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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 24 mai 1979 - Vol. 21 N° 95

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude du projet de loi no 2 - Loi constituant l'Institut québécois de recherche sur la culture


Journal des débats

 

Étude du projet de loi no 2

(Vingt heures quinze minutes)

Le Président (M. Boucher): À l'ordre, messieurs!

La commission des affaires culturelles est réunie pour étudier, article par article, le projet de loi no 2, Loi constituant l'Institut québécois de recherche sur la culture. Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau), M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Godin (Mercier), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier) qui remplace Mme Lavoie-Roux (L'Acadie); M. Le Moignan (Gaspé), M. Laurin (Bourget) qui remplace M. Vaugeois (Trois-Rivières).

Les intervenants sont: M. Beauséjour (Iberville), M. Bertrand (Vanier), M. Brochu (Richmond), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laplante (Bourassa), M. Morin (Sauvé), M. Samson (Rouyn-Noranda).

Comme rapporteur de la commission, M. le député de Deux-Montagnes, est-ce que vous acceptez cette tâche?

M. de Bellefeuille: À la condition que ce soit unanime, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): II y a consentement?

M. Goldbloom: Oui, il y a consentement, faute de mieux.

M. le Président, je regarde autour de la table et je demande le vote.

Le Président (M. Boucher): M. le député de D'Arcy McGee, vous allez vous mettre dans une position difficile.

Une voix: Alors, on rejette le projet de loi.

Le Président (M. Boucher): M. le ministre, est-ce que vous avez des remarques préliminaires?

M. Laurin: J'en ai tellement fait lors de la présentation en deuxième lecture et dans ma réplique que je pense que je peux m'en dispenser, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): Alors, je peux donner la parole à M. le député de D'Arcy McGee.

Remarques préliminaires M. Victor C. Goldbloom

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. Je voudrais effectivement faire des remarques préliminaires sur ce projet de loi. C'est un projet de loi qui ne manque pas d'importance, si nous regardons les diverses définitions qui sont données au mot "culture". Nous en trouvons qui sont extrêmement larges. Nous pouvons même dire que toute activité humaine qui n'est pas de nature absolument technique est du domaine de la culture.

Que l'on propose la constitution d'un organisme qui s'appellerait Institut de recherche sur la culture, c'est proposer la création d'une entité, d'un organisme qui devrait, en toute logique, toucher et affecter la vie de chaque citoyen du Québec.

Or, M. le Président, nous de ce côté-ci de la table, en ce qui concerne l'Opposition officielle, nous attachons une très grande importance à ce projet de loi. Nous nous disons: Faire de la recherche sur la culture, c'est une chose qui est normale, qui est désirable et, si l'on nous demandait de nous prononcer simplement sur le principe de créer un organisme qui s'occuperait de la recherche sur la culture, nous dirions oui sans la moindre hésitation. Mais un projet de loi comprend des modalités et, derrière les modalités, il y a une philosophie. La création d'un organisme n'est ni une bonne ni une mauvaise chose en elle-même; c'est un geste que pose un gouvernement qui veut situer cet organisme dans la structure administrative du Québec.

Vous savez, M. le Président, quand on regarde la définition du mot "institut" dans le dictionnaire, on trouve que cette définition n'est pas absolument précise à cet égard, mais on a nettement l'impression que le mot "institut" veut dire un organisme autonome. On parle, en France, de l'Institut; l'Institut, c'est une chose très importante en France, c'est composé de cinq académies. Les académies, dont la première a été fondée par Richelieu il y a plus de 300 ans, l'Académie française, sont composées de gens qui ne sont pas des fonctionnaires, qui ne sont pas à la remorque de l'État, qui ne sont pas engagés par l'État; ce sont des personnes, des citoyens qui ont une compétence dans un domaine donné et ces cinq académies sont clairement des organismes qui ne sont ni des émanations ni des prolongements du gouvernement.

M. le Président, c'est sur ce point que reposent nos objections à ce projet de loi. C'est donc dans ce sens que je dois, en faisant ces remarques préliminaires, indiquer au ministre que nous ne sommes pas opposés à la notion de recherche sur la culture. Nous ne sommes même pas opposés à la notion de la création d'un organisme qui se chargerait de la coordination de cette recherche, d'un organisme qui agirait comme centre d'information au sujet de la culture et de la recherche sur là culture. Là où nous ne sommes pas d'accord, c'est là où il s'agit d'un prolongement de l'appareil gouvernemental. Cela nous inquiète.

Notre inquiétude ne se situe pas seulement au niveau de l'autorité en question. Le gouvernement est nécessairement l'autorité primordiale et suprême dans un État comme le nôtre. Le gouvernement est quand même formé d'un parti politique qui a ses objectifs. Les êtres humains qui forment ce parti politique sont des personnes qui n'ont ni

plus ni moins de faiblesses que n'importe qui autour de cette table; mais puisque ce sont des êtres humains, ils ont des faiblesses. Une de ces faiblesses est sûrement celle de prendre ses objectifs politiques pour les objectifs de la collectivité.

On est élu — je ne veux pas faire un débat de nature politique, mais c'est un fait — à la majorité des sièges à l'Assemblée nationale, pas nécessairement à la majorité des suffrages exprimés. On a un mandat pour gouverner. On exerce ce mandat en exerçant en même temps sa conscience professionnelle en tant que député, en tant que ministre, en tant que personne formée dans l'une ou l'autre des disciplines que représente l'éventail des députés à l'Assemblée nationale. Mais, M. le Président, on a la responsabilité de représenter l'ensemble des Québécois, autant ceux qui ont voté pour les candidats du gouvernement que ceux qui ont voté pour les candidats d'autres formations politiques et l'on ne doit pas, à partir du moment où l'on obtient la majorité des sièges à l'Assemblée nationale, prendre les objectifs du parti pour les objectifs de la population, surtout quand on a été élu avec 41% des suffrages...

M. de Bellefeuille: 41,4%.

M. Goldbloom: 41,4%

Une voix: Oh, la virgule est disparue.

M. Goldbloom: ... laissant 58,6% qui ont voté pour d'autres formations.

J'ai dit, M. le Président, que ce n'est pas sur ce point-là que je veux insister. Je veux insister sur le fait que le gouvernement nous propose la création d'un organisme qui ferait de la recherche dans le domaine de la culture. M. le Président, le gouvernement ne peut quand même pas laisser croire aux députés de cette Assemblée nationale, à l'opinion publique qu'avant l'adoption éventuelle du projet de loi no 2, il n'y a pas eu de recherche sur la culture au Québec. Il y en a eu, et il y en aura eu parce que le projet de loi n'est pas encore adopté.

M. le Président, cela veut dire, ce fait veut dire qu'il y a actuellement, en ce moment où nous parlons, des Québécois qui poursuivent des projets de recherche dans le domaine culturel. Où sont ces Québécois? Ils sont notamment dans les universités et, M. le Président, je dois me poser une question. Nous créons un institut de recherche dans le domaine culturel, un institut qui, selon ce projet de loi, aura un conseil d'administration et, à ce conseil d'administration de neuf membres, trois seront obligatoirement des chercheurs de l'institut. M. le Président, si nous devons choisir trois chercheurs de l'institut pour les nommer membres du conseil d'administration de ce même institut, il faut croire qu'il y aura au moins trois et, en toute logique, beaucoup plus que cela, un nombre important de chercheurs qui seront identifiés comme chercheurs de l'institut et qui poursuivront leurs recherches au nom de l'institut.

M. le Président, si tel est le cas, si tel devient le cas avec l'adoption éventuelle de ce projet de loi, il faudra aller chercher ces chercheurs. Où est-ce que l'on pourra les trouver? La réponse saute aux yeux: c'est dans les universités. M. le Président, le projet de loi parle d'une façon imprécise des chercheurs de l'institut. Quand je dis que c'est d'une façon imprécise, je veux dire tout simplement que le nombre n'est pas précisé. Il est précisé que trois sur le nombre éventuel de chercheurs devront siéger au conseil d'administration de l'institut. Mais trois sur combien? Cela n'est pas précisé.

Si l'institut, jouissant d'un appui important de la part du gouvernement sur le plan financier, va chercher de nombreuses personnes compétentes en ce domaine et si par le fait même l'institut, donc le gouvernement, vide les universités, nous ne serons pas plus avancés. Nous ferons faire de la recherche dans le domaine culturel, mais nous aurons tout simplement changé cette recherche de lieu. Nous aurons pris des gens qui font ces recherches actuellement dans un milieu et dans un contexte universitaire et nous les aurons transportés dans un autre milieu, milieu qui s'appellera Institut de recherche sur la culture. (20 h 30)

Je soutiens respectueusement, M. le Président, qu'un milieu universitaire est quand même un milieu spécial. Le fait pour un chercheur, dans n'importe quel domaine, de pouvoir côtoyer quotidiennement des gens qui pursuivent des recherches, font de l'enseignement et ont de l'expérience dans d'autres domaines du savoir, c'est un avantage qui ne peut pas se compenser par le fait d'être dans une tour d'ivoire avec seulement d'autres chercheurs dans le même domaine. Il s'agit ici, en l'occurrence, de la culture. C'est un peu comme les personnes qui, étant intéressées à un certain domaine d'activité et se retrouvant ensemble à une réception, à un événement social, se regroupent dans un coin et ne parlent que de leurs activités professionnelles. S'il y a un groupe qui fait preuve de cette caractéristique, c'est celui auquel le ministre et moi appartenons. Combien de fois ai-je vu des réceptions où les médecins se sont regroupés dans un coin pour parler médecine, laissant leurs épouses dans un autre coin pour parler d'autres choses et laissant d'autres personnes dans d'autres coins pour parler d'autres choses? Mais je dis en toute candeur: Ce n'est pas la meilleure façon d'élargir les horizons. Il me semblerait plus souhaitable que les chercheurs de n'importe quel domaine soient obligés de côtoyer d'autres personnes, formées dans d'autres disciplines, capables de fournir d'autres perspectives de la vie, et notamment en ce qui concerne la culture.

