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Projet de loi no 51
(Dix heures vingt-trois minutes)
Le Président (M. Boucher): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission permanente des affaires culturelles est réunie pour
étudier, article par article, le projet de loi no 51, Loi sur le
développement des entreprises québécoises dans le domaine
du livre.
Les membres de la commission sont: M. Alfred (Papineau), M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M. Proulx (Saint-Jean),
remplace M. Godin (Mercier), M. Rivest (Jean-Talon), M. Fallu (Terrebonne),
remplace M. Guay (Taschereau); Mme Lavoie-Roux (L'Acadie), M. Le Moignan
(Gaspé), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Les intervenants: M. Beauséjour (Iberville), M. Bertrand
(Vanier), M. Brochu (Richmond), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Laplante
(Bourassa), M. Laurin (Bourget), M. Morin (Sauvé), M. Samson
(Rouyn-Noranda), M. Saint-Germain (Jacques-Cartier).
Y a-t-il un rapporteur pour la commission? M. le député de
Terrebonne?
M. Le Moignan: M. le député de Terrebonne.
Le Président (M. Boucher): Alors, M. le
député de Terrebonne agira comme rapporteur.
M. le ministre, vos commentaires préliminaires, si vous en
avez.
Remarques préliminaires M. Denis
Vaugeois
M. Vaugeois: M. le Président, j'ai effectivement quelques
amendements à proposer aujourd'hui. Nous allons prendre chacun des
articles, mais j'indique tout de suite qu'il y a un amendement qui me
paraît particulièrement important. Les autres cherchent
généralement à rendre la loi plus claire, plus
compréhensible. Ils tiennent compte de certaines remarques qui nous ont
été formulées en commission parlementaire, soit par
l'Opposition, soit par des collègues de la majorité
ministérielle, soit encore, bien sûr, par des groupes qui ont
présenté des mémoires.
L'amendement le plus important, à mon avis, porte sur le
rôle nouveau ou le rôle accru que nous voulons faire jouer au
Conseil supérieur de la lecture et du livre. Ce n'est pas le Conseil
supérieur du livre. Comment l'appelle-t-on? Le Conseil consultatif de la
lecture et du livre.
On avait fait remarquer, au moment de l'étude du projet de loi,
qu'il y avait beaucoup de choses dans les règlements et que la loi
était davantage une loi-cadre que, bon... Finalement, un ministre, quel
qu'il soit, pouvait peut-être, de façon assez arbitraire, modifier
des choses importantes sans revenir à l'Assemblée nationale,
étant donné que beaucoup de choses se retrouvaient dans les
règlements.
J'ai été particulièrement sensible à ce
genre de remarques et, pour empêcher justement que l'arbitraire puisse
s'installer, j'ai proposé qu'on revoie le projet de loi, qu'on essaie de
donner un rôle accru, à cet égard, au conseil consultatif.
Cela donne un nouveau mandat à ce conseil consultatif: entre autres, il
n'y aura pas d'amendements possibles sans aller chercher l'avis du conseil,
lequel pourra, s'il le juge à propos, recevoir des mémoires,
écouter les gens, et le ministre devra rendre publics les avis, dans un
délai raisonnable qui est précisé dans la loi.
Or, pour le reste, M. le Président, nous prendrons connaissance
des amendements au fur et à mesure.
Cette loi, je le répète, ne va pas sans des programmes
importants d'aide au développement des bibliothèques publiques,
et également sans une révision significative des budgets
d'acquisition de livres en milieu scolaire. Ce sont des choses que nous n'avons
pas nécessairement à traiter en commission parlementaire, mais il
est bon, pour comprendre la portée de la loi, de savoir que cette loi
s'accompagne d'une politique de lecture et d'une politique de
développement des bibliothèques publiques et de leur budget
d'acquisition, sans quoi la loi pourrait en fait rester un instrument utile,
mais un instrument qui ne pourrait pas servir, s'il ne se passe rien par
ailleurs.
Je me doute bien que mon collègue de Jean-Talon va probablement
commencer par de longues références à des
événements vécus au cours des dernières heures.
Pour ma part, je suis ici pour étudier le projet de loi no 51, mais je
suis bien prêt à écouter les gens de l'Opposition nous
raconter des sornettes et, avec mes collègues ministériels, on
tiendra le coup du mieux qu'on pourra.
Le Président (M. Boucher): II ne faut présumer de
rien, M. le ministre. M. le député de Jean-Talon.
M. Rivest: Effectivement, j'ai l'intention de parler des choses
qui m'ont frappé au cours des dernières heures...
M. de Bellefeuille: Cela nous a frappés nous aussi.
M. Jean-Claude Rivest
M. Rivest: Je ne sais pas si le député de
Deux-Montagnes a vu la même référence que moi dans un
journal d'hier où quelqu'un, dans une lettre aux lecteurs, signalait
l'importance des relations France-Québec dans le domaine du livre. Pour
ma part, j'ai été frappé par cet événement
particulier, d'autant plus que j'avais demandé au ministre de nous
donner au départ, puisque le coeur de ce projet de loi rejoint
finalement tout le problème de
la propriété des maisons d'édition, des libraires
et autres... Je voudrais demander au ministre d'une façon très
claire et dans la mesure également où je sais qu'il y a
déjà eu des discussions extrêmement sérieuses au
niveau des premiers ministres, M. Chirac et M. Bourassa, antérieurement
sans doute entre M. Pompidou et M. Bourassa et également entre M. Barre
et M. Lévesque dans le domaine du livre... Comme ce projet de loi
répond ou concerne directement ce problème, je me demande si ce
ne serait pas le moment pour le ministre très brièvement,
je ne demande pas un discours de nous donner des éléments
d'information très précis sur ce qu'est présentement
l'état du dossier dans le domaine du livre avec le gouvernement
français. Première question. Est-ce qu'il y a eu des ententes,
des pourparlers, au niveau du manuel scolaire entre autres, qu'on a
libéré?
Est-ce qu'on a discuté au niveau de M. René
Lévesque et de M. Raymond Barre, ou pris quelque entente que ce soit au
niveau du manuel scolaire ou des distributeurs? Est-ce qu'on a parlé de
cela? Est-ce que, entre la France et le Québec, dans le domaine du
livre, dans le domaine des arts et des lettres en général, le
gouvernement français qui a des intérêts, enfin les
Français à tout le moins, ont des intérêts
économiques certains ici, il a été question... Est-ce que
le problème du livre en particulier a été envisagé
dans une perspective générale des échanges culturels entre
le Québec et la France? C'est très important. Dans ce
cadre-là, je réfère spécifiquement à la
câblodistribution et aux émissions de télévision
française qu'on a achetées pour les produire ici. (10 h 30)
Je veux savoir en somme, une fois pour toutes, je ne demande pas au
ministre de le faire ce matin, parce que ce n'est pas directement sa
responsabilité ministérielle, mais tout de même, il y a
tellement longtemps, on s'y est référé également en
deuxième lecture, il n'y a pas un parlementaire français ou belge
qui vient ici sans nous parler du domaine du livre. Cela a toujours
été au coeur, à ma connaissance, des discussions entre le
Québec et la France, et nulle part on n'a eu, de la part du gouvernement
du Québec, une référence précise pour
établir la position: Les Français ont telle ou telle
prétention, nous leur avons dit que sur telle et telle prétention
nous n'étions pas d'accord, nous prenons telle décision. On voit
la décision, bien sûr, à l'intérieur de ce projet de
loi, mais comment cette décision va-t-elle s'inscrire dans des domaines,
par exemple, comme le doublage de films ou d'autres choses semblables dans le
domaine des relations France-Québec sur le plan culturel.
M. Denis Vaugeois
M. Vaugeois: M. le Président, je suis obligé de
faire amende honorable. Je ne m'attendais pas que le député de
Jean-Talon soit aussi sérieux dès le départ. Je m'excuse
des propos que j'ai tenus tout à l'heure.
M. Rivest: C'est une feinte, M. le Président, attendez la
suite.
M. Vaugeois: Alors, je n'esquiverai pas la feinte. D'abord, je
vais commencer un peu par la dernière référence du
député. C'est vrai que des gens ont fait des parallèles
entre la question du livre et la question du doublage de films. J'ai vu cela
moi aussi dans les journaux. Mais cela me paraît des initiatives, au
fond, d'individus qui sont un peu dans le décor et qui ont réagi
à leur façon devant l'inquiétude que manifestaient
certaines entreprises françaises ou certains porte-parole d'associations
ou d'entreprises françaises, en leur rappelant leur propre politique
dans le domaine du film et dans d'autres domaines. Je ne connais pas cela dans
le détail, mais il semble bien que du côté du doublage de
films en particulier, la France soit d'un protectionnisme assez
poussé.
Je ne veux pas entrer là-dedans, mais je sais qu'on y a fait
référence et que cela a servi, dans les dialogues entre les
individus, de point de référence et qu'on a dit: Écoutez,
ce qu'on propose de faire dans le domaine du livre, ce n'est absolument pas
comparable à ce que vous faites déjà dans d'autres
domaines, par exemple, du côté du film. Mais je ne veux pas porter
de jugement là-dessus.
Le député m'invite à dévoiler le contenu de
certaines conversations ou de certaines ententes qu'il aurait pu y avoir entre
des représentants du gouvernement français et des
représentations du gouvernement québécois. Je vais lui
faire grâce de ce que je sais pour ce qui a précédé
1976.
M. Rivest: Pas besoin de me le dire, on était
ensemble.
M. Vaugeois: Le député de Jean-Talon nous
rappelle...
M. Rivest: On a assisté aux mêmes entrevues. Alors,
pas besoin de se les raconter, on va garder ça entre nous.
M. de Bellefeuille: Je ne suis pas sûr que ce soit une
bonne idée.
M. Vaugeois: Je pense que c'est le bout le plus savoureux dont on
vous prive. Si on passe outre...
M. Rivest: ... du journal des Débats.
M. Vaugeois: Si on passe outre aux conversations qu'il y eu,
entre autres, de 1970 à 1976, je pense qu'il y a eu là des...
mais je vais être honnête là-dessus. Effectivement,
dès cette époque, des pressions très fortes se sont
exercées sur M. Bourassa, qui était alors premier ministre du
Québec, pour que la question de propriété qui avait
été envisagée je pense qu'un arrêté
ministériel avait prévu 80% de propriété
québécoise pour l'agrément des librairies... Il y a donc
eu des pressions faites par des porte-parole français pour
ramener cela peut-être à 70% et on a négocié
quasiment à 1 % près.
Finalement, M. Schuman avait assez insisté auprès de M.
Bourassa pour descendre le plus bas possible. Le plus bas possible,
c'était quand même 50% ou aux alentours de 50% ou 51%. M. Bourassa
n'a jamais, à ma connaissance, fait de déclarations publiques
là-dessus, mais M. Schuman en avait fait pour lui. Il l'avait
remercié publiquement d'avoir révisé à la baisse le
pourcentage envisagé. Cela me paraissait, à l'époque,
être un faux débat, parce que si M. Schuman s'était
tellement énervé là-dessus, c'était, à mon
avis, qu'il avait été mal informé. Les Français qui
l'avaient poussé à ces interventions ne comprenaient pas vraiment
leurs intérêts. De toute façon, le gouvernement, à
l'époque, avait décidé de retraiter là-dessus,
parce qu'il y avait des choses qui avaient été jugées plus
importantes. Je ne lui en fais pas grief, sauf que la profession a
continué au Québec de revendiquer une révision de cette
question de propriété.
Aujourd'hui, la différence, c'est peut-être que le temps a
passé, les gens se sont davantage parlé et nous avons eu
l'occasion de mieux expliquer le sens d'une intervention au titre de la
propriété comme critère d'agrément.
Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas encore eu de l'inquiétude
et de la nervosité. Je peux confirmer qu'il en a été
question à plusieurs reprises, à différents niveaux. Le
délégué général du Québec à
Paris ou le délégué général du Québec
à Bruxelles ont eu des représentations. J'ai assisté
moi-même à un entretien entre M. Raymond Barre et M. Claude Morin,
alors que j'étais adjoint parlementaire aux Affaires
intergouvernementales, pas très longtemps après le 15 novembre
1976. Et M. Barre, dans l'ordre du jour des choses à traiter, avait la
question du livre, parce que cela a toujours été dans l'air, on a
toujours voulu faire le point là-dessus.
M. Barre s'était inquiété du prix de ses livres au
Québec. On lui avait expliqué pourquoi c'était si cher, et
on avait un peu annoncé nos intentions de réviser la Loi du
livre. Il fallait le faire. Cela faisait quinze ans qu'on en parlait.
C'était dans l'air. Quand M. Barre est venu au Québec, il en a
été à nouveau question avec le premier ministre dans des
réunions. Mais c'était au titre de l'information. Le premier
ministre de France voulait savoir à quoi s'en tenir, parce qu'on lui en
parlait, on lui disait les inquiétudes de certains. Et M. Barre voulait
comprendre.
Je pense que j'ai assisté aux principaux entretiens et, à
aucun moment, il n'y a eu, de la part des autorités françaises
plus qu'un désir de comprendre et d'être informées. Les
informations fournies par les porte-parole québécois ont
témoigné de notre désir de rendre le livre, de langue
française en particulier, le plus accessible possible, partout au
Québec, et aux meilleures conditions, possible.
Déjà, il semblerait que le Québec constitue un
très important marché pour le livre français. On parle de
12,5% des exportations françaises qui sont dirigées vers le
Québec. C'est un marché important. La législation que nous
proposons, de toute évidence, ne pourra qu'améliorer la position
du livre français au Québec. C'est le point fondamental qui n'a
pas été spontanément compris par tout le monde, parce
qu'il y en a qui y ont vu leurs intérêts à court terme.
Mais pour ceux qui ont su évaluer leurs intérêts
à moyen terme et à long terme, pour ceux également qui
situent cette question sur un autre plan qu'un plan strictement commercial,
mais également sur un plan plus large, je pense qu'on reconnaît
à ce moment-là l'intérêt de la loi qui aura cet
avantage de soutenir la présence du livre c'est son objectif
partout et aux meilleures conditions possible.
Si cela peut intéresser les membres de cette commission, je
pourrais déposer une lettre assez nette du président du Conseil
supérieur du livre qui a réagi je pense que cette lettre
n'a jamais été rendue publique, mais c'est une lettre d'un
organisme officiel aux positions du Syndicat national de
l'édition de France, qui a continué d'interpréter à
sa façon la loi du livre et qui a continué un certain nombre de
pressions auprès des parlementaires français. Evidemment, les
parlementaires français, comme les parlementaires d'ici,
s'intéressent à beaucoup de choses et ne cherchent pas
nécessairement à se spécialiser dans les moindres
détails de toutes les questions qui leur sont...
M. Rivest: Le député de Terrebonne est très
spécialisé.
M. Vaugeois: Je continue. Les parlementaires français qui
sont venus ici j'en ai rencontré moi-même; j'ai
rencontré des sénateurs qui m'ont parlé de cela
après leur avoir expliqué en trois minutes de quoi il s'agissait,
ont dit: Ah! c'est cela. Ils se sont fait raconter des salades. Ils arrivent un
peu énervés. Ils nous en parlent. Ils veulent être certains
qu'on n'est pas en train de se renfermer. C'est un peu comme les histoires que
les libéraux racontent en campagne électorale. Vous avez ces gens
qui viennent ici bien intentionnés, qui nous posent des questions. Ils
ne demandent qu'à être rassurés. Je pense que c'est notre
devoir de...
