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Étude des crédits du ministère
des Affaires municipales
(Dix heures quatorze minutes)
Le Président (M. Marcoux): À l'ordre,
messieurs!
La commission permanente des Affaires municipales est réunie pour
faire l'étude des crédits budgétaires du ministère
des Affaires municipales. Les membres de la commission sont: M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay
(Taschereau), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy
(Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie). Les
intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Char-bonneau (Verchères), M.
Dubois (Huntingdon), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard
(Laurentides-Labelle), M. Saindon (Argenteuil), M. Samson (Rouyn-Noranda), M.
Vaugeois (Trois-Rivières), M. Verreault (Shefford).
Il faudrait d'abord nommer un rapporteur de la commission. Est-ce que le
député de Deux-Montagnes... Non.
M. de Bellefeuille: Le député de Beauce-Nord.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Beauce-Nord comme rapporteur? Est-ce que vous acceptez?
M. Caron: II est plus présent. Alors, on va accepter.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Beauce-Nord. Alors, le député de Beauce-Nord agira comme
rapporteur des travaux de cette commission. M. le ministre.
Exposé préliminaire du ministre M. Guy
Tardif
M. Tardif: M. le Président, contrairement à ce qui
s'est passé l'année dernière, je n'ai pas l'intention de
faire un grand discours sur les affaires municipales, hormis pour indiquer
qu'au cours de ces douze derniers mois, le ministère des Affaires
municipales s'est affairé passablement à un certain nombre de
pièces de législation que tous ensemble nous avons eu l'occasion
d'examiner ici tant du côté des droits publics que des droits
privés. En fait, il y a eu une dizaine de lois publiques et 17 projets
de loi privés, dont la Charte de Montréal, ce qui fait que, avec
ces 28 pièces de législation, le ministère comme tel a mis
en place un certain nombre d'éléments reliés à
l'administration des cités, des villes et des municipalités
régies par le Code municipal qui devraient connaître leur
aboutissement normal au cours de l'année qui vient dans une ré-
forme plus complète de la fiscalité et de la démocratie
municipale. Cependant, je crois prématuré d'entrer dans les
détails de ces deux réformes, quoique s'il y avait des questions
au passage, il me ferait plaisir d'y répondre, de même que sur
certaines autres orientations du ministère.
Alors, sans plus de préambule, M. le Président, je n'ai
pas d'autre déclaration d'ouverture. Je pense que la réforme de
la fiscalité et celle de la démocratie municipale, pour moi, je
les ai associées, elles vont de pair. Elles vont de pair parce que, si
le gouvernement est tout à fait d'accord pour remettre au monde
municipal, dès que celui-ci sera prêt, l'ensemble des revenus,
pour accroître les revenus autonomes des municipalités, il nous
semble aller de soi qu'il y a une contrepartie à cela et que cette
contrepartie, c'est le contrôle des citoyens. Comment accroître le
contrôle des citoyens, comment accroître la visibilité de
l'administration locale et la visibilité à la fois dans les
dépenses et dans les revenus? C'est un des mérites, d'ailleurs,
de la taxe foncière que d'être éminemment visible, ce qui
n'est peut-être pas le cas de la taxe de vente, avant sa suppression
évidemment, qui, pour les municipalités, constitue une source de
revenus invisible, une source de revenus qu'elles reçoivent du
gouvernement et qu'elles n'ont pas à percevoir et à imposer
elles-mêmes, alors que l'impôt foncier l'est. C'est le principe, je
pense, de la représentation ou du pouvoir de taxation lié
à la représentation qui est en cause. Cependant, après
avoir présenté au monde municipal un certain nombre de
propositions de réforme, celui-ci a demandé un certain temps pour
étudier l'impact de cette réforme. Le gouvernement a consenti
à accorder ce délai étant donné, évidemment,
que c'est un certain changement. Nous serons tout attentifs, évidemment,
aux représentations que nous feront les municipalités en ce qui
concerne cette réforme de la fiscalité. Je pourrai, comme je l'ai
mentionné tantôt, entrer dans les détails au cours des
exposés, mais il me semblait important d'insister sur ces deux points,
étant attendu qu'il s'agit là de choses, dans le cas de la
fiscalité, d'une réforme que demandaient les municipalités
depuis longtemps et que le gouvernement est prêt à faire et sera
prêt à faire aussitôt que le monde municipal le sera.
Le gouvernement ne fait pas cette réforme pour lui, il la fait
pour les municipalités. Il y a eu un certain nombre de questions
soulevées, non pas sur le monde municipal, mais bien par le monde
scolaire qui a charrié littéralement sur cette question, reliant
toute la question de l'autonomie locale au maintien de l'impôt foncier
scolaire. On sait qu'une des principales articulations de la réforme,
c'est la remise en entier du champ d'impôt foncier aux
municipalités.
Alors, accrocher l'autonomie des commissions scolaires à une taxe
ou à un impôt foncier qui est peut-être perçu
localement, mais qui en réalité est imposé
provincialement, puisque le taux est déterminé par Québec,
la valeur est détermi-
née par Québec et le produit sert à payer des
salaires négociés par Québec... s'accrocher à
l'autonomie locale, la seule véritable part d'autonomie locale des
commissions scolaires réside dans la taxation pour les dépenses
dites inadmissibles, au sens des subventions du ministère de
l'Éducation.
Les dépenses dites inadmissibles représentent 2,2% de
l'ensemble du budget de l'enseignement élémentaire et secondaire.
C'est véritablement la seule part que les commissions scolaires peuvent
imposer d'elles-mêmes. Tout le reste, pour l'autre partie de
l'impôt foncier scolaire, elles ne font que percevoir des taxes qui sont
décrétées par le gouvernement du Québec, elles
jouent un rôle de percepteur. Pour ma part, je leur ai demandé
publiquement de jouer plutôt le rôle de précepteur
plutôt que celui de percepteur. Je pense que l'analogie dans les...
Je vois que M. Goldbloom apprécie ce genre de distinction.
Mais selon la définition du petit dictionnaire, le
précepteur est le responsable de l'éducation des enfants, alors
que l'autre doit s'employer à ramasser les impôts. De toute
façon, je suis assuré qu'il y aura des questions au cours de la
commission là-dessus. Le gouvernement a décidé, pour
terminer sur cette question, de tenir une conférence
Québec-municipalités qui aura lieu les 2, 3 et 4 juin prochain,
à Montréal, avec des représentants du monde municipal pour
discuter d'abord et avant tout de fiscalité municipale, possiblement
aussi d'autres sujets.
Voilà, M. le Président, ces quelques remarques
d'introduction. J'aurais peut-être voulu ajouter que, au cours de cette
dernière année, s'est précisé pour moi cette
dernière et cette première en même temps encore plus
le rôle du ministère des Affaires municipales, qui doit en
être un de représentant des collectivités locales
auprès du gouvernement, le ministère des Affaires municipales
n'ayant pas à bâtir de ponts, de routes, n'ayant pas à
réaliser lui-même des choses, mais bien à créer les
conditions qui vont permettre aux collectivités locales de faire, elles,
les choses qui doivent être faites sur le territoire, créer les
conditions qui vont permettre aux citoyens d'exercer véritablement cette
autogestion qui doit être le propre des organisations municipales.
Ce qui implique, parallèlement à l'abolition d'un paquet
de subventions, l'augmentation des revenus autonomes, qu'une nouvelle
orientation du ministère se dessine peu à peu, où sera mis
l'accent sur le rôle-conseil, le rôle de support technique, la
disponibilité des fonctionnaires auprès du monde municipal et,
à tout le moins, la mise au rancart d'un paquet de projets qui auraient
eu pour effet de faire se substituer le ministère aux
collectivités locales. C'est évidemment la tendance de toute
administration bureaucratique de vouloir prendre de l'ampleur, de faire, comme
on dit en anglais, de l'"empire building". Le ministère des Affaires
municipales n'est pas exempt de ces tendances et, là-dessus, je vais
donner un exemple de ce que nous n'avons pas fait au cours de l'année,
pour indiquer que c'est dans cette voie qu'il faudrait se diriger.
Il s'agit de ces normes en matière d'urbanisme, où la
première réaction des fonctionnaires a été de dire:
Devant l'incurie des municipalités: Nous allons faire des normes
minimales, pour ce qui est du lotissement dans les plaines d'inondation, dans
les lieux où il y a des glissements de terrains, dans les lieux
où il y a des maisons mobiles susceptibles d'avoir des glissements de
terrains et pour les lotissements non desservis par des réseaux
d'aqueduc et d'égouts.
Nous nous sommes, en cours de route, tournés de bord pour dire:
Non, nous allons d'abord demander aux collectivités locales de faire de
tels règlements. Ce n'est qu'à défaut par elles de ce
faire que le ministère pourra le faire.
Nous sommes allés plus loin. Nous avons dit: Très bien,
nous nous apprêtions à édicter des règlements.
Voilà que nous allons rédiger un règlement modèle,
un règlement type. Nous allons l'envoyer aux municipalités et
elles pourront s'en inspirer pour rédiger leur propre
réglementation.
Je pense que ceci allié à la mise sur pied de ressources
techniques disponibles je suis conscient que c'est un changement
à insuffler dans la mentalité du fonctionnarisme qui a tendance
à se considérer comme des conseillers du ministre plus que comme
des conseillers des municipalités fera en sorte que cette
fonction publique deviendra de plus en plus un conseiller technique
auprès des municipalités. C'est un changement, je pense, dans
l'orientation du ministère, mais je ne crois pas que les
décisions prises centralement par des techniciens, par des technocrates
puissent coller mieux au besoin des collectivités locales.
Mon désir le plus grand serait de faire en sorte que la fonction
publique se rapproche des milieux qui seront desservis, ce qui pourrait
impliquer une certaine déconcentration des effectifs à un moment
donné et la possibilité de programmes d'échanges entre le
ministère et les municipalités. Ce serait très sain que
des avocats du contentieux du ministère des Affaires municipales
pratiquent dans une municipalité pendant quelques mois et qu'un
fonctionnaire municipal vienne travailler au ministère pendant quelques
mois et ainsi de suite, en urbanisme, en génie, en administration
financière. Je pense que c'est dans cette direction qu'il faudra
s'orienter. Voilà des choses que vous ne trouverez pas, messieurs dans
le livre des crédits, qui sont peut-être plus à
l'état de projets chez moi, mais qui indiquent un peu certaines des
tendances. Je vous remercie. (10 h 30)
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
D'Arcy McGee.
Remarques de l'Opposition M. Victor C.
Goldbloom
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais d'abord
m'adresser à vous-même pour vous parler d'une considération
d'ordre technique. Dans le passé, les crédits ont
été examinés sur une période qui n'était pas
définie dans le temps. J'ai as-
sisté moi-même, comme quelques autres collègues qui
sont ici depuis de nombreuses années, à des débats qui ont
duré trois et même quatre semaines. Dans de telles circonstances,
il était compréhensible que le président de la commission
parlementaire en question fasse un effort soutenu pour faire progresser le
travail en demandant que chaque programme et chaque élément
soient adoptés régulièrement. Cette année, nous
avons accepté un calendrier, nous l'avons accepté de part et
d'autre. Cela veut dire que nous n'avons pas, du côté de
l'Opposition officielle, l'intention de chercher à dépasser la
période prévue. Pour cette raison, je me suis permis de causer
brièvement avec le ministre, il y a quelques jours, et également
avec le député de Saint-Hyacinthe. Il en découle que
j'aimerais vous dire que, quant à nous, l'Opposition officielle, jeudi
soir de cette semaine, nous avons l'intention de déclarer adoptés
les programmes 1 à 7 inclusivement, gardant pour mardi de la semaine
prochaine les programmes 8 à 12 inclusivement, qui touchent
l'habitation, et, à la fin de cette journée, nous avons
l'intention de déclarer adoptés ces cinq derniers programmes.
Si, alors, au cours de notre débat, nous procédons par
grands thèmes, sans nécessairement vous permettre de dire que tel
programme, tel élément est adopté, je voudrais que vous
compreniez l'esprit dans lequel nous voudrions poursuivre le débat. En
regardant la liste des programmes, il ne serait quand même pas difficile
de suivre l'ordre des grands sujets qui y sont représentés, mais
je voulais tout simplement vous expliquer la façon dont nous aimerions
faire le débat et notre intention claire de déclarer
adoptés les programmes à la fin de la période
allouée pour chaque parti.
Maintenant, pour réagir brièvement à ce que vient
de dire le ministre, je dois déclarer que c'est avec un certain
sentiment de peine que nous abordons le débat sur les crédits du
ministère des Affaires municipales cette année. Peine d'abord
parce que le ministre est une personne sympathique et ça me fait de la
peine de devoir le critiquer, et peine aussi pour les municipalités qui
restent sur leur appétit.
Cette année, le budget de la province devait, selon les indices
que nous avions au cours des douze mois qui se sont terminés le 31
mars... Au cours de cette année financière, il y avait des
indices qui laissaient croire que les municipalités recevraient une
attention spéciale dans le budget et il me semble que cette attention
reste en deçà des espérances exprimées par les
autorités municipales.
Il y a un an, le ministre était relativement nouveau dans ses
fonctions. Il n'avait pas eu l'avantage de faire une année
entière comme titulaire du ministère et il a dit, en quelque
sorte, avec raison, que le ministère avait beaucoup de pain sur la
planche. Les municipalités étaient convaincues que le
ministère se servirait de ce pain pour en faire d'énormes
sandwiches, des "sous-marins", mais les sandwiches ont été
relativement minces et peu remplis au cours de l'année. Le budget laisse
les municipalités sur leur appétit, comme je l'ai dit.
Le ministre a indiqué, pas pour la première fois,
l'intention du gouvernement de tenir une consultation formelle et
générale avec les municipalités, au mois de juin. C'est
une bonne chose; ce sera la troisième fois dans l'histoire du
Québec qu'une telle conférence aura eu lieu. Je pense que les
deux précédentes ont été fructueuses et utiles. Je
suis donc heureux de cette initiative et j'en félicite le ministre. Sauf
que je dois exprimer l'espoir, voire la conviction que, le ministre des
Finances n'ayant pas exposé dans son discours du budget toutes les
réformes que proposera le gouvernement au chapitre de la
fiscalité municipale et d'autres, le gouvernement ne se servira pas de
cette conférence pour faire de grandes annonces. Il me semble que la
tradition est bien connue et que c'est à l'occasion, notamment, d'un
discours sur le budget que l'on expose les grandes politiques quant à
l'usage que l'on va faire des deniers publics. Je me rappelle surtout certaines
critiques quand un certain gouvernement s'est servi d'une tribune à
l'extérieur de ce Parlement pour annoncer le projet de la baie James.
Ceux qui ont critiqué cette initiative n'en prendront sûrement pas
une semblable.
Alors, je suis heureux pour résumer cela que le
ministre ait indiqué sa volonté de répondre en
détail aux questions que nous pourrons poser.
Il y a une dernière remarque que je voudrais faire et elle est
inspirée par la toute dernière partie des remarques du ministre.
Entre parenthèses, je ne fais pas grief au ministre, bien au contraire,
de ne pas avoir fait ce qu'il a indiqué au tout début de ses
remarques. Il a dit qu'il avait l'intention de ne dire que quelques mots. Je ne
lui fais point grief d'avoir dépassé les quelques mots pour
exposer effectivement sa pensée dans deux ou trois domaines importants.
Il a parlé d'un rapprochement avec la clientèle il a lancé
une ou deux idées pratiques quant à la façon dont ce
rapprochement pourrait se faire.
Je me rappelle, quand j'ai dû, pour des raisons
indépendantes de ma volonté, quitter le ministère, que le
sous-ministre du temps m'avait fait l'honneur d'un petit discours. Il a dit que
les caractéristiques que j'avais voulu imprimer au ministère au
cours de mon mandat étaient concentrées sur le service à
la clientèle et j'en étais fier. Le ministre ne doit pas
être l'avocat des municipalités au point de déclencher des
conflits publics au sein du gouvernement avec d'autres ministres qui ont
d'autres responsabilités; tel n'est pas le rôle d'un ministre de
toute façon. Un gouvernement se tient, sa solidarité est
essentielle à la bonne administration de la chose publique. Mais
souvent, on dit au ministre des Affaires municipales qu'il doit être
l'avocat des municipalités, tout comme le ministre lui-même a dit
que pour bien connaître sa clientèle il faut aller dans le champ,
sur le plancher des vaches et connaître le milieu, connaître la vie
quotidienne de ce milieu. Il me semble que les contacts
qui ont lieu entre les municipalités et le ministère sont
toujours précieux. Quelquefois, parce que les interlocuteurs ne
s'expriment peut-être pas avec facilité et n'ont pas très
bien pensé, rédigé leur présentation, on a le
sentiment de ne pas poursuivre une conversation fructueuse. Mais c'est
l'exception plutôt que la règle. Je voudrais encourager le
ministre à poursuivre cette ligne de pensée, parce qu'elle est
très importante pour la qualité de ce que nous pouvons faire dans
le domaine municipal.
J'ajoute ce propos entre parenthèses. Le ministre a parlé
de déconcentration. C'est là une chose désirable, mais il
y a en même temps certaines difficultés qui se présentent
quand la déconcentration est trop forte. Il y a peut-être un petit
désaccord qui subsiste entre l'actuel ministre et votre humble
serviteur, M. le Président. C'est sur la valeur des visites faites par
les municipalités que l'on appelle, en employant un mot au sens un peu
péjoratif, pèlerinages à Québec. Si le ministre
doit toujours se déplacer, il ne trouvera pas assez d'heures dans la
semaine ou dans l'année pour aller partout. Je trouve que les visites
que l'on appelle pèlerinages ne devraient pas être
caractérisées d'une façon péjorative, parce que ces
contacts sont aussi bons que ceux qui peuvent avoir lieu dans le champ, s'il y
a un partage entre les deux façons de rencontrer les gens. Je voudrais
encourager le ministre à continuer de penser à la
clientèle, parce que c'est sa clientèle, et c'est une
clientèle qui comprend, à toutes fins pratiques, toute la
population du Québec.
Voilà, M. le Président, d'une façon un peu
décousue, les quelques remarques que je voulais faire en réponse
à celles faites par le ministre. Je suis convaincu que notre
collègue de Saint-Hyacinthe voudrait ajouter un ou deux grains de sel et
nous allons l'écouter avec attention. Après cela, nous serons
à votre disposition pour commencer le débat en détail sur
les crédits.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Fabien Cordeau
M. Cordeau: Merci, M. le Président. Je profite de
l'occasion que m'offre le député de D'Arcy McGee d'adresser
quelques mots.
M. Guay: J'espère, en tout cas.
M. Tardif: C'est le ministre de l'Agriculture.
M. Cordeau: Bien sûr que le discours que nous venons
d'entendre de la part du ministre des Affaires municipales ne le compromet
certainement pas, parce qu'il a voulu être restrictif, sachant
probablement que souvent, des promesses, lors d'un discours, ne peuvent pas se
réaliser durant l'année même. Cela peut prendre deux ans ou
trois ans; surtout en ce qui regarde la fiscalité municipale, on avait
déjà entendu certaines promesses. Le ministre avait
exprimé le désir de pré- senter un projet de loi dans les
délais les plus brefs. Par contre, en route, il a rencontré
quelques difficultés. C'est pour cela, probablement, que nous aurons, au
mois de juin, la conférence Québec-municipalités. (10 h
45)
Je ne sais pas si, à cette date, M. le ministre, vous avez
l'intention d'inviter les représentants des commissions scolaires, sinon
comme participants, au moins comme observateurs, parce qu'on a
manifesté, dans ma région, le désir d'y assister. À
quel titre? Ce sera à vous de le décider. Je crois qu'il serait
bon d'inviter les représentants des commissions scolaires, même si
ce n'est qu'à titre d'observateurs, si les décisions qui sont
prises ne les affectent pas. Sinon, ce serait peut-être bon de leur
demander leur collaboration et de les inviter comme participants.
M. le ministre, dans les crédits que vous nous avez
présentés, nous constatons que vous avez, l'an passé, eu
des crédits de $252 millions et une somme de $220 millions a
été dépensée. Est-ce que la différence,
grosso modo d'environ $32 millions, ce sont des crédits
périmés? Nous aimerions connaître les motifs pour lesquels
ces sommes n'ont pas été dépensées et dans quel
programme c'était.
M. Tardif: Vous voulez une réponse tout de suite?
M. Cordeau: Oui, on peut continuer. Je pense que ce serait une
bonne façon d'agir.
M. Tardif: En gros, je ne suis pas sûr qu'il faille
nécessairement considérer comme, comment dirais-je, un mauvais
signe le fait qu'un ministère ait à périmer des
crédits à la fin de l'année. C'est peut-être une
tendance contraire qu'il faudrait manifester, à savoir que, justement,
cette course folle des fins d'années financières où les
ministères s'empressent d'engager leurs crédits. Il reste que
dans ce cas précis, deux raisons principales expliquent cette
différence entre les crédits votés l'an dernier et les
dépenses probables, puisque toutes les factures ne sont pas encore
entrées.
La première a trait à l'habitation, plus
particulièrement au programme des coopératives d'habitation et la
deuxième aux subventions d'égouts et d'aqueduc. Dans le cas des
coopératives d'habitation il s'agit d'aide à la
restauration et à la construction il y a un retard qui est
dû, non pas à la disponibilité des crédits du
ministère comme tels, mais bien à la formation des
coopératives. On s'est dit, et on persiste à dire encore,
malgré les crédits périmés, qu'on ne veut pas
répéter l'expérience de Coop-Habitat et bâtir des
logements d'abord pour se chercher des sociétaires ensuite. Je pense que
c'est mettre la charrue devant les boeufs. Il faut d'abord faire de l'animation
en milieu pour que les coopératives se forment et qu'après, elles
viennent se prévaloir du programme Logipop.
Des coopératives, cela ne se forme pas comme cela. On verra dans
le détail de ces crédits
qu'on a créé des groupes de ressources techniques qui ont
pour mission de faire de l'animation dans le milieu.
Il y a eu des coopératives qui ont eu des fonds de
démarrage de la Société d'habitation. Mais avant que tout
ceci ne s'organise et qu'un groupe de personnes décident de s'organiser
en coopérative d'habitation et que les logements soient produits
à l'autre bout de la ligne, il y a un délai. Cela ne se fait pas
dans une période de douze mois, si bien que nous accusons, de ce
côté-là, un retard dans l'engagement des crédits, ce
qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas en place, déjà, des groupes.
On verra le nombre de coopératives qui ont été reconnues,
et tout cela.
Le deuxième, pour les égouts et les aqueducs, c'est la
même chose, M. le Président, jusqu'à un certain point. Le
ministère paie des subventions d'égouts et d'aqueduc onze mois
après la fin des travaux. Nous pouvons engager, au cours de
l'année, ou donner le feu vert, dans le cadre de nos programmes PAIRA,
LIQUIDATION et autres, à un certain nombre de projets, mais nous
n'aurons besoin véritablement des crédits qu'onze mois
après la fin des travaux. Dans le cas des subventions d'égouts et
d'aqueduc, il y a eu effectivement $13 millions qui n'ont pas été
utilisés au cours de l'année même. C'est d'ailleurs ce qui
a décidé, par souci de concordance, le Conseil du trésor
à baisser les crédits pour l'année en cours,
l'année 1978/79, de $48 millions à $43 millions, sur la base des
crédits antérieurement utilisés. Si la production et les
engagements des municipalités sont plus rapides, l'on pourra les
dégager.
Ce qu'il est important de noter là-dedans encore une fois, c'est
que ce n'est pas le ministère qui bâtit les logements, dans ce
cas, ce sont les coopératives d'habitation. Ce n'est pas le
ministère qui fait les réseaux d'aqueduc et d'égouts, ce
sont les municipalités. Ce n'est que lorsque ces organismes nous
soumettent leurs projets... On est tributaire du rythme auquel les
municipalités, d'une part, et, dans le cas des coopératives
d'habitation, les coopératives elles-mêmes nous soumettent leurs
projets.
M. Cordeau: J'aimerais attirer l'attention du ministre ou du
président sur la décentralisation dont vous avez parlé
à un moment donné.
M. Tardif: Je m'excuse, je n'ai pas employé le mot
"décentralisation"...
M. Cordeau: Non pas...
M. Tardif: ... qui est différent du grand projet de
décentralisation gouvernementale dont on pourra parler, c'est une ature
chose. Mais, puisque vous faites référence à ce que j'ai
dit, j'ai utilisé le mot "déconcentration", c'est-à-dire
prendre des fonctionnaires qui oeuvrent depuis un point central, à
savoir Québec et quelques-uns à Montréal, et les disperser
à la périphérie, donc dans des municipalités ou
dans des régions. Cela resterait des fonctionnaires
québécois qui continueront de prendre leurs directives du
ministère, même s'ils sont là pour conseiller les
municipalités.
La décentralisation, c'est autre chose que cela, c'est...
Oui.
M. Cordeau: Quand j'ai employé le mot
"décentralisation", c'était dans le sens de la
décentralisation dans la perspective du rôle que vous vouliez
accorder aux conseils de comté.
M. Tardif: C'est complètement différent de ce
à quoi je faisais allusion tantôt...
M. Cordeau: C'est dans ce sens là que votre politique...
Oui, bien sûr.
M. Tardif: ... d'avoir des fonctionnaires de mon ministère
qui pourraient être en région, par exemple. C'est une autre
chose.
M. Cordeau: Je suis bien conscient de cela. C'est pour ce qui
regarde la décentralisation administrative concernant les comtés.
Également, je ne sais pas si vous pouvez expliciter ici le rôle
des villes à l'intérieur de ces conseils de comté. Quel
rôle une grande ville va-t-elle jouer?
M. Tardif: M. le Président, je veux bien parler de ce
sujet de la décentralisation, ayant fait partie du comité avec le
premier ministre et mon collègue, le ministre d'État à
l'aménagement, qui a préparé ce document. Il reste que,
comme tel, c'est beaucoup plus mon collègue, le ministre d'État
à l'aménagement, à l'intérieur peut-être de
l'étude des crédits de sa commission, que ceci pourrait
peut-être se situer.
Je n'ai pas d'objection, en cours de route, à y faire allusion,
mais qu'il suffise pour l'instant d'indiquer que ce document de travail qui a
connu le sort d'un bon nombre d'autres documents de travail, qui a
coulé, est précisément uniquement cela,
c'est-à-dire un document de travail où on a posé un
certain nombre de questions. L'accent a été très peu mis
jusqu'à maintenant dans les media d'information sur ce document. On
s'est posé des questions sur ce que cela allait produire sur les
municipalités, sur les conseils de comté, sur les finances, sur
les commissions scolaires et tout cela, mais on ne s'est pas tellement
posé de questions sur ce que cela va produire sur l'appareil
gouvernemental lui-même. S'il y a un endroit où ce sera
douloureux, c'est bien là. Il faut voir avec quelle réticence
beaucoup de ministères nous ont fourni des données,
réticence, le mot est peut-être fort, mais le peu de conviction
avec laquelle ils nous ont remis des données. Finalement, il a presque
fallu poser la question dans les termes suivants... Non pas dire aux divers
ministères: Dites-nous donc ce que vous pensez qui pourrait être
décentralisé dans vos fonctions, mais il a presque fallu poser la
question de la façon suivante: Dites-nous pourquoi telle fonction que
vous remplissez ne pourrait pas être décentralisée. On a
renversé le fardeau. C'est véritablement un débat de
plusieurs mois, sinon plusieurs années, que
cette question de la décentralisation gouvernementale. Je la vois
beaucoup plus, personnellement, puisque cela n'a pas fait l'objet d'une
position gouvernementale comme telle, comme un processus qui doit être
permanent, c'est-à-dire que, de la même manière que les
forces centripètes sont présentes tout le temps, temps je
veux dire I"empire building" dont je parlais tantôt les tendances
de la bureaucratie à tout vouloir accaparer sont permanentes, de la
même manière, il semble qu'il doit y voir en permanence un
mouvement centrifuge pour contrebalancer. Une politique de
décentralisation ne serait qu'une politique permanente de contrer les
effets de ces forces centripètes que ce serait déjà
beaucoup.
Je ne voudrais pas entrer plus à fond dans ces questions pour
l'instant.
M. Cordeau: Est-ce que cette décentralisation
administrative peut aussi entrer en ligne de compte avec la nouvelle
fiscalité municipale que vous avez en vue ou que vous
prévoyez?
M. Tardif: Le gouvernement a dit à plusieurs reprises, le
ministre des Affaires municipales également et le premier ministre
aussi, que la réforme de la fiscalité telle qu'elle est
présentée dans l'immédiat est une réforme qui vise
à accroître les revenus des municipalités et, qui plus est,
les revenus autonomes et ce, pour faire face à leurs obligations
actuelles. Si jamais, par une décentralisation ou par l'effet d'une
décentralisation, de nouvelles compétences étaient remises
aux municipalités, il est évident que des sources de revenus
appropriées devraient suivre ces nouveaux champs de
compétence.
M. Cordeau: M. le Président, j'aimerais aussi attaquer un
autre sujet, c'est l'endettement des municipalités. L'année
dernière, nous avons posé une question au feuilleton et vous avez
répondu que, pour 1975, à la fin du terme, il y avait $3 485 796
000 d'endettement des municipalités. Nous avions aussi demandé
les chiffres de 1976, mais, à cette période, vous nous avez
répondu que les chiffres n'étaient pas encore disponibles.
C'était au mois de juillet l'an passé. Je ne sais pas si,
aujourd'hui, ces chiffres sont disponibles à votre ministère,
pour voir la progression ou la diminution de l'endettement des
municipalités. Maintenant, M. le ministre, j'aimerais que vous me
fassiez connaître les municipalités qui ne sont pas incluses dans
cet endettement, peut-être Montréal ou Québec, ou Laval, je
ne sais pas. Est-ce que ces municipalités sont incluses dans ce
total?
M. Tardif: Écoutez, il faudrait que je sorte... D'une
part, si vous avez là la réponse qu'on vous a donnée en
termes précis, pour pouvoir donner la même réponse en date
de ce jour, enfin, le plus près possible...
M. Cordeau: À la fin de...
M. Tardif: ... et vous indiquer quelles villes sont incluses...
Je pense que, si on a donné la dette municipale totale, il n'y a pas de
raison, à prime abord, d'exclure ces villes. Je voudrais prendre avis de
votre question et tenter d'y donner réponse aujourd'hui même, le
plus tôt possible.
M. Cordeau: Pendant que la commission siège, le plus
tôt possible.
M. Goldbloom: M. le Président, si le député
de Saint-Hyacinthe me le permet, j'aimerais que le ministre me dise si les
communautés urbaines et régionales sont comprises dans les
chiffres qu'il a déjà fournis et qu'il fournira en réponse
à la question du député de Saint-Hyacinthe.
M. Tardif: D'accord, volontiers. On pourra, de toute
façon, donner un tableau par catégories...
M. Cordeau: Ou faire faire des copies peut-être? En faire
faire des copies pour les remettre, s'il vous plaît.
M. Tardif: Si vous voulez, d'accord. (11 heures)
M. Cordeau: Maintenant, il y a un autre domaine au sujet duquel
j'aimerais vous poser une question, c'est le rôle de la commission
municipale. Dans le Soleil, lorsqu'il paraissait, le 4 mai 1977, vous avez
exprimé des opinions. Je vais vous lire ce que MM. Benoît Routhier
et Denis Angers ont écrit: "Pour le ministre Guy Tardif, la Commission
municipale du Québec devrait être restructurée afin qu'elle
cesse d'être, à la fois, juge et partie". Et, à la fin de
l'article je ne le lirai pas au complet "C'est ainsi que la
commission municipale actuelle serait scindée en deux organismes, d'une
part, un tribunal municipal chargé d'enquêter sur les
administrateurs locales et, de l'autre, une commission qui aurait la
responsabilité de superviser et d'approuver les projets à
caractère municipal".