M. le Président, je dois me demander dans quelle mesure les universités du Québec ont été consultées avant la rédaction de ce projet de loi. Sont-elles d'accord? Le ministre nous dira oui. C'est la tendance, chez les ministres, j'ai été ministre moi-même, quand on est mis au défi, on dit toujours: Oui, le milieu concerné est d'accord. M.

le Président, ayant subi assez souvent les flèches, les attaques des collègues qui siégeaient de ce côté-ci de la table et qui sont maintenant du côté ministériel et qui n'ont jamais voulu accepter ma parole que le milieu était d'accord, je suis certain qu'ils comprendront que je ne sois pas d'accord, que je n'accepte pas facilement cette déclaration que oui, on n'a pas besoin d'entendre les intéressés, moi, le ministre, je sais que tout le monde est d'accord.

M. le Président, il y a une chose qu'il faut dire, c'est que quand on demande à des gens d'être d'accord, leur réponse découle en bonne mesure de la façon dont la question est posée. Ici la question a été psée par un gouvernement qui présente un projet de loi, d'une façon à obtenir une réponse favorable. C'est normal, c'est humain, sauf que ces mêmes interlocuteurs, interrogés par d'autres personnes qui n'ont pas comme but primordial de faire appuyer et adopter un projet de loi, pourraient réagir différemment.

Dans le cas des universités, pour arriver au cas qui nous préoccupe, le ministre nous dit: Les universités, toutes les sept, ont été consultées, elles sont pleinement d'accord. Le ministre leur a-t-il demandé si elles sont prêtes à perdre des membres de leur personnel? Sont-elles prêtes à voir les gens qui font de la recherche actuellement dans le domaine culturel et qui font la renommée de ces mêmes universités, partir et devenir des chercheurs de l'institut? Cette question a-t-elle été posée d'une façon claire et objective?

M. le Président, connaissant le ministre, je sais qu'il va me dire oui, cela a été réglé. Mais le connaissant aussi pour un homme bien analysé, bien équilibré, je sais qu'il comprendra que je n'accepte pas cette déclaration toute simple et que je demande — et je constate que j'aurais dû être plus court dans mes remarques et les terminer avant l'arrivée du député du Lac-Saint-Jean et ainsi demander le vote — au nom de l'Opposition officielle, que cette commission obtienne de l'Assemblée nationale l'autorisation, si elle en a besoin, pour entendre les intéressés, pour convoquer ici ceux qui depuis longtemps s'intéressent à la culture, poursuivent des recherches dans le domaine de la culture.

Motion pour convoquer le Conseil des universités

Très précisément, M. le Président, je pense que nous devons collectivement, d'un côté comme de l'autre de cette table, nous préoccuper de l'avenir de nos universités. Il y a un organisme qui a été créé il y a longtemps, qui est chargé de la santé collective des universités, qui est chargé d'indiquer, en quelque sorte, une politique générale et globale pour les universités du Québec et je voudrais proposer, M. le Président, sous forme d'une motion: Que cette commission invite le Conseil des universités à se faire entendre — et je précise une date, M. le Président — le mardi 5 juin 1979, à 15 heures, devant cette commission.

Ce que j'ai exposé avant la formulation de cette motion précise suffit, je crois, comme justification. Je n'ai pas besoin de donner d'autres explications. Mais, M. le Président, je veux dire tout simplement, en terminant mon intervention, que les universités risquent de se retrouver perdantes avec l'établissement de ce Conseil de recherche sur la culture, risquent de perdre du personnel spécialisé et compétent. C'est pour cette raison que nous croyons qu'avant d'accepter l'adoption de ce projet de loi — tout le monde est pour la culture, tout le monde est pour la recherche sur la culture — mais avant d'accepter les modalités de ce projet de loi, nous devrions entendre le Conseil des universités et nous devrions être en mesure de poser des questions aux porte-parole du Conseil des universités.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de D'Arcy McGee. La motion se lirait comme suit: "Que cette commission invite le Conseil des universités à se faire entendre le mardi 5 juin 1979, à 15 heures, devant cette commission."

Ce genre de motion est recevable, au départ, étant donné qu'il s'agit d'un voeu pieux, étant donné qu'on invite tout simplement; des commissions ont le droit de faire des voeux pieux. Alors, je présume que nous sommes en deuxième lecture, M. le député de D'Arcy McGee, et le mandat de la commission est d'étudier article par article le projet de loi no 2 et non pas de convoquer les intéressés. De toute façon, une invitation peut se faire au moment où la commission délibère; je pense donc que la motion est recevable prima facie.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président, j'invoque respectueusement le règlement. Vous avez dit qu'il s'agit d'un voeu pieux. Je vous ferai remarquer que cette commission pourrait, à n'importe quel moment, ajourner ses travaux, faire rapport à la Chambre, demander à la Chambre un mandat additionnel, notamment le mandat d'émettre des invitations et d'entendre des intéressés, cela s'est déjà vu.

M. le Président, j'attire votre attention sur l'article 154...

Le Président (M. Boucher): Est-ce que vous discutez sur la recevabilité? Je l'ai reçue.

M. Goldbloom: Non, mais, M. le Président, je m'excuse...

Le Président (M. Boucher): Si vous voulez discuter sur le fond de la motion, vous pouvez y aller, elle est reçue.

M. Goldbloom: D'accord, M. le Président. Je pense que la formule traditionnelle est de vous demander une directive.

M. de Bellefeuille: Qu'est-ce que vous avez contre la piété?

Le Président (M. Boucher): Si c'est l'étiquette "pieux" que vous n'aimez pas, on va la retirer; simplement un voeu.

M. Goldbloom: Dans ce cas, M. le Président, je n'ai pas d'autres remarques à vous offrir.

Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le ministre.

M. Laurin: M. le Président, malgré toute l'admiration que j'ai pour les propos que vient de nous tenir le député de D'Arcy McGee, je me vois dans la douleureuse obligation de ne pas souscrire à son voeu.

Évidemment, je me retiens de lui donner toutes les assurances qu'il nous demande, puisqu'il nous dit à l'avance qu'il ne les accepterait pas, y voyant simplement le jeu de la politique. Je ne ferai donc pas l'effort d'essayer de le rassurer puisque, d'avance, il me dit que ce serait inutile.

Cependant, M. le Président, la raison fondamentale pour laquelle il nous paraît impossible de recevoir ce voeu, c'est que la réponse à ses doutes ne vient pas, au fond, d'un parti politique qui forme actuellement le gouvernement, mais vient même de tous les efforts antécédents qui ont précédé la présentation de ce projet de loi, c'est-à-dire le rapport Frégault. On se souvient que la commission chargée d'étudier l'opportunité de créer un institut d'histoire qui, par la suite, dans le rapport Frégault, est devenu un Institut de recherche sur la culture, a été confiée à ce groupe de travail par le gouvernement antérieur, avec toutes les raisons que l'on peut lire dans le livre vert intitulé: "Pour l'évolution de la politique culturelle". (20 h 45)

Le groupe de travail dirigé par M. Frégault a pris connaissance du mandat du ministre et, pour le bien remplir, il a constitué des groupes de travail et il a procédé à une consultation très élaborée. Je pense que tous les groupes auxquels peut penser le député de D'Arcy McGee ont été approchés quant aux idées qu'ils pouvaient avoir sur la création éventuelle d'un institut d'histoire et de civilisation ou d'un institut de recherche sur la culture. Ce groupe a travaillé durant de longs mois. Il a commis un rapport très long, très substantiel, très étoffé et, dans la conclusion, il se prononçait pour la création d'un institut de recherche sur la culture. Donc, toutes les assurances que recherche le député de D'Arcy McGee, il peut les trouver, au fond, dans la conscience avec laquelle le groupe de travail Frégault a accompli son travail, dans les procédures, les modalités que ce groupe a choisies pour s'acquitter de son mandat, dans les mémoires que ce groupe de travail a entendus, dans l'analyse qu'il en a faite et dans les conclusions auxquelles il en est arrivé après mûre réflexion.

Il me paraît donc que ce que demande le député de D'Arcy McGee a déjà été accompli par des personnes autorisées, puisqu'on sait que les membres du groupe de travail Frégault ont été choisis justement dans les universités. Ce travail a aussi été accompli en raison de la façon avec laquelle ce groupe de travail a mené ses activités et ses travaux. Il demande donc quelque chose qui a déjà été accompli. Je ne vois donc pas la raison pour laquelle il serait important de revenir sur un travail qui a été bien fait. Sur les conclusions d'un rapport qui, lorsqu'il a été rendu public, a reçu les éloges unanimes de tous les milieux intéressés. Donc, en conclusion, je me vois obligé de ne pas retenir ce voeu de l'Opposition officielle.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Gaspé.

M. Le Moignan: J'ai pris la parole à l'Assemblée nationale — c'était le 4 avril, je crois — lorsqu'on a proposé de reporter d'un mois l'étude de la loi 2; je pense que c'est plutôt le 2 mai que j'aurais parlé. À ce moment, je m'étais opposé pour certaines raisons que je n'ai pas à reprendre, mais j'avais insisté sur le fait que cet institut devait être autonome, qu'il devait être aussi indépendant. Au cours de l'étude article par article de ce projet de loi, nous avons l'intention, nous de l'Union Nationale, d'apporter certains amendements. Parmi ces amendements, évidemment, on mentionne certains organismes comme les universités ou d'autres institutions qui, normalement, devraient être appelées à collaborer avec l'Institut québécois de recherche sur la culture.

