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Version finale

32e législature, 1re session
(19 mai 1981 au 18 juin 1981)

Le mercredi 3 juin 1981 - Vol. 24 N° 7

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Affaires culturelles


Journal des débats

 

(Vingt heures onze minutes)

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, mesdames, messieurs!

La commission parlementaire permanente des affaires culturelles est ouverte. La commission a pour objet l'étude des crédits du ministère des Affaires culturelles pour l'année financière 1981-1982.

Les membres de cette commission sont: M. Champagne (Mille-Îles), M. Cusano (Viau), M. Dussault (Châteauguay), M. Hains (Saint-Henri), Mme Lachapelle (Dorion), M. Proulx (Saint-Jean), M. Richard (Montmorency), M. Rivest (Jean-Talon), M. Saintonge (Laprairie); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes) remplace M. Dupré (Saint-Hyacinthe); M. Marquis (Matapédia) remplace Mme Juneau (Johnson).

Les intervenants sont M. Baril (Rouyn-Noranda-Témiscamingue), M. Blouin (Rousseau), Mme Dougherty (Jacques-Cartier), M. Lalonde (Marguerite-Bourgeoys), M. Lavigne (Beauharnois), M. Leduc (Fabre), M. Sirros (Laurier), M. Vallières (Richmond).

Il serait maintenant dans l'ordre de nommer un rapporteur à la commission. Est-ce qu'il y a une proposition?

M. Proulx: M. Dussault fera un excellent rapporteur.

Le Président (M. Desbiens): M. Dussault (Châteauguay) est proposé et accepté.

M. Dussault: Si l'Opposition est d'accord, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Si tout le monde est d'accord, bien sûr.

Alors, avant d'entreprendre l'étude des crédits par programme et par élément, je crois qu'il serait peut-être bon de s'entendre sur la façon dont vous voulez procéder. Il y aura d'abord, j'imagine, des considérations générales de la part du ministre et du représentant de l'Opposition. Ensuite, procéderons-nous à l'étude globale ou si on passera les crédits élément par élément?

M. Saintonge: II me paraît préférable de procéder à une étude globale; on va dégager quelques grandes lignes, étant donné que le temps est quand même limité, si vous n'avez pas d'objection.

Le Président (M. Desbiens): Mais quand viendra le temps d'étudier les programmes, est-ce qu'on va procéder programme par programme ou si on va adopter les crédits élément par élément? C'est ce que j'aimerais savoir au début.

M. Richard: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: Quant à nous, j'aimerais laisser l'Opposition décider, je suis encore déformé, M. le Président, par mes quatre années à la présidence de l'Assemblée nationale et j'ai tendance toujours à privilégier l'Opposition.

Le Président (M. Desbiens): J'espère, M. le ministre, que...

M. Dussault: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Oui, M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: Est-ce qu'on pourrait savoir le temps qu'il a été convenu de prendre, entre les partis?

Le Président (M. Desbiens): Quatre heures.

M. Dussault: Quatre heures. On devrait donc terminer à minuit.

Le Président (M. Desbiens): II y a une entente pour terminer ce soir. M. le député de Laprairie, préférez-vous une procédure particulière?

M. Saintonge: Non, mais c'est simplement que, au niveau des questions, au lieu d'analyser les crédits programme par programme, on pourra prendre certains éléments qu'on pourra dégager et sur lesquels on pourra poser des questions; étant donné que le temps est limité, on pourra prendre les questions que l'on juge les plus importantes.

Le Président (M. Desbiens): D'accord.

M. Richard: Cela ne pose pas de problème pourvu qu'évidemment on finisse par adopter les crédits programme par programme. En bloc, ça va?

M. Saintonge: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Je vous demanderai donc, M. le ministre, de faire votre intervention. (20 h 15)

Remarques préliminaires

M. Clément Richard

M. Richard: C'est avec une certaine fierté que je voudrais proposer de présenter aux membres de la commission l'équipe des principaux cadres du ministère des Affaires culturelles, et cela avant de me livrer à une petite déclaration d'ouverture, comme le veut la tradition.

Je voudrais présenter, à ma droite, M. Roland Arpin, qui est le sous-ministre en titre au ministère des Affaires culturelles, depuis le mois de novembre dernier. J'aimerais également présenter Mme Nicole Martin, qui est sous-ministre adjoint à la planification; elle est là depuis un certain nombre de mois, pas plusieurs années quand même non plus; M. Bruno Grégoire, qui est sous-ministre aux institutions et M. André Juneau, qui est directeur général des musées.

Oui, M. Arpin, vous avez raison, j'allais oublier, oh, quel oubli! Je ne vous aurais jamais oublié quand même. M. Jean-Jacques Chagnon, est sous-ministre adjoint aux arts et aux lettres, de même qu'au patrimoine. M. Pierre Genest, directeur général des conservatoires; M. Jean-Rémi Brault, conservateur en chef de la bibliothèque nationale; M. Bernard Ouimet, que je n'ai pas vu encore - il s'en vient - qui est directeur général du patrimoine; M. Georges Cartier, qui est directeur général des arts et des lettres et M. Robert Morin, qui est directeur général de l'administration.

C'est avec beaucoup de fierté que je vous présente aussi ma directrice de cabinet, Mme Murielle Côté-Savard. Je n'ai évidemment pas à vous présenter, puisqu'il est de notoriété publique, mon adjoint parlementaire, le député de Saint-Jean, M. Jérôme Proulx.

M. Proulx: Je suis dans la politique depuis combien de temps?

M. Richard: C'est le plus ancien.

M. le Président, mesdames et messieurs de la commission parlementaire, vous me permettez, suivant la tradition, que je me livre à cette déclaration d'ouverture, en vous rappelant que pour l'année financière 1981-1982, le budget du ministère des Affaires culturelles augmente de 5% par rapport à l'année 1980-1981, passant sur une base comparable de 89 000 000 $ à 93 500 000 $. À noter que nous excluons les crédits permanents inscrits au ministère pour la Régie de la Place des Arts de 12 600 000 $ en 1981-1982 et de 11 000 000 $ pour 1980-1981 qui comprennent des crédits permanents de 5 600 000 $ et un montant de 5 400 000 $ en taxes inscrits aux crédits votés. C'est pourquoi j'ai parlé de base comparable. Alors si on retrouve 106 000 000 $, il faut tenir compte des crédits pour la Régie de la Place des Arts.

Une augmentation des crédits totaux de 5% demeure - c'est le moins qu'on puisse dire - fort modeste si l'on songe qu'à effectifs constants, les rémunérations qui totalisent près de 30% du budget, connaissent une hausse de 15%; reportée sur l'ensemble du budget, cette hausse représente 5%. Donc, dans l'ensemble, les crédits du ministère des Affaires culturelles sont constants. Plusieurs programmes enregistrent des diminutions pour compenser l'inflation des coûts ou pour maintenir priorités et engagements antérieurs.

La situation économique difficile et les restrictions budgétaires que s'impose, pour cette raison, le gouvernement du Québec vont donc exiger du ministère des Affaires culturelles, tout comme des autres organismes gouvernementaux et des organismes culturels, une plus grande discipline dans l'arbitrage des choix budgétaires.

Au cours de cet arbitrage, le ministère des Affaires culturelles a dû privilégier des secteurs en tenant compte des priorités annoncées, tels les bibliothèques et les musées. Il a aussi tenté de garder minimale la réduction des subventions qui servent immédiatement des activités et des fins culturelles. C'est ainsi que, dans l'ensemble, l'enveloppe totale composée des crédits de transfert ne diminue pas. Sans les crédits permanents, elle passe de 43 600 000 $ à 45 800 000 $, soit une augmentation de 2 200 000 $ qui, comme nous le verrons, seront dans une large mesure versés aux municipalités pour les bibliothèques publiques.

À l'inverse, par ces choix, le ministère exige aussi de tous les organismes dont les dépenses d'administration et le chiffre d'affaires sont importants, les institutions nationales et le ministère compris, une part significative d'autofinancement de la hausse du coût de la vie. Certains de ces organismes pourront réduire leurs dépenses, d'autres augmenter leurs sources de revenus. C'est de cette façon seulement qu'il sera permis de maintenir, dans la conjoncture actuelle, le niveau d'activité culturelle au Québec.

Permettez, M. le Président, que je salue l'arrivée du député de Marguerite-Bourgeoys dont je connais l'intérêt pour la culture en général et le ministère des Affaires culturelles en particulier.

Les priorités en 1981-1982. Après avoir enregistré des progressions spectaculaires au

cours des dernières années; 23,1% pour la seule année 1980-1981, la progression du budget du ministère des Affaires culturelles marque donc un ralentissement en 1981-1982. J'ouvre une autre parenthèse, M. le Président, pour saluer cette fois l'arrivée inattendue, inopinée mais quand même bienvenue du député de Jean-Talon dont l'intérêt lui aussi pour les Affaires culturelles ne s'est jamais démenti.

M. Rivest: M. le Président, est-ce que je pourrais très brièvement signaler au ministre, au nouveau ministre, que son arrivée est tout aussi attendue, inopinée au ministère des Affaires culturelles, j'espère, et lui souhaiter que ce soit pour le plus grand avantage du développement des politiques culturelles? Non?

M. Richard: M. le Président, je ferme la parenthèse.

M. Rivest: Ne me laissez pas entre parenthèses aussi longtemps que la souveraineté, hein?

M. Lalonde: On est en veilleuse.

M. de Bellefeuille: Les guillemets! Les guillemets!

M. Proulx: On a mis Veilleux en veilleuse; on va vous mettre en veilleuse, vous allez voir.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: Je continue, M. le Président.

Cela n'a rien d'extraordinaire et je parlais du fait que...

M. Rivest: De moi?

M. Richard: Non, je ne parlais pas de vous, M. le député de Jean-Talon, et vous le savez bien, quand je disais que cela n'a rien d'extraordinaire. Ce qui est assez extraordinaire, M. le député de Jean-Talon, c'est que vous ayez été réélu.

M. Rivest: Vous êtes encore à parler de moi.

M. Richard: Cela n'a rien d'extraordinaire, M. le Président, puisque d'autres ministères connaissent un sort comparable dans la conjoncture financière actuelle. Cela aura cependant des conséquences. La limitation des crédits force les choix. Cette conjoncture invite aux réévaluations, bien sûr, mais elle ne paralyse pas.

M. Rivest: Mettez-le entre parenthèses, ce mot.

M. Richard: Cela ne signifie pas pour autant une rupture d'avec les orientations privilégiées au cours du dernier exercice budgétaire. En 1980-1981, le ministère des Affaires culturelles avait mis de l'avant trois priorités.

Premièrement, le soutien aux intervenants locaux et régionaux, plus particulièrement dans les secteurs des bibliothèques, de la conservation et de la mise en valeur du patrimoine bâti, des activités régionales et de la diffusion des arts de la scène.

Deuxièmement, la consolidation des organismes majeurs, que ce soient les organismes d'État comme la Bibliothèque nationale, le Musée d'art contemporain, le Musée du Québec et le Centre de restauration ou les organismes privés tels les orchestres symphoniques de Montréal et de Québec, les dix compagnies de théâtre institutionnelles et l'Opéra de Montréal. Troisièmement, les équipements culturels comme les bibliothèques publiques, les musées privés, la restauration des monuments historiques, Place Royale, L'île-du-Moulin de Terrebonne.

Le ministère croit devoir maintenir les priorités annoncées, respecter ses engagements et préserver au maximum les crédits affectés à la réalisation des activités culturelles proprement dites. D'une façon générale, il choisit donc de réduire ses dépenses de fonctionnement et celles des organismes de service qu'il subventionne et d'étaler dans le temps la réalisation de certains projets dont l'incidence de report se fera moins sentir à court terme.

Les bibliothèques publiques. Il y a à peine un an, le gouvernement du Québec invitait les municipalités à combler une lacune, un retard qui paraissait déjà presque irrémédiable dans le développement des bibliothèques publiques. Il s'engageait à maintenir pendant trois ans un programme généreux d'aide financière. Le ministère des Affaires culturelles maintiendra ce programme en 1981-1982. Je pense qu'à cet égard nous n'avons vraiment pas le choix, compte tenu d'un retard sur le continent nord-américain dont nous n'avons pas lieu, je pense, d'être très fiers si nous nous comparons, par exemple, à l'Ontario et à beaucoup d'États américains, mais surtout à nos voisins ontariens.

La seule modification consistera à fixer un plafond de 5 $ per capita à la subvention de base, au fonctionnement et à l'achat de livres. Ce changement ne modifie en rien l'objectif du programme. L'aide au fonctionnement a pour but d'initier un rattrapage chez les municipalités qui ont une bibliothèque insuffisante ou dont la collection

doit être mise à jour.

L'aide à la publication et à la vente de livres. En marge de la loi du livre, c'est-à-dire la loi 51, le ministère transforme le programme d'aide à l'édition jusqu'ici basé sur les coûts de production et la sélection de manuscrits en un programme de subventions proportionnelles au volume de ventes. À cette fin, les crédits disponibles sont augmentés de 150 000 $; ce montant provient de compressions à l'aide à l'exportation ainsi qu'à d'autres volets de l'édition du livre.

Par ailleurs, le ministère reporte d'une année la mise en application du programme d'aide financière à l'achat de livres par les bibliothèques scolaires. Ce programme devrait inciter les commissions scolaires à augmenter le niveau de leurs achats de livres et progresser ainsi dans la réalisation du plan d'amélioration des bibliothèques scolaires. La décision de reporter d'un an ce programme permet d'affecter des disponibilités additionnelles aux municipalités au titre de l'aide au fonctionnement des bibliothèques publiques.

Les bibliothèques centrales de prêt. Les bibliothèques centrales de prêt recevront des crédits de 4 118 000 $ pour leur année financière 1981-1982, c'est-à-dire un montant équivalent à celui qu'elles recevaient en 1980-1981. Si les bibliothèques centrales veulent maintenir leurs achats de livres, elles devront, comme la Fonction publique, réduire leurs effectifs et appliquer d'autres compressions budgétaires.

L'ensemble de ces réaménagements budgétaires permettra d'assurer une croissance du quart des budgets consentis au réseau des bibliothèques publiques.

Une voix: Pardon? M. Richard: Hein?

M. Lalonde: Est-ce qu'on peut demander au sous-ministre de lire à la place du ministre? (20 h 30)

M. Richard: Vous avez parfaitement raison, j'avais raison même. Du quart des budgets consentis au réseau des bibliothèques publiques, alors au lieu de "les", je dis "des", M. le député de Jean-Talon, et pour aider à votre compréhension je vais vous dire que ça fait 26%. Je n'aurais peut-être pas dû dire le quart, mais 26%. Cette croissance est nécessaire en raison de l'effort considérable que connaît le développement des bibliothèques municipales, les musées et centres d'expositions. Le ministère a également décidé de ne pas compromettre le développement du secteur muséologique. Dans ce domaine comme dans celui des bibliothèques, le Québec accuse un retard considérable sur l'Ontario. Considéré encore ici par certains comme un bien de luxe, le musée nous paraît, au contraire, l'instrument éducatif et de diffusion culturelle par excellence de demain. Ses retombées économiques sont reconnues. Cette priorité n'implique pas seulement la poursuite des projets de musée national de la civilisation et d'un musée de la science qui me tient beaucoup à coeur.

Elle incite à protéger les subventions aux musées existants ou du moins à leur assurer une indexation minimale, même s'il fallait, au cours de l'année 1981-1982 et en préparation d'une année 1982-1983 tout aussi difficile, revoir les critères d'agrément et sélectionner parmi ces établissements les plus dynamiques et les plus progressifs. Les crédits affectés aux établissements muséologigues du Québec atteindront 12 600 000 $ en 1981-1982, ce qui est bien inférieur au niveau des subventions reçues par les musées de l'Ontario. La croissance de ces crédits par rapport à ceux de l'année précédente est de 7,46%. Le ministère maintient les travaux d'agrandissement et de rénovation de ces musées. Ces travaux, dont le plus important est celui du Musée du Séminaire de Québec, sont financés en vertu de l'entente sur le développement touristique. Par ailleurs, les études sur la transformation du Musée du Québec en musée d'arts et sur son agrandissement se poursuivent. Le ministère consacrera aussi des budgets à la mise en place d'une équipe de planification du Musée national de la civilisation.

La conservation des sites et biens historiques: Le secteur du patrimoine connaîtra une année difficile puisque les crédits affectés par le ministère des Affaires culturelles à la conservation des sites et biens patrimoniaux diminueront.

M. le Président, je peux immédiatement donner l'assurance à mes collègues de l'Opposition officielle que, quand le critique officiel de l'Opposition voudra s'exprimer, je ne l'interromprai pas. C'est ce que j'avais à dire, M. le Président.

M. Lalonde: M. le Président, question de règlement. J'ai entendu des protestations du côté ministériel par le député de Deux-Montagnes. C'est l'écho que le ministre a entendu.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! C'est à vous la parole.

M. de Bellefeuille: Je reconnais que le député de Marguerite-Bourgeoys a raison. Lorsque le ministre a fait allusion à une compression des crédits consacrés à la conservation du patrimoine, j'ai fait ah! ah! ah! pour exprimer un regret.

M. Richard: Ce n'était pas une interruption dans le même sens que celle du

député de Jean-Talon. Je dis ça en toute objectivité, M. le Président, et sans la moindre partisanerie, je vous le jure.

Le Président (M. Desbiens): Question de règlement, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Je pense qu'on devrait laisser le ministre continuer sa lecture. On sait que le ministre sait lire, cela nous rassure.

M. Richard: Que je suis heureux d'entendre les propos de mon collègue le député de Marguerite-Bourgeoys et je vois qu'il m'envie quand il affirme que je sais lire.

Face aux hausses de rémunération, la contraction des dépenses est plus que significative. Une restriction importante de 850 000 $ est prévue aux crédits de fonctionnement. Le choix du ministère des Affaires culturelles à l'égard de la conservation des sites et biens historiques a été de maintenir le niveau des subventions accordées à des municipalités et à des particuliers pour les fins de restauration de même que les programmes d'animation du patrimoine et de développement du patrimoine autochtone. Le ministère a décidé de poursuivre les travaux au chantier de Place Royale, de l'île des Moulins et des autres sites couverts par l'entente sur le tourisme.

Les institutions nationales. Les institutions nationales sont aussi affectées par des restrictions budgétaires puisqu'elles autofinancent une forte partie de l'indexation des salaires. Dans le cas de la Bibliothèque nationale et des Archives, cette compression, en termes réels, est de l'ordre de 222 000 $. Il y a donc un fort resserrement des dépenses de fonctionnement autres que les traitements ainsi qu'un étalement de projets d'acquisition ou de modernisation de leur équipement.

Le soutien aux arts. Le ministère a l'intention de revoir rapidement sa politique d'aide financière aux arts d'environnement visuel ainsi qu'aux arts d'interprétation. S'il est vrai que l'aide financière de l'État a atteint ses limites, il faudra que, dans ces domaines particuliers, les organismes culturels qui ont atteint un seuil leur garantissant une certaine vitalité soient les premiers à prendre davantage en main leur destinée. Déjà, au cours de l'année 1980-1981, le ministère a tenté d'orienter les grandes troupes vers une recherche plus intense de sources de financement privées. Publicité de prestige, galas et dîners-bénéfices, création de fondations, pour ne pas parler de tarification, sont autant de possibilités qui, depuis à peine quelques mois, se multiplient au Québec et s'avèrent prometteuses. Il est certain que de telles sources de financement offrent un potentiel inégal selon la nature de l'activité, l'organisme qui le requiert, le lieu physique, etc., et nos choix d'aide financière devront, tout en étant incitatifs, en tenir compte.

Pour l'année 1981-1982, les programmes d'aide aux artisans sont maintenus. Il y a cependant une contraction de l'aide financière à la promotion et à la mise en marché. Dans l'ensemble, le budget de soutien aux arts d'interprétation fléchit légèrement, 3,6%, mais les crédits de transfert demeurent constants à 14 163 500 $.

Bilan et prospectives. Dans l'ensemble, le ministère a atteint les objectifs dont la réalisation lui incombait. Il les aura même dépassés de façon significative en ce qui concerne les bibliothèques publiques en obtenant une injection additionnelle de 623 000 $ en crédits supplémentaires et en ce qui concerne la restauration des monuments historiques, enclenchant la phase 2 du projet du Vieux-Montréal par le biais de l'OPDQ. J'ouvre une parenthèse pour vous inviter tous à aller faire le tour du Vieux-Montréal peut-être vers la fin du mois de juin parce qu'il y aura beaucoup de projets en voie de réalisation. Beaucoup de chantiers sont déjà en voie de réalisation dans le Vieux-Montréal et je pense qu'on assistera à une revitalisation assez extraordinaire du Vieux-Montréal dans les prochains mois.

Toutefois, l'analyse de l'évolution du budget du ministère des Affaires culturelles dénote un ralentissement par rapport aux années précédentes si on compare, par exemple, l'augmentation actuelle de 5,3% par rapport à une augmentation de 33,6% en 1977-1978 ou de 22% en 1980-1981. Par ailleurs, l'évolution du budget est manifestement insatisfaisante eu égard au budget total de l'État. Seulement un demi de un pour cent est consacré aux Affaires culturelles. Je vous signale que j'hérite là d'un problème qui a l'âge du ministère des Affaires culturelles.

Cette croissance de crédits pour le moins déficiente n'a toutefois pas empêché le développement des activités de nos clientèles durant cette période. À titre d'exemple, signalons que, dans le secteur de la danse, les troupes professionnelles sont passées de deux à six, alors qu'une dizaine de groupes indépendants se sont formés. Les écoles privées de danse passaient de 10 à 60. Il semble donc qu'il y ait une vogue assez extraordinaire pour la danse au Québec. J'ai eu l'honneur et le privilège, il y a quelques jours, de présider à l'inauguration de La Maison de la Danse. Je n'ai pas dansé, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, mais cela a fait danser beaucoup de gens et ils dansent toujours.

M. Lalonde: Eh bien! chantez maintenant.

M. Richard: Dans le domaine de la musique... C'est à vous que je devrais dire cela, M. le député de Marquerite-Bourgeoys, vous avez quatre ans pour chanter.

M. Rivest: Vous n'en laissez pas passer une. Laissez-nous une chance!

M. Richard: Dans le domaine de la musique, nous avons maintenant, au Québec, une quinzaine d'orchestres réqionaux, adultes et enfants. Sept nouveaux camps musicaux ont été créés, et le ministère subventionne maintenant une centaine d'organismes de diffusion des structures au municipal et scolaire, alors qu'il en subventionnait une dizaine auparavant.

Du côté du théâtre et des festivals d'été, leur nombre est passé à plus d'une centaine comparativement à moins d'une dizaine il y a cinq ans. Ces derniers ont servi à déplacer le spectacle culturel des grands centres métropolitains vers les régions excentriques et, ainsi, à stimuler la curiosité du citoyen québécois. Il y a maintenant, je crois, 107 troupes de théâtre d'été. C'est donc une espèce d'explosion du théâtre à travers tout le Québec.

Quant à l'artisanat, il est redevenu une forme populaire d'art et de loisir. Les salons d'artisanat ont proliféré, et ceux du livre passant de trois à huit. Les salons du livre, il y en avait trois, sont passés de trois à huit, ce qui dénote, quand même, un certain succès de tous ces salons du livre. J'ai eu le plaisir, la semaine dernière, d'inaugurer le Salon du livre ou la foire du livre comme ils l'appellent, la foire régionale de l'Abitibi-Témiscamingue à Rouyn-Noranda.

Par la politique gouvernementale d'intégration de l'art à l'architecture, les arts plastiques connaissent également un développement spectaculaire. Ce sont là autant de manifestations de la vitalité de la culture québécoise, laquelle n'a pas encore été directement affectée par les contraintes budgétaires. Cette situation ne pourra, cependant, se poursuivre sans entraîner l'avortement des efforts consentis depuis quelques années. Il faut donc être vigilants particulièrement en période de rareté de ressource alors que les besoins essentiels, les engagements passés prennent trop aisément le pas sur les secteurs plus petits, apparemment plus facilement compressibles, dont l'impact tout aussi réel paraît à d'aucun moins palpable.

Alors, voilà, M. le Président, ce que je voulais livrer comme déclaration d'ouverture. Je remercie les membres de m'avoir donné le temps de me livrer à cet exercice.

