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(Dix heures quinze minutes)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements
entreprend maintenant ses travaux pour procéder à une
consultation particulière portant sur l'avant-projet de loi sur les
pesticides.
Avant les remarques préliminaires, est-ce qu'il y a des
remplaçants, M. le secrétaire?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. Il y a un
remplacement. M. Vallières (Richmond) sera remplacé par M. Cusano
(Viau).
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
secrétaire.
J'aimerais attirer l'attention des membres... À l'ordre, s'il
vous plaît! J'aimerais maintenant attirer l'attention des membres de la
commission sur les ententes qui sont survenues pour procéder à
cette consultation.
Dans un premier temps, la première heure sera répartie en
parts égales de 30 minutes à chacun des côtés pour
des remarques préliminaires. Dans un deuxième temps, nous
commencerons les auditions particulières et le temps réparti sera
de 20 minutes à l'organisme pour présenter son mémoire, et
de 20 minutes à chacun des deux partis pour procéder aux
remarques et aux interrogations.
Cela étant dit, je céderai maintenant la parole à
M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Clifford
Lincoln
M. Lincoln: M. le Président, je voudrais, tout d'abord,
souhaiter la bienvenue à tous les participants à ces audiences
publiques. Je pense qu'il n'y a même pas lieu de souligner l'importance
de ces audiences publiques car le sujet est critique pour nous qui avons
à coeur la protection de l'environnnement.
Le 18 décembre dernier, je déposais à
l'Assemblée nationale un avant-projet de loi sur les pesticides. Le
Québec est, en fait, la dernière province du Canada et le dernier
État nord-américain à se doter d'une législation
pour contrôler les pesticides sur son territoire. À un moment
donné, nous pouvions dire qu'il y avait deux provinces, mais, depuis un
certain temps déjà, la Nouvelle-Ecosse a adopté une
loi.
Ce que nous proposons comme législation est grandement
inspiré de ce qui existe ailleurs, mais adapté à nos
besoins; les mêmes champs d'intervention qui existent dans les autres
provinces. Cette loi complète la loi fédérale. En effet,
alors que la loi fédérale contrôle la fabrication, la mise
en marché et l'homologation des pesticides, la loi que je propose est un
outil essentiel pour contrôler les autres étapes du cycle de vie
de ces substances, soit la vente et l'utilisation des pesticides.
Si nous avons convoqué de nombreux intervenants à cette
commission parlementaire, c'est pour obtenir leur point de vue sur le projet.
Comme pour tout avant-projet de loi faisant l'objet d'une commission
parlementaire, nous sommes tout à fait ouverts à vos suggestions,
l'idée étant de bonifier le projet de loi. C'est une
démarche qui se veut la plus ouverte possible. Nous considérons
que cela constitue une première grande étape concernant la
gestion intégrée des pesticides sur le territoire
québécois.
À ce stade-ci du développement de notre
société, on ne pourrait se priver complètement de ces
produits, malheureusement. II faut admettre que, sans eux, il y aurait des
répercussions importantes au point de vue socio-économique. On ne
peut pas dire demain matin qu'on pourrait bannir les pesticides. Les pesticides
restent toujours des contaminants et un danger pour la santé et
l'environnement. Ceci est clair.
Les principales causes des problèmes reliés à
l'usage des pesticides sont essentiellement celles-ci:
Premièrement, des connaissances scientifiques insuffisantes,
d'une part, sur les effets sur l'humain et, d'autre part, sur la dispersion et
les effets dans l'environnement.
Deuxièmement, des pratiques d'utilisation hasardeuses qui ont
pour conséquence de mettre la santé de ceux qui les utilisent et
même dans certains cas de la population en général en
danger et de répandre de façon incontrôlée des
pesticides dans l'environnement.
La politique d'intervention dont s'est doté le ministère
de l'Environnement du Québec est une politique de gestion des pesticides
qui repose sur quatre grands principes.
Premièrement, l'accent est mis sur la prévention et la
lutte intégrée. Le ministère de l'Environnement
privilégie les moyens naturels et biologiques lorsque c'est possible en
premier lieu.
Deuxièmement, s'il y a utilisation des pesticides, le
ministère demande des pratiques adéquates et des mesures de
protection qui doivent être respectées en tout temps.
Troisièmement, le ministère favorise et encourage les
recherches qui permettront le développement de méthodes, de
systèmes ou de stratégies de lutte intégrées contre
les pesticides.
Quatrièmement, en matière de gestion de l'environnement,
le ministère assurera l'harmonisation des interventions gouvernementales
avec celles du gouvernement fédéral et des autres provinces.
Ces principes doivent nous amener a ce que l'usage des pesticides
présente des risques les plus minimes possible à la santé
et à l'environnement. Il faut les classifier selon leur caractère
plus ou moins dangereux et suivre de très près la circulation sur
leur territoire québécois et, par conséquent, dans
l'environnement. Il nous faut maintenant mieux connaître les effets des
pesticides et leur cheminement dans l'environnement. Nous nous devons
d'informer et d'éduquer les utilisateurs de pesticides, ainsi que
l'ensemble de la population puisque tous et chacun de nous sommes en contact
avec ces produits.
Nous devons responsabiliser les intervenants qui font usage et le
commerce des pesticides. Nous devons compléter nos outils
législatifs et réglementaires afin d'atteindre certains des
objectifs que je viens d'énumérer. Il faut promouvoir la
recherche de moyens alternatifs de remplacement de ces produits. Il nous faut
concerter nos efforts à l'intérieur du gouvernement, avec nos
voisins et avec le gouvernement fédéral pour que nous puissions
gérer les pesticides de façon rationnelle et sécuritaire
à l'échelle du territoire canadien et nord-américain.
D'ailleurs, le mois dernier, à titre de président du
Conseil canadien des ministres des Ressources et de l'Environnement, j'ai pu
exprimer, à l'occasion d'une réunion
fédérale-provinciale convoquée principalement pour le
sujet des pesticides, plusieurs préoccupations du Québec qui
ressemblaient, en fait, aux préoccupations unanimes de tous les
gouvernements provinciaux sur la gestion des pesticides. Ces
préoccupations sont les suivantes:
Premièrement, les difficultés pour les provinces du Canada
d'obtenir des informations appropriées et complètes du
ministère fédéral de l'Agriculture relativement aux
pesticides homologués par l'État fédéral.
Deuxièmement, nous avons souligné qu'une coordination
beaucoup plus efficace au niveau fédéral doit se faire. La
responsabilité pour l'homologation appartient maintenant au
ministère fédéral de l'Agriculture, le ministère
fédéral de l'Environnement et le ministère
fédéral de la Santé nationale et du Bien-Être social
ne sont pas inclus d'une façon aussi active et efficace que nous le
voudrions.
Troisièmement, il y a une implication insuffisante des
préoccupations de la santé et de l'environnement dans la gestion
des pesticides au niveau fédéral, ce que je soulignais tout
à l'heure.
Quatrièmement, il faut une réévaluation des
pesticides déjà sur le marché. Beaucoup de pesticides sont
homologués, mais la réévaluation ne se fait pas de
façon systématique et assez fréquente.
Cinquièmement, il faut assurer un suivi et une surveillance
écologique des pesticides utilisés.
Sixièmement, il faut assurer une formation adéquate pour
les utilisateurs de pesticides.
Septièmement, il y a la question de l'homologation temporaire des
pesticides qui se fait au niveau fédéral.
Ces questions ont été soulevées au niveau
fédéral. C'est la première fois que nous avons pu obtenir
une convocation des trois ministres fédéraux concernés qui
nous ont rencontrés et qui ont accepté que les provinces
déposent une résolution d'action dans le sens de ces
préoccupations. Nous avons eu l'assurance qu'un suivi se fera. Les
provinces sont déterminées à faire le suivi de toutes ces
questions primordiales pour nous.
Essentiellement, l'avant-projet de loi que j'ai déposé
à l'Assemblée nationale et qui fait l'objet de cette consultation
comprend trois séries de dispositions fondamentales. Tout d'abord, il
institue un système de classification des pesticides. Ensuite, il
énonce des exigences générales quant à la
compétence des utilisateurs et des vendeurs au regard de la classe de
produits qu'ils vendent ou emploient. Enfin, il met en place un système
de contrôle de vente et d'utilisation fondé sur la tenue de
registres et de bilans.
Une réglementation complétera la loi; elle est en voie de
fabrication présentement et sera probablement terminée cet
été. Cette réglementation précisera les classes,
les modalités d'obtention des permis et des certificats, de même
que les amendes. Un projet de règlement sera déposé, comme
je le disais, au Conseil des ministres vers le mois de juillet. Il y aura une
prépublication de 45 jours où tous et chacun pourront faire
valoir leur point de vue. Nous sommes déjà en train de finaliser
des codes de bonne pratique avec certains organismes clés. Nous en avons
déjà un avec l'Association des
exterminateurs du Québec. Dès l'adoption de la loi, nous
allons concentrer nos efforts à finaliser ces codes de bonne pratique
avec tous les intervenants possibles.
Pourquoi a-t-on choisi une nouvelle loi pour gérer les
pesticides? Les raisons sont celles-ci: les règles législatives
qui prévalent maintenant nous obligent è rendre les textes
législatifs le plus "substantifs" possible pour permettre une plus
grande visibilité quant à nos autres intentions
réglementaires postérieures. C'est le cadre législatif
actuel. Ainsi, l'introduction dans la Loi sur la qualité de
l'environnement des pouvoirs habilitants requis pour contrôler la vente
et l'utilisation des pesticides aurait impliqué l'addition de plus de 50
articles uniquement pour cette question. L'idée de se retrouver avec une
loi-cadre comme la Loi sur la qualité de l'environnement, dont le tiers
des articles, 50 sur 150 pour le chapitre I seulement, serait spécifique
à un seul contaminant, apparaissait tout à fait
disproportionnée face au problème à résoudre.
Là n'était pas la question la plus grave. L'introduction
dans la Loi sur la qualité de l'environnement des pouvoirs habilitants
pour gérer la vente et l'utilisation aurait impliqué des
modifications substantielles à des articles très importants de
cette loi, par exemple, les articles 20, 22, 25, 31 et d'autres encore. En
effet, il nous aurait fallu restreindre la portée de ces articles
importants qui ont pour objectif d'empêcher le déversement de
contaminants dans l'environnement afin de permettre, dans le même cadre
légal, l'utilisation des pesticides qui sont également des
contaminants. Face à ce risque d'atténuer la portée de
certains articles de la Loi sur la qualité de l'environnement, j'ai
décidé, afin de protéger ces pouvoirs, de gérer les
pesticides par l'entremise d'une autre loi. En effet, une telle introduction
aurait pu constituer un précédent dangereux relativement à
la gestion, par la suite, d'autres contaminants. De plus, la coexistence dans
la même loi, c'est-à-dire celle sur la qualité de
l'environnement, de pouvoirs afin d'empêcher le déversement de
contaminants dans l'environnement et de pouvoirs permettant l'utilisation de
pesticides, aurait eu pour effet, entre autres, d'augmenter la
complexité de la loi. Dans une optique de rendre plus accessible et
moins laborieuse la compréhension des obligations des intervenants dans
ce domaine, il m'a semblé préférable de les traiter de
façon distincte du point de vue juridique.
Quatrièmement, permettez-moi enfin de vous rappeler que
l'ensemble des provinces canadiennes et des États américains qui
ont légiféré dans ce domaine l'ont également fait
de façon distincte. Les échanges que nous avons eus avec les
représentants de l'Ontario, de l'État de New York, du
Wisconsin et de plusieurs autres États et provinces nous ont
convaincus du bien-fondé de notre démarche à ce sujet.
Je tiens également à vous informer de la
prépondérance de la Loi sur la qualité de l'environnement
sur celle proposée pour les pesticides. Ainsi, en ne limitant aucunement
la portée des articles de la Loi sur la qualité de
l'environnement, les pouvoirs que me confère cette loi permettront
toujours à mon ministère d'intervenir dans tous les cas de
contamination de l'environnement par les pesticides. En effet, l'objectif
visé par le projet de loi sur les pesticides est de régir l'usage
approprié de ces produits en contrôlant les standards de
comportement des utilisateurs. Les pouvoirs inclus dans ce projet de loi me
permettront donc d'intervenir avant qu'il n'y ait contamination et même
indépendamment du fait qu'il y ait contamination ou non, si
l'utilisateur ne s'est pas conformé à toutes les obligations
requises. Toutefois, dans les cas de contamination reconnus, c'est en vertu des
pouvoirs que confère la Loi sur la qualité de l'environnement que
je compte intervenir.
Je tiens aussi à vous assurer que tous les droits relatifs
à l'accès à l'information contenus dans la Loi sur la
qualité de l'environnement sont également inclus dans ce projet
de loi. Cependant, afin de clarifier cet enjeu fondamental pour le public, j'ai
l'intention d'amender ce projet de loi afin que l'on puisse mieux les
visualiser. {10 h 30)
En ce sens, je voudrais ouvrir une parenthèse. J'étais,
malheureusement, absent du Québec lorsqu'un article a paru traitant de
choses assez graves. On y disait qu'il y avait une récidive, une
manoeuvre suhtile pour essayer d'abolir les droits à l'information des
citoyens. L'accusation est sérieuse; je veux en traiter tout à
fait directement et séparément. On disait que les technocrates du
ministère avaient eu, par le biais de cet avant-projet de loi sur les
pesticides, ce qu'ils demandaient directement en mai dernier dans la loi 70 et
qu'on leur avait refusé, avec l'aval de leur ministre, semble-t-il.
L'accusation est sérieuse et grave.
Plus loin, l'article disait: Deuxième point d'inquiétude
et, pour l'instant, le plus important: la future loi fera disparaître le
droit à l'information que les articles 117 et 118 de la Loi sur la
qualité de l'environnement accordent aux citoyens. On allait plus loin
pour trouver aussi qu'un symptôme de la politique libérale de
toujours reculer dans l'environnement était que, en vertu de l'article
53, le ministre de l'Environnement acceptait de consulter le ministre des
Affaires municipales avant d'émettre une ordonnance contre une
municipalité.
Je voudrais répondre à tous ces points parce que je pense
que les accusations sont
sérieuses et graves. Tout d'abord, voici les raisons
fondamentales qui ont voulu qu'on opte pour une loi séparée sur
les pesticides, comme cela a été le cas dans toutes les provinces
du Canada et dans tous les États américains que nous avons
consultés, comme cela a été plus récemment le cas
en Nouvelle-Écosse qui a aussi une loi sur la qualité de
l'environnement et qui, après un long examen de la question, a
décidé de procéder par une loi séparée sur
les pesticides.
Après m'être assis avec les représentants de toutes
les provinces canadiennes, après avoir passé de longues heures
avec tous les experts et le commissaire à l'environnement de
l'État de New York sur cette question - l'État de New York a fait
des grands pas en avant dans la question des pesticides, le contrôle,
l'information et la formation des utilisateurs - après avoir fait tout
cela, après avoir consulté de la façon la plus ouverte et
limpide possible une quantité d'intervenants qui ne se comptent plus,
tant les technocrates du ministère que moi-même, depuis un an
déjà, nous avions commencé à élaborer ce qui
était tout d'abord un projet de réglementation en vertu de la Loi
sur la qualité de l'environnement.
Avant la fin de ces audiences, je vais vous présenter le bouquin
que cela a produit. C'est un bouquin qui est tellement gros que, lorsque
nous-mêmes, au sein du ministère, qui travaillons tous les jours
avec la Loi sur la qualité de l'environnement, on a essayé de
comprendre tout ce que cela impliquait, il nous est apparu clairement que le
Comité de législation allait nous dire: Comment voulez-vous qu'un
citoyen puisse se débrouiller dans tout cela? Il y avait des
amendements, comme je l'ai dit, à environ 50 articles au chapitre I de
la section I de la Loi sur la qualité de l'environnement.
Qui plus est, des opinions juridiques de premier calibre m'avaient
avisé que, si je touchais - par exemple, l'article 20 nous donne des
pouvoirs immenses dans la Loi sur la qualité de l'environnement que nous
ne pourrions jamais avoir dans le cadre législatif actuel - à ces
articles pour réduire l'impact - parce qu'il fallait, pour les
pesticides, naturellement réduire l'impact - sur une question
spécifique, d'un seul contaminant, nous ouvririons la
possibilité, le risque d'un précédent dangereux pour des
effets judiciaires en cour et aussi pour d'autres contaminants où on
aurait peut-être à faire des règlements par la suite.
Devant ce risque, on m'a posé la question: Est-ce que vous
êtes prêt à prendre ce risque? Je n'étais pas
prêt à prendre ce risque et je maintiens cette décision
aujourd'hui. Si on m'accuse de quelque chose, je prends toute la
responsabilité. Ce n'est pas la responsabilité des technocrates
qui ont travaillé avec la plus grande conscience, la plus grande
ouverture et la plus grande limpidité dans ce cas. S'il faut m'accuser
d'avoir fait ce choix, qu'on m'accuse. J'ai fait ce choix de façon
très consciente après avoir consulté des gens de premier
calibre.
Je voudrais aussi mentionner que, parmi les gens que j'ai
consultés, il y avait une personne, que je ne mentionnerai pas ici, mais
que beaucoup d'entre vous connaissent très bien, une personne de la plus
haute intégrité qui a autant que vous et moi à coeur le
souci de la protection de l'environnement, peut-être plus que beaucoup
d'autres personnes au Québec, une personne réputée dans le
domaine du droit environnemental, une des personnes clés ayant
participé è la rédaction de la Loi sur la qualité
de l'environnement, qui m'a dit: Oui, vous pouvez faire une
réglementation à la Loi sur la qualité de l'environnement,
mais ce n'est pas ce que je vous recommanderais. Cela va vous apporter des
risques, cela va faire une espèce de loi, excusez le terme,
bâtarde que personne ne comprendra parce qu'elle sera tellement
compliquée. Je vous suggère, si c'était à moi de
vous conseiller, de le faire par le biais d'une loi séparée.
Nous avons essayé très fermement, pendant au moins six
mois, de travailler à la Loi sur la qualité de l'environnement.
Après tous les conseils qui m'ont été donnés par
des gens très habilités à le faire et dont la
réputation et l'intégrité ne se mesurent plus, j'ai pris
la décision que j'ai prise. Si c'est cela, faire une récidive, si
c'est agir en cachette de faire des audiences publiques où les gens vont
s'exprimer sur un avant-projet de loi, qu'on m'en accuse, je suis prêt
à l'accepter!
Il y a trois points que je soulèverai plus spécifiquement
parce que les critiques s'y sont arrêtés. Comme je l'ai
déjà souligné, selon nous, selon nos conseillers
juridiques, les pesticides sont définitivement des contaminants. La Loi
sur les pesticides, quoiqu'elle complète à bien des égards
la Loi sur la qualité de l'environnement, ne la contredit aucunement et
elle est sous l'égide de la Loi sur la qualité de l'environnement
qui s'applique fondamentalement, malgré tout, dans tous ses articles.
Aucun de ses articles, par rapport à l'aspect des contaminants, par
rapport à l'accès à l'information, n'est remis en
cause.
Mais étant donné la méfiance qui a
été exprimée, étant donné les accusations
sérieuses qui ont été faites, je suis prêt, pour la
valeur symbolique que cela aura -selon moi, c'est une valeur symbolique parce
que j'ai eu des avis juridiques très clairs selon lesquels la Loi sur la
qualité de l'environnement s'applique sous toutes ses formes - à
accepter des changements è la Loi sur les pesticides. Ces changements
vont notifier très clairement que les pesticides
sont des contaminants. Elle indiquera aussi que la Loi sur les
pesticides est sujette à la Loi sur la qualité de l'environnement
et que cette dernière est prépondérante. Nous pourrons
même aller vers l'accès à l'information pour
répéter les clauses sur le registre afin qu'il n'y ait aucun
malentendu à savoir que je voudrais cacher des choses. Ce n'est pas mon
habitude et ce n'est pas ainsi que je travaille.
Si ces changements doivent se faire pour une valeur symbolique -
semble-t-il, en un certain sens, que j'ai perdu la confiance des citoyens sur
ces questions, d'après certains experts; je ne le pense pas, mais c'est
ce qu'on véhicule - je les ferai pour démontrer qu'il n'y a rien
dans cette loi qu'on veut cacher par rapport à la Loi sur la
qualité de l'environnement. C'est une accusation que je rejette tout
à fait, que je n'accepterai jamais.
On a dit aussi: Dans la politique libérale, on cède
partout, sur toute la ligne. II n'y a aucune preuve de cela jusqu'à
présent. Si la preuve voulait se faire, on cite l'article 53, L'article
53 a été incorporé dans la Loi sur les pesticides pour
être en concordance exacte avec l'article 30 de la Loi sur la
qualité de l'environnement. Dans la Loi sur la qualité de
l'environnement, il y a des articles de concordance. On doit consulter le
ministre des Affaires municipales pour toute ordonnance qui aurait des
implications fiscales, qui aurait des implications d'emprunt et qui aurait des
implications de dépense d'argent par les municipalités. Ce qui
s'est passé, c'est que, quand l'article 53 a été
rédigé dans l'avant-projet de loi, par suite d'une erreur
typographique, la question des dépenses a été omise, et
nous allons l'inclure. L'article 53 devrait être une copie exacte de
l'article 30 de la Loi sur la qualité de l'environnement. Selon la Loi
sur la qualité de l'environnement, le ministre de l'Environnement doit
aussi consulter le ministre des Affaires municipales et les raisons sont
claires. Ce n'est nullement une affaire de politique libérale ou un
retrait sur la question de l'environnement.
Pour un gouvernement qui s'est vu accuser de négliger
l'environnement, si je pouvais prendre cinq minutes, je pourrais citer toutes
les réalisations qui ont été faites depuis l'année
dernière, incluant cette Loi sur les pesticides - c'est le premier
gouvernement qui a le courage de la présenter - la loi sur le tabac et
plusieurs autres, la reconnaissance de groupes environnementaux. Le premier
contrat a été donné à un groupe environnemental, la
FAPEL. Il y a toutes sortes d'autres choses que nous avons faites, nous. Je
refuse d'accepter ce genre d'insinuation qui veut que nous soyons prêts
à vendre notre chemise par rapport à l'environnement. Ce n'est
pas du tout le cas et cela n'a jamais été prouvé
jusqu'à maintenant. Je tenais à le souligner parce que je pense
que ce sont des actions importantes, sérieuses et graves qui m'ont
été - je ne sais pas le mot exact -imputées en tant que
ministre et je prends la responsabilité de toutes les actions que j'ai
faites.
Pour revenir à l'avant-projet de loi, la raison pour laquelle
nous avons décidé d'introduire justement, au lieu d'un projet de
loi, un avant-projet de loi, c'est qu'il y a eu des erreurs dans le
passé. Je ne suis pas infaillible, seul le pape l'est jusqu'ici et,
même là, parfois des questions se posent. Je sais qu'il y a eu des
erreurs dans la loi 70, je sais que des retraits ont dû être faits,
mais je préfère admettre des erreurs pour ne pas les
répéter. Dans ce cas, nous avons choisi, au lieu de
déposer un projet de loi comme nous aurions pu le faire, compte tenu de
l'importance cruciale de la question, compte tenu des demandes qui nous ont
été faites par toutes sortes d'intervenants, de déposer un
avant-projet de loi, justement, pour qu'on puisse le bonifier et le changer
après que vous aurez donné vos raisons et vos justifications.
Il me reste quelques minutes. Un dernier mot sur la question des
aqriculteurs et des sylviculteurs. Des déclarations ont
été faites à juste titre - dans les mémoires, c'est
revenu plusieurs fois - comme quoi nous laissions de côté les
agriculteurs et les sylviculteurs; ce n'est pas du tout le cas. Le projet de
loi contient des dispositions pour que les sylviculteurs et les agriculteurs
participent complètement à la démarche, mais seulement en
vue de la dimension de l'enjeu pour eux de ces secteurs immenses. Nous avons,
après consultation intensive, suivi la politique qui est
appliquée dans les autres provinces canadiennes. Graduellement, nous
allons amener ces secteurs dans la loi par voie réglementaire. Les
négociations ont déjà commencé intensivement dans
le domaine agricole avec des gens qui seront participants pour les
classifications I et II dans un avenir prochain et, ensuite, pour les autres
classifications qui représentent des milliers d'intervenants. Il faut du
temps, il faut de la préparation, il faut surtout un consensus dans la
société. On ne peut pas imposer des choses aujourd'hui.
Dans le cas de la sylviculture, j'ai, avec mon collègue des
Forêts, une entente par écrit qu'aussitôt que possible nous
allons établir une politique sur les pesticides qui va déboucher
sur un contrôle des pesticides dans le secteur des forêts qui,
naturellement, est un domaine de vaste importance et de dimension qu'on ne peut
sous-estimer. Donc, il n'est nullement question d'éviter aucun secteur
où les pesticides se trouvent et s'utilisent au Québec. (10 h
45)
Finalement, je voudrais dire aux nombreux intervenants qui ont pris la
peine de soumettre des mémoires qu'on les a lus, qu'on les a
étudiés avec le plus grand soin et la plus grande conscience.
Certains voudraient qu'on aille beaucoup plus loin. Certains disent qu'on va
beaucoup trop loin. Il faudra trouver un juste milieu, un consensus qui soit
une évolution sociale dans la société. On ne fait pas des
projets de loi pour, du jour au lendemain, les imposer. Il faut qu'ils soient
le résultat d'une évolution dans la société et
cette évolution, je pense que ces audiences publiques vont pouvoir la
déceler pour nous amener à un consensus qui, je l'espère,
fera de ce projet de loi un succès, une nouvelle étape dans
l'évolution socio-économique du Québec. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre.
M. le député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux d'abord
souhaiter la bienvenue à tous les groupes qui se présenteront
à cette commission. Je reviendrai sur vos remarques à la fin. Je
tiens à dire, au tout début, que, quand on arrive comme
législateurs en dernier pour légiférer, on doit être
forts de l'expérience des précurseurs dans ce domaine et non pas
jouer aux victimes de la presse ou se sentir l'Aurore l'enfant martyre de
mère nature, ce qui nous empêcherait d'agir, je crois, dans le
moment. Je reviendrai là-dessus à la fin.
La commission de l'aménagement et des équipements nous
convie aujourd'hui et pour les prochains jours à un important exercice
de réflexion a la suite de la présentation par le ministre de
l'Environnement, en décembre dernier, d'un avant-projet de loi sur les
pesticides.
Nous aurons tout lieu de nous interroger sur la pertinence et
l'efficacité des moyens privilégiés pour juguler les
dangers reliés aux pesticides. Il était évident que nous
devions agir en ce domaine.
Le Conseil consultatif de l'environnement soulignait, en 1980, dans un
avis intitulé "Proposition d'un contrôle des pesticides au
Québec", que la sélectivité recherchée dans
l'intervention des pesticides contre des parasites cibles était rarement
atteinte et qu'en conséquence l'impact sur l'environnement devait
susciter l'inquiétude.
Nous en sommes tous et point n'est utile de s'adonner à la
nomenclature des effets néfastes des produits antiparasitaires sur
l'homme, sur ses biens et sur l'environnement, nos invités pouvant se
montrer plus compétents et perspicaces en cette matière.
Notre intervention, s'inscrivant dans la problématique d'une
consultation particulière sur un avant-projet de loi, se veut
essentiellement constructive, reponsable et a fortiori non partisane,
l'acuité du problème ne pouvant en exiger moins. Nos
interrogations s'avèrent toutefois nombreuses et nous tenons à en
faire part ici.
Avant de procéder a une brève revue, l'Opposition aimerait
d'abord rappeler au ministre que déjà, en décembre
dernier, au moment du dépôt de son avant-projet de loi à la
toute dernière semaine des travaux parlementaires, elle lui reprochait
sa précipitation.
Convoquer des individus et des organismes à la veille du long
congé des fêtes et leur allouer un mois pour la conception et la
rédaction de mémoires nous semble s'inscrire sous le chapitre
d'une opération catastrophe.
Certains, par défaut de moyens et de ressources, ont
malheureusement dû déclarer forfait et ils sont plusieurs.
D'autres ont pu répondre à l'appel, mais, dans plus d'un cas,
leur reproche au ministre s'est fait fort explicite.
La Loi sur la qualité de l'environnement elle-même.
Pourquoi une loi distincte sur les pesticides et non pas l'ajout d'un chapitre
à la pièce majeure qu'est la Loi sur la qualité de
l'environnement? Nombreux sont ceux qui ont posé cette question et qui
s'inquiètent des redondances ou du manque de concordance. L'avant-projet
de loi soustrait-il les pesticides aux dispositions de l'article 20 de la Loi
sur la qualité de l'environnement relatif à l'émission
d'un contaminant et qui fait en sorte de prohiber toute matière
susceptible de porter atteinte à la vie, a la santé, à la
sécurité, au bien-être ou au confort de l'être
humain, de causer du dommage ou de porter autrement préjudice è
la qualité du sol, à la végétation, à la
faune ou aux biens?
Rien dans l'avant-projet de loi ne balise ni ne précise
l'application de cet article capital et le ministre devra nous expliquer les
tenants et aboutissants de sa décision d'amputer la Loi sur la
qualité de l'environnement d'un chapitre sur les pesticides. Dans son
énoncé préliminaire, le ministre invoque des raisons
techniques qui sont insuffisantes, quant à moi, pour justifier sa
position.
Agriculture et sylviculture. Preuves et démonstrations ont
été faites; l'agriculture et la sylviculture réunissent
à elles seules plus de 90 % des employés applicateurs de
pesticides et utilisent plus de 85 % de tous les pesticides vendus au
Québec. La portée de la loi ne peut faire fi de ces
coordonnées et il serait juste que l'avant-projet de loi prévoie
les dispositions qui s'appliquent a l'agriculteur ou au sylviculteur, tout en
reconnaisant qu'une réglementation spécifique puisse être
élaborée a leur égard.
Mais la clarté fait ici défaut dans les intentions du
ministre. D'une part, l'article 5 de l'avant-projet de loi stipule que les
dispositions de la section III du chapitre III et celles des sections I, IV et
VI de la loi ne s'appliquent pas aux agriculteurs ou aux sylviculteurs, alors
que l'article 95 du même projet de loi annonce que le gouvernement peut,
par règlement, déterminer les dispositions de ces sections et
chapitres qui s'appliquent aux agriculteurs et aux sylviculteurs. Allons-nous
opter pour 5 ou pour 95?
Ces libellés placent l'industrie agricole et sylvicole dans le
noir. Le législateur devra expliquer ces zones troubles et justifier son
choix d'exclure ces importants utilisateurs de pesticides pour les régir
par des règlements non encore définis.
Notons, par ailleurs, que l'Assemblée nationale adoptait en
décembre dernier le projet de loi 150 sur les forêts. Cette loi
précise que, dans le cas d'aménagement de territoires publics,
des plans de protection contre les insectes et maladies par l'utilisation des
pesticides seront prévus.
Le ministre de l'Environnement doit convenir avec le ministère de
l'Énergie et des Ressources d'une politique d'utilisation
aérienne et terrestre des pesticides en forêt, ainsi que des
règlements afférents. De plus, conformément à ses
devoirs environnementaux et en accord avec l'esprit de l'avant-projet, le
ministre de l'Environnement doit être le maître d'oeuvre de cette
politique.
Enfin, le ministre de l'Environnement, dans une perspective plus large,
doit exercer les pouvoirs que lui confère l'article 2 de la Loi sur la
qualité de l'environnement pour superviser les programmes d'utilisation
des pesticides en milieu agricole et syivicole.
Au chapitre I de l'avant-projet de loi, il est à signaler que la
presque-totalité des mémoires qui ont été soumis
à la commission rappelle l'importance de la juste définition des
termes dans une législation et, à ce titre, invite le ministre
à refaire ses devoirs.
La même unanimité s'exprime relativement à
l'éventail des pesticides soumis à la loi par l'article 3 qui
fait problème en incluant que les pesticides déterminés
par règlement et non tous les pesticides, quels qu'ils soient, vendus ou
utilisés au Québec. La nuance est de taille et n'accepte aucune
exclusion.
Les permis. Les dispositions relatives aux permis de vente et
d'utilisation suscitent nombre d'interrogations. Le fabricant en est exclu,
tout comme l'agriculteur, le sylviculteur, celui qui utilise sur ses biens un
pesticide destiné à un usage domestique et enfin celui qui, de
façon exceptionnelle et sans en faire le commerce, vend au détail
des pesticides - ce qui est incompréhensible, mais c'est écrit
comme cela dans la loi - ce qui, dans ce dernier cas, peut constituer une
importante brèche au contrôle qu'entend exercer la loi.
Mais à qui donc s'appliquera cette loi, pourrait-on demander?
N'a-t-on affaire qu'à un vulgaire code de bienséance? Les
conditions d'obtention d'un permis introduisent à l'article 15 la vague
notion de "personne physique agissant sous la supervision immédiate du
titulaire d'un certificat", récurrente aux articles 21, 30 et 39, et qui
ne donne pas suffisamment de garanties sur les connaissances requises. En fait,
jusqu'où cette délégation de responsabilités
peut-elle opérer sans hypothéquer le niveau de
sécurité à respecter? Tous s'interrogent sur un tel
laxisme législatif.
Aussi, pourquoi à l'article 15, accorder une dérogation
aux municipalités quant aux conditions d'obtention d'un permis,
dérogation allant même jusqu'à les soustraire des
implications d'une infraction à la loi?
Les exclusions de l'article 30 quant a la détention d'un
certificat attestant, chez le vendeur ou l'utilisateur, la qualité de
ses connaissances en matière de pesticides nous semblent
hasardeuses.
Ainsi, celui qui, de façon exceptionnelle et sans en faire le
commerce, utilise ou vend au détail des pesticides devrait
détenir ledit certificat, ceci pour assurer que les utilisateurs
recevront les informations appropriées sur les produits qu'ils
achètent.
Nous croyons aussi que celui qui offre ou dispense des services
reliés à la vente en gros des pesticides doit, de la même
façon, obtenir un certificat afin que les produits et équipements
vendus soient conformes aux normes et règlements et que les
renseignements prodigués soient appropriés.
L'article 36 de l'avant-projet de loi précise, quant à
lui, les conditions d'obtention d'un certificat de compétence et, parmi
les critères retenus, le paragraphe 1° indique la réussite
d'un examen prescrit ou reconnu par le ministre pour une catégorie
déterminée de détaillants ou d'utilisateurs de
pesticides.
Nous en sommes sur la passation d'examens. Toutefois, nous nous
inquiétons de l'absence de prescriptions relatives à l'obligation
de suivre un cours de formation puisque le degré de difficulté de
l'examen ne pourra être supérieur à la qualité de la
formation acquise. Pas de cours compétents, pas d'examens valables. Pas
de cours de qualité, pas de détenteurs de permis ayant les
connaissances requises valables et justifiables.
La latitude ainsi accordée au vendeur et à l'utilisateur
de pesticides quant è la nécessité de combler les besoins
de formation risque d'hypothéquer la validité de certificats
acquis, à moins que le ministre ne nous fasse la preuve des avantages de
son approche non contraignante à l'égard de
l'acquisition de compétences. Bref, pourquoi ne pas rendre
obligatoires les cours de formation pour tous les vendeurs et les
utilisateurs?
L'Opposition s'interroge aussi sur les intentions du ministre quant aux
compétences exigées selon la classe de pesticides et selon les
groupes d'intervenants, tels que présentés dans le tableau 7.5 du
remarquable document de travail intitulé "Pour une utilisation
rationnelle des pesticides au Québec" et que le ministre a su si
aimablement mettre à la disposition de tous. C'est un excellent document
de grande qualité.
On y remarque, d'une part, qu'une expertise poussée est
exigée pour l'applicateur commercial des pesticides de classes 1, 2, 3
et 4 et que, pour l'applicateur privé, la même exigence ne se
retrouve qu'aux classes 1 et 2, une compétence minimale étant
demandée pour la classe 3 et aucune pour la classe 4. Nous croyons que
les risques reliés à l'utilisation des produits antiparasitaires
de classes 1, 2, 3 et 4 sont en tous points les mêmes pour les
applicateurs privés ou commerciaux.
D'autre part, en ce qui concerne la vente au détail des
pesticides de la classe 4, la compétence des vendeurs doit être
exigée et non facultative parce qu'il y a risques potentiels
d'utilisation pour le consommateur et que des informations techniques doivent
lui être prodiguées.
Notons, par ailleurs, qu'en novembre 1984 le ministère de
l'Environnement du Québec signait avec l'Association des
spécialistes en extermination du Québec, l'ASEQ, une entente
visant à mieux contrôler l'utilisation des pesticides à des
fins d'extermination. Cette entente devait aussi permettre la conception et la
mise en opération, avec l'aide de la
Télé-université, d'un programme de formation à
l'intention des spécialistes en extermination, ainsi que la production
d'un code des pratiques professionnelles.
Comment le ministre entend-il articuler cette entente avec ses projets
de législation et de réglementation en matière de
pesticides? Le ministre entend-il conclure d'autres accords du genre et quel
avenir, incidemment, réserve-t-il au projet d'entente que lui soumettait
en avril 1985 la Fédération interdisciplinaire de l'horticulture
ornementale relativement à la vente au détail de produits
antiparasitaires et au service d'entretien des espaces verts? De telles
interrogations importent lorsqu'il s'agit d'orchestrer et de mener une
politique cohérente et efficace en matière de contrôle des
pesticides. Le ministre devra procéder à diverses harmonisations
et, parmi celles-ci, on compte les règlements municipaux, tels le
règlement sur l'extermination et celui sur le logement de la ville de
Montréal, ainsi que le règlement concernant l'épandage des
pesticides voté par la ville de Dollard-des-Ormeaux en juillet
dernier.
Malgré les paroles préliminaires du ministre à ce
sujet, le ministre doit-il transmettre à un plaignant copie du rapport
d'analyse ou du rapport technique sur lequel s'appuie un avis d'ordonnance?
Tant que ce n'est pas dans la loi, je me pose de sérieuses questions.
Cette question est majeure et plus d'un organisme invité s'est
inquiété des limites à l'accès à
l'information qu'introduit l'avant-projet de loi sur les pesticides parce qu'on
n'y retrouve aucune des dispositions relatives aux article 117, 118, 118.4 et
118.5 de la Loi sur la qualité de l'environnement.
À l'article 117, un citoyen peut demander au ministre
d'entreprendre une enquête sur un contaminant susceptible de porter
atteinte à la santé ou dommage à ses biens. À
l'article 118, le ministre doit fournir rapport de ladite enquête au
plaignant. À l'article 118.4, un citoyen a droit d'obtenir du
ministère copie de tout renseignement disponible sur un contaminant.
 l'article 118.5, le ministre doit tenir un registre public de ces
décisions à caractère environnemental. On peut se demander
si, par cette loi, le ministre tente de rééditer l'avortement de
la loi 70. Pour assurer toute l'efficacité et le respect de la loi et de
ses règlements, les inspecteurs nommés en vertu de l'article 74
devront, d'une part, être en nombre suffisant - ce que les coupures
budgétaires passées et prochaines du ministre hypothèquent
lourdement - et, d'autre part, détenir une formation et des
compétences adéquates. Seule la réglementation saura
révéler la réelle volonté du ministre de
contrôler l'usage des pesticides. Les questions restent donc,
aujourd'hui, fort nombreuses quant aux dispositions relatives à la
distribution, à l'élimination, à l'entreposage, au
transport ou encore au recyclage des pesticides. (11 heures)
L'armature réglementaire ne peut, d'autre part, user de toute son
efficacité si elle est accompagnée d'une inadmissible permission
aux dérogations. À cette enseigne, retenons que,
l'été dernier, le ministre de l'Environnement a permis au
ministère de l'Énergie et des Ressources de faire fi d'un
décret gouvernemental de 1985 régissant l'usage des insecticides
contre la tordeuse des bourgeons de l'épinette. Ainsi, on a fait de
l'arrosage aérien - vous vous souvenez de l'arrosage aérien - en
utilisant l'insecticide chimique fenitrothion alors que les règles
déjà rééditées devaient en limiter l'usage
à 10 % contre 90 % pour l'insecticide biologique bacillus thuringlensis.
