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Version finale

29e législature, 2e session
(23 février 1971 au 24 décembre 1971)

Le jeudi 7 octobre 1971 - Vol. 11 N° 89

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Projet de loi no 48 - Loi de l'évaluation foncière


Journal des débats

 

Commission permanente des Affaires municipales

Projet de loi no 48 Loi sur l'évaluation foncière

Séance du jeudi 7 octobre 1971

(Dix heures sept minutes)

M. LEDUC (président de la commission permanente des Affaires municipales: A l'ordre, messieurs !

Je désire vous souhaiter la bienvenue à cette deuxième séance de la commission parlementaire permanente des Affaires municipales qui entendra les différents organismes qui ont des représentations à faire sur le projet de loi 48: Loi sur l'évaluation foncière.

Afin de bien s'entendre au début, je voudrais vous lire la liste des organismes qui ont été invités à venir faire des représentations aujourd'hui et vous donner cette liste par ordre de présence au lutrin, en face. Je vous demanderais de bien vouloir vous placer en avant de la barre et de vous installer au lutrin pour faire vos représentations.

Le premier organisme sera l'Association des musées de la province de Québec; ensuite, le Musée des Beaux-Arts de Montréal; l'Association des jardiniers marafchers de la région de Montréal; la Société d'agriculture du comté de Laval; le Barreau du Québec; la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec; les Arpenteurs-géomètres de la province de Québec; Park Laign Ltd; l'Association des détaillants des maisons mobiles et roulottes du Québec; l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française; l'Industrie de production pétrolière du Québec, le Pacifique Canadien et le Canadien national, les deux ensemble.

J'inviterais Me Charles Gonthier ou le représentant de l'Association des musées de la province de Québec à bien vouloir s'avancer au lutrin, face à notre table ici pour faire valoir ses idées.

Excusez, Me Gonthier, il arrive assez souvent que le porte-parole d'une association n'est pas le même que celui dont nous avons le nom sur notre liste; il arrive souvent que ce sont deux personnes bien différentes. Afin de faciliter le travail du personnel du journal des Débats, j'aimerais, si c'était possible, avant de commencer quelque intervention que ce soit, que le porte-parole s'identifie. Je vous remercie.

Musée des Beaux Arts de Montréal

M. GONTHIER: Je vous remercie, M. le Président. Je suis Charles Gonthier. Je suis avocat de Montréal et également secrétaire honoraire du Musée des Beaux-Arts de Montréal.

Je représente ici, ce matin, à la fois l'Association des musées de la province de Québec et le Musée des Beaux-Arts de Montréal. J'ai avec moi M. Raymond Denault, un des membres du conseil de l'association et également président de la Fédération des sociétés d'histoire de la province de Québec.

M. le Président, les deux mémoires de l'Association des musées de la province de Québec et du Musée des Beaux-Arts touchent au même point et s'appuient l'un l'autre. Et, si vous le permettez, je traiterai des deux en même temps. Le mémoire du musée appuie celui de l'association en apportant certaines précisions quant à la situation particulière du Musée des Beaux-Arts.

Le motif qui nous amène devant vous ce matin — et nous vous remercions de cette occasion — est très simple. Il n'y a pas d'exemption de prévue au bill 48 pour les musées. Nous croyons qu'il s'agit là d'une omission qui n'était sans doute pas voulue. Nous constatons, par exemple, à l'article 16 du projet de loi, qu'on prévoit des exemptions pour certaines propriétés lorsqu'elles appartiennent à des corps publics tels que les immeubles à caractère historique, les jardins zoologiques, les jardins botaniques, les aquariums, les Pepinières, mais on ne parle pas des musées.

Aux articles 26 et 27, on prévoit des exemptions pour les institutions d'enseignement aux divers niveaux, les hôpitaux, les institutions de charité, certaines bibliothèques, mais on ne nous parle pas des musées. Je crois que c'est l'évidence même que les musées remplissent une fonction sociale essentielle par la conservation du patrimoine culturel et par leur rôle éducatif. Ils sont un élément essentiel de l'éducation visuelle qui est un si grand facteur aujourd'hui. La visite d'un musée, c'est une leçon de choses. C'est seulement dans les musées que nos jeunes et le public en général peuvent voir les objets mêmes dont ils entendent parler.

Les autorités gouvernementales, d'ailleurs, reconnaissent le rôle des musées à la fois par les exemptions fiscales qui leur sont actuellement accordées — elles sont, je pense, à l'impôt sur le revenu — et par les subventions qu'elles leur versent.

On constate également que dans la charte de la ville de Montréal, article 782, il y a une exemption pour les musées et les galeries d'art qui sont ouverts gratuitement au public.

Nous demandons que les musées soient assujettis au même régime que les universités et les CEGEP, prévu à l'article 26 de la loi, c'est-à-dire une exemption complète des taxes foncières, générales, spéciales et de services, mais le versement, par les musées aux municipalités, d'une compensation pour tenir lieu des services municipaux.

Le régime que nous suggérons est moins favorable que celui de la Place des Arts à Montréal, par exemple, qui, en vertu de sa loi, chapitre 19, 1964, article 18, jouit d'une exemption totale de toutes les taxes. Il est

également moins favorable, par exemple — si l'on cherche les précédents ailleurs — que le régime prévu pour "The Art Gallery of Ontario", qui jouit également d'une exemption complète de taxes. Ce régime serait le même que celui prévu actuellement pour le Grand Théâtre de Québec à l'article 5 du bill 9 qui fut sanctionné le 17 juillet 1970.

La raison particulière pour laquelle nous demandons que les taxes d'eau, par exemple, ne soient pas payables au taux général sur la base de l'évaluation mais plutôt sous forme d'une compensation, c'est que, évidemment, très souvent un musée représente une valeur immobilière, une valeur de construction considérable, soit simplement parce que c'était coûteux à construire, soit parce que c'est quelque chose qui ne peut plus se construire. C'est quelque chose qui nous vient du passé. Par conséquent, une taxe d'eau prélevée sur une telle valeur peut être absolument sans rapport avec le service employé par le musée.

A ce propos, je signalerais que, pour le Musée des Beaux-Arts à Montréal, la ville de Montréal a reconnu la chose et il y a eu une entente à ce sujet. Si bien que le régime que nous proposons, à toutes fins pratiques, pour le Musée des Beaux-Arts de Montréal, ne constituerait que la continuation du statu quo.

En terminant, j'aimerais vous signaler simplement que l'Association des musées de la province de Québec, fondée en 1958, groupe quelque 54 musées et sociétés d'histoire qui oeuvrent, pour la conservation du patrimoine culturel et l'éducation populaire, sans but lucratif. Nous estimons qu'ils accueillent chaque année au moins deux millions de visiteurs et constituent ainsi un attrait et un atout très important pour le développement de l'industrie touristique du Québec.

On me signalait ce matin, dans le dernier numéro de la revue Québec-Histoire publiée par la Fédération des sociétés d'histoire du Québec, cette introduction, ce message du ministre du Tourisme, qui commence par ces mots: "L'histoire et le tourisme possèdent des vocations si étroitement liées que le développement de l'un ne peut que favoriser le rayonnement de l'autre, et réciproquement." Pour le tourisme, qu'est-ce que l'histoire sans musées?

Ajouterais-je que la plupart de nos institutions membres fonctionnent avec des budgets des plus modestes et réussissent à peine à se maintenir avec des revenus souvent aléatoires et, en tout cas, insuffisants pour leur permettre de s'améliorer comme elles le souhaiteraient. Je signalerais également que, évidemment, la seule source de revenus que peut avoir un musée, hors les subventions gouvernementales, est le droit d'entrée qu'il peut charger et, évidemment, les dons qui peuvent lui être faits aussi.

Nous nous permettons donc de demander à l'Assemblée nationale de bien vouloir prendre en considération notre demande et d'apporter les modifications suggérées au projet de loi.

Pour souligner de façon encore plus concrète les conditions difficiles dans lesquelles nos musées au Québec fonctionnent, je pourrais signaler que le Musée des Beaux-Arts de Montréal, qui est le plus important pour sa collection au Québec et un des trois plus importants au Canada, a dû, l'an dernier, couper son budget d'expositions de 90 p.c.

Ceci, nous l'espérons, nous le croyons, est une situation temporaire mais il reste que nous opérons avec un déficit très élevé depuis de nombreuses années. Si, l'an dernier, nous n'avons pas eu de déficit, si nous avons tout juste bouclé notre budget, c'est à cause de cette coupe radicale dans notre budget d'expositions.

Alors, je sollicite la consideration généreuse de cette commission pour permettre à nos membres de continuer à préserver notre patrimoine, pour les encourager à fournir l'apport de centaines de bénévoles pour préserver et à faire connaître ce que nous avons été, pour mieux connaître ce que nous sommes.

Merci, M. le Président.

M. LE PRESIDENT: M. le ministre.

M. TESSIER : M. le Président, je voudrais d'abord remercier Me Gonthier de son exposé et souligner qu'il a parfaitement raison de dire qu'il y a eu un oubli lors de la rédaction, en ce qui concerne les musées. Ceci démontre bien encore une fois l'utilité de tenir, lorsqu'il s'agit de lois aussi importantes, des réunions de la commission parlementaire afin de faire entendre les personnes et les corps publics ou semi-publics intéressés.

Nous nous sommes rendu compte de cette omission. Nous croyons qu'il n'y aurait peut-être pas lieu d'amender le projet de loi dans le sens exact que vous mentionnez — vous vous référez surtout à l'article 26 — mais permettez-moi de vous dire que l'article 26 ne s'applique qu'aux institutions d'enseignement, parce que nous avons fait disparaître à l'article 26 les mots "les corporations municipales".

Lorsqu'il s'agit de payer un montant devant tenir lieu de taxes pour des services, évidemment, c'est une question à négocier avec le ministère de l'Education exclusivement.

Notre proposition est plutôt d'amender l'article 27 afin d'y ajouter un sous-paragraphe g) qui se lirait comme suit: "Les musées non exploités à des fins commerciales" et un autre sous-paragraphe h) qui se lirait: "Les centres d'art, les salles de concert et de théâtre, les centres civiques et communautaires, lorsque possédés par un organisme public ou exploités à des fins non commerciales."

Je crois que cet amendement proposé rencontrerait vos vues, du moins, je l'espère.

M. GONTHIER: Pour une bonne part, M. le ministre. Je comprends la raison administrative que vous m'avez indiquée. Evidemment, le Musée des Beaux-Arts, par exemple, reçoit

20,000 élèves de la Commission des écoles catholiques de Montréal chaque année, en visites guidées. Ils sont guidés par des bénévoles. L'an dernier, nos guides bénévoles ont fait faire des visites guidées du vieux Montréal à 9,000 personnes. Nous avons une bibliothèque qui est unique au Canada et qui dessert les quatre universités de Montréal. Nous avons également une école d'art. Nous croyons qu'un musée est une institution d'enseignement au même niveau qu'une université.

M. TESSIER: Oui, c'est exact dans un sens, mais ce n'est pas exclusif et ce n'est pas le ministère de l'Education qui peut m'autoriser à payer les taxes de service. C'est donc dire qu'il faudrait négocier avec chacun des musées et ce serait susceptible de provoquer des litiges. Ces négociations pourraient durer assez longtemps avant qu'on s'entende sur les montants. Egalement, les musées pourraient dire: Cette année, c'a été moins bon pour les revenus que l'année précédente; alors, nous ne sommes pas en mesure de payer le même montant que l'an dernier.

Avec la liste surtout que vous nous avez produite avec votre mémoire, vous voyez tout de suite toutes les négociations et les difficultés que nous rencontrerions à ce moment-là, tandis que, dans le cas des collèges, des maisons d'enseignement, des universités, on négocie avec une seule partie, c'est le ministère de l'Education.

M. GONTHIER: La seule remarque que je pourrais ajouter, M. le ministre est la suivante: Quand la ville de Montréal, dans le cas du Musée des Beaux-Arts, s'est rendu compte qu'elle avait le pouvoir de faire une entente particulière avec lui, ceci en vertu d'un article de la charte du musée, d'après une loi de ce Parlement, nous n'avons eu aucun problème pour en arriver à une base équitable et satisfaisante.

Et je ne sache pas qu'il y ait eu des problèmes dans ce sens-là dans le passé. Mais évidemment nous sommes entre vos mains. Evidemment, nous ne tombons pas directement, sauf sous certains aspects, sous la juridiction du ministère de l'Education. Nous dépendons du ministère des Affaires culturelles, comme tous les musées, comme les centres d'art, mais je ne sais pas s'il n'y aurait pas une possibilité à ce niveau-là, par cet intermédiaire-là, d'en arriver à la même solution que pour les maisons d'éducation.

Enfin, je vous soumets la chose.

M. TESSIER: A tout événement...Oui, d'accord, puis nous allons continuer à y songer. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des possibilités, je ne veux pas fermer la porte aujourd'hui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie M. Gonthier d'avoir signalé cette omission non coupable de la loi. Il est bien évident que nous sommes d'accord sur les représentations que vous avez faites en ce qui concerne les musées. Le ministre vient d'ailleurs de vous donner l'assurance que l'article 27 de la loi sera amendé par l'ajout de deux paragraphes qui incluront les musées et les centres d'art. Je pense que personne n'a d'objection à cela, tout au contraire. Les musées sont des maisons qui offrent des services au public. Ils offrent ces services de façon ordinairement gratuite. Ils font partie de l'ensemble des établissements qui, de façon indirecte peut-être, sont des établissements éducatifs.

Il n'y a donc aucune sorte d'objection, je pense, de la part de qui que ce soit, à ce que l'on se rende à votre demande, compte tenu, évidemment, de certains mécanismes administratifs qu'il faudra prévoir, comme vient de l'indiquer le ministre des Affaires municipales.

Il est question de relations avec le ministère de l'Education mais, par ailleurs, l'ensemble des musées de même que les centres d'art relèvent du ministère des Affaires culturelles. Il y a donc lieu, pour ces ministères, de se consulter et de donner des avis au ministre des Affaires municipales afin de régler le problème à la satisfaction des musées.

Vous avez mentionné que les musées vivent des petits revenus que peuvent fournir les visiteurs; d'autre part, ils vivent surtout des subventions gouvernementales. C'est le cas, en particulier, du Musée des Beaux-Arts de Montréal qui a été financé pendant longtemps par l'entreprise privée ou par des donations. Le Musée des Beaux-Arts de Montréal est dans une situation actuellement difficile parce que le mécénat est de plus en plus rare et aussi parce que le Musée des Beaux-Arts a tardé, pendant longtemps, à s'intégrer dans l'ensemble des institutions québécoises et à faire corps avec le public du Québec.

Maintenant que le Musée des Beaux-Arts — j'ai travaillé activement à ce qu'il change son orientation — est devenu une maison ouverte à tous les citoyens du Québec et non plus un fief, une chasse gardée, nous serons heureux, M. Gonthier, d'appuyer votre proposition en ce qui concerne les musées en général et en particulier le Musée des Beaux-Arts de Montréal.

M. LE PRESIDENT: M. Léger.

M. LEGER: M. le Président, je ne voudrais poser que quelques questions d'information. Est-ce l'Association des musées comme telle qui reçoit les subventions ou si ce sont les musées individuellement?

M. GONTHIER: Les musées individuellement.

M. LEGER: L'association comme telle ne reçoit aucune subvention?

M. GONTHIER: Non. Elle ne reçoit aucune subvention que je sache. C'est une association qui vise à permettre l'échange d'informations,

de connaissances entre les diverses institutions et personnes membres de cette association.

M. LEGER: Les différents musées reçoivent des subventions du gouvernement. Est-ce que le ministère du Tourisme est un des ministères qui fournissent des subventions au musée? Vous avez parlé de l'attrait qu'ont les musées pour les touristes; est-ce que le ministère fournit quelque subvention?

M. GONTHIER: Je ne pourrais vous répondre en toute connaissance de cause que pour le Musée des Beaux-Arts de Montréal, et la réponse est non. Nous recevons des subventions du ministère des Affaires culturelles, du Conseil des arts de Montréal et du Conseil des arts du Canada.

Evidemment encore, malgré ces subventions, notre source principale de fonds reste le mécénat privé. Seulement la demande s'est accrue tellement, les frais ont crû en conséquence, si bien que le mécénat ne suffit plus. Le musée est beaucoup trop petit, il a besoin de s'agrandir; alors il a besoin, pour appuyer son action et lui permettre de servir plus pleinement la communauté, de l'apport des autorités publiques.

M. LEGER: Je vous remercie, M. Gonthier. J'appuie aussi la proposition que vous faites, que le gouvernement vous donne l'exemption de cette taxe, étant donné que c'est un organisme nécessaire et sans but lucratif.

M. GONTHIER: Merci.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Gonthier. J'inviterais maintenant l'Association des jardiniers maraîchers de la région de Montréal. Je crois que c'est M. Daigneau qui est son porte-parole.

Association des jardiniers maraîchers de la région de Montréal

M. JASMIN: M. le Président, MM. les membres de la commission parlementaire des Affaires municipales, messieurs. Mon nom est Jean-Jacques Jasmin, secrétaire de l'Association des jardiniers maraîchers de Montréal. En fonction des différentes définitions du terme cultivateur, je ne peux pas dire que je suis cultivateur, je ne le sais pas. Disons en tout cas que je suis secrétaire de l'association.

Au nom des jardiniers maraîchers de la région de Montréal, il nous fait bien plaisir de vous soumettre notre mémoire, que vous avez probablement entre les mains depuis déjà un bout de temps et que vous avez eu l'occasion de lire. Je n'ai pas l'intention ce matin de vous en faire lecture mais seulement de faire certains commentaires sur ce mémoire.

Les maraîchers se considèrent également comme cultivateurs et pour une bonne raison: ils exploitent, sur un outil de travail qui est le leur, un fonds de terre, un commerce qui est celui de produire des vivres pour la population de la province et d'ailleurs. Comme je vous le disais, leur outil de travail principal est le fonds de terre. Sans cette terre on ne peut pas parler d'eux comme maraîchers ou comme cultivateurs, nécessairement. Vous me direz qu'il y a des moyens de produire sans sol par méthodes hydroponiques, j'admets cela; mais, pour déposer les bains dans lesquels certaines solutions peuvent produire des aliments que certaines personnes peuvent prétendre pollués, il faut encore de la terre pour asseoir ces bains dans lesquels les produits sont cultivés.

Donc, par mon préambule, vous imaginez que l'article lm) de votre bill nous cause certains problèmes.

Premièrement, parce que vous omettez dans votre définition de cultivateur un élément très important d'une classe de la production maraîchère qui est la production des fleurs. Plusieurs membres de notre association, qui sont des maraîchers au sens propre du mot, comme nous l'entendons, sont également des producteurs de fleurs, les deux choses allant de pair. Nous serions heureux de voir, à l'article lm), quelques mots retranchés, spécialement les mots "autre qu'un floriculteur".

Le maraîcher a besoin de sa terre pour cultiver, comme le mécanicien ou le machiniste qui va travailler avec un coffre d'outils. Le coffre d'outils du maraîcher étant sa terre, pourquoi imposer des taxes sur cet outil de travail? Nous croyons que les taxations sur cet outil de travail sont ici, jusqu'à un certain point, injustifiées.

Donc, en fonction de ce préambule, nous proposons certains amendements au bill. D'abord nous aimerions que l'article lm) se lise comme suit: "Agriculteur" serait remplacé par la définition suivante: "Premièrement, une personne physique qui tire sa subsistance et celle de sa famille ou au moins 25 p.c. du total de son revenu brut de la culture du sol, de l'élevage d'abeilles ou d'animaux de ferme ou de l'exploitation de leur production, de l'élevage d'animaux à fourrure, de l'exploitation d'un verger, d'une érablière ou d'un boisé de ferme. "Deuxièmement, une personne physique qui tire sa substance et celle de sa famille ou au moins 25 p.c. du total de son revenu brut de loyers de ferme et autres rémunérations provenant d'une compagnie à fonds social dont il est actionnaire et dont la majorité, en valeur, des actions est détenue par des agriculteurs."

Cette deuxième partie de l'article lm), corrigée telle que nous vous la présentons, messieurs, est due à des politiques d'un autre de vos ministères, celui de l'Agriculture, qui insiste pour que les producteurs consolident leurs fermes, étant donné que l'agriculture est probablement une des industries les plus marginales actuellement. Alors que les prix de vente des produits agricoles n'ont pas sensiblement aug-

menté dans les vingt dernières années, les prix du matériel, par contre, c'est-à-dire de la machinerie de ferme, de l'engrais chimique, des pesticides, de même que le travail et les taxes, etc., ont augmenté sensiblement. Dans le but de pallier ces choses, le ministère de l'Agriculture a demandé aux cultivateurs de consolider leurs fermes. Depuis quelque temps, plusieurs membres d'une même famille ou plusieurs voisins, dans ce but, ont réuni leurs terres pour ne former qu'une seule exploitation et réduire leurs frais d'exploitation.

Ces corporations ou compagnies limitées sont formées de quelques membres, tous producteurs, tous agriculteurs et tous propriétaires du fonds de terre, car ils louent leur fonds de terre à la corporation. Nécessairement, le cultivateur qui travaille pour sa propre corporation tire un salaire de sa corporation, étant donné que les moyens d'exploitation sont mis en commun. Cet individu qui, dans l'esprit de la loi, est un cultivateur, aux termes de la loi, retirerait plus de 75 p.c. d'un revenu, d'un salaire, alors que la location de son bout de terre à la corporation lui rapporte moins de 25 p.c.

Aux termes de la définition du bill 48 que nous étudions aujourd'hui, cette personne-là verrait son fonds de terre taxé, se verrait imposer et, nécessairement, ceci pourrait entraf-ner la dissolution de ces corporations et un recul de l'agriculture.

Nous aimerions que le deuxième paragraphe de l'article 30 soit remplacé par le paragraphe suivant: "Un tel terrain ainsi que les bâtiments qui s'y trouvent, quelle qu'en soit la valeur, servant à l'exploitation de la ferme et la maison d'habitation, jusqu'à concurrence d'une valeur de $15,000, sont exempts de toutes taxes foncières générales ou spéciales pour la partie de la valeur portée au rôle qui excède $150 l'arpent, sous réserve, quant à son imposition, de l'article 107. La partie de la valeur de la maison d'habitation qui excède $15,000 ne bénéficie d'aucune exemption." Ceci permettrait de limiter le rôle d'évaluation, comme je vous le disais tout à l'heure, à un outil de travail qui est l'outil du cultivateur, du maraîcher.

A l'article 30, nous aimerions voir le quatrième paragraphe remplacé par l'article suivant: "L'alinéa qui précède ne s'applique pas: a) à un terrain qui a cessé d'être utilisé en totalité ou en partie à des fins agricoles, pourvu qu'il ne soit pas autrement utilisé et que son propriétaire ait exercé la profession d'agriculteur au cours des quinze dernières années." Ceci, parce que nous avons plusieurs cultivateurs qui, vieillissant, décident de conserver leur maison, de rester sur leur terre. Il n'y a aucun but spéculatif là-dedans. C'est qu'ils sont attachés à un lopin de terre qu'ils ont cultivé depuis des années. Ils sont attachés à la communauté dans laquelle ils vivent et ils désirent demeurer sur ces -terrains, peut-être pour continuer à les cultiver en foin ou en grain, mais sûrement pas pour en retirer la majeure partie de leurs revenus. A ces cultivateurs retirés, à la retraite, il serait certainement très dur d'imposer une taxe foncière qui les forcerait à vendre la maison dans laquelle ils sont nés et à s'en aller vivre dans un hospice ou dans une petite maison au village.

Pour continuer ce quatrième paragraphe de l'article 30: b) "Un terrain transmis par décès pour l'année financière au cours de laquelle suit le décès... Pardon! Je m'excuse. Je reprends, je bafouille énormément, "a un terrain transmis pas décès pour l'année financière au cours de laquelle survient le décès ainsi que pour les quatre années financières subséquentes si ce terrain, quoique non cultivé, ne change pas de destinataire ou de propriétaire."

Messieurs, plusieurs parmi vous, êtes avocats. Vous savez que pour régler certaines successions, un délai de deux ans est certainement très court, et tout spécialement lorsqu'il y a des transferts de titres sur des propriétés.

Au paragraphe c) du paragraphe 4 de l'article 30: "a un terrain vendu à un autre cultivateur." Autrement dit, la terre ne change pas de fonction. La fonction continue à être un outil de travail.

Messieurs, ce sont à peu près les seuls commentaires que j'ai à faire en fonction de notre mémoire. Permettez-moi d'insister ici sur la fin de notre mémoire dans lequel nous appuyons fortement le mémoire qui vous a déjà été présenté ici et qui a été discuté, le mémoire de la Corporation du marché central métropolitain limitée, qui est un de nos organismes de mise en marché.

Ce marché appartenant aux cultivateurs, aux maraîchers en grande partie, s'il advenait que pour des raisons de taxes le Marché central métropolitain avait à fermer ses portes, les maraîchers de la région de Montréal et de la province se verraient plongés dans un problème certainement très grave. Nous reculerions de trente ans.

Messieurs, c'est à peu près tous les commentaires que j'ai à faire en marge de ce mémoire. Si vous avez des questions, je suis prêt à y répondre.

M. LE PRESIDENT (Veilleux): La parole est au ministre des Affaires municipales.

M. TESSIER: M. le Président, je remercie M. Jasmin des commentaires qu'il a apportés en ce qui concerne la partie qui touche les agriculteurs dans le projet de loi. Nous nous sommes rendu compte, après avoir pris connaissance de six ou sept mémoires qui nous ont été envoyés, dont le vôtre, qu'il fallait apporter certains amendements à la définition de l'agriculteur â l'article lm), de même que certains amendements à l'article 30.

Je crois qu'il va falloir plutôt envisager la definition de la terre même plutôt que de celui qui l'exploite. En d'autres termes, le but que

nous voulions atteindre était de toucher le spéculateur. Le but ultime à atteindre par ces deux articles est d'empêcher la spéculation, d'un côté, et de taxer celui qui achète une terre dans le but d'en faire un lotissement, d'autre part.

Il va falloir redéfinir exactement, je crois, ce qu'est une terre agricole et ce qu'est un agriculteur. Je comprends que dans le cas des maraîchers, des horticulteurs, surtout de la région de Montréal, on tient une comptabilité. Cela peut ne pas vous causer trop d'ennuis. Mais lorsque je pense au cultivateur marginal, dans d'autres parties de la province, qui est à la fois bûcheron, pêcheur et qui retire une très petite partie de ses revenus de la terre, celui-là ne tient pas de comptabilité. Il ne sait même pas ce que la terre lui rapporte. Tout ce qu'il sait, c'est que la terre ne le fait pas vivre et qu'il est obligé d'aller gagner la principale source de ses revenus en dehors pour faire vivre sa famille.

C'est cette question également qu'il faut examiner de très près. Je vous avouerai franchement qu'on a modifié cet article à plusieurs reprises au cours des études et de la rédaction du projet de loi. Je pense qu'on l'a changé au moins à cinq reprises. Il est extrêmement difficile de trouver une formule parfaite. Mais nous espérons qu'à l'aide des mémoires que nous avons reçus et que nous recevrons, on nous fera des suggestions valables que nous pourrons retenir, et que nous pourrons arriver à une rédaction qui rendra justice à la classe agricole. Je dois déclarer immédiatement que ce n'est pas l'intention du gouvernement d'alourdir le fardeau de la taxe pour les cultivateurs. Il s'agit de ne pas augmenter ce fardeau, mais, d'autre part, de taxer le spéculateur.

C'est là qu'est la difficulté de trouver la formule qui couvrira les deux cas.

Nous ne sommes pas en mesure, actuellement, de proposer un texte précis d'amendement. Nous préférons attendre que les autres mémoires nous soient présentés. Lorsque nous aurons entendu toutes les représentations de la part de la classe agricole, nous serons en mesure de refaire complètement la rédaction de l'article lm) et de l'article 30.

M. PAUL: Est-ce que le ministre a consulté son collègue, le ministre de l'Agriculture, quant à la définition possible du terme "cultivateur" et ce qu'elle devrait comprendre, à toutes fins pratiques?

M. TESSIER: Je n'ai pas consulté personnellement mon collègue, le ministre de l'Agriculture, mais il y a eu consultation au niveau des fonctionnaires de mon ministère et de ceux du ministère de l'Agriculture.

M. LE PRESIDENT (Veilleux): L'honorable député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Prési- dent, je remercie M. Daigneau de son mémoire qui remet en lumière certaines faiblesses du projet de loi.

M. LE PRESIDENT (Veilleux): C'est M. Jasmin, n'est-ce pas?

M. JASMIN: C'est cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, M. Jasmin.

M. JASMIN: Je m'excuse. M. Daigneau, le président de notre association, ne pouvait pas être ici aujourd'hui. C'est moi qui le remplace.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le ministre qui m'a induit en erreur.

M. PAUL: Je vous ai toujours dit de le surveiller.

M. TESSIER: Je m'en excuse.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le jasmin, cela fait partie des fleurs. Cela relève des "floriculteurs".

Alors, M. Jasmin, je vous remercie de votre mémoire. Vous avez souligné une des difficultés majeures du projet de loi. Un projet de loi pèche toujours, ordinairement, par ses définitions. Celle du terme "agriculteur" en est une. Mon collègue, M. Vincent, vous interrogera là-dessus.

Je voudrais simplement souligner un aspect de votre mémoire qui se trouve tout à la fin, quand vous nous dites que vous appuyez le mémoire qui a été présenté par le Marché central métropolitain limitée de Montréal. Nous avons eu l'occasion, l'autre jour, d'interroger longuement les représentants de cette association. Nous leur avons exprimé non seulement notre intérêt mais notre appui. J'aimerais savoir du ministre s'il a poursuivi ses recherches en ce qui concerne le Marché central métropolitain parce qu'il s'agit, évidemment, d'un problème de très grande importance, qui risque de jeter par terre un très grand nombre de citoyens qui pratiquent ce métier de l'agriculture sous une forme ou sous une autre. Alors, j'imagine que le ministre est aujourd'hui en mesure de nous donner des précisions en ce qui concerne les intentions du ministère au sujet du Marché central métropolitain.

M. TESSIER: M. le Président, je dois dire que cette question est toujours à l'étude.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre me dit que cette question est toujours à l'étude. Mais vous savez, quand on commence ses études, on commence par la maternelle, l'école primaire, le secondaire et on passe à l'université éventuellement. Mais il vient un temps où on obtient son brevet. Est-ce que le ministre peut

nous dire à quel moment il nous présentera son brevet...

M. TESSIER: Nous sommes à la veille d'obtenir notre brevet.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...en ce qui concerne le Marché central métropolitain, parce que c'est...

M. TESSIER: Je suis à la veille d'avoir mon diplôme.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je doute fort que si c'est nous qui vous faisons passer l'examen, vous l'obteniez. Mais je voudrais bien que vous rassuriez les jardiniers maraîchers au sujet de ce Marché central métropolitain.

M. TESSIER: Il y aura sûrement quelque chose de fait.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quelque chose, cela veut dire quoi? Et dans quel sens?

M. TESSIER: Je vous ai dit que nous continuions à étudier ce problème. Evidemment, il y a énormément d'amendements à apporter au bill 48, sans aucun doute. Je n'ai pas...

M. PAUL: C'est un bill à refaire.

M. TESSIER: Peut-être pas à refaire au complet, mais il y a certainement plusieurs articles à rédiger de nouveau.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. TESSIER: Cela, il faut l'admettre. D'ailleurs, je l'ai exprimé au tout début. C'est justement pour cela que nous sommes heureux que ce projet de loi ait été envoyé à la commission parlementaire, afin de donner l'occasion, justement, de recevoir des représentations et des suggestions qui nous permettront de l'améliorer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre, à une question que lui a posée mon collègue, le député de Maskinongé, à savoir s'il avait consulté son collègue le ministre de l'Agriculture.

Il nous a dit qu'il ne l'avait pas fait personnellement. Alors, il y a deux projets de loi qui se recoupent: la Loi du syndicalisme agricole, la Loi sur l'évaluation foncière et il y aura le projet de loi que nous a annoncé le ministre de l'Education sur la fiscalité scolaire. Il y aura donc trois projets de loi qui vont se recouper. Nous en sommes au stade des brouillons, des devoirs d'élèves. Est-ce que les trois étudiants, le ministre de l'Agriculture, le ministre de l'Education et le ministre des Affaires municipales, vont se consulter pour faire en commun leurs devoirs, pour s'entendre sur certaines définitions?

M. TESSIER: Je pourrais peut-être ajouter que j'ai dit tout à l'heure que je n'avais pas eu de consultation avec mon collègue, le ministre de l'Agriculture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pourriez consulter M. Springate.

M. TESSIER: Mais je pourrais peut-être préciser que j'ai reçu, tout de même, certaines représentations de la part de mon collègue le ministre de l'Agriculture, personnellement. Nous n'avons pas discuté ensemble, mais il m'a soumis un mémoire sur certains points du bill 48.

M. PAUL: Est-ce au sujet de la pomiculture?

M. TESSIER: Pas précisément.

M. PAUL: Le ministre a une interprétation très large, parce que celui qui possède un pommier est un pomiculteur au sens de la loi du cidre.

M. VINCENT: Deux pommiers.

M. PAUL: Deux pommiers alors. Il ne faudrait pas que nous ayons cette même largesse d'interprétation dans la Loi sur l'évaluation foncière.

M. TESSIER: Deux pommiers de combien de pommes chacun?

M. PAUL: Ah! vous demanderez ça au député de Rouville.

M. TESSIER: C'est très important. S'il n'y a qu'une pomme par pommier...

M. PAUL: Il est devenu sidéré après l'adoption de la loi.

M. VINCENT: M. le Président, question supplémentaire à la question posée par le député de Chicoutimi concernant le Marché central métropolitain. Comme les terrains de golf sont d'actualité, n'y aurait-il pas possibilité d'apporter les mêmes exemptions pour les terrains du Marché central métropolitain?

M. TESSIER: ... d'actualité à Saint-Féréol, seulement.

M. VINCENT: Oui, à Saint-Féréol seulement, à cause de la température.

M. PAUL: M. Vézina pourrait nous donner plus de précisions.

M. VINCENT: N'y aurait-il pas lieu d'apporter les mêmes exemptions pour les terrains du Marché central métropolitain que celles appor-

tées ici dans le bill 48 concernant les terrains de golf? Vous auriez là un modèle d'exemptions qui pourrait probablement satisfaire; je pense que M. Jasmin est au courant. Si les mêmes exemptions apportées pour les terrains de golf étaient apportées pour le Marché central métropolitain, M. Jasmin, je pense que ça donnerait satisfaction aux intéressés.

