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(Dix heures dix-neuf minutes)
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission de l'aménagement et des équipements reprend
ses travaux dans le cadre du mandat qui lui a été confié
par l'Assemblée nationale afin de tenir une consultation
particulière portant sur l'avant-projet de loi sur les pesticides. Avant
d'entreprendre notre journée, je voudrais dans un premier temps demander
au secrétaire de la commission s'il y a des remplacements.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M.
Vaillancourt (Orford) sera remplacé par M. Cusano (Viau) et M.
Vallières (Richmond) sera remplacé par M. Maltais (Saguenay).
Dépôt de documents
Le Président (M. Rochefort): Merci. Deuxièmement,
il y a un certain nombre de documents que nous devons déposer pour
l'information des membres de la commission, que nous déposerons
immédiatement et qui sont les suivants: cinq mémoires qui nous
sont parvenus, le mémoire de la Fédération des
associations pour la protection de l'environnement des lacs, le mémoire
de l'Association canadienne des détaillants en quincaillerie, le
mémoire de l'Union québécoise de la conservation de la
nature, le mémoire de l'Association Saint-François-d'Assise pour
la protection des animaux et le mémoire du groupe Cause. Ces
mémoires seront distribués à l'ensemble des membres de la
commission. Il s'agit de mémoires de groupes qui ont
décliné l'invitation, mais qui ont tout de même tenu
à nous faire parvenir leur point de vue dans un mémoire.
De plus, une série de lettres ont été
envoyées à la commission et nous les distribuerons aussi à
l'ensemble des membres de la commission. Il s'agit de lettres provenant des
groupes suivants: le Centre antipoison de l'hôpital Sainte-Justine,
Chemlawn, le CLSC des Trois-Saumons, le CLSC Lotbinière-Ouest, la
Fédération des producteurs de bois du Québec et l'Ordre
des ingénieurs forestiers du Québec. L'ensemble de cette douzaine
de documents vous sera donc distribué dans les prochaines minutes.
D'autre part, je dois solliciter un accord formel des membres de la
commission quant è la réorganisation des travaux qui est
intervenue pour la journée de demain. On sait que nous devions amorcer
nos travaux à compter de dix heures demain matin, mais, dû
à un certain nombre de contraintes, on a dû réorganiser la
journée à partir de 13 h 30 pour travailler jusqu'à 18 h
30 environ en fin de journée demain. L'entente est intervenue entre le
ministre et le porte-parole de l'Opposition, sauf qu'il s'agit d'officialiser
cette entente au niveau des membres de la commission. Alors, je comprends qu'il
y a entente de l'ensemble des membres de la commission pour modifier l'horaire
de demain. Je vous remercie.
Donc, nous allons entreprendre sans plus tarder les auditions de la
journée. J'indique immédiatement qu'aujourd'hui nous recevrons
les groupes suivants... Oui, M. le député de Terrebonne.
M. Blais: II y aurait les dépôts que vous avez faits
de lettres, etc.
Le Président (M. Rochefort): Oui.
M. Blais: Parmi les dépôts, nous avons
consulté Hydro-Québec pour qu'elle présente un
mémoire. Hydro-Québec a téléphoné disant, le
29 janvier, qu'elle enverrait un mémoire, etc. Elle a depuis
décidé que ce mémoire concernant ce projet de loi serait
transmis au ministre de l'Énergie et des Ressources qui en disposerait
un peu selon sa guise. Je voudrais savoir de quelle façon nous, de la
commission, pourrons recevoir ce mémoire qui s'adresse directement
à notre commission.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.
M. Lincoln: Je n'ai pas pris connaissance de cela, mais je suis
tout à fait d'accord que le mémoire devrait être transmis
à la commission en premier lieu. Si vous êtes d'accord, je ferai
des représentations auprès du ministre de l'énergie et des
Ressources pour que ce mémoire soit transmis immédiatement
à la commission.
M. Blais: Vous êtes très gentil. C'est la question
que je posais. Bonne réponse.
Le Président (M. Rochefort): Cela va? Peut-être,
d'ici la fin de nos travaux demain après-midi, serez-vous en mesure de
nous préciser le moment de la transmission du
mémoire?
M. Lincoln: D'accord. Le Président (M. Rochefort): Merci.
Auditions
La journée d'aujourd'hui nous permettra de rencontrer les groupes
suivants et dans l'ordre tel que présenté, soit: l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec, la
Communauté urbaine de Montréal, l'Union des municipalités
du Québec, l'Association des spécialistes en extermination du
Québec, l'Association des manufacturiers canadiens et l'Association des
détaillants en alimentation du Québec.
Sans plus tarder, je voudrais inviter les représentants de
l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec à prendre place tous ensemble devant nous. Je veux
souhaiter la bienvenue à M. Nicolet de même qu'à ses
collaborateurs. Je vous demanderais, M. Nicolet, vous qui êtes un
habitué des commissions parlementaires, de nous présenter
l'ensemble de vos collaborateurs, pour l'information des membres de la
commission de même que pour le Journal des débats. M. Nicolet.
UMRCQ
M. Nicolet (Roger): Je vous remercie, M. le Président.
À mon extrême droite, M. Richard Darveau, responsable des
communications à l'union. À ma droite, Me Gaétane Martel,
avocate, responsable de la recherche à l'union, et, à ma gauche,
M. Marcel Grenier, secrétaire-trésorier de la municipalité
de Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier.
Le Président (M. Rochefort): Bienvenue è vous tous.
M. Nicolet, l'entente qui est intervenue entre les membres de la commission
quant au déroulement de nos travaux est la suivante. 20 minutes sont
accordées à votre association pour nous présenter votre
mémoire. Par la suite, 20 minutes seront accordées è
chacune des deux formations politiques pour discuter avec vous du contenu de
votre mémoire. Je vous inviterais à nous présenter votre
mémoire, s'il vous plaît, M. Nicolet.
M. Nicolet: M. le Président, M. le ministre, madame et
messieurs, dans un premier temps, bien sûr, permettez-moi d'exprimer ma
reconnaissance et la reconnaissance de l'union d'être accueillie ici ce
matin.
L'UMRCQ souscrit d'emblée à la volonté
avancée par le législateur concernant la matière
traitée par l'avant-projet de loi sur les pesticides. Nous croyons qu'il
est urgent que tous les intervenants du milieu se concertent et axent
spécifiquement leurs efforts afin de protéger la santé des
êtres humains des effets néfastes que peuvent entraîner la
manipulation et l'usage de tels produits. Il était donc plus qu'urgent
que le Québec légifère sur ce sujet tout comme l'ont
déjà fait bon nombre de provinces canadiennes. Cependant, si le
projet de loi permet a priori de contrôler l'usage des pesticides au
Québec, il nous apparaît, à l'examen de ce texte
législatif, que sa portée semble, en effet, très
limitée.
Tout d'abord, cette loi s'appliquera aux pesticides
déterminés par règlement du gouvernement. Il faudra donc
attendre ce projet de règlement pour connaître
véritablement la portée de cette nouvelle loi, ce qui
entraînera des délais supplémentaires. Deuxièmement,
le projet de loi crée un régime particulier pour une
catégorie d'utilisateurs. En effet, l'article 5 de l'avant-projet
stipule que la majorité des dispositions ne s'applique ni à
l'agriculteur ni au sylviculteur qui utilisent des pesticides pour les fins de
leur exploitation agricole ou sylvicole.
Cependant, un inventaire effectué par le ministère de
l'Environnement en 1978 estime à 3 000 000 de kilogrammes la
quantité totale de pesticides employés annuellement sur le
territoire québécois. Cet inventaire fait également
état de la distribution, parmi les différents utilisateurs de
pesticides, de la quantité totale employée au Québec. On y
remarque que l'agriculteur occupe la part dominante avec près de 85 % de
la quantité totale de pesticides utilisés.
Même si le ministère de l'Environnement nous informe qu'en
milieu agricole les pesticides aident à maintenir et à
accroître la production tout en améliorant la quantité des
produits, il nous avise également que l'utilisation des pesticides
entraîne aussi d'autres problèmes, soit l'érosion des
terres agricoles et une contamination des nappes d'eau souterraines. On
constate donc par ces observations que les agriculteurs sont de ceux qui
manipulent et utilisent le plus les produits visés dans le projet de
loi. Pourtant, l'avant-projet ne reflète pas du tout cette
réalité. Qui plus est, cette catégorie d'utilisateurs
n'est pas affectée et n'est que peu ou pas concernée par la
formation et l'émission d'un certificat de compétence que
suggère la présente loi. Pourtant, l'usage massif de pesticides
s'ajoute à l'ensemble des polluants qui nous sont déjà
connus, comme les pluies acides. Par conséquent, il nous apparaît
plus qu'inquiétant que le monde agricole ne soit pas davantage
intégré aux mesures suggérées par l'avant-projet de
loi sur les pesticides.
L'utilisation de ces substances comporte des risques et peut avoir des
effets nuisibles pour toute la collectivité et les agriculteurs
eux-mêmes. Nous le verrons d'ailleurs dans le cas de la
municipalité de Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier que nous vous
présenterons tout à l'heure.
Dans ce contexte, si vous me le permettez, j'aimerais également
vous référer au dernier exemplaire de La Terre de chez nous,
en date du 19 février 1987. Je cite un article intitulé "Les
Américains s'inquiètent: produits chimiques agricoles". Je cite
La Terre de chez nous: "Une enquête récente menée en Iowa,
un État agricole du centre des États-Unis, révèle
que trois adultes sur quatre souhaitent qu'on réduise les
quantités de produits chimiques agricoles utilisés. Près
de 52 % de la population de cet État estime que les produits chimiques
agricoles menacent gravement la qualité de leur eau potable. Le
ministère des Ressources naturelles de l'État d'Iowa
prépare actuellement un projet de loi qui exigerait que les utilisateurs
de produits chimiques avertissent leurs voisins au moment de l'application. On
envisage également d'adopter certaines mesures afin d'augmenter les
taxes versées par les compagnies qui vendent ces produits afin de
rassembler des fonds pour décontaminer les puits atteints. Le sondage
indique que 75 % de la population souhaite qu'on réduise maintenant les
quantités de produits chimiques agricoles et industriels
utilisés. On craint que les conséquences néfastes de leur
présence ne se manifestent concrètement dans quelques
années seulement lorsqu'il sera déjà trop tard. Les
agriculteurs se disent les premiers concernés par cette menace. Les
résidents des villages et petites municipalités sont
également inquiets de la qualité de leur eau et surtout des
conséquences encore insoupçonnées que sa consommation
entraîne. Selon un spécialiste du ministère des Ressources
naturelles de l'Iowa, il existe environ 60 points d'approvisionnement en eau
potable dans cet État qui possèdent des quantités de
nitrate supérieures à la moyenne acceptable. (10 h 30) "La
présence excessive de nitrate dans l'eau est particulièrement
dangereuse pour les bébés qui risquent de subir des dommages au
cerveau lorsque les quantités dans l'eau dépassent 45 parties par
million. Par ailleurs, il apparaît de plus en plus évident que
même à faible concentration, les nitrates peuvent causer des
problèmes de santé à long terme. Le ministère des
Ressources naturelles de l'Iowa tient actuellement une série d'audiences
publiques sur la contamination des eaux souterraines et mettra sur pied
très bientôt un programme de protection de ces eaux. Selon un
porte-parole, il semble qu'on ne privilégiera pas de mesures punitives.
On a l'intention d'investir nettement dans la recherche et l'éducation."
Fin de la citation de La Terre de chez nous.
Si nous déplorons que les zones agricoles et sylvicoles soient
soustraites initialement des contrôles que suqgère la loi, l'UMRCQ
s'interroge et s'inquiète fortement des mécanismes de
contrôle de vente et d'utilisation des produits identifiés par la
loi. Qui aura à faire respecter la série de mécanismes de
contrôle de vente et d'utilisation sur l'ensemble du territoire
québécois? De tels mécanismes de contrôle doivent
s'associer à un système de surveillance et de vérification
qui permettra d'assurer le respect de cette loi sur tout ce territoire.
À cet éqard, l'UMRCQ, en tant qu'organisme représentant
plus de 1250 municipalités du Québec, met en qarde le
gouvernement contre la possiblité d'un éventuel transfert de
pouvoir en matière de contrôle des pesticides du palier provincial
au palier municipal. Nos municipalités ne possèdent pas
actuellement les ressources techniques et financières nécessaires
pour assumer une telle compétence. L'UMRCQ tient à vous rappeler
éqalement le premier principe qui a guidé ta réforme de la
fiscalité municipale: Aucun transfert de pouvoir au palier municipal
sans ressources financières autonomes.
Parallèlement, le Code municipal confie actuellement certains
pouvoirs aux municipalités en matière de réglementation
sur les produits toxiques et corrosifs, particulièrement à
l'article 555.1. Les municipalités possèdent donc
déjà un pouvoir en matière de contrôle des
pesticides sur l'ensemble de leur territoire, incluant la zone agricole. Quelle
sera la marge de manoeuvre des municipalités lorsqu'elles voudront
adopter un tel rèqlement par rapport à l'avant-projet de loi sur
les pesticides? Laquelle des deux législations aura priorité?
En conclusion, l'Union des municipalités régionales de
comté et des municipalités locales du Québec souscrit
d'emblée à l'adoption d'une loi permettant de contrôler
l'usage et la manipulation des pesticides au Québec. L'urgence de la
situation l'exige. Cependant, dans sa rédaction actuelle, l'avant-projet
de loi ne régit qu'environ 15 % des utilisateurs de pesticides. Dans ce
contexte, quelle amélioration son application apportera-t-elle à
notre environnement si près de 85 % des utilisateurs de pesticides ne
sont pas régis par cette loi? Nous vous présentons maintenant un
exemple qui démontre les effets néfastes de l'utilisation
incontrôlée des pesticides sur la santé des utilisateurs
eux-mêmes ainsi que sur l'économie municipale, et ceci au
Québec et non pas en Iowa, comme on y faisait référence
dans un article tout à l'heure.
Je cède donc, avec votre permission, M. le Président, la
parole à M. Marcel Grenier, secrétaire-trésorier de la
municipalité de Sainte-Catherine de Portneuf.
M. Grenier (Marcel): Merci, M. Nicolet.
M. le Président, M. le ministre, madame et messieurs... Comme M.
Nicolet l'a fait remarquer, dans l'article qu'il lisait tout à l'heure,
le cas qui nous préoccupe présentement ne se situe pas en Iowa
mais à 30 kilomètres de Québec et c'est un cas tout
à fait similaire à ceux qui ont été relatés
dans l'article dont M. Nicolet vous a fait lecture. Il y a, dans la nappe d'eau
souterraine de Sainte-Catherine, présence de nitrate et de nitrite, et
également présence inquiétante d'insecticides. Au mois de
septembre 1979, le ministère de l'Environnement du Québec a
découvert à Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier la
présence de pesticides dans l'eau de consommation distribuée par
la corporation municipale. À la demande du ministère, les sources
d'alimentation en eau de la municipalité ont dû être
abandonnées avec tous les équipements et bâtiments servant
au pompage de l'eau. C'est la présence de produits toxiques tels le
carbofuran, le métribusine, le disquat, tous des pesticides
utilisés par les producteurs agricoles, qui a forcé les
autorités municipales à relocaliser leur source d'alimentation en
eau potable, à construire de nouveaux bâtiments et à y
installer de nouveaux équipements de pompage, tout en abandonnant les
anciennes sources d'eau potable dont le potentiel était
considérable.
Pour redonner à sa population une eau de qualité, la
corporation a dû investir au-delà de 200 000 $ pour relocaliser
ses sources d'alimentation avec l'aide du gouvernement du Québec. Ce
montant aurait pu être une dizaine de fois plus élevé si
les recherches en eau n'avaient pas donné de résultats positifs
sur un site sis à quelques centaines de mètres seulement du
réseau existant. Pour ceux qui ne connaissent pas la
municipalité, disons que nous avons une très petite population,
seulement 1500 résidents qui sont desservis par le réseau
d'aqueduc. Donc, lorsque l'on parle d'investissements de 200 000 $, c'est un
montant important.
Malgré ces investissements, le problème causé par
l'épandage de pesticides est loin d'être résolu. En effet,
les résidents demeurant en bordure du rang 6, où l'on pratique
surtout la culture de pommes de terre, sont alimentés par des puits
individuels. Parmi ceux-ci, il y a les producteurs agricoles eux-mêmes
ainsi que d'autres résidents exerçant différentes
professions. Selon les analyses du ministère de l'Environnement
effectuées dans ce quartier, les concentrations de pesticides
retrouvées dans certains puits étaient même beaucoup plus
élevées que celles détectées dans les sources
d'alimentation de la municipalité en 1979. On a retrouvé par
exemple une concentration de carbofuran de 71,8 microgrammes par litre, alors
que la norme maximale acceptable serait 7 fois moins élevée.
En conséquence, la corporation municipale se voit aujourd'hui
dans l'obligation de prolonger son réseau d'aqueduc sur une longueur de
3000 mètres pour desservir le petit nombre de personnes
installées en bordure de cette route. Cette opération
représente la somme non négligeable de 500 000 $.
Évidemment, les propriétaires touchés sont peu
enclins à défrayer de lourdes taxes spéciales pour
solutionner un problème peu ou pas apparent, mais qui pourrait
handicaper sérieusement leur santé. Mais qui donc paiera pour
cette situation? Le gouvernement du Québec et la corporation municipale
de Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier, à même les fonds
publics, ou bien les résidents, à même leur santé?
C'est la question que se pose le conseil municipal actuellement.
Finalement, nous aimerions souligner que l'analyse des pesticides dans
l'eau de consommation est peu pratiquée parce qu'assez coûteuse.
Les citoyens qui se contentent d'une analyse bactériologique ou d'une
analyse physicochimique devraient être informés que ces
études ne permettent pas de détecter la présence des
pesticides dans l'eau de consommation. Bref, on se doit d'être
sensibilisé à la nécessité de contrôler
adéquatement l'usage des pesticides qui peuvent avoir des effets
très négatifs et sûrement insoupçonnés sur la
santé des individus. Je vous remercie de votre attention.
Le Président (M. Rochefort): Cela complète votre
présentation, M. Nicolet?
M. Nicolet: Oui, je vous remercie, M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Merci à tous les deux.
M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, tout d'abord je
répondrai à certaines observations très importantes qu'a
faites M. Nicolet, ensuite je parlerai du problème qu'a soulevé
M. Grenier, problème spécifique. Pour ce qui est de toute la
question centrale de votre mémoire, soit l'inclusion des agriculteurs et
sylviculteurs, je ne peux pas être plus d'accord que cela avec vous. Il
est certain qu'il faut que les agriculteurs soient inclus ainsi que les
sylviculteurs. J'ai expliqué à plusieurs intervenants qui ont
soulevé le problème ici que, si vous regardez l'article 5 du
projet de loi, c'est sûr que le premier alinéa de cet article
soustrait ces deux secteurs de la loi, mais par le deuxième
alinéa le gouvernement se donne le pouvoir de les inclure à
n'importe quel moment pour une ou toutes les dispositions du projet de loi. Le
mécanisme adopté ainsi, qui semble au premier abord un petit peu
paradoxal, a
été suggéré par les juristes pour permettre
au départ, parce qu'on n'avait pas les moyens, les ressources d'inclure
ces deux secteurs immenses, qu'on puisse les inclure à une date plus
tardive, et le pouvoir réglementaire est donné sous l'article 95
de les inclure. Je puis vous assurer de la chose, parce que les deux secteurs
ont été représentés ici et l'on veut confirmer
à plusieurs reprises que ces deux secteurs sont prévus dans la
loi, vont être inclus dans tout le système. En fait, il a
déjà eu des pourparlers très poussés qui ont
été entamés avec l'UPA, avec le ministère de
l'Agriculture. Il y a même des échéanciers qui sont
situés par rapport aux agriculteurs. II est clair que, compte tenu du
nombre d'agriculteurs qui est impliqué - plusieurs milliers, 35 000
à 40 000 - il nous est impossible de les inclure au tout début.
En fait, une seule province dans tout le Canada parmi celles qui ont
déjà des lois sur les pesticides, soit l'Ontario, depuis 1949,
n'a pas inclus les agriculteurs, à part, dans une certaine mesure, la
Colombie britannique, pour les mêmes raisons que l'on rencontre ici.
Mais, nous, nous avons situé avec l'UPA des échéanciers
très précis. On parle du début de 1990 pour les
agriculteurs; entre-temps, des cours de formation sont planifiés. On a
discuté tout cela avec eux. Il y a eu plusieurs rencontres avec les
aqriculteurs.
Pour ce qui est du secteur de la forêt, une entente est
déjà intervenue avec mon collègue des forêts pour
qu'une politique sur les pesticides soit arrimée le plus tôt
possible. En fait, on parle de cette année peut-être pour avoir
quelque chose de définitif pour le milieu de la forêt.
Plusieurs intervenants ont soulevé la question que l'article 5
peut, tel que rédigé, apporter des malentendus juridiques, car,
autrement, toutes ces questions de la même nature que les vôtres
n'auraient pas été posées. Nous allons regarder cela de
très près pour voir si l'on peut réajuster l'article 5
pour préciser beaucoup plus clairement que ces deux secteurs sont inclus
dans la loi. En tout cas, je peux vous donner l'engagement formel du
gouvernement que c'est le cas et que ces deux secteurs ne seront aucunement
soustraits è la loi, mais il faut toutefois être réalistes,
puisque nous n'avons pas les mécanismes pour les inclure tout de suite,
surtout du côté des agriculteurs.
Quant à la question de la réglementation que vous avez
soulevée, il est important que nous réglions cette question entre
nous et j'espère que nous aurons un petit dialogue ici aujourd'hui ou
par la suite, si le temps ne nous le permet pas ici. Vous avez soulevé,
avec beaucoup de raison, que par un récent amendement de la loi sur les
municipalités vous avez maintenant le pouvoir de réglementer. Nos
opinions semblent concorder avec les vôtres. Demain matin, les
municipalités pourraient, si elles le veulent, réqlementer dans
le domaine des pesticides selon les dispositions de l'article 555.1 du Code
municipal que vous avez cité et qui a été adopté,
je pense, l'année dernière.
Comme vous le remarquerez, cet article requiert l'approbation du
ministre de l'Environnement avant qu'une disposition sous cet article soit
acceptable. La raison pour laquelle cette notion a été incluse,
c'était justement pour prévenir les duplications ou des
équivoques dans la loi, c'est-à-dire que nous ne donnerions pas
une approbation à tout pouvoir susceptible de causer une duplication de
dispositions juridiques ou toutes sortes de malentendus dans les lois et dans
l'interprétation des lois. Toutefois, il est clair que nous accepterions
n'importe quelle réglementation selon laquelle une municipalité,
de son propre chef, veut se donner des pouvoirs complémentaires ou
additionnels à la loi provinciale.
J'espère que les municipalités aborderont la question dans
ce sens, de façon tout à fait volontaire. Je sais que cela
implique toute la question de fonds et de budget. Il y a eu, à un moment
donné, une discussion à savoir si on inclurait des pouvoirs pour
les municipalités dans notre loi. Nous voulions le faire. L'Union des
municipalités du Québec a suggéré qu'on
diffère la question jusqu'après la commission parlementaire, pour
les mêmes raisons que celles que vous avez soulevées. Je pense
qu'on devrait discuter cette question pour voir si on pourrait établir
des mécanismes d'inspection conjointe dans les plus grandes
municipalités.
Je pourrais vous dire que nous prévoyons un budget spécial
au ministère de l'Environnement, lequel a été
accepté par le Conseil du trésor et qui sera d'environ 5 000 000
$ pour cinq ans. On aura une petite équipe d'inspecteurs pour commencer;
ensuite, on l'agrandira au fil des années selon les possibilités
budgétaires que nous aurons. Nous espérons fortement que les
municipalités s'impliqueront et iront plus loin, si elles le
désirent. Il y en a déjà qui ont fait des
règlements, parce qu'elles voulaient contrôler l'utilisation
locale de plus près. Comme le temps nous manquera et que je sais que mon
collègue aura beaucoup de questions pour vous, on pourrait
peut-être discuter de ces trois points très importants. (10 h
45)
Avant de terminer, j'aurais voulu parler du cas tragique qu'a
souligné M. Grenier. On ne peut qu'être sympathique à ce
cas. Il est sûr que c'est inacceptable que cela se soit passé, que
$ 500 000 aient à être défrayés par des citoyens qui
sont des victimes de ce qui s'est passé. Je ne peux pas vous donner de
réponse, vous dire qui va payer cela. Je n'ai pas pris d'engagement
aujourd'hui,
comme vous pouvez le réaliser. En tout cas, comme vous le savez,
le ministère est au courant du dossier et on examinera toute cette
question. Votre mémoire sera certainement étudié avec
beaucoup de sain. Tout ce que je peux vous dire aujourd'hui, c'est que nous
réalisons que ce sont des choses qui auraient dû être
évitées. C'est très malheureux. J'espère que, dans
l'avenir, avec les loi et les réglementations municipales, cela pourra
être évité. En tout cas, de toute façon, nous
regarderons le cas spécifique que vous citez pour voir ce qui ressortira
de tout cela.
M. Nicolet, si vous avez des remarques ou des questions par rapport aux
points que j'ai apportés, j'aurais bien voulu connaître un peu
votre point de vue, surtout en ce qui concerne la réglementation
municipale.
M. Nicolet: M. le ministre, je vous remercie d'abord de la
clarification que vous avez apportée concernant le milieu agricole et le
milieu sylvicole. Il est évident que, pour nous, il ne s'agit pas d'une
confrontation avec le milieu agricole, bien au contraire. Étant
donné l'imbrication croissante entre le domaine bâti et le domaine
agricole, toute cette problématique devient un soucis partagé et
nous voulons, bien sûr, encourager des solutions communes et acceptables
autant pour le monde agricole que pour l'ensemble des contribuables. Nous
soulevons essentiellement la question, parce que, pour nous, il est essentiel
de ne pas balkaniser le Québec, mais au contraire de permettre que les
solutions dont un milieu se dote puissent effectivement être
appliquées à l'ensemble des citoyens par les responsables de la
réglementation.
Pour ce qui est de l'autre problématique que vous soulevez
à savoir la préséance du projet de loi par rapport aux
pouvoirs déjà conférés par le biais du Code
municipal ou de la Loi sur les cités et villes, nous abordons toujours
avec une certaine appréhension, comme vous le savez, ces dossiers
où on se retrouve avec une compétence partagée. Nous le
vivons dans le quotidien avec le ministère de l'Environnement sur une
multitude de dossiers concernant la pollution. Je crois que nous avons,
ensemble, à faire nos classes et à améliorer les
mécanismes par lesquels nous collaborons. Je pense que, trop souvent,
une des deux parties évacue le champ et le laisse a l'autre.
Malheureusement, ce sont toujours des considérations de gros sous qui
semblent primer plutôt que le fond même de la question ou de la
problématique qui devrait être réglée ou
tranchée. Là-dessus j'ose suggérer que peut-être
c'est un pas de plus qui devrait précipiter une
réévaluation de ce partage qui devrait être beaucoup plus
étroit avec le ministère de l'Environnement et le monde
municipal. Alors, trop souvent nous poursuivons des objectifs similaires, mais
nous travaillons finalement à couteaux tirés plus qu'en
collaboration étroite.
M. Lincoln: Merci beaucoup. Si M. le président me permet
une brève remarque, je dirai que la question de la réglementation
que vous avez soulevée, j'ai oublié de la soulever. Pour ce qui
est de la réglementation prévue dans le projet de loi, vous dites
avec raison: On ne peut pas juger un projet de loi basé vraiment sur une
réglementation qui va venir plus tard. On voudrait savoir ce que c'est.
J'ai déjà souligné en commission parlementaire qu'il y a
une réglementation qui est en train d'être travaillée
maintenant. Elle devait être prête au début ou au milieu de
l'été; elle sera sujette à la consultation la plus ouverte
avec tous les intervenants principaux et les intervenants qui seraient
intéressés è toute la question avant qu'on la pousse plus
loin d'après les procédures pour arriver à une
réglementation finale. Merci beaucoup, M. Nicolet.
Le Président (M. Rochefort):Merci. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Tout d'abord je
tiens à remercier les gens de l'UMRCQ de s'être
déplacés pour venir nous lire leur rapport et répondre aux
questions. C'est signe que les municipalités s'intéressent aux
pesticides et je l'apprécie beaucoup. Cependant, comme l'Opposition,
vous avez reçu te projet de loi tel qu'il est et vous venez demander au
gouvernement de l'améliorer s'il y a possibilité. Je trouve que
votre mémoire sur ce projet de loi est très court, très
clair, très concis et très facile à comprendre et je vois
que, comme moi, vous avez saisi que ce projet de loi s'occupe d'un volet: le
volet sécuritaire de la manipulation de façon
générale. Il s'occupe très peu du côté
quantité utilisée et à peu près rien dans ce projet
de loi ne concerne le fait que le législateur voudrait faire diminuer la
quantité de pesticide utilisée. Je déplore que ce volet ne
soit pas inclus dans ce projet de loi et le moins que l'on puisse dire,
à la lecture de votre mémoire, c'est que vous ne regardez pas ce
projet de loi avec tout l'emballement que l'on aimerait que vous ayez, et je
partage un peu cela.
Vous dites premièrement que les restrictions sur les sortes de
produits visés qu'apporteront les règlements en diminuent
l'impact dans la société; deuxièmement, les restrictions
du projet de loi sur les agriculteurs et les sylviculteurs et ceux qui
utilisent les produits sur leur terrain privé. Tout cela ensemble
élimine 90 % des utilisateurs des pesticides. Donc, ce projet de loi
s'adressant a environ 10 % des utilisateurs est presque - en fait,
j'exagère
pour ne pas discuter trop longtemps - un code de bienséance et le
projet de loi n'a pas un impact vraiment réel. Cependant,
j'apprécie beaucoup parce que je suis persuadé que le
législateur veut vraiment s'occuper de la chose. Vous ne le dites pas
textuellement, mais je sens que malgré la faiblesse de l'approche vous
êtes heureux qu'enfin le législateur arrive avec une approche.
Tout cela pour arriver avec la question suivante. Ne croyez-vous pas que
le législateur devrait être sévèrement avisé
dans ce projet de loi de rajouter des clauses concernant la quantité
utilisée de sorte qu'elles décroissent avec la
réglementation et les années?
M. Nicolet: II est évident que vous soulevez un
problème important, à savoir la quantité des produits
utilisés par le milieu. Il me semble difficile de
légiférer sur cette question de quantité étant
donné la complexité des produits qui sont utilisés et
l'évolution, finalement, du marché quant à la
qualité ou l'efficacité de certains produits qui sont mis en
marché de façon périodique.
Je crois que cet aspect quantitatif, évidemment, doit se relier
au volet éducatif qui devrait être souligné et qui,
peut-être, mériterait d'être traité plus en
profondeur. Ce n'est qu'en sensibilisant les utilisateurs et en s'assurant
qu'ils ont bien saisi la portée des gestes qu'ils posent en se servant
de tels produits qu'on réussira à obtenir une autodiscipline du
milieu. Je pense que ce n'est que de cette manière, étant
donné la complexité et l'ampleur de la problématique,
qu'on pourra, graduellement, atteindre l'objectif que vous soulignez et auquel
je souscris.
M. Blais: Je suis content de votre réponse parce que je
vois que, comme l'Opposition, vous saisissez très bien que le
côté formation et le côté éducatif sont d'une
importance capitale sur la quantité utilisée.
Il y a aussi un autre volet de la quantité utilisée pour
en favoriser sa diminution, c'est la recherche sur les produits biologiques ou
biodégradables. Beaucoup de personnes qui sont venues ici en commission
parlementaire, dans leurs mémoires ou dans leurs exposés ou aux
questions qu'on leur posait, se montraient favorables au fait suivant. Vu que
la publicité et que la recherche sont importantes pour orienter les gens
vers une diminution de l'utilisation, elles disaient qu'il est excessivement
impartant de regarder si le gouvernement, le législateur, ne pourrait
pas, pour aller chercher des fonds pour l'éducation, la
publicité, la formation et la recherche, avoir une taxe sur les
pesticides eux-mêmes, fonds qui serviraient aux quatre volets dont vous
venez de parler.
Sériez-vous d'accord, au nom des municipalités pour une
telle taxe? C'est assez difficile d'y répondre, peut-être, mais
mon devoir est de vous le demander, je l'ai demandé à tous les
intervenants.
M. Nicolet: II est évident qu'il faudrait quantifier
l'impact et les incidences économiques d'une telle taxe. Il n'en demeure
pas moins qu'en tant que collectivité, nous devons trouver les
ressources financières appropriées pour gérer et
réglementer les pesticides. Je faisais allusion, tout à l'heure,
en réponse à M. Lincoln, à l'importance d'une
collaboration plus étroite entre son ministère et le monde
municipal sur toute la question du contrôle et de la gestion de ces
produits. L'argent va devoir venir d'une source quelconque, c'est
évident. C'est une charge additionnelle que la société
assume. C'est au législateur et au gouvernement en particulier
qu'appartient finalement de décider si les montants requis doivent venir
des fonds généraux de la province ou devraient plutôt
être le produit d'une taxe spéciale sur la vente de
pesticides.
M. Blais: Merci beaucoup. Sans vouloir faire voler les couteaux
bas, ce n'est pas du tout mon genre, mais vu que vous avez amené les
couteaux sur la table en disant que parfois vous étiez à couteaux
tirés avec l'Environnement... Je ne voudrais pas me servir de votre
mauvaise expérience sur les analyses des eaux de baignade comme
responsabilité. C'est pour cela que j'ai pris la peine de dire que je ne
voulais pas faire voler les couteaux bas, mais cela me fait plaisir de le
noter.
J'aimerais vous demander si vous prêteriez une main secourable au
ministre pour être responsable de la formation que cette loi va
impliquer. On a demandé à l'UPA, du côté rural, qui
s'y refuse. Du côté urbain, vous ne seriez peut-être pas
prêt à prendre la relève, même du côté
rural, dans certains cas? mais être responsable d'une formation,
peut-être avec une compensation financière cette fois, je ne sais
pas?