M. Rivest: M. le Président, question de règlement.
Les dernières remarques du ministre doivent être attribuées
au ministre et non pas au député de Jean-Talon. J'ai promis de ne
pas me référer à des événements
récents, mais le ministre vient de le faire.
M. Vaugeois: Je m'excuse, M. le Président. Le
Président (M. Boucher): M. le ministre. M. Proulx: ...
M. Vaugeois: Le Syndicat national de l'édition s'est
permis de faire des interventions au Québec. Le président du
Conseil supérieur du livre fait remarquer qu'il existe ici des
associations profes-
sionnelles qui sont capables de parler au nom des professionnels du
livre et prie les partenaires français de respecter les structures qui
sont en place ici. Si on veut y revenir, je pourrai donner lecture de la lettre
tout à l'heure et la déposer. Pour l'essentiel, je termine en
disant au député de Jean-Talon qu'effectivement, il en a
été question, mais c'était sous l'angle de la
compréhension, c'est-à-dire pour chercher à comprendre.
Les explications qui ont été fournies par la partie
québécoise, d'après ma connaissance des choses, ont tout
à fait rassuré ceux qui auraient pu être inquiets et
être amenés à être inquiets par les démarches
que certaines entreprises ont pu faire.
M. Rivest: Si vous permettez...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Je retiens des remarques du ministre qu'il y a une
décision extrêmement importante de prise à
l'intérieur du projet de loi 51 au titre de la propriété
et je retiens aussi que situant cette décision-là dans le cadre
des relations France-Québec au niveau des gouvernements, cette
décision à 100% du gouvernement du Québec, quelles que
soient les pressions ou enfin les intérêts sans doute
légitimes que peuvent avoir les maisons d'édition
française ou autres, c'est qu'au niveau des relations
France-Québec, au niveau politique, au niveau des gouvernements, la
décision du gouvernement du Québec de mettre 100% n'embarrasse
pas le gouvernement français en vue de développer
ultérieurement les échanges culturels entre le Québec et
la France. Autrement dit, ils ne sont pas surpris par cette décision,
peut-être qu'ils n'ont pas à l'endosser ou à la rejeter,
c'est une décision du gouvernement du Québec, et il appartient au
gouvernement du Québec de la prendre, mais cela ne créera pas de
tension sur le plan des relations culturelles France-Québec. C'est dans
ce contexte précis que j'ai posé cette première
question.
M. Vaugeois: Je trouve très intéressant de voir les
inquiétudes du député de Jean-Talon, mais je peux le
rassurer. Les mesures que nous proposons sont susceptibles d'intensifier les
relations culturelles entre la France et le Québec et d'améliorer
la présence du livre français au Québec, mais tout en
soutenant l'entreprise québécoise et lui permettant d'exister,
d'être présente, d'être active, d'être dynamique
partout sur le territoire québécois. Cela est compris.
M. Rivest: II y a un mémoire qui n'a pas été
déposé à la commission. Le ministre l'a
référé au syndicat national de l'édition. Je pense
qu'il a été distribué aux membres de la commission, mais
on n'a pas eu d'audition. Est-ce qu'il a été
déposé? Je ne veux pas que le ministre commente plus que je ne
pourrais le faire, le ton ou le style du mémoire, mais ce mémoire
réfère spécifiquement aux relations France-Québec.
Il y a une inquiétude marquée de la part de celui qui lit ce
genre de mémoire au titre des conséquences qu'il pourrait y avoir
sur les relations France-Québec. Est-ce que le ministre a d'autres
commentaires à ajouter là-dessus?
M. Vaugeois: C'est parmi les choses un peu étonnantes. Il
y a des leçons à tirer de cela. Les gens plongent dans une
espèce de croisade avec ce mémoire sans avoir cherché trop
à comprendre ce qui se passait. Il y a à la base de notre projet
de loi et des règlements qui l'accompagnent des choix extrêmement
avantageux pour les entreprises qui, momentanément, s'inquiètent.
On ne peut jamais gagner sur tous les fronts, et surtout, dans le cas du
dossier du livre, il y a un compromis de taille qui a été
proposé. Or, si quelqu'un devait avoir à s'en plaindre, ce ne
sont pas les entreprises françaises, ce sont les entreprises
québécoises. En dégageant de la loi du livre tout le
secteur du manuel scolaire, on vient de faire un sapré beau cadeau
à des entreprises françaises.
M. Rivest: Est-ce qu'il a été question
spécifiquement entre les premiers ministres Lévesque et Barre du
manuel scolaire?
M. Vaugeois: Pas vraiment, parce que les questions posées
par le premier ministre de la France, c'étaient des questions
d'information. M. Barre voulait tout simplement savoir quelles étaient
nos intentions, quelle était la nature de notre projet de loi, etc. Il
n'est pas entré dans ce genre de considération. Il doit bien se
douter quand même que tout ça est fait de façon positive.
Ce n'est pas pour briser l'amitié franco-québécoise ou
mettre un terme à la coopération, bien au contraire.
Donc, il n'y avait pas, a priori, d'inquiétude, mais il voulait
savoir et les réponses fournies l'ont satisfait. Mais pour le
mémoire auquel vous venez de faire référence, je pense que
ça vaut la peine de lire quelques passages de la lettre de M. Falardeau
adressée à M. Pidoux-Payot, président du Syndicat national
de l'édition au Cercle de la librairie. (10 h 45) "M. le
Président, je me dois de vous faire part de ma surprise et de mon
étonnement comme suite aux agissements au Québec du Syndicat
national de l'édition que vous présidez. "En effet, j'ai appris
que, sans même nous en informer, vous avez présenté un
mémoire à la commission élue permanente des affaires
culturelles du Québec qui étudiait le projet de loi no 51 sur le
développement des entreprises québécoises dans le domaine
du livre et que, de plus, monsieur Michel Dupouey a assisté, en tant
qu'observateur, aux séances de la commission qui se sont tenues à
Québec les 27, 28 et 29 août dernier. "Non seulement ces
façons de procéder sont à tout le moins surprenantes mais
elles sont en contradiction flagrante avec les principes de respect mutuel et
de confraternité qui devraient régir nos rapports. "En vertu de
quelle autorité vous ingérez-vous dans le développement
des entreprises québécoises dans le domaine du livre? Selon quel
principe
vous adressez-vous directement au gouvernement du Québec, faisant
fi de la présence de vos collègues québécois qui,
juridiquement et moralement, sont les seuls interlocuteurs de notre
gouvernement? "Il serait intéressant, monsieur le Président, de
connaître vos réactions si une association d'éditeurs
étrangère se mêlait des affaires des éditeurs
français, passait par-dessus votre tête ignorant votre syndicat et
s'adressait directement au gouvernement de votre pays. Vous protesteriez sans
doute avec la dernière énergie et vous auriez raison. Ce n'est
plus de la non-ingérence et de la non-indifférence, c'est de
l'ingérence pure et simple. "Mon propos n'est évidemment pas
d'engager avec vous un débat sur le contenu du projet de loi no 51 ou
même sur le contenu de votre mémoire dans la mesure où la
politique du livre au Québec ne relève pas
d'intérêts ou d'influences étrangers. Je ne peux que vous
rappeler, ce que vous savez d'ailleurs parfaitement, que, si le Québec
constitue déjà pour vos exportations une terre d'élection,
les éditeurs québécois, en revanche, sont souvent
réduits à la portion congrue. Compte tenu de cette situation,
votre façon de procéder ne peut qu'aller à l'encontre des
intérêts bien compris des éditeurs français et
québécois. "Je croyais, Monsieur le Président, que vous
aviez un peu plus de respect à l'égard de vos collègues
québécois. Votre attitude malheureusement m'oblige à
réviser mon jugement et pourrait remettre en question à l'avenir
nos rapports. "Il est bien évident que je souhaiterais vivement
connaître votre sentiment sur cette affaire, car j'estime qu'en agissant
de la sorte, vous avez enfreint les règles élémentaires de
respect des rapports confraternels et d'éthique professionnelle qui
devraient exister entre nous. "En attendant de vos nouvelles, veuillez
agréer, monsieur le Président, l'expression de mes salutations
distinguées." C'est signé de M. Philippe Falardeau,
président du Conseil supérieur du livre.
Donc, s'il reste de petites ombres au tableau, ce n'est certainement pas
au niveau des gouvernements, mais au niveau de la profession, effectivement.
L'intervention du syndicat a été très mal perçue
par le milieu professionnel québécois qui, comme vous le savez,
attend ce projet de loi depuis fort longtemps et dans l'essentiel de son
orientation.
On nous a fait des remarques pertinentes en commission parlementaire
surtout sur la portée des règlements et leur importance. Nous
cherchons, avec nos amendements de ce matin, à améliorer
ça, sinon à corriger tout ça.
Au niveau des gouvernements, je peux vous dire que tout ce que je sais,
c'est que l'information a été satisfaisante. J'ai eu
moi-même l'occasion d'en donner, j'ai rencontré M. Lecat, le
ministre de la Culture. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec M. Barre
à quelques reprises, j'ai également rencontré des
fonctionnaires qui, à l'occasion de missions au Québec, voulaient
comprendre, parce qu'ils étaient l'objet de démarches du Syndicat
national, par exemple, et, chaque fois, les explications fournies rassuraient
les gens et nous donnaient l'impression qu'ils étaient un peu
gênés d'avoir marché dans l'inquiétude qu'on avait
provoquée chez eux. C'est tout ce que je peux dire, M. le
Président.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le ministre. M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: Merci, M. le Président. Le
député de Jean-Talon me dit qu'il a quelques brèves
questions. J'aurai ensuite quelques remarques préliminaires.
M. Rivest: Je veux simplement...
Le Président (M. Boucher): Oui, M. le député
de Jean-Talon.
M. Rivest: ... dire au ministre qu'on pourra facilement terminer
quant à nous, peut-être pas ce matin, peut-être après
la période des questions, l'étude article par article. Je tiens
cependant, au début des travaux de la commission à vider, dans la
mesure où on peut le faire ici, cet aspect des questions. Je pense que
mon collègue de Gaspé me permet...
M. Le Moignan: ... Allez-y.
M. Rivest: Pour compléter aussi le tableau sur le plan des
relations...
M. Vaugeois: II y a quelque chose que j'aimerais ajouter. Si, au
niveau de l'approvisionnement des bibliothèques municipales, les
bibliothèques subventionnées par l'État, il y a cette
exigence d'acheter les livres auprès du libraire agréé et
que, pour être agréé, finalement, il y a une exigence sur
la propriété québécoise à 100%, il reste que
l'ensemble du marché reste ouvert à l'entreprise, quelle que soit
son origine. Cela pourrait aller très loin d'ailleurs. La loi ne nous
interdirait pas éventuellement d'aider une entreprise mixte comme
Dussault-Garneau, qui est propriété française et
québécoise. Rien ne nous empêcherait d'aider cette
entreprise à être davantage présente dans certains coins du
Québec. Par exemple, nous sommes conscients que, dans les grandes
surfaces à Montréal, la librairie qui nous offre surtout du livre
de langue étrangère ou de langue anglaise est davantage
présente que la librairie qui offre spontanément des livres de
langue française.
Rien ne nous empêche et nous l'avons dit à nos
partenaires français de faire des opérations de
pénétration dans certains milieux au Québec. Il n'y a rien
qui empêche la co-édition, rien n'empêche des associations
d'entreprises. Au contraire, nous aurons des politiques et des programmes pour
favoriser ces relations-là. La loi ne fait finalement que
réserver l'aide gouvernementale en termes de subventions ou en termes de
marché captif pour les institutions que sont les bibliothè-
ques subventionnées par l'État, aux institutions
agréées.
Pour tout le reste, non seulement il n'y a pas de méfiance, mais,
pour tout le reste, il y a plein de programmes qui peuvent intervenir. Notre
objectif n'est pas de juger de la pertinence de l'édition d'un livre, ce
n'est pas de juger de ce qui doit être en vitrine de librairie ou sur les
étagères, mais nous avons quand même la
responsabilité d'assurer la survie de nos entreprises pour que nos
auteurs puissent être publiés et que nos livres puissent circuler,
etc., mais, pour autant, nous ne voulons absolument pas nous priver de la
production étrangère.
Nous sommes conscients qu'il y a des efforts à faire pour
maintenir un équilibre entre la présence de livres, par exemple
de France et de Belgique, par rapport à ce qui nous vient d'ailleurs.
Ces livres coûtent déjà naturellement plus cher une fois
arrivés ici et, si on veut que ces livres se trouvent un peu partout, il
faut, je pense, empêcher les excès au niveau des tabelles en
particulier. Les éditeurs français et les distributeurs
français, qui sont vraiment au courant des conditions du marché
ici, sont les premiers à reconnaître cela. Si on regarde les
tabelles pratiquées par des maisons sérieuses, j'ai envie d'en
nommer ce matin, comme, par exemple, Gallimard, Flammarion, le Seuil, ces
maisons ont des pratiques de tabelles absolument raisonnables, elles sont les
premières à reconnaître que, sans cela, le marché
québécois leur glisse entre les doigts. Le lecteur
québécois sera bien obligé d'aller chercher son livre en
traduction anglaise si le "pocket book" américain lui offre le
même livre à $3.50, $4, ou $5 et que l'édition
française se vend $25, $30 et $40, parce qu'il y a des écarts
aussi poussés que ceux-là actuellement.
Donc, l'entreprise française, qui est assez au courant des
conditions ici, est la première à souscrire à nos
objectifs. Il y a eu accidentellement des phénomènes de parcours
qui font que, momentanément, une entreprise en particulier aura besoin
de se rajuster, mais les règles que nous proposons font que les deux ans
qu'on propose pour se rajuster seront tout à fait suffisants. Des
porte-parole de l'entreprise principalement visée, les porte-parole de
l'entreprise du côté français et non pas du partenaire
québécois, nous ont fait savoir qu'ils pouvaient tout à
fait vivre avec cette loi, que, pour eux, le marché
québécois restait un marché important et qu'ils allaient
continuer à travailler ici de façon très active.
Toute cette approche nous permet, à part cela, de réaliser
un objectif très important pour moi, c'est de ne pas intervenir dans le
contenu. Comme notre référence est la propriété,
cela nous permet de ne pas questionner au-delà de la
propriété, c'est-à-dire sur le choix de l'éditeur,
sur le choix du libraire en librairie. Nous allons donc pouvoir diminuer les
occasions d'intervention qui existaient déjà par les anciennes
lois. C'est un objectif que nous avons. L'éditeur, à partir du
moment où on fait la preuve d'un certain nombre
d'éléments, dont la propriété, aura le catalogue
qu'il voudra, aura le fond qu'il voudra, éditera des auteurs qui
tiendront des propos qui ne plairont pas à un ministre ou à un
autre ministre, à un fonctionnaire ou à un autre fonctionnaire,
à un gouvernement ou à un autre gouvernement.