Est-ce que, depuis ce temps, des études se sont poursuivies?
Pourrait-on connaître l'opinion du ministre concernant les
énoncés rapportés dans le Soleil du 4 mai dernier?
M. Tardif: M. le Président, sauf erreur de ma part, la
citation rapportée est extraite, à peu de choses près, du
rapport de la Commission du droit municipal, la commission Hébert, qui
avait soulevé cette question du rôle, pour le moins, ambivalent ou
cette dualité de fonctions de la commission municipale comme organisme
administratif d'une part, et comme organisme judiciaire d'autre part; en tant
qu'organisme administratif, qui doit approuver quotidiennement les faits et
gestes des municipalités, approuver quotidiennement des
règlements d'emprunt, approuver quotidiennement diverses actions
posées par les municipalités, les conseils de ville, et à
qui on demande parfois ou qui, motu proprio, peut le faire ou qui,
elles-mêmes, recommandent au ministre ou au gouvernement de le faire,
d'aller siéger pour faire enquête sur l'administration d'une
ville, par exemple, au cours des cinq dernières années, et
qui,
comme telle, est amenée à repasser par-dessus des gestes
qu'elle a déjà approuvés quotidiennement. On dit:
Évidemment, ça peut être, pour le moins, une invitation,
parfois, à passer rapidement au cours de ces enquêtes. Mais alors,
pourquoi la commission n'aurait-elle pas, dans son activité quotidienne,
scruté plus attentivement certains règlements municipaux?
La commission Hébert avait posé le problème. Je
dois dire, depuis que je suis au ministère, que la commission municipale
m'a remis trois rapports. Un premier sur la ville de Dolbeau, un
deuxième sur la ville de Saint-Léonard et un troisième sur
Collectivité nouvelle à Longueuil. À la suite de la
réception de ces trois rapports, j'ai été à
même, je devrais dire, particulièrement le premier, en tout cas,
de me poser des questions, justement, sur cette dualité de
fonctions.
J'avais abordé la question avec mon sous-ministre, des gens du
ministère et des gens de la commission, et on a amendé
effectivement la Loi de la commission municipale au cours de l'année
pour ce qui concerne ses membres et certaines de ses prérogatives, mais
on n'a pas abordé cette question de modifications substantielles de son
rôle. L'une des raisons, M. le Président, c'est que j'ai
pensé qu'il convenait de consulter mon collègue à la
Justice avant d'aller plus loin dans cette question, étant donné
qu'on retrouve, bien souvent, la Sûreté du Québec aussi
dans beaucoup des dossiers municipaux et que c'est à la suite d'une
action concertée du ministère de la Justice et du
ministère des Affaires municipales que nous parviendrons mieux à
préciser cela. Mais, pour l'instant, c'est à ce point que nous en
sommes.
M. Goldbloom: M. le Président, nous avons commencé
notre travail en écoutant le ministre faire certaines remarques et par
la suite j'en ai fait. Nous avons passé la parole à notre
collègue de Saint-Hyacinthe et soudainement nous sommes dans une
série de questions et réponses. Je ne proteste pas; j'aimerais
simplement savoir de notre collègue de Saint-Hyacinthe quelle est son
intention quant à l'emploi du temps et quant aux...
M. Cordeau: Moi aussi, je veux bien respecter l'entente
préalable qui a été prise, soit de procéder
à quelques questions. Si j'ai fait mon intervention, c'est parce que je
voulais poser des questions au ministre dans mon allocution ou faire allusion
à certaines déclarations qu'il avait faites. Je suis d'accord
pour que, jeudi soir, ce domaine soit clarifié.
Le Président (M. Marcoux): La question que le
député de D'Arcy McGee soulevait était de savoir si vous
aviez encore plusieurs questions générales comme celle-ci.
M. Cordeau: Non.
Le Président (M. Marcoux): Parce que, normalement, vous
savez que c'est...
M. Goldbloom: Continuons, M. le Président; pas de
problème.
M. Cordeau: Non, pas du tout. Une question concernant
l'habitation: M. le ministre prévoit-il nous présenter une
loi-cadre sur l'habitation? Bien sûr, nous aurons l'occasion d'en parler
lors d'une journée spécifique, lors de l'étude des
crédits sur l'habitation. Au début de l'étude de ces
crédits, j'aimerais connaître l'intention du ministre.
M. Tardif: Je m'excuse, je n'ai saisi que la première
partie de la question, à savoir si j'avais l'intention de
présenter une loi-cadre sur l'habitation. C'est cela?
M. Cordeau: Oui.
M. Tardif: Je présume que le député de
Saint-Hyacinthe fait référence à la promulgation par le
gouvernement d'une politique de l'habitation plus que d'une loi-cadre. Le fait
est qu'en effet des gens à mon ministère et à la
Société d'habitation sont au travail sur l'élaboration
d'une telle politique. Cependant, les exigences de la législation nous
ont obligés à mettre l'accent sur un des éléments
d'une telle politique, à savoir les relations locataire-locateur,
puisqu'une échéance était inscrite dans la loi,
c'est-à-dire que la loi prenait fin le 31 décembre dernier. Je
m'étais je l'ai avoué candidement en Chambre de
façon peut-être un peu téméraire lors de cette
mini-session du mois de novembre 1976 engagé à
opérer une vaste refonte de cette loi qui traînait dans le
décor depuis 1951 et qui avait été recondite
d'année en année depuis 26 ans.
C'est la raison pour laquelle de cet ensemble qui peut constituer une
politique d'habitation nous avons privilégié d'abord la question
des relations locataire-locateur, attendu que 52% de la population du
Québec est locataire; dans la ville de Montréal cela atteint 82%
et dans la ville de Québec c'est 70%-75%. Nous avons donc mis l'accent
là-dessus non seulement à cause du nombre même des
personnes affectées, mais du fait que la loi n'avait pas de
caractère permanent. Le personnel de la régie n'avait pas de
caractère permanent, il n'avait pas été recruté
selon les normes de la Fonction publique, il était nommé selon le
bon plaisir et remercié de la même manière. Donc, il
fallait mettre l'accent là-dessus. Un livre blanc a été
déposé au mois de décembre dernier. Ce livre blanc est
maintenant en train d'être transformé en un projet de loi, projet
de loi dont on m'a remis une première version pas plus tard qu'hier, le
1er mai, et que je dois évidemment lire avant de le déposer au
comité de législation pour que cela suive son cours normal.
C'est, en quelque sorte, un des morceaux importants auquel il a fallu
accorder une priorité en raison des échéances mêmes
de la loi.
Quant au reste, M. le Président, il nous tarde de le promulguer,
de le réaliser, enfin d'énoncer cette politique, même si,
déjà, un certain nombre des gestes ont été
posés qui s'inspirent de cette politique axée sur le droit au
logement, qui est différent du droit à la
propriété, et qui s'est traduite par une
accélération des programmes
sociaux, d'une part de logement social et par la négociation d'un
programme de supplément de loyers. Elle s'est traduite aussi par la mise
au point du programme Logipop des coopératives d'habitation locative,
qui s'est exprimée jusqu'à tout récemment encore dans le
budget du gouvernement par la formule des crédits d'impôt qui
permettront, comme chacun le sait, tant au propriétaire qu'au locataire,
de déduire de leur impôt sur le revenu, jusqu'à concurrence
de 40% des taxes foncières, déduction faite de 2% du revenu
imposable. Voilà donc autant de mesures qui traduisent le souci de
rendre le logement plus accessible et moins onéreux pour certaines
catégories de clientèle. Mais l'énoncé ou la
politique gouvernementale comme telle reste à venir et nous y
travaillons présentement.
M. Cordeau: Je remercie le ministre d'avoir répondu
à nos questions et observations et je crois que nous pouvons
peut-être commencer, à moins que d'autres aient des questions
à poser ou des commentaires à faire.
Questions générales
Le Président (M. Marcoux): Nous allons commencer par le
bloc de la gestion municipale. Est-ce que vous voulez les traiter par
blocs?
M. Goldbloom: Si vous n'avez pas d'objection, M. le
Président, il y a peut-être deux ou trois séries de
questions que j'aimerais poser avant d'arriver au sujet qui s'intitule:
Organisation et aménagement du territoire municipal.
J'aimerais d'abord, demander au ministre de bien vouloir nous fournir
certains documents, c'est un peu traditionnel de le faire. Nous avons
constaté de l'extérieur certaines modifications à
l'organisation du ministère. Le ministre pourrait-il nous fournir le
plan d'organisation supérieure du ministère avec le nom,
évidemment, de chaque personne qui occupe chaque poste, pour que nous
sachions à quoi nous en tenir. En lui demandant cela, je suis
amené à lui poser une question, peut-être
légèrement délicate, mais je me sens en devoir de la
poser: Depuis combien de temps le ministère n'a-t-il plus de
sous-ministre en titre, et quand le ministre pense-t-il nommer un
sous-ministre?
M. Tardif: C'est maintenant depuis le mois de décembre que
le ministère des Affaires municipales n'a pas de sous-ministre en titre
et il y a présentement, M. le Président, au cabinet, un projet de
nomination au poste de sous-ministre.
M. Goldbloom: Est-ce que nous risquons de connaître le nom
avant la fin du débat sur les crédits?
M. Tardif: II se pourrait qu'avant la fin du débat sur les
crédits, le nom du nouveau sous-ministre des Affaires municipales soit
connu.
M. Goldbloom: Est-il vrai, M. le Président, que le
sous-ministre adjoint, Me Yvon Marcoux, ait quitté le ministère
ou soit sur le point de quitter le ministère?
M. Tardif: C'est un fait que le sous-ministre adjoint, qui
agissait comme sous-ministre par intérim, quittera le ministère
le 8 mai prochain.
M. Goldbloom: M. le Président, vous connaissez comme moi
la tradition qui veut que l'on ne parle pas des fonctionnaires, parce qu'ils ne
sont pas en mesure de participer aux débats et de répondre, mais
je crois aussi qu'il y a une tradition qui veut que si l'on a des compliments
à faire, c'est toujours dans l'ordre. Je voudrais, dans la perspective
du départ de Me Marcoux, indiquer l'estime que j'ai eue et que j'ai pour
lui et pour la somme et la qualité du travail qu'il a fourni au
ministère et à la collectivité québécoise.
C'est un départ que nous devons regretter tout en souhaitant que dans
ses nouvelles fonctions, Me Marcoux trouve toute la satisfaction
professionnelle et personnelle qu'il souhaiterait lui-même. (11 h 15)
M. le Président, ma deuxième demande, je m'en excuse, est
une demande volumineuse. J'aurais pu la faire inscrire au feuilleton. Si le
ministre préfère que je le fasse, je n'aurai pas d'objection. Ce
dernier a publié récemment certaines listes de
municipalités ayant bénéficié de certains
programmes: PACEM, entre autres, PAIRA, si ma mémoire est fidèle,
et PAISI. Mais il n'a pas fourni c'est ce que je dois lui demander
la liste des demandes faites, des montants demandés et des
réponses données, parce qu'il y a sûrement des
municipalités qui ont demandé de l'aide et ne l'ont pas
reçue.
Alors, quant à ces cinq programmes, PACEM, PAREM, PAIRA, PAISI,
et LIQUIDATION si le ministre pouvait nous fournir la liste des demandes et des
réponses, outre ce qui a déjà été
publié, je lui en saurais gré.
Maintenant, j'aimerais arriver à un sujet abordé il y a
quelques instants par le député de Saint-Hyacinthe et par le
ministre, dans sa réponse. Le rapport de la Commission de refonte des
lois municipales est entre les mains du ministre et devait faire l'objet d'un
débat public. Le désir en avait été exprimé
de la part du gouvernement du temps, de séparer le chapitre sur les
élections municipales, puis de tenir des séances de la commission
parlementaire pour permettre aux intéressés d'en parler avant
d'effectuer quelque changement que ce soit.
Nous attendons toujours, depuis le changement de gouvernement, la tenue
de ces séances de la commission parlementaire. Le ministre comprendra
sûrement que l'Opposition ne peut se contenter de l'affirmation, par le
ministre, que lui-même et d'autres membres du gouvernement ont eu des
consultations. Quand je donnais ces réponses, cela ne satisfaisait
jamais l'Opposition du temps; or les rôles étant renversés,
il faut que je prenne,
en toute logique, la même position. Cette logique sera
sûrement acceptée de très bon gré par le
ministre.
Réforme municipale
Alors, quand aurons-nous l'occasion de faire ce débat public avec
les intéressés? J'ajoute à cela une inquiétude. Je
viens de prendre connaissance d'un communiqué émis par le
ministre indiquant son intention de déposer et de faire adopter, avant
l'ajournement d'été, un projet de loi sur la démocratie
municipale. Mais quand on examine, d'une façon détaillée,
le communiqué en question, on trouve que ce n'est pas la
démocratie en général qui est touchée, mais bien le
régime électoral de deux municipalités: Montréal et
Lon-gueuil.
Sans présumer que le ministre refusera, après le
dépôt en première lecture de ce projet de loi, la tenue de
séances de cette commission parlementaire pour écouter les
intéressés, je dois exprimer une vive inquiétude; le
ministre songe à intervenir dans le régime électoral de
deux municipalités importantes, à peine quatre mois avant la
tenue des élections dans ces mêmes municipalités. Je dis
quatre mois, parce qu'il reste aujourd'hui six mois, mais il est à
prévoir que ce sera au cours du mois de juin que le projet de loi sera
présenté, si ma mémoire est fidèle. C'est ce qui
est indiqué dans le communiqué de presse. Si nous avons des
séances de la commission parlementaire et si nous avons un débat
qui ne sera pas étranglé par un bâillon, nous pourrons
prévoir que le mois de juin sera consacré, en bonne partie,
à ce débat.
À la fin de juin, avec l'adoption, par la majorité
parlementaire, d'un tel projet de loi, si le gouvernement réussit cela,
il restera quatre mois seulement. Ceux qui auront à administrer les
élections, les citoyens, les électeurs qui auront à voter
auront peu de temps à comprendre et à s'adapter à ce
nouveau régime.
J'aimerais que le ministre explique un peu plus clairement ses
intentions, d'abord en ce qui concerne le chapitre du rapport Hébert sur
les élections municipales; deuxièmement, quant à son
projet de loi qui toucherait, selon le communiqué, deux
municipalités seulement; troisièmement, sur le rapport
Hébert dans son ensemble: qu'est-ce qu'il a l'intention de faire pour
promouvoir le débat public afin de permettre que le projet de loi qui
devait découler de ce rapport soit déposé,
étudié et, un jour, adopté.
M. Tardif: M. le Président, en ce qui concerne le rapport
Hébert dans son ensemble, ce document, cette série de documents,
il faut bien le préciser, était et demeure le rapport d'une
commission de refonte. Ce n'est pas un document de réforme. Ce que la
commission Hébert a fait, ce fut de prendre la Loi des cités et
villes, le Code municipal et quelque 350 à 400 chartes privées
régissant les municipalités, qu'elles avaient fait adopter au
cours des années, en vue d'opérer une refonte dans un seul et
même texte de loi.
Certes, la commission Hébert, dans ce processus de refonte, a
bien été amenée à suggérer, devant des
formules diverses d'organisation, par exemple, des comités
exécutifs de villes, une certaine standardisation, mais ce
n'était pas son mandat d'opérer une réforme de la chose
municipale.
L'actuel gouvernement a, sur le fonctionnement des collectivités
locales, des idées de réforme qui, évidemment,
l'amènent à aller beaucoup plus loin que ce qui est contenu dans
le rapport Hébert, même si ce travail de moine peut lui être
éminemment utile lorsqu'il s'agira d'harmoniser des textes sur des
questions secondaires.
Mais si on pense et c'est l'intention du gouvernement
opérer un certain nombre de réformes, ce n'est pas dans le
rapport Hébert ce n'est pas lui faire injure puisque ce
n'était pas son mandat que le gouvernement va trouver
l'inspiration voulue pour opérer ces réformes.
Deuxièmement, la commission Hébert, et ce, à la
demande même du gouvernement antérieur qui avait commandé
cette étude, avait soumis un rapport distinct sur le processus
électoral dans les municipalités. Encore là, M. le
Président, nous avons pensé qu'il fallait aller plus loin que
cela et, tout en reconnaissant l'urgence de faire cette réforme avant
d'autres aspects du fonctionnement municipal, nous avons décidé
cela rejoint la deuxième question du député de
D'Arcy McGee d'aller de l'avant avec un certain nombre de propositions
de réformes du processus des mécanismes électoraux.
Avant de ce faire cependant, le gouvernement a mis sur pied un
comité conjoint formé de gens qui travaillent au ministère
de mon collègue Burns à la réforme parlementaire afin
d'harmoniser aussi ce que la commission Hébert n'avait quand même
pas fait, ce qui n'a pas été demandé non plus, un certain
nombre des dispositions régissant les élections au Québec
avec celles régissant les municipalités et,
particulièrement, évidemment, l'introduction, et non la moindre,
de la loi 2, par exemple, sur le financement des partis politiques, des caisses
électorales.
Nous avons donc mis sur pied ce comité conjoint qui a
examiné à notre demande une série de questions. Je peux
énumérer ici les points sur lesquels s'est penché ce
comité. Je pense entre autres à la confection des listes
électorales, à la question du cens électoral, à la
question du cens d'éligibilité, au mode de scrutin, à la
carte électorale, au nombre de conseillers par municipalité,
à la durée des mandats, aux partis politiques municipaux,
à leur existence, à leur reconnaissance, que le droit municipal
ignore, au financement des partis politiques et des dépenses
électorales et à la conduite des campagnes électorales
municipales. Sur tous ces points, M. le Président, je pourrais
préciser ma pensée et dire que les listes électorales
confectionnées à la fois par le gouvernement du Québec,
par les municipalités et par les commissions scolaires coûtent
terriblement cher. On évalue, grosso modo, quelque part entre $12
millions et $15 millions le coût total de la confec-
tion des listes électorales au Québec, par toutes ces
diverses instances.
Une des questions qui vient évidemment à l'esprit, c'est
pourquoi on ne pourrait pas avoir une seule liste électorale permanente.
Le gouvernement travaille à cette question présentement. Il y a
une difficulté majeure en ce qui concerne la liste électorale
municipale. C'est relié au deuxième point, c'est que le cens
électoral, c'est-à-dire le droit de vote, n'est pas fondé,
n'est pas le même en droit municipal que sur le plan
québécois. On sait qu'au Québec et au Canada, il suffit
d'être citoyen canadien, âgé de 18 ans et résidant
pour pouvoir voter, alors qu'au municipal, on sait que les personnes morales
ont encore le droit de vote, les compagnies ont encore le droit de vote, les
propriétaires non résidants ont encore le droit de vote. Bref,
autant de questions qui, comme vous pouvez l'imaginer, M. le Président,
soulèvent des problèmes pour peu qu'on pense à une liste
électorale unique et permanente.
La question du cens d'éligibilité également, cette
fois, c'est qui peut se présenter aux élections municipales. Le
mode de scrutin qui est retenu et qui est lié ou la révision du
mode de scrutin qui veut qu'à l'heure actuelle... en fait, c'est une
modalité du régime présidentiel qui est retenue sur le
plan municipal, c'est-à-dire le maire élu au suffrage universel.
Certains ont posé la question: À partir du moment où on
reconnaîtrait les partis politiques sur la scène municipale,
est-ce que le maire ne devrait pas, par exemple, être élu comme un
régime parlementaire, enfin comme simple conseiller d'un quartier, et
c'est à titre de chef de parti qu'il deviendrait, à l'instar du
premier ministre, premier magistrat de sa municipalité? La question a
été posée. (11 h 30)
La règle générale au Québec pour ce qui
concerne le mode de scrutin, c'est encore contrairement à ce que l'on
peut penser, le scrutin plurinominal à un tour, c'est-à-dire
plusieurs éche-vins, plusieurs conseillers sur une liste
électorale. Parfois, à Montréal, par exemple, dans les 17
quartiers, sauf Saraguay et Rivière-des-Prairies, c'est un ou deux dans
ces cas, mais c'est trois généralement. Il y a 17 quartiers
à trois conseillers chacun. À Québec, c'est quatre
conseillers par quartier. Dans certaines municipalités, ce sont les six
conseillers, il y a un maire et six conseillers qui sont élus en bloc.
C'est donc le système qui prévaut présentement. C'est
surtout le système plurinominal, même s'il y a eu, depuis les
dernières années, à la suite des lois régissant les
municipalités du Haut-Saguenay et de l'Outaouais, certains amendements
qui ont eu tendance à consacrer le principe du système
uninominal.
Également, pour les listes électorales, on sait
pertinemment qu'il n'y a, à l'heure actuelle, aucune règle qui
régit le découpage des cartes électorales municipales au
Québec et à Ottawa. Au fédéral, il y a des normes
qui veulent, par exemple, que chaque quartier ou chaque district
électoral ait, par exemple, au Québec, une population de 32 000,
avec une variation de plus ou moins 25%, sauf exception, évidemment,
pour des cas d'espèces comme aux Îles-de-la-Madeleine, notamment,
mais, au municipal, rien de tel n'existe, si bien qu'on retrouve
présentement, dans certaines villes, des quartiers municipaux où
3000 électeurs suffisent à élire un échevin ou un
conseiller, alors que, dans le quartier à côté, il en faut
10 000 ou 11 000 pour faire élire un conseiller.
De telles disparités ou disproportions existent.
Évidemment, il nous a semblé important d'avoir des normes
concernant le découpage des cartes électorales et aussi le nombre
de conseillers par municipalité. On sait que, dans les petites
municipalités rurales, la règle est un maire et six conseillers.
Or, il y a des municipalités qui ont atteint presque 100 000 de
population et qui ont encore un maire et six conseillers seulement. Il nous
semble que, là aussi, il est important d'établir une certaine
corrélation entre la population d'une municipalité et le nombre
de conseillers qui devraient exister pour représenter les citoyens de
cette municipalité.
Quant aux mandats, on retrouve présentement dans le droit
municipal des mandats de deux, trois et quatre ans. Certaines villes ont des
mandats de quatre ans. Les cités et villes ont des mandats de quatre
ans. Les municipalités rurales ont des mandats de deux ans, en
général, le conseil étant renouvelable pour la
moitié tous les ans. Certaines des municipalités rurales
pouvaient, de par la loi, se prévaloir de mandats plus longs avec
l'autorisation du lieutenant-gouverneure en conseil, mandats de trois ans ou de
quatre ans selon les cas.
Les partis politiques municipaux, je l'ai mentionné tantôt,
le droit municipal les ignore, même s'ils existent dans les faits. Il
nous semble que c'est là une anomalie qu'il y a lieu de corriger. Ils
existent, que cela nous plaise ou non, que cela plaise à certaines
administrations ou non; il y a des partis politiques municipaux qui existent.
Qu'est-ce qu'on en fait? Il y a le financement de ces partis politiques et les
dépenses électorales. La question est: Dans quelle mesure la loi
2 pourrait-elle s'appliquer, intégralement ou non, avec les adaptations
nécessaires sur la scène municipale? Évidemment, il y a la
question de la conduite des dépenses électorales. Voilà,
en gros, pour ce qui est des mécanismes électoraux, qui sont
autant de points qui ne sont pas touchés dans le rapport Hébert,
à certains égards, et qu'il nous semblait important d'introduire.
Encore une fois, je n'en fais pas grief à la commission Hébert;
ce n'était pas son mandat, ce n'était pas une commission de
réforme, c'était une commission de refonte.
D'autre part, reliée à la question des mécanismes
électoraux est toute la question du processus de prise de
décision. On retrouve sur la scène locale, en gros, si vous
voulez la résumer: Quels sont les pouvoirs du conseil municipal? Quels
sont les pouvoirs du maire? Lorsqu'il y a un comité exécutif,
quels sont les pouvoirs du comité exécutif? Dans certaines
municipalités, il y a des commissions du conseil. Quels sont les
pouvoirs de ces commissions? De qui sont-elles formées? Relié
à cela, dans les plus grands centres, il nous
semblait important de nous pencher sur la possibilité d'avoir des
conseils de quartier. Quels devraient être les pouvoirs de ces instances
qu'on pourrait appeler conseils de quartier? Il y a aussi certaines questions
que l'on se pose concernant les consultations populaires, les
référendums au niveau des municipalités. Il y a eu des
amendements apportés quant au nombre de personnes qui pouvaient demander
la tenue de consultations populaires ou de référendums. Il nous a
semblé important de nous pencher sur cette question, de même que
sur l'information aux citoyens.
En ce qui concerne le budget, les immobilisations, déjà,
nous avons amendé le Code municipal pour obliger les
municipalités rurales ce sont 1250 municipalités quand
même à faire un budget annuel. Ce n'était pas le cas
avant; elles n'étaient pas tenues d'en faire un. Maintenant, elles sont
tenues de le faire. Il me semble qu'il faut poser des questions maintenant,
à savoir s'il ne faudrait pas aller plus loin maintenant et faire en
sorte que ce budget reçoive une certaine publicité auprès
des populations.
Les cités et villes étaient tenues, de par la loi, de
faire un budget municipal. Les amendements qu'on a apportés par la loi
54 vont plus loin et exigent des cités et villes, ainsi que des
communautés urbaines, qu'elles déposent un programme triennal
d'immobilisations, de sorte que les citoyens sachent vraiment l'étendue,
l'envergure des immobilisations que se propose de faire la municipalité
ou la communauté. Voilà autant de questions que nous nous
posons.
Enfin, un dernier point sur lequel nous avons travaillé, c'est la
question de l'éthique dans les affaires municipales. L'actuel
gouvernement et les membres du cabinet se sont imposés eux-mêmes
des règles d'éthique sur le plan de la déclaration de
leurs intérêts, déclaration volontaire. Ils ont dû se
départir de tout intérêt qui pouvait les mettre en conflit
avec l'exercice de leur fonction. La question que nous nous posons: Dans quelle
mesure devrions-nous introduire dans le droit municipal un certain nombre de
dispositions relatives à l'éthique et à ces questions de
conflits d'intérêt et de déclarations
d'intérêts personnels?
M. le Président, ce mandat très vaste, ainsi que vous le
constatez, qui a été confié à ce comité de
travail, a résulté dans la remise aux deux ministres
concernés, c'est-à-dire Robert Burns et moi-même, par ce
groupe de travail, d'un rapport, à la fin décembre, début
janvier. Nous avons décidé de scinder en deux les recommandations
pour nous attacher d'abord à celles qui touchaient le processus
électoral comme tel. Suite à la remise de ce document, nous avons
préparé un texte qui ne portait que sur ces questions
reliées au processus électoral et nous avons entamé une
consultation avec les municipalités, les conseils de ville des
municipalités ayant plus de 50 000 de population, ainsi qu'avec l'Union
des municipalités, l'Union des conseils de comté. Ce document a
fait l'objet, d'ailleurs, d'un coulage cela me semblait normal on
leur a soumis un certain nombre de propositions. Ces consultations nous ont
permis de nous rendre compte que, si certaines mesures pouvaient être
adoptées à très courte échéance, d'autres
étaient plus problématiques et qu'il était
préférable de les remettre à plus tard, après plus
amples études et consultations, si bien que ce qui a été
publié dans le communiqué... et là, je reviens au souci
manifesté par le député de D'Arcy McGee, à savoir
les élections s'en viennent et c'est très tôt à
Montréal. C'est justement en raison de ces délais très
courts qu'il nous a semblé préférable de nous limiter
à un certain nombre de mesures susceptibles d'accroître le
fonctionnement de la démocratie. Ces mesures, essentiellement, reposent
sur les huit points suivants: d'abord, les mesures s'appliqueront
obligatoirement aux villes de 100 000 âmes et plus. Dans les faits, deux
villes de 100 000 âmes et plus auront des élections en novembre
prochain.
Deuxièmement, ces mesures s'appliqueront facultativement, pour
les prochaines élections, toujours, aux villes de 20 000 âmes et
plus qui, sur résolution de leur conseil, décideront de tenir
leurs élections selon le nouveau processus plutôt que selon
l'ancien. Donc, mesure facultative dans les autres cas.
Quant aux mesures elles-mêmes, M. le Président, elles
reposent essentiellement sur les points suivants: abolition du vote des
personnes morales, consécration du principe uninominal, du scrutin
uninominal, c'est-à-dire d'un conseiller par quartier: reconnaissance
des partis politiques municipaux, financement des campagnes électorales
ou des dépenses électorales, établissement d'une
échelle quant au nombre de conseillers en fonction de la taille des
municipalités; calibrage des cartes électorales en fonction des
principes qui seront édictés dans la loi, c'est-à-dire la
population totale divisée par le nombre de conseillers avec un
écart maximal de plus ou moins 15%, sauf exception, qui devront
être autorisés par la commission québécoise de la
refonte des cartes électorales; permission pour les municipalités
a-yant plus de 15 conseillers d'avoir un conseil exécutif; et,
finalement, tenue du scrutin enfin, c'est la date de tenue du scrutin
dans ces villes le dernier dimanche d'octobre à moins que les
échéanciers de chacune des villes que nous sommes en train
d'examiner fassent qu'il soit trop tôt; dans ce cas-là, ce sera la
date la plus proche possible de ce dernier dimanche d'octobre, compte tenu
qu'à Montréal, par exemple, les élections étant
prévues pour le 12 novembre, cela n'est pas plus conséquent que
ça.
Voilà en gros, M. le Président, les huit points sur
lesquels le Conseil des ministres a donné son accord et qui ont
déjà fait l'objet d'un communiqué qui n'était
peut-être pas aussi explicite que ce que je viens de mentionner; il ne
l'était pas à ce point-là. Il a résulté dans
ces décisions du conseil et un projet de loi est en préparation
présentement, projet de loi qui devra être déposé
incessamment et que l'Opposition pourra discuter à loisir.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Verdun.
M. Caron: M. le Président, au sujet du rapport
Hébert, le ministre dit qu'il y a certains de ses fonctionnaires
il nous a fait un exposé qui sont en train de le
réétudier. J'aimerais demander au ministre si on a confié
à certaines personnes un mandat spécifique pour étudier
des parties de ce rapport en dehors de votre ministère.
M. Tardif: Non, il n'y a eu aucune étude de
recommandée à l'extérieur du ministère.
M. Caron: Parfait!
Le Président (M. Marcoux): D'autres questions?
M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais revenir à
cette réforme électorale au niveau municipal. Le ministre
n'a-t-il pas peur d'être accusé d'afficher une volonté
qu'il n'a sûrement pas, mais une volonté, une intention
d'intervenir de façon à influencer les résultats
électoraux dans les municipalités en question? C'est
délicat, je le reconnais. Je reconnais aussi qu'à n'importe quel
moment, si l'on intervient, il y aura cette année des élections
dans certaines municipalités. Mais je pense que les deux cas en question
sont peut-être un peu plus importants quant au nombre d'électeurs
impliqués et sont des cas un peu chatouilleux. Le gouvernement n'a-t-il
pas peur d'être accusé de vouloir intervenir de façon
à obtenir un certain résultat électoral?
M. Tardif: M. le Président, le gouvernement n'a qu'un seul
souci, s'assurer que la démocratie s'exerce sur la scène locale.
