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Version finale

32e législature, 5e session
(16 octobre 1984 au 10 octobre 1985)

Le mercredi 13 mars 1985 - Vol. 28 N° 19

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude détaillée du projet de loi 6 - Loi modifiant diverses dispositions législatives pour favoriser la mise en valeur du milieu aquatique


Journal des débats

 

(Dix heures sept minutes)

Le Président (M. Marquis): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente de l'aménagement et des équipements se réunit afin de poursuivre l'étude détaillée du projet de loi 6, Loi modifiant diverses dispositions législatives pour favoriser la mise en valeur du milieu aquatique, et de procéder â des consultations particulières, ce que nous allons faire dès ce matin. Je demanderais au secrétaire de la commission, après que j'aurai indiqué l'ordre dans lequel les organismes seront appelés à se faire entendre, de faire l'appel des membres de la commission.

Nous allons entendre les gens, ce matin, dans l'ordre suivant. D'abord, la Fédération québécoise de la faune; en deuxième lieu, la Fédération québécoise de la faune (région 6 sud); en troisième lieu, la Fédération québécoise de la faune (région 6 nord); en quatrième lieu, la Fédération des associations pour la protection de l'environnement des lacs et enfin, s'il se présente, l'organisme STOP. M. le secrétaire.

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Les membres présents sont: M. Assad (Papineau); Mme Bacon (Chomedey); M. Pratt (Marie-Victorin) en remplacement de M. Ciaccia (Mont-Royal); M. Desbiens (Dubuc); M. Ouellette (Beauce-Nord) en remplacement de Mme Juneau (Johnson), et c'est un remplacement pour la durée du mandat; M. Lafrenière (Ungava); M. Marquis (Matapédia); M. O'Gallagher (Robert Baldwin); M. Saintonge (Laprairie); M. Tremblay (Chambly); M. Marcoux (Rimouski); M. Dauphin (Marquette) en remplacement de M. Vaillancourt (Orford).

Remarques préliminaires

Le Président (M. Marquis): Merci. S'il y a lieu, nous allons maintenant donner la parole, pour quelques minutes, au ministre et au critique officiel de l'Opposition à la commission. Pendant ce temps, j'inviterais peut-être les gens de la Fédération québécoise de la faune à prendre place pour l'audition de leur mémoire. M. le ministre.

M. Alain Marcoux M. Marcoux: M. le Président, je voudrais d'abord souhaiter la bienvenue à tous les groupes qui ont accepté l'invitation de la commission parlementaire de venir nous faire part de leurs commentaires sur le projet de loi sur la mise en valeur du milieu aquatique et aussi, je n'en doute pas, sur le programme qui a été lancé par le ministère de l'Environnement parallèlement à l'élaboration de ce projet de loi. Je serai très bref dans mes mots d'introduction.

Voici comment la question se pose pour le gouvernement. Déjà, il y a quelques années, le gouvernement a lancé un vaste programme d'assainissement des eaux du Québec, qui devrait impliquer des investissements publics d'environ 4 700 000 000 $ sur une dizaine d'années. Le gouvernement considère que, s'il est normal, logique et nécessaire de consacrer autant d'argent à l'assainissement de nos cours d'eau, il serait normal d'autre part de consacrer quelques dizaines de millions de dollars pour l'aménagement des rives, des berges, du bord des lacs, du bord du fleuve pour les rendre accessibles à la population. Si on assainit les eaux, c'est bien sûr pour consommer de l'eau propre, de l'eau de bonne qualité, mais c'est aussi pour que nos concitoyens redécouvrent le plaisir de bénéficier de cette richesse que nous avons: de l'eau d'une qualité potable, nos berges, nos lacs, nos rivières, le fleuve.

Le ministère de l'Environnement, déjà depuis quelques mois, depuis les mois d'août ou septembre dernier, a travaillé à l'élaboration d'un programme de subventions, permettant de réaliser des travaux pour améliorer l'accessibilité au milieu aquatique. Dans cette volonté d'améliorer l'accessibilité au milieu aquatique, nous avons cru nécessaire de confier de nouveaux pouvoirs au monde municipal pour réaliser ces travaux. Et c'est le sens du projet de loi, qui est très bref, une douzaine d'articles, qui veut donner de nouveaux pouvoirs aux municipalités du Québec pour permettre de réaliser ces travaux d'aménagement des berges et d'accessibilité au milieu aquatique. C'est ce qui réunit cette commission parlementaire.

Lorsque nous avons commencé l'étude article par article, après l'adoption en deuxième lecture de ce projet de loi, l'Opposition ainsi que FAPEL ont souhaité pouvoir se faire entendre en commission parlementaire, ce que la commission a accepté, et c'est ce qui nous réunit

aujourd'hui et demain pour entendre des mémoires de groupes intéressés à l'amélioration du milieu aquatique et à l'aménagement des berges et des rives.

Le type de pouvoir que nous voulons donner aux municipalités, c'est le pouvoir de faire des investissements sur des terrains publics dont ils sont propriétaires, mais également, à travers le programme de subventions, le pouvoir de faire des travaux sur des terrains propriétés de tiers, à certaines conditions. Ce projet de loi prévoit également que la Société québécoise d'assainissement des eaux, qui réalise dans une bonne part des travaux d'assainissement des eaux au nom des municipalités, puisse réaliser les travaux que des municipalités voudraient voir faire effectuer. Le sens du projet de loi est aussi de permettre à la Société québécoise d'assainissement des eaux de réaliser ces travaux et de le faire sur le service de dettes, comme elle le fait pour le programme d'assainissement des eaux.

Voilà l'essentiel de l'intention de ce projet de loi, qui s'inscrit dans la démarche de faciliter la mise en oeuvre du programme Berges neuves lancé par le ministère de l'Environnement, il y a quelques semaines. Nous sommes là pour entendre vos commentaires, vos critiques, vos suggestions relativement au projet de loi. Je ne doute pas que vos commentaires puissent aussi toucher le programme Berges neuves élaboré par le ministère de l'Environnement. Nous essaierons de tenir compte au maximum des représentations que vous pourrez nous faire dans cette perspective.

Juste un mot supplémentaire pour excuser mon absence cet avant-midi à la commission. Le ministre de l'Environnement sera là pour entendre vos mémoires avec mes collègues, au nom du gouvernement. Je serai présent ici cet après-midi et toute la journée de demain. Je dois participer au Conseil des ministres ce matin, mais j'ai des gens qui seront là pour noter vos commentaires et vos critiques, et nous essaierons d'en tenir compte au maximum. Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): Merci. M. le député de Laprairie.

M. Jean-Pierre Saintonge

M. Saintonge: Avant de dire quelques mots. Simplement, le député de Marguerite-Bourgeois est arrivé, mais il n'est pas inscrit comme membre de la commission. Je pense qu'il y aurait deux façons de procéder, au sens de notre règlement. Le député de Marguerite-Bourgeois, s'il le veut, pourrait prendre la parole sur certaines interventions sans voter, je pense, suivant l'article 129.

Le Président (M. Marquis): Oui.

M. Saintonge: Pour peut-être faciliter les débats, je demanderais à ce moment-ci d'indiquer comme membre le député de Marguerite-Bourgeoys en lieu et place du député de Charlesbourg. Si le député de Charlesbourg vient à la commission - il a été retenu à l'extérieur ce matin - il pourra faire des interventions, sans être membre de la commission, sur des points d'intérêt public. Est-ce que cela convient aux membres de la commission?

M. Marcoux: Pas de problème.

M. Saintonge: D'accord. M. le Président, dans ma remarque d'ouverture je voudrais...

M. Marcoux: D'abord, dans le comté de Marguerite-Bourgeoys, on sait qu'il y a plusieurs lacs, plusieurs rivières et plusieurs cours d'eau.

M. Saintonge: Une grande rivière, un grand fleuve, M. le Président, qui se situe jusqu'aux confins...

M. Marcoux: Qui entoure, c'est cela?

M. Saintonge: Qui entoure et, si le ministre...

M. Marcoux: C'est l'archipel, quoi?

M. Saintonge: Les rapides de Lachine sont très importants, je pense, dans cette région. Je voudrais, au nom de l'Opposition,. souhaiter la bienvenue à tous nos invités que nous allons sûrement écouter avec attention. Je mentionnerai que, lors des discussions sur le projet de loi, ce qu'on appelait antérieurement la deuxième lecture, et l'adoption de principe qui s'est finalement fait le 5 décembre, l'Opposition avait manifesté son désaccord au projet de loi. Je n'ai pas l'intention de reprendre tout le débat, mais un des points fondamentaux sur lesquels nous nous appuyons pour être contre le projet de loi, outre le fait qu'on mettait en question les priorités du gouvernement dans ses interventions au niveau de l'assainissement des eaux, c'est que l'Opposition avait demandé que certains groupes intéressés par la qualité de l'eau et par la qualité de notre milieu de vie soient entendus en commission parlementaire pour donner leurs commentaires sur le projet de loi 6 en question.

Il y avait entre autres le groupe FAPEL, qui avait envoyé un télégramme au ministre de l'Environnement ainsi qu'à tous les députés de l'Assemblée nationale et qui avait sollicité d'être entendu par la commission. On sait que le gouvernement avait refusé d'entendre ces organismes-là avant l'adoption de principe du projet de loi;

ce à quoi nous avons dû nous soumettre, évidemment. Lors du renvoi du projet de loi 6 en commission parlementaire, pour l'étude article par article, c'était le 11 décembre, l'Opposition avait commencé les discussions en commission parlementaire en faisant une motion préliminaire pour demander à nouveau que FAPEL soit entendue, suivant sa propre demandée Nous avions également l'intention de demander au gouvernement que la possibilité d'être entendu soit étendue à différents groupes du milieu qui pourraient avoir des choses intéressantes à dire au gouvernement et principalement au ministre de l'Environnement.

Je suis très heureux de constater ce matin la présence du ministre de l'Environnement, qui pourra sûrement tirer profit des propos qui seront tenus par nos invités.

Je voudrais également donner un autre point de vue ici concernant le projet de loi 6. Le ministre y a fait allusion tantôt. Le projet de loi 6 a surtout pour objet de faire en sorte de mettre en application le programme Berges neuves instauré par le ministre de l'Environnement. Je rappellerai ici qu'en décembre, lors du dépôt du projet de loi 6, de même que lors de l'étude du projet de loi 6 en Chambre, et également le 11 décembre lorsque nous devions l'étudier en commission parlementaire, tout le programme Berges neuves n'avait pas été dévoilé. Le contenu du programme n'avait pas été dévoilé à ce moment-là et nous avions mentionné, entre autres, que nous devions donner ni plus ni moins un chèque en blanc dans ce dossier avec les nouveaux pouvoirs accordés aux municipalités. C'était simplement dire: D'accord, on donne cela, mais le ministère de l'Environnement amènera éventuellement un programme, mettra certaines conditions pour que les gens puissent se prévaloir d'un tel programme; il y aura des normes techniques qui en détermineront l'application, etc.

Aujourd'hui, nous sommes d'une certaine façon un peu plus avancés, et nous pourrons peut-être discuter davantage des effets éventuels du projet de loi 6, puisque nous connaissons maintenant en bonne partie le programme Berges neuves. J'imagine que nos invités, qui ont sûrement pris connaissance du programme Berges neuves, pourront nous donner leurs commentaires là-dessus. Quant à nous, ultérieurement, au niveau des discussions en commission parlementaire, lorsque nous étudierons la loi en détail, nous aurons des remarques préliminaires à faire sur de tels programmes et nous aurons des questions à poser également au ministre des Affaires municipales et au ministre de l'Environnement, s'il est toujours présent avec nous. Je réserverai mes remarques préliminaires et mes questions et commentaires pour l'étude article par article afin de permettre que le véritable mandat confié à la commission pour les deux prochaines journées soit réalisé, c'est-à-dire entendre les organismes intéressés à nous donner leur point de vue sur un tel projet de loi. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Marquis): Merci, M. le député de Laprairie. Avant de donner la parole à nos premiers invités, je voudrais rappeler les règles de fonctionnement de la commission lorsqu'il s'agit d'entendre des organismes. Chaque organisme à partir de maintenant dispose d'une heure au total, dont 20 minutes pour présenter son exposé. Évidemment, si vous dépassez les 20 minutes, il en reste moins pour les échanges avec les membres de la commission. Le reste du temps sera consacré aux échanges avec la commission et ce temps est réparti de façon égale entre le parti ministériel et le parti de l'Opposition, sous réserve de l'alternance et de dix minutes à la fois. Ce sont les règles de fonctionnement habituelles.

J'inviterais donc...

M. Saintonge: Je pense quand même que, généralement, dans de telles circonstances, il y a une certaine souplesse par rapport aux règles que vous avez énoncées. Il faut garantir le droit de parole de chacune des formations politiques, mais si, par exemple, on déborde un peu le temps, selon le côté d'où viennent les questions, on peut assumer que, globalement, en gros, on a confié à la commission une heure pour chacun des mémoires à être entendus et les questions qui pourraient suivre. Est-ce bien cela?

Le Président (M. Marquis): Oui. Je n'arrêtrai pas une intervention au milieu d'une phrase, soyez assuré de cela.

M. Saintonge: Merci.

Consultation particulière

Le Président (M. Marquis): Je vais être très correct de ce côté-là.

Notre premier organisme: la Fédération québécoise de la faune, représentée par M. Léo-Paul Quintal, président de la commission d'étude et de recherche de la fédération. Je lui demanderais de présenter aussi la personne qui l'accompagne.

Fédération québécoise de la faune

M. Quintal (Léo-Paul): M. le Président, je suis accompagné de M. René Plouffe qui est membre de la commission d'étude et de recherche.

Tout d'abord, M. le Président, étant certain que je venais ici exposer les grandes lignes de notre position et que je n'avais pas

besoin de présenter un mémoire, nous n'avons donc pas de mémoire à vous remettre ce matin. D'autre part, nous nous sommes aperçus hier après-midi, en recevant la documentation pertinente venant des bureaux de la FQF, que le protocole voulait que nous vous remettions un mémoire. Enfin, sachez que nous pouvons vous exposer les grandes lignes de notre position; ensuite, comme vous l'avez dit, nous pourrons répondre à vos questions. Dans les jours qui vont suivre, si la commission le désire, nous pourrons vous acheminer notre position par écrit.

Le Président (M. Marquis): Je peux vous rassurer tout de suite. Ce n'est pas une obligation stricte d'avoir un mémoire. Vous y allez selon votre bon plaisir et selon la façon que vous avez choisie de nous présenter votre opinion. Il y aura échange avec les membres de la commission quand vous aurez terminé votre intervention.

M. Quintal: Merci beaucoup. Dans ce dossier-ci, René et moi avons été mandatés par l'exécutif de la Fédération québécoise de la faune, qui représente 260 associations de chasseurs et pêcheurs.

La position de la Fédération québécoise de la faune concernant le projet de loi 6 est la suivante: À notre avis et après mûre réflexion, il nous semble prématuré de donner plus de pouvoirs aux municipalités afin d'aménager les rives et le lit des cours d'eau sans avoir, au préalable, défini les règles de base par un règlement-cadre rédigé par le ministère de l'Environnement. Ce règlement pourrait expliquer le genre de travaux faisables sans causer préjudice à l'environnement et à la faune tout en protégeant l'intégrité des cours d'eau.

Dans le cas de petits tributaires, entre autres, nous émettons des craintes quant à leur sauvegarde. Nous croyons qu'ils ont un rôle très important dans le maintien de la vie. Ce sont souvent les petits tributaires qui jouent un rôle d'oxygénation de l'eau et c'est habituellement des milieux de frai très propices pour la reproduction. Nous croyons que les creuser, les détourner, les remblayer ou les modifier pourrait avoir des effets néfastes sur la faune.

Dans le contexte actuel, nous sommes donc contre ce projet de toi. Nous sommes persuadés que ce projet de loi va entraîner la perte et la dégradation de l'habitat faunique. En ce qui nous concerne, nous désirons obtenir une véritable loi qui protégera nos habitats fauniques, pour que la faune dispose d'habitats et de territoires d'une grande qualité. En fait j'aimerais que vous compreniez très bien que nous sommes d'accord pour que les municipalités aient plus de pouvoirs en ce qui concerne l'environnement et la faune, en ce qui concerne certains travaux qui pourraient être faits, mais tant et aussi longtemps qu'il n'y aura pas une véritable loi qui protège les habitats fauniques, nous émettons énormément de réticence à un tel projet de loi.

À notre avis, pour vous montrer aussi que nous avons quand même réfléchi à ce que pourrait contenir ce projet de loi qui protégerait les habitats fauniques, nous vous énonçons quelques-uns des éléments que pourrait contenir ce projet de loi. Tout d'abord, la protection intégrale du lit d'un cours d'eau, des marécages et des plaines d'inondation. S'il y avait une intervention qui était faite de la part de n'importe quel contrevenant, nous croyons que celui-ci devrait être obligé de remettre les lieux dans leur état original; que toute intervention en milieu hydrique soit soumise obligatoirement à une étude d'impact, incluant tous les ministères ou organismes gouvernementaux; que tout promoteur modifiant ces milieux devrait y contribuer de façon équivalente afin de compenser pour l'étendue des pertes de ces milieux humides; qu'une bande de protection des rives soit assurée pour tous les cours d'eau; que l'usage, la distribution, la vente des pesticides, insecticides, herbicides soit sévèrement réglementée; que toute nouvelle industrie prévoie un système de traitement visant à éliminer les polluants terrestes, aquatiques et atmosphériques; que tous les travaux propres à empêcher ou à diminuer la circulation d'eau dans ces milieux humides soient interdits pour empêcher le vieillissement accéléré du marais par sédimentation; que tout déversement d'eau usée, matières chimiques et objets physiques soit interdit; que toutes les érablières argentées ou toute association végétale de ce type en bordure du fleuve Saint-Laurent ou des marais soient protégées de façon intégrale; qu'on évite de modifier le reste du littoral à moins que ce ne soit pour des aménagements servant à accroître ou à améliorer la faune ou la flore typique du milieu; qu'un programme d'éducation soit mis sur pied pour sensibiliser les citoyens à la valeur biologique et écologique de ces milieux humides.

Pour vous illustrer les raisons de ces quelques revendications très fragmentaires, nous aimerions vous citer quelques exemples parmi tant d'autres où nous avons constaté la faiblesse de nos lois et le manque de surveillance de la part des organismes municipaux. Ces exemples démontrent également jusqu'à quel point certains ministères tiennent compte des habitats fauniques, des habitats naturels.

Tout d'abord, je me permets de vous citer un dossier que la Fédération québécoise de la faune a défendu, concernant le remblaiement d'une frayère dans la rivière Godefroye: il s'agit du rapport Parent-

Désilets. La zone était une plaine d'inondation qui fut perturbée par des travaux non autorisés. Cette zone était giboyeuse et la construction y était interdite par une entente provinciale-fédérale ainsi que par un règlement de contrôle intérimaire qui dit à la municipalité de respecter le caractère naturel des rives - règlement qui s'applique aux zones d'inondation - et par conséquent de les protéger. Les promoteurs, sans se soucier de l'environnement et de la faune, ont remblayé la plaine de débordement dans le but de construire 15 condominiums. Ces condominiums représentaient 40 logements. Â toutes fins utiles, ce terrain ne peut recevoir qu'une douzaine de bungalows à cause du fait que les terrains sont dans une zone agricole. Donc 30 000 pieds carrés, cela faisait en tout une douzaine de bungalows. On voulait y mettre 40 logements. (10 h 30)

La FQF provinciale et régionale étant intervenue à temps, on a évité que ces condominiums fussent construits. Voilà un exemple de dégâts que la faune du Saint-Laurent a subis. Il n'est pas question, au niveau des exemples que je vais vous donner, de vous citer des exemples qui n'auraient pas une certaine forme d'actualité. Il n'est pas question, pour nous, de prendre des exemples d'il y a quatre ou cinq ans. Je vais me limiter à des exemples de ce que nous avons défendu depuis quelques mois. Dans ce cas précis, la FQF s'était demandé comment il se faisait que des milliers de camions - le promoteur nous avait dit 1500 camions, approximativement - aient déversé leurs débris dans une zone inondée, dans une plaine d'inondation. Tous ces camions sont passés sous les yeux aveugles des ministères des Transports - on s'est posé des questions; comment se faisait-il que les débris venaient de l'autoroute en direction de Bécancour? -et de l'Environnement. La FQF a demandé la restauration de la plaine. Le seul gain que nous avons obtenu, c'est qu'aucune maison n'y sera construite. Il n'y aura aucun réaménagement qui sera fait dans la plaine. Nous nous interrogeons encore sur ce jugement du Bureau des audiences publiques. Nous ne comprenons pas qu'un ministère voué à l'environnement pose un tel geste. On aurait pu croire au moins qu'il y aurait eu un petit peu de restauration. Nous sommes persuadés que la zone pouvait être restaurée - et là, quand je vous dis que nous en sommes persuadés, c'est à l'aide des contacts qu'on a eus avec les biologistes du MLCP, section de Trois-Rivières - pour retrouver son potentiel et sa véritable vocation.

Un autre exemple que nous voulons vous citer est le cas de la baie Lavallière. Il n'est pas question pour nous d'entrer dans les détails des travaux de creusage illégaux faits par le ministère de l'Agriculture, d'après le ministère de l'Environnement, qui va accélérer l'implantation de l'espèce arbustive. Nous avons tout simplement réalisé, lors de la mi-janvier, lors d'une visite sur les lieux mêmes du site, qu'il s'effectuait en bordure des rives de la rivière Pot au Beurre une coupe de bois sauvage illégale qui semble échapper aux inspecteurs municipaux de l'environnement de la MRC de cette région. Nous croyons que les MRC doivent absolument faire respecter le caractère naturel des rives et des cours d'eau. Dans ce cas précis, on a constaté que les dommages étaient vraiment évidents. D'ailleurs, s'il y a des membres de la commission qui désirent avoir la preuve de cela, je me ferai un plaisir d'envoyer des photographies que j'ai prises sur les lieux mêmes.

Un autre exemple d'un communiqué, d'une position qu'on a prise, c'est relativement au projet Berges neuves. Je vous cite la position de la fédération concernant ce projet de 40 000 000 $ pour cette année, qui devait améliorer les rives et les cours d'eau. Donc, la commission d'étude et de recherche de la fédération tient à vous signaler que, trop souvent hélas, un réaménagement des rives, pour les non-avertis, signifie un déboisement excessif, un émondage et un taillage des. arbres et arbustes. Excusez peut-être un petit peu ma comparaison, mais je pense que, quand on marche avec une image, cela va toujours mieux. Ce qu'on veut dire par là, et je vous cite un exemple bien précis: la commission d'étude de la fédération est contre le taillage des arbres. Faire des beaux champignons le long de la route avec les épinettes et les sapins, c'est peut-être très beau, mais c'est peut-être plus important que les branches qui sont à la base restent là pour la faune du milieu. C'est un peu cela qu'on veut dire.

Il ne faudrait pas oublier que ces arbres et arbustes font partie de l'encadrement naturel des lacs et cours d'eau et contribuent à maintenir l'équilibre écologique tout en étant le meilleur moyen de contrer l'érosion. Sur cela, le ministère de l'Environnement a des directives. Est toujours préférable une revégétation plutôt que de mettre des murs de soutènement ou des enrochements coûteux. C'est pourquoi nous croyons que les promoteurs de tels projets devraient être sensibilisés au fait qu'il faut conserver le maximum des rives dans leur état naturel et qu'une "artificialisation" des rives à l'aide de pelouses, de pierres, de bois, de pneus, de ciment ou autres matériaux transforme les rives en de véritables canaux. D'un autre côté, dans le cadre de ce programme, il y a un volet nettoyage. Nous tenons à dire au ministère de l'Environnement que ce nettoyage devrait se limiter aux vidanges et non aux débris naturels, comme, entre autres, à titre

d'exemple, les feuilles mortes. Cela nous semble des éléments quand même assez essentiels à la faune.

En ce qui concerne les souches, les branches des arbres et les arbustes qui sont dans les cours d'eau, il est inutile de vous démontrer leur importance en tant que refuge pour certaines espèces de poissons. D'autre part, nous osons croire que les branches, les souches et les arbustes qui nuisent à l'écoulement des eaux seront enlevés sans l'utilisation de machinerie lourde, de scies mécaniques ou de débrousailleuses qui n'ont jamais eu d'effets bénéfiques pour la faune.

En fait, nous craignons pour l'intégrité des cours d'eau, s'il n'y a pas de règlement-cadre qui établit clairement les normes de base à respecter. Nous ne sommes pas contre ce programme, mais nous craignons énormément pour l'intégrité des cours d'eau. Vous savez très bien, et je n'ai pas besoin de vous en faire la démonstration, que nos cours d'eau, dans les années antérieures, ont été énormément massacrés, détruits. Si on pense, entre autres, aux plaines d'inondation, aux marécages, on dit 60%, pour l'estuaire du Saint-Laurent, du littoral qui a été aménagé. D'où l'importance d'essayer de conserver dans son intégralité ce qui reste.

Il n'est pas question non plus pour nous de faire la démonstration de l'importance économique de l'industrie faunique. Nous croyons qu'elle a sa place et qu'elle est très importante.

Voici un autre exemple que je tiens à vous citer. Comme je vous l'ai dit au début, j'ai tenu à prendre des exemples de dossiers que nous avons défendus et j'en, ai pris un peu partout dans la province où la fédération s'est impliquée, il s'agit du petit marais de Saint-Gédéon. Le petit marais de 5aint-Gédéon est un marais d'une importance relativement grande pour la faune et les habitats ripariens du Lac-Saint-Jean. Le petit marais de Saint-Gédéon, pour vous le situer, est aux alentours de Métabetchouan, quelques kilomètres d'Alma, si ma mémoire est bonne. C'est un marais, je ne pourrais pas vous donner le chiffre exact, d'une superficie d'environ 80 à 90 hectares. Pour le Lac-Saint-Jean, c'est un marais d'une très grande importance.

Ce site a été très agressé. Nous avons constaté encore une fois que les lois de l'environnement manquent de dents à un tel point que le MLCP a demandé qu'une partie du site soit zonée refuge faunique. Évidemment, la Fédération québécoise de la faune a appuyé cette demande du MLCP régional et l'a félicité.

Le MLCP a également demandé qu'une vaste campagne de sensibilisation se fasse pour que les citoyens arrêtent d'agresser le marais par des déversements d'insecticides, pesticides, herbicides, d'eaux usées d'égouts, par une circulation d'embarcations à moteur dans les eaux du marais, des tout-terrain, du remblayage, du creusage, etc. Je vous passe tous les agressions que le marais a pu avoir par le passé.

Nous nous sommes demandé dans ce cas ce que faisaient nos lois pour protéger le marais. Nous nous sommes demandé également, parce que, semble-t-il, ce n'est plus vrai à partir de maintenant, quelles conséquences pourrait avoir, par exemple, le déversement des eaux d'égouts de la municipalité de Saint-Gédéon. 5emble-t-il, au moment où on s'était impliqué dans ce dossier, que la municipalité de Saint-Gédéon avait peut-être le droit de déverser ses eaux d'égouts dans le marais. Semble-t-il que ce n'est plus le cas, que la municipalité de Saint-Gédéon, par le programme d'assainissement des eaux, va posséder un système d'épuration des eaux convenable. Au départ, elle devait envoyer ses eaux usées dans le marais, mais nous nous sommes interrogés énormément sur ce qui pourrait se produire au niveau de la percolation dans le marais.

Un autre exemple sur lequel je tiens à vous dire quelques mots, c'est la question des forêts. C'est par expérience personnelle que je vais vous détailler un peu ce point. Je pense que ce qui se passe au niveau de la forêt est loin d'être édifiant. J'ai constaté à maintes reprises, étant un chasseur et un pêcheur, que très souvent les gens qui font les coupes forestières ne sont pas nécessairement des avertis de la conservation et de la protection de la faune. Très souvent, ils vont entrer avec de la machinerie lourde dans les petits tributaires, dans les petits cours d'eau, ils vont même les remplir, ils vont même les déboiser complètement quand on sait très bien que, semble-t-il, il y a des lois qui protègent tout cela. Il faut avoir été quelquefois en forêt pour s'apercevoir que c'est réel ce que je dis là. Je dois vous assurer que j'ai vu des choses au niveau de la destruction d'habitats fauniques en forêt qui sont très récentes, de l'été dernier, qui m'ont fait réfléchir énormément et qui sont peut-être un des facteurs pour lesquels je suis actuellement président de la commission d'étude et de recherche de la fédération parce que je sens qu'il y a un travail immense d'éducation à faire dans ce sens.

Je ne peux pas m'empêcher ce matin de vous parler un peu de la rivière L'Assomption, c'est un dossier que la commission d'étude et de recherche a très à coeur. Donc, dans ce cas, je ne vous entretiendrai pas très longtemps. Je voulais tout simplement vous signaler qu'on se pose encore des questions sur la valeur de nos lois. Dans ce cas, il semble coûter moins cher à un fermier d'aller déverser carrément dans la rivière son purin que de l'étendre.

Nous nous posons de sérieuses questions. Il y a également tout le problème des insecticides, des pesticides, des herbicides qui créent une pollution très grande des eaux de la rivière L'Assomption.

Nous comprenons très mal que, dans le contexte actuel, vous donniez en plus le droit aux municipalités de patauger dans les rives et le lit de la rivière L'Assomption, qui est une rivière extrêmement agressée. Nous trouvons qu'elle a subi suffisamment d'agressions. Nous nous demandons pourquoi on ne légifère pas en matière d'insecticides, pesticides, rejets toxiques, etc. Nous vous demandons d'amender les lois existantes pour permettre au ministère de l'Environnement, dans ce cas, de freiner l'agriculture. Évidemment, cela s'applique aussi dans d'autres cas.

Enfin, de tels projets devraient s'inspirer beaucoup plus des buts principaux de la stratégie mondiale de la conservation qui a été adoptée par le gouvernement du Canada. Si ma mémoire est bonne, je crois que cela a fait l'objet d'une entente fédérale-provinciale ou d'une commission fédérale-provinciale en 1982.

Nous nous permettons ici de vous citer les trois buts principaux de cette stratégie mondiale de conservation. Premièrement, de maintenir les écosystèmes dont dépendent la faune et les êtres humains, de préserver la diversité génétique de la faune et de faire en sorte que la jouissance et l'utilisation des espèces fauniques soient durables. À partir de ces principes, nous pouvons concevoir un plan de gestion qui va rétablir l'équilibre pour permettre à la faune et à son industrie de disposer d'habitats et de territoires de qualité dont elle a besoin.

Nous croyons que de tels projets de loi devraient faire également l'objet d'une vaste campagne de consultation avant d'être mis en branle. Nous croyons également que, dans le cadre d'une plus grande accessibilité à tous concernant l'utilisation de notre ressource, notre gouvernement devrait éduquer et sensibiliser les citoyens relativement à la perte et à la dégradation de l'habitat indispensable à la faune. Ceci ferait en sorte que les citoyens deviendraient responsables de la qualité du milieu de vie dans lequel ils vont puiser leur ressourcement.

Je vous remercie beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Marquis): Merci. M. le ministre de l'Environnement.

M. Ouellette: Merci, M. le Président. Je dois dire a priori que je suis d'accord avec la quasi-totalité des propos que vient de nous tenir le représentant de la Fédération québécoise de la faune. Je dis bien la quasi-totalité parce qu'il y a quand même quelques points qui me sont apparus excessifs ou hors cadre. Je parle tout de suite, par exemple, de ce qui est contenu dans le rapport Parent-Désilets sur ce qui s'est fait comme travaux d'empiétement dans des terres humides. J'ai trouvé que M. Quintal était allé vite aux conclusions, compte tenu de l'état de l'avancement de ce dossier.

Je rappellerai que le BAPE a émis un rapport dans lequel d'abord il recommande de ne pas autoriser la construction des édifices en question. Deuxièmement, contrairement à ce que vous affirmiez, M. Quintal, le BAPE recommande un certain nombre de mesures de mitigation pour corriger les erreurs qui ont été faites à l'insu de nos lois. Alors, la décision n'est pas prise, évidemment, je suis à prendre connaissance de ce rapport et j'aurai à faire des recommandations en m'inspirant du rapport du BAPE. Je voudrais vous rassurer sur le fait que j'aurai à prendre une décision notamment en ce qui concerne la réhabilitation complète de ce terrain et les inconvénients que cela peut créer de même que les adoucissements aux dégâts qui ont été créés sur place pour faire en sorte qu'ils soient minimisés dans les plus brefs délais. Donc, on ne peut pas aussi rapidement conclure, puisque cette décision n'a pas encore été prise de ma part, mais elle le sera bientôt.

En ce qui a trait à la baie Lavallière, le problème qui est soulevé est réel et il est dû essentiellement à une erreur technique qui s'est produite, il y a plusieurs années, au moment où des travaux ont été engagés dans ce secteur. Aussitôt que le ministère de l'Environnement a pris connaissance des travaux de dragage, notamment, qui n'avaient pas fait partie du décret gouvernemental de l'époque, aussitôt qu'on en a pris connaissance, nous y avons mis fin, nous avons demandé que les travaux soient arrêtés. L'étude d'impact reste à être faite pour en venir à autoriser ou à refuser définitivement ces travaux de dragage.

Globalement, j'ai aussi l'impression que vous donnez au programme Berges neuves une importance qu'il n'a pas à certains égards. Le programme Berges neuves, pour la réalisation duquel on a besoin de, la loi 6 pour permettre aux municipalités d'intervenir sur les terrains de tiers, notamment, n'est pas un programme qui vise à agresser les rives d'aucune façon. Au contraire, il vise à corriger des erreurs du passé, d'une part, soit en faisant de la régénération là où elle a été détruite ou encore du reboisement là où des coupes excessives ont été faites pour des fins agricoles ou autres - généralement agricoles - et aussi l'aménagement de façon que le public puisse avoir accès à ces rives tout en les protégeant et en les rendant intéressantes et sécuritaires. Dans vos propos, il y a des choses tout à fait vraies

qui ont été mentionnées, mais qui ne sont pas en rapport direct avec le programme Berges neuves, loin de là. (10 h 45)

Ce sont là mes commentaires. Peut-être qu'au cours de discussions on pourra revenir sur des points plus précis sur le programme comme tel, mais j'aimerais rappeler cependant que chacun des projets qui sera proposé au ministère de l'Environnement dans le cadre de Berges neuves fera l'objet d'études de la part du ministère de l'Environnement et du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour s'assurer que les travaux proposés ne vont pas à rencontre du développement ou du maintien de la faune, bien au contraire. Le MLCP va être omniprésent au moment de l'étude de chacun des cas et ceux-ci ne seront autorisés que dans la mesure où la faune sera adéquatement protégée.

