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Version finale

31e législature, 3e session
(21 février 1978 au 20 février 1979)

Le mardi 2 mai 1978 - Vol. 20 N° 56

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Étude des crédits du ministère des Affaires municipales


Journal des débats

 

Étude des crédits du ministère des Affaires municipales

(Dix heures quatorze minutes)

Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, messieurs!

La commission permanente des Affaires municipales est réunie pour faire l'étude des crédits budgétaires du ministère des Affaires municipales. Les membres de la commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie). Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Char-bonneau (Verchères), M. Dubois (Huntingdon), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle), M. Saindon (Argenteuil), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières), M. Verreault (Shefford).

Il faudrait d'abord nommer un rapporteur de la commission. Est-ce que le député de Deux-Montagnes... Non.

M. de Bellefeuille: Le député de Beauce-Nord.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Beauce-Nord comme rapporteur? Est-ce que vous acceptez?

M. Caron: II est plus présent. Alors, on va accepter.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Beauce-Nord. Alors, le député de Beauce-Nord agira comme rapporteur des travaux de cette commission. M. le ministre.

Exposé préliminaire du ministre M. Guy Tardif

M. Tardif: M. le Président, contrairement à ce qui s'est passé l'année dernière, je n'ai pas l'intention de faire un grand discours sur les affaires municipales, hormis pour indiquer qu'au cours de ces douze derniers mois, le ministère des Affaires municipales s'est affairé passablement à un certain nombre de pièces de législation que tous ensemble nous avons eu l'occasion d'examiner ici tant du côté des droits publics que des droits privés. En fait, il y a eu une dizaine de lois publiques et 17 projets de loi privés, dont la Charte de Montréal, ce qui fait que, avec ces 28 pièces de législation, le ministère comme tel a mis en place un certain nombre d'éléments reliés à l'administration des cités, des villes et des municipalités régies par le Code municipal qui devraient connaître leur aboutissement normal au cours de l'année qui vient dans une ré- forme plus complète de la fiscalité et de la démocratie municipale. Cependant, je crois prématuré d'entrer dans les détails de ces deux réformes, quoique s'il y avait des questions au passage, il me ferait plaisir d'y répondre, de même que sur certaines autres orientations du ministère.

Alors, sans plus de préambule, M. le Président, je n'ai pas d'autre déclaration d'ouverture. Je pense que la réforme de la fiscalité et celle de la démocratie municipale, pour moi, je les ai associées, elles vont de pair. Elles vont de pair parce que, si le gouvernement est tout à fait d'accord pour remettre au monde municipal, dès que celui-ci sera prêt, l'ensemble des revenus, pour accroître les revenus autonomes des municipalités, il nous semble aller de soi qu'il y a une contrepartie à cela et que cette contrepartie, c'est le contrôle des citoyens. Comment accroître le contrôle des citoyens, comment accroître la visibilité de l'administration locale et la visibilité à la fois dans les dépenses et dans les revenus? C'est un des mérites, d'ailleurs, de la taxe foncière que d'être éminemment visible, ce qui n'est peut-être pas le cas de la taxe de vente, avant sa suppression évidemment, qui, pour les municipalités, constitue une source de revenus invisible, une source de revenus qu'elles reçoivent du gouvernement et qu'elles n'ont pas à percevoir et à imposer elles-mêmes, alors que l'impôt foncier l'est. C'est le principe, je pense, de la représentation ou du pouvoir de taxation lié à la représentation qui est en cause. Cependant, après avoir présenté au monde municipal un certain nombre de propositions de réforme, celui-ci a demandé un certain temps pour étudier l'impact de cette réforme. Le gouvernement a consenti à accorder ce délai étant donné, évidemment, que c'est un certain changement. Nous serons tout attentifs, évidemment, aux représentations que nous feront les municipalités en ce qui concerne cette réforme de la fiscalité. Je pourrai, comme je l'ai mentionné tantôt, entrer dans les détails au cours des exposés, mais il me semblait important d'insister sur ces deux points, étant attendu qu'il s'agit là de choses, dans le cas de la fiscalité, d'une réforme que demandaient les municipalités depuis longtemps et que le gouvernement est prêt à faire et sera prêt à faire aussitôt que le monde municipal le sera.

Le gouvernement ne fait pas cette réforme pour lui, il la fait pour les municipalités. Il y a eu un certain nombre de questions soulevées, non pas sur le monde municipal, mais bien par le monde scolaire qui a charrié littéralement sur cette question, reliant toute la question de l'autonomie locale au maintien de l'impôt foncier scolaire. On sait qu'une des principales articulations de la réforme, c'est la remise en entier du champ d'impôt foncier aux municipalités.

Alors, accrocher l'autonomie des commissions scolaires à une taxe ou à un impôt foncier qui est peut-être perçu localement, mais qui en réalité est imposé provincialement, puisque le taux est déterminé par Québec, la valeur est détermi-

née par Québec et le produit sert à payer des salaires négociés par Québec... s'accrocher à l'autonomie locale, la seule véritable part d'autonomie locale des commissions scolaires réside dans la taxation pour les dépenses dites inadmissibles, au sens des subventions du ministère de l'Éducation.

Les dépenses dites inadmissibles représentent 2,2% de l'ensemble du budget de l'enseignement élémentaire et secondaire. C'est véritablement la seule part que les commissions scolaires peuvent imposer d'elles-mêmes. Tout le reste, pour l'autre partie de l'impôt foncier scolaire, elles ne font que percevoir des taxes qui sont décrétées par le gouvernement du Québec, elles jouent un rôle de percepteur. Pour ma part, je leur ai demandé publiquement de jouer plutôt le rôle de précepteur plutôt que celui de percepteur. Je pense que l'analogie dans les...

Je vois que M. Goldbloom apprécie ce genre de distinction.

Mais selon la définition du petit dictionnaire, le précepteur est le responsable de l'éducation des enfants, alors que l'autre doit s'employer à ramasser les impôts. De toute façon, je suis assuré qu'il y aura des questions au cours de la commission là-dessus. Le gouvernement a décidé, pour terminer sur cette question, de tenir une conférence Québec-municipalités qui aura lieu les 2, 3 et 4 juin prochain, à Montréal, avec des représentants du monde municipal pour discuter d'abord et avant tout de fiscalité municipale, possiblement aussi d'autres sujets.