M. JASMIN: Disons que ce serait aux gens du Marché central métropolitain de le mentionner, mais disons que les maraîchers, comme actionnaires du Marché central, seraient heureux de voir une chose comme ça se faire, certainement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président, je reviens à la question que je posais tout à l'heure au ministre. Je lui disais qu'il y a trois projets de loi qui se recoupent dans leurs definitions et même dans leurs intentions. Avant que nous n'entreprenions en Chambre l'étude de ces trois projets de loi, le ministre a-t-il l'intention de présenter celui-ci d'abord? Est-ce que la présentation de ce projet de loi sur l'évaluation foncière est pour bientôt?

M. TESSIER: Il est présenté, il a été adopté en deuxième lecture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est-à-dire que nous vous avons fait reculer, nous avons demandé que vous le présentiez ici en commission parlementaire. Donc, ce projet de loi que vous...

M. TESSIER: M. le Président,...

M. TREMBLAY (Chicoutimi); Laissez moi m'expliquer.

M. TESSIER: Je veux rectifier, c'est faux ce que l'on dit là. C'est absolument faux et je renvoie le député de Chicoutimi aux Débats de l'Assemblée nationale, c'est moi qui ai proposé que le bill 48 soit envoyé à la commission parlementaire.

M. PAUL: Le lundi, après la fête de la Confédération, en deuxième lecture, le député de Maskinongé, au nom de l'Opposition, vous avait demandé d'envoyer ce projet de loi pour étude à la commission parlementaire des Affaires municipales; vous n'avez pas voulu, dans le temps. C'est à la suite de pressions que vous avez consenti à ramener ce bill, devant la logique des arguments qui étaient présentés. C'est vous-même qui ce matin et à la première séance reconnaissiez que la demande que nous avions faite et que les pressions qui étaient exercées étaient bien justifiées.

Je veux vous renvoyer au journal des Débats du mercredi, 30 juin.

M. TESSIER: Que dit-il?

M. PAUL: Vous le lirez.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, revenant à la question que je posais au ministre en tout calme et sérénité comme nous avons coutume de le faire, le ministre nous déclare son intention de présenter son projet de loi à la reprise des travaux de la Chambre. C'est bien son intention. Mais, est-ce que entre temps, il y aura consultation par écrit, verbale ou autrement, ou par l'intermédiaire de M. Springate, pour établir l'ordre de priorité dans la présentation du projet de loi? Comme je l'ai dit tout à l'heure, il y a trois lois qui se recoupent et le ministre de l'Education en a annoncé une autre sur la fiscalité scolaire où nous allons devoir nécessairement retrouver les mêmes définitions.

Si, par hypothèse, cette loi no 48 venait la première, comme elle comporte des définitions que nous allons retrouver dans la Loi du syndicalisme agricole et éventuellement dans la loi portant sur la fiscalité scolaire, il est extrêmement important que le ministre nous indique tout de suite dans quel sens va s'infléchir sa politique en ce qui concerne les définitions d'agriculteur notamment.

M. TESSIER: D'abord, M. le Président, ce n'est pas à moi de décider l'ordre dans lequel les lois seront amenées devant l'Assemblée nationale. Mon collègue sait fort bien que cette question relève du leader du gouvernement. Quant à moi, la manière dont j'envisage les choses, c'est que le projet de loi no 48, ayant été adopté en première et deuxième lectures pour être déféré ensuite devant la commission parlementaire des Affaires municipales...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A notre demande.

M. PAUL: Après étude de 35 articles. M. TESSIER: Oui, oui.

M. PAUL: Il y a eu un ordre de rescision, résultat du travail du comité plénier.

M. TESSIER: C'est ça, motion d'annuler cette étude.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Aux fins de rescinder.

M. TESSIER: ...nous allons entendre toutes les représentations qui peuvent nous venir de la part du public. Nous allons prendre en considération tous les mémoires et lorsque ceci aura été épuisé, c'est-à-dire peut-être avec une autre ou deux autres séances comme celle d'aujourd'hui, nous étudierons en comité, article par article le projet de loi no 48 et, ensuite, nous ferons rapport à l'Assemblée nationale et nous passerons à la troisième lecture.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, le ministre...

M. TESSIER : Maintenant, dans quel ordre ça va se faire, par rapport aux deux autres lois auxquelles vous avez fait allusion, ça je ne peux vous le dire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, le ministre évidemment...

M. TESSIER: Mais je prends bonne note de votre suggestion.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le ministre ne nous apprend rien en nous disant que le projet de loi, après étude en commission parlementaire, va devoir revenir devant la Chambre pour être soumis à l'examen du comité plénier. Cela, c'est élémentaire en procédure parlementaire. Je veux savoir — et c'est là l'objet de la question précise que j'ai posée au ministre — dans quel ordre seront présentés ces projets de loi. Il me dit: Ce n'est pas moi qui dirige les travaux de la Chambre. D'accord. Mais, comme il y a trois lois qui vont comporter des provisions analogues, particulièrement en ce qui concerne les définitions, il est important, quel que soit le projet de loi qui sera présenté le premier devant la Chambre, de savoir quelle est, enfin, l'idée du ministre des Affaires municipales en ce qui concerne la définition d'agriculteur.

M. TESSIER: Sur cette question-là, M. le Président, j'ai dit tout à l'heure qu'après que nous aurons pris connaissance de tous les mémoires et entendu toutes les représentations des agriculteurs nous allons redéfinir exactement à l'article lm) ce qu'est un agriculteur.

M. VINCENT: Dans quel sens? Est-ce que le ministre pourrait nous mentionner immédiatement dans quel sens iront les grandes lignes de cette nouvelle définition? Voici pourquoi je pose cette question et je m'excuse auprès du député de Chicoutimi de l'interrompre. Déjà, nous avons félicité le ministre avec plaisir d'avoir apporté une définition plus concrète du terme agriculteur dans le bill 48. Cela, c'est un fait acquis et je pense bien que les agriculteurs conviendront avec nous que, déjà, nous avons l'amorce d'une définition plus réaliste du terme agriculteur ou du mot que nous employons, "cultivateur".

Nous aimerions savoir du ministre si les paroles qu'il vient de prononcer signifient qu'il pourrait y avoir un recul de sa part afin d'arriver à une définition qui sera encore aussi floue que celle que nous retrouvons dans le bill 64, la Loi du syndicalisme agricole où, en définitive, il n'y a pas du tout de définition. On dit simplement d'un agriculteur "toute personne physique qui cultive le sol".

M. TESSIER: Parlons du bill 48.

M. VINCENT: C'est là...

M. TESSIER: Si vous voulez me laisser finir ce que j'étais à vous dire, nous allons, après avoir entendu toutes ces représentations, redéfinir, améliorer la définition. Ce n'est certainement pas pour reculer, c'est pour avoir une meilleure définition. Nous allons nous inspirer, pour cette définition, des recommantations qui vont nous être faites par les agriculteurs eux-mêmes. C'est aussi simple que cela.

M. VINCENT: Maintenant, est-ce que le ministre...

M. TESSIER: Après que nous aurons redéfini, que nous aurons étudié entre nous cette définition, cela ne veut pas dire que la définition que je vais donner du terme "agriculteur" sera parfaite. Il y aura peut-être même possibilité de l'améliorer encore si vous avez de bonnes suggestions à faire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sans aucun doute.

M. PAUL: Vous ne devriez pas douter de cela.

M. TESSIER: Je crois que j'ai montré, jusqu'à présent, beaucoup de collaboration afin d'avoir la meilleure loi possible.

M. VINCENT: Assurément, mais...

M. TESSIER: Après cela et avant cela, il y aura consultation avec mon collègue le ministre de l'Agriculture de même qu'avec mon collègue le ministre de l'Education afin que nous nous entendions pour avoir la même définition. C'est cela que je voulais dire.

M. VINCENT: Comme cela, le ministre peut nous confirmer que nous aurons la même définition dans les trois lois dont fait mention le député de Chicoutimi pour éviter justement que...

M. TESSIER: C'est mon intention.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il ne faut pas que ce soit seulement votre intention, il faut aussi que ce soit votre volonté.

M. PAUL: Votre volonté.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous comprenez dans quel chaos on se trouverait s'il y avait trois définitions différentes dans chacune des trois lois. Rassurez-nous en nous disant que c'est votre volonté.

M. TESSIER: Il va y avoir consultation, je ne peux vous en dire plus long pour ce matin. Il y aura certainement consultation après qu'au ministère des Affaires municipales nous serons

arrivés à vous suggérer notre définition du terme "agriculteur". Dès que nous aurons rédigé de nouveau l'article 1-m), il sera soumis à mes deux collègues.

M. LEGER: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre? Est-ce que le ministre a affirmé tantôt ceci: Que lorsque nous étions en comité plénier pour l'adoption du bill 45 il y avait environ 30 ou 35 articles d'adoptés?

M. TESSIER: Pour le bill 48.

M. LEGER: Pour le bill 48, excusez-moi. Est-ce que vous voulez dire par là que les 35 articles adoptés sont remis en question? C'est là qu'on peut dire que c'est un recul, puisqu'il y avait quelque chose d'adopté à ce moment-là.

M. TESSIER: J'ai présenté une motion dans ce sens.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y avait 35 articles et il y a eu motion aux fins de rescinder...

M. TESSIER: C'est cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... les décisions du comité plénier.

M. TESSIER: C'est cela. De plus en plus, au fur et à mesure que nous poursuivions l'étude en comité plénier des articles de ce projet de loi, je me suis rendu compte que cela commençait à devenir assez grave.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous avions noté le caractère d'improvisation de la loi et c'est ce qui a amené le ministre à résipiscence.

M. TESSIER: Ce n'est pas cela du tout. Le projet de loi avait été bien étudié, bien mûri, mais c'est un projet de loi extrêmement important et je croyais que nous allions trop vite.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous improvisiez.

M. TESSIER: C'est ce dont je me suis rendu compte.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous improvisiez rapidement.

M. TESSIER: Nous n'improvisions pas. Nous en avons tout de même discuté et vous en avez discuté avec moi. Nous en avons tous discuté ensemble. Ces articles ont été adoptés jusqu'à l'article 35, après que certains amendements furent apportés. Disons que je n'étais pas entièrement satisfait, loin de là.

M. LEGER: Mais on peut dire que si c'était adopté...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous en avons discuté avec le ministre et nous l'avons convaincu que la meilleure improvisation est celle qui est longuement préparée.

M. LEGER: De toute façon, M. le Président, on peut dire que même si une personne recule, ce n'est pas une mauvaise note; cela montre qu'une personne est sérieuse et qu'elle veut corriger des erreurs qu'elle peut avoir faites auparavant. C'était tout en son honneur de vouloir corriger ces choses-là.

M. TESSIER: Mais vous savez...

M. LEGER: Mais il faut admettre, quand même, que le projet n'était pas prêt.

M. TESSIER: Il y a certains reculs qui sont excellents.

M. LEGER: Oui, pour l'avenir, mais ça ne corrige pas les erreurs passées.

M. TESSIER: Il y a des reculs stratégiques aussi.

M. LEGER: Oui. Maintenant, M. le Président, je voudrais poser des questions à...

M. VINCENT: Seulement une question.

M. LEGER: Allez, si vous me remettez le crachoir.

M. VINCENT: Quant au mémoire présenté et lu par M. Jasmin, avec les explications, en ce qui nous concerne, nous trouvons que les amendements proposés à l'article 1 qui, en définitive, gardent dans les grandes lignes les définitions que le ministre a mentionnées dans le bill 48, sont acceptables comme première étape pour en arriver à une meilleure définition. Il y a également l'article 30 qui a soulevé beaucoup de commentaires. Et cet article 30, tel qu'écrit à nouveau ici par le mémoire des jardiniers maraîchers, apporte une lumière nouvelle ou des indications nouvelles. Si le ministre se propose d'apporter des amendements, c'est bien difficile de demander à M. Jasmin de préciser; c'est très précis. Je pense bien qu'il faudrait tenir compte des facteurs ou des points soulevés par le mémoire qui sont réellement l'expression des agriculteurs de la région de Montréal.

M. TESSIER: Sans aucun doute, M. le Président, mais...

M. VINCENT: Cependant...

M. TESSIER: ... il faut tenir compte également des autres mémoires qui vont nous être présentés.

M. VINCENT: Oui, oui.

M. TESSIER: Je crois qu'il y en a sept de la part de la classe agricole.

M. CROISETIERE: Le ministre était tellement bien disposé, parce que tantôt, à l'article 27, il nous a proposé un amendement. Il semblait tellement bien' disposé, ce matin, que nous croyions qu'il était prêt à nous définir davantage à l'article 30...

M. TESSIER: En ce qui concerne les musées, c'était clair, il y avait eu une omission. Nous avons eu un mémoire; nous n'avons pas eu sept mémoires, nous en avons eu un seul qui représentait peut-être 75 musées.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un peu fort, 75.

M. TESSIER: Quarante-quatre, bon. Une quarantaine de musées. Tandis que du côté de la classe agricole, c'est différent, il n'y a pas un seul mémoire au nom de la classe agricole, mais plusieurs. Alors, avant que l'on puisse rédiger à nouveau ces deux articles, il va falloir nécessairement que nous prenions connaissance de tous ces mémoires. Ce n'est qu'à la fin, lorsque nous aurons entendu tous les mémoires de la part de la classe agricole, que nous puiserons dans l'un ou l'autre de ces nombreux mémoires-là, que nous essaierons de trouver la meilleure définition possible, laquelle nous vous soumettrons, mes chers collègues.

M. VINCENT: M. le Président, je continue en disant: Cependant, à la suite de l'intervention des jardiniers maraîchers et des autres interventions que nous aurons c'est bien difficile pour nous de poser des questions à M. Jasmin ou à son groupe, parce que sur les trois points soulevés par l'Association des jardiniers maraîchers, le ministre nous mentionne: Cela a du sens, nous écoutons cela avec beaucoup de sympathie; nous apporterons des amendements. M. Jasmin et l'association peuvent se retirer en ne sachant pas si leur mémoire est pris en considération, ni sur quels points il est pris en considération, ni quels points de leur mémoire seront respectés. Cela embête également les membres de la commission, à savoir sur quoi en particulier nous devrions demander à M. Jasmin de préciser pourquoi ils veulent obtenir telle ou telle chose. Nous sommes dans une zone grise présentement.

M. TESSIER: Je compte sur vous, justement, lorsque nous aurons une nouvelle définition de l'agriculteur pour faire valoir les revendications.

M. VINCENT: Quand?

M. TESSIER: Quand? Avant l'adoption de la loi.

M. VINCENT: C'est bien difficile de faire des suggestions sur une définition éventuelle qui viendra dans X semaines.

M. CROISETIERE: Après l'audition des mémoires?

M. TESSIER: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le problème qui se pose, M. le Président, le ministre, je crois, ne le saisit pas très bien. Lorsque la loi reviendra devant l'Assemblée nationale, on nous proposera une définition.

Naturellement, il nous sera loisible de l'améliorer en faisant des suggestions. Mais est-ce que nos suggestions et la version que nous proposerons au ministre satisferont les gens qui nous ont présenté les mémoires? C'est pour ça que nous aurions aimé que le ministre se commît ce matin et nous indiquât exactement l'envergure qu'il entend donner, le contenu sémantique de ce terme agriculteur, producteur ou cultivateur.

M. TESSIER: Je regrette, M. le Président, mais je ne peux pas me commettre ce matin pour faire plaisir à mon collègue le député de Chicoutimi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas pour me faire plaisir, c'est pour servir les intérêts du public.

M. PAUL: Pour satisfaire ces gens-là.

M. VINCENT: Donc, M. Jasmin, votre mémoire est pris en très grande considération et le ministre se commettra un jour ou l'autre.

M. PAUL: Comptez sur nous pour la défense de vos droits.

M. TESSIER: C'est exactement ce que je vous ai suggéré.

M. PAUL: Pourquoi ne l'avez-vous pas dit? M. TESSIER: Oui, je viens de le dire.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Encore une fois nous nous substituerons au gouvernement.

M. LEGER: M. le Président, j'avais à poser quelques questions. M. Jasmin tantôt a tenu pour acquis que le mot floriculteur n'est pas un mot qui s'exclut de la norme de l'agriculture. Est-ce que le ministre peut me dire si c'est exact?

Tout l'exposé de M. Jasmin portait sur le point que — et il explique — "si nos renseignements sont exacts les mots "autre que floriculteur" sont rayés de l'article".

M. TESSIER: Oui.

M. LEGER: Est-ce exact que, dans votre

esprit actuellement, les floriculteurs feront partie de la définition d'agriculteur?

M. TESSIER: Oui.

M. LEGER: Je n'avais qu'une question à poser à M. Jasmin. Tout à l'heure, je vous écoutais attentivement et vous avez affirmé — dans le but probablement d'avoir un adoucissement de la taxation pour les agriculteurs, chose sur laquelle je suis d'accord que le revenu de l'agriculteur et du cultivateur ou le prix qu'il vend ses produits n'ont pas changé depuis vingt ans, comparativement aux prix qu'il doit payer pour les outils qui lui permettent de faire son travail. Pourriez-vous expliciter davantage votre pensée?

Est-ce que c'est à peu près ça que vous avez exprimé tantôt?

M. JASMIN: C'est bien ça. Les rapports statistiques nous montrent d'une façon très claire que le prix des produits comestibles à la ferme, la nourriture à la ferme, aussi bien fruits, légumes, etc., n'a pas augmenté depuis les vingt dernières années en proportion du coût des intrants qui entrent dans l'agriculture.

M. LEGER: C'est le mot "en proportion" qui change le sens. Merci.

M. JASMIN: Permettez-moi un autre commentaire ici. On a mentionné que dans la définition du terme "agriculteur" on pourrait peut-être suggérer la définition de la terre elle-même plutôt que la définition de l'homme qui exploite cette terre-là. Je demanderais au législateur de bien penser que, dans la définition de la terre, il ne faudrait pas être trop limitatif, étant donné que certains maraîchers exploitent, sur des lopins de terre très restreints, des industries qui sont relativement suffisantes pour faire vivre son homme. Et j'entends là-dedans les floriculteurs, les producteurs de fraises, les producteurs de produits en serre, sous verre ou sous couche, etc., qui, sur peut-être dix ou quinze acres, exploitent une industrie viable.

M. TESSIER: M. Jasmin, je peux vous assurer que nous avons apprécié ce que vous venez d'exposer.

Je pourrais peut-être revenir sur un point qui a été soulevé il y a quelques instants par M. Jasmin, le Marché...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le Marché central métropolitain.

M. TESSIER: Le Marché central métropolitain. Il semblerait que, dans ce cas, c'est une question d'évaluation. On me dit que les évalua-teurs de la ville de Montréal ne veulent pas tenir compte, dans l'évaluation de cet immeuble, des servitudes qui existent, et que si on tenait compte de ces servitudes, l'évaluation serait réduite considérablement. Je crois que toute cette question du Marché central métropolitain est une question de normes d'évaluation.

C'est précisément un des buts de cette loi-cadre d'obliger les municipalités à avoir les mêmes normes d'évaluation, le même manuel d'évaluation. En donnant justement des pouvoirs à la commission municipale, tel que mentionné au projet de loi no 48, d'intervenir auprès des évaluateurs municipaux, je crois que nous pouvons, sans qu'il y ait un article spécifique dans la loi pour le Marché central métropolitain, régler le cas à la satisfaction des horticulteurs de la région métropolitaine de Montréal.

M. VINCENT: Le ministre...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre — excusez-moi — veut dire par là que les dispositions que prendrait le gouvernement aboliraient, à toutes fins utiles, les diverses instances devant lesquelles sont allés les gens du Marché central métropolitain, d'après ce qui appert dans le mémoire que nous avons devant nous? Ils n'ont jamais eu gain de cause.

M. TESSIER: Aboliraient les diverses instances. Vous voulez dire devant les tribunaux?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.

M. TESSIER: Bien, évidemment, la procédure est différente, telle que prévue au bill 48. Il y a évidemment l'appel au bureau de révision, également à la commission municipale et, par la suite, s'il y a lieu, devant les tribunaux, devant la cour Provinciale qui aura une section de l'évaluation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre était présent, l'autre jour, je présume, quand nous avons pris connaissance de ce mémoire en commission parlementaire. Il sait très bien que les problèmes qu'il a évoqués sont réels. Est-ce que les décisions qu'il entend prendre, lorsqu'il parle de normes, vont permettre aux gens du Marché central métropolitain d'abolir toutes les tracasseries judiciaires dont ils disent avoir été victimes et qui les empêchent de...

M. TESSIER: Je l'espère bien.

M. PAUL: Mais pas rétroactivement?

M. TESSIER: Pardon?

M. PAUL: Pas rétroactivement?

M. TESSIER: Bien, évidemment...

M. PAUL: Parce que, autrement, ce serait une intrusion du politique dans le judiciaire.

M. TESSIER: On ne peut certainement pas avoir des dispositions rétroactives. C'est évident que cela va s'appliquer à compter du prochain

rôle d'évaluation qui sera confectionné d'après la loi, lorsqu'elle aura été adoptée et sanctionnée.

M. PAUL: Je pose le problème parce que ce n'est pas la première fois que le gouvernement actuel intervient dans le judiciaire. En temps et lieu, on en donnera la preuve, à l'occasion des débats. C'est pour ça que je veux vous faire préciser...

M. TESSIER: Restons sur le sujet.

M. PAUL: ...qu'il n'y aura aucune rétroactivité dans la loi.

M. TESSIER: Bien, il n'y en a pas. M. PAUL: D'accord. Très bien.

M. TESSIER: Il n'y en a pas actuellement et je n'ai pas l'intention d'en mettre non plus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre des Affaires municipales a consulté son collègue, le ministre de l'Agriculture et de la Colonisation, en ce qui concerne le Marché central métropolitain?

M.,TESSIER: Non, pas particulièrement là-dessus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre a pris connaissance du document qui a été envoyé, par le Marché central métropolitain au ministre de l'Agriculture, le 26 août 1970?

M. TESSIER: Le 26 août 1970?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le 26 août 1970.

M. TESSIER: Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tel qu'il appert au mémoire, page 4. Si j'ai bonne mémoire, le ministre était présent l'autre jour quand on a lu ce mémoire.

M. TESSIER: J'ai pris connaissance du mémoire qui a été présenté par le Marché central métropolitain, d'accord, en même temps que vous tous, d'ailleurs. Je suis parfaitement conscient — d'ailleurs, je l'ai déclaré à cette occasion-là — qu'il y avait une injustice en ce qui concernait le Marché central métropolitain. Je l'ai bien déclaré devant cette commission.

M. VINCENT: A cause des normes qu'on étudie présentement...

M. TESSIER: Exactement. C'est ça.

M. VINCENT: ...mais ces normes pourraient être utilisées quand même. On prend un exem- ple: les terrains de golf. Si, par exemple, les terrains que le Marché central métropolitain possède étaient convertis en terrains de golf, bien, les mêmes injustices se produiraient, sauf qu'avec le bill 48 il y a une exemption pour les terrains de golf. Il y aurait des exemptions pour les terrains de golf.

M. TESSIER: Oui, mais en ce qui concerne le Marché central métropolitain cet immeuble est surévalué parce qu'en vertu des normes qu'on suit actuellement à Montréal on ne tient pas compte des nombreuses servitudes qui existent sur cet immeuble. C'est là le problème.

M. JASMIN: M. le ministre...

M. TESSIER: Mais, lorsque le projet de loi no 48 sera appliqué, on devra se conformer aux nouvelles normes et tenir compte de ces servitudes; ceci aura pour effet de baisser considérablement l'évaluation. Et, si, par hasard, on ne veut pas se conformer à la loi, la Commission municipale aura les pouvoirs d'intervenir et de déterminer elle-même l'évaluation.

M. VINCENT: M. le Président, je peux dire au ministre ceci, et je pense que M. Jasmin aurait un commentaire à faire tout à l'heure: A l'heure actuelle, le Marché central métropolitain, qui occupe 45 acres, je crois...

M. JASMIN: D occupe 109 acres.

M. VINCENT: ... c'est un terrain qui appartient à une compagnie. Généralement, un terrain qui appartient à un particulier ou à une personne physique est évalué sur quatre faces. Mais ce terrain appartient à la compagnie et celle-ci y a construit des routes, des chemins. Au lieu d'évaluer le terrain comme tel sur quatre faces, on l'évalue à l'intérieur des routes, à l'intérieur des chemins, comme si un particulier avait des ruelles ou des entrées de cour et qu'on évaluait chaque côté de l'entrée de cour. C'est là que le problème se pose à l'heure actuelle. Au lieu d'être un terrain évalué sur les quatre faces, il l'est comme un terrain qui serait divisé en lots prêts à être vendus et chaque lot est évalué à l'intérieur du Marché central métropolitain. C'est là qu'est tout le problème.

Est-ce que M. Jasmin pourrait nous faire des commentaires là-dessus? Je pense qu'il est parfaitement au courant du problème.

M. JASMIN: J'ai certains commentaires à faire là-dessus, certainement. Le principal est que ces terrains sont évalués sur la même base que les terrains avoisinants et ces terrains sont, en réalité comme ceux des agriculteurs: un outil de travail. C'est un outil de mise en marché. Je ne demande pas à la commission, qui est loin de la mise en marché des produits agricoles, de comprendre l'ampleur du sujet mais ceci est un outil communautaire qui sert à

l'ensemble de la province de Québec, qui agit comme catalyseur et moyen de distribuer des produits à travers la partie nord-est de l'Amérique. C'est un outil communautaire et on l'évalue comme si c'était un outil qui sert à un particulier pour faire de l'argent.

Regardons votre loi sur l'évaluation. Ce qui manquait au juge ou aux gens qui règlent les litiges entre la ville de Montréal et le marché, c'est que dans les lois précédentes il n'y avait pas suffisamment de critères sur lesquels les juges pouvaient se baser pour dire: Messieurs, vous n'évaluez pas ça de la bonne façon. Et il faudrait que dans la loi, ici, il y ait quelque chose qui le montre.

D'ailleurs, nous avons ici M. Couture, le gérant général du marché; si vous voulez avoir plus de commentaires, je suis certain que M. Couture serait bien aise de vous en apporter plus.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je reviens à une question que j'ai posée au ministre tout à l'heure: Est-ce qu'il a pris connaissance du document que le Marché central métropolitain avait présenté à son collègue, le ministre de l'Agriculture, le 28 juillet dernier?

M. TESSIER : Les fonctionnaires de mon ministère en ont pris connaissance...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président, j'interromps tout de suite le ministre pour lui faire savoir que ledit document se trouve dans le mémoire qu'on nous a lu ici devant la commission.

M. TESSIER: D'accord. Je dis qu'au mois d'août 1970 le...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le 28 juillet 1970.

M. TESSIER: J'ai dit juillet ou août 1970, à ce moment-là...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre est approximatif.

M. TESSIER: Les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture ont eu des rencontres avec ceux des Affaires municipales qui étaient chargés particulièrement de préparer la rédaction du projet de loi no 48. Et il y a eu contact et discussion au niveau des fonctionnaires à ce moment-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): A quel moment ont eu lieu ces réunions?

M. TESSIER : Immédiatement après ou dans les quelques semaines qui ont suivi la présentation du mémoire du 28 juillet 1970.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Entre quels fonctionnaires des dits ministères?

M. TESSIER: Je ne peux pas vous donner les noms. Mais je vous dis qu'il y a eu contact, à ce moment-là, et discussion entre les fonctionnaires des deux ministères.

M. PAUL: Y aurait-il possibilité, si le ministre n'est pas en mesure de nous donner les noms des fonctionnaires, de nous donner les services?

M. TESSIER: Je peux même préciser que les directeurs des services juridiques des deux ministères se sont rencontrés à ce moment-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous remercions le fonctionnaire.

M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions, nous vous remercions, M. Jasmin. Nous invitons M. Nadon ou son représentant, pour la Société d'agriculture du comté de Laval.

Société d'agriculture du comté de Laval

M. NADON: M. le Président, messieurs les membres de la commission parlementaire, mon nom est Lévis Nadon, président de la Société d'agriculture du comté de Laval. C'est à titre de président de la Société d'agriculture du comté de Laval que je viens vous demander de faire quelques modifications au bill 48.

A la section 1 du paragraphe m), il est écrit: "Agriculteur". C'est encore un peu la même chose que M. Jasmin. On dit: "Une personne physique, autre qu'un floriculteur, qui tire sa subsistance et celle de sa famille ou au moins 25 p.c. du total de son revenu brut". Nous demandons que les mots "autre que floriculteur" et "25 p.c. du revenu brut" soient rayés.

Le mot "floriculteur" est difficile à définir. Inclut-il les maraîchers qui sèment des fleurs, en couches ou en serres, pour vendre des plants de fleurs en caissettes, ou des géraniums bouturés, ou des glaïeuls pour l'ornement paysagiste, ou ne veut-on inclure simplement que les fleuristes qui cultivent des plants importés pour la vente de fleurs en pots ou coupées?

Nous demandons que les mots "25 p.c. du revenu brut total de la culture du sol" soient rayés parce que ce serait donner aux villes ou aux municipalités un droit d'entrer trop loin dans notre vie privée. Nous n'aimerions pas exposer nos revenus, nos dépenses, les hypothèques et tout le reste devant des employés municipaux que nous côtoyons. Et si, par malchance, un agriculteur est frappé par la maladie ou qu'il ne peut travailler pour une couple d'années, suivant cette loi, il perd tous ses droits parce que, n'ayant pas obtenu 25 p.c. de son revenu brut. Nous trouvons que cette phrase est très ambiguë. Nous préférons la définition suivante: "Agriculteur: Personne physique dont la principale occupation est l'agriculture." Nous faisons confiance aux administrateurs de villes et de municipalités pour déterminer la différence entre un cultivateur et celui qui ne l'est pas.

Section 3, article 30, premier paragraphe: "Tout terrain appartenant à un agriculteur, ainsi que les bâtiments qui s'y trouvent, à l'exception des bâtiments de ferme, sont portés au rôle à leur valeur marchande".

Texte ambigu entre "bâtiments" et "bâtiments de ferme". Si l'on veut parler de la maison résidentielle du cultivateur, pourquoi ne pas l'avoir désignée par son nom? Le cultivateur ou le secrétaire de différentes corporations municipales qui auront à interpréter ce texte de loi ne sont pas nécessairement des hommes de loi.

Section 3, article 30. Nous aimerions que le troisième paragraphe soit modifié comme suit: "Tout terrain qui cesse d'être utilisé en totalité ou en partie pour la culture du sol, l'élevage des abeilles ou d'animaux à fourrure, l'exploitation de leur production, l'élevage d'animaux à fourrure, l'exploitation d'un verger, d'une érablière ou d'un boisé de ferme devrait être taxé sur sa valeur commerciale, sans rétroactivité de taxes.

La vie de ces cultivateurs — je vous donne comme exemple ceux de la ville de Laval, qui sont situés dans une ville — est troublée, surtout pour ceux qui sont situés près des développements, par exemple, par le pillage, le piétinage, les cultures détruites, les fossés remplis d'ordures de toutes sortes, les routes rurales mal entretenues, les bords de routes non fauchés, les branches non coupées. De plus, l'agriculteur se voit obligé de laisser couper ses terres par des pylônes de l'Hydro-Québec, de la Bell Canada, par des pipe-lines, par le gaz naturel et par des routes utilisées surtout par les citadins.

Le cultivateur dans une ville est donc obligé de supporter tous ces inconvénients sans que ses plaintes soient prises en considération par les villes. Nous, agriculteurs de Laval, sommes environ 500 et possédons les cinq sixièmes du territoire. La majorité des cultivateurs sont des jardiniers maraîchers qui vendent leurs légumes au même prix que lors des années trente-cinq ou quarante.

Cependant, nous payons tout de trois à quatre fois plus cher, soit les semences, les engrais, la main-d'oeuvre, les taxes, etc. De plus, nous sommes aux portes du "dumping" de l'Ontario et des Etats américains, sans compter les intempéries qui frappent les cultivateurs à tout moment.

Pourquoi vouloir une rétroactivité de taxes de cinq ans? Cela, c'est la plus grande injustice envers les cultivateurs. Un cultivateur qui travaille pendant 30 ou 40 ans pour conserver son bien se prive de voyages et de loisirs, et vous allez exiger de lui, peut-être, un quart ou un cinquième de son prix de vente! Ce n'est pas réaliste, messieurs de la commission. Les cultivateurs n'auront pas le droit d'avoir une somme de $40,000 ou de $60,000 pour leur terre sans être obligés de partager avec les corporations. C'est un non-sens. Vous aimeriez mieux, peut-être, qu'ils grossissent le nombre des assistés sociaux! Est-ce qu'il n'est pas assez instruit?

Ce cultivateur n'a pourtant rien coûté aux villes. Il n'a pas eu de bourses d'études ni de prêts; il a simplement travaillé et ménagé pour avoir une vieillesse heureuse, tranquille et paisible.

En supposant qu'un cultivateur vende sa ferme, cette taxe va tout simplement augmenter le prix de vente d'autant, d'où l'inflation. C'est pourtant ce que les gouvernements essaient de combattre.

Et que dire si le gouvernement fédéral met en application l'impôt sur les profits de capitaux projeté pour 1972? On dit que 50 p.c. de ces profits seront taxables.

Nous comprenons que les villes ont besoin du produit des taxes pour leur administration, mais nous nous demandons si, avec des budgets plus restreints, les conseillers retireraient des pensions de 50 p.c. de leur salaire après un mandat de huit ans seulement?

En plus, les sommes d'argent dépensées pour les loisirs devraient faire l'objet de taxes spéciales. Ainsi, les citadins seraient un peu moins exigeants.

Messieurs, nous, agriculteurs, n'avons pas de fonds de pension. Si nous ne sommes pas assez prévoyants et administrateurs pour économiser et freiner ces hausses de taxes qui nous menacent d'année en année, nous n'aurons que l'assistance sociale pour nous faire vivre à l'âge de la retraite.

Notez bien, comme il n'est nullement fait mention du mode de taxation des commissions scolaires dans ce bill 48, que nous demandons que soit ajouté un article spécial décrétant que celles-ci devront utiliser le rôle d'évaluation municipale avec les exemptions qui s'y rattachent.

Le tout humblement soumis, Lévis Nadon, cultivateur et président de la Société d'agriculture de Laval.

M. TESSIER: M. le Président, je voudrais remercier M. Nadon de son excellent mémoire. Et pour commencer mes remarques par la dernière partie du mémoire, c'est-à-dire la note, le nota bene, évidemment il est prévu que les rôles d'évaluation scolaire devront être basés sur les rôles d'évaluation municipale.