Il n'est pas question, par exemple, d'accepter des détournements de cours d'eau tributaires qui feraient en sorte, comme vous l'avez dit tout à l'heure, que la faune s'en trouverait perturbée et même annihilée dans certains cas. Au contraire, ce programme vise à faire des corrections à des erreurs passées, naturelles ou artificielles, c'est bien sûr, parce que le phénomène de déboisement, notamment, a favorisé l'érosion et l'érosion a favorisé, entre autres choses, la pollution diffuse; c'est pourquoi on retrouve dans certains cas des produits chimiques agricoles dans nos cours d'eau. Un des moyens les plus efficaces de contrer cela, c'est, bien sûr, comme vous le mentionniez tout à l'heure, de réglementer l'utilisation de ces produits chimiques, mais aussi de corriger les rives de façon que l'érosion ne transforme pas ces cours d'eau de façon négative par la pollution diffuse.

Voilà l'essentiel de mes remarques, mais, comme je le dis, on pourra toujours les reprendre point par point tout à l'heure, dans le temps qui nous reste. Merci.

M. Quintal: Tout d'abord, je m'excuse énormément concernant le rapport Parent-Désilets. J'ai oublié de vous mentionner que mes réflexions là-dessus faisaient suite à un communiqué que j'ai vu hier aux nouvelles régionales à Trois-Rivières. Je tiens à vous préciser qu'en ce qui me concerne j'attends encore le rapport du Bureau des audiences publiques sur l'environnement et soyez assurés que la commission d'étude et de recherche en fera une étude approfondie. Soyez assurés que, s'il y a possibilité de faire une demande au ministère de l'Environnement pour que le site soit restauré, je suis sûr que la fédération régionale va sûrement acheminer cette demande à vos bureaux. Elle est très intéressée par la restauration du site étant donné les agressions que le Saint-Laurent a subies à ces endroits-là. Pensons au mur de ciment qu'il y a à Champlain, le quai de Trois-Rivières, ce qui est arrivé au niveau du quai de Bécancour. Dans ce coin-là, c'est une région très agressée. La faune a besoin de toutes ces possibilités. Aussi, à l'embouchure de la rivière, il y avait des pêcheurs commerciaux qui ont quand même perdu étant donné que ta frayère est très endommagée.

Je prends en considération vos remarques. C'est un peu ma faute, j'aurais dû vous préciser que c'était à la suite d'un communiqué de journaliste è la télévision hier, à CKTM-TV.

M. Ouellette: On me signale, M. le Président, que le rapport du BAPE vous a été acheminé la semaine dernière. Il est sans doute en cours. Vu qu'il n'y a pas de grève, vous allez le recevoir bientôt.

M. Quintal: Je vous remercie beaucoup. Soyez assurés qu'on va l'étudier à fond. La question de la baie Lavallière, j'ai été heureux de vous entendre dire que le ministère de l'Agriculture va avoir à fournir une étude d'impact sur le restant des travaux, que les travaux sont arrêtés. Moi, je considère que c'est quelque chose. Dans mon esprit, ce n'est pas un gain, c'est juste rétablir les choses à leur juste valeur. La baie Lavallière, c'est important pour la faune dans cette région. Le printemps s'en vient, on sait jusqu'à quel point le site est important pour les oiseaux migrateurs et comme frayère et il est très important qu'il y ait une remise en eaux qui se fasse du site pour essayer de minimiser au maximum les dégâts. Je suis très heureux d'entendre cela et soyez assurés que la fédération va participer activement à l'étude d'impact qui va être fournie, va l'approfondir.

Dans le cas de Berges neuves, je dois vous dire qu'on ne peut pas être contre la vertu, c'est bien officiel. La fédération ne peut pas être contre la vertu, mais il nous a semblé que, pour arriver à la vertu, on passait par le vice. Je suis content de vous entendre dire toutes ces choses-là. Les réflexions qui ont conduit la commission d'étude et de recherche à vous souligner ce point, c'est que, dans certains cas, on s'est aperçu que ce qu'on laissera aux générations, ce seront des enrochements coûteux et des murs de soutènement. Je suis heureux de vous entendre dire qu'il va y avoir une revégétation, un reboisement. On va sûrement utiliser certaines normes.

On aimerait quand même que ces normes soient écrites et ne soient pas uniquement des directives, parce qu'on émet énormément de doute au niveau de la valeur juridique d'une directive. Dans notre cas, on aimerait que ce soit signalé dans de véritables projets de loi, dans de véritables

règlements-cadres. En gros, c'est peut-être pour éclairer un petit peu ce que vous m'avez dit. Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Merci, M. le Président, ma question touche un peu ce que vous venez de mentionner. Vous parlez de la nécessité de règlements-cadres, puisqu'il y a des directives, actuellement, du ministère de l'Environnement. On parle de guides techniques, dans le cas de Berges neuves. Vous avez mentionné tantôt que les lois de l'environnement manquaient de dents.

Ce qui me surprend, dans les différents dossiers que vous avez énoncés et ceux dont j'ai pu prendre connaissance aussi, surtout par des coupures de journaux ou même certains avis du Conseil consultatif de l'environnement, c'est comment il se fait que de telles interventions dégradantes dans le milieu puissent se faire malgré les lois.

Je vous dirai que c'est une question que je veux vous poser franchement. Le ministre nous dit, actuellement - je me souviens de son discours de deuxième lecture pas de problèmes, nos lois de l'environnement sont là; on les fait respecter. Si on prend un cas précis - en parlant de généralités, c'est peut-être plus difficile - vous parlez de la question du projet de remblayage de la plaine inondable de la rivière Godefroy. Vous avez constaté des travaux, à un moment donné. Mais, ce qui m'a surpris, c'est que les travaux se faisaient... J'imagine que, quand on fait du remblayage de cet ordre, ça doit être assez facilement apparent.

Quand vous dénotez une situation comme ça et que votre fédération s'en rend compte, vous faites quoi? Vous faites une plainte au ministère de l'Environnement? Vous faites une plainte auprès des municipalités? Vous faites une plainte auprès des MRC? Cela fonctionne comment? Le délai, à ce moment-là, quant à l'arrêt des travaux en question ou la correction, s'il y a lieu, ou l'enquête de l'Environnement, c'est quoi, d'une part? De quelle façon, à votre connaissance, quand les gens font des interventions dégradantes sur les milieux comme ça, malgré les lois de l'environnement qui sont censées protéger ça, le ministère applique-t-il sa loi? Quelles sont les sanctions qu'on va prendre contre ces individus, s'il en existe?

M. Quintal: Vous me posez beaucoup de questions! Je vais commencer par la dernière, parce que les sanctions, moi, je dois vous avouer honnêtement que j'aurais aimé que les promoteurs Parent et Désilets soient obligés, au moins, de faire des ensemencements dans la rivière. Ce n'est pas dans la loi. Ce n'est pas possible. Ils ont détruit une frayer, il me semble qu'il devrait y avoir des mesures qui feraient en sorte qu'ils soient obligés de remettre des poissons là, quelque part. Cela, je vous le signale ici, dans mon texte.

Au niveau des sanctions, dans le cas de la Godefroy, il ne semble pas y en avoir. Peut-être que M. le ministre de l'Environnement pourrait, bien mieux que moi, répondre à cette question.

En ce qui concerne ce qui se passe au niveau de la procédure, évidemment, on fait une plainte. Dans le cas de la Godefroy, cela a été quelque chose de très long. Si ma mémoire est bonne, c'est M. Louis Perron, de l'aménagement des lacs et cours d'eau, qui a émis un télégramme au promoteur Désilets, je crois, pour faire arrêter complètement les travaux de remblayage. Mais la plainte a été émise après que le promoteur avait déversé dans la plaine d'inondation environ 1500 camions de débris de toutes sortes. Essayez de vous figurer des souches, des arbres, de l'asphalte, du ciment, tout ça, donc, toutes des choses qui ne valaient rien.

La valeur de la plaine d'inondation a été reconnue, c'est un endroit où, entre autres, pour les écologistes, il pousse du phalaris, qui est un milieu propice à la frayère du brochet. C'est également un milieu reconnu de la sauvagine. Il y avait une frénaie de 20 ans qui a été complètement coupée dans le milieu, parce que là, on parle de 1500 camions. Mais, il y avait quand même une frénaie. La frénaie, ce sont les arbres qui sont typique d'une plaine d'inondation qu'on doit protéger. C'est un endroit privilégié. René pourrait peut-être me corriger. Au niveau du branchu, qui est un canard en voie de disparition, il y en a très peu. Donc, d'où l'importance de protéger cela.

En ce qui concerne les mammifères et d'autres espèces, c'est peut-être plus négligeable, mais, dans ce cas-là, cela s'est passé un peu comme cela. Ensuite, le ministère de l'Environnement a demandé aux promoteurs de produire une étude d'impact. II y a eu un certain nombre de jours qui se sont passés entre le moment où l'étude d'impact a été déposée et, en ce qui nous concerne, on a demandé d'aller en audience publique là-dessus, parce qu'on considérait que l'étude d'impact ne se souciait pas du tout de l'environnement et de la faune.

M, Saintonge: La période de temps où des déversements se sont faits, il y a plus de 1500 voyages qui ont été déversés. Cela s'est fait sur quelle période de temps?

M. Quintal: Te souviens-tu René? Je pense que c'est un an.

M. Plouffe (René): Cela a pris environ un an.

M. Quintal: Pour le déversement et le remblÈiement. L'arrêt des travaux s'est effectué... Cela a pris un an. Je ne pourrais pas vous dire, c'est probablement à la suite d'une plainte de citoyens qui habitent la rue Godefroy. Je ne veux pas avancer des noms ici; je pourrais peut-être vérifier et vous communiquer cela.

À la suite de notre demande d'audience publique, le ministère de l'Environnement nous a accordé une audience publique et vous connaissez toute la suite.

Je ne sais pas si j'ai répondu à toutes vos questions; vous en aviez beaucoup.

M. Saintonge: Oui. Finalement, mes principales questions étaient à l'exemple de ce problème précis, de savoir quand votre fédération constate des infractions ou des interventions dégradantes sur le milieu qui devraient être soumises à un règlement ou à une norme applicable. C'est ce qu'on mentionne. Et d'après ce que je comprends de vos propos et malgré certaines lois qui existent actuellement, certains règlements que le ministère de l'Environnement doit appliquer à ce moment-ci, les gens font fi des lois ni plus ni moins et font des interventions. Vous devez à ce moment-là intervenir pour tenter d'arrêter ces interventions dégradantes, mais vous le faites à quel endroit au départ quand vous constatez cela? Est-ce au ministère de l'Environnement directement ou aux municipalités? À quel endroit vous adressez-vous pour tenter d'arrêter de telles interventions et quelles sont les conséquences de votre propre intervention, à ce moment-là? Le délai que cela prend pour qu'on arrête de tels travaux, le délai que cela va prendre pour apporter des corrections, s'il y en a ou, s'il n'y a pas de correction, qu'est-ce qu'on fait vis-à-vis de ces situations?

M. Quintal: Je suis content que vous me posiez cette question. Les délais, je ne les connais pas, mais, en ce qui nous concerne, habituellement, quand on s'aperçoit qu'un site est agressé, on fait nos revendications soit au ministre de l'Environnement ou au ministre du MLCP. Habituellement, la façon que j'ai découverte pour avoir la meilleure réponse, c'est par lettre ouverte, parce que très souvent je réalise que je reçois beaucoup d'accusés de réception et très peu de réponses. En tout cas, la lettre ouverte occasionne habituellement une réponse assez rapide. C'est une chose. Mais le plus important, ce n'est pas de vous dire cela, mais de vous dire qu'actuellement la commission d'étude et de recherche est très vigilante concernant les sites qui sont agressés. Aussitôt que quelque chose nous apparaît être négatif ou néfaste pour l'environnement ou la faune, on se dépêche tout de suite de le dénoncer ou de le signaler au ministère de l'Environnement ou au MLCP. Habituellement, on devrait le faire normalement aux inspecteurs municipaux des MRC ou aux coordon-nateurs de l'environnement des MRC? Normalement, cela devrait être la meilleure filière.

Pour vous signaler l'importance qu'on accorde à cela actuellement, depuis un an, la Fédération québécoise de la faune est en train de mettre sur pied, et il y a beaucoup d'associations qui le mettent sur pied, ce qu'on appelle une patrouille des habitats. La patrouille des habitats a pour but d'essayer de trouver la valeur écologique des marais, des marécages, des plaines d'inondation, etc., et ensuite, après avoir trouvé cette valeur écologique, d'essayer de sensibiliser les gens du milieu à cette valeur écologique. Ensuite, dans ces patrouilles des habitats, on essaie de dire aux gens - parce que le mot "patrouille" avait peut-être l'air un peu trop militaire, on a appelé cela "les anges gardiens" - lorsqu'il y a un site agressé, comme c'est le cas pour la rivière Pot au Beurre où l'on coupe les arbres sur les rives, de le dénoncer. C'est ce que la commission d'étude essaie de faire, essaie de mettre sur pied. On a une association, entre autres - je ne sais pas si le ministre de l'Environnement a pris connaissance de ce dossier - dans la région de Batiscan, qui a fait l'inventaire de tous les marais qu'il y avait dans la région, pour essayer d'en trouver la valeur écologique et de faire des représentations auprès des MRC au niveau des schémas d'aménagement afin que ceux-ci soient protégés. (11 heures)

Actuellement, la Fédération québécoise de la faune investit énormément pour essayer de sauvegarder l'intégrité et le potentiel des sites, des marécages, des marais, des plaines d'inondation, des cours d'eau qui restent dans la province de Québec, qui ne sont pas trop dégradés et d'essayer de protéger ceux qui sont intégraux.

Je ne sais pas si j'ai répondu à votre question. René, peut-être?

M. Plouffe: En ce qui concerne le dossier de la Godefroy, vous vouliez savoir le temps qui s'est écoulé et où on a fait nos premières revendications.

M. Saintonge: C'est à titre d'exemple, je pense. On dit, par exemple, dans le projet... Je veux juste situer le cadre de ma question...

M. Plouffe: En ce qui concerne la Godefroy, on avait affaire avec la ville de Bécancour. C'est drôle à dire, on y a fait

les premières revendications. On a appris -aux audiences publiques seulement, parce qu'on n'avait pas accès à ces dossiers - que la ville de Bécancour avait donné un dossier en blanc au promoteur pour faire la construction qu'il y avait là, sous prétexte qu'il n'y avait pas de loi qui les empêchait de faire cela. C'est une chose qu'on a appris aux audiences. C'est après la loi...

Une voix: En quelle année est-ce arrivé?

M. Quintal: En 1979-1980...

M. Plouffe: Cela a commencé en 1979.

M. Quintal: Donc, la Loi sur la qualité de l'environnement a été mise en application en 1972.

M. Ouellette: Mais la réglementation sur les études d'impact n'était pas encore en vigueur.

M. Plouffe: Non.

M. Ouellette: C'est cela.

M. Plouffe: C'est cela. Il s'est écoulé environ un an...

M. Ouellette: Oui.

M. Plouffe: À partir du début des travaux qu'on a faits jusqu'au moment où le promoteur a reçu une lettre pour arrêter les travaux, il s'est écoulé environ un an. Dans cette année, il a réussi à remblayer la frayère à 80%. Le cheminement de tout cela, le temps que cela a pris pour arrêter ces travaux, ceux-ci étaient finis.

Le Président (M. Marquis): M. le ministre, ce serait de nouveau à votre tour, si vous voulez continuer. Vous avez pris une minute ou deux sur le temps de M. Saintonge.

M. Ouellette: Il est ressorti beaucoup de choses intéressantes des propos des représentants de la Fédération québécoise de la faune. D'abord, ils ont mis le doigt sur certaines lacunes de la loi, surtout à l'époque où se sont faits les travaux Parent-Désilets. Comme je l'indiquais il y a quelques secondes, à cette époque, la réglementation sur les études d'impact n'existait pas, elle n'était pas en vigueur. Cela a été corrigé depuis ce moment-là, de telle sorte que, aujourd'hui, lorsqu'une chose de cette nature est sur le point de se produire, le promoteur doit présenter son projet. Il est susceptible de se voir imposer une étude d'impact, suivie d'audiences publiques tenues par le Bureau des audiences publiques, si demande est faite ou si le ministre décide unilatéralement de les convoquer lui-même.

Un autre point qui pourrait peut-être rassurer nos interlocuteurs, c'est celui-ci. Évidemment, ils nous disent qu'il n'y a pas de politique globale d'aménagement des rives. Je dois les rassurer en leur disant que nous sommes, actuellement, à mettre le point final sur une telle politique, en essayant d'incorporer tous les intervenants possibles et tous les responsables de la protection des berges, des rives et des cours d'eau en général. À l'occasion, le gouvernement se fait promoteur par certains ministères, que ce soit celui de l'Énergie et des Ressources, par exemple, dans la gestion de la forêt, que ce soit celui des Transports lorsqu'il élabore son réseau routier, que ce soit celui de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, lorsqu'il développe du territoire agricole, que ce soit d'autres ministères à l'occasion, peut-être moins fréquemment, mais il y en a d'autres.

Il y a aussi, bien sûr, des promoteurs privés et, pour protéger tout cela, il y a plusieurs types de gardiens. Il y a le MLCP, qui se préoccupe de la faune, cela va de soi; il y a l'Environnement, qui doit protéger tout cela au niveau de l'environnement comme tel; mais il y a aussi les municipalités locales et les municipalités régionales de comté. Là, il faut convenir que tout cela a été mis en place il y a à peine quelques années; tout cela est en train de se roder.

Donc, dans notre stratégie de conservation du milieu riverain, on doit incorporer tous ces gens, que ce soit le gouvernement par ses différents ministères, ou les MRC par leur schéma. Nous en sommes rendus au stade de la consultation interministérielle qui va déboucher sur un document gouvernemental qui va être appliqué selon les besoins. Cela va trouver le jour très prochainement et je pense que cela va répondre à l'inquiétude que vous souleviez.

Si on revient, maintenant, au programme Berges neuves comme tel, évidemment, c'est un programme qui inclut des subventions, c'est donc dire que chaque promoteur devra nécessairement soumettre son projet au ministère de l'Environnement et au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche avant de recevoir une approbation.

Ces projets vont être analysés à la lumière, non pas du règlement puisqu'il n'est pas encore prêt, mais à la lumière de guides qu'on vient d'élaborer et qui seront rendus publics incessamment. Je les ai ici en main; vous en avez un qui s'appelle "Processus général de planification", vous en avez un autre qui s'appelle "Le guide technique pour le nettoyage"; donc, c'est le volet nettoyage de Berges neuves dans lequel on précisera ce que vous disiez tout à l'heure. Il n'est pas

question d'enlever la végétation, il n'est pas question d'enlever les feuilles mortes ni même les troncs d'arbres, mais uniquement les déchets: pneus, carcasses d'automobile, etc. Il n'est pas question, pour nous, de perturber l'environnement, au contraire. Un autre: "Le guide technique pour la revégétalisation", c'est-à-dire qu'on ne permettra pas de planter n'importe quoi n'importe où, au contraire, ce sera bien défini dans le guide ce qu'il faut mettre en place pour assurer la protection des rives et des cours d'eau. Finalement, un guide d'aménagement du milieu riverain et hydrique de façon que chacun des travaux autorisés soit conforme à la conservation de ces milieux. Ces documents vont être regroupés en deux documents et ils seront offerts à tous les promoteurs qui devront en prendre connaissance et proposer des travaux qui seront conformes au contenu de ces guides très détaillés qui ont été conçus par l'entreprise privée spécialisée, de façon que tous les travaux soient vraiment positifs et qu'aucun d'entre eux n'ait d'aspect négatif. 11 y a peut-être un dernier point que je voudrais souligner. Vous l'avez mis en évidence et je m'en réjouis. On parle de travaux qui peuvent être faits parfois â l'insu du ministère de l'Environnement. Évidemment, compte tenu de l'émiettement de la population au Québec à travers 1550 municipalités, sur un territoire extrêmement vaste, ce serait un peu rêver en couleur que de prétendre que le ministère aura, un jour, suffisamment d'inspecteurs dans tout le territoire pour s'assurer que rien de négatif ne se fasse. Pour combler cette lacune qui existera toujours, quant à moi, les groupes soucieux de la protection de l'environnement, de la faune, de la forêt, etc., font un travail magnifique. Vous avez donné un certain nombre d'exemples d'interventions que votre groupe a faites en avertissant les ministères intéressés, ce qui leur a permis de prendre connaissance des travaux, dans bien des cas, illégaux qui se faisaient et d'intervenir pour les faire arrêter ou encore les faire corriger. Alors, on s'en remet beaucoup à tous ces groupes soucieux de la protection de l'environnement pour avoir les avis en temps et lieu pour nous permettre d'intervenir avant qu'il soit trop tard. Je vous en remercie.

Le Président (M. Marquis): M. Quintal.

M. Quintal: Une première question. Est-ce que les promoteurs doivent juste prendre connaissance de vos documents ou s'ils doivent avoir l'obligation de les respecter?

M. Ouellette: Oui, c'est-à-dire que ce sont des guides; donc, ils doivent s'inspirer de cela pour concevoir leurs projets. Ils doivent savoir à l'avance que, si leurs projets ne sont pas respectueux du contenu de ces guides, ils vont être refusés par le comité Environnement-MLCP, au moment d'obtenir des subventions et l'autorisation de les effectuer.

M. Quintal: Si j'étais promoteur, j'imagine que je pourrais avoir ces guides à n'importe quel bureau du ministère de l'Environnement.

M. Ouellette: Oui, et ils vont être aussi acheminés à chacune des municipalités, parce que, dans le processus, c'est la municipalité qui fait la demande au ministère de l'Environnement pour avoir droit aux subventions de ce programme.

M. Quintal: On a parlé du remblayage de la rivière Godefroy, qui est actuel, mais qui est assez vieux en termes d'action. En vous écoutant, il m'est apparu certaines images de ce qui se passe actuellement à Longueuil. J'étais très fier, hier, quand j'ai reçu le communiqué du ministère de l'Environnement disant qu'il y aurait des audiences publiques sur le cas du remblaiement, de ce qui se passe à Longueuil. C'est quand même un remblayage qui est 19 fois plus important que celui qui a eu lieu le long de la. plaine d'inondation. Il s'est quand même produit des choses à Longueuil. Actuellement, je ne suis pas capable d'évaluer le nombre de camions de débris versés. Ceci est seulement pour faire le contrepoids à ce que vous avez dit. Je suis quand même fier que le ministère de l'Environnement ait passé aux actes dans ce cas-là. Soyez assurés qu'on sera sûrement présents aux audiences publiques.

J'aimerais peut-être ajouter une autre chose pour répondre au député de Laprairie. Entre autres, dans le cas de la baie Lavallière, pour se défendre, on a pensé, à un moment donné, utiliser, à la commission d'étude et de recherche, le biais de la Loi sur la qualité de l'environnement. On se disait: Cela n'a pas d'allure, les travaux continuent, la faune est en train d'être détruite. Il y a au moins une trentaine d'hectares de marais qui étaient saccagés par des creusages illégaux et inutiles, semble-t-il, à cause des études hydrologiques qui étaient contestables. On a pensé intervenir par la voie d'une injonction, mais, évidemment, avant d'avoir trouvé de requérant et avec tout ce qui s'est passé, nous ne sommes pas intervenus. C'était une autre possibilité qui restait, mais c'est une possibilité très onéreuse, évidemment. La fédération aimerait bien mieux, dans ces circonstances, profiter d'un ministère, le ministère de l'Environnement, qui est voué à la protection de l'environnement, bien plus que de dépenser la maigre somme d'argent qu'elle a et de dépenser l'énergie des bénévoles à essayer de se battre contre un autre ministère qui est

beaucoup plus important que notre fédération. En gros, c'est ce que j'avais à signaler.

M. Ouellette: Je suis heureux que vous souleviez le cas de Longueuil parce qu'il met en évidence deux époques. Une première époque où il n'existait pas de Loi sur la qualité de l'environnement, où il n'existait pas de règlement sur la procédure d'évaluation des impacts et c'est l'époque, assez triste à mon avis, où n'importe qui pouvait faire n'importe quoi, n'importe quand et même n'importe comment. Je ne porte pas de jugement sur ce qui a été fait en termes de construction de routes à Longueuil, mais, à cette époque, effectivement, on a réalisé des empiétements dans le Saint-Laurent, sans avoir à demander la permission à personne. Quelques années plus tard, voilà qu'un projet, qui a quelques points de similitude avec celui dont je parlais, nous est soumis. Nos lois sont bien en place: qualité d'environnement, études d'impact, de telle sorte que le promoteur doit soumettre son projet. La procédure permet au public en général de se faire entendre pour porter un jugement sur la nature des travaux qui sont proposés et faire valoir les points négatifs que chacun des groupes pourra soulever à l'occasion des audiences publiques. Je n'ai pas à porter aujourd'hui de jugement sur le projet de la ville de Longueuil puisqu'il est - par similitude, si vous voulez - presque sub judice, en ce sens que les audiences ont été déclenchées. Ce sera là l'occasion qu'auront les groupes et les citoyens soucieux de la protection de l'environnement de faire valoir leur point de vue.

Je suis heureux de voir que votre fédération a l'intention d'aller à ces audiences et de faire valoir son point de vue. Je souhaite que tous les groupes soucieux de la protection de l'environnement en fassent autant, de façon que le BAPE puisse me transmettre votre éclairage et que je puisse en tenir compte au moment où une décision ou une recommandantion, en tout cas, sera acheminée au Conseil des ministres.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Laprairie, pour terminer.

M. Saintonge: II reste à peu près huit minutes? D'accord. Je reviens à mes questions. On s'en va vers de beaux voeux pieux, je ne sais pas. J'écoute et cela a l'air beau. On dit au ministre: On est conscient de cela, on est d'accord. Le ministre fait son passible, ou le ministère veut faire son possible. Ce sont presque des fleurs, comme on dit, que vous vous envoypz parfois, au niveau des interventions. Ce qui m'inquiète, en regardant le projet de loi 6... Tantôt, vous preniez l'exemple de ce qui se passait dans la rivière Godefroy. Il y a des travaux qui sont faits, il y a des normes qui existent actuellement - on me dit qu'il y a des normes - on contrevient aux normes et il n'y a pas de poursuite. D'après ce que je peux comprendre, il n'y a pas de poursuite. Ceux qui ont contrevenu aux normes s'en vont chez eux, ils se lavent les mains et cela va. Cela a contribué à dégrader le milieu. Il n'y a pas de remise en état du milieu, d'une part. On se dit: Dans ce cas-là, la municipalité a pratiquement donné carte blanche aux promoteurs. Pourquoi? Parce qu'elle dit qu'elle n'a pas de pouvoir d'intervention. Il n'y a rien qu'elle puisse faire. On nous dit: L'environnement a des points qui peuvent être soulevés; des fois, c'est le MLCP; dans d'autres cas, c'est l'Agriculture. Cela dépend d'un paquet de monde. II n'y a rien qui, conjointement, fait en sorte qu'on a une intervention positive et ordonnée dans le milieu. C'est comme cela que je le vois. Puis, on arrive avec la loi 6. 5i je reprends les propos du début, vous m'avez dit tantôt qu'il n'y avait pas de règlement-cadre, cela en prenait un, cela prenait certaines sanctions, cela prenait des dents dans des lois pour empêcher cela. Le ministre nous dit: Pas de problème, on a quatre beaux guides techniques. On n'a pas su ce qui va arriver. Je comprends qu'une personne va postuler sur un projet. 5i elle postule sur un projet et qu'il y a une subvention en ce qui a trait aux travaux, on vous l'accorde. Mais comment vont se réaliser les travaux? (11 h 15)

On se retrouve dans une situation où il va y avoir des choses à respecter par les guides techniques, mais elles n'ont pas plus été respectées avec une loi antérieurement, avec des règlements d'application. Comment peut-on penser, comment va-t-on faire en sorte que les travaux effectués dans le cadre de Berges neuves respectent les normes des guides techniques ou les normes de la loi actuelle? On s'en va loin, si je regarde simplement les exemples de travaux que le ministre des Affaires municipales mentionnait qui pouvaient être subventionnés, qui pourront découler de l'application de la loi 6. Je le cite au Journal des débats du 5 décembre, à la page 1344: "Ces travaux pourront consister dans le nettoyage des rives, en l'aménagement de terrains situés en bordure des cours d'eau, en travaux de rétention des eaux, dans des ouvrages de régularisation du niveau de l'eau, de construction de voies d'accès aux lacs et aux cours d'eau, en aménagement de plages, en construction d'aires de repos et des équipements de base servant aux fins de récréation, en reboisement... " Donc, c'est un paquet d'inverventions qui sont possibles.

Si je comprends bien vos propos jusqu'à maintenant, au niveau du ministère de l'Environnement, qui devrait coordonner un

minimum de ces travaux, ponctuellement, dans une ville ou même sur un bassin quelconque... Même si une municipalité pouvait avoir des possibilités d'intervenir sur ses rives, chez elle, j'imagine que ses interventions - peut-être pouvez-vous m'expliquer cela - vont sûrement avoir des effets sur ses voisins. J'imagine que, dans le cours d'eau en question, cela ne se limitera pas juste à son impact autour de chez elle. Sur un lac, il peut y avoir plusieurs municipalités autour. Sur une rivière, il y a des gens en bas de cela, qui ont fait des travaux de rétention d'eau, qui ont fait des travaux même dans le lit de la rivière et, dans une certaine disposition au niveau des lois, on peut dire que cela peut aller même jusqu'à quinze mètres de travaux sur les rives, sur le littoral de la rivière.

À ce moment, comment peut-on penser, d'après l'expérience que vous avez vécue dans les différents dossiers dont vous vous êtes occupés, si les municipalités finissent par avoir les pouvoirs que la loi 6 va leur accorder, qu'elles pourront faire en sorte d'appliquer ces normes, faire en sorte que les travaux soient respectés, de faire en sorte que, si on constate que, dans les travaux qui seront exécutés, si votre organisme se rend compte que, dans un certain coin, c'est dégradant, ce n'est pas dans le cadre de l'application des guides techniques du ministère, est-ce qu'on peut penser, valablement, que les municipalités pourront intervenir, arrêter cela ou corriger cela, ou si cela vous satisfait, de la façon qu'on annonce les projets de loi, et que tout cela va être protégé?

M. Quintal: Non, si on était satisfait du projet de loi 6, on ne serait pas ici, c'est officiel. C'est sûr qu'on se pose de sérieuses questions. On se demande si les municipalités ont des personnes compétentes pour faire respecter l'environnement. Si on se pose de sérieuses questions là-dessus, le passé nous a prouvé qu'on pouvait avoir des doutes. Si on demande un règlement-cadre, c'est parce qu'on veut que les règles du jeu soient très bien définies et que les choses faisables, les règles de base soient établies pour que les tributaires ou les rivières ne deviennent pas des canaux tout simplement où il n'y aura plus de vie, parce qu'on va tout avoir détruit. Il ne s'agit pas de tout répéter mon énoncé. Je trouve que vous avez dit des choses très vraies, des choses que nous... C'est sûr et certain que, si on avait été persuadés que le projet de loi 6 améliorait la qualité de l'environnement et de la faune, on ne serait pas ici ce matin, c'est officiel.

Je ne sais pas, René, peut-être que tu as des choses à rajouter.

M. Saintonge: À la suite de votre intervention et même des discussions que vous avez eues avec le ministre, en d'autres mots, vous n'êtes pas plus convaincus que la protection va être accordée.

M. Quintal: Soyez assuré, M. le député de Laprairie, que la Fédération québécoise de la faune va sûrement envoyer des communiqués à ses associations régionales pour que des patrouilles des habitats soient mises sur pied au plus vite afin d'essayer d'éviter que des abus - qu'il y a eus trop souvent dans le passé et sur lesquels on a fermé trop souvent les yeux - ne se reproduisent. La faune a été extrêmement endommagée. Surtout la vallée du Saint-Laurent a été très endommagée, nous en sommes très conscients à la Fédération québécoise de la faune. Si on veut léguer quelque chose à nos enfants et aux générations futures, il va falloir y penser très sérieusement.

M. Saintonge: Une autre question, notre temps achève. On sait que le conseil consultatif avait proposé une politique d'encadrement forestier des lacs et des cours d'eau du Québec, cela touche une partie du problème qui nous occupe. Je ne sais pas si votre association est intervenue, mais disons que, dans ce que j'ai vu de cela, on dit finalement que le conseil consultatif, à la suite des questions qui étaient vivement discutées dans le milieu relativement à l'encadrement forestier des lacs et des cours d'eau, a présenté un avis sur cela, a tenu des audiences, j'imagine. On a donné un avis quelconque. Le conseil consultatif, finalement, dit-on, aborde la question de l'encadrement forestier à partir de la problématique de l'eau. Quel type d'encadrement forestier convient-il d'établir pour assurer la sauvegarde de la ressource "eau" et cela en tenant compte des différentes vocations du territoire? C'est un peu le mandat de la commission. On en est arrivé finalement au fait qu'en avril 1983 on proposait une politique d'encadrement des lacs et des cours d'eau, sauf qu'il n'y a rien qui a suivi, je pense, il n'y a pas de politique globale d'encadrement des lacs et des cours d'eau qui a suivi. Je remarque que, dans les travaux possibles, au niveau par exemple de Berges neuves, on parle justement de reboisement. Si je comprends votre intervention, je veux me faire confirmer qu'au niveau du reboisement, entre autres, vous doutez que les municipalités aient la compétence pour appliquer certaines normes. À votre avis, cela reviendrait carrément au ministère de l'Environnement d'appliquer des normes dans ce sens et de définir des politiques globales qui devraient être suivies par tout le monde; c'est bien cela. La même chose pourrait s'appliquer au niveau des interventions sur les lits des rivières.