Je pense que c'est infiniment souhaitable dans un domaine comme celui du
livre que cette liberté existe et, au-delà de cette
liberté, la liberté du commerce. Or, la liberté du
commerce, nous la maintenons. La seule chose, c'est que nous réservons
à quelques entreprises québécoises des subventions
directes, des subventions de soutien ou l'accès à un
marché qui est essentiel si on veut voir des libraires s'installer dans
les régions périphériques du Québec.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: J'ai une question plus large et une question
précise. Je voudrais également que le ministre nous dise s'il est
au courant j'imagine qu'il l'est du contenu de la réponse
que le premier ministre a donnée à la lettre que lui a
adressée je pense que c'était une lettre, cette
fois-là l'Union internationale des éditeurs, le contenu de
la réponse que le premier ministre aurait donnée à la
lettre. La lettre était adressée au premier ministre, j'imagine
que le ministre des Affaires culturelles est au courant. Deuxièmement,
est-ce que le ministre a des données chiffrées lorsqu'il parle du
marché captif que vise le projet de loi 51, pour qu'on puisse
l'évaluer au départ, savoir exactement de quoi on parle?
Autrement dit, je voudrais avoir les statistiques de base pour savoir quelle
est l'importance du marché qu'on enlève, ou enfin dont on exclut
des maisons d'édition ou des libraires étrangers.
Premièrement, la fameuse lettre de l'Union internationale des
éditeurs et s'il y avait quelques données statistiques pour cet
aspect un peu international du projet de loi, je terminerais là-dessus,
pour l'instant.
M. Vaugeois: Sur l'importance du marché, manuels scolaires
par rapport aux bibliothèques, etc.: pour les lettres, effectivement, il
y a eu une lettre d'un monsieur Koutchoumow, de l'Union internationale des
éditeurs, au premier ministre, M. Lévesque, en date du 5
septembre 1979. M. Lévesque nous a transmis la lettre et il y a eu
réponse de la part de mon sous-ministre, le 29 octobre 1979. C'est
toujours la même chose, on nous arrive avec des inquiétudes non
fondées, alors, il s'agit d'informer. C'est, encore une fois, ce que mon
sous-ministre, M. Frigon, a fait en date du 29 octobre 1979.
C'est à ma demande qu'il a posé ce geste, ce n'est pas le
seul, il a fait la même chose avec des associations belges,
françaises, parce qu'un mot avait circulé indiquant qu'il y avait
des menaces importantes dans nos projets de loi. En général,
c'est assez intéressant de voir que la première lettre
d'explication rassure nos interlocuteurs. Je trouve un peu regrettable que
quelqu'un,
au nom d'un intérêt très personnel et de très
court terme, ait semé une certaine inquiétude. C'est notre
travail de donner cette information, c'est ce que nous faisons.
En tout cas, jusqu'à maintenant, je peux dire que tout rentre
dans l'ordre assez rapidement, d'autant plus que si je répond à
la deuxième partie de la question...
M. Rivest: Sur le premier élément... M.
Vaugeois: Oui.
M. Rivest: ... dans la mesure où la lettre de l'Union
internationale des éditeurs était publique, je ne sais pas
comment je l'ai eue, mais je l'ai eue...
M. Vaugeois: Elle a paru dans les journaux.
M. Rivest: Merci, je pensais que j'avais eu un
privilège.
M. Vaugeois: Bien oui, un gros espion.
M. Rivest: Est-ce que le ministre aurait objection à
rendre publique la réponse que son sous-ministre a adressée au
nom du gouvernement?
M. Vaugeois: Pas de problème, on peut le faire, M. le
Président.
M. Rivest: Je la regarderai. Et pour ce qui est des chiffres?
M. Vaugeois: Je peux vous dire, M. le député de
Jean-Talon, que je n'avais pas pris connaissance de la réponse de M.
Frigon. Alors, je la lirai en même temps que vous. Pour moi, c'est une
question administrative; et quand mon sous-ministre explique la nature d'un
projet de loi...
M. Rivest: M. Frigon est éminemment responsable, je
comprends la confiance du ministre, je l'endosse pleinement.
M. Vaugeois: II a fait un stage au cabinet du premier ministre
Bourassa, ça doit suffire.
Pour la deuxième partie de la question, si on voulait être
un peu démagogue, on pourrait d'ailleurs donner, dans nos
réponses, une idée de ce que représente le marché
qui est libéré par rapport au marché qui reste, en quelque
sorte, captif. Or, pour l'instant, c'est un marché de dupes, en quelque
sorte, pour les entreprises québécoises, parce qu'elles renoncent
à des privilèges au niveau du marché du manuel scolaire
qui est le marché de beaucoup le plus important. C'est un marché
qui, dorénavant, ne sera pas accessible seulement aux entreprises
étrangères mariées à des entreprises
québécoises, parce qu'actuellement, la règle veut qu'une
entreprise française, belge ou étrangère, pour avoir
accès au marché du manuel scolaire, soit en
copropriété avec une entreprise québécoise,
à peu près à part égale. (11 heures)
Dorénavant, l'entreprise française, sans participation
québécoise, pour avoir directement accès à ce
marché, qui est évalué à au moins $15 millions
il oscille entre $15 millions et $20 millions, me dit-on c'est
très difficile à apprécier. D'abord, c'est un
marché qui fluctue beaucoup. Actuellement, la façon de
s'approvisionner en manuels scolaires fait que cela peut varier beaucoup d'une
année à l'autre, étant donné que les manuels sont
généralement achetés par l'institution et qu'ils ont une
durée d'à peu près trois ans, à cause de toute la
variation dans les programmes, dans les manuels. Cela peut jouer passablement.
Mais ce marché est beaucoup plus important que le marché des
bibliothèques.
Le marché des bibliothèques en milieu scolaire est devenu
presque négligeable. Les budgets d'acquisition, dans les
bibliothèques scolaires, sont tombés à presque rien,
à cause de tout le jeu des dépenses admissibles et non
admissibles. On a comprimé les budgets d'acquisition des
bibliothèques scolaires. D'ailleurs, dans les effectifs, cela se ressent
aussi. Les effectifs les plus touchés par les ratios
maître-élèves et par les resserrements budgétaires
ont touché surtout le personnel des bibliothèques. Et les budgets
d'acquisition ont stagné ces dernières années.
Du côté des bibliothèques municipales, ce n'est pas
un budget très important. Je pourrai être plus précis, si
vous voulez. Par exemple, en troisième lecture, on pourra revenir sur
ces chiffres ou je pourrai vous en fournir.
Du côté des bibliothèques municipales, c'est plus
important, surtout au fur et à mesure que nous progressons, parce que
cela a été une des priorités du gouvernement actuel que
d'augmenter le réseau des bibliothèques et leur budget
d'acquisition. Il y a eu l'expansion des BCP également. Je l'ai
déjà dit publiquement, depuis trois ans, nous avons
créé plus de BCP qu'il s'en est créé de 1962
à 1976.
Tout cela fait qu'actuellement, on est en train de rapprocher, avec le
marché des bibliothèques municipales et scolaires, celui du
manuel scolaire, Mais, pour l'instant, ce sont des marchés qui se
comparent et il n'y a pas vraiment d'avantages à renoncer aux manuels
scolaires pour avoir l'exclusivité de l'autre. Mais, honnêtement,
je dois dire que je prévois, au cours des prochaines années, que
le marché le plus intéressant sera le marché du livre de
bibliothèque. Et cela devrait être rapidement vrai.
Le projet de loi que je défends ici n'a pas de sens je le
répète encore une fois s'il n'y a pas de politique de
lecture. Vous l'avez dit vous-même en deuxième lecture, M. le
député de Jean-Talon, et je suis d'accord sur cela. Cela n'a pas
tellement de sens si cela ne s'accompagne pas d'une politique de la lecture. Et
une politique de la lecture n'a pas tellement de sens s'il n'y a pas de livres
accessibles. Les livres ne doivent pas être accessibles uniquement par le
réseau commercial. Il faut que les livres le soient également au
niveau des bibliothèques publiques. Egalement, il faut qu'en milieu
scolaire l'habitude de la lecture puisse se
développer et que le livre soit disponible. Donc, notre action
porte surtout là.
Cela veut donc dire que rapidement ce marché va devenir plus
important. Mais pour l'instant ce n'est pas encore vraiment le cas.
M. Rivest: Pour les remarques préliminaires, je
cède la parole à mon collègue de Gaspé.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gaspé.
M. Michel Le Moignan
M. Le Moignan: M. le Président, lors de la deuxième
lecture, le 8 novembre, je crois qu'à l'Assemblée nationale nous
avons tenu un débat très serein, très rassurant. Et hier
soir, au milieu de certaines distractions, j'ai relu au complet les trois
discours, celui du ministre, celui du député de Jean-Talon et les
remarques que j'avais faites moi-même. J'ai trouvé que le ministre
avait contracté des engagements très audacieux et qu'il nous
apportait certaines innovations dans le domaine de la législation
parlementaire.
Je voudrais ce matin revenir sur certaines paroles du ministre, dans ses
remarques préliminaires. Je vais essayer de regarder un peu
l'économie générale de la loi, cela m'empêchera
peut-être, quand nous étudierons le projet de loi article par
article, de revenir sur certains points.
Cette semaine, dans un rapport intéressant que le
ministère des Affaires culturelles nous faisait parvenir, j'ai retenu
une citation d'André Gide qui s'exprime de cette façon: Tout ceci
a été dit auparavant, mais, comme personne n'a
écouté, il faut le redire.
Je sais qu'en Chambre tout le monde n'a pas écouté le
ministre, tout le monde n'a pas écouté les autres intervenants.
C'est la raison pour laquelle je voudrais revenir sur certains points, certains
engagements qu'il semble avoir contractés.
M. Vaugeois: Si le député me permettait de
l'interrompre à ce moment-ci...
M. Le Moignan: Oui, M. le ministre.
M. Vaugeois: André Gide avait ajouté
également: "Je viens trop tard, tout a été dit. "
M. Le Moignan: Dommage!
M. Vaugeois: Un de ses amis lui a fait remarquer: "Cela
même a déjà été dit, M. Gide, par La
Bruyère."
M. Le Moignan: Vous n'aurez qu'à compléter...
M. Proulx: Socrate a dit la même chose.
M. Vaugeois: Je pense que Socrate...
M. Le Moignan: Quand vous reprendrez votre rapport annuel, l'an
prochain, vous n'aurez qu'à compléter ces différentes
citations.
M. Vaugeois: Merci, j'avais bien besoin d'un adjoint
parlementaire aussi savant.
M. Proulx: L'épée de démocrate!
M. Le Moignan: Vous vous reprendrez l'an prochain, vous
compléterez les citations. Cela pourrait nous rendre service. Le
ministre a mentionné tout à l'heure qu'il allait déposer
des amendements. Je trouve que c'est très chic de sa part. Il est
très fin. Cela dénote chez lui un certain respect des
parlementaires. Je crois qu'il l'a manifesté en deuxième
lecture.
Là, je suis en train de le "crinquer", mais cela ne fait rien.
Tout de même, il faudrait que les règlements qui nous seront
déposés reflètent la prise de position mentionnée
par le ministre à l'Assemblée nationale le 8 novembre. Il y a eu
une certaine surprise, comme je le mentionnais, en écoutant ses propos,
parce qu'il n'y a pas de doute, le ministre, en très bon
démocrate, a voulu nous présenter un projet de loi qui semble
honnête, de nature à équilibrer une politique du livre, car
cette loi doit servir pour les années à venir.
J'ai hâte de voir les amendements. Ce qui est très
important, c'est ce qu'il a mentionné quand il a touché le
pouvoir réglementaire. Il nous parlait dans son discours et je pense que
cela vaudrait la peine de le répéter, pour le cas où on
pourrait déceler quelques contradictions en cours de route en
étudiant ce projet de loi article par article, de son rêve de
bâtir une bonne loi. Il nous dit ensuite: Pour jouer le jeu au moins
à cet égard le plus en harmonie avec mes convictions, j'ai
demandé qu'on prépare tous les règlements
prévisibles en même temps, et qu'on puisse déposer en
commission parlementaire, en même temps que le projet de loi qui est
à considérer, tous les avant-projets de loi et les
règlements nécessaires, pour l'application de la loi. C'est dans
l'un de ces documents que se glissait ce genre d'imprécision, ce genre
d'ouverture qui, à mon avis, est abusif.
Un peu plus loin, le ministre nous dit: sans la solution que je vais
proposer à mes collègues de la commission parlementaire, pour
éviter qu'un ministre, quel qu'il soit, y compris celui qui vous parle,
puisse abuser du pouvoir qu'il a de modifier les règlements sans venir
devant cette Chambre, j'ai l'intention de proposer que tous les amendements aux
règlements soient soumis à un comité consultatif qui est
déjà prévu dans la loi, qui existe déjà sous
une forme. J'y ai fait référence tout à l'heure. La Loi
existante prévoit un comité consultatif du livre."
Ensuite, le ministre parle d'audiences de trente jours. Il nous dit
qu'il voudrait nous donner des pratiques de nature à plaire à
tous les membres du Parlement. Nous attendons donc ces amendements
substantiels. Le ministre a surtout pris l'engagement d'apporter des
amendements aux articles 31 et 37, si ma mémoire est bonne. Le ministre
a eu le temps de réfléchir avec ses
légistes. S'il ne l'a pas fait, je lui en fournirai une occasion
un peu plus loin, dans quelques minutes.
Même encore dans sa réplique, après avoir
écouté l'Opposition, le ministre nous disait ceci: "Je suis le
premier non pas le dernier à ne pas souhaiter qu'un
ministre puisse, étant donné l'importance des règlements
par rapport à la loi-cadre, changer les règlements à son
insu sans revenir à l'Assemblée nationale, puisque les
règlements n'ont pas été portés à
l'attention des membres de cette Assemblée; on y reviendra plus tard.
Nous allons donc substituer à l'Assemblée nationale le Conseil
supérieur du livre."
C'est cela qui est dangereux, parce que, dans nos règlements,
nous allons voir si les futurs amendements seront soumis à ce conseil ou
si les membres de l'Assemblée nationale ou de la commission
parlementaire ici... Ce sont des points sur lesquels, je crois, le ministre
devrait nous apporter un éclairage en cours de route.
Je sais que le ministre n'a pas prononcé que des mots à
l'Assemblée nationale. Il semblait convaincu de son engagement. Si on me
le permet, j'aimerais déposer - c'est peut-être inusité
tout à l'heure un certain amendement, non pas pour discuter ce
matin, mais pour permettre au ministre et aux membres de cette commission d'en
prendre connaissance. Quand nous arriverons à cet article, si le
ministre n'a pas fait lui-même d'amendement, je crois que l'amendement
que je propose sera très valable, même très enrichissant
pour ce projet de loi.
