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Version finale

28e législature, 4e session
(25 février 1969 au 23 décembre 1969)

Le jeudi 25 septembre 1969 - Vol. 8

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Bill 10 - Régimes matrimoniaux


Journal des débats

 

Commission permanente de l'administration de la Justice

Bill 10 — Régimes matrimoniaux

Séance du 25 septembre 1969

(Dix heures treize minutes)

M. BERGERON (président de la commission permanente de l'administration de la Justice): Messieurs, nous allons commencer nos travaux.

M. PAUL: Du consentement de mes collègues, peut-être que je pourrais me réserver le droit de présenter une motion, suivant ce qui pourra se produire un peu plus tard.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, nous étions à étudier l'article 23, modifiant le deuxième paragraphe de l'article 1263 du code. Il y a un amendement de proposé qui se lirait comme suit: « Les conventions passées en violation du présent article ne peuvent être attaquées que par le prodigue, le faible d'esprit, le curateur ou le conseil judiciaire, selon le cas, et elles ne peuvent plus l'être lorsqu'il s'est écoulé une année depuis la célébration du mariage ».

Il y a une note: Cet amendement a pour but d'éviter un doute quant à l'interprétation du mot année, à la suite des discussions que nous avions eues la semaine dernière.

M. PAUL: Alors, nous gardons le premier paragraphe, M. le Président?

M. LE PRESIDENT: C'est ça. Vous avez reçu un ensemble de notes sur tout ce qui s'est dit sur ce bill-là. Les paragraphes qui sont dactylographiés en caractères plus gras sont des amendements qui ont été acceptés par l'Office de révision du code civil.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Je vols ce que vous voulez dire.

M. PAUL: M. le Président, dois-Je comprendre que l'article 23, tel qu'amendé ou clarifié, pourrait être adopté? Il y avait également l'article 2, modifiant l'article 177 du code.

M. LE PRESIDENT: Nous l'avions accepté la semaine dernière, à la suite des corrections qui avaient été faites séance tenante.

M. PAUL: Oui.

M. LE PRESIDENT: Alors, l'article 2 est accepté. L'article 23, se rapportant à 1263 dans le texte de loi, est-il adopté?

M. PAUL: Adopté.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: L'article 24?

Il s'agirait de changer « Les articles 1264 et 1265 tel qu'il se lit à l'article 5809 des Statuts refondus, 1888, ainsi que les articles 1266 et 1267 dudlt code sont remplacés par ce qui suit: » et nous avons le texte: « Les conventions matrimoniales doivent être constatées avant la célébration du mariage, par acte notarié portant minute. Les changements faits aux conventions matrimoniales avant la célébration du mariage doivent, à peine de nullité absolue, être constatés par un acte passé dans les mêmes formes, en présence et avec le consentement de tous ceux qui ont été parties dans le contrat de mariage. »

M. PLAMONDON: Par la suite, faire un contrat de mariage par contrat notarié.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Parce que si vous voulez le régime légal, vous n'irez pas chez le notaire.

M. PLAMONDON: Mais si je me reporte au deuxième alinéa de l'article 1264 antérieur; « Sont exemptés de la forme notariée les contrats de mariage faits dans certaines localités pour lesquelles l'exception à cet égard, existe en vertu des lois particulières. » Dans la loi actuelle?

M. COMTOIS: Si vous permettez, M. le Président, c'était pour la Gaspésie, et il y a quatre ou cinq ans, cette exception a été supprimée. Alors, cela n'avait plus aucune conséquence.

M. PAUL: C'est cela. Cela n'avait pas été amendé en conséquence dans le code.

M. THEORET: Maintenant, M. le Président, si je comprends bien le texte, c'est la même chose que dans le texte précédent. Les changements faits aux conventions matrimoniales peuvent être faits devant un autre notaire, M. Comtois? Il n'y a rien qui s'oppose à cela?

M. COMTOIS: Non.

M. COITEUX: Au deuxième paragraphe, on disait anciennement: « Sont exemptés de la forme notariée, les contrats de mariage laits dans certaines localités. » Si c'était obligatoire que cet article-là s'applique à la Gaspésie, je crois qu'actuellement, pour une distance d'environ, j'oserais dire 550 milles qui comprend 22 ou 23 localités, les mariages se font sans que les gens se présentent chez le notaire. Je crois bien qu'ils ne viendront pas passer un contrat de mariage à partir de la Tabatière, ou de Cap-à-la-Baleine ou de Blanc-Sablon.

M. PLAMONDON: Le régime actuel s'appliquera...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela n'existe plus.

M. THE ORE T: Je vous ferai remarquer que les contrats de mariage ont diminué en très grand nombre. Ce n'est pas un discours pro domo que je fais ce matin... On veut soulager le public de cette cérémonie; le régime légal sera donc la société d'acquêts et il se fera très peu de contrats de mariage. D'ailleurs, cela créait des difficultés cette exemption, et je me demande si elle a même déjà été appliquée. Je ne connais pas, je n'ai jamais vu dans ma pratique de personnes venant de régions éloignées qui auraient fait des contrats de mariage ailleurs que chez des notaires. Est-ce que cela s'est déjà présenté au cours de votre pratique?

M. COMTOIS: C'est une affaire bien compliquée. Je sais que, dans le district de Gaspé, au temps où l'exception existait — mais elle a été supprimée il y a cinq ou six ans — il se faisait des contrats de mariage chez le protonotaire, je pense, et peut-être aussi devant les juges de paix ou des personnes qui n'étaient pas des professionnels. Mais, comme l'exception a disparu, aujourd'hui, on ne peut plus y référer; elle n'existe plus.

L'exception disait qu'elle ne s'appliquerait que tant qu'il n'y aurait pas plus de deux notaires, je pense, dans les districts de Percé et de Gaspé. Il y en a plus de deux depuis déjà un bon nombre d'années. Cela n'empêche pas les gens de se marier, même s'ils viennent de la Gaspésie. Cela ne les empêche pas de faire un contrat de mariage, mais, évidemment, s'ils sont à 125 ou 150 milles du notaire, ils ne se déplaceront pas pour faire un contrat de mariage. Justement, le nouveau régime légal, à notre avis, prévoit qu'ils seront aussi bien mariés que s'ils avaient un contrat. Ce sera aussi légal... C'est le régime légal en l'absence de contrat et ils seront aussi bien servis par lui.

M. PLAMONDON: Est-ce qu'en vertu du régime que nous étudions, il serait possible, après le mariage, de modifier son statut si on le désire?

M. COMTOIS: Oui.

M. PLAMONDON: Alors, je pense que cela règle la question.

M. COMTOIS: C'est un des avantages, Je pense bien. Nous verrons comment fonctionne la société d'acquêts et si, dans certains cas, cela ne va pas, la mutabilité des régimes fait que ce ne sera pas irrémédiable. Toute personne pourra changer de régime selon les formalités qu'on mentionnera plus tard.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, je m'excuse d'interrompre les travaux, mais de consentement unanime, est-ce qu'on pourrait accepter que M. Harvey soit remplacé par le député Louis-Philippe Lacroix, et que M. Maltais (Limoilou) soit remplacé par M. Paul-Henri Picard?

M. PAUL: M. le Président à la dernière séance M. Léveillé avait remplacé M. Maltais.

Il serait peut-être préférable de remplacer M. Léveillé ce matin par M. Picard, pour éviter certaine confusion à la comptabilité.

M. LE PRESIDENT: Alors, est-ce que l'article 1264 serait adopté? 1265: « II est loisible aux époux pendant le mariage de modifier leur régime matrimonial ainsi que leur contrat de mariage pourvu que, par une modification ainsi faite, ils ne portent pas atteinte aux intérêts de la famille ni aux droits de leurs créanciers. « Les donations portées au contrat de mariage ne peuvent néanmoins être modifiées que du consentement de tous les intéressés. »

Si nous nous référons aux notes explicatives, il y est dit: « La règle traditionnelle de l'immutabilité des régimes matrimoniaux et l'ancienne prohibition relative aux donations, que sanctionnent les deux paragraphes de l'actuel article 1265, sont abrogées. « Le système de mutabilité préconisé ici répond au souci d'éviter dans toute la mesure du possible les abus d'influence entre les époux et la fraude à l'égard des créanciers: l'exigence d'un acte notarié, le contrôle judiciaire, la participation éventuelle de tous les intéressés constituent des mesures protectrices qui peuvent sembler rigoureuses mais restent nécessaires. »

Nous pourrions peut-être passer à l'article

1266, qui est connexe: « Toute convention entre époux ayant pour objet de modifier leur régime matrimonial ou leur contrat de mariage doit être constatée par acte notarié portant minute; elle n'a d'effet que si elle est homologuée par le tribunal de leur domicile. « La requête en homologation, avec avis du jour de sa présentation, doit être signifiée à tous les créanciers de chacun des époux et, le cas échéant, à toutes les personnes encore vivantes qui étaient parties au contrat de mariage. Avis de la requête, de la date et du lieu de sa présentation doit en outre être publié en la manière prévue à l'article 139 du code de procédure civile. » Oui?

M. CREPEAU: M. le Président, peut-être y aurait-il lieu de lire également les articles 1266-a) et 1266-b) qui sont la suite des formalités requises.

M. LE PRESIDENT: « Le jugement d'homologation doit être signifié au notaire ou à l'officier dépositaire de la minute du contrat de mariage original, lequel est tenu d'inscrire la date du jugement et le changement intervenu sur telle minute et sur toute copie qu'il en délivre. « II doit également être fait mention de ce jugement en marge de tout enregistrement effectué en vertu des articles 1834 et suivants. » 1266-b): « Tout acte fait en vertu des dispositions des articles 1264 et 1266 est sans effet à l'égard des tiers tant qu'il n'a pas été enregistré au registre central des régimes matrimoniaux établi conformément aux dispositions de la loi. »

Si nous regardons les notes explicatives de 1266-b): « Un système de publicité bien organisé est la condition essentielle pour éviter que la liberté accordée aux époux de modifier à volonté leur régime matrimonial ne soit utilisée au détriment des tiers avec lesquels ils peuvent être appelés à agir. Les auteurs du projet sont d'avis qu'il est urgent que soit organisé à cette fin un registre central où seraient publiés tous les contrats de mariage et toutes les mutations de régime permises ou imposées par un tribunal. « L'organisation technique d'un tel centre de publicité peut présenter quelques difficultés, mais il ne semble pas y avoir d'autres solutions aussi valables et efficaces ».

