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Commission permanente des Affaires municipales
Projet de loi no 48 Loi sur l'évaluation
foncière
Séance du jeudi 7 octobre 1971
(Dix heures sept minutes)
M. LEDUC (président de la commission permanente des Affaires
municipales: A l'ordre, messieurs !
Je désire vous souhaiter la bienvenue à cette
deuxième séance de la commission parlementaire permanente des
Affaires municipales qui entendra les différents organismes qui ont des
représentations à faire sur le projet de loi 48: Loi sur
l'évaluation foncière.
Afin de bien s'entendre au début, je voudrais vous lire la liste
des organismes qui ont été invités à venir faire
des représentations aujourd'hui et vous donner cette liste par ordre de
présence au lutrin, en face. Je vous demanderais de bien vouloir vous
placer en avant de la barre et de vous installer au lutrin pour faire vos
représentations.
Le premier organisme sera l'Association des musées de la province
de Québec; ensuite, le Musée des Beaux-Arts de Montréal;
l'Association des jardiniers marafchers de la région de Montréal;
la Société d'agriculture du comté de Laval; le Barreau du
Québec; la Corporation des ingénieurs forestiers de la province
de Québec; les Arpenteurs-géomètres de la province de
Québec; Park Laign Ltd; l'Association des détaillants des maisons
mobiles et roulottes du Québec; l'Association canadienne de la radio et
de la télévision de langue française; l'Industrie de
production pétrolière du Québec, le Pacifique Canadien et
le Canadien national, les deux ensemble.
J'inviterais Me Charles Gonthier ou le représentant de
l'Association des musées de la province de Québec à bien
vouloir s'avancer au lutrin, face à notre table ici pour faire valoir
ses idées.
Excusez, Me Gonthier, il arrive assez souvent que le porte-parole d'une
association n'est pas le même que celui dont nous avons le nom sur notre
liste; il arrive souvent que ce sont deux personnes bien différentes.
Afin de faciliter le travail du personnel du journal des Débats,
j'aimerais, si c'était possible, avant de commencer quelque intervention
que ce soit, que le porte-parole s'identifie. Je vous remercie.
Musée des Beaux Arts de Montréal
M. GONTHIER: Je vous remercie, M. le Président. Je suis Charles
Gonthier. Je suis avocat de Montréal et également
secrétaire honoraire du Musée des Beaux-Arts de
Montréal.
Je représente ici, ce matin, à la fois l'Association des
musées de la province de Québec et le Musée des Beaux-Arts
de Montréal. J'ai avec moi M. Raymond Denault, un des membres du conseil
de l'association et également président de la
Fédération des sociétés d'histoire de la province
de Québec.
M. le Président, les deux mémoires de l'Association des
musées de la province de Québec et du Musée des Beaux-Arts
touchent au même point et s'appuient l'un l'autre. Et, si vous le
permettez, je traiterai des deux en même temps. Le mémoire du
musée appuie celui de l'association en apportant certaines
précisions quant à la situation particulière du
Musée des Beaux-Arts.
Le motif qui nous amène devant vous ce matin et nous vous
remercions de cette occasion est très simple. Il n'y a pas
d'exemption de prévue au bill 48 pour les musées. Nous croyons
qu'il s'agit là d'une omission qui n'était sans doute pas voulue.
Nous constatons, par exemple, à l'article 16 du projet de loi, qu'on
prévoit des exemptions pour certaines propriétés
lorsqu'elles appartiennent à des corps publics tels que les immeubles
à caractère historique, les jardins zoologiques, les jardins
botaniques, les aquariums, les Pepinières, mais on ne parle pas des
musées.
Aux articles 26 et 27, on prévoit des exemptions pour les
institutions d'enseignement aux divers niveaux, les hôpitaux, les
institutions de charité, certaines bibliothèques, mais on ne nous
parle pas des musées. Je crois que c'est l'évidence même
que les musées remplissent une fonction sociale essentielle par la
conservation du patrimoine culturel et par leur rôle éducatif. Ils
sont un élément essentiel de l'éducation visuelle qui est
un si grand facteur aujourd'hui. La visite d'un musée, c'est une
leçon de choses. C'est seulement dans les musées que nos jeunes
et le public en général peuvent voir les objets mêmes dont
ils entendent parler.
Les autorités gouvernementales, d'ailleurs, reconnaissent le
rôle des musées à la fois par les exemptions fiscales qui
leur sont actuellement accordées elles sont, je pense, à
l'impôt sur le revenu et par les subventions qu'elles leur
versent.
On constate également que dans la charte de la ville de
Montréal, article 782, il y a une exemption pour les musées et
les galeries d'art qui sont ouverts gratuitement au public.
Nous demandons que les musées soient assujettis au même
régime que les universités et les CEGEP, prévu à
l'article 26 de la loi, c'est-à-dire une exemption complète des
taxes foncières, générales, spéciales et de
services, mais le versement, par les musées aux municipalités,
d'une compensation pour tenir lieu des services municipaux.
Le régime que nous suggérons est moins favorable que celui
de la Place des Arts à Montréal, par exemple, qui, en vertu de sa
loi, chapitre 19, 1964, article 18, jouit d'une exemption totale de toutes les
taxes. Il est
également moins favorable, par exemple si l'on cherche les
précédents ailleurs que le régime prévu pour
"The Art Gallery of Ontario", qui jouit également d'une exemption
complète de taxes. Ce régime serait le même que celui
prévu actuellement pour le Grand Théâtre de Québec
à l'article 5 du bill 9 qui fut sanctionné le 17 juillet
1970.
La raison particulière pour laquelle nous demandons que les taxes
d'eau, par exemple, ne soient pas payables au taux général sur la
base de l'évaluation mais plutôt sous forme d'une compensation,
c'est que, évidemment, très souvent un musée
représente une valeur immobilière, une valeur de construction
considérable, soit simplement parce que c'était coûteux
à construire, soit parce que c'est quelque chose qui ne peut plus se
construire. C'est quelque chose qui nous vient du passé. Par
conséquent, une taxe d'eau prélevée sur une telle valeur
peut être absolument sans rapport avec le service employé par le
musée.
A ce propos, je signalerais que, pour le Musée des Beaux-Arts
à Montréal, la ville de Montréal a reconnu la chose et il
y a eu une entente à ce sujet. Si bien que le régime que nous
proposons, à toutes fins pratiques, pour le Musée des Beaux-Arts
de Montréal, ne constituerait que la continuation du statu quo.
En terminant, j'aimerais vous signaler simplement que l'Association des
musées de la province de Québec, fondée en 1958, groupe
quelque 54 musées et sociétés d'histoire qui oeuvrent,
pour la conservation du patrimoine culturel et l'éducation populaire,
sans but lucratif. Nous estimons qu'ils accueillent chaque année au
moins deux millions de visiteurs et constituent ainsi un attrait et un atout
très important pour le développement de l'industrie touristique
du Québec.
On me signalait ce matin, dans le dernier numéro de la revue
Québec-Histoire publiée par la Fédération des
sociétés d'histoire du Québec, cette introduction, ce
message du ministre du Tourisme, qui commence par ces mots: "L'histoire et le
tourisme possèdent des vocations si étroitement liées que
le développement de l'un ne peut que favoriser le rayonnement de
l'autre, et réciproquement." Pour le tourisme, qu'est-ce que l'histoire
sans musées?
Ajouterais-je que la plupart de nos institutions membres fonctionnent
avec des budgets des plus modestes et réussissent à peine
à se maintenir avec des revenus souvent aléatoires et, en tout
cas, insuffisants pour leur permettre de s'améliorer comme elles le
souhaiteraient. Je signalerais également que, évidemment, la
seule source de revenus que peut avoir un musée, hors les subventions
gouvernementales, est le droit d'entrée qu'il peut charger et,
évidemment, les dons qui peuvent lui être faits aussi.
Nous nous permettons donc de demander à l'Assemblée
nationale de bien vouloir prendre en considération notre demande et
d'apporter les modifications suggérées au projet de loi.
Pour souligner de façon encore plus concrète les
conditions difficiles dans lesquelles nos musées au Québec
fonctionnent, je pourrais signaler que le Musée des Beaux-Arts de
Montréal, qui est le plus important pour sa collection au Québec
et un des trois plus importants au Canada, a dû, l'an dernier, couper son
budget d'expositions de 90 p.c.
Ceci, nous l'espérons, nous le croyons, est une situation
temporaire mais il reste que nous opérons avec un déficit
très élevé depuis de nombreuses années. Si, l'an
dernier, nous n'avons pas eu de déficit, si nous avons tout juste
bouclé notre budget, c'est à cause de cette coupe radicale dans
notre budget d'expositions.
Alors, je sollicite la consideration généreuse de cette
commission pour permettre à nos membres de continuer à
préserver notre patrimoine, pour les encourager à fournir
l'apport de centaines de bénévoles pour préserver et
à faire connaître ce que nous avons été, pour mieux
connaître ce que nous sommes.
Merci, M. le Président.
M. LE PRESIDENT: M. le ministre.
M. TESSIER : M. le Président, je voudrais d'abord remercier Me
Gonthier de son exposé et souligner qu'il a parfaitement raison de dire
qu'il y a eu un oubli lors de la rédaction, en ce qui concerne les
musées. Ceci démontre bien encore une fois l'utilité de
tenir, lorsqu'il s'agit de lois aussi importantes, des réunions de la
commission parlementaire afin de faire entendre les personnes et les corps
publics ou semi-publics intéressés.
Nous nous sommes rendu compte de cette omission. Nous croyons qu'il n'y
aurait peut-être pas lieu d'amender le projet de loi dans le sens exact
que vous mentionnez vous vous référez surtout à
l'article 26 mais permettez-moi de vous dire que l'article 26 ne
s'applique qu'aux institutions d'enseignement, parce que nous avons fait
disparaître à l'article 26 les mots "les corporations
municipales".
Lorsqu'il s'agit de payer un montant devant tenir lieu de taxes pour des
services, évidemment, c'est une question à négocier avec
le ministère de l'Education exclusivement.
Notre proposition est plutôt d'amender l'article 27 afin d'y
ajouter un sous-paragraphe g) qui se lirait comme suit: "Les musées non
exploités à des fins commerciales" et un autre sous-paragraphe h)
qui se lirait: "Les centres d'art, les salles de concert et de
théâtre, les centres civiques et communautaires, lorsque
possédés par un organisme public ou exploités à des
fins non commerciales."
Je crois que cet amendement proposé rencontrerait vos vues, du
moins, je l'espère.
M. GONTHIER: Pour une bonne part, M. le ministre. Je comprends la raison
administrative que vous m'avez indiquée. Evidemment, le Musée des
Beaux-Arts, par exemple, reçoit
20,000 élèves de la Commission des écoles
catholiques de Montréal chaque année, en visites guidées.
Ils sont guidés par des bénévoles. L'an dernier, nos
guides bénévoles ont fait faire des visites guidées du
vieux Montréal à 9,000 personnes. Nous avons une
bibliothèque qui est unique au Canada et qui dessert les quatre
universités de Montréal. Nous avons également une
école d'art. Nous croyons qu'un musée est une institution
d'enseignement au même niveau qu'une université.
M. TESSIER: Oui, c'est exact dans un sens, mais ce n'est pas exclusif et
ce n'est pas le ministère de l'Education qui peut m'autoriser à
payer les taxes de service. C'est donc dire qu'il faudrait négocier avec
chacun des musées et ce serait susceptible de provoquer des litiges. Ces
négociations pourraient durer assez longtemps avant qu'on s'entende sur
les montants. Egalement, les musées pourraient dire: Cette année,
c'a été moins bon pour les revenus que l'année
précédente; alors, nous ne sommes pas en mesure de payer le
même montant que l'an dernier.
Avec la liste surtout que vous nous avez produite avec votre
mémoire, vous voyez tout de suite toutes les négociations et les
difficultés que nous rencontrerions à ce moment-là, tandis
que, dans le cas des collèges, des maisons d'enseignement, des
universités, on négocie avec une seule partie, c'est le
ministère de l'Education.
M. GONTHIER: La seule remarque que je pourrais ajouter, M. le ministre
est la suivante: Quand la ville de Montréal, dans le cas du Musée
des Beaux-Arts, s'est rendu compte qu'elle avait le pouvoir de faire une
entente particulière avec lui, ceci en vertu d'un article de la charte
du musée, d'après une loi de ce Parlement, nous n'avons eu aucun
problème pour en arriver à une base équitable et
satisfaisante.
Et je ne sache pas qu'il y ait eu des problèmes dans ce
sens-là dans le passé. Mais évidemment nous sommes entre
vos mains. Evidemment, nous ne tombons pas directement, sauf sous certains
aspects, sous la juridiction du ministère de l'Education. Nous
dépendons du ministère des Affaires culturelles, comme tous les
musées, comme les centres d'art, mais je ne sais pas s'il n'y aurait pas
une possibilité à ce niveau-là, par cet
intermédiaire-là, d'en arriver à la même solution
que pour les maisons d'éducation.
Enfin, je vous soumets la chose.
M. TESSIER: A tout événement...Oui, d'accord, puis nous
allons continuer à y songer. Je ne dis pas qu'il n'y a pas des
possibilités, je ne veux pas fermer la porte aujourd'hui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je remercie M.
Gonthier d'avoir signalé cette omission non coupable de la loi. Il est
bien évident que nous sommes d'accord sur les représentations que
vous avez faites en ce qui concerne les musées. Le ministre vient
d'ailleurs de vous donner l'assurance que l'article 27 de la loi sera
amendé par l'ajout de deux paragraphes qui incluront les musées
et les centres d'art. Je pense que personne n'a d'objection à cela, tout
au contraire. Les musées sont des maisons qui offrent des services au
public. Ils offrent ces services de façon ordinairement gratuite. Ils
font partie de l'ensemble des établissements qui, de façon
indirecte peut-être, sont des établissements éducatifs.
Il n'y a donc aucune sorte d'objection, je pense, de la part de qui que
ce soit, à ce que l'on se rende à votre demande, compte tenu,
évidemment, de certains mécanismes administratifs qu'il faudra
prévoir, comme vient de l'indiquer le ministre des Affaires
municipales.
Il est question de relations avec le ministère de l'Education
mais, par ailleurs, l'ensemble des musées de même que les centres
d'art relèvent du ministère des Affaires culturelles. Il y a donc
lieu, pour ces ministères, de se consulter et de donner des avis au
ministre des Affaires municipales afin de régler le problème
à la satisfaction des musées.
Vous avez mentionné que les musées vivent des petits
revenus que peuvent fournir les visiteurs; d'autre part, ils vivent surtout des
subventions gouvernementales. C'est le cas, en particulier, du Musée des
Beaux-Arts de Montréal qui a été financé pendant
longtemps par l'entreprise privée ou par des donations. Le Musée
des Beaux-Arts de Montréal est dans une situation actuellement difficile
parce que le mécénat est de plus en plus rare et aussi parce que
le Musée des Beaux-Arts a tardé, pendant longtemps, à
s'intégrer dans l'ensemble des institutions québécoises et
à faire corps avec le public du Québec.
Maintenant que le Musée des Beaux-Arts j'ai
travaillé activement à ce qu'il change son orientation est
devenu une maison ouverte à tous les citoyens du Québec et non
plus un fief, une chasse gardée, nous serons heureux, M. Gonthier,
d'appuyer votre proposition en ce qui concerne les musées en
général et en particulier le Musée des Beaux-Arts de
Montréal.
M. LE PRESIDENT: M. Léger.
M. LEGER: M. le Président, je ne voudrais poser que quelques
questions d'information. Est-ce l'Association des musées comme telle qui
reçoit les subventions ou si ce sont les musées
individuellement?
M. GONTHIER: Les musées individuellement.
M. LEGER: L'association comme telle ne reçoit aucune
subvention?
M. GONTHIER: Non. Elle ne reçoit aucune subvention que je sache.
C'est une association qui vise à permettre l'échange
d'informations,
de connaissances entre les diverses institutions et personnes membres de
cette association.
M. LEGER: Les différents musées reçoivent des
subventions du gouvernement. Est-ce que le ministère du Tourisme est un
des ministères qui fournissent des subventions au musée? Vous
avez parlé de l'attrait qu'ont les musées pour les touristes;
est-ce que le ministère fournit quelque subvention?
M. GONTHIER: Je ne pourrais vous répondre en toute connaissance
de cause que pour le Musée des Beaux-Arts de Montréal, et la
réponse est non. Nous recevons des subventions du ministère des
Affaires culturelles, du Conseil des arts de Montréal et du Conseil des
arts du Canada.
Evidemment encore, malgré ces subventions, notre source
principale de fonds reste le mécénat privé. Seulement la
demande s'est accrue tellement, les frais ont crû en conséquence,
si bien que le mécénat ne suffit plus. Le musée est
beaucoup trop petit, il a besoin de s'agrandir; alors il a besoin, pour appuyer
son action et lui permettre de servir plus pleinement la communauté, de
l'apport des autorités publiques.
M. LEGER: Je vous remercie, M. Gonthier. J'appuie aussi la proposition
que vous faites, que le gouvernement vous donne l'exemption de cette taxe,
étant donné que c'est un organisme nécessaire et sans but
lucratif.
M. GONTHIER: Merci.
M. LE PRESIDENT: Merci, Me Gonthier. J'inviterais maintenant
l'Association des jardiniers maraîchers de la région de
Montréal. Je crois que c'est M. Daigneau qui est son porte-parole.
Association des jardiniers maraîchers de la
région de Montréal
M. JASMIN: M. le Président, MM. les membres de la commission
parlementaire des Affaires municipales, messieurs. Mon nom est Jean-Jacques
Jasmin, secrétaire de l'Association des jardiniers maraîchers de
Montréal. En fonction des différentes définitions du terme
cultivateur, je ne peux pas dire que je suis cultivateur, je ne le sais pas.
Disons en tout cas que je suis secrétaire de l'association.
Au nom des jardiniers maraîchers de la région de
Montréal, il nous fait bien plaisir de vous soumettre notre
mémoire, que vous avez probablement entre les mains depuis
déjà un bout de temps et que vous avez eu l'occasion de lire. Je
n'ai pas l'intention ce matin de vous en faire lecture mais seulement de faire
certains commentaires sur ce mémoire.
Les maraîchers se considèrent également comme
cultivateurs et pour une bonne raison: ils exploitent, sur un outil de travail
qui est le leur, un fonds de terre, un commerce qui est celui de produire des
vivres pour la population de la province et d'ailleurs. Comme je vous le
disais, leur outil de travail principal est le fonds de terre. Sans cette terre
on ne peut pas parler d'eux comme maraîchers ou comme cultivateurs,
nécessairement. Vous me direz qu'il y a des moyens de produire sans sol
par méthodes hydroponiques, j'admets cela; mais, pour déposer les
bains dans lesquels certaines solutions peuvent produire des aliments que
certaines personnes peuvent prétendre pollués, il faut encore de
la terre pour asseoir ces bains dans lesquels les produits sont
cultivés.
Donc, par mon préambule, vous imaginez que l'article lm) de votre
bill nous cause certains problèmes.
Premièrement, parce que vous omettez dans votre définition
de cultivateur un élément très important d'une classe de
la production maraîchère qui est la production des fleurs.
Plusieurs membres de notre association, qui sont des maraîchers au sens
propre du mot, comme nous l'entendons, sont également des producteurs de
fleurs, les deux choses allant de pair. Nous serions heureux de voir, à
l'article lm), quelques mots retranchés, spécialement les mots
"autre qu'un floriculteur".
Le maraîcher a besoin de sa terre pour cultiver, comme le
mécanicien ou le machiniste qui va travailler avec un coffre d'outils.
Le coffre d'outils du maraîcher étant sa terre, pourquoi imposer
des taxes sur cet outil de travail? Nous croyons que les taxations sur cet
outil de travail sont ici, jusqu'à un certain point,
injustifiées.
Donc, en fonction de ce préambule, nous proposons certains
amendements au bill. D'abord nous aimerions que l'article lm) se lise comme
suit: "Agriculteur" serait remplacé par la définition suivante:
"Premièrement, une personne physique qui tire sa subsistance et celle de
sa famille ou au moins 25 p.c. du total de son revenu brut de la culture du
sol, de l'élevage d'abeilles ou d'animaux de ferme ou de l'exploitation
de leur production, de l'élevage d'animaux à fourrure, de
l'exploitation d'un verger, d'une érablière ou d'un boisé
de ferme. "Deuxièmement, une personne physique qui tire sa substance et
celle de sa famille ou au moins 25 p.c. du total de son revenu brut de loyers
de ferme et autres rémunérations provenant d'une compagnie
à fonds social dont il est actionnaire et dont la majorité, en
valeur, des actions est détenue par des agriculteurs."
Cette deuxième partie de l'article lm), corrigée telle que
nous vous la présentons, messieurs, est due à des politiques d'un
autre de vos ministères, celui de l'Agriculture, qui insiste pour que
les producteurs consolident leurs fermes, étant donné que
l'agriculture est probablement une des industries les plus marginales
actuellement. Alors que les prix de vente des produits agricoles n'ont pas
sensiblement aug-
menté dans les vingt dernières années, les prix du
matériel, par contre, c'est-à-dire de la machinerie de ferme, de
l'engrais chimique, des pesticides, de même que le travail et les taxes,
etc., ont augmenté sensiblement. Dans le but de pallier ces choses, le
ministère de l'Agriculture a demandé aux cultivateurs de
consolider leurs fermes. Depuis quelque temps, plusieurs membres d'une
même famille ou plusieurs voisins, dans ce but, ont réuni leurs
terres pour ne former qu'une seule exploitation et réduire leurs frais
d'exploitation.
Ces corporations ou compagnies limitées sont formées de
quelques membres, tous producteurs, tous agriculteurs et tous
propriétaires du fonds de terre, car ils louent leur fonds de terre
à la corporation. Nécessairement, le cultivateur qui travaille
pour sa propre corporation tire un salaire de sa corporation, étant
donné que les moyens d'exploitation sont mis en commun. Cet individu
qui, dans l'esprit de la loi, est un cultivateur, aux termes de la loi,
retirerait plus de 75 p.c. d'un revenu, d'un salaire, alors que la location de
son bout de terre à la corporation lui rapporte moins de 25 p.c.
Aux termes de la définition du bill 48 que nous étudions
aujourd'hui, cette personne-là verrait son fonds de terre taxé,
se verrait imposer et, nécessairement, ceci pourrait entraf-ner la
dissolution de ces corporations et un recul de l'agriculture.
Nous aimerions que le deuxième paragraphe de l'article 30 soit
remplacé par le paragraphe suivant: "Un tel terrain ainsi que les
bâtiments qui s'y trouvent, quelle qu'en soit la valeur, servant à
l'exploitation de la ferme et la maison d'habitation, jusqu'à
concurrence d'une valeur de $15,000, sont exempts de toutes taxes
foncières générales ou spéciales pour la partie de
la valeur portée au rôle qui excède $150 l'arpent, sous
réserve, quant à son imposition, de l'article 107. La partie de
la valeur de la maison d'habitation qui excède $15,000 ne
bénéficie d'aucune exemption." Ceci permettrait de limiter le
rôle d'évaluation, comme je vous le disais tout à l'heure,
à un outil de travail qui est l'outil du cultivateur, du
maraîcher.
A l'article 30, nous aimerions voir le quatrième paragraphe
remplacé par l'article suivant: "L'alinéa qui
précède ne s'applique pas: a) à un terrain qui a
cessé d'être utilisé en totalité ou en partie
à des fins agricoles, pourvu qu'il ne soit pas autrement utilisé
et que son propriétaire ait exercé la profession d'agriculteur au
cours des quinze dernières années." Ceci, parce que nous avons
plusieurs cultivateurs qui, vieillissant, décident de conserver leur
maison, de rester sur leur terre. Il n'y a aucun but spéculatif
là-dedans. C'est qu'ils sont attachés à un lopin de terre
qu'ils ont cultivé depuis des années. Ils sont attachés
à la communauté dans laquelle ils vivent et ils désirent
demeurer sur ces -terrains, peut-être pour continuer à les
cultiver en foin ou en grain, mais sûrement pas pour en retirer la
majeure partie de leurs revenus. A ces cultivateurs retirés, à la
retraite, il serait certainement très dur d'imposer une taxe
foncière qui les forcerait à vendre la maison dans laquelle ils
sont nés et à s'en aller vivre dans un hospice ou dans une petite
maison au village.
Pour continuer ce quatrième paragraphe de l'article 30: b) "Un
terrain transmis par décès pour l'année financière
au cours de laquelle suit le décès... Pardon! Je m'excuse. Je
reprends, je bafouille énormément, "a un terrain transmis pas
décès pour l'année financière au cours de laquelle
survient le décès ainsi que pour les quatre années
financières subséquentes si ce terrain, quoique non
cultivé, ne change pas de destinataire ou de propriétaire."
Messieurs, plusieurs parmi vous, êtes avocats. Vous savez que pour
régler certaines successions, un délai de deux ans est
certainement très court, et tout spécialement lorsqu'il y a des
transferts de titres sur des propriétés.
Au paragraphe c) du paragraphe 4 de l'article 30: "a un terrain vendu
à un autre cultivateur." Autrement dit, la terre ne change pas de
fonction. La fonction continue à être un outil de travail.
Messieurs, ce sont à peu près les seuls commentaires que
j'ai à faire en fonction de notre mémoire. Permettez-moi
d'insister ici sur la fin de notre mémoire dans lequel nous appuyons
fortement le mémoire qui vous a déjà été
présenté ici et qui a été discuté, le
mémoire de la Corporation du marché central métropolitain
limitée, qui est un de nos organismes de mise en marché.
Ce marché appartenant aux cultivateurs, aux maraîchers en
grande partie, s'il advenait que pour des raisons de taxes le Marché
central métropolitain avait à fermer ses portes, les
maraîchers de la région de Montréal et de la province se
verraient plongés dans un problème certainement très
grave. Nous reculerions de trente ans.
Messieurs, c'est à peu près tous les commentaires que j'ai
à faire en marge de ce mémoire. Si vous avez des questions, je
suis prêt à y répondre.
M. LE PRESIDENT (Veilleux): La parole est au ministre des Affaires
municipales.
M. TESSIER: M. le Président, je remercie M. Jasmin des
commentaires qu'il a apportés en ce qui concerne la partie qui touche
les agriculteurs dans le projet de loi. Nous nous sommes rendu compte,
après avoir pris connaissance de six ou sept mémoires qui nous
ont été envoyés, dont le vôtre, qu'il fallait
apporter certains amendements à la définition de l'agriculteur
â l'article lm), de même que certains amendements à
l'article 30.
Je crois qu'il va falloir plutôt envisager la definition de la
terre même plutôt que de celui qui l'exploite. En d'autres termes,
le but que
nous voulions atteindre était de toucher le spéculateur.
Le but ultime à atteindre par ces deux articles est d'empêcher la
spéculation, d'un côté, et de taxer celui qui achète
une terre dans le but d'en faire un lotissement, d'autre part.
Il va falloir redéfinir exactement, je crois, ce qu'est une terre
agricole et ce qu'est un agriculteur. Je comprends que dans le cas des
maraîchers, des horticulteurs, surtout de la région de
Montréal, on tient une comptabilité. Cela peut ne pas vous causer
trop d'ennuis. Mais lorsque je pense au cultivateur marginal, dans d'autres
parties de la province, qui est à la fois bûcheron, pêcheur
et qui retire une très petite partie de ses revenus de la terre,
celui-là ne tient pas de comptabilité. Il ne sait même pas
ce que la terre lui rapporte. Tout ce qu'il sait, c'est que la terre ne le fait
pas vivre et qu'il est obligé d'aller gagner la principale source de ses
revenus en dehors pour faire vivre sa famille.
C'est cette question également qu'il faut examiner de très
près. Je vous avouerai franchement qu'on a modifié cet article
à plusieurs reprises au cours des études et de la
rédaction du projet de loi. Je pense qu'on l'a changé au moins
à cinq reprises. Il est extrêmement difficile de trouver une
formule parfaite. Mais nous espérons qu'à l'aide des
mémoires que nous avons reçus et que nous recevrons, on nous fera
des suggestions valables que nous pourrons retenir, et que nous pourrons
arriver à une rédaction qui rendra justice à la classe
agricole. Je dois déclarer immédiatement que ce n'est pas
l'intention du gouvernement d'alourdir le fardeau de la taxe pour les
cultivateurs. Il s'agit de ne pas augmenter ce fardeau, mais, d'autre part, de
taxer le spéculateur.
C'est là qu'est la difficulté de trouver la formule qui
couvrira les deux cas.
Nous ne sommes pas en mesure, actuellement, de proposer un texte
précis d'amendement. Nous préférons attendre que les
autres mémoires nous soient présentés. Lorsque nous aurons
entendu toutes les représentations de la part de la classe agricole,
nous serons en mesure de refaire complètement la rédaction de
l'article lm) et de l'article 30.
M. PAUL: Est-ce que le ministre a consulté son collègue,
le ministre de l'Agriculture, quant à la définition possible du
terme "cultivateur" et ce qu'elle devrait comprendre, à toutes fins
pratiques?
M. TESSIER: Je n'ai pas consulté personnellement mon
collègue, le ministre de l'Agriculture, mais il y a eu consultation au
niveau des fonctionnaires de mon ministère et de ceux du
ministère de l'Agriculture.
M. LE PRESIDENT (Veilleux): L'honorable député de
Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Prési- dent, je remercie M.
Daigneau de son mémoire qui remet en lumière certaines faiblesses
du projet de loi.
M. LE PRESIDENT (Veilleux): C'est M. Jasmin, n'est-ce pas?
M. JASMIN: C'est cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Excusez-moi, M. Jasmin.
M. JASMIN: Je m'excuse. M. Daigneau, le président de notre
association, ne pouvait pas être ici aujourd'hui. C'est moi qui le
remplace.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le ministre qui m'a induit en
erreur.
M. PAUL: Je vous ai toujours dit de le surveiller.
M. TESSIER: Je m'en excuse.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le jasmin, cela fait partie des fleurs. Cela
relève des "floriculteurs".
Alors, M. Jasmin, je vous remercie de votre mémoire. Vous avez
souligné une des difficultés majeures du projet de loi. Un projet
de loi pèche toujours, ordinairement, par ses définitions. Celle
du terme "agriculteur" en est une. Mon collègue, M. Vincent, vous
interrogera là-dessus.
Je voudrais simplement souligner un aspect de votre mémoire qui
se trouve tout à la fin, quand vous nous dites que vous appuyez le
mémoire qui a été présenté par le
Marché central métropolitain limitée de Montréal.
Nous avons eu l'occasion, l'autre jour, d'interroger longuement les
représentants de cette association. Nous leur avons exprimé non
seulement notre intérêt mais notre appui. J'aimerais savoir du
ministre s'il a poursuivi ses recherches en ce qui concerne le Marché
central métropolitain parce qu'il s'agit, évidemment, d'un
problème de très grande importance, qui risque de jeter par terre
un très grand nombre de citoyens qui pratiquent ce métier de
l'agriculture sous une forme ou sous une autre. Alors, j'imagine que le
ministre est aujourd'hui en mesure de nous donner des précisions en ce
qui concerne les intentions du ministère au sujet du Marché
central métropolitain.
M. TESSIER: M. le Président, je dois dire que cette question est
toujours à l'étude.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre me dit que cette question est
toujours à l'étude. Mais vous savez, quand on commence ses
études, on commence par la maternelle, l'école primaire, le
secondaire et on passe à l'université éventuellement. Mais
il vient un temps où on obtient son brevet. Est-ce que le ministre
peut
nous dire à quel moment il nous présentera son
brevet...
M. TESSIER: Nous sommes à la veille d'obtenir notre brevet.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...en ce qui concerne le Marché central
métropolitain, parce que c'est...
M. TESSIER: Je suis à la veille d'avoir mon diplôme.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je doute fort que si c'est nous qui vous
faisons passer l'examen, vous l'obteniez. Mais je voudrais bien que vous
rassuriez les jardiniers maraîchers au sujet de ce Marché central
métropolitain.
M. TESSIER: Il y aura sûrement quelque chose de fait.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Quelque chose, cela veut dire quoi? Et dans
quel sens?
M. TESSIER: Je vous ai dit que nous continuions à étudier
ce problème. Evidemment, il y a énormément d'amendements
à apporter au bill 48, sans aucun doute. Je n'ai pas...
M. PAUL: C'est un bill à refaire.
M. TESSIER: Peut-être pas à refaire au complet, mais il y a
certainement plusieurs articles à rédiger de nouveau.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. TESSIER: Cela, il faut l'admettre. D'ailleurs, je l'ai exprimé
au tout début. C'est justement pour cela que nous sommes heureux que ce
projet de loi ait été envoyé à la commission
parlementaire, afin de donner l'occasion, justement, de recevoir des
représentations et des suggestions qui nous permettront de
l'améliorer.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre, à une question que lui a
posée mon collègue, le député de Maskinongé,
à savoir s'il avait consulté son collègue le ministre de
l'Agriculture.
Il nous a dit qu'il ne l'avait pas fait personnellement. Alors, il y a
deux projets de loi qui se recoupent: la Loi du syndicalisme agricole, la Loi
sur l'évaluation foncière et il y aura le projet de loi que nous
a annoncé le ministre de l'Education sur la fiscalité scolaire.
Il y aura donc trois projets de loi qui vont se recouper. Nous en sommes au
stade des brouillons, des devoirs d'élèves. Est-ce que les trois
étudiants, le ministre de l'Agriculture, le ministre de l'Education et
le ministre des Affaires municipales, vont se consulter pour faire en commun
leurs devoirs, pour s'entendre sur certaines définitions?
M. TESSIER: Je pourrais peut-être ajouter que j'ai dit tout
à l'heure que je n'avais pas eu de consultation avec mon
collègue, le ministre de l'Agriculture.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous pourriez consulter M. Springate.
M. TESSIER: Mais je pourrais peut-être préciser que j'ai
reçu, tout de même, certaines représentations de la part de
mon collègue le ministre de l'Agriculture, personnellement. Nous n'avons
pas discuté ensemble, mais il m'a soumis un mémoire sur certains
points du bill 48.
M. PAUL: Est-ce au sujet de la pomiculture?
M. TESSIER: Pas précisément.
M. PAUL: Le ministre a une interprétation très large,
parce que celui qui possède un pommier est un pomiculteur au sens de la
loi du cidre.
M. VINCENT: Deux pommiers.
M. PAUL: Deux pommiers alors. Il ne faudrait pas que nous ayons cette
même largesse d'interprétation dans la Loi sur l'évaluation
foncière.
M. TESSIER: Deux pommiers de combien de pommes chacun?
M. PAUL: Ah! vous demanderez ça au député de
Rouville.
M. TESSIER: C'est très important. S'il n'y a qu'une pomme par
pommier...
M. PAUL: Il est devenu sidéré après l'adoption de
la loi.
M. VINCENT: M. le Président, question supplémentaire
à la question posée par le député de Chicoutimi
concernant le Marché central métropolitain. Comme les terrains de
golf sont d'actualité, n'y aurait-il pas possibilité d'apporter
les mêmes exemptions pour les terrains du Marché central
métropolitain?
M. TESSIER: ... d'actualité à Saint-Féréol,
seulement.
M. VINCENT: Oui, à Saint-Féréol seulement, à
cause de la température.
M. PAUL: M. Vézina pourrait nous donner plus de
précisions.
M. VINCENT: N'y aurait-il pas lieu d'apporter les mêmes exemptions
pour les terrains du Marché central métropolitain que celles
appor-
tées ici dans le bill 48 concernant les terrains de golf? Vous
auriez là un modèle d'exemptions qui pourrait probablement
satisfaire; je pense que M. Jasmin est au courant. Si les mêmes
exemptions apportées pour les terrains de golf étaient
apportées pour le Marché central métropolitain, M. Jasmin,
je pense que ça donnerait satisfaction aux intéressés.