Nous mettons ici le ministre en garde contre un tel laxisme à
répétition.
Notons enfin que l'avant-projet de loi reste irresponsablement muet sur
les questions de l'étalage, du périmètre de
protection, de l'équipement de sécurité, de
l'arrosage domestique ou encore de la publicité.
Rien encore n'appelle l'établissement de quotas en fonction de la
capacité d'absorption des milieux récepteurs - cela c'est grave -
l'approbation préalable de projets d'arrosage massif ou
l'évaluation des impacts environnementaux de l'utilisation des
pesticides.
Recommandé par la presque totalité des intervenants, un
conseil consultatif sur les pesticides ou, à tout le moins, un
comité "aviseur" pourra revendiquer sa pertinence par les seules lacunes
de cet avant-projet de loi.
À tout le moins, on peut conclure que cette pièce
législative reste hautement perfectible. Dans cette perspective, chacun
des intervenants de cette importante et essentielle consultation
particulière ainsi que le ministre de l'Environnement peuvent compter
sur la collaboration de l'Opposition.
J'aimerais maintenant faire quelques commentaires sur vos remarques en
dehors de votre texte de tantôt. En gros, M. le ministre, lorsqu'on
arrive le dernier, on est censé avoir un projet étoffé et
qui bénéficie de l'expérience de tous ceux qui sont venus
avant nous et toutes les lacunes, les creux et les erreurs qui peuvent avoir
été faits dans le passé, nous sommes censés les
avoir visionnés, les avoir vus et les prévenir lorsqu'on arrive
en dernier avec un projet de loi. Point n'est le cas ici. Et ce n'est pas en
posant au type brimé par la presse que vous allez refaire l'image ou la
qualité de cet avant-projet de loi. C'est ainsi qu'il faut le voir. A
trop s'excuser, on s'accuse.
Cet avant-projet de loi est faiblard, très faiblard, sous le
signe distinctif de la politique actuelle de l'Environnement...
M. Lincoln: Oui, c'est mieux que votre projet de loi. Où
est le vôtre? Qu'est-ce que vous avez fait depuis 1980?
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Terrebonne.
M. Blais: ...sous le signe distinctif de la politique actuelle
faiblarde d'un ministre très faible au cabinet. Faible au Conseil du
trésor, faible devant le ministre des Affaires municipales, faible
devant le ministre délégué aux Forêts, faible devant
le ministre de l'Agriculture. C'est pour cela, que devant le Trésor, le
budget est diminué de 23 %. Aux Affaires municipales, les
municipalités sont soumises à cet avant-projet de loi. Le
ministre est soumis au ministre des Affaires municipales dans cet avant-projet
de loi. Il en est de même en agriculture. Les agriculteurs et les
sylviculteurs ne sont pas inclus. Pour la forêt, le projet de loi 150,
c'est la même chose.
Le ministre pourra, bien sûr, défendre son projet de loi
quand on arrivera à l'étude article par article. Mais, à
cause des remarques préliminaires qu'il a faites, quand on s'allonge le
nez, on court une chance de se le faire frapper.
Aussi, le ministre n'a pas laissé assez de temps aux groupes pour
qu'ils viennent lui dire la faiblesse de cet avant-projet de loi. Moins ils
sont nombreux pour le critiquer, plus il est heureux. Sa faiblesse paraît
moins.
Dans son projet de loi 85 %, des utilisateurs de pesticides sont exclus
et, dans les 15 % qui restent, selon l'article 100, le ministre aura droit de
choisir les pesticides qui sont de bon aloi pour être
réglementés. Alors, s'il en exclut encore là, qui sera
visé par cette loi?
M. Lincoln: Meilleure et plus que votre loi inexistante.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Terrebonne.
M. Lincoln: Beaucoup meilleure que la loi que vous n'avez jamais
adoptée et que vous n'avez jamais eu le courage d'adopter.
M. Blais: C'est vrai.
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaîtl M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Alors, qui sera touché par cette loi? C'est une
loi de bon aloi, un code de bienséance, c'est quoi?
M. Lincoln: C'est beaucoup plus que vous n'avez fait!
M. Blais: C'est très rare que dans l'Opposition on
rédige des lois. M. le Président, voulez-vous mettre un bouchon
sur la cruche, s'il vous plaît? Troisièmement, c'est une
information cachée. Dans la loi Q-2 de l'environnement, tout citoyen a
le droit de recevoir copie des plaintes. Je ne me fie pas à cela tant et
aussi longtemps qu'il n'y aura pas dans l'avant-projet de loi et dans la loi
elle-même une ouverture pour que les plaignants reçoivent copie et
que la Loi sur l'accès aux documents des organismes publics et sur la
protection des renseignements personnels soit respectée. Je suis
obligé de prendre la loi que vous me présentez. C'est sûr
qu'elle est peut-être meilleure que celle qu'on aurait
présentée. On ne l'a pas présentée. Alors, c'est
sûr, vous êtes les derniers arrivés. On ne pouvait pas tout
faire, vous savez!
M. Lincoln: Ah oui!
M. Blais: On ne pouvait pas tout faire!
M. Lincoln: Vous l'avez dit, en vérité!
M. Blais Ce n'est pas en disant que les autres n'ont rien fait qu'on
justifie sa faiblesse. Bon! Ensuite, cet avant-projet de loi étudie la
rationalisation de l'utilisation sécuritaire des pesticides. C'est vrai.
On jurerait que c'est fait par un ministre de la Santé et des Services
sociaux. Un ministre de l'Environnement doit rationaliser l'utilisation qui
brime la qualité de vie de l'environnement, les quantités de
pesticides utilisés et non pas le fait que les utilisateurs et les gens
qui manipulent les pesticides les manipulent avec sécurité. C'est
tout ce que ce projet de loi veut regarder. Les quantités, il n'en est
question nulle part. Est-ce que vous voulez vous suppléer à la
ministre de la Santé et des Services sociaux pour ne pas avoir
d'infections cutanées ou d'inflammations dermatologiques? C'est pour le
sol, la qualité de la vie, pour les gens qui vivent du soll, pour les
gens qui boivent l'eau des nappes phréatiques et souterraines et pour
les gens qui vivent de la terre que ce projet de loi a dû être
fait. Ensuite, ce projet de loi n'a rien, mais rien, pour favoriser
l'agriculture biologique. Dans son énoncé préliminaire, le
ministre dit que c'était l'une des priorités. Encore, il nous a
dit au mois de janvier 1986 qu'il était bientôt pour signer avec
les Mines Noranda sur les pluies acides, très bientôt. Nous sommes
rendus en février 1987 et bientôt n'est pas arrivé encore.
C'est combien long, bientôt?
M. Lincoln: ...
M. Blais: Je serais très heureux si vous signiez. Je sais
que vous avez une lettre de 35 000 $, mais sortez-la.
M. Lincoln: C'est plus que vous n'avez fait durant neuf ans de
pouvoir.
M. Blais: M. le Président, est-ce qu'on a le droit
de...
Le Président (M. Saint-Roch): A l'ordre, s'il vous
plaît! M. le député de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, je l'ai laissé
aller!
M. Lincoln: Neuf ans de pouvoir.
M. Blais: Je l'ai laissé critiquer et jouer à
Aurore devant les journalistes. Je ne l'ai pas interrompu. Il n'y a rien dans
cela pour favoriser la quantité de pesticides qui devrait diminuer selon
les années et que les moyens naturels de combattre les parasites
devraient entrer en ligne de compte par des études et des recherches. Il
n'y a rien dans cela. C'est une loi qui pourrait être faite par la
ministre de la Santé et des Services sociaux, je le
répète, pour ne pas que les gens qui manipulent les pesticides
aient des inflammations dermiques. En réalité, que reste-t-i. de
cet avant-projet de loi? II reste une chance que beaucoup de mémoires
vous ont été présentés. Ces mémoires ont
été rédigés par des gens compétents. Je les
ai tous lus. M. le ministre, malgré le peu de temps que vous leur avez
donné, à ma grande joie, plusieurs vont venir quand même
pour la présentation. Ce sont des rapports très compétents
et des mémoires très bien rédigés. C'est ce qui va
vous rester. II va vous rester aussi, M. le ministre, pour le plus grand bien
de la population québécoise, une Opposition vigilante qui, forte
des rapports et des mémoires qui vous sont soumis, va défendre la
qualité de la vie et l'environnement de façon
générale et faire en sorte que la Loi sur les pesticides
protège les habitants de cette terre québécoise et
agrémente le plus possible le milieu de vie, tout en essayant de vous
imposer un peu plus de biologique dans cette loi et des restrictions
quantitatives de l'utilisation des pesticides. Sur ce, M. le Président,
je vous remercie beaucoup.
Auditions
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. Les déclarations d'ouverture
étant maintenant complétées, je demanderais aux
représentants de l'Institut canadien pour la protection des cultures de
prendre place devant la commission, s'il vous plaît!
Messieurs, permettez-moi, au nom des membres de la commission, de vous
souhaiter la bienvenue pour la présentation de votre mémoire sur
Pavant-projet de loi sur les pesticides. À l'intention des membres de la
commission et du Journal des débats, je demanderais au
porte-parole du groupe de bien vouloir s'identifier, ainsi que les gens qui
t'accompagnent.
M. Letendre (Glenn): Sûrement, M. le Président. Mon
nom est Glenn Letendre. Je suis président du conseil provincial de
l'Institut canadien pour la protection des cultures. À ma gauche, M.
Claude Roger, chargé de l'étude du projet de loi; à ma
droite, M. Michel Tremblay, président sortant du comité; M.
Bernard Poliquin, chargé du comité technique et, enfin, M. Daniel
Savoie, secrétaire-trésorier de notre association.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
président. J'aimerais vous rappeler que vous avez maintenant 20 minutes
pour faire la présentation de votre mémoire. Je vous cède
la parole.
Institut canadien pour la protection des
cultures
M. Letendre: Merci, M. le Président. C'est avec plaisir
que l'Institut canadien pour la protection des cultures, section du
Québec, vous présente son mémoire sur l'avant-projet de
loi. L'Institut canadien pour la protection des cultures représente plus
de 40 compagnies de fabricants et de distribution dans tout le Canada.
L'industrie des produits chimiques agricoles fonctionne selon un code
d'éthique et un code de marketing. Ce code se veut une orientation
générale sur le bon fonctionnement de l'industrie tout en
respectant les lois des utilisateurs et l'environnement. Le respect pour
l'environnement est une responsabilité majeure pour l'ICPC et tous les
membres sont impliqués dans la recherche constante des moyens pour
améliorer les techniques d'application, la disposition des contenants,
l'entreposage, la distribution, de même que la sécurité de
l'utilisateur et du public.
Consciente que ses responsabilités ne se limitent pas à la
création et à la fabrication d'un produit, l'industrie a cru bon
de se doter d'un code de marketing. Les pesticides sont des outils essentiels
qui aident les producteurs québécois et les consommateurs
à contrôler les parasites qui menacent les récoltes, qui
bouleversent notre style de vie et qui ont un effet sur la santé
publique. Afin de s'assurer que ces produits sont utilisés sans danger
et pour les usages prescrits, il est essentiel que les consommateurs, les
distributeurs et les détaillants de pesticides connaissent ces produits
à fond, leur usage et leur mode d'emploi.
L'Institut canadien pour la protection des cultures et toutes les
entreprises membres au sein d'industries fournissent tous les renseignements
nécessaires à la distribution et à l'usage des produits
chimiques. Grâce aux recherches continues et aux systèmes de
contrôle, les entreprises membres ont à leur disposition les
renseignements les plus complets et les plus à jour au sujet des
produits qu'elles vendent, y compris la composition toxicologique et le
rendement de ces produits. (11 h 15)
Au cours des dernières années, la qualification technique
et scolaire de l'ensemble du personnel oeuvrant dans le secteur des pesticides
s'est grandement améliorée au Québec. De plus, depuis
près de trois ans, l'ICPC, section Québec, en collaboration avec
l'Institut de technologie agricole de La Pocatière et le service de
l'éducation aux adultes a assuré la promotion d'un cours sur
l'utilisation rationnelle et sécuritaire des pesticides auprès
des détaillants de produits chimiques agricoles du Québec.
Aujourd'hui, près de 250 personnes représentant la
majorité des vendeurs au détail des pesticides ont suivi ce cours
avec intérêt. L'attitude de ces derniers est très favorable
à l'approche et aux idées développées lors de ces
journées d'études. L'institut, dans le but de sensibiliser les
personnes impliquées dans la vente et l'utilisation des pesticides aux
dangers des pesticides, a produit une présentation audiovisuelle sur le
triple rinçage, un moyen facile de rendre des contenants vides de
pesticides non toxiques è l'environnement.
D'autres présentations sur la manipulation sécuritaire des
pesticides et les premiers soins en cas d'empoisonnement ont été
développées et, grâce au ministère de
l'Environnement, toutes les présentations furent traduites en
français. Ces présentations sont mises à la disposition du
public par l'institut et par les ministères de l'Environnement et de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
L'ICPC est favorable à une meilleure utilisation des pesticides
en vue de la protection du public, des utilisateurs et de l'environnement.
C'est pourquoi l'institut appuie la nécessité de l'existence
d'une loi sur les pesticides au Québec et est en accord avec l'ensemble
et l'idée du projet de loi présenté par le ministre de
l'Environnement.
Par contre, nous voudrons vous faire connaître nos points de vue
sur certains détails de cet avant-projet de loi car nous croyons qu'il
faut assurer une protection aux entreprises évoluant dans ce secteur
ainsi qu'aux agriculteurs qui sont les utilisateurs principaux de pesticides au
Québec.
Nous reconnaissons que l'agriculture représente plus de 80 % de
l'utilisation des pesticides ou environ 2300 tonnes de matière active au
Québec. Ce sont les chiffres du bilan de 1982. Le même projet de
loi, dans une première étape de réglementation, exclut les
agriculteurs et les sylviculteurs. Par contre, reconnaissant qu'ils sont les
utilisateurs principaux de pesticides au Québec, l'institut
espère que le gouvernement du Québec va élaborer, sans
tarder, un ambitieux programme d'éducation à leur intention.
Pour nous, le succès complet de ce projet de loi sur les
pesticides repose sur la qualification des utilisateurs de pesticides, tant au
niveau de la sécurité que du respect des normes d'application.
L'ICPC favorise une approche où les ventes des pesticides de classes
restreintes telles que proposées dans le document de travail appuyant la
loi soient d'abord précédées par une recommandation
professionnelle et que les utilisateurs de ces produits suivent un cours
spécifique relatif à l'utilisation de ces produits.
Le ministre, pour s'assurer que les pesticides ne seront utilisés
que par le personnel qualifié et informé, propose dans
l'avant-projet de loi les points suivants: une classification de
pesticides, la compétence de l'utilisateur et du vendeur et le
contrôle de la vente et de l'utilisation,
Lors de l'élaboration de la liste des différentes classes
de pesticides et des différentes catégories d'utilisateurs et de
vendeurs, l'ICPC recommande que le ministre de l'Environnement inclue dans le
projet de loi un comité interdisciplinaire mandaté à
donner son approbation aux différentes réglementations
régissant cette loi.
Un comité conseil avec la participation de représentants
non gouvernementaux est prévu dans la majorité des provinces
dotées de programmes de contrôle sur les pesticides. Ce
comité, s'il est adopté au Québec, devrait être
formé de personnes provenant du MAPAQ, du MENVIQ, de l'Institut canadien
pour la protection des cultures, de l'Ordre des agronomes du Québec, des
ingénieurs forestiers, des technologues, des groupes environnementaux et
de toute autre personne ou groupe pouvant apporter un apport concret au
comité.
En ce qui concerne le contenu, la diffusion et l'examen pour l'obtention
du certificat, ce même comité interdisciplinaire doit être
consulté. Le comité "aviseur" pourrait également avoir un
rôle important dans l'étude des règlements touchant les
injonctions, tels que décrits à l'article 67 de l'avant-projet de
loi.
L'avant-projet de loi, au chapitre III, Permis et certificats, à
l'article 9 et à l'article 30 exempte toute personne qui, de
façon exceptionnelle et sans en faire commerce, utilise ou vend au
détail des pesticides. Ces paragraphes portent à confusion et
sont en contradiction avec les définitions de "détaillant" et
"vente au détail" du chapitre I, section 1.
L'institut est contre ces exceptions car elles ouvrent la porte à
beaucoup d'interprétations et d'abus. Les exceptions permettent la vente
de pesticides en dehors de la loi. Elles mettent en danger l'éventuel
contrôle des pesticides et risquent de compromettre le succès de
cette loi qui repose sur la qualification des vendeurs de pesticides au
Québec.
L'Institut canadien pour la protection des cultures voudrait donc que
l'article 9, paragraphe 2 , et les mots "vend au détail" de l'article
30, paragraphe 1 , soient rayés.
L'avant-projet de loi fait référence, aux articles 15, 21,
30 et 39, à une personne physique sans certificat agissant sous la
supervision immédiate du titulaire d'un certificat. L'institut croit que
le texte de loi doit éliminer toute idée de personne sans
certificat. De cette façon, nous croyons que la certification de tous
les intervenants quant, aux normes de sécurité et d'application
correspondra davantage à l'esprit de responsabilisation que veut
implanter la présente loi.
Dans le même esprit, l'institut, section du Québec,
désire voir tous ses membres recevoir la même qualification, car
il y a une importante interaction entre les activités des
employés membres des compagnies de base, les grossistes et les
détaillants dans la vente, la promotion et les recommandations de
pesticides chez l'agriculteur.
Au chapitre IV, le ministre fait mention qu'il a le pouvoir de faire
ramasser des pesticides déposés aux mauvais endroits et d'en
disposer. Il faudrait bien définir les normes sur la façon de
disposer de ces rebuts pour permettre de répondre aux exigences de ces
règlements.
L'ICPC ne veut pas que, sous le couvert de cette loi, au chapitre VI,
article 100 de l'avant-projet, on modifie au Québec la loi
fédérale sur les produits antiparasitaires, qui touche
l'étiquetage et l'emballage des pesticides.
L'industrie, pour répondre aux normes fédérales sur
l'étiquetage et l'emballage a développé pour les
utilisateurs une série de contenants allant de 500 ml à 200
litres. L'industrie ne veut pas que cette loi encourage le transvidage de
contenant sans qu'une étiquette complète et approuvée par
le gouvernement fédéral y soit apposée.
Selon l'institut, l'utilisation des contenants tels qu'offerts par
l'industrie agrochimique offre la meilleure sécurité pour
l'utilisateur et le public. L'obligation de suivre les normes
fédérales d'étiquetage et d'emballage devrait
apparaître officiellement dans la loi du Québec.
En terminant, l'Institut canadien pour la protection des cultures
souligne l'importance qu'un comité interdisciplinaire soit inclus dans
la loi pour l'élaboration et la modification des règlements selon
les nouvelles réalités des différentes utilisations des
pesticides.
Nous désirons fortement faire partie d'un tel comité et
avoir un rôle actif dans la présentation des cours pour
l'obtention des permis et des certificats. Grâce à notre
connaissance des pesticides et à l'existence de notre code
d'éthique et de marketing, nous, l'Institut canadien pour la protection
des cultures, croyons pouvoir apporter beaucoup à la réalisation
d'une loi qui pourrait garantir l'utilisation et la vente rationnelle et
sécuritaire des pesticides au Québec.
Je tiens à remercier le ministre pour avoir donné à
notre institut la possibilité de présenter ses idées et
commentaires sur t'avant-projet de loi sur les pesticides. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
président. M. le ministre.
M. Lincoln: M. Letendre, je voudrais
vous poser quelques questions. Comme vous le savez très bien, les
représentants du ministère ont eu une consultation
préalable avec votre organisation, je pense, le 21 novembre 1986. Vous
aviez indiqué plusieurs inquiétudes par rapport à
l'avant-projet de loi qui devait être déposé. Vous nous les
avez confirmées avec beaucoup de soin et de détails dans votre
mémoire et je vous en remercie.
Il y a quelques points qui nous importent plus que d'autres.
Naturellement, on ne peut pas tout passer en revue, puisque le temps ne nous le
permet pas, mais je peux vous dire qu'on a lu votre mémoire avec
beaucoup d'attention; on l'a analysé dans toutes ses parties, mais je
voudrais vous poser quelques questions spécifiques par rapport à
certains articles que nous considérons plus importants que d'autres.
Par exemple, en ce qui concerne la formation des agriculteurs, je sais
qu'il y a une ambiguïté qui semble avoir soulevé des
inquiétudes quant aux articles 5 et 95. En fait, vous le soulignez dans
votre mémoire. Je pense que le critique de l'Opposition l'a
souligné également. Est-ce que vous avez l'avant-projet de loi
devant vous?
M. Letendre: Oui.
M. Lincoln: D'accord. Je voulais souligner qu'à l'article
5 de l'avant-projet de loi il est vrai que le premier alinéa soustrait
les agriculteurs et les sylviculteurs de l'application de la loi parce qu'il
fallait trouver un mécanisme pour ne pas les inclure tout de suite,
étant donné les circonstances spéciales de ces deux
grosses industries. Si vous regardez le deuxième alinéa de
l'article 5, on dit: "Toutefois, le gouvernement peut déterminer, parmi
ces dispositions, celles qui s'appliquent à un agriculteur ou à
un sylviculteur qui utilise des pesticides pour les fins de son exploitation
agricole ou sylvicole." Cela, c'est le pouvoir "substantif que donne la loi
dans ce deuxième alinéa. L'article 95, ce sont les pouvoirs de
réglementation issus de la deuxième partie de l'article 5.
Je veux souligner que ce n'est certainement pas notre intention - je
vous le confirme par l'interprétation de la loi - de soustraire les
agriculteurs et les sylviculteurs. C'est pourquoi le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation est ici aujourd'hui. Il participera
très activement a la rencontre avec l'UPA tout à l'heure. Nous
avons déjà eu des consultations assez intensives avec les gens du
domaine agricole pour que, éventuellement, l'information soit
donnée, pour les classes plus restreintes d'abord, et ensuite pour les
classes plus ouvertes qui contiennent, en tout, à peu près 42 000
personnes, 35 000 et 7000. Est-ce que c'est clair dans ce cas?
M. Letendre: Je crois que, lors de notre dernière
rencontre, la position du ministre a été très claire. Ce
qui nous préoccupe, surtout au début, on réalise que c'est
un mécanisme qu'il faut mettre en place. Le problème qu'on vit
présentement dans l'industrie, c'est une mauvaise réputation
à l'endroit de l'environnement. Vu que ce sont les agriculteurs qui
utilisent la plus grande gamme de produits, il est quand même très
important qu'ils soient inclus et vous nous assurez que ce sera fait.
On a souligné que, pour les produits restreints, il faut
absolument faire quelque chose sans tarder. Je pense que c'est le point qu'on
voulait souligner ici. Si vous dites qu'on va suivre plus tard, il n'y a pas de
problème. (11 h 30)
M. Lincoln: Je pense que le secteur agricole réalise que,
pour les produits plus restreints, il faudra commencer beaucoup plus tôt
que pour les autres domaines.
Il y a aussi la question de la confidentialité des
activités commerciales que vous avez soulignée. En 1978 et en
1982, deux bilans sur les pesticides ont été
déposés, justement de façon à protéger les
données commerciales individuelles des sociétés et des
corporations. Nous en sommes très conscients. Même avec un
registre, c'est sûr que la confidentialité des ventes
individuelles de sociétés ou des ventes individuelles de
personnes morales ou physiques sera protégée; je peux vous en
assurer aussi.
Vous avez parlé de la question des ventes exceptionnelles, la
dérogation à l'article 9. Je tiens à vous expliquer la
raison pour laquelle elle existe afin que le sens et l'objectif de cette
dérogation soient compris. Dans le sens légal, si, par exemple,
j'ai, chez moi, des pesticides que j'avais le droit de garder, si je quitte ma
demeure et que je les vends à mon voisin, c'est une vente légale
pour le vendeur. À ce moment-là, j'aurais dû avoir un
permis.
Vous avez un autre exemple, l'exemple d'un agriculteur pomiculteur. Ils
ont soulevé cette objection spéciale. Si vous avez un pomiculteur
qui se sert de pesticides acceptés, s'il a un permis, etc., s'il doit
aller à l'hôpital et s'il passe un pesticide à son voisin
qui a un permis, cela pourrait être une vente au sens légal du
mot. Il faut permettre des exceptions. Ce qu'on vise, c'est de contrôler
les ventes régulières, mais pas des cas complètement
exceptionnels. C'est une concordance qui a été faite, m'assurent
nos juristes, avec les lois fiscales pour permettre des cas exceptionnels, tout
à fait exceptionnels. Ce ne sont pas des dérogations qui vont
rentrer dans la norme, ce sont des ventes non répétitives,
des
passages de produits de façon non répétitive et
exceptionnelle.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Glenn Letendre.
M. Letendre: Ce qui nous inquiète dans cet article, c'est
que I'exceDtion laisse la porte ouverte à la vente de produits chez
celui qu'on appelle le "farmer dealer". C'est une situation qu'on retrouve dans
le domaine, ce sont des coopératives locales qui achètent en
groupe et qui revendent à l'intérieur du groupe. Nous demandons
justement s'il y a moyen... Je comprends pourquoi vous vouiez inscrire cette
exception dans la loi, mais y aurait-il moyen de ne pas laisser faire cette
sorte de transaction dans ce domaine? On parle de peut-être 20 % des
ventes de pesticides au Québec.
M. Lincoln: Je vais prendre note de cela. Nous allons
considérer sérieusement la chose. Quelle est la procédure?
Est-ce que je finis de poser mes questions et, après, on passe à
l'Opposition? On alterne ou quoi?
Le Président (M. Saint-Roch): Libre à vous, M. le
ministre. On peut faire l'alternance ou...
M. Lincoln: Si je peux terminer, j'ai deux ou trois questions et,
après cela, j'aurai fini.
Le Président (M. Saint-Roch): D'accord, M. le
ministre.
M. Lincoln: II y a aussi la question de la formation de celui
qui, par exemple, est commis dans un établissement. Si je vous ai bien
compris, vous avez dit au sujet des articles 15, 26 et 30: Nous avons des
réserves et des inquiétudes quant à ta question de la
supervision immédiate. Vous dites: On aimerait que les permis circulent
dans l'établissement parce que, autrement, il n'y aura pas de
contrôle. C'est bien cela, votre inquiétude?
M. Letendre: C'est bien cela, oui.
M. Lincoln: D'accord. Si nous insistions pour un permis dans le
cas de chaque personne qui travaille dans un établissement, par exemple
chaque commis, cela créerait une situation presque impossible parce
qu'à ce moment-là il faudrait que la caissière ait un
permis. Dans le cas d'un bureau d'avocats, c'est un avocat qui est responsable
pour ses employés, mais tous ne sont pas des membres du corps
professionnel. C'est le cas, par exemple, dans les pharmacies. Ce sur quoi nous
voulons insister, c'est qu'on parle de supervision immédiate et
l'interprétation dans la loi, cela comporte et renferme l'idée
d'une supervision sur les lieux d'exécution des travaux. Si, par
exemple, on insistait sur un permis pour tous les employés, cela
voudrait dire qu'on ne pourrait pas avoir des employés temporaires
pendant l'été. Cela serait un mécanisme de contrôle
presque impossible aujourd'hui. Peut-être qu'à l'avenir, si on
voit que la question de la supervision immédiate n'est pas
adéquate, on pourra aller plus loin. Mais le faire dès le
départ, cela aurait presque créer une situation bureaucratique
impossible à gérer. Nous avons suivi le système qui s'est
établi dans tous les corps professionnels. Et, dans tous les endroits
où il y a un responsable qualifié, c'est à lui de
surveiller les gens non qualifiés, comme c'est le cas dans une
pharmacie, par exemple.
M. Letendre: Je crois que notre inquiétude à propos
de ce point, c'était plus au niveau de l'utilisation, si on parle des
applications faites en ville, etc. Je pense qu'on est d'accord avec votre
opinion ou votre position concernant les lieux de commerce. Mais, si vous dites
que cela s'applique surtout pour cela et pas pour l'utilisation des produits,
je crois qu'on est d'accord. Si on parle de l'application ou de l'utilisation
des produits, je crois que toute personne qui applique les produits, si on
parle "d'applicateurs" à forfait ou des gens qui font les applications
sur les pelouses, devrait être certifiée.
M. Lincoln: C'est bien le sens de la loi. M. Letendre:
C'est bien le sens?
M. Lincoln: Oui. Nos conseillers juridiques nous confirment, par
exemple, dans la question du "farmer dealer", que, s'il fait un commerce
effectif, c'est-à-dire des ventes qui ne sont pas non
répétitives - pas des ventes exceptionnelles, mais un commerce
qui se fait de façon régulière - il serait soumis à
la loi de toute façon.
M. Letendre: Est-ce que cela comprend les groupes d'achat
aussi?
M. Lincoln: Pardon?
M. Letendre: Les groupes d'achat. Je parle ici plus comme groupe
d'achat.
M. Lincoln: Oui. S'ils le font de façon
répétitive, c'est sûr qu'ils seront soumis à la
loi.
J'ai deux autres remarques à vous faire. J'ai deux autres
questions. À l'article 100 paragraphe 6°, vous avez parlé de
ta question de l'étiquetage. Je voulais vous confirmer que ce n'est
nullement notre intention de contrevenir d'une façon ou d'une autre aux
exigences fédérales, nullement.
Notre objectif, c'est de voir que les produits qui sont
transportés vers les lieux d'application sont clairement
identifiés; par exemple, l'étiquetage des produits que
"l'applicateur" prépare à partir des produits concentrés
pour une application chez divers clients. On pourrait le faire par les codes de
bonne pratique que nous allons établir, mais l'étiquetage, c'est
un champ de juridiction fédérale qu'on laisse géré
par le fédéral. Les normes fédérales, c'est pour
nous une base, une première assise; elles sont
généralement reconnues. On ne veut pas contrevenir, aucunement,
à cela. On va peut-être les complémenter, en ajouter, les
solidifier quand ce sera nécessaire, par exemple, dans les cas que je
vous ai cités, mais ce n'est pas notre intention de contrevenir à
l'application des normes du fédéral concernant
l'étiquetage. À moins que vous n'ayez des questions à
poser, je...
Je m'excuse, j'ai une dernière question.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: Je voudrais vous poser une dernière question.
On a parlé de la confidentialité des renseignements. Concernant
l'accès à l'information, qui est très vaste dans notre
loi, il y a une question où la confidentialité devient
très subjective.
Vous avez parlé de la confidentialité des activités
commerciales des entreprises. J'ai parlé des bilans, des choses qui ont
réellement trait à des renseignements confidentiels touchant une
entreprise, par exemple, sa marge de profit, etc. Vous parlez de la
confidentialité des activités. Est-ce que vous voulez restreindre
toute information qui a trait à l'activité d'une entreprise par
rapport aux pesticides parce que, à ce moment-là, cela va
beaucoup plus loin que ce que je vous ai déjà dit? J'ai envie
d'être sûr qu'on se comprend.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Oui. On a des compagnies qui n'ont qu'un
seul produit vendu au Québec. D'accord, on parle de 158, 180 produits
déclarés vendus sur les listes de prix, mais, en
général, on peut résumer qu'une quarantaine de produits
représentent à peu près 85 % des ventes au Québec.
Lorsqu'une une compagnie vend un seul produit et qu'on le déclare dans
les données nnn pas comme ventes totales au Québec, mais comme
ventes par paroisse ou par village, à ce moment on calcule cela comme
des informations commerciales plutôt que comme des informations
techniques comme telles pour connaître la quantité de produits
vendus au Québec.
M. Lincoln: Dans les bilans de 1978 et 1982 qui ont
été rendus publics, les statistiques ont été
émises de façon que le public soit renseigné sur la
quantité, le volume des pesticides vendus, mais cela n'identifie pas
cela à une entreprise en particulier. Je pense que la
confidentialité des affaires d'une entreprise en distinction des
activités par rapport aux pesticides en général est
respectée. Je ne pense pas qu'il y ait de problème de ce
côté.
M. Savoie (Daniel): En 1978 et 1982, d'accord. En 1982, on a
réussi à corriger certaines familles parce qu'on avait
déjà commencé à préciser davantage les
familles de produits comme telles, les groupes de produits. Puis, dans
l'inventaire qu'on est en train de faire présentement, je crois que
l'intention du ministère n'est pas encore arrêtée. On avait
parlé, au départ, de préciser les familles de produits par
municipalité et de rendre ces choses publiques. À ce moment, cela
se trouve à être en même temps des renseiqnements
environnementaux, des renseignements commerciaux, de lieux de la
clientèle et des quantités achetées ou vendues dans telle
ou telle région, lorsqu'on corrobore cela aux données du nombre
d'agriculteurs dans une région particulière.
M. Lincoln: En fait, ce que je peux vous dire, si vous vous
référez à la Loi sur la qualité de l'environnement,
aux articles 117 et 118 sur l'accès à l'information, par rapport
à la dissémination de l'information au public, c'est le sens de
notre démarche, c'est comme cela qu'on va travailler, c'est dans ce sens
qu'on va travailler. Jusqu'à maintenant, des demandes presque
innombrables nous arrivent sur ces questions. La question de la
confidentialité des entreprises commence à devenir un enjeu. Il y
a, par exemple, une cause qui est en train d'être étudiée
et qui est même allée devant les tribunaux: Est-ce qu'une
entreprise doit déposer ou non son bilan pour prouver qu'elle fait des
profits ou non, dans la question des déchets? Tout cela est en
revue.
Tout ce que je peux vous dire, c'est que notre intervention va
être dans le sens de l'accès à l'information le plus vaste
possible tout en tenant compte des contraintes commerciales des entreprises. On
ne veut pas identifier les choses confidentielles des entreprises, les brevets,
etc. Seulement, il faudra diffuser l'information afin que le public connaisse
exactement tous les contaminants qui sont utilisés dans
l'atmosphère.
Je sais que ce n'est peut-être pas une réponse très
précise, mais ces choses ne sont jamais blanches et noires.
M. Tremblay (Michel): D'accord. Mais si
vous dites que vous vous référez à la loi sur
l'environnement comme telle, je pense qu'on a vécu avec depuis plusieurs
années et on peut continuer.
M. Lincoln: ...cela.
M. Tremblay (Michel): C'est parce que c'était une nouvelle
loi et on se demandait si les règlements étaient pour
changer.
M. Lincoln: Non, non. On va se fonder là-dessus...
M. Tremblay (Michel): D'accord.
M. Lincoln: ...et en plus sur ce qu'on vous a dit, les bilans,
etc. Mais cela va être le sens et l'objectif.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup. D'abord, une question qui va
peut-être vous paraître un peu curieuse. En quelques mots, quel est
le but de votre organisme? (11 h 45)
M. Letendre: Le but de notre organisme est de commercialiser les
produits antiparasitaires au Canada de façon a suivre les lois en place,
les lois du pays et de s'assurer que les produits sont utilisés d'une
façon efficace et aussi d'une façon sécuritaire au Canada.
C'est une association de groupes. On travaille beaucoup sur les normes de
fabrication et aussi de vente, des codes de vente, pour assurer justement que
tout soit en règle. C'est une espèce d'association
policière, peut-être, à l'intérieur des groupes
manufacturiers.
M. Blais: Sur votre page préliminaire vous dites: "L'IPC
ne veut pas que sous le couvert de cette loi l'on modifie au Québec la
toi fédérale sur les produits antiparasitaires." Quelle est votre
crainte là-dedans de nous voir...
M. Letendre: D'accord. Notre crainte est que...
Présentement, si on reqarde les règlements ou les lois qui
touchent les pesticides au Canada, je crois qu'on peut être fiers de dire
qu'on est les plus sévères ou on peut dire peut-être les
plus efficaces à étudier ou à décider si une loi
devrait être utilisée dans l'environnement. Nos craintes, vu que
le marché des pesticides au Québec est quand même petit si
on le compare au Canada, à l'Amérique du Nord et au monde, c'est
que la loi pourrait amener d'autres exigences sur l'homologation d'un produit.
En effet, en plus d'avoir une homologation fédérale, on aurait
peur d'avoir une homologation provinciale. En effet, il y avait des
dépenses encore plus élevées pour les études
nécessaires pour homologuer un produit. Déjà là, au
Canada, on est très exigeant et toutes les compagnies sont très
reconnaissantes de cette situation. Je crois que si on en vient, au
Québec, avec des demandes encore plus exigeantes au niveau de
l'homologation, cela pourrait nuire aux producteurs du Québec, vu que ce
ne serait pas profitable pour une compagnie de pesticides de fonctionner au
Québec et vu les coûts additionnels pour vendre au
Québec.
M. Blais: Sans jeu de mots quand même, je ne veux pas que
vous preniez cela trop au sérieux, mais le ministère de
l'Environnement c'est quasiment votre adversaire, votre ennemi, selon votre
but. D'après le but que vous dites avoir, vous semblez nous trouver des
êtres dangereux et les compagnies productrices de pesticides, à
cause d'une sévérité qui arriverait du gouvernement du
Québec pour empêcher la fabrication en quantité plus grande
de produits... Donc, vous considérez un peu l'environnement au
Québec - entre guillemets, bien sûr - comme une sorte d'ennemi
à votre association.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Non, je ne pense pas. Je pense que, depuis
plusieurs années, on parle avec les représentants de
l'Environnement et de l'Agriculture au Québec. On a réussi a
discuter avec eux, si on regarde le livre blanc qui a été
présenté. Quant aux discussions qu'on a eues avec
l'Environnement, on peut remarquer que plusieurs de nos idées sont
là et que plusieurs des leurs sont là; on les a réellement
adoptées avec eux autres. Au niveau de l'association, on travaille, de
fait, à avoir un peu la même... C'est un lieu de rencontre pour
avoir les mêmes objectifs au niveau de la sécurité et tout
cela. Chacune des compagnies n'a pas les moyens de promouvoir la
sécurité comme telle. Ce qu'on cherche à promouvoir au
niveau de l'association canadienne de l'ICPC, on le fait également au
niveau du Québec. Ce qu'on cherche dans notre association, c'est d'abord
une certaine uniformisation des lois et règlements régissant la
vente des pesticides. Si on a une réglementation différente
à l'extrême au Québec par rapport aux autres provinces, on
a encore davantage de restrictions.
Tout le monde connaît les coupures de budget tant au niveau
gouvernemental qu'au niveau industrie. Je pense que tous les gouvernements ont
eu un jour à faire des restrictions budgétaires. Les compagnies
également ont à en faire tant au niveau québécois,
canadien qu'international car la plupart de ces produits sont fabriqués
à l'extérieur du Canada comme tel et selon les
normes d'Agriculture Canada au fédéral, on les inscrit
pour la vente et la distribution au Canada. Ce qui nous faisait peur aussi en
ce qui concerne les contenants surtout, c'est que, parfois, dans certains
montages, on montrait quelqu'un qui, de fait, divisait un contenant en
plusieurs petits contenants. On avait peur que, dans la réglementation
de l'étiquetage des contenants, cette chose puisse devenir une chose
courante, ce que nous ne voulons pas puisqu'on dépense beaucoup d'argent
pour la sécurité des contenants qu'on fabrique. On calcule qu'en
ce qui concerne la sécurité c'est très important d'avoir
une étiquette sur un contenant. L'étiquette sur un contenant
représente la somme de tout l'ouvrage qui a été fait pour
enregistrer un produit, tant au Canada que dans d'autres pays, ce qui
représente de 40 000 000 $ à 42 000 000 $ présentement.