Alors, à cette question-là, je suis en mesure de répondre immédiatement. Je remarque, et pour faire suite à ce que je disais tout à l'heure, qu'on n'est pas en mesure de donner des définitions aujourd'hui, je pense que nous en avons justement la preuve. Le mémoire précédent, qui nous a été présenté par l'Association des jardiniers maraîchers de la région de Montréal, admettait la définition du cultivateur avec des revenus de 25 p.c. Quant à vous, vous vous opposez complètement à ça, alors là tout de suite nous sommes en présence de deux mémoires successifs d'une contradiction tout à fait flagrante.

M. VINCENT: Il y a une nuance assez

considérable M. le Président, si le ministre me le permet. Ici, dans le mémoire de M. Nadon, on arrive avec une définition encore plus serrée que celle soumise dans le bill, parce qu'on dit: Nous préférons la définition suivante: L'agriculteur, personne physique dont la principale occupation est l'agriculture. Si on considère que c'est la définition du Crédit agricole, à ce moment-là on parle de 50 p.c. dont l'occupation principale est l'agriculture. Et dans le bill 48, le ministre mentionne: "faisant vivre sa famille avec le fruit de la culture, ou 25 p.c ". Il faudrait faire la distinction.

M. TESSIER: Non, non, ce que je veux dire, M. le Président, c'est que dans le mémoire précédent, on admettait, dans la définition de l'agriculteur, que ce soit celui dont le revenu provient, jusqu'à concurrence d'au moins 25 p.c, de la culture de la terre, alors que dans le mémoire que nous avons devant nous, de la Société d'agriculture du comté de Laval, on veut faire disparaître complètement ce pourcentage et on suggère une autre définition.

Ce que je veux simplement dire, M. le Président, c'est que je crois qu'avant d'en venir à une définition ou à un projet de définition, nous avons raison d'attendre de recevoir et de discuter tous les mémoires, parce que nous sommes justement là en face d'un fait comme celui que je viens d'exposer.

Quant à la définition de floriculteur, je crois, M. Nadon, que vous avez parfaitement raison; il va falloir le définir. Nous allons sûrement tenir compte de votre suggestion. Et je pourrais ajouter que, d'ici deux semaines au plus tard, il y aura rencontre avec le ministère de l'Agriculture pour que nous nous entendions sur toutes ces définitions, sur l'ensemble des définitions à donner en ce qui concerne la classe agricole.

Alors je vous remercie, M. Nadon, nous allons certainement tenir compte de plusieurs suggestions très valables qui sont contenues dans votre mémoire.

M. NADON: M. le ministre, si vous permettez, ce à quoi je suis beaucoup intéressé c'est à la rétroactivité de cinq ans.

M. TESSIER: Ah! bon, justement là-dessus, disons que j'y ai fait allusion peut-être un peu vaguement lorsque j'ai dit que nous allions tenir compte des suggestions très valables contenues dans votre mémoire.

En mentionnant cela, je voulais en particulier, faire allusion à la rétroactivité que nous allons réviser.

M. NADON: Dans les années 1958-1960, il s'était vendu plusieurs terres, mais, depuis trois ans, il y en a 120 que les cultivateurs ont été obligés de reprendre avec de grosses pertes d'intérêts et de grosses taxes. Ils sont donc devenus plus pauvres que lorsqu'ils ont vendu.

M. TESSIER: D'accord, nous en tiendrons compte, sûrement.

M. LEGER: M. le Président, j'aurais juste deux petites questions. M. Nadon, quand vous parlez de vous opposer à ce que la terre qui n'est pas exploitée soit taxée sur sa valeur commerciale sans rétroactivité, vous apportez comme argument premier, que c'est une occasion pour un cultivateur de se préparer un fonds de pension.

M. NADON: Oui.

M. LEGER: Je pense qu'il y a deux dimensions différentes, il y a celle où un cultivateur se dit: Bon, cette partie de terre, je la réserve pour la vendre, à un moment donné, pour avoir un profit, pour avoir un fonds de pension. Mais celui qui ne cultive pas une bonne partie de sa terre, qui peut augmenter de valeur du fait que l'urbanisation s'en vient, pendant qu'il vit de sa terre, cette partie devrait quand même être taxée sur une base commerciale. Vous voyez quand même une nuance entre les deux. Du vivant du cultivateur, c'est-à-dire durant la période où il est producteur, c'est une partie qui ne sert pas, et du moment où il ne produit pas du tout, il est à l'âge de la pension et il veut avoir un fonds de pension. Il y a deux dimensions différentes.

M. NADON: Oui, mais vous ne pouvez pas obliger un homme de 60 ou 65 ans à entretenir sa terre comme un vrai jardinier. Ce sont ces terres que nous ne voulons pas voir taxer en grosse valeur.

M. LEGER: Mais quand même vous voyez le problème du fait qu'il y a des gens — autres que des cultivateurs — qui peuvent spéculer parce qu'ils vont se servir de ces terres.

M. NADON : Parmi les cultivateurs, il est très rare qu'il y ait des spéculateurs. Il peut y en avoir un dans tout une grande ville. Moi, le premier, quand même je voudrais vendre demain matin, je sais que je ne trouverai rien. Il faut attendre que le développement se rapproche. Premièrement, les spéculateurs sont des gens qui ont été beaucoup échaudés, que ce soit à Montréal ou à Laval, ou un peu partout. C'est pour ça que je vous donnais comme exemple que dans l'espace de trois ans il s'est remis au-delà de 120 terres .

M. LEGER: J'ai mon collègue qui doit aller à une émission de télévision, je vais lui laisser la parole.

M. VINCENT: M. le Président, comme le ministre, je voudrais remercier M. Nadon de son bref mémoire mais qui apporte des faits assez importants. D'abord en ce qui concerne le

floriculteur, le ministre nous a confirmé qu'il y aurait un amendement, donc passons outre à cette question. En ce qui concerne la définition du terme "agriculteur", il faudrait quand même mentionner ici que l'Association des jardiniers maraîchers qui a présenté son mémoire il y a quelques instants n'a pas parlé de la définition de l'agriculteur comme étant une personne physique qui avait 25 p.c. de son revenu, mais comme étant une personne physique qui tire sa subsistance et celle de sa famille de l'agriculture ou, pour apporter un volet nouveau, 25 p.c. de son revenu. C'est à lui de faire la preuve, quand le secrétaire municipal dit: Vous n'êtes pas agriculteur, même si, lui, considère que c'est sa principale occupation, c'est à lui de faire la preuve que les 25 p.c. de son revenu proviennent de l'agriculture.

Maintenant, M. Nadon, dans votre mémoire, il y a un danger quand vous mentionnez: Nous préférons la définition suivante: L'agriculteur, personne physique dont la principale occupation est l'agriculture. Vous pourriez automatiquement, éliminer une série d'agriculteurs parce qu'elle n'est pas considérée comme étant leur principale occupation. A l'office du crédit agricole, on dit: Pour obtenir un crédit agricole, il faut que la principale occupation soit l'agriculture. Il faut donc qu'il fasse la preuve qu'au moins 50 p.c. de ses revenus proviennent de l'agriculture. Vous pourriez éliminer ainsi plusieurs agriculteurs de votre région. Il y a un danger, et je tiens à le souligner immédiatement au ministre, à prendre seulement cette définition "principal agriculteur "

M. TESSIER: Je pourrais peut-être préciser ceci, M. le Président...

M. VINCENT: Oui, oui y incluant...

M. TESSIER: ... c'est qu'on parle depuis assez longtemps de la définition de l'agriculteur. Mais je tiens à faire remarquer, M. le Président, à mon collègue le député de Nicolet, que j'ai également mentionné la possibilité de considérer uniquement la ferme.

Peut-être qu'au lieu de définir l'agriculteur on va définir ce qu'est une terre agricole.

M. VINCENT: En tenant compte de ce qu'a mentionné M. Jasmin qu'il y a peut-être des dangers là.

M. TESSIER: C'est ça. C'est pour ça qu'on ne peut pas en arriver à une conclusion définitive. On va étudier les deux: la définition de l'agriculteur et la définition d'une ferme ou d'une exploitation, parce qu'il n'y a pas seulement une ferme; ça peut être une exploitation. On a parlé tantôt des fraises, par exemple, des horticulteurs, des fleuristes. Evidemment, il va falloir tâcher de trouver une définition qui va englober, en somme, les diverses exploitations agricoles. C'est justement ce qui va faire l'objet de nos discussions, dans les prochaines semaines, avec le ministère de l'Agriculture.

M. VINCENT: D'accord, M. le Président. C'est très important, comme l'a souligné le député de Chicoutimi — je pense bien que les agriculteurs en sont conscients également — que ce soient les mêmes définitions en ce qui concerne la Loi du syndicalisme agricole et l'autre loi.

M. TESSIER: Je vous l'ai dit, je le considère comme important moi-même.

M. VINCENT: Nous avons à discuter à une autre commission exactement du même problème.

M. TESSIER: C'est ça.

M. VINCENT: Maintenant, M. Nadon a souligné un point très important, au bas de la première page du mémoire, dans sa note concernant l'article 30. J'aimerais quand même que le ministre fasse ses commentaires là-dessus. On parle d'un texte ambigu entre bâtiments et bâtiments de ferme. Je pense qu'il faudra donner un éclaircissement parce que c'est assez ambigu; on veut dire par là résidence de la ferme.

M. TESSIER: J'ai mentionné, M. le Président, à M. Nadon que nous allons considérer toutes ses suggestions très valables. J'en profite pour féliciter M. Nadon et l'Association de l'agriculture du comté de Laval. Réellement, c'est certainement un des meilleurs mémoires qui nous aient été présentés. Il n'est pas volumineux ; il est très concis et chaque phrase a son importance. Nous allons réviser également la définition des bâtiments et des résidences des cultivateurs afin de faire disparaître toute ambiguïté à ce sujet.

M. VINCENT: En ce qui concerne la rétroactivité de cinq ans...

M. TESSIER: Ah! oui, certainement.

M. VINCENT: ... le ministre l'a mentionné. M. Nadon mentionne également dans son mémoire qu'il est question qu'Ottawa impose le profit de capital. On le sait; d'ailleurs, le ministre des Finances du Québec a annoncé cette semaine que lui également avait l'intention de l'imposer. Là, vous avez deux arguments, Ottawa et Québec.

M. NADON: Cela fait qu'il ne nous en restera plus!

M. VINCENT: Enfin, nous sommes contents — je pense que M. Nadon doit également l'être— que le ministre nous ait confirmé, au sujet de la note au bas du mémoire concernant

l'évaluation scolaire, qu'il y aurait les mêmes normes d'évaluation. Ceci va épargner beaucoup de démarches aux agriculteurs. Je tiens à le confirmer; j'ai eu l'occasion de rencontrer les agriculteurs de Laval et c'est un des gros problèmes auxquels les agriculteurs ont à faire face, deux systèmes d'évaluation, scolaire et municipale.

M. TESSIER: Absolument. A ce sujet, M. le Président, je pourrais préciser que j'ai eu des conversations avec mon collègue, le ministre de l'Education. Il est bien convenu que, dès que la présente loi, le bill 48, aura trouvé son application — évidemment, cela peut prendre quelque temps avant que la loi soit appliquée à l'ensemble du territoire du Québec, c'est-à-dire dans toutes les municipalités; il peut s'écouler peut-être deux ou trois ans avant qu'on puisse l'appliquer partout — dans toutes les municipalités, à ce moment-là, il n'est plus question d'avoir des normalisations de rôle. Il y aura un seul rôle uniforme qui servira pour les fins de taxation scolaire.

M. VINCENT: Merci, M. le Président.

M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous donner un avant-goût du projet de loi que va présenter le ministre de l'Education sur la fiscalité scolaire?

M. TESSIER: Non.

M. PAUL: Quelles seront les implications de cette loi? Est-ce qu'elle viendra en contradiction dans sa rédaction, dans ses définitions avec le bill 48?

M. TESSIER: Hors d'ordre, M. le Président. Absolument hors d'ordre !

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je regrette, mais la question que vient de poser mon collègue est très importante, parce qu'il y aura un manuel dont nous a parlé longuement le ministre l'autre jour. Est-ce que ledit manuel va être utilisé par le ministère de l'Education, lorsqu'il s'agira du réaménagement de la fiscalité scolaire...

M. PAUL: Et vice versa.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...et vice versa?

M. TESSIER: Il faudra poser la question au ministre de l'Education.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ecoutez, M. le Président. Nous sommes en présence d'un ministre qui ne me paraît pas être coopérant...

M. TESSIER: Je ne répondrai certainement pas pour le ministre de l'Education.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, je n'entends pas que le ministre parle au nom de son collègue. D'accord. Nous nous entendons là-dessus. Mais il y a quand même trois projets de loi: La Loi du syndicalisme agricole, la Loi de l'évaluation foncière et il y a cette loi, dont le ministre de l'Education nous a dit qu'elle serait déposée à la reprise des travaux parlementaires, le 26 octobre. La loi ne sera pas déposée nécessairement le 26, mais...

M. TESSIER: Peut-être le 27.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...à partir de cette date. Il faut donc qu'il y ait relation très étroite entre les trois projets de loi, puisque ces trois projets de loi touchent à des domaines qui se recoupent et qui, dans bien des cas, sont identiques. Je ne m'attends pas à ce que le ministre parle au nom de son collègue, mais je voudrais savoir du ministre de l'Education, si les consultations qu'il a eues avec son collègue, si le ministre des Affaires municipales, dis-je, dans les consultations qu'il a eues avec son collègue de l'Education, s'est entendu, de même qu'avec le ministre de l'Agriculture, sur certaines définitions et s'il connaît, enfin, est-ce qu'il est informé de l'économie générale de cette loi qui portera sur la fiscalité scolaire? Quels en seront les principes?

M. TESSIER: M. le Président, je n'ai certainement pas l'intention, d'aucune manière, d'aborder, ni de près ni de loin, tout ce qui peut toucher à ce projet de loi du ministre de l'Education. Ce que je peux simplement dire et redire, c'est qu'il y a consultations et que les consultations vont s'intensifier entre le ministère des Affaires municipales et ceux de l'Agriculture et de l'Education, au cours des prochaines semaines, afin d'en arriver à des définitions identiques.

M. LEGER: Est-ce que je peux demander au ministre, à l'occasion des consultations, de vérifier auprès du ministre de l'Agriculture, qui va présenter la Loi du syndicalisme agricole, afin de se renseigner sur un point précis que touche M. Nadon en parlant d'une possibilité à cause de la taxation... sur la rétroactivité de la taxation? L'argument premier, c'est une question de fonds de pension pour les agriculteurs. C'est l'argument dont M. Nadon se sert. Est-ce que, dans la Loi du syndicalisme agricole, il n'y a pas justement des articles qui prévoient un fonds de pension pour les agriculteurs? Alors, je demande au ministre de voir à ce que cette situation soit clarifiée au niveau de l'autre loi pour que cela réponde aux appréhensions du représentant des agriculteurs du comté de Laval.

M. TESSIER: J'ai dit, tout à l'heure, que toute la question de la rétroactivité serait réexaminée complètement. Je ne veux pas aller

jusqu'à dire, ce matin, qu'elle va disparaître totalement. C'est possible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais vous avez dit que, dans le cas des agriculteurs, cela disparaîtrait complètement.

M. TESSIER: C'est possible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ce que vous avez dit tout à l'heure à mon collègue, le député de Nicolet.

M. TESSIER: J'ai dit que nous allions réexaminer toute cette question.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah non! Un instant. Vous avez dit à M. Nadon, tout à l'heure, que la rétroactivité en ce qui concerne les agriculteurs disparaîtrait complètement et qu'il n'en était pas question. Le journal des Débats pourra en témoigner. Est-ce que le ministre peut réaffirmer cela?

M. TESSIER: Je peux réaffirmer cela.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon, d'accord.

M. PAUL: Très bien.

M. NADON: M. le Président, quelle grandeur de terrain va-t-il falloir pour être considéré comme un cultivateur? Avez-vous une idée?

M. TESSIER: Pardon?

M. NADON: Quelle grandeur de terrain cela va prendre?

M. TESSIER: Tout dépend du genre d'exploitation.

M. NADON: Parce qu'un type peut être aviculteur...

M. TESSIER: Il peut être agriculteur et avoir un très petit terrain.

M. NADON: Un très petit terrain.

M. TESSIER: C'est ça.

M. NADON: Il va être considéré...

M. TESSIER: Comme M. Jasmin l'a souligné précédemment.

UNE VOIX: Des abeilles.

M. TESSIER: Des abeilles, des fraises.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un ministre des Affaires municipales.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, nous allons continuer à suivre l'exemple des abeilles, nous allons travailler. On vous remercie, M. Nadon, et j'inviterais maintenant le Barreau du Québec à venir nous causer. Le mémoire no 21.

Barreau du Québec

M. BEAUDRY: Paul Beaudry, avocat de Montréal. Je me fais le porte-parole de Me Micheline Audette-Filion, qui a dû s'absenter pour une réunion du conseil du Barreau, ce soir à Chicoutimi. Elle s'excuse de ne pas pouvoir présenter le mémoire. Je suis accompagné de Me Jean-Marie Paquet, avocat de Montréal.

Le Barreau du Québec a pris connaissance du projet de loi no 48, Loi sur l'évaluation foncière, déposé devant l'Assemblée nationale par l'honorable Maurice Tessier, ministre des Affaires municipales.

Convaincu qu'une loi générale sur l'évaluation foncière s'appliquant à tous les corps publics dans l'ensemble du territoire de la province et utilisant l'évaluation foncière comme base de taxation constitue une excellente mesure, il se doit d'applaudir à l'adoption prochaine d'une telle loi.

En effet, l'existence d'une loi unique d'application générale et du manuel contenant les règles, normes et critères d'évaluation, manuel qui sera adopté par règlement et — c'est à espérer — tenu à jour d'une façon expéditive et efficace, permettra d'étendre à l'ensemble du territoire de la province l'évaluation scientifique des biens immobiliers et facilitera la tâche à ceux qui, de près ou de loin, oeuvrent dans le domaine de l'évaluation.

Le Barreau du Québec désire faire part à la commission parlementaire de certains des commentaires que l'étude plus détaillée du projet de loi no 48 lui a suscités. A l'article 1f), le Barreau demande que cette définition devrait inclure également l'emphytéote. En effet, ce dernier est assimilé par la jurisprudence au propriétaire au même titre que l'usufruitier ou le grevé de substitution; comme eux, son droit est un démembrement de la propriété.

Quant à l'article lm) et l'article 30, nous sommes heureux ce matin d'apprendre que le ministre a l'intention de réviser la définition de la notion de l'agriculteur pour s'attacher à la terre elle-même et non à la personne, tel que nous le proposons dans notre mémoire.

A l'article 2, la notion de nomination d'un évaluateur semble impliquer l'engagement d'un fonctionnaire permanent. Cette notion pourrait être précisée en mentionnant que la nomination peut être faite soit par l'engagement d'un évaluateur permanent soit par l'octroi d'un contrat d'évaluation.

Vous avez devant vous le texte, M. le Président, alors pour épargner du temps, si vous le permettez, je vais attirer votre attention sur certains mots dans notre mémoire.

Articles 9 et 39. En ce qui concerne 9, le texte de cet article ne nous semble pas heureux. Il cherche à concilier la conformité aux normes du manuel avec le critère universellement accepté par la jurisprudence de la valeur marchande. Mais qu'arrive-t-il lorsque la valeur marchande déterminée par le libre jeu de l'offre et de la demande sur le marché donne un résultat différent de celui auquel on arrive suivant le manuel?

En somme, nous demandons, à l'article 9, que les mots "établie conformément au manuel d'évaluation" soient biffés.

L'article 11 pose des critères trop flous et causera une discrimination certaine. En effet, une période de 24 mois est trop longue pour achever un petit bâtiment et souvent insuffisante pour achever une construction considérable.

Nous soumettons respectueusement que le nouveau bâtiment devrait être porté au rôle d'évaluation dès que se réalise l'une des trois conditions suivantes: 1- Le bâtiment en construction est terminé; 2- Le bâtiment est prêt à servir aux fins auxquelles il est destiné; 3- Il commence à être occupé pour les fins auxquelles il est destiné.

A l'article 14, nous disons: Pourquoi rendre non taxables les biens mentionnés, par exemple, aux sous-paragraphes a) et c) de cet article que dans la mesure où ils sont des immeubles par destination? Pourquoi, par exemple, une machine à papier serait-elle non taxable alors que la colonne de cracking catalytique ou les réservoirs servant au mélange de divers produits pour constituer l'essence d'automobile seraient, eux, taxables, parce que ce sont des immeubles par nature?

Et pourquoi les immeubles par destination d'un système de traitement d'eaux usées, par exemple, seraient-ils non taxables en vertu de l'article 14c) et non taxables en vertu de l'article 15c) seulement s'ils appartiennent à un organisme public ou à une personne physique qui ne les exploite pas comme source de revenu?

A l'article 38, nous posons la question: Par qui sont fixés l'époque et le délai? Et nous demandons: Par la commission, peut-être?

L'article 39, je passe par-dessus.

A l'article 56, nous recommandons que les membres du bureau de révision soient nommés par la commission et que leur rémunération soit fixée et payée par elle afin d'éviter qu'ils soient à la fois juges et parties, c'est-à-dire devant juger entre les prétentions des contribuables et celles des personnes qui les ont nommés et paient leur salaire.

A l'article 65, nous croyons que les montants de $15,000 et $500 mentionnés dans cet article sont insuffisants. Le but de cet article, qui se retrouve d'ailleurs dans la Loi de la Communauté urbaine de Montréal, est de faciliter au petit propriétaire l'exercice de ses droits tout en évitant de le forcer à se déplacer sur une grande distance ou à perdre une journée de travail. De nos jours, il existe beaucoup de propriétaires de maisons modestes se vendant sur le marché entre $15,000 et $21,000, propriétaires qu'il faudrait également protéger. Nous suggérons donc les chiffres de $35,000 et $1,500.

A l'article 67, nous ne voyons pas pourquoi le bureau pourrait, proprio motu, ordonner qu'une expertise soit faite quand ceci peut être demandé par l'une ou l'autre des parties ou de consentement. Nous enlèverions les mots "et ordonner qu'il en soit faite".

Aux articles 68, 69 et 71, nous croyons que les frais d'assignation des témoins, tout comme les frais de sténographie, devraient être payés par la partie qui succombe. De plus, des frais d'avocats et d'experts établis selon un tarif fixé par la commission devraient également être payés par la partie qui succombe. Cependant, le contribuable ne devrait pas payer de frais, sauf si sa plainte porte sur une évaluation supérieure à $35,000 ou une valeur locative supérieure à $1,500 et que les dépositions ont été prises en sténographie.

A l'article 77, nous préférerions voir une formule proposée dans les règlements ou le formulaire, et non imposée.

A l'article 81, la signification par huissier est onéreuse. Cet article devrait mentionner que l'avis d'audition est signifié au plaignant par poste recommandée avec accusé de réception. Dans le cas où ce mode de signification ne serait pas possible, le secrétaire du bureau pourrait alors recourir à tous les autres moyens prévus au code de procédure civile.

A l'article 83, nous posons la question: Pourquoi ne pas se référer aux règles ordinaires de l'audition?

A l'article 84, les mots: "Selon qu'il lui semble juste" nous semblent superflus, la chose étant évidente.

A l'article 85, on peut concevoir l'appel d'une décision du bureau de révision ou l'évocation à ce tribunal d'évaluation foncière, tel que prévu à l'article 85, ou encore directement à la cour Provinciale, division ou chambre d'évaluation foncière, et devant un juge seul à la cour Provinciale. Le Barreau, après étude, en vient à la conclusion que, tel que nous le soumettons, M. le Président, il y ait une indépendance des bureaux de révision et des contribuables et des municipalités. Il deviendrait, en somme, une espèce de tribunal de première instance, avec l'appel suivant les notes sténographiques et la preuve qui a été faite à ce bureau-là, devant un juge de la cour Provinciale. On nous a laissé entendre qu'il y aurait peut-être une réorganisation de la cour Provinciale, ce serait peut-être le premier pas à faire en ayant une chambre de la cour Provinciale avec des juges qualifiés en la matière pour entendre ces appels.

D'autre part, nous ne voyons pas pourquoi ce tribunal serait investi des pouvoirs et immunités des commissaires nommés en vertu de la

Loi des commissions d'enquête; il s'agit de juges munis, alors c'est superflu, si on prend notre suggestion.

L'article 89 nous semble signifier que la municipalité peut en appeler de la décision de son bureau de révision. Nous ne voyons pas pourquoi l'on changerait à ce sujet la loi actuelle qui permet aux seuls contribuables d'en appeler de la décision du bureau de révision. Quant au sous-paragraphe b) de l'article 89, il nous semble inutile d'ajouter un délai additionnel de 30 jours, le texte de la loi devrait se lire: "Dans le délai prévu à l'article 80."

Article 90, pourquoi signifier au greffier de la municipalité et au secrétaire du bureau de révision? Ceci semble inutile et onéreux; la signification au greffier de la municipalité, qui est la partie en cause, serait suffisante.

A l'article 93, ici encore, le délai de dix jours serait avantageusement remplacé par un délai de 30 jours. Nous insistons ici sur le fait que le mode d'enquête devant le tribunal d'appel n'est précisé nulle part dans la loi. Nous pensons que l'appel par procès de novo devrait être de règle dans les cas où la plainte porte sur une évaluation de $35,000 ou moins ou une valeur locative de $1500 ou moins. Dans les autres cas, il y aurait appel par audition sans enquête, le dossier et les notes sténographiques du bureau étant transmis au tribunal d'appel. Le réclamant qui n'exigerait pas la sténographie devant le bureau, dans les cas où la loi la prévoit, renoncerait, par le fait même, à son droit d'appel.

Ceci éviterait de grever inutilement le petit réclamant et empêcherait celui qui fait une réclamation plus considérable de ne pas faire sa preuve devant le bureau, voulant la garder pour la cour Provinciale.

L'article 97 semble prévoir la mise à jour perpétuelle des rôles d'évaluation. Nous croyons que le rôle d'évaluation devrait être immuable, sauf dans des cas très précis, comme l'addition de nouvelles constructions, les démolitions, les omissions, etc.

Autrement, l'estimateur pourrait tous les jours modifier les valeurs par certificat et rendre la vie impossible au contribuable. Pour cette raison, nous rayerions les sous-paragraphes b) c) et f).

Par ailleurs, quant au paragraphe e), la responsabilité rétroactive pour les taxes devrait pouvoir exister uniquement dans la mesure où le propriétaire actuel a été propriétaire de l'immeuble ajouté au rôle pendant toute la durée de la rétroactivité. Autrement, nous croyons que la responsabilité du propriétaire actuel devrait être limitée au temps où il a été le propriétaire et que la municipalité devrait avoir, pour le surplus, une créance contre l'ancien propriétaire seulement.

Je vous remercie de votre bonne attention.

M. TESSIER: M. le Président, je voudrais féliciter le Barreau du Québec du magnifique travail qu'il a accompli. Je vois que vous avez étudié ce projet de loi en profondeur, que vous vous êtes donné la peine d'apporter des suggestions d'amendement très valables. Nous avions d'ailleurs l'intention d'amender certains des articles du bill 48, surtout en ce qui concerne le côté juridique, les droits d'appel et la procédure mais nous voulions attendre justement la présentation de votre mémoire pour voir quelles étaient exactement les suggestions que vous aviez à nous faire.

Je n'ai pas l'intention évidemment, vu que vous touchez à un nombre considérable d'articles, de commenter vos suggestions article par article, mais je puis vous assurer que nous tiendrons certainement compte de la plupart de vos suggestions d'amendement.

M. PAUL: M. le Président, vous me permettrez de transmettre des félicitations et des remerciements au Barreau du Québec, pour la présentation de son mémoire. Je l'ai lu avec beaucoup d'intérêt, et je sais qu'il fera l'objet d'analyses demain à la réunion du conseil général du Barreau. Vous me permettrez cependant, Me Beaudry, d'attirer votre attention sur quelques articles et de vous exprimer le point de vue du législateur.

Il y a tout d'abord dans le mémoire des recommandations ou suggestions que vous faites à l'article 25, au sujet de la taxation des immeubles qui appartiennent soit au gouvernement provincial ou au gouvernement fédéral. Je sais que vous êtes parfaitement informés de l'article 25 de notre constitution canadienne qui dit que les immeubles et les biens appartenant au Canada où à l'une des provinces ne seront pas imposables. Alors vous comprendrez qu'il est assez difficile pour le législateur, tant et aussi longtemps que cette constitution ne sera pas changée, de commettre un acte de juridiction ou d'autorité douteuse. C'est pourquoi cet article-là, à mon humble point de vue, ne pourra pas recevoir considération. Il y a également l'article 79 et vous suggérez de le mettre de côté. Je retrouve dans ce mémoire la concision qui caractérise les avocats mais c'est une loi dont l'application et l'interprétation va toucher beaucoup plus de gens que les légistes.

Ce seront les maires, les conseillers municipaux, les secrétaires-trésoriers qui seront appelés à interpréter cette loi et c'est pourquoi le législateur se devait d'apporter certaines précisions dans le but d'informer les secrétaires-trésoriers ou les membres des conseils.

M. BEAUDRY: Je m'excuse. C'est l'article 79?

M. PAUL: Le premier paragraphe de cet article nous semble inutile et à éliminer.

M. BEAUDRY: Oui.

M. PAUL: Alors, il ne faut pas oublier que

cette loi est faite pour atteindre énormément de gens. C'est pourquoi nous retrouvons dans ce projet de loi des articles qui peuvent paraître inutiles ou de la redondance de la part des légistes, mais qui, à toutes fins pratiques, sont peut-être nécessaires pour sa bonne compréhension.

Maintenant, j'aimerais, Me Beaudry, vous poser une question. Vous qui pratiquez dans la ville de Montréal, ne trouvez-vous pas que, si trois juges de la cour Provinciale sont assignés pour remplir la fonction de tribunal de révision, cela pourrait nous priver d'autant de personnes nécessaires à la bonne administration de la justice au niveau de la cour Provinciale? Je sais que des...

M. BEAUDRY: Je m'excuse, mais on a recommandé — je l'ai ajouté verbalement; ça n'appert pas dans notre mémoire — des bureaux de révision nommés par la commission ou par le lieutenant-gouverneur en conseil, indépendamment des municipalités, si vous voulez, comme tribunal de première instance, avec appel devant un juge de la cour Provinciale. Ce juge ferait partie d'une chambre spécialisée en cette matière. C'est ce que nous préconisons et non pas trois juges. La loi prévoyait un tribunal d'appel formé de trois juges. Alors, le Barreau suggère que le tribunal de première instance soit le bureau de révision nommé indépendamment des municipalités avec appel, comme on procède dans les appels de la ville de Montréal ou de la Communauté urbaine de Québec. En somme, on fait notre lit devant le bureau de révision de la Communauté urbaine de Montréal ou de la ville de Montréal, ainsi qu'à Québec et on procède en appel devant un juge de la cour Provinciale qui, lui, a la transcription de tous les témoignages et de tous les documents. On procède par factum, si vous voulez.

M. PAUL: C'est une excellente recommandation qui a frappé sûrement le ministre des Affaires municipales, parce qu'il a parlé d'une révision de tout le mécanisme d'appel et de procédure en révision du rôle d'évaluation.

Est-ce que le ministre me permettrait une question? En supposant que la recommandation du Barreau serait acceptée, est-ce que le ministre voudrait maintenir dans la loi cette disposition qui prévoit que le juge de la cour Provinciale, parce que ce ne seraient plus maintenant trois juges, chargé de la révision aurait les pouvoirs d'un commissaire-enquêteur? Pourquoi cela a-t-il été mis dans la loi? Les juges ont déjà des serments d'office, des pouvoirs bien définis. Alors, pourquoi dans la loi donner le caractère de commissaire-enquêteur aux juges de la cour Provinciale? Pourquoi leur donner les pouvoirs des commissaires-enquêteurs tel que prévu, je crois, au chapitre XI ou IX de nos statuts?

M. TESSIER: Quand vous parlez de commissaires enquêteurs, dans quelle loi?

M. PAUL: La loi telle qu'elle est étudiée; je ne pense pas qu'on étudie ce matin la loi...

M. TESSIER: L'article 85?

M. PAUL: 85.

M. TESSIER: Ah! Bon.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est votre loi!

M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous donner une justification?

M. TESSIER: De toute façon dans la révision que nous envisageons, il y a lieu d'amender complètement l'article 85 et ça, ça va disparaf-tre.

M. PAUL: Mais quand vous dites que "Ça" va disparaître, quel est, d'une façon précise, le terrain que vous voulez couvrir par le mot "ça"?

M. TESSIER: Le paragraphe qui se lit comme suit: "Le tribunal est investi des pouvoirs et immunités des commissaires nommés en vertu de la Loi des commissions d'enquête".

M. PAUL: Est-ce que vous avez aussi l'intention de faire disparaître le paragraphe suivant?

M. TESSIER: Quant à moi, je ne vois pas l'utilité d'avoir ce paragraphe; c'est déjà couvert, comme mon collègue vient de le mentionner. Il y a le serment d'office; en somme, c'est déjà prévu par la loi de nos tribunaux judiciaires et je ne vois pas pourquoi on aurait ce paragraphe-là. Il me paraît, quant à moi, inutile.

M. PAUL: Alors, M. Beaudry, vous pouvez voir que votre mémoire ébranle énormément le ministre, et c'est tout à votre honneur.

M. TESSIER: A propos du mot "ébranler", j'ai mentionné, M. le Président, même avant que nous recevions votre mémoire, que nous avions l'intention d'apporter plusieurs amendements dans le sens que vous suggérez dans votre mémoire, mais nous voulions tout de même attendre de le recevoir et nous voulions attendre de vous écouter avant d'apporter ces amendements.

M. PAUL: Vous vouliez être sûr que le Barreau vous dirigerait très bien.

M. TESSIER: J'ai beaucoup d'affinité avec le Barreau, comme vous le savez.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela ne paraît pas.

M. TESSIER: Comment, ça ne paraît pas! Pour un ancien bâtonnier!

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous ne connaissez pas votre projet de loi?

M. TESSIER: J'aurais une question à poser, M. le Président, à Me Beaudry. Est-ce que le Barreau aurait des objections à ce que le juge qui entend les plaintes en appel soit accompagné sur le banc d'assesseurs?