M. PLAMONDON: Cela veut-il dire que tout individu qui peut se sentir lésé par une mutabilité de régime devra faire appel au registre central pour s'enquérir de la situation matrimoniale de tel ou tel individu?

M. LE PRESIDENT: C'est un peu comme l'index des immeubles pour les notaires. Si on veut savoir si une propriété est grevée d'une charge, eh bien, on va au bureau d'enregistrement et on vérifie.

M. CREPEAU: A ce propos, M. le Président, et pour donner suite & cette recommandation de la commission des régimes matrimoniaux, un comité spécial de l'Office de révision du code civil a été constitué au printemps, groupant un certain nombre de représentants et de fonctionnaires intéressés au système de l'enregistrement. Ce comité était composé notamment de M. Darveau, du Secrétariat de la province; de représentants des bureaux de protonotaires, du « registrateur » de Montréal, Me Langevin; de représentants du ministère de la Justice et également du démographe de la province, le Dr Fredette.

Nous avons tenu un certain nombre de séances et nous avons rédigé, 3 l'intention du ministère, un projet de fiches qui contiendraient les indications nécessaires pour toute mutation de régime. Nous avons transmis le document à M. le ministre de la Justice.

M. THEORET: Je dois comprendre que ce fichier sera tenu au ministère de la Justice et que cela n'est en rien comparable, Me Comtois, au registre des testaments notariés.

M. COMTOIS: Ce sera comparable, en un sens. Le registre des testaments, tenu par la Chambre des notaires, contient la liste alphabétique, établie par procédé mécanographique, de tous les testaments notariés. Lorsqu'une personne décède, si elle a fait son testament notarié, actuellement, on est sûr de le retrouver au registre central. Pour les contrats de mariage, est-ce que ce sera au ministère de la Justice ou au ministère de la Santé? Je n'en sais rien. Mais l'idée est qu'en s'adressant à un endroit unique pour toute la province, on puisse savoir quel est le régime actuel de tel ou tel individu qui se propose de faire une transaction ou un contrat, peu importe.

Actuellement, dans votre pratique, vous recevez un vendeur ou un acheteur, par exemple, et vous leur demandez quel est leur régime matrimonial. Ils vous le déclarent au meilleur de leur connaissance. Supposons que ces gens auraient changé de régime, si la mutabilité est admise, et qu'ils auraient intérêt & ne pas divulguer le changement, on ne peut pas avoir de contrôle parfait, on est obligé de s'en remettre aux déclarations des parties.

Cependant, avec le nouveau système, c'est une publicité qui fera preuve de son contenu. Avec un

certificat du « régistraire » des états matrimoniaux disant que M. Théoret est marié en séparation, on peut le considérer comme marié en séparation, en premières ou secondes noces, peu importe, et c'est cette situation-là qui est publiée, qui est connue et qui va faire loi.

Si ce n'est pas vrai, si une déclaration fausse a été faite ou si un nouvel état matrimonial changé n'a pas été donné cela ne comptera pas. Ce sera comme en matière d'enregistrement; c'est ce qui est écrit au registre qui fait loi et qui apparaît à tout le monde. On veut un système uniforme, universel, sûr, pour connaître l'état matrimonial actuel de toute personne. Evidemment, le bill 10 ne peut pas entrer en vigueur, d'après moi, tant et aussi longtemps que ce registre n'est pas établi. C'est pour cela qu'il faudrait peut-être prévoir que la présente loi, si elle était acceptée par l'Assemblée nationale, n'entrerait en vigueur que sur proclamation et lorsque des instruments comme le registre seront déjà en place.

M. LE PRESIDENT: Me Comtois, les législes m'informent qu'ils sont actuellement à étudier les amendements à l'article 1,266a et 1,266b. on demanderait aux membres de la commission de nous dire s'ils sont en faveur du principe du fichier central. A la prochaine séance, à la suite de la décision que les membres de la commission voudront bien prendre, on nous présentera des amendements pour compléter le tout.

M. PLAMONDON : Si Je comprends bien, toute personne sera régie par la présente loi. A ce moment-là, il n'y aura aucun enregistrement au fichier central, est-ce cela?

M. COMTOIS: II y aurait un problème de rétroactivité. Est-ce que nous pouvons établir un registre comme ça et obliger toutes les personnes déjà mariées à enregistrer leur état matrimonial? Cela me paraîtrait extrêmement onéreux.

M. PLAMONDON: C'est cela.

M. COMTOIS: Comme tout système, c'est une amélioration pour l'avenir. Pour le passé, à mon humble avis, ce sera presque impossible d'obliger tout le monde à faire des frais ou, du moins, des déclarations, ou encore à remplir des formules. Les gens en ont toujours plein le dos des formules. Pour le registre des testaments à la Chambre des notaires, cela commence avec l'année 1961. Ce serait bien mieux si nous avions pu enregistrer et les testaments faits depuis 1961 et ceux qui sont faits depuis toujours. A défaut de mieux, nous essayons de faire ce qui est déjà bien. Le mieux est l'ennemi du bien. Nous appliquerons cela pour l'avenir et, pour ce qui est du passé, cela se corrigera avec le temps. Il serait très difficile d'établir un registre qui soit vraiment rétroactif. Cela serait extrêmement onéreux, à mon sens. Il appartiendra à la commission et aux fonctionnaires de prendre une décision à ce sujet.

M. PAUL: M. le Président, nous devons, ce matin, accepter le principe, quitte à ce que, dans les amendements futurs, on nous expose dans quelles modalités cet enregistrement pourra se faire. Comme le mentionne le notaire Comtois, je pense bien que c'est une nécessité.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il n'y a pas d'autres solutions de proposées à part cela. Alors, en l'occurrence, il me semble...

M. COMTOIS: Oui, nous avions songé à un autre système. Moi, j'ai même pensé de dire: Faites-le donc à la Chambre des notaires. Il y a déjà tout un système pour le registre des testaments, mais l'Etat ne peut pas s'en remettre à une corporation même professionnelle. Je crois que ce n'est pas de la bonne politique. Par ailleurs, faire un enregistrement à chaque bureau d'enregistrement, avec les changements de domicile, c'est presque inextricable. Un bonhomme fait affaires dans un district, disons dans la division d'enregistrement de Papineau, et il est né à Montréal ou à Québec. L'épouse et l'époux n'ont pas toujours le même domicile. Cela prend un registre central.

M. PAUL : Supposons que se réaliserait cette fusion désirée par beaucoup de légistes, tant notaires qu'avocats, et qu'il n'y aurait qu'une profession au Québec, à ce moment-là, cela nous obligerait, dans x années, peut-être, à adopter cette forme de centralisation ou d'enregistrement à la Chambre des notaires qu'on pourrait établir tout de suite.

M. CREPEAU: Ce que vient de dire le ministre de la Justice est d'autant plus vrai que cette formule que nous avons présentée s'inscrit dans le cadre d'un système plus général de l'enregistrement des données.

A l'Office de révision du code civil, nous nous sommes rendus compte qu'un certain nombre de comités s'intéressent à cet enregistrement des données. Il y a, par exemple, l'état civil. Nous allons proposer au gouvernement que soit établi un système central d'enregistrement des données de l'état civil pour éviter le dédoublement, le chevauchement qui se fait, en

ce moment, entre les actes de l'état civil et l'enregistrement des données démographiques du ministère de la Santé, ce qui fait un double système d'état civil, dans la province de Québec, en ce moment. Je me permets de dire que c'est d'autant plus déplorable que l'on entend dire que le gouvernement fédéral demande des certificats de l'enregistrement de la Santé pour l'établissement de passeports, alors que le seul acte authentique de l'état civil est l'acte du code civil.

II y a aussi le comité des régimes matrimoniaux et celui des droits, des sûretés mobilières et immobilières, l'enregistrement des droits réels. Tous ces comités sont intéressés à l'établissement d'un système central qui pourrait être doté des moyens les plus modernes, où un ordinateur central pourrait faire le travail de tout cet enregistrement

A ce propos, un comité doit être établi incessamment, encore là un comité interministériel qui a pour but de proposer au gouvernement l'établissement d'un registre central pour toutes les données que nécessite la législation civile.

M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs,nous allons suspendre l'étude des articles 1265 à 1266 b) jusqu'à la prochaine séance.

M. PAUL: Mais, M. le Président, est-ce qu'on pourrait convenir immédiatement que le principe est accepté...

M. LE PRESIDENT: D'accord. Absolument.

M. PAUL: ... pour ne pas avoir à discuter à la prochaine séance du principe de cet enregistrement?

M. LE PRESIDENT: Oui, nous pourrions même adopter les articles 1265 et 1266 et suspendre l'étude des articles 1266 a) et 1266 b).

L'article 1266 c), évidemment, changera de... « Sous le régime de la société d'acquêts, les biens que chacun des époux possède lors du mariage ou qu'il acquiert par la suite, constituent des propres ou des acquêts, selons les règles prévues ci-après. »

M. PAUL: M. Comtois, est-ce que vous donnez, dans l'article 1266 c), la même signification juridique aux mots « propres » et « acquêts »?

M. COMTOIS: Les deux mots? M. PAUL: Oui.

M. COMTOIS: Bien non. Cela s'oppose. Les propres...

M. PAUL: Bien, c'est justement... « Constituent des propres ou des acquêts »...

M. COMTOIS: « ... ou des acquêts ». Tel bien, il est propre ou il est acquêt.

M. PAUL: Bon, c'est ça.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: L'un ou l'autre.

M. PAUL: C'est ça.

M. COMTOIS: C'est l'un ou l'autre. Il n'y a pas d'autre catégorie.

M. PAUL: D'accord.

M. LE PRESIDENT: Alors, article 1266 d): « Les acquêts de chaque époux comprennent tous les biens non déclarés propres par une disposition de la présente section et spécialement: 1. Les produits de son travail pendant le mariage; 2. Les fruits et revenus échus ou perçus pendant le mariage, provenant de tous ses biens. »

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Je me demande, M. le Président si le notaire Comtois pourrait nous dire si cela a été ajouté à la première rédaction à la suite, je pense, des représentations qui avaient été faites lors de l'audition publique à Montréal.