Évidemment, j'englobe, dans mes remarques préliminaires — comme l'a fait le député de D'Arcy McGee, je veux être très bref sur cela — l'idée que nous voulons... Et je pense bien que l'intention qui a présidé à la création de cet institut, si on remonte au rapport Frégault et à toutes les recherches de l'époque, c'est qu'on voulait nous donner une loi démocratique, j'imagine, devant permettre à toutes les institutions de participer. Je voyais, à ce moment, le Conseil des universités; en d'autres termes, tous les milieux qui sont impliqués dans la recherche universitaire, la recherche culturelle, quel que soit le domaine. C'était de permettre à tous ces organismes, ces groupes, à tous les chercheurs de pouvoir s'exprimer de façon assez étroite, assez intime. Ce que nous désirons, c'est une loi progressive, une loi qui ne freine pas l'expression des milieux de recherche.

Quand on parle des fonctions et des pouvoirs de l'institut, je pense qu'on ne peut pas oublier là-dedans les universités, les arts, l'histoire; en d'autres termes, tous les secteurs qui sont concernés par la recherche culturelle. Je comprends que le député de D'Arcy McGee ne demande pas de reporter cette fois-ci la loi, mais il demande que notre commission invite le Conseil des universités à se faire entendre et donne une date très précise, le mardi 5 juin 1979. Je crois que c'est très important et, d'ailleurs, le ministre ne semble pas souscrire à cette recherche. Mais si on considère simplement l'aspect démocratique de la motion, je crois que c'est très important.

Maintenant, une question à se poser: Est-ce que le Conseil des universités va nous apporter un

éclairage et des lumières? Quand on s'inquiète à savoir si on va vider les universités avec ce Conseil de la recherche, je ne le crois pas. Je pense qu'il y aura une collaboration à établir entre l'Institut québécois de recherche sur la culture et tous les autres milieux quels qu'ils soient, que ce soit la recherche dans les compagnies, la recherche universitaire, la recherche dans ce vaste monde que comportent ces simples mots: "culture québécoise". On l'a déjà expliqué. Je n'ai pas l'intention d'y revenir, je veux simplement terminer ces brèves remarques. Si la commission accepte qu'on invite le Conseil des universités, tant mieux. Je suis prêt à souscrire aussi à ce voeu.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Ce qui me surprend le plus dans cette loi, c'est la mainmise qu'aura le gouvernement sur cet Institut de recherche. On voit que les directeurs seront nommés par le gouvernement. La direction sera formée de neuf membres dont cinq nommés par le gouvernement, après avoir demandé l'avis des milieux intéressés. On voit aussi que le président est nommé d'autorité par le gouvernement, que le directeur sera aussi nommé par le gouvernement. Dans les notes explicatives, on nous dit: "Le projet de loi prévoit de plus que, dans la poursuite de ses objets, l'institut doit exécuter tout mandat spécifique que lui confie le ministre chargé de l'application de la loi, avec l'approbation du gouvernement."

Il me semble absolument évident que si le gouvernement veut abuser de son autorité, tout dans la loi le lui permet. Il me semble que dans un moment aussi important dans l'évolution politique...

M. Godin: M. le Président, question de pertinence ou de directive. Il est question d'inviter le Conseil des universités à se faire entendre et non pas de parler sur le fond même du projet de loi dont parle, bride abattue...

Le Président (M. Boucher): J'écoutais le député...

M. Godin: ... visière levée, comme d'habitude, notre collègue, M. Saint-Germain, de Saint...

M. Goldbloom: Jacques-Cartier.

M. Godin: Jacques-Cartier. Merci monsieur. La motion est très précise dans sa formulation même et...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mercier, j'écoutais le député de Jacques-Cartier et je crois qu'il va y arriver.

M. Brassard: Oui, mais il sait lire, par exemple.

M. Lalonde: Est-ce qu'il a lu la loi?

M. Brassard: II a lu l'amendement. M.Saint-Germain: Alors, monsieur...

M. Godin: Avez-vous la parole, vous, M. le député de Marguerite-Bourgeoys?

M. Saint-Germain: M. le Président... M. Lalonde: ...

M. Godin: Avez-vous la parole, vous? Avez-vous l'autorisation du président pour prendre la parole ici ce soir?

M. Lalonde: Vous n'auriez peut-être pas dû la prendre.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît! S'il vous plaît!

M. Godin: Moi, j'ai suivi les règles qui gouvernent les assemblées polies, courtoises et démocratiques, ce que vous n'avez pas fait.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Jacques-Cartier, vous y arrivez sur la motion?

M. Saint-Germain: M. le Président, je voudrais parler sur la...

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Naturellement, le député de Mercier, qui vient à peine de se joindre à nous, n'a pas saisi la pertinence des propos du député de Jacques-Cartier. Son inquiétude, qui est partagée par beaucoup de membres de cette commission entre autres, c'est que, vu l'interventionnisme gouvernemental inscrit dans la loi, nous, membres de cette commission, devons nous inquiéter et élargir de plus en plus, le plus possible, l'éventail des consultations que cette commission pourrait faire avant d'adopter article par article ce projet de loi.

Une des inquiétudes, justement, du député de Jacques-Cartier — il est en train de l'exprimer — c'est la dépendance de cet institut du gouvernement actuellement. C'était ça qu'il était en train de décrire. Maintenant, le député de Mercier, pour des raisons que j'ignore, n'a pas réussi encore à comprendre que ce qu'on veut, c'est un institut autonome.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, j'ai donné la parole au député de Jacques-Cartier et j'attendais qu'il exprime ses opinions concernant la motion à partir du début de son intervention. M. le député de Jacques-Cartier.

M. Saint-Germain: Alors, lorsqu'on m'a coupé la parole, M. le Président, j'allais dire que dans la

période qu'on vit présentement, c'est-à-dire cette évolution politique rapide de la province et du pays, où on a un gouvernement qui pousse au nationalisme et à l'extrême, il me semblerait et je serais extrêmement surpris que le Conseil des universités approuve une telle loi. Les universités sont très sensibles concernant leur indépendance au point de vue pédagogique sur toutes les recherches qu'elles peuvent faire. Je crois pertinemment, que leur conseil aurait des choses très intéressantes à dire aux membres de cette commission et à la population, surtout, M. le Président, lorsqu'il y a trop de députés, comme le député de Mercier, qui, à tout bout de champ, ne veulent pas entendre les membres de l'Opposition et qu'on essaie constamment de leur couper la parole, parce qu'il y a trop de députés extrémistes comme le député de Mercier. C'est pour ça que ce serait important d'entendre des gens libres à notre commission, des gens indépendants d'esprit...

M. Godin: M. le Président, au nom de l'extrémisme, je voudrais défendre...

M. Saint-Germain: ...qui pourraient nous dire s'ils approuvent un tel projet de loi et nous faire ressortir les faiblesses.

M. de Bellefeuille: Venant de lui, c'est un compliment.

M. Godin: Les extrémistes seraient sûrement très vexés de savoir que je suis classé comme extrémiste. C'est faire injure à l'extrémisme que de me classer parmi ses membres.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le député de Mercier.

M. Saint-Germain: À titre de libéral, M. le Président, lorsqu'on essaie à tout bout de champ de couper la parole à quelqu'un qui ne pense pas comme nous...

M. de Bellefeuille:... extrême libéral.

M. Saint-Germain: ...je crois qu'il y a les éléments...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Jacques-Cartier, je vous avais donné la parole et je vous autorise à continuer, mais disons que l'incident est clos pour la question de l'intervention du député de Mercier.

M. Saint-Germain: Vous savez, M. le Président, s'il essaie de m'empêcher de dire ce que je veux dire, il n'est pas assez important dans cette province pour m'en empêcher, premièrement...

M. Godin: II y a des règles élémentaires... M. Saint-Germain: Bien, suivez-les.

M. Godin: La pertinence est une règle élémentaire ici.

M. Saint-Germain: Je suis ici ce soir et la règle élémentaire veut que j'aie le droit de dire ce que je veux dire. C'est ce que je fais, M. le Président.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Jacques-Cartier, je vous ai donné la parole, alors utilisez-la pour la question de la motion, s'il vous plaît.

M. Saint-Germain: Alors, voilà, M. le Président, grosso modo ce que j'avais à dire. Ce gouvernement en plus a cette méchante habitude de faire ses consultations sans la présence des membres de l'Opposition et des corps intermédiaires et de ceux qui auraient quelque chose à nous dire dans les champs d'activités où ils oeuvrent. C'est bien beau croire les ministres sur parole, ils viennent nous répéter à tout bout de champ qu'ils ont consulté, que les milieux intéressés sont unanimes à approuver tel ou tel principe ou tel ou tel article d'une loi, mais je crois que pour un gouvernement qui se voulait transparent, les consultations doivent être publiques et aller beaucoup plus loin que ce que le ministre responsable de cette loi a fait. Personnellement, j'aurais bien aimé être témoin des représentations qu'on a faites au ministre et j'aurais bien aimé aussi connaître les noms de ceux qui les ont faites, parce que je suis absolument certain que lorsqu'on fait des consultations sur invitation comme ça, il y a bien des gens intéressés à un tel projet de loi qui n'ont pu se faire entendre, qui ont certainement des choses intéressantes à nous dire.

