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Version finale

29e législature, 4e session
(15 mars 1973 au 25 septembre 1973)

Le mardi 1 mai 1973 - Vol. 13 N° 17

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Etude des crédits du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation


Journal des débats

 

Commission permanente de l'agriculture et de la colonisation

Etude des crédits

du ministère de l'Agriculture

et de la Colonisation

Séance du mardi 1er mai 1973

(Dix heures treize minutes)

Préliminaires

M. HOUDE, Limoilou (président de la commission permanente de l'agriculture et de la colonisation): A l'ordre, messieurs!

Etude des crédits 73/74. Au départ, je tiendrais à faire remarquer que M. Pilote remplace M. Lacroix, des Iles-de-la-Madeleine, et que M. Gratton remplace M. Ostiguy, de Rouville.

M. JORON: M. le Président, je remplace M. Tremblay (Sainte-Marie).

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): M. Joron, de Gouin, remplace M. Tremblay (Sainte-Marie).

M. DEMERS: M. le Président, pouvez-vous donner la liste des membres de la commission?

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Oui, avec plaisir: M. Béland, Lotbinière; M. Carpentier, Laviolette; M. Demers, Saint-Maurice; M. Dionne, Compton;M. Faucher, Yamaska; M. Fraser, Huntingdon; M. Pelletier, Ka-mouraska; M. Toupin, Champlain; M. Joron, remplace M. Tremblay (Sainte-Marie); M. Vincent, Nicolet.

L'honorable ministre de l'Agriculture.

Etat de l'agriculture

M. TOUPIN: M. le Président, avant de commencer l'étude des crédits du ministère, si vous me permettez, je voudrais seulement faire un bref résumé du comportement de l'agriculture au Québec en 1972.

Evidemment, en dépit des problèmes que l'agriculture a rencontrés au cours de l'année 1972, nous pouvons, je crois, soutenir que la situation s'est quand même sensiblement améliorée par rapport à l'année 1971 et par rapport également aux années d'avant 1971.

L'ombre au tableau a été, bien sûr — tout le monde l'a constaté — le mauvais temps de l'année 1972, qui eut pour effet d'agir sur la qualité et sur la quantité des produits de ferme. La demande des intrants, ou des entrées en agriculture, est demeurée tellement forte que les coûts de production, surtout au dernier trimestre, septembre, octobre, novembre et décembre, ont grimpé à un rythme effarant. Je vais apporter certaines statistiques pour le démontrer.

Les aliments pour les animaux, par exemple. Au premier trimestre de l'année 1972, on constatait, aux termes des statistiques, 4.5 p.c. en moins par rapport à l'année 1971. Au deuxième trimestre, on constatait 3.3 p.c. en moins en 1972, par rapport à 1971. Là, je parle toujours des aliments pour animaux de ferme.

Au troisième trimestre, c'était 0.8 p.c. en moins en 1972, par rapport à 1971. Mais le quatrième trimestre a été vraiment désastreux.

On a constaté une augmentation des coûts de 9.2 p.c, ce qui a fait, au fond, que le quatrième trimestre a presque détruit, tout compte fait, les avantages au niveau des entrées en agriculture que les agriculteurs s'étaient vu offrir par la conjoncture au cours des trois premiers trimestres.

Au niveau des engrais — et là on ne parle pas seulement des engrais chimiques mais de tous les engrais qui entrent en agriculture — au premier trimestre, c'était 2.7 p.c. en moins par rapport à 1971; au deuxième, c'était 0.6 p.c. en moins par rapport à 1971. On parle toujours, bien sûr, des engrais. Au troisième et au quatrième trimestre, nous avons constaté des augmentations. Au troisième trimestre, 1.6 p.c. en plus et, au quatrième trimestre, 9.1 p.c. en plus en chapitre des engrais.

Les engrais et les aliments, à eux seuls, au niveau des entrées en agriculture, c'est-à-dire ce dont les agriculteurs ont besoin pour alimenter la ferme, représentent à peu près 32 p.c. du total des entrées en agriculture.

Un secteur, au niveau de l'exploitation de la ferme, qui, lui, au cours de l'année 1972, par rapport à l'année 1971, a été défavorable à l'agriculture, c'est celui de la main-d'oeuvre. La main-d'oeuvre représente 11.5 p.c. ou à peu près des sommes que dépense l'agriculteur pour exploiter sa ferme par rapport, par exemple, à 32 p.c. des deux éléments dont je parlais tantôt.

L'augmentation, pour l'année 1972, au niveau de la main-d'oeuvre, s'est située à 6 p.c. pour le premier trimestre, à 6 p.c. pour le deuxième également; pour le troisième trimestre, à 6.3 p.c. et, pour le quatrième, à 5.8 p.c. Cela s'explique parce que le quatrième trimestre, c'est celui de l'automne et de l'hiver. Et là la main-d'oeuvre agricole est beaucoup moins en demande. Par conséquent, évidemment, l'augmentation des salaires peut être un peu moins élevée qu'au cours des trimestres où la main-d'oeuvre est plus en demande.

Nous constatons immédiatement qu'à l'exclusion de la main-d'oeuvre agricole c'est surtout le dernier trimestre qui a contribué à détériorer la situation et plus particulièrement au chapitre des aliments. Je n'apprends rien quand je dis que nous n'avons, pour le moment, aucun contrôle sur le prix des entrées en agriculture.

Il y aurait peut-être avantage à chercher un mécanisme de contrôle à ce chapitre des entrées en agriculture, si toutefois un tel mécanisme de contrôle était institué au niveau des prix à l'alimentation.

II nous paraîtrait tout à fait illogique, si on contrôlait les prix des produits agricoles d'une part, si nous ne mettions pas en parallèle un mécanisme pour contrôler les prix des entrées en agriculture. Encore une fois, ce serait bien sûr l'agriculteur qui serait obligé de se serrer la ceinture.

Toutefois, même si le prix des entrées a augmenté, il demeure que les prix des produits agricoles eux aussi ont augmenté. Peut-être que la hausse n'a pas été suffisante, surtout pour le dernier trimestre. Mais elle s'est située en général en haut de celle des prix des entrées en agriculture.

Les fermes bien équipées, bien gérées ont sans aucun doute réalisé des gains en 1972, beaucoup plus substantiels qu'en 1971 et plus substantiels aussi qu'aux années avant 1971. Et je voudrais apporter quelques exemples: en 1971, au niveau des produits laitiers, les ventes totales ont été de $261,300,000. En 1972 — et là il s'agit d'estimations un peu plus justes que celles que nous avions faites au moment où nous avons parlé de la conjoncture économique de l'agriculture — les estimations étaient de $289,165,000, ce qui représente en plus une augmentation des prix d'environ 10.7 p.c. au chapitre des produits laitiers.

M. VINCENT: $289 millions?

M. TOUPIN: $289,165,000, des estimations.

M. VINCENT: Dans les chiffres qu'on avait mentionnés on donnait combien?

M. TOUPIN: En 1971, les chiffres qu'on a, $261,300,000, en janvier.

M. VINCENT: Mais en 1972... En janvier on avait mentionné combien?

M. TOUPIN: $296 millions dans la conjoncture des chiffres.

M. VINCENT: Cela se confirme.

M. TOUPIN: On va les regarder tantôt, ces statistiques. Quant aux légumes, en 1971, $19,700,000 avaient été, en termes de prix, distribués aux agriculteurs.

En 1972, aux termes des légumes, c'est $22,054,000. On est toujours dans l'ordre des estimations; ça peut varier de quelques millions de dollars pour l'année 1972, ce qui représente un peu plus de 11.9 p.c.

M.VINCENT: L'estimation, au mois de janvier, était de combien pour les légumes?

M. TOUPIN: A peu près $20 millions. Nos estimations, à ce chapitre, étaient trop basses, alors que, dans le lait, elles étaient quelque peu trop élevées.

M. BELAND: Pour les légumes, si j'ai bien saisi, c'est une augmentation?

M. TOUPIN: C'est une augmentation de 11.9 p.c.

M. BELAND: De production? M. TOUPIN: Des prix. M. BELAND: D'accord.

M. TOUPIN: Dans le domaine du porc, en 1971, les agriculteurs ont vendu pour $83,525,000. En 1972 —on est toujours dans les estimations parce que les chiffres officiels viendront un peu plus tard— $106,351,000, soit une augmentation d'environ 27 p.c.

Ces exemples, d'après nous, suffisent à démontrer que les gains enregistrés par les agriculteurs sont réels, qu'on le veuille ou non. Cela peut varier de quelque pourcentage, cela peut varier de quelques millions de dollars, mais les gains sont réels par rapport à 1971. Ils le sont encore davantage par rapport à 1970 et davantage par rapport aux années antérieures.

M. VINCENT: Pas 1970.

M. TOUPIN: Quand vous prenez la moyenne des gains.

M. VINCENT: Non parce qu'en 1971 il y a eu une diminution dans toutes les productions à cause de facteurs extraordinaires.

M. TOUPIN: Oui.

M. VINCENT: Là, on compare l'année 1972 à l'année 1971, alors que les prix étaient très bas...

M. TOUPIN: Oui, c'est encore supérieur.

M. VINCENT: ... et les productions aussi. En 1971, il y a eu une diminution dans tout.

M. TOUPIN: II y a eu une diminution des productions, il y a eu une augmentation des coûts, mais, quand vous regardez les revenus de l'agriculteur, ce que l'agriculteur touche en tant que revenus...

M. VINCENT: C'était inférieur en 1971.

M. TOUPIN: ... ce n'est pas inférieur, c'est supérieur en 1971. Vous n'avez qu'à regarder le prix du lait. Il faut quand même être réaliste. Depuis deux ans, le prix du lait a augmenté de près de $1.50 le cent livres.

M. ROY (Beauce): Est-ce que ça veut dire que notre ministre de l'Agriculture se réjouit de l'inflation?

M. TOUPIN: Non. Cela veut dire que le ministre de l'Agriculture se réjouit du fait que les agriculteurs du Québec sont en train de se prendre une part importante de l'économie en dépit de l'inflation ou avec l'inflation.

M. ROY (Beauce): Est-ce que l'honorable ministre de l'Agriculture se rend compte de la diminution alarmante du nombre d'agriculteurs au Québec?

M. TOUPIN: Ce qui est tout à fait normal; il n'y a rien d'anormal actuellement.

M. ROY (Beauce): C'est normal pour l'agriculture!

M. TOUPIN: II n'y a rien d'anormal à ce que des agriculteurs quittent la ferme actuellement et qu'on arrête donc de faire du chichi avec cette affaire-là. C'est tout à fait normal que des agriculteurs quittent la ferme; l'agriculture est en train de se refaire économiquement et un certain nombre de petites fermes devront arrêter de produire. C'est tout à fait normal.

M. ROY (Beauce): Devront arrêter de produire ou on devra permettre à ces petites fermes d'augmenter leur production?

M. TOUPIN : Vous ne pouvez quand même pas demander à un agriculteur de cultiver 40, 50 acres de terre quand il n'en a que 20. Demandez-lui de grouper sa ferme avec celle d'un autre, puis à ce moment-là il y en a un qui va disparaître. C'est aussi simple que ça.

M. ROY (Beauce): Le ministre ne veut pas comprendre.

M. TOUPIN: Alors donnez plus d'explications.

M. ROY (Beauce): Si on regarde les statistiques, il y a bien des choses que le ministre n'a pas dites, probablement qu'il n'a pas eu le temps. Quand on regarde les statistiques publiées par le ministère de l'Industrie et du Commerce, si on regarde la production du beurre de crémerie, entre autres, la production de fromage, si on prend, par exemple, le mois de janvier, je comprends que la production est moins élevée dans le mois de janvier, mais il y a quand même une diminution comparativement à celle de l'année dernière, alors qu'on nous parle d'amélioration dans tous les domaines.

Alors on constate qu'à l'heure actuelle, 80 p.c...

M. TOUPIN: Si vous voulez, M. le Président, je vais revenir aux produits laitiers tantôt. On parlera tantôt des produits laitiers.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre !

M. TOUPIN: On pourra vous les donner les uns après les autres. Si vous voulez faire des interventions à ce moment-là au chapitre de chacun des produits, ou à peu près, vous pourrez en faire.

M. VINCENT: M. le Président, juste avant que le ministre continue, sur un point de règlement, je voudrais vous demander une directive. Est-ce que nous allons discuter de façon générale pendant quelques heures...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Oui.

M. VINCENT: ... il faut quand même faire attention, M. le Président, est-ce qu'on a l'intention de limiter la discussion à dix heures sur les crédits de l'agriculture? D'après les nouveaux règlements...

M. TOUPIN: C'est dix heures.

M. VINCENT: Bien oui c'est ça, d'après les nouveaux règlements. Après dix heures de discussion, on peut tout arrêter. Le gouvernement peut tout arrêter. Est-ce qu'on a l'intention de limiter ça à dix heures?

M. TOUPIN: J'ai l'impression que, du moins pour le moment, on doit s'en tenir au règlement.

M. VINCENT: Comme ça on a l'intention de limiter ça à dix heures. Donc, cela veut dire, M. le Président, que le ministre peut parler sur des statistiques, corrigeant les statistiques qu'il a données au mois de janvier, ça peut durer deux ou trois heures, puis on n'a pas le temps du tout d'étudier les articles du budget.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Non. J'ai permis au ministre de l'Agriculture de faire un bref exposé, et je pense que si vous ne le questionnez pas trop pendant son exposé, ça ne sera pas trop long, et à la suite de ça, vous pouvez peut-être corriger son exposé, si...

M. VINCENT: J'aimerais bien qu'on s'entende...

M. TOUPIN: S'il y a lieu de corriger.

M. VINCENT: J'aimerais bien qu'on s'entende tout de suite, M. le Président, pour la bonne marche des travaux. Combien de temps le ministre a-t-il l'intention de prendre?

M. TOUPIN: Je ne prendrai pas dix heures. J'en ai à peu près...

M. VINCENT: Pas dix heures, mais si le ministre prend une heure, si moi je prends une heure, si le député de Lotbinière prend une heure, si le député de Gouin prend une heure,

ça fait quatre heures de discussion. Il reste six heures pour examiner chaque article du budget.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Bien vous aurez alors touché à tous les domaines.

M. DEMERS: II y a des détails, tous les domaines sont là-dedans.

M. TOUPIN: Bien oui, M. le Président, il faut qu'on nous pose des questions, le nombre de y, le nombre de z. Vous voulez tout avoir ça?

M. DEMERS: Oui, en tout cas.

M. VINCENT: M. le Président, c'est normal. Dans l'administration du ministère, il faut des détails précis sur certains programmes.

M. TOUPIN: Je suis bien d'accord sur ça, mais pendant ce temps-là vous prenez le temps pour...

M. VINCENT: Là le ministre...

M. TOUPIN: ... alors que vous prenez le temps pour connaître le secrétaire de l'Abitibi, vous n'avez pas...

M. VINCENT: Le ministre profite de l'étude des crédits du ministère de l'Agriculture pour corriger les déclarations qu'il a faites au mois de janvier, alors qu'il déclarait que les agriculteurs ont fait 44.1 p.c...

M. TOUPIN: M. le Président, je ne corrige rien. Nous sommes dans une perspective de conjoncture et je croyais très honnêtement que le député de Nicolet était capable de faire la différence entre des statistiques officielles et des statistiques conjoncturelles.

M. VINCENT: C'est justement ce que je disais.

M. TOUPIN: Alors, s'il est capable de faire la différence, qu'il me laisse parler et qu'il arrête de croire et de faire croire aux autres que tout ce que l'on dit est absolu.

M. VINCENT: Ce n'est pas nous qui l'avons dit.

M. TOUPIN: Qu'on s'en tienne aux documents, qu'on les lise comme il faut et qu'on les interprète dans leur contexte.

M. VINCENT: Pendant combien de temps le ministre a-t-il l'intention de discourir?

M. TOUPIN: Je vais prendre à peu près encore une demi-heure ou trois quarts d'heure, si vous me laissez parler.

M. VINCENT: Encore une demi-heure, trois quarts d'heure?

M. TOUPIN: Mettons une demi-heure, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): D'accord.

M. TOUPIN: Evidemment, d'après le règlement, c'est dix heures, mais on peut peut-être aller à douze heures.

M. ROY (Beauce): II n'y a rien qui vous empêche, M. le Président...

M. VINCENT: On peut aller à quinze ou vingt heures.

M. TOUPIN: Oui, d'accord.

M. DEMERS: Et il y a le bâillon, après cela, quand ça ne marche pas.

M. TOUPIN: Tenons-nous au règlement et on verra, en cours d'étude, si c'est nécessaire de prolonger ou pas. Je continue, M. le Président. Nous sommes d'avis, par ailleurs, que les gains réalisés ne sont pas encore suffisants et qu'il nous faudra intensifier davantage nos efforts, et ce à tous les niveaux, pour soutenir une structure de prix en agriculture qui soit, dans sa courbe montante, un peu plus élevée que l'augmentation des coûts des entrées en agriculture afin de rattraper les écarts encore trop grands qui existent entre le revenu agricole et le revenu des autres secteurs de l'économie.

Dans le but d'aider les agriculteurs à traverser cette difficulté de température au cours de l'année 1972, nous avons, en collaboration avec le gouvernement fédéral, appliqué certaines politiques. Quant au gouvernement provincial, il s'est limité à des prêts subventionnés; quant au gouvernement fédéral, à la suite d'une entente, il a versé des subventions directes aux agriculteurs. Le gouvernement du Québec a, lui aussi, versé des subventions directes aux agriculteurs victimes de la température, mais surtout à ceux qui n'étaient pas couverts par des programmes d'assurance-récolte. Seulement au chapitre des subventions directes, le gouvernement du Québec aura versé au-delà de $5 millions, en plus des millions qu'il aura à verser — peut-être $1 million et demi ou $2 millions — au cours des années à venir en vue de rembourser une partie de l'intérêt aux agriculteurs qui emprunteront en vertu du programme que nous avons mis de l'avant.

De là, d'ailleurs, est née une loi spéciale pour venir en aide aux agriculteurs au cours des périodes difficiles.

Cette loi n'existait pas et maintenant nous serons en mesure d'aider, dans le plus bref délai, à cause de cette loi, les agriculteurs qui seront aux prises avec des problèmes similaires. Et

pour aider à corriger encore davantage la situation, nous n'avons pas, au gouvernement du Québec, ni à la Régie des marchés agricoles, hésité à augmenter le prix du lait nature. Nous n'avons pas non plus, au niveau du ministère de l'Agriculture, hésité à approuver les producteurs de lait industriel dans leur demande d'augmentation de prix à la Commission canadienne du lait et par conséquent au gouvernement fédéral. Dans les deux cas, il s'agit ou il s'agira — dans le lait nature il s'agit, parce que c'est en vigueur, je pense, depuis le 1er avril — d'une augmentation d'au moins $0.60 les cent livres et, au niveau des producteurs de lait industriel, il s'agit au moins d'une augmentation de $0.50 et peut-être même $0.60.

M. BELAND: Brut ou net?

M. TOUPIN: Net, d'après les politiques de la Commission canadienne du lait. Un aspect nouveau dans le domaine de l'agriculture québécoise a été constaté en 1972, à notre point de vue. Il s'agit de l'aspect des consommateurs. Qu'on le veuille ou non, les consommateurs québécois sont directement impliqués dans le domaine de l'agriculture. Il nous semble à nous que les consommateurs québécois comprennent un peu mieux le problème de l'agriculture. Ils ont accepté, pour une fois en tout cas, à ma connaissance, une augmentation des prix du lait nature sans faire des représentations de quelque nature que ce soit. Ils se sont dissociés aussi, les consommateurs québécois, du boycottage des viandes qui a sévi dans les autres provinces du pays — au moins dans une autre — et dans les autres pays du monde.

Cela nous paraît être une attitude très positive du consommateur à l'égard des problèmes de l'agriculture. Je voudrais bien, à ce chapitre, qu'on m'interprète bien. Il est bien sûr que, quand les prix augmentent, la part du budget du consommateur mise pour l'alimentation est plus grande, mais il a compris quand même que l'agriculteur avait besoin de revenus plus substantiels et plus généreux s'il voulait, lui, être en mesure de développer sa ferme.

Dans sa conférence de presse, le député de Nicolet, le 1er mars, avouait ses craintes quant â l'acceptation de l'augmentation des prix des produits agricoles par les consommateurs.

Nous avions annoncé, à ce moment-là, une augmentation substantielle des prix. Je pense que le député de Nicolet a mal compris le consommateur québécois et surtout il lui a prêté des intentions qu'il n'avait pas et il le confirmait, par la suite, de façon positive. Le consommateur québécois accepte, comme l'ensemble des autres secteurs de l'économie, que l'agriculture du Québec doit se développer. Si on veut qu'elle se développe, il faut, là comme ailleurs, y mettre des prix sinon nous continuerons à décourager les agriculteurs et nous continuerons à voir non seulement de petits agriculteurs quitter leur ferme, mais aussi des moyens et de gros agriculteurs quitter leur ferme.

Lorsque nous avons assumé la responsabilité de diriger le ministère de l'Agriculture en 1970, nous nous étions fixé des objectifs précis, notamment celui d'améliorer les revenus en agriculture. Nous constatons, aujourd'hui, en dépit de l'interprétation que l'on peut donner, bien sûr, aux statistiques disponibles, que les agriculteurs ont touché davantage à ce qu'ils avaient touché l'année précédente et à ce qu'ils ont touché dans le cours des années antérieures. Non seulement l'on considère, mais l'on constate qu'il y a véritablement augmentation des gains au niveau des agriculteurs. Je pense que personne ne peut le nier. Ces gains sont évidents. Ils sont réels. Vous n'avez qu'à regarder l'augmentation des prix des principales productions agricoles au Québec, notamment le lait, et vous allez le constater.

Si une partie de l'objectif a été atteinte, c'est sans doute attribuable, pour une grande part, pas exclusivement... on est bien conscient que le ministère de l'Agriculture, tant le ministère provincial que le ministère de l'Agriculture fédéral, ne peut pas contrôler tous les éléments qui agissent sur les prix en agriculture, sur la demande en agriculture, sur l'offre en agriculture, etc. Mais il reste que lorsque les programmes, que nous mettons de l'avant, sont adaptés aux réalités agricoles, correspondent à de véritables besoins de l'agriculture, et quand nous constatons surtout que ces programmes sont utilisés assez substantiellement par l'agriculteur, nous devons en arriver, bien sûr, à la conclusion que ces programmes ont joué un rôle dans le développement de l'agriculture. Il serait avantageux, je crois, pour le bénéfice des membres de la commission, de s'attarder sur les plus importants de ces programmes.

On va commencer par le secteur de la production. Nous avons, en 1970, réorganisé notre mesure d'insémination artificielle par rapport à ce qui existait auparavant. En 1970, 175 unités, ou 175 vaches laitières, s'étaient prévalues, par l'intermédiaire du propriétaire bien sûr, de l'insémination artificielle, ce qui représentait...

M. DEMERS: C'est de la frustration.

M. TOUPIN: Ce qui est encore plus frustrant, M. le député de Saint-Maurice, c'est qu'il y en avait seulement 17 p.c. au Québec alors qu'il y en avait 40 p.c. en Ontario. En 1972, c'est le contraire. C'est 404,000 unités qui représentent 44 p.c. au Québec. C'est extrêmement important parce que nous agissons directement sur la génétique, c'est-à-dire sur l'amélioration de la race.

M. DEMERS: Cela nous aide.

M. TOUPIN: Le médecin vétérinaire qui est là,...

M. DEMERS: Vous nous apprenez des choses.

M. TOUPIN: ...il faut que j'y aille avec des termes prudents.

Un autre programme qui a attiré de façon bien particulière l'intérêt des agriculteurs est notre programme d'assurance-santé animale. En 1970, quatre-vingt médecins vétérinaires seulement, ou à peu près au Québec pratiquaient la médecine vétérinaire. En 1972, nous en avions 168. Vous pouvez constater immédiatement l'augmentation des services à la ferme de la médecine vétérinaire. C'est extrêmement important, quand nous constatons les dizaines de millions de dollars que perdent les agriculteurs à cause, très souvent, d'une mauvaise santé animale.

Il y eut, sur les fermes, au delà de 274,398 visites de médecins vétérinaires. Cela aussi, c'est un indice très important de l'intérêt que portent les agriculteurs au programme et des efforts que font les médecins vétérinaires pour améliorer la santé animale au Québec.

Les coûts moyens de ce programme par visite, au Québec, ont été seulement de $11.04 alors qu'au Nouveau-Brunswick, en vertu des statistiques que nous avons, un programme similaire coûterait plus de $20 par visite. Le programme d'assurance-santé animale prévoyait également une protection au niveau des médicaments vétérinaires, les médicaments qu'utilisent les vétérinaires dans leurs visites, soit les injections ou autres. Nous constatons une diminution de près de 100 p.c. dans le domaine des coûts, à cause de notre programme. Pour le coût des médicaments vendus à l'agriculteur dans des bouteilles ou dans d'autres contenants, nous constatons une diminution qui approche les 40 p.c. Ce sont là, croyons-nous, des programmes qui ne peuvent faire autrement que d'aider l'agriculture à se développer, quoi qu'on en dise et quoi qu'on en pense.