Voilà, M. le Président, ces quelques remarques d'introduction. J'aurais peut-être voulu ajouter que, au cours de cette dernière année, s'est précisé — pour moi cette dernière et cette première en même temps — encore plus le rôle du ministère des Affaires municipales, qui doit en être un de représentant des collectivités locales auprès du gouvernement, le ministère des Affaires municipales n'ayant pas à bâtir de ponts, de routes, n'ayant pas à réaliser lui-même des choses, mais bien à créer les conditions qui vont permettre aux collectivités locales de faire, elles, les choses qui doivent être faites sur le territoire, créer les conditions qui vont permettre aux citoyens d'exercer véritablement cette autogestion qui doit être le propre des organisations municipales.

Ce qui implique, parallèlement à l'abolition d'un paquet de subventions, l'augmentation des revenus autonomes, qu'une nouvelle orientation du ministère se dessine peu à peu, où sera mis l'accent sur le rôle-conseil, le rôle de support technique, la disponibilité des fonctionnaires auprès du monde municipal et, à tout le moins, la mise au rancart d'un paquet de projets qui auraient eu pour effet de faire se substituer le ministère aux collectivités locales. C'est évidemment la tendance de toute administration bureaucratique de vouloir prendre de l'ampleur, de faire, comme on dit en anglais, de l'"empire building". Le ministère des Affaires municipales n'est pas exempt de ces tendances et, là-dessus, je vais donner un exemple de ce que nous n'avons pas fait au cours de l'année, pour indiquer que c'est dans cette voie qu'il faudrait se diriger.

Il s'agit de ces normes en matière d'urbanisme, où la première réaction des fonctionnaires a été de dire: Devant l'incurie des municipalités: Nous allons faire des normes minimales, pour ce qui est du lotissement dans les plaines d'inondation, dans les lieux où il y a des glissements de terrains, dans les lieux où il y a des maisons mobiles susceptibles d'avoir des glissements de terrains et pour les lotissements non desservis par des réseaux d'aqueduc et d'égouts.

Nous nous sommes, en cours de route, tournés de bord pour dire: Non, nous allons d'abord demander aux collectivités locales de faire de tels règlements. Ce n'est qu'à défaut par elles de ce faire que le ministère pourra le faire.

Nous sommes allés plus loin. Nous avons dit: Très bien, nous nous apprêtions à édicter des règlements. Voilà que nous allons rédiger un règlement modèle, un règlement type. Nous allons l'envoyer aux municipalités et elles pourront s'en inspirer pour rédiger leur propre réglementation.

Je pense que ceci allié à la mise sur pied de ressources techniques disponibles — je suis conscient que c'est un changement à insuffler dans la mentalité du fonctionnarisme qui a tendance à se considérer comme des conseillers du ministre plus que comme des conseillers des municipalités — fera en sorte que cette fonction publique deviendra de plus en plus un conseiller technique auprès des municipalités. C'est un changement, je pense, dans l'orientation du ministère, mais je ne crois pas que les décisions prises centralement par des techniciens, par des technocrates puissent coller mieux au besoin des collectivités locales.

Mon désir le plus grand serait de faire en sorte que la fonction publique se rapproche des milieux qui seront desservis, ce qui pourrait impliquer une certaine déconcentration des effectifs à un moment donné et la possibilité de programmes d'échanges entre le ministère et les municipalités. Ce serait très sain que des avocats du contentieux du ministère des Affaires municipales pratiquent dans une municipalité pendant quelques mois et qu'un fonctionnaire municipal vienne travailler au ministère pendant quelques mois et ainsi de suite, en urbanisme, en génie, en administration financière. Je pense que c'est dans cette direction qu'il faudra s'orienter. Voilà des choses que vous ne trouverez pas, messieurs dans le livre des crédits, qui sont peut-être plus à l'état de projets chez moi, mais qui indiquent un peu certaines des tendances. Je vous remercie. (10 h 30)

Le Président (M. Marcoux): M. le député de D'Arcy McGee.

Remarques de l'Opposition M. Victor C. Goldbloom

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais d'abord m'adresser à vous-même pour vous parler d'une considération d'ordre technique. Dans le passé, les crédits ont été examinés sur une période qui n'était pas définie dans le temps. J'ai as-

sisté moi-même, comme quelques autres collègues qui sont ici depuis de nombreuses années, à des débats qui ont duré trois et même quatre semaines. Dans de telles circonstances, il était compréhensible que le président de la commission parlementaire en question fasse un effort soutenu pour faire progresser le travail en demandant que chaque programme et chaque élément soient adoptés régulièrement. Cette année, nous avons accepté un calendrier, nous l'avons accepté de part et d'autre. Cela veut dire que nous n'avons pas, du côté de l'Opposition officielle, l'intention de chercher à dépasser la période prévue. Pour cette raison, je me suis permis de causer brièvement avec le ministre, il y a quelques jours, et également avec le député de Saint-Hyacinthe. Il en découle que j'aimerais vous dire que, quant à nous, l'Opposition officielle, jeudi soir de cette semaine, nous avons l'intention de déclarer adoptés les programmes 1 à 7 inclusivement, gardant pour mardi de la semaine prochaine les programmes 8 à 12 inclusivement, qui touchent l'habitation, et, à la fin de cette journée, nous avons l'intention de déclarer adoptés ces cinq derniers programmes.

Si, alors, au cours de notre débat, nous procédons par grands thèmes, sans nécessairement vous permettre de dire que tel programme, tel élément est adopté, je voudrais que vous compreniez l'esprit dans lequel nous voudrions poursuivre le débat. En regardant la liste des programmes, il ne serait quand même pas difficile de suivre l'ordre des grands sujets qui y sont représentés, mais je voulais tout simplement vous expliquer la façon dont nous aimerions faire le débat et notre intention claire de déclarer adoptés les programmes à la fin de la période allouée pour chaque parti.