M. BEAUDRY: En tant que membre, je ne peux pas répondre au nom du Barreau, M. le Président.

Toutefois, je peux me permettre de vous répondre en mon nom personnel, en tant qu'avocat pratiquant exclusivement en matière d'évaluation municipale. Si on procède de novo, l'expérience a été que le contribuable... Même dans la loi, présentement, on dit que les bureaux de révision sont formés d'un membre, soit avocat ou notaire, d'une autre personne et d'un évaluateur détenant un certificat en vertu de l'article 101. Si je peux le suggérer personnellement, on pourrait employer un autre mot que le mot "évaluateur". Le contribuable, lorsqu'il se présente devant un bureau de révision, s'il demande quels sont les membres de ce bureau, on répond; M. Untel est un avocat, M. Untel est un architecte et le troisième est un évaluateur. Lui, tout de suite, il s'imagine que l'évaluateur, c'est l'évaluateur de la municipalité. Je vous le dis en passant.

Quand on procède de novo où on procède directement par appel, comme on l'a suggéré, si on a une chambre de la cour Provinciale avec des juges qualifiés en la matière, je ne vois pas l'utilité qu'ils soient accompagnés d'assesseurs. Ils seront qualifiés et ils pourront rendre les décisions.

M. TESSIER: Oui, mais, évidemment, le juge est un avocat de profession qui accède au banc, à la magistrature. C'est une chose que nous envisagions, et c'est pourquoi je suis content d'avoir vos réactions. C'est que nous pensions, pour faciliter la tâche du juge, que la commission municipale pourrait lui nommer, comme adjoint, un assesseur qui serait un expert en évaluation municipale. Il ne ferait que cela en somme.

M. BEAUDRY: Mais là, M. le Président, si je me présente...

M. TESSIER: Il n'aurait pas, évidemment, la qualification juridique...

M. BEAUDRY: Ah! d'accord.

M. TESSIER: ... mais, par contre, il pourrait compléter justement la qualification juridique du juge par son expérience en évaluation.

M. BEAUDRY: Si vous me le permettez encore une fois, en mon nom personnel et non au nom du Barreau parce qu'on n'en a pas discuté, supposons que je me présente devant un bureau de révision de Montréal pour une cause, disons, de $25 millions d'évaluation, avec mes experts et qu'on plaide le mieux possible pour gagner notre cause.

La ville de Montréal ou la communauté va être représentée par ses experts et le tout va être envoyé devant votre tribunal où il y aura un juge avec son expert, que je n'aurai pas le droit de contre-interroger; je n'aurai le droit de rien dire. Légalement, il sera partie et juge en même temps. Je préfère rester suivant les dispositions de la charte de la ville de Montréal, présentement. En somme, si les bureaux de révision, M. le Président, ont un caractère d'indépendance des municipalités, le juge de la cour Provinciale, s'il est qualifié, rendra justice et il n'a pas besoin d'assesseur. Les experts des parties pourront certainement l'éclairer.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, au sujet des dernières observations que vient de faire Me Beaudry, je veux bien croire que les juges sont qualifiés, en l'espèce il s'agira d'un juge qualifié dans le domaine des affaires municipales. A supposer, comme vous en faites l'hypothèse, que vous ayez à plaider pour des clients pour une cause d'évaluation de $25 millions, vous venez avec vos experts.

M. BEAUDRY: Oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): L'autre partie vient, elle aussi, avec ses experts. Mais je pense que, pour démêler les versions ordinairement contradictoires desdits experts, il ne serait pas mauvais que le juge ait aussi un expert sans que pour autant son jugement en soit influencé d'une façon préjudiciable aux intérêts des clients qui viendront devant lui. Je ne comprends absolument pas cette objection personnelle que vous faites, puisque vous dites ne pas parler, en l'occurrence, au nom du Barreau.

M. BEAUDRY: Au nom du Barreau, d'accord.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'estime personnellement que, pour la protection du judiciable, il est nécessaire que le juge, tout qualifié qu'il soit, puisse quand même requérir l'avis d'une personne qui sera constamment auprès de lui et qui le renseignera sur tout ce qui pourra se passer à partir du moment où on mettra en application cette loi. C'est une protection additionnelle pour les contribuables. Et je ne comprendrais pas que le Barreau, pris globalement, s'oppose à une précaution comme celle que l'on demande au ministre de prendre.

M. BEAUDRY: Si vous me le permettez, M. le Président, ça fait vingt ans, uniquement en évaluation municipale, que je plaide à travers la province. Cela fait vingt ans. Si on n'est pas satisfait d'une décision de la cour Provinciale,

comme le prévoit le projet de loi 48, on peut en appeler à la cour d'Appel de la province, la cour Suprême du Canada. Il y aura toujours des litiges, que ce soit une question de droit, que ce soit une question de fait. Et je ne vois pas, personnellement — je reviens toujours à ça — pourquoi on va greffer un assesseur à un tribunal d'appel. C'est mon opinion personnelle. Il n'y a rien qui empêche un juge de consulter quelqu'un; rien ne peut l'empêcher de faire cela mais, de greffer, à côté d'un tribunal d'appel, un assesseur, malheureusement, M. le Président, je ne peux pas l'admettre.

Je vous le dis. Je vous dis que les droits des citoyens ou des contribuables ne seront pas plus protégés qu'ils ne le sont présentement. Le contribuable a tous les outils pour se défendre et contester son évaluation, sauf que nous demandons au gouvernement ou au ministère de donner un caractère de tribunal de première instance indépendant au bureau de révision et, après cela, l'appel comme il existe pour les villes de Montréal et de Québec. C'est la seule chose que je recommande.

M. TESSIER: L'appel, tout de même, c'est simplement dans des cas où la réclamation est assez élevée. Il n'y a pas appel dans tous les cas.

M. BEAUDRY: Si on regarde les statistiques des appels, soit des bureaux de révision de Montréal ou des bureaux dans la région de Montréal, quand on est rendu à la cour d'Appel, Montréal, disons, peut entendre environ 3,500 plaintes par année, peut-être un peu plus, et vous aurez peut-être un maximum de dix causes qui sont appelées au tribunal de la cour Provinciale. Alors, c'est la minorité qui se rend à la cour Provinciale. La majorité est décidée en première instance, à la satisfaction de tout le monde.

M. LEGER: M. le Président, j'aimerais poser une question à Me Beaudry.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne pensez-vous pas que cela permettrait de diminuer encore le nombre de causes portées en appel si le juge était assisté d'un spécialiste?

M. BEAUDRY: C'est pour cela que nous préconisons un tribunal de première instance au niveau du bureau de révision, qui restreindra encore.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de l'Assomption.

M. PERREAULT: A l'article 9, vous mentionnez que le critère de la valeur marchande devrait être retenu. Dans le passé, nous avons vu plusieurs abus dus à cela. Ne croyez-vous pas qu'en recommandant qu'on s'en tienne à ce principe, on continue certains abus de valeur marchande dont j'ai moi-même été témoin?

M. BEAUDRY: Nous entrons dans la question à savoir ce qu'est la valeur marchande. Sur cela, il y a beaucoup de tomes, de décisions, etc. La notion de la valeur marchande, c'est une décision d'après la jurisprudence qui date de 1845, je crois, et qui a toujours été maintenue. Les tribunaux se sont toujours prononcés sur la valeur marchande, quoique nos lois actuelles parlaient toujours de valeur réelle.

Alors, si on dit que l'on va faire une valeur marchande d'après un manuel, ce n'est plus une valeur marchande, c'est une valeur de manuel. C'est pour ça que nous disons: Dans un cas en particulier. Nous n'avons rien dit concernant l'article numéro 6: La préparation et la confection des rôles devraient être faites suivant le manuel afin de maintenir l'uniformité de l'évaluation au niveau de la province. Toutefois, nous disons que lorsque nous arrivons pour déterminer l'évaluation, dans un cas particulier, suivant une plainte, le tribunal ne soit pas restreint à dire: Le manuel a été appliqué, donc allez-vous-en, vous n'avez plus de plainte. C'est pour ça que nous disons qu'à l'article 9, la référence au manuel qui précise que l'immeuble devrait être porté au rôle à sa valeur marchande, est suffisante

M. PERREAULT: Je ne suis pas d'accord sur ce que vous avez dit, à l'article 10; j'aimerais que vous donniez un peu votre opinion. Vous mentionnez que si on employait simultanément les trois critères on pourrait en arriver à une inscription totale au rôle d'évaluation supérieure à ce qui existe et vous recommandez de biffer la superficie effectivement occupée.

M. BEAUDRY: Pour éviter la double taxation.

M. PERREAULT: Quant à la superficie effectivement occupée, on le voit dans plusieurs coins de la province, j'ai vu des cas typiques où la superficie effectivement occupée devrait même être celle qui prévaudrait. J'ai vu des endroits où les terrains ont été agrandis à même des rivières ou des lacs.

M. BEAUDRY: C'est ça.

M. PERREAULT: Il y a aussi des terrains qui ont subi de l'érosion, comme dans mon comté des terrains qui ont diminué de moitié.

M. BEAUDRY: D'accord.

M. PERREAULT: Alors, on devrait tenir compte de la superficie effectivement occupée et non pas la biffer.

M. BEAUDRY: C'est une question d'opinion, moi aussi, je pourrais...

M. PERREAULT: Il faut tenir compte du cas des gens qui ont une propriété sur le bord

d'une rivière et où il y a de l'érosion. Vous n'en tenez pas compte.

M. BEAUDRY: Je présume que si on réfère au manuel d'évaluation, l'estimateur aura des directives dans la manuel afin d'évaluer ce qui existe. Alors, si un terrain a été réduit, à la suite de l'érosion, ou a augmenté d'ampleur à la suite de remplissage, l'estimateur doit évaluer ce qui existe et non pas ce qui n'existe pas.

M. PERREAULT: S'il a diminué d'ampleur?

M. BEAUDRY: S'il a diminué d'ampleur, l'estimateur n'a pas à évaluer quelque chose qui n'existe pas.

M. PERREAULT: D'après l'article 10, on doit prendre la plus grande valeur.

M. BEAUDRY: On parle de la superficie.

M. PERREAULT: L'article 10 du projet de loi dit qu'on doit prendre la plus grande valeur des trois critères.

M. BEAUDRY: Oui, oui. Mais on ne parle pas de la valeur, on parle de la superficie, M. le Président, dans l'article 10.

M. PERREAULT: L'article 10 dit ici "selon la plus grande des trois".

M. BEAUDRY: "La superficie d'un terrain s'établit soit d'après l'inscription qui en est faite au cadastre, soit d'après le titre de propriété, soit d'après la superficie effectivement occupée, selon la plus grande des trois". On parle de superficie; on ne parle pas de valeur à l'article 10. La valeur, on y réfère à l'article no 6. L'article no 6 dit qu'on doit confectionner un rôle suivant le manuel qui sera déposé et qui fera partie intégrante de la loi. Alors, si vous jetez un coup d'oeil au manuel, l'estimateur doit évaluer les choses telles qu'elles existent.

M. PERREAULT: Moi, je ne parle pas de valeur; je parle de superficie.

M. BEAUDRY: Sur la superficie là, ce n'est pas le premier mémoire, que je vois. Les arpenteurs-géomètres doivent me suivre, ainsi qu'un autre groupe d'ingénieurs. Alors, je présume qu'eux ils doivent avoir certaines remarques concernant la superficie.

M. LEGER: M. le Président, je veux poser une question à Me Beaudry. Je vois que vous avez fait une étude en profondeur du projet de loi et que vous avez apporté des amendements très pertinents. A l'article 25, des juristes disent, entre autres le député de Maskinongé...

M. PAUL: Pardon, M. le Président, je ne voudrais pas qu'on me prête des intentions. J'ai lu l'article 125 de la constitution. Je n'ai pas fait de commentaire.

M. LEGER: Ah! bon. De toute façon, certains juristes disent que, selon la constitution canadienne, les immeubles du fédéral ou du provincial ne peuvent pas être taxés et d'autres juristes nous disent que c'est une possibilité. Or, je vois que, dans l'article 25, vous dites que vous ne voyez pas d'inconvénients légaux à ce qu'un immeuble du gouvernement fédéral ou du gouvernement du Québec soit sujet au paiement de taxes pour services municipaux. Pourriez-vous étoffer votre affirmation par des explications?

M. BEAUDRY: La seule chose que je peux vous dire, c'est qu'en faisant des recherches, toujours au point de vue de la jurisprudence, nous avons découvert une décision de la cour Suprême qui déclarait, en 1919, que le prix d'un service devait être payé. Cela, c'est la cause de Dorothy vs Lévys, 1919, Appeal Cases de la cour Suprême.

Alors, le prix d'un service, je comprends qu'on va tomber dans le jeu des mots. On a une question: Est-ce qu'une taxe d'amélioration locale, c'est une taxe ou bien un prix de service? Alors, là, ça devient encore bien plus compliqué. On peut avoir un jeu de mots; on emploie le mot taxes pour dire toutes sortes de choses, alors que des prix de service, ça peut être totalement différent. Un service doit être payé; c'était la règle générale, à ce moment-là.

Je comprends que nous ne l'avons pas trop mise en application. Je crois humblement que rien ne défendrait au gouvernement provincial de payer des taxes de service. Mais de là à dire que le gouvernement provincial peut, par une loi, forcer le gouvernement fédéral à payer une taxe de service, je ne suis pas pour ça.

M. LEGER: Mais l'affirmation que vous avez faite avant est une opinion du Barreau ou une opinion personnelle?

M. BEAUDRY: En ce qui concerne la province?

M. LEGER: Sur l'article 25, que vous avez...

M. BEAUDRY: Sur l'article 25, c'est le Barreau. Cela fait partie de notre mémoire.

M. LEGER: Oui.

M. LE PRESIDENT: Le député de Lévis.

M. ROY (Lévis): Me Beaudry, vous êtes au courant qu'actuellement beaucoup de bâtiments appartiennent soit au provincial ou au fédéral et pour lesquels un montant est payé aux municipalités, par arrangement.

M. BEAUDRY: D'accord!

M. ROY (Lévis): En inscrivant cet article dans la loi, est-ce que ça ne laissera pas une porte ouverte pour ne plus le payer aux municipalités?

M. BEAUDRY: Là, on tombe dans un domaine de taxation, M. le Président, et ce domaine de taxation est quelque chose d'exclusif au gouvernement. Je ne crois pas, même, que le Barreau devrait se prononcer sur ces points-là. Nous, nous nous prononçons; nous le glissons dans notre mémoire parce qu'à la suite de nos recherches, nous avons trouvé cela. Mais de là à dire qu'on devrait donner une opinion sur la question des limites ou des non-limites de taxation d'un gouvernement, je ne crois pas, même, que le Barreau oserait faire cela.

M. PAUL: M. le Président, je pense que Me Paquet voulait ajouter quelque chose tout à l'heure. Il aurait une question à poser.

M. PAQUET: M. le Président, je voulais simplement, si vous me le permettez, donner brièvement un autre son de cloche, une autre opinion personnelle — encore une fois ce n'est pas le Barreau qui parle — sur la question des assesseurs en tribunal d'appel. Je pense, pour avoir pratiqué dans le domaine de l'évaluation pour et contre des municipaliés, que si on s'entend sur la notion d'assesseur, il serait peut-être très utile à un juge de la cour Provinciale, qui est appelé à entendre un appel où il y a des prétentions contradictoires de la part des experts, d'avoir un officier judiciaire qui soit un expert dans la matière et qui pourrait servir d'interlocuteur valable au juge pour discuter de ce qu'il a entendu, pour l'aider à faire des calculs techniques. Je ne vois pas un assesseur nécessairement comme membre d'un tribunal de trois qui a voix au chapitre pour rendre jugement, mais je verrais fort bien un expert qui constituerait un interlocuteur valable à un juge qui est devant deux théories d'expertises contradictoires ou devant des calculs qui peuvent devenir extrêmement complexes ou extrêmement fastidieux à faire. Je le fais personnellement comme pratique.

C'est extrêmement fastidieux de se mettre à analyser pendant des heures et des heures, des relevés de ventes, des états de dépenses, des états de revenus. Je pense qu'un off icier judiciaire pourrait tout aussi bien constituer un interlocuteur valable, que, dans bien des cas, je pense, un rédacteur de jugement expérimenté constitue un interlocuteur valable au juge pour discuter des points de droit avant que le juge se forme lui-même une opinion et rende lui-même la décision, ce qui est sa responsabilité comme magistrat. Je voulais tout simplement vous donner un autre son de cloche sur cette question.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Paquet, Me Beaudry, on vous remercie de votre exposé au sujet du mémoire du Barreau. Je pense bien que Mlle Filion a choisi un remplaçant qui a fait un bon travail. Nous suspendons nos travaux jusqu'à deux heures trente cet après-midi et notre premier organisme sera la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec. Merci.

Reprise de la séance à 14 h 36

M. LEDUC (président de la commission permanente des Affaires municipales): A l'ordre, messieurs !

Nous allons entendre, dans l'ordre, cet après-midi, la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec; les Arpenteurs-géomètres de la province de Québec; Park Laign Ltd.; l'Association des détaillants de maisons mobiles et roulottes du Québec; l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française; l'Industrie de production pétrolière du Québec, le pacifique Canadien et le Canadien national.

Afin de simplifier le travail, je me permets de suggérer aux porte-parole de bien vouloir résumer le mémoire qu'ils ont présenté. Quelques-uns de ces mémoires sont très longs; ils feront l'objet d'études par les membres de la commission. Je vous suggère de bien vouloir relever les points les plus importants qui se trouvent à l'intérieur de ces mémoires.

J'invite la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec à bien vouloir se rendre au lutrin, en avant, et à faire valoir ses représentations. Je rappelle à chacun des porte-parole de bien vouloir s'identifier au début de son intervention, s'il vous plaît.

Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec

M. BOILY: Mon nom est Gratien Boily, avocat, conseiller juridique de la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec.

M. le Président, M. le ministre, MM. les députés, dans un premier temps, la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec veut d'abord manifester son accord de principe sur le but que vise le bill 48, Loi sur l'évaluation foncière. Cependant, dans ses modalités, elle vous a soumis par son mémoire certains amendements qu'elle voudrait voir apporter au bill dont il s'agit.

La Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec veut d'abord rappeler au législateur une réalité qui semble avoir été oubliée ou largement omise dans la rédaction du bill 48, à savoir que plus des deux tiers des terres imposables du Québec sont des terres forestières. Compte tenu de cette importance, la corporation énonce le principe premier que les terres forestières devraient être évaluées selon la productivité de leur sol.

Deuxièmement, pour fins de taxation, la corporation n'admet pas l'évaluation des bois sur pied, car cette évaluation, en accordant une plus-value aux stocks ligneux, décourage les sylviculteurs de la pratique des méthodes sylvicoles permettant un aménagement intensif.

Compte tenu de ces deux principes de base que la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec voudrait voir reconnus, elle vous suggère les modifications suivantes:

A l'article 1, paragraphes a) et b), la Corporation des ingénieurs forestiers voudrait qu'il soit précisé que les arbres ne sont pas des immeubles. On sait que, par l'article 378 du code civil, les arbres sont considérés, tant qu'ils sont reliés au sol par leurs racines, comme des immeubles et qu'ils deviennent meubles une fois qu'ils sont coupés.

Pour les fins d'évaluation, la corporation suggère donc qu'il soit précisé que les arbres ne sont pas des immeubles.

M. PAUL: Excusez...

M. BOILY: Dans le code civil...

M. TESSIER: On n'est pas pour préciser ce que le code civil dit.

M. PAUL: Elle irait même à l'encontre de la définition du code civil.

M. TESSIER: Excusez-moi. Continuez.

M. BOILY: Nous préciserons. Entre les paragraphes m) et n) de l'article 1, où est défini le terme "agriculteur", la corporation voudrait que soit défini comme suit le terme "sylviculteur": une personne physique ou morale qui s'occupe de la culture des arbres ou de la production de la matière ligneuse. Si vous vous référez au mémoire qui vous a été soumis, vous remarquerez qu'il n'est pas ajouté une personne morale. C'est que le mémoire, vous ayant été soumis il y a une dizaine de jours, la corporation a tenu une autre réunion, et des amendements et des modifications ont été apportés au texte même du mémoire, modifications qu'on vous demande d'apporter au texte qui est devant vous.

A l'article 2 du bill 48, la corporation tient à rappeler que seul l'ingénieur forestier, membre de la Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec, est habilité à évaluer le potentiel des terres forestières. On sait que par sa loi constitutive chapitre 264 des Statuts refondus du Québec, intitulée Loi des ingénieurs forestiers, à l'article 2, paragraphe 4, l'expression "ingénieur forestier" y est définie et attribue à l'ingénieur forestier le pouvoir d'évaluer et de classifier le fonds et la superficie des forêts.

A l'article 9, la Corporation des ingénieurs forestiers remarque que l'expression "valeur marchande" n'a pas été définie et qu'on s'en réfère au manuel d'évaluation. Elle suggère donc qu'une définition soit incluse, à la Loi sur l'évaluation foncière, du terme "valeur marchande" afin d'éviter toute ambiguïté et toute spéculation qu'il pourrait y avoir relativement à cette expression. A cette fin, elle suggère la définition suivante du terme "valeur marchande": Prix qu'un vendeur, qui n'est pas obligé de vendre et qui n'est pas dépossédé malgré lui, mais qui désire vendre, réussira à avoir d'un acheteur qui n'est pas obligé d'acheter mais qui désire acheter.

A l'article 10, la Corporation des ingénieurs forestiers a convenu de s'en remettre aux propositions que fera sans doute la Corporation des arpenteurs-géomètres, étant donné que les définitions de la superficie relèvent plus particulièrement de sa compétence et de son ressort.

A l'article 14, paragraphe b) on y lit que: Ne sont pas portés au rôle les immeubles par destination qui sont utilisés: à des fins agricoles. Nous vous suggérons d'y ajouter, après le paragraphe b), "aussi à des fins sylvicoles".

A l'article 15, on y lit que: Ne sont pas portés au rôle: les réserves de matières premières dans les tourbières, les carrières, les bancs de sable et de gravier. Nous suggérons — et d'autres sous-paragraphes y sont inclus aussi — qu'un paragraphe e) y soit ajouté: Aux fins d'exclure les bois sur pied.

A l'article 16, paragraphe b), nous suggérons que l'article se lise plutôt comme suit: "Ne sont pas portés au rôle lorsqu'ils appartiennent à un organisme public les immeubles suivants:... b) les concessions forestières, les réserves cantonales, les forêts domaniales, les réserves forestières spéciales, les forêts expérimentales, les forêts éducatives ainsi que les constructions qui y sont érigées". On y ajoute donc les forêts expérimentales et les forêts éducatives.

Au sous-article h), nous souhaiterions que soient ajoutés, après les jardins botaniques, les arboretums et ensuite les Pepinières, qui y sont déjà incluses.

A l'article 30, nous suggérons que le texte soit modifié de la façon suivante: Tout terrain, appartenant à un agriculteur ou à un sylviculteur, est porté au rôle à sa valeur réelle basée sur la productivité du sol. Les bâtiments qui s'y trouvent, à l'exception des bâtiments qui servent à l'agriculture ou à la sylviculture, sont portés au rôle à leur valeur marchande. On se référera alors à la définition que nous vous suggérions d'ajouter à la loi pour l'expression "valeur marchande".

A l'article 57, la corporation admet le principe que le président du bureau de révision doit être un avocat ou un notaire en exercice, étant donné les implications légales du travail qui est de son ressort. Cependant, elle propose qu'un assesseur soit nommé et adjoint au président du bureau de révision pour le conseiller dans les domaines techniques qui sont inhérents à une telle tâche.

A l'article 61, la corporation suggère que, pour les régions forestières, le bureau de révision comprenne aussi un ingénieur forestier puisque, par ses fonctions, celui-ci est au fait des problèmes qui sont mis en cause.

A l'article 101, la corporation suggère qu'il soit ajouté, au premier paragraphe qui se lit comme suit: "Nul ne peut agir comme évalua-teur pour les fins de la présente loi sans détenir un certificat que délivre à cette fin la commission d'après les critères qu'elle établit par ordonnance", les mots " à moins d'y être habilité en vertu d'une loi corporative".

On sait qu'en vertu du chapitre 264 les ingénieurs forestiers ont déjà le pouvoir de faire l'évaluation des fonds de terres forestières et qu'il s'agit-là d'un droit exclusif par la loi corporative.

A l'article 120, on suggère tout simplement que cet article du bill 48 soit abrogé. Celui-ci, on le sait, venait abroger les articles 163 et 164 de la Loi des Terres et Forêts, Statuts refondus du Québec, 1964, chapitre 92. Or, les articles 163 et 164 du chapitre 92 visaient à encourager l'exploitation des terres forestières. En effet, à l'article 163 on peut lire: "Le lieutenant-gouverneur en conseil peut faire des règlements concernant: premièrement, l'encouragement à donner sous forme de primes en argent ou de subsides en terres pour les travaux de reboisement; deuxièmement, le nombre d'années durant lesquelles les plantations ainsi primées doivent être conservées avant d'y faire des coupes finales; troisièmement, les conditions à remplir par les personnes réclamant ces primes; quatrièmement, l'évaluation municipale des terrains reboisés et des plantations primées".

Al'article 164, on prévoyait: "Tant qu'on y conserve au moins 300 arbres à l'acre, les terrains reboisés gardent, et ce, durant 30 ans, l'évaluation qu'ils avaient avant la plantation; à l'expiration de cette période de 30 ans, l'évaluation municipale de ces plantations, pourvu qu'elles restent à l'état de forêt, ne peut être modifiée que tous les dix ans."

Vu son code d'éthique, la Corporation des ingénieurs forestiers croit de son devoir de demander que soient maintenus pour les sylviculteurs les avantages que les lois antérieures leur accordaient déjà. C'est pourquoi elle demande que soit abrogé l'article 120 actuel du bill 48.

Ce sont là, somme toute, les recommandations principales soumises par la corporation.

M. TESSIER : M. le Président, je voudrais remercier d'abord la Corporation des ingénieurs forestiers. Il y a certainement des choses que nous allons retenir, notamment la définition de tout ce qui touche la sylviculture en général, de même que la définition d'un sylviculteur, particulièrement en ce qui concerne les articles 14 et 15. Toutefois, certaines choses peuvent être assez difficiles à retenir, notamment lorsque vous demandez que l'évaluation des immeubles en forêt ou des terres en forêt soit faite par des ingénieurs forestiers.

Evidemment, si on suivait votre raisonnement, ça voudrait dire que les terres des cultivateurs devraient être également évaluées par des agronomes et ainsi de suite. C'est peut-être là compliquer les choses. A tout événement, nous allons réfléchir à vos suggestions et nous allons sûrement retenir certaines de vos recommandations.

M. PAUL: M. le Président, je voudrais également remercier la Corporation des ingénieurs

forestiers pour l'intérêt que ses membres ont apporté à l'étude de ce projet de loi et je voudrais féliciter le procureur, Me Boily, d'avoir en quelque sorte torturé son esprit juridique, particulièrement sur deux points. Premièrement, c'est la définition nouvelle que l'on trouve dans les commentaires de la page 2 du mémoire, à l'effet que les arbres soient considérés comme des biens meubles.

Je comprends que cela peut probablement faire l'affaire des membres de la corporation mais, personnellement, j'aime mieux me fier au texte du code civil et à l'interprétation jurisprudentielle qu'en ont faite nos tribunaux.

Deuxièmement, je voudrais, Me Boily, vous signaler à l'article 9, la deuxième et la troisième ligne de votre mémoire où je lis ceci: La loi de la Corporation des ingénieurs forestiers, chapitre 264, article 2, paragraphe 4 dit que "l'évaluation du fonds et de la superficie des forêts" doit être faite par l'ingénieur forestier. Je regrette, ce n'est pas ce que dit le chapitre 264 à l'article 2, paragraphe 4. Il est spécifié: "L'expression "ingénieur forestier" signifie une personne exerçant les fonctions d'ingénieur et compétente à donner des conseils sur ou à surveiller, exécuter ou diriger l'exécution de tous les travaux suivants: l'inventaire, la classification," etc.

Par conséquent, je rejoins un peu l'opinion émise par l'honorable ministre à l'effet que vouloir interpréter dans le sens du mémoire la recommandation que vous faites serait obliger nos cultivateurs au sens le plus strict du mot à avoir recours aux services d'un ingénieur forestier pour établir la valeur de leur terre à bois. Il y a d'excellentes choses dans le mémoire. Je m'en voudrais, cependant, M. le ministre, de ne pas vous faire part d'une crainte personnelle qui, je crois, est partagée par mes collègues de l'Opposition officielle, c'est l'insertion que l'on voudrait faire à la définition du terme "sylviculteur": une personne physique ou morale M. le Président, en voulant considérer comme sylviculteur une compagnie qui se spécialiserait dans l'achat des terres à bois pour faire de la sylviculture, je craindrais que nous ne serions pas conformes aux principes premiers visés par le bill 48.

Je vous fais ces remarques, M. Boily, non pas dans l'intention de vous blâmer, aucunement. C'est l'interprétation que je fais de ce projet de loi qui, par contre, contient d'excellentes recommandations, spécialement pour ce qui a trait à la sylviculture. Lorsque nous en serons à la rédaction définitive de ce présent projet de loi, nous nous référerons sûrement avec avantage aux différentes recommandations de votre mémoire.

De toute façon, nous vous félicitons pour la qualité, la brièveté et la concision de votre mémoire.

M. TESSIER: J'aimerais, avec votre permission, M. le Président, dire que je suis en parfait accord avec mon ami, le député de Maskinongé, en ce qui concerne la définition du mot "sylviculteur".

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lotbinière.

M. BELAND: J'aurais également une question à poser relativement à la page 2, article 2, en ce qui concerne les personnes habilitées à évaluer le potentiel des terres forestières. Est-ce que, pour agencer cette définition, vous vous êtes basés sur des choses qui se sont faites en pratique, notamment qu'aucune personne, autre que les ingénieurs forestiers, n'est apte à évaluer d'une façon acceptable le potentiel forestier sur une propriété donnée?

M. BOILY: Je pense que, pour répondre à cette question, le président de la corporation serait mieux habilité que moi. Je laisse la parole à M. Julien Rivest, président de la Corporation des ingénieurs forestiers.

M. RIVEST: Je m'appelle Julien Rivest, je suis président de la Corporation des ingénieurs forestiers.

Je pense que certaines interventions sont mal interprétées. Je remercie le député d'avoir posé cette question. Je répondrai simplement qu'au niveau fédéral, l'établissement du potentiel forestier des terres du Canada, dans le domaine forestier, est établi par des ingénieurs forestiers. Le contexte n'est pas facile, sauf que ça prend des gens assez spécialisés dans le domaine pour réaliser l'objectif premier du mémoire ou des remarques que nous faisons, soit la taxation du potentiel et non la taxation du stock ligneux.

On a fait une remarque à l'effet que les bois sur pied doivent être considérés comme immeubles. S'ils le sont, j'aime prévenir cette commission parlementaire qu'on décourage de cette façon-là — d'une façon peut-être indirecte — les pratiques saines de la sylviculture, puisqu'en pratique, si la forêt ou les bois sur pied sont considérés comme des immeubles, donc sujets à taxation, on se trouve à pénaliser les gens qui sont prévoyants et qui s'occupent de leur terre forestière au détriment, souvent, des gens beaucoup moins précautionneux ou beaucoup moins prévenus qui font des coupes rases sur leur terre forestière de façon qu'on ne puisse d'aucune façon les imposer. J'espère avoir répondu à votre question.

M. BELAND: Il est entendu que vous avez éclairé magnifiquement bien ce qui peut être votre point de vue, parce que si on se place à l'intérieur du contexte des agriculteurs qui possèdent un lot boisé ou quelques lots boisés, ou toute autre entreprise qui est spécialisée dans l'exploitation rationnelle des boisés, ça causerait certainement un préjudice très grave d'être dans l'obligation constante...

Je comprends que vous l'avez expliqué. C'est entendu que je comprends le bill. Il a été agencé en vue de la taxation. Par contre, à mon sens, cela va viser également tous ceux qui font une exploitation des boisés, surtout des petits exploitants. En vertu de tous les autres bills connexes, à l'agriculture qui sont adoptés et d'autres qu'on sent venir, ce serait relativement très grave, à mon sens, si l'article 2 que vous avez agencé n'était pas tout au moins modifié pour faire en sorte qu'il n'y ait pas cette obligation extrême.

Je ne sais pas si vous avez d'autres commentaires supplémentaires pour pallier ces inconvénients possibles. Mais, dans le moment, pour ma part, j'ai de la difficulté à accepter l'article tel que défini présentement, pour avoir lu le bill 48 dans son ensemble.

M. RIVEST: M. le Président, pour apporter une précision, je pense qu'on a eu également une certaine réticence à ajouter, au terme sylviculteur, une personne physique et morale. Tout en respectant l'esprit du bill 48 — que nous trouvons excellent, soit dit en passant, comme le disait Me Boily — je pense que la préoccupation principale de la corporation est de prévenir que le bill 48 soit un frein à certaines activités forestières en milieu rural.

Je m'explique. Si les mécanismes de taxation empêchent d'une certaine façon ou peuvent annihiler l'effet incitateur de certaines mesures des différents autres ministères, je pense que la corporation comme telle se doit d'intervenir dans l'intérêt du public, que ce soit une personne physique ou une personne morale; pour autant que chacune des parcelles forestières soient mises à profit et qu'on en tire le meilleur pour l'ensemble de la collectivité, je pense qu'elle a rempli son rôle. Maintenant, c'est au législateur, je pense, de définir, peut-être d'une façon un peu plus corsée, ces différentes personnes, soit personnes physiques ou morales.

M. BOILY: Si vous me permettez, M. le Président, d'ajouter quelque chose, parce qu'il me semble qu'il y a peut-être une ambiguïté dans les propos que nous avons tenus; c'est que, par ses recommandations, la Corporation des ingénieurs forestiers veut en fait que soit changé le système d'évaluation des terres forestières, partant du principe que l'évaluation des terres forestières doit être basée sur la productivité potentielle des sols forestiers plutôt que sur le nombre d'arbres qu'il y a sur ces terres forestières. Cela, pour exercer une incitation qui semble, à la Corporation des ingénieurs forestiers, saine pour un développement cohérent des forêts.