D'ailleurs, je voudrais mentionner un fait qui est peut-être une
première dans les annales parlementaires du Québec. Quand on a
discuté le projet de loi no 9, Loi électorale du Québec,
si le ministre a pris connaissance de ce projet de loi, il y a deux articles
très importants: les articles 208 et 209. Le ministre de la Justice et
ministre d'Etat à la Réforme électorale, qui est
très bien coté d'ailleurs au cabinet, comme le ministre des
Affaires culturelles je n'en doute pas, je ne veux pas établir
d'échelle ce qu'il a fait en commission parlementaire, ce geste
mérite d'être souligné et imité également par
ses autres collègues. Si on regarde l'article 208, c'est un article
très important, puisqu'il s'agit de règlement. L'article 208 dit
ceci: "Le directeur général élabore des projets de
règlement sur les matières qui doivent être prévues
par règlement en vertu de la présente loi. Ces projets de
règlements sont soumis à l'approbation de la commission
permanente de l'Assemblée nationale du Québec. Une fois
approuvés avec ou sans modification par cette commission, les
règlements sont publiés à la Gazette officielle du
Québec et entrent en vigueur à la date de cette publication ou
à une date ultérieure qui y est fixée."
Immédiatement après, à l'article 209, le ministre
de la Justice et ministre d'Etat à la Réforme électorale
émettait un premier principe à l'article 208 et, à
l'article 209, il semblait contredire ce premier principe, puisque l'article
209 commence par ces mots: "Les règlements portant sur les
matières visées dans l'article 208 sont adoptés par le
gouvernement". À la demande de notre représentant de l'Union
Nationale, le ministre d'Etat à la Réforme électorale a
consenti à biffer l'article 209. Je crois qu'il y a une très
grande parenté entre cet article 208 et en même temps les articles
que nous allons voir plus loin dans le projet de loi.
Je crois que l'engagement solennel de M. Bédard appelle aussi le
ministre actuel à suivre son exemple. Si je veux également imiter
en cela le ministre d'Etat à la Réforme électorale, je
voudrais vous soumettre, si j'ai l'autorisation des membres de la commission,
cet amendement, comme je vous le dis, qui sera déposé à
vos légistes, à vos conseillers, M. le ministre, et aussi aux
autres membres de la commission. L'amendement que...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gaspé, je ne crois pas qu'on en soit au moment de faire des amendements
au projet de loi. Si vous voulez proposer...
M. Le Moignan: Je veux simplement proposer pour que le ministre
puisse méditer, parce que le 15 novembre, c'est un grand anniversaire,
c'est le troisième anniversaire d'une victoire au Québec. Le 15
novembre, c'est le lendemain du 14 novembre 1979. C'est une journée de
réflexion. Je ne veux pas en discuter. Je veux simplement lire cette
motion, la remettre au ministre et à ses conseillers, et à mes
collègues également...
M. Rivest: Vous le faites à titre d'information.
M. Le Moignan: ... à titre d'information, pas à
titre de propagande, à titre d'information. Cet amendement concerne
l'article 37. Que l'article 37 soit modifié en ajoutant, après le
premier alinéa, les mots suivants: "Les projets de règlement
élaborés en vertu du premier alinéa sont soumis à
l'approbation de la commission parlementaire permanente des affaires
culturelles. Une fois approuvés avec ou sans modification par cette
commission, les règlements sont publiés à la Gazette
officielle du Québec et entrent en vigueur à la date de cette
publication ou à une date ultérieure qui y est fixée." Que
l'article 38 soit biffé, c'est un article de concordance. Evidemment,
c'est exactement le processus qui a été employé en
commission parlementaire, lors de l'article du projet de loi no 9, concernant
la Loi électorale. Je laisse ces amendements au secrétaire de la
commission, qui pourra vous les distribuer. Je crois qu'il y a un beau sujet de
méditation là-dedans pour notre ministre ce matin. C'est la
raison pour laquelle je disais que, quand nous serons rendus à l'article
37, nous allons franchir le pont à ce moment. Si je dépose cet
amendement, c'est pour inviter le gouvernement à être
cohérent avec lui-même. (11 h 15)
Alors, si le ministre de la Justice et de la Réforme
électorale a posé un geste, je crois que ce geste peut
certainement être analysé et peut être suivi
également. Je crois que la même chose s'est faite aussi par Mme la
ministre Payette à
l'époque, lorsqu'on a étudié la Loi sur l'assurance
automobile, je n'en suis pas tellement certain. Maintenant, M. le
Président...
M. Vaugeois: Est-ce que je peux demander au député
s'il veut me permettre de voir la rédaction exacte de l'article 208, tel
qu'il l'a cité? Je voudrais méditer sur ce texte aussi.
M. Rivest: Est-ce que le ministre veut indiquer que le
député aurait mal cité l'article?
M. Vaugeois: Non, parce que je veux le relire tranquillement.
M. Le Moignan: Oui. On vous en fera parvenir une copie s'il n'est
pas en votre possession.
M. Vaugeois: Non, les erreurs de citation, ça nous est
propre.
M. Le Moignan: Non, je vous donne le privilège de me
contrôler, M. le ministre. J'ai été très
honnête...
M. Vaugeois: Non, ce n'est pas pour vous contrôler. C'est
parce que ça m'intéresse. Je veux être certain que je
comprends bien.
M. Le Moignan: C'est pourquoi j'attire votre attention, ce matin,
parce que c'est un article de poids, présenté par un ministre de
très grande valeur également.
M. Vaugeois: C'est une caractéristique dans le
gouvernement actuel.
M. Le Moignan: ...
M. Vaugeois: Qui n'est pas toujours reconnue.
M. Rivest: Non, c'est vrai.
M. Le Moignan: Ils sont toujours reconnus plus tard, vous savez,
les beaux gestes que pose un gouvernement. Parfois, ils sont souvent
méconnus aussi.
Alors, pour revenir, M. le Président...
M. Rivest: Vous parlez de la retraite...
M. Le Moignan: Non, ne mêlons pas les cartes. Je pense que
le moment est trop sérieux, étant donné la valeur positive
de ce projet de loi.
Je voudrais, en parlant des règlements, en parlant de l'article
208, attirer l'attention du ministre sur l'article 7 que nous allons voir dans
notre projet de loi sur le livre, parce que le ministre peut, à
volonté, consulter les membres du Conseil consultatif du livre je
ne sais pas comment vous l'appeler en temps et lieu.
Si le ministre accepte la suggestion que je viens de faire, je sais
qu'il ne la repoussera pas du revers de la main, ce n'est pas selon son
tempé- rament... le ministre Bédard lui a ouvert toutes grandes
les portes, et en regardant les amendements, d'ailleurs, que nous ne
connaissons pas encore, que le ministre doit nous soumettre tout à
l'heure, ceci est tellement important, parce que, dans le projet de loi, nous
l'avons souligné en deuxième lecture, le ministre a eu la
décence de nous donner lavant-projet des règlements. Mais, tout
de même, dans l'article de loi comme tel, il n'est fait mention d'aucune
définition, que ce soit d'un auteur, d'un éditeur, d'un libraire,
d'un distributeur, etc.
Si je reprends encore les paroles du ministre un peu plus loin... Ah
oui! les paroles du ministre, j'ai mentionné tout à l'heure,
c'est là qu'il nous promettait, dans sa réplique, les amendements
aux articles 31 et 37...
Une voix: ...
M. Le Moignan: Alors, je n'insiste pas davantage. Le ministre
avait promis de nous déposer également ce matin le sondage auquel
il a fait état ce matin ou cet après-midi, ça ne
presse pas j'aimerais que le ministre n'oublie pas ces
points-là.
Maintenant, il y a une chose ici qui est un peu inquiétante et
très importante. Quand le ministre a parlé du rôle des
éditeurs, des libraires et de tout ce beau monde qui oeuvre dans le
domaine du livre, il a dit, à la fin de ses remarques
préliminaires...
M. Vaugeois: À quelle page?
M. Le Moignan: À la page 3450... ceci: Nous avons
incité les bibliothécaires à reconnaître le
mérite des libraires, les libraires à reconnaître les
mérites et les services du distributeur, le distributeur à
reconnaître ceux de l'éditeur et nous prions l'éditeur de
reconnaître les mérites des auteurs, etc.
C'est parce qu'à l'audition des mémoires, tous ces gens ne
sont pas d'accord pour des intérêts qui leur sont tout à
fait particuliers. En somme, le ministre leur dit: Aimez-vous les uns les
autres. C'est un peu ça... Il leur lance cette invitation.
Mais, un peu plus loin, le ministre a fait une petite menace à
peine voilée. Il dit: Tout cela gravite finalement autour de la
propriété intellectuelle du droit d'auteur. Nous donnons les
moyens à l'Union des écrivains de se regrouper et nous croyons
que les distributeurs pourront s'autodiscipliner... Il invite tout ce beau
monde à se mettre d'accord. En somme, le ministre semble dire: On vous
donne une chance et, si vous n'êtes pas capables de prendre vos
responsabilités, on s'engage à le faire à votre place. Ce
n'est pas dit dans ces mots-là, mais il semble que ce soit un peu la
conclusion qui s'en dégage.
Toujours en rapport avec d'autres lois qui sont déposées,
on veut faire de bonnes lois. Je ne voudrais pas qu'il y ait de
l'incohérence dans les projets du ministre. Il a été
tellement rassurant en deuxième lecture que tous les membres de
l'Assemblée nationale ont approuvé à
l'unanimité ce projet de loi, je crois. Le ministre s'est engagé
à être très bon garçon lors de notre rencontre ce
matin. Je ne voudrais pas lui enlever ces attributs que je lui accorde de
très bonne grâce parce que le ministre semble attacher beaucoup
d'importance au rôle du parlementaire et grâce à ce
précédent qui est créé par la loi no 9 on trouve un
souffle d'air frais. Il y a quelque chose de rafraîchissant
là-dedans et je ne voudrais pas que le ministre vienne donner des coups
d'épée dans l'eau ici, s'il ne tient pas compte de ses
engagements antérieurs.
Si un processus de réforme a été commencé
par un autre ministre, je voudrais bien qu'on puisse continuer un peu dans la
même veine.
Il y a un autre point dont nous allons parler, une chose très
importante, le ministre n'en a pas tellement parlé, c'est à
l'article 37, le pouvoir de dispenser. Dispenser qui, dispenser quoi, les
raison, on pourra en parler quand nous arriverons là. Je sais que dans
les avant-projets de loi, aux règlements 1 et 2, on y fait allusion,
mais tout ceci demeure très vague.
Quant à la question des tabelles, les règlements n'ont pas
été déposés à ma connaissance. Je crois que
ces règlements doivent être déposés ici pendant
l'étude que nous faisons de ce projet de loi.
Sur ces remarques générales, M. le Président, je
crois que je vais conclure pour permettre à d'autres collègues
d'intervenir.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Gaspé. M. le ministre.
M. Vaugeois: Je remercie le député de Gaspé
de l'intérêt qu'il porte au projet de loi et des bonnes paroles
qu'il a de façon générale à l'endroit du projet de
loi et de celui qui le présente.
M. Rivest: Depuis hier, les ministres sont beaux et bons.
M. Vaugeois: M. le Président...
M. Le Moignan: Est-ce qu'il a dit bas ou bons?
M. Rivest: Beaux et bons.
M. Le Moignan: Ah bon!
Une voix: Ce n'est pas antiparlementaire.
M. Rivest: C'est parlementaire, M. le Président.
M. Vaugeois: Je ne vous demanderai certainement pas de retirer
vos paroles, j'aimerais plutôt que vous les répétiez.
M. Le Moignan: Cela vous étonne, ce n'est pas souvent
qu'on vous dit des choses semblables.
M. Vaugeois: J'aimerais que le député de Jean-Talon
ait plus d'influence sur son chef.
M. Le Moignan: ...
M. Vaugeois: Ce n'est pas son langage habituel.
M. Le Moignan: Son chef est bon pourtant.
M. Vaugeois: Oui, mais je ne répéterai pas à
l'endroit du chef du Parti libéral les propos que le
député de Jean-Talon tient à l'endroit des membres du
cabinet. En tout cas.
M. Rivest: Oui, mais j'ai dit depuis hier. Les paroles auxquelles
le ministre se réfère sont antérieures.
M. Vaugeois: C'est ça. D'abord je vais corriger un petit
problème de vocabulaire. J'ai moi-même parlé tantôt
d'un Conseil supérieur du livre et de la lecture, tantôt d'un
Comité consultatif du livre et de la lecture et finalement notre projet
de loi retient l'appellation Conseil consultatif de la lecture et du livre.
Cela peut être à l'origine d'une certaine ambiguïté.
Si nous renonçons au terme Conseil supérieur du livre, c'est
qu'il existe comme structure privée un regroupement des
différentes associations des professionnels du livre dans une
association générale qui s'appelle le Conseil supérieur du
livre. Je pense que ce serait dangereux d'avoir deux Conseils supérieurs
du livre, un à l'intérieur du mécanisme prévu par
loi et un autre issu de la profession sans relation directe avec cette loi ou
avec nos gestes législatifs.
Je pense qu'il faut éviter de parler de conseil supérieur
de, dans le cas du livre. Deuxièmement, le comité consultatif
existe déjà par la Loi de l'agrément des librairies, mais,
comme nous le modifions considérablement, ça vaut la peine
également de changer son appellation. Nous proposons donc dans la loi no
51 de parler d'un Conseil consultatif de la lecture et du livre et je vais
faire attention moi-même dorénavant pour retenir cette appellation
pour éviter une certaine confusion.
Une autre confusion s'est glissée entre les articles 31 et 37.
C'est un peu ma faute là aussi, parce que, dans un des documents que
j'avais pour travailler, l'article 37 avait été
numéroté 31. D'ailleurs, l'erreur se répétait ce
matin. Je ne sais pas à quoi tient cette erreur. Probablement que
quelqu'un des services français dans nos services, qui fait des 1 comme
les 7 ou les 7 comme les 1... En tout cas, il reste que cela m'a amené
tantôt à confondre les articles 31 et 37.
Ce qui est vrai, c'est que j'avais donc dit que nous apporterions des
amendements aux articles 31 et 37. Je suis allé moi-même au
comité de législation discuter de l'article 31 et les
spécialistes qui sont là, qui n'ont rien à voir avec un
gouvernement en particulier, ce sont des gens qui font leur travail sous tous
les gouvernements, m'ont quasi supplié de ne pas toucher à la
rédaction de l'article 31 en me disant que c'était
un article qu'on retrouvait dans plusieurs autres lois.
Je pourrai d'ailleurs vous en citer tout à l'heure, si vous le
voulez, quand on verra cet article-là, mais on m'a dit: Ce n'est pas
nécessaire de changer la formule, c'est celle que nous utilisons
couramment et il n'y a pas à être gêné de cette
façon de dire la chose. Donc, nous en reparlerons quand on passera
à 31.
Je vous dis donc tout de suite que je n'ai pas d'amendement de
préparé pour l'article 31, contrairement à ce que j'avais
laissé entendre. Quant à l'article 37, effectivement, il va faire
l'objet d'une nouvelle rédaction et je vous proposerai tout à
l'heure les amendements pertinents. Justement, à cause des amendements
que je vais proposer pour l'article 37, je dis tout de suite que ce qu'a fait
mon collègue de la Justice, au niveau de la loi no 9, ne
m'apparaîtrait pas, du moins à première vue, pertinent pour
la loi 51, parce que, d'abord, le domaine n'est absolument pas le même,
là on est dans un domaine spécialisé, et cela ne me
paraît pas être de même portée que la loi no 9, et la
grosse différence tient surtout au fait que, dans le cas de la loi 9, si
je ne m'abuse, la révision des règlements ou leur approbation
n'était pas subordonnée à un organisme comme celui que
nous prévoyons dans la loi 51, c'est-à-dire un Conseil
consultatif de la lecture et du livre.