M. JASMIN: Disons que ce serait aux gens du Marché central
métropolitain de le mentionner, mais disons que les maraîchers,
comme actionnaires du Marché central, seraient heureux de voir une chose
comme ça se faire, certainement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. le Président, je reviens
à la question que je posais tout à l'heure au ministre. Je lui
disais qu'il y a trois projets de loi qui se recoupent dans leurs definitions
et même dans leurs intentions. Avant que nous n'entreprenions en Chambre
l'étude de ces trois projets de loi, le ministre a-t-il l'intention de
présenter celui-ci d'abord? Est-ce que la présentation de ce
projet de loi sur l'évaluation foncière est pour
bientôt?
M. TESSIER: Il est présenté, il a été
adopté en deuxième lecture.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est-à-dire que nous vous avons fait
reculer, nous avons demandé que vous le présentiez ici en
commission parlementaire. Donc, ce projet de loi que vous...
M. TESSIER: M. le Président,...
M. TREMBLAY (Chicoutimi); Laissez moi m'expliquer.
M. TESSIER: Je veux rectifier, c'est faux ce que l'on dit là.
C'est absolument faux et je renvoie le député de Chicoutimi aux
Débats de l'Assemblée nationale, c'est moi qui ai proposé
que le bill 48 soit envoyé à la commission parlementaire.
M. PAUL: Le lundi, après la fête de la
Confédération, en deuxième lecture, le
député de Maskinongé, au nom de l'Opposition, vous avait
demandé d'envoyer ce projet de loi pour étude à la
commission parlementaire des Affaires municipales; vous n'avez pas voulu, dans
le temps. C'est à la suite de pressions que vous avez consenti à
ramener ce bill, devant la logique des arguments qui étaient
présentés. C'est vous-même qui ce matin et à la
première séance reconnaissiez que la demande que nous avions
faite et que les pressions qui étaient exercées étaient
bien justifiées.
Je veux vous renvoyer au journal des Débats du mercredi, 30
juin.
M. TESSIER: Que dit-il?
M. PAUL: Vous le lirez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, revenant à la question que je
posais au ministre en tout calme et sérénité comme nous
avons coutume de le faire, le ministre nous déclare son intention de
présenter son projet de loi à la reprise des travaux de la
Chambre. C'est bien son intention. Mais, est-ce que entre temps, il y aura
consultation par écrit, verbale ou autrement, ou par
l'intermédiaire de M. Springate, pour établir l'ordre de
priorité dans la présentation du projet de loi? Comme je l'ai dit
tout à l'heure, il y a trois lois qui se recoupent et le ministre de
l'Education en a annoncé une autre sur la fiscalité scolaire
où nous allons devoir nécessairement retrouver les mêmes
définitions.
Si, par hypothèse, cette loi no 48 venait la première,
comme elle comporte des définitions que nous allons retrouver dans la
Loi du syndicalisme agricole et éventuellement dans la loi portant sur
la fiscalité scolaire, il est extrêmement important que le
ministre nous indique tout de suite dans quel sens va s'infléchir sa
politique en ce qui concerne les définitions d'agriculteur
notamment.
M. TESSIER: D'abord, M. le Président, ce n'est pas à moi
de décider l'ordre dans lequel les lois seront amenées devant
l'Assemblée nationale. Mon collègue sait fort bien que cette
question relève du leader du gouvernement. Quant à moi, la
manière dont j'envisage les choses, c'est que le projet de loi no 48,
ayant été adopté en première et deuxième
lectures pour être déféré ensuite devant la
commission parlementaire des Affaires municipales...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A notre demande.
M. PAUL: Après étude de 35 articles. M. TESSIER: Oui,
oui.
M. PAUL: Il y a eu un ordre de rescision, résultat du travail du
comité plénier.
M. TESSIER: C'est ça, motion d'annuler cette étude.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Aux fins de rescinder.
M. TESSIER: ...nous allons entendre toutes les représentations
qui peuvent nous venir de la part du public. Nous allons prendre en
considération tous les mémoires et lorsque ceci aura
été épuisé, c'est-à-dire peut-être
avec une autre ou deux autres séances comme celle d'aujourd'hui, nous
étudierons en comité, article par article le projet de loi no 48
et, ensuite, nous ferons rapport à l'Assemblée nationale et nous
passerons à la troisième lecture.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, le ministre...
M. TESSIER : Maintenant, dans quel ordre ça va se faire, par
rapport aux deux autres lois auxquelles vous avez fait allusion, ça je
ne peux vous le dire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, le ministre évidemment...
M. TESSIER: Mais je prends bonne note de votre suggestion.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, le ministre ne nous
apprend rien en nous disant que le projet de loi, après étude en
commission parlementaire, va devoir revenir devant la Chambre pour être
soumis à l'examen du comité plénier. Cela, c'est
élémentaire en procédure parlementaire. Je veux savoir
et c'est là l'objet de la question précise que j'ai
posée au ministre dans quel ordre seront présentés
ces projets de loi. Il me dit: Ce n'est pas moi qui dirige les travaux de la
Chambre. D'accord. Mais, comme il y a trois lois qui vont comporter des
provisions analogues, particulièrement en ce qui concerne les
définitions, il est important, quel que soit le projet de loi qui sera
présenté le premier devant la Chambre, de savoir quelle est,
enfin, l'idée du ministre des Affaires municipales en ce qui concerne la
définition d'agriculteur.
M. TESSIER: Sur cette question-là, M. le Président, j'ai
dit tout à l'heure qu'après que nous aurons pris connaissance de
tous les mémoires et entendu toutes les représentations des
agriculteurs nous allons redéfinir exactement à l'article lm) ce
qu'est un agriculteur.
M. VINCENT: Dans quel sens? Est-ce que le ministre pourrait nous
mentionner immédiatement dans quel sens iront les grandes lignes de
cette nouvelle définition? Voici pourquoi je pose cette question et je
m'excuse auprès du député de Chicoutimi de l'interrompre.
Déjà, nous avons félicité le ministre avec plaisir
d'avoir apporté une définition plus concrète du terme
agriculteur dans le bill 48. Cela, c'est un fait acquis et je pense bien que
les agriculteurs conviendront avec nous que, déjà, nous avons
l'amorce d'une définition plus réaliste du terme agriculteur ou
du mot que nous employons, "cultivateur".
Nous aimerions savoir du ministre si les paroles qu'il vient de
prononcer signifient qu'il pourrait y avoir un recul de sa part afin d'arriver
à une définition qui sera encore aussi floue que celle que nous
retrouvons dans le bill 64, la Loi du syndicalisme agricole où, en
définitive, il n'y a pas du tout de définition. On dit simplement
d'un agriculteur "toute personne physique qui cultive le sol".
M. TESSIER: Parlons du bill 48.
M. VINCENT: C'est là...
M. TESSIER: Si vous voulez me laisser finir ce que j'étais
à vous dire, nous allons, après avoir entendu toutes ces
représentations, redéfinir, améliorer la
définition. Ce n'est certainement pas pour reculer, c'est pour avoir une
meilleure définition. Nous allons nous inspirer, pour cette
définition, des recommantations qui vont nous être faites par les
agriculteurs eux-mêmes. C'est aussi simple que cela.
M. VINCENT: Maintenant, est-ce que le ministre...
M. TESSIER: Après que nous aurons redéfini, que nous
aurons étudié entre nous cette définition, cela ne veut
pas dire que la définition que je vais donner du terme "agriculteur"
sera parfaite. Il y aura peut-être même possibilité de
l'améliorer encore si vous avez de bonnes suggestions à
faire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sans aucun doute.
M. PAUL: Vous ne devriez pas douter de cela.
M. TESSIER: Je crois que j'ai montré, jusqu'à
présent, beaucoup de collaboration afin d'avoir la meilleure loi
possible.
M. VINCENT: Assurément, mais...
M. TESSIER: Après cela et avant cela, il y aura consultation avec
mon collègue le ministre de l'Agriculture de même qu'avec mon
collègue le ministre de l'Education afin que nous nous entendions pour
avoir la même définition. C'est cela que je voulais dire.
M. VINCENT: Comme cela, le ministre peut nous confirmer que nous aurons
la même définition dans les trois lois dont fait mention le
député de Chicoutimi pour éviter justement que...
M. TESSIER: C'est mon intention.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il ne faut pas que ce soit seulement votre
intention, il faut aussi que ce soit votre volonté.
M. PAUL: Votre volonté.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous comprenez dans quel chaos on se
trouverait s'il y avait trois définitions différentes dans
chacune des trois lois. Rassurez-nous en nous disant que c'est votre
volonté.
M. TESSIER: Il va y avoir consultation, je ne peux vous en dire plus
long pour ce matin. Il y aura certainement consultation après qu'au
ministère des Affaires municipales nous serons
arrivés à vous suggérer notre définition du
terme "agriculteur". Dès que nous aurons rédigé de nouveau
l'article 1-m), il sera soumis à mes deux collègues.
M. LEGER: Est-ce que je pourrais poser une question au ministre? Est-ce
que le ministre a affirmé tantôt ceci: Que lorsque nous
étions en comité plénier pour l'adoption du bill 45 il y
avait environ 30 ou 35 articles d'adoptés?
M. TESSIER: Pour le bill 48.
M. LEGER: Pour le bill 48, excusez-moi. Est-ce que vous voulez dire par
là que les 35 articles adoptés sont remis en question? C'est
là qu'on peut dire que c'est un recul, puisqu'il y avait quelque chose
d'adopté à ce moment-là.
M. TESSIER: J'ai présenté une motion dans ce sens.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y avait 35 articles et il y a eu motion aux
fins de rescinder...
M. TESSIER: C'est cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... les décisions du comité
plénier.
M. TESSIER: C'est cela. De plus en plus, au fur et à mesure que
nous poursuivions l'étude en comité plénier des articles
de ce projet de loi, je me suis rendu compte que cela commençait
à devenir assez grave.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous avions noté le caractère
d'improvisation de la loi et c'est ce qui a amené le ministre à
résipiscence.
M. TESSIER: Ce n'est pas cela du tout. Le projet de loi avait
été bien étudié, bien mûri, mais c'est un
projet de loi extrêmement important et je croyais que nous allions trop
vite.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous improvisiez.
M. TESSIER: C'est ce dont je me suis rendu compte.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous improvisiez rapidement.
M. TESSIER: Nous n'improvisions pas. Nous en avons tout de même
discuté et vous en avez discuté avec moi. Nous en avons tous
discuté ensemble. Ces articles ont été adoptés
jusqu'à l'article 35, après que certains amendements furent
apportés. Disons que je n'étais pas entièrement satisfait,
loin de là.
M. LEGER: Mais on peut dire que si c'était adopté...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous en avons discuté avec le ministre
et nous l'avons convaincu que la meilleure improvisation est celle qui est
longuement préparée.
M. LEGER: De toute façon, M. le Président, on peut dire
que même si une personne recule, ce n'est pas une mauvaise note; cela
montre qu'une personne est sérieuse et qu'elle veut corriger des erreurs
qu'elle peut avoir faites auparavant. C'était tout en son honneur de
vouloir corriger ces choses-là.
M. TESSIER: Mais vous savez...
M. LEGER: Mais il faut admettre, quand même, que le projet
n'était pas prêt.
M. TESSIER: Il y a certains reculs qui sont excellents.
M. LEGER: Oui, pour l'avenir, mais ça ne corrige pas les erreurs
passées.
M. TESSIER: Il y a des reculs stratégiques aussi.
M. LEGER: Oui. Maintenant, M. le Président, je voudrais poser des
questions à...
M. VINCENT: Seulement une question.
M. LEGER: Allez, si vous me remettez le crachoir.
M. VINCENT: Quant au mémoire présenté et lu par M.
Jasmin, avec les explications, en ce qui nous concerne, nous trouvons que les
amendements proposés à l'article 1 qui, en définitive,
gardent dans les grandes lignes les définitions que le ministre a
mentionnées dans le bill 48, sont acceptables comme première
étape pour en arriver à une meilleure définition. Il y a
également l'article 30 qui a soulevé beaucoup de commentaires. Et
cet article 30, tel qu'écrit à nouveau ici par le mémoire
des jardiniers maraîchers, apporte une lumière nouvelle ou des
indications nouvelles. Si le ministre se propose d'apporter des amendements,
c'est bien difficile de demander à M. Jasmin de préciser; c'est
très précis. Je pense bien qu'il faudrait tenir compte des
facteurs ou des points soulevés par le mémoire qui sont
réellement l'expression des agriculteurs de la région de
Montréal.
M. TESSIER: Sans aucun doute, M. le Président, mais...
M. VINCENT: Cependant...
M. TESSIER: ... il faut tenir compte également des autres
mémoires qui vont nous être présentés.
M. VINCENT: Oui, oui.
M. TESSIER: Je crois qu'il y en a sept de la part de la classe
agricole.
M. CROISETIERE: Le ministre était tellement bien disposé,
parce que tantôt, à l'article 27, il nous a proposé un
amendement. Il semblait tellement bien' disposé, ce matin, que nous
croyions qu'il était prêt à nous définir davantage
à l'article 30...
M. TESSIER: En ce qui concerne les musées, c'était clair,
il y avait eu une omission. Nous avons eu un mémoire; nous n'avons pas
eu sept mémoires, nous en avons eu un seul qui représentait
peut-être 75 musées.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un peu fort, 75.
M. TESSIER: Quarante-quatre, bon. Une quarantaine de musées.
Tandis que du côté de la classe agricole, c'est différent,
il n'y a pas un seul mémoire au nom de la classe agricole, mais
plusieurs. Alors, avant que l'on puisse rédiger à nouveau ces
deux articles, il va falloir nécessairement que nous prenions
connaissance de tous ces mémoires. Ce n'est qu'à la fin, lorsque
nous aurons entendu tous les mémoires de la part de la classe agricole,
que nous puiserons dans l'un ou l'autre de ces nombreux
mémoires-là, que nous essaierons de trouver la meilleure
définition possible, laquelle nous vous soumettrons, mes chers
collègues.
M. VINCENT: M. le Président, je continue en disant: Cependant,
à la suite de l'intervention des jardiniers maraîchers et des
autres interventions que nous aurons c'est bien difficile pour nous de poser
des questions à M. Jasmin ou à son groupe, parce que sur les
trois points soulevés par l'Association des jardiniers maraîchers,
le ministre nous mentionne: Cela a du sens, nous écoutons cela avec
beaucoup de sympathie; nous apporterons des amendements. M. Jasmin et
l'association peuvent se retirer en ne sachant pas si leur mémoire est
pris en considération, ni sur quels points il est pris en
considération, ni quels points de leur mémoire seront
respectés. Cela embête également les membres de la
commission, à savoir sur quoi en particulier nous devrions demander
à M. Jasmin de préciser pourquoi ils veulent obtenir telle ou
telle chose. Nous sommes dans une zone grise présentement.
M. TESSIER: Je compte sur vous, justement, lorsque nous aurons une
nouvelle définition de l'agriculteur pour faire valoir les
revendications.
M. VINCENT: Quand?
M. TESSIER: Quand? Avant l'adoption de la loi.
M. VINCENT: C'est bien difficile de faire des suggestions sur une
définition éventuelle qui viendra dans X semaines.
M. CROISETIERE: Après l'audition des mémoires?
M. TESSIER: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le problème qui se pose, M. le
Président, le ministre, je crois, ne le saisit pas très bien.
Lorsque la loi reviendra devant l'Assemblée nationale, on nous proposera
une définition.
Naturellement, il nous sera loisible de l'améliorer en faisant
des suggestions. Mais est-ce que nos suggestions et la version que nous
proposerons au ministre satisferont les gens qui nous ont
présenté les mémoires? C'est pour ça que nous
aurions aimé que le ministre se commît ce matin et nous
indiquât exactement l'envergure qu'il entend donner, le contenu
sémantique de ce terme agriculteur, producteur ou cultivateur.
M. TESSIER: Je regrette, M. le Président, mais je ne peux pas me
commettre ce matin pour faire plaisir à mon collègue le
député de Chicoutimi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas pour me faire plaisir, c'est pour
servir les intérêts du public.
M. PAUL: Pour satisfaire ces gens-là.
M. VINCENT: Donc, M. Jasmin, votre mémoire est pris en
très grande considération et le ministre se commettra un jour ou
l'autre.
M. PAUL: Comptez sur nous pour la défense de vos droits.
M. TESSIER: C'est exactement ce que je vous ai
suggéré.
M. PAUL: Pourquoi ne l'avez-vous pas dit? M. TESSIER: Oui, je viens de
le dire.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Encore une fois nous nous substituerons au
gouvernement.
M. LEGER: M. le Président, j'avais à poser quelques
questions. M. Jasmin tantôt a tenu pour acquis que le mot floriculteur
n'est pas un mot qui s'exclut de la norme de l'agriculture. Est-ce que le
ministre peut me dire si c'est exact?
Tout l'exposé de M. Jasmin portait sur le point que et il
explique "si nos renseignements sont exacts les mots "autre que
floriculteur" sont rayés de l'article".
M. TESSIER: Oui.
M. LEGER: Est-ce exact que, dans votre
esprit actuellement, les floriculteurs feront partie de la
définition d'agriculteur?
M. TESSIER: Oui.
M. LEGER: Je n'avais qu'une question à poser à M. Jasmin.
Tout à l'heure, je vous écoutais attentivement et vous avez
affirmé dans le but probablement d'avoir un adoucissement de la
taxation pour les agriculteurs, chose sur laquelle je suis d'accord que le
revenu de l'agriculteur et du cultivateur ou le prix qu'il vend ses produits
n'ont pas changé depuis vingt ans, comparativement aux prix qu'il doit
payer pour les outils qui lui permettent de faire son travail. Pourriez-vous
expliciter davantage votre pensée?
Est-ce que c'est à peu près ça que vous avez
exprimé tantôt?
M. JASMIN: C'est bien ça. Les rapports statistiques nous montrent
d'une façon très claire que le prix des produits comestibles
à la ferme, la nourriture à la ferme, aussi bien fruits,
légumes, etc., n'a pas augmenté depuis les vingt dernières
années en proportion du coût des intrants qui entrent dans
l'agriculture.
M. LEGER: C'est le mot "en proportion" qui change le sens. Merci.
M. JASMIN: Permettez-moi un autre commentaire ici. On a mentionné
que dans la définition du terme "agriculteur" on pourrait
peut-être suggérer la définition de la terre
elle-même plutôt que la définition de l'homme qui exploite
cette terre-là. Je demanderais au législateur de bien penser que,
dans la définition de la terre, il ne faudrait pas être trop
limitatif, étant donné que certains maraîchers exploitent,
sur des lopins de terre très restreints, des industries qui sont
relativement suffisantes pour faire vivre son homme. Et j'entends
là-dedans les floriculteurs, les producteurs de fraises, les producteurs
de produits en serre, sous verre ou sous couche, etc., qui, sur peut-être
dix ou quinze acres, exploitent une industrie viable.
M. TESSIER: M. Jasmin, je peux vous assurer que nous avons
apprécié ce que vous venez d'exposer.
Je pourrais peut-être revenir sur un point qui a été
soulevé il y a quelques instants par M. Jasmin, le Marché...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le Marché central
métropolitain.
M. TESSIER: Le Marché central métropolitain. Il semblerait
que, dans ce cas, c'est une question d'évaluation. On me dit que les
évalua-teurs de la ville de Montréal ne veulent pas tenir compte,
dans l'évaluation de cet immeuble, des servitudes qui existent, et que
si on tenait compte de ces servitudes, l'évaluation serait
réduite considérablement. Je crois que toute cette question du
Marché central métropolitain est une question de normes
d'évaluation.
C'est précisément un des buts de cette loi-cadre d'obliger
les municipalités à avoir les mêmes normes
d'évaluation, le même manuel d'évaluation. En donnant
justement des pouvoirs à la commission municipale, tel que
mentionné au projet de loi no 48, d'intervenir auprès des
évaluateurs municipaux, je crois que nous pouvons, sans qu'il y ait un
article spécifique dans la loi pour le Marché central
métropolitain, régler le cas à la satisfaction des
horticulteurs de la région métropolitaine de Montréal.
M. VINCENT: Le ministre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre excusez-moi
veut dire par là que les dispositions que prendrait le
gouvernement aboliraient, à toutes fins utiles, les diverses instances
devant lesquelles sont allés les gens du Marché central
métropolitain, d'après ce qui appert dans le mémoire que
nous avons devant nous? Ils n'ont jamais eu gain de cause.
M. TESSIER: Aboliraient les diverses instances. Vous voulez dire devant
les tribunaux?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui.
M. TESSIER: Bien, évidemment, la procédure est
différente, telle que prévue au bill 48. Il y a évidemment
l'appel au bureau de révision, également à la commission
municipale et, par la suite, s'il y a lieu, devant les tribunaux, devant la
cour Provinciale qui aura une section de l'évaluation.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre était présent,
l'autre jour, je présume, quand nous avons pris connaissance de ce
mémoire en commission parlementaire. Il sait très bien que les
problèmes qu'il a évoqués sont réels. Est-ce que
les décisions qu'il entend prendre, lorsqu'il parle de normes, vont
permettre aux gens du Marché central métropolitain d'abolir
toutes les tracasseries judiciaires dont ils disent avoir été
victimes et qui les empêchent de...
M. TESSIER: Je l'espère bien.
M. PAUL: Mais pas rétroactivement?
M. TESSIER: Pardon?
M. PAUL: Pas rétroactivement?
M. TESSIER: Bien, évidemment...
M. PAUL: Parce que, autrement, ce serait une intrusion du politique dans
le judiciaire.
M. TESSIER: On ne peut certainement pas avoir des dispositions
rétroactives. C'est évident que cela va s'appliquer à
compter du prochain
rôle d'évaluation qui sera confectionné
d'après la loi, lorsqu'elle aura été adoptée et
sanctionnée.
M. PAUL: Je pose le problème parce que ce n'est pas la
première fois que le gouvernement actuel intervient dans le judiciaire.
En temps et lieu, on en donnera la preuve, à l'occasion des
débats. C'est pour ça que je veux vous faire
préciser...
M. TESSIER: Restons sur le sujet.
M. PAUL: ...qu'il n'y aura aucune rétroactivité dans la
loi.
M. TESSIER: Bien, il n'y en a pas. M. PAUL: D'accord. Très
bien.
M. TESSIER: Il n'y en a pas actuellement et je n'ai pas l'intention d'en
mettre non plus.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre des Affaires
municipales a consulté son collègue, le ministre de l'Agriculture
et de la Colonisation, en ce qui concerne le Marché central
métropolitain?
M.,TESSIER: Non, pas particulièrement là-dessus.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Est-ce que le ministre a pris connaissance du
document qui a été envoyé, par le Marché central
métropolitain au ministre de l'Agriculture, le 26 août 1970?
M. TESSIER: Le 26 août 1970?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le 26 août 1970.
M. TESSIER: Non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tel qu'il appert au mémoire, page 4. Si
j'ai bonne mémoire, le ministre était présent l'autre jour
quand on a lu ce mémoire.
M. TESSIER: J'ai pris connaissance du mémoire qui a
été présenté par le Marché central
métropolitain, d'accord, en même temps que vous tous, d'ailleurs.
Je suis parfaitement conscient d'ailleurs, je l'ai déclaré
à cette occasion-là qu'il y avait une injustice en ce qui
concernait le Marché central métropolitain. Je l'ai bien
déclaré devant cette commission.
M. VINCENT: A cause des normes qu'on étudie
présentement...
M. TESSIER: Exactement. C'est ça.
M. VINCENT: ...mais ces normes pourraient être utilisées
quand même. On prend un exem- ple: les terrains de golf. Si, par exemple,
les terrains que le Marché central métropolitain possède
étaient convertis en terrains de golf, bien, les mêmes injustices
se produiraient, sauf qu'avec le bill 48 il y a une exemption pour les terrains
de golf. Il y aurait des exemptions pour les terrains de golf.
M. TESSIER: Oui, mais en ce qui concerne le Marché central
métropolitain cet immeuble est surévalué parce qu'en vertu
des normes qu'on suit actuellement à Montréal on ne tient pas
compte des nombreuses servitudes qui existent sur cet immeuble. C'est là
le problème.
M. JASMIN: M. le ministre...
M. TESSIER: Mais, lorsque le projet de loi no 48 sera appliqué,
on devra se conformer aux nouvelles normes et tenir compte de ces servitudes;
ceci aura pour effet de baisser considérablement l'évaluation.
Et, si, par hasard, on ne veut pas se conformer à la loi, la Commission
municipale aura les pouvoirs d'intervenir et de déterminer
elle-même l'évaluation.
M. VINCENT: M. le Président, je peux dire au ministre ceci, et je
pense que M. Jasmin aurait un commentaire à faire tout à l'heure:
A l'heure actuelle, le Marché central métropolitain, qui occupe
45 acres, je crois...
M. JASMIN: D occupe 109 acres.
M. VINCENT: ... c'est un terrain qui appartient à une compagnie.
Généralement, un terrain qui appartient à un particulier
ou à une personne physique est évalué sur quatre faces.
Mais ce terrain appartient à la compagnie et celle-ci y a construit des
routes, des chemins. Au lieu d'évaluer le terrain comme tel sur quatre
faces, on l'évalue à l'intérieur des routes, à
l'intérieur des chemins, comme si un particulier avait des ruelles ou
des entrées de cour et qu'on évaluait chaque côté de
l'entrée de cour. C'est là que le problème se pose
à l'heure actuelle. Au lieu d'être un terrain évalué
sur les quatre faces, il l'est comme un terrain qui serait divisé en
lots prêts à être vendus et chaque lot est
évalué à l'intérieur du Marché central
métropolitain. C'est là qu'est tout le problème.
Est-ce que M. Jasmin pourrait nous faire des commentaires
là-dessus? Je pense qu'il est parfaitement au courant du
problème.
M. JASMIN: J'ai certains commentaires à faire là-dessus,
certainement. Le principal est que ces terrains sont évalués sur
la même base que les terrains avoisinants et ces terrains sont, en
réalité comme ceux des agriculteurs: un outil de travail. C'est
un outil de mise en marché. Je ne demande pas à la commission,
qui est loin de la mise en marché des produits agricoles, de comprendre
l'ampleur du sujet mais ceci est un outil communautaire qui sert à
l'ensemble de la province de Québec, qui agit comme catalyseur et
moyen de distribuer des produits à travers la partie nord-est de
l'Amérique. C'est un outil communautaire et on l'évalue comme si
c'était un outil qui sert à un particulier pour faire de
l'argent.
Regardons votre loi sur l'évaluation. Ce qui manquait au juge ou
aux gens qui règlent les litiges entre la ville de Montréal et le
marché, c'est que dans les lois précédentes il n'y avait
pas suffisamment de critères sur lesquels les juges pouvaient se baser
pour dire: Messieurs, vous n'évaluez pas ça de la bonne
façon. Et il faudrait que dans la loi, ici, il y ait quelque chose qui
le montre.
D'ailleurs, nous avons ici M. Couture, le gérant
général du marché; si vous voulez avoir plus de
commentaires, je suis certain que M. Couture serait bien aise de vous en
apporter plus.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je reviens à une question que j'ai
posée au ministre tout à l'heure: Est-ce qu'il a pris
connaissance du document que le Marché central métropolitain
avait présenté à son collègue, le ministre de
l'Agriculture, le 28 juillet dernier?
M. TESSIER : Les fonctionnaires de mon ministère en ont pris
connaissance...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le Président,
j'interromps tout de suite le ministre pour lui faire savoir que ledit document
se trouve dans le mémoire qu'on nous a lu ici devant la commission.
M. TESSIER: D'accord. Je dis qu'au mois d'août 1970 le...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le 28 juillet 1970.
M. TESSIER: J'ai dit juillet ou août 1970, à ce
moment-là...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre est approximatif.
M. TESSIER: Les fonctionnaires du ministère de l'Agriculture ont
eu des rencontres avec ceux des Affaires municipales qui étaient
chargés particulièrement de préparer la rédaction
du projet de loi no 48. Et il y a eu contact et discussion au niveau des
fonctionnaires à ce moment-là.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): A quel moment ont eu lieu ces
réunions?
M. TESSIER : Immédiatement après ou dans les quelques
semaines qui ont suivi la présentation du mémoire du 28 juillet
1970.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Entre quels fonctionnaires des dits
ministères?
M. TESSIER: Je ne peux pas vous donner les noms. Mais je vous dis qu'il
y a eu contact, à ce moment-là, et discussion entre les
fonctionnaires des deux ministères.
M. PAUL: Y aurait-il possibilité, si le ministre n'est pas en
mesure de nous donner les noms des fonctionnaires, de nous donner les
services?
M. TESSIER: Je peux même préciser que les directeurs des
services juridiques des deux ministères se sont rencontrés
à ce moment-là.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Nous remercions le fonctionnaire.
M. LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres questions, nous vous
remercions, M. Jasmin. Nous invitons M. Nadon ou son représentant, pour
la Société d'agriculture du comté de Laval.
Société d'agriculture du comté de
Laval
M. NADON: M. le Président, messieurs les membres de la commission
parlementaire, mon nom est Lévis Nadon, président de la
Société d'agriculture du comté de Laval. C'est à
titre de président de la Société d'agriculture du
comté de Laval que je viens vous demander de faire quelques
modifications au bill 48.
A la section 1 du paragraphe m), il est écrit: "Agriculteur".
C'est encore un peu la même chose que M. Jasmin. On dit: "Une personne
physique, autre qu'un floriculteur, qui tire sa subsistance et celle de sa
famille ou au moins 25 p.c. du total de son revenu brut". Nous demandons que
les mots "autre que floriculteur" et "25 p.c. du revenu brut" soient
rayés.
Le mot "floriculteur" est difficile à définir. Inclut-il
les maraîchers qui sèment des fleurs, en couches ou en serres,
pour vendre des plants de fleurs en caissettes, ou des géraniums
bouturés, ou des glaïeuls pour l'ornement paysagiste, ou ne veut-on
inclure simplement que les fleuristes qui cultivent des plants importés
pour la vente de fleurs en pots ou coupées?
Nous demandons que les mots "25 p.c. du revenu brut total de la culture
du sol" soient rayés parce que ce serait donner aux villes ou aux
municipalités un droit d'entrer trop loin dans notre vie privée.
Nous n'aimerions pas exposer nos revenus, nos dépenses, les
hypothèques et tout le reste devant des employés municipaux que
nous côtoyons. Et si, par malchance, un agriculteur est frappé par
la maladie ou qu'il ne peut travailler pour une couple d'années, suivant
cette loi, il perd tous ses droits parce que, n'ayant pas obtenu 25 p.c. de son
revenu brut. Nous trouvons que cette phrase est très ambiguë. Nous
préférons la définition suivante: "Agriculteur: Personne
physique dont la principale occupation est l'agriculture." Nous faisons
confiance aux administrateurs de villes et de municipalités pour
déterminer la différence entre un cultivateur et celui qui ne
l'est pas.
Section 3, article 30, premier paragraphe: "Tout terrain appartenant
à un agriculteur, ainsi que les bâtiments qui s'y trouvent,
à l'exception des bâtiments de ferme, sont portés au
rôle à leur valeur marchande".
Texte ambigu entre "bâtiments" et "bâtiments de ferme". Si
l'on veut parler de la maison résidentielle du cultivateur, pourquoi ne
pas l'avoir désignée par son nom? Le cultivateur ou le
secrétaire de différentes corporations municipales qui auront
à interpréter ce texte de loi ne sont pas nécessairement
des hommes de loi.
Section 3, article 30. Nous aimerions que le troisième paragraphe
soit modifié comme suit: "Tout terrain qui cesse d'être
utilisé en totalité ou en partie pour la culture du sol,
l'élevage des abeilles ou d'animaux à fourrure, l'exploitation de
leur production, l'élevage d'animaux à fourrure, l'exploitation
d'un verger, d'une érablière ou d'un boisé de ferme
devrait être taxé sur sa valeur commerciale, sans
rétroactivité de taxes.
La vie de ces cultivateurs je vous donne comme exemple ceux de la
ville de Laval, qui sont situés dans une ville est
troublée, surtout pour ceux qui sont situés près des
développements, par exemple, par le pillage, le piétinage, les
cultures détruites, les fossés remplis d'ordures de toutes
sortes, les routes rurales mal entretenues, les bords de routes non
fauchés, les branches non coupées. De plus, l'agriculteur se voit
obligé de laisser couper ses terres par des pylônes de
l'Hydro-Québec, de la Bell Canada, par des pipe-lines, par le gaz
naturel et par des routes utilisées surtout par les citadins.
Le cultivateur dans une ville est donc obligé de supporter tous
ces inconvénients sans que ses plaintes soient prises en
considération par les villes. Nous, agriculteurs de Laval, sommes
environ 500 et possédons les cinq sixièmes du territoire. La
majorité des cultivateurs sont des jardiniers maraîchers qui
vendent leurs légumes au même prix que lors des années
trente-cinq ou quarante.
Cependant, nous payons tout de trois à quatre fois plus cher,
soit les semences, les engrais, la main-d'oeuvre, les taxes, etc. De plus, nous
sommes aux portes du "dumping" de l'Ontario et des Etats américains,
sans compter les intempéries qui frappent les cultivateurs à tout
moment.
Pourquoi vouloir une rétroactivité de taxes de cinq ans?
Cela, c'est la plus grande injustice envers les cultivateurs. Un cultivateur
qui travaille pendant 30 ou 40 ans pour conserver son bien se prive de voyages
et de loisirs, et vous allez exiger de lui, peut-être, un quart ou un
cinquième de son prix de vente! Ce n'est pas réaliste, messieurs
de la commission. Les cultivateurs n'auront pas le droit d'avoir une somme de
$40,000 ou de $60,000 pour leur terre sans être obligés de
partager avec les corporations. C'est un non-sens. Vous aimeriez mieux,
peut-être, qu'ils grossissent le nombre des assistés sociaux!
Est-ce qu'il n'est pas assez instruit?
Ce cultivateur n'a pourtant rien coûté aux villes. Il n'a
pas eu de bourses d'études ni de prêts; il a simplement
travaillé et ménagé pour avoir une vieillesse heureuse,
tranquille et paisible.
En supposant qu'un cultivateur vende sa ferme, cette taxe va tout
simplement augmenter le prix de vente d'autant, d'où l'inflation. C'est
pourtant ce que les gouvernements essaient de combattre.
Et que dire si le gouvernement fédéral met en application
l'impôt sur les profits de capitaux projeté pour 1972? On dit que
50 p.c. de ces profits seront taxables.
Nous comprenons que les villes ont besoin du produit des taxes pour leur
administration, mais nous nous demandons si, avec des budgets plus restreints,
les conseillers retireraient des pensions de 50 p.c. de leur salaire
après un mandat de huit ans seulement?
En plus, les sommes d'argent dépensées pour les loisirs
devraient faire l'objet de taxes spéciales. Ainsi, les citadins seraient
un peu moins exigeants.
Messieurs, nous, agriculteurs, n'avons pas de fonds de pension. Si nous
ne sommes pas assez prévoyants et administrateurs pour économiser
et freiner ces hausses de taxes qui nous menacent d'année en
année, nous n'aurons que l'assistance sociale pour nous faire vivre
à l'âge de la retraite.
Notez bien, comme il n'est nullement fait mention du mode de taxation
des commissions scolaires dans ce bill 48, que nous demandons que soit
ajouté un article spécial décrétant que celles-ci
devront utiliser le rôle d'évaluation municipale avec les
exemptions qui s'y rattachent.
Le tout humblement soumis, Lévis Nadon, cultivateur et
président de la Société d'agriculture de Laval.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais remercier M. Nadon de
son excellent mémoire. Et pour commencer mes remarques par la
dernière partie du mémoire, c'est-à-dire la note, le nota
bene, évidemment il est prévu que les rôles
d'évaluation scolaire devront être basés sur les
rôles d'évaluation municipale.
Alors, à cette question-là, je suis en mesure de
répondre immédiatement. Je remarque, et pour faire suite à
ce que je disais tout à l'heure, qu'on n'est pas en mesure de donner des
définitions aujourd'hui, je pense que nous en avons justement la preuve.