Dans la mesure où un propriétaire donné a une terre forestière non exploitée, il est évident que sa taxation foncière est inférieure à celle du propriétaire voisin qui, ayant la même superficie, par exemple, exploite ce sol forestier. Dans la mesure ou l'évaluation foncière est fixée d'après la productivité potentielle de ce sol, il arrive que ces deux propriétaires se retrouveraient avec la même évaluation, en sorte qu'il serait exercé sur ce propriétaire une incitation à exploiter un sol qui, en soi, est de nature à être productif, et qui ne l'est pas par incurie, négligence ou autrement. C'est un peu le but que vise la recommandation qui vous est soumise aujourd'hui. Je ne sais pas si cela vous satisfait.

M. TESSIER: Permettez-moi, Me Boily, d'attirer votre attention sur le concept de l'évaluation que vous voulez modifier totalement. En somme, toute la base de l'évaluation, c'est la valeur marchande. Et là, vous voudriez, en ce qui concerne les boisés ou les forêts, que ce soit basé sur le potentiel de production. Or, à ce moment-là, on déséquilibre tout. Est-ce qu'on va avoir une manière d'évaluer pour les cultivateurs? Est-ce qu'on va en avoir une autre pour les sylviculteurs? Est-ce qu'on va en avoir une autre pour d'autres genres de commerces ou d'exploitations? Je ne crois pas que l'on puisse accepter votre théorie.

La manière d'évaluer un boisé, c'est la valeur marchande. Il ne s'agit pas du tout de dénombrer le nombre d'arbres qu'il peut y avoir sur un boisé de ferme, par exemple. Mais, que vaut la ferme? Vous avez une ferme qui, disons, est à 50p.c. en exploitation agricole et à 50 p.c. en boisé. Que vaut ce boisé? D'abord, cela dépend de quelles essences d'arbres il y a sur ce boisé. 51 c'est de l'épinette, il a certainement une valeur marchande beaucoup plus grande que si c'est du tremble. Ce peut également être une érablière, par exemple, ce boisé. Alors, qu'est-ce qu'il vaut?

L'évaluateur, je crois, doit consulter — et là-dessus je suis parfaitement d'accord avec vous — un ingénieur forestier pour connaître la valeur marchande de certaines essences de bois. Mais, après qu'il a établi ceci, il s'agit de savoir si telle ferme, à tel endroit, avec les essences de bois qu'il y a là vaut $10,000, $15,000, $25,000 ou seulement $800. Le principe qu'on ne peut pas abandonner, c'est de se baser sur la valeur marchande dans tous les cas.

M. BOILY: Est-ce à dire, M. le ministre, que vous renoncez à exercer quelque incitation ou motivation pour l'exploitation des terres forestières? C'est un peu, en fait, la question que se sont posée les membres de la corporation. Parce que, d'après leurs études, il est évident que les besoins en bois vont augmenter au cours des années; les rendements actuels sont insuffisants ou le seront dans un avenir rapproché pour répondre à la demande. C'est un peu dans cette optique que la Corporation des ingénieurs forestiers voulait trouver un moyen d'inciter ceux qui détiennent des terres forestières non exploitées à les exploiter.

M. TESSIER: Je crois qu'il ne faudrait pas

mal interpréter ce que je vous ai dit. Il ne s'agit pas de nuire: il ne s'agit pas de ne pas encourager la sylviculture. Au contraire. Mais il faut tout de même établir certaines nonnes d'évaluation. Or, le concept lui-même doit être la valeur marchande. Maintenant, en tenant compte, bien entendu, de tous les aspects de la question. Le manuel d'évaluation, en somme, va tenir compte des endroits. Evidemment, une terre à bois dans telle région n'a pas la même valeur que dans une autre région. Tout cela doit être pris en considération.

En terminant là-dessus, je voudrais ajouter que le tout a été fait après consultations avec le ministère des Terres et Forêts qui est en parfait accord. Nous avons envisagé à peu près tout ce que vous venez de soulever. Cela a été discuté avec le ministère des Terres et Forêts. C'est après consultations avec ce ministère que nous en sommes arrivés à la rédaction du projet de loi. Mais il y a lieu, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, de peut-être le compléter par certaines de vos suggestions, comme la définition du sylviculteur, et d'amender en conséquence les articles 14 et 15.

M. CROISETIERE: Nul doute que le ministre s'inspirera aussi des lumières de son collègue du comté de Duplessis pour compléter.

M. RIVEST: Si vous me le permettez, M. le ministre Tessier, si on admet que le bois est un bien immobilier, il faudra admettre que les carottes et les patates sont également des biens immobiliers, puisque le bois est essentiellement une récolte. Il n'est pas un immeuble par destination ou quoi que ce soit.

M. TESSIER: C'est le code civil qui définit la question. Nous n'avons pas l'intention d'aller à l'encontre du code civil.

M. RIVEST: Nous demandons, pour les fins de l'évaluation municipale, pour les fins du projet de loi, que les bois ou le stock ligneux ne soit pas considéré comme un bien immeuble. Je pense, au sujet des modalités, qu'en consultation avec les différents ministères il y aurait moyen d'établir assez facilement des barèmes ou certaines normes de base qui pourraient aussi bien régir le potentiel des sols que la valeur des bois sur pied. C'est aussi simple l'un que l'autre. Il s'agit de savoir comment, tout simplement. Merci, M. le Président.

M. TESSIER: Je pourrais peut-être ajouter que nous avons également tenu compte de ce qui existe dans les autres provinces canadiennes et même dans les autres pays, notamment dans les Etats américains. Il faut tout de même que nous ayons une loi-cadre de l'évaluation municipale qui se rapproche le plus possible et qui concorde avec les principes qui existent en Amérique du Nord.

Evidemment, il y a des cas spécifiques au

Québec dont nous devons tenir compte, mais je parle des grands principes de base de l'évaluation. Las manuels d'évaluation dont se servent les éva uateurs, nous essayons de les rendre aussi conformes que possible à ceux qui existent ailleurs.

Quant aux mesures incitatrices pour les sylviculteurs ou les producteurs de bois, je crois que ce n'est pas la place, dans une loi de l'évaluation, pour inclure ou incorporer des mesures incitatrices. Il y a d'autres moyens de le faire. Il y a un ministère pour cela, qui s'appelle le ministère des Terres et Forêts, et qui peut, lui, avoir des mesures incitatrices et qui en a, d'ailleurs.

M. PAUL: Tout à l'heure, Me Boily, dans le cours de vos remarques, vous avez mentionné que la recommandation ou la requête des membres de la Corporation des ingénieurs forestiers, au fins de déclarer biens meubles les arbres, la forêt ou la sylviculture, c'était dans le but de promouvoir la sylviculture et que cela aurait pour effet de pénaliser le sylviculteur si nous continuions à considérer comme bien immeuble la forêt. Est-ce que j'ai bien compris?

M. BOILY: Je ne sais pas si ce sont à peu près les propos que j'ai tenus, mais c'est dans le sens, du moins, de ce que j'ai dit.

M. PAUL: Je n'ai pas répété mot à mot vos expressions. Apporteriez-vous le même argument de pénalisation à l'endroit d'un propriétaire qui posséderait une maison et qui ne l'entretiendrait pas et, du fait qu'il en prendrait soin, l'améliorerait, l'entretiendrait, il serait pénalisé en supportant une évaluation plus forte que celle qu'il porterait si la maison était laissée en désuétude, en démolition, à l'abandon total?

M. BOILY: M. le Président, je pense qu'il faut regarder le problème particulier qui se pose aux sylviculteurs du fait qu'une forêt et que des arbres, en l'occurrence, plus particulièrement, ont une existence qui s'échelonne sur des années qui sont de l'ordre de 50 ou de 60 ans parfois, selon les essences dont il s'agit, et que dans la mesure où, pour les fins d'évaluation municipale, foncière, ces arbres ne seraient pas considérés comme des immeubles, eh bien, on pourrait, de cette façon, favoriser un développement cohérent dans lé domaine forestier et de la sylviculture plus particulièrement. C'est dans cette optique-là qu'il faut regarder les arbres selon leur échelonnement d'une quarantaine d'années ou d'une vingtaine d'années tout au moins.

M. PAUL: Dois-je comprendre que vous retirez votre argument à l'effet qu'il s'agirait, pour le législateur d'une pénalité à l'endroit de celui qui ferait de la sylviculture?

M. BOILY: Si on le taxe sur les arbres qui sont sur son lot de terre, si, effectivement, ça entre en ligne de compte, le fait qu'il y ait des arbres sur cette terre forestière, augmentera son fardeau fiscal de taxes.

M. PAUL: Si nous poussons l'argument jusqu'à l'absurde, c'est donc dire que rien ne devrait être taxé sur une terre.

M. BOILY: Au contraire, nous avons établi comme principe que la taxation, l'évaluation foncière devait être basée sur la productivité potentielle d'une terre forestière. Alors, nous voulons que les terres forestières soient taxées mais taxées sur leur productivité potentielle plutôt que sur ce qui est au moment où les évaluateurs font leur évaluation. C'est donc dire que la Corporation des ingénieurs forestiers veut, au contraire, que les terres forestières soient taxées mais taxées sur une base qui nous apparaît conforme aux nécessités des sylviculteurs, à leurs obligations et aux besoins aussi de...

M. TESSIER: Si nous poursuivons votre argumentation, nous devrions taxer les commerces suivant le profit, cela équivaudrait à la même chose. C'est le principe que vous émettez.

M. BOILY: En fait, nous voulons qu'un statut particulier dans cette loi-là soit...

M. TESSIER: C'est le chambardement complet des principes de base mêmes de l'évaluation.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai écouté avec intérêt M. Boily qui plaide la cause que lui ont confiée les ingénieurs forestiers. Je pense qu'il y a, dans l'esprit du procureur, une confusion entre l'évaluation comme telle, qui est sous-tendue par les principes que nous retrouvons dans la loi, et, d'autre part, le code qui servira à cette évaluation. Alors, nous avons parlé, tout à l'heure, de valeur marchande. On va tenir compte de la valeur marchande de ces territoires dits ligneux ou boisés, mais je ne pense pas que le plaidoyer que vous avez fait, M. Boily, soit vraiment convaincant et serve la cause de vos clients parce que, comme on vient de le dire, si on poussait jusqu'à l'absurde ce que vous venez de dire, il n'y aurait pas de loi d'évaluation foncière parce que chacun pourrait citer une exception pour passer à côté de la loi, ce qui reviendrait à dire qu'il ne serait pas nécessaire de présenter une loi.

Alors, même compte tenu de la valeur des arguments qui sont exposés dans ce projet de loi, je pense que la demande que vous faites en ce qui concerne l'évaluation des terrains dits forestiers, demande sérieuse, exigerait une sérieuse considération avant que nous changions d'idée et que nous changions le principe qui veut que nous évaluions selon la valeur marchande. Parce qu'il me paraît y avoir, de toute évidence, une confusion entre l'évaluation comme telle et le code qui servira à cette évaluation, ce qui n'infirme pas, pour autant, l'ensemble des propositions que vous avez soumises au nom de la Corporation des ingénieurs forestiers.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de L'Islet.

M. GIASSON: Votre conception de l'évaluation des terrains boisés, si on essayait de l'appliquer dans des cas pratiques. J'achète un lot de 100 acres que je paye $1,000 parce que je considère qu'il y a environ 200 cordes de bois prêtes pour le marché. De quelle façon allez-vous procéder dans cette évaluation si, à côté, j'achète une autre terre à bois de 100 acres également, que je paye $5,000, dont le sol a à peu près la même productivité, mais sur laquelle je considère qu'il y a 1,000 cordes de bois. Dans votre conception, de quelle manière allez-vous évaluer les deux boisés?

M. RIVEST: M. le Président, d'après la conception du mémoire soumis par la corporation, aux fins du bill à l'étude, ces deux terres ont exactement la même valeur au point de vue de la taxation. La seule différence, c'est qu'une des deux terres devient un agent économique important dans la région où elle est située et l'autre devient un fardeau économique. Il y a évidemment une différence énorme à mon point de vue, elle est moins dans la taxation que dans l'élément moteur que peut représenter du stock ligneux en milieu rural.

Je pense que les remarques autant que le mémoire tendent à démontrer que la corporation comme telle se soucie des spéculateurs qui vont acheter des blocs de forêt, qui vont les piller et qui vont voir dégrever leur évaluation foncière au détriment de gens plus prévoyants qui conservent des stocks ligneux respectables et qui, évidemment, laissent sur le marché, les marchés locaux qui alimentent les usines, des stocks ligneux assez importants justement pour justifier l'existence des stocks ligneux.

Vous connaissez, dans l'Islet, les différents problèmes. Il y en a à différents endroits. Ce que la corporation vise, c'est justement qu'on puisse avoir dans des régions des stocks ligneux qui puissent alimenter ces usines-là, les alimenter sur une base soutenue, puis on pense que les éléments de taxation ont une importance assez capitale pour faire les représentations que nous faisons, malgré tout, avec assez d'insistance, je crois.

M. GIASSON: Mais vous jugez que c'est convenable que, pour les deux boisés de 100 acres, de même dimension, avec un sol de type forestier équivalent, on accepte la même évaluation sur les deux terrains?

M. RIVEST: Je pense, M. le député, qu'un champ de mais doit être taxé sur le même type de sol au même titre qu'une friche qui est à côté. C'est la productivité qu'on doit taxer et non ce qu'on y cultive. Si on y cultive des arbres, je pense qu'on ne doit pas taxer les arbres, mais on doit taxer la productivité du sol.

M. GIASSON: Mais on ne peut pas comparer le domaine forestier au domaine agricole à ce niveau-là? Le mais vous le récoltez chaque année, au bout d'une saison estivale de six mois, il est disparu. La forêt est là pour au moins 40 ans avant d'atteindre une certaine maturité. La comparaison ne peut pas tenir entre les deux.

M. RIVEST: Je pense que vous avez raison jusqu'à un certain point, sauf que la taxation sur un champ de mais est à peu près minime, alors que la cumulation de la taxation sur un stock ligneux devient énorme, devient un fardeau qui est quasi insupportable et qui force la plupart du temps les propriétaires forestiers à faire souvent avant terme des récoltes qui étaient quand même assez prometteuses, qui auraient été un apport important aux paroisses rurales.

On a mentionné tout à l'heure qu'on voulait faire un cas d'exception; on croit qu'un cas d'exception qui représente les deux tiers des terres imposables, je pense que ça mérite considération.

M. SEGUIN: M. le Président, je ne viens pas d'un milieu forestier étant de l'île de Montréal où il n'y a que de petites forêts ou des boisés. Je serais curieux de savoir quel traitement on proposerait dans le cas d'un secteur boisé ou d'une forêt qui aurait passé au feu.

Question de valeur marchande vis-à-vis de la valeur productive de cette forêt qui, d'un moment à l'autre, aura disparu à cause d'un incendie. Quels seraient vos propos dans un cas semblable? C'est hypothétique, mais je vous demande votre opinion. Est-ce qu'on doit considérer la valeur productive, la valeur du sol ou si, en réalité, la valeur marchande sera à considérer dans un cas semblable, parce qu'une fois qu'il y aura eu l'incendie, il se peut fort bien que la valeur marchande pour autres fins aura augmenté?

M. RIVEST: M. le Président, on a reproché à notre mémoire d'être un peu théorique.

M. SEGUIN: Je concède cela.

M. RIVEST: Je pense que c'est une question théorique. Je pense que, sur l'île de Montréal, en particulier dans la zone...

M. SEGUIN: Non, non, en dehors de l'île.

M. RIVEST: ... dans la zone habitée, où les systèmes de protection des forêts sont en général assez bien assurés, les destructions complètes par le feu, si elles se font, se font sur des étendues assez restreintes. Je pense tout de même que vous avez raison de souligner ce point. Il arrive ceci: quand il y a des zones détruites par le feu, si petites soient-elles, on s'assure en général qu'elles sont reboisées mécaniquement, d'une façon artificielle. Je pense que le gouvernement, en particulier le ministère des Terres et Forêts, qui fait des efforts louables dans des questions de reboisement, s'assure que ces parcelles de terrain sont reboisées effectivement. Est-ce que j'ai bien répondu à votre question?

M. SEGUIN: Oui, je vous remercie.

M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions, Me Boily et M. le Président. Nous allons maintenant passer... oui, excusez.

M. BELAND: Est-ce que je peux poser une question?

M. LE PRESIDENT: Allez, allez.

M. BELAND: Si je prends tout le contexte à l'intérieur duquel le mémoire se situe, est-ce que cela voudrait laisser entendre au gouvernement qu'il serait nécessaire, dans un avenir très prochain, qu'il y ait une évaluation scientifique, par exemple, de tout le territoire boisé du Québec y compris les territoires qui sont forêts privées?

M. RIVEST: M. le Président, il est assez évident qu'il y a des travaux qui pourraient éventuellement servir de base, et je réfère en particulier aux travaux de l'inventaire canadien des terres, qui peut éventuellement servir de base. Evidemment, il y a des imperfections; il s'agirait probablement de brosser et de rebrosser les méthodes et on pourrait atteindre une certaine efficacité. Ce sont des choses qui peuvent se réaliser assez bien. Je pense que l'ensemble des terrains privés doit être évalué de cette façon, puisque l'ensemble des terrains privés a été l'objet d'une classification des sols par l'inventaire des terres du Canada. Je pense que les travaux de base sont amorcés. Il s'agirait en général de prendre avantage et de compléter, de perfectionner ces travaux. Je pense qu'on pourrait en arriver assez rapidement à ces résultats.

M. BELAND: Très bien, merci.

M. BROWN: Mr. Chairman, I am most interested in this brief that was submitted and I realize that there are very complicated conditions dealing with this. In my particular area, Brome, that I have the honor to represent here, and the areas around there, it seems that the only benefits that the tree farmer gets is the benefit of beeing taxed.

If a farmer owns a farm, he has benefits that go to him on almost every count. But in the case of the tree farmer, there is absolutely no benefits. Now, it is not just a generalized picture when you are talking of trees. Trees are more than just an asset. They are part of our environment that is most important today because they make water; they see that water is in water sheds; they help to fight pollution. A grove of trees grown by a tree farmer within a community is an asset to everybody; it is an asset to the land around them, moreso than we will say if you have a farmer who has cows eating hay and browsing, you will find that it destroys to a certain amount the land. This business of tree farming should require a special study in my opinion, to see if there is not some way that we could work out an arrangement that would at least get them some benefits. I know it is very difficult, for instance, if a farmer has Christmas trees, he is going to cut this crop in seven years.

How are you going to fit it into the picture against the man who has maple trees over a period of 150 years? I know it is complicated but at the same time I would like to say that we should encourage tree farmers. It is for the good of our country. We do not want to give away programs, but there should be some way of adopting a standard that could be used throughout the Province.

M. LE PRESIDENT: Thank you, Mr. Brown. Maintenant nous allons passer aux arpenteurs-géomètres de la province de Québec. C'est M. Lévesque ou M. Chastenay qui doit parler au nom de la corporation.

Je me permets de rappeler au porte-parole de bien vouloir être bref et de résumer les commentaires qui ont été faits dans le mémoire. Je vous remercie à l'avance de votre collaboration.

Arpenteurs-géomètres de la province de Québec

M. BLANCHET (Bernardin): M. le ministre, M. le Président, messieurs, le mémoire des arpenteurs-géomètres de la province de Québec a été composé en collaboration. Votre lecteur est Bernardin Blanchet, avocat. Les arpenteurs-géomètres sont ici représentés par M. Marcel Lévesque, le président de la corporation, professeur à l'université Laval, M. Paul Lachance, professeur à l'université Laval et M. Réjean Blanchet, qui est dans la pratique privée.

Evidemment, le présent mémoire a été conçu dans la ligne de pensée du législateur, en vue du bien commun et non pas dans le but de défendre une chapelle particulière.

Notre corporation professionnelle, qui est vétuste, a été fondée tout d'abord dans un but de bien commun, et si nous présentons actuellement un mémoire, c'est dans un but de collaboration aux objectifs du gouvernement qui présente cette loi.

Nous voulons donner quelques idées fondamentales seulement en déclarant d'abord qu'il faut donner à l'évaluation foncière une base authentique, strictement fidèle à la réalité juridique et physique, à caractère définitif, mais n'excluant pas les modalités oscillatoires de la valeur qui vont s'y greffer. Ce que nous voulons — un mot d'explication — c'est que la base de l'évaluation foncière soit solidement édifiée sur le droit actuel, sur le code civil, le code de procédure civile, la Loi du cadastre, la Loi des arpenteurs-géomètres et que chacun puisse travailler à l'intérieur de sa juridiction propre.

Si, dans le but d'une uniformité des critères d'évaluation, il y a immédiatement différence entre l'évaluation et l'objet lui-même qui sera évalué, si, dans le but d'une uniformité de l'évaluation, des critères et des normes, nous arrivons à l'étonnant résultat caractérisé par la multiplicité des cadastres, la variété des cadastres polymorphes, l'enchevêtrement des notions fondamentales de propriété, l'arbitraire création de nouveaux patrimoines, la méthamorphose de l'occupation en propriété, eh bien! on aura manqué le coup dès la base.

Le citoyen sur la défensive, dans ce cas, devra payer les frais d'une juxtaposition de cadastre dit confectionné pour des fins fiscales spécifiques, se dépêtrer au milieu de nouveaux concepts juridiques étrangers à la législation existante.

De ces principes se dégagent les recommandations que nous croyons devoir formuler dans un premier temps, sous la forme de modifications à la loi proposée; dans un second temps, si ce n'est pas trop audacieux de le faire en regard de l'importance de la matière, en proposant une étude sérieuse avant l'adoption du présent projet de loi.

L'unité d'évaluation. Nous voudrions la définition d'une unité d'évaluation. Elle se définirait ainsi: "Un immeuble appartenant à un seul propriétaire et borné de tous les côtés par des immeubles appartenant à d'autres propriétaires."

On ne veut pas par là, évidemment, comme conséquence que dans l'organisation elle-même qui a pour but d'uniformiser les critères et normes d'évaluation, arbitrairement, on sépare la propriété d'un propriétaire. La raison pour introduire cette définition et que quand deux immeubles contigus appartiennent à un seul propriétaire — nous donnons des exemples — certains droits, comme les droits résultant du voisinage, tombent dans la confusion et deviennent inexistants. Ainsi un droit de passage, établi préalablement à la réunion des deux immeubles, disparaît quand les immeubles deviennent, par la suite, la propriété d'un seul.

Si, lors de l'évaluation, on sépare ces deux propriétés de façon qu'elles puissent, à l'occasion de la saisie et de la vente pour taxes impayées, être vendues séparément, s'il y a plusieurs unités d'évaluation et si, sur une des unités, le propriétaire taxé n'a pas payé ses

taxes, on vendra cette unité, alors qu'il est propriétaire des autres unités factices, je dirais, d'évaluation qui auront été ainsi créées dans le rôle d'évaluation par les personnes préposées. Si c'est vendu à des propriétaires différents, comme cela arrivera évidemment, il se créera de nouveaux droits, entre autres, ceux résultant du voisinage, qui auront été établis par le fait que ces propriétés auront été portées au rôle comme deux propriétés distinctes. L'évaluation n'est pas cause valable pour distribuer autrement les droits d'un propriétaire.

L'ajouté de cette définition demande une modification à l'article 12, dans le sens suivant: "L'immeuble est porté au rôle au nom du propriétaire du fonds de terre; mais s'il y a titre enregistré attestant qu'un immeuble par nature placé sur son fonds appartient à une autre personne, cet immeuble par nature est porté au rôle au nom de son propriétaire, s'il y a titre enregistré. Dans tous les cas, les immeubles sont portés au rôle par unité d'évaluation de façon à ne pas créer de droits nouveaux ou à restreindre ou changer ceux qui existent suivant les titres."

Je vous prie ici de rayer, l'article 13 n'a plus besoin de la restriction exprimée s'il n'y a pas de titre de propriétaire. C'est une erreur du copiste.

A l'article 9, il est dit: "Sauf disposition contraire, tout immeuble doit être porté au rôle à sa valeur marchande établie conformément au manuel d'évaluation."

Ici le manuel d'évaluation, vous le comprenez, prend une importance capitale. Nous soumettrions que, vu son importance, il reçoive une certaine publicité permettant la critique des suggestions, avant d'être adopté.

Ces articles présupposent, comme conséquence presque inévitable, un inventaire complet de tous les immeubles affectés par la présente loi. La Corporation des arpenteurs-géomètres a remis à différents ministres un mémoire sur le cadastre fiscal, c'est-à-dire le cadastre confectionné en vue de la fiscalité d'imposition foncière, mais un cadastre réel, c'est-à-dire un cadastre qui est fondé sur la propriété, les droits de propriété et, en conséquence, les titres de propriété, le plan du cadastre. Nous avons, dans notre mémoire, donné la définition du cadastre. Nous nous sommes, en même temps, référés au code civil et au code de procédure civile, aux articles que nous croyons évidemment les plus touchés.

Nous voulons aussi demander une modification à l'article 10, qui se lit de la façon suivante: "La superficie d'un terrain s'établit soit d'après l'inscription qui en est faite au cadastre, soit d'après le titre de propriété, soit d'après la superficie effectivement occupée, selon la plus grande des trois." C'est le texte actuel. Cet article devrait être rédigé dans le sens suivant: "La superficie d'un terrain s'établit suivant les droits du propriétaire". Voici les principales raisons du changement. Le texte n'est pas limitatif. Il faut faire les recherches, les mesurages et les calculs nécessaires pour obtenir les trois superficies. Nous sommes dans le domaine proprement physique, dans le domaine de la précision et de l'exactitude.

Des recherches plus poussées aboutiront probablement à trouver deux superficies différentes ou plus pour chacune des trois catégories. La plus grande des trois superficies n'est pas toujours la meilleure nécessairement. On obtiendra des recouvrements ayant pour conséquence d'évaluer en double des lisières de terrains. Les terrains aboutant, par exemple, au terrain du propriétaire voisin se trouveront, en vertu de ce principe de la plus grande des trois superficies...

M. TESSIER: Je m'excuse, mais je voudrais vous faire remarquer qu'un amendement a été apporté à cet article. Les mots "selon la plus grande des trois" ont été biffés.

M. BLANCHET (Bernardin): Merci, M. le ministre, de nous avoir prévenus et, en même temps, de nous avoir précédés.

Je ne vais donner que les remarques qui concernent les autres modifications demandées. Lorsque nous parlons de ces mesurages de propriétés, nous déclarons que c'est le problème qu'affronte chaque jour l'arpenteur dans l'exécution de ses fonctions d'étudier les différents documents qui concernent la propriété, de déceler les différences qui existent entre le cadastre, les titres et l'occupation. On se plaint, évidemment, de ce que le cadastre ait des lacunes. Nous croyons que la présente loi qui vient devant le Parlement nous fournit une occasion particulière de combler les lacunes du cadastre Mais nous craindrions qu'un nouveau cadastre, qui n'est pas conforme au réel, qui n'est pas copié, qui n'est pas authentique, qui n'est pas le cadastre officiel dont les lacunes pourraient être comblées évidemment par des mesures gouvernementales appropriées, ne devienne la base de l'évaluation.

Nous faisons toujours la différence, M. le Président, entre normes et critères d'évaluation et l'objet qui est évalué. Ce n'est pas du tout la même chose. Il est fallacieux de vouloir reconnaître sans discernement comme limites des propriétés les marques d'occupation. Etablir la superficie d'un terrain, c'est d'abord en fixer les limites et, ensuite, en calculer la contenance enfermée à l'intérieur- des limites. Dans notre contexte juridique, fixer les limites des propriétés est un acte quasi judiciaire parce qu'il a pour objet une décision à prendre en matière de droits, ceux du propriétaire.

Or, le code civil établit les droits du propriétaire: la propriété et le droit de jouir d'une façon absolue d'une chose, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par la loi et les règlements. Or, si, par une législation, on intervient sur la propriété elle-même en la subdivisant, on change les droits, c'est-à-dire la

jouissance du propriétaire lui-même dans ce qu'il a de fondamental.

L'adoption de la présente loi est une chance unique de remettre à jour l'inventaire des biens-fonds. Il en a été question partiellement tout à l'heure. Il serait inestimable pour les différentes fonctions gouvernementales, municipales et autres que les plans et les renseignements précis, à ce jour, soient produits suivant un programme bien établi, un système permanent et universel. C'est ce que nous vous proposons, messieurs, et nous croyons que pour les considérations déjà données, le projet de loi actuel tendrait à venir à l'encontre du droit civil lui-même, du code de procédure, de la Loi du cadastre et des droits des corps professionnels.

Nous reconnaissons évidemment — je le dis en conclusion et simplement en aparté, après discussions avec les membres de la corporation — que les évaluateurs font une oeuvre basée sur des contacts interdisciplinaires. Mais il reste qu'à la base, pour faire la preuve devant les tribunaux, par exemple, et pour donner un objet précis à évaluer, chacune des disciplines concernées est la seule qui puisse servir le bien public. C'est pour cette raison que nous avons fait notre rapport et nous vous remercions.

M. TESSIER: M. le Président, je tiens à remercier Me Blanchet qui, au nom des arpenteurs-géomètres du Québec, nous a présenté un très bon mémoire que nous lirons d'ailleurs avec beaucoup d'intérêt.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je veux faire de même et remercier la Corporation des arpenteurs-géomètres qui a étudié le projet de loi qui est devant nous et qui, par ses observations, donne une dimension beaucoup plus large au problème qui nous préoccupe. Il est bien entendu que, dans le cadre de la loi 48, il n'est pas possible d'intégrer les propositions que vous faites. Il reste toutefois que vous ouvrez des avenues qui nous serviront à demander au gouvernement d'entreprendre ces révisions dont vous parlez, particulièrement en ce qui concerne le cadastre et l'ensemble des biens immobiliers en fonction des dispositions du code civil.

M. BLANCHET (Bernardin): Nous demandons, M. le député, non pas de l'intégrer à la loi mais que la loi respecte, évidemment, la législation déjà existante. C'est extrêmement vaste. C'est fondamental et extrêmement important.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ceci étant déjà entendu dans mon esprit, Me Blanchet.

M. LE PRESIDENT: Merci, Me Blanchet. J'inviterais maintenant Me Beaudry à nous faire valoir les demandes de Park Laign Ltd.

Park Laign Ltd.

M. BEAUDRY: Paul Beaudry, avocat de Montréal. Le mémoire a été préparé en collaboration avec M. Roger Charland, président de la firme Bégin, Charland & Valiquette Inc. et M. Ronald-J. Richard, vice-président de Park Laign Ltd.

La loi-cadre de l'évaluation foncière constitue une amélioration énorme par rapport à tout ce qui existait auparavant dans ce domaine, et l'industrie en général est heureuse de le constater et d'en féliciter le ministère des Affaires municipales.

Les commentaires et suggestions qui suivent ont pour but de la rendre encore plus équitable et d'en faciliter la mise en vigueur en proposant d'y inclure certaines modifications de détail basées sur l'expérience du secteur industriel.

Quant à l'article 1, paragraphe c), la définition de "immeuble par destination": "tout objet mobilier placé sur un fonds à perpétuelle demeure par le propriétaire ou par toute autre personne", semble complète par elle-même, peu importe qui en conserve la propriété. Nous suggérons de supprimer les neuf derniers mots de ce paragraphe.

En ce qui concerne les roulottes, il est suggéré d'ajouter les mots "et utilisée" après le troisième mot du paragraphe i) et à la fin du paragraphe: "roulotte" comprend aussi "maison mobile". Dans le texte anglais, après le quatrième mot du début, ajouter les mots "and used", et à la fin du paragraphe, "trailer" also includes "mobile homes".

Quant à l'article 1, paragraphe m), nous regrettons qu'aux fins de la présente loi, la définition du mot "agriculteur', serve à des fins d'imposition foncière. Ici, je vous réfère aux remarques que j'ai faites au nom du Barreau, ce matin.

Quant à l'article 4, section Il, lorsque les prix et les valeurs varient rapidement en période d'inflation ou de régression, la préparation d'un nouveau rôle après cinq ans peut amener un changement considérable des valeurs foncières et un brusque accroissement de taxes difficile à supporter pour le contribuable ordinaire aussi bien que pour l'industrie. Dans le passé, on laissait aux municipalités la faculté de décider si le rôle devait être fait tous les ans ou, au plus tard, tous les trois ans.

Il est vrai qu'on peut toujours faire varier les taux de taxation, mais il est rare que les taux municipaux et scolaires varient dans la même proportion et, de plus, comme le rôle est supposé refléter la valeur marchande, suivant la nouvelle loi, un ajustement à tous les cinq ans risquerait de donner une image fausse du crédit des municipalités à certaines années aussi bien que d'imposer un brusque fardeau au budget des contribuables.

Il est suggéré de conserver l'obligation pour les municipalités de faire un rôle complet à tous

les cinq ans mais de leur laisser la faculté de déposer un nouveau rôle soit après deux, soit après trois ans en changeant seulement les normes générales d'indices des coûts et de dépréciation suivant une procédure simple qui pourrait être contenue dans le manuel d'estimation.

L'article 6, section Il. Cet article est d'une importance capitale en ce qu'il rend le gouvernement en totalité ou en partie, directement ou indirectement, évaluateur des propriétés et, jusqu'à un certain point, juge de la valeur marchande, selon l'article 9 qui suit.

Cela a son bon côté du point de vue de l'uniformité des normes et critères et peut aussi avoir son mauvais côté, si le manuel devient en tous points obligatoire.

Il est suggéré de biffer la référence au manuel.

A l'article 11, section Il: L'industrie en particulier trouve injuste qu'on porte au rôle, pour fins de taxation, des immeubles dont la construction n'est pas terminée et dont elle ne peut encore tirer aucun revenu. D'autre part, l'industrie n'a jamais intérêt à laisser inoccupés de nouveaux immeubles et il s'écoule peu de temps avant la construction aux trois quarts et la construction complète. Il est suggéré de supprimer le paragraphe a) de l'article 11 et d'ajouter à la fin du paragraphe b): "Pour l'usage auquel il est destiné."

En ce qui concerne les roulottes, je vous fais grâce de lire le texte qui appert pour m'en tenir à l'article 14.

Article 14, section Il, paragraphe a). Cet article est d'une importance capitale pour l'industrie en général dans la province de Québec. Nous devons féliciter le gouvernement pour une telle initiative qui tend à mettre notre province sur un pied d'égalité avec l'Ontario, sa voisine. L'expérience a montré cependant qu'un bon nombre de cas particuliers sont extrêmement difficiles à classifier, soit dans les immeubles par nature, soit dans les immeubles par destination.