L'action du gouvernement aurait pour résultat de s'assurer d'une
présence de l'opposition au conseil; ce serait, pour moi, tout
simplement permettre de corriger certaines distorsions du genre de celle qu'on
a connue à Québec ici aux dernières élections,
où l'Opposition a reçu 40% des voix sans avoir un seul
représentant au conseil. Cela m'apparaît grave. (11 h 45)
Dans les cas de Montréal et Longueuil, j'ai peut-être omis
de mentionner que nous avons consulté non seulement l'administration,
mais également les partis d'opposition. Nous leur avons fait part
à tous les deux de notre intention dans ce domaine, de sorte que les
règles du jeu sont connues de tous. Il a peut-être aussi je
m excuse, mais il me semblait tantôt qu'il y avait un autre point que
j'avais oublié été question, à un moment
donné, d'introduire un élément de correction dans le vote,
donc un processus qui permettrait d'avoir, en sus des conseillers élus
par quartiers, un certain nombre de conseillers qui viseraient à
corriger la représentation ou à équilibrer autant que
possible le nombre de sièges avec le nombre de voix obtenues. Cette
solution a été mise de côté. Cependant, pour
favoriser l'apparition de l'opposition à l'hôtel de ville, le
principe de permettre au maire de se présenter à la fois à
la mairie et à l'échevinage dans un quartier avec un
suppléant a été retenue aussi par le Conseil des
ministres.
M. Goldbloom: M. le Président, je crois que le ministre
n'a pas répondu précisément aux questions que j'ai
posées au sujet de l'opportunité de tenir des séances de
la commission parlementaire sur la question électorale au niveau
municipal en général et sur le projet de loi qu'il
s'apprête à déposer pour les municipalités de 100
000 âmes ou plus et autres sur une base facultative. Aurons-nous des
séances de la commission parlementaire?
M. Tardif: II n'y a pas de raison pour laquelle il ne devrait pas
y avoir de séance de la commission parlementaire sur ces questions, M.
le Président.
M. Goldbloom: Le ministre nous a indiqué qu'il a
informé les administrations municipales des grandes lignes du contenu du
projet de loi , qu'il en a discuté également avec les groupes
d'opposition dans les municipalités en question. Il a dit: Les
règles du jeu sont donc connues des intéressés depuis
déjà un certain temps. "Connues " est une chose;
"acceptées" en est une autre.
M. Tardif: D'accord.
M. Goldbloom: Est-ce que, effectivement, les
municipalités, les administrations actuelles ont accepté avec
joie et empressement les propositions du ministre?
M. Tardif: Je pense que ce serait beaucoup dire, M. le
Président.
M. Goldbloom: C'est ce que je soupçonnais.
M. Tardif: II serait exagéré d'affirmer que les
municipalités ont accepté avec joie et empressement toutes les
réformes proposées. Le fait est que vis-à-vis d'un certain
nombre d'élus locaux, municipaux, pour eux, il n'y a aucun besoin
d'effectuer une réforme de la démocratie. La preuve que c'est
démocratique, nous ont-ils dit parfois: Regardez si nous avons
été élus. Dans un cas, un conseiller ou un maire m'a dit:
Cela fait 25 ans que je suis élu, donc que voulez-vous de plus
démocratique? Il est bien évident, cependant, que dans le cas des
deux villes concernées, particulièrement Montréal et
Longueuil, et des autres, on reconnaît qu'il y a des distorsions qu'il
faut corriger. En principe, il y a des arguments pour et contre le
système plurinominal. L'on reconnaît qu'il y a des partis
politiques qui existent présentement dans les municipalités et il
est peut-être important que le droit municipal les reconnaisse
également. Quant à la question du financement des partis
politiques, si l'Assemblée nationale du Québec l'a adoptée
unanimement pour les élections au Québec, il me semble que
mutatis mutandis les mêmes principes devraient pouvoir s'appliquer sur la
scène municipale.
Si bien que je ne vois là-dedans rien qui aille à
l'encontre des intérêts bien sentis de la chose municipale.
Il est évident que certaines habitudes de fonctionner seront
peut-être changées par cela. Mais j'ai cru déceler,
à défaut d'un enthousiasme délirant, de la part notamment
du maire de Montréal, administration que vous avez qualifiée de
chatouilleuse, un certain défi, une certaine attitude qui fait dire:
Écoutez, peu importe les règles du jeu, nous sommes quasi
assurés que la population montréalaise saura reconnaître ce
que nous avons fait. Si bien que je ne prévois pas, de ce
côté-là, de difficultés majeures non plus.
Le fait d'abolir, par exemple, le vote des personnes morales, quand on
sait qu'il n'y a pas 4% des personnes morales inscrites au rôle qui se
servent de leur droit de vote, il n'y a pas là de quoi
révolutionner le monde, mais il reste que cela consacre un principe
selon lequel le droit de vote est fondé essentiellement sur la personne
et non sur la richesse.
Je pourrais ainsi continuer sur le plan des justifications de chacun des
autres points mentionnés.
M. Goldbloom: M. le Président, il y a quand même une
chose qui m'embête un peu. Le ministre a tracé certaines
comparaisons, certains parallèles entre ce qui se fait aux niveaux
fédéral et provincial et ce qui devrait se faire au niveau
municipal. Il a dit que la situation qui existait à Montréal il y
a un certain temps, et celle qui existe à Québec
présentement, où il y a eu un bloc de votes accordés
à un parti politique municipal qui n'a pas obtenu de siège,
n'étaient pas normales.
Il a même laissé sous-entendre je ne voudrais pas
mal l'interpréter qu'il y avait là des
éléments de danger, que la population qui avait ainsi voté
se sentirait très frustrée de ne pas être
représentée. Est-ce que cela veut dire que le gouvernement actuel
va faire le même raisonnement à rebours et dire, au niveau
municipal, qu'il n'est pas normal qu'il y ait un pourcentage X de votes et
qu'il n'y ait pas de siège et qu'il faudrait donc un mécanisme
proportionnel qui permette un certain nombre de sièges soient
accordés à un pourcentage donné de votes exprimés?
Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'un régime
proportionnel sera proposé pour le Québec, au niveau provincial?
Si oui, le ministre est sûrement conscient du fait que le parti dont il
est membre a 65% des sièges avec 41% des votes. Est-ce qu'il serait
aussi heureux de modifier le régime provincial qu'il semble l'être
de le modifier au municipal?
M. Tardif: M. le Président, je suis
particulièrement au fait des avantages, des désavantages et des
distorsions que cause le système uninominal à un tour. À
ce sujet, je croyais avoir indiqué assez clairement que la
décision du Conseil des ministres avait été, pour
l'instant, de ne pas retenir le principe d'un facteur de correction, parce que
ce n'était pas véritablement proportionnel au sens plein du
terme, mais de retenir l'idée d'un facteur de correction pour les
élections municipales qui viennent, justement à raison des
questions que nous nous posons sur l'introduction d'un tel système
à l'échelle du Québec.
Ce qui a été retenu comme formule mitoyenne pour la chose
municipale, cela a été d'allier un élément du
régime parlementaire à un élément du régime
présidentiel. J'ai mentionné que nous conservions pour la mairie
le régime présidentiel, donc le maire élu au suffrage
universel.
Par ailleurs, au lieu que le maire soit élu comme simple
conseiller d'un quartier, c'est à titre de chef de parti qu'il
deviendrait maire. Nous avons donc gardé le maire élu au suffrage
universel; par ailleurs, nous proposons que le maire puisse également se
présenter, dans les villes de plus de 20 000 de population, comme
conseiller dans un quartier avec un suppléant. Si bien qu'étant
élu à la mairie, donc étant maire de sa ville, s'il est
élu également comme conseiller, alors, c'est son suppléant
qui, automatiquement, deviendra conseiller de ce quartier, ou le colistier.
S'il n'est pas élu à la mairie, mais qu'il est élu comme
conseiller, à ce moment-là, il pourra, à l'hôtel de
ville, diriger son parti d'Opposition ou représenter l'Opposition
à l'hôtel de ville.
C'est pour nous une façon d'introduire l'opposition à
l'hôtel de ville, plutôt que de l'avoir dans la rue, ainsi que
risquait ou peut risquer de se produire une opposition qui accorde 40% de
suffrages à un parti et que celui-ci n'a aucun représentant au
conseil.
M. Goldbloom: M. le Président, il me reste trois petites
questions dont j'aimerais réserver la troisième pour midi,
vingt-neuf minutes et demie, pour que je puisse commencer à courir
immédiatement.
Je pose les deux autres. Qu'est-ce que le ministre entend faire pour
permettre à un candidat indépendant, qui n'est pas membre d'un
parti politique municipal, d'avoir des chances raisonnables de se faire
élire? C'est, de toute évidence, plus difficile au niveau
provincial et au niveau fédéral, mais, au niveau local, le
citoyen qui se sent capable de représenter son quartier et qui n'est pas
affilié à un mouvement politique et qui ne veut pas l'être
ne devrait pas, à mon sens, être exclu de la course, à
toutes fins pratiques, par les mécanismes, les contrôles et les
restrictions qui pourraient être imposés.
C'est la première question que je voulais poser. Je pose
immédiatement la deuxième. Est-ce que, dans la législation
que le ministre a l'intention de proposer dans les tout prochains jours ou les
toutes prochaines semaines, nous verrons la création, promise l'an
dernier, du poste de vérificateur général pour les
municipalités?
M. Tardif: M. le Président, les modifications
proposées n'ont pas pour effet d'empêcher les candidatures
indépendantes. La reconnaissance des partis politiques, c'est une chose,
mais, au contraire, je pense que les amendements apportés pourront
faciliter les candidatures indépendantes dans la mesure où le
projet de loi, dont le principe a été accepté par le
Conseil des ministres, recon-
naîtra le remboursement des dépenses électorales,
à la fois faites par les partis et les candidats, y compris les
candidats indépendants, si bien que, sans être supportés
par toute une machine, par tout un appareillage ou par tout un parti, il est
possible pour un candidat indépendant de se voir rembourser une partie
de ses dépenses électorales, au même titre que s'il avait
été membre d'un parti.
Quant à la deuxième question, je m'excuse, M. le
Président.
M. Goldbloom: La création du poste de vérificateur
général?
M. Tardif: La création du poste de vérificateur
général n'entre pas dans la série d'amendements sur les
modifications électorales. Il est prévu cependant, puisqu'on
parle d'amendements aux dispositions électorales, que le directeur
général du financement des partis politiques sur la scène
provinciale pourra, en ce qui concerne le financement des partis politiques
municipaux, exercer un certain nombre de fonctions de surveillance et de
contrôle. De même, pour ce qui est du président
général des élections, il pourra, sur certaines questions,
superviser l'action des présidents d'élection,
c'est-à-dire les greffiers municipaux, sur la scène locale.
Le poste de vérificateur général des
municipalités, c'est une autre chose. Déjà, nous avons
introduit cette fonction dans les amendements à la charte de
Montréal, en ce qui concerne cette municipalité, mais ce n'est
pas comme tel dans les amendements. C'est une chose qui sera à faire,
mais ce n'est pas dans les amendements des mécanismes électoraux
comme tels que cette disposition sera abordée. (12 heures)
M. Caron: M. le Président, au sujet du poste de
vérificateur, est-ce que le ministre a l'intention, dans l'année
qui vient, de trouver un moyen de l'avoir? Vous savez, M. le ministre, c'est
important. J'ai déjà demandé ici, il y a plusieurs
années, qu'il y ait une équipe volante pour aller dans les
municipalités. Naturellement, cela n'avait pas semblé toucher les
gens du temps. Je pense que ce serait une nécessité que les
municipalités soient visitées à l'occasion, un peu comme
on le fait pour les banques où des vérificateurs passent et font
une vérification. Que cela plaise ou non, ils y vont. À
l'occasion, on trouve de petits bobos.
Je pense que c'est la responsabilité du gouvernement. Je pense
que les élus n'ont pas toujours la compétence ou le temps voulu
pour pouvoir fouiller et regarder. Je suis bien à l'aise pour en parler.
Un cas s'est glissé je ne voudrais pas m'étendre
là-dessus parce que c'est devant les tribunaux dans la
municipalité de Verdun qui est certainement un cas qui a passé
entre les doigts de tout le monde. Personne de la municipalité ou du
conseil n'en est responsable. J'imagine qu'on devrait essayer de
prévenir ces choses-là. S'il y a des vérifications qui se
font dans les banques, je ne vois pas pourquoi cela ne se ferait pas dans les
municipalités.
C'est le devoir, j'en suis convaincu, du gouvernement du Québec
de prendre les mesures nécessaires pour que ces vérifications se
fassent.
M. Tardif: M. le Président, je suis bien heureux que ce
soit un député-maire qui me fasse une telle demande. Si la
suggestion avait émané du ministère, on aurait pu me taxer
d'impérialiste ou encore rappeler mon passé. Le fait est
qu'à l'heure actuelle, la vérification comme telle est d'abord,
si vous voulez, l'affaire des municipalités qui doivent produire des
rapports financiers, des états financiers dûment
vérifiés. Il s'agit là de vérifications comptables,
évidemment, qui peuvent s'assurer que les colonnes de chiffres
s'équilibrent, mais de là à aller voir ce qui est
derrière cela, c'est une autre chose.
Deuxièmement, lorsque les gens de l'administration
financière ont à approuver les règlements d'emprunts et
qu'ils s'aperçoivent que la cote d'alarme est dépassée,
ils peuvent envoyer des gens sur place. Ils peuvent, ce n'est pas fait
systématiquement.
Il y a aussi la Commission municipale qui, à cet égard,
joue un rôle de surveillance. Je dois vous avouer, M. le
Président, que j'ai pu, au cours de ces 16 ou 17 derniers mois,
recueillir assez de faits et de plaintes, non seulement des plaintes ou des
allégations, mais même des faits que, justement, il m'apparaisse
urgent de faire un certain nombre de gestes sur ce plan.
On parle de la fonction de vérificateur général, je
voudrais même aller plus loin, M. le Président, pour dire que, par
exemple, sur le plan de la loi concernant la fraude et la corruption
municipale, il m'apparaît urgent de faire en sorte que le procureur
général ait l'intérêt suffisant au sens de la loi.
À l'heure actuelle, sauf évidemment s'il s'agit de choses
carrément criminelles, il faut qu'un citoyen se mette au blanc, qu'il
aille devant la cour et qu'il s'expose, avec tout ce que cela comporte, pour
mettre en branle le processus d'enquête et de requête en
disqualification pour des élus municipaux qui se seraient livrés
à de la corruption municipale.
Il me semble que, là-dessus, c'est beaucoup demander aux
citoyens. Il ne s'agit pas d'enlever ce droit aux citoyens, je pense qu'il
devra toujours être là, mais il faudrait aussi que le procureur
général ait un intérêt suffisant en la
matière pour agir.
Il y a ces autres dispositions pour ce qui concerne les conflits
d'intérêts. Vous avez fait allusion, M. le député de
Verdun, à une affaire qui concernait votre municipalité. Pas bien
loin, dans l'ouest, juste à côté, dans la ville de Lachine,
pour ne pas la nommer, il y a eu un autre beau cas récent qui est
proprement criminel, qui est devant les tribunaux présentement. J'ai
présentement sur mon bureau, sur ma table de travail, les cas de deux
autres municipalités importantes de la région de Montréal
où, véritablement, il m'apparaît important de poser des
gestes.
J'ai, d'ailleurs, eu à ce sujet un rapport du juge
président de la commission municipale, me recommandant un certain nombre
de mesures. J'ai
déclaré que j'étais d'accord avec ces
recommandations, si bien que les choses devraient suivre leur cours. Quand vous
parlez d'avoir un vérificateur général qui aille sur place
faire enquête, vous savez, la loi organique du ministère des
Affaires municipales est ainsi faite qu'elle donne beaucoup de pouvoirs,
jusqu'à un certain point, au ministre des Affaires municipales. Cela me
fait penser que j'ai l'impression parfois d'être le shérif qui
remet un badge à quelqu'un et qui dit: Allez faire enquête. Le
fait est que la loi organique du ministère permet au ministre des
Affaires municipales de désigner des enquêteurs
vérificateurs. C'est toujours dans cet esprit de vérification
comptable. Je pense que ce n'est pas suffisant et que ce n'est pas uniquement
par le biais d'une vérification comptable que l'on saura examiner le
train de vie sans rapport avec les revenus de tel maire ou de tel conseiller.
Est-ce assez clair?
M. Caron: M. le Président, vous savez, je le dis, non pas
seulement au point de vue de maire et de conseiller, mais de fonctionnaires
aussi. Chez nous, c'est arrivé dans un cas de fonctionnaire. Je pense
que le ministre ne sera jamais assez sévère. Peu importe qui est
à la tête de votre ministère, je pense que l'exemple doit
partir des municipalités, si on veut que les gouvernements
supérieurs marchent dans la bonne direction. Le ministre sait aussi ce
que je veux dire. Je n'ai pas à lui faire un dessin ce matin. Cela me
fait plaisir de le dire. J'en ai déjà parlé ici. Comme je
vous le dis, cela n'a jamais donné de résultat, pour une raison
ou pour une autre; je ne veux juger personne. Il faut absolument
prévenir d'autre chose qui peut arriver. Vous dites qu'il y a une autre
municipalité, vous en avez deux autres cas. Sur le nombre de
municipalités en province, j'imagine que ce qui peut se faire dans
l'île de Montréal doit se faire ailleurs aussi.
M. le ministre, j'espère que vous prendrez tous les moyens
possibles pour qu'il y ait de l'ordre, ou, si des choses se sont
passées, qu'elles ne se reproduisent plus.
M. Tardif: M. le Président, je voudrais ajouter seulement
un mot là-dessus. Je remercie le député de Verdun d'avoir
indiqué que, effectivement, il serait injuste de n'impliquer
là-dedans que des élus. Le fait est que dans beaucoup de cas,
d'ailleurs, dans cet autre cas que j'ai cité, des fonctionnaires
municipaux étaient impliqués, des fonctionnaires non
salariés, au sens du Code du travail, jouissant d'une protection
particulière en vertu de la Loi des cités et villes avec droit
d'appel à la commission municipale etc. C'est un fait. À ce
sujet, d'ailleurs, les amendements apportés l'an dernier à la Loi
des travaux municipaux rendaient inhabiles à siéger ou à
occuper une charge élective ou nominative, toute personne qui se rendait
coupable de. Je pense que c'était un premier pas dans cette
direction.
Deuxième élément, je pense qu'on reconnaîtra
ici l'importance, encore une fois, des amendements que le gouvernement se
propose d'apporter sur la réforme de la démocratie, sur le
financement des élections des partis politiques. Quand on reçoit
des plaintes nous informant qu'il n'y a pas un clou qui s'achète dans la
municipalité sans qu'il y ait une entrée dans un compte de banque
à Toronto ou ailleurs, je pense que tout cela est relié au climat
politique et au financement des partis politiques. Il y a beaucoup d'hommes
publics qui ne demandent pas mieux finalement que de se sortir de cette
dépendance vis-à-vis de ces fournisseurs, entrepreneurs et
autres, sur la scène locale. Je voudrais seulement ajouter un dernier
renseignement. Lorsque la Régie anti-inflation a été
abolie au Québec, j'ai récupéré un fonctionnaire,
un comptable qui est revenu à mon ministère et qui a
été chargé avec une petite équipe d'aller
vérifier périodiquement, lorsque je recevais des plaintes. Il a
au moins présentement à sa liste une vingtaine de
municipalités à visiter.
M. Caron: Alors, déjà, le travail est
commencé?
M. Tardif: D'accord.
M. Caron: Je vous remercie.
M. Goldbloom: M. le Président, ce que dit le ministre au
sujet de la démocratie municipale et de la propreté qu'il faut
assurer au niveau municipale doit, de toute évidence, rallier l'appui de
tout le monde.
Je reviens quand même à cette question de
l'opportunité de légiférer dans ce domaine au mois de
juin. Cela me préoccupe. Il me semble que, surtout pour une grande
municipalité où il y aurait des transformations importantes
à effectuer en peu de temps, on risque de créer une situation
difficile, un fouillis même, et ce n'est pas un risque que j'aimerais
voir prendre un gouvernement quand l'intérêt des citoyens
municipaux est en jeu. Il me semble que c'est le genre de législation
que l'on devrait présenter et faire adopter au mois de novembre,
après les élections de cette année-là pour
permettre l'adaptation nécessaire pendant une année
entière. C'est une opinion que j'exprime et que je soumets à
l'attention du ministre.
M. Caron: M. le Président, juste avant que le ministre
finisse, je m'excuse, est-ce que vous avez pu consulter aussi les
fonctionnaires municipaux, à savoir s'ils vont avoir le temps, dans les
villes où il y aura des élections, de mettre le mécanisme
en branle pour la date voulue? Si ce projet de loi est adopté à
la fin du mois de juin, naturellement, il ne restera pas grand temps.
M. Tardif: M. le Président, les greffiers qui, en vertu de
notre droit municipal, agissent comme présidents d'élections, ont
été vus dans les deux cas où il y aura obligatoirement des
réformes. Nous nous sommes intéressés, à la fois
auprès des élus, des partis d'opposition et des fonctionnaires,
de la "faisabilité" de ces points de réforme. Quant à la
population, M. le Président, n'en déplaise au
député de D'Arcy McGee, nous allons simplifier les choses.
Le citoyen n'aura plus à voter pour quatre, cinq, six ou huit noms; que
le maire et son conseiller. Pour les citoyens ordinaires, on vient de
simplifier les choses, je pense.
M. Goldbloom: Cela me plairait beaucoup si les choses
étaient plus simples, M. le Président. Je ne partage pas
parfaitement la confiance du ministre, mais l'avenir nous dira si c'est une
bonne chose. Il ne faut pas présumer aujourd'hui d'un débat qu'il
faudra faire au mois de juin, paraît-il.
J'aimerais prendre l'initiative d'un changement de sujet, mais pas si
mes collègues...
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Saint-Hyacinthe, je crois, sur le même sujet.
M. Cordeau: Cela regarde les municipalités, bien
sûr, mais cela...
M. Goldbloom: Allez!
M. Cordeau:... concerne la taxe de vente. Suite à
l'entente qui devrait être ratifiée entre Ottawa et Québec
concernant la taxe de vente sur certains secteurs mous, comme on les appelle
communément, j'ai reçu des appels téléphoniques de
municipalités voulant savoir si elles vont recevoir encore leur part de
la taxe de vente et de quelle façon le gouvernement va procéder
pour leur donner ce qui leur est dû. Dans certaines municipalités,
l'industrie du meuble... Je connais une municipalité du comté qui
a un gros marchand de meubles; donc la taxe de vente était
considérable. Cela va les affecter. Pourriez-vous rassurer les
municipalités sur ce problème d'actualité?
M. Tardif: M. le président, je ne sais pas si le
député de Saint-Hyacinthe était présent en Chambre
lorsque le ministre des Finances a fait sa déclaration sur la taxe de
vente. À ce moment-là, il a dit en substance, et le
député de Saint-Hyacinthe pourra aller rassurer les
municipalités de son comté, que le gouvernement du Québec
allait compenser le manque à gagner résultant de la disparition
de la taxe sur les vêtements, les textiles, les chaussures et les meubles
autres que les appareils électroménagers, et que ceci allait
compenser pour les municipalités.
M. Goldbloom: M. le Président...
M. Cordeau: Allez-vous ajouter également la progression
qu'il y avait normalement dans certaines municipalités, parce que... (12
h 15)
M. Tardif: Je ne suis pas au courant du mécanisme
d'ajustement, mais ce qui apparaît important, c'est qu'il n'y ait pas de
manque à gagner pour les municipalités.
M. Goldbloom: M. le Président, il faut quand même
reconnaître le fait qu'il y a une évolution du revenu provenant de
la taxe de vente qui varie de municipalité en municipalité et
d'année en année. Ce n'est pas une remise automatique, ce n'est
pas une remise connue d'avance. Les versements sont faits d'abord selon des
barèmes, mais il y a ensuite des ajustements, parce que la performance
varie justement de municipalité en municipalité. S'il y en a une,
par exemple, qui fait bâtir en 1978 un centre commercial, la
différence entre 1977 et 1978 sera considérable.
Selon quels barèmes le ministre va-t-il compenser le manque
à gagner? Comment pourra-t-il savoir quelle aura été la
performance de la taxe de vente là où celle-ci n'existera plus?
Il y a évidemment des municipalités où il y a une
concentration de magasins dans un domaine, disons. Il y a des
municipalités où, par exemple, il n'y a pas de magasin de
chaussures, mais il y en d'autres où il y en a deux ou trois. Il y aura
donc une différence de performance de la taxe de vente entre ces
municipalités. Comment le ministre pense-t-il rendre justice à
tout le monde?
M. Tardif: M. le Président, encore une fois, je pense que
je pourrais énoncer ici sans doute cinq ou six propositions qui peuvent
venir à l'esprit à partir de méthodes statistiques: faire
des extrapolations et présumer que le pourcentage moyen de revenus
créés par les autres secteurs pourrait être appliqué
à ces domaines. Je vous dis que les modalités ne sont pas
arrêtées pour l'instant. Le député de D'Arcy McGee
sait pertinemment que, de cette taxe de vente de 8%, la proportion
redistribuée aux municipalités est l'équivalent de 2%. Sur
ces 2%, il y a 50% donc 1% qui est distribué sur une base
locale en fonction des emplettes ou des achats effectués à
l'intérieur des limites de la municipalité. Il y a 40% de ces 2%
qui sont distribués sur une base régionale, c'est-à-dire
au prorata de la population de la municipalité dans la grande
région économique, et il y a 10% de ces 2% qui sont
redistribués au prorata de la population de la municipalité sur
celle du Québec. En réalité, ce ne sont même plus,
à ce moment-là, les 2% entiers qui sont affectés, mais
uniquement 1% par les achats strictement locaux. Encore là, ces achats
strictement locaux ne sont que dans les quatre secteurs mentionnés, M.
le Président, et je pense qu'il est facile d'en arriver à des
ajustements où personne ne serait perdant. Le grand conflit ou les
grands problèmes de péréquation, de toute façon, de
cette formule de redistribution de la taxe de vente, restent entiers de
même que les problèmes d'ajustement quinquennaux causés par
les publications du recensement du Canada qui font que, puisque le chiffre de
la population importe pour beaucoup dans cette redistribution aux villes entre
les périodes de recensement, on fonctionne avec des extrapolations de
population et ce genre de problème est, je pense, tout aussi important
sinon plus que l'autre.
M. Goldbloom: M. le Président, la taxe de vente a produit,
en 1977, une certaine masse d'argent et cette masse a été
utilisée au quart pour une redistribution vers les municipalités.
Cette
année, cette somme sera vraisemblablement inférieure,
parce qu'il y a des achats qui sont détaxés. Or, il y aura un
montant additionnel qui sera accordé en compensation. On calculera que,
cette année, il y aurait eu une progression de la taxe de vente et l'on
donnera aux municipalités un montant équivalent.
Mais est-ce que le ministre est au courant j'allais dire du fait,
mais je ne dis pas du fait, parce que je n'ai que des chiffres qui m'ont
été fournis, je ne voudrais pas m'en porter garant je suis
informé que la croissance, pour l'ensemble de la province en 1977. a
été de 9%. On pourrait donc dire que l'on pourrait majorer la
taxe de vente de 9% ou un chiffre analogue, sauf que, pour la ville de
Montréal, la croissance n'a été que de 6%. Si ce que je
viens d'avancer est vrai, si la croissance n'a été que de 6% pour
Montréal, cela veut dire que, dans beaucoup d'autres
municipalités, il y a eu une augmentation de 12%, 15% ou 20% pour rendre
la moyenne plus élevée que la performance à
Montréal, qui est le facteur le plus pesant dans le calcul, à
cause de l'importance de la population. Le ministre a-t-il l'intention de tenir
compte de cet écart, d'abord de vérifier que les chiffres que
j'ai avancés sont véridiques et, deuxièmement, s'ils sont
confirmés, d'en tenir compte dans les calculs qui se feront?
M. Tardif: M. le Président, le souci du
député de D'Arcy McGee pour les effets de la réduction de
la taxe de vente sur les municipalités l'honore. On va peut-être
souhaiter qu'il manifeste le même souci pour les effets de la disparition
de la taxe de vente sur les revenus du Québec, à cause de
l'action unilatérale du gouvernement fédéral.
Ceci dit, M. le Président... Non, enfin, on me permettra d'en
parler. Ceci dit, M. le Président, je peux assurer le
député de D'Arcy McGee qu'avec mon collègue des Finances
nous tenterons d'en arriver à combler le plus exactement possible le
manque à gagner des municipalités au chapitre de la taxe de
vente.
Déjà, le dernier budget contenait un certain nombre de
mesures qui venaient accroître les revenus des municipalités. Je
pense notamment aux subventions statutaires qui sont maintenant accessibles aux
municipalités de 5000 âmes et plus; je pense à
l'augmentation de la taxation sur les biens des réseaux de
l'enseignement, de l'éducation et des services de santé, qui
passent de $0.30 les $100 d'évaluation à $0.50; je pense au gel
de l'impôt foncier scolaire qui se trouve à libérer, en
quelque sorte, une potentialité ou un champ virtuel de quelque $20
millions pour les municipalités. Si bien que, tout compte fait, et
après s'être assuré qu'il n'y ait pas de manque à
gagner, la situation des municipalités ne s'en trouvera que mieux sur le
plan financier.
Ce n'est évidemment pas la grande réforme dont j'ai
parlé, mais encore une fois cette réforme, nous voulons la faire
pour et avec les municipalités. La conférence sera
peut-être l'occasion d'examiner en détail, non seulement les
principes, mais également les modalités d'application de cette
réforme.
M. Goldbloom: M. le Président, comme je l'ai dit au
début de notre discussion, les sandwiches continuent d'être petits
et peu remplis.
M. le Président, flèche pour flèche, je vais poser
la question que j'avais gardée en réserve. Il y a quelques
minutes, le ministre, en parlant d'un certain document, a mentionné le
fait qu'il y avait eu un coulage, que ce document avait coulé. Il a dit
que le coulage lui semblait presque normal. Alors, la petite question
méchante que je lui pose est la suivante: Est-ce que les coulages
normaux sont ceux qui sont voulus?
M. Tardif: M. le Président...
M. Goldbloom: Je n'exige pas une réponse.
M. Tardif: ... ce n'est même pas méchant de la part
du député de D'Arcy McGee. Il est à peu près normal
que lorsque vous allez consulter toutes les municipalités de plus de 50
000 habitants, et dans le cas des consultations concernant la démocratie
municipale, c'était tout le conseil municipal qui était
invité, y compris d'ailleurs le député-maire de Verdun...
écoutez, cela m'apparaît...
M. Caron: M. le Président, je tiens à dire une
chose.
M. Tardif: Non, je n'ai pas dit que cela avait coulé.
M. Caron: Je tiens à dire une chose au ministre par
l'entremise du président. Même mon whip m'a dit: Comment cela se
fait-il que tu ne nous aies rien dit? Vous voyez, vous m'avez fait confiance et
j'ai gardé le secret. Même mon whip m'a demandé comment il
se faisait que je n'en avais pas parlé.
M. Goldbloom: M. le Président, un des avantages de la
télévision, quand elle sera installée, sera de pouvoir
transmettre le sourire avec lequel ce genre d'échange a
été fait.
Il ne nous reste que quelques minutes avant la suspension. J'aimerais
poser peut-être une dernière question au ministre, pour l'instant,
et elle touche un aspect un peu différent de la fiscalité
municipale.
Durant, la campagne électorale de 1976, un certain nombre
d'engagements ont été pris et, parmi eux, se trouvait la
création d'un office du crédit municipal. J'aimerais demander en
toute simplicité au ministre où nous en sommes. Allons-nous
assister effectivement cette année à la création d'un tel
office? Le ministre pense-t-il toujours que c'est une bonne idée?