M. COMTOIS: La première idée était de réserver comme propre le revenu des biens propres. Par exemple, une femme a un immeuble au moment de son mariage, un immeuble dont elle a hérité de ses parents. Notre idée était que c'était un bien personnel et que les revenus de ce bien-là devaient rester personnels. A la suite de représentations, on a élargi la notion d'acquêts. Pour éviter des comptabilités toujours délicates et pour rendre plus acceptable la société d'acquêts, on a changé notre principe et on a ajouté cet article.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Qu'est-ce qui arriverait, par exemple, à une femme qui aurait un bien propre dont elle aurait hérité, une propriété?

C'est évident que les revenus, les revenus de cette propriété-là vont faire partie des acquêts. Au moment de la vente de cette propriété, évidemment, le capital reste un bien propre?

M. COMTOIS: Oui. Là, il y a tout le problème du remploi. Comme actuellement, quand une personne mariée en communauté a un bien qui lui est propre, qu'elle le vend et qu'elle prend le prix de vente pour acheter un autre bien...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. COMTOIS: ..„ il existe le procédé du remploi qui établit, si on peut dire, l'affiliation des deux immeubles pour établir que le dernier immeuble acquis ou le bien meuble, cela peut être un bien mobilier aussi, est en remploi ou est subrogé ou substitué au précédent. Alors, toute cette technique du remploi va demeurer sous le régime de la société d'acquêts.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Et cela va s'appliquer?

M. COMTOIS: Certainement. H faut, si on peut dire, tenir trace que tel bien remplace tel autre. Cela se fera par des déclarations appropriées dans les actes d'acquisition.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Maintenant, le même cas, supposons que cette femme ne vend pas sa propriété, elle la conserve. Les taxes deviennent assez élevées, enfin les frais d'entretien, etc., cela rapporte très peu. H reste son capital. A ce moment-là, est-ce que le mari peut demander qu'elle rende compte, jusqu'à un certain point, ou la forcer...

M. COMTOIS: C'est sont propre à elle, elle en fera ce qu'elle veut.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. COMTOIS: Les revenus des propres...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Je comprends que le capital... Mais si le revenu est presque inexistant à cause de certains changements...

M. COMTOIS: Economiques, vous voulez dire?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. COMTOIS: Mais là, écoutez, on ne peut pas...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'est hypothétique, mais je me dis...

M. COMTOIS: Oui, mais ma réponse est qu'on ne peut pas exproprier un homme ou une femme de son immeuble. Elle en fera ce qu'elle veut ou il en fera ce qu'il veut. Si, pour des valeurs sentimentales...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Elle conserve...

M. COMTOIS: ... le conjoint désire garder l'immeuble, même s'il n'est pas rentable, eh bien, on ne peut pas le forcer.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, oui.

M. COMTOIS: Tout ce que l'on peut dire: Les revenus, ils appartiennent aux deux.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, c'est ce que je...

M. COMTOIS: Mais le capital reste la propriété exclusive du conjoint.

M. CREPEAU: M. le Président, ces audiences publiques, auxquelles Mme Kirkland-Casgrain fait allusion, nous ont montré l'une des difficultés du projet qu'on nous a signalée, c'était les problèmes que pouvait soulever la liquidation du régime, complexités résultant du fait qu'il fallait distinguer entre ce qui était le capital et ce qui était le revenu, ce qui nécessitait, comme vient de le dire le notaire Comtois, une espèce de comptabilité si on ne voulait pas que la présomption d'acquêts joue. Alors, nous avons pensé devoir élargir la notion d'acquêts et en l'élargissant, on simplifie d'autant la liquidation du régime parce que presque tout devient sujet à partage dans des petites successions qui sont le cas normal.

M. LE PRESIDENT: Alors, est-ce que l'on pourrait adopter l'article 1266 c)?

M. PAUL: Adopté.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, adopté.

M. LE PRESIDENT: L'article 1266 d)?

M. PAUL: Adopté.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: L'article 1266 e): « Sont propres à chacun des époux: 1. Les biens dont il a la propriété ou la possession au jour de la célébration du mariage;

2. Les biens qui lui échoient pendant le mariage, par succession, legs ou donation, ainsi que les fruits et revenus qui en proviennent si le testateur ou le donateur en a ainsi expressément disposé; 3. Les biens qu'il acquiert en remplacement d'un propre; 4. Ses vêtements, son linge personnel, ainsi que ses décorations, ses diplômes et sa correspondance; » — il y a un amendement — 5. « Les produits, droits ou autres avantages qui lui appartiennent ou lui échoient en vertu d'un contrat d'assurance sur la vie sous réserve seulement des dispositions de l'article 1266 ]). »

L'article 1266 ]), nous pourrions peut-être le lire immédiatement?

MME KIRKLAND-CASGRA1N: Oui, je pense bien.

M. LE PRESIDENT: « Les produits, droits ou autres avantages qui appartiennent à un époux en vertu d'un contrat d'assurance sur la vie conclu par lui-même sont acquêts s'ils sont échus ou perçus pendant la durée du régime. « Doit également être considéré acquêt de l'époux décédé le produit d'un contrat d'assurance sur sa vie payable à ses héritiers ou représentants légaux.

Cependant, le produit d'un contrat d'assurance sur la vie auquel a droit un époux en sa qualité de bénéficiaire nommément désigné lui reste propre et aucune récompense n'est due en raison des sommes ou primes qui auraient été payées à même les acquêts.

M. PLAMONDON: Il y a une distinction bien précise de faite entre la désignation expresse d'un bénéficiaire et le paiement aux héritiers légaux. Dans un cas cela demeure l'avoir propre et dans l'autre cela devient des acquêts. Quelle est la raison de...?

M. COMTOIS: Sur cette question d'assurance, nous avons avec nous M. Plamondon, qui représente l'Association des compagnies d'assurance-vie. Evidemment, il est très versé dans la matière et en a vu toutes les conséquences pratiques dans son métier d'assureur. Inutile de vous rappeler que le peuple québécois est le plus assuré du monde, je pense bien. Dans la plupart des successions des sociétés d'acquêts, des communautés, des régimes matrimoniaux, c'est une question extrêmement importante. Maintenant, c'est un contrat très difficile. Nous avons travaillé en collaboration et nous nous sommes entendus sur le texte que nous proposons pour ce qui est des principes. Je pense qu'avec votre permission on pourrait demander à M. Plamondon de nous les résumer aussi clairement que possible, même s'il est difficile d'être clair là-dedans. M. Plamondon.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, sûrement.

M. PLAMONDON (Luc): Pour éviter la confusion pour les transcripteurs, mon prénom est Luc.

Nous avons rencontré à l'Office de revision les gens qui s'occupaient plus particulièrement de ce secteur des régimes matrimoniaux et au nom de l'Association, j'aimerais souligner que nous avons été très bien reçus par l'Office de revision. On a accueilli nos commentaires je dirais presque religieusement, si on me permet le terme, de telle sorte qu'à aucun moment j'ai pu croire qu'il me faudrait recourir au Protecteur du citoyen pour me faire entendre auprès de Me Marceau, Me Comtois et Me Crépeau.

Nous avions soumis — la commission s'en souviendra — un mémoire. Vous remarquerez probablement des différences entre les textes que nous avons suggérés dans le mémoire et ceux sur lesquels nous nous sommes mis d'accord ici. Nous avions préparé le mémoire en supposant que l'Office de revision prenait comme point de départ, pour le régime de la société d'acquêts et en ce qui touche l'assurance, certains principes de base. Dans nos rencontres subséquentes avec l'Office, on nous a indiqué que les principes que nous croyions être ceux de la commission n'étaient pas tout à fait ceux-là, et c'est pourquoi nous avons changé un peu nos recommandations.

Pour répondre plus spécifiquement à votre question, à savoir pourquoi la distinction entre le contrat payable à un des époux en qualité de bénéficiaire et le contrat payable aux ayants-droit, le principe est le suivant: Au point de départ, en assurance, pour simplifier les choses, tout est propre. C'est 1266 e), 5. La seule réserve est 1266 j) qui va créer quelques catégories d'acquêts en ce qui touche l'assurance.

Nous avons considéré que si un époux reçoit un produit d'assurance en qualité de bénéficiaire soit parce qu'il a été nommé bénéficiaire par son conjoint ou par un tiers, ceci est intuitu persone, Je dirais; cela devrait être reçu à titre de propre. Il n'y a pas de raison que ce soit partagé avec l'autre époux et que cela tombe dans les acquêts. Les produits reçus en qualité de bénéficiaire sont reçus à titre de propre. Par ailleurs, pour le produit qui est payable aux

ayants-droit d'une personne, aux ayants-droits de l'un des deux époux, parce que le contrat était sur la vie de cet époux, ce principe de l'intuitu persone ne s'applique plus. Poursuivre le parallèle qui existe actuellement dans la communauté de biens ou si le mari est propriétaire d'un contrat d'assurance sur sa vie à lui, payable à ses ayants-droit, cela tombe dans la communauté. Nous avons suivi le même principe ici pour la société d'acquêts et c'est ce qui explique la différence.

M. LE PRESIDENT: Merci,M.Plamondon. Alors, l'article 1266-e, adopté. Me Crépeau.

M. CREPEAU: Nous avions une petite suggestion sur le plan de la version anglaise dans le mémoire qui vous a été soumis le 17 juillet. La version anglaise de l'article 1266-e) cinquième paragraphe, se lit à la fin: « but subject to the provisions of article 1266-j. » Il nous a semblé qu'étant donné que dans le texte français nous ajoutions « sous réserve seulement des dispositions de l'article 1266-j, » il y aurait peut-être intérêt à bien préciser encore la nature de cette exception par « but subject only to the provisions of article 1266-J ».

M. le Président, je ne sais pas si la chose est permise mais, si un retour en arrière était autorisé, ne pourrait-on pas ajouter des virgules à l'article 1265, premier paragraphe: « II est loisible aux époux pendant le mariage de modifier leur régime matrimonial ainsi que leur contrat de mariage pourvu que, par une modification ainsi faite, ils ne portent pas atteinte »...

M. LE PRESIDENT: D'accord.

M. CREPEAU: Et à l'article 1266-e), cinquième paragraphe: « En vertu d'un contrat d'assurance sur la vie, sous réserve seulement »...

M. LE PRESIDENT: Très bien. L'article 1266-f). « Est également propre le bien acquis avec des deniers propres ou en échange d'un propre sauf récompense au profit des acquêts, s'il y a un excédent le prix ou soulte.

Si toutefois l'excédent de prix ou la soulte est supérieur à la moitié de la valeur du bien acquis, ce bien devient acquêt à charge de récompense. »

M. COMTOIS: Il faudrait peut-être préciser ici, parce que les premières fois qu'on lit cela, cela peut avoir l'air bien compliqué.