D'accord, au Canada, homologuer un produit sur une seule culture peut
coûter de 350 000 $ à 500 000 $ si l'on calcule que la plupart des
étiquettes ont une dizaine de cultures, c'est le coût canadien
approximatif du travail pour amener un produit. Si, en plus de cela, il faut
développer des règlements spéciaux ou des examens
différents du fédéral, c'est ce qui faisait peur à
notre industrie. Lorsque nous avons vu l'étiquette sur le
règlement disant qu'on pouvait modifier l'étiquetage et
l'emballage, nous avons été un peu craintifs. Si nous avons
souligné cela dans notre mémoire, c'est de façon à
nous faire assurer que le gouvernement provincial suivrait, de fait, les normes
fédérales et ne chercherait pas à faire des ajouts sur les
étiquettes déjà là. Si on relit l'article et si on
continue, on s'aperçoit qu'on vise également, j'imagine, le
transport de pesticides à la ferme ou en ville, ou des choses comme
cela. Ce sont des normes de sécurité qui ne sont pas
réglementées présentement et qui ne nous touchent pas
réellement. Ce qui nous inquiétait, c'étaient les normes
fédérales sur l'étiquette. Nous désirons que ces
normes restent semblables au Québec. C'est notre point de vue. Ce n'est
pas une question d'ennemi, c'est une question de bien s'entendre.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: C'était entre guillemets, vous savez. Vu que
c'est vous qui avez répondu à la question tantôt sur la
confidentialité, je vais vous poser immédiatement la question.
J'avais préparé une petite question. Je vais vous la lire telle
quelle: Croyez-vous que la confidentialité des activités
commerciales que vous défendez soit aussi compromise par la tenue des
registres prescrits dans l'avant-projet de loi? Vous avez ajouté
tantôt, à une question que le ministre vous a posée sur
cela, que, lorsque vous avez un producteur qui n'offre qu'un seul produit, si
la confidentialité n'est pas là, on pourra aller voir village par
village comme vous le disiez et trouver le chiffre d'affaires de la compagnie.
C'est à cela qu'on en vient, je crois. Si jamais c'était vrai
qu'on pourrait par le cardex faire cela, quelle serait votre attitude? Vous
nous demanderiez d'arrêter l'information ou vous demanderiez à
votre compagnie de diversifier sa production?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Je vais répondre. Nous sommes
d'accord avec la tenue des registres, etc. La seule crainte que nous ayons,
c'est lors de la publication de ces données de façon publique. Je
comprends qu'un gouvernement pour la surveillance ait besoin de connaître
où ont été appliqués différents produits
pesticides au Québec. C'est peut-être quelque chose de louable de
voir comment ces registres présentement ont été faits dans
les deux derniers inventaires. On peut retracer par ces deux inventaires la
plupart des produits vendus au Québec par région et pratiquement
par compagnie, puisque, dans certaines régions, lorsqu'on connaît
un peu l'agriculture, on peut savoir que telle culture va accepter te! ou tel
produit. D'autres provinces publient tout simplement les chiffres totaux de
vente d'un produit et non le produit, région par région. C'est
à ce sujet que, pour la confidentialité, on a peut-être
toujours eu des restrictions et des demandes, de fait. Pour une compagnie qui
n'a qu'un produit et qui voit son produit dans les rapports d'inventaires
pratiquement village par village, c'est un peu inquiétant sur le plan
commercial.
M. Blais: Dans le monde moderne où nous vivons et
où les gens ont droit à l'accès à l'information,
j'ai bien l'impression que ce serait à la compagnie de faire en sorte de
diversifier sa production. Personnellement, je voterais pour que la
confidentialité, à ce moment, on passe pardessus.
M. Tremblay (Michel): Ce n'est pas une question de
confidentialité et de ne pas donner ses chiffres. Nous sommes d'accord
pour donner les chiffres. D'ailleurs, nous avons souvent offert de donner les
chiffres totaux de la province. Ce que nous ne voulons pas, c'est que, dans la
divulqation des données, il y ait certaines limites. Je n'ai rien contre
le fait que, dans les dossiers du ministère, tous les produits des
compagnies soient là, produit par produit et village par village, mais
pas dans les dossiers de compétiteurs.
M. Blais: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: À la page 8 votre texte dit: "En ce qui concerne
l'examen pour l'obtention du certificat, cet examen devrait avoir l'approbation
d'un comité multidisciplinaire composé de représentants de
l'ICPC, MAPAQ...", Au sujet de ce comité interdisciplinaire où
vous vous incluez très jalousement - je vous comprends - un
comité "aviseur" plutôt qu'un comité multidisciplinaire
pourrait-il faire l'affaire de votre organisme?
M. Letendre: Je crois que oui, si ce comité peut consulter
des gens impliqués comme l'ICPC. Il n'est pas nécessaire d'avoir
un membre direct dans un comité de cette façon, mais je crois
que, vu notre implication dans la fabrication et la distribution des pesticides
au Québec, c'est quand même très important qu'on soit
consulté en tant que comité.
M. Blais D'accord, une petite dernière, si vous permettez.
Vous dites à la page 2 que, depuis près de trois ans, l'ITA,
l'Institut de technologie agricole - vous en avez parlé tantôt - a
donné des cours et que 250 personnes - ce n'est pas beaucoup - ont suivi
ces cours avec intérêt. Quand on songe qu'il y a environ 47 000
agriculteurs, la moyenne n'est pas très forte. Ce projet de loi n'oblige
pas les agriculteurs à certaines choses, mais s'ils étaient
obligés comme tous les autres d'avoir des certificats, des permis, etc.,
ils iraient acquérir des connaissances là; le cours de formation
du ministre prendrait peut-être de l'ampleur. À cause de cette
formation que vous aviez comme objectif dans le temps, à laquelle vous
avez participé, si on obligeait les agriculteurs et les sylviculteurs
à être inclus dans l'article 5, le but que vous visiez serait
alors plus facilement atteint. Malgré les explications du
deuxième paragraphe qu'on a lu tantôt, pour essayer de vous
consoler de votre demande, à savoir que les agriculteurs soient inclus,
on dit: "Toutefois, le gouvernement peut déterminer parmi ces
dispositions...". Si on retourne à 5: "Les dispositions de la section
III..." et "ces dispositions", c'est le même mot. Si on ne voulait pas
que la section III soit incluse, on ne l'aurait pas mise déjà.
C'est pour cela que c'est difficile à comprendre. Cela serait mieux que
les agriculteurs et les sylviculteurs soient inclus dans l'article 5 pour
donner un peu plus d'étoffe au but de formation que vous aviez.
Êtes-vous d'accord avec cela?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Oui.
M. Blais: C'est fatigant, n'est-ce pas?
M. Tremblay (Michel): De fait, le but de notre association... Je
ne sais pas si j'ai très bien compris votre question, mais je comprends
assez bien notre conception à nous. Pour nous, un permis d'applicateur
est un peu comme un permis de conduire. On ne demande pas à quelqu'un
d'être mécanicien pour conduire une auto. Par contre, on demande
un minimum relativement au code de conduite. Lorsqu'on a visé notre
clientèle de détaillants, au départ, puisqu'on visait la
clientèle des détaillants, c'était de rejoindre le plus de
personnes travaillant comme commis pour un détaillant de pesticides ou
un applicateur en ville à forfait. De fait, on parle d'un petit nombre
d'environ 240 personnes. Il faut comprendre que le nombre de détaillants
au Québec est inférieur 6 400 personnes. Donc, on a couvert un
bon groupe de personnes. La population que l'on visait était autour de
600 à 680 personnes travaillant dans ce domaine. Dans ce domaine comme
tel, on a compilé les chiffres il y a quelque temps et on s'est
aperçu que 60 % des personnes qui suivaient nos cours avaient
déjà trois ans de formation agricole et que 40 % des autres
avaient d'autres formations. Dans ces 40 %, on retrouve surtout des gens en
ville où il y a environ 500 à 600 applicateurs qui travaillent
dans ce domaine et qui, normalement, devraient avoir un minimum de normes de
sécurité. Les certificats de compétence dont on parle ne
sont pas dans le secteur agricole, mais portent sur la sécurité
des applicateurs. Cela répond-il à votre question, monsieur?
M. Blais: Oui.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Vous avez beaucoup insisté sur la
formation...
M. Tremblay (Michel): Oui. M. Dufour: ...des
individus...
M. Tremblay (Michel): ...au niveau sécuritaire, oui. (12
heures)
M. Dufour: ...au moins à deux ou trois reprises. On dit
à l'article 36 de quelle façon et comment le certificat sera
délivré. Si je regarde l'article 36, votre critique ou vos
suggestions sont dans le sens qu'il y ait un comité multidisciplinaire.
Vous nommez un certain nombre d'organismes qui devraient être
représentés. Vous n'avez aucune assurance, au moment où
vous présentez
votre mémoire et, que je sache, le ministre n'a donné
aucune indication en ce sens qu'il accepterait votre suggestion ou qu'il
procéderait de la façon que vous suggérez. Sans que le
ministre nous donne son point de vue, est-ce que votre groupe tient
essentiellement ou très fortement à ce que ce comité
multidisciplinaire soit mis sur pied aux points de vue de la surveillance, des
décisions ou de l'orientation?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Je vais répondre. Oui, on y tient,
et la preuve est qu'on l'a mentionné dans notre mémoire. On a eu
très peu de temps pour répondre par ce mémoire, mais on a
pris la peine de mentionner cela. De fait, on parle d'un groupe
multidisciplinaire ou d'un comité "aviseur" avec plusieurs
comités. On espère que d'autres groupes auront la même
mention que nous. Sept ou huit provinces à travers le Canada ont
déjà des comités "aviseurs".
C'est quelque chose de très important si on pense à la
philosophie de ces cours. Nous parlons de la sécurité. On ne
pense pas donner une formation agricole à un applicateur, mais on pense
donner une formation sur la sécurité, sur son application et sur
le respect de l'environnement et des biens d'autrui. C'est dans ce sens qu'un
comité "aviseur" est très important pour nous.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Dans votre esprit, un cours sur la
sécurité, c'est combien d'heures? Vous dites qu'il y a 180
produits en application. Est-ce que ce sont des cours spécifiques
seulement pour cela ou cela s'inscrit-il à l'intérieur d'une
démarche plus grande? II ne faut pas oublier que, pour la plupart de ces
pesticides, il y a un certain nombre de recommandations écrites sur le
contenant, etc.
Le Président (M, Saint-Roch): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Les cours offerts au cours des deux
dernières années étaient d'une durée de quinze
heures. Dans ces cours, il y avait des volets sur l'environnement, des volets
sur les produits et une grosse partie portait sur la sécurité,
les calculs d'application et le respect de l'environnement. Selon les autres
personnes à l'intérieur de ces comités, nous calculons
que, si nous parlons de sécurité et de sensibilisation à
l'utilisation rationnelle des pesticides, quinze heures devraient être
suffisantes. Si on veut faire un autre cours que celui-là, c'est
différent. C'est notre point de vue présentement. Le cours qu'on
prône depuis quelques années et qui est donné par l'ITA
à La Pocatière était destiné aux vendeurs et
était d'une durée de quinze heures. Si on parle de cours
d'application et... Nous, ce que nous voulons, c'est que, une fois qu'on a fait
la recherche de A à Z pour la protection de l'environnement - les
résidus dans l'environnement et les résidus sur les
récoltes - la personne qui applique nos produits respecte les normes de
l'étiquette ou du produit.
M. Dufour: J'ai entendu votre exposé et, selon la
région, vous connaissez les produits qui sont appliqués. C'est
assez rare qu'une région aurait à appliquer les 180 produits.
Donc, il y a un certain nombre de produits. Pour une utilisation
sécuritaire d'un produit X, sans le nommer, cela pourrait prendre un
certain nombre d'indications ou une formation de base. Est-ce que ce serait
possible d'exiger... Parce qu'on ne fait pas nécessairement une
utilisation de tous les produits. La personne qui a à l'appliquer n'est
peut-être pas obligée d'être familière avec
l'ensemble des pesticides utilisés.
Est-ce que vous croyez que ce sera nécessaire ou que cela
pourrait être possible que, au lieu d'avoir un cours
général s'appliquant à l'ensemble des produits, on puisse
donner des cours et même forcer les gens à suivre ces cours... Ces
cours seraient de durée beaucoup plus courte.
Le Président (M. Saint-Roeh): M.
Tremblay.
M. Tremblay (Michel): Ce que nous calculions, c'est qu'il y avait
un cours de base de quinze heures. Si la personne applique un produit à
usage restreint ou qui représente des dangers supérieurs,
à ce moment-là, tenant compte des réglementations, il y a
des cours d'une, deux ou trois sessions de quatre ou cinq heures qui
s'ajoutent.
Mais il reste quand même que les normes de sécurité
et de protection de l'environnement, au départ, sont les mêmes
pour tout le monde. C'est cette sensibilisation qu'on a essayé de
pousser à travers nos cours. D'accord?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Vous avez parlé aussi de la disposition des
contenants. Vous avez manifesté certaines craintes par rapport à
cela, des contenants dont vous ne pouvez pas disposer, par exemple. Comment
disposer de produits qui deviendraient périmés et non
utilisés? Je comprends qu'il y a toujours un
pouvoir réglementaire du ministre, mais vous, étant sur le
terrain, comment voyez-vous cela?
M. Letendre: Présentement, on sait qu'au Québec il
n'existe pas de règlement touchant les rebuts ou les contenants vides de
pesticides. Notre institut a proposé de développer un moyen pour
rendre le produit le plus sécuritaire possible: c'est le triple
rinçage. C'est une technique qui est employée partout au Canada,
une technique assez simple. Pour l'instant, c'est là-dessus qu'on
espère régler le problème. Je crois que le Québec
n'est pas la seule province qui a un problème dans la façon de
disposer des contenants vides. On attend encore quelque chose qui va nous
diriger là-dessus au Québec.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: Si j'ai bien compris, des politiques existent ailleurs
qu'au Québec pour disposer de ces contenants, ce qui n'est pas le cas
pour le Québec?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Letendre.
M. Letendre: On peut dire que c'est une demi-solution Je crois
que c'est un problème sérieux dans plusieurs provinces. On essaie
de trouver des façons, mais c'est un problème partout au
Canada.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce que ceci
complète les questions, M. le député de Jonquière?
M. Dufour: Cela va.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie. M. le
ministre, pour de brèves remarques.
M. Lincoln: Je n'ai pas de remarque. Je voudrais vous remercier,
messieurs, d'avoir parlé ici, d'avoir d'abord pris le temps de nous
rencontrer, en novembre et ensuite d'avoir fourni un mémoire bien
étoffé pour appuyer vos positions. Il y a seulement trois choses
que je voudrais dire, c'est par rapport à l'efficacité de
l'homologation fédérale. Je suis d'accord avec vous que c'est un
travail sérieux qui se fait. En même temps, je ne pense pas que
nous puissions être satisfaits.
Je pense que, comme province, nous avons exprimé le voeu unanime
des provinces que, du point de vue de l'homologation fédérale,
une coordination beaucoup plus effective et efficace se fasse entre le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
qui est le responsable titulaire, et le ministère de la Santé et
des
Service sociaux et celui de l'Environnement. En fait, les ministres
qu'on a rencontrés ont constaté qu'il y avait une lacune dans ce
sens et qu'il faudrait faire beaucoup plus de travail de coordination, en plus
de faire une réévaluation des produits homologués et aussi
d'avoir un accès à l'information sur l'homologation qui sera
beaucoup plus vaste et d'impliquer les provinces de plus en plus activement
dans ce travail. Quant à nous, nous prendrons une part active en accord
avec les autres provinces. Je pense que c'est presque l'avis unanime entre nous
et le fédéral, qu'il faudra faire un travail beaucoup plus
concerté dans ce sens.
Sur la question de l'article 5, je répète que
l'interprétation que je vous en ai donnée est très claire.
Sur la question des cours -puisque le député de Jonquière
a soulevé cela avec beaucoup de pertinence - nous n'avons pas
défini la chose, mais nous pensons qu'il y aura des cours qui varieront
entre 30 et 60 heures, selon les circonstances. Pour la question du
comité-conseil, que le député de Jonquière a
soulevée et qui a été soulevée aussi par beaucoup
d'intervenants, on en prend avis, comme le critique de l'Opposition l'a
souligné. Je préfère attendre que tous les intervenants se
soient prononcés, mais c'est certainement une recommandation qui
répond au voeu de beaucoup de gens qui viendront s'exprimer ici. Merci
beaucoup d'être venus.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne, en conclusion.
M. Blais: Je voudrais vous remercier de votre présence et
dire que tous les travaux qui sont faits ici, c'est dans l'espoir d'une
qualité de vie meilleure pour l'ensemble de la population. Merci
beaucoup.
Le Président (M, Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. Je tiens à remercier, au nom des
membres de la commission, l'Institut canadien pour la protection des cultures
pour sa participation aux travaux de la commission.
La commission de l'aménagement et des équipements suspend
maintenant ses travaux jusqu'à 14 heures, cet après-midi.
(Suspension de la séance à 12 h 10) (Reprise à 14 h
10)
Le Président (M. Saint-Roch): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
maintenant ses travaux pour poursuivre la consultation particulière
portant sur l'avant-projet de loi sur les pesticides. M. le
député de Terrebonne, vous aviez une question?
M. Blais: Oui. Normalement, en début de séance, on
mentionne les remplacements. J'aimerais avoir un consentement unanime pour que
le député de Lévis et le député de Roberval
puissent assister à la séance de cet après-midi; cela
prendrait un consentement unanime. Je crois que M. le ministre a aussi une
demande à faire.
M. Lincoln: Oui, je donne mon consentement. Le ministre de
l'Agriculture sera aussi présent.
Le Président (M. Saint-Roch): II y a consentement unanime
pour que M. le député de Lévis, M. le député
de Roberval et M. le député de Portneuf puissent intervenir en
tant que membres de la commission cet après-midi. M. le
secrétaire me mentionne que M. le ministre pourra participer, mais ne
pourra pas être membre.
Cela étant dit, je demanderais maintenant à l'Union des
producteurs agricoles de venir prendre place. Permettez-moi, au nom des membres
de la commission, de vous souhaiter la bienvenue et de vous féliciter de
votre participation aux travaux de notre commission. Je demanderais à M.
Jean-Yves Couillard, vice-président de l'Union des producteurs
agricoles, dans un premier temps, pour faciliter nos travaux, d'identifier les
membres qui l'accompagnent.
Union des producteurs agricoles
M. Couillard (Jean-Yves): Merci, M. le Président, de nous
avoir invités. Je pense qu'on est concerné aussi. J'aimerais,
dans un premier temps, vous présenter les membres qui sont avec moi: M.
Michel Legault, agriculteur et membre de l'UPA, bien sûr, et
également spécialiste de tout ce qui s'appelle pesticides. Il a
travaillé à l'homologation et je pense qu'en tant qu'agriculteur,
c'est un gars qui peut beaucoup nous aider, qui a beaucoup à apporter
sur ce sujet. Il fait partie de notre délégation.
Nous avons aussi M. Ménard, agronome. C'est lui qui a
monté le dossier sur les pesticides. Il est présent avec nous et
pourra répondre aux questions. À M. Legault, également,
vous pourrez poser toutes les questions que vous aurez, à lui ou
à moi-même. Cela nous fera plaisir de répondre à
toutes les questions.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M.
Couillard. À partir de ce moment-ci, M. Couillard, vous avez 20 minutes
pour nous faire part de votre mémoire. Je vous cède la
parole.
M. Couillard: Si cela prend 22 minutes, M. le Président,
est-ce que je serai pénalisé?
Le Président (M. Saint-Roch): Comme à l'habitude,
le président fera preuve de tolérance.
M. Couillard: Très bien, merci. Dans l'introduction, vous
trouvez: L'Union des producteurs agricoles est l'organisation officielle
représentant les 46 887 producteurs agricoles du Québec. La
Fédération des producteurs de bois du Québec est
affiliée à l'UPA et représente les 120 000 producteurs de
bois et propriétaires de boisés du Québec. L'UPA est
structurée en regroupements régionaux et il y a seize
fédérations régionales et quinze fédérations
spécialisées. L'agriculture et la forêt contribuent a 60 %
du PIB ainsi qu'à 72 % des emplois créés dans le secteur
primaire. L'agriculture emploie directement 76 000 personnes et l'exploitation
forestière 9881 personnes.
Par ailleurs, les effets d'entraînement de l'activité
agricole et forestière sont multiples et fort importants, notamment dans
le secteur des aliments, boissons et tabac, avec 3 500 000 000 $, et, dans les
industries des produits du bois et des pâtes et papiers, avec 2 900 000
000 $ en valeur ajoutée. Cette dernière s'approvisionne
auprès des producteurs de bois privés pour combler plus de 20 %
de ses besoins en matière ligneuse. Il faut aussi mentionner les effets
d'entraînement dans des domaines aussi variés que le transport, la
machinerie, la finance, les assurances, l'énergie et autres.
Au cours de la dernière décennie, l'agriculture
québécoise s'est diversifiée, à partir de la
production laitière qui demeure toutefois la principale occupation
agricole, vers d'autres productions horticoles ou végétales,
comme les céréales, et d'autres productions animales telles que
le porc et le boeuf. Le degré d'autosuffisance du Québec en
produits alimentaires est passé de 47,4 % en 1976 à 71 % en 1983
et davantage en 1986. L'avant-projet de loi présenté par le
ministre de l'Environnement ayant pour objet de régir l'usage des
pesticides au Québec concerne donc plusieurs dizaines de milliers de
producteurs agricoles et forestiers, et touche des activités
économiques vitales pour le Québec.
Au fil des années, l'agriculture s'est développée
et s'est transformée pour répondre aux besoins et aux aspirations
de la société. L'urbanisation et l'industrialisation de la
société québécoise ont drainé du milieu
rural une part importante de la population contribuant ainsi à
réduire la disponibilité de la main-d'oeuvre agricole. En 1931,
la population agricole québécoise représentait 26 % de la
population totale, et, en 1981, seulement 2,9 % de la population
québécoise assurait la production agricole du Québec.
Pour assurer en permanence l'abondance alimentaire à un
coût abordable, l'agriculture, au Québec comme partout ailleurs, a
dû accroître sa productivité et
son efficacité au cours des 50 dernières années. La
productivité agricole a connu une croissance remarquable depuis 1946 et
nous avons un tableau à la page suivante. Si on compare l'indice de la
production par personne dans le secteur agricole avec l'ensemble de
l'industrie, on constate que l'agriculture devance de loin le secteur
industriel.
Cette hausse de la productivité n'aurait pu se réaliser
sans l'amélioration des techniques et pratiques agricoles. L'usage des
pesticides en agriculture est sans contredit l'un des facteurs qui a
aidé à l'essor de la productivité en contribuant à
la protection des cultures, è l'augmentation des rendements, à
l'amélioration de la qualité des récoltes, à
assurer la conservation en entrepôt et, finalement, à diminuer la
quantité d'énergie et de main-d'oeuvre nécessaires
à la production.
Je pense qu'on va passer à la page 4 qui représente le
tableau qu'on a mentionné tout à l'heure, pour en prendre
connaissance. En contribuant à accroître la productivité
agricole et ainsi à diminuer le prix de l'alimentation, les pesticides
ont participé au développement de l'économie de la
société moderne. Il semble clair que rien ne peut actuellement se
substituer complètement â l'utilisation des pesticides qui
demeurent essentiels pour que les agriculteurs et les sylviculteurs puissent
produire la quantité et la qualité nécesssaires pour
affronter la compétition dans l'environnement économique
nord-américain. Par ailleurs, les agriculteurs sont conscients que les
pesticides peuvent causer des problèmes à l'utilisateur comme
à l'environnement lorsqu'ils ne sont pas utilisés selon les
normes de la bonne pratique.
Une des caractéristiques frappantes du projet de loi est que
l'agriculture et la sylviculture sont, par l'article 5, exemptées d'un
grand nombre de dispositions, en particulier celles qui régissent
l'attribution et le renouvellement de permis et de certificats pour les
vendeurs et les utilisateurs. Le gouvernement pourra, toutefois, par
règlement, décider d'appliquer une partie ou la totalité
des dispositions légales à l'agriculture. Ce n'est donc pas d'une
exemption dont il s'agit, mais plutôt d'un choix d'avoir une approche
différente face à l'agriculture et à la sylviculture. Nous
sommes entièrement d'accord avec l'idée que l'agriculture et la
sylviculture doivent être traitées différemment de
l'épandage d'herbicide sur les pelouses des résidences par des
applicateurs à forfait. Il y a plusieurs raisons à cela.
Premièrement, c'est notre conviction qu'avant d'imposer des contraintes
légales et réglementaires aux agriculteurs, il faut d'abord
passer par un processus de sensibilisation et de formation. Une approche trop
légaliste risquerait d'engendrer de l'hostilité et de la
méfiance, alors que ce qui est recherché des agriculteurs, c'est
une ouverture et une collaboration. On ne peut avoir une approche simpliste
face à l'utilisation des pesticides en agriculture. Les pesticides sont
et vont demeurer, pour le moment, une nécessité
économique. Il faut balancer les considérations
économiques avec les considérations environnementales et cela ne
peut être une affaire simple.
La rédaction du projet produit par ailleurs des
conséquences imprévues, vraisemblablement non souhaitées
par le législateur. En effet, lorsqu'on examine les exemptions
prévues pour les agriculteurs et les sylviculeurs, on constate que ces
dispositions auraient pour effet de les priver de la procédure d'appel,
de même que de celle prévoyant l'annulation de contrat. Cette
situation pourrait sans doute être corrigée par l'adoption d'un
règlement, mais nous préférerions que ces droits se
retrouvent dans la loi même.
Nous voudrions également attirer votre attention sur les abus
pouvant résulter des dispositions de l'article 69 qui stipule qu'une
demande d'injonction auprès d'un juge de la Cour supérieure peut
être faite par toute personne qui allègue que des pesticides sont
utilisés contrairement aux méthodes, normes et
procédés généralement reconnus. Il nous
apparaît, cependant, que ces dispositions peuvent mener à des abus
de toutes sortes. Nous considérons qu'une procédure de plaintes
au ministère de l'Environnement devrait plutôt être
prévue dans cette loi.
Une politique concernant les pesticides en agriculture.
Parallèlement au dépôt de l'avant-projet de loi, le
ministre a fait connaître la politique qu'il entendait poursuivre en
matière de pesticides. On retrouve l'essentiel de cette politique
à l'intérieur du document de travail intitulé: Motif et
nature des interventions proposées par le ministère de
l'Environnement du Québec. Les philosophies et les principes contenus
dans ce document s'appliquent à tous les secteurs. Cependant, plusieurs
dispositions relatives à l'agriculture demeurent à
préciser dans ce document comme dans l'avant-projet.
Par ailleurs, le ministre a indiqué, quelques jours avant le
dépôt officiel de l'avant-projet de loi, devant l'Assemblée
nationale, qu'il entendait intervenir dans le secteur agricole. Il a
affirmé qu'il consulterait les agriculteurs sur la manière de
procéder. À cet effet, les fonctionnaires du ministère
nous ont remis un document décrivant les éléments d'une
approche relative à l'utilisation agricole des pesticides. Cette
approche serait, dans un premier temps, éducative en ce sens qu'elle
prévoit l'établissement de programmes de formation permettant aux
individus d'acquérir certaines connaissances et habiletés
requises pour un
usage rationnel et sécuritaire des pesticides. En même
temps, elle prévoit l'obligation de réussir un examen de
qualification pour avoir accès aux pesticides de la classe 1 et 2, et
ces classifications, bien sûr, sont les classifications
fédérales.
Permettez-nous de formuler les commentaires suivants sur la politique
proposée par le ministère de l'Environnement pour l'agriculture.
Le ministère de l'Environnement vise à une utilisation
rationnelle des pesticides dans le but de prévenir la
détérioration de l'environnement. Face aux répercussions
environnementales reliées à l'utilisation des pesticides, ainsi
qu'aux problèmes de santé potentiels liés à leur
usage pour les utilisateurs, l'UPA endosse la proposition du ministère
de l'Environnement d'inciter les agriculteurs à suivre un cours de
formation. Les agriculteurs reconnaissent leur besoin de formation et sont
soucieux d'utiliser les pesticides selon les règles de bonne pratique.
D'ailleurs, les délégués réunis au congrès
général de l'UPA en 1981 avaient formulé aux
ministères de l'Environnement et de l'Éducation la demande de
préparer et d'offrir des cours de formation sur l'utilisation des
pesticides.
Par ailleurs, le cadre général de la politique qui nous
est proposée rejoint l'essentiel de ce que nous avons toujours
défendu en matière de pesticides, c'est-à-dire l'approche
éducative plutôt que coercitive. Nous discuterons un peu plus loin
des modalités de cette approche. Dans son plan d'action pour la gestion
des pesticides, le ministère de l'Environnement du Québec
préconise, en outre, des méthodes préventives de lutte, de
même que des moyens physiques, naturels et biologiques de
répression, ainsi que le recours aux stratégies de lutte
intégrée. Cependant, nulle part à l'intérieur des
énoncés de politique, il n'est fait mention de la manière
permettant aux agriculteurs d'utiliser ces moyens de protection des
cultures.
L'avant-projet de loi entraîne l'obligation pour les
détaillants et les utilisateurs commerciaux de pesticides de
détenir un permis ou un certificat selon le groupe d'intervenants auquel
ils appartiennent. Aucun permis n'est requis dans la loi pour les agriculteurs
et les sylviculteurs qui utilisent des pesticides aux fins de leur exploitation
agricole ou sylvicole, ou qui, de façon exceptionnelle et sans en faire
commerce, utilisent des pesticides aux fins de l'exploitation agricole ou
sylvicole d'un autre agriculteur ou sylviculteur.
Par ailleurs, le ministère indique à l'intérieur
d'un de ses documents qu'il réglementera l'accès aux pesticides
de classe 1 et 2 qui correspondent à la classe restreinte de la
classification fédérale, conformément à la loi
fédérale sur les produits antiparisitaires.
On doit conclure que l'agriculteur ou le sylviculteur, qui aura à
utiliser les pesticides de classe 1 et 2 devra éventuellement être
détenteur d'un certificat. Nous ne nous opposons pas en principe
à cette politique, à condition que les modalités
d'application soient réalistes et acceptables.
Nous mettons en qarde le gouvernement de vouloir imposer au secteur
agricole le fardeau de l'administration et du financement de toute cette
politique. Nos craintes à ce sujet ne cessent d'augmenter puisque dans
les documents qui nous ont été remis, on peut lire maintes fois
que 85 % des pesticides achetés sont utilisés en agriculture.
Aussi, le ministère de l'Environnement a-t-il signifié dans un de
ses documents que la nouvelle loi exigera des efforts importants du secteur
privé et du secteur public.
Nous ne voulons pas non plus que les certificats soient renouvelables
tous les deux ou trois ans, comme semble vouloir le faire le ministère
de l'Environnement pour les autres classes d'utilisateurs de pesticides. Le
contexte est différent pour les utilisateurs commerciaux qui peuvent
tirer avantage d'un tel système et récupérer ce coût
additionnel dans le prix chargé aux consommateurs. La situation est tout
à fait autre pour les agriculteurs qui subissent la concurrence des
marchés étrangers dans la mise en marché de leurs
produits. En outre, une seule province au Canada exige des agriculteurs qu'ils
détiennent un certificat qui leur permet d'avoir accès aux
pesticides de classe 1 et 2.
La formation des utilisateurs est une étape nécessaire et
essentielle, mais il est illusoire de croire que la formation, à elle
seule, permettra d'atteindre l'objectif d'une utilisation rationnelle des
pesticides en agriculture. Les agriculteurs font usage des pesticides pour
protéger leurs cultures des ravageurs. Les solutions de rechange sont
à peu près inexistantes dans le contexte actuel.
Il faut mettre en place les moyens de réaliser le plus rapidement
possible l'objectif que le ministère de l'Environnement et le
gouvernement se sont fixé. Le ministère de l'Agriculture doit
être associé de très près a l'élaboration de
la politique des pesticides en agriculture. Trois provinces canadiennes ont
confié cette responsabilité à leur ministère de
l'Agriculture.
La formation. L'UPA veut être consultée sur l'ensemble de
la procédure qu'entend poursuivre le gouvernement dans son programme de
formation destiné aux agriculteurs. À cet effet, l'UPA accepte la
proposition de joindre le comité représenté par les
ministères de l'Environnement, de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, de l'Éducation, et de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, formé pour la préparation du
programme global de
la formation en agriculture.
Le rôle de l'UPA au sein de ce comité sera d'assurer que la
réalité agricole sera respectée et que les besoins des
agriculteurs seront considérés dans la démarche
proposée par le ministère de l'Environnement. L'UPA
décline l'offre de prendre à sa charge l'organisation et la
réalisation du programme de formation, hypothèse qui a
déjà été évoquée par les instances
gouvernementales. Nous pensons que cette responsabilité relève du
réseau des institutions d'éducation publiques. Les agriculteurs
veulent un enseignement de qualité et des cours où seront
conjugués la théorie et la pratique.
Il faut que les autorités gouvernementales soient conscientes que
le projet de réglementer le contrôle de la vente et de
l'utilisation des pesticides est contraignante pour les agriculteurs. Nous
recommandons au ministère d'agir progressivement dans
l'établissement de son règlement. La réglementation
devrait prévoir plusieurs moyens dans le processus d'évaluation
des connaissances pour l'obtention du certificat. L'évaluation de la
compétence des utilisateurs de pesticides de classes 1 et 2 se doit
d'être menée solidement tout en étant adaptée pour
les agriculteurs qui n'ont pas l'habitude de la vie académique. On pense
a une évaluation qui mettrait davantage l'accent sur la pratique que sur
la théorie. L'UPA est d'accord avec la proposition du ministère
de l'Environnement de laisser la possibilité aux agriculteurs de se
présenter à l'examen de qualification sans avoir
préalablement suivi un cours de formation.
Nous avons certaines réserves sur l'évaluation faite par
le groupe de travail formé de fonctionnaires du ministère et du
MAPAQ quant au nombre de producteurs qui utilisent actuellement des pesticides
de classes 1 et 2. Ce groupe de travail estime à 7290 le nombre
d'agriculteurs qui auront à se qualifier pour avoir accès aux
pesticides d'usage restreint. Cette estimation est basée principalement
sur les renseignements reçus par les principaux distributeurs de
pesticides au Québec et les statistiques du recensement agricole de
1981. Nous estimons, quant à nous, plus réaliste de parler de 13
000 ou 14 000 producteurs susceptibles d'être touchés a court
terme par la réglementation proposée. La majorité des
produits classés usage restreint (classes 1 et 2) dans la classification
fédérale sont des insecticides. Ces produits sont, par
conséquent, susceptibles d'être utilisés à n'importe
quel moment par les producteurs qui s'adonnent aux productions suivantes:
culture maraîchère, pomme de terre, fraise et framboise,
serriculture, pomiculture, grandes cultures et production de plants.
Nous croyons, de plus, que l'échéancier proposé par
le ministère de l'Environnement, d'exiger un certificat à compter
du 1er janvier 1989 aux producteurs qui utilisent des pesticides de classes 1
et 2, doit être réévalué. Le contenu et la
durée du programme de formation, le recrutement des formateurs ainsi que
le processus qu'entend utiliser le ministre pour rejoindre les producteurs ne
sont pas encore établis. L'élaboration et le rodage d'un tel
programme risquent de prendre de un à deux ans. Par conséquent,
les producteurs auraient moins de deux ans pour obtenir leur certificat.
Aussi, dans la mesure où le ministère envisage d'offrir
aux agriculteurs qui utilisent des pesticides de classe 3 un cours de
formation, il semble évident que 1990 constitue une
échéance beaucoup trop serrée. Un échéancier
trop serré risque de mener à des cours donnés à la
hâte à des gens plus préoccupés de satisfaire aux
délais que d'apprendre et de comprendre.
Le volet manquant de la politique globale des pesticides est celui du
soutien agronomique aux agriculteurs en matière de protection des
cultures. Dans la majorité des cas actuellement, les producteurs ne
peuvent compter que sur eux-mêmes ou le vendeur de pesticides pour
solutionner leurs problèmes de protection des cultures. Dans bien des
cas, les producteurs souhaiteraient diminuer l'emploi des pesticides, mais
faute de moyens, ils ne peuvent prendre le risque de mettre en péril le
rendement de leurs récoltes et leurs revenus. Il existe pourtant une
solution à cette situation: la lutte intégrée,
c'est-à-dire une combinaison de différentes méthodes de
contrôle des ravageurs des cultures: la lutte Ghimique, culturale et
biologique. (14 h 30)
Pour réaliser cet objectif, il faut que, parallèlement
à la mise en place d'un programme de formation destiné aux
agriculteurs, on prévoie une politique agricole de lutte
intégrée. La poursuite d'une option semblable suppose
préalablement que le gouvernement joue un rôle actif et pose un
certain nombre de gestes précis. À court terme, des
réseaux de dépistage permettant de suivre l'évolution des
populations d'insectes ravageurs et des maladies doivent être
développés. En plus de s'acquitter de cette tâche, les
réseaux de dépistage offrent aux producteurs les services de
conseillers techniques et phytosanitaires qui les renseignent sur le moment
propice d'intervention ainsi que sur les moyens de lutte qui tiennent compte
d'exigences économiques, écologiques et toxicologiques. Certaines
expériences ont déjà été menées dans
ce domaine.
En effet, depuis 1981, un réseau de dépistage existe au
sud de Montréal pour les cultures de la carotte, de l'oignon et du
céleri. Ce réseau de dépistage couvrait, en 1986, 1909
hectares et regroupait 56
producteurs maraîchers. L'expérience démontre que le
réseau a permis de réduire de beaucoup l'utilisation de certains
pesticides. Par exemple, en 1985, plus du tiers des 3000 acres de carottes
dépistées n'ont reçu aucun traitement insecticide alors
que sans dépistage elles auraient toutes été
traitées au moins deux fois. Le réseau permet aussi d'offrir
d'autres services comme les cours sur l'utilisation rationnelle des pesticides
adaptés aux besoins des productions spécialisées ou le
calibrage des pulvérisateurs et des applicateurs d'insecticide
granulaire.
Le réseau de dépistage au sud de Montréal a
démontré l'efficacité de ce type d'intervention en
même temps que les difficultés pratiques de le mettre en place et
de le faire fonctionner. Les producteurs sont prêts à faire leur
part face aux avantages et aux économies possibles, mais ils faut aussi
une implication gouvernementale pour assurer une continuité de ce
service. Le gouvernement du Québec devra s'impliquer
financièrement dans la création et le maintien de ces
réseaux de lutte intégrée.
À court et à moyen terme, le gouvernement et ses
institutions devront aussi accroître leurs efforts de recherche vers les
moyens de lutte intégrée et former des spécialistes en
protection des cultures. Cet effort fait défaut actuellement. En effet,
depuis 1980, seulement 20 projets de recherche sur la lutte
intégrée ont été conduits par les gouvernements
fédéral et provinciaux, les universités, l'industrie et
les divers établissements de recherche au Canada. C'est insuffisant
compte tenu des enjeux. Un besoin existe dans ce champ d'activité
puisque la recherche constitue le fondement de la lutte intégrée
en agriculture et en sylviculture. Les réseaux de dépistage
prendront tout leur sens lorsqu'en plus de dépister les ravageurs des
champs, ils pourront proposer aux producteurs une diversité de moyens de
contrôle complémentaires: lutte biologique, lutte chimique et
lutte culturale.