Le Président (M. Desbiens): M.

Saintonge de Laprairie. Pour les remarques préliminaires.

M. Jean-Pierre Saintonge

M. Saintonge: M. le Président, au départ, permettez-moi de mentionner que je suis heureux d'avoir été désigné, comme porte-parole de l'Opposition en matière culturelle. C'est un domaine d'intérêt certain qui préoccupe la collectivité et qui rejoint mes affinités personnelles. Je voudrais également féliciter le ministre de sa nomination à ce poste et l'assurer de notre collaboration et coopération dans les divers dossiers qui seront soumis à l'attention de l'Assemblée nationale. De plus, il me fait plaisir, à ce moment-ci, de souligner que le dossier des affaires culturelles a été source de préoccupation et le demeure toujours pour la population du comté de Laprairie. En effet, la ville de La Prairie, une partie de la ville connue comme le vieux La Prairie, a été décrétée arrondissement historique. La ville de La Prairie constitue, en fait, un des berceaux du développement de la rive sud immédiate de Montréal, de sorte que la sauvegarde et la mise en valeur de ce patrimoine représentait et représente toujours un vif intérêt pour le milieu et même pour toute la collectivité de la rive sud.

Je voudrais également souligner, à ce stade, quelques contributions importantes du Parti libéral dans le domaine des affaires culturelles: la création du ministère en 1961 dont le premier titulaire fut M. Lapalme, le livre blanc de M. Laporte en novembre 1965 qui faisait à l'époque un inventaire complet de ce que pouvait être l'intervention de l'Etat en matière culturelle.

Malheureusement, à cause des élections de 1966 et de la prise du pouvoir par le Parti de l'Union Nationale, à ce moment, la mise en place d'une telle politique culturelle pour le Québec et la réorientation fondamentale du ministère furent laissées en plan. (20 h 45)

Également le livre vert de M. L'Allier en mai 1976, document de travail qui précisait les orientations qu'il comptait donner au ministère et devait amener la consultation et les discussions avec le milieu pour établir une politique culturelle du Québec. Quelques mois plus tard, ce furent les élections et l'arrivée en scène du Parti québécois.

Tout au cours du présent mandat du gouvernement, le Parti libéral a l'intention d'accorder une importance prioritaire au dossier des affaires culturelles. En conséquence, l'Opposition actuelle sera vigilante et active tout en vous assurant de sa collaboration dans les meilleurs intérêts de la population.

Les orientations majeures et les préoccupations actuelles du Parti libéral en

matière culturelle visent à rendre l'aide de l'État en matière culturelle accessible à tous les Québécois. Pour ce faire, il y aurait lieu de conférer une autorité administrative et financière plus grande aux organismes gouvernementaux chargés de distribuer l'aide financière de l'État, ce qui aurait pour résultat de soustraite les activités aux aléas d'une politique plus ou moins partisane de la culture. Il y aurait lieu aussi de prôner un retour aux sources, c'est-à-dire reconnaître que l'oeuvre d'art est avant tout le fait d'un individu et que, en conséquence, le rôle de l'État n'est pas de créer une culture, mais plutôt de susciter un climat favorable à son éclosion et à sa motivation, rendre la culture accessible à tous et la rendre attrayante. L'État doit être un catalyseur, un animateur de la culture et non un concepteur. Également, il faudrait encourager et inciter à la recherche d'autres sources d'appui que celles presque exclusives de l'État, arriver en fait à développer dans les divers domaines de la culture un effort individuel au moins aussi important que celui de l'État. Il s'agit de poursuivre une concertation avec le secteur privé pour établir des objectifs communs et coordonner les efforts de développement culturel.

Un programme important, auquel le Parti libéral croit dans le cadre de l'application d'une politique en matière culturelle, est la création d'un conseil des arts du Québec. Plusieurs instances prétendent la même chose. Le ministre titulaire dans le gouvernement précédent le reconnaissait d'ailleurs, l'an dernier, et déclarait: C'est un projet qu'on n'a jamais abandonné et qui devra être étudié au mérite. Nous souhaitons une action en ce sens du présent gouvernement.

Nous reviendrons plus loin au cours du présent débat sur certaines politiques souhaitables, selon nous, à être adoptées et révisées en matière de conservation et de mise en valeur du patrimoine relativement au livre et à l'édition, relativement aux arts plastiques et d'interprétation, ainsi que relativement aux musées et au cinéma.

Quant au gouvernement actuel, nous avons pu constater, lors du discours inaugural par le premier ministre, l'absence de tout élément politique relatif aux affaires culturelles. Nous sommes, à vrai dire, un peu inquiets de la performance éventuelle du Parti québécois en matière de développement culturel dans la mesure où il y a eu à la direction du ministère au cours du mandat précédent, un manque de continuité.

En terminant, je voudrais identifier les dossiers prioritaires en matière culturelle sur lesquels l'Opposition entend porter une attention plus particulière et en surveiller l'évolution. Premièrement, l'expression des valeurs culturelles du Québec dans toutes ses dimensions, en particulier, au titre de l'apport culturel de chacune des communautés du Québec. Deuxièmement, l'aide à la publication et à la vente du livre. Troisièmement, le cinéma. Quatrièmement, le développement d'un réseau de bibliothèques publiques. Cinquièmement, la conservation du patrimoine. Sixièmement, la politique de formation artistique. Septièmement, le développement muséologique.

Nous tiendrons également le compte suivi du déluqe de promesses électorales du Parti québécois, plus spécialement celles qui ont inondé la région de Montréal, à savoir la mise en valeur des arrondissements et des monuments classés, particulièrement dans le Vieux-Montréal, la réalisation du pôle cultuel du quadrilatère Bleury, Saint-Denis, Sherbrooke et Sainte-Catherine, la création de mini-maisons de la culture et de bibliothèques, l'ouverture permanente de Terre des hommes qui, semble-t-il, relèverait du ministère des Affaires culturelles.

Nous réitérons notre engagement de demeurer vigilants dans l'application des politiques du gouvernement en matière culturelle tout en vous assurant, encore une fois, de notre plus entière collaboration et coopération.

Le Président (M. Desbiens): Y a-t-il d'autres remarques préliminaires?

M. Richard: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: ...si on me permet d'apporter seulement un bref commentaire, je voudrais remercier M. le député de Laprairie, le nouveau critique de l'Opposition officielle en matière culturelle de son offre de collaboration. Je lui sais gré aussi d'avoir fait état de la contribution du Parti libéral dans les années soixante, que je reconnais d'emblée.

J'étais en 1960 - et je n'ai pas honte de le dire - un admirateur du premier titulaire de ce ministère qui, si ma mémoire est fidèle, était Georges-Émile Lapalme. Et je sais gré à M. le député de Laprairie d'avoir rappelé la contribution du Parti libéral au ministère des Affaires culturelles, jusque dans les années soixante-dix, bien sûr. Il aurait dû toutefois ne pas s'arrêter au livre vert de mon ami et électeur, Jean-Paul L'Allier, mais continuer jusqu'au livre blanc du gouvernement précédent et à l'énoncé de politique.

Ce que j'ai surtout apprécié, M. le député de Laprairie, c'est que vous affirmez - et je voudrais vous dire que je suis tout à fait d'accord avec vous là-dessus - que le ministère des Affaires culturelles n'est pas là pour créer la création, mais pour aider la création, pour encourager la création. Et en

cela je pense que nous aurons l'occasion de nous retrouver d'accord durant les prochains mois.

M. Rivest: M. le Président, si vous le permettez, sur la manière de procéder...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: ...après les déclarations d'introduction; dans la mesure où normalement on doit terminer à minuit, selon l'entente, et qu'on ne peut pas - compte tenu qu'il y a un nouveau ministre qui arrive au ministère des Affaires culturelles et que du côté de l'Opposition également ce sont de nouveaux députés qui vont assurer le suivi et la continuité de l'examen de tout le dossier des Affaires culturelles - je me demande si le ministre est d'accord... Le député de Laprairie a évoqué un certain nombre de... Le ministre lui-même a parlé des priorités de son ministère; on pourrait peut-être les prendre comme ça. Le député de Laprairie a indiqué six ou sept éléments majeurs, bibliothèques publiques, etc. Je me demande si on ne pourrait pas convenir d'examiner, ou enfin de faire un survol très rapide, les intentions du gouvernement sur l'ensemble de ces sujets, les priorités du ministre. Le ministre pourrait expliciter. Mes collègues de l'Opposition pourraient demander des informations sur ce qui est indiqué et que, par la suite, nous mettions une heure sur ces généralités et que l'on puisse procéder assez rapidement sur les programmes, compte tenu du contexte bien particulier dans lequel s'inscrit cette étude des crédits. Si ça convient au ministre, l'Opposition serait d'accord pour procéder de cette façon.

M. Richard: Cela me va.

Le Président (M. Desbiens): On va procéder de cette façon. On commence par M. le député de Laprairie?

Questions générales

M. Saintonge: J'aurais une question d'ordre général. Selon le cahier de renseignements supplémentaires sur les crédits 1981-1982, le MAC, le ministère aurait périmé environ 3 548 000 $ pour l'exercice financier précédent. Quel est le montant exact qui fut périmé?

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: Le montant périmé a été d'environ 500 000 $, mais il y a eu un gel de crédits, dans les mois qui ont précédé la fin de l'année financière. Je crois que c'est ce qui fait qu'apparaît probablement une somme de 3 000 000 $, ça correspond à un gel des crédits et non pas à des crédits périmés. Les crédits périmés ont été d'environ 500 000 $.

M. Lalonde: Si vous le permettez, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Le résultat est le même, il y a eu à peu près 3 000 000 $ ou 3 500 000 $ qui n'ont pas été dépensés.

M. Richard: Dans ce sens, oui; mais ce n'est pas...

M. Lalonde: Dans quels secteurs plus particulièrement?

M. Richard: Le total des crédits non dépensés, incluant le gel, il y a eu un gel de 3 395 000 $, de sorte que les crédits périmés ont totalisé environ 412 000 $. À la Bibliothèque nationale, cela donne 10 000 $. Je peux vous le donner; j'ai la liste ici.

M. Rivest: Les principaux montants.

M. Richard: J'en ai cinq ou six. Je peux vous les donner en détail.

M. Rivest: Oui, c'est cela.

M. Richard: Bibliothèque nationale, 10 900 $; Archives nationales, 9300 $; au patrimoine, 138 000 $; à la direction générale de l'administration, 58 000 $; aux bureaux régionaux, 7000 $; aux musées, 20 000 $. J'en ai d'autres ici. C'est un renseignement qui avait été demandé préalablement par l'Opposition et je pense que nous lui avons transmis ce renseignement.

M. Saintonge: Je m'excuse de ne pas en avoir pris connaissance avant, mais on l'a eu il y iilil i a à peine deux jours. C'est pour cette raison que...

M. Richard: Aux conservatoires, c'est 9800 $; aux arts et lettres, 39 700 $; à la direction du cinéma, 26 000 $; au Bureau de surveillance du cinéma, 33 000 $.

M. le député de Marguerite-Bourgeoys, si vous me permettez, pour répondre de façon plus spécifique à votre question, il y a trois catégories de dépenses qui ont été plus particulièrement touchées par les gels; ce sont les dépenses de capital et d'équipement, les dépenses de voyage et on a retardé certains travaux.

M. Lalonde: C'est bien cela.

M. Rivest: Je pense que la question du député se situe dans cette catégorie ou cette rubrique des dépenses, mais quels secteurs d'activité cela a-t-il touchés d'une façon significative?

M. Richard: II n'y a pas de secteurs qui ont été touchés de façon...

M. Rivest: Voyons!

M. Lalonde: Écoutez! Là, vous avez...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ...peut-être 4 000 000 $ de crédits périmés, mais vous avez près de 3 000 000 $ ou 3 500 000 $ de crédits gelés. Il n'y avait quand même pas 3 500 000 $ de frais de voyage qui ont été gelés. Je ne sais pas si c'est au niveau de l'équipement que vous avez...

M. Richard: C'est le patrimoine. Pour répondre à votre question, c'est le patrimoine, parce qu'on a pu retarder les travaux.

M. Lalonde: Je comprends que le député de Deux-Montagnes fait ah! ah! ah! C'est au niveau du patrimoine qu'on a fait des reculs.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Richard: M. le député de

Marguerite-Bourgeoys, c'est le député de

Montmorency qui pourrait s'en plaindre le plus.

M. Lalonde: J'espère qu'il va s'en plaindre, parce que le nouveau ministre se plaint dans ses remarques préliminaires de la proportion très mince du budget qui est consacrée aux affaires culturelles, à la culture, mais a-t-il des plans, des projets pour augmenter cette si mince pitance?

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: Avec l'appui de l'Opposition, M. le Président, avec l'appui que je vais essayer d'aller chercher dans l'Opposition, avec l'appui de ma propre formation politique et l'appui du gouvernement, j'espère bien qu'un jour, nous pourrons, dans le monde occidental, faire exception à la règle et ne pas craindre de consacrer une part beaucoup plus importante aux affaires culturelles, ce qui témoignerait de l'importance que, comme peuple distinct, comme société distincte en Amérique du Nord, nous accordons à la culture et à notre propre identité, puisqu'il en va, justement, de notre propre identité, mais, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, vous savez mieux que quiconque que c'est un phénomène, c'est un problème, devrais-je plutôt dire, de toutes les sociétés occidentales où, pour des raisons qu'il serait peut-être trop long d'énumérer ici et pour d'autres raisons que j'arrive mal à appréhender, on a toujours craint d'accorder une part plus importante ou, en tout cas, la part qu'il conviendrait d'accorder à la culture. Ce n'est pas un phénomène unique au Québec. Nous ne sommes pas l'exception à la règle en ce domaine. (21 heures)

M. Lalonde: Mais vous savez que...

Le Président (M. Desbiens): M. le député, sur le même sujet?

M. Lalonde: Je suis prêt à croire le ministre, mais il faudrait peut-être avoir plus que des déclarations générales. Par exemple, le ministre s'est déclaré d'accord avec les observations du porte-parole officiel, le député de Laprairie, à savoir que l'État ne serait pas le concepteur, quoique certaines déclarations d'un ancien gouvernement étaient peut-être un peu moins claires. Par exemple, dans le domaine des bibliothèques publiques, on a eu l'occasion de faire un voyage, il y a deux ans et demi, à Toronto...

M. Richard: C'était formidable, n'est-ce pas?

M. Lalonde: Oui, et c'était une révélation pour plusieurs d'entre nous.

M. Richard: Oui.

M. Lalonde: Nous avons un secteur d'activité pour le ministère qui ne met pas en cause cette politique de non-intervention dans l'expression culturelle elle-même, mais l'intervention immédiate, directe, concrète, avec des sous et des dollars dans les décisions qui doivent être prises et les projets de bibliothèques publiques. Est-ce que le ministre peut nous assurer actuellement... Je comprends, il a hérité d'un ministère il y a à peine quelques semaines, le budget était déjà fait avant qu'il arrive, on ne peut pas lui tenir rigueur de ce qui a été décidé, et il ne peut pas le changer lui-même. Pour l'avenir immédiat, est-ce qu'il peut nous assurer qu'un effort très sérieux sera fait dans ce sens?

M. Richard: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je pense que vous aurez l'honnêteté de reconnaître qu'un effort tout à fait particulier avait été fait par mon prédécesseur, à qui je tiens à rendre hommage, en ce qui a trait, justement, au développement des bibliothèques publiques au

Québec, un effort absolument remarquable, et j'entends poursuivre cet effort. J'entends d'autant plus le poursuivre qu'il n'y a actuellement que deux des principales villes du Québec qui ne sont pas dotées de bibliothèques publiques, et l'une de ces villes, j'ai l'honneur de la représenter à l'Assemblée nationale, c'est Beauport. Il y a Beauport et Charlesbourg parmi les grandes villes, par exemple. En dehors de ces deux exceptions à la règle, il faut bien reconnaître que mon prédécesseur, le député de Trois-Rivières, avait déployé des efforts considérables du côté du développement des bibliothèques publiques.

Je dirais que la contribution importante de l'actuel gouvernement, au-delà des budgets qui ont été consacrés au développement des bibliothèques publiques, ç'a été d'amener les municipalités à apporter elles aussi leur contribution au développement culturel au Québec. Il faut bien reconnaître que jusqu'à il y a quelques années, les municipalités au Québec se laissaient plutôt porter par le gouvernement. Il faut absolument amener, ce qui a été fait dans une très large mesure par mon prédécessseur, les municipalités à apporter leur contribution aussi, dans la mesure de leurs moyens, au développement culturel, en particulier au développement du réseau des bibliothèques. Cela a été fait dans une certaine mesure; il faut que ce soit fait dans une plus large mesure encore, et je compte bien poursuivre les efforts de mon prédécesseur.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: M. le Président, je m'étonne un peu de la tournure que prennent nos travaux et je voudrais inviter nos amis de l'Opposition à accorder leurs violons parce que, il y a quelques instants, le député de Jean-Talon a fait une proposition, pour la première partie de nos travaux ce soir, qui me paraît très positive et qui pourrait être très fertile, très féconde, ce serait d'examiner tour à tour les priorités que le ministre nous a présentées et les priorités que le député de Laprairie, à son tour, nous a présentées.

Au lieu de cela, nous nous sommes égarés dans les méandres des crédits périmés et de considérations qui ne sont pas nécessairement rattachées à ces priorités. Il me paraîtrait utile de revenir à la marche que nous a proposée le député de Jean-Talon.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys, sur les remarques.

M. Lalonde: Si vous permettez, dans les sept priorités mentionnées par le député de

Laprairie, il y avait les bibliothèques publiques. Cela me tient à coeur de façon plus particulière, et c'est pour cela que j'ai sauté directement à cette priorité. Je laisse à l'initiative des autres membres d'attaquer les autres points.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie, en se guidant sur les priorités.

Le rôle du ministère

M. Saintonge: D'accord, sauf que j'avais une question d'ordre général, au départ, pour les crédits. Maintenant, j'aurais une autre question d'ordre général avant de passer aux priorités. Je suis quand même assez nouveau dans le domaine également, et j'aurais une question à poser au ministre. Comment concevez-vous le rôle du ministère des Affaires culturelles, coincé, d'après ce que je peux voir, entre le ministère d'État au Développement culturel, le nouveau ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration et le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche? Il me semble qu'il y a beaucoup d'éléments du domaine culturel qui sont plus ou moins flous dans ces différents ministères.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: Si vous me le permettez, M. le député de Laprairie, avant, je voudrais apporter un complément à la réponse que je faisais tout à l'heure au député de Marguerite-Bourgeoys. Pour donner un exemple de l'effort qui a été fait par mon prédécesseur pour toute la politique du livre, tout le programme du livre, ce qui comprend les bibliothèques, en 1976-1977, il y avait 7 000 000 $ consacrés à ce programme dans le budget du ministère des Affaires culturelles. Grosso modo, 7 000 000 $.

Ce qu'on vous propose aujourd'hui, c'est un budget de l'ordre de près de 22 000 000 $ auxquels s'ajoutent 7 000 000 $ dans le cadre du programme PAEQ. Cela veut dire, en gros, tout près de 28 000 000 $ par rapport à 7 000 000 $. Mais je reconnais d'emblée avec vous, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, que quand nous sommes allés ensemble à Toronto j'étais envieux de voir les institutions dont ils disposent au niveau des musées et, notamment, cette splendide bibliothèque municipale de Toronto. J'espère bien qu'avant longtemps on pourra doter le Québec d'institutions à peu près semblables.

En ce qui a trait à votre question, M. le député de Laprairie, je voudrais vous dire spontanément que je trouve assez extraordinaire et assez utile d'avoir à travailler en collaboration avec un ministre

et un ministère d'État au Développement culturel. Ce qui nous permet d'éviter les incohérences, ce qui nous permet de pouvoir planifier, de concevoir toute la concordance entre chacun des ministères qui sont directement ou indirectement reliés au développement culturel. Chaque fois qu'une politique, en matière culturelle, doit être conçue, réalisée et appliquée, c'est toujours avec intérêt et, finalement, avec plaisir que je la soumets à mes collègues du comité ministériel de développement culturel, pour faire en sorte qu'il y ait une cohérence dans les politiques en matière culturelle.

Je trouve, maintenant que nous avons vécu l'expérience, que l'expérience des ministères d'État, en tout cas en ce qui a trait au développement culturel, a été une expérience fort utile et fort heureuse.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: II y a un élément que ma collègue de Jacques-Cartier va souligner avec vous au titre des communautés culturelles. C'est bien joli, et sans doute tout à fait exact, ce que vous nous avez dit. Mais il existe un problème très pratique que vous n'avez peut-être pas rencontré encore - dans la mesure où vous arrivez au niveau du ministère - je m'en étais inquiété l'an dernier parce que c'est une vieille bataille dans l'administration publique, et chaque fois qu'il arrive un nouveau ministre, le danger est très grand qu'une offensive se fasse au niveau du loisir socio-culturel et des responsabilités du ministère des Affaires culturelles.

Je m'étais soucié de cette question l'an dernier: Est-ce que la création du nouveau ministère du Loisir - tout le domaine du loisir socio-culturel, des chapitres dans le livre blanc de votre collègue, l'actuel leader parlementaire et le nouveau ministre du Loisir en a maintenant la responsabilité -est-ce que le ministère des Affaires culturelles a maintenant complètement renoncé à ce secteur pour le confier au ministère du Loisir?

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: Bien sûr que non, M. le Président! Encore une fois, on peut constater à partir de votre question, l'importance d'un ministère de coordination, d'un organisme de coordination de toutes les politiques. Cet organisme de coordination, c'est justement le ministère d'État au Développement culturel. Ne serait-ce, par exemple, que pour faire en sorte que les équipements des commissions scolaires et des municipalités soient mis au service de l'ensemble de la population pour les loisirs, et également pour les fins d'activités proprement culturelles. Alors de là l'importance d'avoir un ministère d'État au Développement culturel pour ajuster toutes ces politiques.

En ce qui a trait aux loisirs, la politique a été définie au sein du CMPDC. Il s'agit de faire en sorte que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche s'occupe des amateurs, et le ministère des Affaires culturelles, du reste.

M. Rivest: Ah bon. Est-ce que le ministre est bien certain... La question qui se pose est très facile. Je comprends, le ministre insiste sur les fonctions de coordination du ministère d'État au Développement culturel...

M. Richard: C'est cela.

M. Rivest: ...et j'en conviens volontiers, le témoignage qu'il nous donne peut sans doute être vrai. Mais le problème, surtout pour le ministère des Affaires culturelles qui, lui, est un ministère de services, il a des clientèles de tous ordres que le ministre a évoquées et la personne ou le groupe qui a des activités, on pense aux fêtes populaires, qui ont toujours une dimension culturelle... Vous pensez, par exemple, au cas classique, parce que dans ce débat qui date depuis longtemps dans l'administration publique québécoise, la petite fille qui, dans sa ville, veut suivre des cours de ballet ou un groupe veut organiser cela, vous avez souligné avec raison le développement des troupes de théâtre, amateurs, etc., dans vos théâtres d'été, il doit y avoir beaucoup d'amateurs.

Quelle est la responsabilité, dans vos 107 troupes de théâtre d'été pour parler d'une façon... il y a certainement du théâtre amateur, et quand vous dites que cela a été réglé en faisant la séparation avec le professionnalisme du ministère des Affaires culturelles et le caractère amateur ou la partie amateur, dans un sens absolument non péjoratif, au niveau du ministère du Loisir, et quand on a fait l'intégration des ministères, quand on a formé le ministère du Loisir, on s'est inquiété, lors de l'étude des crédits, l'an dernier, comment ces arrimages ont été faits... Parce que le souci que nous avons en posant cette question, c'est celui de la cohérence au niveau de l'administration publique, mais aussi un souci à double volets. Le premier, c'est que les clientèles doivent savoir à qui s'adreser, et deuxièmement, vous devez éviter le "shopping", si vous me permettez l'expression, qui est une pratique courante par laquelle les gens vont chercher une subvention d'un ministère.

Peut-être que vous n'êtes pas - je le conçois volontiers - absolument familier avec cela, mais je voudrais que vous nous rassuriez en nous disant que ces clarifications vont être fournies.

