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Version finale

35e législature, 2e session
(25 mars 1996 au 21 octobre 1998)

Le jeudi 20 mars 1997 - Vol. 35 N° 76

Consultations particulières sur le projet de loi n° 92 - Loi sur la Commission de développement de la métropole


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Table des matières

Auditions

Remarques finales


Autres intervenants
Mme Madeleine Bélanger, présidente
M. Jean Campeau
Mme Jocelyne Caron
M. André Boulerice
Mme Margaret F. Delisle
Mme Hélène Robert
M. Camille Laurin
M. Joseph Facal
*M. Roger Valois, CSN
*M. René Lachapelle, idem
*M. Arthur Sandborn, idem
*M. Michel Paquet, idem
*M. Cameron Charlebois, IDU
*M. Michel Dumais, idem
*Témoins interrogés par les membres de la commission

Journal des débats


(Neuf heures sept minutes)

La Présidente (Mme Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais aux membres de la commission de bien vouloir prendre place. Alors, la commission de l'aménagement et des équipements débute ses travaux. Le mandat de la commission est de procéder à des consultations particulières et audiences publiques sur le projet de loi n° 92, Loi sur la Commission de développement de la métropole. Est-ce qu'il y a des remplacements, ce matin?

Le Secrétaire: Oui, Mme la Présidente. J'informe les membres de la commission que nous aurons les mêmes remplacements que ceux qui ont été identifiés au début du mandat.


Auditions

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. Alors, je vais vous faire la lecture de l'ordre du jour. Ce matin, 9 heures, Confédération des syndicats nationaux – s'il vous plaît, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques – et, à 10 heures, Institut de développement urbain du Québec, à 11 heures, Groupe de travail sur Montréal et sa région, pour ajourner nos travaux à 12 heures.

Je demanderais à la Confédération des syndicats nationaux de bien vouloir prendre place. Bonjour, messieurs. Je demanderais au porte-parole de se présenter et présenter les personnes qui l'accompagnent. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi d'un questionnement du côté ministériel de 20 minutes et, du côté de l'opposition, de 20 minutes.

Alors, pour faciliter le Journal des débats , pour l'identification des personnes, on demanderait au porte-parole de commencer à identifier l'extrême gauche en s'en allant vers l'extrême droite.


Confédération des syndicats nationaux (CSN)

M. Valois (Roger): Merci, Mme la Présidente. Mon nom est Roger Valois. Je suis vice-président de la CSN. Bonjour, tout le monde de la commission, bonjour, Mmes et MM. les ministres et députés. En commençant, comme vous me l'avez mentionné: Maurice Sauvé, qui est adjoint à l'exécutif de la CSN, il y a Michel Paquet aussi – ça s'écrit juste un «t», il n'y a pas de «te», comme l'autre – Michel Paquet, du service de recherche de la CSN, qui est économiste; il y a René Lachapelle, qui est président du Conseil central de la Montérégie de la CSN, il y a Gilles Turcotte, président du Conseil central de la région des Laurentides, Arthur Sandborn, président du Conseil central du Montréal métropolitain, et Jean-Marie Bourret, qui est président du Conseil central de Lanaudière.

(9 h 10)

On va y aller avec la lecture du mémoire que vous avez reçu en commençant à la page 6. Le développement global n'est pas invité à la table. Précisons d'abord que nous sommes en accord avec les principaux champs de responsabilité de la CDM – développement économique, l'aménagement du territoire, le transport et la gestion des déchets – ainsi qu'avec les mandats spéciaux de recommandation de la Commission. Cependant, il nous semble, pour reprendre et parodier les propos utilisés dans le document explicatif du ministère à la page 4, que, pour assurer la cohérence des actions, pour tenir compte des interdépendances entre les questions d'ordre métropolitain et pour faciliter l'émergence d'une vision d'ensemble du développement de la métropole, le choix d'une approche de développement global s'imposait.

En mars 1992, la CSN adoptait son énoncé de principe en développement régional et local et s'appuyait, entre autres, sur les principes du développement global, du développement endogène et du développement viable. En conséquence, nous avions inclus, dans les domaines d'intervention de la Commission de développement de la métropole, la santé et les services sociaux, l'éducation, le logement social, l'environnement, la sécurité publique et la protection civile. En effet, pour notre part, le développement ne peut se restreindre ou se limiter à des fonctions essentiellement ou exclusivement municipales, mais il nécessite l'intégration des politiques nationales et sectorielles du gouvernement et de ses services, entre autres en santé et en services sociaux ainsi qu'en éducation. Ces deux dimensions sont à ce point cruciales que nous les développons ci-dessous.

Santé et services sociaux. La plan Johnson et le rapport Pichette se limitaient dès le départ à examiner l'ensemble des fonctions municipales et à identifier, pour chacune d'elles, la dimension qui devait être traitée à l'échelle du Grand Montréal. La santé et les services sociaux ne faisaient pas partie des enjeux de développement et, pourtant, puisqu'il s'agit de responsabiliser le plus grand nombre d'acteurs dans les décisions influant sur le développement de la métropole, on ne peut nier que les décisions du ministère de la Santé et des services sociaux ainsi que celles des cinq régies de la santé et des services sociaux sont probablement aussi déterminantes, sinon davantage, que celles réunies de tous les autres ministères visés spécifiquement par le projet de loi. L'effet structurant en emploi et en développement économique de ce réseau est majeur et indéniable. L'évolution récente dans tout le réseau de la santé et des services sociaux a fait éclater au grand jour non seulement l'impact local et régional de la configuration du réseau à partir de la distribution métropolitaine des ressources et équipements de la santé et de services sociaux, mais également ses dimensions interrégionales évidentes à base de forte interdépendance des régions sanitaires de la métropole. Il nous semble illogique que les frontières administratives en fonction desquelles ont été constituées des régies régionales fassent en sorte que l'on doive fermer des établissements au centre pour en créer de nouveaux en périphérie immédiate. Tout comme nous semble illogique une vision étroite de l'équité interrégionale sur la simple base de la capitation qui entraînerait l'affaiblissement d'établissements pour lesquels une masse critique dépasse le palier local, voire régional.

Nous demeurons fermement convaincus que la configuration du réseau de la santé et des services sociaux doit comporter une dimension métropolitaine en sorte que les régies régionales aient impérativement à collaborer à une planification d'ensemble d'envergure métropolitaine. On ne peut plus ignorer le fait, parmi bien d'autres, que les ressources en santé de l'île de Montréal connaissent une desserte extrarégionale de plus de 1 000 000 de personnes. C'est en soi un indice révélateur de l'étendue du territoire et de l'inter-dépendance très étroite entre chacune des composantes de la métropole. Tout le mode actuel d'allocation des ressources dans le réseau de la santé et des services sociaux pose comme question centrale celle de l'équité interrégionale. Cette dernière dimension devrait donc faire l'objet d'une attention métropolitaine. D'ailleurs, suite aux dernières décisions du ministère de la Santé et des Services sociaux, certaines composantes de la métropole vont même jusqu'à prôner un retour à une formule brute de capitation, tant de dollars par tête d'habitant, comme critère prépondérant du mode d'allocation des ressources aux régies. Une telle approche constitue non seulement une force centrifuge indéniable, mais elle représenterait sans doute un gaspillage incroyable de ressources et un recul considérable par rapport à la solidarité métropolitaine qu'il faut construire. La CDM ne peut se cacher la tête dans le sable face à un enjeu aussi important. Elle doit s'en occuper.

Éducation postsecondaire. Tout comme pour la santé et les services sociaux, le plan Johnson et le rapport Pichette n'ont pas véritablement abordé l'éducation parce que cette dimension du développement du Grand Montréal ne relevait pas des fonctions municipales. Le même raisonnement utilisé ci-dessus pour la santé et les services sociaux prévaut aussi pour le secteur de l'éducation postsecondaire: la recherche d'une équité interrégionale étroite – l'approche per capita – pourrait nous conduire à affaiblir des établissements spécialisés dont l'accessibilité doit être évaluée à l'échelle métropolitaine. Les plus grandes universités du Québec sont accessibles en moins d'une heure de pratiquement n'importe quelle agglomération de la périphérie. Il est impératif que les bassins naturels de tels établissements leur assurent une capacité de performer à l'échelle internationale. On ne devrait donc admettre aucun projet de dispersion universitaire dans la région métropolitaine autre que l'établissement de centres spécialisés reliés à des caractéristiques régionales, telle la Faculté de médecine vétérinaire de l'Université de Montréal à Saint-Hyacinthe.

Certains débats récents quant à la création de cégeps à L'Assomption ou dans le West Island invitent aussi à une approche métropolitaine. Il est socialement, économiquement et financièrement moins coûteux de transporter la clientèle que de multiplier des équipements spécialisés en risquant de les priver d'un bassin suffisant pour leur viabilité.

Cette réflexion métropolitaine devient même une urgence suite aux positions avancées par certains organismes oeuvrant de près ou de loin dans ce secteur, entre autres à Laval et en Montérégie. La volonté exprimée par ces deux régions de se doter d'infrastructures universitaires ou carrément d'universités constitue d'autres exemples de forces centrifuges et de facteurs de développement qui échapperaient au contrôle de la Commission de développement de la métropole.

La région de Laval. Dans sa Planification stratégique 1995-2000: vers un carrefour de développement durable , la région de Laval fait de l'éducation un enjeu principal de son développement et le formule de la façon suivante: «L'accessibilité à une gamme complète de services de santé, de services sociaux et d'éducation, diversifiés et de qualité, est un facteur important d'attraction et de rétention des familles et des entreprises. Compte tenu des perspectives de croissance démographique et du rôle de pôle d'activité suprarégional que joue Laval, la région doit compléter et développer son réseau de ressources et d'équipements de santé, d'enseignement supérieur et de formation professionnelle.» Les soulignés sont de nous.

La région de la Montérégie. De même, en Montérégie, la revendication récurrente du déplacement des ressources universitaires vers cette région au nom de l'équité interrégionale doit être nuancée par la portée nationale inhérente à des ressources universitaires.

En somme et en bref, ces deux missions fondamentales de l'État, entre autres, ne sont pas invitées à la table même si elles sont, de toute évidence, d'un intérêt métropolitain. Le développement social harmonieux énoncé pourtant comme un des quatre enjeux principaux de la première page du document explicatif du ministère ne trouve pas d'écho véritable dans le projet de loi comme tel.

L'harmonisation et l'équilibre entre le développement régional et le développement de la métropole. On pourrait titrer: De la juste solution des contradictions au sein des structures de développement.

Les CRD et la CDM. Tout le langage utilisé couramment pour expliquer le rôle, les fonctions et les pouvoirs des conseils régionaux de développement se retrouvent tels quels, à peu de nuances près, pour expliquer la future Commission de développement de la métropole: développement d'une fusion commune d'avenir, développement d'un sentiment d'appartenance, un lieu de concertation entre les élus locaux et les acteurs socioéconomiques, un lieu de partenariat avec le gouvernement où on élabore les orientations et fixe les priorités d'action, un rôle essentiel de planification et de coordination pour la métropole par la métropole. Au-delà même du langage, la mise en parallèle des pouvoirs d'intervention de la CDM avec les pouvoirs consultatifs d'un CRD est parfois lourde de sens, particulièrement en développement économique: élaborer des orientations et fixer des priorités d'action stratégiques, conclure avec le gouvernement une entente-cadre, gérer un fonds de développement ou de promotion. Cette culture de l'ambiguïté tire sans doute sa source du dire même du ministre – à la fois ministre d'État à la Métropole et ministre responsable de la région de Montréal – et elle se développe spontanément dans sa lettre d'accompagnement du projet de loi dans les termes suivants: «Ce nouveau levier de développement, à la disposition et au bénéfice de l'ensemble de la métropole, exprime la volonté gouvernementale d'établir un véritable partenariat entre les gouvernements et la région.» Les soulignés sont de nous, bien sûr.

(9 h 20)

De quelle région parle-t-on? Assistons-nous à la création officielle de la région de la métropole, surimposée à cinq régions administratives tout aussi officielles et reconnues? L'essentiel de la question et du questionnement à faire est sans doute là. Sans aucun doute, le ministère n'est pas seul à vivre et à cultiver cette ambiguïté. Nous la partageons tous, mais le moment viendra et devra venir où on devra trancher. On peut cultiver l'ambiguïté et l'arroser un peu chaque jour. Si c'est une plante, ça leur donne des fleurs, mais en politique rien n'est moins sûr. Au fond de la question... Mûr ou sûr, c'était bon, ça. Ha, ha, ha!

Au fond de la question, il y a peut-être toute la différence de sens entre le sentiment d'intérêt commun métropolitain et le sentiment d'appartenance métropolitain. On peut avoir un sentiment d'intérêt commun avec l'Ontario ou le ROC, le reste du Canada, sans avoir un sentiment d'appartenance. De quel bord penche-t-on? Une chose est certaine, cependant, un sentiment d'appartenance ne se décrète pas.

De façon plus concrète et pratique, il nous semble donc clair que le projet de loi aboutira tôt ou tard à une remise en question des CRD actuels ainsi que des régions administratives existantes. L'effet négatif déjà perceptible est l'affaiblissement des CRD auprès de plusieurs acteurs régionaux. À quoi bon mettre des énergies dans une structure dont l'existence est mise en cause? Il y a donc urgence de trancher cette question. C'est d'autant plus urgent qu'il n'est pas si faux ou si aberrant de qualifier la CDM de super CRD et de super MRC sous plusieurs aspects. Mais, ce faisant, toute la question du partage clair des pouvoirs demeure entière et devra être arrimée à la fois au livre blanc sur les régions et à la politique de consolidation des communautés locales.

La composition de la CDM. Par ailleurs, la composition de la CDM reprend le même principe de représentation mixte en vigueur au sein des CRD en alliant des élus du monde municipal avec des socioéconomiques désignés par le gouvernement. L'équilibre entre ces deux groupes est par contre assez variable d'un CRD à l'autre tandis que celui avancé dans le projet de loi tient compte, avec raison, d'une autre dimension dans les équilibres à savoir entre, d'une part, les élus de la ville de Montréal et, d'autre part, les élus des couronnes nord et sud. Au total, on se retrouve donc avec un tiers des membres qui seront des élus municipaux de la ville de Montréal, un tiers des membres seront des élus municipaux des couronnes, un tiers seront des socioéconomiques désignés par le gouvernement et en provenance d'un peu partout des secteurs et du territoire de la métropole.

La reprise d'une formule où se retrouvent les socioéconomiques a fait ses preuves dans la plupart des CRD. Elle nous satisfait et même nous réjouit. Elle poursuit bien, à cet égard, la reconnaissance effectuée lors du sommet socioéconomique. Par ailleurs, la nouveauté et l'originalité viennent surtout à nos yeux de ce que le monde socioéconomique sera probablement en position de détenir une certaine balance du pouvoir. C'est en soi réjouissant et même flatteur, mais c'est également un défi très considérable. Le fait que le gouvernement décide lui-même en bout de ligne en désignant ces socioéconomiques est également d'une portée considérable.

Nous attirons donc l'attention du ministre sur le fait que le choix de ces personnes désignées devra tenir compte des recommandations de divers collègues électoraux existants et que ces personnes devront essentiellement provenir des milieux patronaux, syndicaux et communautaires. Nous attirons encore l'attention du ministre sur le fait que le choix de ces personnes désignées va s'avérer un exercice d'autant plus difficile qu'il devra tenir compte des impacts sur l'équilibre fondamental entre Montréal et les couronnes, d'autant plus difficile également que les acteurs socioéconomiques devront relever le défi de tenir compte davantage de la dimension métropolitaine tandis que les élus locaux seront spontanément davantage préoccupés à représenter les intérêts de leur territoire respectif. Autrement dit, détenteurs de la balance du pouvoir les socioéconomiques auront à porter le fardeau de l'harmonisation, de l'équilibre et de l'équité interrégionale.

Nous sommes prêts à relever le défi. Mais, pour alléger un peu ce fardeau et rendre plus facile le maintien de cet équilibre interrégional, il nous semble qu'on devrait amender l'article 25 du projet de loi en permettant que six membres au lieu de neuf puissent exiger du président la convocation d'une séance spéciale. On permettrait alors que toutes les régions puissent à elles seules procéder à une telle convocation.

Pour les pages 18 à 22, M. le ministre, on va vous laisser la lecture privée parce que c'est un peu nos appréhensions à nous, puis nos positions à nous. Mais on va vous laisser la lecture privée de tout ça et pour les membres de la commission aussi.

À la page 23, donc. Le territoire de la métropole est une matière à débattre. Il est important de faire état de nos interrogations sur le territoire d'application prévu dans la loi. Avec le territoire actuel, il nous faut sans doute admettre qu'on n'est pas dans l'évidence. Il s'agit d'une matière à débattre et dont on ne peut retarder indûment l'échéance. La question du territoire devra faire partie des discussions urgentes qui impliquent, de toute évidence, autant le territoire d'application de la dimension métropolitaine de chacune des compétences désignées dans le projet de loi que le poids de la représentation au sein de la Commission.

Comme nous voudrions inclure des compétences non municipales telles la santé et l'éducation parmi les domaines d'intervention de la Commission, cela suffit amplement pour remettre en question et en débat le territoire prévu dans la loi. C'est sans doute à ce prix que l'on pourrait atteindre le consensus de base indispensable permettant de développer une vision et des actions communes intégrées et véritablement métropolitaines. Il nous faut donc ouvrir le débat dans les plus brefs délais et, en cette matière comme en bien d'autres, le gouvernement ne peut échapper à sa responsabilité fondamentale d'assumer le leadership nécessaire et d'assurer les arbitrages indispensables.

Si, dans l'ensemble, le projet de loi s'astreint à respecter l'intégralité territoriale des MRC, nous ne pouvons expliquer l'exception créée pour la MRC de Vaudreuil-Soulanges.

Même si le document explicatif du ministère de la Métropole, en conclusion, souligne le caractère «évolutif» de la Commission de développement et précise que le projet de loi en est un de «phase initiale», nous souhaitons que les membres de la commission de l'Assemblée nationale fassent preuve de diligence dans l'adoption du projet de loi. Quant à nous, il demeure urgent que des actions s'enclenchent dans le développement de la métropole.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Valois. Alors, M. le député de Crémazie.

M. Campeau: Merci, Mme la Présidente. Bien, M. Valois et tous vos membres, merci de votre apport aux travaux de notre commission. On sent que votre témoignage est tout à fait désintéressé et que vous venez ici dans le but de faire avancer la société. Alors, là-dessus, nous remercions d'avoir aussi mis le temps et d'être venus tous les sept présenter votre rapport.

Si je comprends bien, vous êtes d'accord avec la création d'une Commission de développement de la Métropole. Si je comprends bien, vous seriez pour une commission qui serait décisionnelle plutôt que consultative; à la suite de vos suggestions, j'en conclus que ça prend une commission décisionnelle, selon vous. Vous arrivez aussi, au point de vue des membres non élus sur la Commission... Vous semblez dire que vous allez faire la juste balance entre les élus et les socioéconomiques. Est-ce que c'est vraiment ça que vous voulez dire, ou si vous allez venir compléter la compétence des membres élus? Parce que c'est évident qu'un membre élu a beaucoup de difficultés à connaître tous les domaines et qu'il a besoin de spécialistes, de techniciens, de gens plus spécialisés dans certains domaines, et là-dessus, c'est bien sûr que dans votre domaine vous pouvez aider beaucoup. Alors, est-ce que c'est ça? Je voudrais que vous m'expliquiez d'abord la complémentarité que vous venez, par votre présence, donner à la Commission de développement de la métropole.

M. Valois (Roger): D'abord, pour ce qui est de si c'est une commission décisionnelle ou consultative, nous, on dit qu'il faut qu'elle se mette en marche, et, à l'évolution et à l'usure, on verra bien comment on pourra se placer avec le temps, parce que, à force de jouer et à force de danser la polka dans les portes battantes, il semble que, d'abord, on ne prend pas le rythme et il y a du danger qu'on se fasse frapper. Mais il faut que ça parte.