Le mémoire précédent, qui nous a été
présenté par l'Association des jardiniers maraîchers de la
région de Montréal, admettait la définition du cultivateur
avec des revenus de 25 p.c. Quant à vous, vous vous opposez
complètement à ça, alors là tout de suite nous
sommes en présence de deux mémoires successifs d'une
contradiction tout à fait flagrante.
M. VINCENT: Il y a une nuance assez
considérable M. le Président, si le ministre me le permet.
Ici, dans le mémoire de M. Nadon, on arrive avec une définition
encore plus serrée que celle soumise dans le bill, parce qu'on dit: Nous
préférons la définition suivante: L'agriculteur, personne
physique dont la principale occupation est l'agriculture. Si on
considère que c'est la définition du Crédit agricole,
à ce moment-là on parle de 50 p.c. dont l'occupation principale
est l'agriculture. Et dans le bill 48, le ministre mentionne: "faisant vivre sa
famille avec le fruit de la culture, ou 25 p.c ". Il faudrait faire la
distinction.
M. TESSIER: Non, non, ce que je veux dire, M. le Président, c'est
que dans le mémoire précédent, on admettait, dans la
définition de l'agriculteur, que ce soit celui dont le revenu provient,
jusqu'à concurrence d'au moins 25 p.c, de la culture de la terre, alors
que dans le mémoire que nous avons devant nous, de la
Société d'agriculture du comté de Laval, on veut faire
disparaître complètement ce pourcentage et on suggère une
autre définition.
Ce que je veux simplement dire, M. le Président, c'est que je
crois qu'avant d'en venir à une définition ou à un projet
de définition, nous avons raison d'attendre de recevoir et de discuter
tous les mémoires, parce que nous sommes justement là en face
d'un fait comme celui que je viens d'exposer.
Quant à la définition de floriculteur, je crois, M. Nadon,
que vous avez parfaitement raison; il va falloir le définir. Nous allons
sûrement tenir compte de votre suggestion. Et je pourrais ajouter que,
d'ici deux semaines au plus tard, il y aura rencontre avec le ministère
de l'Agriculture pour que nous nous entendions sur toutes ces
définitions, sur l'ensemble des définitions à donner en ce
qui concerne la classe agricole.
Alors je vous remercie, M. Nadon, nous allons certainement tenir compte
de plusieurs suggestions très valables qui sont contenues dans votre
mémoire.
M. NADON: M. le ministre, si vous permettez, ce à quoi je suis
beaucoup intéressé c'est à la rétroactivité
de cinq ans.
M. TESSIER: Ah! bon, justement là-dessus, disons que j'y ai fait
allusion peut-être un peu vaguement lorsque j'ai dit que nous allions
tenir compte des suggestions très valables contenues dans votre
mémoire.
En mentionnant cela, je voulais en particulier, faire allusion à
la rétroactivité que nous allons réviser.
M. NADON: Dans les années 1958-1960, il s'était vendu
plusieurs terres, mais, depuis trois ans, il y en a 120 que les cultivateurs
ont été obligés de reprendre avec de grosses pertes
d'intérêts et de grosses taxes. Ils sont donc devenus plus pauvres
que lorsqu'ils ont vendu.
M. TESSIER: D'accord, nous en tiendrons compte, sûrement.
M. LEGER: M. le Président, j'aurais juste deux petites questions.
M. Nadon, quand vous parlez de vous opposer à ce que la terre qui n'est
pas exploitée soit taxée sur sa valeur commerciale sans
rétroactivité, vous apportez comme argument premier, que c'est
une occasion pour un cultivateur de se préparer un fonds de pension.
M. NADON: Oui.
M. LEGER: Je pense qu'il y a deux dimensions différentes, il y a
celle où un cultivateur se dit: Bon, cette partie de terre, je la
réserve pour la vendre, à un moment donné, pour avoir un
profit, pour avoir un fonds de pension. Mais celui qui ne cultive pas une bonne
partie de sa terre, qui peut augmenter de valeur du fait que l'urbanisation
s'en vient, pendant qu'il vit de sa terre, cette partie devrait quand
même être taxée sur une base commerciale. Vous voyez quand
même une nuance entre les deux. Du vivant du cultivateur,
c'est-à-dire durant la période où il est producteur, c'est
une partie qui ne sert pas, et du moment où il ne produit pas du tout,
il est à l'âge de la pension et il veut avoir un fonds de pension.
Il y a deux dimensions différentes.
M. NADON: Oui, mais vous ne pouvez pas obliger un homme de 60 ou 65 ans
à entretenir sa terre comme un vrai jardinier. Ce sont ces terres que
nous ne voulons pas voir taxer en grosse valeur.
M. LEGER: Mais quand même vous voyez le problème du fait
qu'il y a des gens autres que des cultivateurs qui peuvent
spéculer parce qu'ils vont se servir de ces terres.
M. NADON : Parmi les cultivateurs, il est très rare qu'il y ait
des spéculateurs. Il peut y en avoir un dans tout une grande ville. Moi,
le premier, quand même je voudrais vendre demain matin, je sais que je ne
trouverai rien. Il faut attendre que le développement se rapproche.
Premièrement, les spéculateurs sont des gens qui ont
été beaucoup échaudés, que ce soit à
Montréal ou à Laval, ou un peu partout. C'est pour ça que
je vous donnais comme exemple que dans l'espace de trois ans il s'est remis
au-delà de 120 terres .
M. LEGER: J'ai mon collègue qui doit aller à une
émission de télévision, je vais lui laisser la parole.
M. VINCENT: M. le Président, comme le ministre, je voudrais
remercier M. Nadon de son bref mémoire mais qui apporte des faits assez
importants. D'abord en ce qui concerne le
floriculteur, le ministre nous a confirmé qu'il y aurait un
amendement, donc passons outre à cette question. En ce qui concerne la
définition du terme "agriculteur", il faudrait quand même
mentionner ici que l'Association des jardiniers maraîchers qui a
présenté son mémoire il y a quelques instants n'a pas
parlé de la définition de l'agriculteur comme étant une
personne physique qui avait 25 p.c. de son revenu, mais comme étant une
personne physique qui tire sa subsistance et celle de sa famille de
l'agriculture ou, pour apporter un volet nouveau, 25 p.c. de son revenu. C'est
à lui de faire la preuve, quand le secrétaire municipal dit: Vous
n'êtes pas agriculteur, même si, lui, considère que c'est sa
principale occupation, c'est à lui de faire la preuve que les 25 p.c. de
son revenu proviennent de l'agriculture.
Maintenant, M. Nadon, dans votre mémoire, il y a un danger quand
vous mentionnez: Nous préférons la définition suivante:
L'agriculteur, personne physique dont la principale occupation est
l'agriculture. Vous pourriez automatiquement, éliminer une série
d'agriculteurs parce qu'elle n'est pas considérée comme
étant leur principale occupation. A l'office du crédit agricole,
on dit: Pour obtenir un crédit agricole, il faut que la principale
occupation soit l'agriculture. Il faut donc qu'il fasse la preuve qu'au moins
50 p.c. de ses revenus proviennent de l'agriculture. Vous pourriez
éliminer ainsi plusieurs agriculteurs de votre région. Il y a un
danger, et je tiens à le souligner immédiatement au ministre,
à prendre seulement cette définition "principal agriculteur "
M. TESSIER: Je pourrais peut-être préciser ceci, M. le
Président...
M. VINCENT: Oui, oui y incluant...
M. TESSIER: ... c'est qu'on parle depuis assez longtemps de la
définition de l'agriculteur. Mais je tiens à faire remarquer, M.
le Président, à mon collègue le député de
Nicolet, que j'ai également mentionné la possibilité de
considérer uniquement la ferme.
Peut-être qu'au lieu de définir l'agriculteur on va
définir ce qu'est une terre agricole.
M. VINCENT: En tenant compte de ce qu'a mentionné M. Jasmin qu'il
y a peut-être des dangers là.
M. TESSIER: C'est ça. C'est pour ça qu'on ne peut pas en
arriver à une conclusion définitive. On va étudier les
deux: la définition de l'agriculteur et la définition d'une ferme
ou d'une exploitation, parce qu'il n'y a pas seulement une ferme; ça
peut être une exploitation. On a parlé tantôt des fraises,
par exemple, des horticulteurs, des fleuristes. Evidemment, il va falloir
tâcher de trouver une définition qui va englober, en somme, les
diverses exploitations agricoles. C'est justement ce qui va faire l'objet de
nos discussions, dans les prochaines semaines, avec le ministère de
l'Agriculture.
M. VINCENT: D'accord, M. le Président. C'est très
important, comme l'a souligné le député de Chicoutimi
je pense bien que les agriculteurs en sont conscients également
que ce soient les mêmes définitions en ce qui concerne la
Loi du syndicalisme agricole et l'autre loi.
M. TESSIER: Je vous l'ai dit, je le considère comme important
moi-même.
M. VINCENT: Nous avons à discuter à une autre commission
exactement du même problème.
M. TESSIER: C'est ça.
M. VINCENT: Maintenant, M. Nadon a souligné un point très
important, au bas de la première page du mémoire, dans sa note
concernant l'article 30. J'aimerais quand même que le ministre fasse ses
commentaires là-dessus. On parle d'un texte ambigu entre bâtiments
et bâtiments de ferme. Je pense qu'il faudra donner un
éclaircissement parce que c'est assez ambigu; on veut dire par là
résidence de la ferme.
M. TESSIER: J'ai mentionné, M. le Président, à M.
Nadon que nous allons considérer toutes ses suggestions très
valables. J'en profite pour féliciter M. Nadon et l'Association de
l'agriculture du comté de Laval. Réellement, c'est certainement
un des meilleurs mémoires qui nous aient été
présentés. Il n'est pas volumineux ; il est très concis et
chaque phrase a son importance. Nous allons réviser également la
définition des bâtiments et des résidences des cultivateurs
afin de faire disparaître toute ambiguïté à ce
sujet.
M. VINCENT: En ce qui concerne la rétroactivité de cinq
ans...
M. TESSIER: Ah! oui, certainement.
M. VINCENT: ... le ministre l'a mentionné. M. Nadon mentionne
également dans son mémoire qu'il est question qu'Ottawa impose le
profit de capital. On le sait; d'ailleurs, le ministre des Finances du
Québec a annoncé cette semaine que lui également avait
l'intention de l'imposer. Là, vous avez deux arguments, Ottawa et
Québec.
M. NADON: Cela fait qu'il ne nous en restera plus!
M. VINCENT: Enfin, nous sommes contents je pense que M. Nadon
doit également l'être que le ministre nous ait
confirmé, au sujet de la note au bas du mémoire concernant
l'évaluation scolaire, qu'il y aurait les mêmes normes
d'évaluation. Ceci va épargner beaucoup de démarches aux
agriculteurs. Je tiens à le confirmer; j'ai eu l'occasion de rencontrer
les agriculteurs de Laval et c'est un des gros problèmes auxquels les
agriculteurs ont à faire face, deux systèmes d'évaluation,
scolaire et municipale.
M. TESSIER: Absolument. A ce sujet, M. le Président, je pourrais
préciser que j'ai eu des conversations avec mon collègue, le
ministre de l'Education. Il est bien convenu que, dès que la
présente loi, le bill 48, aura trouvé son application
évidemment, cela peut prendre quelque temps avant que la loi soit
appliquée à l'ensemble du territoire du Québec,
c'est-à-dire dans toutes les municipalités; il peut
s'écouler peut-être deux ou trois ans avant qu'on puisse
l'appliquer partout dans toutes les municipalités, à ce
moment-là, il n'est plus question d'avoir des normalisations de
rôle. Il y aura un seul rôle uniforme qui servira pour les fins de
taxation scolaire.
M. VINCENT: Merci, M. le Président.
M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous donner un avant-goût
du projet de loi que va présenter le ministre de l'Education sur la
fiscalité scolaire?
M. TESSIER: Non.
M. PAUL: Quelles seront les implications de cette loi? Est-ce qu'elle
viendra en contradiction dans sa rédaction, dans ses définitions
avec le bill 48?
M. TESSIER: Hors d'ordre, M. le Président. Absolument hors
d'ordre !
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je regrette, mais la
question que vient de poser mon collègue est très importante,
parce qu'il y aura un manuel dont nous a parlé longuement le ministre
l'autre jour. Est-ce que ledit manuel va être utilisé par le
ministère de l'Education, lorsqu'il s'agira du
réaménagement de la fiscalité scolaire...
M. PAUL: Et vice versa.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...et vice versa?
M. TESSIER: Il faudra poser la question au ministre de l'Education.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ecoutez, M. le Président. Nous sommes
en présence d'un ministre qui ne me paraît pas être
coopérant...
M. TESSIER: Je ne répondrai certainement pas pour le ministre de
l'Education.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, je n'entends pas que le ministre parle au
nom de son collègue. D'accord. Nous nous entendons là-dessus.
Mais il y a quand même trois projets de loi: La Loi du syndicalisme
agricole, la Loi de l'évaluation foncière et il y a cette loi,
dont le ministre de l'Education nous a dit qu'elle serait déposée
à la reprise des travaux parlementaires, le 26 octobre. La loi ne sera
pas déposée nécessairement le 26, mais...
M. TESSIER: Peut-être le 27.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ...à partir de cette date. Il faut donc
qu'il y ait relation très étroite entre les trois projets de loi,
puisque ces trois projets de loi touchent à des domaines qui se
recoupent et qui, dans bien des cas, sont identiques. Je ne m'attends pas
à ce que le ministre parle au nom de son collègue, mais je
voudrais savoir du ministre de l'Education, si les consultations qu'il a eues
avec son collègue, si le ministre des Affaires municipales, dis-je, dans
les consultations qu'il a eues avec son collègue de l'Education, s'est
entendu, de même qu'avec le ministre de l'Agriculture, sur certaines
définitions et s'il connaît, enfin, est-ce qu'il est
informé de l'économie générale de cette loi qui
portera sur la fiscalité scolaire? Quels en seront les principes?
M. TESSIER: M. le Président, je n'ai certainement pas
l'intention, d'aucune manière, d'aborder, ni de près ni de loin,
tout ce qui peut toucher à ce projet de loi du ministre de l'Education.
Ce que je peux simplement dire et redire, c'est qu'il y a consultations et que
les consultations vont s'intensifier entre le ministère des Affaires
municipales et ceux de l'Agriculture et de l'Education, au cours des prochaines
semaines, afin d'en arriver à des définitions identiques.
M. LEGER: Est-ce que je peux demander au ministre, à l'occasion
des consultations, de vérifier auprès du ministre de
l'Agriculture, qui va présenter la Loi du syndicalisme agricole, afin de
se renseigner sur un point précis que touche M. Nadon en parlant d'une
possibilité à cause de la taxation... sur la
rétroactivité de la taxation? L'argument premier, c'est une
question de fonds de pension pour les agriculteurs. C'est l'argument dont M.
Nadon se sert. Est-ce que, dans la Loi du syndicalisme agricole, il n'y a pas
justement des articles qui prévoient un fonds de pension pour les
agriculteurs? Alors, je demande au ministre de voir à ce que cette
situation soit clarifiée au niveau de l'autre loi pour que cela
réponde aux appréhensions du représentant des agriculteurs
du comté de Laval.
M. TESSIER: J'ai dit, tout à l'heure, que toute la question de la
rétroactivité serait réexaminée
complètement. Je ne veux pas aller
jusqu'à dire, ce matin, qu'elle va disparaître totalement.
C'est possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais vous avez dit que, dans le cas des
agriculteurs, cela disparaîtrait complètement.
M. TESSIER: C'est possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est ce que vous avez dit tout à
l'heure à mon collègue, le député de Nicolet.
M. TESSIER: J'ai dit que nous allions réexaminer toute cette
question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah non! Un instant. Vous avez dit à M.
Nadon, tout à l'heure, que la rétroactivité en ce qui
concerne les agriculteurs disparaîtrait complètement et qu'il n'en
était pas question. Le journal des Débats pourra en
témoigner. Est-ce que le ministre peut réaffirmer cela?
M. TESSIER: Je peux réaffirmer cela.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Bon, d'accord.
M. PAUL: Très bien.
M. NADON: M. le Président, quelle grandeur de terrain va-t-il
falloir pour être considéré comme un cultivateur? Avez-vous
une idée?
M. TESSIER: Pardon?
M. NADON: Quelle grandeur de terrain cela va prendre?
M. TESSIER: Tout dépend du genre d'exploitation.
M. NADON: Parce qu'un type peut être aviculteur...
M. TESSIER: Il peut être agriculteur et avoir un très petit
terrain.
M. NADON: Un très petit terrain.
M. TESSIER: C'est ça.
M. NADON: Il va être considéré...
M. TESSIER: Comme M. Jasmin l'a souligné
précédemment.
UNE VOIX: Des abeilles.
M. TESSIER: Des abeilles, des fraises.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un ministre des Affaires municipales.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, nous allons continuer à suivre
l'exemple des abeilles, nous allons travailler. On vous remercie, M. Nadon, et
j'inviterais maintenant le Barreau du Québec à venir nous causer.
Le mémoire no 21.
Barreau du Québec
M. BEAUDRY: Paul Beaudry, avocat de Montréal. Je me fais le
porte-parole de Me Micheline Audette-Filion, qui a dû s'absenter pour une
réunion du conseil du Barreau, ce soir à Chicoutimi. Elle
s'excuse de ne pas pouvoir présenter le mémoire. Je suis
accompagné de Me Jean-Marie Paquet, avocat de Montréal.
Le Barreau du Québec a pris connaissance du projet de loi no 48,
Loi sur l'évaluation foncière, déposé devant
l'Assemblée nationale par l'honorable Maurice Tessier, ministre des
Affaires municipales.
Convaincu qu'une loi générale sur l'évaluation
foncière s'appliquant à tous les corps publics dans l'ensemble du
territoire de la province et utilisant l'évaluation foncière
comme base de taxation constitue une excellente mesure, il se doit d'applaudir
à l'adoption prochaine d'une telle loi.
En effet, l'existence d'une loi unique d'application
générale et du manuel contenant les règles, normes et
critères d'évaluation, manuel qui sera adopté par
règlement et c'est à espérer tenu à
jour d'une façon expéditive et efficace, permettra
d'étendre à l'ensemble du territoire de la province
l'évaluation scientifique des biens immobiliers et facilitera la
tâche à ceux qui, de près ou de loin, oeuvrent dans le
domaine de l'évaluation.
Le Barreau du Québec désire faire part à la
commission parlementaire de certains des commentaires que l'étude plus
détaillée du projet de loi no 48 lui a suscités. A
l'article 1f), le Barreau demande que cette définition devrait inclure
également l'emphytéote. En effet, ce dernier est assimilé
par la jurisprudence au propriétaire au même titre que
l'usufruitier ou le grevé de substitution; comme eux, son droit est un
démembrement de la propriété.
Quant à l'article lm) et l'article 30, nous sommes heureux ce
matin d'apprendre que le ministre a l'intention de réviser la
définition de la notion de l'agriculteur pour s'attacher à la
terre elle-même et non à la personne, tel que nous le proposons
dans notre mémoire.
A l'article 2, la notion de nomination d'un évaluateur semble
impliquer l'engagement d'un fonctionnaire permanent. Cette notion pourrait
être précisée en mentionnant que la nomination peut
être faite soit par l'engagement d'un évaluateur permanent soit
par l'octroi d'un contrat d'évaluation.
Vous avez devant vous le texte, M. le Président, alors pour
épargner du temps, si vous le permettez, je vais attirer votre attention
sur certains mots dans notre mémoire.
Articles 9 et 39. En ce qui concerne 9, le texte de cet article ne nous
semble pas heureux. Il cherche à concilier la conformité aux
normes du manuel avec le critère universellement accepté par la
jurisprudence de la valeur marchande. Mais qu'arrive-t-il lorsque la valeur
marchande déterminée par le libre jeu de l'offre et de la demande
sur le marché donne un résultat différent de celui auquel
on arrive suivant le manuel?
En somme, nous demandons, à l'article 9, que les mots
"établie conformément au manuel d'évaluation" soient
biffés.
L'article 11 pose des critères trop flous et causera une
discrimination certaine. En effet, une période de 24 mois est trop
longue pour achever un petit bâtiment et souvent insuffisante pour
achever une construction considérable.
Nous soumettons respectueusement que le nouveau bâtiment devrait
être porté au rôle d'évaluation dès que se
réalise l'une des trois conditions suivantes: 1- Le bâtiment en
construction est terminé; 2- Le bâtiment est prêt à
servir aux fins auxquelles il est destiné; 3- Il commence à
être occupé pour les fins auxquelles il est destiné.
A l'article 14, nous disons: Pourquoi rendre non taxables les biens
mentionnés, par exemple, aux sous-paragraphes a) et c) de cet article
que dans la mesure où ils sont des immeubles par destination? Pourquoi,
par exemple, une machine à papier serait-elle non taxable alors que la
colonne de cracking catalytique ou les réservoirs servant au
mélange de divers produits pour constituer l'essence d'automobile
seraient, eux, taxables, parce que ce sont des immeubles par nature?
Et pourquoi les immeubles par destination d'un système de
traitement d'eaux usées, par exemple, seraient-ils non taxables en vertu
de l'article 14c) et non taxables en vertu de l'article 15c) seulement s'ils
appartiennent à un organisme public ou à une personne physique
qui ne les exploite pas comme source de revenu?
A l'article 38, nous posons la question: Par qui sont fixés
l'époque et le délai? Et nous demandons: Par la commission,
peut-être?
L'article 39, je passe par-dessus.
A l'article 56, nous recommandons que les membres du bureau de
révision soient nommés par la commission et que leur
rémunération soit fixée et payée par elle afin
d'éviter qu'ils soient à la fois juges et parties,
c'est-à-dire devant juger entre les prétentions des contribuables
et celles des personnes qui les ont nommés et paient leur salaire.
A l'article 65, nous croyons que les montants de $15,000 et $500
mentionnés dans cet article sont insuffisants. Le but de cet article,
qui se retrouve d'ailleurs dans la Loi de la Communauté urbaine de
Montréal, est de faciliter au petit propriétaire l'exercice de
ses droits tout en évitant de le forcer à se déplacer sur
une grande distance ou à perdre une journée de travail. De nos
jours, il existe beaucoup de propriétaires de maisons modestes se
vendant sur le marché entre $15,000 et $21,000, propriétaires
qu'il faudrait également protéger. Nous suggérons donc les
chiffres de $35,000 et $1,500.
A l'article 67, nous ne voyons pas pourquoi le bureau pourrait, proprio
motu, ordonner qu'une expertise soit faite quand ceci peut être
demandé par l'une ou l'autre des parties ou de consentement. Nous
enlèverions les mots "et ordonner qu'il en soit faite".
Aux articles 68, 69 et 71, nous croyons que les frais d'assignation des
témoins, tout comme les frais de sténographie, devraient
être payés par la partie qui succombe. De plus, des frais
d'avocats et d'experts établis selon un tarif fixé par la
commission devraient également être payés par la partie qui
succombe. Cependant, le contribuable ne devrait pas payer de frais, sauf si sa
plainte porte sur une évaluation supérieure à $35,000 ou
une valeur locative supérieure à $1,500 et que les
dépositions ont été prises en sténographie.
A l'article 77, nous préférerions voir une formule
proposée dans les règlements ou le formulaire, et non
imposée.
A l'article 81, la signification par huissier est onéreuse. Cet
article devrait mentionner que l'avis d'audition est signifié au
plaignant par poste recommandée avec accusé de réception.
Dans le cas où ce mode de signification ne serait pas possible, le
secrétaire du bureau pourrait alors recourir à tous les autres
moyens prévus au code de procédure civile.
A l'article 83, nous posons la question: Pourquoi ne pas se
référer aux règles ordinaires de l'audition?
A l'article 84, les mots: "Selon qu'il lui semble juste" nous semblent
superflus, la chose étant évidente.
A l'article 85, on peut concevoir l'appel d'une décision du
bureau de révision ou l'évocation à ce tribunal
d'évaluation foncière, tel que prévu à l'article
85, ou encore directement à la cour Provinciale, division ou chambre
d'évaluation foncière, et devant un juge seul à la cour
Provinciale. Le Barreau, après étude, en vient à la
conclusion que, tel que nous le soumettons, M. le Président, il y ait
une indépendance des bureaux de révision et des contribuables et
des municipalités. Il deviendrait, en somme, une espèce de
tribunal de première instance, avec l'appel suivant les notes
sténographiques et la preuve qui a été faite à ce
bureau-là, devant un juge de la cour Provinciale. On nous a
laissé entendre qu'il y aurait peut-être une réorganisation
de la cour Provinciale, ce serait peut-être le premier pas à faire
en ayant une chambre de la cour Provinciale avec des juges qualifiés en
la matière pour entendre ces appels.
D'autre part, nous ne voyons pas pourquoi ce tribunal serait investi des
pouvoirs et immunités des commissaires nommés en vertu de la
Loi des commissions d'enquête; il s'agit de juges munis, alors
c'est superflu, si on prend notre suggestion.
L'article 89 nous semble signifier que la municipalité peut en
appeler de la décision de son bureau de révision. Nous ne voyons
pas pourquoi l'on changerait à ce sujet la loi actuelle qui permet aux
seuls contribuables d'en appeler de la décision du bureau de
révision. Quant au sous-paragraphe b) de l'article 89, il nous semble
inutile d'ajouter un délai additionnel de 30 jours, le texte de la loi
devrait se lire: "Dans le délai prévu à l'article 80."
Article 90, pourquoi signifier au greffier de la municipalité et
au secrétaire du bureau de révision? Ceci semble inutile et
onéreux; la signification au greffier de la municipalité, qui est
la partie en cause, serait suffisante.
A l'article 93, ici encore, le délai de dix jours serait
avantageusement remplacé par un délai de 30 jours. Nous insistons
ici sur le fait que le mode d'enquête devant le tribunal d'appel n'est
précisé nulle part dans la loi. Nous pensons que l'appel par
procès de novo devrait être de règle dans les cas où
la plainte porte sur une évaluation de $35,000 ou moins ou une valeur
locative de $1500 ou moins. Dans les autres cas, il y aurait appel par audition
sans enquête, le dossier et les notes sténographiques du bureau
étant transmis au tribunal d'appel. Le réclamant qui n'exigerait
pas la sténographie devant le bureau, dans les cas où la loi la
prévoit, renoncerait, par le fait même, à son droit
d'appel.
Ceci éviterait de grever inutilement le petit réclamant et
empêcherait celui qui fait une réclamation plus
considérable de ne pas faire sa preuve devant le bureau, voulant la
garder pour la cour Provinciale.
L'article 97 semble prévoir la mise à jour
perpétuelle des rôles d'évaluation. Nous croyons que le
rôle d'évaluation devrait être immuable, sauf dans des cas
très précis, comme l'addition de nouvelles constructions, les
démolitions, les omissions, etc.
Autrement, l'estimateur pourrait tous les jours modifier les valeurs par
certificat et rendre la vie impossible au contribuable. Pour cette raison, nous
rayerions les sous-paragraphes b) c) et f).
Par ailleurs, quant au paragraphe e), la responsabilité
rétroactive pour les taxes devrait pouvoir exister uniquement dans la
mesure où le propriétaire actuel a été
propriétaire de l'immeuble ajouté au rôle pendant toute la
durée de la rétroactivité. Autrement, nous croyons que la
responsabilité du propriétaire actuel devrait être
limitée au temps où il a été le propriétaire
et que la municipalité devrait avoir, pour le surplus, une
créance contre l'ancien propriétaire seulement.
Je vous remercie de votre bonne attention.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais féliciter le
Barreau du Québec du magnifique travail qu'il a accompli. Je vois que
vous avez étudié ce projet de loi en profondeur, que vous vous
êtes donné la peine d'apporter des suggestions d'amendement
très valables. Nous avions d'ailleurs l'intention d'amender certains des
articles du bill 48, surtout en ce qui concerne le côté juridique,
les droits d'appel et la procédure mais nous voulions attendre justement
la présentation de votre mémoire pour voir quelles étaient
exactement les suggestions que vous aviez à nous faire.
Je n'ai pas l'intention évidemment, vu que vous touchez à
un nombre considérable d'articles, de commenter vos suggestions article
par article, mais je puis vous assurer que nous tiendrons certainement compte
de la plupart de vos suggestions d'amendement.
M. PAUL: M. le Président, vous me permettrez de transmettre des
félicitations et des remerciements au Barreau du Québec, pour la
présentation de son mémoire. Je l'ai lu avec beaucoup
d'intérêt, et je sais qu'il fera l'objet d'analyses demain
à la réunion du conseil général du Barreau. Vous me
permettrez cependant, Me Beaudry, d'attirer votre attention sur quelques
articles et de vous exprimer le point de vue du législateur.
Il y a tout d'abord dans le mémoire des recommandations ou
suggestions que vous faites à l'article 25, au sujet de la taxation des
immeubles qui appartiennent soit au gouvernement provincial ou au gouvernement
fédéral. Je sais que vous êtes parfaitement informés
de l'article 25 de notre constitution canadienne qui dit que les immeubles et
les biens appartenant au Canada où à l'une des provinces ne
seront pas imposables. Alors vous comprendrez qu'il est assez difficile pour le
législateur, tant et aussi longtemps que cette constitution ne sera pas
changée, de commettre un acte de juridiction ou d'autorité
douteuse. C'est pourquoi cet article-là, à mon humble point de
vue, ne pourra pas recevoir considération. Il y a également
l'article 79 et vous suggérez de le mettre de côté. Je
retrouve dans ce mémoire la concision qui caractérise les avocats
mais c'est une loi dont l'application et l'interprétation va toucher
beaucoup plus de gens que les légistes.
Ce seront les maires, les conseillers municipaux, les
secrétaires-trésoriers qui seront appelés à
interpréter cette loi et c'est pourquoi le législateur se devait
d'apporter certaines précisions dans le but d'informer les
secrétaires-trésoriers ou les membres des conseils.
M. BEAUDRY: Je m'excuse. C'est l'article 79?
M. PAUL: Le premier paragraphe de cet article nous semble inutile et
à éliminer.
M. BEAUDRY: Oui.
M. PAUL: Alors, il ne faut pas oublier que
cette loi est faite pour atteindre énormément de gens.
C'est pourquoi nous retrouvons dans ce projet de loi des articles qui peuvent
paraître inutiles ou de la redondance de la part des légistes,
mais qui, à toutes fins pratiques, sont peut-être
nécessaires pour sa bonne compréhension.
Maintenant, j'aimerais, Me Beaudry, vous poser une question. Vous qui
pratiquez dans la ville de Montréal, ne trouvez-vous pas que, si trois
juges de la cour Provinciale sont assignés pour remplir la fonction de
tribunal de révision, cela pourrait nous priver d'autant de personnes
nécessaires à la bonne administration de la justice au niveau de
la cour Provinciale? Je sais que des...
M. BEAUDRY: Je m'excuse, mais on a recommandé je l'ai
ajouté verbalement; ça n'appert pas dans notre mémoire
des bureaux de révision nommés par la commission ou par le
lieutenant-gouverneur en conseil, indépendamment des
municipalités, si vous voulez, comme tribunal de première
instance, avec appel devant un juge de la cour Provinciale. Ce juge ferait
partie d'une chambre spécialisée en cette matière. C'est
ce que nous préconisons et non pas trois juges. La loi prévoyait
un tribunal d'appel formé de trois juges. Alors, le Barreau
suggère que le tribunal de première instance soit le bureau de
révision nommé indépendamment des municipalités
avec appel, comme on procède dans les appels de la ville de
Montréal ou de la Communauté urbaine de Québec. En somme,
on fait notre lit devant le bureau de révision de la Communauté
urbaine de Montréal ou de la ville de Montréal, ainsi qu'à
Québec et on procède en appel devant un juge de la cour
Provinciale qui, lui, a la transcription de tous les témoignages et de
tous les documents. On procède par factum, si vous voulez.
M. PAUL: C'est une excellente recommandation qui a frappé
sûrement le ministre des Affaires municipales, parce qu'il a parlé
d'une révision de tout le mécanisme d'appel et de
procédure en révision du rôle d'évaluation.
Est-ce que le ministre me permettrait une question? En supposant que la
recommandation du Barreau serait acceptée, est-ce que le ministre
voudrait maintenir dans la loi cette disposition qui prévoit que le juge
de la cour Provinciale, parce que ce ne seraient plus maintenant trois juges,
chargé de la révision aurait les pouvoirs d'un
commissaire-enquêteur? Pourquoi cela a-t-il été mis dans la
loi? Les juges ont déjà des serments d'office, des pouvoirs bien
définis. Alors, pourquoi dans la loi donner le caractère de
commissaire-enquêteur aux juges de la cour Provinciale? Pourquoi leur
donner les pouvoirs des commissaires-enquêteurs tel que prévu, je
crois, au chapitre XI ou IX de nos statuts?
M. TESSIER: Quand vous parlez de commissaires enquêteurs, dans
quelle loi?
M. PAUL: La loi telle qu'elle est étudiée; je ne pense pas
qu'on étudie ce matin la loi...
M. TESSIER: L'article 85?
M. PAUL: 85.
M. TESSIER: Ah! Bon.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est votre loi!
M. PAUL: Est-ce que le ministre pourrait nous donner une
justification?
M. TESSIER: De toute façon dans la révision que nous
envisageons, il y a lieu d'amender complètement l'article 85 et
ça, ça va disparaf-tre.
M. PAUL: Mais quand vous dites que "Ça" va disparaître,
quel est, d'une façon précise, le terrain que vous voulez couvrir
par le mot "ça"?
M. TESSIER: Le paragraphe qui se lit comme suit: "Le tribunal est
investi des pouvoirs et immunités des commissaires nommés en
vertu de la Loi des commissions d'enquête".
M. PAUL: Est-ce que vous avez aussi l'intention de faire
disparaître le paragraphe suivant?
M. TESSIER: Quant à moi, je ne vois pas l'utilité d'avoir
ce paragraphe; c'est déjà couvert, comme mon collègue
vient de le mentionner. Il y a le serment d'office; en somme, c'est
déjà prévu par la loi de nos tribunaux judiciaires et je
ne vois pas pourquoi on aurait ce paragraphe-là. Il me paraît,
quant à moi, inutile.
M. PAUL: Alors, M. Beaudry, vous pouvez voir que votre mémoire
ébranle énormément le ministre, et c'est tout à
votre honneur.
M. TESSIER: A propos du mot "ébranler", j'ai mentionné, M.
le Président, même avant que nous recevions votre mémoire,
que nous avions l'intention d'apporter plusieurs amendements dans le sens que
vous suggérez dans votre mémoire, mais nous voulions tout de
même attendre de le recevoir et nous voulions attendre de vous
écouter avant d'apporter ces amendements.
M. PAUL: Vous vouliez être sûr que le Barreau vous
dirigerait très bien.
M. TESSIER: J'ai beaucoup d'affinité avec le Barreau, comme vous
le savez.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela ne paraît pas.
M. TESSIER: Comment, ça ne paraît pas! Pour un ancien
bâtonnier!
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous ne connaissez pas votre projet de
loi?
M. TESSIER: J'aurais une question à poser, M. le
Président, à Me Beaudry. Est-ce que le Barreau aurait des
objections à ce que le juge qui entend les plaintes en appel soit
accompagné sur le banc d'assesseurs?
M. BEAUDRY: En tant que membre, je ne peux pas répondre au nom du
Barreau, M. le Président.
Toutefois, je peux me permettre de vous répondre en mon nom
personnel, en tant qu'avocat pratiquant exclusivement en matière
d'évaluation municipale. Si on procède de novo,
l'expérience a été que le contribuable... Même dans
la loi, présentement, on dit que les bureaux de révision sont
formés d'un membre, soit avocat ou notaire, d'une autre personne et d'un
évaluateur détenant un certificat en vertu de l'article 101. Si
je peux le suggérer personnellement, on pourrait employer un autre mot
que le mot "évaluateur". Le contribuable, lorsqu'il se présente
devant un bureau de révision, s'il demande quels sont les membres de ce
bureau, on répond; M. Untel est un avocat, M. Untel est un architecte et
le troisième est un évaluateur. Lui, tout de suite, il s'imagine
que l'évaluateur, c'est l'évaluateur de la municipalité.