M. Richard: Oui. Encore une fois, cela me permet d'expliciter la réponse que j'ai apportée au député de Laprairie. Encore tout récemment, j'ai eu une demande de subvention importante. Je soupçonnais que le groupe qui frappait à ma porte avait pu frapper à d'autres portes, alors je suis allé soumettre le cas au CMPDC, et on a découvert, effectivement, que ce groupe avait frappé à plusieurs portes. Donc on a décidé ensemble d'une subvention unique qui est donnée à partir d'un ministère ou de deux ou trois ministères pour former un montant.

M. Rivest: J'aimerais préciser ma question. Est-ce que cette demande, vous n'auriez pas pu, parce que tantôt vous avez affirmé d'une façon assez claire que c'était réglé... tout ce qui était amateur était au ministère du Loisir et tout ce qui était professionnel...

M. Richard: Non, mais ce n'était pas lié à la distinction entre l'amateur et le professionnel. D'une façon générale, les amateurs relèvent du ministère du Loisir, les professionnels, l'art et la culture, du ministère des Affaires culturelles. Mais nous essayons, dans toute la mesure du possible, d'être pragmatiques et il est bien évident qu'il peut subsister certaines zones grises. De là, encore une fois, l'importance d'un organisme qui s'appelle le ministère d'État au Développement culturel, pour enlever les zones grises.

M. Rivest: Une question concrète. M. Richard: Oui.

M. Rivest: Peut-être que vous pourriez vous informer. Voici la question qui flottait dans l'air depuis fort longtemps. Les choeurs, les chorales et les harmonies, est-ce que c'est encore chez vous ou si c'est rendu au ministère du Loisir? (21 h 15)

M. Richard: En principe, c'est exactement la distinction que je faisais tout à l'heure. Les chorales amateurs relèvent du ministère du Loisir, et les chorales professionnelles, il y en a très peu d'ailleurs, peuvent être subventionnées, aidées par le ministère des Affaires culturelles.

M. Rivest: J'accepte cette réponse. Mais quand les clientèles... Pour éviter le tour, parce que vous ne pourrez pas au niveau du comité de coordination, enfin, au niveau du ministère d'État, amener toutes les subventions. Quand vous dites "en principe", ce qui m'intéresse - je pense que c'est ça qui était la bataille menée par vos prédécesseurs dans tout ce domaine dont on pourrait parler fort longuement - c'est que, justement, tout le monde a toujours eu de beaux principes là-dessus. Il y a toujours des distinctions de principe qui ont été faites. Mais au point de vue pratique, ces arbitrages ont toujours donné lieu à la même série de problèmes. Je ne veux pas prolonger indûment, mais je vous inviterais, M. le ministre, à surveiller de très près cette dimension et, avec vos collègues, à la régler si elle ne l'est pas encore.

M. Richard: Oui mais, M. le député de Jean-Talon si vous me permettez, il faut justement être pragmatique. Je n'aime pas ces distinctions qui n'existent parfois qu'en théorie. Justement, les problèmes sont maintenant réglables. On peut apporter une solution à ce genre de problème précisément parce qu'il y a un organisme pour les régler qui s'appelle le CMPDC.

M. Rivest: Vous les réglez par le haut. À l'expérience, au niveau du ministère, vous allez vous apercevoir en consultant, en prenant connaissance et en travaillant avec vos collaborateurs, que ce n'est pas si simple. Cela se règle beaucoup plus par le bas, par les champs de juridiction et de responsabilité de l'un et l'autre ministères. Vous allez le découvrir, comme vos prédécesseurs.

M. Richard: Je comprends que, parce que vous êtes de formation juridique, vous souhaiteriez des textes toujours clairs, précis, qu'on ne peut jamais contourner. Mais parce que moi aussi je suis de formation juridique, j'ai envie d'être pragmatique et de dire il y a des cas justement, où il vaut mieux faire une discussion entre collègues directement ou indirectement touchés pour décider ce qu'on doit faire, ce qu'on doit appliquer comme politique, plutôt que de décider d'avance sur papier. Parce qu'il restera toujours, et vous le savez mieux que quiconque comme avocat, des zones grises. Alors, le CMPDC existe justement pour régler tous les cas litigieux qui tombent dans les zones grises. Si on avait l'équivalent avec le fédéral, cela réglerait bien des problèmes.

Le Président (M. Desbiens): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Les groupes ethniques

Mme Dougherty: Merci. M. le Président, j'ai une question qui touche les orientations fondamentales du gouvernement. Le ministre a parlé d'une société distincte. J'aimerais lui demander quelle est la perception du gouvernement, l'obligation du gouvernement, vis-à-vis des groupes ethniques, des anglophones et de tous les non-francophones de notre société québécoise. Est-ce que le gouvernement les considère comme des

groupes intégraux de notre culture québécoise? Bref, quelle est l'attitude du gouvernement vers la réalité pluraliste du Québec?

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: M. le Président, le gouvernement est parfaitement conscient du pluralisme culturel qui existe au Québec. L'attitude du gouvernement a été de favoriser l'intégration de tous les groupes qui composent la société québécoise à la majorité culturelle du Québec; j'ai bien dit l'intégration et non pas l'assimilation, ce qui laisse donc une grande place au développement de chacun des groupes à travers sa propre identité et sa propre culture.

Mme Dougherty: M. le Président, est-ce que je pourrais poser une autre question?

M. le Président (M. Desbiens): Oui, Mme la députée.

Mme Dougherty: Une question pragmatique. Quelles sont les mesures concrètes que le gouvernement va prendre pour appuyer les initiatives et les intérêts spécifiques de ces groupes dans le contexte pluraliste du Québec. Pour leurs intérêts...

Une voix: Députée de Jacques-Cartier.

M. Richard: Non, non, j'ai saisi votre question. C'est parce que comme nous sommes au tout début d'un nouveau Parlement, j'avais momentanément oublié le nom de votre circonscription électorale, Mme la députée de Jacques-Cartier. Je le sais maintenant. Je m'en excuse.

La première décision concrète, Mme la députée de Jacques-Cartier et qui n'est pas -je pense que vous le reconnaîtrez - sans importance, c'est d'avoir, en quelque sorte, donné une vocation tout à fait nouvelle et un mandat tout à fait nouveau au ministère de l'Immigration en en faisant, dès le début de la première session de ce nouveau Parlement, le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles. Le ministère de l'Immigration aura donc à travailler désormais au développement culturel de toutes les communautés qui composent la société québécoise dont j'ai dit tout à l'heure qu'elle était une société distincte.

Je vous rappelle, d'autre part, le plan d'action du gouvernement pour les communautés culturelles qui a été publié par le ministre d'État au Développement culturel en janvier 1981. Je vous réfère à ce document de base sur la politique du gouvernement à l'égard des communautés culturelles.

Le Président (M. Desbiens): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Mme Dougherty: M. le ministre, vous avez parlé de l'immigration. Les anglophones... Je ne suis pas une immigrante. Je suis, ici, depuis plusieurs générations. Donc, je me demande si vous êtes prêt à reconnaître l'enrichissement qui peut être réalisé d'une reconnaissance des contributions de tous nos groupes de différentes langues et cultures. J'ai l'impression que les autres sont un peu marginalisés dans vos politiques culturelles et je me demande si vous êtes prêt à reconnaître les vrais intérêts de tous les groupes qui... If you are ready to recognize the multifaceted contribution and richness that can be realized from all of the people of Québec rather than a narrow, une vue étroite des Québécois. J'ai l'impression que jusqu'à maintenant, vous avez un point de vue assez étroit des Québécois. Je me demande si vous êtes prêt à élargir votre concept de cette société distincte dont vous avez parlé.

M. Richard: Mme la députée, je ne sais vraiment pas ce que vous entendez par une vue étroite. Il me semble qu'en ce qui a trait au gouvernement et en ce qui me concerne personnellement, nous avons toujours pratiqué une politique d'ouverture sur le monde en général et une politique d'ouverture sur toutes les composantes de la société québécoise en particulier. J'ignore vraiment ce que vous voulez dire par "une vue étroite". Au contraire. Nous avons toujours considéré que les cultures différentes qui composaient la société québécoise étaient une source d'enrichissement pour cette société distincte, dans la mesure où ces cultures et les éléments composant ces différentes cultures étaient disposés à s'intégrer à la majorité francophone du Québec et non pas à s'en écarter et à la combattre.

J'ignore ce que vous entendez pas une vue étroite parce que, encore une fois Mme la députée, en ce qui me concerne, j'aurais envie de vous dire que j'ai combattu toutes ces vues étroites dont vous parlez, depuis ma tendre enfance et ce n'est pas au sein de la majorité francophone du Québec que je l'ai le plus souvent retrouvée.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laurier.

M. Sirros: Ma question c'est un peu dans la même veine, M. le Président, et je voulais demander au ministre si, par rapport au ministère des Affaires culturelles, quand on parle de la reconnaissance d'une société pluraliste, etc., le ministre pourrait nous donner certaines indications de l'appui, par exemple, à la création culturelle que le

ministère donne aux comités ethniques en particulier.

M. Richard: Oui. Vous comprendrez qu'il y a déjà eu plusieurs actions qui ont été faites par le ministère des Affaires culturelles auparavant, et avant mon arrivée comme titulaire de ce ministère. Mais, maintenant qu'il y a une vocation spéciale qui a été donnée au ministère de l'Immigration, vous imaginez bien que, justement au sein du CMPDC, c'est-à-dire le comité ministériel permanent de développement culturel, nous devrons, à très brève échéance, essayer de concevoir et de mettre en application des politiques d'aide à toutes les communautés culturelles, ce que nous nous apprêtons à faire très bientôt.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laurier, sur le même sujet?

M. Sirros: Oui. Je suis d'accord sur la réponse mais, par contre, je trouve un peu que le fait de restreindre l'aspect culturel dans le ministère de l'Immigration, par exemple, a l'effet de marginaliser et de laisser de côté un peu, si vous voulez, ces communautés culturelles ou ces minorités ethniques et de ne pas vraiment les intégrer avec - et non pas peut-être à - la majorité francophone en les traitant sur la même base que tout le monde dans ce sens-là, c'est-à-dire que c'est une création culturelle québécoise avec une certaine saveur, peut-être, qui pourrait être traitée à l'intérieur même du ministère des Affaires culturelles et non pas être mise de côté et identifiée comme quelque chose à part.

M. Richard: Vous n'avez à entretenir aucune inquiétude à cet égard. Quant à moi, tous les citoyens du Québec sont des citoyens à part entière. Je pense que vous n'avez pas à vous inquiéter; les citoyens, de quelque culture que ce soit, dans la mesure où ils acceptent de s'intégrer à la majorité francophone du Québec, seront considérés comme des citoyens à part entière et auront droit à tous les programmes prévus par le ministère des Affaires culturelles comme à tous les programmes prévus par chacun des ministères du gouvernement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Une précision. Je suis content de la déclaration du nouveau ministre des Affaires culturelles en réponse aux questions de mes collègues de Jacques-Cartier et de Laurier. Une question pratique. Remarquez que, dans le passé, ce n'est pas le propre de votre gouvernement, il y a toujours eu une certaine difficulté, ou enfin c'était perçu comme tel, dans les programmes réguliers - et c'est le sens de la question, je pense, du député de Laurier en particulier - du ministère des Affaires culturelles, dès lors qu'il s'agissait d'une initiative culturelle venant des communautés culturelles autres que les communautés francophones. On a senti, en tout cas, dans ces milieux un certain désintéressement du ministère. À tort ou à raison, c'était perçu comme tel. Ma question précise, pour donner suite à la question du député de Laurier et, je pense, aux préoccupations du député de Jacques-Cartier, est celle-ci: Maintenant que le nouveau ministre des Communautés culturelles va avoir, et vous vous êtes vous-même référé, un plan d'action, est-ce que, dans les éléments de ce plan d'action qui vient de me parvenir, en termes purement administratifs, au niveau du ministère - la volonté politique, vous l'avez exprimée, on l'appréciera à son mérite - sur le rôle même du ministère des Affaires culturelles, de ces programmes, de ces politiques, est-ce qu'il va y avoir des programmes et des politiques qui seront maintenant de la responsabilité... (21 h 30)

Dans la danse, par exemple, on sait que les communautés ethniques ont des organisations, elles s'expriment culturellement ainsi. Vous avez des programmes aux Affaires culturelles; on ne sait pas encore, enfin, j'ai encore certains doutes si cela va aller au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, ou si cela va rester au ministère des Affaires culturelles ou si désormais cela va être de la responabilité du ministre des Communautés culturelles et de l'Immigration. C'est ce plan très pratique qu'illustre, je pense, la préoccupation du député de Laurier. Je pense que le sens de sa question indique que la communauté anglophone du Québec et les communautés culturelles veulent avoir leur place au même titre que la communauté francophone au sein du ministère des Affaires culturelles. Cela fait partie de la culture et de l'expression culturelle du Québec.

M. Richard: M. le député de Jean-Talon, en ce qui a trait à la communauté culturelle de langue anglaise, je pense que je n'ai pas à vous dire, à vous, qu'au sein de la communauté québécoise, elle a toujours été relativement privilégiée. Qu'on songe, entre autres, aux trois universités anglophones du Québec; et quand on sait que la culture n'est qu'un prolongement de l'éducation et qu'elle est indissociable de l'éducation, on se rend compte qu'on est mal venu de se plaindre du sort qui a été réservé, jusqu'à maintenant, à la minorité anglophone du Québec. Elle a probablement été - je pense que les anglophones eux-mêmes sont disposés à le reconnaître - la minorité la mieux traitée de toutes les minorités à travers le monde. Je pense qu'il y a peu d'exemples où une

majorité a traité sa minorité avec autant d'égards comme nous l'avons fait depuis que nous cohabitons avec cette minorité anglophone. Et je suis assez fier de pouvoir dire cela maintenant.

Il reste qu'il y a des efforts considérables à faire au niveau des autres communautés culturelles, en particulier. Il y a un plan d'action qui est prévu par le ministère des Affaires culturelles en collaboration avec le ministère de l'Immigration. Ce plan d'action prévoit un certain nombre d'actions - comme je l'ai mentionné - que je pourrais vous énumérer, qui vont être étudiées par le CMPDC et dont l'énoncé de politique faisait déjà état. Par exemple, afin de favoriser la conservation, le développement des langues, des coutumes et des cultures des différentes communautés culturelles du Québec, le ministre des Affaires culturelles se propose, entre autres, d'accorder des subventions supplémentaires et une aide technique aux associations des communautés culturelles, de fournir une aide financière pour l'amélioration des équipements de ces communautés, des locaux, des centres communautaires - ce qui est déjà fait, par exemple, et ce que j'ai déjà fait dans une très large mesure au ministère des Communications à l'égard de leurs publications et de tous les journaux des communautés culturelles - d'élargir le programme d'acquisition de livres dans différentes langues et de favoriser l'accès à ces volumes dans les bibliothèques municipales des régions où il y a concentration de membres de communautés culturelles et ainsi de suite.

Il y a tout un plan d'action qui est prévu par le ministère des Affaires culturelles pour faire en sorte que les communautés culturelles ne soient pas les parents pauvres de la société québécoise.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: Vous avez déjà répondu à une partie de ma question. Je voudrais seulement souligner que depuis 1952 j'essaie de m'intégrer à cette société québécoise. Je pensais que j'avais réussi cette intégration. Ce que je crains présentement c'est qu'on ait une tendance de ségrégation en créant ce ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles. Je vous demanderais, M. le ministre, d'essayer, dans votre mandat, de prendre comme vous l'avez dit tout à l'heure, et de développer ces programmes culturels, mais en les intégrant à l'intérieur de votre progamme, parce que l'intégration, c'est le respect mutuel des cultures. De mon côté, vous pouvez être assuré d'une collaboration totale sur cet aspect.

M. Richard: Je peux vous dire, M. le Président, qu'essentiellement, à l'égard des communautés culturelles, l'action du ministère des Affaires culturelles va viser à rendre accessibles à toutes les communautés composant la société québécoise les programmes généraux du ministère des Affaires culturelles. C'est le premier objectif.

Une voix: C'est cela.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: II y a une chose qu'on constate encore dans le comté de Viau, dans l'agglomération montréalaise c'est le problème que nous connaissons tous et regrettons à l'égard des générations telles quelles. Chez les milieux ethniques, cet écart est plus grave, plus prononcé. Ainsi, si on prend la dernière vague des immigrants qui s'est terminée en 1967 et qui est arrivée ici à un âge où il serait peut-être difficile de l'intégrer, ces immigrants ont maintenant des enfants qui se sont intégrés à la culture québécoise et il y a un vacuum culturel entre les parents et les enfants. J'aimerais encore souhaiter qu'il y ait de l'ouvrage fait par votre ministère, et si cela ne relève pas exactement de vous, je crois que cela devrait être votre responsabilité de proposer ces activités à d'autres ministres.

M. Richard: M. le Président, avec votre permission, le sous-ministre, M. Arpin, aurait des renseignements d'ordre technique à donner à M. le député à ce sujet.

Dans l'ordre des programmes du ministère, concrètement, ce que nous faisons actuellement pour les communautés ethniques dans les différents programmes, comme dit le ministre, qui sont ouverts aux communautés ethniques, si on prend les musées, par exemple, il y a deux musées indiens qui sont financés par le ministère des Affaires culturelles, le musée d'Odanak et le musée de Pointe-Bleue. Le musée de Pointe-Bleue reçoit cette année 51 000 $. Il recevait l'année dernière 23 000 $. De plus, dans les musées qui sont davantage dans les milieux anglophones, le musée de la Société historique de Richmond, à Melbourne, le musée d'Eaton Corner, le musée de la Société historique de Stanstead, le musée Beaulne, le Centre d'exposition Sadie Bronfman. Ce sont des musées qui sont davantage axés sur les communautés ethniques.

Dans le domaine des arts d'interprétation ou du soutien aux arts d'interprétation, deux organismes majeurs, la Eondation du centre Bronfman, la Fondation Centaur, qui sont des fondations pour les anglophones, the Black Theater Workshop,

Playwright's Workship, est également pour les anglophones, l'Orchestre de chambre McGill, qui est bien connu, l'ensemble vocal Tudor, le choeur Elgar sont autant d'organismes qui sont davantage ouverts aux milieux ethnigues. Dans le cadre des activités que nous pilotons au ministère, plus ponctuelles, en novembre 1981, par exemple, il y aura une semaine complète consacrée à la contribution des allophones à la culture québécoise à la Bibliothèque nationale du Québec. Aux Archives nationales, il y a des subventions qui sont accordées dans le cadre de l'inventaire national des archives pour l'inventaire des archives ethniques dans la région de Montréal, pour l'inventaire des archives à la United Church. Ce sont autant d'activités qui sont offertes dans le cadre des programmes réguliers du ministère à des groupes ethniques. La nouvelle Loi sur le livre, qui prévoit l'agrément de libraires de langue anglaise, des librairies spécialisées dans les livres d'autres langues, toute la politique du livre est également une politique qui favorise le développement des autres cultures. Ce sont autant d'activités que, présentement, nous menons avec les communautés ethniques qui sont à l'intérieur de programmes qui sont tous ouverts aux communautés ethniques. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Peut-être une remargue en passant au bénéfice des députés. Les paroles qui sont ainsi prononcées par un sous-ministre sont indiquées au journal des Débats comme étant celles du ministre.

M. le député de Viau.

M. Cusano: Seulement une question additionnelle. Vous avez donné cette longue liste, je n'ai rien entendu du côté du théâtre, des arts.

M. Richard: Pas encore. L'Expo-Théâtre est offert en priorité aux communautés ethniques; il est loué pour 1 $ et il sert à des manifestations ethniques. Vous avez également deux troupes de théâtre anglophones, la troupe Centaur, notamment.

M. Cusano: Je ne veux pas faire de distinction, mais je ne considère pas que la culture anglophone est la même que la culture italienne, ou grecque ou portugaise. Je n'ai rien entendu de spécifique pour ces communautés.

M. Richard: L'Expo-Théâtre, en particulier, est un lieu où s'expriment largement ces communautés. D'ailleurs, des activités comme l'orchestre de chambre de McGill ne sont pas offertes uniguement aux anglophones non plus. Un coin comme Melbourne, par exemple, dans les Cantons de l'Est, n'est pas exclusivement anglophone, il y a plusieurs autres communautés à Melbourne, qui est une petite ville.

M. Cusano: Je trouve malheureux, lorsqu'on regarde, le dimanche matin, le programme Teledomenica au canal 12 à Montréal, que plusieurs anglophones et francophones regardent sérieusement, qu'on doive importer de Toronto des programmes italophones. Je crois que, dans l'esprit du respect mutuel, on se devrait d'encourager ces productions.

M. Richard: Je comprends, mais vous devez bien admettre aussi qu'on a la politique de nos moyens. De ce côté-là, ceux qui sont en quelque sorte intégrés à la culture et à la langue anglaise sur le continent nord-américain sont un peu moins coïncés, oserais-je dire, que ceux qui appartiennent à la communauté de langue française. Sur le continent nord-américain, nous sommes littéralement encerclés par au-delà de 225 000 000 d'anglophones. Vous devez bien comprendre et admettre, je suppose, qu'il nous importe d'abord et avant tout de protéger les parlant français et ceux qui appartiennent à la communauté de langue et de culture française ou qui ont adhéré à cette communauté.

Est-ce que le Québec doit prendre les moyens pour encourager le développement de chacune des cultures qui composent la société québécoise? Bien sûr, mais dans la mesure de ses moyens, et les moyens du Québec, M. le député de Viau, vous ne l'ignorez pas, sont modestes.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Quand nous passerons au point 2 des priorités, c'est-à-dire à la publication et à la vente du livre, en vertu de la loi 51, cinq projets de règlement ont été publiés dans la Gazette officielle, le 11 mars 1981, et le délai expirait trente jours plus tard. Je voudrais savoir où vous en êtes rendus, depuis ce temps, dans la réqlementation applicable en vertu de la loi et à quel moment la loi pourra s'appliquer intégralement.

M. Richard: M. le Président, je suis heureux de répondre au député de Laprairie. Cela a été à peu près le premier dossier sur lequel j'ai eu à me pencher en arrivant au ministère des Affaires culturelles et je dois dire que le projet de règlement est maintenant prêt. Il sera soumis, justement, au CMPDC a sa prochaine réunion qui aura lieu le 18 juin et j'espère qu'il sera adopté dans les jours qui vont suivre.

M. Saintonge: Merci.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: La loi...

M. Richard: Si le ministre des Communications ne s'y oppose pas.

M. Rivest: Oui, c'est justement cela qui m'inquiète. La loi 51 a été adoptée à quel moment? Il y a un an? Un an et demi?

M. Richard: À peu près.

M. Rivest: C'est cela. Après cela, il y a eu des projets de règlement qui ont circulé dans le monde de l'édition, qui est un monde extrêmement complexe, où votre prédécesseur...

M. Richard: Vous le connaissez bien. (21 h 45)

M. Rivest: ... a un intérêt particulier étant donné qu'il a participé lui-même au développement de l'édition au Québec. Il avait une connaissance très pratique du milieu et il a éprouvé énormément de difficulté parce que, de temps à autre, nous arrivaient, à l'Opposition, des gens du milieu, très impliqués, qui s'inquiétaient de certains avant-projets qui circulaient dans le milieu. Comme c'est notre rôle, on essayait dans toute la mesure du possible d'attirer l'attention du ministre sur les représentations qui nous étaient faites. Au moment où le ministre des Affaires culturelles, va se rendre au CMPDC, comme vous dites - ce travers que vous avez déjà pris habilement depuis que vous occupez les fonctions ministérielles de tout dénommer par sigle -est-ce qu'il y a des assurances raisonnables démontrant que la bataille au niveau des règlements ne reprendra pas?

M. Richard: M. le Président, je nuancerais, à tout le moins, les propos de M. le député de Jean-Talon. M. le député de Jean-Talon dit que le milieu était inquiet. Je serais assez d'accord avec lui pour dire que le milieu était inquiet mais inquiet, parce qu'il a hâte de voir adopté le règlement sur le livre.