L'autre problème, à savoir si la CSN ou les groupes syndicaux vont faire le joint ou on va être la balance entre les élus et les socioéconomiques, nous, on pense qu'on est dans le secteur socioéconomique. On n'est pas au niveau des élus, bien sûr, mais on est aussi au niveau socioéconomique, parce qu'on fait partie, comme monde syndical, beaucoup du socioéconomique, parce qu'on prétend, avec justesse d'ailleurs, qu'on est probablement l'instrument qui répartit le mieux la richesse collective. Et là-dessus, pour en avoir géré une partie au niveau des négociations, on pense qu'on n'est pas là pour faire la balance, on est là pour contribuer, et contribuer de plain- pied, au fonctionnement de la Commission. On n'est pas là pour agir en arbitres ou en juges lorsque les élus et le socioéconomique ne s'entendront pas, on est là pour participer de plain-pied et mettre toutes à contribution les connaissances que le mouvement syndical a au niveau de son appareil, mais au niveau de ses membres aussi. Nous représentons les cols bleus, mais nous représentons aussi les professionnels, on représente du monde qui a des intérêts au niveau de la métropole et au niveau des autres régions qui l'environnent aussi. On est capables non seulement de faire le poids, mais on est capables de contribuer avec beaucoup, beaucoup d'ardeur au fonctionnement de cette Commission-là.

M. Campeau: Pour aller à mon autre question, j'ai bien aimé quand vous avez dit: Un sentiment d'appartenance ne se décrète pas. Je pense que c'est un motto qu'il faut répéter, j'aime beaucoup l'entendre de votre bouche. Là, vous, est-ce que vous souhaiteriez que la région métropolitaine devienne une région administrative indépendante au sein de laquelle les compétences de santé, de services sociaux et l'éducation pourraient être mieux planifiés? Est-ce que c'est ça que vous souhaitez, une seule région indépendante?

(9 h 30)

M. Valois (Roger): Il y a de mes collègues qui ont fait le débat de façon assez... Parce que, je vais vous dire pourquoi, je vais demander à quelqu'un de répondre parce que...

M. Campeau: Avec plaisir.

M. Valois (Roger): ...même chez nous, le débat n'a pas été facile. On est accompagnés des présidents des régions environnantes, comme vous l'avez vu, et du président du Conseil central de Montréal, et, à la question que vous posez: Est-ce qu'on souhaiterait, je ne sais pas qui...

M. Campeau: Sur sept, je suis bien sûr que... Ce n'est pas nécessaire qu'il y ait unanimité, il y a des opinions différentes, nous autres aussi, dans notre parti, des fois, il y a des petites opinions différentes.

M. Valois (Roger): Oui, on a cru remarquer ça, ces derniers temps.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Valois (Roger): On n'a pas voulu jouer là-dessus, par exemple, mais on a cru remarquer qu'il n'y avait pas...

M. Campeau: On vient vous dire qu'on ne se cache pas.

Des voix: Ha, ha, ha!

Une voix: On n'est pas menteurs.

M. Valois (Roger): Ce n'est pas le motto de la maison chez nous non plus de se cacher mais...

M. Campeau: Mais, ça, est-ce qu'il y en a qui pourraient élaborer là-dessus?

M. Valois (Roger): René va... René ou Arthur.

M. Lachapelle (René): Bien, moi, je pense que ce qu'il est important de voir, c'est selon qu'on regarde la question que vous posez à partir de l'île de Montréal ou qu'on la regarde à partir des régions qui sont autour, on a une perception un peu différente. C'est pour ça que, dans le mémoire, on n'a pas pris une position tranchée sur cette question-là parce qu'il y a débat entre nous autres puis, comme Confédération, on ne voulait pas présenter une position sur laquelle on n'aurait pas de consensus. Il est certain que, selon d'où on vient, ça, ça colore notre façon de faire le débat.

Ce qu'on trouve important, par contre, puis ce sur quoi on insiste, c'est, on dit: Il y a des compétences de niveau métropolitain qui ne devraient pas être laissées dans des régions. Un des exemples, c'est toute la question de la présence internationale ou de la représentation internationale ou de la prospection internationale, on ne voit pas pourquoi ça, ça relèverait d'un niveau régional alors que c'est une fonction typiquement puis réellement métropolitaine ou nationale. Alors, c'en est un exemple de compétence de niveau très métropolitain.

Par contre, le problème que ça pose aussi de penser une région, vous parliez tantôt de la santé puis de l'éducation, c'est des bons exemples, il y a une intégration, par exemple du réseau de la santé, je vais parler de la région que je connais, la Montérégie, qui a un poids très considérable. Quand la régie régionale de la Montérégie dépense 900 000 000 $ dans le réseau de la santé, elle a un effet extrêmement structurant sur la région, premièrement. Puis, cet effet-là, il y a aussi des conséquences pas juste sur la partie qui est à l'intérieur de la région métropolitaine mais aussi sur ce qui est à l'extérieur, sur la carte de la région métropolitaine. Il y a des équilibres qui sont créés. Alors, ça, c'est très lourd. Quand on parle de faire une région avec la métropole puis qu'il y a la moitié du territoire, c'est seulement 40 % de la population mais c'est la moitié du territoire, la Montérégie qui est en dehors, du point de vue montérégien, on éprouve une certaine inquiétude, pour ne pas dire une inquiétude certaine.

Par contre, à l'inverse, puis Arthur va sûrement le faire valoir, quand on regarde comment il y a une interdépendance entre les ressources de santé de l'île de Montréal puis les ressources de santé de la Montérégie, en Montérégie, on est à 62 % de financement, en bonne partie, parce que la population se déplace sur l'île pour aller chercher des services. Quand on regarde cet équilibre-là puis qu'on est dans une période de rationalisation des dépenses, on a déjà fait des débats puis on est d'accord là-dessus avec les gens de Montréal, c'est douloureux de ne pas avoir une harmonisation qui tienne compte de toute la réalité métropolitaine. Alors, c'est pour ça que, dans le mémoire, on dit: Il y a un débat à compléter puis on est conscients qu'il y a des tensions là-dedans. Peut-être Arthur pourrait présenter le point de vue plus d'un petit centre.

M. Valois (Roger): Avec votre permission, Mme la Présidente, je vais demander à Arthur de compléter.

La Présidente (Mme Bélanger): Ça m'enlève du travail étant donné que vous présidez vous autres mêmes.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Valois (Roger): On est habitués.

Une voix: Ce n'est pas des scabs.

M. Sandborn (Arthur): Je peux même ajouter à ce que René dit de la Montérégie, le problème, c'est que ce qu'il veut, la per-capitation, puis il le veut vraiment, il veut installer des services qui sont disponibles de l'autre bord du pont sur la Rive-Sud. Et il y a la même tendance dans leur course à développer des services sur la Rive-Sud, à vider les services dans les régions plus éloignées de la Montérégie, du monde qu'il faut après ça voyager pas mal plus loin pour arriver à Longueuil que des gens de Longueuil pour arriver à l'hôpital Notre-Dame, par exemple.

Vous avez un problème assez important et on ne peut pas vous dire jusqu'où ça doit aller mais c'est très clair qu'ayant choisi les... On aura choisi Montréal et Laval. Le maire Vaillancourt ne sera pas content mais ça créerait moins de problèmes. Mais, à ce stade-ci, on a tracé une ligne qui divise les territoires administratifs existants et, quand on regarde ça, on dirait que c'est... Nous, on en ajoute des compétences comme René a dit. On en ajoute, on trouve que ce n'est pas juste des problématiques municipales auxquelles il faut que vous vous adressiez dans votre réaménagement. C'est les services du gouvernement, c'est les interventions gouvernementales sur le terrain et quand on arrive là, bien, là, il faut regarder très sérieusement et nous, on ne s'est pas mis d'accord et on ne mettra pas une position clairement sur la table de c'est où qu'il faut tracer la ligne. Est-ce qu'il faut regrouper les cinq, créer un autre qui changera les trois autres? Ce qui est clair, ce qu'ils ont toujours été imposés, les territoires administratifs. Est-ce que c'est clair, ça?

Jamais personne n'a été demandé comment organiser ça. Et, à l'époque, ce n'était pas important, c'était administratif. Maintenant, c'est devenu politique et peut-être même décisionnel. Alors, c'est une autre paire de manches. C'est un débat à faire, puis, à un moment donné, même le gouvernement il va falloir qu'il décide certaines choses sans toucher aux autres. Laval est sur le territoire que je dessers mais les syndicats à Laval sont tout à fait d'accord avec ce que je vais vous dire, que Laval reste une ville, une MRC et un territoire administratif qui ne se coordonne avec personne. Il faut que ça arrête.

M. Campeau: Ça va. Merci, madame.

M. Sandborn (Arthur): C'est une aberration.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Bienvenue à vous tous. M. Sandborn, on va continuer un peu dans la même veine. On siège ensemble sur le CRD, alors on se connaît quand même relativement bien. On va revenir aux pages 14 et 15 de votre mémoire où on parle de régions et de rationalisation. D'abord, je veux revenir aux régies. Après ça, on va parler de régions versus métropolisation parce qu'il y a vraiment dans l'air deux concepts qui ne sont pas fondamentalement, à mon avis, conflictuels. C'est juste qu'il faut qu'on s'organise pour que les deux concepts s'imbriquent bien. Je veux juste revenir au niveau des régies.

Hier, on a reçu le regroupement des régies, hein, et plusieurs groupes avant vous nous ont dit que les régies, enfin les dispensateurs de services devraient siéger sur la Commission forcément que ce soit au niveau socioéconomique ou enfin. Je pense qu'on est un peu, moi en tout cas je suis un petit peu surprise. Les regroupements des régies sont venues nous dire que non. Ils vont collaborer, oui, excepté que, de par leurs lois, leur conseil d'administration, ils sont d'abord redevables ou imputables, parce qu'ils sont élus, les membres du conseil d'administration, d'une part, et leur lien est avec le ministère de la Santé et qu'il y a tellement de bouleversements là qui se sont faits quand même relativement rapidement, ce qui fait en sorte qu'ils ne veulent pas avoir un autre intervenant. Ils sont prêts à collaborer mais pas vraiment à rajouter, en plus, un intervenant supplémentaire parce qu'ils disent: c'est trop là, d'une chose.

Deuxièmement, je pense que je résume bien là, ce qu'ils nous disent, c'est... En tout cas, de toute façon... Ah oui, garder les cinq régies. Ce qu'ils ont dit c'est que ça a pris assez de temps de s'arrimer, puis tout ça, qu'en quelque part combiner – parce qu'il y a eu ces discussions-là aussi un peu – cinq régies en trois, en deux, en une, oubliez ça, comme ils disent, avec les changements, on fonctionne bien, on a un intervenant, on est occupés sur le terrain à faire ces changements-là. Pour l'amour, on va collaborer mais ne nous mettez pas là-dedans. Là, c'est comme trop. C'est un peu, je vous dis, donc, votre argument; là, je parle des principaux intéressés. Vous n'êtes pas d'accord avec ça, là?

M. Valois (Roger): Arthur ou René? Avec votre permission, tout le temps.

Mme Frulla: René, parce que Arthur, on va revenir au niveau des régions, ou un des deux mais allons-y, René, je ne sais pas trop.

M. Valois (Roger): Oui, Arthur. On va commencer par Montréal, noblesse oblige. Ha, ha, ha!

(9 h 40)

M. Sandborn (Arthur): Le problème – je ne sais pas comment sont placées les cinq – mais je sais comment ça se passe quand on parle avec la régie de Montréal, quand on va parler avec la régie de Laval. Je ne sais pas comment vous voulez régler ça mais les chicanes intestinales de où est-ce que tu vas mettre le centre ambulatoire? Quel bord du pont entre Chomedey et le nord de Montréal? C'est un pont que ça prend une minute et quart à traverser à pied, O.K. Il y a un gros hôpital d'un bord, Sacré-Coeur, et il y a un centre ambulatoire, puis à Laval ils s'obstinent à vouloir en mettre un juste de l'autre bord du pont. Et la régie de Montréal s'oppose totalement à ça. Puis, là, on argument de par capitation. Il en faut, il en faut absolument un, centre ambulatoire. En tout cas, ça, il faut trouver les moyens de mettre fin à ça. Et on ne sait pas si on devrait créer cinq autres régions, mais on a la distincte impression qu'il faut qu'il y ait une instance qui soit capable de regarder ces questions-là quand ça devient un débat interrégional dans la région de la métropole.

Il faut qu'il y ait quelqu'un qui soit capable de donner des avis au gouvernement puis peut-être même aux régies. Parce que, là, elles sont aussi intéressées, tous et chacun, que l'ensemble des autres, hein. La bataille sur les centres jeunesse entre Laval et Montréal, c'est épouvantable. Laval ne veut plus garder les gens à long terme dans ses centres jeunesse parce que ça coûte trop cher. Puis Montréal n'a pas de long terme parce que c'est à Laval que ça se fait. Mais, comme on a divisé ça en deux, bien, là, ça fait deux ans que ça se chicane, qu'on parle avec les deux régies, nous, en parlant des syndicats, et que, finalement, leur guerre de pouvoir prime. Puis il n'y a personne qui peut mettre de l'ordre là-dedans. Ça fait que c'est là où il y a un problème.

Mme Frulla: Avant de passer la parole, juste un petit peu. C'est que leur argument, c'était que... Peut-être que c'est vrai, tout ça. Mais notre intervenant, c'est le ministère de la Santé. Tu sais, ils n'ont pas vraiment dit... peut-être que c'est vrai. Mais, en tout cas, ça se passe sur le territoire. Mais notre intervenant, ce qu'il dit, c'est le ministère de la Santé.

Autrement dit, que ce soit le ministère de la Santé, envers lequel on est redevables, qui devrait organiser ou enfin prendre les décisions, mais ne nous mettez pas à l'intérieur d'une autre structure! C'est un peu ça, là. Est-ce que c'est le ministère de la Santé qui devrait faire ça, ou bien, finalement, la structure en soi, en prenant forme, pourrait couvrir ce secteur?

M. Lachapelle (René): Bien, nous autres, ce qu'on dit... Puis il y a une dimension métropolitaine d'un certain nombre de questions qui doivent être prises en compte. Je comprends, moi, que les régies régionales se sentent très reliées au ministère de la Santé et des Services sociaux. C'est comme ça qu'on les perçoit aussi. On les perçoit simplement comme un télécopieur du ministère en région, là, puis... Je caricature un peu, mais, bien souvent, ils n'ont pas une très grande marge de manoeuvre et ça, ça pose un problème.

Je le disais tantôt, les régies, elles ont un poids très considérable. Elles sont très, très structurantes dans les territoires des régions administratives. Alors, moi, je pense qu'il faut les inviter à rendre des comptes quelque part, à un niveau régional, puis, quand elles parlent de leur assemblée, mettons qu'elle est déjà moins représentative qu'elle l'était à l'origine. Puis il faudrait voir sa qualité, en tout cas, démocratique. Mais c'est un autre débat.

Mais ce que je veux dire, c'est que je pense qu'il faut intégrer... Je maintiens, moi, qu'il faut intégrer la dimension de la santé dans le débat sur la métropole, comme il faut forcer aussi que les régies régionales, dans les régions, prennent conscience puis soient parties prenantes d'une planification. Parce qu'on ne peut pas faire une planification de développement économique d'un côté puis avoir une intervention structurante qui n'est pas coordonnée de l'autre côté.

Et il y a un certain nombre de choses qui devront être faites au niveau de la métropole. Je pense que, simplement en bonne logique, là, de citoyen, préserver la qualité des équipements collectifs puis ne pas dépenser indûment. Il y a des harmonisations qui doivent être faites entre les régies. Ça vaut peut-être la peine de garder les mises en place qu'on a. Qu'on déplace des services de première ligne, ça, c'est une question, mais qu'on déplace la deuxième puis la troisième ligne, il faut voir, sur une région métropolitaine, si ça se défend. Et, là-dessus, je pense que les régies doivent être interpellées. Je ne sais pas si elles doivent participer, là, à la Commission, pour y siéger, mais elles doivent certainement avoir des comptes à rendre quelque part là-dedans.

Mme Frulla: O.K. Ce qui m'amène alors à... parce qu'on parle de l'ensemble de l'organisation du territoire... parce qu'il y a la régie et, bon, on peut s'en aller là-dedans, le transport. D'abord, les cinq régions administratives, déjà, on en a discuté ici. Bon. Montréal, par exemple, l'île, puis tout ça, prônent une région. D'autres, évidemment: «Il ne faut pas toucher aux régions».

Puis j'aime beaucoup, dans votre mémoire, quand vous dites, finalement – puis c'est là-dessus que je rejoignais mon collègue de Crémazie – c'est qu'il y a une différence entre appartenance et intérêt. Mais on a parlé de peut-être trois régions, mais, quelque part, ça prend... L'article 51 du projet de loi dit que ça prend une simplification, enfin, des structures si on veut organiser puis mettre tout le monde ensemble.

Ce qui m'amène à parler du livre blanc sur les régions versus la métropolisation. C'est clair, au moment où on se parle, qu'il semble, en fait, y avoir deux visions qui se confrontent. Une vision qui est régionale, qui parle de décentraliser mais de donner à certaines instances locales, donc garder les cinq régions telles quelles. Le ministre du Développement régional l'a dit clairement. Et nous, ici, de plus en plus, on parle de métropolisation, mettre les choses en commun puis plus...

Il y en a qui sont prêts, l'île surtout. Laval, Brossard, disent plus que ça: Nous autres, on est prêts à ce que ce soit décisionnel. Puis on parle de déchets, du transport, puis tout ça. C'est déjà un pas en avant, là. On va décider des choses. S'il faut être métropole, on va être métropole puis on va décider. Mais il y a deux conflits, là, il y a deux visions ici qui semblent se dessiner. Alors, selon votre page 14 surtout, vous autres, quelle vision – enfin, si on vous donnait le choix ou le pouvoir – prôneriez-vous?

M. Valois (Roger): Bien, vous savez, si le gouvernement, il a une patate chaude dans son chaudron, nous, on n'est pas plus à l'aise d'avoir ça dans nos mains, là. Il y a des discussions que, nous, on veut finir. On est en train de les faire, d'ailleurs, chez nous. Présentement, oui, il y a des régions administratives qui tiennent à rester en vie. Soit dit en passant, je réitère au gouvernement la même demande qu'on a d'ajuster toutes les régions du Québec dans tous les ministères de la même façon. Ça pourrait régler une partie – pas toutes les solutions – des problèmes qu'on a. Parce qu'on n'a pas tous les mêmes régions selon les ministères. Mais sauf que, nous, ce qu'on a à exprimer, c'est qu'il faut mettre des choses en marche et, à l'usure, on va voir comment ça se place. Je ne vous conterai pas l'histoire de la pelle du gars qui était pris dans la neige dans un rang de campagne, mais il ne faudrait pas jouer à ça. Tu sais, il était resté pris dans son banc de neige puis il n'avait pas de pelle dans son char puis il voyait la maison du cultivateur à à peu près un mille puis, à mesure qu'il se rapprochait, il se disait: Il va me dire que ça n'a pas de bon sens, il se promène pas de pelle dans son char puis etc. Il s'est tellement convaincu que l'autre lui dirait des bêtises, quand le cultivateur a ouvert la porte, il dit: Bien, garde-la donc ta pelle. L'autre n'avait pas parlé, là.

Nous, on dit: On va commencer, il faut se mettre en marche avec la Commission de la métropole et on verra comment à l'usure on peut regarder, soit, je ne sais pas, moi, trois sous-régions, cinq qui demeurent quand même. Non, il faut partir. Puis, moi, je pense qu'on ne peut pas tout régler de façon théorique puis en discutant tous les problèmes qui pourraient nous être présentés, soit par les élus, soit les socioéconomiques et même par nous. On ne peut pas régler ces problèmes-là en faisant des théories, il faut se mettre en marche. Et on a besoin d'une métropole qui s'active, une métropole qui bouge, parce qu'il y a un essentiel. Mais on ne peut pas régler, madame. J'aimerais ça répondre plus...

Mme Frulla: Non, c'est parce que je fais référence...

M. Valois (Roger): D'habitude, je suis plus direct que ça, mais, je ne sais pas si c'est l'ambiance du Parlement, je patine un peu là, mais c'est l'ambiance.

Mme Frulla: Non, c'est parce que je fais référence à votre page 14 quand vous dites: «De quelle région parle-t-on? Assistons-nous à la création officielle de la région de la métropole, surimposée à cinq régions administratives tout aussi officielles et reconnues? L'essentiel de la question et du questionnement à faire est sans doute là.» Donc, vous la posez aussi, la question comme, finalement, l'ensemble des intervenants se la posent...

