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Commission permanente de l'Agriculture et de la
Colonisation
Projet de loi no 64 Loi du syndicalisme
agricole
Séance du jeudi 2 septembre 1971
(Dix heures dix minutes)
M. FRASER (président de la commission parlementaire de
l'Agriculture et de la Colonisation): A l'ordre, messieurs! Nous allons
commencer les séances de la commission de l'Agriculture. Nous entendrons
trois organismes aujourd'hui. D'abord, la Compagnie du marché central
métropolitain et l'Association des jardiniers maraîchers de la
région de Montréal, dont les porte-parole sont MM. Alphonse
Couture et Moise Riendeau. Nous avons aussi la Coopérative
fédérée du Québec dont le porte-parole est M. L.-P.
Poulin, secrétaire.
Je vais demander d'abord à M. Couture s'il est prêt
à s'adresser à la commission.
M. PIGEON: M. le Président, le porte-parole de la
Coopérative fédérée, Roland Pigeon,
président.
M. LE PRESIDENT: C'est parfait.
M. JASMIN: M. le Président, le porte-parole de l'Association des
jardiniers maraîchers de la région de Montréal sera M.
Honoré Daignault, président, ainsi que moi-même, Jasmin,
secrétaire.
M. LE PRESIDENT: Qui est le porte-parole de la Compagnie du
marché central métropolitain?
M. COUTURE: Alphonse Couture, le directeur général.
M. LE PRESIDENT: Vous commencez la bataille, M. Couture?
M. COUTURE: Je pense que ce serait plus dans l'ordre que le
président de l'Association des jardiniers maraîchers prenne la
parole, étant donné que le Marché central est ici pour
appuyer l'Association. Il y a concordance de vues, mais je crois que. ce serait
plus logique de laisser l'initiative à l'Association des jardiniers
maraîchers qui est un syndicat professionnel qui représente les
jardiniers maraîchers.
M. LE PRESIDENT: D'accord. M. Daignault a la parole.
Association des jardiniers maraîchers de la
région de Montréal
M. DAIGNAULT: M. le Président, M. le ministre de l'Agriculture et
de la Colonisation,
MM. les membres de la commission parlementaire. Il me fait plaisir, en
tant que président de l'Association des jardiniers maraîchers de
la région de Montréal, de venir ici aujourd'hui pour
présenter un document que nous avons préparé conjointement
avec la Corporation du marché central métropolitain.
Le bill 64 concernant le syndicalisme en agriculture est un geste que
pose votre gouvernement et qui aura des conséquences sur l'agriculture
de demain. Nos jardiniers ne sont pas convaincus de l'effet
bénéfique du geste que vous posez, mais il est certain que votre
sagesse et la grande compétence des gens qui vous entourent sont un gage
du progrès qui découlera de l'acceptation de la syndicalisation
des patrons agricoles, paradoxe de notre monde ouvrier.
Nous voulons donc, par le mémoire que nous avons
déposé, collaborer à faire de cette loi un outil aussi
efficace que possible. C'est pourquoi nous demandons que quatre points de base
soient légèrement modifiés.
Premièrement, que les mots "cultivateur" et "cultivateur
spécialisé" soient spécifiques et permettent de regrouper
des gens qui demeurent définitivement intéressés à
l'agriculture et dont 25 p.c. des revenus nets proviennent de la production
primaire de leur ferme. Ces gens seront taxés en fonction de ce
même barème d'ici quelque temps.
Deuxièmement, que l'accréditation ne soit pas l'apanage
d'une seule association, mais qu'une association spécialisée ou
qu'un syndicat spécialisé puisse représenter ces membres
qui souvent peuvent avoir des problèmes incompatibles avec la
majorité des gens d'une association regroupant des cultivateurs de la
province. Nous croyons qu'établir un gouvernement parallèle par
la formation d'une seule association représentera tous les secteurs
primaires de l'industrie agricole. Vous n'atteindrez pas le but réel qui
est de faire rencontrer les différents secteurs pour résoudre, au
niveau des propriétaires terriens, une grande partie des conflits
d'intérêt entre les différents centres de production d'une
industrie qui est mal aidée, mal orientée et mal
protégée.
Troisièmement, de permettre à un syndicat de percevoir les
cotisations de ses membres dans le but de structurer le système par la
base et de donner à chaque syndicat une force qu'il ne pourra avoir que
s'il reçoit de ses membres les capitaux dont il a besoin pour
fonctionner.
Quatrièmement, de séparer les syndicats, les
fédérations et les associations de tout organisme de mise en
marché et un syndicat où une fédération
reçoit de l'argent par le truchement de ces revenues faites dans les
cadres d'un plan conjoint. Il est évident que l'association fera des
pieds et des mains pour voir fleurir ce système de mise en marché
qui apporte des avantages financiers.
Il ne me sert à rien, messieurs, de lire textuellement le
document que nous avons
déposé à votre secrétariat permanent le 26
août dernier, car vous en avez certainement pris connaissance à
présent. Nous nous contenterons donc de reprendre le projet en montrant
les concordances, et pour ceci, je demanderais à mon secrétaire,
M. Jasmin, de bien vouloir faire ses commentaires.
M. JASMIN: M. le Président, messieurs les membres de la
commission parlementaire de l'Agriculture, comme vous avez pu voir, par le
discours de notre président, nous relevons quatre points à cette
loi: la précision des termes "cultivateur" et "cultivateur
spécialisé", point qui a été soulevé par
votre commission à la dernière assemblée et qui a
certainement raison d'être clarifié.
Nous proposons ici une définition du terme. Je sais que votre
commission a demandé à la Corporation des agronomes de la
province de Québec également d'essayer de résoudre ce
dilemme par une définition plus appropriée du terme "cultivateur"
et du terme "cultivateur spécialisé".
Nous croyons, en ce qui nous regarde, maraîchers, qu'advenant
d'autres lois sur la taxation des biens fonciers une autre loi s'en
vient qui, elle aussi, définit le terme "cultivateur" dans un sens bien
précis, à 25 p.c. de son revenu brut -- cette définition
devrait également s'appliquer dans le cas d'une syndicalisa-tion de ces
mêmes gens qui seront taxés fortement, disons-le, parce que les
jardiniers sont ordinairement les gens qui sont près des centres de
développement et près des centres urbains. Dans un projet de loi
comme celui qui viendra plus tard, les jardiniers sont très conscients
que la définition du terme "cultivateur spécialisé" doit
être, pour une fois, déterminée pour l'ensemble ou pour la
majorité des politiques agricoles.
Nous appuyons, deuxièmement, sur l'accréditation de
syndicats spécialisés, de fédérations de syndicats
spécialisés, parce que nous avons peur d'élever
parallèlement à votre honorable gouvernement, un autre
gouvernement qui sera l'association regroupant tous les agriculteurs et qu'en
somme ce soit l'association qui dicte à la province les politiques, vu
qu'elle représentera réellement l'élément fort.
Elle sera le seul porte-parole de la classe agricole, dans l'ensemble de la
province. S'opposeront à ce nouveau gouvernement ou ministère de
l'Agriculture parallèle, seulement les autres ministères qui
verront là-dedans, peut-être, des conflits d'intérêts
soit pour le consommateur, soit pour l'industrie des pâtes et papier,
soit pour une autre industrie. Mais, dans l'ensemble de l'agriculture, si nous
n'avons qu'une seule association accréditée, à quoi sert
d'avoir un ministère? A ce moment-là, c'est l'association qui
dictera les politiques, parce qu'elle représentera et qu'elle sera la
voix de l'ensemble de la classe agricole.
C'est là-dessus que nous croyons que, définitivement, il
faut que les différents secteurs de l'agriculture s'assoient autour
d'une table et discutent de leurs problèmes. Soyez conscients que les
maraîchers le savent.
Nous nous assoyons tous les ans à une table à Ottawa, au
Conseil national de l'horticulture, et là nous discutons non seulement
de maraîcher à maraîcher, mais de maraîcher à
pomiculteur, de maraîcher à producteur de fleurs et de
maraîcher du Québec à maraîcher de l'Ontario,
à maraîcher des Maritimes et à producteur de pommes de
Colombie-Britannique. Nous discutons à une table de tous nos
problèmes et essayons de demander au gouvernement responsable, le
gouvernement fédéral dans ce cas-là, vu que c'est une
séance qui se tient entre tous les représentants des provinces du
Canada, de tracer des politiques pour le bien de l'ensemble du monde horticole
du Canada. Nous avons des fois des prises de bec assez sérieuses, assez
dures mais je pense que c'est bon, ces choses-là. Je vois qu'il y a
besoin que différents secteurs de l'agriculture du Québec
s'assoient à une table et règlent leurs problèmes. Il ne
faut pas que le gouvernement règle tous les problèmes, mais il
faut éventuellement qu'il règle certains problèmes
lorsqu'il y a des conflits d'intérêts entre les grands secteurs de
l'agriculture.
Nous ne pourrons pas faire manger aux gens plus d'aliments qu'ils ne
peuvent en absorber dans leur petit estomac. Espérons qu'un jour leur
estomac grandira mais, pour l'instant, chaque fois qu'un consommateur boit un
verre de lait, il entre en concurrence directe avec l'industrie du jus de pomme
et des autres jus de légumes et de fruits. Chaque fois qu'un
consommateur mange de la viande, il emplit dans son estomac un espace en
aliments qu'il ne peut pas ensuite remplir avec d'autres aliments qui sont ceux
que nous vendons en tant que maraîchers. Et chaque secteur de
l'agriculture est en concurrence avec l'autre.
Le troisième point que nous relevons ici et qui a
été relevé par notre président, c'est qu'il ne
faudrait pas structurer une organisation comme ça par le sommet, il faut
que chacun des syndicats soit relativement autonome. Dans le monde capitaliste
dans lequel nous vivons, l'argent a certainement un grand rôle à
jouer. Si les syndicats sont capables de percevoir eux-mêmes leurs
cotisations, quitte à en passer une partie à l'association ou aux
associations les représentant ou aux fédérations, pour
permettre à ces fédérations, à ces associations de
fonctionner, j'en suis. Mais, l'on ne peut renverser la vapeur et dire que
l'association, elle, percevra tout et qu'elle ira ensuite nourrir les
éléments à la base, selon son bon vouloir. C'est
peut-être, malheureusement, parce que l'homme est homme et que chaque
fois que l'homme est homme, il y a des choses bien humaines qui se font. C'est
que les syndicats peuvent être nourris en fonction de l'adhésion
qu'il y aura ou de la guerre qu'ils feront à l'intérieur de
l'association.
C'est un moyen de contrôle, un moyen qui s'emploie dans bien des
secteurs de notre monde capitaliste.
Finalement, le quatrième point que nous voulons relever ici,
c'est d'éviter de mêler les raves et les choux, d'éviter de
mêler ensemble une association qui a un but, qui est d'établir des
politiques, de regrouper les gens, et un autre organisme qui a un but de mise
en marché. Il faudrait que ces deux choses soient bien
séparées, parce que si un des moyens de mise en marché qui
est les plans conjoints est relié aux associations ou aux
fédérations et contribue au financement de ces
fédérations ou de ces associations, il est certain que cette
méthode de mise en marché sera favorisée par les
associations ou les fédérations, étant donné
qu'elles ont un intérêt vital, un intérêt financier
de voir que cette méthode de mise en marché soit mise de l'avant.
Autrement dit, multiplier les plans conjoints parce que ce serait payant
d'avoir des plans conjoints.
Pour éviter cette tentation il ne faut pas exposer des
gens au supplice de tantale si on séparait les deux et si on
demandait que les associations ou les fédérations soient
financées strictement par les cotisations de leurs membres, et non pas
par des redevances venant des plans conjoints ou d'autres méthodes de
mise en marché. Autrement dit, séparer les deux: l'association et
le syndicat et les fédérations des méthodes de mise en
marché.
Ce sont les trois seuls petits points sur lesquels nous aimerions que
votre comité se penche et fasse de légères modifications
à cette loi qui en somme est très bonne, vu qu'elle a
été étudiée minutieusement par vos fonctionnaires
et vous-même depuis déjà plusieurs années.
Nous ne passerons pas à travers le mémoire que nous vous
présentons, comme M. le président vous l'a dit, parce que vous
l'avez entre vos mains. A la fin du mémoire, en appendice, nous avons
rédigé un projet de bill 64 dans lequel nous essayons de faire
les modifications à l'intérieur du bill qui répondraient
à nos petits changements de philosophie ou petits changements
d'attitude.
Nécessairement, vous voyez, à l'article e), des
définitions, que nous introduisons ici un nouveau terme, qui est la
fédération spécialisée accréditée,
une fédération reconnue par la régie comme
fédération spécialisée représentante d'un ou
plusieurs groupes de producteurs spécialisés du
Québec.
En dehors de cela, dans ces définitions-là, nous acceptons
à peu près tout, excepté certaines petites modifications
à l'article g) qui seraient, nécessairement, "des producteurs
spécialisés". Nous répétons les mots
"spécialisés" à deux endroits à l'article g). A
l'article h), nous parlons d'un syndicat spécialisé
accrédité, nécessairement, un syndicat
spécialisé reconnu par la régie comme syndicat
spécialisé représentant un groupe de producteurs
spécialisés du Québec.
Pour passer à l'article 1) des définitions, nous parlons
de producteurs. Nous définissons le producteur comme une personne,
société ou corporation engagée dans la production d'un
produit agricole qui tire sa subsistance et celle de sa famille ou au moins 25
p.c. du total de son revenu brut de la culture du sol, de l'élevage
d'animaux de ferme ou de l'exploitation de leur production, de l'élevage
d'animaux à fourrure, de l'exploitation d'un verger, d'une
érablière ou de la partie boisée de la ferme, sauf... Nous
acceptons les mêmes modifications qui sont dans la loi, dans la
proposition du bill 64. Forcément, le sous-paragraphe iii) est donc
rayé.
Finalement, nous définissons "producteur
spécialisé" comme nous avons défini
"fédération spécialisée" et "syndicat
spécialisé". Un producteur spécialisé est une
personne, société ou corporation engagée dans une
production agricole spécialisée qui constitue sa principale
source de revenus. Nous insistons là-dessus. Beaucoup de nos
maraîchers se sont regroupés dans des corporations familiales et
ne peuvent être identifiés comme une personne, c'est une
entité légale, ce sont des cultivateurs, des maraîchers qui
se sont regroupés de façon à être plus efficaces et
plus rentables sur les marchés nationaux et internationaux.
A l'article 2, nous disons qu'un producteur spécialisé a
le droit d'appartenir à un syndicat spécialisé de son
choix. Je crois que nous tenons à cette liberté d'action.
Dans la section lll, article 5, nous ajoutons: Toute association,
fédération spécialisée ou syndicat
spécialisé qui veut être accrédité pour
représenter les producteurs ou un groupe de producteurs
spécialisés doit transmettre à la régie une
requête. Et nous acceptons le reste de cet article 5.
A l'article 6, encore, nous précisons, à la
troisième ligne: De la fédération
spécialisée ou des syndicats spécialisés en regard
des producteurs ou des producteurs spécialisés concernés
et s'assurer que les règlements de cette association,
fédération spécialisée ou syndicat
spécialisé, a) et b).
Nous appuyons sur ces points-là et spécialement à
l'article c) du paragraphe 6, où nous appuyons de nouveau sur le secteur
qui nous concerne et qui représente les agriculteurs, les cultivateurs
spécialisés et leur syndicat qui existe en soi, qui est un fait
actuellement, et ces producteurs spécialisés, marafchers ne
voudraient pas perdre le terrain qu'ils ont gagné après des
années et des années de bataille et de travail
acharné.
A l'article d) de ce même paragraphe 6 de la loi, nous disons,
à la sixième ligne: "Les fédérations
spécialisées qui adhèrent à une association
d'obtenir la tenue d'une assemblée générale
spéciale de cette association et à 10 p. c. des producteurs ou
producteurs spécialisés qui sont membres d'un syndicat ou
d'un
syndicat spécialisé, d'obtenir la tenue d'une
assemblée générale spéciale d'un syndicat ou d'un
syndicat spécialisé et à 7.5 p. c. des membres de
syndicats ou de syndicats spécialisés affiliés à
une fédération ou fédération
spécialisée d'obtenir la tenue d'une assemblée
générale spéciale de cette fédération ou
fédération spécialisée."
C'est une partie que nous ajoutons à votre paragraphe d).
Nous avons souligné les points que nous avons changés ou
ajoutés ici et là. A l'article 8, nous ajoutons un nouveau
paragraphe qui est: "L'accréditation d'une fédération
spécialisée ou d'un syndicat spécialisé annule
l'accréditation de toutes associations ou fédérations
spécialisées pour le groupe de producteurs
spécialisés visé par la nouvelle
accréditation."
Autrement dit, le processus est à peu près impensable
lorsqu'on parle de l'accréditation d'une seule association. Mais il faut
penser que, dans le monde syndical d'aujourd'hui, les gens ont le droit de
s'affilier au syndicat de leur choix. Si une unité de négociation
syndicale décide d'arrêter son affiliation à un syndicat
pour se réaffilier à un autre syndicat, elle a le droit de le
faire. Je pense que, si nous avons, à ce moment-ci,
l'accréditation d'une association unique, l'affiliation ou la
désaffiliation devient très difficile, étant donné
qu'il n'y a qu'une association accréditée dans l'ensemble du
secteur agricole de la province.
Lorsque nous introduisons la possibilité d'accréditation
de syndicats et de fédérations, nous permettons à des
groupes de se désaffilier et de se réaffilier et de demander
l'accréditation de la nouvelle affiliation.
Je vais vous relire au complet l'article 13 parce que nous l'avons
changé. L'article 13 est modifié pour fins de concordance,
à l'exception du paragraphe b) où les mots "et la contribution"
sont supprimés. "Dans un référendum tenu aux fins
d'établir le caractère représentatif d'une association,
d'une fédération spécialisée ou d'un syndicat
spécialisé, la régie doit, dans le même bulletin de
vote, demander à chaque producteur spécialisé: a) s'il
veut que cette association ou cette fédération
spécialisée ou ce syndicat spécialisé le
représente aux fins de la présente loi; et b) s'il veut que cette
association, fédération spécialisée ou syndicat
spécialisé soit investi du pouvoir de prélever, pour et au
nom de son syndicat ou syndicat spécialisé, la cotisation
obligatoire visée aux sections VIIl et IX. La régie doit porter
à la connaissance des producteurs ou producteurs
spécialisés, avant le référendum, un
résumé explicatif desdites sections."
A l'article 14, nous ajoutons un paragraphe disant: "Nonobstant ce qui
précède, dans le cas d'une fédération
spécialisée ou d'un syndicat spécialisé, pour que
tout référendum visé par la présente loi soit
considéré comme valable par la régie, au moins 60 p. c. en
nombre et en superficie en culture des producteurs spécialisés
concernés doivent se prévaloir de leur droit de vote." C'est la
même concordance. On dit en nombre et en superficie en culture,
superficie en culture étant un nouvel élément que nous
voulons introduire, je pense, dans cette loi et qui devrait être
examiné de près.
A l'article 19, il y a concordance, excepté au paragraphe f ) qui
accorde aux syndicats ou aux syndicats spécialisés la
propriété des cotisations des membres, permet des ententes avec
une fédération ou une association concernant la perception des
cotisations. Nous relevons ici le paragraphe f): "Sous réserve de
l'article 17 et du consentement préalable des syndicats, syndicats
spécialisés, fédérations, fédérations
spécialisées, une association ou une fédération
spécialisée peut prélever, recevoir et redistribuer les
cotisations pour et au nom des syndicats ou syndicats
spécialisés, conformément aux sections VIIl et IX." Nous
ne fermons pas la porte complètement. Nous croyons qu'une loi est un
outil de travail. C'est quelque chose qui doit être opérationnel.
Si une loi n'est qu'une chose pour mettre sur les tablettes, cela ne vaut pas
la peine de la voter. Il faut que cela soit quelque chose d'opérationnel
et qui peut rendre service à la société.
Nous sommes en concordance avec les articles 20, 21, 22. Aucun
changement, nécessairement. A l'article 23, nous voudrions ajouter un
paragraphe qui dirait: "Les règlements d'une fédération
spécialisée qui demande l'accréditation doivent prescrire
les conditions que doivent remplir les syndicats spécialisés pour
s'affilier à une telle fédération
spécialisée." On pense qu'il est important de souligner que les
gens soient avisés.
A l'article 24, nous ajoutons également un nouveau paragraphe:
"Une fédération spécialisée
accréditée doit accepter l'affiliation de tout syndicat
spécialisé qui remplit les conditions déterminées
par les règlements de cette fédération
spécialisée."
A l'article 25, nous sommes d'accord et nous aimerions ajouter un
paragraphe: "L'affiliation peut être révoquée par une
fédération spécialisée accréditée si
un syndicat spécialisé affilié ne se conforme pas à
la présente loi, à une ordonnance ou à un règlement
adopté en vertu de cette loi ou à une décision pertinente
de la régie."
Pour les articles 26 et 27, nous sommes en concordance à
l'exception de quelques petites corrections. De même pour l'article
29.
Article 30: "Sous réserve de l'article 17, les dépenses
d'une association accréditée ou d'une fédération
spécialisée accréditée sont défrayées
au moyen d'une cotisation des fédérations,
fédérations spécialisées, syndicats ou syndicats
spécialisés qui sont affiliés à cette association
ou fédération spécialisée. Les dépenses d'un
syndicat, d'un syndicat spécialisé ou d'un syndicat
spécialisé accrédité sont défrayées
au moyen
de cotisations des producteurs ou des producteurs
spécialisés de ces syndicats ou syndicats
spécialisés.
Article 31. Le montant de la cotisation annuelle fixe et exigible de
chaque producteur ou producteur spécialisé et les
modalités de paiement sont déterminés par les
règlements des syndicats ou syndicats spécialisés. Sous
réserve de l'article 35, le maximum d'une telle cotisation ne doit pas
excéder $15 pour un producteur et $25 pour un producteur
spécialisé. C'est un autre élément nouveau que nous
introduisons. Les producteurs spécialisés savent qu'ils sont
peut-être déficients au point de vue du nombre, mais ils sont
prêts à payer plus cher pour leur fédération ou leur
syndicat afin que ces gens aient les moyens financiers de faire le travail
qu'ils doivent faire.
Article 32. Les règlements visés à l'article 31
sont exécutoires à l'égard de toute
fédération ou syndicat, fédération
spécialisée non accréditée ou syndicat
spécialisé non accrédité, affiliés à
une association accréditée ou une fédération
spécialisée accréditée.
Un syndicat spécialisé accrédité est
dispensé de toute contribution ou cotisation à une
fédération spécialisée accréditée ou
à une association accréditée.
Une fédération spécialisée
accréditée est dispensée de toute contribution ou
cotisation à une association accréditée.
Les règlements visés à l'article 31 sont
exécutoires à l'égard de tout producteur, membre ou non
d'un syndicat, et de tout producteur spécialisé, membre ou non
d'un syndicat spécialisé affilié ou non à une
fédération ou à une fédération
spécialisée.
Un producteur dont l'exploitation agricole est située à
l'intérieur du territoire d'un syndicat groupant des producteurs devra
verser la cotisation prévue à l'article 31 à ce syndicat,
qu'il en soit membre ou non.
Un producteur spécialisé dont l'exploitation agricole est
située à l'intérieur du territoire d'un syndicat
spécialisé groupant les producteurs spécialisés de
sa spécialité devra verser la cotisation prévue à
l'article 31 à ce syndicat spécialisé, qu'il en soit
membre ou non.