Alors, je crois que la motion du député de D'Arcy McGee est dans l'intérêt de nous tous.

Le Président (M. Boucher): Merci M. le député de Jacques-Cartier. M. le député de Deux-Montagnes. (21 heures)

M. de Bellefeuille: M. le Président, la motion que nous a présentée le député de D'Arcy McGee aurait pour effet de retarder peut-être le processus d'adoption de cette loi. Elle est donc, en ce sens-là, dilatoire. En employant ce mot-là, je ne veux pas prêter d'intention à l'auteur de la motion, mais elle aurait un effet dilatoire. Le député de D'Arcy McGee nous a parlé comme si nous avions les siècles devant nous, parce qu'il a fait allusion aux siècles qui sont derrière nous. Il a fait remonter les mobiles qui l'ont poussé à présenter cette motion jusqu'à Richelieu, qui fonda l'Académie française.

J'avoue, M. le Président, que je n'ai pas très bien compris comment cette allusion pourrait fonder l'affirmation d'une volonté d'assurer l'autonomie de cet institut par rapport au gouvernement. Est-ce que le député veut nous donner à entendre qu'au moment où elle a été fondée, l'Académie française était déjà autonome par rapport au cardinal Richelieu? Cela me paraîtrait étonnant. J'ai l'impression que le prestige de l'Académie française est venu avec le temps, que le prestige de l'Académie française, c'est une affaire d'autorité morale, que ça ne se fait pas tout seul, que ça ne dépend pas vraiment de la loi

constituante, que l'autonomie, comme d'ailleurs la souveraineté, c'est une chose qu'il faut assumer, et je pense que nous pouvons faire confiance aux personnes qui composeront cet institut pour affirmer, avec le temps et le plus vite possible, leur autonomie.

Cette motion, qui aurait un effet dilatoire, il faut la rejeter, je pense, parce que nous sommes pressés à plusieurs égards. Nous, de l'Assemblée nationale, sommes pressés d'adopter le plus rapidement possible les lois qui sont inscrites à notre feuilleton, afin que ça avance, que ça marche. Nous sommes pressés en un autre sens aussi, parce que, justement, les recommandations nombreuses venant du milieu québécois et dont ce projet de loi est l'aboutissement font état de certaines urgences culturelles. Dans les milieux où on se préoccupe de l'état de la culture au Québec, on parle, comme, notamment, dans le rapport Frégault, auquel le ministre a fait allusion, d'urgences culturelles.

Il y a effectivement urgence à mettre cet institut en marche et ce n'est pas avec des motions comme celle-là qu'on va répondre à ce besoin qui s'exprime dans les milieux préoccupés de la culture au Québec. Par ailleurs, les consultations que le député de D'Arcy McGee voudrait faire sont des consultations qui ont déjà été faites, peut-être pas jusqu'à épuisement, parce que des consultations, si on voulait, on pourrait en faire pendant des décennies et ne jamais agir, mais je ne pense pas que ce soit ça que la population du Québec attende de nous, de l'Opposition comme du côté ministériel. Et parmi les gens qui ont été consultés, justement, je relève le nom de M. Germain Gauthier, président du Conseil des universités, Conseil des universités que le député de D'Arcy McGee voudrait maintenant inviter devant la commission, alors que ce conseil, par la voix de son président, a répondu aux appels de consultation qui ont mené à la rédaction du rapport Frégault.

Il y a une longue liste des personnes qui ont été consultées pour l'élaboration de ce rapport. Je vais vous en épargner la lecture, mais il y a là des gens venus de nombreuses disciplines, des gens dont l'autorité morale, technique et scientifique est reconnue généralement au Québec. La période des consultations est passée, c'est une chose faite. Il s'agit maintenant pour l'Assemblée nationale de passer aux actes et je ne prétendrai pas que cette loi soit parfaite, aucune loi n'est parfaite. Cette loi correspond à la situation actuelle. Nous allons, grâce à cette loi, mettre sur pied cet Institut de la culture, institut auquel il faudra faire confiance pour qu'il affirme son autorité.

Il n'y a évidemment pas, de la part du gouvernement, et je voudrais chercher à convaincre — je ne sais pas si j'y arriverai — les députés de Jacques-Cartier et de Marguerite-Bourgeoys qu'il n'y a aucune volonté interventionniste de la part du gouvernement; il n'y a aucune volonté de mainmise de la part du gouvernement. Il y a au contraire, de la part du gouvernement, un très vif désir de permettre à cet institut de naître et de voler de ses propres ailes, d'entreprendre les travaux qui, selon les affirmations venant des milieux préoccupés par les questions culturelles, sont des travaux urgents.

Je propose que nous rejetions cette motion afin d'agir le plus rapidement possible.

M. Godin: M. le Président...

Le Président (M. Boucher): M. le député de Mercier.

M. Lalonde: Je m'excuse, je ne pensais pas que vous aviez demandé la parole.

M. Godin: Sur le fond de la motion elle-même, s'il s'agissait d'étudier le livre blanc sur la politique scientifique du gouvernement, ou le livre vert, M. le ministre me corrigera, je comprendrais très bien le sens de la proposition du député de D'Arcy McGee, mon collègue qui est aussi soucieux du développement de la culture que nous pouvons l'être de ce côté-ci de la Chambre. Je souhaite qu'il soit moins seul dans son groupe. Je présume que le nouveau député de Jean-Talon pourra donner un coup de main à cet égard.

M. Rivest: À quel effet?

M. Godin: Celui d'avoir à coeur le développement de la culture québécoise.

M. Goldbloom: Vous ne diviserez pas et vous ne régnerez pas longtemps.

M. Rivest: Je vais attendre le député de Mercier avant de me former une opinion.

M. Godin: Les universités elles-mêmes et le conseil qui les regroupe sont dotés par l'État de fonds de recherche sur la culture, recherche pure, recherche appliquée, et il n'appartient pas à l'État, d'aucune manière, d'intervenir dans l'affectation de ces fonds. Chaque institut de recherche dans les universités québécoises en dispose à son gré et même si, en tant que citoyen, on peut se poser des questions au sujet de certaines recherches que font les universités, non pas quant à leur valeur, mais quant à leur applicabilité à court terme ou à moyen terme pour régler certains problèmes plus immédiats de la culture québécoise, il ne nous appartient pas d'intervenir dans ce secteur, d'aucune manière. Il n'en est pas question d'ailleurs.

Par ailleurs, il manquait à cet éventail de moyens qui existent au service de la population du Québec, en partie dans les universités... Je pense entre autres au Centre de recherche sur la culture canadienne-française de l'Université McGill, qui est abondamment doté par l'État québécois, je pense à d'autres centres de recherche culturelle qui existent au Québec, le Centre ethnographique, entre autres, de l'Université du Québec à Trois-Rivières. Ces gens poursuivent des objectifs de recherche qui peuvent coïncider à l'occasion avec les objec-

tifs d'un gouvernement ou d'un État, quel qu'il soit. Mais il est apparu au gouvernement qu'il y avait un manque dans cet éventail de moyens dont la communauté québécoise dispose. Les recommandations visant à la création d'un tel institut ne sont pas d'engeance ou de création ou de gésine péquiste, elles existaient avant. Les ministres des Affaires culturelles que j'ai eu le plaisir de connaître avant ceux que nous avons maintenant parta-geaint ces mêmes préoccupations. C'est de leur réflexion qu'est sorti ce projet de loi.

La réflexion est simple, c'est que l'État veut savoir certaines choses relatives à la culture québécoise. Pour le savoir, l'État, qui ne peut pas intervenir dans les programmes de recherche des universités, ne peut compter que sur lui-même, en quelque sorte, que sur son propre institut pour donner des commandes précises à un organisme chargé de les exécuter. Non pas que tout le travail de cet institut relèvera d'une commande ferme de l'État, mais l'État veut se doter de ce moyen supplémentaire en vue de savoir un peu mieux, de connaître un peu mieux de quoi est faite la culture québécoise, de quoi elle sera faite dans l'avenir et comment le support de l'État, d'une façon ou d'une autre, soit par le moyen de subventions ou par d'autres moyens législatifs, par quel moyen l'État peut parvenir à en savoir un peu plus et ainsi à mieux orienter ses politiques dont, en fin de compte, les contribuables sont non seulement les consommateurs, mais surtout ceux qui paient, les cochons de payants, comme on dit dans certains journaux, dans certains articles.

Je me fais ici le défenseur des cochons de payants, qui veulent savoir, et moi, en tant que cochon de payant, je veux savoir aussi comment sont dépensés les fonds que l'État consacre à la culture. Le meilleur moyen de le savoir, c'est d'avoir un instrument d'analyse qui ne peut nous être donné que par cet institut. C'est sur le fond de la motion.

Maintenant, sur les craintes qu'expriment les députés de Jacques-Cartier et de Marguerite-Bourgeoys et qu'ils souhaitent voir élucidées par l'apport de mémoire du Conseil des universités, qui d'ailleurs, n'a pas demandé à être entendu ici, je ne sais pas par quel processus une telle motion aboutit ici, sinon la volonté du député de D'Arcy McGee de faire entendre une voix critique, face à une telle loi. Si la critique porte sur l'interventionnisme de l'État dans le domaine culturel, je ne pense pas que le Conseil des universités puisse nous être d'un grand recours là-dessus.

