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Commission permanente des Affaires municipales
Etude du livre blanc sur la réforme des
structures municipales
Séance du jeudi 12 août 1971
(Dix heures onze minutes)
M. LEDUC (président de la commission permanente des Affaires
municipales): A l'ordre, messieurs!
Je désire tout d'abord vous souhaiter la bienvenue à cette
première séance de la commission permanente des Affaires
municipales qui, aujourd'hui, étudiera le livre blanc sur la
réforme des structures municipales.
Présentation de mémoires
M. LE PRESIDNET: Au moment de siéger, quelques organismes
six en fait ont manifesté le désir de faire valoir leurs
idées ou leurs opinions. Quelques-uns de ces organismes ont
présenté un mémoire. Je vais les nommer par ordre
d'arrivée ou de demande de présentation de ces mémoires.
S'il y a d'autres personnes dans la salle, en plus de ces six organismes que je
vais nommer, qui désirent prendre part au débat je leur
demanderais de bien vouloir s'identifier pour que nous puissions enregistrer
leur présence et leur donner l'occasion de faire valoir leurs
idées.
D'abord, il y a l'Association des gérants municipaux, qui a comme
porte-parole M. Yvon Gariépy et M. Richard Vanier, la ville de
Sherbrooke, qui est représentée par M. Jacques Besre, l'Union des
conseils de comté, qui est représentée par son
président, M. Jean-Marie Moreau, la Corporation des urbanistes du
Québec, qui est représentée par son président M.
Claude Asselin, l'Union des municipalités qui sera
représentée par son président, M. Réal Desrosiers
et, enfin, l'Association canadienne d'urbanisme, section de Québec, qui
est représentée par M. Ledoux. Est-ce qu'il y a d'autres
représentants d'associations, de municipalités ou d'organismes
qui veulent participer à cette séance? Oui?
M. DEPOT: Jean-Guy Dépôt, de la municipalité
d'Orford.
M. LE PRESIDENT: Pardon? Jean...
M. DEPOT: Jean-Guy Dépôt, de la municipalité
d'Orford.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y en a d'autres?
Avant de débuter, je demanderais au ministre des Affaires
municipales, M. Tessier, de nous dire quelques mots.
Rétrospective
M. TESSIER: M. le Président, mes chers collègues,
messieurs, je voudrais faire une très brève rétrospective
de ce qui s'est passé depuis le dépôt du livre blanc sur
les nouvelles structures municipales.
D'abord, il y a eu consultation, même avant le dépôt,
un peu partout à travers la province. J'ai eu l'occasion de tenir
au-delà d'une douzaine de réunions et d'engager le dialogue avec
au-delà de 400 conseils municipaux dans différents endroits.
Ceci m'a permis de répondre à un nombre
considérable de questions, de donner les explications et aussi de
prendre en considération certaines suggestions qui m'étaient
faites et que je considérais comme très valables.
Egalement a eu lieu, comme vous le savez, la conférence
provinciale-municipale où durant une journée entière lors
de deux séances, celle de la matinée et celle de
l'après-midi, nous avons dialogué avec les représentants
des conseils municipaux, avec des associations paramunicipales, avec toutes les
personnes qui étaient intéressées. A cette occasion
également, j'ai pu donner et fournir des explications additionnelles,
tenir compte de certaines recommandations.
Par la suite, nous avons aussi reçu plusieurs mémoires,
environ une centaine en tout. Certains de ces mémoires contenaient aussi
des suggestions valables qui ont été retenues. Je salue mon
collègue, le député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je salue l'auteur de "mon livre blanc".
M. TESSIER: Ce n'est pas le vôtre, c'est le mien. Nous avons
préparé, par la suite, avant de déposer le projet de loi
définitif devant l'Assemblée nationale, ce que je pourrais
appeler un brouillon de projet de loi. Et j'ai cru que tout de même il
valait la peine, une dernière fois avant que le texte définitif
ne soit rédigé, de tenir cette séance de la commission
parlementaire des Affaires municipales afin de recevoir d'autres
recommandations et d'autres suggestions, s'il y a lieu, et de les discuter.
M. le Président, en conclusion, je puis dire qu'il y a trois
choses que nous avons retenues particulièrement et qui diffèrent
de l'exposé sur ces mêmes points qui étaient contenus au
livre blanc.
Dans le livre blanc, pour la formation d'une communauté
municipale, nous suggérions que, lorsque 75 p.c. d'un groupe de
municipalités représentant 75 p.c. de la population de ces
mêmes municipalités manifestait le désir de former une
communauté municipale, à ce moment-là la communauté
pouvait exister.
Or, justement à la suite de centaines de représentations
qui ont été faites, lors de consultations à travers la
province, au cours de la conférence provinciale-municipale, dans les
différents mémoires, on nous a dit que ce pourcentage
était trop élevé.
Aucune municipalité pour autant que je puisse m'en
souvenir n'a mentionné que le pourcentage n'était pas
assez élevé. Nous avons tenu compte de ces représentations
et nous avons l'intention d'incorporer dans le projet de loi qu'une
communauté municipale pourrait être formée lorsque, dans un
groupe de municipalités donné, 60 p.c. de celles-ci,
représentant 50 p.c. de la population totale du territoire, en
manifesteront le désir.
Second point, des craintes ont été émises à
plusieurs reprises par des municipalités à l'effet que dans
plusieurs cas une municipalité pourrait avoir le contrôle des
votes au conseil de la communauté. Le cas se produirait surtout
lorsqu'une ville importante ou de moyenne importance regrouperait de plus
petites municipalités autour d'elle pour former une communauté
municipale.
Le projet de loi, tel que mentionné au livre blanc,
établirait le vote au conseil de la communauté par 1,000
habitants ou fraction de 1,000 habitants. Afin qu'aucune municipalité ne
puisse contrôler le vote, nous avons cru que nous devrions limiter
à 30 p.c. le maximum du vote que pourrait donner une seule
municipalité à l'intérieur d'une communauté. C'est
donc dire qu'aucune municipalité dans ce cas-là ne pourrait
contrôler le conseil, et lorsqu'elle présentera un projet de
règlement, elle devra nécessairement avoir l'assentiment d'un
certain nombre de municipalités formant la communauté pour
obtenir la majorité absolue.
Troisième différence, c'est que le livre blanc proposait,
au départ, sept compétences qui revenaient automatiquement
à la communauté municipale. Nous avons réduit le nombre de
ces compétences de sept à trois. Ces trois compétences
seraient: la première, l'élaboration d'un schéma
d'aménagement du territoire de la communauté; la deuxième
compétence, la promotion économique et l'établissement de
fonds industriels et enfin, la troisième compétence,
l'évaluation des immeubles dans son territoire et le recensement qui se
fait de pair.
Ce sont là trois compétences qui, au départ,
seraient dévolues à la communauté municipale. Quant aux
quatre autres qui étaient mentionnées au livre blanc,
c'est-à-dire le traitement des données, l'uniformisation des
règlements de circulation, la construction de logements à loyer
modique, le contrôle de l'environnement, ce sont des compétences
qui peuvent également être dévolues à la
communauté municipale, mais non pas dès le départ,
dès la création.
Il faudra dans ce cas-là, pour départir les
municipalités qui ont ces compétences, pour les transférer
au conseil de la communauté, qu'il y ait un règlement
d'adopté à la majorité des membres du conseil de la
communauté. Dans ces quatre cas que je viens de mentionner, de
même que pour toute autre compétence qui relève
actuellement, en vertu de la Loi des cités et villes ou du code
municipal, d'une municipalité, ces compétences, du consentement
de la majorité des membres du conseil, peuvent être
transférées également au conseil de la
communauté.
Voilà, M. le Président, dans les grandes lignes,
l'intention du ministère des Affaires municipales en ce qui concerne le
projet de loi sur les nouvelles structures des municipalités et des
communautés municipales.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. le ministre. J'aimerais, avant de demander
aux différents organismes de participer aux travaux de la commission,
rappeler à ceux qui ont à présenter un mémoire
d'être brefs dans leur intervention en résumant leur
mémoire puisque les membres de la commission, dans certains cas, ont eu
l'occasion d'en prendre connaissance et d'autres auront l'occasion, au cours
des prochains jours, de prendre connaissance de ces mémoires, et de s'en
tenir au sujet de la rencontre de cette commission.
Le député de Chicoutimi.
Commentaires
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, M. le ministre, nous
avons écouté avec intérêt le ministre des Affaires
municipales nous parler de ce problème général des
réformes de structures des municipalités du Québec.
Je dois d'abord faire observer au ministre que c'est la première
fois, en fait, que les parlementaires ont l'occasion de discuter et d'entendre
les représentants des municipalités et d'autres organismes sur le
problème du livre blanc. Le livre blanc a été
déposé à la Chambre mais nous n'avons pas eu l'occasion
d'en faire l'examen détaillé. Il y a eu des réunions avec
des municipalités, réunions dont on nous avait dit que nous
pourrions avoir la transcription mais nous ne l'avons pas reçue encore.
Le ministre nous avait promis que ces documents nous seraient remis
aussitôt que ces réunions auraient été tenues,
enfin...
M. TESSIER: Il y a la conférence provinciale-municipale
aussi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. Tout cela est nettement relié.
M. TESSIER: On me dit, M. le Président, que c'est actuellement
à l'impression.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'avais l'impression que nous l'aurions plus
tôt. C'est vraiment la première fois que les parlementaires sont
saisis officiellement de l'attitude du ministre et qu'ils ont l'occasion
d'entendre le ministre s'exprimer sur les réactions qui ont pu lui venir
de droite et de gauche de la part des municipalités.
Il est bien entendu que sur les objectifs
généraux nous pouvons être d'accord, sous toutes
réserves, naturellement, d'examiner les modalités que le ministre
entend institutionnaliser dans un projet de loi.
Nous sommes d'accord sur les objectifs généraux, sur le
réaménagement du territoire, sur les pouvoirs qu'il faut impartir
aux municipalités, les moyens financiers qui doivent être
donnés aux municipalités, afin que ces centres de décision
extrêmement importants soient efficaces et que les municipalités
ne soient pas constamment paralysées par une action administrative
gouvernementale qui créerait une interférence constante dans les
objectifs et l'activité administrative des municipalités.
Il y aura évidemment à examiner très longuement
ce n'est pas l'objet de la discussion que nous devons avoir ce matin en
entendant les représentants des organismes qui nous parleront il
faudra, dis-je, examiner le problème des relations du Québec avec
le gouvernement central en ce qui concerne les municipalités, parce
qu'il n'échappe à personne que le gouvernement central s'est
arrogé, depuis quelques années et tout particulièrement
ces derniers mois, des prérogatives qui ne sont pas les siennes et que
le gouvernement du Québec devra immédiatement s'occuper de
revendiquer, afin de stopper cette entreprise de centralisation qui se
précise de jour en jour. Le ministre le sait, il a eu à s'en
plaindre, et j'imagine qu'il est très soucieux de ce qui se passe du
côté du ministère du Développement économique
régional.
Par conséquent, M. le Président, si nous sommes d'accord
sur les objectifs généraux, nous sommes par ailleurs inquiets en
ce qui concerne l'attitude pratique que prendra le ministre lorsqu'il s'agira
de formuler par le biais d'un projet de loi les modalités d'application
des principes qu'il a évoqués tout à l'heure, qui se
trouvent d'ailleurs dans le livre blanc et dans le document que nous avons
devant nous ce matin.
Nous serons donc très heureux d'entendre les représentants
de divers organismes nous faire part de leurs points de vue.
Mais il est entendu qu'une fois ces auditions terminées il sera
nécessaire que le ministre des Affaires municipales accepte de
siéger avec les parlementaires afin d'analyser toutes les implications
des suggestions qui nous seront faites avant même que de rédiger
un projet de loi qui sera soumis à l'examen de la Chambre.
Je ne veux pas abuser du temps de la commission parce que j'imagine que
les groupes qui sont devant nous ce matin ont des représentations
très concrètes à faire et des opinions à formuler
sur le livre blanc tel qu'il a été déposé et sur
les propos que vient de tenir le ministre des Affaires municipales.
Je représente une région où le problème de
ce réaménagement municipal est extrêmement important en
fonction du développement économique régional. Je crois
que c'est dans cette perspective du développement économique
régional que les municipalités voudront bien s'exprimer en tenant
compte du fait que s'il y a de grandes agglomérations, il y a
également des agglomérations numériquement moins
importantes mais qui auront sur l'avenir économique du Québec des
incidences très sérieuses. Le ministre, venant d'ailleurs
lui-même d'une région dont on peut dire qu'elle n'est pas
particulièrement favorisée, ne s'étonnera donc pas que les
représentants des régions fassent valoir ce point de vue de
l'émergence de certaines grandes entités administratives
régionales qui sont touchées par ce réaménagement
municipal. C'est à la lumière des représentations qui nous
seront faites qu'il sera possible aux parlementaires de faire au ministre des
propositions concrètes afin que soit préservée l'autonomie
des municipalités, que leur soient donnés les moyens de
financement dont elles ont besoin et que soient en même temps
établies les lignes directrices qui permettront aux entités
administratives régionales d'être intégrées dans le
cadre de la politique gouvernementale en fonction d'un développement
économique du Québec planifié, coordonné et qui
écarte tout danger de monopolisation par les grandes
agglomérations des énergies du gouvernement, ce qui serait au
détriment des entités administratives régionales.
Alors, nous entendrons donc avec intérêt les
représentants des organismes qui sont ici ce matin nous
réservant, bien entendu, d'indiquer au ministre des Affaires
municipales, à ses conseillers et au gouvernement quelles sont les vues
du parti que je représente ici à cette commission.
M. TESSIER: M. le Président, j'aimerais savoir si le
député de Chicoutimi me permettrait une question pour
éclaircir un point qu'il a soulevé.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je vous permets tout, M. le ministre,
même de démissionner!
M. TESSIER: Ce n'est pas pour aujourd'hui, ni pour demain.
M. VINCENT: Et après-demain? M. TESSIER: Non plus.
M. VINCENT: Parce que demain c'est vendredi et après-demain c'est
samedi.
M. TESSIER: Alors voici. Le député de Chicoutimi, M. le
Président, a parlé d'une autre consultation avec les
parlementaires. Je suis parfaitement d'accord. Mais est-ce qu'il entend par
là qu'il devrait y avoir d'autres réunions de la commission
parlementaire, comme celle qui siège ce matin, uniquement avec les
parlemen-
taires? Après le dépôt du projet de loi,
évidemment ce projet de loi devra être examiné en
comité, article par article, est-ce que ce ne sera pas là le
moment, justement, pour les membres de l'Assemblée nationale, de quelque
parti qu'ils soient, de faire des suggestions d'amendement?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Voici, M. le ministre...
M. TESSIER: Je voulais simplement que vous éclaircissiez votre
pensée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, je vais vous dire bien carrément
ce que j'en pense et le ministre sera d'accord avec moi. Nous avons
adopté depuis quelques années à l'Assemblée
nationale un nouveau style législatif. D'accord, l'initiative des lois
vient du gouvernement et cela est normal, cela est également conforme
aux institutions qui nous régissent. Mais il reste que, lorsqu'un projet
de loi est déposé, même si nous avons l'occasion de
l'examiner en comité en Chambre, il arrive assez souvent que le
gouvernement accepte les suggestions d'amendement que nous lui faisons. Mais il
s'agit ici d'un problème général du
réaménagement municipal. C'est donc un problème de base.
La loi-cadre que le ministre présentera, puisqu'il s'agira d'une
loi-cadre en fait, sera appelée à régir l'administration
municipale pour des années à venir. Nous avons, chacun dans nos
circonscriptions et dans nos régions, poursuivi des consultations,
rencontré les autorités municipales. Je dis au ministre,
puisqu'il veut savoir exactement ma pensée, qu'avant même que soit
déposé le projet de loi, je crois qu'un projet de
rédaction devrait être soumis à la commission parlementaire
afin que nous puissions, avant même qu'il y ait dépôt formel
d'un projet de loi, ensemble, entre parlementaires, faire la synthèse
des opinions qui ont été exprimées.
Ainsi, lorsque le projet de loi sera déposé, nous ne
serons pas devant un fait acquis et nous ne serons pas dans l'obligation, pour
améliorer ou bonifier un projet de loi, de simplement pouvoir faire
quelques suggestions au gouvernement. Mais, comme on nous l'a laissé
entendre et comme cela devient coutume de plus en plus, je crois qu'en une
matière aussi importante que celle-là il faudrait que les
parlementaires soient associés de façon beaucoup plus active
à l'élaboration même du projet de loi quitte,
naturellement, à laisser aux spécialistes en rédaction des
lois le soin de rédiger les textes législatifs. Mais, il faudrait
que nous soyons associés à l'élaboration du projet de loi
afin de faire mieux entendre, avant qu'il y ait dépôt formel, le
point de vue des régions et des circonscriptions que nous
représentons.