Article 33. Une association accréditée doit, par
règlements approuvés par ses fédérations et
syndicats affiliés, déterminer la quote-part de chaque cotisation
des producteurs de ce syndicat qui lui sera remise ainsi que la quote-part de
chaque cotisation qui sera remise à ses fédérations pour
les services rendus par cette association et ses fédérations.
Une fédération spécialisée doit, par
règlements approuvés par ses syndicats spécialisés
affiliés, déterminer la quote-part de chaque cotisation des
producteurs spécialisés de ces syndicats
spécialisés qui lui sera remise pour les services rendus à
ces syndicats spécialisés par cette fédération
spécialisée.
Article 35. Nous rayons "ou des contributions", cela va de soi.
Les articles 36, 37 et 38 sont nécessairement supprimés.
L'article 39 devient 36 par le fait même. Afin de comprendre la suite de
ce rapport et le comparer au projet de loi 64, vous devriez donc changer les
articles puisqu'ils n'arrivent plus maintenant face à face.
Les articles 40 et 41, qui deviennent 37 et 38, sont en concordance.
L'article 41 devient l'article 38.
Article 39. Nous ajoutons un paragraphe complet qui se lit comme suit,
à la fin de l'article: ''Au plus tard le 1er mars de chaque
année, cette association accréditée ou
fédération spécialisée accréditée
devra remettre aux fédérations non affiliées ou aux
syndicats non affiliés s'ils ne sont pas membres d'une
fédération, ou aux syndicats spécialisés non
affiliés, les cotisations que cette association accréditée
ou fédération spécialisée accréditée
aura pu percevoir des producteurs ou producteurs spécialisés de
ces fédérations, syndicats ou syndicats
spécialisés, moins une charge raisonnable pour les frais de
perception et comptabilité qui pourra être
déterminée d'un commun accord ou fixée par la Régie
à la demande de l'une ou l'autre des parties en cause."
Messieurs, je crois que ceci résume en gros les modifications que
nous avons indiquées dans cette annexe à notre mémoire.
Soyez certains, MM. les membres de la commission parlementaire, que nous sommes
disposés à répondre à vos questions. Merci.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie. Est-ce qu'il y a des questions?
M. VINCENT: M. le Président...
M. LE PRESIDENT: Le député de Nicolet.
M. VINCENT: ... au tout début, j'aimerais remercier MM. Jasmin et
Daignault de nous avoir présenté un mémoire très
complet, même une nouvelle législation. C'est un travail de
titan.
Je voudrais maintenant poser quelques questions afin d'ouvrir la
discussion et y revenir plus tard.
M. Jasmin, à la page 9 du mémoire, nous remarquons que
vous êtes d'accord avec déjà la Corporation des agronomes,
qui a exprimé le désir de voir mieux redéfinir le terme
"agriculteur" ou "producteur". Nous constaterons que les autres mémoires
qui suivront ont exactement les mêmes observations à faire
là-dessus.
Vous dites: "Pour que les personnes aptes à voter soient celles
qui vivent au moins partiellement de l'agriculture et qui ne considèrent
pas leur revenu de ferme comme un simple revenu d'appoint négligeable."
Et là, vous apportez dans votre projet de législation la
définition qu'on a élaborée au ministère des
Affaires municipales en ce qui concerne l'évaluation foncière.
C'est donc dire qu'en ce qui concerne les producteurs maraîchers, le
Marché "central
métropolitain, vous seriez parfaitement d'accord sur cette
définition qu'on lit dans le bill présentement à
l'étude.
M. JASMIN: Oui, M. le membre de la commission parlementaire, et je
dirais plus, je dirais que non seulement les maraîchers de la
région de Montréal et les membres de la Corporation du
marché central métropolitain mais également l'Association
des pomiculteurs du Québec sont d'accord. Je vous lis une lettre que je
peux déposer, M. le Président, dans vos dossiers, qui se lit
ainsi: "L'Association des pomiculteurs de la province de Québec vous
félicite de votre initiative et appuie le mémoire que vous devez
présenter à l'Assemblée nationale du Québec. Ce
mémoire, quoique présenté par l'Association des jardiniers
maraîchers de la région de Montréal, fait ressortir avec
précision les points auxquels les pomiculteurs aimeraient eux aussi
obtenir des amendements. C'est pourquoi nous appuyons fortement votre
délégation et demandons à l'Assemblée nationale du
Québec de bien vouloir considérer les amendements
proposés. Le secrétaire de l'Association."
M. VINCENT: Merci, M. Jasmin, cela va faire plaisir au
député de Rouville, qui a un lien très étroit avec
les pomiculteurs. Combien de pomiculteurs font partie de l'association?
M. JASMIN: Je n'ai aucune idée, je ne suis pas secrétaire
de l'Association des pomiculteurs, je regrette.
M. VINCENT: Combien de pomiculteurs font partie de l'association?
M. OSTIGUY: Environ 3,200.
M. VINCENT: Environ 3,200. Est-ce qu'on peut dire, M. Jasmin ou le
député de Rouville, que les 3,200 producteurs ou pomiculteurs qui
font partie de l'association sont des personnes dont le revenu compte pour au
moins 25 p. c. de leur revenu global?
M. JASMIN: Là encore, vous me posez une question à
laquelle il m'est impossible de répondre. Je pense que ce serait aux
gens de cette association d'y répondre.
M. VINCENT: Vous avez parlé également... Vous êtes
représentant des producteurs mararchers, combien de membres compte
l'Association des producteurs maraîchers?
M. DAIGNAULT: Environ 500 membres.
M. VINCENT: Est-ce que M. Daignault, les 500 membres de l'Association
des producteurs maraîchers retirent un minimum de 25 p.c. de leur revenu
global?
M. DAIGNAULT: Je pourrais vous dire oui, M. Vincent.
M. VINCENT: Même si nous prenons une autre définition qui
nous viendra tout à l'heure ou la définition qui sera
ajoutée par la Corporation des agronomes ou la définition du
crédit agricole, pouvons-nous dire que la culture
maraîchère est la principale occupation de ces 500 membres et
qu'ils en retirent la majeure partie de leurs revenus, c'est-à-dire 50
p.c. et plus?
M. DAIGNAULT: Même plus.
M. VINCENT: Qui avait signé la lettre de l'Association des
pomiculteurs?
M. JASMIN: Elle a été signée par son
secrétaire, M. Pierre Fillion.
M. le Président, voulez-vous la déposer au dossier?
M. VINCENT: Je continue, M. Jasmin. A la page 10, vous mentionnez: "Les
jardiniers maraîchers réclament l'accréditation pour tout
syndicat spécialisé ou fédération
spécialisée qui sont conformes aux exigences de la régie
pour obtenir une telle accréditation." Vous faites un exposé en
mentionnant que chaque groupe a des intérêts particuliers à
défendre à une table de négociations ou de discussions au
niveau gouvernemental, tant fédéral que provincial. Nous sommes
parfaitement d'accord que chaque groupe spécialisé a des
problèmes particuliers, mais je voudrais vous poser cette question:
Quand on considère l'interdépendance entre les groupes de
production, que ce soit les pomiculteurs, que ce soit les producteurs
maraîchers, que ce soit les producteurs de lait, que ce soit les
producteurs de poulets de gril ou les producteurs d'oeufs Dieu sait
qu'il y en a des problèmes avec les oeufs et les poulets de gril
ne croyez-vous pas qu'à un certain moment il faut que toute
l'économie agricole, sans distinction, en arrive à une voix
unique pour faire des représentations, parce que, chaque fois qu'il y a
une législation ou une mesure d'imposée, il faut tenir compte de
tous les secteurs et non pas d'un secteur en particulier?
Donc, ne croyez-vous pas que, dans le monde agricole, actuellement,
même en acceptant qu'on doive aller rencontrer les producteurs
spécialisés dans une ligne donnée pour avoir leur opinion,
il faut qu'à un certain moment tout le milieu agricole, de quelque
région qu'il soit ou de quelque spécialité qu'il soit, ait
une voix unique pour faire valoir des représentations qui touchent
l'ensemble de l'économie agricole, quand on discute je vous cite
un exemple avec les autres provinces des échanges
interprovinciaux ou avec les autres pays des importations et des
exportations?
M. JASMIN: Vous savez, M. le député, que l'agriculture est
un vaste, vaste vaste monde et que les intérêts des producteurs de
champignons et les intérêts des producteurs de boeuf de boucherie
sont loin l'un de l'autre. Cependant, à un moment donné, certains
conflits se
sont présentés. Justement, quelqu'un me disait hier que le
ministère de l'Environnement, en Ontario, venait de sommer une fabrique
de champignons, qui avait des investissements de l'ordre de $3 millions aux
environs d'une ville, de déménager parce que le terreau qui sert
aux champignons, et qui est encore du fumier de cheval dans bien des cas,
pollue l'environnement. Cela, ce sont des conflits d'intérêts
entre deux ministères: le ministère de l'Environnement et le
ministère de l'Agriculture.
Mais, même à l'intérieur du ministère de
l'Agriculture, vous avez des endroits où une tierce personne doit
nécessairement tracer les grandes lignes. Sans ça, à quoi
ça sert d'avoir des dirigeants qui vont planifier notre agriculture pour
des années à venir? Il faut penser que le producteur qui est dans
le champ vous ne pourrez faire autrement pense surtout à
vivre aujourd'hui et à essayer de vivre demain. On ne peut pas lui
demander de planifier pour 50 ans; il faut, d'abord, qu'il vive
aujourd'hui.
Cela ne sert à rien de mourir aujourd'hui pour vivre dans 50 ans.
Mais un gouvernement peut le faire parce qu'il a les outils en main pour
permettre des planifications à long terme, pour permettre de dire
à des gens: Très bien, vous avez un conflit
d'intérêts actuellement entre les producteurs de jus de pomme et
les producteurs de lait, nous allons essayer de prendre des mesures pour soit
exporter du jus de pomme ou exporter du lait pour que les deux vivent.
L'industrie de la bière l'a répété maintes
et maintes fois avant que le bill sur le cidre soit fait, c'est que toute
boisson, y compris l'eau et le lait, entre en concurrence directe avec la
bière et il ne faut blâmer personne; c'est un fait, c'est vrai. La
même chose dans le cidre. Toute boisson, y compris le lait, va être
une concurrence directe pour le cidre.
Qui va trancher? Vous allez demander à ces gens de s'asseoir
chacun de son côté de la table pour savoir qui va arrêter de
faire du cidre et qui va arrêter de faire du lait? Vous ne pouvez pas
leur demander ça. Il faut qu'une tierce personne tranche ces questions.
A l'intérieur de l'horticulture, dans une association qui
représente l'horticulture, les gens ont encore certains conflits
d'intérêts, mais au moins ils peuvent accorder, jusqu'à un
certain point, leurs violons, en-dedans de l'horticulture. Mais ne leur
demandez pas de s'asseoir avec des gens qui ont des intérêts tout
à fait différents.
M. OSTIGUY: Vous conviendrez avec moi qu'entre le cidre et le lait il y
a une différence. Le lait n'est pas alcoolisé.
M. DEMERS: La teneur.
M. OSTIGUY: La teneur en alcool n'est pas la même.
M. DEMERS: Cela dépend des vaches!
M. VINCENT: Ce que M. Jasmin veut dire, c'est que le volume se
ressemble.
D'après votre association des jardiniers maraîchers,
même celle des pomiculteurs, ne croyez-vous pas que, si le bill 64
était accepté comme tel avec une seule association
représentant la profession agricole qui serait accréditée,
cette seule association ne pourrait représenter les
intérêts des syndicats spécialisés, à cause
des conflits qui existent entre ces syndicats spécialisés?
Avez-vous pensé je veux simplement le souligner
que, si une association professionnelle, une seule, était
accréditée, représentant la profession agricole dans son
ensemble, si, à un moment donné, les intérêts des
pomiculteurs n'étaient pas élaborés de la façon que
ceux-ci le désirent, il y aurait danger qu'ils se retirent de cette
seule association, que par la suite les jardiniers maraîchers se retirent
de cette seule association?
Vous allez me dire que la cotisation y demeurerait, mais ils pourraient
faire un grabuge en se retirant officiellement de l'association et il
arriverait un conflit entre le ministère de l'Agriculture et la seule
association accréditée. Cela pourrait même obliger le
ministère de l'Agriculture et l'intérêt agricole ou les
autres associations à redemander un autre référendum pour
désaccréditer l'association unique.
Là je pose la question directement: Est-ce que comme parce
que nous voulons être éclairés la législation
prévoit qu'une seule association peut être
accréditée, mais qu'elle prévoit également que
cette association peut être désavouée par un autre
référendum, ça n'obligera pas la seule association
accréditée de voir à représenter d'une façon
équitable et complète les intérêts de chacune des
fédérations spécialisées?
Est-ce que ça ne serait pas suffisant?
M. JASMIN : Vous me posez la question?
M. VINCENT: Oui, je la pose, parce que nous voulons être
éclairés.
M. JASMIN : Pourquoi prendre le problème à rebours et
dire: Nous vous mettons dans une camisole de force, vous êtes, par action
coerciti-ve, obligés de vous asseoir. Tant que vous ne vous chicanerez
pas, nous savons que ça va arriver.
Dans six mois vous allez vous retirer, vous allez aller brailler et
là, on vous donnera ce que vous voulez. Pourquoi ne pas prendre la chose
avec bon sens et dire: Messieurs, formez vos syndicats
spécialisés et nous espérons que vous allez vous affilier
graduellement dans une seule association qui, elle, sera la voix de l'ensemble
des cultivateurs pour la province de Québec?
Probablement qu'il est possible de penser comme vous pensez
à rebours dans l'autre sens que si vous permettez aux syndicats
d'être accrédités, ces syndicats se regrouperont en
fédération accréditée et que finalement,
après avoir croisé' le fer comme cela au-dessus de la table et
peut-être au-dessus de la clôture pendant un ou deux ans, les gars
diront: Le seul moyen de marcher, c'est de tous nous mettre ensemble, de le
faire tous de bonne foi, pas forcés par la loi, mais "willingly", parce
que tout le monde aura mis de l'eau dans son vin à ce moment-là,
et de former une association.
Vous l'aurez peut-être éventuellement, cela. Je ne vous le
garantis pas, mais on peut le voir comme cela aussi plutôt que forcer les
gens à être tous dans un paquet et leur dire: Battez-vous et quand
ça pétera, on ramassera les morceaux et on vous formera une autre
association à côté.
M. VINCENT: Donc, vous êtes, en définitive, pour cet
objectif qu'un jour on en vienne à avoir une seule association...
M. JASMIN: Si c'est le désir de l'ensemble.
M. VINCENT: Si c'est le désir de l'ensemble qu'on ait une seule
association qui représente la profession agricole, des agriculteurs qui
parlent au nom de cette association. C'est l'objectif. Maintenant, on constate
que depuis nombre d'années, depuis 30, 40 et même 50 ans, on vise
cet objectif. Chaque fois qu'il y a une législation importante, il y a
d'un côté l'UCC, il y a d'un autre côté la
Coopérative fédérée et d'un autre côté
les producteurs maraîchers.
L'exemple le plus frappant que l'on a, c'est entre les producteurs
d'oeufs et les producteurs de poulets à griller. Les producteurs d'oeufs
font des représentations en disant: Bloquez ce qui vient de l'Ontario,
cela ne nous intéresse pas, il faut produire ici au Québec. Au
même moment, les producteurs de volaille disent: Oui, mais si vous faites
cela, nous allons être pénalisés. Ce sont des
intérêts différents. Les producteurs d'oeufs ne veulent pas
entendre parler de cela; ils parlent de leur patelin d'abord. Quand on arrive
pour faire la jonction entre les deux, il est difficile d'avoir une seule voix
concordante qui représente l'intérêt ou l'économie
agricole du Québec.
Sommes-nous rendus au moment je pose la question où
il faille imposer par une législation qui sera sanctionnée, par
la suite, par l'ensemble des producteurs... Il ne faut pas oublier que la
législation à laquelle nous travaillons ne pourra être
utilisée qu'au moment où l'ensemble des producteurs l'aura
acceptée. Donc, nous n'en sommes pas rendus au moment où il
faille imposer, par une législation, l'obligation d'avoir une seule
association pour représenter les intérêts agricoles et que
les gens s'entendent entre eux avant de venir faire des représentations
qui, quelquefois, s'opposent les unes aux autres.
On a vu très souvent, dans le passé, 2,500 noms sur une
requête demandant telle chose et, la même semaine, 2,200 noms sur
une autre requête s'opposant à cette solution alors qu'il n'y
avait que 2,700 producteurs dans le même secteur. Donc, 2,500 avaient
signé oui, 2,200 avaient signé non et c'étaient les
mêmes producteurs sur un total de 2,700 ou 2,800. C'est le
problème qui se pose à l'heure actuelle.
M. JASMIN: Vous amenez le problème des oeufs et des poulets. Vous
parlez de gens qui ont des intérêts communs. Ils ne sont pas les
seuls qui ont des intérêts également très communs ou
affiliés de très près. Vous avez les emboucheurs et les
producteurs de grain. Tous ces gens ont des intérêts très
communs, mais loin des intérêts des producteurs de citrouilles,
des producteurs d'oignons et des producteurs de carottes. Nous ne parlons pas
le même langage même si nous parlons d'agriculture.
Nous cultivons sur des étendues restreintes, avec des rendements
d'argent à l'acre de dix à quarante fois supérieurs
à ceux des producteurs de grain ou de foin. Nous parlons de mise en
marché d'un produit qui est terriblement périssable. Il ne faut
pas se cacher que les fruits et les légumes sont bien plus fragiles
qu'un oeuf. Même si les gens disent qu'il n'y a rien de plus fragile
qu'un oeuf, je sais que je peux laisser tomber un oeuf d'une certaine hauteur,
d'un pouce ou un pouce et quart, et il ne craquera pas; mais si je laisse
tomber une pomme ou une tomate d'une hauteur d'un pouce et quart, je la
meurtris, cette tomate, elle est finie, elle est bonne pour le déchet.
Cela finit là. Nous ne parlons pas des mêmes choses.
Nous sommes tous des agriculteurs, mais nous ne sommes pas plus parents
que les gens qui font de l'acier et les gens qui se servent de l'acier pour
monter dans la lune, avec les expériences de la NASA. Dans les deux cas,
c'est de l'acier. Il y en a un qui le sort de la terre et l'autre qui l'envoie
à la lune.
M. VINCENT: M. le Président, avant de toucher à l'autre
point, je veux simplement faire une remarque sur ce point particulier, en
spécifiant ceci, et c'est là que nous nous posons la question:
Est-ce que c'est bon d'avoir une seule association accréditée?
Nous avons des oppositions. Il y en a d'autres qui sont favorables. C'est
normal qu'il y ait des pour et des contre. Nous voulons être
éclairés afin d'avoir le meilleur projet de loi possible. Parce
que le projet de loi qui sera présenté devra être
voté par l'immense majorité des agriculteurs du Québec.
Inutile de présenter un projet de loi si, avant de l'envoyer dans le
public, on est certain qu'il sera battu par l'immense majorité des
producteurs.
Mais il y a une chose, par exemple, qui, à mon sens, dans le
projet de loi, va devenir ce qu'on appelle l'épée de
Damoclès au-dessus de la direction de cette seule association unique.
Si, par exemple, l'association unique qui serait accréditée,
à un moment donné, ne satisfaisait pas ou ne jouait pas le
rôle que lui avaient fixé
tous les coopérateurs ou la majorité des
coopé-rateurs de la province, cela voudrait dire qu'il y aurait 40,000
coopérateurs qui pourraient, eux, voter contre l'accréditation de
cette association unique. Ou si l'association unique ne répond pas aux
désirs des 35,000 producteurs de lait industriel du Québec, il
pourrait y avoir une majorité des 35,000 producteurs de lait industriel
du Québec qui voteraient contre l'accréditation de cette
association unique. A mon sens, avec ce pouvoir de désaccréditer
ou de désavouer une association par référendum, il va
falloir que l'association qui sera éventuellement
accréditée s'occupe de représenter les
intérêts de chaque secteur, non pas seulement de bouche, non pas
seulement avec des mémoires, mais également dans les faits, car,
autrement, ils devront faire face à leurs membres, à l'ensemble
des membres du Québec et, peut-être, perdre leur
accréditation.
Je tenais simplement à souligner cela, qu'il y a là une
prévision ou une stipulation dans la loi qui peut devenir un
témoin très important dans l'action future de cette association
unique, si le projet de loi était accepté comme tel.
Je pense que là-dessus, si on y pense sérieusement, on va
constater que cela va devenir pour l'association unique, si elle est
accréditée, un point très délicat dont ils devront
se souvenir tous les jours, toutes les semaines et tous les mois, car cela peut
prendre un rien de temps à se faire désaccréditer,
à cause du voeu de l'ensemble des producteurs du Québec.
Si vous avez d'autres commentaires à ajouter là-dessus,
moi, j'y reviendrai plus tard. J'aurais maintenant, à la page 12...
M. TOUPIN: M. le Président, si le député de Nicolet
me le permet, je voudrais simplement poser une question sur cet aspect de la
question des syndicats spécialisés et des
spécialités en agriculture. Je voudrais demander au
représentant de l'Association du marché central, s'il fait une
distinction, dans son esprit, entre ce que nous appelons communément la
mise en marché d'un produit et ce que nous sommes convenus d'appeler,
depuis un bon bout de temps, la représentation générale de
la classe agricole. Est-ce qu'ils ont réfléchi, par exemple,
autour du fait qu'il existait ou qu'il existe déjà au
Québec une loi, qu'on appelle la Loi de mise en marché, et qui,
elle, prévoit précisément l'organisation de la mise en
marché par spécialité? Avez-vous fait d'abord cette
distinction du début? Deuxièmement, vous êtes-vous
penchés sur la possibilité d'atteindre les fins, au fond, qu'ils
cherchent par l'intermédiaire de l'autre loi?
M. JASMIN: Oui, assurément, M. le ministre. Non seulement cela,
mais on le souligne dans nos remarques et on demande, justement, à la
loi de ne pas confondre l'association avec son but et les organismes de mise en
marché.
On le demande parce que la loi semble les rapprocher tellement que c'est
une influence financière de l'un à l'autre. Nous voudrions, au
contraire, qu'ils soient bien séparés. Nous réalisons
comme vous que ce sont deux choses tout à fait séparées et
nous connaissons les lois qu'il y a déjà sur la mise en
marché, oui. Mais, sur la représentation au point de vue de nos
intérêts politiques, nous voulons également qu'il y ait
là une différence.
M. TOUPIN: Je veux en venir surtout à ceci: Est-ce que vous
êtes d'accord pour conclure et au fond, dans l'ensemble de votre
mémoire, c'est un peu ce qui se dégage que la mise en
marché d'un produit, dans le cadre des lois qui existent, peut se faire
non pas tellement par ce projet de loi, mais probablement par
l'intermédiaire d'autres lois qui existent déjà? Est-ce
que vous êtes d'accord sur une telle conclusion?
M. JASMIN: D'autres lois! Si je comprends l'esprit de ce que vous dites,
nous sommes contre les offices de mise en marché. Les maraîchers
n'ont jamais cru que cet outil de mise en marché était efficace
pour eux.
M. VINCENT: Tels qu'ils sont structurés présentement; pas
dans l'ensemble?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans le même ordre d'idées.
M. JASMIN: Pour les maraîchers. M. VINCENT: Oui.
M. JASMIN: Ils ne peuvent pas se prononcer sur d'autres choses qui ne
sont pas de leur domaine, mais, pour le marafchage, dans le passé, nous
avons expérimenté les plans conjoints. L'association s'est
prononcée à maintes et maintes reprises au niveau provincial et
au niveau fédéral en disant que cet outil de mise en
marché n'est pas l'outil que nous voulons.