Concernant la formation des spécialistes en protection de
cultures, ces derniers devront démontrer une bonne connaissance des
cultures, des ravageurs et des besoins des producteurs. L'écoute des
besoins des producteurs permet de cerner les problèmes véritables
auxquels ils ont à faire face. C'est en poursuivant une telle politique
qu'il deviendra possible d'utiliser plus rationnellement les pesticides. En
plus d'une politique basée sur le contrôle et la régie, le
gouvernement doit absolument investir des ressources humaines et
financières dans les directions que nous venons
d'énumérer.
En conclusion, la politique sur les pesticides, telle que
proposée par le ministère de l'Environnement, est
incomplète - il y a des choses à ajouter - pour le secteur
agricole. Les agriculteurs reconnaissent qu'un programme de formation bien
pensé et bien adapté peut les aider à utiliser les
pesticides de façon plus sécuritaire pour leur santé et
pour l'environnement. Cependant, nous pensons que la formation et l'exigence de
certificats sont une amélioration à la situation existante, mais
elles n'entraîneront pas nécessairement une diminution importante
de l'utilisation des pesticides en agriculture. Pour nous, la solution
véritable doit inclure une politique axée sur la lutte
intégrée qui serait administrée par le ministère de
l'Agriculture.
Les expériences de réseaux de dépistaqe des
insectes et des maladies établies en culture maraîchère ont
démontré qu'il est possible de réduire les applications de
pesticides lorsque les agriculteurs peuvent compter sur les services de
spécialistes en lutte intégrée.
Parallèlement à la formation des agriculteurs et à
l'établissement de réseaux de dépistage, le gouvernement
et ses institutions universitaires et de recherche doivent accentuer leurs
efforts de recherche de solutions alternatives aux pesticides. La recherche
constitue le fondement de la lutte intégrée en agriculture et en
sylviculture. Ensemble, ces moyens vont entraîner une utilisation plus
rationnelle. Je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M.
Couillard. M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, je voudrais d'abord remercier
M. Couillard et ses collègues de l'UPA d'avoir accepté de
participer à cette commission parlementaire. Comme M. Couillard l'a dit,
le milieu agricole représente un élément important dans
toute la question d'une politique de lutte intégrée par rapport
aux pesticides. Comme le milieu agricole représente un grand nombre
d'utilisateurs de pesticides, c'est certain que ce milieu représente un
élément très important de toute cette politique.
Je voudrais souligner encore une fois, comme mon collègue de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et moi l'avons
déjà fait lors de nos rencontres préalables, que le projet
de loi est justement une première étape pour implanter un
système éducatif, un système de formation, d'abord, mais
ce qui n'est pas une démarche complète en elle-même. C'est
impossible, dans tout projet de loi, de résoudre des problèmes
tellement complexes et tellement importants qu'ils nécessitent des
mesures économiques et sociales de grande envergure. Il fallait
commencer et, comme vous l'avez souligné vous-même, nous serions
la deuxième province au Canada qui rendrait les agriculteurs
responsables d'un programme de
formation en vertu d'une loi ou d'un règlement. Je suis heureux
de noter que vous endossez notre politique de formation, ainsi que le point de
vue de la lutte intégrée par rapport au domaine des pesticides.
Ainsi, c'est l'élément que vous soulignez comme étant
crucial et, dans cet objectif, nous nous rencontrons tout à fait.
Je voudrais m'attarder à quelques aspects de votre
mémoire. Je sais que mon collègue, le ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation, va lui aussi vous poser des
questions. Il y a certaines choses qui méritent d'être
relevées et certaines corrections à apporter. Par exemple, vous
avez souligné, concernant l'article 5, que les agriculteurs et les
sylviculteurs n'étaient pas soumis à la même
procédure d'appel que celle des autres utilisateurs. Vous avez tout
à fait raison de l'avoir souligné. Nous sommes tout à fait
sensibles à votre démarche, c'est une omission qui sera
corrigée. C'est sûr que nous devons accorder à tous les
intervenants, y compris les agriculteurs et les sylviculteurs, les mêmes
droits que tous les autres utilisateurs. Ce sera corrigé, vous pouvez
tenir cela pour acquis.
Quant à la question des cours de formation, comme vous le savez,
nous avons fait une proposition selon laquelle l'UPA pourrait prendre charge de
cette chose. Je comprends par votre mémoire que vous
préférez que ce soit un système beaucoup plus global qui
inclue des ministères comme celui de l'Éducation qui a un cadre
plus académique. En même temps, vous avez souligné dans
votre mémoire que vous cherchiez une approche plus pragmatique
qu'académique. C'est pourquoi cela a été le souci de notre
ministère de suggérer que l'UPA soit le principal intervenant
pour mener toute la question de la formation, des examens, etc. Cette
suggestion tient toujours, mais je prends note avec beaucoup de sérieux
de votre proposition, soit que vous soyez un des principaux intervenants avec
l'appui d'autres ministères, comme ceux de l'Éducation, de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, etc. Nous
espérons que votre offre d'être intervenant sera majeure dans
cette question parce qu'on a affaire à votre milieu et c'est vous qui
connaissez vraiment l'implication de votre milieu, les problèmes et les
circonstances de votre milieu bien mieux que n'importe quel autre
intervenant.
Pour ce qui est de la lutte intégrée, c'est
évidemment l'objectif principal que nous nous sommes fixé, comme
je vous l'ai dit ce matin. Ce que je peux vous dire, c'est que le projet de loi
sur les pesticides axé sur la formation et l'éducation, c'est une
première étape. Nous comptons nous associer, comme
ministère, de très près, le plus près possible du
ministère de l'Agriculture, qui est le principal intervenant,
naturellement, dans votre domaine, tout mettre en oeuvre, faire de la
concertation pour en arriver à cet objectif. Tout ce qui pourra
être fait, en somme, nous allons le faire. Bien sûr, le
ministère de l'Agriculture va toujours rester le principal intervenant
pour la solution de ce problème et pour l'arrivée de
méthodes alternatives. Nous allons continuer de travailler de
très près, en somme, pour atteindre ces objectifs.
Il y a deux choses que je voudrais vous demander, deux problèmes
que j'aimerais élucider, qui ne sont pas dans votre mémoire
à vous, mais qui paraissent dans beaucoup d'autres mémoires et
qui vous affectent directement ou indirectement. Il y a d'abord l'Ordre des
agronomes du Québec qui a suggéré que les pesticides
puissent n'être vendus que si un agriculteur possède une
prescription d'un spécialiste, le spécialiste étant un
agronome, selon la suggestion de l'Ordre des agronomes. Peut-être que
d'autres pourront dire que les pharmaciens sont les meilleurs
spécialistes, mais la question globale reste: Quelle est votre
réaction, au premier abord, è cette suggestion que des pesticides
ne soient vendus que par le système des prescriptions?
Le Président (M. Saint-Roch: M.
Couillard.
M. Couillard: Dans un premier temps, il est bien certain qu'on
aurait pu en parler dans notre rapport, nous étions conscients qu'il y
aurait des questions en commission parlementaire. C'était
peut-être plus facile pour nous de l'expliquer que de l'écrire. Je
pense que M. Legault, qui travaille dans les pesticides, pourra l'expliquer
beaucoup mieux que moi. Je demanderais à Michel, de répondre
è cette question, il peut le faire plus facilement.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Legault.
M. Legault (Michel): II me semble que la suggestion de l'Ordre
des agronomes va un peu à l'encontre de la philosophie que le
ministère de l'Environnement propose, l'éducation et la
responsabilité des agriculteurs qui utilisent les pesticides. Je pense
que ce qu'on veut - et l'UPA est d'accord - c'est que les producteurs agricoles
deviennent plus conscients et utilisent plus rationnellement les pesticides. Si
un intervenant qui fait des recommandations dit: Là, tu utilises un
pesticide, là, tu n'en utilises pas, je pense qu'on enlève la
responsabilité à l'agriculteur et on enlève aussi le sens
de la loi, qui est de former les agriculteurs. Je pense que c'est un peu une
suggestion anachronique, si vous me permettez le terme. Il y a dix ou vingt
ans,
on allait au bureau des agronomes au début de la saison pour leur
demander ce qu'on utiliserait comme pesticide. Ils nous faisaient une formule,
ils disaient: Telle date, tu utilises tel pesticide.
Je pense que l'agriculteur a beaucoup évolué depuis ce
temps. On utilise actuellement les pesticides le plus rationnellement possible,
d'une façon très temporelle. Je pense qu'on ne peut pas
prévoir un an d'avance, un mois d'avance ou même une semaine
d'avance notre programme de pesticides. On peut prévoir globablement ce
que cela peut être, mais l'utilisation directe dépend de la
température, dépend des insectes présents. Il ne faudrait
pas penser que les agriculteurs utilisent des pesticides par plaisir, ils les
utilisent quand il y a un problème que les agriculteurs eux-mêmes
sont les premiers à pouvoir identifier dans leurs champs.
C'est assez peu réaliste, à notre point de vue, de revenir
en arrière et que quelqu'un nous surveille et nous dise quoi faire. Je
pense que les agriculteurs qui sont conscients du problème pourraient
travailler dans ce système; cela ne les dérangerait
peut-être pas. Les agriculteurs qui ne voudront pas suivre ces
recommandations pourront toujours passer à côté. Je pense
que l'approche actuelle d'une formation et d'une conscientisation des
producteurs agricoles est peut-être la voie la plus souhaitable pour le
moment.
M. Couillard: Si vous me le permettez, M. le ministre, si on
prend la page 14, il ne faudrait pas penser qu'en agriculture rien ne se fait
à l'heure actuelle. Si vous pensez que rien ne se fait en agriculture
à l'heure actuelle, nous, les agriculteurs, nous vivons quand même
sur nos terres; nous ne sommes pas là pour les détruire, mais, au
contraire, pour les protéger. Il faut partir du principe qu'il y a
beaucoup de choses qui sont faites. (14 h 45)
On reçoit même beaucoup d'invitations du ministère
de l'Agriculture durant la période hivernale et aussi durant la
période estivale pour aller voir les essais qui se font. Chaque fois que
ces réunions ont lieu, on parle tout le temps de quelle façon
aménager nos terres, c'est-à-dire quelle quantité on va
mettre ici ou là, les produits d'arrosage traités de telle
manière, tant à l'acre, les résultats, etc.
Déjà, les agriculteurs sont conscientisés sur ce qui se
fait en agriculture. Durant une année, je dirais qu'il y a sept ou huit
cliniques et davantage pour ceux qui veulent les suivre toutes: l'agriculteur
est très conscient de tout ce qui se passe, de quelle façon c'est
utilisé. La base de cela, on l'a tous et on suit l'évolution et
les produits nouveaux. Chaque fois qu'ils lancent des nouveaux produits, on
reçoit des invitations. On suit ces choses-là et on est au
courant de ce qui existe. C'est pour vous dire qu'on n'est pas des profanes. On
est quand même des personnes qui ont une responsabilité et on
l'assume. C'est ce que je voudrais vous signaler en même temps. On ne
part pas a zéro, nous autres.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Couillard. M. le
ministre.
M. Lincoln: M. Couillard, je voudrais vous dire qu'on est
très conscients. Du reste, on a eu des rencontres où tout cela a
été souligné. Chez vous, une fois, j'ai rencontré
beaucoup de gens des grandes écoles agricoles qui ont beaucoup
parlé de lutte intégrée et d'alternative biologique, etc.
On est très conscients de cela.
Dans le même ordre d'idées, vous avez axé votre
mémoire pour dire: C'est sûr que la loi, c'est une chose, mais
cela ne va pas apporter beaucoup de solutions. Votre conclusion est dans le
sens de dire: Bon, la formation, c'est bien, mais ce n'est pas la solution
éventuelle. Là-dessus, en principe, nous sommes d'accord. Les
lois ne résoudront pas le problème de base, qui est un
problème de remplacement, de dépistage, de lutte
intégrée. Nous sommes d'accord là-dessus, mais c'est un
problème beaucoup plus vaste; on agit par étapes.
Dans le sens de votre mémoire, soît d'aider le
dépistage et la recherche, le fait que nous faisons face à des
questions d'ordre budgétaire, d'investissements immenses, qu'est-ce que
vous pensez de la suggestion qui est faite par plusieurs intervenants qui vont
témoigner plus tard? Comme vous le savez, le domaine des pesticides
n'est soumis à aucune taxe de vente. Plusieurs ont dit: Si on mettait
une taxe, même une taxe minimale, qui ne serait pas une taxe de 9 %...
Disons qu'on met une taxe inférieure, là où il faudrait
mettre 0,10 %, ou une taxe de 1 % ou 2 %, une taxe légère. Dans
le domaine global des pesticides vendus au Québec, cela
représenterait une somme très conséquente et l'idée
de la taxe, selon ces intervenants, serait d'utiliser ce moyen purement pour la
recherche, le dépistage, la lutte intégrée, les moyens
alternatifs. Quelle est votre réaction à ce genre de discours qui
va être tenu par plusieurs intervenants assez importants?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Couillard.
M. Couillard: Là-dessus, j'aimerais vous dire, M. le
Président et M. le ministre, que, déjà, des associations
se cotisent et, pour accentuer la recherche, investissent de l'argent à
l'intérieur de cela, eux-mêmes, sans aller vers la taxe. Je pense
que la façon dont elles le font, c'est un moyen
beaucoup plus efficace que d'imposer une taxe. Il faut, à
l'intérieur des politiques que vous mettez en place, pas simplement des
politiques au niveau de l'environnement, mais d'autres politiques afin de
permettre aux agriculteurs d'investir aussi dans la recherche. On l'a permis de
différentes façons et on lit dans L'Actualité qu'il
y a eu quand même une exemption d'impôt pour la modique somme de 3
000 000 000 $ dont 1 000 000 000 $ allait directement passer à
côté. Il y aurait sûrement des moyens qui nous
permettraient, à nous les agriculteurs, de pouvoir investir sans
l'imposition d'une taxe. À ce moment-là, M. le ministre, si je le
dis comme ça, c'est que cela nous permettrait, à nous aussi, de
participer. Lorsqu'on investit une part, cela veut dire qu'on peut signaler
exactement à quelle place on veut que la recherche se fasse parce qu'on
y participe. Mais le faire par une taxe, je ne crois pas que ce soit le moyen
le plus approprié à l'heure actuelle.
M. Lincoln: Merci, M. le Président.
M. Couillard: Je ne sais pas si M. Legault a quelque chose
à ajouter.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Legault.
M. Legault: Je pense que le problème de l'utilisation des
pesticides est un problème qui déborde un peu les agriculteurs
qui les utilisent. À mon avis, c'est plutôt un problème
social. La société a décidé d'avoir une agriculture
intensive et d'utiliser des produits pour arriver à cette fin. Quand on
fait porter tout le fardeau de ces dépenses -même actuellement,
les coûts considérables que représentent les allocations
des pesticides - il ne faut pas oublier que ce sont les producteurs agricoles
qui les paient actuellement. Je pense qu'on est déjà assez
taxés à un certain niveau pour ne pas en ajouter d'autres. De
plus, dans la plupart des domaines, toute augmentation du coût de de
production est directement relié et va directement aux producteurs qui
en souffrent. Dans la plupart des produits, on concurrence d'autres provinces,
on concurrence les États-Unis et on ne peut pas augmenter notre prix de
vente. On est obligé d'absorber ces coûts de production. Je pense
que l'agriculture n'est pas assez rentable actuellement pour ajouter d'autres
frais. Déjà, être obligé de payer les frais dont on
parlait ce matin, de 300 000 $ à 400 000 $ pour homologuer un produit au
Canada et peut-être 25 000 000 $ ou 50 000 000 $ dans le monde, il faut
penser que ce sont les agriculteurs qui finissent par payer cela quand ils
achètent les produits et que cela nous coûte déjà
très cher. Finalement, c'est un service qui est social. C'est pour
protéger l'environnement, pour protéger la santé, mais
tout le fardeau revient, finalement, aux agriculteurs. Il ne faudrait
peut-être pas trop en mettre.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Legault. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais aussi
remercier le député de Terrebonne de me permettre d'intervenir
à ce moment-ci.
M. Couillard, messieurs de l'Union des producteurs agricoles, je suis
bien heureux de vous voir avec nous aujourd'hui dans le cadre de l'étude
d'un avant-projet de loi sur les pesticides. Je dois aussi exprimer ma
satisfaction de constater toute l'ouverture qu'a manifestée dans
l'élaboration de ce dossier jusqu'à maintenant mon
collègue, le ministre de l'Environnement, qui a déposé,
non pas un projet de loi, mais un avant-projet de loi dans une perspective de
susciter des échanges entre les deux côtés de
l'Assemblée et aussi avec les intervenants, les groupes qui viendront
témoigner dans les jours suivants. Essentiellement, lorsqu'un
avant-projet de loi est déposé, cela témoigne d'une
volonté du gouvernement d'agir, dans un premier temps, mais aussi de
dire que le projet ou l'intervention qui est proposée est toujours
susceptible d'être bonifiée. C'est ce pourquoi on à
l'occasion d'échanqer aujourd'hui.
C'est avec évidemment beaucoup d'intérêt, beaucoup
d'attention que j'ai pris connaissance de votre mémoire qui est le
résultat de réflexions et d'analyses sur ce dossier depuis
plusieurs années à l'Union des producteurs agricoles, conscients
que vous êtes de l'importance d'être de plus en plus riqoureux dans
l'utilisation de tels produits. C'est aussi le résultat
d'échanges que nous avons eus, l'Union des producteurs agricoles, le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
que j'ai l'honneur de diriger, et le ministère de l'Environnement.
Plusieurs des recommandations que vous formulez recevront très
probablement une réponse positive de la part du gouvernement.
Déjà, mon collègue vous indiquait tout à l'heure
que certaines propositions que vous avez formulées cet après-midi
étaient d'ores et déjà acceptées. Nous allons tout
faire ce qui est humainement possible pour tenter de vraiment traduire, dans le
texte législatif qui sera proposé à l'Assemblée,
étudié par l'Assemblée et adopté
ultérieurement, les recommandations que vous formulez.
La lecture de la situation que je fais comme ministre est la suivante:
le monde agricole est le grand utilisateur de tels produits. Je dois
témoigner aujourd'hui de ma satisfaction et je me sens
sécurisé comme ministre de constater toute l'importance
qu'attachent les agriculteurs du Québec à l'utilisation de
tels produits. Les agriculteurs du Québec sont préoccupés
par leur milieu environnemental, par l'utilisation de ces produits qui
constituent évidemment un outil de travail qui est au premier plan,
finalement, de la rentabilité de leur production, plus
particulièrement dans certaines cultures, notamment dans la culture
maraîchère, d'une part.
D'autre part, les producteurs et les productrices sont bien conscients
que l'utilisation des pesticides constitue un intrant important dans leurs
coûts de production. Comme vous le disiez si bien tout à lheure,
et j'endosse pleinement votre commentaire et votre propos, les producteurs
agricoles du Québec n'utilisent pas de pesticides pour le plaisir.
Cependant, toute situation pouvant être améliorée, le
gouvernement a eu des échanges avec votre organisme. Nous avons
d'ailleurs eu une rencontre le 15 décembre dernier, si ma mémoire
est fidèle. Je crois que la position ou l'attitude adoptée par le
gouvernement donnera des résultats qui seront plus palpables et plus
visibles, soit de procéder par le dépôt d'un avant-projet
de loi, projet de loi qui sera éventuellement déposé,
étudié et adopté. Le législateur aurait pu, les
députés à l'Assemblée nationale auraient pu adopter
une pièce législative indiquant toute une série de
contrôles, établissant des normes, des critères d'admission
ou régissant cette activité. L'approche que nous avons prise - on
doit constater que c'est de plus en plus l'approche que prennent les
gouvernements - est de vraiment associer les intervenants à notre
démarche en y allant, dans un premier temps, par une formation
adéquate. Cela nous apparaît, pour nous, essentiel.
Les utilisateurs, les producteurs et les productrices agricoles doivent
bénéficier, doivent être davantage informés et
doivent recevoir une formation mieux encadrée pour l'utilisation de tels
produits. Vous y faites référence dans votre mémoire et
vous formulez certaines recommandations. Je peux vous donner l'assurance que
cela sera traité avec beaucoup de sérieux. Cependant, ce n'est
pas - je suis d'accord avec vous -seulement par de la formation qu'on va
fournir, en fait, tous les outils adéquats au producteur ou à la
productrice pour utiliser adéquatement de tels produits.
Je souscris à votre intention ou à votre désir de
voir davantage d'efforts déployés au plan de la recherche.
Notamment, on a fait référence tout à l'heure, de
façon incidente, à des propositions formulées par d'autres
groupes que le vôtre, recommandant qu'une taxe soit imposée afin
de consacrer le produit de cette taxe à la recherche. Je peux vous
indiquer, M. Couillard, que le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation dépense, chaque année, des
sommes très importantes d'une part, en matière de recherche
appliquée dans les instituts administrés par le gouvernement du
Québec - les centres de recherche - et, d'autre part, en recherche
fondamentale avec les universités. Je peux vous faire part, aujourd'hui,
de ma volonté comme ministre de convier nos partenaires et de nous
convier nous-mêmes à faire davantage d'efforts et a consacrer un
peu plus d'argent sous le volet de la recherche en reqard des pesticides.
J'ose espérer que cela pourra donner les résultats
escomptés dans les meilleurs délais. En plus de la recherche, de
la formation, il faut, comme vous l'avez dit tout à l'heure, qu'on
puisse en arriver à des techniques de vulgarisation, de sensibilisation,
qu'on puisse fournir davantage de soutien agronomique aux producteurs et aux
productrices. Les agronomes nous proposent un genre de prescription, un peu
comme on a fait dans le domaine de l'utilisation des médicaments. Nous
aurons l'occasion de discuter avec eux lorsqu'ils comparaîtront devant
nous. Cependant, je peux vous faire part de la volonté très
claire de notre gouvernement de rapprocher - j'ai fait part, il y a quelques
mois, à l'Union des producteurs agricoles, de la volonté qui nous
anime - davantage nos professionnels du producteur et de la productrice; ce
sont des choses comme celle-là auxquelles je faisais
référence et auxquelles je pensais notamment.
Fournir davantage d'encadrement technique, de meilleures informations,
cela ne se fera pas en un temps deux mouvements, nous en sommes conscients.
Mais, si on se convie mutuellement - tous les intervenants, le ministère
de l'Environnement, le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation, l'Union des producteurs agricoles et les producteurs
eux-mêmes en régions - à un exercice visant à la
formation, à une meilleure diffusion de nos recherches, de nos
conclusions, de nos études, à davantage de présence de nos
agronomes auprès des producteurs, je crois qu'en fin de compte
l'utilisation des pesticides sera plus rationnelle et sera plus adéquate
en regard des objectifs qui nous animent et que nous poursuivons. (15
heures)
Dans votre mémoire, vous vous êtes
référés au réseau de dépistage. Cela
m'apparaît primordial. Vous avez d'ailleurs des exemples concrets
où l'utilisation des pesticides n'a pas été requise compte
tenu des informations qui vous étaient fournies. La diffusion de telles
informations s'avère évidemment le meilleur moyen pour une
utilisation optimale et rationnelle des pesticides.
Or, essentiellement, le message que je veux vous livrer aujourd'hui,
c'est vous
remercier de votre mémoire et vous indiquer la volonté
très claire du ministère de l'Agriculture d'être
présent. Je vous remercie d'avoir sensibilisé non seulement mon
collègue de l'Environnement qui l'est déjà beaucoup, mais
aussi les collègues autour de cette table. II serait tout à fait
illusoire de croire qu'une véritable action positive et concluante
puisse avoir cours si on n'a pas une interaction de tous les intervenants, le
ministère de l'Éducation, comme vous le proposez, le
ministère de l'Environnement, le ministère de l'Agriculture et
les producteurs et les productrices concernés.
Cependant, j'aurais une question à poser. Dans une rencontre
antérieure - je ne voudrais pas, évidemment, me
référer au contenu privé d'échanges - vous aviez
indiqué l'intérêt del'UPA à la possibilité de
prendre à sa charge l'organisation et la réalisation des
programmes de formation. Entre parenthèses, je note vos recommandations
concernant les délais qu'on s'est donnés. On va étudier
cela et je suis persuadé que le ministre de l'Environnement, comme
d'habitude, va procéder è une analyse très sérieuse
et très rigoureuse de vos propositions à cet égard. Pour
nous, la formation est importante. On ne peut pas se permettre de mettre sur
pied une structure de services, de sensibilisation, d'information, de formation
comme telle et, finalement, manquer notre coup. Le sujet est trop important. Je
suis conscient que les producteurs sont bien sensibles à ces questions.
Comme ministre de l'Agriculture, il m'apparaissait que le fait de donner aux
producteurs eux-mêmes la qestion de l'organisation d'une telle formation
était un gage additionnel de succès de la démarche.
D'ailleurs, j'avais entrepris comme ministre et nous avions entrepris au
ministère des échanges avec le gouvernement fédéral
dans la perspective d'une telle structure. Aujourd'hui, vous nous dites: Nous
déclinons cette offre. J'en suis surpris. Je n'en suis pas
déçu parce que je suis convaincu que vous allez être assis
autour de la table. Pourriez-vous m'indiquer pourquoi l'Union des producteurs
agricoles refuse d'assumer la gestion d'une telle activité?
Le Président (M. Richard): M. Couillard.
M. Couillard: M. le ministre, je dois vous dire que, lorsqu'on
décline cette offre, il faut quand même donner un peu
d'explications. Je m'attendais un peu à cette question. D'ailleurs, en
ce qui concerne l'Union des producteurs agricoles, lorsqu'on parle de
formation, depuis le début, on a toujours été
impliqués en ce qui a trait a la formation. Bien sûr, on s'est
impliqués de plus en plus. Â l'heure actuelle, ce dossier est
arrivé à l'Union des producteurs agricoles et nous
désirons être impliqués encore. Ce n'est pas que nous nous
retirons du dossier, au contraire. Bien sûr, quant au contenu des cours
et le fait d'inciter les agriculteurs à aller aux cours, nous sommes
avec vous. Lorsqu'on dit que nous déclinons l'offre, je dois aussi vous
dire que nous avons eu du fédéral des offres de sommes d'argent
pour faire de la formation, pas simplement en ce qui concerne le dossier des
pesticides, mais sur d'autres sujets. Nous avons toujours cru bon de continuer
à travailler avec nos partenaires immédiats, avec lesquels nous
avons toujours travaillé dans le passé, soit le ministère
de l'Éducation, le ministère de la Main-d'Oeuvre et le
ministère de l'Agriculture. Je ne pense pas que nous devions nous
retirer et changer notre façon de travailler quand se présente un
dossier social. Nous avons toujours travaillé avec nos partenaires au
Québec. Nous sommes conscients que, même à
l'intérieur de ce dossier, malgré qu'il va y avoir plus
d'implications, nous devons continuer dans le même ordre d'idées,
c'est-à-dire travailler avec nos partenaires. Pour préparer ces
cours, nous sommes disposés à travailler avec les
ministères de l'Environnement, de l'Aqriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu et de l'Éducation. C'est le réseau qu'on a toujours
privilégié. Nous sommes convaincus que, malgré
l'énormité du projet, nous sommes encore capables d'avoir le
même réseau. La CFP est arrivée dans le décor, j'en
fais partie et je pense qu'on est capable à l'intérieur de cela
d'aller chercher les ressources nécessaires pour tâcher de mener
à bien ce projet.
La seule chose qu'on mentionnait, c'est qu'au lieu de 7000 à 8000
agriculteurs, nous croyons sincèrement qu'avec la liste ries produits
qui nous a été fournie, il y aura plus d'aqriculteurs que
prévus qui seront obligés de s'en aller vers une certification.
Ce n'est pas une échappatoire qu'on veut avoir. Si on demande un laps de
temps un peu plus grand, ce n'est absolument pas pour cela. C'est simplement
pour être certain qu'on est capable de couvrir tous les agriculteurs qui
peuvent prendre le temps de suivre des cours très
adéquatement.
Dans un premier temps, M. le ministre, vous avez saisi qu'on a des
partenaires, qu'on les a toujours respectés; nous avons toujours
été satisfaits de travailler avec eux. Je ne vois pas pour quelle
raison ils seraient retirés quand un dossier particulier arrive. On est
capable d'aller chercher ensemble les montants d'argent nécessaires et
d'exploiter les institutions que nous avons.
M. Pagé: M. Couillard, vous ne répondez pas tout
à fait à ma question.
M. Couillard: D'abord, je suis aussi politicien que vous, M. le
ministre.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Pagé: Comment dites-vous cela? Je m'excuse.
M. Couillard: Je suis aussi politicien que vous si je ne
réponds pas tout à fait à votre question. Vous
m'excuserez, je vais me reprendre,
M. Pagé: Ah! Je réponds à toutes les
questions venant de l'Union producteurs agricoles, et surtout celles de mes
collègues.
M. Couillard: Je vais me reprendre, M. le ministre.
M. Pagé: Elles sont tellement peu nombreuses de l'autre
côté.
M. Couillard: Je vais me reprendre, M. le ministre, je vais
essayer de faire un peu mieux.
M. Pagé: Dans le cas de la santé et de la
sécurité au travail, on se rappellera que l'Union des producteurs
agricoles a accepté de prendre en charge la diffusion des informations
et la sensibilisation auprès des producteurs. C'est l'Union des
producteurs agricoles elle-même qui a travaillé avec la Commission
de la santé et de la sécurité du travail. On doit vous
dire que vous avez fait un très bon boulot, un très bon travail
dans le dossier de la santé et de la sécurité à la
ferme. D'ailleurs, les démonstrations qu'on a vues pendant
l'été dans différentes expositions, les contacts que j'ai
avec les producteurs, avec les syndicats de base m'indiquent que le fait que
cela ait été assumé par l'Union des producteurs agricoles
a été très concluant, très positif. On voulait s'en
inspirer, on voulait s'inspirer de ce modèle d'intervention qui nous a
permis d'atteindre un très haut degré de sensibilisation et
d'information auprès des producteurs dans le cas des pesticides. Vous me
dites: Nous allons collaborer, nous allons y être, on est ouvert, on va
vous aider à aller chercher des sommes d'argent si nécessaire.
Parfait, merci, je l'apprécie. D'ailleurs, c'est ce à quoi je
m'attendais de votre part parce que vous êtes profondément, vous
aussi, préoccupés par ces questions. Mais pourquoi
refusez-vous?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Couillard.
M. Couillard: On ne veut pas être le seul partenaire
è l'intérieur de cela, dans un dossier aussi important. Je crois
d'ailleurs qu'à l'intérieur de tout ce dossier, M. le ministre,
on est bien sûr que la loi doit être administrée par le
ministère de l'Environnement. Mais, si vous avez bien pris connaissance
du dossier, M. le ministre, vous êtes impliqué. Je pense que le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation est
impliqué directement dans tout le dossier.
Quant à la question de la formation, bien sûr que nous
allons faire la diffusion de notre journal, qu'on va inciter les agriculteurs
à suivre des cours de formation et qu'on va les sensibiliser à
cette nécessité. Il est bien certain qu'on va faire toutes ces
choses, mais ce dont on a discuté avec vous, M. le ministre, dans un
premier temps, c'est de prendre presque uniquement à notre charge le
fait d'aller chercher l'argent au gouvernement fédéral pour
préparer les cours et sur la façon de les donner. C'est à
ce sujet qu'on dit, M. le ministre: Non, on va le faire conjointement, on sera
à l'intérieur, mais on va le faire avec les organisations qui ont
toujours été nos partenaires, soit le ministère de
l'Éducation. C'est là que les cours doivent se donner. Pour cela,
on a certaines personnes qui sont capables de le faire. Il est bien certain
qu'au ministère de la Main-d'Oeuvre aussi nous avons toutes les
possibilités voulues de ce côté-là. Pourquoi
irions-nous enlever ces partenaires alors qu'on a toujours été
ensemble? On dit: Non, on va rester avec eux.
Même pour les cours avec la CSST ou ces choses-là, je dois
vous dire qu'on va chercher de l'arqent, bien sûr et qu'on commence
à faire monnayer nos cours par la CFP, c'est-à-dire qu'elle
achète nos cours et qu'on va chercher un peu d'argent là parce
que l'Union des producteurs agricoles ne peut pas financer à elle seule
toutes ces choses-là. Bien sûr, c'est pour cela qu'on dit: Les
partenaires sont là. On va demeurer dans la même ligne de
pensée et on va s'impliquer davantaqe peut-être que dans d'autres
circonstances.
M. Pagé: Je vous remercie, M. Couillard. Je retiens
cependant que vous recherchez non pas une situation où l'Union des
producteurs agricoles piloterait seule le dossier. J'en conclus que vous
recherchez une relation encore plus étroite, plus intime avec le
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et
le gouvernement du Québec. On va se marier.
M. Couillard: C'est une manière de le faire!
M. Pagé: Un dernier commentaire avant de terminer, et mon
collègue pourra continuer. Je peux vous donner l'assurance de la
présence et du rôle très actif du ministère de
l'Agriculture dans l'ensemble de cette démarche. Comme vous le savez
déjà très probablement, le ministère collabore au
conseil interministériel sur les pesticides. D'ailleurs, la
présidence est assumée par un
fonctionnaire du ministère de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation.
On participe évidemment aux différents conseils
consultatifs. On sera intimement associé à l'élaboration
du cours sur les pesticides et nous sommes déterminés à
déployer plus d'efforts au niveau de la recherche pour vous fournir
davantage d'outils, pour accentuer notre réseau d'avertissement
phytosanitaire et pour rapprocher nos agronomes de la ferme.
Je pense que, mutuellement, de part et d'autre, on est de bonne foi dans
l'ensemble de cette démarche, étant donné que les
producteurs agricoles utilisent 82 % des pesticides au Québec et que
c'est important non seulement pour eux, mais aussi pour le milieu
environnemental.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M.
Couillard.
M. Couillard: M. le Président, je comprends que le
ministre est souvent très occupé. J'aurais une question à
poser et j'aimerais que le ministre de l'Agriculture sott là au moment
de la question que j'aurai à poser. La question peut m'être
posée, mais, au cas où elle ne le serait pas, je ne voudrais pas
manquer ma chance au cas où il s'absenterait. Je connais un peu les
ministres. Vous savez, ils sont occupés parfois.
M. Pagé: Pas de problème avec !es questions. C'est
avec les réponses qu'on a des problèmes.
M. Couillard: Non, la réponse va être pareille. Cela
va être très bien. La seule chose, c'est que la remarque que je
voulais faire, c'est que vous avez dît que vous voulez quand même
un rapprochement. Je comprends cela. Vous avez énoncé
l'idée, la pensée, plusieurs fois, que les agronomes devraient
être de plus en plus proches des champs et des agriculteurs plutôt
que de rester dans un bureau. On en est bien conscient et on en est fier.
L'autre chose, par contre, c'est que l'on parle de nouvelles
technologies, surtout sur le plan des applications de nouveaux produits ou
n'importe quoi. On dit: Bravo! C'est bien sûr que les agronomes du
ministère ont un rôle important à jouer. Mais, entre cela
et faire des prescriptions, je vous dis qu'il y a une grosse différence.
C'est là où je voudrais vous mettre en garde: il y a une grosse
différence entre apporter une nouvelle technologie en agriculture, de
quelle façon une nouvelle technologie s'applique, de quelle façon
les nouveaux produits travaillent et toutes ces choses-là. Mais
être obligé d'avoir des prescriptions pour aller chercher des
pesticides, c'est autre chose. C'est ce que je voulais vous dire.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Pagé: Je peux vous dire, M. Couillard, sans engager la
décision ou la recommandation que mon collègue de l'Environnement
aura à formuler, comme suite à de telles propositions, que nous
avons adopté une loi qui touche des milliers et des milliers de
producteurs agricoles du Québec concernant l'ajout de médicaments
vétérinaires aux aliments consommés par nos cheptels.
Selon moi, on devrait commencer par bien digérer cette loi, être
capable de l'articuler avant d'envisager d'autres démarches analogues.
Mais on aura l'occasion d'y revenir.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. Je
cède maintenant la parole à M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. D'abord, merci,
MM. Couillard, Ménard et Legault, d'être là et de nous
avoir présenté un mémoire aussi étoffé et
aussi intéressant. Je vais aller directement -je ne suis pas politicien
- au noeud. Vous dites à la page 6 qu'une approche trop légaliste
risquerait d'engendrer hostilité et méfiance. En faisant un petit
chapeau à la question qui va suivre, les cultivateurs et les
agriculteurs du Québec ont la chance d'avoir une Loi sur la protection
du territoire agricole qui est bien structurée et que vous
défendez comme la prunelle de vos yeux, et je vous en félicite.
Cette loi est là pour protéger la quantité de terres
cultivables au Québec. C'est une loi qui fait honneur à
l'Assemblée nationale. Les cultivateurs en sont fiers. Voici qu'arrive,
pour la première fois du côté législatif, un pan qui
vient essayer de protéqer la qualité de la quantité de
terre qui vous est allouée. Bien sûr que c'est votre connaissance
du sol et votre amour de la terre nourricière qui fait qu'elle demeure
productive d'année en année, de décennie en
décennie. Mais vous dites aussi, de façon générale,
dans votre rapport et ailleurs, que les cultivateurs manquent de moyens, etc.
Donc, arrive une loi gouvernementale qui vient essayer d'ouvrir un pan de
protection du côté qualitatif de la terre elle-même; c'est
donc d'une importance capitale pour la classe de gens que vous
représentez ici. (15 h 15)
Personnellement, vu que c'est le premier volet législatif qu'on
voit dans ce sens, trouvez-vous vraiment qu'en étant un peu trop
légaliste on risquerait d'engendrer vraiment la méfiance si on
était très sévère pour protéger la
qualité de vos terres? Disons juste cela, je continuerai après.
Cette
sévérité, est-ce que vous trouvez cette loi
sévère? Je ne la trouve pas sévère du tout.
J'aimerais avoir votre opinion sur cela.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Couillard.
M. Couillard: L'avant-projet de loi qui est déposé,
on ne dit pas qu'il est sévère; au contraire, on y souscrit. On
vous met simplement en garde contre certains éléments qu'on a mis
à l'intérieur de notre mémoire. Lorsqu'on dit que la loi
telle que présentée, c'est une loi présentée sur le
côté éducatif, il est certain qu'on y souscrit. On met en
garde de ne pas aller du côté coercitif. D'autres gouvernements se
sont dirigés du côté coercitif quant à
l'environnement en obligeant les agriculteurs à faire des
dépenses et aujourd'hui on s'aperçoit qu'elles ne sont même
pas justifiables. À partir de ce moment, on dit oui à une loi qui
va du côté éducatif et non à une loi qui va du
côté coercitif. L'approche est très positive et on dit oui
à cette loi.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: D'accord. Je vais vous poser exactement la même
question que le ministre vous a posée. Les cultivateurs, de façon
générale - j'ai été élevé sur une
ferme, je sais ce que c'est - n'ont pas toujours les moyens de faire ce qu'ils
veulent; ils sont toujours un peu plus riches qu'ils le laissent voir, et tant
mieux pour eux. Je reviens à la charge. Afin de favoriser un programme
de recherche pour avoir une culture un peu plus biologique -
intégrée, si vous voulez - un plan élaboré de
diminution de l'utilisation du côté quantitatif des pesticides
pour l'inspection des dépisteurs-conseillers et pour avoir aussi des
conseillers agronomes spécialistes pour conseiller sur la
quantité à utiliser pour ne pas dépasser les
quantités qu'on devrait - croyez-vous que dans cette loi - je ne parle
pas du discours qui entoure, je ne parle pas de l'intention législative
avouée, mais de la verbalité, de la lettre de la loi - il y a
quelque chose qui vient vous protéger vers la diminution de l'emploi de
pesticides?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Couillard.