Nous avions prévu des achats de médicaments pour environ $500,000 et nous sommes actuellement rendus à des achats qui vont atteindre peut-être $2 millions.

Un autre programme qui attire notre attention — et il est extrêmement important, il se situe dans le contexte de l'orientation des productions et dans le contexte de l'utilisation de tout ce que nous avons comme ressources agricoles au Québec, de même que dans le contexte d'une demande de marché qui est très évidente — c'est le programme de production de bovins ou encore le programme d'élevage.

En 1970, le Québec comptait environ 35,000 têtes de bétail d'élevage. On parle toujours du boeuf de boucherie quand on parle de bétail d'élevage. En 1972, nous comptons 53,000 têtes, deux ans après. Il nous paraft évident que ce programme a été acheté par les agriculteurs. Les agriculteurs ont épousé ce programme parce que nous avons près de 40 p.c. ou 44 p.c. d'augmentation dans deux ans seulement. Et si nous continuons à ce rythme à développer cette production, dans le cadre de ce que nous avons appelé, nous, une sorte d'autosuffisance dans le domaine de l'agriculture, nous allons en atteindre tout au moins une partie si nous ne l'atteignons pas en totalité.

Seulement en Abitibi, par exemple, là où le programme a été le plus intensifié, en 1970 il y avait environ 2,000 têtes de bétail de boucherie et, en 1972, nous avons dépassé les 10,000. C'est fantastique l'intérêt que portent les agriculteurs à ce programme et la compréhension qu'ont les agriculteurs des marchés disponibles et des besoins réels des consommateurs.

Un nouveau programme avait été mis de l'avant aussi dans le cadre de la production; il s'est agi du programme F-l, c'est-à-dire un croisement d'un type de boucherie avec des vaches laitières.

En 71/72 ce programme a rapporté aux agriculteurs environ $600,000 de plus-value, c'est-à-dire que, si on ne s'était pas prévalu du programme, on aurait quand même produit des veaux, mais on les aurait vendus à $600,000 de moins dans l'ensemble de la province de Québec.

Pour 72/73 — et ici j'insiste parce que le député de Nicolet dans sa conférence de presse a laissé planer des doutes là-dessus, il s'agit de projections, il ne s'agit pas de réalités — nous visons pour 72-73 environ $2 millions à $2.5 millions de plus-value par rapport à $600,000 pour 71/72. C'est extrêmement important que nous apportions des précisions sur ces aspects.

L'hydraulique agricole, nous ne nous y attarderons pas tellement longtemps, nous allons parler seulement du drainage souterrain. En 1970, nous posions environ 11,311,000 pieds. En 1972, nous avons dépassé les 23 millions de pieds.

M. VINCENT: Un instant, en 1970?

M. TOUPIN: En 1972, nous avons dépassé les 23 millions de pieds.

M. VINCENT: Mais, en 1970, combien de millions de pieds?

M. TOUPIN: Environ 11 millions; 11,311,000 pieds.

M. VINCENT: En 1970? Le ministre confirme ces chiffres? Qn reviendra là-dessus.

M. TOUPIN: Alors, c'est 1969.

M. DEMERS: Rajustez votre draineuse.

M. VINCENT: Rajustez-vous. Après ça, le ministre va dire qu'il a été mal interprété.

M. TOUPIN: Non, en 1969. Pour 1970, c'est 15 millions.

Ce n'est pas pour deux ou trois millions. Du reste, en 1972...

M. DEMERS: Ah! pour deux ou trois millions, en 1967 il y eut 2,600,000 en tout.

M. TOUPIN: ... on constate 23 millions de pieds. Le député de Nicolet devra l'admettre...

M. DEMERS: Où est la politique nouvelle là-dedans?

M. TOUPIN: ... un bon matin qu'il y a des résultats au ministère de l'Agriculture, 23 millions de pieds de drainage posés en 1972.

Les productions maraîchères, nous avions un programme, et on sait fort bien ce que signifie pour les producteurs québécois l'entreposage des produits en termes de mise en marché. Nous avons mis un programme de l'avant à la disposition des producteurs maraîchers, notamment de la grande région de Montréal, qui a coûté à peu près $399,000. Ce programme s'appliquait à des types d'entrepôts à refroidissement à l'eau ou à double paroi. Ce sont les deux principaux programmes.

Ces seuls programmes mis de l'avant, nous avons construit quatre entrepôts en 1972 et ça a coûté comme je le disais tantôt $399,000 pour une seule année. La plus-value que les producteurs de carottes seulement ont touchée est au-delà de $1 million. Ce sont les résultats concrets d'une politique de commercialisation qui a été appliquée vis-à-vis d'un type de production donnée, où il était nécessaire que nous intervenions. Non pas avec des politiques à la va-comme-je-te-pousse, mais des politiques planifiées, après avoir fait une étude du marché, après avoir considéré les besoins et la demande des consommateurs. C'est là où nous en sommes venus.

Au niveau de l'assurance-récolte — et là nous constatons certaines difficultés qui seront corrigées sous peu, nous l'espérons puisqu'un comité travaille actuellement à une réforme de l'assurance-récolte au Québec — en 1972, nous avons mis un seul programme nouveau à la disposition des agriculteurs. Il s'agissait de la production de la pomme. En 1973 — et nous aurons l'occasion de le discuter peut-être au cours des crédits — nous ajoutons les cultures industrielles et les pommes de terre au niveau des programmes de l'assurance-récolte.

Bien sûr, s'ajoute à cela la loi dont on parlait tantôt. Nous avons mis de l'avant également un programme d'auto-approvisionnement, notamment dans le secteur des céréales et des fourrages. Nous ne pouvons immédiatement analyser les résultats parce que nous venons de mettre notre programme à la disposition des agriculteurs. Mais ce que nous constatons, par exemple, c'est que chaque bureau régional actuellement demande aux agriculteurs d'épouser les objectifs du ministère et les objectifs que nous nous sommes fixé sont en train d'être épousés en entier ou presque par les agriculteurs. Nous attendons de ce programme des résultats positifs parce que nous croyons que c'est là une façon, un moyen de régler chez nous un problème que nous essayons de régler depuis dix ou quinze ans à l'extérieur. Nous croyons que c'est un élément de solution; ce n'est pas le seul.

Nous continuons, par ailleurs, à négocier, bien sûr, avec le gouvernement fédéral et avec les autres provinces concernant la politique des grains de provende. On nous a dit récemment que des solutions nous seront peut-être offertes d'ici les prochains mois. Du reste, cela ne nous empêche pas d'inciter les agriculteurs québécois à utiliser les sols disponibles au Québec dans les zones où il est possible de produire des céréales. Nous avons réussi ou, tout au moins, nous sommes en train de réussir dans le domaine de la viande de boeuf. Je ne verrais pas pourquoi les agriculteurs n'arriveraient pas également à réussir au moins une partie des programmes dans le domaine céréalier et dans le domaine des fourrages, ce qui est extrêmement important tant pour l'élevage que pour la production laitière.

La commercialisation. Nous avons travaillé surtout au niveau de la Régie des marchés agricoles du Québec. Nous avons créé des comités spéciaux au niveau de la régie, qui touchaient presque chacune des productions. Un de ces comités a déjà produit un travail extrêmement efficace, c'est celui du poulet, où un plan conjoint est né à la suite duquel des négociations furent entreprises avec d'autres provinces et à la suite desquelles la production et les prix se sont stabilisés au Québec. Les producteurs de volailles au Québec jouissent présentement de prix qui, en dépit de l'augmentation des coûts, sont quand même beaucoup plus satisfaisants que ce qu'ils touchaient en 1970 ou même auparavant.

Là, on a un mécanisme de contrôle. Ce n'est pas le seul moyen; ce n'est pas, dis-je, lui seul qui nous permettra de régler tous les problèmes parce qu'il y a parfois des conjonctures qui nous sont favorables et d'autres qui ne le sont pas. Dans le domaine du porc, les problèmes étaient sérieux; on a tenté l'expérience d'un plan conjoint, je pense qu'on l'a ratée. Un comité a mis en place, un plan conjoint est prêt et, bientôt, il sera soumis au vote. Je ne sais pas quelle décision la régie prendra, mais on m'informait récemment que toutes les parties intéressées dans la production du porc ont accepté un programme de commercialisation. Nous avons également un comité qui siège au niveau de la production de la pomme au Québec; c'est important aussi à ce chapitre que nous débouchions dans le plus bref délai sur une commercialisation mieux structurée, plus adaptée au marché.

Dans le domaine laitier, le comité a fait un travail énorme pour arriver, par exemple, à préparer des négociations avec le gouvernement

fédéral et avec les autres provinces. Le comité, en collaboration avec les principaux éléments impliqués, est parvenu quand même à une entente avec le secteur coopératif. Vous savez depuis combien d'années le secteur coopératif et le secteur syndical au Québec se sont chicanés, voire affrontés dans les assemblées.

Actuellement une entente est intervenue entre le secteur coopératif et le secteur des plans conjoints et le tout se déroule très normalement. Tous les groupes de producteurs laitiers au Québec travaillent ensemble, avec le ministère de l'Agriculture, avec la Commission canadienne du lait quand c'est nécessaire, pour que nous puissions en arriver à des solutions plus acceptables aux problèmes que vivent les agriculteurs québécois.

Un programme au niveau du lait aussi qui est très important est celui de la fusion des usines laitières. On a toujours soutenu et on soutient encore que le secteur primaire agricole au Québec se développera dans la mesure où nous serons capables de développer au même rythme le secteur secondaire, c'est-à-dire le secteur de la transformation et également celui de la distribution. Il ne servirait à rien d'équiper des fermes pour produire, si nous ne sommes pas en mesure, au niveau des industries, de bien transformer ce produit. Nous avons réussi douze fusions dans le domaine du lait industriel et nous avons réussi dix fusions dans le domaine du lait nature, dont la mise en place de Québec Lait, qui est une des plus grosses entreprises québécoises dans le domaine et de la transformation et de la distribution du lait au Québec.

Dans le domaine toujours de la commercialisation, nous avons mis de l'avant des nouveaux services où il était nécessaire que nous agissions dans un délai assez bref. Nous avons, par exemple, au ministère, un service d'aide technique à l'industrie et de recherche économique, qui existait au début à l'état très embryonnaire et dont l'un d'entre eux n'existait pas du tout. Alors ces services de recherche nous permettent actuellement d'analyser les marchés, de dépister les marchés nouveaux, d'étudier tout le secteur de la transformation et tout le secteur de la production primaire, d'étudier l'impact que peut avoir un plan conjoint, que peut avoir le contrôle de l'offre par rapport à la demande, etc.

C'était très important que nous ayons ces services. Ceux-ci, en plus, ont travaillé à la promotion d'un certain nombre de produits. Nous avons aidé par exemple les pomiculteurs à vendre, cette année, ce qu'on a appelé la pomma A/C à atmosphère contrôlée; la télévision en a fait écho très souvent. Le ministère a participé à cette étude de promotion et a participé également je pense économiquement à la production du cidre. Nous avons créé un comité avec les principaux producteurs. Nous avons ensemble cherché des moyens pour vendre à l'ensemble des consommateurs ce produit québécois qui est disponible depuis quelques années seulement : le cidre. Nous avons travaillé également au niveau de la production des produits maraîchers et notamment la production des salades au Québec.

Vis-à-vis de la recherche, nous avons fait un travail également important. Nous constations, au niveau de la recherche au Québec, un certain nombre de programmes plutôt disparates où il était difficile de trouver la coordination. Nous avons réorganisé la recherche en vue d'abord de regrouper les forces et ensuite d'éviter le dédoublement. Le Conseil de recherche est maintenant composé non pas de spécialistes choisis un peu au hasard, qui sont bien sûr des bons spécialistes, mais il est composé maintenant du ministère, des facultés d'agriculture qui existent au Québec et des stations de recherche fédérales, de telle sorte que nous sommes capables, au niveau du conseil, de planifier la recherche, d'éviter le double emploi et de faire en sorte que les sommes que nous y mettons soient dépensées à des fins véritablement efficaces pour l'ensemble des agriculteurs. Les autres organismes de recherche qui existaient, comme le conseil des productions végétales et le conseil des productions animales, sont demeurés. Nous cherchons même à ajouter s'il y a lieu, au cours des prochains mois ou des prochaines années, un conseil qui s'occuperait de façon plus particulière du secteur agro-alimentaire.

Les travaux prioritaires que se sont fixés les chercheurs au Québec sont d'abord des grilles plus réalistes de fertilisation : le développement de nouvelles productions céréalières, la production des légumes en serre, etc. Nous nous sommes fixé des priorités, ce qui n'existait pas ou peu auparavant. Il est très important que nous nous penchions sur ces aspects de la question agricole. Pour l'aménagement du territoire, nous avons au moins des programmes précis dans trois régions du Québec: dans le Bas Saint-Laurent, dans le Saguenay-Lac-Saint-Jean et dans l'Abitibi et le Témiscamingue.

Nous aurions voulu étendre tous ces programmes à l'ensemble de la province de Québec, mais les études disponibles ne nous étaient pas encore parvenues.

Les moyens financiers étaient, bien sûr, limités et nous voulions, en plus, voir ce que pourraient donner des expériences précises d'aménagement du territoire dans plus d'une région au Québec. Nous avons quand même, à travers tout cela, contribué à déterminer au Québec trois ou quatre zones de production agricole comme, par exemple, l'élevage des bovins qui n'est pas stimulé de la même façon dans toutes les régions du Québec. Nous avons déterminé des zones pour l'élevage du bovin au Québec; nous sommes en train d'en déterminer également pour les productions maraîchères et certaines productions céréalières. Cela se situe dans le domaine de l'aménagement du territoire.

Le crédit agricole. L'amendement aux lois a apporté déjà des améliorations sensibles. La

moyenne des prêts, en 1971, était de $14,683 et, cette année, en 1972, elle dépassera les $15,000; donc, c'est plus de crédits mis à la disposition des agriculteurs. Cette moyenne de $15,000 entre dans le taux d'intérêt réduit de 2.5 p.c. parce que nous payons la différence entre 2.5 p.c. et le taux du marché, jusqu'à concurrence de $15,000. Quant à la demande des prêts, pour 1972, le président m'informait récemment qu'elle augmentait de 45 p.c. Ce sont là, croyons-nous, des indices très évidents montrant que les agriculteurs avaient hâte de voir les lois du crédit agricole amendées pour qu'ils aient à leur disposition plus de crédits à long terme et plus de crédits à court terme. De $25,000 nous l'avons porté à $40,000 et à $60,000 pour les sociétés.

Les sommes prêtées en 1971 étaient d'environ $19 millions; en 1972 —les statistiques seront compilées très bientôt définitivement, si ce n'est déjà fait — c'est près de $25 millions. Les prêts à moyen terme, qui peuvent varier entre 2 et 10 ans — 15 ans maintenant avec les amendements à la loi que nous avons apportés — $24 millions consentis aux agriculteurs en 1971 et $31 millions en 1972, ou à peu près, en termes de dollars; bien sûr, on pourra ajouter des $100 à cela, peut-être même des $1,000. Il s'agissait de démontrer que les programmes du ministère, dans ce que je viens de dire, semblent coller à la réalité. Tout au moins, ils sont utilisés au maximum par les agriculteurs du Québec. C'était là un objectif que nous nous étions fixé. Je pense que nous avons atteint une partie de cet objectif. Ce n'est pas complet, ce n'est pas total en soi, mais ce sont quand même des indices intéressants du développement de l'agriculture au Québec.

Nous avons agi, bien sûr, dans d'autres domaines aussi, par exemple, dans le domaine des lois. Nous parlions tantôt du crédit agricole; nous avons ajouté de nouvelles lois au crédit: le crédit à la production, le crédit pour venir en aide aux agriculteurs dans des périodes difficiles où ces prêts, contractés par les agriculteurs, sont en totalité garantis par le gouvernement. De tels types de crédit aideront les agriculteurs à organiser leur production au début de la saison, ils mettront à leur disposition les sommes d'argent pour leur permettre d'acheter tout ce dont ils ont besoin pour démarrer leur production. Nous avons, bien sûr, aussi la loi 64. En dépit de tout ce qu'on a pu dire et en dépit de ceux qui ont jugé bon de ne pas l'approuver, les agriculteurs ont quand même, au terme d'un référendum, démontré qu'ils en voulaient de cette loi, ils l'ont démontré clairement, très clairement. Je pense que c'est là un indice important que les agriculteurs du Québec savent ce qu'ils veulent.

M. BELAND: Approuver la loi et refuser certaines modalités, c'est deux choses.

M. TOUPIN: Un certain nombre de députés devraient se pencher davantage sur les besoins des agriculteurs; à ce moment-là, je pense qu'on appuierait davantage les mesures qu'on met à leur disposition.

Les relations fédérales-provinciales, en dépit de ce qu'on a pu écrire ce matin dans le Soleil, quoique certains aspects peuvent être négatifs... Ce matin ou hier soir, je ne sais pas, on parlait d'un dossier négatif. Dans le domaine de la commercialisation, les ententes sont difficiles mais elles avancent graduellement. Dans le domaine des oeufs, par exemple, elles sont trop lentes à notre point de vue.

On devrait aboutir plus rapidement sur des choses concrètes.

Dans le domaine du poulet, elles ont avancé un peu plus rapidement, mais nous nous heurtons au mécanisme du partage des marchés. Le Québec ne cédera aucune partie de son marché en faveur d'une autre province. Il nous serait impossible de signer des ententes avec quelque province que ce soit, si nous sommes obligés de laisser aller une partie des marchés que nous avons conquis au cours des années antérieures.

Au niveau du lait, les ententes en général sont assez bonnes. Nous nous entendons assez bien avec les provinces et notamment avec la province de l'Ontario, quoiqu'il est normal que nous rencontrions certaines difficultés, quoique les négociations demeurent quand même assez ardues.

Dans le domaine des grains de provende, on en a dit un mot tantôt, nous attendons une contre-proposition; la nôtre, elle est très simple. Tous les agriculteurs du pays doivent être sur un pied d'égalité à l'égard de cette politique.

Le programme des petites fermes, nous avons considéré qu'il était incomplet ce programme. Nous sommes en voie encore de négociation. Des progrès ont été enregistrés, mais nous ne sommes pas en mesure de dire si ces ententes pourront être signées dans deux mois ou trois mois ou avant ou après.

M. le Président, c'étaient, dans les grandes lignes, les quelques éléments des différents travaux que le ministère de l'Agriculture a accomplis depuis un bout de temps et ce, en vue d'informer les membres de la commission.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Avant de continuer, il serait important de choisir un rapporteur. Le nom de Benjamin Faucher, député de Yamaska, est-ce qu'il a l'assentiment de tout le monde?

M. VINCENT: Certainement, M. le Président.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors, M. Faucher est choisi comme rapporteur de la commission.

L'honorable député de Nicolet.

M. VINCENT: M. le Président, très brièvement, nous avons l'intention — pour employer

un vocable pontifical — de revenir sur plusieurs articles mentionnés par le ministre aux crédits particuliers qui touchent ces domaines, tel le drainage. A ce moment-là, j'aimerais bien que nous puissions avoir les chiffres exacts de ces augmentations que se vante d'avoir réalisées le ministre actuel, avec un programme qui fut établi, comme on le sait, par le plan quinquennal de 1968. Egalement il y a d'autres articles particuliers comme les usines laitières, la fusion des usines laitières. Il a parlé de fusion des usines de lait industriel, en vertu du programme qui a été voté par l'Assemblée nationale en 1968. Il a parlé du programme des usines de pasteurisation, qui est un programme nouveau — et ça je peux le confirmer — qui est un programme nécessaire, qui est un programme qui devait être réalisé. Nous y reviendrons à l'article particulier dans le budget en ce qui concerne ces fusions. Egalement en ce qui concerne l'insémination artificielle, il y a un programme qui a été amélioré. Je ne pense pas que le ministre tienne pour acquis que le tout a commencé en 1970...

M. TOUPIN: Ce n'est pas ce que j'ai dit, M. le Président.

M. VINCENT: ...en ce qui concerne l'insémination artificielle. D'ailleurs, on se sert, à l'heure actuelle, de semence congelée de douze ans, quinze ans alors que le ministre n'avait probablement même pas l'âge de voter. On se sert de semence congelée pour réaliser le programme.

La commercialisation, nous allons également en discuter lorsque nous nous trouverons dans ce domaine. L'aménagement du territoire, encore là, il dit qu'il y a trois régions où on a des programmes spécifiques, la région du Bas-Saint-Laurent par exemple. Des programmes spécifiques qui découlent de quoi? Je pense que seulement se poser la question, c'est y répondre; ça découle de programmes qui ont été mis sur pied antérieurement à la venue du ministre. Nous reviendrons sur ces sujets.

Ce que je veux aborder dans cette discussion générale, c'est que le ministre a touché dès le début, en commençant à corriger les chiffres qu'il avait publiés avec grand renfort de publicité en 1973, au début de l'année, au mois de janvier. A ce moment-là, il avait déclaré que les agriculteurs du Québec avaient réalisé en 1972 un revenu net accru 44.3 p.c. comparativement à 1971.

Nous avons voulu... Quand je dis "nous", je ne parle pas de moi, mais des économistes qui travaillent pour l'UPA, également des députés et d'autres personnes qui ont voulu mentionner au ministre, à ce moment-là, que c'était une mauvaise publicité d'aller dans le public déclarer que les agriculteurs avaient réalisé un revenu net de 44.3 p.c. supérieur et que ce n'était pas rendre un service aux agriculteurs de lancer cela dans le grand public.

Pourquoi? Parce que l'on se servait, pour donner ces chiffres pour l'année 1971, de chiffres provisoires. On se servait, pour l'année 1972, de prévisions. Il y aurait certainement des corrections à apporter aux prévisions qu'on faisait pour 1972. Aujourd'hui, le ministre nous apporte lui-même des corrections. Au lieu d'une production laitière totalisant presque $297 millions, comme on l'annonçait dans les chiffres, on nous arrive, ajourd'hui, avec d'autres chiffres, qui sont encore provisoires, de $289 millions, ce qui fait quand même tout de suite une diminution de $8 millions, alors que, dans les chiffres qu'on a mentionnés, on pouvait dire qu'il y aurait une erreur de $10 millions. Mais cela peut aller là.

M. TOUPIN: Est-ce que vous me permettez...

M. VINCENT: Oui.

M. TOUPIN: ... de faire une intervention? Je pense que le député de Lafontaine va être en mesure de comprendre ce que je veux dire.

UNE VOIX: De Nicolet.

M. TOUPIN: Le député de Lafontaine. Il est économiste, je pense.

M. JORON: Gouin.

M. TOUPIN: De Gouin. Le secteur agricole n'est pas habitué à travailler avec des statistiques tellement. Je crois que c'est l'une des premières fois que l'on prend le risque au fond, alors qu'on le fait dans tous les autres secteurs de l'économie. Combien de fois dans les autres secteurs de l'économie on analyse, par exemple, pour le secteur minier et le secteur forestier, le comportement du marché en termes économiques. On analyse les marchés et on essaie, dans le cadre de ces analyses, d'orienter des politiques. On essaie aussi, dans le cadre de ces analyses, d'informer l'ensemble du public sur les situations qui prévalent. C'est ce que nous avons voulu faire en agriculture. Nous sommes toujours dans le domaine de la recherche économique. Nous sommes toujours dans le domaine de l'évaluation de ce qui peut se produire à compter des expériences antérieures et des projections que l'on peut faire à l'égard des marchés, à l'égard de la demande, à l'égard du potentiel de production que nous avons à notre disposition.

C'est simplement ce que nous avons voulu faire. Nous avons apporté des corrections. Nous en apporterons encore. Ce ne sont pas des chiffres officiels. Ce sont des données provisoires. Nous allons continuer à agir de cette façon. Il est normal que les agriculteurs sachent une fois de temps en temps, où s'en va l'économie agricole. Je pense qu'il est temps qu'on arrête de penser qu'on doit tenir les agriculteurs dans

l'ignorance parce que les consommateurs vont avoir peur à l'autre bout. S'il y a augmentation des prix à l'agriculture, les consommateurs vont se mettre à dire: Là, il n'y a pas de problème. Normalement, les prix ne devraient plus augmenter, les agriculteurs font un peu plus d'argent. Je pense qu'il est normal que nous mettions à leur disposition ces données statistiques. On peut les interpréter, mais dans ce contexte-là, pas dans un autre contexte. Sinon, nous faussons totalement des programmes aussi importants que ceux d'une information économique au niveau de l'ensemble de la population. C'est simplement ce que le ministère a voulu faire. C'est ce qu'il va continuer à faire au cours des prochaines années. Il est possible que, dans ses projections, il se trompe encore de 2 p.c, de 8 p.c. ou même de 10 p.c. d'autant plus que c'est le secteur sur lequel, économiquement parlant, nous avons le moins de contrôle. Le député de Nicolet, lui-même dans sa conférence de presse, a risqué des chiffres.

M. DEMERS: Est-ce que vous recommencez votre discours?

M. TOUPIN: II a risqué. Non, je ne le recommence pas, mais il est important d'apporter cette précision pour que l'on puisse vraiment se situer...