M. HOUDE: C'est du français, ça?

M. COMTOIS: C'est du français juridique.

M. PAUL: Ce ne sont pas des termes sportifs.

M. LACROIX: Cela se place mal dans la conversation!

MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... ni sportifs ni spontanés.

M. HOUDE : Je suis content de l'apprendre.

M. CREPEAU: Cela place la conversation sur un ton bien précis...

M. COMTOIS: Si on prenait un petit exemple, peut-être qu'après on comprendrait mieux. Je suppose que je suis marié en société d'acquêts, que j'ai un immeuble qui vaut $5,000. Je le vends, je prends les $5,000 et j'achète un autre immeuble. L'autre immeuble sera un acquêt. C'est-à-dire que je prends plutôt l'exemple que cet immeuble de $5,000 est un propre. Je peux, l'ayant vendu, acheter un autre propre. Maintenant, si j'ai un immeuble propre de $5,000 et que je l'échange contre un immeuble de $15,000, il y a une soulte... Cela est bien français, cela vient du latin « solvere », façon de payer. Alors, il y a une soulte de $10,000. On dit, dans le deuxième paragraphe, qu'à ce moment-là on ne peut pas convertir en propre un bien de $15,000 en échange d'un bien qui ne valait que $5,000. A ce moment-là, l'immeuble de $15,000 sera un acquêt, mais la société d'acquêts me devra une « récompense », un autre terme très utilisé en communauté de biens et en acquêts. La communauté ou la société d'acquêts devra me rembourser les $5,000 qui étaient propres. C'est une question de comptabilité.

Alors, si l'excédent du prix ou la soulte, $10,000 dans mon exemple, est supérieure à la moitié de la valeur du bien acquis — c'est ce qui se présentait — ce bien devient acquêt, mais à charge de récompense. Est-ce que...

M. PLAMONDON: Et s'il n'est pas supérieur à la moitié, qu'est-ce que cela fait?

M. COMTOIS: Cela reste un propre, mais...

M. PLAMONDON: A charge de récompense aussi?

M. COMTOIS: A charge de récompense. Par exemple, j'échange un immeuble de $5,000 contre un immeuble de$7,000. Je serai propriétaire en propre de $7,000, mais je devrai payer à la société $2,000. C'est de la comptabilité.

M. PLAMONDON: Alors, c'est toujours à charge de récompense, mais, dans un cas, cela demeure propre et, dans l'autre, cela devient acquêts.

M. COMTOIS: C'est cela.

M. LE PRESIDENT: Adopté? Article 1266-g): « Lorsque l'époux acquiert pendant le mariage une part d'un bien dont il était copropriétaire en propre, la part ainsi acquise reste propre, sauf récompense s'il y a lieu. « Cependant, si c'est à même les acquêts que cette part nouvelle est ainsi acquise et que sa valeur soit supérieure à celle dont 11 était déjà propriétaire, les deux deviennent acquêts, à charge de récompense. »

M. PAUL: M. Crépeau ou M. Comtois,lorsqu'il y a disposition d'un propre au profit de la société d'acquêts, il y a toujours récompense pour celui qui a fourni ou qui a disposé du propre.

M. COMTOIS: Qui s'appauvrit. M. PAUL: C'est cela.

M. LE PRESIDENT: C'est le même principe que pour l'autre, mais, ici, ce sont des copropriétaires.

M. PAUL: C'est ça. M. COMTOIS: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: Adopté? Article 1266-h): « Le droit d'un époux à une pension alimentaire, à une pension d'invalidité, de retraite ou à quelque autre bénéfice de même nature lui reste propre, et aucune récompense n'est due en raison des sommes ou primes payés à même les acquêts. « Mais sont acquêts tous les produits et revenus qui en proviennent et qui sont échus ou perçus au cours du régime. »

M. PLAMONDON: Si Je reçois une pension de retraite, c'est un avoir-propre, mais, si je place cet argent et qu'il me rapporte de l'intérêt, cela devient un acquêt. Est-ce que je comprends bien?

M. COMTOIS: J'ai dit...

M. PLAMONDON: Ce n'est pas tout à fait cela?

M. COMTOIS: Oui et non. Si vous me le per- mettez, c'est une disposition extrêmement importante. Avec la multiplication des caisses de retraite, avec la Régie des rentes du Québec, ainsi de suite, il a fallu faire une option là-dessus.

Prenons un exemple très concret, très précis...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Un exemple qui est près de nous: éventuellement, les députés vont recevoir une pension.

M. COMTOIS: Bon, alors, supposons, madame, que vous soyez mariée en société d'acquêts, ce que vous ferez sans doute quand la mutabilité des régimes sera permise, et que vous receviez une pension de l'Etat du Québec, les produits et revenus, c'est-à-dire les prestations de la pension, tombent en société d'acquêts.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ce que je reçois chaque mois, cela...

M. COMTOIS: Oui, oui, les prestations.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: ...devient acquêts.

M. COMTOIS: Ce sont des acquêts. Parce qu'une pension est constituée des contributions de l'employeur et de celles de l'employé. Cela est investi et la pension qui est versée périodique ment comporte à la fois une diminution du capital et le revenu représenté.

Apres deux mois de pension, à l'âge de 65 ans et deux mois, vous avez droit à un paiement capital forfaitaire de la pension, au moins au remboursement de vos primes, de vos contributions, avec intérêt dans la plupart des cas. Cela est un capital. Le capital est propre. Cela fait partie pour le tout de votre succession. Cela n'est pas divisible entre vous et votre mari. Votre mari n'en a pas la moitié. On considère que c'est personnel, le capital.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, je comprends. Mais, dans le cas des députés, il n'y a pas de remboursement de capital.

M. COMTOIS: Non, mais prenez le cas des...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais seulement, il y a une chose...

M. COMTOIS: ... fonctionnaires de la province. Là, il y en a un remboursement de capital parce qu'après tout quelqu'un a contribué pendant 35 ans, il a constitué, de sa propre contribution, un capital de $25,000. Il décède

au bout de trois ou quatre mois — il n'est pas habitué de ne pas travailler, et cela ne lui fait pas — et ce ne serait pas Juste qu'il n'ai pas droit au moins au remboursement de ses contributions. C'est ce que J'appelle le capital de la pension. Ce capital de la pension, il est propre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: J'avais une autre question. Pour suivre l'exemple que vous avez pris, le député qui a contribué au plan de pension reçoit une pension et décède. Son conjoint a la moitié...

M. COMTOIS: La demi-pension.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: La demi-pension. Alors, cette demi-pension, comment est-ce que..., si la veuve se remarie?

M. COMTOIS: Si la veuve se remarie, cela dépend du règlement; je ne le connais pas pour ce qui concerne les députés. Mais les prestations, dans votre hypothèse, sont perçues après que le régime est dissous. Cela ne peut pas être propre ni acquêts. H n'y a plus de régime.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, vous avez raison. Mais Je pense au remariage.

M. COMTOIS: Oui.

M. PAUL: Il y aurait un nouveau régime.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Par exemple, la veuve d'un député.

M. COMTOIS: Elle va se remarier...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Si elle se remarie.

M. COMTOIS: Oui, mais ce sont des biens qu'elle a avant de se marier.

M. LE PRESIDENT: Ce sera propre. M. COMTOIS: Cela sera propre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela sera propre?

M. COMTOIS: Oui.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela sera considéré comme propre.

M. CREPEAU: Sauf que si elle se remarie et que les fruits sont perçus...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... pendant le mariage. Cela devient des acquêts. Exactement.

M. CREPE AU: Ce qui est perçu pendant le mariage...

M. COMTOIS: Vous avez raison.

M. CREPE AU: C'est une application, ce que vient de dire Me Comtois, du principe fondamental qui est inscrit à l'article 1266 d), lorsque le capital d'un bien est propre, les revenus qu'on en retire et qui sont échus ou perçus durant la durée du mariage, eux, sont acquêts. Tout ce qui vient comme fruits au revenu est un acquêt. Mais le droit reste un propre. Et s'il y avait séparation, s'il y avait divorce, par exemple, eh bien le droit lui-même reste un propre. S'il y a a remariage, alors le droit reste propre, mais les revenus retombent...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'est probablement dans le même esprit que l'assurance groupe; le bénéfice de l'assurance groupe constitue un acquêt. Est-ce que Je me trompe lorsque j'avance cela?

M. COMTOIS: Le capital, vous voulez dire? MME KIRKLAND-CASGRAIN: Est-ce que...

M. COMTOIS: Cela dépendra de qui est bénéficiaire.

M. PLAMONDON (Luc): Oui, c'est cela. L'assurance collective qui serait payable aux ayants-droits de l'employé tombe dans les acquêts. C'est le deuxième alinéa de l'article 1266 ]). Mais l'assurance collective qui serait payable nommément 3 l'épouse sera reçue par l'épouse à titre de propre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ah bon!

M. THEORET: M. le Président, je m'excuse, Je suis quand même perplexe au sujet de l'explication que vient de donner Me Crépeau quant au remariage dont parlait notre collègue, Mme Casgrain. Parce qu'on dit ici: Sont acquêts tous les produits et revenus qui en proviennent et qui sont échus et perçus au cours du régime. Mais on a changé de régime. Alors, Je trouve quand même un peu extraordinaire qu'on considère comme acquêts les produits qui proviennent d'un régime précédent auquel le nouveau conjoint n'a pas contribué.

M. COMTOIS: Malgré cela, Je crois que...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais s'il se remarie en société d'acquêts, comme le souligne Me Beaudoin, cela entre dans les acquêts mais c'est possible qu'il choisisse un autre régime.

M. CREPE AU: Non, pas les fruits antérieurs. M. PAUL: Non, non.

M. CREPEAU: Au moment du remariage... M. PAUL: C'est cela.

M. CREPEAU: ... le capital sera propre, mais ceux qui à partir du second mariage seront perçus ou échus comme revenus, comme prestations, si les époux sont mariés en société d'acquêts tombent dans les acquêts.

M. COMTOIS: Je pense que mon collègue, Me Crépeau, a bien fait de me rectifier là-dessus. Je crois qu'il a raison. On distingue entre le droit à une pension ou le capital d'une pension et les prestations ou le revenu.