M. Nicolet: À première vue, je dois vous dire que
nous sommes prêts à faire notre part du mandat collectif pour
trancher ces questions. Je crois que les exemples particuliers par lesquels
nous avons voulu illustrer notre présentation aujourd'hui confirment
notre préoccupation. Si le volet formation et sensibilisation du milieu
implique une participation municipale, je puis vous assurer qu'elle sera
disponible et qu'elle sera apportée. Il reste que, et c'est à
cela que je faisais allusion tout à l'heure, je pense que c'est
important qu'on ne néglige pas le partage des coûts. C'est
peut-être, dans tout ce domaine de la protection de
l'environnement, la question névralgique actuellement parce que,
de plus en plus, on s'aperçoit que les sommes engagées sont
considérables. Il va falloir qu'on s'attaque collectivement, le
gouvernement et le monde municipal, à une solution plus
générale du financement même de toutes ces fonctions
réglementaires.
M, Blais: Merci beaucoup. Je vais vous poser une toute dernière
question avant de passer la parole à mon confrère qui s'occupe de
ce dossier devant les municipalités. L'article 8 de l'avant-projet de
loi soumet les municipalités à l'obligation d'obtenir un permis.
Nous allons recevoir l'UMQ, qui est, dans son mémoire, contre le fait
que des municipalités soient obligées d'avoir un permis. Vous ne
vous prononcez pas sur l'obtention de ce permis. Est-ce que vous seriez du
même avis que l'UMQ, soit que vous aimeriez autant que les
municipalités n'aient pas à le demander? Est-ce que c'est le sens
de votre intervention première disant que vous aimeriez avoir un peu
plus de responsabilités comme municipalités? (11 heures)
M. Nicolet: À première vue, je pense que s'il y a
des règles objectives qui sont établies, elles devraient
s'appliquer à l'ensemble de tous les citoyens, qu'ils soient du domaine
public ou privé. Le gouvernement municipal, tout comme le gouvernement
du Québec, devrait respecter les mêmes règles. À
première vue, je ne pense pas que cette exigence particulière
constitue un problème particulier pour nous.
M. Blais: Je vous remercie beaucoup, M. Ni`Colet. Je m'occupe de
l'environnement. Nous avons de notre côté aussi le responsable de
notre formation avec les municipalités. Il aimerait vous poser quelques
questions. M. Dufour.
Le Président (M. ROchefOrt): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: M. Nicolet, dans votre mémoire, à la
page 6, vous soulevez un certain nombre de questions concernant d'abord les
principes qui ont guidé la réforme de la fiscalité
municipale et vous posez un certain nombre de questions pour savoir qui aura
è faire respecter la série de mécanismes de contrôle
de vente, etc.
Le ministre a peut-être eu l'occasion de se prononcer ou non,
mais, en tout cas, je voudrais vous poser la question è vous. Est-ce
qu'actuellement vous vous sentez rassuré par rapport à ces
questions que vous avez posées ou que vous posez
régulièrement depuis un bon bout de temps?
M. Nicolet: Je pense que, dans le respect et pour donner une
chance à M.
Lincoln de nous confirmer les bonnes intentions dont il nous a fait
part, je ne voudrais pas préjuger de la tournure que prendra
éventuellement le dossier. II n'en demeure pas moins que
l'expérience municipale avec les dossiers de l'environnement depuis
plusieurs années est plutôt peu encourageante. C'est pourquoi je
répète et j'insiste sur l'importance d'un dialogue en profondeur
sur toute cette question du partage des coûts entre le gouvernement, en
l'occurrence, le ministre de l'Environnement, et le monde municipal parce que
je crois que c'est au coeur de difficultés que nous avons encourues
depuis de nombreuses années. Dans ce sens, nous sommes évidemment
toujours appréhensifs.
M. Dufour: J'aurais une question è poser au
secrétaire-trésorier de la municipalité de
Sainte-Catherine de Portneuf. Quand vous vous êtes aperçus du
problème causé par les pesticides ou autres dans les
réservoirs d'eau potable, de quelle façon vous êtes-vous
rendu compte de cela? Est-ce que c'est À la demande du ministère,
à la demande des citoyens, d'un problème particulier?
M. Grenier: Voici. Au départ, les analyses de l'eau qui se
faisaient en milieu municipal étaient des analyses strictement
bactériologiques. Donc, on détectait strictement s'il y avait
présence de conformes dans l'eau ou non. Cela ne fait quand même
pas longtemps que le ministère a demandé qu'il y ait des analyses
physico-chimiques, c'est-à-dire qu'on analyse les quantités de
fer, les nitrates et les nitrites. De cette façon, le ministère a
découvert la présence de nitrates et de nitrites. Les nitrates et
les nitrites, c'est un indice qu'il y a eu un épandage important
d'engrais chimique. Cela peut occasionner des problèmes comme ce qu'on a
appelé la maladie des bébés bleus. Cela a
inquiété les qens du ministère lorsqu'ils ont
instauré ce processus d'analyse physico-chimique. On sait que depuis ce
temps il y a eu beaucoup d'évolution. Maintenant, les
municipalités sont obligées de faire ces analyses. Cela les a
portées À pousser un peu plus À fond et à faire une
analyse des pesticides. C'est comme cela qu'elles les ont découverts, ce
qui fait que la présence de pesticides dans la nappe d'eau peut dater de
très longtemps. Il faut dire que si on recule de peut-être dix
ans, en termes de contrôle de la qualité de l'eau, on ne faisait
à peu près rien, autant au municipal qu'au ministère de
l'Environnement. On ne faisait à peu près rien.
C'est ce que je disais à un moment donné, il faut faire
attention. Lorsqu'on analyse de l'eau et qu'on regarde juste sa qualité
bactériologique, cela ne nous dit pas qu'il peut y avoir de l'arsenic
dans l'eau et
cela ne nous dit pas qu'il peut y avoir toutes sortes de poisons dans
l'eau. Cela nous dit qu'il y a des conformes ou non. Souvent, les gens se
sécurisent d'une analyse de ce type. Les gens vont à la
pharmacie, ils vont mener leur échantillon d'eau. Ils se font dire que
leur eau est bonne. Alors, pour les gens, votre eau est bonne veut dire qu'elle
est bonne à tout point de vue. Les gens du ministère peuvent vous
le confirmer, il y a très peu d'analyses de pesticides dans l'eau
potable qui s'effectuent. D'abord, ce sont des analyses coûteuses qui
s'effectuent seulement lorsqu'on a de forts indices qu'il peut y avoir une
certaine présence. Ce n'est pas de façon systématique. On
peut appeler cela un accident, mais c'est à partir de la présence
de nitrates et de nitrites que les gens du ministère ont dit:
Peut-être que s'il y a une forte présence de nitrates et de
nitrites il y a autre chose. Cela s'est fait comme cela. Ce n'est pas une
analyse systématique partout dans les municipalités. C'est pour
cela que j'ai un peu insisté à la fin pour dire: Les analyses de
pesticides, cela doit s'effectuer. Dans le moment, ce n'est systématique
nulle part. Les pesticides pouvaient être là depuis très
longtemps et quel est l'effet è long terme de ces produits? À peu
près personne ne le sait. On travaille avec des normes
américaines que le gouvernement du Canada emprunte et que le
gouvernement du Québec emprunte au gouvernement du Canada. Alors,
à un moment donné, l'effet de ces pesticides, on ne le
connaît pas. On va le découvrir dans dix ou vingt ans. On va avoir
encore des cancers et on ne saura pas d'où cela vient. C'est
arrivé comme cela. C'est à partir d'analyses du
ministère.
M. Dufour: Vous n'avez pas de cas de santé publique qui
ait été affectée directement. C'est juste par les analyses
bactériologiques ou chimiques, physicochimiques, que vous vous
êtes rendu compte de cela.
M. Grenier: C'est ça.
M. Dufour: Est-ce qu'à partir de cette connaissance des
faits les citoyens de la municipalité se sont réglementés?
Quelle a été la position des citoyens par rapport au conseil
municipal?
M. Grenier: En fait, tous les citoyens qui étaient
desservis par le réseau, je pense, ont très bien accepté
qu'on se relocalise. Ils ont accepté de payer des contributions
importantes pour qu'on se relocalise. C'est arrivé comme un sinistre. On
avait des quantités d'eau formidables là-bas. On avait des
équipements qui fonctionnaient très bien. Il a fallu tout
relocaliser cela. On a dit aux citoyens: Écoutez, faites-nous confiance,
c'est dangereux pour votre santé. Vous ne vous en apercevez pas, vous ne
le voyez pas, vous ne le goûtez pas, mais c'est dangereux pour votre
santé. Ils nous ont fait confiance. On les a relocalisés. Ils
paient maintenant... Je peux vous dire que chaque individu paie peut-être
200 $ de plus par année juste pour ce problème. Là, il
nous reste un problème majeur. C'est que les agriculteurs
eux-mêmes continuent à consommer cette eau parce qu'eux
n'étaient pas desservis par le réseau. Je ne sais pas
jusqu'à quel point ils l'acceptent bien parce que, lorsqu'on parle de
payer 200 $ de plus par année pour consommer de l'eau, ce n'est quand
même pas si mal, mais, lorsqu'on parle des agriculteurs qui ont
peut-être 2000 pieds de façade en bordure du réseau et
qu'on leur dit que, pour changer leur façon de boire de l'eau, pour
consommer de l'eau maintenant qui n'est pas contaminée, cela va leur
coûter 6000 $ par année de plus pendant vinqt ans, ils ne le
prennent pas, eux autres. D'autant plus que, comme je vous le dis, l'effet des
pesticides à court terme, on ne le connaît pas. Les gens ne
détectent pas dans leur santé d'effets à court terme. Les
gens du secteur vont être très réticents à se
raccorder à un réseau et à payer ce réseau,
à moins d'assistance financière importante du gouvernement. C'est
ce qu'il va falloir demander. Il faut aussi sensibiliser les gens. Il y a des
gens qui, lorsqu'ils voyaient des fonctionnaires du ministère venir leur
dire que leur eau n'était pas bonne, étaient portés
à les mettre à la porte en leur disant: écoutez, mon eau,
cela fait dix ans que je la bois et elle est bonne. Les effets des pesticides
sur la santé, on va les découvrir, comme je vous le disais, dans
plusieurs années et il va être malheureusement trop tard.
M. Dufour: On va vous souhaiter bonne chance dans vos tractations
avec les différents ministères. Espérons que vous aurez
une réponse favorable à vos demandes puisque ce n'est pas
causé par vous. C'est vraiment un effet du hasard, c'est accidentel si
vous vous êtes rendu compte de ce problème. Je veux dire aussi que
le mémoire est suffisamment explicite. Il complète certaines
prises de position. C'est la journée du municipal aujourd'hui. Il y aura
certainement d'autres questions qu'on pourra poser à d'autres
intervenants, mais on comprend déjà votre préoccupation,
qui est une préoccupation collective.
En gros, ce que je retiens de votre mémoire: oui au
contrôle, mais pas de n'importe quelle façon. D'abord,
réalisation ou complétion d'actions entre les
municipalités et les différents ministères. Pas seulement
l'Environnement. L'Agriculture est concerné et un peu tout le monde.
 mes yeux, les municipalités sont vraiment un bon
véhicule, mais, ce qu'il faut retenir: pas de transfert de
pouvoirs sans ressources financières autonomes. Je pense qu'il faut
retenir cela. Merci.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Après les questions très opportunes
posées par le député de Jonquière, j'aurais une
question à vous poser. Seriez-vous d'accord, pour la meilleure
protection des citoyens et citoyennes du Québec, que le ministre de
l'Environnement, par règlement ou d'une autre façon, oblige
toutes les municipalités du Québec à faire des analyses
plus complètes de l'eau potable que les citoyens boivent dans tout le
territoire québécois?
M. Nicolet: Vous me permettrez de vérifier le coût
de ces analyses avant de vous dire si nous sommes prêts à en
assumer la charge financière. Je pense que, fort de l'expérience
dont on a parlé, il est important que dans certains milieux
particulièrement sensibles on étudie de façon plus
approfondie la qualité de l'eau fournie par nos réseaux
municipaux.
M. Blais: Une sous-question, si vous me permettez. Est-ce que le
principe de l'analyse obligatoire, quelles que soient les personnes qui paient
- cela ferait l'objet d'une autre étude - est-ce que le principe selon
lequel l'eau doit être mieux analysée au Québec serait
soutenu par votre organisme pour le bien-être et la santé de tous
les Québécois et Québécoises?
M. Nicolet: En tenant compte des particularités locales et
régionales, ma réponse serait oui.
M, Blais: Merci beaucoup.
Le Président (M. Rochefort): D'autres questions? M. le
ministre.
M. Lincoln: Je voudrais tout d'abord, M. Nicolet, vous remercier
très sincèrement d'Être venu ici avec votre équipe.
Je cannais les contraintes de temps que vous et les autres membres de votre
délégation avez et je pense qu'il était très
important d'entendre la voix des municipalités régionales de
comté qui, comme vous l'avez vous-même souligné, regroupent
1250 municipalités. Je pense que mon collègue, tout en se gardant
de ne pas porter de coup bas, est revenu sur l'affaire des plages. Je le dis
bien sincèrement, je ne suis pas infaillible, et, si l'on commet des
fautes, il faut l'admettre bien simplement. Quand on prend des
décisions, on ne possède pas toujours la sainte
vérité, je ne t'ai jamais prétendu. Il faut essayer de
faire amende honorable et faire mieux la prochaine fois.
On s'est parlé plusieurs fois de toute la question de
l'échange de pouvoirs, de la complémentarité de nos
responsabilités. On a eu je ne sais combien de rencontres. Je crois
qu'il faut accélérer le processus. Je suis tout à fait
d'accord avec vous qu'il faudra trouver une solution tant de votre
côté que du côté de l'Union des municipalités
du Québec. En fait, on a des pourparlers avec M. Pelletier en ce sens,
en ce moment, et je suis tout à fait d'accord avec vous que c'est une
solution qui devient pressante et je peux vous assurer que j'en suis pleinement
conscient, comme on en a discuté très récemment entre
nous.
Pour ce qui est de ce que M. Grenier a parlé a la suite des
questions du député de Jonquière, je croîs qu'il est
très important de préciser que toute la question des
micropolluants dans l'eau, incluant les pesticides, est soumise à un
examen prioritaire du ministère en ce moment. Comme vous le savez, une
division de l'eau potable a été formée. Il y a des
expériences qui sont faites dans 18 municipalités du
Québec depuis environ deux ans. Un premier rapport a été
déposé, je pense, à l'été 1986, qui
recommandait que les pesticides fassent l'objet d'une étude très
spécifique. Cette étude est en cours avec ces 18
municipalités pilotes.
Cette année, sans vous dévoiler les choses qui doivent
être discutées en commission parlementaire à l'occasion de
l'étude des crédits, il y aura des sommes additionnelles
très significatives pour poursuivre l'étude des micropolluants
dans l'eau. Nous sommes très conscients qu'on ne peut pas toucher toutes
les municipalités du Québec, que là aussi il y a une
question de fiscalité, de moyens financiers de le faire. Mais
l'équipe qui fait l'étude sur les mleropolluants se penchera
très sérieusement sur toute la question des pesticides pour
parfaire le rapport qui, comme vous le savez, a été
travaillé depuis environ deux ans auprès de 18
municipalités choisies, tout à fait représentatives du
Québec.
Nous sommes très conscients de ce que vous avancez. C'est
sûr que des solutions ne seront pas apportées tout de suite. Il
faut d'abord travailler à améliorer la qualité de l'eau
potable et, ensuite, comme M. Nicolet l'a souligné, faire la
sensibilisation des citoyens afin qu'il y ait un usage beaucoup plus rationnel
qui réduise la quantité, l'impact des pesticides de façon
draconnienne dans les années à venir. Je pense qu'il faut aller
aux sources. J'espère qu'on va travailler tous ensemble è cet
objectif qui nous touche tous. Merci beaucoup. {11 h 15)
Le Président (M. Rochefort): Vous avez un commentaire, M.
Nicolet?
M. Nicolet: C'est simplement pour vous remercier, M. le
Président, M. le ministre, madame, messieurs, de l'attention que vous
avez portée à notre mémoire.
Le Président (M. Rochefort): Nous vous remercions aussi de
votre participation à nos travaux. Sur ce, j'inviterais maintenant les
représentants de la Communauté urbaine de Montréal
à prendre place à la table devant nous.
Communauté urbaine de Montréal
Alors, bienvenue, M. Hamelin. Je vous demanderais, pour l'information
des membres de la commission, de nous présenter les personnes qui vous
accompagnent, s'il vous plaît!
M. Hamelin (Michel): Merci, M. le Président. Je suis
accompagné ce matin, à mon extrême droite, de M. Robert
Laurier, conseiller en environnement au bureau du président; de M.
Gérald Perreault, directeur du service de l'environnement de la
Communauté urbaine de Montréal; à ma gauche, de M. Sam
Elkas, maire de la ville de Kirkland, membre du comité exécutif
de la communauté et président de la commission de
l'environnement. Viendra se joindre à nous dans quelques minutes M.
André Gamache, adjoint au président du comité
exécutif de la communauté.
Le Président (M. Rochefort): Bienvenue parmi nous
aujourd'hui. Je vous rappelle les règles de notre commission. Vous avez
environ vingt minutes pour nous faire la présentation de votre
mémoire et, ensuite, un échange suivra avec l'ensemble des
membres de la commission. M. Hamelin.
M. Hamelin: Merci. M. le Président, M. le ministre, madame
et messieurs de la commission. D'abord, je tiens à vous remercier de
nous recevoir ici aujourd'hui pour vous faire part de nos commentaires sur
l'avant-projet de loi. Je dois spécifier que nos commentaires ou que
notre mémoire a été fait en vertu de l'avant-projet de
règlement. C'est pourquoi, à l'intérieur du
mémoire, vous retrouverez des allusions au règlement.
De façon générale, le document intitulé
"Pour une utilisation rationnelle des pesticides au Québec" fait une
excellente synthèse de la problématique des pesticides dans
l'environnement et des conséquences que peuvent engendrer ces
composés sur le métabolisme humain. Ce document nous renseigne
aussi sur les avantages de l'utilisation des pesticides dans l'agriculture ou
la foresterie. Les auteurs soulignent que l'apparition des inconvénients
est due aux mauvaises pratiques d'utilisation de ces produits chimiques,
à la négligence, à l'insouciance, au manque de
connaissance et à l'inconscience des risques d'utilisation de ces
produits.
La Communauté urbaine de Montréal comprenant un bassin de
population élevé demeure très préoccupée par
les problèmes environnementaux. À cet effet, elle a
créé un service de l'environnement et lui a confié divers
mandats avec comme objectif principal l'amélioration de la
qualité de vie de ses citoyens. Ces mandats consistent principalement
à réaliser la mise en place d'un système de traitement des
eaux usées du territoire de la communauté, à assurer
l'exploitation de ce système, à assurer l'application des lois,
règlements et ordonnances relatifs à l'assainissement de l'air et
de l'eau, et à la qualité des aliments préparés,
servis ou vendus sur son territoire. Ayant la préoccupation du
bien-être de sa population, la communauté se doit donc d'appuyer
toute action ayant pour but d'assurer une utilisation rationnelle des
pesticides. Nous comprenons la position des agriculteurs qui ont à coeur
la réussite de leurs récoltes. Toutefois, on doit veiller
à ce que les composés ou des metabolites provenant de pesticides
ne se retrouvent pas dans les légumes, les fruits et les viandes.
De plus, nous sommes conscients que les utilisateurs ne sont pas
localisés seulement en milieu rural et forestier, mais aussi dans les
agqlomérations urbaines. D'après le document du ministère,
il est estimé qu'en 19B2 la population du Québec a acheté
pour plus de 56 tonnes métriques de pesticides d'usage domestique, soit
pour l'arrosage des pelouses, la protection des potagers, etc. Ceci nous
amène à conclure que la problématique des pesticides n'est
pas seulement circonscrite à l'agriculture ou à la foresterie,
mais qu'elle affecte l'ensemble de la collectivité
québécoise. Cette prise de conscience est telle que,
déjà, certaines municipalités sur le territoire de la
Communauté urbaine de Montréal ont adopté des
règlements à ce sujet. À titre d'exemple, on trouvera en
annexe le règlement de la ville de DoIlard-des-Ormeaux concernant
l'épandage de pesticides ainsi que deux règlements adoptés
par la ville de Montréal ayant trait à la salubrité des
logis et à l'expertise professionnelle des applicateurs de
pesticides.
Le contrôle de la compétence des utilisateurs de pesticides
au Québec est l'intervention que le gouvernement doit favoriser dans les
plus brefs délais. Son approche dans l'élaboration de la
problématique répond très bien à cette attente. Le
document dans son ensemble nous fait connaître tous les problèmes
qui entourent l'utilisation inconsciente de tels produits ainsi que ses
répercussions environnementales et socio-économiques.
L'analyse de la situation est juste. Le projet de règlement
garantit un emploi sécuritaire de ces produits par l'instauration d'un
système de qualification des applicateurs et il permet aussi
l'acquisition de données sur la circulation des produits par la mise en
place de bilans d'activité. Toutefois, il risque de ne pas assurer une
diminution substantielle de l'usage de ces produits nocifs à cause du
manque de contrôle des utilisations. En effet, il aurait
été intéressant et même souhaitable de voir
apparaître dans les derniers chapitres touchant à la
réglementation une volonté de changement dans les pratiques en
agriculture et en foresterie par l'instauration de cultures
intégrées, telles que mentionnées dans le chapitre 5, et
plus près de nous par une diminution des produits vendus chez les
pépiniéristes. À titre d'exemple, une brève
enquête auprès de quelques pépiniéristes de
l'île de Montréal a démontré que le consommateur
peut avoir accès à plus d'une centaine de formulations
différentes de pesticides. Ceci nous apparaît énorme quand
on sait que peu de consommateurs lisent les modes d'emploi ou encore ne savent
pas faire la préparation adéquate des solutions
recommandées par le fabricant.
Le document mentionne au chapitre 2 que, devant le
phénomène de la résistance chez les insectes parasites,
les fabricants et les utilisateurs augmentent les doses ou encore cherchent
à remplacer un pesticide par un autre afin d'obtenir un traitement
efficace. Ces stratégies ont pour conséquence
d'hypothéquer la croissance des végétaux cultivés
ou de favoriser une bioaccumulation des toxiques dans la nourriture qui se
retrouvent éventuellement absorbés par l'homme comme, par
exemple, dans le lait maternel. Il devient donc essentiel d'assurer une
diminution de l'utilisation des pesticides afin de réduire les
coûts sociaux et environnementaux tels qu'illustrés au tableau
4-6.
Le projet de règlement provincial énonce la politique
générale et les principes directeurs de l'intervention
gouvernementale. Il prévoit la formation et la qualification des
différents intervenants et le maintien de bilans d'utilisation, ce qui
permettra d'assurer un certain contrôle de la compétence des
utilisateurs et des quantités de produits utilisés. Toutefois, le
projet ne devrait être considéré que comme une
première étape suivi d'une deuxième visant à
réduire d'une façon substantielle les quantités de
produits vendus au Québec, ainsi qu'à mettre en application, tel
qu'énoncé, des codes de pratique établis de concert avec
les utilisateurs, les fabricants et les divers paliers gouvernementaux.
Rappelons que la juridiction provinciale s'applique sur le contrôle de la
vente et de l'utilisation de ces produits chimiques. Il lui serait donc
aisé de restreindre l'accès de ces produits nocifs sur son
territoire en limitant les quantités ou les diverses catégories
de produits.
La communauté recommande donc que les modifications ou additions
suivantes soient considérées: Premièrement, selon le
projet de règlement, le sous-ministre peut émettre des permis de
vente ou d'utilisation, de même qu'il peut révoquer ces permis. Il
y aurait également lieu de bien préciser l'organisme responsable
de l'application du règlement et de prévoir des sanctions ainsi
que la possibilité pour des organismes régionaux ou des
municipalités d'assurer un contrôle dans la surveillance des
utilisations tel que le code de pratique.
Deuxièmement, il serait, à notre avis, important de
prévoir des mécanismes de contrôle des quantités
utilisées et de recyclage des résidus de pesticides, incluant
ceux de la classe 4. Ceci pourrait être réalisé en
obligeant les différents points de vente ou de distribution à
récupérer ces résidus. Ce dernier élément
pourrait donc inciter les commerçants à ne vendre aux
utilisateurs que les quantités de pesticides correspondant à
leurs besoins réels et ainsi éviter que des produits
excédentaires ne soient dispersés inconsidérément
dans l'environnement par les lieux d'enfouissement ou les réseaux
d'égout.
Troisièmement, il est prévu dans le règlement un
pouvoir d'ordonnance permettant au sous-ministre d'ordonner l'arrêt d'une
pulvérisation ou d'une application lorsqu'elle présente un danqer
pour l'homme ou l'environnement, ou qu'elle contrevient aux exigences de la loi
ou des règlements.
À notre avis, toutes les pulvérisations aériennes
dans les zones urbaines hahitées ou à proximité de
celles-ci devraient faire l'objet d'un permis du ministère de
l'Environnement et de la municipalité concernée. De plus, les
utilisateurs devraient être obligés d'afficher à
l'hôtel de ville un avis de pulvérisation et d'informer la
population par la presse écrite et électronique. L'avis devrait
comporter les heures, les secteurs de pulvérisation, les composés
chimiques utilisés, les dangers toxiques ainsi que les soins d'urgence
en cas d'intoxication.
Quatrièmement, il faudrait aussi prévoir que, dans le cas
d'une utilisation de produits de classe 4, un particulier devrait aviser son
voisinage immédiat de ce fait. Cette recommandation permettra au voisin
de prendre certaines dispositions de rangement des objets qui sont è
l'extérieur de chez lui, par exemple, mobilier de jardin, jouets, etc.,
et de protéger les enfants de tout contact direct avec le produit. En
fait, la réglementation de la ville de Dollard-des-Ormeaux est à
cet effet tout particulier: qui pulvérise ou fait pulvériser sa
pelouse doit afficher un
avis bien en vue sur sa pelouse pour indiquer aux voisins qu'un produit
a été placé sur sa pelouse.
Cinquièmement, il y aurait lieu de limiter le plus possible la
concentration des pesticides qui sont dans la classe domestique.
Sixièmement, il y aurait lieu de prévoir que l'application
de pesticides dans un endroit public soit toujours effectuée par une
personne détenant un certificat de compétence.
Madame, messieurs, M. le Président, ceci résume les
commentaires exprimés par la Communauté urbaine de
Montréal.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. Hamelin. M. le
ministre.
M, Lincoln: M. le Président, je voudrais tout d'abord remercier
M. Hamelin et sa délégation d'être venus. Cela
démontre que, pour la Communauté urbaine de Montréal,
cette question est primordiale. Comme on sait que la commission urbaine
représente approximativement 40 % de la population du Québec,
pour nous, c'est primordial que nous ayons le son de cloche de la
communauté.
Vous me permettrez aussi de faire remarquer avec beaucoup de plaisir que
le maire Elkas, qui est maire de Kirkland, ville située au coeur
même de mon comté, est aujourd'hui président de la
commission de l'environnement. Nous nous réjouissons dans notre
région que l'environnement tienne une grande place dans la
mentalité des citoyens.
M. Hamelin, nous avons, notre équipe qui s'occupe des pesticides,
lu votre mémoire avec beaucoup d'attention, considérant ce que
j'ai avancé auparavant, l'importance qu'a la communauté urbaine
pour nous dans toute cette problématique. Je voudrais d'abord commenter
certains points et peut-être vous poser une ou deux questions aussi. Vous
avez parlé d'une première étape. Je suis
entièrement d'accord qu'un projet de loi de cette nature ne pourra pas
régler tous les problèmes à la fois. Il fallait commencer
quelque part. Je pense que toutes les provinces du Canada et beaucoup
d'États américains, si ce n'est la grande majorité, ont
commencé de cette façon, en ayant un projet de loi cadre qui a eu
un effet d'entraînement. On a suivi les conseils du Conseil consultatif
de l'environnement en 1980 et, en fait, notre loi est axée sur la
responsabilisation et l'éducation.
Je suis d'accord que c'est une première étape. Je voulais
vous assurer que la loi, aujourd'hui, dans ses pouvoirs réglementaires,
nous donne tous les pouvoirs d'aller plus loin lorsque nous serons prêts
è le faire, lorsque nous aurons les moyens, les structures, etc., et
nous travaillerons certainement, dès le départ, à tracer
la deuxième étape pour pouvoir perfectionner le projet de loi et
le cheminement. Je peux vous assurer qu'on a déjà ces pouvoirs et
qu'on les considérera.
Vous avez parlé de la possibilité pour les organismes
régionaux et les municipalités d'assurer un contrôle, une
surveillance des pesticides. Cela me semble une interprétation du voeu
de la Communauté urbaine de Montréal que les organismes
municipaux et les communautés urbaines puissent avoir les pouvoirs de
réglementer s'ils le veulent. Vous avez dû entendre la discussion
que nous avons eue avec M. Nicolet à ce sujet. J'aurais aimé que
vous nous expliquiez votre point de vue là-dessus parce que c'est
très important pour nous de connaître le point de vue des
municipalités et des communautés urbaines. Voulez-vous avoir les
pouvoirs réglementaires de "complémenter" le projet de loi et
d'aller plus loin sur votre territoire? (11 h 30)
M. Hamelin: M. le ministre, en ce qui concerne les pouvoirs
réglementaires comme tels, on n'a pas pris position. Cela portait
surtout sur le pouvoir de faire respecter cette réglementation. La
communauté s'est inspirée un peu de l'inspection des aliments,
par exemple. On a un pouvoir délégué par le gouvernement
et, moyennant compensation financière, la communauté se charge de
l'inspection des aliments. Il y a un programme saisonnier de lutte contre
l'herbe à poux qui est de même nature. Ce programme de
réglementation sur les pesticides est aussi, en ce qui concerne la
Communauté urbaine de Montréal en tout cas, quelque chose de
saisonnier. Dans notre demande, on faisait référence à ces
deux points.
M. Lincoln: Comme vous l'avez souligné vous-même
dans votre mémoire, une ville assez importante de la communauté,
qui a environ 50 000 habitants, la ville de Dollard-des-Ormeaux...
M. Hamelin: 42 000.
M. Lincoln: ...42 000 habitants, a elle-même
réglementé là-dessus. Comment voyez-vous les
réglementations par les villes de la communauté? Est-ce que vous
êtes d'accord avec cette ligne de conduite ou si vous avez pris position
en laissant les municipalités décider si elles peuvent le faire
ou non?
M. Hamelin: Toute réglementation des municipalités
favorisant la protection de la santé des citoyens, sous quelque forme
que ce soit, la communauté urbaine ne s'y opposera jamais. Au contraire,
elle va même l'encouraqer. Personnellement, je trouve que ce qu'a fait la
municipalité de Dollard-des-Ormeaux devrait être un exemple
à suivre pour l'ensemble des municipalités. Cela ne brime en rien
les droits des propriétaires de prendre les mesures pour s'assurer
d'une
belle pelouse, mais cela informe cependant les voisins qu'il y a quelque
chose qui s'est produit. Encore une fois, ce n'est qu'une ébauche. Dans
ce domaine, ce règlement est fait pour aviser les gens que des
pesticides ont été employés. C'est un début. Est-ce
qu'il y aurait lieu d'aller un peu plus loin selon la nature des pesticides
utilisés? Il faudrait s'adresser à des experts. Pour cette forme
de réglementation, la communauté urbaine n'a aucune objection. Je
ne sais pas si M. le maire Etkas...
M. Elkas (Sam): M. le ministre, pour répondre à
votre question, j'aimerais ajouter qu'il y a plusieurs municipalités qui
attendaient des résultats de cette commission. S'il n'y avait pas eu de
commission parlementaire sur ce sujet, il y en a plusieurs qui auraient suivi
l'exempte de Dollard-des-Ormeaux. On appuie la position de Dollard-des-Ormeaux,
mais elle n'a peut-être pas été étoffée en
études. C'est pour cela que je crois que les résultats de cette
commission vont permettre aux 28 autres municipalités de l'île de
Montréal de prendre position.
M. Lincoln: Pour ce qui est de la question de la réduction
et des méthodes alternatives, vous avez souligné que, pour vous,
c'est un objectif qui aurait pu être explicité et plus
étoffé dans le document de travail du ministère. En fait,
le critique de l'Opposition a justement ramené cette question sur le
tapis plusieurs fois, à savoir que le projet de loi ne se
préoccupe peut-être pas assez de toute la question de la
réduction et des méthodes alternatives. Je voudrais vous dire que
l'on a étudié le texte qui parle des objectifs de la loi. Nous
comptons le retravailler pour le modifier afin de souligner
précisément que la réduction de l'usage des pesticides et
la recherche des méthodes et moyens alternatifs sont parmi les
principaux objectifs de la loi. À ce point de vue, je pense que nous
sommes d'accord que ces objectifs sont tellement significatifs et importants
qu'il faut les souligner particulièrement dans le projet de loi comme
objectifs à apporter. Dans toute la recherche qui va se faire au sein du
groupe d'études sur les pesticides, au sein de la problématique
d'échanges avec les municipalités et les grands secteurs et des
codes de pratique, l'objectif recherché est la sensibilisation, afin de
réduire par l'usage des pesticides la recherche et l'application de
méthodes alternatives.
Pour revenir à la question de l'application, vous avez dit: II y
aurait lieu également de bien préciser l'organisme responsable de
l'application du règlement et de prévoir des sanctions ainsi que
la possibilité de surveillance des organismes régionaux. Comme je
l'ai souligné à M.
Nicolet, on prépare actuellement une réglementation qui
ira en consultation durant l'été. Le responsable de la politique
sera le ministère de l'Environnement. Une équipe sera
formée en ce sens; on est en train de la mettre en place. Il y aura des
inspecteurs, peut-être seulement deux ou trois au début,
malheureusement, car nous n'avons pas les moyens de faire plus. Sur toute cette
question, je voudrais savoir si vous seriez disposés à
considérer une discussion quant à une surveillance conjointe
où tous les effectifs policiers de la sécurité de la
communauté pourraient être impliqués d'une façon ou
d'une autre.