La nouvelle loi semble remplacer le mot "machinerie" qui existait auparavant par les mots "immeubles par destination." Le concept de l'industrie est différent. L'industrie divise généralement ses actifs physiques en terrains, bâtiments et équipements industriels. L'équipement industriel est tout ce qui n'est pas terrains et bâtiments proprement dits, c'est-à-dire tous les instruments, machines, équipements mobiles ou non, qui servent à un processus industriel. Les bases de machines, bâtis, supports sont généralement considérés comme équipement. De plus, dans la technique moderne, le concept de mobilité n'est plus un critère exclusif des machineries et équipements de production. L'ère de l'électronique a, en effet, ajouté toute une catégorie d'instruments de contrôle de production qui servent bien à des fins commerciales ou industrielles et qui cependant ne sont pas strictement mobiles.

Un autre concept ou critère non prévu par la loi jusqu'ici, mais qui est souvent employé par les évaluateurs dans la pratique, est celui de l'entreposage à long et court terme des produits bruts ou finis par rapport aux produits de transformation. Dans le cas de réservoirs industriels, par exemple ceux qui servent à entreposer des produits bruts ou des produits finis pourraient, par définition, entrer dans la catégorie des immeubles par nature, alors que ceux qui servent à l'entreposage temporaire de produits de transformation sont assimilables à des équipements de production et pourraient entrer, par définition, dans la catégorie des immeubles par destination.

Un autre critère industriel est celui de l'interchangeabilité. Ce qui fait partie d'un bâtiment et peut être vendu avec lui pour d'autres fins que celles du présent propriétaire est assimilable à un immeuble par nature; ce qui normalement doit être changé ou enlevé par un propriétaire nouveau est assimilable à un immeuble par destination.

Si l'intention du législateur est d'exempter de la taxe foncière les moyens propres de production industrielle, il vaudrait mieux apporter certaines précisions à des catégories de biens qui pour les uns sont des immeubles par nature et pour les autres des immeubles par destination, quand ce ne serait que pour des raisons d'uniformité.

Sans restreindre la généralité du paragraphe a) de l'article 14, il est suggéré de préciser certaines catégories d'immeubles industriels à ne pas porter au rôle. Par exemple, les bases de machines, l'enveloppe ou la cage des convoyeurs, les réservoirs industriels servant à emmagasiner temporairement des produits de transformation, les transformateurs électriques et tous autres appareils électriques ou électroniques.

Alternativement, il est suggéré de modifier ainsi la première phrase de l'article 14: "Ne sont pas portés au rôle les immeubles par destination et les équipements qui sont utilisés."

Quant à la section, Il paragraphe c) de l'article 14, à cause des énormes investissements non directement productifs que l'industrie sera forcée de faire ou appelée à faire dans un avenir rapproché pour servir exclusivement à des fins de lutte contre la pollution de l'eau, de l'air ou du sol, il paraît injuste de distinguer, pour ces fins seulement, entre immeubles par nature et immeubles par destination.

De plus, certaines industries seront appelées à investir contre la pollution beaucoup plus que d'autres dans des immeubles par nature, par exemple des réservoirs d'aération de l'eau des canalisations souterraines, des prises d'eau, etc., suivant les procédés employés.

Il est suggéré de biffer au paragraphe c) de l'article 14 le mot "exclusivement" et d'ajouter à la suite "de même que les immeubles par nature dans la mesure où ils sont utilisés à de telles fins".

Au paragraphe d) de l'article 14, section Il, le même commentaire qui a été fait pour le paragraphe a) de l'article 14 s'applique également.

Si les mots "et les équipements" sont ajoutés après les mots "immeubles par destination", aucune autre suggestion n'est faite ici.

Permettez-moi d'ouvrir ici une parenthèse, M. le Président. Ce matin, on m'a dit, concernant l'article 14, qu'un autre groupe voulait se joindre au mémoire que je présente. Je vais faire les remarques verbalement et je produirai en annexe d'ici quelques jours le texte écrit qui est proposé au nom de l'Association des propriétaires de cinéma du Québec.

Les propriétaires disent: Nous félicitons d'abord le gouvernement d'avoir pris l'initiative d'une loi générale sur l'évaluation foncière. Nous sommes d'accord sur la grande majorité des réformes proposées dans cette loi générale. Nous croyons cependant que nous-mêmes et la totalité des quelque 322 cinémas du Québec, appartenant soit à des chafnes soit à des propriétaires indépendants, seraient gravement affectés de nouveau et, en certains cas, réduits à fermer leurs portes, si l'article 14 du bill proposé n'était pas modifié.

Nous pensons que le gouvernement n'a pas l'intention de taxer les instruments de production et de commerce qui ne sont pas dans la catégorie des terrains et des bâtiments. Mais il paraît certain que l'exemption de ces moyens dans l'article 14, si elle repose sur les mots "immeubles par destination", aurait pour effet de rendre imposables des articles qui ne l'étaient pas jusqu'à maintenant. Par exemple, les équipements de cinématographic, projecteurs, systèmes sonores, écrans de projection, rideaux de scène, fauteuils, distributeurs automatiques et mêmes caisses enregistreuses.

Cela résulterait du fait que ces objets sont placés à l'intérieur des bâtiments, sinon à perpétuelle demeure, du moins pour une durée indéfinie. Il existe une jurisprudence concernant les immeubles par destination qui pourrait conduire à une exemption plus restreinte que celle des machineries et accessoires, qui existe dans la loi actuelle des cités et villes. De plus, l'article 14 ne mentionne pas d'exemption pour ce qui sert à des fins industrielles-commerciales ou commerciales.

Dans ces catégories, une série d'appareils ou de machines non actuellement portées au rôle d'évaluation pourraient le devenir du fait de la seule distinction entre immeuble par nature et immeuble par destination. Exemples: balances, comptoirs, caisses enregistreuses, appareils audio-visuels, appareils de projection cinématographique, etc.

Nous présumons que le gouvernement n'a pas l'intention de faire porter au rôle ces instruments de l'activité commerciale, commerciale-industrielle ou industrielle. Nous recommandons donc que l'article 14 soit modifié pour se lire comme suit. "Ne sont pas portés au rôle les immeubles par destination, machineries, appareils et équipements qui sont utilisés pour des fins industrielles ou industrielles-commerciales ou commerciales, pour servir principalement à un processus de production, de transformation, d'extraction ou de modification d'un produit, ou de tout autre procédé, opérations, activités ou services de nature industrielle-commerciale ou commerciale.

En ce qui concerne l'article 15, paragraphe d), l'industrie voudrait être assurée que tous les chemins de fer...

M. TESSIER: Me Beaudry, est-ce que c'est dans le mémoire qu'on a?

M. BEAUDRY: Non. J'ai dit que j'ouvrais une parenthèse, M. le Président. C'est parce qu'on m'a donné cela ce matin.

M. TESSIER: Est-ce que vous pourriez nous remettre ce document?

M. BEAUDRY: J'en ai seulement une copie. M. TESSIER: Oui, oui, mais même si on...

M. BEAUDRY: J'ai dit que d'ici deux ou trois jours le nombre voulu de copies serait produit au secrétaire de la commission.

M. TESSIER: Je vous remercie.

M. BEAUDRY: En ce qui concerne le paragraphe d) de l'article 15, l'industrie voudrait être assurée que tous les chemins de fer seront traités sur la même base. Il semble y avoir une imprécision lorsque l'article 15 d) dit: "Les réseaux de transport en commun et de chemin de fer, "et, en anglais, "public transport and railway systems". Plusieurs industries importantes ont des chemins de fer, soit à l'intérieur des limites d'un complexe industriel ou d'une usine, soit à l'extérieur, pour assurer le transport d'un point à l'autre, parfois assez éloignés. Il est suggéré de remplacer le huitième mot "de" du paragraphe d) par les mots "tous les".

L'industrie considère que les systèmes industriels privés d'égouts, d'aqueduc et de traitement d'eau qui servent directement à la production dont le coût est défrayé par elle et qui ne sont pas en soi une source de revenus, ne devraient pas être portés au rôle. On suggère d'ajouter un nouveau paragraphe e) se lisant comme suit: "Les systèmes industriels d'aqueduc, d'égouts et de traitement d'eau non utilisée en soi comme sources de revenus."

Je vous fais grâce de la lecture des articles 20 et 21, sauf que j'attire votre attention sur le fait que l'on suggère de remplacer le mot "fluide" par le mot "liquide", pour les raisons mentionnées dans notre mémoire.

L'article 71, section VIl, ne mentionne que les frais de sténographie et de traduction. Les frais d'experts et les frais légaux semblent avoir été

oubliés. Ajouter, après la première virgule de l'article, les mots "les frais d'experts et les frais légaux". Ici, l'industrie se joint au Barreau.

A l'article 77, le rôle n'étant confectionné que tous les cinq ans les modifications possibles dans les années intermédiaires ne peuvent s'opérer dans la nouvelle loi que selon les articles 97 et 98 qui assurent la tenue à jour du rôle pour motifs spécifiés. Cependant, dans la grande industrie en particulier, il peut être difficile, sinon impossible pour l'évaluateur d'apprécier, au cours des cinq ans d'un rôle, les changements de la valeur marchande dus à des raisons économiques, fonctionnelles ou simplement physiques. C'est pourquoi il semble équitable que tout contribuable puisse loger une plainte une fois par an dans les quatre années qui suivent celle du dépôt. Suggestion: ajouter à l'article 77: "Il sera toutefois loisible à tout contribuable de formuler une plainte semblable une fois dans chacune des quatre années suivant celle écoulée de la date du dépôt du rôle."

L'article 79. Les deux dernières lignes du premier paragraphe créent pour l'évaluateur l'obligation d'être mis en cause dans tout appel prévu dans la présente loi. S'il s'agit de l'évaluateur d'une municipalité importante et si le nombre des appels est très considérable l'évaluateur peut se trouver détourné de son travail ordinaire pendant des mois. Supprimer les deux dernières lignes du premier paragraphe'.

L'article 81, ça a été mentionné dans le mémoire du Barreau. En somme, il s'agit de remplacer la signification "par huissier" par "poste recommandée".

Quant à l'article 97, si l'on s'en tient au sens strict des paragraphes b) et c) le rôle devrait être modifié sans cesse pour tenir compte des variations continuelles de la valeur marchande des propriétés. Poussée à l'extrême cette obligation équivaut à modifier le rôle d'évaluation sans cesse. Suggestion: ajouter à la suite de chacun des paragraphes b) et c) les mots suivants: "Due à un changement physique affectant un immeuble ou son voisinage immédiat."

Quant à l'article 106, M. le Président, souvent, des roulottes se trouvent placées à un endroit où elles ne sont aucunement utilisées, par exemple, après leur fabrication, etc. Aussi au point de vue industriel, lorsqu'on va développer un barrage ou construire une grosse industrie dans une zone, on peut stationner sur notre terrain le bureau mobile. On se demandait si c'était le sens de la loi que les bureaux mobiles, qui sont là pour abriter les plans, les devis et tout le matériel nécessaire pour la construction, soient également visés.

En conclusion, le manuel, partie intégrante de la nouvelle loi, contient un grand nombre de normes, de critères et de taux d'évaluation qui ne sont pas assez connus pour pouvoir être discutés dans le présent mémoire. Le temps, d'ailleurs, ne permettra pas de le faire. C'est pourquoi nous suggérons de nouveau que son application ne soit pas universellement obligatoire au début de la mise en vigueur de la présente loi.

Nous réitérons nos félicitations au gouvernement pour le progrès remarquable que laisse présager le bill 48. Les proposants de ce mémoire offrent leur coopération sur des points de détail, si jugés opportuns, et remercient la commission parlementaire d'en avoir autorisé la présentation.

M. TESSIER: M. le Président, je voudrais encore une fois remercier Me Beaudry. Je constate que plusieurs des suggestions apportées par Park Laign Ltd. rejoignent sensiblement celles présentées par le Barreau, que vous représentiez également en tant que procureur.

Nous allons certainement considérer plusieurs des suggestions que vous nous faites, mais je voudrais souligner un point qui est très important — je crois que vous l'admettrez avec moi — celui de la machinerie. Il y a lieu évidemment de rédiger de nouveau cet article-là en tenant compte de vos suggestions et d'autres suggestions qui nous ont été faites dans d'autres mémoires par d'autres organismes.

L'intention du législateur c'est que toute machinerie ne soit pas portée au rôle et par conséquent pas taxée. C'est ça. Il s'agit maintenant de trouver la meilleure rédaction possible pour en arriver à atteindre ce but-là.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre vient de dire que toute machinerie ne sera pas portée au rôle et donc non taxable. Cela couvre le cas de ces appareils qui se trouvent dans les salles de projection de cinémas?

M. TESSIER: Là, je ne pourrais pas répondre...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez dit "toute machinerie".

M. TESSIER: Je présume que oui.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il ne s'agit pas de présumer, il s'agit de savoir.

M. TESSIER: Nous le saurons mieux lorsque nous aurons le texte définitif.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, je n'attends pas le texte définitif, il y a ici un témoin que je veux bien interroger.

Lorsque vous avez parlé au nom des propriétaires de salles de cinéma, Me Beaudry, qu'est-ce que vous entendiez exactement par machinerie, et comment la distinguez-vous de la machinerie industrielle?

M. BEAUDRY: Si j'ai bien compris l'intention du ministre, au point de vue industriel — si je comprends bien l'esprit de la loi, après l'avoir étudié avec des représentants, non pas seule-

ment de l'industrie cinématographique, mais de l'industrie d'une façon générale — l'intention était d'éviter les procès de jeux de mots que nous avons eus dans le passé. Egalement, je présume que le gouvernement veut, par cette loi, créer un renouveau au point de vue industriel en enlevant ces questions qui nous ont toujours posé un problème en matière d'évaluation devant les tribunaux.

Je présume que, lorsqu'on parle de machinerie de projection, ce sont des machines de projection. Encore là nous avons été souvent devant les tribunaux. Si vous avez un projecteur de 8 millimètres, 16 millimètres, 35 millimètres, et aujourd'hui nous sommes rendus avec des projecteurs de 70 millimètres, ce sont des choses assez massives. Cela se transporte, mais disons que ce n'est pas portatif.

M. TESSIER: Tous les meubles ne sont pas portatifs, loin de là.

M. BEAUDRY: C'est ça.

M. TESSIER : Vous avez des meubles qui pèsent des centaines de tonnes.

M. BEAUDRY: Pour obvier à ces malentendus, nous voulions inclure, en changeant un peu les mots, pour des fins industrielles ou industrielles-commerciales. Cela englobe ces parties mi-industrielles, mi-commerciales, leur procédé de fonctionnement — les projecteurs, etc. — serait considéré comme étant de la machinerie industrielle-commerciale et non portée au rôle.

C'est de cette façon que je l'ai interprété et j'espère que c'est de cette façon que vous l'avez fait.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est-ce que le ministre pense de cela, dans le cas des salles de projection de cinéma? J'aborderai l'autre aspect du problème après. Il y a évidemment le bâtiment. Il y a les fauteuils. Il y a les guichets. Il y a les vestiaires. Il y a aussi les machines à projection, les écrans, etc. Est-ce que, selon le ministre, ce sont là des immeubles par destination?

M. TESSIER: Moi, je ne crois pas. Je crois que ce sont des biens meubles. En ce qui concerne l'énumération que vous avez faite, vous parlez des vestiaires. Bien, le vestiaire, c'est une pièce.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! pardon, il y a des vestiaires mobiles. Le ministre ne sait pas ça?

M. TESSIER: Si c'est un vestiaire mobile, c'est un meuble.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et cela se loue. Non, remarquez, ce qui est important, ce n'est pas...

M. TESSIER: Quant aux fauteuils également, je crois...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le ministre.

M. TESSIER: ... que, selon l'interprétation que j'en donne du moins, ce sont des biens meubles de même que les appareils à projection.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sont des biens meubles et non pas des immeubles par destination. Lorsque je parle des vestiaires, ce n'est pas une blague que je fais. Il y a des vestiaires mobiles...

M. TESSIER: Possible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et qui sont loués ou qui sont donnés en concession à quelqu'un qui les exploite. Alors, qu'est-ce que c'est?

M. TESSIER: C'est un meuble.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un meuble.

M. TESSIER: Bien, du moins, c'est l'interprétation que j'en donne.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas un immeuble à l'intérieur d'un autre immeuble?

M. TESSIER: Pardon?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a un autre aspect aussi dans le cas du cinéma; il y a le cas de l'industrie cinématographique comme telle. Il n'y a pas seulement les salles de projection, il y a aussi les salles où se fabrique le film. Il y a la machinerie là-dedans. Une machinerie très importante, de toute nature. Je n'énumérerai pas au ministre, qui connaît très bien cette industrie, quels sont les appareils dont on se sert. Est-ce qu'il s'agit de meubles ou d'immeubles?

M. TESSIER: C'est un avis juridique que vous me demandez?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, mais vous avez dit tout à l'heure que toute machinerie...

M. TESSIER: Je vais vous donner l'avis juridique et après cela je vais aller percevoir mes honoraires.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord.

M. PAUL: Il faudra être sûr que votre compte ne sera pas sujet à débat.

M. TESSIER: C'est bien possible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On le fera ventiler par le Barreau.

M. TESSIER: Le Barreau décidera si mon compte d'honoraires est trop élevé ou non.

M. TREBLAY (Chicoutimi): D'accord.

M. TESSIER: A moins qu'on s'entende pour que ce soit le député de Maskinongé...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le bâtonnier de Maskinongé...

M. TESSIER: Le bâtonnier... qui soit l'arbitre. Non, voici, je l'ai mentionné. Il n'est pas question d'imposer de machinerie. Que ce soit dans l'industrie du cinéma en particulier ou ailleurs, évidemment, cela inclut l'industrie du cinéma.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une précision que je voulais avoir du ministre. Donc, toute machinerie n'est pas imposable, y compris celle qui sert à la production de films.

M. TESSIER: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez donc l'assurance, Me Beaudry, en ce qui concerne les propriétaires de cinémas et en ce qui concerne les producteurs de cinéma, que leur machinerie est non imposable, parole du ministre.

M. BEAUDRY: Non porté au rôle, parole du ministre.

M. TESSIER: Oui, non porté au rôle.

M. PAUL: M. le ministre, je n'ai pas à critiquer l'opinion que vous venez de donner. Je me réjouis pour les producteurs de cinéma, mais après les mémoires de ce matin et ceux que j'ai lus qui ont été présentés la semaine dernière, pourriez-vous nous dire ce qui va rester d'imposable dans le Québec?

M. TESSIER: Il va en rester pas mal.

M. LE PRESIDENT: Me Beaudry, nous vous remercions. J'inviterais maintenant l'Association des détaillants des maisons mobiles et roulottes du Québec Incorporée à faire valoir ses opinions.

Association des détaillants de maisons mobiles et de roulottes du Québec

M. DELISLE: On va demeurer approximativement sur le même sujet. Encore d'autres immeubles par destination. Pierre Delisle, avocat, conseiller juridique de l'Association des détaillants des maisons mobiles et roulottes du Québec, Inc.

Nous avons soumis un mémoire, il y a environ un mois, au nom de l'Association des détaillants des maisons mobiles et, indirectement, au nom de certaines autres associations, dont les manufacturiers de maisons mobiles et l'Association des terrains de camping.

Pour aller directement au but du présent mémoire, disons que le point que nous voulons soulever concerne uniquement et exclusivement le problème de la taxation de la maison mobile ou roulotte résidentielle, un problème, d'ailleurs, qui est vieux au Québec, qui a fait l'objet de beaucoup de débats en jurisprudence et qui est maintenant devant l'Assemblée nationale.

En effet, c'est la première fois dans les lois municipales du Québec qu'on retrouve spécifiquement une mention soit de roulottes, soit de roulottes commerciales ou résidentielles ou de maisons mobiles. Je pense que tant les députés que l'association elle-même sont intéressés à essayer de pousser un peu plus loin cette idée-là.

Sur la question de principe, l'association, d'une façon unanime, se dit d'accord sur l'intention du gouvernement de taxer les maisons mobiles ou roulottes résidentielles, c'est-à-dire que tous le monde constate que les propriétaires de maisons, qu'elles soient installées sur des terrains qui leur appartiennent ou groupées en parc, doivent payer une compensation pour les services municipaux et scolaires qu'ils reçoivent.

Sur ce sujet, nous félicitons évidemment le ministre et le gouvernement d'avoir présenté une proposition, un début en fait, qui va, je l'espère, nous aider tous à trouver une solution définitive à ce problème.

Quant à la modalité, c'est-à-dire à l'inscription au rôle d'évaluation d'un meuble, en fait, d'une maison mobile, l'association est en désaccord total sur la proposition incluse dans le projet de loi 48. Le projet de loi 48 en parle dans trois articles. Je pense qu'ils sont bien connus maintenant. Il s'agit de l'article 1 i) qui définit les roulottes, de l'article 13 qui les rend imposables au propriétaire du fonds et de l'article 106 qui prévoit que cette imposition sera faite sur une base mensuelle.

Ces trois articles, en ce qui nous concerne, ne peuvent pas trouver d'application pratique, tant en ce qui concerne les municipalités que les propriétaires de parcs de maisons mobiles, les propriétaires de maisons mobiles et, enfin, toutes les personnes concernées dans ce commerce particulier. Ces personnes — je n'y référerai plus par la suite — sont évidemment des manufacturiers de maisons mobiles, ceux qui en font le commerce, ceux aussi qui les financent, parce qu'il s'agit de biens mobiliers, ceux qui les achètent et ceux qui installent des parcs. Donc, beaucoup de personnes sont intéressées par ce problème.

Dans la mémoire, nous avons essayé, à partir de la proposition gouvernementale, d'établir ce que serait un système administratif basé sur

cette proposition, c'est-à-dire l'inscription au rôle d'évaluation de maisons mobiles et leur taxation annuelle et même mensuelle puisque l'article 106 prévoit un rajustement. Nous avons essayé de voir l'impact juridique, mais autant que possible pratique de cette loi.

Le système proposé, quant à nous — pour aller au plus vite — pose les problèmes suivants: il s'agit d'abord du rôle qui est fait pour cinq ans. Cela nous semble une technique très lourde en matière de maisons résidentielles. Vous avez des personnes qui peuvent partir tous les mois, tous les deux mois ou vous pouvez avoir, groupées dans un même parc, parfois, 200, 300 et même 400 maisons mobiles. Ce système d'un rôle par fiches, qui serait fait sur cinq ans, pourrait accumuler 300, 400 et peut-être même jusqu'à 1,000 fiches d'évaluation concernant des maisons mobiles parties, parfois depuis trois ou quatre ans ou depuis quelques mois. Tant les évaluateurs de la municipalité que le propriétaire du parc qui serait tenu de payer les taxes sur cette base, quant à nous, ne s'y comprendraient pas.

Le deuxième argument vient directement du manuel d'évaluation. Actuellement, l'association se demande si le manuel prévoit ou prévoira des techniques particulières d'évaluation pour ces maisons mobiles, advenant le cas où elles seraient taxées et évaluées. On pense particulièrement au problème des meubles qui sont vendus avec la maison mobile et qui, jusqu'ici, dans l'histoire de l'évaluation au Québec, ont été inclus dans l'évaluation. Il serait totalement injuste que le propriétaire d'une maison mobile, qui l'a payée $10,000 en incluant pour une valeur de $8,000 de meubles, soit taxé pour son mobilier alors que le propriétaire d'une maison résidentielle ordinaire ne l'est pas actuellement.

Le troisième argument nous semble beaucoup plus pertinent et beaucoup plus difficile aussi. Il s'agit du problème causé par les plaintes qui nécessairement proviendraient du propriétaire — nous référons toujours à un parc autant que possible, à des maisons installées en groupe — du parc des maisons mobiles, qui serait obligé de se plaindre individuellement dans le cas de chacune des maisons mobiles évaluées. Alors, autant de plaintes, autant de causes, quant à nous, que de maisons mobiles sur son territoire.

Je pense que nous donnons, quelque part, l'exemple d'une municipalité qui évaluerait à $1,000 de trop — seulement $1,000 par roulotte — 200 à 250 roulottes. L'intérêt, si évidemment la cause se portait sur l'ensemble, serait de $250,000 d'évaluation en trop, mais l'intérêt individuel pour chacune des maisons mobiles n'est que de l'ordre de $1,000. Cela nous semble une incitation pour les municipalités à, peut-être, exagérer un peu — surtout, quand on connaît un peu l'attitude de plusieurs municipalités face au problème des roulottes — et peut-être chercher ce moyen pour s'en débarrasser, à défaut d'une loi-cadre qui viendrait régler définitivement le problème.

Il reste aussi que, légalement, le propriétaire du parc qui devra se défendre contre ces plaintes d'évaluation n'est pas du tout dans les souliers du propriétaire de la maison mobile. Il n'a aucun pouvoir de visiter la maison mobile. Il n'a pas les informations nécessaires pour défendre sa cause. A toutes fins pratiques, nous croyons qu'il n'a ni l'intérêt, ni les moyens, finalement, de défendre son évaluation et ce, en vertu de l'ensemble des dispositions qui sont prévues dans le bill à cet effet.

M. TESSIER: Me Delisle, me permettriez-vous d'apporter certaines précisions? Peut-être que cela pourrait abréger l'argumentation.

C'est l'intention du gouvernement, d'abord, à l'article 13, de porter de 30 à 90 jours la durée de stationnement, si vous voulez, d'une roulotte sur un fonds. De plus, ce même article, nous suggérons de l'amender en biffant les mots, à la fin de l'article, "au nom du propriétaire du fonds". De la sorte, l'article 13 pourrait se lire comme suit: "Une roulotte placée sur un fonds de terre pour une période supérieure à 90 jours consécutifs est portée au rôle".

L'esprit de ceci, c'est de taxer la roulotte qui sert d'habitation ou de commerce ou de lieu d'affaires, et qui est là pour une période indéfinie. Il existe de très nombreux cas au Québec. Enormément de municipalités ont essayé de taxer ces roulottes. Il y a eu je ne sais pas combien de douzaines de procès qui ont eu lieu. Cela a suscité énormément de difficultés. Vous avez même des municipalités où la majorité des habitations sont des roulottes. Les gens y demeurent depuis deux ans, trois ans et même plus, dans certains cas.

Il ne s'agit pas du tout de taxer la roulotte de camping. C'est pour cela, d'ailleurs, que nous avons trouvé que la période de 30 jours était trop courte et que nous l'avons portée à 90 jours. Je crois qu'à ce moment-là, à 90 jours, nous éliminons tous les estivants, tous ceux qui font du camping avec des roulottes. Ce n'est qu'après 90 jours que cela veut dire que le type a l'intention d'en faire sa résidence, sa principale demeure. Dans certains cas, évidemment, cela peut être six mois, comme il y a des gens qui habitent à la campagne six mois par année, qui habitent des résidences d'été, des résidences de campagne, des chalets. Ceux-là paient des taxes. Je ne vois pas pourquoi ceux qui arrivent au bord d'un lac pour quatre ou cinq mois, au bord d'une plage ou ailleurs, ne paieraient pas comme celui qui s'est construit un chalet au même endroit.

Je vous ai expliqué la situation. Je pense que cela peut peut-être éliminer certaines discussions.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre me permettrait-il de lui poser une question à ce sujet? Vous parlez de prolonger le délai de 30 à

90 jours. Dans le cas des personnes qui travaillent sur des chantiers, par exemple, et qui s'établissent dans une roulotte, le travail en chantier peut durer, par exemple, 90 jours ou moins. Qu'en est-il du cas de ces roulottes?

M. TESSIER: Je crois que la plupart des chantiers sont en dehors des limites des municipalités.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas nécessairement, parce que...

M. TESSIER: Non, non. J'ai dit la plupart.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. Mais j'ai à l'esprit des cas très précis. Des gens peuvent travailler sur un chantier à dix, même à quinze milles d'un chantier, s'établir quand même à proximité d'une ville ou d'un grand village afin de jouir des services qu'on y donne. Alors comment pourrait-on résoudre ce problème?

M. TESSIER: Vous dites plus de 90 jours, n'est-ce pas?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, plus de 90 jours, mais ils peuvent être là...

M. TESSIER: Pour quatre mois, par exemple.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pendant moins de 90 jours.

M. TESSIER: Moins de 90 jours, ils ne sont pas taxables.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils ne seraient pas taxables s'ils sont là moins de 90 jours.

M. TESSIER: Non, non. Sûrement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): La taxe sera mensuelle.

M. TESSIER: Oui, après 90 jours.

M. PAUL: La taxe sera-t-elle rétroactive pour les trois premiers mois d'occupation ou si elle ne deviendra en vigueur que la 91e journée, c'est-à-dire la première journée du quatrième mois?

M. TESSIER: Cette question est présentement à l'étude; il n'y a pas eu de décision encore.

M. PAUL: Je voulais savoir si vous travaillez tout le temps.

M. TESSIER: Nous travaillons pas mal tout le temps là-dessus et pas seulement là-dessus. Je serais porté à croire...

M. GIASSON: L'article 106 répond à cette question.

M. TESSIER: ...que normalement cela devrait être rétroactif. Evidemment, si quelqu'un habite une roulotte au même endroit pendant cinq mois, je crois qu'il devrait payer durant cinq mois.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si un travailleur...

M. GIASSON: L'article 106 l'affirme du moins.

M. TESSIER: L'article 106?

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il a été modifié, "...sont exigibles proportionnellement à la période durant laquelle elle a été placée sur un fonds de terre." C'est que des gens peuvent se déplacer à l'intérieur d'un même territoire dans une municipalité. Alors, il faudrait qu'on prévoie ce genre de migration.

M. TESSIER: A ce moment-là, évidemment, celui qui veut éviter des taxes n'a qu'à devenir migrateur.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais...

M. PAUL: Il va déplacer sa roulotte de quinze pieds.

M. TESSIER: C'est-à-dire que même s'il déplace sa roulotte de quinze pieds, s'il reste sur le même fonds de terrain, je pense bien qu'il sera encore sur le même lot.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais s'il est à quinze pieds du lot du voisin?

M. TESSIER: Il peut y avoir des exceptions.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! Il faut tout prévoir.

M. PAUL: On voit que vous n'avez pas beaucoup d'expérience municipale.

M. TESSIER: J'avoue bien humblement, M. le Président, que je n'ai même aucune expérience en roulotte parce que je n'en possède pas moi-même.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si le ministre avait été maire d'une municipalité, d'un petit village, d'une ville, il saurait ce qui se passe actuellement avec les roulottes, les difficultés qu'ont les autorités municipales à retrouver ces propriétaires de roulottes.

M. TESSIER: Je les connais, ces problèmes, et c'est justement pourquoi nous avons incorpo-

ré dans la loi un article spécial pour les roulottes. C'est un problème dont j'entends parler depuis de très nombreuses années et que je tente de résoudre une fois pour toutes de la meilleure façon possible. Nous allons essayer de trouver la meilleure formule pour résoudre le problème et je compte beaucoup sur votre collaboration pour cela.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.

M. ROY (Lévis): M. le Président, d'abord je remercie le ministre d'avoir pris la décision de reporter le délai de 30 à 90 jours. Le ministre se rappelle que dans les Débats de la Chambre, au mois de février, je lui avais moi-même suggéré de le porter de 30 à 90 jours.

M. PAUL: Vous voulez parler du 30 juin où vous avez donné la réplique au ministre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le 30 juin.

M. PAUL: J'ai eu la courtoisie de vous laisser parler avant moi.

M. ROY (Lévis): Disons que le temps paraît court quand on est occupé et je suis très heureux que le ministre ait pris cette décision.

Maintenant, le ministre peut-il nous expliquer... Dans le cas des terrains qui appartiennent à une corporation ou à une municipalité, il n'y a pas d'erreur possible parce que la municipalité prend $30, $20 ou $40 par mois pour les services donnés. Mais quand ce sera le cas d'un terrain privé qui appartient à un propriétaire qui fait de la location pour les roulottes, est-ce que la municipalité va prendre des mesures, soit par compteurs ou par une charge fixe en dedans de 90 jours pour faire au moins payer les services qui auront été donnés durant les 90 jours si quelqu'un part la 89e journée?

M. TESSIER: Ecoutez, il y en aura certainement quelques-uns qui réussiront à frauder, c'est sûr. Mais la question n'est pas de toucher ceux qui feront 91 jours, 92 jours, nécessairement. L'esprit de cet article, c'est que nous voulons toucher en particulier ceux qui en font une résidence permanente ou quasi permanente. C'est cela. Alors, l'évaluateur municipal, dans une petite municipalité ou une moyenne municipalité n'aura pas trop de difficulté. D'abord, il y a des règlements de zonage; il y a des parcs de roulottes d'établis en vertu des plans d'urbanisme. Les roulottes ne peuvent donc pas aller se placer n'importe où dans une municipalité. Tout de suite, cela rend plus facile la tâche de l'évaluateur municipal qui ira faire son tour de temps en temps et qui verra telle roulotte qui sera là depuis trois mois et demi.

A partir de ce moment-là, elle deviendra taxable et ainsi de suite. Je comprends que ça va peut-être créer du travail additionnel à l'évaluateur municipal mais, d'un autre côté, c'est à la municipalité de voir à son affaire. Si elle ne s'en occupe pas, c'est elle qui perdra un revenu. Cet article a été mis dans la loi à la demande unanime de toutes les municipalités du Québec, tant de l'Union des municipalités que de l'Union des conseils de comtés.

M. ROY (Lévis): C'est très bien pour ça, seulement ma question est celle-ci. Dans les 90 jours pendant lesquels ils ne seront pas taxés ou ne seront pas évalués, est-ce que la ville aura droit, même s'ils sont sur un terrain privé, de charger une taxe d'eau pour les trois mois qui vont rester?

M. TESSIER: Là on est complètement en dehors du bill 48. On parle d'un règlement municipal de taxation; chaque municipalité a ses règlements qu'elle a le droit de faire en vertu des pouvoirs qui lui sont accordés par la Loi des cités et villes et le code municipal. Elle peut avoir des règlements pour la taxe d'eau. Alors, c'est complètement en dehors de l'évaluation.

M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.

M. PERREAULT: M. le Président, le ministre a mentionné tout à l'heure que la roulotte ne serait plus portée au rôle au nom du propriétaire du bien-fonds mais au nom du propriétaire de la roulotte. Alors ne serait-il pas à propos, maintenant qu'on a accepté ça, que la roulotte — qu'elle soit n'importe où dans n'importe quel endroit de la municipalité, quand même elle change de place — dès qu'elle reste dans les limites de la municipalité soit assujettie à l'évaluation, qu'elle aille sur n'importe quel terrain, qu'elle soit déplacée dans n'importe quel parc?