J'admets que, dans les prestations, il y a déjà une partie de capital. On bâtit une pension et, évidemment, le capital diminue de mois en mois. Malgré cela, on a voulu... et j'espère que la clause utilisée ici est assez claire: « Les produits et revenus qui proviennent d'une pension de retraite et qui sont perçus ou échus du régime, sont assimilés au revenu, aux dividendes, aux intérêts d'un capital et cela tombe dans la société d'acquêts. » Si tel est le régime.

M. THEORET: Vous avez probablement raison. D'ailleurs, Je crois que c'est très humanitaire. Cela permettrait de faciliter le mariage ou le remariage des veuves des députés.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Des veuves ou des veufs...

M. COMTOIS: II y aura, comme on dit à la campagne, des augmentations.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Pour l'instant.

M. LE PRESIDENT: M. Comtois, si Je comprends bien, prenons le cas d'une séparation de corps, supposons qu'une personne a droit & une pension d'invalidité, par exemple, si elle se sépare de son conjoint, à ce moment-là, l'autre ne pourrait pas, dans le partage...

M. COMTOIS: ... pourrait pas demander la moitié de la valeur de la pension, la capitaliser.

M. PLAMONDON: Alors, la prestation est considérée comme produits et revenus, quelque soit le fait qu'il y ait une part du capital...

M. COMTOIS: C'est cela. Oui.

M. LE PRESIDENT: Alors, adopté? 12661; « Sont également propres à l'époux les indemnités perçues après la célébration du mariage, i titre de dommages-intérêts, pour injures, torts personnels ou blessures corporelles, ainsi que le droit à ces indemnités et les actions qui en découlent ».

M. PAUL: Les revenus de ces indemnités de capital sont des acquêts.

M. COMTOIS: C'est cela.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela, c'est la partie qui est nouvelle, mais cela a toujours été propre...

M. PAUL: On dit nouveau... mais si c'est la communauté, c'est propre...

M. COMTOIS: 1279, je crois.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais, cela a toujours été propre, le résultat...

M. COMTOIS: Cela, c'est complètement du droit nouveau. On a appliqué à la société d'acquêts ce qui prévalait en communauté de biens. C'est vraiment personnel. Les revenus, comme vous le dites, tombent dans les acquêts.

M. LE PRESIDENT: Adopté?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: 1266j: « Les produits, droits ou autres avantages qui appartiennent à un époux, en vertu d'un contrat d'assurance sur la vie », nous l'avons lu tout à l'heure, cet article.

M. PAUL: Aucune difficulté.

M. LE PRESIDENT; Alors, adopté? 1266k: « Le bien acquis à titre d'accessoire ou d'annexe d'un bien propre ainsi que la construction faite sur un immeuble propre, restent propres, sauf récompense, s'il y a lieu. Cependant, c'est à même les acquêts. Si c'est à même les acquêts qu'a été l'acquis, l'accessoire ou l'annexe ou qu'a été faite la construction, et que sa valeur soit supérieure à celle du bien propre, le tout devient acquêt à charge de récom-

pense. » C'est une question de comptabilité tout simplement.

M. THEORET: Question de comptabilité, mais ne trouvez-vous pas que le texte est très lourd?

M. LE PRESIDENT: Très quoi? M. THEORET: Le texte est lourd.

M. HOUDE: Vous en avez trouvé qui étalent légers?

M.LACROIX: ...quand c'est fait par des avocats ou des notaires.

M. COMTOIS: C'est difficile à rédiger. On voudrait bien être plus clair, mais ce n'est pas facile.

M. THEORET: C'est clair. Je me permettrais tout de même...

M. CREPE AU: Je pense que cela n'ajouterait pas beaucoup à la clarté du texte. Je pense qu'il y aurait lieu de mettre une virgule après cependant. Cela règle...

M. LACROIX: Cela fait une pause. M. LE PRESIDENT: Cela repose. M. HOUDE: C'est volatisé.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Est-ce que nous pourrions avoir un exemple, sur le premier paragraphe de 1266, c'est-à-dire qu'il y en a juste un, mais la première phrase.

M. COMTOIS: Oui. Ecoutez: Vous avez un immeuble, disons qui est propre — vous avez 13 une maison et vous décidez de l'agrandir...

M. PAUL: Un garage, une annexe...

M. COMTOIS: C'est cela. L'addition que vous avez faite restera propre ou acquit, selon que le bien principal était propre ou acquêt. Si l'addition est telle que cela dépasse la valeur du principal, cela changera de nature.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le même principe que tout à l'heure...

M. COMTOIS: ... pour devenir propres ou acquêts ici, achat de récompense. Actuellement, dans le code civil en ce qui touche la communau- té, on n'avait pas cette nuance qui est dans les cinq dernières lignes. Au point que, malgré que cela pouvait être discuté, et ça l'a été en jurisprudence française, si on bâtissait un immeuble de $100,000 sur un terrain de $1,000 qui était propre, toute l'affaire devenait propre. Aucun sens. On disait: L'accessoire suit le principal.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, c'est vrai.

M. COMTOIS: Alors, là, aujourd'hui, on fait une nuance, si l'accessoire devient plus important que le principal, c'est le principal qui va suivre l'accessoire au point de vue de la répartition des récompenses entre les deux patrimoines.

M. LE PRESIDENT: Très bien. Adopté? MME KIRKLAND-CASGRAIN: Merci. Adopté.

M. LE PRESIDENT: Article 1266 1). « Le produit de toute capitalisation de réserves ou de surplus, de toute distribution ayant les caractères d'un capital ainsi que toute prime de rachat ou de remboursement anticipé et tout droit de souscription, afférents à des valeurs mobilières propres à l'un des époux, lui restent propres ».

M. COMTOIS: J'aimerais signaler que c'est le droit nouveau, ça aussi. A l'époque où on a rédigé le code civil, en 1866, les valeurs mobilières n'étaient pas tellement courantes. Mais aujourd'hui, supposons qu'à un moment donné, une compagnie décide de distribuer une partie de son surplus en émettant, disons, des droits de rachats pour le bénéfice de chaque détenteur d'une action. Alors, disons que j'ai une action dans la compagnie Bell Telephone ou une autre compagnie et on dit: Chaque détenteur d'une action aura des droits, des « rights », d'acheter tant de lots d'actions à tel prix. Ce n'est pas du revenu. Ce n'est pas de l'intérêt. Ce n'est pas des dividendes. C'est une participation de l'actionnaire au surplus, au capital de la compagnie.

M. PAUL: C'est un accroissement de capital.

M. COMTOIS: C'est ça, c'est de la nature du capital. Alors cela ne devrait pas être traité comme du revenu. Cela devrait être propre si la valeur mobilière qui donne lieu à ce paiement était propre. Parce que cela, c'est de la nature du ca-pital. C'est l'idée qui a été émise.

M. PAUL: Si le capital, au lieu d'être divisé par des droits est divisé en liquidité par un chèque...

M. LE PRESIDENT: Cest encore un propre.

M. PAUL: Est-ce que cela serait considéré quand même comme un propre?

M. COMTOIS: Bien, oui, là, c'est le capital lui-même qui est payé.

M. PAUL: Oui. Mais, par exemple...

M. COMTOIS: Maintenant le cas d'actions. Par exemple, une action privilégiée est rachetée. Cest évident que l'actionnaire, si c'est un propre d'action, le profit va rester propre.

M. PAUL: C'est un profit.

M. COMTOIS: Oui.

M. PAUL: C'est un profit.

M. COMTOIS: II peut y avoir un profit mais de la nature du capital. Je ne dis pas que tous les cas vont être d'une clarté totale.

M. PAUL: Cest très subtil, cette partie-là.

M. LE PRESIDENT: Me Comtois, à supposer, par exemple, que je sois propriétaire d'une action de $1,000 au début et qu'à la suite de dividendes accumulés mais non versés, cette action-là vaudrait $1,500 et puis qu'à un moment donné, on nous paie $1,500 une action privilégiée. On n'a pas payé le dividende et puis on paie. A ce moment-là, est-ce que cela serait...

M. COMTOIS: Je crois que c'est propre. Le produit de toute capitalisation de réserves ou de surplus, de distribution ayant les caractères d'un capital quand on ne distribue pas les revenus, je crois que les réserves demeurent du capital, n'est-ce pas? Une appréciation de capital. Il me semble que cela devrait être de même nature.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Vous n'avez pas peur que cela donne lieu à certains abus dans le cas d'époux, mariés, comme cela, sous le régime d'acquêts? Que l'un d'eux, par exemple, s'ils ne travaillent pas tous les deux, utilise ses gains pour justement en faire des acquisitions...

UNE VOIX: Après le mariage?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... oui, après le mariage, sachant, lui, que cela ne tombe pas dans les acquêts.

M. COMTOIS: Vous voulez dire qu'un époux, par exemple, voulant garder pour lui-même...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: C'est ça.

M. COMTOIS: ... une valeur mobilière, va plutôt opter pour des valeurs mobilières qui ne paient pas beaucoup de dividendes mais qui s'apprécient en capital et qui, éventuellement, lui seront remises et qu'il conservera le tout, comme propre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. COMTOIS: C'est possible mais, sans avoir une grande expérience dans les valeurs mobilières, je ne sais pas si on peut faire des catégories comme ça. Dire; telle ou telle valeur, c'est du capital, cela supposerait...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il y a quand même des Blue Chips Security Stocks, qui sont des valeurs certaines et qui...

M. COMTOIS: Oui.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... généralement paient assez bien. Cela me paraît...

M. COMTOIS: Ah, quelqu'un de bien rusé peut certainement profiter de cette loi-là...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Il me semble qu'on ne suit pas le principe établi auparavant, d'ailleurs, avec ce nouvel article-là.

M. PAUL: S'il y a un profit de capital à la Bourse, qu'est-ce qu'il arrive?

M. COMTOIS: Cela reste propre, un profit de capital.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Si c'est acheté avec les gains personnels, avec les acquêts?

M. COMTOIS: Oui, c'est évident. C'est-à-dire que la valeur mobilière... On fait un profit quand on échange une valeur contre une autre. On en vend une mais on en rachète une autre.

M. PAUL: Supposons que j'achète 1,000 parts de New-Hosco...

M. CREPEAU: Avec quoi?

M. PAUL: Avec mon argent propre. Je change cela pour du Orchan International Nickel, n'importe quoi.

M. COMTOIS: Vous faites un profit. M. PAUL: Je fais un profit. M. COMTOIS: C'est du propre. M. CREPEAU: C'est du propre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Si vous achetez cela avec votre salaire, par exemple, c'est différent.