Le député de Gaspé ne pouvait pas le savoir, mais
le changement que nous apportons, c'est que les amendements aux
règlements, comme l'approbation des règlements, même au
départ, seront soumis à ce conseil consultatif. Cela veut donc
dire qu'il y a déjà cette précaution de prise. Si on
retenait la suggestion du député de Gaspé ce sur
quoi je ne suis pas en désaccord a priori, bien au contraire, cela
rencontre exactement mes préoccupations je pense que ce serait
inutile d'arriver avec deux précautions en même temps tout d'un
coup, alors que, d'habitude il n'y avait rien pour nous protéger devant
certains abus au niveau des modifications aux règlements. Je pense
qu'une précaution à la fois, cela suffit.
Dans le cas de la loi 9, mon collègue de la Justice a
proposé le retour à la commission permanente. Dans le cas de la
loi 51, ce que je propose, c'est le recours au conseil consultatif, sans lequel
les amendements ne seront pas possibles. Le ministre s'engage à rendre
publics les avis reçus de ce conseil consultatif. Donc, il ne pourrait
pas se faire de modifications aux règlements sans qu'on en soit
informé. Je m'engage à déposer d'ailleurs les avis
reçus. Il ne faut pas que je me trompe... Je m'engage à
déposer les avis reçus devant l'Assemblée nationale dans
les 30 jours de la réception de l'avis reçu.
Les membres de l'Assemblée nationale en seront donc saisis et
pourraient provoquer un débat s'ils avaient l'impression que les
amendements prévus vont dans un sens contraire à celui qu'on
avait au moment de la législation. Je pense que cette précaution
est amplement suffisante et c'est justement parce que je respecte
profondément le système parlementaire et le travail parlementaire
que je ne voudrais quand même pas les assaillir de petits
problèmes comme celui que pourrait signifier le retour à une
commission parlementaire comme celle des affaires culturelles, pour un travail
qui pourrait être strictement administratif.
S'il arrivait qu'il y ait une dimension plus grande, l'Assemblée
nationale en serait saisie par le biais de l'avis que le ministre serait
obligé de rendre public. Je pense que cela aussi est novateur, cela
rejoint nos préoccupations et, pour l'instant, sous réserve d'en
débattre tout à l'heure, je pense que ce que nous faisons devrait
satisfaire les membres de cette commission.
Quant au sondage CROP dont j'ai annoncé le dépôt, au
moins partiel, aujourd'hui, je pourrai le faire dans quelques minutes, je dis
tout de suite que je ne pourrai pas déposer tous les résultats du
sondage, parce que nous n'avons pas fini, loin de là, l'analyse de ce
sondage, mais je pourrai vous donner un premier document, résultat d'une
première appréciation du sondage fait sur les habitudes
culturelles des Québécois.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jean-Talon. (11 h 30)
M. Rivest: Est-ce que vous me permettez un court commentaire sur
la question des pouvoirs réglementaires qu'on va examiner plus tard?
L'exemple qu'a choisi le député de Gaspé pour amener le
ministre à déposer les avant-projets de règlement ou les
projets de règlement, au niveau d'une commission parlementaire, n'est
peut-être pas le meilleur, pour les fins de l'argumentation, dans la
mesure où l'exemple du député de Gaspé se situe
dans le domaine du droit électoral. Le droit électoral
s'élabore, je pense que c'est un consensus d'à peu près
tout le monde, par tous les partis. C'est une affaire de tous les partis.
La raison pour laquelle on entreprend la démarche décrite
aux articles 208 ou 209 qu'a cités le député de
Gaspé, c'est précisément celle-là, alors que
là, on est vraiment, dans le cadre du projet de loi 51, dans le domaine
de l'administration. En tout cas, à première vue, quitte à
ce qu'on revoie la formulation, quant à moi, les explications fournies
par le ministre sur la façon dont il entrevoyait exercer le pouvoir
réglementaire au niveau des précautions qu'il entendait proposer
à cette commission, pour l'instant, je trouve que l'approche du ministre
me paraît beaucoup plus pratique.
M. Vaugeois: Est-ce qu'à mon tour, je pourrais inviter mon
collègue de Gaspé à regarder ça attentivement? Je
ne connais pas très bien toute la législation, mais j'ai
l'impression que, dans ce que nous proposons, il y a quelque chose de nouveau
également. Je suis, comme les autres membres de cette commission,
préoccupé de l'importance que certains règlements ont par
rapport aux textes des lois et je suis le premier à chercher des
façons d'empêcher, de faire en sorte, en tout cas, qu'une fois une
loi votée, les règlements ne puissent pas être
modifiés sans qu'un certain nombre de précautions soient
prises.
Là, je propose une précaution qui est, je pense,
intéressante, qui s'inspire d'ailleurs de la Loi des biens culturels,
c'est là que je suis allé chercher mon idée. Nous avons,
avec la Loi des biens culturels, une commission des biens culturels. Ce n'est
pas nouveau, la commission, mais ce qui est nouveau, c'est le pouvoir que la
commission a de faire des auditions publiques, de recevoir des mémoires
et cette obligation qu'a le ministre de rendre publics les avis reçus de
la commission.
Je pense que là, on fait un bon bout de chemin. Si on trouvait ce
genre de précautions dans les lois où les règlements sont
importants... On a quelquefois reproché un peu allègrement
à certaines lois d'être bien minces par rapport aux
règlements qui suivaient. Il y a des fois où c'est
inévitable et c'est même souhaitable, au fond, qu'il en soit
ainsi, parce qu'il ne faudrait quand même pas provoquer l'engorgement du
Parlement par un retour constant devant l'Assemblée nationale pour toute
modification mineure apportée à une loi ou à une autre. De
là à laisser à la discrétion des ministres ou de
ses fonctionnaires les modifications aux règlements, des
règlements parfois très importants, très substantiels, il
y a une marge. Ce qu'il faut faire, c'est s'assurer qu'on ne peut pas modifier
les règlements sans que le débat ait pu s'engager, sinon à
l'Assemblée nationale ou dans une commission, du moins devant un
organisme représentatif et habilité à écouter les
gens du milieu.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Si le ministre le permet, je ne suis pas juriste,
mais, à la suite de certaines conversations de membres qui ont
participé à l'étude de la loi no 9, c'est pour ça
que j'avais regardé cela, on avait fait allusion à cet article
208, j'avais trouvé que c'était sage. C'est pour ça que je
me demandais, je me posais la question si on pouvait, dans notre projet de loi,
adopter la même procédure. Maintenant, je sais très bien
que, si le ministre nous donne des garanties... D'ailleurs, les
règlements passent ici en commission parlementaire, il y aura ce conseil
consultatif, mais, de toute façon, les parlementaires en sont
avisés dans les trente jours. S'il y a des amendements importants ou
mineurs, nous en serons...
M. Vaugeois: On va provoquer un débat.
M. Le Moignan: On peut toujours provoquer un débat.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Terrebonne.
M. Élie Fallu
M. Fallu: Merci, M. le Président. Comme
député de l'arrière-ban, devrais-je dire, on n'a pas
toujours le loisir de s'exprimer en première ronde, ici aux commissions,
et pas toujours, nécessai- rement, le plaisir de le faire en seconde
lecture, parce que souvent...
M. Rivest: ...
M. Fallu: ... il arrive que des ententes entre les partis font
que les débats sont abrégés. Je n'ai rien contre
ça, on épargne beaucoup de paroles et peut-être beaucoup
d'argent à nos concitoyens, parce que le temps horaire de la Chambre
coûte relativement cher. Toutefois, il arrive, en l'occurrence, que je
dois prendre la parole, ne serait-ce que comme adjoint parlementaire au
ministre de l'Education, pour amener certaines précisions à
propos de la loi 51.
Toutefois, préalablement, j'aimerais faire deux petites remarques
qui ne sont nullement des attaques ou des agressions de quelque nature que ce
soit. J'aimerais me permettre de rectifier un peu dans le sens qu'il l'a fait,
mais en allant plus loin, une parole qu'a dite tout à l'heure le
député de Jean-Talon à propos de la Loi électorale
qui est une affaire de tous les partis. Je voudrais plutôt dire que bien
au-delà des partis, la Loi électorale est l'affaire de tous les
citoyens électeurs et au-dessus des partis. C'est pour cette raison
qu'on peut se permettre d'aller très loin dans une réflexion
commune. Il n'y a rien qui engage le gouvernement ou un parti, dans une loi
électorale.
Je voudrais également féliciter le député de
Gaspé de sa recherche d'une meilleure gestion du parlementarisme et de
son désir de trouver quelques méthodes d'adaptation de nos modes
de législation. Il est un fait que la réflexion ne doit pas
s'arrêter là. Il y a ce précédent qui est
créé. Il faut continuer ensemble, entre parlementaires, notre
réflexion, pour trouver des mécanismes qui fassent qu'on ait,
sinon un meilleur contrôle de la législation
déléguée, du moins voir passer le train quand il arrive.
Non seulement il n'y a pas de contrôle du Parlement actuellement, mais le
Parlement n'est même pas invité à regarder, n'est
même pas invité à lire, pas davantage que tout autre
citoyen.
Mais mes propos sont relatifs à l'interférence qui arrive
entre la loi 51, qui relève du ministre des Affaires culturelles et
certaines actions qui devront être entreprises au ministère de
l'Education, en conséquence.
Je veux rappeler très brièvement trois choses. Je veux
surtout le dire, non pas en m'adressant surtout aux parlementaires, puisqu'il
n'y a pas d'inférence directe sur le texte législatif, mais
surtout le dire en cette occasion, plus à nos partenaires. Il s'agit
essentiellement de deux choses, dont l'une que je ne veux pas
développer, c'est la politique de développement des
bibliothèques scolaires. En temps et lieu, elle sera connue. Mais il y
en a une qu'il faut déjà aborder sans donner trop de
précision, au moins pour rassurer nos partenaires, c'est la politique du
manuel scolaire. La loi prévoit maintenant qu'il y a la
libéralisation du marché.
J'ai trois choses à dire. D'abord, une prévision. Il
arrive qu'au moment de la libéralisation du manuel scolaire de la loi
51, au même moment, le
plan d'action, le livre orange, annonce une transformation probablement
en profondeur, d'ici dix ans, de l'ensemble de nos outils pédagogiques,
donc de la refonte de presque tous les manuels.
On annonce quoi? Une politique d'agrément du manuel. On va
tâcher qu'elle soit le plus simple possible, la plus ouverte à la
recherche, la plus ouverte au marché, parce que lorsqu'on dit recherche,
on dit marché, en l'occurrence. Ce n'est pas le ministère qui se
charge de fabriquer les manuels. On laisse aux mains des auteurs, des
éditeurs, le soin de cette recherche.
Egalement, il faut prévenir nos partenaires en
l'occurrence ce sont les auteurs et l'éditeur que les devis de
manuels leur seront fournis à temps et qu'ils auront également le
temps suffisant pour élaborer par la suite les manuels pour pouvoir
être en juste concurrence sur le marché.
Je m'adresserai enfin, en troisième lieu, aux commissions
scolaires nos partenaires dans la négociation, comme on les
appelle actuellement, nos partenaires patronaux pour les rassurer. La
libéralisation du manuel scolaire, s'il n'y a pas de rectification
donnée assez rapidement, pourrait leur causer des problèmes
très sérieux au niveau économique.
Il y aura donc des compensations pour la perte de ce pourcentage de
remise qui leur était automatiquement octroyé qui était de
l'ordre de 15%. De plus, sans dire ce qui en est, du moins annoncer qu'ensemble
nous préparerons un plan quinquennal de compensation pour qu'ils ne
soient pas perdants au niveau de leur propre fiscalité. C'est ce qui
aurait dû être dit d'ailleurs en deuxième lecture
plutôt qu'à ce moment-ci, mais n'ayant pas eu l'occasion de le
faire dans ces débats initiaux...
M. Rivest: J'aurais une question. Cette politique à
laquelle vous référez, celle du manuel scolaire vous
êtes adjoint parlementaire à l'Education quand croyez-vous
que le ministère de l'Education ou le ministre sera en mesure de la
terminer?
M. Fallu: Elle sera bientôt en négociation avec nos
partenaires, dans quelques semaines maintenant, parce qu'il faudra s'être
entendus sur les conséquences financières de cette politique au
moment où la loi sera mise en application. On parle, je crois, du 1er
avril 1980.
Le Président (M. Boucher): Sommes-nous prêts
à passer à l'étude de l'article 1? J'appelle donc
l'article 1 du projet de loi. M. le ministre.
M. Vaugeois: M. le Président, vous a-t-on donné
l'ensemble des amendements?
Le Président (M. Boucher): Oui. J'aimerais avoir les
originaux. Il n'y en a pas à l'article 1.
M. Vaugeois: II y en a un de dernière minute à
l'article 1. Apparemment, il serait préférable de lire "L'aide
financière" plutôt que "L'aide".
M. Rivest: Si le ministre me permet étant
donné qu'il y en a, on pourra y revenir j'avais une
dernière remarque, si le ministre pense que c'est possible. Est-ce
possible d'avoir les documents je reviens sur l'affaire de la
propriété; quand on arrivera à l'article, cela pourra
peut-être aller plus vite si les gens les ont pertinents qui nous
permettraient d'établir le portrait le plus complet de la
propriété étrangère au Québec en
matière d'édition, de distribution et de commerce du livre? Y
a-t-il des chiffres? Il y a des chiffres qui ont été
présentés en commission parlementaire. Certains ont parlé
de 85%. D'autres ont contesté cette donnée-là. Je pense
que c'est un élément d'information quand même assez
capital. Si on n'a pas les chiffres précis, pourrions-nous au moins
savoir quelle est l'évaluation du ministère de ce problème
précis qui est la propriété étrangère?
M. Vaugeois: On peut donner de l'information, mais on ne pourra
certainement pas donner un tableau complet, parce que tout d'abord on n'a
jamais eu à vérifier la propriété comme nous la
posons là, mais aurait-on sur la main un document ou des documents qui
nous permettraient de donner une idée de la propriété des
éditeurs, des distributeurs et des libraires? C'est quelque chose qui
pourrait être fait quasiment à main levée, mais sous
réserve de...
M. Rivest: Oui, je ne veux pas de chiffre. C'est seulement pour
avoir une idée quand même assez précise, parce que cela a
fait l'objet d'une discussion.
M. Vaugeois: On dit ici que 61 distributeurs sont membres de
l'ADELF, l'Association des distributeurs, mais, sur un total de 73
distributeurs que nous avons relevés, il y en a 46 qui seraient
québécois, 20 qui seraient étrangers, en termes de
propriété...