Je m'explique. La définition d'un Institut de la culture du Québec et surtout la façon dont il va fonctionner, s'inspire directement des exemples qui existent déjà dans nos statuts et auxquels sûrement, en tant que conseiller privilégié des deux premiers ministres libéraux qui ont précédé le régime actuel, M. Jean-Claude Rivest a sûrement travaillé à la confection des statuts qui régissent, par exemple, l'Institut québécois du cinéma, qui est cité en exemple dans le milieu. Comme vous le savez très bien, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il n'y a personne, dans le milieu du cinéma, qui conteste l'Institut du cinéma, malgré que, à première vue, si l'on regarde le fonctionnement de cet institut, on se rend compte que l'intervention gouvernementale, ou ministérielle, ou de l'État, dans son fonctionnement, va infiniment plus loin que ce qui apparaît dans ce nouveau statut qui serait éventuellement adopté, qui régira l'Institut québécois de la culture.

C'est, rappelons-le, cet Institut québécois du cinéma qui, de par sa loi, définit ce qu'est un film québécois. C'est l'institut qui définit cela. Quand on parle de l'État définisseur de la culture, l'exemple vient de loin, d'une part. Et je rappelle que la critique contre l'institut est muette depuis quelques années que je suis les activités dans ce secteur.

Deuxièmement, comme dans notre statut, les groupes constituants de ce milieu ont été consultés pour aider le ministre à nommer les membres de l'institut, sauf que la loi créant l'Institut du cinéma va beaucoup plus loin que celle-ci, puisqu'elle dit qu'en cours de route, dans une même année, le ministre peut remettre en question la représentativité du milieu consulté. Et si ce milieu ne lui apparaît plus à lui, ministre, donc l'État, comme étant représentatif, il peut changer d'équipage en cours de route. Il peut changer d'attelage au moment où il traverse le gué, comme on dit. Cela va beaucoup plus loin comme exemple, l'intervention du ministre, donc intervention politique, que la loi no 2 le propose. Et je répète, qu'il n'y a pas de critique, malgré ces outrances ou ces garanties supplémentaires, il n'y a pas de critique qui est faite dans le milieu, à l'égard de cet institut.

Je rappellerai aussi que c'est également le ministre qui nomme ou qui nommait, dans le cas de l'Institut québécois du cinéma, les gens qui en feraient partie, tout comme selon le projet de loi no 2.

Ce qui m'étonne de la part de l'Opposition libérale à l'égard de ces inquiétudes et à l'égard des garanties qu'elle veut se donner en ayant cherché une espèce de chèque en blanc ou de garantie supplémentaire auprès d'un Conseil des universités qui n'a même pas demandé à être consulté, c'est que nous ne faisons que nous situer dans une sorte de tradition qu'elle a, en quelque sorte, entérinée, avec l'Institut québécois du cinéma. (21 h 15)

Ce qui m'étonne c'est que ce qui leur semblait normal pendant leur règne leur semble anormal maintenant, parce que nous ne partagerions pas les mêmes objectifs politiques. C'est vrai que nous ne partageons pas les mêmes objectifs politiques, sauf que, au-delà de ces objectifs politiques, au-delà des moyens dont nous voulons nous doter, le résultat, au fond, est le même. Faisons confiance à l'Opposition libérale pour croire que, bien qu'elle tienne toujours à laisser aux conservateurs maintenant la moitié du destin du Québec à Ottawa, nous partageons probablement le même objectif qui est de donner aux Québécois et au Québec les meilleurs instruments possible pour que le Québec se développe. Le seul point où on diverge au

fond, c'est sur les moyens d'assurer ce développement le plus efficacement possible et le plus profondément possible.

C'est la raison pour laquelle je dois dire qu'une fois de plus je reprocherai aux libéraux ce que le général de Gaulle reprochait à certains Français: "Ils reviennent à leur vomi", c'est leur principal défaut. Je cite le général de Gaulle, M. le député de Jacques-Cartier, ce n'est pas moi qui ai inventé ça. Parce que vous avez adopté un modèle... Je vois le député de Jean-Talon qui veut bien vérifier si je dis la vérité, si mes citations sont exactes à l'égard de la Loi du cinéma. Eh bien! J'ai vérifié avant de venir ici, M. le député de Jean-Talon, vous verrez que je suis probablement en deçà de la réalité de la loi de l'institut.

En d'autres termes et pour revenir, en terminant, sur la motion proprement dite et pour rester dans la pertinence étroite de ce débat, je pense que ce que le Conseil des universités pourrait nous dire, nous l'avons déjà entendu abondamment de l'Opposition, nous en avons pris bonne note et le fonctionnement et la composition même de l'institut, qui va beaucoup moins loin, je le répète, que l'institut précédent créé par eux et qui s'occupe du cinéma, offrent plus de garanties que l'autre qui est libéral aux citoyens, contribuables et consommateurs de culture. Les mandats qu'il exécutera, de son propre chef ou sur l'instance du gouvernement, seront dans le meilleur intérêt du développement de la culture québécoise. Merci beaucoup.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Mercier. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je voudrais invoquer une question de règlement. Dans l'Institut du cinéma, c'est exact et c'est pour ça que...

M. de Bellefeuille: Quel article du règlement?

M. Rivest: Je ne sais trop, je ne connais pas encore beaucoup votre règlement.

Le Président (M. Boucher): L'article 96; vous voulez...

M. Rivest: Je n'ai pas encore pris tous vos travers de parlementaires, j'arrive.

M. Godin: C'est le règlement de M. Lavoie, c'est le règlement de votre collègue de Laval, mon cher.

Le Président (M. Boucher): On va régler pour 96.

M. Rivest: Je n'ai pas d'objection, mais ce n'est pas de 32 dont je veux parler, mais bien de 55.

En écoutant le député de Mercier, je me rappelais — parce qu'effectivement j'ai participé à de nombreuses rencontres avec les gens du cinéma et c'est un milieu extrêmement compliqué: les pro- ducteurs, les créateurs, etc. — que c'est exact que le ministre nomme les membres de l'institut, mais à partir d'une liste — c'est ce que je voulais vérifier — qui lui est donnée par chacun des secteurs représentatifs de l'industrie.

M. Lalonde: Ah, il y a une liste!

M. Rivest: II y a une différence considérable. Il y a une liste qui lui est fournie par le milieu.

M. Godin: Puis-je poser une question au collègue de Jean-Talon? Est-ce qu'il est tenu de s'en tenir à cette liste? Pas du tout.

M. Rivest: Le ministre choisit, à même les noms qui lui sont soumis, pour chaque secteur, un nom qu'il recommande au lieutenant-gouverneur.

M. Godin: Tournez la page et lisez les secteurs.

M. Rivest: Oui, ça c'est si l'association... M. Godin: Là où il est dit que le ministre...

M. Rivest: Oui, mais c'est en raison de la nature particulière de l'industrie et je me rappelle très bien, c'est si l'association ne s'entend pas...

M. Godin: Laissez-moi terminer.

M. Rivest:... à ce moment le ministre..., mais il y a toute une différence avec un article comme l'article 5 de la loi ici.

M. Godin: Lisez plus avant, M. le député de Jean-Talon, et vous verrez que le ministre peut modifier, peut changer les milieux qu'il consulte en cours de route.

M. Rivest: Oui, là-dessus, vous aviez raison.

M. Godin: II peut, par conséquent, se servir d'un pouvoir de congédiement et de chantage auprès d'un milieu s'il n'était pas d'accord avec la personne choisie. Par conséquent...

M. Rivest: C'est l'argument à la limite, mais ça n'a jamais été utilisé, étant donné la fragilité de ce milieu.

M. Godin: ... nous n'avons pas de leçon à recevoir de ce parti, de ce groupe.

Le Président (M. Boucher): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le Président, j'attendais beaucoup de l'intervention du député de Mercier et, ce n'est pas la première fois, je suis fort déçu.

Il veut ramener — avec tout le respect que j'ai pour l'Institut du cinéma qui est sûrement un pilier, dans l'esprit du député de Mercier, de notre vie culturelle au Québec — il veut ramener l'im-

portance de l'Institut de recherche sur la culture que le projet de loi no 2 veut créer à un simple institut du cinéma. Ce n'est pas un argument nouveau qui nous a été servi lors de l'étude de ce projet de loi en deuxième lecture. Je pensais que nos interventions auraient réussi à renvoyer le député de Mercier à ses livres et à lui permettre de consulter la réalité simplement, à savoir ce que peut faire l'Institut du cinéma et ce que pourra faire, ce que devra faire l'institut créé par le projet de loi no 2. Je ne ferai pas insulte au ministre du développement culturel et je ne réduirai pas la portée de son projet de loi à la création d'un simple institut du cinéma.

Je pense que le député de Mercier, c'est de bonne guerre, ici, d'un côté et de l'autre de la table, de nous servir des exemples du passé. Il a quand même été rappelé à l'ordre par le député de Jean-Talon, qui démontre après un si court temps dans son nouveau métier, un à-propos prometteur...

M. Godin: C'est une idée cela, prometteur. M. Lalonde: Effectivement, dans l'Institut...

M. Godin: Espérons qu'il dépassera la promesse des fleurs.

M. Lalonde: ... du cinéma, malgré les prétentions qui nous ont été justement proposées par les députés ministériels, soit en deuxième lecture, soit maintenant par le député de Mercier, même au niveau...

M. Rivest: Je m'excuse auprès de mon collègue de Marguerite-Bourgeoys, mais je voudrais quand même soulever une question de règlement. Je ne voudrais pas que, par ces propos, le député de Marguerite-Bourgeoys me laisse dire que je n'ai pas apprécié l'intervention du député de Mercier, qui était largement légitime, sauf que le député de Mercier a mal utilisé son argument. Je ne voudrais pas que le député de Marguerite-Bourgeoys tente de diminuer la pertinence des propos du député de Mercier.