M. TESSIER: Bien écoutez, il va falloir, M. le Président, examiner ce problème. Je suis bien heureux que vous l'ayez soulevé et je vous en remercie. Il est évident que, dans une municipalité, il peut y avoir deux ou trois endroits, que l'on nomme communément des parcs de roulottes. Quelqu'un qui à tous les trois mois ferait le tour de ces parcs de roulottes, s'il doit être taxé, en principe je serais porté à croire que oui, si c'est à l'intérieur des limites d'une même municipalité. Autrement, ça serait encourager à contourner le loi et à éviter de payer une taxe qui normalement devrait revenir à la municipalité.

Alors je suis bien heureux que le député de l'Assomption ait soulevé cette question-là. Nous allons sûrement en tenir compte. Mais je soulignerai tout de même qu'on me dit — remarquez bien que je n'ai pas une expérience personnelle de la question — que de changer d'endroit est assez dispendieux, aller d'un endroit à l'autre.

M. PERREAULT: Dans la région de Mont-

réal, c'est très commun. Des ouvriers travaillant à Montréal demeurent dans des roulottes et changent souvent de place.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le problème que j'ai évoqué tout à l'heure avant que le député de l'Assomption ne le fasse; est-ce que ça comprend aussi des roulottes motorisées?

M. TESSIER:Non.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On ne pourra le faire.

M. TESSIER: Dans la définition de la roulotte, c'est une roulotte-remorque; les roulottes motorisées sont exclues.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sont exclues. Alors on va tout simplement s'acheter des roulottes motorisées.

M. TESSIER: Oui, mais ça coûte pas mal plus cher.

M. LE PRESIDENT: Avant de s'acheter une roulotte motorisée, est-ce qu'on peut demander à Me Delisle de continuer son exposé?

M. TESSIER : On va commencer par essayer de régler ce problème-là, c'est le problème qui nous a été posé par les municipalités.

M. PAUL: Je n'aime pas ça quand vous dites: On va essayer de régler; dites qu'on va régler ce problème-là et après...

M. TESSIER: Non, non, moi, je... M. PAUL: On va collaborer.

M. TESSIER: Je ne suis pas au point de me vanter comme serait porté à le faire le député de Maskinongé.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. TESSIER : Je dis que nous allons essayer de régler le problème et nous allons certainement le régler en très grande partie. Nous verrons par la suite. Si on prend des moyens pour contourner la loi et la taxation, il y aura toujours lieu d'apporter des amendements.

Ce seront les municipalités, elles-mêmes je pense bien, qui nous feront des représentations.

M. LE PRESIDENT: Merci, messieurs de la commission. Me Delisle, si vous voulez bien continuer.

M. DELISLE: Je tiens d'abord à remercier M. le ministre pour les deux points qu'ils nous a apportés, c'est-à-dire la taxation seulement au bout de 90 jours, ce qui règle le problème de l'Association des terrains de camping qui vous en remercie et, en ce qui concerne les propriétaires de parcs de maisons mobiles, ils y trouvent aussi leur acquis ou que les roulottes ne seront plus portées au nom du propriétaire du fonds.

Evidemment, cela enlève au moins les trois quarts de la teneur du mémoire que nous avons présenté. Il demeure, cependant, que le principe même qui était à la base du mémoire portait sur l'évaluation et non pas sur le fait qu'on en tire des revenus ou qu'on les taxe. Après avoir longuement étudié la question, spécialement les contestations dans la région de Montréal où des municipalités ont tenté d'évaluer et ont eu des problèmes pratiques, quotidiens, l'expérience de l'association sur cette question est que l'évaluation est une technique impossible.

Maintenant que vous avez enlevé le fait qu'elle soit portée au nom du propriétaire du fonds, nous n'y avons plus d'intérêt en ce qui concerne les propriétaires de parcs. Nous croyons que les municipalités et les propriétaires de maisons mobiles n'y trouveront pas plus leur compte parce que le système d'évaluation n'est pas fait pour des maisons qui sont aussi mobiles que celles que l'on connaît, des maisons — on l'a souligné; les membres de la commission l'ont souligné eux-mêmes — qui peuvent s'en aller. On comprendra que l'évaluateur peut bien passer au bon moment dans la municipalité, mais la taxe sera peut-être imposée à la fin de l'année et, déjà, la maison mobile sera partie ou pourra partir et on n'aura aucune garantie de paiement.

Après une analyse sommaire des lois des provinces de l'Ontario, de 1'Alberta et spécialement de plusieurs Etats américains, on s'aperçoit que les provinces et les Etats américains qui ont connu de nombreux problèmes avec les maisons mobiles, qui en ont eu beaucoup, un peu comme le Québec industriel actuel, la Côte-Nord en particulier, ont plutôt adopté la technique d'une tarification ou d'un permis mensuel payable d'avance ou en donnant un dépôt, ce qui simplifie énormément la tâche de la municipalité et celle des propriétaires de maisons mobiles aussi. Un tel tarif pourrait être provincial; il peut être régional, même par catégorie. Il faut prévoir les problèmes de construction, par exemple dans des régions minières ou des problèmes particuliers de logement dans une région donnée. On pense, par exemple, à Saint-Jean-Vianney où, à un moment donné, un quartier complet disparaît. Si on avait utilisé la technique des maisons mobiles pour loger les gens dans l'intervalle, on aurait pu avoir une tarification particulière.

Quelle que soit la méthode, il demeure que changer le système lui-même nous semblerait de beaucoup favorable tant aux municipalités qu'aux propriétaires individuels de maisons mobiles qui sauraient alors à quoi s'en tenir, quel serait leur taux mensuel ou trimestriel ou semestriel ou annuel. La municipalité, de son côté, aurait beaucoup plus de facilité de perce-

voir ces tarifs ou ces paiements de permis. Elle n'aurait pas à tenir un rôle qui est une technique lourde, qui est une technique compliquée avec ses propres appels, avec quand même une certaine lourdeur administrative puisqu'on prévoit un projet de loi d'au moins 100 articles sur cette question. Alors, on n'aurait pas besoin de passer par un système aussi lourd pour des évaluations, si on enlève les meubles meublants, comme on les appelle, de $4,000 à $5,000 pour des roulottes neuves.

Les municipalités elles-mêmes devraient essayer de s'organiser pour en arriver à tirer des revenus qui seraient en proportion de ce qu'elles évalueraient. Les propriétaires de maisons mobiles, de leur côté, devraient s'organiser avec les évaluateurs, avec le bureau de révision. Nous croyons — même avec les amendements que vous entendez y apporter — que la technique d'un permis mensuel ou d'une tarification serait beaucoup plus utile et permettrait aux municipalités d'en tirer des revenus beaucoup plus sérieux et beaucoup plus probants. Ainsi, lorsque la municipalité établirait dans son budget annuel que le tarif, pour cette année-là, est de, disons, $10 par mois, elle saurait d'avance que, pour chaque mois d'occupation de ces maisons mobiles, elle pourrait retirer tant de revenus. Elle n'aurait pas, si elle impose, par exemple, une taxe à l'évaluation, à se demander si les gens déménageront ou s'ils resteront dans la municipalité.

M. TESSIER: Excusez-moi, mais, pour abréger un peu, je dois vous dire que nous allons certainement étudier cette question qui est une excellente suggestion. Je ne vous dis pas qu'on la mettra nécessairement en application, mais on va certainement l'étudier en profondeur. Il faudrait tenir compte également, jusqu'à un certain point, tout de même, de la valeur des roulottes. Vous avez des roulottes qui valent $1,500 et vous en avez d'autres qui valent $15,000. Il faudrait, tout de même, que ces taux ou ces permis pour les roulottes soient gradués. Il faut, tout de même, se baser sur la valeur marchande.

Je ne crois pas qu'il y ait autant de difficultés que celles que vous mentionnez. En somme, il y aura un répertoire des taux unitaires avec des critères et des bases d'évaluation. Il y a un certain nombre de manufacturiers de roulottes; en connaissant le nom du manufacturier et le modèle, on a exactement le prix de vente, on a l'année de fabrication. Par conséquent, l'évaluateur doit tenir compte, comme dans toute autre maison ou bâtiment, de la dépréciation de la roulotte.

De toute façon, je vous dis que nous prendrons en très sérieuse considération votre suggestion. Nous allons l'étudier. Nous allons voir lequel des deux serait le plus pratique.

M. DELISLE: Sur ce point particulier, est-ce qu'on peut connaître au moins l'intention de ceux qui préparent le manuel d'évaluation quant aux meubles meublants à l'intérieur de la roulotte?

M. TESSIER: Il n'est pas question de les taxer.

M. DELISLE: Ne sera taxé que le meuble lui-même, c'est-à-dire sa fabrication, les murs.

M. TESSIER: Absolument.

M. DELISLE: Un autre point est soulevé dans le mémoire, et c'est le dernier que j'aimerais exposer. Il concerne les ventes conditionnelles de ces roulottes, problème qui ne sera pas changé parce que les propriétaires du fonds ne paieront pas la taxe. On a dit, au début du mémoire, que c'était un des seuls biens meubles taxés au Québec et on en fait un immeuble à toutes fins utiles. Et cela a des répercussions très importantes sur tout le système de financement de ces maisons mobiles.

Actuellement les ventes de maisons mobiles sont faites comme toutes les ventes de meubles avec un contrat de vente conditionnelle et le propriétaire en conserve la propriété. On peut se demander ce qu'il adviendrait des ventes pour taxes de ces biens immobiliers. Je peux vous énoncer l'appréhension des personnes qui en font le commerce actuellement, face à une modification aussi importante de leur rapport civil avec leurs acheteurs éventuels ou avec les compagnies de finance ou les banques qui essaient de faire développer ce commerce. Il s'agit d'un commerce qui est jeune au Québec et la Société centrale d'hypothèques et de logement étudie même actuellement des possibilités de financer elle aussi ce nouveau type d'habitations.

M. TESSIER: C'est certainement une question qu'il va falloir éclaircir dans le texte. Je vous remercie d'avoir soulevé ce point-là, parce que je crois que c'est l'acheteur qui deviendra éventuellement propriétaire qui doit être taxé et non pas le vendeur. Vous soulevez justement la question que le titre de propriété ne peut venir qu'au bout de deux ans.

M. DELISLE: Trois, quatre ou même dix ans.

M. TESSIER : Même trois ou quatre ans.

M. DELISLE: Il y a des ventes qui sont faites sur une base de dix ans. Evidemment ces ventes ne sont pas enregistrées, on ne peut donc pas comparer avec un créancier hypothécaire normal.

M. TESSIER: Je prends bonne note de votre suggestion. Je crois qu'il serait tout à fait normal que ce soit l'occupant de la roulotte, et non pas le vendeur qui en est demeuré proprié-

taire et qui en demeurera propriétaire jusqu'au dernier paiement d'une vente conditionnelle.

M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, Me Delisle. Maintenant nous passons à l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française et je crois que c'est Me Charles Stein qui est son porte parole.

Je me permets de rappeler aux porte-parole des différents organismes d'essayer de résumer leur mémoire, autant que possible.

Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française

M. STEIN: M. le Président, comme vous venez de le dire, mon nom est Charles Stein, je suis avocat et je représente l'ACRTF, qui est l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française Inc. Je suis accompagné de trois administrateurs de cette association: MM. Jean Pouliot, France Fortin et Aurèle Pelletier, et nous avons également ici le vice-président administratif de l'Association canadienne des radiodiffuseurs, M. Allard.

Vous avez en main notre mémoire que je n'ai pas l'intention de vous lire, ainsi qu'une annexe qui est une étude économique. Le mémoire porte le numéro 15 et l'annexe, le numéro 15 a). Cette étude sur les aspects financiers ou économiques que j'ai appelée l'annexe, numéro 15 a), a été préparée par l'étude Price Waterhouse et associés. Si vous avez des questions à poser sur cette annexe ou sur d'autres aspects techniques, financiers ou autres, ceux que j'ai nommés, l'un ou l'autre d'entre eux, selon les questions, pourront répondre et vous fournir les précisions nécessaires.

Cet organisme, l'ACRTF, a une charte québécoise et représente les radiodiffuseurs et les télé diffuseurs privés francophones du Québec et des autres provinces. Comme nous le mentionnons — il y a une erreur quand nous disons 68 — il y a 70 postes privés de radio au Québec. Soixante-dix et non 68. C'est à la page 1, deuxième alinéa. Il y a sept postes anglophones et treize postes privés de télévision dont deux anglophones.

Nous sommes d'accord sur ce que nous croyons être les objectifs primordiaux du projet de loi no 48 que vous étudiez et, plus particulièrement, sur l'uniformisation des règles et des normes d'évalutation et, en général, sur toute cette législation et cette réglementation au sujet des taxes foncières, municipales et scolaires. Nous sommes d'accord aussi, sur ce qui semble être le but de certaines dispositions comme celles des articles 14 et 15 par exemple, de garder au Québec et d'y attirer aussi le plus grand nombre d'industries possible.

Nous sommes d'avis que la taxe ou l'impôt sur les revenus bruts que le projet de loi propose d'imposer à l'industrie de la radiodiffusion — et ici, j'englobe dans radiodiffusion la radio et la télévision — s'opposerait à l'objectif dont je viens de parler. Vu les conjonctures économique et sociale actuelles, l'importance grandissante des moyens de communication, de la radiodiffusion, justement, alors qu'on soustrairait — on vient d'en parler assez longuement — à la taxe foncière l'équipement industriel des autres industries, on assujettirait cette industrie de la radiodiffusion, radio et télévision, à un impôt spécial, à un nouvel impôt sur les revenus bruts destinés, d'après les termes du projet de loi, à tenir lieu de la taxe foncière en question.

Il faut souligner tout de suite, alors que, de façon générale, cet équipement industriel des radiodiffuseurs n'est pas taxable en ce moment, au Québec. Il peut y avoir quelques exceptions. Il ne l'est pas non plus ailleurs qu'au Québec. Je vous signale aussi quelques difficultés d'interprétation auxquelles donneraient lieu, selon moi, les articles 22, 104 et 105 qui prévoient cet impôt spécial et nouveau sur les revenus bruts de l'industrie de la radiodiffusion. Comme vous le savez, l'article 22 prévoit l'inscription au rôle des terrains et bâtiments des entreprises de télécommunication qui ne tombent pas sous le coup de l'article 21.

Il s'agit justement des entreprises de télécommunication que j'ai appelées les entreprises de radiodiffusion. Alors, leurs terrains et bâtiments seraient portés au rôle.

Et l'article 22 ajoute: "Les autres immeubles d'une telle entreprise ne sont pas portés au rôle, sous réserve, quant à leur imposition, de l'article 104 ou 105." Incidemment, ce devrait être sous réserve des articles 104 et 105 et non pas "ou" 105 parce qu'il faut absolument avoir recours à l'article 104. L'article 105 n'est qu'une disposition ancillaire et de procédure.

L'article 104 ne prévoit aucunement la taxation des autres immeubles dont on vient de parler à l'article 22, ni d'aucun immeuble, d'ailleurs. Il prévoit seulement la taxation des revenus bruts, mais il dit que cet impôt sur les revenus bruts est destiné à "tenir lieu des taxes municipales et scolaires sur l'équipement et le réseau d'une telle entreprise." Nous ne savons trop ce que désignent ces termes "équipement et réseau". Pour ce qui est du réseau, je pense bien qu'il s'agit d'un réseau physique, de fils, de supports, de matériel quelconque. Mais l'industrie de la radiodiffusion n'utilise qu'exceptionnellement des lignes ou réseaux téléphoniques et à ce moment-là elle les loue, par exemple, à une compagnie de téléphone qui, elle, est taxée sur ces lignes.

Il faut se demander aussi de quelle façon on appliquerait cette clause de l'article 104 "pour tenir lieu des taxes sur l'équipement et le réseau". Est-ce qu'il faudrait tenir compte des taxes auxquelles l'équipement et le réseau serait assujettis en vertu de cette nouvelle loi si on ne les exemptait pas de la taxe foncière ou bien est-ce qu'il faut tenir compte de la taxe foncière actuelle, en vertu de la législation actuelle? Justement, je viens de faire remarquer qu'il n'y

en a à peu près pas en vertu de la loi actuelle. Il n'y a pas d'impôt en général sur ces biens-là.

Vous aurez remarqué aussi que l'article 104 ne parle pas d'immeubles, comme l'article 22. Et puis, à l'article 22, mettant de côté la définition qu'on a donnée au début, des "immeubles par nature", on ne parle que de bâtiments et terrains: "les terrains, les bâtiments, etc., et ensuite les autres immeubles. On ne parle pas d'améliorations non plus, dont parle la définition "d'immeuble par nature" dans l'article 1. Inutile de vous souligner que la clarté laisse à désirer par suite de ce manque d'uniformité de la terminologie. Et le rôle des définitions, c'est justement d'assurer cette uniformité. On devrait donc utiliser les termes définis partout où c'est possible.

Incidemment, si on veut éliminer le terme "améliorations", qui n'est peut-être pas indispensable, c'est dans la définition de l'article 1 b) qu'on devrait le faire. Je le remplacerais plutôt par "aménagements" et, en même temps, je remplacerais "bâtiments" par "constructions" qui est plus général. Je nommerais le sol en premier lieu, ce qui est plus logique et conforme â la nature des choses et, enfin, je préciserais qu'il s'agit d'aménagements et de constructions formant corps avec le terrain, avec le sol.

Cela donnerait comme définition: Immeuble par nature, le sol, les aménagements et les constructions qui font corps avec lui.

J'ajouterai seulement qu'à mon humble avis, il serait sage de consulter l'Office de révision du code civil au sujet des définitions et dispositions relatives aux distinctions entre meubles et immeubles et entre immeubles par nature, immeuble par destination et immeubles par l'objet auquel il s'attache. Ici, j'utilise la terminologie de l'article 381 du code civil: "les immeubles par l'objet auquel ils s'attachent."

Cette catégorie d'immeubles, qui comprend, entre autres, toujours selon l'article 381 du code, le droit de coupe de bois perpétuel ou pour un temps limité n'est pas mentionné comme tel au projet, ni défini à son article 1 mais parait impliquer, au paragraphe b) de l'article 16 les concessions forestières et, peut-être, au paragraphe b) de l'article 15, les réserves de matières première dans les tourbières, les carrières, les bancs de sable et de gravier. On a parlé aujourd'hui du bois debout. On n'a peut-être pas parlé expressément de droit de coupe mais il faut songer à tout cela.

Autre point que je vous signale, c'est que le dernier alinéa de l'article 104 prévoit une répartition de la taxe sur les revenus bruts des radiodiffuseurs entre toutes les corporations municipales et scolaires, suivant une formule qu'on établira par règlement du gouvernement, du conseil des ministres. Est-ce qu'on pourra trouver une formule qui conviendra, une formule équitable? Incidemment, à la page 5 de notre mémoire, le mot "formalité" devrait se lire "formule".

Les corporations municipales et scolaires sont rarement la source d'une part appréciable des revenus qu'on veut taxer. Encore une fois, ces corporations, généralement, ne taxent pas les équipements et les réseaux dont la présence chez elles, comme objets d'imposition, serait censée justifier la nouvelle taxe sur les revenus bruts et sa répartition.

Quant aux conséquences de cet impôt projeté, ce nouvel impôt sur les revenus bruts, sur les finances de l'industrie, vous l'avez au mémoire et je n'ai pas besoin, je pense, d'insister. Encore une fois, nous avons des chiffres, dans l'annexe, qui pourront au besoin vous être expliqués.

Il y a le fait que le taux de la taxe sera établi annuellement par le gouvernement, — je ne parle pas ni du gouvernement actuel, ni d'un gouvernement que nous pourrions avoir prochainement, mais enfin, le principe serait là — un jour, un gouvernement pourrait s'en servir à mauvais escient.

M. PAUL: On prend note de votre admission!

M. STEIN: J'ai bien dit que je ne parle pas du gouvernement actuel, ni de l'ancien d'ailleurs, ni de celui qui l'a précédé.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Du bon monde, du bon monde!

M. STEIN: Il y aura en plus le fait de l'incertitude résultant de cette fixation annuelle. On ne pourrait pas planifier à long terme.

Il reste enfin, M. le Président, l'aspect constitutionnel. Là encore, je ne veux pas vous ennuyer, vous lire cela. J'ai cité une décision — j'en ai cité un assez long extrait — aux pages 8 à 10 du mémoire. C'est discutable. Mais je prétends, m'appuyant sur cette décision du Conseil privé, qu'il s'agit là d'un impôt indirect, donc un impôt que la province n'a pas le pouvoir d'instituer.

Pour toutes ces raisons, nous recommandons la suppression des articles 22, 104 et 105 du projet, et l'application à l'industrie de la radiodiffusion, c'est-à-dire à la radio et à la télévision, c'est-à-dire les entreprises qui ne sont pas visées à l'article 21, de l'exemption prévue à l'article 14. Cela peut se faire de bien des manières mais nous suggérons ici l'addition de quelques mots, un paragraphe e) par exemple, les mots: par une entreprise de télécommunication qui n'est pas visée à l'article 21.

C'est tout ce que j'ai à dire, M. le Président, pour le moment.

M. TESSIER: M. le Président, je voudrais remercier Me Stein de son brillant exposé et lui dire que les articles 21, 22, 23 et 24 auront une nouvelle rédaction. Un de ces articles, probablement l'article 21, s'appliquera exclusivement au réseau d'utilités publiques. Par contre, l'article

22 s'occupera des postes de radio et de télévision. Quant aux articles 104 et 105, il y aura également une nouvelle rédaction. Mais, nonobstant votre référence à la jurisprudence et au jugement de la cour Suprême, confirmé par le Conseil privé, je trouve tout de même assez curieux que Bell Canada soit taxée, de cette manière-là depuis, je crois, 1907 en Ontario et continue à l'être. Après consultations, remarquez bien — d'ailleurs, nous avons entendu, à la dernière séance, je crois, les représentants de Bell Canada et de Québec Téléphone — nous en sommes arrivés à cette formule-là qui fonctionne très bien en Ontario depuis de très nombreuses années. Pour Québec Téléphone, évidemment, c'est nouveau. On nous a demandé un délai auquel le gouvernement est prêt à consentir afin qu'il y ait une période de transition et qu'elle puisse s'équiper en conséquence. La compagnie Bell, pour sa part, nous a manifesté qu'elle était très heureuse de ce système en Ontario qu'elle trouve des plus justes. Par conséquent, elle n'a aucune objection à ce que ce système-là s'applique également au Québec. Ce qui me surprend, c'est que ça n'ait jamais été attaqué en Ontario depuis 1907.

Je voulais simplement souligner ce point-là. Je ne veux pas m'engager dans un débat juridique, pas davantage, du moins.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remarque, M. le Président, que le ministre a été extrêmement prudent et qu'il a utilisé des procédés dilatoires pour éviter de poser réellement le problème qu'avait évoqué Me Stein. De l'avis du ministre des Affaires municipales, la radio et la télévision sont-elles des entreprises d'utilité publique?

M. TESSIER: Pas dans le sens que nous l'entendons, que nous le définissons dans la loi.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans quel sens l'entendez-vous?

M. TESSIER: Dans la loi, nous considérons comme utilités publiques l'électricité, le téléphone, le gaz, les télécommunications.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les télécommunications, téléphone, télégraphe.

M. TESSIER: Oui, téléphone, télégraphe.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tout ce qui s'appelle télécommunications.

Maintenant, M. le Président, à partir des observations que vient de faire Me Stein, j'aimerais attirer l'attention du ministre sur deux aspects du problème que pose le mémoire de l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française. Il s'agit d'abord d'une industrie, appelons-la ainsi, et l'on sait que le gouvernement s'intéresse à la promotion industrielle afin de créer des emplois, tout au moins afin d'occuper les chômeurs.

Deuxièmement, on peut placer le problème aussi dans l'optique de l'éducation, un service éducatif. Cette Association de la radio et de la télévision de langue française qui est devant nous, ne fait-elle pas partie d'un organisme dont les buts sont à caractère d'abord éducatif?

D'accord, ils diffusent des nouvelles, mais la grande partie de leur programmation consiste en des émissions d'information au sens général du terme et au sens éducatif du terme, des émissions spécifiquement éducatives et des émissions artistiques.

Alors, en raison de cette vocation particulière de ces sociétés au nom desquelles a parlé M. Stein, est-ce que le ministre peut faire une distinction entre les compagnies d'utilité publique dont il a parlé tout à l'heure et ces sociétés?

M. TESSIER: Assurément, nous faisons une distinction. Les compagnies d'utilité publique que nous avons mentionnées tout à l'heure et les entreprises de radiodiffusion et de télévision sont l'objet de dispositions différentes. Nous vous soumettrons prochainement les nouveaux textes que nous étudions présentement et auxquels nous mettons la dernière main.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, le ministre voudrait-il répondre, s'il peut le faire, à mon autre question, puisque c'était un diptyque? Est-ce que l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française ne représente pas une réalité qui est de caractère éducatif et culturel et à ce titre, ne peut-elle jouir des exemptions que le ministre a volontairement consenties ce matin aux musées et aux centres d'art de même qu'aux salles communautaires. ..

M. TESSIER: Non, j'admets...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et aux propriétaires de cinéma?

M. TESSIER: Non, non, on n'a rien consenti aux propriétaires de cinéma.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! la machinerie est présumée exclue et non portée au rôle.

M. TESSIER: Ecoutez, bien oui, comme dans toute autre industrie. Là, évidemment, le cinéma n'aura pas un traitement privilégié. L'industrie du cinéma ne sera pas taxée sur ses appareils cinématographiques et autre équipement, comme toute autre industrie. Elle sera tout simplement sur le même pied que les autres. C'est ce que j'ai dit. Il n'y a pas d'exception, mais elle va bénéficier de ce dégrèvement de taxes en ce sens que cet équipement ne sera pas porté au rôle.

En ce qui concerne les postes de radio et de télévision, je suis parfaitement d'accord avec mon collègue que ces entreprises jouent un rôle

artistique et éducationnel que nous devons considérer, mais, par contre, contrairement aux musées, ce ne sont pas des entreprises sans but lucratif. Les musées sont des entreprises sans but lucratif alors que dans tous les postes de radio et de télévision, les propriétaires sont là pour faire de l'argent, et en retirer des profits et des dividendes.

C'est la distinction essentielle qu'il faut faire au départ.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. le ministre, là vous avez ouvert une porte et c'était celle que je voulais que vous ouvriez. Prenez, par exemple, le cas de Radio-Canada, une entreprise d'Etat, une société d'Etat...

M. TESSIER: Elle sera taxée...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... que vous et moi payons. Ah, Radio-Canada sera taxée!

M. TESSIER: Assurément. C'est une corporation de la couronne, ce n'est pas le gouvernement fédéral.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. Radio-Canada a sur l'ensemble du territoire canadien et québécois des privilèges énormes. Elle se finance à nos frais. Parallèlement à cela s'est développé un réseau de radiodiffuseurs et de télédiffuseurs de langue française — de langue anglaise également — qui donne aux citoyens du Québec un choix dans le domaine des émissions d'information, d'éducation, de culture, etc.

Etant donné la position concurrentielle difficile dans laquelle se trouve l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française par rapport aux entreprises financées par l'Etat, est-ce que les sociétés membres de cette association ne pourraient pas recevoir du gouvernement un traitement que j'appelerai de faveur à défaut d'un autre terme? Est-ce que le gouvernement ne pourrait pas avoir une considération spéciale pour ces entreprises qui ont été montées de toutes pièces, qui, d'accord, ont un certain but lucratif, mais qui, si elles n'existaient pas, devraient être remplacées, enfin devraient être créées par le gouvernement lui-même afin que le public ait un choix dans l'ensemble de la programmation en ce qui concerne l'information, l'éducation, la culture, etc.?

M. TESSIER: Je ne veux pas, M. le Président, engager le gouvernement en déclarant que ces postes de radio et de télévision doivent être encouragés de quelque manière. S'ils doivent l'être, ce n'est sûrement pas par les municipalités ou du moins ça ne devrait pas être les municipalités, mais comme justement l'a souligné mon collègue, le gouvernement, par l'entremise peut-être du ministre des Affaires culturelles, ou peut-être du ministre des Finances ou du ministre du Revenu, avec des dégrèvements d'impôts... A tout événement, c'est une question qui pourra faire l'objet d'études, si le gouvernement en vient à la conclusion que cette entreprise privée de radio et de télévision doit être encouragée de quelque manière.

Mais nous sommes présentement — et c'est ce qu'il ne faut pas perdre de vue — à étudier un projet de loi de taxation foncière municipale. Je ne vois pas pourquoi ce seraient les municipalités que nous forcerions, par un texte de loi, à donner un bénéfice à ces entreprises de radio et de télévision. Si le gouvernement veut le faire, d'accord. Encore là, je ne veux pas engager le gouvernement dans ce domaine. Moi, en tant que ministre des Affaires municipales, je suis en train d'étudier avec vous une loi de l'impôt foncier municipal.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voudrais, M. Stein, vous rassurer; nous avons très bien compris l'objectif de votre mémoire. Le ministre le comprend moins, parce que je crois qu'il n'a pas saisi exactement la dimension du travail qu'accomplit l'Association canadienne de la radio et de la télévision de langue française. Toutefois, le ministre nous dit: D'accord, nous étudions le projet de loi 48, qui porte sur l'évaluation foncière, l'évaluation municipale. Il n'est pas dans mon intention non plus de demander aux municipalités de faire les frais de certaines exemptions que consentirait le gouvernement. Vous aurez noté avec nous que le gouvernement a exprimé, non pas l'intention formelle, mais a laissé entrevoir que si vos sociétés se trouvaient en difficulté par suite des exigences que vous imposera la loi 48, si le ministre ne consent pas à l'amender, nous travaillerons afin qu'elle soit amendée dans le sens que vous avez indiqué, parce que je considère ces sociétés que vous représentez comme des sociétés à caractère très particulier. Le ministre, sans engager le gouvernement, vous a laissé entendre que vous pourriez probablement tirer sur le gouvernement pour vous financer au cas où vous vous trouveriez dans des difficultés.

M. TESSIER: Je n'ai rien laissé entendre du tout, M. le Président.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre...

M. TESSIER: Je ne voudrais pas que vous m'interprétiez comme ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre s'est déjà commis dans le cas...

M. TESSIER: J'ai été, il me semble, très clair. Lorsque vous avez déclaré tout à l'heure que je n'avais pas compris le mémoire, je pense que c'est vous qui ne me comprenez pas, malgré que je m'exprime assez clairement. Je vous ai dit positivement qu'il ne pouvait pas être

question que le gouvernement soit engagé de quelque manière que ce soit, mais que le gouvernement peut toujours étudier la possibilité de venir en aide à un organisme culturel ou éducatif quelconque. Pas plus loin que ça, sans prendre d'engagement.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Plaçons le problème dans l'optique simplement de l'industrie, de l'économie, de la promotion de l'économie du Québec. Le 9 septembre 1971, à cette même commission, vous nous avez déclaré que, dans le cas des entreprises de téléphone, de télécommunication, de la compagnie de gaz métropolitain, etc., à la page B-4001: "Si le gouvernement suivant les circonstances juge à propos d'accorder les exemptions d'impôt ou autre chose, évidemment ce sera au ministre des Finances ou au lieutenant-gouverneur en conseil à prendre ces décisions".

M. TESSIER: C'est ça.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une admission, nous en avons pris note, parce que je vous avais posé alors les mêmes questions que celles que je vous ai posées.

M. TESSIER: Il n'y a aucune admission.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous venez de nous dire qu'ils pourront avoir recours au ministère des Affaires culturelles.

M. TESSIER: J'ai dit que si cette question-là se soulevait, ce n'était même pas de mon ressort d'en discuter.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais les ressorts du ministre des Affaires municipales sont imbriqués dans les ressorts des autres ministres, j'imagine, si on veut former un cabinet qui marche

M. TESSIER: Mais ça marche, ça marche bien.

M. PAUL: Vous allez toujours admettre que c'est une suggestion pour le moins...

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pertinente.

M. PAUL: ... pertinente et invitante pour les membres de l'association.

M. TESSIER: C'est exact.

M. PAUL: Si vous êtes convaincu qu'aucun ministère ne se portera au secours de l'association, pourquoi aujourd'hui parler des Affaires culturelles...

M. TESSIER : Je n'ai jamais dit ça.

M. PAUL: ... la semaine dernière vous avez parlé du ministère des Finances, le 9 septembre vous avez parlé du lieutenant-gouverneur en conseil?

M. TESSIER : Je suis absolument logique dans mes propos. Je viens de vous répéter il y a trois minutes" exactement ce que je disais le 9 septembre.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, nous tenons pour acquis...

M. TESSIER: Et le gouvernement est prêt en tout temps à examiner toutes les représentations qui sont faites.

Je crois que, s'il y a un gouvernement qui dialogue avec les organismes et la population, c'est bien le gouvernement actuel.

M. PAUL: Vous êtes allé à la bonne école.

M. TESSIER: Je suis allé à l'école du Parti libéral.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il n'est pas question de juger le gouvernement actuel, il s'agit de considérer la situation financière des sociétés que représente Me Stein. Il a fait des propositions, il a suggéré qu'on amende le projet de loi dans tel ou tel sens. Pour ma part, je crois que, sous réserve d'un examen plus approfondi, les propositions de Me Stein sont non seulement valables, mais fondées. Nous aurons, lors de l'étude à l'Assemblée nationale, en comité plénier, l'occasion de reprendre ce débat en tenant toujours compte de l'engagement implicite qu'a pris le ministre d'aider ces sociétés.

M. TESSIER: Je n'ai pris aucun engagement de quelque nature que ce soit, pas d'aider... sauf que j'ai dit que le gouvernement était toujours prêt à dialoguer et à discuter avec les organismes en question.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Aux fins de les aider.

M. TESSIER: Si c'est possible.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dont acte.

M. BOIS: J'aimerais poser une question à M. Stein. A la page 7 de votre mémoire, à la fin du premier paragraphe de la page précédente, quand vous dites que la taxe projetée porterait sur le revenu brut, non pas sur le revenu net, auriez-vous l'obligeance d'expliquer la différence que vous voyez par exemple entre les deux, entre la façon de taxer le revenu brut plutôt que le revenu net?

M. STEIN: Je ne sais pas si je peux vous rendre ça plus clair, mais il me semble que le revenu brut, ça se passe d'explication. Avant

toute déduction pour frais quelconques, on taxera le taux qu'on fixera, quel que soit le pourcentage, qui portera sur les recettes, par opposition au profit, au revenu net, c'est-à-dire le revenu brut, moins certains dégrèvements pour dépenses ou autre chose.

M. TESSIER: Me Stein, en terminant, je voudrais vous dire que nous tiendrons sûrement compte de plusieurs de vos recommandations dans les nouvelles rédactions que nous ferons des articles 21, 22, 23 et 24 et des articles 104 et 105 qui vous concernent plus particulièrement.