DES VOIX: C'est propre.

M. PAUL: Le premier placement...

M. COMTOIS: Oui.

M. PAUL: ... si je l'ai fait avec de l'acquêt?

M. COMTOIS: Cela reste des acquêts tout le temps.

M. PAUL: Tout le temps.

M. CREPEAU: C'est la théorie du remploi.

M. PAUL: C'est le remploi.

M. COMTOIS: Ce serait la même chose avec un immeuble, si le commerce d'immeuble était aussi spéculatif et rentable. Quelqu'un, par exemple, a un immeuble propre de $5,000. Il l'avait acheté $5,000 et il le revend $10,000. Les $10,000 lui sont propres. Le profit, c'est lui qui en profite.

M. LACROIX: Cela dépend toujours de la provenance du capital.

M. COMTOIS: C'est ça.

M. CREPEAU: Sous réserve d'une autre règle. Cest une chose que de dire: J'ai acheté cela il y a 20 ans avec $1,000 qui étaient mon propre; mais sous réserve de l'article 1266 n). « Tout bien est réputé acquêt, sauf preuve du contraire... » Alors, si l'un des conjoints vient dire: Moi, il y a 20 ans, j'ai acheté cela avec mon propre, dans la liquidation, 11 faudra qu'il ait une preuve...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela sera prouvé.

M. CREPEAU: Parce que s'il n'y a pas de preuve, pour faciliter la liquidation on dit: présomption d'acquêts.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ah bon!

M. CREPEAU: Fournissez une preuve de propre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela me rassure.

M. CREPEAU: Cela évite, vous comprenez, des contestations possibles.

M. PLAMONDON: S'il y a un privilège de rachat attaché à une valeur acquise avec un bien propre, ce privilège, pas nécessairement de conversion, mais d'achat d'actions additionnelles qui nécessite un déboursé, qu'est-ce qui arrive à ce moment-là? Est-ce qu'il y a une distinction entre les valeurs achetées par la suite mais qui sont quand mêmes acquises à cause d'un privilège attaché à un bien propre? Je m'excuse, je complique peut-être l'affaire pas mal...

M. COMTOIS: Non, non, c'est très vraisemblable, très actuel, l'exemple que vous prenez.

M. PLAMONDON: Qu'est-ce qu'il arrive à ce moment-là?

M. COMTOIS: Un droit de rachat qui est accordé à un actionnaire, généralement, s'exerce avec le paiement...

M. PLAMONDON: Bien oui.

M. COMTOIS: ... d'une somme. Mais là, tout dépendra. Si le prix en question, pour exercer le droit d'achat, est pris à même les propres, toute l'affaire sera propre. Mais si, pour exercer mon droit de rachat qui m'est propre, je suis obligé d'emprunter à la société d'acquêts, je lui devrai récompense. Dans le fond, la société d'acquêts, un peu comme la communauté, c'est une espèce de coopérative de consommation ou de prêt, un peu comme une caisse populaire mais où les prêts se font sans intérêt d'un époux à la société d'acquêts ou de la société d'acquêts à un époux.

Alors, j'ai le droit d'acheter à $10 des actions du Trust Général du Canada qui me sont propres, c'est-à-dire que les actions qui me donnent ce droit-là sont des propres, mais je n'ai pas les $10 ou les $1,000. Je l'emprunte de la communauté. Bien, le tout sera propre mais je devrai rembourser à la communauté ce que j'ai emprunté d'elle. C'est évident...

M. PLAMONDON: Ah bon.

M. COMTOIS: ... que dans tous ces cas-là, quand un achat est fait avec des propres, avec des acquêts, que tout est mêlé, là, comme vous le disait M. Crépeau, il y a une présomption d'acquêts. Comment voulez-vous, 25 ou 30 ans après, dire: Cela c'est à moi, cela venait de l'argent qui venait de ma mère et ainsi de suite. La présomption va être telle que cela va être des acquêts pour le tout.

M. PAUL: Supposons que le Bell Telephone ou la Noranda — ce sont des exemples que je prends au hasard — au mois de novembre, au lieu de payer un dividende décident de payer en actions. Au mois de mai, je reçois un dividende en argent; cela s'en va dans la société d'acquêts. Au mois de novembre, on paie en actions. A qui vont les actions?

M. COMTOIS: D'après moi, cela va être une question de fait, si vous pouvez... Ici, on dit « de la nature d'un capital ». Si, par hypothèse, vous avez une compagnie qui avait toujours payé, disons, 5%, et qui, à un moment donné, au lieu de payer un dividende comme elle le fait depuis cinq ans paie en actions un montant identique, d'après moi, c'est tout comme du revenu, et on ne pourra pas dire que c'est une prime de la nature d'un capital. On ne peut pas dire que c'est une distribution ayant les caractères d'un capital. Au contraire, cela a bien plus les caractères d'un revenu. Cela devient une question de fait, à mon point de vue.

M. PAUL: Si, au lieu de payer en argent, on donne des droits. Le dividende en argent va aller à la société d'acquêts et au lieu de payer en argent, on paie en droits.

M. COMTOIS: Même les droits, si on peut prouver que c'est de la nature d'un revenu, devraient être des acquêts. Pour cet article en particulier — si M. Crépeau s'en rappelle bien — nous n'avons pas voulu nous limiter à nos faibles connaissances en valeurs mobilières et c'est une de nos distingués confrères qui est maintenant juge qui a proposé l'article. Je peux la nommer, c'est Mme Colas. Nous avons étudié cet article, nous l'avons repassé dans tous les sens et nous n'ignorons pas qu'il reste des points marginaux...

M. PAUL: II y a un motif... M. Crépeau, je voudrais que vous saisissiez dans quel esprit nous posons ces questions. Nous allons partir d'ici pour aller à l'Assemblée nationale. Les membres de l'Assemblée nationale qui n'auront pas été présents à nos discussions peuvent à un moment donné nous poser ces questions. C'est pour cela que nous essayons de mieux nous éclairer pour être en mesure de répondre à chaque cas d'espèce qui pourra être soulevé.

UNE VOIX: Vous avez parfaitement raison, M. le ministre.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Je vois ça d'ici.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que quelqu'un a d'autres questions?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela facilite de beaucoup la comptabilité. De toute façon, il ne faut pas s'imaginer qu'il n'y a pas de comptabilité dans d'autres cas. Dans le cas de la communauté...

M. PAUL: Par les exemples que nous avons donnés ou les questions que nous avons posées, disons que nous avons joué un peu le rôle d'avocat du diable en envisageant toutes les possibilités... M. le Président, l'usage demande que ce soit..

M. LE PRESIDENT: Ne commencez pas à faire les diables.

Alors, adopté? Adopté. 1266 m): « Les droits de propriété intellectuelle et industrielle sont propres; mais sont acquêts tous les produits et revenus qui en proviennent et qui sont perçus au cours du régime. » Les droits d'auteur...

M. PAUL: Cela couvre les droits des artistes, des auteurs, des inventeurs de brevets, tous ces cas-là.

M. LE PRESIDENT: Les politiciens! UNE VOIX: Oui!

M. CREPEAU: Il y a quelque chose qui nous a échappé. Dans la rédaction finale et notamment à l'occasion des discussions avec les représentants des assureurs, nous avons toujours inséré, dans nos textes non seulement le fait que ce qui était perçu au cours du régime, mais également ce qui était échu et qui pourrait être perçu plus tard.

Les représentants des compagnies d'assurance nous ont fait valoir que, dans certains cas, 11 se pouvait fort bien qu'une valeur étant échue le bénéficiaire demande que la percep-

tion soit retardée après une séparation ou après un divorce pour éviter que cela ne tombe... Si bien que nous vous suggérerions de faire une modification de concordance et d'ajouter, à l'article 1266 m): « Tous les produits et revenus qui en proviennent et qui sont perçus ou échus au cours du mariage », comme c'est le cas pour les autres modifications que nous vous avons suggérées.

M. LE PRESIDENT: Adopté?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: L'article 1266 n): « Tout bien est réputé acquêt, sauf preuve contraire établie, tant entre les époux qu'à l'égard des tiers, suivant les règles du droit commun ». Adopté?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: L'article 1266 o): « Les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier d'une propriété exclusive sont réputés acquêts indivis, à chacun pour moitié ». Adopté?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: L'article 1266 p): « Chaque époux a l'administration, la jouissance et la libre disposition de tous ses biens propres et de tous ses acquêts. Il ne peut, cependant, sans le concours de son conjoint, disposer de ses acquêts entre vifs à titre gratuit, si ce n'est de sommes modiques et de présents d'usage. Le présent article ne limite pas le droit d'un époux de désigner un tiers comme bénéficiaire d'un contrat d'assurance sur la vie et aucune récompense n'est due en raison des sommes ou primes payées en exécution de tel contrat à même les acquêts. »

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ilyauneques-tion ici. « Sans le concours de son conjoint », est-ce qu'on veut dire par cela que le conjoint devrait autoriser l'autre par un document écrit ou quoi?

M. COMTOIS: On ne parle plus d'autorisation, cela n'existe plus.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non, mais je ne comprends pas. « Sans le concours de son conjoint, » qu'est-ce qu'on entend par cela?

M. COMTOIS: On veut dire qu'un époux ne peut pas donner ses acquêts sans que l'autre soit d'accord.

Comme, actuellement, dans le bill 16, on dit que le mari, époux commun en biens, ne peut pas aliéner ses immeubles sans le concours de sa femme.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais, à ce moment-là, c'est un concours. Il faut qu'elle se rende chez un notaire pour autoriser...

M. COMTOIS: C'est un concours qui doit être prouvé.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, c'est cela! Alors, ici, je me demande...

M. COMTOIS: II n'y a pas un notaire qui va accepter la déclaration du mari disant: « Ma femme concourt ». Elle concourra sur place.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Alors, il faudra que ce soit la même formule. Elle l'autorisera...

M. COMTOIS: C'est une question de preuve.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, mais est-ce qu'on ne devrait pas, à ce moment-là, pour que cela soit clair, le dire de la même façon ou, je ne sais pas, faire allusion à la formule...

M. COMTOIS: C'est comme dans le bill 16 et comme à l'article 1292, oïl l'on dit que le mari ne peut pas...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, sans le concours de sa femme.

M. COMTOIS: C'est cela.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, c'est vrai, vous avez raison. La façon dont cela est interprété...