M. DEMERS: Attendez que l'on vous en donne et vous répondrez.

M. TOUPIN: ... dans le contexte réel du travail que nous avons fait à ce chapitre.

M.VINCENT: M. le Président, le ministre vient justement de confirmer ce que je voulais dire. J'ai dit: II faut que ces chiffres soient donnés au grand public.

Ce n'est pas nouveau. D'abord, le ministre a tort de dire que c'est nouveau qu'on donne ces chiffres. Les chiffres, je les ai, ici, depuis 1968.

M. TOUPIN: Oui.

M. VINCENT: J'ai chacune des années spécifiquement.

M. TOUPIN: C'est rendu public de cette façon-là bien...

M.VINCENT: A ce moment-là, quand on donne ces chiffres...

M. DEMERS: ... publicité, publié par qui, et qui a payé cela?

M. VINCENT: Quand on donne ces chiffres publics, il faut quand même non pas les donner dans le but de faire de la publicité à un parti politique ou à une personne.

M. TOUPIN: Trouvez donc un...

M. VINCENT: C'est exactement ce qui est arrivé au mois de janvier 1973.

M. TOUPIN: Ah bon!

M. VINCENT: Le ministre a donné ces chiffres non pas objectivement, pour démontrer à la population l'évolution de l'agriculture au Québec, mais a voulu démontrer, avec son Nous pontifical, qu'il avait réussi à réaliser un revenu net supérieur de 44. 3 p.c. en 1972, comparativement à 1971.

Maintenant, prenons les chiffres. Le ministre a commencé à les corriger aujourd'hui.

M. TOUPIN: On va les corriger encore!

M. VINCENT: II a commencé à les corriger, et nous avons mentionné de même que l'économiste de l'UCC, de l'UPA, qui n'est quand même pas le dernier venu non plus, et d'autres personnes ont mentionné que le ministre n'avait pas donné toutes les nuances qu'il aurait dû donner ce que je vais essayer de faire.

Par exemple, si le ministre...

M. TOUPIN: Lisez le texte avant.

M. VINCENT: ... avait, en 1973, au mois de janvier, mentionné à la population du Québec — voici les chiffres — que les renevus nets réalisés au Québec par les agriculteurs, en 1968, étaient de $197,590,000. Ce sont les chiffres que le ministre avait, lors de sa conférence de presse. En 1969, les revenus nets réalisés au Québec étaient de $218,032,000. Le ministre avait ces chiffres-là lors de sa conférence de presse. Les revenus nets réalisés par les agriculteurs du Québec, en 1970, sont tombés à $167,605,000. Les revenus nets réalisés en 1971, des chiffres provisoires, ce que le ministre aurait dû dire, étaient seulement de $168,043,000. Et en 1972, même pas des chiffres provisoires mais des chiffres estimatifs, c'était $242 millions.

Donc, le ministre aurait dû dire, à ce moment-là, ce qu'il a dit aujourd'hui: Ce sont des chiffres même pas provisoires mais des chiffres estimatifs qui pourront être corrigés. Partant de cela, il arrivait avec une augmentation de 44.3 p.c. par rapport à l'année 1971. Il aurait dû faire sa comparaison par rapport à l'année 1969, à l'année 1968, au lieu d'années désastreuses comme celle de 1971, parce qu'on sait qu'en 1971, il n'y en avait pas de prix de porc, il n'y en avait pas de prix pour les oeufs, il n'y en avait pas de prix pour les poulets, il n'y en avait pas de prix pour aucune production agricole. On a été obligé de voter des montants, à l'Assemblée nationale du Québec, au Parlement fédéral d'Ottawa. On a versé, en 1972, $64 millions de subventions totales, subventions versées en 1972 mais pour des productions de 1971, à cause de la mévente des produits agricoles en 1971.

M. TOUPIN: Qu'est-ce que cela vient faire de plus dans...

M. VINCENT: Ce sont toutes ces explications qu'il faut donner.

M. TOUPIN: Les explications sont dans le texte.

M. VINCENT: Mais non, on dit: 44.3 p.c. de revenus nets comparativement à 1971, alors qu'on aurait dû dire que comparativement aux années antérieures, à cause des exceptions de 1970-1971, il n'y avait pratiquement pas d'augmentation.

Et je n'ai pas l'intention de discuter longuement là-dessus. Nous allons y revenir lorsque nous aurons les chiffres plus officiels que ceux que nous avons eus. Et je suis certain qu'à ce moment-là, comme le ministre a commencé à le faire aujourd'hui, commencé à nous dire que les trois derniers mois, où on avait seulement donné des estimations se basant sur les années précédentes, cela a changé complètement la situation de ces statistiques.

M. TOUPIN: Je l'ai dit dans ma conférence de presse, que le dernier trimestre, les prix et les entrées ont augmenté de 40 p.c. et de 50 p.c.

M. VINCENT: M. le Président, est-ce que le ministre veut se tenir bien tranquille?

M. TOUPIN: Je veux bien ne pas parler, à condition que le député de Nicolet arrête de charrier.

M. DEMERS: Ah! minute.

M. VINCENT: Le ministre a assez charrié tout à l'heure, M. le Président, on l'a laissé charrier pour employer son expression.

M. DEMERS: Vous vous êtes promené en quatre roues depuis le matin.

M. TOUPIN: Je vais lui donner un cours d'économique.

M. VINCENT: Pour employer son expression, il veut maintenant nous donner un cours d'économique. Ce qui est important dans le secteur agricole, ce n'est pas de faire de la publicité pour un parti politique ou pour un ministre, si nous prenons...

M. TOUPIN: M. le Président, je n'accepterai pas une telle interprétation du travail que fait le ministère. C'est de la foutaise. Le député de Nicolet est imbu...

M.VINCENT: M. le Président, est-ce que nous allons...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre!

M. TOUPIN: II interprète tout en termes de politique. Il ne pense qu'à ça. Il ne vit que de ça. C'est ça qu'il a fait pendant qu'il était ministre d'ailleurs, de la politique.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît!

L'honorable député de Nicolet.

M. TOUPIN : II en a fait assez pour que le ministère ne se soit pas développé.

M. DEMERS: M. le Président, sur un rappel au règlement.

M. VINCENT: Pour revenir à ce que le ministre aime bien, ce qui est important, je pense qu'il va falloir que le ministre le réalise, ce n'est pas la vocation d'un ministre de l'Agriculture de faire de la publicité pour lui ou pour le parti politique qu'il représente...

M. TOUPIN : De la morale maintenant, ça c'est le comble! Une leçon de morale politique.

M. VINCENT: ... c'est de donner la situation exacte, de mettre des programmes en marche. Et quand je parle de programmes, il se vante depuis trois ans de programmes de drainage, comme il l'a fait aujourd'hui — je donne un exemple seulement, j'en donnerai d'autres au cours des discussions — lesquels programmes où lui-même n'a rien changé, absolument rien. Il se vante des réalisations d'un programme qui a été mis sur pied pour en faire une publicité personnelle. Ce n'est pas ça qu'il faut.

M. TOUPIN: Cela dépend...

M. VINCENT: II faut cesser, au Québec, d'avoir un ministre de l'Agriculture qui, à l'intérieur de l'Assemblée nationale, fait des déclarations comme ministre, et qui, à l'extérieur de l'Assemblée nationale, dans son comté ou ailleurs, fait des déclarations comme politicien, et qui, à d'autres endroits, fait des déclarations comme publiciste. Et ça, ça fait dire à des gens responsables, comme ceux de l'UPA: Un ministre vend la peau de l'ours avant de l'avoir tué. Cela fait dire par exemple à des gens de l'extérieur qui entendent le ministre, comme il l'a dit tout à l'heure: Les députés qui se sont opposés à la Loi du syndicalisme agricole.

Mais que le ministre commence à réaliser qu'il n'y a aucun député de l'Assemblée nationale qui a voté contre la Loi du syndicalisme agricole. Mais regardez le ministre à l'heure actuelle, il n'est même pas encore capable de se rendre compte qu'il n'y a aucun de ses collègues de l'Assemblée nationale —qu'il soit donc franc — qui a voté contre la Loi du syndicalisme agricole.

M. BELAND: ... trop jeune pour...

M. VINCENT: Cela a été unanimement voté en deuxième lecture, sur le principe de la loi. Et quand nous arrivons à la troisième lecture de la loi, nous votons contre les modalités d'application d'une loi.

M. TOUPIN : Vous avez ménagé la chèvre et le chou. Si ça passe tant mieux, si ça ne passe pas on est sauvé.

M. BELAND: II n'entrera jamais chez les Chevaliers de Colomb.

M.VINCENT: M. le Président, est-ce que nous pouvons avoir un peu de décorum?

M. DEMERS: M. le Président, j'invoque le règlement. Est-ce qu'il y aurait possibilité de ramener le ministre à l'ordre? S'il veut commencer cette petite chicane, nous allons lui en faire une petite chicane, ça va être long en masse. S'il veut nous laisser parler comme nous l'avons laissé parler, nous allons nous plier à ça, mais qu'il arrête ses interventions loufoques qui ne tiennent à rien. Il n'a pas à faire une petite campagne dans le comté de Saint-Maurice... venir me faire battre dans Saint-Maurice.

M. TOUPIN : ... d'avoir peur.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît!

L'honorable député de Nicolet.

M. DEMERS: Si les chiens aboient...

M. VINCENT: Le ministre de l'Agriculture, si vous l'avez écouté à la télévision et à la radio... un matin, j'étais dans ma voiture, je voyageais sur la route, il était à une émission de Frenchie Jarraud, il déclare que la première année il y a eu 24,000 assurés à l'assurance-récolte.

M. DEMERS: C'était épouvantable.

M.VINCENT: Le type qui écoute ça: 24,000 assurés. Même pas capable de réaliser qu'il y en avait 17,000. Cela a tombé à 9,000 ou 10,000. Il s'en va déclarer sur les ondes de radio récemment que quant à l'affaire des petites fermes, l'entente serait signée avec Ottawa. Nous reviendrons là-dessus tout à l'heure. Cela aurait été supposé il y a trois semaines passées. Il s'en va déclarer à l'Assemblée nationale, à une question du député de Lotbinière et du député de Bourget, et à la suite d'une de mes questions, que pour la première fois dans l'histoire du Canada, de l'agriculture du Québec, tous les ministres de l'Agriculture sont tombés d'accord, sans exception, pour faire front commun contre le gouvernement fédéral sur la question des grains de provende, sur la question de la politique des petites fermes.

Cela ne s'était jamais vu. M. TOUPIN: C'est vrai.

M. VINCENT: II dit que c'est vrai. L'autre jour, après que l'UPA eut fait une sortie...

M. TOUPIN: Ils sont tombés d'accord.

M. VINCENT: ... plutôt fracassante sur une question telle que les grains de provende, le ministre a dit: J'étais certain que c'était pour arriver parce que, depuis que je suis ministre de l'Agriculture, jamais je n'ai été capable d'obtenir l'accord des autres ministres des autres provinces sur la question des grains de provende, des petites fermes et le reste. Et, en Chambre, il déclarait que tout le monde était d'accord pour la première fois, tout le monde avait fait l'unanimité pour faire front commun contre le gouvernement fédéral sur les grains de provende et la question des petites fermes, et le reste.

M. TOUPIN: C'est devenu du charriage!

M. VINCENT: M. le Président, le ministre charrie continuellement, c'est pour ça qu'il a cette expression à la bouche. On reviendra sur toutes ces questions tout à l'heure; nous avons des documents ici, des déclarations du ministre. Par exemple, vous avez ici le Devoir, il y a quelque temps — je n'ai pas la date ici: "Toupin réalisera sa politique agricole en ignorant Ottawa". M. le Président, est-ce qu'il nous en a parlé tout à l'heure? Il ignore Ottawa pour la politique des petites fermes? Cela va se signer prochainement. Toutes les provinces sont d'accord, il y a déjà huit provinces qui ont signé avec le gouvernement fédéral.

M. TOUPIN : Ce n'est pas notre politique, M. le Président.

M. VINCENT: II y en a déjà huit qui ont signé avec le gouvernement fédéral.

M. TOUPIN : Ce n'est pas notre politique, c'est la politique du gouvernement fédéral.

M. VINCENT: En ce qui concerne, M. le Président...

M. TOUPIN: II me semble que c'est très clair.

M. VINCENT: ... les problèmes avec le fédéral, où en sommes-nous rendus avec le crédit agricole, le financement des fermes? Le ministre on n'en a pas parlé. Il y a un dossier au ministère des Affaires intergouvernementales.

M. TOUPIN: J'ai dit qu'on mettrait nos programmes en place et j'en mentionnais...

M. VINCENT: Bon, en place.

M. TOUPIN: On a amendé nos lois aussi et on a arrêté de charrier, on est allé.

M. VINCENT: M. le Président, en définitive nous allons revenir sur chacun des articles, je pense que c'est important, sur chacun des programmes. Mais, dès le début, ce que je demande au ministre qu'il cesse d'être le publiciste du Parti libéral, d'être le publiciste d'un homme qui veut faire de la politique sur le dos des agriculteurs. Qu'on donne exactement la situation telle qu'elle se produit au Québec. Je sais qu'au ministère de l'Agriculture et de la Colonisation il y a environ 2,000 fonctionnaires; est-ce que le ministre en a parlé? Du tout.

M. TOUPIN: C'est normal.

M. VINCENT: Est-ce qu'il nous a parlé de l'organisation de ses bureaux régionaux, de l'administration de son ministère?

M. TOUPIN: Voulez-vous avoir des noms?

M. VINCENT: De quelle façon on procédait dans l'organisation des bureaux régionaux?

M. TOUPIN: Je vais donner tous les noms, partout.

M. VINCENT: Non, il nous a simplement mentionné qu'il y avait des programmes en marche, des programmes nouveaux, des programmes où tout avait été réalisé grâce à son intervention.

UNE VOIX: Son dynamisme.

M. VINCENT: Est-ce qu'il nous a parlé de l'organisation des bureaux régionaux, des services aux agriculteurs? Est-ce qu'il nous en a parlé?

M. TOUPIN: J'ai dit ce qui était important. Nous reviendrons.

M. VINCENT: Le ministre, ce qu'il a voulu dire, il a voulu commencer à corriger des chiffres et continuer à faire sa publicité personnelle. C'est pour ça que nous allons, M. le Président...

M. TOUPIN: On donnera les noms tantôt. On n'est pas capable de faire...

M. VINCENT: Je n'ai pas l'intention de discuter plus longtemps. Nous reviendrons sur les programmes spécifiques; il y a, par exemple, la gestion interne de soutien. Je pense que c'est important que nous sachions de quelle façon l'organisation des bureaux régionaux, des laboratoires régionaux, des services aux agriculteurs procède; nous recevons des plaintes des agricul- teurs et c'est normal d'avoir des plaintes. Je pense que c'est le rôle des membres de cette commission, le rôle des députés, à l'occasion des crédits du ministère de l'Agriculture, de se faire l'interprète des populations qu'ils représentent pour apporter des correctifs à l'administration. En ce qui concerne la commercialisation des produits agricoles, est-ce qu'il y a des programmes de publicité? Nous y reviendrons. En ce qui concerne l'aide à la production agricole, on parle des subventions qui sont votées, on parle — je reviendrai tout à l'heure sur la question des plans conjoints — du financement agricole; nous aurions aimé savoir le programme du ministre pour les prochaines années en ce qui concerne le financement agricole. Je ne parle pas du programme qu'on a voté, le programme législatif. On l'a voté. Le ministre est-il au courant? même si on a voté quinze ans avec les banques pour les prêts d'amélioration de fermes, les banques ou les caisses populaires vont à sept, huit ans et c'est très difficile de dépasser dix ans; c'est de cela qu'il faut discuter. Ce n'est pas la publicité du ministre. Est-ce qu'il est au courant, par exemple, que même si on a voté les lois du crédit agricole, le financement agricole, ça prend encore des mois et des mois avant que l'agriculteur reçoive le service auquel il a droit suivant la législation que nous avons votée à l'Assemblée nationale?

M. TOUPIN: C'est vrai.

M. VINCENT: Est-ce que le ministre est au courant de cela? C'est ce qu'il faut corriger. C'est bien beau dire qu'on a adopté des lois à l'Assemblée nationale favorisant le crédit agricole.

Quand l'agriculteur fait une demande pour avoir un prêt agricole, ça prend combien de temps avant que son prêt agricole soit accordé? Cela prend combien de temps avant que tout soit prêt, qu'il reçoive son argent? C'est ça qui est important, l'efficacité des lois.

Quand bien même le ministre avec son chef viendrait nous dire que, depuis le début des trois ans d'administration, on a adopté mille lois...

M. TOUPIN: Neuf cents.

M. VINCENT: M. le Président, 900 ou 1,000 lois. Si on fait le décompte de tout ça, prenons seulement l'évaluation foncière, on l'a amendée trois fois, cette loi. Cela fait quatre lois pour l'évaluation foncière, puis elle n'est pas encore opérante. Il y a des lois qu'on a adoptées, par exemple, que ce soit le bill 15, le bill 16, est-ce qu'ils sont opérants? On a adopté les lois du crédit agricole. Est-ce que ça opère à l'heure actuelle, est-ce que ça va bien, est-ce que ça fonctionne bien? Je pense que c'est ça qu'il faut discuter durant l'étude des crédits du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation.

Je pense que ce sont ces interventions que nous devons faire.

On parle de la recherche et de l'enseignement. Pour la première fois, on est rendu avec un Conseil de recherche; ça existait, le Conseil de recherche. Le Conseil de recherche existait; il s'agit maintenant de faire des suggestions pour l'améliorer. Le ministre nous dit que, maintenant, les universités, le gouvernement fédéral sont entrés dans ce service. C'est ce que tous les ministres de l'Agriculture doivent préconiser et c'est ce que nous devons établir.

On parle d'enseignement. Est-ce qu'on est allé loin dans l'enseignement? Est-ce que le ministère de l'Education joue son rôle dans l'enseignement agricole? Est-ce qu'il le joue pleinement? Est-ce que l'Ecole d'agriculture de Sainte-Croix de Lotbinière...

M. TOUPIN: Non, pas ça.

M. VINCENT: Comment non, pas ça? Le ministre dit pas ça, non. C'est quand même une institution qui existe. Quelle sera sa vocation future? Je commence par celle-là, parce que c'est la plus petite qui, à l'heure actuelle, fonctionne sous la surveillance du ministère de l'Agriculture. Est-ce que l'Institut de technologie agricole en ce qui concerne l'enseignement, l'Institut de Sainte-Anne-de-la-Pocatière... C'est tout ça qu'il va falloir discuter pendant l'étude du budget, et non pas faire la publicité du ministre en faisant des déclarations comme il en a fait tout à l'heure. Il n'y a rien de concret dans ce que le ministre déclare. Il corrige ce qu'il a déclaré il y a un mois. Dans un mois d'ici, il va déclarer autre chose. On a des piles de déclarations du ministre, contradictoires les unes des autres. On va revenir sur chaque article, puis on va demander quelle déclaration est bonne. Est-ce celle d'il y a deux ans? Est-ce celle d'il y a trois mois? Est-ce celle d'il y a quinze jours ou celle qu'il va faire dans quinze jours?

M. DEMERS: La correction de la correction.

M. VINCENT: On va le prouver au ministre tout à l'heure que les gens se cherchent dans tout ça.

M. TOUPIN: Les agriculteurs, je ne pense pas.

M. VINCENT: Les agriculteurs, je pense que le ministre ne sort pas.

M. DEMERS: Cela fait longtemps qu'il n'a pas labouré.

M. VINCENT: Je pense que le ministre ne sort pas. M. le Président, moi, je termine et nous y reviendrons sur chacun des articles.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Le député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, ça me fait plaisir d'intervenir ce matin, suite surtout peut-être aux déclarations fracassantes, le genre soufflage de ballons à l'extrême, qui ont été faites dès le début par le ministre de l'Agriculture. Je prendrai ici une phrase qu'il répète de temps à autre et qu'il a répétée encore ce matin dans les tout derniers moments. Peut-être que je me ferai accuser de commencer par la fin, mais disons que, pour se situer à un moment donné, il faut commencer quelque part.

Il a dit à un moment donné: Le Québec ne cédera pas une partie de notre marché au profit des autres provinces. Je me demande réellement sur quoi il se basait. Ou il est cachottier... C'est peut-être un petit cachottier, le ministre. On ne le sait pas, on ne le connaît pas encore entièrement.

M. DEMERS: II est cachottier, c'est vrai.

M. BELAND: De toute façon, la réalité présentement chez les agriculteurs au Québec, c'est peut-être quelque peu autre chose que ce que le ministre a semblé vouloir dévoiler avec grand éclat ce matin. D'abord, si on remonte un petit peu plus loin, il va sans dire que, dans les années 1950, tout le monde sait que chaque travailleur agricole produisait pour environ seize personnes, seize citoyens, mais, en 1973, chaque travailleur agricole produit pour environ 55 à 58 personnes.

Or, c'est entendu qu'il y a une nette amélioration, une nette augmentation dans la productivité de chacune des fermes. Il va sans dire que cela a fait en sorte, en même temps, qu'il y a eu diminution de la quantité des producteurs.

Donc, par le fait même, les fermes ont triplé, quadruplé et peut-être encore davantage. Par contre, lors de la dernière session j'ai demandé au ministre de l'Agriculture, par des questions posées à l'Assemblée nationale, ce qu'il avait suggéré comme fond, comme question première, ce qu'il avait suggéré comme entente possible, comme premiers pourparlers avec le gouvernement fédéral, ce qu'il avait suggéré en ce qui concerne les petites fermes au Québec. D'autre part, j'ai posé d'autres questions concernant les fameux grains de provende, quant à la politique qui existe présentement, qui existe depuis plusieurs années devrais-je dire, où on ne s'arrête pas. Les faits exacts, que les cultivateurs vivent, que les meuniers vivent, on ne s'arrête pas à cela, cela n'en vaut pas la peine. On regarde dans les nuages, mais par contre, ce que les producteurs véritables vivent, les producteurs sans sol peut-être principalement, disons qu'on laisse cela de côté, au ministère de l'Agriculture.

Pour quelle raison? Je ne le sais pas. Peut-être qu'on est gêné de parler avec le gouvernement fédéral ou pour quelque autre raison; de toute façon, cela reste de côté totalement. Tantôt, lorsque nous reviendrons plus à fond dans la discussion, j'aimerais que le ministre dépose le genre de protocole suggestif

qu'il a dû déposer au ministère fédéral de l'Agriculture pour en venir à une entente. J'imagine qu'entre autres il a suivi de près les évolutions qui ont eu cours dans le domaine fédéral, évolutions qui ont fait en sorte qu'à un moment donné ce Parlement national a voté la loi C-176. A-t-il remarqué que l'article 23 précisément permet aux provinces, suite à une entente fédérale-provinciale, qu'il y ait un office de commercialisation de créé, office de commercialisation qui permettrait que les producteurs du Québec puissent s'alimenter directement dans les provinces productrices de blé ou d'autres céréales.

M. le Président, j'aimerais qu'encore là le ministre nous fasse part des suggestions faites lors de cette fameuse rencontre entre les ministres de l'Agriculture des différentes provinces, y compris le ministre fédéral de l'Agriculture. Pour aller un peu plus à fond, encore là j'emprunterai les termes que le ministre lui-même a utilisés tout à l'heure à savoir que dans les politiques, dans les chiffres, dans les statistiques qu'il se permet de citer selon les besoins du moment ou selon peut-être les besoins politiques du moment, sa phrase bien précise: Nous nous en tenons au niveau des projections. A ce niveau, pour faire des projections est-ce que l'on part des besoins â la suite des recherches qui doivent être faites, qui ont dû être faites, besoins réels du marché de consommation, est-ce que l'on part de cela pour élaborer des politiques d'intensification, de production, soit animale ou végétale?

Est-ce que l'on part de là ou si l'on part d'autres facteurs à d'autres paliers? Je ne le sais pas et j'aimerais le savoir. Quant aux chiffres qu'il a mentionnés tout à l'heure certains sont réels et, entre autres, quand il parlait, par exemple, d'une augmentation de $0.60 du prix du lait industriel, c'est vrai, l'augmentation de $0.60. Mais ce qu'il n'a pas mentionné c'est que, dans le dernier trimestre de 1972, l'augmentation, seulement due à l'augmentation des intrants en agriculture, c'est-à-dire les moulées, a été de $0.32 les 100 livres de lait pour les derniers trois mois de 1972 — c'est curieux, on peut en sortir des chiffres — sans compter l'augmentation du prix du foin que les producteurs ont été obligés de payer au cours de l'année 1972 et qu'ils sont obligés de payer encore en 1973, tant et aussi longtemps que les animaux n'iront pas paître dans les champs.

M. le Président, il y a une augmentation à ce niveau de la balle de foin qui, je pense, va au quintuple si ce n'est pas davantage d'avec ce que c'était en 1971, en 1970 aux pareilles dates de l'année. Quant à faire des analyses, je pense qu'il faut les faire complètes, sinon, on induit la population en erreur. Cela me fait penser un peu...