M. VINCENT: M. le Président, à la page 12...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Sur l'affiliation, dans le même ordre
d'idées, est-ce que vous me permettez?
M. VINCENT: D'accord.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Jasmin, dans votre mémoire, si je
comprends bien, il y a beaucoup d'amendements qui changeraient le
mécanisme de la loi, mais, en somme, ce que vous voulez, ce n'est pas
l'union des producteurs agricoles du Québec et une seule
accréditation. Vous voudriez, par exemple, que les producteurs de
légumes ou les producteurs de jus de pomme aient un syndicat qui ne soit
pas nécessairement affilié. Ce sont des exemples
que vous donniez. Maintenant, advenant le cas où vous
désireriez-vous affilier, quel serait le processus? Car, à ce
moment-là, vous changez tout le mécanisme actuel de la loi dans
le processus d'affiliation. Il pourrait y avoir plusieurs petits syndicats:
producteurs de légumes, producteurs de jus de pomme, de champignons,
n'importe et, comme vous le disiez tantôt, rien n'empêcherait qu'on
s'affilie à l'UPAQ, l'Union des producteurs agricoles du Québec.
Alors, ça procéderait comment, ce mécanisme? Parce que le
mécanisme actuel disparaîtrait.
M. JASMIN: Il n'y a rien qui empêche une affiliation de trois
syndicats dans une fédération. C'est un mécanisme
normal.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce serait par référendum ou
par je ne sais pas une assemblée générale
des membres? Est-ce que vous exigeriez que 50 p.c. des membres votent pour
l'affiliation ou 60 p.c? Je ne sais pas, moi. Ce n'est pas prévu dans
les amendements que vous soumettez.
M. JASMIN: Non, on n'a pas prévu ça. D'ailleurs, dans le
bill 64, non plus, il n'est question de ces choses-là, de la
façon dont ça va se séparer ou s'affilier. Il y a
déjà des syndicats spécialisés qui existent, puis
il y a des fédérations. Comment ça va s'intégrer
dans l'association, ce n'est pas prévu dans la loi. J'imagine que
ça va être prévu dans ce qui vient après la loi,
dans les règlements.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Si vous allez, par e x e m p 1 e, à
l'article 19, paragraphe c), on dit que l'effet de l'accréditation,
c'est de "concilier et coordonner les activités des différentes
fédérations, fédérations
spécialisées, syndicats, et syndicats spécialisés
affiliés ainsi que celles de leurs membres et les intérêts
particuliers des producteurs avec le bien commun des producteurs en
général." C'est le but d'une seule accréditation. Vous ne
pensez pas que des petits îlots comme ça de syndicats qui ne
seraient pas affiliés à une seule fédération, cela
deviendrait peut-être un nid de mésentente, de chicane entre les
différents groupes et que ça enlèverait
l'efficacité du syndicat?
M. JASMIN: Disons que dans l'article 23, comme la loi est faite, on dit:
"Les règlements d'une association qui demande l'accréditation
doivent prescrire les conditions que doivent remplir les
fédérations et les fédérations
spécialisées pour s'affilier à une telle association."
J'imagine que ce même mécanisme pourrait s'appliquer dans les
règlements des syndicats et des fédérations pour savoir
comment ils s'affilieraient avec l'association ou avec une association.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Jasmin, je suis d'accord quand vous dites
que vos problèmes ne sont pas les mêmes que ceux du producteur de
sirop d'érable ou de pommes de terre, c'est un fait. Mais il reste que
la force d'un syndicat, c'est quand tous les groupes sont ensemble. Vous allez
dans le secteur industriel, par exemple. Ce n'est pas pareil, mais je
procède par comparaison. Je prends l'Hydro-Québec que je connais
bien, où il y a un syndicat qui représente des monteurs de
lignes, des électriciens, des opérateurs, des menuisiers, des
journaliers, des laveurs de planchers, n'importe. On ne forme pas de petits
syndicats dans toutes ces spécialités. Il n'y a qu'un seul
syndicat qui les représente toutes; chaque groupe est
représenté dans la convention collective et les tâches sont
définies. C'est entendu que si vous êtes dans l'UPAC, l'Union des
producteurs agricoles du Québec, quand vous allez discuter de vos
problèmes, ils ne sont pas les mêmes que ceux du producteur de
sirop d'érable, etc. Je reste convaincu je respecte votre opinion
si vous pensez que c'est mieux comme cela qu'une seule
accréditation, c'est ce qui va vous donner un pouvoir de revendication,
de négociation, quitte à établir des mécanismes
dans la loi par des règlements pour s'occuper de chaque groupe
concerné, producteurs de légumes et autres. Mais que vous ayez
une seule accréditation, pour moi, c'est la condition sine qua non pour
que le syndicat soit efficace. Cela ne m'a pas convaincu que les petits
syndicats séparés pourraient vous apporter quelque chose.
M. JASMIN: M. le Président, pour illustrer peut-être une
objection à la mention qui a été faite, il y a des lois
qui ont été votées antérieurement et qui avaient
trait au syndicalisme en agriculture, où on permettait à trois
employés de ferme de se syndiquer et d'avoir une accréditation
pour avoir un syndicat sur la ferme. Les seuls qui ont été assez
chanceux pour en avoir, ce sont les maraîchers, parce que ce sont les
maraîchers qui emploient vingt et quarante gars. Ce n'est pas le gars qui
a des vaches qui en emploie vingt. Il n'a pas les moyens d'en employer vingt.
Il n'a pas l'industrie voulue pour en employer vingt. On a déjà
été échaudé avec le syndicalisme en agriculture,
dans la main-d'oeuvre agricole. Là vous voulez syndiquer et vous
prenez votre exemple directement dans l'industrie, dans le syndicalisme ouvrier
des gens qui sont de gros opérateurs, des gars qui emploient et
qui ont déjà des syndicats chez eux, qui se battent à la
table des négociations avec leur syndicat, vous voulez syndiquer ces
gars-là pour qu'ils fassent partie d'un autre syndicat. Voyons donc!
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. VINCENT: M. le Président sur le même point...
M. JASMIN: C'est la loi du syndicalisme agricole et vous prenez vos
exemples dans le syndicalisme ouvrier. Appelez-la comme vous voudrez, cette
loi. Je suis pour que des gens se regroupent pour essayer de clarifier leurs
problèmes, laver leur linge sale en famille. J'en suis. Seulement, quand
une femme fait son lavage, elle met son blanc ensemble et ses couleurs ensemble
et je veux qu'on fasse la même chose.
M. LAURIN: Sur le même point, M. le Président, continuant
l'argumentation du député de Sainte-Marie, j'ai retenu de votre
témoignage que, selon vous, plus de facteurs vous séparaient des
autres professions agricoles qu'ils vous rassemblaient. Les facteurs de
division étaient plus importants et plus nombreux que les facteurs
d'unité ou de rassemblement. Ceci est peut-être vrai quand on
regarde les techniques de production, les modalités de production, mais
est-ce vrai quand on inclut, quand on insère votre profession ou
d'autres, que ce soit la pomiculture ou l'horticulture, dans le grand circuit
économique? Car là nous voyons surgir des facteurs communs
à toutes les professions agricoles, par exemple, l'achat des produits
qui sont nécessaires pour la production agricole.
Qu'il s'agisse d'engrais, qu'il s'agisse de produits absolument
nécessaires pour la production, là, nous voyons que, pour toutes
les professions agricoles, il y a un facteur d'unité qui se
dégage, que ce soit au point de vue de la qualité du produit, que
ce soit au point de vue de la mise en marché du produit, des
méthodes d'achat, de ceux qui vous les vendent, des trusts, des cartels,
des monopoles qui peuvent vous les vendre et qui sont organisés. Nous
retrouvons peut-être le même facteur d'unité
également en aval lorsque votre produit est terminé, lorsqu'il
est rendu à maturité et que le moment arrive de l'écouler
sur les marchés. Là aussi, vous vous trouvez à peu
près dans la même situation que les pomiculteurs ou que ceux qui
vendent le lait ou que ceux qui vendent d'autres produits. Vous vous trouvez,
encore une fois, en face d'organismes qui sont bien structurés, que ce
soit les magasins à succursales, que ce soit l'Association des marchands
détaillants, ou que ce soit même, si on étend le terrain,
les marchés américains, les marchés internationaux.
Est-ce que ces facteurs communs, aussi bien en amont qu'en aval, ne
constituent pas des facteurs importants dans l'économie de marché
concurrentielle où nous sommes et qui est un climat
d'interdépendance, non seulement à l'intérieur du
Québec, mais à l'intérieur du Canada, à
l'intérieur du continent américain et même dans le monde?
Est-ce que ces facteurs communs ne sont pas plus importants pour le
mieux-être à long terme de votre profession que les facteurs de
division que vous avez mentionnés et qui, eux, sont plutôt
axés sur la technique de production? C'est une question que je vous
pose.
M. JASMIN: Vous avez un point très valable auquel nous avons
pensé depuis longtemps. Nos maraîchers sont assez importants parce
qu'ils sont regroupés au niveau de la famille pour commander des intrans
assez imposants pour avoir un "bargaining power" avec ceux qui vendent.
Autrement dit, je suis certain nous avons ici des maraîchers dans
la salle qu'ils vont acheter pour $25,000 d'engrais chimiques pour leurs
fermes. Ils ont un outil de "bargaining". Quand ils arrivent chez deux
concurrents qui essaient de vendre ils disent: A qui est-ce que je donne la
commande? Ma commande, sur ma ferme, j'en prends pour $25,000. Le gars qui fait
du lait au Lac-Saint-Jean, s'il en achète pour $50 ou $100, il a une
grosse commande. Lui, il est obligé de se regrouper. Où nous
avons été des petits maraîchers... Je prends
peut-être des exemples extrêmes dans les deux cas, je prends le
meilleur d'un côté et le plus mauvais de l'autre, mais je sais que
vous êtes assez intelligents pour comprendre. Je défends mon point
de vue.
M. TREMBLAY ( Sainte-Marie ): Cinquante dollars, c'est pour un
parterre.
M. JASMIN: Pardon? C'est cela. Vous me faites perdre mes idées,
vous autres en arrière. C'est ce que vous voulez, d'ailleurs! Où
ils n'ont pas été capables de l'avoir par un regroupement
familial ou de quelques personnes, ils se sont regroupés par des outils
qui existaient déjà, par leurs coopératives. Aussi bien en
amont qu'en aval, aussi bien pour les extrans. Ils ont ouvert des
marchés. Ils se sont regroupés avec des empa-queteurs, ils ont
grossi leurs opérations pour pouvoir vendre. Lorsqu'ils ne pouvaient pas
le faire, ils ont englouti des coopératives, réussi à
vaincre cette affaire-là et à mettre en marché leurs
oignons ou leurs fraises par des mécanismes qui existent. Ils sont
actuellement satisfaits de leur sort. Ils savent qu'il y a encore d'autres pas
à faire vers l'avenir et ils étudient actuellement d'autres
solutions à leurs problèmes. Mais s'asseoir à la table
comme vous avez mentionné est-ce que les gars qui
produisent du lait font la même chose? Ils ne font pas la même
chose puisqu'eux, ils ont un plan conjoint pour le lait. Tout ce qu'ils ont
à faire, ce sont des représentations suffisantes pour faire
monter le prix et c'est le consommateur à l'autre bout qui en souffre.
C'est une autre méthode qui, dans le cas du lait, s'avère bonne,
tant mieux, mais dans notre cas, chez nous, on ne peut pas concevoir cela. On a
d'autres méthodes qui sont bonnes et on veut les garder.
M. LAURIN: J'aurais une autre question...
Un peu dans le même secteur, M. le Président, je voudrais
demander au représentant de l'Association des jardiniers
maraîchers ce qu'il pense de la possibilité que la loi
prévoie une accréditation par spécialité, tout en
incluant dans la loi un genre d'association ou de palier
provincial où tous les accrédités par
spécialité se retrouveraient pour discuter de leurs
problèmes et essayer de coordonner leur action, plutôt qu'une
accréditation strictement provinciale. On garderait
l'accréditation par spécialité, mais on prévoirait
un mécanisme provincial où toutes ces associations se
rencontreraient pour discuter et mettre en commun leurs problèmes.
M. JASMIN: C'est ce que nous demandons, en somme. Peut-être que
nous prenons d'autres mots trop complexes, mais c'est ce que nous demandons,
l'accréditation par spécialité. Il reste à
définir l'ampleur de ces spécialités. On est prêt
à prendre l'ensemble du maraîchage comme une
spécialité et probablement que, dans d'autre cas, on pourrait
prendre l'ensemble de grands secteurs agricoles comme étant des
spécialités. Il faut que les économistes et les
spécialistes en agriculture se penchent là-dessus pour savoir
exactement comment ces spécialités pourraient se regrouper. Je
pense que c'est là qu'est la clé du succès.
M. VEILLEUX: Vows demandez l'accréditation par
spécialité, mais, si on ne prévoit pas un mécanisme
unique à l'échelle de là province, où toutes ces
spécialités se rencontreraient, vous pouvez, à un certain
moment, vous retrouver dans des positions complètement contradictoires
d'une spécialité à l'autre. Si on permettait un
mécanisme de rencontre, il y a peut-être des accrochages qui
n'auraient pas lieu et cela pourrait se régler à ce niveau entre
les spécialistes du domaine agricole.
M. JASMIN: Certainement, monsieur.
M. VEILLEUX: C'est une impression personnelle. Si on donne une
accréditation unique, qu'arrivera-t-il là-dedans? Le danger que
j'y vois, c'est que le spécialiste membre d'un petit groupe va
être englouti par une spécialité beaucoup plus nombreuse et
qu'il n'aura jamais droit de parole, droit de cité à
l'intérieur de l'association. J'ai vécu assez de syndicalisme
pour me rendre compte qu'il y a un danger dans ce domaine, et je tiens à
le signaler au ministre de l'Agriculture.
M. VINCENT: M. le Président, il faudrait un caucus du Parti
libéral avant la rédaction finale du projet de loi.
M. VEILLEUX: D'ailleurs, je le signale aussi à l'ancien ministre
de l'Agriculture qui, lui, veut une accréditation unique.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Juste une question, M. Jasmin. On demande
une accréditation pour les producteurs agricoles du Québec. Si on
donne cela par spécialité, est-ce que vous avez calculé
combien il y a de spécialités chez les producteurs agricoles?
Cela représenterait combien d'accréditations et ça
formerait combien de syndicats?
M. JASMIN: Je ne le sais pas. A priori, je ne l'ai pas calculé;
je dirais peut-être une douzaine.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Pas plus que ça?
M. JASMIN: Je ne le pense pas.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice a une
question.
M. DEMERS: J'aurais une question à vous poser, M. Jasmin. A la
page 8, article 14, vous ajoutez à l'article, en disant: "Pour que tout
référendum visé par la présente loi soit
considéré comme valable par la régie, au moins 60 p. c. en
nombre et en superficie en culture des producteurs spécialisés
concernés doivent se prévaloir de leur droit de vote."
Est-ce que vous pourriez nous définir un peu ce que vous entendez
par la superficie?
M. JASMIN: Par superficie en culture, nous entendons, selon
l'unité de surface que l'on veut établir, que ce soit en acres,
que ce soit en arpents carrés, que ce soit en pieds carrés, le
nombre de ces unités de surface en culture par un type qui vote.
Où voulons-nous en venir avec ça? Il y a de gros producteurs; on
regroupe une couple de cents acres de culture maraîchère chez un
gars ou chez une famille. Ces gens ont un droit de vote par individu, mais ils
représentent un impact énorme pour notre industrie,
comparés à un autre maraîcher qui cultive 30 acres et qui a
un vote, mais dont l'impact sur l'industrie est beaucoup moins fort.
Nous croyons que, dans un cas comme ceci, les deux facteurs devraient
entrer en ligne de compte: non seulement le nombre d'individus, mais
également que 60 p.c. des cultures représentées là
soient indiquées sur le vote. Autrement dit, qu'il n'y ait pas que 60
p.c. des personnes ou 60 p.c. des gens, mais 60 p.c. des surfaces en
culture.
M. DEMERS: Mais vous ne croyez pas que la surface agisse au
détriment de votre association? Disons, par exemple...
M. JASMIN: Non, ce sont les plus gros qui sont les plus progressistes
chez nous.
M. DEMERS: Je comprends. Chez vous, mais cela va être
rejeté par le groupe, par tous les cultivateurs de la province de
Québec. Disons qu'il y a un cultivateur qui développe son
agriculture d'une façon un peu marginale et qu'il a 300 acres de terre
quasi abandonnées. Cela va en prendre des maraîchers dans la
région de Montréal pour compenser.
M. JASMIN: C'est parce qu'au départ on rejette
complètement l'association.
M. DEMERS: Mais nous négocierons. Nous ne présentons pas
un projet de loi simplement
pour les maraîchers. Nous allons tomber dans tout le "melting
pot", si je peux m'exprimer ainsi et je crois que vous êtes à vous
trouver une arme...
M. JASMIN: Voyez-vous, si on relit bien ce paragraphe que nous avons
ajouté: "Nonobstant ce qui précède dans le cas d'une
fédération spécialisée ou d'un syndicat
spécialisé on ne dit pas dans le cas d'une
fédération ou d'un syndicat, on parle ici seulement pour le cas
des organismes spécialisés pour que tout
référendum visé par la présente loi soit
considéré comme valable, etc...." Alors, on ne les mêle pas
à la...
M. DEMERS: Vous établissez une distinction.
M. JASMIN: Oui.
M. OSTIGUY: M. le Président, le député me
permettrait-il de poser une question dans le même sens? M. Jasmin,
actuellement...
M. DEMERS: Je n'ai pas de permission à vous donner.
M. OSTIGUY: Je croyais que vous n'aviez pas terminé.
M. Jasmin, pouvez-vous nous dire ce que fait actuellement l'Association
des marafchers pour les producteurs et quelle est la position du Marché
central vis-à-vis des producteurs de culture
maraîchère?
M. JASMIN: Voulez-vous que le gérant général du
Marché central vous dise ce qu'il fait pour les producteurs? Les
producteurs sont en réalité, en grande partie, les
propriétaires du Marché central. C'est un de leurs outils. C'est
un outil de mise en marché qui n'est pas fini mais que l'on va
finir.
M. OSTIGUY: Quel pourcentage des producteurs fait partie du
Marché central? Et une autre question, M. Jasmin. Est-il facile d'avoir
un emplacement au Marché central actuellement? Est-ce que tous les
producteurs de culture maraîchère peuvent avoir un emplacement au
Marché central?
M. JASMIN: Si cela ne vous fait rien, M. Couture va répondre
à ees questions. Il est plus versé que moi dans la question du
Marché central.
Compagnie du marché central
métropolitain Ltée
M. COUTURE: Cela me fait plaisir de répondre. En fait,...
M. VINCENT: M. le Président, une question de privilège. Je
pense que je vois venir le député de Rouville. Il veut en venir
à la question du Marché central métropolitain. Je
profiterais de l'occasion pour demander au ministre que, dans une autre
circonstance, lorsque nous parlerons de mise en marché, lorsque nous
parlerons de l'organisation du Marché central métropolitain, il y
ait une autre commission de l'Agriculture qui siégera sur les
problèmes spécifiques du Marché central
métropolitain. Ici, nous pouvons parler pendant des heures et des heures
sur les relations entre le Marché central métropolitain et les
producteurs, l'avenir du Marché central métropolitain. Nous
allons nous éloigner très considérablement du projet en
discussion.
M. OSTIGUY: M. le Président, ma question était tout
simplement ceci: Vu que nous discutons actuellement avec l'Association des
producteurs marafchers, il faut quand même savoir où et comment se
fait la mise en marché de ces producteurs.
M. LAURIN: Sur la question de privilège, M. le Président,
je trouve moi aussi que la question du député de Rouville est
très pertinente. Il ne s'agit pas d'étudier en détail la
structure du Marché central métropolitain, mais simplement
d'avoir quelques réponses à quelques questions qui peuvent
éclairer la discussion en cours.
M. OSTIGUY: C'est tout ce que j'ai demandé.
M. VEILLEUX: Comme on le fait dans toutes les commissions. On l'a fait
à la commission des Transports hier durant trois heures, on peut bien le
faire dix minutes ici.
M. OSTIGUY: Je n'avais que deux questions très courtes.
M. COUTURE: Alors, à la question à savoir s'il est
difficile de réserver un espace au Marché central, je crois que
c'est une de vos questions.
M. DEMERS: Le rôle d'abord. M. OSTIGUY: Le rôle d'abord.
M. COUTURE: En fait, c'est un organisme qui permet le contact entre
producteurs et acheteurs des produits agricoles. Maintenant, ce rôle est
assez complexe, mais si nous nous limitons au domaine strictement horticole,
vous avez de ce temps-ci environ 400 présences régulières
quotidiennes au marché.
Ce sont des gens qui viennent avec leurs camions offrir leurs produits
aux acheteurs qui fréquentent le marché.
Parallèlement à ces transactions physiques qui sont faites
sur le marché même, vous avez également ce que nous
appelons chez nous le commerce invisible, c'est-à-dire qu'un jardinier
et il y en a même qui sont ici dans la salle qui
fréquente régulièrement le marché, vient simplement
avec sa voiture de promenade rencontrer les acheteurs de magasins à
succursales.
les hôteliers, etc., et fait une transaction pour livraison
directement de la ferme à l'entrepôt de cet acheteur.
Cela représente, en fait, si l'on prend le volume des
transactions qui sont physiquement faites sur le marché, plus les
transactions qui sont faites pour livraison à l'entrepôt de
l'acheteur, un pourcentage considérable des légumes qui sont
vendus dans la région de Montréal. Et comme vous le savez,
environ 80 p.c. à 90 p.c. de la production maraîchère est
dans la région de Montréal, alors, nous avons un très fort
pourcentage des transactions qui se font sous une forme ou l'autre au
Marché central.
M. OSTIGUY: Est-ce que ces gens sont tous membres de l'Association des
maraîchers?
M. COUTURE: Pas nécessairement, mais un grand nombre sont membres
de l'association. L'association regroupe certainement les
éléments les plus progressifs chez les jardiniers
maraîchers.
M. OSTIGUY: Dans quel pourcentage à peu près?
M. COUTURE: Je peux difficilement vous répondre avec
précision, parce qu'en fait, on ne demande pas à une personne qui
fréquente le marché si elle est membre ou non de l'Association
des jardiniers marafchers. Ce n'est pas une obligation pour fréquenter
le marché.
M. OSTIGUY: Vous avez combien de membres vous l'avez dit
tantôt dans l'association?
M. DAIGNAULT: J'ai dit tantôt que nous avions 500 membres, et je
pourrais affirmer que des 500 membres qui visitent le Marché central
quotidiennement il y en a 50 p.c. en nombre qui font partie de l'association,
mais qu'il y en a 80 p.c. à 85 p.c. en volume de production.
M. OSTIGUY: De ce nombre-là, quel pourcentage fait partie des
gens qui sont au Marché central?
M. DAIGNAULT: J'ai dit 50 p.c. en nombre, mais j'oserais dire de 80 p.c.
à 85 p.c. en volume de production.
M. DEMERS: Le Marché central appartient aux jardiniers
marafchers?
M. COUTURE: Le Marché central est une corporation,
incorporée en vertu de la troisième partie de la Loi des
compagnies. Les actions ordinaires sont détenues par des cultivateurs,
plus l'Association des jardiniers marafchers et la Coopérative
fédérée de Québec, qui sont les deux plus gros
détenteurs d'actions ordinaires.
Les actions privilégiées sont détenues dans une
forte proportion par les mêmes organismes.