M. Valois (Roger): Ah oui, oui.

Mme Frulla: On a beau dire... C'est parce qu'il faut revenir au projet de loi. Le projet de loi institue une commission par loi avec des secteurs précis aussi où on siège quatre fois. Pour l'instant, c'est consultatif, pas d'obligation de résultat – c'est de la consultation – mais, après ça, on réfère au ministre sectoriel qui, lui, garde, finalement, son pouvoir sectoriel. Dans ce cas-là, c'est un peu normal aussi, puisqu'il a l'ensemble de la province à s'occuper. Donc, on a beau dire: On va commencer. Mais, vous, vous la posez aussi, la question quand vous dites: C'est quoi l'intervention de la CDM avec les pouvoirs consultatifs d'un CRD? On peut bien dire: On va commencer, là – c'est correct – mais, si c'est une autre table de concertation par-dessus les autres tables de concertation, je ne sais pas, là. Vous dites: Nous autres, ça nous satisfait pleinement, bon, c'est correct. Par rapport aux autres, il y en a d'autres qui disent: Non, ce n'est pas assez. C'est un peu ça, là, que j'essaie de savoir. Vous autres, vous dites: On est parfait avec le projet de loi tel quel ou il y a des modifications? C'est le temps de dire, là. De toute façon, le ministre nous l'a dit hier, puis c'est avec une grande ouverture qu'on est ici à regarder. S'il y a une bonification à apporter au projet de loi, c'est le temps de l'apporter.

(9 h 50)

M. Valois (Roger): Nous, on ne pense pas que c'est en enlevant des pouvoirs à qui que ce soit, au CRD ou à d'autres organismes, pour les mettre au niveau de la métropole qu'on va faire avancer. La situation évolutive de la Commission va faire en sorte que tous les meubles vont probablement se placer au fur et à mesure. Et on a chez nous les mêmes problèmes que vous avez au niveau des discussions. Elles ont l'air calmes comme ça à matin, là, mais je vais vous dire que, des fois, il a venté fort chez nous, hein. Puis on a aussi nos secteurs. Parce que nos fédérations professionnelles, qui, elles, sont dans toutes les régions du Québec puis qui veulent aussi participer à la reprise de l'emploi, amènent leur position puis elles pensent que peut-être que, sectoriellement parlant, le développement de l'emploi va passer. C'est ça, aussi, qu'on a chez nous, sauf qu'on dit: Il faut partir, il faut commencer. On a une structure à mettre en marche, à savoir s'il va y avoir plus de lits ou plus de socioéconomique. On se dit: Il faut commencer et, enfin, à mesure que la situation va évoluer, on verra bien à faire les ajustements nécessaires. Et, comme ces commissions-là ne démarrent jamais sur les chapeaux de roue, on a le temps de voir aller la locomotive, puis on va être en mesure de faire des correctifs. Puis, tout le monde est assez intéressé au niveau de son développement que tout le monde va vouloir arrêter le bras de la locomotive en temps pour ne pas que ça déraille de partout. Moi, je pense qu'il faut commencer. C'est essentiel.

Il y a Michel qui pourrait... parce que c'est lui qui nous a suivis au niveau technique puis qui a participé à tous ces travaux-là, Michel Paquet. Puis, avec votre permission, Mme la Présidente, je voudrais que Michel Paquet intervienne là-dessus.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. Paquet.

M. Paquet (Michel): Merci. Je ne pense pas que le débat devrait se situer, puis le problème aussi, entre un choix fondamental, les cinq régions versus la métropole. Il y a, pour chacune des compétences qu'on peut accorder à une commission de développement de la métropole, une dimension métropolitaine qui doit faire l'objet d'une mise en commun. O.K. Mais est-ce que ça doit vouloir dire automatiquement qu'on nie par là la dimension régionale existante sur le terrain de chacune d'entre elles? Pas du tout. Je veux dire, il n'y a donc pas à faire un choix, semble-t-il, fondamental entre une seule région ou cinq autres régions.

Il y a au moins deux éléments qui nous interrogent beaucoup comme conséquences. Une seule région administrative, actuellement, mais, dans notre projet à la CSN, on parle beaucoup qu'avec l'accession du Québec à la souveraineté il y a transformation des régions administratives en régions politiques et administratives. Or, ça pose tout le questionnement éventuel d'une seule région politique et administrative au Québec qui représenterait à peu près la moitié de la population. Il y a au moins ça déjà comme équilibre à l'intérieur du Québec à quoi il faut songer. Mais je ne pense pas qu'il y ait de choix fondamental précis à faire entre soit une seule région et toute la compétence en entier... Je pense que ce n'est même pas ça, j'imagine, qui est envisagé. On ne peut pas dire que la santé n'est que quelque chose de métropolitain, même dans le bassin de desserte qu'on peut appeler métropolitain. Il y aura toujours, forcément, une dimension locale, régionale et, bien sûr, par contre, une prise en compte qui est commune de ce qui est véritablement métropolitain. Je pense...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Paquet.

M. Paquet (Michel): ...que c'était bien articulé au niveau du développement économique où je ne pense pas que l'idée, c'était, exemple, d'éliminer toutes les corporations de développement économique des municipalités locales. En tout cas, il faudrait leur dire si c'est ça. Mais c'est beaucoup plus de prendre en compte la dimension véritablement métropolitaine, ce qui doit être mis en commun.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci...

M. Paquet (Michel): ...le reste, ça peut demeurer local et régional.

La Présidente (Mme Bélanger): ...M. Paquet. Mme la députée de Terrebonne, cinq minutes.

Mme Caron: Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Si elle en prend trois, ça...

Mme Caron: Je suis très heureuse de vous rencontrer puis de vous entendre. M. Paquet, vous venez de sortir un élément qui, moi, me préoccupe beaucoup par rapport à une région administrative, bien sûr à l'intérieur d'un Québec souverain, mais même, aussi, à l'intérieur du système actuel. Parce que, si on se retrouve avec une région administrative qui a la moitié du Québec, à l'intérieur même d'un système fédéral, le poids au niveau du gouvernement du Québec, c'est évident qu'il est très différent.

Ça n'a pas dû être facile de préparer votre mémoire, parce que plusieurs des gens qui sont là ont eu, aussi, à préparer un mémoire dans les CRD et les positions étaient très variables. CRD de Lanaudière, c'est pas de Commission du tout, Laurentides non plus, d'autres, une commission décisionnelle, d'autres, une commission consultative. Donc, c'est évident que ça ne devait pas être facile.

Comme il ne me reste pas beaucoup de temps, moi, je vais revenir à votre mémoire au point, pages...

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Terrebonne, le ministre m'a demandé d'avoir deux minutes sur votre cinq minutes.

Mme Caron: ...16 et 17, parce que je pense que vous êtes ceux qui avez le mieux présenté l'importance des socioéconomiques dans la composition de la Commission qui, finalement, se retrouve à être obligée de faire l'équilibre: un tiers, un tiers, un tiers. Et, à cet égard-là, par rapport aux décisions importantes qui vont reposer sur les socioéconomiques, vous voyez votre rôle comment? Les élus nous disent: «Si la commission est consultative, oui, les socioéconomiques peuvent participer, sans difficulté, mais, si elle devient décisionnelle, les socioéconomiques ne sont pas imputables.» Donc, à ce moment-là, ils pourraient présenter leur opinion mais ne devraient pas avoir droit de vote.

Compte tenu que vous définissez très bien à quel point votre rôle doit être important, vous réagissez comment, par rapport à ça?

M. Valois (Roger): Là-dessus, je pense que,au niveau du débat, celui qui va vous exprimer ça le mieux, c'est René Lachapelle.

M. Lachapelle (René): Alors, ce qu'on dit là-dessus, c'est qu'on est d'accord que les élus ont une imputabilité mais ce qu'on prétend, c'est que leur imputabilité est sur leur territoire d'élection. Alors, quelqu'un qui est élu pour représenter une municipalité défend les intérêts de cette municipalité-là. Il n'y a pas d'imputabilité métropolitaine, à proprement parler.

Alors, de ce point de vue là, qu'on soit socioéconomiques ou élus, l'imputabilité métropolitaine viendra au moment où il y aura élection et pouvoir de taxation de niveau métropolitain. Alors, ça, c'est la première chose. Deuxièmement, on expérimente, à différents niveaux, à différents lieux, un partage d'imputabilité comme représentants socioéconomiques. On siège déjà dans des conseils régionaux de développement, on siège dans des comités et des commissions, des conseils où il y a de la gestion de fonds publics, soit municipaux ou autres. Puis, on participe a ces décisions-là.

Je pense que ce qui est important, c'est qu'on y aille comme citoyens. On pense que, effectivement, c'est une participation au pouvoir, ça suppose des grandes responsabilités mais on ne voit pas pourquoi, comme représentants socioéconomiques, on ne serait pas capables de participer à ce niveau-là. La prétention de monopole d'imputabilité des élus, on questionne ça sérieusement parce qu'on reconnaît qu'ils sont imputables là où ils sont élus.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre.

M. Ménard: Rapidement, je suis d'accord avec l'esprit de votre rapport et j'apprécie votre appui. On m'a dit souvent que la politique était l'art du possible. Quand on entre en politique, on pense qu'il y a beaucoup plus de possible que ce que, finalement, on se retrouve à faire. Je pense qu'il faut rentrer, effectivement, comme vous, qu'il faut commencer quelque part.

Il y a un aspect qui ne semble pas évident pour vous. Je vous demande si vous l'avez vu. Et, si vous l'avez vu, êtes-vous d'accord avec? C'est la chance que je donne aux élus municipaux et aux acteurs socioéconomiques qui en feront partie, d'entrer dans le processus de planification gouvernementale, ce qui atteint un double but. D'abord, au lieu de voir des gens qui sont inquiets de se faire imposer quelque chose par la majorité ou la majorité qui voudrait avoir plus de pouvoir sur la minorité qui prospère trop à ses dépens, de les mettre dans une autre atmosphère. De planifier, donc fixer des objectifs, chercher ensemble des solutions pour les atteindre, reconnaître ses forces et ses faiblesses, mais aussi amener les ministères sectoriels à penser métropole et, donc, ne pas appliquer une politique mur à mur. L'avez-vous vu? Si oui, êtes-vous d'accord?

M. Valois (Roger): C'est clair qu'on l'a vu, là. Mais l'imputabilité des élus municipaux, quand le gouvernement du Québec... pas nécessairement celui-là, là. Ça remonte à des décennies derrière nous. Quand le gouvernement du Québec a permis, par exemple, que des municipalités naissent en étant des abris fiscaux connus... Et on est placés devant le phénomène. Si on peut arrêter de raisonner comme des Bérets blancs au niveau des taxes, on va peut-être avancer un peu plus vite puis que les élus municipaux essaient, dans des discours ronflants puis dans des discours avec des structures, de camoufler tout l'intérêt qu'ils ont pour ne pas augmenter des taxes, en fixant ou en adhérant à ce que le ministre met sur la table... je pense qu'on va aller plus vite. Et ce n'est pas en tenant des discours du côté de la bouche droite qu'on va faire avancer le côté gauche. Et, là-dessus, il y a beaucoup, beaucoup – en filigrane puis en discussions de corridor – toute l'appréhension que des banlieues ou certaines villes comme la Communauté urbaine de Montréal ont en ce qui a trait au fardeau fiscal à partager.

On parle de solidarité sociale, on parle de solidarité où on est rendus. Il me semble que ça, il va falloir que ça arrête. Et, là-dessus, je vais dire, de façon claire, nette et précise, que c'est vrai que des fois ils ont une imputabilité mais je «peux-tu» vous dire qu'à Montréal, par exemple, juste au niveau de la caricature, Arthur Sandborn représente beaucoup plus de personnes que beaucoup de maires de la Communauté urbaine de Montréal. Hein? Il y a 75 000 personnes affiliées au Conseil central du Montréal métropolitain et il y a des municipalités qui n'ont pas ça. Et, quand Arthur Sandborn parle, c'est parce qu'il y a des débats assez sérieux qui se font dans nos instances syndicales.

(10 heures)

Et là-dessus, soyez assurés, M. le ministre puis MM. et Mmes les députés et ministres, que le monde nous suit beaucoup et l'intérêt pour la métropole est là. Et toute la discussion que, nous, on fait avec nos organismes affiliés, les conseils centraux de la ceinture nord et sud, porte aussi sur l'intérêt du développement de la métropole pour relancer l'emploi. Et pas à n'importe quel prix, pas n'importe comment.

Mais je pense que là-dessus, nous, ce qu'on vous dit, puis c'est un peu la conclusion que la CSN veut soumettre: Il faut commencer, il faut mettre ça de l'avant pour qu'on puisse décoller, et des correctifs, dès que l'évolution se fera, on les apportera dès que ça commencera. C'est la conclusion puis c'est un peu la réponse que je veux vous faire. Mais il y a beaucoup de monde qui se camouflent derrière un discours, mais la vraie raison, c'est parce qu'on ne veut plus payer et que le fardeau fiscal, semble-t-il, il est accoté puis on ne peut plus aller.

Il y a des villes, au Québec, qui sont venues au monde – puis ça, là-dessus, le ministre des Affaires municipales le sait – en étant des abris fiscaux pour... C'est clair et net: il y en a une quantité indescriptible. Nous, on pense qu'il y a 700 municipalités de trop au Québec. Quand on dit ça, peut-être qu'on a l'imputabilité d'autres personnes, mais il y a certains maires qui devraient remettre en question le poste qu'ils occupent puis la grandeur de leur territoire, puis, aussi, l'implication au niveau de la solidarité québécoise.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci.

M. Valois (Roger): Nous, on pense qu'il faut aller de l'avant; il faut mettre ça en marche. Avec toutes les critiques qu'on pourra vous faire, même nous, au courant de l'évolution du dossier, on va vous en faire des critiques; on va apporter notre point de vue. On ne s'est jamais gêné pour le faire. Et ce n'est pas l'étiquette de la maison de se taire quand ça ne fait pas notre affaire.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Valois.

M. Valois (Roger): Non, mais...

La Présidente (Mme Bélanger): Là, on va être obligé...

M. Valois (Roger): J'allais justement finir en vous disant: Merci beaucoup!

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Valois (Roger): Vous m'avez volé le punch!

La Présidente (Mme Bélanger): Vous voulez toujours avoir le dernier mot, hein?

M. Valois (Roger): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, nous vous remercions de votre participation. On va suspendre quelques instants, le temps de changer d'invités.

(Suspension de la séance à 10 h 2)

(Reprise à 10 h 4)

La Présidente (Mme Bélanger): La commission reprend ses travaux. À l'ordre, s'il vous plaît! Mmes, MM. les députés. Si vous voulez prendre votre place. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys, Mme la députée de Deux-Montagnes. De la discipline un peu, s'il vous plaît! Mme la députée de Jean-Talon.

Alors, je demanderais à l'Institut de développement urbain du Québec de bien vouloir s'approcher à la table. Je demanderais au porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter la personne qui l'accompagne. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire qui sera suivi d'un questionnement du côté ministériel et du côté de l'opposition.


Institut de développement urbain du Québec (IDU)

M. Charlebois (Cameron): Merci, Mme la Présidente. Je m'appelle Cameron Charlebois. Je suis président-directeur général de l'Institut de développement urbain du Québec. Je suis accompagné de mon collègue Michel Dumais, qui est membre du comité exécutif et président d'une entreprise immobilière qui s'appelle Sécurespace. Tout d'abord, permettez-moi de nous excuser pour notre absence lors de la première audience que vous nous avec accordée. J'ai manqué le train à sept heures le matin et, avec le tempête d'il y a deux semaines, c'était impossible qu'on se rende, à Montréal. Alors, on s'excuse profondément pour ça. J'espère qu'il n'y a pas eu trop d'inconvénients. Aussi, on vous remercie pour l'opportunité que vous nous offrez de présenter notre mémoire dans un deuxième temps.

Tout d'abord, l'IDU du Québec est un organisme indépendant sans but lucratif qui regroupe des promoteurs, des gestionnaires, des propriétaires et des professionnels de l'industrie immobilière du Québec, notamment du secteur non résidentiel. Il s'agit de noter que les contribuables non résidentiels supportent au-delà de 50 % du fardeau fiscal dans les municipalités de la région. D'ailleurs, notre mémoire contient un exemple de la ville de Saint-Laurent où le fardeau porté par les contribuables non résidentiels touche 70 % des revenus municipaux de cette municipalité. Ces contribuables financent les services municipaux en grande partie destinés aux résidents et dont l'implantation est décidée par des résidants par le biais des conseillers et du maire que ces derniers élisent. Bien que ce soit dans l'intérêt des entreprises et propriétaires fonciers que des villes soient en santé et que des résidants jouissent d'une qualité de vie adéquate, il faut de meilleures balises gouvernementales sur les dépenses municipales si le système veut garder son caractère équitable.

Inquiets face à la décroissance et à la stagnation économique et démographique qui affligent la région, l'IDU se voit dans l'obligation de réclamer promptement des initiatives majeures de la part des gouvernements afin de recréer des conditions propices au développement et à la croissance dans la région. l'IDU croit fortement que la voie de l'avenir passe par des gestes concrets qui impliqueront l'ensemble des acteurs. Des gestes telles l'implantation d'un plan d'aménagement régional, une stratégie intégrée de développement économique, des méthodes praticables accréditées pour l'assainissement des sols contaminés, etc. Nous croyons que la situation actuelle dans la région rend impossible la prise de telles actions concrètes sur le plan régional.

La planification et la mise en branle de telles actions nécessiteront de l'information ainsi que l'engagement et la participation des gens et organisations du milieu qui ne sont pas nécessairement rejoignables à travers des municipalités. C'est pourquoi nous appuyons fortement la présence de représentants socioéconomiques au sein de la Commission. Selon nous, les représentants socioéconomiques apportent trois contributions fondamentales. D'abord, une connaissance de certains aspects de la faisabilité et de l'efficacité des projets, notamment en ce qui concerne l'implication des divers milieux. Deuxièmement, une compréhension concrète des obstacles et des opportunités, et, troisièmement, une certaine neutralité politique et territoriale et une capacité d'agir à titre de porte-parole auprès des divers milieux composant la région.

L'IDU est très préoccupé par le débat sur la présence des non- élus que nous entendons aujourd'hui. Selon nous, il est symptomatique d'un problème encore plus fondamental, soit l'adhésion inébranlable des administrations locales à la doctrine de l'autonomie locale. Poussé à l'extrême, ce dogme a conféré implicitement sur ces administrations le quasi-statut d'un gouvernement. Or, cette vision de l'administration au niveau municipal est révolue. Partout, nous voyons que les gouvernements doivent maintenant, explicitement, mandater des municipalités pour réaliser certains rôles très précis qui se cadrent dans les objectifs et les stratégies de l'État, notamment en ce qui concerne la réduction des coûts de l'ensemble de l'État et le partage des responsabilités pour la fourniture de certains services. L'effet de cette nouvelle vision est d'encadrer la liberté d'action des villes, en faveur d'une stratégie de société globale plus cohérente et efficace.

(10 h 10)

Les deux visions sont catégoriquement contradictoires l'une avec l'autre, de sorte que, si on ne fait pas le point sur laquelle sera principalement favorisée, le présent débat et ceux qui suivront sur d'autres partages sur la décentralisation et sur la fiscalité seront aussi cacophoniques et déchirants, et nous nous trouverons toujours stoppés dans nos tentatives de relancer la région. Nos principaux commentaires sur le projet de loi se résument ainsi.

D'abord, nous vous proposons de passer, le plus vite possible, à réduire le nombre de municipalités dans la région. Nous croyons que la multiplicité des municipalités ajoute à la cacophonie qui règne et que ça gaspille des ressources. Il faut confirmer la ville de Montréal comme l'élément clé qui structure la région. Il faut remettre Montréal en santé, il faut remettre à Montréal les outils et les finances nécessaires pour qu'elle gère son territoire comme il faut. Il faut établir le centre-ville de Montréal comme le centre prioritaire pour des activités et investissements à caractère régional, et, notamment, comme centre transactionnel pour la métropole. Nous avons eu un conférencier, tout dernièrement, à l'IDU, qui décrivait en détail comment Montréal avait perdu son statut comme centre transactionnel pour des entreprises financières et des entreprises d'investissements, et que, ça, c'est le phénomène qui érode le plus le statut et l'importance du centre-ville de Montréal, qui, nous vous rappelons, est l'image même de la métropole.

