan: Des conseils régionaux de la culture. Il y en a à peu près un par territoire...

M. Vaugeois: D'accord. C'est qu'il y a deux organismes. Il y a les bureaux, qui sont la projection du ministère ou la présence du ministère dans les

régions, qui sont une forme de décentralisation, si vous voulez, et, à ce côté, il y a les conseils régionaux qui sont une émanation du milieu et qui sont là pour nous éclairer sur les besoins du milieu, mais, en même temps, qui sont là pour faire de l'animation auprès du milieu. Ce sont des fonctions bien différentes. Les uns, donc, partent du ministère vers les régions; les autres partent des régions vers le ministère.

Votre question, c'est donc le rôle des conseils régionaux de la culture. Je vais demander à M. Vallerand de faire le point, parce qu'il n'a pas été suffisant de les créer, il faut aussi, si vous voulez, apprendre à travailler avec les conseils.

M. Le Moignan: Oui, il y a les conseils, il y a les bureaux...

M. Vaugeois: Oui.

M. Le Moignan: ... parce que je vois qu'il y a une hausse de crédits de prévue, je crois cette année pour ça.

M. Vaugeois: Vous voulez une réponse de combien de minutes?

M. Le Moignan: Pas trop longue. Ce que l'on conçoit bien s'énonce clairement.

M. Vaugeois: Je vais être très succinct. Au point de départ, le ministère a signé des protocoles avec les conseils de la culture en vertu desquels, essentiellement, ces derniers devaient s'engager à entreprendre un plan de développement de ce qui leur paraissait être leurs caractéristiques ou leurs besoins en matière de culture et d'en négocier, à toutes fins utiles, la mise en application avec le ministère.

En réalité, pour la plupart des conseils qui étaient créés quasi tout de go, se lancer dans la préparation d'un plan de développement, c'était fort complexe. Peu d'entre eux étaient capables de s'accommoder, compte tenu de leur impatience naturelle, du temps que cela allait prendre et des délais qui leur paraissaient être imposés par une opération semblable. Plusieurs ont manifesté le désir non pas de travailler à la fabrication ou à la préparation de plans de développement culturel régionaux, mais de disposer immédiatement, enfin dans les plus brefs délais, d'un pouvoir décisionnel quant à l'affectation des crédits qui sont de facto consacrés au développement de la culture dans chacune des régions.

Nous avons entamé des pourparlers globaux avec tous les conseils régionaux de la culture pour en arriver à nous entendre avec la majorité d'entre eux, neuf sur dix, sur un modèle de collaboration qui est d'ailleurs en marche depuis quelques semaines et qui a pour effet précis, au cours de l'exercice 1979/80, de les associer au processus de prise de décision quant au choix des priorités de développement culturel régional. Il est donc trop tôt pour porter un jugement sur le succès de cette entente très précise, mais je dirai qu'elle ne porte Das sur l'ensemble de l'enveloppe du ministère, mais sur la partie du budget des arts d'interprétation, théâtre, musique, danse, chanson, qui est dépensée dans chacune des régions, exception faite de la ville de Montréal, pour laquelle il n'y a pas de conseil de la culture.

Nous avons pris la base historique, les sommes affectées à ces fins pour chacune des régions et, au lieu de procéder unilatéralement à leur ventilation plus ou moins empirique entre chacune des disciplines concernées et d'en justifier le geste en référence à nos propres normes et nos propres critères, nous avons consenti et nous avons cru opportun, voire très intéressant pour l'harmonie du développement culturel, d'associer les conseils de la culture à ce que j'appellerais un choix global par région.