M. Hamelin: M. le ministre, je puis vous dire que la
communauté est ouverte à toute forme de collaboration avec le
gouvernement du Québec, comme cela a toujours été. Je l'ai
mentionné tantôt dans deux domaines particuliers et nous sommes
prêts à nous asseoir avec le gouvernement pour, d'un commun
accord, en arriver à des ententes concernant l'application de ces
règlements.
M. Lincoln: Pour ce qui est de la question de la
pulvérisation aérienne, c'est sûr que, dans toute cette
question, il faut une autorisation du ministère. Personne ne peut le
faire sans autorisation, sauf dans un secteur protégé par la Loi
sur le zonage agricole où on n'a pas de droit de regard sur
l'agriculture. Un agriculteur peut le faire sans l'autorisation du
ministère. La loi est ainsi faite, mais, dans tous les autres secteurs,
il faut une autorisation du ministère pour le faire.
Quant à la question des avis lesquels vous suggérez soient
postés à un hôtel de ville ou à une
municipalité ou, dans certains cas d'arrosage domestique, qu'une
notification soit donnée d'un voisin à l'autre, ces suggestions
nous apparaissent très intéressantes et nous allons les examiner
très sérieusement pour voir si on peut les insérer, et de
quelle façon, dans la réglementation ou dans les codes de
pratique. En tout cas, on en prend bonne note et je pense que ces suggestions
sont fort intéressantes,
J'aurais voulu que vous puissiez nous expliquer un peu votre point de
vue à ce sujet. Souhaitez-vous que ce soit, dans le cas des voisins,
quelque chose de... Jusqu'où voulez-vous aller? Pouvez-vous nous en
parler un peu?
M. Hamelin: Le premier objectif serait un objectif d'avis,
à tout le moins. Par la suite, je pense qu'il faudrait pousser la
réflexion un peu plus loin pour voir ce que cet avis devrait comporter,
le nom du produit déversé et la composition de ce produit.
Là-dessus, je pense qu'il faudrait s'adresser à des experts en ce
domaine.
Notre but est que les autorités de la communauté puissent
assurer une certaine protection du citoyen. Comment assurer cette protection et
dans quel format? Quels sont les détails qu'il serait utile de
connaître?
On me rappelle que, l'an dernier, des enfants ont été
malades près d'une école où on avait fait usage de
certains pesticides. Une campagne avait été menée et, si
je me rappelle bien, la ville de Dollard-des-Ormeaux avait adopté son
règlement à la suite de ce malheureux événement.
C'est tout simplement pour éviter la reprise d'événements
semblables. Comment cela devrait-il se faire et quels devraient en être
les détails? Je ne suis pas en mesure d'affirmer des choses à ce
sujet ce matin, sinon que cela doit être fait d'une façon ou d'une
autre.
M. Lincoln: Vous avez entendu toute la discussion qui a eu lieu
concernant l'eau potable et le cas de la municipalité de
Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier. Pourriez-vous nous dire, du point de
vue de la communauté urbaine et de l'eau de Montréal - je sais
que c'est Montréal qui s'occupe des centres de filtration de l'eau et de
la qualité de l'eau potable - si les analyses dans ce cas vont jusqu'aux
micropolluants et incluent les pesticides en ce moment?
M. Hamelin: Là-dessus, je ne peux vous répondre, M.
le ministre. Ce n'est pas une responsabilité de la
communauté.
M. Lincoln: J'en suis conscient.
M, Hamelin: Je sais que Montréal fournit l'eau à
peut-être 16 municipalités sur 28. Quelle est la qualité
des analyses? Je ne l'ai que par référence extérieure. On
me dit que c'est très bien fait, mais je n'ai pas d'autres...
M. Lincoln: Pourriez-vous nous expliciter votre pensée sur
la question des déchets, des résidus de pesticides? Par exemple,
si on faisait obligation aux utilisateurs ou aux vendeurs d'être
responsables des résidus, cela signifierait une responsabilisation
beaucoup plus grande. Vous parlez des pépinières. Est-ce que vous
appliqueriez cette mesure à tous les utilisateurs?
M. Hamelin: Nous sommes bien conscients qu'il s'agit d'une mesure
qu'il est difficile de contrôler sur l'ensemble des utilisateurs. Combien
de fois des gens qui sont sensibles aux problèmes de l'environnement, se
sont retrouvés avec un surplus de pesticides ou de produits chimiques et
ne savaient pas quoi faire pour s'en débarrasser. Si on obligeait le
vendeur ou le pépiniériste à reprendre ses produits et
à en disposer d'une façon écologique, cela donnerait un
débouché à ces gens. De là à
prévoir... Il n'est pas question, je pense, d'instaurer un
mécanisme par lequel on dirait: Vous avez acheté un litre de tel
produit, prouvez-nous que vous en avez utilisé la moitié et
rapportez l'autre moitié. Ce n'est pas cela.
Le but est de donner une chance aux qens qui sont sensibilisés
à l'environnement et de sensibiliser le plus de gens possible au fait
que, s'il y a un excédent de produit, le vendeur est obligé de le
reprendre moyennant paiement ou non-paiement. Là n'est pas la question
pour l'instant, mais c'est de fournir aux citoyens un endroit
sécuritaire pour disposer de ces surplus de pesticides, d'engrais ou de
choses comme cela.
M. Lincoln: Merci beaucoup, M. le Président. Si mes
collègues ont des questions...
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. M. Hamelin, je
tiens à vous dire que le mémoire que vous nous avez fourni a
été celui que j'ai lu avec le plus de ravissement. C'est le
contenu de la meilleure qualité et qu'en termes polis vous nous faisiez
à nous, législateurs, une leçon diplomate parce que vous
vous préoccupez directement du problème de la quantité des
produits utilisés. À cause de cela, je pense que c'est le plus
respectueux des mémoires sur l'environnement qu'il nous ait
été donné d'entendre ici, durant cette commission. Je vous
félicite de la qualité de ce rapport.
Pour soutenir ceci, je me réfère à la page 2
où vous parlez de la compétence des utilisateurs, etc. Le projet
se préoccupe beaucoup de la sécurité des utilisateurs,
mais vous nous mettez en garde, les législateurs. Vous dites, à
peu près au milieu de la page: "Toutefois, il risque de ne pas - ce
projet de loi - assurer une diminution substantielle de l'usage de ces produits
nocifs à cause du manque de contrôle de l'utilisation. En effet,
il aurait été intéressant et même souhaitahle de
voir apparaître dans les derniers paragraphes touchant la
réglementation une volonté de changement dans les pratiques en
agriculture et en foresterie par l'instauration de cultures
intégrées et par une diminution des produits vendus chez les
pépiniéristes."
Plus loin, en page 3, à la fin du deuxième paragraphe: "II
devient donc essentiel d'assurer une diminution de l'utilisation des pesticides
afin de réduire les coûts sociaux et environnementaux tel
qu'illustrés..." Et vous allez encore plus loin, en page 4, au
paragraphe 2: "II serait, à
notre avis, important de prévoir des mécanismes de
contrôle des quantités utilisées..." En page 5,
recommandation 5: "II y aurait lieu de limiter le plus possible la
concentration des pesticides qui sont dans la classe domestique." Et il y en a
d'autres, je ne les ai pas toutes relevées.
On voit que dans votre rapport vous insistez - je pense que c'est
là le problème -sur la quantité de pesticides
utilisés. Je suis content que le ministre responsable de ce projet de
loi vous dise qu'il va regarder cela pour essayer de faire diminuer la
quantité en introduisant des normes dans le projet de loi. Ce sera
facile d'en inclure parce qu'actuellement il n'y en a pas. La moindre ligne qui
pourrait viser à la diminution serait une amélioration sensible.
(11 h 45)
Devant tout cela, je vais maintenant vous poser la deuxième
question. La première que je pose à tout le monde, c'est la
réduction de la quantité. Vous avez tellement appuyé
là-dessus que je vois que cela fait partie de votre philosophie à
la communauté urbaine. Cependant, pour que la population accepte plus
facilement des restrictions d'utilisation quantitative des pesticides, il faut
une formation, il faut faire des recherches pour les remplacer, il faut faire
une publicité, une formation. Pour ce faire, il y a des coûts
à partager entre les municipalités qui ont le pouvoir
délégué et le ministère de l'Environnement du
Québec. Quelle que soit la façon dont on répartit les
coûts de cette formation, la publicité, etc., seriez-vous d'accord
avec l'instauration d'une taxe sur les pesticides?
M. Hamelin: Je sentais venir la question.
M. Blais: C'est normal. Je dois la poser à tout le monde
pour avoir une espèce d'éventail de connaissances. À peu
près tout le monde m'a répondu oui jusque-là.
M. Hamelin: Je pense qu'il faut vraiment regarder si cela doit
être pris à même une taxe ou si cela doit être pris
à même le fonds général de la province ou des
revenus généraux des municipalités. C'est facile de dire
chaque fois qu'on a un problème: Mettons une taxe là-dessus et on
va prendre cet argent pour servir le bien commun, pour contrer ce
problème. Personnellement, je pense qu'il revient au législateur
de déterminer comment seront financés ces programmes de
formation, comment seront financés ces programmes de recherche. Je ne
suis pas en position de dire actuellement si ce sera par le biais d'une taxe
spécifique là-dessus ou par le biais du fonds
général de la province. À ce sujet, je n'ai pas de
réponse toute faite.
M. Elkas: Je pourrais vous répondre, M. le
député, qu'il me semble qu'on relie tout problème à
l'argent et aux taxes. Je regarde un milieu comme le nôtre, 28
municipalités, et je compte le nombre d'employés qui auraient la
compétence de mettre des gens au courant, d'être formés par
le ministère et qui pourraient donner une bonne main à la
surveillance de ces produits. Après tout, combien de mois par
année cela se fait-il D'ailleurs, dans ma municipalité, il y a
peut-être trois ou quatre patrouilleurs de la sécurité que
je pourrais former, pas une grande formation, et on ne cherche jamais une
confrontation avec l'utilisateur, mais l'approcher et lui démontrer la
façon d'épandre si nécessaire. Il me semble qu'il est
important qu'on le fasse et que dans le premier volet on forme les gens qui
seraient prêts à nous donner un coup de main dans ce milieu. Je ne
vois pas de gros montants d'argent consacrés à ce
problème.
M. Blais: Est-ce que vous aurez une question après?
Une voix: ...
M. Blais: Ce sera ma dernière avant que mon
confrère qui fait les relations entre les municipalités
n'intervienne. J'ai une question à vous poser. À la page 4, vous
parlez des résidus. Cela peut être des contenants, n'importe quoi,
des résidus. Vous suggérez une politique de consignation, de
façon plus ou moins évidente. Selon l'expérience que nous
avons eue avec les centres d'alimentation, les points de vente, il y a eu une
très grande résistance. Ne craignez-vous pas que, dans les
résidus ou les contenants de pesticides, on frappe une résistance
encore plus forte?
M. Hamelin: Ce n'était pas, M, le député,
dans le contenant comme tel.
M. Blais: Non?
M. Hamelin: Non. Supposons que vous achetez un litre d'un produit
et qu'il vous en reste la moitié, qu'est-ce que vous faites avec cela
à la maison? Actuellement, le seul recours possible, c'est de le verser
dans l'évier, dans l'égout ou dans la rue. Si les vendeurs
étaient obligés de reprendre ces résidus, même pas
question de les acheter, si le consommateur avait un endroit où aller
les déposer... Vous avez acheté des produits chez un
pépiniériste; il vous reste la moitié du produit ou le
quart du produit. Vous retournez le produit chez le pépiniériste
et ce dernier doit voir à s'en débarrasser de façon
écologique. C'était beaucoup plus cet aspect de fournir au
citoyen conscient de son environnement un endroit où déposer ces
choses-là.
M. Blais: Je me suis peut-être mal exprimé. C'est un
peu comme cela que je le voyais. C'est encore pire, je crois, qu'une
"consignation", entre guillemets, pure et simple de canettes vides. C'est une
canette -exagérons - à demi pleine qu'ils
récupéreraient de quelle façon, pour en faire quelle
utilisation? J'ai peur de la résistance des points de vente.
M. Hamelin: C'est clair qu'il pourrait y avoir une
résistance des points de vente, mais nous voulons offrir au
consommateur, au public qui est conscient de l'environnement une façon
écologique de disposer de ces surplus. C'est la première
étape que l'on vise. Par la suite, s'il y a lieu de raffiner...
M. Blais: Cette intention vous honore. Sur ce, je vous remercie.
C'est le rapport que j'ai le plus goûté, point n'est besoin de
vous le répéter. Merci de votre présence. Mon
confrère de Jonquière aurait quelques questions à vous
poser.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: Je voudrais m'adresser au maire de Kirkland. Je veux
d'abord le saluer d'une façon spéciale, vu que l'on a eu
l'occasion de travailler ensemble, dans d'autres circonstances, sur des
dossiers. Je voudrais poser une première question. Vous avez
adopté un règlement municipal qui réglemente
jusqu'à un certain point l'utilisation des pesticides.
M. Elkas: Pas Kirkland, Dollard-des-Ormeaux.
M. Dufour: Dollard-des-Ormeaux? Ah bon! Je vais m'adresser...
M. Elkas: Nous sommes voisins et nous avions hâte de voir
la réglementation et de connaître la réaction des citoyens
de Dollard-des-Ormeaux. Il va sans dire qu'à Kirkland, quand nous avons
démontré de l'intérêt, il y a bien des gens qui
étaient aussi contre que pour, parce qu'ils n'avaient aucune formation.
À Dollard-des-Ormeaux, à la suite des actions qui ont
été prises, il y a eu une meilleure connaissance et une meilleure
acceptation de la part des citoyens.
M. Dufour: Après l'adoption de ce règlement, qui a
été entériné par le ministre de l'Environnement
sûrement, est-ce que la municipalité a été
obligée de le soumettre à ce dernier?
M. Elkas: Non, pas à notre connaissance. C'est un
règlement municipal, simplement.
M. Dufour: Est-ce que vous connaissez les effets qu'il a pu y
avoir dans le milieu? Par exemple, on peut adopter le plus beau
règlement au monde, mais, pour la question de l'application et du
vécu... Je m'adresse à vous comme maire. Selon votre
expérience, est-ce que cela a été appliqué? Est-ce
qu'il y a eu des délinquants, par exemple, dans l'application de ce
règlement, à votre connaissance?
M. Elkas: Je ne suis pas au courant. Par contre, on revient
toujours à la même question. C'est une première
étape. Cela a pris bien des gens par surprise, surtout dans un milieu
qui n'était pas trop informé. Cela a forcé les élus
de la communauté à être plus conscients du problème.
Aujourd'hui, quand le ministère a fait ce pas de créer une
commission pour étudier une réglementation, évidemment,
les 28 municipalités de l'île de Montréal, au lieu
d'adopter des règlements à la suite des actions prises par
Dollard-des-Ormeaux, ont voulu attendre les résultats de cette
commission parlementaire.
M. Dufour: Je vous remercie. Vous nous dites aussi dans le
mémoire que le règlement a été annexé. Nous
ne l'avons pas. C'était un peu là le sens de mes questions. Je
voulais savoir un peu plus où vous alliez.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Jonquière, je pense que M. Hamelin a une précision à
apporter sur la question de...
M. Hamelin: On s'excuse. Normalement, te règlement ainsi
que les deux règlements de Montréal devaient accompagner le texte
que l'on vous a envoyé* S'ils ne le sont pas, nous vous ferons parvenir
dans les plus brefs délais copie de ces règlements municipaux.
Nous nous excusons de ce malheureux contretemps.
Le Président (M. Rochefort): On m'informe qu'ils ne feraient pas
partie des documents qui ont été fournis à la
commission.
M. Hamelin: Ils vous seront envoyés dans les plus brefs
délais.
Le Président (M. Rochefort): À moins que ce ne soit
volumineux, on peut en faire faire des photocopies maintenant.
M. Hamelin: On en a des copies; ce n'est pas très
volumineux.
Le Président (M. Rochefort): Oui? Alors, j'imagine qu'il y
a consentement des
membres de la commission pour que l'on distribue à chacun d'entre
vous copie de ces documents.
M. le député de Jonquière, vous pouvez poursuivre
maintenant.
M. Dufour: À la page 5, au paragraphe 3, vous dites que
pour toutes les pulvérisations aériennes on devrait être
obligé d'afficher un avis à l'hôtel de ville et d'informer
par la presse écrite et électronique des composés
chimiques, etc. Donc, il y a un certain nombre de balises que vous tracez
concernant l'usage de tels produits. En ce qui concerne l'obligation d'afficher
à l'hôtel de ville, est-ce que vous croyez qu'il y a encore
beaucoup de gens qui lisent cela? J'essaie de comprendre. Est-ce que vous
n'aimez pas mieux que la municipalité soit avisée d'une
façon directe et bien comprise de ce qui va se passer? L'affichage
à l'hôtel de ville comme tel, pensez-vous que beaucoup de gens en
prennent connaissance?
M. Elkas: Je dois vous dire que je suis d'accord avec vous. Je ne
pense pas que beaucoup de gens se déplacent pour aller voir les
affichages. Par contre, la municipalité a plusieurs moyens d'aviser les
gens, comme les bulletins, et vous le savez.
M. Dufour: Si la municipalité était bien avertie
par lettres recommandées, cela pourrait être suffisant et elle
pourrait, à l'assemblée du conseil, aviser les gens, en plus de
tous les moyens qui sont là: la presse écrite,
électronique, etc.
M. Hamelin: Disons que c'était le mode traditionnel
d'avis, mais c'est clair qu'il ne rejoint pas tout le monde qui devrait
l'être.
M. Dufour: Un autre point me semble drôlement
intéressant et il n'est pas nécessairement utilisé, c'est
celui d'aviser son voisinage immédiat.
M. Hamelin: La portée du règlement de
Dollard-des-Ormeaux que vous aurez l'occasion de lire tantôt, c'est que
quiconque fait un épandage de pesticides sur sa pelouse, soit par une
compagnie ou personnellement, est tenu de placer deux pancartes bien en vue sur
sa pelouse avisant les voisins qu'il y a eu épandage de pesticides, et
l'avis doit demeurer là durant les 48 heures. C'est la portée
essentielle du règlement de Dollard-des-Ormeaux.
M. Dufour: Si je comprends bien, cet avis permet au voisinage
immédiat de voir. Il ne s'agit pas d'aller cogner à la porte et
de le dire. Il y a peut-être le petit problème du jeune qui ne
verra pas ce qui se passe. De jeunes enfants pourraient aller un peu partout
autour et être en contact avec le produit. Je me pose une question
à ce sujet. Je trouve cette préoccupation excellente, le fait
qu'une affiche avertisse les gens qu'il y a eu épandage de pesticide. Je
n'aurais pas pensé à cela et je vous félicite d'avoir eu
cette préoccupation.
M. Hamelin: C'est la ville de Dollard-des-Ormeaux qui l'a
eue.
M. Dufour: Un autre point concerne les jeunes qui ne savent pas
lire. Ces jeunes pourraient venir en contact avec le produit.
M. Hamelin: Actuellement, M. le député, les jeunes
qui ne savent pas lire ou toute autre personne peuvent venir en contact avec le
produit, car personne ne sait qu'un tel produit a été
épandu. S'il y a au moins un avis, on pense que les parents pourront
aviser leurs enfants de faire attention et de ne pas aller sur le terrain du
voisin durant une ou deux journées. À tout le moins, il y a
là un avertissement qui est donné aux parents qui devront faire
l'éducation de leurs enfants.
M. Dufour: Je comprends, à travers votre
préoccupation, que vous attachez beaucoup d'importance à
l'éducation et à la sensibilisation du public. J'aurais une
dernière question. Quand vous parlez de bioaccumulation de toxiques dans
la nourriture, est-ce que la Communauté urbaine de Montréal a un
système lui permettant... Je sais, par exemple, que vous avez un
système d'inspection pour la viande, les fruits et les légumes.
Pouvez-vous reconnaître, en plus, dans les fruits et les légumes,
une accumulation de l'usage de ces pesticides?
M. Hamelin: Je laisserai à notre directeur du service de
l'environnement le soin de répondre à cette question plutôt
technique.
M. Perreault (Gérald): Dans l'analyse des
différents aliments qu'on prend sur les tablettes, dans les
épiceries ou ailleurs, on fait la vérification de ce qui peut s'y
retrouver. Il est évident qu'on fait une recherche des produits ou des
toxiques qu'on peut reconnaître dans ces aliments. C'est de cette
façon indirecte qu'on se trouve à constater que certains produits
se retrouvent, en quantités plus ou moins importantes, mais disons que
le fait que, connaissant certains produits - car ce ne sont pas tous les
produits - il y a des produits bioaccumulables et, à ce
moment-là, on les retrouve dans les aliments en certaines
quantités. Ce n'est pas toujours au-delà des normes, car, lorsque
c'est au-delà des normes, on avise immédiatement et on retire les
aliments en
question, mais on met en garde sur le fait que, si on l'utilise d'une
façon excessive, on peut avoir des problèmes. On fait, en tout
cas, bien attention, lors de nos vérifications et de nos analyses sur
les légumes, entre autres, pour savoir si c'est comestible ou non. C'est
dans ce sens-là qu'on fait une vérification dans nos
laboratoires. (12 heures)
M. Dufour: Je vous remercie et je vous félicite de la
teneur de votre mémoire que je trouve extrêmement
intéressant.
M. Elkas: M. le député de Jonquière... M.
Dufour: Oui.
M. Elkas: ...pour ajouter sur la question de l'affichage, l'an
passé, après ce qui s'est passé à
Dollard-des-Ormeaux, une firme, sans y être forcée, a
commencé à faire de l'affichage là où elle faisait
de l'épandage sans que cela ne lui soit demandé par la
municipalité. On voit qu'il y a une bonne volonté et il reste
simplement à s'assurer qu'une bonne surveillance se fasse.
M. Dufour: Je vous remercie.
Le Président (M. Rochefort): D'autres questions ou
commentaires? M. le ministre.
M. Lincoln: Je veux remercier M.
Hamelin ainsi que sa délégation, d'abord, pour le
mémoire très étoffé qu'ils nous ont
présenté et, ensuite, pour l'éclairage qu'ils nous ont
donné. Cela va beaucoup nous aider à structurer des
modifications, des additions qu'il sera très intéressant pour
nous de considérer. Je me réjouis spécialement de
l'ouverture dont vous avez témoigné à la question que j'ai
posée sur la surveillance et aussi à la question du
député de Jonquière ou du député de
Terrebonne au sujet d'une taxe. Vous disiez qu'il y a peut-être
déjà des structures dans les villes qu'on pourrait mettre
à contribution si le ministère était prêt à
collaborer à la formation. Cela va nous intéresser au plus haut
point de travailler de très près avec vous dans toute
l'application de ce champ bien important pour nous tous.
Concernant Dollard-des-Ormeaux, j'ai remarqué aussi dans le
règlement qu'il y a une disposition qui demande un avis prioritaire,
c'est-à-dire un avis a priori d'un épandage. Ce n'est pas
seulement après, mais je pense qu'il y a obligation d'aviser au
préalable la personne. J'ai cru que votre intervention était dans
ce sens-là et c'est dans ce sens-là qu'on va l'examiner. Je vous
remercie beaucoup d'être venus. On a trouvé votre
présentation très constructive et très
intéressante.
M. Hamelin: Merci, M. le ministre. M. le Président,
madame, messieurs, merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
présentation. La commission suspend ses travaux jusqu'à 14
heures.
(Suspension de la séance à 12 h 3)
(Reprise à 14 h 11)
Union des municipalités du
Québec
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît! La commission de l'aménagement et des équipements
reprend ses travaux dans le cadre du mandat que lui a confié
l'Assemblée nationale sur une consultation particulière portant
sur l'avant-projet de loi sur les pesticides. Nous en sommes rendus au
troisième groupe de la journée, soit l'Union des
municipalités du Québec. Je voudrais sans plus tarder souhaiter
la bienvenue au président et de l'union et maire de Québec, M.
Pelletier. Bienvenue parmi nous. Je vous demanderais, à vous qui
êtes un habitué des commissions parlementaires, de nous
présenter, comme à l'habitude, vos collaborateurs et, par la
suite, de nous faire la présentation de votre mémoire.
M. le maire.
M. Pelletier (Jean): M. le Président, je voudrais vous
remercier de votre habituelle bienvenue renouvelée aujourd'hui. Ce n'est
pas la première fois que je comparais devant une commission que vous
présidez et je le fais une fois de plus avec plaisir. J'ai à ma
gauche, ici, le directeur général de l'Union des
municipalités du Québec, M. Raymond L'Italien et, de notre
personnel permanent, notre conseiller juridique, Me Marc Laperrière.
Le Président (M. Rochefort): Bienvenue à vous
trois. Sans plus tarder, nous vous demanderons de passer à la
présentation de votre mémoire. M. le président.
M. Pelletier: M. le Président, au nom de tous les membres
de l'Union des municipalités du Québec, j'aimerais tout d'abord
remercier M. le ministre de l'Environnement et les membres de votre commission
parlementaire pour la qualité de la consultation menée au sujet
de l'avant-projet de loi sur les pesticides.
Nous reconnaissons pleinement, tout comme les autres intervenants,
espérons-nous, la nécessité de contrôler
l'utilisation des pesticides afin de mieux préserver la qualité
de l'environnement. Le fait que le Québec soit la seule province
à ne pas avoir légiféré en cette matière
témoigne aisément de cette nécessité et de la
pertinence de l'intervention législative proposée par M. le
ministre de l'Environnement.
Par le passé, nous avons d'ailleurs fait des
représentations auprès du gouvernement afin d'assurer un meilleur
contrôle de l'épandage des pesticides sur les pelouses. Aussi,
l'Association paritaire sectorielle en santé et sécurité
du travail regroupant les employeurs du secteur municipal propose, dans sa
programmation de 1987 - et j'ai plaisir à le rappeler - de
procéder à l'élaboration de guides à l'intention
des utilisateurs de pesticides. Toutefois, la consultation prend un sens tout
particulier puisqu'il s'agit d'un dossier très complexe, tant du point
de vue écologique qu'administratif, et que le succès de la
démarche entreprise par le ministre de l'Environnement est intimement
lié à la compréhension de la réalité
vécue par chacun des intervenants. En effet, c'est seulement à
partir de cette compréhension qu'il sera possible, selon nous,
d'identifier les obstacles aux mesures de contrôle proposées pour
l'utilisation des pesticides.
Puisqu'il s'agit d'un dossier complexe, je tiens è
préciser que nos commentaires ne porteront que sur la
réalité municipale et la place qui lui est réservée
dans l'avant-projet de loi, afin de soulever les difficultés
éventuelles d'application. La sagesse nous indique de demeurer dans les
sentiers que nous connaissons et de laisser chacun intervenir sur les autres
spécificités qui leur sont propres.
Enfin, comme il s'agit d'une consultation sur un avant-projet de loi,
nos propos n'ont pas comme objectif autre que d'entamer la discussion sur les
points et les interrogations que nous soulèverons. L'ensemble de nos
propos s'appuie essentiellement sur la prémisse voulant que le
succès d'une démarche dépende souvent de son
efficacité administrative et de la simplicité des
mécanismes de contrôle.
Assimilation des municipalités aux entreprises
privées.
En vertu de l'article 8 de l'avant-projet de loi, les
municipalités sont assimilées aux entreprises privées et
elles doivent respecter les mêmes exigences qui sont imposées
à ces entreprises. Or, nous croyons que la nature même de
l'administration municipale peut difficilement être assimilée
à celle de l'entreprise privée qui se spécialise dans le
domaine de l'utilisation des pesticides.
La municipalité offre un très large éventail de
services à ses citoyens et ses employés doivent oeuvrer dans une
grande sphère d'activités. Il ne s'agit donc pas d'une entreprise
spécialisée de laquelle il serait normal d'exiger une expertise
minimum dans l'exercice de sa spécialité.
Nos propos, M. le Président, apparaissent particulièrement
importants à la lumière de la définition du terme
"pesticides" apporté par l'avant-projet de loi. Au sens de cette
définition, les herbicides, les engrais, les insecticides et la plus
grande partie des produits ajoutés a l'eau pour la rendre potable sont
inclus à cette définition. Ainsi, un éventail de produits
visés dans l'avant-projet de loi sont utilisés de façon
très sporadique par plusieurs employés municipaux. Il nous semble
donc difficile d'assimiler en réalité une corporation municipale,
où les employés n'utilisent des pesticides qu'occasionnellement,
à une entreprise spécialisée dont la tâche
principale des employés est reliée à l'utilisation
continuelle des pesticides.
De plus, nous nous questionnons sur l'opportunité de situer les
municipalités au niveau d'exigences requises des entreprises
spécialisées en la matière lorsqu'on constate que le
domaine de l'agriculture - et cela, à notre grande surprise - n'est
soumis, pour l'essentiel, qu'à très peu d'exiqences. Pourtant,
les agriculteurs sont de loin les plus grands utilisateurs de pesticides. Dans
la coulisse, on m'a parlé de 85 % de l'utilisation des pesticides qui
relèvent du monde agricole. Les rédacteurs de l'avant-projet de
loi ont, semble-t-il, limité les exigences agricoles pour des raisons
d'économie. Permettez que cela nous fasse un peu sourire.
Pour les mêmes motifs, nous sommes d'avis que les
rédacteurs devraient revoir le niveau d'exigences requises des
municipalités en ayant à l'esprit les critères
d'efficacité, de rentabilité et de célérité
qu'exigent de plus en plus les citoyens de leur administration locale. Pour
nous, en clair, M. le Président et M. le ministre, le texte devant nous
est encore, sur cette question, un brouillon qui a besoin d'être, entre
guillemets, "travaillé". Nous offrons volontiers notre collaboration au
ministre de l'Environnement pour tenter d'élaborer une approche qui
tienne compte des objectifs de l'avant-projet de loi et des impératifs
municipaux.
Obligation de détenir un permis et des certificats.
Puisque les municipalités sont assimilées à
l'entreprise privée au sens de l'avant-projet, non seulement
devront-elles obtenir un permis, mais leurs employés qui effectuent des
travaux de nature technique relativement à l'utilisation de pesticides
devront également être détenteurs d'un certificat de la
catégorie appropriée ou agir sous la supervision immédiate
d'un titulaire d'un tel certificat.
Ces certificats seront émis à ceux qui auront
réussi les examens prescrits démontrant qu'ils possèdent
les connaissances requises pour l'utilisation de la catégorie de
pesticides faisant l'objet du certificat, pourvu qu'ils satisfassent aux autres
conditions qui seront déterminées par règlement
ultérieurement.
L'introduction de ce système de contrôle des utilisateurs
par certificat a pour conséquence de rendre tout travail de nature
technique relié à l'utilisation de pesticides de la
compétence exclusive des détenteurs de ce certificat ou des
personnes qui agissent sous leur supervision immédiate. Le
contrôle de la qualification des utilisateurs au moyen de certificats
aura des impacts certains sur l'administration municipale et ce, à
plusieurs niveaux.
Formation de personnel.
Le personnel devant obtenir les certificats exigés devra recevoir
la formation requise pour pouvoir subir les examens prescrits et obtenir le
certificat approprié. Compte tenu du fait que les municipalités
utilisent plusieurs types de pesticides dans plusieurs sortes
d'activités - je me rapporte toujours à la définition au
sens de l'avant-projet de loi - une formation diversifiée devra
être dispensée à plusieurs intervenants.
Organisation du travail.
Comme l'avant-projet de loi prescrit que les travaux de nature technique
relatifs à l'utilisation des pesticides doivent être
exécutés par des personnes détenant un certificat ou sous
leur supervision immédiate, les méthodes de travail et
l'allocation des ressources humaines devront être révisées
en ce qui concerne les activités où des pesticides sont
utilisés.
Rémunération.
Compte tenu du degré d'expertise et de connaissance qui sera
exigé des détenteurs de certificat, il est fort possible de
prévoir les impacts sur la rémunération des personnes qui
devront obtenir un tel certificat pour pouvoir exercer leurs fonctions. II nous
semble clair que la très grande polyvalence des employés
municipaux qu'exige la diversité considérable des services locaux
cadre mal avec les exigences de l'avant-projet au plan des certificats. Il
s'agit, quant à nous, d'une difficulté qu'il faudra
résoudre. Si, aujourd'hui, nous n'en avons pas encore trouvé la
solution, nous vous offrons à nouveau notre collaboration pour la
trouver.
Obligation de tenir des registres et des pièces
justificatives.
En vertu des articles 22 et 42 de l'avant-projet, le titulaire d'un
permis et le titulaire de certificat devront chacun maintenir des registres,
conserver les pièces justificatives et transmettre au ministre les
états des transactions prévus par le règlement. Ceci
signifie que les municipalités et chacun des détenteurs de
certificat à leur emploi devront maintenir ces registres, conserver les
pièces justificatives et transmettre au ministre l'état des
transactions. Il s'agit carrément, quant à nous, d'une redondance
administrative qui risque d'alourdir la gestion municipale et de congestionner
l'appareil gouvernemental responsable du contrôle des pesticides.
De plus, ces exigences ne sont pas requises des agriculteurs, puisque
les pesticides qu'ils utilisent proviennent de commerçants qui doivent
aussi tenir ces registres et transmettre l'état des transactions au
ministre. L'information relative à l'utilisation des pesticides par les
agriculteurs provient en définitive des commerçants. Puisque les
municipalités obtiennent leurs produits des mêmes
commerçants, nous croyons qu'elles devraient être
dégagées de cette exigence au même titre que les
agriculteurs.
Mécanisme d'appel.