Maintenant, pour réagir brièvement à ce que vient de dire le ministre, je dois déclarer que c'est avec un certain sentiment de peine que nous abordons le débat sur les crédits du ministère des Affaires municipales cette année. Peine d'abord parce que le ministre est une personne sympathique et ça me fait de la peine de devoir le critiquer, et peine aussi pour les municipalités qui restent sur leur appétit.

Cette année, le budget de la province devait, selon les indices que nous avions au cours des douze mois qui se sont terminés le 31 mars... Au cours de cette année financière, il y avait des indices qui laissaient croire que les municipalités recevraient une attention spéciale dans le budget et il me semble que cette attention reste en deçà des espérances exprimées par les autorités municipales.

Il y a un an, le ministre était relativement nouveau dans ses fonctions. Il n'avait pas eu l'avantage de faire une année entière comme titulaire du ministère et il a dit, en quelque sorte, avec raison, que le ministère avait beaucoup de pain sur la planche. Les municipalités étaient convaincues que le ministère se servirait de ce pain pour en faire d'énormes sandwiches, des "sous-marins", mais les sandwiches ont été relativement minces et peu remplis au cours de l'année. Le budget laisse les municipalités sur leur appétit, comme je l'ai dit.

Le ministre a indiqué, pas pour la première fois, l'intention du gouvernement de tenir une consultation formelle et générale avec les municipalités, au mois de juin. C'est une bonne chose; ce sera la troisième fois dans l'histoire du Québec qu'une telle conférence aura eu lieu. Je pense que les deux précédentes ont été fructueuses et utiles. Je suis donc heureux de cette initiative et j'en félicite le ministre. Sauf que je dois exprimer l'espoir, voire la conviction que, le ministre des Finances n'ayant pas exposé dans son discours du budget toutes les réformes que proposera le gouvernement au chapitre de la fiscalité municipale et d'autres, le gouvernement ne se servira pas de cette conférence pour faire de grandes annonces. Il me semble que la tradition est bien connue et que c'est à l'occasion, notamment, d'un discours sur le budget que l'on expose les grandes politiques quant à l'usage que l'on va faire des deniers publics. Je me rappelle surtout certaines critiques quand un certain gouvernement s'est servi d'une tribune à l'extérieur de ce Parlement pour annoncer le projet de la baie James. Ceux qui ont critiqué cette initiative n'en prendront sûrement pas une semblable.

Alors, je suis heureux — pour résumer cela — que le ministre ait indiqué sa volonté de répondre en détail aux questions que nous pourrons poser.

Il y a une dernière remarque que je voudrais faire et elle est inspirée par la toute dernière partie des remarques du ministre. Entre parenthèses, je ne fais pas grief au ministre, bien au contraire, de ne pas avoir fait ce qu'il a indiqué au tout début de ses remarques. Il a dit qu'il avait l'intention de ne dire que quelques mots. Je ne lui fais point grief d'avoir dépassé les quelques mots pour exposer effectivement sa pensée dans deux ou trois domaines importants. Il a parlé d'un rapprochement avec la clientèle il a lancé une ou deux idées pratiques quant à la façon dont ce rapprochement pourrait se faire.

Je me rappelle, quand j'ai dû, pour des raisons indépendantes de ma volonté, quitter le ministère, que le sous-ministre du temps m'avait fait l'honneur d'un petit discours. Il a dit que les caractéristiques que j'avais voulu imprimer au ministère au cours de mon mandat étaient concentrées sur le service à la clientèle et j'en étais fier. Le ministre ne doit pas être l'avocat des municipalités au point de déclencher des conflits publics au sein du gouvernement avec d'autres ministres qui ont d'autres responsabilités; tel n'est pas le rôle d'un ministre de toute façon. Un gouvernement se tient, sa solidarité est essentielle à la bonne administration de la chose publique. Mais souvent, on dit au ministre des Affaires municipales qu'il doit être l'avocat des municipalités, tout comme le ministre lui-même a dit que pour bien connaître sa clientèle il faut aller dans le champ, sur le plancher des vaches et connaître le milieu, connaître la vie quotidienne de ce milieu. Il me semble que les contacts

qui ont lieu entre les municipalités et le ministère sont toujours précieux. Quelquefois, parce que les interlocuteurs ne s'expriment peut-être pas avec facilité et n'ont pas très bien pensé, rédigé leur présentation, on a le sentiment de ne pas poursuivre une conversation fructueuse. Mais c'est l'exception plutôt que la règle. Je voudrais encourager le ministre à poursuivre cette ligne de pensée, parce qu'elle est très importante pour la qualité de ce que nous pouvons faire dans le domaine municipal.

J'ajoute ce propos entre parenthèses. Le ministre a parlé de déconcentration. C'est là une chose désirable, mais il y a en même temps certaines difficultés qui se présentent quand la déconcentration est trop forte. Il y a peut-être un petit désaccord qui subsiste entre l'actuel ministre et votre humble serviteur, M. le Président. C'est sur la valeur des visites faites par les municipalités que l'on appelle, en employant un mot au sens un peu péjoratif, pèlerinages à Québec. Si le ministre doit toujours se déplacer, il ne trouvera pas assez d'heures dans la semaine ou dans l'année pour aller partout. Je trouve que les visites que l'on appelle pèlerinages ne devraient pas être caractérisées d'une façon péjorative, parce que ces contacts sont aussi bons que ceux qui peuvent avoir lieu dans le champ, s'il y a un partage entre les deux façons de rencontrer les gens. Je voudrais encourager le ministre à continuer de penser à la clientèle, parce que c'est sa clientèle, et c'est une clientèle qui comprend, à toutes fins pratiques, toute la population du Québec.

Voilà, M. le Président, d'une façon un peu décousue, les quelques remarques que je voulais faire en réponse à celles faites par le ministre. Je suis convaincu que notre collègue de Saint-Hyacinthe voudrait ajouter un ou deux grains de sel et nous allons l'écouter avec attention. Après cela, nous serons à votre disposition pour commencer le débat en détail sur les crédits.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Hyacinthe.

M. Fabien Cordeau

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Je profite de l'occasion que m'offre le député de D'Arcy McGee d'adresser quelques mots.