M. Quintal: Oui.

M. Saintonge: La même chose, disons, quand on parlait dans ce cadre d'une planification de développement; on parlait d'une politique de bassins, si l'on veut, c'est-à-dire l'ensemble du milieu aquatique concerné; si c'est un lac, c'est l'ensemble du lac qui va être concerné. Un programme donné devra suivre des normes applicables à l'ensemble du lac. D'accord. Ce qui veut dire qu'à l'intérieur du projet de loi 6, à l'intérieur des travaux qu'on veut accorder aux municipalités est-ce que ce n'est pas possible, d'après vous, de faire en sorte d'en arriver à un encadrement valable de tous ces travaux? Est-ce bien cela?

M. Quintal: Actuellement, on donne des pouvoirs aux municipalités et on ne les définit pas; dans le projet de loi, on ne définit rien. On donne un mandat en blanc. Il m'apparaît clairement que, si le mandat est en blanc, c'est sûr que les municipalités vont avoir le droit de faire n'importe quoi. Donc, elles vont avoir le droit de les creuser, de les remblayer, de les modifier. Nous, c'est sur cela qu'est basée toute notre argumentation, et on est entièrement d'accord avec vous. On a comme l'impression qu'il n'y a aucun règlement-cadre et aucune règle de base actuellement qui oblige les municipalités à respecter des choses. Ces règlements-cadres, vous avez entièrement raison en ce qui nous concerne, cela revient au ministère de l'Environnement de les édicter.

En ce qui concerne le conseil consultatif, je vous ai perdu un peu. Il m'est apparu une chose dans ce que j'ai pu lire, en ce qui concerne certaines choses que le conseil consultatif a écrites, à un moment donné. Je ne sais pas si on se rejoint. J'ai cru, à un moment donné, me rendre compte que, à plusieurs endroits, le conseil consultatif signale que les ministères, au lieu d'essayer d'appliquer la philosophie de la Loi sur la qualité de l'environnement, vont chercher l'exception pour passer à côté. Je ne sais pas si on se rejoint, mais j'ai senti cela à plusieurs reprises.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup. Votre temps est écoulé.

M. Quintal: Je remercie beaucoup les membres de la commission parlementaire de nous avoir entendus.

Le Président (M. Marquis): Merci aux représentants de la Fédération québécoise de la faune. J'inviterais, pour faire suite, les représentants de la Fédération québécoise de la faune, toujours, mais de la région 6 sud de Montréal.

Fédération québécoise de la faune, région 6 sud

M. Bourbeau (Jean-Jacques): M. le Président, j'aurais de la documentation à faire distribuer.

Le Président (M. Marquis): Votre organisme est bien représenté par M. Jean-Jacques Bourbeau, président de la régionale FQF de Montréal.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Montréal-Montérégie. Pour le terme 6 sud, cela représente la division administrative, mais on s'est donné un nom pour localiser l'endroit où nous opérons et cela comprend la partie sud de la ville de Montréal et la partie sud du fleuve Saint-Laurent de Sorel à Valleyfield.

Le Président (M. Marquis): Voulez-vous nous présenter la personne qui vous accompagne?

M. Bourbeau (Jean-Jacques): M. Léon Marchessault qui est membre du comité de conservation de notre régionale. C'est un ancien président qui est aussi directeur de notre régionale.

Le Président (M. Marquis): M. Bourbeau, la parole est à vous.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Bonjour, mesdames, messieurs. C'est à titre de président de la FQF Montréal-Montérégie que je m'adresse à la commission. M. Léon Marchessault, qui m'accompagne, est membre de notre comité de conservation. Il a bien voulu remplacer le président de ce comité, M. Jean-Marc Ribière.

Avant d'entrer dans le vif du sujet, je voudrais vous rappeler que la FQF Montréal-Montérégie regroupe plus de 15 000 chasseurs et pêcheurs. Notre territoire s'étend le long des rives du Saint-Laurent, de Valleyfield à 5orel, et englobe la vallée du Richelieu ainsi que la vallée de la Yamaska. Tout en veillant aux intérêts de ses membres, la FQF Montréal-Montérégie accorde une grande priorité à la protection des habitats fauniques.

Je suis heureux de pouvoir présenter le mémoire de la FQF Montréal-Montérégie concernant le projet de loi 6 sur la mise en valeur du milieu aquatique. Ce projet de loi vise à donner aux municipalités tous les pouvoirs requis pour faire des aménagements sur le lit et les rives des lacs et cours d'eau.

Tout en soulignant que les chasseurs et pêcheurs encouragent depuis fort longtemps toutes les initiatives visant à rendre nos lacs et cours d'eau plus accessibles, la FQF Montréal-Montérégie ajoute sa voix à celle

des autres organismes de conservation préoccupés par le problème de la protection des habitats fauniques pour éviter qu'à partir d'un objectif louable le projet de loi 6 n'ouvre une porte qui mène à la dégradation des rives et du littoral de nos plans d'eau.

Permettez que j'emprunte d'un texte du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, récemment publié dans la revue Sentier, Chasse et Pêche. On y lit que "les milieux riverains, ce sont d'abord et avant tout des habitats fauniques". Dans un autre document du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche intitulé "Politique sur la conservation des habitats fauniques au Québec" et publié en 1984, on ajoute "À cause des caractéristiques qui en font un milieu de première importance pour la faune, à cause de sa fragilité et du caractère quasi irrémédiable des altérations qu'il subit, le milieu riverain doit jouir d'une attention toute particulière. " Il est donc essentiel que les aménagements prévus dans le cadre du projet Berges neuves du ministère de l'Environnement et du projet de parc national de l'Archipel, du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, ne se fassent pas au détriment des habitats fauniques.

Le FQF Montréal-Montérégie estime donc qu'il serait pour le moins imprudent d'accorder de nouveaux pouvoirs aux municipalités avant que ne soient adoptés une loi et des règlements précis sur la protection des habitats fauniques. Pour s'en convaincre, on n'a qu'à lire la description de la situation actuelle dans le document du MLCP sur la conservation des habitats fauniques. Le groupe de travail, chargé de la rédaction de ce document, n'hésite pas à affirmer que "la nécessité d'agir est d'autant plus pressante que les diverses lois et les règlements actuellement en vigueur au Québec ne suffisent plus à assurer une protection adéquate à la faune". Or, la loi et les règlements, qui devaient répondre à nos préoccupations et qui ont fait l'objet d'un engagement formel de la part du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, se font toujours attendre. (11 h 30)

En 1982, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche publiait un avant-projet de sa Loi sur la conservation de la faune. Les groupements des citoyens furent appelés à donner leur opinion aux membres de la commission parlementaire du loisir, de la chasse et de la pêche. L'avant-projet de loi prévoyait accorder au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche un pouvoir de réglementation "pour assurer la protection, permettre ou prohiber toute modification de l'habitat de la faune et en fixer les conditions ou normes. "

Nous ne serions pas ici aujourd'hui si la Loi sur la protection des habitats fauniques avait été adoptée avec ses règlements. Je me permets d'ajouter que nous sommes très déçus. Nous étions en droit de nous attendre que le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche émette de sérieuses réserves quant à l'opportunité de présenter le projet de loi 6 avant que la Loi sur la protection des habitats fauniques ne soit adoptée.

J'ouvre une parenthèse pour souligner que les guides d'aménagement que le ministère de l'Environnement s'est engagé à publier pour les municipalités qui s'inscriront à Berges neuves n'auront guère plus de valeur que le "Guide d'aménagement forestier" du ministère de l'Énergie et des Ressources. C'est le genre de document qu'on distribue à ceux qui s'informent des politiques du ministère, mais que les compagnies forestières ne sont pas tenues de respecter. On ne peut remplacer une Loi sur la protection des habitats fauniques (et des règlements) par une série de voeux pieux.

Les chasseurs et pêcheurs fréquentent assidûment les rives des lacs et cours d'eau où ils sont régulièrement confrontés à des aménagements dégradants. Ils sont donc en mesure d'affirmer que la plupart des municipalités ne se sentent pas concernées par la conservation des habitats fauniques. Ce sont nos associations qui doivent exercer des pressions auprès des municipalités pour éviter que certains aménagements ne détruisent les habitats, ou pour exiger qu'elles adoptent des règlements visant à les protéger. Cette situation justifie pleinement nos inquiétudes au sujet du projet de loi 6.

Les membres de la FQF Montréal-Montérégie sont d'autant plus inquiets qu'ils ont présentement sous les yeux le cas de la ville de Longueuii. Cette municipalité se propose de remblayer le lit du fleuve Saint-Laurent sur une longueur d'environ trois kilomètres, pour la construction de l'intercepteur régional d'eaux usées, à même une subvention du ministère de l'Environnement.

Des travaux d'excavation sont présentement en cours pour la section ouest de l'intercepteur et la ville de Longueuii en profite pour empiéter graduellement sur le lit du fleuve. Ni le ministère de l'Environnement, ni le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ne sont intervenus pour faire cesser ce remblayage.

Devant ces faits, nous comprenons mai l'empressement du gouvernement du Québec à faire adopter le projet de loi 6, au risque de causer des torts irrémédiables à nos habitats riverains. (Présentation d'une photographie prise à Longueuii le 23 février 1985).

Lors du début des travaux d'excavation à Longueuii, une partie s'est faite non pas dans les trois kilomètres mentionnés dans notre exposé, parce que ce n'est pas encore ouvert; ils attendent des nouvelles. L'autre section se fait dans de l'ancien remblayage.

II y en a eu de jeté dans le fleuve. La photo que vous avez là...

Malheureusement, dans mon amateurisme de photographe et avec les moyens qu'on a... C'est ce que vous auriez en ayant inverti le négatif. C'est la vue que vous avez de Longueuil dans l'ancien remblayage et dans le nouveau remblayage, quand vous êtes à l'île Saint-Hélène à l'ombre. On parle d'aménager les trois kilomètres, en partant de l'échangeur Roland-Therrien à aller jusqu'au pont-tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine. Mais c'est depuis 1971 que la fédération est aux aguets des remplissages de la ville de Longueuil. Si vous prenez le volume no 1 de Québec Chasse et Pêche, vous allez voir que, dans les pages de la fédération, on parle déjà de ça.

En 1971, la Fédération québécoise de la faune, par l'entremise du club de tir chasse et pêche de Longueuil, a fourni un montant au projet Un fleuve, un parc, pour faire cesser momentanément les remblayages de la ville de Longueuil dans ce secteur.

Malheureusement, nos moyens ne nous permettent pas de faire plusieurs photos 8 sur 10; je les fais chez nous bénévolement. C'est ce qui est sur la berge du Saint-Laurent, vis-à-vis du remblaiement qui a été commencé le vendredi 22, mais... Ce qui est ici, on ne l'a pas mis dans le fleuve, on attend que la MRC amende sa loi, tel que stipulé dans l'étude d'impact commandée par la ville de Longueuil. Cela, c'est de l'ancien remblayage où on creuse actuellement, en face de la résidence de l'ancien maire de Longueuil, près de la passerelle, et on s'en va vers l'ouest, vers le pont Jacques-Cartier.

La ville de Longueuil nous a dit, lors d'une réunion publique, que ce qui est bon serait pris pour remblayer dans le fleuve ou remblayer où on creuse, mais, pour ce qui est du reste, on a des doutes, on sait où cela va aller: des tuyaux, des pneus, des anciens tuyaux de traverse et ainsi de suite.

Nous avons pris nos renseignements pour arriver à préparer notre mémoire, premièrement, dans la Charte mondiale de la nature des Nations Unies qui a été adoptée en 1982. Le Canada était un des pays en faveur parmi les 111 qui étaient pour; il y avait un contre, les États-Unis, et 18 abstentions. Nous prenons notre documentation dans le volume no 1 de Québec Chasse et Pêche et nous avons aussi de la publicité payée par le gouvernement que la ville de Longueuil distribue par l'assainissement des eaux où l'on mentionne, lors du Salon québécois des techniques de l'eau, le choix d'une vie de qualité, mais à quel prix, au détriment de certains autres choix.

La ville de Longueuil veut faire du remblaiement dans le fleuve pour regagner ses rives. Elle prétend qu'antérieurement, lors de la construction de la route 132, elle s'est fait voler ses rives du fleuve, mais là elle va venir nous voler du territoire québécois en empiétant sur 20 mètres de large et les dommages que cela va causer. On nous dit qu'il y a une option terrestre de prévue dans l'étude d'impact commandée par la ville de Longueuil, mais on nous dit qu'on ne peut pas passer sur le boulevard Marie-Victorin au lieu de passer dans le fleuve; cela dérangerait les instruments de précision de la compagnie d'avionnerie qui est là. Le métro de Montréal s'est construit et personne n'a arrêté de travailler à cause du dynamitage. Alors, il y en a des options et nous, de la Fédération québécoise de la faune, c'est ce qui nous inquiète. S'il n'y a pas une loi de la protection des habitats fauniques, la ville de Longueuil va passer son tuyau, va remblayer dans le fleuve et va continuer à remblayer vis-à-vis du parc Marie-Victorin.

Nous avons dans nos dossiers le projet futur qui a été préparé, il y a très longtemps, et la ville de Longueuil va s'y rendre. Si vous prenez la carte des profondeurs d'eau maritime et que vous allez dans la région de Longueuil, vous allez voir qu'une révision de la carte en 1978 indique à plusieurs endroits qu'on n'a pas été plus loin et qu'on n'a pas défini le contour de la carte parce que, dans le secteur de Longueuil, on y voit à plusieurs endroits "en remplissage" et "en remblaiement". C'était en 1978 et les cartographes qui ont travaillé là-dessus se sont sûrement informés à la ville de Longueuil de ce qu'elle avait l'intention de faire.

Nous avons ici: Interception des eaux usées (la berge), où il va y avoir d'injectés 45 000 000 $ entre le pont Jacques-Cartier et le pont-tunnel Louis-Hippolyte Lafontaine. Admettons que c'est de l'autre moitié du trajet dont on s'inquiète - ce sont les trois kilomètres entre Roland-Therrien - qui fait partie de ces 45 000 000 $. On en a, des guides techniques sur l'environnement, mais la ville de Longueuil va passer son tuyau dans le fleuve et va continuer à remblayer; tant qu'on sera là, on va guetter.

On a aussi la documentation qui nous vient du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. D'ici peu, plusieurs familles devront quitter cet endroit: un marécage. On y lit: Les marécages sont d'abord et avant tout des habitats fauniques. Si les municipalités n'ont pas de loi-cadre, ne sont pas restreintes, avec un guide technique, est-ce qu'on peut porter des accusations? Est-ce qu'on peut forcer par la loi à faire quelque chose? On peut retirer des subventions, mais est-ce qu'on peut forcer par la loi?

Il y a un autre article aussi publié dans la revue Québec Chasse et Pêche: Les milieux riverains sont d'abord et avant tout des habitats fauniques. Cela vient encore de la même source. Notre inquiétude aussi, aux

dires des représentants de la ville de Longueuil, est que la partie qu'elle veut prendre dans le fleuve sera la partie finale de l'empiétement dans le fleuve. On nous a même avancé que, si elle fait l'empiétement dans le fleuve, Archipel ne touchera plus à cette section-là du fleuve. On veut redorer la rive et l'aménager pour qu'elle ait de la gueule et qu'elle soit présentable pour ceux qui passent en bateau, mais on n'a jamais rien fait pour aménager et donner de la gueule - une belle photographie - pour ceux qui sont à l'île Sainte-Hélène dans les parties qu'on a inondées et remblayées.

Dans l'étude d'impact de la ville de Longueuil, on dit qu'on va prendre simplement 10% des frayères le long du cours d'eau du Saint-Laurent, mais on ne parle pas des 80% qu'on a prises depuis X années. On parle seulement de 2% des herbiers qu'on va détruire, mais c'est déjà trop. Si on protège notre patrimoine, cette partie de littoral de notre province fait partie d'un patrimoine sacré. Si c'est sacré pour la ville de Longueuil de faire passer des vélos dans le fleuve, moi, je préfère me promener en pédalo.

Je vais vous répéter une farce de l'ex-maire de Longueuil qui a dit: On n'aurait plus de problèmes; pourquoi ne nous laissez-vous pas passer le fleuve dans les tuyaux et on va se rendre jusqu'à l'île Sainte-Hélène? Cela s'en vient, mais, si vous remarquez, sur la carte hydrographique, ils ont arrêté dans la limite des 10 mètres des hautes eaux quand il s'est agi de toucher la voie maritime du Saint-Laurent. Ils ne se rendront pas là parce qu'il y a une loi fédérale qui empêche cela.

Si on regarde dans le volume ISBN2-550-10918-X, Le loisir, synthèse des études et propositions, archipel de Montréal, on y lit à la page 74, paragraphe 4. 4. 1: Le débat récréation-conservation est à la fois un vrai et un faux problème. Le véritable ennemi de la conservation, c'est d'abord le développement anarchique, le remblayage, les égouts à ciel ouvert, les usines aux affluents non traités et les abattages d'arbres. Ces gestes d'aménagement menacent et font disparaître la faune et la flore beaucoup plus sûrement que les pique-niqueurs, les cyclistes et les skieurs de randonnée; on semble parfois l'oublier.

Pour finir mon intervention, si j'ai encore quelques minutes... Hier matin, avant de quitter mon domicile, j'étais très heureux de recevoir une belle boîte du ministère de l'Éducation, m'étant inscrit à un cours par correspondance, parce que je n'ai pas encore fini d'apprendre et j'espère que cette commission va m'éclairer aussi. Je me suis inscrit au cours par correspondance Hébergement Québec et je me suis aperçu, durant l'heure que j'ai pu feuilleter ces documents qui sont très intéressants, très instructifs - et je vais commencer, dès lundi, à m'y mettre assidument - que le dicton "Fais ce que je te dis, mais ne fais pas ce que je te fais", c'est vrai. Je l'ai chez nous. Si vous voulez le feuilleter, il est à votre disposition pour 37, 50 $, montant que j'ai souscrit et cela vaut plus que cela. Si vous voulez vous instruire, c'est le cours 3015 des cours par correspondance, messieurs.

Le Président (M. Marquis): M. le ministre.

M. Ouellette: Merci, M. le Président. L'essentiel de l'intervention que je viens d'entendre porte, à mon avis - je peux me tromper, mais je vais essayer de comprendre au fur et à mesure - sur quelque chose de présumé. Ce que vous nous dites, M. Bourbeau, à toutes fins utiles, c'est que la ville de Longueuil va passer un tuyau sur du territoire d'empiétement sur le Saint-Laurent. Je voudrais vous rassurer là-dessus. J'en ai parlé tout à l'heure en disant; 11 y a eu deux époques à Longueuil, une première époque où on a décidé de passer la route 132 sans consulter personne. Cela s'est fait. Il y a eu des empiétements et personne n'a eu l'occasion d'intervenir.

Aujourd'hui, on se retrouve avec un nouveau projet qui est celui de la ville de Longueuil, qui est relié, bien sûr, à l'assainissement des eaux, qui a fait l'objet d'un protocole d'entente avec le ministère de l'Environnement. D'abord, je voudrais vous dire que le protocole d'entente entre la ville de Longueuil et le ministère de l'Environnement ne prévoit pas devoir passer le tuyau dans le Saint-Laurent. Le protocole qu'on a signé prévoit que le tuyau passera, notamment, sur le boulevard Marie-Victorin, à la hauteur des trois kilomètres qui vous inquiètent, mais on n'a quand même pas le pouvoir d'interdire à une municipalité ou à un promoteur de concevoir un projet. Cela, c'est sa pleine liberté sauf qu'il y a des lois, maintenant, qui existent, dont celle sur la qualité de l'environnement et le règlement qui en découle sur les études d'impact. Ce promoteur, qui a conçu ce projet, doit soumettre son projet dans le cadre de la loi et du règlement; ce qu'il a fait. On lui a demandé une étude d'impact, on a émis des directives. L'étude d'impact a été produite, elle a été rendue publique et j'ai demandé moi-même - je n'ai pas attendu que quelqu'un le demande - des audiences publiques pour que l'étude de ce projet se fasse publiquement. Ce n'est qu'après que le Bureau des audiences m'aura remis un rapport que la décision de l'autoriser ou non sera prise. (11 h 45)

Voilà un domaine où le gouvernement a le pouvoir, en vertu de la Loi sur, 1a qualité de l'environnement, de dire non au projet.

Ce n'est pas ici qu'on va tenir ces audiences publiques; elles vont se tenir à Longueuil. Vous me dites que vous allez y participer, cela me rassure parce que c'est l'occasion rêvée, pour tous ceux qui s'opposent, de faire valoir leur point de vue auprès d'un bureau indépendant qui s'appelle le Bureau des audiences publiques sur l'environnement. Donc, ne présumez pas que le projet de Longueuil va être accepté, il sera étudié à la suite du rapport que le BAPE me soumettra.

Pour vous rassurer également, les travaux d'excavation qui se font présentement ne se font pas en milieu hydrique. Ils se font en milieu terrestre et ce dont je viens de parler ne s'applique pas là. Le premier projet de la ville de Longueuil qui a fait l'objet d'une entente avec l'Environnement prévoit que le tuyau en question, sur les trois kilomètres et demi, doive passer sur le boulevard Marie-Victorin, même si cela perturbe l'industrie ou les résidents qui s'y trouvent. Le projet qui a fait l'objet d'une entente, donc, n'est pas en milieu hydrique. Voilà un exemple où on a la loi et les dents qu'il faut pour interdire un tel projet, s'il se révèle inacceptable, aussi bien pour la protection de la faune que pour la protection de l'environnement en général. Je pense que c'est là l'essentiel.

Quant à la politique à laquelle vous faites allusion, je l'ai dit tout à l'heure, nous nous sommes inspirés grandement du rapport du CCE et de la politique de l'encadrement forestier. Ces documents sont entre les mains du comité interministériel et la politique générale qui va en découler va s'inspirer très largement de ces études qu'on avait commandées nous-mêmes au CCE pour établir une politique générale de laquelle découleront, éventuellement et le plus rapidement possible, je l'espère, des règlements qui permettront de respecter la politique qui est en train d'être discutée entre les différents ministères. Je pense que, là-dessus, il y a de quoi être rassuré.

En ce qui a trait - je me trouve à répondre à vos prédécesseurs un peu - aux travaux prévus dans le programme Berges neuves, c'est exactement la même chose. Pour une fois, ces travaux ne se feront pas à l'insu du ministère de l'Environnement ni du MLCP, puisqu'ils devront être soumis au ministère de l'Environnement par les municipalités et ils devront être conformes également au guide dont j'ai parlé tout à l'heure et qu'on pourra vous remettre, je pense, aujourd'hui même, de telle sorte que ces travaux vont être sévèrement contrôlés. Ce sont les directions régionales du ministère de l'Environnement qui doivent faire une première évaluation de chacun des projets avant de les soumettre au comité interministériel qui pourra les approuver ou les modifier ou les refuser, selon qu'ils sont conformes ou non à nos guides. C'est donc un pas très sérieux vers l'avant, puisque ces guides sont beaucoup plus détaillés que n'importe quelle loi ou n'importe quel règlement qui pourrait découler des travaux du comité interministériel actuellement en cours au gouvernement. Je ne vois pas de risque puisque nos spécialistes, aussi bien de l'Environnement que du MLCP, vont devoir se prononcer cas par cas, accepter les choses acceptables, refuser les choses inacceptables ou les faire modifier de façon qu'elles deviennent positives.

Personnellement, je suis tout à fait rassuré et je vois là un geste complémentaire à l'assainissement des eaux puisque nous voulons, une fois les eaux assainies, qu'on puisse y avoir accès et les protéger par un autre volet qui n'est pas l'assainissement comme tel, mais la remise en valeur des rives qui sont - vous en êtes conscients - jusqu'à un certain point, responsables de la détérioration des eaux au Québec. Il n'y a pas que l'industrie, il n'y a pas que l'agriculture, il n'y a pas que le monde municipal qui ont pollué les rivières; il y a tout le phénomène de l'érosion qui se traduit en pollution diffuse et nous voulons, par le montant de 170 000 000 $ qu'on va investir au cours des trois prochaines années, apporter un correctif additionnel à la situation qui a entraîné la dégradation de nos cours d'eau.

Quant aux équipements d'accessibilité, ce sont des mesures de sécurité qui devront être appliquées, toujours conformément à nos guides, de façon qu'on ne retrouve pas, par exemple, de constructions de quais inutiles et que, si jamais on devait en autoriser sous forme de gabion ou autres formules du genre, ce soit limité aux cas strictement nécessaires. On n'a pas du tout l'intention d'aider à la prolifération de ce genre de construction que nous rejetons dans nos guides, de toute façon, mais que nous pourrons peut-être devoir accepter dans certains cas parce que c'est la seule solution pour éviter, par exemple, les glissements de terrain et autres choses du genre.

Ce n'est pas un programme d'envahissement du milieu hydrique et de destruction de la faune. Au contraire, c'est un programme de restauration et de consolidation des rives, de reboisement et de revégétation pour leur redonner leur caractère naturel initial. C'est là qu'est notre intention. Les guides font foi de tous ces éléments, de toute notre pensée environnementale dans le programme.

Le Président (M. Marquis): M. Bourbeau.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Si vous me permettez, M. le ministre, si nous avons pris Longueuil, c'est parce que c'est un point qui me touche parce que cela fait déjà 20 ans

que je patauge dans cet endroit et que je l'ai à coeur. Mais là, cette partie, je ne l'ai pas à coeur, c'est-à-dire qu'elle m'écoeure. D'accord? Je pourrais vous citer un autre dossier où notre régionale travaille actuellement, c'est le déversement des neiges usées à Chambly, où on fait de l'érosion des deux parcs qui ont été construits avec des subventions gouvernementales, près du barrage, en haut de la ville de Chambly, près du pont qui va à Richelieu. Il y a un beau parc, on met de la neige là l'hiver et on la jette dans les rapides; en bas, en face de l'hôtel de ville, il y a un petit parc et on fait la même chose. Le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche paie pour de l'ensemencement dans les rapides de Chambly, où on y prend de la très belle truite, mais la ville de Chambly la sale dans un bout et dans l'autre. Je demeure à l'île de Carignan. Qu'est-ce qui passe chez nous? C'est de l'eau salée. Quand je veux de l'eau salée, je vais à la mer, mais j'aime pêcher dans le bassin. C'est là que j'ai décidé de faire ma vie, de finir mes jours. Alors, ce sont deux petits exemples qu'on peut vous donner.

S'il y avait une loi pour la protection des habitats fauniques, il y aurait deux lois avec lesquelles on pourrait les pincer, parce que nous ne pouvons pas combattre le gouvernement ou la ville par des moyens judiciaires. Alors, on prend les moyens qu'on a. On est entendu en commission et on écrit aux journaux. Léon a quelque chose à ajouter, si vous le permettez.

M. Marchessault (Léon): Cela s'adresse à M. le ministre. Vous avez mentionné, dans le cas de Longueuil, ou toute autre ville du genre, qu'il y aura des réunions. À la suite des réunions qui seront tenues, vous aurez une décision à prendre. On va prendre le cas de Longueuil parce que, pour nous, c'est un cas patent qui va peut-être faire état de tout l'ensemble du Québec par la suite. Si la population de Longueuil se prononce favorablement à la décision de la ville de vouloir passer l'intercepteur dans la partie du fleuve, quelle sera votre décision?

M. Ouellette: Je ne peux pas présumer. Il faudra...

M. Marchessault: C'est cela qui nous inquiète, M. le ministre.

M. Ouellette: Non, mais je vais vous dire... Les audiences vont permettre d'analyser le projet; ce dernier comprend des travaux et des études d'impact en rapport avec chacun de ces travaux. Si les travaux s'avèrent n'être que positifs, on ne peut quand même pas adapter une loi générale disant: Désormais, en Amérique du Nord ou au Québec, toute forme d'empiétement est interdite, parce qu'il arrivera toujours des circonstances où ce sera préférable d'en faire que de ne pas en faire, par exemple, pour réparer des dégâts plutôt que de les laisser se perpétuer dans le temps.

Je ne peux pas présumer. Je n'ai pas pris connaissance de l'étude d'impact dans le détail. Les audiences sont justement là pour critiquer, point par point, chacun des éléments du projet de ta ville de Longueuil. Tout à l'heure, on mentionnait 2% des herbières qui sont menacées. Je ne sais pas, mais, si dans le projet de la ville de Longueuil, on met l'argent suffisant pour recréer davantage d'herbiers, ce sera à vous d'analyser et de faire valoir votre opinion, à savoir qu'on est mieux de garder les 2% qui sont menacés que d'en recréer dix à côté, qui seraient peut-être vus comme des apports artificiels. Ce sont les audiences qui vont décider de tout cela, et le BAPE est justement là pour tenir compte des points de vue de chacun, de faire la pondération et de me faire un rapport dont je m'inspire pour faire une recommandation au Conseil des ministres. Ce n'est pas moi qui décide, c'est le Conseil des ministres et c'est prévu comme cela dans la loi.

Alors, ce sera à nous tous de faire l'évaluation du positif et du négatif et de prendre une décision en fonction du bien commun et du bien environnemental, cela va de soi. C'est un mécanisme qui n'existait pas, malheureusement, il y a dix ans.

M. Marchessault: Tout de même, M. le ministre, ce n'est pas encore dans une loi.

M. Ouellette: Bien oui, c'est dans la loi!

M. Marchessault: C'est pour cela que, dans le projet de loi présenté par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche en 1982, dont j'ai ici quelques extraits, ou on disait: "vivre avec la faune en protégeant les habitats fauniques, dont le milieu riverain". On mentionne ici: Qu'entend-on par milieu riverain? C'est le milieu de transition entre le milieu strictement aquatique et les milieux terrestres. Il est composé surtout par les zones humides qui recouvrent environ 14% du territoire québécois. Sa limite inférieure s'étend jusqu'à une profondeur de deux mètres sous le niveau des basses eaux moyennes et comprend donc une partie aquatique et une partie terrestre. Ensuite, on dit: Quelle est l'importance de la faune en milieu riverain? La faune de ce milieu est la plus variée, la plus abondante et la source la plus importante de revenu parmi les activités reliées à l'utilisation de la faune. Enfin, on dit: L'utilisation de la faune de ce milieu entraîne des dépenses de plus de 400 000 000 $. Immédiatement après, on dit:

Quelles sont les principales causes humaines de détérioration du milieu riverain? On dit: le remblayage. Le principal effet négatif du remblayage, c'est qu'il détruit sans retour les caractéristiques du milieu riverain et engendre la disparition de toute la faune associée à ce site.

C'est ce qui devait aller dans la loi que M. Guy Chevrette nous avait présentée et on a cru en lui. On a voulu continuer. Après, il nous faisait des recommandations et disait: Activité pour une assciation: détecter dans son milieu des projets qui mettent en cause la protection des berges. Aujourd'hui, notre association, à Saint-Hyacinthe, a un comité de conservation. La régionale 6 sud a un comité de conservation et on doit venir ici, aujourd'hui, M. le ministre, pour vous demander: De grâce, incluez cela dans votre projet de loi 6! Parce qu'à la suite de consultations, malgré toute votre bonne volonté, chacune des municipalités aura raison de dire: Je devrais empiéter un peu dans le cours d'eau. Ce n'est pas pour 2% ou 3%. On a un exemple à Saint-Hyacinthe. Cela a été construit dans le passé, il y a quelques années, mais, aujourd'hui, on est en discussion sur des projets de réaménagement du cours d'eau parce qu'on a remblayé les rives de la rivière Yamaska pour faire passer le tuyau d'eaux usées pour la future usine d'épuration. Présentement, on est devant un projet de tronçon d'amélioration qui va coûter environ 250 000 $. C'est un exemple. Si on laisse aller ou si, par une décision... De la manière dont la ville de Longueuil fonctionne présentement, elle a installé un projet d'aménagement à la réunion des techniques de l'eau. Donc, ce n'est pas d'aujourd'hui qu'on se prépare, cela doit faire deux ou trois ans. Tout est là, le schéma d'aménagement est préparé. Elle va trouver des raisons, elle va même aller, semble-t-il, devant la population de Longueuil pour avoir son opinion. S'il y avait une loi bien définie pour la protection des habitats fauniques, il n'y aurait personne qui pourrait y contrevenir. Tandis que là, chacune des associations... Et c'est là notre crainte, M. le ministre. C'est pour cela qu'on demande que ce soit inclus dans le projet de loi 6.

M. Ouellette: Ce n'est pas dans le projet de loi 6 qu'on va inclure cela, c'est dans la politique globale de conservation des milieux riverains. C'est précisément cela qui est en discussion au comité interministériel, pour en venir à établir la politique globale de laquelle découleront des règlements. Et le document dont vous venez de faire une certaine citation, assez abondante, d'ailleurs, est justement à la table des discussions interministérielles pour en venir è établir cette politique.

Alors, tout cela va se faire au printemps, cela va faire l'objet à nouveau de consultations publiques et, ensuite, on va adopter la loi que vous souhaitez toujours voir adopter et que mon collègue, M. Chevrette, annonçait il y a quelque temps. Donc, M. Chevrette n'a pas menti, loin de là. Nos fonctionnaires sont tous à l'oeuvre actuellement et, dès le printemps, on va déposer ce projet de politique globale et on va le soumettre à l'opinion publique pour y apporter les corrections nécessaires, mais ce n'est pas dans un projet de loi spécifique, comme le projet de loi 6, qu'on va faire cela.