M. THEORET: On ne rédigera Jamais un acte sans faire concourir l'autre conjoint.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: L'autre époux.

M. THEORET: C'est sûr.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Parfait.

M. PLAMONDON: Mais qu'arriverait-il d'un mari, par exemple, qui aurait pris une police d'assurance sur la vie d'un de ses enfants et qui, évidemment, aurait payé cela à même les acquêts? Est-ce qu'il pourrait changer de bénéficiaire?

M. COMTOIS: Est-ce une donation? Je vais laisser M. Plamondon (Luc) répondre à cela, parce que c'est une question bien embêtante.

M. PLAMONDON (Luc): Le point principal, ici, c'est l'absence ou l'élimination, disons donc, de la récompense en matière de nomination de bénéficiaire. Dans notre mémoire, nous avions suggéré une forme quelconque de récompense dans ces cas-là. L'Office de révision a préféré, pour la simplicité de tout le système, éliminer toute récompense en matière d'assurance. Pour répondre spécifiquement à votre question, techniquement, un époux qui est propriétaire d'un contrat d'assurance-vie, que ce soit sur sa vie ou sur la vie d'un enfant ou de son épouse, aurait le droit de désigner un tiers bénéficiaire.

J'entends par un tiers quelqu'un qui serait même en dehors du cadre familial. Techniquement, il a ce droit. Dans l'ordre des faits, cela ne se produit à peu près pas.

Dans la majorité des cas qui se produiront, cela sera le mari qui est propriétaire d'un contrat sur sa vie ou sur la vie de son épouse qui désignera les enfants. On peut difficilement croire que, dans un tel cas, l'autre époux puis se se plaindre particulièrement.

M. PLAMONDON: Je poursuis mon raisonnement qui, évidemment, est purement hypothétique. Le monsieur a une concubine, à un moment donné. Il est en chicane avec sa femme. Il dit: Cest toi que j'avais nommée bénéficiaire, ou encore, c'est moi, cela tombera dans les acquêts. A ce moment, je désigne Madame Une-telle comme bénéficiaire de la police d'assurance sur la vie de mon enfant. Cela a été payé avec les acquêts. Or, on cause un préjudice à l'endroit de la femme...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: De la légitime.

M. PLAMONDON: Oui.

M. LE PRESIDENT: Est-ce que dans la Loi de l'assurance des maris et des parents, il n'y a pas une clause...?

M. PLAMONDON (Luc): Oui, il y a un problème sous-jacent là; c'est la position des bénéficiaires en vertu de l'article 1029, la stipulation pour autrui, et de la Loi de l'assurance des maris et des parents. Nous tenons pour acquis, je présume, pour les fins de notre discussion, qu'on obtiendra bientôt pleine liberté de changer les bénéficiaires sans le consentement du bénéficiaire. Cela présuppose des changements ma- jeurs à la Loi de l'assurance des maris et des parents et à l'artice 1029.

Pour répondre à votre question: Oui, techniquement, il aurait le droit d'aller nommer sa concubine dans un tel cas. Nous en avons discuté, et l'office a préféré cette solution.

M. PAUL: Est-ce que nous pourrions avoir une justification à la solution?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, oui. Cela s'imposerait, franchement. On ne peut pas laisser passer une chose comme cela.

M. PLAMONDON: Une petite discussion interne et...

M. PAUL: Cest grave cela, c'est une voie bien dangereuse.

M. PLAMONDON: J'aimerais que Me Gilles Fortier, qui fait partie du comité, prenne la parole.

M. FORTIER: Je n'admets pas...

M. PAUL: Pourriez-vous vous identifier?

M. FORTIER: Gilles Fortier. Personnellement, je n'admets pas qu'il n'y ait pas récompense dans un cas comme celui-là; autrement, les assureurs se serviront de moyens pour frauder l'un des époux. Par exemple, le deuxième paragraphe de 1266 p) permettrait à l'un des conjoints de souscrire à un contrat d'assurance-vie à prime unique — cela peut être $25,000, cela peut être $100,000 - et de désigner qui il veut comme bénéficiaire.

M. PAUL: A l'insu du conjoint?

M. FORTIER: Absolument.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. FORTIER: M. Plamondon l'a souligné tout à l'heure, nous n'avons pas suggéré cette solution. Il y a quelque chose. Cela pose un problème très sérieux dans ce domaine. En communauté de biens, je pense que, dans un cas comme celui-là, il y aurait lieu à récompense. Il me semble que le même principe devrait être appliqué.

M. PLAMONDON: Je me permettrais un autre commentaire. Nous avons suggéré à un moment donné, au cours de nos discussions avec l'office de révision, une solution inter-

médiaire, c'est-à-dire que, pour éliminer le plus possible les problèmes de comptabilité et de récompense, il n'y aurait pas lieu à récompense dans le cas de nomination d'un bénéficiaire, lorsque le bénéficiaire désigné est soit l'autre époux, soit un enfant Du moment que cela reste à l'intérieur du cadre familial immédiat, on éliminerait la récompense. Mais lorsque le produit de l'assurance commencerait à sortir du cercle familial immédiat, là il y aurait peut-être lieu à récompense. Je dois dire que la majorité de ces discussions mettait en cause Me Marceau. Je pense bien que c'est lui qui défendait le plus la théorie de l'élimination totale de récompense dans ces cas. Malheureusement, il n'est pas ici ce matin.

MME KIRKLAND-CASGRA1N: Ah, non, cela me parafi inacceptable.

M. PLAMONDON: Nous aurions aimé avoir plus d'information...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non, mais nous ne pouvons pas consacrer un principe comme celui-là.

M. LE PRESIDENT: Je me permettrai de souligner aux membres de la commission que la Loi de l'assurance des maris et des parents apporte des restrictions bien précises.

Le mari peut assurer sa vie ou attribuer, s'il en est le détenteur, toute police d'assurance sur sa vie au profit et bénéfice de qui? De sa femme, de sa femme ou de leurs enfants collectivement, de sa femme, de ses enfants, des enfants de sa femme, des siens et de leurs enfants collectivement ou de sa femme et des enfants de sa femme ou des siens collectivement, ou de sa femme ou d'un ou plusieurs des enfants de sa femme ou des siens ou de leurs enfants. C'est restrictif. Alors...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui mais cela ne change rien à l'injustice du principe qu'on consacrerait par cet article. S'il décide de payer une rente viagère à une tierce personne, la concubine.

M. PLAMONDON: Je prends le cas de...

M. LE PRESIDENT: Et l'article 12, si vous me permettez: « Cette autre personne ou ces personnes doivent néanmoins être du nombre de celles au profit desquelles une assurance peut être effectuée ou appliquée en vertu des présentes dispositions. » Là, on parle de révocations. Supposons que le type a mis la police d'assuran- ce au nom de sa femme. S'il veut la changer, il faut qu'il mette l'assurance au nom d'un bénéficiaire autorisé en vertu de la loi.

M. CREPEAU: M. le Président, une précision que j'aimerais apporter. Une question a été posée tout à l'heure au sujet de savoir si lorsqu'un contrat, disons d'assurance, comportait une désignation, disons, de l'épouse comme bénéficiaire et qu'ensuite, selon la question posée, on voulait changer la désignation du bénéficiaire pour en faire bénéficier une tierce personne — dans le cas posé, une concubine — je pense que c'est un des cas où l'article 1029 du code civil s'applique. On ne peut pas — le cas de la stipulation pour autrui — changer de désignation de bénéficiaire normalement sans le consentement de la personne qui est désignée comme bénéficiaire, à moins que l'on soit dans les cas exceptionnels de la loi pour l'assurance des maris et des parents ou à l'intérieur d'un cercle familial. On peut interchanger, mais cela reste le cercle familial.

M. PLAMONDON: Mais l'assuré étant mineur et le père étant le tuteur naturel de l'enfant, qu'arrive-t-il? Les bénéficiaires en question?

M. CREPEAU: Oui.

M. PLAMONDON (Luc): Me permetteriez-vous un commentaire?

M. PLAMONDON: Ah bon excusez, c'esttrès bien.

M. PLAMONDON (Luc): Avant de répondre spécifiquement à votre question, M. Plamondon, j'aimerais peut-être répondre au président. Il y a deux problèmes essentiels ici: La nomination initiale d'un bénéficiaire n'est pas régie par la loi, je veux dire qu'il pourrait aller tout de suite désigner sa concubine et, à ce moment-là, la loi des maris et des parents ne l'empêcherait pas de la désigner.

Voici le mari qui a $100,000 d'acquêts. Il achète un contrat à prime unique aujourd'hui et désigne tout de suite la concubine. Ni l'article 1029, ni les articles de la Loi de l'assurance des maris et des parents n'empêcheraient cette désignation.

A l'heure actuelle, ce que la Loi des maris et des parents empêcherait, c'est le mari qui a déjà désigné son épouse bénéficiaire d'un contrat sur sa vie à lui de changer ce bénéficiaire, à un tiers en dehors du cercle familial. Mais le problème initial demeure de la nomination de tiers sans récompense.

Relativement a l'article 1029 et à la Loi de l'assurance des maris et des parents, nous espérons que ces lois sont en train d'être repensées et qu'on en viendra à une révocabilité des bénéficiaires, d'une façon générale. Mais c'est un problème, je dirais, connexe, subsidiaire.

M. PAUL: M. le Président, je ne sais si nous pourrions nous rallier à la suggestion que vient de me faire l'honorable député de Marguerite-Bourgeoys, à l'effet que cette rédaction devrait être reconsidérée ou repensée à la lumière des arguments soulevés par M. Plamondon pour tâcher, peut-être, de trouver un texte qui jettera moins de désarroi, à prime abord, dans le public.

M. CREPEAU: M. le Président, est-ce que l'idée fondamentale, si elle est admise, que l'on devrait retenir, serait à l'effet qu'une désignation ne puisse pas être faite en dehors du cercle familial sans récompense?

UNE VOIX: C'est cela.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. CREPEAU: Et sans le concours.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Sans le concours.

M. PLAMONDON (Luc): Avec le concours. L'épouse, à ce moment-là...

M. CREPEAU: Si la commission voulait se prononcer sur ce principe, alors là nous pourrions rédiger un texte conformément à vos instructions.

M. LACROIX: On pourrait éviter des injustices graves.

M. COMTOIS: Ce sont des cas extrêmes, mais quand ça arrive cela est très grave.

M. LACROIX: Cela peut se répéter à plusieurs reprises.

UNE VOIX: Nous allons repenser ça!