M. Couillard: Je vais vous dire quelque chose au départ.
Je suis un agriculteur, je ne suis pas un avocat pour voir tout ce que devrait
contenir la loi ou tout ce qu'elle ne devrait pas contenir et de quelle
façon on peut l'appliquer. Je pense à quelque chose de plus
simple. Plus vous allez inclure de réglementation à
l'intérieur d'une loi, plus, en fin de compte, cela ne voudra plus rien
dire, à mon idée, parce que vous ne serez pas capahles de
l'appliquer. Je ne pense pas que c'est une loi comme cela que vous voulez
avoir.
Je pense plutôt qu'une loi contient l'essentiel lorsque vous
parlez de la protection de l'environnement, des pesticides. Par la suite, ce
que vous greffez par règlements, la façon d'arriver à
faire fonctionner la loi, je pense que c'est cela qui est le plus facile et
c'est la meilleure loi que vous pourrez faire à ce moment. Ce n'est pas
en essayant de la formuler de telle façon qu'il n'y ait plus aucune
échappatoire, qu'il n'y ait plus rien et que cela soit tellement
complexe que vous ne pourrez plus l'appliquer.
On a noté à l'intérieur de la loi que des choses
manquent. Quand on parle de lutte intégrée, bien sûr
qu'à l'intérieur de la loi on n'en parle pas beaucoup. Est-ce
qu'on devrait y faire une place ou si on doit aller dans... Je ne le sais pas.
Je dis tout simplement: Si vous cherchez à tout mettre dans la loi, vous
ne réussirez pas. Je pense qu'après vous allez continuer avec
l'agencement autour de la loi quant à l'application. Réellement,
c'est là que vous pouvez changer des choses plus facilement parce qu'on
peut se tromper, vous savez. Je me trompe et je suis certain que vous aussi
vous vous trompez, malgré que vous soyez les législateurs.
M. Blais: On est rendu dans l'Opposition, on doit s'être
trompé de temps en temps.
Une voix: Pas souvent.
M. Couillard: Je présume. Il y a des choses dans une loi
qui sont plus difficiles à changer tandis que dans les
règlements, c'est plus facile à adapter à la minute
où on fonctionne avec cette loi. C'est le travail que le
législateur a à faire. Je vous fais part de ma pensée
là-dessus.
M. Blais: Je ne suis pas avocat non plus et j'ai souvent de la
misère à me retrouver dans les lois, mais je trouvais que, dans
votre mémoire, vous aviez bien compris. C'est en lisant votre
mémoire que j'ai formulé ma question; moi-même, j'avais de
la misère.
Je tiens cependant à vous dire une chose. Cette loi, je ne la
trouve pas assez sévère, et je trouve qu'elle ne protège
pas assez la quantité de terre qui vous est allouée pour nous
nourrir. C'est pour cela que je vous demandais si vous trouviez cette loi assez
sévère. Je ne la trouve pas assez sévère.
D'après moi, il n'y a rien dans cette loi qui va permettre la diminution
de l'utilisation des pesticides. Tout ce qu'il y a, ce sont des articles de loi
pour que l'utilisation soit faite avec sécurité, non pas
sur la diminution. Personnellement, dans ce sens, je trouve qu'il n'y a
rien dans la loi pour diminuer, pour arriver è l'agriculture
intégrée. C'est le réponse que je voulais avoir, mais je
me la donne moi-même.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Legault.
M. Legault: Je pense que la question de la diminution des
pesticides est vaste. Je ne sais pas si l'objectif de la loi, c'est vraiment
une diminution des pesticides ou une meilleure utilisation des pesticides, une
utilisation quand c'est nécessaire seulement. On est dans un contexte
mondial où on ne peut pas dire qu'au Québec on n'utilisera plus
de pesticides. On est en concurrence avec les produits. Je pense que tout le
monde veut mieux utiliser les pesticides, en utiliser le moins possible,
évidemment. Je pense que, finalement, avec son approche
éducative, la loi mènera vers cela. Je fais partie d'un
réseau de dépistage depuis plusieurs années, et c'est avec
l'information qu'on a eu, l'aide de techniciens du ministère de
l'Agriculture et de chercheurs d'Agriculture Canada qui nous ont permis de
réduire l'utilisation des pesticides dans certains cas; dans d'autres
cas, c'est une utilisation plus efficace des pesticides qu'on a. Je pense que
ce n'est pas avec une loi qu'on va réduire les pesticides, c'est avec
beaucoup de recherche dans le monde pour amener d'autres techniques.
Je voudrais ajouter autre chose. Il faut faire attention, dans une loi
comme cela -cela a été mentionné ce matin par les
producteurs de produits chimiques - de ne pas taxer un groupe de producteurs
dans une province. Ce qu'on voudrait, c'est une certaine uniformisation dans
tout le Canada des lois sur les pesticides pour éviter qu'un groupe de
producteurs, au Canada ou dans une province, ait droit à des pesticides,
alors que d'autres n'y auraient pas droit. Il faudrait que ce soit uniforme.
Déjà, on se rend compte, dans les cultures
maraîchères, qui sont des cultures de peu de superficie, que c'est
très difficile d'avoir des pesticides. Il y en a de moins en moins parce
que, économiquement, ce n'est pas rentable pour les compagnies
productrices d'en développer. C'est un problème. Plus on avance,
moins il y a de produits. En même temps, comme producteurs, il faut
devenir concurrentiels avec les États-Unis et l'Europe dans la
production de nos produits. Déjà, au Canada, les lois sont
à peu près les plus sévères au monde. Il ne
faudrait pas qu'en plus, comme producteurs, nous soyons régis par une
loi provinciale ou par un ensemble de lois provinciales qui soient les plus
sévères au Canada. Je pense qu'on serait très
pénalisés par rapport au contexte mondial de l'agriculture
où il faut concurrencer.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Legault.
M. Blais: Je pense à peu près comme vous, mais
j'aimerais que cette loi nous mène, par la recherche, vers une
diminution de l'utilisation. Je crois qu'on le sent aussi dans votre
rapport.
La dernière question, parce que le temps coule et va vite. Avant
que vous partiez, parce que je ne vous ai pas souvent sous la main, à la
page 6, je voudrais vous demander pourquoi vous croyez qu'il y aurait des abus
relativement aux demandes d'injonction de citoyens. Vous dites que l'article 69
stipule qu'une demande d'injonction auprès d'un juge de la Cour
supérieure peut être faîte par toute personne qui
allègue que des pesticides sont utilisés contrairement aux
méthodes, normes et procédés reconnus. Vous pensez qu'il
peut y avoir abus, ce qui nuirait fortement è votre production" Pourquoi
croyez-vous qu'il peut y avoir abus?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Couillard.
M. Couillard: Dans un premier temps, il faut dire que ce n'est
pas la seule loi avec laquelle les producteurs vivent; il y en a d'autres
aussi. On s'aperçoit qu'en agriculture, c'est si simple de porter en
cour un préjudice et cela ne fonctionne plus.
Des exemples, on en a dans l'environnement, le bruit, etc. Un
agriculteur, que vous le vouliez ou non, cela cultive et les meilleures terres
- ce n'est pas notre faute et ce n'est sûrement pas la vôtre non
plus - sont toujours autour des centres urbains, des villages.
Évidemment, il nous faut aussi travailler à l'intérieur de
ces périmètres. Lorsqu'on arrose, bien sûr...
Moi-même, lorsque je prends la transcanadienne, s'il y en a qui arrosent
à un demi-mille de là - je sens le produit, je sais qu'ils
arrosent, même si je ne les vois pas. Dès qu'arrivent des choses
semblables, n'importe qui est à même de porter un jugement et
prendre des actions.
Nous, en agriculture, avec les moyens qu'on a et avec le travail qu'on
a, on n'a pas le temps d'être tout le temps dans les papiers et dire: Un
gars a pris une action, il faut que j'en prenne une autre. Qu'est-ce que je
vais faire? Je vais faire ceci et cela. Ce qu'on veut, c'est pouvoir produire
au meilleur marché possible et la meilleure qualité possible. Ce
qu'on veut d'une loi, c'est qu'elle nous donne les moyens de le faire sans tout
le temps avoir des restrictions et se demander: Est-ce que celui-là va
nous assommer ou l'autre, de l'autre bord? Vous avez vu cela un peu
partout dans les journaux. Souvent, on est obligé de faire des
arrosages par avion et vous avez vu ce que cela fait; cela s'est produit
à Beloeil, à Saint-Jean-Baptiste et un peu partout. Bien
sûr qu'avec l'avion il faut commencer à 4 heures du matin; parce
qu'à 7 heures, il faut s'arrêter, les abeilles commencent à
sortir. Il y en a qui travaillent de bonne heure, il y en a d'autres qui
travaillent plus tard. On commence les arrosages à 4 heures et, parfois,
à 6 h 30, il faut s'arrêter. C'est bien certain qu'on
réveille le monde. Aussitôt qu'on entend l'avion, on appelle la
police et on lui demande d'arrêter les avions, ceci et cela. Regardez ce
qui est arrivé à Saint-Jean-Baptiste; cela arrive, des accidents
semblables. Il y a même un policier, à un moment donné, qui
s'est fait frapper. Je me demande pourquoi, parce qu'il avait été
appelé sur les lieux. Toute action qui est prise contre nous, vous ne
pouvez pas savoir comment cela devient fatigant de cultiver, de travailler en
agriculture.
Bien sûr, nous voulons nous astreindre à des normes, nous
voulons utiliser les bonnes pratiques, mais, par contre... On ne dit pas qu'on
ne veut pas avoir de plaintes du tout; s'il y a des plaintes, qu'on les fasse
au bon moment pour qu'on puisse prendre le temps de savoir ce qui va nous
arriver et de quelle façon on peut régler le problème. Six
millions de personnes qui font des plaintes, savez-vous que ça devient
fatigant?
M. Blais: D'accord, je comprends bien. M. le Président,
avant de passer la parole à mon confrère de Jonquière,
j'aimerais vous dire simplement que je suis content, malgré nos mauvais
coups, d'avoir été du gouvernement qui vous a donné la Loi
sur la protection du territoire agricole. Je serais content d'être
député de cette Chambre si la Loi sur les pesticides devient
aussi constructive que je voudrais qu'elle soit quand on aura fini. Merci
beaucoup, M. Couillard.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Il y a juste un point qui mériterait, à
mes yeux, d'être un peu éclairci. Lorsque vous parlez des
exigences du certificat et de la mise en marche le 1er janvier 1990. Je pense
que le 1er janvier 1990 est une date idéale, mais je ne pense pas que
vous employiez des pesticides en saison hivernale. Cela veut dire que ce n'est
pas avant le mois de mai ou de juin, j'imagine; cela donne donc six mois
supplémentaires. Si vous demandez un report de l'application de la
loi... Est-ce parce que ce cours est complexe à mettre en marche ou si
c'est parce que cela ne donne pas assez de temps pour que les gens puissent
obtenir leur certificat?
M. Couillard: Ce n'est pas parce que c'est complexe à
mettre en marche, il y a des choses qui sont déjà faites. Des
cours, il y en a déjà qui sont donnés, ce n'est pas
nouveau. À l'heure actuelle, il y a deux catégories: ceux qui
sont obligés de s'en aller vers une certification et ceux qui devront
suivre un cours pratique. Dans un premier temps, il peut y avoir une quinzaine
d'heures pour ceux qui suivent un cours pratique axé sur la
prévention, l'économie d'herbicide, la calibration, etc. Il est
bien certain que vous allez avoir l'autre aussi, pour ceux qui utilisent les
produits un ou deux, et il y aura des périodes supplémentaires
qui s'ajouteront pour qu'ils connaissent mieux les préparations et la
façon d'utiliser les produits plus dangereux. Ce pourrait être une
période de trente heures. (15 h 30)
Ce n'est pas que ce soit long de faire la préparation du cours.
Non, il y a des choses qui sont déjà toutes alignées. Je
veux vous dire que, dans un premier temps, on sait qu'on s'en va vers une
certification. Je crois - c'est ce qu'on dit dans notre document - que
près de 14 000 agriculteurs seront obligés d'aller vers une
certification. Je voudrais vous mentionner que 14 000 agriculteurs, ce n'est
pas 200, 300, 500 ou 600, c'est 14 000, On note qu'on voudrait au moins que,
parmi tous les autres agriculteurs, il y en ait 80 % en 1990 qui aient suivi le
cours d'économie et de prévention. C'est bien certain qu'à
ce moment-là on parle d'à peu près 40 000 agriculteurs,
mais il faut prendre le temps de suivre ces cours. Au niveau agricole,
même si vous demandiez à l'agriculteur de les suivre pendant la
période des semis, cela veut dire à partir du 15 avril, durant
l'été, je ne pense pas qu'il puisse suivre des cours. C'est pour
cela qu'on serait restreints à la période hivernale pour suivre
des cours, c'est-à-dire qu'on commencerait à suivre nos cours au
mois de novembre. En décembre, ce sont les fêtes comme pour tout
le monde. On serait peut-être disposés à suivre des cours,
mais il n'y aurait personne pour les donner. Cela vous mène à
janvier, février et mars. Voyez-vous? Les périodes sont
restreintes.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Couillard. Est-ce
qu'il y a d'autres interventions?
M. Dufour: J'ai une question directement au ministre.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Jonquière.
M. Dufour: M. le ministre, dans votre loi, à quelque
endroit, est-ce que vous avez laissé l'impression ou avez
recherché à travers la mise en marche de cette loi la
possibilité de diminuer l'importance et l'utilisation des pesticides en
agriculture? Dans le mémoire de l'UPA, ils font un peu
référence à cela. Je regarde la mise en marche ou les
notes préliminaires et il ne semble pas que vous recherchiez cela
nécessairement, une diminution de l'emploi des pesticides. Est-ce que
c'est assez clair à vos yeux ou si cela doit aller plus loin?
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, cette question, je suis
content qu'elle me soit posée parce que je pense qu'elle est
fondamentale. Il me semble qu'il va de soi que toute la question et tout
l'objectif de cette loi, comme on l'a dit et comme on le retrouve dans le
mémoire de l'UPA et dans le mémoire d'autres intervenants, c'est
une méthode, c'est une recherche éducative, c'est une recherche
de formation. Il est évident, quasi évident - pour moi cela saute
aux yeux - qu'une personne formée et éduquée saura mieux
se servir des pesticides et, en plus, elle saura s'en servir de façon
beaucoup plus judicieuse, économique, et c'est facile de le prouver. Je
suis certain que M. Legault me confirmera que quelqu'un qui est
complètement ignorant, une personne ignorante de l'utilisation ou qui le
fait d'après les usages qui étaient en place sans
l'éducation qu'elle aurait pu avoir le fait d'après le
calendriers mais qu'une personne éduquée, formée
concernant l'impact des pesticides, ses bienfaits et ses méfaits, les
utilisera de façon beaucoup plus judicieuse et pas selon des
méthodes du calendrier. À ce moment-là, il est clair qu'il
y a une relation directe entre le volume des pesticides et la formation. C'est
clair que depuis qu'on a institué des cours de formation par
télévision, par code de bonne pratique, comme le cas de
l'Association des exterminateurs du Québec, les insecticides et les
pesticides utilisés dans le monde de l'extermination ont diminué
dans ce secteur è cause de gens qui ont été formés
parce qu'ils les utilisent de façon beaucoup plus judicieuse, beaucoup
plus sécuritaire, beaucoup plus rationnelle et parce qu'ils sont
conscients des méfaits, également des alternatives possibles et
de la façon de mieux les utiliser.
Je ne dis pas que cette loi, naturellement, est une fin en soi. On ne
peut pas imposer de la recherche par une loi. On ne peut pas imposer des
méthodes de dépistage par une loi. Ce qu'on dit, nous
commençons par la formation. On va plus loin que huit provinces sur dix
qui n'ont même pas touché l'agriculteur et qui ne pensent
même pas à le faire. Aujourd'hui, l'Ontario y pense, elle a une
loi depuis 1969. Seule la Colombie britannique l'a fait jusqu'à
présent, mais dans une certaine mesure seulement. Et nous, on va plus
loin que cela, on l'associe à la démarche. Il ne faut pas dire
que cette loi ne veut rien dire et que cela ne peut pas diminuer l'utilisation
des pesticides. Je crois qu'il faut dire que le système d'information et
d'éducation est la clé de tout le succès dans tous les
domaines, incluant les pesticides; c'est cela la clé. Il me semble que
c'est tellement évident. C'est là ma réponse.
Je serais bien content que M. Legault nous le dise; si, par exemple,
vous avez un agriculteur qui n'a pas de formation du tout, n'est-il pas vrai
qu'il aurait pour réflexe de se servir d'une méthode de
calendrier, routinière, alors qu'un agriculteur qui est formé
agirait de façon beaucoup plus judicieuse et, donc, avec bien moins de
pesticides en employant des moyens alternatifs? J'aurais voulu poser cette
question à M. Legault puisque cette question c'est presque un
défi de nous dire que cette loi c'est comme si ce n'était rien.
Cela va plus loin en fait que la plupart des provinces et beaucoup
d'États. Comme je vous l'ai déjà dit, j'ai passé
presque une journée dans l'État de New York. C'est l'approche
qu'ils prennent et ils ont été bien loin avec les agriculteurs,
aussi loin qu'ils le peuvent et c'est l'approche qu'ils prennent parce que la
formation et le volume de pesticides cela va de pair.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Legault.
M. Legault: Je pense que c'est ce que j'ai dit tout à
l'heure. Je pourrais vous le répéter, M. le ministre. Je suis
convaincu que la formation c'est la meilleure façon de diminuer
l'utilisation des pesticides, dans une situation plus rationnelle.
Je voudrais aussi peut-être déborder un peu du sujet des
pesticides et de l'environnement. Il faudrait aussi se souvenir que les
pesticides sont un danger potentiel pour l'agriculteur qui les utilise,
peut-être le plus grand danger actuellement. La plupart des pesticides
sont rejetés souvent pour le danger que cela représente pour
l'agriculteur qui les utilise. Je pense que les cours de formation auront
certainement l'avantage de rendre plus conscients les agriculteurs au danger
potentiel d'utilisation des pesticides. Dans le fond, les pesticides, on ne les
utilise pas par plaisir. D'abord, cela peut représenter un danger pour
notre santé et ils nous coûtent cher. Je pense que notre but,
comme agriculteurs, avec l'information, c'est d'en utiliser le moins
possible.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Legault. Est-ce
qu'il y a d'autres commentaires? Brièvement, M. Couillard.
M. Couillard: M. le Président, M. le ministre n'a pas
touché à un point. J'aimerais quand même essayer d'avoir
une certitude de notre ministre de l'Environnement. Bien sûr que le
financement de cette loi m'inquiète un peu. J'aimerais quand même
revenir un peu sur cela, M. le ministre, à savoir que vous avez
parlé de permis. Pour nous, on est exempté de permis. Cela prend
des certifications pour les utilisations dans les classes 1 et 2. Nous disons:
Bien sûr, on accepte ces choses, mais, par contre, il ne faudrait pas que
ce soit renouvelé à tous les ans parce qu'on vous a dit
également qu'au niveau académique on n'est pas là pour
passer des concours à tous les deux ou trois ans pour savoir si la
certification est là. On est bien prêt à avoir une bonne
formation et on disait que c'est une loi qui arrive quand même, avec la
pratique, à une certification. Mais on aimerait se faire dire par vous
que pour ces choses, le financement, vous allez appuyer le financement parce
qu'on ne voudrait pas arriver avec des permis ou des certifications qu'on
serait obligé de renouveler à tous les deux ou trois ans dans le
secteur agricole, sans penser qu'on est environ 40 000 agriculteurs. J'aimerais
cela que vous nous disiez... C'est votre loi et c'est votre affaire aussi,
quant au financement.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: Tout ce que je peux vous dire à ce stade-ci,
M. Couillard, c'est qu'il n'y a pas de position figée dans le ciment du
tout là-dedans. Comme vous le savez, il y a une réglementation
qui va s'appliquer aux agriculteurs et qui va délimiter ce genre de
choses.
Tout ce que je peux vous dire, c'est que toutes les questions de permis
vont être nominales. C'est sûr que cela ne sera pas quelque chose
qui va affecter le coût de production. Deuxièmement, nous allons
éviter une bureaucratie monstre qu'il serait impossible d'administrer
par nous-mêmes, parce qu'il y a des coûts de part et d'autre. Il y
a aussi les coûts du ministère, le Conseil du trésor en est
très conscient. Nous avons discuté de cette question. Rien ne
sera fait sans une consultation préalable poussée avec vous et
avec le ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, parce que nous considérons avec vous que ces questions
sont très importantes à régler. On aura le
règlement d'ici juillet. Il y aura pas mal de temps pour discuter de ces
questions. Il n'y a rien qui est fiqé dans le ciment, mais ce n'est
certainement pas l'idée de vous envoyer des coûts et des choses
bureaucratiques pour faire fonctionner l'affaire financièrement. Pour
nous aussi il y a des coûts immenses et il faudra financer toute la
bureaucratie. Alors, moins il y aura de bureaucratie, moins il y aura de
coûts.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. S'il
n'y a pas d'autres commentaires...
M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Je voudrais vous remercier de vous être
déplacés. Merci aussi de votre franchise. C'est très rare
qu'on se fait dire par un président ou un vice-président que vous
êtes aussi politiciens que les politiciens. Cela m'a fait plaisir que
vous le disiez parce qu'on l'est un peu nous autres aussi. Merci d'être
venus. Merci d'avoir produit un aussi bon rapport et à la prochaine.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. Couillard, très
brièvement, s'il vous plaît!
M. Couillard: Je voudrais vous remercier d'avoir accepté
qu'on se présente et qu'on formule des commentaires pour vous autres. Je
vous remercie, M. le Président, M. le ministre et MM. les membres de la
commission.
Le Président (M. Saint-Roch): MM. les représentants
de l'Union des producteurs agricoles, je vous remercie de votre participation
aux travaux de cette commission. J'inviterais maintenant les
représentants de la Fédération des producteurs
maraîchers du Québec à prendre place devant la
commission.
Fédération des producteurs
maraîchers du Québec
Bienvenue parmi nous. Je demanderais maintenant au porte-parole de
s'identifier pour le bénéfice des membres de cette commission et
du Journal des débats et de nous présenter les gens qui
l'accompagnent.
M. Mousseau (André): Je m'appelle André Mousseau,
je suis vice-président de la Fédération des producteurs
maraîchers du Québec; M. Jean-Bernard Vanwinden, membre de
l'exécutif de la fédération et président du
Syndicat des producteurs d'oignons; M. Jean-Pierre Girard, secrétaire
adjoint à la fédération.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M.
Mousseau. À partir de ce moment-ci, je vous demande de déposer
votre mémoire.
M. Mousseau: Je vais commencer par vous présenter notre
fédération. Notre fédération représente sept
syndicats régionaux, soit de Québec, Nicolet, Saint-Hyacinthe,
Saint-Jean-de-Valleyfield, de Lanaudière, de la Mauricie et du
Saguenay-Lac-Saint-Jean. Elle comprend aussi trois syndicats provinciaux, soit
un pour les fraises et framboises, un pour les serres et un pour les oignons.
La fédération représente 4000 producteurs maraîchers
répartis dans toute la province. La production maraîchère
c'est 100 000 000 $ de ventes à la ferme, c'est aussi 34 000 hectares de
légumes. Quant à la production en serres, c'est 50 000 000 $ de
ventes à la ferme. En tout, cela représente une masse salariale
de 50 000 000 $ au Québec.
Nous sommes des utilisateurs de pesticides, car la population exige un
produit parfait en concurrence avec les autres provinces au pays et eux aussi
en utilisent. C'est pourquoi nous appuyons la position de l'UPA et avons
décidé de développer un secteur particulier, soit la
rationalisation et sans doute la diminution de l'utilisation des pesticides.
Les produits de protection des cultures sont nécessaires à
l'agriculture. Ils ont permis d'augmenter les rendements, d'améliorer la
qualité des récoltes et d'assurer leur conservation en
entrepôts. Sans les produits de protection des cultures, les
maraîchers seraient incapables de protéger leurs cultures et leurs
récoltes contre les innombrables ravageurs toujours présents. Les
consommateurs feraient souvent face â des raretés d'aliments qui
entraînent inévitablement des hausses de coûts
considérables.
Les produits de protection des cultures ont permis d'assurer
l'approvisionnement régulier et abondant en produits maraîchers de
qualité supérieure. Cependant, la Fédération des
producteurs maraîchers du Québec est consciente qu'il faut
diminuer les dommages causés à l'environnement et éliminer
les risques pour la santé des utilisateurs et du public en
général. Il est important que les produits de protection des
cultures soient employés d'une façon plus rationnelle. La
Fédération des producteurs maraîchers du Québec ne
peut être que d'accord avec le projet de loi du ministre de
l'Environnement de régir l'utilisation des produits qui conviennent
à ces productions.
La fédération croit qu'en augmentant la compétence
des producteurs maraîchers ils pourront utiliser les produits de
protection des cultures d'une façon plus judicieuse. Mais cette
approche, tout en étant bonne, a des limites. Elle ne permettra pas aux
producteurs maraîchers de les utiliser d'une façon plus
rationnelle. Elle ne fera qu'informer les maraîchers sur la façon
sécuritaire de les utiliser. Pour en arriver à une utilisation
plus rationnelle des produits de protection des cultures, il faudrait mettre en
place des réseaux de dépistage. Le principal objectif des
réseaux de dépistage est de rationaliser la fréquence des
arrosages en synchronisant les traitements avec le développement du
ravageur. Cette méthode de travail permet d'effectuer des interventions
plus efficaces et souvent moins fréquentes. De cette façon, on
attend l'ennemi visé tout en réduisant les effets néfastes
sur les organismes utiles.
Depuis 1981, il existe un réseau de dépistage dans la
région sud de Montréal couvrant les productions en sols
organiques. Ce réseau de dépistage est né de
problèmes rencontrés par les producteurs de carottes à
contrôler le charançon. Le but, au départ, était de
déterminer l'opportunité et le moment optimum de traiter avec un
insecticide en pulvérisation. En 1981, il y a eu cinq producteurs qui
ont adhéré au réseau de dépistage. Le réseau
couvrait les producteurs de carottes et d'oignons pour un total de 100
hectares. Au cours des années se sont ajoutés des producteurs de
sorte qu'en 1986 les superficies couvertes par le réseau
représentaient plus de 2000 hectares et 35 maraîchers. De plus, la
culture du céleri s'est ajoutée au réseau. (15 h 45)
Le réseau de dépistage assure aux producteurs participants
que leurs champs seront visités en moyenne deux fois par semaine par un
dépisteur. Ce dernier suit des méthodes éprouvées
et améliorées chaque année, pour dépister tous les
insectes et toutes les maladies de la carotte, de l'oignon et du
céleri.
Les observations du dépisteur sont compilées pour chaque
champ et les producteurs sont avisés du moment opportun de traiter.
L'application de la lutte intégrée permet d'apporter
plusieurs avantages qui profitent aux producteurs, à l'agriculteur et
à la société en général.
L'élimination d'un grand nombre de traitements inutiles permet aux
producteurs de réaliser des économies importantes dans les
produits de protection des cultures et dans le temps d'application. À
titre d'exemple, en 1985, dans le réseau du sud de Montréal, plus
du tiers de 3000 acres de carottes dépistées n'aura reçu
aucun traitement insecticide, alors que sans dépistage elles auraient
toutes été traitées au moins deux fois. Le
dépistage du céleri a permis, dans la plupart des cas, de
réduire de moitié le nombre des traitements insecticides pour un
même niveau de dommages.
Parmi les autres avantages du réseau de dépistage, on peut
mentionner que cette méthode de travail permet de vérifier
immédiatement l'efficacité des traitements et le besoin de les
répéter. L'amélioration des méthodes de lutte
permet l'augmentation
de leur efficacité, ce qui permet de réaliser un
accroissement des rendements consécutifs à la diminution des
pertes dues aux ravageurs.
La diminution du nombre de traitements réalisés favorise
l'augmentation de la durée de vie utile des produits de protection des
cultures, en évitant ou en atténuant l'apparition et
l'évolution de la résistance des ravageurs. De plus, cette
rationalisation de l'emploi des produits de protection des cultures
amène la réduction des risques de pollution, et favorise donc
l'amélioration de la qualité de l'environnement.
Malgré tous ces avantages, plusieurs problèmes
reliés à l'implantation des réseaux de dépistage
viennent freiner l'expansion de cette méthode. Un des principaux
problèmes est le coût du dépistage. Le dépistage
coûte cher, particulièrement dans les régions où les
surfaces sont éparses ou lorsqu'il est nécessaire de faire un
très grand nombre de relevés pour une culture donnée. Les
producteurs sont prêts à payer une partie du coût du
dépistage. Cependant, ils ne peuvent payer plus cher que le traitement
chimique qu'ils peuvent épargner. Les autres problèmes
rencontrés dans l'implantation des réseaux sont le manque de
personnes-ressources compétentes et avisées, l'instabilité
du réseau entraînant la rotation du personnel, et la faible
collaboration de la recherche dans cette orientation.
Devant l'incertitude qui plane sur les réseaux de
dépistage déjà existants et ta difficulté d'en
créer d'autres, il est important que le gouvernement du Québec
s'implique financièrement. La Fédération des producteurs
maraîchers du Québec demande au ministère de
l'Environnement et au ministère de l'Agriculture de s'impliquer
financièrement dans la création et le maintien des réseaux
de dépistage.
En conclusion, la Fédération des producteurs
maraîchers du Québec est d'accord avec le projet de loi
régissant l'usage des produits de protection des cultures. Cependant,
pour concilier les exigences de la production maraîchère et celles
de la protection de l'environnement, il est important de rationaliser leur
utilisation et, pour ce faire, le ministre de l'Environnement et le ministre de
l'Agriculture doivent s'impliquer financièrement dans la création
et le maintien des réseaux de dépistage.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M.
Mousseau. M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, je voudrais remercier M.
Mousseau et sa délégation pour leur rapport qui confirme, en bien
des sens, ce que l'UPA nous a dit, à savoir que la formation est une
étape. Nous concevons cela tout à fait, mais l'utilisation
rationnelle des pesticides ne se fera que lorsque nous aurons des moyens de
remplacement, soit tout le système d'utilisation des méthodes de
dépistage, la recherche pour une lutte intégrée qui
impliquerait des alternatives biologiques et d'autres moyens chimiques. Nous
sommes très conscients de la position que vous avez prise et du message
que vous nous avez transmis de travailler de très près avec le
ministre de l'Agriculture et son ministère pour développer une
recherche plus approfondie et des moyens d'arriver à l'utilisation
rationnelle des pesticides pour une lutte intégrée dans ce
domaine.
Je sais que vous avez suivi tes échanges qui ont eu lieu avec
l'Union des producteurs agricoles, en premier lieu. Je ne vais pas
répéter les questions qui ont été posées.
Selon ce que je comprends, vous cherchez à dire: Bon, la toi, dans un
premier temps, apportera ta formation. C'est une étape importante et
valable. En deuxième temps, il faudrait une politique du gouvernement
par rapport à l'utilisation rationnelle, à la lutte
intégrée et aux méthodes de dépistage. Ai-je bien
compris le sens de votre mémoire?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Mousseau.
M. Mousseau: Oui, c'est le sens exact de notre mémoire. Ce
qu'on aimerait pousser plus loin, c'est vous faire comprendre un peu plus ce
que cela peut représenter comme énergie de mettre en place un
service de dépistage. Jean-Bernard, membre de l'exécutif de la
fédération, a travaillé sur le réseau dans sa
région. Il pourrait vous expliquer exactement toutes les implications
que cela a de mettre en place un réseau de dépistage, que ce
n'est pas seulement faire promener des dépisteurs dans le champ, et
hourral c'est réglé. J'aimerais que Jean-Bernard puisse vous
expliquer exactement comment cela fonctionne et les coûts que cela peut
impliquer.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Bernard... M. Vanwinden.
M. Vanwinden (Jean-Bernard): Qu'est-ce que c'est qu'un
réseau de dépistage? C'est un groupe de producteurs qui se paient
les services de dépisteurs dans le but d'utiliser des pesticides de
façon plus rationnelle. Ces dépisteurs parcourent
généralement les champs des producteurs de deux à trois
fois par semaine pendant toute la saison de production et font rapport au
producteur de la présence et du taux d'infestation des insectes et des
maladies dans le champ. Les dépisteurs suivent des méthodes
d'échantillonnage très précises et longuement
éprouvées. Ces méthodes nous permettent de prévoir
le pourcentage de perte à la récolte
associé à n'importe quel taux d'insectes ou de maladies
dans le champ et le degré optimal de traitement si nécessaire.
Pour vous donner un exemple, dans les carottes, avant la création du
réseau, tout le monde faisait un traitement contre les charançons
aux semis suivi de deux è trois traitements foliaires. Après des
recherches et des méthodes de dépistage du charançon dans
le champ qui ont pris trois à quatre ans avant d'avoir des
méthodes certaines, en collaboration avec les chercheurs de la station
de recherche à Saint-Jean, on est arrivé à commencer
à enlever tous les insecticides granulaires aux semis; il n'y a plus un
producteur dans le réseau qui met des insecticides granulaires aux
semis. Environ 30 % de la superficie des carottes dépistées n'ont
pas été arrosés du tout, c'est-à-dire n'ont eu
aucun traitement insecticide è la suite du dépistage du nombre de
charançons qu'il y avait dans le champ.
Le dépistage nous permet de dire que, quand on trouve tant de
charançons dans le champ, rendu à tel niveau de population, il
faut traiter et qu'en bas de tel niveau on ne traite pas, et le stade optimal
de traitement.
C'est pour en venir à démontrer qu'il est très
important qu'il y ait un lien qui se fasse et que les réseaux de
dépistage sont là comme lien entre la recherche et la
pulvérisation.
M. Lincoln: Je céderai la place à mes
collègues pour d'autres questions.
M. Pagé: M. le Président.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation.
M. Pagé: Très brièvement, seulement un
commentaire à nos amis de la Fédération des producteurs
maraîchers du Québec. C'est avec beaucoup de satisfaction que je
reçois le mémoire par lequel la fédération
s'inscrit dans la perspective de l'adoption du projet de loi. Vous en appuyez
les principes, vous êtes d'accord avec les objectifs poursuivis par le
gouvernement et par le législateur. Je voudrais reprendre très
brièvement, parce que vous y étiez tout à l'heure
lorsqu'on a eu l'occasion de discuter avec l'Union des producteurs agricoles...
Je voudrais vous indiquer la volonté très claire, très
ferme et bien comprise aussi... Nous croyons bien saisir la façon de
faire pour en arriver à l'objectif d'une utilisation plus rationnelle
des pesticides au Québec. D'ailleurs, l'une des préoccupations,
tout à l'heure, de nos collègues était de se demander si
l'adoption d'un projet de loi comme celui-là allait réduire
l'utilisation d'un tel produit. Je pense que vous venez de confirmer - et la
preuve est maintenant faite - que, lorsqu'on s'organise, lorsqu'on peut avoir
la disponibilité des productrices et des producteurs, par exemple, des
réseaux de dépistage, cela débouche
généralement sur une diminution de la consommation de tels
pesticides. L'expérience nous enseigne que c'est près de 1000
acres sur 3000 sur la rive sud de Montréal l'année
dernière dans certaines productions qui n'ont eu besoin d'aucun
pesticide, alors que, normalement, cela aurait été deux
traitements par année.
Qu'est-ce que cela veut dire concrètement? Cela veut dire - et
j'interprète votre mémoire et la position que vous avez
adoptée aujourd'hui - une volonté très claire et un
intérêt de votre fédération de vous associer
à une démarche qui s'articulera à partir de meilleurs
outils de formation et d'information mis à la disposition des
productrices et des producteurs. Je retiens que vous êtes d'accord aussi
avec le fait que les producteurs soient intimement et directement
associés au travail du ministère de l'Agriculture, du
ministère de l'Environnement et aussi du ministère de
l'Éducation, en regard des cours qui seront dispensés.
Tel que je l'ai indiqué tout à l'heure à l'Union
des producteurs agricoles, comme ministre de l'Agriculture, il ne suffit pas de
voir à une formation accrue et plus adéquate, il faut que cela
s'inscrive dans une complémentarité et, notamment, avec davantage
d'efforts au plan de la recherche appliquée et en utilisant une
technique ou une façon de faire pour que le résulat de nos
recherches se rende vraiment chez le producteur et la productrice.
Je vous remercie de votre mémoire. Les producteurs
maraîchers du Québec jouent un rôle très important,
non seulement au plan de l'approvisionnement de produits frais aux
consommateurs et consommatrices du Québec, mais aussi dans
l'économie du Québec. Vous êtes un maillon important de la
chaîne de production des produits alimentaires et je voudrais vous
témoigner mon appréciation.
Vous dites à la page 4 de votre mémoire: "Devant
l'incertitude qui plane sur les réseaux de dépistage
déjà existants et la difficulté d'en créer
d'autres, il est important que le gouvernement du Québec s'implique
financièrement." Je dois vous faire part que l'expérience
conduite avec de tels réseaux de dépistage, de 1981 à
1986, s'avère très concluante, selon moi. Sachez qu'une
représentation comme celle que vous nous faites aujourd'hui recevra
certainement beaucoup de considération.
D'ailleurs, on a établi, depuis quelque temps, une
quantité et une qualité de contacts qui, je crois, sont
privilégiés. Votre fédération est très
dynamique et je voudrais profiter de l'occasion que j'ai aujourd'hui de
vous rencontrer, ici, au parlement, pour vous remercier des efforts que
vous déployez.
Malheureusement, les circontances ont voulu que je ne puisse être
avec vous le 6 février, vendredi dernier. Cependant, soyez
persuadés qu'en ce qui concerne vos propositions, notamment au niveau de
la commercialisation des produits, le ministre est très réceptif
et on aura l'occasion de se rencontrer bientôt.
Je vous remercie de votre mémoire et nous escomptons bien que les
producteurs maraîchers du Québec s'associeront à cette
démarche de sensibilisatoin, parce que le travail ne peut pas venir
seulement du gouvernement ou des gouvernements, mais il doit aussi venir des
producteurs, étant donné l'importance de l'utilisation de tels
produits au plan des coûts, dans un premier temps, et quant à
l'opportunité évidemment.
Alors, je compte bien sur un appui substantiel de la
Fédération des producteurs maraîchers dans la mise en
oeuvre de cette programmation qui sera établie à partir de
l'adoption du projet de loi. Merci de vos recommandations, messieurs; je les
apprécie.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup. J'ai trouvé votre rapport
très intéressant; je vous remercie de l'avoir fait. C'est, en
fait, le premier plaidoyer que je vois - il est très chaud - en faveur
de l'agriculture intégrée, le premier qui se présente.
Donc, vous êtes des gens qui pensez à la protection de nos terres
à long terme, et je vous en félicite.
J'aimerais, cependant vous poser des questions. L'agriculture
intégrée, pour beaucoup, c'est un rêve, pour moi, c'en est
un aussi; cela va peut-être me prendre un peu de temps. Il y a quand
même des questions terre à terre que j'aimerais vous poser
directement.