Entre-temps, nous allons permettre aux municipalités de préparer des projets à partir des guides et ce qu'on retrouve dans les guides sont les grandes lignes de ce qu'on va retrouver dans la politique globale. Tout cela est cohérent. Il n'y a aucun risque dans l'application de Berges neuves, compte tenu des mesures de contrôle qu'on va mettre tout au long du processus, que ce soit incohérent en bout de piste. On va exactement dans la pensée que vous exprimez et je l'appuie votre pensée puisque c'est aussi la mienne: il est urgent qu'on puisse contrôler tout ce qui se fait dans le milieu hydrique parce qu'il s'est fait trop de "gâcheries", devrais-je dire, dans le passé.

Je vous ferai remarquer aussi que votre association ou quelques membres de votre coin de votre association se sont adressés au programme Berges neuves pour obtenir de l'aide financière pour permettre de créer ou de réaménager des zones de frayères, par exemple. Donc, c'est très positif, et le programme Berges neuves va nous permettre de vous aider à investir aux deux tiers les sommes nécessaires pour atteindre vos buts, qui sont des buts très positifs et des buts d'amélioration.

Donc, il faut distinguer le projet Longueuil dans tout cela. Le projet Longueuil, ce n'est qu'un projet comme les autres qui est soumis à la loi, et la loi nous donne le pouvoir de dire catégoriquement non si les audiences publiques nous indiquent qu'il faut dire non. (12 heures)

Le Président (M. Marquis): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: M. le Président, vous m'excuserez, on a des invités, mais j'ai une question à poser au ministre. Le ministre a répondu et cela me fait me poser des questions, probablement les mêmes que vous. Vous pourrez en juger et dire après si c'est le cas.

Le ministre nous dit qu'il y a une loi-cadre qui va s'en venir au printemps, qu'il va faire des consultations. Ce que je comprends de tout cela, c'est qu'on met la charrue avant les boeufs tout simplement, dans le sens que, si on fait une loi-cadre et qu'on veut en arriver à la protection des

habitats fauniques et à une politique, par exemple, d'encadrement forestier pour les lacs et les cours d'eau, à tout niveau d'intervention sur les rives, on va toucher à tout cela en même temps. Le ministre nous dit: On va faire cela au printemps, on va vous consulter sur cela et on verra l'expertise des gens comme la Fédération québécoise de la faune, que ce soit la fédération comme telle, la région sud ou la région nord, ou FAPEL, qui est dans le domaine depuis plus de 20 ans, d'après ce que comprends des consultations que j'ai faites dans le milieu et de ce que j'ai pu lire.

Le ministre vient nous dire: C'est bien beau tout cela, ces gens ont travaillé. Il reconnaît même qu'en principe ce sont ces associations sans but lucratif qui contribuent à protéger l'environnement. Ce sont peut-être les gens au Québec, plus que le ministère de l'Environnement même, d'après ce que je peux comprendre, qui sont les gardiens de la qualité de vie autour de nos lacs, de nos rivières et de notre fleuve. Vis-à-vis de tout cela, le ministre vient dire: Cela fait longtemps, il faut que tout le monde s'asseoie à la même table, ni plus ni moins, c'est-à-dire que les différents ministères - il y a le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui est dans cela, il y a le ministère de l'Environnement, il y a le ministère des Affaires municipales qui va être impliqué indirectement, il y a le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation... J'ai pu comprendre ce matin que, dans certains cas, le ministère de l'Agriculture est à la table, est inscrit sur cela. Je vous dirai qu'il y a peut-être d'autres associations qui viendront et qui démontreront qu'il n'y a peut-être pas de communication souhaitable entre l'Agriculture et l'Environnement. Ce sont des choses que je me suis fait dire et je suis convaincu que cela va ressortir ici à un moment donné.

Ce qui m'intéresse et ma grande question est: Comment le ministre peut-il sérieusement nous dire qu'il respecte ces gens, qu'il respecte l'agir des gens qui veulent protéger la qualité de vie et qu'en même temps il nous dise qu'il va mettre des normes techniques? Les municipalités le font à travers des normes techniques. M. le ministre, est-ce que les personnes qui ont travaillé à la protection des rives, à la protection des rivières et des lacs pourront intervenir sur les normes techniques que vous imposez? Par exemple, ces gens, au niveau des possibilités d'intervention dans une municipalité par un groupe donné qui demande à une municipalité une intervention sur un milieu et vient détruire des habitats fauniques d'une certaine façon, parce qu'on dit que des travaux pourraient avoir lieu dans le lit de la rivière... Quand on va construire un quai, on va toucher au lit du cours d'eau ou du lac, on va avoir une intervention qui peut aller jusqu'à quinze mètres dans le lac ou dans la rivière, carrément sur les rives, si j'ai bien compris les documents du ministère que j'ai lus. Cela va perturber le milieu. Si des gens s'occupent depuis des années de la protection du milieu faunique, de l'aménagement des rives et de la question de l'encadrement forestier des lacs et des rivières, comment ces gens peuvent-ils intervenir au niveau des normes techniques que vous imposez aux municipalités ou aux groupes qui, à travers les municipalités, vont demander la réalisation de projets? Comment ces gens peuvent-ils s'assurer que, dans certains cas, des façons d'agir fondamentales au niveau de leur expertise ou de leur expérience antérieure vont être respectées par les municipalités? D'aucune façon: vos normes sont faites, sont établies.

Vous dites: Ce n'est pas grave, cela va être dans la loi éventuelle. Si, éventuellement, dans la loi, on se rend compte dans certains cas que des interventions qui pourraient être allouées et permises en vertu du programme Berges neuves, en vertu des normes techniques que le ministère va mettre en place, si on se rend compte donc, que cela serait dégradant ou que cela irait contre des principes d'environnement que ces gens défendent, ils n'auront aucune façon de bloquer tout cela, ils n'auront aucune façon de dire leur façon de penser et ils n'ont aucune façon de s'assurer que le ministère de l'Environnement et le ministre de l'Environnement vont les écouter et vont réagir à leur propos. J'aimerais que vous me donniez une réponse à cela.

M. Ouellette: La question est longue. J'ai eu une certaine difficulté à trouver le fil conducteur de votre question. Vous semblez mettre en doute notre bonne foi en ce qui a trait aux groupes qui sont soucieux de la protection de l'environnement, et vous semblez dire: Pourquoi ne pas attendre que toutes les lois soient adoptées, que tous les règlements soient adoptés également avant de faire quoi que ce soit? Je vous rappellerai, si vous faisiez allusion tout à l'heure au groupe de la fédération, la FAPEL que la FAPEL travaille dans le paysage depuis de nombreuses années et qu'elle travaille à partir de guides qu'elle s'est elle-même bâtis en collaboration avec une direction du ministère de l'Environnement. C'est donc dire qu'il y a des choses qui existent puisqu'il y a des gens qui travaillent à partir de ces guides-là. Les guides qu'on va rendre publics aujourd'hui ont été bâtis de toutes pièces à partir de ce que le ministère de l'Environnement a déjà, de ce qu'utilise la FAPEL, par exemple, pour effectuer ses travaux depuis une vingtaine d'années et vont

être rendus publics pour fins de modifications, s'il y a lieu. Nous sommes au mois de mars et les travaux prévus dans le cadre du programme Berges - neuves ne peuvent guère commencer avant le mois de juin, ce qui laisse un délai important pour recevoir les commentaires de tous les gens intéressés par ces guides et pour qu'on les modifie à la satisfaction de la protection de l'environnement et de la faune. Donc, il n'y a rien là, les guides sont ici, ils ne sont pas imprimés en version finale. Ils vont être remis aux groupes intéressés. Si des modifications devaient être apportées, nous en tiendrons compte, bien sûr, et nous le ferons à la lumière des commentaires qui nous parviendront des groupes. Je ne sais pas si cela répond à votre question.

M. Saintonge: Cela répond en partie à ma question, mais il n'y a pas de garantie là-dessus.

M. Ouellette: Bien, ma parole...

M. Saintonge: Je vous dis simplement... Vous avez votre droit de parole, mais je vous dis que c'est mettre la charrue avant les boeufs. C'est ça que je veux dire, dans le sens que vous garantissez que toutes les lois... Je ne vous demande pas toutes les lois, vous parlez d'un encadrement, d'une loi...

M. Ouellette: Est-ce que la FAPEL...

M. Saintonge:... d'encadrement qui devrait même être appelée au printemps, ou quoi que ce soit que vous mentionnez qui va être déposé. Dans le cadre d'un projet de loi, c'est étudié. Vous avez des gens qui viennent donner leur point de vue, vous avez une réglementation qui peut s'appliquer. Les gens peuvent réagir à la réglementation. Actuellement, vous me dites: On va émettre des guides techniques. Ce que je ne comprends pas, c'est que les guides techniques vont arriver quand? Ce n'est pas public, ça va être public peut-être la semaine prochaine ou dans deux semaines. On est rendu au mois de mars, on va être rendu au moins d'avril. Les travaux vont commencer à se faire. Vous parlez du mois de mai; c'est deux mois, ça. En deux mois, les gens devront réagir, vous inciter à modifier des guides techniques sur certains points pour que cela soit en accord avec des normes. C'est ça qu'il y a.

Ce sur quoi je m'interroge, c'est qu'on a dit tantôt que, sur certains points où il y a des politiques actuellement, il y a des lois et des règlements de l'Environnement qui doivent être appliqués. Ces règlements ne sont pas appliqués, on a des cas. On nous dit qu'à Longueuil... On a parlé tantôt des trois kilomètres entre Roland-Therrien et le pont- tunnel. Je pense que ce que M. Bourbeau disait tantôt, le remblayage dont il se plaignait, ce n'était pas ce qu'il y avait lieu sur cette partie, c'était avant cela. Ce n'était pas sur la partie des trois kilomètres éventuels. Il parlait de remblayage avant cela. Donc, c'est en contravention des normes actuelles du ministère, je pense.

On parle de déversement à Chambly, de neige, par exemple, dans le fleuve. Mon problème, c'est que, vis-à-vis des interventions de ce genre, il n'y a rien qui permet aux associations de faire en sorte que cela cesse. Comment est-ce qu'on fait pour arrêter cela? Comment est-ce qu'on fait pour bloquer cela...

M. Ouellette: Je regrette...

M. Saintonge:... au niveau des interventions du ministère? Donc, la réglementation actuelle, la loi, a des normes. On dit que cela manque de dents. On vous demande, au niveau des associations, autant la Fédération québécoise de la faune de la rive sud que la fédération comme telle, de faire en sorte qu'une loi cadre vienne assurer la protection des habitats fauniques ou d'autres domaines au niveau des interventions qui sont possibles par des gens dans le milieu. Vous nous dites: Les normes techniques vont régler, vont protéger cela. Je n'y crois pas nécessairement.

M. Ouellette: Mais pourquoi?

M. Saintonge: De quelle façon allez-vous faire en sorte que vos normes techniques soient appliquées, soient respectées? Vous avez la réglementation actuelle et ce n'est pas respecté.

M. Ouellette: Ce que vous êtes en train de dire, finalement, si je voulais charrier le moindrement, dans le sens où vous le faites, c'est que tout ce qui a été fait dans le passé par la FAPEL a été fait de façon toute croche parce qu'il n'y avait pas de loi, qu'il n'y avait pas de règlement. Au contraire, la FAPEL s'est bâtie, avec l'aide du ministère de l'Environnement, des guides techniques et elle les a scrupuleusement respectés, ces guides techniques. Aujourd'hui, on peut profiter de son expérience pour bâtir des guides techniques encore plus poussés et mettre en place une loi générale qui tiendra compte de chacun des éléments qui ont été utilisés par ceux qui ont fait des travaux positifs dans le passé. Je ne vois pas où est votre inquiétude à ce niveau-là.

Maintenant, vous me parlez de neige usée. Vous dites: II n'y a pas de loi, il n'y a pas de règlement. C'est vrai. Il ne faut pas prétendre qu'en cinq ans on pouvait tout régler, tout faire le travail qui n'a pas été fait entre 1960, par exemple, ou même 1940,

et 1976; il fallait faire du rattrapage et nous sommes en train de l'effectuer ce rattrapage. Il y a des pas qui ont été faits dans différentes directions, par différents ministères. Aujourd'hui, nous sommes à l'étape où il faut coordonner le travail qui a été fait ici et là pour se doter d'une politique globale qui tiendra compte de chacun des éléments. Nous aurons l'avantage de profiter des expériences passées pour en faire une cueillette sélective, si vous me permettez l'expression, et les regrouper dans un tout cohérent qui impliquera l'obligation, désormais, pour tous les intervenants, qu'ils soient municipal, gouvernemental ou privé, que chacun de ces groupes ait à respecter des normes acceptées de tous.

Moi, je vous dis que, d'un côté, on est en train de compléter, au comité interministériel, cette politique globale, mais ça n'interdit pas de faire des travaux de correction ou d'amélioration. Planter un arbre, il n'y a pas de mystère là-dedans. Il suffit de planter le bon arbre et de la bonne manière. Il n'est pas nécessaire d'avoir une loi pour le faire, ça se fait depuis des décennies. La FAPEL, entre autres, le fait et, à ma connaissance, le fait très bien, parce que son action repose sur l'expérience et sur la consultation des groupes ou des entreprises spécialisées dans le domaine. C'est justement à cette entreprise que nous nous sommes adressés, pour faire élaborer des guides détaillés qui sont tout à fait cohérents avec les guides qu'ont suivis les différents intervenants dans le passé et dont l'expérience a été heureuse.

Le Président (M. Marquis): Nous avons toujours nos invités qui sont là. M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Je demanderais à M. Bourbeau s'il peut nous dire sa réaction, si vous êtes satisfait des normes techniques que le ministère pourra émettre éventuellement, qu'on ne connaît pas actuellement, qui vont arriver un jour. On ne sait pas sur quoi cela va être basé.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Les guides techniques, par le passé, cela nous a prouvé que ça valait ce que ça valait. Cela dépend de la pince qu'il y a en arrière. Mais si c'est couvert par une loi, si vous avez, par exemple, un règlement municipal qui est renforcé par une loi, cela va encore mieux. Si vous avez un guide technique qui n'a pas de pénalité et qui n'arrête rien, c'est qu'on le fait comme ça. Si on ne respecte pas ça, il est fait, c'est fait.

Si on dit qu'il n'a pas de dents, la MRC de Champlain, dans le rapport d'étude d'impact de la ville de Longueuil, interdit toute modification en milieu riverain à moins de dix mètres des hautes eaux. Mais dans le rapport d'impact de la ville de Longueuil commandé à MENVIQ, c'est mentionné là-dedans que, sur ce point, ils ne se prononcent pas. La ville de Longueuil est en train de faire amender, a fait une demande à la MRC de Champlain d'amender la loi ou la réglementation de la MRC de Champlain pour lui permettre de faire une chose. Alors, quand ils présentent leurs projets, qu'il y a de la publicité et des imprimés... Si c'est faux, d'après ce que le ministre nous dit, qu'il n'y a pas eu d'entente et que ça va passer dans le fleuve entre Roland-Therrien, pourquoi de la publicité? Alors, l'assainissement des eaux sur la rive sud, ce n'est pas la ville de Longueuil, je ne pense pas, qui paie ça.

M. Ouellette: Ce n'est pas le gouvernement non plus.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): L'assainissement des eaux, c'est qui? En tout cas, il y a quelqu'un qui paie pour ça et on dit que ça va passer là, que cela va passer en berge. Si on prend Chambly, on a une copie de la réglementation de la MRC de Richelieu qui défend de déverser de la neige. On a reçu un accusé de réception de votre bureau, mais on n'a pas encore eu de réponse depuis le 15 janvier. Vous dites qu'il y a un protocole d'entente signé avec Environnement Québec. Dans le protocole, c'est mentionné qu'actuellement, jusqu'à preuve du contraire, ça va passer sur Marie-Victorin. Est-ce qu'il est possible, légalement, de se procurer une copie de ce protocole d'entente?

M. OueUette: Sans doute, oui, c'est disponible pour tout le public.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Vous avez notre adresse, j'aimerais qu'on nous en envoie.

Maintenant, ce qu'on veut, nous autres, M. le ministre ou messieurs, c'est quelque chose qui se tienne. Si on a une loi, tout le monde y est astreint. On est astreint à cette loi, sans que ce soient des enchaînements. Il y a toujours des modifications qui peuvent être apportées, il y a des réglementations. Mais, comme on s'en va là, il y a des lois existantes actuellement et Longueuil remblaie. Il y a d'autres villes qui le font. On pourrait se promener à la longueur de la province. Cela se fait continuellement, du remblaiement et de la destruction systématique. On appelle ça du grignotage pouce par pouce. Mais il y a des impacts là-dessus.

Quand Longueuil va avoir fini de rogner dans le fleuve, l'eau va refouler en haut. L'argent dépensé pour le projet Archipel de la rade de La Prairie, vous allez être obligés de remonter le mur de soutènement qu'il y

aura là, parce que l'eau va avoir monté. S'il y a un barrage hydroélectrique qui se bâtit dans les rapides de Lachine, il n'y aura plus de rapides. Je suis venu au monde è côté de ça. L'eau va refouler et elle va entrer sur la rue Saint-Joseph, è Lachine. On va faire des murs de ciment partout. C'est là que ça nous inquiète.

Quand est-ce que ça va arrêter, cet empiétement-là? Il faut toujours aller dans le fleuve. Il y a du terrain qui se perd dans la province de Québec. Il y en a du terrain, mais on veut aller jouer dans l'eau. Si on veut tous aller jouer dans l'eau, la ville de Longueuil va faire quelque chose de grandiose. Les six tuyaux qui déversent leurs déchets usés - en tout cas, les égouts dans le fleuve - il n'y en aura plus en 1992. Mais, dans le rapport d'impact, on dit aussi que le tuyau qui va partir de la route 132 et qui va aller passer dans le lit du fleuve pour rejoindre l'île Charron, il est aussi mentionné que cette terre-là est tellement polluée qu'on ne pourra pas l'utiliser ailleurs. Mais le pourcentage de pollution causée par le remblayage, dans le passé, de la ville de Longueuil jusqu'à récemment, vous allez voir que les mêmes produits chimiques qui sont dans le remblayage, parce que le remblayage qu'il y a là vient d'une partie de l'ancien remblayage, se retrouvent dans le lit du fleuve; il y a ces mêmes produits chimiques, cette même pollution que la ville de Longueuil a toujours faite. (12 h 15)

Je vous le répète encore. Ce n'est pas au projet d'ensemble de la ville de Longueuil qu'on en veut, mais à une partie. C'est ce qu'elle va chercher dans le fleuve. Si on peut qualifier cette action quand on a à coeur notre patrimoine c'est un vol qu'elle fait dans le fleuve. Elle vole la province et les citoyens de la province.

M. Ouellette: Je pense qu'il faut corriger des choses. Je reviens encore à la charge pour vous dire que vous présumez et vous avez même affirmé - si j'avais le texte, je vous le lirais - que la ville de Longueuil remblaie. La ville de Longueuil ne remblaie pas, elle présente un projet de remblayage. Vous dites: On a besoin d'une loi pour contrôler cela, mais la loi, nous l'avons; c'est la Loi sur la qualité de l'environnement. Nous avons un règlement spécifique qui découle de cette loi et qui s'appelle le règlement sur les études d'impact. Nous l'avons. C'est très exactement et cette loi et ce règlement que nous appliquons présentement en disant à Longueuil: Avant de vous autoriser ou de refuser vos remblayages, vous allez vous soumettre à la loi qui exige une étude d'impact qui pourra faire l'objet d'audiences publiques. J'ai moi-même décrété ces audiences publiques pour permettre aux gens de venir se prononcer sur le projet de la ville de Longueuil, en analyser le contenu, faire également l'analyse des retombées positives et négatives et le Bureau des audiences publiques va devoir me faire rapport sur à la fois l'étude d'impact, les mesures de mitigation et la position des citoyens individuels ou en groupes qui se prononceront lors de ces audiences.

Donc, il ne faut pas prendre avis que nécessairement cela va être autorisé; cela peut aussi être refusé et nous avons la loi et les dents qu'il faut pour le refuser, s'il faut le refuser. Donc, de ce côté-là, il est bien attaché, il n'y a aucun problème. Ensuite, je pense que vous confondez - je ne voudrais pas entrer dans le contenu, ce n'est pas tout à fait de mes affaires - entre du dragage et du remblaiement; ce n'est pas la même chose. C'est sûr que, si vous me parlez d'une conduite qui va devoir partir de la terre ferme, mais atterrir, si vous me permettez l'expression, sur l'île Charron, il y aura vraisemblablement du dragage. Mais cela, l'étude d'impact doit en tenir compte et doit nous faire connaître toutes les données positives et négatives de ces travaux et les mesures de mitigation.

Sachez qu'il n'y a rien d'acquis pour la ville de Longueuil. Quant à la publicité dont vous parlez, ce n'est pas le ministère de l'Environnement ni son volet assainissement des eaux qui en est l'auteur; j'imagine que ce doit être la régie intermunicipale qui regroupe les sept municipalités qui font le projet ou la ville de Longueuil elle-même, puisque cela touche uniquement, je pense, le volet des trois kilomètres et demi, et c'est la responsabilité de la ville de Longueuil.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Cela touche le programme d'ensemble, M. le ministre. Il y a une brochure qui a été distribuée la semaine dernière au Salon québécois des techniques...

M. Ouellette: C'est ni le gouvernement ni l'Environnement. C'est la ville de Longueuil

M. Bourbeau (Jean-Jacques):... de l'eau et on voit... En tout cas, M. le. ministre, si vous le permettez, je voudrais clarifier une situation. On est inquiet sur deux points: la partie des trois kilomètres qui va probablement être faite et l'autre partie. Vous avez une photo du remblayage qui a été prise le 22 février 1985, cela, c'est concret. Il y a quelqu'un qui est menteur là-dedans, ceux qui vous ont dit que la ville de Longueuil ne faisait pas de remblayage ou moi qui ai été prendre la photo sur les lieux. Il y en a un des deux qui est menteur, ou il y en a un des deux qui s'est trompé de place.

M. Ouellette: Je ne veux pas mettre en doute...

M. Bourbeau (Jean-Jacques): S'ils ont regardé sur la terre ferme, il y avait cela prêt à être jeté dans le fleuve, juste sur le bord, à environ 50 pieds, et il y a la partie que vous avez là qui a été jetée dans le fleuve le vendredi 22 février 1985. Mais la partie qui est entre le pont-tunnel Louis-Hippolyte-Lafontaine et Roland-Therrien, il n'y a rien de fait encore, juste des sondages, et c'est cette partie-là qui nous inquiète. Les deux endroits nous inquiètent: le vieux remblayage qui continue et le nouveau qui va se faire.

M. Ouellette: Sur le remblayage, je ne veux pas mettre votre parole en doute, d'autant plus que vous avez une photo éloquente, mais la photo ne me dit pas si le sol déplacé l'a été en milieu hydrique. Nos inspecteurs vont aller sur les lieux pour vérifier cela. Je dois vous avouer que nous n'avons reçu aucune plainte à ce sujet jusqu'à maintenant. Vous êtes les premiers à m'en parler. On va faire examiner les lieux pour voir s'il y a eu remblayage en milieu hydrique, évidemment.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Dans votre ministère, est-ce qu'il y a une réglementation qui défend le remblayage à moins de dix mètres des hautes eaux?

M. Ouellette: Les dix mètres des hautes eaux, je ne saurais vous le dire.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): C'est dans la MRC de Champlain. Il y a une réglementation à la MRC de Champlain. La MRC de Champlain a certainement une réglementation car, dans l'étude d'impact, il est mentionné qu'elle va la faire modifier pour que Longueuil puisse le faire légalement.

M. Ouellette: II y a le règlement de contrôle intérimaire de la ville de Longueuil qui peut s'opposer à cela. On va le vérifier.

Une voix: La MRC de Champlain.

M. Ouellette: La MRC de Champlain plutôt, qui va pouvoir vérifier cela. On va aller le vérifier pour voir s'ils sont allés en contradiction avec les propres règlements de la MRC et on posera les gestes qui s'imposent s'il y a eu une violation de ce règlement.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Parce que le remblaiement, dans ce secteur, n'a jamais cessé. Quand on se sert de Trizec, qu'on a un dépôt de neige usée et, en même temps, qu'on oublie quelques camions encombrants qu'il faudrait aller mener ailleurs, on pousse la neige dans le fleuve et avec elle, on pousse des tonnes de terre. Si les travaux de Longueuil avaient commencé l'automne passé, on aurait de belles surprises au printemps. On aurait toutes sortes de choses.

Notre intervention, M. le ministre, c'est pour vous demander - la commission - de vous pencher sur une loi de la protection de la faune, une loi qui va encadrer cela. Vous pouvez avoir la loi sur l'environnement qui peut être très bonne, mais on veut, nous, une loi sur la protection des habitats fauniques. Si votre loi ou vos guides techniques protègent le littoral, qu'on inclue le remblayage parce qu'il y en a. À part cela, ce qui est curieux, je vais vous relater un petit fait. En 1974, au Holiday Inn de Longueuil, le maire de Longueuil du temps, M. Robidas, vantait l'essor que sa ville prenait, cela s'étendait, Longueuil a grossi et ce n'est pas fini. Il nous a dit, au congrès, en vantant sa ville: Prenez ici, on s'étend; avant, on pêchait et on chassait ici. Bien, on se le rappelle. Ils n'ont jamais arrêté de voler du territoire dans le fleuve. Ils n'ont jamais arrêté de grignoter et d'empiéter. C'est commode le métro à Longueuil, je n'ai pas besoin de traverser à Montréal avec ma camionnette, mais le métro est bâti dans le fleuve. Le port de mer, c'est bâti dans le fleuve. Je le sais, j'ai déjà fait du "clink" à Longueuil, dans l'armée. Le camp militaire, dans ce temps, était à place Longueuil et c'était le bord de l'eau. C'est cela qu'on veut arrêter, c'est cela qu'on veut empêcher. Dans le bout de Longueuil, dans la partie où. Longueuil va faire ses travaux, il y a 28 espèces de poissons et une vingtaine d'espèces d'oiseaux, des sauvagines qui vont là. Si on enlève cette place... Si vous remarquez, dans le volume I, numéro 1 de Québec Chasse et Pêche, vous allez voir qu'en 1972 ou 1973, dans une photographie qui a été prise dans ce temps, il y avait beaucoup de goélands à l'île Verte, mais ils n'y vont plus maintenant. Ils ne mangent plus dans ce coin, c'est pollué. Ils vont manger sur les terrains chez McDonald. Ils vont manger les frites qu'il y a là.

C'est peut-être un exemple comique, mais c'est la façon dont on le voit. Il n'y a plus de goélands qui mangent dans le fleuve, dans ce bout. Il n'y a plus de goélands qui suivent les bateaux; c'est pollué. Comme on dit toujours, dans le bassin de Chambly, je vais là, je ne sais pas nager, je ne mets jamais de veste de sauvetage. Quand je vais là, je ne me noierai pas, je vais m'empoisonner.

M. Saintonge: M. Bourbeau, j'aurais un point à vous demander. Dans votre mémoire, vous mentionnez que le groupe de travail - il s'agit de la rédaction d'un document du MLCP sur la conservation des habitats

fauniques, c'est à la page 4 de votre mémoire - n'hésite pas à affirmer - et c'est la citation - que la nécessité d'agir est d'autant plus pressante que les diverses lois et les règlements actuellement en vigueur au Québec ne suffisent plus à assurer une protection adéquate à la faune. Donc, on constate cela. C'est une constation que vous dégagez, d'après ce que vous nous avez mentionné. Le ministre nous dit qu'avec la loi 6 on va donner la possibilité aux municipalités de participer à certains travaux, d'être les maîtres d'oeuvre de certains travaux. Est-ce que les normes techniques que le ministre promet de mettre de l'avant au niveau de la réalisation de ces travaux vous satisferaient au lieu d'une loi ou d'un règlement? Est-ce que les normes techniques, pour vous, cela va être satisfaisant?

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Les guides techniques ne nous ont rien donné dans le passé. Il y a toujours eu des gars - des fignoleurs - qui ont passé à travers cela et qui ont fait ce qu'ils ont voulu dans la majorité des cas. Il n'y a que les peureux qui ont obéi à cela, mais une loi, c'est tout le monde qui doit s'y soumettre, c'est tous les citoyens qui doivent s'y soumettre. S'il y a un guide technique pour une municipalité, cela ne veut pas dire qu'un citoyen qui a un terrain en bordure ne va pas se mettre à vidanger; il va donner quelques piastres au maire et va lui payer un "party". Quand c'est une loi, dans ce cas, les deux sont en faute: celui qui accepte les pots-de-vin et celui qui les donne, c'est cela.

M. Saintonge: J'ai une autre question. Est-ce que, à votre connaissance, les municipalités, actuellement, au niveau du respect des normes de l'environnement, au niveau de la protection de la faune, si l'on veut, ont certains pourvoira coercitifs qu'elles peuvent exercer au niveau des lois actuelles: l'environnement, loisir, chassse et pêche, le domaine municipal ou autres?

M. Bourbeau (Jean-Jacques): II y a beaucoup de villes qui ont adopté des réglementations ou des lois dans ce sens; des règlements, parce qu'une municipalité ne peut pas adopter une loi, il n'y a que le gouvernement qui le peut. Elles ont des réglementations et elles y voient. La ville de Saint-Hyacinthe a adopté une loi-cadre.

Une voix: On a été obligé d'y voir par en arrière.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Oui, par en arrière. La ville de Saint-Hyacinthe a adopté un projet de réglementation municipale relatif aux rives et littorals des lacs et cours d'eau; elle a adopté cela.

M. Marchessault: Elle a adopté cela, mais on est souvent obligé d'être encore les gardiens pour lui rappeler qu'elle a adopté cela. Mardi dernier, j'assistais à la première réunion du programme préliminaire d'aménagement des MRC des Mascoutains et seule la ville de Saint-Hyacinthe avait adopté cela. Donc, toutes les autres petites municipalités... Je remercie M. le ministre de nous mentionner que c'est bien heureux qu'on l'aide à être les anges gardiens, mais on ne peut pas être partout. Où il y a des associations, c'est dans les villes moyennement populeuses, mais, dans les campagnes ou ailleurs, les petites municipalités... Je vais prendre encore ma région. Il y a 21 ou 26 municipalités dans la MRC des Mascoutains. Donc, il y a une organisation de chasse et de pêche qui est à Saint-Hyacinthe et, pour toutes les autres, il n'y a rien pour les surveiller. Je veux arrêter là. Si, dans votre projet de loi, c'était écrit, comme c'était défini en 1982, que le principal effet négatif du remblayage, c'est qu'il détruit sans retour, s'il est dit dans la loi qu'il n'y a pas de remblayage dans les terrains humides ou dans le milieu riverain, personne ne pourra jouer là-dedans. C'est cela que vous ne mettez pas dans la loi. Vous mettez beaucoup de choses et, comme nous sommes très peu connaissants dans ce domaine, on dit: Cela semble satisfaisant. C'est après qu'on va se rendre compte que d'autres personnes diront: Cela veut dire ce que ça veut dire. Dans la loi, si on dit qu'on ne fait pas de remblayage dans le milieu riverain, c'est tout le monde qui le respecte, du simple citoyen à l'industrie. C'est cela qui était prévu avant.

M. Ouellette: Si vous me permettez, je voudrais répondre. Vous avez l'air de dire que rien ne se fait. Premièrement, si des municipalités ont adopté le règlement dont vous parlez, c'est à la demande du ministère de l'Environnement. On est bien conscient qu'on doit, nous aussi, décentraliser au moins la préoccupation environnementale puisqu'on ne pourra jamais contrôler cela d'un seul immeuble, à travers le Québec. On met les MRC à contribution et on leur a demandé d'adopter cette réglementation, justement, pour que ce soit respecté dans le milieu.

Deuxièmement, un règlement qui dirait: Désormais, toute forme de remblayage est interdite sur le territoire du Québec, ce serait un joyeux carcan qui ferait en sorte qu'on ne pourrait à peu près plus rien faire, même dans des circonstances où il est souhaitable, par exemple, d'apporter des corrections aux actions passées qui ont été négatives. On ne peut pas avoir un règlement ou une loi qui serait aussi catégorique que cela. Il faut laisser la place à l'évaluation cas par cas, tout en se gardant une poignée très ferme. Nous avons déjà cette poignée

qui nous permet d'interdire des travaux d'une certaine envergure et même de petite envergure en termes de remblayage; nous l'avons déjà.

D'ailleurs, vous demandez d'avoir accès au programme Berges neuves pour faire des travaux en milieu hydrique que vous jugez positifs et qui vont améliorer la condition de la faune. Le programme vient vous dire: Oui, on va marcher dans votre sens. Ce sont quand même des travaux en milieu hydrique qui sont valables et, si la loi disait: Non, c'est interdit, on n'aurait aucun moyen de vous autoriser à faire cela et on perdrait l'occasion d'améliorer la situation. Il y aurait peut-être un dernier point...

Le Président (M. Marquis): Le temps est fini, M. le ministre.

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Trente secondes...

Le Président (M. Marquis): Trente secondes, pour conclure. (12 h 3Q)

M. Bourbeau (Jean-Jacques): Messieurs de la commission, nous sommes d'autant plus inquiets, dans les deux régionales 6 sud et 6 nord, que, dans notre territoire, nous avons 50% des terres inondables et 60% des utilisateurs de la faune. Nous n'avons pas que des joueurs de pétanque ou des cyclistes, nous avons toutes sortes de gens. Merci.

M. Marchessault: Merci.

Le Président (M. Marquis): Merci, MM. Bourbeau et Marchessault.

J'inviterais immédiatement, du sud vers le nord, la Fédération québécoise de la faune, région 6 nord, à se présenter, s'il vous plaît! Compte tenu de l'horaire, il va y avoir une partie de votre exposé, peut-être un début d'échange d'opinions avant l'heure du dîner, mais vous devrez revenir en après-midi, après la période des questions de l'Assemblée nationale, si la chose vous est possible.

Je pense que c'est M. Filiatreault qui est le président. Si vous voulez présenter les gens qui vous accompagnent, s'il vous plaît!