M. Godin: Je me rends compte que la propension au cours magistral fait des ravages terribles de l'autre côté de la Chambre.

M. Lalonde: M. le Président, je veux rassurer le député de Jean-Talon. Naturellement, malgré les promesses qu'il entretient à l'égard de sa carrière politique, je vois qu'il nourrit encore une certaine naïveté dont il se défera assez rapidement à se frotter aux gens d'en face quotidiennement, comme on le fait nous, depuis plusieurs années.

Je disais donc que je ne ferai pas insulte au ministre et je vais donner l'importance, je vais accorder — je pense que c'est notre devoir, c'est simplement une question de réalisme — toute l'importance qu'il mérite à l'Institut québécois de recherche sur la culture que veut créer le projet de loi no 2. Même l'Institut du cinéma, avec son mandat, sa mission quand même limitée — il faut le reconnaître — voit ses membres nommés à même des listes proposées par le milieu, la différence est énorme, elle est capitale, à savoir qu'ils sont nommés après consultation comme le dit de façon sibylline l'article 5. Imaginez-vous les promesses contenues dans cette formule! La différence est énorme entre cette nomination après consultation et la nomination à même les listes. Je rejoins le député de Jean-Talon, il y a quand même des leçons...

Une voix: II est temps!

M. Lalonde: ... à retenir de l'intervention du député de Mercier. Il a montré son jupon, le député de Mercier, vous ne le saviez pas, il en a un, et il l'a montré, quand il dit qu'il est temps que l'État forme son institut pour qu'il reçoive des commandes de l'État. C'est à peu près l'importance — je laisserai au député de Mercier de me corriger si je fais erreur — qu'il accorde à l'Institut de recherche sur la culture.

C'est là que le bât blesse, c'est là que se situe la grande partie de notre inquiétude, de nos appréhensions, à savoir qu'ajouté aux articles 5 et 6 que nous aborderons éventuellement, M. le Président, il y a l'article qui donne à l'institut non pas le droit, mais le devoir de remplir les mandats qui lui sont confiés non pas par le milieu, non pas par les universités, même pas par le gouvernement, à moins que je ne fasse erreur... C'est quel article? Enfin, on arrivera à cet article éventuellement, mais l'institut doit remplir les mandats qui lui sont donnés par le ministre. À l'article 25? C'est ça. Dans la poursuite de ses objets, l'institut doit exécuter tout mandat spécifique que lui confie, avec l'approbation du gouvernement, le ministre chargé de l'application de la présente loi. Donc, l'initiative est laissée au ministre avec l'approbation du gouvernement. Vous allez reconnaître, M. le Président, que ce n'est pas une assurance tellement grande que cette approbation du gouvernement pour les membres de cette commission qui savent que le ministre et le gouvernement s'entendent très bien, généralement. Il y a des lézardes que l'on voit se faire. Il y a des brèches qui s'ouvrent de temps à autre. On en a vu dernièrement, mais c'est justement ça que le député de Mercier a retenu du projet de loi. On fait un institut; c'est l'institut du gouvernement et le gouvernement lui passe des commandes.

Le ministre, aux inquiétudes du député de D'Arcy McGee lorsqu'il présente sa motion, dit: Écoutez, le député de D'Arcy McGee est sceptique. Il ne croira pas, il ne prendra pas ma parole. Donc, je vais lui lancer à la figure le rapport Frégault. Il s'était caché derrière le livre vert de Jean-Paul L'Allier autrefois, c'est-à-dire à l'étude en deuxième lecture. Maintenant, il se cache derrière le rapport Frégault.

Allons voir ce que M. Frégault et son groupe nous recommandaient.

M. Laurin: M. le Président, question de règlement. Avant que le député ne s'égare, j'ai parlé, dans le rapport Frégault, des références que fait le

rapport Frégault à la consultation intensive qu'il a menée auprès des organismes du milieu; un point, c'est tout.

M. Lalonde: Bon! Alors, M. le Président, moi, je vais invoquer le même rapport Frégault pour appuyer la motion...

Le Président (M. Boucher): Je présume que cela a rapport à la motion.

M. Lalonde: Oui.... pour appuyer la motion du député de D'Arcy McGee, qui demande de consulter le Conseil des universités.

D'abord, le rapport Frégault réclame un institut autonome. Il dit, à la page 183, au chapitre 6, et je cite: "II faut d'abord voir l'institut comme un service à la disposition de la communauté entière, c'est-à-dire comme un organisme de recherche à long terme sur la nature de la culture québécoise, etc." Je cite un peu plus loin: "II devra rendre accessible à toute la population l'éventail le plus riche possible de connaissances et de données pertinentes, etc."

Allons un peu plus loin, M. le Président, à la page 186: D'autre part, les universités contribueraient à l'orientation de l'institut tant par le rôle qu'elles joueraient dans la nomination des membres..." Ah! M. Frégault proposait que les universités jouent un rôle dans la nomination des membres. Alors, peut-être que les universités auraient quelque chose à dire sur l'article 5 en particulier.

Allons un peu plus loin dans le rapport derrière lequel le ministre se cache, à la page 188: "L'institut est d'abord au service de la communauté nationale." Je pense que le député de Mercier n'est pas d'accord avec ça. L'institut est aussi au service de l'État qui lui passe des commandes. Là, on voit jusqu'à quel point il y a une différence fondamentale entre la façon d'aborder la question de l'institut par le rapport Frégault et celle qui nous est proposée par le projet de loi no 2.

Allons un peu plus loin... Si vous permettez, je vais terminer pour votre édification; oui, sûrement, d'accord. À la page 190: "L'institut doit être autonome afin que soient assurées la valeur de ses travaux et la crédibilité de ses interventions". (21 heures)

Quelqu'un a dit qu'un institut qui ne serait pas complètement autonome, serait mort-né. Ce n'est pas Frégault qui l'a dit, c'est Jean-Paul L'Allier, qui a précédé quand même, par son livre vert, les travaux du comité dirigé par M. Frégault. Ils sont d'accord là-dessus.

Alors, comment le comité Frégault arrive-t-il dans la question qui nous préoccupe? Parce que je pense que le député de Mercier le reconnaîtra, nous sommes parfaitement d'accord avec la création d'un Institut québécois de recherche sur la culture. Nous l'avons dit lors de l'étude de ce projet de loi en deuxième lecture. Nous voulons qu'il ne soit pas mort-né. Nous voulons qu'il soit utile, qu'il soit efficace. Nous ne voulons pas que ce soit l'institut du ministre, ni du gouvernement.

Alors, M. Frégault et son groupe de travail disent ceci, à la page 192: "Le conseil d'admi- nistration est l'instance suprême, détenteur de pouvoirs de décision, il compte douze membres. Huit d'entre eux, dont le président de l'institut, sont nommés par le gouvernement, à partir d'une liste présentée par le Conseil des universités". Où retrouvons-nous cette disposition dans le projet de loi no 2, M. le Président? Là, je reviens à la pertinence de la motion. Est-ce qu'on a demandé au Conseil des universités s'il est d'accord avec le projet de loi, alors que le rapport Frégault proposait quelque chose de complètement différent et de fondamental pour l'indépendance de cet institut?

Un peu plus loin, dans le rapport Frégault, on lit encore à la page 192: "Ce corps élit tous les ans un de ses membres président du conseil". Ce n'est pas le président de l'institut. Il faut le distinguer quand même. Il n'est pas nommé par le gouvernement. Il est nommé par le groupe, le conseil d'administration.

Allons un peu plus loin, à la page 194, M. le Président. "Le conseil d'administration en nomme les membres". On parle des membres d'une commission consultative de 40 membres qui est formée annuellement. Ce n'est pas le gouvernement qui le forme, d'après M. Frégault. Ce n'est pas le gouvernement qui forme cette commission non plus, c'est le conseil d'administration qui est nommé à même une liste.

Un peu plus loin, on parle du président. C'est important, le président. On le reconnaît ici dans le rapport, à la page 194: "L'agent principal de l'institut est le président de l'institut nommé à plein temps pour une période renouvelable de cinq ans par le gouvernement". Est-ce qu'ils disent "après consultation" comme l'article 5 nous le propose? Non. "Sur la recommandation du conseil d'administration". Il faut que ce soit quelqu'un de recommandé par le conseil d'administration, non pas après consultation. "Le directeur scientifique — je poursuis à la même page 194 — est un chercheur déjà attaché à l'institut, nommé par le conseil d'administration" pas par le gouvernement. Il n'y a personne qui est nommé par le gouvernement proprio motu ou après consultation dans l'institut de M. Frégault. Alors, j'espère que le ministre et les députés qui semblent un peu s'ouvrir les yeux de l'autre côté de la table vont reconnaître que ce sont deux êtres différents et que la différence est fondamentale quand on parle d'un institut de recherche.

Un peu plus loin, à la même page: "Ce directeur scientifique qui est nommé par le conseil d'administration l'est, sur recommandation du président de l'institut" pas du ministre.

On poursuit la lecture, M. le Président. Je pourrais poursuivre encore. Cela crève les yeux. Le rapport Frégault et le livre vert de Jean-Paul L'Allier ont recommandé tout d'abord un institut, qu'on n'appelait pas à ce moment l'Institut québécois de recherche sur la culture, mais c'est la même chose; cependant ce n'est pas la même chose que ce que nous propose le ministre.

C'est la raison pour laquelle nous devons tous, ici, comme législateurs, au-delà des partis quand même — je pense qu'autour de la table, on

est capable de s'élever au-dessus de la partlsa-nerie quand on parle d'un Institut québécois de recherche sur la culture. Je pense que tous les membres de cette commission devraient appuyer la motion du député de D'Arcy McGee et inviter le Conseil des universités.