M. TOUPIN: Est-ce que le député de Lotbinière me permettrait juste une petite intervention?

M. BELAND: Allez, cela me fait plaisir.

M. TOUPIN: Le gouvernement fédéral avait prévu une politique d'aide pour ceux qui achèteraient du foin au cours de la saison d'hiver et de l'automne, c'était une politique d'aide au transport, je pense. A ce jour, combien d'agriculteurs ont fait une demande? 162 ou 169 producteurs à peu près, d'après les chiffres qu'on a, remarquez bien que ça peut changer, mettons-les au maximum au cas où, 200 producteurs à peu près qui ont fait la demande au fédéral pour le transport du foin.

M. BELAND: Dans toute la province? M. TOUPIN: Dans les zones désignées.

M. DEMERS: Est-ce que ça veut dire que...

M. TOUPIN: Dans les zones désignées. Là-dessus, il faut quand même être réaliste, c'est bien beau de dire que les gars ont manqué de foin, etc. Le foin n'était pas de qualité. Sur ça, tout le monde est d'accord. Pas seulement là, il l'était un peu plus là qu'ailleurs. Mais en termes de quantité, et c'est toujours ce qu'on a soutenu, il y en avait du foin au Québec. C'était la qualité qui faisait défaut. Plus les programmes qu'on avait s'appliquent, plus nos hypothèses se précisent dans ce domaine. On était toujours dans l'ordre des hypothèses, plus nos hypothèses se précisent. Le prix du foin a été élevé, c'est un fait.

Une autre petite précision, vous disiez tantôt que j'ai parlé de l'augmentation du prix du lait et que je n'ai pas parlé de l'augmentation des coûts, ce n'est pas vrai. Je l'ai dit tantôt en termes de statistiques, on a des tableaux, on va vous les redonner. Seulement au niveau de trois articles, dernier trimestre, augmentation de 9 p.c. des coûts. Vous traduisez ça en termes de $0.32 les cent livres de lait, nous ne sommes pas équipés, nous, au ministère pour analyser ça aussi loin que ça. Nous sommes équipés pour dire par exemple... Vous l'êtes peut-être, vous autres, je ne le sais pas, si vous l'êtes, tant mieux. Nous, nous ne sommes pas équipés pour analyser que 9 p.c. au niveau du coût des entrées, ça représente $0.32 les cent livres de lait. Nous ne sommes pas rendus là encore. Nos économistes ne sont pas encore rendus là. Mais nous avons donné des statistiques là-dessus, tantôt.

M. BELAND: C'est que ça confirme encore davantage ce que je pensais, à savoir qu'il y a beaucoup à faire, je crois, au ministère de l'Agriculture pour se situer exactement au Québec où nous en sommes présentement. Quant à ce qui concerne le transport, je relève également vos dernières paroles. C'est peut-être vrai. Enfin, moi je n'ai pas de chiffres à savoir combien d'agriculteurs ont demandé une rétribution en vertu de l'aide offerte par le fédéral. Je n'ai pas cela.

M. TOUPIN: Je viens de vous le donner.

M. BELAND: Seulement ce que je sais par exemple... D'ailleurs, tantôt quand on y viendra plus à fond, j'aimerais que seraient déposés les noms, les adresses, les régions, où ces cultivateurs résident, ceux qui ont fait la demande, pour tâcher de savoir exactement où nous en sommes. C'est vrai qu'il y a eu des régions au Québec où la production de foin a été très bonne l'an passé, c'est vrai ça. Mais il y a de très grandes quantités de régions où il y a eu un transfert de ferme à ferme ou encore aux dix milles ou aux quinze milles, où le producteur lui-même allait chercher, allait faucher, récolter le foin et, à ce moment-là, ceci était refusé pour l'aide au transport parce qu'il le transportait lui-même. Est-ce qu'il n'y avait pas également de ce côté, une faille dans la possibilité d'aide au transport? Parce que dans plusieurs cas, cela a été l'engagement de camions pour transporter cedit foin, mais les gars n'ont pas été remboursés pour le transport; non, cela n'est pas vrai pour plusieurs régions. Je pourrais même apporter des noms bien précis au ministre qui ont fait la demande, qui sont allés rencontrer les agronomes régionaux et qu'on leur a dit en vertu de l'offre faite par Ottawa: Vous ne satisfaisez pas aux normes. Alors, au nom de sa majesté la norme, on ne pourra pas vous aider au transport, mes amis. C'est comme ça que ça se passe dans la réalité des faits, pas dans la brume, dans les nuages, mais dans les faits, c'est comme ça que ça se passe.

M. TOUPIN: Sans aller plus loin, est-ce que le député de Lotbinière est d'accord avec moi qu'en gros, à quelques exceptions près — le député de Nicolet est agriculteur, il a une ferme, il y en a d'autres ici, M. Fraser en est un — de façon générale, un gars qui loue une terre, il ne va pas la louer à 40 ou 50 milles? Il va la prendre le plus près possible, soit à un mille, deux milles ou trois milles.

M. DEMERS: Là où il y a du foin. M. TOUPIN: Là où il y a du foin.

M. BELAND: Je suis obligé de rappeler le ministre à l'ordre, M. le Président, si vous ne le faites pas. Justement, l'an passé, cela n'a pas été un travail de louage de terres pour cultiver le foin. La plupart des agriculteurs ont simplement acheté le foin debout. Ils n'ont pas loué la terre.

M. TOUPIN: Cela est une autre façon.

M. BELAND: II n'est même pas au courant de cela. Mais quelle sorte de ministre avons-nous?

M. TOUPIN: C'est une autre façon.

M. BELAND: Cela me fait penser un peu au cultivateur qui a un beau champ de blé. En dernier ressort, au tout dernier moment, soi-disant parce que c'est la mode il va cultiver des chardons à travers le blé pour faire de meilleurs pains. C'est un peu le genre de discussions que semble vouloir agencer le ministre ce matin. Il veut introduire quelque chose qui est tout à fait en dehors de l'ordre des choses pour tâcher de mousser encore de la politique partisane.

M. TOUPIN: Je ne vous ai que posé une question.

M. DEMERS: Ne posez pas de question. Vous connaissez les réponses, pourquoi posez-vous des questions? Vous savez que vous savez tout.

M. TOUPIN: II m'a apporté des chiffres tantôt.

M. BELAND: M. le Président, un autre aspect. Lorsque l'on parle de la valeur des fermes au Québec, il va sans dire qu'il y en a un très grand nombre qui ont besoin d'égoutte-ment. Cela a été reconnu par les gouvernements passés. C'est reconnu par le gouvernement actuel qu'on a besoin d'égouttement. Là-dessus, c'est peut-être une des rares qualités que j'accepte de dire que le ministre a. C'est qu'il reconnaît qu'il y a une grande quantité de fermes qui ont besoin d'égouttement. Encore là, dans les faits, qu'est-ce qui se passe dans l'égouttement? Le ministre a sorti un chiffre tantôt, à savoir 15 millions de pieds de drains qui ont été installés en 1970. Ensuite, il y a quelques autres chiffres qu'il va nous déclarer tout à l'heure pour ce qui est de 71/72. Il va peut-être faire des projections pour 1973. Par contre, si l'on tombe dans les faits, qu'est-ce qui se passe?

J'ai un gars, chez nous, je pense que cela vaut la peine de citer le nom, c'est Jean-Louis Laflamme de Saint-Agapit dans Lotbinière. Il a communiqué, l'été passé, dans les mois de juin ou juillet, avec le ministère de l'Agriculture pour tâcher de se faire faire un plan de ferme. Il est arrivé à peu près quinze jours trop tard, il aurait fallu qu'il ait fait cela quinze jours avant, avant que les inspecteurs ou soi-disant inspecteurs qui vont faire les plans de ferme chez les cultivateurs partent de Québec. Imaginez, il n'y a pas de téléphone au bureau du gouvernement. Alors, ce qui arrive, c'est que le type — nous sommes rendus au mois d'avril 1973, cela a été demandé en 1972 — n'a pas vu la couleur des yeux d'un bonhomme encore. Alors, il attend. Il veut cultiver du mais. Le ministre prône l'autosuffisance, l'autoproduction, l'auto je ne sais plus quoi, à ce moment-là où en sommes-nous rendus?

M. VINCENT: Loto-Perfecta!

M. BELAND: Est-ce que le ministre est sérieux quand il parle d'autosuffisance pour la

province de Québec en agriculture pour satisfaire les besoins du marché? Est-ce que cet agriculteur, ce M. Laflamme de Saint-Agapit, va pouvoir compter que cette année il va pouvoir faire effectuer les...

M. TOUPIN: J'aurais juste une question...

M. BELAND: ... travaux de drainage? Le type en question, ce n'est pas seulement 200 pieds qu'il veut faire installer, c'est au moins 15,000 pieds sur sa ferme.

M. TOUPIN: Est-ce que je pourrais poser une question au député de Lotbinière?

M. BELAND: Allez-y.

M. TOUPIN: Est-ce que le député de Lotbinière est certain que la zone du territoire dont il parle est une zone qui serait propice pour la production du mais?

M. BELAND: M. le Président,...

M. TOUPIN: Non, non, je veux une réponse à la question.

M. BELAND: ... je suis obligé de ramener le ministre devant les faits.

M. TOUPIN: C'est bien sûr!

M. BELAND: C'est malheureux. Mais, justement, la région no 3...

M. FRASER: Est-ce que le député me permet une question?

M. BELAND: Pardon?

M. FRASER: Est-ce que je peux vous poser une question? Est-ce que vous avez lu ce rapport qui parle du drainage?

M. BELAND: Oui.

M. FRASER: A la page 172, regardez, il y a la liste des cours d'eau qui ont été faits. Dans Lotbinière, on a creusé 19 cours d'eau. Dans le comté d'Huntingdon — il y a encore des cultivateurs et de bonnes terres — on en a creusé deux. Cela montre le favoritisme du gouvernement, apparemment cela. Voulez-vous qu'il fasse tout dans le comté de Lotbinière, qu'il laisse de côté tous les autres comtés et qu'il les néglige?

M. BELAND : M. le Président, justement, je suis obligé même de ramener devant les faits aussi — c'est malheureux parce que c'est un agriculteur tout comme moi — le député de Huntingdon, parce que je n'avais pas parlé de creusage de cours d'eau. C'est à un tout autre article. J'admets que, dans Lotbinière, il y en a eu plusieurs de creusés l'an passé et ce n'est pas seulement sous votre gouvernement. Il y en a eu plusieurs, mais il y en a encore à faire.

Mais, là, je parlais seulement du drainage des fermes, du drainage au point de vue des drains posés par la machinerie sous le sol.

M. FRASER: C'est la même chose avec cela. Il y a d'autres terres que celles qui sont dans Lotbinière.

M. DEMERS: II y en aura toujours du drainage à faire parce que les cours d'eau se remplissent d'une année à l'autre. Il faut recommencer.

M. FRASER: Ils se remplissent plus vite chez vous qu'ailleurs!

M. BELAND: M. le Président, pour en revenir à l'intérieur de la discussion même, au point de vue du drainage souterrain, j'espère qu'il sera possible, tout au long de l'étude des crédits de l'Agriculture, que je puisse avoir des réponses là-dessus. Si je puis avoir une réponse pour mon bonhomme de Saint-Agapit, mon agriculteur de Saint-Agapit, je présume que cela va me fixer un peu. Je saurai combien cela prend de mois entre la demande de l'agriculteur et la réalisation du travail dans le champ. Cela pourra peut-être me fixer et, quand des questions me seront posées par d'autres agriculteurs, soit par écrit ou au téléphone, je pourrai leur répondre approximativement. Je pourrai leur dire: Selon M. le ministre, cela va vous prendre à peu près tant de mois. Ce n'est pas certain, mais à peu près tant de mois. Là, je pourrai leur répondre.

Tel que c'est là, je suis obligé de référer à des cas bien précis. Là, je n'ai pas cité celui que cela faisait le plus de temps. Non, je m'en suis bien gardé. J'ai protégé de quelque façon, encore, le ministre, dans ma déclaration, ce matin.

M. TOUPIN: Je vous en prie, M. le député!

M. BELAND: Disons qu'un jeune homme comme lui, il faut quand même, à un moment donné, le protéger, comme le père de famille protège ses tout jeunes enfants, lorsqu'ils s'assoient alentour d'une table. Il sait très bien que les plus vieux peuvent se prendre à manger, mais celui qui a seulement un an ou deux ans, il est obligé de lui donner à manger. Alors, il faut protéger le ministre.

M. DEMERS: Le ministre en chaise haute!

UNE VOIX: II développe les complexes du paternalisme!

M. DEMERS: C'est à l'image du gouvernement!

M. BELAND: M. le Président, il y a également d'autres facteurs sur lesquels j'aimerais m'attarder pour en discuter. Par exemple,

j'aimerais revenir sur la question des grains de provende.

Sur cette question des grains de provende, M. le Président, tout à l'heure, le ministre a dit que peut-être que, dans deux ou trois mois, il va y avoir un avant-propos de solution ou quelque chose du genre, en vue de résoudre, évidemment, il va sans dire, le problème des grains de provende. Mais seulement, par contre, est-ce que, comme le disait si bien le député qui m'a précédé, lorsqu'ils sont tombés d'accord, à un moment donné, sur un objectif bien précis, comme il le citait, est-ce qu'ils sont tombés d'accord sur l'objet des grains de provende ou sur un facteur qui entrait en ligne de compte dans le commerce des grains de provende ou s'ils sont tombés d'accord, tous les ministres de l'Agriculture du Canada ensemble, y compris celui du fédéral, pour fermer la fenêtre ou le hublot qu'il y avait à l'intérieur de la salle où ils étaient? Sur quoi sont-ils tombés d'accord?

Nous n'avons rien vu, dans les journaux, qui était quelque chose de palpable, quelque chose sur quoi il y avait possibilité de discuter, où on pourrait voir qu'il y avait des éléments de solution véritables qui pourraient satisfaire les Québécois.

M. le Président, cela retarde continuellement. Ce n'est pas d'hier que la question des grains de provende est un facteur important dans l'agriculture, important pour les Québécois et important pour les agriculteurs du Québec. C'est si important qu'en 1971 il y a plusieurs cultivateurs, plusieurs producteurs sans sol, que ce soient des producteurs, par exemple, de porc ou de volaille, qui ont fait faillite. Etant donné qu'il y en a plusieurs qui ont fait faillite, c'est à partir probablement de ces données de 1971 que le ministre s'est basé pour faire la fameuse déclaration qu'en 1972, suite à l'augmentation des prix dans la vente des produits agricoles, augmentation qui, soi-disant, toujours selon le ministre, avait été de l'ordre de 44.3 p.c.

Si l'on regarde les chiffres le plus près possible, qu'on analyse le tout, de 1966 à 1972, l'augmentation réelle moyenne sur les fermes au Québec — pas dans d'autres pays, mais au Québec — a oscillé dans les 9 p.c.

Mais, par contre, en même temps, dans les mêmes années, il y a eu augmentation du coût de la vie sur les fermes de l'ordre de 20.4 p.c. Et je vous prie de vérifier les chiffres pour me contredire si je ne dis pas la vérité.

IL y aurait tellement d'éléments sur lesquels nous pourrions discuter comme cela. Il y a l'enseignement en agriculture aussi. Nous avons, c'est vrai — cela a été dit tout à l'heure — à Lotbinière, l'école d'agriculture de Sainte-Croix. C'est peut-être l'école où il se donne le meilleur enseignement agricole au Québec et au Canada. Or, le ministre de l'Agriculture semble vouloir se faire tirer l'oreille pour accorder à cette école les deniers suffisants pour qu'elle puisse continuer à s'épanouir et pour que tous les jeunes agriculteurs qui veulent aller y séjour- ner puissent réellement avoir l'espace requis, etc.

M.TOUPIN: Vous devriez adresser cette demande au ministère de l'Education.

M. BELAND: J'ai posé la question au ministre de l'Education, mais il m'a tout simplement répondu qu'il en prenait avis et qu'il en discuterait avec le ministre de l'Agriculture provincial. Or, qui est donc le ministre de l'Agriculture provincial, si ce n'est l'honorable Toupin?

Est-ce qu'il y a eu discussions? Est-ce qu'il y a eu échange de conversations entre les deux ministres?

M.TOUPIN: Cela, c'est une autre affaire, dans ce cas-là.

M. DEMERS: Certainement. Ils en ont parlé.

M. TOUPIN: Tout ce que je voulais signaler, c'est que l'école de Sainte-Croix relève du ministère de l'Education en termes de financement, qu'il y a collaboration entre les deux ministères pour la préparation des programmes.

M. BELAND: Bon. Alors, comme ça, il y a discussion de temps à autre. Après avoir discuté des principales choses, vous discutez de l'enseignement avec le ministre de l'Education, au cas où il y aurait possibilité d'améliorer la situation.

M.TOUPIN: L'enseignement fait partie de nos priorités, comme les autres. Nous l'analysons sur le même pied d'égalité.

M. BELAND: J'y reviendrai de toute façon plus avant dans la discussion pour tâcher de voir de plus près certains éléments, à savoir à quel endroit s'est située la discussion avec le ministre de l'Education et quelles sortes de propositions concrètes on a décidé d'essayer de réaliser au cours de l'année 1973. Parce qu'il y a des choses qui urgent quand même.

J'aurais également ici — et ce n'est pas un cas unique — parler justement de ces fameux comtés reconnus sinistrés en 1972. Je devrais peut-être dire quelques comtés privilégiés, malgré que je n'en veux pas aux agriculteurs qui sont à l'intérieur de ces comtés, loin de là. Je suis fier d'eux.

Mais, lorsqu'on constate dans la réalité qu'il peut pleuvoir beaucoup moins dans la paroisse de Joly de Lotbinière, à Sainte-Emmélie, de Leclercville qu'à Val-Alain ou à Deschaillons ou à Parisville, franchement, il y a des choses renversantes, des choses que je ne comprends pas.

M. TOUPIN: Cela, c'est la thèse du député de Saint-Maurice; Quand il mouille à quelque part, il mouille ailleurs.

M. DEMERS: Quand il mouille dans la même paroisse, dans le bout du rang, il va pleuvoir.

M. TOUPIN: Votre influence, mon cher député, s'est fait sentir jusque dans Lotbinière.

M. DEMERS: C'est bon. M. BELAND: C'est que...

M. DEMERS: J'ai mouillé le député de Lotbinière.

M. BELAND: ... je ne pense pas que personne ait installé d'immenses parapluies pour protéger les paroisses environnantes, à moins que le ministre n'ait inventé...

M. DEMERS: C'est ce que vous ne savez pas.

M. BELAND: Ah! C'est le ministre qui a inventé ça dernièrement. Bon, j'ignorais. Mais, étant donné qu'il y a une certaine quantité de paroisses où les pertes ont dépassé — et très largement — les 40 p.c. qui avaient été agencés comme barème minimum pour qu'il y ait reconnaissance de ces paroisses comme sinistrées, il y a eu, à l'intérieur de ces paroisses qui n'ont pas pu être reconnues sinistrées, plusieurs demandes.

L'une entre autres, a été faite conjointement par trois cultivateurs de Saint-Edouard-de-Lotbinière: MM. Benoit Lemay, Télesphore Lemay et Simon Lemay. Ces agriculteurs ont eu des pertes très considérables dans la production de leur maïs-grain; en l'occurrence, ils n'ont pas pu le récolter en majeure partie et ce sont des pertes qui, dans certains cas, — je n'ai pas les chiffres ici — sont à peu près de $4,000 chacun. Il y a eu des demandes répétées de la part de ces agriculteurs afin d'être aidés. Est-ce que la fameuse politique — et j'ai cru déceler dans le livre des crédits...

M. FRASER: Est-ce que je peux interrompre encore le député de Lotbinière?

M. BELAND: Oui.

M. FRASER: J'ai battu du mais-grain, la semaine passée, chez nous, qui est resté là tout l'hiver.

M. BELAND: Je considère que vous êtes un des chanceux de la province. Peut-être que dans votre région...

M. FRASER: On n'a pas été chanceux l'automne passé parce qu'on ne pouvait pas entrer dans le champ, la machine calait. La semaine passée, j'ai battu à peu près quinze arpents; il me reste encore vingt arpents mais...

M. BELAND: Je considère...

M. FRASER: ...on n'a pas bénéficié d'aide de nulle part non plus.

M. BELAND: Je considère le député très chanceux. Justement, dans mon comté, et je n'irai pas prendre l'exemple ailleurs, je le prendrai dans mon comté, il y en a même dans ma propre paroisse, Saint-Gilles, et il y en a également d'autres à Saint-Edouard-de-Lotbinière, d'autres à Sainte-Croix qui ont essayé cela ce printemps aussitôt après la fonte des neiges, et même tout dernièrement, mais ce grain, à cause du très grand nombre de pouces de neige qu'il y a eu cet hiver...

M. DEMERS: Mettez des skis.

M. BELAND: ...le grain est tout à terre. A ce moment-là, M. le Président, il n'y a pas possibilité de le récolter; on peut le récolter lorsqu'il reste après l'épi et lorsque ce dernier est debout. Mais lorsque tout est rendu par terre, si l'honorable député de Huntingdon a des façons de procéder pour récolter dans cet état, je pense que ce serait peut-être une excellente suggestion qu'il pourrait faire pour aider ces agriculteurs qui ont été lourdement massacrés, pour employer leur expression au cours de 1972.

M. FRASER: Une grande perte sans doute, on a ramassé à peu près le tiers de la récolte.

M. BELAND: Je vous considère chanceux, mais il va sans dire, M. le Président, que le comté de Huntingdon est dans le sud de la province et il y a beaucoup moins de neige, un beaucoup moins grand nombre de pouces de neige qui tombe à cet endroit qu'il peut en tomber dans la région de Québec.

M. FRASER: En décembre, il y avait deux pieds de neige.

M. DEMERS: M. le Président, est-ce qu'on pourrait offrir une mention des précipitations de neige?

M. BELAND: M. le Président, je continue et, justement, j'étais pour le faire d'ailleurs pour devancer le député de Saint-Maurice. C'est que j'aimerais — je n'irai pas au fond des problèmes qu'il y a à l'intérieur de cette sphère d'activité — j'aimerais qu'il y ait élaboration courte de la part du ministre en ce qui concerne les intentions du ministère de l'Agriculture, les intentions touchant les politiques précises préconisées relativement aux expositions agricoles régionales ou celles qui ne sont pas encore régionales et où il y a tendance à faire en sorte qu'elles deviennent régionales, d'une part, et est-ce que justement les expositions locales vont être encouragées encore au cours de cette année? Ce sont des questions auxquelles j'aimerais avoir quelques précisions pour tâcher de

répondre à une certaine quantité de demandes à l'intérieur de la province.

D'autre part, un autre domaine, en ce qui a trait au remboursement de la taxe sur l'essence dont peuvent bénéficier les agriculteurs, est-ce qu'on pourrait avoir quelques éléments de la politique précise que le ministre entend mettre de l'avant cette année, à savoir si ce sera seulement pour une machine bien précise comme ce fut le cas dans le passé ou exactement les mêmes catégories que dans le passé?

Pourra-t-on y inclure cette année également la moissonneuse-batteuse, l'andaineuse automotrice, la récolteuse, enfin les machineries propices pour la récolte du tabac et le reste?

J'aimerais avoir quelques précisions lorsque nous irons plus avant dans les détails des différents éléments à l'intérieur du ministère, j'aimerais avoir des détails suffisamment précis, encore là, pour pouvoir répondre aux demandes qui sont faites dans ce domaine. Or, somme toute, et ce seront mes derniers mots, en 1972, il va sans dire que les agriculteurs ont touché des prix supérieurs et très largement supérieurs à ceux qu'ils ont touchés, entre autres, en 1971 et même je peux inclure 1970, mais ceci est très relatif.

Il ne faudrait pas imiter l'autruche et se mettre la tête dans le sable, mais il faudrait regarder exactement quel est le potentiel de développement vis-à-vis des différentes productions. Le ministre a parlé du boeuf tantôt. Pourrait-on parler également d'autres productions? Quelle est la politique précise du ministère, politique où on a refusé de discuter depuis trois ans exactement, ou à peu près, concernant la production de la betterave sucrière au Québec, suite au rapport qui a été agencé, qui a été fait dans les années 1967/68 et dont un, entre autres, de ceux qui a fait de très grandes recherches, et je nomme l'éminent Dr Auguste Scott, lequel faisait partie de la commission qui a préparé le rapport et lequel rapport, après sa parution, démontrait que dans le centre du Québec il y avait plusieurs comtés, dont le comté même du ministre? Cela me surprend quand même que le ministre n'en ait pas fait état avant aujourd'hui, ou enfin n'ait pas essayé de scruter pour voir à ce qu'il y ait une suite à ce rapport, rapport qui disait que la betterave sucrière... il y avait un total de 172,000 acres dans les comtés de Champlain, Portneuf, Lotbinière, Nicolet, Lévis et je crois une partie de Bellechasse si je ne m'abuse, lequel rapport décrétait, et j'irai plus loin, qu'entre autres, dans Lotbinière seulement il y avait 42,000 acres où la production de la betterave sucrière serait rentable et même très rentable à cause justement de la texture du sol, mais que, par contre, il faudrait l'établissement d'une autre raffinerie de sucre au Québec et cette autre raffinerie du sucre au Québec, est-ce qu'à ce moment-là étant donné que ça coûterait...