Fédération québécoise de la faune, région 6 nord

M. Filiatreault (André): Je suis accompagné, à ma gauche, du vice-président de la régionale 6 nord, M. Roger Provost, qui est aussi président de l'Association plein air Saint-Michel de Saint-Michel-des-Saints; à ma droite, M. Michel Lapointe, qui est trésorier de la régionale; il demeure à Laprairie; moi-même, André Filiatreault, je suis président de la régionale, vice-secrétaire-trésorier à l'Association plein air

Saint-Michel.

Bonjour, messieurs, mesdames. M. le Président de la commission, MM, les membres, MM. les députés du gouvernement et de l'Opposition, nous, de la régionale 6 nord Montréal-Laurentides-Lanaudière de la Fédération québécoise de la faune, sommes très heureux de pouvoir, aujourd'hui, émettre nos commentaires sur le projet de loi 6, Loi modifiant diverses dispositions législatives pour favoriser la mise en valeur du milieu aquatique. Nous remercions la commission de l'aménagement et des équipements d'avoir bien voulu nous recevoir.

La régionale 6 nord Montréal-Laurentides-Lanaudière est une des dix régionales appartenant à la Fédération québécoise de la faune qui regroupe les associations dont le secteur est le nord de Montréal, Laval, les Laurentides, de Brownsburg à L'Annonciation, le secteur de Lanaudière, les municipalités de Saint-Michel-des-Saints, Saint-Gabriel-de-Brandon à Repentigny. À l'intérieur de ce territoire, nous regroupons 40 associations de chasse et pêche, pour un total d'environ 35 000 membres.

Les objectifs de la régionale 6 nord et de la Fédération québécoise de la faune sont voués â la protection de la nature, de la faune terrestre, aquatique et ailée et de leurs habitats en particulier, ainsi qu'à l'utilisation rationnelle de la nature et de la faune.

Lorsque nous avons pris connaissance du projet de loi 6 par l'entremise des articles des chroniqueurs de chasse et de pêche, aussi par les articles provenant de la Fédération des associations pour la protection de l'environnement des lacs, nous avons été un peu surpris de l'ampleur des pouvoirs délégués aux municipalités du Québec sur la mise en valeur du milieu aquatique.

L'article 555. 1 dit: "Toute corporation locale peut, dans le but d'améliorer la qualité du milieu aquatique et de favoriser l'accès à ce milieu, faire, modifier ou abroger des règlements pour ordonner des travaux d'aménagement du lit, incluant les rives, et des terrains en bordure des rives des lacs et des cours d'eau municipaux ou autres situés sur son territoire et des travaux de régularisation de leur niveau. " Ce n'est pas que nous soyons contre le fait de déléguer aux municipalités des pouvoirs de réglementation, des pouvoirs d'aménagement et de restauration en milieu aquatique, mais à quel prix pour les habitats fauniques.

Mais cette délégation aux municipalités nous fait extrêmement peur, car le milieu aquatique est un écosystème en lui-même très fragile et toute manipulation, obstruction, modification, rajout peut en modifier grandement ses composantes et donner souvent un effet contraire à ce qu'on recherchait. De plus, qui va nous dire que

c'est vraiment pour améliorer la qualité du milieu aquatique? Qui va en être les juges? Ou ne serait-ce pas plutôt pour justifier des projets ou des emplois?

M. le ministre Alain Marcoux disait, lors des débats du 5 décembre 1984, à la page 1344 du Journal des débats: "Québécois et Québécoises n'acceptent plus que leur milieu naturel soit pollué, altéré et détérioré. " Un peu plus loin, il disait: "II faut comprendre, M. le Président, que les rives d'un cours d'eau constituent une composante à part entière de ce cours d'eau. Une rivière, c'est bien plus qu'un canal qui charrie de l'eau, c'est un milieu de vie à la fois complexe et intégré. Les rives et les berges de cette rivière font partie de son environnement propre et la qualité de l'une est liée à celle de l'autre. "

Alors que M. le ministre Alain Marcoux admet qu'il y a une complexité à l'aménagement des rives, des berges des rivières, des lacs et des ruisseaux tributaires municipaux ou des terres humides, il est prêt à remettre aux municipalités, qui ne possèdent pas l'expertise nécessaire à tous ces travaux, la gérance et l'ordre de priorité que se fixera, à l'intérieur de ce programme, les municipalités, sans en avoir au préalable fixé les règles de procédure et d'aménagement.

Sur l'ensemble des munipalités du Québec, combien possèdent l'expertise biologique et faunique? Les promoteurs qui se serviront du principe de la qualité et de l'accessibilité au milieu aquatique, qui les en empêchera? Que deviendront nos centaines de lacs et rivières qui sont visés par les promoteurs?

Alors que l'éducation faite, par les nombreuses associations de chasse et de pêche ainsi que de plein air aux utilisateurs de l'environnement, commence à porter fruit, il nous faut maintenant aller un peu plus loin et les sensibiliser à la protection des habitats fauniques, c'est-à-dire qu'il faut dépasser un peu le cadre de l'environnement et aller sur des points beaucoup plus spécifiques. Quand on parle d'habitats fauniques, c'est devenu une spécialisation à l'intérieur de la Loi sur l'environnement. Mais de quelle façon pourrons-nous le faire alors qu'on devra se battre contre chaque municipalité et chaque projet d'empiétement des rives, des berges, des lits des lacs, des ruisseaux et des rivières pour le principe de la qualité et de l'accessibilité du milieu aquatique; alors qu'on détruira systématiquement les habitats fauniques et qu'on modifiera le milieu aquatique pour l'adapter à l'environnement que désire l'être humain?

Donc, nettoyer les rives avant d'avoir fini la dépollution des cours d'eau, c'est un peu comme mettre la charrue à côté des boeufs pour exécuter le travail. Car nombre d'aménagements ne seront rentables qu'après la dépollution totale des cours d'eau qui ne sera pas réalisée avant plusieurs années. Donc, aménager maintenant pour laisser moisir plus tard.

Nous sommes d'accord lorsqu'on parle de nettoyer les rives, d'ensemencer des arbres aux endroits requis, de réaliser en bordure des structures de loisirs selon certains critères établis d'avance tels qu'une loi-cadre ou règlement-cadre de procédure sur les habitats fauniques pour rendre accessibles le milieu aquatique et les plans d'eau aux citoyens. Mais lorsqu'on parle d'aménager le lit, incluant les berges, les rives, nous nous opposons fortement à ce bout de loi tel qu'exprimé dans le texte du projet de loi 6.

Même si les ministres de l'Environnement et du Loisir, de la Chasse et de la Pêche nous confirment que les municipalités devront respecter les lois sur l'environnement et autres lois qui sont déjà existantes, nous sommes sceptiques. Car l'automne dernier, à la baie Lavallière près de Sorel, sur un terrain qui appartenait au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, acheté au coût de 100 000 $ et plus, qui avait été aménagé par Canard Canada illimitée au coût de 500 000 $ et plus, dont une partie avait été suventionnée, même si l'environnement était protégé par des lois, à la suite d'une ancienne entente, le ministère de l'Agriculture a effectué des travaux de dragage à l'intérieur de cette baie. Le ministère de l'Agriculture a fait effectuer des travaux d'excavation à même la baie. Donc, le ministre a fait arrêter les travaux, mais à quelque 300 pieds d'un barrage établi par Canard Canada. Ce qui nous avait coûté près du million provenant des contribuables québécois. Cela nous fait réfléchir pour l'avenir de tout autre habitat faunique au Québec.

Pour nous, la Loi sur la qualité et la protection de l'environnement est une loi générale sur la qualité de l'environnement. Cette loi protège l'environnement de façon visuelle sur la qualité, sur l'espace, sur la qualité de l'air, sur le bruit, sur la gestion des déchets et un peu sur tout ce qui peut être de qualité pour l'être humain. Mais pour nous de la Fédération québécoise de la faune, régionale 6 nord, les chasseurs et les pêcheurs, cette loi oublie encore certains points importants. Donc, pour que puisse être à jour plusieurs autres lois, il faudrait une loi-cadre sur la protection des habitats fauniques, loi qui serait de beaucoup plus spécifique que la Loi sur la qualité de l'environnement.

Cette loi sur la protection des habitats fauniques pourrait être incluse dans la Loi sur la qualité de l'environnement. Cette loi aurait aussi pour résultat de diminuer en partie la structure d'audiences publiques et

d'étude d'impact. Je dis bien "en partie" car des règles très bien définies et très spécifiques sur l'environnement et sur la protection des habitats seraient à suivre, mais il y a toujours des points à soulever.

Cette loi-cadre pourrait servir, justement, à des projets comme le projet de loi 6 et à des programmes comme Berges neuves, car la protection des habitats fauniques est primordiale et serait assurée pour l'application de toutes les autres lois, ce qui créerait des balises à observer avant d'effectuer des projets de promotion ou des travaux dans les habitats fauniques ou en milieu aquatique. Sinon, nous serons obligés, dans dix ou vingt ans, de faire ce que l'on fait actuellement avec la dépollution des eaux. On a pollué et, aujourd'hui, il faut payer le gros prix pour dépolluer. La même chose est à se reproduire avec les habitats fauniques que nous détruisons actuellement. Il faudra les reconstruire dans dix à vingt ans et à quel prix. C'est à nous d'y penser maintenant.

Je ne peux que vous citer actuellement le projet de Longueuil où le ministère de l'Environnement du Québec, selon certaines études qui ont du reste donné le feu vert à Longueuil pour une partie du projet qui permettra sur près de trois kilomètres de modifier la berge actuelle du fleuve Saint-Laurent en effectuant un remblai sur un égoût collecteur vers l'île Charron où sera située l'usine d'épuration.

À la suite de cette étude, le ministère de l'Environnement évaluait à 2% le risque que la faune soit directement affectée. De plus, je cite le maire de Longueuil qui disait: "C'est très peu si l'on considère que l'aménagement des berges constituera une nette amélioration de la qualité de la vie des Longueuilois. " Ceci est au détriment des habitats fauniques. Si on pouvait additionner, dans cette partie du fleuve tous les 1%, 2%, 5% qui ont attaqué la faune à cet endroit depuis dix ans, que nous restera-t-il demain? À quoi sert de donner la qualité d'accessibilité et la qualité de vie si nous détruisons et que nous ne pouvons donner aux citoyens la pêche qu'ils demandent?

De plus, M. le Président de la commission, messieurs les ministres, messieurs les députés, ce projet de loi vise à aider les municipalités à planifier les aménagements en loisirs de toutes sortes, même au détriment des habitats et de la faune, tels qu'aménagement de marinas, places, accès aux rivières, alors que, déjà, plusieurs sont abandonnés.

Aménager des pistes le long des cours d'eau alors que le gouvernement a déjà, dans le passé, subventionné à grands frais d'autres types de loisirs qui ont atteint des pointes d'utilisation et qui sont retombés par la suite dans une utilisation presque marginale! On ne doit pas fournir à outrance certains aménagements en sachant très bien que dans cinq ans ils seront abandonnés au détriment d'une nouvelle activité. Citons en exemple les pistes de motoneige qui ont été subventionnées il y a quelques années à grands frais; aujourd'hui, c'est rendu une marginalité. C'est à réfléchir.

Nous, de la régionale 6 nord, avons constaté, après avoir vérifié les bilans d'exploitation émis par le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche que l'activité de pêche a connu au Québec un accroissement constant au cours des dernières années et qui ira en s'accroissant avec la dépollution ce qui regroupe environ 1 300 000 adeptes de la pêche. L'accès aux plans d'eau est très important et même primordial dans certains secteurs et ne doit pas pour cela nous pénaliser en effectuant des travaux d'aménagement des rives et des lits des plans d'eau en détruisant des habitats fauniques.

L'accès aux plans d'eau ne doit pas être fait sur le dos des chasseurs et des pêcheurs mais plutôt en consultation avec eux, car la pêche est une industrie importante au Québec qui génère des fonds de plus de 500 000 000 $ en revenus indirects au gouvernement.

Dans le projet de loi 6, on parle de la possibilité pour les municipalités de la régularisation du niveau des cours d'eau sur leur territoire. Ces travaux vont-ils dépendre d'un ministère, d'une régie? Répondront-ils à un ensemble d'aménagements structurés? Toutes sortes de questions nous viennent à l'esprit. Le contrôle des eaux est un problème d'envergure que certaines municipalités ne pourront jamais régler seules. Pourquoi alors leur en donner le pouvoir? Il n'y a qu'à penser à la rivière des Outaouais et à ses tributaires qui ont plus de 300 barrages de toutes dimensions et on ne parvient pas encore à effectuer le contrôle des niveaux d'eau acceptables. Presque chaque année, le lac des Deux Montagnes en subit les inondations printanières ainsi que les rivières des Mille îles et des Prairies. (12 h 45)

Donc, pour tenter de corriger ces situations, les municipalités verront à endiguer les secteurs d'inondation et feront disparaître en grande partie les plaines d'inondation et certains marécages qui se formaient à la suite de ces inondations. Vous avez l'ensemble des ruisseaux tributaires des rivières de la plaine du Saint-Laurent, nommément les rivières Saint-François, Châteauguay, L'Assomption, qui sont continuellement dragués pour l'irrigation des terrains agricoles. Un fort pourcentage de la pollution agricole provient de ces mêmes ruisseaux et terrains qui sont tous irrigués. En plus, le fait de draguer tous ces ruisseaux tributaires, cela détruit tout un ensemble de faune, de poissons fourrages qui devraient

être la nourriture des rivières.

De plus, les berges des rivières ou ruisseaux tributaires subiront le même sort pour la régularisation des niveaux, c'est-à-dire la canalisation, par la modification de leur lit ou de leurs berges.

Ces plaines d'inondation qu'on a tendance, en cette décennie, a faire disparaître systématiquement, depuis quelques années, ce que l'on pourrait qualifier de désastre écologique pour les pêcheurs et chasseurs, ce sera multiplié par dix avec ce projet de loi.

Pour ce qui est de la régularisation des niveaux d'eau, nous croyons que de remettre cette délégation de pouvoirs aux municipalités sans émettre une loi-cadre sur la protection des habitats fauniques ou règlement-cadre qui fasse état de normes précises concernant les aménagements des rives et du littoral des lacs et cours d'eau, tant par les individus que les organismes responsables de l'aménagement d'accès publics, et qui interdise la construction domiciliaire dans les limites d'une plaine d'inondation épisodique, c'est-à-dire une véritable loi-cadre sur la protection des habitats fauniques, sera le début d'un long désastre, d'une destruction calculée, provoquée des derniers habitats fauniques qu'il nous reste dans les endroits hautement urbanisés. Et tout ceci pour façonner l'environnement aux besoins de l'être humain, au détriment de la nature et de la faune.

Considérant que le milieu aquatique est un écosystème très fragile; considérant que le fait d'effectuer tout genre de travaux dans le lit, le littoral, sur les rives des rivières, des lacs et des ruisseaux est un type de pollution; considérant que des aménagements pour l'accessibilité et la qualité du milieu aquatique ne doit en aucun temps détruire un habitat faunique; considérant que le fait de régulariser les niveaux d'eau d'un lac, d'une rivière et d'un ruisseau est une atteinte directe à l'habitat faunique en milieu aquatique; considérant que le projet de loi 6 ne spécifie pas à quelle loi devront se plier les municipalités (loi-cadre ou règlement-cadre); considérant que présentement seules certaines normes sont accessibles aux promoteurs de travaux en milieu aquatique; considérant que des normes ou directives ne sont pas une loi-cadre ou un règlement-cadre sur la protection des habitats fauniques; considérant que toute atteinte au milieu aquatique et aux habitats fauniques ne peut être défendue que par voie d'injonction selon la Loi sur la qualité de l'environnement, lorsqu'on constate des faits; considérant que cette façon de défendre les habitats fauniques n'est pas à la portée de tous et chacun et est complexe pour le citoyen ordinaire; considérant que de défendre un dossier écologique devant le Bureau d'audiences publiques sur l'environnement est très onéreux et que les associations ne possèdent pas l'expertise nécessaire pour une bonne contrepartie des dossiers présentés, nous vous demandons, M. le Président de la commission, MM. les ministre, MM. les députés, dans un premier temps, de surseoir au projet de loi 6, de discuter avec les ministères de l'Environnement et du Loisir, de la Chasse et de la Pêche pour que soit rédigée une véritable loi-cadre sur la protection des habitats fauniques. Dans un deuxième temps, par la suite, favoriser les municipalités à développer l'accessibilité aux plans d'eau et la qualité du milieu aquatique à partir de cette loi-cadre. Merci beaucoup.

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup, M. Filiatreault. M. le ministre.

M. Ouellette: Je ne reprendrai pas toute la problématique de ce mémoire parce que plusieurs réponses ont été données aux intervenants précédents. Je voudrais juste rappeler, par exemple, qu'il est demandé, dans ce mémoire, qui sera juge des travaux à être acceptés ou refusés ou modifiés. La réponse a été donnée clairement. Il y a un comité qui va étudier chacune des propositions qui vont être faites et ce comité regroupe notamment les gens du ministère de l'Environnement et ceux du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. On va retrouver à cette table justement les gens compétents qui pourront analyser cas par cas chacun des dossiers pour leur attribuer leur accord ou leur refus.

Vous dites aussi quelque part que vous allez avoir à vous battre contre les municipalités. Je vous rappelle que les municipalités vont devoir suivre le cheminement prévu au programme Berges neuves notamment, à savoir faire adopter leur projet et se le voir modifier s'il est inacceptable dans certains de ses volets.

Une autre remarque qui m'a frappé, c'est doit-on remettre aux municipalités la responsabilité du contrôle des eaux? Ce n'est pas tout à fait cela qu'on dit. On parle de barrages-seuils qui devront être construits, si jamais ils sont autorisés, dans le respect de la Loi sur la qualité de l'environnement, dans le respect de la Loi sur le régime des eaux. En somme, toute la législation existe dans ce domaine et, si un projet prend une certaine envergure, il est alors soumis au règlement sur les études d'impact de telle sorte que tous les fils sont attachés et le tout est toujours sous la gouverne, sous la poignée serrée du programme Berges neuves qui, lui, voit au financement des deux tiers de ces travaux. Donc, au lieu de laisser aller les choses comme elles vont malheureusement depuis très longtemps, c'est-à-dire que des promoteurs fassent n'importe quoi, au contraire, chacun des projets adoptés ou

acceptés dans le cadre du programme le sera avec une supervision serrée, à la fois, du ministère de l'Environnement et du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche. Ce sont là les points les plus importants.

Je veux peut-être revenir juste une seconde sur Longueuil. Vous avez tendance à confondre entre un promoteur qui présente un projet et le ministère de l'Environnement qui, lui, va avoir à analyser ce projet. Ce n'est pas tout à fait la même chose. Ce n'est pas le ministère de l'Environnement qui dit à Longueuil: Placez votre tuyau en bordure du Saint-Laurent et faites un empiétement pour améliorer vos rives. C'est Longueuil qui dit cela et Longueuil, à titre de promoteur, doit se soumettre à la loi et devra suivre la procédure prévue à la loi, une procédure qui a fait ses preuves dans le passé, d'ailleurs.

J'aurais peut-être juste une petite remarque à propos de la baie Lavallière. À plusieurs reprises, vous dites: II faut à tout prix une loi, il faut une loi et une loi c'est une garantie suprême et étanche. Remarquez que dans le cas de la baie Lavallière les travaux qui se sont faits là, à notre connaissance, se sont faits dans l'illégalité, c'est-à-dire qu'il y avait une loi les interdisant et pourtant ils ont été effectués; c'est notre point de vue actuellement. Donc, la loi n'est pas un mur de protection parfaitement étanche. Il arrive que des gens aillent contre la loi. C'est pourquoi nous, on s'est servi de la loi pour faire stopper les travaux parce qu'à notre point de vue ils étaient dans l'illégalité et, toujours à notre point de vue, si ces travaux doivent être repris, ils devront l'être après le dépôt d'une étude d'impact et audiences publiques, si demandé. La loi ce n'est quand même pas le parapluie parfaitement imperméable, il faut demeurer vigilants et c'est ce que je demandais à vos prédécesseurs à cette table ce matin. Nous avons besoin de votre collaboration pour nous avertir aussitôt que des choses qui se passent vous paraissent non conformes à la loi et aux règlements qui existent et bientôt à la loi générale qui sera déposée pour fin de discussions publiques. Je vous remercie.

M. Filiatreault: Je veux ajouter quelque chose, M. le ministre. Des grandes municipalités, quand elles font des projets, c'est toujours d'envergure, on finit par les connaître et elles doivent passer chez vous, etc. Où il y a un danger beaucoup plus important, c'est les municipalités qui sont très loin des grands centres. Elles ne font jamais des grands projets, c'est toujours très petit. Cela peut être un barrage, un bout de canalisation, c'est toujours quelque chose de très petit et elles ne prennent pas le temps de vous consulter, ou elles disent: Ce n'est même pas important de demander une subvention. Des fois ce sont celles-là qui font le plus de tort possible à la faune parce qu'elles sont dans un milieu très sensible. Si on prend tout le nord, dans ces municipalités, en règle générale, ce sont tous des bénévoles, il n'y a pas de maire à temps plein, il y a peut-être juste un inspecteur municipal et parfois il est parent avec le maire. Cela n'arrive pas souvent mais il y en a quelques-uns. Quand il y a des petits projets, c'est là que ces municipalités s'attaquent à la faune et qu'elles font beaucoup plus mal que peut-être des grands centres où cela a déjà été fait. Pour rehausser le niveau d'un lac pour contenter un ou deux messieurs sur un lac, là on peut détruire une belle frayère à truite et détruire pratiquement le lac. Les municipalités sont un peu comme des citoyens aussi, il y en a qui passent à côté des choses, elles ne connaissent pas toutes les branches et elles vont s'essayer. Moi, j'en n'ai pas peur des grands centres parce qu'il y a tellement de monde dans les grands centres qui sont avertis et qui travaillent de concert à défendre. C'est plutôt dans les petites municipalités éloignées. Je demeure dans un centre éloigné où la faune a son importance parce que c'est la richesse locale, c'est ce qui amène le tourisme, c'est ce qui amène tout le monde à vivre, à part la forêt. Donc, c'est important de sauvegarder la moindre petite affaire.

Quand vient le temps de faire une intervention, d'empêcher quelqu'un de faire quelque chose, c'est très lourd. Tu vas voir l'inspecteur municipal, il est parent avec le maire, ou sa "job" dépend du maire, en tout cas. Il faut que tu passes par la MRC qui est située à presque 100 milles de là. Si on prend Saint-Michel-des-Saints, on est obligé d'aller à Joliette. Le bonhomme a beaucoup plus de problèmes avec les municipalités environnantes de Joliette; avec la rivière L'Assomption, il est pris dans la pollution par-dessus la tête. Donc, ce qui arrive, c'est que tu es obligé de te battre, c'est dans ce sens-là que je parlais de se battre. Ce n'est pas sur des grosses affaires que cela va être dur, c'est sur des petites et souvent c'est là qu'on va devoir intervenir.

M. Ouellette: Je vous fais juste remarquer que Berges neuves va avoir ce grand mérite d'obliger même les promoteurs de petits projets à nous les soumettre s'ils veulent avoir accès au financement. Cela va nous permettre de contrôler dans le détail tous les projets dignes d'être subventionnés dans Berges neuves. À ce moment-là, les directions régionales du ministère vont devoir jeter un premier regard et ensuite une étude plus approfondie sera faite par la table de concertation incluant MLCP et

Environnement. Donc, c'est une sauvegarde additionnelle à ce niveau. Je vous remercie.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Vous dites, comme vous l'avez fait précédemment il y a quelques minutes, que dans les petites municipalités il y a des travaux qui se font, et ce sont des exemples que vous avez vécus, que vous avez pu constater par vous-même. Vos possibilités d'intervention, c'est quoi actuellement avec la Loi sur la qualité de l'environnement telle qu'elle existe et les normes qui s'appliquent en vertu de la loi?

M. Filiatreault: C'est qu'il y a toujours la possibilité de voir, comme je le disais, l'inspecteur municipal qui devrait être le premier palier mais dans une petite municipalité quand tout est de concert, que tout le monde est pratiquement parent, il y a des fois, quand même on parle à ce gars-là, il va dire: On s'en occupe. Tu repasses trois jours plus tard et les travaux sont encore à se faire ou sont finis.

M. Saintonge: Est-ce que ces travaux sont exécutés par la municipalité ou par des entreprises privées?

M. Filiatreault: Parfois, cela peut être fait par un entrepreneur, d'autres fois par la municipalité. J'ai déjà vu le maire avec son bulldozer prendre du gravier dans un ruisseau. Quand même j'aurais été lui dire qu'il n'a pas le droit de faire cela, il le faisait.

M. Saintonge: À votre connaissance, il n'y a pas de règlement municipal qui s'applique actuellement, il n'y a pas de contraintes que les municipalités peuvent imposer à quelqu'un qui fait des. travaux de ce genre?

M. Filiatreault: Si vous allez dans des petites municipalités de campagne, ils n'iront pas s'encadrer dans un paquet de règlements. Déjà, ils trouvent qu'il y en a beaucoup trop. Quand ils sont obligés de répondre aux différents paliers de gouvernement, ils trouvent cela excessivement lourd, alors ils n'iront pas s'encadrer à moins qu'ils aient un avocat ou quelqu'un qui prenne charge de la municipalité, qui est évolué et qui va vouloir s'encadrer dans des règlements. Au niveau des petites municipalités, ce n'est pas le cas, c'est surtout un entrepreneur ou quelqu'un de la place qui a un peu d'argent, qui est le maire ou qui contrôle déjà en partie les activités du village. C'est assez dur de revenir contre lui.

M. Saintonge: Vous parlez d'une loi-cadre ou d'un règlement-cadre. Ce qui veut dire, à mon point de vue, la nécessité que la municipalité soit soumise à quelque chose de précis, à des contraintes ou qu'elle ait la possibilité de mettre les gens en demeure de cesser des travaux ou de les poursuivre si on exécute des travaux qui seraient contre, si on veut, l'habitat faunique ou qui seraient dégradants pour le milieu environnemental. C'est bien cela, c'est le but que vous voulez viser avec un règlement-cadre. Cela veut dire qu'actuellement l'expérience que vous avez d'interventions dans certaines municipalités sur des cours d'eau, pas nécessairement par des municipalités mais par d'autres organismes ou par des entrepreneurs, les municipalités n'ont pas en main la possibilité d'arrêter cela. Est-ce bien cela?

M. Filiatreault: Ils l'ont peut-être la possiblité mais, dans le système des gens, ils ne le feront pas parce que la personne qui a la responsabilité est indirectement liée, soit que c'est son travail qui va en dépendre, c'est son beau-frère ou l'autre qui est le maire, un entrepreneur. J'ai vu en Gaspésie, dans une rivière à saumon, prendre du gravier à même la rivière. C'était du beau gravier, le gars ramassait cela. Le gars qui prend un voyage, tu le vois une fois, mais, la deuxième fois, on n'est pas là. Ce n'est pas tout le monde qui va le voir, il va peut-être en prendre 25 avant que cela se sache. Tu peux peut-être l'arrêter, faire une plainte, le gars ne le fera pas pendant un mois, deux mois, il va le refaire après parce que c'est une accessibilité qui ne lui coûte rien. Il n'est pas obligé de prendre un permis. Ce sont toutes des petites choses de même qui, parfois, détruisent plus que des gros projets. (13 heures)

C'est sûr que, même une loi-cadre, ça va être dur de la faire appliquer, parce que, si on regarde seulement la vitesse sur la route, il n'y a jamais personne qui la respecte, à moins qu'ils voient un char de police. Mais, déjà, s'il y en a une petite, ça donne toujours des interventions, mais, aussi, ce sont les modes d'intervention. Quand on dit: II faut faire une injonction sur certains travaux, qu'on voit qu'ils sont déjà pas mal évolués, c'est à peu près la seule façon que tu as d'arrêter, mais ce n'est pas n'importe qui qui va se lancer dans une injonction.

Cela va devenir encore restreint à un certain groupe. Cela peut être soit des fédérations ou des associations. Mais, souvent, avant qu'ils aient pris connaissance du sujet, qu'ils aient vérifié s'il y avait des permis, qu'ils aient tout vérifié, il se passe un laps de temps. Des fois, tous les travaux ont eu le temps d'être finis et tu t'aperçois qu'il n'y avait pas eu de permis.

Aujourd'hui, c'est tellement complexe d'essayer de trouver quelque chose, dans la société, que, souvent, quelqu'un profite de ça pour faire des méchants coups.

M. Saintonge: Dans d'autres mots, è votre connaissance, si vous vérifiez s'il y a un permis, ce n'est pas nécessairement un permis municipal; c'est un permis qui pourrait être émis par l'Environnement ou qui correspondrait è des normes de l'Environnement.

M. Filiatreault: II faudrait qu'ils répondent, parce qu'il y a des municipalités qui ne répondront à aucune norme, parce que, eux, ils sont tellement loin et que pour les normes, comme on dit, on peut toujours s'arranger entre voisins. Mais il y a souvent des arrangements qui coûtent cher à la faune et à la nature.

J'écoutais quelqu'un, tout à l'heure, qui disait: On peut reconstruire des frayères ou des marécages. Nous autres, on en a discuté et on ne croit pas beaucoup à ça. Dans la faune, on peut réensemencer du poisson. Cela prend des années et des années. Cela ne se fait pas dans un an. Si on avait pris le Cap Tourmente et construit des maisons, je ne crois pas - quand même on aurait aménagé un terrain à côté - que les oies y seraient allées, parce que ce sont elles qui choisissent l'emplacement; un peu comme une frayère, c'est le poisson qui la choisit.

On ne fera jamais une place et leur dire: Venez, voilà votre nouvel habitat. On vous a mis de beaux appartements, vous n'avez qu'à y aller. Ils n'iront pas, parce que c'est eux qui choisissent. Ils ne vont pas n'importe où, les poissons. Ils ont des frayères qui sont là depuis des millénaires; ça s'est toujours perpétué dans la race. Donc, je pense, essayer de se mettre dans l'optique et faire accroire au monde qu'on peut recréer... On peut peut-être en recréer une petite partie avec des années de travail, mais le refaire pour que ce soit rentable, je crois que ça va nous coûter aussi cher que la dépoltution. Des fois, c'est peut-être mieux d'y penser avant.

Le Président (M. Marquis): Comme il est 13 heures, je vais suspendre les travaux de la commission jusqu'après la période des affaires courantes. Pour votre information, cela se situerait un peu passé 16 heures, cet après-midi.

M. Tremblay: M. le Président, si nous avons terminé avec ce groupe, s'il n'y a pas d'autres intervenants, peut-être qu'on pourrait les libérer.

M. Saintonge: S'il y a des questions à poser ultérieurement, au retour, tantôt, il nous reste un peu de temps.

Le Président (M. Marquis): II reste 25 minutes.

(Suspension de la séance à 13 h 4)

(Reprise à 16 h 22)

Le Président (M. Marquis): La commission parlementaire de l'aménagement et des équipements reprend ses travaux. Avant de redonner la parole au député de Laprairie - il reste 25 minutes à l'organisme qui était avec nous avant l'ajournement de ce matin - je voudrais apporter une correction qui est la suivante: le ministre de l'Environnement ne peut être membre de la commission. Il peut donc continuer d'intervenir selon l'article 129 de nos règlements. Contrairement è ce que nous avons fait ce matin, il ne peut être membre de la commission. En conséquence, la députée de Johnson redevient membre et n'est pas remplacée pour les besoins de la séance d'aujourd'hui. M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: Merci, M. le Président. Dans votre mémoire, ce matin, quand vous avez fait vos commentaires sur le projet de loi 6, il y a une chose qui a retenu mon attention. Vous avez mentionné, entre autres, qu'avant d'en arriver à un programme pour donner l'accès aux rives, si on veut, avec le genre de travaux que Berges neuves permettrait de faire aux municipalités, il faut que l'eau soit assainie, je pense. Est-ce que c'est un problème majeur que vous avez pu constater dans les régions d'intervention de votre groupement, c'est-à-dire à la Fédération québécoise de la faune, région nord, relativement au problème de l'assainissement des eaux?

M. Filiatreault: C'est sûr qu'il y a certains aménagements que Berges neuves peut faire. S'ils se placent sur la rivière L'Assomption pour installer des endroits pour se baigner ou s'ils mettent un autre genre d'activité pour amener la pêche, que ce soit des débarcadères, etc., je crois que, si on part du village de L'Assomption en allant vers le fleuve, quand bien même on ferait n'importe quel type d'aménagement pour les dix prochaines années, il n'y aura même pas une personne qui va se présenter là. Il y a beaucoup de choses que peut faire Berges neuves, mais cela va être relié à la dépollution complète, à 100% presque, des rivières. On peut constater que, sur certaines rivières, il y a un commencement de dépollution, mais, parfois, elle ne se fait pas dans le bon sens. C'est qu'on dépollue à l'embouchure alors qu'il faudrait commencer à dépolluer à la tête des rivières. Bien souvent, à la tête des rivières, il n'y a que des petits villages, que des petites unités. Avant que les villages puissent se faire des systèmes de dépollution et avoir accès aux systèmes de dépollution, cela va prendre encore plusieurs années.

Si on regarde un peu le nord de

Montréal, comme par exemple Saint-Michel-des-Saints, avant qu'on ait une usine d'épuration cela va peut-être prendre encore quatre ou cinq ans. D'ailleurs, il n'y a même pas encore de démarches de faites avec le gouvernement. C'est quelque chose qui ne se fera pas cette année, ni l'année prochaine, ni dans l'autre année. Donc, on va continuer à polluer leur réservoir d'eau, la rivière Matawin et la rivière Saint-Maurice. Même si Trois-Rivières dépolluait à 100%, il va toujours arriver quelque chose d'en haut.

M. Saintonge: Mais, dans ce cas-là, vous parlez de dépollution? est-ce la dépollution des eaux usées au niveau des municipalités? Est-ce que vous avez pu constater également des phénomènes de pollution industrielle ou de pollution agricole majeurs dans la région qui vous concerne?