Je vous le dis en passant.
Quand on procède de novo où on procède directement
par appel, comme on l'a suggéré, si on a une chambre de la cour
Provinciale avec des juges qualifiés en la matière, je ne vois
pas l'utilité qu'ils soient accompagnés d'assesseurs. Ils seront
qualifiés et ils pourront rendre les décisions.
M. TESSIER: Oui, mais, évidemment, le juge est un avocat de
profession qui accède au banc, à la magistrature. C'est une chose
que nous envisagions, et c'est pourquoi je suis content d'avoir vos
réactions. C'est que nous pensions, pour faciliter la tâche du
juge, que la commission municipale pourrait lui nommer, comme adjoint, un
assesseur qui serait un expert en évaluation municipale. Il ne ferait
que cela en somme.
M. BEAUDRY: Mais là, M. le Président, si je me
présente...
M. TESSIER: Il n'aurait pas, évidemment, la qualification
juridique...
M. BEAUDRY: Ah! d'accord.
M. TESSIER: ... mais, par contre, il pourrait compléter justement
la qualification juridique du juge par son expérience en
évaluation.
M. BEAUDRY: Si vous me le permettez encore une fois, en mon nom
personnel et non au nom du Barreau parce qu'on n'en a pas discuté,
supposons que je me présente devant un bureau de révision de
Montréal pour une cause, disons, de $25 millions d'évaluation,
avec mes experts et qu'on plaide le mieux possible pour gagner notre cause.
La ville de Montréal ou la communauté va être
représentée par ses experts et le tout va être
envoyé devant votre tribunal où il y aura un juge avec son
expert, que je n'aurai pas le droit de contre-interroger; je n'aurai le droit
de rien dire. Légalement, il sera partie et juge en même temps. Je
préfère rester suivant les dispositions de la charte de la ville
de Montréal, présentement. En somme, si les bureaux de
révision, M. le Président, ont un caractère
d'indépendance des municipalités, le juge de la cour Provinciale,
s'il est qualifié, rendra justice et il n'a pas besoin d'assesseur. Les
experts des parties pourront certainement l'éclairer.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, au sujet des
dernières observations que vient de faire Me Beaudry, je veux bien
croire que les juges sont qualifiés, en l'espèce il s'agira d'un
juge qualifié dans le domaine des affaires municipales. A supposer,
comme vous en faites l'hypothèse, que vous ayez à plaider pour
des clients pour une cause d'évaluation de $25 millions, vous venez avec
vos experts.
M. BEAUDRY: Oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): L'autre partie vient, elle aussi, avec ses
experts. Mais je pense que, pour démêler les versions
ordinairement contradictoires desdits experts, il ne serait pas mauvais que le
juge ait aussi un expert sans que pour autant son jugement en soit
influencé d'une façon préjudiciable aux
intérêts des clients qui viendront devant lui. Je ne comprends
absolument pas cette objection personnelle que vous faites, puisque vous dites
ne pas parler, en l'occurrence, au nom du Barreau.
M. BEAUDRY: Au nom du Barreau, d'accord.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'estime personnellement que, pour la
protection du judiciable, il est nécessaire que le juge, tout
qualifié qu'il soit, puisse quand même requérir l'avis
d'une personne qui sera constamment auprès de lui et qui le renseignera
sur tout ce qui pourra se passer à partir du moment où on mettra
en application cette loi. C'est une protection additionnelle pour les
contribuables. Et je ne comprendrais pas que le Barreau, pris globalement,
s'oppose à une précaution comme celle que l'on demande au
ministre de prendre.
M. BEAUDRY: Si vous me le permettez, M. le Président, ça
fait vingt ans, uniquement en évaluation municipale, que je plaide
à travers la province. Cela fait vingt ans. Si on n'est pas satisfait
d'une décision de la cour Provinciale,
comme le prévoit le projet de loi 48, on peut en appeler à
la cour d'Appel de la province, la cour Suprême du Canada. Il y aura
toujours des litiges, que ce soit une question de droit, que ce soit une
question de fait. Et je ne vois pas, personnellement je reviens toujours
à ça pourquoi on va greffer un assesseur à un
tribunal d'appel. C'est mon opinion personnelle. Il n'y a rien qui
empêche un juge de consulter quelqu'un; rien ne peut l'empêcher de
faire cela mais, de greffer, à côté d'un tribunal d'appel,
un assesseur, malheureusement, M. le Président, je ne peux pas
l'admettre.
Je vous le dis. Je vous dis que les droits des citoyens ou des
contribuables ne seront pas plus protégés qu'ils ne le sont
présentement. Le contribuable a tous les outils pour se défendre
et contester son évaluation, sauf que nous demandons au gouvernement ou
au ministère de donner un caractère de tribunal de
première instance indépendant au bureau de révision et,
après cela, l'appel comme il existe pour les villes de Montréal
et de Québec. C'est la seule chose que je recommande.
M. TESSIER: L'appel, tout de même, c'est simplement dans des cas
où la réclamation est assez élevée. Il n'y a pas
appel dans tous les cas.
M. BEAUDRY: Si on regarde les statistiques des appels, soit des bureaux
de révision de Montréal ou des bureaux dans la région de
Montréal, quand on est rendu à la cour d'Appel, Montréal,
disons, peut entendre environ 3,500 plaintes par année, peut-être
un peu plus, et vous aurez peut-être un maximum de dix causes qui sont
appelées au tribunal de la cour Provinciale. Alors, c'est la
minorité qui se rend à la cour Provinciale. La majorité
est décidée en première instance, à la satisfaction
de tout le monde.
M. LEGER: M. le Président, j'aimerais poser une question à
Me Beaudry.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ne pensez-vous pas que cela permettrait de
diminuer encore le nombre de causes portées en appel si le juge
était assisté d'un spécialiste?
M. BEAUDRY: C'est pour cela que nous préconisons un tribunal de
première instance au niveau du bureau de révision, qui
restreindra encore.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de l'Assomption.
M. PERREAULT: A l'article 9, vous mentionnez que le critère de la
valeur marchande devrait être retenu. Dans le passé, nous avons vu
plusieurs abus dus à cela. Ne croyez-vous pas qu'en recommandant qu'on
s'en tienne à ce principe, on continue certains abus de valeur marchande
dont j'ai moi-même été témoin?
M. BEAUDRY: Nous entrons dans la question à savoir ce qu'est la
valeur marchande. Sur cela, il y a beaucoup de tomes, de décisions, etc.
La notion de la valeur marchande, c'est une décision d'après la
jurisprudence qui date de 1845, je crois, et qui a toujours été
maintenue. Les tribunaux se sont toujours prononcés sur la valeur
marchande, quoique nos lois actuelles parlaient toujours de valeur
réelle.
Alors, si on dit que l'on va faire une valeur marchande d'après
un manuel, ce n'est plus une valeur marchande, c'est une valeur de manuel.
C'est pour ça que nous disons: Dans un cas en particulier. Nous n'avons
rien dit concernant l'article numéro 6: La préparation et la
confection des rôles devraient être faites suivant le manuel afin
de maintenir l'uniformité de l'évaluation au niveau de la
province. Toutefois, nous disons que lorsque nous arrivons pour
déterminer l'évaluation, dans un cas particulier, suivant une
plainte, le tribunal ne soit pas restreint à dire: Le manuel a
été appliqué, donc allez-vous-en, vous n'avez plus de
plainte. C'est pour ça que nous disons qu'à l'article 9, la
référence au manuel qui précise que l'immeuble devrait
être porté au rôle à sa valeur marchande, est
suffisante
M. PERREAULT: Je ne suis pas d'accord sur ce que vous avez dit, à
l'article 10; j'aimerais que vous donniez un peu votre opinion. Vous mentionnez
que si on employait simultanément les trois critères on pourrait
en arriver à une inscription totale au rôle d'évaluation
supérieure à ce qui existe et vous recommandez de biffer la
superficie effectivement occupée.
M. BEAUDRY: Pour éviter la double taxation.
M. PERREAULT: Quant à la superficie effectivement occupée,
on le voit dans plusieurs coins de la province, j'ai vu des cas typiques
où la superficie effectivement occupée devrait même
être celle qui prévaudrait. J'ai vu des endroits où les
terrains ont été agrandis à même des rivières
ou des lacs.
M. BEAUDRY: C'est ça.
M. PERREAULT: Il y a aussi des terrains qui ont subi de
l'érosion, comme dans mon comté des terrains qui ont
diminué de moitié.
M. BEAUDRY: D'accord.
M. PERREAULT: Alors, on devrait tenir compte de la superficie
effectivement occupée et non pas la biffer.
M. BEAUDRY: C'est une question d'opinion, moi aussi, je pourrais...
M. PERREAULT: Il faut tenir compte du cas des gens qui ont une
propriété sur le bord
d'une rivière et où il y a de l'érosion. Vous n'en
tenez pas compte.
M. BEAUDRY: Je présume que si on réfère au manuel
d'évaluation, l'estimateur aura des directives dans la manuel afin
d'évaluer ce qui existe. Alors, si un terrain a été
réduit, à la suite de l'érosion, ou a augmenté
d'ampleur à la suite de remplissage, l'estimateur doit évaluer ce
qui existe et non pas ce qui n'existe pas.
M. PERREAULT: S'il a diminué d'ampleur?
M. BEAUDRY: S'il a diminué d'ampleur, l'estimateur n'a pas
à évaluer quelque chose qui n'existe pas.
M. PERREAULT: D'après l'article 10, on doit prendre la plus
grande valeur.
M. BEAUDRY: On parle de la superficie.
M. PERREAULT: L'article 10 du projet de loi dit qu'on doit prendre la
plus grande valeur des trois critères.
M. BEAUDRY: Oui, oui. Mais on ne parle pas de la valeur, on parle de la
superficie, M. le Président, dans l'article 10.
M. PERREAULT: L'article 10 dit ici "selon la plus grande des trois".
M. BEAUDRY: "La superficie d'un terrain s'établit soit
d'après l'inscription qui en est faite au cadastre, soit d'après
le titre de propriété, soit d'après la superficie
effectivement occupée, selon la plus grande des trois". On parle de
superficie; on ne parle pas de valeur à l'article 10. La valeur, on y
réfère à l'article no 6. L'article no 6 dit qu'on doit
confectionner un rôle suivant le manuel qui sera déposé et
qui fera partie intégrante de la loi. Alors, si vous jetez un coup
d'oeil au manuel, l'estimateur doit évaluer les choses telles qu'elles
existent.
M. PERREAULT: Moi, je ne parle pas de valeur; je parle de
superficie.
M. BEAUDRY: Sur la superficie là, ce n'est pas le premier
mémoire, que je vois. Les arpenteurs-géomètres doivent me
suivre, ainsi qu'un autre groupe d'ingénieurs. Alors, je présume
qu'eux ils doivent avoir certaines remarques concernant la superficie.
M. LEGER: M. le Président, je veux poser une question à Me
Beaudry. Je vois que vous avez fait une étude en profondeur du projet de
loi et que vous avez apporté des amendements très pertinents. A
l'article 25, des juristes disent, entre autres le député de
Maskinongé...
M. PAUL: Pardon, M. le Président, je ne voudrais pas qu'on me
prête des intentions. J'ai lu l'article 125 de la constitution. Je n'ai
pas fait de commentaire.
M. LEGER: Ah! bon. De toute façon, certains juristes disent que,
selon la constitution canadienne, les immeubles du fédéral ou du
provincial ne peuvent pas être taxés et d'autres juristes nous
disent que c'est une possibilité. Or, je vois que, dans l'article 25,
vous dites que vous ne voyez pas d'inconvénients légaux à
ce qu'un immeuble du gouvernement fédéral ou du gouvernement du
Québec soit sujet au paiement de taxes pour services municipaux.
Pourriez-vous étoffer votre affirmation par des explications?
M. BEAUDRY: La seule chose que je peux vous dire, c'est qu'en faisant
des recherches, toujours au point de vue de la jurisprudence, nous avons
découvert une décision de la cour Suprême qui
déclarait, en 1919, que le prix d'un service devait être
payé. Cela, c'est la cause de Dorothy vs Lévys, 1919, Appeal
Cases de la cour Suprême.
Alors, le prix d'un service, je comprends qu'on va tomber dans le jeu
des mots. On a une question: Est-ce qu'une taxe d'amélioration locale,
c'est une taxe ou bien un prix de service? Alors, là, ça devient
encore bien plus compliqué. On peut avoir un jeu de mots; on emploie le
mot taxes pour dire toutes sortes de choses, alors que des prix de service,
ça peut être totalement différent. Un service doit
être payé; c'était la règle générale,
à ce moment-là.
Je comprends que nous ne l'avons pas trop mise en application. Je crois
humblement que rien ne défendrait au gouvernement provincial de payer
des taxes de service. Mais de là à dire que le gouvernement
provincial peut, par une loi, forcer le gouvernement fédéral
à payer une taxe de service, je ne suis pas pour ça.
M. LEGER: Mais l'affirmation que vous avez faite avant est une opinion
du Barreau ou une opinion personnelle?
M. BEAUDRY: En ce qui concerne la province?
M. LEGER: Sur l'article 25, que vous avez...
M. BEAUDRY: Sur l'article 25, c'est le Barreau. Cela fait partie de
notre mémoire.
M. LEGER: Oui.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lévis.
M. ROY (Lévis): Me Beaudry, vous êtes au courant
qu'actuellement beaucoup de bâtiments appartiennent soit au provincial ou
au fédéral et pour lesquels un montant est payé aux
municipalités, par arrangement.
M. BEAUDRY: D'accord!
M. ROY (Lévis): En inscrivant cet article dans la loi, est-ce que
ça ne laissera pas une porte ouverte pour ne plus le payer aux
municipalités?
M. BEAUDRY: Là, on tombe dans un domaine de taxation, M. le
Président, et ce domaine de taxation est quelque chose d'exclusif au
gouvernement. Je ne crois pas, même, que le Barreau devrait se prononcer
sur ces points-là. Nous, nous nous prononçons; nous le glissons
dans notre mémoire parce qu'à la suite de nos recherches, nous
avons trouvé cela. Mais de là à dire qu'on devrait donner
une opinion sur la question des limites ou des non-limites de taxation d'un
gouvernement, je ne crois pas, même, que le Barreau oserait faire
cela.
M. PAUL: M. le Président, je pense que Me Paquet voulait ajouter
quelque chose tout à l'heure. Il aurait une question à poser.
M. PAQUET: M. le Président, je voulais simplement, si vous me le
permettez, donner brièvement un autre son de cloche, une autre opinion
personnelle encore une fois ce n'est pas le Barreau qui parle sur
la question des assesseurs en tribunal d'appel. Je pense, pour avoir
pratiqué dans le domaine de l'évaluation pour et contre des
municipaliés, que si on s'entend sur la notion d'assesseur, il serait
peut-être très utile à un juge de la cour Provinciale, qui
est appelé à entendre un appel où il y a des
prétentions contradictoires de la part des experts, d'avoir un officier
judiciaire qui soit un expert dans la matière et qui pourrait servir
d'interlocuteur valable au juge pour discuter de ce qu'il a entendu, pour
l'aider à faire des calculs techniques. Je ne vois pas un assesseur
nécessairement comme membre d'un tribunal de trois qui a voix au
chapitre pour rendre jugement, mais je verrais fort bien un expert qui
constituerait un interlocuteur valable à un juge qui est devant deux
théories d'expertises contradictoires ou devant des calculs qui peuvent
devenir extrêmement complexes ou extrêmement fastidieux à
faire. Je le fais personnellement comme pratique.
C'est extrêmement fastidieux de se mettre à analyser
pendant des heures et des heures, des relevés de ventes, des
états de dépenses, des états de revenus. Je pense qu'un
off icier judiciaire pourrait tout aussi bien constituer un interlocuteur
valable, que, dans bien des cas, je pense, un rédacteur de jugement
expérimenté constitue un interlocuteur valable au juge pour
discuter des points de droit avant que le juge se forme lui-même une
opinion et rende lui-même la décision, ce qui est sa
responsabilité comme magistrat. Je voulais tout simplement vous donner
un autre son de cloche sur cette question.
M. LE PRESIDENT: Merci, Me Paquet, Me Beaudry, on vous remercie de votre
exposé au sujet du mémoire du Barreau. Je pense bien que Mlle
Filion a choisi un remplaçant qui a fait un bon travail. Nous suspendons
nos travaux jusqu'à deux heures trente cet après-midi et notre
premier organisme sera la Corporation des ingénieurs forestiers de la
province de Québec. Merci.
Reprise de la séance à 14 h 36
M. LEDUC (président de la commission permanente des Affaires
municipales): A l'ordre, messieurs !
Nous allons entendre, dans l'ordre, cet après-midi, la
Corporation des ingénieurs forestiers de la province de Québec;
les Arpenteurs-géomètres de la province de Québec; Park
Laign Ltd.; l'Association des détaillants de maisons mobiles et
roulottes du Québec; l'Association canadienne de la radio et de la
télévision de langue française; l'Industrie de production
pétrolière du Québec, le pacifique Canadien et le Canadien
national.
Afin de simplifier le travail, je me permets de suggérer aux
porte-parole de bien vouloir résumer le mémoire qu'ils ont
présenté. Quelques-uns de ces mémoires sont très
longs; ils feront l'objet d'études par les membres de la commission. Je
vous suggère de bien vouloir relever les points les plus importants qui
se trouvent à l'intérieur de ces mémoires.
J'invite la Corporation des ingénieurs forestiers de la province
de Québec à bien vouloir se rendre au lutrin, en avant, et
à faire valoir ses représentations. Je rappelle à chacun
des porte-parole de bien vouloir s'identifier au début de son
intervention, s'il vous plaît.
Corporation des ingénieurs forestiers de la
province de Québec
M. BOILY: Mon nom est Gratien Boily, avocat, conseiller juridique de la
Corporation des ingénieurs forestiers de la province de
Québec.
M. le Président, M. le ministre, MM. les députés,
dans un premier temps, la Corporation des ingénieurs forestiers de la
province de Québec veut d'abord manifester son accord de principe sur le
but que vise le bill 48, Loi sur l'évaluation foncière.
Cependant, dans ses modalités, elle vous a soumis par son mémoire
certains amendements qu'elle voudrait voir apporter au bill dont il s'agit.
La Corporation des ingénieurs forestiers de la province de
Québec veut d'abord rappeler au législateur une
réalité qui semble avoir été oubliée ou
largement omise dans la rédaction du bill 48, à savoir que plus
des deux tiers des terres imposables du Québec sont des terres
forestières. Compte tenu de cette importance, la corporation
énonce le principe premier que les terres forestières devraient
être évaluées selon la productivité de leur sol.
Deuxièmement, pour fins de taxation, la corporation n'admet pas
l'évaluation des bois sur pied, car cette évaluation, en
accordant une plus-value aux stocks ligneux, décourage les sylviculteurs
de la pratique des méthodes sylvicoles permettant un aménagement
intensif.
Compte tenu de ces deux principes de base que la Corporation des
ingénieurs forestiers de la province de Québec voudrait voir
reconnus, elle vous suggère les modifications suivantes:
A l'article 1, paragraphes a) et b), la Corporation des
ingénieurs forestiers voudrait qu'il soit précisé que les
arbres ne sont pas des immeubles. On sait que, par l'article 378 du code civil,
les arbres sont considérés, tant qu'ils sont reliés au sol
par leurs racines, comme des immeubles et qu'ils deviennent meubles une fois
qu'ils sont coupés.
Pour les fins d'évaluation, la corporation suggère donc
qu'il soit précisé que les arbres ne sont pas des immeubles.
M. PAUL: Excusez...
M. BOILY: Dans le code civil...
M. TESSIER: On n'est pas pour préciser ce que le code civil
dit.
M. PAUL: Elle irait même à l'encontre de la
définition du code civil.
M. TESSIER: Excusez-moi. Continuez.
M. BOILY: Nous préciserons. Entre les paragraphes m) et n) de
l'article 1, où est défini le terme "agriculteur", la corporation
voudrait que soit défini comme suit le terme "sylviculteur": une
personne physique ou morale qui s'occupe de la culture des arbres ou de la
production de la matière ligneuse. Si vous vous référez au
mémoire qui vous a été soumis, vous remarquerez qu'il
n'est pas ajouté une personne morale. C'est que le mémoire, vous
ayant été soumis il y a une dizaine de jours, la corporation a
tenu une autre réunion, et des amendements et des modifications ont
été apportés au texte même du mémoire,
modifications qu'on vous demande d'apporter au texte qui est devant vous.
A l'article 2 du bill 48, la corporation tient à rappeler que
seul l'ingénieur forestier, membre de la Corporation des
ingénieurs forestiers de la province de Québec, est
habilité à évaluer le potentiel des terres
forestières. On sait que par sa loi constitutive chapitre 264 des
Statuts refondus du Québec, intitulée Loi des ingénieurs
forestiers, à l'article 2, paragraphe 4, l'expression "ingénieur
forestier" y est définie et attribue à l'ingénieur
forestier le pouvoir d'évaluer et de classifier le fonds et la
superficie des forêts.
A l'article 9, la Corporation des ingénieurs forestiers remarque
que l'expression "valeur marchande" n'a pas été définie et
qu'on s'en réfère au manuel d'évaluation. Elle
suggère donc qu'une définition soit incluse, à la Loi sur
l'évaluation foncière, du terme "valeur marchande" afin
d'éviter toute ambiguïté et toute spéculation qu'il
pourrait y avoir relativement à cette expression. A cette fin, elle
suggère la définition suivante du terme "valeur marchande": Prix
qu'un vendeur, qui n'est pas obligé de vendre et qui n'est pas
dépossédé malgré lui, mais qui désire
vendre, réussira à avoir d'un acheteur qui n'est pas
obligé d'acheter mais qui désire acheter.
A l'article 10, la Corporation des ingénieurs forestiers a
convenu de s'en remettre aux propositions que fera sans doute la Corporation
des arpenteurs-géomètres, étant donné que les
définitions de la superficie relèvent plus
particulièrement de sa compétence et de son ressort.
A l'article 14, paragraphe b) on y lit que: Ne sont pas portés au
rôle les immeubles par destination qui sont utilisés: à des
fins agricoles. Nous vous suggérons d'y ajouter, après le
paragraphe b), "aussi à des fins sylvicoles".
A l'article 15, on y lit que: Ne sont pas portés au rôle:
les réserves de matières premières dans les
tourbières, les carrières, les bancs de sable et de gravier. Nous
suggérons et d'autres sous-paragraphes y sont inclus aussi
qu'un paragraphe e) y soit ajouté: Aux fins d'exclure les bois sur
pied.
A l'article 16, paragraphe b), nous suggérons que l'article se
lise plutôt comme suit: "Ne sont pas portés au rôle
lorsqu'ils appartiennent à un organisme public les immeubles
suivants:... b) les concessions forestières, les réserves
cantonales, les forêts domaniales, les réserves forestières
spéciales, les forêts expérimentales, les forêts
éducatives ainsi que les constructions qui y sont
érigées". On y ajoute donc les forêts expérimentales
et les forêts éducatives.
Au sous-article h), nous souhaiterions que soient ajoutés,
après les jardins botaniques, les arboretums et ensuite les
Pepinières, qui y sont déjà incluses.
A l'article 30, nous suggérons que le texte soit modifié
de la façon suivante: Tout terrain, appartenant à un agriculteur
ou à un sylviculteur, est porté au rôle à sa valeur
réelle basée sur la productivité du sol. Les
bâtiments qui s'y trouvent, à l'exception des bâtiments qui
servent à l'agriculture ou à la sylviculture, sont portés
au rôle à leur valeur marchande. On se référera
alors à la définition que nous vous suggérions d'ajouter
à la loi pour l'expression "valeur marchande".
A l'article 57, la corporation admet le principe que le président
du bureau de révision doit être un avocat ou un notaire en
exercice, étant donné les implications légales du travail
qui est de son ressort. Cependant, elle propose qu'un assesseur soit
nommé et adjoint au président du bureau de révision pour
le conseiller dans les domaines techniques qui sont inhérents à
une telle tâche.
A l'article 61, la corporation suggère que, pour les
régions forestières, le bureau de révision comprenne aussi
un ingénieur forestier puisque, par ses fonctions, celui-ci est au fait
des problèmes qui sont mis en cause.
A l'article 101, la corporation suggère qu'il soit ajouté,
au premier paragraphe qui se lit comme suit: "Nul ne peut agir comme
évalua-teur pour les fins de la présente loi sans détenir
un certificat que délivre à cette fin la commission
d'après les critères qu'elle établit par ordonnance", les
mots " à moins d'y être habilité en vertu d'une loi
corporative".
On sait qu'en vertu du chapitre 264 les ingénieurs forestiers ont
déjà le pouvoir de faire l'évaluation des fonds de terres
forestières et qu'il s'agit-là d'un droit exclusif par la loi
corporative.
A l'article 120, on suggère tout simplement que cet article du
bill 48 soit abrogé. Celui-ci, on le sait, venait abroger les articles
163 et 164 de la Loi des Terres et Forêts, Statuts refondus du
Québec, 1964, chapitre 92. Or, les articles 163 et 164 du chapitre 92
visaient à encourager l'exploitation des terres forestières. En
effet, à l'article 163 on peut lire: "Le lieutenant-gouverneur en
conseil peut faire des règlements concernant: premièrement,
l'encouragement à donner sous forme de primes en argent ou de subsides
en terres pour les travaux de reboisement; deuxièmement, le nombre
d'années durant lesquelles les plantations ainsi primées doivent
être conservées avant d'y faire des coupes finales;
troisièmement, les conditions à remplir par les personnes
réclamant ces primes; quatrièmement, l'évaluation
municipale des terrains reboisés et des plantations primées".
Al'article 164, on prévoyait: "Tant qu'on y conserve au moins 300
arbres à l'acre, les terrains reboisés gardent, et ce, durant 30
ans, l'évaluation qu'ils avaient avant la plantation; à
l'expiration de cette période de 30 ans, l'évaluation municipale
de ces plantations, pourvu qu'elles restent à l'état de
forêt, ne peut être modifiée que tous les dix ans."
Vu son code d'éthique, la Corporation des ingénieurs
forestiers croit de son devoir de demander que soient maintenus pour les
sylviculteurs les avantages que les lois antérieures leur accordaient
déjà. C'est pourquoi elle demande que soit abrogé
l'article 120 actuel du bill 48.
Ce sont là, somme toute, les recommandations principales soumises
par la corporation.
M. TESSIER : M. le Président, je voudrais remercier d'abord la
Corporation des ingénieurs forestiers. Il y a certainement des choses
que nous allons retenir, notamment la définition de tout ce qui touche
la sylviculture en général, de même que la
définition d'un sylviculteur, particulièrement en ce qui concerne
les articles 14 et 15. Toutefois, certaines choses peuvent être assez
difficiles à retenir, notamment lorsque vous demandez que
l'évaluation des immeubles en forêt ou des terres en forêt
soit faite par des ingénieurs forestiers.
Evidemment, si on suivait votre raisonnement, ça voudrait dire
que les terres des cultivateurs devraient être également
évaluées par des agronomes et ainsi de suite. C'est
peut-être là compliquer les choses. A tout
événement, nous allons réfléchir à vos
suggestions et nous allons sûrement retenir certaines de vos
recommandations.
M. PAUL: M. le Président, je voudrais également remercier
la Corporation des ingénieurs
forestiers pour l'intérêt que ses membres ont
apporté à l'étude de ce projet de loi et je voudrais
féliciter le procureur, Me Boily, d'avoir en quelque sorte
torturé son esprit juridique, particulièrement sur deux points.
Premièrement, c'est la définition nouvelle que l'on trouve dans
les commentaires de la page 2 du mémoire, à l'effet que les
arbres soient considérés comme des biens meubles.
Je comprends que cela peut probablement faire l'affaire des membres de
la corporation mais, personnellement, j'aime mieux me fier au texte du code
civil et à l'interprétation jurisprudentielle qu'en ont faite nos
tribunaux.
Deuxièmement, je voudrais, Me Boily, vous signaler à
l'article 9, la deuxième et la troisième ligne de votre
mémoire où je lis ceci: La loi de la Corporation des
ingénieurs forestiers, chapitre 264, article 2, paragraphe 4 dit que
"l'évaluation du fonds et de la superficie des forêts" doit
être faite par l'ingénieur forestier. Je regrette, ce n'est pas ce
que dit le chapitre 264 à l'article 2, paragraphe 4. Il est
spécifié: "L'expression "ingénieur forestier" signifie une
personne exerçant les fonctions d'ingénieur et compétente
à donner des conseils sur ou à surveiller, exécuter ou
diriger l'exécution de tous les travaux suivants: l'inventaire, la
classification," etc.
Par conséquent, je rejoins un peu l'opinion émise par
l'honorable ministre à l'effet que vouloir interpréter dans le
sens du mémoire la recommandation que vous faites serait obliger nos
cultivateurs au sens le plus strict du mot à avoir recours aux services
d'un ingénieur forestier pour établir la valeur de leur terre
à bois. Il y a d'excellentes choses dans le mémoire. Je m'en
voudrais, cependant, M. le ministre, de ne pas vous faire part d'une crainte
personnelle qui, je crois, est partagée par mes collègues de
l'Opposition officielle, c'est l'insertion que l'on voudrait faire à la
définition du terme "sylviculteur": une personne physique ou morale M.
le Président, en voulant considérer comme sylviculteur une
compagnie qui se spécialiserait dans l'achat des terres à bois
pour faire de la sylviculture, je craindrais que nous ne serions pas conformes
aux principes premiers visés par le bill 48.
Je vous fais ces remarques, M. Boily, non pas dans l'intention de vous
blâmer, aucunement. C'est l'interprétation que je fais de ce
projet de loi qui, par contre, contient d'excellentes recommandations,
spécialement pour ce qui a trait à la sylviculture. Lorsque nous
en serons à la rédaction définitive de ce présent
projet de loi, nous nous référerons sûrement avec avantage
aux différentes recommandations de votre mémoire.
De toute façon, nous vous félicitons pour la
qualité, la brièveté et la concision de votre
mémoire.
M. TESSIER: J'aimerais, avec votre permission, M. le Président,
dire que je suis en parfait accord avec mon ami, le député de
Maskinongé, en ce qui concerne la définition du mot
"sylviculteur".
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de
Lotbinière.
M. BELAND: J'aurais également une question à poser
relativement à la page 2, article 2, en ce qui concerne les personnes
habilitées à évaluer le potentiel des terres
forestières. Est-ce que, pour agencer cette définition, vous vous
êtes basés sur des choses qui se sont faites en pratique,
notamment qu'aucune personne, autre que les ingénieurs forestiers, n'est
apte à évaluer d'une façon acceptable le potentiel
forestier sur une propriété donnée?
M. BOILY: Je pense que, pour répondre à cette question, le
président de la corporation serait mieux habilité que moi. Je
laisse la parole à M. Julien Rivest, président de la Corporation
des ingénieurs forestiers.
M. RIVEST: Je m'appelle Julien Rivest, je suis président de la
Corporation des ingénieurs forestiers.
Je pense que certaines interventions sont mal
interprétées. Je remercie le député d'avoir
posé cette question. Je répondrai simplement qu'au niveau
fédéral, l'établissement du potentiel forestier des terres
du Canada, dans le domaine forestier, est établi par des
ingénieurs forestiers. Le contexte n'est pas facile, sauf que ça
prend des gens assez spécialisés dans le domaine pour
réaliser l'objectif premier du mémoire ou des remarques que nous
faisons, soit la taxation du potentiel et non la taxation du stock ligneux.
On a fait une remarque à l'effet que les bois sur pied doivent
être considérés comme immeubles. S'ils le sont, j'aime
prévenir cette commission parlementaire qu'on décourage de cette
façon-là d'une façon peut-être indirecte
les pratiques saines de la sylviculture, puisqu'en pratique, si la
forêt ou les bois sur pied sont considérés comme des
immeubles, donc sujets à taxation, on se trouve à
pénaliser les gens qui sont prévoyants et qui s'occupent de leur
terre forestière au détriment, souvent, des gens beaucoup moins
précautionneux ou beaucoup moins prévenus qui font des coupes
rases sur leur terre forestière de façon qu'on ne puisse d'aucune
façon les imposer. J'espère avoir répondu à votre
question.
M. BELAND: Il est entendu que vous avez éclairé
magnifiquement bien ce qui peut être votre point de vue, parce que si on
se place à l'intérieur du contexte des agriculteurs qui
possèdent un lot boisé ou quelques lots boisés, ou toute
autre entreprise qui est spécialisée dans l'exploitation
rationnelle des boisés, ça causerait certainement un
préjudice très grave d'être dans l'obligation
constante...
Je comprends que vous l'avez expliqué. C'est entendu que je
comprends le bill. Il a été agencé en vue de la taxation.
Par contre, à mon sens, cela va viser également tous ceux qui
font une exploitation des boisés, surtout des petits exploitants. En
vertu de tous les autres bills connexes, à l'agriculture qui sont
adoptés et d'autres qu'on sent venir, ce serait relativement très
grave, à mon sens, si l'article 2 que vous avez agencé
n'était pas tout au moins modifié pour faire en sorte qu'il n'y
ait pas cette obligation extrême.
Je ne sais pas si vous avez d'autres commentaires supplémentaires
pour pallier ces inconvénients possibles. Mais, dans le moment, pour ma
part, j'ai de la difficulté à accepter l'article tel que
défini présentement, pour avoir lu le bill 48 dans son
ensemble.
M. RIVEST: M. le Président, pour apporter une précision,
je pense qu'on a eu également une certaine réticence à
ajouter, au terme sylviculteur, une personne physique et morale. Tout en
respectant l'esprit du bill 48 que nous trouvons excellent, soit dit en
passant, comme le disait Me Boily je pense que la préoccupation
principale de la corporation est de prévenir que le bill 48 soit un
frein à certaines activités forestières en milieu
rural.
Je m'explique. Si les mécanismes de taxation empêchent
d'une certaine façon ou peuvent annihiler l'effet incitateur de
certaines mesures des différents autres ministères, je pense que
la corporation comme telle se doit d'intervenir dans l'intérêt du
public, que ce soit une personne physique ou une personne morale; pour autant
que chacune des parcelles forestières soient mises à profit et
qu'on en tire le meilleur pour l'ensemble de la collectivité, je pense
qu'elle a rempli son rôle. Maintenant, c'est au législateur, je
pense, de définir, peut-être d'une façon un peu plus
corsée, ces différentes personnes, soit personnes physiques ou
morales.
M. BOILY: Si vous me permettez, M. le Président, d'ajouter
quelque chose, parce qu'il me semble qu'il y a peut-être une
ambiguïté dans les propos que nous avons tenus; c'est que, par ses
recommandations, la Corporation des ingénieurs forestiers veut en fait
que soit changé le système d'évaluation des terres
forestières, partant du principe que l'évaluation des terres
forestières doit être basée sur la productivité
potentielle des sols forestiers plutôt que sur le nombre d'arbres qu'il y
a sur ces terres forestières. Cela, pour exercer une incitation qui
semble, à la Corporation des ingénieurs forestiers, saine pour un
développement cohérent des forêts.
Dans la mesure où un propriétaire donné a une terre
forestière non exploitée, il est évident que sa taxation
foncière est inférieure à celle du propriétaire
voisin qui, ayant la même superficie, par exemple, exploite ce sol
forestier. Dans la mesure ou l'évaluation foncière est
fixée d'après la productivité potentielle de ce sol, il
arrive que ces deux propriétaires se retrouveraient avec la même
évaluation, en sorte qu'il serait exercé sur ce
propriétaire une incitation à exploiter un sol qui, en soi, est
de nature à être productif, et qui ne l'est pas par incurie,
négligence ou autrement. C'est un peu le but que vise la recommandation
qui vous est soumise aujourd'hui. Je ne sais pas si cela vous satisfait.