M. Tardif: M. le Président, si je me souviens bien, le
député de D'Arcy McGee avait posé la même question
l'an passé, à peu près à la même date,
à l'occasion de l'étude des crédits. Le fait est que j'ai
passé un certain nombre de commandes aux gens de mon ministère
à ce sujet. J'ai peut-être été trop ambitieux dans
les commandes que
j'ai passées, en ce sens que j'ai relié le tout à
une autre question qui intéresse le monde municipal, à savoir la
création, pour ceux qui n'en jouissent pas déjà, de
régimes de retraite, à la fois pour les élus et pour les
fonctionnaires, et en imaginant qu'il pourrait être possible d'atteindre
deux objectifs à la fois, c'est-à-dire la création d'une
caisse de retraite, qui pourrait donner aux fonctionnaires et aux élus
des rentes appropriées qui pourraient constituer un fonds à
l'usage du monde municipal, caisses de retraite qui, selon moi, non seulement
répondraient à un besoin, mais pourraient même, par leurs
modalités, assurer une mobilité professionnelle qu'on ne retrouve
pas présentement dans la fonction publique municipale, les gens quittant
une municipalité et ne pouvant généralement pas faire
suivre avec eux leurs bénéfices.
C'est donc l'ampleur du mandat ou de la commande que j'ai donnée
qui a peut-être fait que cela n'a pas encore abouti. D'un autre
côté, on m'a assuré au ministère qu'il n'y avait pas
de problème de financement des municipalités et des petites
municipalités, en particulier sur les marchés d'obligations, et
que même dans le cas des petites municipalités, les ventes
d'obligations de gré à gré, localement auprès des
populations, des organismes locaux s'effectuaient très bien.
D'une part, il y a absence d'urgence en ce qui concerne les
problèmes de financement, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de
problème de financement des municipalités et, d'autre part, le
fait que j'aie relié cela à une autre question, qui est celle des
caisses de retraite, font que le dossier est encore à
l'étude.
Le Président (M. Marcoux): Nous allons ajourner les
travaux de cette commission sine die.
(Fin de la séance à 12 h 30)
Reprise de la séance à 16 h 11
Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission des affaires municipales est réunie pour poursuivre
l'étude des crédits budgétaires du ministère des
Affaires municipales.
Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), M. Mercier
(Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw
(Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie).
Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères), M. Dubois (Huntingdon), M. Lacoste (Sainte-Anne), M.
Léonard (Laurentides-Labelle), M. Saindon (Argenteuil), M. Samson
(Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières), M. Verreault
(Shefford).
Je crois que la dernière question avait été
soulevée par le député de D'Arcy McGee. Je ne sais pas
s'il avait obtenu une réponse.
M. Goldbloom: Oui.
Le Président (M. Marcoux): Avez-vous d'autres
questions?
M. Goldbloom: Oui.
Le Président (M. Marcoux): Ce n'est pas encore
adopté? Pas tout à fait?
Conférence
Québec-municipalités
M. Goldbloom: Non, pas tout à fait.
M. le Président, peut-être que l'on peut aborder un autre
sujet. C'en est un que le ministre a déjà mentionné: La
conférence avec les municipalités, qui aura lieu au mois de juin.
Y a-t-il un budget qui a été établi pour la tenue de cette
conférence? Le ministre peut-il nous dire à peu près
combien cela devra coûter et à quel poste budgétaire la
conférence émarge dans le document devant nous?
M. Tardif: M. le Président, la conférence
Québec-municipalités est en préparation, non seulement au
ministère des Affaires municipales, mais au secrétariat, par le
secrétariat aux conférences du Conseil exécutif qui,
j'imagine, ne va évidemment pas pousser la gentillesse jusqu'à
assumer la note complète de cette conférence. On m'informe que ce
genre d'événement ne suscite aucun problème. C'est dans le
programme de la gestion interne du ministère pour lequel il est
possible...
M. Goldbloom: On ne l'appelle pas "minisommet" alors?
M. Tardif: On pourrait l'appeler "muni sommet".
M. Goldbloom: Le ministre est vite sur ses patins, cet
après-midi.
M. Tardif: Toujours, M. le Président.
M. Goldbloom: Je n'irai pas jusque là. La politesse a
quand même ses limites!
M. le Président, y a-t-il un thème précis qui a
été choisi? Y a-t-il un sujet en particulier ou est-ce une
discussion un peu à la bonne franquette qui aura lieu? Y a-t-il un
programme qui est déjà disponible et qui pourrait être
consulté par des intéressés?
M. Tardif: M. le Président, il est bien évident
qu'il y a un thème central majeur de cette conférence, soit la
fiscalité municipale. Quant aux sous-thèmes, ou aux sujets
mineurs de cette conférence, des projets d'ordre du jour sont en
préparation en ce qui concerne la démocratie municipale, la
décentralisation et un certain nombre d'autres questions connexes
susceptibles d'intéresser le monde municipal. Je pense que tout ceci
devra céder la place à la préoccupation majeure, la raison
principale de cette conférence qui est la question de
fiscalité.
M. Goldbloom: Cela veut-il dire qu'effectivement, nonobstant ce
que j'ai dit ce matin, le ministre aura des annonces à faire? On
connaît le point de vue des municipalités, on connaît la
nature de leurs demandes; ce n'est pas un dossier nouveau. Le ministre va-t-il
écouter attentivement et poliment comme il le fait toujours
ou aura-t-il des choses à dire, à dévoiler?
M. Tardif: M. le Président, si cela devait être une
conférence uniquement pour poser la question "What do the municipalities
want?", je pense qu'il serait préférable de ne pas avoir de
conférence.
M. Goldbloom: C'était la conclusion à laquelle je
venais dans mon propre esprit. Alors, cela veut dire, même si le ministre
ne l'a pas affirmé de façon précise, qu'il aura des choses
à annoncer lors de cette conférence.
M. Tardif: II y aura des choses à annoncer, M. le
Président, et il faut quand même se reporter... Je n'ai pas avec
moi le télégramme reçu de l'Union des municipalités
qui, tout en appelant la réforme de tous ses voeux, demandait au
gouvernement de lui donner le temps d'aiguiser ses crayons à
l'Union des municipalités et de calculer, d'effectuer un certain
nombre d'activités. Elle nous demandait également de "dynamiser"
cette réforme, c'est-à-dire de ne pas la faire une fois dans le
temps, mais dire: qu'est-ce que vaudrait en cents et piastres, aujourd'hui,
cette réforme, mais sur une période d'années?
Évidemment, nous sommes en train de faire ces projections et nous
aurons les réponses voulues. Il ne s'agit pas de bousculer le monde
municipal dans l'acceptation de cette réforme ou de ces
modalités, mais bien de répondre, encore une fois, aux demandes
des municipalités souven-tefois répétées et ce
faisant, de tenir notre engagement vis-à-vis d'elles.
Il se produit un phénomène assez particulier, à
savoir qu'après avoir revendiqué une réforme de la
fiscalité et notamment l'occupation complète du champ
d'impôt foncier, tout à coup, il y a une espèce de
mouvement, je ne dirais pas de recul, mais d'hésitation lorsqu'on dit:
Mais quand même... La pleine conséquence de cela, c'est que nous
devons taxer maintenant. On dit: Oui, c'est dans la suite logique de ce que
vous avez demandé pendant des années. Il est normal qu'on veuille
faire un certain nombre d'activités et nous voulons, nous avons offert,
d'ailleurs, aux municipalités, les services techniques du
ministère des Affaires municipales et ceux du ministère des
Finances pour les aider à évaluer l'impact de la
réforme.
M. Goldbloom: M. le Président, quand le ministre dit que
les municipalités ont demandé un temps additionnel pour
étudier davantage les détails de ce qui pourrait être
proposé, fait-il allusion à certaines, j'allais dire promesses,
je ne sais pas si c'étaient vraiment des promesses, mais il y avait des
déclarations selon lesquelles il y aurait la libération du champ
de l'impôt foncier et scolaire à l'intention des
municipalités et il y avait des contreparties, l'élimination de
la redistribution de la taxe de vente et d'autres choses, est-ce que c'est de
cela que le ministre parle? Est-ce que c'est sur ce genre de proposition que
les municipalités se penchent présentement?
M. Tardif: C'est sur ce genre de proposition, ainsi que sur
diverses portes que nous avons laissé ouvertes
délibérément au cours de la consultation et qui sont
toujours ouvertes, d'ailleurs. À titre d'exemple, puisque, encore une
fois, les documents qui ont servi de consultation ont été
publiés pour une large part dans les média d'information, une des
hypothèses et une des demandes des municipalités, en plus de
vouloir occuper en entier le champ d'impôt foncier, cela a
été, pendant des années, d'exiger la taxation à
pleine valeur des biens du gouvernement, par exemple.
Alors, on dit: Très bien, cette taxation à pleine valeur
des biens du gouvernement représenterait, grosso modo, $225 millions,
c'est-à-dire à peu près l'équivalent de deux points
de taxe de vente. Si les municipalités préféraient
maintenir comme hypothèse des revenus provenant de la taxe de vente,
quoique, par les temps qui courent, ce n'est pas très sain de le faire,
puisque beaucoup de gens se permettent de venir tripoter cette source de
revenus et si elles voulaient s'accrocher néanmoins à cette
source de revenus, on pourrait très bien concevoir de la laisser aux
municipalités et donc de ne pas donner suite à l'autre partie qui
est la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement.
Ce qui est important aussi, ce qui est sous-jacent à tout cela,
c'est la formule de péréquation retenue, c'est-à-dire que
la péréquation se fait au moyen de ces $225 millions de la taxe
de vente, par exemple, au moyen de la redistribution de l'impôt foncier
qui frappe les biens du gouvernement;
l'une ou l'autre formule, je pense, exigera qu'on se penche sur cette
question de la péréquation et pourrait être selon des
modalités différentes, une partie pouvant très bien
être distribuée dans les villes fournissant des services à
ses édifices gouvernementaux et une partie étant
redistribuée.
Je m'excuse M. le Président, en terminant, ceci fait partie de
ces modalités que certaines municipalités voudraient jauger.
M. Cordeau: Tantôt vous faisiez allusion à la
taxation à pleine valeur des biens du gouvernement. Peut-être
qu'il serait difficile d'appliquer ce plan également à travers
toute la province parce qu'il y a des municipalités qui sont
peut-être plus avantagées vu leur situation géographique.
Dans certaines localités il y a plus d'édifices ou de biens
appartenant au gouvernement que dans d'autres localités où il n'y
en a pas du tout. Si cette taxe remplaçait une partie de la taxe de
vente, peut-être qu'à ce moment, il y aurait certainement des
municipalités qui s'opposeraient parce que si elles n'ont pas de biens
du gouvernement dans leur municipalité, elles se trouveraient
peut-être désavantagées de ce côté.
M. Tardif: C'est tout à fait juste, M. le
Président, et c'est la raison pour laquelle j'ai rattaché
à ceci le deuxième élément, c'est-à-dire la
formule de péréquation. Il est bien évident que...
Imaginons que dans une municipalité dotée d'un service public
majeur, je ne sais pas, prenons la petite municipalité de
Baie-Saint-Paul, avec son immense hôpital psychiatrique. On pourrait
concevoir, si cet hôpital était taxé à pleine
valeur, que la municipalité n'aurait plus besoin de taxer ses
contribuables. Donc, qu'il y ait une partie de la taxe provenant de cet
hôpital qui aille à la ville et qui lui fournisse les services
d'égouts, d'aqueduc, de police, de pompier et autres et qu'une partie
soit redistribuée sur une base de péréquation, si bien que
toutes les municipalités du Québec auront leur petite part
d'impôt provenant de l'Université de Montréal, de
l'Université Laval, de l'Hôpital de Baie-Saint-Paul et d'ailleurs.
Cela peut très bien se calculer.
M. Cordeau: Est-ce que cela concerne le Parc olympique? Se
pourrait-il que les Beaucerons profitent de la taxe foncière sur le Parc
olympique?
M. Tardif: C'est vraiment un cas assez particulier, puisque,
présentement, il n'y a pas de taxe comme telle imposée sur ces
équipements.
M. Cordeau: Si c'est de cette façon que la taxe doit
être répartie, je crois que la province en entier va
peut-être demander que les travaux soient complétés au
Stade olympique. Enfin, que le gouvernement paie plus de taxes.
M. Tardif: Enfin.
M. Goldbloom: Mais présentement, le Parc olympique
appartient au gouvernement.
M. Cordeau: Oui c'est cela. S'il est complété, il
prendra plus de valeur.
M. Tardif: On peut aussi penser que le gouvernement est
fiduciaire et administre en lieu et place de la ville de Montréal des
équipements présentement, mais, je n'entrerai pas dans ces
subtilités.
M. Caron: M. le Président, nous autres à Verdun, on
a une usine de filtration sur notre territoire et elle appartient à la
ville de Montréal. C'est un autre cas à étudier et dans le
comté suivant, Marguerite-Bourgeoys, il y a aussi une usine de
filtration. Je pense que...
M. Tardif: Je parlais de la taxation à pleine valeur des
biens du gouvernement du Québec. Évidemment, je ne parlais pas
des biens des municipalités pas plus que de ceux du gouvernement
fédéral qui, dans le contexte actuel, ne sont pas soumis à
une évaluation.
M. Caron: Dans certains cas, ce sera assez difficile de
l'équilibrer. Je ne sais pas de quelle façon... Vous avez des
données, comme je l'ai déjà dit en Chambre, que nous, les
municipalités, n'avons pas. Vous allez garantir aux municipalités
qu'elles ne seront pas perdantes?
M. Tardif: Écoutez, le projet, tel que
présenté, contenait une garantie de recette fiscale.
C'est-à-dire que, pendant une période de temps, les
municipalités se verraient garantir des revenus au moins
équivalents. Je vous rappellerai que, dans les diverses
hypothèses et cela continue de se raffiner au fur et à
mesure que nos consultations avec les municipalités progressent
dans le projet, 93,5% des municipalités étaient gagnantes et 6,5%
étaient perdantes. Les perdantes se retrouvaient parmi les petites
municipalités rurales de moins de 3000 habitants et même, parmi
celles-ci, la plupart d'entre elles formaient des municipalités de moins
de 1500 personnes qui vivaient essentiellement des produits de la taxe de
vente.
M. Cordeau: ... il n'y a pas de taxe municipale?
M. Tardif: Ou à peu près pas, enfin, $0.05 ou $0.10
du $100.
M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais revenir à
la question de la conférence elle-même pour deux ou trois minutes
seulement. Le ministre peut-il nous dire qui, au ministère, quelle
équipe ou quelle personne, est responsable de la conférence?
M. Tardif: Oui, M. le Président, mon sous-ministre adjoint
qui est à ma droite M. Jean-Louis Lapointe, est, au
premier chef, responsable de la préparation du dossier en ce qui
concerne la fiscalité, à tout le moins.
M. Goldbloom: Est-ce que la liste des invités a
été dressée?
M. Tardif: Concernant la liste des invités, une rencontre
a eu lieu entre les gens du ministère, l'Union des municipalités
et l'Union des conseils de comté. Les deux organismes se sont entendus
pour une représentation paritaire d'environ 175 représentants par
organisme, 175 venant des municipalités rurales, 175 venant des
municipalités des cités et villes et le gouvernement,
évidemment, pouvant inviter un certain nombre d'observateurs, d'experts
et peut-être de gens qui n'appartiennent ni à l'Union des
municipalités ni à l'Union des conseils de comté.
M. Goldbloom: Et des membres de l'Assemblée nationale?
M. Tardif: Ce n'est pas exclu, évidemment, comme d'autres
ont pensé, à un moment donné, que les commissions
scolaires pourraient y être invitées. Mais c'est une autre
question.
M. Goldbloom: M. le Président, il y a une chose qui me
tracasse un peu. Le ministre a indiqué, si j'ai bien compris, que la
conférence aura lieu au tout début du mois de juin, les 2, 3 et
4?
M. Tardif: C'est cela.
M. Goldbloom: Et à Montréal?
M. Tardif: À Montréal, les 2, 3 et 4 juin.
M. Goldbloom: Le projet de loi sur la démocratisation
municipale, qui touchera les villes de 100 000 âmes et plus et, d'une
façon facultative, les villes de 20 000 âmes et plus, aura-t-il
été déposé? Fera-t-il partie de l'ordre du jour de
la conférence ou est-ce plutôt ici, à la commission
parlementaire, comme l'a indiqué le ministre ce matin, que le vrai
débat se fera là-dessus?
M. Tardif: M. le Président, à moins
d'imprévus majeurs, le projet de loi aura été
déposé. La discussion sera ouverte à ce
moment-là.
M. Goldbloom: Maintenant, M. le Président...
M. Cordeau: Sur un autre sujet ou sur le même?
M. Goldbloom:... j'aimerais revenir à la fiscalité
municipale mais si...
M. Cordeau: C'est sur le même sujet de la
conférence.
M. Goldbloom: Certainement, oui.
M. Cordeau: M. le Président, est-ce que le programme de
cette conférence sera disponible un peu avant la conférence ou
à la conférence même?
M. Tardif: Je souhaite bien qu'il soit disponible avant et non
seulement le programme mais, également, la documentation pertinente. (16
h 30)
M. Cordeau: Le député de D'Arcy McGee parlait de la
participation gouvernementale. Serait-il possible qu'au moins un
représentant tout dépend du point de vue du ministre
des partis de l'Opposition soit invité à titre
d'observateur, un de chaque parti?
M. Caron: Le gouvernement du temps, je pense, avait invité
les partis de l'Opposition, si ma mémoire est bonne.
M. Cordeau: C'est parce que si on participe, peut-être que
cela nous empêchera de poser beaucoup de questions par après
étant donné que nous serons sur les lieux.
M. Tardif: M. le Président, personnellement, je n'y vois
pas d'objection. Pour moi, cette conférence doit être la plus
ouverte possible. Je ne vois donc aucune espèce de restriction, bien au
contraire. Si des membres de l'Assemblée nationale, que la chose
municipale intéresse, voulaient être présents, je n'y vois
aucune espèce d'objection.
M. Cordeau: Des membres de la commission des affaires
municipales?
M. Tardif: Je prends note de votre suggestion. M. Cordeau:
D'accord.
M. Goldbloom: On doit en remercier le ministre.
M. Cordeau: Maintenant, est-ce que, dans le contenu de cette
conférence, le ministre a l'intention d'apporter des suggestions
concrètes, c'est-à-dire de faire connaître les politiques
que le gouvernement entend adopter, libre aux participants d'en discuter ou
d'apporter des suggestions, ou si, comme vous l'avez mentionné
tantôt, vous n'avez pas l'intention de demander aux gens ce qu'ils
veulent parce qu'à ce moment-là, déjà vos
consultations vont avoir eu lieu? Quelle politique voulez-vous apporter
à ce moment-là?
M. Tardif: On a l'impression, enfin, le sentiment, que les
municipalités ont déjà exprimé, aux gouvernements
antérieurs et au gouvernement actuel, leurs revendications. Il s'agit,
pour nous, de faire un certain nombre de propositions et d'indiquer
également quelles sont les modalités qui pourraient varier selon
les représentations qui nous seront faites. Mais il me semble que, sur
les questions principales, il y aura un énoncé des politiques
gouvernementales, le reste étant des arrangements donnant effet à
ces politiques. C'est là que la discussion pourra s'amorcer, sur
l'application des modalités.
M. Cordeau: Merci.
Fiscalité municipale
M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais revenir à
la question, plus générale, plus globale,
de la fiscalité municipale. J'aimerais demander au ministre ce
qui suit: En ce qui concerne la fiscalité municipale, il ne suffira pas
d'effectuer un réaménagement si, dans ce
réaménagement, on n'augmente pas les revenus des
municipalités. Les municipalités ne seront point satisfaites si
elles n'ont pas une augmentation de leurs revenus. Alors, pour augmenter ces
revenus, il n'y a que deux choses que l'on peut faire: ou bien augmenter le
montant que le contribuable sera appelé à fournir, ou bien couper
ailleurs.
Quand on parle du transfert de la taxe foncière,
présentement perçue par les commissions scolaires, vers les
municipalités, on donne parfois et je ne suggère pas que
c'est une intention du ministre de le faire l'impression que le
contribuable sera, en quelque sorte, soulagé; c'est-à-dire que la
taxe scolaire disparaîtra et voilà que le contribuable aura moins
à payer. Mais, si les municipalités sont pour augmenter leurs
revenus, il faut qu'elles occupent le champ, il faut qu'elles aillent chercher
le montant en question. Alors, si l'on est pour augmenter les revenus des
municipalités, sans en diminuer ceux des commissions scolaires, le
contribuable va payer davantage, ou bien on va couper quelque part.
J'aimerais que le ministre nous explique ce qui va arriver exactement.
Les taxes vont-elles effectivement augmenter, parce qu'il faudra remplacer la
taxe foncière scolaire? Il faudra la remplacer par des revenus que
fourniront les contribuables. Le ministre pourra me dire que ce sera fait sur
une base plus juste que celle de la taxe foncière. Je pourrai facilement
accepter cette hypothèse, mais je reviens à la question
fondamentale: Est-ce que l'on augmente les taxes ou coupe ailleurs?
M. Tardif: M. le Président, il y a une réserve
à ce que vient de dire le député de D'Arcy McGee, en ce
sens que, techniquement et théoriquement, il est possible d'effectuer
une réforme de la fiscalité qui ne se traduise pas par un apport
de revenus plus élevés pour les municipalités. Je dis que
théoriquement c'est possible et, bien sûr, politiquement aucun
gouvernement ne fera une réforme qui aurait pour effet de changer quatre
$0.25 pour $1.
Il y aura donc de nouveaux revenus pour les municipalités. Ces
nouveaux revenus vont provenir essentiellement de la libération d'un
champ important qui pourra être occupé à 100% ou à
X% par les municipalités. Ce champ si on parle du champ
d'impôt foncier scolaire à partir du moment où il
devient un champ d'impôt foncier municipal, n'est plus normalisé.
Il n'y a qu'un seul rôle d'évaluation, avec une possibilité
de taxation à la pleine valeur, et non pas sur la valeur
normalisée.
Il y a aussi dans cette réforme des éléments qui
visent à élargir le champ d'impôt à des secteurs qui
en sont présentement exemptés. J'ai parlé tantôt des
biens du gouvernement, mais il y a également d'autres secteurs.
Déjà, dans le dernier budget, une mesure a été
annoncée, qui a pour effet d'améliorer l'assiette fiscale des
muni- cipalités, notamment sur le plan de la taxation des services de
télécommunication et ceci, après avoir effectué une
étude comparée entre le Québec, l'Ontario et le
Nouveau-Brunswick, c'est-à-dire les deux provinces voisines, afin de
voir, par exemple, ce que payait une entreprise donnée, une raffinerie
de pétrole, une brasserie, une distillerie, une aciérie, une
usine de montage d'automobiles. Donc, dans chacune de ces provinces, on a voulu
voir quel était le montant de taxes réelles payé par
chacune d'elles.
Nous avons commandé cette étude. J'en ai eu les
résultats. Ceci nous a permis de constater des disparités assez
intéressantes. Au même moment où l'Ontario, par la
commission Blair, se penche sur cette question de la réforme de
l'évaluation en Ontario, nous allons nous articuler sur ces
modalités soit existantes, comme en Ontario ou dans les provinces
voisines, soit en gestation. Donc, élargissement du champ. J'ai
parlé tantôt de la taxation, à titre d'exemple, des
réseaux de télécommunication qui, au Québec,
étaient taxés à raison de 10% du revenu net, alors qu'en
Ontario la taxation est à raison de 5% seulement, mais du revenu brut.
Ceci rapportait $25 millions de plus en Ontario et cette mesure au
Québec va rapporter $17 millions supplémentaires aux
municipalités.
Donc, élargissement du champ, ouverture de nouveaux champs, d'une
part. Maintenant, il est bien évident que la réforme de la
fiscalité se présente comme un bilan avec des plus et des moins.
Au chapitre des plus, nous avons dressé la liste ou l'impact des
diverses mesures à la fois pour les municipalités, pour le
gouvernement, pour les communautés urbaines, pour les commissions
scolaires, pour les contribuables fussent-ils particuliers ou entreprises.
Donc, effet pour chacun d'eux, par exemple, du transfert de l'impôt
foncier scolaire. Effet, pour chacun d'eux, de la taxation des biens du
gouvernement. Effet, pour chacun d'eux, de l'élargissement de l'assiette
fiscale. Effet, pour chacun d'eux, de la disparition des subventions, puisque
dans ce tableau, si d'une part, le gouvernement remet aux municipalités
des revenus autonomes accrus, il y aura une diminution importante des revenus
de transferts et ces revenus de transferts comprennent à la fois une
série de subventions les unes statutaires, les autres inconditionnelles,
les autres conditionnelles. Or, dans ce bilan, dans ce tableau, avec une
série de plus et de moins, le résultat net se traduit par un
accroissement. Divers chiffres ont été mentionnés,
jusqu'à maintenant et cela pouvait se traduire par un accroissement,
selon les premières estimations, d'au-delà de $200 millions,
selon que l'on retienne l'une ou l'autre des hypothèses
mentionnées, n'importe où entre $200 millions et $250 millions,
soit en argent nouveau, soit en champ virtuel de taxation.
M. Goldbloom: La masse monétaire représentée
par la taxe foncière municipale se chiffre à combien
présentement? Le chiffre est-il disponible?
M. Tardif: On peut vérifier immédiatement pour
avoir cette donnée, M. le Président.
M. Laplante: Est-ce que je pourrais poser une question sur le
même sujet?
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Bourassa.
M. Laplante: Sur les corporations à Montréal, pour
fins scolaires, il y a, grosso modo, $55 millions de ces sommes dont les
commissions scolaires ne profitent pas, qui retournent au MEQ pour une plus
juste distribution, après cela, de ces impôts fonciers. Combien
avez-vous de prévu pour ces sommes? Parce que c'est un taux plus
élevé qu'elles ont, elles. Ce n'est pas un taux
uniformisé. Qu'est-ce que vous prévoyez pour ces $55
millions?
M. Tardif: Actuellement, c'est un fait et cela c'est une autre
des modalités quand j'ai mentionné tantôt, M. le
Président, que nous avions tenté d'évaluer l'impact pour
les municipalités, les commissions scolaires, les communautés
urbaines, le gouvernement et les particuliers, enfin les contribuables, qu'ils
soient particuliers ou entreprises, lorsque nous sommes arrivés au cas
des communautés urbaines, notamment celle de Montréal, il y a
là des modalités particulières qui ont un impact
important. À titre d'exemple: les immeubles de $100 000 sur le
territoire de la Communauté urbaine font l'objet, pour des fins
municipales, d'une surtaxe de $0.60 du $100 d'évaluation. Pour ces
immeubles situés sur le territoire de la ville de Montréal, cette
fois, et non plus de la communauté, une taxe additionnelle de $0.43,5 du
$100 d'évaluation frappe ces immeubles. En sus de cela, pour des fins
scolaires, une surtaxe de $1.12 du $100 d'évaluation frappe, encore une
fois, les immeubles d'une valeur de plus de $100 000. Si bien que, pour les
immeubles d'une valeur de plus de $100 000 tant résidentiels que
commerciaux ou industriels, c'est donc une surtaxe de $2.25 du $100
d'évaluation qui frappe ces immeubles à Montréal.
Ceci nous préoccupe et il nous apparaît important, dans
cette réforme de la fiscalité, d'apporter certaines corrections
à cette situation, particulièrement, en tout cas, en ce qui a
trait aux immeubles résidentiels, car on sait, aujourd'hui, qu'avec
l'inflation, il ne faut pas un gros immeuble résidentiel pour que
celui-ci atteigne la valeur de $100 000 et, en conséquence, il nous
semble que ceci se répercute, évidemment, sur le coût des
loyers. Un des aspects de la réforme est l'élimination d'un
certain nombre de ces surtaxes, à tout le moins, sur le secteur
résidentiel.
Pour ce qui est des entreprises sur le territoire de la
communauté urbaine, le gouvernement vise à accorder la
fiscalité avec, par exemple, la décision gouvernementale
annoncée par mon collègue le ministre d'État à
l'aménagement en ce qui concerne l'hypothèse de la consolidation
du tissu urbain de la communauté urbaine de Montréal et donc de
réduire le fardeau des contribuables montréalais de la grande
communauté. Sur ce plan, la réforme proposée aurait pour
effet une diminution du fardeau, non seulement sur les immeubles
résidentiels, mais également sur les entreprises dans cette
communauté. Un des volets proposés est l'introduction d'une taxe
d'affaires générale au Québec, mais à taux
variables selon l'emplacement. (16 h 45)
En gros, voilà la réponse à certaines des questions
qui ont été soulevées. Pour ce qui est des commissions
scolaires comme telles, la réforme prévoyait et prévoit
toujours d'ailleurs le maintien d'un champ d'impôt local, autonome, pour
les dépenses dites inadmissibles aux fins de subvention du
ministère de l'Éducation. C'est véritablement la seule
partie de l'impôt foncier qui est autonome, l'impôt foncier
normalisé n'étant pas autonome au sens plein du terme, puisqu'il
s'agit d'un impôt encore une fois provincial, mais perçu
localement.
Des modalités sont examinées présentement pour ce
qui est des dépenses afférentes aux déboursés dits
inadmissibles et pour ce qui est de leur mode de financement local.
M. Goldbloom: M. le Président, je ne sais pas si le
chiffre est maintenant disponible.
M. Tardif: On m'informe que dans les municipalités de plus
de 5000 âmes et on va aller chercher les chiffres pour l'ensemble
des autres les municipalités de plus de 5000 âmes, pour ce
qui est de la taxe foncière générale et des taxes
foncières spéciales, en 1976 le total serait de $690
millions.
M. Goldbloom: La masse transférée vers les
municipalités, si ma mémoire est fidèle, se chiffrait par
un peu plus de $800 millions par année quand je suis parti du
ministère. Je cherche des ordres de grandeur, oui.
M. Tardif: C'est à peu près l'ordre de grandeur, M.
le Président.
M. Goldbloom: Cela veut dire que si le ministre veut augmenter
les recettes des municipalités de quelque $200 millions si j'ai
bien compris ce qu'il a dit, à savoir que les processus de
réaménagement donnerait un montant additionnel aux
municipalités de $200 millions alors si je prends les $700
millions qui sont perçus en revenus autonomes et j'ajoute les $800
millions qui sont transférés, cela donne $1 500 000 000 et si
l'on calcule ce que représente par rapport à cette masse
l'augmentation de $200 millions, on arrive à quelque 13%. Je fais des
calculs rapidement ici, je ne veux pas induire la commission en erreur.
M. Tardif: Mais sur la base des calculs effectués par le
député de D'Arcy McGee cela représenterait en effet, si la
réforme se limitait à ces mesures et qu'on le calculait de cette
façon, un accroissement de cet ordre.
M. Goldbloom: Tandis que s'il s'agissait du transfert de tout le
produit de la taxe scolaire, ce
serait deux fois et demie cela et plus encore, parce que ce sont environ
$550 millions, presque trois fois ce montant, donc 36% d'augmentation des
revenus des municipalités.
M. Tardif: J'ai bien dit: Si on effectuait les calculs de la
même façon que le député de D'Arcy McGee. Je pense
qu'il convient de laisser de côté les revenus autonomes des
municipalités présentement au chapitre de l'impôt foncier
et, d'effectuer plutôt les calculs suivants: à partir du moment
où on met dans la colonne des plus les revenus provenant du transfert du
champ d'impôt foncier scolaire, revenus actualisés, d'une part;
d'autre part, la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement;
troisièmement, de l'élargissement de l'assiette d'impôt des
biens-fonds actuellement exemptés en vertu de la loi, d'une nouvelle
taxe applicable aux biens-fonds industriels et commerciaux pour remplacer la
très grande série de taux et de taxes d'affaires que nous
rencontrons un peu partout et si nous ajoutons à cela des revenus
possibles de péréquation pour les fins des communautés
urbaines, à tout le moins, il s'agit là d'un apport qui
dépasse le milliard. Si, d'autre part, sont éliminés ou
sont enlevés les subventions gouvernementales, les revenus de transfert
de taxe de vente, l'abolition de la taxe d'affaires locale et la taxe des
locataires, une diminution de l'ordre de $800 millions. Je vous laisse le soin
de faire le calcul rapide de la différence entre la colonne des plus et
celle des moins. On arrive à quelque chose, selon les hypothèses,
entre $200 millions et $250 millions de plus.