M. Filiatreault: Dans la région au nord de Montréal, il y en a plusieurs. Il y a le fleuve qui est déjà pollué à l'extrême; il y a la rivière Outaouais qui a une très grande section de polluée. Malgré qu'il y ait deux provinces qui touchent la rivière Outaouais, elle est polluée presque en entier, à partir de la source à aller jusqu'à la fin. Par exemple, il y a des usines dans l'Abitibi qui jettent leur eau - M. le ministre semble surpris - dans le Témiscaminque; à partir du lac Témiscamingue, c'est pollué. Donc, cela se fait de la source de la rivière à son embouchure. Si on prend des réservoirs comme le réservoir Taureau où on fait encore de la drave, qui est encore un réservoir de tête pour certaines rivières, il y en a encore de la pollution pour des années et tant qu'on ne corrigera pas cela, hé bien!... Qu'on veuille corriger cela, si on établit des programmes, que ce soit Berges neuves... Il y a de très belles activités dans Berges neuves. Restaurer une bonne partie des rives des rivières, c'est beau. Les restaurer, aller jusque-là, je suis d'accord, mais, quand on dit: On va se remettre à creuser dans les rivières, on va repolluer la rivière. On pourrait dire: On va l'aménager, mais on va la polluer avant de la réaménager. Déjà, on les a polluées à l'extrême. Il y a peut-être des nuances à faire, et c'est là que l'on dit que c'est important qu'il y ait une loi-cadre, pour dire que ce n'est pas n'importe qui qui creuse n'importe où, n'importe quand.

M. Saintonge: Quand vous parlez de creusage, vous faites allusion à quoi avec Berges neuves?

M. Filiatreault: Quand on dit d'aller jusque dans le lit d'une rivière, d'après moi, ce n'est pas seulement pour prendre une petite pelle, c'est d'arriver avec de la machinerie lourde. Règle générale, quand on dit d'aménager des rives ou creuser des canaux, on ne fera certainement pas cela avec des petites choses. Quand on parle de régularisation des eaux, cela peut toujours être autre chose que régulariser des rivières, mais cela peut être de régulariser le niveau d'un lac. Par exemple, si une municipalité veut avoir une qualité d'accessibilité à un lac, vous allez dire: On va aménager un barrage pour maintenir le niveau égal. Donc, sans faire exprès, des fois, on va détruire quelque chose. Ce sont toutes des choses comme celles-là. Avant de le faire, il va falloir qu'il y ait des intervenants. Comme les personnes qui vont avoir à choisir les projets de Berges neuves, il va falloir que ce soit des personnes qualifiées, autant au niveau de la faune que de l'aménagement du territoire. H ne s'agit pas de dire: On fait cela à...

M. Saintonge: À votre point de vue, si un règlement-cadre était adopté par le ministère de l'Environnement, tel que vous le souhaitez, est-ce que cela ferait en sorte que, dans un tel règlement-cadre, il y aurait nécessité d'y intégrer, si on veut, des questions de priorité au niveau de l'intervention sur les rives et les cours d'eau?

M. Filiatreault: C'est certain qu'il va falloir fixer des priorités parce que, si on veut dépolluer une berge et que la rivière est encore polluée à l'extrême, je me demande ce que cela donnerait. Il va falloir se donner des priorités et que les municipalités marchent avec ces priorités, parce qu'une priorité d'une municipalité peut être complètement différente de celle de la municipalité à côté. Cela dépend des loisirs ou des infrastructures qu'elles ont en place ou de ce qu'elles veulent se donner par la suite.

M. Saintonge: À votre point de vue, au niveau des interventions des municipalités, est-ce que je peux comprendre que vous souhaitez que ce soit coordonné non pas par une seule municipalité, mais par le ministère, dans le cadre du règlement-cadre? Est-ce cela que vous souhaitez?

M. Filiatreault: Soit le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche ou le ministère de l'Environnement. Il va falloir en venir à un règlement cadre parce qu'à force de faire disparaître des habitats fauniques, parce qu'on le fait, qu'on le veuille ou pas... Lorsqu'on parle de qualité de l'environnement pour l'être humain, on agit toujours sur le milieu. On étend nos villes; on étend nos structures, par exemple, dans le fleuve, pour pouvoir aider les bateaux; on les étend. On n'a pas le choix, il faut que cela se fasse. Qu'on construise des routes, qu'on fasse des

lignes de transmission; on le fait, mais, règle générale, on fait toujours cela au coeur de la nature et des fois dans des sites qui sont très précaires, mais qui aussi sont rentables pour la faune. Par exemple, juste aux environs de Montréal, on regarde les rapides au barrage Saint-Vincent-de-Paul où, à l'heure actuelle, on travaille. On a une belle frayère de dorés en plein milieu de Montréal où on peut sortir du doré pratiquement de sept à huit livres. Il y a une frayère d'esturgeons au pied du barrage, où il peut y avoir un esturgeon de 80 livres. Dans les rapides de Lachine, on a de la truite arc-en-ciel: le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche les a ensemencés depuis plusieurs années. Il commence è y avoir une frayère. Il y a de la truite brune d'ensemencée pratiquement à tous les ans. On a un potentiel récréatif autour de Montréal, ce n'est pas possible è penser. 11 y des espèces de poissons qu'on ne retrouve pas ailleurs dans la province. Il y a du maskinongé. Si on regarde le lac Saint-Louis, il y a une association qui, à tous les ans, donne des prix. Ce sont des poissons de 50 livres et plus des fois qui sont pris et ce sont des premiers prix à tous les ans. Ce sont des lacs, comme le lac Saint-Louis, où il y a une plaine de débordement, une plaine d'inondation et cela permet au maskinongé de se régénérer facilement. La journée où on va stabiliser les berges, on va peut-être diminuer l'espèce.

Par contre, il y a d'autres espèces qui vont peut-être prendre le dessus parce qu'en stabilisant cela va replacer leur frayère en meilleure condition. Mais, à chaque fois qu'on joue dans le milieu, on en pénalise une pour en avoir une autre. Parfois, on est obligé de le faire. Qu'est-ce qu'on veut? Le modernisme et la vie nous obligent à faire des choses, mais il faudrait que ce soit fait dans un cadre très précis et non pas laisser aux promoteurs... En tout cas, je regarde juste le Bureau des audiences publiques. Quand il y a quelque chose présenté au Bureau des audiences publiques, c'est présenté par des experts pour prouver que leur projet est bon et que l'étude d'impact n'est pas si pire, mais nous, en tant qu'organisme ou association, on n'a jamais les recours de la partie adverse. Ils ont fait une étude d'impact avec des biologistes, des ingénieurs, tout ce qu'ils veulent. Ils ont pris le temps de le faire et ils ont de l'argent. Nous, on arrive en arrière pour dire: Vous êtes en plein dans une frayère, mais c'est tout ce qu'on est capable de dire, ou alerter l'opinion publique. Parfois, c'est dur de réveiller l'opinion publique. On la réveille beaucoup trop tard.

Dans dix ans, si on a à reconstruire la faune, si on a reconstruire ce qu'on a perdu dans les habitats fauniques, cela va être beaucoup plus dur que de dépolluer, parce que, pour habituer les espèces de gibiers è s'implanter de nouveau où on les a enlevées, cela ne se fera pas aussi vite que la dépollution et cela va coûter aussi cher si ce n'est pas plus.

M. Saintonge: Est-ce qu'à votre point de vue, quand on parle... Le ministre nous mentionnait ce matin qu'il y aura des guides techniques qui vont répondre aux normes et aux critères environnementaux qui existent actuellement, qui vont respecter les normes et les critères environnementaux. Je pense que c'est un bien grand mot. J'essaie de voir, dans la réalité, si ces normes et ces critères sont satisfaisants, actuellement, ou s'il faudrait les préciser. Est-ce que vous êtes satisfaits des normes et des critères qui existent généralement, actuellement, pour faire en sorte qu'on puisse assurer la protection de la faune comme vous le désirez, ou s'il n'y aurait pas lieu de préciser davantage ces normes ou de donner des priorités dans le respect de certaines normes ou de certains critères?

M. Filiatreault: Des normes ou des directives, c'est toujours fait à la suite d'études, à la suite de ce qui se passe sur le terrain et cela évolue tout le temps. Je pense qu'établir des normes, c'est normal, mais il faut quand même mettre un plan de base et dire: II va falloir qu'on parte de là et qu'on commence. Des normes, il devrait y en avoir même en plus d'une loi, parce que des normes, cela va évoluer continuellement avec chaque étude, à chaque année, à chaque fois qu'il y a quelque chose de nouveau qui arrive. Après un nouveau type d'études, il va y avoir de nouvelles normes, de nouvelles applications, mais, si on n'a pas un plan de base, les normes valent quoi? Des normes, ce n'est pas une loi ou ce n'est pas un règlement. Si je dis à un entrepreneur: Tu auras à respecter telles normes, on dit bien: Tu auras. On accepte ton projet parce que cela, c'est d'accord. Le gars le fait et il le fait en passant un petit peu à côté des normes. On va faire quoi? C'est fait. Va-t-on le détruire? Si le gars a mis des millions là-dedans, on va dire: On va encore le tolérer un petit peu.

Je lisais un petit article qui a paru dans le Devoir, de Louis-Gilles Francoeur, où il parle du Bureau des audiences publiques et il dit que le Bureau des audiences publiques a semoncé publiquement le ministère de l'Environnement pour avoir accordé des autorisations de conformité à des études d'impact incomplètes.

Cela fait que, quand il commence à y avoir une petite largesse ou une petite ouverture, c'est un peu comme ouvrir la porte. Elle va peut-être s'ouvrir tranquillement, cela peut prendre des années, mais c'est un commencement. C'est pour

cela que cela nous fait peur un peu de dire que les municipalités vont peut-être suivre les règlements, mais s'il faut, à chaque fois, aller en audience publique, je pense que c'est alourdir toute la machine pour rien, alors que si, au départ, on partait avec des normes, un critère, parce qu'on ne peut pas les mettre tous, mais avoir des critères de base pour partir et dire: Un habitat faunique, c'est cela; la protection de l'environnement, c'est cela... Parce que je vois quand même une différence entre les deux. L'environnement, je place toujours cela en vertu de l'être humain. C'est qu'on veut se chercher une qualité de vie sur la terre et on tente de ne pas trop briser ce qu'il y a dans la nature, mais on peut détruire les habitats fauniques tout en se donnant une qualité de vie. On ne protège pas nécessairement les habitats fauniques pour avoir une qualité de vie. Si on veut faire une belle berge le long du fleuve, on fait un remblai, on met un trottoir, visuellement, cela va être très beau. Cela va donner une accessibilité de qualité A-1, mais on peut avoir beaucoup détruit.

C'est d'arriver à faire un lien entre les deux pour que cela se produise le moins souvent possible. C'est une chose qui est pratiquement impossible, mais il faudrait en arriver à cela.

M. Saintonge: Dans le fond, seriez-vous d'accord, par exemple, si on fait une intervention qui peut détruire en partie le milieu faunique en question, pour dire qu'il faut évaluer, au niveau des impacts, les avantages et les inconvénients et voir s'il y a des possibilités. Si cela devient obligatoire de faire du remblayage, il faut regarder les conséquences et regarder également si oui ou ou non il y a une possibilité de remédier, dans la plus grande mesure possible, aux inconvénients qu'on fait subir au milieu.

À ce moment, il y aurait des possibilités d'intervention parfois qui pourraient être dictées par la qualité de vie des gens, pour améliorer certains points, pour donner une plus grande qualité de vie au niveau de l'accessibilité à un lac ou à une rivière. Même si on fait une intervention au point de vue du milieu faunique ou des habitats fauniques, c'est de tenter de minimiser l'impact là-dessus.

Autrement dit, ma question est peut-être ambiguë: Est-ce que vous êtes contre toute intervention? Par exemple, le remblayage, est-ce à proscrire complètement ou si, dans certains cas, il pourrait exister des situations où le remblayage pourrait être souhaitable, même si...

M. Filiatreault: Ce serait peut-être un critère de base de dire qu'au départ c'est défendu. C'est sûr qu'il y a des exceptions. On étudiera les exceptions, mais, au départ, cela devrait être défendu. Parce que, quand un cours d'eau est là... D'abord, de l'eau, on n'en a pas a jeter par les fenêtres et la seule qui nous reste est tellement polluée, que ce soit par les pluies ou par l'industrie ou autre chose.

Dans les années cinquante, on disait: La nature, c'est vaste, elle peut tout prendre. Personne ne s'en est occupé à ce moment. Parce que si, dans ce temps, on s'en était occupé, aujourd'hui, on ne serait pas obligé de se battre pour dépolluer et cela ne coûterait peut-être pas le même prix.

Dans les habitats fauniques, c'est la même affaire. C'est qu'aujourd'hui on est prêt à dire: Pour économiser peut-être 1 000 000 $, on va passer là, mais, dans dix ans, on aura peut-être à reconstruire des habitats fauniques au coût de 1 000 000 $. Parce qu'on ne construira jamais un habitat faunique dans un an, et cela ne se fera jamais dans deux ans. Ce sont toujours des périodes échelonnées sur dix ans et plus parce qu'il faut que les poissons prennent le temps de s'adapter ou la faune ou la nature; ce n'est pa3 comme construire une maison.

Donc, c'est peut-être mieux d'y penser tout de suite et de dire: Des fois, cela peut nous coûter 1 000 000 $ de plus, mais, dans dix ans, ce ne sera peut-être plus 1 000 000 $ que cela va nous coûter, ce sera peut-être 10 000 000 $. C'est un peu comme la dépollution; il y a dix ans, combien cela nous aurrait coûté? Les salaires étaient plus bas, tout était plus bas, mais, aujourd'hui, elle nous coûte excessivement cher et, à cause de cela, on est obligé de se priver de beaucoup d'autres choses.

Le Président (M. Marquis): M. le ministre de l'Environnement.

M. Ouellette: Merci, M. le Président. Je voudrais revenir au début de l'intervention du député de Laprairie qui m'est apparue comme essayant de faire dire à nos intervenants qu'il serait préférable d'attendre la fin de l'application du programme d'assainissement des eaux avant de penser à toucher aux rives.

Au gouvernement, on aurait pu, en 1978, lorsque est venu le temps d'annoncer le programme d'assainissement des eaux, tenir le raisonnement suivant - cela rejoindrait à peu près l'opinion exprimée par le député de Laprairie - est-ce qu'on va faire l'assainissement urbain après avoir fait l'assainissement agricole? Et on ne fera l'assainissement agricole que lorsqu'on aura fait l'assainissement industriel, et on ne fera l'assainissement industriel qu'après avoir livré le combat final aux pluies acides, et on ne livrera le combat final aux pluies acides que lorsque les Américains auront décidé de faire la tâche chez eux. On aurait pu tout mettre cela en escalier, l'un se fera si l'autre est

fait et l'autre se fera si l'autre est fait, etc., de telle sorte qu'on se serait ramassé en l'an 2025 avant de commencer. Au contraire, on a pris la décision, au gouvernement, en 1978, de mener simultanément les trois combats, c'est-à-dire urbain, agricole et industriel, dans le cadre du programme d'assainissement des eaux.

Il se trouve que ce programme existe déjà depuis six ans et qu'on a investi des sommes d'argent, c'est-à-dire qu'on a rendu disponibles des sommes d'argent pour un montant égal à 77% des sommes devant être affectées à ce programme, de telle sorte que, si le programme cessait d'exister aujourd'hui et qu'on se limitait à terminer les travaux qui sont à différentes phases, déjà 77% des eaux usées municipales au Québec seraient traitées au moment où on se parle, ce qui nous rapproche sensiblement de l'Ontario. Mais, à partir de cela, est-ce qu'on va attendre que tout cela soit terminé avant de s'attaquer à une autre source de pollution qu'est, par exemple le phénomène d'érosion?

Vous êtes tous conscients que nos cours d'eau sont en partie pollués par le fait que... J'ai dit argent engagé, non pas dépensé, il y a une nuance; c'est tout enclenché, chère madame. Est-ce qu'on va attendre que tout cela soit terminé pour régler un quatrième phénomène, celui de l'érosion, qui est dû au développement agricole il y a un siècle et plus, à l'exploitation forestière, à l'urbanisation. Tout cela a fait en sorte que nos cours d'eau sont devenus très vulnérables parce qu'à la première pluie ou à la fonte des neiges, tous les produits chimiques utilisés en agriculture se retrouvent dans les cours d'eau, la terre se retrouve dans les cours d'eau aussi à cause en bonne partie du drainage agricole, etc. Alors, on est bien conscients, nous à l'Environnement, que, si l'on veut mener une lutte globale à toutes les causes de la pollution de nos cours d'eau, on doit attaquer tous les points en même temps.

Donc, le programme d'assainissement, il y en a déjà six dixièmes de faits, on est à 77% des sommes engagées; il y a une quantité assez importante des municipalités qui y ont déjà adhéré et il y a encore un nombre plus grand de municipalités qui ont été retenues au Conseil du trésor pour fins d'application du programme d'assainissement des eaux.

Dans les travaux de Berges neuves, qui se veulent le volet complémentaire au programme d'assainissement des eaux, il y a tout un volet qui s'appelle le nettoyage. Est-il nécessaire d'attendre que toutes les usines d'épuration des 900 projets prévus au Québec soient en marche pour ramasser les pneus, et vous me permettrez la vieille expression, les "springbeds", les boîtiers de télévision et toutes les saloperies qu'on retrouve sur nos rives? Vous allez me dire: Sûrement, ce n'est pas nécessaire d'attendre que l'assainissement soit terminé.

Il y a un autre volet qui s'appelle régénération des rives. Nos rives ont été déboisées et on les a laissées aller, de telle sorte que les plantes même modestes sont disparues à bien des endroits. Est-ce qu'il est nécessaire d'attendre que l'eau soit devenue du H2O pour replanter ces arbustes? Ce que fait, par exemple, la FAPEL depuis une vingtaine d'années, de toute façon. Est-il nécessaire d'attendre aussi qu'on ait tout terminé avant de planter des arbres? Des arbres, quant à moi, cela prend quelques années à pousser. Je pense que, si on en plantait dès le mois de juin prochain, en 1988 ou en 1989, à la fin de l'assainissement des eaux, ces arbres auront pris quelques années de croissance et viendront compléter le travail ou la lutte qu'on aura livrée à l'urbain, à l'agricole et à l'industriel.

Donc, ce raisonnement, je ne le prends pas parce qu'il risque de nous conduire dans des temps immémoriaux et on risque, à ce moment, que le gouvernement se fasse reprocher d'avoir attendu trop tard pour appliquer une mesure essentielle, si on veut garder véritablement nos cours d'eau, une fois qu'ils auront été nettoyés de la pollution industrielle, agricole et municipale.

Ce matin, on discutait aussi de grandes lois, de projets de loi globaux ou de règlements qui doivent être appliqués. Évidemment, la Fédération québécoise de la faune insistait beaucoup sur la protection des habitats fauniques. On rappelait que M; Chevrette s'était engagé à ce que des discussions publiques aient lieu, à ce que ses fonctionnaires préparent la législation et on semblait mettre en doute ces affirmations. Je dois vous dire que j'ai vérifié tout à l'heure avec le nouveau ministre du MLCP, M. Brassard, qui me disait que tout est prêt, que les fonctionnaires ont travaillé en collaboration avec ceux de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de l'Énergie et des Ressources et de l'Environnement, que des consultations publiques auront lieu, dès ce printemps, et qu'une loi sera vraisemblablement déposée en Chambre dans les plus brefs délais qui suivront cette consultation, pour doter le Québec d'une véritable loi sur la protection des habitats fauniques. C'est un des éléments qu'on retrouve à la table de concertation interministérielle qui visent essentiellement à cerner l'ensemble du problème et à nous donner, comme législateur, aussi bien au niveau du Québec qu'au niveau des MRC, toute la réglementation nécessaire à la sauvegarde non seulement des habitats fauniques, mais des rives, des bandes forestières, puisque l'on triendra compte nécessairement de la politique d'encadrement forestier. Et c'est à ce moment-là qu'on sera

prêt à tout mettre en marche. Je vous ferais remarquer que le programme Berges neuves va è peu près coïncider avec ce moment précis où toutes nos ficelles seront attachées et où nous pourrons dire qu'enfin nous avons la législation et la réglementation nécessaires pour protéger tout cela en même temps. (16 h 45)

M. Filiatreault: Je peux vous assurer, M. le ministre, que, si on voit le dépôt du projet de loi sur la protection des habitats fauniques, on va être très heureux. Cela va servir aussi comme cadre à tous les travaux qui vont s'effectuer par la suite, on va être très heureux et c'est ce qu'on attend depuis longtemps.

M. Ouellette: J'ai oublié, M. le Président, un élément important. Le programme Berges neuves s'inscrit en faux contre tous les travaux de dragage. Quand on parle de travaux en milieu hydrique, il ne s'agit pas de travaux de dragage, il n'est pas considéré du tout dans le programme Berges neuves. Par contre, il peut y avoir évidemment d'autres types de travaux comme ramasser des vieux pneus. Je sais qu'à un endroit sur la rivière Chaudière on a trouvé 4000 pneus d'automobiles. Je pense qu'on n'aurait pas besoin d'une étude d'impact très élaborée pour savoir si on devrait les retirer ou non de la rivière. Cela a été fait. Le programme Berges neuves permettra de tels travaux, mais il n'est pas question de permettre des dragages qui, de toute façon, doivent faire l'objet d'études d'impact.

Le Président (M. Marquis): Comme président, je veux permettre la libre expression et, avec la volubilité de mes collègues des deux côtés, ce n'est pas toujours facile. Le temps achève, mais j'avais une demande du député de Charlesbourg et du député de Laprairie. Pour autant que cela ne dégénère pas en débat des deux côtés, je vous permettrais de prendre la parole.

M. Côté: Je comprends, M. le Président, que vous vous adressez à moi au moment ou je m'apprête à prendre la parole, vous avez peur d'un débat. Cela va être la semaine prochaine. Vous allez pouvoir constater encore une fois que cela va être vrai.

Je suis heureux de constater que, dans le mémoire qui a été soumis, principalement à la page 9, on s'inquiète des habitats fauniques. J'ai frais à la mémoire le mois de décembre 1983, au moment où on a étudié article par article le projet de loi 9 qui amendait la Loi sur la conservation de la faune. Dans un effort additionnel, le ministre est arrivé, à ce moment-là - le député de Joliette, à l'époque - avec 54 amendements au projet de loi, principalement sur les habitats fauniques, sans consultation au préalable avec l'Opposition. Nous avions accepté à l'époque, considérant que c'était un pas en avant dans la protection des habitats fauniques. On avait accepté loyalement en se disant: C'est un essai et il vaut mieux avoir cela que ne rien avoir.

Cela n'a pas pris de temps pour que l'ex-ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche - vous avez sans doute frais à la mémoire ces discussions puisque vous y étiez, M. le Président - dès avril 1984, devant la FAPEL, dise que c'était nettement insuffisant et qu'il fallait en arriver à des modifications.

On peut bien entendre des intentions, mais, à ce niveau, ce n'est pas d'aujourd'hui qu'il y a des intentions. J'ai eu la chance de mettre la main sur une lettre, parce que, lorsque les gens du milieu veulent parler, ils parlent de la protection des habitats fauniques. C'est parce que c'est un débat qui a cours à l'intérieur du ministère et on connaît tout le débat qu'ont eu le ministre de l'Environnement et le ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche qui tentaient de faire le poids avec le ministre de l'Agriculture. Cela a été des combats presque perdus d'avance dans les marais de Kamouraska, dans la baie Lavallière, à Pointe-aux-Outardes.

J'ai encore frais à la mémoire une lettre que j'ai eue entre les mains, signée du ministre du Loisir, de la Chasse et de la Pêche de l'époque, et qui disait à peu près ceci. Si j'avais eu le temps d'aller dans mes dossiers, je pourrais même la porter à votre connaissance. Il constatait, dans la lettre concernant la baie Lavallière - parce que cela avait dû tirailler entre vous autres, vous avez dû vous parler un petit peu dans le casque - il constatait, première chose, qu'il y aurait au moins 3000 morts ou disparitions de rats musqués et d'autres statistiques que j'oublie. Le ministre disait à peu près ceci: Je ne comprends pas, mais, dans un ultime effort de consensus, j'accepte. Encore une fois, c'est la faune qui payait pour, parce qu'on avait des faiblards pour défendre la faune.

Aujourd'hui, lorsque vous dites dans votre mémoire: II faut que quelqu'un prenne la défense et la protection des habitats fauniques, c'est par une loi. Bien sûr que le député de Beauce-Nord tantôt s'est fait le porte-parole de ses collègues après un appel téléphonique.

Effectivement, il y a un projet de loi préliminaire qui circule dans les officines du gouvernement, mais c'est au mois de janvier qu'il est allé au ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche et les discussions sur le plan interne du ministère ne vont pas très loin. Aujourd'hui, au printemps, vous nous dites, pour rassurer tout le monde: Peut-être à l'automne, mais on sait ce qui va arriver

d'ici ce temps-là. Moi, je pense que vous êtes des gens du milieu - si le député de Chambly peut écouter - très impliqués dans la conservation de la faune. J'ai manqué les discussions de ce matin. Vous êtes impliqués dans le milieu de la faune, je pense que, sur le plan de la protection des habitats fauniques, vous avez, depuis fort longtemps, exigé une loi pour la protection des habitats fauniques.

M. Ouellette: Les demandes ont commencé sous le gouvernement Bourassa.

M. Côté: Cela fait huit ans que vous êtes là et vous n'avez rien fait. Tu as passé le bâton à d'autres; Il y en a d'autres qui vont s'en occuper. À ce niveau-là, M. Filiatreault, la nécessité pour vous, est-ce que c'est dès ce printemps ou si on reporte cela è l'automne? Bien sûr, on va repartir en consultation, alors que la fédération, l'association des biologistes et tout le monde s'est exprimé là-dessus. Dans mon esprit à moi, c'est le temps qu'on passe à une pièce législative en Chambre, très rapidement, pour la protection des habitats fauniques, parce que des consultations, on en a déjà eu. Est-ce que ce sont des consultations que vous voulez ou est-ce que c'est un projet de loi sur lequel...

M. Filiatreault: Le projet sur les habitats fauniques aurait dû être fait il y a deux ou trois ans et, même, peut-être avant ça. Quand on a commencé à parler de dépollution, ça aurait dû être global. Cela veut dire: On s'en vient de front. Comme disait M. Ouellette: On ne pouvait pas faire des escaliers et il ne fallait pas en faire, non plus. Là-dessus, il avait raison. Mais il fallait être global partout et foncer partout.

Là, il y a peut-être une petite lacune, parce qu'il y a eu des choix ou des priorités qui ont été faites. Ce n'est pas nous qui avons fait les choix, ni les priorités.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Laprairie.

M. Saintonge: M. le Président, on a des invités à entendre. La seule remarque que je veux donner, c'est qu'on va en arriver à étudier, article par article, le projet de loi. Je suis très content que le ministre de l'Environnement soit présent pour l'audition de nos invités. Mais, j'aurais des questions à poser au ministre. J'en ai posé en Chambre lors du débat sur l'adoption de principe du projet de loi et je n'ai pas eu de réponse. J'aurais bien aimé avoir des réponses et je ne veux pas le faire pour prendre le temps de nos intervenants. Mais, qu'il y ait juste un exemple et, la réponse, je ne la veux pas tout de suite.

On parle d'un programme d'assai- nissement des eaux de l'ordre de 4 700 000 000 $. On a dit tantôt que c'était 77% de conventions signées. On a fait des allusions à 3 700 000 000 $ de conventions signées. Il faut payer 77% des travaux qui pourraient être réalisés. Si on continue le cheminement, on arriverait à 77% de l'assainissement des eaux qui serait réalisé.

Ma question va être: Dans combien de temps, ça? Actuellement, les données que vous nous avez transmises, que j'ai retrouvées dans vos coupures de presse au niveau de Berges neuves nous disent qu'il y a 1 100 000 000 $ de travaux réalisés. Mais quand je regarde aussi toute la projection de ça, les travaux qui ont été réalisés, c'est combien? Cela s'adresse où et est-ce que c'est vraiment de la dépollution? On arrivera, en tout cas, à le clarifier.

M. Ouellette: On peut vous donner les réponses.

M. Saintonge: D'accord, les réponses, on les aura, j'espère, simplement, au niveau de l'étude article par article; avant de les adopter article par article, on pourra s'interroger, au lieu de prendre le temps de nos invités qui doivent nous donner leur mémoire et qui ont des temps limités d'intervention. Je souhaite votre présence, à ce moment-là, pour qu'on ait des réponses aux questions posées et j'en aurai à vous poser.

M. Ouellette: Je peux vous donner une réponse rapide. Il y a un an, votre porte-parole en matière d'environnement demandait au gouvernement un moratoire sur le programme d'assainissement des eaux. Alors...

Le Président (M. Marquis): Merci beaucoup aux représentants de la Fédération québécoise de la faune, région 6 nord, pour leur présence et les avis qu'ils ont apportés à la commission.

M. Filiatreault: On remercie la commission.

Le Président (M. Marquis): J'inviterais maintenant les représentants de la Fédération des associations pour la protection de l'environnement des lacs à se présenter, s'il vous plaît! Selon ma liste, il y aurait M. Benoît Roy, vice-président, et Mme Louise Lepage, bénévole. Je laisse la parole au porte-parole de votre groupe.

FAPEL

M. Roy (Benoît): M. le Président, j'ai ici copie du mémoire présenté par FAPEL.

Mme Lepage (Louise): Avant de se

lancer dans le mémoire, j'aimerais, faute d'éducation probablement, connaître un petit peu ce que, M. le Président, vous avez dit tout à l'heure, concernant M. Quellette qui ne faisait pas partie de la commission. Il peut quand même répondre à nos questions?

Le Président (M. Marquis): Absolument.

Mme Lepage: D'accord, merci. Nous n'avons pas l'intention d'étudier le projet de loi article par article. On a déjà donné à M. Ouellette toute l'opinion que FAPEL avait, mais on veut quand même réitérer notre opinion devant la commission. On remercie le gouvernement d'avoir accepté de nous recevoir et de nous entendre. Je pense que c'était une nécessité et nous sommes très heureux de pouvoir être ici cet après-midi.

Alors, comme M. le président le dit, mon nom est Louise Lepage, responsable du dossier des rives et du littoral, et M. Benoît Roy, vice-président de FAPEL, m'accompagne.

Si vous me le permettez, j'aimerais prendre quelques minutes pour vous donner un petit historique pour ceux qui ne sont pas au courant de ce qu'est FAPEL et pour vous parler spécifiquement du dossier des rives.

Depuis sa fondation, FAPEL consacre une grande partie de ses énergies à la protection des rives et du littoral de nos plans d'eau. C'est d'ailleurs pour répondre aux inquiétudes de nos associations qu'a été institué en 1975, au sein du programme des lacs du ministère de l'Environnement, un programme de protection des rives ainsi qu'un programme de régénération. Ces deux programmes conçus par M. Tony LeSauteur ont été développés avec l'étroite collaboration de nos associations. Ils fonctionnent en faisant appel au bénévolat et aux convictions des citoyens pour redonner à nos rives leur caractère naturel et aux lacs et aux cours d'eau leur équilibre écologique. FAPEL célèbre cette année un double anniversaire: le dixième anniversaire de sa fondation ainsi que le dixième anniversaire du programme de régénération des rives.

Avec l'appui et la compétence des spécialistes du programme des lacs et grâce au travail de nos 650 associations, pionnières dans ce domaine, des centaines de milliers de citoyens ont radicalement transformé leur attitude face aux aménagements riverains. Les aménagements artificiels aujourd'hui ont été remplacés par des aménagements naturels. Ce matin, M. le ministre Ouellette vantait l'expertise de FAPEL. Cependant, ce vaste mouvement qui a donné naissance au seul véritable programme de protection et de renaturalisation des rives du Québec n'a jamais reçu l'appui du ministère de l'Environnement. Le premier geste de M. Ouellette, à la suite de sa nomination au ministère de l'Environnement, a été de rogner dans les budgets et dans les effectifs du programme des lacs. Le ministre de l'Environnement n'accorde toujours pas aux bénévoles de nos associations et au programme de régénération des rives, qui a fait ses preuves durant dix années, l'importance qu'ils méritent.

En plus d'avoir contribué à la mise sur pied des programmes de protection et de régénération des rives et d'avoir consacré beaucoup d'énergie à sensibiliser le gouvernement du Québec, les municipalités et les citoyens aux aménagements naturels, FAPEL et ses associations ont fait adopter un règlement pour la protection des rives et du littoral dans un grand nombre de municipalités. Soutenu par les spécialistes du programme des lacs, le mouvement a fait boule de neige de sorte qu'aujourd'hui on trouve dans les règlements de contrôle intérimaire de la plupart des municipalités régionales de comté un certain nombre de dispositions visant à protéger les rives et le littoral des lacs et des cours d'eau. Ce règlement-là, ce n'est pas le ministère de l'Environnement qui l'a fait adopter aux MRC, ce sont les associations qui ont fait adopter dans plus de 400 municipalités, avec des inspecteurs municipaux, un projet de réglementation municipale relatif aux rives et au littoral des lacs et des cours d'eau. Quand les MRC ont conduit des auditions publiques ou des consultations publiques à travers tout le Québec pour savoir ce que les villégiateurs voulaient, on leur a dit cela et, si elles l'ont mis dans le règlement de la MRC, c'est grâce aux règlements qui avaient déjà été votés dans plus de 400 municipalités par les associations.