Ainsi, pour répondre directement à la question du
ministre, je lui dis qu'il serait souhaitable, avant qu'il y ait
rédaction définitive du projet de loi, que nous tenions des
réunions ou une réunion, quelques réunions de la
commission parlementaire des Affaires municipales, pour faire ensemble une
revue de synthèse des diverses opinions qui ont été
émises d'autant plus que, comme je le disais tout à l'heure, il y
a eu dépôt du livre blanc, il y a eu ensuite cette
conférence provinciale-municipale et qu'à toutes fins utiles,
c'est la première fois que les parlementaires sont invités
à examiner dans ses détails le livre blanc, entendre l'opinion
des organismes intéressés puisque, lorsqu'il y a eu
dépôt de la loi sur l'évaluation foncière, lorsqu'il
y a eu cette conférence provinciale-municipale, nous avons
été invités à titre d'observateurs. Et le ministre
l'a dit tout à l'heure, nous n'avons pas encore reçu le compte
rendu, les procès verbaux de cette importante réunion qui se
tenait alors même que la Chambre siégeait et que nous devions
examiner d'autres projets de loi très importants.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.
M. ROY (Lévis): M. le Président, comme représentant
d'un parti politique, je dirai seulement quelques mots. D'abord, en ce qui me
regarde, je suis très satisfait d'avoir avec nous ce matin le ministre.
Avec toutes les rumeurs qui ont circulé hier soir, avec des
démentis, je me demandais, après ce que nous avons passé
l'automne dernier, s'il n'avait pas été question de kidnapper le
ministre. Je suis donc très heureux de le voir avec nous, malgré
la mauvaise entente qu'il y a avec le député
fédéral DeBané dans Gaspé.
Je suis très satisfait de la représentation que le
ministre vient de nous faire au point de vue du regroupement. Personnellement,
je ne suis pas tellement enthousiaste vis-à-vis du regroupement.
Cependant, il reste toujours aux municipalités, avec 75 p.c. de
représentation, à décider si oui ou non elles doivent se
regrouper. Il restera toujours au ministre, en dernier lieu, à
décider. Comme dans toute loi gouvernementale, probablement, il y a
toujours le ministre qui a son mot à dire à la fin.
Je crois que les contribuables ou les maires des municipalités
qui sont représentées ici ce matin pourront être
éclairés. Il y a aussi le ministre qui a l'intention de nous
présenter un livre blanc. Cela lui permettra aussi d'avoir une certaine
documentation. On pourra lui donner des conseils. Cela aidera tout le
monde.
Pour le moment, je ne me prononcerai pas contre, parce que nous allons
voir la manière dont les représentations des municipalités
seront faites. Il reste que, même si nous représentons des
municipalités, cela ne veut pas dire qu'après que nous sommes
élus nous pouvons dire oui ou non, faire le beau ou le mauvais temps
contre la population. Nous étudierons. Je crois que dans l'avenir on
peut même suggérer au ministre des choses pour compléter le
livre blanc; avec le peu de capacité et le peu
d'expérience que nous avons au point de vue de l'administration
municipale, il nous fera toujours plaisir de le faire.
En terminant, je ne voudrais pas vu qu'il est déjà
assez tard et que plusieurs ont des représentations à faire
m'éterniser, mais je crois que nous pourrons faire là une
étude et qu'au moins 75 p.c. à 80 p.c. de la population, si la
chose est acceptée, seront satisfaits.
Merci.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Maisonneuve.
M. BURNS: M. le Président, en ce qui nous concerne, qu'il y ait
une nécessité de réforme, je pense que nous l'admettons
carrément. Qu'il y ait trop d'unités administratives, c'est un
fait. Que leurs pouvoirs soient trop restreints, c'est également un
fait. Que de nouveaux problèmes naissent par les restructurations
scolaires, etc. et que grandisse la nécessité de la
restructuration des municipalités, c'est exact aussi en ce qui nous
concerne. Que les structures actuelles soient trop rigides, inadaptées,
nous partageons également l'opinion du ministère à ce
sujet-là. Que ces structures soient faibles sur le plan administratif,
encore une fois nous l'admettons.
Sauf que, là-dessus je ne voudrais pas entrer trop
profondément dans le sujet, tout simplement la grande critique que nous
avons à formuler contre ce projet de réforme qui a
déjà été, d'ailleurs, soulignée par mon
collègue le député de Lafontaine est que, fort
probablement, ces lacunes que nous constatons nous amènent
peut-être à la conclusion que la nécessité
première est d'avoir des gouvernements régionaux d'abord.
S'il doit y avoir des gouvernements régionaux, je ne sais pas
encore si c'est dans l'opinion du ministre quelque chose qui doit arriver.
Selon nous c'est une réforme qui est faite à l'envers,
c'est-à-dire qu'il devrait d'abord y avoir création de
gouvernements régionaux plutôt que de communautés urbaines
ou de structures de communautés urbaines, lesquels, c'est-à-dire
les gouvernements régionaux, pourraient par la suite, voir à
cette réforme de structure à l'intérieur de sa
région.
Pour le moment, c'est tout simplement cette critique que nous voulons
formuler. Je m'en voudrais cependant de ne pas faire écho à la
suggestion du député de Chicoutimi. En ce qui me concerne je
considère qu'une fois qu'on aura entendu les personnes
intéressées, les diverses municipalités, etc., il y aurait
peut-être lieu, avant le dépôt d'un projet de loi pour
changer toute la situation, que les parlementaires se réunissent
à nouveau entre eux, afin qu'on ne soit pas pris dans le carcan d'un
projet de loi, qu'on tentera de faire modifier...Là je pense que, sans
faire de l'angélisme tout le monde est prêt à admettre que
c'est beaucoup plus facile de faire modifier une politique ministérielle
avant que le projet de loi soit déposé, et c'est pour ça
que je trouve la suggestion du député de Chicoutimi très
constructive. En ce qui me concerne, je l'appuie entièrement.
Pour le moment ce sont les seuls commentaires que j'aurai à faire
relativement à ce projet.
M. VINCENT: M. le Président, si vous me permettez, je voudrais
dire quelques mots avant que le ministre reprenne la parole ou réponde
au voeu exprimé par le député de Chicoutimi, appuyé
également par l'autre député qui vient d'adresser la
parole. Le ministre, au début de son exposé, a mentionné
qu'il existait un brouillon de projet de loi, un document de travail. Il a dit
que ce document de travail avait apporté certains changements et que,
sur ce document, le ministère, à l'heure actuelle, à la
suite des représentations qui seront faites ici à la commission,
pourrait travailler sur ce brouillon, avant que le projet définitif soit
élaboré.
Donc, ce serait tellement facile pour le ministre, à la suite des
représentations que nous entendrons aujourd'hui, de réunir
à nouveau les parlementaires, de présenter ce brouillon de projet
de loi comme document de travail.
Nous pourrions travailler avec le ministre et faire des suggestions,
également. D'ailleurs, le ministre lui-même, en terminant son
exposé, a dit: Voilà les intentions du ministère des
Affaires municipales.
C'est donc dire que c'est réellement sur un projet de projet de
loi que nous travaillons, que ce n'est pas encore accepté dans tous les
principes par le conseil des ministres. Avant que ce projet, ce brouillon se
rende au conseil des ministres, je crois qu'il serait très important
d'accepter la suggestion du député de Chicoutimi à l'effet
que les parlementaires se réunissent à nouveau et regardent avec
le ministre d'ailleurs, on sait que le ministre est très ouvert
aux discussions, il en donnera la preuve demain soir...
M. TESSIER: Demain soir?
M. VINCENT: Il n'y a pas une réunion importante demain soir?
M. TESSIER: Je ne sais pas si elle est importante. On verra quand cela
aura lieu. Avez-vous terminé?
M. VINCENT: Oui, oui. C'est là-dessus que je voudrais que le
ministre nous réponde à savoir si les membres de la commission
parlementaire pourront disposer de son brouillon afin de s'en servir,
répondant ainsi au voeu du député de Chicoutimi.
M. TESSIER: M. le Président, je suis heureux de déclarer
tout de suite, en réponse aux suggestions qui ont été
faites par le député de Chicoutimi, le député de
Maisonneuve et le député de Nicolet, que c'est avec plaisir que
je
verrai à faire imprimer ce brouillon qu'on pourrait en somme
qualifier d'avant-projet de loi et à le faire distribuer à tous
les membres de l'Assemblée nationale, laissant à ceux-ci quelques
semaines pour l'étudier. A la fin de septembre, peut-être, au
début d'octobre ou avant, pour permettre au président de revenir
d'un assez long périple autour du globe, on pourrait réunir de
nouveau la commission parlementaire afin de recevoir les suggestions de nos
collègues. C'est certainement de tout coeur que je me rends à ce
voeu.
Autre chose, M. le Président, si vous le permettez. Dans mon bref
exposé des différences, tout à l'heure, j'avais
mentionné trois différences que nous nous proposions d'incorporer
dans le projet de loi en comparaison de ce qui était exposé dans
le livre blanc. Or, j'ai omis deux autres choses assez importantes. Nous avons
l'intention également, comme quatrième disposition importante qui
n'apparaît pas au livre blanc cela n'est pas une chose
différente, c'est une affaire nouvelle qui provient de plusieurs
suggestions à cet effet de la part de diverses municipalités
de permettre au ministre, s'il croit que c'est dans
l'intérêt public de le faire, d'ordonner à un groupe de
municipalités d'entreprendre des études sur les avantages et les
désavantages de former, dans tel territoire, une communauté
municipale.
Cinquièmement, ce serait également de permettre au
ministre d'ordonner, s'il y a lieu, un référendum dans un groupe
de municipalités données afin de consulter la population, surtout
dans le cas où, par exemple, il y aurait dix municipalités et
où c'est à peu près divisé. Est-ce que,
réellement, la population désire se former en communauté
municipale ou ne le désire pas? On ne sait pas trop.
Il arrive, comme tout le monde le sait, que dans certains cas je
ne dis pas que c'est la règle générale un conseil
municipal ne représente pas nécessairement le sentiment de la
majorité de la population.
Il y a évidemment des conseillers municipaux qui peuvent avoir
des intérêts personnels, avoir des conflits
d'intérêts même. J'ai l'intention d'incorporer dans le
projet de loi ce pouvoir qu'aura le ministre d'ordonner un
référendum qui pourrait même porter sur deux points:
l'opportunité de former une communauté municipale et
l'opportunité d'une fusion de deux, trois municipalités ou plus
à l'intérieur d'une communauté.
Ces dispositions m'ont été demandées par un nombre
considérable de municipalités et d'organismes paramunicipaux.
M. VINCENT: Est-ce que le ministre pourrait répondre à une
question?
M. TESSIER: Oui.
M. VINCENT: Nous avons ici devant la commission parlementaire
différents groupes qui veulent se faire entendre et qui ont
déjà préparé des mémoires. Ces
différents groupes, si je comprends bien, n'avaient pas
été informés de ces nouvelles dispositions que le ministre
vient d'annoncer. C'est cela?
M. TESSIER: Officiellement, non, M. le Président.
M. VINCENT: Donc...
M. TESSIER: Mais, si vous me permettez de compléter ma phrase,
j'ai eu l'occasion, à plusieurs reprises, d'être interrogé
par des journalistes sur le sujet et la presse a largement diffusé les
cinq points que je viens de mentionner.
M. VINCENT: Officiellement, les différents groupes qui sont ici
pour faire des représentations se sont basés sur ce qui
était écrit dans le livre blanc. Prenons, par exemple, le
pourcentage des municipalités. On exigeait, dans le livre blanc, 75 p.c.
des municipalités, 75 p.c. de la population des municipalités qui
devaient se prononcer favorablement à un projet de création de
communautés municipales.
Le ministre vient de nous dire il l'a mentionné il y a
quelques instants qu'il avait l'intention de diminuer ce pourcentage
à 60 p.c. des municipalités et à 50 p.c. de la population.
C'est un premier pas. Deuxièmement, le ministre nous informe qu'il a
l'intention de prévoir dans le projet de loi que le ministre des
Affaires municipales pourra ordonner un référendum dans un groupe
de municipalités, se basant sur ce nouveau pourcentage. Là
où je veux faire le point, c'est que les représentants des
groupes qui sont ici n'ont pas été informés de ces deux
nouveaux principes, c'est-à-dire le changement de principe d'abord, dans
a), et également le nouveau principe qu'il veut se donner dans le
cinquièmement. Si les municipalités, les conseils de comté
ou les autres organismes qui sont ici n'ont pas été
informés de ces deux nouvelles choses, cela peut changer presque du tout
au tout la présentation de leur mémoire et cela sans tenir compte
des trois autres principes que le ministre a l'intention d'incorporer dans son
projet de loi.
M. TESSIER: M. le Président, il y a déjà plusieurs
mois, au moins deux mois à tout événement, j'ai eu
l'occasion de parler de ces changements que j'avais l'intention d'incorporer
dans le projet de loi. Je me souviens d'avoir lu dans à peu près
tous les journaux et d'avoir entendu à la radio des commentaires
à ce sujet-là. Je pense que tout le monde en a été
informé, comme je l'ai mentionné, peut-être pas
officiellement, mais officieusement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le ministre...
M. TESSIER: A tout événement, nous sommes ici aujourd'hui
pour cela. J'ai mentionné cinq points mais il peut peut-être y en
avoir six ou sept, il peut peut-être y en avoir d'autres aujourd'hui,
après nos discussions.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, cela ne nous
empêche pas d'entendre les organismes qui veulent se faire entendre ce
matin, mais il reste que, depuis le dépôt du livre blanc en
Chambre, le ministre a fait beaucoup de déclarations. Il a
rencontré les représentants d'un grand nombre de
municipalités.
Il a apporté des changements qui s'avèrent majeurs dans
les objectifs généraux qu'il avait formulés dans le livre
blanc, de sorte que les municipalités et les organismes qui avaient
préparé les mémoires auront peut-être un autre avis
maintenant qu'ils connaissent les modifications que le gouvernement semble
vouloir apporter à sa politique.
Je reviens sur ce que je vous disais tout à l'heure, que les
parlementaire, pour leur part, n'ont eu l'occasion en aucun temps de discuter
du livre blanc comme tel et de discuter notamment des nouveaux
éléments de cette politique de réaménagement
municipal dont le ministre nous a fait part ce matin.
Ainsi, par exemple, à cinquièmement, quand le ministre
nous dit qu'il entendrait donner au ministre des Affaires municipales le
pouvoir d'ordonner un référendum afin de consulter la population,
il nous a dit que cette idée d'inscrire une prescription permettant au
ministre d'ordonner tel référendum, lui est venue à la
suite de consultations et de demandes qui ont été
formulées par des municipalités.
Alors, est-ce qu'il s'agit de grandes municipalités? Est-ce qu'il
s'agit de grandes agglomérations urbaines? Est-ce qu'il s'agit de
municipalités rurales? D'où sont venues ces suggestions?
M. TESSIER: Je pourrais dire tout de suite que je ne voudrais pas
évidemment mettre en cause certaines municipalités
particulières en les nommant, mais je puis dire qu'il ne s'agit pas de
grandes municipalités. Il s'agit de municipalités moyennes, tant
urbaines que rurales.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela répond à ma question, M. le
ministre, mais...
M. BOIVIN: M. le Président, vous avez parlé de trois
différences nouvelles et vous en avez élaboré deux:
permettre une étude et ordonner un référendum. C'est
à sixièmement.
M. TESSIER: Oui, mais avant ça, j'avais parlé des trois
autres. Il y en a cinq en tout.
M. BOIVIN: Cinq ou six? M. TESSIER: Cinq. M. BOIVIN: D'accord.
M. TESSIER: Bien, rapidement, je peux simplement en faire
l'énumération. La première, c'est la clause de 60 p.c. et
50 p.c. au lieu de 75 p.c. et 75 p.c. Deuxièmement, un maximum de 30
p.c. des votes à une municipalité. Troisièmement, trois
compétences au lieu de sept. Quatrièmement, pouvoir ordonner des
études sur l'opportunité de créer une communauté
municipale. Cinquièmement, le référendum.
M. ROY (Lévis): M. le Président, je comprends que la
discussion est peut-être utile, mais nous avons des gens ici qui sont
venus pour faire des représentations et si nous passons notre temps
à discuter entre nous de ce que nous allons faire...D'abord le livre
blanc, il ne sera pas accepté aujourd'hui. Nous sommes ici pour
l'étudier. Je crois qu'on devrait immédiatement...
M. TESSIER: Il ne sera accepté ni aujourd'hui ni jamais. On n'est
pas ici pour accepter ou ne pas accepter le livre blanc.
M. ROY (Lévis): Non, non, mais nous sommes ici pour
l'étudier et il va être accepté après. Maintenant,
si on veut étudier les points...
M. TESSIER: Il ne sera pas accepté après non plus...
M. ROY (Lévis): Oui, en tout cas...
M. TESSIER: Après, c'est un projet de loi qui va suivre...
M. ROY (Lévis): Bien, c'est un projet de loi qui va suivre...
M. VINCENT: C'est un jeu de mots, ça.
M. ROY (Lévis): Oui, oui, c'est un jeu de mots. C'est une chose
qui sera une loi et il va falloir passer par là à un moment
donné. Maintenant, ces gens ici, nous sommes là à discuter
entre nous...
UNE VOIX: On attend que le vent tourne...