M. Rivest: Hum! Je voudrais tellement que le ministre...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît:

M. Richard: Alors, ce n'est pas tout à fait l'inquiétude dont faisait état le député de Jean-Talon. D'autre part, il est bien évident qu'il sera extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, de satisfaire tout le monde. Mais je puis donner l'assurance, M. le député de Jean-Talon, compte tenu des consultations que j'ai eues avec les gens du milieu, que l'immense majorité des intéressés est déjà plus que satisfaite de la loi et sera plus que satisfaite du règlement adopté dans le cadre de cette loi 51 qui était espérée, désirée, souhaitée par ladite majorité des intéressés.

De là à vous dire que tout le monde sera absolument satisfait et ravi, j'espère bien qu'il y aura quelques critiques.

M. Rivest: M. le ministre, une question pratique, justement, en parlant de critique. Est-ce que vous croyez que, dans le dossier des relations France-Québec, notre délégué à Paris, lors de son dernier passage, vous a fait part du résultat concret des négociations au niveau du premier ministre, où il fut question de ce dossier, étant donné que nos amis, les Français, sont fortement intéressés à l'évolution de ce dossier?

M. Richard: Je n'ai pas parlé de ce sujet...

M. Rivest: Heureusement.

M. Richard: ...avec le délégué général du Québec à Paris, M. le Président.

M. Rivest: Probablement que vous allez en entendre parler prochainement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: M. le Président. Toujours dans l'aide à la publication et à la vente du livre, dans l'énoncé de politique en matière du droit d'auteur et intitulé: La juste part des créateurs, le gouvernement soutient qu'il entend prendre à court terme, dans le cadre de ses pouvoirs, une série de mesures correctives. J'en élimine quelques-unes et j'en énumère quelques-unes, entre autres: L'élimination dans les maisons d'enseignement et les bibliothèques publiques de la reproduction illégale et abusive des écrits et documents; la compensation de l'auteur d'oeuvres uniques faisant partie d'expositions dans tout musée, comme c'est déjà la règle dans les grands musées; la contribution de l'État québécois au développement d'une société polyvalente de perception des droits, et ce, durant cinq ans; la mise en place, au ministère des Affaires culturelles, d'un service des droits d'auteur qui aura une double tâche d'information et d'animation et la création d'un comité consultatif présidé par un créateur québécois.

Parmi ces mesures, lesquelles ont été réalisées ou sont en voie de l'être?

M. Richard: M. le Président, il y a eu, au sujet de cette politique, des annonces qui ont été faites avant mon arrivée au

ministère des Affaires culturelles Personne n'ignore que, depuis toujours au Québec, les auteurs se faisaient littéralement spoliés, piratés et qu'ils ont été victimes d'injustices. Le gouvernement a déjà eu l'occasion d'annoncer qu'il entendait mettre un terme à cette situation qui prévaut depuis à peu près toujours. Même si la législation dans le domaine du droit d'auteur est une législation de compétence fédérale, le gouvernement a décidé d'adopter diverses mesures pour faire en sorte que les auteurs puissent recueillir le produit auquel ils ont droit pour les oeuvres qu'ils créent. À cette fin, il y a déjà un budget qui a été mis à la disposition des auteurs. Il reste que l'annonce de cette nouvelle politique, il va sans dire, a suscité l'intérêt de plusieurs et le gouvernement -spécialement mon collègue le ministre d'État au Développement culturel qui avait lui-même annoncé la nouvelle politique en ce qui a trait aux droits d'auteur - est en train de chercher à accorder les violons de tout le monde pour faire en sorte qu'il y ait une société qui dispose d'un budget, d'une subvention gouvernementale qui puisse être mise sur pied aux fins de percevoir les droits d'auteur, mais cette politique n'a pas encore été appliquée intégralement, elle est en voie d'exécution.

Ce qui est assez formidable, remarquez, parce que depuis toujours les auteurs avaient été spoliés, mais du jour au lendemain, annoncer qu'on va faire en sorte que les droits des auteurs soient respectés, cela suscite l'intérêt de beaucoup de monde, notamment en ce qui a trait à ce que vous signaliez tout à l'heure, la reproduction dans les écoles, les CEGEP, et les universités.

M. Saintonge: Mais à ce sujet, M. le Président, je voudrais savoir si des directives spéciales ont été données dans les CEGEP, les universités?

M. Richard: Non, pas encore, que je sache. Sauf erreur, ce qui a été décidé, c'est qu'un budget serait consacré à cette fin par le gouvernement. Alors, il s'agit moins d'interdire les reproductions - ce n'est pas là l'objectif poursuivi - que de faire en sorte que si on reproduit, les auteurs puissent récolter les droits auxquels ils ont droit.

M. Saintonge: Dans ce cadre là justement, il y avait eu quand même certaines procédures qui avait été intentées par des auteurs contre...

M. Richard: Oui, il y a une procédure devant les tribunaux à laquelle le gouvernement n'a rien à voir. Une procédure intéressante pour les avocats toutefois. Je le reconnais.

M. Rivest: Mais le gouvernement n'a rien à voir. Est-ce que ce n'est pas les collèges qui sont en cause? Et dans cette magnanimité que manifeste le ministre au niveau de ses déclarations d'intention et de principe, est-ce que ce ne serait pas un beau geste de reconnaître, de régler, enfin d'une façon qui lui apparaîtrait légitime, les revendications des personnes qui ont cru ou des auteurs qui se sont crus spoliés par les pratiques d'une institution qui fait partie du cadre public et du gouvernement, et qui s'appelle entre autre un collège?

M. Richard: Oui, c'est la SADA qui poursuit un certain nombre de collèges, mais c'est précisément à cause de cette situation que le gouvernment a décidé enfin d'avoir une politique globale qui règle tous ces problèmes et il ne s'agit pas de régler les problèmes à la pièce pour chacun des collèges, mais il s'agit d'avoir une politique globale pour l'ensemble du Québec et l'ensemble de la reproduction qui est faite dans les institutions publiques du Québec.

Le Président (M. Desbiens): Le député de Saint-Henri.

M. Hains: M. le Président, M. le ministre a parlé tout à l'heure de l'aide qu'il devait apporter à la publication et à l'édition du livre. Alors nos écrivains, nos éditeurs se plaignent presque toujours du commerce du livre, disant toujours que cela ne rapporte pas suffisamment. Ils se plaignent aussi de nos citoyens qui, d'après eux - une grosse part de vérité - ne lisent pas assez. Mais quand on songe vraiment aux prix exorbitants et parfois même prohibitifs des livres actuels, on peut vraiment rechercher ailleurs que dans l'apathie de nos concitoyens. On rapportait dans la Presse du 11 mai 1981 qu'en Ontario, les éditeurs anglophones qui doivent affronter les éditeurs américains ont trouvé un système pour protéger leur production. Cette formule, on l'appelle la "half-backing", est liée à Loto-Ontario. Chaque personne qui prend un billet peut, après le tirage, si le billet est perdant, s'en servir pour acheter un livre de poche canadien. Son billet de loterie lui assure, dit-on, une remise de 0,50 $. Résultat, - en Ontario, toujours - les libraires mettent en évidence les livres de poche canadiens, et dans les écoles mêmes, dit-on, les professeurs colligent de vieux billets de loterie pour se monter des bibliothèques. Tout cela semble peut-être un peu drôle, mais tout de même, cette formule qui est simple et efficace ne pourrait-elle pas s'appliquer ici au Québec?

M. Richard: M. le Président, vous ne savez pas à quel point la question du député de Saint-Henri me fait plaisir.

M. Rivest: Nous sommes là pour cette raison, vous savez. Vous n'avez que du plaisir ici ce soir.

M. Richard: Encore une fois, M. le Président, on peut constater qu'au Québec, on paie plus allègrement pour le sport que pour la culture. Si on n'avait pas à payer un certain stade olympique, M. le député de Saint-Henri, la formule que vous proposez, je la proposerais d'emblée au gouvernement pour qu'elle soit adoptée...

M. Rivest: Avec le toit ou sans toit?

M. Richard: ...à des fins culturelles. Vous n'ignorez pas, M. le député de Saint-Henri, qu'un certain stade olympique, qui n'est malheureusement pas dans votre circonscription, nous coûte très cher et que toute la loto s'en va pour le payer.

M. Rivest: Pourquoi...

M. Richard: Je le regrette autant que vous. Je suis heureux de constater que vous aussi, toutefois, vous le regrettez.

M. Rivest: M. le Président, je ne vois pas du tout pourquoi le ministre des Affaires culturelles accable ainsi le maire de Montréal en son absence.

Des voix: Ah! Ah!

M. Rivest: Déjà, dans le domaine culturel, il a eu son Corridart.

M. Richard: Oui, mais il ne m'a laissé qu'un corridor très étroit.

M. Rivest: Avez-vous une autre question?

M. Hains: Non.

M. Rivest: Dois-je comprendre que la réponse du ministre à la suggestion qui a été faite par mon collègue de Saint-Henri est négative. Il ne veut pas ou ne croit pas possible en ce moment de s'engager dans cette direction, parce que non seulement cela pourrait s'appliquer au livre, mais cette technique pourrait s'appliquer au disque et à d'autres biens culturels, là où elle a été expérimentée, semble-t-il, d'après les informations du député de Saint-Henri, avec un certain succès.

Cela m'amène, voulant vous faire plaisir en ce début au ministère, vous affectionnez les questions d'ordre général, à vous demander un engagement que vos deux collègues qui vous ont précédé aux Affaires culturelles ont pris relativement au livre, ou tout près. Chaque fois, autant le premier ministre que le second nous a parlé avec beaucoup d'emphase d'une politique globale de la lecture au Québec et cette politique, je suppose que vous allez nous la promettre vous aussi... Vous connaissant...

M. Richard: Certainement.

M. Rivest: ...très bien, j'ai bon espoir que vous tiendrez promesse et ferez honte à vos deux prédécesseurs qui s'en sont simplement tenus au niveau des grandes intentions. Vous allez la faire, la politique globale de la lecture?

M. Richard: M. le Président, il me fait plaisir, encore une fois, de répondre à cette question. Je ne ferai certainement pas honte à mes prédécesseurs, parce que ce sont eux qui auront toujours eu le mérite de mettre sur pied ce réseau de bibliothèques publiques et de bibliothèques centrales de prêts sans lesquelles il est absolument impossible de concevoir une politique globale du livre.

Maintenant que mes prédécesseurs ont vu à appliquer une politique d'implantation d'un réseau de bibliothèques publiques, de bibliothèques municipales et de bibliothèques centrales de prêts, je pense qu'il sera possible de concevoir et d'appliquer une politique du livre.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Rivest: Une politique de la lecture, en passant. Ce n'est pas une politique du livre. Ce n'est pas la même chose. En tout cas!

M. Richard: Oui, oui, c'est-à-dire de la lecture.

M. Rivest: Oui, oui, c'est cela.

M. Richard: Mais je vous signale que le livre est donc, par ricochet... Cela représente 20% du budget total du ministère des Affaires culturelles, M. le député de Jean-Talon.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

Prix littéraires imposés

M. Saintonge: Merci, M. le Président. Le 10 décembre 1980, une question était adressée à votre prédécesseur aux Affaires culturelles concernant les cotisations imposées par la Régie des loteries et courses du Québec sur les prix littéraires. À ce moment-là, tant le ministre des Affaires culturelles que celui du Revenu avaient pris l'engagement de modifier la loi pour empêcher que de telles absurdités se répètent. Je voudrais savoir où en est rendu

ce dossier. (22 heures)

M. Rivest: Question générale!

M. Richard: Ah oui! Je prends le même engagement, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Rivest: II prend le même engagement, ne lui en demandez pas plus.

M. Saintonge: Est-ce qu'on peut savoir quand une action concrète pourrait être entreprise? Cela fait déjà quand même un bout de temps que cet engagement avait été pris, c'était en décembre dernier.

M. Richard: Comme vous avez probablement dit très souvent devant les tribunaux, M. le député de Laprairie, dans les meilleurs délais.

M. Saintonge: Dans les meilleurs délais.

M. Rivest: M. le Président, tantôt vous avez fait grand état du sport et vous en avez traité d'une façon un peu haute. Je vous rappellerais que nos lois du revenu pour les athlètes ont des dispositions qui les favorisent sur le plan fiscal. Je vous inviterais à vous en inspirer justement pour régler dans le même esprit ces procédures et ces demandes de nos écrivains qui obtiennent des prix littéraires.

M. Richard: Je le ferai, M. le Président.

M. Rivest: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Saintonge: M. le Président, juste une seconde, s'il vous plaît. Pour terminer cette question, je comprends que, dans les meilleurs délais, c'est quand même assez vague, mais j'ose espérer que l'action sera entreprise avant la remise des prochains prix qui viendra, si je ne me trompe, à l'automne.

M. Richard: Dans les meilleurs délais, M. le député.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Viau.

M. Cusano: M. le ministre, à cause des coupures budgétaires faites par le ministre de l'Éducation, la bibliothèque très spécialisée de la CECM, la Commission des écoles catholiques de Montréal, est menacée de fermeture. Est-ce qu'on entend relocaliser cette bibliothèque ou la subventionner par le truchement de votre ministère en lui versant les fonds nécessaires pour qu'elle reste ouverte?

M. Richard: M. le Président, il semblerait que le problème soulevé par M. le député de Viau ne relève pas du ministère des Affaires culturelles, mais on est quand même en mesure, je crois, d'y apporter une réponse. Le ministère de l'Éducation a toujours pensé que cette bibliothèque très spécialisée, qui est destinée essentiellement, pour ne pas dire exclusivement, aux enseignants, devrait être intégrée à l'Université du Québec à Montréal. Si cela était fait, cela ne poserait aucun problème. C'est qu'apparemment, il y a un litige entre le ministère de l'Éducation et la CECM, qui tiendrait à conserver cette bibliothèque spécialisée. Est-ce que c'est là un mandat ou la vocation de la CECM? Je l'ignore, mais je sais que le ministère de l'Éducation prétend que cela devrait être intégré à I'UQAM.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Une dernière question sur le livre. Vous savez, M. le ministre, qu'à l'intérieur de la loi 51, tout le domaine qui est très important pour nos éditeurs et nos auteurs, celui du livre scolaire, a échappé à l'essentiel des démarches qui étaient en fait la structure de la loi 51 et qu'au niveau de votre collègue du ministre de l'Éducation et en particulier l'ancien député de Terrebonne, maintenant député de Groulx, qui était à l'époque adjoint parlementaire du ministre de l'Éducation et qui l'est encore - oui - vous ne le savez pas, M. l'ex-whip - avait promis aux éditeurs, qui sont très concernés par ce problème, l'élaboration d'une politique du livre scolaire dans les institutions. Est-ce que vous en avez eu des échos depuis votre arrivée récente au ministère? Lorsque vous irez au CP je ne sais plus trop quoi -j'imagine que vous auriez intérêt à soulever cette question?

M. Richard: Ce problème est la responsabilité du ministère de l'Éducation. Le ministère des Affaires culturelles apporte son expertise dans le domaine au ministère de l'Éducation, qui est en train d'élaborer une politique pour les bibliothèques scolaires.

M. Rivest: Oui, mais quand vous allez à votre fameux comité...

M. Richard: C'est le MPDC.

M. Rivest: ...le MPDC, vous y arrivez avec vos dossiers sectoriels et vous dites que vos collègues vous aident beaucoup. Mais, quand votre collègue de l'Éducation va

arriver avec le dossier du livre scolaire, allez-vous avoir quelque chose à dire? Et quoi?

M. Richard: M. le Président, ce dossier n'a pas encore été à l'ordre du jour d'une réunion du CMPDC...

M. Rivest: Cela fait un an et demi que c'est promis.

M. Richard: ...quand il sera à l'ordre du jour et que notre expertise sera sollicitée, ça nous fera plaisir d'apporter notre contribution.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

Conservation du patrimoine

M. Saintonge: D'accord, M. le Président, nous allons passer à l'étape 5, la conservation du patrimoine.

M. Lalonde: Où est le député de Deux-Montaqnes?

M. Rivest: Oui, le patrimoine. L'allié dans le patrimoine a quitté la place.

M. Lalonde: Celui qui grognait tout à l'heure, il n'est pas là.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: C'était le programme 2, à ce moment-là, du livre, mais c'était mon article.

M. Rivest: M. le ministre, ne soyez pas inquiet. Les programmes vont tomber rapidement.

M. Lalonde: Comme le ministre. M. Rivest: Comme les ministres.

M. Saintonge: M. le Président, depuis quelques années, un projet de loi...

M. Richard: Depuis que vous avez vu le Parti libéral tomber, vous autres, vous vous imaginez que tout le monde va tomber comme le Parti libéral, regardez-moi donc ça.

Des voix: On a monté, nous autres.

M. Lalonde: On était à... combien? 39% de plus de votes.

M. Saintonge: Vous étiez ministre, vous, dans ce gouvernement-là.

M. Lalonde: On a pris en charge toute...

M. Richard: C'est vrai, c'est vrai. M. Rivest: C'est une victoire morale!

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: M. le Président, depuis quelques années, un projet de loi-cadre sur les archives traîne dans le décor. Lors de l'étude des crédits, l'an dernier, l'ex-ministre Vaugeois avait promis de le déposer à l'automne. Est-ce que vous avez progressé depuis dans ce secteur?

M. Richard: M. le député de Laprairie, ça me fait plaisir de vous répondre. Si le temps le permet et je pense qu'il devrait normalement le permette, s'il n'y a pas accumulation de lois c'est la seule précaution que je prends, je suis prêt et j'ai l'intention de déposer un projet de loi à l'automne. La seule précaution que je prends, c'est qu'on pourrait me dire: II y a trop de lois ou je ne sais quoi...

M. Lalonde: Comment? Vous allez vous laisser bousculer comme ça?

M. Richard: Non, c'est que j'aurai beaucoup de lois à l'automne, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Rivest: Comme quoi, par exemple?

M. Richard: Et nous autres, dois-je vous le rappeler, on forme une équipe, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Mais, ne vous cachez pas derrière, s'il vous plaît.

M. Richard: Non, non.

M. Lalonde: Oui, mais l'équipe en somme c'est ce que...

M. Richard: L'équipe au grand complet...

M. Lalonde: Beaucoup de lois, voulez-vous les nommer s'il vous plaît?

M. Richard: Bon. M. le député de Marguerite-Bourgeoys, il y aura une loi sur les archives; il y aura une loi en ce qui a trait au ministère des Affaires culturelles; vraisemblablement sur le rôle des conseils de la culture et la régionalisation. Il y aura sans doute aussi - ça me fait plaisir de parler de ça - une loi sur certaines des institutions dépendant du ministère des

Affaires culturelles et, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, en réponse plus spécifigue à votre guestion, le rêve d'une majorité, vous ne l'ignorez pas, c'est de passer toutes ses lois. Mais, elle est souvent dépendante aussi, et je pense qu'il est bon qu'il en soit ainsi, de la volonté de l'Opposition. C'est pourguoi j'étais si heureux tout à l'heure de vous entendre me garantir votre collaboration. Je sais qu'ainsi, je pourrai passer la législation qui me tient à coeur dès l'automne.

M. Lalonde: M. le Président, répondant...

M. Richard: II y aura le cinéma aussi; J'oubliais le cinéma.

M. Lalonde: J'espère que vous ne ferez pas le erreurs qui ont coulé votre prédécesseur. Répondant à l'invitation du ministre, je réitère ce que le porte-parole de l'Opposition a dit tout à l'heure, à savoir que l'Opposition officielle offre toute sa collaboration. Si ça peut avoir un certain poids dans la fameuse équipe dont faisait état tout à l'heure le ministre, vous pouvez invoquer cette collaboration de l'Opposition, à savoir recevoir et étudier les projets de loi que le ministre pourrait proposer à l'Assemblée nationale. Pas nécessairement les adopter dans la forme que le ministre proposera, ça, ça dépend un peu du contenu. Mais vous pouvez compter sur nous là-dessus.

M. Richard: Ah bien, ça c'est une bonne nouvelle! Je vous remercie M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Rivest: Si vous voulez avoir une suggestion...

M. Richard: Dans de pareilles conditions on aura sans doute une loi sur les archives à l'automne.

M. Rivest: Si vous voulez avoir une suggestion, si vous voulez nous faire jouer dans votre éguipe, franchement, quand vous avez fait état de la proportion du budget des Affaires culturelles dans le budget du gouvernement, je trouve que dans votre équipe, il y en a qui "shoot" dans vos "goals".

M. Richard: Oui, mais remarquez que dans votre équipe, c'était encore pire si on tient compte de l'augmentation, toutes proportions gardées, qu'a connue le budget des Affaires culturelles par rapport à ce qu'il était sous le règne d'un gouvernement que vous avez fort bien connu, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Vous parlez de M. L'Allier?

M. Richard: Même avant.

M. Lalonde: C'est votre électeur!

M. Richard: M. Hardy, tous. Je vous l'ai expliqué tout à l'heure en toute objectivité et ce n'est pas un phénomène unique au Québec; dans toutes les sociétés occidentales, on craint toujours d'accorder une part importante du budget d'État aux affaires culturelles. Je le déplore, je le regrette et je constate que nous ne faisons pas exception à la règle.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

Les archives

M. Saintonge: Nous apprenions, M. le Président, l'existence d'un plan quinquennal de développement, plan 1980-1985, dans le cadre des archives. Est-ce que le ministre pourrait déposer ou nous faire parvenir une copie de ce plan? C'est une étude, en fait, pour analyser en détail le fonctionnement et l'évolution de chacune des activités du réseau des centres d'archives de l'État québécois.

M. Rivest: II y a tellement d'études dans ce gouvernement, on les perd.

M. Lalonde: Est-ce que le silence du ministre est un aveu qu'il n'y a pas de plan?

M. Richard: C'est assez extraordinaire, M. le Président. On me dit - je comprends pourquoi je ne connaissais rien de ce dossier - qu'il y a eu un plan quiquennal préparé au sein du ministère en 1977, qui a été devancé et qui est maintenant complété. C'était en 1977. Il s'agit d'un plan quinquennal qui devait être parachevé en 1982. Il a été devancé et complété.

M. Rivest: Quels sont les résultats pratiques? Est-ce que le ministre peut porter un jugement sur cette réalisation magnifigue dont il se vante?

M. Richard: J'avoue que, comme j'ignorais l'existence de ce plan quinquennal mûri par le ministère, en 1977, je serais bien malvenu, M. le député de Jean-Talon, de porter un jugement sur l'effet et le résultat de l'application de ce plan quinquennal.

M. Lalonde: Pour permettre aux députés de l'Opposition de porter un jugement très modeste, il y aurait peut-être lieu de rendre public ce plan.

M. Rivest: ... de nous donner un rapport détaillé de cela, non pas à nous, il y a la population derrière nous qui s'intéresse

à cela.

M. Lalonde: Peut-être que le plan était trop modeste.

M. Richard: C'était un plan qui visait simplement à créer des bureaux d'archives dans les régions, cela a été fait, c'est tout.

M. Rivest: Par exemple, dans la région de Québec, dont vous êtes, qu'est-ce que c'a donné concrètement? Il me semble que vous devriez être au courant.

M. Richard: La région de Québec, dites-vous, ça ne devait pas viser Québec parce que...

M. Rivest: La région de Québec est une région qui est sans doute riche en archives, vous êtes député depuis combien d'années?

Une voix: Cinq ans.

M. Rivest: ... cinq ans, ministre, vous ne savez pas cela?

M. Richard: Savez-vous ce qu'on a créé en 1978...

M. Rivest: Nous posons les questions.

M. Richard: ... sur le campus Laval, M. le député de Jean-Talon?

M. Rivest: On vient de vous le dire, dites-le-moi.

M. Richard: Dans votre comté, savez-vous ce qu'on a créé? Vous ne saviez même pas cela.

M. Rivest: Non, c'est dans le comté de Louis-Hébert. Vous ne connaissez pas votre carte électorale.

M. Richard: Dans votre comté. Vous ne le savez pas?

M. Lalonde: C'est le comté de Louis-Hébert.

M. Rivest: C'est le comté de Louis-Hébert.

M. Richard: Vous ne savez pas cela. Savez-vous ce que le ministère a créé dans votre comté à ce sujet?

M. Lalonde: Est-ce que votre plan quinquennal serait déjà rendu aux archives?

M. Richard: Ah! Je ne vous le dirai pas.

M. Rivest: Oui, il est probablement aux archives, le plan quinquennal.

M. Lalonde: Pouvez-vous nous dire ce qui a été créé à Québec?

M. Richard: La maison Casault. M. Lalonde: C'est tout:

M. Richard: C'est tout pour les archives, oui.

M. Rivest: Je sais ce que vous avez fait dans mon comté, par exemple, pour les archives: vous avez mis en péril l'avenir de la paroisse Saint-Coeur-de-Marie, alors que vous avez une politique de revalorisation et de revitalisation de la colline parlementaire. Lorsque les archives ont annuler le bail qu'elles avaient avec la fabrique de la paroisse Saint-Coeur-de-Marie, il y aura une paroisse, qui est une vie humaine, dans un milieu communautaire, qui est celui de la colline parlementaire, que le ministère des Affaires culturelles et le ministère des Travaux publics ont refusé de renouveler le bail de location des archives parce qu'on a intégré... Je n'ai pas pu obtenir du gouvernement du Québec, et cela c'est votre politique... Je le sais parce que cela s'est fait dans mon comté. L'autre truc, c'est en dehors. (22 h 15)

M. Richard: M. le Président, cela prend un sapré culot pour nous dire que c'est nous qui avons détruit la vie paroissiale autour de la colline parlementaire. Cela prend un sapré culot, M. le Président, et je m'inscris en faux...