Il y a ces règlements-ci et plusieurs règlements dans plusieurs autres municipalités. Ce ne sont pas toutes les municipalités qui l'ont accepté, mais un bon nombre l'ont accepté. Parce que ces règlements sont incomplets, nous nous attendions que le ministre de l'Environnement adopte à brève échéance un règlement-cadre qui viendrait compléter et uniformiser les règlements des municipalités, tant pour les aménagements privés - ce qui est très important - que pour les aménagements prévus pour faciliter l'accès du grand public aux plans d'eau. Ce règlement devait être mis en vigueur par les municipalités, comme c'est le cas présentement pour le règlement concernant les installations septiques adopté en 1981, à la suite des pressions exercées par FAPEL et ses associations. {17 heures)

Vous me permettrez ici d'ouvrir une parenthèse. De 1975 à 1981, FAPEL et ses associations ont mené une bataille acharnée pour faire adopter un règlement-cadre sur les installations septiques. M. Léger qui était le ministre de l'Environnement a l'époque a finalement accepté, en 1981, de faire

adopter ce règlement. Mais, avant ce règlement, qu'est-il arrivé? Il y a des associations qui ont fait adopter un même projet de règlement par toutes les municipalités qui étaient intéressées à conserver l'écologie de leurs lacs. Ce sont les associations, avec l'aide du programme des lacs, de l'assainissement des eaux, qui avaient fait la même chose, le programme de réglementation des installations septiques, et on l'a fait accepter, encore une fois, à au-delà de 400 municipalités, juste sur le bon vouloir des associations. Non seulement les municipalités ont adopté ce règlement, mais elles ont même engagé des inspecteurs municipaux à l'environnement, même avant que le gouvernement du Québec se décide à adopter la réglementation.

Enfin, en 1981, on l'a eue, la réglementation, et cela a passé comme du beurre dans la poêle. Il n'y a eu aucun problème et, aujourd'hui, ce règlement marche très bien, mais les municipalités qui ne voulaient pas, avant 1981, s'y conformer sont maintenant obligées de s'y conformer.

Maintenant, nous revenons au projet de loi 6. Vous pouvez donc comprendre, avec toute l'expérience qu'on a depuis dix ans, nos inquiétudes face au projet de loi 6 qui vise à modifier le Code municipal de façon qu'il accorde à toute corporation locale le pouvoir de "faire, modifier ou abroger des règlements pour ordonner des travaux d'aménagement du lit, incluant les rives, et des terrains en bordure des rives des lacs et des cours d'eau municipaux ou autres situés sur son territoire et des travaux de régularisation de leur niveau", dans le but très louable - on est tout à fait pour le but - d'améliorer la qualité du milieu aquatique et de favoriser l'accès à ce milieu.

Nous ne sommes pas contre la mise en valeur du milieu aquatique. C'est précisément ce que FAPEL fait depuis nombre d'années et on a consacré le gros de nos énergies à cette cause. Mais, nous tenons à rappeler que cette mise en valeur peut prendre différentes formes selon que l'on favorise les aménagements naturels ou les aménagements artificiels. Les pistes cyclables, par exemple, situées trop près de la ligne du rivage peuvent détruire des terres humides ou contribuer, par le déboisement nécessaire à la piste cyclable, à détruire l'équilibre écologique d'une rive. FAPEL ne s'oppose pas non plus à ce qu'on accorde aux municipalités tous les pouvoirs qui leur permettent de faire des aménagements en bordure et sur le lit des lacs et des cours d'eau, mais nous sommes opposés catégoriquement à ce que l'on accorde ces pouvoirs avant que le ministère de l'Environnement ait pris ses responsabilités et ait adopté un règlement-cadre pour contrôler les formes d'aménagement, exactement comme il l'a fait pour les installations septiques.

Pour calmer les inquiétudes de FAPEL, le ministre de l'Environnement a répondu à ses lettres et il annonce la publication de guides techniques qu'il entend distribuer aux municipalités pour leur donner un chemin à suivre dans le choix des aménagements. Ces guides n'ont pas force de loi. Ils ne peuvent pas non plus remplacer un règlement. FAPEL estime que les guides du ministère de l'Environnement n'ont guère plus de chance d'être respectés que les guides d'aménagement forestier du ministère de l'Énergie et des Ressources dont la publication n'a pas encore réussi à enrayer le fléau des coupes forestières sauvages près de nos lacs. On en connaît quelque chose.

Le ministre de l'Environnement aura de la difficulté à nous convaincre qu'il a l'étoffe nécessaire pour faire respecter de vagues recommandations alors que le même ministre ne réussit pas à respecter la Loi sur la qualité de l'environnement en ce qui concerne la pollution industrielle, la pollution agricole et les plaines d'inondation du lac Saint-Pierre.

Dans une lettre qu'il adressait à notre présidente, Mme Hélène Louise Élie, le 7 décembre dernier, M. Ouellette affimait, pour calmer de nouveau nos inquiétudes: Toutes les lois et tous les règlements actuellement en vigueur et qui touchent spécifiquement les types de travaux ou d'opération proposés - l'aménagement des rives - devront être respectés. Plus particulièrement, M. Ouellette rappelait que la Loi sur la qualité de l'environnement allait s'appliquer avec des règlements qui s'y rapportent.

Or, aucun des règlements adoptés à ce jour, en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, ne concerne la protection des rives et du littoral des lacs et des cours d'eau. Qu'on appelle cela de n'importe quelle couleur, H n'y en a pas. C'est précisément ce que FAPEL réclame à grands cris depuis plusieurs années. Tout ce que M. Ouellette nous offre pour nous inviter à lui faire confiance et à accorder notre appui au projet de loi 6, c'est quelques fascicules de voeux pieux et des règlements qui n'existent pas.

Je regrette de ramener le problème de Longueuil, mais c'est tellement à notre esprit. Cela a été discuté, mais nous aimerions quand même le mentionner ici. Nous profitons de l'occasion qui nous est offerte aujourd'hui pour rappeler que la ville de Longueuil - on comprend bien que c'est la ville de Longueuil - qui projette d'effectuer un monstrueux remblayage sur le lit du fleuve Saint-Laurent - elle projette, d'accord avec vous, M. le ministre - profite ainsi d'une subvention du ministère de l'Environnement accordée dans le cadre de l'assainissement des eaux. Ce n'est pas sûr qu'elle va l'avoir, mais, si cela arrive, c'est

l'assainissement des eaux. La ville de Longueuil tente présentement de rallier l'opinion publique autour de ce projet en le présentant comme un projet de mise en valeur du milieu aquatique. Le projet de loi 6 risque d'ouvrir un porte encore plus grande à tous les promoteurs désireux de modifier à leur façon les rives et le littoral des lacs et cours d'eau.

FAPEL estime que le remblayage est une pratique à proscrire complètement. La seule façon d'assurer la protection des rives et du littoral contre ce fléau est l'adoption d'un règlement-cadre qui l'interdise.

Avant que le ministère des Affaires municipales accorde de nouveaux pouvoirs aux municipalités, le ministère de l'Environnement doit prendre ses responsabilités et présenter un règlement-cadre qui fasse état de normes précises concernant les aménagements des rives et du littoral des lacs et cours d'eau, tant par les individus que par les organismes responsables de l'aménagement d'accès publics. Adopter le projet 6 à ce moment-ci, avant l'adoption d'un règlement-cadre, c'est vraiment mettre la charrue devant les boeufs.

Il y a beaucoup de choses qui ont été dites. J'aurais trois questions à poser à M. Ouellette. Je ne sais si vous préférez qu'on les pose maintenant ou si vous préférez que je réponde à vos questions avant.

La Présidente (Mme Bacon): Vous pouvez peut-être y aller tout de suite, Mme Lepage, et les ministres pourront répondre à tour de rôle.

Mme Lepage: Pour effacer Longueuil une fois pour toutes, M. Ouellette, je suis allée à une ligne ouverte à deux reprises, au programme de Jean Pagé, et on m'a dit des choses qui m'ont absolument renversée. Je voudrais, avant de vraiment dire à nos associations que c'est un fait, avoir votre opinion là-dessus. Est-ce que c'est vrai que la ville de Longueuil ne pourrait pas profiter des montants d'argent du parc national de l'Archipel ou du projet de l'Archipel si l'usine d'épuration n'est pas située sur l'île Charron ou si l'égout collecteur n'est pas passé dans le fleuve?

M. Ouellette: Réponse: complètement faux. C'est bref et clair.

La Présidente (Mme Bacon): Vous pourriez peut-être continuer et poser vos trois questions et les ministres pourront intervenir.

Mme Lepage: D'accord. C'est une question. À la ligne ouverte, il y a des biologistes de l'environnement qui ont appelé, qui ne se sont pas nommés - c'est pour cela que ça vaut ce que ça vaut, je vous dis simplement ce qu'on m'a dit - et qui ont dit que oui, les biologistes du ministère de l'Environnement avaient approuvé l'installation du tuyau sous un remblai. Les biologistes du ministère de l'Environnement auraient approuvé ce remblai pour couvrir le tuyau en question.

M. Ouellette: La même réponse: complètement faux.

La Présidente (Mme Bacon): Est-ce que vous avez terminé vos questions?

Mme Lepage: Pour Longueuil, c'est terminé.

La Présidente (Mme Bacon): Peut-être...

M. Saintonge: Seulement une précision, vous dites que les biologistes auraient à approuver, est-ce que c'est cela que vous voulez dire?

Mme Lepage: Approuvé.

M. Saintonge: Ils auraient approuvé cela.

Mme Lepage: Oui, ils auraient approuvé le remblai pour justement couvrir le tuyau d'eau dans le fleuve. Comme je vous dis, c'était une ligne ouverte. On me questionnait sur le problème des rives et je leur ai dit que je poserais la question au ministre. Comme cela prend tellement de temps à se parler par courrier ou à étudier le dossier et qu'on n'a jamais de réponse, j'ai pensé que je profiterais de l'occasion pour le demander à M. Ouellette directement.

M. Ouellette: Je pense avoir été clair sur ces deux questions. Il n'est pas nécessaire que les travaux, tel que prévu dans le projet de Longueuil, se réalisent ou enfin que l'émissaire soit enterré sur les rives pour que la ville de Longueuil puisse faire appel au budget du programme Archipel. Archipel vise à aménager des rives qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas de tuyau conducteur des eaux usées.

Mme Lepage: Est-ce que Archipel vise à améliorer des rives, qu'il y ait ou qu'il n'y ait pas de remblai pour Longueuil?

M. Ouellette: Archipel vise à améliorer les rives, point. Il y a des rives à Longueuil. Qu'on fasse des travaux ou qu'on n'en fasse pas, il y a déjà des rives qui, d'ailleurs, ont été perturbées au moment de la construction de la route 132.

Mme Lepage: Lorsque M. Brassard nous a invités pour nous expliquer ce qu'il voulait faire avec le parc national de l'Archipel - on

a eu une belle soirée et cela a continué avec plusieurs organismes après - il nous a dit que cela faisait partie du projet du parc national.

M. Ouellette: II faut faire attention, Le projet du parc national de l'Archipel s'applique, si ma mémoire est bonne, à 200 kilomètres de rive dans l'archipel de Montréal. Selon les informations que j'ai, les trois ou six kilomètres de rive de la ville de Longueuil seraient inscrits dans le programme du parc Archipel. Qu'il y ait des travaux d'assainissement des eaux ou qu'il n'y en ait pas, cela ne change rien.

Mme Lepage: Je ne parle pas de l'assainissement des eaux, je parle du remblai.

M. Ouellette: À Longueuil, le problème se pose de la façon suivante. La ville de Longueuil, sachant qu'elle devrait enfouir un tuyau qui conduit les eaux usées vers l'île Charron, s'est dit: On va profiter de ces travaux pour reconquérir les berges qu'on s'est fait voler - ce sont ses mots - au moment de la construction de la route 132 et on va en profiter pour élargir les berges pour les rendre accessibles aux citoyens de Longueuil. Donc, elle profite de cette occasion que constitue la mise en place de ce tuyau pour mousser son projet de réfection des rives, mais elle pourrait très bien le faire - peut-être que cela lui coûterait plus cher - sans que l'assainissement des eaux soit impliqué. Ce que je dis, c'est que, bien sûr, ces rives sont susceptibles d'être traitées dans le cadre du programme du parc Archipel, complètement en dehors de l'assainissement des eaux.

Mme Lepage: Les rives actuelles. Là, on parle d'une autre rive; on parle d'un remblai.

M. Ouellette: Oui, mais, enfin, la ville peut toujours avoir un projet de remblaiement, qu'il y ait assainissement ou non. Ce n'est pas nous qui décidons, c'est la ville qui se fait promotrice. Cela n'a rien à voir avec nous.

Mme Lepage: Concernant Longueuil, encore une fois, vous avez demandé -j'imagine que c'est vous qui l'avez dit - au BAPE d'avoir des audiences publiques concernant le projet de Longueuil.

M. Ouellette: Exactement.

Mme Lepage: Vous demandez aux gens qui viennent vous recontrer ici d'y être présents.

M. Ouellette: Autant que possible.

Mme Lepage: Je peux vous dire qu'on refuse automatiquement - écoutez une minute, s'il vous plaîtî - d'assister à des audiences publiques pour un remblai. Un remblai devrait être défendu, quel qu'il soit. Vous dépensez l'argent des Québécois pour leur demander s'ils sont d'accord avec une chose qui ne devrait pas exister. Cela n'a pas d'allure, M. Ouellette. On ne remblaie pas! Le pauvre villégiateur - cela fait vingt ans que FAPEL travaille - jette deux, trois chaudières de sable dans son tac. Ne craignez pas, on se fait tomber dessus et on n'a pas le droit de le faire, mais des villes ont le droit! Ce n'est pas parce que les gens ont toujours fait cela au niveau du Saint-Laurent qu'il faut continuer à le faire. Les remblais, quels qu'ils soient, sont mauvais pour l'écologie et pour la survie des cours d'eau autant que pour la survie des lacs. Si le ministère de l'Environnement ne peut pas prendre cette position, je pense qu'on est aussi bien de changer et d'essayer de former un ministère de la conservation.

Pour la Loi sur la qualité de l'environnement, on était là quand elle a été faite. On a présenté un mémoire, on a été bien déçus que la loi, à ce moment-là, ne couvre pas du tout la protection de la nature. Peut-être que, s'il y avait eu un volet sur la protection de la nature, il y a cinq ou six ans, on ne se retrouverait pas dans le dilemme où on est aujourd'hui. De toute façon, il n'y en avait pas, mais la Loi sur la qualité de l'environnement vous a quand même donné, M. le ministre, des pouvoirs de réglementer. C'est parfait et on est bien contents de cela. Vous avez réglementé sur la pollution industrielle et je ne veux pas discuter si les règlements sont appliqués ou non. Ce n'est pas de cela que je veux discuter aujourd'hui.

Vous avez fait des règlements sur la pollution industrielle, il y en a eu un sur les installations septiques, il y en a eu un sur la production animale, il y en a eu un sur votre bébé chéri, l'assainissement des eaux, il y en a eu un sur les canettes, il va y en avoir sur les fumeurs, sur toutes sortes de choses. Pourquoi pas sur les rives? Pouquoi pas un règlement-cadre sur les rives? Vous avez le pouvoir de le faire. C'est votre responsabilité. On n'a rien contre le projet de loi 6. On trouve qu'il vient trop vite. Il donne des pouvoirs aux municipalités de faire ce qu'elles veulent avant que vous, vous ayez dit: Cela va être fait comme ça. Vos guides, on ne peut pas s'y fier. On l'a vue, on l'a vécue, l'expérience. Si c'est si beau, les habitats fauniques - vous nous disiez tout à l'heure que l'on va avoir une loi sur les habitats fauniques - pourquoi est-ce qu'on est si pressé d'adopter le projet de loi 6? Pourquoi est-ce si urgent? Cela ne vous empêche pas d'assainir les eaux. Est-ce que c'est pour le projet Archipel, pour nous le

faire avaler plus facilement, pour nous donner des parcs, pour qu'on puisse dire: La population n'a rien à dire, on lui a donné des parcs? Parce que, comme c'est là, les municipalités ne peuvent pas faire ce qu'elles veulent, parce qu'il y en a trop qui ont adopté des règlements pour la protection de leurs rives, grâce à FAPEL et à votre direction de l'aménagement des lacs et des cours d'eau. Pourquoi? Quelle est l'urgence? C'est cela qu'on ne peut pas comprendre. (17 h 15)

Le projet de loi 6 est là. Il était là le 6 décembre et il était urgent, urgent. Il est encore urgent, vite il faut l'adopter. Mais on ne fait pas un gâteau sans avoir les ingrédients; vous ne les avez pas, les ingrédients. Parce que votre loi 6, elle devrait exister, M. le ministre, on est bien d'accord avec vous que cela leur prend des pouvoirs. Mais cela prend des normes environnementales. Les raisons pour lesquelles on est si alarmé? C'est qu'on regarde le lac Saint-Pierre, Longueuil, les îles de Boucherville, Kamouraska, l'égout collecteur de la CUM, les sites toxiques, et j'en passe. Vous voulez qu'on ait confiance à un guide? Merci.

Le Président (M. Marquis): M. le ministre.

M. Ouellette: Merci, M. le Président. J'ai presque envie de répondre à Mme Lepage, quand elle nous dit: Pourquoi faut-il adopter ce projet de loi, aujourd'hui? C'est peut-être parce qu'on n'a pas envie de se faire dire dans six ans qu'on aurait dû l'adopter il y a six ans.

Mme Lepage: Mais elle vient après la sécurité des habitats fauniques....

M. Ouellette: Non.

Mme Lepage:... après la sécurité des rives. Oui, M. le ministre.

M. Ouellette: Ce que j'ai dit, Mme Lepage, c'est fort simple. Au printemps, le ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche, qui est responsable de la section de la faune, qui a préparé un projet de règlement, va le soumettre à la consultation publique et il va s'occuper de ce volet qui relève de sa juridiciton.

Le ministère de l'Environnement travaille, actuellement, avec le MLCP, avec le ministère de l'Agriculture, avec le ministère de l'Énergie et des Ressources et avec lui-même, bien sûr, pour faire en sorte qu'on obtienne une politique cohérente. Cette politique cohérente ne sera pas nécessairement un projet de loi unique qui va traiter à la fois de la faune, de la gestion de la forêt, de la gestion du milieu agricole, de la protection du milieu hydrique ou de la protection des rives. On risque fort de se retrouver avec des lois dans chacun des ministères où se retrouve la juridiction. Mais ce à quoi nous travaillons, actuellement, c'est une concertation pour assurer une cohérence, tout en respectant la juridiction de chacun des ministères.

On m'a parlé de la faune, ce matin; j'ai dit que M. Brassard ferait la consultation sur le volet de la faune. Quant au reste, nous sommes à la table de concertation interministérielle pour faire surgir les autres éléments de cette politique globale. Tout cela va être terminé ce printemps, à peu près en même temps où le programme Berges neuves commencera à s'appliquer. Mais vous reconnaîtrez avec moi qu'on est 30, 40, 50 ans en arrière, que des dégâts ont été commis. Si on attend que tout soit réparé avant de passer à l'action, on va se faire dire, dans 20 ans: Que c'est donc dommage que, en 1985, le gouvernement ne s'en soit pas occupé; tout comme on se fait dire: Qu'il est donc regrettable que le gouvernement Lesage n'ait pas mis en application le programme d'assainissement des eaux. Cela se tient. Oui, je veux bien croire qu'il aurait été souhaitable que, en 1960, on ait procédé à l'assainissement des eaux; mais, à la décharge de ces gouvernements, je dis qu'ils avaient d'autres problèmes, d'autres priorités et qu'ils les ont réglés au cours des 20 années qui ont suivi. Alors, on prend les choses telles qu'elles se présentent à nous.

Nous disons qu'il n'est pas nécessaire, à ce stade-ci, compte tenu de ce qu'on retrouve dans Berges neuves, d'attendre que toute la législation nous soit tombée du ciel pour commencer è nettoyer des rives. D'ailleurs, cela m'étonne un peu, puisque FAPEL s'est donné une réputation très enviable sur le plan québécois, parce que, depuis au moins dix ans, elle effectue des travaux sur les berges. Elle fait du reboisement, de la régénération, de la consolidation là où c'est nécessaire, tout cela sans loi, alors qu'on se retrouve, dans certains cas, avec la situation exactement inverse, comme à Longueuil, où il existe une loi que vous nous réclamez. Mais elle est là, la loi. Il y a un règlement, également, qui découle de cette loi, qui s'appelle le règlement sur les études d'impact. Vous nous dites: Cela n'a pas de bon sens, il nous faut une loi, mais nous l'avons la loi. À ce moment, vous nous dites: Cela n'a pas de bon sens que le ministère de l'Environnement daigne même s'arrêter et permettre que quelqu'un ose penser à quelque chose comme un remblaiement, parce que, pour vous -vous l'avez affirmé clairement - le remblaiement ne se peut nulle part et en aucun temps.

Si vous, vous avez décidé que

désormais, au Québec, il n'y aurait plus jamais de remblaiement pour quelque raison que ce soit, libre à vous de penser à cela, mais moi, je ne pense pas comme cela et je suis certain que personne autour de la table ici ne pense comme cela. Il peut toujours arriver des circonstances où il faille remblayer et où ce soit bon de le faire, si, bien sûr, en le faisant, on prévoit des mesures de mitigation pour annuler les effets négatifs du remblaiement et peut-être augmenter la qualité de la rive.

Il y a des gens à Longueuil qui pensent, figurez-vous, qu'on n'aurait pas dû faire la route 132 il y a 20 ans et que, ce faisant, on a volé les rives et que les rives ne sont pas dans un bon état, qu'elles sont laides et qu'elles sont inaccessibles aux gens là-bas. Ils souhaiteraient que la municipalité profite des travaux d'assainissement pour y déverser le roc qu'elle aura sorti d'un tunnel, m'a-t-on dit, et ce faisant, pour améliorer la qualité des rives tout en permettant aux citoyens d'y avoir accès.

Ce n'est pas votre point de vue, je le respecte, mais leur point de vue aussi, je me dois de le respecter. C'est pourquoi la Loi sur la qualité de l'environnement dit: Études d'impact et audiences publiques. À ce moment, les gens pourront faire valoir leur point de vue. Je regrette que FAPEL ne profite pas de cette occasion, parce que c'est presque une première, où on pourra peut-être faire école là-dessus et faire en sorte que désormais il soit très difficile de faire des empiétements. La loi le prévoit, elle est là, servons-nous-en, ne la boudons pas. Parce que, si on boude nos lois, cela ne sert à rien d'en faire.

Mme Lepage: M. Ouellette, ce qu'on vous demande, c'est pourquoi vous adoptez des règlements dans différents domaines et que vous vous opposez à adopter un règlement pour la protection des rives. On n'est pas contre le projet de loi 6. Peut-être que c'est à M. Marcoux que je devrais poser la question. Pourquoi l'urgence du projet de loi 6? Si vous êtes capable d'accepter que les berges du Québec ne soient pas protégées par une loi-cadre... C'est bien sûr qu'il y a des gens comme nous qui sont en train de donner leur vie à ce genre de choses, mais ça ne peut pas être fait partout. Cela ne peut pas être fait dans tous les lacs au Québec. Cela peut être fait partout où on est, mais ce n'est pas toujours la même chose.

On a parlé des municipalités, ce ne sont pas toutes les municipalités qui nous écoutent. Ne vous imaginez pas qu'on est Dieudonné pour elles. Vous le savez qu'on a des problèmes avec les municipalités et on ne demande pas mieux qu'elles aient des pouvoirs. Ce qu'on ne comprend pas, c'est pourquoi vous vous opposez à avoir un règlement-cadre protégeant les rives surtout et avant tout, parce que le projet de loi 6 est là avant que ce règlement arrive.

M. Ouellette: Mme Lepage, je ne m'oppose pas à ce qu'un tel règlement soit adopté, mais comprenez donc avec moi que cela ne peut pas être le résultat d'une action unilatérale d'un seul ministère lorsqu'il y a plusieurs ministères d'impliqués, lorsqu'il y a le monde municipal d'impliqué et lorsque les citoyens... Ce que je veux, c'est un règlement qui soit cohérent avec la protection de la faune, cohérent avec la pratique agricole, cohérent avec la gestion de la forêt et les coupes, entre autres. Je veux avoir quelque chose qui fasse véritablement le chapeau et qu'on n'en parle plus, mais qu'on ait entre les mains autant de pièces de législation cohérentes qu'il le faut pour s'assurer qu'une fois pour toutes le milieu aussi bien des rives que le milieu hydrique soient éternellement protégés si possible.

Je vous répète qu'on ne pourra pas mettre dans une telle pièce de législation une affirmation aussi catégorique que celle que vous avez faite, à savoir que désormais les remblais, ce n'est pas possible. Il va falloir laisser des portes...

Mme Lepage: J'imagine qu'à une occasion spéciale, à un cas donné, cela pourrait être étudié. Mais là, ce n'est pas cela qu'on fait. On donne les pouvoirs aux municipalités de faire ce qu'elles veulent, sans norme. C'est cela qu'on fait. Si vous vous promenez sur les lacs des Laurentides et des Cantons de l'Est, on sait ce que peuvent faire des municipalités. Installer une marina sur le bord d'un lac, c'est payant, cela aide et les municipalités sont toutes pauvres, vous le savez. S'il n'y a pas des normes pour dire comment installer cette marina, qu'est-ce que vous pensez qu'elles vont faire? Elles t'ont fait avec les coupes de bois. Le ministère de l'Énergie et des Ressources continue à couper tout près de nos lacs. Il n'est pas supposé le faire. Avez-vous lu le guide d'aménagement du ministère de l'Énergie et des Ressources? Lisez-le, c'est une beauté. Avez-vous lu le document du ministère du Loisir, de la Chasse et de la Pêche sur le projet national d'archipel de M. Brassard? C'est fantastique. On ne permettra pas les remblais, on ne touchera pas aux plaines d'inondation, on ne fera pas ci, on ne fera pas ça. On se retourne et, le lendemain, vous voyez ce qu'on nous propose pour Longueuil.

Je ne vous dis pas que des remblais, c'est un jamais catégorique; cela devrait toujours être défendu et proscrit à vie à moins de cas spéciaux, et ce sont ces cas que vous étudierez un à un; ce ne sont pas des cas comme Longueuil ou les rapides de

Lachine, ces cas où vous dites: On les prendra un par un. Vous avez fait des règlements à l'intérieur de la loi, vous avez bien fait ces règlements et on ne peut pas comprendre pourquoi les rives ne peuvent pas être considérées aussi importantes que des canettes ou n'importe quel autre règlement que vous avez fait.

M. Ouellette: J'aime votre "à moins que", il me rassure un peu. Je voudrais aussi relever une autre affirmation qui m'a quelque peu frappé. Vous dites, à un moment donné - je ne sais pas, les pages ne sont pas numérotées - qu'à toutes fins utiles la première chose que j'ai faite en arrivant au ministère de l'Environnement, cela a été de couper le programme des berges - le programme que vous utilisez dans votre travail - de 200 000 $. Je vais vous dire une chose. C'est vrai qu'on a coupé de 200 000 $ votre programme, c'est vrai que cela avait été fait l'année d'avant par M. Léger, et tout cela dans un contexte de restrictions budgétaires et de coupures de dépenses gouvernementales. Il était normal que, malheureusement, vous passiez par là vous aussi. Mais, aujourd'hui c'est peut-être regrettable, mais on ne pouvait pas faire autrement - on dégage un montant de 170 000 000 $ étalé sur trois ans qu'on met à la disposition de tous les citoyens du Québec pour réaliser des travaux qui vont exactement dans le sens de ceux qui ont toujours été faits par FAPEL; c'est 170 000 000 $ et cela commence à être de l'argent et c'est pas mal mieux que 200 000 $. Il n'y a rien qui empêche toutes les associations de lacs de venir puiser dans le programme Berges neuves et de combler très largement les 200 000 $ dont vous avez été les victimes au niveau des coupures. Je comprends mal. C'est bien beau 200 000 $, mais venez chercher notre programme Berges neuves, vous allez pouvoir en faire du reboisement, de la régénération, de la consolidation de rives là où il le faut, etc.

Il y a un autre problème que vous ne soulevez pas. Il arrive souvent que vos associations de lacs connaissent des problèmes de fosses septiques. C'est facile de déceler les problèmes, c'est facile de faire l'étude et de dire que c'est le réseau de fosses septiques qui ne fonctionne pas. Mais le terrain étant de telle nature, il n'est pas possible de faire des champs d'épuration dans tel lac ou tel tour de lac ne pourra trouver son état normal que si on y implante un réseau d'égout; le PAIRA, malheureusement, ne tient pas compte ou tient compte de trop de densité, etc. Cela fait longtemps que je travaille auprès de mes collègues - à l'époque où j'étais député, je le faisais - pour obtenir que le PAIRA soit modifié un jour pour permettre de régler les problèmes environnementaux autour de ces lacs. J'en ai parlé à mon collègue et il pourra peut-être vous en dire plus long. Nous allons dans ce sens, dans le sens que vous ayez accès à de grands programmes pour réaliser des choses qui vont dans le sens de vos aspirations. Dans Berges neuves, il y a une foule de choses qui peuvent vous intéresser, j'en suis sûr, mais venez les chercher ces montants, c'est pour vous.

Mme Lepage: Est-ce qu'on peut revenir au programme Berges neuves? J'aimerais laisser M. Roy vous en parler.

M. Roy: M. Ouellette, j'ai vécu la transition et le changement de ministres à l'Environnement, j'étais à FAPEL quand cela s'est fait. Je vous ai vu arriver avec une hache, c'est pour cela qu'on parle de rogner dans les budgets du programme des lacs. Encore cette année, vous venez couper - non pas un gros montant - 35 000 $ au programme des lacs. Vous donnez 170 000 000 $; on le fait gratuitement et bénévolement; nos arbres, quand on les plante, c'est Clin Clin qui les plante sur son terrain, cela ne coûte pas un sou, il le fait gratuitement et, quand il le plante lui-même chez lui, on n'y touche plus après. Mais, si c'est n'importe qui qui plante n'importe quoi n'importe où, cela va être à couper après et cela va à être à retoucher. On le fait bénévolement, gratuitement. Prenez ces montants et donnez-les ailleurs au programme. Ne les donnez pas à des citoyens qui vont les couper deux jours après ou qui vont passer dessus. Il faut sensibiliser les gens et il ne faut pas le faire en payant. On le fait depuis dix ans, on en plante chez nous 12 000 par année, depuis quatre ans. Je plains le chrétien qui va passer dessus. Où allez-vous prendre vos plants? Qu'est-ce que vous allez planter? On a un programme et vous avez, dans votre ministère, un programme d'études de renaturalisation: à tel lac, c'est telle chose qu'on plante. Aidez donc votre programme à nous aider, nous. Ce serait bien plus clair; au lieu de couper (à, donnez-leur les pouvoirs, l'argent, les moyens de nous aider, mais ne payez pas l'association, on est bénévole, on est prêt à le faire. (17 h 30)

M. Ouellette: On met à votre disposition, et cela s'applique aux associations qui font partie de votre fédération, 170 000 000 $ pour faire les travaux qui sont énumérés dans le cadre du programme. Ce qui veut dire que vous pourrez avoir accès à ces sommes d'argent.

Quant aux 35 000 $ de coupure à laquelle vous faites allusion, c'est une fausse coupure puisque les études hydrauliques vont être faites désormais par le ministère de l'Environnement qui a le personnel compétent. Au lieu de donner des contrats à

l'extérieur, étant donné qu'on a le personnel, on va faire effectuer ces études-là; ce qui n'affectera en rien votre budget puisque vous n'aurez pas à payer à l'extérieur ce qu'on peut faire à l'interne. Il y a une totale concordance. Je vous le répète, nous avons de l'argent comme il n'y en a jamais eu dans ce volet et vous devriez, je pense, vous mettre au travail, le plus vite possible. On va vous remettre les guides. Vous pourrez les comparer à ce que vous faites, à ceux que vous suivez actuellement. S'il y a des lacunes, vous nous le dites, on les corrige, on s'entend et on met tout le monde à l'action en même temps, pas uniquement les associations de lacs, mais tous les résidents en bordure de cours d'eau au Québec. Je pense que l'Environnement va marquer un pas rapide, très important et dans la bonne direction.

M. Roy: Où je ne comprends pas...

M. Saintonge: Une question sur le débat, M. le ministre. Quand on parle de guides techniques qui vont s'appliquer au niveau des programmes, je comprends qu'une municipalité pourra s'entendre avec une association quelconque. Les intéressés contactent la municipalité, ils veulent faire tel genre de travaux. On s'adresse au ministère, on dit: Vous nous financez les deux tiers des travaux, la municipalité en finance le tiers, mais à condition que vous respectiez nos guides.

Ma question supplémentaire est la suivante. On a un pouvoir habilitant qu'on va donner par la loi 6 aux municipalités. C'est ce qui m'inquiète beaucoup. Je veux dire que le projet de règlement-cadre serait important, parce que la municipalité qui décide de ne pas entrer dans le programme Berges neuves, qui décide de ne pas demander au ministère de l'Environnement les deux tiers de subvention qui peuvent lui être alloués là-dessus, à quoi est-elle soumise actuellement, si vraiment, comme FAPEL le mentionne, il n'y a pas de règlement sur la question de la protection des rives? Vous donnez un pouvoir habilitant aux municipalités de faire tel genre de travaux; à ce moment, une municipalité pourrait, dans le cadre de règlements d'application, donner la capacité de faire des interventions à quelqu'un sur son littoral, sur les berges où une municipalité est située, mais sans entrer dans le cadre, tout n'étant pas soumis à des normes techniques. À quoi vont-elles être soumises? C'est ça ma question.

Une voix: À la loi.

M. Saintonge: II n'y a pas de règlement. Je vais être soumis è la loi sur l'environnement, mais s'il n'y a pas de règlement comme tel pour obliger à respecter telle ou telle norme. C'est ça la question que je me pose, fondamentalement. Elles ne seront donc soumises à rien. Vous n'avez pas mentionné... Disons, ce que FAPEL a dit là-dessus, qu'il n'y a aucun règlement adopté à ce jour, en vertu de la Loi sur la qualité de l'environnement, en ce qui concerne la protection des rives et du littoral des lacs et des cours d'eau. Est-ce qu'il en existe? Il me semble qu'il n'en existe pas. S'il en existe, de quelle façon sont-ils appliqués?

M. Ouellette: C'est au niveau municipal, je vais laisser à M. Marcoux le soin de vous répondre.

M. Saintonge: Je m'excuse! On parle d'environnement, on ne parle pas du ministère des Affaires municipales. On parle d'une loi....