M. ROY (Lévis): Ce n'est pas la question que j'attends que le
vent tourne, mais je crois, quand je vais faire des représentations
quelque part, que j'ai le droit de me présenter et non pas attendre
indéfiniment la discussion des gens entre eux.
Je crois, M. le Président, qu'on devrait entendre les
représentations et, par après, nous pourrons discuter sur les
représentations qui auront été faites.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je crois que le
député de Lévis a raison,
mais il reste qu'il était nécessaire de déblayer un
peu le terrain au départ...
M. ROY (Lévis): Je ne suis pas contre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...pour savoir exactement quelles
étaient les grandes orientations du ministre. Il nous les a
communiquées. Nous sommes, quant à nous, disposés à
entendre les organismes qui attendent de nous faire connaître leurs
points de vue.
M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, le premier organisme que nous avons
sur notre liste est l'Association des gérants municipaux. J'aimerais que
l'association fasse valoir ses opinions et que le porte-parole veuille bien
s'identifier avant de commencer.
Association des gérants municipaux du
Québec
M. GARIEPY: Mon nom est Yvon Gariépy, gérant de la ville
de Saint-Laurent; je suis président de l'Association des gérants
municipaux du Québec.
M. le Président, le mémoire que nous avons
présenté est exactement dans les mêmes termes, il est
exactement le même mémoire que nous avions soumis à la
conférence provinciale-municipale.
Nous avons été avisés il y a environ deux semaines
de la tenue de cette séance de la commission et nous avons
immédiatement fait parvenir les copies que vous avez.
Les propositions que nous avons soumises dans notre mémoire sont
généralement favorables au livre blanc. Nous nous sommes permis
de soumettre certaines modifications qui seraient faites dans le but de
permettre, de favoriser la création de nouvelles communautés
municipales. Nous croyons que le mémoire établit quelles seraient
les réformes elles-mêmes, mais qu'il y a lieu d'apporter certaines
modifications qui aideraient un peu plus la création de
communautés municipales.
Quant à la réforme elle-même qui est proposée
concernant la création des communautés municipales, nous sommes
d'accord sur son contenu, mais nous avons suggéré fortement que
parallèlement à cette réforme concernant la
création de communautés municipales, il y ait aussi une politique
qui favoriserait un peu plus les fusions des municipalités et qui
permettrait de grouper certaines municipalités qui ne sont pas viables
présentement.
Parmi les conditions ou les mécanismes que nous avons
suggérés dans notre mémoire pour la création de
communautés municipales, nous avons soumis qu'il y aurait lieu d'obliger
les municipalités à effectuer des études concernant la
création de communautés municipales. Nous faisons mention dans le
mémoire que, tout en respectant l'autonomie des municipalités,
nous croyons qu'il se peut que certains administrateurs fassent une obstruction
systématique aux négociations si celles-ci sont laissées
libres. C'est la raison pour laquelle nous avons suggéré que des
études devraient pouvoir être imposées aux
municipalités qui font partie d'une même région afin
d'établir les avantages et les désavantages d'une
communauté municipale dans cette région.
Nous avons aussi soumis notre point de vue concernant le pourcentage de
municipalités et de population pour créer une communauté
municipale et nous avons recommandé 50 p.c. dans les deux cas. Nous
croyons qu'il ne devrait pas être possible à une minorité
de municipalités ou de population d'empêcher la création de
communautés municipales. Nous y croyons à cette réforme et
nous croyons que la majorité, étant une norme reconnue dans notre
système électoral actuel, devrait pouvoir permettre la
création de communautés municipales.
En résumé, nous prétendons que le pourcentage de 75
p.c. du livre blanc devrait être dans les deux cas la majorité,
c'est-à-dire 50 p.c.
En ce qui concerne le découpage du territoire dont il est fait
mention dans le livre blanc, nous croyons qu'il devrait y avoir une formule
assez flexible qui permettrait aux municipalités d'étudier la
possibilité d'aller dans un territoire voisin si c'est possible pour
autant que tous les principes fondamentaux qui ont servi à
établir les territoires tels qu'ils sont soumis dans la proposition
soient respectés.
Pour ce qui a trait aux subventions recommandées dans le livre
blanc ou suggérées dans le livre blanc, nous croyons qu'elles ne
devraient pas être fixes, tel que mentionné, qu'elles pourraient
être variables selon les différentes régions. Nous avons
ajouté en plus, en ce qui concerne ces subventions, que dans le cas de
communautés urbaines existantes, les subventions pour les fusions
devraient aussi s'appliquer à ces communautés urbaines et non pas
seulement aux communautés municipales dont il est question dans le livre
blanc.
Le livre blanc, je pense, fait mention que ces nouvelles propositions ne
s'appliqueraient pas aux communautés urbaines existantes. Nous
soumettons respectueusement qu'on devrait permettre aux municipalités
qui font partie de communautés urbaines existantes de profiter elles
aussi de ces subventions.
Nous soumettons, de plus, que les subventions devraient pouvoir
être accordées aux municipalités qui désirent se
fusionner, même si elles ne font pas partie d'une communauté
municipale. Dans le livre blanc, il est fait mention de subventions pour des
municipalités qui feraient partie d'une communauté municipale.
Nous croyons qu'on devrait permettre aux municipalités de pouvoir se
regrouper pour faire des entités plus viables. Afin de favoriser cela,
il y aurait lieu que les subventions s'appliquent même si les petites
municipalités ne font pas encore partie d'une communauté
municipale.
En ce qui a trait aux compétences, nous avions
suggéré que le nombre de sept soit réduit à deux
compétences c'est ce que nous
retrouvons dans notre mémoire parmi les trois
compétences que le ministre des Affaires municipales a
mentionnées aujourd'hui comme devant être la nouvelle proposition
du ministre à ce sujet. En ce qui concerne les deux compétences
que nous avions mentionnées, il y a le schéma
d'aménagement du territoire et l'évaluation municipale. La
troisième compétence mentionnée par l'honorable ministre
aujourd'hui est la promotion économique des fonds industriels. Nous
croyons que, pour certaines régions, elle pourrait s'appliquer. En
somme, nous soutenons le fait que le nombre de compétences ne devrait
pas être trop grand parce que s'il est trop grand, plusieurs
municipalités vont craindre que le conseil de la communauté
urbaine ait des pouvoirs trop étendus. Cela pourrait empêcher la
création des communautés.
Ceci résume, M. le Président, le mémoire que nous
avons soumis. Nous serions heureux de répondre à toute question
de la part des membres de la commission.
M. LE PRESIDENT: Merci. M. Gariépy.
M. TESSIER: M. le Président, j'aimerais ici faire quelques
remarques. D'abord, je voudrais féliciter l'Association des
gérants municipaux pour l'excellent mémoire qu'elle nous a
présenté. Je suis très heureux de constater que, dans les
grandes lignes, sur les principes, vous êtes entièrement d'accord
sur le projet de loi sur de nouvelles structures municipales. Comme vous avez
pu le constater, nous avons retenu quelques-unes de vos suggestions, notamment
l'étude obligatoire à laquelle j'ai fait allusion au début
de mes remarques tout à l'heure.
Quant au pourcentage, encore là je crois que nous nous
rapprochons sensiblement puisque nous l'avons abaissé à 60 p.c.
des municipalités représentant 50 p.c. de la population alors que
le livre blanc mentionnait 75 p.c. dans les deux cas. Vous suggérez 50
p.c. dans les deux cas. Permettez-moi de vous faire part de certaines
appréhensions pour ce qui est de le baisser à 50p.c. dans le cas
du nombre des municipalités.
Si on arrivait à 51 p.c, 52 p.c. ou 53 p.c. d'un groupe de
municipalités, disons de douze ou quinze municipalités,
âès le début de la formation d'une communauté
municipale, il serait à craindre qu'on soit pratiquement bloqué
dans l'administration. Si une municipalité détient le
contrôle, elle peut bloquer n'importe quel règlement. C'est
pourquoi nous avons cru qu'il fallait monter ce pourcentage à 60 p.c.
Nous sommes ainsi assurés au départ, dès la
première séance que tiendra le conseil de la nouvelle
communauté municipale, que dans toute proposition qui sera faite, on
aura au moins un minimum de 60 p.c. pour. Je crois que cela s'impose. Ma
crainte, justement, c'est que, si nous mettions cela à 50 p.c. on
pourrait être bloqué, au départ, dans l'administration
d'une nouvelle communauté municipale. Mais je suis parfaitement
d'accord, par exemple, que quant à la population cela doit être
réduit à 50 p.c. C'est ce que nous suggérons.
Le dernier point que j'ai retenu dans votre intervention ou dans votre
exposé, c'est au sujet des subventions qui devraient être
variables suivant les régions. Il ne faut pas perdre de vue deux choses.
D'abord, c'est que la subvention statutaire qui est suggérée de
$2 per capita et de $1 per capita et un autre $2 s'il y a lieu, dans le cas
d'une fusion complète, est pour aider les municipalités qui font
partie d'une communauté municipale à mettre sur pied leurs
structures. C'est uniquement pour cela. Et que ce soit une communauté
municipale populeuse ou non, je crois qu'il y a un minimum de dépenses
pour mettre sur pied les structures, la mise en commun de certains services,
pour faire des études, par exemple, ou préparer le schéma
d'aménagement. En somme, c'est pour les aider à remplir les trois
compétences qui sont obligatoires au départ.
Et cela, bien entendu, est complètement en dehors des structures
municipales, il en a été question à la conférence
provinciale-municipale, le ministre des Finances a alors présenté
un document et il a fait un exposé sur la restructuration de la
fiscalité municipale, d'abord. Il y a eu différentes suggestions,
soit sur un certain nombre d'années, d'entrer graduellement dans le
champ de l'impôt foncier des commissions scolaires. Cela a
été une proposition.
Deuxième proposition: une nouvelle répartition de la taxe
de vente en tenant compte des obligations de certains centres urbanisés.
D'autres propositions sont incluses dans le document qui a été
déposé, et que je n'ai pas évidemment devant moi, et
constituent un problème différent. On sait et tout le
inonde en est parfaitement conscient que les municipalités ont
des difficultés financières, que le principal problème
à l'heure actuelle des municipalités est
précisément la question fiscale, qu'il doit y avoir par
conséquent un réaménagement de la fiscalité des
municipalités, qu'on doit leur permettre d'accéder à des
sources additionnelles de revenus. C'est un problème qui est
traité différemment du problème des structures.
Aujourd'hui, nous sommes à discuter la question de structures
municipales. Mon collègue, le ministre des Finances, aura l'occasion,
lorsque le rapport sera donné par le comité, parce que
vous savez qu'il a pris un engagement, au cours de la conférence
provinciale-municipale, de créer un comité d'études qui
doit faire des recommandations d'abord au ministre des Finances de
présenter par la suite ses propres recommandations au cabinet. Ce
comité a été formé et il étudie
présentement les diverses recommandations faites par le ministre des
Finances.
Tout ceci pour dire que nous sommes parfaitement conscients de ce
problème mais que c'est un problème différent qui sera
traité
en dehors de la question des structures municipales. Mais les deux,
évidemment, doivent trouver leur application en même temps. Il est
évident que nous ne pouvons pas mettre sur pied de nouvelles structures
municipales sans, en même temps, apporter des revenus additionnels.
Je crois, M. le Président, que nos idées se rencontrent
sur cette question, et ça va se réaliser, mais en dehors du
projet de loi-cadre des communautés municipales, c'est-à-dire par
d'autres lois qui seront présentées au cours de la
présente session ou de la prochaine session.
Quant aux communautés urbaines existantes, je vous rappelle que
ces communautés urbaines reçoivent, ont reçu et continuent
à recevoir des subventions statutaires d'après les lois qui les
ont créées. Egalement, je prends le cas de la Communauté
urbaine de Montréal, des dispositions spéciales ont
été prises pour lui apporter des revenus additionnels, notamment
pour le prolongement du métro.
Même chose pour la Communauté urbaine de Québec,
où il y a des subventions spéciales qui lui ont été
données pour mettre sur pied la commission des transports. Cela existe
déjà. Evidemment, il faudra prévoir qu'avec les futures
communautés municipales, en dehors des subventions statutaires, il
faudra considérer chaque cas en particulier, et donner, s'il y a lieu,
de l'aide pour la création de commissions de transport en commun, par
exemple.
C'est évident que le gouvernement étudiera chaque cas
à son mérite. Ce que je voulais souligner tout simplement, c'est
que ce sont des subventions qui arriveront au fur et à mesure que les
besoins s'en feront sentir en dehors des $2 ou du $1 par capita accordés
à l'occasion de la création même d'une communauté
municipale.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. Gariépy, dans la seconde partie de
votre mémoire, à la page 5, vous parlez du problème de la
police, de l'organisation policière, et vous réclamez,
semble-t-il, une réorganisation des services policiers à
l'échelon du Québec.
Est-ce qu'il s'agit de votre part, en ce qui concerne l'organisme que
vous représentez, d'une recommandation impérative demandant au
gouvernement d'assumer en somme la responsabilité de l'organisation de
la police?
M. LE PRESIDENT: Excusez-moi, avant que M. Gariépy ne
réponde, je voudrais bien que l'on s'entende sur un point. Si ma
mémoire est bonne, lorsque l'Association des gérants municipaux a
fait des représentations au niveau de la police et à d'autres
niveaux, il s'agissait là d'une représentation qui avait
été faite le vendredi matin, lorsqu'au cours de la
conférence provinciale-municipale, nous avons parlé d'un
deuxième sujet qui était le partage des compétences.
Aujourd'hui, nous discutons de l'autre sujet, celui qu'on a
discuté et qui est relié très directement au livre blanc,
qui est la réforme des structures municipales. Il peut y avoir
évidemment un lien entre les deux, mais pour éviter je
n'ai aucune objection qu'on discute de quelque sujet que ce soit que
l'on touche à un éventail trop considérable de sujets, je
me permets de faire cette mise au point, quitte à ce que les membres de
la commission acceptent de discuter d'autres sujets, je n'y ai aucune
objection, au contraire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, permettez-moi de vous
faire observer qu'à la page 5 de cette seconde partie du mémoire,
l'Association des gérants municipaux rattache le problème de la
police au problème général des compétences des
municipalités.
Comme je l'ai souligné au départ, comme nous, les
députés, nous n'avons pas officiellement été
invités à assister à cette conférence
provinciale-municipale, nous n'étions pas au courant de tous les sujets
qui avaient pu y être traités. Comme nous n'avons pas d'autre part
les documents que l'on avait promis de nous remettre...
M. TESSIER: Je m'excuse d'interrompre le député de
Chicoutimi, mais vous avez été invités directement par
moi-même à l'Assemblée nationale.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, si vous me permettez,
et si le ministre me permet, nous n'avons pas été officiellement
informés, nous l'avons été officieusement et nous n'avons
pas encore les documents ad hoc, par conséquent nous ne savons pas
d'office quels ont été les sujets traités lors de cette
rencontre. Comme l'Association des gérants municipaux rattache cette
question de la police au problème des compétences, c'est la
raison pour laquelle j'ai demandé à M. Gariépy de nous
dire très brièvement s'il en fait une recommandation
impérative.
M. GARIEPY: Nous avions traité cette question dans le chapitre
des compétences, à la conférence provinciale-municipale et
nous avons mentionné, dans notre mémoire, que la police
n'était pas une des compétences mentionnées dans le livre
blanc. La raison pour laquelle nous avons fait mention de ce service est que
pour les municipalités assez importantes de la province, c'est quand
même un service important et un service qui a été tellement
considéré important par le gouvernement, que c'est
celui-là qui a été la cause première de la
création de la Communauté urbaine de Montréal.
Nous avons mentionné dans notre mémoire que nous croyons
et nous faisons mention que nous nous référons au rapport
Prévost à ce sujet que les recommandations du rapport
Prévost semblent à notre point de vue acceptables. Ce sont des
personnes spécialisées dans le
domaine qui ont examiné le problème et ce rapport
recommande la création de services policiers par région, pour la
province. Il est même spécifique en disant qu'il devrait y avoir
dix régions policières dans la province et que ces régions
policières devraient être autonomes quant à leur
administration locale, mais relever d'une autorité gouvernementale en ce
qui concerne les grandes politiques de l'administration des services policiers
dans la province.
Nous en avons fait mention, parce que nous sommes des gérants
municipaux, que nos municipalités ont presque toutes des services
policiers et que pour nous ce sont des services importants.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Avez-vous remarqué, M. Gariépy,
que ça répond à la question que je vous ai posée?
M'en tenant aux indications que nous a données le président, je
ne veux pas poursuivre un débat sur ce sujet-là, mais je veux
avoir une opinion formelle, parce que c'est dans le mémoire que vous
présentez ce matin.
Alors je vous remercie, M. Gariépy.
M. LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a d'autres questions à poser
à M. Gariépy?
M. BURNS: Oui, M. le Président.
M. Gariépy, à la page 7 de la première partie de
votre mémoire, vous vous dites d'accord sur les principes qui ont servi
à établir le découpage. Est-ce que, pour arriver à
cette accord, votre association s'est penchée sur le problème de
la capacité administrative par rapport à la taille des secteurs
administratifs, les secteurs d'aménagement municipaux,
c'est-à-dire la balance d'efficacité administrative selon la
population couverte dans le découpage suggéré ou bien si
tout simplement vous avez...