Autrement dit, les conseils de la culture, en ce qui a trait aux arts d'interprétation, ont à donner des avis que nous nous engageons à prendre en compte, quant à l'importance de la ventilation des enveloppes qui leur sont consenties, la ventilation par discipline. Bien sûr, l'avantage pour chacun de ces conseils, c'est de pouvoir faire part du caractère relatif de priorité régionale. Il n'est pas exclus du tout que nous étendions progressivement ce type de collaboration à d'autres secteurs que celui des arts d'interprétation, mais nous allons attendre de voir comment l'expérience en cours cette année va se dérouler. Nous avons tout lieu de croire — d'ailleurs le directeur des bureaux régionaux que j'aperçois ici pourrait en témoigner— que l'expérience est particulièrement bien enclenchée. Vous savez de toute évidence que dans les circonstances, étant donné la loi du ministère, nous ne pouvons pas remettre le pouvoir de dépenser à des organismes consultatifs. Les grands objectifs de décentralisation ne pourront être atteints que le jour où nous remettrons le pouvoir de dépenser aux organismes élus démocratiquement, c'est-à-dire au suffrage universel. Les partenaires privilégiés dans le domaine du patrimoine sont les conseils municipaux. Disons que pour l'instant nos partenaires privilégiés, en ce qui a trait au développement des arts d'interprétation en région, sont les conseils régionaux de la culture.

Voilà, j'ai essayé d'être bref. Je pourrais vous entretenir de cela pendant de longues heures, étant donné les longues heures qu'on y a mises nous-mêmes. Mais l'essentiel tient à ce que je viens de dire.

Mme La voie-Roux: M. le Président, si le député de Gaspé me le permet, je me demande si cela ne ferait pas un beau débat du vendredi. J'ai un article devant moi — je ne connais pas l'auteur — du Soleil...

M. Vaugeois: La date? Juste avant que l'on ne parvienne à s'entendre sur une forme de collaboration.

Mme Lavoie-Roux: Le 3 février 1979. M. Vaugeois: La tour de Babel.

Mme La voie-Roux: II est extrêmement sévère, mais, même si vous arriviez à un protocole et à vous entendre sur le champ qui serait couvert, le domaine d'activité soulève beaucoup d'autres questions. Mais enfin c'est hors... (22 h 45)

Le Président (M. Blank): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Le Moignan: Je garde toutes mes questions pour l'an prochain, suite à votre très bel exposé, étant donné que vous...

M. Vaugeois: Vraiment on se fera un plaisir de commenter l'expérience en cours parce qu'à nos yeux...

M. Le Moignan: On aura votre expérience.

M. Vaugeois: ...c'est une voie absolument positive que de s'engager dans un processus de partage de responsabilités et d'acquisition par le ministère, directement, sans prisme déformant, de la connaissance que les gens des régions ont de leur propre besoin.

M. Le Moignan: C'est le résultat de cette expérience qui, l'an prochain, va certainement nous intéresser.

Le Président (M. Blank): M. le député de D'Arcy McGee, votre dernière question'.

M. Goldbloom: Ma dernière demande au ministre, M. le Président, c'est qu'il nous parle brièvement de l'Opéra du Québec. J'ai gardé cette question pour la fin. Oui, mon péché mignon, c'est de chanter l'opéra. Je voulais dire au ministre que si pour faire revivre l'Opéra du Québec, il a besoin d'artistes qui accepteraient de chanter sans cachet, il y en a un ici à cette table.

M. Vaugeois: Je pense qu'il est paru assez de choses dans les journaux pour que je n'aie pas besoin d'être très long. Nous avons, au cours des derniers mois, considéré plusieurs hypothèses qui vont de la compagnie d'Etat à la compagnie privée, en passant par des subventions qui toucheraient tantôt la Société d'Aubigny, tantôt la Place des Arts, tantôt le MAALQ, le Mouvement d'action pour l'art lyrique, et qui permettraient aux uns et aux autres de monter une production à l'occasion. L'hypothèse que nous retenons, qui serait étudiée très prochainement par le Comité ministériel du développement culturel implique la Place des Arts, amènerait la Place des arts à être responsable de la relance de l'opéra, avec un directeur général qui serait celui de la Place des Arts.