Il faut harmoniser les régimes fiscaux locaux. Nous croyons qu'à l'intérieur de la Loi sur la fiscalité municipale, telle qu'elle existe aujourd'hui, il est possible, par entente et par travail en commun, d'harmoniser et de mettre plus en commun les régimes fiscaux des municipalités. Il faut voir que, dans les 110 villes de la région, notamment celles qui imposent des taxes non résidentielles, il y a à peu près 110 régimes locaux de taxation. Donc, ce n'est pas facile de percevoir le niveau de concurrence d'une ville à l'autre. Mais tous ces régimes locaux là sont concoctés ou montés de sorte à favoriser, évidemment, la ville en question elle-même au détriment, souvent, des villes voisines.

Il faut structurer et coordonner les interventions du gouvernement sur le territoire. Il faut créer une force de frappe publique-privée inégalée parmi tous les acteurs en matière de développement économique à l'appui, évidemment, de Montréal international et des autres initiatives.

Ce dont nous parlons plus à ce chapitre-là, c'est l'arrimage des différents niveaux d'actions en développement économique que ce soient des services très locaux de développement économique, des municipalités qui agissent comme service d'accueil, service après- vente, service de soutien, jusqu'au supramunicipal qui agit plus dans la prospection, puis la détermination de la localisation des entreprises sur le territoire, jusqu'au niveau de l'intervention du gouvernement en prospection économique et internationale.

Il faut développer des mécanismes de prise en charge par les gens de la région. Et là aussi nous revenons à l'expérience du forum de l'automne dernier où c'était très intéressant d'amener tous les acteurs de la région ensemble pour penser stratégies, pour travailler en ateliers, pour recommander et pour regarder l'évolution de la Commission et se prononcer sur comment les choses avancent. Donc, nous proposons que de tels forums soient tenus, de rigueur, quitte à le mettre dans la loi, régulièrement, que ce soit biennalement ou autrement.

Il faut passer plus vite à l'action. Nous voyons que les dates limites pour certains gestes, certains plans, c'est la fin de 1998, début 1999. Nous disons dans le mémoire que nous croyons que ces périodes-là pourraient être raccourcies de six mois facilement et arriver plus vite à l'action.

Nous ouvrons ici une parenthèse qui n'est pas dans le mémoire, c'est la question du problème de la contamination des sols. C'est un grand problème. C'est un grand problème sur l'île de Montréal et sur certaines parties de la rive sud et Laval, et ce que nous constatons, et ça c'est un écho que nous avons directement de nos membres, c'est que si vous voulez aujourd'hui développer un site contaminé qu'on appelle familièrement «brown field» vous ne pouvez pas trouver du financement, vous ne pouvez pas trouver un certificat du gouvernement qui vous accrédite pour la décontamination que vous pouvez faire de sorte que les acteurs en développement ne veulent pas toucher ces sites-là.

Ce qui a été réussi ou réalisé en Ontario, c'était l'adoption d'une politique-cadre qui garantit l'obtention d'un certificat si on suit un certain procédé pour la décontamination de sorte que les financiers, les investisseurs et les usagers des propriétés sont protégés. Cette politique n'existe pas au Québec et nous croyons que la définition d'une telle politique peut être beaucoup aidée par l'action commune ou en commun des gens de la région quand on regarde très, très, très directement les effets de cette situation dans le développement de la région et, d'ailleurs, qui encourage l'étalement urbain par le fait même que la plupart de ces terrains-là sont dans le centre du territoire et, pour avoir un terrain finançable et un projet finançable, il faut aller trouver un terrain non contaminé.

Finalement, nous énonçons une mise en garde contre la création de nouvelles structures bureaucratiques et l'imposition de nouvelles taxes. Avant de passer à ça, on comprend qu'en intérim ça prendra une certaine structure ou une certaine bureaucratie, mais à la longue il faut remanier les structures de la région de sorte à réduire les structures, pas les augmenter. Alors, avec ça, j'inviterais mon collègue, s'il le veut, à vous adresser quelques mots, mais, pour ma part, nous serons heureux de recevoir vos questions.

La Présidente (Mme Bélanger): M. Dumais.

M. Dumais (Michel): Je vous remercie. Simplement, on va peut-être plutôt répondre aux questions. Disons que le mémoire ou le projet que vous voyez ici a fait l'objet, à l'intérieur d'un comité de l'IDU, de nombreuses discussions. Simplement pour vous rappeler que les gens de l'IDU sont composés de francophones, gens d'affaires francophones, et aussi de gens d'affaires anglophones, de la communauté juive de Montréal, etc. Alors, le débat a été assez vif par moments. On a pris le temps, au cours de nombreuses semaines, de discuter à fond du projet dans tous les détails. Je n'irai pas aujourd'hui... Loin de moi l'idée de revenir sur tout ça, là.

Simplement un commentaire: c'est qu'il existe beaucoup de scepticisme de la part des milieux d'affaires, peut-être moins francophones, mais surtout anglophones. Beaucoup de points d'interrogation demeurent. Et il est certain qu'il va falloir faire davantage pour convaincre ces gens-là, à un moment donné, de se rallier à un projet comme celui-là. Enfin, disons que je resterai sur ce point-là, et on pourra peut-être revenir sur certains autres détails plus tard. Merci beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, M. le député de Sainte-Marie–Saint-Jacques.

M. Boulerice: Alors, merci, Mme la Présidente. M. Charlebois, M. Dumais, je vous remercie d'avoir repris la route pour Québec de façon à venir nous rencontrer. Il va de soi qu'on a regardé avec beaucoup d'attention le mémoire que vous avez présenté. J'ai remarqué que vous aviez d'ailleurs – et je ne vais pas vous le relire puisque c'est vous qui l'avez écrit – mais vous avez des positions relatives à la mission de la Commission, à sa composition, à son fonctionnement, notamment le mandat des membres.

À l'article 33, vous spécifiez que les comités devraient relever directement du conseil et non pas du comité exécutif comme tel. Vous en avez sur le secrétariat, sur les pouvoirs et fonctions, aménagement du territoire, transport. J'ai remarqué aussi, au niveau des déchets, que vous nous suggérez d'inclure la gestion des neiges usées. C'est vrai que, lorsqu'on n'est pas précis, à l'occasion on oublie; il n'est pas mauvais de vouloir ajouter. Effectivement, c'est une problématique.

(10 h 20)

Donc, ceci pour vous dire que vous apportez des choses qui, inévitablement, méritent une certaine attention, sinon une attention certaine. Et, à la page 10, et c'est surtout là-dessus que ma question va porter, à la page 10 de votre mémoire, et vous l'avez resouligné tantôt... vous avez bien dit que la Commission de développement ne devrait pas donner lieu à la création de structures additionnelles, mais qu'on devrait plutôt aller à une certaine rationalisation ou au remplacement de structures bureaucratiques, entre guillemets, gouvernementales ou supramunicipales qui existent actuellement. Mais si je vous demandais à brûle-pourpoint: Quelles sont les structures qui, à vos yeux, pourraient être rationalisées, remplacées, disons, dans un immédiat raisonnable?

La Présidente (Mme Bélanger): M. Charlebois.

M. Charlebois (Cameron): Merci. Juste comme ça, c'est sûr... D'ailleurs, on rejoint les propos en quelque sorte qui ont précédé, si on regarde une métropole qui va agir comme une métropole et on espère que les interventions du gouvernement sur le territoire seront concertées et seront cohérentes, il faut regarder les structures, que ça soit les conseils régionaux de santé, que ça soit les CRD, que ça soit les MRC, que ça soit la CUM et d'autres. Je pense que le projet de loi – en appelant une étude et une proposition de la Commission sur les structures dans la région – le projet de loi touche surtout les structures municipales, mais ça peut regarder toutes ces structures-là. Il y a lieu de rationalisation. On comprend aussi les représentations des élus locaux comme quoi les CRD et les MRC sont devenus des lieux de rencontre et de concertation sur un plan sous-régional. Je pense qu'il faut tenir compte de ça. Il faut regarder comment ne pas perdre ce dynamisme-là mais quand même rationaliser de sorte qu'on n'a pas la sorte de concurrence interrégions, interstructures ou interorganismes qu'on peut voir aujourd'hui. Mais, une étude plus détaillée, je ne l'ai pas devant moi.

M. Boulerice: D'accord. Mais on pourrait postuler que la présence des CRD comme étant membres des socioéconomiques, et présents à ce conseil de développement, permettrait effectivement une concertation et non pas une confrontation. C'est un lieu où à la fois les pratiques et les mentalités pourraient facilement changer.

M. Charlebois (Cameron): Oui. Je peux vous donner comme exemple, on a reçu, dans le cadre de nos réflexions sur ça, la personne responsable pour le développement économique, l'office d'expansion de la CUM, et elle je pense qu'elle a trouvé son créneau en termes d'action et elle espérait que l'action sur le plan local soit bien arrimée avec l'action qu'elle prend, elle, sur la prospection et que son action soit bien arrimée avec l'action que prend Montréal international ou le gouvernement du Québec ou le ministère de l'Industrie et du Commerce. Donc, ça c'est une personne qui nous parle de son réel qui est à l'intérieur de la CUM. Est-ce qu'on arrive à la même vision si on parle aux agents de développement économique qui travaillent pour les différentes villes de la région ou pour les CRD? Je ne sais pas, on ne les a pas consultés. Ça nous a frappé, son intervention, comme étant très intéressante et très pertinente. Il faut donner un lieu, il faut donner une place pour que ça se travaille, ça.

M. Boulerice: Vous avez abordé un deuxième sujet qui n'est pas nouveau, qui est très ancien, mais qui revient d'actualité, la réduction des municipalités. Vous dites que ça devrait être un enjeu majeur de la Commission. J'ai presque le goût de rééditer devant vous une phrase que j'ai faite et qui a peut-être été mal interprétée par certains, mais je disais: Vous imaginez fusionner Hampstead et Westmount? Qu'est-ce que ça donnerait comme article dans la presse allemande le lendemain? Et peut-être pour en rajouter, à partir d'une expérience vécue, ma collègue députée de Marie-Victorin pourrait en témoigner. Le Vieux-Longueuil, au niveau des structures scolaires, n'a jamais voulu appartenir à Jacques-Cartier, mais bien à Saint-Exupéry, qui représentait à la fois Boucherville et Saint-Lambert. Géographiquement c'est totalement incohérent. Alors vous voyez comment peut être vif ce que je vais appeler, avec le plus grande des réserves, les nationalismes locaux. Alors, sur Montréal, j'admets que 28 ou 29, il y en a tellement que j'oublie le nombre, mais, sans jeu de mots, vaste programme, aurait dit un général célèbre.

M. Charlebois (Cameron): Je pourrais vous proposer une solution...

Une voix: Plus radicale.

M. Charlebois (Cameron): ...encore plus radicale pour Montréal. Fusionnez Montréal avec Westmount, Outremont et Ville Mont-Royal et vous allez avoir toute une ville là.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Charlebois (Cameron): Et ce n'est pas farfelu, d'ailleurs. Je pense qu'on l'a dit et on ne veut pas être trop radicaux, mais on le dit. D'ailleurs, on l'a aussi mentionné dans une communication dernièrement avec le ministère des Affaires municipales. Nous sommes très préoccupés par la notion de l'autonomie locale. Nous la respectons, nous l'acceptons comme un principe de fonctionnement, mais, quand même, elle a ses limites. Puis, quand ça vient mobiliser pour le bénéfice de l'État, ce qui est, en effet, ce qu'on est en train de faire ici en restructurant ou en structurant la métropole, il faut que quelqu'un, notamment le gouvernement, oriente les structures municipales dans la région de sorte qu'elles soient plus productives et le plus efficace possible. Alors, je ne peux pas trouver d'autres raisons pour la sorte de territorialisme que vous décrivez là que le dogme de l'autonomie locale parce qu'un maire élu localement est là pour défendre l'intégrité du territoire d'où il provient. Puis, ce n'est pas surprenant. Ce n'est pas surprenant. Et, si on fusionnait quatre villes, le maire élu dans l'ensemble de ces quatre villes-là, ultérieurement, va défendre le territoire de ces quatre villes là une fois rassemblées. Alors, mais d'où vient l'initiative et le geste qui va résulter de ça? Ce n'est pas dans la nature organisationnelle d'une ville de volontairement s'offrir pour la fusion. Je ne crois pas. Alors, c'est pour ça que nous disons: La Commission ou le gouvernement devrait regarder. Puis, d'ailleurs, on apprécie que le ministre des Affaires municipales soit en train de regarder exactement cette question-là. Il y en a trop, de municipalités dans la région de Montréal comme il y en a trop au Québec. Puis, c'est très, très, très coûteux. C'est sûr que, pour la qualité de vie locale, si les citoyens locaux veulent se doter d'un conseil ou d'un mécanisme de contrôle de leur environnement très local, il n'y a aucun problème avec ça, surtout si c'est eux qui paient la facture. Mais, en ce qui concerne les plus grands enjeux puis la concertation régionale, je pense qu'il faut regarder au-delà de ces limites-là et regarder une plus grande efficacité de fonctionnement.

M. Boulerice: Merci.

M. Charlebois (Cameron): Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Mme la députée de Jean-Talon.

Mme Delisle: Merci, Mme la Présidente. Messieurs, bonjour. Dans votre mémoire, à la page 3, le troisième élément, là, vous dites qu'il faut établir le centre-ville de Montréal comme le centre prioritaire pour les activités et les investissements à caractère régional. Et une des dernières phrases dans le bas de la page: «Selon l'IDU-Québec, la loi devrait établir le centre-ville comme l'élément structurant prioritaire.» Bon, je ne relirai pas toute la phrase. Est-ce que, lorsqu'on lit ça, on doit aussi comprendre – je ne veux pas vous mettre les mots dans la bouche – que vous remettriez en question les limites territoriales, finalement, de la Commission? Est-ce que, pour vous autres, on en embrasse beaucoup trop grand par rapport aux priorités, là, que vous avez identifiées?

M. Charlebois (Cameron): Non, on a accepté la prémisse que le territoire soit défini par la RMR, ces paramètres-là, à quelques exceptions près et que c'est une base raisonnable pour organiser le territoire. C'est aussi une base économique qui se défend bien parce que c'est sûr que les municipalités qui sont à l'intérieur de ce territoire-là, par définition, ont des échanges économiques assez importants proportionnellement avec le centre de la région de sorte que ça fait un raisonnement économique pourquoi le territoire devrait avoir cette configuration-là. Tout ça pour dire pourtant que, aussi grand, aussi petit que soit le territoire, le centre-ville de Montréal comme tel, comme le centre transactionnel et le centre des grandes institutions, est quand même l'image de la métropole. Puis il ne faut pas, là, permettre d'éroder. Il ne faut pas permettre que ça se détériore. Il faut le renforcer dans son image en localisant des équipements à caractère régional, en localisant des services de transport en commun comme on a fait avec le métro, ainsi de suite.

Mme Delisle: Je reviens toujours sur cette affirmation-là que vous venez de faire, finalement, que Montréal doit être le centre structurant, il doit avoir les équipements régionaux. Est-ce que ce n'est pas là un élément qui pourrait créer – je ne veux pas dire de la discorde, là – qui pourrait, en tout cas, certainement nécessiter des discussions assez viriles puis assez importantes puisque la Commission, en tout cas ce que j'en comprends, la base de la Commission, finalement, c'est d'essayer d'établir effectivement une concertation à l'égard du développement économique, de l'endroit où seront établies les principales entreprises et aussi pour permettre à Montréal de revivre, entre guillemets? Mais, après avoir entendu, lors de cette commission, lors de ces audiences, l'ensemble des intervenants, il y a Montréal, il y a la métropole mais aussi il y a la région métropolitaine qui déborde du cadre de Montréal. Et j'aurais aimé vous entendre. C'est parce que je trouve ça très spécifique, ce que vous dites là et ça ne concorde pas, c'est-à-dire que l'idée est bonne, c'est certain, mais je ne suis pas certaine que ce n'est pas une pomme de discorde en partant à l'égard des régions avoisinantes. Enfin, c'est un commentaire, c'est certain.

(10 h 30)

M. Charlebois (Cameron): Je vais juste dire quelques mots puis je passerai à Michel après, deux commentaires par rapport à votre question. D'abord, le centre de la région, c'est le centre-ville de Montréal, il n'y a pas de doute, et, si cette Commission et les acteurs qui y figurent vont transiger avec l'extérieur, ce n'est pas à partir de Blainville qu'ils vont le faire. O.K.? Si des gens arrivent dans la région de Montréal, à l'aéroport ou autrement, puis ils se dirigent vers le centre-ville, c'est naturel. Alors, c'est important que ce centre-ville soit quelque chose de non seulement très fonctionnel mais de beau et qui est à la mesure de l'image qu'on veut projeter à l'extérieur. Alors, ce n'est pas très différent; centre-ville de Montréal, centre de la région, pour nous, c'est la même chose.

Quand on vient à d'autres sortes de structures, des technopoles, des parcs de haute technologie, il n'y a rien de mal à voir un parc de haute technologie à Laval puis un autre à Saint-Laurent, ainsi de suite. Où le problème arrive, c'est quand Laval fait une meilleure offre de rabais fiscal pour avoir une entreprise qui considère aller dans la technopole de Saint-Laurent; là, ça ne marche plus. Mais, avoir deux parcs de haute technologie, c'est très bien, d'augmenter la diversité de l'offre auprès des entreprises qu'on veut attirer ici, c'est magnifique, ça, il n'y a aucun problème.

Mais, ce qu'on dit, dans toute cette structure-là ou toute cette organisation, il ne peut avoir qu'un centre-ville. On peut avoir d'autres pôles d'activités, que ce soit le centre-ville de Laval, que ce soit la Rive-Sud, mais il n'y a qu'un centre-ville et c'est là où se passent les transactions, et c'est ça la base même de notre industrie qui se passe dans un centre-ville comme ça. Alors, sans centre-ville, tu n'as pas de ville, en effet. Donc, ce n'est pas l'image qu'on veut projeter. Michel, peut-être que...

M. Dumais (Michel): Créer une mentalité régionale comme le ministre veut le faire avec sa Commission, je pense que c'est un objectif qui est souhaitable en soi. Le faire, dans un premier temps, en essayant de rallier tout le monde et d'éviter la controverse, c'est probablement impossible. On sent qu'il n'y a pas unanimité, évidemment, comme vous le dites, Mme Delisle, au niveau des maires de la banlieue et de l'élite politique régionale mais on sent aussi qu'il n'y a pas unanimité au sein du gouvernement qui est au pouvoir présentement. Alors, c'est, pour nous, tout à fait normal. On commence quelque part et, comme les gens qui nous précédaient l'ont bien dit, il faut partir, alors on se rallie à la même position que le groupe qui nous précédait, à savoir que ça doit commencer quelque part puis ça doit avoir une structure et des objectifs qui vont être définis en cours de route. La structure, elle est là, on la prend et on part. Évidemment, il y aura toujours une certaine controverse qui pourra peut-être diminuer avec le temps, beaucoup de scepticisme, comme je disais tout à l'heure, en tout cas du milieu des affaires, mais, lorsqu'on verra des réalisations concrètes de cette Commission, au cours des prochaines années, probablement qu'on va réussir à faire l'unanimité davantage.

On parle de Montréal. L'objectif de la Commission, c'est de relancer Montréal. Peut-être qu'on devrait en parler davantage. Peut-être que les moyens éventuels que la Commission envisage de mettre sur pied pour relancer Montréal... On parle de la situation fiscale de Montréal qui est vraiment préjudiciable et qui impose à ses citoyens actuels une taxe supplémentaire par rapport à des villes de l'autre région; c'en est un. Mais l'image de Montréal, à l'heure actuelle, selon nous, l'image que projette Montréal auprès de ses citoyens, les citoyens de la grande région de Montréal, est une image, en général, assez négative. Je ne pense pas que ça soit la Commission seule qui puisse refaire tout ça. Il y a des problèmes que les gens d'affaires ont mis sur la table au moment où on a étudié votre projet, qui sont des problèmes concrets auxquels, un jour ou l'autre, vous aurez à faire face. Cette revitalisation de quartiers de Montréal, il y a des moyens qu'on peut prendre, mais je n'ai jamais entendu au cours des dernières années, ni de l'administration actuelle ni des précédentes administrations, des objectifs clairs et nets dans ce sens-là. Enfin, on ne peut pas non plus empêcher les citoyens de Montréal de poursuivre le rêve américain de vouloir s'en aller en banlieue puis de s'installer dans leur petit bungalow avec leur cour en arrière. Tu sais, ça, c'est quelque chose...