Pour votre information, le Marché central compte environ 600
actionnaires cultivateurs.
M. LAURIN: Une autre question dans le même sens. Vous avez dit que
vous aviez 500 membres. De ces 500 membres, combien font partie de l'UCC?
M. COUTURE: Je demanderais à M. Daignault de répondre, je
suis avec le Marché central et non avec l'UCC.
M. DAIGNAULT: C'est assez difficile, nous ne savons pas si nos membres
sont membres de l'UCC.
M. DEMERS: Est-ce que l'UCC le sait?
M. DAIGNAULT: Peut-être que le président de l'UCC pourrait
vous répondre.
M. DEMERS: Est-ce que l'UCC peut nous répondre?
M. ALLAIN: Il n'y a pas de vérification nom par nom, cependant,
j'avance ici que si le décompte était fait, il y a probablement
plus de marafchers chez nous que dans leur association.
M. DEMERS : Ils vont se chicaner.
M. COUTURE: Je ne voudrais pas aller plus loin.
M. LAURIN: Ceci n'est peut-être pas étonnant. Je vais
avancer une hypothèse. Est-ce qu'on peut présumer que les
marafchers les plus progressifs, les plus gros, font partie de l'association,
et que les petits marafchers indépendants font plutôt partie de
l'UCC? C'est une hypothèse.
M. COUTURE: Dans les paroisses où il y a le plus de
maraîchers, où la culture horticole se développe le plus,
j'ai eu l'occasion de constater, il y a trois ou quatre jours, qu'il semblait
en fait y avoir très peu de membres de l'UCC. Pour une bonne raison, je
discutais du bill 64 et je voulais avoir l'opinion de membres de l'UCC s'il y
en avait eu de présents. Je n'en ai pas trouvé. Il y avait
environ 400 personnes à cette réunion-là.
Il ne faut pas oublier une chose. C'est qu'en culture
maraîchère, il faut d'abord s'entendre, si on veut parler de
pourcentage, sur ce qu'est un jardinier marafcher, ce qu'est un
cultivateur.
Il y a beaucoup de cultivateurs qui, tout en faisant de la grande
culture, vont cultiver, par exemple, un arpent de fèves. Cela occupe les
enfants, les écoliers durant la période des vacances; c'est un
"cash crop". Maintenant, est-ce qu'on va considérer ce
cultivateur-là comme un maraîcher parce qu'il cultive un arpent de
fèves qu'il va probablement vendre à un camionneur qui passe dans
son rang et qui,
lui, va venir le vendre au Marché central? Est-ce cela un
jardinier? Pour autant que les jardiniers sont concernés, ils croient
que doit être considéré comme jardinier le type qui obtient
au moins 50 p. c. de son revenu de la culture des légumes. Maintenant,
quelle définition va-t-on donner d'un cultivateur? C'est une autre
chose.
M. LAURIN: Est-ce que vous connaissez le nombre total des
maraîchers au Québec?
M. COUTURE: J'ai eu l'occasion de faire une expérience qui date
déjà de plusieurs années. Lorsque nous avons
incorporé la Compagnie du marché central, il y a
déjà très longtemps de cela, disons que, dans la
région de Montréal, dans un rayon d'environ 50 milles, parce
qu'on les avait tous rencontrés un par un, porte par porte, dans toutes
les paroisses de l'île Jésus, sur la rive nord du Saint-Laurent et
également dans un secteur au sud, on avait trouvé 1,300 à
1,400 jardiniers. Je parle de jardiniers qui faisaient de la culture pour
vendre à l'état frais. Il y a également des gens qui vont
cultiver des carottes qui vont être vendues à une conserverie.
C'est un secteur bien différent qui a des intérêts bien
particuliers. Cela se mélange difficilement.
M. OSTIGUY: J'avais demandé aussi à M. Jasmin quels
étaient les objectifs de l'Association des jardiniers marafchers. Quels
sont les cadres de votre association? Qu'est-ce que vous faites pour vos
producteurs, pour vos maraîchers?
M. COUTURE: M. le député, excusez, mais je pense que vous
aviez une deuxième question à laquelle je n'ai pas
répondu? Quelles étaient les conditions pour avoir une place au
Marché central? Effectivement, pour obtenir un espace
réservé au Marché central, il faut être actionnaire,
détenir au moins 15 actions. Cela coûte $50 par année de
frais de réservation.
Maintenant, ce qui arrive je sais que des députés
ont eu des problèmes avec cela c'est qu'effectivement le
marché comporte 400 places; physiquement, il y en a 400. Cela nous fait
huit plates-formes et il y a 50 places par plate-forme. Comme, au printemps,
les récoltes se font graduellement, forcément, il se fait un
noyau. Les deux premières plates-formes qui sont occupées
attirent les acheteurs au début et puis les acheteurs ont tendance
à fréquenter ces deux rangées-là un peu plus que
les autres plates-formes, avec le résultat qu'on a des gens qui se
lamentent pour avoir de l'espace. Ils disent que c'est impossible d'en avoir.
Par contre, il y a une centaine de places qui sont libres, qui ne sont jamais
réservées parce que tout le monde voudrait occuper les 100
meilleures places au marché.
Ce sont toutes les mêmes plates-formes; il n'y a aucune
différence au point de vue physique, mais le commerce se fait surtout
dans deux rangées et tout le monde voudrait être là. C'est
évident qu'à un moment donné cela crée des
problèmes. Quand il y en a 400 ou 500 qui fréquentent le
marché, il faut que cela déborde. C'est un problème. C'est
un peu comme la rue Sainte-Catherine, où le terrain vaut une centaine de
dollars à l'ouest contre une dizaine de dollars à l'est.
Pourquoi? Parce que la clientèle a tendance à vouloir
fréquenter un secteur plus que l'autre.
M. OSTIGUY: Cela veut dire quoi, 15 actions monétairement?
M. COUTURE: 15 actions, cela veut dire $300, selon la valeur actuelle
des actions.
M. OSTIGUY: Merci.
M. COUTURE: Maintenant, c'est un placement sur lequel ils touchent un
dividende de 6 p. c. par année.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lotbinière.
M. BELAND: M. Jasmin, j'aurais une question à vous poser.
Certaines choses ont été dites tout à l'heure. Cela semble
aller un peu en contradiction avec la documentation que vous nous avez
apportée. C'est simplement pour m'éclairer que je désire
vous poser cette question..
Premièrement, vous êtes ou vous semblez être
partisans dans votre association d'une reconnaissance d'un droit
à part des autres sections spécialisées de l'agriculture.
Un peu plus loin, vous avez semblé également être partisans
que les membres comme tels doivent être reconnus dans une association
d'une façon légale. D'autre part, vous désirez que ce soit
nettement à part la mise en marché même du produit.
Qu'est-ce qui vous fait désirer que la mise en marché ne
soit pas partie intégrante de votre association, ou d'une façon
reconnue légalement par un projet de loi quelconque?
M. JASMIN: Nous mentionnons dans notre rapport, à l'article D)
"d'éviter tout lien ou attache financière des syndicats,
fédérations ou associations avec un organisme de mise en
marché particulier." Lien ou attache financière. Notre
association et tout syndicat, ou fédération de producteurs
spécialisés doit défendre les intérêts
de ses membres et s'occuper des politiques de mise en marché. Ce qui est
différent d'une attache financière avec un organisme de mise en
marché.
Il est certain que notre association est très touchée par
les politiques de mise en marché. Nous sommes actuellement très
touchés par les politiques qui sont pratiquées aux Etats-Unis
à la suite du discours de M. Nixon. Cela nous affecte directement. Nous
croyions que cela
nous aurait affecté encore bien plus que cela nous affecte, mais
enfin, cela nous affecte jusqu'à un certain point.
Ces choses-là sont des politiques qui intéressent
énormément l'association, le syndicat ou la
fédération. Mais nous croyons que des attaches financières
avec des organismes ne doivent pas exister, parce que, justement comme je vous
l'ai dit tout à l'heure, c'est immédiatement porter
préjudice à ces organismes.
M. BELAND: Maintenant, vous vous êtes montré
catégoriquement opposé aux plans conjoints tel qu'ils sont
conçus présentement, enfin de la façon dont cela
fonctionne présentement. Etant donné ce fait, il y aurait
également une autre question que je désirerais vous poser,
à savoir est-ce que vous avez pensé à un outil quelconque
qui remplacerait, à votre sens, les plans conjoints ou si vous n'avez
pas fait de recherche dans ce sens? Est-ce que vous pourriez donner votre
version à ce sujet?
M. JASMIN: On ne peut pas dire qu'il faille trouver un outil. La mise en
marché de quoi que ce soit est un complexe d'une foule de facteurs. Il
est certain que lorsqu'en Ontario, il y a quelque années, on s'est
prévalu de la Loi de mise en marché, on a instauré un plan
conjoint sur les oignons. A ce moment, je dirigeais une entreprise qui
était importante dans le marché des oignons de la province de
Québec. Nous avons été heureux que l'Ontario pose ce
geste. Cela a apporté un parapluie formidable sur notre industrie de
l'oignon. Le parapluie a été si bon que trois ans après
l'Ontario a décidé de sortir du plan conjoint des oignons, parce
qu'elle avait mangé une maudite claque.
C'est un mécanisme...
M. MARCHAND: Elle manquait d'eau. Avec le parapluie, elle manquait
d'eau.
M. JASMIN: Elle manquait d'eau. C'est ça. C'était trop
sec. Cela a été une ombrelle, nécessairement, parce
qu'à ce moment nous avons pu pénétrer dans d'autres
marchés où elle ne pouvait pénétrer à cause
de son mécanisme lourd. La mise en marché des produits
maraîchers est une chose qui est très rapide. Comme vous le savez,
le prix de la laitue qui est fixé le matin, à l'ouverture du
marché, peut doubler ou tomber à 50 p.c. de son prix initial une
demi-heure ou trois quarts d'heure après l'ouverture du
marché.
Certains rapports qui ont été déposés au
gouvernement fédéral, il y a quelques jours, et dont le ministre
doit avoir pris connaissance aujourd'hui, indiquent qu'une intégration
des marchés, une connaissance des présences physiques de l'offre
et de la demande sont des outils auxquels on voudrait avoir accès. Nous
voudrions avoir accès à ces outils qui seraient de beaucoup
supérieurs à des plans conjoints.
Si nous savions la consommation, la demande. On le sait à peu
près. On sait que le marché de Montréal absorbe 25,000
sacs d'oignons par semaine. Mais qu'est-ce qui va arriver lundi, mardi,
mercredi matin sur les marchés? On ne veut pas savoir à dix
heures du matin ce qui est arrivé, on veut le savoir au fur et à
mesure que ça arrive.
Ces mécanismes ont été établis dans d'autres
pays où il y a une bourse, ni plus ni moins, de ces marchés, de
ces produits, avec des tableaux où on connaît les arrivages,
où on connaît les départs, où on connaît les
importations, où on connaît les exportations. Ce sont des
mécanismes que nous préconisons depuis longtemps et qui
remplaceraient, mais ce n'est pas un mécanisme unique, c'est une foule
de choses qui peuvent aider la mise en marché des produits
maraîchers.
M. BELAND: Est-ce qu'à ce moment-là, vous semblez placer
dans le même "melting pot" la mise en marché telle que vue et
pratiquée logiquement par les agriculteurs eux-mêmes ou par des
personnes dépendant d'eux, mais, d'autre part, la mise en marché
réelle qui, sur un autre palier, existe présentement, qui vient
faire du "dumping" par ricochet par certaines entreprises disons commerciales
très bien établies? Il y en a trois ou quatre dans la province
seulement qui contrôlent le marché.
A ce moment-là, est-ce que vous désirez simplement l'offre
et la demande ou quasi ça ou le contrôle disons par les
producteurs eux-mêmes? Ou est-ce que vous avez quelque chose de
défini dans ce sens pour en venir à mettre un terme à ces
agences commerciales qui contrôlent le marché ou qui l'ont
contrôlé jusqu'à maintenant? De quelle façon
allez-vous procéder? Est-ce que vous avez quelque chose de
précis?
M. JASMIN: Je crois savoir à quoi vous faites allusion. Disons
que l'industrie maraf-chère du Québec a évolué
énormément depuis les dix dernières années. Nous
sommes rendus, je crois, suffisamment forts pour pouvoir lutter contre les
organismes qui achètent de grandes quantités de produits, de
lutter à armes à peu près égales, à la
condition qu'on nous donne les outils de travail dont nous avons besoin: la
connaissance des arrivages, la connaissance des départs, des ventes. A
ce moment-là, disons que les gros acheteurs ont besoin de nous. Us nous
l'ont prouvé maintes et maintes fois, et quand les gros acheteurs ont
besoin de nous, ils vont se plier à nos prix. Je crois que l'industrie
maraîchère est rendue suffisamment forte que si on lui donnait les
outils de travail, sans lui donner des structures rigides, des contingentements
ou des choses comme ça, nous n'avons plus besoin de ça.
Peut-être que le maraîchage, dans les périodes de
transition, d'après-guerre, aurait eu besoin à ce
moment-là d'organismes, mais encore là, je ne sais pas.
Aujourd'hui, nous avons
évolué énormément, nous sommes capables de
lutter à armes égales avec l'Ontario, avec la Californie, et
lorsque nous savons exactement quand ces gens-là sont forts sur nos
marchés, nous diminuons de nous-mêmes nos quantités, nos
arrivages, nos productions et nous savons quand nous pouvons aller sur leurs
marchés également à la condition de connaître les
faits. Et là, encore, rapidement, ça nous prend des outils, pour
savoir quand on peut aller vendre de la laitue sur le marché de New York
et il y a des moments où on peut le faire.
M. BELAND: Si je définis bien vos termes, dans ce cas, vous avez
suffisamment confiance dans l'avenir de votre association et vous ne pensez pas
que ce soit nécessaire qu'il y ait une espèce d'organisme central
qui serait ni plus ni moins le joint entre les diverses sections
spécialisées de l'agriculture et qui pourrait apporter tous les
renseignements dont vous semblez parler, entre autres choses
évidemment.
M. JASMIN: Je ne pense pas qu'un organisme central, à moins qu'il
ne soit fortement financé, puisse apporter des choses comme ça.
Quand on parle de rejoindre tous les marchés du Québec par
téléscripteur avec le Marché central métropolitain
de Montréal, qui est le gros marché des fruits et légumes
de la province, de rejoindre les autres marchés par
téléscripteur pour savoir exactement ce qui sort et ce qui entre,
de pouvoir forcer les gros acheteurs de magasins de chaîne ou bien les
grossistes, à dévoiler la quantité qu'ils achètent
de l'étranger au moment où ils placent leur commande.
Ce sont des mécanismes, des outils dont nous avons besoin. Je ne
pense pas qu'une association puisse faire cela; cela prend une
législation pour faire cela. Dans d'autres pays, c'est ce qui s'est
fait. On a demandé que ces choses soient dévoilées,
autrement dit qu'on joue une partie de poker où tout le monde a les
cartes sur la table, que personne n'ait d'as dans ses manches. A ce
moment-là, on est capable de jouer au poker aussi bien qu'eux.
M. BELAND: C'est bien, merci.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, M. Jasmin, lorsque
M. Allain, le président de l'UCC, est venu devant cette commission, il
nous a dit qu'il était d'accord avec la définition du mot
producteur, tel que définie dans le projet de loi. Vous, ici, à
la page deux de votre mémoire, vous faites une suggestion; vous avez une
nouvelle définition du mot producteur: "Une personne,
société ou corporation engagée dans la production d'un
produit agricole qui tire sa subsistance ou celle de sa famille ou au moins 25
p.c. du total de son revenu brut de la culture du sol, de l'élevage,
etc." A première vue, théoriquement, je serais porté
à opter pour cette formule, mais au point de vue opération- nel,
au point de vue pratique, comment voulez-vous appliquer cela et définir
celui qui retire 25 p.c. de sa culture des pommes de terre, du sirop
d'érable ou autre? Comment dresser les listes de ceux qui vont faire
partie du syndicat en vertu de votre nouvelle formule? J'y trouve un
inconvénient.
M. JASMIN: Il faudrait peut-être demander au ministère des
Institutions financières comment il va l'appliquer, parce que c'est
inspiré à peu près textuellement du bill 48. Il va
certainement avoir des mécanismes pour l'appliquer pour fins de taxation
municipale. A ce moment-là, on prendra le même rôle que le
ministère des Affaires municipales aura établi pour les
taxes.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Prenons un cultivateur dont la
spécialité est la culture des pommes de terre, des patates. Il
est qualifié comme un producteur de pommes de terre mais on trouve que
le revenu qu'il reçoit de la culture des pommes de terre est de 20 p.c.
de son revenu. Ou va-t-on le placer dans le syndicat? Il va faire partie de
quoi? Il n'entre plus là-dedans, il n'est plus syndicable, parce que
vous dites: "...celle de sa famille ou au moins 25 p.c. du total du revenu brut
de la culture du sol, de l'élevage..." Il retire 20 p.c. de la culture
des pommes de terre. On ne peut plus l'inclure dans la loi.
M. JASMIN: Non, il n'a pas assez d'intérêts en agriculture;
vous voulez dire qu'il a 100 p.c. de son revenu en agriculture mais 20 p.c.
dans les pommes de terre, 20 p.c. dans l'huile de lin si cela existe
encore ou dans le soja, 20 p.c. dans les vaches, 20 p.c. dans le tabac
jaune et 20 p.c. ailleurs. Il est en dehors de tous les secteurs. C'est ce que
vous voulez dire?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il reste que c'est un gros producteur.
M. JASMIN: Il est à 100 p.c. en agriculture, mais il est à
20 p.c. dans chacune des différentes spécialisations.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Jasmin, vous parlez de syndicat par
spécialités.
M. JASMIN: Oui, spécialisé.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais dans quelle spécialité
va-t-on le placer? Il retire 20 p.c. des pommes de terres, 20 p.c. du lait, du
sirop, etc., et vous demandez 25 p.c. En théorie, c'est beau ça,
mais quand vous venez pour mettre ça en pratique, c'est un rouage
administratif d'où vous ne sortez à peu près pas.
M. JASMIN: Ecoutez...
M. GIASSON: Ce n'est pas un problème.
UNE VOIX: Un producteur qui est à 100 p.c. dans l'agriculture
c'est un producteur agricole.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il veut qu'on parle des syndicats par
spécialités. Il va être dans quelle
spécialité?
M. GIASSON: Celle de son choix.
M. JASMIN: Dans cet article restons-en aux mots de notre article
nous définissons le mot producteur. A la page 2, article 1, nous
définissons le mot producteur. Il est pour 25 p.c. en agriculture, c'est
un producteur. On ne parle pas de producteur spécialisé.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais dans l'optique où vous dites que
ça devrait être des syndicats par spécialités: sirop
d'érable, patates, légumes. On n'en sort pas.
M. JASMIN: Passez à la page 3, à l'article m). "Un
producteur spécialisé, une personne, société ou
corporation engagée dans une production agricole
spécialisée qui constitue sa principale source de revenu." A ce
moment-là, sa principale source de revenu peut être de 21 p.c,
peut-être, et les autres de 19 p.c, 20 p.c. et 20 p.c. C'est celle qui
aura 21 p.c. qui sera la principale ou celle qui aura 50 p.c. ou 75 p.c On
définit d'abord le producteur comme un gars qui retire 25 p.c du revenu
de la production de la ferme pour ensuite le mettre dans un syndicat
spécialisé à la majeure partie de sa
spécialisation.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je ne comprends pas.
M. JASMIN: On définit d'abord un producteur...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je parle du point de vue
opérationnel...
M. JASMIN: Au point de vue opérationnel...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Théoriquement, c'est clair, votre
affaire, mais dans l'application de la loi, pour cataloguer tous ces gens dans
telle ou telle spécialité, j'y vois un fouillis indescriptible.
On n'en sortira pas avec votre formule de la définition du mot
producteur dans votre mémoire.
M. GIASSON: Cela ne donne rien de fendre les cheveux en quatre.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Non, je ne fends pas les cheveux en
quatre.
M. GIASSON: On sait ce que sera l'agriculture de demain. Ce sera une
partie extrêmement minime de cultivateurs qui vont se partager en cinq
spécialités.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, mais on parle de syndiquer les
cultivateurs en 1971, on ne parle pas de 1980. On parle d'aujourd'hui.
M. GIASSON: Même en 1971.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas fait cela, je suis d'accord.
Quand est-ce que cela va se réaliser? Il y a vingt ans qu'on en parle et
c'est encore pareil. Si on attend que le problème que vous soumettez
soit réglé, il vaut mieux mettre le projet du syndicalisme
agricole sur les tablettes et attendre.
M. GIASSON: Même en 1971, quel est le pourcentage des cultivateurs
du Québec qui sont répartis en quatre ou cinq
spécialités de proportion égale? Quelle est la proportion
au Québec? Il n'y en a pas beaucoup. Est-ce qu'il y en a 2 p.c?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je n'ai pas de statistiques, mais il y en a
beaucoup.
M. GIASSON: Il n'y en a pas 2 p. c au Québec.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je n'ai pas de statistiques, j'accepte les
vôtres, mais j'en connais une foule qui ont cinq, six ou sept
spécialités soit le pomme de terre, le lait, le sirop, la
patate...
M. JASMIN: Ils ne sont pas plus forts dans l'une que dans l'autre.
M. TOUPIN: M. le Président, si vous me le permettez, ce qui
m'apparaît un peu ambigu dans toute cette question est que vous basez
votre thèse sur les spécialités. Or, la question qui me
vient à l'esprit à prime abord, je suis d'avis que, dans
l'avenir, plus on ira, plus il y aura des producteurs
spécialisés, mais ceux qui ne le seront pas et ceux qui ne le
sont pas présentement, où est-ce qu'on va les loger dans cet
ensemble? Est-ce qu'on devra créer une catégorie de producteurs
non spécialisés? Comment va-t-on les loger dans tout ce contexte
de dépenses générales, des intérêts de
l'agriculture? Ce bonhomme qui a 25 p.c. dans le lait, 25 p.c. dans le poulet
à griller, 25 p.c. dans les tomates, dans quelle
spécialité va-t-on le situer? C'est la question que je me
pose.
M. JASMIN: M. le ministre, vous connaissez certainement vos agriculteurs
de la province beaucoup mieux que je ne puis les connaître...
M. TOUPIN: C'est pour cela.
M. JASMIN: ... mais je m'étonne de voir qu'il y en aurait un si
grand nombre de partagés dans différentes
spécialités à intérêt égal.
M. TOUPIN: Parmi les maraîchers, par exemple, vous avez
déjà de ces producteurs, et vous en avez un grand nombre, je
pense, qui vont produire deux ou trois catégories de légumes, par
exemple, des tomates, des carottes, des pommes de terre.
M. JASMIN: D'accord.
M. TOUPIN : Il est bien sûr qu'à ce moment-là, si
vous vous essayez sur les spécialités, cela crée des
problèmes pour ceux qui sont aux prises avec des fermes à
production multiple...
M. JASMIN: Loin de là.
M. TOUPIN: ... à cause de ce problème. Je vous pose la
question. Je vous demande où dans votre contexte on peut les situer
ceux-là.