Soit dit en passant, M. Lamarche ne nous a rien demandé. C'est nous qui lui avons demandé s'il était prêt à reprendre du service à ce titre. Ses locaux, ses effectifs, son infrastructure, son expérience serait à la disposition de l'Opéra du Québec; pour nous, c'est une économie importante. Deuxièmement, il y a aussi des garanties de qualité qui paraissent tout aussi importantes. Par ailleurs, nous serions prêts si je réussis dans ma démarche actuelle, très prochainement, à désigner un directeur artistique. Je pense d'ailleurs que le choix que nous avons à l'esprit pourrait rapprocher les parties et réduire la méfiance que j'ai rencontrée chez différents partenaires concernés.

Notre projet prévoierait que ce directeur artistique pourrait, dès l'automne prochain, organiser des tournées de théâtre lyrique au Québec, et préparer des choses pour qu'à la saison 1980/81, il puisse y avoir trois productions à Montréal, avec sept repre'sentations chacune, que l'année suivante, il puisse y en avoir quatre à Montréal, toujours avec sept représentations et trois productions à Québec, avec trois représentations.

Cela nous amènerait des déficits, au début, de l'ordre de $800 000 et après deux ans, de l'ordre de $1 900 000. Nous avons abordé ces questions avec les gens du Conseil des arts d'Ottawa qui semblent prêts à faire leur part, encore qu'on ne soit pas certain de ce qu'ils feraient. Mais apparemment, ils devraient au moins faire autant qu'avec le Canadian Opera.

La ville de Montréal, jusqu'à maintenant, s'intéresse à la relance de l'opéra, mais n'a pas pris d'engagement précis. Notre gros défi, c'est de rapprocher les partenaires dont nous avons besoin pour procéder à la relance de l'opéra. Et les partenaires dont nous avons besoin, c'est la Place des Arts, c'est le Mouvement d'action pour l'art lyrique.

Je dois dire que les sorties publiques des derniers jours ont été bénéfiques, parce que cela nous a permis de constater que nos appuis à ce plan, que je viens rapidement d'esquisser, étaient peut-être plus nombreux qu'on ne le croyait. Et sans dire que le MAALQ lui-même est divisé, déchiré, je dois dire que plusieurs membres du MAALQ nous ont fait savoir maintenant que ce qui leur importait, c'était la relance de l'opéra, qu'à bien des égards, ce que nous avions annoncé leur semblait réunir l'essentiel et qu'on pouvait compter éventuellement sur un rapprochement. Je ne sais pas comment il va se faire, à quel rythme il va se faire, mais pour le favoriser, nous avons prévu un comité conseil, auprès de la direction de l'opéra. La nomination du directeur artistique et la formation du comité conseil, devraient être d'autres éléments qui devraient rapprocher les partenaires.

Il y a beaucoup de choses que je pourrais ajouter, M. Vallerand également. Mais ce n'est pas le temps d'entrer dans trop de détails. Tout ce que je vous dis, c'est pour vous manifester notre volonté de procéder à la relance de l'opéra dans les plus brefs délais, avec les moyens qu'il faut. Mais nous ne pouvons le faire contre des partenaires que nous jugeons essentiels à la qualité de la relance. Et cette qualité passe, à notre avis, par l'implication du MAALQ autant que par l'implication de la Place des Arts.

Nous aurions voulu trouver une formule qui aurait été, au départ, sans problème, mais il arrive qu'il y a un héritage qui a laissé quelques

blessures. Il y a des postes qui sont convoités, il faut le dire aussi. Cela joue dans les opinions qui s'expriment. J'ai pris publiquement la défense des gens de la Place des Arts et je le fais — et je le répète ce soir parce que c'est l'ancien gouvernement qui a été responsable de tout cela — ce soir, je me porte à la défense de ce qui s'est passé entre 1970 et 1975 et je juge injuste la position publique prise par les gens du MAALQ à l'endroit de Gérard Lamarche.

Je l'ai fait publiquement, je le refais ce soir, et, en autant que je suis concerné, il a la confiance du ministre des Affaires culturelles et notre programme de relance passe par un rôle important pour son institution et, également, pour les gens du MAALQ. Nous pensons qu'il y a moyen de rapprocher les parties. Nous avons besoin de tous ces partenaires pour réussir.