M. TESSIER: Permettez-moi, Me Boily, d'attirer votre attention sur le
concept de l'évaluation que vous voulez modifier totalement. En somme,
toute la base de l'évaluation, c'est la valeur marchande. Et là,
vous voudriez, en ce qui concerne les boisés ou les forêts, que ce
soit basé sur le potentiel de production. Or, à ce
moment-là, on déséquilibre tout. Est-ce qu'on va avoir une
manière d'évaluer pour les cultivateurs? Est-ce qu'on va en avoir
une autre pour les sylviculteurs? Est-ce qu'on va en avoir une autre pour
d'autres genres de commerces ou d'exploitations? Je ne crois pas que l'on
puisse accepter votre théorie.
La manière d'évaluer un boisé, c'est la valeur
marchande. Il ne s'agit pas du tout de dénombrer le nombre d'arbres
qu'il peut y avoir sur un boisé de ferme, par exemple. Mais, que vaut la
ferme? Vous avez une ferme qui, disons, est à 50p.c. en exploitation
agricole et à 50 p.c. en boisé. Que vaut ce boisé?
D'abord, cela dépend de quelles essences d'arbres il y a sur ce
boisé. 51 c'est de l'épinette, il a certainement une valeur
marchande beaucoup plus grande que si c'est du tremble. Ce peut
également être une érablière, par exemple, ce
boisé. Alors, qu'est-ce qu'il vaut?
L'évaluateur, je crois, doit consulter et là-dessus
je suis parfaitement d'accord avec vous un ingénieur forestier
pour connaître la valeur marchande de certaines essences de bois. Mais,
après qu'il a établi ceci, il s'agit de savoir si telle ferme,
à tel endroit, avec les essences de bois qu'il y a là vaut
$10,000, $15,000, $25,000 ou seulement $800. Le principe qu'on ne peut pas
abandonner, c'est de se baser sur la valeur marchande dans tous les cas.
M. BOILY: Est-ce à dire, M. le ministre, que vous renoncez
à exercer quelque incitation ou motivation pour l'exploitation des
terres forestières? C'est un peu, en fait, la question que se sont
posée les membres de la corporation. Parce que, d'après leurs
études, il est évident que les besoins en bois vont augmenter au
cours des années; les rendements actuels sont insuffisants ou le seront
dans un avenir rapproché pour répondre à la demande. C'est
un peu dans cette optique que la Corporation des ingénieurs forestiers
voulait trouver un moyen d'inciter ceux qui détiennent des terres
forestières non exploitées à les exploiter.
M. TESSIER: Je crois qu'il ne faudrait pas
mal interpréter ce que je vous ai dit. Il ne s'agit pas de
nuire: il ne s'agit pas de ne pas encourager la sylviculture. Au contraire.
Mais il faut tout de même établir certaines nonnes
d'évaluation. Or, le concept lui-même doit être la valeur
marchande. Maintenant, en tenant compte, bien entendu, de tous les aspects de
la question. Le manuel d'évaluation, en somme, va tenir compte des
endroits. Evidemment, une terre à bois dans telle région n'a pas
la même valeur que dans une autre région. Tout cela doit
être pris en considération.
En terminant là-dessus, je voudrais ajouter que le tout a
été fait après consultations avec le ministère des
Terres et Forêts qui est en parfait accord. Nous avons envisagé
à peu près tout ce que vous venez de soulever. Cela a
été discuté avec le ministère des Terres et
Forêts. C'est après consultations avec ce ministère que
nous en sommes arrivés à la rédaction du projet de loi.
Mais il y a lieu, comme je vous l'ai mentionné tout à l'heure, de
peut-être le compléter par certaines de vos suggestions, comme la
définition du sylviculteur, et d'amender en conséquence les
articles 14 et 15.
M. CROISETIERE: Nul doute que le ministre s'inspirera aussi des
lumières de son collègue du comté de Duplessis pour
compléter.
M. RIVEST: Si vous me le permettez, M. le ministre Tessier, si on admet
que le bois est un bien immobilier, il faudra admettre que les carottes et les
patates sont également des biens immobiliers, puisque le bois est
essentiellement une récolte. Il n'est pas un immeuble par destination ou
quoi que ce soit.
M. TESSIER: C'est le code civil qui définit la question. Nous
n'avons pas l'intention d'aller à l'encontre du code civil.
M. RIVEST: Nous demandons, pour les fins de l'évaluation
municipale, pour les fins du projet de loi, que les bois ou le stock ligneux ne
soit pas considéré comme un bien immeuble. Je pense, au sujet des
modalités, qu'en consultation avec les différents
ministères il y aurait moyen d'établir assez facilement des
barèmes ou certaines normes de base qui pourraient aussi bien
régir le potentiel des sols que la valeur des bois sur pied. C'est aussi
simple l'un que l'autre. Il s'agit de savoir comment, tout simplement. Merci,
M. le Président.
M. TESSIER: Je pourrais peut-être ajouter que nous avons
également tenu compte de ce qui existe dans les autres provinces
canadiennes et même dans les autres pays, notamment dans les Etats
américains. Il faut tout de même que nous ayons une loi-cadre de
l'évaluation municipale qui se rapproche le plus possible et qui
concorde avec les principes qui existent en Amérique du Nord.
Evidemment, il y a des cas spécifiques au
Québec dont nous devons tenir compte, mais je parle des grands
principes de base de l'évaluation. Las manuels d'évaluation dont
se servent les éva uateurs, nous essayons de les rendre aussi conformes
que possible à ceux qui existent ailleurs.
Quant aux mesures incitatrices pour les sylviculteurs ou les producteurs
de bois, je crois que ce n'est pas la place, dans une loi de
l'évaluation, pour inclure ou incorporer des mesures incitatrices. Il y
a d'autres moyens de le faire. Il y a un ministère pour cela, qui
s'appelle le ministère des Terres et Forêts, et qui peut, lui,
avoir des mesures incitatrices et qui en a, d'ailleurs.
M. PAUL: Tout à l'heure, Me Boily, dans le cours de vos
remarques, vous avez mentionné que la recommandation ou la requête
des membres de la Corporation des ingénieurs forestiers, au fins de
déclarer biens meubles les arbres, la forêt ou la sylviculture,
c'était dans le but de promouvoir la sylviculture et que cela aurait
pour effet de pénaliser le sylviculteur si nous continuions à
considérer comme bien immeuble la forêt. Est-ce que j'ai bien
compris?
M. BOILY: Je ne sais pas si ce sont à peu près les propos
que j'ai tenus, mais c'est dans le sens, du moins, de ce que j'ai dit.
M. PAUL: Je n'ai pas répété mot à mot vos
expressions. Apporteriez-vous le même argument de pénalisation
à l'endroit d'un propriétaire qui posséderait une maison
et qui ne l'entretiendrait pas et, du fait qu'il en prendrait soin,
l'améliorerait, l'entretiendrait, il serait pénalisé en
supportant une évaluation plus forte que celle qu'il porterait si la
maison était laissée en désuétude, en
démolition, à l'abandon total?
M. BOILY: M. le Président, je pense qu'il faut regarder le
problème particulier qui se pose aux sylviculteurs du fait qu'une
forêt et que des arbres, en l'occurrence, plus particulièrement,
ont une existence qui s'échelonne sur des années qui sont de
l'ordre de 50 ou de 60 ans parfois, selon les essences dont il s'agit, et que
dans la mesure où, pour les fins d'évaluation municipale,
foncière, ces arbres ne seraient pas considérés comme des
immeubles, eh bien, on pourrait, de cette façon, favoriser un
développement cohérent dans lé domaine forestier et de la
sylviculture plus particulièrement. C'est dans cette optique-là
qu'il faut regarder les arbres selon leur échelonnement d'une
quarantaine d'années ou d'une vingtaine d'années tout au
moins.
M. PAUL: Dois-je comprendre que vous retirez votre argument à
l'effet qu'il s'agirait, pour le législateur d'une
pénalité à l'endroit de celui qui ferait de la
sylviculture?
M. BOILY: Si on le taxe sur les arbres qui sont sur son lot de terre,
si, effectivement, ça entre en ligne de compte, le fait qu'il y ait des
arbres sur cette terre forestière, augmentera son fardeau fiscal de
taxes.
M. PAUL: Si nous poussons l'argument jusqu'à l'absurde, c'est
donc dire que rien ne devrait être taxé sur une terre.
M. BOILY: Au contraire, nous avons établi comme principe que la
taxation, l'évaluation foncière devait être basée
sur la productivité potentielle d'une terre forestière. Alors,
nous voulons que les terres forestières soient taxées mais
taxées sur leur productivité potentielle plutôt que sur ce
qui est au moment où les évaluateurs font leur évaluation.
C'est donc dire que la Corporation des ingénieurs forestiers veut, au
contraire, que les terres forestières soient taxées mais
taxées sur une base qui nous apparaît conforme aux
nécessités des sylviculteurs, à leurs obligations et aux
besoins aussi de...
M. TESSIER: Si nous poursuivons votre argumentation, nous devrions taxer
les commerces suivant le profit, cela équivaudrait à la
même chose. C'est le principe que vous émettez.
M. BOILY: En fait, nous voulons qu'un statut particulier dans cette
loi-là soit...
M. TESSIER: C'est le chambardement complet des principes de base
mêmes de l'évaluation.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, j'ai
écouté avec intérêt M. Boily qui plaide la cause que
lui ont confiée les ingénieurs forestiers. Je pense qu'il y a,
dans l'esprit du procureur, une confusion entre l'évaluation comme
telle, qui est sous-tendue par les principes que nous retrouvons dans la loi,
et, d'autre part, le code qui servira à cette évaluation. Alors,
nous avons parlé, tout à l'heure, de valeur marchande. On va
tenir compte de la valeur marchande de ces territoires dits ligneux ou
boisés, mais je ne pense pas que le plaidoyer que vous avez fait, M.
Boily, soit vraiment convaincant et serve la cause de vos clients parce que,
comme on vient de le dire, si on poussait jusqu'à l'absurde ce que vous
venez de dire, il n'y aurait pas de loi d'évaluation foncière
parce que chacun pourrait citer une exception pour passer à
côté de la loi, ce qui reviendrait à dire qu'il ne serait
pas nécessaire de présenter une loi.
Alors, même compte tenu de la valeur des arguments qui sont
exposés dans ce projet de loi, je pense que la demande que vous faites
en ce qui concerne l'évaluation des terrains dits forestiers, demande
sérieuse, exigerait une sérieuse considération avant que
nous changions d'idée et que nous changions le principe qui veut que
nous évaluions selon la valeur marchande. Parce qu'il me paraît y
avoir, de toute évidence, une confusion entre l'évaluation comme
telle et le code qui servira à cette évaluation, ce qui n'infirme
pas, pour autant, l'ensemble des propositions que vous avez soumises au nom de
la Corporation des ingénieurs forestiers.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de L'Islet.
M. GIASSON: Votre conception de l'évaluation des terrains
boisés, si on essayait de l'appliquer dans des cas pratiques.
J'achète un lot de 100 acres que je paye $1,000 parce que je
considère qu'il y a environ 200 cordes de bois prêtes pour le
marché. De quelle façon allez-vous procéder dans cette
évaluation si, à côté, j'achète une autre
terre à bois de 100 acres également, que je paye $5,000, dont le
sol a à peu près la même productivité, mais sur
laquelle je considère qu'il y a 1,000 cordes de bois. Dans votre
conception, de quelle manière allez-vous évaluer les deux
boisés?
M. RIVEST: M. le Président, d'après la conception du
mémoire soumis par la corporation, aux fins du bill à
l'étude, ces deux terres ont exactement la même valeur au point de
vue de la taxation. La seule différence, c'est qu'une des deux terres
devient un agent économique important dans la région où
elle est située et l'autre devient un fardeau économique. Il y a
évidemment une différence énorme à mon point de
vue, elle est moins dans la taxation que dans l'élément moteur
que peut représenter du stock ligneux en milieu rural.
Je pense que les remarques autant que le mémoire tendent à
démontrer que la corporation comme telle se soucie des
spéculateurs qui vont acheter des blocs de forêt, qui vont les
piller et qui vont voir dégrever leur évaluation foncière
au détriment de gens plus prévoyants qui conservent des stocks
ligneux respectables et qui, évidemment, laissent sur le marché,
les marchés locaux qui alimentent les usines, des stocks ligneux assez
importants justement pour justifier l'existence des stocks ligneux.
Vous connaissez, dans l'Islet, les différents problèmes.
Il y en a à différents endroits. Ce que la corporation vise,
c'est justement qu'on puisse avoir dans des régions des stocks ligneux
qui puissent alimenter ces usines-là, les alimenter sur une base
soutenue, puis on pense que les éléments de taxation ont une
importance assez capitale pour faire les représentations que nous
faisons, malgré tout, avec assez d'insistance, je crois.
M. GIASSON: Mais vous jugez que c'est convenable que, pour les deux
boisés de 100 acres, de même dimension, avec un sol de type
forestier équivalent, on accepte la même évaluation sur les
deux terrains?
M. RIVEST: Je pense, M. le député, qu'un champ de mais
doit être taxé sur le même type de sol au même titre
qu'une friche qui est à côté. C'est la productivité
qu'on doit taxer et non ce qu'on y cultive. Si on y cultive des arbres, je
pense qu'on ne doit pas taxer les arbres, mais on doit taxer la
productivité du sol.
M. GIASSON: Mais on ne peut pas comparer le domaine forestier au domaine
agricole à ce niveau-là? Le mais vous le récoltez chaque
année, au bout d'une saison estivale de six mois, il est disparu. La
forêt est là pour au moins 40 ans avant d'atteindre une certaine
maturité. La comparaison ne peut pas tenir entre les deux.
M. RIVEST: Je pense que vous avez raison jusqu'à un certain
point, sauf que la taxation sur un champ de mais est à peu près
minime, alors que la cumulation de la taxation sur un stock ligneux devient
énorme, devient un fardeau qui est quasi insupportable et qui force la
plupart du temps les propriétaires forestiers à faire souvent
avant terme des récoltes qui étaient quand même assez
prometteuses, qui auraient été un apport important aux paroisses
rurales.
On a mentionné tout à l'heure qu'on voulait faire un cas
d'exception; on croit qu'un cas d'exception qui représente les deux
tiers des terres imposables, je pense que ça mérite
considération.
M. SEGUIN: M. le Président, je ne viens pas d'un milieu forestier
étant de l'île de Montréal où il n'y a que de
petites forêts ou des boisés. Je serais curieux de savoir quel
traitement on proposerait dans le cas d'un secteur boisé ou d'une
forêt qui aurait passé au feu.
Question de valeur marchande vis-à-vis de la valeur productive de
cette forêt qui, d'un moment à l'autre, aura disparu à
cause d'un incendie. Quels seraient vos propos dans un cas semblable? C'est
hypothétique, mais je vous demande votre opinion. Est-ce qu'on doit
considérer la valeur productive, la valeur du sol ou si, en
réalité, la valeur marchande sera à considérer dans
un cas semblable, parce qu'une fois qu'il y aura eu l'incendie, il se peut fort
bien que la valeur marchande pour autres fins aura augmenté?
M. RIVEST: M. le Président, on a reproché à notre
mémoire d'être un peu théorique.
M. SEGUIN: Je concède cela.
M. RIVEST: Je pense que c'est une question théorique. Je pense
que, sur l'île de Montréal, en particulier dans la zone...
M. SEGUIN: Non, non, en dehors de l'île.
M. RIVEST: ... dans la zone habitée, où les
systèmes de protection des forêts sont en général
assez bien assurés, les destructions complètes par le feu, si
elles se font, se font sur des étendues assez restreintes. Je pense tout
de même que vous avez raison de souligner ce point. Il arrive ceci: quand
il y a des zones détruites par le feu, si petites soient-elles, on
s'assure en général qu'elles sont reboisées
mécaniquement, d'une façon artificielle. Je pense que le
gouvernement, en particulier le ministère des Terres et Forêts,
qui fait des efforts louables dans des questions de reboisement, s'assure que
ces parcelles de terrain sont reboisées effectivement. Est-ce que j'ai
bien répondu à votre question?
M. SEGUIN: Oui, je vous remercie.
M. LE PRESIDENT: Nous vous remercions, Me Boily et M. le
Président. Nous allons maintenant passer... oui, excusez.
M. BELAND: Est-ce que je peux poser une question?
M. LE PRESIDENT: Allez, allez.
M. BELAND: Si je prends tout le contexte à l'intérieur
duquel le mémoire se situe, est-ce que cela voudrait laisser entendre au
gouvernement qu'il serait nécessaire, dans un avenir très
prochain, qu'il y ait une évaluation scientifique, par exemple, de tout
le territoire boisé du Québec y compris les territoires qui sont
forêts privées?
M. RIVEST: M. le Président, il est assez évident qu'il y a
des travaux qui pourraient éventuellement servir de base, et je
réfère en particulier aux travaux de l'inventaire canadien des
terres, qui peut éventuellement servir de base. Evidemment, il y a des
imperfections; il s'agirait probablement de brosser et de rebrosser les
méthodes et on pourrait atteindre une certaine efficacité. Ce
sont des choses qui peuvent se réaliser assez bien. Je pense que
l'ensemble des terrains privés doit être évalué de
cette façon, puisque l'ensemble des terrains privés a
été l'objet d'une classification des sols par l'inventaire des
terres du Canada. Je pense que les travaux de base sont amorcés. Il
s'agirait en général de prendre avantage et de compléter,
de perfectionner ces travaux. Je pense qu'on pourrait en arriver assez
rapidement à ces résultats.
M. BELAND: Très bien, merci.
M. BROWN: Mr. Chairman, I am most interested in this brief that was
submitted and I realize that there are very complicated conditions dealing with
this. In my particular area, Brome, that I have the honor to represent here,
and the areas around there, it seems that the only benefits that the tree
farmer gets is the benefit of beeing taxed.
If a farmer owns a farm, he has benefits that go to him on almost every
count. But in the case of the tree farmer, there is absolutely no benefits.
Now, it is not just a generalized picture when you are talking of trees. Trees
are more than just an asset. They are part of our environment that is most
important today because they make water; they see that water is in water sheds;
they help to fight pollution. A grove of trees grown by a tree farmer within a
community is an asset to everybody; it is an asset to the land around them,
moreso than we will say if you have a farmer who has cows eating hay and
browsing, you will find that it destroys to a certain amount the land. This
business of tree farming should require a special study in my opinion, to see
if there is not some way that we could work out an arrangement that would at
least get them some benefits. I know it is very difficult, for instance, if a
farmer has Christmas trees, he is going to cut this crop in seven years.
How are you going to fit it into the picture against the man who has
maple trees over a period of 150 years? I know it is complicated but at the
same time I would like to say that we should encourage tree farmers. It is for
the good of our country. We do not want to give away programs, but there should
be some way of adopting a standard that could be used throughout the
Province.
M. LE PRESIDENT: Thank you, Mr. Brown. Maintenant nous allons passer aux
arpenteurs-géomètres de la province de Québec. C'est M.
Lévesque ou M. Chastenay qui doit parler au nom de la corporation.
Je me permets de rappeler au porte-parole de bien vouloir être
bref et de résumer les commentaires qui ont été faits dans
le mémoire. Je vous remercie à l'avance de votre
collaboration.
Arpenteurs-géomètres de la province de
Québec
M. BLANCHET (Bernardin): M. le ministre, M. le Président,
messieurs, le mémoire des arpenteurs-géomètres de la
province de Québec a été composé en collaboration.
Votre lecteur est Bernardin Blanchet, avocat. Les
arpenteurs-géomètres sont ici représentés par M.
Marcel Lévesque, le président de la corporation, professeur
à l'université Laval, M. Paul Lachance, professeur à
l'université Laval et M. Réjean Blanchet, qui est dans la
pratique privée.
Evidemment, le présent mémoire a été
conçu dans la ligne de pensée du législateur, en vue du
bien commun et non pas dans le but de défendre une chapelle
particulière.
Notre corporation professionnelle, qui est vétuste, a
été fondée tout d'abord dans un but de bien commun, et si
nous présentons actuellement un mémoire, c'est dans un but de
collaboration aux objectifs du gouvernement qui présente cette loi.
Nous voulons donner quelques idées fondamentales seulement en
déclarant d'abord qu'il faut donner à l'évaluation
foncière une base authentique, strictement fidèle à la
réalité juridique et physique, à caractère
définitif, mais n'excluant pas les modalités oscillatoires de la
valeur qui vont s'y greffer. Ce que nous voulons un mot d'explication
c'est que la base de l'évaluation foncière soit solidement
édifiée sur le droit actuel, sur le code civil, le code de
procédure civile, la Loi du cadastre, la Loi des
arpenteurs-géomètres et que chacun puisse travailler à
l'intérieur de sa juridiction propre.
Si, dans le but d'une uniformité des critères
d'évaluation, il y a immédiatement différence entre
l'évaluation et l'objet lui-même qui sera évalué,
si, dans le but d'une uniformité de l'évaluation, des
critères et des normes, nous arrivons à l'étonnant
résultat caractérisé par la multiplicité des
cadastres, la variété des cadastres polymorphes,
l'enchevêtrement des notions fondamentales de propriété,
l'arbitraire création de nouveaux patrimoines, la méthamorphose
de l'occupation en propriété, eh bien! on aura manqué le
coup dès la base.
Le citoyen sur la défensive, dans ce cas, devra payer les frais
d'une juxtaposition de cadastre dit confectionné pour des fins fiscales
spécifiques, se dépêtrer au milieu de nouveaux concepts
juridiques étrangers à la législation existante.
De ces principes se dégagent les recommandations que nous croyons
devoir formuler dans un premier temps, sous la forme de modifications à
la loi proposée; dans un second temps, si ce n'est pas trop audacieux de
le faire en regard de l'importance de la matière, en proposant une
étude sérieuse avant l'adoption du présent projet de
loi.
L'unité d'évaluation. Nous voudrions la définition
d'une unité d'évaluation. Elle se définirait ainsi: "Un
immeuble appartenant à un seul propriétaire et borné de
tous les côtés par des immeubles appartenant à d'autres
propriétaires."
On ne veut pas par là, évidemment, comme
conséquence que dans l'organisation elle-même qui a pour but
d'uniformiser les critères et normes d'évaluation,
arbitrairement, on sépare la propriété d'un
propriétaire. La raison pour introduire cette définition et que
quand deux immeubles contigus appartiennent à un seul
propriétaire nous donnons des exemples certains droits,
comme les droits résultant du voisinage, tombent dans la confusion et
deviennent inexistants. Ainsi un droit de passage, établi
préalablement à la réunion des deux immeubles,
disparaît quand les immeubles deviennent, par la suite, la
propriété d'un seul.
Si, lors de l'évaluation, on sépare ces deux
propriétés de façon qu'elles puissent, à l'occasion
de la saisie et de la vente pour taxes impayées, être vendues
séparément, s'il y a plusieurs unités d'évaluation
et si, sur une des unités, le propriétaire taxé n'a pas
payé ses
taxes, on vendra cette unité, alors qu'il est propriétaire
des autres unités factices, je dirais, d'évaluation qui auront
été ainsi créées dans le rôle
d'évaluation par les personnes préposées. Si c'est vendu
à des propriétaires différents, comme cela arrivera
évidemment, il se créera de nouveaux droits, entre autres, ceux
résultant du voisinage, qui auront été établis par
le fait que ces propriétés auront été
portées au rôle comme deux propriétés distinctes.
L'évaluation n'est pas cause valable pour distribuer autrement les
droits d'un propriétaire.
L'ajouté de cette définition demande une modification
à l'article 12, dans le sens suivant: "L'immeuble est porté au
rôle au nom du propriétaire du fonds de terre; mais s'il y a titre
enregistré attestant qu'un immeuble par nature placé sur son
fonds appartient à une autre personne, cet immeuble par nature est
porté au rôle au nom de son propriétaire, s'il y a titre
enregistré. Dans tous les cas, les immeubles sont portés au
rôle par unité d'évaluation de façon à ne pas
créer de droits nouveaux ou à restreindre ou changer ceux qui
existent suivant les titres."
Je vous prie ici de rayer, l'article 13 n'a plus besoin de la
restriction exprimée s'il n'y a pas de titre de propriétaire.
C'est une erreur du copiste.
A l'article 9, il est dit: "Sauf disposition contraire, tout immeuble
doit être porté au rôle à sa valeur marchande
établie conformément au manuel d'évaluation."
Ici le manuel d'évaluation, vous le comprenez, prend une
importance capitale. Nous soumettrions que, vu son importance, il
reçoive une certaine publicité permettant la critique des
suggestions, avant d'être adopté.
Ces articles présupposent, comme conséquence presque
inévitable, un inventaire complet de tous les immeubles affectés
par la présente loi. La Corporation des
arpenteurs-géomètres a remis à différents ministres
un mémoire sur le cadastre fiscal, c'est-à-dire le cadastre
confectionné en vue de la fiscalité d'imposition foncière,
mais un cadastre réel, c'est-à-dire un cadastre qui est
fondé sur la propriété, les droits de
propriété et, en conséquence, les titres de
propriété, le plan du cadastre. Nous avons, dans notre
mémoire, donné la définition du cadastre. Nous nous
sommes, en même temps, référés au code civil et au
code de procédure civile, aux articles que nous croyons
évidemment les plus touchés.
Nous voulons aussi demander une modification à l'article 10, qui
se lit de la façon suivante: "La superficie d'un terrain
s'établit soit d'après l'inscription qui en est faite au
cadastre, soit d'après le titre de propriété, soit
d'après la superficie effectivement occupée, selon la plus grande
des trois." C'est le texte actuel. Cet article devrait être
rédigé dans le sens suivant: "La superficie d'un terrain
s'établit suivant les droits du propriétaire". Voici les
principales raisons du changement. Le texte n'est pas limitatif. Il faut faire
les recherches, les mesurages et les calculs nécessaires pour obtenir
les trois superficies. Nous sommes dans le domaine proprement physique, dans le
domaine de la précision et de l'exactitude.
Des recherches plus poussées aboutiront probablement à
trouver deux superficies différentes ou plus pour chacune des trois
catégories. La plus grande des trois superficies n'est pas toujours la
meilleure nécessairement. On obtiendra des recouvrements ayant pour
conséquence d'évaluer en double des lisières de terrains.
Les terrains aboutant, par exemple, au terrain du propriétaire voisin se
trouveront, en vertu de ce principe de la plus grande des trois
superficies...
M. TESSIER: Je m'excuse, mais je voudrais vous faire remarquer qu'un
amendement a été apporté à cet article. Les mots
"selon la plus grande des trois" ont été biffés.
M. BLANCHET (Bernardin): Merci, M. le ministre, de nous avoir
prévenus et, en même temps, de nous avoir
précédés.
Je ne vais donner que les remarques qui concernent les autres
modifications demandées. Lorsque nous parlons de ces mesurages de
propriétés, nous déclarons que c'est le problème
qu'affronte chaque jour l'arpenteur dans l'exécution de ses fonctions
d'étudier les différents documents qui concernent la
propriété, de déceler les différences qui existent
entre le cadastre, les titres et l'occupation. On se plaint, évidemment,
de ce que le cadastre ait des lacunes. Nous croyons que la présente loi
qui vient devant le Parlement nous fournit une occasion particulière de
combler les lacunes du cadastre Mais nous craindrions qu'un nouveau cadastre,
qui n'est pas conforme au réel, qui n'est pas copié, qui n'est
pas authentique, qui n'est pas le cadastre officiel dont les lacunes pourraient
être comblées évidemment par des mesures gouvernementales
appropriées, ne devienne la base de l'évaluation.
Nous faisons toujours la différence, M. le Président,
entre normes et critères d'évaluation et l'objet qui est
évalué. Ce n'est pas du tout la même chose. Il est
fallacieux de vouloir reconnaître sans discernement comme limites des
propriétés les marques d'occupation. Etablir la superficie d'un
terrain, c'est d'abord en fixer les limites et, ensuite, en calculer la
contenance enfermée à l'intérieur- des limites. Dans notre
contexte juridique, fixer les limites des propriétés est un acte
quasi judiciaire parce qu'il a pour objet une décision à prendre
en matière de droits, ceux du propriétaire.
Or, le code civil établit les droits du propriétaire: la
propriété et le droit de jouir d'une façon absolue d'une
chose, pourvu qu'on n'en fasse pas un usage prohibé par la loi et les
règlements. Or, si, par une législation, on intervient sur la
propriété elle-même en la subdivisant, on change les
droits, c'est-à-dire la
jouissance du propriétaire lui-même dans ce qu'il a de
fondamental.
L'adoption de la présente loi est une chance unique de remettre
à jour l'inventaire des biens-fonds. Il en a été question
partiellement tout à l'heure. Il serait inestimable pour les
différentes fonctions gouvernementales, municipales et autres que les
plans et les renseignements précis, à ce jour, soient produits
suivant un programme bien établi, un système permanent et
universel. C'est ce que nous vous proposons, messieurs, et nous croyons que
pour les considérations déjà données, le projet de
loi actuel tendrait à venir à l'encontre du droit civil
lui-même, du code de procédure, de la Loi du cadastre et des
droits des corps professionnels.
Nous reconnaissons évidemment je le dis en conclusion et
simplement en aparté, après discussions avec les membres de la
corporation que les évaluateurs font une oeuvre basée sur
des contacts interdisciplinaires. Mais il reste qu'à la base, pour faire
la preuve devant les tribunaux, par exemple, et pour donner un objet
précis à évaluer, chacune des disciplines
concernées est la seule qui puisse servir le bien public. C'est pour
cette raison que nous avons fait notre rapport et nous vous remercions.
M. TESSIER: M. le Président, je tiens à remercier Me
Blanchet qui, au nom des arpenteurs-géomètres du Québec,
nous a présenté un très bon mémoire que nous lirons
d'ailleurs avec beaucoup d'intérêt.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je veux faire de
même et remercier la Corporation des arpenteurs-géomètres
qui a étudié le projet de loi qui est devant nous et qui, par ses
observations, donne une dimension beaucoup plus large au problème qui
nous préoccupe. Il est bien entendu que, dans le cadre de la loi 48, il
n'est pas possible d'intégrer les propositions que vous faites. Il reste
toutefois que vous ouvrez des avenues qui nous serviront à demander au
gouvernement d'entreprendre ces révisions dont vous parlez,
particulièrement en ce qui concerne le cadastre et l'ensemble des biens
immobiliers en fonction des dispositions du code civil.
M. BLANCHET (Bernardin): Nous demandons, M. le député, non
pas de l'intégrer à la loi mais que la loi respecte,
évidemment, la législation déjà existante. C'est
extrêmement vaste. C'est fondamental et extrêmement important.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ceci étant déjà entendu
dans mon esprit, Me Blanchet.
M. LE PRESIDENT: Merci, Me Blanchet. J'inviterais maintenant Me Beaudry
à nous faire valoir les demandes de Park Laign Ltd.
Park Laign Ltd.
M. BEAUDRY: Paul Beaudry, avocat de Montréal. Le mémoire a
été préparé en collaboration avec M. Roger
Charland, président de la firme Bégin, Charland & Valiquette
Inc. et M. Ronald-J. Richard, vice-président de Park Laign Ltd.
La loi-cadre de l'évaluation foncière constitue une
amélioration énorme par rapport à tout ce qui existait
auparavant dans ce domaine, et l'industrie en général est
heureuse de le constater et d'en féliciter le ministère des
Affaires municipales.
Les commentaires et suggestions qui suivent ont pour but de la rendre
encore plus équitable et d'en faciliter la mise en vigueur en proposant
d'y inclure certaines modifications de détail basées sur
l'expérience du secteur industriel.
Quant à l'article 1, paragraphe c), la définition de
"immeuble par destination": "tout objet mobilier placé sur un fonds
à perpétuelle demeure par le propriétaire ou par toute
autre personne", semble complète par elle-même, peu importe qui en
conserve la propriété. Nous suggérons de supprimer les
neuf derniers mots de ce paragraphe.
En ce qui concerne les roulottes, il est suggéré d'ajouter
les mots "et utilisée" après le troisième mot du
paragraphe i) et à la fin du paragraphe: "roulotte" comprend aussi
"maison mobile". Dans le texte anglais, après le quatrième mot du
début, ajouter les mots "and used", et à la fin du paragraphe,
"trailer" also includes "mobile homes".
Quant à l'article 1, paragraphe m), nous regrettons qu'aux fins
de la présente loi, la définition du mot "agriculteur', serve
à des fins d'imposition foncière. Ici, je vous
réfère aux remarques que j'ai faites au nom du Barreau, ce
matin.
Quant à l'article 4, section Il, lorsque les prix et les valeurs
varient rapidement en période d'inflation ou de régression, la
préparation d'un nouveau rôle après cinq ans peut amener un
changement considérable des valeurs foncières et un brusque
accroissement de taxes difficile à supporter pour le contribuable
ordinaire aussi bien que pour l'industrie. Dans le passé, on laissait
aux municipalités la faculté de décider si le rôle
devait être fait tous les ans ou, au plus tard, tous les trois ans.
Il est vrai qu'on peut toujours faire varier les taux de taxation, mais
il est rare que les taux municipaux et scolaires varient dans la même
proportion et, de plus, comme le rôle est supposé refléter
la valeur marchande, suivant la nouvelle loi, un ajustement à tous les
cinq ans risquerait de donner une image fausse du crédit des
municipalités à certaines années aussi bien que d'imposer
un brusque fardeau au budget des contribuables.
Il est suggéré de conserver l'obligation pour les
municipalités de faire un rôle complet à tous
les cinq ans mais de leur laisser la faculté de déposer un
nouveau rôle soit après deux, soit après trois ans en
changeant seulement les normes générales d'indices des
coûts et de dépréciation suivant une procédure
simple qui pourrait être contenue dans le manuel d'estimation.
L'article 6, section Il. Cet article est d'une importance capitale en ce
qu'il rend le gouvernement en totalité ou en partie, directement ou
indirectement, évaluateur des propriétés et,
jusqu'à un certain point, juge de la valeur marchande, selon l'article 9
qui suit.
Cela a son bon côté du point de vue de l'uniformité
des normes et critères et peut aussi avoir son mauvais
côté, si le manuel devient en tous points obligatoire.
Il est suggéré de biffer la référence au
manuel.
A l'article 11, section Il: L'industrie en particulier trouve injuste
qu'on porte au rôle, pour fins de taxation, des immeubles dont la
construction n'est pas terminée et dont elle ne peut encore tirer aucun
revenu. D'autre part, l'industrie n'a jamais intérêt à
laisser inoccupés de nouveaux immeubles et il s'écoule peu de
temps avant la construction aux trois quarts et la construction
complète. Il est suggéré de supprimer le paragraphe a) de
l'article 11 et d'ajouter à la fin du paragraphe b): "Pour l'usage
auquel il est destiné."
En ce qui concerne les roulottes, je vous fais grâce de lire le
texte qui appert pour m'en tenir à l'article 14.
Article 14, section Il, paragraphe a). Cet article est d'une importance
capitale pour l'industrie en général dans la province de
Québec. Nous devons féliciter le gouvernement pour une telle
initiative qui tend à mettre notre province sur un pied
d'égalité avec l'Ontario, sa voisine. L'expérience a
montré cependant qu'un bon nombre de cas particuliers sont
extrêmement difficiles à classifier, soit dans les immeubles par
nature, soit dans les immeubles par destination.
La nouvelle loi semble remplacer le mot "machinerie" qui existait
auparavant par les mots "immeubles par destination." Le concept de l'industrie
est différent. L'industrie divise généralement ses actifs
physiques en terrains, bâtiments et équipements industriels.