M. Ouellette: La loi 6, c'est une loi des Affaires municipales, à moins que je ne sois complètement dans l'erreur.

M. Saintonge: Je vous parle actuellement au niveau de l'environnement. Est-ce qu'il existe une loi...

M. Marcoux: Je vais répondre à la question de...

M. Saintonge:... un règlement au niveau de l'environnement là-dessus?

M. Ouellette: M. Marcoux va vous donner la réponse.

Une voix: II est embêté.

M. Ouellette: Je ne suis pas embêté du tout, j'ai le texte sous les yeux.

M. Marcoux: Je ne suis pas embêté du tout, ni le ministre de l'Environnement, sauf qu'il y a une chose qui existe; c'est qu'il y a une très grande concertation entre le ministère des Affaires municipales et le ministère de l'Environnement depuis plusieurs années et spécialement depuis la mise en oeuvre de la loi sur l'aménagement, la loi 125.

Vous savez qu'il y a eu une opération. La première opération a été de mettre en oeuvre des règlements de contrôle intérimaire. Ce qu'on a demandé à toutes les municipalités régionales de comté, c'est d'intégrer à ces règlements de contrôle intérimaire, sans quoi ils étaient désavoués, les règlements de l'Environnement, par exemple, sur la grandeur des terrains pour lotir, que ce soit pour installer des fosses septiques ou pour le puits artésien, etc., tenant compte des terrains plus grands, si c'était sur le bord des lacs, des cours d'eau,

que si c'était dans un village, etc. On a obligé les municipalités régionales de comté à intégrer dans les règlements de contrôle intérimaire ces normes qui n'étaient pas nécessairement réglementaires, à ce moment-là, au ministère de l'Environnement. Une de ces normes-là, qui contredit l'affirmation que vous avez faite tantôt selon laquelle le ministère des Affaires municipales ou de l'Environnement n'avait porté aucune exigence aux municipalités, c'est la bande de dix ou de quinze mètres en bordure des cours d'eau et des lacs qui a été introduite obligatoirement dans tous les règlements de contrôle intérimaire des municipalités régionales de comté, sans quoi leurs projets de règlement étaient désavoués.

Alors, c'est faux de dire, comme vous l'avez indiqué tantôt lors de la présentation de votre mémoire, qu'il n'existe pas de réglementation au niveau municipal protégeant les berges et les rives. Il y en a une qui est intégrée aux règlements de contrôle intérimaire. Les municipalités qui présenteront, dans le cadre du programme Berges neuves, des projets d'aménagement des cours d'eau, des rives, etc., devront respecter les règlements de contrôle intérimaire. Compte tenu de la nature des projets, elles pourront proposer des modifications à ces règlements de contrôle intérimaire qui devront être ratifiées par le ministre des Affaires municipales à la suite de la consultation qui est faite auprès du ministère de l'Environnement. Il est complètement faux de dire, sous forme de question - comme l'a indiqué le député de Laprairie - alors que c'était sous forme d'affirmation en ce qui vous concerne, Mme Lepage, qu'il n'y a pas de norme gouvernementale qui s'applique pour la protection des rives et des berges. Â ceci s'ajoutera le guide d'interventions qui sera donné à chacune des municipalités du Québec et aux municipalités régionales de comté, comme la Communauté urbaine de Québec et celle de Montréal, lors de l'élaboration de leurs projets pour tenir compte de mesures supplémentaires qui sont indiquées pour l'approbation, pour concevoir leurs projets. Les projets, un à un, devront recevoir l'approbation du ministère de l'Environnement qui verra si ce guide d'application est respecté. Quant au règlement de contrôle intérimaire, il sera respecté obligatoirement.

Quant à la question municipale, il y a une autre chose que je voudrais corriger qui est fausse. Vous avez dit que les municipalités du Québec étaient pauvres. Les municipalités du Québec sont en excellente santé financière. Je vais vous donner quatre chiffres qui l'indiquent. Leur taux d'endettement a diminué de 26% dans les quatre dernières années. Il est passé de 5, 75 $ des 100 $ d'évaluation à 4, 50 $ des 100 $, une baisse de 26% du taux d'endettement des municipalités. Un deuxième chiffre. Les surplus accumulés des municipalités sont passés de 150 000 000 $ à 389 000 000 $ dans les trois dernières années. Une autre indication. La part consacrée au service de la dette par les municipalités est restée, malgré les taux d'intérêt de 22% et 25% des dernières années, à 23% et à 25% dans le budget des municipalités. Ce qui signifie que les municipalités sont en excellente santé financière; les municipalités du Québec ne sont pas pauvres. C'est pourquoi le gouvernement ne s'est pas gêné pour faire appel à elles dans le cadre du plan de relance de l'économie du Québec adopté à Compton, soit pour l'assainissement des eaux, en apportant une contribution supplémentaire de la part du gouvernement du Québec de 80% à 90% des travaux faits jusqu'au 31 mars 1986, et également en leur demandant de s'impliquer dans un autre programme qui a d'autres objectifs, le programme de revitalisation des centres-villes.

Une autre chose que je voudrais noter dans votre mémoire, c'est un paradoxe. Vous dites: Durant dix ans, on a travaillé sans pouvoir réglementaire, simplement par le pouvoir de conviction et on a convaincu environ 400 municipalités du Québec de mettre dans les règlements municipaux, dans les règlements de lotissement, de construction, etc., des règlements protégeant les berges et les rives. Par ailleurs, à écouter toute votre argumentation, c'est un témoignage de non-confiance face aux municipalités du Québec. Je ne vois pas comment, dans le même discours, on peut dire: Nous avons travaillé bénévolement - ce que tout le monde reconnaît et applaudit -durant une dizaine d'années à convaincre municipalité par municipalité de protéger les berges du Québec, de rendre les eaux accessibles en protégeant l'environnement et en protégeant la faune, etc., et dire: On a convaincu 400 municipalités de le faire. Alors qu'aujourd'hui le gouvernement du Québec veut que les municipalités s'impliquent davantage, il a, à travers la Loi sur l'aménagement, à travers les règlements ou les directives de l'environnement que nous avons obligé les municipalités à' intégrer au règlement de contrôle intérimaire et toutes les autres lois qui existent, soit de l'Environnement ou soit du Loisir, de la Chasse et de la Pêche... Ces règlements qui s'appliquent au monde municipal, les projets élaborés dans le cadre de la mise en valeur du milieu aquatique devront respecter l'ensemble de ces règlements et l'ensemble des lois. Les projets qui seront acceptés par le ministère de l'Environnement seront assujettis et vont obliger à respecter ces lois qui existent déjà. Il y a un ensemble, il y a un contexte qui fait qu'entre la confiance face au succès que vous avez eu durant

plusieurs années de convaincre les municipalités de respecter les berges et, d'autre part, la crainte que vous avez, plus que la crainte, parce que, si je reprenais vos propos, c'est plus que de la crainte, c'est de la méfiance qui, je crois, n'est pas justifiée face à l'ensemble des municipalités du Québec... Je comprends qu'il y a une discordance entre les succès que vous avez obtenus et les résultats. Ce que je ne voudrais pas y voir - là je voudrais entendre commenter - ce que je ne voudrais pas y voir, mais ce que j'y sens, c'est que, malgré le fait que vous souhaitiez une réglementation plus forte, un règlement-cadre, une loi, etc., dans le fond, ce qui s'est passé depuis quelques années, c'est qu'on a dit: Ce n'est peut-être pas suffisant le bénévolat, ce n'est peut-être pas suffisant la conviction, on va y ajouter des lois et des règlements. C'est fait en grande partie, il faut le reconnaître. Cela fait partie des règlements de contrôle intérimaire qui s'appliquent dans les municipalités régionales de comté. Je ne comprends pas du tout votre attitude de confiance aux municipalités, d'une part, et, d'autre part, d'extrême défiance face aux municipalités.

Je peux vous dire, en tant que ministre des Affaires municipales - je suis convaincu de parler au nom du gouvernement - qu'on est suffisamment en contact avec le monde municipal depuis des années pour voir que, même face à la protection de la qualité de la vie, face à la qualité de l'environnement, les esprits ont aussi évolué. Il n'y a pas seulement dans les organismes qui, depuis des années, s'occupent de protection de l'environnement que les esprits ont évolué. Il n'est pas dit que ce soit toujours par réglementation et par des pouvoirs législatifs qu'on peut atteindre des objectifs.

L'argumentation que vous développez suppose que c'est seulement par des arguments législatifs ou des arguments réglementaires qu'on peut arriver à ces fins de protection de l'environnement ou de conscientisation du milieu municipal et des groupes de citoyens à la protection de l'environnement. Nous, ce qu'on dit, et je pense que c'est plus réaliste, c'est qu'il n'y a pas un seul moyen, il n'y a pas un seul truc, il n'y a pas une seule façon d'en arriver à protéger l'environnement. Cela prend des lois, cela prend des règlements. Mais il y a des choses qui ne seront jamais faites par règlement ou par loi et qui vont être faites par incitation. Tant mieux si on n'est pas obligé de tout réglementer, parce que là aussi il y a un paradoxe. C'est que tout le monde au Québec dit qu'il y a trop de règlements, il y a trop de réglementations, que le gouvernement sorte de ci, abolisse tel règlement, etc. Chaque groupe vient nous voir en disant: Je veux ma loi, je veux mes règlements et je veux tant d'inspecteurs pour les appliquer. En même temps, on veut qu'il y ait moins d'inspecteurs partout. Nous, on n'a pas de doctrine idéologique, on ne voit pas cela comme une religion. On pense qu'il y a à la fois des moyens législatifs, des moyens réglementaires, mais il y a aussi des moyens éducatifs et des moyens de persuasion. C'est l'action du ministère de l'Environnement telle que je la vois depuis huit ans. À partir du moment où il y a eu un ministère de l'Environnement, on n'a pas dit: Les groupes bénévoles, on va renier leur rôle. Au contraire, je me souviens très bien du prédécesseur de M. Ouellette qui disait qu'il devait y avoir 6 000 000 de protecteurs de l'environnement au Québec.

On n'a pas essayé de diminuer le rôle de FAPEL ou le rôle d'autres groupes de conseils régionaux de l'environnement comme il en est né dans ma région et dans d'autres régions. On n'a pas essayé de diminuer le rôle et l'importance des groupes bénévoles, des comités de citoyens ou des comités populaires qui s'occupent de la protection de l'environnement, mais on a dit: On va prendre notre responsabilité, pour une part, qui est l'aspect de la législation et l'aspect réglementaire. Là s'ajoute un moyen financier fort incitatif qui va véritablement permettre de commencer à régler le problème de la qualité de la vie, de la qualité de l'environnement des berges. Je pense qu'en ce sens-là l'attitude du gouvernement est plus polyvalente, elle est plus complexe, je l'admets, mais la réalité est complexe dans cela. Je ne pense pas qu'il y ait un seul moyen pour régler tous ces problèmes.

Mme Lepage: M. Marcoux, je suis bien d'accord avec tout ce que vous avez dit. C'est vrai qu'il y a un règlement au niveau des règlements intérimaires, sauf qu'aujourd'hui dans la municipalité...

M. Marcoux:... tantôt.

Mme Lepage: Non, non, ce que je veux dire, c'est...

M. Marcoux:... parce que le document que vous avez montré, c'est un document...

Mme Lepage:... peut-être à l'intérieur, mais dans la municipalité du petit lac Nominingue où je suis, la municipalité de comté, ils ne font rien avec eux. C'est ma municipalité qui mène et, tant que cela va être ma municipalité qui mène, la municipalité régionale n'a rien è dire. Il faut qu'elle lui demande la permission avant. Je vous le dis dans les faits. Il y avait des gens qui coupaient des arbres sur des îles de Sorel - je m'occupe aussi des îles de Sorel -on a regardé et c'est vrai qu'ils n'avaient

pas le droit de les couper. On est allé voir et la municipatîté régionale a dit: On ne se mêle pas de cela maintenant. Gela commence. C'est vrai que ça commence, c'est vrai que ce n'est pas tout mis en application, mais ce qu'on dit, c'est que, autant on a pu avoir de succès avec des municipalités, autant les règlements se changent. (17 h 45)

Regardez ce qui est arrivé avec tout le dossier des embarcations motorisées; je ne veux pas l'expliquer en détail. La minute que ça a été dit en cour que ce n'était pas nos affaires, le provincial, tous les règlements sur les embarcations motorisées, même si c'était une diminution de vitesse dans les 200 premiers pieds, sont tombés à l'eau. Us auraient pu les garder, parce qu'on n'empêchait pas les embarcations motorisées; on leur demandait de diminuer la vitesse.

Ce règlement, selon ce que vous dites, qui est allé... Nous autres, on a l'impression qu'on a quelque chose à faire avec, parce qu'on est allé à tellement de réunions des programmes; quand ils ont voulu savoir de quoi il s'agissait dans toutes les régions, tout le monde était bien d'accord. C'est vrai qu'ils l'ont mis dedans, sauf que ce n'est pas une loi; comprenez-vous? Ce n'est pas applicable aujourd'hui. On se demande - aussi vrai que votre loi 6 est là, on n'a pas encore la réponse - pourquoi l'urgence. Pourquoi est-ce qu'on est obligé de voter cette loi avant de s'assurer que les berges sont protégées? Elles ne sont pas protégées.

Le Président (M. Marquis): M. le député de Laprairie, ce serait votre tour, si vous avez une intervention.

M. Saintonge: Mme Lepage, ce qui m'a frappé, c'est quand vous dites que le ministre ne réussit pas à faire respecter la Loi sur la qualité de l'environnement, en ce qui concerne la pollution industrielle, la pollution agricole et les plaines d'inondation du lac Saint-Pierre.

Est-ce à dire que, dans la Loi sur la qualité de l'environnement comme telle, è ce niveau-là, il n'y a pas de possibilité pour le ministre de mettre en application des poursuites ou quoi que ce soit? Il y en a, des possibilités.

Mme Lepage: II y a des possibilités dans certains domaines, pour les déchets toxiques, par les lois qu'on a votées, mais il n'y en a pas pour la protection des rives. S'il y en avait eu une pour le lac Saint-Pierre, je ne suis pas sûre que M. Garon aurait écouté. Mais là, je ne veux pas ouvrir le débat entre M. Garon et les autres ministres; d'accord? Mais, pour le lac Saint-Pierre, si on avait eu une loi sur les plaines d'inondation... On nous dit: Cela n'a pas d'allure; on n'est pas pour enlever ça. Cela coûterait trop d'argent; il ne faudrait pas enlever ça aux agriculteurs. Mais, tout le domaine des plaines inondables, on n'est pas pour y aller cas par cas et dire: D'accord, celui-là, on va le régler.

Ce n'est pas compliqué. Vous allez me dire: Tu demandes encore une toi. Mais il reste quand même que, dans des domaines, il faut une loi. Il faut s'empêcher de construire dans la plaine d'inondation si on veut conserver nos fleuves, nos rivières et nos lacs. L'environnement, ça me fait un petit peu penser à la santé; c'est un choix. Cela coûterait bien moins cher, laisser mourir le monde, ne pas avoir d'hôpitaux, ne pas avoir de docteurs et ne pas assumer tout ce que l'assurance-maladie paie. Mais, on le fait parce qu'on a fait le choix d'avoir du monde en santé. L'environnement, en exagérant un peu, c'est peut-être un petit peu comme ça. C'est qu'on n'a pas fait le choix de l'environnement, C'est vrai que ça coûte de l'argent, mais est-ce qu'on va faire le choix ou si on le fera pas?

Cela a l'air qu'on ne le fait pas et on en revient toujours à la même chose. Les rives du Québec ne sont pas protégées au jour qu'on vous parle et on vous dit: Si vous avez l'intention de les protéger, bravo! On est avec vous autres; on va vous aider à le faire, mais ne votez pas la loi 6 avant de l'avoir fait.

M. Saintonge: Autrement dit, je dois comprendre que ce que vous voulez, c'est que le ministère de l'Environnement coordonne les interventions par une loi-cadre. Est-ce que c'est ça?

Mme Lepage: On veut une loi-cadre pour la protection des rives, comme il y a une loi pour les installations septiques. Cela a passé comme du beurre dans la poêle. Demandez à toutes vos municipalités. Elles l'ont appliquée et il n'y a pas de problème. Je ne vous dis pas qu'il y a des inspecteurs qui ne font pas leur job. Je ne vous dis pas qu'il n'y en a pas qui se font acheter, pour continuer à construire leur puisard. Il y en a toujours qui vont passer sur les lumières rouges.

Mais, comme je vous dis, les plus grandes sources de pollution de l'eau du Québec - je ne veux pas toucher au domaine industriel; vous allez en entendre parler demain et il est bien plus "rough" que moi -au niveau des lacs, si vous voulez, c'est le déboisement de la rive et la mauvaise installation septique. On est presque arrivé à régler le problème des installations septiques, parce qu'il y a finalement eu une loi-cadre. On vous demande de faire la même chose pour les rives. Ce n'est pas si malin.

M. Saintonge: À ce moment-là, vous seriez d'accord avec l'avis qui avait été émis par le Conseil consultatif de l'environnement sur la nécessité qu'une politique d'encadrement forestier soit mise sur pied par le ministère de l'Environnement et appliquée par le ministère de l'Environnement à l'intérieur d'une loi-cadre?

Mme Lepage: C'est parce qu'à ce moment-là je peux vous dire, vous pouvez voir... Je faisais partie de ce conseil consultatif. Il le faut absolument, mais je ne veux pas prendre tous les problèmes à la fois. On peut bien vous parler des coupes de bois; on peut bien vous parler des déversements de fosses septiques, parce qu'il n'y a pas de sites d'enfouissement sanitaire. Les gars vident la fosse septique et ils vont jeter ça dans la rivière à minuit, le soir. Tu as ça partout au Québec.

Mais, on va commencer par les avoir, les terrains d'enfouissement sanitaire; au moins, le fait qu'il y a une loi, ça empêche... Tu sais que c'est une lumière rouge; si tu es pris, tu vas être "poigné", "tough luck". Si tu n'es pas pris, tant mieux. Mais, au moins, ça empêche les trois quarts du monde de passer sur les lumières rouges.

Le Président (M. Marquis): M. le ministre des Affaires municipales.

M. Marcoux: Mme Lepage, j'aurais deux commentaires. Vous avez réaffirmé indirectement qu'il n'y avait pas de réglementation ou que, s'il y en avait une, elle n'était pas respectée. J'ai encore reçu quelqu'un à mon bureau de comté, lundi, qui me disait: À Saint-Simon, dans le comté de Rimouski, lors des tempêtes qu'il y a eu l'automne passé, il y a un quai en bois qui a été démoli sur le bord de la plage. C'est un endroit de villégiature et, quand la personne a voulu reconstruire ceci, elle ne pensait pas avoir à demander un permis, alors elle a commencé. Au lieu de le construire en bois, elle a décidé de le faire en ciment. Tout de suite, l'inspecteur de la MRC des Basques, de Trois-Pistoles, est arrivé pour arrêter les travaux et cela a pris de longues discussions. Finalement, ils ont reconnu son droit acquis et que la reconstruction n'allait pas plus loin que le quai allait auparavant. Donc, ils ont accepté la reconstruction. Je peux vous dire que c'est partout comme cela au Québec. Les municipalités régionales de comté font respecter les règlements de contrôle intérimaire qu'elles adoptent et vous dites que cela ne s'applique pas. Vous avez même dit que ce n'est pas obligatoire dans les municipalités. C'est complètement faux. Les règlements de contrôle intérimaire s'appliquent obligatoirement dans chacune des municipalités.

Tantôt, vous avez identifié comme étant la réglementation de FAPEL le projet de réglementation municipal relatif aux rives et au littoral des lacs et des cours d'eau, qui est bien identifié comme étant un document du ministère de l'Environnement et qui a été repris. Sur 94 MRC, 70 MRC ont repris textuellement ce projet de règlement. Quand aux 24 autres, elles l'ont repris en l'adaptant à leur milieu et on a reconnu qu'elles atteignaient par d'autres moyens les mêmes objectifs qui étaient dans ce projet de règlement.

Quand vous dites qu'il n'y a pas de normes, qu'il n'y a pas de règlements pour protéger les berges et les rives, c'est faux. Quand vous dites que cela ne s'applique pas, c'est faux. Comme député d'un comté, j'en ai encore un exemple. Dans mon bureau de comté, lundi dernier, une petite paroisse...

Mme Lepage: Félicitations à cette MRC parce qu'elle a fait sa "job".

M. Marcoux: Vous avez dit: Les règlements de contrôle intérimaire ne s'appliquent pas dans les municipalités; c'est faux.

Mme Lepage: Pas qu'ils ne s'appliquent pas; ils devraient.

M. Marcoux: Vous dites: Les municipalités régionales de comté n'ont pas de règlement pour protéger les berges et les rives. C'est faux. Il y en a 70 qui l'ont pris tel quel; les 24 autres en ont pris des éléments ou l'ont adapté à leur milieu, mais elles atteignent par d'autres moyens les mêmes objectifs. La première chose, il faut s'entendre sur les faits. Quand on dit qu'il n'y a pas de réglementation dans ce secteur, c'est faux. On va ajouter à cela un guide d'application pour trouver les meilleures formules. Les 10 ou les 15 mètres, ils sont dans les règlements de contrôle intérimaire. Je pense qu'il faut d'abord s'entendre sur les faits. Quand vous dites... Attendez.

Mon deuxième commentaire, c'est pour dire que je suis d'accord avec vous quand vous avez dit: On ne peut pas régler tous les problèmes en même temps. Vous avez dit cela tantôt. Je ne peux pas être autrement que d'accord avec vous. Ce que vous souhaitez, c'est qu'on règle tous les problèmes en même temps, le problème agricole par rapport aux rives.

Cela fait 100 ans qu'on déboise jusqu'aux cours d'eau. Est-ce qu'on va demander aux agriculteurs, du jour au lendemain, de planter 45 pieds, 15 mètres de boisés le long de vos cours d'eau? Non. Il faut regarder cela un peu plus. Il faut regarder ce qui se passe aux États-Unis, il faut regarder ce qui se passe en Ontario pour trouver des formules qui, à la fois, permettent l'agriculture et protègent le

déversement des eaux, etc., sur le bord des cours d'eau.

Lorsqu'on regarde le niveau forestier, là aussi on ne peut pas régler tous les problèmes en même temps parce qu'il y a des garanties d'approvisionnement qui sont données par le ministère de l'Énergie et des Ressources et il y a certaines façons traditionnelles d'effectuer des coupes de bois. H y a des aménagements et il y a des améliorations à faire, on le reconnaît, mais tout cela ne peut pas être réglé en même temps.

Ce que le gouvernement a décidé de faire, c'est de ne pas attendre que tout cela soit réglé pour agir et permettre aux municipalités d'améliorer le bord des rives et le bord des berges. C'est le choix qu'on a fait. C'est sûr qu'on peut attendre toujours des politiques globales, des études globales et des règlements globaux, certes. On a déjà été habitué a cela un bout de temps dans certaines sociétés ou dans certains milieux et au Québec aussi. Ce qu'on a décidé de faire plutôt, c'est qu'au fur et à mesure qu'on est prêt à agir dans tel domaine, dans tel secteur, que ce soit au niveau industriel, que ce soit au niveau des pluies acides, que ce soit au niveau des sites d'enfouissement sanitaire, et vous pourriez tout aussi bien que moi énumérer la liste des règlements... Je ne pense pas qu'il y ait grand monde au Québec qui se plaigne d'une absence de réglementation et ce, spécialement dans le secteur de l'environnement. Mais, avant d'édicter de nouveaux règlements, il faut ajuster nos flûtes avec les objectifs agricoles, les objectifs forestiers et les objectifs de protection des rives. Ceci peut être fait encore mieux dans l'avenir, mais ce n'est pas parce qu'il y a des améliorations à faire que le point de départ de la discussion doit être de nier le fait qu'il y en a des règlements actuellement et qu'il y en a des lois qui protègent les berges et les cours d'eau.

Mme Lepage: Est-ce que je peux poser une question à M. Ouellette?

Le Président (M. Marquis): Oui, madame.

Mme Lepage: Vous m'avez dit qu'il y aurait des audiences publiques sur Longueuil et que vous étiez pour étudier la situation; si cela existe, la question n'est même pas à étudier.

M. Oueilette: Chère madame...

Mme Lepage: Le remblai de Longueuil, si cela existe, n'a pas le droit d'être là. Qu'on parle le même langage. Ou est-ce que, pour les villes, c'est différent des pauvres municipalités rurales?

M. Ouellette: Mme Lepage, si la ville de Longueuil, qui a bâti de toutes pièces son projet d'élargissement des rives pour y aménager un accès au public, tout en enfouissant son tuyau de conduite des eaux usées vers l'île Charron, si la ville de Longueuil veut réaliser son projet, elle devra d'abord toucher le règlement de contrôle intérimaire de sa MRC; deuxièmement, répondre à toutes les exigences de la Loi sur la qualité de l'environnement et le règlement sur les études d'impact. La loi est là et elle ne dit pas a priori: Moi, le gouvernement, je suis beau, je suis fin, je suis omniscient, je sais tout et je décrète unilatéralement et sans retour possible que votre projet est fou. Il n'y a pas un gouvernement qui va faire cela, sauf peut-être en Union soviétique, et encore. Alors, la loi dit: Si vous avez un projet - vous avez toujours le droit d'en avoir un - vous devrez le soumettre dans le cadre de la loi et de la réglementation et cette loi dit: Ce sont des études d'impact et ce sont des audiences publiques. Vous ne pouvez pas nous en demander plus.

Mme Lepage: D'accord, je comprends cela, c'est avant que cela arrive. Si cela existe, le remblai n'est pas permis à Longueuil.

M. Ouellette: À moins que... Mme Lepage: À moins que quoi?

M. Ouellette: À moins qu'elle n'obtienne de la MRC une modification à son règlement.

Mme Lepage: Ah! Là les...

M. Ouellette: Parce que les lois et les règlements ne sont jamais dans le béton éternel.

Mme Lepage: Et les berges sont protégées avec la loi 61 Alors, on a tout compris.

M. Ouellette: Ce n'est pas cela du tout. Madame, il existe une interdiction réglementaire auprès du projet de Longueuil, mais il n'existe pas de règlement qui émanerait du ciel interdisant à quiconque d'essayer de faire modifier les lois et les règlements existants. Sinon, chaque fois qu'un gouvernement adopterait une loi, le dossier serait clos, on n'en parlerait plus jamais et il n'y aurait plus moyen d'évoluer dans notre société.

Mme Lepage: Je comprends, mais là nous parlons strictement des remblais.

M. Ouellette: Si je vous dis que les remblais proposés par Longueuil dans la

réglementation de la MRC sont illégaux, allez-vous me croire?

Mme Lepage: Si c'est cela, pourquoi payez-vous pour des audiences publiques?

M. Ouellette: Longueuil n'a pas le droit de faire ces travaux, compte tenu de la réglementation existante. C'est pourquoi elle doit se soumettre à des audiences publiques pour obtenir un accord ou un refus.

Mme Lepage: Oui, mais si ce n'est pas permis, M. Ouellette, pourquoi dépense-t-on de l'argent aux audiences publiques?

M. Ouellette: Parce que la loi permet d'étudier des demandes, des projets...

Mme Lepage: Même quand c'est défendu?

M. Ouellette: Bien sûr.

Mme Lepage: Quand une loi défend, vous pouvez demander...

M. Ouellette: La loi ne défend pas d'avoir des projets, elle défend de les réaliser sans...

Mme Lepage: Et vous me dites que les berges sont protégées au Québec?

M. Ouellette: Et comment voulez-vous les protéger autrement que par un règlement?

Mme Lepage: Par une loi-cadre. Quand vous aurez des cas de remblai spéciaux, vous les étudierez un par un, mais ils seront spéciaux, ce sera du "cas-par-cas".

M. Ouellette: Que va dire votre loi-cadre? Pas de remblaiement?

Mme Lepage: Comme les installations septiques: pas de remblaiement...

M. Ouellette: Pas de remblaiement. Mme Lepage: Pas de remblayage.

M. Ouellette: Donc, il n'y en aura plus. C'est fini.

Mme Lepage: Je suis bien d'accord que, lorsqu'on a fait ces installations septiques, quand M. Léger a décidé: D'accord, on va y aller pour les installations septiques en milieu rural, c'était aussi urbain, mais cela ne touchait pas les industries... Cela ne touchait pas n'importe quel gros pollueur ou quoi que ce soit. On était bien d'accord qu'on aurait voulu que les industries soient touchées directement, mais on va dire: On va prendre cette partie-là et cela sera peut-être un autre service. C'est la même chose avec l'aménagement des lacs et cours d'eau. Quand on a une plainte sur un chalet ou une maison sur le bord de l'eau, c'est la municipalité qui s'en occupe. Si elle a son règlement, cela va bien et, si elle remplit les prescriptions de son règlement, il n'y a personne d'autre; si c'est un camp de vacances ou un hôtel, la municipalité va essayer de faire respecter son règlement, mais elle va avoir bien de la misère. Elle va à l'Environnement et là l'Environnement entre et il n'y a pas de problème. Ce que je vous dis, c'est que les remblais sont à proscrire. Si vous arrivez au port de Montréal ou vous arrivez à... Comme à l'Expo, je ne me serais pas battue, même si j'avais été là. Je me serais battue contre un remblai de l'Expo, mais, que voulez-vous, il faut savoir avec quoi on se bat. Je me bats avec des gens qui, je le sens, vont être capables de changer leur attitude envers leur environnement. Je ne peux pas me battre contre le maire Drapeau et contre vous autres. Vous avez décidé de mettre votre maudit mât olympique; que cela coûte n'importe quoi, vous allez le mettre pareil, que je sois là ou pas.

Ce que je vous dis, c'est qu'il faut changer l'attitude du monde si 6n veut vraiment protéger l'environnement; pour ce faire, il faut de la participation et on l'a. Ce que je vous dis, que vous me disiez n'importe quoi, peut-être que oui, c'est dans le règlement intérimaire, mais puisque... Je ne comprends pas; si c'est défendu au Québec de faire un remblai, pourquoi est-ce que vous faites des audiences publiques et que vous continuez à payer M. Beauchamp, qui court après nous pour qu'on soit aux audiences publiques?

M. Ouellette: Je souhaite, Mme Lepage, que FAPEL soit aux audiences publiques.

Mme Lepage: Pas pour des choses défendues, voyons donc!

M. Ouellette: Vous avez suivi le dossier de la tordeuse du bourgeon de l'épinette...

Mme Lepage: Oui, mais un peu...

M. Ouellette:... qui a fait l'objet de deux audiences publiques.

Mme Lepage: Mais je l'ai moins suivi.

M. Ouellette: Avant que j'arrive là ou au moment où je suis arrivé ministre, le MER, depuis au moins douze ans, arrosait avec des produits chimiques. Il n'a demandé la permission à personne. Il n'avait pas de compte à rendre à personne non plus, il arrosait.

À un moment donné est arrivé le règlement sur les études d'impact et on a soumis ce genre de projet, parce que c'est un projet. On a obtenu du MER qu'il raffine un peu sa façon d'agir. En deuxième année, ils sont venus à nouveau, ils ont invoqué la catastrophe appréhendée, ils ont donc échappé à la loi. On a réussi quand même à les contraindre encore davantage. À la dernière audience - là, la castastrophe appréhendée ne tenait plus - on les a obligés tout simplement à réduire à 700 000 hectares la superficie arrosable, on les a obligés à passer à 100% d'utilisation de produits biologiques pour abandonner complètement le chimique d'ici deux ans. Mais c'est cela, les audiences publiques. C'est de permettre au promoteur de venir nous exposer son objectif et c'est à nous de dire: Un instant, cela a du bon sens, cela n'en a pas, vous allez donc devoir modifier votre projet pour le rendre acceptable, environnementalement parlant.

Alors, s'il suffisait d'avoir un règlement qui interdise les remblayages, ce serait vite réglé. Mais on risquerait de paralyser notre société pour longtemps.

Le Président (M. Marquis): II reste les remerciements. M. le ministre des Affaires muncipales.

M. Marcoux: Je voudrais remercier les représentants de FAPEL d'être venus nous présenter leur point de vue et leur mémoire et simplement ajouter la phrase suivante, sous forme d'interrogation: Je ne comprends pas que, après avoir eu autant de succès par la méthode de la conviction et de la persuasion de nos concitoyens face à la protection des lacs, des rives, etc., vous ne soyez pas d'accord pour faire la même démarche auprès des citoyens de Longueuil et de la rive sud. Les audiences publiques, c'est le lieu tout désigné pour faire ce débat public et convaincre les concitoyens de votre point de vue. Évidemment, là il y aura un arbitrage, il y aura des élus qui prendront des décisions et qui feront des recommandations. Mais je ne vois pas, encore là, la cohérence de votre action, à savoir que, durant des années, vous avez fait un travail éducatif que vous continuez et que, dans le cadre, par exemple, du dossier de Longueuil en particulier, dès le point de départ, vous dites: Non, on n'y va pas, on se refuse à continuer ce travail.

Mme Lepage: Non, on refuse d'accepter que le ministre de l'Environnement n'empêche pas les remblais, c'est aussi simple que cela. Parce que, pour nous, c'est un péché. Quand il y a un péché là, je ne suis pas intéressée à aller voir ce qu'ils vont dire.

Une voix: II y a le péché véniel et le péché mortel.

Mme Lepage: Le remblai, c'est un gros péché mortel et peut-être qu'un jour... Vous avez vu ce qui arrive au Saint-Laurent! Continuez comme cela et cela va continuer, vous n'aurez plus de Saint-Laurenti

Le Président (M. Marquis): Le dernier mot, M. le député de Laprairie.

M, Saintonge: M. le Président, c'est simplement pour remercier FAPEL et aussi la Fédération québécoise de la faune, régions nord et sud, de nous avoir fait part de leurs commentaires sur le projet de loi 6, pour tenter de nous éclairer dans les décisions qui seront à prendre au niveau législatif.

Le Président (M. Marquis): Sur ce, merci beaucoup aux représentants de FAPEL. La commission ajourne ses travaux à demain matin, dix heures.

(Fin de la séance à 18 h 5)

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