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Je pense que oui. H faut penser aussi au conjoint survivant, les enfants, à part ça, à ce moment-là sont également lésés.

M. LACROIX: Ce sont des exceptions qui peuvent se répéter plusieurs fois.

M. CREPEAU: Surtout quand on sait qu'elles existent.

M. LE PRESIDENT: Alors, l'article 1266 b) est suspendu.

M. CREPEAU: La commission accepte que nous rédigions sur la base de cet énoncé de principe.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Pour éviter l'injustice qu'on a soulignée tout à l'heure.

M. CREPEAU: Je me permets de souligner que cette injustice, sous le régime de séparation de biens, n'est empêchée d'aucune manière.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Non, non, d'accord.

UNE VOIX: Cela prouve que la séparation simplifie les choses.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, elle n'est pas aussi bonne que ça.

M. COMTOIS: Cela favorise la conclusion.

M. LE PRESIDENT: Alors, l'article 1266 q): « Chacun des époux est tenu, tant sur ses biens propres que sur ses acquêts, de toutes les dettes nées de son chef avant ou pendant le mariage; pendant la durée du régime, il n'est pas tenu des dettes nées du chef de son conjoint, sous réserve des dispositions des articles 178 et 180. »

L'article 178 se lit comme suit: « Chacun des époux peut donner à l'autre mandat de le représenter dans l'exercice des droits et pouvoirs que le régime matrimonial lui attribue. »

L'article 179: « Le conjoint quoique mineur peut donner son concours ou son consentement dans tous les cas où il est nécessaire. »

M. CREPEAU: Et l'article 180.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ce sont des articles du bill 16 pour faciliter...

M. COMTOIS: La femme mariée... mandat domestique.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mandat domestique.

M. COMTOIS: On veut que, sous la société d'acquêts, il y ait séparation de dettes sauf quand un époux encourre une dette par le tru-

chement de son conjoint en l'autorisant à agir pour lui.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, oui.

M. LE PRESIDENT: Alors, la femme mariée a, sous tous les régimes, le pouvoir de représenter le mari pour les besoins courants du ménage et l'entretien des enfants y compris les soins médicaux et chirurgicaux. Les actes ainsi accomplis par la femme obligent le mari envers les tiers à moins qu'il n'ait retiré à la femme le pouvoir de faire des actes dont 11 s'agit et que les tiers n'aient eu connaissance de ce retrait au moment où ils ont traité avec elle.

M. LE PRESIDENT: Alors, adopté. MME KIRKLAND-CASGRAIN: Adopté.

M. LE PRESIDENT: Article 1266 r): « Les époux contribuent aux charges du ménage en proportion de leurs ressources respectives. A défaut d'accord entre eux, le tribunal peut, sur requête, déterminer la part contributoire de chacun. »

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Cela me paraît excellent ça!

UNE VOIX: Est-ce que le mot « ressources » s'applique seulement aux revenus ou également au capital?

M. COMTOIS: Très bonne question. MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

UNE VOK: Moi, j'ai l'impression que ça s'applique seulement aux ressources, c'est pour cela que je voulais vous suggérer d'utiliser le mot « faculté » qui s'appliquerait, à ce moment-là, à la fois au capital et aux revenus.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Vous suggérez le mot « facultés » au lieu de « ressources»?

M. PAUL: Peut-être que le terme « leurs moyens », tout en incluant leurs facultés...

M. CREPEAU: Le texte anglais de cet article dit: « In proportion to the respected means... »

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Leurs moyens respectifs... non?

M. CREPEAU: Lorsqu'on parle de « means » d'une personne...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Lorsqu'on plaide pour une pension alimentaire, il faut toujours faire la preuve des besoins de la personne qui demande et des moyens de celle à qui on demande une pension. Est-ce que le mot « moyens » n'est pas le terme utilisé constamment? Devant les tribunaux, ce l'est. Il me semble...

M. CREPEAU: Si vous aviez une personne possédant un capital de $100,000 dont elle ne retirait que des bénéfices très restreints et si on faisait la preuve devant le tribunal de l'existence d'un capital de $100,000, j'ail'impression que le tribunal serait porté à croire...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Le juge est influencé par cela...

M. CREPEAU: ... qu'elle a des moyens.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, oui, absolument. C'est normal, aussi.

M. COMTOIS: Je pense que le mot « moyens », comme vous dites est beaucoup plus accepté dans le langage courant...

M. PAUL: En proportion de leurs moyens...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Absolument, oui.

M. COMTOIS: Evidemment, « ressources »...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: J'aipeur qu'on ouvre la porte à toutes sortes d'interprétations avec le mot « ressources ».

M. COMTOIS: Leurs moyens respectifs... M. CREPEAU: Leurs moyens respectifs...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: J'aimerais mieux leurs moyens respectifs, même si cela peut paraître un anglicisme.

M. PLAMONDON: Et cela comprendrait... M. PAUL: Et le capital et...

M. COMTOIS: La suggestion de M. Beaudoin est déjà dans le code à l'article 213, me dit M. Plamondon.

M. PLAMONDON: Oui, pour les pensions alimentaires, on emploie le terme « les facultés », dans l'article 213, pour traduire l'expression « means »... On pourrait se demander si, aujourd'hui, le terme « les moyens » ne serait pas plus acceptable.

M. BEAUDOIN: Moyens ou facultés, cela revient à peu près au même...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Si vous n'aviez pas objection au terme « moyens », je pense que pour les avocats ce serait peut-être plus accepté.

M. COMTOIS: On pourrait référer cela à l'Office de la langue française...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Ah non! Il est possible qu'on n'ait pas de chance avec ce mot-lâ.

M. PAUL: Non, non, nous voulons adopter le « bill » cette année.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, on veut « passer le bill »...

M. LE PRESIDENT: On me fait remarquer qu'à l'article 169 du code, on parle de « la fortune de celui qui doit »...On dit: « Les aliments ne sont accordés que dans la proportion du besoin de celui qui les réclame et de la fortune de celui qui les doit. » Je pense que le terme...

M. COMTOIS: On ne parle pas de moyens, à ce moment-là..,

M. LE PRESIDENT: Non, on parle de fortune.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Là, on aurait peut-être dû utiliser le mot « moyen ».

M. PAUL: Même dans le langage populaire, le mot « moyens » est bien compréhensible. Il me semble que c'est tout simplement...

M. LACROIX: Où cela commence et où cela se termine...

M. BEAUDOIN: Si à l'article 213, on utilise déjà le mot « facultés », on va peut-être se demander si on a voulu dire autre chose que « facultés » en utilisant « moyens » ailleurs dans le projet de loi.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Mais est-ce qu'on ne pourrait pas justement apporter un amendement à l'article 213 pour faire la concordance?

M. BEAUDOIN: Certainement, je pense qu'on pourrait le faire.

M. THEORET: C'est parce que le mot « moyens » — évidemment, j'accepte l'interprétation de Mme Casgrain — a plutôt l'air de « revenus », alors qu'on veut dire les deux. Abondance de mots ne nuisant pas, si on disait: Selon leur fortune et moyens. Ainsi, on ferait allusion au capital et aux revenus.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Fortune et moyens, si vous voulez, mais je sais qu'en jurisprudence et devant les juges, le mot moyens, ne signifie pas uniquement les revenus, c'est le capital que cela comporte. Mais je n'aipas d'objection à ce qu'on mette les deux, « fortune et moyens ».

M. COMTOIS: Est-ce que vous seriez d'accord pour que cela soit reporté à une prochaine réunion où on pourra peut-être vous faire un rapport plus précis pour essayer de relever dans le code et dans la jurisprudence l'emploi des termes?

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, d'accord.

M. COMTOIS: Pour éviter de faire un amendement qu'on voudra peut-être changer la semaine prochaine.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui, oui. SI vous en veniez à cette conclusion d'utiliser le mot « moyen », est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité, à ce moment-là, d'apporter des amendements aux autres articles...

M. CREPEAU: C'est ça, uniformiser.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: ... où on a, par exemple, le mot « fortune »?

M. COMTOIS: Si le mot est très correct au point de vue du français, moi, Je n'ai pas d'objection.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Oui.

M. CREPEAU: Nous vous apporterons un rapport, madame et messieurs, pour uniformiser le texte.

M. LE PRESIDENT: Alors, on suspend cet article-là?

M. PAUL: Le 8 octobre.

M. LE PRESIDENT: A dix heures?

M. PAUL: Est-ce que nous pouvons compter sur la présence indispensable de nos conseillers, de nos experts?

M. COMTOIS: Le 8 octobre?

M. PAUL: Le mercredi, 8 octobre.

M. CREPEAU: En matinée?

M. PAUL: En matinée.

M. COMTOIS: Dix heures?

M. PAUL: Dix heures. M. Plamondon, est-ce que l'on peut espérer votre visite également?

M. PLAMONDON (Luc): Non, malheureusement, Je devrai être en Floride pour une affaire judiciaire. Mais il y aura certainement de mes collègues, aussi compétents dans cette matière, qui pourront prendre ma relève.

M. PAUL: Très bien, merci.

M. LACROIX: Vous êtes un pauvre malchanceux!

M. LE PRESIDENT: Merci, messieurs, nos travaux sont ajournés au 8 octobre, à dix heures.

(Fin de la séance: 11 h 52)

MME KIRKLAND-CASGRAIN: D'accord.

M. PAUL: M. le Président, vu que, cet après-midi, un certain nombre de membres de cette commission seront occupés, il y aurait peut-être lieu de permettre aux collègues d'aller faire un peu de travail de bureau et d'envisager la possibilité d'ajourner la séance.

M. LE PRESIDENT: Nous ajournons à quand?

M. PAUL: C'est là le problème. Mercredi prochain, je pense qu'il y a la commission...

MME KIRKLAND-CASGRAIN: De la copropriété.

M. PAUL: C'est ça.

M. LE PRESIDENT: On pourrait peut-être siéger jeudi.

M. LACROIX: Mardi, il y a la commission des Affaires municipales; mercredi, la copropriété des immeubles; jeudi, les engagements financiers.

M. PAUL: II y a le 16 octobre, à part ça. M. LACROIX: Le 16 octobre, c'est vrai.

MME KIRKLAND-CASGRAIN: Est-ce que la session commence le 7 octobre?

M. PAUL: Oui, c'est ça. Cela pourrait être le 8 octobre.

M. LE PRESIDENT: Le 8 octobre?

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