M. Guay: J'espère, en tout cas.

M. Tardif: C'est le ministre de l'Agriculture.

M. Cordeau: Bien sûr que le discours que nous venons d'entendre de la part du ministre des Affaires municipales ne le compromet certainement pas, parce qu'il a voulu être restrictif, sachant probablement que souvent, des promesses, lors d'un discours, ne peuvent pas se réaliser durant l'année même. Cela peut prendre deux ans ou trois ans; surtout en ce qui regarde la fiscalité municipale, on avait déjà entendu certaines promesses. Le ministre avait exprimé le désir de pré- senter un projet de loi dans les délais les plus brefs. Par contre, en route, il a rencontré quelques difficultés. C'est pour cela, probablement, que nous aurons, au mois de juin, la conférence Québec-municipalités. (10 h 45)

Je ne sais pas si, à cette date, M. le ministre, vous avez l'intention d'inviter les représentants des commissions scolaires, sinon comme participants, au moins comme observateurs, parce qu'on a manifesté, dans ma région, le désir d'y assister. À quel titre? Ce sera à vous de le décider. Je crois qu'il serait bon d'inviter les représentants des commissions scolaires, même si ce n'est qu'à titre d'observateurs, si les décisions qui sont prises ne les affectent pas. Sinon, ce serait peut-être bon de leur demander leur collaboration et de les inviter comme participants.

M. le ministre, dans les crédits que vous nous avez présentés, nous constatons que vous avez, l'an passé, eu des crédits de $252 millions et une somme de $220 millions a été dépensée. Est-ce que la différence, grosso modo d'environ $32 millions, ce sont des crédits périmés? Nous aimerions connaître les motifs pour lesquels ces sommes n'ont pas été dépensées et dans quel programme c'était.

M. Tardif: Vous voulez une réponse tout de suite?

M. Cordeau: Oui, on peut continuer. Je pense que ce serait une bonne façon d'agir.

M. Tardif: En gros, je ne suis pas sûr qu'il faille nécessairement considérer comme, comment dirais-je, un mauvais signe le fait qu'un ministère ait à périmer des crédits à la fin de l'année. C'est peut-être une tendance contraire qu'il faudrait manifester, à savoir que, justement, cette course folle des fins d'années financières où les ministères s'empressent d'engager leurs crédits. Il reste que dans ce cas précis, deux raisons principales expliquent cette différence entre les crédits votés l'an dernier et les dépenses probables, puisque toutes les factures ne sont pas encore entrées.

La première a trait à l'habitation, plus particulièrement au programme des coopératives d'habitation et la deuxième aux subventions d'égouts et d'aqueduc. Dans le cas des coopératives d'habitation — il s'agit d'aide à la restauration et à la construction — il y a un retard qui est dû, non pas à la disponibilité des crédits du ministère comme tels, mais bien à la formation des coopératives. On s'est dit, et on persiste à dire encore, malgré les crédits périmés, qu'on ne veut pas répéter l'expérience de Coop-Habitat et bâtir des logements d'abord pour se chercher des sociétaires ensuite. Je pense que c'est mettre la charrue devant les boeufs. Il faut d'abord faire de l'animation en milieu pour que les coopératives se forment et qu'après, elles viennent se prévaloir du programme Logipop.

Des coopératives, cela ne se forme pas comme cela. On verra dans le détail de ces crédits

qu'on a créé des groupes de ressources techniques qui ont pour mission de faire de l'animation dans le milieu.

Il y a eu des coopératives qui ont eu des fonds de démarrage de la Société d'habitation. Mais avant que tout ceci ne s'organise et qu'un groupe de personnes décident de s'organiser en coopérative d'habitation et que les logements soient produits à l'autre bout de la ligne, il y a un délai. Cela ne se fait pas dans une période de douze mois, si bien que nous accusons, de ce côté-là, un retard dans l'engagement des crédits, ce qui ne veut pas dire qu'il n'y a pas en place, déjà, des groupes. On verra le nombre de coopératives qui ont été reconnues, et tout cela.

Le deuxième, pour les égouts et les aqueducs, c'est la même chose, M. le Président, jusqu'à un certain point. Le ministère paie des subventions d'égouts et d'aqueduc onze mois après la fin des travaux. Nous pouvons engager, au cours de l'année, ou donner le feu vert, dans le cadre de nos programmes PAIRA, LIQUIDATION et autres, à un certain nombre de projets, mais nous n'aurons besoin véritablement des crédits qu'onze mois après la fin des travaux. Dans le cas des subventions d'égouts et d'aqueduc, il y a eu effectivement $13 millions qui n'ont pas été utilisés au cours de l'année même. C'est d'ailleurs ce qui a décidé, par souci de concordance, le Conseil du trésor à baisser les crédits pour l'année en cours, l'année 1978/79, de $48 millions à $43 millions, sur la base des crédits antérieurement utilisés. Si la production et les engagements des municipalités sont plus rapides, l'on pourra les dégager.

Ce qu'il est important de noter là-dedans encore une fois, c'est que ce n'est pas le ministère qui bâtit les logements, dans ce cas, ce sont les coopératives d'habitation. Ce n'est pas le ministère qui fait les réseaux d'aqueduc et d'égouts, ce sont les municipalités. Ce n'est que lorsque ces organismes nous soumettent leurs projets... On est tributaire du rythme auquel les municipalités, d'une part, et, dans le cas des coopératives d'habitation, les coopératives elles-mêmes nous soumettent leurs projets.

M. Cordeau: J'aimerais attirer l'attention du ministre ou du président sur la décentralisation dont vous avez parlé à un moment donné.

M. Tardif: Je m'excuse, je n'ai pas employé le mot "décentralisation"...

M. Cordeau: Non pas...

M. Tardif: ... qui est différent du grand projet de décentralisation gouvernementale dont on pourra parler, c'est une ature chose. Mais, puisque vous faites référence à ce que j'ai dit, j'ai utilisé le mot "déconcentration", c'est-à-dire prendre des fonctionnaires qui oeuvrent depuis un point central, à savoir Québec et quelques-uns à Montréal, et les disperser à la périphérie, donc dans des municipalités ou dans des régions. Cela resterait des fonctionnaires québécois qui continueront de prendre leurs directives du ministère, même s'ils sont là pour conseiller les municipalités.