M. GARIEPY: Nous avons obtenu les explications des représentants
du ministère à une réunion qui a eu lieu à
Drummondville à la fin du mois d'avril concernant cette question. Les
représentants du ministère nous ont fait part que, lorsqu'ils ont
proposé certains territoires dans la province qui pourraient être
groupés en communautés municipales, ils ont tenu compte de
différents facteurs dont des facteurs économiques, dont la
possibilité de grouper autour d'un centre économique reconnu
différentes municipalités.
Nous faisons mention d'une façon générale, que nous
sommes d'accord sur ces grands principes, mais nous soumettons respectueusement
que ces propositions ne devraient pas être rigides, que les
municipalités qui sont à la limite de ces territoires-là
devraient avoir la possibilité de discuter avec les communautés
voisines, avec les villes voisines, pour voir si pour elles il ne serait pas
avantageux de faire partie d'un territoire voisin plutôt que celui
où elles ont été montrées dans le découpage
du territoire faisant partie du livre blanc.
M. BURNS: Ce que je veux dire tout simplement, M. Gariépy, c'est
que votre conclusion qui se trouve à la page 7, je me posais la
question n'arrive pas à la suite d'une étude scientifique
de votre part. C'est-à-dire que c'est beaucoup plus empirique et qu'elle
provient des renseignements qui vous ont été fournis, comme vous
le dites, par le ministère des Affaires municipales.
M. GARIEPY: D'accord. Nous avons pris connaissance, comme je vous l'ai
expliqué, des principes dont le ministère s'est servi pour en
arriver à ces propositions-là et c'est quand même en tenant
compte des grandes régions économiques reconnues par le
gouvernement, depuis un très grand nombre d'années.
C'était un des principes directeurs,
M. BURNS: Merci.
M. BOIS: M. Gariépy, à la page 9 de votre rapport vous
parlez de la nécessité de former un comité
exécutif. En faisant ces recommandations, est-ce votre but de
protéger l'individu, par exemple, qui pourra avoir droit plus facilement
à l'administration d'un regroupement régional? En limitant cela
à 100,000, si vous voulez.
M. GARIEPY: Oui. Nous avons soumis cette proposition parce que nous
croyons que, dans la plupart des régions de la province, les
communautés municipales n'auront pas tellement une grande population,
n'atteindront pas 100,000. Nous croyons que, s'il y a un comité
exécutif, ce ne sont pas toutes les municipalités qui seront
représentées à ce comité exécutif; il
pourrait arriver que le maire d'une ville représente trois ou quatre
municipalités. Etant donné que, dans les municipalités
rurales, elles sont assez éloignées, il pourrait arriver qu'un
maire soit le représentant de municipalités qui sont à 20
ou 25 milles de la sienne, peut-être, ou à 10 ou 15 milles de la
sienne. Ce serait ce maire-là qui représenterait lesdites
municipalités à un comité exécutif.
Nous croyons que, dans la majorité des cas, pour la province, il
ne serait pas recommandable d'avoir un comité exécutif. Nous
mentionnons "quand la population est moindre de 100,000" justement parce que
dans ces cas-là il lui serait difficile d'être
représentée par un maire qui est éloigné d'une
municipalité.
M. BOIS: Je vous remercie, M. Gariépy.
M. LE PRESIDENT: Il n'y a pas d'autres questions? Merci. M.
Gariépy. Nous allons passer à la ville de Sherbrooke. Je
demanderais au porte-parole de la ville de Sherbrooke de bien vouloir
s'identifier.
Comité d'étude des structures
municipales de la région de Sherbrooke
M. BUREAU: Marc Bureau, maire de la ville de Sherbrooke. M. le
Président, M. le ministre, ce n'est pas au nom de la ville de Sherbrooke
que je viens parler ce matin, mais plutôt à titre de
président du comité d'étude des structures municipales,
secteur 5, de la région de Sherbrooke.
Le secteur 5 de la région de Sherbrooke comprend 17
municipalités, dont six ont une population de moins de 1,000 âmes,
dont sept ont une population variant entre 1,000 et 3,000, dont une a une
population de 3,000 à 5,000 et Sherbrooke avec ses 80,000. Lors de la
présentation du livre blanc faisant suite à la conférence
municipale-provinciale et après plusieurs séances assez
difficiles, d'un commun accord les représentants des différentes
municipalités ont décidé de former un comité
d'étude sur les structures municipales et sur le livre blanc.
Chacune des municipalités a délégué un
représentant officiel et un observateur à ce comité
d'étude. Le comité s'est fixé les objectifs suivants:
l'étude du découpage du territoire, et des sept
compétences proposées dans le livre blanc. Evidemment, notre
comité ne fait pas exception à la règle et nous
éprouvons certaines difficultés venant de la diversification des
besoins de chaque municipalité, compréhension encore
incomplète de la documentation mise à la disposition des
délégués, réticence de certaines
municipalités, et certaines expertises, que nous avons commandées
au centre de recherche en aménagement régional, ne sont pas
encore disponibles. Cependant, chez tous les délégués il
existe un désir d'étude en commun des moyens de résoudre
les difficultés suscitées par les problèmes d'ordre
régional.
Nos dernières délibérations nous amènent
à ceci: le découpage du territoire, qui a fait le sujet d'une
étude qui a pris plusieurs heures, et les municipalités
limitrophes du territoire proposé font l'objet d'une étude
particulière. Nous ne pouvons arriver, à ce moment-ci, à
dire que les municipalités limitrophes, soit à l'intérieur
du territoire proposé ou à l'extérieur, ont avantage ou
pas à faire partie de notre secteur et que notre secteur a avantage ou
pas qu'elles en fassent partie. Nous avons décidé, à ce
moment-là, que seulement l'étude de l'application possible des
différentes compétences pourrait nous permettre de dire, sans
l'ombre d'un doute, que telle municipalité devrait faire partie de telle
région.
Les membres du comité sont d'accord sur le nombre et le type de
compétences contenues dans le livre blanc, qui devront
éventuellement être administrées par une communauté
municipale lors de sa création et pas nécessairement au
départ.
Les membres du comité appuient également toutes les
dispositions qui permettraient au ministère des Affaires municipales
d'ordonner un référendum dans le territoire des
municipalités touchées par le regroupement éventuel.
D'autre part, le comité désirerait que le ministre puisse
rendre obligatoire la participation des municipalités de chacun des
secteurs aux comités qui seront formés pour l'étude des
structures municipales, et cela sous peine d'amende.
Actuellement, dans notre territoire, la majorité des
municipalités font partie du comité d'étude. Il y en a
qui, faute de compréhension ou d'intérêt, ne s'y
présentent pas. Le comité chemine et aura à recommencer
son cheminement si, un jour ou l'autre, ces municipalités font partie du
territoire. C'est pourquoi le comité voudrait que le ministre ait le
pouvoir d'ordonner la participation aux études.
Quant à la représentativité, le comité s'est
limité à dire 60 p.c. des municipalités
représentant 60 p.c. de la population, ce qui, dans notre secteur, ne
change rien par rapport à des municipalités et 50 p.c. de la
population.
Au sujet de la participation de la population, notre secteur qui
comprend beaucoup de zones ou de secteurs d'été, demande que, si
la population doit être consultée, les résidents aient
à se prononcer, comme les domiciliés. C'est donc dire que si M.
X. a un chalet à tel endroit, il devrait se prononcer pour cette
municipalité aussi.
Nous vous remercions de l'occasion d'avoir pu dire où nous en
étions rendus et ce que nous pensions.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Bureau.
M. TESSIER : M. le Président, je voudrais saisir cette occasion
pour remercier le maire de Sherbrooke du travail très valable qui a
été fait par le comité qu'il a formé. Je garde un
excellent souvenir de la visite que je lui avais rendue à l'hôtel
de la ville de Sherbrooke, et au cours de laquelle il avait eu
l'amabilité de convoquer un certain nombre de maires des
municipalités environnantes.
Je vois que depuis ce temps-là vous n'avez pas
chômé, que vous vous êtes réunis, que votre
comité a siégé à plusieurs reprises. J'en suis
d'autant plus heureux de...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela fait des chômeurs de moins.
M. TESSIER: ...constater que les principales recommandations que vous
venez d'énumérer seront toutes contenues dans le projet de loi,
comme je l'ai exposé tout à l'heure. Je vous remercie, M. le
maire.
M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autre question, je demanderais au
représentant de l'Union des conseils de comté de bien vouloir
s'approcher du micro. M. Moreau.
Union des conseils de comté
M. MOREAU: M. le Président, mon nom est Jean-Marie Moreau,
président de l'Union des conseils de comté de la province de
Québec. J'aimerais au début, au nom de l'Union des conseils de
comté, remercier le ministre des Affaires municipales pour avoir
consenti, à la lumière des suggestions qui vont être faites
ici aujourd'hui, à soumettre pour étude aux parlementaires un
avant-projet de loi susceptible d'apporter certains éclaircissements sur
la loi-cadre et peut-être aussi certaines améliorations.
Nous savons combien il est à la fois important et délicat
d'entreprendre une réforme des structures municipales. Important,
d'abord parce qu'en certains endroits du Québec les organismes actuels
sont débordés par l'ampleur et le nombre des problèmes
à résoudre.
Délicat aussi, parce que le Québec étant presque un
continent, il n'est pas souhaitable d'ériger des structures identiques
pour régler des problèmes qui diffèrent beaucoup d'une
région à l'autre.
Depuis plusieurs années déjà, notre union fait part
aux autorités gouvernementales de ses inquiétudes face aux
nombreux problèmes que suscite la transformation rapide de notre
société.
Ce que nous désirons, c'est une véritable réforme
qui tienne compte de tous les besoins réels de la population. Il faut
être réaliste et bien connaître les outils que nous avons
déjà si on veut que cette réforme possède des
assises solides.
Des structures régionales vidées de leurs pouvoirs et de
leurs revenus.
Tout le beau projet des structures actuelles locales et supramunicipales
s'est désagrégé lentement avec les années.
Le conseil de comté a vu ses pouvoirs diminuer progressivement
à mesure qu'étaient accordés des pouvoirs plus
étendus aux villes et aux villages. Effectivement, dès qu'une
municipalité obtient un statut de ville, elle sort automatiquement de la
juridiction du conseil de comté.
Quant aux pouvoirs des conseils de comté, ils sont aussi disparus
à mesure que les ministères provinciaux étendaient leur
juridiction sur des matières semblables.
Au fond, notre législation parle encore de cette structure
régionale qu'est le conseil de comté, mais l'organisme n'a
pratiquement plus de pouvoirs, il n'a plus de revenus également, il n'a
pas juridiction sur les villes et ses limites territoriales sont
défectueuses.
Voilà un exemple de structure régionale existante qu'on
s'est ingénié d'année en année à
affaiblir.
Dans son souci de mieux répartir les richesses de la
société, notre gouvernement provincial doit tenir compte de
plusieurs impératifs. Il nous semble que le premier à
considérer et de loin le plus important est la recherche des besoins
réels de la population.
Nous devons relever chez nous comme ailleurs le défi que
présentent les années d'abondance que nous traversons.
Paradoxalement ces années nous apportent encore trop souvent
l'appauvrissement et la désertion des régions rurales et la
formation dans les centres urbains d'une classe où la maladie, la
pauvreté et le chômage sont le lot d'un trop grand nombre de nos
concitoyens.
Des besoins de superflu sont créés à grand renfort
de publicité tandis qu'on laisse aux organismes publics le soin de
combler des besoins aussi essentiels que le droit à l'éducation,
au travail et à la santé.
Un simple coup d'oeil sur l'ensemble des problèmes auxquels nous
faisons face aujourd'hui suffit pour nous convaincre que la solution n'est pas
la même pour toutes les régions du Québec.
Il est aussi vrai de dire que c'est de la pure utopie que de vouloir
régler ces problèmes par-dessus la tête de la population ou
sans que cette dernière ne soit dans le coup.
Le conseil de comté et toutes les municipalités
d'ailleurs, qu'elles s'appellent paroisses, villages, cantons ou villes, sont
des organismes connus depuis longtemps chez nous. Les ignorer en entreprenant
une réforme, c'est tout simplement faire le jeu de l'autruche.
Qu'on les critique, qu'on les amène à agir, soit, mais
qu'on les ignore en voulant ériger une structure supramunicipale,
voilà qui dépasse tout entendement.
Réformer nos structures municipales en utilisant les conseils de
comté éviterait beaucoup de frictions et de heurts inutiles. L'on
pourrait aussi amorcer des changements en tenant compte non seulement des
données géographiques et économiques, mais aussi et
surtout de la dimension humaine des problèmes à
résoudre.
Une telle approche permettrait d'avoir une vue à la fois
synthétique et analytique des services que nos organismes doivent rendre
à la population. On pourrait aussi profiter de l'expérience que
vivent actuellement les communautés urbaines pour enrichir nos
connaissances sur le fonctionnement des organismes régionaux.
Ainsi, on risque moins de connaître des erreurs coûteuses
tant en deniers publics qu'en énergies dépensées
inutilement. On active de plus les initiatives régionales et l'on rend
productifs des organismes qui ne demandent qu'à travailler.
La réforme de nos structures municipales pourrait, comme nous
l'avons mentionné précédemment, avoir comme base le
conseil de comté. Elle pourrait par la suite se poursuivre facilement en
incluant les villes dans le champ de leur juridiction. Nous éviterions
ainsi, dès le départ, la formation d'un bloc urbain et d'un bloc
rural qui s'affronteraient à l'année.
Cela ne réglerait certes pas toutes les tensions entre les ruraux
et les urbains, mais ça leur permettrait à tout le moins d'avoir
un forum leur permettant de discuter de problèmes communs.
Il nous semble qu'on a trop longtemps parlé de la division
ville-campagne. N'est-il pas grandement temps de mettre le doigt sur les
problèmes communs aux deux parties et les amener autour d'une même
table à collaborer pour trouver des solutions durables?
Il est certain qu'il y aura toujours des frictions, voire même des
oppositions farouches à certains projets. Eliminer les
possibilités de discussions autour d'une table, n'est-ce pas transporter
dans le chemin des questions qui exigent de la patience, de la réflexion
et un honnête échange d'idées?
Une véritable réforme exige aussi qu 'on fasse
l'inventaire de l'actif et du passif. Notre esprit critique bien connu, aura
tôt fait de montrer ce qui ne va pas. Il ne faut pas se contenter de cela
mais aller plus loin et voir ce qui permet d'avancer.
Les citoyens de nos municipalités nous ont élus pour
administrer leurs biens et fournir des services à la population.
Nous avons reçu mandat d'administrer, dans le meilleur
intérêt de la communauté et au meilleur de nos
connaissances. Nous devons donc voir la réalité en face et nous
ne pouvons pas cacher à nos contribuables les taxes futures qu'ils
auraient à payer.
Conséquemment, il nous paraît logique de procéder
à bien établir nos actifs. Dans chaque comté municipal,
une étude devrait être faite afin de savoir quels sont les actifs
de chacune des municipalités en présence et comment sera
réparti le fardeau fiscal lors de la réforme.
L'industrie a de grandes leçons à nous apprendre à
ce sujet. Etant aux prises avec la concurrence et les impératifs des
marchés, l'entreprise se doit d'obtenir des résultats tangibles
à défaut de quoi la faillite la guette. Lorsqu'elle prend de
l'expansion et décide d'élargir ses cadres en faisant
l'acquisition d'autres entreprises, elle analyse toutes les données de
la question.
Une entreprise sérieuse ne marche pas à l'oeil et
procède à bien jauger la situation et à faire un
inventaire sérieux des actifs qu'elle acquiert. Elle décide de la
réorganisation après avoir franchi toutes les étapes
nécessaires à une saine administration.
Pour parler plus simplement, elle envoie les comptables faire la
vérification des livres, avant plutôt qu'après la
réorganisation.
En ce qui concerne les fusions, M. le Président, nous avons
depuis longtemps insisté et nous insistons aujourd'hui auprès de
notre gouvernement sur le fait qu'une politique de réorganisation
valable en matière municipale doit commencer par le regroupement des
villages et des paroisses.
C'est le point de départ, à notre sens la première
étape à franchir avant d'aller plus loin.
Nous connaissons déjà la loi des fusions volontaires. Il
nous semble qu'il serait facile d'inciter les municipalités à
étudier les possibilités de fusion en prévoyant un
mécanisme qui forcerait un conseil à entreprendre
l'étude.
Par une requête présentée à un conseil
municipal, dix électeurs propriétaires et domiciliés dans
une municipalité pourraient demander au conseil d'étudier la
possibilité de fusionner leur territoire avec un ou plusieurs autres.
Une telle requête obligerait alors les conseils en question à
s'asseoir à une même table et à aborder sérieusement
la question.