Nous vous soulignons que le mécanisme d'appel d'une
décision du ministre prévu dans l'avant-projet de loi
précise que l'appelant doit publier dans les journaux un avis indiquant
son intention de porter la décision du ministre en appel. Une telle
obligation déroge aux pratiques usuelles de procédures
judiciaires et constitue une invitation à tous les
intéressés à intervenir dans le litige, ce qui n'aura
certes pas pour conséquence d'accélérer ou
d'alléger le mécanisme d'appel.
Entente avec les municipalités.
Le paragraphe 5° de l'article 7 de l'avant-projet de loi stipule que
le ministre peut conclure une entente avec toute personne ou toute
municipalité afin de faciliter l'exécution de cette
éventuelle loi. Nous devons vous signaler que cet article risque
d'ouvrir la porte à un éventuel transfert de
responsabilité. En vertu des principes de fiscalité
régissant les municipalités, aucune entente ne devrait être
conclue sans le consentement de la municipalité concernée et sans
qu'un financement approprié ne soit accordé. On se souvient
qu'à la base de la réforme de la fiscalité municipale du
début des années quatre-vingt un principe était bien
retenu et bien clair pour tout le monde: à responsabilité
municipale additionnelle, source de revenus additionnels.
Pouvoir réglementaire du ministre.
La rédaction du projet laisse au gouvernement un très
large pouvoir réglementaire. Nous croyons qu'il serait opportun que le
gouvernement mentionne dans cette réglementation l'obligation aux
utilisateurs d'afficher, durant une période raisonnable et à
l'endroit où un épandage a été fait, un avis en
informant les passants. Il s'agit là d'une requête,
rappelons-nous, faite à maintes reprises par les citoyens.
Avant de conclure, nous aimerions remercier à nouveau le ministre
de l'Environnement, les membres de cette commission et vous-même, M. le
Président, pour la tenue de cette consultation. Nous
réitérons notre offre de collaboration afin d'aplanir toute
difficulté dans l'application de la future loi, en ayant à coeur
la protection de notre environnement et les exigences particulières
au monde municipal.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. Pelletier. M. le
ministre.
M. Lincoln: M. Pelletier, je voudrais vous remercier, ainsi que
vos collègues, pour la participation de l'Union des municipalités
du Québec à ces audiences publiques, Je pense qu'il n'est
même pas nécessaire de souligner l'importance pour nous d'avoir la
participation du monde municipal à toute élaboration de projets
qui touchent de très près, comme il l'avait souligné
lui-même, le monde municipal qui va être impliqué à
la base dans toute cette problématique de l'environnement, incluant le
contrôle des pesticides. Je me réjouts de votre offre de
collaboration dans l'amélioration et la bonification du projet de loi.
Vous pouvez être certain que nous allons collaborer de très
près dans toutes les recherches qui vont amener le règlement
éventuel et le projet de loi définitif.
Avant de vous poser quelques questions sur certaines observations et
commentaires de votre rapport, je voulais passer quelques remarques par rapport
aux commentaires que vous avez faits dans votre mémoire. Par exemple,
pour commencer, la définition des pesticides. Notre
interprétation de la définition, c'est - si vous pouvez vous
référer à votre mémoire, à la page 1, je
pense - que les engrais ne sont certainement pas inclus. Pour ce qui est des
produits qui sont ajoutés à l'eau pour la rendre potable, ce
n'est nullement l'intention d'inclure ces produits. Dans la
réglementation, il y aura une exclusion qui va expliquer très
clairement que ces produits ne sont pas inclus comme pesticides.
Peut-être que cela pourrait avoir un impact sur les remarques suivantes
de votre mémoire.
Pour ce qui est des agriculteurs, j'ai précisé à
d'autres intervenants qui ont fait la même remarque que vous que les
agriculteurs seront assurément inclus. Je sais que cela a l'air un peu
contradictoire, la façon dont cela a été inclus dans le
projet de loi: les exclure dans le premier alinéa rie l'article et
ensuite, donner un pouvoir habilitant le gouvernement de les inclure selon une
ou plusieurs dispositions ou toutes les dispositions de la loi dans le
deuxième alinéa de l'article 5 et prévoir une
réglementation spécifique pour les agriculteurs et les
sylviculteurs. De toute façon, puisque cela a apporté un certain
malentendu, nous réalisons que la rédaction de cet article
pourrait être plus claire. En tout cas, nous sommes tout à fait
ouverts à l'idée de préciser la chose dans l'article 5,
par une modification à l'article 5. Entre-temps, je puis vous donner mon
engagement formel que les agriculteurs sont inclus dans le projet de loi.
L'intention du gouvernement est assuré- ment de les inclure. Les
agriculteurs ont été avisés en conséquence. Nous
avons déjà consulté l'UPA de très près;
celle-ci est très au courant et les autres agriculteurs qui sont
concernés.
Le mouvement agricole est tellement vaste, les considérations
d'infrastructures, de contrôle, etc. sont tellement plus exigentes pour
un domaine aussi vaste qu'il est impossible de les inclure au départ. En
fait, la seule province qui le fait aujourd'hui dans une mesure minimale est la
Colombie britannique. Même l'Ontario qui a une loi depuis presque 40 ans
ne le fait pas.
Nous aurons un échéancier dont nous avons
déjà discuté avec les agriculteurs pour, je pense, le
début de 3990 où seront appliqués graduellement des cours
de formation qui sont déjà en voie de préparation. Ils
seront également appliqués dans le projet de loi, de même
que pour le domaine sylvicole. (14 h 30)
Vous avez parlé des utilisateurs et des municipalités.
À mon avis, il est très important que nous abordions ce
problème avec vous. Je me demandais au préalable -car on ne le
réglera sûrement pas aujourd'hui, dans le temps qui nous est
alloué - si vous pouviez nous donner votre réaction. Une des
choses qui nous a frappés, c'est que dans les municipalités, par
exemple, pour l'épandage des pesticides sur les pelouses, dans les
parcs, etc. - c'est arrivé plusieurs fois aussi dans les
municipalités que je connais un peu plus - ce sont souvent des
travailleurs saisonniers employés pour l'été qui le font.
Ne pensez-vous pas qu'il serait raisonnable de demander qu'il y ait au moins
une supervision immédiate de la part de quelqu'un qui a reçu une
formation qui lui permettrait d'avoir une connaissance beaucoup plus
approfondie de la question et d'assurer une supervision qui serait sans doute
plus compétente du fait même de la formation, mise à part
la question de qui forme et qui paie pour la chose? En principe, je parle.
M. Pelletier: Je pense bien que je puis dire à M. le
ministre que, de façon générale, le monde municipal voit
très bien la raison de cette loi éventuelle et des
réglementations qui en découleront. Sur le principe de la chose,
je veux rassurer le ministre! Nous sommes fondamentalement d'accord et
parfaitement prêts à collaborer.
Les seules choses qui nous inquiétaient, d'abord, à cause
de la définition des pesticides, c'était de soumettre des choses
qui sont un peu dans l'habitude municipale, comme le contrôle de la
qualité des eaux que l'on boit. M. le ministre, de suite, a
réglé ce problème dans son premier commentaire, ce qui
m'indique que, le fait qu'on l'ait souligné et la réponse qu'il
nous
donne, la cible était juste. Deuxièmement, vous nous dites
qu'il y aurait probablement lieu d'avoir un certain contrôle sur le
personnel qui oeuvre d'une façon saisonnière. Je pense bien que
là-dessus, M. le ministre, tout le monde est d'accord. Disons que, sur
le principe des responsabilités nouvelles, nous sommes fidèles
à la philosophie qui veut qu'à une responsabilité
déléguée une source de revenus de financement est aussi
déléguée. Cela m'apparaît simplement dans la logique
des choses. Je ne voudrais pas qu'on oublie cela, mais on fait
déjà toutes sortes de contrôles de ce genre. Enfin, je
rappelle que la Communauté urbaine de Montréal et la ville de
Québec, par exemple, sont les agents du ministère de
l'Agriculture pour le contrôle de la qualité des aliments et la
qualité de la restauration sur leur territoire. Nous agissons comme des
agents du gouvernement étant remboursés des dépenses,
donc, le principe est déjà acquis que le palier municipal peut
être l'agent de dispensation d'un service quitte à ce que celui-ci
soit payé par l'autorité provinciale.
Vous m'avez posé la question particulière d'un
responsable, je pense qu'en fait l'intention est excellente, il faudra
peut-être prévoir une sorte de mécanisme de transition
parce qu'on ne voudrait pas décider qu'à partir de la date
où entrera en vigueur la loi ou le règlement qui obligerait la
question des permis ou celle des certificats tout notre personnel qui supervise
déjà toute l'action sur notre territoire soit
déclaré incompétent du jour au lendemain. Je pense qu'il y
a probablement une expertise vécue qui peut sans doute, dans plusieurs
cas, remplacer, je dirais, qui tient lieu de "formation académique",
entre guillemets. Et, là-dessus, il faudrait qu'il y ait un temps de
mutation entre le temps d'aujourd'hui et Je temps de demain pour ne pas tomber
dans une situation où tous ceux qui font cela depuis 30 ans sont tout
à coup déclarés incompétents et ont l'impression
d'avoir commis des péchés toute leur vie.
Je pense que là-dessus...
M. Lincoln: Cela me semble très logique, ce que vous
dites.
M. Pelletier: Sinon, vous allez créer, de façon
très immédiate, un problème aux municipalités qui,
du jour au lendemain, vont se trouver avec un personnel sur leur liste de paie,
mais non autorisé à faire les tâches pour lesquelles on l'a
employé.
M. Lincoln: Oui, je comprends très bien. Étant
donné qu'on se rejoint, je pense que votre réponse va permettre
de dialoguer là-dessus pour trouver un terrain d'entente. Pour ce qui
est de la question des registres et des bilans, ce n'est pas prévu dans
la réglementation... Si vous vous référez à
l'article 22 que vous avez cité, en fait, on dit: "...les états
des transactions prévus par règlement."
C'est sûr qu'on comprend votre point de vue, que les
municipalités tiennent déjà des registres, ont des
contrôles là-dessus et on n'a pas l'intention d'inclure cela dans
le règlement. Alors, je pense que, là, vous avez apporté
un point important qu'on considère certainement positivement.
Pour ce qui est du mécanisme d'appel, ce que nous avons inclus,
c'était pour faire une concordance à la Loi sur la qualité
de l'environnement où le même mécanisme se trouve
déjà. L'idée, c'était de rendre ces deux lois
concordantes dans les aspects judiciaires et cela a été le sens
de cette procédure, mais on prend bonne note de ce que vous avez
à dire.
Pour ce qui est des ententes avec les municipalités, là,
j'aurais voulu qu'on puisse connaître un peu plus votre point de vue.
Vous dites que l'article 7 permettrait de conclure une entente avec toute
municipalité, et cela est vrai, mais il est certain qu'aucune entente ne
pourra être conclue sans l'accord de la municipalité
elle-même. On ne pourra jamais conclure une entente si la
municipalité n'est pas d'accord. C'est vrai qu'on pourrait le faire,
mais ce sera impossible de la conclure si ce n'est pas une entente
bipartite.
M. Pelletier: Je pense qu'une entente avec une
municipalité suppose bien que la municipalité concourt à
l'entente; sinon, il n'y en aura pas. Ce n'est pas dans ce cas que cela nous
inquiète. C'est que vous dites: "peut conclure une entente avec toute
personne". Alors, vous décideriez de faire une entente avec une personne
qui agirait dans une municipalité sans que la municipalité soit
partie à l'entente. Cela nous gêne un peu parce que, si le
ministre ne s'entendait pas avec une municipalité, pour une raison ou
pour une autre, il pourrait tout simplement passer par la porte de
côté et faire une entente avec un individu contre le gré de
la municipalité et faire faire à la municipalité ce
qu'elle ne veut pas. À partir de là, où est le respect
entre les élus? Nous pensons qu'il y a un accroc et, sur ce point, je
suis convaincu, M. le ministre, vous connaissant, que vous verrez qu'il y a
peut-être là un ajustement à faire.
M. Lincoln: Je comprends très bien le sens de votre
objection. En tous les cas, je vais prendre cela en bonne note, c'est
sûr, parce que ce n'est pas du tout l'intention. L'intention n'est pas du
tout de faire ce que vous avez décrit.
Pour ce qui est de la question de l'affichage par les utilisateurs,
cette question est revenue souvent ce matin surtout dans la présentation
de la Communauté urbaine de
Montréal. Il y a déjà une municipalité,
Dollard-des-Ormeaux, qui a adopté un règlement où elle
prévoit, par exemple, que, d'un voisin à l'autre, il y a une
obligation d'aviser le voisin avant l'épandage et, ensuite, d'afficher
48 heures après, immédiatement après. Cette question a
été débattue un peu ce matin et il y s beaucoup
d'intervenants qui voudraient, justement, voir un contrôle de
l'utilisation qui pourrait se faire et qui pourrait être prévu
dans la réglementation.
Ce que je voulais savoir de vous, parce qu'il y a déjà un
amendement qui a été voté au Code municipal l'année
dernière, l'Union des municipalités régionales de
comté l'a souligné dans son mémoire... Je pense que c'est
l'article 555, alinéa 1, qui donne déjà un pouvoir aux
municipalités d'adopter des réglementations au point de vue des
toxiques, etc. et la description de la réglementation. On nous a dit, au
sein du ministère - les techniciens et les légistes qui l'ont vu
- que cela donnerait déjà un pouvoir aux municipalités de
prévoir un règlement, comme celui de Dollard-des-Ormeaux, d'aller
plus loin que la loi, si elles le voulaient.
J'aurais voulu avoir votre réaction là-dessus par rapport
au règlement tel que voté par Dollard-des-Ormeaux ou d'autres
municipalités. Comment le voyez-vous, comme président de
l'union?
M. Pelletier: Je pense, M. le ministre, que l'idée que les
municipalités puissent exercer un pouvoir que l'Assemblée
nationale leur a permis d'exercer, en soi est bonne et que ce pouvoir soit
assujetti à une juste et correcte information du public le rend encore
meilleur. Ce que nous avons à l'esprit, c'est que, dans toute
l'accession au respect de l'environnement par les citoyens, dans tous les
efforts qui sont faits, il y a une partie éducative très
importante et l'éducation ne se fera que si les gens sont bien
informés quant aux choses qui se produisent dans leur milieu. On ne voit
pas quelque chose se produire et personne n'être informé. À
ce moment-là, les gens s'en rendent compte de façon brutale, ils
ont l'impression qu'on leur a passé quelque chose sans vouloir les en
informer et au lieu de les mettre de notre côté, on fait en sorte
qu'ils se cabrent, qu'ils se braquent. On pense que ce respect à
l'information doit être assuré non pas uniquement par les
règlements municipaux en vertu de la loi, mais par la loi
elle-même qui en ferait une obligation. À ce moment-là, il
n'y a rien qui est plus patent qu'un texte du législateur dûment
adopté par lui. C'est le point de vue qu'on a.
On pense que, premièrement, il y a un droit des citoyens de
savoir et deuxièmement, il y a un grand avantage à notre
société de mettre l'humeur de nos citoyens du bon
côté, par une juste information.
M. Lincoln: Si je vous comprends bien, M. le président,
vous seriez d'accord avec la philosophie de la Communauté urbaine de
Montréal qui, ce matin, a suqgéré que, dans le
mécanisme de la loi ou la réglementation, il y ait une
disposition selon laquelle il y aurait l'obligation d'aviser le voisin. Pour
une compagnie qui ferait un arrosage quelconque, ce pourrait être
balisé, il y aurait l'obligation d'aviser toute autre personne de
l'impact possible de la chose.
M, Pelletier: Nous serions parfaitement d'accord avec cette
suggestion de la CUM.
M. Lincoln: Merci beaucoup. M. le Président, je ne sais
pas si mes collègues ont des questions à ce moment-ci.
Le Président (M. Maltais): Merci, M. le ministre. Je
cède maintenant la parole au député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Il me fait
plaisir que vous soyez là, mais vu que nous avons l'honneur, notre
formation politique, d'avoir votre ancien président de l'UMQ, je vais
lui demander de lancer les premières flèches en votre direction.
J'espère qu'elles seront tendres.
M. Pelletier: Ce seront des flèches amicales, connaissant
M. le député de Jonquière.
Le Président (M. Maltais): M. le député de
Jonquière, à vous.
M. Dufour: Connaissant le député de Terrebonne, on
ne peut s'attendre à autre chose qu'à avoir des guerres, mais qui
ne porteront pas à conséquences graves. Je voudrais le remercier
de me céder ce droit de parole au début. Je voudrais aussi en
profiter pour souhaiter la plus cordiale des bienvenues au président de
l'Union des municipalités du Québec et aux membres qui
l'accompagnent, son directeur général et son conseiller
juridique.
Ma première question, M. le Président, c'est que je suis
surpris un peu que, dans la loi, on parle beaucoup de pouvoirs
réglementaires et c'est un avant-projet de loi. Ne croyez-vous pas au
moment présent que, lors du dépôt du projet de loi comme
tel, vous n'aurez pas à aborder la question des pouvoirs
réglementaires? Par exemple, il arrive de temps en temps dans certaines
lois, surtout pour des lois qui sont de nature nouvelle, un peu
différentes de ce qu'on est habitué de voir... Ne croyez-vous
pas, comme président de l'Union des municipalités du
Québec ou au nom des municipalités que vous représentez,
que la parution des
pouvoirs réglementaires ne devrait pas être
déposée en même temps que le projet de loi qu'on aura
à étudier subséquemment?
M. Pelletier: Je pense bien qu'il est maintenant ancré
dans la pratique législative que la loi ne peut contenir tout et que les
règlements qui sont beaucoup plus faciles à modifier, d'ailleurs,
que la loi elle-même, reprendront dans le détail toute une
série de points reliés à l'application de la loi. Je pense
qu'on ne fait pas école nouvelle aujourd'hui.
Je veux simplement indiquer que, dans le cas de l'avant-projet de loi
qui est devant nous, on nous a communiqué un certain nombre de documents
que notre permanence et nous avons pu étudier et qui nous ont,
jusqu'à un certain point, confortés, si je peux m'exprimer ainsi,
et qui nous ont laissé, enfin, une confiance telle que nous n'avons pas
jugé utile aujourd'hui ou nécessaire d'en relever les points les
plus significatifs. Bref, d'après ce que nous avons eu en main comme
document, nous n'avons pas cru nécessaire d'aller plus avant dans les
commentaires que nous avons déposés devant cette commission.
C'est peut-être, d'ailleurs, par le biais rendre hommage à M. le
ministre de l'Environnement et à ses collègues.
M. Dufour: Je ne sais pas si le ministre me corrigera, mais j'ai
l'impression qu'il y a des groupes qui ont exigé que le
dépôt de la réglementation soit fait en même temps
que le projet de loi. Si je me souviens bien, vous vous étiez
pratiquement engagé à déposer le projet de
réglementation en même temps que le projet de loi? (14 h 45)
M. Lincoln: Non, non, non. Ce qui est arrivé, c'est que,
dans le cahier de travail que nous avons déposé, il y a un projet
de réglementation qui est inclus comme esquisse. Ce que je me suis
engagé à faire l'autre jour, en réponse à l'un des
intervenants, c'est de dire que, sitôt que le projet de
réglementation sera fini naturellement, cela va découler beaucoup
de ce qu'on va entendre ici - on s'engage à faire une consultation et
à le rendre public. C'est-à-dire que les gens vont savoir
exactement ce que va contenir le projet de règlement définitif
avant que le projet de loi soit définitif. Je peux répéter
l'engagement que le projet de réglementation qui est en marche et qui
devrait être prêt d'ici la mi-été ou la fin de
l'été va être rendu public, c'est sûr, pour que tous
les gens le connaissent.
M. Dufour: Je vous ai entendus parler tout à l'heure;
à la suite d'une de vos remarques, selon quoi cela demanderait beaucoup
de personnes impliquées pour l'épandage des pesticides à
cause des qualifications nécessaires, le ministre de l'Environnement a
parlé de la supervision immédiate. On pourrait avoir quelqu'un
qui est compétent, qui pourrait exercer un certain pouvoir de
surveillance sur un ensemble de personnes qui utilisent les pesticides et qui
n'auraient donc pas la même qualification. D'après votre
expérience vécue et connaissant aussi l'étendue d'une
municipalité et les endroits possibles où il pourrait y avoir des
épandages de pesticides, comment interprétez-vous une supervision
immédiate? Trouvez-vous que cela peut représenter certains
problèmes ou certaines difficultés?
M. Pelletier: Le meilleur exemple que je pourrais prendre serait
peut-être celui de ma ville. Je pense qu'au niveau de notre service des
loisirs et des parcs nous devrions avoir quelqu'un de parfaitement
qualifié et détenant tous les certificats et autres autorisations
et lui aurait l'autorité sur tous les contremaîtres des travaux
qui se promènent avec les différentes équipes à
travers la ville pour faire les travaux et les contremaîtres devraient
être eux aussi en mesure de contrôler leurs équipes. Dire
qu'à chaque fois qu'on arrose un arbre avec des pesticides il faut qu'il
y ait quelqu'un à côté de celui qui tient le boyau
d'arrosage pour contrôler, cela va un peu loin, mais pour autant que le
contremaître qui a la charge d'une équipe est sur place, dans les
environs, et qu'il contrôle ses gens qui font le travail, il me semble
que cela serait correct. J'imagine que l'évêque du lieu veut
contrôler tous ses prêtres, mais il n'est pas assis à
côté de chaque vicaire dans le confessionnal.
M. Dufour: J'aimais entendre votre point de vue concernant la
supervision immédiate parce que j'ai l'impression qu'il y a une
difficulté quelque part qui serait difficile à établir,
mais j'essayais de la faire ressortir par le fait que vous voyez cela de cette
façon. il y a d'autres endroits où on parle aussi de supervision
immédiate, mais pas de façon aussi visible.
M. Pelletier: M. le député, l'interprétation
que je vous ai donnée me semble raisonnable, mais je ne revendique pas
avoir la seule définition possible du raisonnable.
M. Dufour: Je l'ai pris comme cela. J'aimerais vous poser une
autre question. Ce matin on a eu des intervenants qui nous ont beaucoup
parlé de la qualité de l'eau potable où l'eau potable des
nappes souterraines s'est dégradée ou
détériorée à cause, justement, de l'épandage
de pesticides sur de qrandes étendues de terrain. À ce
moment-là, j'ai posé la question pour savoir de quelle
façon
on s'était rendu compte de ce phénomène. On
connaît l'étude de l'eau potable dans les municipalités qui
a pour objet de déceler des conformes dans l'eau. Il nous a parlé
d'une étude biophysique qui fait qu'on peut déceler des nitrates,
etc. Dans l'ensemble des municipalités du Québec, seriez-vous
favorable à ce que les études sur la qualité de l'eau
potable aillent plus loin que juste l'étude sur les bactéries
qu'on connaît? Je pense qu'on pourrait répondre qu'il y a
peut-être dix-huit municipalités; on a entendu le ministre nous
dire ce matin qu'il y avait dix-huit municipalités qui étaient
sous étude, c'est ce qu'on a appris ce matin. Je ne sais pas si vous
êtes au courant qu'il y a des expériences de faites actuellement
dans l'ensemble du Québec. Mais, à votre point de vue, est-ce que
cela pourrait éventuellement être une exigence ou une obligation
municipale d'étudier la qualité de l'eau potable par rapport aux
étendues arrosées de pesticides qu'on retrouve un peu partout?
Dans le fond, on sait que cela va toucher aussi de temps en temps l'eau.
M. Pelletier: Autant, M. le député, il
m'apparaît important qu'on reste très éveillé aux
abus, autant il ne me semble pas que l'abus doit engendrer la
réglementation, enfin, l'établissement de la règle
générale. Je pense que la contamination des nappes
phréatiques par tes pesticides, cela reste des exceptions. II ne
faudrait pas que pour une, deux ou trois exceptions, on décide que ce
sera un péché global dans tout le territoire de sorte qu'il y a,
je dirais, un équilibre à maintenir. Il faut que le
ministère et les municipalités restent éveillés au
cas où il y a vraiment un débordement. Mais de là à
aller réglementer, en tenant pour acquis que le
dérèglement exceptionnel va se produire partout à tous les
jours, il me semble que cela serait aller trop loin.
J'imagine que le ministère de l'Environnement et le
ministère responsable de la santé publique sont deux organismes
qui, quotidiennement, surveillent ce genre de problèmes qui, bien
sûr, peuvent provoquer aussi des maladies et des
épidémies.
Au lendemain, vous savez, d'un malheureux feu où un foyer pour
personnes âgées a été lourdement endommagé,
avec des pertes de vie, il y a une émotivité qui nous tente
d'aller à une réglementation qu'on s'aperçoit devoir
être impossible à faire respecter 365 jours par année.
Alors, il y a un équilibre là-dedans.
M. Dufour: Vous ne vous opposez pas à ce qu'il y ait
certaines analyses conduites dans des municipalités, mais pas d'une
façon globale, régulière, journalière ou
hebdomadaire? Je pense que c'est cela.
M. Pelletier: Je ne m'oppose pas au contrôle de la vertu
sans prétendre que le péché est présent
partout.
M. Dufour: Mais nous sommes bien conscients, tout de même,
qu'il y a des étendues assez qrandes qui font l'objet d'arrosages
importants de pesticides. En tout cas, à première vue, je serais
porté à croire que le ministère veut continuer ces
études. Ce serait intéressant pour l'Opposition et le public d'en
prendre connaissance un jour pour savoir ce qui s'est produit et en même
temps, peut-être, à ce moment-là établir des
mécanismes, pas aussi régulièrement ou aussi souvent que
ceux qui ont trait à la façon de déceler ou de compter les
bactéries qu'il peut y avoir dans l'eau.
Vous avez soulevé un point, le mécanisme d'appel, qui
déroge aux pratiques usuelles. Le ministre a répondu d'une
certaine façon, mais j'aimerais avoir un peu plus d'explications
concernant votre position en regard de ce mécanisme. On vous a dit: Il y
en a un qui existe d'une façon. C'est une question de concordance.
J'aimerais connaître la position de l'Union des municipalités du
Québec concernant le mécanisme qui est proposé dans cet
avant-projet de loi.
M. Pelletier: M. le député, le commentaire que nous
avons fait dans notre texte s'appuie sur ceci: Ce qui est important, c'est
qu'il y ait un appel et qu'une autorité en appel puisse statuer. De
là à ameuter toute la paroisse, ce n'est pas nécessaire
pour que justice soit rendue et équité soit reconnue. C'est ce
qu'on dit. Si, dans des causes qui créent de l'émotivité
comme celle-là, on confond le droit qu'on veut donner à une
pleine justice avec l'idée d'inclure toute l'émotivité de
tout le monde dans le processus, on n'est pas très sûr que,
premièrement, cela va rendre service, finalement, parce que ce n'est pas
dit que cela va provoquer une meilleure justice et ce n'est pas dit non plus
que cela ne ralentira pas le processus d'appel. On trouve qu'il n'y a pas de
raison fondamentale pour justifier cet avis dans les journaux, etc.
L'important, c'est qu'un mécanisme d'appel puisse s'exercer sur la
décision du ministre. C'est cela, l'important. Le reste est très
secondaire, quant à nous, et peut-être pas nécessaire, ni
désirable dans tous les cas.
M. Dufour: M. le président de l'union, est-ce que vous
considérez qu'il est obligatoire et nécessaire qu'il y ait une
entente entre les municipalités et le ministère de
l'Environnement pour l'application de la loi qui est devant nous?Est-ce que vous considérez aussi, en même temps, qu'à
défaut d'entente il n'y a pas de transfert de responsabilités
sans qu'il y ait des montants d'argent disponibles ou des
sources de revenu équivalentes pour les nouvelles obligations qui
pourraient vous être dévolues?
M. Pelletier: Nous croyons que les normes qui régissent
l'environnement, la santé, la qualité des services sociaux, tout
cela ne peut pas être morcelé d'un petit territoire à un
autre petit territoire. Il faut qu'il y ait une cohérence d'un
territoire à l'autre. Conséquemment, cela doit relever de
l'autorité du gouvernement de l'ensemble du territoire du Québec.
Si, pour des raisons de livraison de services, à un endroit, il est
jugé utile ou préférable de le faire faire par un autre,
c'est un contrat de services. Quand on donne un contrat de services, on paie
pour. Ce que je dis, c'est que les municipalités sont parfaitement
disposées à être détentrices de contrats de services
en provenance de l'autorité provinciale, si jugé utile. Mais,
comme pour n'importe quel contrat de services, il faut qu'il y en ait un qui
soit consentant à le donner et il faut que l'autre partie soit
consentante à le recevoir et il y a une compensation financière
qui se fait de l'un à l'autre. C'est notre philosophie; c'est la
même que dans tous les autres contrats.
M. Dufour: Je vous remercie, M. le président.
Le Président (M. Maltais): Merci, M. le
député de Jonquière. Je cède maintenant la parole
à M. le député de Louis-Hébert.
M. Doyon: Merci, M. le Président. En parlant de contrat de
services, je pense que la position de l'Union des municipalités est bien
connue et aussi défendable. En contrepartie de cela, je me demande si
vous avez étudié la possibilité de tarification en ce qui
concerne le genre de services qui seraient rendus par les municipalités
pour ce qui est de l'utilisation de fertilisants ou de pesticides de quelque
nature. Est-ce qu'il serait concevable, selon vous, M. le président de
l'union, que les municipalités exigent un montant qui pourrait
être évalué, tarifé selon le service rendu par la
municipalité pour, justement, faire payer celui qui en est le premier
bénéficiaire? Si on pense, par exemple, à
l'épandage d'engrais chimiques ou de pesticides de quelque nature que ce
soit sur les gazons, sur les terres ou dans les arbres, on peut concevoir que
l'utilisateur en tire un profit puisqu'il le fait. Est-ce que ce serait
concevable? Est-ce que vous avez étudié la possibilité
d'une tarification à ce sujet ou si c'est quelque chose que vous n'avez
pas étudié ou qui, à votre avis, est totalement exclu?
M. Pelletier: Vous dire que nous l'avons étudié en
détail, ce serait vous mentir, M. le député, mais je vous
dirai que, si c'est une décision d'un service à donner prise par
l'autorité provinciale, c'est à elle de décider comment
elle va financer sa décision. Je n'ai pas de conseil à lui donner
là-dessus. Est-ce que ce doit être une taxe spéciale ou si
cela doit provenir des revenus généraux du Québec? Ce
n'est pas à moi de me prononcer. Si, par ailleurs, c'est une politique
qui relève de l'autorité municipale, je pense que, dans la
municipalité, on a tendance à dire que, comme on ne fait pas de
redistribution de revenus, on ne fait que répartir le coût des
services municipaux à ceux qui en profitent proportionnellement et dans
l'équité de leur utilisation de ces services. Si,
évidemment, c'est fait au profit de certains individus particuliers, je
ne verrais pas, à ce moment-là, que d'autres citoyens qui n'en
bénéficient pas paient pour eux. (15 heures)
Si, par ailleurs, c'est une politique générale qui
s'applique, par exemple, à l'ensemble des parcs de la
municipalité où tous les citoyens de la ville sont
conviés, à ce moment-là, cela ne serait plus objet de
tarification. Ce serait tarification ou non-tarification, selon la nature des
programmes et ta clientèle municipale à laquelle ils
s'adressent.
M. Doyon: Si vous me le permettez, M. le Président,
c'était dans ce sens que je le concevais, évidemment. Dans le cas
où il s'agit d'un traitement dont l'ensemble des citoyens
bénéficie, je pense que la tarification est exclue, mais quand il
s'agit d'une politique provinciale et que la municipalité est tout
simplement un exécutant d'une politique générale dont
l'ensemble de la population bénéficie, je pense qu'on s'entend
bien.
Mon propos était plutôt vis-à-vis de certains
particuliers, certains contribuables qui, pour des bénéfices
qu'eux-mêmes évaluent, décident de se servir de certains
ingrédients qui peuvent être dommageables, mais qui doivent
être en même temps contrôlés. À ce
moment-là, le contrôle étant une dépense
supplémentaire pour les municipalités - je pense qu'on se rejoint
là-dessus - si c'est pour le bénéfice d'un particulier,
d'un individu, la municipalité envisagerait possiblement une
tarification de façon à éviter que ce ne soit l'ensemble
qui paie.
C'est un peu le sens et je suis heureux de voir que c'est une
possibilité qui serait envisageable. Vous le disiez tout à
l'heure, tout le monde est pour la vertu, personne ne pense que le
péché est partout, mais, comme le disait le curé, la
tentation est fort présente, par contre; alors, il faut agir en
conséquence. Merci, M. le Président.
M. Pelletier: J'ajouterais, par ailleurs, M. le Président,
qu'il ne faut jamais oublier dans la tarification municipale qu'il y a des
services qui profitent directement à des citoyens et qu'on ne peut pas
tarifer, tels les pompiers et la police. Si chaque fois que quelqu'un appelle
la police, il sait que dans trois jours il va recevoir un compte pour avoir
appelé, il n'appellera plus et c'est peut-être dans
l'intérêt public qu'il appelle. C'est la même chose pour la
protection contre les incendies. S'il appelle les pompiers et qu'il
reçoit un compte parce qu'on a éteint le feu chez lui, il va
essayer d'appeler moins souvent. À ce moment-là, il va
peut-être prendre une chance sur la nature du feu et il va attendre le
plus longtemps possible, et, finalement, on ne sera plus capable de rien
contrôler, ni pour lui, ni pour les maisons voisines.
Là-dessus, je pense qu'il y a un bon jugement qui se fait par
rapport au désir qu'on a, je pense, à la base, que chacun paie
pour les services reçus, mais ceci est limité par
l'intérêt du bien public qu'il faut aussi avoir è l'esprit
dans chaque décision à prendre.
Le Président (M. Maltais): Merci. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Oui, avant de vous poser les deux questions classiques
que j'ai posées à tous les intervenants, j'aimerais revenir sur
une question qui vous a déjà été posée, M.
le maire. À la page 4 de votre mémoire, entente avec les
municipalités - la question vous a été posée - dans
le deuxième paragraphe, vous avez deux volets. Vous avez peur qu'une
personne soit autorisée au détriment de la municipalité,
et on a répondu à ce membre de phrase. Cependant, vous dites
aussi à la fin "et sans qu'un financement approprié ne soit
accordé". Concernant ce deuxième membre, ce sont certainement des
événements passés qui suscitent vos craintes. Quelles sont
vos craintes de ce côté-là? Vous ne prendriez pas de
responsabilité sans compensation fiscale?