La décentralisation, c'est autre chose que cela, c'est... Oui.

M. Cordeau: Quand j'ai employé le mot "décentralisation", c'était dans le sens de la décentralisation dans la perspective du rôle que vous vouliez accorder aux conseils de comté.

M. Tardif: C'est complètement différent de ce à quoi je faisais allusion tantôt...

M. Cordeau: C'est dans ce sens là que votre politique... Oui, bien sûr.

M. Tardif: ... d'avoir des fonctionnaires de mon ministère qui pourraient être en région, par exemple. C'est une autre chose.

M. Cordeau: Je suis bien conscient de cela. C'est pour ce qui regarde la décentralisation administrative concernant les comtés. Également, je ne sais pas si vous pouvez expliciter ici le rôle des villes à l'intérieur de ces conseils de comté. Quel rôle une grande ville va-t-elle jouer?

M. Tardif: M. le Président, je veux bien parler de ce sujet de la décentralisation, ayant fait partie du comité avec le premier ministre et mon collègue, le ministre d'État à l'aménagement, qui a préparé ce document. Il reste que, comme tel, c'est beaucoup plus mon collègue, le ministre d'État à l'aménagement, à l'intérieur peut-être de l'étude des crédits de sa commission, que ceci pourrait peut-être se situer.

Je n'ai pas d'objection, en cours de route, à y faire allusion, mais qu'il suffise pour l'instant d'indiquer que ce document de travail qui a connu le sort d'un bon nombre d'autres documents de travail, qui a coulé, est précisément uniquement cela, c'est-à-dire un document de travail où on a posé un certain nombre de questions. L'accent a été très peu mis jusqu'à maintenant dans les media d'information sur ce document. On s'est posé des questions sur ce que cela allait produire sur les municipalités, sur les conseils de comté, sur les finances, sur les commissions scolaires et tout cela, mais on ne s'est pas tellement posé de questions sur ce que cela va produire sur l'appareil gouvernemental lui-même. S'il y a un endroit où ce sera douloureux, c'est bien là. Il faut voir avec quelle réticence beaucoup de ministères nous ont fourni des données, réticence, le mot est peut-être fort, mais le peu de conviction avec laquelle ils nous ont remis des données. Finalement, il a presque fallu poser la question dans les termes suivants... Non pas dire aux divers ministères: Dites-nous donc ce que vous pensez qui pourrait être décentralisé dans vos fonctions, mais il a presque fallu poser la question de la façon suivante: Dites-nous pourquoi telle fonction que vous remplissez ne pourrait pas être décentralisée. On a renversé le fardeau. C'est véritablement un débat de plusieurs mois, sinon plusieurs années, que

cette question de la décentralisation gouvernementale. Je la vois beaucoup plus, personnellement, puisque cela n'a pas fait l'objet d'une position gouvernementale comme telle, comme un processus qui doit être permanent, c'est-à-dire que, de la même manière que les forces centripètes sont présentes tout le temps, temps — je veux dire I"empire building" dont je parlais tantôt — les tendances de la bureaucratie à tout vouloir accaparer sont permanentes, de la même manière, il semble qu'il doit y voir en permanence un mouvement centrifuge pour contrebalancer. Une politique de décentralisation ne serait qu'une politique permanente de contrer les effets de ces forces centripètes que ce serait déjà beaucoup.

Je ne voudrais pas entrer plus à fond dans ces questions pour l'instant.

M. Cordeau: Est-ce que cette décentralisation administrative peut aussi entrer en ligne de compte avec la nouvelle fiscalité municipale que vous avez en vue ou que vous prévoyez?

M. Tardif: Le gouvernement a dit à plusieurs reprises, le ministre des Affaires municipales également et le premier ministre aussi, que la réforme de la fiscalité telle qu'elle est présentée dans l'immédiat est une réforme qui vise à accroître les revenus des municipalités et, qui plus est, les revenus autonomes et ce, pour faire face à leurs obligations actuelles. Si jamais, par une décentralisation ou par l'effet d'une décentralisation, de nouvelles compétences étaient remises aux municipalités, il est évident que des sources de revenus appropriées devraient suivre ces nouveaux champs de compétence.

M. Cordeau: M. le Président, j'aimerais aussi attaquer un autre sujet, c'est l'endettement des municipalités. L'année dernière, nous avons posé une question au feuilleton et vous avez répondu que, pour 1975, à la fin du terme, il y avait $3 485 796 000 d'endettement des municipalités. Nous avions aussi demandé les chiffres de 1976, mais, à cette période, vous nous avez répondu que les chiffres n'étaient pas encore disponibles. C'était au mois de juillet l'an passé. Je ne sais pas si, aujourd'hui, ces chiffres sont disponibles à votre ministère, pour voir la progression ou la diminution de l'endettement des municipalités. Maintenant, M. le ministre, j'aimerais que vous me fassiez connaître les municipalités qui ne sont pas incluses dans cet endettement, peut-être Montréal ou Québec, ou Laval, je ne sais pas. Est-ce que ces municipalités sont incluses dans ce total?

M. Tardif: Écoutez, il faudrait que je sorte... D'une part, si vous avez là la réponse qu'on vous a donnée en termes précis, pour pouvoir donner la même réponse en date de ce jour, enfin, le plus près possible...

M. Cordeau: À la fin de...

M. Tardif: ... et vous indiquer quelles villes sont incluses... Je pense que, si on a donné la dette municipale totale, il n'y a pas de raison, à prime abord, d'exclure ces villes. Je voudrais prendre avis de votre question et tenter d'y donner réponse aujourd'hui même, le plus tôt possible.

M. Cordeau: Pendant que la commission siège, le plus tôt possible.

M. Goldbloom: M. le Président, si le député de Saint-Hyacinthe me le permet, j'aimerais que le ministre me dise si les communautés urbaines et régionales sont comprises dans les chiffres qu'il a déjà fournis et qu'il fournira en réponse à la question du député de Saint-Hyacinthe.