M. BOIS: Excusez-moi, M. le Président, j'avais une autre question.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'imagine que, dans cette nouvelle rédaction, il ne s'agira pas simplement de littérature...

M. TESSIER: Je l'espère bien.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais que l'on va tenir compte du fond de la question.

M. TESSIER: Je n'ai jamais été ministre des Affaires culturelles.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela paraît.

M. TESSIER: Alors, il n'est pas question de faire de la littérature, de la phraséologie et de la poésie, mais d'avoir un texte pratique, clair et légal.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qui aide, comme vous l'avez dit tout à l'heure, les sociétés en question.

M. LE PRESIDENT: Me Stein, je vous remercie.

M. BOIS: M. le Président, j'aurais une autre question.

M. TESSIER: Cela va certainement les aider dans une certaine mesure.

M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. PAUL: Ah! c'est bien.

M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.

M. BOIS: En fait, M. Stein, quand vous parlez des revenus bruts, voudriez-vous dire, par exemple, qu'on se trouverait, de cette façon, à imposer même le capital qui va servir aux réinvestissements ou à l'amélioration des réseaux et de l'équipement?

M. STEIN: Là, j'aimerais mieux demander à

M. Pouliot de vous donner quelques explications.

M. POULIOT: Jean Pouliot, de la télévision de Québec. En imposant le revenu brut plutôt que le profit, on se trouve à imposer même les postes qui fonctionnent à déficit. Il y a plusieurs postes de la province qui fonctionnent à déficit.

M. TESSIER: Bien, je peux répondre immédiatement à cette question-là. Il ne sera pas question d'imposer les postes de radio et de télévision au revenu brut.

M. BOIS: C'est inscrit en toutes lettres.

M. TESSIER: J'ai dit qu'on aurait une nouvelle rédaction.

DES VOIX: Ah!

M. BOIS: C'est ça que je voulais savoir.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah, bien, là, en voilà une bonne !

M. TESSIER: Il me semble que je l'ai dit. Je l'ai répété au moins quatre fois...

M. PAUL: Non, on vous arrache cela à petites gouttes.

M. TESSIER: ... qu'il y aurait une nouvelle rédaction pour tous ces articles.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, il ne faut pas jouer sur les mots. Le ministre, tout à l'heure... Un instant, un instant, j'ai la parole!

M. TESSIER: J'ai même ajouté que nous tiendrons compte dans les nouvelles rédactions de la plupart des recommandations faites par Me Stein dans son mémoire. Il me semble que c'est assez clair. On ne peut tout de même pas aller plus loin que cela avant que les articles ne soient définitivement rédigés.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens à ce que je disais tout à l'heure. J'ai demandé au ministre de se commettre là-dessus. Il a dit qu'il ne se commettrait pas. Il a dit ensuite que, peut-être, il allait envisager la possibilité d'aider ces sociétés. Bon. Il a parlé ensuite d'une nouvelle rédaction. Je lui ai demandé: Est-ce que cela va être de la littérature ou si cela va être des faits? Il m'a dit: Moi, je ne fais pas de littérature, je ne suis pas le ministre des Affaires culturelles; ce qui est évident, bien entendu.

M. TESSIER: Je ne suis pas un ancien ministre des Affaires culturelles. J'ai parlé d'un ancien ministre des Affaires culturelles. C'est bien important, le mot "ancien".

M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez raison de faire la distinction entre l'ancien et le nouveau, parce que c'est toute la différence du monde.

M. TESSIER: Oui, oui, c'est très important.

M.TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. Stein, à la suite de ma brillante plaidoirie, vous avez l'assurance que les revenus bruts ne seront pas imposés.

M. TESSIER: Enfin, le député de Chicoutimi a compris.

M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, si j'ai bien compris, c'est terminé. On vous remercie, M. Stein. Nous invitons maintenant le représentant de l'Industrie de production pétrolière du Québec.

Industrie de production pétrolière du Québec

M. THOMSON: M. le Président, je m'appelle Alex Thomson. Je suis avocat à Montréal. Je vous fais grâce des boniments d'usage dans le préambule, étant donné que le temps passe et aussi en raison du fait que Me Beaudry est passé, non seulement une fois avant moi, mais deux fois; cela va raccourcir de beaucoup mon exposé.

Nous demandons, à l'article 11, essentiellement la même chose que Park Laign, c'est-à-dire de biffer le paragraphe a) et également le paragraphe c). Nous ajoutons que si, dans la sagesse du gouvernement, on ne veut pas biffer le sous-paragraphe c), qu'on allonge au moins la période de 24 mois à 36 mois.

A l'article 12, je vous fais grâce de le lire, nous demandions tout simplement que, dans le cas des baux enregistrés, l'avis soit donné également au locataire.

A l'article 14, j'avais des remarques à faire mais devant la philosophie exprimée par Me Beaudry et surtout devant ce qu'a dit le ministre, que je ne veux pas prendre outre mesure à la lettre, si c'est vrai que toute machinerie sans aucune restriction ne sera pas portée au rôle, évidemment, je n'ai rien à ajouter. Je voudrais pourtant souligner que dans le cas de l'industrie que je représente et l'industrie chimique en général, et peut-être certaines parties d'autres industries, il arrive que ce que nous appelons machines ou équipement à la production n'a peut-être pas la même forme qu'une machine à papier, disons. C'est généralement un contenant qui peut servir, en sa forme générale, autant pour l'entreposage que pour le procédé chimique. C'est-à-dire que, extérieurement, les différences ne sont pas tellement notables. Je fais seulement cette mise au point sur ce que nous considérons comme machinerie et ce que la loi considère comme machinerie, ayant mis de côté cet embarras de "immeubles par destination". Cela comprend des grands réservoirs dans lesquels il se produit des réactions chimiques ou des malaxages.

J'arrive à l'article 15 et encore je crois que Me Beaudry m'a précédé. Je vous fais grâce de la lecture.

Quant aux articles 37, 39 et 40 du projet de loi, nous étions un peu confus et nous nous demandions si ce rôle de valeur locative comprendrait des articles qui ne seront pas compris dans le rôle foncier. Et je tiens seulement à remarquer que l'usage jusqu'à ce jour veut que la valeur locative ne se rapporte qu'aux terrains et aux bâtiments. Je présume que la machinerie ou équipement industriel, qui n'est pas porté au rôle en vertu du rôle proprement dit, ne le sera pas en vertu de la valeur locative.

Pour ce qui est de l'article 127, nous exprimons peut-être une certaine appréhension des normalisations faites par les commissions scolaires. Tout en admettant qu'il ne s'agit que d'une période intérimaire qui peut peut-être quand même durer plusieurs années, nous suggérons que les normalisations soient faites soit par le ministère des Affaires municipales ou peut-être par la Commission municipale.

Je vous remercie beaucoup.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Thomson.

M. TESSIER : M. le Président, je voudrais d'abord remercier M. Thomson de l'intérêt qu'il a manifesté en venant aujourd'hui présenter un mémoire et d'avoir examiné attentivement le projet de loi 48. Je veux l'assurer en même temps que, définitivement, il n'y aura aucune taxe sur la machinerie puisque qu'elle ne sera pas portée au rôle et que par machinerie nous comprenons tout ce qui sert dans votre production pétrolière. Egalement, en ce qui concerne le valeur locative, ça s'appliquera seulement aux immeubles portés au rôle et non pas, évidemment, à la machinerie, laquelle ne sera pas portée au rôle.

M. THOMSON: Merci, M. le ministre.

M. TESSIER : Je crois que ça va vous donner entière satisfaction.

M. THOMSON: Merci beaucoup, M. le Président, messieurs.

M. TREMBLAY (Chicoutimi): On a obtenu encore ça.

M. LE PRESIDENT: Merci, M. Thomson. Et maintenant le dernier organisme pour aujourd'hui, les représentants du Pacifique canadien et du Canadien national.

Pacifique canadien

M. GADBOIS: M. le Président, mon nom est Albert Gadbois; je suis procureur du Pacifique

canadien et je suis accompagné de Me Gagnon, procureur des Chemins de fer nationaux.

Tout d'abord, pour répondre à l'invitation faite à maintes reprises par le président de la commission, j'ai l'intention d'être extrêmement bref dans l'exposé que je ferai devant vous.

Tout d'abord, permettez-moi d'attirer votre attention sur la composition de notre mémoire, que nous avons disposé de cette façon afin, selon notre croyance, de faciliter votre tâche. Notre mémoire est disposé de telle façon que, du côté gauche de chaque page, vous avez le texte actuel et, du côté droit, vous avez le texte que nous proposons: Au bas de la page se trouvent les notes explicatives. A l'exception de quelques paragraphes, je vous ferai grâce des notes explicatives.

Sans plus de préambule, je veux passer immédiatement à l'article 8, où nous suggérons que les mots "dans un délai raisonnable n'excédant pas 90 jours" soient insérés au texte, parce que nous avons présent à l'esprit le cas du grand propriétaire, du propriétaire d'immeubles de grande envergure, pour qui c'est plus difficile de fournir des renseignements et à qui cela prend plus de temps.

Nous soumettons aussi que l'évaluateur puisse obtenir tous les renseignements mais les renseignements raisonnables, afin qu'on ne soit pas l'objet d'une véritable inquisition de la part d'un évaluateur trop zélé.

M. PAUL: Si vous me permettez, à ce stade-ci de votre mémoire, pourriez-vous nous donner une interprétation pratique du mot "raisonnable"?

M. GADBOIS: Ce sera une question de fait, M. le député, qui pourra être soumise aux tribunaux. Mais ce que nous voulons, c'est limiter ce droit qui est accordé à l'évaluateur de venir et de demander n'importe quoi, des choses qui peuvent n'être absolument pas pertinentes. Nous voulons que le contribuable soit protégé dans cette éventualité. Il pourra s'adresser aux tribunaux et dire: On me demande des choses qui ne sont pas raisonnables. La cour décidera. Ce sera une question de fait.

Au paragraphe 10, — je comprends, d'après les remarques qui ont été faites au cours de l'après-midi, que ce paragraphe est maintenant rayé — je ne ferai pas de commentaires.

A l'article 11, nous soumettons une rédaction qui insère le principe de la susceptibilité d'utilisation. En d'autres termes, nous insérons en ce paragraphe un principe semblable à celui que les cours sont appelées à interpréter dans les cas de privilèges, par exemple, où on a souvent à décider si le bâtiment était complété ou susceptible d'habitation. Parce que, comme vous le savez, messieurs les législateurs, il y a un délai, pour enregistrer un privilège, qui court de la fin des travaux. Nos tribunaux ont, à plusieurs reprises, été appelés à décider de la question, à savoir si les travaux étaient terminés ou non. Nous avons cette règle jurisprudentielle qui se dit de substantiellement terminer. Alors nous avons ici: Qui est susceptible d'utilisation.

M. PAUL: Est-ce que vous êtes au courant de la dernière décision de la cour d'Appel que vous retrouvez à la page 1 des rapports de la cour d'Appel de cette année, où la cour d'Appel, à l'unanimité, — le juge Rivard, le juge Montgomery et le juge Turgeon — a décidé que tant et aussi longtemps que tout n'est pas complété dans un contrat, l'immeuble est considéré comme non terminé et par conséquent sujet à l'enregistrement d'un privilège.

M. GADBOIS: Je suis au courant de cette décision, M. le député, mais vous l'êtes aussi, je le suppose de votre part, de cette autre jurisprudence qui existe à l'effet contraire. C'est pour cela que nous avons voulu ici instaurer le principe, à savoir s'il est susceptible ou non d'habitation. S'il est susceptible d'habitation, nous disons: A partir de ce moment, vous pourrez le taxer.

Parce que le texte tel qu'il se lit actuellement, 24 mois et ces choses-là, eh bien, quand on construit un édifice disons comme celui de la Place Ville-Marie, ce n'est pas terminé dans 24 mois. Et pour éviter ce problème-là, pour avoir une règle équitable à la fois pour la municipalité et pour l'entrepreneur, nous insérons ce principe qui, nous le soumettons, est conforme à cette règle d'équité.

L'article suivant, M. le Président, est un article qui a été discuté à maintes reprises aujourd'hui, c'est l'article 14 se rapportant à la machinerie. Si j'ai bien compris les remarques qui ont été faites aujourd'hui, il semblerait que la commission est à la recherche d'un texte qui la satisferait et lui permettrait d'exempter la machinerie. Nous n'avons pas la témérité de prétendre que le texte que nous vous soumettons est la formule magique qui résoudra vos problèmes, mais je crois que ce texte est un peu dans l'esprit ou la pensée qui a été exprimée cet après-midi lorsque nous disons: "à des fins autres que l'opération, l'entretien, le service et la protection d'un immeuble par nature." Ce qui veut dire que ne seront pas portés au rôle des immeubles par destination qui ne servaient pas à ces fins-là. Qu'est-ce qui sert à ces fins-là? Ce sont des meubles que l'on installe, tels que les fournaises, les machineries de climatisation, et qui sont, je crois, de véritables immeubles par destination qui ne servent pas à la production, qui ne sont pas de la machinerie au sens que nous l'entendons généralement. C'est la raison pour laquelle nous vous soumettons ce texte et nous espérons qu'il est conforme à la pensée du législateur.

Nous soumettons aussi, au sous-paragraphe e) un texte se lisant: "à des fins d'opération d'un réseau de transport aérien." La raison pour laquelle nous soumettons ce texte est la suivante: si le texte actuel était pour demeurer,

nous avons des machines qui servent aux compagnies aériennes qui seraient taxables, et je pense tout particulièrement au simulateur de vol qui est un instrument dont se servent les compagnies d'aviation pour la formation de leurs pilotes, pour fins éducatives, et nous soumettons que de telles machines, au cas où vous n'accepteriez pas notre sous-paragraphe a), au cas où vous ne reconnaîtriez pas l'exemption de la machinerie, eh bien qu'au moins de telles machines devraient être exemptées.

Nous passons maintenant à l'article 15 qui, pour les chemins de fer, est l'article qui a le plus d'intérêt. Tout d'abord au sous-paragraphe c), nous demandons l'inclusion des mots: "à une entreprise" parce que l'on parle simplement d'organismes publics ou de personnes physiques pour les systèmes d'aqueduc, d'égouts et de traitement d'eau, alors que l'on sait très bien qu'il existe des entreprises qui possèdent de tels systèmes mais qui ne les possèdent pas pour des fins lucratives.

Au paragraphe d), nous voyons, dans la rédaction actuelle, un grave danger. Il est dit: "les réseaux de transport en commun et de chemins de fer" Or, j'ai ici, je vous en ferai grâce, à moins que vous vouliez que j'y réfère, de la jurisprudence du Conseil privé et de la cour Suprême à l'effet qu'un réseau c'est l'ensemble des objets physiques qui constituent le chemin de fer; un réseau de chemins de fer, c'est l'ensemble des objets physiques qui constituent ce chemin de fer et non pas les objets physiques.

Or, il est évident que le paragraphe d), dans sa rédaction actuelle, tend vers une exemption, mais nous croyons que ce qui est exempté par les mots: "les réseaux de transport" c'est un intangible, c'est l'ensemble mais non pas ces instruments physiques qui font partie de l'ensemble. Or, nous croyons qu'il serait beaucoup plus heureux de prendre le texte que nous soumettons, qui est conforme, dans son esprit, à celui que nous trouvons dans la charte de la ville de Montréal et la charte de la cité de Québec à l'heure actuelle.

Maintenant, nous remarquons qu'en vertu du paragraphe d) tel que rédigé, et nous l'avons mis dans le même sens, au sous-paragraphe que nous soumettons:

Les terrains des réseaux de chemins de fer seront taxés ou portés au rôle à leur valeur marchande. Autrefois, en vertu des dispositions de la Loi des cités et villes, ils étaient portés au rôle selon la valeur des terrains avoisinants. Nous ne sommes pas absolument très enthousiasmés de ce changement, mais nous réalisons, M. le Président que la règle est que tout doit être évalué à la valeur marchande et nous nous résignons à ce que nos emprises, nos terrains le soient comme ceux des autres contribuables de la province.

Nous passons maintenant aux articles 21 et 22 qui viennent d'être discutés devant vous. Nous non plus nous ne sommes pas heureux de la rédaction de ces articles, mais vu la déclaration du ministre à l'effet que de nouveaux textes seront préparés, il nous semble qu'il n'est pas nécessaire pour nous d'en discuter cet après-midi.

A l'article 27, sous-paragraphe f), même si nous sommes des cheminots, même si les cheminots n'ont pas beaucoup affaire aux choses culturelles, nous croyons que les musées devraient eux aussi profiter des mêmes privilèges que "les bibliothèques ouvertes gratuitement au public".

M. PAUL: Le ministre s'est prononcé là-dessus ce matin.

M. GADBOIS: Maintenant, nous suggérons, M. le Président...

M. BOIS: Juste en aparté, est-ce que monsieur le ministre a voulu mentionner les musées qui sont construits individuellement? Si je prends le cas des chemins de fer, je constate que ceux-ci ont beaucoup de musées dans leur gare. Est-ce cela que vous avez mentionné?

M. GADBOIS: C'est exclusivement employé comme bibliothèque ou musée ouverts gratuitement au public. Cela comprend ceux qui sont ouverts gratuitement au public. Il y a le Musée des Beaux-Arts, par exemple, sur la rue Sherbrooke à Montréal, qui, je crois, pour certaines expositions demande un prix d'entrée, mais pas toujours. Je crois que les musées devraient profiter des mêmes privilèges qu'une bibliothèque. Nous avons nous aussi des musées de chemin de fer, à Delson par exemple, qui sont ouverts gratuitement au public. Je crois qu'ils devraient profiter des mêmes avantages que les autres musées. C'est quelque chose que nous mettons à la disposition du public en général et je ne crois pas qu'il devrait y avoir des distinctions parce que ce sont des compagnies de chemin de fer qui les mettent à la disposition du public.

Nous suggérons aussi M. le Président, qu'il soit inséré au projet de loi un article 27 a) qui se lirait comme suit: "Les emprises ferroviaires et les cours de triage sont exemptes de toutes taxes spéciales pour les services municipaux et les travaux d'amélioration locale dont elles ne bénéficient pas directement". Voici, M. le Président, notre suggestion. Comme vous le savez tout probablement, les emprises de chemin de fer, c'est cette étendue d'environ 80 pieds de large sur laquelle les trains passent.

Ces emprises traversent la province de Québec sur toute sa grandeur. Or, vous avez des municipalités qui viennent construire, juste à côté de ces emprises, une rue et elles décident que le coût de construction de cette rue ou de l'installation des égouts — quel que soit le service municipal — sera payé par les propriétaires riverains. Dans ces cas-là, nous sommes à 50 p.c. redevables du coût de la construction de

cette rue, puisque nous la longeons sur tout un côté et nous ne retirons absolument aucun avantage de cette rue, parce qu'enfin tout ce qu'il y a sur notre emprise, ce sont nos rails sur lesquels circulent nos trains. Nous ne retirons donc aucun avantage de la présence de la rue, de la présence de l'aqueduc, de la présence des égouts ou encore de l'éclairage.

Lorsque nous considérons que nous payons, les deux chemins de fer ici, un minimum de $20 millions par année en taxes municipales et scolaires dans la province de Québec seulement, nous croyons qu'ici on nous fait supporter, au profit des autres contribuables, un fardeau qu'équitablement nous ne devrions pas être appelés à supporter puisque nous ne retirons aucun avantage de ces services publics dont les autres contribuables tirent avantage.

M. TESSIER: Est-ce que vous permettriez une question, Me Gadbois? Dans les autres provinces, est-ce que le Pacifique canadien ou le Canadien national ne paient pas ces mêmes taxes, notamment en Ontario?

M. GADBOIS: Oui, nous les payons en Ontario, M. le ministre.

M. TESSIER: Alors, pourquoi votre compagnie voudrait-elle payer moins de taxes au Québec qu'en Ontario?

M. GADBOIS: M. le ministre, si vous me le permettez, nous ne voulons pas payer moins de taxes dans le Québec qu'en Ontario, mais nous voulons commencer par faire accepter le principe dans une province pour nous présenter dans d'autres provinces par la suite et faire accepter cela de nouveau. Nous ne voulons pas faire de préférence entre une province et l'autre.

M. TESSIER: D'accord, nous allons attendre que vous ayez convaincu les neuf autres provinces.

Canadien national

M. GAGNON: M. le Président, si vous me le permettez, mon nom est Edmond Gagnon; je représente le Canadien national. En fait, il y a eu une confusion majeure. Dans les autres provinces, en Ontario pour prendre l'exemple pertinent que je connais, nous payons si nous bénéficions. Cela peut être présenté devant le tribunal. Le commissaire général des taxes est ici, il peut le confirmer. Nous payons les taxes d'amélioration locale en Ontario si nous en bénéficions. Ce serait la situation qu'on demande ici.

M. GADBOIS: C'est exactement ce que nous demandons lorsque nous disons qu'elle ne bénéficie pas directement. Nous demandons la consécration du même principe.

Maintenant, nous passons à l'article 30 qui concerne les cultivateurs et qui a été beaucoup discuté. Nous demandons l'inclusion des mots "les intérêts sur les taxes devant courir le jour où elles seront devenues exigibles".

Quant aux clubs de golf mentionnés à l'article 31, nous demandons que les arrérages de taxes soient limités, dans ce cas, à cinq années et que les taxes deviendront exigibles.

A l'article 32, nous proposons que l'évaluateur signe le rôle et le dépose au bureau de la municipalité avec tous les documents ayant servi à sa confection ou sa modification, en vertu de l'article 97, car, comme vous le savez, en vertu de cet article 97, l'évaluateur peut modifier le rôle. Nous demandons aussi que ce rôle et les modifications puissent être consultés par toute partie intéressée ou son représentant.

M. PAUL: Est-ce que ça ne découle pas de l'économie du code municipal et de la Loi des cités et villes que tout contribuable a le droit de consulter les archives municipales?

M. GADBOIS: Oui, mais nous sommes devant une nouvelle loi et dans la Loi des cités et villes et le code municipal, on ne parle pas du représentant. Ici, il y a le représentant. Par exemple, nous avons à l'idée l'avocat ou encore son évaluateur, son expert, qui pourra consulter le rôle au nom du contribuable.

M. TESSIER: Cela existe déjà. M. GADBOIS: A quel endroit?

M. TESSIER: Ce que je veux dire, c'est que dans la Loi des cités et villes et le code municipal, toute personne intéressée a le droit de consulter les archives. En disant que ça fait partie des archives, ça veut dire automatiquement que n'importe qui peut le consulter.

Je souligne ceci parce que ce serait, à mon sens, une répétition.

M. GADBOIS: Nous l'avons apporté comme clarification, M. le ministre, pour qu'il ne se présente pas de difficultés et que, si un avocat ou l'expert d'un contribuable se présente, il ait le droit bien mentionné dans la loi d'obtenir les informations. C'est tout.

M. PAUL: A la suite des remarques que je faisais ce matin, vu que c'est une loi dont la mise en application va impliquer énormément de gens, ça se comprend qu'il soit nécessaire parfois de ne pas utiliser la concision du juriste. C'est dans ce sens-là que le procureur fait cette recommandation.

M. GADBOIS: C'est une précaution, M. le ministre.

A l'article 37, où on parle de la valeur locative, nous demandons que soient exclues les emprises des chemins de fer et d'utilité publi-

que, pour la raison que, sur les emprises de chemins de fer, nous ne négocions pas. C'est ce que la cour d'Appel a déjà décidé. Montreal Tramways — dont il s'agissait, contre la Cité de Montréal, dans ce jugement de la cour d'Appel — ne négociait pas des affaires sur son emprise, mais s'en servait pour les fins à l'occasion de ses affaires, mais ce n'est pas là qu'elle négociait. Nous demandons donc que les emprises soient exclues de la valeur "locomotive," c'est-à-dire locative. Déformation professionnelle, M. le ministre.

M. TESSIER: On pensait que vous nous demandiez que les municipalités puissent imposer les locomotives.

M. GADBOIS: Bien, cela prendrait du temps avant que je fasse ça. A l'article 54, nous demandons tout simplement que le texte demeure le même que celui que nous trouvons actuellement à la Loi des cités et villes.

A l'article 59, concernant la constitution du bureau de révision, nous suggérons que ne soit pas inclus un membre de la société à laquelle il appartient, s'il s'agit d'une société ou corporation c'est-à-dire l'évaluateur ou les membres de ces sociétés.

A l'article 70, nous ajoutons beaucoup d'importance à notre suggestion, parce que nous la considérons ici d'ordre général. Il s'agit de la sténographie devant le bureau de révision. Nous soumettons que la sténographie doit avoir lieu seulement lorsque toutes les parties l'exigent et, de cette façon, nous croyons que nous nous faisons les avocats du petit contribuable qui n'a pas les moyens de se payer de la sténographie.

A l'article 80, il s'agit d'une concordance; nous croyons que l'allusion à l'article 29, que l'on y voit, devrait se lire à l'article 77. En effet, l'article 29, vous le verrez immédiatement en le regardant, n'a absolument aucune relation avec le texte de l'article 80.

M. TESSIER: Vous avez raison, Me Gadbois. Cela a déjà été corrigé.

M. GADBOIS: Ah bon! A l'article 81, nous demandons tout d'abord que le secrétaire du bureau fasse parvenir au plaignant un avis d'au moins quinze jours au lieu de huit jours, pour fournir au plaignant l'occasion de préparer sa cause. Lorsque vous avez des causes qui comprennent de grands complexes domiciliaires ou encore des complexes tels que Place Ville-Marie, c'est le genre de cause que vous ne pouvez pas préparer dans huit jours. Nous demandons aussi que la transmission se fasse par la poste recommandée.

L'article 84: il s'agit aussi d'une question de concordance, M. le Président, et nous suggérons que l'article auquel il doit se référer suive l'article 81.

A l'article 92, nous demandons qu'une peine, sous forme d'amende, soit imposée au secrétaire-trésorier s'il ne rapporte pas les documents au greffe du tribunal dans le délai imparti. Notre suggestion n'a rien de nouveau, nous la trouvons déjà dans la Loi des cités et villes.

A l'article 93, nous demandons que dans les cas où, devant le bureau de révision, la preuve a été prise par sténographie, l'on ne procède pas à un procès de novo mais que l'on produise tout simplement les notes sténographiques. Ce qui est exactement le cas, comme vous le savez, qui existe en vertu de la charte de la ville de Montréal. Vous allez devant le bureau de révision, les notes sont sténographiées; vous voulez aller devant la cour Provinciale, et nous déposons les notes sténographiées. Nous disons que si la preuve a été prise par sténographie devant le bureau de révision, on doit éviter un procès de novo et produire les notes sténographiques.

M. PAUL: M. Gadbois, est-ce que vous ne trouveriez pas avantageux que cet article amendé supposons qu'il soit adopté, puisse s'appliquer à faire disparaître la suggestion que vous avez apportée à l'article 70 lorsque vous avez inscrit: "Lorsque toutes les parties l'exigent."

M. GADBOIS: La raison pour cette distinction, M. le député, est celle-ci: Nous avons pensé — comme je le disais quand j'ai parlé de l'article 70 — au petit contribuable. Il va se présenter devant le bureau de révision. Tout probablement qu'il n'y ira pas avec des experts parce qu'il n'a pas les moyens d'y aller et qu'il n'ira pas non plus devant la cour Provinciale parce qu'il n'a pas les moyens d'y aller. Et je ne vois pas pourquoi on pourrait lui imposer les frais de sténographie. Mais par contre...

M. PAUL: De toute façon, s'il veut aller en appel, il faudra qu'il ait un procès de novo.

M. GADBOIS: S'il veut aller en cour d'Appel, il ne perd aucun droit. Il a son procès de novo. Nous ne lui faisons perdre aucun droit par nos suggestions...

M. PAUL: D'un autre côté, l'amendement que vous suggérez à l'article 93 ne pourrait pas s'appliquer parce que ce serait alors une preuve de novo.

M. GADBOIS: Si le déroulement n'a pas été sténographié, nous avons cru que de cette façon, il n'y avait rien de contradictoire. Nous protégions tout le monde.

M. PAUL: Je n'ai pas dit que c'était contradictoire.

M. GADBOIS: Non, non. Je me défends tout simplement.

M. PAUL: J'ai soulevé le point pour vous signaler que l'application de l'amendement à l'article 93 serait peut-être plus facile, s'il était adopté, si on n'avait pas cette obligation que l'on retrouve par votre amendement suggéré à l'article 70.

M. GADBOIS: Non, je crois que les deux se complètent, M. Paul.

M. TESSIER: On va moins loin avec son amendement.

M. GADBOIS: Oui.

M. TESSIER: Parce que, dans l'article original, il y a toujours la sténographie.

M. GADBOIS: C'est exact.

M. TESSIER: Tandis que ce que vous suggérez...

M. GADBOIS: C'est la liberté.

M. TESSIER: Oui. C'est cela, lorsque toutes les parties le demandent.

M. GADBOIS: Oui.

M. PAUL: Dans un cas comme cela, ce sera toujours une preuve de novo...

M. TESSIER: Oui.

M. PAUL: ... suivant l'article 93.

M. TESSIER: C'est cela. C'est ce que l'article 93 veut dire.

M. GADBOIS: C'est cela. Il faut que les deux parties consentent pour qu'il y ait sténographie. De cette façon, tout le monde est sur un pied d'égalité.

M. TESSIER: Je trouve personnellement, Me Gadbois, ces deux suggestions très intéressantes.

M. GADBOIS: Merci. A l'article 95, nous disons que le jugement du tribunal doit être signifié à toutes les parties en cause, alors que le texte dit qu'il doit être signifié à la municipalité et transmis au bureau de révision. Nous soumettons que le contribuable aussi a le droit d'être informé du jugement qui a été rendu.

Nous disons que tous les documents seront remis à la municipalité après l'expiration des délais d'appel en absence d'appel.

A l'article 96, nous nous permettons de suggérer un changement. Le recours à la cour d'Appel, selon le texte actuel, s'exerce en vertu des articles 9 à 15 de la Loi des cours Municipales. Le délai prévu est de huit jours. Nous trouvons qu'un tel délai est très minime pour donner à une partie l'occasion de détermi- ner si elle veut exercer son droit d'appel ou non. C'est pour cela que nous suggérons que le délai de 30 jours que l'on prévoit au code de procédure civile pour l'appel devrait être instauré.

A l'article 98, nous suggérons: Toute personne ou corporation qui désire la modification du rôle pour une des raisons mentionnées à l'article 97. L'article 97, M. le Président, prévoit que l'estimateur peut varier le rôle s'il y a une augmentation de la valeur marchande ou une diminution. Nous voulons que ce même droit soit accordé au contribuable.

Nous disons: Si l'estimateur ou si la municipalité a le droit de varier le rôle, le contribuable devrait lui aussi, s'il croit qu'il y a une diminution dans la valeur marchande de sa propriété, avoir le droit de demander qu'une majoration soit apportée au rôle. En d'autres termes, nous disons: Si c'est bon pour la municipalité, ça doit être aussi bon pour le contribuable. C'est tout ce que nous voulons et c'est le principe que nous voulons faire reconnaître dans cet article, et par la suite, nous lui accordons le droit de porter appel et d'exercer tous les autres droits qui lui sont conférés antérieurement.

L'article 113, je crois qu'il ne sera pas long à plaider, la loi devait entrer en vigueur le 30 septembre 1973, je crois bien qu'un amendement est tout indiqué à cet article et que la commission verra à le faire.

A l'article 122, nous soumettons que ce sont les articles 25, 26 et 27 qui s'appliquent et non pas 24 et 25. Peut-être qu'une vérification par les conseillers juridiques de la commission démontrera le bien-fondé de notre suggestion.

Finalement, et c'est là ma dernière suggestion, il s'agit de l'article 373 de la Loi de l'instruction publique, qui a déjà été discuté aujourd'hui, nous en demandons l'abrogation. Nous comprenons que c'est l'intention de la commission de procéder à une telle abrogation, mais dans un délai... Le seul souhait qu'il nous reste à vous formuler, c'est que le délai soit très court parce que nous avons, à Montréal, avec les commissions scolaires et le rôle, les questions d'uniformisation, de très mauvaises expériences.

MM. les membres de la commission, c'étaient les remarques que les chemins de fer avaient à porter à votre attention, je vous remercie au nom du Pacifique canadien et des chemins de fer nationaux.

M. TESSIER: M. le Président, je voudrais féliciter le Pacifique canadien et le Canadien national de même que leur procureur, Me Gadbois, pour la présentation d'abord du mémoire et également pour les excellentes suggestions, dont plusieurs sont très constructives.

Je puis vous assurer que nous allons relire très attentivement ce mémoire et que nous allons certainement retenir plusieurs de vos suggestions. Encore une fois, je tiens à vous

féliciter et également à remercier votre collègue, Me Gagnon, qui est intervenu tout à l'heure.

C'est certainement un des meilleurs mémoires, je crois, un des plus constructifs que nous ayons eus depuis la tenue des séances de la commission parlementaire des Affaires municipales.

M. PAUL: Je me joins à l'honorable ministre pour vous féliciter, Me Gadbois, de même que Me Gagnon et vos collaborateurs. Vous avez fait un excellent travail. Si ce n'est pas le meilleur mémoire, c'est parmi les meilleurs qu'il nous a été donné d'entendre jusqu'ici. Vous avez été objectifs, vous ne vous êtes pas arrêtés seulement aux articles qui pouvaient concerner les deux compagnies de chemin de fer. Vous avez fait une analyse complète du projet de loi. C'est tout à votre honneur et nous retirerons sûrement des bénéfices et des avantages des suggestions que vous nous avez faites, que vous nous avez soumises et qui ont été présentées avec clarté. Votre mémoire est très bien fait, il est intéressant à lire, facile à comprendre. Vous méritez, vous et votre équipe, toutes nos félicitations.

M. BOIS: M. le Président, mes plus sincères félicitations aux deux procureurs qui représentent les grandes compagnies de chemin de fer ici. Ce que je remarque surtout, c'est qu'ils se sont justement préoccupés surtout de toutes les classes et non pas seulement de leurs entreprises en particulier. C'est ça, M. le ministre, qui m'intéresse dans le mémoire présenté.

Alors, merci.

M. BROWN: I would like to congratulate my friend from Brome County. It is the same thing always, when you get something from Brome, you get quality.

UNE VOIX: I will remind you of that.

M. LE PRESIDENT: Messieurs, je vous remercie de votre collaboration. Nous ajournons les travaux de la commission au mardi 2 novembre à dix heures du matin.

(Fin de la séance: 18 h 7)

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