M. Pelletier: Je pense que M. le député de
Jonquière pourra privément vous informer là-dessus. Quand
la réforme de la fiscalité municipale a été faite,
elle a été faite dans le cadre des responsabilités
à ce moment dévolues aux municipalités avec l'entente que,
si des responsabilités additionnelles étaient dévolues aux
municipalités, il y aurait des sources additionnelles de revenus
compensatoires. C'est simplement un rappel des principes qui fait que les
municipalités sont formellement contre la décentralisation des
comptes à payer.
M. Blais: Je n'ai pas dit les autres, d'ailleurs. Je vais vous
poser la question classique. Dans votre mémoire, nulle part vous ne
faites allusion au fait que le projet de loi touche quantitativement les
pesticides. Je crois que, dans le contexte moderne dans lequel nous vivons, un
projet de loi devrait comporter un volet pour que la quantité de
pesticides utilisée soit diminuée de plus en plus au fur et
à mesure que les techniques de remplacement le permettront. Est-ce que
vous croyez, malgré que dans votre mémoire il n'y soit fait
aucune allusion, qu'il serait nécessaire, dans la loi qui vient, qu'au
fur et à mesure des recherches - on pourrait même y consacrer de
l'argent - les pesticides soient remplacés par des produits moins
nocifs?
M. Pelletier: M. le député, à mesure que la
recherche fait ses progrès, il faut que la civilisation en fasse son
profit; là-dessus, je rejoindrais ce que vous avez en tête. La
seule chose est que nous, de l'Union des municipalités, ne sommes pas
des spécialistes des pesticides. Ce qu'on s'est dit, c'est: Nous allons
aller devant la commission pour parler des aspects de cet avant-projet de loi
qui nous regardent plus directement. La question à laquelle vous vous
référez est une question qui ne nous regarde pas
spécifiquement, mais qui regarde l'ensemble des législateurs, y
compris ceux de cette Assemblée. Nous n'avons pas jugé utile,
là-dessus, de faire un commentaire spécifique, mais c'est clair
que plus le respect de la nature sera assuré, moins on sera
obligé d'intervenir de façon chimique et bravo!
M. Blais: Je lis aussi entre les lignes, par votre
réponse, que la qualité de vie intéresse, bien sûr,
les municipalités au plus haut point, vous le dites dans votre
mémoire. Pour respecter la qualité de la vie, il faut qu'on
utilise de moins en moins de pesticides parce que c'est nocif à la
nature. Dans ce sens - j'ai posé cette question à tous ceux qui
ont présenté un mémoire - pour la recherche, la
publicité, ta formation, de sorte que les pesticides soient de plus en
plus éliminés quantitativement, est-ce que vous seriez d'accord
qu'une taxe spéciale sur les pesticides soit levée pour favoriser
l'éducation générale et la recherche au Québec?
M. Pelletier: Je pense que je n'ai pas à me prononcer sur
cette question, M. le député. Si le gouvernement décide
d'avoir des programmes de recherche ou des programmes d'éducation, c'est
à lui seul de décider du moyen de financer les programmes qu'il
désirera. Là-dessus, nous n'avons pas d'opinion à exprimer
puisque la décision ne relève vraiment pas de nous.
M. Blais: Votre réponse me prouve que
vous avez un respect intégral et intrinsèque des
responsabilités autant municipales que provinciales. Je vous remercie
beaucoup. J'ai bien aimé votre mémoire. J'ai bien aimé la
façon dont vous vous êtes exprimé, on voit que cela vous
tient à coeur. Cependant, ce respect très grand que vous avez
vous empêche parfois de nous dire, à nous, que nous devrions
peut-être faire certaines choses. Je vous remercie de votre
délicatesse.
M. Pelletier: M. le député, je vous dirai qu'il me
semble que les rapports entre les paliers publics d'administration sont
beaucoup meilleurs quand chacun se mêle de ses affaires.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre.
M. Lincoln: Très brièvement, M. le président
de l'Union des municipalités du Québec, je voudrais vous
remercier, ainsi que votre groupe, d'avoir pris la peine de venir
témoigner ici. Je pense que, symboliquement et aussi de façon
pratique, c'était très important que vous y soyez, le monde
municipal représentant le palier de base sans lequel rien ne marche et
ne peut être effectué. Nous en sommes très conscients et
nous allons collaborer avec vous de très près.
En passant, je voudrais vous dire que votre interprétation de ce
que nous concevons comme supervision immédiate, c'est cela, c'est bien
ce que vous avez décrit, c'est le sens dans lequel on va se diriger. Il
faudrait trouver les mots de la réglementation, mais c'est ce qu'on
envisage. On vous remercie et on vous promet de collaborer de très
près afin de trouver des instruments qui vont tenir compte de vos
contraintes et des nôtres pour en arriver à un objectif commun.
Merci.
Le Président (M. Rochefort): Moi aussi, je voudrais vous
remercier, M. Pelletier, de votre présence parmi nous et de la
contribution que vous avez apportée à nos travaux.
M. Pelletier: Merci, M. le Président, merci, M. le
ministre, mesdames et messieurs, de votre gentillesse.
Le Président (M. Rochefort): J'appellerais maintenant
l'Association des spécialistes en extermination du Québec et
l'inviterais à prendre place devant nous.
Le Président (M. Dufour): Je voudrais souhaiter, au nom de
la commission, la plus cordiale bienvenue à l'Association des
spécialistes en extermination du Québec. Si je comprends bien,
elle est représentée par M. Pierre Cameron, président. Je
voudrais l'inviter, tout en lui souhaitant la bienvenue, à
présenter son groupe et à prendre ses 20 minutes pour nous
expliquer son mémoire.
Association des spécialistes
en extermination du Québec
M. Cameron (Pierre): Merci, M. le Président. M. le
ministre, membres de la commission, l'Association des spécialistes en
extermination du Québec est heureuse de pouvoir participer à
cette commission parlementaire et c'est avec plaisir qu'aujourd'hui nous venons
vous présenter notre mémoire. À ma droite, vous avez M.
André Maheux, président sortant de l'Association des
spécialistes en extermination du Québec, et, à ma gauche,
M. Harold Leavey, directeur de notre association.
La raison d'être de l'ASEQ. Au début des années
soixante-dix, il n'existait aucun regroupement au Québec pour venir en
aide aux spécialistes en extermination. Une association canadienne
était déjà bien implantée, mais, au Québec,
l'intérêt se faisait attendre pour une section authentiquement
québécoise et autonome. Le matériel en langue
française devenait de plus en plus pressant afin qu'on puisse mieux
échanger sur le sujet et accroître l'efficacité des
intervenants du milieu. C'est en 1976 que fut enfin créée
l'Association des spécialistes en extermination du Québec. Ses
objectifs principaux étaient d'être réglementée et
organisée. La jeune association visait à s'assurer que ses
membres seraient bien en mesure de répondre aux nouvelles exigences de
la clientèle québécoise actuelle.
Dans le but de fournir des outils adéquats à ses membres,
la jeune association s'est documentée. Elle a traduit de nombreux textes
en français. Ses seules références sérieuses
provenaient de travaux réalisés aux États-Unis.
En 1978, notre association rencontrait un représentant du
ministère de l'Environnement du Québec afin de lui faire part des
revendications de l'association et de le sensibiliser à l'urqence d'une
loi visant à réglementer l'utilisation de tous les pesticides
couramment appliqués au Québec. L'Association des
spécialistes en extermination du Québec négociait, puis
signait, en novembre 1982, un premier protocole d'entente avec le
ministère de l'Environnement du Québec. Cette convention a
été reconduite par la signature d'une seconde entente en novembre
1984. Dans le cadre de ces ententes, deux comités ont été
mis sur pied afin d'améliorer le niveau de connaissances des
exterminateurs, de normaliser et de surveiller les méthodes de travail
pour assurer une meilleure protection du public.
Dans un premier temps, un programme de formation a été mis
au point. Les cours
constituant ce programme sont offerts depuis l'automne 1983 par la
Télé-université. On accorde sept crédits
universitaires aux participants qui ont réussi l'examen. L'ASEQ
émet une carte personnalisée démontrant que
l'exterminateur a obtenu l'attestation d'études.
Une approche globale pour encadrer la normalisation des méthodes
de travail a aussi été élaborée et un premier code
des pratiques professionnelles a été préparé. Cette
première version fut adoptée par les membres de notre association
lors de l'assemblée annuelle de 1983. Depuis lors, des travaux en
atelier avec la participation de plusieurs membres et des inspections ont
permis de préciser certains points couverts par le code. La seconde
version du code a pour but de présenter ces précisions qui se
retrouvent surtout au niveau du transport, de l'entreposage et de la
sécurité. Le code des pratiques professionnelles est un outil qui
est appelé è être complété au cours des
années et, déjà, plusieurs des secteurs couverts font
l'objet d'une étude en vue de mieux les comprendre afin qu'ils soient
présents avec plus de précision dans la prochaine version.
Comme vous pouvez le constater, M. le Président, notre
association a emprunté avec le ministère de l'Environnement une
démarche des plus originales. Cette démarche est aussi la
véritable démonstration qu'un groupe de personnes
décidées peut se prendre en charge et assumer ses
responsabilités face à la sécurité du public et
à la protection de l'environnement. (15 h 15)
Voici, M. le Président, quelques commentaires, suggestions et
réactions en regard de l'avant-projet de loi présenté
à l'Assemblée nationale le 18 décembre 1986.
Notre attention se porte en particulier sur les points suivants: les
droits des citoyens quant à l'utilisation abusive des pesticides, la
trop grande permissivité chez les utilisateurs, l'émission de
permis et de certificats, la reconnaissance des compétences
déjè acquises chez les professionnels de l'extermination, le
contrôle et la disposition des résidus, l'utilisation et le
fonctionnement des registres.
Les droits des citoyens quant à l'utilisation abusive des
pesticides. Selon l'ASEQ, un citoyen peut manifester son mécontentement
face à l'utilisation de certains pesticides, que ce soit quant à
leur mode d'application ou au choix du produit. Mais une certaine vigilance
devra être exercée relativement au droit du citoyen à
recourir aux tribunaux pour des motifs non valables. Tout en nous
référant au chapitre IV, section II, articles 47 à 54
inclusivement, et è la section V, articles 67 à 72 inclusivement,
nous recommandons au ministre, à la suite de l'intention d'un citoyen de
mettre en oeuvre les mécanismes d'ordonnance ou d'injonction à
l'endroit d'un professionnel de l'extermination, d'ordonner une étude
exhaustive du sérieux et du bien-fondé de la plainte. Telle
démarche pourrait être entreprise par un inspecteur
spécialiste nommé par le ministère de l'Environnement.
Ceci est recommandé dans le but évident d'éviter de
lourdes dépenses au gouvernement et pour éviter qu'on ne porte
inutilement atteinte è la réputation d'un exterminateur
professionnel.
La trop grande permissivité chez les utilisateurs. Les pesticides
et le locataire. Compte tenu que l'objet principal de la politique du
ministère de l'Environnement est de s'assurer de la compétence
des intervenants du secteur des pesticides dans le but de minimiser les effets
néfastes et les risques pour la santé humaine et pour
l'environnement en général résultant de la mauvaise
application de ces produits, il nous apparaît essentiel que toute
personne autorisée à vendre des pesticides au détail,
ainsi que toute personne autorisée à appliquer des pesticides en
d'autres lieux que celui de son domicile soit titulaire d'un certificat
attestant la qualité de ses connaissances en matière de
pesticides.
Compte tenu des visées dudit projet de loi, notre association
estime qu'il serait logique que le propriétaire d'un restaurant, d'une
usine de transformation alimentaire, d'un marché d'alimentation ou d'un
complexe d'habitation ne puisse appliquer lui-même ou faire appliquer par
son propre personnel des pesticides dans son établissement sans avoir
subi au préalable l'examen prescrit et reconnu par le ministère
et sans être détenteur d'un certificat officiel.
À notre avis, même des pesticides dits de classe domestique
appliqués de façon abusive ou non conforme aux règles de
l'art peuvent causer des dommages importants à l'environnement et
à la santé des particuliers.
Notre expérience professionnelle nous démontre hors de
tout doute que les utilisateurs de pesticides qui n'ont pas une connaissance
suffisante de ces produits toxiques et de leurs conséquences ont
tendance à rechercher des résultats à tout prix, sans
tenir compte, évidemment, des règles de sécurité
les plus élémentaires.
Un certain propriétaire d'immeuble de plusieurs centaines de
logements se vantait, à l'occasion d'une rencontre avec la ville de
Montréal, en présence de fonctionnaires du MENVIQ, de
fonctionnaires de la ville de Montréal et de membres de notre
association, qu'il obtenait des résultats supérieurs à
ceux des professionnels de l'extermination. Sa méthode consistait tout
simplement à doubler les doses prescrites d'insecticide, à
mélanqer plusieurs insecticides ensemble et à les appliquer dans
ses appartements même sans prendre la
précaution de faire vider armoires et garde-manger, pratique que
tout exterminateur professionnel refuserait.
Dans le cadre de la loi proposée, il nous apparaît
indispensable que les locataires de logements puissent avoir l'assurance
qu'aucun pesticide ne sera appliqué dans leur logement par des personnes
ne possédant pas les compétences requises.
Nous ne voyons pas comment une loi qui a pour objet de s'assurer de la
compétence des applicateurs de pesticides peut en même temps
assurer un propriétaire d'immeuble que le professionnel qui interviendra
dans son établissement aura la compétence requise pour effectuer
son travail; elle ne prévoit aucune garantie aux locataires d'un
immeuble à partir du moment où le propriétaire dudit
immeuble prend la décision de faire ces applications de pesticides
lui-même ou de faire effectuer les applications par son concierge.
Les pesticides et l'agriculteur. À la suite d'un rapport
émis par le ministère de l'Environnement du Québec en date
du 6 novembre 1986, soit "Le sommaire de la problématique et de la
politique d'intervention proposée par le ministère de
l'Environnement", nous pouvons constater qu'au Québec, d'après
ledit document, l'agriculture occupe la part prédominante d'application
de pesticides avec un taux de plus de 85 % de la quantité totale des
pesticides utilisés.
Notre réflexion est la suivante. Selon le document "Proposition
d'un contrôle des pesticides au Québec", préparé par
le Conseil consultatif de l'environnement du Québec en juillet 1980, on
peut y lire en page 30, tableau 1, source M. Roland Saint-Jean, du
ministère de l'Environnement: "Les agriculteurs en 1978 avaient
utilisé plus de 4 700 000 livres de pesticides. L'utilisation des
produits pour fins d'usage domestique comptaient à eux seuls 120 000
livres et que les exterminateurs n'avaient utilisé, pour leur part, que
55 000 livres."
Nous tenons à vous rappeler que l'objet du présent projet
de loi étant, tel que stipulé au chapitre I, section II, article
2, "de régir l'usage des pesticides afin de prévenir la
détérioration de l'environnement et de protéger les
espèces vivantes", nous acceptons difficilement que les milieux agricole
et sylvicole constituent des catégories distinctes tel que
stipulé dans le chapitre 1, section II, articles 4 et 5 dudit projet de
loi.
L'émission de permis et de certificats. Le permis. Une certaine
ambiguïté dans le chapitre III, section I, article 9,2°
traitant des permis nous incite à demander des éclaircissements.
Selon notre compréhension de l'article en question, tout le monde peut
s'improviser vendeur de pesticides sans aucun contrôle. Nous sommes
plutôt d'avis que toute personne qui, de façon occasionnelle,
exceptionnelle ou sans en faire commerce, vend au détail des pesticides
soit détentrice d'un permis reconnu par le ministère de
l'Environnement.
Le certificat. Afin de satisfaire les contraintes saisonnières
des applicateurs de pesticides, notre association demande au ministre
d'émettre un certificat spécial temporaire qui permette à
l'industrie de qualifier du personnel occasionnel saisonnier. Ce personnel
pourra accomplir des travaux spécifiques et sera habilité
à exécuter certaines tâches particulières. Il est
stipulé dans le code des pratiques professionnelles de notre
association, au chapitre 1, Les préalables à l'intervention,
section 1.1, la formation: "L'assistant-exterminateur est l'individu qui
réalise des tâches routinières d'extermination impliquant
la manipulation de pesticides. Avant d'appliquer un pesticide, il doit avoir
suivi et réussi le cours intitulé "Les pesticides et
l'environnement" dispensés par la Télé-université
sous le code "Environnement 5001" ou l'équivalent approuvé par
notre association et dispensé par la compagnie."
Nous demandons donc par tes présentes qu'un certificat puisse
être émis à un employé occasionnel et ce, dans le
but de répondre adéquatement à la demande de notre
clientèle, laquelle demande est considérable en saison de pointe.
Dans l'accomplissement de ses tâches reliées à la
manipulation sécuritaire de produits chimiques, cet employé
occasionnel sera sous la responsabilité d'un exterminateur qui aura au
préalable établi par écrit le programme de travail. Par
conséquent, nous demandons au ministre de respecter les acquis
indiqués dans notre code des pratiques professionnelles, lequel code a,
d'ailleurs, été accepté par votre ministère. (Texte
de la conférence prononcée par M. Jean-Pierre Gauthier,
sous-ministre adjoint au ministère de l'Environnement, le 28 septembre
1985, à Québec, lors de notre assemblée annuelle de
l'ASEQ.)
La reconnaissance des compétences déjà acquises
chez les professionnels de l'extermination. Depuis quatre ans, il existe au
Québec un cours de formation spécifique sur l'utilisation des
pesticides et leur effet sur l'environnement. Ce cours a été mis
sur pied par l'Université du Québec, le ministère de
l'Environnement et l'Association des spécialistes en extermination du
Québec. Il est composé de trois volets: l'environnement, un bien
collectif menacé, les pesticides et l'environnement et l'utilisation
rationnelle des pesticides dans les bâtiments. 300 heures de cours
donnent l'équivalent de sept crédits universitaires. Fiers
d'avoir été les instigateurs d'un tel cours de formation, nous
nous reconnaissons le privilège, messieurs les commissaires, de vous
demander de reconnaître ce cours comme étant le
prérequis indispensable à l'obtention des permis et
certificats émis au Québec à l'intention de tous les
utilisateurs de pesticides.
Le contrôle et la disposition des résidus. Comme notre
association a toujours été extrêmement sensible au
bien-être de la population et de son environnement, nous vous saurions
gré, M. le ministre, d'élaborer une politique de contrôle
et de disposition des résidus de pesticides. Nous apprécierions
donc une solution répondant aux exigences du public, celui-ci voulant
protéger l'environnement et vivre dans un milieu sain favorable à
une bonne santé.
La prise en charge de ces résidus par votre ministère
pourrait, à court terme, être une solution acceptable. Sachez que
nous demeurons toujours ouverts à la consultation et que nous
espérons qu'aucune décision ne sera prise sans qu'on ait
avisé les principaux intéressés, c'est-à-dire les
exterminateurs eux-mêmes.
L'utilisation et le fonctionnement des registres. Nous sommes d'accord
sur l'utilisation des registres. Par contre, nous considérons que, dans
la pratique et à certains niveaux, leur utilisation semble plutôt
lourde. Pour répondre plus adéquatement aux besoins des
utilisateurs professionnels, nous suggérons que, tel que proposé
dans le projet de réglementation sur le contrôle de la vente et de
l'utilisation des pesticides, les registres soient révisés et
simplifiés. Sachez que nous vous assurons de notre entière
collaboration pour l'élaboration d'un nouveau type de registre
répondant mieux à nos besoins de tous les jours.
Avec les années, de nouveaux éléments créent
une demande qui a pour effet d'augmenter les exigences de la
société face à l'extermination. La résistance des
organismes nuisibles aux pesticides, la prise de conscience des dangers que
représentent les produits chimiques de même que la demande
croissante de programmes préventifs antiparasitaires sont des
éléments qui imposent compétence et professionnalisme.
En conclusion, nous estimons que tous les utilisateurs de pesticides au
Québec, quels qu'ils soient, doivent respecter la loi. De plus, il est
dans l'intérêt collectif que tous les utilisateurs de pesticides
au Québec jouissent d'une compétence reconnue afin de
protéger les vies humaines et l'environnement. Qu'on se le dise, les
pesticides sont des produits dangereux qui demandent à être
utilisés ou vendus avec discernement et modération.
M. le ministre, membres de la commission, sachez que nous sommes
très sensibles à l'intérêt que vous manifestez
à l'endroit de notre démarche et soyez assurés de notre
entière collaboration. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
présentation. M. le ministre.
M. Lincoln: M. Cameron, nous vous remercions d'être venu
témoigner ici. C'est une démarche qui est très importante,
en ce sens que votre association a été, dans des secteurs
très importants par rapport à l'utilisation des pesticides, un
élément clé, un pionnier surtout dans tout le domaine de
l'éducation où vous avez réussi à implanter, avec
le concours du ministère, de l'Université du Québec et
d'autres, un système de cours qui, vous l'avez souligné, offre
350 heures d'éducation pour les utilisateurs qui sont membres de votre
association. Il faut vous féliciter très sincèrement pour
votre initiative.
En même temps, je pense qu'il était juste et
équitable de donner le crédit aussi au gouvernement
antérieur et au ministère de l'Environnement d'alors qui ont pris
l'initiative de collaborer avec vous et d'élaborer le protocole
d'entente qui, encore une fois, a été le précurseur des
codes de bonne pratique qui vont suivre le fil de ce projet de loi. En 1982 et
1984, ces protocoles d'entente et le cours de formation ont jeté une
base, ont eu un effet d'entraînement, ont commencé un mouvement
qui est très important par rapport à la formation des
utilisateurs de votre milieu. Nous nous réjouissons de cela et en
félicitons votre association.
Vous avez fait beaucoup d'observations, de demandes et de commentaires.
Je vais essayer de passer à travers les plus importants. Vous comprenez
que le temps va manquer pour tout couvrir, mais, au moins, on pourra
peut-être dialoguer sur les plus importants. S'il y a des choses sur
lesquelles il faut travailler ensemble, naturellement, nous sommes prêts
à continuer ce travail, comme cela se fait présentement entre le
ministère et vous-mêmes.
D'abord, les agriculteurs et les sylviculteurs. Je crois que vous
étiez ici aujourd'hui lorsque l'on a précisé les choses.
Je ne veux pas retourner dans le détail, mais c'est certainement notre
intention de les inclure. Ils le savent et certains seront inclus.
L'échéancier sera différent des autres pour les raisons
que j'ai déjà citées. (15 h 30)
Pour ce qui est de votre souhait que tous les acquis soient
préservés, je peux vous assurer que le protocole d'entente qui a
été signé avec votre association sera un genre de
modèle pour les autres intervenants. Des codes de bonne pratique seront
prévus dans tout le système. Il y aura toute la
réglementation et les codes de bonne pratique qui seront une extension
du projet de loi. Surtout sur cela va reposer, en fait, l'essence même du
projet de loi qui est basé sur la formation que votre association s
déjà expérimentée. Je prends bonne note de ce que
vous avez
dit par rapport aux employés saisonniers. Je ne peux pas vous
donner de réponse immédiate, mais on va examiner cela.
Pour ce qui est de la mention "de façon exceptionnelle" de
travail, là aussi, il y a d'autres intervenants qui ont apporté
des observations. On va voir cela de près afin de savoir si on va
ajuster ou amender cela en conséquence.
Vous avez aussi suggéré qu'on applique des certificats
même à ceux qui se servent de pesticides pour usage domestique.
Naturellement, toutes ces choses sont souhaitables, mais toute la question
repose sur la façon de pouvoir les appliquer. Faire une loi, c'est bien
beau, mais si vous n'avez pas l'infrastructure nécessaire, le
financement pour l'appliquer et la suivre, cela fait plus de tort que de bien.
C'est peut-être quelque chose qu'on pourrait considérer dans une
phase ultérieure, mais pour le moment nous n'avons pas les ressources,
les infrastructures et la structure pour pouvoir le considérer
actuellement.
Pour les gens qui ont déjà suivi le cours de 350 heures de
la Télé-université, c'est bien vrai que ce cours va
beaucoup plus loin que les cours qui seront prévus dans la loi. On
parle, nous, peut-être de 60 heures et vous en avez 350. Au
départ, je peux vous dire que tous ceux qui ont déjà suivi
le cours de votre association n'auront pas à subir d'autres examens. Je
pense que c'est une question très légitime que vous posiez. On ne
va pas obliger des gens è reprendre des cours qu'ils ont
déjà suivis dans le cadre de votre entente. Mais, pour tous les
nouveaux membres qui n'ont pas déjà subi l'examen et suivi les
cours, à ce moment-là, ils auront à subir les examens
d'après les cours de formation établis selon la loi de concert
avec le ministère de l'Éducation, science et technologie, etc.
C'est compréhensible.
En ce qui concerne les registres, là aussi, vous avez dit: II y a
des registres et il faudrait que la procédure soit moins lourde. Tout le
contenu des registres sera précisé dans le règlement
à suivre. On va devoir ajuster cela en fonction des besoins et des
expériences qui ont été faites. Si on peut alléger
le processus dans le sens de ce que vous nous dites, ce sera
considéré très sérieusement.
J'avais pris note d'une autre chose que je voulais discuter
brièvement avec vous. Ah, oui! En ce qui concerne les résidus
toxiques, comme vous le savez, c'est le grand problème qui afflige
toutes les entités gouvernementales où qu'elles se trouvent
aujourd'hui. J'en ai discuté avec des intervenants d'autres provinces.
Nous travaillons présentement à l'élaboration d'une
politique pour couvrir cette question des déchets toxiques en petite
quantité dans les maisons. L'Ontario a élaboré une
politique.
En ce moment, elle y travaille afin de voir avec quelle
efficacité on peut se débarrasser de cela et par quels
mécanismes. Nous travaillons actuellement à cela pour trouver une
solution à ce problème qui, je le réalise, persiste et
s'étend à tout le Québec. On n'a encore trouvé
aucune solution pour l'instant.
Ce sont les points que j'ai pu souligner en parcourant votre
mémoire. Si vous avez des questions et que vous croyez que j'ai
oublié quelque chose dans votre mémoire ou que vous n'avez pas
obtenu de réponse, veuillez me poser des questions et j'essaierai d'y
répondre du mieux possible.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre.
Avez-vous des questions?
M. Cameron: Oui, M. le Président. M. le ministre, en ce
qui a trait à l'utilisation pour usage domestique, nous, on disait qu'on
veut englober tous les utilisateurs ou les applicateurs de pesticides quels
qu'ils soient. Les gens ne le savent peut-être pas, mais il y a beaucoup
de concierges, dans les complexes d'habitation, qui font des traitements dans
des logements de locataires sans aucune compétence et qui appliquent
à qui mieux mieux, tel qu'on l'a décrit dans notre
mémoire, des pesticides et ce, sans aucune règle de base de
sécurité élémentaire que l'on juge essentielle.
C'est peut-être seulement sur cela que l'on voudrait avoir
peut-être un peu plus d'informations. C'est sûr que la loi,
présentement, est la base. Vous allez construire autour. On voudrait
connaître le mécanisme que votre ministère entend appliquer
dans ce type de situation.
M. Lincoln: Je vais vérifier cela et je vais revenir
là-dessus. Notre légiste vérifiera cela pour voir quelle
disposition s'appliquera ou ce qu'on a en vue. Je vais vous revenir
là-dessus.
M. Cameron: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Rochefort): Pendant ce temps, M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Tout d'abord, merci d'être là et d'avoir
produit un mémoire d'aussi bonne qualité. J'oserais qualifier
votre mémoire d'une kyrielle d'incantations à la
compétence. On voit, presque à chaque page, que vous voulez
absolument que les gens qui utilisent les pesticides aient la compétence
de les utiliser. Cela, je trouve que c'est une grande force de votre
mémoire. En contrepartie, sa grande faiblesse serait que vous ne
spécifiez à peu près nulle part qu'on devrait avoir des
normes pour diminuer la quantité de pesticides utilisée. Ce sont
les deux grandes choses que je retiens. Il est très bien
rédigé et très clair.
Ma première question est connexe à
celle que vous avez posée au ministre. Vous nous dites dans ce
mémoire que, dans l'utilisation domestique qui s'élève au
Québec à environ 120 000 livres par année, 55 000 livres
seulement ont été utilisées par des gens de votre
association. De là découle chez vous une grande crainte que des
gens incompétents n'utilisent à qui mieux mieux des pesticides
sans aucune base. Je suis complètement d'accord avec vous pour que les
gens qui utilisent des choses aussi nocives aient les compétences pour
le faire. Vous nous dites aussi dans votre mémoire qu'un grand programme
de cours de formation, en 1983, a été mis sur pied par le biais
de la Télé-université et d'autres moyens. Est-ce que, chez
vous, chaque membre doit d'abord avoir suivi ce cours pour être reconnu
comme membre? Sinon, quelle compétence faut-il et où vos cours de
formation sont-ils donnés pour être reçu membre de votre
association? Vu que vous insistez tellement sur la compétence, je suis
persuadé que vous pouvez facilement me répondre.
M. Cameron: Je ne commencerai pas à vous expliquer la
nomenclature des états des membres de notre association. Mais, seulement
pour vous situer, pour vous positionner, nous avons ce que nous appelons les
membres en probation et les membres actifs. Les membres en probation sont des
gens qui sont intéressés au domaine de l'extermination ou ce sont
des gens qui, déjà à l'heure actuelle, manipulent des
pesticides et veulent parfaire leurs connaissances. Avant d'arriver chez nous
en tant que membres actifs, d'être reconnus comme exterminateurs et
d'avoir leur carte de compétence, ils doivent avoir suivi les trois
volets du cours de la Téléuniversité.
Vous nous disiez: On ne voit pas, au niveau quantitatif...
M. Blais: Si cela ne vous fait rien - je m'excuse de vous
interrompre - avant de tomber du côté quantitatif, je voudrais
rester du côté qualitatif. Combien avez-vous de membres dans votre
association et combien ont suivi le cours?
M. Cameron: On représente environ 85 % de l'industrie
totale québécoise au niveau de l'extermination. Cela
représente environ 225 personnes sur 250.
M. Blais: D'accord. Donc, pour la majorité, vos membres
qui ont une carte de membre reconnue par votre association sont des gens qui
ont la compétence parce qu'ils ont suivi le cours que vous donnez
à la Téléuniversité, 225 sur 250? Cela veut dire
cela?
M. Cameron: C'est cela.
M. Blais: Bon. Alors, je comprends très bien maintenant
que vous insistiez sur la compétence. Maintenant, qu'est-ce qu'un membre
en prohation, chez vous, et quelle formation lui donnez-vous pour lui permettre
d'avoir les compétences voulues pour avoir sa carte de membre?
M. Cameron: Concernant cela, M. Leavey, qui a travaillé au
bureau de direction et qui a travaillé au niveau de la formation et des
cours, pourra vous donner les informations pertinentes mieux que moi.
M. Leavey (Harold): En fait, le membre en probation, chez nous,
c'est simple, c'est qu'on ne veut pas remettre, au niveau de notre association,
des cartes de compétence à des qens qui n'ont pas suivi les
cours, a des gens qui n'ont pas aussi une expérience pratique assez
importante. Alors, tout nouveau qui voudrait s'inscrire à notre
association entre membre en probation et le demeure tant qu'il n'a pas
terminé ses cours. Cela lui permet, en fin de compte, d'obtenir beaucoup
d'information que notre association véhicule parmi ses membres. On ne
voulait pas empêcher des exterminateurs d'acquérir cette formation
de base qu'on dispense. On donne beaucoup de formation complémentaire,
on donne de l'information, on a des congrès annuels où de
l'information est donnée sur les pesticides, etc. On voulait permettre
au plus grand nombre de gens de l'acquérir. On a créé ce
membre en probation, mais il n'a pas le droit d'utiliser le sigle de
l'association, il n'a pas le droit de s'identifier comme un membre de
l'association, etc. Il n'est là que pour acquérir une certaine
formation.
M. Blais: Je comprends très bien. De là, je
comprends aussi la question de M. Cameron qui demandait: Qu'est-ce qui va
empêcher à l'avenir, si ce projet de loi est bonifié,
quelqu'un qui se dit exterminateur de le faire sans aucune compétence?
C'est votre crainte. Vous aimeriez que le projet de loi empêche certaines
personnes non compétentes de se dire exterminateurs, comme le concierge,
par exemple. C'est dans ce sens que vous insistez sur la formation. Que votre
association soit presque exclusivement reconnue, est-ce que ce n'est pas aller
trop loin?
M. Leavey: Ce n'est pas tout à fait ce qu'on demande, on
ne veut pas que ce soit...
M. Blais: Je voudrais le savoir.
M. Leavey: Ce qu'on demande, c'est simple. Présentement,
l'extermination se fait par des firmes spécialisées. Nous disons:
La loi fera en sorte que les exterminateurs, les professionnels de
l'extermination devront obtenir une certaine compétence. On aura un
acquis à ce niveau. Par contre, la loi passe è
côté de gens qui ne se disent pas exterminateurs, qui ne sont pas
des professionnels de l'extermination, comme le bonhomme qui possède 20
immeubles de 100 logements - cela existe en grand nombre à
Montréal - qui fait lui-même ou qui a un concierge qui fait de
l'extermination dans ses logements, qui n'est pas un spécialiste, qui ne
connaît rien au niveau de l'extermination et au niveau des pesticides,
qui les applique de façon absolument inacceptable. Ces gens ne seront
pas couverts par la loi, selon ce qu'on a vu, parce que ce ne sont pas des
exterminateurs, ils utiliseront des produits domestiques. Nous disons à
ces gens: Tu peux utiliser des pesticides de classe domestique chez toi, cela
va. Si tu veux en utiliser ailleurs que chez toi, dans le logement d'un de tes
locataires, quelque chose comme ça, si tu as plusieurs logements, donne
la formation nécessaire à ton concierge. Il aura un certificat
qui garantira aux locataires de ces immeubles un niveau de compétence
acceptable. Nous trouvons inacceptable que beaucoup de gens pourraient
continuer à faire de l'extermination sans avoir aucune
compétence.