M. Tardif: D'accord, volontiers. On pourra, de toute façon, donner un tableau par catégories...

M. Cordeau: Ou faire faire des copies peut-être? En faire faire des copies pour les remettre, s'il vous plaît.

M. Tardif: Si vous voulez, d'accord. (11 heures)

M. Cordeau: Maintenant, il y a un autre domaine au sujet duquel j'aimerais vous poser une question, c'est le rôle de la commission municipale. Dans le Soleil, lorsqu'il paraissait, le 4 mai 1977, vous avez exprimé des opinions. Je vais vous lire ce que MM. Benoît Routhier et Denis Angers ont écrit: "Pour le ministre Guy Tardif, la Commission municipale du Québec devrait être restructurée afin qu'elle cesse d'être, à la fois, juge et partie". Et, à la fin de l'article — je ne le lirai pas au complet — "C'est ainsi que la commission municipale actuelle serait scindée en deux organismes, d'une part, un tribunal municipal chargé d'enquêter sur les administrateurs locales et, de l'autre, une commission qui aurait la responsabilité de superviser et d'approuver les projets à caractère municipal".

Est-ce que, depuis ce temps, des études se sont poursuivies? Pourrait-on connaître l'opinion du ministre concernant les énoncés rapportés dans le Soleil du 4 mai dernier?

M. Tardif: M. le Président, sauf erreur de ma part, la citation rapportée est extraite, à peu de choses près, du rapport de la Commission du droit municipal, la commission Hébert, qui avait soulevé cette question du rôle, pour le moins, ambivalent ou cette dualité de fonctions de la commission municipale comme organisme administratif d'une part, et comme organisme judiciaire d'autre part; en tant qu'organisme administratif, qui doit approuver quotidiennement les faits et gestes des municipalités, approuver quotidiennement des règlements d'emprunt, approuver quotidiennement diverses actions posées par les municipalités, les conseils de ville, et à qui on demande parfois ou qui, motu proprio, peut le faire ou qui, elles-mêmes, recommandent au ministre ou au gouvernement de le faire, d'aller siéger pour faire enquête sur l'administration d'une ville, par exemple, au cours des cinq dernières années, et qui,

comme telle, est amenée à repasser par-dessus des gestes qu'elle a déjà approuvés quotidiennement. On dit: Évidemment, ça peut être, pour le moins, une invitation, parfois, à passer rapidement au cours de ces enquêtes. Mais alors, pourquoi la commission n'aurait-elle pas, dans son activité quotidienne, scruté plus attentivement certains règlements municipaux?

La commission Hébert avait posé le problème. Je dois dire, depuis que je suis au ministère, que la commission municipale m'a remis trois rapports. Un premier sur la ville de Dolbeau, un deuxième sur la ville de Saint-Léonard et un troisième sur Collectivité nouvelle à Longueuil. À la suite de la réception de ces trois rapports, j'ai été à même, je devrais dire, particulièrement le premier, en tout cas, de me poser des questions, justement, sur cette dualité de fonctions.

J'avais abordé la question avec mon sous-ministre, des gens du ministère et des gens de la commission, et on a amendé effectivement la Loi de la commission municipale au cours de l'année pour ce qui concerne ses membres et certaines de ses prérogatives, mais on n'a pas abordé cette question de modifications substantielles de son rôle. L'une des raisons, M. le Président, c'est que j'ai pensé qu'il convenait de consulter mon collègue à la Justice avant d'aller plus loin dans cette question, étant donné qu'on retrouve, bien souvent, la Sûreté du Québec aussi dans beaucoup des dossiers municipaux et que c'est à la suite d'une action concertée du ministère de la Justice et du ministère des Affaires municipales que nous parviendrons mieux à préciser cela. Mais, pour l'instant, c'est à ce point que nous en sommes.

M. Goldbloom: M. le Président, nous avons commencé notre travail en écoutant le ministre faire certaines remarques et par la suite j'en ai fait. Nous avons passé la parole à notre collègue de Saint-Hyacinthe et soudainement nous sommes dans une série de questions et réponses. Je ne proteste pas; j'aimerais simplement savoir de notre collègue de Saint-Hyacinthe quelle est son intention quant à l'emploi du temps et quant aux...

M. Cordeau: Moi aussi, je veux bien respecter l'entente préalable qui a été prise, soit de procéder à quelques questions. Si j'ai fait mon intervention, c'est parce que je voulais poser des questions au ministre dans mon allocution ou faire allusion à certaines déclarations qu'il avait faites. Je suis d'accord pour que, jeudi soir, ce domaine soit clarifié.

Le Président (M. Marcoux): La question que le député de D'Arcy McGee soulevait était de savoir si vous aviez encore plusieurs questions générales comme celle-ci.

M. Cordeau: Non.

Le Président (M. Marcoux): Parce que, normalement, vous savez que c'est...

M. Goldbloom: Continuons, M. le Président; pas de problème.

M. Cordeau: Non, pas du tout. Une question concernant l'habitation: M. le ministre prévoit-il nous présenter une loi-cadre sur l'habitation? Bien sûr, nous aurons l'occasion d'en parler lors d'une journée spécifique, lors de l'étude des crédits sur l'habitation. Au début de l'étude de ces crédits, j'aimerais connaître l'intention du ministre.

M. Tardif: Je m'excuse, je n'ai saisi que la première partie de la question, à savoir si j'avais l'intention de présenter une loi-cadre sur l'habitation. C'est cela?

M. Cordeau: Oui.

M. Tardif: Je présume que le député de Saint-Hyacinthe fait référence à la promulgation par le gouvernement d'une politique de l'habitation plus que d'une loi-cadre. Le fait est qu'en effet des gens à mon ministère et à la Société d'habitation sont au travail sur l'élaboration d'une telle politique. Cependant, les exigences de la législation nous ont obligés à mettre l'accent sur un des éléments d'une telle politique, à savoir les relations locataire-locateur, puisqu'une échéance était inscrite dans la loi, c'est-à-dire que la loi prenait fin le 31 décembre dernier. Je m'étais — je l'ai avoué candidement en Chambre de façon peut-être un peu téméraire lors de cette mini-session du mois de novembre 1976 — engagé à opérer une vaste refonte de cette loi qui traînait dans le décor depuis 1951 et qui avait été recondite d'année en année depuis 26 ans.