Il nous semble plus logique et plus raisonnable d'amener les gens
à collaborer et à discuter ensemble de leurs problèmes
plutôt qu'à leur présenter une formule qui laisse la porte
toute grande ouverte au bon vouloir de personnes qui, bien que
compétentes, n'ont pas d'intérêt dans la place et n'auront
ni le plaisir ni le déplaisir de payer le coût de leurs
décisions.
Le nombre de membres siégeant au conseil de comté devrait
être choisi afin d'établir un juste équilibre entre villes
et municipalités rurales.
Cette représentation pourrait être modifiée par
suite du regroupements de municipalités ou de changement dans le nombre
de la population.
Nous sommes convaincus que chaque conseil de comté pourrait
facilement trouver, en partant de ces quelques principes, le système le
mieux adapté à ses besoins.
Un écueil guette la réalisation de la réforme que
nous proposons, comme d'ailleurs celle qui nous fut soumise pour étude
par l'honorable ministre: la hausse du coût des services et la
disparition de collectivités auxquelles les citoyens sont depuis
longtemps attachés.
Nous sommes d'avis que l'administration publique, la trop grande
hâte à transformer les structures et le fait de mal étudier
tous les aspects de la question entraînent trop souvent des erreurs
coûteuses pour plusieurs générations.
C'est vouer à l'échec, dès le départ, un
travail de réorganisation par ailleurs valable.
En ce qui concerne les pouvoirs des conseils de comté, voici la
liste des pouvoirs que nous remettions en décembre dernier à
l'honorable ministre. Cette liste n'est pas limitative mais indique bien
l'intention qu'ont depuis longtemps les conseils de comté de jouer le
rôle pour lequel ils ont été créés, soit
:
Promouvoir l'industrie, le commerce, la récréation et le
tourisme dans son territoire;
Aménager, posséder, développer et administrer dans
son territoire des parcs commerciaux ou industriels, y construire des voies
publiques et des terrains de stationnement, y installer des services
publics;
Aménager, posséder, développer et administrer dans
son territoire des parcs publics, des complexes récréatifs,
sportifs et touristiques comprenant des centres de ski, des terrains de camping
et de pique-nique ainsi que des activités secondaires destinées
à des fins récréatives, sportives et touristiques
inhérentes au fonctionnement de telles entreprises;
Préparer l'évaluation des biens immobiliers dans son
territoire, la révision de cette évalua-
tion et le recensement; l'élaboration d'un plan
d'aménagement du territoire; l'établissement d'un service
centralisé du traitement des données, la facturation et l'envoi
des comptes de taxes, en laissant toutefois la perception au
secrétaire-trésorier de la municipalité locale;
l'uniformisation et la réglementation de la circulation, de la
synchronisation des systèmes de contrôle mécanique de la
circulation sur les grandes voies de communication et les chemins
intermunicipaux; l'élaboration de normes minimales en matière de
construction; un droit de regard sur le drainage, le reboisement et sur la
distribution des forêts; les abus préjudiciables à
l'agriculture; le réaménagement des terres; le service
d'ambulances; les foyers pour vieillards.
Dans le transfert des pouvoirs toutefois, M. le Président, il
faudrait aussi agir avec prudence. Chaque conseil de comté devrait alors
prévoir quel personnel serait requis pour administrer de tels services
ainsi que le coût supplémentaire d'administration, s'il y a
lieu.
Nous savons tous de plus que certaines personnes ont mis des
années à élaborer des moyens rapides et peu coûteux
de régler les problèmes locaux. Il faudrait
bénéficier de cette expérience et, peut-être, faire
l'essai de l'administration en commun de certains services avant de mettre sur
pied un système qui vaille pour tous les services mentionnés plus
haut.
Il faut éprouver les formules nouvelles en commençant au
bas de l'échelle et en faisant confiance aux administrateurs de
l'endroit.
Après le regroupement de quelques municipalités, une
nouvelle municipalité serait ainsi formée qui assumerait les
pouvoirs et les devoirs des anciennes. On peut même prévoir
qu'éventuellement plusieurs comtés municipaux pourraient faire
des travaux ensemble.
Entre-temps, il serait facile et peu coûteux de favoriser la
collaboration intermunicipale au moyen d'ententes de service.
L'on sait que présentement plusieurs municipalités louent
d'une autre des services tels que la police, la protection contre les
incendies, les loisirs, les systèmes d'eau potable, la disposition des
ordures.
En ce qui concerne la fiscalité, M. le Président,
voilà un sujet complexe et combien important dans la réalisation
d'une véritable réforme de nos structures municipales.
Tous les services que nous sommes appelés à rendre
à la population doivent être payés par elle. Aussi
importe-t-il de ne rien lui cacher sur le coût de l'opération.
Nous sommes convaincus que toute proposition de réforme des
structures municipales est suspendue davantage aux revenus des
municipalités et des conseils de comté qu'aux besoins qu'on
voudrait bien leur conférer.
A la suite de la conférence provinciale-municipale de mai
dernier, nous avons commencé l'étude du volumineux document qui
nous fut alors remis par l'honorable ministre des Finances. Nous avons fait
imprimer les chapitres 2, 3 et 4 de ce document et nous le transmettons
dès cette semaine aux maires de toutes les municipalités
régies par le code municipal. Ce texte servira de document de travail
lors du congrès de notre union en octobre prochain.
Nous avons de plus répondu à l'invitation de l'honorable
ministre des Finances en nommant deux membres de notre organisme pour faire
partie du comité chargé d'étudier la fiscalité
municipale.
M. le Président, honorables membres de la commission, nous vous
avons fait part de nos recommandations sur ce que nous considérons
être des étapes essentiels afin de réformer
véritablement nos structures municipales. Nous osons espérer
qu'elles seront accueillies comme un apport valable à un travail de
réorganisation qui touche de près toute la population du
Québec.
Pour notre part, nous poursuivons notre travail et nous croyons que
notre mandat d'élus du peuple nous oblige à prendre nos
responsabilités en apportant des suggestions qui permettent de
transformer nos institutions afin qu'elles puissent répondre
adéquatement aux besoins des dernières décennies de notre
siècle.
Je vous remercie, M. le Président, et l'Union des conseils de
comté, notre organisme, reste à la disposition du
ministère des Affaires municipales en ce qui concerne les consultations
dans l'avenir. Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Moreau, M. le Ministre.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais féliciter M.
Moreau, président de l'Union des conseils de comté pour cet
excellent mémoire qu'il nous a présenté. Il y a
certainement des suggestions très valables à retenir. Nous avons
besoin, M. Moreau, de la collaboration entière de l'Union des conseils
de comté pour mettre sur pied cette réforme des structures
municipales.
Vous avez notamment parfaitement raison lorsque vous dites que le point
de départ serait de porter une attention toute particulière
à la fusion des municipalités de village avec les
municipalités de paroisse. C'est précisément pour cela que
j'ai l'intention comme je l'ai mentionné tout à l'heure
d'incorporer dans le projet de loi des dispositions ordonnant des
études obligatoires dans ces cas-là entre autres, même
d'ordonner des référendums, s'il y a lieu.
Je tiendrai sûrement compte de plusieurs de vos recommandations,
et j'espère qu'avec la collaboration de l'Union des conseils de
comté, nous pourrons travailler ensemble à mettre sur pied ces
nouvelles structures municipales, comme d'ailleurs vous collaborez
présentement à la commission de la fiscalité
municipale.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie M. Moreau
de son exposé. Il nous a fait valoir le point de vue des conseils de
comté.
J'aimerais poser une question au ministre à ce sujet-là.
Le mémoire de l'Union des conseils des comtés me paraît
assez clair, on voit très bien leurs intentions, leur volonté,
mais j'aimerais connaître l'opinion du ministre sur l'ensemble des
suggestions, non par chacune en particulier, qui sont faites aux pages 11 et 12
du mémoire.
Il s'agit là de l'énumération d'un ensemble de
pouvoirs que revendiquent en somme les conseils de comté. Est-ce que, de
l'avis du ministre, ces pouvoirs peuvent s'inscrire dans le cadre de la
politique que le ministre a définie lorsqu'il a parlé des
communautés municipales?
M. TESSIER: Il n'y a pas de contradiction entre les pouvoirs qui sont
requis par les conseils de comté et ceux qui peuvent être
incorporés dans le projet de loi-cadre des communautés
municipales. Il s'agit maintenant, en face de ces recommandations et
suggestions, de les étudier en profondeur, d'en discuter avec l'Union
des conseils de comté, pour voir s'il n'y aurait pas lieu d'apporter
certains amendements à la Loi des conseils de comté pour
étendre les pouvoirs des conseils de comté.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cet ensemble de pouvoirs que demandent les
conseils de comté implique des dépenses assez importantes. Est-ce
que le ministre pourrait nous donner quelques indications sur la façon
dont le gouvernement entend procéder à un
réaménagement fiscal de façon à permettre aux
conseils de comté de se prévaloir des pouvoirs que le ministre
pourra éventuellement leur donner?
M. TESSIER: Il serait prématuré, je crois,
d'émettre une opinion avant de connaître le rapport du
comité ad hoc qui a été formé pour étudier
toute la question de la fiscalité municipale, comité dont M.
Moreau fait partie.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela veut dire que le projet de loi-cadre qui
suivra l'audition de la commission ne pourra pas être
présenté avant que nous n'ayons reçu ce rapport et que
nous n'ayons étudié en même temps le projet de loi sur
l'évaluation foncière, le partage fiscal, taxe de vente, etc.
M. TESSIER: Non, je ne suis pas d'accord avec le député de
Chicoutimi sur cet exposé, parce qu'il n'y a rien qui empêche de
mettre sur pied une loi-cadre des structures municipales. Dans les quelques
mois qui suivront, mon collègue le ministre des Finances, aura, comme je
l'ai mentionné, des propositions à faire qui amèneront des
réformes en profondeur de la fiscalité municipale.
Comme je l'ai exprimé tout à l'heure, l'un ne peut pas
aller sans l'autre, mais pas nécessairement en même temps.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas nécessai- rement en même
temps, mais cela va se faire de façon concomitante puisqu'on ne peut pas
imaginer des structures qui impliqueraient des dépenses assez
importantes, des mécanismes fiscaux, et les mettre en place avant que de
faire connaître de façon précise à toutes les
personnes qui seront touchées par cela de quelle façon on
pourrait financer les projets qui naîtraient, par exemple, de ces
pouvoirs que l'on reconnaîtrait aux conseils de comté.
Le ministre connaît fort bien l'expérience que l'on a faite
récemment. On parle de nouveaux partages de la taxe de vente, etc., de
réaménagement fiscal, en même temps qu'on impose à
certaines municipalités de ville des charges additionnelles. On leur
retire les subventions qu'elles avaient pour l'entretien de certaines
artères, de certaines voies publiques et, par ailleurs, on leur parle
d'un nouveau partage fiscal. On veut leur donner de nouvelles
responsabilités puis d'une autre main on leur retire l'argent qu'on leur
donnait.
C'est pour cela que je demande au ministre de nous donner l'assurance
qu'aucune de ces structures nouvelles qui touchent le
réaménagement municipal ne pourra être mise en place avant
que nous connaissions exactement quels sont les projets du gouvernement en ce
qui concerne le financement des municipalités.
M. TESSIER: Ceci m'amène à expliquer le processus qui sera
suivi pour la mise sur pied des nouvelles structures municipales,
c'est-à-dire de futures communautés municipales. Lorsque la loi
sera adoptée et sanctionnée, il n'est pas question que du jour au
lendemain se crée sur le territoire du Québec un nombre
considérable de communautés municipales.
Il va falloir, en somme, éviter certaines erreurs du
passé, dont nous nous rendons parfaitement compte aujourd'hui. Il faudra
procéder avec beaucoup de précaution. Il ne s'agit pas de mettre
sur pied, dans les douze mois qui suivront, 25 ou 30 communautés
municipales. Il faudra que, dans chaque cas, une étude approfondie soit
menée. Nous avons déjà mis sur pied, au ministère
des Affaires municipales, un service qui va se spécialiser dans ces
études et des fonctionnaires seront à la disposition des
municipalités et des groupes de municipalités. Par exemple,
lorsqu'un groupe de municipalités en fera la demande, ou même,
comme je l'ai mentionné, lorsque certains pouvoirs pourront être
donnés au ministre concernant des études obligatoires, les
fonctionnaires feront une étude intensive de tous les avantages, des
coûts, des fardeaux additionnels que cela pourrait imposer aux
contribuables.
Dans certains cas, on trouvera sûrement qu'il n'est pas avantageux
de créer une communauté municipale, qu'il y aurait lieu
d'attendre, par exemple, que des revenus accrus soient donnés à
ces municipalités. Il ne s'agit donc pas de créer du jour au
lendemain des communautés municipales. Il y en a qui ont
déjà commencé
des études. Je sais pertinemment que certains groupes de
municipalités, depuis près d'un an, ont engagé des
experts, ont fait des études approfondies et savent exactement combien
cela va coûter, s'ils ont les moyens de former leur communauté
municipale, quel va être le taux de la taxe. Tout cela a
été étudié. Dans certains cas il y a des
municipalités qui, dans les quelques semaines qui suivront la sanction
de la loi, parce que les études ont été poursuivies, ont
été terminées même, seront prêtes à
mettre sur pied cette nouvelle structure.
Dans d'autres cas, les études devront se poursuivre et il pourra
peut-être s'écouler deux ou trois ans. Ce n'est qu'à ce
moment-là, je crois, qu'une communauté municipale pourra
être créée. C'est pour cela, et je l'ai souvent
répété, qu'il ne faut pas aller trop vite. Il va falloir
pousser les études à fond afin que nous soyons assurés que
c'est à l'avantage des contribuables de former ou de ne pas former une
communauté municipale.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie le
ministre des explications qu'il nous donne. Il apparaît évidemment
clairement que c'est l'intention du ministre de ne pas procéder trop
rapidement, de ne pas brusquer les organismes municipaux à se regrouper
dans des communautés municipales afin d'éviter certaines erreurs
je suis heureux que le ministre l'ait souligné et afin que
l'on ne retrouve pas le fouillis que l'on a connu lorsqu'on a
procédé à la régionalisation scolaire qui a
entrafné des catastrophes financières dont nous subissons tous
aujourd'hui les effets.
Je prends note de l'affirmation du ministre en ce qui concerne le
processus qu'il entend suivre pour procéder au
réaménagement municipal en même temps qu'au
réaménagement fiscal. Lorsqu'on examine le problème dans
son entier ou lorsqu'on le prend partie par partie, on voit très bien
que chacune des régions a ses particularités, a ses
difficultés économiques. Ce sur quoi je voudrais insister, et
c'est ce à quoi j'invite le ministre à réfléchir,
c'est sur l'importance de créer des structures qui deviennent de
véritables assises économiques pour les grandes régions du
Québec, particulièrement celles qui sont en voie de
développement et les régions qui sont plus
particulièrement défavorisées.
Nous avons pris, d'autre part, note de l'attention qu'il porte aux
conseils de comté et il ressort je ne crois pas mal
interpréter la pensée du ministre des Affaires municipales
que le ministre n'a pas du tout l'intention de faire disparaître le
conseil de comté, mais plutôt de lui donner une nouvelle vocation
qui s'inscrive dans le cadre d'une politique de réaménagement
global.
M. TESSIER: M. le Président, vous l'avez constaté à
la lecture du bill 48 je crois, de la Loi de l'évaluation
foncière, où il y a déjà des dispositions à
cet effet-là qui, justement, vont donner des pouvoirs aux conseils de
comté en ce qui concerne la confection des rôles
d'évaluation. Je pourrais ajouter, en terminant sur ce point, que
l'annexe au livre blanc, dans laquelle on a découpé tout le
territoire du Québec en un certain nombre, 133 je crois, de
régions...
M. VINCENT: En secteurs d'aménagement.
M. TESSIER: En secteurs d'aménagement, oui. Ce n'est qu'un
document de travail. On ne peut tenir pour acquis d'aucune manière que
toutes les parties du Québec ou toutes les municipalités seront
intégrées dans une communauté municipale. Il y a
certainement des territoires, même si l'annexe mentionne que là on
pourrait éventuellement former une communauté municipale,
où il est possible qu'il n'y en ait jamais soit à cause de
l'étendue du territoire, soit à cause de circonstances
particulières. Peut-être y aura-t-il lieu d'en former dans dix ou
quinze ans si, à un moment donné, on découvre des mines,
des richesses naturelles ou que des nouvelles agglomérations surgissent;
à ce moment-là on pourra, en face de ces faits nouveaux,
étudier la possibilité de former une communauté
municipale.
C'est pour cela que je tiens à dire qu'il n'est pas question, du
jour au lendemain ni même au cours des prochaines années, dans un
proche avenir, de former des communautés municipales partout, mais de
laisser, après étude, comme je l'ai mentionné, se grouper
les municipalités qui le désirent.
Le but de la loi, en somme, ce n'est pas autre chose que de donner un
outil. Actuellement, cet outil n'existe pas dans notre législation. Si
l'on veut former une communauté municipale aujourd'hui je prends
l'exemple de Sherbrooke, nous avons entendu l'exposé du maire, tout
à l'heure, qui a formé son comité. Il y en a des douzaines
d'autres comme ça à travers la province qui poursuivent des
études actuellement. Mais dans chaque cas, il faudrait adopter une loi
spéciale. Dans chaque cas, parce que nous n'avons pas de loi-cadre.