II faut dire qu'il y a à Montréal - nous en sommes
convaincus - plus d'utilisation par des gens qui ne sont pas exterminateurs,
qui sont des concierges ou tout simplement des propriétaires, que par
des exterminateurs. C'est cela que nous trouvons un peu inacceptable.
M. Cameron: Pour compléter dans le même sens que
l'intervention de M. Leavey, tous les gens du Québec, quels qu'ils
soient, s'ils sont sensibilisés à la protection de
l'environnement, à l'utilisation rationnelle des pesticides, peuvent
suivre en tout temps les cours de la Télé-université. Je
peux vous dire qu'il n'y a pas que des exterminateurs qui ont suivi ces cours,
beaucoup d'environnementalistes, beaucoup de gens sensibilisés au
domaine de l'environnement et à l'utilisation de pesticides les ont
suivis avec beaucoup d'attention et d'ardeur, même.
M. Blais: L'article 30 dit: "Aucun certificat n'est requis de
celui qui utilise, sur ses biens, des pesticides destinés à un
usage domestique." C'est à cela que vous vous en prenez, si je comprends
bien.
M. Cameron: Vous comprenez très bien.
M. Blais: D'accord. Mon devoir est de voir à ce que vous
demandez soit respecté dans la loi si on juge que c'est opportun. C'est
ce que vous nous demandez.
M. Cameron: Exactement.
M. Blais: C'est ce qu'on va examiner.
M. Cameron: Merci.
M. Blais: Je vous demande une chose, maintenant. Vous dites
à la page 13: "La prise en charge des résidus par votre
ministère pourrait, à court terme, être une solution
acceptable." Vu que vous êtes des spécialistes en extermination,
comment ces résidus peuvent-ils être contrôlés? Ne
les prendriez-vous pas sous votre gouverne, vous les exterminateurs, si jamais
le ministère vous le demandait, comme il a demandé à l'UPA
de surveiller la formation, etc.? Croyez-vous qu'il y aurait une
coopération possible avec votre association sur ce contrôle?
M. Cameron: Oui. De toute façon, on a toujours
été favorables à cela. Nous avons un code des pratiques
professionnelles qui a été ébauché avec l'aide du
ministère de l'Environnement. On a un code qui parle, justement, du
contrôle des résidus. (15 h 45)
II faut se dire une chose, par exemple, c'est que les exterminateurs,
par l'utilisation de 55 000 livres de pesticides au Québec, ne
représentent pas une masse d'utilisateurs qui ont des chances de rester
pris avec des gros résidus. Il ne faut pas oublier, non plus, que nos
interventions, dans 90 % des cas, se font à l'intérieur des
bâtiments et non pas à l'extérieur.
Ce matin, un monsieur disait: Si j'ai acheté un litre de produit
et qu'il m'en reste un demi-litre, qu'est-ce que je fais? Ces petites
quantités, je peux les entreposer en attendant que le ministre trouve
une solution adéquate pour disposer de ces résidus. Avec ce que
nous apportons au ministre de l'Environnement, ce que le ministre nous apporte,
conjointement, nous pourrons sûrement trouver des solutions à
court terme et à long terme pour favoriser la protection de
l'environnement et la santé de toute la population du Québec.
M. Blais: Merci. À la page 5, vous avez un titre qui me
déplaît, je le comprends très mal. "Les droits des citoyens
quant à l'utilisation abusive des pesticides". Comme si on avait des
droits, comme citoyen, d'utiliser de façon abusive des pesticides. Je
sais que ce n'est pas ce que vous vouliez dire, mais c'est ce qui est
écrit. Vous dites dans cela que vous avez une certaine crainte, à
la page 5: Devant la gravité des causes, toute demande d'injonction
selon l'article 72 doit être instruite et jugée d'urgence. Votre
recommandation ne vient-elle pas ici poser un frein et augmenter les risques
à l'environnement et à la santé? Vous parlez "d'ordonner
une étude exhaustive et sérieuse du bien-fondé de la
plainte"; ne croyez-vous pas que ce serait là un frein un peu trop fort,
quand même?
M. Cameron: Face à cela, notre position était... En
tout cas, nous l'avons interprété de cette manière. Vous
pourrez me corriger ou M. le ministre pourra me corriger. On voyait que la loi
permettait a tout individu, que ce soit vous ou n'importe qui, sans aucune
compétence ou connaissance, d'arrêter...
M. Blais: Il ne faut pas que vous me disiez que je n'ai pas de
compétence!
M. Cameron: Non, monsieur, ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Blais: Merci, M. Cameron.
M. Cameron: Prenons le cas d'un exterminateur. Le bonhomme est en
train de faire un traitement et, woops, un citoyen ou n'importe qui dit: Selon
moi, cette personne fait une utilisation abusive ou n'utilise pas le bon
produit. Face à cela, on avait une certaine crainte. Cela voulait dire
qu'il pouvait faire arrêter le traitement dans une maison d'appartements
ou à quelque endroit que ce soit. C'est pour cela qu'on demande au
ministre de fournir des inspecteurs qui, eux, seront compétents et
pourront juger du bien-fondé d'une telle plainte ou d'une telle demande
d'injonction.
M. Blais: J'ai mon confrère qui suit tout cela de
très près et qui a bien étudié la chose aussi; je
ne veux pas être égoïste, je vais lui céder la parole
parce qu'il a plusieurs questions certainement très pertinentes.
M. Dufour: Merci, M. le Président. Peut-être pas
plusieurs questions, mais au moins cette question-ci puisqu'il y aura d'autres
points que mon collègue va vouloir approfondir. Vous parlez des droits
des citoyens concernant l'utilisation abusive. Je comprends que le citoyen
pourra porter plainte devant le tribunal. Vous dites, dans le même
mémoire, un peu plus loin, qu'avant de faire cela le ministère
devrait s'interférer en faisant une étude exhaustive pour savoir
si c'est sérieux ou pas. J'ai l'impression que ce que vous demandez,
cela n'existe nulle part. C'est le danger et c'est le problème de la
démocratie. Tous les citoyens, par rapport à ce qui se passe dans
l'environnement, peuvent, à un moment ou à un autre,
prétendre qu'il y a un danger, un problème. C'est pour cela qu'il
y a un bureau d'audiences publiques, il y a des études d'impact.
Si cela vous est accordé, à mon point de vue, vous
remettez en cause tout ce qui existe dans notre droit. Si le ministère
de la voirie veut construire une route, quelqu'un pourra dire: Je vais faire
émettre une injonction. Là, on va dire: Pas devant le tribunal.
Avant cela, le ministère va prendre le dossier et étudier sa
propre cause, il va prendre sa propre décision et dire au citoyen: Vous
n'avez pas le droit de le faire. C'est un risque propre à la
démocratie par l'application de la loi comme telle. Si un citoyen pense
qu'il y a une situation abusive, il doit avoir le droit de recourir au tribunal
et on doit vivre avec cela. L'histoire nous rappelle
régulièrement qu'à la longue - et cela ne prend pas
tellement de temps - les citoyens prennent leurs distances par rapport aux
tribunaux. Il y a des coûts attachés a cela. Le citoyen ne peut
pas rêver et se dire chaque matin, en se réveillant: Il doit y
avoir un problème là, il y a un problème du
côté gauche, il y en a un peu partout. Il va prendre des
injonctions tout le temps.
Je ne sais pas si vous avez des explications à nous donner, mais,
personnellement, je ne vois pas de quelle façon vous pourriez appliquer
cet article. Vous devriez, si vous le pouvez, nous donner de meilleures
explications sur la façon dont on pourrait appliquer cet article, parce
que je ne la connais pas. Normalement, quand il y a une démarche
judiciaire, le civil ne va pas à l'encontre de cela. Cela n'existe nulle
part. C'est nier tout pouvoir à des tribunaux, ce qui n'est pas notre
cas. Pourriez-vous me donner plus d'informations? On peut le retirer, parce que
je n'ai pas l'impression qu'on pourrait donner suite à votre
demande.
M. Cameron: M. Leavey.
M. Leavey: Je vais essayer de répondre à cette
question. Au départ, l'idée qui a fait qu'on a écrit ce
paragraphe, c'était à partir de cas précis. À un
moment donné, on s'interrogeait et on se disait: On est à faire
un traitement dans un domaine à cause d'un problème bien
particulier d'insectes; on doit agir rapidement; il y a des délais et
les périodes où on doit agir sur l'insecte, c'est le moment
présent. A un moment donné, quelqu'un lève une injonction.
Une personne dit: Je ne le sais pas, j'ai peur de cela et je lève une
injonction contre eux. Les travaux arrêtent. Cela pourrait vouloir dire
des sommes considérables et des dommages importants par certains
insectes. Cela pourrait vouloir dire des dommages importants et ce serait
arrêter un travail qu'il serait nécessaire de faire rapidement. Ce
qu'on a, tout simplement, voulu faire, c'est essayer de sensibiliser les
commissaires à cet effet. Effectivement, je crois qu'on a, dans ce qu'on
a écrit, dépassé de beaucoup cela. On ne savait pas
comment. Il faut dire que ce travail, on l'a fait d'urgence parce qu'il a
été préparé à la dernière minute. On
a été avisés très tard. C'est peut-être un
des éléments qui sont sortis, mais le fond de l'histoire,
c'était tout simplement de vous sensibiliser au fait que, souvent, on a
des
problèmes qui pressent. On a des interventions qui doivent se
faire rapidement et, si elles sont arrêtées d'une façon
injustifiée, cela pourrait créer des dommages importants. Les
mécanismes, je vous avoue que je n'entrerai pas là-dedans.
M. Blais: M. Cameron, je vous ai interrompu tantôt pendant
que vous répondiez au deuxième volet de ma question et, à
cause des questions qui ont suivi... Je suis persuadé que vous ne l'avez
pas oubliée, mais je veux vous donner l'opportunité d'y
répondre. À la page 3 de votre mémoire, vous dites: "Cette
démarche est une véritable démonstration qu'un groupe de
personnes décidées peut se prendre en charge et assumer ses
responsabilités face à la sécurité du public et
à la protection de l'environnement". La sécurité, à
cause de la compétence qui transparaît partout dans votre
mémoire, j'en suis, mais j'osais dire que la faiblesse, c'était
sur l'utilisation quantitative. Vous alliez me répondre, mais,
malheureusement, je vous ai interrompu. Alors, je vous donne
l'opportunité de nous donner votre avis à ce sujet.
M. Cameron: Merci beaucoup, M. Blais. Je trouve plaisant de voir
qu'on est capable de revenir sur un sujet. On parlait du qualitatif et on va
sur le quantitatif.
Dans notre industrie, à l'Association des spécialistes en
extermination du Québec, on a mis sur pied - j'y reviens encore une fois
- un code des pratiques professionnelles. Dans ce code, pour revenir au niveau
quantitatif, on est de plus en plus conscient que les moyens qu'on a changent
et évoluent avec le temps. Nous avons déterminé, dans
notre code des pratiques professionnelles, une démarche. La
première démarche, c'est qu'au lieu d'arriver et d'appliquer
immédiatement un pesticide, on va regarder la situation; on va agir sur
la cause en premier. On va utiliser soit des moyens physiques ou des moyens
biologiques pour contrôler la cause et, en dernier recours, on va
utiliser les pesticides...
M. Blais: Des moyens biologiques comme?
M. Cameron: Des moyens biologiques, on va utiliser des
phéromones. On va utiliser des trappes collantes. Les phéromones,
en passant, ce sont des "attractants" sexuels pour les insectes. C'est
drôle à dire, mais c'est cela.
M. Blais: J'ai mal entendu.
M. Cameron: Comme moyens biologiques, nous allons utiliser des
phéromones. Des phéromones, ce sont des "attractants" sexuels.
Donc, ils se font prendre par le mauvais bord. M. Blais: Ah bon!
M. Cameron: On va utiliser, encore une fois, des moyens
mécaniques, soit...
M. Blais: Cela ne s'applique qu'aux animaux?
M. Cameron: Oui, jusqu'à présent.
Des voix: Ha! Ha!
Une voix: Dans les clubs à gogo.
M. Cameron: Dans certains cas. À partir de cela, si on
emploie tous les moyens autres que les pesticides en premier - et c'est ce
qu'on préconise dans notre code des pratiques professionnelles - on
rationalise de beaucoup l'utilisation des pesticides dans notre industrie.
J'espère que vous n'avez pas peur des phéromones, M. Blais?
M. Blais: Vous m'avez rassuré en disant que cela n'allait
que chez les insectes surtout. Je vous remercie beaucoup. En gros, je tiens
à vous dire que vu que vous insistez tellement sur la compétence
des utilisateurs, cela me donne confiance, d'abord, en votre association et
cela rend ce mémoire qualitatif. Je vous remercie d'être venu et
d'avoir dit votre idée. Je n'ai pas d'autres questions; je ne sais pas
s'il y en a d'autres.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le
député. M. le ministre, vous avez d'autres questions? Le mot de
la fin, peut-être.
M. Lincoln: Non, merci beaucoup, M. le Président. Merci
à M. Cameron et à son équipe d'être venus. On va
continuer à travailler et à collaborer ensemble pour que le code
des pratiques que vous avez utilisé serve de base à tout notre
travail ultérieur et, ensuite, les cours de formation plus uniformes
dans tout le Québec. On va solliciter votre collaboration pour un
travail commun. Merci beaucoup d'être venus.
Le Président (M. Rochefort): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: M. le ministre, il me semble que M. Cameron vous avait
posé une question au tout début et vous avez dit que vous
reviendriez avec une réponse.
M. Lincoln: Je m'excuse.
M. Blais: C'est un oubli, j'en suis persuadé.
M. Lincoln: Oui, c'est tout à fait un oubli.
Le Président (M. Rochefort): M. le ministre,
M. Lincoln: Je pense que la question avait trait au concierge. Ce
qui arrive, c'est que les dispositions actuelles prévoient que les
concierges aient un certificat dans le cas de l'utilisation de pesticides
jusqu'à la catégorie 3, mais pas de la catégorie 4. J'ai
cru comprendre que le sens de votre intervention était de vouloir qu'ils
soient soumis à des examens et à des certificats pour la
catégorie 4 aussi. On va examiner cela. Vous comprenez, comme je l'ai
dit au départ, qu'il faut faire cela par étapes. Il est
très difficile de commencer des structures qu'on ne peut pas
contrôler, qu'on ne peut pas surveiller. On n'a pas les
mécanismes, on n'a pas l'infrastructure. On part du point de
départ. Alors, il faudra voir. En tout cas, on prend bonne note de cela.
Pour le moment, c'est catégories 1, 2 et 3. On n'a pas le
mécanisme pour la catégorie 4, mais on va l'examiner avec
sérieux.
M. Cameron: M. le Président... Le Président (M.
Rochefort): Oui.
M. Cameron: M. le ministre, soyez assuré, encore une fois,
de notre totale collaboration pour les années à venir. Quant aux
membres de la commission, on vous remercie beaucoup de votre attention lors de
la présentation de notre mémoire. Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre participation
à nos travaux. J'appellerai maintenant l'Association des manufacturiers
canadiens.
M. Lincoln: Est-ce qu'on peut avoir deux ou trois minutes de
suspension pour donner un coup de téléphone?
Le Président (M. Rochefort}: Oui. Toutes les raisons sont
bonnes. On va suspendre nos travaux pour quelques minutes.
(Suspension de la séance è 15 h 59)
(Reprise à 16 h 13)
Le Président (M. Rochefort): À l'ordre, s'il vous
plaît! À l'ordre, s'il vous plaît! Merci.
La commission reprend ses travaux. J'inviterais sans plus tarder
l'Association des manufacturiers canadiens à prendre place parmi nous.
Je vous demanderais de vous présenter pour l'information des membres de
la commission et pour le Journal des débats, s'il vous
plaît. Allez-y.
Association des manufacturiers canadiens
Mme Fecteau (Louise): Je m'appelle Louise Fecteau. Je suis la
vice-présidente de l'Association des manufacturiers canadiens au
Québec. J'aimerais vous présenter mon collègue, Me Michel
Yergeau, qui a collaboré étroitement à la rédaction
de notre mémoire. Me Yergeau, avec moi, se prêtera à la
période de questions qui nous sera réservée.
Le Président (M. Rochefort): Bienvenue parmi nous. Sans
plus tarder, je vous demanderais de nous faire la présentation de votre
mémoire.
Mme Fecteau: C'est avec plaisir que la division du Québec
a accepté l'invitation qui nous a été faite en
décembre dernier de commenter le présent projet de loi qui fait
l'objet de cette commission parlementaire. Elle vous a donc transmis un
mémoire dont j'éviterai la lecture, me contentant d'en
résumer les principes.
Je crois qu'il est important de vous souligner que ce mémoire a
été rédigé avec l'aide d'un groupe de travail au
sein duquel siègent les entreprises manufacturières de toutes les
grosseurs et de tous les secteurs d'activités. Ce même
mémoire a fait l'objet d'un consensus auprès des membres de notre
conseil d'administration qui est composé de 35 représentants
d'entreprises manufacturières.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, il faut également souligner
que, tant comme citoyens que comme manufacturiers, les membres de l'association
sont indiscutablement préoccupés par la qualité de
l'environnement et par la protection du milieu de vie. En témoignent
assurément les efforts considérables consentis, la plupart du
temps de plein gré - je prends pour exemple le dossier des BPC - pour
améliorer les moyens de production, en termes d'efficacité
environnementale, mettre au point les programmes d'assainissement, se conformer
aux normes toujours plus sévères de nos lois et règlements
à ce sujet et pour contribuer à une diminution des charges
polluantes.
Ceci dit, l'Association des manufacturiers canadiens appuie le principe
d'une loi sur les pesticides et tient donc à assurer le gouvernement de
son appui quant à la pertinence de légiférer en ce
domaine. Toutefois, des réserves vous sont étalées dans le
mémoire qui a été déposé et elles
comprennent deux volets: les principes généraux qui sous-tendent
cet avant-projet de loi et le libellé de l'avant-projet de loi.
En ce qui concerne les principes qui sous-tendent cet avant-projet de
loi, des réserves sont faites è l'égard de la pertinence
de faire adopter une loi particulière pour réqir l'usage des
pesticides au Québec. L'AMC croit plutôt que les
gouvernements pourraient procéder par simple amendement
législatif de la Loi sur la qualité de l'environnement car cette
dernière offre toutes les garanties de souplesse permettant d'accorder
aux pesticides les mesures spécifiques que le contrôle et la
gestion de leur usage justifient. Cela éviterait des conflits potentiels
que peut comporter l'administration de deux textes législatifs visant
sensiblement les mêmes fins. Cela pourrait éviter également
aux personnes susceptibles d'y être visées de devoir se
familiariser avec un autre texte législatif et surtout se familiariser
avec de nouveaux mécanismes décisionnels qu'il faudra encore de
nombreuses années à assimiler.
La seconde réserve concerne le manque de clarté et le
chevauchement qui existe entre l'avant-projet de loi actuel et la Loi sur la
qualité de l'environnement. Comme exemple, l'article 20 de la Loi sur la
qualité de l'environnement; l'avant-projet de loi, visant principalement
l'émission de permis d'exploitation et de certificats d'utilisation, ne
soustrait pas les pesticides à l'application de cet article, ce qui, en
l'occurence, peut également conduire à des conflits
potentiels.
La troisième réserve concerne le dédoublage de la
Loi sur la qualité de l'environnement avec l'avant-projet de loi sur les
pesticides. En effet, plusieurs dispositions telles celles relatives à
la modification, la suspension ou la révocation d'un permis ne sont rien
d'autre que la transposition des articles de la Loi sur la qualité de
l'environnement. Nous pourrions multiplier les exemples faisant ainsi la
démonstration que l'avant-projet de loi sur les pesticides n'est en
fait, par sa nature, qu'un chapitre qui se serait égaré hors de
la Loi sur la qualité de l'environnement, soit un système de
certificats d'autorisation qui couvre le volet prévention et un
système d'ordonnances qui, lui, vise à corriger les
problèmes déjà causés.
Pour conclure ce premier volet qui met en doute la
nécessité d'adopter une loi spécifique pour régir
les pesticides, l'Association des manufacturiers canadiens déplore
autant la multiplication des démarches administratives que l'absence de
perspective et de vue d'ensemble de l'actuel avant-projet de loi. En effet, les
principaux utilisateurs de pesticides au Québec qui sont les
agriculteurs sont exclus du champ d'application de la loi, si ce n'est que le
gouvernement se réserve un pouvoir réglementaire à leur
endroit. N'y aurait-il pas lieu plutôt d'appliquer la loi aux
agriculteurs, les principaux utilisateurs de pesticides, quitte à
définir un régime particulier qui tienne compte de leurs
besoins?
Le deuxième volet de notre intervention concerne le texte
même de cet avant-projet de loi. Pour ne citer que quelques exemples, la
définition du mot "environnement" diffère dans l'avant-projet de
loi sur les pesticides de celle de la Loi sur la qualité de
l'environnement. Cette extension du mot "environnement" constitue une addition
importante et, si cette dernière est utile pour une meilleure protection
de l'environnement, c'est dans la Loi sur la qualité de l'environnement
qu'on devrait l'y trouver et non pas uniquement dans une loi ne visant qu'un
aspect de la protection de l'environnement.
Un deuxième élément touchant le texte du projet de
loi concerne la concentration des demandes de permis ou de certificats dans les
mains du ministre de l'Environnement plutôt que dans celles du
sous-ministre, comme c'est le cas actuellement dans la Loi sur la
qualité de l'environnement. Cette conception centralisatrice nous semble
aller à contre-courant de la régionalisation du ministère
et elle risque de créer un goulot d'étranglement à
Québec.
Un troisième élément touche le larqe pouvoir
réglementaire conféré au gouvernement dans ce projet de
loi. Alors qu'on se trouve dans une ère de
déréglementation, ce que reflètent bien les propos du
mémoire Scowen à ce sujet, le présent projet de loi
contient un pouvoir réglementaire tel qu'il nous est impossible d'en
connaître précisément la portée puisque celle-ci ne
sera évaluable que lorsque le texte des règlements qui
l'accompagnent sera connu. Bref, dans l'état actuel des choses, il est
présentement impossible de dire à quels pesticides s'appliquera
la loi si elle est adaptée, non plus qu'à quel type de
commerçants qui font la vente ou de services elle s'appliquera. Tout ce
qu'il est possible de déterminer, c'est que la future loi sur les
pesticides ne s'appliquera pas aux plus gros utilisateurs de pesticides.
Mais à qui donc s'appliquera la loi? Au manufacturier qui utilise
les pesticides dans son procédé industriel? À toute
entreprise qui désire procéder à des pulvérisations
aériennes? À celui qui exploite un commerce d'horticulture qui
devra avoir à son emploi au moins une personne physique titulaire d'un
certificat d'utilisation?
Vu sous cet angle, non seulement l'adoption du projet de loi
spécifique aux pesticides risque-t-elle d'alourdir inutilement la
législation en matière de protection de l'environnement au
détriment d'une vraie protection de l'environnement, mais encore est-ce
là utiliser le processus législatif pour une fin qui, somme
toute, ne justifie pas les moyens.
En conclusion, l'Association des manufacturiers canadiens estime qu'il
n'y a pas une urgence telle qu'il faille adopter l'avant-projet de loi sur les
pesticides en son état actuel. L'AMC estime que l'objet de cet
avant-projet de loi cadre parfaitement avec
l'actuelle Loi sur la qualité de l'environnement et qu'il devrait
en faire partie intégrante.
Par ailleurs, l'AMC se réjouit de l'importance que le
gouvernement du Québec accorde aux pesticides et appuie ses efforts
visant à aborder ce sujet sans créer de fausses paniques, mais
sans non plus le prendre à la légère. L'AMC se
réjouit aussi du fait que le gouvernement du Québec reconnaisse
l'importance et ia nécessité de l'utilisation des pesticides dans
de nombreux domaines de l'activité humaine autant qu'elle partage
l'opinion du gouvernement sur la pertinence d'assurer la présence d'un
personnel qualifié dans les entreprises.
D'autre part, vu l'ampleur du processus réglementaire
nécessaire pour donner une portée et un encadrement à la
Loi sur les pesticides, il serait nécessaire à la fois
d'accompagner tout futur projet de loi sur la question des balises permettant
de prévoir de façon plus précise la portée des
règlements et de déposer les textes réglementaires
essentiels en même temps que le projet de loi. Dans une perspective plus
large de protection de la santé du public et de l'environnement en
général, l'Association des manufacturiers canadiens est d'avis
que la question des pesticides devrait être réabordée en
fonction d'une vision large de l'environnement et des effets synergiques de
l'utilisation des pesticides plutôt qu'en termes de processus
administratif, de permis, de certificats d'autorisation et de pouvoirs de
révocation comme c'est exclusivement le cas dans l'état actuel du
projet de loi.
Enfin, l'AMC persiste è croire qu'un tel projet de loi, s'il
devait être adopté, créerait à long terme des
problèmes d'incompatibilité avec la Loi sur la qualité de
l'environnement, que ce ne serait que par son incapacité à
résoudre les problèmes causés par l'actuel article 20 de
la Loi sur la qualité de l'environnement qui risque d'imposer un fardeau
à la fois très lourd et surtout extrêmement difficile
à l'ensemble de l'industrie et des utilisateurs de pesticides.
Merci.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
présentation. M. le ministre.
M. Lincoln: M. le Président, tout d'abord je dois me
réjouir, en m'adressant à la présidente de l'association,
de voir l'attachement ou l'affection qu'a déclaré l'association
pour la Loi sur la qualité de l'environnement. Je pense que j'avais mal
interprété mes contacts, parce que je semblais toujours voir que
la Loi sur la qualité de l'environnement, du point de vue des industries
manufacturières, n'était pas toujours comprise dans son aspect
positif. Alors, je me réjouis de cet attachement que vous
démontrez dans votre mémoire à la
Loi sur la qualité de l'environnement. Cela nous aidera beaucoup
à remplir notre tâche par rapport à la dépollution
industrielle.
J'ai peut-être ma! compris bien des propos qui m'ont
été tenus aujourd'hui. La Loi sur la qualité de
l'environnement est devenue un instrument central pour vous et je m'en
réjouis beaucoup. Je voulais vous poser quelques questions, Mme Fecteau,
parce que, lisant votre mémoire, il me semble qu'il y a des malentendus
qui se sont glissés de part et d'autre. Avez-vous reçu et lu
le...
Mme Fecteau: Oui, effectivement, nous en avions deux copies.
M. Lincoln: D'abord, vous dites des choses dans votre
mémoire qui semblent démontrer que peut-être la lecture
n'était pas... Par exemple, vous dites a la page 11: "Qu'en est-il des
objectifs d'éducation que s'était fixés le
ministère de l'Environnement lors de sa création? N'est-ce pas
dans ce domaine des pesticides qu'un programme d'éducation serait
présentement le plus utile?" Je me demandais comment vous pouvez
concilier cela avec tout un chapitre de ce projet qu'on vous a envoyé
qui traite justement d'éducation. Au chapitre 6.2, par exemple, on dit:
Le plan d'action du ministère de l'Environnement, le coeur du plan
d'action démontre qu'éduquer c'est la chose centrale. Au chapitre
7 de l'avant-projet de réglementation, tout une section est
consacrée au projet d'éducation du ministère. À la
page 7.21, on dit l'évaluation de la compétence des intervenants
et on décrit tout le processus d'éducation que le
ministère se donne. En fait, ia base même du projet de loi va dans
le sens de dire que tout est basé sur la formation. Des gens nous ont
dit: Vous mettez trop l'accent sur la formation. Je me demandais comment vous
pouvez dire qu'on ne tient pas compte de l'éducation dans tout ce
projet.
Mme Fecteau: M. le ministre, malheureusement, les propos que vous
venez de tenir ne se retrouvent pas dans l'avant-projet de loi et c'est
malheureux que ces termes ne se retrouvent pas dans des avant-projets de loi
comme celui que vous venez de déposer. J'aimerais passer la parole
è mon confrère.
M. Lincoln: C'est ça que j'avais envie de situer. Est-ce
que c'est purement par rapport à l'absence du terme "éducation"
que vous dites que l'éducation n'est pas centrale dans ce projet?
Mme Fecteau: II ne semblait pas que dans l'avant-projet de loi on
y accorde tellement d'importance. Je pense que c'est malheureux. La population
ne sait pas, elle,
que vous attachez de l'importance à l'éducation.
M. Lincoln: Non, non. Oui, d'accord. Mais, vous, est-ce que vous
saviez, lorsque vous avez lu cela, que c'était le plan central du
projet?
Mme Fecteac: Tout à fait. J'ai lu ce document d'un bout
à l'autre.
M. Lincoln: Ah bon! Mais vous saviez que, dans le document,
incluant l'avant-projet de réglementation qui découle du projet
de loi, toute la question de la formation est le point central?
M. Yergeau (Michel): Je peux peut-être répondre
à cette question, M. Lincoln.
M. Lincoln: Oui.
M. Yergeau: Je pense que c'est le même vieux
problème en matière de législation sur l'environnement.
Tous les gouvernements s'entendent pour dire qu'il est nécessaire de
faire de l'éducation. L'éducation n'est pas uniquement une
question de formation des utilisateurs ou des commerçants dans le
domaine. L'éducation est une affaire plus large que cela, qui revient
continuellement mais c'est comme si on n'avait pas encore réussi
à trouver une façon d'instrumenter les questions
d'éducation dans les textes mêmes de la loi.
Nous sommes d'accord que, effectivement, ce que le projet de loi
implique quant aux certificats est une des formes d'éducation pour ceux
qui les utilisent, qui les manipulent ou qui font commerce de pesticides. Sauf
que, en ce qui concerne l'éducation en général et la
publicité intelligente qui peut être en même temps
éducative, c'est comme si le législateur était
soudainement - je pèse mes mots - sans imagination. C'est vrai dans ce
projet de loi, c'est vrai dans l'actuelle Loi sur la qualité de
l'environnement et c'est, entre autres, cruellement vrai dans le récent
avant-projet de loi sur la protection de l'environnement fédéral
qui en parle mais qui ne trouve aucune solution.
Je suis intimement convaincu - vous le savez, on en a déjà
parlé - que l'éducation est la base de tout et que ce qu'on
reproche souvent comme étant de la négligence, de l'incurie, de
la peur des utilisateurs ou du public ou des manufacturiers est souvent
dû à la force de l'habitude, à l'ignorance, à la
tradition, à la force d'inertie. Tout peut être renversé
par la force de l'éducation. Mais encore faudrait-il que ces programmes
d'éducation auxquels vous croyez, vous aussi, réussissent
à être traduits par les textes de la loi. Or, les textes de la loi
en général sont muets sur cette question. C'est un peu pour cela
que l'Association des manufacturiers canadiens revient avec ce sujet parce
qu'on semble réduire dans le projet de loi la question de
l'éducation à la question de la formation alors que, è mon
humble avis, c'est plus que cela.
M. Lincoln: Maintenant que je comprends le sens de votre
intervention, je voudrais préciser parce que quand j'ai lu votre
mémoire vous parliez d'objectifs d'éducation. Vous parlez
d'inscrire des objectifs d'éducation dans le projet de toi
lui-même, et c'est certainement un commentaire que nous allons prendre
bien au sérieux. Ce que je voulais expliquer c'est que dans tout le
cheminement du ministère... Par exemple, dans le plan d'action ce n'est
pas purement la formation, que tout est basé sur l'éducation des
utilisateurs, mais aussi la communication, la connaissance, la sensibilisation
du public. Tout cela est inscrit. Il y a un programme de sensibilisation qui va
démarrer - et, en fait, c'est écrit là-dedans -
aussitôt l'adoption du projet de loi. Ce que vous voulez dire c'est qu'on
n'a pas traduit de façon explicite dans le projet de loi.
M. Yergeau: Oui. Et je dois dire qu'avec le projet de loi nous
avons pris connaissance des documents d'appoint qui sont d'ailleurs
remarquablement bien faits sauf que nous avons voulu nous en tenir au texte
même de la loi. J'aurai tantôt aussi quelques commentaires sur le
libellé de la loi qui me semble comporter certains problèmes.
Mais notre travail s'est arrêté volontairement aux mots de la loi
et uniquement aux mots de la loi. (16 h 30)
M. Lincoln: Cela explique beaucoup de choses parce que pour nous
il est certain que c'est une loi qui a des pouvoirs habilitants. Même si,
par exemple, nous avions pris votre suggestion d'amender la Loi sur la
qualité de l'environnement pour nous donner des pouvoirs
réglementaires... C'est sûr que tout ce que nous allons faire
c'est parmi les pouvoirs réglementaires; c'était le sens,
justement, du travail et des codes de bonne pratique. Je comprends que, si vous
prenez le projet de loi comme un texte détaillé et complet en
lui-même, il ne répondra pas à vos attentes. Je le
conçois très bien.
M. Yergeau: Ce que nous recherchons, c'est que la loi,
finalement, donne des instruments qui dépassent la volonté du
ministre du moment. Vous disiez tantôt qu'entre autres les textes
réglementaires feraient l'objet de consultations publiques, sans doute,
mais, en ayant choisi de procéder par une loi spécifique, vous
avez évacué aussi l'application de l'article 124 de l'actuelle
Loi sur la qualité de l'environnement qui oblige la
prépublication et qui
force le ministre à prendre en considération les
commentaires écrits qui peuvent être faits sur les projets de
règlement. Or, j'ai dénombré, dans mon petit travail
d'étude de l'avant-projet, 34 pouvoirs réglementaires
différents, ce qui est beaucoup et ce qui permet mal d'encadrer. Que
sera finalement l'application de la loi? Comment le règlement sera-t-il
fait? Combien y aura-t-il de règlements? Est-ce que finalement ils
seront rendus publics dans le cadre des dispositions actuelles de la Loi sur la
qualité de l'environnement? II vaudrait mieux prévoir un pouvoir
semblable dans l'actuelle loi et des modalités semblables.