Dans le cas des dépisteurs - vous avez commencé cela
depuis 1981; je trouve cela très bon - est-ce que des
représentations ont été faites auprès du
ministère de l'Environnement ou du ministère de l'Agriculture
pour avoir le soutien gouvernemental là-dedans? Sinon, ce projet de loi
n'est-il pas pour vous le plateau tout désigné pour des
représentations?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Mousseau.
M. Mousseau: Nous faisons des représentations depuis
maintenant une couple d'années auprès du ministère de
l'Agriculture à propos des réseaux de dépistage. On
comprend que, depuis l'arrivée au gouvernement du Parti libéral,
il y a eu une certaine rationalisation des coûts; il a fallu qu'ils
entrent dans leurs souliers. Je pense qu'aujourd'hui, à la suite de ce
que nous a dit le ministre de l'Agriculture, les représentations qu'on
faisait sur ce plan ont fait leur chemin. Je suis sûr que, dans
l'année qui va venir, on aura sans doute des réponses à
propos de ces réseaux de dépistage. C'est sûr que le
gouvernement n'a pas des millions à dépenser, mais je pense que
dans un tel système, ce qu'on lui offre pour lui permettre d'aller un
peu plus loin, s'il y tient vraiment, on lui donne l'occasion d'aller plus
loin. (16 heures)
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Terrebonne.
M. Blais: Avez-vous eu des ententes ou des promesses formelles
que les dépisteurs seront payés soit par le ministre de
l'Environnement ou le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation? J'aimerais bien entendre un oui de votre part, je n'en ai pas
entendu parler.
M. Mousseau: Tout ce qu'on sait à l'heure actuelle, c'est
que les nouveaux programmes du ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation sont supposés être
déposés à la fin de mars ou au début d'avril.
À l'heure actuelle, d'après les indices qu'on a eus, on devrait
avoir de bonnes réponses. Tant que les programmes ne sont pas
déposés, on ne sait pas ce qu'ils contiennent. Tout ce qu'on sait
à l'heure actuelle, ce sont les indications du ministre à aller
dans ce sens, mais on n'a pas de oui que cela va fonctionner.
M. Blais: Vous faites bien d'être sur vos qardes. La
fédération nous donne des moyens par le dépistage, on dit
que cela coupe jusqu'à 50 % de l'utilisation des pesticides. C'est la
moitié...
Une voix: ...
M. Blais: Pardon? Vous avez dit 30 %, moi, j'ai lu 50 %, mais ce
n'est pas grave, cela élimine beaucoup l'utilisation. J'avais lu 50 %,
je vais vérifier quand même. Vous dites qu'il n'y a pas eu
d'épandaqe et, normalement, on aurait dû traiter deux fois. "Elle
auraient toutes été traitées au moins deux fois." Donc,
c'est 50 %, je vous remercie.
À ce moment-là, à part les dépistaqes
directs, est-ce que vous avez d'autres moyens à conseiller au
législateur ici, en commission parlementaire, pour diminuer
l'utilisation des pesticides, à part le dépistaqe? Est-ce qu'il y
a d'autres moyens que vous connaîtriez?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Mousseau.
M. Mousseau: Le dépistage est sûrement une
façon. Une autre façon de diminuer te nombre... À l'heure
actuelle, on a des problèmes avec le gouvernement fédéral
à faire homologuer de nouveaux pesticides. Il y a de nouveaux pesticides
aux États-Unis qui pourraient être utilisés d'une
façon beaucoup plus efficace ici. À cause des lois du
gouvernement fédéral, ces produits sont utilisés aux
États-Unis et ne peuvent être utilisés ici. Si ces nouveaux
produits étaient introduits ici, cela nous permettrait d'avoir des
produits nouveaux, moins toxiques et beaucoup plus utilisés par les
producteurs. C'est surtout là-dessus qu'il y aurait une
amélioration.
Également, au niveau de la recherche, on sent un très
grand manque; c'est incroyable, depuis cinq ans, il y a une diminution
constante. Il n'y a pas de volonté réelle, au niveau des
gouvernements, d'aller vers la lutte intégrée. Ce qui nous
intéresserait, c'est une recherche réelle, mais les agronomes ne
sont même pas formés en fonction de cela. Il y a tout un ensemble
de choses à établir pour permettre que cette lutte
intégrée soit effective. À l'heure actuelle, on ne sent
pas, chez les universités ni chez les gouvernements, d'une façon
très tangible, que c'est vraiment une nécessité. C'est
là-dessus qu'il faudrait insister à l'heure actuelle.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Vous sentez pas dans ce projet de loi quelque chose qui
favorise l'agriculture intégrée? Vous ne le sentez pas, vous non
plus.
M. Mousseau: À l'heure actuelle, de ce que je lis dans
l'avant-projet de loi, c'est surtout de l'utiliser d'une façon
sécuritaire.
M. Blais: C'est ce que je comprenais moi aussi. Je vous
remercie.
Le Président (M. Saint-Roch): Est-ce qu'il y a d'autres
interventions? Je tiens à remercier la Fédération des
producteurs maraîchers du Québec d'être venue
présenter ses travaux aux membres de cette commission.
Je demanderais maintenant au Mouvement pour l'agriculture biologique de
prendre place, s'il vous plaît! Dans un premier temps, je vous souhaite
la bienvenue à la commission de l'aménagement et des
équipements. Je demanderai au porte-parole de s'identifier et
d'identifier aussi celui qui l'accompagne à l'intention des membres de
cette commission.
Mouvement pour l'agriculture biologique
M. Boutet (Jean): Mon nom est Jean Boutet, directeur
général du Mouvement pour l'agriculture biologique. Je suis
accompagné par M. Robert Marcotte, agronome. Il devait y avoir aussi M.
Claude Cadieux, biologiste, mais il a dû s'absenter â la
dernière minute.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Boutet.
Nous allons maintenant entendre votre mémoire.
M. Boutet: Avant de faire la lecture du mémoire, je
voudrais, dans une petite introduction, faire une présentation du
Mouvement pour l'agriculture biologique. Il s'agit d'un organisme sans but
lucratif dont le but est de promouvoir les principes et la pratique de
l'agriculture biologique qui respecte l'environnement. C'est un organisme qui
regroupe toute personne intéressée à atteindre ce but. En
particulier, nous regroupons des agriculteurs, des consommateurs, des
jardiniers, des transformateurs, des distributeurs, des formateurs, des
professionnels, toute personne intéressée par l'agriculture.
Nous remercions le ministère de l'Environnement de nous avoir
demandé notre avis sur son intervention proposée afin d'utiliser
rationnellement les pesticides. Nous apprécions son désir
d'impliquer les divers intervenants dans sa démarche. Nous tenons
à le féliciter pour le travail qui a été fait. Le
ministère a vraiment réussi à concentrer l'information
disponible pour brosser un tableau saisissant de la réalité. Le
fait de légiférer implique une démarche de courage. Nous
considérons qu'il s'agit d'un premier pas vers une nouvelle approche de
la gestion de la santé de l'environnement et des gens. Nous souhaitons
que les commentaires et suggestions contenus dans le présent
mémoire soient pris en considération avant l'adoption de la
loi.
Nous ne voulons pas revenir sur la démonstration des effets
insidieux des pesticides car ils sont clairement définis dans le
document, mais nous tenterons de saisir l'idée générale
des différents chapitres afin de bâtir l'argumentation sur les
propositions que veut faire le Mouvement pour l'agriculture biologique sur la
loi.
Dans le premier chapitre du document de support à la
préconsultation pour une utilisation rationnelle des pesticides au
Québec, on constate l'usage de plus en plus répandu de produits
chimiques de synthèse dans le contrôle et la répression des
organismes considérés comme nuisibles à l'activité
humaine. On remarque entre autres, dans cette analyse, que les agriculteurs
sont les principaux utilisateurs, dans une proportion de 83 %, selon la figure
1.2 et le paragraphe 1,6 du document. On voit aussi au tableau 1.6 que le
nombre d'employés en agriculture constitue 73 % du nombre de
personnes concernées dans le secteur des pesticides.
Dans le chapitre 2, nous voyons que l'introduction de ces substances
dans l'environnement ne va pas sans causer de nombreux problèmes. La
figure 2.1 illustre à quel point on retrouve ces produits partout dans
le milieu qui nous entoure. De plus, on conclut qu'il y a beaucoup de lacunes
dans la connaissance de l'effet des pesticides dans l'environnement.
Malgré que beaucoup de recherche reste à faire, on rapporte que
nous en savons déjà assez pour recommander une gestion prudente
et contrôlée de ces produits chimiques dangereux pour la
santé humaine et l'environnement.
Les effets des pesticides sur la santé humaine proviennent
essentiellement de l'exposition des individus è ces substances. La
principale source d'exposition aux pesticides pour l'ensemble de la population
serait le contact avec les denrées alimentaires. Elles sont,
rappelons-le, le produit de la chaîne agro-alimentaire. De plus, une
catégorie de personnes est plus directement exposée à ces
dangers. Il s'agit de ceux qui entrent en contact avec ces produits lors de
leurs activités professionnelles. La grande majorité se retrouve
dans le secteur agricole.
On retient aussi que les formes d'intoxication peuvent être
spontanées (aiguës), à court terme (subaiguës) et d'une
accumulation à long terme (chroniques). Cette dernière forme est
la plus insidieuse et, potentiellement, peut être la plus importante car
elle touche constamment tous les individus; donc, il ne faudrait pas la
négliger. Si on connaît encore peu les effets spécifiques
d'un produit, nous en savons encore moins sur les effets synergiques entre les
pesticides, leurs substances associées, les métabolites et autres
produits chimiques et, pourtant, il s'agit sans doute là de la situation
la plus courante d'exposition à ces produits. En tant que principaux
utilisateurs, les agriculteurs sont particulièrement exposés et
pourtant, le document fait état de leur niveau de connaissance
très faible.
Le maintien et l'accroissement de la production agricole,
l'amélioration de la qualité des produits, l'économie de
main-d'oeuvre ainsi que l'allégement de la tâche constituent les
principaux avantages de l'utilisation des pesticides. Une recherche
d'alternatives devra donc tenir compte de ces avantages tout en visant à
diminuer les inconvénients.
En termes d'évaluation économique, à très
court terme, il peut sembler plus rentable d'utiliser les pesticides, mais,
déjà, des études démontrent qu'il y a
surutilisation. Dans ce sens, une rationalisation et la lutte
intégrée constitueraient une amélioration. Cependant,
l'approche économique actuelle n'intègre pas assez les
coûts sociaux et environnementaux. L'internalisation de ces coûts
devrait faire partie de toute étude de rentabilité et permettrait
de mieux faire ressortir les avantages des alternatives aux pesticides pour la
gestion des parasites et des plantes adventices.
Finalement, au chapitre 5 du document de travail, la
problématique exposée identifie les lacunes des connaissances
scientifiques relatives aux pesticides et illustre les pratiques hasardeuses
reliées à l'utilisation des pesticides. La recherche
nécessaire comporte deux volets: une meilleure connaissance des
substances en question ainsi que le développement d'alternatives
à leur utilisation. L'éducation doit se faire par des cours de
formation à tous les usaqers ainsi que le respect de codes de bonne
pratique spécifiques à chacun des secteurs d'activité.
L'idéal serait certainement l'élimination des pesticides
de synthèse tout en assurant un contrôle des organismes nuisibles.
Nous sommes convaincus que ce but est possible à atteindre.
Déjà, des agriculteurs membres de notre mouvement y arrivent
bien. Cela leur demande des connaissances et une gestion efficace de leurs
pratiques culturales. D'autre part, il faut être réaliste et
concevoir que nous n'arriverons pas à l'élimination avant 20
à 30 ans. L'approche du ministère de l'Environnement est
certainement la meilleure pour atteindre cet objectif car, tout en respectant
l'état de la situation présente, elle permet une évolution
rationnelle et graduelle.
L'émission de permis et de certificats aux utilisateurs
entraînera la gestion rationnelle de l'utilisation des pesticides.
L'éducation, par des cours de formation et les codes de bonne pratique,
constitue le moteur de l'utilisation plus rationnelle des pesticides car, avec
l'avancement des connaissances sur les méthodes préventives,
celles-ci peuvent être intégrées au contenu des cours et
ainsi entraîner une évolution dynamique vers la substitution des
pesticides de synthèse par des moyens plus appropriés. La demande
de tenir des bilans d'utilisation améliorera la connaissance et
permettra d'orienter la recherche en plus de permettre une intervention en cas
de problèmes pressants.
Cela dit, un élément nous inquiète au plus haut
point: l'absence des agriculteurs et des forestiers de la politique
d'intervention. Nous ne pouvons pas comprendre les raisons qui motivent cette
absence, surtout après avoir si bien identifié l'origine agricole
de la grande majorité des pesticides. Même si des modalités
particulières peuvent être prévues, il faudrait qu'au bout
du compte les agriculteurs et les forestiers détiennent des certificats
à la suite de cours de formation et soumettent des bilans d'utilisation.
La définition de "pesticide" devrait être
accompagnée d'une liste exhaustive de ces produits. Cette liste
devrait inclure les herbicides et bactéricides utilisés dans les
piscines.
En ce qui concerne la classification, on semble avoir retenu la
toxicité aiguë chez les humains comme critère. Il ne
faudrait pas en omettre d'autres comme la toxicité chronique. En effet,
des problèmes peuvent aussi survenir par l'accumulation è long
terme, ce qui devrait pondérer la classification,
particulièrement pour les classes 4 et 5. Il faudrait s'assurer que
l'accumulation n'entraîne que peu de nuisance. De plus, il faudrait
considérer l'effet chez d'autres organismes; par exemple, les
pyréthrines n'ont pas d'effet chez les humains mais, si elles sont mal
utilisées, elles peuvent être nuisibles aux abeilles.
Un autre point nous semble ambigu: la distinction entre utilisateur
privé et commercial, d'une part, et entre privé et domestique,
d'autre part. Pourquoi l'employé d'un propriétaire d'un
édifice à bureaux qui fait de l'entretien paysager est-il
différent de l'applicateur commercial qui vient faire le même
travail à contrat? En ce qui concerne les produits de classe 4,
où est la limite entre l'applicateur privé et domestique?
Un aspect qui n'est pas partie inhérente à l'intervention
proposée, mais qui constitue un appui essentiel est la recherche et le
développement. À maintes reprises dans le document, on sent les
limites aux connaissances actuelles. La recherche devrait se faire à
deux niveaux: l'amélioration des connaissances actuelles sur les
pesticides et l'élaboration des stratégies alternatives. Un
programme de recherche devrait être établi dans le même
esprit de collaboration qui prévaut dans le processus de consultation
actuel sur cette loi.
Un aspect à développer est la notion de
rentabilité. Toute étude comparative devrait intégrer les
coûts environnementaux. Des modèles économiques
d'internalisation de ces coûts devraient être établis. Cette
recherche pourrait être financée à l'aide d'un fonds
alimenté par une taxe spéciale sur les pesticides. Cette taxe
devrait être variable selon la classe, et une note sur
l'étiquetage devrait mentionner que telle proportion du prix va pour la
recherche d'alternatives. Cette taxe pourrait varier de 10 % pour la classe 5
à 200 % pour la classe 1. Cela permettrait de mieux sensibiliser les
utilisateurs.
Il faudrait développer un programme particulier,
administré indépendamment, de façon que les projets en
agriculture écologique soient évalués à leur juste
valeur et non pas noyés dans la recherche conventionnelle. Il faudrait
aussi accentuer la cueillette de données, d'où l'importance que
tous les usagers, incluant les agriculteurs et les grossistes, soumettent des
bilans. Les permis et certificats devraient être obtenus à la
suite de tests pratiques autant que théoriques. Ces tests pourraient
comprendre la manipulation de l'équipement, l'évaluation du
comportement en cas de fuite des contenants, etc. Il devrait y avoir un
réévaluation périodique par de nouveaux tests, par exemple
tous les cinq ans, qu'il y ait ou non des modifications au contenu des cours de
formation.
En ce qui concerne les agriculteurs, le coût des certificats
pourrait être défrayé par la taxe sur les pesticides. Les
demandes de permis de classe 1 devraient être accompagnées d'une
description de l'organisme visé ainsi que de la région
d'application. Il faudrait référer à une banque de
données avant de l'émettre, afin de vérifier si une
demande semblable a déjà été faite et proposer des
moyens différents s'il s'agit d'un problème persistant. Un
système de points de démérite pourrait être
instauré afin de pénaliser ceux qui abuseraient des pesticides.
(16 h 15)
La formation est sans contredit le pivot de l'intervention du
ministère; en elle réside les clés du succès. D'une
manière générale, elle devrait privilégier les
méthodes préventives de lutte, l'usage des pesticides
n'intervenant qu'en dernier ressort. Il est sûr que le contenu va
évoluer avec les connaissances. En fait, il faudrait prévoir un
mécanisme permanent de révision. Les cours devraient comprendre
des notions de premiers soins. Les utilisateurs devraient recevoir des
dépliants informatifs décrivant les moyens alternatifs de lutte,
les symptômes d'empoisonnement avec l'achat de chaque produit.
L'étiquetage devrait être le plus détaillé possible
décrivant la classification des produits, leur toxicité, et ainsi
de suite. Les intervenants non utilisateurs, comme le personnel du
ministère de l'Agriculture, les techniciens, les membres de l'Ordre des
aqronomes, des chimistes et autres, devraient aussi recevoir cette
information.
En annexe, on retrouve une proposition concernant l'expertise attendue
des utilisateurs.
Les étalages devraient distinquer les produits chimiques des
produits bioloqiques. Ils devraient être inaccessibles aux acheteurs qui
seront servis par un employé, un peu comme pour les médicaments
d'ordonnance. Le public devrait aussi être informé par des
dépliants appropriés accompagnant les produits qu'il
achète et par des campagnes de sensibilisation à la
télévision et dans les journaux. Afin de stimuler ceux qui font
des efforts pour se libérer des pesticides de synthèse, des
classes particulières pourraient être intégrées
à des concours comme "Villes et villages fleuris" par un prix à
ceux qui auront les meilleurs résultats sans pesticide
ou, comme le mérite agricole, par un prix pour le meilleur
aménagement écologique d'une ferme.
Au chapitre de la sécurité, il faudrait voir à
identifier adéquatement les lieux traités et prévoir une
période de temps avant de permettre la réintégration de
ces lieux.
Afin de permettre une meilleure sensibilisation du public, un programme
de conversion des jardins communautaires à l'agriculture biologique
devrait être implanté de façon à ce que, d'ici trois
à cinq ans, tous ces jardins soient cultivés sans produit de
synthèse. Il s'agit d'un objectif réaliste. Déjà,
l'expertise est au point et le mouvement est disposé à apporter
son assistance à une telle entreprise.
Pour terminer, nous aimerions dire quelques mots concernant le
comité "aviseur". Nous nous interrogeons sur sa composition. Pour
répondre à la question du ministère, nous croyons qu'il y
a nécessité de former un comité "aviseur" mixte permanent
composé de l'ensemble des intervenants de façon qu'il y ait
autant de représentants de ceux qui voient à
l'intérêt de la santé publique et de l'environnement de
ceux qui voient à leur intérêt dans l'utilisation des
pesticides.
Son rôle devrait consister, entre autres, à faire les
recommandations au ministre sur la loi et les règlements, faire des
recommandations sur le contenu et la diffusion des cours de formation,
évaluer les demandes de permis pour des programmes majeurs d'application
de pesticides, jouer le rôle de comité d'appel, superviser et
orienter la recherche et le développement de méthodes
alternatives pour le contrôle des organismes et tout autre rôle
jugé pertinent.
En conclusion, nous désirons que notre participation soit
perçue comme constructive. Cette intervention est un premier pas pour
une utilisation rationnelle des pesticides. Il nous semble que la
volonté du ministre d'impliquer le maximum d'intervenants sème
les germes de succès de l'entreprise. Nous sommes tout à fait
disponibles à participer à cette démarche dans la mesure
de nos moyens.
Pour terminer, nous nous excusons de répéter encore une
fois que, pour en assurer le succès, tous les utilisateurs doivent
être impliqués. Merci de votre attention.
Dans le texte, on reprenait le tableau 7.5, je crois, du document qui
proposait quel genre d'expertise on attendait de chacun des utilisateurs en
fonction des classes de pesticides. Nous avons modifié ce tableau
essentiellement de façon que les applicateurs commerciaux, les
applicateurs privés et les agriculteurs et forestiers soient soumis au
même régime, à savoir qu'on attend d'eux une expertise
poussée pour l'utilisation des pesticides des classes 1 à 3 et au
moins une expertise exigée pour les pesticides de classe 4. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. Boutet.
M. le ministre.
M. Lincoln: M. Boutet, je vous remercie très
sincèrement de votre mémoire très étoffé qui
apporte des suggestions qui ne se retrouvent pas dans d'autres mémoires,
donc des suggestions innovatrices qu'il faudra considérer comme toutes
les autres. C'est sûr que certaines sont réalistes et, dans le
contexte de la loi, d'autres ne pourront pas être
considérées au même niveau. De toute façon, elles
vont être prises en considération avec beaucoup de sérieux
parce que votre approche représente une solution dans le domaine de la
lutte intégrée, dans le domaine du remplacement éventuel.
Vous parlez de 20-30 ans; je ne sais pas quel est le... Qui sait?
Une voix: ...
M. Lincoln: Dans tous les cas, c'est l'espoir de demain.
Personnellement, je suis très content que vous ayez
accepté la notion de la loi que dans la formation réside vraiment
une grande clé du succès. Vous en faites la balise de votre
mémoire et j'en suis très heureux parce que cela a
été le sens de notre démarche.
Vous dites aussi au début de votre intervention, je vais vous
citer: "Le fait de légiférer implique une démarche de
courage." Je vous suis reconnaissant de l'avoir souligné parce que,
depuis ce matin, il y a eu pas mal de références qui disaient que
ce projet de loi ne vaut rien. C'est au moins un premier pas parce que, depuis
1980, le conseil consultatif a demandé une démarche qui ne s'est
pas faite jusqu'à aujourd'hui. Il fallait commencer. La démarche
se fait dans le sens même des recommandations presque textuelles du
Conseil consultatif sur l'environnement en 1980, et elle est appuyée de
toutes les expériences que nous avons pu suivre et qui ont
été précisées dans le document de travail dont vous
avez fait référence pour ce qui est des autres provinces, des
États américains, etc.
C'est sûr que nous aurions tous voulu aller le plus loin possible.
Comme vous le dites, s'il n'y avait pas de pesticides dans l'atmosphère,
tout le monde aurait été bien plus heureux mais il faut situer
des objectifs, il faut commencer quelque part.
On a tenu compte de beaucoup de vos recommandations par rapport aux
cours de formation et d'éducation en vue d'y insérer des
éléments positifs de recherche, de mettre l'accent sur des
méthodes alternatives afin que ces cours de formation ne soient pas
axés purement sur le côté négatif de
l'utilisation mais aussi sur la recherche afin que la formation et la
lutte intégrée se fassent de pair et en
complémentarité, si j'ai bien compris.
Vous avez souligné que l'absence des agriculteurs et des
forestiers de la politique d'intervention ne va pas avec votre point de vue. Je
partage ce point de vue et je voudrais souligner que, malgré que vous
puissiez ne pas être d'accord sur le fait qu'on aurait dû avoir
donné un temps de recul, il est clair que l'intention - et c'est
exprimé par les agriculteurs qui ont paru ici devant vous - n'est pas de
soustraire les agriculteurs, n'est pas de soustraire le milieu forestier. Mais,
vu la dimension de l'enjeu dans les deux cas, surtout dans le domaine agricole
où on parle de 35 000 à 40 000 personnes, un mécanisme qui
va demander beaucoup de consultations, beaucoup de concertations, de consensus,
de mises en marche graduelles, il faut que cela se fasse de façon
évolutive. Nous allons attaquer d'abord les pesticides de
catérogies 1 et 2 et ensuite les autres, le temps, le délai. Je
sais que vous voudriez un délai beaucoup plus court, peut-être
immédiat, Vous avez entendu l'UPA qui disait: même 1990. Nous
pensons que cela va être trop vite. Et il faudra chercher un consensus,
travailler ensemble avec le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation naturellement, avec les agriculteurs pour
arriver à une formule qui va satisfaire et les objectifs que nous
recherchons tous ensemble de part et d'autre et aussi les
réalités vécues du milieu.
Pour ce qui est du domaine des forêts, je ne sais pas si vous
étiez là ce matin lorsque j'ai dit que j'ai une entente
écrite avec mon collègue, le ministre
délégué aux Forêts, pour qu'aussitôt que
possible nous élaborions une politique sur l'usage des pesticides en
forêt. Là encore, cela va se faire en consultation avec les
intervenants avant qu'une politique finale soit adoptée. En tous les
cas, il est clair que l'intention du projet de loi est que le domaine de la
forêt en fasse partie.
J'ai tenu compte de plusieurs recommandations pratiques que vous avez
faites. Je ne vais pas toutes les énumérer parce que nous
partageons environ 20 minutes entre nous, et je ne voudrais pas prendre le
temps de mes collègues qui voudront aussi vous poser des questions. Par
exemple, par rapport à l'étalage pour la séparation des
produits chimiques et biologiques, nous trouvons que cette suggestion est
très très positive et mérite d'être
considérée avec le plus grand sérieux. Nous allons
l'examiner dans ce sens et je pense que ce sont des recommandations d'ordre
pratique qui pourront avoir un effet bénéfique et éducatif
de premier ordre. Nous allons considérer de très près ce
genre de choses.
Vous avez parlé aussi, comme les intervenants
précédents, du domaine de la recherche qui devrait être
accentué. Nous voulons faire une distinction dans le projet de loi, qui
est axé sur la formation, donc, sur un système de permis et de
certificats comme l'avait suggéré le Conseil consultatif sur
l'environnement, et une politique. Je peux vous dire qu'une politique sur les
pesticides va être préparée; on va travailler de concert
avec les autres ministères impliqués - les Forêts et,
surtout, l'Agriculture - et toute la question de la recherche va être la
base même de tout le système.
Vous, vous suggérez - vous m'avez entendu poser la question aux
représentants de l'UPA - une taxe. Vous nous dites: On ira à 10
%, et dans le cas de catégorie 1,on ira à 200 %. On pourrait se
poser beaucoup de questions parce que, si on additionne les chiffres, cela fait
pas mal d'argent. Il y en a qui ont dit: Peut-être une taxe minimale.
J'aurais voulu savoir de vous si vous proposez une taxe spéciale sur les
pesticides qui serait d'un pourcentage X et, dont les fonds seraient en fiducie
et ces fonds seraient désignés spécifiquement pour la
recherche, les méthodes de remplacement, de dépistage, tout ce
qu'on a discuté avec les autres intervenants et qui est discuté
dans votre mémoire. Est-ce que c'est cela le sens de votre...
Pourriez-vous élaborer un peu? Avez-vous pensé plus loin à
cela ou si c'est purement l'idée d'une taxe qui servirait à la
recherche ou si vous avez des idées plus précises que vous
pourriez nous définir?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Boutet.
M. Boutet: M. le ministre, tout d'abord, j'aimerais mentionner
que le Mouvement pour l'agriculture biologique est très conscient de la
réalité, et il n'est pas de notre intention de demander qu'on ait
un programme efficace d'élimination des pesticides d'ici cinq ans. On
est très conscient que les agriculteurs utilisent présentement
des pesticides et ont des méthodes agricoles telles. Il y a une science
agronomique. On prévoit le résultat de notre intervention dans
des échelles de 20, 30 ou 40 ans. C'est un peu symbolique, 20, 30 ans.
Si, pour des raisons techniques, il faut retarder les délais
d'application de la loi au monde agricole à 1992 ou 1993, on peut
comprendre facilement ces choses.
Pour revenir à la question du sens de la taxe, on voyait
effectivement qu'il s'agissait d'une taxe qui permettrait de dégager des
fonds pour la recherche d'une solution de rechange aux pesticides. Maintenant,
pour les modalités d'application de ces travaux de recherche, il
faudrait trouver des mécanismes qui soient efficaces
et qui permettraient de réunir les différents intervenants
du domaine de la recherche, que ce soit les universités ou d'autres
organismes. Évidemment, les nombres de 10 % à 200 %,
c'était un peu symbolique aussi. C'était une façon de dire
qu'il fallait que les sommes consacrées à la recherche en
vaillent la peine parce qu'on est toujours un peu embarrassé lorsqu'on
parle de pesticides. Nous, nous vivons dans un monde sans pesticide.
Présentement, nous consommons, au Québec, des
légumes, de la viande, des oeufs, du fromage qui sont produits sans
pesticide et à des coûts de production généralement
équivalents à ceux de l'agriculture conventionnelle. Pour nous,
l'objectif de produire sans pesticide, est tout à fait réaliste
et possible. Il est évident qu'on ne peut pas changer des pratiques en
l'espace de cinq ans. Cela prend des générations pour modifier
des mentalités. Mais, dans ce sens, on sait qu'il est possible d'avoir
une agriculture productive, rentable et sans pesticide. Sauf que,
présentement, le plus grand frein au développement de cette forme
d'agriculture, c'est le manque de fonds. Que ce soit à la recherche, ou
au plan des programmes d'aide aux agriculteurs en période de conversion
de méthodes conventionnelles à la méthode biologique, que
ce soit dans la formation et à tous les niveaux du monde agricole
présentement, nous vivons un manque de fonds criant. Si nous en avions
les moyens, nous pourrions développer d'une façon beaucoup plus
rapide des alternatives à l'utilisation de ces produits qu'on sait
dangereux. Ils ont la qualité d'être présentement
efficaces, mais on sait que, à moyen terme, il y va de la santé
de la population. (16 h 30)
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre.
M. Lincoln: Je vais terminer. Je vais passer la parole à
mes collègues qui sont près de vous. Je vais faire deux remarques
très courtes. Sur le comité "aviseur", nous avons tenu compte de
ce que vous avez dit.
Il y a plusieurs mémoires qui ont exprimé le même
voeu d'un conseil "aviseur" ou d'un comité "aviseur" ou d'un conseil
consultatif. Je sais que plusieurs provinces en ont. Tout ce que je peux vous
dire, c'est que cela va être considéré. Je ne sais pas
quels seront les résultats. On va écouter tout ce que les gens
auront à dire, mais ce sera certainement dans le sens d'une
recommandation du conseil consultatif. En tout cas, on prend bonne note de tout
ce que vous avez dit sur cela. Une dernière petite question: Votre
mouvement est-ce qu'il s'amplifie? Est-ce qu'au sein du monde agricole cela
prend de l'ampleur? Quelle est votre expérience?
M. Boutet: M. le ministre, cela fait douze ans que le mouvement
existe. Au début, il s'agissait d'un groupe de 50 personnes qui
étaient un peu des prophètes perdus dans le désert.
Maintenant, douze ans plus tard, il s'agit d'un mouvement qui regroupe plus de
2500 membres, mais qui a touché à plus de 20 000 à 25 000
personnes par ses différentes activités, que ce soit par le biais
de cours ou d'autres activités de sensibilisation. Depuis le 10 janvier,
on a permis la création d'un syndicat d'agriculteurs et d'agricultrices
bioloqiques. Nous administrons depuis deux ans un programme de certification en
production végétale où en 1986 il y avait 60 agriculteurs
dont la production végétale était certifiée comme
provenant de l'agriculture écologique. Nous faisons l'édition
d'un magazine destiné au grand public. C'est un magazine
spécialisé en agriculture écologique qui désire
faire connaître les buts et les principes de l'agriculture biologique.
Nous avons aussi parmi nos membres des formateurs qui, depuis des
années, donnent des cours.
Effectivement, on sent qu'il y a une réponse et qu'il y a des
attentes auprès de la population. Je lisais justement dans le journal,
il y a deux semaines, un résultat de sondaqe indiquant que 66 % des
Canadiens ont comme préoccupation principale l'environnement. Le
problème présentement lorsqu'on parle d'environnement à la
population, c'est qu'on lui présente les catastrophes environnementales,
on lui présente le problème des pesticides, on lui
présente le danger des centrales nucléaires ou quoi que ce soit
et on présente très peu de solutions. Souvent, cela a l'effet de
déprimer les gens plus qu'autre chose. Finalement, nous avons des
solutions concrètes aux problèmes environnementaux de
l'agriculture. Si nous avions plus de moyens, nous pourrions abattre un boulot
beaucoup plus considérable, mais nous sommes freinés par le
manque de moyens.
M. Lincoln: Je vous remercie. Je vous félicite de nous
faire réfléchir. Vous avez exprimé bien mieux que moi ce
que je pense de beaucoup de choses que vous avez dites. Je vous félicite
de nous faire réfléchir et de nous montrer une voie
différente et nouvelle.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le ministre de
l'Agriculture.
M. Pagé: Merci, M. le Président. Je voudrais
remercier, d'abord, M. Boutet, le directeur général du Mouvement
pour l'agriculture biologique. Je veux vous remercier d'être
présent avec nous aujourd'hui et de nous présenter ce
mémoire. C'est en quelque sorte une autre étape pour un mouvement
qui s'est inscrit dans une
démarche qui, comme vous le disiez, a été
peut-être un peu longue et un peu difficile, mais aujourd'hui on doit
constater que votre mouvement est en développement. Les opinions que
vous véhiculez et les recommandations que vous formulez trouvent de plus
en plus preneur dans une société qui se veut plus
conscientisée aujourd'hui qu'elle ne l'était hier sur toute la
problématique, par exemple, des ajouts de médicaments dans les
aliments, ou, évidemment, aujourd'hui sur la question des
pesticides.
C'est la première occasion que j'ai comme ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation de témoigner de
mon appréciation concernant les objectifs qui vous animent. D'ailleurs,
j'anticipe avoir l'occasion d'échanger avec votre groupe bientôt.
Je retiens que, le 10 janvier dernier, une décision avait
été entérinée, une recommandation avait
été formulée, à savoir que vous vous regroupiez en
syndicat de producteurs. J'ai bien hâte de vous saluer et de vous
rencontrer pour échanger sur des choses très concrètes.
Votre mouvement a peut-être seulement 2500 membres, mais il
intéresse beaucoup plus de gens que cela. Je dois dire, comme ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, que les
consommateurs et les consommatrices du Québec sont de plus en plus
préoccupés par la qualité des aliments qu'ils consomment
et aussi, évidemment, par toutes les interventions autres que naturelles
dans l'élaboration ou - excusez le terme - le "processing" du produit
qu'ils consomment.
Dans votre mémoire, vous souscrivez à l'idée que le
gouvernement s'appuie tout d'abord sur une intervention de formation, de
sensibilisation. Vous partez de rapprocher l'information et les techniques, de
rapprocher la science de ceux qui la véhiculent tous les jours, de ceux
qui produisent. Par contre, è d'autres égards, je perçois
votre approche comme étant assez légaliste, assez ferme, assez
rigoureuse. La première question qui me vient à l'esprit, c'est:
Quel est le créneau d'intervention que vous privilégiez? Nous
croyons, en ce qui nous concerne, mon collègue de l'Environnement et
moi, qu'une approche progressive d'information et de vulgarisation nous donnera
autant sinon de meilleurs résultats qu'une approche purement et
simplement légaliste et interventionniste en vue de policer cette
activité ou de multiplier les contrôles, etc.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Boutet.
M. Boutet: M. le ministre, il est effectivement difficile de
partager ces deux différents aspects; je n'avais pas vraiment
réalisé à quel point on véhiculait les deux
aspects: le légalisme, ainsi que l'éducation. Une façon
d'y répondre, c'est de dire que le fait d'informer les qens
n'empêche pas d'avoir aussi une volonté de ce qu'on veut faire.
Dans ce sens-là, effectivement, il faudrait faire attention à ne
pas tomber dans un légalisme plat. En fait, ce serait tout à fait
"contreproductif" par rapport aux objectifs qu'on veut atteindre. Dans ce
sens-là, on privilégie effectivement la question des cours et de
la formation, sauf qu'il faudrait quand même être clair sur le
contenu des cours de formation, sur les buts qu'on veut atteindre et sur ce
qu'on doit faire. Plutôt que l'aspect légaliste, j'aimerais mieux
un terme qui voudrait dire l'expression de la volonté, d'un désir
de changement. Un désir de changement ne peut pas faire autrement que
déplaire à certaines personnes ou être perçu comme
difficile par certains autres groupes, que ce soit des groupes
d'intérêts ou des gens impliqués. Dans ce sens-là,
c'est une évolution qui sera difficile, mais il est évident
qu'une non-intervention ou une absence de volonté de changement serait
tout aussi difficile quant aux conséquences. Je vais donner comme
exemple - je ne sais pas ici, si les gens sont familiers avec cela - le
Sénat canadien qui a présenté un rapport en 1984 sur la
dégradation des sols. Dans ce rapport, on fait état du fait qu'au
rythme actuel de dégradation des sois au Canada, dans 30 à 40
ans, dans toutes les régions, il n'y aura plus de sols agricoles. Ce
n'est pas le Mouvement pour l'agriculture biologique qui parle, c'est un
comité agricole du Sénat canadien.
Dans ce sens, l'absence de volonté ou l'absence d'orientation
vers un changement serait certainement aussi difficile, mais sans doute
beaucoup plus grave quant à ses conséquences qu'une intervention
volontaire visant à changer des méthodes agronomiques de
façon à corriger ces problèmes agricoles.
Il y a un autre point aussi que j'aimerais mentionner. On comprend
très bien la différence entre la réalité du monde
agricole, d'une part, et la réalité de l'application de
pesticides sur les pelouses dans les banlieues et dans les villes, d'autre
part. À dessein, on a surtout parlé de l'aspect agricole et, sur
ce plan, je pense qu'on est tout à fait disposé è faire
preuve d'un grand réalisme par rapport à l'état
présent et par rapport aux gens qui pratiquent présentement
l'agriculture.
Je pense que le Mouvement pour l'agriculture biologique, depuis
plusieurs années, a une approche constructive à cet éqard.
Mais, dans les villes, il me semble qu'on pourrait avoir une approche beaucoup
plus radicale face à l'utilisation des pesticides, parce que,
premièrement, il y a une grande concentration de population et,
deuxièmement, le fait d'avoir une pelouse exempte de pissenlits ou
n'ayant qu'une seule variété de graminées, ce sont des
caprices qui répondent à des critères
d'esthétique
relativement arbitraires. En ce sens-là, une approche plus
sévère à ce sujet pourrait être acceptable.
Maintenant, en ce qui concerne l'agriculture, c'est évident que
l'approche de la formation serait préférable.
M. Pagé: Juste une précision. J'ai trouvé en
parcourant votre mémoire une recommandation qui m'a un peu surpris. Vous
recommandez d'instaurer un système de points de démérite
afin de pénaliser ceux qui abuseraient. C'est intéressant.
Comment voyez-vous son fonctionnement?
M. Boutet: Disons, qu'en gros les utilisateurs doivent obtenir un
certificat. Cela se fait un peu comme le permis de conduire, finalement. Le
certificat serait accompagné d'un nombre de points, mettons douze, pour
employer la même image que pour les permis de conduire. Les utilisateurs
qui outrepasseraient, qui abuseraient d'un pesticide de classe 3 perdraient des
points sur leur certificat et, éventuellement, si jamais cet abus se
répétait, ils pourraient voir le renouvellement de leur permis
compromis. C'est un peu le sens. On n'avait pas élaboré tous les
modèles administratifs que cela pourrait impliquer.
M. Pagé: Vous recommandez, de plus, un comité
consultatif qui aurait comme mandat de revoir la loi et les règlements
périodiquement, etc. Tout comme mon collègue de l'Environnement,
c'est avec beaucoup d'intérêt que je prends connaissance de cette
proposition. Cependant, il y a une question qui est bien importante. Au
début des travaux ou de mon intervention cet après-midi, j'ai
indiqué la relation très ouverte, très bonne entre le
ministère de l'Agriculture et le ministère de l'Environnement sur
nos interventions.