M. TOUPIN: Vous m'accusez de faire trop de déclarations, de temps en temps, je n'en fais pas. Cela en est une que je n'ai pas faite.

M. BELAND: ... pour établir une autre raffinerie de sucre au Québec. Cette étude démontrait avec des chiffres assez précis, et même peut-être très précis, enfin moi, j'ai peut-être eu seulement des fragments de ce rapport qui établissait qu'il y avait possibilité d'établir une raffinerie...

M. DEMERS: Est-ce que le ministre me permettrait une question?

M. BELAND: ... qui coûterait autour de $10 à $11 millions.

M. DEMERS: Est-ce que le député de Lotbinière me permettrait de poser une question au ministre, parce qu'il vous a embêté en disant qu'il n'avait pas fait do déclaration là-dessus?

Il en a fait une en 1972...

M. TOUPIN: Qu'est-ce que j'ai dit?

M. DEMERS: ... pour annoncer un programme de dépenses de $6 millions — il ne se rappelle pas de ce qu'il a dit — reparti sur plusieurs années à la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire.

M. TOUPIN: Non, le député de Saint-Maurice s'est fait prendre cette fois, il s'est fait enfarger. Ce que le député de Lotbinière voulait dire, c'est qu'il y a des études...

M. DEMERS: II n'y a aucune politique de dépenses, aucune déclaration sur les dépenses des raffineries.

M. TOUPIN: II y a des études qui ont été faites sur les territoires du comté de Portneuf, Champlain, Lotbinière, où semble-t-il, il serait possible de produire de la betterave à sucre. C'est ce à quoi fait allusion le député de Lotbinière. Il me reproche de ne pas avoir rendu publique cette étude faite par le Conseil économique régional, je pense, quelque chose comme ça, M. Scott...

M. BELAND: Je ne sais pas.

M. DEMERS: C'est un M. Scott, ça c'était...

M. TOUPIN: II me reproche de ne pas avoir fait cette déclaration-là. Alors je lui ai dit que j'en avais déjà trop fait de déclarations alors j'arrête d'en faire.

M. DEMERS: Je m'excuse, honorable ministre.

M. BELAND: Je ne voudrais pas à ce moment-là que quelqu'un...

M. DEMERS: Excusez.

M. TOUPIN: Je vous en reparlerai.

M. BELAND: ... insinuerait des choses mauvaises à l'endroit du Dr Scott, parce que moi-même je l'ai eu comme professeur à Sain-te-Anne-de-la-Pocatière et je puis dire que c'est un spécialiste de très haut choix. Or, il ne faudrait pas laisser de blâme ou d'amertume vis-à-vis de ce docteur en sciences agricoles.

De toute façon, pour en revenir au fait que la raffinerie de sucre...

M. DEMERS: M. le Président, je ne sais pas si on voulait faire des allusions au fait qu'on aurait dit quelque chose de disgracieux à l'endroit de M. Scott. D'abord, moi, je ne le connais pas. Les Scott que j'ai connus sont Duns Scot, un philosophe dans le temps de saint Thomas d'Aquin, ces gars-là, et il y avait scotch.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît! A l'ordre! L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: M. le Président, je veux renseigner davantage la commission au sujet de l'allusion qu'a faite le député de Saint-Maurice concernant les $6 millions; le ministre n'a pas été tellement bavard suite à cette déclaration. Justement, à propos de ces $6 millions qu'on a votés, que le ministre nous a fait voter l'an passé pour réparation de la raffinerie de sucre, la machinerie, etc., la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire, où sont allés ces $6 millions? Est-ce que la raffinerie de sucre a été réparée, est-ce qu'elle a été réparée en partie, qu'est-ce qui s'est passé?

M. TOUPIN: On ne vous a jamais fait voter là-dessus.

M. BELAND: Etant donné...

M. TOUPIN: On ne vous a rien fait voter là-dessus.

M. BELAND: Pardon, il y a $6 millions aux engagements financiers qui ont été acceptés pour la raffinerie de sucre de Saint-Hilaire pour réparations.

M. TOUPIN: II n'y a pas eu de vote.

M. BELAND: Où cela a-t-il été? Je ne le sais pas mais le ministre doit le savoir.

M. DEMERS: II ne nous dira rien.

M. BELAND: Etant donné qu'il y a eu amélioration des bâtisses de la raffinerie, est-ce que cela a une relation avec la baisse de production de la betterave dans cette région l'an passé, à savoir de 177,000 tonnes en 1971 à 82,000 tonnes seulement en 1972? Est-ce qu'il y a un rapport quelconque ou si c'est seulement dû aux pluies dans cette région? J'apporte même un élément pour donner une chance au ministre, peut-être que je n'aurais pas dû. Est-ce que l'on pourrait avoir, au cours des discussions qui vont s'ensuivre, des détails, si les $6 millions ont été dépensés ou quelle partie a pu être dépensée, à quoi cela a-t-il été dépensé et quels sont les facteurs qui ont influencé de telle sorte qu'il y a eu diminution de la production de la betterave dans la région de Saint-Hilaire, de Bagot et ces comtés-là, Rouville, etc.?

Est-ce qu'on pourrait avoir une idée quand il y aura possibilité d'établir une autre raffinerie de sucre au Québec dans cette région? Un rapport bien précis démontrait même que tous les seuils de rentabilité ont été atteints, qu'il y avait une très forte possibilité d'absorption strictement au Québec. Il y a le marché du sucre découlant de cette raffinerie, il y a la pulpe de betterave qui en découlerait, des sous-produits quoi, et également la mélasse. Si nous avions eu cette betterave au centre du Québec l'an passé, est-ce que cela n'aurait pas contribué, M. le ministre, à abaisser le coût de production des 100 livres de lait ou de la livre de viande de boeuf? Il y avait possibilité de consommation de pulpe de betterave pour une partie ou à la place des moulées achetées, de certaines de ces moulées que les cultivateurs ont été obligés de se procurer. Cela aurait peut-être remplacé une partie du foin que les cultivateurs ont été obligés de se procurer à $1, $1.10, $1.25 la balle de 75 ou 80 livres et peut-être moins.

Est-ce qu'on ne pourrait pas regarder de ce côté-là? Lorsque nous étudierons en profondeur les prix ou l'ensemble du contexte, j'espère que l'honorable ministre pourra apporter quelques précisions dans ce domaine-là. J'espère aussi qu'il pourra nous dire, par exemple, comment il se fait qu'au Québec il y ait des quotas de restriction dans la production du lait. Remarquez que ce n'est pas une critique que je fais à ce moment-ci. Je ne la situe qu'au niveau du fait qu'il y a eu une très grande baisse dans la production du beurre au Québec.

Je donne ici les statistiques de janvier 1972 et également celles de janvier 1973, chiffres qui se situent à 4,051,000 livres en 1972 pour baisser à 3,222,000 livres au 1er janvier 1973,alors que, dans le même temps, notre bon, notre charmant, notre très stylé gouvernement fédéral augmentait l'importation de beurre des divers pays et à quel prix. Nous voyons des prix moyens, par exemple, provenant de l'Australie, de $1.94 la livre pour une certaine quantité de livres. Ceci a été la réponse donnée par un ministre fédéral à une question posée par M. Adrien Lambert, député de Bellechasse au fédéral, laquelle question portait le numéro 851, pour le renseignement du ministre s'il veut vérifier. Or, M. le Président, je cite également un autre endroit où l'on s'est procuré du beurre et d'autres sous-produits du lait, au prix de $1.08 la livre et

celui-ci provenait de l'Italie. Je ne citerai que ceux-là. Parce qu'il y a toute une gamme, toute une litanie de pays d'où sont provenus du beurre et d'autres produits du lait, alors que le Québec, notre province, est la province idéale, la meilleure province pour la production du lait au Canada. Je me demande qu'est-ce qui se passe. Est-ce que c'est par une absence de politique véritable? Qu'est-ce qui fait défaut dans la baratte à beurre?

M. TOUPIN: C'est justement...

M. DEMERS: Il n'y a presque pas de beurre.

M. BELAND: Est-ce que ce sont les ministres qui ne se sont pas entendus?

M. TOUPIN: C'est parce qu'ils ne mettent pas de crème dans la baratte, eux.

M. BELAND: Est-ce à la suite d'un manque de réalisme dans les propositions du ministre de l'Agriculture du Québec, l'honorable ministre souriant, l'honorable ministre Toupin? Est-ce à la suite de cela qu'il n'y a pas eu de suite logique et qu'on a fait en sorte qu'il y ait davantage d'importations comparativement aux années précédentes alors que, dans la province les producteurs agricoles où les cultivateurs ne demandent qu'à produire? Ce n'est pas la quantité, non plus, de produits qui compte d'une certaine façon rendu à l'échelle du producteur, mais c'est le revenu net. Or, à la minute où il y a continuelle baisse du revenu net en agriculture, on voit que les producteurs se découragent. Ils manquent de motivation, cela va de soi.

M. le Président, tantôt, lorsque l'honorable ministre a parlé de quelques politiques agricoles, c'est curieux qu'il n'a pas touché à ces problèmes. Je trouve ça quand même véritablement curieux. Comment cela se fait-il? Mais je lui donne l'opportunité, M. le Président, de revenir tantôt lorsque nous irons plus à fond, que ce soit dans la production du lait, que ce soit dans la production du boeuf, dans la production du porc et le reste. M. le Président, que l'honorable ministre revienne sur ces sujets. Pour ma part, je souhaite que nous puissions discuter, non seulement dix heures, mais quinze heures ou dix-huit heures, s'il le faut, si c'est à l'avantage des agriculteurs du Québec, peu importe où ils sont situés dans le Québec, je devrais ajouter. Parce qu'encore là il semble y avoir une concentration d'efforts pour fermer une certaine quantité de paroisses à l'agriculture. Est-ce à la suite de recherches bien précises, de recherches logiques, ou s'il y a des failles également de ce côté? Dans les fermes qui ont été achetées présentement, soit par le gouvernement provincial, soit par le gouvernement fédéral, dans ces régions dont on dit qu'elles devront être fermées à l'avenir, est-ce que les producteurs ont eu un montant suffi- sant pour être expropriés, pour être expatriés, je devrais dire, dans d'autres régions?

M. TOUPIN: M. le Président.

M. BELAND: Est-ce qu'on a pris ces agriculteurs et qu'on les a envoyés tout simplement dans une petite ville voisine sur le bien-être social afin de grossir le montant à être accordé au ministère des Affaires sociales?

M. TOUPIN: II n'y a aucune politique au ministère qui exproprie les fermes. Je ne comprends pas.

M. BELAND: M. le Président, ce n'est pas de l'expropriation pure...

M. TOUPIN: Si cela n'en est pas, ne le dites pas.

M. BELAND: ...mais c'est de l'expropriation sous-jacente.

M. TOUPIN: Ah! bon.

M. BELAND: Sous-jacente, hypocrite, oui, comme le dirait le député de Beauce, comme il l'a déjà dit, d'ailleurs, si bien à l'Assemblée nationale. Alors, est-ce que nous avons des politiques qui sont à l'avantage de la population...

M. TOUPIN: En dessous du puits.

M. BELAND: ...ou si ce sont des politiques qui véritablement sont à l'avantage de ceux qui ont à vivre en dessous du seuil de la pauvreté?

C'est un fait, c'est réel, qu'il y a environ le quart des Québécois qui vivent en dessous du seuil de pauvreté. Mais par l'agriculture, par ce ministère à voie économique, est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité d'améliorer la situation de telle façon qu'il y ait véritablement un essor économique? C'est tellement prôné par l'équipe "bourassante" que si au moins cela pouvait exister dans les faits par un ministre de l'équipe "bourassante", c'est-à-dire l'honorable Toupin, mais à quand? Combien d'années ou combien de décennies les cultivateurs devront-ils attendre? Heureusement, M. le Président, je termine par là, que les agriculteurs n'ont pas long à attendre. Pendant quelques mois, lorsque le gouvernement Bourassa décidera de déclencher des élections, ce sera nous qui serons au pouvoir. A ce moment-là, il y aura un véritable essor des agriculteurs au Québec.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): L'honorable député de Gouin.

M.JORON: M. le Président, je n'ai pas l'intention de tenter de démontrer, comme l'a fait un peu avant moi le député de Nicolet, que certains ou plusieurs programmes actuels du

ministre de l'Agriculture sont en fait tout simplement la concrétisation de mesures qui avaient été prises par le précédent gouvernement ou ainsi de suite.

Comme je n'ai jamais été ministre de l'Agriculture, je ne m'inscrirai pas au concours d'attribution des mérites entre ex-ministres de l'Agriculture...

M. DEMERS: Mérite agricole.

M. JORON: Je pense qu'il conviendrait davantage de parler, évidemment, de ce qui se passe aujourd'hui, peut-être aussi, et surtout, de ce qui devrait se passer demain. Je relevais des propos du ministre un peu plus tôt, à savoir l'évaluation globale, qu'il a faite dans une phrase à un moment donné, dans son exposé un peu plus tôt, de la politique de son ministère, en disant qu'il croyait que les différents programmes en cours collaient à la réalité. Je pense qu'avant de discuter de cela, en étudiant les divers programmes les uns après les autres, il conviendrait peut-être, au départ, mais brièvement par contre, de s'attarder un peu à cette réalité de l'agriculture québécoise.

C'est cette réalité que, pour ma part, je n'accepte pas. Malgré le ton plaisant et agréable des discussions, ce matin, il reste que la situation de l'agriculture au Québec n'est pas agréable, ni plaisante du tout. Ce sont des lieux communs de répéter cela. Alors, je ne l'illustrerai pas abondamment par des tas de statistiques. Tout le monde sait, en gros, que dans l'économie québécoise, l'agriculture est un des secteurs qui est un peu à la trafne, non seulement il ne contribue pas au rythme de croissance de l'économie québécoise, bien loin de l'accélérer, mais au contraire, il le freine. C'est un peu comme si l'on tramait un boulet. Il n'y a absolument pas de raison à cela. Ce n'est pas le fait que le Québec ait une situation climatique ou climatologique — je ne sais pas ce qu'il faut dire entre les deux— difficile, qu'il faut se satisfaire d'une agriculture qui ne répond, selon deux façons de le calculer, qu'à 50 p.c. de nos besoins alimentaires au Québec.

Si on prend le chiffre le plus favorable, c'est-à-dire en tenant compte d'un degré de transformation qui a pu intervenir au Québec, à ce moment-là, on serait autosuffisant dans une mesure de 50 p.c. Mais si on considère juste les matières premières qui rentrent dans la fabrication des aliments, à ce moment-là l'agriculture québécoise ne fournit que 30 p.c. ne nourrit, si vous voulez, que 30 p.c, ne fournit que ces 30 p.c. des besoins alimentaires du Québec.

Il y a des pays, dans le nord de l'Europe, par exemple, comme le Danemark ou la Suède, où le taux n'est pas de 30 p.c. mais de 97 p.c. et 98 p.c. Bien entendu, je sais bien qu'il ne poussera jamais de bananes et d'oranges au Québec. Ce n'est pas cela qui est en question ici. Mais il y a des tas de choses qui pourraient être produites au Québec et qui ne le sont pas.

Evidemment, on sait que l'économie du Québec est maintenant dans une ère industrielle, l'économie du Québec n'est pas assise sur l'agriculture comme elle l'était il y a 50 ans ou davantage encore avant le début de la révolution industrielle. C'est bien évident. On a juste à considérer qu'il n'y a environ qu'entre 3 p.c. et 4 p.c. de la main-d'oeuvre, aujourd'hui, qui est occupée à l'agriculture, c'est-à-dire à peu près un peu moins de 100,000 personnes sur une main-d'oeuvre totale de 2,300,000 ou 2,400,000.

M. TOUPIN: 5.6 p.c, je pense.

M. JORON: C'est-à-dire que les 5.6 p.c. ne s'appliquent pas à la main-d'oeuvre. On dit qu'il y a 5.6 p.c. de la population du Québec qui vivent de l'agriculture. Cela inclut la femme, les enfants, les familles et ainsi de suite. On peut estimer que, sur une population totale de six millions, il y a environ 300,000 personnes qui dépendent de l'agriculture. Mais vous incluez, à ce moment-là, dans cette statistique, les femmes et les enfants, c'est-à-dire que l'agriculture est responsable de faire vivre X p.c. de familles québécoises. Cela, c'est vrai, d'une part, parce que les familles sont plus nombreuses à la campagne mais des travailleurs comme tels, je me réfère — je pourrais me référer — à ce que je lisais il y a un moment...

M. FRASER: J'ai des nouvelles pour le député. Sur la ferme, la femme travaille et les enfants aussi.

M. JORON: Oui, oui. Mais ce n'est pas cela que je dis.

M. FRASER: Le prix de tous nos aliments est basé sur le travail des esclaves plus ou moins.

M. JORON: Des esclaves?

M. FRASER: Oui.

M. JORON: On en reparlera à Mme Fraser!

M. FRASER: Si vous voyiez ce qu'elle fait dans une journée, vous resteriez surpris!

M. JORON: Quelque part autour de 4 p.c. De toute façon, c'est un chiffre qui est décroissant continuellement. Mais il ne faut pas s'arrêter au fait que ce chiffre n'est pas important et conclure que l'agriculture, c'est fini et qu'on ne doit pas s'en préoccuper. Au contraire — je le signalais tout à l'heure — l'agriculture québécoise pourrait prendre une ampleur infiniment plus considérable que celle qu'elle a aujourd'hui, dans notre économie, ne serait-ce que si elle réussissait à fournir à la population une proportion plus importante de ses besoins alimentaires.

Il est inutile de dire aussi, évidemment, que les agriculteurs, comme toutes les classes de la

société, ont droit à un minimum de vie décent, que l'état actuel de l'agriculture réussit à peine à procurer. Il n'y a pas de raison, en somme, que par définition il faudrait que ce soient les agriculteurs qui soient la classe sociale qui gagne le moins dans la société. Il n'y a aucune raison à cela.

D'autres pays réussissent, à cet égard, mieux que le Québec. Et ici il faudrait faire davantage, il y a énormément de choses à faire pour revaloriser l'agriculture au Québec, lui faire une place, faire en sorte qu'elle devienne un élément-moteur de l'économie, un élément qui pousse et qui fasse augmenter le taux de croissance de l'ensemble de l'économie plutôt que l'inverse. J'en dirai un mot un petit peu plus tard parce qu'il ne faut pas considérer l'agriculture au strict niveau de la production primaire. Il y a évidemment tout ce qui s'enchaîne, la transformation et la commercialisation, tout ça amène une activité économique considérable.

Si c'est le but qu'il faut atteindre — et je pense que tout le monde serait bien d'accord sur ça — je veux dire cependant que ce but n'a aucune chance d'être atteint sous le gouvernement actuel. Pas parce qu'il est nécessairement méchant, et je n'ai pas dit sous le ministre actuel, parce que ce n'est pas une question de personnalité, de compétence individuelle non plus. C'est qu'il y a des raisons qui tiennent au système même dans lequel on vit.

Il y a deux raisons principales à l'état lamentable — jusqu'à un certain point — de l'agriculture au Québec. Il y en a une qui est l'absence de juridiction du gouvernement du Québec en la matière. Pas une absence totale, bien entendu, absence relative. Et le fait que deux gouvernements — un qui est contrôlé par nous, celui du Québec, et un qui ne l'est pas et qui a d'autres intérêts à protéger et dont il doit tenir compte, celui d'Ottawa, où nous sommes minoritaires cette fois-là — se partagent les compétences dans ce domaine; cela fait qu'il y a bien des programmes qui devraient être mis en branle et qui ne peuvent pas l'être.

J'en signalerai juste quelques-uns à titre d'exemple, les plus importants, d'autres l'ont dit avant moi, un qui est le plus populaire, le plus publicisé, le député de Lotbinière l'a évoqué avant moi, toute la question des grains de provende. Il est évident que tant que les grains de provende ne seront pas disponibles aux agriculteurs québécois à un prix plus convenable, à un prix comparable à celui d'autres parties du Canada, il y a des secteurs agricoles qui vont rester bloqués au Québec, l'élevage va rester aussi insignifiant dans la production agricole totale du Québec qu'il l'a été dans le passé.

Il est clair que le gouvernement central quand il a 400,000 ou 500,000 agriculteurs dans les Prairies à courtiser, ses faveurs vont beaucoup plus normalement pencher du côté des agriculteurs des Prairies que du côté des 100,000 agriculteurs québécois.

Tout ça a fait que — je ne m'étendrai pas inutilement sur le sujet des grains de provende parce que d'autres l'ont fait avant moi et il est bien connu — c'est un des bobos majeurs, des pierres d'achoppement qui empêchent notre agriculture d'aller de l'avant.

Il y en a d'autres, qui ne sont peut-être pas encore aujourd'hui déterminants mais qui peuvent peut-être le devenir, comme la politique de rachat des petites fermes du gouvernement fédéral, par exemple, sur laquelle on n'est pas parvenu — à ma connaissance en tout cas — à s'entendre définitivement.

Cette politique risque éventuellement de créer dans les mains du gouvernement central des banques de terre considérables et qui va faire qu'à toutes fins pratiques, le zonage ou un plan de développement global du territoire agricole du Québec, ce n'est pas le ministre de l'Agriculture du Québec qui va l'avoir en main, cela va être le ministre de l'Agriculture d'Ottawa; c'est une chose qui risque éventuellement d'handicaper sérieusement les possibilités d'action du gouvernement du Québec dans ce domaine.

Il y a d'autres domaines évidemment: la question des importations, la circulation des denrées agricoles entre le Québec et les provinces voisines et /ou, aussi, les pays étrangers. Pas besoin de se faire des dessins, sur le peu de juridiction, pas le peu mais l'absence totale de juridiction que le Québec a dans ce secteur —évidemment, puisque le Québec n'est pas un pays indépendant, n'est pas un pays souverain, il n'a pas le droit de légiférer en matière de douanes, d'importation, de tarifs, bref de ces choses — ces réglementations seront donc établies par un autre gouvernement. Mais ça va plus loin. Le gouvernement fédéral, se prévalant de théories constitutionnelles, d'articles de la constitution qui lui permettent de superviser la circulation des marchandises entre les provinces, quand il y a une incidence de commerce interprovincial, peut également s'interposer. On a vu l'exemple: La belle omelette que ç'a donné dans le cas de la bataille des oeufs l'année dernière, qui s'est terminée — vous le savez — par la déclaration de non-constitutionnalité du règlement que Québec voulait proposer pour tenter d'exercer un certain contrôle en cette matière.

J'ai seulement à reprendre — d'ailleurs, pas besoin de continuer longuement — les propos mêmes du ministres tels que rapportés dans une édition du journal Le Soleil en juillet 1972, à la suite d'une conférence des ministres de l'Agriculture qui s'est terminée dans une impasse. C'est ce que dit le titre. Il y a une citation du ministre: "Ce sont des problèmes aussi importants que celui du crédit agricole, du développement des importations des produits agricoles — dont on vient de parler — des grains de provende et enfin celui des petites fermes qui constituent en fait les problèmes ayant la plus grande portée sociale. Nous avons subi des refus d'Ottawa de façon presque intégrale dans tous

les domaines." C'est-y assez clair? Ou, c'est-y assez fort, comme dirait Stanfield. C'est assez évident.

Tant qu'on sera placé dans cette situation constitutionnelle, la marge de manoeuvre du ministre de l'Agriculture est limitée au départ. Il y a bien des choses dont on pourrait rêver et qu'on pourrait penser souhaitables et qui le sont; il n'est pas question de faire des plans de recherches pendant des années; on sait ce qu'il faudrait faire; le seul petit problème, c'est qu'on ne peut pas le faire. C'est aussi bête que ça. Deuxièmement, il y a un autre facteur qui fait en sorte que notre industrie agricole tourne un petit peu en rond; c'est le peu de contrôle qu'exercent les agriculteurs sur l'industrie agroalimentaire. Là, encore une fois, aussi bien le ministre — et je le plains à cet égard — de l'Agriculture se trouve mal placé en ce qui a trait à la première raison d'ordre juridictionnel, si vous voulez, que j'exposais tout à l'heure, il est également mal placé face à la deuxième dans un sens, ne serait-ce que par le semblant de conflit qui semble exister entre lui et son collègue du ministère de l'Industrie et du Commerce, à savoir qui des deux finalement va déterminer une politique agro-alimentaire, un plan de développement ou des politiques touchant le domaine agro-alimentaire au Québec.

Cela mis à part, en admettant que cette chicane de clocher pourrait se régler, il reste qu'il faut souligner que, tant que les agriculteurs, les producteurs agricoles n'auront pas débouché dans le domaine de la transformation, d'une part, et, troisièmement, dans le domaine de la commercialisation, c'est-à-dire que tant que leurs intérêts à eux ne seront pas représentés ou tant qu'ils ne seront pas présents dans ces deux autres phases indispensables et indissociables de l'industrie agro-alimentaire... En effet, je pense qu'il faut maintenant considérer l'agriculture à partir de la patate qui pousse jusqu'au moment où vous la retrouvez — encore, dans une patate, il n'y a pas beaucoup de transformation — dans une poche, dans une épicerie. Prenons un autre produit.