M. JASMIN: Loin de nous l'idée de fendre les cheveux en quatre.
On regroupe tous les maraîchers ensemble au complet comme étant
une spécialité, comme vous pouvez regrouper tous les producteurs
de grain, que les gars produisent de mais, de l'avoine, de l'orge, ce que vous
voudrez, comme vous pouvez regrouper ensemble tous les producteurs d'animaux
à l'exception de la vache laitière: qu'ils fassent du porc, du
boeuf de boucherie ou de la volaille, ils sont exactement également
fonction de l'industrie des grains et de l'industrie des protéines. Ce
sont les deux grandes industries qui sont les industries en aval. Alors, ce
sont tous des gens qui ont des intérêts communs, qu'ils fassent du
porc, du boeuf de boucherie ou du poulet. Les éleveurs de vaches ont des
intérêts communs, c'est la mise en marché de leur lait dans
une économie qui va être d'ici cinq ans changée, on va
s'arracher le lait, il n'y en aura pas assez. Mais ce sont des gens qui ont des
intérêts communs, comme les maraîchers ensemble ont des
intérêts communs.
Il ne faudrait pas distinguer entre le gars qui a des vaches pour faire
du veau blanc et d'autres, pour faire du veau de 300 livres. Non, il ne faut
pas fendre les cheveux en quatre, mais étudier cela de façon
qu'on mette les gens qui ont des intérêts communs ensemble et
aussi ceux qui ont des divergences d'opinions. Cela ne vous prendra pas 200
différentes catégories; je disais une douzaine tout à
l'heure. Peut-être que sept ou huit, ce serait assez.
M. TOUPIN: Tout ce que je voulais souligner, M. le Président,
c'était cet aspect de la question des fermes à productions
multiples.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le Président, est-ce que
pour employer une expression populaire pour allumer nos lumières,
vous permettez que je pose une question à M. Allain?
M. LE PRESIDENT: Certainement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Allain, parmi vos membres de l'UCC,
d'après vous je ne sais pas si vous pouvez me répondre
comme ça; je ne sais pas si vous avez présentement les
statistiques quel est le pourcentage de cultivateurs qui ont quatre ou
cinq spécialités, par exemple, les produits du lait, de la pomme
de terre, de sorte qu'on ne pourrait pas dire qu'il y a 25 p. c. de leur revenu
qui viennent de la pomme de terre ou du lait, mais qu'ils font une culture
générale? Ils tirent leur revenu de différentes
productions.
M. ALLAIN: M. le Président, je regrette, nous n'avons pas de
chiffres. Remarquez bien qu'il y aurait moyen de les trouver, mais il faudra
avoir recours aux statistiques. Cela pourrait peut-être poser certains
problèmes. Néanmoins, de visu, le problème continue,
même chez des producteurs hautement spécialisés. Il y a des
producteurs qui sont, à la fois, de gros producteurs de porcs et de gros
producteurs de volailles. Ce n'est pas une caractéristique du petit
producteur.
Il reste que, tant et aussi longtemps qu'on n'est pas parvenu à
créer une sécurité en agriculture, les producteurs
très dynamiques choississent de rester dans plus d'une production, parce
que, disent-ils, c'est l'art de ne pas mettre tous les oeufs dans le même
panier. A ce moment-là, si une production va mal, ils peuvent avoir une
sécurité dans une autre. Cela prévaut encore. La
spécialisation n'a pas atteint un point où on peut dire que c'est
une infime minorité qui reste en polyculture; il y en a encore
plusieurs.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): On peut conclure que, si on donnait des
accréditations par spécialité, cela créerait tout
un problème.
M. ALLAIN: Certainement.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Merci.
M. VINCENT: M. le Président, je voudrais revenir à mes
questions. M. Jasmin, vous avez mentionné que vous aimeriez voir un
référendum un peu similaire aux référendums
municipaux où on considère le nombre et la valeur foncière
de ceux qui votent pour ou contre. En définitive, ce que vous
suggérez, c'est qu'on revienne à ce qui existe dans les
municipalités. Quand on demande un référendum des
propriétaires, on considère le nombre et la valeur de leurs
propriétés.
Ne pensez-vous pas que si on éliminait la définition qui
est dans le projet de loi, à l'heure actuelle, qui n'en est pas une, et
que l'on avait une meilleure définition du mot "producteur", cela
éviterait, justement, d'avoir à demander en plus de cela, dans un
référendum, qu'on regarde également la valeur?
Ceci m'amène à la page 12 de votre mémoire. Vous
dites: "Le bill 64 qui, dans sa forme
actuelle, permettrait de recueillir des fonds de tous les
propriétaires de terres, y inclus les milliers de citadins qui en
possèdent comme résidence d'été et vendent pour
quelques centaines de dollars de produits agricoles, justifierait que
l'association s'occupe de tourisme, de chasse, de pêche, de sports
d'été et d'hiver." Enlevons cette dernière phrase. Vous
êtes d'accord que si, on ne définit pas mieux le mot "producteur",
c'est exactement ce qui va arriver. Des milliers de citadins seront aptes
à voter et ils vont devenir automatiquement membres de ce syndicat
accrédité.
Dans votre dernier paragraphe de cette partie de l'article, à la
page 12, vous mentionnez: "Les jardiniers s'opposent énergiquement
à ce qu'une association ait la propriété et le
contrôle de leurs cotisations." Est-ce que ce sont les jardiniers comme
individus ou comme association? Si c'est comme individus, si vous
définissez mieux le mot "producteur", vous éliminez le
problème du paragraphe précédent.
Si c'est l'individu, c'est éliminé, il n'y a plus de
problème à ce moment-là. Et si c'est comme association, il
faudra que ce dernier paragraphe entre dans votre autre article d) parce que
ça devient une association spécialisée. D'accord?
M. JASMIN: D'accord.
M. VINCENT: J'arrive au paragraphe d), et ça va faire plaisir au
ministre parce que, tout à l'heure, le ministre a semblé d'accord
avec vous sur ce principe qu'il faut faire une distinction entre la Loi de mise
en marché et le syndicalisme agricole. C'est ce qu'a mentionné le
ministre tout à l'heure.
M. TOUPIN: Mais ça existe déjà dans la loi, M. le
Président.
M. VINCENT: Il faut faire une distinction.
M. TOUPIN: C'est exact, mais ça existe déjà dans la
loi.
M. VINCENT: Donc, le ministre est d'accord avec nous, il faut faire une
distinction, trancher entre la Loi de mise en marché ou l'Office des
marchés et le syndicalisme agricole.
Donc à d) vous dites: "Eviter tout lien ou attache
financière des syndicats, fédérations ou associations avec
un organisme de mise en marché en particulier". Le ministre est
d'accord...
M. TOUPIN: M. le Président, je pense que le déput de
Nicolet interprète avec beaucoup d'extension les propos que j'ai
tenus.
M. VINCENT: C'est ça ou ce n'est pas ça. Le ministre a
mentionné tout à l'heure, M. Jasmin, les membres de la commission
l'ont entendu...
M. TOUPIN: M. le Président, si le député de Nicolet
permet...
M. LE PRESIDENT: Le député de Nicolet devrait laisser le
ministre parler pour lui, et le député de Nicolet pourrait parler
pour le député de Nicolet.
M. VINCENT: M. le Président, le ministre ne peut pas parler pour
lui-même parce qu'il est ministre de l'Agriculture et de la Colonisation,
et quand il parle, il engage le ministère de l'Agriculture et de la
Colonisation.
M. TOUPIN: Mais je voudrais apporter une précision, si vous le
permettez, M. le Président, avec la permission du député
de Nicolet. Je ne laisserai pas le député de Nicolet
interpréter comme ça mes paroles, je vais lui apporter plus de
précisions.
M. VINCENT: C'est justement pour ça que je les ramène.
M. TOUPIN: L'Association des jardiniers soutient qu'il doit y avoir une
distinction entre la mise en marché et l'organisation de la
profession.
M. VINCENT: D'accord.
M. TOUPIN: Là-dessus, je pense que nous sommes tous d'accord et,
dans le projet de loi que nous proposons, le bill 64, c'est déjà
clair. C'est un aspect de la question, mais il reste quand même que les
façons d'appliquer cette loi, les méthodes d'application de cette
loi, les techniques d'application de cette loi peuvent amener l'association
accréditée générale à se servir des
organismes de mise en marché pour, par exemple, prélever une
cotisation, et là, il y a toute une différence entre la mise en
marché comme telle et la technique d'application d'une loi.
M. VINCENT: M. le Président, si nous sommes tous d'accord qu'il
faut faire une distinction entre les deux organismes, ou les offices de mise en
marché, la Loi de mise en marché et le syndicalisme agricole, il
y a quand même des implications, et c'est le mémoire de MM. Jasmin
et Daignault qui le souligne. On dit à l'article d) page 12: "Eviter
tout lien ou attache financière des syndicats, fédérations
ou associations avec un organisme de mise en marché en particulier."
Nous sommes d'accord sur la fonction que doit exercer chacun de ces organismes.
Mais si nous sommes d'accord sur la fonction que doit exercer chacun de ces
organismes, je pense que c'est ça que veut souligner M. Jasmin quand il
dit que nous devons également être d'accord sur les liens
financiers. Et là, je pose la question à M. Jasmin et je la pose
également au ministre de l'Agriculture: Pourquoi ne pas être
d'accord au complet, garder les cotisations bien spécifiques en cet
endroit, en ce qui concerne la Loi du syndicalisme agricole, et en ce qui
concerne les fédérations de mise en marché, laisser
les
cotisations à chacun de ces organismes? Cela évitera ainsi
de continuer un mariage financier entre deux groupements bien
différents. Pour les besoins de la cause, il faut arrêter ce
mariage financier et avoir une distinction complète. Ainsi, nous nous
acheminerons graduellement vers une séparation complète de la
mise en marché et du syndicalisme agricole.
Là-dessus, j'aimerais que M. Jasmin parce que tout
à l'heure le ministre lui a ouvert la porte, il est entré, le
ministre a semblé être d'accord avec lui, c'est pour ça que
je me suis reporté tout de suite à la page 12 reclarifie
les positions qu'il a défendues tout à l'heure, quand il a
demandé de cesser ce lien financier. Il dit: "Le bill 64 et c'est
inscrit dans le bill 64 par l'article 3, indique qu'une somme ne
dépassant pas 20 p.c. des montants exigibles des cultivateurs soumis
à un plan conjoint pourra être versée à
l'association".
Si M. Jasmin définit sa position, à ce moment-là,
peut-être que son dernier paragraphe, avant l'article d) où les
jardiniers maraîchers s'opposent énergiquement à ce qu'une
association ait la propriété et le contrôle de leurs
cotisations, enlèvera cette crainte qui existait dans le paragraphe
précédent.
Moi, j'ai compris tout à l'heure que le ministre était
d'accord et que ça enlevait tout ça. Nous ne serions pas revenus
sur la question, ça aurait été retranché du
bill.
Donc, je voudrais avoir des précisions de M. Jasmin et des
précisions également du ministre.
M. TOUPIN: Bien sûr, M. le Président.
M. JASMIN: S'il y a un ordre de préséance, je pense que M.
le ministre...
M. VINCENT: Si on l'établissait, M. Jasmin, vous seriez
surpris.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pour la compétence, on commencerait par
vous.
M. TOUPIN: Le député de Nicolet veut jouer un peu sur les
mots. Comme d'habitude, il faut apporter beaucoup d'éclaircissements, je
me permettrai d'en apporter encore une fois. Dans le projet de loi que nous
présentons, il est clair que la mise en marché est une chose et
que le syndicalisme agricole en est une autre.
M. VINCENT: D'accord.
M. TOUPIN: Dans le mode de financement de l'association qui sera
accréditée éventuellement, il y avait plusieurs moyens que
nous pouvions utiliser. Nous aurions pu, par exemple, proposer un
mécanisme tout à fait nouveau pour percevoir une cotisation. Nous
aurions pu aussi mettre dans cette loi ce mécanisme nouveau pour
percevoir les cotisations.
Or, nous avons conclu qu'il n'était pas nécessaire que
nous mettions dans cette loi ce mécanisme, parce qu'il existait
déjà dans une autre loi, dans la Loi de mise en marché.
Nous avons cru bon de procéder par cette loi pour ne pas créer de
confusion dans l'ensemble, seulement au niveau du mode de financement.
C'était le premier critère qui nous a amenés
à penser dans cette perspective.
Le second, c'est que nous savions fort bien que les agriculteurs
voulaient avoir un mode de cotisation basé d'une part sur la vente du
produit et d'autre part sur l'effectif. Nous en sommes venus à la
conclusion que ça devient facile à ce moment-là de faire
porter la cotisation sur les deux parties, c'est-à-dire que nous
proposons une cotisation de $15 pour tous les agriculteurs du Québec. Et
nous nous proposons en plus pour qu'il y ait une répartition plus
équitable dans l'ordre de financement de l'association
accréditée, qu'une partie des revenus de l'association
accréditée, qui fait partie en gros des cotisations, soit prise
à même les prélevés, de telle sorte qu'il y a
équité vis-à-vis des petits, des moyens et des gros
producteurs. De la sorte, le gros financera un peu plus l'association et le
petit financera un peu moins, mais tous seront tenus de payer une cotisation
minimale de $15.
C'est d'ailleurs une question de justice et d'équité
à la base qui était voulue par les producteurs. C'est la raison
pour laquelle nous avons voulu utiliser ce mécanisme. C'est la raison
pour laquelle nous l'avons mis dans le projet de loi. C'est
précisément pour atteindre cette fin de justice et
d'équité.
Donc, il faut faire cette distinction bien claire entre la mise en
marché d'une part et le financement de l'association; il faut prendre
pour critère de base que le membre doit payer une cotisation minimale
mais que, pour la justice et l'équité, il faut que les gros
participent un peu plus à l'ensemble du financement de l'association que
les petits.
M. VINCENT: Merci, M. le Président. Je voudrais remercier le
ministre, avant de céder la parole à M. Jasmin, de nous avoir
apporté cet éclaircissement entre association et office de mise
en marché. Même si on veut faire une distinction bien
limitée entre les deux, il reste quand même ce que vient d'exposer
le ministre, qu'il va exister un lien, un mariage financier entre les deux et
qu'ils ne seront jamais séparés complètement; il faudra
toujours parler d'association et également d'office de mise en
marché.
Deuxièmement, il est bon que le ministre, dès aujourd'hui,
ait publiquement mentionné... J'ai lu la législation et on
demande des commentaires. Je pense qu'on devrait également demander les
commentaires des témoins, de ceux qui viennent présenter des
mémoires sur ces deux objectifs de cotisation. Il y a une cotisation
connue, qui est de $15, et il y aura une autre cotisation que le
ministre vient de confirmer qui pourrait être
interprétée par plusieurs comme une cotisation
déguisée. A ce moment, il faudrait que ce soit bien clair
dans
l'esprit de tout le monde qu'il y aura deux cotisations aux syndicats
accrédités.
Il faudrait que ce soit connu de tout le monde parce qu'il ne faudrait
pas, après que la législation sera adoptée, que les gens
nous reviennent pour dire: Sous de fausses représentations, on nous a
dit que c'était $15. Là, on s'aperçoit que c'est plus que
cela parce qu'il y a 20 p.c. du groupe spécialisé qui doit
contribuer à l'association. Cela veut dire qu'en ce qui me concerne, je
ne me prononce pas sur le principe. Je veux que les témoins, ceux qui se
font entendre, donnent leur version ou leur opinion sur cette question des deux
cotisations.
M. TOUPIN: Si vous permettez, M. le Président, avant que la
réponse ne soit donnée par le représentant de
l'association, j'aimerais apporter cette précision-ci. Seulement les
spécialités groupées dans des plans conjoints paieront ces
20 p.c. L'Association des maraîchers, par exemple, n'est pas tenue de
payer ces 20 p.c. parce qu'elle n'est pas assujettie à un plan conjoint.
Evidemment, les producteurs maraîchers, par exemple, en vertu de la loi,
seront tenus à une cotisation minimale de $15.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ces 20 p.c. sont prélevés sur
les $15 par mois. Comment expliquez-vous cela?
M. TOUPIN: Les 20 p.c. proviennent...
M. VINCENT: Est-ce que le ministre peut nous donner des exemples?
M. TOUPIN: Oui, je vais vous donner un exemple. Les 20 p.c. proviennnent
des...
M. VINCENT: Prenons l'exemple des fédérations de
producteurs de lait nature...
M. TOUPIN: Si le député de Nicolet veut me laisser
terminer...
M. VINCENT: ... de lait industriel.
M. TOUPIN: ... je pense que je pourrai trouver mes exemples. Il y a deux
modes, comme on a dit. Il y a $15 que tous les producteurs sont tenus de payer,
c'est $15 en entier. Tous les agriculteurs du Québec sont tenus de les
payer en vertu de la loi si le référendum est favorable.
Deuxièmement, il existe, dans la province de Québec, des
plans conjoints, des producteurs spécialisés organisés en
plans conjoints. J'apporte un exemple: le plan conjoint des producteurs de lait
nature retient sur chacun des cent livres de lait mis en marché, X
cents.
M. VINCENT: Combien?
M. TOUPIN: Dans les circonstances actuelles, cela peut être $0.02
1/2 ou $0.03 1/2. Je sais que la fédération, présentement,
a fait certains changements. C'est un organisme administré par les
producteurs. Je reconnais ici, je pense, le président de la
fédération, il pourrait nous apporter immédiatement cette
précision. C'est $0.03 1/2, je pense.
M. TARDIF: C'est exactement cela, M. le ministre, $0.03 1/2.
M. TOUPIN: Bon, alors $0.03 1/2... M. VINCENT: Les cent livres.
M. TOUPIN: ...les cent livres de lait. Alors les producteurs de lait du
Québec paient $0.03 1/2 pour administrer le plan conjoint. L'ensemble de
ces $0.03 1/2 fait un total X à la fin de l'année. Je prends un
chiffre, je ne le sais pas, approximatif dans l'ordre des exemples. Supposons
que cela rapporterait $400,000. La Fédération des producteurs de
lait nature devra prendre 20 p.c. de ces $400,000 et les verser à
l'association sous forme de participation financière, en vue, par
exemple, de rendre plus équitable le fardeau financier. Le petit
producteur de lait nature qui produit seulement 60,000 livres devrait payer lui
aussi $15, et le producteur qui produit 300,000 livres devra payer aussi $15.
Mais le producteur des 300,000 livres va payer plus, en termes de pourcentage,
sur son prélevé que le petit producteur. C'est là qu'on
établit l'équité. Parce qu'un gros producteur
bénéficie davantage des mécanismes de mise en
marché qui existent, de même que de l'ensemble des institutions
qui sont à sa disposition. Ce même principe vaut dans l'ordre des
coopératives, par exemple. Le gars qui vend 300,000 livres de lait par
année, si une ristourne est donnée, en bénéficie
davantage que celui qui en produit seulement 60,000 livres. Il y a là un
facteur de justice et d'équité. Nous l'avons transposé
dans l'autre ordre.
M. VINCENT: M. le Président, je remercie le ministre. Voici, cela
éclaire beaucoup plus...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Une spécialité... Non, mais il
y aurait juste un petit détail...
M. VINCENT: Non, j'ai justement une question à poser. Dans son
exemple, qu'il a lui-même choisi, tout le monde en est témoin, il
mentionne les producteurs de lait nature. En pratique, si j'ai bien compris le
ministre cela m'arrive quelquefois de ne pas bien le comprendre...
M. TOUPIN: C'est vrai, M. le Président.
M. VINCENT: ...et il affirme que c'est vrai. Cette fois-ci, le ministre
va nous spécifier si je l'ai bien compris.
Le producteur de lait nature qui expédie 400,000 livres de lait
annuellement, c'est un producteur, quand même, moyen on lui
retient $0.03 1/2 les cent livres comme cotisation à sa
fédération spécialisée, ce qui fait un total,
à la fin de l'année, de $140.
M. TOUPIN: Exact.
M. VINCENT: Donc, le producteur de lait nature va payer $15 de
cotisation à l'UCC et va payer indirectement, mais, enfin, il va payer
quand même, par l'entremise de son syndicat, un autre montant de $28, ce
qui veut dire qu'en définitive ce n'est pas $15; ça deviendra $43
de cotisation à l'association unique. C'est ça?
M. TOUPIN: Evidemment, en principe, ça existe déjà.
Les contrats de services existent déjà entre, par exemple, l'UCC
et les syndicats spécialisés.
M. VINCENT: Non, non! mais il faut bien se comprendre, car je ne
voudrais pas que le ministre me dise que je l'ai mal compris, est-ce que, sur
le plan pratique, ça signifie ça?
M. TOUPIN: Sur le plan pratique, sa fédération
spécialisée va prendre 20 p.c. de son prélèvement
et va le remettre à l'association accréditée.
M. VINCENT: Elle va remettre $28 de son prélèvement
à l'association accréditée.
M. TOUPIN: Au maximum 20 p.c. Evidemment, je ne sais pas quelles
ententes pourront intervenir, mais la loi dit que le pourcentage peut aller
jusqu'à 20 p.c. Donc, théoriquement, nous pouvons soutenir que ce
producteur dont vous parlez paiera à son association une cotisation de
$15 et que sa fédération prendra 20 p.c. de son
prélèvement et le versera à l'association comme
contribution financière.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Juste une question au ministre. Vous dites
que ça va être réparti plus justement, mais un producteur
spécialisé qui ne fait pas partie d'un plan conjoint va payer
juste $15.
M. TOUPIN: C'est exact. Dans le projet de loi actuel, c'est exact. Dans
ce cas, c'est un produit non commercialisé en vertu de la Loi de la mise
en marché, mais presque toutes les productions sont couvertes
présentement ou, du moins, bon nombre d'entre elles.
M. VINCENT: M. le Président, comme le président de la
Fédération des producteurs de lait nature nous a répondu
tout à l'heure, je voudrais lui demander si c'était de cette
façon que la Fédération des producteurs de lait nature le
comprenait.
M. TARDIF: M. le Président, pour éclairer les lanternes de
tous ceux qui veulent bien discuter la question... Excusez-moi, je suis tout
enroué, mais c'est un fait.
M. VINCENT: Avez-vous eu une assemblée dernièrement?
M. TARDIF: On a siégé toute la journée, hier, que
voulez-vous?
Alors, sur les $0.03 1/2 qu'on prélève, il y a $0.01 1/2
qui va à la publicité et qui n'est pas affecté, à
proprement parler, dans les $0.03 1/2. C'est séparé, la
publicité et l'administration. Pour les $0.02 qu'on paie pour
l'administration, on se donne des services en conséquence. Alors, ce
sera 20 p.c. des $0.02 versés, non pas des $0.03 1/2.
M. VINCENT: Il faudrait être bien certain de ça.
M. TARDIF: $0.01 1/2 pour la publicité et $0.02 pour
l'administration. En somme, on prélève $0.03 1/2 aux
producteurs.
M. VINCENT: L'article 3 du bill 64 dit: "Tout membre d'un syndicat ou
d'un syndicat spécialisé..." Juste un instant...
M. LE PRESIDENT: Dernière question. M. VINCENT: Je n'ai pas
fini... M. GIASSON: M. Jasmin...
M. VINCENT: M. le Président, on ajourne ou on continue?
M. LE PRESIDENT: Continuez.
M. VINCENT: M. le Président, est-ce que dans la
législation on pourrait demander au ministre ce que vient
de mentionner le président de la Fédération des
producteurs de lait nature du Québec, c'est bien le cas?
M. TOUPIN: Evidemment...
M. VINCENT: Dans le cas de la Fédération des producteurs
de lait nature, on dit que le prélevé est de $0.03 1/2 les cent
livres, mais que sur ce prélevé il y a $0.02 pour
l'administration et $0.01 et demi pour la publicité. Est-ce bien clair
dans l'esprit du ministre que ce sera jusqu'à un maximum de 20 p.c. des
$0.02 ou jusqu'à un maximum de 20 p.c. des $0.03 1/2.
M. TOUPIN: Je pense que la loi là-dessus est assez explicite,
c'est 20 p.c. des prélevés pour fins de commercialisation.