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous voulez...

M. Dumais (Michel): Pardon?

La Présidente (Mme Bélanger): ...raccourcir vos réponses un peu, parce qu'il y a d'autres questions à être posées. Les réponses sont un petit peu longues.

M. Dumais (Michel): O.K. Alors, disons que je détaillerai davantage plus tard. Ça va me faire plaisir.

La Présidente (Mme Bélanger): D'accord.

Mme Frulla: Je veux juste revenir à la fiscalité municipale...

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous me permettez, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. Mme la députée de Deux-Montagnes.

Mme Robert: Merci, Mme la Présidente. J'étais arrêtée sur votre dernière remarque: On ne peut pas empêcher les gens de rêver d'aller dans un petit bungalow pour avoir... Je suis de la MRC de Deux-Montagnes, du comté de Deux-Montagnes. Effectivement. Et on ne pourra pas empêcher les gens de choisir quelque chose dont ils pensent que c'est mieux pour eux. C'est bien clair qu'il faut revitaliser le centre de Montréal. Je vous écoute et je dis toujours: Comment je vais faire pour convaincre mon monde que la ville de Montréal, il faut la relancer, qu'ils ont un rôle à jouer là-dedans? Mais, en même temps – vous l'avez souligné – il y a les ajustements de la fiscalité, ces choses-là, etc. Est-ce que ce sont les banlieues qui vont arriver à régler ce problème-là? Puis est-ce que, en même temps, on va arrêter les gens d'espérer de vivre des situations, c'est-à-dire d'aller élever leurs enfants à l'extérieur de Montréal? Alors, on a à faire à un problème de comportement qui n'est pas nécessairement créé par les banlieues. Bon, alors, sauvons Montréal. Vous n'avez pas pu me démontrer, en tout cas, ce matin que sauver Montréal peut devenir une volonté intéressante, tout aussi intéressante pour les banlieues. Est-ce que vous avez une vue là-dessus ou quelque chose qui pourrait...

(10 h 40)

M. Dumais (Michel): Très concrète, ma chère madame. Des choses qui ont été discutées entre nous, développeurs immobiliers qui développons à Montréal et en banlieue. On sait ce que les gens pensent, on sait ce que les gens veulent demain matin. On n'a pas le choix. Si on se lance en affaires puis on investit tant de millions de dollars dans un développement résidentiel, il faut que ça fonctionne. Alors, aujourd'hui à Montréal, ça serait utopique de penser qu'on va se lancer dans un projet immobilier résidentiel d'importance, parce que la clientèle n'est pas là. Les gens, comme vous dites, veulent aller ailleurs, alors il faut changer l'image de Montréal. Lorsqu'on va, par exemple, dans une exposition de l'habitation comme il y en a eu une dernièrement au Stade olympique, vous allez remarquer que la ville de Montréal, avec son stand magnifique... Et ils investissent là-dedans pour essayer de se rendre un peu plus sympathiques auprès de la clientèle éventuelle. Je veux dire, les résultats sont très, très décevants malgré les efforts qu'ils font. Les gens aujourd'hui, à 90 % des cas, n'ont pas le goût de s'installer à Montréal, parce que l'image de Montréal est très mauvaise. Et je pense que l'administration de Montréal, encore cet hiver, dans les cas concrets a prouvé qu'elle n'avait pas le contrôle. Les gens sont très sceptiques et avec raison. Dernièrement, on parlait de lancer un projet dans le quartier Notre-Dame-de-Grâce – pour donner deux cas concrets, on va parler de Hochelaga-Maisonneuve puis Notre-Dame-de-Grâce. Pourquoi Notre-Dame-de-Grâce? C'est un quartier qui vieillit. Pourquoi? Notre-Dame-de-Grâce, c'est un quartier où la population qui est là est veille et attend, je veux dire, de disparaître, et la jeune génération n'est pas intéressée. Je veux dire, vous avez le boulevard Décarie, qui est en plein milieu du quartier, qui pollue l'environnement, qui crée toutes sortes de problèmes. La décision de construire Décarie, il y a 25 ans, c'est une décision qui a été imposée par le gouvernement provincial, par le ministère des Transports. Bien, c'est un quartier qui était comparable, à l'époque, Notre-Dame-de-Grâce, à Westmount, à Outremont, à Ville Mont-Royal, mais, aujourd'hui, c'est un quartier qui ne s'en va nulle part. Et, Hochelaga-Maisonneuve, c'est la même chose, les gens, les jeunes qui ont commencé à vouloir s'installer là au cours des dernières années attendent qu'on réaménage les rues, qu'on développe un peu plus de logements sociaux, qu'on construise des espaces verts, qu'on crée un environnement qui soit finalement sécuritaire pour tout le monde. Mais ça, ce n'est pas fait. C'est tout ce dont on a besoin, finalement, pour...

Mme Robert: Mais en quoi la Commission va-t-elle amener une solution là-dessus?

M. Dumais (Michel): On veut aider Montréal, on veut ramener la population à Montréal, on veut stopper l'étalement urbain, on veut créer une réglementation pour empêcher les villes de banlieue de continuer à faire du développement à outrance comme ça s'est fait d'une façon désordonnée au cours des 20, 25 dernières années, et je suis d'accord avec ça en principe, sauf qu'à un moment donné on va offrir quoi comme alternative aux citoyens montréalais? Il va falloir, à un moment donné, qu'on se penche sur ce problème-là.

Mme Robert: Oui, mais est-ce qu'on va mettre une clôture sur les ponts pour ne pas qu'ils sortent et les obliger à rester en dedans? Il faut attirer le monde. Ils sont là et ils s'en vont.

Une voix: Non, je pense que...

M. Dumais (Michel): La mise au point qui doit être faite...

La Présidente (Mme Bélanger): Si vous me permettez, le temps pour les ministériels est terminé.

M. Dumais (Michel): Je vais juste finir là-dessus, là, si vous permettez. La mise au point qui doit être faite...

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, mais là, si vous permettez...

M. Dumais (Michel): ...c'est que ce n'est pas les villes de banlieue qui sont principalement responsables, selon nous, des problèmes de Montréal aujourd'hui, et à l'heure actuelle, ce qu'on voit et ce qu'on lit, c'est ça. Je veux dire, les gens, les dirigeants des banlieues se sentent accusés et ils se sentent obligés de justifier leur position, et ils ont peut-être raison, mais... Ils ont sûrement raison de dire que ce n'est pas eux qui sont les principaux responsables de la situation de Montréal. L'image de Montréal est à reconstruire, et c'est Montréal elle-même qui va prendre un jour ou l'autre, avec l'appui du gouvernement provincial probablement, les moyens pour la rebâtir. Et ça...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Desmarais...

M. Dumais (Michel): ...cette stratégie-là, j'aimerais...

La Présidente (Mme Bélanger): M. Desmarais, s'il vous plaît.

M. Dumais (Michel): ...qu'un jour ou l'autre, à la Commission, on en parle.

La Présidente (Mme Bélanger): Dumais, c'est-à-dire, M. Dumais. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Rapidement, les problèmes, en fait, que vous soulignez, qui sont très, très réels, sont très pertinents à Montréal, Montréal ville entre autres. Tantôt, on a étudié ensemble le projet de loi n° 67, sur l'évaluation municipale, la désynchronisation, etc., et ce n'est rien à côté de ce qui va arriver dans deux ans – M. Charlebois était là tout le temps – si on n'agit pas à cause de la dévaluation des grands édifices et de tout ça. Là, vraiment, ça n'a plus de bon sens, et c'est vraiment un cri d'alarme et qui est justifié et qui est chiffré, en plus.

Je veux revenir à la fiscalité municipale, parce que, en somme, il y a deux raisons. Effectivement, on a beaucoup, par des décisions qui ont été prises dans le passé, détruit l'aménagement urbain de certains quartiers à Montréal, entre autres, mais il y a toute la question de la fiscalité municipale. Vous dites que, finalement, cette Commission-là ne peut pas dire: La fiscalité, je ne m'en occupe pas parce que ça relève d'autres, parce que la fiscalité, c'est aussi important comme secteur que le développement économique, l'aménagement du territoire, le transport, la gestion des déchets. Alors, ce que vous suggérez un peu plus tard, c'est que dans l'article 4, par exemple, on ajoute toute la question de la fiscalité, qui se doit d'être discutée dans la Commission avec les intervenants pour que les décisions soient prises en fonction de ça, sinon on s'en va vers un mur. Mais c'est vraiment à l'article 4, si je fais le parallèle avec votre document par rapport à l'étude détaillée des articles des projets de loi, que vous insériez cette dimension-là, qui est la fiscalité, et qui fait consensus.

On doit dire, là, on a beau dire aux intervenants, la CSN, etc., que les maires... Les maires sont inquiets et ils ont raison d'être inquiets, parce qu'ils sont inquiets pour leurs contribuables, et puis, en quelque part, tout le monde est très, très taxé, ça fait que personne n'est intéressé non plus à ajouter des taxes. C'est légitime, ça, et nous autres non plus, on n'est pas intéressés. Ça fait que, tu sais, en quelque part, c'est légitime, il faut comprendre. Mais il y a un problème majeur. J'aimerais ça vous entendre parler brièvement sur cette question de fiscalité, pourquoi il faut absolument mettre le dossier fiscal à l'intérieur de la Commission.

M. Charlebois (Cameron): Mais, entendons-nous, la question de la fiscalité, c'est assez vaste, puis on comprend qu'il y a du travail qui se fait au niveau du ministère des Affaires municipales. À la suite de l'étude de la loi n° 67, on regarde le retour au rôle annuel. On regarde d'autres choses qui vont améliorer la fiscalité municipale à travers le Québec. Alors, ça, on est embarqués dans cette démarche-là.

Ce que nous proposons ici, c'est que, même à l'intérieur de la Loi sur la fiscalité municipale dans sa formulation aujourd'hui, on peut harmoniser les régimes fiscaux dans chacune des villes ou des municipalités de la région, ce qui veut dire que... Est-ce que Montréal devrait garder sa taxe d'eau et de services? Parce que, là, c'est une taxe par-dessus d'autres taxes. Est-ce qu'on devrait permettre les rabais de taxes on les congés de taxes pour que des entreprises se localisent dans certaines municipalités de la région? Est-ce qu'on devrait harmoniser toute la taxation non résidentielle de sorte à réduire la fausse concurrence entre les villes, que ce soit au niveau des dégrèvements, que ce soit au niveau de l'imposition d'une taxe sur les terrains vacants, que ce soit au niveau d'autres surtaxes qu'on peut voir dans la loi?

Mais quand on regarde la carte, si on faisait une carte de la fiscalité dans la région, le problème de fond c'est que c'est complètement incompréhensible. D'une ville à l'autre, et d'ailleurs, comme on dit dans notre mémoire, vous traversez un coin de rue, puis vous êtes dans un autre régime fiscal en ce qui concerne au moins les entreprises, les résidences aussi. Alors, on dit, avec un bruit de fond comme ça, comment on peut espérer avoir de la concertation? C'est sûr que chaque ville taille son régime fiscal de sorte à mieux faire bénéficier ses contribuables locaux. Mais cette diversité, cette divergence, ça n'aide pas le développement de la région.

Donc, on propose que la Commission travaille au moins sur le niveau de l'harmonisation de ces choses-là, quelles taxes imposer. Si les taux de taxes changent d'une ville à l'autre, pour le moment, il faut vivre avec ça parce que c'est les coûts de fourniture de services, ainsi de suite, qui sont en jeu, puis, jusqu'à ce qu'on fusionne les villes, chaque ville va travailler ses coûts de livraison de services. Mais, au moins, le système d'imposition, si on ne parle pas de taux, parlons d'un système et de quelles seront les taxes qu'on va imposer, jusqu'à ce que la loi soit réformée comme il faut.

Mme Frulla: Parfait, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci. M. le ministre, une minute et demie.

M. Ménard: M. Dumais, j'ai bien aimé vous entendre dire que ce n'était pas les banlieues qui étaient responsables de la situation déplorable de la métropole. Vous aurez remarqué qu'il y a un acteur important qui ne l'a jamais dit, c'est le ministre de la Métropole, et pourtant c'est toujours là-dessus qu'on nous critique. Je crois à la même chose que vous. Mais, justement, je pars de là. Croyez-vous qu'il est possible de relancer la métropole, de guérir ces régions malades, sans diminuer d'aucune façon la croissance des parties de cette métropole qui est plus dynamique?

M. Dumais (Michel): Absolument. Si vous avez un centre-ville...

M. Ménard: O.K. Alors, moi aussi...

M. Dumais (Michel): Pardon?

M. Ménard: Oui, alors, j'ai dit, moi aussi mais continuez, oui.

M. Dumais (Michel): Si vous avez un centre-ville dynamique, à plus forte raison, les banlieues vont en tirer un certain bénéfice. Montréal doit se redéfinir elle-même. Comme je disais tout à l'heure, à mon avis, ce n'est pas ailleurs que ça doit se faire. Probablement avec l'appui d'un gouvernement supérieur, du gouvernement provincial, parce qu'elle est évidemment dans une situation telle aujourd'hui qu'elle n'est pas capable de se restructurer, de se redéfinir et de se donner des objectifs réalisables au cours des prochaines années, et concrets pour intéresser à nouveau les citoyens.

Moi, je suis un Montréalais depuis quelques années et je suis témoin de la situation de cette ville-là tous les jours et je trouve ça immensément triste. Il va falloir qu'un jour ou l'autre on trouve le moyen de tourner ça autrement.

M. Ménard: O.K.

(10 h 50)

M. Dumais (Michel): La transition dans laquelle on vit, si je peux me permettre, M. le ministre, à Montréal... Montréal, c'est une ville qui se dégrade. On parle d'une ville pauvre, la plus pauvre au Canada. Je veux dire, ça date de 25 ans. On parlait de l'exode des citoyens et des 300 000 départs; je veux dire, c'est sûr que Montréal vit et souffre de cette situation-là encore aujourd'hui. Ces 300 000 départs, c'est un know-how incroyable; c'est une partie de l'establishment montréalais qui est partie; c'est des capitaux de – on faisait un calcul, l'autre jour, à l'IDU – peut-être 25 000 000 000 $ à 50 000 000 000 $. Et une partie de ces gens-là, ils sont rendus aujourd'hui en Ontario, à Toronto, et c'est pour le bénéfice, malheureusement, de cette région-là qu'ils utilisent les capitaux qu'ils ont récupérés avec eux, et tout ce know-how là.

Malheureusement, ça va prendre peut-être une génération; on va devoir la rebâtir avec la nouvelle élite: l'élite davantage francophone, le nouvel establishment. Et, bon, ces gens-là, aujourd'hui, ils ont peut-être besoin de se parler, parce qu'ils manquent d'expérience, parce qu'ils ne savent pas comment faire. Il y a de la bonne volonté mais on sent que tout ça est très épars. Et cette concertation-là, elle est encore très loin d'être définie.

La Présidente (Mme Bélanger): En conclusion.

M. Dumais (Michel): Et finalement, bon, écoutez. Montréal, la meilleure image que j'ai, c'est des yens qui sont dans le désert. Et M. Frank McKenna a profité de la dégradation de Montréal: plusieurs entreprises montréalaises sont allées s'installer au Nouveau-Brunswick, les états limitrophes du nord-est des États-Unis également, Ottawa également.

M. Ménard: C'est parce que...

M. Dumais (Michel): Donc, je veux dire...

M. Ménard: C'est parce que je vous apprécie que j'aimerais vous poser une question de plus.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui, mais là...

M. Ménard: Juste une question de plus qui est courte. Là, les économistes qui ont témoigné nous disent que les deux problèmes les plus importants qui nuisent à Montréal, à Montréal ville, c'est le poids de sa dette et le coût de sa main-d'oeuvre. Posez-vous le même diagnostic?

M. Charlebois (Cameron): Oui.

M. Ménard: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): Très bien.

M. Charlebois (Cameron): Oui, en termes très brefs: le plancher d'emploi est le problème majeur pour que Montréal ramène à l'ordre ses coûts. On l'a dit depuis longtemps, puis la nouvelle entente signée avant Noël, ça n'aide pas beaucoup.

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, merci, M. Charlebois et M. Dumais, de votre participation.

M. Charlebois (Cameron): C'est nous qui vous remercions.

M. Dumais (Michel): Merci.

M. Charlebois (Cameron): Merci beaucoup. Bonne journée!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, je demanderais au Groupe de travail sur Montréal et sa région de bien vouloir prendre place. À l'ordre, s'il vous plaît!

Alors, bienvenue, messieurs! On demanderait au porte-parole de bien vouloir se présenter et présenter la personne qui l'accompagne. Vous avez 20 minutes pour présenter votre mémoire, qui sera suivi d'un questionnement du côté ministériel et du côté de l'opposition.


MM. Claude Pichette et Stephen Cheasley

M. Pichette (Claude): Merci, Mme la Présidente. Je m'appelle Claude Pichette. Je suis l'ex-président de l'ex-Groupe de travail sur Montréal et sa région. Je suis accompagné de M. Stephen Cheasley, qui est également un ex-membre de l'ex-Groupe de travail sur Montréal et sa région. Donc, nous venons ici comme simples citoyens puisque ce groupe-là n'existe plus. Alors, nous vous remercions...

La Présidente (Mme Bélanger): Mais le rapport existe.

M. Pichette (Claude): Pardon?

La Présidente (Mme Bélanger): Mais le rapport existe.

M. Pichette (Claude): Encore. Et dépoussiéré.

Alors, il y aura bientôt cinq ans, dans quelques jours, que le ministre Ryan a créé le Groupe de travail sur Montréal et sa région. Et M. le ministre Ménard, dans ses documents, a rappelé fort opportunément que ce problème de Montréal et sa région existe depuis de nombreuses décennies. Ceux qui pourraient penser en lisant le document que nous avons déposé devant cette commission que nous avons renié notre rapport de décembre 1993 ou que nous n'y croyons plus avec autant de conviction, ceux-là se trompent. Nous croyons tout autant qu'à l'époque, et peut-être plus encore maintenant, que le contenu du rapport du Groupe de travail est toujours un objectif à atteindre. Toutefois, la politique étant l'art du possible, nous sommes très conscients de l'extrême difficulté qu'il y aurait à implanter maintenant les recommandations principales de ce rapport. Le ministre Ryan, qui avait créé le Groupe de travail en avril 1992, percevait d'ailleurs la nécessité de faire cheminer la pensée des décideurs municipaux de la métropole à cet égard et c'est pourquoi il avait créé un comité d'élus locaux à cette fin.

Aujourd'hui, nous venons donner notre appui au projet du ministre Ménard car nous croyons qu'il est urgent qu'un forum des décideurs métropolitains soit créé. Qu'on commence par quelque chose, même si ce n'est pas l'idéal. Si la Commission parvient à des résultats satisfaisants dans le temps imparti sur les dossiers qui lui sont confiés par la loi, elle aura atteint un objectif important. Après, on pourra aller plus loin. Dans ce dossier comme dans bien d'autres, certains exigent plus, et je pense qu'on a un bon exemple là, en regardant l'attitude de certains, qu'il y a des fois où le mieux est l'ennemi du bien.

Nous ne venons pas vous parler de tuyauterie ou de «nuts and bolts», mais nous venons vous dire qu'il faut agir maintenant et cesser de tergiverser. Aujourd'hui, on se trouve, au plan métropolitain, comme on était il y a un quart de siècle devant le développement de l'île Jésus. Essayons d'imaginer, devant l'afflux de population qui est allée à l'île Jésus, essayons d'imaginer quel aurait été son développement si on n'avait pas eu la sagesse et le courage, il y a plus de 25 ans, de créer la ville de Laval, malgré la tempête soulevée. Pourtant, on se félicite maintenant de ce succès.