L'équipement industriel est tout ce qui n'est pas terrains et
bâtiments proprement dits, c'est-à-dire tous les instruments,
machines, équipements mobiles ou non, qui servent à un processus
industriel. Les bases de machines, bâtis, supports sont
généralement considérés comme équipement. De
plus, dans la technique moderne, le concept de mobilité n'est plus un
critère exclusif des machineries et équipements de production.
L'ère de l'électronique a, en effet, ajouté toute une
catégorie d'instruments de contrôle de production qui servent bien
à des fins commerciales ou industrielles et qui cependant ne sont pas
strictement mobiles.
Un autre concept ou critère non prévu par la loi
jusqu'ici, mais qui est souvent employé par les évaluateurs dans
la pratique, est celui de l'entreposage à long et court terme des
produits bruts ou finis par rapport aux produits de transformation. Dans le cas
de réservoirs industriels, par exemple ceux qui servent à
entreposer des produits bruts ou des produits finis pourraient, par
définition, entrer dans la catégorie des immeubles par nature,
alors que ceux qui servent à l'entreposage temporaire de produits de
transformation sont assimilables à des équipements de production
et pourraient entrer, par définition, dans la catégorie des
immeubles par destination.
Un autre critère industriel est celui de
l'interchangeabilité. Ce qui fait partie d'un bâtiment et peut
être vendu avec lui pour d'autres fins que celles du présent
propriétaire est assimilable à un immeuble par nature; ce qui
normalement doit être changé ou enlevé par un
propriétaire nouveau est assimilable à un immeuble par
destination.
Si l'intention du législateur est d'exempter de la taxe
foncière les moyens propres de production industrielle, il vaudrait
mieux apporter certaines précisions à des catégories de
biens qui pour les uns sont des immeubles par nature et pour les autres des
immeubles par destination, quand ce ne serait que pour des raisons
d'uniformité.
Sans restreindre la généralité du paragraphe a) de
l'article 14, il est suggéré de préciser certaines
catégories d'immeubles industriels à ne pas porter au rôle.
Par exemple, les bases de machines, l'enveloppe ou la cage des convoyeurs, les
réservoirs industriels servant à emmagasiner temporairement des
produits de transformation, les transformateurs électriques et tous
autres appareils électriques ou électroniques.
Alternativement, il est suggéré de modifier ainsi la
première phrase de l'article 14: "Ne sont pas portés au
rôle les immeubles par destination et les équipements qui sont
utilisés."
Quant à la section, Il paragraphe c) de l'article 14, à
cause des énormes investissements non directement productifs que
l'industrie sera forcée de faire ou appelée à faire dans
un avenir rapproché pour servir exclusivement à des fins de lutte
contre la pollution de l'eau, de l'air ou du sol, il paraît injuste de
distinguer, pour ces fins seulement, entre immeubles par nature et immeubles
par destination.
De plus, certaines industries seront appelées à investir
contre la pollution beaucoup plus que d'autres dans des immeubles par nature,
par exemple des réservoirs d'aération de l'eau des canalisations
souterraines, des prises d'eau, etc., suivant les procédés
employés.
Il est suggéré de biffer au paragraphe c) de l'article 14
le mot "exclusivement" et d'ajouter à la suite "de même que les
immeubles par nature dans la mesure où ils sont utilisés à
de telles fins".
Au paragraphe d) de l'article 14, section Il, le même commentaire
qui a été fait pour le paragraphe a) de l'article 14 s'applique
également.
Si les mots "et les équipements" sont ajoutés après
les mots "immeubles par destination", aucune autre suggestion n'est faite
ici.
Permettez-moi d'ouvrir ici une parenthèse, M. le
Président. Ce matin, on m'a dit, concernant l'article 14, qu'un autre
groupe voulait se joindre au mémoire que je présente. Je vais
faire les remarques verbalement et je produirai en annexe d'ici quelques jours
le texte écrit qui est proposé au nom de l'Association des
propriétaires de cinéma du Québec.
Les propriétaires disent: Nous félicitons d'abord le
gouvernement d'avoir pris l'initiative d'une loi générale sur
l'évaluation foncière. Nous sommes d'accord sur la grande
majorité des réformes proposées dans cette loi
générale. Nous croyons cependant que nous-mêmes et la
totalité des quelque 322 cinémas du Québec, appartenant
soit à des chafnes soit à des propriétaires
indépendants, seraient gravement affectés de nouveau et, en
certains cas, réduits à fermer leurs portes, si l'article 14 du
bill proposé n'était pas modifié.
Nous pensons que le gouvernement n'a pas l'intention de taxer les
instruments de production et de commerce qui ne sont pas dans la
catégorie des terrains et des bâtiments. Mais il paraît
certain que l'exemption de ces moyens dans l'article 14, si elle repose sur les
mots "immeubles par destination", aurait pour effet de rendre imposables des
articles qui ne l'étaient pas jusqu'à maintenant. Par exemple,
les équipements de cinématographic, projecteurs, systèmes
sonores, écrans de projection, rideaux de scène, fauteuils,
distributeurs automatiques et mêmes caisses enregistreuses.
Cela résulterait du fait que ces objets sont placés
à l'intérieur des bâtiments, sinon à
perpétuelle demeure, du moins pour une durée indéfinie. Il
existe une jurisprudence concernant les immeubles par destination qui pourrait
conduire à une exemption plus restreinte que celle des machineries et
accessoires, qui existe dans la loi actuelle des cités et villes. De
plus, l'article 14 ne mentionne pas d'exemption pour ce qui sert à des
fins industrielles-commerciales ou commerciales.
Dans ces catégories, une série d'appareils ou de machines
non actuellement portées au rôle d'évaluation pourraient le
devenir du fait de la seule distinction entre immeuble par nature et immeuble
par destination. Exemples: balances, comptoirs, caisses enregistreuses,
appareils audio-visuels, appareils de projection cinématographique,
etc.
Nous présumons que le gouvernement n'a pas l'intention de faire
porter au rôle ces instruments de l'activité commerciale,
commerciale-industrielle ou industrielle. Nous recommandons donc que l'article
14 soit modifié pour se lire comme suit. "Ne sont pas portés au
rôle les immeubles par destination, machineries, appareils et
équipements qui sont utilisés pour des fins industrielles ou
industrielles-commerciales ou commerciales, pour servir principalement à
un processus de production, de transformation, d'extraction ou de modification
d'un produit, ou de tout autre procédé, opérations,
activités ou services de nature industrielle-commerciale ou
commerciale.
En ce qui concerne l'article 15, paragraphe d), l'industrie voudrait
être assurée que tous les chemins de fer...
M. TESSIER: Me Beaudry, est-ce que c'est dans le mémoire qu'on
a?
M. BEAUDRY: Non. J'ai dit que j'ouvrais une parenthèse, M. le
Président. C'est parce qu'on m'a donné cela ce matin.
M. TESSIER: Est-ce que vous pourriez nous remettre ce document?
M. BEAUDRY: J'en ai seulement une copie. M. TESSIER: Oui, oui, mais
même si on...
M. BEAUDRY: J'ai dit que d'ici deux ou trois jours le nombre voulu de
copies serait produit au secrétaire de la commission.
M. TESSIER: Je vous remercie.
M. BEAUDRY: En ce qui concerne le paragraphe d) de l'article 15,
l'industrie voudrait être assurée que tous les chemins de fer
seront traités sur la même base. Il semble y avoir une
imprécision lorsque l'article 15 d) dit: "Les réseaux de
transport en commun et de chemin de fer, "et, en anglais, "public transport and
railway systems". Plusieurs industries importantes ont des chemins de fer, soit
à l'intérieur des limites d'un complexe industriel ou d'une
usine, soit à l'extérieur, pour assurer le transport d'un point
à l'autre, parfois assez éloignés. Il est
suggéré de remplacer le huitième mot "de" du paragraphe d)
par les mots "tous les".
L'industrie considère que les systèmes industriels
privés d'égouts, d'aqueduc et de traitement d'eau qui servent
directement à la production dont le coût est défrayé
par elle et qui ne sont pas en soi une source de revenus, ne devraient pas
être portés au rôle. On suggère d'ajouter un nouveau
paragraphe e) se lisant comme suit: "Les systèmes industriels d'aqueduc,
d'égouts et de traitement d'eau non utilisée en soi comme sources
de revenus."
Je vous fais grâce de la lecture des articles 20 et 21, sauf que
j'attire votre attention sur le fait que l'on suggère de remplacer le
mot "fluide" par le mot "liquide", pour les raisons mentionnées dans
notre mémoire.
L'article 71, section VIl, ne mentionne que les frais de
sténographie et de traduction. Les frais d'experts et les frais
légaux semblent avoir été
oubliés. Ajouter, après la première virgule de
l'article, les mots "les frais d'experts et les frais légaux". Ici,
l'industrie se joint au Barreau.
A l'article 77, le rôle n'étant confectionné que
tous les cinq ans les modifications possibles dans les années
intermédiaires ne peuvent s'opérer dans la nouvelle loi que selon
les articles 97 et 98 qui assurent la tenue à jour du rôle pour
motifs spécifiés. Cependant, dans la grande industrie en
particulier, il peut être difficile, sinon impossible pour
l'évaluateur d'apprécier, au cours des cinq ans d'un rôle,
les changements de la valeur marchande dus à des raisons
économiques, fonctionnelles ou simplement physiques. C'est pourquoi il
semble équitable que tout contribuable puisse loger une plainte une fois
par an dans les quatre années qui suivent celle du dépôt.
Suggestion: ajouter à l'article 77: "Il sera toutefois loisible à
tout contribuable de formuler une plainte semblable une fois dans chacune des
quatre années suivant celle écoulée de la date du
dépôt du rôle."
L'article 79. Les deux dernières lignes du premier paragraphe
créent pour l'évaluateur l'obligation d'être mis en cause
dans tout appel prévu dans la présente loi. S'il s'agit de
l'évaluateur d'une municipalité importante et si le nombre des
appels est très considérable l'évaluateur peut se trouver
détourné de son travail ordinaire pendant des mois. Supprimer les
deux dernières lignes du premier paragraphe'.
L'article 81, ça a été mentionné dans le
mémoire du Barreau. En somme, il s'agit de remplacer la signification
"par huissier" par "poste recommandée".
Quant à l'article 97, si l'on s'en tient au sens strict des
paragraphes b) et c) le rôle devrait être modifié sans cesse
pour tenir compte des variations continuelles de la valeur marchande des
propriétés. Poussée à l'extrême cette
obligation équivaut à modifier le rôle d'évaluation
sans cesse. Suggestion: ajouter à la suite de chacun des paragraphes b)
et c) les mots suivants: "Due à un changement physique affectant un
immeuble ou son voisinage immédiat."
Quant à l'article 106, M. le Président, souvent, des
roulottes se trouvent placées à un endroit où elles ne
sont aucunement utilisées, par exemple, après leur fabrication,
etc. Aussi au point de vue industriel, lorsqu'on va développer un
barrage ou construire une grosse industrie dans une zone, on peut stationner
sur notre terrain le bureau mobile. On se demandait si c'était le sens
de la loi que les bureaux mobiles, qui sont là pour abriter les plans,
les devis et tout le matériel nécessaire pour la construction,
soient également visés.
En conclusion, le manuel, partie intégrante de la nouvelle loi,
contient un grand nombre de normes, de critères et de taux
d'évaluation qui ne sont pas assez connus pour pouvoir être
discutés dans le présent mémoire. Le temps, d'ailleurs, ne
permettra pas de le faire. C'est pourquoi nous suggérons de nouveau que
son application ne soit pas universellement obligatoire au début de la
mise en vigueur de la présente loi.
Nous réitérons nos félicitations au gouvernement
pour le progrès remarquable que laisse présager le bill 48. Les
proposants de ce mémoire offrent leur coopération sur des points
de détail, si jugés opportuns, et remercient la commission
parlementaire d'en avoir autorisé la présentation.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais encore une fois
remercier Me Beaudry. Je constate que plusieurs des suggestions
apportées par Park Laign Ltd. rejoignent sensiblement celles
présentées par le Barreau, que vous représentiez
également en tant que procureur.
Nous allons certainement considérer plusieurs des suggestions que
vous nous faites, mais je voudrais souligner un point qui est très
important je crois que vous l'admettrez avec moi celui de la
machinerie. Il y a lieu évidemment de rédiger de nouveau cet
article-là en tenant compte de vos suggestions et d'autres suggestions
qui nous ont été faites dans d'autres mémoires par
d'autres organismes.
L'intention du législateur c'est que toute machinerie ne soit pas
portée au rôle et par conséquent pas taxée. C'est
ça. Il s'agit maintenant de trouver la meilleure rédaction
possible pour en arriver à atteindre ce but-là.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre vient de dire que toute machinerie
ne sera pas portée au rôle et donc non taxable. Cela couvre le cas
de ces appareils qui se trouvent dans les salles de projection de
cinémas?
M. TESSIER: Là, je ne pourrais pas répondre...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez dit "toute machinerie".
M. TESSIER: Je présume que oui.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il ne s'agit pas de présumer, il s'agit
de savoir.
M. TESSIER: Nous le saurons mieux lorsque nous aurons le texte
définitif.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, je n'attends pas le texte
définitif, il y a ici un témoin que je veux bien interroger.
Lorsque vous avez parlé au nom des propriétaires de salles
de cinéma, Me Beaudry, qu'est-ce que vous entendiez exactement par
machinerie, et comment la distinguez-vous de la machinerie industrielle?
M. BEAUDRY: Si j'ai bien compris l'intention du ministre, au point de
vue industriel si je comprends bien l'esprit de la loi, après
l'avoir étudié avec des représentants, non pas seule-
ment de l'industrie cinématographique, mais de l'industrie d'une
façon générale l'intention était
d'éviter les procès de jeux de mots que nous avons eus dans le
passé. Egalement, je présume que le gouvernement veut, par cette
loi, créer un renouveau au point de vue industriel en enlevant ces
questions qui nous ont toujours posé un problème en
matière d'évaluation devant les tribunaux.
Je présume que, lorsqu'on parle de machinerie de projection, ce
sont des machines de projection. Encore là nous avons été
souvent devant les tribunaux. Si vous avez un projecteur de 8
millimètres, 16 millimètres, 35 millimètres, et
aujourd'hui nous sommes rendus avec des projecteurs de 70 millimètres,
ce sont des choses assez massives. Cela se transporte, mais disons que ce n'est
pas portatif.
M. TESSIER: Tous les meubles ne sont pas portatifs, loin de
là.
M. BEAUDRY: C'est ça.
M. TESSIER : Vous avez des meubles qui pèsent des centaines de
tonnes.
M. BEAUDRY: Pour obvier à ces malentendus, nous voulions inclure,
en changeant un peu les mots, pour des fins industrielles ou
industrielles-commerciales. Cela englobe ces parties mi-industrielles,
mi-commerciales, leur procédé de fonctionnement les
projecteurs, etc. serait considéré comme étant de
la machinerie industrielle-commerciale et non portée au rôle.
C'est de cette façon que je l'ai interprété et
j'espère que c'est de cette façon que vous l'avez fait.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qu'est-ce que le ministre pense de cela, dans
le cas des salles de projection de cinéma? J'aborderai l'autre aspect du
problème après. Il y a évidemment le bâtiment. Il y
a les fauteuils. Il y a les guichets. Il y a les vestiaires. Il y a aussi les
machines à projection, les écrans, etc. Est-ce que, selon le
ministre, ce sont là des immeubles par destination?
M. TESSIER: Moi, je ne crois pas. Je crois que ce sont des biens
meubles. En ce qui concerne l'énumération que vous avez faite,
vous parlez des vestiaires. Bien, le vestiaire, c'est une pièce.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! pardon, il y a des vestiaires mobiles. Le
ministre ne sait pas ça?
M. TESSIER: Si c'est un vestiaire mobile, c'est un meuble.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Et cela se loue. Non, remarquez, ce qui est
important, ce n'est pas...
M. TESSIER: Quant aux fauteuils également, je crois...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un instant, M. le ministre.
M. TESSIER: ... que, selon l'interprétation que j'en donne du
moins, ce sont des biens meubles de même que les appareils à
projection.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce sont des biens meubles et non pas des
immeubles par destination. Lorsque je parle des vestiaires, ce n'est pas une
blague que je fais. Il y a des vestiaires mobiles...
M. TESSIER: Possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et qui sont loués ou qui sont
donnés en concession à quelqu'un qui les exploite. Alors,
qu'est-ce que c'est?
M. TESSIER: C'est un meuble.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est un meuble.
M. TESSIER: Bien, du moins, c'est l'interprétation que j'en
donne.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ce n'est pas un immeuble à
l'intérieur d'un autre immeuble?
M. TESSIER: Pardon?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il y a un autre aspect aussi dans le cas du
cinéma; il y a le cas de l'industrie cinématographique comme
telle. Il n'y a pas seulement les salles de projection, il y a aussi les salles
où se fabrique le film. Il y a la machinerie là-dedans. Une
machinerie très importante, de toute nature. Je
n'énumérerai pas au ministre, qui connaît très bien
cette industrie, quels sont les appareils dont on se sert. Est-ce qu'il s'agit
de meubles ou d'immeubles?
M. TESSIER: C'est un avis juridique que vous me demandez?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Non, mais vous avez dit tout à l'heure
que toute machinerie...
M. TESSIER: Je vais vous donner l'avis juridique et après cela je
vais aller percevoir mes honoraires.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord.
M. PAUL: Il faudra être sûr que votre compte ne sera pas
sujet à débat.
M. TESSIER: C'est bien possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On le fera ventiler par le Barreau.
M. TESSIER: Le Barreau décidera si mon compte d'honoraires est
trop élevé ou non.
M. TREBLAY (Chicoutimi): D'accord.
M. TESSIER: A moins qu'on s'entende pour que ce soit le
député de Maskinongé...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le bâtonnier de Maskinongé...
M. TESSIER: Le bâtonnier... qui soit l'arbitre. Non, voici, je
l'ai mentionné. Il n'est pas question d'imposer de machinerie. Que ce
soit dans l'industrie du cinéma en particulier ou ailleurs,
évidemment, cela inclut l'industrie du cinéma.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une précision que je voulais
avoir du ministre. Donc, toute machinerie n'est pas imposable, y compris celle
qui sert à la production de films.
M. TESSIER: C'est ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez donc l'assurance, Me Beaudry, en ce
qui concerne les propriétaires de cinémas et en ce qui concerne
les producteurs de cinéma, que leur machinerie est non imposable, parole
du ministre.
M. BEAUDRY: Non porté au rôle, parole du ministre.
M. TESSIER: Oui, non porté au rôle.
M. PAUL: M. le ministre, je n'ai pas à critiquer l'opinion que
vous venez de donner. Je me réjouis pour les producteurs de
cinéma, mais après les mémoires de ce matin et ceux que
j'ai lus qui ont été présentés la semaine
dernière, pourriez-vous nous dire ce qui va rester d'imposable dans le
Québec?
M. TESSIER: Il va en rester pas mal.
M. LE PRESIDENT: Me Beaudry, nous vous remercions. J'inviterais
maintenant l'Association des détaillants des maisons mobiles et
roulottes du Québec Incorporée à faire valoir ses
opinions.
Association des détaillants de maisons mobiles
et de roulottes du Québec
M. DELISLE: On va demeurer approximativement sur le même sujet.
Encore d'autres immeubles par destination. Pierre Delisle, avocat, conseiller
juridique de l'Association des détaillants des maisons mobiles et
roulottes du Québec, Inc.
Nous avons soumis un mémoire, il y a environ un mois, au nom de
l'Association des détaillants des maisons mobiles et, indirectement, au
nom de certaines autres associations, dont les manufacturiers de maisons
mobiles et l'Association des terrains de camping.
Pour aller directement au but du présent mémoire, disons
que le point que nous voulons soulever concerne uniquement et exclusivement le
problème de la taxation de la maison mobile ou roulotte
résidentielle, un problème, d'ailleurs, qui est vieux au
Québec, qui a fait l'objet de beaucoup de débats en jurisprudence
et qui est maintenant devant l'Assemblée nationale.
En effet, c'est la première fois dans les lois municipales du
Québec qu'on retrouve spécifiquement une mention soit de
roulottes, soit de roulottes commerciales ou résidentielles ou de
maisons mobiles. Je pense que tant les députés que l'association
elle-même sont intéressés à essayer de pousser un
peu plus loin cette idée-là.
Sur la question de principe, l'association, d'une façon unanime,
se dit d'accord sur l'intention du gouvernement de taxer les maisons mobiles ou
roulottes résidentielles, c'est-à-dire que tous le monde constate
que les propriétaires de maisons, qu'elles soient installées sur
des terrains qui leur appartiennent ou groupées en parc, doivent payer
une compensation pour les services municipaux et scolaires qu'ils
reçoivent.
Sur ce sujet, nous félicitons évidemment le ministre et le
gouvernement d'avoir présenté une proposition, un début en
fait, qui va, je l'espère, nous aider tous à trouver une solution
définitive à ce problème.
Quant à la modalité, c'est-à-dire à
l'inscription au rôle d'évaluation d'un meuble, en fait, d'une
maison mobile, l'association est en désaccord total sur la proposition
incluse dans le projet de loi 48. Le projet de loi 48 en parle dans trois
articles. Je pense qu'ils sont bien connus maintenant. Il s'agit de l'article 1
i) qui définit les roulottes, de l'article 13 qui les rend imposables au
propriétaire du fonds et de l'article 106 qui prévoit que cette
imposition sera faite sur une base mensuelle.
Ces trois articles, en ce qui nous concerne, ne peuvent pas trouver
d'application pratique, tant en ce qui concerne les municipalités que
les propriétaires de parcs de maisons mobiles, les propriétaires
de maisons mobiles et, enfin, toutes les personnes concernées dans ce
commerce particulier. Ces personnes je n'y référerai plus
par la suite sont évidemment des manufacturiers de maisons
mobiles, ceux qui en font le commerce, ceux aussi qui les financent, parce
qu'il s'agit de biens mobiliers, ceux qui les achètent et ceux qui
installent des parcs. Donc, beaucoup de personnes sont
intéressées par ce problème.
Dans la mémoire, nous avons essayé, à partir de la
proposition gouvernementale, d'établir ce que serait un système
administratif basé sur
cette proposition, c'est-à-dire l'inscription au rôle
d'évaluation de maisons mobiles et leur taxation annuelle et même
mensuelle puisque l'article 106 prévoit un rajustement. Nous avons
essayé de voir l'impact juridique, mais autant que possible pratique de
cette loi.
Le système proposé, quant à nous pour aller
au plus vite pose les problèmes suivants: il s'agit d'abord du
rôle qui est fait pour cinq ans. Cela nous semble une technique
très lourde en matière de maisons résidentielles. Vous
avez des personnes qui peuvent partir tous les mois, tous les deux mois ou vous
pouvez avoir, groupées dans un même parc, parfois, 200, 300 et
même 400 maisons mobiles. Ce système d'un rôle par fiches,
qui serait fait sur cinq ans, pourrait accumuler 300, 400 et peut-être
même jusqu'à 1,000 fiches d'évaluation concernant des
maisons mobiles parties, parfois depuis trois ou quatre ans ou depuis quelques
mois. Tant les évaluateurs de la municipalité que le
propriétaire du parc qui serait tenu de payer les taxes sur cette base,
quant à nous, ne s'y comprendraient pas.
Le deuxième argument vient directement du manuel
d'évaluation. Actuellement, l'association se demande si le manuel
prévoit ou prévoira des techniques particulières
d'évaluation pour ces maisons mobiles, advenant le cas où elles
seraient taxées et évaluées. On pense
particulièrement au problème des meubles qui sont vendus avec la
maison mobile et qui, jusqu'ici, dans l'histoire de l'évaluation au
Québec, ont été inclus dans l'évaluation. Il serait
totalement injuste que le propriétaire d'une maison mobile, qui l'a
payée $10,000 en incluant pour une valeur de $8,000 de meubles, soit
taxé pour son mobilier alors que le propriétaire d'une maison
résidentielle ordinaire ne l'est pas actuellement.
Le troisième argument nous semble beaucoup plus pertinent et
beaucoup plus difficile aussi. Il s'agit du problème causé par
les plaintes qui nécessairement proviendraient du propriétaire
nous référons toujours à un parc autant que
possible, à des maisons installées en groupe du parc des
maisons mobiles, qui serait obligé de se plaindre individuellement dans
le cas de chacune des maisons mobiles évaluées. Alors, autant de
plaintes, autant de causes, quant à nous, que de maisons mobiles sur son
territoire.
Je pense que nous donnons, quelque part, l'exemple d'une
municipalité qui évaluerait à $1,000 de trop
seulement $1,000 par roulotte 200 à 250 roulottes.
L'intérêt, si évidemment la cause se portait sur
l'ensemble, serait de $250,000 d'évaluation en trop, mais
l'intérêt individuel pour chacune des maisons mobiles n'est que de
l'ordre de $1,000. Cela nous semble une incitation pour les
municipalités à, peut-être, exagérer un peu
surtout, quand on connaît un peu l'attitude de plusieurs
municipalités face au problème des roulottes et
peut-être chercher ce moyen pour s'en débarrasser, à
défaut d'une loi-cadre qui viendrait régler définitivement
le problème.
Il reste aussi que, légalement, le propriétaire du parc
qui devra se défendre contre ces plaintes d'évaluation n'est pas
du tout dans les souliers du propriétaire de la maison mobile. Il n'a
aucun pouvoir de visiter la maison mobile. Il n'a pas les informations
nécessaires pour défendre sa cause. A toutes fins pratiques, nous
croyons qu'il n'a ni l'intérêt, ni les moyens, finalement, de
défendre son évaluation et ce, en vertu de l'ensemble des
dispositions qui sont prévues dans le bill à cet effet.
M. TESSIER: Me Delisle, me permettriez-vous d'apporter certaines
précisions? Peut-être que cela pourrait abréger
l'argumentation.
C'est l'intention du gouvernement, d'abord, à l'article 13, de
porter de 30 à 90 jours la durée de stationnement, si vous
voulez, d'une roulotte sur un fonds. De plus, ce même article, nous
suggérons de l'amender en biffant les mots, à la fin de
l'article, "au nom du propriétaire du fonds". De la sorte, l'article 13
pourrait se lire comme suit: "Une roulotte placée sur un fonds de terre
pour une période supérieure à 90 jours consécutifs
est portée au rôle".
L'esprit de ceci, c'est de taxer la roulotte qui sert d'habitation ou de
commerce ou de lieu d'affaires, et qui est là pour une période
indéfinie. Il existe de très nombreux cas au Québec.
Enormément de municipalités ont essayé de taxer ces
roulottes. Il y a eu je ne sais pas combien de douzaines de procès qui
ont eu lieu. Cela a suscité énormément de
difficultés. Vous avez même des municipalités où la
majorité des habitations sont des roulottes. Les gens y demeurent depuis
deux ans, trois ans et même plus, dans certains cas.
Il ne s'agit pas du tout de taxer la roulotte de camping. C'est pour
cela, d'ailleurs, que nous avons trouvé que la période de 30
jours était trop courte et que nous l'avons portée à 90
jours. Je crois qu'à ce moment-là, à 90 jours, nous
éliminons tous les estivants, tous ceux qui font du camping avec des
roulottes. Ce n'est qu'après 90 jours que cela veut dire que le type a
l'intention d'en faire sa résidence, sa principale demeure. Dans
certains cas, évidemment, cela peut être six mois, comme il y a
des gens qui habitent à la campagne six mois par année, qui
habitent des résidences d'été, des résidences de
campagne, des chalets. Ceux-là paient des taxes. Je ne vois pas pourquoi
ceux qui arrivent au bord d'un lac pour quatre ou cinq mois, au bord d'une
plage ou ailleurs, ne paieraient pas comme celui qui s'est construit un chalet
au même endroit.
Je vous ai expliqué la situation. Je pense que cela peut
peut-être éliminer certaines discussions.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre me permettrait-il de lui poser une
question à ce sujet? Vous parlez de prolonger le délai de 30
à
90 jours. Dans le cas des personnes qui travaillent sur des chantiers,
par exemple, et qui s'établissent dans une roulotte, le travail en
chantier peut durer, par exemple, 90 jours ou moins. Qu'en est-il du cas de ces
roulottes?
M. TESSIER: Je crois que la plupart des chantiers sont en dehors des
limites des municipalités.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pas nécessairement, parce que...
M. TESSIER: Non, non. J'ai dit la plupart.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui. Mais j'ai à l'esprit des cas
très précis. Des gens peuvent travailler sur un chantier à
dix, même à quinze milles d'un chantier, s'établir quand
même à proximité d'une ville ou d'un grand village afin de
jouir des services qu'on y donne. Alors comment pourrait-on résoudre ce
problème?
M. TESSIER: Vous dites plus de 90 jours, n'est-ce pas?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, plus de 90 jours, mais ils peuvent
être là...
M. TESSIER: Pour quatre mois, par exemple.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... pendant moins de 90 jours.
M. TESSIER: Moins de 90 jours, ils ne sont pas taxables.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ils ne seraient pas taxables s'ils sont
là moins de 90 jours.
M. TESSIER: Non, non. Sûrement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): La taxe sera mensuelle.
M. TESSIER: Oui, après 90 jours.
M. PAUL: La taxe sera-t-elle rétroactive pour les trois premiers
mois d'occupation ou si elle ne deviendra en vigueur que la 91e journée,
c'est-à-dire la première journée du quatrième
mois?
M. TESSIER: Cette question est présentement à
l'étude; il n'y a pas eu de décision encore.
M. PAUL: Je voulais savoir si vous travaillez tout le temps.
M. TESSIER: Nous travaillons pas mal tout le temps là-dessus et
pas seulement là-dessus. Je serais porté à croire...
M. GIASSON: L'article 106 répond à cette question.
M. TESSIER: ...que normalement cela devrait être
rétroactif. Evidemment, si quelqu'un habite une roulotte au même
endroit pendant cinq mois, je crois qu'il devrait payer durant cinq mois.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais si un travailleur...
M. GIASSON: L'article 106 l'affirme du moins.
M. TESSIER: L'article 106?
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il a été modifié,
"...sont exigibles proportionnellement à la période durant
laquelle elle a été placée sur un fonds de terre." C'est
que des gens peuvent se déplacer à l'intérieur d'un
même territoire dans une municipalité. Alors, il faudrait qu'on
prévoie ce genre de migration.
M. TESSIER: A ce moment-là, évidemment, celui qui veut
éviter des taxes n'a qu'à devenir migrateur.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais...
M. PAUL: Il va déplacer sa roulotte de quinze pieds.
M. TESSIER: C'est-à-dire que même s'il déplace sa
roulotte de quinze pieds, s'il reste sur le même fonds de terrain, je
pense bien qu'il sera encore sur le même lot.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Mais s'il est à quinze pieds du lot du
voisin?
M. TESSIER: Il peut y avoir des exceptions.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! Il faut tout prévoir.
M. PAUL: On voit que vous n'avez pas beaucoup d'expérience
municipale.
M. TESSIER: J'avoue bien humblement, M. le Président, que je n'ai
même aucune expérience en roulotte parce que je n'en
possède pas moi-même.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Si le ministre avait été maire
d'une municipalité, d'un petit village, d'une ville, il saurait ce qui
se passe actuellement avec les roulottes, les difficultés qu'ont les
autorités municipales à retrouver ces propriétaires de
roulottes.
M. TESSIER: Je les connais, ces problèmes, et c'est justement
pourquoi nous avons incorpo-
ré dans la loi un article spécial pour les roulottes.
C'est un problème dont j'entends parler depuis de très nombreuses
années et que je tente de résoudre une fois pour toutes de la
meilleure façon possible. Nous allons essayer de trouver la meilleure
formule pour résoudre le problème et je compte beaucoup sur votre
collaboration pour cela.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Lévis.
M. ROY (Lévis): M. le Président, d'abord je remercie le
ministre d'avoir pris la décision de reporter le délai de 30
à 90 jours. Le ministre se rappelle que dans les Débats de la
Chambre, au mois de février, je lui avais moi-même
suggéré de le porter de 30 à 90 jours.
M. PAUL: Vous voulez parler du 30 juin où vous avez donné
la réplique au ministre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le 30 juin.
M. PAUL: J'ai eu la courtoisie de vous laisser parler avant moi.
M. ROY (Lévis): Disons que le temps paraît court quand on
est occupé et je suis très heureux que le ministre ait pris cette
décision.
Maintenant, le ministre peut-il nous expliquer... Dans le cas des
terrains qui appartiennent à une corporation ou à une
municipalité, il n'y a pas d'erreur possible parce que la
municipalité prend $30, $20 ou $40 par mois pour les services
donnés. Mais quand ce sera le cas d'un terrain privé qui
appartient à un propriétaire qui fait de la location pour les
roulottes, est-ce que la municipalité va prendre des mesures, soit par
compteurs ou par une charge fixe en dedans de 90 jours pour faire au moins
payer les services qui auront été donnés durant les 90
jours si quelqu'un part la 89e journée?
M. TESSIER: Ecoutez, il y en aura certainement quelques-uns qui
réussiront à frauder, c'est sûr. Mais la question n'est pas
de toucher ceux qui feront 91 jours, 92 jours, nécessairement. L'esprit
de cet article, c'est que nous voulons toucher en particulier ceux qui en font
une résidence permanente ou quasi permanente. C'est cela. Alors,
l'évaluateur municipal, dans une petite municipalité ou une
moyenne municipalité n'aura pas trop de difficulté. D'abord, il y
a des règlements de zonage; il y a des parcs de roulottes
d'établis en vertu des plans d'urbanisme. Les roulottes ne peuvent donc
pas aller se placer n'importe où dans une municipalité. Tout de
suite, cela rend plus facile la tâche de l'évaluateur municipal
qui ira faire son tour de temps en temps et qui verra telle roulotte qui sera
là depuis trois mois et demi.
A partir de ce moment-là, elle deviendra taxable et ainsi de
suite. Je comprends que ça va peut-être créer du travail
additionnel à l'évaluateur municipal mais, d'un autre
côté, c'est à la municipalité de voir à son
affaire. Si elle ne s'en occupe pas, c'est elle qui perdra un revenu. Cet
article a été mis dans la loi à la demande unanime de
toutes les municipalités du Québec, tant de l'Union des
municipalités que de l'Union des conseils de comtés.
M. ROY (Lévis): C'est très bien pour ça, seulement
ma question est celle-ci. Dans les 90 jours pendant lesquels ils ne seront pas
taxés ou ne seront pas évalués, est-ce que la ville aura
droit, même s'ils sont sur un terrain privé, de charger une taxe
d'eau pour les trois mois qui vont rester?
M. TESSIER: Là on est complètement en dehors du bill 48.
On parle d'un règlement municipal de taxation; chaque
municipalité a ses règlements qu'elle a le droit de faire en
vertu des pouvoirs qui lui sont accordés par la Loi des cités et
villes et le code municipal. Elle peut avoir des règlements pour la taxe
d'eau. Alors, c'est complètement en dehors de l'évaluation.
M. LE PRESIDENT: Le député de l'Assomption.
M. PERREAULT: M. le Président, le ministre a mentionné
tout à l'heure que la roulotte ne serait plus portée au
rôle au nom du propriétaire du bien-fonds mais au nom du
propriétaire de la roulotte. Alors ne serait-il pas à propos,
maintenant qu'on a accepté ça, que la roulotte qu'elle
soit n'importe où dans n'importe quel endroit de la municipalité,
quand même elle change de place dès qu'elle reste dans les
limites de la municipalité soit assujettie à l'évaluation,
qu'elle aille sur n'importe quel terrain, qu'elle soit déplacée
dans n'importe quel parc?
M. TESSIER: Bien écoutez, il va falloir, M. le Président,
examiner ce problème. Je suis bien heureux que vous l'ayez
soulevé et je vous en remercie. Il est évident que, dans une
municipalité, il peut y avoir deux ou trois endroits, que l'on nomme
communément des parcs de roulottes. Quelqu'un qui à tous les
trois mois ferait le tour de ces parcs de roulottes, s'il doit être
taxé, en principe je serais porté à croire que oui, si
c'est à l'intérieur des limites d'une même
municipalité. Autrement, ça serait encourager à contourner
le loi et à éviter de payer une taxe qui normalement devrait
revenir à la municipalité.