M. Lincoln: M. Yergeau, je pense que ce serait bien mal
avisé de ma part de commencer une discussion sur la question juridique.
Moi, mon juriste m'assure que la nouvelle Loi sur les règlements -
projet de loi 12 - qui a été adoptée et sanctionnée
en juin 1986, prévoit justement toute la question de la
prépublication des règlements et c'est pourquoi, dans le cadre
juridique actuel, le gouvernement prend cela comme la loi qui prévoit la
procédure pour toute la réglementation.
M. Yergeau: Je suis d'accord avec vous. Sauf qu'il y a des
modalités particulières à la Loi sur la qualité de
l'environnement qu'à mon avis on évacue en choisissant de faire
une loi supplémentaire, une loi nouvelle, une loi spécifique aux
pesticides. Il y a là un différend sur la nécessité
ou non. Moi, je prétends qu'il fallait redonner plus de poids à
la Loi sur la qualité de l'environnement plutôt que faire une loi
parallèle.
M. Lincoln: J'aurais voulu toucher à ce point qui est
central à tout votre mémoire. Par exemple il dit en page 7:
"D'ici là, qu'il nous soit permis de croire qu'un tel projet de loi
offre comme principal avantage de garantir une certaine visibilité,
ponctuelle et de courte durée, à la question des pesticides, ce
qui est insuffisant pour justifier le moyen retenu." Il me semble que j'aurais
pu vous développer très clairement que c'était bien loin
de nous cette préoccupation de donner une visibilité comme raison
pour adopter la procédure que nous avons adoptée. J'aurais voulu
vous dire le cheminement qui s'est fait. J'ai apporté ici - parce que je
pense que votre argument est de nature très sérieuse - le travail
purement d'alternatives qui ont été suivies depuis presque un
an.
D'abord, comme je l'ai déjà situé au début
de mon intervention dans cette commission parlementaire, nous avions choisi le
mécanisme de nous servir de la Loi sur la qualité de
l'environnement et de l'amender. Il a fallu 50 amendements à une seule
section de la loi elle-même pour permettre que les pesticides y soient
insérés. Le premier projet de loi que nous avons envoyé,
qui était un projet de réglementation sous le cadre de la Loi sur
la qualité de l'environnement, lorsqu'il est arrivé au
comité interministériel, au ministère de la Justice, au
Comité de législation, il était tellement compliqué
à lire que la première objection fut de dire: Comment un citoyen
va-t-il se retrouver dedans? Cela va être un dédale de
première grandeur. Ils nous ont dit d'aller le retravailler, d'aller
revoir ce qui se faisait ailleurs. Nous avons regardé les projets de loi
des provinces canadiennes, de plusieurs États américains. Nous
avons étudié tout le système. Nous avons revu les
recommandations de 1960 du Conseil consultatif de l'environnement, qui
recommandait une loi spécifique.
Nous avons aussi eu un avis juridique très sérieux, selon
moi. J'ai pris cette décision et, si j'ai mal fait, j'ai mal fait. Mais,
en tout cas, j'ai obtenu des avis juridiques très sérieux en ce
sens que si nous commencions à amender la Loi sur la qualité de
l'environnement - je vous cite un exemple, l'article 22; il faudrait l'amender,
pour un contaminant spécifique qui est te pesticide, en diminuant la
portée générale de cet article. Si nous pouvions
introduire cette notion et que cela devenait acceptable, on pourrait le
demander ensuite pour d'autres contaminants spécifiques et cela aurait
pour effet de diminuer la portée immense de l'article 22 qui, dans le
cadre juridique actuel, ne pourrait pas être dupliqué. On m'a dit
qu'en touchant à cette chose on risquait d'ouvrir une boîte de
Pandore. Ce sont des juristes éminents qui me l'ont dit et j'ai dû
en tenir compte. Il y a également eu l'argument apporté par M.
Green, pour dire ici que la Loi sur les produits antiparasitaires
fédérale est une loi spécifique. Il faut cadrer cela avec
toute l'homologation fédérale. C'est un argument additionnel.
II y a aussi toute la question du nouveau cadre habilitant du
gouvernement du Québec qui exige que les choses soient
précisées par rapport à une loi-cadre comme la Loi sur la
qualité de l'environnement. Il fallait y apporter tellement
d'amendements, comme je vous l'ai dit, que cela devenait presque intraitable.
Nous avons essayé. Voilà, le projet est ici.
En fin de compte, je peux vous dire qu'un des pères de cette loi,
une des personnes que vous connaissez très bien, qui a une
réputation de premier plan tant comme légiste que comme
défenseur de l'environnement, m'a dit que, si j'avais le choix
après tout ce que j'ai vu, je choisirais une loi spécifique sur
les pesticides.
Je peux vous assurer - et je prends le temps d'en discuter, parce que
c'est une question cruciale pour nous tous parce que cela n'a pas
été quelque chose qui a été fait
à pied levé, qui a été fait sans qu'on se
penche sur toutes les constatations, les avantages et désavantages,
après avoir obtenu des avis considérables de gens
qualifiés dans le domaine... Je sais que les opinions diffèrent
là-dessus, mais je peux vous dire que la décision a
été prise après avoir étudié les nombreuses
considérations qui s'y rattachent. C'était beaucoup plus que de
donner une visibilité dans une loi pour les pesticides. Moi-même,
au départ, j'étais en faveur d'utiliser la Loi sur la
qualité de l'environnement. Après tout ce dédale, il a
été très très difficile pour nous quand j'ai
essayé moi-même, comme simple citoyen, de lire le projet de loi
qui nous était présenté... Il aurait fallu pour un citoyen
avoir un conseiller juridique pour lui dire ce qu'il en était parce que
tous les articles étaient touchés, parfois même des
sections entières où il y avait 50 amendements. C'était le
sens de notre intervention.
Mme Fecteau: Je pense que si on attache tellement d'importance
à ce point-là, sur la nécessité d'adopter une loi
spécifique, c'est qu'à l'article 2 de l'avant-projet de loi on
dit: "La présente loi a pour objet de régir l'usage des
pesticides afin de prévenir la détérioration de
l'environnement et de protéger les espèces vivantes, l'homme et
ses biens." Une fois qu'on exclut de l'application d'un avant-projet de loi la
plupart des utilisateurs, c'est là qu'on se demande pourquoi adopter un
projet de loi. Adopter un projet de loi c'est important...
M. Lincoln: Mme Fecteau, tout d'abord pour l'exclusion des
utilisateurs, je ne pense pas qu'on ait le temps ou que j'aie les
compétences pour faire un débat juridique sur l'inclusion ou
l'exclusion de certains utilisateurs. Tout ce que je peux vous dire c'est que
cela a été une des questions centrales discutées à
cette commission parlementaire. Ce que je peux vous dire, c'est que les
agriculteurs - les trois fédérations -les sylviculteurs et
l'industrie forestière sont venus ici, que tous les ministres
impliqués en sont très conscients, que les juristes du
gouvernement nous disent très clairement que les dispositions qui sont
ici incluent les agriculteurs et les sylviculteurs. Ce qu'on ne veut pas faire,
c'est de les inclure tout de suite. Je sais que les dispositions ont l'air
contradictoires et paradoxales et qu'on pourrait les interpréter
juridiquement d'une façon ou d'une autre.
J'ai dit ce matin qu'afin d'éviter tout malentendu sur cela nous
allons reformuler l'article 5 afin qu'il n'y ait plus ce genre de contradiction
entre le premier alinéa et te deuxième. En tout cas, je peux vous
dire que l'intention du gouvernement, qui est connue des agriculteurs et
acceptée par eux et par les sylviculteurs, c'est qu'ils vont être
touchés par le projet de loi et inclus dans toute la
réglementation. Excepté, qu'il est impossible, aujourd'hui, pour
nous de les inclure tout de suite.
Ce que je peux vous souligner c'est que, de toutes les provinces
canadiennes aujourd'hui qui ont des réglementations et des lois sur les
pesticides, il n'y en a pas une, à part la Colombie britannique dans une
certaine mesure, qui inclut les agriculteurs. J'ai passé une
demi-journée avec l'État de New York, qui a
légiféré bien avant nous, et l'État de New York
lui-même va de façon étapiste pour les agriculteurs. C'est
un domaine tellement vaste qu'il serait bon de dire: On va les inclure tout de
suite. Mais d'abord il faut les contrôler, il faut avoir des inspecteurs,
des systèmes, une infrastructure que nous n'avons pas aujourd'hui.
Quelle méthode? Quelle que soit la méthode employée, la
Loi sur la qualité de l'environnement ou une autre, il faudra
préparer des cadres, des cours de formation, s'impliquer dans ce
milieu-là pour suivre ce qui se passe. C'est un milieu immense; il y a
55 000 personnes d'impliquées; 35 000 seulement en catégorie 3
des pesticides. Alors, pour toutes ces raisons, nous allons les inclure, mais
le premier échéancier que l'on discute avec l'UPA et les
agriculteurs aujourd'hui, c'est le 1er janvier 1990. On ne doit pas le faire
avant, c'est sûr.
Pour ce qui est du domaine forestier, on discute déjà des
modalités qui seront appliquées cette année-ci pour
certains.
M. Yergeau: M. le ministre, si vous me le permettez, je ferai
deux remarques supplémentaires pour bien faire comprendre la position
philosophique de l'Association des manufacturiers canadiens dans le dossier.
D'une part, nous avons connu un précédent en 1982 où une
loi a été adoptée qui est finalement restée lettre
morte jusqu'à maintenant faute d'avoir adopté le cadre
réglementaire qui lui donnerait une efficacité, en
l'espèce le chapitre 10.1 sur ce que l'on appelait la responsabilisation
des professionnels. Elle est à toutes fins utiles inutilisable parce que
les règlements qui pouvaient la rendre opérationnelle sont
inexistants.
Deuxièmement, comme avocat on ne peut que s'inquiéter du
fait que l'on multiplie des lois qui visent sensiblement les mêmes
objectifs et qui se répètent entre elles sensiblement. Il y a de
nombreuses dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement que
l'on reprend plus ou moins dans les mêmes termes dans la nouvelle Loi sur
les pesticides.
Je comprends vos préoccupations et les contraintes. Je n'en ai
pas pris connaissance, mais puisque vous me les communiquez je les tiens pour
acquises, mais il n'en demeure pas moins que dans dix ans nous allons avoir
deux lois parallèles sur l'environnement qui définissent
l'environnement de façon différente et qui définissent des
mécanismes semblables en n'utilisant pas exactement les mêmes
mots. Or, un tribunal qui est pris pour interpréter deux lois, parce que
je suis, contrairement à ce que la rumeur publique m'a fait dire, de
ceux qui croient que les pesticides continuent à être soumis
â la Loi sur la qualité de l'environnement avec toutes les
conséquences que cela implique... Donc, on peut imaginer des cas
où des utilisateurs, des propriétaires, des producteurs sont
à la fois soumis à la Loi sur la qualité de
l'environnement et à la Loi sur les pesticides pour les mêmes
produits, mais avec des textes législatifs qui diffèrent
légèrement, même s'ils semblent se répéter
à première vue.
On pourrait reprendre ensuite des cas hypothétiques pour
illustrer ce que je viens de dire là, mais on ne peut jamais souhaiter
que la loi ne soit pas claire à long terme. Même si pour ce qui
est du processus de l'amendement de la Loi sur la qualité de
l'environnement c'était une grosse montagne à traverser, nous
nous posons la question: Sur une période de dix ans ou de vingt ans,
est-ce que les contraintes d'amendement de la loi actuelle vont encore
être dans les mémoires et est-ce que finalement nous ne sommes pas
en train de créer des confusions législatives en matière
de protection de l'environnement?
Vous comprenez qu'on attache de l'importance à l'argument parce
que l'on voit ces possibilités. On a bâti des cas
hypothétiques qui nous permettent de penser qu'on ne charrie pas
totalement lorsqu'on apporte cet argument. D'autre part, si je peux me
permettre une troisième petite remarque, je crois qu'il existe
maintenant un style législatif qui est malheureux dans la
rédaction des lois. Entre autres, on répète plusieurs fois
dans une loi un même pouvoir réglementaire, mais en n'utilisant
pas exactement les mêmes mots. Encore une fois, on est en train de se
constituer des pièges législatifs en matière de protection
de l'environnement. (16 h 45)
Je persiste à croire que, par exemple, le pouvoir de fixer des
conditions pour l'obtention du permis, soit la section t du chapitre III, et
les renseignements à fournir pour l'obtention du permis, comme on
prévoit des règlements déjà dans ces deux articles,
cela rend incompréhensible le quatrième paragraphe de l'article
14 de la loi qui semble prévoir les mêmes règlements pour
les mêmes fins. Il en va de même pour les articles 31 et 32 de la
loi dont l'objet semble être répété à
l'article 37. On prévoit le règlement sur l'application des
sections III du chapitre III et I, IV et VI du chapitre IV de la loi aux
agriculteurs à l'article 5, et on reprend le même pouvoir
réglementaire dans des termes différents à l'article 95.
Si on emploie des mots différents, c'est donc qu'on veut normalement
recouvrir des réalités différentes.
On parle aussi de fixer des normes d'utilisation et on prévoit,
dans un autre article réglementaire, de prévoir des règles
d'utilisation. Il est très difficile de comprendre la différence
qu'il y a entre une norme d'utilisation et une règle d'utilisation des
pesticides. On prévoit de fixer des règles sans dire quelles
règles et à quel effet à l'article 98 de la Loi sur les
pesticides. C'est un pouvoir réglementaire qui est, à toutes fins
utiles, incompréhensible dans son libellé actuel.
Je me permets de souligner aussi que le mot "entreprise" n'est pas
particulièrement clair à l'article 8 de la loi, ce qui fait qu'il
est permis de se poser la question à savoir si une entreprise
désigne aussi une entreprise enregistrée qui n'est pas une
personne morale. Si on répond oui à cette question, cela
désigne à la fois une personne morale et une personne qui est
enregistrée sans être une corporation. Pourquoi l'article I8
est-il libellé tel qu'il l'est présentement, lorsqu'il dit qu'une
société ou une personne morale titulaire d'un permis doit
informer le ministre de toute fusion ou vente? Si une entreprise n'est
qu'enregistrée, elle n'est pas une personne morale et elle n'est pas
nécessairement une société, et elle n'aurait donc pas
d'obligation de prévenir le ministre en cas de vente de l'entreprise, ce
qui pose un problème de fonctionnement éventuel puisque des
entreprises se demandent souvent; Quand doit-on prévenir le
ministère de l'Environnement d'une fusion ou d'une vente et quand
n'a-t-on pas à le faire? Quand quelqu'un est déjà
titulaire d'un certificat d'autorisation ou d'un permis du sous-ministre, par
exemple.
Pourquoi, comme le disait Mme Fecteau, le pouvoir est-il si
systématiquement concentré dans les mains du ministre
lui-même et non pas dans les mains du sous-ministre? Vous avez
peut-être une réponse, mais elle ne nous semble pas
évidente.
Mme Fecteau: Je crois que l'intervention de Me Yergeau
démontre bien la complexité de cet avant-projet de loi. Cela aura
des répercussions. Si c'est complexe pour nous-mêmes qui sommes
juristes, vous pouvez imaginer comment ce sera dans la vie d'une entreprise ou
dans la vie des gens qui auront à vivre avec cet avant-projet de
loi.
M. Lincoln: Mme Fecteau, j'en suis très conscient. De
notre côté, je puis vous assurer que les gens qui travaillent
à ce projet de loi ont aussi les compétences et le statut. J'ai
le plus grand respect pour la
compétence de Me Yergeau, je puis vous l'assurer. Je peux vous
assurer aussi que c'est impossible pour nous de faire un débat sur ce
qu'il a soulevé ici. Ce n'est pas du tout notre intention et je crois
que, personnellement, je n'en ai pas les compétences. Ce que je veux
vous dire, c'est que tout cela a été transmis au Journal des
débats. C'est cela l'idée même d'une commission
parlementaire, que ces choses soient soulevées. Je vous suis très
reconnaissant, Me Yergeau, d'avoir soulevé ces points, nous allons les
examiner point par point.
Si Me Yergeau voulait communiquer avec nos légistes pour donner
de plus amples détails sur tous les points qu'il a soulevés, nous
lui serions très reconnaissants d'avoir soulevé ce débat.
En même temps, je veux vous souligner encore une fois que beaucoup de
travail a été fait de ce côté-ci, que les gens qui y
travaillent ont les compétences, ont leurs raisons pour inscrire les
choses comme elles le font. Par exemple, vous avez souligné les pouvoirs
du ministre. Aujourd'hui, dans l'appareil gouvernemental, je peux vous dire que
c'est le voeu très catégorique de ce gouvernement, celui du
Conseil des ministres et du premier ministre, on a réalisé que
dans les lois il y avait beaucoup trop de délégation à des
sous-ministres et que le ministre s'esquivait alors que c'était lui le
plus grand responsable. C'est lui, après tout, que la loi nomme comme
responsable d'un ministère. Il y avait beaucoup trop de
délégation officielle dans les lois à ce sujet.
Maintenant, partout où le sous-ministre se retrouvait, le ministre aura
à mettre sa tête sur le billot. C'est dans ce sens que le
Comité de législation et le gouvernement du Québec
aujourd'hui ont décidé que, partout où il y avait la
mention du sous-ministre, on responsabiliserait le ministre. Mais cela ne veut
pas dire qu'il n'y a pas de pouvoir de délégation, cela ne veut
pas dire que le ministre aura à signer le dernier papier qui va venir
pour chaque certificat. En même temps, on veut signaler que le ministre
est la personne ultimement responsable et qu'il a accepté cette
responsabilité. C'est le cadre qui va se retrouver dans les lois
d'aujourd'hui et je pense que cela va se refléter de plus en plus.
Ce que je voulais souligner par rapport à la question centrale
que vous avez posée, c'est que, dans votre mémoire, vous avez
décelé une raison, que je trouve accessoire, mais je comprends
aussi tout le sens de ce que vous dites: Un joint doit se faire entre la Loi
sur la qualité de l'environnement et la Loi sur les pesticides afin de
prévenir des maux futurs, surtout pour les dix ou les vingt ans à
venir.
Par exemple, nous avons déjà accepté qu'il doit y
avoir une corrélation. On accepte tout à fait que les pesticides
sont des contaminants selon la Loi sur la qualité de l'environnement,
qu'il faut qu'on le situe dans la Loi sur les pesticides très
clairement. Nous avons aussi confirmé que l'accès à
l'information sera précisé afin que toutes les dispositions de la
Loi sur la qualité de l'environnement s'appliquent de façon
intégrale. Nous allons aussi inclure une disposition pour
démontrer que la Loi sur la qualité de l'environnement va
s'appliquer dans toute son intégrité.
Au début de la commission, il y a eu une discussion où
j'ai parlé de la prépondérance de la Loi sur la
qualité de l'environnement. On m'a dit qu'il fallait revoir cela. Je ne
sais pas si on peut déclarer dans une loi que l'une est
prépondérante sur l'autre, mais il sera explicité de
façon très claire que I'intéqrité de la Loi sur la
qualité de l'environnement va s'appliquer de façon totale. C'est
tout ce dont je peux vous assurer aujourd'hui, sans entrer dans les
détails. Mais on va étudier vos suggestions de très
près. Les détails sont sur des bandes magnétiques et, si
on a manqué des parties de votre intervention, si vous avez d'autres
choses à nous suggérer, naturellement, nous sommes très
ouverts à écouter ces suggestions.
M. Yergeau: Je ne m'attendais pas que vous puissiez
répondre point par point à tout ce que j'ai dit. Je l'ai fait
pour les fins de l'enregistrement, de la même façon que j'avais
oublié de noter une certaine ambiguïté dans le
libellé des paragraphes a et b de l'article 7 et un texte que je trouve
carrément ambigu à l'article 117. Cela me ferait plaisir d'en
discuter.
Je me réjouis, d'autre part, que vous ayez anticipé ma
remarque, que vous deviez voir venir, sur l'accès à l'information
et les dispositions de la Loi sur la qualité de l'environnement à
cet effet. Je me réjouis aussi de voir que vous n'avez pas
décidé de passer par-dessus bord la régionalisation du
ministère, qui est l'une des clés de l'efficacité et que
vous n'avez pas décidé de signer vous-même tous les
certificats, ce qui est très encourageant,
M. Lincoln: Je peux vous confirmer cela.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Merci
d'être là. Je suis content d'avoir lu votre mémoire,
surtout de vous avoir entendu parce que, en termes différents, c'est un
peu ce que l'Opposition dit depuis quelque temps, mais vous l'avez dit de
façon plus claire. C'est un mémoire qui a été fait
par des gens convaincus et compétents. C'est le plus
sévère que nous
ayons eu. Je pense que le législateur vient de recevoir le
mémoire le plus sévère de tous ceux que nous avons
reçus. Il est limpide. Il fait une critique un peu négative, mais
je la croirais un peu méritée dans certains cas, dans plusieurs
cas d'ailleurs.
Vous dites que l'avant-projet de loi est un peu échevelé
à cause de la loi Q-2 sur l'environnement; je suis d'accord avec vous.
Du côté éducatif, du côté publicité,
vous trouvez curieux qu'il y ait une grosse différence de la parole
à l'écriture de la loi. Vous ne le dites pas, vous, mais moi, je
le dis. Entre la parole et l'écriture d'une loi, il y a parfois un
manque de volonté politique è cause de certaines contraintes
parfois explicables et parfois moins explicables.
Devant tout cela, je voudrais vous poser une question è cause de
cette sévérité que je trouve correcte. En plus de dire que
ce projet de loi ne vaut et ne vaudra que lorsqu'arriveront les
règlements qui sous-tendront cette loi - on est tous d'accord
là-dessus et le ministre lui-même est d'accord -vous dites,
à la page 9: "La protection de l'environnement par le papier. Mais il y
a plus encore et c'est ce qui nous amène à la seconde question
d'amont que pose l'Association des manufacturiers canadiens sur l'avant-projet
de loi sur les pesticides. Plus encore que la Loi sur la qualité de
l'environnement, l'avant-projet de loi sur les pesticides nous apparaît
être un de ces exemples de la gestion de l'environnement par le papier.
Demandes d'autorisation, formulaires è compléter, permis à
obtenir, démarches administratives, examens à subir, autant de
dispositions supplémentaires qui, pour utile que soit l'objectif,
risquent fort d'en rester là et de contribuer à l'augmentation
effarante du nombre de mesures administratives auxquelles sont soumises les
entreprises."
J'achève; ma question viendra. Je tiens à lire l'autre
paragraphe: "Pourtant, il nous semble qu'une loi sur les pesticides devrait
reposer sur une vision plus large de la protection de l'environnement que la
conception purement administrative par permis et ordonnances qu'on retrouve
dans l'avant-projet de loi. Dans l'état actuel des choses, il en
résulte une gestion de l'environnement qui fonctionne au cas par cas,
sans jamais embrasser les problèmes d'ensemble liés aux
utilisations individuelles, ponctuelles, isolées et aux effets
synergiques mal connus,"
Vous avez expliqué certaines choses. Je tiens à vous dire
que ces deux paragraphes en particulier sont d'une
sévérité excessive. Vous aimeriez qu'il y ait, dans ce
projet de loi que vous trouvez un peu faiblard dans la façon dont il est
rédigé - vous le dites vous-mêmes - une vision plus large
et qu'il embrasse les problèmes d'ensemble liés aux utilisations.
J'aimerais que vous m'expliquiez exactement - ce sera, bien sûr,
succinctement - ce que vous entendez par ces deux expressions "vision plus
large" et "problèmes d'ensemble".
M. Yergeau: Écoutez! Vous me posez une question et
j'aimerais bien pouvoir y répondre à la fois
précisément et succinctement. Je serai moins précis, mais
plus succinct.
C'est toujours dans la perspective où on a deux lois. À
mon avis, l'actuelle Loi sur la qualité de l'environnement est une loi
qui pose des principes d'amant et qui repose sur un cadre théorique qui,
sous divers angles, que ce soit à l'article 19.1, à l'article 20,
à l'article 22, dans les dispositions concernant l'accès à
l'information, forme un tout, assez cohérent et assez rigoureux. Il y a
une vision de la protection de l'environnement qui est sous-jacente à la
Loi sur la qualité de l'environnement. L'actuel projet de loi, qui est
excellent dans sa raison d'être, est, évidemment, un projet
différent, spécifique, qui ne peut pas véhiculer une
vision ou un cadre théorique aussi large que la Loi sur la
qualité de l'environnement, sauf qu'on est obligé de le prendre
tel qu'il est. C'est un projet de loi à des fins administratives, c'est
un projet de loi qui implique une multiplication des procédures ou des
démarches administratives. Ce n'est pas mauvais, sauf que, sorti du
contexte plus global de la Loi sur la qualité de l'environnement, cela
en fait une loi un peu paperassière. (17 heures)
Est-ce que cela change quelque chose, finalement, est-ce qu'on
protège mieux l'environnement lorsqu'on demande de tenir des registres?
Est-ce qu'on va avoir les moyens - c'est une des questions fondamentales qui me
préoccupe dans ce dossier - de contrôler, après coup, tous
ces registres et toutes ces demandes qu'on va faire aux utilisateurs et aux
commerçants dans le domaine? Si M. Lincoln n'a pas de budget
considérablement plus important pour la gestion de l'environnement,
comment va-ton faire pour faire plus que demander des permis, des certificats,
des autorisations et même tenir des registres si on ne peut pas ensuite
prendre tous les registres et comprendre où on s'en va? Pour faire cela,
pour comprendre où on s'en va, pour comprendre quels sont les nouveaux
produits sur le marché, combien on en utilise, à quel endroit on
les utilise, comment on les utilise, non pas en termes d'infractions, mais en
vue de savoir où on s'en va avec les pesticides au Québec, cela
prend absolument des budgets, cela prend du personnel, cela prend des
analystes, cela prend des fonctionnaires pour le faire.
Si, faute de budgets, comme il est tout permis de le croire, nous nous
retrouvons
avec les registres et que personne ensuite ne peut les analyser, que
personne ne peut en tenir compte, que personne ne peut faire la synthèse
de toute cette information, nous nous retrouvons donc avec une simple question
de "nous signons des permis et nous préparons des registres" et on
s'arrête là. Or, c'est tout le temps une des choses qui me
préoccupent. C'est la même chose au fédéral. Je suis
bien aise de critiquer ici une loi fédérale, mais la nouvelle loi
fédérale sur l'environnement qui tombe à peu près
au même moment que celle-ci, encore une fois, vise à faire
dépenser moins d'argent en environnement. Or, il n'y a pas de protection
de l'environnement sans dépenser de l'argent et il n'y a pas de
protection de l'environnement sans contrôler après, sans faire les
synthèses et tirer les conclusions.
M. Blais: D'accord. C'est peut-être ce que vous vouliez
dire à la page 11 quand vous dites, au milieu de l'avant-dernier
paragraphe: "Quant aux méthodes d'utilisation, n'y aurait-il pas lieu au
moins de prévoir dans la loi elle-même les paramètres d'une
réglementation sur la question pour éviter d'imposer aux
utilisateurs des contraintes que le texte de la loi n'aurait pas permis
d'évaluer?" Ces contraintes, c'est quand on ne sait pas où on va
et on impose des contraintes qui ne donneraient peut-être rien. Je vais
être sévère pour vous autres. Je vais vous poser une
question très dure qu'un politicien normalement ne poserait pas à
des gens, mais je ne suis pas un politicien, je suis un serviteur de
l'État.
Vous représentez l'Association des manufacturiers canadiens. Vous
arrivez avec un mémoire très critique que j'apprécie
beaucoup. Vous représentez les fabricants de pesticides, vous venez nous
faire une leçon très sévère sur leur utilisation et
la façon de s'en servir. C'est de bon aloi. Je ne veux pas que vous le
preniez mal, mais ma question est dure. Est-ce que c'est pour vous donner bonne
bouche dans les journaux que vous êtes aussi sévères ou si
vous avez vraiment, les manufacturiers canadiens, une section qui s'occupe de
la qualité de l'environnement et de sa protection à tout
prix?
Mme Fecteau: Vous savez, l'Association des manufacturiers
canadiens, c'est national. Nous avons des comités de l'environnement
dans toutes les provinces qui aident, justement, nos manufacturiers à
vivre avec les lois de l'environnement, qu'elles soient provinciales ou
fédérales.
Nous y avions bien pensé avant d'intervenir sur cet avant-projet
de loi. Alors, la première question que nous nous sommes posée:
Mais pourquoi irait-on en commission parlementaire pour critiquer cet
avant-projet de loi? C'est lorsqu'on a vu la façon dont était
libellé cet avant-projet de loi et le pouvoir réglementaire qui
était tellement important et dont on ne connaissait pas la portée
que je pense que cela a été une des raisons fondamentales pour
lesquelles nous sommes intervenus.
Vous n'êtes pas sans savoir qu'au Québec un rapport a
été déposé, le rapport Scowen, qui visait,
justement, la déréglementation au Québec. Alors, quand
nous apercevons dans un projet de loi un pouvoir réglementaire si large,
je m'inquiète et je pense que c'est là un objectif de
l'association d'intervenir pour dire au gouvernement: Voici un outil qui, selon
nous, ne convient pas aux objectifs que vous vous fixez dans la loi, à
savoir de régir l'usage des pesticides afin de prévenir la
détérioration de l'environnement et de protéger les
espèces vivantes, l'homme et ses biens." Nous croyons que ce n'est pas
l'outil qu'il faudrait adopter pour régir l'objectif pour lequel cet
avant-projet de loi est déposé.
Je crois que cela a été la raison importante pour laquelle
l'association est intervenue. Je crois que, si d'autres projets de loi comme
celui-là étaient déposés devant l'Assemblée
nationale, nous serions sans gêne d'intervenir pour les raisons que je
vous ai expliquées, parce que la déréglementation, parce
que le pouvoir législatif, c'est important pour les associations et pour
les manufacturiers que nous représentons.
M. Blais: Maintenant que j'ai posé la question -
c'était difficile pour moi de vous la poser - je suis content de l'avoir
posée parce que cela ne fait que donner plus de poids à votre
critique. C'est dans ce but que je la posais, cette question difficile, quand
même, à poser.
Je vais vous en poser une autre qui est classique. Je la pose à
tout le monde. Elle est à deux volets. Dans ce projet de loi, il n'y a
pas tellement de restrictions du côté de l'utilisation
quantitative. C'est en vue d'une utilisation sécuritaire surtout que ce
projet de loi a été fait et non pas d'une éventuelle
diminution quantitative des produits. Est-ce que vous aimeriez que ce soit plus
sévère de ce côté pour une meilleure protection de
l'environnement? Deuxièmement, vu que vous êtes les
manufacturiers, je suis bien content de vous adresser cette question. Plusieurs
nous ont dit qu'il serait bon d'avoir une taxe spéciale sur les
pesticides pour avoir des revenus pour l'éducation, la publicité,
la formation et l'ensemble des choses que vous dites qui manquent dans ce
projet de loi. Seriez-vous d'accord, vous, pour une taxe spéciale sur
cela?
Mme Fecteau: Je vais répondre à votre
deuxième question et je laisserai mon
collègue répondre à la première. Je ne vous
dirai certainement pas que je suis d'accord avec l'imposition d'une taxe pour
régir les pesticides au Québec, il y a tellement, justement, de
façons de taxer autrement les entreprises et les individus, ce n'est pas
aujourd'hui que je vais vous dire que je suis pour cela. Je pense qu'il y a
d'autres façons d'intervenir pour l'Etat et de régir les
pesticides. Est-ce que cela répond à votre question?
M. Blais: Cela répond, mais on dit toujours, il y a une
sorte d'axiome dans le monde de l'environnement: on voudrait aussi essayer de
faire payer ceux qui polluent. Dans ce cas-là, le pesticide
lui-même étant l'adversaire, on demanderait à ceux qui
l'utilisent de payer une taxe afin de combattre les effets nocifs qu'il a.
C'est sur ce principe que plusieurs des mémoires qui nous ont
été présentés "demandaient", entre guillemets, une
sorte de taxe que le gouvernement, le législateur verrait a appliquer.
C'est dans ce sens.
Mme Fecteau: Cette taxe s'appliquerait à qui? Aux
manufacturiers, aux entreprises, aux personnes physiques, peu importe?
M. Blais: Peu importe.
Mme Fecteau: Moi, je vous répondrai aujourd'hui que je
serais contre le fait d'imposer une taxe pour régir les pesticides parce
que je ne crois pas qu'on arriverait à régir les pesticides
demain matin en imposant une taxe. Tout comme la cigarette, ce n'est pas en
imposant des taxes nouvelles qu'on va arrêter les gens de fumer. On va
arrêter les gens de fumer parce que la maladie est là, parce que
c'est dangereux pour la santé, mais je ne crois pas qu'en imposant des
taxes nouvelles, vous allez arrêter les vrais fumeurs de fumer.
M. Blais: J'ai arrêté de fumer parce que
c'était trop cher, trop de taxes.
Mme Fecteau: Vous êtes peut-être une exception.
M. Blais: M. Yergeau, vous aviez un complément de
réponse?
Mme Fecteau: À la première question.
M. Yergeau: Pourriez-vous reformuler, s'il vous plaît,
votre question?
M. Blais Le projet de loi légifère sur la façon
sécuritaire d'utiliser les pesticides plutôt que de s'attaquer
à une diminution quantitative des pesticides. Il n'y a rien, je crois,
dans la loi pour diminuer la quantité de pesticides utilisée.
Est-ce que vous trouvez que c'est un reproche qu'on devrait faire aux
législateurs?
M. Yergeau: Je ne suis pas convaincu que ce soit un reproche
qu'on puisse faire parce que je ne suis pas sûr que ce soit pertinent et
que ce soit possible de réduire l'utilisation des pesticides compte tenu
des contraintes que notre société s'est données. Je pense
avec beaucoup de respect que la question est plus théorique que
pratique. Qu'on décide de légiférer sur la façon
d'utiliser et qu'on puisse accumuler assez de données pour porter un
jugement sur les comportements d'utilisation de ces produits me semble
très important et pour l'instant, me semble suffisant.