UNE VOIX: En "chips".

M. JORON: Oui, c'est vrai, elle passe en "chips", puis elle aboutit sur le comptoir chez Steinberg ou chez Dominion.

M. DEMERS: En amidon.

M. JORON: C'est comme ça aujourd'hui qu'il faut parler d'agriculture. Je pense que c'est évident, sauf que le problème au Québec, c'est que, d'une part, les agriculteurs ont été confinés à la première partie de ces trois étapes, c'est-à-dire à l'étape de la production. Il y a peu d'agriculteurs ou de coopératives agricoles ou de groupes représentatifs d'agriculteurs qui ont occupé une place dans la deuxième partie, c'est-à-dire celle de la transformation.

Si je signalais tout à l'heure qu'il y avait environ 4 p.c. de la main-d'oeuvre, c'est-à-dire pas loin de 100,000 personnes intéressées à la production primaire directe, il faut se rendre compte que, dans la transformation au niveau secondaire, c'est encore bien plus important. Là, on monte à 160,000. Signalons aussi que sur toutes les expéditions manufacturières au Québec, le domaine alimentaire représente 20 p.c. de nos expéditions. Cela, c'est $3 milliards par année. Or, les Québécois contrôlent... Je ne parle pas des agriculteurs, là; je parle des intérêts québécois comme tels. C'est encore une chose.

Comme le ministre Saint-Pierre le soulignait dans une conférence qu'il avait donnée à Montréal, il y a déjà quatre ou cinq mois — je pense que c'était en novembre 1972 — 70 p.c. de cette industrie, qui groupe pas loin de 2,000 établissements au Québec, qui emploie au-delà de 160,000 personnes et qui fournit 20 p.c. de nos expéditions manufacturières, 70 p.c. de cette industrie, donc, sont contrôlés par des intérêts non québécois. Il y a juste 30 p.c. que les Québécois contrôlent.

Dans ces 30 p.c. contrôlés par les Québécois, les agriculteurs, eux, sont représentés principalement dans un seul secteur. Il y a une place où cela a bien marché, c'est dans le domaine du lait; ça, on le sait. Le secteur coopératif était à toutes fins pratiques la seule formule d'organisation d'entreprises qui a permis aux agriculteurs de déboucher dans ce secteur. Le secteur coopératif transforme environ, si ma mémoire est fidèle, pas loin des trois quarts de la production du lait au Québec.

M. TOUPIN: Soixante-dix pour cent.

M. JORON: C'est le seul secteur, vraiment, où on a réussi à s'implanter. Tant que les agriculteurs ne seront pas eux-mêmes intéressés et tant aussi que les Québécois ne seront pas présents majoritairement, comme le souhaite tout le monde, puis comme le répétaient encore le ministre Saint-Pierre, puis le ministre de l'Agriculture aussi —il ne suffit pas de le souhaiter ou de dire qu'il faudrait que ça arrive — il n'y aura pas d'avenir assuré aux agriculteurs québécois. En effet, si, aujourd'hui, vous ne contrôlez pas le niveau de la transformation et que vous vous contentez de rester au niveau du secteur primaire de l'agriculture, bien, il n'y a pas d'avenir assuré du tout.

Ensuite, il y a la troisième phase, celle de la commercialisation, qui est également importante.

Je n'ai pas de chiffre dans la mémoire pour dire combien cela emploie au Québec dans le secteur de la commercialisation des produits alimentaires mais je sais que cela représente un chiffre d'affaires annuel de $3 milliards; pour en situer l'importance. Au total, on pourrait dire que les trois phases de l'industrie occupent probablement quelque chose comme 400,000

Québécois; 400,000 Québécois, ce n'est pas loin, c'est à peu près 20 p.c. de toute notre main-d'oeuvre. C'est là qu'on réalise toute l'importance de l'agriculture, en fait, de ce que cela pourrait être si on contrôlait véritablement les deux phases qui nous ont toujours échappé. C'est une des raisons fondamentales, en dehors de la question constitutionnelle dont on a parlé tout à l'heure: mais la deuxième, c'est le fait que ces trois phases-là ne sont pas occupées par les agriculteurs québécois.

La première l'est par définition, bien entendu, la production; la deuxième ne l'est pas. Non seulement ce ne sont pas des agriculteurs mais ce sont majoritairement des intérêts étrangers au Québec en plus de cela. La troisième phase ne l'est pas non plus. D est essentiel de trouver les politiques qui vont permettre cette intégration totale et cette présence des agricultueurs dans les deux phases de l'industrie ou de l'activité agro-alimentaire qui sont les plus payantes et qui pourraient permettre aussi de revitaliser considérablement la production primaire. Si vous contôlez le supermarché qui met les tomates sur la tablette, il y a de grosses chances que vous ayez tendance, si vous êtes en même temps le producteur de ces tomates, à placer vos tomates sur la tablette. Il y a toutes sortes de politiques qui pourraient être conçues.

J'aurais aimé pouvoir vous résumer brièvement les principales propositions du Parti québécois en matière d'agriculture mais comme j'ai dû, à la toute dernière minute, remplacer le député de Sainte-Marie, je n'ai même pas eu le temps d'apporter avec moi le texte de référence, c'est-à-dire le programme du parti. De mémoire, tout à l'heure, je tentais de me rappeler les éléments les plus importants.

Avant de vous les signaler fort brièvement, je voudrais vous dire deux choses en ce qui concerne notre politique à cet égard. D'abord, nous avons un parti pris en faveur du coopératisme. Cela semble, dans le domaine de l'agriculture, un peu usé de répéter cela parce qu'à peu près tout le monde est d'accord sur cela. Je lisais même tout à l'heure un texte du premier ministre devant une assemblée de l'UPA qui reprenait aussi que si ce n'était pas du coopératisme, évidemment, comme formule d'organisation, il est possible que l'agriculture québécoise, qui est déjà un peu chambranlante, ait sombré dans un marasme encore plus grand; tout le monde est d'accord pour réaliser que la formule coopérative est un des instruments clés qui a permis de sauver quelques meubles jusqu'à présent. Nous voudrions étendre cette formule, en la privilégiant, aux autres secteurs, aux deux autres étapes de l'industrie agro-alimentaire dont je vous parlais tout à l'heure, celle de la transformation, d'une part, et celle non moins importante, parce que c'est celle qui contrôle finalement le marché, les réseaux de distribution, de la commercialisation. C'est un appui au système coopératif que nous donnons, pas dans le sens que le gouvernement, à l'occasion, est obligé de reconnaître — il le fait principalement dans deux secteurs — qu'en matière de production agricole la formule coopérative a été le succès qu'il a été, relatif si vous voulez mais qui a quand même permis, comme je le disais tout à l'heure, de sauver quelques meubles...

Quand c'est une évidence historique, à ce moment-là, le gouvernement dit: D'accord sur la formule coopérative puis il donne un coup d'encensoir. Dans un autre domaine, dans celui, par exemple, des institutions financières, on sait le succès de la formule coopérative, de toute l'extension considérable qu'ont connue les caisses populaires au Québec. Dans des cas semblables, le gouvernement dit: Bravo pour le coopé-ratisme! Mais n'allez surtout pas appliquer cette formule plus loin. Quand c'est déjà fait, quand c'est déjà établi, quand c'est reconnu historiquement, il est prêt à donner un coup de chapeau au coopératisme, mais il n'est certainement pas prêt à pousser la formule au-delà du domaine restreint dans laquelle elle a fonctionné jusqu'à ce jour. Il y a aussi une raison bien simple, c'est qu'à ce moment-là il se heurte probablement à des intérêts privés. L'extension de la formule coopérative dans un certain nombre de secteurs c'est évident que ça va déplacer d'autres intérêts. Connaissant — je ne veux pas soulever un grand débat — les méthodes de financement des partis politiques traditionnels, on sait évidemment que, quand ça heurte ces intérêts, cela a de sérieuses chances de bloquer des politiques. On voit...

M. TOUPIN: Est-ce que je pourrais seulement apporter un petit raisonnement? Sur cette formule de la coopérative ou du corporatisme, je pense que tout le monde est passablement d'accord. Quand vous dites qu'on se heurte à des intérêts privés ou à des intérêts qui, tout compte fait, sont contre la formule collective qui peut être la formule coopérative, c'est vrai jusqu'à certain point. Il y a une chose qu'il ne faut pas ignorer là-dedans, je pense que le secteur agricole en est encore un autre qui peut donner un exemple assez typique dans ça. C'est que, si le secteur coopératif a pris forme en agriculture, il n'en a pas été ainsi dans tous les domaines. Il a réussi dans le lait, mais dans d'autres domaines des expériences ont été tentées, cela n'a pas fonctionné. Le principal élément ce n'était pas tellement le fait de la présence de l'industrie privée, c'était beaucoup plus le peu d'intérêt ou le manque d'intérêt de la part des agriculteurs d'épouser dans ce contexte la formule coopérative. On a préféré d'autres types de formules à la formule coopérative. Vous avez d'autres expériences aussi, je pense, dans l'habitation. Il y a des expériences qui ont été tentées, certaines ont réussi, certaines ont avorté aussi. C'était attribuable beaucoup plus, tout compte fait, à un manque d'intérêt de la part de ceux qui ont épousé la formule qu'à une philosophie non acceptée, tant par le gouvernement que par les autres. Je

pense qu'il faut apporter ces nuances dans l'ensemble. Comme vous disiez tantôt, je ne pense pas qu'il y ait un Québécois qui s'oppose à la formule coopérative, c'est une formule collective qui a fait ses preuves au moins dans deux secteurs au Québec.

M. JORON: Ce que le ministre signale, c'est juste que dans un certain nombre de secteurs agricoles la formule ne s'est pas avérée une méthode efficace ou, en fait, n'a peut-être pas suscité l'intérêt des producteurs agricoles eux-mêmes. C'est exact. Je ne pense pas que l'agriculture soit un secteur où on a bloqué la formule coopérative au Québec. Moi, je parle de la nécessité de la prolonger à d'autres secteurs, peut-être à la transformation ou peut-être à la commercialisation; c'est davantage à ça que je pensais. Je mettais en doute la volonté réelle du gouvernement de faire cela. On peut mesurer la volonté, quel appui moral si vous voulez, quel intérêt le gouvernement apporte au mouvement coopératif quand on sait que les subventions totales cette année se chiffrent à peu près par $238,000 au total et qu'on enlève celles à toutes sortes d'autres organismes, associations, coopératives d'économie familiale et ainsi de

Enfin, il y a toutes sortes de domaines où il faudrait pousser la formule.

Le parti pris que nous avons, c'est que nous sommes prêts à l'épauler, financièrement également. Le deuxième point majeur, qui découle quasiment de facto du programme du Parti québécois, c'est, bien entendu, la récupération totale de la juridiction, en matière agricole comme dans toutes les autres matières, au seul gouvernement de Québec. C'est le résultat de l'indépendance politique. C'est ce qui permettrait à ce que le Soleil qualifie de dossier négatif du fédéralisme... Cela est un autre des ballons des publicist es libéraux de 1970 qui vient d'être dégonflé. Il y en avait deux, si vous vous souvenez. Il y avait celui des 100,000 emplois qui devaient être créés dans la première année. Trois ans après, on n'est même pas rendu au chiffre encore, d'une part. La deuxième balou-ne, c'est celle du fédéralisme rentable, tellement rentable que là, une fuite d'un rapport du ministère des Affaires intergouvernementales le qualifie de peu rentable. Sur 24 dossiers, il n'y en a que cinq qui seraient positifs. Il y en a une dizaine qui seraient négatifs et d'autres sur lesquels on n'a pas osé se prononcer. Sans parler aussi que le gouvernement, pour ne pas continuer à montrer la preuve du peu de rentabilité fiscale du fédéralisme, a arrêté — le ministre des Finances nous l'a dit juste avant l'ajournement de Pâques — de quantifier la part du Québec dans les revenus et dépenses du gouvernement fédéral. Enfin, cela mis à part, on est en agriculture devant ce que le ministère des Affaires intergouvernementales qualifie de dossier négatif.

L'élimination, évidemment, de la juridiction fédérale, qui est le résultat de l'indépendance du Québec en matière agricole, permettrait au ministre actuel de peut-être passer un peu moins de temps à négocier. C'est effarant dans ce ministère, comme dans bien d'autres d'ailleurs, le temps perdu, c'est une façon de dire, le temps consacré, si vous voulez, aux négociations, le temps consacré aussi à étudier ce que l'autre est en train de faire, le temps consacré à trouver les moyens de contrer ce que l'autre est en train de faire, toutes sortes d'exercices qui empêchent finalement d'aller de l'avant et de faire quelque chose. Quand on est responsable d'un domaine, on fonce, on y va. C'est cela qui découlerait de l'indépendance politique du Québec. Cela permettrait au ministère de l'Agriculture d'avoir les coudées franches. Là, il n'est plus question de négocier, de taponner, de discuter, de vérifier, d'étudier, d'évaluer et ainsi de suite. Il ne serait plus question de dossiers négatifs, positifs et tout le temps que cela prend pour les faire. On aurait la responsabilité de ce qui nous arriverait. On pourrait commencer à foncer.

Qu'est-ce que l'on pourrait commencer à faire? Par exemple, on pourrait avoir, à ce moment-là, un crédit agricole intégré, pas un qui fait... par exemple, dans les chiffres de l'an passé, il y a $2,500,000 qui ont été consentis au chapitre, à toutes fins pratiques, pour subventionner des taux d'intérêt qu'exige la Société du crédit agricole du fédéral. On pourrait planifier à quelles fins les sommes d'argent, que l'on veut consacrer au crédit agricole, doivent aller, à qui et ainsi de suite. On pourrait apporter une aide financière substantielle, sous une forme de prêts ou d'avances aux coopératives pour les aider, par exemple, à se regrouper, pour aider les producteurs agricoles à se regrouper.

Je ne m'étendrai pas longuement, il y en a bien d'autres qui l'ont fait avant moi, sur la nécessité du regroupement pour une utilisation plus efficace et plus rentable des terres, ainsi de suite. D'accord. Nous savons tout cela. Encore faut-il favoriser cette affaire-là. C'est bien beau de parler de regroupement mais il faut y mettre, à un moment donné, les moyens, les instruments qui permettent de le réaliser. Il faudrait surtout, aussi, permettre aux coopératives de producteurs agricoles de s'implanter dans le domaine de la transformation, soit en leur ouvrant la possibilité d'acquérir des entreprises existantes, dans le domaine de la transformation des denrées alimentaires, au Québec, soit la possibilité d'en ouvrir dans ces secteurs — je les lisais encore il y a un moment — dans tous les secteurs où nous sommes absents.

A titre d'exemple, on mange des biscuits, au Québec, mais on ne les produit à peu près pas, apparemment. J'en donne un au hasard, comme cela, je le lisais tout à l'heure, ainsi de suite. Toute une série d'exemples...

M. TOUPIN: Celui-là n'est pas le meilleur.

M. JORON: D'accord. Admettons que je me trompe sur les biscuits. Je ne me souviens plus...

M. TOUPIN: II a changé de biscuit.

M. DEMERS: II y en avait une à Joliette, et elle a été vendue.

M. JORON: ... de toute la nomenclature. Le gouvernement était propriétaire de Stuart, aussi, une autre fabrique de biscuits, et il l'a revendue également. Enfin...

M. DEMERS: Qui a négocié la vente de celle de Joliette?

M. JORON: Cela, je l'ignore, M. le député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: Je pourrais peut-être vous le dire?

M. JORON: Vous me le direz après, d'accord?

M. DEMERS: Je vais vous le dire tout de suite. C'est un M. Landry, candidat du Parti québécois, qui a négocié cela avec des étrangers.

M. ROY (Beauce): Qui a contribué à vendre l'entreprise québécoise aux étrangers?

M. DEMERS: Oui, monsieur.

M. ROY (Beauce): C'est épouvantable!

M. DEMERS: Et il n'a pas demandé l'aide gouvernementale.

M. BELAND: C'est un fait assez extraordinaire!

M. DEMERS: C'est épouvantable! C'est maître chez nous!

M. VINCENT: On avait comme producteur officiel Pierre Bourgault !

M. JORON: Pendant qu'autant de vierges s'offensent sur des petits détails et sur ce qui est en fait un contrat de location de services professionnels, je ne sais même pas à qui cela a été vendu...

M. BELAND: Vendre le Québec aux étrangers!

M. ROY (Beauce): ... de vendre le Québec aux étrangers!

M. JORON: ... le gouvernement dont faisaient partie mes interlocuteurs précédents, au lieu d'installer une raffinerie québécoise, comme c'était tout prêt pour être fait, de l'autre côté, à Saint-Romuald, Québec, vendait tout à la Golden Eagle et laissait une compagnie étrangère s'installer avec des subventions. En plus de cela, il achetait l'équipement en Angleterre.

M. DEMERS: Quelles ont été les subventions?

M. JORON: Et cela, ce n'était pas une petite biscuiterie de $300,000. C'était une raffinerie de pétrole de $80 millions.

M. DEMERS: On n'avait pas prêché la vertu comme vous autres!

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, s'il vous plaît!

M. VINCENT: On va revenir à l'Ungava!

M. DEMERS: On va parler de l'Ungava, l'Iron Ore.

M. JORON: Quand vous aurez des...

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): A l'ordre, à l'ordre!

M. DEMERS: ... même prix. Les lambeaux de patrie qu'on cède dans le fleuve!

M. JORON: M. le Président, est-ce que je peux continuer?

M. DEMERS: Maître chez nous! UNE VOIX: C'est terrible! M. JORON: Quand ces messieurs... UNE VOIX: Hydro-Québec!

M. JORON: ... auront des roches ou des cailloux à lancer, qu'ils sortent de leur maison de verre !

M. DEMERS: Ah Seigneur! Nous autres, on ne prêche pas ces vertus-là.

M. JORON: Deuxièmement, M. le Président...

M. ROY (Beauce); ... encore la tache originelle, M. le Président!

M. DEMERS: Et la vente de Joy?

M. JORON: Joy, je ne connais pas cela. Je vous avoue que je n'ai jamais entendu parler de Joy de ma vie.

M. DEMERS: Parlez-en à papa!

M. JORON: Je n'en parlerai pas à papa parce que Joy n'a rien à voir avec papa. J'entends des

fois, justement... C'est plaisant, même si c'est inscrit au journal des Débats, de faire une petite parenthèse. Mais je dis au député de Saint-Maurice et à d'autres "back benchers" libéraux qui s'amusent à crier cela des fois de vérifier, s'ils veulent lancer des quolibets.

Moi et ma famille, nous n'avons jamais rien eu à faire avec Joy. Je ne connais pas ça Joy, je ne sais même pas ce que c'est.

M. VINCENT: On va faire le point aujourd'hui.

M. JORON: On va faire le point. Cela va être amusant, ça va vous éviter de perdre bien de la salive à l'avenir.

Deuxièmement, ce qu'il serait possible de faire — et c'est ce que propose le Parti québécois — c'est un système de protection temporal re sur certaines denrées qui sont produites au Québec, mais qui sont également produites ailleurs. C'est la question des denrées saisonnières.

Pourquoi n'y aurait-il pas moyen d'établir un système? Il y aurait ce moyen, bien évidemment, si nous avions le pouvoir de passer de telles réglementations, pouvoir qu'on n'a pas à l'heure actuelle. Dans certaines périodes, quand il y a effectivement des légumes québécois de certaines catégories qui sont produits et qui arrivent sur le marché... Je sais bien qu'il ne poussera pas de tomates au mois de janvier au Québec. Si on veut manger des tomates au mois de janvier, il faudra...

M. BELAND: Dans les serres, oui.

M. JORON: C'est vrai. Il y a toujours moyen de trouver une façon...

M. ROY (Beauce): Nous avons même de l'électricité à vendre, alors nous pourrions chauffer les serres.

M. JORON: C'est ça. Il y aurait moyen...

M. DEMERS: Vous avez dit à vendre, pas à donner.

M. JORON: ...dans les périodes de production intensive de grandes récoltes québécoises, pendant l'été, d'établir des systèmes temporaires de douanes, qui protègent les producteurs québécois, au lieu de voir leur marchandise pourrir, pendant que, sur les tablettes de Steinberg ou Dominion, se vendent des produits qui viennent de la Californie ou du sud de l'Ontario, de protéger temporairement les producteurs agricoles. C'est une des mesures.

M. VINCENT: Comme on a essayé de faire avec les oeufs et le poulet. Ils ont fait la guerre, mais là, c'est réglé.

M. JORON: Avec les oeufs et le poulet. On n'a pas le droit de le faire.

M. VINCENT: Ce n'est pas nouveau.

M. JORON: Deuxièmement, il y aurait moyen, comme l'évoquait le ministre de l'Industrie et du Commerce dans la conférence, intéressante d'ailleurs, qu'il faisait au mois de novembre 1972, où il disait qu'il fallait inciter les entreprises...

M. DEMERS: Avant ses vacances.

M. JORON: ...de production de denrées alimentaires au Québec à transformer au Québec d'abord, quand ils vendent. Il donnait un exemple, — je pense que c'est Nestlé — d'entreprises qui vendent passablement de marchandises au Québec, qui non seulement ne les produisent pas au; Québec, mais encore bien moins, dans certains cas, ne les produisent pas à partir de productions agricoles québécoises.

Il y aurait moyen, non pas d'inciter, mais d'obliger, comme tous les pays du monde le font. Pourquoi est-ce que nous, nous n'aurions pas le cran de le faire, ou l'intelligence ou la volonté d'obliger les entreprises qui exploitent des marchés fort profitables, fort lucratifs au Québec et qui nous vendent bien des aliments que nous consommons, à les produire au Québec? S'ils ne poussent pas au Québec, à les transformer au Québec, etc.

Voilà des mesures, entre autres, que propose le Parti québécois. " II y a finalement un autre point aussi, l'élimination, la spéculation foncière qui est une des tares qui, à certains égards... Le ministre l'a mentionné parmi ses doléances dans la citation que je faisais tout à l'heure.

Il a parlé d'une loi visant à l'interdiction de la vente à des fins non agricoles de terres arables qui serait précédée forcément d'un zonage délimitant la qualité des terres et empêchant justement des terres arables... On pense surtout dans le voisinage des grandes villes et peut-être plus précisément dans la région de Montréal, qui est une région idéale pour la culture maraîchère et où on voit très souvent des terres de premier choix se vendre à des fins de développement domiciliaire ou des fins de spéculation foncière et très souvent d'ailleurs à des spéculateurs étrangers. Une loi, et c'est une des propositions aussi dans le domaine du Parti québécois, visant à interdire ce genre d'opérations.

Finalement, et ce serait peut-être là un des points les plus importants, j'ai parlé longuement de l'extension de la formule coopérative dans le domaine de la transformation. Il y a la troisième étape, non moins importante, qui est celle de la commercialisation des produits. Tant que les Québécois, d'une part, et plus spécifiquement les producteurs agricoles québécois, n'exerceront pas un contrôle également dans les réseaux de distribution, c'est-à-dire soyons spécifiques et parlons du magasin, des magasins à succursales, ainsi de suite, il en restera encore qui vivront dans une situation aléatoire parce

que, évidemment, si on opère une entreprise intégrée qui va de la production, passant par la transformation, jusqu'à la vente au détail, on peut être relativement sûr d'assurer sa subsistance.

C'est pourquoi vous retrouvez dans le programme du Parti québécois la proposition suivante: Que les réseaux de distribution, les succursales, appartenant à des non-résidents québécois, que ce soit là un secteur réservé à des intérêts québécois. Une telle loi provoquerait la vente d'un certain nombre de ces succursales; pas toutes, parce qu'il y. a des succursales québécoises là-dedans aussi; mais d'un certain nombre, et c'est parmi les plus importantes, de succursales étrangères aussi qui occupent une partie importante sinon prépondérante de tout ce secteur du réseau de distribution des produits alimentaires au Québec. Le transfert de propriété de ces succursales aux coopératives de producteurs agricoles aurait pour effet de leur assurer un débouché.

Je m'aperçois qu'il est bientôt une heure. Je vais donc me résumer en disant, M. le Président, qu'après vous avoir énuméré de mémoire, parce que je n'ai pas eu le temps de le faire autrement, les principaux points que le Parti québécois suggère dans son programme pouvant aider à la construction de l'agriculture de demain au Québec, ce que j'ai hâte de voir maintenant dans la discussion des programmes d'aujourd'hui du ministère de l'Agriculture, c'est comment ces programmes répondent ou ne répondent pas aux aspirations que j'ai mentionnées il y a quelques moments.

LE PRESIDENT (M. Houde, Limoilou): Alors, la commission suspend ses travaux à cet après-midi, quatre heures, après la période des questions, et la parole sera au député de Beauce.

(Suspension de la séance à 12 h 57)

Reprise de la séance à 16 h 20

M. KENNEDY (Président de la commission permanente de l'agriculture et de la colonisation): A l'ordre, messieurs!

J'aurais deux membres à faire remplacer. M. Lessard, député de Saguenay, remplace le député de Gouin, M. Joron, et le député de Témiscamingue remplace le député de Rouville. Adopté?