M. Goldbloom: Je m'excuse auprès de mon collègue de
Saint-Hyacinthe, mais il me semble que nous venons de faire un cercle parfait.
Nous sommes partis d'un calcul de $200 millions. Le ministre a dit: Je ne
reprends pas les calculs du député de D'Arcy McGee, j'en fais les
miens. Il a fait les siens et il est arrivé à $200 millions ou
$250 millions. D'accord; si ce sont bien $250 millions, c'est une augmentation
en pourcentage qui est un peu plus importante, mais ce n'est quand même
pas le double des recettes actuelles des municipalités, ni même
50% d'augmentation.
M. Tardif: Non, d'accord.
M. Goldbloom: C'est seulement cela que j'ai voulu souligner. En
pourcentage, les municipalités vont toucher même avec les
meilleurs calculs du ministre une augmentation d'à peu
près 15%. Réglons pour 16%.
M. Tardif: Oui, M. le Président. Réglons pour 16%.
Maintenant, il reste une modalité importante qu'on appelle, dans le
jargon du métier le "circuit-breaker" et qui est le crédit
d'impôt qui a été annoncé dans le dernier discours
du budget. Il peut contribuer aussi à accroître les revenus
autonomes des municipalités, à partir du moment où une
partie de l'impôt foncier peut être déduite de l'impôt
sur le revenu.
M. Goldbloom: M. le Président, je ferai une
dernière remarque et je passerai la parole aux autres collègues.
Ce n'est pas une augmentation directe des revenus des municipalités,
c'est plutôt une augmentation indirecte, dans le sens que les conseils
municipaux se sentiront parce que je présume que le gouvernement
adoptera cette mesure un peu plus libres d'augmenter les taxes
foncières. Le rapport entre le revenu du particulier, du
propriétaire, et la valeur de sa propriété, sera
établi partiellement, pour la première fois.
Je ne serais pas objectif et pas honnête si je ne
félicitais pas le gouvernement d'avoir adopté cette mesure.
D'ailleurs, je l'avais recommandée au Conseil des ministres avant les
élections de 1976 et le Conseil des ministres avait accepté cette
hypothèse, mais les événements nous ont
empêchés de donner suite à cette intention. Je pense que
c'est important que cette relation soit enfin établie et que les
personnes qui ont une propriété d'une certaine valeur et qui,
pour une foule de raisons possibles, n'ont plus les revenus qui leur
permettraient de payer facilement les taxes foncières, soient en mesure
de bénéficier de cette considération. Je voudrais en toute
sincérité féliciter le gouvernement d'avoir pris cette
décision.
M. Tardif: Je remercie le député de D'Arcy McGee;
je veux juste ajouter aussi que cette formule du crédit d'impôt
est intéressante, ainsi que le mentionnait le député de
D'Arcy McGee. Elle l'est non seulement pour les gens qui, ayant atteint
l'âge de la retraite, voient tout à coup leurs revenus diminuer de
façon substantielle, et qui voudraient continuer quand même
à habiter leur maison ou leur logement, mais également pour les
gens qui, au cours de leur période active, connaissent une baisse de
revenus importante, tout en cours de travail. Le crédit d'impôt,
à l'heure actuelle, avec la formule de 40% de l'impôt foncier
moins 2% du revenu imposable, jusqu'à un maximum de $400, est accessible
à la fois aux propriétaires et aux locataires. Ce qu'il est
peut-être important de souligner ici, c'est que cette formule
n'élimine pas le remboursement pour l'impôt foncier scolaire, qui
était jusqu'à concurrence de $125 pour le propriétaire et
$75 pour les locataires. Cette formule demeure, et le contribuable aura le
choix entre les deux formules, celui-ci choisissant de prendre la formule la
plus payante pour lui, ces formules de l'impôt foncier scolaire
étant limitées d'ailleurs aux seules personnes de plus de 65 ans
Or, pour une personne de plus de 65 ans, il suffira de faire un calcul rapide
et de prendre la formule qui sera la plus payante pour elle.
M. Goldbloom: Quand le ministre parle de personnes qui peuvent
subitement perdre leurs revenus en cours d'activité, il parle
peut-être des députés qui perdent leurs élections ou
des ministres qui se retrouvent députés d'Opposition.
Préparez-vous!
M. Tardif: De toute façon, oui, députés et
ministres ne sont pas les plus à plaindre sur ce plan et
l'échelle d'impôt est plus progressive
qu'elle ne l'était, si bien que cette diminution des fardeaux des
petits contribuables se fait évidemment en taxant les contribuables les
mieux nantis, dont les députés et les ministres
évidemment.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Verdun.
M. Caron: M. le Président, le ministre a mentionné
tout à l'heure que dans les villes de banlieue les
propriétés d'une valeur de $100 000 et plus payaient $0.60 les
cent dollars et dans le territoire de la ville de Montréal $0.43,5.
J'aimerais savoir du ministre pourquoi c'est plus cher dans les banlieues
qu'à Montréal?
M. Tardif: Mais non, c'est le contraire M. le Président.
Toutes les villes de la Communauté urbaine connaissent une surtaxe de
$0.60 des cent dollars sur les immeubles de plus de $100 000. En plus de ces
$0.60 des cent dollars, les édifices situés sur le territoire de
la ville de Montréal se voient taxés de $0.43,5; donc le taux sur
toutes les villes de la communauté est de $0.60; à
Montréal c'est $1.03. D'accord? Pour le municipal.
M. Caron: Merci, je n'avais pas bien saisi. M. Tardif: Au
scolaire, c'est $1.12 de plus.
M. Goldbloom: M. le Président, si ma mémoire est
fidèle, nous avons accordé aux autres municipalités le
droit de taxer pour cette somme additionnelle. Cela a été un des
moyens de compenser un déséquilibre apparent, je ne me prononce
pas là-dessus, mais un déséquilibre apparent dans le
rôle d'évaluation de la Communauté urbaine de
Montréal. (17 heures)
M. Tardif: M. le Président, je me souviens, en effet,
avoir eu l'occasion de prendre connaissance, si ce n'est pas d'un
arrêté en conseil, de quelque chose à ce sujet, à un
moment donné, mais dont le texte était à ce point peu
clair que cette mesure n'a jamais été étendue aux autres
villes de la communauté. Il faudrait que je fasse ressortir le texte et
les raisons qui avaient amené le retard.
M. Goldbloom: S'il vous plaît. D'accord.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président, tantôt, suite à
la question du député de Bourassa, M. le ministre a fait allusion
à une taxe d'affaires en compensation d'autres taxes. Voulez-vous
expliciter votre pensée sur ce point, s'il vous plaît? Est-ce une
taxe d'affaires provinciale que vous imposeriez? Je n'ai pas saisi votre point
de vue, à ce moment-là.
M. Tardif: Actuellement, les municipalités
perçoivent, de plus en plus, une taxe d'affaires, taxe dont le taux
varie de municipalité en municipalité et qui amène parfois
même des surenchères coûteuses d'une municipalité
à l'autre et qui s'est généralisée, surtout, par
suite de l'adoption de la Loi d'évaluation foncière en 1972,
alors que la machinerie industrielle s'est vue détaxée à
raison de 6% l'an, pendant 16 ans. Si bien qu'au bout de 16 ans les entreprises
ne paieront plus de taxe sur la machinerie industrielle. Or, dans beaucoup de
cas, les municipalités, il y avait un manque à gagner, et elles
ont substitué graduellement toutes sortes de taxes d'affaires et il nous
semble que c'est la pagaille la plus complète dans ce domaine. Il nous
semblait opportun de profiter de l'occasion de la réforme de la
fiscalité pour établir une taxe d'affaires uniforme qui serait
perçue provincialement pour les entreprises. Ceci, sans préjudice
au droit de taxation des municipalités sur les biens-fonds industriels
et commerciaux, évidemment.
M. Cordeau: Est-ce que le gouvernement va prendre des
dispositions nécessaires afin que le revenu de ces municipalités
qui actuellement ont une taxe d'affaires ne diminue pas aussi?
M. Tardif: Cela fait partie, M. le Président, de
l'ensemble de la réforme qui, encore une fois, ne doit pas se traduire
par un manque à gagner, mais par un gain pour l'ensemble des
municipalités. C'est bien sûr qu'il y a là-dedans une
série de plus et de moins. J'ai mentionné que selon la
première hypothèse, 93,5% des municipalités étaient
gagnantes et que les autres, surtout les petites municipalités, se
voyaient offrir une garantie de recettes fiscales.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bourassa.
M. Laplante: M. le Président, je vais profiter de la
grande ouverture d'esprit du ministre pour poser quelques questions
peut-être un peu plus complexes sur le financement. Si on
considère ce que ces $200 millions de surplus donneraient à
l'ensemble des municipalités, en considérant aussi qu'il y a une
centaine de municipalités au Québec où l'on ne paie
à peu près pas d'impôt foncier... Dans votre réforme
vous considérez aussi l'uniformisation des rôles provinciaux pour
la pleine valeur des propriétés. Par contre, vous ne
considérez pas un taux uniforme de taxation provinciale, ce qui fait
encore un déséquilibre d'une ville à l'autre. Vous avez
toute l'inflation qui va s'ajouter aux villes, d'année en année;
alors ces $200 millions ne seront peut-être plus suffisants dans deux ou
trois ans, après une réforme. Mais on considère aussi par
la taxe de vente qu'on se trouverait à garder au complet où il y
a un taux normal d'inflation qui se fera ou par le surplus des ventes, qui
grossira les coffres de la province d'année en année, n'ayant pas
d'uniformisation de taux provincial. Vous parlez aussi du crédit
d'impôt foncier que le contribuable reçoit. Est-ce qu'il n'y
aurait pas là une tentation, à un moment donné, pour les
municipalités de dire: L'impôt, cela ne fait rien, on va remonter
encore les taxes foncières municipa-
les; le contribuable ne sera pas trop pénalisé, il va
recevoir cela en crédit d'impôt et, d'une municipalité
à l'autre, à un moment donné, c'est après cela une
guerre d'évaluation foncière surtout sur le taux
d'imposition?
Vous n'avez pas peur qu'au bout de trois ans les municipalités se
retournent et qu'on vous dise: On n'arrive plus, on est plafonné dans ce
que le consommateur, le contribuable peut payer, il nous faut encore 1% ou 2%
de la taxe de vente?
M. Tardif: M. le Président, la réforme de la
fiscalité doit évidemment, pour entrer en vigueur, s'appuyer sur
la réforme de l'évaluation foncière qui est en marche
présentement et qui a été décrétée il
y a maintenant un peu plus d'un an, avec l'obligation, pour toutes les
municipalités du Québec, de produire des rôles
d'évaluation scientifiques avant le 31 décembre 1983 et ce, avec
l'aide du gouvernement, qui assume 50% des coûts de confection des
nouveaux rôles d'évaluation. Lorsque le député de
Bourassa parle d'une centaine de municipalités qui ne se taxent pas ou
qui n'ont pas de taxe foncière, c'est un peu fort. En fait, il y a
peut-être une dizaine de municipalités et même pas, qui
n'ont pas de taxe foncière municipale et qui vivent uniquement du
résultat du produit de la taxe de vente. Elles n'ont aucun service non
plus. Il n'y a pas de service de police, il n'y a pas de service d'incendie, il
n'y a à peu près rien là.
Par ailleurs, certaines ont un taux très faible, c'est un fait.
Lorsque j'ai parlé tantôt de garantie de recettes fiscales pour
les municipalités perdantes dans la réforme du fait que,
justement, précisément, le gros de leur revenu était
tiré de la taxe de vente, j'aurais peut-être dû ajouter que
cette garantie de recettes fiscales ne sera pas éternelle et qu'elle
sera pour une période de temps je crois l'avoir mentionné
ce matin où le gouvernement exigera d'elles un effort fiscal en
conséquence.
La deuxième question, ou le deuxième volet de la question
du député de Bourassa, est plus technique; il nous reporte sur
toute la question de l'élasticité du revenu de la taxe de vente
par rapport au revenu provenant de l'impôt foncier. Je n'ai pas les
documents avec moi, j'espère bien que nous les aurons à
l'occasion de la conférence, pour pouvoir démontrer que cette
croyance dans l'élasticité plus grande de la taxe de vente sur le
plan des revenus est un mythe qui ne tient pas, à tout le moins en
période d'inflation, où la valeur des propriétés
constitue encore la valeur la plus sûre et l'accroissement des revenus
créés par la taxe foncière, au cours des dernières
années, dans le monde municipal, a été supérieur
à celui créé par la taxe de vente. Ainsi, ce
problème, à supposer que toutes choses soient égales, par
ailleurs, que les tendances observées ces dernières années
se continuent, et que cette situation ou les revenus créés par
l'impôt foncier soient aussi stables et même offrent une garantie
d'accroissement de revenus aussi importants que la taxe de vente, tout ceci
sous-tend une hypothèse. Cette hypothèse, c'est que l'on ne
s'embarque pas au Québec dans une normalisation des services municipaux.
L'erreur fondamentale consisterait et elle pourrait mener aux
résultats indiqués par le député de Bourassa
à en venir au Québec en matière municipale, à
procéder exactement comme on l'a fait pour l'éducation et la
santé. En effet, à partir du moment où le gouvernement du
Québec, les gouvernements antérieurs ont décidé,
à juste titre d'ailleurs, que tous les Québécois,
où qu'ils soient, avaient droit à la même quantité
de services, que le petit Gaspésien autant que le petit citoyen
d'Outremont avait droit à la même qualité d'enseignement et
aux mêmes services, que le gouvernement, dis-je, du Québec, a
décidé de financer l'éducation à même
l'impôt sur le revenu et non pas en fonction de la richesse
foncière.
Le vestige que l'on a de l'impôt foncier scolaire sur ce plan est
vraiment anachronique. Cependant, rien n'indique et c'est là que
je fais le parallèle avec les services d'éducation et de
santé que nous devions procéder à cette
normalisation des services. Il n'y a rien au monde qui oblige tous les citoyens
du Québec... Qu'on établisse des normes selon lesquelles pour
chaque tête de pipe, il y aura un aréna, deux arénas, trois
arénas et que pour chaque citoyen il devra y avoir tant de policiers au
mille carré et des normes semblables.
Je pense qu'il appartient, à partir d'un certain minimum de
services, à la population de se doter des services qu'elle veut bien
avoir, en fonction de sa capacité de payer, sans quoi, c'en est fait des
gouvernements locaux. Ne nous taxons pas de mots, et ne parlons plus
d'autonomie locale et de gouvernement responsable. C'est le gouvernement du
Québec qui prendra charge de tout et qui décidera de la
quantité et de la qualité des services de police.
Tantôt le député de Saint-Hyacinthe posait une
question sur la décentralisation. Justement, et je parlais de la
nécessité ne serait-ce que d'avoir en permanence un document au
gouvernement qui vienne contrer les tendances centralisatrices pour faire en
sorte qu'on n'en arrive pas, dans le domaine de la chose municipale, à
ce qui s'est produit dans le domaine de l'éducation et de la
santé, où là, on pouvait, je pense, exiger une
qualité et une quantité de services identiques pour tous les
citoyens. Je ne crois pas que, sur le plan municipal, cela s'impose, même
s'il y a des tendances dans les ministères à vouloir se
substituer. La liste serait longue des interventions des divers
ministères qui, graduellement, sont venus édicter leurs normes.
On pourrait penser au ministère de la Justice, avec la Commission de
police, qui a émis ses normes d'embauche, de recrutement, de formation,
d'uniformes, de voitures de police. On pourrait penser au Haut-Commissariat
à la jeunesse, aux loisirs et aux sports qui a ses normes
d'équipements de loisirs et autres. On pourrait penser au
ministère des Affaires culturelles, en ce qui concerne la
préservation du patrimoine. On pourrait penser au ministère de
l'Industrie et du Commerce, en ce qui concerne les parcs industriels. On
pourrait penser au ministère des Transports, qui tantôt
établit des normes pour les auto-
routes, tantôt pour le transport en commun, et maintenant pour les
pistes cyclables. Bref, on pourrait passer ainsi en revue tous les
ministères, pour se rendre compte que ces tendances centralisatrices
sont toujours actives et que seule une action vigilante des
collectivités locales viendra contrer ces tendances.
À partir du moment où on dit: II appartient aux gens de
décider de la qualité et de la quantité des services
qu'ils veulent avoir et, deuxièmement, de se taxer pour ces services, je
pense qu'on respecte le principe de l'autonomie locale. Mon rôle, comme
ministre des Affaires municipales, est précisément non pas de me
substituer aux collectivités locales, mais de créer les
conditions qui permettent aux gens de s'administrer eux-mêmes.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Deux-Montagnes.
Déconcentration
M. de Bellefeuille: M. le Président, ce matin, le ministre
a parlé de la déconcentration dont il est question à
propos de l'effectif de son ministère. Le ministre se rappellera sans
doute que je lui ai fait, il y a quelque temps, une proposition précise
dans ce sens. Il s'agissait d'une mesure de déconcentration qui
consisterait à implanter à Montréal une partie de son
service du contentieux. L'idée n'était pas de moi. Ce sont les
maires de quelques municipalités de mon comté qui avaient fait
cette proposition, que j'ai transmise au ministre. Il s'agit de
municipalités d'importance relativement faible qui ont, plus que les
grandes villes, besoin des conseils du contentieux du ministère, comme
d'autres services du ministère et cette demande visait à leur
rendre ce service plus accessible. Est-ce que le ministre pourrait nous dire
où en est l'étude de cette proposition dans son ministère?
(17 h 15)
M. Tardif: M. le Président, je me souviens, en effet, des
représentations du député de Deux-Montagnes. Cependant,
c'est peut-être là le pire exemple à prendre, celui des
avocats du contentieux, puisque ceux-ci peuvent être amenés
à donner des avis juridiques au ministre, à l'encontre des
municipalités, en tout cas, en ce qui concerne les faits et gestes
posés par les municipalités.
Ceci dit, je suis bien conscient que le problème d'avoir, dans le
territoire, des agents du ministère qui puissent informer les
municipalités, qui puissent leur servir de support technique, de
conseillers sur le plan de l'urbanisme, de l'aménagement, de
l'administration financière, de même que sur l'ensemble de la
législation du ministère, du moins celle qui les concerne cela
m'apparaît un objectif à atteindre. C'est en ce sens-là, ce
matin, que je parlais de déconcentration des effectifs, de sorte que la
seule réserve que j'ai présentement, c'est en ce qui concerne les
avis juridiques des avocats du contentieux, ce qui n'exclurait pas du tout que
deux corps différents, l'un chargé de donner des avis au
ministre, d'une part, et l'autre formé de gens peut-être plus
polyvalents, d'ailleurs. Je souhaite ardemment que cette déconcentration
se fasse, d'autant plus que ceia m'apparaît comme étant la
meilleure école de formation pour nos fonctionnaires.
J'ai eu à déplorer au cours des 16 ou 17 derniers mois
et ceci sans préjugé à l'égard des
fonctionnaires qui font bien leur boulot, je pense le fait que lorsque
je devais recevoir les membres d'un conseil municipal, parce que, n'en
déplaise au député de D Arcy McGee, mes portes
n'étaient pas fermées, les portes de mon bureau n'étaient
pas fermées...
M. Goldbloom: Cela me plaît beaucoup, M. le
Président.
M. Tardif: Lorsque je recevais les représentants d'un
conseil municipal, le maire et ses conseillers qui venaient me parler de leur
ville, il m arrivait de recevoir des points de vue sectoriels. J'avais parfois
les urbanistes du ministère qui me donnaient le dossier des tuyaux
d'égout et d'aqueduc; j'avais les analystes financiers qui me donnaient
le portrait financier de la ville et j'avais les avocats qui me parlaient des
problèmes de règlements d'emprunt. Mais je n'avais pas beaucoup
de monde qui pouvait faire la synthèse de tout cela et me donner le
portrait de la ville. Lorsque le maire venait me voir, il ne parlait pas
uniquement de son bout de tuyau et de son règlement d'emprunt, mais de
sa ville, qui est un tout.
Là-dessus, je pense que ce n'est pas porter un blâme
à l'endroit des équipes de fonctionnaires
spécialisés que nous avons au ministère, mais cette vision
plus globale serait, je pense, éminemment favorisée,
c'est-à-dire que ce faisant, en déconcentrant, non seulement le
ministère rendrait-il service aux municipalités, mais il se
rendrait service lui-même en ayant tantôt des fonctionnaires qui
reviendront à la maison-mère et qui auront de la chose municipale
une vision beaucoup plus englobante que celle que leur spécialité
ou leur routine leur aura permis d'avoir au cours des années.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Beauce-Nord.
M. Ouellette: M. le ministre, dans le même esprit, est-ce
que vos intentions seraient d'imiter, en quelque sorte, ce que font un certain
nombre de ministères actuellement, en particulier, je pense au
ministère de l'Industrie et du Commerce qui maintient des bureaux
régionaux, ou encore le ministère de l'Agriculture qui, en plus
de maintenir des bureaux régionaux, en maintient au niveau de certaines
localités, et de faire en sorte que ces bureaux soient en mesure de
répondre à peu près à toutes les questions que se
posent les municipalités au Québec?
Je comprends très bien, par exemple, que la ville de
Montréal ait amplement les moyens de se payer tous les professionnels
nécessaires à sa bonne administration, que certaines grandes
capitales régionales aient également ces moyens, mais si on tient
compte du fait qu'il y a au-delà de 1500
municipalités au Québec dont un grand nombre sont vraiment
minuscules et n'ont pas les moyens de se payer des gens en permanence pour les
informer de tout ce qui se passe au ministère des Affaires sociales
à Québec et ainsi risquent de manquer certains bons programmes
qui ont pu être mis de l'avant, surtout depuis le 15 novembre 1976,
est-ce qu'il serait de votre intention d'installer de ces bureaux
régionaux pour venir en aide aux municipalités qui ne peuvent pas
se payer le luxe de maintenir du personnel à plein temps capable de les
informer adéquatement?
M. Tardif: M. le Président, la réponse est oui. En
attendant, le ministère s'est efforcé, au cours de seize derniers
mois, enfin, je prends toujours comme date de référence non pas
le dernier exercice financier, M. le Président, mais on me le permettra,
les seize derniers mois ou à peu près, d'organiser, à
diverses reprises, des séances d'information. Je vais vous donner
à titre d'exemple les lois 54 et 55 qui ont été
discutées ici devant cette commission et qui venaient modifier
substantiellement la Loi des cités et villes et le Code municipal. Une
équipe itinérante de fonctionnaires a aussi tenu des
séances d'information dans différents coins du Québec. Il
en a été de même pour ce qui concerne les programmes PAIRA,
PAIRE, PAISI, LIQUIDATION, etc., d'une part.
D'autre part, un bulletin d'information bimensuel a été
mis au point, c'est Mini-Express, pour informer les municipalités non
seulement de ce qui se passe au ministère, mais aussi aux autres
ministères et qui est susceptible de les intéresser. Cette
question de l'ouverture des bureaux, je compte la reprendre activement avec mon
nouveau sous-ministre, dès qu'il sera en poste, et j'espère
encore une fois peut-être avoir l'occasion de l'annoncer avant la fin des
travaux de la présente commission.
Le Président (M. Marcoux): D'autres questions?
M. Laplante: Sur un autre sujet.
Le Président (M. Marcoux): Sur un autre sujet? Le
député de D'Arcy McGee.
M. Laplante: Est-ce qu'en attendant on pourrait la poser?
M. Brassard: M. le Président, concernant la question du
député de Beauce-Nord, étant donné que la
réponse du ministre est oui aux bureaux régionaux, est-ce que,
dans son esprit, il y a un échéancier? Compte-t-il commencer
à mettre en place certains de ces bureaux régionaux dès
cette année?
M. Tardif: M. le Président, je croyais avoir dit que je
voulais confier ce dossier comme premier mandat à mon sous-ministre,
dès qu'il sera en poste.
M. Brassard: Y compris le soin de dresser un
échéancier?
M. Tardif: Y compris le soin de préparer avec moi un
échéancier.
Le Président (M. Marcoux): Est-ce sur la même
question? Sur un autre sujet. M. le député de D'Arcy McGee.
M. Laplante: Sur un autre sujet.
M. Goldbloom: M. le Président, j'ai vu le
député de Saint-Hyacinthe demander la parole avant moi. Je
voudrais...
Le Président (M. Marcoux): Alors, M. le
député de Saint-Hyacinthe.
Evaluation foncière
M. Cordeau: Merci, M. le Président. Tantôt, vous
avez fait allusion à la réforme de l'évaluation
foncière, qui devrait être terminée en 1983. Vous avez
mentionné aussi que cette réforme était une des bases de
la réforme sur la fiscalité. Est-ce à dire que la
réforme de la fiscalité ne pourra être
présentée en son entier avant 1984, parce qu'il peut y avoir des
municipalités dont le travail sur l'évaluation foncière ne
sera terminé qu'en 1983? Pourriez-vous nous faire connaître votre
point de vue concernant...
M. Tardif: Non, il est évident, M. le Président,
que nous ne saurions attendre que tous les rôles d'évaluation
aient été refaits au Québec pour implanter la
réforme de la fiscalité. Nous devons accélérer
cette réforme, dans la mesure du possible, mais il est évident
qu'à partir du moment où la redistribution des revenus, des
formules de péréquation s'appuiera sur autre chose qu'un prorata
de la population, mais voudra tenir compte de l'effort fiscal, à ce
moment-là, nous devrons introduire des facteurs de normalisation dans
l'évaluation foncière et des formules de correction qui nous
permettent d'en arriver à une certaine parité pour fins de
comparaison et de péréquation.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, le ministre a dit une chose
que j'ai trouvée passablement intéressante: il a mentionné
ce qu'il a appelé le mythe de l'élasticité de la taxe de
vente, élasticité plus grande que celle de la taxe
foncière.
Je voudrais lui demander si, en faisant ses calculs qui lui permettent
d'affirmer que l'élasticité n'est pas plus grande du
côté de la taxe de vente, il a tenu compte de l'évaluation
foncière. Il y a beaucoup de municipalités, comme de commissions
scolaires, qui ont augmenté leurs revenus à même la taxe de
vente en augmentant leur évaluation. Cette évaluation avait
été négligée, en quel-
que sorte, pendant une longue période de temps, mais avec un bon
travail, l'évaluation ayant été portée à la
valeur réelle, le revenu a été augmenté; à
l'avenir, ce sera la croissance normale plutôt que ce rattrapage qui
influencera le rôle d'évaluation. Donc, il me semble que dans
cette récente période de quelques années c'est une
hypothèse que j'avance des municipalités ont donné
l'impression d'une plus grande élasticité et d'une croissance
plus rapide de la taxe foncière, quand effectivement c'était du
rattrapage sur le plan de l'évaluation.
M. Tardif: M. le Président, il est sûr que dans
l'affirmation que j'ai faite de l'élasticité au moins aussi
grande, sinon plus, de l'impôt foncier par rapport à la taxe de
vente, il y a lieu de décomposer ce dont est fait l'impôt foncier,
à savoir une valeur foncière et, d'autre part, un taux.
On sait que les municipalités, en fonction des services qu'elles
veulent se donner, font et déposent un rôle d'évaluation,
pouvant être ou bien à valeur normale, ou bien à tout
pourcentage inférieur à la valeur marchande. Conséquemment
à la déposition de ce rôle, les municipalités
imposent un taux de taxe qui leur permettra de faire face aux dépenses
qu'elles veulent effectuer.
Il s'est produit, en ce qui concerne les municipalités, ce qui...
Nous devrons tenir compte de ces deux facteurs dans l'évaluation de
l'élasticité. Il s'est produit, dans le cas des
municipalités, un peu ce qui s'est produit sous l'ancien gouvernement,
lorsque celui-ci disait: Nous n'augmentons pas les impôts. Comme il n'y
avait pas d'indexation, finalement, ce que payait le contribuable augmentait
sans cesse. C'est le même phénomène qui s'est produit sur
la scène municipale.
Le ministre des Affaires municipales veut, dans des amendements à
la loi d'évaluation, qui seront présentés en Chambre en
temps et lieu, se faire donner le pouvoir de prescrire le contenu des comptes
de taxe, de façon que le citoyen sache bien que s'il y a confection des
rôles à la valeur réelle, c'est une opération, et
que le taux de taxe décrété par son conseil, c'est une
autre opération. La première est technique, la deuxième
est politique.
M. Goldbloom: D'accord, M. le Président. Justement, le
ministre reconnaîtra avec moi que la croissance de la taxe de vente se
fait sans douleur, au niveau municipal comme au niveau provincial. C'est une
augmentation reliée à l'activité économique, tandis
que l'augmentation de la taxe foncière se fait, comme le ministre vient
de le souligner, par un geste politique qui n'est pas sans douleur.
M. Brassard: ... ne se fait pas sans douleur.
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais poursuivre sur
une autre facette du sujet. Le ministre a indiqué que les rôles
d'évaluation seront gelés cette année pour les fins de la
taxation scolaire et que ce gel, mise à part l'inscription de nouvelles
propriétés, permettra une augmenta- tion des revenus des
municipalités, c'est-à-dire que les municipalités pourront
occuper, dans une certaine mesure, ce champ. Ai-je raison de retenir un chiffre
global de quelque $29 millions comme augmentation possible? Mais je reviens
à ce que je disais il y a un seul instant. Il faudra que les
municipalités posent un geste politique pour aller chercher ce
montant-là. Il faudra que les contribuables paient ce montant
additionnel. Je présume que le gel des rôles scolaires ne privera
pas les commissions scolaires des revenus qui leur sont nécessaires et
qui risquent de connaître une certaine augmentation cette année
à cause de l'inflation et de besoins accrus; toutes sortes de raisons
peuvent influencer les besoins des commissions scolaires et presque toujours
vers le haut.
Alors, le ministre reconnaît-il qu'il y a quelque part
là-dedans une augmentation de taxes?
M. Tardif: M. le Président, il n'y a pas, à
proprement parler, une augmentation de taxe. Il y a libération d'un
champ qui, s'il n'y avait pas eu de geste posé par le gouvernement,
aurait été occupé par les commissions scolaires
jusqu'à concurrence de $28 700 000.
Le gouvernement dit: Les commissions scolaires ne pourront pas imposer
ces $28 700 000. Nous les financerons et, à la place, nous les
cédons aux municipalités qui peuvent décider de s'en
prévaloir ou non, de taxer oui ou non leurs citoyens.
M. Caron: Oui, mais, M. le Président, encore là,
ça tombe sur le dos des municipalités. On le prend d'une main et
on le donne à l'autre. C'est là-dessus que...
M. Tardif: Mais...
M. Caron: On ne peut pas dire qu'on rendra service à nos
contribuables, parce que ça va leur coûter à peu
près la même chose.
M. le ministre, vous savez que les municipalités, en
général, diront: On peut aller chercher X. Elles vont organiser
les budgets en conséquence.
M. Tardif: Mais...
M. Caron: Je pense qu'on n'épargnera pas
énormément.
M. Tardif: M. le Président, c'est là tout le fond
de la question et tout le principe de l'autonomie locale. Ou bien on veut
être un gouvernement autonome... Or, il y a trois attributs qu'on
reconnaît généralement à un gouvernement ou à
un palier de gouvernement. Le premier, c'est d'être électif. Le
deuxième, c'est le pouvoir de taxation et le troisième, c'est le
pouvoir de réglementation. Quand on a ces trois attributs, on est
généralement reconnu comme un palier d'administration de
gouvernement.