M. Lalonde: Répondez donc aux questions.

Des voix: Répondez donc aux questions. M. Lalonde: On a assez des...

M. Richard: Je m'inscris en faux contre cette affirmation dénuée de tout fondement, farfelue...

M. Rivest: Bien, vous irez voir.

M. Richard: Ceux qui ont massacré tous les alentours de la colline parlementaire et tout le Vieux-Québec, en particulier...

M. Lalonde: Qu'avez-vous fait du boisé Saint-Amable?

M. Richard: ...et autour des murs du Vieux-Québec, ce sont nos prédécesseurs, M. le Président, et non pas nous.

M. Rivest: M. le Président, question de règlement.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît! M. le député de Jean-Talon, sur une question de règlement.

M. Rîvest: Vous lirez les interventions du député de Louis-Hébert, en 1968, à l'Assemblée nationale du Québec.

Le Président (M. Desbiens): Quelle est la question de règlement?

M. Rivest: La question de règlement, M. le Président, c'est qu'on nous a accusés d'une chose. Vous lirez le député de Louis-Hébert qui, à l'époque, était M. Lesage. Et vous saurez que...

M. Dussault: II y en a pas de question de privilège ici.

M. Rivest: ...l'aménagement du G, du H et du "bunker", du bureau du premier ministre c'est une décision qui n'est pas du tout celle de l'administration libérale des années soixante-dix non plus que celle de 1966 à 1970, c'est l'administration de 1960...

M. Richard: Ai-je dit cela, M. le Président? Ai-je dit cela? J'ai dit nos prédécesseurs.

M. Rivest: Non, je vous informe, M. le Président.

M. Richard: Ceux qui ont été nos prédécesseurs. Et je peux vous parler...

M. Rivest: C'est l'Union Nationale. Le ministre était M. Armand Russell.

M. Richard: ...du Hilton, je peux vous parler de Place d'Youville et je peux vous parler de tout ce qu'on a fait autour de la colline parlementaire et pas seulement du "bunker", du G puis de tout ce qu'il y a là.

M. Rivest: Parlez-nous donc des rapports...

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. Rivest:...et des programmes accélérés que vous avez faits et dont vous n'avez même pas l'ombre de l'existence.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. Rivest: Le rapport sur les archives, parlez-nous en donc.

M. Lalonde: Est-ce que votre rapport sur les archives est rendu aux archives?

M. Richard: M. le député.

M. Rivest: C'était cela la question entre parenthèse.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre s'il vous plaît;

M. Richard: M. le Président, j'ai expliqué tout à l'heure qu'il y a eu un plan quinquennal en 1977 qui est déjà appliqué et qui est déjà en quelque sorte caduc puisqu'il est déjà parachevé, qui était pour créer des bureaux d'archives dans les régions, ce qui n'existait pas auparavant. Maintenant, il y a des bureaux d'archives dans des régions du Québec, ce qui est nouveau, ce qui a été fait dans le cadre de ce plan quinquennal élaboré au sein du ministère en 1977. Alors, je peux vous dire qu'en 1980-1981 il y a eu l'établissement du Centre d'archives de la Côte-Nord à Sept-Îles. C'était le parachèvement de ce plan quinquennal de 1977 et de telle sorte que maintenant il y a des archives dans neuf des dix régions administratives du Québec, ce qui est nouveau, ce qui n'existait pas auparavant.

M. Rivest: Quelle région a été négligée?

M. Richard: Le Grand-Nord, M. le Président.

Une voix: C'était cochon!

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Rivest: On va lui faire passer son test. Il va être poli dans les prochaines années.

M. Lalonde: Cela va être un bon ministre à part cela. Vous allez voir, vous allez être bon.

M. Rivest: Après, il va être bon.

Le Président (M. Desbiens): Mme la députée de Jacques-Cartier.

Les sites historiques

Mme Dougherty: M. le Président, j'ai une question sur la conservation des sites et des biens historiques. Il s'agit d'une enquête réclamée par Héritage Montréal. La fondation Héritage Montréal a adressé, juste avant les élections, une requête à l'ex-ministre des Affaires culturelles, M. Denis Vaugeois, pour instituer une commission d'enquête et d'étude sur la protection du patrimoine des institutions dans l'île de Montréal. Cette commission d'enquête étudierait les situations des communautés religieuses, des institutions charitables, des corporations hospitalières, des maisons

d'éducation et autres institutions à caractère public qui, en milieu urbain, possèdent d'importantes propriétés. La fondation Héritage justifie cette demande d'enquête du fait que, je cite, "les institutions qui sentent leur survie menacée tentent de spéculer ou de vendre les propriétés foncières et immobilières qu'elles possèdent. Le résultat des transactions qui s'ensuivent n'est pas nécessairement toujours à l'avantage ni de l'institution ni de la collectivité. Quel sort le ministre a-t-il réservé à cette requête?

M. Richard: M. le Président, la question est fort pertinente et fort intéressante. C'est l'un des premiers dossiers sur lesquels j'ai eu à me pencher en arrivant au ministère des Affaires culturelles. Je signale, au passaqe, que la première décision d'importance que j'ai prise il y a quelques semaines dès mon arrivée, a été de classer le domaine des messieurs de Saint-Sulpice.

M. Rivest: Si Mme la députée de L'Acadie était ici, elle vous en parlerait.

M. Richard: Mme la députée de L'Acadie se dirait réjouie de cet avis de classement.

D'autre part, Mme la députée de Jacques-Cartier, j'ai pris connaissance de la requête d'Héritage Montréal. Je vous signale immédiatement que je partage entièrement les objectifs poursuivis par Héritage Montréal. Il n'y a pas la moindre divergence d'opinions en ce qui concerne les objectifs poursuivis de part et d'autre.

Toutefois, Héritage Montréal propose une commission d'enquête. J'avoue que j'ai de la difficulté à acquiescer à cette requête, puisqu'il existe déjà une Commission des biens culturels dont le mandat est précisément celui qu'Héritage Montréal voudrait donner à une commission d'enquête. Ce que j'ai plutôt demandé à la Commission des biens culturels, c'est de préparer un plan d'action pour la sauvegarde, la protection et la restauration des biens conventuels à Montréal. Cela fait partie de la mission de la Commission des biens culturels; alors, il m'apparaissait superflu de dédoubler cette commission d'une autre commission d'enquête, puisque c'est déjà son rôle essentiel. Inutile de vous dire qu'on a l'intention d'associer étroitement les communautés religieuses concernées à la préparation de ce plan d'action pour sauvegarder les biens conventuels.

Mme Dougherty: Vous avez parlé du classement. Est-ce que le ministre est prêt à émettre un avis de classement pour ce qui reste du bois des Sulpiciens à Montréal?

M. Richard: Mme la députée de Jacques-Cartier, c'est ce que je disais tout à l'heure, j'ai moi-même émis un avis de classement pour tout le domaine des Sulpiciens.

Mme Dougherty: II sera trop tard peut-être.

M. Richard: Je suis allé rencontrer les messieurs de Saint-Sulpice trois ou quatre jours après mon assermentation comme ministre des Affaires culturelles, pour les en aviser verbalement parce qu'il me semble que la courtoisie élémentaire l'exigeait. Nous avons eu une rencontre très cordiale avec les messieurs de Saint-Sulpice et je leur ai ensuite signifié un avis écrit de classement dont la Presse d'aujourd'hui a fait état, je crois.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: M. le ministre. Vous avez vous-même évoqué ce problème de la conservation des immeubles qui ont un certain caractère historique, en particulier, dans les centre-ville. Je conçois volontiers que dans la région de Québec, sur ce plan, on a eu beaucoup de regrets à formuler. Vous l'avez fait vous-même et on est parfaitement d'accord. Il y a un article qui a paru dans le journal Le Soleil, il y a environ trois semaines, où on a évoqué les expériences qui existent à ce titre. Le titre du programme, c'est le programme du transfert de droit de développement. C'est un peu technique, c'est un article qui a paru dans le Soleil, le 12 mai 1981, sous la signature de M. Jean-Yves Cloutier. En particulier dans les villes américaines, l'idée générale c'est qu'au lieu d'acheter ou de détruire un immeuble - si quelqu'un veut faire une expansion quelconque dans un centre-ville et en particulier dans le quartier des affaires - on négocie la partie non développée par des fins d'affaires et on trouve à ce moment à partager en quelque sorte le droit de propriété et à préserver à l'intérieur des aménagements urbains les immeubles historiques en rachetant les droits qui ne sont pas nécessaires à la construction des immeubles.

Je veux vous signaler, parce que je ne suis pas plus familier que vous avec cette démarche, que j'ai vu à Montréal dans un bulletin de nouvelles une chose qui m'a frappé, où l'Alcan construit un immeuble en hauteur. Mais, comme il y avait des maisons qui présentaient un caractère historique, on a su préserver et intégrer dans le plan architectural la maison en question. Je me demande si le ministre, je le lui signale le plus simplement du monde ce soir, à songé à demander à son ministère d'étudier ces possibilités parce que, dans l'article auquel je me réfère, on signale des expériences entre

autres dans les villes de New-York, Chicago et certaines autres villes américaines. Ce semble être une technique, mais sans doute y a-t-il un problème de coût au niveau du ministère dans le cadre de ces projets. Le député de Marguerite-Bourgeoys me signale qu'on a procédé un peu ainsi sans le savoir quand on a construit aux coins de Berri et Sainte-Catherine...

M. Richard: Tout à fait:

M. Rivest: ...l'université du Québec et conservé la tour de l'église Saint-Jacques. Est-ce que le ministère des Affaires culturelles est intéressé à ce genre de démarche? Et, si oui, dans quelle mesure.

M. Richard: Tout à fait, M. le député de Jean-Talon. Je pense que ce qui a eu une valeur d'exemple et de modèle, cela a été justement la construction, dont faisait état M. le député de Marguerite-Bourgeoys, l'université du Québec, à Montréal, avec la conservation des deux clochers, qui sont magnifiques d'ailleurs, et qui ont donné beaucoup de cachet non seulement à l'édifice, mais à tout le quartier.

Il y a en cours d'exécution le projet de l'Alcan qui, à mon humble avis, sera assez extraordinaire pour la conservation d'édifices à valeur patrimoniale à Montréal. Il y a également, dans la région de Québec, en particulier sur la Grande-Allée...

M. Rivest: Dans Jean-Talon.

M. Richard: ...dans votre comté, M. le député, de Jean-Talon, des projets comme cela, où on essaie d'harmoniser l'architecture ancienne avec des projets de construction modernes. Il s'agit d'amener les architectes à être très conscients de la sauvegarde du patrimoine et à concevoir une architecture pouvant incorporer l'ancien et le moderne en vue de la sauvegarde de ce qui a une valeur patrimoniale. Nous encourageons très fortement ce genre d'initiatives.

M. Rivest: Je ne voudrais pas prolonger indûment ces propos, mais j'aimerais que le ministre, au fil des semaines et des mois, certainement au cours de la prochaine année, puisse articuler davantage un programme - si ses collaborateurs lui indiquent que l'on peut s'orienter dans ce sens - plus défini que ces expériences qui sont peut-être venues d'entreprises privées, enfin de cette espèce de sensibilisation qu'à peu près tous les milieux, y compris les grandes entreprises, et c'est de bon augure, ont à ce sujet.

M. Richard: II y a plusieurs entreprises, notamment des banques et des caisses populaires, qui utilisent maintenant de vieux édifices et s'installent dans de vieilles maisons. Malheureusement, ce ne sont pas toutes les caisses et les banques qui sont disposées à tenter l'aventure, mais on va essayer de les inspirer.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: M. le ministre, comment pouvez-vous nous promettre de nouvelles initiatives en ce sens alors que vous avez diminué, enfin que votre gouvernement a diminué le budget à ce titre, au grand scandale du député de Deux-Montagnes, qui a sûrement de nombreuses questions à poser la-dessus. (22 h 30)

M. Richard: M. le Président, le député de Marguerite-Bourgeoys laisse entendre que la défense du patrimoine est essentiellement reliée aux montants alloués pour le budget des Affaires culturelles, ce qui n'est pas le cas.

M. Rivest: C'est l'intention qui compte.

M. Richard: II faut convaincre le secteur privé de s'intéresser à la défense et à la sauvegarde du patrimoine. C'est ce qui a été réussi comme jamais auparavant dans les dernières années et c'est ce qu'on espère réussir dans l'avenir. C'est ce qui a été fait - vous l'avez mentionné vous-même - et ce qui a eu une valeur d'exemple à l'Université de Montréal, ensuite, l'Alcan a repris. Dans le Vieux-Montréal, maintenant, il y a beaucoup d'entreprises privées qui sont tout à fait conscientes qu'elles donnent même de la valeur à leur propre parc immobilier en sauvegardant le patrimoine. On espère que cela servira d'exemple et que ça fera boule de neige, mais ce n'est pas essentiellement lié au montant du budget des Affaires culturelles, il faut que la population s'intéresse d'abord à la défense du patrimoine.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: M. le Président...

M. Lalonde: Excusez-moi, si le député de Saint-Henri me le permet, j'avais une question additionnelle.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: Devant cet étalage de bonnes intentions, ça me fait penser un peu à ce dont l'enfer est pavé. En parlant de pavé, est-ce que le ministère des Affaires culturelles a été consulté sur les splendeurs parlementaires qu'on est en train de construire devant le parlement dans le comté

de Jean-Talon, justement?

M. Richard: Je l'ignore, M. le Président; je n'étais point titulaire du ministère des Affaires culturelles à ce moment-là.

M. Rivest: Vous étiez président de l'Assemblée nationale.

M. Richard: Oui, mais je ne suis pas en train de défendre les crédits de la présidence de l'Assemblée nationale; je suis en train de défendre les crédits du ministère des Affaires culturelles. Alors, je l'ignore.

M. Lalonde: Vous ne pouvez pas nous faire part des connaissances que vous auriez acquises comme président sur ces travaux très élaborés qu'on fait devant l'Assemblée nationale où on est en train de paver je ne sais pas de quelle façon, ce sera découvert un jour.

M. Richard: Oh, mon Dieu! Cela prend l'un des concepteurs du stade olympique pour me parler de travaux élaborés en face du parlement. Voyons!

M. Rivest: Pauvre M. Drapeau, ce n'est pas sa soirée.

M. Lalonde: Est-ce que vous me prenez pour le maire de Montréal?

M. Rivest: M. le ministre, sérieusement...

M. Richard: Non, mais pour un collaborateur au moment de la construction du stade olympique.

M. Lalonde: Vous n'avez sûrement pas lu le rapport Malouf qui a dit que j'avais fait un excellent travail.

M. Rivest: C'est vrai.

M. Richard: Oui, vous l'avez mené à bonne fin sans toit.

M. Rivest: Vous êtes ministre des Affaires culturelles. Est-ce que vous pourriez vous informer auprès de vos collaborateurs des avis qui ont été émis ou des préoccupations qui ont été adressées à vos prédécesseurs sur le projet grandiose, fontaines, mât et pavé, qui va maintenant être sans doute devant l'un des monuments historiques les plus remarquables, enfin celui auquel on attache le plus grand prix et qui s'appelle la colline parlementaire.

M. Richard: Je vais m'enquérir de cela, M. le Président.

M. Rivest: Nous allons attendre.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: M. le Président...

M. Rivest: Vous permettez, M. le député?

M. Hains: Oui, certainement.

M. Rivest: II va demander l'information.

M. Lalonde: Le député de Deux-Montagnes a une question; c'est notre allié.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Je ne veux pas priver le député de Saint-Henri...

M. Richard: M. le Président, si vous me le permettez, pour apporter un complément de réponse, le ministère des Affaires culturelles a été consulté sur le projet d'aménagement de la colline parlementaire et, précisément parce qu'il a été consulté et à la suite de cette consultation, le ministre des Affaires culturelles a émis l'avis qu'il ne devrait y avoir ni fontaines, contrairement à ce que vous venez d'insinuer, ni bassins. Il n'y aura donc ni fontaines, ni bassins, l'avis du ministère des Affaires culturelles ayant été entendu.

M. Rivest: Cela a eu pour conséquence de contredire les projets du président de l'Assemblée nationale de l'époque.

M. Richard: Pas du président de l'Assemblée nationale, mais du ministre des Travaux publics.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Deux-Montagnes.

M. Rivest: Oui, les disparus ont toujours tort.

M. Lalonde: Les absents ont tort.

M. Rivest: Les disparus ont tort.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre!

M. de Bellefeuille: M. le Président, je m'en voudrais d'interrompre ce débat passionnant sur le parlement, mais, avec votre permission, j'aimerais revenir à la question des archives. M. le ministre nous a dit que, grâce au plan quinquennal du ministère, il y a eu implantation d'archives régionales dans neuf des dix régions administratives du Québec. Telles qu'on les

connaît généralement, les régions administratives comprennent particulièrement la région 6, qui est composée de toute l'île de Montréal, de toute l'île Jésus, d'un vaste secteur de la rive sud et des régions des Laurentides et de la Lanaudière, et j'en oublie, c'est plus de la moitié du Québec.

Malheureusement, on ne peut pas tout suivre. Je n'ai pas beaucoup suivi l'évolution de cette question des archives au cours des dernières années. Je voudrais savoir ce qui en est dans cet univers très vaste qui est la région no 6.

M. Rivest: Bonne chance!

M. de Bellefeuille: J'ajoute, M. le Président, que, dans la région no 6, il y a par exemple Saint-Eustache, où il y avait des éléments d'archives extrêmement intéressants, dont les journaux du curé Paquin et d'autres pièces relatives à l'histoire locale qui a, bien sûr, une dimension nationale. Je crois que ces pièces-là sont en lieu sûr quelque part mais je suis curieux de savoir où elles se trouvent et quelles sont les conditions d'accès.

M. Richard: M. le Président, avec la permission de mes collègues, la question revêt un caractère si technique que je demanderai au sous-ministre adjoint, M. Chagnon, de répondre à cette question.

Le Président (M. Desbiens): Au nom du ministre.

M. Richard: On m'informe que, dans cette région-là, il y a toujours eu un centre d'archives qui, d'ailleurs, est le plus important en dimension et c'est également la région où les sommes les plus considérables ont été investies pour justement protéger les archives; il n'y a qu'un seul centre, mais ce centre a les dimensions nécessaires pour répondre aux besoins.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Nos biens culturels immobiliers, M. le Président, sont souvent spoliés. Je pense, par exemple, à la maison Melançon, vieille de 300 ans, située dans un parc de verdure à Candiac, sur les bord du Saint-Laurent. Cette maison n'a pas été classée et est actuellement la proie des vandales, jeunes et vieux, et est maintenant dans un état fort piteux. La demande a été faite par des groupes désireux de sauver ce patrimoine et par la famille Girard que, je crois, M. le député de Châteauguay connaît bien. Pourtant, rien n'a été fait. Dans cette même petite ville, on a détruit le moulin banal, sur l'île des Seigneurs, puis une autre maison vieille de 100 ans, qu'on appelait autrefois Les Barrières.

Je demande donc à M. le ministre sur quelles bases il intervient dans la désignation des biens culturels à conserver, s'il vous plaît.

M. Richard: M. le Président, ça me fait plaisir de signaler à M. le député de Saint-Henri que j'ai déjà eu l'occasion de faire le tour des sites patrimoniaux de l'île de Montréal. Je n'ai pas encore eu l'occasion d'aller sur la rive sud de Montréal mais l'île de Montréal, j'ai déjà eu l'occasion d'en faire le tour.

Je vais vous indiquer, par exemple, quand vous faites état d'une maison vieille de 100 ans... 300 ans, s'il fallait, M. le Président, que toutes les maisons de 300 ans de mon comté soient classées, je pense que, encore une fois, le budget du ministère des Affaires culturelles se révélerait largement insuffisant. Il y a des critères de classement. Il y a un danger dans le classement, c'est que, une fois que vous avez classé, vous êtes engagés indéfiniment ensuite à assumer les coût de restauration de telle sorte que le ministère des Affaires culturelles ne peut pas s'engager inconsidérément en classant chaque immeuble ou chaque bien, même mobilier, qui lui apparaît intéressant. Il y a donc des choix à faire qui ne sont pas toujours faciles à faire mais qui sont faits suivant certains critères reposant sur la valeur patrimoniale essentiellement.

M. Hains: Je reviens un peu là-dessus, c'est que cette maison est située vraiment dans un parc de verdure et c'est un parc qu'on conserve pour que les gens aillent s'y promener et s'y reposer l'été. C'est pour ça qu'on a déjà demandé que cette maison soit classée monument historique. C'est à la demande de ces gens que je fais cette requête aujourd'hui. M. le député de Châteauguay pourrait peut-être intervenir?

M. Richard: Selon les renseignements que j'ai, personne au ministère ne se souvient d'avoir reçu une demande de classement. Si une demande de classement nous est acheminée, on l'étudiera attentivement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, effectivement, je connais très bien cette maison située dans le parc de Candiac qui n'est plus dans le comté de Châteauguay, mais qui l'était avant la dernière élection. À ma connaissance, du moins pendant les années que j'ai été le député de cette partie du comté de Châteauguay dans le temps, il n'y a jamais eu de demande de classement de cette maison. Je sais que la ville

souhaitait avoir plus de réserves dans ses coffres pour pouvoir transformer un peu cette maison pour en faire peut-être une bibliothèque, quelque chose comme cela, ou un musée, mais, à ma connaissance, il n'y a jamais eu de demande de classement et si cela a été le cas, c'est quelque chose de tout à fait récent.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Saint-Henri.

M. Hains: Pourtant vous savez vous-même peut-être que je suis un grand ami de la famille Girard et je suis certain qu'elle a déposé cette demande.

M. Dussault: Vous connaissez donc les hirondelles de Mme Girard.

M. Hains: C'est cela. Une deuxième question, si vous permettez. Ne serait-ce pas aussi à l'avantage de tout le monde que l'on sache à l'avance à quoi serviront désormais les biens immobiliers que le gouvernement classe et dont il se porte acquéreur.

M. Richard: M. le Président, il y a un parc immobilier qui appartient au ministère des Affaires culturelles. Je vous avoue que, dans toute la mesure du possible, j'essaierai de trouver une vocation utile à chacune des composantes de ce parc immobilier, iI me semble que ce n'est pas la vocation du ministère des Affaires culturelles d'être propriétaire d'un parc immobilier important et, en ce sens, on essaiera de céder à d'autres qui auront le souci de conserver le patrimoine tout le parc immobilier, en tout cas, toute la fraction du parc immobilier qu'on pourra céder. C'est ce que j'ai l'intention d'adopter comme politique.

M. Lalonde: Si vous me permettez, M. le Président...

M. Richard: Peut-être qu'il y a confusion. Le député de Saint-Henri pense peut-être que, quand on classe, on se porte acquéreur. Quand on classe, M. le député de Saint-Henri, on ne se porte pas acquéreur.

M. Hains: Oui, mais quand le gouvernement se porte lui-même acquéreur d'un bien historique comme celui-là, est-ce qu'il ne serait pas bon qu'on sache d'avance ce qu'il veut en faire et comment il va en disposer? La politique d'utilisation...