C'est le but tout simplement de la loi-cadre, afin de mettre cette nouvelle loi
à la disposition des municipalités qui veulent s'en servir.
M. BURNS: Si je comprends bien le ministre, pour revenir aux conseils de
comté, ce n'est pas son intention de les faire disparaître?
M. TESSIER: Non, pas du tout. Aucunement. Au contraire.
M. BURNS: Au contraire. C'est-à-dire que vous voulez augmenter
leurs pouvoirs?
M. TESSIER: Dans certains cas, oui. J'ai donné, à titre
d'exemple, la loi-cadre de l'évaluation foncière qui le
prévoit déjà.
M. BURNS: En matière fiscale entre autres?
M. TESSIER: En matière fiscale, évidemment. C'est
discuté également au comité qui a été
formé.
M. BURNS: Donc, il n'est pas question de diminuer leurs pouvoirs?
M. TESSIER: Non, mais il est question, par exemple, de continuer le
dialogue, qui est déjà d'ailleurs amorcé avec l'Union des
conseils de comté, et de voir comment on peut aménager pour
l'avenir les conseils de comté.
Je peux vous dire que je suis très réceptif à ce
sujet-là. Je n'ai pas d'idée préconçue. Je suis
prêt à toute discussion pour essayer de trouver la meilleure
solution dans les circonstances.
M. VINCENT: Maintenant, M. le Président, quand on regarde
l'annexe au livre blanc, dans laquelle on mentionne les secteurs
d'aménagement municipaux, on constate, par exemple, que des secteurs
d'aménagement sont formés, découpant le territoire d'un
conseil de comté en trois ou quatre parties. Mais je ne peux pas voir
comment nous pouvons laisser des pouvoirs aux conseils de comté,
lorsqu'en même temps, dans les secteurs d'aménagement, les
municipalités de leur propre territoire dépendront de trois ou
quatre secteurs d'aménagement. Cela va amener des conflits tout à
l'heure.
M. TESSIER: C'est justement ce qui est présentement à
l'étude.
M. VINCENT: Par exemple, vous avez le conseil de comté de
Nicolet; il y a des paroisses qui sont situées dans le secteur no 9,
d'autres paroisses dans le secteur no 10, d'autres paroisses dans le secteur no
11. Je me demande de quelle façon le conseil de comté pourra
étudier les projets ou encore avoir des représentations de ces
différentes paroisses, qui sont considérées, dans l'annexe
du livre blanc, comme faisant partie d'un futur autre territoire.
M. le Président, quelles seraient les objections majeures du
ministre à ne pas donner les pouvoirs que demande le conseil de
comté, pour justement en arriver à faire ce que le ministre veut
faire faire dans la province comme aménagement de territoires, comme
promotion industrielle, comme évaluation? Le conseil de comté
pourrait posséder ces pouvoirs, et au lieu d'avoir des secteurs
définis comme dans l'annexe, que ce soient les conseils de comté
qui aient ces pouvoirs-là.
M. TESSIER: Bien, actuellement, il y a une objection majeure. C'est que
les municipalités de ville ne feront pas partie des conseils de
comté, comme justement cela est souligné dans le mémoire
de l'Union des conseils de comté.
Dans certains cas je prends, à titre d'exemple, les
municipalités de la rive sud de Montréal, où je crois que
tous ces comtés sont urbanisés le conseil de comté
ne peut jouer aucun rôle, dans le contexte actuel. Alors, justement, on
attend l'adoption de cette loi-cadre des communautés municipales pour
former des communautés municipales.
Dans d'autres régions de la province, dans le Nord-Ouest
québécois, à titre d'exemple, ou dans la Gaspésie,
évidemment, c'est très peu urbanisé et ce sont pour la
plupart des municipalités rurales où le conseil de comté
aura sûrement un nouveau rôle à jouer. C'est là qu'il
va falloir à un moment donné départir les pouvoirs suivant
les circonstances en tenant compte des régions. C'est ce qui est
présentement à l'étude.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Reprenant l'idée de mon
collègue, le député de Nicolet, il est bien évident
et le ministre l'a dit lui-même qu'il y a des
régions qui sont largement urbanisées. Je représente une
région, une circonscription qui est de plus en plus urbanisée.
C'est le cas d'autres régions que vous avez mentionnées
vous-même, c'est le cas de la région de Drummondville, etc. Est-ce
que vous ne pensez pas qu'à un moment donné, les conseils de
comté vont finir par ne regrouper que très, très peu
d'unités municipales?
M. TESSIER: Le nombre va certainement diminuer et c'est un
phénomène irréversible, c'est l'urbanisation. Il y avait
je prends un exemple le conseil de comté de Chambly qui,
à toutes fins pratiques, a cessé d'exister parce que toutes les
municipalités du comté de Chambly sont aujourd'hui des
cités ou des villes. C'est un exemple, et il est évident qu'avec
l'urbanisation, les conseils de comté ont un rôle qui se situe au
niveau des municipalités rurales.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. le ministre, est-ce que
justement la déclaration que vous avez faite tout à l'heure et ce
que vous venez de dire ne constituent pas une sorte de leurre? Lorsque vous
assurez les conseils de comté de leur existence et du grand cas que vous
allez en faire, est-ce qu'en même temps vous pensez au fait que ces
conseils de comté seront de moins en moins nombreux, regrouperont de
moins en moins d'unités et qu'à toutes fins utiles leur
rôle ne pourra absolument pas devenir celui qu'ils réclament
à la page 11 de leur mémoire puisqu'il semble bien dans votre
esprit et cela va dans le sens de la politique que vous mettez de
l'avant que l'on regroupera en fonction d'une urbanisation qui
s'accélère et que, du même coup, le rôle et la
vocation des conseils de comté seront altérés et
diminués d'autant?
M. TESSIER: Non, leur rôle ne sera pas diminué à mon
sens, mais le nombre des conseils de comté sera diminué
nécessairement par l'urbanisation de certains comtés.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, leur poids...
M. TESSIER: Mais ça ne veut pas dire que leur rôle sera
diminué.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Leur rôle ne sera pas diminué,
mais leur poids, en termes de rapport de force, ne signifiera plus rien
lorsqu'on aura procédé à la création d'un certain
nombre de communautés municipales.
M. TESSIER: Non, je crois que vous allez trop loin en disant...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est-à-dire que je ne vous prête
pas d'intentions, M. le ministre, mais je vois...
M. TESSIER: C'est ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... j'envisage l'avenir.
M. TESSIER: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Puisque la politique que vous mettez de
l'avant va dans le sens de la création de communautés
municipales, il y aura d'autres communautés urbaines. Compte tenu de
l'urbanisation qui s'accélère, il arrivera fatalement que
même si le rôle des conseils de comté n'est pas
diminué, comme vous le dites, le rapport de force entre les conseils de
comté et, d'autre part, les communautés municipales et les
communautés urbaines ne sera plus du tout le même. Les conseils de
comté ne seront plus, à toutes fins utiles, que des vestiges d'un
système.
M. TESSIER: Evidemment, si l'on veut parler de ce qui arrivera dans 200
ans d'ici, c'est possible, mais...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela n'ira pas vite, votre réforme.
M. TESSIER: ... pas dans un avenir immédiat.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous allez avoir le temps de
démissionner plusieurs fois d'ici ce temps-là.
M. TESSIER: C'est-à-dire que je n'aurai pas besoin de
démissionner à ce moment-là. Je pense bien que la plupart
de nous...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous regarderons cela d'en haut.
M. TESSIER: Nous regarderons cela d'en haut, oui.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de l'Assomption.
M. PERREAULT: M. Moreau, à la page 7 de votre mémoire, je
vois que vous avez mentionné: "La réforme de nos structures
municipales pourrait, comme nous l'avons mentionné, avoir comme base les
conseils de comté." Mais vous ajoutez: "Elle pourrait, par la suite, se
poursuivre facilement en incluant les villes." Est-ce que vous auriez
objection, à l'Association des conseils de comté, à
inclure les villes immédiatement?
M. MOREAU: Absolument pas.
M. PERREAULT: Pas par la suite, immédiatement. On constate, en
regardant la carte municipale de la province et particulièrement la
région de Montréal, que plusieurs conseils de comté ont
une population entre 50,000 et 100,000. Ils pourraient automatiquement devenir
immédiatement des communautés municipales sans grandes
discussions. Nous pourrions leur donner des pouvoirs.
M. MOREAU: Aux conseils de comté?
M. PERREAULT: Aux conseils de comté qui correspondent à
des communautés municipales...
M. MOREAU: Qui correspondent aux communautés municipales.
M. PERREAULT: ... dans plusieurs cas. M. MOREAU: Exactement.
M. PERREAULT: Dans ma région, par exemple, le comté de
l'Assomption pourrait facilement, dans son entier, devenir une
communauté municipale.
M. MOREAU: Et jouer le même rôle à travers les
structures de conseil de comté qu'une communauté municipale
pourrait jouer. Exactement.
M. PERREAULT: Alors, vous n'auriez pas objection à inclure les
villes dès le départ?
M. MOREAU: Non.
M. BOIS: M. le Président, je me reporte à la question
soulevée par le député de Chicoutimi. Est-ce que, par
exemple, nous devrions nous arrêter aujourd'hui à continuer
strictement dans la réforme de la façon qu'elle a
été entreprise au lieu de considérer les conseils de
comté parce que cela ne s'est pas fait, disons, à cause de la
loi? Je comprends que les villes sortaient automatiquement des conseils de
comté. Mais dans la pratique, l'idée est excellente, ici. Est-ce
que les conseils de comté ne constituent pas réellement une base
d'approche, si vous voulez, à une réforme globale plutôt
que d'entreprendre une réforme tout à fait structurée?
M. TESSIER : Le tout doit se faire évidemment en collaboration
avec les conseils de comté, mais le but principal du projet de loi
je l'ai expliqué c'est de viser surtout aux
municipalités urbaines. C'est là l'urgence. Je suis convaincu que
ce sont des groupes de municipalités urbaines qui sont
déjà dans des secteurs urbanisés qui seront les premiers
à se prévaloir de l'outil qu'on met à leur disposition
pour créer une communauté municipale. A travers ça, il va
se glisser évidemment quelques municipalités rurales dans
certains cas. Mais le but de la loi n'est pas de refuser, en premier lieu,
uniquement des municipalités rurales. C'est là que le conseil de
comté continuera à avoir un rôle à jouer. Il faut
étudier la possibilité, peut-être, d'accroître les
pouvoirs.
M. BOIS: Justement, en regard de votre...
M. TESSIER: On discute deux questions évidemment en même
temps. Il faut d'abord donner aux municipalités urbaines qui veulent se
regrouper, la loi qui leur permettra de le faire légalement et de mettre
en commun certains services qui, dans certains cas, sont urgents, absolument
urgents.
En même temps, nous allons poursuivre les études avec
l'Union des conseils de comté sur les nouvelles structures à leur
donner.
M. BOIS: M. le Président, pour reprendre l'affirmation de M. le
ministre Tessier, est-ce que la loi aura pour effet automatiquement, par le
simple fait qu'il y aura trois ou quatre villes dans un comté, qu'il y
aurait peut-être des avantages particuliers à se réunir, de
forcer automatiquement tout un groupe de municipalités rurales du
même secteur à se rallier forcément à ce groupe de
municipalités de ville?
M. TESSIER: Forcément, l'étude pourra devenir dans
certains cas obligatoire. Mais il faut tout de même qu'il y ait au moins
60 p.c. des municipalités concernées qui adoptent le
règlement.
M. BOIS: Une dernière question, M. le Président, à
M. Moreau...
M. TESSIER: S'il y a juste 60 p.c, on peut avoir des hésitations
à ce moment-là. On peut dire: Il vaudrait peut-être mieux
encore attendre, poursuivre les études. Cette norme de 60 p.c. est un
minimum. Mais c'est tout de même le lieutenant-gouverneur en conseil qui
décide et qui émettra de nouvelles lettres patentes. Et j'ai bien
l'impression que, dans le cas où ça arriverait juste à 60
p.c, le lieutenant-gouverneur en conseil dira: Ecoutez, on va continuer
à étudier ça encore pendant un an. Et si, au bout d'un an,
on nous rapporte qu'il y a 75 p.c. ou 80 p.c, je pense bien qu'il n'y aura plus
d'hésitation à émettre les lettres patentes.
M. BOIS: Une dernière question à M. Moreau...
M. TESSIER: Excusez-moi. Mais il faut que chaque cas soit
étudié à son mérite. C'est bien difficile de
prendre un exemple général qui va s'appliquer dans tous les
cas.
M. BOIS: Merci. M. Moreau, à la page 6 de votre mémoire,
à l'avant-dernier paragraphe, vous mentionnez par exemple, à la
dernière partie: "On pourrait aussi profiter de l'expérience que
vivent actuellement les communautés urbaines pour enrichir nos
connaissances sur le fonctionnement des organismes régionaux."
Est-ce que par là vous pouvez par exemple définir d'une
façon plus précise ce que vous entendez, soit sur la partie
péjorative ou la partie des améliorations qu'il y aurait pour des
villes ou des municipalités quelconques à s'unir?
M. MOREAU: A la lumière de l'expérience des
communautés urbaines existantes, et également de
l'expérience qu'elles vivent présentement parce que je
pense que c'est tout de même une expérience, c'est tellement
récent il y aurait lieu de prendre exemple de certaines erreurs
qui ont pu être commises et aussi de certains avantages qui existent dans
les communautés urbaines et qui pourraient être appliqués
au conseil de comté, qui serait à ce moment-là l'organisme
municipal qui grouperait dans son sein des municipalités.
M. BOIS: Est-ce que, dans ces erreurs, vous voulez mentionner surtout
les coûts administratifs supplémentaires occasionnés par
certains regroupements?
M. MOREAU: Cela pourrait faire partie des études.
Je n'ai pas de cas d'espèce précis présentement,
mais il reste que nous devrions prendre exemple et avantage des
expériences déjà amorcées dans les
communautés urbaines, pour les appliquer dans les conseils de
comté qui régiraient les municipalités.
M. BOIS: Je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions, je crois que,
même s'il est midi et vingt-cinq, nous pourrions suspendre les travaux de
la commission jusqu'à deux heures cet après-midi, alors que nous
entendrons les trois autres groupes qui ont des représentations à
faire.
Reprise de la séance à 14 h 15
M. LEDUC (président de la commission permanente des Affaires
municipales): A l'ordre, messieurs!
J'invite maintenant le représentant de la Corporation des
urbanistes du Québec à s'identifier et à faire ses
représentations.
Corporation des urbanistes du Québec
M. ASSELIN : Mon nom est Claude Asselin, président de la
Corporation des urbanistes du Québec. La Corporation des urbanistes a
répondu en mai à l'invitation de l'honorable ministre des
Affaires municipales concernant la proposition de réforme des structures
municipales. C'est dans les termes suivants que cette réponse a
été adressée au ministre.
La proposition de réforme des structures municipales dont vous
avez bien voulu nous adresser un exemplaire a suscité parmi les membres
de notre corporation le plus vif intérêt. Notre conseil,
notamment, a été en mesure d'en apprécier le contenu et le
comité, par son étude, a confirmé les heureuses
conséquences que l'on peut attendre pour l'ensemble de la province de la
mise en oeuvre de la réforme proposée. Dans le domaine qui est le
nôtre, celui de l'urbanisme entendu dans son sens le plus large, il
répond à une nécessité souvent
évoquée dans le passé, en préface ou en conclusion,
des projets d'aménagement à l'échelle municipale, soit
celle de dépasser les territoires administrativement restreints, pour
considérer l'agglomération de fait dont la croissance est souvent
suburbaine.
Bien que toute étude comporte normalement une analyse de
l'étendue du caratère des ressources et des besoins de la zone
d'influence privilégiée et de son évolution, il est dans
la plupart des cas difficile de dépasser le mandat donné à
l'urbaniste lorsque celui-ci aborde les propositions relatives aux politiques,
aux concepts, à l'utilisation du sol et surtout aux programmes
opérationnels. Le devenir des municipalités
périphériques reste dès lors du domaine des projections et
des suggestions comme le démontre entre autres la difficulté de
créer des parcs industriels d'intérêt commun.
La détermination des sites de loisirs souvent disponibles
au-delà des limites de la ville centre a souvent posé des
problèmes du même ordre, ainsi que l'établissement
incontrôlable des centres commerciaux dits centres d'achat.
L'expérience quotidienne des urbanistes pourrait nous conduire à
multiplier ces exemples de la situation paradoxale dans laquelle il se trouve,
ici comme ailleurs, quand un périmètre administratif parfois
séculaire restreint a priori leur champ d'action à une partie
seulement d'une entité d'aménagement. Les dispositions prises
à cet égard par les législateurs étrangers,
notamment en France depuis 1943, se retrouvent au chapitre 73 du rapport de la
Commission provinciale d'urbanisme dans les prévisions de
différents types de plans régionaux.