Or, M. le Président, les municipalités nous croyons
beaucoup à leur autonomie peuvent
décider du niveau de services qu'elles vont donner à leurs
concitoyens, à leurs contribuables et, conséquemment, du niveau
de taxation. Ce que la mesure a eu pour effet... Là, encore une fois, je
reviens à la principale articulation de la réforme de la
fiscaité; l'Union des municipalités, l'Union des conseils de
comté, pendant des années, ont dit: Donnez-nous le champ
d'impôt foncier. C'est à nous; on veut l'avoir exclusivement pour
nous. Que les commissions scolaires se retirent de ce champ-là. Le
gouvernement était prêt à faire la réforme tout d'un
coup. Les municipalités ont demandé d'attendre un peu, mais,
déjà, cette année, dans le présent budget, nous
n'allons pas à l'encontre de la réforme. Nous gelons
l'impôt foncier scolaire, nous permettons déjà aux
municipalités d'occuper en tout ou en partie ou pas du tout un champ qui
leur est libéré. Maintenant, c'est vrai, c'est un fait que cela
accroît la visibilité de la taxation; c'est une taxe qui est
éminemment visible.
M. Caron: Parce qu'on ne peut pas baisser les budgets, surtout
à Montréal, M. le ministre; vous savez que la communauté
urbaine nous coûte de l'argent, nous coûte plus cher et nous donne
moins de services. Ce n'est pas croyable comme on a un service policier pourri,
M. le ministre, ce n'est pas croyable. Une heure et une heure et demie avant
qu'on réponde à l'appel, alors que les coûts ont
triplé depuis... Vous savez celui qui payait... Au point de vue de
l'évaluation, chez nous, cela a augmenté, en quatre ans,
jusqu'à 85% pour une maison semi-familiale dont le propriétaire
est obligé de payer et il n'a pas le service en retour. Vous savez,
payer quand on a le service, ce n'est pas si mal, mais quand on n'a pas le
service... Il y a une loi, qui a été adopté, je pense, en
1972, quand on a dit: On va vous enlever vos corps policiers, mais vous
garderez le même nombre de personnes à votre service, et c'est
passé peut-être de quinze à dix-huit. Les gens sont
tannés de payer pour ne pas avoir de services.
M. Laplante: J'aimerais vous poser une question, M. le
député. Vous êtes administrateur d'une ville, je vis dans
une ville un petit peu plus grosse que la vôtre. Si on fait un retour en
arrière avec la CUM, vous savez dans quel contexte cela a
été monté, cette patente, sous un ancien gouvernement chez
vous. Je sais toujours bien que chez nous on s'est promené avec des
pancartes pour ne pas que cela se fasse; dans ce temps-là, le droit
d'une ville, vous ne l'avez pas reconnu, mais aujourd'hui, dans le plan que le
ministre propose, êtes-vous d'accord que si cette année dans votre
budget à vous, on avait donné cette décentralisation
l'impôt foncier, le même plan que le ministre propose
vous auriez été capable à Verdun, aussi bien qu'à
Montréal-Nord, de baisser de $0.20 à $0.30 votre taxe
d'impôt foncier, avec ces revenus-là?
M. Caron: On ne l'a pas baissé, nous autres, on a
été obligé de... oui...
M. Laplante: Non, vous auriez été capable si vous
aviez eu ce plan-là, pouvez-vous nier cela? On l'a fait le calcul, je
l'ai fait, on aurait pu diminuer de $0.20 à $0.30 la taxe
foncière, avec les mêmes services.
M. Caron: Oui, si on avait eu le plan... J'espère qu'on ne
se trompe pas. Parce que les gens sont tannés d'être taxés,
surtout nous autres dans l'ouest, on y a goûté cette année
au point de vue de l'évaluation et chez nous je peux vous dire qu'il y a
environ 1100 personnes qui ont une évaluation entre 40% et 52%, 53%; je
pense que vous avez eu de la documentation. J'ai des piles de lettres, j'aime
autant ne pas vous les apporter, je sais que vous ne pourrez rien faire, je
suis conscient du problème. Mais il faut trouver un mécanisme
pour arrêter d'écoeurer, excusez l'expression, le petit
propriétaire. Si on avait évalué tout le monde sur le
même pied, on aurait dit: Le coût de la vie augmente de 8%, 10% ou
12%, on augmente tout le monde, alors le type qui loue un six logements, aurait
une augmentation de 8%, à 10%: l'autre qui est tout seul avec un cottage
comme on disait tout à l'heure, s'il n'est pas à sa
pension, il va prendre sa pension son revenu diminue.
Ce sont eux qui ne sont plus capables de tenir le coup.
M. Laplante: Oui, l'orgueil d'une ville comme chez vous, comme
dans d'autres villes...
M. Caron: L'orgueil, on met cela de côté, c'est
l'argent qui compte. C'est ce qui reste dans les poches.
M. Laplante: Dans des quartiers complètement neufs, vous
vous êtes payé des services d'incendie. Vous avez peut-être
10% ou 15% d'employés de ville en trop, cela se produit dans toutes les
municipalités de la grosseur de la vôtre, comme chez-vous. Je peux
vous en donner la preuve de cela. Pourquoi le contribuable paie toujours plus.
C'est à cause des extravagances des administrateurs des villes, tant que
les citoyens ne seront pas impliqués dedans...
M. Caron: Je peux dire au député, M. le
Président, que chez nous on a un service d'entraide qui est...
M. Laplante: Vous ne faites pas exception, vous autres non
plus.
M. Caron: ... établi et je vous dis que c'est une
très bonne chose. Les villes de banlieue vont nous aider. Quand vous
avez une propriété qui a 75 ou 80 années, je vous jure que
quand le feu prend là-dedans...
Ce à quoi je veux en venir, M. le ministre, c'est qu'on essaie de
trouver je sais que ce n'est pas facile, d'autres avant nous n'ont pas
trouvé de solutions miracles un moyen quelconque pour
arrêter d'augmenter le petit propriétaire. C'est à ce
niveau-là qu'il faut protéger le petit propriétaire,
si
on veut que les gens aient leur chez-soi. Vous savez quand le
propriétaire demeure dans sa maison, il y a bien plus de chances que la
maison reste belle, qu'elle reste propre et qu'elle soit entrenue. Cela
coûte meilleur marché pour une municipalité quand c'est le
propriétaire même qui demeure dans sa maison, parce qu'il s'en
occupe et il va même jusqu'à nettoyer le trottoir pour garder sa
devanture propre. Or, c'est pour cela qu'il faut encourager les gens à
avoir leur propriété, mais s'il y a des taxes qu'ils ne peuvent
pas payer, on ne les encourage pas et ils vont dire: On est aussi bien
d'être locataires.
M. Laplante: J'aimerais ouvrir une porte à M. le ministre
à ce moment-ci. Vous avez fait plusieurs déclarations concernant
justement l'évaluation des maisons, le coût des services que cela
peut occasionner. Je pense vous me corrigerez si j'ai tort que
vous disiez qu'un petit bungalow coûtait, à un moment
donné, $7000 pour cent pieds de rue, en services d'égouts et
d'eau.
M. Tardif: Le ratio est de 6,5% à 1% entre le coût
des infrastructures et l'évaluation foncière, c'est-à-dire
que pour chaque $1000 investis en aqueduc, égouts, rues et trottoirs, il
fallait $6500 d'évaluation foncière, derrière.
M. Laplante: Croyez-vous, M. le ministre qu'il y a une
sensibilisation à faire là-dessus au niveau des
municipalités, d'ouvrir des territoires vierges et construire des
bungalows avec une valeur, à l'évaluation municipale,
peut-être de $25 000 ou de $30 000? S'il en coûte encore plus, cela
prend une évaluation, je crois, de $38 000 ou de $40 000 que vous avez
déjà donnée. Pouvez-vous détailler
là-dessus?
M. Tardif: M. le Président, on rejoint un des facteurs qui
contribuent à l'augmentation des coûts pour les citoyens de (a
Communauté urbaine de Montréal et de la ville de Verdun. Les
coûts, en effet, dans les grandes villes, on peut tenter de les
contrôler de diverses manières et déjà le
gouvernement, en obligeant les communautés urbaines et les cités
et villes à adopter des programmes triennaux d'immobilisation, a voulu
justement mieux prévoir les augmentations et même, dans le cas des
communautés urbaines, les contrôler, parce que le gouvernement du
Québec défraie une large part des coûts reliés
à la communauté urbaine. Je vous laisse le soin
d'apprécier, M. le député de Verdun, par votre entremise
évidemment, M. le Président, ce qu'il en coûterait à
vos contribuables s'ils devaient payer la note réelle des services
communautaires. À titre d'exemple: le gouvernement du Québec paie
50% du coût d'épuration de l'île de Montréal. Le
gouvernement fédéral paie 16 2/3%, la communauté urbaine
33 1/3%. Je vous laisse le soin d'apprécier ce que cela signifierait
s'il fallait que la municipalité écope de la note en entier de
cela. C'est donc 50%. Or, quand on sait que pour le seul collecteur-nord et
intercepteur-nord avec le col- lecteur et l'usine d'épuration et enfin
le tour de l'île, on parlait d'un coût global de $1 200 000 000
mais on sait pertinemment qu'une fois fini, cela aurait coûté $1
500 000 000, le gouvernement du Québec en paie 50%. Dans le cas du
métro, le gouvernement du Québec défraie 30% du coût
d'acquisition de l'équipement roulant: métro et autobus. Le
gouvernement du Québec défraie 60% du service de la dette du
métro. C'est important cela, les immobilisations du métro.
Troisièmement, le gouvernement du Québec défraie
entre 45% et 55% du déficit d'exploitation de la CTCUM. Écoutez,
c'est presque, si on totalise tout cela, 75% du coût du transport en
commun qui est défrayé par le gouvernement du Québec.
Donc, sur ce plan, l'État apporte déjà une contribution en
argent sur le plan des contrôles avec les programmes triennaux
d'immobilisation. Mais, il reste une chose, c'est que qu'est-ce que vous
voulez le mode d'urbanisation que l'on connaît au Québec,
qu'on a connu dans la région de Montréal, est à mon avis
le grand responsable des coûts astronomiques pour les citoyens de la
communauté.
À partir du moment ou vous avez de moins en moins de citoyens sur
l'île de Montréal, et dans la ville de Montréal, parce que
n'en déplaise au député de Verdun, je suis résidant
de la ville de Montréal, il y a donc, de moins en moins de citoyens qui
paient pour des services qui coûtent de plus en plus cher. (17 h 45)
La déperdition de population, de 1971 à 1976, dans la
seule ville de Montréal, est de 160 000 de population. Ces 160 000
contribuables de moins sont partis avec leurs taxes, en banlieue. Ils sont
allés demander au ministre des Affaires municipales des subventions pour
des égouts, des aqueducs, au ministre des Transports des réseaux
d'autobus, au ministre de l'Éducation des écoles, et au ministre
des Affaires sociales des hôpitaux. Pendant ce temps, l'hôpital du
Sacré-Coeur a plusieurs lits vides je parle du nord de la ville,
dans mon coin on ferme des écoles en grand nombre la CECM
annonce la fermeture de 32 écoles en septembre prochain et on a
des équipements qui pourraient accueillir beaucoup plus de gens.
Alors, collectivement je pose la question est-ce que nous
avons les moyens de laisser faire ce développement tous azimuts, avec
les coûts énormes que cela comporte? Jusqu'à maintenant, on
ne s'était pas tellement interrogé sur cette relation et il faut
la faire évidemment. Tant en raison des coûts astronomiques que
cela suppose pour les populations des noyaux urbains centraux que pour le
gouvernement de favoriser et quand je dis le gouvernement, je pense,
entre autres, aux programmes de la Société centrale
d'hypothèques et de logement, qui sont des programmes d'accès
à la propriété individuelle et unifamiliale pavillonnaire
qui, outre le fait qu'elle engendre tout ceci, est aussi consommatrice de sol,
de terre, d'énergie. Il m'apparaît que des mesures doivent
être prises dans ce sens.
Le ministre d'État à l'aménagement a
déjà annoncé l'option du gouvernement en faveur d'une
politique de consolidation du tissu urbain pour le territoire de la
communauté urbaine de Montréal. Je vous ai dit tantôt que
certains volets de la politique fiscale allaient renforcer ceci en diminuant le
fardeau sur le territoire de la communauté. D'autre part, par les divers
programmes de subventions d'égouts et d'aqueduc, mon ministère
peut freiner, jusqu'à un certain point, certains développements;
ne pas les empêcher, parce que je ne crois pas qu'il faille les
empêcher, mais je pense qu'il faut clairement dire à ces gens: Ne
comptez pas sur l'État pour aller vous subventionner pour ce genre
d'habitat. Si vous voulez y aller, développez-vous, mais selon vos
moyens et à vos frais. Il ne faudrait pas demander à
l'État d'apporter à la campagne les services de la ville. Si on
veut aller vivre à la campagne, avoir de l'air pur, j'en suis, mais il y
a des conséquences à cela et les conséquences sont de ne
pas avoir les services de la grande ville.
M. Caron: M. le Président, on apprécie ce que le
gouvernement fait. Je ne l'ai pas dit d'une façon
désagréable tout à l'heure, soyez assuré que...
M. Tardif: Non, mais c'est que très peu de citoyens
connaissent ce fait-là.
M. Caron: Soyez assuré, M. le ministre, que peu importe
celui qui est à votre place, ce n'est pas facile, je vous le dis souvent
et je suis conscient de cela. Mais naturellement, quand on parle d'aide pour le
métro aussi bien que d'égout collecteur, ce n'est pas pour trois
ans, cinq ans et dix ans, c'est pour des années, M. le ministre. C'est
pour cela que c'est une responsabilité du gouvernement. En plus, s'il
fallait taxer les contribuables de Montréal pour tous ces services, on
ne pourrait pas leur imposer, déjà ils sont surchargés.
Vous disiez que les gens de Montréal s'en vont dans les banlieues. On
vit aussi la même chose à Verdun. Notre population n'augmente pas,
depuis les dix dernières années elle va en diminuant. Nous aussi
nous sommes bien contents qu'on se penche sur ce problème pour essayer
de regagner de la population pour diminuer nos coûts de services.
Je veux dire à mon bon ami d'en face que nous, on n'essaie pas
d'être trop luxueux. Le maire est très sévère pour
les engagements. Pour ce qui est des pompiers, on a juste le strict
nécessaire et on se sert des villes de banlieue, dans une belle
collaboration que j'ai mise sur pied quand on a eu un gros feu le 6 septembre.
Je pense qu'on a rendu un service à Verdun, Lasalle, Lachine, ville
Saint-Pierre et Dorval. Tout le monde a été heureux de cela.
M. Brassard: ... félicitations au maire de Verdun.
M. Caron: Merci, et je les prends parce que j'ai travaillé
fort là-dessus.
M. Brassard: ... on va vous les redire à part cela...
Le Président (M. Marcoux): Le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais d'abord
corriger ce que j'ai cru comprendre de l'affirmation du député de
Bourassa, qui attribuait au gouvernement précédent la
paternité des communautés urbaines. C'est effectivement l'Union
Nationale, à la fin de 1969, le ministre...
M. Tardif: L'intégration de la police en 1972 s'est faite
sous les libéraux et sous M. Choquette. Je ferme la
parenthèse.
M. Goldbloom: C'est vrai, et je ne fais pas de commentaire
là-dessus, c'est bien sûr. Mais je voulais rappeler que le
ministre des Affaires municipales du gouvernement de l'Union Nationale
s'appelait le Dr Robert Lussier, qui est connu dans certains milieux.
Le ministre a parlé de 16 mois, mais il s'agit effectivement de
17, si je calcule correctement. Au cours de ces 17 mois, j'ai appris à
connaître l'honnêteté intellectuelle du ministre. Je n'ai
aucune hésitation à le dire. Je voudrais faire appel à
cette honnêteté intellectuelle pour deux choses. D'abord le
ministre a mentionné les subventions données à
l'épuration des eaux et les subventions données aux transports en
commun. Il se rappellera que c'est le gouvernement précédent qui
en était responsable. Mais ce que je voudrais dire, parenthèse
pour parenthèse, n'est-ce pas?
M. Tardif: D'accord.
M. Goldbloom: Je voudrais dire que le ministre a
mentionné...
M. Laplante: II parle d'épuration.
M. Goldbloom: L'épuration s'en viendra aux prochaines
élections.
M. Laplante: Attendons que le vent change de bord.
M. Cordeau: On nous a promis 90%.
M. Goldbloom: M. le Président, on voit qu'ils est 18
heures moins 8 minutes. Les esprits s'égaient un peu.
Je voulais demander ceci au ministre. Il a mentionné un chiffre
de $28 700 000 comme étant mis à la disposition des
municipalités ainsi qu'un programme global qui mettrait à la
disposition des municipalités un montant qui se chiffrerait entre $200
millions et $250 millions. Mais il a aussi eu l'honnêteté
intellectuelle de dire que peut-être les municipalités ne s'en
serviront pas ou ne s'en serviront pas au complet. Or, les montants en question
pourront justement ne pas être atteints. C'est un point.
Mais, deuxièmement, quand on enlève quelque chose au
système scolaire, il faut le remplacer; et nous risquons de nous trouver
devant une situation où les montants en question auraient
été enlevés au système scolaire. C'est notamment le
cas des $28 700 000, parce qu'ils sont libérés par le gel des
rôles pour fins scolaires. Ce montant aura été
enlevé au système scolaire, il faudra le remplacer. Mais si les
municipalités ne profitent pas de ces disponibilités, on n'aura
pas effectivement transféré autant d'argent vers elles. Le
contribuable sera quand même obligé de payer d'une manière
ou d'une autre le montant enlevé au système scolaire. Cela vient
toujours du contribuable. Alors, je pense qu'il y a...
M. Tardif: Excusez-moi, mais j'essaie de suivre le
député de D'Arcy McGee. Ou bien les municipalités occupent
le champ ou elles ne l'occupent pas. Ou bien elles l'occupent en entier, si
elles l'occupent, ou bien elles l'occupent partiellement. Si elles ne
l'occupent pas, c'est un gain net pour le contribuable, localement en tout cas,
c'est évident. Si elles décident de l'occuper en partie, c'est un
gain partiel. Si elles l'occupent en entier, le contribuable, au lieu de payer
$100 de plus ou $50 de plus dans son compte de taxes scolaires, le paiera
à la municipalité.
D'autre part, le gouvernement, pour chaque dollar de revenu non
perçu localement par les commissions scolaires, doit donc augmenter
l'enveloppe budgétaire des commissions scolaires. C'est évident.
À ce moment-là, la situation, pour ce qui est des commissions
scolaires, hormis la partie des dépenses dites inadmissibles, deviendra,
pour l'étendue du manque à gagner des $28 700 000, après
la réforme, l'équivalent d'une enveloppe budgétaire comme
celle qui est donnée aux cégeps et aux universités
notamment et où les administrateurs fonctionnent avec cette
enveloppe.
Municipalités en danger de faillite
M. Goldbloom: Je pense que l'on se comprend, M. le
Président. J'ai une dernière question pour cet après-midi.
La campagne électorale de 1976 a été marquée par
certaines déclarations. C'est l'actuel premier ministre qui, au cours de
cette campagne, a indiqué l'intention de son éventuel
gouvernement de réaménager rapidement la fiscalité
municipale afin d'éviter la faillite de nombreuses municipalités
et briser le cercle vicieux qui les étouffe. Y a-t-il vraiment de
nombreuses municipalités qui sont en danger de faillite? Si oui, comment
les a-t-on sorties du pétrin avec des mesures qui sont quand
même en deçà de cette réforme globale de la
fiscalité municipale que l'on a pu effectuer jusqu'à
maintenant?
M. Tardif: Beaucoup de municipalités, sans être
nécessairement en faillite, étaient et sont dans une situation
pour le moins critique. Les derniers chiffres dont je disposais au
ministère, il y a de cela quelque temps, nous indiquaient que plus de
160 municipalités au Québec avaient un taux d'endettement
dépassant les 20%. Il y a trois façons de considérer la
situation financière des municipalités. L'une d'elles est
d'établir le taux de la dette per capita; la deuxième est de
considérer la proportion du budget annuel qui est consacrée au
service de la dette et la troisième est de calculer la dette sur la base
de l'évaluation foncière. C'est le taux d'endettement sur la base
de l'évaluation.
Au-delà de 160 municipalités avaient dépassé
le seuil critique. Déjà, on considère comme un seuil
critique un taux d'endettement dépassant 15% selon la taille des
municipalités; nous en avions au-delà d'une centaine, à
tout le moins 60 qui étaient entre 15% et 20% et 100 qui étaient
au-delà de 20% de taux d'endettement. Là-dessus, je dois dire que
cette situation financière difficile des municipalités
était en partie attribuable à un système qui faisait en
sorte que les municipalités soumises à des pressions de la part
de, appelons-les des vendeurs de réseaux d'acqueduc, se faisaient vendre
des réseaux chromés ce n'est pas le seul cas, il y a un
certain nombre de cas que j'ai en mémoire qui étaient
nettement, mais très nettement au-dessus de leurs moyens, sans compter,
parfois, des dépenses inconsidérées qui étaient
faites pour toutes sortes de raisons et qui faisaient parfois que la valeur
totale de la dette pour l'installation d'un seul réseau d'acqueduc et
d'égout dépassait de deux, même trois ou quatre fois la
valeur foncière totale de la municipalité. Ceci, selon moi, a
constitué, pour un certain nombre d'entre elles, une situation
difficile. C'est la raison pour laquelle, d'une part, dès le 22
décembre 1976, je faisais une déclaration ministérielle
concernant les engagements pris envers un certain nombre d'entre elles, en
disant: Écoutez, nous allons honorer les engagements du gouvernement
antérieur, les engagements autorisés par le Conseil des ministres
et le Conseil du trésor, mais de grâce, si vous n'avez pas
commencé les travaux, ne vous engagez pas là-dedans.
Deuxièmement, pour celles dont les travaux sont substantiellement
avancés, nous allons examiner les cas un à un. C'est ce que nous
avons fait et ce que j'ai continué de faire au cours de cette
année jusqu'au 29 mars dernier, alors que, grattant les fonds de tiroirs
pour les crédits périmés de fin d'année, j'ai
accordé à un certain nombres d'entre elles, sur la foi
d'engagements, non pas du gouvernement, mais d'engagements moraux
appelons-les comme cela un certain nombre de subventions pour que le
fardeau de taxation soit plus tolérable pour ces
municipalités.
Entre-temps, la situation s'est un peu améliorée pour un
certain nombre d'entre elles, par un resserrement du côté des
dépenses; parfois la population s'est chargée elle-même
d'effectuer l'épuration souhaitée en novembre 1976 dans certains
cas et même 1977 dans d'autres. De plus, en accroissant les subventions
statutaires aux municipalités de 10 000 âmes et plus enfin,
auparavant c'était de 15 000, cela a baissé à 10 000
l'an passé et cette année, c'est à 5000 en
ayant des programmes clairs et précis où l'on connaît les
règles du jeu, je pense que la situation des municipalités
commence à s'assainir et c'est mon désir le plus cher qu'on
puisse faire en sorte que celles-ci, connaissant ces règles de
financement, sachent qu'elles devront s'autofinancer dans leurs projets
dès que ceux-ci se situent en dehors des programmes gouvernementaux
précis, ne s'engagent pas dans des dépenses
inconsidérées. Afin de les aider à s'assurer de ce fait,
la Loi des travaux municipaux a été amendée; non seulement
impose-t-elle une amende, mais elle peut rendre inhabile à siéger
toute personne qui, de façon inconsidérée, engage les
crédits de la municipalité.
Voilà, M. le Président, certaines des mesures prises pour
tenter d'assainir le climat: aide ponctuelle, amendement à la loi,
surveillance du ministère, tutelle dans certains cas, enquête
administrative dans d'autres. Mais, je pense que c'est par une série de
mesures et non pas en jouant nécessairement le Père Noël que
la situation pouvait être assainie.
M. Goldbloom: M. le Président, le ministre
reconnaîtra sûrement que ce n'est que quand il a parlé de
l'augmentation des subventions statutaires qu'il a parlé de
fiscalité. Les autres questions sont d'un autre ordre. La vente sous
pression de réseaux d'aqueduc et d'égouts exagérés
par rapport aux besoins de la municipalité, ce n'est pas une question de
fiscalité municipale, c'est une question de jugement.
M. Laplante: Une saine administration.
M. Tardif: Oui, M. le Président, mais on conviendra avec
moi que cela se transforme vite en une question de fiscalité lorsqu'il
faut imposer des taxes pour payer ces réseaux.
M. Laplante: On n'est pas pour payer cela, M. le
député de D'Arcy McGee avec les lettres de créances que
vous avez données.
Le Président (M. Marcoux): La commission...
M. Goldbloom: Ne commencez pas! Ne commencez pas! Cela va bien
jusqu'à maintenant, et si vous voulez commencer on ira...
M. Laplante: Ah, cela va bien!
M. Goldbloom: ... jusqu'au bout.
M. Laplante: ...
M. Goldbloom: Oui, monsieur!
Le Président (M. Marcoux): La commission des Affaires
municipales suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.
(Suspension de la séance à 18 h 4)
Reprise de la séance à 20 h 15
Le Président (M. Marcoux): À l'ordre,
messieurs!
La commission des Affaires municipales poursuit l'étude des
crédits du ministère des affaires municipales. M. le
député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Merci, M. le Président. L'an dernier, il y a
eu certaines mesures qui ont été annoncées afin d'aider
dans le domaine de la fiscalité. Il y avait je m'excuse d'en
parler le projet de loi qui aurait donné le droit de taxer les
plaques d'immatriculation, il y avait une surtaxe de 50% sur les terrains
vacants et il y avait l'assimilation des maisons mobiles à des immeubles
pour fins de taxation.
La surtaxe de 50% a été mise en vigueur, mise à la
disposition des municipalités, mais, si j'ai bien compris, la question
des maisons mobiles n'a pas été réglée
parfaitement. Est-ce que je me trompe?
M. Tardif: C'est tout à fait juste, M. le
Président. Ceci suppose un amendement à la Loi sur
l'évaluation foncière et déjà, l'an dernier, bon
nombre d'amendements ont été proposés par le
ministère, mais ces amendements n'étaient pas du nombre.
Le fait est que nous étions prêts assez tôt au
début de la présente session avec les amendements qui auraient
donné effet à cette mesure. Cependant, connaissant les intentions
du gouvernement en ce qui concerne la réforme de la fiscalité, il
nous a semblé préférable d'attendre pour regrouper ces
amendements à cette Loi sur l'évaluation qui avait connu par le
passé moult amendements, ainsi que le député de D'Arcy
McGee s'en souviendra sans doute. Il nous a semblé
préférable de les regrouper avec ceux découlant de
l'actuel discours du budget.
M. Goldbloom: Je ne voudrais pas aborder comme telle la question
de l'évaluation foncière pour l'instant, mais dois-je comprendre
que le ministre a trouvé que d'importantes modifications sont
nécessaires pour rendre la loi opérante, efficace ou s'agit-il
plutôt d'ajustements de la nature de ceux dont nous venons de parler?
M. Tardif: Non, M. le Président, il ne s'agit pas d'une
opération majeure. Je pense qu'il s'agit beaucoup plus d'ajouts, de
modifications mineures. Cependant, je vais donner un exemple. À partir
du moment où on a modifié, dans le discours du budget, la
taxation sur les entreprises de télécommunication, c'est un des
amendements aussi qu'il faudra apporter à la Loi de l'évaluation
foncière.
Je pense également tantôt aux prescriptions concernant le
contenu des comptes de taxe municipaux aussi, mais ce n'est rien qui va changer
la nature fondamentale de ce projet de loi.
M. Goldbloom: En ce qui concerne la surtaxe de 50% sur les
terrains vacants, le ministre est-il en mesure de nous indiquer combien de
munici-
palités s'en sont prévalues? Une liste est-elle
disponible? Aussi, le ministre peut-il exprimer une opinion ou nous fournir
certains renseignements sur l'effet de cette mesure? Le but n'était pas
seulement celui d'augmenter les revenus des municipalités, il
était en même temps, d'encourager un développement plus
rationnel en insistant pour que les lots vacants desservis avec une
infrastructure convenable soient les premiers à être bâtis,
parce que l'on a assisté à un développement
incohérent dans beaucoup de municipalités.
Il est peut-être tôt pour évaluer l'effet d'une telle
mesure mais il serait quand même utile et intéressant que le
ministre soit capable de nous donner au moins une impression de l'effet de
cette mesure sur ce deuxième plan.
M. Tardif: M. le Président, je prends avis de la question
en ce qui concerne le nombre de municipalités qui se seraient
prévalues de cette disposition de la loi.
J'en connais au moins une dont je peux lui dire présentement
qu'elle impose une surtaxe sur les terrains vacants, c'est la ville de
Montréal, par suite de la taxe olympique; ce n'est pas en vertu de ces
dispositions, mais je prends avis de sa question.
Quant à l'impact sur l'urbanisation, il est bien évident
que ce n'est pas cette seule mesure qui peut avoir un effet. Je pense notamment
aux programmes PAIRA et LIQUIDATION, dont les normes comportaient des exigences
sur le plan de la densité, où des normes de deux usagers à
l'acre et vingt usagers par mille pieds linéaires existaient et venaient
donc encore là amener une utilisation plus rationnelle des
infrastructures. Je pense également au programme de la
Société centrale d'hypothèques et de logement que nous
administrons et qui permet aux municipalités d'obtenir $1000 par
unité de logement moyennant que des normes de densité entre dix
et 45 unités de logement à l'acre soient respectées.
Comment distinguer entre l'effet des programmes PAIRA et les
éléments d'identification qu'ils comportent, entre le programme
de la Société centrale d'hypothèques et de logement que
nous administrons, entre la surtaxe sur les terrains vacants viabilisés,
à moins de faire une analyse factorielle, comment pondérer
l'impact de chacune de ces mesures? Je pense qu'il serait assez difficile de le
faire. Comme le député de D'Arcy McGee l'a mentionné,
c'est peut-être un peu trop tôt.
Néanmoins, je vais prendre avis de cette deuxième partie
pour le cas où nous serions en mesure d'indiquer si,
véritablement, nous avons réussi à restreindre un tant
soit peu l'étalement urbain.
M. Goldbloom: Le ministre a indiqué son intention de
regrouper plusieurs modifications à la Loi sur l'évaluation
foncière. Peut-être que je ne l'ai pas entendu clairement, mais
a-t-il indiqué à quel moment il prévoit être en
mesure de déposer un projet de loi?
M. Tardif: M. le Président, il y a les amendements qui
découlent du dernier budget; il y a ceux qui découlent des
impératifs reliés à l'application de la réforme de
l'évaluation foncière; il y a ceux qui découlent du budget
qui vient juste d'être annoncé; il y a ceux qui pourraient
résulter de l'application ou de la mise en oeuvre de la réforme
de la fiscalité à la suite de la conférence. Allons-nous
attendre d'avoir tout le paquet ou si nous allons faire dans un premier temps
ce qui est déjà, en fait, requis par les annonces dans le budget?
Je ne saurais le dire à ce moment-ci. Je préférerais
consulter les gens du contentieux, de la législation et aussi de la
Direction générale de l'évaluation foncière, dans
la mesure où je leur ai commandé cette étude
comparée, Ontario-Nouveau-Bruns-wick, et où on examine
attentivement ce qui se fait du côté de l'Ontario notamment,
à la suite des recommandations de la commission Blair. Mais je tenterai
peut-être, d'ici la fin des travaux de cette commission, d'indiquer de
façon un peu plus précise à quel moment nous pourrions
présenter des amendements.
M. Goldbloom: M. le Président, j'aurais l'intention
maintenant de passer à une autre facette de la fiscalité. Donc,
je ne voudrais pas monopoliser...