Aujourd'hui, c'est la métropole qu'il faut créer. Le projet qu'on nous présente est raisonnable et ne bouleverse pas les structures, ni les modes de fonctionnement en place, ce qui devrait rassurer les plus inquiets et diminuer la peur de l'inconnu. C'est un compromis qui va faire naître une nouvelle dynamique métropolitaine. Une fois assis ensemble enfin, les élus des différents territoires seront forcés de composer, de faire des compromis. Le gouvernement doit résister aux pressions visant à édulcorer le projet. D'ailleurs, certains ne seront jamais satisfaits parce que certains ne veulent rien savoir d'un projet semblable. Donc, il faut résister aux pressions visant à édulcorer le projet, il l'est déjà assez. Autrement, on risque de se retrouver devant une coquille vide.

Le maintien en place des structures existantes va faire que toutes ces instances, avec la Commission, vont faire face aux défis de la cogestion, du partage des responsabilités et de la nécessaire complémentarité. Et le succès de la Commission se mesurera à l'équilibre qui sera atteint sur ces questions. Le succès de la Commission dépendra également de l'attitude des municipalités, des MRC et des régions administratives à l'égard de la première. Si elles se liguent pour neutraliser la Commission, ça sera la mort de celle-ci. Le succès de la Commission dépendra aussi de l'attitude du gouvernement à son égard et de l'importance qu'il accordera à ses recommandations. Je dirais qu'aujourd'hui on ne sait pas trop ce que le gouvernement pense de la Commission. Il faudra qu'il envoie un message clair.

L'attribution à la Commission d'un fonds de développement métropolitain – et c'est prévu, d'ailleurs, dans la loi – par le gouvernement donnerait à celle-là une assise plus solide dans la réalisation de projets collectifs. Qui peut dire, en terminant, que la région métropolitaine n'a pas besoin d'un cadre métropolitain d'aménagement, d'un plan stratégique de développement économique, d'un plan de transport, de faire régionalement la promotion économique et touristique internationale, de politiques et de programmes régionaux en environnement, d'orientations et de stratégies régionales de développement culturel, d'un service spécialisé de police?

(11 heures)

Mais comment parvenir à réaliser ces objectifs avec plus de 100 municipalités sans d'abord créer un lieu de rassemblement qui incarne le leadership régional et où se définit la vision d'avenir de la région? Je rappellerai qu'on on est en train de transformer le système de santé du Québec pour le rendre plus efficace et pour en réduire les coûts. Pourquoi ne pas regarder aussi, avec le plus grand sérieux, notre organisation municipale? Nous pensons qu'il faut prendre le virage métropolitain même si ce n'est pas selon la forme que l'un ou l'autre aurait préférée. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. Pichette. M. le député de Bourget.

M. Laurin: Il me fait plaisir de vous souhaiter la bienvenue à cette commission, à M. Pichette et M. Cheasley qui ont travaillé, durant de si longues années, sur les problèmes qui nous préoccupent actuellement. Je suis un de ceux qui ont lu et relu, avec le plus vif intérêt, le rapport qu'ils nous ont soumis en 1992.

Tout en admirant leur travail de réflexion, j'ai partagé, pour la plus grande partie, ce qu'ils disaient sur l'analyse de la situation métropolitaine, surtout ses côtés négatifs. J'ai partagé aussi ce qu'ils disaient sur les défis qui se posent à toute métropole, pas seulement celle de Montréal, mais celles des autres métropoles qu'on connaît, particulièrement Atlanta, Île-de-France, Lyon, Toronto, Philadelphie et... Quand ils disaient que les défis qui s'opposent aux métropoles qui veulent se développer sont partout les mêmes, je les suis très bien là-dessus. D'abord, créer une vision mobilisatrice, regrouper les forces pour mettre fin aux rivalités intestines, faire des choix, les priorités, mobilisateurs pour toutes les composantes de la métropole, ainsi que le développement de moyens adéquats équitables. Le succès n'est qu'à ce prix. Le développement n'est qu'à ce prix.

Je partageais aussi la vision qu'ils avaient des domaines d'intérêt communs métropolitains. Vous en avez énuméré beaucoup dans votre rapport. Je vois dans votre mémoire que vous voudriez même en ajouter: santé, éducation, marché du travail. Effectivement, ce sont des domaines d'intérêt métropolitains auxquels on ne peut échapper.

Je n'étais pas toujours d'accord avec les recommandations qui s'ensuivaient, par exemple quand vous vouliez laisser à une sorte de gouvernorat métropolitain la gestion de tous ces problèmes, en particulier par la création d'organismes intermunicipaux métropolitains. Vous-même, vous admettez dans votre mémoire que peut-être c'était prématuré, que ça bousculait peut-être un peu trop les structures existantes. Vous vous ralliez maintenant à la création de cette Commission et à ce qu'elle contient, y compris au respect des structures existantes auxquelles la Commission viendra s'ajouter mais tout en les mobilisant, cependant, pour le développement des solutions.

Je suis aussi d'accord avec ce que vous dites sur la définition. Même, vous y ajoutez beaucoup de clarté. L'objet de la Commission devrait être des problèmes qui transcendent les responsabilités des municipalités qui sont communs à tous ces organismes, qu'ils s'appellent municipalités, MRC ou organismes de développement. Je suis d'accord quand vous dites qu'il faut bien identifier les problèmes métropolitains et, ensuite, apporter à ces problèmes métropolitains des solutions métropolitaines, et la Commission devrait être l'organisme, au fond, qui va amener la solution de ces problèmes métropolitains.

Vous ajoutez aussi, dans votre mémoire, quelque chose qui m'apparaît très important, que le principe qui devrait régir les activités de la Commission, c'est le principe de subsidiarité que l'on retrouve d'ailleurs dans d'autres domaines, c'est-à-dire laisser aux organismes les plus aptes à exercer une fonction les mandats et les responsabilités.

Ce qui nous amène à définir d'une façon plus exacte, selon ce principe de subsidiarité, la responsabilité de la Commission de la métropole. Et vous en arrivez à la conclusion qu'il faut identifier, comme mandat principal de la Commission, le rôle de planification, le rôle de coordination et le rôle d'arbitrage. Je ne sais pas s'il y a quelque chose qui réunit, là, ces trois fonctions, je dirais, de la Commission. Planification, est-ce que ça ne comporte pas arbitrage? Planification, est-ce que ça ne comporte pas implicitement coordination? Ou si ce sont trois rôles différents, selon vous?

M. Pichette (Claude): Je pense que je pourrais dire qu'on a mis plus de mots qu'il en fallait pour être sûrs qu'on n'accrocherait pas sur un mot ou l'autre. Par exemple, je suis d'accord avec vous pour dire que «planification» peut comprendre les deux autres. Et ça spécifie mieux le sens à donner à «planification». On va coordonner. Pour planifier, il faut coordonner. Pour planifier, il faut faire des arbitrages. Je pense que c'est pour être bien sûrs que ceux qui n'auront pas compris ce qu'il y a dans «planification» ou ceux qui auraient une notion négative de «planification»...

M. Laurin: Vous excluez la gestion, un rôle de gestion?

M. Pichette (Claude): Oui, monsieur.

M. Laurin: Alors que, quand on utilise le mot «coordination», on peut penser que ça implique presque toujours «gestion».

M. Pichette (Claude): Oui. On a bien dit dans notre rapport, d'ailleurs, le premier rapport du Groupe de travail... c'est que la gestion, on ne veut pas que cet organisme-là devienne une autre supermunicipalité ou une autre CUM, par exemple, avec des services à rendre. On veut que cet organisme-là coordonne ce qui se fait dans la région, coordonne les dossiers de nature métropolitaine.

M. Laurin: Une autre question que j'aimerais vous poser. Moi, je suis bien d'accord quand vous dites que la région métropolitaine a besoin d'un cadre métropolitain d'aménagement, d'un plan stratégique de développement économique, de transport, d'une politique de l'environnement, d'orientations en développement social et culturel.

Mais, quand vous énumérez dans votre mémoire les mandats qu'il faudrait donner à la Commission, vous faites état, par exemple, d'avoir une métropole qui saura rééquilibrer ses pôles de développement sans déstabiliser, et, deuxièmement, bâtir une métropole compétitive au plan international. Pourriez-vous développer un petit peu davantage ces deux rôles et comment y arriver?

M. Pichette (Claude): Il y a quelques décennies, je ne sais pas, là, on pourrait dire que le seul pôle de développement qu'il y avait dans la région, c'était le pôle de Montréal la ville. Aujourd'hui, ce n'est plus le cas. Des pôles de développement, vous en avez sur l'île Jésus; vous en avez à l'extérieur, dans la couronne nord; vous en avez sur la rive sud, dans la couronne sud. Par conséquent, il faut...

On ne peut plus raisonner comme on le faisait il y a 30, 40 ans, en termes de Montréal, l'essence même de la région, et les villes dortoirs autour. Ce n'est plus le cas. Aujourd'hui, il y a des pôles de développement sur l'ensemble du territoire. Il faut assurer une coordination entre ces pôles de développement, chacun n'ayant pas les mêmes missions. Et je pense que c'est ça qu'il faut arriver à préciser. Il faut arriver à préciser les missions de chacun.

Le centre-ville a une mission, sans doute, au plan des services, et la couronne a une autre mission. Par exemple, une entreprise qui a besoin de grands terrains ne va pas aller s'établir dans l'île de Montréal, sans doute, ou, en tout cas, dans certains coins de l'île de Montréal; elle va aller plutôt dans la couronne. Alors, c'est ça qu'on voulait dire.

M. Laurin: Vous vous réjouissez aussi, en ce qui a trait à la composition de la Commission, qu'il y ait des élus municipaux mais aussi des représentants de groupes socioéconomiques susceptibles d'apporter de l'éclairage sur les tenants et aboutissants des travaux entrepris par la Commission sur ces objets. Est-ce que votre accord vient du fait que vous avez déjà vu, dans vos études, fonctionner de telles synergies?

M. Pichette (Claude): Dans le cadre des travaux du...

(11 h 10)

M. Laurin: Dans d'autres métropoles.

M. Pichette (Claude): Oui. Dans le cadre des travaux du groupe de travail, on a longuement discuté de la composition du conseil métropolitain qu'on recommandait, et on est arrivés à la conclusion que ceux qui sont redevables, comment je dirais, ceux qui sont comptables à la population, ce sont les élus. Et je vous dirais que, si ça n'avait pas été une commission consultative qu'on avait proposée, on vous aurait proposé qu'il n'y ait pas... si ça avait été une commission décisionnelle, on vous aurait dit que les non-élus n'avaient pas d'affaire là. Je le pense, nous le pensons, et, si on donne notre accord à la présence de non-élus, c'est parce que c'est une commission consultative. Je ne vois pas comment les non-élus pourraient rendre des comptes, ils ne sont pas élus, ils ne sont pas redevables, directement, à la population. Je comprends qu'il y a toutes sortes de nuances qu'on peut apporter, puis j'entendais les gens de la CSN, tout à l'heure, en apporter sur ce sujet-là, je suis d'accord, mais je pense que, si ça devait devenir une commission décisionnelle, ça ne devrait être que des élus.

M. Laurin: Mais avez-vous vu, dans les études que vous avez faites, des synergies de ce genre dans d'autres métropoles?

M. Pichette (Claude): Je ne pourrais pas vous dire. Écoutez, là, je ne sais pas, c'est peut-être ma mémoire qui défaille, parce que le rapport date déjà, mais je n'ai pas de souvenir de ça.

M. Laurin: Donc, c'est au nom d'un principe que...

M. Pichette (Claude): Exactement.

M. Laurin: ...vous faites cette proposition.

M. Pichette (Claude): Vous savez, on se disait, dans nos discussions: Oui, mais les non-élus, ils vont faire ci, ils vont faire ça. Mais, vous savez, les non-élus, là, ils ne sont pas plus fins que les élus, hein, et ils ont des comptes à rendre à leurs membres, dans leurs organisations. Mais ceux qui ont été élus par l'ensemble de la population, ce sont les élus, précisément. Alors, la question à laquelle on a dû répondre à la fin de nos débats, c'est: Mais qui peut mieux parler au nom de la population en général que les élus? Voilà pourquoi, dans notre rapport du Groupe de travail, on recommandait que des non-élus soient dans les commissions, mais qu'ils ne soient pas dans le conseil métropolitain. Ici, aujourd'hui, on dit: Oui, des non-élus, tel que proposé, on n'est pas prêts à faire une grosse bagarre là-dessus, oui, parce que... puis, on en parlait encore ce matin, Stephen Cheasley et moi, oui, parce que c'est une commission consultative.

M. Laurin: Je vous remercie, M. Pichette.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le député de Bourget. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Merci beaucoup, M. Pichette, M. Cheasley. Je veux revenir un petit peu au rapport Pichette de 1993 et la Commission, là, tel que présenté. Bon, vous avez lu, ce matin, de toute façon, comme quelques-uns d'entre nous, dans les journaux, un petit peu la surprise de la Conférence des maires de la banlieue de Montréal, qui ont appuyé – avec réserve sur deux irritants, on se souvient – le rapport Pichette un peu dans son entier, et qui continuent de le faire, parce qu'eux se disent que le travail, d'abord, avait été bien fait – et, c'est tout en votre honneur, là, je regarde aussi M. Cournoyer – alors, avait été bien fait, et, plus que ça, a été source d'inspiration pour d'autres, dont l'Ontario. Vendredi dernier, bon, à la conférence de la CUM, les gens de l'Ontario sont venus nous dire qu'ils l'avaient traduit puis ils l'avaient présenté, et ça a été une source d'inspiration. Alors, eux – si on lit, là, ce matin, leur communiqué de presse et l'article dans le journal – ils sont déçus un peu. Ils sont déçus parce que... ce qu'ils sont venus nous dire en commission, c'est que ce qui est pré... Tout le monde est d'accord pour une vision métropolitaine, tout le monde est d'accord pour faire son bout, c'est le comment, et certains sont d'accord sans vraiment être d'accord, alors...

Laval, par exemple, dit: Allons avec une commission consultative qui, dans leurs têtes à eux, c'est plus un groupe social, tu sais: On va se rencontrer puis on va prendre ce qui fait notre affaire, mais il n'y a pas d'obligation de résultat. La ville de Montréal, la CUM, dans son ensemble, dit: En bout de ligne, oui, décisionnelle. Ce n'est pas un palier de gouvernement, on ne dit pas aux gouvernements combien d'argent ceux-ci doivent nous transférer, ce n'est pas ça. Mais à un moment donné qu'on devienne décisionnel sur des grands enjeux, on ne dispensera pas des services, on a les mécanismes, on a nos dispensateurs de services, mais on va décider, par exemple, sur les grands objectifs, les grands enjeux et c'est ce qui va développer la pensée métropolitaine et les grandes villes de la Rive-Sud aussi sont d'accord avec ça.

Donc, à partir de 1993, la pensée, la réflexion a fait du chemin. En 1993, on ne pouvait même pas penser à ça, on se souvient. Là, ça a vraiment fait du chemin et il y a une déception, en disant, finalement, on approuve ceux qui ont travaillé et qui nous ont fait cheminer, on approuve une solution qui est selon eux édulcorée. C'est sûr, une belle table de concertation, consultative, tout le monde est autour, qui chapeaute toutes les autres, vous l'avez dit vous-même dans votre mémoire, on ne met pas en doute la... Vous dites: La Commission, dans sa forme proposée, est un projet raisonnable qui ne bouleverse ni les structures, ni les modes de fonctionnement en place. Alors, pour ceux qui ont cheminé, c'est un retour en arrière, c'est un recul, et ils sont déçus. Parce que, ici, si on est sérieux, agissons et plus. Il y a plus encore d'urgence maintenant à cause de la fiscalité et de tout ça et les conditions économiques ne sont pas faciles. Alors, plus d'urgence maintenant même qu'il n'y en avait il y a quelques années et l'urgence se fait de plus en plus pressante. Alors, qu'est-ce que vous répondez à ça, M. Pichette?

M. Pichette (Claude): J'ai été invité dans toutes les parties du territoire à aller présenter le rapport du Groupe de travail. J'ai continué à en faire encore jusqu'à récemment et vous savez, dans certains coins, il y a une agressivité immense à l'égard du rapport du Groupe de travail encore aujourd'hui parce que, même s'il y en a qui ont cheminé, il y en a qui n'ont pas cheminé. Ils sont encore très, très nombreux. Aussi, il y a beaucoup de désinformation. Par exemple, on dit: Comme le dit le rapport du Groupe de travail sur Montréal et sa région, et j'ai la prétention de connaître assez bien ce qu'il y a dedans, des fois même j'ai douté, je suis allé voir ce qu'on disait là-dessus et on ne disait rien ou on disait des choses très, très douces et, là, on nous fait dire régulièrement toutes sortes de choses, par exemple qu'on prône la fusion des municipalités. Ce qu'on n'a jamais dit. On a dit: Ça serait au conseil métropolitain de s'attaquer à cette question-là parce que c'est une question extrêmement complexe. Il y a beaucoup d'agressivité. Il y a beaucoup de désinformation. Aussi, on dit, par exemple: C'est juste pour régler les problèmes fiscaux de Montréal. Ce n'est pas ça qu'on a dit non plus. On a dit, et on le répète: Il y a des problèmes de nature métropolitaine et il n'y a rien, il n'y a aucune organisation actuellement, dans la région, pour s'attaquer de façon convenable aux problèmes métropolitains. Ce matin, je pense que Stephen avait un bon exemple – je pense que ça vaudrait la peine que tu le rappelles, Stephen – sur tous les dossiers de nature métropolitaine qu'on a vus, à commencer par l'Agence spatiale il y a quelques années puis, par exemple, ADM aujourd'hui. Stephen, je pense que ça vaut la peine de souligner ça.

(11 h 20)

M. Cheasley (Stephen): Je veux essayer de répondre à votre question, excellente question. Il y a un an, j'étais invité à assister à un congrès à Toronto sur le rapport Golden. Le rapport Golden c'est presque, mot pour mot, le rapport Pichette. Donc, on m'avait invité pour parler de ce qui arriverait après le dépôt de notre rapport Pichette. Donc, j'ai sorti de l'ordinateur de la Gazette tous les commentaires faits par les maires après notre rapport, j'ai sorti du Globe and Mail les commentaires faits par les maires des banlieues après le dépôt du rapport Golden. C'est presque mot pour mot la même chose. Le maire de Mississauga et le maire de Mirabel, ce sont exactement les mêmes commentaires. Donc, j'ai donné mon discours. J'ai assisté durant une journée. C'est fascinant d'écouter tout le monde. C'est la même chose. Les mêmes groupes sortent et disent exactement la même chose que les personnes à Montréal. Et, franchement, je suis sûr que le rapport Golden est complètement mort. Six semaines plus tard, le ministre des Finances de l'Ontario a dit: On n'a pas d'argent pour ça. Lettre morte. Donc, en six semaines, à Toronto, ils ont tué le rapport Golden. Ici, ça a pris trois mois, je pense, entre décembre et mai. Maintenant, à ma grande surprise, tout d'un coup, le gouvernement d'Ontario a lancé le programme «Common Sense Revolution» dont il parle pour la métropole. Ça explique notre situation ici. Ça vous donne la réponse. À un moment donné, quelqu'un va prendre le taureau par les cornes et dire: «Bon, voici, on avance.» C'est ça, la situation. On peut continuer pour des années. On va écouter les mêmes discussions que nous avons ici à Montréal et à Toronto et probablement à Atlanta avant et dans d'autres villes. Donc, c'est évident pour moi qu'il faut passer à l'action. Et l'urgence de passer à l'action, c'est que, maintenant, notre plus grand concurrent, Toronto, est en route pour se réorganiser d'une façon efficace pour faire la concurrence contre Montréal. Il existe 25 grandes régions urbaines en Amérique du Nord dont deux au Canada: Montréal et Toronto. Ce n'est plus maintenant le Canada contre les États-Unis. Ce n'est plus la province de Québec contre l'État de New York. C'est Montréal contre Philadelphie, contre Atlanta, contre Pittsburgh, contre Toronto. Et nous avons besoin de nos outils pour faire la bataille. C'est ça, la situation. Toronto est en train d'aller de l'avant. Et je dois féliciter le gouvernement provincial parce qu'ils sont passés à l'action et vite. Pour moi, c'est une grande frustration d'être ici, le 20 mars, devant vous. Quand nous avons sorti notre rapport au mois de décembre 1993 et discuté encore le rapport Pichette et pourquoi on doit l'avancer, je trouve ça impensable que quatre ans aient passés sans action. Entre-temps, Toronto va prendre notre rapport, le traduit et le met en application. Et je dois féliciter mon ami Claude parce que, intégralement, son rapport doit être adopté à Toronto bientôt.