Alors je suis bien heureux que le député de l'Assomption
ait soulevé cette question-là. Nous allons sûrement en
tenir compte. Mais je soulignerai tout de même qu'on me dit
remarquez bien que je n'ai pas une expérience personnelle de la question
que de changer d'endroit est assez dispendieux, aller d'un endroit
à l'autre.
M. PERREAULT: Dans la région de Mont-
réal, c'est très commun. Des ouvriers travaillant à
Montréal demeurent dans des roulottes et changent souvent de place.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est le problème que j'ai
évoqué tout à l'heure avant que le député de
l'Assomption ne le fasse; est-ce que ça comprend aussi des roulottes
motorisées?
M. TESSIER:Non.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On ne pourra le faire.
M. TESSIER: Dans la définition de la roulotte, c'est une
roulotte-remorque; les roulottes motorisées sont exclues.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sont exclues. Alors on va tout simplement
s'acheter des roulottes motorisées.
M. TESSIER: Oui, mais ça coûte pas mal plus cher.
M. LE PRESIDENT: Avant de s'acheter une roulotte motorisée,
est-ce qu'on peut demander à Me Delisle de continuer son
exposé?
M. TESSIER : On va commencer par essayer de régler ce
problème-là, c'est le problème qui nous a
été posé par les municipalités.
M. PAUL: Je n'aime pas ça quand vous dites: On va essayer de
régler; dites qu'on va régler ce problème-là et
après...
M. TESSIER: Non, non, moi, je... M. PAUL: On va collaborer.
M. TESSIER: Je ne suis pas au point de me vanter comme serait
porté à le faire le député de
Maskinongé.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre!
M. TESSIER : Je dis que nous allons essayer de régler le
problème et nous allons certainement le régler en très
grande partie. Nous verrons par la suite. Si on prend des moyens pour
contourner la loi et la taxation, il y aura toujours lieu d'apporter des
amendements.
Ce seront les municipalités, elles-mêmes je pense bien, qui
nous feront des représentations.
M. LE PRESIDENT: Merci, messieurs de la commission. Me Delisle, si vous
voulez bien continuer.
M. DELISLE: Je tiens d'abord à remercier M. le ministre pour les
deux points qu'ils nous a apportés, c'est-à-dire la taxation
seulement au bout de 90 jours, ce qui règle le problème de
l'Association des terrains de camping qui vous en remercie et, en ce qui
concerne les propriétaires de parcs de maisons mobiles, ils y trouvent
aussi leur acquis ou que les roulottes ne seront plus portées au nom du
propriétaire du fonds.
Evidemment, cela enlève au moins les trois quarts de la teneur du
mémoire que nous avons présenté. Il demeure, cependant,
que le principe même qui était à la base du mémoire
portait sur l'évaluation et non pas sur le fait qu'on en tire des
revenus ou qu'on les taxe. Après avoir longuement étudié
la question, spécialement les contestations dans la région de
Montréal où des municipalités ont tenté
d'évaluer et ont eu des problèmes pratiques, quotidiens,
l'expérience de l'association sur cette question est que
l'évaluation est une technique impossible.
Maintenant que vous avez enlevé le fait qu'elle soit
portée au nom du propriétaire du fonds, nous n'y avons plus
d'intérêt en ce qui concerne les propriétaires de parcs.
Nous croyons que les municipalités et les propriétaires de
maisons mobiles n'y trouveront pas plus leur compte parce que le système
d'évaluation n'est pas fait pour des maisons qui sont aussi mobiles que
celles que l'on connaît, des maisons on l'a souligné; les
membres de la commission l'ont souligné eux-mêmes qui
peuvent s'en aller. On comprendra que l'évaluateur peut bien passer au
bon moment dans la municipalité, mais la taxe sera peut-être
imposée à la fin de l'année et, déjà, la
maison mobile sera partie ou pourra partir et on n'aura aucune garantie de
paiement.
Après une analyse sommaire des lois des provinces de l'Ontario,
de 1'Alberta et spécialement de plusieurs Etats américains, on
s'aperçoit que les provinces et les Etats américains qui ont
connu de nombreux problèmes avec les maisons mobiles, qui en ont eu
beaucoup, un peu comme le Québec industriel actuel, la Côte-Nord
en particulier, ont plutôt adopté la technique d'une tarification
ou d'un permis mensuel payable d'avance ou en donnant un dépôt, ce
qui simplifie énormément la tâche de la municipalité
et celle des propriétaires de maisons mobiles aussi. Un tel tarif
pourrait être provincial; il peut être régional, même
par catégorie. Il faut prévoir les problèmes de
construction, par exemple dans des régions minières ou des
problèmes particuliers de logement dans une région donnée.
On pense, par exemple, à Saint-Jean-Vianney où, à un
moment donné, un quartier complet disparaît. Si on avait
utilisé la technique des maisons mobiles pour loger les gens dans
l'intervalle, on aurait pu avoir une tarification particulière.
Quelle que soit la méthode, il demeure que changer le
système lui-même nous semblerait de beaucoup favorable tant aux
municipalités qu'aux propriétaires individuels de maisons mobiles
qui sauraient alors à quoi s'en tenir, quel serait leur taux mensuel ou
trimestriel ou semestriel ou annuel. La municipalité, de son
côté, aurait beaucoup plus de facilité de perce-
voir ces tarifs ou ces paiements de permis. Elle n'aurait pas à
tenir un rôle qui est une technique lourde, qui est une technique
compliquée avec ses propres appels, avec quand même une certaine
lourdeur administrative puisqu'on prévoit un projet de loi d'au moins
100 articles sur cette question. Alors, on n'aurait pas besoin de passer par un
système aussi lourd pour des évaluations, si on enlève les
meubles meublants, comme on les appelle, de $4,000 à $5,000 pour des
roulottes neuves.
Les municipalités elles-mêmes devraient essayer de
s'organiser pour en arriver à tirer des revenus qui seraient en
proportion de ce qu'elles évalueraient. Les propriétaires de
maisons mobiles, de leur côté, devraient s'organiser avec les
évaluateurs, avec le bureau de révision. Nous croyons
même avec les amendements que vous entendez y apporter que la
technique d'un permis mensuel ou d'une tarification serait beaucoup plus utile
et permettrait aux municipalités d'en tirer des revenus beaucoup plus
sérieux et beaucoup plus probants. Ainsi, lorsque la municipalité
établirait dans son budget annuel que le tarif, pour cette
année-là, est de, disons, $10 par mois, elle saurait d'avance
que, pour chaque mois d'occupation de ces maisons mobiles, elle pourrait
retirer tant de revenus. Elle n'aurait pas, si elle impose, par exemple, une
taxe à l'évaluation, à se demander si les gens
déménageront ou s'ils resteront dans la municipalité.
M. TESSIER: Excusez-moi, mais, pour abréger un peu, je dois vous
dire que nous allons certainement étudier cette question qui est une
excellente suggestion. Je ne vous dis pas qu'on la mettra nécessairement
en application, mais on va certainement l'étudier en profondeur. Il
faudrait tenir compte également, jusqu'à un certain point, tout
de même, de la valeur des roulottes. Vous avez des roulottes qui valent
$1,500 et vous en avez d'autres qui valent $15,000. Il faudrait, tout de
même, que ces taux ou ces permis pour les roulottes soient
gradués. Il faut, tout de même, se baser sur la valeur
marchande.
Je ne crois pas qu'il y ait autant de difficultés que celles que
vous mentionnez. En somme, il y aura un répertoire des taux unitaires
avec des critères et des bases d'évaluation. Il y a un certain
nombre de manufacturiers de roulottes; en connaissant le nom du manufacturier
et le modèle, on a exactement le prix de vente, on a l'année de
fabrication. Par conséquent, l'évaluateur doit tenir compte,
comme dans toute autre maison ou bâtiment, de la
dépréciation de la roulotte.
De toute façon, je vous dis que nous prendrons en très
sérieuse considération votre suggestion. Nous allons
l'étudier. Nous allons voir lequel des deux serait le plus pratique.
M. DELISLE: Sur ce point particulier, est-ce qu'on peut connaître
au moins l'intention de ceux qui préparent le manuel d'évaluation
quant aux meubles meublants à l'intérieur de la roulotte?
M. TESSIER: Il n'est pas question de les taxer.
M. DELISLE: Ne sera taxé que le meuble lui-même,
c'est-à-dire sa fabrication, les murs.
M. TESSIER: Absolument.
M. DELISLE: Un autre point est soulevé dans le mémoire, et
c'est le dernier que j'aimerais exposer. Il concerne les ventes conditionnelles
de ces roulottes, problème qui ne sera pas changé parce que les
propriétaires du fonds ne paieront pas la taxe. On a dit, au
début du mémoire, que c'était un des seuls biens meubles
taxés au Québec et on en fait un immeuble à toutes fins
utiles. Et cela a des répercussions très importantes sur tout le
système de financement de ces maisons mobiles.
Actuellement les ventes de maisons mobiles sont faites comme toutes les
ventes de meubles avec un contrat de vente conditionnelle et le
propriétaire en conserve la propriété. On peut se demander
ce qu'il adviendrait des ventes pour taxes de ces biens immobiliers. Je peux
vous énoncer l'appréhension des personnes qui en font le commerce
actuellement, face à une modification aussi importante de leur rapport
civil avec leurs acheteurs éventuels ou avec les compagnies de finance
ou les banques qui essaient de faire développer ce commerce. Il s'agit
d'un commerce qui est jeune au Québec et la Société
centrale d'hypothèques et de logement étudie même
actuellement des possibilités de financer elle aussi ce nouveau type
d'habitations.
M. TESSIER: C'est certainement une question qu'il va falloir
éclaircir dans le texte. Je vous remercie d'avoir soulevé ce
point-là, parce que je crois que c'est l'acheteur qui deviendra
éventuellement propriétaire qui doit être taxé et
non pas le vendeur. Vous soulevez justement la question que le titre de
propriété ne peut venir qu'au bout de deux ans.
M. DELISLE: Trois, quatre ou même dix ans.
M. TESSIER : Même trois ou quatre ans.
M. DELISLE: Il y a des ventes qui sont faites sur une base de dix ans.
Evidemment ces ventes ne sont pas enregistrées, on ne peut donc pas
comparer avec un créancier hypothécaire normal.
M. TESSIER: Je prends bonne note de votre suggestion. Je crois qu'il
serait tout à fait normal que ce soit l'occupant de la roulotte, et non
pas le vendeur qui en est demeuré proprié-
taire et qui en demeurera propriétaire jusqu'au dernier paiement
d'une vente conditionnelle.
M. LE PRESIDENT: Je vous remercie, Me Delisle. Maintenant nous passons
à l'Association canadienne de la radio et de la télévision
de langue française et je crois que c'est Me Charles Stein qui est son
porte parole.
Je me permets de rappeler aux porte-parole des différents
organismes d'essayer de résumer leur mémoire, autant que
possible.
Association canadienne de la radio et de la
télévision de langue française
M. STEIN: M. le Président, comme vous venez de le dire, mon nom
est Charles Stein, je suis avocat et je représente l'ACRTF, qui est
l'Association canadienne de la radio et de la télévision de
langue française Inc. Je suis accompagné de trois administrateurs
de cette association: MM. Jean Pouliot, France Fortin et Aurèle
Pelletier, et nous avons également ici le vice-président
administratif de l'Association canadienne des radiodiffuseurs, M. Allard.
Vous avez en main notre mémoire que je n'ai pas l'intention de
vous lire, ainsi qu'une annexe qui est une étude économique. Le
mémoire porte le numéro 15 et l'annexe, le numéro 15 a).
Cette étude sur les aspects financiers ou économiques que j'ai
appelée l'annexe, numéro 15 a), a été
préparée par l'étude Price Waterhouse et associés.
Si vous avez des questions à poser sur cette annexe ou sur d'autres
aspects techniques, financiers ou autres, ceux que j'ai nommés, l'un ou
l'autre d'entre eux, selon les questions, pourront répondre et vous
fournir les précisions nécessaires.
Cet organisme, l'ACRTF, a une charte québécoise et
représente les radiodiffuseurs et les télé diffuseurs
privés francophones du Québec et des autres provinces. Comme nous
le mentionnons il y a une erreur quand nous disons 68 il y a 70
postes privés de radio au Québec. Soixante-dix et non 68. C'est
à la page 1, deuxième alinéa. Il y a sept postes
anglophones et treize postes privés de télévision dont
deux anglophones.
Nous sommes d'accord sur ce que nous croyons être les objectifs
primordiaux du projet de loi no 48 que vous étudiez et, plus
particulièrement, sur l'uniformisation des règles et des normes
d'évalutation et, en général, sur toute cette
législation et cette réglementation au sujet des taxes
foncières, municipales et scolaires. Nous sommes d'accord aussi, sur ce
qui semble être le but de certaines dispositions comme celles des
articles 14 et 15 par exemple, de garder au Québec et d'y attirer aussi
le plus grand nombre d'industries possible.
Nous sommes d'avis que la taxe ou l'impôt sur les revenus bruts
que le projet de loi propose d'imposer à l'industrie de la
radiodiffusion et ici, j'englobe dans radiodiffusion la radio et la
télévision s'opposerait à l'objectif dont je viens
de parler. Vu les conjonctures économique et sociale actuelles,
l'importance grandissante des moyens de communication, de la radiodiffusion,
justement, alors qu'on soustrairait on vient d'en parler assez
longuement à la taxe foncière l'équipement
industriel des autres industries, on assujettirait cette industrie de la
radiodiffusion, radio et télévision, à un impôt
spécial, à un nouvel impôt sur les revenus bruts
destinés, d'après les termes du projet de loi, à tenir
lieu de la taxe foncière en question.
Il faut souligner tout de suite, alors que, de façon
générale, cet équipement industriel des radiodiffuseurs
n'est pas taxable en ce moment, au Québec. Il peut y avoir quelques
exceptions. Il ne l'est pas non plus ailleurs qu'au Québec. Je vous
signale aussi quelques difficultés d'interprétation auxquelles
donneraient lieu, selon moi, les articles 22, 104 et 105 qui prévoient
cet impôt spécial et nouveau sur les revenus bruts de l'industrie
de la radiodiffusion. Comme vous le savez, l'article 22 prévoit
l'inscription au rôle des terrains et bâtiments des entreprises de
télécommunication qui ne tombent pas sous le coup de l'article
21.
Il s'agit justement des entreprises de télécommunication
que j'ai appelées les entreprises de radiodiffusion. Alors, leurs
terrains et bâtiments seraient portés au rôle.
Et l'article 22 ajoute: "Les autres immeubles d'une telle entreprise ne
sont pas portés au rôle, sous réserve, quant à leur
imposition, de l'article 104 ou 105." Incidemment, ce devrait être sous
réserve des articles 104 et 105 et non pas "ou" 105 parce qu'il faut
absolument avoir recours à l'article 104. L'article 105 n'est qu'une
disposition ancillaire et de procédure.
L'article 104 ne prévoit aucunement la taxation des autres
immeubles dont on vient de parler à l'article 22, ni d'aucun immeuble,
d'ailleurs. Il prévoit seulement la taxation des revenus bruts, mais il
dit que cet impôt sur les revenus bruts est destiné à
"tenir lieu des taxes municipales et scolaires sur l'équipement et le
réseau d'une telle entreprise." Nous ne savons trop ce que
désignent ces termes "équipement et réseau". Pour ce qui
est du réseau, je pense bien qu'il s'agit d'un réseau physique,
de fils, de supports, de matériel quelconque. Mais l'industrie de la
radiodiffusion n'utilise qu'exceptionnellement des lignes ou réseaux
téléphoniques et à ce moment-là elle les loue, par
exemple, à une compagnie de téléphone qui, elle, est
taxée sur ces lignes.
Il faut se demander aussi de quelle façon on appliquerait cette
clause de l'article 104 "pour tenir lieu des taxes sur l'équipement et
le réseau". Est-ce qu'il faudrait tenir compte des taxes auxquelles
l'équipement et le réseau serait assujettis en vertu de cette
nouvelle loi si on ne les exemptait pas de la taxe foncière ou bien
est-ce qu'il faut tenir compte de la taxe foncière actuelle, en vertu de
la législation actuelle? Justement, je viens de faire remarquer qu'il
n'y
en a à peu près pas en vertu de la loi actuelle. Il n'y a
pas d'impôt en général sur ces biens-là.
Vous aurez remarqué aussi que l'article 104 ne parle pas
d'immeubles, comme l'article 22. Et puis, à l'article 22, mettant de
côté la définition qu'on a donnée au début,
des "immeubles par nature", on ne parle que de bâtiments et terrains:
"les terrains, les bâtiments, etc., et ensuite les autres immeubles. On
ne parle pas d'améliorations non plus, dont parle la définition
"d'immeuble par nature" dans l'article 1. Inutile de vous souligner que la
clarté laisse à désirer par suite de ce manque
d'uniformité de la terminologie. Et le rôle des
définitions, c'est justement d'assurer cette uniformité. On
devrait donc utiliser les termes définis partout où c'est
possible.
Incidemment, si on veut éliminer le terme "améliorations",
qui n'est peut-être pas indispensable, c'est dans la définition de
l'article 1 b) qu'on devrait le faire. Je le remplacerais plutôt par
"aménagements" et, en même temps, je remplacerais
"bâtiments" par "constructions" qui est plus général. Je
nommerais le sol en premier lieu, ce qui est plus logique et conforme â
la nature des choses et, enfin, je préciserais qu'il s'agit
d'aménagements et de constructions formant corps avec le terrain, avec
le sol.
Cela donnerait comme définition: Immeuble par nature, le sol, les
aménagements et les constructions qui font corps avec lui.
J'ajouterai seulement qu'à mon humble avis, il serait sage de
consulter l'Office de révision du code civil au sujet des
définitions et dispositions relatives aux distinctions entre meubles et
immeubles et entre immeubles par nature, immeuble par destination et immeubles
par l'objet auquel il s'attache. Ici, j'utilise la terminologie de l'article
381 du code civil: "les immeubles par l'objet auquel ils s'attachent."
Cette catégorie d'immeubles, qui comprend, entre autres, toujours
selon l'article 381 du code, le droit de coupe de bois perpétuel ou pour
un temps limité n'est pas mentionné comme tel au projet, ni
défini à son article 1 mais parait impliquer, au paragraphe b) de
l'article 16 les concessions forestières et, peut-être, au
paragraphe b) de l'article 15, les réserves de matières
première dans les tourbières, les carrières, les bancs de
sable et de gravier. On a parlé aujourd'hui du bois debout. On n'a
peut-être pas parlé expressément de droit de coupe mais il
faut songer à tout cela.
Autre point que je vous signale, c'est que le dernier alinéa de
l'article 104 prévoit une répartition de la taxe sur les revenus
bruts des radiodiffuseurs entre toutes les corporations municipales et
scolaires, suivant une formule qu'on établira par règlement du
gouvernement, du conseil des ministres. Est-ce qu'on pourra trouver une formule
qui conviendra, une formule équitable? Incidemment, à la page 5
de notre mémoire, le mot "formalité" devrait se lire
"formule".
Les corporations municipales et scolaires sont rarement la source d'une
part appréciable des revenus qu'on veut taxer. Encore une fois, ces
corporations, généralement, ne taxent pas les équipements
et les réseaux dont la présence chez elles, comme objets
d'imposition, serait censée justifier la nouvelle taxe sur les revenus
bruts et sa répartition.
Quant aux conséquences de cet impôt projeté, ce
nouvel impôt sur les revenus bruts, sur les finances de l'industrie, vous
l'avez au mémoire et je n'ai pas besoin, je pense, d'insister. Encore
une fois, nous avons des chiffres, dans l'annexe, qui pourront au besoin vous
être expliqués.
Il y a le fait que le taux de la taxe sera établi annuellement
par le gouvernement, je ne parle pas ni du gouvernement actuel, ni d'un
gouvernement que nous pourrions avoir prochainement, mais enfin, le principe
serait là un jour, un gouvernement pourrait s'en servir à
mauvais escient.
M. PAUL: On prend note de votre admission!
M. STEIN: J'ai bien dit que je ne parle pas du gouvernement actuel, ni
de l'ancien d'ailleurs, ni de celui qui l'a précédé.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Du bon monde, du bon monde!
M. STEIN: Il y aura en plus le fait de l'incertitude résultant de
cette fixation annuelle. On ne pourrait pas planifier à long terme.
Il reste enfin, M. le Président, l'aspect constitutionnel.
Là encore, je ne veux pas vous ennuyer, vous lire cela. J'ai cité
une décision j'en ai cité un assez long extrait aux
pages 8 à 10 du mémoire. C'est discutable. Mais je
prétends, m'appuyant sur cette décision du Conseil privé,
qu'il s'agit là d'un impôt indirect, donc un impôt que la
province n'a pas le pouvoir d'instituer.
Pour toutes ces raisons, nous recommandons la suppression des articles
22, 104 et 105 du projet, et l'application à l'industrie de la
radiodiffusion, c'est-à-dire à la radio et à la
télévision, c'est-à-dire les entreprises qui ne sont pas
visées à l'article 21, de l'exemption prévue à
l'article 14. Cela peut se faire de bien des manières mais nous
suggérons ici l'addition de quelques mots, un paragraphe e) par exemple,
les mots: par une entreprise de télécommunication qui n'est pas
visée à l'article 21.
C'est tout ce que j'ai à dire, M. le Président, pour le
moment.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais remercier Me Stein de
son brillant exposé et lui dire que les articles 21, 22, 23 et 24 auront
une nouvelle rédaction. Un de ces articles, probablement l'article 21,
s'appliquera exclusivement au réseau d'utilités publiques. Par
contre, l'article
22 s'occupera des postes de radio et de télévision. Quant
aux articles 104 et 105, il y aura également une nouvelle
rédaction. Mais, nonobstant votre référence à la
jurisprudence et au jugement de la cour Suprême, confirmé par le
Conseil privé, je trouve tout de même assez curieux que Bell
Canada soit taxée, de cette manière-là depuis, je crois,
1907 en Ontario et continue à l'être. Après consultations,
remarquez bien d'ailleurs, nous avons entendu, à la
dernière séance, je crois, les représentants de Bell
Canada et de Québec Téléphone nous en sommes
arrivés à cette formule-là qui fonctionne très bien
en Ontario depuis de très nombreuses années. Pour Québec
Téléphone, évidemment, c'est nouveau. On nous a
demandé un délai auquel le gouvernement est prêt à
consentir afin qu'il y ait une période de transition et qu'elle puisse
s'équiper en conséquence. La compagnie Bell, pour sa part, nous a
manifesté qu'elle était très heureuse de ce système
en Ontario qu'elle trouve des plus justes. Par conséquent, elle n'a
aucune objection à ce que ce système-là s'applique
également au Québec. Ce qui me surprend, c'est que ça
n'ait jamais été attaqué en Ontario depuis 1907.
Je voulais simplement souligner ce point-là. Je ne veux pas
m'engager dans un débat juridique, pas davantage, du moins.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je remarque, M. le Président, que le
ministre a été extrêmement prudent et qu'il a
utilisé des procédés dilatoires pour éviter de
poser réellement le problème qu'avait évoqué Me
Stein. De l'avis du ministre des Affaires municipales, la radio et la
télévision sont-elles des entreprises d'utilité
publique?
M. TESSIER: Pas dans le sens que nous l'entendons, que nous le
définissons dans la loi.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dans quel sens l'entendez-vous?
M. TESSIER: Dans la loi, nous considérons comme utilités
publiques l'électricité, le téléphone, le gaz, les
télécommunications.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Les télécommunications,
téléphone, télégraphe.
M. TESSIER: Oui, téléphone, télégraphe.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Tout ce qui s'appelle
télécommunications.
Maintenant, M. le Président, à partir des observations que
vient de faire Me Stein, j'aimerais attirer l'attention du ministre sur deux
aspects du problème que pose le mémoire de l'Association
canadienne de la radio et de la télévision de langue
française. Il s'agit d'abord d'une industrie, appelons-la ainsi, et l'on
sait que le gouvernement s'intéresse à la promotion industrielle
afin de créer des emplois, tout au moins afin d'occuper les
chômeurs.
Deuxièmement, on peut placer le problème aussi dans
l'optique de l'éducation, un service éducatif. Cette Association
de la radio et de la télévision de langue française qui
est devant nous, ne fait-elle pas partie d'un organisme dont les buts sont
à caractère d'abord éducatif?
D'accord, ils diffusent des nouvelles, mais la grande partie de leur
programmation consiste en des émissions d'information au sens
général du terme et au sens éducatif du terme, des
émissions spécifiquement éducatives et des
émissions artistiques.
Alors, en raison de cette vocation particulière de ces
sociétés au nom desquelles a parlé M. Stein, est-ce que le
ministre peut faire une distinction entre les compagnies d'utilité
publique dont il a parlé tout à l'heure et ces
sociétés?
M. TESSIER: Assurément, nous faisons une distinction. Les
compagnies d'utilité publique que nous avons mentionnées tout
à l'heure et les entreprises de radiodiffusion et de
télévision sont l'objet de dispositions différentes. Nous
vous soumettrons prochainement les nouveaux textes que nous étudions
présentement et auxquels nous mettons la dernière main.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, le ministre voudrait-il
répondre, s'il peut le faire, à mon autre question, puisque
c'était un diptyque? Est-ce que l'Association canadienne de la radio et
de la télévision de langue française ne représente
pas une réalité qui est de caractère éducatif et
culturel et à ce titre, ne peut-elle jouir des exemptions que le
ministre a volontairement consenties ce matin aux musées et aux centres
d'art de même qu'aux salles communautaires. ..
M. TESSIER: Non, j'admets...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... et aux propriétaires de
cinéma?
M. TESSIER: Non, non, on n'a rien consenti aux propriétaires de
cinéma.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah! la machinerie est présumée
exclue et non portée au rôle.
M. TESSIER: Ecoutez, bien oui, comme dans toute autre industrie.
Là, évidemment, le cinéma n'aura pas un traitement
privilégié. L'industrie du cinéma ne sera pas taxée
sur ses appareils cinématographiques et autre équipement, comme
toute autre industrie. Elle sera tout simplement sur le même pied que les
autres. C'est ce que j'ai dit. Il n'y a pas d'exception, mais elle va
bénéficier de ce dégrèvement de taxes en ce sens
que cet équipement ne sera pas porté au rôle.
En ce qui concerne les postes de radio et de télévision,
je suis parfaitement d'accord avec mon collègue que ces entreprises
jouent un rôle
artistique et éducationnel que nous devons considérer,
mais, par contre, contrairement aux musées, ce ne sont pas des
entreprises sans but lucratif. Les musées sont des entreprises sans but
lucratif alors que dans tous les postes de radio et de
télévision, les propriétaires sont là pour faire de
l'argent, et en retirer des profits et des dividendes.
C'est la distinction essentielle qu'il faut faire au départ.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Maintenant, M. le ministre, là vous avez
ouvert une porte et c'était celle que je voulais que vous ouvriez.
Prenez, par exemple, le cas de Radio-Canada, une entreprise d'Etat, une
société d'Etat...
M. TESSIER: Elle sera taxée...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... que vous et moi payons. Ah, Radio-Canada
sera taxée!
M. TESSIER: Assurément. C'est une corporation de la couronne, ce
n'est pas le gouvernement fédéral.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. Radio-Canada a sur l'ensemble du
territoire canadien et québécois des privilèges
énormes. Elle se finance à nos frais. Parallèlement
à cela s'est développé un réseau de radiodiffuseurs
et de télédiffuseurs de langue française de langue
anglaise également qui donne aux citoyens du Québec un
choix dans le domaine des émissions d'information, d'éducation,
de culture, etc.
Etant donné la position concurrentielle difficile dans laquelle
se trouve l'Association canadienne de la radio et de la
télévision de langue française par rapport aux entreprises
financées par l'Etat, est-ce que les sociétés membres de
cette association ne pourraient pas recevoir du gouvernement un traitement que
j'appelerai de faveur à défaut d'un autre terme? Est-ce que le
gouvernement ne pourrait pas avoir une considération spéciale
pour ces entreprises qui ont été montées de toutes
pièces, qui, d'accord, ont un certain but lucratif, mais qui, si elles
n'existaient pas, devraient être remplacées, enfin devraient
être créées par le gouvernement lui-même afin que le
public ait un choix dans l'ensemble de la programmation en ce qui concerne
l'information, l'éducation, la culture, etc.?
M. TESSIER: Je ne veux pas, M. le Président, engager le
gouvernement en déclarant que ces postes de radio et de
télévision doivent être encouragés de quelque
manière. S'ils doivent l'être, ce n'est sûrement pas par les
municipalités ou du moins ça ne devrait pas être les
municipalités, mais comme justement l'a souligné mon
collègue, le gouvernement, par l'entremise peut-être du ministre
des Affaires culturelles, ou peut-être du ministre des Finances ou du
ministre du Revenu, avec des dégrèvements d'impôts... A
tout événement, c'est une question qui pourra faire l'objet
d'études, si le gouvernement en vient à la conclusion que cette
entreprise privée de radio et de télévision doit
être encouragée de quelque manière.
Mais nous sommes présentement et c'est ce qu'il ne faut
pas perdre de vue à étudier un projet de loi de taxation
foncière municipale. Je ne vois pas pourquoi ce seraient les
municipalités que nous forcerions, par un texte de loi, à donner
un bénéfice à ces entreprises de radio et de
télévision. Si le gouvernement veut le faire, d'accord. Encore
là, je ne veux pas engager le gouvernement dans ce domaine. Moi, en tant
que ministre des Affaires municipales, je suis en train d'étudier avec
vous une loi de l'impôt foncier municipal.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Je voudrais, M. Stein, vous rassurer; nous
avons très bien compris l'objectif de votre mémoire. Le ministre
le comprend moins, parce que je crois qu'il n'a pas saisi exactement la
dimension du travail qu'accomplit l'Association canadienne de la radio et de la
télévision de langue française. Toutefois, le ministre
nous dit: D'accord, nous étudions le projet de loi 48, qui porte sur
l'évaluation foncière, l'évaluation municipale. Il n'est
pas dans mon intention non plus de demander aux municipalités de faire
les frais de certaines exemptions que consentirait le gouvernement. Vous aurez
noté avec nous que le gouvernement a exprimé, non pas l'intention
formelle, mais a laissé entrevoir que si vos sociétés se
trouvaient en difficulté par suite des exigences que vous imposera la
loi 48, si le ministre ne consent pas à l'amender, nous travaillerons
afin qu'elle soit amendée dans le sens que vous avez indiqué,
parce que je considère ces sociétés que vous
représentez comme des sociétés à caractère
très particulier. Le ministre, sans engager le gouvernement, vous a
laissé entendre que vous pourriez probablement tirer sur le gouvernement
pour vous financer au cas où vous vous trouveriez dans des
difficultés.
M. TESSIER: Je n'ai rien laissé entendre du tout, M. le
Président.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre...
M. TESSIER: Je ne voudrais pas que vous m'interprétiez comme
ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le ministre s'est déjà commis
dans le cas...
M. TESSIER: J'ai été, il me semble, très clair.
Lorsque vous avez déclaré tout à l'heure que je n'avais
pas compris le mémoire, je pense que c'est vous qui ne me comprenez pas,
malgré que je m'exprime assez clairement. Je vous ai dit positivement
qu'il ne pouvait pas être
question que le gouvernement soit engagé de quelque
manière que ce soit, mais que le gouvernement peut toujours
étudier la possibilité de venir en aide à un organisme
culturel ou éducatif quelconque. Pas plus loin que ça, sans
prendre d'engagement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Plaçons le problème dans
l'optique simplement de l'industrie, de l'économie, de la promotion de
l'économie du Québec. Le 9 septembre 1971, à cette
même commission, vous nous avez déclaré que, dans le cas
des entreprises de téléphone, de télécommunication,
de la compagnie de gaz métropolitain, etc., à la page B-4001: "Si
le gouvernement suivant les circonstances juge à propos d'accorder les
exemptions d'impôt ou autre chose, évidemment ce sera au ministre
des Finances ou au lieutenant-gouverneur en conseil à prendre ces
décisions".
M. TESSIER: C'est ça.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une admission, nous en avons pris note,
parce que je vous avais posé alors les mêmes questions que celles
que je vous ai posées.
M. TESSIER: Il n'y a aucune admission.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous venez de nous dire qu'ils pourront avoir
recours au ministère des Affaires culturelles.
M. TESSIER: J'ai dit que si cette question-là se soulevait, ce
n'était même pas de mon ressort d'en discuter.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Oui, mais les ressorts du ministre des
Affaires municipales sont imbriqués dans les ressorts des autres
ministres, j'imagine, si on veut former un cabinet qui marche
M. TESSIER: Mais ça marche, ça marche bien.
M. PAUL: Vous allez toujours admettre que c'est une suggestion pour le
moins...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Pertinente.
M. PAUL: ... pertinente et invitante pour les membres de
l'association.
M. TESSIER: C'est exact.
M. PAUL: Si vous êtes convaincu qu'aucun ministère ne se
portera au secours de l'association, pourquoi aujourd'hui parler des Affaires
culturelles...
M. TESSIER : Je n'ai jamais dit ça.
M. PAUL: ... la semaine dernière vous avez parlé du
ministère des Finances, le 9 septembre vous avez parlé du
lieutenant-gouverneur en conseil?
M. TESSIER : Je suis absolument logique dans mes propos. Je viens de
vous répéter il y a trois minutes" exactement ce que je disais le
9 septembre.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, nous tenons pour acquis...
M. TESSIER: Et le gouvernement est prêt en tout temps à
examiner toutes les représentations qui sont faites.
Je crois que, s'il y a un gouvernement qui dialogue avec les organismes
et la population, c'est bien le gouvernement actuel.
M. PAUL: Vous êtes allé à la bonne école.
M. TESSIER: Je suis allé à l'école du Parti
libéral.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Il n'est pas question de juger le gouvernement
actuel, il s'agit de considérer la situation financière des
sociétés que représente Me Stein. Il a fait des
propositions, il a suggéré qu'on amende le projet de loi dans tel
ou tel sens. Pour ma part, je crois que, sous réserve d'un examen plus
approfondi, les propositions de Me Stein sont non seulement valables, mais
fondées. Nous aurons, lors de l'étude à l'Assemblée
nationale, en comité plénier, l'occasion de reprendre ce
débat en tenant toujours compte de l'engagement implicite qu'a pris le
ministre d'aider ces sociétés.
M. TESSIER: Je n'ai pris aucun engagement de quelque nature que ce soit,
pas d'aider... sauf que j'ai dit que le gouvernement était toujours
prêt à dialoguer et à discuter avec les organismes en
question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Aux fins de les aider.
M. TESSIER: Si c'est possible.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Dont acte.
M. BOIS: J'aimerais poser une question à M. Stein. A la page 7 de
votre mémoire, à la fin du premier paragraphe de la page
précédente, quand vous dites que la taxe projetée
porterait sur le revenu brut, non pas sur le revenu net, auriez-vous
l'obligeance d'expliquer la différence que vous voyez par exemple entre
les deux, entre la façon de taxer le revenu brut plutôt que le
revenu net?
M. STEIN: Je ne sais pas si je peux vous rendre ça plus clair,
mais il me semble que le revenu brut, ça se passe d'explication.
Avant
toute déduction pour frais quelconques, on taxera le taux qu'on
fixera, quel que soit le pourcentage, qui portera sur les recettes, par
opposition au profit, au revenu net, c'est-à-dire le revenu brut, moins
certains dégrèvements pour dépenses ou autre chose.
M. TESSIER: Me Stein, en terminant, je voudrais vous dire que nous
tiendrons sûrement compte de plusieurs de vos recommandations dans les
nouvelles rédactions que nous ferons des articles 21, 22, 23 et 24 et
des articles 104 et 105 qui vous concernent plus particulièrement.