Le député de Mercier a dit: Oui, mais il n'a même pas demandé à être invité. C'est exact. Je prends sa parole, je ne pense pas que le ministre me démente, je prends sa parole. Mais on sait comment ça se passe, M. le Président. On sait comment se passe l'étude de ces lois-là. Il y a eu une consultation, une tournée du ministre. Parfait, je suis d'accord avec toutes les tournées des ministres, que les ministres tournent et puis tant mieux, mais qu'est-ce que c'est? C'est pour instruire le ministre, c'est pour informer le ministre, c'est pour mettre le ministre en garde. C'est donc pour faire bénéficier l'exécutif de l'éventail d'éléments qu'il recherche à bon droit, d'accord, mais une fois rendu ici à l'Assemblée nationale, dont nous sommes une extension à la commission parlementaire, il me semble que c'est un autre forum et qu'on a le droit de profiter, au-delà des tournées du ministre, des lumières de ceux qui sont au premier chef intéressés par ce qu'on nous propose d'appuyer.

C'est pour ça que je pense que le refus du ministre actuellement est prématuré. Qu'il relise le rapport Frégault et qu'il reconnaisse que dans le rapport Frégault, le Conseil des universités a été mis en cause, qu'il y a des propositions qui concernaient le Conseil des universités. Qu'il reconnaisse cela, malgré l'urgence qui a été décrite par le député de Deux-Montagnes. On est pressé, dit-il, on est en retard. Oui, on est en retard sur tout. "Dilatoire" qualifie-t-il cette motion. Oui, cette motion-là est dilatoire, c'est-à-dire qu'on cherche du temps. J'aime mieux prendre une bonne décision un peu plus tard que faire une erreur plus rapidement. Il me semble que tous les députés aussi devraient être d'accord avec cette proposition. Cela prendrait quoi, quelques jours de plus? Le 5 juin on aurait le Conseil des universités et le ministre et le gouvernement auront leur loi avant l'ajournement d'été.

Il n'y a pas de presse, mais nous accordons une importance capitale à la création de l'Institut québécois de recherche sur la culture. Tout d'abord parce qu'en soi c'est important et, deuxièmement, quand on connaît la définition très large de culture que nourrissent plusieurs milieux, y compris les milieux gouvernementaux, c'est un institut qui va affecter la vie de tous les gens. Donc, nous devons accorder, comme législateurs, une importance précieuse, comme la prunelle de nos yeux, à cet institut. C'est pour ça que nous ne devons éviter aucune précaution, aucune prudence comme celle que nous propose la motion du député de D'Arcy McGee. J'invite le gouvernement à y repenser avant de dire non à une telle motion. Je vous remercie.

Le Président (M. Boucher): Merci. M. le député de Mercier vous avez demandé au député de Marguerite-Bourgeoys de poser une question?

M. Godin: Ce qu'il a dit par la suite a éclairé ma lanterne suffisamment.

M. Lalonde: Alors vous allez voter pour?

Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le député de Jean-Talon.

M. Godin: Non, justement, à plus forte raison.

M. Rivest: M. le Président, je pense que personne, à l'occasion de la présentation de la motion du député de D'Arcy McGee, ne s'oppose — et je pense que tout le monde l'a exprimé — au principe même — d'ailleurs, on ne peut pas ici, au niveau de la commission parlementaire, le remettre en cause — de la création d'un institut de recherche en matière de culture. Tout le monde est d'accord, je pense, pour qu'il y ait un lieu et que les gens aient des moyens pour remplir ou satisfaire à ce besoin et même à cette carence dans le domaine de la recherche culturelle qu'a soulignée le ministre dans son intervention de deuxième lecture dont j'ai pris connaissance tantôt.

La première remarque que je voudrais faire sur la base de la motion du député de D'Arcy McGee, c'est de rappeler... Bien sûr, le député de Mercier a cité le cas de l'Institut du cinéma; je pense qu'il y avait certainement des différences, que je lui ai soulignées, au niveau de la technique proprement législative de la formation de l'Institut du cinéma, mais, également, ce qui m'apparaît plus sérieux, c'est qu'il y a une différence de nature entre les deux instituts, dans la mesure où la définition du concept de culture dans le projet de loi 2 est beaucoup plus large, que dans le cadre restreint de l'Institut du cinéma, alors qu'il s'agissait simplement de promouvoir une forme très particulière d'expression artistique.

Comme le ministre l'a souligné dans le livre blanc sur le développement culturel, ainsi que dans son intervention en deuxième lecture, sa définition du concept de culture s'étend à à peu près toutes les sphères de l'activité humaine. Sur ce plan, je pense que le gouvernement doit agir avec une extrême prudence, dès lors qu'il s'agit de créer un organisme quelconque et de lui confier un mandat aussi large.

En réalité, le problème de base que je vois là-dedans, et en prenant connaissance autant du rapport de M. Frégault ou du livre de M. L'Allier, et même du livre blanc du ministre, ce problème touche une donnée fondamentale de la réalité culturelle du Québec. C'est clair que si cette question est arrivée et que la demande est à ce point forte, c'est que le Québec a changé. C'est sûr qu'il fut un temps où le Québec avait, sur le plan culturel ou pouvait affirmer dans à peu près tous les secteurs d'activité ses particularismes propres en tant que société culturelle, au temps où le Québec était une société rurale, où son identification se faisait auprès de la langue ou même de la religion ou même au niveau de la structure familiale, même dans le milieu de travail. Je pense que c'est dans cette perspective que le ministre d'État au développement culturel a situé son livre blanc.

C'est évident que quand le Québec était une société rurale, à ce moment-là, il n'y avait pas tellement de problèmes d'identification comme telle. C'est simplement à la suite du facteur clef d'urbanisation que cette cohérence culturelle du Québec a plus ou moins éclaté, parce que l'urbanisation a réduit l'espace culturel spécifique du Québec, de la société québécoise en tant que telle, dans la mesure où, à partir du moment où le Québec s'est donné un développement, tous les facteurs de développement, on le voit, réalisent une uniformisation des données culturelles de base d'une société. Le milieu de travail devient le même, les modes de loisir sont absolument de plus en plus uniformes, la structure familiale ou l'évolution de la famille devient exactement la même, si bien que l'espace culturel propre à une société se rétrécit.

J'ai compris, d'après les documents du ministre, que le gouvernement était bien conscient de ce problème et voulait une intervention de l'État. On parle même, dans le livre blanc du ministre, de l'habitat, où la société québécoise aurait perdu nos vieilles maisons canadiennes qui traduisaient une donnée culturelle de base, y disant qu'on devait se préoccuper de ça.

Tout cela amène le choix du gouvernement actuel, et le ministre ne s'en est pas caché, lorsqu'il parlait que des ambitions. J'ai vu ça dans son discours d'intervention. Il disait entre autres: ..."la présentation de ce projet de loi m'incitait à replacer dans son plus vaste contexte les responsabilités et les ambitions de notre gouvernement en matière culturelle".

C'est pour cela, je pense, que, de ce côté-ci de la table, on peut avoir énormément de réticence, pas encore sur le plan du principe du projet de loi, mais quand on voit le gouvernement s'attribuer des pouvoirs aussi considérables au niveau des articles 5, 7 et 25, comme on l'a souligné. Et les milieux concernés, les milieux de recherche et en particulier le milieu universitaire doivent certainement être préoccupés de la façon même que le ministre a conçu son projet de loi, parce que, très clairement, il traduit, à mon avis, une volonté — je n'emploierai pas le terme "dirigisme" — une présence certainement très forte du gouvernement et de l'État dans l'affirmation ou dans le développement culturel de l'ensemble de la société. (21 h 45)

C'est pourquoi je pense... Évidemment, il s'agit d'une motion pour convoquer les gens, mais je pense que les milieux universitaires, plusieurs universitaires, non seulement les créateurs sur le plan artistique, mais les milieux universitaires, en particulier dans le domaine de la sociologie, ceux qui réfléchissent sur la définition même d'une société, doivent être inquiets de la façon que le gouvernement a conçu son projet de loi au niveau de la désignation des personnes.

Connaissant un peu certains milieux universitaires et sachant les personnes sans doute très compétentes qui ont travaillé, au cours des dernières années, auprès du ministre d'État au développement culturel, dans ce milieu, il y a des écoles de pensée très diverses.

Le ministre peut faire lui-même ses choix, un gouvernement peut faire ses choix, avec les collaborateurs qu'il choisit, pour publier les orientations de sa politique, j'en conviens très facilement. Mais quand on demande à l'Assemblée nationale d'adopter un projet de loi et que, dans le corps même du projet de loi, on fournit un régime, ou on prévoit un régime juridique dans lequel le gouvernement va lui-même désigner les membres, sans qu'il y ait une obligation légale quelconque de consultation avec différents milieux, et deuxièmement, en tenant compte qu'il s'agit du problème culturel, du développement culturel général de la société, je pense que c'est bien légitime de la part d'une Opposition qui a, d'une façon tout aussi légitime que celle du gouvernement, une conception du développement culturel qui diffère considérablement de celle du présent gouvernement, je pense qu'il est tout à fait légitime de s'inquiéter de la façon que ce projet de loi no 2 est rédigé.