Mme Frulla: Mais, M. Cheasley, je vais continuer alors. Vous avez déposé le rapport, bon, fin 1993-1994. Élection en septembre 1994. Le rapport est encore là. Il y avait des craintes. Quand on parle de fusion puis tout ça, bon. Et ça, il faut que ça soit imposé. Dans le fond, ce que vous nous dites, c'est un peu ce qui est arrivé à Laval. La CUM, ça a été la même affaire. C'est qu'à un moment donné, comme l'Ontario, même si, pour nous, bon, ce n'est peut-être pas... En tout cas, on verra, là, ce n'est pas concluant de faire une mégapole à ce point-là, peut-être que oui, peut-être que non, mais c'est à voir, mais quand même c'est imposé. Là, il me semble qu'il y a une volonté qui est encore plus... Oui, c'est vrai que la couronne nord a dit: On n'en veut même pas. On s'organise. On n'en veut pas. Laval, on connaît Laval. C'est une problématique. Et Laval ne voudra jamais payer pour Montréal, on s'entend là, et vice versa et c'est toujours ça qui sous-tend l'ensemble des discussions. Mais il y a du positif parce que l'île de Montréal, Brossard, enfin, Longueuil, les grandes villes de la rive sud sont prêtes à contribuer puis à embarquer puis à comprendre. Alors, si je suis le raisonnement, deux ans et demi après ou trois ans, trois ans après, il n'y aurait pas lieu, au lieu d'arriver à une solution qui est emplie de bonne volonté, emplie de bonne volonté, mais qui semble encore un grand groupe de concertation puis tout ça pour essayer d'avoir un consensus, ce que vous nous dites, c'est: le consensus. Puis – on l'a bien vu, là, on finit notre commission – on ne l'aura jamais. On ne l'aura jamais. Alors, est-ce que la solution ne serait pas de dire: Il faut faire ce qu'il faut faire et d'imposer certaines choses? Donc, certaines mesures, qu'elles soient décisionnelles, composées d'élus pour les raisons que vous avez données parce que, moi aussi je trouve que les socioéconomiques ont aussi leur groupe d'intérêt, là... Alors, donc, quand ça devient décisionnel, mais la contribution des socioéconomiques... Créer une dynamique, mais de l'imposer parce que, là, il n'y a d'obligation de résultat à nulle part, là, dans ce document-là, dans le projet – c'est un projet de loi – dans le projet de loi. Il n'y a aucune... C'est de la consultation. C'est vrai qu'on s'assoit ensemble. C'est vrai qu'on peut parler d'une vision métropolitaine. Mais ça peut prendre quelques années avant que les gens décident, tu sais, de s'obliger à agir.

M. Pichette (Claude): Moi, j'ai compris, en lisant le projet de loi, qu'il y avait quand même des obligations de résultat puis il y avait des dates qui sont là. Donc, je comprends, moi, qu'il y a des obligations de résultat et j'espère que ça va être le cas. C'est sûr que ça ne va pas aussi loin que ce qu'on pourrait souhaiter, mais, moi, je regarde le contexte, comme je l'ai dit tout à l'heure, la politique est l'art du possible. Je regarde ça, puis je me dis: Bon. Bien, ce n'est pas si mal. Je voudrais juste rappeler que M. Jean-Noël Lavoie a perdu son siège aux élections suivantes après avoir été le promoteur de la création de la ville de Laval. C'est ça que je veux dire quand je dis: La politique est l'art du possible.

Mme Frulla: C'est vrai. Excepté que, compte tenu de ce que M. Cheasley a dit à propos des autres grandes villes qui s'organisent, compte tenu des discussions à Montréal, compte tenu de Montréal, on l'a vu tantôt avec l'IDU les problèmes de Montréal île, hein, quelque part ça ne serait pas l'urgence d'agir qui fait en sorte que... Puis je pense que les gens vont applaudir à un moment donné parce que l'urgence d'agir elle est là et tout le monde est très, très conscient que la situation est très, très difficile.

M. Pichette (Claude): Vous savez...

Mme Frulla: Parce qu'il n'y a pas d'obligation. Je regarde encore... Oui, il y a des dates mais il n'y a pas d'obligation de résultat. C'est le ministre, par exemple, de l'Environnement qui donne le plan à la Commission. La Commission fait ses recommandations, renvoie ça au ministre de l'Environnement, le ministre de l'Environnement travaille avec le Conseil des ministres.

M. Pichette (Claude): Mais vous savez que même si on créait un conseil métropolitain, comme le Groupe de travail sur Montréal et sa région l'a proposé, les dossiers que la Commission va aborder ne pourraient pas se régler seulement au niveau du conseil métropolitain. Le conseil métropolitain pourrait élaborer des projets mais il serait nécessairement obligé...

Mme Frulla: Absolument.

M. Pichette (Claude): ...d'avoir l'accord des différents ministères concernés. C'est pour ça que moi je dis, vous savez, oui, c'est une Commission qui a l'air tenue bien en laisse sur ces dossiers-là... puis la plupart des dossiers de nature métropolitaine qui transcendent les frontières municipales on ne pourrait pas faire grand-chose seul dans le cadre d'un conseil métropolitain. Il faudra toujours en référer aux différents ministères, puis obtenir la bénédiction et les sous des ministères concernés. C'est pour ça que nous vous disons aujourd'hui: Oui. Ce n'est pas l'idéal, ce n'est pas ce que nous avions recommandé, mais au moins on va avoir quelque chose.

Prenez par exemple le cas d'ADM, la bataille qu'il y a actuellement à Mirabel et Dorval. S'il y avait eu un conseil, s'il y avait eu une commission, cette question-là, en supposant qu'on remonte quelques années en arrière puis qu'il y avait eu une commission ou qu'il y avait eu un organisme métropolitain, la bagarre elle se serait faite là, on se serait échangé des taloches, sans doute, on aurait parlé fort, mais on aurait fait les arbitrages nécessaires et la question serait réglée.

Imaginez, par exemple, ce qui s'est passé dans le cas de l'Agence spatiale. Il y avait combien de municipalités qui ont fait un pèlerinage à Ottawa pour avoir l'Agence spatiale? S'il y avait eu un conseil métropolitain ou s'il y avait eu une commission on aurait fait les arbitrages à l'interne et n'aurait pas risqué de perdre cette Agence spatiale.

Alors Toronto, qu'est-ce qu'elle fait Toronto actuellement? Toronto va se donner une force de frappe, une cohésion très, très grande. Alors, je me dis, il faut au moins se donner une commission comme celle-là si on veut être capables d'avoir un leadership métropolitain, puis d'avoir une voix qui parle au nom de la région parce qu'actuellement, vous savez, le maire de Montréal quand il parle il parle au nom d'un million d'habitants. Il n'y a personne qui parle au nom de la région. Moi je pense que c'est extrêmement important qu'on ait cette voix pour parler au nom de l'ensemble de 3 000 000 d'habitants. Ça peut faire peur, peut-être, mais c'est essentiel que vous ayez quelqu'un, que vous ayez un groupe qui dit: Voici. Nous, nous voulons telle chose. Ça, c'est extrêmement important et c'est important dans les équilibres à l'intérieur du Canada. Ça va être important aussi dans la question d'ensemble de la compétition internationale. Prenez par exemple, récemment...

Mme Frulla: On va continuer, mais juste pour... C'est-à-dire que les gens seront pour avoir, comme je disais tantôt, une vision métropolitaine – on ne peut pas être contre la vertu – puis à part de ça on en sent le besoin. C'est que certains intervenants dont, je dirais, là, presque la majorité disent: Soyons donc décisionnels.

(11 h 30)

Dans le cas de Dorval versus Mirabel encore aurait-il fallu que le ministre du Conseil du trésor siège aussi là-dessus, là. Tu sais, ce n'est pas simple, puis ce n'est pas évident que dans une commission de concertation consultative... les craintes respectives et mutuelles sont encore là précisément. C'est pour ça que les gens, les grosses municipalités ou quoi que ce soit se disent: Décidons au moins sur certaines choses. Quand on part, au moins nous autres on peut dire: On a pris la décision. C'est au gouvernement d'en disposer, mais nous on a pris la décision.

M. Pichette (Claude): Bon. Vous voulez me faire dire que...

Mme Frulla: Non, c'est parce que j'essaie de voir...

M. Pichette (Claude): ...je souhaiterais que la Commission soit décisionnelle?

Mme Frulla: Non, non, pas du tout. C'est que je pars un peu là de ce qui s'était dit, de ce qui s'est dit ce matin, d'un peu ce que M. Cheasley a dit tantôt à propos de Toronto. C'est un peu ça. C'est parce qu'on peut se contenter de dire: C'est bien. Puis, c'est vrai, il n'y a rien de mal à ça, au contraire. Le principe est bon, c'est bien, excepté que pourquoi se contenter de moins quand je pense qu'on peut faire plus, puis il y a beaucoup d'intervenants qui sont prêts à faire plus. C'est un peu ça.

M. Pichette (Claude): Bon, écoutez. Moi, je souhaite, personnellement, puis nous souhaitons que la Commission soit la plus forte possible. Mais, vous savez, quand on lit les journaux, depuis un certain temps, on dit: Oui, mais le pauvre ministre, il a tout le monde contre lui. Il y en a qui sont contre parce qu'ils ne veulent rien savoir, puis il y en a qui sont contre parce qu'ils en veulent plus. Bien, nous autres, on dit: On va leur dire que, nous autres, on est d'accord pour au moins avoir ça.

Une voix: Mais en plus de ça...

Mme Frulla: Où est-ce qu'il est le ministre? On l'a perdu. Je pense qu'on l'a échappé en dessous de son banc.

Des voix: Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Des besoins naturels, il a quitté pour une seconde. M. le député de Fabre.

M. Facal: Merci, Mme la Présidente. Je dois vous dire, MM. Pichette et Cheasley, que j'ai adoré votre mémoire, pas parce que vous dites exactement ce que je pense – c'est beaucoup plus subtil – c'est parce que, depuis le début, j'écoute tous les groupes, j'entends les débats au sein même de notre formation et je n'arrivais pas à me faire une tête sur un sujet terriblement complexe et que je n'avais pas suffisamment creusé. J'avais, plutôt qu'une position, des sentiments, des humeurs, des inclinaisons, mais qui n'étaient pas du tout étayés, étoffés par un raisonnement solide. Et vous venez de me le donner, et je vous en remercie infiniment.

En politique, on a généralement peu de temps pour vraiment réfléchir. Et je suis aussi un petit peu agacé par la tendance générale des parlementaires à épouser un petit peu trop rapidement les positions qui circulent dans la région qu'ils représentent. Il me semble que, parfois, on a le devoir d'être un petit peu plus que les caisses de résonnance de ce qui se passe dans notre propre région et votre mémoire réussit – en tout cas, pour moi – à donner cohérence, à donner sens à ce que je ressentais un peu intuitivement, mais sans arriver à le formuler. Donc, vous me faites vivre un moment d'émotion rare et je vous jure que ce n'est pas fréquent en commission parlementaire.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Facal: Je pense que je comprends un petit peu ce que Newton a ressenti quand il a compris pourquoi la pomme tombait de l'arbre. Il y avait un principe fondamental là et il a été éclairé.

Alors, si le diagnostic posé par vous me convient tout à fait, la question est de savoir si le moyen retenu est le bon. Et ce que vous dites, c'est que le projet est un compromis raisonnable, pas l'idéal, et qu'il faut donner sa chance à un projet sans lequel la région resterait irrémédiablement divisée. Je vous rejoins là-dessus.

J'ai aussi beaucoup aimé la façon dont vous tordez le cou à un cliché, celui sur la lourdeur. Vous dites que ce n'est pas parce qu'une structure est simple qu'elle réussit et ce n'est pas nécessairement parce qu'elle est complexe qu'elle échoue et que, quand un problème est complexe, il est dans la nature des choses que les moyens mis en place pour essayer de le résoudre sont un peu le reflet de cette complexité.

Ma question est donc toute simple: Vous dites que ceci doit, avec toutes ses imperfections, voir le jour. Mettons que ce projet, en dépit des oppositions, voie le jour, nous nous retrouverons donc avec une commission qui a des opposants. À partir de là, qu'est-ce que vous suggérez au gouvernement comme approche, comme stratégie pour l'aider, pour l'amener peu à peu surmonter les oppositions de ces récalcitrants-là et peu à peu les amener à collaborer? Essayons de faire un peu de prospective, là! Vous suggérez quoi au lendemain de sa création quand il y aura des gens qui diront: Bien, nous, on ne veut rien savoir, on n'y va même pas? On fait quoi au lendemain? Parce que, évidemment, la mise au monde de ceci en soi, ça ne suffit pas. Il faudrait faire quoi, après?

M. Cheasley (Stephen): Je peux donner une réponse très simple, très brève. On va suivre le modèle de l'Ontario parce qu'ils sont avant nous maintenant. Au commencement, nous sommes avant Toronto et, maintenant, nous sommes en arrière. Donc, il faut suivre qu'est-ce qu'ils vont faire en Ontario.

Mais je veux juste ajouter une autre chose. Je ne pense pas que nous avons beaucoup de luxe de temps parce qu'il y a d'autres...

M. Facal: Je n'ai pas compris, beaucoup de temps?

Une voix: Luxe de temps.

M. Facal: Ah! O.K.

M. Cheasley (Stephen): Le luxe de temps. O.K.? Parce qu'il y a d'autres forces maintenant, la force de concurrence entre les grandes villes, elles existent partout, ces forces-là. Et, si votre ville... Laissez-moi vous donner un exemple.

Une voix: Oui.

M. Cheasley (Stephen): General Motors, aujourd'hui, décide qu'elle veut construire une autre usine pour les Saturn; qu'est-ce qu'elle fait? Elle engage des experts, des consultants qui font un rapport où ils disent: Voici des villes, voici des options et voici leur grille: taxes municipales plus basses ici, le transport, les aéroports, les hôpitaux. Et, finalement, ils font une suggestion, peut-être ils vont donner deux options. Si votre ville n'est pas capable d'être concurrentielle, General Motors n'installera jamais dans votre ville des usines. C'est ça, la réalité d'aujourd'hui.

J'ai passé une expérience récemment, dans Montréal international, où nous avons vu exactement comment ça fonctionne maintenant. C'est ça, la réalité. Donc, il faut que votre région urbaine soit efficace et concurrentielle et que nous puissions faire des offres. Parce que, maintenant, c'est ça que General Motors fait, elle a envoyé des lettres à 25 villes: Faites des offres.

Moi, depuis huit ans, je suis impliqué avec la Société de la Conférence internationale, nous avons à aller chercher des organisations internationales pour venir à Montréal, on fait des offres contre 19 villes à travers le monde. C'est féroce, c'est vraiment féroce là-bas, la concurrence est féroce. Et, aujourd'hui, ça devient de plus en plus féroce pour les hommes d'affaires, les gens d'affaires. C'est ça, la réalité d'aujourd'hui.

Donc, je ne pense pas qu'on a beaucoup de temps pour parler de la philosophie en arrière de tout ça, il faut passer à l'action. L'Ontario passe à l'action. L'Ontario a déjà organisé un Ontario international, il fait des offres aussi. C'est ça, la réalité d'aujourd'hui, il faut vivre avec.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, c'est terminé. Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys.

Mme Frulla: Bien, je ne sais pas, deux minutes. C'est tout simplement pour dire, M. Cheasley, je pense que, en tout cas, les intervenants ici, à Montréal, on sent ça, on sent ce besoin-là. On a vu l'IDU passer avant et d'autres groupes. On termine en beauté, évidemment, la commission, parce que votre apport, M. Pichette, entre autres, au niveau de la réflexion et de faire avancer, si on veut, les mentalités, ça a été un apport, je dois vous dire, considérable puis on le sent dans le milieu et c'est pour ça que, tantôt, si j'avais l'air d'une personne qui essayait de faire... ce n'était pas ça du tout, c'est que, dans ce besoin et cette urgence d'agir, il y a aussi des volontés qui disent: On devrait aller plus loin. Il va toujours y en avoir d'autres qui vont dire: On est craintifs pour telle ou telle raison.

On n'a pas parlé de fiscalité et il me semble que toute la question de la fiscalité sous-tend aussi cette crainte. Si la question de la fiscalité était en voie de se régler, parce que ça ne se règle pas comme ça, mais en voie d'être réglée pour donner un avantage comparatif, par exemple à Montréal versus les autres, la vision métropolitaine puis ça, je pense qu'on pourrait l'avoir beaucoup plus facilement. Alors, je ne sais pas, avez-vous quelque chose, oui, à ajouter, M. Pichette?

M. Pichette (Claude): D'abord, on a dit très peu de choses, dans notre rapport du Groupe de travail, sur la fiscalité parce que, quand on a commencé à s'attaquer à ça, on s'est aperçu que c'était un dossier d'une complexité et d'une difficulté épouvantables. Mais je voudrais juste vous dire qu'en Ontario, avec le projet qu'on vient de déposer, on va le régler, le problème de la fiscalité, en fusionnant six villes. Ils prennent les six villes, ils font une grande ville de Toronto, bien, il va y avoir une fiscalité, à Toronto, ils vont régler la question.

(11 h 40)

Alors, les gens ne se rendent pas compte de ça ici, que ce que le gouvernement fait, il laisse aux gens la possibilité de vivre dans leur ville. Les gens disent: Nos villes sont bien importantes, on veut garder nos villes. Mais il faudrait qu'ils voient la contrepartie. Il faudrait que les gens soient raisonnables et qu'ils acceptent que, oui, ils vont garder leurs villes, mais que ça va avoir un effet sur la fiscalité. Mais les gens, ils ne veulent rien savoir: ils veulent garder leurs villes, ils veulent garder leur fiscalité, ils veulent laisser les choses telles qu'elles sont. En Ontario, ça a été le bulldozer: une seule ville et puis la fiscalité réglée.

Mme Frulla: Merci.

La Présidente (Mme Bélanger): M. le ministre, pour une minute et demie.

M. Ménard: Oui. Je suis vraiment très heureux de votre rapport et de la compréhension que vous apportez à la situation dans laquelle je me trouve. Je voudrais vous demander une chose, un point précis. Vous m'avez entendu tout à l'heure exposer comment j'ai cherché à concilier plusieurs objectifs: décisionnel, consultatif et le rôle du gouvernement. Alors, j'ai cherché à les concilier en les plaçant dans une perspective de planification. Je crois que c'est une perspective différente. On ne part pas avec un sentiment d'affrontement, parce qu'on se fixe des objectifs, on reconnaît ses forces qu'on veut développer, on reconnaît ses faiblesses qu'on veut corriger, et je pense que les solutions en découlent et le niveau de gouvernement qui doit appliquer ces solutions en découle également; et aussi, d'un autre côté, parce que c'était une de mes missions d'amener les ministères sectoriels à avoir une attitude différente lorsqu'ils abordent les problèmes de leur secteur pour la métropole, puisqu'ils doivent planifier avec les élus locaux, et donc aussi ne rien enlever aux élus locaux, mais leur permettre d'avoir accès à la planification gouvernementale, ce qu'ils n'avaient jamais demandé et peut-être jamais espéré, mais qui peut être important.

Est-ce que je me trompe? Est-ce que vous comprenez cela dans le système? Parce que je vois que très peu de gens le comprennent, très peu de gens le rapportent, quoiqu'il y en ait. Et est-ce que c'est une bonne solution, enfin?

M. Pichette (Claude): Excusez. Qu'est-ce qui est une bonne solution?

M. Ménard: L'idée de la planification, de les mettre dans une optique de planification, et de planification avec les ministères sectoriels du gouvernement.

M. Pichette (Claude): Moi, je pense que ça va être extrêmement difficile tout simplement en raison de la nature humaine, parce que ce qu'on perçoit et ce qu'on entend derrière les branches, c'est: Oui, bien, il y a peut-être un premier ministre qui, un bon jour, a eu l'idée qu'il fallait faire un ministère de la Métropole, mais il n'a pas de moyens. Mais il y a des ministères sectoriels qui ont les moyens, et eux autres, oui, bien, on verra bien ce qu'on fera en temps et lieu. Et moi, je pense que ça, ça va être le grand défi de la Commission, d'aller chercher l'appui des ministères sectoriels et d'amener ces gens-là, sans arrière-pensée, à travailler avec la Commission, et ça, je pense que ça va être un grand, grand défi.