C'est la raison pour laquelle de cet ensemble qui peut constituer une politique d'habitation nous avons privilégié d'abord la question des relations locataire-locateur, attendu que 52% de la population du Québec est locataire; dans la ville de Montréal cela atteint 82% et dans la ville de Québec c'est 70%-75%. Nous avons donc mis l'accent là-dessus non seulement à cause du nombre même des personnes affectées, mais du fait que la loi n'avait pas de caractère permanent. Le personnel de la régie n'avait pas de caractère permanent, il n'avait pas été recruté selon les normes de la Fonction publique, il était nommé selon le bon plaisir et remercié de la même manière. Donc, il fallait mettre l'accent là-dessus. Un livre blanc a été déposé au mois de décembre dernier. Ce livre blanc est maintenant en train d'être transformé en un projet de loi, projet de loi dont on m'a remis une première version pas plus tard qu'hier, le 1er mai, et que je dois évidemment lire avant de le déposer au comité de législation pour que cela suive son cours normal.

C'est, en quelque sorte, un des morceaux importants auquel il a fallu accorder une priorité en raison des échéances mêmes de la loi.

Quant au reste, M. le Président, il nous tarde de le promulguer, de le réaliser, enfin d'énoncer cette politique, même si, déjà, un certain nombre des gestes ont été posés qui s'inspirent de cette politique axée sur le droit au logement, qui est différent du droit à la propriété, et qui s'est traduite par une accélération des programmes

sociaux, d'une part de logement social et par la négociation d'un programme de supplément de loyers. Elle s'est traduite aussi par la mise au point du programme Logipop des coopératives d'habitation locative, qui s'est exprimée jusqu'à tout récemment encore dans le budget du gouvernement par la formule des crédits d'impôt qui permettront, comme chacun le sait, tant au propriétaire qu'au locataire, de déduire de leur impôt sur le revenu, jusqu'à concurrence de 40% des taxes foncières, déduction faite de 2% du revenu imposable. Voilà donc autant de mesures qui traduisent le souci de rendre le logement plus accessible et moins onéreux pour certaines catégories de clientèle. Mais l'énoncé — ou la politique gouvernementale comme telle — reste à venir et nous y travaillons présentement.

M. Cordeau: Je remercie le ministre d'avoir répondu à nos questions et observations et je crois que nous pouvons peut-être commencer, à moins que d'autres aient des questions à poser ou des commentaires à faire.

Questions générales

Le Président (M. Marcoux): Nous allons commencer par le bloc de la gestion municipale. Est-ce que vous voulez les traiter par blocs?

M. Goldbloom: Si vous n'avez pas d'objection, M. le Président, il y a peut-être deux ou trois séries de questions que j'aimerais poser avant d'arriver au sujet qui s'intitule: Organisation et aménagement du territoire municipal.

J'aimerais d'abord, demander au ministre de bien vouloir nous fournir certains documents, c'est un peu traditionnel de le faire. Nous avons constaté de l'extérieur certaines modifications à l'organisation du ministère. Le ministre pourrait-il nous fournir le plan d'organisation supérieure du ministère avec le nom, évidemment, de chaque personne qui occupe chaque poste, pour que nous sachions à quoi nous en tenir. En lui demandant cela, je suis amené à lui poser une question, peut-être légèrement délicate, mais je me sens en devoir de la poser: Depuis combien de temps le ministère n'a-t-il plus de sous-ministre en titre, et quand le ministre pense-t-il nommer un sous-ministre?

M. Tardif: C'est maintenant depuis le mois de décembre que le ministère des Affaires municipales n'a pas de sous-ministre en titre et il y a présentement, M. le Président, au cabinet, un projet de nomination au poste de sous-ministre.

M. Goldbloom: Est-ce que nous risquons de connaître le nom avant la fin du débat sur les crédits?

M. Tardif: II se pourrait qu'avant la fin du débat sur les crédits, le nom du nouveau sous-ministre des Affaires municipales soit connu.

M. Goldbloom: Est-il vrai, M. le Président, que le sous-ministre adjoint, Me Yvon Marcoux, ait quitté le ministère ou soit sur le point de quitter le ministère?

M. Tardif: C'est un fait que le sous-ministre adjoint, qui agissait comme sous-ministre par intérim, quittera le ministère le 8 mai prochain.

M. Goldbloom: M. le Président, vous connaissez comme moi la tradition qui veut que l'on ne parle pas des fonctionnaires, parce qu'ils ne sont pas en mesure de participer aux débats et de répondre, mais je crois aussi qu'il y a une tradition qui veut que si l'on a des compliments à faire, c'est toujours dans l'ordre. Je voudrais, dans la perspective du départ de Me Marcoux, indiquer l'estime que j'ai eue et que j'ai pour lui et pour la somme et la qualité du travail qu'il a fourni au ministère et à la collectivité québécoise. C'est un départ que nous devons regretter tout en souhaitant que dans ses nouvelles fonctions, Me Marcoux trouve toute la satisfaction professionnelle et personnelle qu'il souhaiterait lui-même. (11 h 15)

M. le Président, ma deuxième demande, je m'en excuse, est une demande volumineuse. J'aurais pu la faire inscrire au feuilleton. Si le ministre préfère que je le fasse, je n'aurai pas d'objection. Ce dernier a publié récemment certaines listes de municipalités ayant bénéficié de certains programmes: PACEM, entre autres, PAIRA, si ma mémoire est fidèle, et PAISI. Mais il n'a pas fourni — c'est ce que je dois lui demander — la liste des demandes faites, des montants demandés et des réponses données, parce qu'il y a sûrement des municipalités qui ont demandé de l'aide et ne l'ont pas reçue.

Alors, quant à ces cinq programmes, PACEM, PAREM, PAIRA, PAISI, et LIQUIDATION si le ministre pouvait nous fournir la liste des demandes et des réponses, outre ce qui a déjà été publié, je lui en saurais gré.