M. Goldbloom: M. le Président, je suis heureux d'entendre le ministre dire que M. Gérard Lamarche a sa confiance, parce qu'il la mérite.

Le Président (M. Blank): Mme le député de L'Acadie, vous avez une question?

Mme Lavoie-Roux: Deux petites questions. Elles seront courtes, si on répond rapidement. La semaine du patrimoine, quand sera-t-elle tenue? Est-ce qu'elle sera tenue durant l'année scolaire ou après l'année scolaire?

M. Vaugeois: Elle sera tenue durant l'année scolaire. Les dates qui ont été considérées sont celles du 21 au 27 octobre.

Mme Lavoie-Roux: Deuxième question. A l'automne qui vient?

M. Vaugeois: Oui.

Mme Lavoie-Roux: Deuxième question. Est-ce que vous-même ou votre sous-ministre avez des réactions à la place qui est faite aux arts dans le plan d'action du ministère de l'Education?

M. Vaugeois: Vous regardez mon sous-ministre, vous attendez une réponse de sa part.

Je vous promets d'être absolument bref. Je suis en pourparlers incessants avec mon collègue de l'Education et un des membres du cabinet de M. Morin sur la question de l'enseignement des arts et plus particulièrement de l'enseignement de la musique.

Mme Payette: Parce qu'elle semblait tomber dans la...

M. Vaugeois: "Incessants", qu'est-ce que cela veut dire, M. le sous-ministre? J'ai dit: "incessants". Oui.

Je voulais dire qui ne cessent pas, des pourparlers continuels.

Mme Lavoie-Roux: Oui, mais, très sérieusement, c'est que les arts, à ce moment-là, cela devient très large avec un temps extrêmement restreint. Plus de personnes...

M. Vaugeois: Je dois vous dire qu'on s'intéresse d'abord et avant tout à la formation professionnelle, étant donné évidemment notre mission historique, qui est celle d'assumer la responsabilité de la gestion des conservatoires de musique et d'art dramatique. Nous sommes conscients, par ailleurs, qu'il y a une "interface" entre la formation professionnelle et la formation générale. Nous n'avons pas de prétention à assumer une responsabilité directe au niveau de la formation générale, cela dépasse de toute évidence le cadre du mandat qui est confié aux Affaires culturelles...

Mme Lavoie-Roux: D'accord, mais vous êtes la conscience des arts.

M. Vaugeois: ... mais nous entendons bien être la conscience des arts, si vous me permettez de vous citer, d'une part. D'autre part, je note chez mes partenaires de l'Education davantage peut-être que l'an dernier où vous me posiez la question un vif intérêt pour écouter ce qu'on a à dire et, à titre peut-être d'expérience de collaboration, nous avons réussi à nous entendre avec le ministère de l'Education sur ce que j'appellerais la caution d'une formule nouvelle qui prendra forme à l'Université de Sherbrooke pour ce qui a trait à la formation universitaire et à la formation professionnelle à tous les niveaux. On compte que cette expérience contribuera à briser cette espèce de dilemme dans lequel on a toujours été enfermé à savoir que l'exclusivité des prétentions devait coller à l'exclusivité des ministères.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le sous-ministre.

Le Président (M. Blank): Merci. Je déclare les programmes 2. 3, 4 et 5 adoptés. Tous les crédits sont adoptés.

M. Le Moignan: Sans notre consentement.

Le Président (M. Blank): Oui, avec le consensus de la commission. Les crédits sont adoptés.

M. Vaugeois: J'ai oublié de répondre — je sais que c'est fini — à une de vos trois questions concernant l'OSM, la troisième quant aux postes qui seraient susceptibles d'être perdus par ceux qui les occupent. C'est impossible. L'entente que nous avons négociée avec l'OSM ne porte que sur les postes qui deviennent vacants et non pas sur l'ensemble des postes.

Fin de la séance à 22 h 55

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