Et là vous allez peut-être avoir 106 municipalités, 105, 100 municipalités sur un dossier, trois, quatre régions, peut-être même cinq, on ne sait jamais, et 11 MRC ou un certain nombre de MRC qui vont se liguer à un moment donné contre la Commission, qui vont aller voir les ministères sectoriels. Comment est-ce que ça va être arbitré, cette affaire-là, à l'intérieur du gouvernement? Et ça, je pense que ça va être un défi extrêmement difficile à relever, et ça ne veut pas dire qu'il ne faut rien faire, loin de là. Je pense qu'un ministère de la Métropole, il en faut un, mais ça ne peut pas être un gouvernement. Il faut donc qu'il travaille avec les ministères sectoriels et il va falloir que les ministères sectoriels acceptent qu'il y ait un ministère de la Métropole et que tout le monde ensemble travaille pour réaliser des choses.

On perçoit, par exemple, qu'entre certains ministres et le ministre d'État à la Métropole il y a des affinités, mais on perçoit aussi, comme simples citoyens, en lisant les journaux et en entendant des gens parler, qu'il y en a qui ne veulent rien savoir d'un ministère de la Métropole, même dans le gouvernement, et ça va être la difficulté d'amener les ministères sectoriels à travailler sans arrière-pensée avec le ministère de la Métropole. Et moi, je pense que ça va être le grand défi, parce que ceux qui, aujourd'hui, s'opposent au rôle du ministère de la Métropole et à la création d'une commission, qu'est-ce qu'ils vont faire? Ils vont aller voir les ministères sectoriels et ils vont essayer de mettre des bois dans les roues aux projets proposés par la Commission. Ça va être la...

La Présidente (Mme Bélanger): Malheureusement, M. Pichette, c'est très intéressant mais c'est terminé. On vous remercie de votre participation, ainsi que M. Cheasley.


Mémoires déposés

Alors, avant de passer aux remarques finales, j'aimerais faire le dépôt de mémoires qui ont été déposés à la commission mais qui n'ont pas été entendus. Alors, la Centrale de l'enseignement du Québec, le Front commun québécois pour une gestion écologique des déchets, le Groupe Vélo inter-CDEC ville de Blainville et ville de Saint-Eustache. Alors, ces mémoires sont déposés et je demanderais à Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys de faire ses remarques finales.


Remarques finales


Mme Liza Frulla

Mme Frulla: Merci, Mme la Présidente. D'abord, je tiens à remercier...

La Présidente (Mme Bélanger): Vous pouvez rester là pour écouter.

Mme Frulla: ...tous les intervenants d'une part et tous les membres de la commission de part et d'autre. Je pense qu'on a eu de bons échanges, de très, très bons échanges, et c'était une commission qui était, dans son activité intellectuelle aussi, malgré qu'il faut arrêter de parler de philosophie puis commencer à agir, mais, dans son activité intellectuelle, une commission qui était très, très, très plaisante.

Cela dit, Mme la Présidente, j'aimerais revenir – parce que là le ministre va aller travailler de son côté et nous revenir – mais je voudrais vraiment réitérer le sentiment d'urgence par rapport aux intervenants qui sont venus nous voir et qui nous ont dit: il faut agir. Maintenant, agir, c'est bien d'essayer de trouver un consensus global, métropolitain, c'est bien mais je ne pense pas, sans être négative, avec ce qu'on a entendu, qu'on va pouvoir faire plaisir à tout le monde tout le temps. Alors, il y a des façons de faire, et des façons de procéder, mais en bout de ligne il y a convaincre, et il va aussi falloir, si on trouve qu'il y a une urgence, imposer.

On a beaucoup parlé de la situation «trou de beigne» – et le ministre a été un des premiers à le dire de son gouvernement en Chambre – on déplore la situation «trou de beigne» qui s'accentue de plus en plus au niveau de Montréal et il faut absolument s'organiser pour le contrer. C'est sûr que, dans son principe même, d'avoir une vision métropolitaine, on s'organise pour justement essayer de contrer ces effets-là et ce n'est pas parce que certaines villes vivent cette situation-là que nous, au Québec, on est obligés de l'accepter.

Mais je dois aussi noter qu'avec la théorie il y a aussi la pratique. Et je vous donne deux exemples, deux exemples qui font en sorte que la situation «trou de beigne», ce n'est pas évident qu'on va la contrer. Ce sont deux exemples qui viennent du gouvernement. La Régie du bâtiment, section électrique, décide de fermer ses bureaux à Montréal et d'envoyer ses 60 fonctionnaires à Longueuil et à Laval. Plus de service à Montréal, les services donc doivent et seront dispensés à Longueuil et à Laval. On devrait se réjouir de cette situation. C'est dans la métropole mais en bout de ligne, le trou de beigne, bien, on y contribue.

Le Revenu. Le Revenu: on crée 125 emplois au niveau du Revenu. On décide de faire un grand bureau du Revenu. On déménage ça à Laval. En plus, on prend 100 fonctionnaires de Montréal et on les envoie l'autre bord du pont, à Laval. Le ministre hier s'est réjoui – c'est légitime, un, c'est son comté, deuxièmement, c'est Laval, c'est le ministre métropolitain, on se réjouit de la situation – excepté que, comme ministre responsable de la région de Montréal et de l'île de Montréal, je ne suis pas sûre si c'est réjouissant parce que ce transfert-là, veux veux pas, reflète encore une fois cette situation qui se passe à Montréal, c'est-à-dire cette situation qui est une situation que l'on déplore tous ensemble. On dit une situation «trou de beigne». Et il y en a, il y en a.

(11 h 50)

Le rabais de taxes, par exemple, les villes, d'attirer les entreprises, comme l'IDU disait, «chez eux versus Montréal», ça aussi, ça contribue parce que ça fait, par exemple, une région centrale, un noyau faible qui s'affaiblit encore plus et qui, pour ne pas aider la situation, reste ou demeure, malgré l'intervention de plusieurs intervenants, dans une situation de déséquilibre fiscal par rapport à ses villes environnantes. Alors, c'est ça aussi, c'est que, entre la philosophie, comme M. Cheasley disait tantôt, la bonne volonté – tout le monde est de bonne volonté, le ministre, le premier, est de bonne volonté – et la réalité pratico-pratique, il y a une marge, et je pense que, là, il est temps de mettre cette réalité pratico-pratique et d'aller lui chercher des solutions pour agir maintenant. Je le disais tantôt: Pourquoi se contenter de moins quand on est capables de faire plus? C'est sûr qu'il va falloir imposer, M. Pichette a raison, Jean-Noël Lavoie a perdu ses élections quand il a imposé Laval, mais je pense qu'on n'est pas dans cette situation-là non plus. Il y a beaucoup d'intervenants qui disent: Nous autres, on veut agir, on veut que ce soit décisionnel, on veut la contribution de l'ensemble du milieu, mais on est prêts à décider.

Si le territoire est trop grand, et d'autres se sentent inconfortables, peut-être qu'il y aurait lieu de le regarder au niveau du territoire. Chose certaine, c'est qu'il y a, à cause de ce qui se passe dans le macro-environnement, cette urgence qui n'existait peut-être pas il y a quelques années, mais, là, on en est là. Alors, je laisse le ministre avec ces pensées-là, ce n'est pas facile, ce n'est pas facile pour lui, M. Pichette dit qu'il a beaucoup de sympathie pour le ministre, et on en a tous. Excepté que, à un moment donné, c'est le gouvernement qui devra trancher, et le premier ministre, entre la métropolisation et la régionalisation. C'est le premier ministre qui a demandé une commission de développement de la métropole, alors, c'est lui qui devra, probablement, trancher entre ces deux visions-là, et nous, au niveau du projet de loi, bien, il y aurait des amendements à être apportés. Il y a des amendements, peut-être, à être apportés au niveau du territoire, au niveau du consultatif versus décisionnel, au niveau, évidemment, de la participation dans un processus, si jamais on s'en va là-dessus, sur certaines décisions décisionnelles des élus versus les non-élus. On a parlé, aussi, de certains secteurs, d'ajouter la fiscalité, parce que, à l'avis – ça, ça fait consensus, là – c'est un dossier qui est extrêmement complexe, mais c'est un dossier majeur.

Et, en regard, aussi, de l'ensemble des structures à garder ou à simplifier, le ministre disait, hier: On va payer moins de taxes quand on va abolir ou, enfin, simplifier les structures. On en est là. Et je sais que c'est assez difficile de dire... On ne peut pas partir puis avoir tout parfait, excepté que l'urgence nous dit aussi que, s'il y a une façon de sauter, peut-être, quelques étapes, sauter quelques étapes pour qu'on en vienne avec une commission qui a des dents, avec la volonté du premier ministre qui, lui-même, l'a demandé cette commission-là, alors, à ce moment-là, allons-y et faisons-le. De notre part, évidemment, vous l'avez senti, là, on opte pour une commission ou un projet de loi qui a plus de mordant et qui oblige plus. Mais, encore une fois, on est tous d'avis et d'accord à ce qu'il y ait une vision métropolitaine qui s'établisse et que les intervenants travaillent ensemble. On laisse, évidemment, le ministre sur cette réflexion, on lui souhaite bonne chance par rapport à d'autres intervenants au Conseil des ministres. C'est vrai que ce n'est pas facile, puis on l'a vécu, hein, de part et d'autre, ce n'est pas particulier au gouvernement en place, mais, s'il y a une volonté réelle de faire une métropole, s'il y a une volonté réelle par rapport à l'urgence d'agir, d'avoir une métropole forte, pourquoi, parce que les retombées se font à la grandeur du Québec, alors, allons-y, on a tout en main pour mettre les décideurs en place et pour dire aux décideurs: Là, c'est à votre tour, décidez. Merci, Mme la Présidente.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, Mme la députée de Marguerite-Bourgeoys. M. le ministre.


M. Serge Ménard

M. Ménard: D'abord, mes premières remarques iront pour remercier la présidence, pour la façon juste, équitable et le doigté avec lequel cette commission a été présidée. Je veux dire aussi que j'ai apprécié la façon dont l'opposition a abordé la question et dont elle s'est comportée pendant tout le temps de la commission, je pense que... Ici, de notre côté, vous aurez remarqué que j'ai laissé beaucoup de liberté aux députés de ce parti. Qu'en avons-nous récolté? Une présence exceptionnelle durant tout le temps de la commission. Nous terminons, soit dit en passant, avec huit femmes présentes et cinq hommes, un équilibre nouveau que beaucoup espèrent, un effet inattendu, une transformation que la liberté pourra peut-être exercer.

Je pense que ce faisant, ne cherchant pas à polariser dans les lignes de parti les oppositions qui existaient, nous avons véritablement agi comme la population veut que nous agissions. Je suis convaincu, d'une part, que le système adversaire est bon en politique comme devant les tribunaux, mais qu'il doit savoir respecter ses limites et je pense que nous avons donc, d'une certaine façon, exprimé les préoccupations diverses et parfois contradictoires qui s'expriment dans la population. Je pense que cette liberté nous a aussi permis d'évoluer, d'évoluer chacun à la lumière des messages que nous avons entendus. Il est évident que nous ne partions pas tous du même endroit, que nous n'avions pas cheminé de la même façon auparavant, et c'est absolument, non seulement compréhensible, mais normal. Il est compréhensible qu'à la fin nous ne soyons pas encore rendus tout à fait au même endroit. Cependant, je pense que certains consensus ont été dégagés. Il appartiendra à d'autres, plus objectifs que nous peut-être, de dégager ces consensus et de les reconnaître. Je pense à la presse et particulièrement à ceux qui ont suivi avec beaucoup d'attention l'ensemble.

Je vous ferais remarquer, quand vous ferez cette évaluation, de considérer que d'abord il était normal que certains qui ont des oppositions les plus fermes viennent les exprimer avec le plus de vigueur et beaucoup semblent avoir compris ce que Louise Harel m'avait déjà expliqué et que je trouve remarquable. Elle m'avait dit: Si les gouvernements sont parfois aveugles, ils ne sont jamais sourds. Certains le savent et savent crier fort quand il s'agit de leurs intérêts. Mais, dans l'évaluation de ces positions qui se sont exprimées, de ces oppositions mais aussi de ces accords, je pense qu'il est bon de mesurer la représentativité de chacun et combien d'électeurs ils représentent, mais aussi quelles sont leurs clientèles. Il est normal que ceux qui sentaient qu'ils... Bon, je crois qu'il y a un consensus très net sur un objectif, sur une nécessité, sur une urgence. Tout le monde reconnaît que l'objectif de créer et de développer une vision métropolitaine doit être poursuivie. Tout le monde reconnaît qu'il est urgent que cela soit fait et tout le monde reconnaît que c'est urgent et nécessaire parce que nous sommes une métropole. Cette métropole doit compétitionner avec les autres grandes métropoles du monde. Que nous gagnions cette compétition, que nous allions chercher notre juste part de ce qui revient aux grandes métropoles du monde est essentiel pour la santé économique du territoire dont nous sommes la métropole et de tout le territoire. Beaucoup veulent que cela se réalise sans enlever quoi que ce soit aux parties de cette métropole. Je dois dire que c'est quelque chose, que c'est un objectif que je partage. Mais beaucoup sont venus ici et beaucoup ont abordé la critique de ce projet de loi avec leurs craintes ou avec leurs déceptions. J'espère qu'ils sont conscients que je suis conscient de ces craintes et que je les comprends et que j'en ai tenu compte, que je suis conscient de ces déceptions et j'en ai tenu compte aussi. Mais comme l'ont dit tellement de représentants qui n'ont pas un électorat local à représenter, des intérêts locaux à représenter, il faut partir. L'immobilité n'est pas la solution. La peur n'est pas la solution.

(12 heures)

La métropole est malade, mais la maladie n'est pas encore mortelle. Sans doute comme dans tout corps qui est malade, il y a encore des parties qui sont en santé et ces parties qui sont en santé ne voudraient pas perdre leur santé, mais, si on ne guérit pas les parties malades, il est évident que la maladie va les rejoindre et qu'ils doivent le réaliser. Ils doivent comprendre aussi que les malades ne sont peut-être pas toujours habiles à crier au secours. Je ne les ai pas trouvés très habiles et, donc, qu'il y a nécessité de s'élever au-dessus et de voir. Mais ils doivent comprendre, les parties qui sont en santé aussi, que cette santé sera tellement plus grande si nous obtenons notre juste part du développement économique qui attend les grandes métropoles mondiales dans la maîtrise des nouvelles technologies, dans l'établissement d'objectifs métropolitains, que c'est un objectif auquel ils doivent adhérer. Et cette richesse est si grande qu'il y en aura plus pour eux encore. Il est significatif de ce que disait M. Pichette: Il n'y a plus un seul pôle de développement dans la métropole, il y en a plusieurs, j'en suis conscient. Nous en serons conscients. Et donc, il y a plus de richesse pour tout le monde. Je voudrais que ces gens aussi se fassent confiance, fassent confiance à leur capacité de persuader les autres de la justesse de leur position. C'est ça, l'avantage de venir autour d'une table commune, c'est faire confiance en la justesse de ses positions et en notre capacité de convaincre les autres dont la seule contre-partie est d'être capable de compréhension à l'égard des autres.

Et c'est pourquoi nous avons imaginé au ministère cette formule originale entre décisionnelle et consultative qui était de planifier ensemble. Qu'est-ce que c'est que planifier ensemble? Planifier ensemble, c'est se regarder dans le temps, c'est se fixer des objectifs communs que nous aurons tous avantage à poursuivre et à réaliser, c'est reconnaître ses forces, c'est reconnaître ses faiblesses, c'est dégager les décisions qui doivent être prises pour atteindre ses objectifs en fonction de nos forces et en fonction de nos faiblesses. Dans ce mécanisme, tout le monde reconnaîtra qu'il peut y avoir des décisions qui affecteront certaines parties et en avantageront indûment certaines autres, cela peut arriver n'importe où. Nous verrons ensemble quels mécanismes nous pourrions avoir pour atténuer ces différences et faire que le fardeau de la santé, le fardeau de l'augmentation de la richesse soit distribué équitablement. Mais pour ça il faut que nous arrivions avec un esprit ouvert et un esprit régional à la table, confiants en soi, en la justesse de sa cause. Ensemble, c'est vrai que cette Commission devra être évolutive. Mais je veux, justement, que, s'il est nécessaire d'aller plus loin parce que nous sommes très en retard sur les autres, nous allions si possible plus loin de façon consensuelle. Il y a un rôle pour chaque partie de la métropole, il y a des avantages pour chaque partie de la métropole.

L'autre chose aussi, l'avantage de la planification, c'était d'amener les ministères sectoriels à avoir une vision métropolitaine lorsqu'ils décident de leur planification et, donc, lorsqu'ils prévoient leur budget pour cela. C'était un des rôles importants que le premier ministre m'avait donnés où là aussi il y a des opposants et des opposants pour les mêmes raisons qu'il y a des oppositions régionales. Mais, justement, c'est de les amener à une table.

Et, finalement, je voudrais dire ma conviction la plus profonde que la métropolisation de la métropole est la forme adaptée de la régionalisation. Mais la métropole est si grande, et je le reconnais, que cette régionalisation doit probablement se poursuivre dans certains secteurs, là où c'est le plus efficace à l'intérieur même de cette métropole. La métropolisation et la régionalisation, non seulement sont compatibles, mais il ne peut y avoir de véritable régionalisation qui enrichirait le Québec que si l'on reconnaît la fin des politiques mur à mur, la nécessité d'adapter cette politique générale, qui est un bien pour tous, aux situations particulières.

On dit qu'on va le faire pour les grandes régions. C'est vrai qu'on ne pourrait pas traiter l'Abitibi comme la Gaspésie, comme le Lac-Saint-Jean. Et je tiens à répéter, de ce côté-là, que je crois, quant à moi, que la richesse des régions ne peut emmener qu'une plus grande richesse de sa métropole et qu'il n'y a rien d'incompatible entre la richesse de la métropole et la richesse de ses régions. Au contraire! Il y a une partie, aussi, de la richesse des régions qui va dépendre de sa métropole. Alors, non seulement c'est compatible, mais c'est une nécessité. J'espère, enfin.

Nous avons vu les oppositions. Certains ont pu mesurer en eux-mêmes les oppositions et la transformation de leur opinion au cours de cette commission à laquelle nous sommes tous arrivés, quel que soit notre parti politique, quelle que soit notre région, avec un esprit ouvert. J'espère qu'ils feront bénéficier d'autres députés, dans leurs contacts, de leur expérience et qu'ils chercheront à les faire évoluer également. Je vous remercie.

La Présidente (Mme Bélanger): Merci, M. le ministre. Et j'aimerais, en terminant, remercier les membres de la commission pour leur collaboration. Et je voudrais peut-être féliciter le ministre. Ça fait 11 ans que je préside des commissions, et je peux dire au ministre que c'est le premier ministre que je rencontre qui donne autant de place à ses députés dans une commission. Puis je pense que c'est beaucoup plus intéressant pour les députés ministériels, au lieu de faire les pots de fleurs, assis à la table à écouter le ministre parler pendant 20 minutes de temps, il a donné du temps à chacun des députés. Et je l'en remercie et je le félicite.

Une voix: Pour la présidente aussi.

La Présidente (Mme Bélanger): Pardon?

Une voix: Pour la présidente aussi, c'est plus intéressant.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est plus intéressant pour la présidente aussi, parce qu'il y a des idées nouvelles qui sortent.

Alors, merci. La commission... Oui?

M. Boulerice: C'est parce qu'il ne faut quand même pas oublier aussi qu'il y a le personnel de soutien qui est essentiel à nos commissions: le secrétaire de la commission, l'adjointe, M. Drolet, tout ça.

La Présidente (Mme Bélanger): Oui.

M. Boulerice: Alors, je pense que ces gens-là nous sont très utiles. Il faudrait les remercier également.

La Présidente (Mme Bélanger): C'est un fait. Alors, la commission, ayant accompli son...

M. Boulerice: Notre preneur de son, en plus. Ha, ha, ha!

La Présidente (Mme Bélanger): Alors, la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 12 h 8)


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