M. Rivest: Vous n'avez pas l'importance relative des uns et des
autres? (11 h 45)
M. Vaugeois: Non. Il y en a sept dont on n'est pas certain. On
n'a pas tellement de chiffres sur les distributeurs. Il faudrait aller au
ministère du Revenu, et je pense qu'on n'aurait pas beaucoup de
succès. Le plus gros distributeur au Québec est sans doute de
propriété québécoise. C'est sans doute l'Agence de
distribution populaire. À peu près au même niveau, il y a
les nouvelles messageries Hachette, qui sont certainement d'une importance
comparable, mais on n'a pas de données sur les chiffres d'affaires des
distributeurs. Ce seraient des choses très approximatives qu'on pourrait
dire.
Remarquez qu'avec la loi sur la propriété, les
distributeurs de propriété étrangère ou
propriété mixte ont une activité libre. La seule chose,
c'est qu'un distributeur de propriété mixte ou
étrangère ne pourrait pas demander l'aide de l'État. On ne
prévoit pas non plus que les distributeurs de propriété
québécoise puissent demander l'aide de l'État, sauf quand
ils vont à la SDIC. Pour aller à la
Société de développement des industries
culturelles, ils ont besoin d'être agréés et, pour
être agréés, ils ont besoin d'être de
propriété québécoise. Tout le monde va accepter
cela, parce que c'est bien connu que le distributeur de propriété
étrangère, partielle ou complète, profite du financement
de sa maison mère, de l'entreprise qui est à son origine, tandis
que le distributeur de propriété québécoise ne peut
pas compter sur une maison mère pour le financer. Sa maison mère
sera la Société de développement des industries
culturelles.
Je vais essayer d'obtenir des chiffres semblables pour les libraires et
les éditeurs. Pour les éditeurs, je peux vous dire tout de suite
que, sauf pour les éditeurs de manuels scolaires qui ne sont pas
touchés par notre loi, pour les autres éditeurs, à peu
près tous les éditeurs qui font affaires au Québec sont de
propriété québécoise. De mémoire, je n'ai
pas d'exception à l'esprit. Est-ce qu'il y a un seul éditeur qui
fait affaires au Québec qui n'est pas de propriété
québécoise?
Il est possible qu'on découvre que telle maison a un partenaire
français ou belge. C'est possible qu'on découvre cela, mais,
à première vue, la très grande majorité des
éditeurs au Québec sont de propriété
québécoise. Ce n'est pas un marché lucratif, cela
n'intéresse pas les étrangers, et faire de l'édition
culturelle au Québec ne motive pas nécessairement des
étrangers. Pour les libraires québécois aussi bien le
dire, c'est assez simple comme situation, sur à peu près 150
libraires, il y en aurait près du tiers qui pourraient être
touchés par la question de la propriété. Le tiers, c'est
en termes de portes, parce qu'en termes d'entreprises, il y en aurait cinq ou
six, mais qui donnent au total près d'une cinquantaine de librairies.
À lui seul, le réseau Garneau-Dussault compte plus d'une
vingtaine de librairies.
M. Rivest: Avez-vous les chiffres en termes de volume
d'affaires?
M. Vaugeois: Non, on n'a pas de statistiques précises sur
le chiffre d'affaires...
M. Rivest: Je vous pose la question: Quand on dit dans certains
mémoires...
M. Vaugeois: Oui, c'est le...
M. Rivest: ... que les 85% dont on parle, cela se
réfère à cela dans le domaine des libraires.
M. Vaugeois: Oui. Voyez-vous, c'est que la distinction
n'était pas faite entre le manuel scolaire nécessairement et le
livre de bibliothèque, parce que quand Dussault-Garneau vendait des
livres à une polyvalente, à une commission scolaire ou un CEGEP,
c'était une commande globale tantôt pour la bibliothèque,
tantôt pour le manuel scolaire. Il va être difficile de
départager cela pour faire des statistiques. Je ne pense pas que ce soit
vraiment possible. Je pense que c'est le président de l'Association des
libraires qui avait parlé de 85%, mais lui-même ne pourrait pas
faire la distinction. On n'a pas de chiffres réels là-dessus.
Cela n'avait pas tellement de signification, parce que, comme le disait mon
collègue de Terrebonne, et comme on le suggérait dans le
débat précédent, révolution rapide du livre de
bibliothèque par rapport au changement de caractère du manuel
scolaire et à sa perte d'importance, va faire que ces chiffres n'auront
pas nécessairement de signification dans les prochaines années.
On me fait remarquer que l'affirmation était faite surtout pour
identifier les livres français ou étrangers par rapport aux
livres édités ici au Québec.
M. Rivest: D'accord, je conclus là-dessus, ces questions
de chiffres. Je comprends l'approche du ministre elle est
légitime et on l'a appuyée quant à nous d'essayer
d'aider, dans le domaine du livre, les entreprises québécoises
d'abord. Est-ce que les chiffres démontrent que la présence des
entreprises étrangères gêne le développement de nos
entreprises québécoises? C'est ça qui sous-tend la
politique, et c'est une conviction, j'imagine, qui est chiffrée ou enfin
qui... Ce n'est pas une affirmation en l'air. C'est ça que je veux faire
établir par le ministre, à savoir que ce n'est pas à cause
d'une espèce de gratuité ou de sentiment de retrait, de repli
qu'on fait ça. C'est parce qu'il y a un problème réel. La
propriété étrangère pose des problèmes aux
entreprises québécoises dans le domaine du livre. C'est ça
que je veux que le ministre établisse dès le départ.
M. Vaugeois: Dans un document qui a été
publié par... C'est le ministère de l'Industrie et du Commerce
qui a publié ça?
M. Rivest: À l'époque de M. Tremblay?
M. Vaugeois: Je ne suis pas sûr qu'il ait lu ce document,
M. Tremblay. C'est un comité d'étude sur le fonctionnement et
l'évolution du commerce au Québec.
M. Rivest: Quelle année?
M. Vaugeois: Cela vient d'être publié, en août
1978.
M. Rivest: Ah oui! M. Tremblay était ministre.
M. Vaugeois: Oui, mais, en tous cas... Alors, à la page
44, on lit ceci: "En ce qui concerne la répartition des ventes entre les
librairies à succursales multiples et indépendantes, nous ne
connaissons pas l'historique de son évolution. Cependant, la croissance
des librairies à succursales multiples semble avoir été
forte au cours des cinq dernières années. En 1978, la part de
marché des librairies à succursales multiples se situerait entre
75% et 80% des ventes des librairies. Ce sont les informations recueillies
auprès des membres du secteur.
"Un autre-facteur important à considérer dans
l'évolution des librairies à succursales multiples est
l'évolution de la propriété. En effet, de récentes
transactions ont encore contribué à abandonner le réseau
des librairies à succursales multiples aux capitaux
étrangers."
Cela a été l'évolution des dernières
années. Ce qui est arrivé, en fait, c'est que la Loi de
l'agrément des libraires a créé des marchés
protégés un petit peu partout et on a vu naître
momentanément des libraires locaux, mais ils ont subi la pression de la
succursale de la librairie réseau et la librairie réseau avait
plus de moyens d'aller chercher le marché institutionnel et aussi de
supporter de mauvaises années de démarrage. Le résultat a
été que le libraire local, généralement, n'a pas
tenu le coup et la librairie réseau, après un certain temps, si
elle se rend compte que ça ne répond pas à ses normes de
rentabilité, va même se retirer avec la situation que le libraire
local n'a pas résisté à l'assaut et que la librairie
réseau ne tient pas finalement à rester, parce que ce n'est pas
assez rentable, compte tenu de ses critères.
Je pense que je pourrais donner l'exemple d'Alma. C'est arrivé
dernièrement à Alma où une librairie rattachée
à un réseau, que je ne veux pas nommer inutilement a fermé
finalement. Ces gens sont allés à Alma pour profiter de la loi du
livre. Ils ont essayé. Finalement, ils se sont dit: Bon! Ce n'est pas
assez important pour nous. On est mieux de se concentrer dans l'est de
Montréal ou quelque chose comme ça où il y a un bassin
plus important.
On ne peut pas être catégorique pour répondre
à votre question et dire, de façon très nette: Cela nuit
ou ainsi de suite. Mais on voit la tendance. Cela, c'est un document où
nous n'avons rien eu à faire. C'est une enquête qui a
été faite par un autre ministère au niveau du commerce de
détail, mais qui rejoint notre appréciation de la situation.
En région, notre approche n'est pas d'empêcher la librairie
réseau de s'y installer, pas du tout, mais c'est d'assurer au libraire
qui ouvre, qui s'installe en région, des moyens, si possible, de survie.
Ce n'est pas pour empêcher l'autre d'exister. D'ailleurs, si on faisait
une étude de localisation du tiers des librairies qui appartiennent
à des réseaux qui sont surtout de propriété
étrangère, elles sont fortement concentrées, ces
librairies, dans Montréal et dans Québec. On en trouve
exceptionnellement en dehors et, quand c'est en dehors, c'est encore dans de
grands centres. Par exemple, il n'y a pas de librairie "Classic", je pense, en
dehors de Montréal et de Québec et encore il y en a une à
Québec. Dans le cas de Dussault-Garneau, on en trouvera à
Rimouski, à Trois-Rivières, à Sherbrooke, à Hull et
même à Toronto, mais, pour rester au Québec... Coles est
concentrée à Montréal. Smith est concentrée
à Montréal. Ces gens ne vont pas en région, de toute
façon. Ils ne font donc pas la vie dure au petit libraire local. Mais le
petit libraire local, pour démarrer lui-même, a besoin qu'on
l'assure d'un minimum de marché.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Gaspé.
M. Le Moignan: Puisque le ministre parle de librairies locales,
si une librairie voulait s'installer... Je prends, par exemple, la ville de
Gaspé, où il n'y a pas de librairie locale...
M. Vaugeois: Oui.
M. Le Moignan:... elle peut compter sur l'aide
financière...
M. Vaugeois: J'aime beaucoup la question du député
de Gaspé. Dès que cette loi va avoir franchi les étapes
nécessaires, ce que j'espère, nous allons demander à la
Société de développement des industries culturelles de
souscrire à un plan de développement des librairies que nous
avons mis dans nos services. Parce que cette société est une
société de financement, mais ça peut être une
société d'initiatives également. Nous allons lui
suggérer c'est conforme à la Loi créant la
Société de développement des industries culturelles
d'avoir un programme pour inciter des libraires à se moderniser ou
encore des gens à ouvrir des librairies là où il n'y en a
pas, avec des programmes spéciaux de financement. Je ne peux pas dire
concrètement que ça pourra jouer dans le cas de
Gaspé...
M. Le Moignan: Non, c'est seulement un exemple.
M. Vaugeois: Mais il reste qu'au cours de l'année
quatre-vingt, normalement on devrait voir la SODIC annoncer un plan d'aide au
développement des librairies et cedit plan pourrait être valable
pour des librairies qui existent déjà, mais qui ont à
s'agrandir ou à se moderniser, et pour des librairies éventuelles
dans certaines régions. À côté de ça, il y
aura le plan de développement des bibliothèques publiques dont
j'ai rendu publics certains éléments, et également, nous
n'en avons pas parlé mais mon collègue de Terrebonne aurait pu en
faire allusion de façon plus précise, toute la révision du
programme des budgets d'acquisition en milieu scolaire. Nous devons attendre la
revue de programme pour en parler de façon plus explicite, mais c'est en
marche.
M. Le Moignan: En fin de semaine, j'ai rencontré une
personne à Gaspé même qui était
intéressée à ouvrir une librairie, qui sait qu'on parle
dans le moment de la loi du livre. C'est une question que cette personne m'a
posée.
M. Vaugeois: Voyez-vous, déjà cette personne aura
l'assurance que le marché institutionnel de sa commission scolaire, de
son CEGEP lui sera réservé ou sera réservé aux
libraires de la région, mais ce n'est pas nécessairement
suffisant. Si, en plus, on dit que le budget d'acquisition de la
bibliothèque du CEGEP et celui de la bibliothèque de la
polyvalente vont être augmentés, ça devient un peu plus
intéressant.
Egalement, si la bibliothèque publique soutient les habitudes de
lecture, on sait très bien que les gens ne vont pas tous chercher leurs
livres en bibliothèque, mais quand l'habitude de lecture se
développe, les gens cherchent à acheter plus de livres. Tout
ça se tient, c'est un pari qui peut être tenu sur quelques
années. On ne peut pas attendre d'effets magiques en un an.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. Vaugeois: On
revient à l'article 1? M. Rivest: L'article 1...
Dispositions générales
Le Président (M. Boucher): Si j'ai bien compris à
l'article 1, M. le ministre a proposé un amendement: après le mot
"aide" ajouter le mot "financière".
M. Rivest: Si le ministre n'a pas d'objection, parce que ma
remarque va précéder sa suggestion... À l'article 1, comme
plusieurs mémoires l'ont demandé, j'ai préparé le
texte quand je dis "j'ai" ça comprend mon conseiller...
M. Vaugeois: Vous parlez comme Louis XIV, M. le
député.
M. Rivest: Louis XIV?
M. Vaugeois: Le "je" est collectif.
M. Rivest: Louis XIV?
M. Vaugeois: Trois après Louis XI.
M. Rivest: Plusieurs mémoires ont manifesté cette
réserve ou ont formulé ce souhait, savoir que les
définitions soient incluses dans la loi. Nous avons
préparé, pour la réflexion du ministre, à partir
d'ailleurs des définitions que le ministre a lui-même
avancées à l'intérieur de ses avant-projets de
règlements, par contre en en précisant une ou deux autres, dont
le mot "aide"... J'aimerais bien que les définitions de base puissent
être incluses dans la loi. Cela se fait. Je sais que le ministre va me
répondre en disant: Écoutez, ça prend un peu de souplesse,
etc. Bien sûr, c'est probablement son argument, je le
précède. Néanmoins, dans toutes les lois ou presque, les
définitions sont incluses dans les projets de loi. On sait ce dont on
parle. Cela assure une certaine stabilité et un certain cadrage qui est
absolument essentiel à la définition de la loi, parce que
autrement, malgré les précautions que le ministre peut prendre
sur la façon dont les règlements vont être
ultérieurement modifiés, il reste qu'il y aura une loi dans les
statuts, à sa lecture même, dont on ne pourra nullement
connaître les tenants et les aboutissants, parce que ce sera toujours
à la merci du Conseil des ministres d'élargir à sa
volonté, sans doute avec d'excellentes intentions, la portée.
M. Vaugeois: ...
(12 heures)
M. Rivest: C'est beaucoup plus un argument technique qu'un
argument de fond et je ne prête pas de mauvaises intentions au ministre.
Loin de moi cette pensée, mais, néanmoins, je pense que sur le
plan de la technique législative, au moins que le ministre nous dise
pourquoi il refuse de faire cela. Cela se fait constamment. L'argument de fond,
c'est que, quand on a une loi, il faut que le cadrage de la loi, ses tenants et
ses aboutissants soient bien déterminés. Sur ce plan-là,
le ministre ne peut quand même pas me dire que c'est impossible de les
définir dans la mesure où ces règlements ont
eux-mêmes défini, de toute façon, que mon amendement
reprend...
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jean-Talon, je m'excuse. On a déjà un amendement qui avait
été proposé par le ministre. Est-ce que cet amendement est
adopté, d'abord?