Nos amis de l'Union des producteurs agricoles demandent que les
règlements ou les programmes applicables le soient sous le chapiteau du
ministère de l'Agriculture. Est-ce que vous allez dans le même
sens ou si vous privilégieriez davantage l'intervention du
ministère de l'Environnement?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Boutet.
M. Boutet: M. le ministre, ma vision du ministère de
l'Environnement est la suivante: normalement, le ministère de
l'Environnement, au lieu d'être un ministère compartimenté
comme les autres ministères, devrait être une structure
horizontale qui couvre tous les ministères. Peut-être que, dans
deux ou trois gouvernements, on aura quelqu'un qui nous créera une telle
structure.
Il me semble qu'on gagnerait à avoir une collaboration
multipartite, c'est-à-dire qu'un des problèmes
présentement, c'est le fait que la forêt soit gérée
par un ministère, l'agriculture par un autre ministère,
l'éducation par un autre ministère. Lorsque vient le temps
d'établir des cours de formation en agroforesterie, il faut regrouper
tous ces gens et il y a à côté le ministère de
l'Environnement qui essaie de faire valoir l'aspect environnemental dans chacun
de ces compartiments. Alors, en ce sens-là, je verrais que le
comité "aviseur" soit formé du maximum d'intervenants possible,
des différents ministères, en particulier, dans le cas
présent, de l'Agriculture et de l'Environnement. On verrait aussi
très bien le ministère de la Santé et le ministère
des Affaires municipales et, enfin, quelques autres qui sont touchés, en
plus des différents groupes.
On a vu passer plusieurs groupes ici aujourd'hui ayant des objectifs
relativement différents. Je pense qu'il y aurait avantage à ce
que ces gens se retrouvent ensemble autour d'une même table. (16 h
45)
M. Pagé: Merci, M. Boutet.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
ministre. M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord,
je vous salue, M. Boutet et M. Marcotte. J'ai eu la chance de visiter plusieurs
producteurs qui produisent des légumes sans pesticide dans le bout de
Saint-Hilaire. J'y suis allé à différentes reprises, je
connais plusieurs de vos membres et je sais de quoi vous parlez. On est
toujours très exigeant devant ceux qui sont très
compétents. Je vais vous poser une question très difficile,
d'après moi. D'après moi, elle est difficile.
Je lis ce que vous dites: "L'idéal serait certainement
l'élimination des pesticides de synthèse tout en assurant le
contrôle des organismes nuisibles. Nous sommes convaincus que ce but est
possible à atteindre. Déjà, des agriculteurs, membres de
notre mouvement, y arrivent bien. Cela leur demande des connaissances et une
qestion efficace de leurs pratiques culturales. D'autre part, il faut
être réaliste et concevoir que nous n'arriverons pas à
l'élimination avant 20 ou 30 ans." Je vous félicite de le penser.
J'aimerais que cela prenne moins de temps, personnellement, et je pense que
vous aussi. "L'approche - c'est là que je ne vous suis plus; le
mémoire est extrêmement bien fait, je trouve que vous expliquez
bien ce que vous écrivez - du ministère de l'Environnement est
certainement la meilleure pour atteindre cet objectif - et s'en aller vers
l'élimination des pesticides dans 20 ou 30 ans, c'est ce que cela veut
dire - car tout en respectant l'état de la
situation présente, elle permet une évolution rationnelle
et graduelle."
J'aimerais que vous me disiez, dans ce projet de loi que nous
étudions ici, quels sont les articles qui vous font dire qu'il y a une
volonté législative gouvernementale afin que d'ici 20 ou 30 ans
l'approche du ministère donne cet objectif car, actuellement, cette loi
permet une évolution rationnelle et graduelle. Personnellement, je ne
l'ai pas vue.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Boutet.
M. Boutet: M. le député de Terrebonne, j'attendais
votre question, après les autres questions d'aujourd'hui. Je dois dire,
pour commencer, que, pour des raisons techniques tout à fait
malheureuses, on n'a pas eu le texte de la loi comme telle. Notre
mémoire a été bâti à partir du document de
préconsultation pour une utilisation rationnelle des pesticides.
De la façon dont nous l'avons compris, la clé de
l'intervention du ministère de l'Environnement pour la question des
pesticides, c'est la formation. Lorsqu'on dit que l'approche du
ministère est certainement la meilleure, c'est telle que nous l'avons
comprise. Les utilisateurs auront à obtenir un certificat à la
suite de cours de formation. Nous disons, ailleurs dans le mémoire, que
les certificats devraient être renouvelés tous les deux ou trois
ans et que les contenus de cours devraient comprendre la présentation
des alternatives aux pesticides. L'usage d'un pesticide est
présenté comme une question de dernier recours.
Nous faisons aussi allusion au besoin de développer la recherche
des alternatives. Il est évident qu'il y a besoin aussi de travailler
encore dans ce sens. Si la clé de voûte de la loi c'est les cours
de formation et que les contenus présentent les pesticides comme une
utilisation de dernier recours, et que ces contenus sont modifiés
à mesure de l'avancement des connaissances, nous comprenons donc que
cette approche est celle qui va permettre une élimination graduelle de
l'utilisation des pesticides. Nous savons qu'à mesure que la science
agronomique se développera on réalisera l'inutilité des
pesticides de synthèse par le développement d'alternatives
efficaces au contrôle des parasites.
M. Blais: Vous voyez bien, M. Boutet, par mes questions, que je
suis plutôt favorable à un mouvement comme le vôtre.
J'aimerais que vous soyez un peu plus revendicateur à cause du
"lobbying" des vendeurs de pesticides qui sont très forts, qui sont
capables de se défendre. J'aimerais que vous alliez un peu plus loin,
c'est pour cela que je vous ai posé la question. Vous dites que cela
permet une évolution, juste par des cours. Vous nous avez dit, juste un
peu avant, qu'il y a 12 ans vous étiez 50 membres et qu'au bout de 12
ans, vous êtes 2500 membres, assez nombreux pour former une association
syndicale de taille. Durant 12 ans, c'est passé de 50 à 2500.
Comme il y a 47 000 producteurs, cela n'est pas loin. Pourquoi ça
prendrait 20 ans?
Ce n'est pas en reproche que je vous fais cette remarque, c'est un signe
d'encouragement. Vous devriez être encore plus vindicatifs, plus
revendicateurs que vous ne l'êtes. Vous faites bien votre travail, je
vous ai déjà vus aller, mais j'aimerais que, devant le ministre
de l'Envrionnement, vous soyez plus vindicatifs, plus revendicateurs. Le
ministre de l'Agriculture vous a ouvert une porte. Il a dît qu'il
aimerait vous rencontrer pour que vous lui disiez vos exigences du
côté de l'évolution de l'agriculture biologique. Ne le
manquez pas, je vous en supplie, la prochaine fois que vous le rencontrerez. Je
vous souhaite bonne chance.
C'était une remarque pour M. Boutet. Pour les questions,
j'aimerais passer la parole à mon confrère, le
député de Lévis, Merci de votre présence. Je vous
remercierai à la fin.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis.
M. Boutet: Est-ce que vous permettez que je fasse un
commentaire?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Boutet.
M. Boutet: M. le député de Terrebonne,
stratégiquement, nous avons appris que c'est le jour où nous
avons cessé de revendiquer que nous avons commencé à
être écoutés. C'est notre attitude de dialogue qui nous a
procuré les meilleurs résultats. C'est la raison pour laquelle on
désire être présents dans la préparation des
contenus de cours, au sein du comité consultatif, etc. Ce qui fait
avancer l'agriculture biologique, c'est le fait que les producteurs le font
effectivement dans le champ. C'est la preuve, c'est le témoignage. C'est
la seule façon dont nous avons réussi à faire avancer nos
idées jusqu'à maintenant.
J'aimerais clarifier un point. Le mouvement n'est pas devenu un
syndicat. Il s'est formé un syndicat des agriculteurs biologiques. C'est
un organisme indépendant du Mouvement pour l'agriculture biologique.
C'était une précision que je tenais à apporter.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Boutet. M. le
député de Lévis.
M. Garon: Bonjour, MM, Boutet et
Marcotte. J'ai été étonné d'apprendre que
vous n'aviez pas encore rencontré le ministre de l'Agriculture. Je
pensais que c'était déjà fait. Il y a un point que vous
soulignez dans votre mémoire où vous parlez des cours de
formation aux usagers. Vous n'avez pas le sentiment qu'il faudrait commencer
par former ceux qui vont former les usagers? J'aimerais savoir, dans ce sens,
quels sont vos rapports, par exemple, avec l'Ordre des agronomes.
Jusqu'à quel point avez-vous le sentiment que les agronomes, dans leur
formation, sont conscientisés ou ont vraiment une formation portant sur
des questions environnementales?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Boutet.
M. Boutet: M. le député de Lévis, la
question de la formation en agriculture biologique est le plus gros
problème que nous rencontrons présentement parce
qu'effectivement, comme vous le mentionnez si bien, il s'agit,
premièrement, d'avoir des formateurs qui soient compétents. Le
problème en agriculture biologique, c'est le fait que ceux qui
détiennent les connaissances présentement sont les agriculteurs
dans le champ qui les ont développées à sueur de bras et
par l'investissement de leur temps et argent. Une démarche de formation
qui voudrait intégrer les techniques biologiques et les techniques
écologiques en agriculture devrait, dans un mouvement préalable,
aller chercher cette expertise auprès de ces gens.
À ma connaissance, je ne crois pas qu'il existe vraiment des
agronomes qui soient compétents, à moins qu'ils n'aient eu une
formation autodidactique poussée ou qu'ils aient fait du travail
agricole eux-mêmes auprès d'agriculteurs ou quoi que ce soit,
mais, effectivement, il n'existe pas de professionnel dans le réseau
traditionnel qui soit compétent pour donner cette formation.
Évidemment, on est très réaliste quand on dit 20 à
30 ans pour l'élimination des pesticides. C'est une vision très
réaliste des choses dans le sens qu'il faut attaquer, aborder le
problème de toutes sortes d'angles, il y a toutes sortes d'aspects
à considérer. Effectivement, la question de la formation des
formateurs, c'est un problème sur lequel il faudra travailler.
Si on mettait, pour le développement de l'agriculture biologique,
la même énergie qui avait été mise, par exemple,
sans vouloir faire de partisanerie, au développement de l'autosuffisance
du Québec, si on y mettait la volonté politique, on pourrait
avoir un avancement assez rapide de l'agriculture biologique.
Déjà, les agriculteurs sont très réceptifs aux
problèmes environnementaux, Souvent, leurs pratiques agricoles
contiennent déjà des possibilités de s'orienter vers des
méthodes plus purement biologiques. La lutte intégrée,
cela constitue un avancement. Ce que la Fédération des
producteurs maraîchers nous a présenté aujourd'hui, c'est
une amélioration de la situation. Il se fait un énorme travail
dans ce sens, que ce soit au Mouvement pour l'agriculture biologique ou en
dehors. Il y aurait peut-être besoin d'une concertation des
décideurs en agriculture et d'exprimer une volonté dans ce
sens.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis.
M. Garon: Quand vous parlez de 20 ou 30 ans pour aller en
agriculture biologique, j'ai l'impression que cela peut prendre plus de temps.
Mais sans aller en agriculture biologique à 100 % immédiatement,
il faut être conscient que le cultivateur est plus sensibilisé -
vous avez raison de dire cela -aux questions environnementales, à la
question des pesticides ou des lignes électriques parce qu'il vit
là-dedans et il se rend compte que cela a des effets. Il les voit dans
sa vie quotidienne. Avez-vous le sentiment que les professionnels qui
conseillent les agriculteurs qui apprennent dans les écoles accordent
à cela une part importante? Je parlais avec quelqu'un, cette semaine, en
vue d'une conférence que je dois faire, et je lui demandais: Combien
d'heures avez-vous là-dessus? La personne n'était pas certaine
s'il y avait une heure dans son cours de quatre ans. Quand on veut parler de
ces questions, j'ai le sentiment qu'il faudrait d'abord que les professionnels
qui conseillent dans ce secteur y soient eux-mêmes sensibles. S'ils n'ont
jamais eu de cours là-dessus et qu'ils n'ont jamais été
vraiment formés...
Actuellement, au point où on en est, on parle de faire des lois
et des règlements. Mais ceux qui vont être dans le champ? Des lois
et des règlements, je trouve cela gentil. Le ministre de l'Environnement
a fait une belle loi pour empêcher le fumage. Je dis bravo, sauf que la
loi est là et, si elle n'était pas là, ce serait pareil.
Apparemment, personne ne l'applique. C'est une belle loi; le principe est
voté pour être sûr de ne pas respirer trop la boucane des
autres. J'ai arrêté de respirer la mienne il y a plusieurs
années. C'est beau, une loi et un rèqlement, mais si on fait une
loi et un règlement sur les pesticides et que, par ailleurs, ceux qui
donnent les conseils aux usagers ne sont pas sensibilisés à cela
et n'ont jamais étudié vraiment cela, s'ils suivent la posologie
inscrite sur la bouteille, c'est déjà beau. Ne trouvez-vous pas
qu'il faudrait commencer par le commencement? Les professionnels dans ce
secteur qui doivent conseiller les autres devraient d'abord être
avisés et on devrait sans doute commencer par les sensibiliser.
Le Président (M. Saint-Roch): M. Boutet.
M. Boutet: Je vais donner la parole à mon confrère,
M. Marcotte, qui est agronome.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Marcotte.
M. Marcotte (Robert): Effectivement, tous les agronomes ne sont
pas nécessairement sensibilisés au problème, comme vous le
mentionnez. Par contre, il y a certains agronomes qui le sont plus que
d'autres. De plus, dans les universités, on commence quand même
à donner des cours de formation. Ce sont des petits cours; c'est un
début, mais il y a quand même une sensibilisation de plus en plus
grande, à l'intérieur du contenu des cours. De plus, dans le
mémoire qu'on a présenté ici, il est souligné que
les jeunes membres de l'Ordre des agronomes, parmi tant d'autres, devraient
être soumis à un programme de formation et cela pourrait
s'étendre jusqu'à une formation particulière qui pourrait
même, à un moment donné, être obligatoire dans tous
les programmes de formation de tous les intervenants techniciens ou agronomes
dans le secteur agricole. C'est évident.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Lévis.
M. Garon: Je vais vous poser une question. Je suis content que
vous soyez agronome. Pendant votre cours d'agronomie, pourriez-vous nous dire
le nombre de crédits que vous avez suivis, le nombre d'années
pendant lesquelles vous avez étudié et le nombre d'heures que
vous avez eues portant sur les questions environnementales ou sur les
pesticides? En quelle année l'avez-vous fait?
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Marcotte.
M. Garon: Sans nous dire votre âge, vers quelle
époque l'avez-vous fait?
M. Marcotte: J'ai terminé mon bac en agronomie en 1985.
J'ai suivi des cours sur les pesticides, en pollution et en environnement,
parce que j'en ai choisi. Des agronomes peuvent être formés sans
en avoir jamais eu; c'est évident. Mais on pouvait, si on voulait, aller
se chercher des cours. Actuellement, c'est un libre choix pour les
étudiants.
M. Garon: Cela veut dire qu'il n'y avait aucun cours obligatoire
sur ces questions pour un agronome.
M. Marcotte: Non.
M. Garon: Vous aviez le choix de combien de cours?
M. Marcotte: Dans mon cas, je pouvais aller fouiller dans tous
les cours portant sur l'environnement, mais il me fallait quand même un
minimum pour avoir un bac en agronomie et non en environnement.
M. Garon: Est-ce qu'il y a un bac en environnement?
M. Marcotte: Bien oui!
M. Garon: Mais dans votre cours d'agronomie, il n'y avait aucun
cours sur les questions d'environnement que vous étiez obligé de
prendre.
M. Marcotte: Pas comme tel. Parfois dans des cours, mais pas
comme tel, mais ce serait à élaborer et, ça, c'est la
base.
M. Garon: II n'y en avait pas sur les pesticides non plus.
C'étaient des cours optionnels.
M. Marcotte: C'est cela. (]7 heures)
M. Garon: C'est pour cela que je dis qu'il faudrait d'abord vous
sensibiliser, parce que le cultivateur se fait donner des conseils. Si ceux qui
donnent des conseils n'ont pas nécessairement une formation
là-dedans, il y a une responsabilité de quelqu'un quelque part.
Est-ce au ministère de l'Agriculture, est-ce aux universités? Par
exemple, pour les techniciens en agriculture, quel est le contenu
là-dedans? Tantôt, des gens d'une école secondaire
étaient ici. La plupart semblaient Être de Saint-Anselme. Ils sont
venus et nous ont entendus parler de cela. Dans le curriculum de quelqu'un qui
suit un cours d'agrotechnique dans un cégep, quel est le contenu? II me
semble que la sensibilisation pourrait commencer par là, par ceux qui
vont éventuellement enseigner à d'autres.
M. Marcotte: On avait souligné dans notre mémoire
le désir que les formateurs soient formés aussi. Je pense que le
ministère de l'Environnement en est quand même conscient. C'est
évident qu'il devrait être concerné.
M. Garon: Le ministère peut être conscient. Il est
conscient de l'interdiction de la cigarette dans certains endroits, sauf qu'il
n'applique pas sa loi. Il peut avoir une belle loi sur les pesticides. Vous
avez soulevé un point important tout à l'heure. On voit des beaux
jets d'insecticide dans les villes. Quand le camion est parti, souvent le
bébé
peut être autour quand on arrose. Dans les villes, quelle est la
conscientisation par rapport aux arrosages recommandés quatre fois
durant la saison, durant l'été? Avec des beaux fusils, on va
arroser et, les trois quarts du temps, un carrosse peut être à
côté. Les gens ne sont pas sensibilisés ou au courant qu'il
peut y avoir des dommages. Ou encore on va arroser et il y a une piscine
à côté. Cela va aller autant dans la piscine s'il y a le
moindrement de vent.
Il y a beaucoup d'arrosages qui sont faits, non seulement dans les
champs éloignés, mais dans les villes actuellement. En tout cas,
il doit y en avoir pas mal parce qu'on n'a qu'à voir le nombre de
dépliants qu'on reçoit à nos résidences pour nous
vendre des produits. C'est très récent. Cela s'est fait dans les
deux dernières années parce qu'avant on n'en recevait quasiment
pas. Je ne sais pas si c'est parce que les compagnies ne craignent pas le
ministre de l'Environnement, mais il y a une action importante è faire
dans les villes actuellement où il y a beaucoup plus de monde encore que
dans les champs.
Le Président (M. Saint-Roch): S'il n'y a pas d'autres
interventions... M. le ministre.
M. Lincoln: Je veux remercier le Mouvement pour l'agriculture
biologique de son mémoire très étoffé, de son
intervention constructive, intelligente, qui a pris l'approche d'un dialogue
qui nous intéresse particulièrement. On tient bien compte de ce
que vous avez dit.
Je dois dire en terminant que j'ai été bien
étonné par les remarques du député de Lévis
qui m'a accusé de faire des lois et des règlements qui ne valent
rien. Il était le "recordman" des lois et des règlements. Il en
pondait plus souvent que les poules ne pondent des oeufs. Je me souviens, comme
critique des pêches, comment il pondait des lois tous les jours. On se
demandait pourquoi parfois et on se demande toujours pourquoi certaines lois
ont été faites dans ce sens. Pour ce qui est de la loi sur le
tabac, il n'a pas vu les mêmes établissements que j'ai vus depuis
que la loi sur le tabac est en vigueur. La loi sur le tabac commence à
fonctionner. Il y a une conscientisation qui se fait et va se faire tous les
jours. Cela aura un effet symbolique d'entraînement très important
comme cette loi sur les pesticides.
Est-ce que la réponse est de ne rien faire? Est-ce que la
réponse est d'être la seule province au Canada, le seul
gouvernement de toute l'Amérique du Nord à ne pas avoir de loi?
C'est cela qu'il veut suggérer? Une loi qui, justement, a pour but
principal -il n'a pas dû lire l'avant-projet de loi - la formation qu'il
préconise lui-même, n'est-ce pas cela que l'on recherche? N'est-ce
pas cela que le Conseil consultatif sur l'environnement nous a
recommandé et que nous avons suivi presque textuellement? Des permis,
des certificats axés sur la formation, axés sur le contrôle
de la vente, axés sur la formation surtout et avant tout? C'est cela
qu'on recommande, c'est cela que la loi veut faire, c'est cela que la loi
cherche. C'est une loi qui ne cherche pas à être coercitive, qui
cherche à être incitative, justement comme la loi sur le
tabac.
Je m'oppose à ces remarques qui sont tout à fait non
fondées et je vous remercie beaucoup d'être venus nous
éclairer ici et de nous apporter une nouvelle orientation, un nouveau
visage et de nouvelles idées. Je vous remercie.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation,
brièvement.
M. Pagé: MM. Boutet et Marcotte, je voudrais vous
remercier, moi aussi, de la présentation que vous nous avez faite
aujourd'hui. Je voudrais, de plus, vous assurer de toute ma
considération et vous assurer aussi que l'aide que je vous ai
signifiée, comme ministre de l'Agriculture, se poursuivra. Nous
apprécions beaucoup la façon dont les sommes qui vous ont
été versées sont utilisées. J'ai cru comprendre que
les cahiers de normes visant l'inspection seraient complétés
incessamment. J'anticipe de vous rencontrer bientôt, quoique cela ne m'a
pas empêché, évidemment, de visiter une très belle
ferme pendant l'été où on produisait des oeufs et
où il n'y avait aucun ajout aux médicaments, aucun pesticide
d'utilisé dans les grains qui étaient mangés par les
poules là-bas, etc. J'ai trouvé cela vraiment très
intéressant. Ce seront des sujets comme ceux-là que j'aurai
l'occasion de discuter avec vous bientôt.
Essentiellement, dites-vous que l'aide du gouvernement qui vous a
été accordée sera maintenue parce que nous sommes bien
conscients et bien au fait que les objectifs que vous poursuivez
méritent d'être non seulement encouragés, mais nettement
endossés. À preuve que même sans rencontrer le ministre,
l'aide est venue pareil. C'est bon: moins de parlotte, plus d'action.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
ministre. M. le député de Terrebonne, en conclusion.
M. Blais: Même si je connais le tabac, je ne vous ferai pas
subir dans mes remerciements cette conversation. Je vous remercie de votre
mémoire, de votre allure, de votre façon de représenter
qui est compétente, clairvoyante, habile et très
intéressante. Je vous encourage à continuer
votre lutte très civilisée, de la façon dont vous
la faites, pour atteindre l'objectif que vous poursuivez qui est le même
que le mien du côté biologique. Merci d'être là,
merci de vous donner tant de trouble et de tant vous dévouer pour la
cause que vous défendez. Merci beaucoup.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis, très brièvement, s'il vous plaît!
M. Garon: MM. les membres du Mouvement pour l'agriculture
biologique, je suis content de vous voir parce que j'ai été le
premier ministre de l'Agriculture à vous reconnaître comme
association. En me disant que le possible est déjà fait,
l'impossible se fera. Étant un de ceux qui croient que l'agriculture
doit être la plus biologique possible, je vous félicite de faire
votre travail. J'ai été content de reconnaître votre
association pour faire un programme au ministère pour que vous puissiez
développer, justement, les normes biologiques avec des fermes
biologiques en établissant un suivi entre vous et le ministère
pour qu'on en arrive à définir quels étaient ces produits
biologiques et comment cela doit se faire.
Maintenant, l'inflation étant, le ministère devra
accroître ces montants parce qu'une fois les normes
préparées il va être possible d'aller plus loin. Il fallait
commencer par établir un cadre dans lequel s'exercerait l'agriculture
biologique. Nous avons été heureux, comme gouvernement du Parti
québécois, de faire en sorte que votre mouvement puisse le faire
et être un intervenant important auprès du ministère.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M. le
député de Lévis. Je tiens à remercier, au nom des
membres de la commission, le Mouvement pour l'agriculture biologique de la
qualité de ses interventions. Je vous remercie.
Je demanderais maintenant aux représentants de la
Fédération québécoise de la faune de venir prendre
place. Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue aux travaux de cette
commission. Je demanderais au porte-parole de ta Fédération
québécoise de la faune de s'identifier et d'identifier les
membres qui l'accompagnent.
Fédération québécoise de
la faune
M. Quintal (Léopold): Merci, M. le Président»
M. le ministre, MM. les députés, il me fait plaisir de vous
présenter les membres qui m'accompagnent. Tout d'abord, à ma
gauche, c'est M. Yves Jean qui est président de la commission
d'études et de recherches de la Fédération
québécoise de la faune. À ma droite, M. Daniel Vanier,
biologiste responsable du dossier sur les pesticides à la
fédération, entre autres, et M. Bruno Rajotte qui est
également biologiste et qui nous a aidés è préparer
ce mémoire.
Le Président (M. Saint-Roch): Je vous remercie, M, le
président. Je tiens à vous faire remarquer que vous nous avez
soumis un très volumineux rapport. J'aimerais vous rappeler que vous
avez 20 minutes pour nous présenter votre mémoire. Je vous
cède la parole, M. le président.
M. Quintal: Je vais essayer de faire un survol au cours des 20
minutes qui me sont allouées.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
président.
M. Quintal: Nous remercions le gouvernement du Québec de
nous permettre de présenter ce mémoire. Nous avons répondu
positivement à l'annonce; d'ailleurs, je pense que le nombre de pages
est là pour justifier le travail de nos bénévoles. Je
tiens à vous signaler au tout début que la
Fédération québécoise de la faune est toujours
intervenue dans le but de préserver et de conserver la faune et ses
habitats. Forte de ses 150 000 membres et plus, et de ses 220 associations de
chasseurs et pêcheurs, la Fédération
québécoise de la faune a toujours favorisé
l'éducation de ses membres et de la population è la conservation
de la faune et de ses habitats.
À propos des pesticides, souventefois, ta Commission
d'études et de recherches de la Fédération
québécoise de la faune, présidée par le Dr Yves
Jean, s'est adressée au gouvernement afin de dénoncer l'usage
abusif et irrationnel des pesticides qui s'accumulent dans nos cours d'eau et
se concentrent dans la chair des poissons. Des études ont
également montré que l'érosion des terres agricoles est la
source majeure de contamination des cours d'eau par les pesticides. Cette
pollution diffusée par les pesticides, fertilisants et matières
organiques serait la première cause de la pollution de nos cours d'eau
selon les plus récentes recherches. La Fédération
québécoise de la faune est très inquiète de cette
pollution et de ses impacts sur la faune aquatique. Même si la
quantité de ces substances ne dépasse pas les normes
environnementales, il n'en demeure pas moins qu'il existe une certaine
contamination, et certains de ces produits ont la capacité, entre
autres, de se concentrer dans la chaîne alimentaire. Le nombre de cas
également connus de contamination de l'eau souterraine par les
pesticides continue sans cesse de s'accroître.
Là-dessus, permettez-moi d'ouvrir une parenthèse que nous
n'avons pas signalée dans notre mémoire, mais que je trouve
très
importante. Quoique incomplet, le projet du ministre Clifford Lincoln
relativement au règlement en milieu riverain est intéressant dans
la lutte à la pollution diffuse. À ce sujet, nous souhaitons que
le ministre puisse un jour reprendre son document et en faire un projet de
loi.
Un autre phénomène inquiète également la
Fédération québécoise de la faune, c'est
l'augmentation de la résistance des ravageurs à l'action des
pesticides. Ce phénomène de résistance entraîne une
augmentation des coûts de traitement, car les utilisateurs augmentent les
doses de pesticides ou cherchent è les remplacer par des pesticides
encore plus toxiques. Il y a également, au Québec, un rapport de
recherche du ministère de l'Énergie et des Ressources qui
souligne que, lors d'une étude sur les pulvérisations
aériennes, entre un tiers et un quart des produits utilisés sont
arrivés au sol, ce qui, à notre avis, est désastreux.
La Fédération québécoise de la faune
réalise que dans cet avant-projet de loi plusieurs articles diminuent
considérablement son efficacité à contrôler la vente
et l'utilisation des pesticides. Permettez-moi de vous en souligner
quelques-uns. D'abord, l'article 5 et l'article 9 où on constate que les
agriculteurs et les sylviculteurs ne sont pas obligés de détenir
un permis pour la vente et l'utilisation des pesticides et de certificats
attestant la qualité de leurs connaissances en matière de
pesticides.
Comme bien d'autres, nous vous soulignons que, en 1978, d'après
les statistiques, environ 85 % des pesticides utilisés au Québec
étaient utilisés en agriculture. On a constaté à
plusieurs reprises dans les journaux que certains sols étaient rendus
stériles ou étaient brûlés ou encore
contaminés par l'usage de pesticides qui laissent des résidus. La
Fédération québécoise de la faune craint donc que,
sous le lobby des agriculteurs et de l'industrie forestière, le
ministère de l'Environnement laisse tomber les règlements
concernant ces utilisateurs au profit du ministère de l'Énergie
et des Ressources et de celui de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation. (17 h 15)
L'article 7 permet également de constater qu'on ne dit rien des
intentions du législateur concernant les recherches sur les
méthodes alternatives à l'utilisation des pesticides comme la
lutte biologique, la lutte intégrée et l'agriculture biologique,
lesquelles permettraient, à notre avis, de diminuer à long terme
notre dépendance vis-à-vis de l'utilisation des pesticides.
On s'aperçoit également, è l'article 15, que les
municipalités pourraient profiter d'une clause de dérogation.
Donc, à l'article 15, cette clause de dérogation s'exprimerait de
la façon suivante. Cela permettrait à une municipalité
d'obtenir un permis pour la vente et l'utilisation des pesticides dans le cas
où cette dernière a été reconnue coupable d'une
infraction visée à l'article 102 dans les douze mois
précédant la demande du permis.
À l'article 30, la Fédération
québécoise de la faune croit qu'il est imprudent de confier les
travaux de nature technique à une personne n'ayant pas de certificat
attestant ses connaissances en matière de pesticides même si
celle-ci est sous la supervision immédiate d'une personne physique
détenant ce permis ou ce certificat. Il nous semble difficile de
connaître l'interprétation que les détenteurs d'un
certificat feront des mots "supervision immédiate". La
Fédération québécoise de la faune demande que toute
personne qui effectuera des travaux de nature technique relatifs è
l'utilisation de pesticides devra obtenir un certificat attestant la
qualité de ses connaissances.
On constate également à l'article 67 que celui-ci donne au
ministre le pouvoir de faire cesser la vente ou l'utilisation des pesticides
s'il est susceptible d'en résulter un danger pour la santé, le
bien-être, le confort des personnes ou un dommage sérieux à
l'environnement, à la flore, à la faune et aux biens... À
l'article 47, la Fédération québécoise de la faune
tient à vous signaler qu'elle s'inquiète de
l'interprétation que l'on peut faire du mot "danger". Nous croyons que
les termes "risque raisonnable" sembleraient plus appropriés et
éviteraient probablement des situations déplorables.
Aux articles 49 et 53, nous considérons que le ministre de
l'Environnement devrait être le seul responsable de la loi. Nous
constatons également que les ordonnances délivrées par le
ministre doivent être publiées dans un quotidien de la
région où l'événement qui a donné lieu
à la délivrance d'une ordonnance est survenu, ce qui constitue, a
notre avis, un accès important à l'information pour les
citoyens.
Quant aux articles 67 et 68, nous appuyons cette procédure
d'injonction car elle donne la possibilité à un citoyen d'avoir
un recours pouvant être efficace contre tout acte en contravention
à l'article 67. Nous aimerions ouvrir ici une parenthèse.
Peut-être que le ministère de l'Environnement devrait aider les
citoyens qui veulent se prévaloir de cette clause. Mais nous tenons
également à vous signaler que nous aimerions voir ajoutés
à l'article 67 les cas où il y a eu utilisation ou
élimination d'un pesticide contrairement aux méthodes, normes et
procédés généralement reconnus en matière
d'utilisation de pesticides ou aux normes fixées par règlement du
gouvernement.
Quant à l'article 100, la Fédération
québécoise de la faune trouve important que les pesticides
visés par cette réglementation
couvrent la totalité des pesticides vendus et utilisés au
Québec. Nous croyons que, pour avoir un contrôle, le ministre doit
se donner le pouvoir de bannir tous les autres pesticides qui pourraient
être toxiques ou dangereux.
En ce qui concerne les propositions de la Fédération
québécoise de la faune, dans le but de vous faire quelques
suggestions pour améliorer ce projet de loi ou pour nous rendre un peu
plus justice dans le domaine de la faune, nous tenons à vous faire part
de certaines suggestions, très rapidement.
Tout d'abord, en ce qui concerne une ouverture aux méthodes
alternatives à l'utilisation des pesticides, nous tenons à vous
souligner que nous proposons au gouvernement d'intervenir dans deux secteurs
précis. Premièrement, nous suggérons au ministère
de l'Environnement de publier des manuels de procédure différents
selon les secteurs (agricole, forestier, domestique) qui seraient
réglementaires et auxquels le détenteur d'un certificat ou d'un
permis serait obligé de se conformer. Ceci permettrait d'avoir des
directives très claires et de posséder un outil de travail qui,
à notre avis, nous paraît essentiel.
Le deuxième champ d'intervention que nous aimerions voir
développé par le gouvernement consiste à mettre sur pied
une recherche sur la production intégrée. L'article 7 de
l'avant-projet de loi indique la volonté du ministère de
l'Environnement de coordonner des études toxicologiques sur les
pesticides dans l'environnement, mais il n'y a aucune mention de coordonner des
recherches avec d'autres ministères, organismes paragou-vernementaux,
etc., en ce qui a trait à la recherche sur des moyens pour remplacer
l'utilisation des pesticides. Nous vous recommandons donc l'ajout d'une phrase
stipulant que le gouvernement doit coordonner des recherches dans ce secteur,
si nous voulons vraiment, à long terme,, réduire l'utilisation
des pesticides.
Une deuxième suggestion est l'obtention obligatoire d'un
certificat pour les sylviculteurs et les agriculteurs. La
Fédération québécoise de la faune propose d'inclure
les agriculteurs et les sylviculteurs dans votre avant-projet de loi en les
obligeant à posséder un certificat attestant leurs connaissances
en matière de pesticides afin d'être certains que les agriculteurs
et les sylviculteurs utilisent les pesticides conformément aux normes
établies. Les connaissances des cultivateurs dans le domaine des
pesticides, d'après les études ou les rapports que nous avons pu
lire, nous ont semblé très faibles. L'obligation pour les
agriculteurs et les sylviculteurs de posséder un certificat de
compétence permettrait de mieux protéger leur propre santé
et celle de la population et de mieux préserver la qualité de
l'environnement.
Une troisième suggestion est la possibilité de prohiber
l'utilisation de certains pesticides et leur vente. La Fédération
québécoise de la faune aimerait que le gouvernement du
Québec ait la possibilité de prohiber l'utilisation de certains
pesticides qui représenteraient un risque trop grand pour la
santé et l'environnement. Ce processus pourrait s'appliquer
également pour remplacer des pesticides par de nouvelles méthodes
de répression ayant une meilleure efficacité.
Une autre suggestion est la mise en place de cours de formation
obligatoires. La fédération vous propose la mise en place d'un
cours de formation sur l'utilisation des pesticides que les utilisateurs
devront suivre obligatoirement, en plus d'avoir à passer l'examen
mentionné à l'article 36 de l'avant-projet de loi, pour obtenir
le certificat attestant leurs connaissances en matière de
pesticides.
Nous aimerions également que l'accès à
l'information soit un peu plus favorisé et que le ministère de
l'Environnement du Québec s'engage dans une politique d'accès
à l'information sur les pesticides. La Fédération
québécoise de la faune a constaté à plusieurs
reprises que les citoyens n'ont pu obtenir une copie de certaines études
sur les pesticides et leur contamination de l'environnement. La
fédération dénonce une telle pratique et propose
différents moyens pour permettre un meilleur accès à
l'information sur les pesticides.
Le premier de ces moyens consisterait en une politique du
ministère de rendre publics tous les résultats des recherches
produites par les ministères et les organismes gouvernementaux,
concernant le réseau de surveillance de la contamination par les
pesticides, les études toxicologiques sur la santé humaine et
l'environnement, le développement de la lutte intégrée et
biologique.
Deuxièmement, l'obligation pour le ministère de
l'Environnement de publier un bulletin qui donnerait de l'information sur les
activités de recherche du ministère de l'Environnement, les
ordonnances dans le domaine, les injonctions obtenues devant les tribunaux, les
consultations publiques du conseil consultatif, les données
toxicologiques sur certains pesticides, etc. Ce bulletin pourrait avoir la
forme du bulletin que vous publiez actuellement par le biais du Bureau des
audiences publiques sur l'environnement.
Ensuite, pour favoriser l'accès à l'information, nous
suggérons que les deux centres de documentation Envirodoq devraient
posséder un budget spécial pour l'acquisition de livres,
documents, études portant sur la toxicologie des pesticides et sur des
méthodes de rechange. Des copies des recherches produites par le
ministère de l'Environnement devraient être déposées
dans
ces deux centres, à notre avis.
Un troisième point: le développement de la recherche. La
Fédération québécoise de la faune demande au
gouvernement d'intensifier les activités du réseau toxique afin
de détecter annuellement la contamination par les pesticides en milieu
aquatique, dans les eaux de consommation et souterraines. Nous demandons
également la formation d'un conseil consultatif sur les pesticides. Nous
avons constaté, dans le document de support a la préconsultation,
que le ministère de l'Environnement nous posait la question à
savoir si nous désirions voir la création d'un comité
"aviseur". À cette question, nous répondons par l'affirmative et
nous croyons que le comité pourrait s'appeler comité consultatif
sur les pesticides.
La Fédération québécoise de la faune
aimerait que de nouvelles mesures soient appliquées aux
municipalités. Nous tenons à vous souligner un exemple. À
la suite de l'incident de l'école élémentaire de
Beechwood, au mois de juin dernier, le département de santé
communautaire de Lakeshore a recommandé que l'utilisaton des pesticides
dans les parcs ou à proximité, dans les cours de
récréation et autres endroits publics, devrait être
interdite lorsque ces lieux sont fréquentés.
Quant à la question des amendes, la Fédération
québécoise de la faune serait pour une augmentation substantielle
des amendes. Nous aimerions que les amendes soient comparables à celles
adoptées dans le nouveau projet de loi sur la protection de la
qualité de l'environnement au Canada. En plus de l'augmentation des
amendes, nous aimerions qu'on réduise les écarts entre le minimum
et les maximums des amendes à cause de la tendance de nos tribunaux
à accorder des pénalités minimales dans le domaine.
Enfin, nous souhaitons la remise à jour de certains
règlements contenus dans d'autres projets de loi concernant
l'utilisation de certains pesticides. À cet effet, nous vous soulignons
l'amende aussi ridicule de 20 $ pour l'usage du DDT. C'est moins cher que
l'amende qu'un citoyen peut payer lorsqu'il est pris en infraction pour ne pas
avoir attaché sa ceinture et, pourtant, on se réfère
à la santé de la population dans ce cas-ci.
Une dernière suggestion de la fédération, c'est
l'imposition d'une taxe. La fédération vous suggère
d'imposer une taxe sur les pesticides vendus chez les grossistes et les
détaillants afin de financer la recherche sur les pesticides en vue de
trouver des solutions de rechange et les cours de formation donnés aux
différents utilisateurs. Le montant attribué à la taxe
devrait être proportionnel à la classe de toxicité du
pesticide déterminée par le ministère de l'Environnement.