M. Cordeau: J'ai peut-être une question qui se rapporte un
peu indirectement à la fiscalité des municipalités. M. le
Président, lorsque M. le ministre a participé au congrès
de la Chambre de commerce du Haut-Saguenay, il a été question
d'une politique gouvernementale concernant le financement des infrastructures
par des promoteurs, et que vous auriez peut-être l'intention de demander
aux promoteurs une contribution jusqu'à 20% des projets et qu'il
était aussi dans vos intentions de présenter, durant la
présente année, un projet de loi à cet effet.
Pourriez-vous nous faire connaître plus en profondeur vos intentions
concernant ce financement des infrastructures pour aider les
municipalités?
M. Tardif: Oui, M. le Président. Sur la question du
financement des infrastructures, un bon nombre de municipalités nous ont
demandé de pouvoir exiger des promoteurs et des bâtisseurs une
partie de plus en plus grande des coûts des infrastructures.
Parallèlement à cela, nous avons reçu des
représentations de l'industrie de la construction demandant de freiner
cette tendance des municipalités de leur refiler une partie plus grande
de ces coûts. Les municipalités s'inspiraient en cela du
modèle ontarien et des provinces de l'Ouest où ce sont les
promoteurs, les entrepreneurs qui paient en entier le coût des
infrastructures. Face à cette situation et à ce qui se
développait au Québec, c'est-à-dire avoir des
municipalités qui payaient entièrement, d'autres qui refilaient
entièrement le coût et certaines qui en faisaient assumer 20%,
40%, 50%, 60%, 80% par les bâtisseurs, le ministère a
procédé à une consultation auprès des divers
intervenants: industrie de la construction, prêteurs
hypothécaires, promoteurs, municipalités, greffiers,
trésoriers du
monde municipal, et avait formulé une hypothèse à
l'effet de faire assumer 20% des coûts par les promoteurs, 60% par les
usagers, les riverains, et 20% par l'ensemble de la collectivité.
Cette hypothèse résultait de cette série de
consultations avec les divers intervenants. Elle nous semblait se situer dans
un lieu raisonnable entre repasser tous les coûts au bâtisseur et
en dernier lieu à la clientèle. Nous ne croyions pas sage,
à ce moment-là, de préconiser une formule semblable
à celle de l'Ontario pour la simple raison que l'industrie de la
construction, au Québec, est encore le fait de plusieurs petites
entreprises québécoises francophones. Il nous semblait que
permettre le financement des infrastructures à 100% par les promoteurs
aurait pour effet d'augmenter le coût moyen des constructions de $6000
à $8000 et d'éliminer du marché de la construction
plusieurs petits entrepreneurs qui n'auraient pas les reins assez forts pour
défrayer le coût des rues, des trottoirs, des infrastructures.
D'autre part, il nous semblait qu'une contribution minimale de
l'entrepreneur pouvait assurer que celui-ci voie à la surdimension des
services, donc s'assure que véritablement il n'y ait pas de gaspillage
de ce côté.
Évidemment, on se trouvait entre ces deux extrêmes, les
municipalités voulant refiler une partie de plus en plus grande des
coûts et les constructeurs s'y opposant. Cette hypothèse du
ministère qui a été soumise nous apparaisait comme une
solution de compromis honorable, en l'occurrence. Une fois que nous l'avons
formulée, nous l'avons mise par écrit et envoyée à
l'Union des municipalités, l'Union des conseils de comté, qui a
pris un temps beaucoup plus long à réagir à ce document
que nous l'aurions cru. (20 h 30)
Ce n'est que tout récemment que nous avons eu les réponses
de l'Union des municipalités et de l'Union des conseils de comté,
réponses qui sont décevantes, à certains égards,
puisque ce qu'on préconise, ni plus ni moins, c'est le laisser-faire.
C'est la politique de non-intervention. Laissez-nous donc décider de la
façon de financer ces infrastructures.
Je résume peut-être de façon succincte, mais c'est,
en gros, la situation, au moment où nous nous parlons. J'ai donc
demandé, tout juste avant la fin de semaine, à mes
fonctionnaires, de reprendre le dossier et de me faire des recommandations qui,
tout en essayant d'atteindre les objectifs que nous souhaitions, n'aient pas
les effets secondaires indésirables que l'on a constatés dans les
autres provinces.
C'est la situation présentement et au moment où nous nous
parlons, c'est le résumé...
M. Cordeau: Est-ce que vous croyez, M. le ministre, que vous
allez avoir à votre disposition de nouvelles recommandations pour la
conférence Québec-municipalités au mois de juin
prochain?
M. Tardif: Pour autant que les municipalités sont
concernées, j'ai l'impression que l'affaire est à peu près
classée. Elles ont indiqué leur position de politique de
laisser-faire, peut-être tempérée par une marge de
manoeuvre qui ferait en sorte que si ce n'est pas entre 0 et 100%, cela
pourrait être entre 25% et 50%, en tout cas; une marge de manoeuvre assez
grande pour elles.
Nous allons voir dans quelle mesure il sera possible d'obtenir quelque
chose qui puisse se défendre, sans porter préjudice, encore une
fois, à une industrie qui, chez nous, a la caractéristique que
l'on connaît.
J'ai été particulièrement à même de
constater l'influence de cette politique de financement des infrastructures par
les bâtisseurs lorsque je suis allé à Edmonton
récemment, pour constater qu'une petite maison unifamiliale de cinq
pièces, construite en banlieue d'Edmonton, rien de luxueux se vendait
$66 000 l'équivalent de ce que nous pouvons peut-être payer $33
000 dans la région de Montréal.
Tout n'est pas directement attribuable, dans un premier temps, au seul
fait que les entrepreneurs financent les coûts des infrastructures. Il y
a une bonne part des coûts résultant de cela. Mais mon
interlocuteur établissait la situation à Edmonton de la
façon suivante: D'une part, financement des infrastructures par les
promoteurs, élimination de la concurrence, monopolisation de l'industrie
de la construction. Seuls les gros entrepreneurs pouvaient encore une fois
avoir les reins assez forts pour payer le coût des infrastructures. Cette
monopolisation de l'industrie de la construction a amené une
monopolisation du sol si bien que maintenant, autour d'Edmonton, il y a deux
entrepreneurs qui possèdent tous les terrains vacants et qui font les
prix, littéralement. Je ne crois pas que cette situation soit
souhaitable. J'aurais espéré que les municipalités en
viennent à réaliser les dangers de cette situation. Je ne
lâcherai pas. J'ai l'intention de reprendre le dossier avec elles et si,
à un moment donné, d'un commun accord avec le monde municipal, il
n'était pas possible d'établir des règles du jeu, le
gouvernement prendrait ses responsabilités, le ferait.
M. Cordeau: Est-ce que vous avez toujours l'intention de
présenter un projet en ce sens en 1978?
M. Tardif: Ce n'est pas nécessaire, à ce
moment-là, de présenter un projet de loi, puisque le
ministère a, à cet égard, beaucoup d'autres outils,
notamment l'approbation de règlements d'emprunts et d'autres choses
semblables qui pourraient lui permettre d'agir.
Quant à la technique, elle m'apparaissait plutôt secondaire
par rapport au fond du problème.
M. Cordeau: La question était pour clarifier ce qui avait
été rapporté dans le journal Le Constructo.
M. Tardif: La technique, c'est l'objectif à
atteindre...
M. Cordeau: C'est l'objectif.
M. Tardif: ... la technique voulue, la réglementation aux
projets de loi.
M. Cordeau: Parfait.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais encore une fois
féliciter le ministre de cette prise de position. Il a compris ce que
certaines autres personnes n'ont pas compris la nécessité de
protéger la petite entreprise québécoise contre l'effet
d'une mesure qui est commune aux autres provinces. Je pense avoir dit, au cours
d'un débat précédent, peut-être l'an dernier, que
chaque fois que j'allais à une conférence
fédérale-provinciale, sur l'habitation notamment, les
collègues des autres provinces soulignaient la différence et me
disaient: Ne changez pas, ne changez pas le régime que vous avez, parce
que nous subissons de mauvais effets du nôtre.
Je suis heureux que le ministre poursuive cette même ligne de
pensée. J'aimerais lui poser une question qui découle
indirectement de cette discussion. En parlant de la fiscalité
municipale, nous avons, à plusieurs reprises, parlé de
l'autonomie des municipalités, de l'autosuffisance que nous voudrions
donner aux municipalités. Le régime des subventions statutaires
per capita a été instauré dans ce but et a
été élargi, d'abord, par le gouvernement
précédent et maintenant, à deux reprises, par le
gouvernement actuel; sauf que, quand on baisse le plancher pour le situer
à 5000 âmes de population à raison de $6 et quelques cents
par...
M. Tardif: 94 cents.
M. Goldbloom: $6.94; alors, disons $7.00.
M. Tardif: C'était $6.40, mais, avec l'indexation
automatique...
M. Goldbloom: D'accord. Alors, rendu à $7.00 per capita,
pour une municipalité de 5000 âmes, il y aura un montant, en
chiffres ronds, de $35 000 par année.
Le ministre croit-il vraiment qu'une telle municipalité pourra
devenir auto-suffisante avec $35 000 de plus par année?
M. Tardif: Je pense que...
M. Goldbloom: Si le ministre me permet... Il y a un corollaire,
une question corollaire à celle-ci...
Le Président (M. Marcoux): Additionnelle.
M. Goldbloom: Additionnelle, si vous voulez,
supplémentaire. Est-ce l'intention du ministre de suivre la politique
déjà établie par rapport aux subventions statutaires per
capita, c'est-à-dire d'informer les municipalités qu'à
partir du moment où de telles subventions commenceront à
être versées, il n'y en aura plus pour des projets
précis?
M. Tardif: M. le Président, il est bien évident que
poser la question comme l'a fait le député de D'Arcy McGee, c'est
presque y répondre en même temps.
C'est qu'on ne saurait faire résider l'autonomie des
municipalités dans cette seule forme de revenus statutaires. Il s'agit
beaucoup plus d'une mesure additionnelle qui, s'ajoutant à des revenus
autonomes accrus, à une assiette fiscale élargie, à
l'évacuation en ce qui concerne, par exemple, une partie de
l'impôt foncier scolaire par le gel cette année, d'une mesure qui,
s'ajoutant à d'autres, vient assurer ces municipalités d'un
revenu qu'elles pourront affecter à toutes fins municipales qu'elles
jugeront opportunes, sans l'assortir de conditions quant à son
utilisation.
Il est bien évident que ce n'est pas une mesure suffisante en
soi.
Le deuxième élément: Est-ce que les
municipalités sont bien au fait que ceci implique la disparition
d'autres formes de subventions ponctuelles ou conditionnelles à
l'intérieur de certains programmes? La réponse est oui, dans la
mesure où les programmes PAIRA, PAISI, LIQUIDATION, PAIRE, PAREM. PACEM,
énoncent clairement les conditions d'admissibilité.
Ces conditions d'admissibilité, dans le cas de PAIRA notamment,
indiquent que ces programmes d'aide à l'implantation de réseaux
d'aqueduc parce que c'est ça la signification du sigle ne
s'appliquent qu'aux municipalités rurales régies par le Code
municipal et qui, à 99,9%, ont moins de 5000 de population. Il y a bien
une ou deux exceptions dont celle de Saint-Louis-de-Terrebonne, qui a presque
10 000 de population. C'est l'exception qui confirme la règle. Les
municipalités savent pertinemment, au moment où les programmes
sont annoncés, à quelle catégorie de municipalités
ces programmes s'adressent.
Dans le cas du programme PAIRE, celui-ci est accessible, peu importe la
taille des municipalités, y compris les communautés urbaines.
C'est celui d'aide à la confection d'un rôle
d'évaluation.
L'an dernier, M. le Président, nous avions établi, sur le
plan des infrastructures notamment, le programme PAIRA pour les
municipalités rurales, les municipalités de 10 000 âmes et
plus qui recevaient un per capita de $6.40, qui a été
indexé au cours du dernier budget à $6.94; elles recevaient donc
automatiquement un chèque à toutes fins qu'elles jugeaient
utiles. Il y avait, entre les deux, un vacuum entre les municipalités
rurales d'une population de 3000 et moins ou à peu près et les
municipalités admissibles au per capita. Ce vacuum de
municipalités qui, parfois, avaient connu une croissance rapide, nous
avons donc pensé le combler à l'aide du programme LIQUIDATION,
dont le nom symbolique impliquait que nous voulions liquider un certain nombre
de situations
difficiles sur le plan de l'éclatement qu'avaient connu ces
villes. Ce programme avait été instauré pour elles. Je
dois dire qu'en gros nous avons pu régler un certain nombre de cas et
que, s'il s'avérait nécessaire pour ces villes qui, somme toute,
et là, c'est important de le souligner, M. le Président, sont
déjà dotées de réseaux d'aqueduc et d'égout,
lorsqu'on parle de municipalités d'entre 5000 et 10 000 âmes
à peu près, et où une croissance plus ou moins rapide
exige parfois pas tellement un développement de leur propre
réseau, mais bien posent des problèmes d'intermunicipalisation de
réseaux et de raccordements... C'est une autre donnée, une autre
dimension du problème sur lequel nous nous penchons. Il est bien
évident que l'introduction ou le fait de mettre le plancher à
5000 âmes pour les subventions statutaires ne dispensent pas de se
préoccuper des autres mesures visant à accroître
l'autonomie des municipalités.
M. Goldbloom: M. le Président, il y a une autre facette
que j'aimerais examiner avec le ministre nous en avons parlé un
peu cet après-midi, je pense c'est l'endettement des
municipalités.
Dans la revue du ministère, Municipalité 78, du mois de
février, il y a des statistiques sur les obligations municipales qui
indiquent qu'en 1976 les administrations municipales du Québec ont
négocié un total de 532 émissions d'obligations pour une
valeur totale de $748 147 000.
Il n'y a pas de tableau pour nous indiquer comment cela se compare aux
années précédentes. Y a-t-il des chiffres
déjà disponibles pour 1977? M. le Président, ce chiffre de
$750 millions représente-t-il une diminution suffisante pour permettre
au ministre de dire qu'il est satisfait que l'on ait réussi à
rétablir le rythme de l'endettement des municipalités? (20 h
45)
M. Tardif: M. le Président, les chiffres dont je dispose
m'indiquent que pour l'année 1976/77 le montant des obligations
émises s'élevait à $743 millions; en 1977/78, il
s'élevait à $1 187 000 000 et l'estimation pour l'année
1978/79 s'élève à $841 millions.
L'année 1977/78, avec ce sommet et ce nouvel affaissement en
1978/79, provient entre autres du financement de la dette olympique de la ville
de Montréal de $214 millions ou $224 millions.
M. Goldbloom: Or, à part ce sommet, il n'y a vraiment pas
de changement significatif dans le rythme des emprunts des
municipalités? On émet des obligations à un rythme qui est
à peu près constant si l'on tient compte de l'inflation, de
l'augmentation des coûts des travaux et tout cela?
M. Tardif: Si l'on défalque les $224 millions
opération que je vais essayer de faire tout de suite en effet, la
situation progresse à peu près normalement si on fait la part de
l'augmentation des coûts des infrastructures.
On me signale également une autre donnée importante qui
ferait qu'il est peut-être imprudent de s'attarder au nombre
d'obligations émises au cours d'une seule année, puisque le
nombre d'obligations autorisées ou de règlements autorisés
non vendus s'élève à $1 800 000. Bien souvent, il y a des
délais entre le moment où les règlements d'emprunt ont
été autorisés par le ministre et la commission municipale,
puisque ce sont les deux qui doivent autoriser, et le moment où ces
règlements sont effectivement vendus sur le marché, des
délais pouvant s'échelonner entre 12 et 24 mois et même
davantage.
M. Goldbloom: Le ministre pourrait-il répéter ce
chiffre?
M. Tardif: De règlements d'emprunt autorisés non
vendus: $1 800 000 000.
M. Goldbloom: Ce chiffre représente-t-il surtout des
délais de procédure? Est-ce un montant qui finira par se vendre
en majeure partie?
M. Tardif: Sur le $1 800 000 000, environ $7 millions à $8
millions sont pour la seule communauté urbaine de Montréal avec
les infrastructures, le métro, les immobilisations diverses. Maintenant,
étant donné que ce sont les municipalités qui ont la
maîtrise d'oeuvre des travaux et qu'elles viennent chercher des
autorisations tant chez le ministre qu'à la commission municipale et que
parfois elles peuvent décider de retarder elles-mêmes la
réalisation de ces projets, il nous est difficile d'apprécier
à quel moment elles décideront d'aller sur le marché des
obligations. Ce n'est pas une décision qui relève du
ministère.
M. Goldbloom: Néanmoins, M. le Président, j'ai cru
comprendre que le ministre exprimait au cours de la journée une certaine
inquiétude quant à la masse financière
représentée, quant au fardeau financier assumé par les
municipalités. Est-ce une inquiétude générale ou en
est-ce une qui porte sur les quelques cas qu'il a mentionnés où
l'endettement semble dépasser les normes raisonnables?
M. Tardif: Je crois, M. le Président, qu'il ne faudrait
pas exagérer. Si j'ai mentionné que, sur 1600
municipalités au Québec, 160 d'entre elles avaient à
l'occasion d'un relevé effectué il y a quelques mois
dépassé la cote de 15%, cela reste quand même 160
municipalités sur 1600, moins de 10% des municipalités. C'est
donc dire que, dans 90% des cas, et bien souvent pour les plus populeuses et
les mieux pourvues, le seuil d'endettement est encore à un niveau
raisonnable. Le fait est qu'aucune des municipalités ou à peu
près n'éprouve de difficultés à écouler ses
obligations sur le marché. Il reste que ces cas d'endettement doivent
faire l'objet d'une attention et la Commission municipale s'arrête, aussi
bien que le ministère, sur ces cas particuliers.
M. Goldbloom: M. le Président, le ministre a
mentionné plus tôt dans la journée les trois
critères qui peuvent être utilisés pour évaluer le
degré d'endettement d'une municipalité. Un de
ces critères, c'est le rapport entre l'endettement et
l'évaluation totale. Cela me ramène à une question que
j'ai posée dans un autre contexte, c'est-à-dire que, la
réforme de l'évaluation foncière n'étant pas encore
réalisée, il y a sûrement des municipalités dont le
rôle n'est pas à la valeur réelle. Or, sur papier, la
valeur totale de la municipalité, valeur contre laquelle la
municipalité peut emprunter, valeur contre laquelle il faut calculer
l'endettement n'est pas réaliste. Dans l'évaluation de
l'endettement, a-t-on tenu compte de cela?
M. Tardif: La réponse est oui, M. le Président. De
telles études se font généralement à partir des
rôles d'évaluation scolaire qui, eux, sont normalises.
M. Goldbloom: D'une certaine façon.
M. Tardif: Oui, enfin de la façon prévue par la
loi.
M. Goldbloom: Disons d'une façon controversée.
M. Tardif: Oui, si l'on veut, mais, enfin, qui est mieux de ne
tenir compte d'aucun facteur de correction du tout, puisque c'est tout à
fait juste de dire qu'un taux d'endettement qui serait basé sur une
valeur foncière évaluée à 10%, à 20%,
à 30% de la valeur et une autre à 80% ne permettraient pas une
base comparée, enfin comparative.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président, ce matin...
M. Tardif: Juste une remarque additionnelle, si on me permet
aussi. L'amendement que nous avons apporté à la Loi des
cités et villes en obligeant les municipalités à nous
fournir un programme triennal d'immobilisations nous aide également dans
ce sens-là à avoir une meilleure idée et à
questionner les municipalités face à ces règlements
d'emprunt autorisés non vendus. Nous nous efforçons, chaque fois
qu'on nous présente des règlements d'emprunt, avant d'en
autoriser de nouveaux, d'essayer avec elles de liquider les anciens à la
lumière, évidemment, de leur taux d'endettement. Je m'excuse.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Ce matin, il a été question de
l'endettement des municipalités avec $3 485 000 000. Je vois depuis
tantôt que vous avez une bible, est-ce que vous avez aussi l'endettement
des municipalités à la même date, pour 1976?
M. Tardif: M. le Président, à la suite de la
question qui a été posée ce matin par le
député de Saint-Hyacinthe, on m'informe que, jeudi matin, nous
devrions pouvoir lui donner les chiffres exacts de l'endettement au 28
février 1978.
M. Cordeau: Est-ce que vous pouvez me dire, par la même
occasion, pour quelle date était le chiffre de $3 485 000 000?
M. Tardif: C'était le 31 décembre 1975, mais nous
avons reçu votre document et nous nous arrangerons pour que les
données qu'on vous fournira, quant aux chiffres pour les années
1976/77, soient comparables à celles que vous avez.
M. Cordeau: S'il vous plaît!
M. Goldbloom: M. le Président, quant à celui qui
vous parle, je serais prêt à changer de sujet et à aborder
celui qui est l'élément 1 du programme 1, c'est-à-dire la
restructuration municipale. Je ne veux toutefois pas priver mes
collègues de l'occasion de poser d'autres questions.
M. Cordeau: Si d'autres questions nous viennent à
l'esprit, même si cela concerne le programme 3 et qu'on est rendu au
programme 1, serait-il possible de les poser? Je serais prêt à
procéder, à ce moment-là.
M. Tardif: Tout à fait.
Restructuration municipale
Le Président (M. Marcoux): Élément 1 du
programme 1; Restructuration municipale.
M. Goldbloom: J'ai d'abord une question technique, M. le
Président. Je constate que, selon les chiffres qui nous sont fournis, il
y a une diminution du total des hommes-année de 83 à 69 et
pourtant il y a une augmentation des traitements de presque $300 000.
M. Tardif: M. le Président, deux raisons expliquent ce
phénomène. La première, ce sont évidemment les
augmentations de salaires prévues dans les conventions collectives de
travail, en raison du vieillissement du système, du fait qu'on gravit
les échelons. Quant à la diminution des effectifs comme telle,
elle n'est pas aussi réelle que celle qui apparaît dans ce
document, puisque tous les postes d'occasionnels ont été
regroupés dans un autre programme et que l'on trouvera, je crois, au
programme 4.
M. Goldbloom: M. le Président, je me permets un
commentaire que je ne voudrais pas désobligeant: ce genre de question
pourrait être évité, s'il y avait un peu plus
d'explications dans le cahier. C'est peut-être beaucoup demander à
chaque ministère de fournir de telles explications, de façon
écrite, dans un cahier, mais quand même, je me demande s'il n'y a
pas moyen de fournir un peu plus de détails. Il y a toujours une
explication et elle est presque toujours bonne. On pourrait parler de choses
plus fondamentales, s'il y avait un peu plus de renseignements.
M. le Président, pour aller dans le vif du sujet, y a-t-il eu des
regroupements cette année, des
annexions de territoires, des choses comme cela? Si oui, combien? (21
heures)
M. Tardif: M. le Président, il y a eu en effet quelques
fusions de municipalités en 1977/78, mais très peu: En fait, j'en
dénombre huit, grosso modo, si cela intéresse la commission:
Sainte-Hélène-de-Bagot, paroisse et village; Shipshaw et l'ancien
village de Saint-Jean-Vianney; Sainte-Claire paroisse et Sainte-Claire
municipalité et la municipalité de Louis-Joliette; les
municipalités de Fiedmont et Barraute, municipalités sans
désignation avec Barville; Pointe-du-Lac et la municipalité de La
Visitation de la Pointe-du-Lac, municipalité sans désignation
également; de la même manière je ne sais pas si cela s'est
produit avant le 31 mars dans le cas de Sainte-Marie village et paroisse, ainsi
que dans le cas de Brassard et Notre-Dame-du-Sacré-Coeur. C'était
pendant devant le Conseil des ministres, de sorte que je ne sais pas à
quel moment précis ces fusions ont eu lieu, soit avant ou après
le 31 mars.
M. Goldbloom: Le ministre a-t-il décrété des
unités de regroupement au cours de la dernière année?
M. Tardif: Aucune, M. le Président, de mémoire.
M. Goldbloom: Y a-t-il des unités de regroupement,
décrétées dans le passé, qui ont été
modifiées?
M. Tardif: II y a beaucoup de demandes pour en avoir, notamment
dans l'Outaouais, M. le Président, mais il n'y en a pas eu encore.
M. Goldbloom: Puisque le ministre a abordé le sujet,
qu'est-ce qui arrive? Quelles sont les intentions du ministre dans le
célèbre cas de Buckingham?
M. Tardif: M. le Président, évidemment, je me suis
avancé en quelque sorte en parlant de l'Outaouais. Il s'agit
évidemment du cas de Buckingham, lequel cas a été soumis
au ministère il y a déjà quelques mois. Nous avons
reçu des requêtes de divers groupes de citoyens, ceux des
anciennes municipalités d'Angers et de Masson, ceux de
Notre-Dame-de-la-Salette, ceux de quelques-unes des autres municipalités
anciennement autonomes qui ont été fusionnées à la
ville de Buckingham par la loi régissant les municipalités du
Haut-Saguenay et de l'Outaouais.
M. le Président, ces requêtes de citoyens visaient, dans le
cas de Buckingham, à prier le ministre des Affaires municipales à
décréter la tenue d'un référendum sur la question
de ce qu'on a appelé le dégroupement.
J'ai expliqué à tous les groupes concernés que la
loi ne permettait pas au ministre des Affaires municipales de
décréter un tel dégroupement ou un tel
référendum, que le conseil municipal avait, de par la Loi des
cités et villes, tous les pouvoirs voulus pour décréter un
tel référendum.
Le conseil municipal de Buckingham, il y a de cela plusieurs mois, a
passé une première fois une résolution en ce sens, mais
par la suite en a passé une autre pour s'opposer à la tenue d'un
tel référendum.
Des groupes de citoyens sont venus me voir et ont, à nouveau,
insisté auprès de moi. Je les ai à nouveau renvoyés
à leur conseil en disant que celui-ci était, dans le contexte
actuel, de par les lois de droit municipal, le seul habilité à
décréter la tenue d'un tel référendum. Les citoyens
ont décidé, après des études possibles de
réaménagement du territoire, de se cotiser entre eux, parce que
le conseil refusait de tenir le référendum en invoquant une
question de coûts. Les citoyens se sont cotisés, ont
ramassé l'argent requis et je suis informé à l'instant
même qu'ils ont obtenu, hier soir, du conseil de ville de Buckingham que
ce dernier adopte une résolution décrétant la tenue d'un
référendum qui serait payé par ces cotisations des
citoyens. Il y aura donc tenue d'un référendum. À la
lumière de cela, nous verrons quelle sorte de dégroupement ou de
nouveau découpage du territoire s'imposera. Je pense qu'il n'est pas
question de retourner aux huit municipalités qui ont été
regroupées dans la ville de Buckingham, mais il est bien évident
que des municipalités sises tout à fait au nord de cette ville
qui fait, de mémoire, environ 35 milles de long, quand on pense à
Notre-Dame-de-la-Salette tout à fait en haut au nord et à des
municipalités sises sur le bord de l'Outaouais, comme Masson et Angers,
il est tout à fait concevable d'avoir des unités de regroupement
différentes. Selon le résultat du référendum, nous
examinerons la situation.
M. Goldbloom: M. le Président, je ne veux pas être
désagréable à l'endroit du ministre, mais il m'a
donné une réponse, il y a quelques instants le
problème n'est pas majeur et il m'a dit qu'il n'avait pas
décrété de modifications à des unités de
regroupement. Or, je viens d'en trouver...
M. Tardif: Je l'ai dit à ma connaissance, de
mémoire.
M. Goldbloom: ... une dans Municipalité 1978... M.
Tardif: II y en a une.
M. Goldbloom: ... du mois d'avril: Rivière-du-Loup,
paroisse de Saint-Patrice et...
M. Tardif: Cacouna.
M. Goldbloom: ... Cacouna, oui, les deux Cacouna qui ont
été ajoutés. Ce n'est pas grave, M. le
Président.
M. Tardif: Je m'en excuse auprès du
député.
M. Goldbloom: Ce n'est pas plus grave que cela, M. le
Président.
Il y a eu certains projets de regroupement qui ont été
mentionnés l'an dernier par le ministre. Notamment, la ville de
Québec était intéressée à
absorber Lac-Saint-Charles et Saint-Émile. Y a-t-il des
développements dans ces deux dossiers?
M. Tardif: On m'informe, M. le Président, qu'effectivement
une étude technique avait été commandée au
ministère par suite de ce que nous percevions comme certains
désirs d'une ou des municipalités concernées d'effectuer
et de voir à effectuer ce regroupement.
Or, on m'informe qu'il n'y a eu aucun développement de ce
côté. Comme chacun le sait, il y a eu des élections
à Québec. Peut-être qu'il y a eu d'autres priorités.
Est-ce que le dossier sera repris à un moment donné? Je ne
saurais le dire à ce moment-ci.
M. Goldbloom: Le nombre de projets de regroupement ce
sont, maintenant, à ma connaissance, des projets volontaires de
regroupement accuse-t-il une baisse ou s'il y a encore plusieurs
dossiers qui sont entre les mains de la direction générale?
M. Tardif: À l'oeil, M. le Président, je dirais
qu'il y a une baisse. Quant au nombre de cas à l'étude, j'ai
déjà signifié publiquement que nous n'avions pas
l'intention d'imposer des regroupements. Peut-être cela a-t-il eu cet
effet à la baisse. C'est ce que je constate dans les dossiers qui sont
à l'étude au ministère.
M. Goldbloom: Y a-t-il un travail qui se fait
présentement, de la part des fonctionnaires, pour préparer des
ententes, des protocoles d'entente entre municipalités? Y a-t-il
d'autres dossiers qui requièrent présentement l'aide technique du
ministère?
M. Tardif: La situation, en ce qui concerne la Direction
générale des structures municipales, a été,
jusqu'à maintenant, de procéder à des analyses ou à
des études sur demande soit de municipalités, soit de divers
groupements, et il n'y a pas eu systématiquement d'entreprises, au
ministère, des études motu proprio de fonctionnaires voulant, ou
croyant regrouper des municipalités. Cela a été beaucoup
plus, encore une fois, d'attendre, d'agir à l'initiative des
municipalités.
M. Verreault: M. le Président, il y a environ un an, la
municipalité d'Adamsville avait souligné l'intention de se
désannexer de la municipalité de Bromont. Est-ce qu'il y a eu des
développements ou si la demande a été rejetée?
M. Tardif: Aucun dossier, ici en tout cas, m'apprend-on, n'est
à l'ordre du jour. Je pourrais me renseigner de façon plus
précise sur ce cas et essayer de répondre au député
de Shefford au cours des travaux de cette commission.
Il serait peut-être bon de souligner qu'au cours de ces derniers
mois, si nous n'avons pas étudié les cas de fusion autrement
qu'en nous penchant sur ces cas à la suite des requêtes des
municipalités, nous avons mis l'accent sur l'étude des structures
supramunicipales que constituent les communautés, et notamment la
Communauté urbaine de Québec, et ce, sur les instances du
député de D'Arcy McGee qui, lorsque, l'an dernier, j'apportais
des amendements à la loi de la CUQ, me posait la question: Quand
allez-vous repenser les structures de cette communauté?
Le fait est qu'un projet de modification aux structures de la
Communauté urbaine de Québec a été adopté au
Conseil des ministres, que j'ai rencontré toutes les
municipalités membres de la Communauté urbaine de Québec,
que le projet de loi est rédigé, qu'il est présentement au
comité de législation et devrait être déposé
en Chambre incessamment.
M. Goldbloom: C'est une nouvelle intéressante, M. le
Président.
J'aimerais parler un peu des communautés, mais, avant de le
faire, j'ai un cas d'espèce sur lequel j'aimerais avoir des
renseignements. Quel est l'état actuel du dossier
Lévis-Lauzon-Saint-David-de-l'Auberivière?