M. VINCENT: Est-ce que le prélevé de la
Fédération des producteurs de lait nature est
considéré comme un prélevé global de $0.03 1/2?
M. TOUPIN: Il faudrait le leur demander.
M. VINCENT: Non, M. le Président, ce n'est pas à eux
à nous le dire, c'est le ministre qui présente la
législation.
M. TOUPIN: Je ne sais pas, M. le Président, comment le syndicat,
lui, a défini son prélevé...
M. VINCENT: Quel article de la loi?
M. TOUPIN: ... mais tout ce que je peux dire et c'est clair dans
la loi c'est jusqu'à un maximum de 20 p.c. des
prélevés pour fins de commercialisation.
M. VINCENT: Pour que ce soit encore plus clair, M. le Président,
est-ce que le président de la Fédération des producteurs
de lait nature, qui a compris que c'était 20 p.c, jusqu'à un
maximum de 20 p.c, non pas de $0.03 et demi mais de $0.02.
M. TOUPIN: Je ne sais pas si le président a dit cela.
M. VINCENT: Mais oui, il l'a dit, il vient de le mentionner, M. le
Président. Est-ce jusqu'à concurrence de 20 p.c. de $0.02 dans ce
cas particulier de l'exemple choisi par le ministre lui-même ou si c'est
20 p.c. de $0.03 1/2? Je pense que c'est important.
M. TOUPIN: Si on interprète la loi telle qu'elle est
actuellement, il apparaît que le prélevé de $0.03 1/2 est
un prélevé pour fins de commercialisation.
M. VINCENT: Bon! Donc, M. le Président de la
Fédération des producteurs de lait nature, ce serait
jusqu'à un maximum de 20 p.c. de $0.03 1/2, comme vient de le dire le
ministre et non pas 20 p.c du prélevé de $0.02 les 100 livres.
Cela fait quand même une différence.
M. TARDIF: M. le Président, si vous le permettez, j'ai
parlé de la loi qui existe et non pas de la loi future. Nous, de la
fédération, prenons un prélevé de $0.03 1/2 et nous
payons à la fédération un prélevé de $0.02.
Mais quant à la loi future, ce n'est pas à moi d'en
décider.
M. LE PRESIDENT: M. les membres de la commission, c'est l'heure du
dîner. Nous entendrons une dernière question de la part du
député de Nicolet.
M. VINCENT: M. le Président, à ce moment-là...
M. LE PRESIDENT: On pourrait reprendre cet après-midi, à
deux heures et demie.
DES VOIX: D'accord.
M. LE PRESIDENT: A deux heures et demie. Reprise de la séance
à 14 h 34
M. OSTIGUY (président de la commission parlementaire de
l'Agriculture et de la Colonisation): A l'ordre, messieurs!
A la suspension, ce midi, le député de Nicolet avait la
parole.
M. VINCENT: M. le Président, nous avons établi certains
éclaircissements dans la définition des objectifs du projet de
loi 64. Nous avons lu et même relu le mémoire
présenté par l'Association des jardiniers maraîchers.
D'ailleurs, je pense bien que le ministre est d'accord là-dessus que
pour toute personne ou tout groupement qui veut faire des
représentations ici, il n'y a aucune limite dans les
représentations qu'on veut faire. C'est simplement pour nous
éclairer.
M. TOUPIN : Il y a une certaine sélection quand même.
M. VINCENT: S'il y a d'autres groupements... D'ailleurs, il y en a
d'autres qui viendront s'ajouter tout à l'heure.
Donc, partant de tous ces éclaircissements qui ont
été donnés par le ministre, j'en arrive au dernier point
que je voudrais soulever. Tout à l'heure, M. Jasmin devait
détailler davantage, partant de la page 12 où on mentionne: "Les
jardiniers s'opposent énergiquement à ce qu'une association ait
la propriété et le contrôle de leurs cotisations". M.
Jasmin m'a spécifié que c'était comme groupe; les
jardiniers s'opposent comme groupe. Pour les cas particuliers, une grande
partie du problème serait réglée si on définissait
mieux le terme "cultivateur".
Il y a enfin la question importante soulevée dans le
mémoire que nous avons présentement devant nous, à la page
13: "Les syndicats doivent être financés par les cotisations des
cultivateurs. Ils ne doivent pas être financés par des offices de
producteurs ou autres organismes de mise en marché". Je pense bien, M.
le Président, sans prendre position pour ou contre cette affirmation
nous avons devant nous un document de travail qui est le projet de loi
64 que nous aimerions quand même, à la lumière de ce
qui a été dit tout à l'heure en savoir davantage. Si M.
Jasmin veut ajouter quelque chose là-dessus, nous lui laissons la
parole. En ce qui me concerne, je voudrais être éclairé
davantage.
M. JASMIN: M. le Président, l'association que je
représente ici devant vous a été fondée en 1924.
Elle fonctionne depuis ce temps avec les cotisations de ses membres.
Il ne faut pas oublier que tout syndicat qui ne recevrait pas les
cotisations de ses membres autrement dit, tout syndicat qui recevrait de
l'association une contribution pour fonctionner, advenant le jour où il
décide de se désaffilier, ce syndicat-là a les vivres
complètement coupés, à moins qu'il redemande à
ses
membres de bien vouloir faire une deuxième contribution sur une
base volontaire. Vous voyez un syndicat qui n'a pas de fonds? La chose est
à peu près impossible. Lorsque nous disons que la contribution
devrait revenir au syndicat, c'est de façon que l'élaboration
normale du processus se fasse. Les membres contribuant à leur syndicat,
le syndicat peut contribuer à la fédération, et la
fédération peut contribuer à l'association de son choix.
Advenant les autres sources de financement, le bill 64, tel que proposé
ici, parle d'un prélèvement à partir de certains moyens de
mise en marché.
Les maraîchers ont déjà proposé au
gouvernement l'exemple de l'Ontario où, si vous voulez aider à ce
que la contribution ne soit pas faite tellement par individu mais par volume ou
par importance du commerce de l'individu, on a trouvé une solution:
taxer les contenants. Ils ne taxent pas une méthode de mise en
marché, ils taxent exactement le volume de production en plus de taxer
l'individu à sa quote-part, tel qu'il est représenté comme
individu dans l'association des jardiniers maraîchers de l'Ontario. En
plus de ça, ils peuvent contribuer par leur volume de mise en
marché ou leur volume de vente ou leur volume de production, non pas en
fonction d'un système de mise en marché mais en fonction
réellement de la vente de leur produit qui doit être placé
dans un contenant, et c'est ce contenant-là qui est taxé.
Si la loi veut prévoir un mécanisme pour prélever
des cotisations en fonction du volume, elle devrait peut-être se tourner
vers d'autres mécanismes qu'un mécanisme de mise en marché
qui, immédiatement, restreint les mécanismes de mise en
marché à probablement un, qui est le plan conjoint. Pourrait-on
taxer un grossiste en fonction de la quantité de produits qu'il
achète d'un cultivateur? Cela deviendrait plus difficile que de taxer un
plan conjoint à 20 p.c. des prélevés qu'il prend sur la
mise en marché d'un produit.
Je pense qu'en fonction de ça, ce sont les points que je voulais
souligner pour éclairer, peut-être, ce que nous voulons dire ici
par le financement se faisant au niveau du syndicat.
Remarquez bien que nous acceptons de faire avec vous un exercice de la
pensée pour essayer de modifier un bill que nous voyons graduellement se
dessiner à l'horizon, mais je ne veux pas vous laisser l'impression que
l'Association des jardiniers marafchers est en faveur du syndicalisme agricole
tel que la philosophie de la loi le décrit. Le syndicalisme agricole
doit avoir une grande association qui embrasse l'ensemble de l'agriculture, je
tiens à réitérer ce que j'ai dit
précédemment, les marafchers ne sont pas en faveur de ce
principe.
La Coopérative Fédérée de
Québec
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): S'il n'y a pas d'autres questions, je
remercie M. Jasmin et je demanderais à la Coopérative
fédérée de Québec de nous présenter son
mémoire.
M. Roland Pigeon
M. PIGEON: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la
commission, messieurs, la Coopérative fédérée de
Québec...
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): M. le président, pour l'enregistrement
du journal des Débats, pourriez-vous vous identifier?
M. PIGEON: Mon nom est Roland Pigeon, président de la
Coopérative fédérée.
La Coopérative fédérée de Québec est
la fédération des coopératives agricoles
québécoises. Elle réunit 225 coopératives
sociétaires groupant environ 40,000 agriculteurs.
Mais ce n'est pas à titre d'entreprise commerciale et
industrielle ou de réseau d'entreprises économiques,
propriété exclusive d'agriculteurs québécois,
qu'elle définit une attitude vis-à-vis du projet de loi du
syndicalisme, dit bill 64. Les coopératives agricoles, dans leur
rôle d'entreprises collectives, ne sont pas directement concernées
comme telles par le projet de loi du syndicalisme agricole, si ce n'est
à titre d'agents éventuels de perception des cotisations
syndicales. Mais une coopérative constitue aussi une association de
personnes et d'individus. Et si ceux-ci choisissent l'entreprise commune comme
instrument de solution de certaines catégories de problèmes
collectifs, cela ne signifie pas que, comme agriculteurs oeuvrant au sein d'un
type particulier d'organisation professionnelle, ils se
désintéressent ou doivent nécessairement se
désintéresser de tous leurs problèmes professionnels qui
ne sont pas de caractère strictement coopératif.
Il est donc normal que s'exprime au sein de la coopération
agricole une gamme variée d'opinions portant sur tous les principaux
problèmes professionnels de la vie agricole.
La gamme des opinions est variée parce qu'il existe plusieurs
catégories d'agriculteurs sur le double plan de la dimension des
exploitations et de la spécialisation de la production évoluant
dans des milieux agricoles qui tendent à se différencier de plus
en plus.
Nous acceptons d'autant plus une telle situaction que la
coopération étant essentiellement volontaire par nature, et
croyant fermement à la possibilité d'édifier des
organisations valables sans recourir à la coercition ou à "
l'encarcanement ", comme disent nos gens, elle doit être assez confiante
dans la valeur de ses objectifs et l'efficacité de ses moyens pour faire
place à la plus entière liberté d'adhésion et
d'opinion.
Aussi, dès le départ, est-elle opposée au recours
à la force souveraine de l'Etat pour imposer, par un vote favorable
minoritaire voir les articles 14b), 15 et 16 du bill une
cotisation syndicale obligatoire qu'une forte partie des producteurs agricoles
ne veulent pas ou ne veulent plus payer volontairement.
Nous venons d'affirmer qu'au sein de nos groupements il existe une
variété d'opinions,
variété que nous acceptons. L'une de ces opinions est
celle exprimée par l'UCC. Elle se retrouve, dans ses points
fondamentaux, dans les dispositions du bill 64. Nous entendons aussi d'autres
opinions. Comme groupe d'agriculteurs professionnels, nous avons tenté
de saisir la synthèse de ces autres opinions. Nous désirons vous
l'exprimer en ayant conscience de parler au nom d'un nombre important
d'agriculteurs silencieux.
Cependant, avant d'exposer ces opinions, nous savons gré à
l'Etat d'avoir modifié le projet original soumis par l'UCC, projet dit
de l'Union des producteurs agricoles du Québec, et surtout d'avoir
opté pour la tenue d'un référendum. Même s'il
n'exige qu'un vote favorable minoritaire, l'Etat a voulu au moins sauvegarder
le principe de la consultation des agriculteurs intéressés, ce
que nous avions nous-mêmes suggéré. D'autres modifications,
telle l'inclusion dans la loi du maximum de la cotisation, d'un
mécanisme de consultation pour réviser ce maximum, d'une
régie d'Etat comme enquêteur et inspecteur, etc., contribuent
à mieux informer l'agriculteur, à mettre plus de clarté
dans l'interprétation de la portée de la loi, à mieux
délimiter le champ d'action du syndicalisme à vocation
générale, etc. Nous aurions tort de ne pas apprécier
l'effort du législateur pour améliorer le projet original.
Essentiellement, le projet de loi se présente comme suit:
La définition de l'expression "association", contenue au
paragraphe a) de l'article 1, constitue une description anonyme de l'UCC
actuelle, de sa nature juridique et de sa structure, éléments qui
en font la seule organisation agricole québécoise qui corresponde
exactement à cette définition. b) Les dispositions de la section
IIl concernant l'accréditation ne permettent d'accréditer qu'une
association dont la nature et la structure correspondent à la
définition du paragraphe a) de l'article 1, c'est-à-dire qu'en
pratique seulement l'UCC peut rechercher et obtenir l'accréditation.
D'après les dispositions de l'article 13, elle obtient
l'accréditation en obtenant seulement 30 p.c. du vote favorable des
agriculteurs aptes à voter et le droit de percevoir des cotisations
syndicales obligatoires en obtenant seulement 36 p.c. du vote favorable des
agriculteurs aptes à voter. Dans les deux cas, il s'agit d'un vote
favorable passablement minoritaire, confirmant une fois de plus une
règle établie par la Loi des marchés agricoles, à
savoir qu'en agriculture une minorité peut obtenir le droit légal
d'imposer ses vues à la majorité.
Les dispositions de la section VIIl du bill, plus
particulièrement celles de l'article 32, font le reste: elles imposent
à tous les agriculteurs la pratique de la cotisation syndicale
obligatoire universelle.
Voilà l'ossature de base de l'instrument mis au point par le
législateur et dont l'effet serait de résoudre de façon
permanente le problème du financement de l'UCC à vocation
générale. La méthode est subtile, mais déjà
elle ne dupe plus personne. Aussi bien y aller carrément. A noter que
nous n'avons aucune objection à ce que l'UCC tente d'employer la
puissance de l'Etat pour faire officialiser son rôle de syndicalisme
unique à vocation générale et pour résoudre ses
problèmes financiers. C'est la méthode employée, surtout
le vote minoritaire favorable, que nous discutons.
Dans l'organisation de son syndicalisme à vocation
générale, l'agriculteur a le choix entre quatre options
fondamentales: a) le syndicalisme pluraliste avec cotisation syndicale
volontaire; b) le syndicalisme pluraliste avec cotisation syndicale obligatoire
pour tous les agriculteurs représentés par une association
donnée; c) le syndicalisme unique avec cotisation syndicale volontaire;
d) le syndicalisme unique avec cotisation syndicale universelle
obligatoire.
Le bill 64 incarne la quatrième et dernière option. Quant
à nous, nous sommes disposés à accepter la
troisième option, celle du syndicalisme unique avec cotisation syndicale
volontaire.
Au point de vue de l'agriculteur, chacune de ces grandes options
comporte ses avantages et ses inconvénients. Dans une étude
objective, bien malin serait celui qui pourrait les classer par ordre de
qualité, mais il ne fait aucun doute que, pour les permanents et les
organisateurs, l'option incarnée par le bill 64, soit la
quatrième, présente des avantages certains.
Nous acceptons l'option du syndicalisme unique avec cotisation
volontaire, même si nous sommes convaincus qu'un syndicalisme unique
imposé par une législation devient de plus en plus inapte
à jouer le rôle de porte-parole officiellement exclusif d'une
agriculture de moins en moins homogène, c'est-à-dire qui tend
à se différencier de plus en plus. De plus, l'inconvénient
majeur du syndicalisme unique pour l'agriculteur moyen est qu'il n'entend
toujours qu'une seule version, qu'il ne voit toujours qu'un seul
côté de la médaille, ce qui oblige moralement des
organismes d'une autre nature à provoquer des débats pour
compléter l'éclairage des problèmes et prévenir un
fanatisme trop agressif. Donc, même si l'Etat ne reconnaissait
officiellement qu'un seul porte-parole de l'agriculture, nous n'avons
aucunement l'intention de nous taire lorsque nous ne serons pas d'accord.
En optant pour l'option c) de l'article 7 des présentes, nous
croyons nécessaire de définir notre attitude sur un certain
nombre de points que voici :
Nous trouvons que la définition du mot producteur au paragraphe
j) de l'article 1 est insuffisante. Nous sommes d'accord sur les trois
exceptions prévues, mais nous aimerions que le législateur,
s'inspirant de la Loi du crédit agricole et de ses règlements,
définisse le pro-
ducteur comme étant celui qui retire au moins la moitié de
ses revenus bruts de la vente des produits agricoles. Personne ne contestera la
nécessité que le sort du syndicalisme soit mis entre les mains
d'agriculteurs vraiment intéressés à l'agriculture.
L'article 13, fait une distinction entre la proportion des votes
minoritaires favorables prévue pour obtenir l'accréditation, au
paragraphe a), et le pouvoir de prélever les cotisations et
contributions, au paragraphe b ), telle proportion s'établissant
à 30 p.c. des voteurs éligibles dans le premier cas et à
36 p.c. dans le second cas.
Lorsqu'une association a la prétention de représenter tous
les agriculteurs sans distinction, un vote minoritaire favorable de 30 p.c.
pour obtenir l'accréditation est indéfendable dans une saine
démocratie. Cependant, nous ne présentons pas de contre
proposition car nous sommes bien conscients que le gouvernement a pris une
décision plus politique qu'objective et rationnelle.
Quant au paragraphe b) de l'article 13, disposition liée à
l'imposition de la cotisation syndicale universelle obligatoire, nous ne
l'acceptons pas, car, dans le choix de notre option, nous favorisons la
cotisation syndicale volontaire dans le cas du syndicalisme à vocation
générale, comme la chose existe dans tous les pays occidentaux
où nous avons pu vérifier la situation. D'ailleurs, nous invitons
qui que ce soit à nous citer un seul pays ou partie de pays où le
syndicalisme agricole à vocation générale
bénéficie d'un pouvoir de taxation sanctionné par l'Etat
sous la forme et de la façon que le bill 64 propose.
Le bill 64 est d'inspiration ouvrière dans son essence, mais les
conditions prévalant en agriculture sont fort différentes de
celles existant à l'intérieur d'une même usine. De plus,
dans le syndicalisme ouvrier, c'est l'unité de base et non la tête
qui bénéficie de la cotisation syndicale obligatoire et
universelle, l'unité de base demeurant libre d'adhérer ou de ne
pas adhérer à des structures de regroupement, cela sans perdre
ses privilèges financiers si elle n'adhère pas ou quitte une
structure fédérale ou confédérale. C'est là
une autre astuce du bill 64, qui dirige la cotisation vers le haut plutôt
que vers le bas, vers la confédération plutôt que vers
l'unité de base qui, elle, colle à l'agriculteur moyen.
La section Il du bill était fort amusante à lire, en
regard de la cotisation universelle obligatoire payée à la
tête du mouvement plutôt qu'à la base. Un individu, un
syndicat ou une fédération peut fort bien, pour des raisons
valables, ne pas s'affilier ou révoquer son affiliation, mais cela ne
change rien au fait que, dans le cas de l'application des articles relatifs
à la cotisation obligatoire, l'agriculteur continuera à payer de
force sa cotisation à la tête du mouvement. Voilà qui est
complètement inacceptable, car, si des agriculteurs libres
désirent former des groupes qui les représentent vraiment, ils
seront soumis à une double cotisation, soit une cotisation obligatoire
à l'UCC et une cotisation volontaire à leur véritable
groupement représentatif. C'est dans un tel contexte que les articles 2,
3 et 4 du bill prennent figure de subterfuge pour faire gober le projet
à des opposants ou à des tièdes qui ne se donneront pas la
peine de comprendre toute l'économie du projet de loi.
Etant donné que, dans l'état actuel des faits au
Québec, nous croyons opportun, sinon rationnel et équitable
d'accepter un syndicalisme unique, tout en nous opposant à la cotisation
universelle obligatoire, nous reconnaissons qu'eu égard au niveau de
prestige actuel du syndicalisme, il peut être difficile et ingrat pour un
dirigeant de syndicat local ou un permanent de passer la cotisation syndicale
de porte en porte.
Nous entendons beaucoup d'aveux à ce sujet et nous avons beaucoup
de sympathie pour nos confrères qui, par esprit de dévouement, se
livrent à cet exercice. Aussi, accepterions-nous que les cotisations des
adhérents puissent être déduites à la source.
L'acheteur ou la coopérative de mise en marché ou l'office de
producteurs ou l'agence monopolistique de mise en marché d'une
fédération spécialisée, telle Fedco, seraient tenus
légalement de déduire la cotisation sur production par
l'adhérent, le syndicat ou tout autre élément de la
structure syndicale d'une carte officielle d'adhésion, et de soumettre
cette cotisation au mouvement syndical. En somme, il s'agit de donner un
caractère légal ou officiel à la volonté librement
exprimée de l'adhérent.
Mais si le gouvernement est lié au point où il n'y a pas
d'autre choix que celui d'imposer la cotisation universelle obligatoire, il
nous apparaît alors beaucoup plus décent d'exiger la
majorité absolue de tous ceux qui devront payer cette cotisation. Chaque
fois qu'on exige un vote favorable minoritaire pour mettre quelque chose en
vigueur, nous avons l'impression d'être les victimes d'une sorte de
mépris de la part des autorités du syndicalisme et de l'Etat,
l'un et l'autre n'ayant pas suffisamment confiance au bon jugement de la
majorité des agriculteurs pour décider de leur propre sort.
Essayer de masquer l'inaptitude du syndicalisme agricole à rallier la
majorité des exploitants par l'imposition à tous d'une
volonté minoritaire, c'est fausser les problèmes fondamentaux de
l'organisation syndicale de notre agriculture, plus particulièrement de
notre agriculture la plus progressive. Dans le cas de l'imposition de la
cotisation universelle obligatoire, nous réclamons donc la
majorité absolue de tous ceux qui devront la payer.
Voilà notre attitude vis-à-vis de ce qui, d'après
nous, constitue l'essence du bill 64. Bien sûr qu'on y trouve des
éléments de confusion surtout dans des définitions et
qu'une fois de plus, on nous impose une sorte
de confiance absolue de la Régie des marchés agricoles ce
qui nous est difficile à donner. Une fois de plus aussi, le
législateur fait de la régie un juge et une partie dans
l'appréciation de ses propres décisions. Mais nous voulons
éviter de traiter tous les aspects du bill afin de bien dégager
dans votre esprit et dans celui du public nos commentaires suggestifs relatifs
aux points les plus fondamentaux.
Nous vous savons gré, M. le Président et messieurs les
députés, d'avoir bien voulu nous fournir l'occasion d'exprimer
nos opinions et nous vous remercions.
M. LE PRESIDENT (Cornellier): Le député de Nicolet.
M. VINCENT: M. le Président, si vous me le permettez, j'aurais
une question en commençant par la fin pour revenir au début.
A la dernière page, la page 7, M. le Président, la
Coopérative fédérée de Québec mentionne,
souligné: "Dans le cas de l'imposition de la cotisation universelle
obligatoire, nous réclamons donc la majorité absolue de tous ceux
qui devront la payer". Est-ce que ceci veut dire, si je le comprends bien, que
si, sur les listes qui seront fabriquées, il y a 60,000 producteurs
inscrits, qu'il y en a seulement 36,000 ou 38,000 qui votent, on exigerait
quand même, pour un vote majoritaire tel que l'entend la
Coopérative fédérée de Québec, 30,001 votes
qui diraient oui? C'est ça?
M. PIGEON: Exactement, monsieur.
M. VINCENT: Même s'il y avait seulement 32,000 ou 36,000 personnes
qui votaient sur 60,000 on exigerait 30,001 votes?
M. PIGEON: La majorité absolue de ceux qui sont inscrits sur la
liste.
M. VINCENT: Bon, c'est dur. A ce moment-là, ça
amènerait...
M. PIGEON: C'est dur aussi de placer 50,000 ou 60,000 personnes
je ne sais pas au juste combien il y en a dans la province de Québec
dans le même bateau et les forcer à payer une contribution,
qu'elles le veuillent ou non. Je pense que ça ne s'est fait dans aucun
pays.