Cela fait référence è ce que je disais tantôt
en réponse à une autre de vos questions. Il faut
reconnaître l'utilité des produits. C'est-à-dire que votre
question me ramène à une autre de mes préoccupations,
c'est qu'il y a peut-être quelque chose, de toute façon, de
très actuel et très ponctuel dans la façon de
définir les pesticides: on parle d'organismes nuisibles, nocifs, ou
gênants pour l'environnement. Je ne suis pas certain que cette notion de
pesticides ne soit pas vite surannée ou qu'on ne porte pas un jugement
sévère sur cette définition des pesticides dans dix ans.
Cela implique que ce qu'on considère nuisible maintenant ne sera pas
toujours nuisible nécessairement ou on ne le considérera pas
comme nuisible. On peut considérer quelque chose comme nuisible parce
qu'on comprend mal certains processus aussi. Donc, pour avoir vécu
l'expérience de la tordeuse des bourgeons de l'épinette de
près, je ne suis pas convaincu que cette définition des
pesticides soit la meilleure. Je ne peux pas être convaincu, non plus,
qu'il faille réduire la quantité des pesticides. Je ne suis pas
équipé pour porter un jugement présentement
là-dessus. Idéalement, il ne faudrait plus qu'il y ait de
pesticides.
M. Blais: Vous savez, M. Yergeau, que je fais ici allusion
à l'agriculture intégrée ou biologique, sachant qu'en 1980
un goupe s'est fondé. Ils étaient 50 et ils sont maintenant 2600.
Ils forment même un syndicat d'agriculteurs qui n'utilisent aucun
pesticide et cela semble vouloir fonctionner. Si cela fonctionne pour 2600 qui
sont des jardiniers, des maraîchers ou des gens qui cultivent même
du blé - je suis allé visiter plusieurs fermes de ce genre -
pourquoi cela ne marcherait-il pas pour presque l'ensemble et n'aurait-on pas
un mouvement où petit à petit on abandonnerait les pesticides qui
ne sont pas absolument nécessaires, parce qu'il y aura toujours des
pesticides qui seront nécessaires? On ne peut jamais prédire
qu'il y aura une invasion de la tordeuse des bourgeons de l'épinette
dans trois ans ou dans cinq ans. On ne le sait pas. Il faut
utiliser des moyens de s'en débarasser. Mais, en
général, si dans ce projet de loi, il y avait des recherches, des
études d'agriculture intégrée, etc., cela favoriserait la
diminution quantitative des pesticides. Personnellement, comme membre de
l'Opposition, je trouve malheureux qu'il n'y ait rien pour diminuer
quantitativement, les pesticides sauf dans l'esprit et dans la verbalisation
qui accompagne la présentation.
M. Yergeau: Je ne suis pas convaincu que, compte tenu de la
conception qu'on a des pesticides dans ce projet de loi, il soit ni souhaitable
ni possible de prévoir un mécanisme de réduction des
pesticides. D'autre part, vous me posez une question, mais vous y donnez une
réponse éloquente, de votre côté. J'ai l'impression
que vous me posez une question dans l'absolu et j'ai de la difficulté,
compte tenu de mes connaissances dans le domaine, à vous répondre
dans l'absolu. C'est pour cela que j'émets des réticences, des
nuances et que je ne parviens pas à vous donner peut-être la
réponse que vous souhaiteriez.
M. Blais: En tout cas, je vous remercie beaucoup. Le temps qui
m'était alloué est terminé. Je vous remercie de votre
franchise, de vous être présenté ici et d'avoir
défendu votre mémoire de façon très convaincante et
convaincue, et avec beaucoup de compétence, contrairement à ce
que vous disiez à la fin dans certains domaines. Vous l'avez bien
présenté. C'était très bien fait. Je vous remercie,
mademoiselle et monsieur.
Le Président (M. Rochefort): Je vous remercie. M. le
ministre, pour le mot de la fin.
M. Lincoln: M. le Président, si vous me le permettez, il y
a une ou deux choses que j'aurais voulu commenter très
brièvement. Me Yergeau a parlé de la budgétisation
prévue pour les pesticides. Je voudrais souligner qu'on prévoit
avoir quinze employés à plein temps lors de la mise en vigueur de
cette loi afin d'en assurer le succès au départ.
Éventuellement, ils seront régionalisés. C'est eux qui
feront le suivi de la loi après que les programmes de formation auront
été mis en marche.
Il y a quelques remarques de Mme Fecteau que je ne peux m'empêcher
de relever. Vous avez dit qu'une des raisons pour lesquelles vous vouliez venir
ici, c'était parce qu'on ne connaissait pas la portée du pouvoir
réglementaire. Je trouve cela peut-être exagéré, Mme
Fecteau, si vous me permettez de le dire, parce que, justement, dans le
document de travail qu'on vous avait soumis, il y a un chapitre entier, le
chapitre VII, qui est intitulé "Projet de réglementation sur le
contrôle de la vente et l'utilisation des pesticides". Alors, on ne peut
pas dire qu'on ne connaissait pas avant d'arriver ici, si on l'a lu, ce
qu'était sa portée et l'intention du ministère. On peut
dire qu'on n'est pas d'accord avec cela. Mais pour dire qu'on ne la connaissait
pas du tout, à ce moment-là, il faut ne pas l'avoir lu.
Vous avez fait référence au comité Scowen. Je vous
ferai remarquer que le comité Scowen, par rapport à
l'environnement, a fait une exception bien importante. Il a dit que le
Québec concernant la question de l'environnement, au contraire, est
moins réglementé que les autres provinces. Le comité
Scowen accepte que, dans l'environnement, il faut faire plus dans ce sens.
C'est une exception très précise du comité Scowen par
rapport à l'environnement. Je pense qu'il y avait également une
autre matière. En fait, le comité Scowen a repris les
recommandations du comité MacDonald sur l'économie qui disait
exactement la même chose: qu'au Canada on ne surveille pas assez
l'environnement et qu'il faut faire beaucoup plus au plan de la
réglementation et de la loi. (17 h 15)
Concernant les pouvoirs réglementaires que vous dites presque
abusifs ou très larges, je vous dirais qu'à la lecture de la Loi
sur la qualité de l'environnement les pouvoirs réglementaires
sont beaucoup plus larges. Si vous prenez seulement l'article 3Îe, le
ministère peut faire des règlements dans presque tous les
domaines de l'environnement et assurer des normes de protection presque sans
balises. Pourtant, on sait très bien que ce n'est pas le cas parce que
le cadre législatif ne nous le permettra pas. Donc, il n'y a aucune
relativité. Si, par exemple, on parle des pouvoirs réglementaires
qui sont sensés être abusifs dans cette loi, certainement que dans
la Loi sur la qualité de l'environnement ils vont beaucoup plus loin,
ils sont beaucoup plus larges pour le ministre. Je voulais vous assurer qu'il
n'est nullement question pour nous d'aller abuser de pouvoirs
réglementaires, nous allons les baliser selon le document de travail qui
a été émis. On va se situer dans ce cadre. Si on peut
bonifier le projet de loi, il n'est nullement l'intention du ministère
d'essayer de faire de la paperasserie inutile. On ne veut pas le faire. Ce
n'est pas du tout notre intention, mais en même temps nous pensons, nous,
qu'il est grandement temps de mettre en pratique les recommandations du
comité consultatif qui a déjà six ans d'existence. Le
Québec étant la seule entité en Amérique du Nord
entière qui n'a pas de législation ou de réglementation
sur les pesticides, il fallait le faire au plus tôt.
Le Président (M. Rochefort): Mme
Fecteau.
Mme Fecteau: Oui, j'aimerais faire, si vous me le permettez, M.
le ministre, deux remarques. Lorsque j'ai cité le rapport Scowen, ce
n'était pas sur la spécificité de l'environnement, mais
c'était sur l'objectif global du rapport Scowen qui est de
déréglementer, parce que la réglementation est excessive
au Québec et qu'elle coûte très cher aux entreprises. Mon
deuxième point, l'inquiétude que nous avons vis-à-vis du
pouvoir réglementaire, je pense qu'on peut prendre un exemple patent de
ce qui est arrivé les dernières années concernant les
règlements sur les déchets dangereux. Voilà un
règlement qui a fait l'objet de beaucoup de consultations, notamment
avec les entreprises et qui maintenant trouve beaucoup de difficulté
à être appliqué. C'est également un autre exemple
qui vient justifier notre inquiétude face au pouvoir
réglementaire. Tant et aussi longtemps qu'on n'a pas vu ces
règlements, je m'inquiète de ces règlements qui seront
déposés. C'était l'objet de mon intervention, je faisais
référence au règlement sur les déchets
dangereux.
M. Lincoln: Merci beaucoup, M. Yergeau et Mme Fecteau pour votre
participation à la commission parlementaire. C'est sûr que vous
avez dit des choses qui vont nous donner beaucoup à
réfléchir. Nous vous sommes très reconnaissants.
Le Président (M. Rochefort): À mon tour je veux
vous remercier de votre présence parmi nous et de la contribution de vos
travaux. J'inviterais maintenant l'Association des détaillants en
alimentation du Québec à prendre place devant nous. Je vous
demanderais de vous présenter, de même que de présenter la
personne qui vous accompagne, pour l'information des membres de la commission,
s'il vous plaît.
Association des détaillants en alimentation du
Québec
M. Martel (André): Mon nom est André Martel, je
suis le président et directeur général de l'Association
des détaillants en alimentation du Québec et je suis
accompagné par M. René Lévesque qui est président
du conseil d'administration de l'Association des détaillants en
alimentation du Québec.
Le Président (M. Rochefort): Bienvenue parmi nous et je
vous demanderais sans plus tarder de nous présenter votre
mémoire. M, Martel.
M. Martel: Merci beaucoup. M. le Président, M. le
ministre, mesdames, messieurs de la commission, permettez-moi tout d'abord de
vous remercier au nom de l'Association des détaillants en alimentation
du Québec de nous avoir invités à présenter un bref
mémoire devant cette commission. Je ne sais pas si le fait d'être
le dernier intervenant devant cette honorable commission aujourd'hui est le
fruit du hasard, mais les détaillants en alimentation, dans le secteur
agro-alimentaire sont évidemment habitués à être le
dernier maillon de la chaîne, puisqu'ils sont en relation directe avec
les consommateurs. Ceci étant dit, j'aimerais souligner à cette
honorable commission que les problèmes que nous allons soulever
aujourd'hui sont fort modestes comparativement à ceux que j'ai eu
l'occasion d'entendre depuis ce matin à la commission. Je voudrais vous
souligner immédiatement que nous n'avons aucune prétention
d'être des experts en matière de pesticides, bien au contraire, et
qu'également nous n'entendons pas aborder l'aspect juridique de
l'avant-projet de loi. Nous aimerions situer notre intervention en deux volets
précis: tout d'abord, vous présenter un peu notre association et
vous dire pourquoi nous avons cru utile d'accepter votre invitation et de nous
présenter aujourd'hui devant vous et, enfin, nous formulerons quelques
commentaires généraux sur l'avant-projet de loi.
Tout d'abord, au niveau de l'association, mentionnons que nous avons
pris connaissance de l'avant-projet de loi qui a été
déposé le 18 décembre 1986 ainsi que du document auquel il
a été fait référence et qui est intitulé
"Pour une utilisation rationnelle des pesticides au Québec". Notre
association, fondée en 1955, a comme mandat principal de promouvoir et
défendre les intérêts professionnels, sociaux et
économiques des détaillants en alimentation, et nous nous sommes
également donné comme mandat de demeurer au service de la
société et des consommateurs en général. Forte de
2500 membres répartis en dix régionales dans toute ta province de
Québec, notre association a toujours été reconnue comme le
porte-parole des 12 000 détaillants indépendants en alimentation.
Soulignons que la très grande majorité de nos membres est
regroupée ou affiliée è l'un des quatre groupements
majeurs au Québec, à savoir: Les Aliments Servi, Hudon et
Deaudelin Ltée, Métro-Richelieu et Provigo
Distribution. Nous avons, au sein de l'association, des
établissements de taille variée, du simple dépanneur su
grand supermarché qui arborent l'une ou l'autre des bannières
auxquelles j'ai fait référence tantôt. Je pense que c'est
important de saisir cet aspect de l'association puisque c'est dans cet esprit
que nous nous présentons devant vous aujourd'hui.
Évidemment, M. le Président, nous pourrions certes
discuter longuement de l'aspect réglementaire, mais, comme le
mentionne notre bref mémoire à la page 2, nous avons cru
que les chapitres 6 et 7 du document de support à la
préconsultation nous permettaient d'envisager immédiatement la
réglementation que vous entendiez proposer à l'avenir, même
si nous n'en connaissons pas tous les détails aujourd'hui.
L'avant-projet de loi, à son article 3, répartit les
pesticides en cinq classes précises, et le document de support à
la préconsultation nous révèle que les classes 4 et 5
touchent particulièrement la classe domestique. C'est surtout cet aspect
particulier que nous aimerions traiter aujourd'hui avec vous. Certes, nous
approuvons et appuyons tous les motifs à l'origine du document de
support à la préconsultation et à l'avant-projet de loi
sur les pesticides. Je pense que c'est important de retenir que nous appuyons
tout au moins le principe et que nous entendons limiter nos commentaires
strictement aux catégories 4 et 5.
Nous nous sommes permis, dans ce bref mémoire, de revenir sur
quelques citations que nous avons retrouvées plus
particulièrement aux chapitres 6 et 7 du document et qui nous laissent
croire que les classes 4 et 5 seront traitées différemment par le
ministre de l'Environnement. Nous souscrivons au fait que les classes 4 et 5 ne
nécessitent pas de permis et de certificat de la part des vendeurs au
détail. C'est d'autant plus important, comme je l'ai mentionné,
qu'il y a au Québec environ 12 000 détaillants en alimentation
et, comme vous le savez, dans un marché en maturité, il arrive de
plus en plus que les détaillants en alimentation offrent aux
consommateurs des produits qui ne sont pas des produits strictement
comestibles.
Les pesticides, sous certains aspects, sont des produits maintenant
offerts au consommateur par le détaillant en alimentation. Si nous avons
bien compris l'essence de l'avant-projet de loi et du document de
préconsultation, la majorité, sinon la presque totalité
des pesticides offerts par les épiciers, et même en région
éloignée, entrent dans la catégorie 5 définie par
le ministre dans ce document. Ce qui nous inquiète un peu, je dois dire,
c'est le fait que le ministre, en parlant de la catégorie 4, mentionne
à plusieurs reprises dans le document que le ministère entend
favoriser ou encourager des consommateurs à se présenter aux
points de vente où ils peuvent compter sur les services d'un vendeur
qualifié.
Très respectueusement - probablement qu'il y a déjà
des réponses à nos interrogations - on s'imaginerait mal qu'il y
ait deux classes qui visent des produits domestiques et que le ministère
puisse favoriser une catégorie plutôt qu'une autre si nous ne
connaissons pas en détail, évidemment, les critères qui
doivent être respectés. Si on ne fait pas de théorie et
qu'on esssaie d'être terre à terre, notre position dans ce domaine
est un peu similaire à celle que nous avons toujours défendue en
ce qui concerne les produits vendus en épicerie.
On croit que l'information au consommateur doit être donnée
par le produit lui-même. À cet égard, on croit que la
meilleure façon, au niveau du pesticide vendu au consommateur
directement, c'est par une information claire et précise sur le produit
lui-même, comme cela existe en matière de produits de santé
et de beauté. Je voudrais que vous compreniez que nos commentaires
à cet égard doivent être perçus comme positifs,
d'autant plus que, comme vous le savez, lorsqu'on s'éloigne des grandes
régions, on sait que les détaillants en alimentation vendent
aussi beaucoup d'autres produits que des produits alimentaires, soit le magasin
de quartier ou le marché rural.
Donc, en conclusion, M. le Président, M. le ministre, je pense
que nous ne nous trompons pas si notre perception est que l'avant-projet de loi
ne semble pas viser directement le détaillant en alimentation autrement
que par les classes 4 et 5 et sous réserve des quelques commentaires et
interrogations que nous avons soulevés. Cet avant-projet de loi
rencontre notre approbation.
Je dois dire que nous appuyons plus particulièrement les articles
67 à 72 du projet de loi qui vont permettre, du moins,
espérons-nous, au procureur général et à une
municipalité ou à une personne physique de déposer une
demande d'injonction devant la Cour supérieure. Je pense que le ministre
a certainement compris qu'entre la théorie et la pratique il y a souvent
plusieurs embûches. Si on ne veut pas uniquement viser la vertu, mais
être en mesure de faire appliquer la loi et les règlements
à venir, c'est par une politique de cette nature qu'on va pouvoir faire
appliquer la loi. Sans cela, je pense qu'on va devoir faire face au
dédale de la procédure judiciaire qui, malheureusement, fait trop
souvent en sorte que les lois ne puissent être appliquées
très rapidement.
Nous demeurons donc à votre disposition, M. le ministre, comme
dans tous les dossiers où l'environnement est impliqué, et nous
vous offrons notre collaboration pour trouver des solutions souhaitables non
seulement pour l'ensemble des consommateurs, mais également pour les
détaillants en alimentation que nous représentons. Merci de votre
attention.
Le Président (M. Rochefort): Merci. M. le ministre.
M. Lincoln: Je voudrais remercier M.
Martel et son collègue d'être venus ici; vous
représentez un secteur tellement important, qui touche tant de
consommateurs et, aussi, les entreprises que vous représentez sont
d'envergure très importante au Québec. Comme vous l'avez
souligné, vous n'êtes pas directement impliqués dans le
système de distribution des pesticides, mais vous y touchez de
façon indirecte. Si on prend l'étendue du territoire, c'est assez
conséquent. j'ai pris beaucoup de temps avec le premier intervenant, je
n'ai pas envie de gruger le temps de mon collègue, alors, mes remarques
seront brèves. Je voulais vous parler des permis ou certificats. Il
semble y avoir un malentendu dans la compréhension par rapport à
4 et à 5. Ce que nous envisageons par rapport aux permis,
c'est-à-dire les autorisations qui seront données à
l'entreprise, cela va couvrir les classes 1 à 4, cela ne s'appliquera
pas à la classe 5. Pour les permis, cela ira de 1 à A. Pour ce
qui est des certificats des employés ou des détaillants qui
vendent des pesticides, cela va couvrir les classes 1 à 3. Pour ce qui
est des certificats individuels, cela ne couvrira pas les classes 4 et 5. Les
permis vont couvrir les classes 1 à 4; est-ce comme cela que vous le
comprenez aussi? (17 h 30)
M. Martel: Je dois dire bien honnêtement, M. le ministre,
en me référant aux documents de préconsultation, que notre
compréhension était plutôt qu'au niveau de la
catégorie 5, c'est-à-dire probablement ce que les techniciens
appelleront les pesticides légers, ceux qui sont vendus dans les
magasins en alimentation, notamment, il n'y aurait pas nécessité
d'obtenir ni un permis ni un certificat de compétence.
Mo Lincoln: C'est vrai. C'est correct.
M. Martel: Pour ce qui est de la catégorie 4, ce que le
document identifie comme étant des produits qui sont destinés
à des fins domestiques, par exemple, jardins, pelouses, etc., le
document indique exactement cela de la façon suivante: Et, pour plus de
détails, les consommateurs, au niveau de la classe 4, seront
encouragés à acheter aux points de vente où ils peuvent
compter sur les services d'un vendeur qualifié. On dit un peu plus loin:
Les vendeurs de ces produits devraient avoir acquis une expertise sur les
produits de cette classe. On parle de la classe 4. Notre perception
était dans le sens que, pour la classe 4 également, il n'y avait
pas nécessité d'avoir ni un permis ni un certificat de
compétence, mais que le ministère entendait référer
ou encourager les consommateurs à s'approvisionner à des endroits
où on aurait des vendeurs détenant des certificats de
compétence.
M. Lincoln: Je sais que vous ne l'avez pas avec vous, mais je
pourrais distribuer le document de travail. Si vous regardez le tableau 7.6, je
pense que cela va vous éclairer. II y a un diagramme, à la page
7-40, au chapitre 7, no 40. Il y a un dessin, un diagramme, qui montre un peu
les classes. C'est à la page 40 du chapitre 7.
M. Martel: D'accord.
M. Lincoln: Vous l'avez? Pour ce qui est des détaillants,
pour les certificats, on s'en va aux classes 1 è 3 et, pour les permis,
on s'en va aux classes 1 à 4. D'accord?
M. Martel: D'accord.
M. Lincoln: J'aurais voulu vous poser deux questions avant de
donner la parole à mon collègue de l'Opposition. Des
recommandations au sujet de l'étalage ont été faites par
des intervenants qui vous ont précédés la semaine
dernière où ils demandaient que, dans un magasin, on ait des
sections tout à fait séparées pour l'alimentation et les
produits autres que les pesticides. Donc, qu'il y ait un étalage tout
à fait séparé pour les pesticides. Certains sont
allés plus loin et ont dit qu'il devrait y avoir une mention
spéciale sur cet étalage, à savoir que c'est poison, ce
sont des pesticides ou autre, pour démontrer que c'est tout à
fait séparé des autres commodités que vous vendez. Quelle
est votre réaction à cela?
M. Martel: Notre réaction sera une réaction des
gens du milieu. Il faut comprendre que la vente de pesticides, c'est quand
même très secondaire dans un magasin d'alimentation. On
imaginerait mal d'avoir des étalages spéciaux qui seraient
limités aux pesticides puisqu'en pratique ces éléments se
retrouvent dans le rayon des produits non alimentaires.
Généralement, comme vous le savez, si vous allez dans un magasin
d'alimentation, vous verrez que c'est un petit rayon. Vous trouverez dans ce
rayon non alimentaire un ensemble de produits qui ne sont pas comestibles. Vous
allez peut-être trouver dans ce rayon, à titre d'exemple, des
fourchettes, des papiers hygiéniques, etc. Ce sont tous des produits
qui, en soi, ne sont pas comestibles. De toute façon, en pratique, je
pense que ce genre de produit, les pesticides, sera placé dans le rayon
des produits non alimentaires. Ce n'est pas nécessaire de faire une
disposition particulière pour obliger des détaillants à
faire ce que le sens normal des choses veut bien. Je pense que vous n'avez
jamais vu des pesticides dans le rayon des fromages ou des produits laitiers.
Il y a des choses qu'il n'est pas nécessaire de réglementer et
ceux qui
insisteraient pour avoir une telle réglementation, je pense, ne
comprennent pas bien le marché de l'alimentation. Très
respectueusement, pour répondre précisément à cette
question, je pense que ce ne serait absolument pas nécessaire et ce
serait même presque inutile et abusif au point de vue de !a
réglementation que d'obliger à avoir une section
séparée puisque, en pratique, c'est comme cela.
M- Lincoln: D'autres intervenants ont également
suggéré que, pour les pesticides, il y ait une classification,
que le Québec aille plus loin que l'étiquetage qui est
prévu par le fédéral, en vertu d'une loi
fédérale, mais que le Québec aille plus loin dans certains
produits pour rendre l'étiquetage, foncer l'étiquetage ou le
rendre beaucoup plus clair parce qu'il y en beaucoup qui disaient que
c'était impossible de s'y retrouver, le lettrage étant tellement
petit. Je voulais avoir votre réaction là-dessus.
M. Martel: Écoutez, à ce niveau, je dois dire que
c'est la position que l'on défend. S'il y a de l'information qui doit
être transmise aux consommateurs, on pense... Et je ne parle pas des
produits dangereux, il faut bien comprendre, je parle toujours des classes 4 et
5; quant aux autres classes, je comprends très bien l'avant-projet de
loi et on l'appuie.
Donc, en ce qui concerne les produits que nous vendons aux
consommateurs, notre position a toujours été de dire
qu'effectivement cela devrait être la responsabilité de celui qui
le fabrique de bien indiquer sur son produit les dangers d'utilisation ainsi
que les caractéristiques du produit. Nous, on s'engage à vendre
le produit et on est fort heureux lorsque le consommateur est bien servi. Notre
but premier est d'assurer la protection de notre consommateur, finalement.
Alors, si le consommateur, en venant dans notre magasin d'alimentation, trouve
sur le produit toutes les informations dont il a besoin pour porter un jugement
ou pour utiliser le produit, on sera les plus heureux puisque, comme je vous
l'ai expliqué au tout début de l'exposé, nous sommes en
relation directe avec le consommateur. Si un produit est inapte ou n'est pas
bon, en général, le consommateur le retourne à l'endroit
où il l'a acheté et, donc, va le retourner - dans notre exemple -
chez le détaillant en alimentation. Donc, on a tout intérêt
è ce que les informations auxquelles vous avez fait
référence soient bien expliquées.
Si vous me permettez, je vous donne simplement un exemple qui va
illustrer ma pensée. Il y a environ un an, le gouvernement
fédéral avait déposé une lettre de renseignement
qui avait pour objectif de sortir, si vous voulez, des magasins en alimentation
les analgésiques dans des formats de plus de 50. L'objectif qui
était visé, c'était évidemment la protection du
public. On s'imaginait mal, vous comprendrez très bien, qu'un
consommateur puisse acheter chez nous dix formats d'analgésique de 25
tablettes, mais pas un format de 100. Cela n'avait aucun sens. Notre position,
qui est la même aujourd'hui, a été de dire: Écoutez,
s'il y a un problème quelconque à la consommation
d'analgésiques, qu'on l'indique clairement sur les bouteilles, que les
mises en garde soient précises pour que le consommateur puisse s'y
référer. Alors, à ce niveau, notre position demeure la
même et, pour répondre spécifiquement à votre
question, nous croyons que les avis sur le produit devraient être le plus
clairs possible, de façon que le consommateur que nous tentons de servir
puisse s'y retrouver et trouver les caractéristiques du produit. Je
pense que c'est la meilleure... Très respectueusement, M. le ministre,
sans enlever de valeur a toute autre forme de formation ou d'éducation,
il s'agit certainement d'un mode important au niveau de l'information au
consommateur.
M. Lincoln: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Rochefort): Merci, M. le ministre. M. le
député de Terrebonne.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. Je vous
remercie d'être là. Vous n'êtes pas les derniers, parce que
ce n'est pas qualitatif, ce n'est pas cela du tout, ce que vous disiez au
début, c'est le hasard des choses qui a fait que vous soyez les
derniers.
Je tiens à vous dire que cela a été une commission
parlementaire extrêmement intéressante - et fatigante un peu pour
nous - mais extrêmement enrichissante et vous êtes de ceux qui avez
enrichi notre commission.
Nous exigeons beaucoup des détaillants, surtout à
l'extérieur des grands centres. À l'extérieur des grands
centres, les détaillants sont des marchands généraux, ils
en ont, ils en ont. Cependant, il est fort possible, je ne sais pas si... Bien
que vous ayez dit que vous n'envisagiez pas d'étiquetage spécial,
j'ai retenu aussi que vous avez dit que vous étiez prêts à
collaborer, comme d'habitude. Il serait possible, je ne sais pas, que dans une
réglementation l'on dise ce que vous faites déjà - parce
qu'il y a des marchands qui ne le font peut-être pas - qu'il y ait des
présentoirs spéciaux pour tout ce qui n'est pas alimentaire,
lorsqu'on est dans un magasin d'alimentation. Ce serait peut-être cela le
règlement qui serait fait, je ne sais pas. Je suis persuadé que
vous ne vous opposeriez pas à cela.
Cependant, il y a une chose que j'aimerais vous dire, c'est que vous
exigez, vous autres, que les avis soient mis sur le
produit. Je suis d'accord avec vous, sur les médicaments, par
exemple, des choses comme cela, qu'un avis soit mis et que vous n'ayez pas,
vous-mêmes comme détaillants, à faire des
préventions. D'accord lorsque le produit est une chose qui peut brimer
ou faire du tort à une personne. Si quelqu'un s'achète 25
boîtes de pilules de 50 pour les prendre, il fait tort à une
personne. C'est la liberté individuelle. Cependant, il y a une chose
qu'on doit dire. On légifère de façon
générale lorsque c'est la liberté collective qui est
brimée. Un pesticide ne nuit pas juste à la personne qui
l'achète, même si c'est bien indiqué dessus. C'est que la
personne qui l'utilise peut nuire à la collectivité en
l'utilisant mal tandis que pour des choses normales c'est à
elle-même qu'elle nuit si elle utilise mal les produits.
Je reviens à la charge parce que la question a été
posée. Verriez-vous vraiment d'un si mauvais oeil un étiquetage
ou une indication spécifique pour des produits comme les pesticides dans
vos commerces de détail?
M. Martel: Pour répondre directement a la question, je
vous dirai que nous verrions certainement d'un bon oeil un avis qui pourrait
être donné selon la gravité du pesticide en question. Si
j'ai bien saisi l'avant-projet de loi, ainsi que le document à la
préconsultation, le ministère entend, par réglementation,
recommander que les pesticides de catégorie 5, soit ceux qui sont vendus
dans les magasins d'alimentation, ne nécessitent pas de permis ni de
certificat de compétence parce qu'ils génèrent
probablement un risque minime.
Je ne voudrais pas mentionner de noms de pesticides ici, mais, si on
pense à un pesticide du genre "psch! psch!", je ne pense pas qu'on
puisse parler de danger public à ce niveau. Si vous me permettez
respectueusement, je crois comprendre que l'avant-projet de loi vise des choses
plus importantes et plus sérieuses concernant le danger public, quand on
parle de pesticides, que le simple consommateur qui achète une petite
boîte et qui se sert de ce pesticide pour nettoyer peut-être son
lavabo ou pour mettre sur une plante quelconque.
Pour répondre à votre question, je pense que...
M. Blais: Je comprends très bien. C'est pour la
deuxième question que je vous pose la première, même si
c'est à répétition parce qu'on vous l'a demandé.
C'est qu'il y a aussi des suggestions faites par des mémoires qui
demandent au législateur de ne pas permettre aux magasins d'alimentation
de vendre des pesticides de quelque ordre que ce soit. J'ai l'impression qu'il
va falloir que les deux fassent un bout de chemin quelque part. C'est juste
dans ce sens. Souvent, le législateur, c'est Salomon, n'est-ce pas?
C'est dans ce sens.
M. Martel: Je vais répondre à votre question en
étant peut-être un peu plus méchant que vous ne l'avez
été è mon égard. Je vous dirai simplement que, si
vous nous appuyez quand viendra le temps d'enlever dans tous les magasins de
détail tout ce qui est alimentaire, si vous nous appuyez quand viendra
le temps d'enlever des pharmacies tout ce qui est alimentaire, si vous nous
appuyez quand viendra le temps d'enlever des stations-service tout ce qui est
alimentaire, etc., nous arriverons peut-être à trouver un terrain
d'entente.
Puisque, logiquement, je doute que vous puissiez nous appuyer à
cet égard, je devrai dire que le marché se chargera de la
compétition et de la concurrence. Je ne vois pas ce qu'il y a de plus
mauvais à avoir, è un bout d'une épicerie, un produit non
alimentaire et à l'autre bout un produit alimentaire qu'il y en a, par
exemple, è avoir dans une pharmacie les mêmes produits et, en
plus, les pilules pour vous permettre de vous soigner. Donc, je pense
qu'à cet égard, sans répondre directement à votre
question, je suis obligé de décliner votre aimable offre.
M. Blais: Un vrai politicien. Pour que vous ne me
répondiez pas que vous n'aimez pas être victime de votre
bonté, je vais vous demander quand même: À l'instar des
canettes d'aluminium dont vous êtes les heureux
récupérateurs, est-ce que vous feriez la même chose pour
les contenants de pesticides? (17 h 45)
M. Martel: Je pense qu'il doit être très dangereux
de récupérer des contenants de pesticides. Cela m'apparaît
beaucoup plus dangereux que de récupérer des canettes de boisson
gazeuse ou de bière. Puisque déjà nous aimerions et nous
souhaiterions fortement ne pas avoir à devenir des
récupérateurs, je préférerais vous répondre
bien poliment que nous n'entendons pas récupérer des canettes de
pesticides.
M. Blais: Sur cette phrase, vous avez
récupéré ma bonne humeur.
Des voix: Ha! Ha! Ha!
M. Blais: Cette commission, qui a été assez longue
cependant, a été extrêmement enrichissante. Je suis content
que vos dernières paroles aient été des paroles moins
sérieuses que celles que nous avons entendues tout au long parce que
vous avez voulu répondre à ma dernière question qui
était un peu badine.
M. le ministre, je suis content d'avoir fait cette commission
parlementaire avec
vous. J'ai l'impression que nous l'avons fait avec le sérieux que
la Loi sur les pesticides impose.
Une voix: Ce n'est pas encore fini, M. Blais: Est-ce qu'il
y en a demain? Des voix: Oui, oui. M. Dufour: De 12 h 30 à
18 heures. M. Blais: Ah!
Le Président (M. Rochefort): Dois-je vous rappeler, M. !e
député de Terrebonne, que nous avons cinq groupes à
rencontrer demain? Nous avions compris que vous seriez des nôtres.
M. Dufour: De 12 h 30 à 18 h 30?
M. Blais: D'accord. Alors, je retire toutes les
félicitations que je vous ai faites. Vous n'êtes pas les derniers
qu'on va rencontrer. On en rencontre demain. C'est une échappatoire que
j'avais à l'intérieur de ma mémoire. Cela arrive de temps
en temps. Vous avez été intéressants autant, même si
vous n'êtes pas les derniers. Merci beaucoup.
Le Président (M. Rochefort): Le mot de la fin, M. le
ministre?
M. Lincoln: Merci beaucoup M. Martel et M. Lévesque, pour
votre présentation et votre participation. Je vous suis bien
reconnaissant.
M. Martel: C'est nous qui vous remercions, M. le
Président, M. le ministre, madame et messieurs.
Le Président (M. Rochefort): Merci de votre
participation.
Sur ce, nous ajournons nos travaux à demain, 13 h 30.
(Fin de la séance à 17 h 47)