M. Tardif: Statu quo, M. le Président, dans la mesure
où Lévis n'est pas du tout intéressée à
partager sa taxe de vente avec la municipalité de Lauzon.
M. Goldbloom: Bon, M. le Président. L'an dernier...
M. Tardif: On pourra peut-être reprendre le dossier
après la réforme de la fiscalité.
M. Goldbloom: Je ne fais pas de commentaire. J'attendrai tout
simplement.
L'an dernier, le ministre nous a permis d'examiner avec lui une
hypothèse avancée dans le programme électoral du Parti
québécois pour 1976, c'est-à-dire celle de la
création de municipalités régionales, je pense que c'est
le terme qui a été employé.
Les réflexions du ministre et du gouvernement ont-elles
accusé un certain progrès? Si oui, où seront
créées les premières municipalités
régionales au Québec?
M. Tardif: M. le Président, je regrette de devoir
décevoir le député de D'Arcy McGee, mais je ne pourrais
pas lui annoncer en primeur la création d'une communauté
régionale dans l'un quelconque des coins du Québec. (21 h 15)
Je dois dire néanmoins que, puisque, ce matin, nous avons
parlé brièvement du dossier sur la décentralisation, cette
question de la création d'organismes supramunicipaux dans les endroits
autres que les communautés urbaines, celle de Montréal et celle
de Québec, une communauté régionale, celle de l'Outaouais,
qu'il existe le Conseil métropolitain du Haut-Saguenay, et je dois
peut-être faire ici, également, une parenthèse pour dire
que nous avons, dans le cas de la rive sud de Montréal, travaillé
sur une hypothèse de création d'un organisme supramunicipal
à vocation polyvalente, notamment en matière d'adduction
d'eau,
de fourniture d'eau, d'égout et d'aménagement, organisme
qui pourrait s'apparenter, quant aux territoires couverts, aux sept ou huit
municipalités qui sont déjà desservies par une commission
de transport.
Hormis ces cinq cas d'organismes supramunicipaux, quatre existants et un
cinquième en gestation, le comité sur la décentralisation
s'est penché sur cette question, à partir non pas de la
création d'organisme de novo, mais bien de structures municipales
existantes, à savoir les conseils de comté, structures
municipales qui datent, d'accord, et dont il faudra peut-être revoir les
frontières qui ont été dessinées à une autre
époque, mais qui nous apparaissent être ou devoir être la
structure porteuse d'une éventuelle décentralisation de
compétences gouvernementales, d'une part, et, d'autre part, de
regroupements de certaines fonctions qui seraient ou sont présentement
accomplies localement. C'est beaucoup plus dans une approche plus globale que
de songer à la création, dans un endroit du territoire
donné, d'une communauté régionale, c'est donc dans une
approche beaucoup plus globale que nous avons abordé cette question. Le
document sur la décentralisation, qui est un document de travail, a
posé non seulement la question de la décentralisation de
fonctions gouvernementales, mais aussi de structures supramunicipales,
appelons-les comme ça.
M. Goldbloom: Ce n'est pas la première fois que le
ministre parle des conseils de comté comme l'éventuelle structure
administrative porteuse pour l'élargissement de la chose municipale, en
reconnaissance de la nécessité d'une collaboration
structurée entre des municipalités sur un territoire
donné.
J'aimerais lui demander, surtout en ce qui concerne la redistribution de
la carte des conseils de comté, s'il a carrément obtenu le
consentement de l'Union des conseils de comté à la refonte de la
carte du Québec à cet égard.
M. Tardif: Non, M. le Président, on n'en est pas
là. On en est présentement à examiner quelle est cette
carte des conseils de comté municipaux, laquelle, comme chacun le sait,
est différente de celle des comtés électoraux, des
districts électoraux du Québec, laquelle est aussi
différente et recoupe les régions administrations du gouvernement
du Québec; elle diffère également de la carte des
commissions scolaires locales, régionales ou intégrées, et
on pourrait ainsi faire le tour de tous les ministères et se rendre
compte que chacun s'est découpé le territoire en autant de
morceaux que ça faisait son affaire.
C'est donc un vaste travail, et serait bien malin celui qui croirait
pouvoir trouver ou avoir trouvé le découpage idoine. Il reste
qu'un premier effort a été fait de ce
côté-là, et nonobstant les décisions ultimes et les
négociations qui pourraient avoir lieu en temps et lieu avec l'Union des
conseils de comté, il existe dans notre droit municipal depuis 1855 une
structure supramunicipale qui s'appelle le conseil de comté. Cet
organisme, qui a été considéré par certains de nos
prédécesseurs com- me étant moribond, est revenu à
la surface il y a quelques années et s'est vu en mesure d'occuper une
place de plus en plus grande. Je pense à la Loi sur l'évaluation
foncière, qui leur confie un rôle que les conseils de comté
n'avaient pas auparavant; je pense à la Loi sur les mutations
immobilières, qui permet aux conseils de comté de substituer aux
municipalités pour la perception de leurs droits; je pense aux
amendements à la loi 55, qui permet aux conseils de comté
d'établir des systèmes de gestion des déchets solides; je
pense aux normes minimales d'urbanisme qui ont été
adoptées aussi en vertu de la loi 55, loi qui permet aux conseils de
comté d'adopter ces normes en lieu et place des municipalités
rurales.
Bref, les conseils de comté jouent de plus en plus ou
tentent de jouer de plus en plus un rôle, et il m'apparaît
que, en tout cas, le gouvernement, au lieu de vouloir créer de toutes
pièces une structure nouvelle dans le paysage québécois,
songe à utiliser cette structure et à élaborer avec ces
organismes l'avenir en quelque sorte de compétences qui pourraient
être confiées à des organismes supramunicipaux.
M. Goldbloom: M. le Président, le ministre sait
sûrement que, quand il parle de l'élargissement du rôle des
conseils de comté, quand il parle de confier aux conseils de
comté des responsabilités au lieu de créer de nouvelles
structures administratives, en ce qui me concerne, il prêche à un
converti. Je suis tout à fait d'accord avec lui.
Il y a deux ombres au tableau. J'en ai mentionné la
première, c'est-à-dire le découpage. Il est vrai qu'il
existe depuis 1855, mais il est également vrai que les conseils de
comté, depuis que je les connais, résistent vigoureusement
à toute tentative de modification de leurs frontières. C'est pour
cela que j'ai posé la question tout à l'heure: Le ministre a-t-il
obtenu ce consentement? Le ministre m'a répondu qu'il n'est pas rendu
à cette étape.
L'autre problème, qui a été majeur dans le
passé, c'est que, pour faire administrer un territoire donné par
un conseil de comté, il faut, dans la majorité des cas, tenir
compte de la présence sur ce même territoire d'au moins une
municipalité régie par la Loi des cités et villes. Les
conseils de comté ont souvent exprimé la volonté
d'accueillir les cités et villes, mais les cités et villes n'ont
pas répondu à cette invitation accueillante, sauf dans de rares
cas où des villes ont voulu siéger aux conseils de comté,
parce qu'étant relativement isolées et étant à
caractère disons presque semi-rural. Mais c'est une minorité.
Si ma mémoire est fidèle, il y a 32 agglomérations
au Québec, en dehors des trois communautés, où il y a
chevauchement d'un territoire urbain, d'une municipalité régie
par la Loi des cités et villes sur le territoire d'au moins un conseil
de comté. Dans plusieurs cas, une ville chevauche sur deux conseils de
comté actuels. Si ma mémoire est fidèle, il y a un cas
où il y a trois conseils de comté qui sont touchés par une
seule ville; je me demande si ce n'est pas Saint-Hyacinthe. De toute
façon, ce problème est de taille, à moins que le
ministre ne puisse me dire ce soir que ses consultations ont aplani les
difficultés et que les villes seront, dès demain, dans les bras
des conseils de comté.
M. Tardif: Non, M. le Président, je ne peux donner au
député de D'Arcy McGee cette assurance. Le fait est que c'est
vrai que dès qu'une municipalité rurale cesse d'être
régie par le Code municipal et devient une municipalité relevant
des cités et villes, elle sort automatiquement du conseil de
comté. Si bien que les conseils de comté se retrouvent toujours
avec les municipalités qui n'ont pas acquis de développement ou
un développement qui leur permettrait de passer aux cités et
villes. Ce problème de l'intégration de l'urbain au rural, ou
vice versa, n'est pas du tout réglé. Il pose un problème
de représentation et de poids démographiques. C'est bien
évident que je n'irai même pas jusqu'à dire, comme le
député de D'Arcy McGee, que le conseils de comté sont
prêts à accueillir les cités et villes comme telles
puisqu'un certain nombre de conseils de comté ont évidemment peur
d'être écrasés sous le poids démographique des
villes et que, par ailleurs, ils vont dire que si les villes ont la population,
les conseils de comté, eux, ont le territoire. Alors, cette querelle du
pot de fer et du pot de terre, pour rappeler LaFontaine, est loin d'être
réglée. Je pense néanmoins que c'est peut-être par
le biais de nouvelles compétences gouvernementales qui pourraient
être confiées à ces organismes que sont les conseils de
comté que nous pourrions envisager, tout en leur confiant une
compétence accrue, un rapprochement entre les deux. Dans le document sur
la décentralisation, diverses hypothèses étaient
soulevées pour résoudre ce problème. Je pense qu'il est
illusoire de vouloir concocter une solution magique en vase clos et que c'est
en s'assoyant avec le monde rural aussi bien que le monde urbain que nous
pourrons tenter d'en arriver à des éléments de solution
à ce problème.
M. Goldbloom: Le ministre est sûrement conscient de
l'ampleur du problème. S'il s'agissait tout simplement de trouver un
mécanisme de coordination entre des municipalités rurales et des
cités et villes, le problème ne serait pas insurmontable,
à mon sens. C'est justement à cause de l'envergure des
propositions du gouvernement, contenues dans le document en question, le
document sur la décentralisation, et contenues dans le programme
électoral du parti qui constitue actuellement le gouvernement... Il y a
toute une perspective d'élargissement des responsabilités
municipales pour englober le domaine scolaire, le domaine de la santé,
du bien-être. Ces hypothèses ont été avancées
et l'on a même parlé d'une structure assez importante où un
nombre de 25 ou de 50 personnes seraient élues, ou en partie
élues et en partie nommées, et ainsi de suite. Cela est beaucoup
plus qu'une refonte des structures des conseils de comté comme nous les
connaissons et implique absolument, inévitablement, la participa- tion
active de cités et de villes. Autrement, il n'y aura pas moyen
d'administrer tout cela. (21 h 30)
J'aimerais savoir si la pensée du ministre a évolué
devant toute cette perspective complexe. Le gouvernement, étant un parti
politique, ayant pris des positions, mais ayant maintenant la
responsabilité du pouvoir, se trouvant donc face à des
problèmes d'ordre pratique, maintient-il ses visées? La politique
du Parti québécois devenu gouvernement du Québec est-elle
toujours la même?
M. Tardif: M. le Président, la politique du gouvernement
en ce qui concerne la décentralisation est, en effet, toujours la
même. Il y a eu une décision du Conseil des ministres, à
l'occasion d'une réunion spéciale tenue au mois de mars dernier
à Montréal, de considérer le document de travail,
précisément comme son nom l'indique, un document contenant
diverses hypothèses, et de s'aligner, dans un premier temps, sur des
fonctions qui, tout en étant moins contentieuses, parce que non remplies
par personne, je pense notamment à l'aménagement du territoire
où on ne va pas sabrer les fonctions des municipalités, lorsqu'on
parle d'aménagement, ni celles des conseils de comté, ni celles
du gouvernement du Québec, personne n'en fait, donc, en
commençant par ce genre de fonctions d'une part et, pour le reste, en
nous assoyant à une table avec les gens de l'Union des
municipalités, l'Union des conseils de comté, afin de tenter d'en
arriver à des formules de fonctionnement qui tiennent compte de cette
réalité.
Que cela nous plaise ou non, diverses instances oeuvrent dans le
territoire québécois, comme si elles étaient sans aucune
relation avec le reste du monde, le monde scolaire a son réseau, ses
institutions, ses équipements qui sont défrayés et
payés par les mêmes contribuables qui ne peuvent pas les utiliser,
le réseau des affaires sociales, c'est une autre histoire, le
réseau des affaires municipales, c'en est une autre également. Il
nous semble qu'il est important d'avoir un minimum de concertation.
Le résultat net de cette décision du Conseil des ministres
ne serait que d'obtenir de tous ces intervenants qu'ils consentent à
s'asseoir à une même table et à discuter des
problèmes en commun, que ce serait déjà un pas dans la
bonne direction. Il n'est pas question de plaquer bêtement des structures
à un milieu qui n'est pas prêt à les recevoir, il s'agit de
travailler ensemble à trouver une structure porteuse qui sera la plus
près possible des clientèles desservies. Je pense que c'est tout
ce que je puis dire au député de D'Arcy McGee. Je veux bien
m'employer à réaliser cette concertation avec le monde municipal,
à tout le moins.
M. Goldbloom: M. le Président, il y a un paradoxe majeur
dans ce dossier. J'aimerais amener le ministre à l'éclaircir pour
nous. Je retourne
en arriére, à la campagne électorale de 1976. Le
Parti québécois disait, d'une façon très simple:
Nous voulons abolir la taxe foncière scolaire, nous voulons ouvrir ce
champ aux municipalités.
À cause de cela, maintenant que le Parti québécois
est devenu le gouvernement du Québec, il y a eu, on le sait, des
réactions de la part du milieu scolaire. Des inquiétudes ont
été exprimées, le ministre de l'Éducation,
collègue solidaire du ministre des Affaires municipales, a
rassuré les commissions scolaires en leur disant: Vous ne
disparaîtrez pas.
Pourtant, l'an dernier, le ministre des Affaires municipales je
crois que c'était lui, c'était le gouvernement de toute
façon a dit: Oui, nous allons transférer l'impôt
foncier du réseau scolaire vers le réseau municipal, mais nous
donnerons aux municipalités une responsabilité dans le domaine
scolaire, ce qui n'avait pas été compris pendant la
période électorale où l'on parlait tout simplement...
M. Tardif: Le gouvernement n'a jamais dit cela, M. le
député.
M. Goldbloom: Je crois...
M. Tardif: Si vous me le permettez, le ministre des Affaires
municipales a, à l'occasion d'une entrevue avec un journaliste du
journal Le Soleil à Québec qui lui posait la question,
répondu: Quand le gouvernement allait-il ou non transférer
l'impôt foncier scolaire aux municipalités? Le ministre des
Affaires municipales s'est permis, à l'endroit de ce journaliste, une
question, qui était la suivante: Pourquoi est-ce que le gouvernement, au
même moment où il se pencherait sur cette question du transfert du
champ de l'impôt foncier ne se pencherait-il pas également sur le
transfert aux municipalités de certaines compétences en
matière scolaire, ou, à tout le moins, sur les
équipements?
C'était une question que se posait et que se pose toujours,
d'ailleurs, le ministre des Affaires municipales.
M. Goldbloom: Je remercie le ministre de cette explication qui
donne une allure différente de ce que nous avions compris à
l'époque. Or, nous constatons que le gouvernement s'apprête
à transférer l'impôt foncier aux municipalités, sans
pour autant abolir les commissions scolaires. Le ministre a
précisé, avec raison dans l'ensemble, que le taux
normalisé ne représente pas vraiment une autonomie pour les
commissions scolaires. Ces commissions perçoivent le montant au nom du
gouvernement et s'en servent pour l'administration de la chose scolaire.
Pourtant, il y a toujours cette question très vaste qui se pose:
Pouvons-nous envisager et créer une structure qui ait une
responsabilité plus large que celle de la municipalité
d'aujourd'hui, responsabilité qui pourrait englober la chose
scolaire?
C'est moins paradoxal depuis la précision que vient de fournir le
ministre, mais il me semble que, si le gouvernement a rassuré tout
récemment les com- missions scolaires, il y a une modification qu'il
faudra apporter quelque part à cette visée, à cette notion
de créer une structure qui soit plus vaste et qui ait une
responsabilité plus grande pour l'administration de la chose locale.
M. Tardif: M. le Président, il n'y a en tout cas pas de
contradiction. Je pense avoir répondu clairement au député
de D'Arcy McGee. Le ministre de l'Éducation a déclaré que
les commissions scolaires allaient continuer d'exister. La décision du
gouvernement là-dessus est ferme.
Je voudrais cependant lui souligner que ce n'est pas incompatible, ni
contradictoire d'une part, de dire que les commissions scolaires vont continuer
d'exister, ainsi qu'il l'a d'ailleurs souligné lui-même, et de
transférer le champ d'impôt foncier normalisé à tout
le moins aux municipalités.
D'autre part, je vous ferai également remarquer qu'il existe sur
le territoire de l'île de Montréal le Conseil scolaire, qui est un
organisme supra-commission scolaire, qui remplit un certain nombre de fonctions
également et qu'il est tout à fait concevable d'imaginer que, si
ce n'étaient pas des commissions scolaires, de tels organismes
pourraient être polyvalents. Là, on est dans la pure conjoncture,
dans de pures hypothèses. Ce que je pense qui est important, c'est
finalement d'éviter peut-être un certain éparpillement, un
certain émiettement. Les hypothèses contenues dans le document de
travail produit par les fonctionnaires contenaient peut-être un
hypothèse maximaliste, j'en conviens.
Je pense que, ce travail ou cet exercice ayant été fait,
nous avons peut-être une certaine perspective, une certaine idée
de l'ampleur des problèmes que pourrait soulever l'application d'une
telle hypothèse ou de telles hypothèses et que, maintenant, il
nous appartient de nous asseoir avec le gens du milieu et d'essayer de trouver
une solution qui ne soit pas uniquement faite, enfin qui ne soit pas même
du tout faite in abstracto, en laboratoire, par des techniciens.
M. Goldbloom: Le ministre n'a pas l'intention de régler
tous les problèmes de la Communauté urbaine de Montréal en
la remplaçant par un conseil scolaire de l'île élargi avec
de nouveaux pouvoirs?
M. Tardif: Absolument pas, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président, tantôt, il a
été question de structures paramunicipales. Est-ce que, pour la
région de Trois-Rivières, il est question aussi d'une telle
structure?
M. Tardif: La réponse est non, dans l'immédiat, M.
le Président. Même si nous recevons régulièrement
les doléances du maire de Trois-Rivières quant à
l'étalement urbain dans les villes avoisi-nantes, tant de la rive nord
que de la rive sud du
fleuve, non, ce n'est pas pour l'instant dans les dossiers du
ministère.
M. Goldbloom: Notre collègue de Saint-Hyacinthe se
rappelle sûrement que l'actuel député de Johnson
était autrefois député de Champlain et est toujours
très vigilant en ce qui concerne les intérêts de cette
région.
M. Cordeau: Et du Cap. Je crois qu'il y a des
intérêts aussi. Je suis prêt à adopter
l'élément 1, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Élément 1,
adopté.
M. Goldbloom: Une dernière question, M. le
Président. Le ministre a-t-il des nouvelles sur les dossiers Beauport et
Charlesbourg? S'il veut tout simplement me répondre non, j'accepterai la
réponse.
M. Tardif: La réponse est non. En effet, M. le
Président, j'ai soumis un document au Conseil du trésor et il
n'est pas revenu.
M. Goldbloom: Espérons qu'il revienne avec une
approbation.
Le Président (M. Marcoux): L'élément 1 du
programme 1, adopté. L'élément 2.
Urbanisme et aménagement du territoire
M. Cordeau: À l'élément 2, j'aurais une
question. Concernant les transferts, j'ai constaté qu'il y avait une
augmentation sensible à cet article de $775 000.
Peut-on en connaître la raison?
M. Tardif: L'augmentation n'est pas à
l'élément 2 comme tel, mais bien à l'élément
1 et correspond aux nouveaux calculs de subventions pour l'aide aux
regroupements.
Je crois avoir donné l'an dernier, à l'occasion du budget,
des explications concernant les formules de financement des regroupements. On
sait que la loi favorisant le regroupement des municipalités
prévoit une subvention de $3 par année pendant cinq ans et que,
traditionnellement, le ministère des Affaires municipales donnait un
coup de pouce à la conclusion d'ententes de fusion ou d'annexion de ces
municipalités en doublant presque le montant des subventions aux
regroupements. Je dis "doublant presque"; cela dépendait des
régions, des endroits, des circonstances, enfin d'un paquet de facteurs.
(21 h 45)
J'ai donc tenté d'établir une formule mathématique
qui puisse me permettre d'utiliser ce montant additionnel en tenant compte de
la taille des municipalités regroupées, des anciennes et de la
nouvelle résultant de la fusion. C'est donc dire que le montant
additionnel a été établi de la façon suivante: la
population totale des villes fusionnées, moins la population de la ville
la plus popu- leuse, sur la population de cette même ville plus populeuse
et ceci nous donne un ratio. Si ce ratio est égal ou supérieur
à un, le taux additionnel de la subvention est de $9 la première
année, de $6 la deuxième et de $3 la troisième; si le
ratio est inférieur à un, par exemple, si le ratio est de .5,
donc un demi pour cent, la subvention serait la moitié de cela, $4.50,
$3 et $1.50 et ce, en sus des $3 par année pendant cinq ans. Si bien que
le résultat net d'une opération qui peut sembler complexe a pour
effet de ne pas accorder de subvention ou à peu près rien
à une ville comme Montréal qui annexerait le village de Saraguay,
par exemple en fait, cela est déjà fait, mais prenons-en
un autre tout petit cela ne paraît vraiment pas dans
l'administration d'une ville comme Montréal, alors que pour une ville
comme Lévis, Lauzon ou Saint-David, on changerait d'ordre de grandeur.
La fusion de deux villes de 5000 âmes chacune ou de trois villes de 5000
âmes chacune pour n'en faire qu'une seule de 15 000 âmes suppose la
mise en place d'un équipement, d'un support administratif à peu
près inexistant dans les trois villes. Donc, c'est selon la taille
d'origine et d'arrivée des villes fusionnées que cette formule a
été établie.
Ce montant additionnel qui apparaissait avant dans un autre poste
budgétaire est tout simplement là maintenant.
M. Cordeau: Est-ce que cette augmentation de subvention,
d'après ce nouveau barème, s'adresse aux municipalités qui
ont été fusionnées il y a deux ans?
M. Tardif: Non, cela n'a pas d'effet rétroactif.
M. Cordeau: C'est pour les nouvelles. Ce n'est pas
rétroactif. Je pensais à Saint-Hyacinthe.
M. Tardif: À Saint-Hyacinthe, les gens ont
été gâtés là-dedans. Il faudrait que je fasse
les calculs...
M. Cordeau: C'est parce qu'on avait reçu beaucoup de
promesses, M. le ministre.
M. Tardif: Écoutez! Connaissant la
générosité de l'ex-ministre des Affaires municipales, je
suis convaincu que cette...
M. Cordeau: II n'a pas eu le temps de remplir ses promesses!
M. Tardif: Je n'ai pas le montant exact ici. M. Cordeau:
Les élections sont arrivées.
M. Tardif: On m'informe que, lorsque... Cette formule que je vous
énonce ici, j'en avais parlé au dernier budget; on m'informe que,
dans les dossiers de fusion qui étaient à l'étude...
M. Cordeau: D'accord, ce n'est pas nouveau.
M. Tardif:... au mois de novembre 1976, cela a déjà
été appliqué.
M. Cordeau: D'accord.
M. Goldbloom: M. le Président, en consultant le journal
des Débats, je constate que demain, ce sera le premier anniversaire
d'une déclaration faite par le ministre...
M. Tardif: Peut-on connaître cette déclaration?
M. Goldbloom: ... et je la cite. Elle n'est pas très
compromettante, sauf qu'une année s'est écoulée et
j'aimerais savoir si nous avons fait des progrès.
Je cite le ministre: "Ma préoccupation est une loi-cadre sur
l'urbanisme".
M. Tardif: Ah oui! Il y a un avantage que j'ai sur le
député de D'Arcy McGee, ex-ministre des Affaires municipales, et
cet avantage, c'est d'avoir un collègue ministre d'État à
l'aménagement. Voici que ce dernier s'est vu confier, par le Conseil des
ministres puisque les ministres d'État, qu'on se plaît
à appeler parfois les superministres, n'ont de mandats que ceux que leur
confie le Conseil des ministres ce ministre d'État, dis-je, s'est
vu confier le mandat de préparer un projet de loi-cadre sur
l'aménagement et, par la même occasion, finalement, on s'est rendu
compte que certains des aspects touchés dans ce projet de loi,
évidemment, débordaient sur le contenu ou sur ce que pouvait
contenir une loi-cadre sur l'urbanisme. J'ai donc consenti que des
fonctionnaires de mon ministère travaillent de concert avec ceux de
l'aménagement pour préparer ce qui pourrait être une
loi-cadre de l'aménagement et de l'urbanisme, qui sera parrainée
par le ministre d'État à l'aménagement.
M. Goldbloom: M. le Président, effectivement, nous avons
fait, il y a dix jours, un débat, dans le cadre de cette nouvelle
formule Question avec débat le vendredi matin, avec le ministre
d'État, et sa préoccupation a été plus large que ce
que l'on peut appeler l'aménagement du territoire; c'était la
décentralisation administrative qui le préoccupait. Mais, il y a
des problèmes aigus. Il y a un développement
désordonné, incohérent, sauvage qui se poursuit, faute de
plans directeurs d'urbanisme, faute de notions de l'aménagement d'un
territoire donné. Il me semble que l'urgence que je croyais
déceler dans cette déclaration du ministre... Sa
préoccupation était tout à fait valable et
nécessaire. Il y avait eu un projet de loi qui n'avait pas
été adopté, mais qui avait quand même des
éléments qui auraient pu être modifiés; il y avait
quand même un canevas, un échafaudage sur lequel le nouveau
ministre aurait pu ériger un système d'aménagement du
territoire au moins pour amener les municipalités et les conseils
de comté à poser des gestes, à prendre des
décisions, à donner des affectations au sol, à
déterminer où serait la zone industrielle, où serait la
zone résidentielle plutôt que de permettre aux promoteurs
d'acheter une ferme et nous faire perdre du sol arable etc.
Il me semble donc que l'urgence est telle que nous ne pouvons être
tout à fait satisfaits nous ne pouvons pas être satisfaits
du tout malgré le respect que nous devons avoir pour le ministre des
Affaires municipales d'une perspective qui ne nous assure pas qu'il y
aura, cette année, à brève échéance, une Loi
sur l'aménagement des territoires.
M. Tardif: M. le Président, premièrement, à
cet égard, le discours inaugural indiquait bien l'intention du
gouvernement de déposer cette loi au cours de la présente
session. Deuxièmement, le grand problème, c'est vrai qu'il y
avait beaucoup de choses bien faites et intéressantes dans le projet de
loi no 12 présenté à l'Assemblée nationale par le
député de D'Arcy McGee, à l'époque ministre des
Affaires municipales. C'est aussi vrai que ce projet de loi non seulement
parlait d'urbanisme, mais introduisait, créait de toutes pièces
une structure municipale nouvelle appelée les conseils
d'agglomération.
M. Goldbloom: M. le Président, le ministre m'a interrompu
il y a quelques minutes pour apporter une précision. Je me permets de
faire la même chose. Il est vrai que le texte comprenait la
création de cette nouvelle structure, mais la réaction a
été très vive de la part des municipalités,
notamment de celle des conseils de comté. J'avais indiqué
clairement et publiquement mon intention de laisser tomber cette notion de
structure nouvelle pour la remplacer par un mécanisme de coordination
entre les conseils de comté et les cités et villes, avec un
arbitre qui trancherait les litiges qui pourraient exister entre les deux afin
que des décisions puissent se prendre. Je voulais apporter cette
précision.
M. Tardif: Le geste posé par l'ex-ministre des Affaires
municipales indique bien que si les dispositions de son projet de loi qui
touchaient l'urbanisme comme tel ne soulevait pas tellement de
réactions, il n'en était pas de même des structures
prévues, et c'est là justement où le bât blesse et
où il nous semble important de revenir à cette question non
seulement de loi-cadre sur l'aménagement, mais ce dossier sur la
décentralisation, et cela a été une des raisons pour
lesquelles le dossier a été confié à mon
collègue à l'aménagement. C'est bien beau d'énoncer
que quelqu'un quelque part doit avoir une compétence en matière
d'aménagement, c'est une chose, et c'en est une autre de décrire
des compétences de façon assez claire et précise, et cela
en est encore une autre que de rallier un certain consensus sur le citus
même de cette compétence, et c'est à la solution de ce
problème, beaucoup plus qu'au problème finalement technique de la
loi-cadre d'urbanisme ou d'aménagement, que s'en prend mon
collègue présentement.
M. Goldbloom: M. le Président, j'ai eu l'impression l'an
dernier que le ministre faisait une certaine distinction, peut-être une
différence d'échelle, entre l'expression "aménagement du
terri-
toire" et le mot "urbanisme", et qu'il laissait entendre je ne
veux pas lui prêter des mots qu'il n'a pas prononcés que la
notion d'aménagement du territoire était vaste et était
confiée à son collègue le ministre d'État, tandis
que la notion d'urbanisme était une fonction administrative d'une
municipalité et qu'il allait s'en occuper dans l'exercice de ses propres
fonctions.
M. Tardif: Le problème ne se situe pas au niveau de la
définition des tâches entre mon collègue le ministre
d'État à l'aménagement, et moi, mais bien au niveau des
organismes porteurs ou des structures porteuses ou des institutions qui auront
cette compétence sur le territoire. Mon collègue et moi nous
pouvons très bien nous entendre sur qui va faire quoi, mais lorsqu'il
s'agit d'élaborer un projet de loi et de savoir dans la
réalité des faits qui, sur le territoire des municipalités
rurales, des municipalités de cités et villes, des organismes
supramunicipaux existants, va accomplir telle fonction, c'est là, je
pense, qu'il y a des problèmes et c'est à la solution de ces
problèmes que nous nous employons beaucoup plus qu'à une
définition ou un problème de définition de
compétences entre mon collègue et moi.
M. Goldbloom: M. le Président, quant à celui qui
vous parle, je voudrais aborder d'autres facettes du sujet, mais il ne nous
reste que quatre minutes. Je ne protesterais pas s'il y avait une suggestion
d'ajournement ou si peut-être le député de
Saint-Hyacinthe...
M. Cordeau: J'aurais une question avant de terminer. Est-ce que
le zonage agricole va être compris dans cette loi-cadre de
l'aménagement et de l'urbanisme?
M. Tardif: Non, le zonage agricole est une chose
différente, il s'agit d'un ensemble de lois qui sera
présenté par le ministre de l'Agriculture, mais qui,
évidemment...
M. Cordeau: Oui, mais...
M. Tardif: ... a des liens...
M. Cordeau: ... c'est bien près.
M. Tardif: ... très directs avec l'aménagement.
C'est la raison d'ailleurs pour laquelle le COMPAT, le comité
ministériel permanent de l'aménagement du territoire regroupe le
ministre de l'Agriculture, en plus de celui des Affaires municipales et les
autres intervenants sur le territoire.
M. Goldbloom: Le ministre a bien dit qu'il y aura plusieurs
projets de loi sur le zonage agricole?
M. Tardif: Enfin, il y a un train de lois prévu, oui.
M. Goldbloom: M. le ministre de l'Agriculture semble avoir pris
l'habitude de présenter des projets de loi, six à la fois.
M. Tardif: C'est toujours assez impressionnant.
M. Goldbloom: Question d'appréciation, M. le
Président.
Le Président (M. Marcoux): La commission ajourne ses
travaux à demain. L'élément 2 n'est pas adopté, si
j'ai bien compris?
M. Goldbloom: Non, pas encore, mais il ne pose pas de
problèmes.
Le Président (M. Marcoux): La commission ajourne ses
travaux à demain, dix heures.
(Fin de la séance à 22 heures)