M. BOIS: Excusez-moi, M. le Président, j'avais une autre
question.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): J'imagine que, dans cette nouvelle
rédaction, il ne s'agira pas simplement de littérature...
M. TESSIER: Je l'espère bien.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... mais que l'on va tenir compte du fond de
la question.
M. TESSIER: Je n'ai jamais été ministre des Affaires
culturelles.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Cela paraît.
M. TESSIER: Alors, il n'est pas question de faire de la
littérature, de la phraséologie et de la poésie, mais
d'avoir un texte pratique, clair et légal.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Qui aide, comme vous l'avez dit tout à
l'heure, les sociétés en question.
M. LE PRESIDENT: Me Stein, je vous remercie.
M. BOIS: M. le Président, j'aurais une autre question.
M. TESSIER: Cela va certainement les aider dans une certaine mesure.
M. LE PRESIDENT: A l'ordre! M. PAUL: Ah! c'est bien.
M. LE PRESIDENT: L'honorable député de Saint-Sauveur.
M. BOIS: En fait, M. Stein, quand vous parlez des revenus bruts,
voudriez-vous dire, par exemple, qu'on se trouverait, de cette façon,
à imposer même le capital qui va servir aux
réinvestissements ou à l'amélioration des réseaux
et de l'équipement?
M. STEIN: Là, j'aimerais mieux demander à
M. Pouliot de vous donner quelques explications.
M. POULIOT: Jean Pouliot, de la télévision de
Québec. En imposant le revenu brut plutôt que le profit, on se
trouve à imposer même les postes qui fonctionnent à
déficit. Il y a plusieurs postes de la province qui fonctionnent
à déficit.
M. TESSIER: Bien, je peux répondre immédiatement à
cette question-là. Il ne sera pas question d'imposer les postes de radio
et de télévision au revenu brut.
M. BOIS: C'est inscrit en toutes lettres.
M. TESSIER: J'ai dit qu'on aurait une nouvelle rédaction.
DES VOIX: Ah!
M. BOIS: C'est ça que je voulais savoir.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Ah, bien, là, en voilà une bonne
!
M. TESSIER: Il me semble que je l'ai dit. Je l'ai
répété au moins quatre fois...
M. PAUL: Non, on vous arrache cela à petites gouttes.
M. TESSIER: ... qu'il y aurait une nouvelle rédaction pour tous
ces articles.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, il ne faut pas jouer
sur les mots. Le ministre, tout à l'heure... Un instant, un instant,
j'ai la parole!
M. TESSIER: J'ai même ajouté que nous tiendrons compte dans
les nouvelles rédactions de la plupart des recommandations faites par Me
Stein dans son mémoire. Il me semble que c'est assez clair. On ne peut
tout de même pas aller plus loin que cela avant que les articles ne
soient définitivement rédigés.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, je reviens à ce
que je disais tout à l'heure. J'ai demandé au ministre de se
commettre là-dessus. Il a dit qu'il ne se commettrait pas. Il a dit
ensuite que, peut-être, il allait envisager la possibilité d'aider
ces sociétés. Bon. Il a parlé ensuite d'une nouvelle
rédaction. Je lui ai demandé: Est-ce que cela va être de la
littérature ou si cela va être des faits? Il m'a dit: Moi, je ne
fais pas de littérature, je ne suis pas le ministre des Affaires
culturelles; ce qui est évident, bien entendu.
M. TESSIER: Je ne suis pas un ancien ministre des Affaires culturelles.
J'ai parlé d'un ancien ministre des Affaires culturelles. C'est bien
important, le mot "ancien".
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Vous avez raison de faire la distinction entre
l'ancien et le nouveau, parce que c'est toute la différence du
monde.
M. TESSIER: Oui, oui, c'est très important.
M.TREMBLAY (Chicoutimi): Alors, M. Stein, à la suite de ma
brillante plaidoirie, vous avez l'assurance que les revenus bruts ne seront pas
imposés.
M. TESSIER: Enfin, le député de Chicoutimi a compris.
M. LE PRESIDENT: Alors, messieurs, si j'ai bien compris, c'est
terminé. On vous remercie, M. Stein. Nous invitons maintenant le
représentant de l'Industrie de production pétrolière du
Québec.
Industrie de production pétrolière du
Québec
M. THOMSON: M. le Président, je m'appelle Alex Thomson. Je suis
avocat à Montréal. Je vous fais grâce des boniments d'usage
dans le préambule, étant donné que le temps passe et aussi
en raison du fait que Me Beaudry est passé, non seulement une fois avant
moi, mais deux fois; cela va raccourcir de beaucoup mon exposé.
Nous demandons, à l'article 11, essentiellement la même
chose que Park Laign, c'est-à-dire de biffer le paragraphe a) et
également le paragraphe c). Nous ajoutons que si, dans la sagesse du
gouvernement, on ne veut pas biffer le sous-paragraphe c), qu'on allonge au
moins la période de 24 mois à 36 mois.
A l'article 12, je vous fais grâce de le lire, nous demandions
tout simplement que, dans le cas des baux enregistrés, l'avis soit
donné également au locataire.
A l'article 14, j'avais des remarques à faire mais devant la
philosophie exprimée par Me Beaudry et surtout devant ce qu'a dit le
ministre, que je ne veux pas prendre outre mesure à la lettre, si c'est
vrai que toute machinerie sans aucune restriction ne sera pas portée au
rôle, évidemment, je n'ai rien à ajouter. Je voudrais
pourtant souligner que dans le cas de l'industrie que je représente et
l'industrie chimique en général, et peut-être certaines
parties d'autres industries, il arrive que ce que nous appelons machines ou
équipement à la production n'a peut-être pas la même
forme qu'une machine à papier, disons. C'est généralement
un contenant qui peut servir, en sa forme générale, autant pour
l'entreposage que pour le procédé chimique. C'est-à-dire
que, extérieurement, les différences ne sont pas tellement
notables. Je fais seulement cette mise au point sur ce que nous
considérons comme machinerie et ce que la loi considère comme
machinerie, ayant mis de côté cet embarras de "immeubles par
destination". Cela comprend des grands réservoirs dans lesquels il se
produit des réactions chimiques ou des malaxages.
J'arrive à l'article 15 et encore je crois que Me Beaudry m'a
précédé. Je vous fais grâce de la lecture.
Quant aux articles 37, 39 et 40 du projet de loi, nous étions un
peu confus et nous nous demandions si ce rôle de valeur locative
comprendrait des articles qui ne seront pas compris dans le rôle foncier.
Et je tiens seulement à remarquer que l'usage jusqu'à ce jour
veut que la valeur locative ne se rapporte qu'aux terrains et aux
bâtiments. Je présume que la machinerie ou équipement
industriel, qui n'est pas porté au rôle en vertu du rôle
proprement dit, ne le sera pas en vertu de la valeur locative.
Pour ce qui est de l'article 127, nous exprimons peut-être une
certaine appréhension des normalisations faites par les commissions
scolaires. Tout en admettant qu'il ne s'agit que d'une période
intérimaire qui peut peut-être quand même durer plusieurs
années, nous suggérons que les normalisations soient faites soit
par le ministère des Affaires municipales ou peut-être par la
Commission municipale.
Je vous remercie beaucoup.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Thomson.
M. TESSIER : M. le Président, je voudrais d'abord remercier M.
Thomson de l'intérêt qu'il a manifesté en venant
aujourd'hui présenter un mémoire et d'avoir examiné
attentivement le projet de loi 48. Je veux l'assurer en même temps que,
définitivement, il n'y aura aucune taxe sur la machinerie puisque
qu'elle ne sera pas portée au rôle et que par machinerie nous
comprenons tout ce qui sert dans votre production pétrolière.
Egalement, en ce qui concerne le valeur locative, ça s'appliquera
seulement aux immeubles portés au rôle et non pas,
évidemment, à la machinerie, laquelle ne sera pas portée
au rôle.
M. THOMSON: Merci, M. le ministre.
M. TESSIER : Je crois que ça va vous donner entière
satisfaction.
M. THOMSON: Merci beaucoup, M. le Président, messieurs.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On a obtenu encore ça.
M. LE PRESIDENT: Merci, M. Thomson. Et maintenant le dernier organisme
pour aujourd'hui, les représentants du Pacifique canadien et du Canadien
national.
Pacifique canadien
M. GADBOIS: M. le Président, mon nom est Albert Gadbois; je suis
procureur du Pacifique
canadien et je suis accompagné de Me Gagnon, procureur des
Chemins de fer nationaux.
Tout d'abord, pour répondre à l'invitation faite à
maintes reprises par le président de la commission, j'ai l'intention
d'être extrêmement bref dans l'exposé que je ferai devant
vous.
Tout d'abord, permettez-moi d'attirer votre attention sur la composition
de notre mémoire, que nous avons disposé de cette façon
afin, selon notre croyance, de faciliter votre tâche. Notre
mémoire est disposé de telle façon que, du
côté gauche de chaque page, vous avez le texte actuel et, du
côté droit, vous avez le texte que nous proposons: Au bas de la
page se trouvent les notes explicatives. A l'exception de quelques paragraphes,
je vous ferai grâce des notes explicatives.
Sans plus de préambule, je veux passer immédiatement
à l'article 8, où nous suggérons que les mots "dans un
délai raisonnable n'excédant pas 90 jours" soient
insérés au texte, parce que nous avons présent à
l'esprit le cas du grand propriétaire, du propriétaire
d'immeubles de grande envergure, pour qui c'est plus difficile de fournir des
renseignements et à qui cela prend plus de temps.
Nous soumettons aussi que l'évaluateur puisse obtenir tous les
renseignements mais les renseignements raisonnables, afin qu'on ne soit pas
l'objet d'une véritable inquisition de la part d'un évaluateur
trop zélé.
M. PAUL: Si vous me permettez, à ce stade-ci de votre
mémoire, pourriez-vous nous donner une interprétation pratique du
mot "raisonnable"?
M. GADBOIS: Ce sera une question de fait, M. le député,
qui pourra être soumise aux tribunaux. Mais ce que nous voulons, c'est
limiter ce droit qui est accordé à l'évaluateur de venir
et de demander n'importe quoi, des choses qui peuvent n'être absolument
pas pertinentes. Nous voulons que le contribuable soit protégé
dans cette éventualité. Il pourra s'adresser aux tribunaux et
dire: On me demande des choses qui ne sont pas raisonnables. La cour
décidera. Ce sera une question de fait.
Au paragraphe 10, je comprends, d'après les remarques qui
ont été faites au cours de l'après-midi, que ce paragraphe
est maintenant rayé je ne ferai pas de commentaires.
A l'article 11, nous soumettons une rédaction qui insère
le principe de la susceptibilité d'utilisation. En d'autres termes, nous
insérons en ce paragraphe un principe semblable à celui que les
cours sont appelées à interpréter dans les cas de
privilèges, par exemple, où on a souvent à décider
si le bâtiment était complété ou susceptible
d'habitation. Parce que, comme vous le savez, messieurs les
législateurs, il y a un délai, pour enregistrer un
privilège, qui court de la fin des travaux. Nos tribunaux ont, à
plusieurs reprises, été appelés à décider de
la question, à savoir si les travaux étaient terminés ou
non. Nous avons cette règle jurisprudentielle qui se dit de
substantiellement terminer. Alors nous avons ici: Qui est susceptible
d'utilisation.
M. PAUL: Est-ce que vous êtes au courant de la dernière
décision de la cour d'Appel que vous retrouvez à la page 1 des
rapports de la cour d'Appel de cette année, où la cour d'Appel,
à l'unanimité, le juge Rivard, le juge Montgomery et le
juge Turgeon a décidé que tant et aussi longtemps que tout
n'est pas complété dans un contrat, l'immeuble est
considéré comme non terminé et par conséquent sujet
à l'enregistrement d'un privilège.
M. GADBOIS: Je suis au courant de cette décision, M. le
député, mais vous l'êtes aussi, je le suppose de votre
part, de cette autre jurisprudence qui existe à l'effet contraire. C'est
pour cela que nous avons voulu ici instaurer le principe, à savoir s'il
est susceptible ou non d'habitation. S'il est susceptible d'habitation, nous
disons: A partir de ce moment, vous pourrez le taxer.
Parce que le texte tel qu'il se lit actuellement, 24 mois et ces
choses-là, eh bien, quand on construit un édifice disons comme
celui de la Place Ville-Marie, ce n'est pas terminé dans 24 mois. Et
pour éviter ce problème-là, pour avoir une règle
équitable à la fois pour la municipalité et pour
l'entrepreneur, nous insérons ce principe qui, nous le soumettons, est
conforme à cette règle d'équité.
L'article suivant, M. le Président, est un article qui a
été discuté à maintes reprises aujourd'hui, c'est
l'article 14 se rapportant à la machinerie. Si j'ai bien compris les
remarques qui ont été faites aujourd'hui, il semblerait que la
commission est à la recherche d'un texte qui la satisferait et lui
permettrait d'exempter la machinerie. Nous n'avons pas la
témérité de prétendre que le texte que nous vous
soumettons est la formule magique qui résoudra vos problèmes,
mais je crois que ce texte est un peu dans l'esprit ou la pensée qui a
été exprimée cet après-midi lorsque nous disons:
"à des fins autres que l'opération, l'entretien, le service et la
protection d'un immeuble par nature." Ce qui veut dire que ne seront pas
portés au rôle des immeubles par destination qui ne servaient pas
à ces fins-là. Qu'est-ce qui sert à ces fins-là? Ce
sont des meubles que l'on installe, tels que les fournaises, les machineries de
climatisation, et qui sont, je crois, de véritables immeubles par
destination qui ne servent pas à la production, qui ne sont pas de la
machinerie au sens que nous l'entendons généralement. C'est la
raison pour laquelle nous vous soumettons ce texte et nous espérons
qu'il est conforme à la pensée du législateur.
Nous soumettons aussi, au sous-paragraphe e) un texte se lisant:
"à des fins d'opération d'un réseau de transport
aérien." La raison pour laquelle nous soumettons ce texte est la
suivante: si le texte actuel était pour demeurer,
nous avons des machines qui servent aux compagnies aériennes qui
seraient taxables, et je pense tout particulièrement au simulateur de
vol qui est un instrument dont se servent les compagnies d'aviation pour la
formation de leurs pilotes, pour fins éducatives, et nous soumettons que
de telles machines, au cas où vous n'accepteriez pas notre
sous-paragraphe a), au cas où vous ne reconnaîtriez pas
l'exemption de la machinerie, eh bien qu'au moins de telles machines devraient
être exemptées.
Nous passons maintenant à l'article 15 qui, pour les chemins de
fer, est l'article qui a le plus d'intérêt. Tout d'abord au
sous-paragraphe c), nous demandons l'inclusion des mots: "à une
entreprise" parce que l'on parle simplement d'organismes publics ou de
personnes physiques pour les systèmes d'aqueduc, d'égouts et de
traitement d'eau, alors que l'on sait très bien qu'il existe des
entreprises qui possèdent de tels systèmes mais qui ne les
possèdent pas pour des fins lucratives.
Au paragraphe d), nous voyons, dans la rédaction actuelle, un
grave danger. Il est dit: "les réseaux de transport en commun et de
chemins de fer" Or, j'ai ici, je vous en ferai grâce, à moins que
vous vouliez que j'y réfère, de la jurisprudence du Conseil
privé et de la cour Suprême à l'effet qu'un réseau
c'est l'ensemble des objets physiques qui constituent le chemin de fer; un
réseau de chemins de fer, c'est l'ensemble des objets physiques qui
constituent ce chemin de fer et non pas les objets physiques.
Or, il est évident que le paragraphe d), dans sa rédaction
actuelle, tend vers une exemption, mais nous croyons que ce qui est
exempté par les mots: "les réseaux de transport" c'est un
intangible, c'est l'ensemble mais non pas ces instruments physiques qui font
partie de l'ensemble. Or, nous croyons qu'il serait beaucoup plus heureux de
prendre le texte que nous soumettons, qui est conforme, dans son esprit,
à celui que nous trouvons dans la charte de la ville de Montréal
et la charte de la cité de Québec à l'heure actuelle.
Maintenant, nous remarquons qu'en vertu du paragraphe d) tel que
rédigé, et nous l'avons mis dans le même sens, au
sous-paragraphe que nous soumettons:
Les terrains des réseaux de chemins de fer seront taxés ou
portés au rôle à leur valeur marchande. Autrefois, en vertu
des dispositions de la Loi des cités et villes, ils étaient
portés au rôle selon la valeur des terrains avoisinants. Nous ne
sommes pas absolument très enthousiasmés de ce changement, mais
nous réalisons, M. le Président que la règle est que tout
doit être évalué à la valeur marchande et nous nous
résignons à ce que nos emprises, nos terrains le soient comme
ceux des autres contribuables de la province.
Nous passons maintenant aux articles 21 et 22 qui viennent d'être
discutés devant vous. Nous non plus nous ne sommes pas heureux de la
rédaction de ces articles, mais vu la déclaration du ministre
à l'effet que de nouveaux textes seront préparés, il nous
semble qu'il n'est pas nécessaire pour nous d'en discuter cet
après-midi.
A l'article 27, sous-paragraphe f), même si nous sommes des
cheminots, même si les cheminots n'ont pas beaucoup affaire aux choses
culturelles, nous croyons que les musées devraient eux aussi profiter
des mêmes privilèges que "les bibliothèques ouvertes
gratuitement au public".
M. PAUL: Le ministre s'est prononcé là-dessus ce
matin.
M. GADBOIS: Maintenant, nous suggérons, M. le
Président...
M. BOIS: Juste en aparté, est-ce que monsieur le ministre a voulu
mentionner les musées qui sont construits individuellement? Si je prends
le cas des chemins de fer, je constate que ceux-ci ont beaucoup de
musées dans leur gare. Est-ce cela que vous avez mentionné?
M. GADBOIS: C'est exclusivement employé comme bibliothèque
ou musée ouverts gratuitement au public. Cela comprend ceux qui sont
ouverts gratuitement au public. Il y a le Musée des Beaux-Arts, par
exemple, sur la rue Sherbrooke à Montréal, qui, je crois, pour
certaines expositions demande un prix d'entrée, mais pas toujours. Je
crois que les musées devraient profiter des mêmes
privilèges qu'une bibliothèque. Nous avons nous aussi des
musées de chemin de fer, à Delson par exemple, qui sont ouverts
gratuitement au public. Je crois qu'ils devraient profiter des mêmes
avantages que les autres musées. C'est quelque chose que nous mettons
à la disposition du public en général et je ne crois pas
qu'il devrait y avoir des distinctions parce que ce sont des compagnies de
chemin de fer qui les mettent à la disposition du public.
Nous suggérons aussi M. le Président, qu'il soit
inséré au projet de loi un article 27 a) qui se lirait comme
suit: "Les emprises ferroviaires et les cours de triage sont exemptes de toutes
taxes spéciales pour les services municipaux et les travaux
d'amélioration locale dont elles ne bénéficient pas
directement". Voici, M. le Président, notre suggestion. Comme vous le
savez tout probablement, les emprises de chemin de fer, c'est cette
étendue d'environ 80 pieds de large sur laquelle les trains passent.
Ces emprises traversent la province de Québec sur toute sa
grandeur. Or, vous avez des municipalités qui viennent construire, juste
à côté de ces emprises, une rue et elles décident
que le coût de construction de cette rue ou de l'installation des
égouts quel que soit le service municipal sera payé
par les propriétaires riverains. Dans ces cas-là, nous sommes
à 50 p.c. redevables du coût de la construction de
cette rue, puisque nous la longeons sur tout un côté et
nous ne retirons absolument aucun avantage de cette rue, parce qu'enfin tout ce
qu'il y a sur notre emprise, ce sont nos rails sur lesquels circulent nos
trains. Nous ne retirons donc aucun avantage de la présence de la rue,
de la présence de l'aqueduc, de la présence des égouts ou
encore de l'éclairage.
Lorsque nous considérons que nous payons, les deux chemins de fer
ici, un minimum de $20 millions par année en taxes municipales et
scolaires dans la province de Québec seulement, nous croyons qu'ici on
nous fait supporter, au profit des autres contribuables, un fardeau
qu'équitablement nous ne devrions pas être appelés à
supporter puisque nous ne retirons aucun avantage de ces services publics dont
les autres contribuables tirent avantage.
M. TESSIER: Est-ce que vous permettriez une question, Me Gadbois? Dans
les autres provinces, est-ce que le Pacifique canadien ou le Canadien national
ne paient pas ces mêmes taxes, notamment en Ontario?
M. GADBOIS: Oui, nous les payons en Ontario, M. le ministre.
M. TESSIER: Alors, pourquoi votre compagnie voudrait-elle payer moins de
taxes au Québec qu'en Ontario?
M. GADBOIS: M. le ministre, si vous me le permettez, nous ne voulons pas
payer moins de taxes dans le Québec qu'en Ontario, mais nous voulons
commencer par faire accepter le principe dans une province pour nous
présenter dans d'autres provinces par la suite et faire accepter cela de
nouveau. Nous ne voulons pas faire de préférence entre une
province et l'autre.
M. TESSIER: D'accord, nous allons attendre que vous ayez convaincu les
neuf autres provinces.
Canadien national
M. GAGNON: M. le Président, si vous me le permettez, mon nom est
Edmond Gagnon; je représente le Canadien national. En fait, il y a eu
une confusion majeure. Dans les autres provinces, en Ontario pour prendre
l'exemple pertinent que je connais, nous payons si nous
bénéficions. Cela peut être présenté devant
le tribunal. Le commissaire général des taxes est ici, il peut le
confirmer. Nous payons les taxes d'amélioration locale en Ontario si
nous en bénéficions. Ce serait la situation qu'on demande
ici.
M. GADBOIS: C'est exactement ce que nous demandons lorsque nous disons
qu'elle ne bénéficie pas directement. Nous demandons la
consécration du même principe.
Maintenant, nous passons à l'article 30 qui concerne les
cultivateurs et qui a été beaucoup discuté. Nous demandons
l'inclusion des mots "les intérêts sur les taxes devant courir le
jour où elles seront devenues exigibles".
Quant aux clubs de golf mentionnés à l'article 31, nous
demandons que les arrérages de taxes soient limités, dans ce cas,
à cinq années et que les taxes deviendront exigibles.
A l'article 32, nous proposons que l'évaluateur signe le
rôle et le dépose au bureau de la municipalité avec tous
les documents ayant servi à sa confection ou sa modification, en vertu
de l'article 97, car, comme vous le savez, en vertu de cet article 97,
l'évaluateur peut modifier le rôle. Nous demandons aussi que ce
rôle et les modifications puissent être consultés par toute
partie intéressée ou son représentant.
M. PAUL: Est-ce que ça ne découle pas de l'économie
du code municipal et de la Loi des cités et villes que tout contribuable
a le droit de consulter les archives municipales?
M. GADBOIS: Oui, mais nous sommes devant une nouvelle loi et dans la Loi
des cités et villes et le code municipal, on ne parle pas du
représentant. Ici, il y a le représentant. Par exemple, nous
avons à l'idée l'avocat ou encore son évaluateur, son
expert, qui pourra consulter le rôle au nom du contribuable.
M. TESSIER: Cela existe déjà. M. GADBOIS: A quel
endroit?
M. TESSIER: Ce que je veux dire, c'est que dans la Loi des cités
et villes et le code municipal, toute personne intéressée a le
droit de consulter les archives. En disant que ça fait partie des
archives, ça veut dire automatiquement que n'importe qui peut le
consulter.
Je souligne ceci parce que ce serait, à mon sens, une
répétition.
M. GADBOIS: Nous l'avons apporté comme clarification, M. le
ministre, pour qu'il ne se présente pas de difficultés et que, si
un avocat ou l'expert d'un contribuable se présente, il ait le droit
bien mentionné dans la loi d'obtenir les informations. C'est tout.
M. PAUL: A la suite des remarques que je faisais ce matin, vu que c'est
une loi dont la mise en application va impliquer énormément de
gens, ça se comprend qu'il soit nécessaire parfois de ne pas
utiliser la concision du juriste. C'est dans ce sens-là que le procureur
fait cette recommandation.
M. GADBOIS: C'est une précaution, M. le ministre.
A l'article 37, où on parle de la valeur locative, nous demandons
que soient exclues les emprises des chemins de fer et d'utilité
publi-
que, pour la raison que, sur les emprises de chemins de fer, nous ne
négocions pas. C'est ce que la cour d'Appel a déjà
décidé. Montreal Tramways dont il s'agissait, contre la
Cité de Montréal, dans ce jugement de la cour d'Appel ne
négociait pas des affaires sur son emprise, mais s'en servait pour les
fins à l'occasion de ses affaires, mais ce n'est pas là qu'elle
négociait. Nous demandons donc que les emprises soient exclues de la
valeur "locomotive," c'est-à-dire locative. Déformation
professionnelle, M. le ministre.
M. TESSIER: On pensait que vous nous demandiez que les
municipalités puissent imposer les locomotives.
M. GADBOIS: Bien, cela prendrait du temps avant que je fasse ça.
A l'article 54, nous demandons tout simplement que le texte demeure le
même que celui que nous trouvons actuellement à la Loi des
cités et villes.
A l'article 59, concernant la constitution du bureau de révision,
nous suggérons que ne soit pas inclus un membre de la
société à laquelle il appartient, s'il s'agit d'une
société ou corporation c'est-à-dire l'évaluateur ou
les membres de ces sociétés.
A l'article 70, nous ajoutons beaucoup d'importance à notre
suggestion, parce que nous la considérons ici d'ordre
général. Il s'agit de la sténographie devant le bureau de
révision. Nous soumettons que la sténographie doit avoir lieu
seulement lorsque toutes les parties l'exigent et, de cette façon, nous
croyons que nous nous faisons les avocats du petit contribuable qui n'a pas les
moyens de se payer de la sténographie.
A l'article 80, il s'agit d'une concordance; nous croyons que l'allusion
à l'article 29, que l'on y voit, devrait se lire à l'article 77.
En effet, l'article 29, vous le verrez immédiatement en le regardant,
n'a absolument aucune relation avec le texte de l'article 80.
M. TESSIER: Vous avez raison, Me Gadbois. Cela a déjà
été corrigé.
M. GADBOIS: Ah bon! A l'article 81, nous demandons tout d'abord que le
secrétaire du bureau fasse parvenir au plaignant un avis d'au moins
quinze jours au lieu de huit jours, pour fournir au plaignant l'occasion de
préparer sa cause. Lorsque vous avez des causes qui comprennent de
grands complexes domiciliaires ou encore des complexes tels que Place
Ville-Marie, c'est le genre de cause que vous ne pouvez pas préparer
dans huit jours. Nous demandons aussi que la transmission se fasse par la poste
recommandée.
L'article 84: il s'agit aussi d'une question de concordance, M. le
Président, et nous suggérons que l'article auquel il doit se
référer suive l'article 81.
A l'article 92, nous demandons qu'une peine, sous forme d'amende, soit
imposée au secrétaire-trésorier s'il ne rapporte pas les
documents au greffe du tribunal dans le délai imparti. Notre suggestion
n'a rien de nouveau, nous la trouvons déjà dans la Loi des
cités et villes.
A l'article 93, nous demandons que dans les cas où, devant le
bureau de révision, la preuve a été prise par
sténographie, l'on ne procède pas à un procès de
novo mais que l'on produise tout simplement les notes sténographiques.
Ce qui est exactement le cas, comme vous le savez, qui existe en vertu de la
charte de la ville de Montréal. Vous allez devant le bureau de
révision, les notes sont sténographiées; vous voulez aller
devant la cour Provinciale, et nous déposons les notes
sténographiées. Nous disons que si la preuve a été
prise par sténographie devant le bureau de révision, on doit
éviter un procès de novo et produire les notes
sténographiques.
M. PAUL: M. Gadbois, est-ce que vous ne trouveriez pas avantageux que
cet article amendé supposons qu'il soit adopté, puisse
s'appliquer à faire disparaître la suggestion que vous avez
apportée à l'article 70 lorsque vous avez inscrit: "Lorsque
toutes les parties l'exigent."
M. GADBOIS: La raison pour cette distinction, M. le
député, est celle-ci: Nous avons pensé comme je le
disais quand j'ai parlé de l'article 70 au petit contribuable. Il
va se présenter devant le bureau de révision. Tout probablement
qu'il n'y ira pas avec des experts parce qu'il n'a pas les moyens d'y aller et
qu'il n'ira pas non plus devant la cour Provinciale parce qu'il n'a pas les
moyens d'y aller. Et je ne vois pas pourquoi on pourrait lui imposer les frais
de sténographie. Mais par contre...
M. PAUL: De toute façon, s'il veut aller en appel, il faudra
qu'il ait un procès de novo.
M. GADBOIS: S'il veut aller en cour d'Appel, il ne perd aucun droit. Il
a son procès de novo. Nous ne lui faisons perdre aucun droit par nos
suggestions...
M. PAUL: D'un autre côté, l'amendement que vous
suggérez à l'article 93 ne pourrait pas s'appliquer parce que ce
serait alors une preuve de novo.
M. GADBOIS: Si le déroulement n'a pas été
sténographié, nous avons cru que de cette façon, il n'y
avait rien de contradictoire. Nous protégions tout le monde.
M. PAUL: Je n'ai pas dit que c'était contradictoire.
M. GADBOIS: Non, non. Je me défends tout simplement.
M. PAUL: J'ai soulevé le point pour vous signaler que
l'application de l'amendement à l'article 93 serait peut-être plus
facile, s'il était adopté, si on n'avait pas cette obligation que
l'on retrouve par votre amendement suggéré à l'article
70.
M. GADBOIS: Non, je crois que les deux se complètent, M.
Paul.
M. TESSIER: On va moins loin avec son amendement.
M. GADBOIS: Oui.
M. TESSIER: Parce que, dans l'article original, il y a toujours la
sténographie.
M. GADBOIS: C'est exact.
M. TESSIER: Tandis que ce que vous suggérez...
M. GADBOIS: C'est la liberté.
M. TESSIER: Oui. C'est cela, lorsque toutes les parties le
demandent.
M. GADBOIS: Oui.
M. PAUL: Dans un cas comme cela, ce sera toujours une preuve de
novo...
M. TESSIER: Oui.
M. PAUL: ... suivant l'article 93.
M. TESSIER: C'est cela. C'est ce que l'article 93 veut dire.
M. GADBOIS: C'est cela. Il faut que les deux parties consentent pour
qu'il y ait sténographie. De cette façon, tout le monde est sur
un pied d'égalité.
M. TESSIER: Je trouve personnellement, Me Gadbois, ces deux suggestions
très intéressantes.
M. GADBOIS: Merci. A l'article 95, nous disons que le jugement du
tribunal doit être signifié à toutes les parties en cause,
alors que le texte dit qu'il doit être signifié à la
municipalité et transmis au bureau de révision. Nous soumettons
que le contribuable aussi a le droit d'être informé du jugement
qui a été rendu.
Nous disons que tous les documents seront remis à la
municipalité après l'expiration des délais d'appel en
absence d'appel.
A l'article 96, nous nous permettons de suggérer un changement.
Le recours à la cour d'Appel, selon le texte actuel, s'exerce en vertu
des articles 9 à 15 de la Loi des cours Municipales. Le délai
prévu est de huit jours. Nous trouvons qu'un tel délai est
très minime pour donner à une partie l'occasion de
détermi- ner si elle veut exercer son droit d'appel ou non. C'est pour
cela que nous suggérons que le délai de 30 jours que l'on
prévoit au code de procédure civile pour l'appel devrait
être instauré.
A l'article 98, nous suggérons: Toute personne ou corporation qui
désire la modification du rôle pour une des raisons
mentionnées à l'article 97. L'article 97, M. le Président,
prévoit que l'estimateur peut varier le rôle s'il y a une
augmentation de la valeur marchande ou une diminution. Nous voulons que ce
même droit soit accordé au contribuable.
Nous disons: Si l'estimateur ou si la municipalité a le droit de
varier le rôle, le contribuable devrait lui aussi, s'il croit qu'il y a
une diminution dans la valeur marchande de sa propriété, avoir le
droit de demander qu'une majoration soit apportée au rôle. En
d'autres termes, nous disons: Si c'est bon pour la municipalité,
ça doit être aussi bon pour le contribuable. C'est tout ce que
nous voulons et c'est le principe que nous voulons faire reconnaître dans
cet article, et par la suite, nous lui accordons le droit de porter appel et
d'exercer tous les autres droits qui lui sont conférés
antérieurement.
L'article 113, je crois qu'il ne sera pas long à plaider, la loi
devait entrer en vigueur le 30 septembre 1973, je crois bien qu'un amendement
est tout indiqué à cet article et que la commission verra
à le faire.
A l'article 122, nous soumettons que ce sont les articles 25, 26 et 27
qui s'appliquent et non pas 24 et 25. Peut-être qu'une
vérification par les conseillers juridiques de la commission
démontrera le bien-fondé de notre suggestion.
Finalement, et c'est là ma dernière suggestion, il s'agit
de l'article 373 de la Loi de l'instruction publique, qui a déjà
été discuté aujourd'hui, nous en demandons l'abrogation.
Nous comprenons que c'est l'intention de la commission de procéder
à une telle abrogation, mais dans un délai... Le seul souhait
qu'il nous reste à vous formuler, c'est que le délai soit
très court parce que nous avons, à Montréal, avec les
commissions scolaires et le rôle, les questions d'uniformisation, de
très mauvaises expériences.
MM. les membres de la commission, c'étaient les remarques que les
chemins de fer avaient à porter à votre attention, je vous
remercie au nom du Pacifique canadien et des chemins de fer nationaux.
M. TESSIER: M. le Président, je voudrais féliciter le
Pacifique canadien et le Canadien national de même que leur procureur, Me
Gadbois, pour la présentation d'abord du mémoire et
également pour les excellentes suggestions, dont plusieurs sont
très constructives.
Je puis vous assurer que nous allons relire très attentivement ce
mémoire et que nous allons certainement retenir plusieurs de vos
suggestions. Encore une fois, je tiens à vous
féliciter et également à remercier votre
collègue, Me Gagnon, qui est intervenu tout à l'heure.
C'est certainement un des meilleurs mémoires, je crois, un des
plus constructifs que nous ayons eus depuis la tenue des séances de la
commission parlementaire des Affaires municipales.
M. PAUL: Je me joins à l'honorable ministre pour vous
féliciter, Me Gadbois, de même que Me Gagnon et vos
collaborateurs. Vous avez fait un excellent travail. Si ce n'est pas le
meilleur mémoire, c'est parmi les meilleurs qu'il nous a
été donné d'entendre jusqu'ici. Vous avez
été objectifs, vous ne vous êtes pas arrêtés
seulement aux articles qui pouvaient concerner les deux compagnies de chemin de
fer. Vous avez fait une analyse complète du projet de loi. C'est tout
à votre honneur et nous retirerons sûrement des
bénéfices et des avantages des suggestions que vous nous avez
faites, que vous nous avez soumises et qui ont été
présentées avec clarté. Votre mémoire est
très bien fait, il est intéressant à lire, facile à
comprendre. Vous méritez, vous et votre équipe, toutes nos
félicitations.
M. BOIS: M. le Président, mes plus sincères
félicitations aux deux procureurs qui représentent les grandes
compagnies de chemin de fer ici. Ce que je remarque surtout, c'est qu'ils se
sont justement préoccupés surtout de toutes les classes et non
pas seulement de leurs entreprises en particulier. C'est ça, M. le
ministre, qui m'intéresse dans le mémoire
présenté.
Alors, merci.
M. BROWN: I would like to congratulate my friend from Brome County. It
is the same thing always, when you get something from Brome, you get
quality.
UNE VOIX: I will remind you of that.
M. LE PRESIDENT: Messieurs, je vous remercie de votre collaboration.
Nous ajournons les travaux de la commission au mardi 2 novembre à dix
heures du matin.
(Fin de la séance: 18 h 7)