M. DEMERS: Adopté.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): M. le ministre, je suis un peu... je tombe dans la soupe. Où en étiez-vous rendu ce matin?

M. BELAND: C'était le député de Beauce qui avait demandé à prendre la parole. Après le député de Beauce, c'était le député de Saint-Maurice qui avait demandé la parole.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Vu l'absence du député de Beauce, je donne la parole au député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: Mon collègue de Beauce m'a prié de dire à la commission qu'il ne se défilait pas, mais qu'il avait été obligé de se présenter à une autre commission qui siège présentement, celle des institutions financières, compagnies et coopératives.

M. le Président, ce matin, en votre absence, alors que le député de Limoilou...

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Je présidais une autre commission.

M. DEMERS: ... présidait à votre place alors que vous étiez à une autre commission, nous avions entendu les paroles du ministre faisant l'éloge, le plaidoyer pro domo de son ministère. Il avait tenté de nous prouver que tout allait pour le mieux dans le meilleur des mondes et que, depuis l'apparition du député de Champlain, Normand Toupin, l'agriculture était devenue prospère dans la belle province de Québec.

Nous avons écouté avec surprise cette révélation parce que nous aussi nous vivons dans le milieu agricole et que notre vie actuelle s'étant orientée dans un autre domaine, mais antérieurement à notre carrière politique, parce que je dois parler maintenant en parlant de moi avec le nous pontifical auquel le ministre nous a initiés, nous avons pensé, nous avons décidé — l'exemple de la ménagère du curé qui avait dit: Le chat est sur notre lit, M. le curé — c'est ainsi qu'ayant été orienté vers le nous pontifical, nous reprendrons les mêmes propos. Nous allons rappeler au ministre que, vivant parallèlement à l'agriculture, rencontrant régulièrement les agriculteurs, étant mêlé à leur vie, nous devons rappeler à cet honorable ministre, à cet honorable monsieur, que ce n'est pas si rose qu'il a bien voulu nous le déclarer. Il aura été,

ce ministre de l'Agriculture, l'homme aux déclarations sans lendemain. C'est ainsi qu'en octobre 1971, il avait proposé une loi qui, disait-il, permettrait au ministère de l'Agriculture de jouir d'un droit de préemption sur la vente des fermes. Cette politique devait être présentée au conseil des ministres dès la prochaine séance. C'était le lendemain matin. Où est-il ce droit de préemption actuellement? C'était en octobre 1971. Au mois d'août 1972, le même ministre-député déclarait qu'il entendait présenter dès la réouverture de la session, en octobre, un projet de loi-cadre sur l'aménagement du territoire. Août 1972, mai 1973, où est-il ce projet qui était entièrement rédigé? Où est-il? Projet lancé en l'air, tiré en l'air sans réalisation. En juin 1972, il y aura bientôt un an, un communiqué émis par le même ministre annonçait la signature des contrats pour l'acquisition de génisses F-l, un revenu d'appoint de $4,500,000 pour les cultivateurs du Québec, textuellement.

Un autre communiqué du 24 octobre de la même année, ramène le tout — les génisses ont rapetissé — à des proportions plus modestes, soit $550,000.

Les contrats ont été déposés à la Chambre en février 1973...

M. TOUPIN: C'est cela que le député de Saint-Maurice n'a pas compris, ce matin.

M. DEMERS: J'ai compris, M. le Président, et je demanderais, par votre intermédiaire, à l'honorable ministre, de me laisser faire mon exposé. S'il a quelque chose à dire après, il en aura tout le loisir. Actuellement, c'est moi qui ai la parole et à moins que vous-même, M. le Président, me la retiriez, je ne la cède à personne.

M. TOUPIN: M. le Président, est-ce que je pourrais vous demander une directive? Quand un député a la parole et qu'il tente d'interpréter des déclarations et qu'il leur donne un autre sens que celui qu'on a voulu leur donner, est-ce que, à ce moment-là, on peut intervenir pour rétablir les faits?

M. VINCENT: Oui, après.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Après l'intervention du député, à moins que le député qui a la parole consente à ce qu'un opposant ou un autre membre de la commission intervienne pour lui poser des questions ou faire des mises au point.

M. VINCENT: Est-ce que je pourrais vous demander également une autre directive? Est-ce qu'un ministre a la même priorité ou les mêmes droits qu'un simple député?

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Evidemment.

M. VINCENT: II pourra se prévaloir des mêmes dispositions applicables à tous les membres de l'Assemblée nationale.

M. DEMERS: Est-ce que vous me redonnez la parole?

LE PRESIDENT (M. Kennedy): M. le député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: M. le Président, j'étais dans l'énumération de la kyrielle de promesses et de déclarations que fit et qu'a faites et je peux même dire que fera le ministre, parce qu'il fait même des déclarations dans l'avenir. Le ministre de l'Agriculture extrapole, il nous dit ce que cela sera dans tant d'années. Nous avons eu une conférence ce matin sur les données futures. Il s'attribue des rôles de prophétisme.

En août 1972, $300,000 ont été dépensés — disait-il, cette année — dans l'installation de l'usine de Saint-Bruno. Où et quand ont été faites ces dépenses? Il répond qu'il n'a jamais fait cette déclaration. Je pourrais vous référer à l'article du journal qui le rapporte, passons!

Retournons, si vous le voulez bien, à la publicité du Parti libéral, de: Bourassa, deux ans après. Le ministre de l'Agriculture se vante d'avoir procédé au zonage du territoire agricole en fonction de la nature du sol et des marchés. C'est fort! Procéder au zonage du territoire agricole en fonction de la nature du sol et des marchés! Dans peu de temps, depuis que le ministre est là, il a pris les rapports, les analyses de sols qui étaient faites à la grandeur de la province. Il a aussi étudié les marchés et il a établi un zonage du territoire agricole, en fonction de la nature de ces sols et de ces marchés. J'aimerais, lorsqu'il nous répondra, qu'il puisse bien nous déterminer à quel endroit il a zoné le territoire, en fonction de la nature du sol et des marchés.

A la suite d'une question posée en Chambre, il répond que la direction des bureaux et des laboratoires régionaux avait entrepris une étude poussée de zonage, dont une phase prévoit la consultation. Ce qui, tout en étant nécessaire, est assez long. En somme, on étudie les études qui ont étudié le problème ! Qui dit vrai? Le ministre en Chambre ou le ministre politicien?

Dans la deuxième brochure: Bourassa, deux ans après, le même ministre se donne le crédit d'un plan de zonage et de réaffectation des terres impropres à l'agriculture, du remembrement des exploitations et de l'amélioration du fonds de terre. C'est à la page 13. A la suite d'une question, en Chambre, le ministre déclare que ce plan était en voie d'élaboration et qu'il n'était pas d'intérêt public de le publier. Où est ce plan? J'aimerais qu'il nous dépose ce plan. S'il n'a pas de plan, où est la vérité? J'aimerais qu'on nous la dise!

Dans la même brochure, le ministre dit qu'il a honoré ses obligations en mettant sur pied une vraie politique de drainage souterrain et

d'irrigation. Une vraie! Quelle vraie politique d'irrigation? Quelle vraie politique de drainage souterrain, à part d'avoir ajouté à ce qui existait? Il ne fera pas plus que les autres! Il ne fera que drainer le sol naturellement. Il y avait un programme quinquennal d'établi par son prédécesseur, et il le continue. A une question posée en Chambre, il répond qu'elle concerne uniquement les étangs de ferme. Cette politique existait déjà depuis plusieurs années — les étangs de ferme, ce ne sont pas les canards qui ont inventé ça! Est-ce une vraie politique de drainage que de différer durant une année l'évolution de l'aménagement des cours d'eau de surface? Il faudrait les drainer aussi.

Dans la même brochure, le même ministre, député de Champlain, se vante d'avoir défini une politique de classification et de mise en marché des produits pour orienter la production et réduire les prix aux consommateurs. Quelle est cette politique de classification? Quelle est cette politique de mise en marché qui a réduit les prix aux consommateurs? Ils sont pas mal réduits, les prix aux consommateurs, depuis quelque temps, à tel point qu'on ne veut plus acheter le boeuf et qu'on marche contre le boeuf, dans les grandes villes! Quelles sont les denrées que l'on paie moins cher? Je voudrais qu'on me les nomme ou qu'on nous dise la vérité.

Dans la même brochure — c'est un livre inépuisable que ce livre — M. Toupin, ministre, vante la loi no 15, modifiant la loi des marchés comme étant une protection des marchés, de la qualité et des prix par catégorie de production. A une question posée en Chambre, il répond, le plus candidement du monde, que le bill 15 a uniquement pour but de rendre plus efficace l'application de la loi et des règlements et d'enrayer l'action de ceux qui mettent illégalement en marché des oeufs au Québec. Il faudrait qu'il précise ces choses. Il faudrait qu'il nous réponde, ou en homme politique ou en politicailleur, qu'il nous dise la vérité ou qu'il ne dise rien.

En février 1972, M. le Président, l'un de ses sous-ministres, d'après un communiqué émanant du ministère, alors que ce sous-ministre remplaçait le ministre, déclare ceci: L'industrie du porc traverse la période la plus critique de son histoire. C'était grave, les cochons étaient tristes. Quelques mois plus tard, c'est-à-dire au mois d'août de la même année, en 1972, le ministre de l'Agriculture, à Chicoutimi, invitait les producteurs à développer l'élevage du porc. D'une part, vous avez un sous-ministre qui dit que l'industrie du porc traverse la période la plus critique de son histoire et, d'un autre côté, vous avez le ministre, qui est le patron de ce sous-ministre, qui va dire: Elevez des porcs, élevez-en, cela va être bon! Qui dit vrai? Où est la vérité? Est-ce le sous-ministre qui ne dit pas la vérité ou est-ce le ministre qui ne la dit pas? Serait-ce qu'il y a un plan conjoint qui ne marcherait pas ou qui serait sur le point de naître? D nous en a donné, ce matin, un semblant de prévision. H avait aussi, à Chicoutimi, invité les producteurs à s'orienter vers la production des poulets. Sait-il, ce bon ministre, qu'il y a un plan conjoint de la chair de volaille et que les producteurs sont soumis à un contingentement, afin d'éliminer la surproduction?

Une motion a été déposée à l'Assemblée nationale demandant copie de la correspondance échangée avec le gouvernement fédéral, au sujet des grains de provende, nous en avons parlé, ce matin.

On n'a pas parlé de cette correspondance. Sujet d'actualité, s'il en est un! Or, quelle surprise! Le ministre de l'Agriculture répond qu'il n'en a pas, dans le document 205, déposé le 13 décembre 1972. Où sont les grandes déclarations?

Il y a autre chose. Au symposium agro-alimentaire, le ministre de l'Agriculture a fait des exposés d'intention. Il déplore la sous-exploitation des bonnes terres agricoles, en rappelant que 300,000 acres de terre ont été acquises par des spéculateurs dans la seule région de Montréal. Comme nouvelle stratégie ou plan de développement, qu'apporte-t-il? Quelle solution? Rien. On étudie les études qui étudiaient le problème et les rapports. Il regrette le manque d'aménagement foncier vraiment rationnel. On devrait faire des efforts véritables et soutenus dans ce domaine, dit-il. Comme nouvelle stratégie ou plan de développement, rien ! Au contraire, il a fait diminuer ou laissé diminuer le budget de drainage de surface. IL a éliminé la subvention à l'achat d'engrais chimiques. Il a éliminé la subvention à l'achat de la chaux. Il réclame une meilleure identification des sols, selon les régions. Comme nouvelle stratégie ou plan de développement, rien.

Il déplore une pénurie de main-d'oeuvre agricole professionnelle chez les exploitants et chez les employés. Comme nouvelle stratégie, rien, moins que rien! Il faudrait, dit-il que le ministère de l'Agriculture travaille sur plusieurs types de produits à la fois. Comme nouvelle stratégie ou plan de développement, rien. Au niveau du regroupement des fermes, le ministère de l'Agriculture et de la Colonisation n'a pas d'autre choix que de revoir ses politiques dans une perspective de protection du territoire agricole. Encore ici, rien!

Dans son plaidoyer, ce matin, le ministre semblait ne pas sentir les problèmes qui existent. Il semblait aussi déclarer qu'il avait tout réglé, ou à peu près. L'agriculture est joliment malade, quand un ministre ne sent pas le mal des cultivateurs. Quand un patient en est rendu à ne plus sentir son mal, c'est qu'il est fini! Nous en sommes — et je ne voudrais pas qu'on le soit — à cette époque.

Je l'admets, il y a eu des surplus de revenus en agriculture cette année. Mais est-ce dû aux politiques mises de l'avant par le ministre? Est-ce dû à cela ou à une conjoncture économique? Si le porc s'est vendu plus cher, cette

année, à qui est-ce dû? Au ministre de l'Agriculture, député de Champlain? S'il s'attribue de semblables mérites, il est plus malade...

M. TOUPIN: On a fait marcher les machines à pluie !

M. DEMERS: Oui, vous êtes en train de vous noyer à force de pluie. Et vous n'êtes pas comme le savon Ivory, vous ne flottez pas!

M. le Président, il y a eu augmentation dans le prix du lait. Ce serait dû au ministre de l'Agriculture? Il y a eu des départs en agriculture. Le président de l'UPA, M. Allain, est parti. La raison profonde de son départ, on ne la saura peut-être jamais, mais ne serait-ce pas une certaine désillusion devant le manque de réalisations par cet homme qui fut un de ses compagnons de travail? Je ne dis pas que c'est cela. Je pose la question. La question reste posée. Lui seul pourra répondre.

Il est retourné vers la terre. Pourquoi?

UNE VOIX: Crever.

M. DEMERS: Pardon?

M. FRASER: Pour crever de faim.

M. DEMERS: Non. Si vous avez crevé de faim sur votre terre, M. le député de Huntingdon, vous étiez terriblement riche, parce que vous fumez encore de très gros cigares.

M. le Président, mes remarques se terminent. Nous étudierons tantôt les crédits du ministère en détail, programme par programme, en nous servant de la formule PPBS.

M. TOUPIN: C'est en plein cela.

M. DEMERS: Je ne sais ce que cela apportera dans l'avenir. Cela se voudrait, il me semble, une planification des dépenses du gouvernement en fonction des politiques à venir. J'aimerais que le ministre, lorsqu'il reprendra la parole, nous dise exactement ce qu'est la formule PPBS, qu'il nous explique comment il entend faire fonctionner son ministère en appliquant ces formules, ce programme, et qu'il nous détaille les politiques qu'il veut faire entrer en fonction de ces programmes. Nous avons remarqué que le programme 1 était naturellement le premier mais que l'administration — c'est vrai, cela va vous surprendre, c'est une vérité de La Palice — qui était étudiée au début, antérieurement, est reportée au programme 5.

UNE VOIX: C'est la politique du ministère.

M. DEMERS: Je me demande si c'est la politique du ministère ou si c'est la politique du gouvernement de nous sortir le traité sur la main-d'oeuvre agricole d'abord et de venir nous parler d'administration ensuite. Je trouve qu'il aurait fallu qu'on étudie d'abord l'administration, pour qu'on connaisse ceux qui font la recherche dans l'enseignement, le financement agricole, l'aide à la production agricole, la commercialisation agricole, la "gestation" interne de soutien...

M. TOUPIN: La gestation...

M. DEMERS: ...la gestion... Je m'excuse. C'est neuf mois. C'était comme cela dans le temps, mais il y a une espèce où c'est trois mois, trois semaines, trois jours.

M. TOUPIN: Ce n'est pas la vôtre, j'espère.

M. DEMERS: Je n'ai pas fait de personnalité. Je me reprends et je remercie le ministre d'avoir corrigé mon lapsus afin qu'au journal des Débats on tienne compte de ces gestions et non pas ces gestations parce qu'on peut gester sans...

UNE VOIX: gérer... sans gestation.

M. DEMERS: Non. Ce n'est pas un mot, ce n'est pas un verbe... sans être en gestation. Mes propos se terminent et je vous remercie.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): M. le ministre, vous avez le droit de réplique, sinon, nous allons commencer l'étude des programmes.

M. TOUPIN: Je voudrais dire seulement quelques mots. Le tableau que le député de Saint-Maurice vient de brosser, le député de Nicolet l'avait fait dans sa conférence de presse, c'est de la vieille soupe. Ce n'est rien d'autre que cela. Je pensais vraiment qu'au cours de l'étude des crédits, les députés de l'Opposition, notamment ceux de l'Union Nationale, qui se targuent très souvent d'avoir été avant nous les initiateurs de bien des programmes, allaient nous apporter des suggestions positives, nous faire des propositions. Ils se contentent purement et simplement d'énumérer les idées que nous mettons de l'avant, les programmes que nous mettons de l'avant. Je ne sais pas qui a préparé ces documents de travail, mais cela n'en demande pas beaucoup de compiler des déclarations. C'est très facile. Je me demande vraiment où est dans l'Union Nationale actuellement la véritable force de pensée, la véritable idée d'originialité. Je me demande où elle est. On nous ressasse toujours exactement les mêmes pots de soupe aux pois.

M. DEMERS: Je fais remarquer au ministre...

M. TOUPIN: On revient toujours sur les mêmes choses, des déclarations ici, des déclarations là. Quand, M. le Président, dans les propos qu'ont tenus et le député de Nicolet et le député de Saint-Maurice avez-vous quelque chose de positif en termes d'analyse du problème agricole au Québec? Quand avez-vous dans les

propos du député de Saint-Maurice et du député de Nicolet des suggestions le moindrement constructives?

Le député de Lotbinière en a au moins fait quelques-unes et il n'a quand même pas l'expérience d'avoir administré le ministère de l'Agriculture. Il n'a quand même pas l'expérience d'avoir été député pendant aussi longtemps que le député de Saint-Maurice l'a été. Il me semble qu'il y aurait possibilité pour eux de nous présenter des choses qui peuvent se tenir un bon matin. Ce n'est pas pour rien que les agriculteurs ont voté, à la dernière élection, en gros paquet contre eux. C'est très simple, c'est qu'ils ressassaient encore toujours les mêmes pois et la même soupe. C'est cela qui est le problème.

M. DEMERS: M. le Président, j'invoque le règlement.

M.TOUPIN: Je me demande quand est-ce qu'on va être capable de trouver, au niveau de ce groupe-là, des idées. Nous, nous en émettons des idées et on nous reproche d'en émettre. On essaie d'analyser les problèmes et on nous reproche de les analyser.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): M. le ministre, je crois que vous vous éloignez quelque peu de la réplique qui prévaudrait aux attaques du député de Saint-Maurice.

M. DEMERS: M. le Président, j'invoque le règlement.

M. TOUPIN: C'est tout ce que j'avais à dire.

M. DEMERS: On n'a pas le droit en commission, je suppose?

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Oui, évidemment.

M. DEMERS: Je voudrais faire remarquer à l'honorable ministre que nous ressassons la vieille soupe, mais ce sont ses propos. Nous ne sommes pas ici pour orienter le ministère, nous sommes ici pour critiquer la politique du gouvernement, et lorsque nous serons au pouvoir et que nous préparerons un programme électoral, nous aurons ce qu'il faut dans le programme. En attendant, nous allons étudier les politiques du gouvernement et nous allons étudier les déclarations de cet honorable ministre, que cela lui plaise ou pas, et nous allons les répéter 25 fois. Quand on brasse la vieille soupe, ce sont vos vieux mots, vos vieux arguments, et ce n'est même pas de la soupe au pois, c'est de la soupe au chou!

M.TOUPIN: M. le Président, cela ne me déplait pas du tout, parce que les seules idées valables qui sortent d'un discours comme cela, ce sont des citations qui viennent de mon ministère. Je ne vois pas d'inconvénient à ce qu'on les fasse. Qu'on les fasse partout, qu'on veuille, au Québec, améliorer l'agriculture en faisant du zonage, qu'on dise qu'on veut améliorer la condition de l'agriculture en voulant, par exemple, planifier davantage l'utilisation du territoire...

M. DEMERS: Qu'on améliore.

M. TOUPIN: ... qu'on nous dise qu'on a fait des déclarations pour investir $300,000 et qu'on ne les a pas dépensés en entier, qu'on en a appliqué $192,000 ou $200,000, selon les projets qu'on avait de l'avant, on est bien d'accord sur cela, nous ne voyons pas d'inconvénient à cela. Vous pouvez dire cela sur tous les tons, sur tous les toits, dans toutes les rues et sur tous les trottoirs, nous ne voyons pas d'inconvénient à cela.

M. DEMERS: Dans ce cas-là...

M. TOUPIN: Mais la seule critique que j'apporte à votre discours, la seule de toutes, c'est que je pensais trouver dedans des opinions originales, des idées originales, des idées de gars qui s'assoient quelque part et qui sont capables de penser quelque chose.

M. DEMERS: On n'est pas pour vous donner des idées, vous n'en avez pas.

M. TOUPIN: C'est cela qu'on voudrait, c'est cela qu'on voudrait que vous nous fassiez comme proposition. Ce n'est rien d'autre chose que cela.

M. DEMERS: Cela vous en prend quelques-unes.

M. TOUPIN: C'est la seule critique que j'ai à apporter.

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Cela clôt le débat, quand le député exerce son droit de réplique.

M. BELAND: Etant donné que le ministre n'avait pas tout à fait fini d'user de son droit de réplique, est-ce qu'il pourrait également nous faire part de la politique véritable de mise en marché du lait, tel que la question lui fut posée par le député de Lévis, afin de pouvoir situer le point exact et faire en sorte que les producteurs donnés sachent exactement à quoi s'en tenir à propos du lait cru? Est-ce que vous pourriez, en terminant, nous donner...

LE PRESIDENT (M. Kennedy): Est-ce que cette question-là ne pourrait pas être intégrée? Sans cela, on va passer notre temps à se poser des questions. Alors, programme 1: Recherches et enseignement, élément 1, Recherche agricole.

Recherche agricole

M. VINCENT: M. le Président, dans la recherche et l'enseignement, est-ce qu'il y a des nouvelles politiques du ministère en ce qui concerne la recherche? Il y a quelques instants — c'est-à-dire ce matin — le ministre a mentionné en touchant la recherche, qu'on avait créé au ministère un Conseil de la recherche, je crois. Est-ce que c'est cela que le ministre a mentionné? Je ne veux pas insulter le ministre, mais il a dit qu'il avait créé cela récemment, le Conseil de la recherche.

M.TOUPIN: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit. Si vous voulez, je peux rectifier tout de suite ce que vous dites. Ce que j'ai dit — et je peux reprendre mon discours de ce matin — c'est que nous avons réorganisé, nous avons refait un peu le Conseil de recherche.

M. VINCENT: Ce n'est pas tout à fait ce qu'il a dit ce matin. D'après ce qu'on peut constater, ce matin, c'est que c'était tout nouveau, le Conseil de la recherche.

M. TOUPIN: Dans sa forme actuelle.

M. VINCENT: A cause des réaménagements à l'intérieur du Conseil de la recherche.

M.TOUPIN: Ce qu'on a fait... Vous savez comment le conseil de la recherche était constitué? Il y avait des spécialistes, c'était le Dr Forest qui était responsable au service de la recherche et de l'enseignement.

On faisait appel à un certain nombre de spécialistes pour juger les demandes qui venaient de l'extérieur, concernant des programmes de recherche. Nous avons constaté qu'il y avait double emploi parce que, d'une part les universités faisaient de la recherche et que, d'autre part, le Conseil de la recherche approuvait des programmes de recherche. De plus, le gouvernement fédéral, par ses stations de recherche, faisait de la recherche et le ministère subventionnait de la recherche via le Conseil de recherche. Alors, la réforme m'apparaît bien logique. On s'est dit : Pourquoi ne pas impliquer tout le monde au niveau du Conseil: les universités, le gouvernement fédéral avec ses stations et le ministère. Les trois vont se retrouver au niveau du Conseil de la recherche et, ensemble, ils vont sélectionner les projets de recherche. Ceux que feront l'université Laval, on ne les fera pas faire par les stations de recherche du gouvernement fédéral. Ceux qui seront faits au gouvernement fédéral, on ne les confiera pas à des chercheurs qui ont proposé des programmes. C'est la seule réforme que nous avons faite. Cela paraît bénin, simple au départ mais c'est extrêmement important pour ne pas gaspiller les budget qu'on met et pour éviter le double emploi. C'est extrêmement important également pour retrouver autour d'une même table des hommes qui sont engagés dans la recherche. C'est la seule réforme que nous ayons faite au niveau du Conseil de la recherche. On ne l'a pas changé. Il existait le Conseil de la recherche. On l'a réformé.

M. VINCENT: M. le Président, le ministre vient de clarifier ce qu'il a dit ce matin. Si je prends le rapport du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation pour l'année 69/70 sous la signature du ministre actuel de l'Agriculture et de la Colonisation, il dit...

M. TOUPIN: Mais...

M. VINCENT: Non, mais tout de même, ce qu'il vient de dire...

M. TOUPIN: L'année était terminée lorsqu'on a écrit ça.

M. VINCENT: Dans le rapport du ministère de l'Agriculture et de la Colonisation en 1969-1970...

M. TOUPIN: Oui, ce n'est pas l'année...

M. VINCENT: ... on dit ceci à la page 44: "Le Conseil des recherches agricoles est un organisme consultatif du ministère de l'Agricul-tur eet de la Colonisation. Il a pour mission de diriger et de coordonner la recherche agricole". C'est exactement ce que vient de dire le ministre.