M. Rivest: Je pense que le ministre était d'accord avec
moi pour...
M. Vaugeois: C'est parce que si on adoptait son amendement, cela
deviendrait l'article 1.
M. Rivest: C'est cela.
M. Vaugeois: Est-ce que je peux, M. le Président, faire
remarquer que...
M. Rivest: Est-ce que je peux au moins le faire formellement pour
que vous ayez l'occasion de remporter...
M. Vaugeois: Oui.
Le Président (M. Boucher): ... votre amendement, M. le
député de Jean-Talon, et c'est le premier amendement que je
reçois.
M. Rivest: ... si jamais vous êtes contre, que vous avez
l'occasion de remporter une victoire, de défaire l'Opposition? Je pense
que vous avez besoin de cela aujourd'hui. Alors, je vais le déposer
formellement. Il est très long. Est-ce que de consentement, on
pourrait... parce que je reprends toutes les définitions.
Le Président (M. Boucher): Pour le journal des
Débats, il pourrait être reproduit en annexe, M. le
député de Jean-Talon, étant donné qu'il a quatre
pages.
M. Rivest: D'accord. J'attire l'attention du ministre. On a
spécifié mais on y reviendra au moment de la discussion de
l'article 1 tel que rédigé dans le projet de loi on a
défini le mot "aide". J'aurai des explications à fournir sur la
définition qu'on a avancée.
M. Vaugeois: M. le Président, il s'agit d'une loi du
livre. Il n'y a pas de problème de définition. Les
définitions qu'on trouve dans les règlements sont les
définitions qu'on trouve dans le dictionnaire. Si jamais, dans les
définitions proposées par le député de Jean-Talon,
il y en avait qui allaient dans le sens contraire du dictionnaire ou des
dictionnaires habituellement en usage dans le milieu du livre, peut-être
que ce serait opportun de commencer par définir nos termes. Mais,
très sérieusement j'en ai d'ailleurs un, au cas où
cela deviendrait le point majeur de nos discussions j'ai un article 1
qui est prêt pour donner des définitions, mais...
M. Rivest: C'est merveilleux. Je suis prêt à
abandonner le mien pour prendre celui du ministre.
M. Vaugeois: ... les experts du gouvernement, ceux qui sont
restés là et qui sont un héritage de l'ancien
gouvernement, des gens en qui on a confiance, ce sont des experts en
législation, nous ont vraiment demandé de renoncer, dans une loi
comme celle-là, à définir au début ces termes qui
ne posent pas de problèmes, disent-ils, qui ne feraient qu'alourdir la
loi. À leur avis, il suffit de les trouver dans les règlements
à titre de rappel. Etant donné les précautions que nous
prenons pour modifier les règlements, je pense qu'on se met à
l'abri. Je suis d'accord avec le député quand il dit qu'au
départ cela rend la loi plus complète, mais nous renonçons
à avoir une loi qui dit tout. C'est plutôt une loi-cadre qui
permet les règlements qu'une loi qui est complète en
elle-même qui n'a pas besoin de règlements. Comme cette loi est
plutôt une loi-cadre qui a besoin de ces règlements, les experts
du ministère de la Justice comme ceux du comité de
législation nous exhortent à ne pas commencer pas des
définitions qui n'ajoutent rien, parce que les termes utilisés
dans la loi des termes au sens habituel et au sens des dictionnaires et cela ne
pose pas de problème de compréhension. Il y a des lois dont on a
besoin de définir les termes pour comprendre. Une loi comme
celle-là ne pose pas ce genre de problème.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Jean-Talon.
M. Rivest: Je suis d'accord avec le ministre quand il dit: On
peut sans doute procéder par règlement, mais, sur le plan de la
technique législative, il est certainement préférable
je comprends les arguments que les légistes ont pu donner au
ministre de définir cela. Deuxièmement, tous les
intervenants, sauf erreur, au niveau de la commission parlementaire, ont
demandé que les définitions soient incluses dans la loi, non
seulement, je pense, ce qui était leur préoccupation, à
des fins de clarté législative ou d'esthétique
législative, je pense que ce n'était pas leur
préoccupation. Il faut quand même se rendre compte qu'on traite
ici d'activités commerciales. On parle du commerce du livre. Or, les
entreprises, que ce soient les éditeurs, les distributeurs, les
libraires, vont faire des investissements, vont planifier le
développement de leur entreprise sur la base d'un texte
législatif, qui est la loi qui va régir leur commerce.
Il y a là un argument d'équité, en ayant à
l'esprit la dimension proprement commerciale. Ils vont faire des
investissements, donc ça implique une certaine stabilité des
règles du jeu, stabilité que garantit beaucoup plus une loi,
parce qu'une loi doit revenir devant le Parlement formellement. Si, d'aventure,
le ministre, pour des raisons sans doute louables de politique à
l'intérieur de ce que le gouvernement entrevoit du commerce de livres
fait qu'ils sont à la merci d'une décision qui sera toujours
discrétionnaire, sous réserve du comité consultatif, je
parle commerce, affaires, argent, je parle investissements, je trouve que la
préoccupation des commerçants est très saine, d'exiger que
ce soit dans la loi, ça leur donne une garantie de stabilité.
Comme il y a des investissements de l'argent, de l'emploi en cause, je
parle vraiment de la dimension commerciale des choses, c'est très
important qu'une définition aussi essentielle que celle du mot "livre",
on ne l'exclue pas, qu'on ne la fasse pas disparaître car c'est un
élément que la définition du dictionnaire, qui serait
important dans l'élaboration d'une politique.
Si le ministre ne veut pas prendre toutes les définitions, au
moins qu'il y en ait quelques-unes de fondamentales, dont celle, je pense, du
mot "livre", il faudrait que ça y soit, pour des raisons de
stabilité commerciale, des raisons de planification du
développement des entreprises engagées dans le secteur.
Le Président (M. Boucher): Merci. M. le
député de Gaspé.
M. Le Moignan: Dans le même sens, M. le Président.
Je suis peut-être lent de comprenure, mais le ministre, tout à
l'heure, nous a dit qu'il ne voyait pas la raison d'inclure les
définitions. Mais le ministre nous dit qu'il a déjà un
nouvel article 1 qui est prêt. Est-ce qu'il prévoyait des
questions de l'Opposition à ce moment-là? S'était-il dit:
Si l'Opposition nous demande d'inclure les définitions, nous allons les
inclure? Je ne vois pas pourquoi le ministre a déjà un nouvel
article 1 en main. Est-ce que le ministre s'est dit: si l'Opposition n'en parle
pas, on va remiser notre article, ou, si on en parle, on pourra peut-être
l'inclure dans le projet de loi?
M. Vaugeois: C'est dit en vos propres termes, mais c'est un peu
ça.
M. Le Moignan: C'est à peu près la raison.
M. Vaugeois: Écoutez, là-dessus, comme ça ne
change rien, si ce n'est pas à une place, c'est à l'autre.
À l'autre, c'est dans les règlements et c'est plus facile de
corriger ou de faire suivre les règlements par rapport au réel.
Les dictionnaires
sont réédités continuellement, le sens des mots se
précise à l'usage, etc. Il y a des choses nouvelles qui
apparaissent, on corrige les dictionnaires, sans revenir devant
l'Assemblée nationale.
Nous autres, on voulait se donner la possibilité de corriger nos
définitions, au long des années, sans nécessairement
déranger les membres de l'Assemblée nationale, mais en prenant
quand même la précaution de soumettre tous ces amendements
à un conseil consultatif, lequel rend ses avis publics, etc. Si les
membres de l'Assemblée nationale, à cette époque, trouvent
dangereuse l'évolution des définitions, trouvent que, pour les
raisons données par le député de Jean-Talon, il faut
intervenir, il y a la possibilité d'intervenir, elle existera, ce ne
sera pas fait en cachette, mais on trouve que ce n'est ni utile, ni
nécessaire de l'écrire dans la loi même.
Au cas où ce serait pour les membres de l'Opposition quelque
chose de majeur, comme ce n'est pas quelque chose de mauvais en soi, on avait
préparé des définitions, mais les principales, ce ne sont
pas nécessairement toutes celles proposées dans la proposition
d'amendement du député...
M. Rivest: Par exemple, vous pourriez prendre la base, je pense
que c'est essentiel, c'est le paragraphe 2 de l'article 37.
M. Vaugeois: Voulez-vous, on va faire un échange de bons
procédés, je vais vous montrer que, pour nous, c'était
utile de définir éventuellement le distributeur,
l'éditeur, le libraire et le livre. Par exemple, le conseil, c'est
défini dans la loi...
M. Rivest: Je suis d'accord avec ça.
M. Vaugeois: Voulez-vous, on va faire un échange de
documents, mais je continue de croire que ce n'est pas nécessaire? Mais
si on en fait une histoire, je peux bien mettre ça à l'article
premier. À ce moment-là, j'aurais été plus
conciliant avec l'Opposition, moins avec les experts de la Justice en
particulier. Cela a du bon sens, mais ce n'est pas nécessaire.
M. Le Moignan: Pour autant que le ministre nous assure que les
dictionnaires ne changeront pas trop souvent et que le ministre n'influencera
pas les dictionnaires surtout...
M. Vaugeois: Là, par exemple, il y a une précaution
à prendre...
M. Le Moignan: Si on a les assurances, on n'a pas besoin d'aller
plus loin.
M. Vaugeois: Pour ne pas se retarder pour le reste cela ne
change rien à la loi, de toute façon je proposerais que...
On est à échanger des documents, on va regarder cela. De toute
façon, je pense qu'on ne terminera pas pour midi trente. On va regarder
cela et, pour la prochaine séance, on s'en reparlera, lorsqu'on aura eu
l'occasion de comparer nos définitions.
M. Rivest: Avec deux remarques additionnelles, si vous le
permettez. Le mot "contrôle", je me permettrais d'insister, vous verrez
dans votre définition. Et deuxièmement, le mot "aide".
M. Vaugeois: On va le définir à une place ou
à l'autre.
M. Rivest: Mais, dans la mesure où on voudrait en
tout cas, ce qu'on envisage, je ne sais pas quelle est la volonté du
ministre je le signale rapidement pour qu'on passe à l'article 1,
tel que proposé, pour l'instant.
Nous, on dit: Toute assistance financière ou technique
prévue par la Loi constituant la Société
québécoise de développement des industries culturelles. On
le restreint à cela, parce que c'est une entreprise commerciale qui peut
recevoir de l'aide à d'autres titres. Par exemple, la
Société de développement industriel pourrait
peut-être... Il y a un livre, parmi les milliers de livres
gouvernementaux, sur le commerce, le développement du commerce. Il y
aura peut-être une législation. Vous savez, l'étude qui a
été commandée par le ministère de l'Industrie et du
Commerce. Il y aura peut-être une législation qui viendra pour
donner suite à cela, pour aider le secteur commercial "at large".
M. Vaugeois: C'est la raison d'être de l'article 37,
cinquièmement.
M. Rivest: En tout cas.
Le Président (M. Boucher): Pour que ce soit bien clair, je
reçois le sous-amendement du ministre à l'amendement du
député de Jean-Talon.
M. Rivest: Mais tout est suspendu.
Le Président (M. Boucher): Et nous suspendons l'amendement
et le sous-amendement.
M. Vaugeois: Et, éventuellement, on décalera les
numéros des articles qu'on aura acceptés d'ici midi trente
minutes, si on l'introduit.
Le Président (M. Boucher): II n'y aurait pas lieu de
suspendre l'article 1, étant donné que nous pourrons
renuméroter lorsque nous adopterons l'article, si jamais un nouvel
article 1 se présente.
Est-ce que l'aide financière est adoptée? Est-ce que
l'article 1 est adopté tel qu'amendé?
M. Rivest: L'aide, le ministre l'a dit brièvement dans son
discours, mais l'aide financière, vous vous y référez de
quelque ordre qu'elle soit, peu importe, qu'elle vienne de n'importe
où.
M. Vaugeois: Oui.
M. Fallu: Suivant la loi. Il faut lire l'article 1.
M. Rivest: La loi, c'est la loi au sens
générique.
M. Vaugeois: Suivant la loi, mais c'est toute aide
financière du gouvernement.
M. Rivest: Cela veut dire la SDI, cela veut dire n'importe quoi
qui pourrait survenir.
M. Vaugeois: Oui.
M. Rivest: Vous restreignez cela, parce qu'à la SDI ainsi
qu'à la Société des industries culturelles, il n'y a
aucune espèce de référence dans la pratique aux
critères de la propriété.
M. Vaugeois: C'est juste. Absolument.
M. Rivest: Et le ministre est bien conscient qu'à ce
moment-là, pour le secteur du livre, il ampute l'aire d'activité
d'autres organismes ou d'autres instances de l'État en imposant son
critère de propriété.
M. Vaugeois: C'est une bonne remarque du député de
Jean Talon. Et c'est à cause de cette remarque que l'article 37.5 est
très important. C'est pour prévoir ces cas-là que nous
avons l'article 37.5 qui sera maintenu, si tout le monde est d'accord.
Effectivement, le député a parfaitement raison de dire qu'il ne
faudrait quand même pas empêcher la SDI éventuellement
d'aider une entreprise à propriété mixte ou même
à propriété étrangère. Il n'y a rien qui
empêche cela. Cela s'est déjà fait, cela peut se faire
encore.
M. Rivest: Dans le domaine du livre?
M. Vaugeois: Je ne sais pas si cela s'est fait dans le domaine du
livre pour l'établissement ici, mais, pour l'exportation, cela s'est
certainement fait.
M. Rivest: Est-ce que je comprends bien le sens de l'article 1?
Tel que rédigé, cela voudrait dire que cette aide-là...
Prenons l'exemple de la SDI, qui a un gros programme qui se développe du
côté de l'exportation. (12 h 15)
M. Vaugeois: Cela peut se produire.
M. Rivest: Elle ne pourrait pas aider des entreprises mixtes. Il
faudrait que ce soit uniquement des entreprises agréées,
autrement dit, des entreprises à 100% à propriété
québécoise.
M. Vaugeois: Sans qu'on se serve de l'article 37, elle ne
pourrait pas, mais avec l'article 37, elle pourrait.
M. Rivest: Imaginez-vous dans quelle situation vous allez vous
placer. Vous allez faire cela par règlement, donc par décision
ministérielle, pour une entreprise.
M. Vaugeois: Non, on va, par règlement, préciser
les catégories de cas où cela pourra se produire. On peut les
prévoir. Vous les prévoyez vous-même quasiment comme cela,
par génération spontanée.
M. Rivest: Oui, c'est parce que je suis intuitif.
M. Vaugeois: Oui. Imaginez-vous une armée de
fonctionnaires qui essaient de faire l'inventaire des cas possibles. Ils ont
déjà identifié les cas possibles.
M. Rivest: Je suis d'accord, je comprends très bien ce que
le ministre dit.
M. Vaugeois: On est tellement conscient de ce que dit le
député de Jean-Talon que je peux lui faire l'aveu que, dans les
amendements qu'on avait préparés, on avait même
pensé écrire dans l'article 1 "sauf exceptions, et patati et
patata", mais on trouvait que cela avait l'air un peu ridicule de commencer de
cette façon-là et on a préféré se servir de
l'article 37 et faire attention dans nos règlements qui découlent
de l'article 37 pour prévoir des catégories, pour ne pas avoir
à revenir là-dessus cas par cas.