M. Richard: Actuellement, M. le Président, je peux répondre ceci à M. le député de Saint-Henri. On n'achète plus parce qu'on a découvert que dans le passé, il y a eu de bonnes intentions. Par exemple, dans ma propre circonscription électorale, on avait jadis acheté la fameuse maison

Montmorency qui a été abandonnée durant plusieurs années jusqu'au moment où, devenu député de Montmorency, je lui ai trouvé une vocation, mais cela n'a pas été facile.

Dans ma propre circonscription encore, il y a un moulin absolument extraordinaire qui a été acquis par les Affaires culturelles et qui s'appelle le moulin du Petit Pré. Il n'est toujours pas utilisé, mais je crois maintenant lui avoir trouvé une vocation pour le céder à d'autres, justement, ce moulin du Petit Pré. Le ministère des Affaires culturelles n'a pas l'intention d'acheter d'une manière systématique des biens classés, certainement pas. Au contraire!

M. Lalonde: M. le Président...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Lalonde: ... je voudrais faire suite à la question du député de Saint-Henri. Le ministre a bien décrit, je pense, le dilemme dans lequel il se trouve lorsqu'il s'agit de classer. C'est un engagement, en fait, à engager des dépenses dans la conservation. Lorsqu'il est mis devant ce dilemme, les limites de ses moyens, quels sont les critères les plus importants qu'il suit pour décider de classer un monument qu'il croit historique, premièrement? Deuxièmement, je profite de sa mention du moulin dans son comté pour dire que, dans le comté de Marguerite-Bourgeoys à LaSalle, il y a un très vieux moulin qui est devenu l'emblème de la ville lorsque les Jeux du Québec ont eu lieu. C'est devenu l'emblème de LaSalle et tous les LaSallois en sont très fiers. (22 h 45)

Maintenant, on me dit qu'il y a une demande de classement de ce moulin et qu'on a répondu à la ville depuis un bon moment, que le ministère était à faire un inventaire des moulins, à travers la province, avant de décider si ce moulin est réellement un monument historique. Donc, il subit les intempéries et le vieillissement parce que la ville hésite à dépenser pour ce moulin aussi longtemps que le ministère n'aura pas décidé si c'est un monument historique ou non, auquel cas les dépenses seraient quand même partagées entre le ministère et la ville. Est-ce qu'il y a un calendrier pour cette étude qui est en cours?

M. Richard: En ce qui concerne votre première question, je dois vous dire que les critères qui sont retenus, c'est l'âge d'un édifice, son architecture, sa valeur architecturale, son histoire aussi, et un des éléments extrêmement importants auquel nous attachons, au ministère, beaucoup d'importance, c'est l'intérêt du milieu, quand dans un milieu donné, il y a un intérêt évident à vouloir conserver un édifice.

Ce sont à peu près les critères qui sont retenus. Par exemple, le moulin du Petit Pré à Château-Richer, tout le milieu de Château-Richer et de l'Ange-Gardien veut absolument le conserver et il lui cherche et lui a trouvé, je pense, une vocation.

M. Lalonde: Est-ce que la pureté et l'authenticité du style est un élément?

M. Richard: C'est un des éléments. Par ailleurs, il me fait plaisir de vous dire cela car aujourd'hui même, j'apprenais avec beaucoup de tristesse qu'un milieu n'a pas eu le même intérêt; à Warwick, on a démoli une maison d'une très, très grande valeur pour agrandir ou reconstruire une caisse populaire. C'est extrêmement malheureux, et à ce moment-là, on m'a rappelé que mon prédécesseur avait envoyé un avis de classement et qu'il y a eu une pétition du milieu lui demandant de ne pas classer. C'est assez extraordinaire, mais c'est comme ça.

Alors, il ne faut pas classer malgré les citoyens. Je pense qu'il a dit: Très bien, vous n'en voulez pas, vous n'en voulez pas. L'intérêt du milieu est extrêmement important et c'est l'un des critères qui sont retenus.

M. Lalonde: Pour la deuxième question?

M. Richard: Pour la deuxième question, je sais qu'il y a eu une étude sur tous les moulins. Une des difficultés, je l'ai vécue dans ma propre circonscription électorale, c'est qu'il y a eu, à tout le moins un, peut-être deux moulins auxquels on a redonné la vocation originale, on a fait produire de la farine et on vendait de la farine, etc. Évidemment, cela a inspiré plusieurs groupes vivant autour de certains de ces moulins, mais c'est hors de prix, ça coûte une fortune, cela a pour effet de concurrencer des restaurants dans le coin, d'autres commerçants, etc, ça coûte vraiment une fortune. Dans le cas, par exemple, du moulin du Petit Pré, lui redonner sa vocation originale, cela coûterait 2 000 000 $. Vous pouvez imaginer que c'est une part bien trop importante du budget des Affaires culturelles pour faire ça.

Alors, ce qu'on essaie maintenant, comme politique d'ensemble, c'est de protéger l'essentiel des moulins quand ils ont une valeur patrimoniale importante et une valeur architecturale importante.

M. Lalonde: Dans celui de LaSalle, on ne cherche pas...

M. Richard: Dans celui de LaSalle, je ne sais pas.

M. Lalonde: ...à lui donner sa vocation originale, seulement à protéger la construction.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Châteauguay.

M. Dussault: M. le Président, pour appuyer ce que demande le député de Marguerite-Bourgeoys, c'est rare que j'appuie ce qu'il demande, mais c'est important...

M. Lalonde: ...pour la prochaine fois.

M. Dussault: ...peut-être qu'il pourra nous remettre la pareille après. C'est très important, je pense, de préserver ce moulin, d'autant plus qu'il pourrait être à la rencontre de l'ancien et du moderne, parce que je pense que de ce moulin, on pourrait voir une partie très importante des équipements d'Archipel, qui s'installeront dans ce coin très bientôt. Je pense que cela serait très intéressant, tout cela, marié ensemble. Peut-être que M. le député de Marguerite-Bourgeoys pourra nous donner son appui pour le projet Archipel.

M. Lalonde: Cela ne regarde pas les Affaires culturelles. Maintenant, si le député de Châteauguay s'engage à ne pas faire des rapides de Lachine un petit ruisseau, j'appuierai son projet Archipel.

M. Dussault: J'y travaillerai, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Richard: M. le Président, j'ai oublié tout à l'heure un critère extrêmement important; quand un monument a un caractère unique, on force sur le classement, c'est bien important.

M. Rivest: On a plusieurs cas qui nous sont signalés, les députés en ont. Où est-ce que cela en est? parce que, là, on a la maison de Warwick. Il y a eu la construction d'une caisse électorale je me rappelle une maison à Chicoutimi, tout près de l'hôtel de ville, une caisse populaire.

Une voix: Pas une caisse électorale, mais une caisse populaire!

M. Rivest: Je me rappelle la maison Angers On est dans la conservation, M. le Président, mon lapsus s'explique, on est dans la conservation du patrimoine. Mais il y a eu par exemple un cas soumis à l'hôtel de ville de Chicoutimi. Celui de la maison Angers, qui présentait un certain intérêt. C'est cela qui m'inquiète un peu, souvent, lorsqu'arrive un cas comme cela, un corps municipal ou un corps public ou parapublic, prend une décision. On voit alors arriver à la course, littéralement à la course, enfin cela nous est décrit comme cela - je pense que les députés ont un peu cette même expérience -

le ministère des Affaires culturelles qui vient faire son classement. Cela s'est fait pour la maison dont je parle à Chicoutimi. Vous l'avez échappée. Elle a été détruite et la ville de Chicoutimi a fait un stationnement sur l'emplacement. Cette maison était au centreville.

Cela m'amène à vous demander quel est votre inventaire finalement et quel suivi pratique vous avez de cet inventaire. Deuxièmement, on a pas l'occasion souvent, sur le plan parlementaire d'en parler. Je vous demanderais de penser, par exemple, à tout le domaine de la conservation du patrimoine. Des critiques ont été formulées contre le ministère à ce sujet. Il y a tout une problématique derrière cela. À l'occasion des crédits, chaque député essaie de passer son château, son moulin ou je ne sais trop quoi. Ceci est tout à fait légitime. Remarquez que j'en aurais moi-même quelques-uns à passer, dont la maison Krieghoff, qui m'inquiète toujours, quand j'arrive sur la rue Cartier.

Mais c'est là un autre problème. Est-ce que, M. le ministre, vous ne pourriez pas considérer qu'on puisse, avec les gens de votre ministère, lorsque vous serez plus dégagé sur le plan des exigences ministérielles ou même parlementaires, regarder cet aspect particulier qui revient chaque année lors des crédits? Il est inadmissible qu'on escamote des choses comme on le fait ce soir. Il faudrait qu'on regarde ce qu'est la réalité, ce qu'on a à protéger, de quels moyens financiers on dispose, de quels moyens de classement, de quels moyens d'achat, quels sont les problèmes d'utilisation. Il faudrait qu'on puisse discuter avec vous-même et vos principaux collaborateurs. Je suis convaincu que bien des députés seraient d'accord pour consacrer un après-midi ou même une journée complète à un tel exercice, parce qu'à l'intérieur des crédits, c'est toujours un peu rapide, hélas.

M. Richard: Mon Dieu, M. le Président, qu'on serait donc disposé à faire cela, d'autant plus qu'on a un outil, maintenant, qui est assez extraordinaire! On a un macroinventaire, il s'agit de savoir ce qui doit être protégé et comment cela doit l'être.

Un des moyens que je vais signaler au député de Jean-Talon, c'est d'intéresser la population, les corps intermédiaires, les municipalités à la protection du patrimoine, non seulement par des budgets du ministère des Affaires culturelles, mais à condition que les municipalités - je pense qu'on aura des développements assez heureux dans ce sens à brève échéance - s'intéressent à la défense de ce qu'elles considèrent un morceau de leur patrimoine et de leur héritage. Il s'agit de voir comment on peut enclencher tout cela pour être sûr de bien protéger le patrimoine.

M. Rivest: Je m'excuse, mais c'est important, cela fait un bon nombre d'années que j'assiste à l'étude des crédits, est-ce que vous seriez d'accord, quand vous trouverez que c'est raisonnable pour vous, pour les gens du ministère, pour les parlementaires, qu'au niveau d'une commission parlementaire ou d'un forum on puisse, avec des gens qui viendraient aussi s'exprimer sur le sujet, au nom de l'éducation populaire, utiliser les instruments de la télévision des débats?

M. Richard: Bien sûr, je suis tout à fait d'accord.

M. Rivest: II serait souhaitable qu'on puisse prendre une journée ou deux pour regarder les documents que vous avez et pour voir cette dimension des Affaires culturelles qui fait souvent la manchette des journaux? Les députés en sont inondés.

M. Richard: Non seulement je suis d'accord, mais je vous saurais gré de votre proposition, je la retiens.

M. Lalonde: Je vais terminer la-dessus. L'intérêt de la population a centuplé depuis un dizaine d'années et, pour continuer ce mouvement, peut-être qu'une initiative comme celle-là serait très utile, parce que les gens sont prêts. Souvent, on n'est pas mis devant ces situations mais, quand on sait qu'il y a un problème, une situation, on est sensibilisé et le ministère a une responsabilité à assumer. Peut-être que cet exercice serait très utile.

M. Richard: Très juste!

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que je peux vous rappeler à ce moment-ci, lorsqu'on avait parlé de procédure pour le déroulement de la commission de ce soir, qu'on passerait à peu près une heure sur les priorités? On a maintenant deux heures de passées. Si vous vous entendez, continuez.

M. Rivest: M. le Président, quant à nous...

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: ...à moins que nos collègues aient... nous suivons l'horaire. On peut arriver facilement à la fin de l'étude des crédits dans le délai qui nous est imparti.

Je m'excuse auprès du ministre, on va peut-être atteindre minuit, mais qu'est-ce que vous voulez? Cette année, finalement, on ne peut pas, à l'étude des crédits, pour des raisons qu'on connaît tous, attacher autant

d'importance. C'est pourquoi j'essaie de faire des suggestions pour dégager certains aspects clés pour l'année, étant donné que le ministre arrive en fonction.

Mais, quant à nous, à moins que nos collègues de l'autre côté aient d'autres interventions, on peut vous assurer que vers 23 h 30 ou 23 h 45, on pourrait avoir terminé.

Le Président (M. Desbiens): Alors, on continue de cette façon.

M. le député de Laprairie.

Vous avez demandé la parole, M. le député de Mille-Îles.

M. Champagne: Je ne sais pas si tout l'horaire de ce soir est basé sur celui du député de Laprairie ou si on peut intervenir à un moment donné. Est-ce que c'est à la fin, selon vous, qu'on intervient?

M. Saintonge: Au niveau de la conservation du patrimoine, au programme 2, j'aurais peut-être quelques questions encore. D'après mon ordre de priorités, je me rends compte que j'ai sauté le troisième point, le cinéma, où on aurait quelques questions.

M. Champagne: De toute façon...

M. Saintonge: Après cela, si vous avez des questions, je serais d'accord qu'on vous laisse une période de temps.

M. Champagne: C'est parce que le député de Jean-Talon semblait satisfait des réponses qui étaient données, et puis il voulait peut-être, sans vouloir dire...

M. Rivest: Certaines réponses. M. Lalonde: Pas très satisfait.

M. Champagne: Vous aviez l'intention peut-être, M. le député...

M. Lalonde: Un peu déçu.

M. Champagne: Non, de toute façon, M. le député de Jean-Talon semblait vouloir clore d'une façon quelconque.

M. Rivest: Non, je ne veux pas enlever le droit de parole aux députés ministériels, sauf que vous réalisez là la condition du député ministériel.

M. Champagne: Oui.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mille-Îles.

M. Rivest: J'ai beaucoup de sympathie. M. Champagne: Je fais cette douloureuse expérience ce soir. Allons dans le processus de l'Opposition.

M. Rivest: Non, mais je voudrais que...

M. Lalonde: Allez-y donc avec vos questions.

M. Rivest: Si vous avez des questions là-dessus.

Le Président (M. Desbiens): À l'ordre, s'il vous plaît!

M. le député de Mille-Îles, vous avez toujours le droit de parole.

Les musiciens et leur affiliation

M. Champagne: Au sujet du Syndicat de la musique du Québec par rapport à la Guilde des musiciens qui est une association syndicale, elle a des ramifications mais le château fort est à New York, je voudrais savoir quelle est la politique du ministère face à cet envahissement et à ce monopole qui est la Guilde des musiciens ici dans la province. Il arrive des situations absolument loufoques et cocasses, comme celle-ci. Si les membres de la Guilde des musiciens accompagnent un musicien ils renoncent à l'accompagner s'il n'est pas syndiqué ou s'il fait partie du Syndicat de la musique du Québec.

Quelle serait votre position face au syndicat?

M. Richard: M. le Président, M. le député de Mille-Îles remet en cause une politique qui a l'âge des lois syndicales au Québec, c'est-à-dire la politique des monopoles syndicaux. Le monopole dont jouit la Guilde américaine n'est pas un cas unique. Au contraire, nous avons comme système dans nos lois en droit du travail, celui du monopole. Je ne vous dis pas que je suis favorable ou non à ce système; mais par rapport aux Européens, qui ont adopté un système essentiellement différent, nous, nous avons adopté le système du monopole.

Alors, quand vous faites état du monopole de la Guilde américaine, vous pouvez peut-être le déplorer, mais en même temps, vous remettez en cause toute notre politique de législation dans le domaine du droit du travail.

Est-ce que vous êtes disposé à remettre tout cela en cause? C'est la question qu'il faut se poser.

M, Champagne: Jusqu'à quel point le ministère des Affaires culturelles peut-il favoriser la syndicalisation des musiciens vers le Syndicat des musiciens du Québec? (23 heures)

M. Richard: II est évident que nous avons intérêt, comme Québécois, à privilégier

le regroupement de l'ensemble des travailleurs québécois au sein d'organismes syndicaux québécois. Mais je vous signale que votre question a une portée que vous ne soupçonnez peut-être même pas. Va-t-on interdire l'affiliation? Beaucoup de travailleurs québécois sont membres de syndicats américains et même internationaux; va-t-on interdire ça? Cela remet en cause toute la législation dans le domaine du droit du travail. Il n'y a pas que le ministère des Affaires culturelles qui est concerné, mais à peu près tous les ministères et beaucoup d'entreprises parapubliques, publiques et privées. C'est un problème d'envergure et pas facile à résoudre, croyez-moi!

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je veux dire une chose. D'abord, je suis impressionné par cette assurance nouvelle, à 23 heures, lorsque le ministre parle des problèmes syndicaux. On sait qu'il connaît d'une façon remarquable ce problème et qu'il a fait une carrière non moins remarquable dans le domaine.

Si je voulais le ramener maintenant au titre de ministre des Affaires culturelles, est-ce qu'il pourrait me donner sa réaction personnelle, ou celle de son ministère, en rapport avec la question de notre collègue sur le dossier noir qui avait été transmis au député par l'Association des musiciens du Québec sur cette situation? Y a-t-il eu une réaction finale de la part du ministère des Affaires culturelles?

M. Richard: Non, je suis en train de prendre connaissance de ce dossier noir, il y a plusieurs ministères qui ont à prendre connaissance de ce dossier et on doit essayer de concevoir les solutions idoines. Mais, encore une fois, ces solutions idoines ne sont pas autant à la portée de la main qu'on le souhaiterait parfois.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre favorise plutôt la liberté d'affiliation qu'une législation coercitive qui exigerait qu'un syndicat - que ce soit celui des musiciens ou d'autres - soit proprement québécois?

M. Richard: En répondant à votre question, je vais répondre à côté. J'ai toujours été tenté par le pluralisme syndical au sein des entreprises, alors que notre législation...

M. Rivest: Y compris dans la fonction publique?

M. Richard: Y compris dans la fonction publique.

M. Rivest: Dans l'enseignement également?

M. Richard: Je vous livre une opinion personnelle. Dans l'enseignement et dans n'importe quel domaine. Au fond, je suis tenté par le système européen.

M. Rivest: La CEQ va être contente d'apprendre ça!

M. Richard: Non, c'est un choix personnel. Je ne dis pas qu'il faut remettre ça en cause, c'est déjà séculaire notre législation dans le domaine du droit du travail. Mais je pense que, dans le passé, il y aurait peut-être eu beaucoup moins de problèmes, beaucoup moins d'affrontements. On a choisi ça parce qu'on a choisi un mode nord-américain; c'est un mode nord-américain qu'on a peut-être été obligé d'adopter, mais je sais qu'il y a beaucoup de syndicalistes convaincus qui, de temps en temps, songent au système européen. Il faut cependant laisser les choses évoluer normalement.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

Protocoles avec les municipalités

M. Saintonge: M. le Président, j'aurais une question sur les protocoles signés entre les administrations municipales et le ministère concernant l'application de la Loi sur les biens culturels.

Serait-il possible de savoir combien de protocoles ont été signés au cours de la dernière année budgétaire et les sommes qu'on met à la disposition des municipalités? En fait, ma question pourrait se résumer à ceci: Est-ce possible d'obtenir une copie de ces protocoles d'entente? Je dois vous mentionner que, dans les années antérieures, on obtenait ces protocoles de vos prédécesseurs, sauf l'an dernier où on ne les a pas obtenus.

M. Richard: Là, il y a Lachine, Longueuil, Laval et celui de Montréal que je vais avoir l'honneur de, signer dans quelques jours.

M. Saintonge: Y aurait-il possibilité d'avoir copie des protocoles?

M. Richard: Aucun problème. M. Saintonge: D'accord.

Commission des biens culturels

Concernant le budget de la Commission des biens culturels, pour l'année 1981-1982, on constate qu'il passe de 419 000 $ à 349 000 $, une diminution de 16,73%. Je

voudrais savoir de quelle manière ces coupures du budget se répercuteront sur le fonctionnement de la commission.

M. Richard: Je crois que c'est l'équivalent d'un poste de moins.

M. Lalonde: II était payé cher.

M. Richard: Un instant, il doit y avoir autre chose parce que cela lui faisait un bon salaire.

M. Lalonde: Oui, quand on calcule l'inflation normale, à part cela...

M. Richard: C'est un bon salaire.

M. Rivest: C'est peut-être les deux ministres.

Des voix: Ah!

M. Lalonde: Est-ce que le ministre a accepté une diminution de salaire?

M. Saintonge: 70 100 $.

M. Richard: C'est encore mieux. C'est encore plus intéressant. Alors, c'est un ajustement mécanique. On me dit qu'il y avait trop d'argent.

Des voix: Ah!

M. Richard: Je vous ai dit que c'était intéressant.

M. Rivest: Mais vous croyez tout ce qu'on vous dit.

Des voix: Ah!

M. Richard: II y avait trop d'argent pour l'ensemble des postes de la Commission des biens culturels.

M. Rivest: Oui, c'est possible. Argent encore...

M. Richard: Non, je ne crois pas tout ce qu'on me dit.

M. Rivest: Non, on le sait. Vous êtes assez sceptique.

M. Richard: Non.

M. Rivest: Question d'argent. Des gens qui démolissent un immeuble selon le plan de enfin, l'ami de tous, je présume, au Conseil des ministres, de ce temps-ci - M. Parizeau - ne pourriez-vous pas le sensibiliser au fait qu'une personne qui démolit un immeuble a droit à des dégrèvements d'impôt pour la perte de l'immeuble; quelqu'un qui le rénove et qui investit n'a pas les mêmes avantages fiscaux?

M. Richard: C'est intéressant cela. M. Rivest: C'est intéressant, hein? M. Richard: Oui.

M. Rivest: Est-ce que M. Parizeau se montre intéressé de ce temps-ci par les choses intéressantes?

M. Richard: C'est l'une des voies que j'envisage comme solution au problème de la conservation du patrimoine. La plus intéressante serait peut-être la loto, solution proposée par M. le député de Saint-Henri, mais tant qu'on n'aura pas fini de payer le stade, on va avoir des problèmes avec celle-là.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Alors...

M. Richard: Mais c'est intéressant comme solution.

M. Rivest: Je pense que vous devriez regarder la question d'une façon générale. Il y a une mesure qui a été adoptée pour les oeuvres d'art au niveau de la construction. Vous devriez regarder également - je pense que tout le monde est bien d'accord; je n'invente rien - tout l'aspect de la fiscalité en rapport avec le patrimoine, bien sûr, mais toutes et chacune des dimensions des activités culturelles. Je ne sais pas si cela existe quelque part, mais il y aurait lieu de regarder l'ensemble de nos lois à ce titre-là, pour que l'instrument de la fiscalité devienne un instrument de promotion culturelle. Je ne sais pas si vous avez des choses actuellement en vue. Cela a peut-être déjà été fait, mais...

Une voix: II y a une étude de faite.

M. Rivest: En tout cas, il va me le dire.

M. Richard: À ma connaissance, M. le député de Jean-Talon, il y a une seule politique de dégrèvements fiscaux, elle s'applique à ceux qui font des dons aux musées.

M. Rivest: Oui. Il y aurait autre chose à faire.

M. Richard: Mais c'est vrai que...

M. Rivest: On en a parlé deux fois.

M. Richard: ...c'est à revoir, l'ensemble des politiques fiscales à l'égard des biens culturels.

M. Saintonge: M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Dans un article qui paraissait dans le Devoir en novembre 1980, on disait qu'il y avait une étude qui avait été menée pour le compte de la Commission des biens culturels à ce sujet. On y qualifiait de masochisme fiscal le fait que les lois fiscales actuelles récompensent le contribuable qui inflige un tort irréparable au patrimoine en comparaison de celui qui veut le conserver. C'est ce qu'un article du Devoir mentionnait.

M. Richard: M. le Président, ce qui m'étonne - je vais même surenchérir ce que vous dites - ce qui est extraordinaire, c'est que non seulement il n'y a pas de dégrèvements fiscaux pour ceux qui protègent le patrimoine, mais ils sont pénalisés parce qu'ils donnent de la valeur à leur immeuble, et plus ils donnent de la valeur à leur immeuble, plus l'évaluation foncière intervient. Donc, ils sont pénalisés. Là, cela prend peut-être aussi le concours des municipalités.

M. Saintonge: Je pense que le...

M. Richard: Mais je dois vous signaler, ce qui est heureux quand même, qu'il y aura la conférence des ministres des Affaires culturelles du Canada, à Québec, à l'automne, et j'aurai l'honneur de la présider. L'un des principaux thèmes de cette conférence, c'est justement la fiscalité et les biens culturels.