M. TOUPIN: M. le Président, le député de Nicolet ne veut pas comprendre. Je pense que je vais lui faire un dessin.

M. VINCENT: "II approuve les programmes de recherche, distribue des subventions aux facultés de l'agriculture et accorde des crédits aux institutions gouvernementales".

M. TOUPIN: C'est exact!

M. VINCENT: "II aide aussi à la formation des scientifiques et au perfectionnement des fonctionnaires..."

M. TOUPIN: C'est exact!

M. VINCENT: "... par l'attribution de bourses d'études. Les membres sont au nombre de huit. Us sont nommés par le ministre".

M. TOUPIN: Oui, oui.

M. VINCENT: "Ils sont assistés par un secrétaire", et on continue...

M. TOUPIN: Oui, oui.

M. VINCENT: Et là, comme le ministre le mentionnait tout à l'heure au sujet de la

réforme qu'il a apportée à ce Conseil de recherche, ces gens s'assoient autour d'une même table. C'est exactement ce qu'on dit dans le rapport de 1969. Qu'est-ce qu'il y a de nouveau?

M. TOUPIN: Le seul nouveau...

M. VINCENT: Ce sont encore des paroles, seulement des paroles pour faire croire à la population que quelque chose a été fait. Je pense que la seule chose nouvelle qui a été faite, c'est que le Conseil de recherche a été rattaché à la direction du ministère au lieu d'être au service de la recherche et de l'enseignement. Je pense que c'est la seule réforme qui a été faite.

M. TOUPIN: Oui, à la direction du ministère et on a ajouté...

M. VINCENT: Mais qu'on cesse de faire de la publicité !

M. TOUPIN: ... au comité de recherche des représentants officiels des universités, alors que cela n'existait pas avant. Il y avait des chercheurs avant au Conseil de recherche. On est bien d'accord sur ça. Le Conseil de recherche était composé de chercheurs, mais il n'y avait vraiment pas à l'intérieur du conseil cette discipline pour qu'on soit en mesure d'éviter le double emploi, pour qu'on soit en mesure...

M. VINCENT: Les membres du conseil sont reconnus au sein des institutions de recherches agricoles du Québec.

M. TOUPIN: C'est un fait! On les prenait là!

M. VINCENT: C'est exactement ce qui existait en 1969. C'est encore un autre propos du ministre. Les gens qui l'écoutent disent: II y a quelque chose de neuf qui vient d'être fait. On prend les documents de 1969 et c'est exactement ce qui existait.

M. TOUPIN: C'est vous qui y étiez avant que j'y sois. Qui était au Conseil de recherche? Donnez les noms.

M. VINCENT: Non, je donne officiellement le document de 1969.

M. TOUPIN: Non, non c'est moi qui ai signé le rapport parce que vous avez fait des élections avant.

M. VINCENT: Je n'ai pas les noms ici. M. TOUPIN: Si vous ne les avez pas.

M. LESSARD: Quels sont les membres du Conseil de recherche actuellement?

M. TOUPIN: Les normes?

M. LESSARD: Les membres.

M. VINCENT: Bon! Le ministre actuel de l'Agriculture demande à l'ancien ministre de nommer les membres d'il y a quatre ans et il n'est même pas capable de nommer les membres actuels.

M. TOUPIN: En termes de noms, je sais que les universités sont présentes.

M. VINCENT: Comme elles étaient présentes.

M. TOUPIN: Les stations de recherche sont présentes de façon officielle et non pas...

M. VINCENT: Comme elles étaient présentes de façon officielle.

M. TOUPIN: ... par des chercheurs de l'université.

M. LESSARD: Est-ce encore le même nombre de membres qu'en 1969?

M. TOUPIN: Qui est membre?

M.LESSARD: Quels sont les noms des membres qui représentent ces membres, si on veut? Si vous dites que vous avez donné une certaine représentativité au Conseil de recherche, quels sont les membres qui représentent l'université, le ministère, etc.? ...

M. TOUPIN : II y a les trois doyens des trois universités qui sont membres du conseil.

M. VINCENT: Les trois doyens?

M. TOUPIN: ... De la faculté d'agriculture qui sont rattachés aux universités, le collège Macdonald, l'université Laval et l'Université de Montréal, les médecins-vétérinaires. Ils sont sur le comité. Par la suite, il y a trois représentants, les trois régisseurs des stations de recherche du gouvernement fédéral, les trois premiers responsables au niveau des facultés et au niveau des stations de recherche, et la direction générale du ministère, représentée par son sous-ministre d'abord, responsable de la recherche et de l'enseignement, qui est le président du comité. Est-ce qu'il y a un autre membre? Il y a deux ou trois autres personnes du ministère qui sont directement impliquées dans le Conseil de recherche...

M. VINCENT: Cela fait neuf avec le secrétaire.

M. TOUPIN: ... et qui sont membres du conseil.

M. LESSARD: Est-ce que le ministre pourrait nous dire combien de fois les membres du Conseil de recherche se sont réunis et quels sont

les différents programmes de recherche qui ont été acceptés pour l'année en cours?

M. TOUPIN : Est-ce qu'on a les programmes de recherche? Le conseil se réunit à peu près une fois par mois ou une fois, ça dépend évidemment...

M. LESSARD: Est-ce qu'il se réunit...? M. TOUPIN : Régulièrement. M. LESSARD: Régulièrement.

M. TOUPIN : Très régulièrement. Quant aux programmes, on peut les donner; il y en a plusieurs.

M. VINCENT: Cinq à six fois par année habituellement.

M. TOUPIN : J'ai donné la grille ce matin des critères sur lesquels on s'était basé. On a établi des priorités au niveau de la recherche, et c'est maintenant le Conseil de recherche qui détermine, à la suite de discussions avec le ministère, parce que son sous-ministre est là, présent, les priorités de recherche.

M. LESSARD: Maintenant, étant donné qu'il y a des représentants du gouvernement fédéral, est-ce qu'actuellement le ministre peut dire que les priorités déterminées par le gouvernement du Québec ont été en général respectées par les organismes fédéraux?

M. TOUPIN: Depuis qu'il y a coordination, oui. Mais avant ça il était possible qu'on retrouve du dédoublement.

M. LESSARD: Alors avant ça, l'objectif de la représentation était le même en 1969 et actuellement. Le problème qui se posait, c'était lors de la nomination probablement. Si je veux bien comprendre là ce que vous vouliez expliquer tout à l'heure, c'est qu'il y a eu des changements strictement au niveau de la nomination, c'est-à-dire que vous êtes allés chercher des gens qui représentaient tous les milieux de recherche.

M. TOUPIN: C'est-à-dire qu'avant ça, les représentants de la recherche venaient à peu près des mêmes milieux, sauf que ce n'étaient pas les responsables véritables des institutions. Alors, nous nous sommes dits, si nous voulons vraiment agir de façon efficace, sur un programme de recherche de l'université Laval, par sa faculté d'agriculture et d'alimentation, il me paraît normal que nous ayons, au conseil, le responsable de la faculté. Alors là nous avons demandé au responsable d'être membre du conseil. On a fait la même chose vis-à-vis des autres universités. Ceux-ci ensemble, à la suite de réunions, regardent les différents program- mes de recherche qui peuvent provenir tant d'une faculté que d'une autre, ou tant du gouvernement fédéral, par ses stations de recherche, que du ministère de l'Agriculture.

C'est là une de leurs premières fonctions que de faire la sélection. Maintenant, le ministère s'est établi des priorités dans la recherche au nombre de quatre ou cinq. Il me semble que c'est quatre que j'ai donné ce matin. Ces priorités sont respectées par le Conseil de recherche et les stations de recherche fédérales et les universités orientent leurs recherches dans cette perspective.

M. LESSARD: Quand vous dites que ces priorités sont respectées, vous voulez dire, vous l'avez ajouté là, qu'actuellement les organismes fédéraux orientent leur programme de recherche à partir des priorités déterminées par le Conseil de recherche.

M. TOUPIN: Le Conseil de recherche, lui, prend sa source dans les programmes du ministère au niveau des priorités.

M. LESSARD: Vous n'avez plus de problème de coordination entre la recherche faite par les organismes du gouvernement fédéral puis...

M. TOUPIN : II ne faut pas pousser à l'extrême. Le gouvernement fédéral fait, par ailleurs, lui aussi, de la recherche.

Il peut bien faire porter des programmes de recherche vis-à-vis de son gouvernement par exemple sur, je ne sais pas, les perspectives de ... des consommateurs.

M. LESSARD: D'accord, mais il reste que les organismes de recherche du gouvernement fédéral, en ce qui concerne la recherche agricole au Québec, accepteraient, par l'entremise du conseil de recherche, de se soumettre aux priorités québécoises.

M. TOUPIN: Acceptent et non seulement accepteraient.

M.LESSARD: Acceptent. Des fois on a l'impression, d'après les déclarations du ministre, que ce n'est peut-être pas le cas en réalité. C'est bien beau en principe, devant la commission parlementaire, mais des fois le ministre se fâche et dit...

M. TOUPIN: Dans certains domaines c'est moins vrai et dans certains autres c'est plus vrai. On est bien conscient qu'on travaille avec des hommes, que ce soit là ou ailleurs. On s'entend sur des programmes, et sur d'autres, on s'entend moins.

M.LESSARD: Maintenant, je vais poser la question. Je pense que cela est assez important au niveau des crédits du ministère de faire connaître les différents programmes, les princi-

paux programmes. Est-ce qu'on les a donnés ce matin, M. le Président? Si on les a donnés ce matin, je suis bien d'accord.

M. TOUPIN : J'ai donné seulement les principaux critères.

M.LESSARD: Je pense que c'est quand même important que l'on sache justement les résultats de ce conseil de recherche pour l'année 72/73.

M. TOUPIN: Le sous-ministre va vous les donner et cela pourra être enregistré comme étant le ministre qui parle.

En dehors du Conseil de recherche agricole, qui est chargé de planifier les priorités de recherche en fonction des besoins de l'agriculture québécoise, c'est là un des changements fondamentaux du Conseil de recherche agricole, celui d'être en mesure d'utiliser véritablement les fonds qui sont mis à sa disposition par l'entremise du budget du ministère de l'Agriculture, en recevant les divers projets de recherche soumis par les chercheurs tant provinciaux que des universités, ou même fédéraux dans certains cas, en fonction d'une acceptation monétaire suivant les priorités que nous avons déterminées.

Pour répondre adéquatement à votre question, ces priorités se situent dans les grandes têtes de chapitre d'action du ministère de l'Agriculture, plus particulièrement au niveau de la production; par exemple, le ministre a mentionné ce matin qu'un des éléments fondamentaux qui nécessitaient énormément de sueur, d'efforts et de fonds financiers, était l'établissement d'une véritable grille de fertilisation à travers tout le Québec pour une meilleure connaissance des sols et une meilleure connaissance de la fertilisation; de même aussi, on a parlé du programme d'autoapprovisionnement. Donc, dans le domaine des productions céréaliè-res et fouragères plus particulièrement, se font des efforts d'essai, de croisement, d'adaptation, de régie de différentes productions à travers les diverses stations provinciales qui sont au nombre de six, ou encore par les diverses stations agronomiques des facultés d'agriculture soit de McGill ou de l'université Laval.

De même aussi, au niveau des légumes nous avons énormément de préoccupations. Je pourrais détailler chacun des éléments, c'est un document assez volumineux, mais je vais citer simplement les têtes de chapitre. Dans le domaine des petits fruits, plus particulièrement les fraises, nous faisons des efforts d'adaptation de nouvelles variétés de plants exempts de maladie à virus, ce qui est fondamentalement important, des essais de fertilisation, de contrôle des mauvaises herbes, etc. Au niveau de la pomme de terre, là, nous avons une station de pomme de terre Elite, pour la multiplication de pommes de terre exemptes de maladie à virus pour servir dans le champ d'utilisation des pommes de terre.

Au niveau du mais sous toutes ses formes: maïs-ensilage, mais-grain aussi. Au niveau des plantes industrielles: soya, colza, fèverolle. Nous avons des efforts de recherche qui portent dans ce domaine, au niveau des vergers: chimie, fertilité des sols, utilisation des sols et aménagement du territoire, pédogénèse, de la classification des sols plus particulièrement par notre division de pédologie. Au niveau des différents laboratoires de sol qui se trouvent tant sur le plan provincial au complexe scientifique ou encore dans les diverses régions agronomiques du Québec, il se fait des efforts d'analyse de sol, etc. Au niveau de l'écologie végétale, qui est assez fondamentale dans l'orientation de l'agriculture, au niveau de l'application de lois ou de maintien de certaines activités à caractère scientifique; dans le domaine de l'acériculture, par exemple, il se fait énormément de recherches sur les divers modes de collecte de l'eau d'érable et des divers modes de dilution pour arriver à la fabrication du sirop d'érable ou d'autres produits.

Dans l'apiculture, c'est la même chose. Au niveau des bovins, on a parlé des productions animales. C'est un secteur extrêmement important de la recherche au Québec, particulièrement parce que 75 p.c. de l'activité économique provient de ce secteur fondamental de l'activité animale. Là, nous pourrions détailler un ensemble de projets qui touchent tout autant la génétique, la reproduction, l'alimentation ou la régie même du troupeau de même que dans tous les autres secteurs des productions animales, que ce soient les chevaux, les volailles, les porcs ou les moutons. Nous avons aussi énormément d'intérêt au niveau de la mécanisation au niveau de la ferme et de plus en plus tant à l'université Laval que dans plusieurs de nos stations, nous faisons des essais de machinerie de différents modèles pour essayer de soulager autant économiquement que physiquement les efforts des agriculteurs dans la recherche d'une accumulation de productivité.

Nous pourrions rallonger la liste dans le détail.

M. LESSARD: Malgré toutes ces recherches-là — c'est bien important de faire des recherches — mais quels sont les moyens que prend le ministère de l'Agriculture pour permettre aux agriculteurs de pouvoir profiter des résultats de ces recherches? Je pense, par exemple, vous parliez tout à l'heure de la pomme de terre...

M. TOUPIN: Oui.

M. LESSARD: ...il y a dans notre région à Pointe-Lebel, aux Buissons...

M. TOUPIN: D'accord.

M. LESSARD: ...une station de recherches en ce qui concerne la pomme de terre. Cependant, il semble que les cultivateurs du coin aient énormément de difficulté à pouvoir profiter de

la pomme de terre qui est produite là, etc. Quels sont concrètement les moyens — j'aurai l'occasion de revenir probablement, si je ne suis pas ailleurs, à la station aux Buissons — que peut prendre le ministère de l'Agriculture pour rendre concret aux cultivateurs, à un moment donné.,.

M. TOUPIN: M. le Président, je peux essayer d'une façon générale, parce que vous avez un aspect général et spécifique à votre question...

M. LESSARD: Oui.

M. TOUPIN: D'une façon générale, nous étions conscients qu'il y avait une période de temps beaucoup trop prolongée entre les résultats de recherches et leur application sur le plan pratique. C'est ainsi que, dans le cadre de la création, plus particulièrement, de deux conseils qui regroupent au-delà de 300 spécialistes, non seulement du ministère de l'Agriculture, mais tant sur le plan de l'industrie et de tous les secteurs para-agricoles, chaque année des rencontres très fréquentes se font, pour analyser les résultats de recherches, voir si leur applicabilité peut être réaliste et si oui, nous publions, chaque année, à l'intention des agriculteurs, ce que nous appelons des guides de production. Alors, par l'entremise du Conseil des productions végétales du Québec, nous sortons au-delà d'une demi-douzaine de guides spécifiques aux productions industrielles ou autres qui reflètent, dès que la recherche a été démontrée probante, au niveau de nos agriculteurs, les nouvelles opportunités, dans l'amélioration de leur efficacité et la réduction de leur coût de production. Beaucoup plus que cela, maintenant, d'une façon beaucoup plus intensive, les agronomes responsables de la gestion au niveau de chacun des territoires agricoles sont mandatés pour préparer, avec les agriculteurs, des programmes de production tant végétale qu'animale.

M. LESSARD: Là vous parlez des bureaux de renseignements agricoles qui sont mandatés pour rencontrer les agriculteurs puis organiser des programmes. Je ne sais pas si c'est pareil dans toutes les régions, mais j'en ai un chez nous, dans mon comté, un bureau de renseignements agricoles, et si vous demandez des informations, des renseignements, vous avez énormément de difficulté à pouvoir avoir ces renseignements de ces gens. Au niveau du ministère de l'Agriculture, je ne sais pas si c'est la fonction publique, je ne sais pas ce qui se passe, mais j'ai l'impression qu'on est bien mal organisé pour rendre concrets les résultats de ces recherches. En tout cas, demandez aux personnes du bureau de renseignements agricoles de ne pas simplement rester chez eux, dans leur bureau, et d'attendre que les agriculteurs viennent, mais que ces gens bougent et que ces gens se déplacent, etc. Je ne sais pas si c'est comme ça un peu partout, dans toutes les régions, mais je constate, moi, par exemple, que, parmi tous les bureaux régionaux des différents ministères du gouvernement, le ministère de l'Agriculture est à peu près le bureau le plus inutile, le plus vide, où il est le plus difficile d'obtenir des renseignements. Même au niveau des travaux mécanisés. Je comprends que cela a été politisé, mais j'ai été obligé de me chicaner, pendant presque quinze jours — je ne sais pas si j'embarque dans un autre thème — pour savoir qui était responsable. Il reste, M. le Président, que c'est au niveau des bureaux de renseignements agricoles. Ils ont peur. Je ne sais pas s'ils ont peur de faire de la supposée politique ou de se mêler là-dedans, mais la seule chose que je sais, leur spécialité, c'est qu'ils ne bougent pas.

M. BELAND: C'est-à-dire qu'ils ne veulent pas faire de la politique, mais suivre les instructions du ministère...

M. LESSARD: C'est incroyable. Il y a un travail à faire à ce niveau. Là, je donne l'expérience que j'ai au niveau de mon comté parce que, même si on n'a pas de cultivateurs à Sept-Iles et dans le nord, on en a quand même dans la région de Sacré-Coeur-Tadoussac-Escoumins. J'espère en tout cas que ce n'est pas partout pareil.

M. TOUPIN: On peut se permettre de dire beaucoup de choses là-dessus, pour une raison très simple. C'est que j'ai fortement l'impression que le député de Saguenay ne connaît pas suffisamment tout cela.

Il y aurait avantage à ce qu'il y aille lui-même au bureau...

M. LESSARD: J'y suis allé, M. le Président.

M. TOUPIN: ... voir travailler les gars, voir comment ils répartissent leur travail, comment ils font leur programme de recherches et de travail. Il est possible, dans certaines régions, que ce soit un peu plus au ralenti que dans d'autres. Tout dépend du dynamisme du milieu aussi. Quand, par exemple, le milieu ambiant est un milieu de chiâleux, un milieu de ci et de ça, il est bien évident que vous ne pouvez pas motiver plus qu'il ne le faut les gars qui sont dans le bureau. Ces bonshommes travaillent avec des agriculteurs, et Dieu sait, et vous le savez comme moi, que ce n'est pas toujours facile d'amener un agriculteur à penser dans des termes de techniques nouvelles. C'est bien beau de dire que l'agriculteur...

M. LESSARD: Ce n'est pas à ce niveau-là, M. le Président.

M. TOUPIN: Allons plus loin.

M. LESSARD: Si je ne peux, moi, obtenir certains renseignements agricoles...

M. TOUPIN:Oui.

M. LESSARD: ... certaines informations, parce que les agriculteurs communiquent avec moi justement pour obtenir ces informations, si, moi, je ne peux pas les obtenir, M. le Président, comment voulez-vous que l'agriculteur puisse les obtenir?

M. TOUPIN: Vous avez le même problème, probablement au niveau de tous les autres bureaux, lorsque les gens, dans un comté, ont besoin des services d'un bureau. Très souvent, ils s'adressent au bureau du député. C'est normal, c'est la même chose dans mon comté. Les gens viennent me voir, c'est encore pire évidemment, parce que j'assume le ministère, et il y a des renseignements que je ne peux pas leur donner. Je les envoie au bureau régional, et les gens disent: C'est vrai, des fois, ç'a pris un peu de temps, des fois ç'a pris moins de temps, mais on est parvenu quand même à avoir le renseignement qu'on demandait et ça dépend quel renseignement on veut avoir aussi au niveau d'un ministère. Si on veut avoir un renseignement sur la recherche, ce n'est pas dans l'espace de cinq minutes qu'un spécialiste, par exemple, en génétique de pomme de terre va expliquer à un producteur comment on va procéder; c'est une question d'années, c'est une question de, je ne sais trop quoi, non pas de mois, d'années avant d'arriver à orienter cela.

J'ai, personnellement en tout cas, au ministère, très peu de courrier, et on reçoit 600 à 700 lettres par semaine, j'ai très peu de courrier où les agriculteurs se plaignent que les services dans les bureaux régionaux ne fonctionnent pas. Dans toutes les régions, vous allez trouver huit ou dix agriculteurs pour qui, c'est bien sûr, les renseignements ne sont jamais assez rapides. Un problème qu'on constate par ailleurs, et le député de Nicolet le mentionnait ce matin, le même problème existait alors qu'il était ministre, lui, on essaie de le corriger, c'est le crédit agricole. On peut changer les bureaux régionaux, vous savez, on peut mettre d'autres hommes dans les bureaux régionaux, on l'a fait, on les change, on peut essayer de trouver des super-hommes pour les placer dans les bureaux régionaux. Le secteur de l'agriculture est un secteur complexe, ce n'est pas un secteur administratif, ce n'est pas un secteur où on distribue des chèques d'allocations sociales, ce n'est pas un secteur...

M. LESSARD: C'est pourquoi ça prend du monde dynamique, M. le Président, ça ne prend pas des ronds-de-cuir, des fonctionnaires, à un moment donné, qui attendent continuellement...

M. TOUPIN: Je ne suis pas certain de ça, je voudrais bien voir le responsable de la région venir ici, le Saguenay relève de quel bureau? Ken. Choquette...

M. LESSARD: De la région de Chicoutimi...

M. TOUPIN: ... je voudrais bien que vous rencontiez Ken. Choquette, qui est directeur général pour la région. Grâce à ce bonhomme, c'est la seule région actuellement au Québec qui est parvenue à nous déterminer actuellement des plans de zonage dans le sens qu'on voulait les avoir.

M. VINCENT: M. le Président, si vous me le permettez, nous allons ajourner dans quelques minutes, dans quelques instants, et je ne veux pas déplaire au député de Saguenay, mais la parenthèse est assez longue. Je voulais simplement, discuter sur la recherche comme telle, et je pense bien que nous allons revenir sur la question administrative des bureaux régionaux, il y a des correctifs à apporter sur toute la question administrative...

M. LESSARD: D'accord.

M. VINCENT: Mais avant d'ajourner...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si le député de Nicolet me permet...

M. VINCENT: Oui.

LE PRESIDENT (M. Giasson): ... j'ai bien voulu laisser aller le député de Saguenay du côté de la recherche, mais pas au même titre que la recherche inscrite au livre des crédits. Il recherchait des causes...

M. LESSARD: M. le Président, c'est parce que...

LE PRESIDENT (M. Giasson): ... de telle utilisation...

M. VINCENT: Dans toute la question...

M. LESSARD: Si vous me permettez, quand même, c'est parce que nous avons discuté justement comment rendre concret au niveau des...

LE PRESIDENT (M. Giasson): Vous aurez l'occasion de revenir avec les thèmes que vous avez apportés.

M. LESSARD: Je suis d'accord, mais je pense que j'étais en grande partie dans l'ordre, même si, par la suite, on s'est déplacé un petit peu.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Je reconnais le député de Lotbinière, qui m'avait demandé la parole depuis quelques instants.

M. VINCENT: M. le Président, je ne sais pas si vous étiez président à ce moment-là, j'avais la parole et le député de Saguenay a fait une

intervention à l'intérieur et ça s'est prolongé, je l'ai laissé aller...

M. TOUPIN: On avait discuté un peu au début, il est 5 h 20.

M. VINCENT: J'ai quelques questions à poser dans le domaine de la recherche. Cela permettrait peut-être aux fonctionnaires de compiler les chiffres. Dans le domaine de la recherche, vous avez les stations expérimentales qui relèvent de ce service.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Si le député de Nicolet le permet. Il m'apprend que c'est lui qui avait la parole; au moment où je suis arrivé pour présider, vous étiez à lire. Vous aviez la parole, je vous le concède. Je reconnaîtrai le député de Nicolet dès l'ouverture de la séance. On me dit que le ministre doit s'absenter et qu'il ne peut vraiment pas trop retarder.

M. VINCENT: D'accord.

LE PRESIDENT (M. Giasson): La commission ajourne ses travaux.

M. TOUPIN: Nous ne siégeons pas demain. Sine die.

LE PRESIDENT (M. Giasson): Sine die. Merci, messieurs!

(Fin de la séance à 17 h 16)

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