M. VINCENT: D'accord, mais...
M. PIGEON: C'est pour ça qu'on demande qu'il y en ait au moins 50
p.c. qui soient favorables.
M. VINCENT: Donc, M. le Président, ce serait comme si on exigeait
un vote obligatoire des producteurs? Je pose la question simplement parce que,
présentement, la Coopérative fédérée va
beaucoup plus loin que le PQ quand elle demande une révision du
vote.
M. PIGEON: Pas nécessairement. On aurait tout simplement à
établir des pourcentages. Par exemple, si on dit qu'il faut qu'il y ait
75 p.c. des gens qui votent, il faudra prendre un pourcentage, soit 66 p.c. ou
67 p.c. de 75 p.c. pour arriver à la majorité absolue. Ce n'est
que de changer les pourcentages.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Dans le même ordre d'idées.
M. LE PRESIDENT (Cornellier): Le député de Sainte-Marie,
une question dans le même ordre d'idées.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Pigeon, naturellement, s'il y en a la
moitié on suppose qu'il y a 60,000 producteurs soit 30,000
qui votent, cela prend 50 p.c. de ces 30,000 pour c'est ça, pour
la cotisation, c'est 60 p.c. des gens qui votent et pour...
M. PIGEON: Dans le projet de loi c'est 60 p.c.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est 60 p.c. pour la cotisation, mais pour
l'adhésion, pour se prononcer sur le syndicalisme, c'est 50 p.c.
M. PIGEON: C'est 50 p.c. de 60 p.c. Et dans un autre cas, c'est 60 p.c.
de 60 p.c.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui.
M. PIGEON: Cela veut dire 30 p.c. dans le premier et 36 p.c. dans le
deuxième.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Par contre, tout le monde a le droit de
voter. Ceux qui s'abstiennent de voter, c'est comme pour tous les organismes.
Dans un comté, si quelqu'un ne vote pas, cela veut dire qu'il se soumet
à la décision des autres. Que ce soit dans une élection
provinciale, municipale, ou tout autre organisme, si quelqu'un exerce son droit
de vote, c'est démocratique. S'il ne l'exerce pas, c'est son droit. Si
on disait: Il n'y a que la moitié qui a le droit de vote, parfait, mais
tous les gens peuvent voter. S'il y a la moitié qui ne vote pas, que
voulez-vous qu'on y fasse? Je ne trouve pas que c'est abusif.
On ne peut pas dire que c'est seulement 30 p.c. qui vont imposer une
chose à 70 p.c. des autres. S'il y en a qui n'ont pas exercé leur
droit démocratique, celui d'aller voter, que voulez-vous que nous y
fassions? Vous dites: On ne voit ça dans aucun pays. Mais ça se
fait partout à l'occasion d'élections.
UNE VOIX: Aux élections, mais...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Chaque fois que l'on se prononce sur quelque
chose. Il y a eu des élections où seulement 20 p.c. des gens
avaient voté dans un comté lors d'élections partielles.
Que voulez-vous? Les 80 p.c. qui
n'ont pas exercé leur droit de vote ont été
obligés de se soumettre au verdict des autres 20 p.c. Ils n'avaient
qu'à exercer leur droit de vote. C'est démocratique.
M. PIGEON: Oui, mais ils le savaient.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Mais c'est pareil, je conçois
ça comme ça.
M. PIGEON: Ce n'est pas tout à fait pareil. C'est pour leur
mettre un carcan. Les gars n'auront plus le choix après et ils seront
dedans. Si on regarde ce qui se passe en Angleterre, en France, en Allemagne,
qui sont de grands pays, on n'a pas ces lois; ça reste volontaire. Le
type n'a plus le choix là-dedans. C'est pour ça qu'on exige 60
p.c. Quand ce sera passé, il n'y aura plus de choix; il faudra qu'il
paie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): S'il ne veut pas du syndicalisme agricole,
il n'a qu'à voter contre. S'il veut du syndicalisme agricole, il n'a
qu'à voter pour. Personne ne l'en empêche. La façon dont se
tiendrait le référendum, je dis que c'est démocratique.
C'est à chaque producteur à exercer son droit à ce moment.
S'il ne l'exerce pas, que voulez-vous qu'on y fasse? Je ne dis pas que
ça n'a pas un peu de bon sens, les recommandations que vous faites,
mais...
UNE VOIX: Rien qu'un peu.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il y a beaucoup de bon sens. Disons que j'ai
voulu résumer ma pensée et que je me suis très mal
exprimé. Votre mémoire est très bien. Il nous laisse
songeurs et nous rappelle certains points de loi qu'il faudra étudier et
auxquels il nous faudra penser longuement. Cela n'a pas un peu de bon sens mais
beaucoup de bon sens, je m'excuse. Mais il reste que je suis convaincu que la
formule est démocratique, qu'on n'impose rien à personne. Il
s'agit que chaque producteur exerce son droit.
M. LE PRESIDENT: (Ostiguy): Le député de
Lotbinière. Sur le même sujet?
M. BELAND: Sur le même sujet, oui. Ma question est celle-ci, tout
simplement. J'ai écouté avec beaucoup d'attention ce que vous
avez dit à la page 5 de votre mémoire, paragraphe c): "... un
vote minoritaire favorable de 30 p.c. pour obtenir l'accréditation est
indéfendable dans une saine démocratie." Si je me rapporte, par
exemple, à votre pratique à l'intérieur de votre
mouvement, soit la coopération, est-ce que ça veut dire que
lorsque vous avez, à l'intérieur d'une coopérative
donnée, 200 membres et qu'à l'assemblée
générale il y a en 78 ou 100 et qu'il manque même deux
directeurs du bureau de direction, vous procédez par deux ou trois
étapes afin que les 200 membres soient représentés ou si
vous prenez, même si c'est une décision très difficile
à prendre, sur une affaire d'envergure, si vous avez seulement 50
personnes qui votent, dont 40 ou 45 votent pour ou contre, ce vote-là?
Ou avez-vous d'autres barèmes pour justifier votre argumentation
relativement au projet dans le bill?
M. PIGEON: Je ferai remarquer au député de
Lotbinière que lorsqu'il s'agit de la coopération, cela reste
strictement volontaire. Ce n'est pas coercitif. L'individu est toujours libre
d'en sortir. Il n'est pas encarcané. C'est pourquoi nous disons que ce
sera 30 p.c. qui feront marcher la majorité à cause du
caractère coercitif. C'est là-dessus que nous nous exprimons.
M. BELAND : J'admets qu'il y a quand même une distinction. Mais si
le type est libre d'en sortir, pourquoi les coopératives locales
refusent-elles de lui redonner sa part?
M. PIGEON: Cela reste une politique interne à la
discrétion du conseil d'administration.
M. BELAND : Je vous ai peut-être amené sur un terrain autre
que celui dont nous devons discuter ici. Mais je partais de ce principe,
à la page 5, et je trouvais que c'était difficilement conciliable
avec ce qui existe en pratique à l'intérieur, non seulement de la
coopération, non seulement au sein d'une association agricole, soit
l'UCC, soit peut-être l'Association des jardiniers maraîchers ou
d'autres corps organisés d'agriculteurs, mais je pense que c'est un peu
comme ça partout.
Je ne dis pas ça pour défendre le bill, non. J'essaie de
faire sortir des arguments que l'on pourra juger valables pour tâcher de
justifier votre affaire.
M. PIGEON: Si nous nous exprimons comme ça, je vous le dis
carrément, c'est à cause du caractère coercitif. Quand ce
sera adopté, si c'est adopté tel que c'est dans le bill, il n'y
aura plus de choix, le type devra payer.
M. LE PRESIDENT: Le député de Nicolet. Dans le même
ordre d'idée?
M. VINCENT: Sur les questions que je devais poser, j'avais pensé
que c'étaient des questions supplémentaires. Voici pourquoi j'ai
posé cette question, qui concerne la toute fin du mémoire; c'est
parce que dans le mémoire de la Coopérative
fédérée de Québec on discute d'un principe nouveau,
d'un pourcentage de vote. Aucun vote dans une élection ou
référendum ne s'est jamais pris en tenant compte de ceux qui
s'abstenaient.
Il y a un vieil adage qui dit "Qui ne dit mot consent", ou ceux qui ne
veulent pas voter sont considérés comme étant favorables
au projet. C'est un vieil adage qui mentionne ça, excepté dans
les pays où on a imposé le vote obligatoire.
Il ne faudrait pas en arriver à l'imposition du vote obligatoire
en voulant amener un nouveau principe.
Question suivante, dans le mémoire présenté par la
Coopérative fédérée de Québec, on mentionne
que cette dernière réunit 40,000 agriculteurs. Je tiens à
le souligner, ce sont probablement les agriculteurs les plus progressifs de la
province. L'UCC, la semaine dernière, nous a dit qu'elle groupait entre
38,000 et 40,000 agriculteurs. Donc, ce sont deux organismes qui viennent
présenter un mémoire et qui groupent à peu près le
même nombre d'agriculteurs et probablement les mêmes agriculteurs.
Cela pose toujours un conflit de conscience chez les membres d'une commission
parlementaire, quand on voit des porte-parole d'à peu près les
mêmes groupes arriver avec des positions complètement
opposées. Un se situe à l'extrême est et l'autre se situe
à l'extrême ouest.
Ces 40,000 agriculteurs, peut-on les définir comme des personnes
dont la principale occupation est l'agriculture et qui en retirent 50 p.c. de
leur revenu brut? Plus loin dans le mémoire, on mentionne cette
définition. Est-ce que c'est pas mal la définition des 40,000
agriculteurs?
M. PIGEON: M. le député, comme les autres vous l'ont dit
tout à l'heure, on n'a pas vérifié d'un bout à
l'autre les 40,000, mais je suis certain que la plupart de ces gens-là
vivent exclusivement d'agriculture. C'est la grande majorité. Il y a
certainement des exceptions, parmi nos sociétaires de
coopérative, qui ne retirent pas 50 p.c. de leur revenu de la ferme. Il
y en a certainement, mais, des pourcentages, je ne peux pas vous en donner.
M. VINCENT: Je pose cette question parce que l'on sait que, si le bill
64 était voté par l'Assemblée nationale, il ne deviendrait
qu'un outil à la disposition des agriculteurs du Québec qui
pourraient, par la suite, le refuser ou le rejeter par
référendum. Je pose cette question parce que si la
coopérative s'oppose, en très grande majorité, au bill 64
en disant que c'est une façon déguisée ou astucieuse de
reconnaître l'UCC, à ce moment-là, je pense bien que le
ministre va être conscient que si, d'un côté, on place la
coopérative avec 40,000 membres et l'UCC avec 40,000 membres devant le
bill 64, les résultats, on les connaît immédiatement
aujourd'hui; on n'a pas besoin d'aller en référendum.
Je pense que les membres de la commission doivent être conscients
de cela. Comme je le mentionnais l'autre jour, c'est facile de demander le
référendum, mais que le bill ne soit pas voté, ce peut
être le résultat que nous allons obtenir si on n'arrive pas
à un consensus entre les groupements et les associations qui ferait du
bill 64 un véritable instrument de travail et un véritable code
ou une loi du syndicalisme agricole. C'est pour cela que j'ai demandé
cela.
Ceci m'amène à mon autre question. La Coopérative
fédérée, comme, d'ailleurs, l'ont souligné les
jardiniers maraîchers et contrairement à l'UCC, n'accepte pas la
définition du terme "producteur" telle que rédigée dans le
bill. Elle suggère, plus loin, une autre définition. Donc, ne
croyez-vous pas, M. Pigeon, que, si cette nouvelle définition
était insérée dans le bill 64, une grande partie des
difficultés seraient réglées?
M. PIGEON: Pour cette définition-là, nous nous sommes
inspirés de la Loi du crédit agricole avec ses règlements.
Je pense qu'à l'avenir les gens qui vont rester en agriculture seront de
véritables agriculteurs. Ce devrait être eux qui décident
et qui administrent le syndicalisme que l'on aura et non pas des gars à
temps partiel et qui font autre chose. C'est pour cela que nous sommes plus
exigeants sur ce côté-là. Il faut que ce soit de
véritables agriculteurs qui vivent sur la terre et de la terre.
M. VINCENT: La Coopérative fédérée est
très ferme sur cette définition du mot "producteur" et elle croit
représenter la majorité de ses membres. Autre question, M. le
Président. On mentionne ici que la description qu'on fait de
l'association, page 2, paragraphe 5, sous-article a) constitue une description
anonyme de l'UCC actuelle.
On continue en disant que les dispositions de la section IIl concernant
l'accréditation ne permettent d'accréditer qu'une association
dont la nature et la structure correspondent à la définition du
paragraphe a) de l'article 1. C'est-à-dire qu'en pratique seulement
l'UCC peut rechercher et obtenir l'accréditation. Je pose la question au
président de la Coopérative fédérée de
Québec. Même avec le bill 64, en théorie, n'est-il pas
possible qu'une autre organisation, qui grouperait, par exemple, 40,000
membres, puisse former un autre mouvement qui pourrait demander
l'accréditation sous le patronage, par exemple, de la Coopérative
fédérée?
M. PIGEON: Si vous dites tout de suite sous le patronage de la
Coopérative fédérée, je vais dire non, parce que
nous ne sommes pas une organisation à vocation syndicale. Mais rien
n'empêche qu'il aurait pu se former un autre groupement qui aurait
recruter 15,000 ou 20,000 ou 30,000 membres et demandé lui aussi
l'accréditation. Il n'y avait rien qui empêchait cela.
M. VINCENT: Dans la loi c'est permis.
M. PIGEON: Mais, jusqu'à présent, il y a seulement l'UCC.
C'est la seule. Il n'y a pas d'autre organisation dans la province de
Québec, à vocation syndicale.
M. VINCENT: Oui, mais, M. le Président, même avec le bill
64 tel que rédigé, un autre groupement de personnes qui prendrait
naissance, demain, peut-être pas provoqué par la
Coopérative fédérée, mais auquel celle-ci serait
sympathique autant qu'elle l'est avec l'UCC, peut-être plus,
peut-être moins, mais si, par exemple, quinze, vingt leaders des
différentes régions du Québec décidaient de mettre
sur pied, demain, un autre mouvement et se servaient du bill 64, ils pourraient
obtenir une accréditation. Même si le bill 64 a l'air d'un manteau
qui convient très bien à l'UCC, c'est parce qu'il y a seulement
l'UCC qui existe à l'heure actuelle. Cela ne signifie pas que si nous
avions dans le Québec deux grandes associations agricoles, comme cela
existe en Ontario, les deux grandes associations agricoles qui existeraient
dans les faits ne pourraient pas, en vertu du bill 64, se faire
accréditer. C'est parce que, dans les faits, il y en a seulement une
qu'on connaît.
M. PIGEON: Cela prendrait un référendum, la même
chose, pour choisir laquelle les gens veulent.
M. VINCENT: Oui.
M. PIGEON: Comme cela s'est fait en Ontario, il y a deux ou trois ans.
Le gouvernement a préparé un référendum et il l'a
soumis aux cultivateurs. Deux associations revendiquaient le droit de
représenter les agriculteurs en Ontario. La gouvernement a voulu
trancher la question. Il a organisé un référendum. On l'a
voté et on l'a rejeté. Cela s'est passé en Ontario, ce
n'est pas loin de nous autres, des gens avec lesquels on travaille très
souvent.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): Le député des
Iles-de-la-Madeleine.
M. LACROIX: Concernant le référendum, la crainte que j'en
ai toujours, c'est que les personnes qui s'abstiennent ou les personnes qui
votent, qui va leur donner, par exemple, les deux côtés de la
médaille? C'est bien beau d'avoir un référendum, de faire
voter des gens, mais il faudrait que les gens qui sont appelés à
voter connaissent exactement les deux côtés de la médaille.
Est-ce que vous et l'UCC êtes capables, par exemple, d'atteindre tous
vous membres et de leur expliquer votre position pour que les cultivateurs qui
seront appelés à voter sur ce référendum le fassent
en toute connaissance de cause?
M. PIGEON: Je pense que dans le projet de loi, M. le
député, c'est dit que la régie doit, a le devoir
d'informer les cultivateurs, parce que c'est elle qui va dresser la liste et
c'est elle qui va envoyer le référendum. Je pense que c'est dit
dans le projet de loi.
M. DEMERS: C'est dit.
M. PIGEON: Je ne le sais pas par coeur, mais, en autant que je me
souvienne, il est dit dans le projet de loi que la régie doit donner
toutes les informations possibles.
M. LACROIX: Oui, mais seulement il faut que les informations soient
"saprement" objectives.
M. DEMERS: Ah, cela dépend de la régie. M. LACROIX:
Oui.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): Le député de Nicolet. Vous avez
terminé?
M. VINCENT: Non, j'y reviendrai tout à l'heure. Parce qu'il y a
plusieurs questions...
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): Vous y reviendrez. Le député de
Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je reviens juste un peu sur la question du
référendum.
Dans ce référendum-ci, on exige que 60 p.c. des
producteurs exercent leur droit de vote, et dans la plupart des
référendums on ne voit pas que ce pourcentage soit exigé.
Ordinairement, on décrète un référendum sur
n'importe quoi, que ce soit dans une municipalité ou n'importe; tous les
gens qui ont le droit de vote n'ont qu'à exercer ce droit de vote. S'il
n'y en a que 20 p.c. qui votent, les autres se soumettent, un peu comme le
député de Nicolet disait: "Qui ne dit mot consent". Mais, moi, je
ne vois pas que ce soit antidémocratique.
Je comprends que lorsque dix hommes décident que Mlle Untelle est
Miss Univers, c'est frustrant pour les autres parce que ce n'est pas
démocratique, mais là, ce n'est pas la même chose.
Là, tout le monde peut voter. Pour Miss Univers, je n'ai pas
voté, ce n'est pas pareil.
M. PIGEON: Moi non plus.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'était une blague en passant. Mais
là, tout le monde a le droit de voter, alors qu'ils exercent leur droit
de vote.
M. PIGEON: M. le député de Sainte-Marie, c'est toujours
à cause du caractère coercitif qu'on voulait être plus
exigeant. C'est à cause de ça.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je comprends votre point de vue quand
même.
M. LACROIX: On devrait les faire voter après qu'ils auraient
payé la retenue syndicale, là ils vont être plus actifs
pour se rendre au bureau de votation.
M. CROISETIERE: Ils devraient payer les prestations au début et
voter après.
M. BELAND: J'aurais une question à ce sujet-là
également. Il a été établi bien clairement, lors de
la première séance de la commission parlementaire, la semaine
dernière le ministre en a parlé et quelques autres en ont
parlé, c'est inclus dans le bill qu'il doit y avoir un
référendum. Ma question est celle-ci au représentant de la
Coopérative fédérée: A votre sens, M. Pigeon,
est-ce qu'il est nécessaire, ce référendum? Est-ce
très clair ou du moins suffisamment clair, dans l'esprit des
coopéra-teurs et dans l'ensemble du monde agricole, que c'est
nécessaire ou pas le référendum?
M. PIGEON: Dans notre mémoire, on dit que c'est nécessaire
et on trouve même qu'on ne va pas assez loin comme pourcentage. Il est
nécessaire que les gens se prononcent.
M. DEMERS: Il y a une présomption.
M. BELAND: Et selon vous, à l'intérieur de quelle limite
de temps un référendum devrait-il se tenir et sur quoi?
M. PIGEON: Sur le caractère représentatif de l'association
syndicale qui sera choisie. C'est là-dessus que les gens vont se
prononcer. On va en reconnaître une, et il n'y a plus de place pour
d'autres organisations syndicales. C'est pour ça. De ce
côté-là, il y a de la place pour d'autres, le
député de Nicolet l'a dit tout à l'heure. Il peut fonder
un autre groupement demain matin pour revendiquer le droit de
représenter un groupe de producteurs.
M. CROISETIERE: Ce sont toujours les mêmes cultivateurs.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): Le ministre de l'Agriculture et de la
Colonisation.
M. TOUPIN: M. le Président, je n'ai pas, pour le moment, de
question à poser, néanmoins j'aimerais apporter certains
éclaircissements sur le projet de loi, notamment lorsqu'on dit, par
exemple, que seule cette association évidemment on en a
discuté, le député de Nicolet a posé des questions
là-dessus seule l'UCC serait, au fond, habilitée
actuellement à demander une accréditation, parce que les faits
veulent que ce soit comme ça. Mais il reste quand même qu'à
l'article 5, c'est très clair que toute association qui veut être
accréditée pour représenter les producteurs, etc., peut en
faire la demande.
Donc, toute association peut le faire. Pour le gouvernement, c'est
extrêmement important ce principe, parce que vous vous rappelez, vous
l'avez dit vous-même au début, dans le premier projet de loi qui a
été présenté, on ne retrouvait pas cette
disposition. Nous la retrouvons maintenant parce que nous croyons que c'est
beaucoup plus démocratique, c'est essentiellement démocratique
que ça se déroule ainsi. Cela, c'est la première
précision que je voulais apporter.
Quant à la deuxième, lorsque vous parlez de cette
association qui serait accréditée et serait à peu
près le seul porte-parole, vous ajoutez que la Coopérative,
évidemment, pourra donner elle-même son point de vue. Je suis bien
d'accord. Mais selon l'article 19 b), ce n'est pas seulement cette association
qui pourra faire des représentations, mais toutes les associations qui
existent présentement sur le territoire. Nous avons tenu à ce que
ce soit clair dans le projet de loi. C'était pour nous très
important, du point de vue du principe, que toute association de producteurs
puisse continuer à faire des revendications auprès de l'Etat. Il
n'y a aucun problème là-dessus, c'est très clair. C'est
à l'article 19 b): "représenter les producteurs en
général auprès des pouvoirs publics, de toute agence,
régie, commission ou groupement, chaque fois qu'il est de
l'intérêt général des producteurs de le faire, et
coopérer avec tout organisme poursuivant des fins similaires".
Donc, cela laisse clairement voir que tous les organismes agricoles qui
poursuivent des fins similaires, pas nécessairement
accrédités...
M. DEMERS: Pour autant qu'ils sont accrédités.
M. TOUPIN: Pas nécessairement.
M. DEMERS: Votre loi le dit, mon cher M. le ministre.
L'accréditation...
M. TOUPIN: Toute association qui veut continuer à faire des
représentations peut continuer à les faire, dans l'esprit du
projet de loi.
M. PIGEON: M. le Président...
M. DEMERS: Dans l'article, on dit que l'accréditation...
M. PIGEON: M. le Ministre, si on lit bien... M. DEMERS:
L'accréditation...
M. PIGEON: ... l'association qui va être accréditée,
c'est elle qui va avoir le droit de représenter en général
auprès des pouvoirs publics toute agence...
M. TOUPIN: C'est exact.
M. PIGEON: ... régie, commission, groupement, et
coopérer...
M. TOUPIN: Et coopérer avec tout organisme poursuivant des fins
similaires.
M. PIGEON: C'est l'association qui sera accréditée qui
aura ce droit.
M. TOUPIN: Ce droit-là.
M. PIGEON: Cela veut dire que les autres n'ont plus le droit de le
faire.
M. TOUPIN: Cela veut dire que toutes les associations qui poursuivent
des fins similaires, d'après le projet de loi, peuvent...
M. DEMERS: Etre accréditées...
M. TOUPIN: ... si elles le désirent faire des
représentations.
M. DEMERS: Pour autant qu'elles sont accréditées.
M. TOUPIN: Si elles poursuivent des fins similaires.
M. DEMERS: En tout cas! Ce n'est pas une réunion de
légistes.