M. Lalonde: Est-ce que le ministre pourrait, sans faire de promesse, naturellement - peut-être même sans prendre d'engagement - nous dire qu'il fera des efforts pour convaincre le ministre des Finances d'introduire des changements à la fiscalité dans le prochain budget?

M. Richard: Je ne ferai pas de promesse, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, parce que je voudrais regarder avant l'ensemble de la problématique pour voir quelles seraient les meilleures solutions. Peut-être que ce ne sont pas des dégrèvements fiscaux; si ça me prend les municipalités, c'est peut-être trop long et trop difficile comme voie d'accès, mais il est évident que cela me sourit à première vue.

M. Rivest: Parlant de problématique, est-ce que le ministre des Affaires culturelles s'est fait une idée des commentaires réciproques, j'imagine, que s'adressent, à l'occasion des rapports annuels, en particulier, la Commission des biens culturels et la Direction générale du patrimoine de son ministère? On dit, entre autres, dans le huitième rapport de la Commission des biens culturels, que par son attitude cette Direction générale du patrimoine suscite parfois le découragement et freine souvent l'initiative des citoyens ou des groupes populaires à l'égard d'une demande de protection. C'est une problématique à laquelle vous allez devoir faire face.

M. Richard: Êtes-vous en train de me dire qu'il y a parfois échange de propos virils entre la commission et la Direction générale du patrimoine?

M. Rivest: Oui.

M. Richard: Tant mieux, c'est sain.

M. Rivest: C'est sain, mais cela demande des solutions...

M. Richard: C'est générateur de solutions.

M. Rivest: ... parce que la commission constate, dans le même rapport, que le ministère l'abandonne. On a été obligé d'admettre, dit-on, le manque d'adéquation entre les services offerts par le ministère et les problèmes vécus par les conservateurs du patrimoine.

D'une part, le ministère souhaiterait intervenir pour préserver la qualité architecturale, esthétique ou environnementale d'un parc immobilier et, d'autre part, il renvoie le propriétaire aux avis du quincaillier du coin.

M. Richard: Oui, mais je voudrais dire au député de Jean-Talon que s'il y a, pour chapeauter, en quelque sorte, la Direction générale du patrimoine, une Commission des biens culturels, c'est parce qu'au départ on estime qu'il peut et, oserais-je dire, qu'il doit arriver qu'il y ait désaccord entre la Commission des biens culturels et la Direction générale du patrimoine. Le rôle du ministre est de trancher entre les deux.

M. Rivest: C'est cela.

M. Richard: Et c'est important que le ministre soit en présence de ce désaccord.

M. Rivest: J'en conviens. S'il y a un ministre, comme vous l'avez vous-même dit, c'est pour trancher. Aujourd'hui, vous devez

répondre devant une commission parlementaire des actions de votre ministère et vous devez nous dire de quel côté vous avez tranché. Et si vous n'avez pas eu l'occasion de trancher, allez-vous trancher?

M. Richard: Dans quel cas? Le ministre a à trancher dans des cas spécifiques.

M. Rivest: Je pense que vous avez une note qui vous arrive.

M. Richard: La note était pour vous rappeler, une fois de plus, ce que je vous ai dit tout à l'heure, M. le député de Jean-Talon. C'est exactement ce que je vous ai dit tout à l'heure.

M. Rivest: Quand un orqanisme comme la Commission des biens culturels...

M. Richard: II est sain qu'il en soit ainsi. Le législateur, dont vous étiez, l'a voulu ainsi, M. le député de Jean-Talon, pour que ce soit générateur de solutions, justement.

M. Rivest: Lesquelles.

M. Richard: Et le ministre a comme fonction de trancher lorsqu'il y a conflit.

M. Lalonde: Comment allez-vous trancher?

M. Rivest: Je comprends...

M. Richard: Mais dans des cas spécifiques.

M. Rivest: ... mais quand la Direction générale du patrimoine est ainsi remise en cause, enfin, que certaines de ses pratiques sont remises en cause par la Commission des biens culturels à tort ou à raison, je ne sais pas du tout, est-ce que cela préoccupe le ministre, est-ce que le ministre reçoit les recommandations qui lui sont formulées par la Commission des biens culturels et y donne suite? Est-ce qu'il y a un échange, est-ce qu'il organise des rencontres pour que ces gens se parlent et qu'ils conviennent ensemble d'une solution si le ministre n'est pas en mesure ou hésite à trancher? Comment cela se passe-t-il? Quelle suite donnera-t-on au huitième rapport et aux affirmations qui y sont faites?

M. Richard: Là, votre question est absolument hypothétique. Quand vous soulèverez des cas concrets, des cas spécifiques...

M. Rivest: II y a un ancien premier ministre qui disait: Citez-moi un cas;

M. Richard: Oui, et vous savez ce qu'il est arrivé à ce premier ministre? Moi, je ne vous donne pas...

M. Rivest: II n'est plus premier ministre.

M. Lalonde: Faites attention!

M. Rivest: Est-ce que vous nous annoncez votre départ?

M. Richard: Non, mon retour. (23 h 15)

Conseils régionaux de la culture

M. Rivest: Justement, pendant que l'ancien ministre est là, j'ai une autre question, si vous voulez. En tout cas, on suivra ça, vous vous informerez. Il serait peut-être bon que vous vous assoyiez de l'autre côté. Les Conseils régionaux de la culture sont généralement inquiets face aux attitudes du ministère des Affaires culturelles. Vous savez qu'ils ont des responsabilités. Par exemple, je ne sais trop le numéro, dans la région de Québec, j'ai eu l'occasion de les rencontrer dans le passé ainsi que de recevoir périodiquement leurs communiqués; région très vaste qui va, à moins que ce soit changé, jusqu'à Thetford-Mines, etc. Quel est le rôle et la conception... Le ministre va me dire: J'ai promis un projet de loi pour l'automne. Vous avez évoqué cela tantôt, dans le déferlement législatif que vous nous aviez promis aux Affaires culturelles. Est-ce que vous pouvez nous indiquer les orientations générales de l'avenir des Conseils régionaux de la culture, et surtout les situer par rapport au ministère des Affaires culturelles, non seulement en termes d'orientation ou de suggestions ou de propositions qu'ils peuvent vous faire à l'échelle d'une région, mais surtout en termes des mandats que vous auriez ou non l'intention de leur confier sur le plan de la réalisation concrète de programmes ou d'initiatives culturelles dans le milieu. Ainsi que les budgets que vous êtes prêt également à leur accorder.

M. Richard: M. le Président, le député de Jean-Talon n'ignore pas que l'une des politiques les plus heureuses de mes prédécesseurs a été justement de créer les conseils de la culture. Je crois que cette création appartient à M. O'Neill, et mon prédécesseur immédiat avait donné encore plus de vigueur à l'existence de ces conseils de la culture qui ont joué et qui jouent un rôle d'animation et de concertation dans les régions qui s'est avéré, je pense, intéressant et utile. J'ai l'intention, à très brève échéance, avant la fin du mois de juin, j'en ai pris la décision ce matin, d'ailleurs, de

proposer aux conseils de la culture une rencontre avant la fin du mois de juin. Par la suite, je serai en mesure de me prononcer quant aux politiques qui devraient être établies en rapport avec les conseils de la culture.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Laprairie.

Projet de loi sur le cinéma

M. Saintonge: M. le Président, j'aimerais passer à l'étape 3 de mes priorités, je reviendrais au cinéma. Le projet de loi no 20, Loi sur le cinéma, a été déposé en première lecture en décembre dernier. J'ai compris tantôt, des intentions du ministre, que cette loi reviendrait à l'automne.

M. Richard: Oui, sauf, M. le Président, que s'il devait revenir à l'automne, cela va dépendre un peu du travail de la commission d'étude également. J'ai déjà rencontré les membres de la commission d'étude sur le cinéma qui ont commencé leur travail et qui manifestent beaucoup d'enthousiasme à poursuivre le travail qui avait été commandé par mon prédécesseur. J'aimerais indiquer que s'ils souhaitaient me faire tenir un rapport d'étapes, je les laissais libres de le faire et qu'à ce moment, j'essaierais d'enclencher le processus parlementaire pour faire adopter, le cas échéant, une loi le plus rapidement possible. Sinon, j'attendrai bien sûr la remise de leur rapport avant d'enclencher le mécanisme d'adoption d'une loi.

M. Saintonge: Ce que je veux savoir également...

M. Richard: Mais quand je dis à l'automne, je voudrais bien vous rappeler, M. le député de Laprairie, que j'espère bien qu'ils vont avoir terminé leur rapport au cours de l'automne.

M. Saintonge: À quelle date?

M. Richard: C'est janvier 1982, je crois, l'échéance. Mais on a beaucoup parlé d'un rapport d'étapes qui me permettrait d'aboutir à une loi à l'automne.

M. Saintonge: Je voudrais savoir si c'est l'intention du ministre également de procéder à la consultation d'autres corps intermédiaires intéressés par ce projet de loi, d'appeler une commission parlementaire sur...

M. Richard: II y a déjà une commission d'étude au sein de laquelle la plupart, pour ne pas dire tous les intervenants sont représentés ou presque tous les principaux intervenants. Ils vont rédiger un rapport. Si ce rapport est suivi du dépôt d'une loi, il sera toujours temps, à ce moment, d'évaluer si on doit en commission parlementaire recommencer le processus de consultation. Je suppose qu'en cours de route la commission d'étude va elle-même faire les consultations qu'elle jugera utiles et nécessaires. C'est là l'un de ses rôles essentiels.

M. Rivest: La Loi sur le cinéma, j'ai vécu l'expérience des années 1970 et 1976, où cela a été très difficile de concilier tous les intervenants dans le domaine, mais en discutant avec vos prédécesseurs de 1976 et 1980, je ne sais plus, il faudrait que je fasse des statistiques pour savoir combien de messages inauguraux ont promis une loi-cadre du cinéma. Il y a eu des projets de déposés en première lecture. Il y a une commission d'étude qui va reprendre toute la même démarche que pour ma part j'avais eu l'occasion de vivre du temps où j'étais au bureau du premier ministre avec le ministre de l'époque. Je souhaite que vous arriviez à quelque chose. Pour l'instant, vous avez pris cette décision, j'imagine que vous aviez vos raisons. Dans ce domaine, c'est extrêmement difficile. Vous êtes certainement conscient qu'au ministère tout le monde le sait.

Par ailleurs, il y a eu sur la place publique des débats assez acrimonieux à certains égards. Il était question de conflits d'intérêts, de centralisation des pouvoirs de l'Institut du cinéma, recours continuels à des études et à des comités. Par exemple, cette enquête qui est en cours va coûter encore des sommes importantes. Vous ne faites pas cela à des coûts... Il y a eu des contestations de la part des personnes impliquées dans l'Institut du cinéma, sur le plan administratif également. Enfin, vous connaissez probablement tout ce qui a été soulevé. Il y a eu des réponses qui ont été fournies. Quelle est la réaction du ministère à ce jour? Je ne veux pas donner de noms ou de faits précis, j'imagine que le ministre est bien au courant de la situation. Ceux qui oeuvrent dans le milieu du cinéma, ceux qui ont à coeur l'adoption par le Québec d'une politique de cinéma qui puisse avoir de l'allure et avoir de la consistance et surtout de la continuité... J'imagine que le ministre est sensible à l'ensemble de ces éléments. Je voudrais avoir sa réaction brièvement à ce moment-ci.

M. Richard: M. le Président, ma réaction est la suivante, c'est qu'une fois que les consultations ont été faites, que les objectifs sont bien fixés je ne me laisse pas arrêter dans la poursuite des objectifs par les querelles entre les personnes et entre les intervenants; autrement, le ministre des Affaires culturelles risquerait d'être condamné à la passivité la plus complète.

Une fois que les objectifs sont fixés, quel que soit le domaine - c'est vrai pour le cinéma comme c'est vrai pour d'autres secteurs d'activités culturelles - je pense que ce qu'il faut continuer de regarder bien en face et de poursuivre, ce sont les objectifs et ne pas se laisser arrêter par des querelles.

M. Rivest: Indépendamment des personnes, quand on parle de la centralisation des pouvoirs, de la structure même, de la composition, de la formation de l'institut, j'imagine que cela trouve des échos, parce que vous avez un certain nombre d'idées?

M. Richard: Oui, mais ce sont les grandes écoles. Est-ce qu'on devrait assumer le rôle que joue l'institut au sein du ministère? Je ne le crois pas. Je pense que l'expérience s'est avérée globalement heureuse, cette expérience de l'Institut québécois du cinéma. Qu'il y ait des frictions à l'occasion, sans doute, mais disons que, à première vue, je ne suis pas disposé à entreprendre la démolition de l'Institut québécois du cinéma, au contraire.

M. Lalonde: En ce qui concerne le cinéma en particulier, nous espérons qu'à la suite de l'arrivée au ministère de l'ancien président de l'Assemblée nationale, son profil soit à ce point imprimé dans les orientations du ministère qu'il témoigne de changements pour le mieux.

M. Richard: J'espère, M. le Président, qu'on réussira à faire en sorte que toute l'industrie du cinéma québécois non seulement survive, mais puisse s'épanouir et se développer dans toute la mesure du possible, avec les contraintes qui seront toujours les siennes sur le continent nord-américain. J'espère qu'on arrivera à régler les problèmes. Je suis très optimiste quant au travail qui est et qui sera effectué par la Commission d'étude sur le cinéma qui a été mise sur pied par mon prédécesseur.

M. Rivest: Concrètement, est-ce que les commentaires publics et les critiques assez virulentes du Syndicat national du cinéma vous ont impressionné ou non?

M. Richard: J'ai envie de vous dire que, jusqu'à maintement, j'ai trouvé le milieu du cinéma serein.

M. Rivest: Oui, actuellement, vous trouvez le ministère serein, mais vous allez voir que c'est compliqué.

M. Richard: Vous me direz que j'ai l'inconscience heureuse? Peut-être.

M. Rivest: Non, mais vous commencez et je le comprends, mais vous allez voir que c'est... Je pense que l'expérience de tout le monde dans ce milieu... Enfin, je ne vous demande pas d'autre réponse, je comprends que vous n'êtes pas en mesure...

M. Richard: Oui, bien sûr, mais ne me souhaitez pas de malheur; pour le moment, le milieu est serein.

M. Rivest: En parlant de malheur - je vais changer de sujet. Est-ce que M. Jean Duceppe a commencé sa course auprès de vous, parce qu'il pourchassait tous les ministres au sujet de la politique sur le théâtre? Le théâtre, cela va bien?

M. Richard: Ah non! je suis un admirateur du comédien Jean Duceppe, mais je dois vous avouer...

M. Rivest: Oui, mais attendez qu'il arrive au ministère, vos prédécesseurs ont changé d'avis.

M. Richard: ... que je ne lui pas parlé une seule fois depuis mon arrivée au ministère. Je suppose, je pense qu'il...

Une voix: Y a-t-il d'autres questions?

Projet de conseil des arts

M. Rivest: J'ai une dernière question, pour vous donner plus d'assurance. Dans le domaine culturel, au ministère des Affaires culturelles, on parle du cinéma à peu près partout. Mon collègue de Laprairie a évoqué la création d'un conseil des arts. Vous n'avez pas trop réagi. J'aurais aimé que vous indiquiez votre réaction à l'idée que nous proposons de constituer un conseil des arts pour l'octroi de toutes les subventions, enfin, pour que toutes les politiques soient administrées par ce conseil des arts.

M. Richard: Ah! c'est une avenue intéressante, mais il ne faudrait pas me proposer en même temps de démolir l'Institut québécois du cinéma...

M. Rivest: Non, mais dans la Loi sur le cinéma?

M. Richard: ...qui est une forme de conseil des arts s'appliquant au cinéma.

M. Rivest: Oui, très bien. Ce n'est pas cela que je veux vous dire en terminant, en tout cas, quant à moi. Le gouvernement fédéral - vous connaissez? - a un certain nombre d'activités dans le domaine culturel. Des écrits nombreux ont été faits dans le passé - et non sans raison, à bien des égards - sur la cohérence des programmes des ressources au niveau des priorités. C'est

d'une façon très générale, parce que cela s'applique finalement à peu près à tout. Les activités du Conseil des arts du Canada sont bien connues et très importantes. Il y a aussi les activités du Secrétariat d'État.

Je sais que vous allez pouvoir exercer votre sens critique sur bien des aspects du fonctionnement ou de ce dédoublement, c'est pourquoi je vous laisse la chance de le faire et, à certains égards, il peut y avoir un certain caractère complémentaire. Maintenant que nous vivons dans une espèce de consensus universel, puisque le gouvernement actuel travaille d'arrache-pied au renouvellement de la fédération canadienne, et que vous vous y inscrivez, en tout cas jusqu'à nouvel ordre, dans cette voie, je voudrais vous demander si vous vous préoccupez de reprendre ce qui a été une bataille difficile et largement décevante de tous vos prédécesseurs, soit d'en arriver, avec le gouvernement fédéral, indépendamment du contexte politique, à articuler les initiatives fédérales - les sommes d'argent fédérales dépensées dans le domaine culturel, le cinéma ou autre - avec les priorités, les objectifs que le Québec a pour ses fins propres en regard avec la culture québécoise, entendue dans le sens où nos collègues de Laurier et de Jacques-Cartier l'ont dit. C'est un aspect important que nous voulons vous souligner. Est-ce que c'est une préoccupation que vous avez? (23 h 30)

M. Richard: Je réponds à votre préoccupation voulant qu'on défende le système fédéral. J'ai envie de vous dire oui, un peu comme on défend le patrimoine, avant de lui trouver une vocation. On veut protéger l'acquis et le patrimoine parce que là...

M. Rivest: Dans les deux cas, c'est une valeur sûre.

M. Richard: Là, on est en train d'inverser et d'aboutir à l'état unitaire. D'une part, vous auriez dû vous en rendre compte un peu plus tôt, mais en tout cas.

D'autre part, M. le député de Jean-Talon, je voudrais vous signaler qu'après un mois, ce qui m'apparaît le plus troublant, encore une fois, c'est comment il nous apparaît impossible de concilier les politiques fédérales en matière de culture, avec les intérêts du Québec. Les politiques fédérales sont des politiques pancanadiennes, visant les intérêts de l'ensemble de la population canadienne, alors que nous avons besoin de politiques spécifiques.

Je pourrais vous donner une douzaine d'exemples. Un des exemples, en matière de droits d'auteur. Pourquoi le gouvernement fédéral ne veut pas bouger en matière de droits d'auteur? Ce qui est assez étonnant, il y a même un député libéral fédéral qui a protesté à ce sujet récemment. C'est rare qu'ils protestent, eux, pour les comités.

M. Rivest: M. Duclos?

M. Richard: Non, ce n'est pas mon homologue de Montmorency, c'est M. Gourd, je crois.

M. Rivest: Le député d'Argenteuil-Papineau.

M. Richard: Ce que M. Gourd n'a pas compris encore, c'est que la politique des droits d'auteur fédérale est une politique pancanadienne. On ne veut pas protéger les auteurs québécois parce que, en protégeant les auteurs québécois, on protégerait les auteurs anglophones et, en protégeant les auteurs anglophones, on protégerait les auteurs américains. Voilà le cercle vicieux.

Donc, on est incapable d'avoir une politique spécifique pour le Québec, alors que nous, notre problème est essentiellement différent du problème canadien. Il en était ainsi d'ailleurs - heureusement il y a eu une bonne décision pour une fois du CRTC - du projet de deuxième chaîne de Radio-Canada, en matière culturelle. Pourquoi voulait-on une deuxième chaîne à Radio-Canada? Pour répondre à un problème spécifique du Canada anglais. Et alors qu'on n'a même pas réussi à avoir une première chaîne adéquate pour la section française de Radio-Canada, on était prêt à avoir une deuxième chaîne immédiatement - vous voyez la déception du président de Radio-Canada - pour répondre à un besoin du Canada anglais.

Le problème, en matière culturelle, c'est que nous avons justement des problèmes spécifiques, et on veut apporter à ces problèmes spécifiques, des solutions pancanadiennes qui sont des solutions absolument inadéquates pour nous. C'est ainsi que cela m'apparaît globalement.

M. Rivest: Globalement. J'avais prévu en général le sens de sa réaction et je la comprends. Par exemple, le Conseil des arts du Canada donne aux Québécois - on n'entend pas d'échos dans ce sens-là dans le domaine de la recherche - dans un paquet de domaines. Est-ce que l'action du Conseil des arts du Canada vous apparaît profitable, globalement, ou néfaste au progrès de la culture au Québec?

M. Richard: Cela dépend. Il faut distinguer. Quand vous me parlez du domaine de la recherche scientifique.

M. Rivest: Non, le domaine des arts.

M. Richard: C'est absolument dramatique. La politique fédérale, au niveau de la recherche scientifique, est absolument

négative à l'égard du Québec; cela, vous le savez.

M. Rivest: Sur quel plan en particulier?

M. Richard: Toute la recherche dans le domaine médical, par exemple.

M. Rivest: Oui. Quelles sont les proportions?

M. Richard: De mémoire, je ne pourrais pas vous dire, mais j'aurais envie de vous répondre quelque chose comme 15%.

M. Lalonde: J'aimerais quand même donner la chance au ministre de réviser ses chiffres. Est-ce que ce n'est pas justement dans le domaine médical où le Québec est en avance?

M. Richard: Peut-être.

M. Lalonde: Proportionnellement. Je pense que son exemple est... Je suis d'accord avec lui pour d'autres domaines. Quant au domaine médical, c'est le Québec qui a la première...

M. Richard: Globalement, en tout cas, tous les autres domaines de politique scientifique, globalement, c'est 15%.

M. Rivest: Dans le domaine?

M. Richard: Dans tout le domaine de la recherche scientifique.

M. Rivest: Dans le domaine des arts?

M. Richard: Notamment des communications et des télécommunications.

M. Rivest: Dans le domaine des arts d'interprétation, des écrivains?

M. Richard: II y a eu des expériences heureuses. Je pense qu'il faut reconnaître qu'il y a eu certaines expériences ponctuelles qui ont été heureuses et qui ressemblent, justement, à ce qui est fait par l'Institut québécois du cinéma.

M. Rivest: Prenant acte des déclarations du ministre, je sais que vous vous trouvez sans doute mal à l'aise dans le contexte politique actuel dans la mesure où les orientations du gouvernement sur l'avenir constitutionnel du Québec sont bien différentes des nôtres en particulier et, jusqu'à nouvel ordre, de celles d'une majorité de la population du Québec. Vous êtes le ministre des Affaires culturelles et, comme vous l'avez évoqué, les situations malheureuses sont dramatiques à votre point de vue, les situations heureuses sont ponctuelles; enfin, je ne veux pas qu'on fasse le bilan ce soir.

Voici le sens de ma question. D'autres avant vous ont essayé, c'est très difficile autant sous votre gouvernement que sous le gouvernement précédent, mais est-ce que vous ne croyez pas qu'au ministère des Affaires culturelles - encore là, je fais vraiment abstraction de la dimension politique qui sera réglée de toute façon à d'autres niveaux - pour la bonne conduite dans les prochaines années du développement culturel du Québec, comme Québécois qui, jusqu'à nouvel ordre, faisons encore partie de l'ensemble fédéral canadien et qui avons droit à retirer de notre appartenance à l'ensemble fédéral canadien notre juste part, qu'au niveau du ministère des Affaires culturelles, dis-je, le ministre devrait prendre l'initiative non pas en dramatisant ou en dédramatisant les inconvénients ou les avantages de la situation actuelle? Je vous invite à le faire; je l'avais fait avec vos collègues des années antérieures sans trop de succès. Je n'ose pas vous le demander parce que vous arrivez au ministère. Mais j'aimerais bien connaître, par exemple, quelles communications ont été faites, quelle correspondance a été échangée avec vos homologues fédéraux qui dépensent dans le domaine culturel, à quelle date la dernière communication et quelle en a été la nature.