Dans ce sens-là, c'est normal, je pense également, que l'on fasse appel aux milieux universitaires qui, traditionnellement, sont les milieux les plus libres des pouvoirs politiques, quels que soient leurs projets. C'est pourquoi je trouve que la motion du député de D'Arcy McGee s'inscrit très bien, parce que, pour ma part, j'aimerais bien rencontrer les gens du milieu universitaire, de manière qu'ils viennent nous dire si, effectivement, le régime juridique prévu par le projet de loi ne risque pas de forcer, d'une façon plus ou moins rigide, le futur Institut de recherche à adopter un style de recherche, un contenu, qui ne soit que la traduction des ambitions politiques du présent gouvernement, ambitions politiques dans le domaine culturel, entendu dans son sens large, dont le ministre ne s'est d'ailleurs pas caché dans son discours en deuxième lecture, lorsqu'il disait que la présentation du projet de loi l'avait amené à placer le débat dans son contexte large et dans le contexte précis des ambitions de notre gouvernement en matière culturelle.

Or, je pense que de ce côté-ci de la table, on peut respecter ou comprendre les ambitions du présent gouvernement à ce titre, sans les partager. Je pense également que le milieu universitaire, le milieu de recherche et même le milieu artistique doivent avoir au moins l'occasion de manifester, au niveau d'une commission parlementaire, ses inquiétudes ou ses divergences de vues avec l'actuel gouvernement, parce que dès lors que le projet de loi va être adopté, le ministre va lui-même désigner, comme membres de l'institut, des personnes qu'il choisira. Je ne dis pas que ces personnes seront des personnes sur lesquelles le ministre ou le gouvernement exercera sa discrétion d'une façon irresponsable, mais le ministre va certainement, normalement et humainement être tenté de choisir des gens qui partagent les mêmes ambitions que les siennes ou que celles du gouvernement.

Dans ce sens, je pense que si on parle de la sauvegarde ou du développement de la culture québécoise en tant que telle, on ne peut pas revenir, par ce biais, courir le danger ou qu'il y ait même risque que l'on puisse concevoir le développe-

ment culturel du Québec sur la base d'un monolithisme qui a déjà eu cours au Québec et qui ne correspond absolument plus maintenant au degré de développement de la société québécoise.

C'est dans ce sens que, pour ma part, ayant pris connaissance de ce dossier, pour les raisons que les membres de la commission connaissent, d'une façon très récente, dans la mesure où c'est au mois de mars que le projet a été déposé, il a été étudié en avril, j'ai été un peu surpris — je vous le dis très franchement, en dehors du cadre, de la participation même à la motion du député de D'Arcy McGee — parce que dans mes temps de loisir, au cours des derniers mois — j'en ai eu plusieurs, il n'y avait absolument aucun problème, ce n'était pas stressant du tout, je ne sais pas pourquoi — en suivant du coin de l'oeil les ministres qui se promenaient dans Jean-Talon, je gardais un oeil très vigilant sur le livre blanc du ministre...

M. Godin: Entre l'Ouganda et le Katanga!

M. Rivest:... d'État au développement culturel et je le dis très franchement, en dehors de toute blague, mais je trouve ça dangereux et je pense que les milieux universitaires... Je ne sais pas quelle est la nature des consultations que le ministre a menées sur la rédaction elle-même de ce projet de loi.

Je termine là-dessus, revenant simplement aux petits problèmes du cinéma. Je sais que de très longues bagarres ont eu lieu entre les gens du milieu, dans un milieu culturel qui est extrêmement sensible et extrêmement délicat et que l'arbitrage législatif — j'ai cité les textes tantôt — a été le fruit de très longues consultations, cela a été l'expression d'une très grande sensibilité du milieu. Je trouve, pour ma part, et je le dis franchement, très dangereuse la façon dont le ministre et le gouvernement a conçu le projet de loi 2 et l'Institut québécois de recherche sur la culture. Parce que la culture québécoise, quoi qu'on en pense, cela ne peut être l'affaire d'un ministre, non plus que l'affaire d'un gouvernement et, selon ma conception, encore moins l'affaire de l'État.

Le Président (M. Boucher): Merci, M. le député de Jean-Talon. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Godin: Est-ce que c'est le droit de réplique?

Le Président (M. Boucher): Non. M. le député de D'Arcy McGee n'a pas encore parlé sur la motion. Il l'a présentée.

M. Goldbloom: Non, j'ai fait mes remarques préliminaires, je les ai terminées par la présentation d'une motion.

M. de Bellefeuille: Vous avez commencé...

M. Goldbloom:... très brièvement par la suite. Il me reste un certain droit de parole. Je voudrais m'en servir d'abord pour réagir à certains propos de mon ami, le député de Deux-Montagnes. Je sais que c'est mon ami, parce que j'ai reçu aujourd'hui même une note. Il me l'a remise lui-même. C'est de la part d'un pédiatre que je connais aux États-Unis. Dans la note, c'est marqué: "Le monde est donc petit, nous venons de rencontrer un de tes amis." Alors, ce doit être un de mes amis.

M. le Président, mon ami, le député de Deux-Montagnes, a caractérisé ma motion — il ne l'a pas fait d'une façon méchante — de dilatoire. Strictement sur le plan sémantique, toute motion qui propose que l'on prenne un temps additionnel...

M. Godin: Je vous ferai remarquer que les visiteurs s'en vont quand vous parlez, M. le député de D'Arcy McGee. Cela m'inquiéterait, si j'étais vous.

Le Président (M. Boucher): S'il vous plaît, M. le député de Mercier!

M. Rivest: C'est encourageant pour moi. Ils sont arrivés au moment où je parlais.

M. de Bellefeuille: Ils habitent peut-être dans Jean-Talon.

M. Godin: Vous les aviez convoqués?

M. de Bellefeuille: Ils sont arrivés un peu en retard.

M. Goldbloom: Même si cela m'inquiète, je ravale mon inquiétude et je continue mes propos.

Dans le sens strictement sémantique du mot, toute proposition qui a pour effet de prolonger le débat sur un projet de loi est une proposition dilatoire. Cet après-midi, à l'Assemblée nationale, nous avons adopté en deuxième lecture, en commission plénière, et en troisième lecture, dans l'espace de quinze minutes, un projet de loi.

Par comparaison, toute autre procédure devient dilatoire.

Si j'avais voulu poser un geste véritablement dilatoire, je n'aurais pas proposé que le Conseil des universités soit entendu le mardi 5 juin. J'aurais proposé qu'il soit entendu le vendredi 5 juillet, parce que, rendu au 5 juillet, il aurait fallu attendre la reprise des travaux parlementaires à l'automne pour pouvoir procéder à l'adoption du projet de loi.

Le député de Deux-Montagnes a parlé d'une urgence relative à adopter ce projet de loi. Il n'a pas défini, n'a pas explicité cette urgence. Il me paraît, M. le Président, raisonnable de croire que l'adoption de cette loi le 1er juin ou le 20 juin ne ferait pas une différence catastrophique dans l'histoire du Québec et que l'urgence n'est pas à un degré tel qu'il faudra absolument adopter le projet de loi avant le 5 juin. Donc, je ne voudrais pas que l'impression se répande que le but visé par l'Opposition officielle, en présentant cette motion pour que soit entendu devant cette commission parlementaire le Conseil des universités, était un but véritablement dilatoire, était un désir de ne pas accepter l'adoption du projet de loi.

Deuxièmement, mon ami le député de Deux-Montagnes a repris une allusion que j'ai faite à l'Académie française et a dit, en quelque sorte: L'Académie française, à ses origines, lorsqu'elle a été fondée par Richelieu, n'était vraiment pas autonome par rapport au cardinal Richelieu et n'a acquis son autonomie qu'avec le temps. M. le Président, je ne suis pas un historien. Je ne voudrais donc pas essayer de contrebalancer cette affirmation du député de Deux-Montagnes par une autre de mon propre cru. Mais vous comprendrez, M. le Président, que nous, de ce côté-ci de la table, ayons le désir d'être certains que l'Institut québécois de recherche sur la culture soit autonome par rapport à Camille "Cardinal" Laurin. Ça, c'est autre chose!

M. Laurin: Je n'ai aucune propension pour la vie religieuse!

M. Goldbloom: II est trop tard de toute façon!

M. le Président, puisque nous sommes tous de si mauvaise humeur, je voudrais continuer dans la même veine et je voudrais — parce que l'on a fait allusion à l'Institut du cinéma et l'on a fait des comparaisons avec cet institut — citer l'article 47 du chapitre 14 des Lois de 1975, la Loi sur le cinéma, et cet article se lit comme suit: "L'institut a pour mandat de répartir, en veillant à la liberté de création et d'expression ainsi qu'à la liberté de choix des consommateurs, les fonds que l'État destine au secteur privé pour mettre en oeuvre la politique cinématographique définie suivant la présente loi."

M. le Président, ce n'est pas la même chose dans le projet de loi que nous avons devant les yeux. C'est un institut, l'Institut québécois de recherche sur la culture, qui exécuterait, qui effectuerait lui-même des recherches. Ce n'est pas la même chose que de répartir des budgets en respectant une liberté de création et une liberté de choix des consommateurs.

M. le Président, je constate qu'il est 22 heures. Je voudrais...

Le Président (M. Boucher): L'institut Greenwich.

M. Rivest: M. le Président, avant de terminer, me permettez-vous de poser une question que le ministre voudra peut-être interpréter comme étant une question naïve? Elle est très courte. Pourquoi le...

M. Laurin: De votre part, une question naïve?

M. Rivest: Je suis complètement nouveau dans ce milieu parlementaire.

Pourquoi exactement le gouvernement tient-il à nommer les membres de l'institut?

M. Laurin: On verra bien ça; on va se rencontrer souvent encore.

Le Président (M. Boucher): Comme il est l'heure de terminer, la commission ajourne ses travaux jusqu'à 10 heures mardi matin.

Fin de la séance à 22 heures.

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