M. BELAND: J'ai une question justement à adresser au ministre
faisant suite à cette explication supplémentaire qui porte
quelque peu à controverse. Tout au moins, la définition n'est pas
assez claire. C'est peut-être pour cela que vous apportez dans un autre
article l'obligation d'un référendum. Si je me
réfère au texte qui a été préparé
du moins un par la confédération de l'UCC, il est
très net qu'il n'y aurait certainement pas eu besoin de
référendum. C'est à la suite du bill tel que vous le
présentez que le référendum devient quasi obligatoire par
suite de l'ambuiguïté même du bill à certains endroits
précis, dont un vient d'être cité.
M. TOUPIN: Evidemment, je ne vois pas tellement d'ambiguïté.
Je reste persuadé que les autres organismes qui représentent les
producteurs peuvent continuer à faire des représentations
auprès de l'Etat.
M. DEMERS: ... au point de vue de l'efficacité parce qu'il faut
qu'ils soient accrédités, la loi le dit clairement. On aura beau
en parler, mais je tiens à le voir...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je voudrais poser une question au ministre.
On suppose que le référendum a eu lieu et que l'UCC devient la
Fédération des producteurs agricoles du Québec. Cela
devient un syndicat légalement constitué. Un groupe de
cultivateurs décide de former une association, soit par un
système de cartes d'adhésion ou autrement. Ils prennent la
majorité, demandent une autre accréditation et déplacent
la fédération qui est déjà là.
M. le Ministre, cela va plus loin que cela. C'est une loi
spéciale qui n'est pas soumise au code du travail. Dans le code du
travail, dès qu'une association est accréditée, il y a la
période légale de rodage qui est entre le 60e et le 30e jour
avant la fin d'une convention collective. La convention collective finissant le
31 décembre, du 1er novembre au 1er décembre un autre syndicat
peut faire une campagne de recrutement. S'il obtient la majorité, il
demande l'accréditation. Mais là, il n'y a pas de période
légale. Cela voudrait dire qu'en tout temps il pourrait se former une
autre association. Moi, je décide de former une autre association. Cela
m'intéresse, cette affaire. Je commence à sortir des cartes et je
prends 51 p.c. des membres. Là, n'importe quand, je demande
l'accréditation. Il n'y a aucune période légale de
prévue. Je pense que ce n'est pas normal. Il faut, quand un syndicat est
accrédité, que ce soit pour une période x, soit la
durée de la convention collective de travail. Dans le syndicalisme,
c'est comme ça que cela se passe. Ici, il n'y a rien qui prévoie
cela. Il pourra toujours y avoir des campagnes de maraudage en tout temps chez
les producteurs agricoles pour essayer de les faire démissionner et de
les faire entrer dans une autre association. Vous trouvez que cela va
créer un bon climat parmi les producteurs si cela peut se faire
continuellement?
M. TOUPIN: Selon la loi actuelle, il peut se former des associations
à côté de celle qui sera accréditée si
toutefois les agriculteurs conviennent d'en faire accréditer une.
M. DEMERS: C'est la Régie des marchés qui va
accréditer l'association?
M. TOUPIN: Tel que le projet de loi le démontre, c'est le
référendum qui accréditera l'association. Evidemment,
à côté de cela, il peut se former des associations de
producteurs.
Il est dit plus loin, je ne sais pas exactement à quel article,
que, si une association nouvelle qui naît croit, elle aussi,
représenter l'ensemble des agriculteurs du Québec, elle
présente une requête à la régie et celle-ci jugera
de l'à-propos, s'il y a lieu, d'un référendum ou pas.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Avec cela, vous allez avoir vos 100,000
emplois parce que cela va prendre du monde.
M. VINCENT: Oui, mais pour remplacer l'autre? M. le Président,
juste un éclaircissement de la part du ministre. Celui-ci vient de
mentionner que si un autre groupement désire l'accréditation
c'est la régie qui décidera si oui ou non elle doit aller au
référendum pour donner ou refuser l'accréditation de
l'autre association. A ce moment-là, M. le Président, il faudrait
être bien clair; cela signifierait par le fait même qu'il y aurait
une deuxième association accréditée. Il faudrait que le
ministre ajoute qu'en vertu du bill 64 cela enlèverait automatiquement
l'accréditation à la première. La première
accréditation tomberait là.
M. TOUPIN: Oui, s'il y a référendum, évidemment, la
régie est obligée d'aller au référendum. C'est le
référendum qui va décider de l'accréditation. Un
deuxième référendum demandera quel choix feront les
agriculteurs de telle ou telle association. C'est le
référendum
qui décidera cette fois-là quelle association sera
accréditée et les représentera.
M. VINCENT: Ce serait la section VI Révocation. Il faudrait
procéder d'abord par révocation d'une accréditation avant
d'aller dans un référendum pour qu'une autre association soit
reconnue. Je pense qu'il faudrait être explicite là-dessus parce
que cela pose...
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Les articles 7 et 8.
M. VINCENT: ... une question de principe.
M. LE PRESIDENT: Le député de Saint-Maurice.
M. DEMERS: Sur quel critère la régie va-t-elle se baser
pour savoir s'il y aura un référendum ou non? Actuellement
l'article F mentionne: Aux fins de s'assurer du caractère
représentatif d'une association qui demande l'accréditation, la
régie doit ordonner la tenue d'un référendum auprès
des producteurs. Mais sur quel critère va-t-on se baser? Sur le nombre
d'achalants qui vont se rendre à la porte?
M. CROISETIERE: On ne peut toujours pas demander de tenir des
référendums à tout bout de champ. Il faut qu'elle ait des
critères.
M. DEMERS: Actuellement la régie pour avoir un
référendum, par exemple si l'UCC ou la Coopérative veut en
obtenir un, doit le demander. Sur quel critère? Après qu'un est
passé, il y en a un autre qui arrive, par exemple, six mois
après.
M. VAILLANCOURT: Ils vont faire une liste de producteurs,
premièrement.
M. CROISETIERE: C'est toujours le même producteur qui est
bercé d'une façon ou d'une autre d'une association à
l'autre.
M. VAILLANCOURT: Ils vont faire une campagne électorale.
M. BELAND: A ce moment-là, le mot producteur va être
défini et il entre à l'intérieur de certains
barèmes, à savoir 25 p.c. ou plus de produits agricoles vendus
constituent son revenu et le reste.
M. DEMERS: ... fabriqués ici. Si le mot producteur n'est pas
défini, il n'y a rien à faire.
M. VAILLANCOURT: De la manière que je comprends cela, il va y
avoir une liste établie et une association va demander un
référendum à la régie. Je pense bien que la
régie sera obligée d'accepter le référendum et les
producteurs vont choisir une association ou l'autre. Ils vont voter pour
l'association à laquelle ils veulent appartenir.
M. CROISETIERE: Il faudrait tout de même définir ce qu'est
un agriculteur. Il faut établir la liste.
M. VAILLANCOURT: C'est entendu. Le producteur est défini dans la
loi.
M. DEMERS: Le député de Stanstead.
M. VAILLANCOURT: La liste sera établie d'après les
critères décrits dans la loi.
M. DEMERS: Mais disons qu'il y a un référendum et c'est
l'UCC qui est choisie. Au bout de neuf ou dix mois, un autre groupe demande
d'avoir un référendum; sur quel critère la régie
va-t-elle alors se baser pour accepter ou refuser le
référendum?
M. TOUPIN: Le député de Saint-Maurice devrait se
référer à l'article 6. Je pense qu'on a là les
explications, et par la suite on peut aller à l'article 20. Il y a
peut-être certains autres articles, mais à l'article 6, vous avez
les conditions que doivent remplir des associations pour demander
l'accréditation. Si l'association qui demande une accréditation
élabore un projet qui entre dans les cadres...
M. DEMERS: C'est 5 p.c. des producteurs.
M. TOUPIN: ... de la loi, à ce moment-là, selon l'article
20, la régie doit tenir un référendum,
c'est-à-dire: La régie peut également, d'office,
révoquer l'accréditation. Mais la régie doit tenir un
référendum de toute façon pour accréditer une
association. La régie peut aussi désaccréditer
l'association, si elle le désire. L'accréditation est
déterminée aux articles 5 et 6 notamment.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre, on parlait tantôt
d'une seule accréditation et les articles 7 et 8 la définissent:
une seule association peut être accréditée. Mais le
problème que je soulève, j'aimerais bien que vous en teniez
compte, car ce sera assez difficile à régler. Remarquez bien que,
si mon parti était au pouvoir, ce serait bien facile, mais, étant
donné que nous ne sommes pas encore au pouvoir...
M. DEMERS: Si les cultivateurs attendent après ça!
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ...nous sommes obligés de vous faire
des suggestions en attendant.
M. DEMERS: Je vous dis que ce n'est pas pour demain.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Au cas où ça prendrait encore
quelques mois.
UNE VOIX: C'est permis de rêver. M. DEMERS: C'est de votre
âge.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. le ministre si, dans la loi, il n'y a pas
de période légale où une autre association peut demander
une accréditation, il est certain que vous allez avoir des
problèmes. C'est garanti !
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): M. Pigeon.
M. PIGEON: M. le Président, je voudrais relever une affirmation
qu'a faite le député de Nicolet tout à l'heure. Je voulais
lui répondre et ça m'est sorti de l'idée tout de suite. Il
a dit que la Coopérative fédérée ne reconnaissait
pas le syndicalisme agricole. Nous disons dans notre mémoire...
M. VINCENT: Non, je n'ai pas dit ça. J'ai dit qu'il y avait des
petits conflits et parfois des gros.
M. PIGEON: ...que nous reconnaissons le syndicalisme unique. Nous le
disons là-dedans; c'est ce que nous reconnaissons. Ce que nous
n'acceptons pas, c'est la formule coercitive. Nous acceptons un syndicalisme,
mais volontaire avec déduction à la source pour les gens qui sont
consentants, comme ça se fait en France. Il ne s'agit pas d"'encarcaner"
les gens. Je pense que nous sommes encore dans un pays libre, dans la province
de Québec. On a vérifié un peu ce qui se passe en
Angleterre. Le syndicalisme agricole y est très puissant, mais on va
encore chercher des contributions de porte en porte. En France, on a permis la
déduction à la source, mais ça reste volontaire.
M. DEMERS: Seulement pour ceux qui veulent?
M. PIGEON: Ceux qui veulent, pour empêcher les gens d'aller de
porte en porte chercher des cotisations. On fait les déductions
volontaires pour ceux qui signent.
M. DEMERS: Ceux qui ne veulent pas?
M. PIGEON: On ne les fait pas. La moitié, à peu
près, des cultivateurs français font partie d'un syndicat. Nous
favorisons la formule volontaire, mais nous sommes favorables au syndicalisme
unique. Nous le disons dans notre mémoire.
M. VINCENT: Vous êtes favorable au syndicalisme à vocation
générale unique pour autant que la contribution ou la cotisation
syndicale soit volontaire. Vous préconisez le système
suivant.
M. PIGEON: De déduction à la source.
M.VINCENT: Si je comprends bien, les cotisations seraient retenues
à la source pour tous les producteurs, mais si un producteur cela
se fait dans certains pays ou dans certaines provinces même envoie
une lettre refusant que la cotisation soit retenue à la source, on ne
retient pas sa cotisation à lui, mais on retient les cotisations de tous
les autres producteurs. C'est le volontariat qui s'exerce dans certaines
provinces et dans certains pays. On retient à la source pour autant que
la personne elle-même ne spécifie pas dans une lettre qu'elle
refuse.
M. PIGEON: On avait pensé à un système inverse.
M. VINCENT: Pensez-vous à cet autre système?
M. PIGEON: Oui, mais, à ce moment-là, il faudrait informer
nos gens pour qu'ils envoient des lettres. D'abord, il y aura des
déductions et le gars ne sera pas content. Je préférerais
qu'on fasse signer une carte à ceux qui veulent adhérer. Nous les
donnerions à l'organisme qui achète les produits et il ferait les
déductions.
M. VINCENT: Si on gardait toujours le vieil adage: "Qui ne dit mot,
consent", celui qui ne dirait rien...
M. PIGEON: "Qui ne dit mot, consent" est peut-être beaucoup moins
vrai en 1971, avec la contestation qu'on vit, M. le député.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): Le député de Sainte-Marie.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): M. Pigeon, je comprends votre point de vue.
Naturellement, le syndicalisme agricole ne peut pas être identique au
syndicalisme dans l'industrie et tout cela. Tout de même, on peut faire
des comparaisons.
Dans le domaine industriel, par exemple, vous avez ce qu'on appelle la
formule Rand, c'est un genre de formule...
UNE VOIX: C'est ça.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): ... en autant que la majorité s'est
prononcée pour, même si quelqu'un ne veut pas adhérer au
syndicat, il va payer sa cotisation quand même, c'est la formule Rand
dans l'entreprise. Maintenant, qu'est-ce qui est le plus juste? Le juge Rand
qui a institué cette formule, son jugement est mort aussi, c'est parce
qu'il était très vieux quand c'est arrivé...
UNE VOIX: Il est mort.
M. PIGEON: Il n'est pas mort à cause de ça.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Qu'est-ce qui est le plus juste, est-ce
obliger tout le monde à payer quand tout le monde
bénéficie des services d'un organisme, ou si on laisse ça
sur une base de volontariat, que la moitié des gens paie, et que l'autre
moitié retire les mêmes bénéfices? Ils ont les
mêmes services de la fédération, ils jouissent des
mêmes privilèges. On ne peut pas leur refuser l'aide qu'ils
demandent, mais par contre c'est les 50 p.c. qui paient. Pour que l'organisme
fonctionne, pour qu'il ait l'argent nécessaire parce que
l'argent, il faut qu'il y en ait dans tous les organismes pour que le
syndicalisme fonctionne, ils seront peut-être obligés d'augmenter
la cotisation à $20, $25 ou $30. C'est ceux qui paieront qui seront
obligés de payer pour ceux qui ne paient pas, et qui continueront quand
même à bénéficier des mêmes privilèges.
Qu'est-ce qui est le plus juste?
Ce n'est pas dans les termes qu'il l'avait dit, mais c'était le
jugement du juge Rand, et c'est ce qui a établi la formule Rand dans le
syndicalisme. Il y en a un autre aussi, il y a l'atelier fermé; le gars
est dans le syndicat ou il est dehors. Mais cela il n'en est pas question. Il
n'est pas question de dire au gars: tu vas entrer dans le syndicat ou tu vas
rester dehors. Cela ne marche pas. C'est un jugement qui a été
jugé impartial et c'est pour ces raisons-là que la formule Rand
existe aujourd'hui. Mais, dans le secteur industriel, par contre, vous
êtes accrédité et après, si la formule Rand se
négocie entre l'employeur et les employés, ça entre dans
la convention collective de travail, ce qu'on ne peut pas faire dans ce cas-ci.
Mais on ne peut pas dire que ce n'est pas juste. Vous citez l'Angleterre et la
France, mais je peux vous citer des pays où ils ont le syndicalisme
agricole avec ce genre de formule-là.
M. PIGEON: En connaissez-vous?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je vais vous apporter la liste.
M. PIGEON: A vocation générale?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Ce n'est pas sur une base de volontariat. En
autant que la majorité a adhéré, tout le monde paie.
M. PIGEON: Un syndicat à vocation générale?
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Je vais être obligé d'aller
derrière le rideau de fer et peut-être dans...
M. PIGEON: D'accord, si vous allez là.
M. GIASSON: Il ne faut pas s'en faire, il n'y a pas de syndicalisme
là-bas.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il y en a, il n'y en a qu'un pour tout.
M. PIGEON: M. le député de Sainte-Marie, nous sommes
contre la formule Rand pour le syndicat à vocation
générale. On a donné des exemples ce matin, le
député de Nicolet a donné l'exemple du type qui produisait
300,000 livres de lait. On repaie une deuxième fois par en
arrière; c'est une formule Rand et vous n'avez pas le choix; par la Loi
des marchés agricoles, ça revient par en arrière, c'est
une deuxième qu'on paie, celle-là est déguisée
parce que, dans le projet de loi, il n'en est pas question.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Oui, d'accord.
M. PIGEON: Elle y est, la formule Rand, dans le plan conjoint, vous
n'êtes pas capable de passer à côté, c'est
obligatoire.
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): C'est humain ça, on est tellement
porté à ne pas payer quand on sait que l'on va recevoir les
services, c'est un problème humain.
M. TOUPIN: M. le Président, je voudrais apporter une
précision, c'est que je ne pense pas que ce soit déguisé
dans le projet de loi. C'est très clair que s'il y a acceptation par
référendum, les fédérations
spécialisées devront payer 20 p.c, et c'est un maximum de 20 p.c,
ce n'est pas déguisé, c'est très clair.
M. PIGEON: M. le ministre je n'ai pas dit qu'elle était
déguisée dans cette partie-là, mais l'autre partie c'est
tout de même la contribution du producteur, il y a 20 p.c. de sa
contribution qui s'en va au syndicat spécialisé...
M. TOUPIN: C'est exact.
M. PIGEON: ... qui s'en retourne à la
fédération.
M. TOUPIN: Ce n'est pas déguisé non plus, comme le
député de Nicolet le disait ce matin, comme nous le disions nous
aussi, lorsque le producteur, paiera son prélevé à un plan
conjoint, il acceptera, par le fait-même, en vertu du projet de loi, s'il
est approuvé, de prendre 20 p.c. de ce prélevé pour
financer une association professionnelle dite à vocation
générale.
M. PIGEON: Cette partie-là est déjà obligatoire,
c'est à l'autre que nous nous opposons.
M. VINCENT: J'aurais une question...
M. TOUPIN: ... c'est à dire qu'on n'ajoute pas à la...
M. VINCENT: J'aurais une question à poser au ministre. Si,
advenant un référendum, la majorité vote en faveur d'une
seule association accréditée, mais vote contre la cotisation
obliga-
toire de $15, est-ce que la seule association accréditée
percevra quand même les 20 p.c. de contribution des
fédérations affiliées?
M. TOUPIN: Non, c'est très clair aussi dans le projet de loi. Je
pensais que le député de Nicolet l'avait lu plus en
profondeur.
M. VINCENT: On reviendra là-dessus.
M. TOUPIN: Le référendum qui porte sur la cotisation
obligatoire porte sur les deux à la fois, sur les $15 et sur les 20 p.c,
c'est ça la cotisation obligatoire. Quant à
l'accréditation, c'est une autre partie du référendum qui
exige un pourcentage un peu moindre que celui de la formule Rand, deux choses
bien séparées, bien claires.
S'il y a accréditation, seulement par voie de
référendum, il y aura donc seulement accréditation.
M. VINCENT: Il y aura seulement accréditation de
l'association.
Et elle sera à ce moment-là dans l'obligation de
prélever sur une base de volontariat les contributions des membres
individuellement et également si le vote est refusé par
référendum, les associations ou les fédérations de
producteurs spécialisées ne pourront pas, même si elles le
désirent, donner jusqu'à un maximum de 20 p.c. de leur
contribution?
M. TOUPIN: Je ne pense pas qu'on puisse aller jusque-là. S'il y a
entente qui interviendrait.
M. VINCENT: Est-ce possible présentement même avec une
entente sans législation?
M. TOUPIN: Présentement il y a des contrats de service qui
existent entre l'association générale de producteurs qu'on
appelle communément l'UCC...
M. VINCENT: Des contrats de service?
M. TOUPIN: Oui et les fédérations
spécialisées, il existe des ententes... Je ne sais pas comment on
appelle ces ententes, je ne sais pas si ce sont des contrats de service, mais
il existe des ententes entre les deux groupes. Evidemment, si l'association ne
reçoit que le mandat d'accréditation, elle pourra continuer
à fonctionner aussi dans cette voie-là. Comme si cette
association accréditée existait auparavant.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): M. Allain, vous aviez quelque chose à
ajouter?
M. ALLAIN: C'est qu'en fait déjà les
fédérations spécialisées et la
confédération ont institué cette habitude-là,
ça existe et ça existe en vertu de services. On en est venu
à l'opinion qu'il y avait un intérêt pour les
fédérations spécialisées de se donner des services
communs par le truchement de la confédération. Que ce soient des
services en économique, en recherche, cela importe peu. La question qui
entre sous économie, les intéressés pensent que c'est
utile que la fédération soit équipée en
conséquence et qu'ils puissent y avoir recours. C'est la même
chose pour les services d'information.
Cela peut être la même chose pour un service d'informatique.
Il y a une opinion qui a pris forme et il y a une habitude qui s'est
créée, c'est de payer mutuellement ou assumer mutuellement des
dépenses pour des services qui sont redistribués à toutes
les fédérations spécialisées. Ce dont il est
question dans la loi c'est déjà quelque chose qui vaut à
l'heure actuelle.
M. LE PRESIDENT: Il n'y a pas d'autres questions; je remercie M. Pigeon
de la Coopérative fédérée de Québec.
M. VINCENT: M. le Président, si vous me le permettez, on avait
demandé, à la dernière réunion, à la
Corporation des agronomes de nous préparer, d'après eux, la
meilleure définition du terme ou du mot "producteur". Nous voyons ce
matin que la Corporation des agronomes de la province de Québec nous a
présenté en annexe des commentaires sur le bill 64, je vous
demanderais, M. le Président, si c'est le voeu de la commission, s'il y
a un représentant de cette corporation qui pourrait...
M. PIGEON: Ils sont partis.
M. LE PRESIDENT: On peut demander que le texte soit déposé
au journal des Débats.
M. TOUPIN: Je n'ai pas d'objection.
M. VINCENT: On pourrait faire inscrire au journal des Débats en
annexe les commentaires sur le bill 64; sans faire de jaunisme, c'est la page
jaune des pages roses. (Voir Annexe)
M. TREMBLAY (Sainte-Marie): Il y a un représentant qui
était venu devant la commission et qui avait dit qu'il nous ferait
parvenir cela. Il n'avait pas dit qu'il reviendrait à la commission.
M. LE PRESIDENT (Ostiguy): La prochaine séance aura lieu le 23
septembre à dix heures. Les organismes qui se feront entendre seront :
le Conseil de l'alimentation du Québec, l'Association professionnelle
des meuniers du Québec et le Conseil du patronat du Québec.
La séance est ajournée jusqu'au 23 septembre, dix heures
de la matinée.
(Fin de la séance: 15 h 51)
ANNEXE Commentaires sur le projet de loi no 64
Considérations sur la définition du terme "producteur"
dans la loi du Syndicalisme agricole
Faisant suite à nos commentaires à ce sujet, et suite
à un désir exprimé lors de la dernière
séance de cette commission, nous avons consulté et
réexaminé de plus près la définition du terme
"producteur" dans la loi du syndicalisme agricole.
A cause de la difficulté de les vérifier et de la
possibilité d'un changement très fréquent, nous avons
laissé tomber l'idée de normes quantitatives de production ou de
revenus dans cette définition.
Nous ne voudrions pas trop pénaliser le producteur
considéré comme marginal, mais nous aimerions que ce dernier soit
stimulé à devenir rentable le plus tôt possible. Dans ce
sens, la loi du syndicalisme agricole pourrait aider à bonifier
l'agriculture.
Nous sommes donc prêts à recommander pour votre
considération une des définitions suivantes: "Producteur" Une
personne activement engagée dans la production d'un produit agricole
destiné à la vente, sauf une personne qui exploite la forêt
sauf quand elle exploite la partie boisée de sa ferme. "Producteur"
Toute personne reconnue dans son entourage comme vivant du travail de la ferme
et dont la vente des produits qu'il en obtient, constitue une partie importante
de son revenu, sauf une personne qui exploite la forêt sauf quand elle
exploite la partie boisée de sa ferme.
Montréal, 2 septembre 1971.