Il y a sans doute eu des communications d'ordre ponctuel, mais mon intention ce soir, c'est de vous inviter au niveau du ministère des Affaires culturelles, en vue d'assurer la cohérence des deux niveaux de gouvernement, à prendre l'initiative. Je sais que vous vous inscrivez dans une dynamique de la défense des intérêts, mais je crains - je vous le dis comme je le pense - que cette dynamique politique - il y a déjà quatre ans que cela dure, à mon avis - ne nous situe dans une dynamique qu'on a connue antérieurement au Québec. Je le dis à l'intérieur de l'étude des crédits du ministère des Affaires culturelles. Il faut que vous preniez l'initiative vous-même, comme ministre des Affaires culturelles et comme membre du gouvernement, de proposer au gouvernement fédéral un plan d'intégration et d'harmonisation, sans préjuger des changements constitutionnels de quelque ordre qu'ils soient qui surviendront dans l'avenir, mais que vous le fassiez, que vous vous donniez cela comme objectif. Ce sera extrêmement exigeant, périlleux à bien des égards, mais au moins vous aurez fait l'effort d'assurer la cohérence et de défendre dans ce sens, selon mon objectif, d'une manière positive les intérêts du Québec.

Mon illustration de cela - je vous le dis très franchement encore, c'est presque le seul endroit où cela s'est fait; on vit avec ce régime et on en profite au Québec, je

pense que les interventions de mes collègues l'ont démontré - c'est l'exemple de votre ancien collègue, M. Couture, qui partageait autant que vous les objectifs politiques et qui sont propres à votre formation politique qui sont dans une conjoncture politique que l'on connaît, mais il a négocié avec son homologue de l'époque, M. Cullens, une entente au niveau de l'immigration qui, sans permettre au ministère de l'Immigration, à votre ancien collègue et à votre nouveau collègue à l'Immigration, d'atteindre l'essentiel des objectifs politiques de votre formation, a tout de même permis au Québec de débloquer et d'avancer là-dessus. Un des aspects dans le domaine culturel - je vous donne cette suggestion en vrac ce soir - c'est que nous aimerions, du côté de l'Opposition, que vous fassiez cet effort. Nous qui avons des convictions politiques sur ce plan qui vous sont connues, nous serions très intéressés à nous associer à cela. Je vous demande votre réaction.

M. Richard: II me fait plaisir de vous donner ma réaction, M. le député de Jean-Talon, puisque je suis moins optimiste que vous. Je vais vous dire pourquoi. Je sors d'une expérience de six mois, d'une brève expérience au ministère des Communications où j'avais le même homologue que j'ai l'honneur d'avoir, maintenant, aux Affaires culturelles.

M. Rivest: ... des offres.

M. Richard: Non, justement, parce qu'il n'y a pas eu moyen de le rencontrer pour lui soumettre quoi que ce soit en matière de communication. Au moins à deux reprises, il a refusé de venir à des réunions des ministres des Communications. Cela, vous le savez. Quand le fédéral a juridiction, il refuse de participer aux conférences des provinces; quand il n'a pas juridiction, avec son argent, il s'immisce dans des domaines qui ne relèvent pas de lui.

La question que je vais vous poser est celle-ci: Pourquoi, en tant que Québécois, vous qui connaissez tous ces dédoublements inutiles, ne nous aidez-vous pas à dire à ce gouvernement, qui a des velléités unitaristes - au moins, je ne vous demande pas de renoncer à vos convictions fédéralistes, je vous demande simplement de nous aider à dire - : Qu'avez-vous à faire dans le domaine culturel où l'identité culturelle du Québec est tellement spécifique sur le continent nord-américain? C'est quoi, ce dédoublement? Vous connaissez les injustices, découlant justement de cette spécificité, dont nous avons été victimes.

Vous parliez de la recherche, tout à l'heure. Vérifiez pour savoir quelles ont été, de 1970 à 1980, les bourses du Commonwealth, pour savoir dans quelle proportion elles ont été accordées au Québec. Vous parliez de recherche. Les bourses du Commonwealth ont été accordées au Québec dans une proportion qui n'excède pas 2%. C'est ça, la réalité politique de ce pays. Quand je parle de 2%, je suis obligé d'en donner plus que... 80% des bourses accordées au Québec ont été accordées à McGill, en plus. Je pourrais vous donner les chiffres complets là-dessus.

Ce que je vous demande, c'est votre aide. On va avoir besoin de votre aide pour dire à ce gouvernement: Qu'est-ce que vous faites dans tous ces dédoublements? Pourquoi ces dédoublements inutiles, coûteux, qui mènent à l'incohérence la plus totale? Que vient faire le gouvernement fédéral en matière culturelle, alors que tout ce qu'il veut, c'est appliquer des critères pancanadiens. Vous savez pertinemment que des critères pancanadiens, cela veut dire le plus souvent des critères "pancanadian".

M. Rivest: Très bien, M. le ministre, j'accepte cette argumentation, selon votre optique. Mais la réalité politique concrète est telle - parce que vous avez des engagements qui ont été exprimés par le premier ministre - que vous entendez fonctionner à l'intérieur du régime fédéral... J'essaie la même chose, j'essaie cela à chaque commission.

M. Richard: ... elle existera après la décision de la Cour suprême.

M. Rivest: Le rapatriement de la constitution, c'est une autre chose. Je vous parle de l'administration, je vous parle à titre de ministre des Affaires culturelles. Sur le plan de la révision constitutionnelle, qui peut être en cause... comme gouvernement du Québec. Des intervenants sont venus le dire au ministre des Affaires intergouvernementales en particulier, et ont proposé, depuis maintenant cinq ans, alors que votre prédécesseur, le dernier ministre, M. L'Allier, a, sur ce plan, à l'intérieur du livre vert - il était vert, je crois, celui de 1976, je ne me rappelle plus très bien la couleur - fait des propositions là-dessus, c'étaient les propositions du gouvernement à l'époque. Elles sont arrivées en 1976 et le gouvernement est parti. Il y avait une base de négociations sur ce plan.

Personne sur ce plan, à ma connaissance en tout cas, au niveau du gouvernement depuis 1976, n'a repris ces éléments. Sans doute que dans la période préréférendaire... Je vous donne même l'excuse de ne pas l'avoir fait parce que vous ne vouliez pas, sans doute, préjuger de la décision au moment du référendum, mais dans la mesure où maintenant... Que cela vous chagrine et que vous soyez déçu de cette décision, j'en conviens, mais quand

vous dites vouloir, comme gouvernement - le premier ministre et vous-même, comme ministre des Affaires culturelles, comme vous venez de l'évoquer - respecter la décision majoritaire des Québécois, cela a un certain nombre de conséquences dans chacun des ministères. Or, une de ces conséquences, c'est que vous essayiez, dans le domaine culturel, sur le plan administratif - c'est le sens de ma demande - d'y mettre de la cohérence, car c'est votre mandat. (23 h 45)

Je demande que vous formuliez votre mandat avec cohérence puisque vous vous inscrivez dans le processus de révision constitutionnelle. Le premier ministre a lui-même signé une déclaration conjointe avec huit premiers ministres du Canada. C'est une chose qui n'est pas négligeable, ce processus dans lequel il s'engage. Je n'ai pas la déclaration ici, mais les journaux, au cours de la campagne électorale, ont publié cette déclaration par laquelle le premier ministre du Québec dit qu'il s'engage, qu'il s'inscrit dans la démarche du renouvellement de la fédération.

Voici le sens de ma question. Sur le plan administratif, est-ce que vous avez l'intention de faire, sans y donner une connotation politique, cet effort de cohérence. De plus, est-ce aussi votre intention, sur le plan de la révision constitutionnelle?

Quant aux moyens dont vous disposez, vous en avez vous-même évoqué un, parce que les priorités du Québec, en matière culturelle, sont comme les priorités d'autres régions du Canada. Je comprends qu'il y a une dimension particulière du Québec qu'il faut souligner, je vous invite à la souligner, et notre groupe va certainement vous appuyer en ce sens quand vous allez rencontrer vos homologues provinciaux. Vous nous avez dit que vous les receviez au cours de l'été, je ne sais trop la date.

M. Richard: À l'automne.

M. Rivest: À l'automne, à Québec. Pourquoi ne pas prendre alors l'initiative, lorsque vous allez les recevoir? Vous allez parler de fiscalité et d'autres choses. Je ne sais pas si l'ordre du jour est fermé. Vous allez discuter avec vos collègues qui administrent, comme vous, des budgets qui touchent au développement culturel des différentes entités politiques au Canada, au niveau des provinces. Vous leur direz: L'initiative fédérale, on la remet en cause sur le plan politique. Vous pourrez l'affirmer, c'est votre orientation, mais, pour l'instant, on fonctionne, comme le gouvernement le dit, à l'intérieur du régime fédéral. Il y a telle initiative fédérale ponctuelle, ma foi, qui a un certain nombre d'aspects heureux, mais il y a des initiatives qui sont malheureuses, comme celles que vous avez évoquées sur le plan du développement de la culture québécoise.

Bien entendu, encore une fois, n'oubliez jamais le sens large qui a été souligné par mes collègues tantôt, au début de la commission, et vous-mêmes, mes collègues provinciaux, quel type de problèmes cela vous impose-t-il? Est-ce que l'initiative fédérale bouscule vos priorités? Si elle bouscule vos priorités, quelles représentations pourrions-nous faire adresser?

Ce que je veux, ce n'est pas un document, ce n'est pas une démarche politique, c'est une démarche...

M. Richard: M. le Président, en matière de culture, ma position, M. le député de Jean-Talon, est très simple.

Que vient faire le fédéral dans le domaine culturel qui n'est que le prolongement de l'éducation, du domaine de l'éducation?

M. Rivest: Dans l'état... Oui, dans l'état...

M. Richard: Que vient faire le fédéral là-dedans? C'est moi qui sollicite votre appui pour que nous disions ensemble, tout en respectant vos convictions fédéralistes, que ce n'est pas être souverainiste que de dire au fédéral qu'il n'a rien à voir avec le développement culturel du Québec. On peut être souverainiste, comme on peut être fédéraliste, pour dire au fédéral: Vous n'avez rien à voir avec le développement culturel du Québec.

M. Rivest: Sauf...

M. Richard: Cela relève des Québécois. Et les Québécois ne veulent pas confier au gouvernement fédéral leur développement culturel. C'est trop lié à leur identité propre comme Québécois que le développement culturel. C'est ce que le gouvernement fédéral fait depuis toujours. La seule façon d'assurer la cohérence des politiques, c'est d'éviter les chevauchements inutiles et de faire en sorte que le Québec soit le véritable et unique maître d'oeuvre de sa politique culturelle.

M. Rivest: M. le ministre, l'ancien gouvernement avait avancé une idée...

M. Richard: Mon Dieu, vous êtes presque l'auteur, M. le député de Jean-Talon - comment appelaient-ils cela? - de la souveraineté culturelle, on se rejoint pour une fois, de la souveraineté culturelle totale, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je prévois tout cela et je tiens compte de vos réactions, je les

comprends. Sauf que ce que je vous demande de reconnaître pour l'instant, c'est que le gouvernement fédéral applique actuellement une constitution qui est celle que nous avons. On peut la contester, nous l'avons contestée à notre manière. Vous parlez des propositions qu'on avait faites au titre de la souveraineté culturelle, vous la contestez d'une façon globale. Lorsque vous véhiculez l'idée de la souveraineté, vous la contestez d'une façon que je ne connais pas actuellement, à l'intérieur de la révision du fédéralisme dans lequel vous vous inscrivez, dans la mesure où il n'y a aucune proposition du gouvernement du Québec sur ce plan qui est sur la table. Vous avez suivi les priorités qui ont été définies. Enfin, c'est le contexte.

Mais, actuellement, les Québécois, majoritairement, et tous les Québécois sont régis...

M. Richard: M. le Président, encore une fois, j'ai répondu à cela, M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Non.

M. Richard: J'épouse tout à fait la thèse de votre ex-collègue, votre patron et ami Robert Bourassa, en matière culturelle, qui prônait la souveraineté culturelle. J'épouse cette thèse. Je suis d'accord avec la souveraineté culturelle. M. Bourassa était fédéraliste...

M. Rivest: Oui, et si vous avez vu la...

M. Richard: ... que je sache, et il prônait la souveraineté culturelle. Alors, je suis bien à l'aise, évidemment, parce que je suis un peu plus souverainiste que M. Bourassa, de prôner moi aussi la souveraineté culturelle.

M. Rivest: Encore là, cela je ne vous le conteste pas. D'ailleurs, si vous voulez regarder nos propositions propres d'aujourd'hui - nommément dans la position constitutionnelle du Parti libéral - les arts, les lettres et le patrimoine sont des demandes qu'on a formulées. Mais on est dans l'Opposition, et, au titre de la révision constitutionnelle, si vous regardez, le livre beige est à ce titre. Il y a toute un mécanisme prévu.

Mais ce n'est pas ça l'affaire, parce que la souveraineté culturelle, la souveraineté politique et nos propositions du livre beige, en ce moment, elles n'existent pas. Or, vous, vous existez comme ministre des Affaires culturelles du Québec. Vous fonctionnez dans le cadre d'un ordre constitutionnel, qui est celui qui existe. D'accord? Cet ordre constitutionnel, interprété, il n'y a pas d'illégalité, enfin le gouvernement fédéral est dans le champ culturel et il y est massivement pour l'instant, à tort ou à raison, peu importe, ce n'est pas l'objet, mais votre responsabilité, comme ministre des Affaires culturelles, je vous le demande...

M. Richard: C'est de l'en sortir.

M. Rivest: C'est politique, mais, comme ministre des Affaires culturelles, vous devez éviter... c'est le sens des démarches que je vous demande. Quand je vous demande de communiquer d'une façon sereine, en respectant l'ordre que vous refusez - ça j'en conviens - avec votre homologue fédéral, de faire des points d'accord et de concertation avec vos homologues des autres provinces qui s'intéressent au dossier culturel pour que les inconvénients actuels du régime - ceux qu'on peut régler sur le plan administratif - soient réglés et que nos artistes, nos créateurs, les gens qui se préoccupent de questions de patrimoine, nos écrivains ne soient pas pénalisés par les difficultés d'ordre constitutionnel que nous connaissons, que ces difficultés trouvent leur solution dans la voie que vous proposez de la souveraineté ou dans la voie qu'on propose du renouvellement de la fédération canadienne, il y a un problème sérieux. Vous êtes le ministre des Affaires culturelles, vous devez fonctionner dans l'ordre constitutionnel actuel. Je vous demande ceci: Êtes-vous prêt à le faire? Et si vous êtes prêt à fonctionner, comme vous le dites, comme le premier ministre du Québec le dit en ce moment, êtes-vous prêts à prendre des initiatives pour assurer qu'il y a une plus grande cohérence des initiatives actuelles qui existent et qui vont continuer d'exister tant qu'on sera dans l'ordre constitutionnel actuel, présent, dans le domaine des affaires culturelles? C'est ça, le sens de la question. Oui ou non? Si vous acceptez de faire cela, avez-vous l'intention de prendre un certain nombre d'initiatives à cet égard pour assurer cette cohérence auprès de vos homologues provinciaux, en produisant des documents, en montrant le pour et le contre de la situation actuelle? Voilà le sens de ma question, ce n'est pas la question politique.

M. Richard: M. le Président, durant toute ma brève carrière politique, jusqu'à maintenant, j'ai essayé de démontrer l'absurdité du système politique dans lequel on vit. En matière culturelle, c'est encore plus évident que dans d'autres domaines. Il est évident, M. le député de Jean-Talon, que je vais continuer à essayer de faire la démonstration des aberrations qu'il y a dans ce chevauchement inutile et coûteux. À chaque fois que je vais avoir la possibilité d'aller chercher les pouvoirs qu'on nous a arrachés, je vais le faire parce que ça aussi c'est cohérent...

M. Rivest: Comment?

M. Richard: À chaque fois que je vais pouvoir convaincre... Si c'est possible de le faire. Je vous rappelle que j'ai le même homologue que j'avais aux Communications. Or, ce dernier refusait même de venir aux conférences des ministres des

Communications des provinces. J'ai participé à deux conférences des ministres des Communications des provinces, sans que M. Fox daigne venir s'asseoir à la même table que nous. Aura-t-il la même attitude avec les ministres des Affaires culturelles? Je l'ignore, M. le député de Jean-Talon. Tout ce que je peux vous dire c'est que vous savez pertinemment que toute la politique fédérale, depuis qu'il y a un gouvernement fédéral, a consisté à essayer d'agrandir ses pouvoirs au détriment des provinces, d'agrandir son champ de juridiction, et qu'il ne veut jamais céder les pouvoirs qu'il a arrachés, la plupart du temps par la force, aux provinces. Voilà la réalité politique de ce pays.

M. Rivest: Etes-vous prêt à faire...

M. Richard: Et quand il a l'appui de l'Opposition libérale, à Québec, pour le faire, c'est encore infiniment plus difficile pour nous. Si vous dénoncez, avec autant de virulence que je vais les dénoncer, les incohérences de ce système...

M. Rivest: Ah, vous y allez pour la virulencel Ce n'est pas là ma question.

M. Richard: ...et on va réussir à rester les seuls maîtres de notre développement culturel au Québec.

M. Rivest: Oui. Êtes-vous prêt à vous engager...

M. Lalonde: Si je comprends bien, vous ne voulez rien faire pour que cela marche.

M. Rivest: C'est cela.

M. Richard: Bien sûr, qu'on veut le faire. Je vous ai donné la...

M. Rivest: Mais c'est là ma question. Votre discours, cela va. Ma question, c'est cela.

M. Richard: M. le député de Marguerite-Bourgeoys, je vous ai parlé spécifiquement des expériences...

M. Lalonde: Vous avez dit que...

M. Richard: ...que je viens de vivre au ministère des Communications.

M. Lalonde: ...vous allez tout faire pour que cela ne marche pas.

M. Rivest: C'est cela.

M. Lalonde: Vous avez fait démontrer que cela ne marche pas. Compris.

M. Richard: Je vous ai parlé spécifiquement des expériences sur lesquelles vous vous fermez les yeux. Vous ne voulez pas les voir celles-là. Au ministère des Communications, j'ai vécu deux conférences, en six mois, des ministres des Communications. À ces deux conférences des ministres des Communications, alors qu'il y a consensus des dix ministres des Communications en matière de communication, le ministre fédéral a refusé d'y assister. C'est moi, M. le député de Marguerite-Bourgeoys, qui veux que cela ne marche pas? J'étais présent aux deux conférences dont l'une a eu lieu à Québec et l'autre à Vancouver, M. le député de Marguerite-Bourgeoys.

M. Rivest: Ma question est la suivante: Est-ce que...

Une voix: ...

M. Rivest: Non, une dernière question.

M. Champagne: Question de privilège.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Mille-Iles, il n'y a pas de question de privilège en commission.

M. Champagne: En fin de compte, c'est que...

M. Rivest: Non, je le lui permets.

Le Président (M. Desbiens): Une question de règlement.

M. Champagne: M. le député de Jean-Talon avait souhaité, à 23 heures...

M. Rivest: Oui, on va y aller. Une dernière question.

M. Champagne: ...que cela finisse vers 23 h 30, 23 h 45. De toute façon, est-ce qu'on pourrait...

M. Rivest: Mais on a eu droit à un discours, enfin.

M. Champagne: Lequel? Le vôtre ou le sien?

Le Président (M. Desbiens): Alors... Une voix: Deux.

Une voix: Une.

M. Champagne: C'est cela. On a eu droit à deux discours.

M. Rivest: Je reviens, M. le ministre.

Le Président (M. Desbiens): M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Essayez de me répondre. Je connais toutes vos convictions, etc. Est-ce que vous êtes prêt, dans le domaine culturel, à vous engager dans le même sens de la démarche qu'a suivie votre collègue dans le domaine de l'immigration, M. Couture, qui a négocié une entente qu'on appelle l'entente Couture-Cullen qui a permis au Québec, même si le Québec, dans votre option, n'est pas souverainiste, etc., d'exercer un pouvoir réel dans le domaine de l'immigration et de respecter davantage les caractéristiques de notre société? Êtes-vous prêt à vous engager dans ce domaine? C'est là le sens de ma question. Je ne veux pas avoir de...

M. Richard: M. le député. M. Rivest: Oui ou non?

M. Richard: M. le député de Jean-Talon, je suis disposé...

M. Rivest: Ah!

M. Richard: ...à suivre exactement la politique qui a été la mienne au ministère des Communications...

M. Rivest: Bien, franchement, vous n'avez pas eu grand succès.

M. Richard: ...à être présent...

M. Rivest: Mais votre collègue a eu des succès.

M. Richard: ...et à indiquer nos réclamations comme je l'ai fait.

M. Rivest: Très bien, M. le Président.

Le Président (M. Desbiens): Alors, si j'ai bien compris le sens de la procédure qu'on avait déterminée...

M. Rivest: Vous êtes meilleur en constitution qu'en affaires culturelles.

Le Président (M. Desbiens): ...il n'y aurait plus aucune question. Je demande donc si les crédits du ministère des Affaires culturelles sont adoptés en bloc.

Une voix: Oui.

Le Président (M. Desbiens): Est-ce que c'est de cette façon que vous l'entendiez?

M. Rivest: M. le Président, est-ce qu'on peut remercier le ministre qui a fait des efforts héroïques?

Le Président (M. Desbiens): Alors, les crédits du ministère des Affaires culturelles, pour l'année financière 1981-1982, sont adoptés. M. le député de Jean-Talon.

M. Rivest: Je voudrais simplement remercier le ministre et ses collaborateurs ainsi que tous nos collègues pour qui c'était une initiation - je ne sais pas si cela a été un exemple - et lui dire, au moins à travers tous ces débats et surtout ces ébats, à certains moments, qu'on a acquis au moins la conviction que le nouveau ministre des Affaires culturelles va certainement, dans les prochains jours et les prochains mois, se retourner, comme il l'a fait souvent ce soir, mais cette fois-là vers tout son ministère, s'en pénétrer. Je suis convaincu qu'il le fera. Il nous a demandé notre collaboration. Nous avons essayé d'obtenir, enfin, jeter les bases à la fin d'une autre dimension de notre collaboration ici. Je regrette que nous n'ayons pas pu obtenir des voies sur le plan des relations fédérales-provinciales. Je veux -je veux le dire au ministre - exprimer également le sentiment qu'à notre collègue Jean-Pierre Saintonge, qui, maintenant, va assumer la responsabilité du dossier, on voudra bien accorder toute notre collaboration. Également, je voudrais remercier tous les collaborateurs du ministre qui ont dû être bien nerveux parce que, quand un ministre a ses crédits en arrivant, cela crée toujours un certain nombre d'activités parlementaires au niveau des ministères. Je sais que le ministre lui-même a apprécié la collaboration que ses fonctionnaires lui ont donnée.

Le Président (M. Desbiens): M. le ministre.

M. Richard: M. le Président, je voudrais vous remercier, vous d'abord, pour le travail que vous avez fait, et les collaborateurs du ministère, les hauts fonctionnaires du ministère qui ont fait un travail de géant depuis mon arrivée au ministère pour me rendre la tâche facile. Je voudrais remercier mes collègues de l'Opposition, spécialement mon nouveau vis-à-vis, le député de Laprairie, pour la sérénité de ses interventions. (Minuit)

Quant aux députés de Jean-Talon et de Marguerite-Bourgeoys, je leur sais gré de la collaboration qu'ils m'offrent pour lutter contre les velléités unitaristes du gouvernement fédéral en matière culturelle.

J'en prends acte et je suis heureux de constater que le député de Jean-Talon et moi-même partageons des convictions profondes en ce qui a trait à la souveraineté culturelle du Québec.

M. Rivest: Attention!

M. Lalonde: M. le Président, j'ai été mis en cause, ce n'est pas une question...

M. Rivest: Question de règlement! Défends-moi en même temps.

M. Richard: Alors, je vous en remercie et je suis sûr qu'ainsi il sera plus facile d'apporter des solutions au problème du développement culturel du Québec.

M. Lalonde: M. le Président, j'ai été mis en cause, j'ai entendu un acte de foi du nouveau ministre à l'égard de la souveraineté culturelle, on s'en souviendra.

Le Président (M. Desbiens): Alors, je demanderais au rapporteur de faire rapport à l'Assemblée nationale dans les plus brefs délais...

M. Richard: J'ai toujours de la misère à leur faire adopter une motion, à eux.

Le Président (M. Desbiens): ...que le mandat qui avait été confié à la commission a été rempli. J'ajourne donc la séance en remerciant tous les participants.

La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 0 h 02)

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