Les urbanistes sont particulièrement satisfaits d'avoir
généralisé, par la loi-cadre annoncée dans votre
livre blanc, le principe des secteurs d'aménagement. Il englobe, en
effet, celui des groupements d'urbanisme puisque cette responsabilité
figure parmi les compétences obligatoirement conférées aux
futures communautés municipales.
Notre corporation voit, en effet, dans cette nouvelle répartition
territoriale, des pouvoirs en matière d'aménagement avec une
normalisation de ceux-ci beaucoup plus proche des réalités de la
vie socio-économique de la province, la disparition lontemps
souhaitée des contraintes imposées par le découpage
administratif ou électoral en une définition de la mission des
urbanistes plus conforme aux principes de notre discipline.
Bien que l'importance des pouvoirs spécifiques
énumérés, d'autre part: évaluation, circulation,
habitation, etc., n'ait pas échappé à notre comité,
celui-ci a limité temporairement ses commentaires aux perspectives
désormais offertes à un urbanisme indirectement renouvelé,
et affirmé dans son caractère méthodologique
l'intégration de l'urbain, du suburbain et du rural.
Si la longue expérience acquise par nos membres nous conduit
à accorder une certaine part aux réticences et aux atermoiements
inspirés de l'esprit de clocher, on connaît aussi le rôle
catalytique de l'élaboration des plans d'urbanisme et leur importance
dans la prise de conscience des besoins, des ressources et des contraintes de
la collectivité. L'urbaniste a donc un rôle éventuel
à jouer avant même que les délimitations soient
précisées en aidant à les définir dès qu'un
certain consensus est localement obtenu. Les moyens de mise en oeuvre
évoqués dans le livre blanc font, d'autre part, une large place
à l'information préalable des municipalités et notamment
à la distribution de manuels qui leur permettent de travailler d'une
façon autonome.
Dans la mesure où ce memento devra comporter une part
d'initiation à l'élaboration des plans d'urbanisme, nous mettons
à votre disposition la collaboration de notre corporation. D'une
façon plus générale, nous vous assurons de notre entier
appui dans la poursuite de la réforme entreprise. C'est dans ces termes
que la réponse a été adressée à l'honorable
ministre des Affaires municipales.
Maintenant, si vous me permettez, il y a deux points que je voudrais
ajouter. D'abord, la corporation souhaiterait être invitée
à prendre connaissance de l'avant-projet de la loi-cadre afin qu'elle
puisse faire part de ses commentaires dans le domaine qui serait plus
spécifiquement le sien, soit l'aménagement de l'urbanisme.
Un autre point que j'aimerais mentionner, c'est qu'actuellement, au
Québec, il y a un très
grand défi à relever en urbanisme et que l'effectif de la
corporation compte en fait une centaine de membres; à brève
échéance il y aurait, disons, un besoin pour 500, et dans ce
sens-là il y a un très grand pas à faire.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais remercier M. Asselin de
son appui à notre projet de loi-cadre sur les nouvelles structures
municipales. J'ose espérer que je pourrai obtenir de la Corporation des
urbanistes du Québec la même bonne collaboration lorsque nous
discuterons du projet de loi-cadre de l'urbanisme. Merci bien.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Merci, monsieur.
M. LE PRESIDENT: J'invite maintenant le représentant de
l'Association canadienne d'urbanisme, section de Québec, à
prendre la parole.
Association canadienne d'urbanisme
M. LEDOUX: M. le Président, mon nom est Jacques Ledoux. Je suis
le directeur administratif de la division du Québec de l'Association
canadienne d'urbanisme. Mon président, M. Delisle, a été
empêché de venir, à la toute dernière minute, et il
s'excuse auprès de vous.
Tôt après la déposition du livre blanc, notre
division a organisé des journées d'étude à
Drummondville pour étudier les propositions de réforme. A la
suite de ces propositions de réforme, nous avons fait parvenir au
ministre un compte rendu des délibérations du travail des
ateliers qui avaient été formés à Drummondville. Ce
compte rendu est contenu dans le numéro de "Vie urbaine" que vous avez
devant vous.
Les recommandations qui avaient été incluses dans ce
rapport au ministre étaient limitées, en fait, à une
acceptation générale de principe, mais en fonction des
modalités précises qui suivront dans la loi, certains membres
pourraient avoir des commentaires à ajouter.
Normalement, notre association ne présenterait pas de
mémoire à la suite de ces journées d'étude,
principalement parce que nos membres viennent d'à peu près toutes
les professions et que, normalement, dans chaque secteur d'intérêt
précis, ils se servent de leur association professionnelle pour faire
leurs représentations.
Ils sont regroupés dans notre association simplement en fonction
d'un objectif général qui est l'amélioration de la
qualité du milieu où vivent les populations. Toutefois, lorsque
le ministre a annoncé les modifications à son projet, et
nous avons pris connaissance de la déclaration ministérielle du 9
juillet cette déclaration nous a incités à relier
certains de nos travaux antérieurs au contenu du livre blanc. Lorsque le
ministre a dit qu'il croyait utile d'ordonner des enquêtes et de faire
suivre ces enquêtes d'un référendum, il a changé de
palier pour la décision des structures qui devraient être mises en
place. En fait, il implique, à ce moment-là, le citoyen
lui-même, la population.
Pendant deux ans, notre division a travaillé sur la question de
la participation du citoyen. Ce travail était fait en fonction de
programmes que nous ne voyons pas à court terme, mais à terme
plus long, et il nous a semblé opportun, à ce moment-ci, de vous
faire rapport des conclusions auxquelles nous étions arrivés au
cours de ces travaux antérieurs.
Spécifiquement, notre mémoire, qui est intitulé
"Vouloir commun et pouvoir collectif" suggère qu'il y ait une
modification dans l'orientation, qu'effectivement les politiques des services
municipaux soient établies par un processus de planification, que ce
processus de planification inclue dans la cueillette des données le
vouloir de la population elle-même et que, d'autre part, la
répartition des coûts pour les services soit toujours faites sur
une base de services rendus.
Si les deux recommandations étaient acceptées, la question
de l'approbation des conseils municipaux, voire même de la population, ne
serait plus aussi importante qu'elle l'est dans le moment parce que le
système actuel prévoit que le citoyen ordinaire n'a pas d'autre
choix que de déléguer sa volonté elle-même, sa
faculté de vouloir à des représentants municipaux en
espérant qu'ils agiront de la façon dont lui-même aurait
décidé d'agir.
Quand les structures regroupent très peu de monde, ce
système est fort satisfaisant. Mais lorsque les structures regroupent
beaucoup de population, le citoyen ordinaire a peur d'être perdu dans la
masse, de ne pas pouvoir faire valoir ses opinions et de payer peut-être
pour des services qu'il ne recevrait pas.
Je ne crois pas utile de lire le message ici. Je crois qu'il est
peut-être un peu difficile à digérer et demande de la
réflexion. Je le dépose et j'espère que vous pourrez y
trouver quelque utilité.
Merci.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais remercier le
représentant de l'Association canadienne d'urbanisme, section de
Québec. J'ai parcouru votre mémoire. Je vois que la plupart des
points que vous avez soulevés dans votre mémoire ont
déjà été éclaircis à la suite, comme
vous l'avez mentionné, de la déclaration ministérielle que
je faisais à l'Assemblée nationale le 12 juillet et des
déclarations additionnelles que je faisais ce matin à cette
séance.
Il reste peut-être un point que vous venez de soulever et que je
n'ai pas eu l'occasion de préciser: c'est celui de la répartition
des coûts des services. Vous avez parfaitement raison lorsque vous
mentionnez que seules les municipalités à l'intérieur
d'une communauté municipale qui peuvent bénéficier d'un
service doivent être appelées à en défrayer le
coût.
Le coût des services, d'abord. La loi prévoira qu'il sera
défrayé au prorata de la valeur des rôles
d'évaluation des différentes municipalités qui composeront
une communauté municipale. C'est-à-dire en d'autres termes, qu'on
se base sur la richesse d'une municipalité. La municipalité la
plus riche défraiera évidemment une plus grande part du
coût et la municipalité la plus pauvre paiera moins pour les
mêmes services.
Egalement, seules les municipalités qui
bénéficieront d'un service seront appelées à en
défrayer le coût. A titre d'exemple, s'il était
décidé, à l'intérieur d'une communauté
municipale, d'intégrer le service d'enlèvement des vidanges,
disons qu'il y aurait douze municipalités qui composeraient la
communauté et que huit seulement seraient désireuses de
bénéficier de ce service intégré. Seulement ces
huit municipalités-là se diviseront entre elles, au prorata de
leur rôle d'évaluation, le coût d'un tel service
intégré. Les quatre municipalités qui voudront continuer
à avoir leur propre service défraieront le coût de leur
propre service d'enlèvement des vidanges sans être obligées
de participer au service intégré.
Je pense que c'était le dernier point qui avait été
soulevé dans votre mémoire et qui n'avait peut-être pas
été éclairci.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Ledoux. J'inviterais maintenant le
représentant de la municipalité d'Orford à nous dire son
opinion.
Canton d'Orford
M. DEPOT: M. le Président, M. le ministre, MM. les membres de la
commission, mon nom est Jean-Guy Dépôt. Je suis conseiller
municipal dans la municipalité du canton d'Orford. Je ne sais pas si
vous connaissez un peu la région. C'est la région tout
près de Magog qui englobe tout le mont Orford et beaucoup de lacs.
Disons que c'est une région spécialement de
villégiature.
Je vous remercie de l'occasion qui nous est donnée
d'émettre quelques opinions sur le livre blanc. J'aimerais aussi parler
au nom des contribuables villégiateurs d'Orford et aussi au nom des
villégiateurs de la province de Québec parce que je suis
également président d'un comité que l'on appelle le
Comité des maires et conseillers résidants du Québec qui a
déjà fait à M. Tessier des recommandations pour modifier
la Loi électorale en milieu municipal de villégiature. Ceci dit,
nous sommes d'accord avec la proposition gouvernementale et nous aimerions lui
apporter quelques légères modifications.
J'aurais une question bien précise qui se résume à
ceci: Quel serait le rôle exact des contribuables résidants ou
villégiateurs en ce qui concerne la formation d'une communauté de
villégiature? Je m'attarderai sur le secteur no 6, de la région
5, c'est-à-dire les Cantons de l'Est. Ce secteur a actuellement une
population de quelque 19,000 domiciliés; la ville de Magog à elle
seule en a 14,000. C'est vous dire que les six autres municipalités ont
une population totale de 5,000, ceci en ce qui concerne les
domiciliés.
Mais si vous incluez les propriétaires résidants, vous en
avez presque autant. C'est-à-dire que, dans ce secteur précis, le
no 6, il y a beaucoup plus de propriétaires villégiateurs que de
propriétaires domiciliés. Cela amène un problème,
c'est que nous sommes d'accord avec la proposition d'augmenter le rôle
des différentes municipalités, mais il nous semble qu'il serait
bon que les villégiateurs aient leur mot à dire dans la formation
de ces communautés.
M. Bureau, ce matin, a mentionné à un moment donné
parce que nous faisons aussi partie du comité d'étude que
M. Bureau préside, c'est-à-dire la région de Sherbrooke
que les résidants aimeraient participer au
référendum éventuel dont on a parlé. M. le
ministre, est-ce que les villégiateurs auront les mêmes droits que
les domiciliés dans un avenir rapproché, c'est-à-dire pour
la formation des communautés régionales?
M. TESSIER : Absolument, les villégiateurs sont des
propriétaires, sont des contribuables. Ils votent aux élections
municipales et ils auront exactement les mêmes droits. Il n'est pas
question de faire de distinction. Ils auront les mêmes droits qu'un
contribuable résidant.
M. DEPOT: M. Tessier, si je vous pose cette question
spécialement, c'est que lorsqu'on parle d'élection, vous savez
très bien que les villégiateurs sont un peu
désavantagés.
M. TESSIER: Oui.
M. DEPOT: C'est en ce sens qu'ils n'ont pas le même vote, leur
vote n'est pas aussi pesant que celui des domiciliés en ce sens que
leurs conjoints n'ont pas le droit de vote. Aussi, ce qui arrive, c'est que les
élections ayant lieu au mois de novembre...
M. TESSIER: C'est surtout ça le gros point. D'ailleurs, c'est une
autre question distincte de celle des structures municipales, comme j'ai
déjà eu l'occasion de vous le mentionner ou d'en faire part
à certaines occasions.
J'ai mis en place un comité d'étude de la refonte de la
Loi électorale municipale. Nous aurons l'occasion pas au cours de
la présente session, peut-être de la prochaine de
présenter une nouvelle Loi électorale municipale. Nous tiendrons
compte alors des revendications que votre association m'a fait parvenir dans un
mémoire.
Je crois que le gros point, le point qui me paraît essentiel,
c'est la date des élections. Nous considérons actuellement vos
recommandations à ce sujet. La loi prévoira que, dans des
municipalités en majorité composées de
villégiateurs, la date des élections devrait être au
cours
des mois de juillet ou d'août, à tout
événement durant la période estivale.
M. DEPOT: Ce serait déjà une grosse amélioration,
parce que présentement on considère les villégiateurs sur
un pied égal en ce qui concerne les taxes municipales et les taxes
scolaires, mais lorsque vient le moment des élections ils sont
passablement désavantagés. Je suis d'accord avec vous que cela ne
fait pas tellement partie du sujet qu'on discute, mais j'y vois un
rattachement, en ce sens que je peux vous dire qu'on est bien
intéressé à former le secteur 6. De fait, une
assemblée est convoquée pour demain soir au golf d'Orford,
réunissant tous les maires du secteur 6.
M. TESSIER: Au 19e trou?
M. DEPOT: Exactement. Tous les maires et conseillers de la
région, de même que les présidents de l'association de la
région sont invités, mais il reste que les maires qui seront
présents ne représentent pas complètement les
contribuables de la région. Il y a beaucoup plus de villégiateurs
que de domiciliés. Il est important que les villégiateurs aient
leur mot à dire, au moment d'un référendum, etc.
Disons que pour le secteur 6, dont j'ai fait mention, l'idée
maîtresse est de regrouper en un tout tous les lacs importants de cette
région. Je pense entre autres aux lacs Massawippi, Memphrémagog,
Brompton, Bennaly, Bowker, Fraser.
Disons que le secteur proposé sépare en partie certains
lacs, entre autres les lacs Memphrémagog, Massawippi, Brompton et
Bennaly. Il arrive que des associations de
propriétaires-villégiateurs aimeraient faire partie du secteur 6,
le secteur qui aurait une vocation touristique ou de villégiature.
Quelle serait la procédure ou est-ce qu'une procédure est
prévue dans votre avant-projet pour permettre une certaine fusion d'un
secteur donné ayant une vocation plus particulière de
villégiature?
M. TESSIER: D'abord, il s'agit de regrouper des
municipalités.
M. DEPOT: D'accord.
M. TESSIER: Il ne s'agit pas de regrouper des lacs ou des campings ou
autres choses semblables...
M. DEPOT: D'accord.
M. TESSIER: Maintenant, évidemment, comme je l'ai
déjà déclaré, l'annexe au livre blanc est à
titre d'exemple. C'est flexible, ça. On n'est pas obligé de s'en
tenir à ça. Si une municipalité qui était à
la limite de deux secteurs veut appartenir à un secteur plutôt
qu'à l'autre, il n'y a aucune objection. C'est la municipalité
qui décidera dans quel secteur elle veut se regrouper.
Et également, la loi prévoira qu'il pourra y avoir des
ententes de mise en commun de certains services, par exemple pour les loisirs
ou les récréations, entre deux communautés. Les ententes
de regroupement de services ne se font pas uniquement à
l'intérieur d'une communauté municipale. Deux ou trois
communautés municipales peuvent avoir un intérêt commun au
point de vue des loisirs et peuvent faire une entente entre elles pour
intégrer leurs services de loisirs, qu'il s'agisse de camping ou
d'autres choses semblables.
M. DEPOT: Je vais préciser ma question, M. Tessier. Supposons le
cas d'une municipalité en longueur où vous avez à une
extrémité un secteur fortement rural et à l'autre
extrémité un secteur touristique qui touche au secteur no 6. Les
villégiateurs de cette partie de municipalité veulent s'annexer,
se séparer de l'autre municipalité. Ce matin, M. Moreau, a
mentionné que dans le cas des cités et villes, il y a la loi des
fusions volontaires, mais dans le cas des municipalités régies
par le code municipal, on dit que sur requête de dix domiciliés,
il peut y avoir séparation d'un secteur ou quelque chose comme
ça. Bien, à ce moment-là, est-ce que ce sera possible pour
les résidants de se séparer d'un secteur d'une
municipalité pour faire partie d'un autre secteur?
M. TESSIER: Bien oui, certainement que c'est possible, c'est
prévu par la loi. C'est l'annexion qui est prévue au code
municipal ou à la Loi des cités et villes. Si les
résidants d'un secteur veulent s'annexer à une autre
municipalité et automatiquement faire partie d'une autre
communauté municipale, rien ne les empêche de le faire. Cela
existe déjà.
M. DEPOT: Est-ce que ce sera possible ça d'une région
à l'autre? Parce que le cas que je vous ai cité, c'est un lac.