M. Rivest: Concrètement, pour suivre le ministre, pour
bien comprendre quand il parle des catégories, qu'est-ce qu'il vise? Il
n'existe pas, je pense, actuellement, d'avant-projet de règlements
à ce titre-là. Le ministre peut-il nous dire substantiellement
comment il voit ses règlements? Ce que je veux éviter je
pense que c'est la préoccupation du ministre aussi c'est de
placer quelque gouvernement ou quelque ministre des Affaires culturelles devant
une demande spécifique d'une entreprise qui ira demander de l'aide pour
déroger à cela et qui amènera le ministre à rendre
une décision ad hoc. Cela se situe quand même dans un milieu de
concurrence. Le ministre sera dans une situation extrêmement difficile.
Il fera l'objet de critiques, parce qu'il aura donné l'impression de
donner un coup de main à une entreprise mixte, qui ne sera pas
agréée. En l'acceptant, il va rendre des décisions ad hoc.
Il va y avoir un lobby. Ce sera des décisions pour des entreprises
particulières.
M. Vaugeois: J'en ai perdu des bouts, parce qu'on m'expliquait
quelque chose de compliqué. Pouvez-vous résumer la fin de votre
question?
M. Rivest: Mon bout ou ce qu'on vous expliquait?
M. Vaugeois: J'écoutais ce qu'on disait derrière
moi.
M. Rivest: Ce que je veux dire, en fait, c'est que... Je ne le
sais plus, moi non plus.
M. Vaugeois: Je trouvais votre question assez compliquée
pour douter que vous puissiez la répéter deux fois.
M. Rivest: Ce que je crains, c'est la position dans laquelle le
ministre sera placé à l'intérieur
des règlements qui seront des exceptions. Il me parle de
catégories, à un moment donné, qu'il va excepter face, par
exemple, à l'action de la Société de développement
industriel pour des fins d'exportation, pour prendre un exemple concret, mais,
en pratique, ce n'est pas de cette façon que cela va se passer.
Cela va être une entreprise mixte non agréée qui va
aller voir le ministre et lui dire: Voici, M. le ministre, nous avons un projet
d'expansion dans tel secteur. On peut obtenir l'aide de la SDI. Voulez-vous
pour nous? Donc, tous vos règlements, vos gestes risquent d'être
des décisions ad hoc. Ce seront des décisions qui risquent
d'être arbitraires.
M. Vaugeois: Je ne suis pas tout à fait d'accord avec
cela, parce qu'on en a déjà prévu. On a déjà
prévu l'aide gouvernementale, mais à d'autres titres que ce qui
est prévu avec cette loi. Par exemple je prends un cas concret
qui ne peut choquer personne Garneau-Dussault. Si Garneau-Dussault reste
dans la situation de propriété actuelle qui ne la rend pas
admissible à l'aide normale telle qu'on la prévoit, si ce
réseau acceptait de souscrire à un certain nombre de nos
propositions d'interventions commerciales à tel endroit ou de soutien
à une politique d'exportation pour tels fonds, etc., c'est
déjà prévu que non seulement on pourrait lui dire oui si
elle nous demandait quelque chose, mais il est déjà prévu
de lui proposer des programmes. C'est particulièrement vrai pour toutes
les associations d'entreprises.
Je vais vous donner des cas concrets que nous allons prévoir par
règlement. Un premier cas, ce serait une entreprise d'édition,
une maison québécoise, qui voudrait faire une affaire avec une
maison française pour s'assurer que tel livre d'Antonine Maillet a des
chances de fonctionner en France. On sait fort bien que, si ce livre arrive en
France avec l'étiquette Leméac, il a peu de chance de faire
fureur. Dès le départ, il y a une entente d'envisagée avec
une maison française à des fins de diffusion en France. Nous
voulons être certains que nous n'empêcherons pas des ententes entre
une entreprise qui peut profiter de notre aide et une entreprise qui ne
pourrait pas profiter de notre aide. On ne voudrait pas brimer les
possibilités commerciales de nos entreprises.
Donc, on va prévoir des ententes d'affaires. On va prévoir
des ententes à l'exportation. On peut même prévoir des
opérations à l'intérieur du Québec à des
fins de diffusion, encore une fois. C'est déjà prévu au
niveau de la distribution. Nous avons déjà des petits programmes
qui prévoient pour le libraire qui est en région une aide
financière qui cherche à compenser la distance. On a un programme
qui s'appelle, je pense, abolir la distance, en termes de coûts. On
abolit la distance en intervenant sur les frais de transport et sur les
communications téléphoniques ou de télex. Si le libraire
d'Alma ou de Chicoutimi est en contact avec les nouvelles messageries Hachette,
il n'est pas question de l'empêcher de profiter de notre programme d'aide
au transport ou d'aide à l'interurbain, aux lignes out Watt, quand il
communique avec un distributeur de propriété
étrangère. Ces cas doivent être prévus par
règlement, autrement la loi nous amènerait à dire des
choses qu'on ne veut absolument pas.
M. Rivest: Je comprends, il y a des problèmes de
coédition et des trucs comme cela.
M. Vaugeois: C'est cela.
M. Rivest: Cela veut dire que l'article 1, tel qu'il se lit, lu
par une entreprise à 100% propriété
québécoise, a l'air très intéressant. Elle se dit:
C'est nous qui allons profiter de cela à l'exclusion des autres.
L'article 1, avec les règlements qui vont suivre, va faire en sorte que
même une entreprise dans le domaine du livre qui ne serait pas
agréée va dire: L'article 1, il y aura moyen de passer à
côté. C'est cela?
M. Vaugeois: Non, par exemple...
M. Rivest: La signification de votre article 1, je comprends
qu'il va y en avoir une, mais il n'y en aura pas une aussi large et aussi
généreuse pour les entreprises québécoises à
100% que le laisse croire le libellé de l'article 1.
M. Vaugeois: Mais ce qui est important, c'est que
l'éditeur, parce que québécois, ayant droit à
l'aide du gouvernement pour une édition, une publication, ne se verra
pas dire en même temps que si jamais, pour la diffusion de cet ouvrage,
il a le malheur de traiter avec un libraire non québécois ou avec
une agence de distribution non québécoise, on lui enlève
l'aide qu'on lui a accordée. Il ne faut quand même pas l'aider
d'une main et l'empêcher d'agir de l'autre. On va, en même temps,
lui dire: Ce genre d'aide est réservé à l'éditeur
québécois, bien! sauf qu'on n'empêche pas l'éditeur
québécois de faire des affaires avec d'autres. Cela, il faut le
dire au départ.
Mais, pour autant, il sait bien que cette caisse lui est
réservée. D'ailleurs, nous n'inventons rien. Le Conseil des arts
d'Ottawa a des pratiques semblables. On ne peut pas soumettre au Conseil des
arts d'Ottawa un programme d'édition qui ne correspond pas à des
livres écrits uniquement par des auteurs canadiens. Ce genre de
réserve existe déjà. Mais ça n'empêche pas le
même éditeur d'avoir dans son catalogue des livres écrits
par des auteurs non canadiens.
M. Rivest: Oui. Concrètement, mettons qu'une entreprise
non agréée, un libraire non agréé veut s'adresser
à la Société de développement industriel. Je ne
sais pas si c'est dans le mandat spécifique de la SDI...
M. Vaugeois: Non, ce n'est plus possible, là.
M. Rivest: II ne peut plus, mettons, pour développer un
réseau, son réseau de librairie en région
excentrique...
M. Vaugeois: II faut s'entendre. La SDI ou la SODIC?
M. Rivest: La SDI. M. Vaugeois: Ce n'est plus possible.
M. Rivest: Ce n'est plus possible? M. Vaugeois: Non.
M. Rivest: Vous ne pourriez pas l'accepter par
règlement?
M. Vaugeois: Non, d'après ma connaissance on peut
me corriger avec cette nouvelle loi, tout le secteur des industries
culturelles n'est plus de la compétence de la SDI, mais il est de la
compétence de la SODIC.
M. Rivest: Autrement dit, la rédaction de l'article qui
donne les mandats dans la nouvelle société, la SDIC, à
votre avis, c'est exclusif, lorsqu'on dit: favoriser le développement de
l'industrie du livre, à un moment donné. C'est quel article?
L'article 4 de la Loi de la Société québécoise de
développement des industries culturelles. Favoriser la création
et le développement des entreprises culturelles
québécoises dans le domaine du livre. Cette rédaction
exclut l'article 4 de la Loi de la Société
québécoise de développement des industries culturelles. On
dit: Le mandat de la société a pour objet de favoriser la
création et le développement des entreprises culturelles
québécoises dans le domaine du livre et autres, etc.
M. Vaugeois: D'accord.
M. Rivest: Cela, à moins qu'il n'y ait d'autres
dispositions, vous croyez que c'est exclusif...
M. Vaugeois: Non, parce qu'il y a une situation...
M. Rivest: Cela enlève sa juridiction à la
Société de développement industriel.
M. Vaugeois: Non, pas nécessairement. Cependant, comme il
y avait la loi des prêts garantis, qui était de la
compétence de la SDI et ça n'avait jamais tellement marché
d'ailleurs... Avec la création de la SODIC, il a été dit
expressément qu'à partir de la création de la SODIC, ce
qui était la loi du prêt garanti, qui était sous la
juridiction de la SDI, passait à l'autre. De fait, on en a déduit
avec l'article 4 et cet article-là que, dorénavant, ce
secteur-là était de la compétence de la SODIC. La SDI
avait déjà assez de mal avec ça; maintenant, elle prend
prétexte de 4 et de 32, je ne sais pas comment on pourrait
interpréter ça sur le plan juridique, pour dire: Cela, c'est
maintenant du domaine de la SODIC. C'est vraiment dans l'ordre des choses;
même si on ne lui a pas formellement interdit d'agir, elle avait
déjà assez de mal à agir auparavant que, maintenant qu'il
y a une société d'État pour ce secteur-là, on ne
peut pas prévoir que la SDI aurait à intervenir dans le genre de
cas que vous supposiez.
Même, pour vous aider, il reste que, par un autre biais, ça
pourrait arriver et ce sont des catégories que nous devrons
prévoir.
M. Rivest: En mentionnant le mot "aide", est-ce que vous avez
dressé l'ensemble des programmes ou des lois qui pourraient tomber sous
ce vocable?
M. Vaugeois: Ce sont principalement les programmes du
ministère des Affaires culturelles et...
M. Rivest: La SDI s'ajoute à ça...
M. Vaugeois: ... ce qui en découle au niveau des budgets
d'acquisition des bibliothèques subventionnées soit par les
Affaires culturelles soit par l'Education, ou peut-être
éventuellement par les Affaires municipales, par exemple, mais c'est
certain qu'il restera des programmes au ministère de l'Industrie et du
Commerce qu'il nous reste à identifier, aux Affaires
intergouvernementales, au titre de la coopération
franco-québécoise, qui pourront aller au-delà. On peut
faire une liste, mais une liste qui serait vraie aujourd'hui...
M. Rivest: Le Conseil exécutif aussi.
M. Vaugeois: Cela dépend s'il y a des changements de
gouvernement.
M. Rivest: Mais non, avec le livre intitulé La nouvelle
entente Québec-Canada...
M. Vaugeois: Cela a été édité par
l'Editeur officiel.
M. Rivest: Dont on va changer le mandat prochainement?
M. Vaugeois: De l'Editeur officiel? M. Rivest: Oui.
M. Vaugeois: Pas nécessairement. Si le
député veut en savoir davantage là-dessus, je pourrais lui
dire que nous allons régler...
M. Rivest: Non, on s'informe.
M. Vaugeois: ... un des vieux problèmes qu'avait le
gouvernement libéral de 1970 à 1976.
M. Rivest: Vous avez été... Là-dessus, je
dois vous rendre hommage parce que les vieux problèmes, vous achevez de
les régler.
M. Le Moignan: Dans trois ans, ils sont bons!
Le Président (M. Boucher): Est-ce que l'article 1 tel
qu'amendé est adopté?
M. Rivest: Sur division, à cause de
l'imprécision.
Le Président (M. Boucher): Sur division. J'appelle
l'article 2.
Est-ce qu'on suspend à l'article 2 immédiatement, ou
si...
M. Vaugeois: On pourrait bien faire les articles 2 et 3 et...
Non? D'accord. De toute façon, on m'informe qu'on va continuer,
très probablement, mardi prochain.
M. Rivest: On ne siégera pas cet après-midi?
M. Vaugeois: Cela n'a pas l'air. Je ne sais pas pourquoi.
M. Rivest: On pourrait faire un cadre.
M. Vaugeois: Pour pouvoir s'avancer un peu.
M. Rivest: C'est cela, en tout cas quant à moi...
M. Vaugeois: Avez-vous beaucoup d'amendements comme cela?
M. Rivest: Non, il n'y a rien de... C'est une bonne loi que le
ministre nous présente. Un bon ministre avec un bon gouvernement, alors
l'Opposition est un peu prise au dépourvu.
M. Vaugeois: Je ne voudrais pas insister trop là-dessus,
mais...
M. Rivest: Entre nous, pour autant qu'on ne dise pas cela au
monde, ce n'est pas grave; mais entre nous, on peut se dire cela ici, parce que
les gens ne sont pas de cet avis.
M. Vaugeois: Est-ce que vous voudriez bien le
répéter à Trois-Rivières, un de ces jours
prochains?
M. Rivest: Le 19? Non, les gens ne sont pas de cet avis. Il faut
respecter la volonté, l'expression des gens.
M. Vaugeois: J'ai déposé la plupart des amendements
que je prévoyais. J'en avais fait tenir copie aux gens de l'Opposition.
Si de leur côté, ils ont des amendements qu'ils veulent soumettre,
j'aimerais qu'on puisse les regarder également d'ici la prochaine
séance.
M. Rivest: Quant à moi...
M. Le Moignan: On doit transmettre nos amendements.
M. Vaugeois: Je ne vous oblige pas, bien sûr. Il n'y a rien
qui me permettrait cela, mais si on veut s'avancer...
M. Rivest: Quant à nous, je ne sais pas, sous
réserve de l'avis de mon collègue de Gaspé, si on pouvait
prévoir un bloc de deux et peut-être trois heures, une bonne
séance, on pourrait passer à travers le projet de loi.
M. Vaugeois: D'accord.
M. Rivest: Si le ministre veut dire cela à son leader
parlementaire.
M. Vaugeois: Êtes-vous d'accord sur cela, M. le
député de Gaspé?
M. Le Moignan: On a quelques amendements. On pourrait vous les
transmettre ainsi qu'aux membres.
M. Vaugeois: Vous aurez compris une chose, au niveau des
amendements, je ne cherche qu'à améliorer la loi, la rendre la
plus claire possible et la moins paralysante possible. Alors, votre
collaboration là-dessus est bienvenue.
Le Président (M. Boucher): La commission ajourne ses
travaux sine die.
Fin de la séance à 12 h 31