Ainsi, par exemple, l'aldrine qui appartient à la classe 1 selon les
critères de classification du gouvernement serait plus taxée
qu'un autre pesticide classé dans une catégorie moins
dangereuse.
Une telle mesure, à notre avis, inciterait les applicateurs et
les consommateurs à utliser des pesticides moins toxiques ou à
appliquer d'autres méthodes de répression des ravageurs, ce qui,
à notre avis, constitue un énorme avantage.
Enfin, M. le Président, en guise de conclusion, après
mûre réflexion sur l'avant-projet de loi qui nous a
été présenté, la Fédération
québécoise de la faune croit que cet avant-projet de loi sur les
pesticides devrait faire l'objet d'un chapitre spécial de la Loi sur la
qualité de l'environnement, de façon à ne pas créer
deux régimes distincts. Le Québec devrait avoir une seule loi
contrôlant tous les pollueurs, y compris les agriculteurs et les
sylviculteurs.
La Fédération québécoise de la faune
réalise également que cet avant-projet de loi ne semble pas
dégager une volonté gouvernementale de favoriser une utilisation
plus rationnelle des pesticides en développant des moyens
préventifs et des alternatives.
La Fédération québécoise de la faune
réalise également qu'aucun chapitre ne traite de la
quantité globale (maximum) de pesticides qu'un milieu peut absorber. Il
n'y a aucune limite au niveau de la quantité globale de pollution
permise dans un milieu donné. On laisse le choix des quantités
à être utilisées au lieu d'administrer en fonction de la
capacité globale des régions selon le respect de la faune
présente.
On oublie d'exercer un contrôle nécessaire au respect de
l'écologie. On oublie également de gérer en fonction des
impacts causés globalement à la faune par une surcharge de
polluants. Nous sommes persuadés que l'imposition de quotas permettrait
d'assurer la survie de la faune, surtout dans les secteurs plus sensibles et
plus vulnérables. Nous croyons que, lorsque le milieu a atteint une
quantité globale de pollution, on devrait interdire l'utilisation de
pesticides.
D'autre part, la Fédération québécoise de la
faune souhaite que cette loi soit très sévère et
appliquée. C'est pourquoi nous pensons qu'il serait important de
prévoir une augmentation du nombre des inspecteurs afin de faire
respecter cette loi auprès de tous les utilisateurs de pesticides.
Enfin, soyez persuadés que la Fédération
québécoise de la faune est prête à poursuivre sa
collaboration avec votre ministère. Elle est prête à
travailler avec le ministère de l'Environnement afin de trouver les
outils pertinents et permanents et afin d'éduquer ses membres et les
utilisateurs de la faune à protéger adéquatement
l'environnement indispensable à leur survie et à notre
survie. Merci, M. le Président. (17 h 30)
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. Quintal. M. le
ministre.
M. Lincoln: M. Quintal, tout d'abord, je dois vous remercier,
votre organisation et vos bénévoles, d'avoir pris tellement de
temps, comme vous l'avez vous-même souligné, pour nous produire un
mémoire qui est étoffé, qui contient beaucoup de
représentations dont plusieurs ne sont pas contenues dans d'autres
mémoires. Donc, cela ajoute à l'inventaire que nous aurons pour
essayer de bonifier le projet de loi. Un de mes collègues va intervenir
de notre côté et, ensuite, je vais passer la parole à
l'Opposition. On a environ quinze minutes.
Je voudrais revenir sur quelques points très importants que vous
avez soulignés. D'abord, pourquoi adopter une loi spécifique
plutôt que de se servir de la Loi sur la qualité de
l'environnement? Je ne sais pas si vous étiez ici ce matin lorsque cette
question a été discutée et débattue, mais, tout ce
que je peux vous dire, c'est qu'il y a des raisons très importantes pour
lesquelles on ne l'a pas fait. Par exemple, ici, je vous montre tout le travail
qui a mené à ce projet. La moitié ou les trois quarts de
ce travail, c'est la première esquisse que nous avions faite pour
introduire les pesticides comme une réglementation de la Loi sur la
qualité de l'environnement. En fin de compte, la raison pour laquelle
nous ne l'avons pas fait, c'est qu'il y avait des dangers de diminuer
l'efficacité de plusieurs articles de la Loi sur la qualité de
l'environnement, dont l'article 20 était le principal, en
réduisant l'impact par rapport à un contaminant
spécifique, ce qui aurait créé un précédent
très dangereux parce qu'il serait impossible, aujourd'hui, après
ouverture d'un article comme l'article 20, de pouvoir le retrouver dans son
ensemble. Cela aurait été un vice, un précédent
dangereux dans le cas où on aurait eu a légiférer ou
à réglementer d'autres contaminants. C'est la raison
principale.
La deuxième, c'est qu'il aurait fallu amender environ 50 articles
de la section I de la Loi sur la qualité de l'environnement, qui est une
loi-cadre, qui ne se prête pas facilement à une
interprétation spécifique sur un contaminant. Cela aurait fini
par être une loi que le citoyen ordinaire n'aurait jamais pu comprendre.
Pour cela et pour plusieurs ajtres raisons que j'ai
énumérées ce matin, nous avons choisi d'aller dans le sens
de la recommandation du Conseil consultatif de l'environnement qui nous
recommandait une loi spécifique sur les pesticides, sur le modèle
que toutes les provinces canadiennes, je pense, ont utilisé d'une loi
spécifique, surtout les modèles qui nous ont été
recommandés par les États que nous avons consultés, les
États avec qui nous avons des accords environnementaux, l'État de
New York, l'État du Wisconsin, etc., qui ont fait toute l'étude,
et la Nouvelle-Écosse, la dernière province à adopter une
loi, qui a examiné les deux modèles et qui, pour les mêmes
raisons que nous, a adopté une loi spécifique. Nous avons
l'intention de confirmer que la Loi sur la qualité de l'environnement
aura préséance sur la Loi sur les pesticides. Donc, tous les
pouvoirs qui sont conférés au ministre vont demeurer dans la Loi
sur les pesticides.
Pour ce qui est des remarques précises que vous avez faites sur
certains sujets spécifiques, je voudrais passer en revue certaines de
vos constatations principales et vous répondre. Par exemple, vous avez
suggéré que les ministères soient assujettis a l'article
6. Si vous voulez bien vous référer à votre
mémoire... Pardon. Les ministères sont inclus dans la
définition des personnes; qu'on ajoute les ministères. Les
ministères sont couverts par l'article 6. Si vous regardez l'article 6
de la loi, cela inclut le gouvernement, les ministères et les organismes
qui en sont mandataires.
Vous avez parlé d'usage domestique. Vous vouliez une
précision à ce sujet. L'usage domestique pour les fins de cette
loi se réfère à la classification d'usage domestique selon
la loi fédérale sur les produits antiparasitaires. C'est pour
faire une concordance avec la loi fédérale.
Pour ce qui est des sylviculteurs et des agriculteurs, je ne sais pas si
vous avez assisté à la présentation de l'UPA où on
a spécifié que les deux groupes, sylviculteurs et agriculteurs,
vont être inclus dans la loi par réglementation.
Le deuxième alinéa du paragraphe 5 le prévoit et
l'article 95 prévoit une réglementation. Il y a
déjà une entente avec le ministre délégué
aux Forêts pour une politique de réglementation sur la
forêt, sur les pesticides en forêt, et nous allons aussi
établir une réglementation éventuelle pour les
agriculteurs. Cela est en négociation en ce moment avec l'UPA, les
intervenants du monde agricole et le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
Vous avez aussi suggéré qu'à l'article 7 nous
incluions une référence aux recherches et à la
méthode alternative. Nous allons considérer cela de près.
Nous allons naturellement discuter avec le ministère de l'Agriculture,
des Pêcheries et de l'Alimentation pour arriver a un texte qui
reflète vos préoccupations. C'est une suggestion que nous
acceptons très positivement.
Vous avez aussi répondu positivement à la demande portant
sur un "comité aviseur", comme l'ont fait du reste une grande
quantité d'intervenants ici. Nous allons prendre cela en
considération et avec beaucoup de sérieux. Vous vous êtes
demandé si le ministre de l'Environnement est responsable de
l'application de la Loi sur les pesticides. La réponse est oui. En fait,
à l'article 119, vous allez voir que c'est le cas. C'est le ministre de
l'Environnement qui va être responsable de cette Loi sur les
pesticides.
Une voix: ...
M. Lincoln: C'est cela. Il n'y a rien de nouveau
là-dedans.
Vous avez aussi évoqué la question de la supervision
immédiate. Cela aussi a été discuté et mis de
l'avant par d'autres intervenants. Ce que nous voulons préciser par
"supervision immédiate", c'est l'idée d'une supervision sur les
lieux d'exécution des travaux ou de vente. Nous ne voulons pas que tous
les gens qui sont employés soient nécessairement munis de permis
comme les gens qui vont, eux, faire les applications ou la vente. Mais vous
ajoutez la notion qu'il faudrait que les gens qui s'occupent de la technique
des pesticides soient inclus. Nous allons regarder cela, mais nous pensons que
ta définition que nous avons prise va encadrer la chose dans le
même sens que le Code des professions où vous avez des personnes
responsables et d'autres qui sont des adjoints ou des employés qui sont
sous la responsabilité de la personne qui est habilitée. Il faut
aussi considérer qu'il y a toutes sortes de personnes qui, par exemple,
pourraient travailler d'une façon accessoire dans le système et
nous ne voulons pas, nous, avoir à émettre des permis de
façon tout à fait globale.
Vous avez dit que l'article 53 vous inquiétait. En vertu de
l'article 53, une ordonnance est sujette à la consultation avec le
ministre des Affaires municipales. J'ai expliqué ce matin que ceci est
fait en concordance avec l'article 30 de la Loi sur la qualité de
l'environnement. Cependant, lors de l'inclusion de cet article 53 dans la Loi
sur les pesticides, nous avons malheureusement - c'est purement une omission
tout à fait involontaire omis deux ou trois mots qui expliquent que ceci
a trait seulement à la consultation lorsqu'il y a une dépense
engagée par une municipalité. C'est pour cadrer avec la Loi sur
les cités et villes et le Code municipal. C'est une concordance avec la
Loi sur la qualité de l'environnement où vous allez voir, a
l'article 30, que cela apparaît déjà.
À l'article 69, vous avez suggéré - et, en passant,
cela va être corrigé par l'article 53 - d'ajouter "à toute
personne physique, tout groupe de citoyens domiciliés au Québec".
Peut-être que vous pourriez nous préciser vos attentes. Le sens
des balises que vous voulez mettre quant à ces groupes de citoyens n'est
pas très clair dans votre mémoire. Qu'entendez-vous par cela?
Peut-être que vous pourriez nous préciser vos attentes.
À l'article 100, vous avez demandé des pouvoirs
additionnels pour bannir les pesticides. Comme vous le savez, le pouvoir de
bannir les pesticides sur le marché appartient d'abord au gouvernement
fédéral, mais nous avons aussi le pouvoir de le faire. En fait,
il a été explicité clairement dans l'article 100, à
l'alinéa 6° , qu'on peut le faire. Si vous lisez l'alinéa
6°, cela nous donne tous les pouvoirs de le faire. Les pouvoirs sont assez
étendus en ce sens. L'idée d'imposer une taxe a été
soulevée par plusieurs intervenants aussi. Nous la prenons en
considération. C'est une notion, naturellement, qui est
intéressante et vous avez pu entendre certains intervenants, par
exemple, l'UPA, qui s'est opposée formellement à cela parce
qu'elle dit que cela va élever le coût de production. C'est une
suggestion qui revient plusieurs fois et qui, certainement, va être
examinée.
Finalement, il y avait deux autres points que vous avez apportés
en terminant la lecture de votre mémoire. C'est la question de la
quantité globale. Cela, on l'étudié avec beaucoup de
sérieux. C'est vrai. Cela va être inclus. On va le
considérer très sérieusement. Pour ce qui est de la
question des méthodes et des recherches alternatives, comme je vous ai
dit, à l'article 7, nous avons considéré cette inclusion
après en avoir discuté avec le ministère de l'Agriculture.
Mais, en même temps, si vous avez lu le document de travail que nous
avons présenté, toute la politique du ministère, la
politique, par contraste avec la loi, s'axe justement sur la recherche d'une
méthode alternative de lutte intégrée. Ce sera l'objectif
du ministère, c'est-à-dire une politique distincte d'une loi qui
ait un cadre qui permette l'application et le contrôle des pesticides
chez les utilisateurs par des permis et des certificats.
Je voulais faire le point brièvement parce qu'il y a un
collègue qui va vous interroger sur certaines questions clés que
vous avez soulevées dans votre mémoire. Si vous avez des
questions à soulever par rapport à cela, allez de l'avant, mais,
en attendant, je vais passer la parole à mon collègue, l'adjoint
parlementaire au ministre de l'Environnement, qui voudrait vous poser quelques
questions.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Pontiac.
M. Middlemiss: Merci, M. le Président. M. Quintal,
à l'article 7, vous suggérez que le ministère de
l'Environnement crée un conseil consultatif sur les pesticides. Dans
l'avant-dernier paragraphe, vous suggérez que le conseil soit
constitué de quinze membres. Si vous vous êtes rendu au nombre de
quinze, est-ce qu'en faisant cet exercice vous avez pu identifier de quels
milieux devaient provenir ces quinze membres?
M. Quintal: M, le député, je vais passer la parole
à M. Vanier, à ma droite.
M. Vanier (Daniel): Je vais répondre à votre
question.
M. Quintal: M. Vanier.
M. Vanier: Pour le nombre de quinze membres, c'est un nombre un
peu arbitraire qu'on a pris. On s'est fié un peu au nombre de personnes
qu'il y avait au Conseil consultatif de l'environnement où il y a dix
personnes environ, dix ou onze personnes. Mais on a regardé aussi
l'ensemble des groupes qui pourraient être intéressés
à participer à un genre de conseil consultatif de ce type,
c'est-à-dire que, si on compte les représentants de l'industrie
des pesticides, ceux qui sont aussi les exterminateurs, les agriculteurs, les
sylviculteurs, l'industrie forestière, les gens de l'autre
côté qui sont du domaine de la santé, de la gestion de la
faune, comme la Fédération québécoise de la faune,
les gens des groupes environnementaux, tout ça, on arrivait, grosso
modo, à une quinzaine de personnes qui pourraient être membres de
ce conseil consultatif. C'est sûr que c'est un chiffre arbitraire, mais
l'idée, c'est de faire en sorte qu'il y ait la plus grande
représentation possible de l'ensemble des intervenants qui seraient
intéressés à participer à un tel conseil
consultatif. C'est d'avoir le plus de monde possible. Et cela va permettre
aussi, si on a tous ces gens représentant différents milieux, que
l'application de la loi se fasse plus facilement, dans une meilleure
coordination et une meilleure concertation. (17 h 45)
M. Middlemiss: Merci. Maintenant, à l'article 15, vous
suggérez de biffer, dans l'alinéa 2 : "on ne s'est pas
avoué coupable". Est-ce que vous pourriez dire quels sont les motifs de
cette demande? C'est l'article 15 où vous suggérez de biffer,
à l'alinéa 2 : "on ne s'est pas avoué coupable".
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Vanier.
M. Vanier: Ce sont les cas où une révocation de
permis serait en cours. Ce sont les cas où il y aurait une ordonnance
devant les tribunaux. La personne plaide non coupable ou dit; Je ne suis pas
coupable d'avoir fait cela. À ce moment-là, on voudrait quand
même que son permis ne lui soit pas remis immédiatement. On laisse
la prodécure trancher vraiment là-dessus, à savoir s'il y
a révocation ou pas de son permis.
M. Middlemiss Si la cause est pendante dans l'intervalle du...
M. Vanier: C'est cela. Qu'il n'ait pas le droit d'utiliser son
permis pendant cette étape, pendant que sa cause est soit devant les
tribunaux ou devant le ministère de l'Environnement.
M. Middlemiss: C'est bien.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Pontiac. M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Avant de passer la parole au député de
Dubuc qui est responsable de la faune - je reviendrai pour les cinq
dernières minutes, à 17 h 55 - j'aimerais tout de même vous
dire qu'on voit que vous travaillez pour la conservation, et cela se sent
à l'intérieur. C'est le rapport le plus élaboré que
nous ayons eu, le plus fouillé, celui qui va nous aider le plus quand on
va étudier le projet de loi article par article parce que vous l'avez
vraiment fouillé. C'est le plus percutant et le plus critique dans le
vrai sens du mot.
Avant que je vous pose des question sur ce sujet à 17 h 55, parce
qu'on termine à 18 heures, le responsable de la faune chez nous,
puisqu'on travaille de façon collégiale, vous posera des
questions sur votre mémoire.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député de
Dubuc.
M. Desbiens: Merci, M. le Président. Je veux saluer les
membres et ajouter que je fais miennes les remarques de mon collègue sur
la qualité du mémoire. D'ailleurs, on est habitué à
des mémoires assez substantiels de la part de la
fédération. Je vais d'abord à la conclusion et je viendrai
sur d'autres articles si le temps le permet.
En conclusion, quand vous recommandez que le futur projet de loi sur les
pesticides fasse l'objet d'un chapitre de la Loi sur la qualité de
l'environnement, évidemment, M. le ministre a donné ses raisons
pour justifier la présentation d'un projet de loi qui soit distinct de
la Loi sur la qualité de l'environnement, sauf que je n'ai pas entendu
le ministre vous offrir de faire valoir une argumentation
supplémentaire. Est-ce que vous auriez, à la suite des propos du
ministre, des arguments supplémentaires pour justifier votre demande,
votre suggestion?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Quintal.
M. Quintal: M. le député de Dubuc, cette
proposition de la Fédération québécoise de la
faune, c'est pour éviter qu'on ne soit soumis à deux
régimes distincts qui feraient que la Loi sur la qualité de
l'environnement serait atténuée ou diminuée. Remarquez
bien que c'est le même style d'argumentation que le ministre vient de
nous faire dans sa réplique. Mais notre remarque se situait dans une
stratégie globale de conservation, et à notre avis, tous les
pollueurs devraient être soumis à la même loi,
c'est-à-dire celle sur la qualité de l'environnement. À ce
titre, on croit que tous les polluants devraient être inclus dans cette
loi. Les pesticides ne devraient pas atténuer la rigueur ou la
capacité de la Loi sur la qualité de l'environnement.
On s'aperçoit dans l'avant-projet de loi que plusieurs clauses
font sentir que les polluants ne seraient pas soumis à certains articles
de la Loi sur la qualité de l'environnement. En tout cas, on sentirait
une espèce de diminution de l'impact. Peut-être que mes
collègues pourraient essayer de m'aider a formuler une réponse
plus cohérente et plus exhaustive. Peut-être Daniel ou Yves.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Vanier.
M. Vanier: Concernant la Loi sur la qualité de
l'environnement, l'article 20, tout cela, on trouve important que les
pesticides, toute la réglementation sur les pesticides devienne un
chapitre à l'intérieur de la loi pour que, dans les cas de
pollution ou des choses semblables, il y ait quand même une certaine
conformité entre les règlements et les articles sur les
pesticides. C'est un peu le danger qu'on voyait de deux régimes
distincts, que certains pesticides ou certains produits utilisés au
niveau de l'agriculture, de la sylviculture et autres utilisations ne soient
pas dans le même régime que celui de la Loi sur la qualité
de l'environnement. C'est un problème qu'on perçoit dans le
projet de loi. On dit très bien, à un moment donné, qu'on
veut que le projet de loi couvre la totalité des pesticides vendus et
utilisés au Québec. On ne veut pas que, par règlement, le
Conseil des ministres fasse en sorte que certains pesticides soient mis de
côté.
On a demandé aussi qu'il y ait une prohibition de certains
pesticides qui pourraient être utilisés. Entre autres, on a un cas
qui, ces temps-ci, défraie peut-être la manchette, le cas du 2,4-D
utilisé par Hydro-Québec sous les lignes à haute tension.
Hier, le DSC du centre hospitalier de l'Université Laval a dit que ce
pesticide ne devrait plus être utilisé, car il a un pouvoir
"cancérigène. Même si on savait qu'à l'alinéa
6° de l'article 100, le ministre avait ce pouvoir de prohibition, on
voulait préciser davantage. On veut aussi le soumettre à un
processus de consultation important qui entrerait dans un des mandats du
conseil consultatif des pesticides. Je pense que c'est un des points importants
à aborder là-dessus. Dans l'ensemble, on voudrait que ce soit un
chapitre de la Loi sur la qualité de l'environnement. Bien sûr,
l'exercice peut présenter certains problèmes législatifs
pour la réécriture de certaines normes ou de certains articles de
la Loi sur la qualité de l'environnement, mais on ne voudrait pas que ce
soit mis à part. Cela devrait être un tout qui concerne l'ensemble
de l'environnement au Québec.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: Est-ce que je vous interprète bien en disant
que votre crainte est qu'en faisant une loi distincte, il y ait, dans son
application, moins de rigueur que si elle est à l'intérieur?
M. Quintal: On sent, dans l'avant-projet de loi, qu'on diminue
l'efficacité de la Loi sur la qualité de l'environnement dans son
application. Cela ne donne rien de recommencer à citer une série
d'exemples qu'on a déjà cités dans notre
présentation ou que vous avez pu lire.
M. Desbiens: Je reviens maintenant aux propositions, chapitre III
A, Ouverture aux méthodes alternatives à l'utilisation des
pesticides. Vous faites une recommandation sur les manuels de procédures
que devrait publier le gouvernement, qui me paraît intéressante et
qui est originale, je pense; on ne retrouve pas ce genre de recommandation dans
les autres mémoires. Pourriez-vous préciser un peu plus cette
recommandation?
M. Quintal: C'est un manuel qui constituerait un inventaire des
moyens préventifs existants, des techniques de dépistage, des
tests, un répertoire des techniques de lutte biologique et
intégrée, de la manipulation sécuritaire de certains
pesticides en précisant la dose, la fréquence, le type de
pesticides à utiliser. Ce manuel devrait présenter des cas
généraux, des cas concrets, etc., et permettre ainsi à
l'applicateur de choisir les meilleures méthodes pour enrayer les
ravageurs ou les organismes nuisibles. C'est un peu dans ce sens qu'on a fait
notre recommandation. Peut-être que Daniel pourrait ajouter des
éléments à ma réponse.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Vanier.
M. Vanier: On s'est inspiré un peu de ce qui s'est fait
dans le milieu forestier. On
sait que, pour ie secteur de la forêt, on a fait un guide des
modalités d'intervention en milieu forestier, Le ministre
délégué aux Forêts, auprès de l'industrie
forestière, s'est engagé à publier un manuel
d'aménagement forestier, c'est-à-dire un genre de manuel
où il y aurait les prescriptions sylvicoles, les traitements sylvicoles
à faire. Donc, on s'est dit: Pourquoi ne pas faire la même chose
avec les pesticides? Ce manuel de procédures, l'agriculteur, le
sylviculteur et les autres utilisateurs vont pouvoir l'avoir en main. Cela va
empêcher aussi le fait d'avoir des prescriptions et tout le
phénomène... Les agronomes, eux, proposent plus des
prescriptions. Pour nous, le manuel est plus tangible. Il pourrait aussi
être modifié avec le temps et avec les nouvelles connaissances. Il
pourrait y avoir une révision, au bout de trois ou quatre ans, du manuel
auquel on ajouterait certaines pages et duquel on enlèverait certaines
autres pages. Cela pourrait être fait en collaboration avec le
ministère de l'Environnement et le ministère de l'Agriculture, de
même que le ministère de l'Énergie et des Ressources pour
la forêt et ces choses-là. Cela permettrait vraiment aux gens
d'avoir un outil pratique en main, sur le terrain, déjà, au lieu
d'être toujours obligés d'appeler un agronome ou un autre
spécialiste de la question pour venir présenter un bilan de la
situation. Je pense que c'est un outil qui serait plus tangible et plus
pratique.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: Vous faites le rapprochement avec le manuel
d'intervention en milieu forestier. Est-ce que vous le verriez
intégré au manuel lui-même ou est-ce un manuel
supplémentaire ou complémentaire?
M. Vanier: Ce serait complémentaire parce que ça
dépend aussi du contenu. Il faut que le contenu soit clair. Il y a
certaines parties du manuel de procédures qui seraient
réglementaires, c'est-à-dire que les gens devraient
répondre à des normes importantes qui y seraient contenues. Cela
leur montrerait que, selon la loi ou les règlements de la loi, ils n'ont
pas le droit de faire telle chose et telle chose. Cela irait peut-être
plus loin que le guide des modalités d'intervention ou que le manuel
d'aménagement. Ce ne serait pas juste prescriptif, ce serait aussi
réglementaire à certains points.
M. Desbiens: Je vous remercie. Une petite vite avant de rendre la
parole à mon collègue.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Dubuc.
M. Desbiens: Le ministre parle d'imposer un certificat aux
agriculteurs et aux sylviculteurs pour les pesticides de classes 1 et 2.
Croyez-vous que c'est suffisant? Est-ce que cela ne devrait pas s'adresser
aussi aux classes 3, 4...
M. Quintal: Nous, nous demandons l'obligation de détenir
un certificat pour toute personne qui utilise ou fait l'usage d'un
pesticide.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. ie
député de Dubuc. M. le député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup. Je vais aller très très
vite. Votre conclusion porte sept ou huit paragraphes et le ministre vous a
interrogé sur un seul. Sur les autres qui sont importants, je crois, je
vais aller très vite parce qu'il ne me reste que cinq minutes. Vous
dites: "La Fédération québécoise de la faune
réalise également que cet avant-projet de loi ne dégage
aucunement une volonté gouvernementale de favoriser une utilisation plus
rationnelle des pesticides en développant des moyens préventifs
et des alternatives." Je pense que vous avez vu très juste.
Troisième paragraphe: "La Fédération
québécoise de la faune réalise qu'aucun chapitre ne traite
de la quantité globale (maximum) des pesticides qu'un milieu peut
absorber." Encore là, vous avez vu très juste. "Il n'y a aucune
limite au niveau de la quantité globale de pollution permise dans un
milieu donné." Encore très juste comme observation. "On laisse le
choix des quantités à être utilisées au lieu
d'administrer en fonction de la capacité globale des régions,
selon le respect de la faune présente." Encore un point juste. "On
oublie d'exercer un contrôle nécessaire au respect de
l'écologie. On oublie de gérer en fonction des impacts
causés globalement à la faune par une surcharge de polluants.
Nous sommes persuadés que l'imposition de quotas permettrait d'assurer
la survie de la faune, surtout pour les secteurs plus sensibles et plus
vulnérables." Je n'ai jamais lu rien d'aussi précis et d'aussi
juste devant l'étude d'un avant-projet de loi.
Comme le ministre ne vous interroge pas là-dessus, ne vous a pas
interrogés, c'est donc qu'il ne veut pas en tenir compte. Son
avant-projet de loi est fait dans ce sens-là. J'aimerais qu'on en tienne
compte, mais ce n'est pas moi le législateur. Je suis de l'Opposition.
Vous pouvez faire des pressions. Est-ce que vous entendez, pour que vos
idées et vos conclusions justes passent et aient une grande
publicité, faire au moins des représentations spéciales
auprès du ministre de l'Environnement et, s'il le faut, faire des
conférences de presse pour sensibiliser les journalistes à cette
lacune impardonnable de
cet avant-projet de loi?
Le Président (M. Saint-Roch): M. Quintal,
M, Quintal: M. le député, une chose est certaine, la
Fédération québécoise de la faune s'est
dotée, tout dernièrement, d'une revue officielle pour essayer de
sensibiliser ses membres à des phénomènes de pollution,
à des phénomènes de remblayage qui détruisent des
habitats fauniques. Elle s'est également donné une revue
officielle pour pouvoir sensibiliser son monde à la
sécurité, à la conservation, à l'éducation
et à la protection des habitats fauniques. Soyez assuré que, dans
notre prochain numéro qui sortira au début d'avril, la
Fédération québécoise de la faune aura plusieurs
pages sur les commentaires qu'elle aura faits en commission parlementaire et du
suivi qui, tout normalement, devrait se faire concernant cet avant-projet de
loi. C'est notre moyen à nous de rejoindre nos 220 associations et nos
150 000 membres et plus.
Soyez également assuré qu'il y a un mouvement... Plusieurs
de ces commentaires ont été faits en conclusion. Nous les
trouvons pertinents parce qu'ils sont fondés sur des exemples bien
précis. Ces éléments de la conclusion, entre autres
choses, en ce qui nous concerne, proviennent en gros des analyses, des
études ou des discussions qu'on a eues avec le mouvement à Cours
d'eau en regard de la rivière L'Assomption. Cela est devenu un exemple
extrêmement révélateur, frappant ou déterminant dans
les mots qu'on a pu utiliser en conclusion là-dessus parce que la charge
de polluants que subit la rivière L'Assomption est immense,
énorme, ajoutée au déversement de purin de porc, les
rejets toxiques, les déversements d'Hydro-Ouébec au niveau des
insecticides qui peuvent se faire d'une manière abusive à
certains moments. Tout cela fait qu'on se retrouve à des périodes
de l'année où cela devient dangereux de boire l'eau de la
rivière L'Assomption, même, entre guillemets,
dépolluée. Il y a beaucoup de cas dans les hôpitaux de la
région de la rivière L'Assomption; ceux-ci sont pleins durant la
période estivale parce que les gens souffrent de maladies causées
par les bactéries qui sont contenues dans l'eau. C'est un peu dans ce
sens-là, c'est un peu cela qui nous a guidés dans
l'élaboration de ces quelques paragraphes, entre autres choses. (18
heures)
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis.
M. Garon: Dans le débat sur la rivière
L'Assomption, je remarque que vous ne parlez pas beaucoup des 43
municipalités qui jettent leurs égouts tels quels dans la
rivière. Je remarque qu'on parle beaucoup des cultivateurs, mais qu'on
ne parle jamais des municipalités qui jettent leurs égouts tels
quels dans la rivière. Dans tout ce débat, j'ai l'impression
qu'on n'a pas été équitable pour tout le monde. C'est beau
que les cultivateurs aient des systèmes, mais, en même temps, on
ne dit rien des municipalités qui jettent leurs égouts tels quels
dans la rivière ni du ministre de l'Environnement qui a
arrêté son programme d'assainissement des eaux. Même s'il
n'y avait plus un seul cultivateur dans le bassin de la rivière
L'Assomption, l'eau ne serait pas plus buvable qu'avant parce que les
municipalités jettent leurs égouts tels quels dans ia
rivière.
Le Président (M. Saint-Roch): M.
Quintal.
M. Quintal: M. Garon, là-dessus, à plusieurs
reprises, on a signalé le problème de la rivière
L'Assomption et, chaque fois, on a toujours identifié quatre sources de
pollution, et, la quatrième, c'est celle que vous m'avez
rappelée. Je pense que c'est la globalité de la pollution que
subit cette rivière qui fait que, c'est même impensable dans les
prochaines années de réintroduire une espèce de poisson
sportif ou autre dans la rivière qui pourrait être consommable
à court, moyen ou long terme. II y a des résidus dans la
rivière L'Assomption. Aussitôt qu'il y aura un dragage, cela va
remonter en surface. La pollution est omniprésente actuellement. Il ne
faut quand même pas se le cacher. Vous avez raison de me souligner qu'il
y a un quatrième élément de pollution, en plus des rejets
toxiques, des pesticides et des déversements de purin.
Le Président (M. Saint-Roch): M. le député
de Lévis.
M. Garon: II y a eu un effort considérable de fait dans le
cadre d'un programme pour déplacer la production porcine, là
où il y avait des concentrations. Des sommes d'argent importantes ont
été placées en 1985 par l'ancien gouvernement qui
totalisent presque 10 000 000 $ pour déplacer des productions pour
lesquelles les producteurs avaient tous eu leur permis du ministère de
l'Environnement.
M. Quintal: Je vous avoue qu'il y a eu des efforts de faits au
niveau agricole et également au niveau de l'assainissement des eaux. Je
vous le concède. On pourrait peut-être aller plus loin, mais il
reste que les produits toxiques sont encore présents. Il y a encore des
industries qui ne sont pas contrôlées au niveau des rejets
toxiques et, au niveau des pesticides, au niveau de la pollution diffuse, c'est
encore présent. Evidemment, vous comme moi ne pouvons
contrôler les déversements de purin dans la rivière
et les nuages ammoniacaux qui pourraient se produire è certaines
périodes de l'année qui détruisent tout. Il reste que le
mouvement à Cours d'eau, il faut quand même le souligner, fait un
travail immense de surveillance et je pense que cela mérite d'être
souligné en commission parlementaire. C'est un membre affilié
à la fédération et on en est très fiers. C'est un
membre qui fait beaucoup pour l'environnement.
Le Président (M. Saint-Roch: II est maintenant 18 heures.
Je demanderais à M. le ministre, suivi de M. le critique officiel, de
conclure avec de brèves remarques.
M. Lincoln: M. Quintal, je vous remercie beaucoup, ainsi que vos
collègues, d'être venus. Vous êtes une des grandes
fédérations qui ont pour but la protection de l'environnement et
la poursuite d'une écologie au Québec. Nous vous en sommes
très reconnaissants comme ministère de l'Environnement. Je peux
vous assurer encore une fois que, ce matin, il y a eu un débat qui a
duré très longtemps sur toute la question de la Loi sur la
qualité de l'environnement par rapport à une loi
spécifique et la raison pour laquelle vous n'étiez pas
présents - ce n'est pas un blâme... Mais je regrette de ne pas
avoir le temps d'expliciter la question qui a été ramenée
sur le tapis è la dernière minute et qui donne l'impression que
nous essayons de diminuer l'impact de la Loi sur la qualité de
l'environnement.
Ce matin, j'ai expliqué... Je vais vous envoyer le texte complet
avec mes remarques, ce qui va expliquer tout à fait que la Loi sur la
qualité de l'environnement va s'appliquer de façon
intégrale, indépendante et va avoir préséance sur
la Loi sur les pesticides. Qui plus est, afin de diminuer toutes les
inquiétudes à ce sujet, nous allons préciser cette
question très clairement dans la Loi sur les pesticides et je vais vous
envoyer le texte complet de mes remarques là-dessus. II n'y a aucune
inquiétude à ce sujet. Je peux vous dire que le rédacteur
même de la Loi sur la qualité de l'environnement, le père
de la qualité de l'environnement, c'est lui-même une des
nombreuses personnes qui nous ont recommandé de faire une loi
séparée sur les pesticides, tout comme le Conseil consultatif de
l'environnement dans son rapport de 1980.
Je voudrais aussi souligner l'indignation qui a été
exprimée par le critique de l'Opposition qui disait que cette loi ne va
pas assez loin. Depuis 1980, ils avaient le rapport du Conseil consultatif de
l'environnement, rapport recommandant justement ce genre de projet. Rien n'a
été fait pendant six ans. Maintenant, c'est facile de
blâmer les autres qui ont le courage de faire la chose. Vous devriez lire
le rapport. Je vous recommande de le lire. Cela avait été
recommandé au ministre Léger qui, en 1981, faisait des discours
disant qu'ils allaient faire cela, tout comme la loi sur le tabac et beaucoup
de lois qui n'ont pas été adoptées.
Je trouve, en fin de compte, très étonnant que ce soit le
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
antérieur qui soit le défenseur de l'environnement actuel, lui
qui a remblayé les marais de Kamouraska, l'architecte même du
remblai des marais de Kamouraska. C'est lui qui vient nous dire aujourd'hui
qu'on a cessé le programme d'assainissement des eaux. Il n'a pas suivi
ce qui se passe. Bientôt, il va y avoir 58 nouvelles municipalités
qui vont être ajoutées au programme d'assainissement des eaux. On
va mettre 100 000 000 $ de plus, pour les trois prochaines années, que
ce qu'ils y ont mis, eux.
Je pourrais faire un débat avec lui n'importe quel jour sur le
programme d'assainissement des eaux et, sur ce qui se fait dans l'environnement
depuis un an comparé à ce qui s'est fait avant. Je pourrais, par
exemple, parler de la politique des rives, de la protection des rives que nous
essayons de faire malgré beaucoup de luttes farouches. Cela aurait
dû être fait depuis des années déjà au
Québec. On est le dernière province à
légiférer sur les pesticides. Je suis fier qu'au moins il y ait
un départ là-dessus. Je suis content que les remarques et les
commentaires que vous avez faits soient pris dans la mesure la plus
constructive possible. On va les examiner avec le plus grand sérieux. Ce
qu'on pourra incorporer dans la. Loi sur les pesticides, nous le ferons et nous
allons communiquer avec vous. Je vais vous envoyer les remarques de notre
texte. Je m'excuse d'avoir fait les remarques que je viens de faire, mais je
trouve que c'est faire de la politicaillerie sur cette question, surtout que le
gouvernement antérieur n'a jamais eu le courage lui-même de
déposer un projet de loi. S'ils avaient toutes les réponses,
c'est ce qu'ils auraient dû faire. S'ils n'ont pas de réponses
aujourd'hui, qu'ils acceptent au moins que, nous, on ait fait ce qu'ils n'ont
pas eu le courage de faire.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le ministre. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: M. le Président, je tiens à remercier les
gens qui se sont présentés, qui ont amené leur
mémoire. Je tiens à vous dire que je n'ai fait que lire les
conclusions de votre mémoire sans faire de commentaires partisans. Si
c'est de la petite politicaillerie que de lire votre mémoire, c'est
à vous que ces remarques s'adressent
et non à moi. Cela me peine qu'il vous les ait
adressées.
Cependant, il faut faire bien attention. Vous n'êtes pas ici pour
écouter deux partis qui s'engueulent. De la façon dont vous
allez, si vous vous mordez la langue, vous allez vous empoisonner. Il ne
faudrait pas que ceci arrive devant tout le monde.
Je vous remercie d'être là. Je ne tomberai pas dans cette
lutte partisane. On fera cela quand on sera seuls. Je suis très capable
de le faire. Merci d'être venus.
Le Président (M. Saint-Roch): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. Quintal, brièvement, s'il vous
plaît!
M. Quintal: Oui. Tout d'abord, je tiens à vous remercier
de nous avoir entendus. Je tiens à vous signaler que la
Fédération québécoise de la faune est un organisme
apolitique. Je tiens également à vous signaler qu'il y a quelques
remarques, commentaires ou quelques précisions que je vous ferai
parvenir par courrier relativement à des questions que vous m'avez
posées au début de votre énoncé, sur les critiques
que vous avez pu faire sur notre mémoire ou sur les précisions
que vous nous avez demandées. Je les ai notées. J'essaierai de
vous les faire parvenir.
J'ai également quelques questions que je vous poserai à
cette occasion. Comme on est un organisme apolitique et qu'on est public, je
pourrai mettre l'Opposition en copie conforme. Je pense que vous n'y verrez
aucun inconvénient. Vous avez proposé de m'envoyer un
écrit ou les remarques, les commentaires que vous avez faits
relativement à la Loi sur la qualité de l'environnement par
rapport à votre avant-projet de loi; on apprécierait beaucoup
avoir le texte ou vous rencontrer pour connaître votre point de vue
là-dessus. Merci.
Le Président (M. Saint-Roch): Je remercie la
Fédération québécoise de la faune ainsi que ses
participants pour la qualité de leurs interventions lors des travaux de
la commission. Étant maintenant arrivée à la fin de son
mandat, la commission de l'aménagement et des équipements suspend
maintenant ses travaux jusqu'à 10 heures demain matin. J'attire
l'attention des membres de la commission que nous nous réunirons dans la
salle, ici, soit la salle du Conseil législatif.
(Fin de la séance à 18 h 10)