C'est une région qui fait partie de la région de Montréal
et qui voudrait venir dans la région de Sherbrooke, des Cantons de
l'Est.
M. TESSIER: Vous ne pouvez pas passer par-dessus d'autres
municipalités. L'annexion ou la fusion volontaire peut se faire
uniquement à une municipalité contiguë.
M. DEPOT: Oui, c'est le cas.
M. TESSIER: Du moment que c'est contigu, cela peut se faire demain, si
vous voulez.
M. DEPOT: Même si ce n'est pas dans la même région?
C'est cela que je veux que vous compreniez.
M. TESSIER: Même si ce n'est pas dans le même secteur.
M. DEPOT: Même si ce n'est pas dans la même région,
région de Montréal, région des Cantons de l'Est.
M. TESSIER: Oui, cela n'a pas d'importance.
M. DEPOT: Bon, d'accord.
M. TESSIER: Cela n'a aucune espèce d'importance pour autant que
ce sont deux municipalités contiguës.
M. DEPOT: Parfait.
M. TESSIER: Cela peut ne pas être dans la même
région, ni dans le même comté.
M. DEPOT: C'est ce qui arrive, ce n'est pas dans la même
région, c'est-à-dire que le lac Bennaly est dans la région
de Montréal, et Orford est dans la région des Cantons de
l'Est.
M. TESSIER: Il n'y a aucune objection à cela.
M. DEPOT: Parfait. Cela répond à ma question.
M. BOIS: M. le Président, je crois que dans le cas des
affiliations ou des détachements de parties de municipalités pour
des secteurs touristiques ce ne soit pas aussi facile qu'on le dit parce que
récemment une partie d'une municipalité, qui est un secteur
touristique, me demandait ce qui arrivait au sujet de la possibilité de
se séparer de leur municipalité actuelle.
M. TESSIER: Evidemment, il faut que les municipalités...
M. BOIS: On nous dit, dans la Loi des cités et villes, vu que
c'était une ville que cela devenait impossible et qu'il faudrait
absolument un bill privé. Dans la pratique, c'est dire que cela rend le
détachement quasi impossible, même si...
M. TESSIER: J'ai consulté mon sous-ministre et il me dit qu'il
n'y a aucune objection à ce qu'une partie de municipalité rurale
s'annexe à une ville, il n'y a aucune objection non plus à ce
qu'une partie de ville s'annexe à une partie d'une autre ville.
M. BOIS: Mais pas à une autre municipalité qui serait
rurale, par exemple.
M. TESSIER : Deux municipalités rurales peuvent s'annexer.
M. BOIS: Le cas est typique, M. le Président, c'est un secteur de
la ville de Bélair qui veut se rattacher à Sainte-Catherine, par
exemple.
M. TESSIER: Un secteur de ville à un secteur rural.
M. BOIS: Oui.
M. TESSIER: C'est cela, un secteur de ville à un secteur rural,
cela ne peut pas se faire.
M. BOIS: Là, cela prendrait un bill privé.
M. TESSIER: Ou un amendement à la loi actuelle.
M. DEPOT: M. Tessier, la requête qui est faite pour qu'il y ait un
tel détachement dit, je crois: Si dix propriétaires
domiciliés demandent un détachement. Est-ce que dix
propriétaires résidents cela fait la même chose? Si je ne
me trompe pas, il me semble que c'est dans ces termes-là que la
loi...
M. TESSIER: Non, la loi spécifie que c'est la majorité
tout simplement.
M. DEPOT: La majorité.
M. TESSIER: Ce n'est pas dix, quinze ou vingt, c'est la
majorité.
M. DEPOT: Disons que c'est la majorité d'un secteur
donné.
M. TESSIER: C'est cela.
M. DEPOT: D'accord, cela répond à ma question. Il n'y a
pas d'autres questions. Je vous remercie beaucoup.
M. LE PRESIDENT: Merci bien. J'inviterais maintenant le
représentant de l'Union des municipalités à bien vouloir
s'approcher du micro. On n'a pas tellement donné la chance à M.
DesRosiers de reprendre son souffle après le succès de
Loto-Québec, au Cap.
Union des municipalités
M. DESROSIERS: Je vous remercie. J'ai eu peu de temps pour reprendre mon
souffle depuis que je suis arrivé, et je suis venu très vite
je n'ai pas encore de jet, comme le gouvernement du Québec, alors
je suis obligé de faire le trajet en automobile je n'ai pris
qu'une heure et trente du Cap-de-la-Madeleine à venir ici, c'est
déjà bon. Pour me permettre de reprendre mon souffle, je vais
tout simplement demander à l'administrateur attitré de l'Union
des municipalités, M. Robert Boiteau, de vous donner lecture du texte
qu'il a lui-même rédigé, d'ailleurs. Ce sera plus
facile.
M. BOITEAU: M. le Président et M. le ministre, vous comprenez la
raison pour laquelle je me présente devant vous. J'essaierai de me
résumer et si, pour messieurs les députés, nous
passons quelques paragraphes, c'est que, depuis ce matin, nous avons appris que
le ministre des Affaires municipales avait déjà accepté
certaines de nos recommandations. Il me paraît inutile de vous les
renouveler puisqu'elles ont déjà reçu une oreille
attentive.
Nous avons déjà fait connaître notre point de vue
lors de l'historique conférence provinciale-municipale des 27 et 28 mai
derniers, et nous supposons que votre commission a pris connaissance de nos
mémoires. M. Tremblay, le député de Chicoutimi,
mentionnait ce matin qu'il n'en avait pas pris connaissance mais nous avons
déposé, en annexe à ce mémoire, copie des
mémoires que nous avions déposés lors de la
conférence provinciale-municipale.
J'espère qu'elles ont été distribuées.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si vous me permettez, M. le Président,
je n'ai pas dit que je n'avais pas pris connaissance des mémoires. J'ai
dit que nous n'avions pas pris connaissance des discussions qui avaient eu lieu
lors de la réunion provinciale-municipale. Ce qui est une tout autre
chose.
M. BOITEAU: Correction. Nous nous bornerons donc à appuyer
certains points particuliers, compte tenu des modifications que le ministre des
Affaires municipales a déjà annoncées.
L'Union des municipalités du Québec a étudié
avec attention la proposition de réforme des structures municipales et
tient compte des modifications.
L'Union des municipalités ne saurait nier l'évidence de
l'exposé de la situation. Elle constate donc le fait et ne s'attardera
pas à déplorer l'absence de mesures correctives
antérieures.
L'Union des municipalités du Québec appuie les objectifs
de la réforme et endosse les principes qui les ont
déterminés. Si louables que soient les objectifs, si rationnels
que soient les principes, seule une meilleure fiscalité permettra
d'atteindre ces objectifs et d'appliquer ces principes.
L'unité de pensée et d'action est maintenant un
impératif si l'on veut développer logiquement le potentiel de nos
corporations, et cette unité ne peut se faire sans fusion et
regroupement de toutes nos forces.
En effet, les inégalités fiscales entre diverses
corporations, par exemple l'injustice résultant de la façon
actuelle de taxation foncière industrielle uniquement pour la
localité où est située l'industrie par rapport et en
comparaison de la distribution de la taxe de vente provinciale, empêchent
certaines municipalités de se développer normalement et de rendre
à la population les services pour lesquels elles ont été
créées.
La vraie réforme des structures municipales ne peut se faire sans
l'ensemble des citoyens et corps intermédiaires de la province, qui
rempla- cera la chauvinisme local "par un véritable sentiment
d'appartenance à leur région ou à leur communauté
municipale."
Croyant cependant que les représentants élus de tous les
gouvernements doivent dicter, jusqu'à un certain point, la voie au
progrès et montrer vigoureusement les écueils à
éviter, nous soumettons qu'il serait impossible d'atteindre le but
mentionné plus haut sans leur intervention directe, par des mesures
incitatrices, coercitives même en certaines occasions et dans certains
endroits, s'il y a nécessité et urgence.
L'Union des municipalités du Québec reconnaît que
toutes les municipalités du Québec n'ont pas un besoin
égal et immédiat de restructuration.
L'orientation de la réforme est basée sur le volontariat
des municipalités. L'Union des municipalités recommande cependant
que le volontariat proposé respecte les principes reconnus en
démocratie et, par conséquent, que la majorité simple,
soit 51 p.c. des municipalités représentant la majorité
simple des citoyens, soit 51 p.c. de la population, soit suffisante pour
obliger la création d'une communauté municipale. Nous avons
noté avec intérêt la proposition nouvelle à l'effet
que 60 p.c. des conseils représentant 50 p.c. de la population des
municipalités impliquées pourront obliger les autres
municipalités à former une communauté. Toutefois, pour
nous, le principe de la majorité simple demeure.
Les administrateurs ont été élus pour
représenter une population et la population leur demande d'exercer un
leadership judicieux. Ils doivent orienter et diriger les politiques
nécessaires à la réalisation du bien commun puisqu'ils
doivent posséder la qualité et la quantité d'informations
utiles à la prise de décision.
L'Union des municipalités croit donc nécessaire d'ajouter
que la création des communautés municipales étant
conditionnée par les besoins réels, la loi-cadre devra
prévoir un recours à un organisme judiciaire ou parajudiciaire
telle la Commission municipale qui pourra ordonner une
enquête sur les besoins réels d'une communauté. Sur rapport
de ses enquêteurs, établissant la nécessité
objective d'une communauté, cet organisme pourra décréter
la création d'une communauté et nommer un administrateur
délégué pour sa mise en place.
L'Union des municipalités croit fermement que, lorsqu'une
communauté municipale est justifiée, elle doit être
créée; si le volontariat s'avère illusoire, après
une période d'information et d'animation, la communauté doit
être imposée.
En effet, l'expérience démontre l'inefficacité du
volontariat municipal en matière de fusion, tant dans la province depuis
dix ans que dans la plupart des autres circonscriptions territoriales
étrangères qui ont proposé la fusion ou le regroupement
volontaire, même si le regroupement régional et même local
des entités scolai-
res s'est fait et se complète de cette manière dans le
Québec.
Il faut prendre pour exemple ce qui s'est passé dans la
péninsule du Niagara, en Ontario, depuis une douzaine d'années.
En effet, l'on a d'abord tenté, sans résultat, la fusion
volontaire pour en arriver par la suite à son implantation obligatoire,
après étude, enquêtes et auditions devant la commission
municipale ou organismes analogues.
Les limites territoriales des communautés devraient être
guidées entre autres par les considérations suivantes:
l'efficacité administrative: l'étendue du territoire doit
faciliter l'efficacité administrative la plus grande; les
communautés d'intérêts: les citoyens qui habitent un
territoire doivent posséder une certaine communauté
d'intérêts; l'utilisation maximum des ressources: le territoire
doit renfermer une population suffisamment dense pour permettre une utilisation
optimum des ressources humaines, financières et physiques.
La région économique, le pôle de croissance, le
pôle d'attraction, la zone d'influence devront être clairement
établis. La plus totale coordination devrait exister entre les limites
territoriales des communautés municipales et celles des commissions
scolaires régionales.
L'UMQ a étudié différents modes de
représentation pour les communautés municipales: la
représentation directe par élection directe universelle ou par
districts électoraux; la représentation indirecte par élus
locaux représentés ex-officio ou par un élu local
représenté ex-officio avec un nombre de votes basé sur la
population représentée.
Elle recommande donc la représentation indirecte par le maire,
ex-officio, ou un conseiller municipal nommé par le conseil de la
municipalité lorsque le maire refuse.
La municipalité possédera un vote par 1,000 de population
ou fraction supérieure à 500 sous les réserves
ci-après: chaque municipalité dont la population est
inférieure à 1,000 habitants possède un vote; chaque
municipalité est limitée à 30 p. c. du nombre total des
votes déterminé par la population totale de la
communauté.
Je me permets ici de mentionner que le ministre a dit ce matin à
l'ouverture de la séance qu'il avait retenu cette suggestion.
Pour une meilleure efficacité administrative, l'union recommande
la division des pouvoirs entre le conseil de la communauté et un
exécutif, l'exécutif se justifiant toujours par le nombre des
municipalités qui constitueront la communauté.
Compétences de la communauté. Le partage des pouvoirs
entre les municipalités et la communauté. Il faut justifier le
transfert d'une fonction locale au niveau de la communauté. L'union
retient entre autres les facteurs suivants: la nécessité de
coordonner une activité; la planification; les économies
d'échelle; une fonction qui nécessite l'emploi de
spécialistes nombreux.
En conséquence, elle distingue: a) trois fonctions qui devront
être de la compétence des communautés dès leur
création et qui devront être assumées dès leur
création: l'aménagement du territoire et le contrôle de
l'environnement; l'évaluation foncière; la promotion
économique et le développement industriel; b) trois fonctions qui
devront être de la compétence des communautés dès
leur création, mais qui ne seront assumées que lorsque les
communautés elles-mêmes le jugeront nécessaire: voies de
circulation; traitement des données; offices d'habitation.
L'union insiste sur le caractère facultatif de la création
de ces services par la communauté, dans le temps, suivant les besoins.
Elle reconnaît que l'exercice de ces fonctions sera obligatoirement de la
compétence des communautés lorsqu'elles seront jugées
nécessaires.
L'union concourt avec les propositions du livre blanc quant aux
responsabilités ou fonctions additionnelles que les municipalités
pourront transférer à la communauté par ententes entre
elles. La loi-cadre devra permettre cette souplesse par l'émission de
lettres patentes supplémentaires pour accorder des pouvoirs additionnels
de réglementation à la communauté et éviter ainsi
les frais onéreux de l'adoption de bills privés.
L'union subordonne l'exercice de toute compétence administrative
à la capacité fiscale. Les municipalités, comme
gouvernements locaux responsables, doivent détenir des pouvoirs de
taxation aussi étendus que les responsabilités qu'elles assument.
Les communautés municipales proposées devront elles aussi
être assurées d'une fiscalité suffisante pour exercer leurs
responsabilités et remplir pleinement leur rôle.
En conclusion, l'Union des municipalités du Québec
approuve les principes et les objectifs qui ont guidé
l'élaboration de la proposition de réforme des structures
municipales. Bref, elle soumet à votre commission qu'il y a urgence et
nécessité de réformer nos structures municipales, que ces
réformes doivent être faites en même temps que celles
touchant les compétences et la fiscalité, que le volontariat soit
limité dans le temps lorsqu'une communauté municipale est
justifiée, qu'une majorité simple des municipalités
représentant une majorité simple de la population soit suffisante
pour obliger la création d'une communauté, qu'un organisme
judiciaire ou parajudiciaire relevant du ministre des Affaires municipales
puisse ordonner enquêtes et études et décider de la
création d'une communauté ou autre forme de regroupement, qu'une
représentation indirecte soit établie au conseil de la
communauté éliminant la domination possible d'un seul partenaire,
que des étapes soient prévues pour assumer certaines
compétences de la communauté.
Je vous remercie, messieurs.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Boiteau.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais
remercier M. Boiteau, le secrétaire général de
l'Union des municipalités, qui doit constater que toutes les
recommandations contenues dans le mémoire ont été
retenues, comme je l'ai exposé ce matin, sauf, peut-être, deux. Il
y a, d'abord, celle où vous recommandez la majorité absolue ou 51
p.c. J'ai expliqué, ce matin, qu'en ce qui concerne la population, il
n'y avait pas d'objection. Mais j'ai exprimé des doutes sérieux
sur l'efficacité administrative d'une communauté municipale qui,
au début, ne comporterait que 51 p.c. Je crois que j'ai donné les
raisons qui motivaient mon attitude à ce sujet.
Quant au regroupement forcé que vous suggérez, j'ai eu
l'occasion, à plusieurs reprises, de déclarer que je suis
absolument contre toute coercition. Mais, par contre, nous avons assoupli, je
crois, ou nous nous proposons d'assouplir le texte de loi, afin de faciliter
davantage le regroupement municipal en réduisant le pourcentage
nécessaire et également en diminuant le nombre maximum de votes
dont pourrait se prévaloir une municipalité. Cela, c'est une
chose qui faisait peur à beaucoup de municipalités.
C'était, dans bien des cas, la première objection qui
était soulevée lorsqu'on discutait avec un secteur de
municipalité. On disait: C'est la grande ville, la ville importante qui
va nous absorber, qui va tout mener. Alors, nous avons fait disparaître
cela en réduisant la proportion à 30 p.c, conformément
d'ailleurs à une suggestion contenue dans votre mémoire.
Dans l'ensemble, j'ai bien l'impression que nous nous entendons sur les
principaux points que nous avons retenus, la très grande majorité
de vos suggestions.
Alors, je vous remercie, M. Boiteau.
M. BOITEAU: Merci.
M. LE PRESIDENT: Alors, je tiens à remercier tous ceux qui,
aujourd'hui se sont présentés devant la commission permanente des
Affaires municipales. Je remercie les députés, et la commission
ajourne ses travaux à jeudi prochain, deux heures, alors que nous
étudierons le projet de loi 84 constituant la Commission de transport de
la rive sud de Montréal. Merci, messieurs.
(Fin de la séance: 14 h 58)