Maintenant, j'aimerais arriver à un sujet abordé il y a quelques instants par le député de Saint-Hyacinthe et par le ministre, dans sa réponse. Le rapport de la Commission de refonte des lois municipales est entre les mains du ministre et devait faire l'objet d'un débat public. Le désir en avait été exprimé de la part du gouvernement du temps, de séparer le chapitre sur les élections municipales, puis de tenir des séances de la commission parlementaire pour permettre aux intéressés d'en parler avant d'effectuer quelque changement que ce soit.

Nous attendons toujours, depuis le changement de gouvernement, la tenue de ces séances de la commission parlementaire. Le ministre comprendra sûrement que l'Opposition ne peut se contenter de l'affirmation, par le ministre, que lui-même et d'autres membres du gouvernement ont eu des consultations. Quand je donnais ces réponses, cela ne satisfaisait jamais l'Opposition du temps; or les rôles étant renversés, il faut que je prenne,

en toute logique, la même position. Cette logique sera sûrement acceptée de très bon gré par le ministre.

Réforme municipale

Alors, quand aurons-nous l'occasion de faire ce débat public avec les intéressés? J'ajoute à cela une inquiétude. Je viens de prendre connaissance d'un communiqué émis par le ministre indiquant son intention de déposer et de faire adopter, avant l'ajournement d'été, un projet de loi sur la démocratie municipale. Mais quand on examine, d'une façon détaillée, le communiqué en question, on trouve que ce n'est pas la démocratie en général qui est touchée, mais bien le régime électoral de deux municipalités: Montréal et Lon-gueuil.

Sans présumer que le ministre refusera, après le dépôt en première lecture de ce projet de loi, la tenue de séances de cette commission parlementaire pour écouter les intéressés, je dois exprimer une vive inquiétude; le ministre songe à intervenir dans le régime électoral de deux municipalités importantes, à peine quatre mois avant la tenue des élections dans ces mêmes municipalités. Je dis quatre mois, parce qu'il reste aujourd'hui six mois, mais il est à prévoir que ce sera au cours du mois de juin que le projet de loi sera présenté, si ma mémoire est fidèle. C'est ce qui est indiqué dans le communiqué de presse. Si nous avons des séances de la commission parlementaire et si nous avons un débat qui ne sera pas étranglé par un bâillon, nous pourrons prévoir que le mois de juin sera consacré, en bonne partie, à ce débat.

À la fin de juin, avec l'adoption, par la majorité parlementaire, d'un tel projet de loi, si le gouvernement réussit cela, il restera quatre mois seulement. Ceux qui auront à administrer les élections, les citoyens, les électeurs qui auront à voter auront peu de temps à comprendre et à s'adapter à ce nouveau régime.

J'aimerais que le ministre explique un peu plus clairement ses intentions, d'abord en ce qui concerne le chapitre du rapport Hébert sur les élections municipales; deuxièmement, quant à son projet de loi qui toucherait, selon le communiqué, deux municipalités seulement; troisièmement, sur le rapport Hébert dans son ensemble: qu'est-ce qu'il a l'intention de faire pour promouvoir le débat public afin de permettre que le projet de loi qui devait découler de ce rapport soit déposé, étudié et, un jour, adopté.

M. Tardif: M. le Président, en ce qui concerne le rapport Hébert dans son ensemble, ce document, cette série de documents, il faut bien le préciser, était et demeure le rapport d'une commission de refonte. Ce n'est pas un document de réforme. Ce que la commission Hébert a fait, ce fut de prendre la Loi des cités et villes, le Code municipal et quelque 350 à 400 chartes privées régissant les municipalités, qu'elles avaient fait adopter au cours des années, en vue d'opérer une refonte dans un seul et même texte de loi.

Certes, la commission Hébert, dans ce processus de refonte, a bien été amenée à suggérer, devant des formules diverses d'organisation, par exemple, des comités exécutifs de villes, une certaine standardisation, mais ce n'était pas son mandat d'opérer une réforme de la chose municipale.

L'actuel gouvernement a, sur le fonctionnement des collectivités locales, des idées de réforme qui, évidemment, l'amènent à aller beaucoup plus loin que ce qui est contenu dans le rapport Hébert, même si ce travail de moine peut lui être éminemment utile lorsqu'il s'agira d'harmoniser des textes sur des questions secondaires.

Mais si on pense — et c'est l'intention du gouvernement — opérer un certain nombre de réformes, ce n'est pas dans le rapport Hébert — ce n'est pas lui faire injure puisque ce n'était pas son mandat — que le gouvernement va trouver l'inspiration voulue pour opérer ces réformes.

Deuxièmement, la commission Hébert, et ce, à la demande même du gouvernement antérieur qui avait commandé cette étude, avait soumis un rapport distinct sur le processus électoral dans les municipalités. Encore là, M. le Président, nous avons pensé qu'il fallait aller plus loin que cela et, tout en reconnaissant l'urgence de faire cette réforme avant d'autres aspects du fonctionnement municipal, nous avons décidé — cela rejoint la deuxième question du député de D'Arcy McGee — d'aller de l'avant avec un certain nombre de propositions de réformes du processus des mécanismes électoraux.

Avant de ce faire cependant, le gouvernement a mis sur pied un comité conjoint formé de gens qui travaillent au ministère de mon collègue Burns à la réforme parlementaire afin d'harmoniser aussi ce que la commission Hébert n'avait quand même pas fait, ce qui n'a pas été demandé non plus, un certain nombre des dispositions régissant les élections au Québec avec celles régissant les municipalités et, particulièrement, évidemment, l'introduction, et non la moindre, de la loi 2, par exemple, sur le financement des partis politiques, des caisses électorales.

Nous avons donc mis sur pied ce comité conjoint qui a examiné à notre demande une série de questions. Je peux énumérer ici les points sur lesquels s'est penché ce comité. Je pense entre autres à la confection des listes électorales, à la question du cens électoral, à la question du cens d'éligibilité, au mode de scrutin, à la carte électorale, au nombre de conseillers par municipalité, à la durée des mandats, aux partis politiques municipaux, à leur existence, à leur reconnaissance, que le droit municipal ignore, au financement des partis politiques et des dépenses électorales et à la conduite des campagnes électorales municipales. Sur tous ces points, M. le Président, je pourrais préciser ma pensée et dire que les listes électorales confectionnées à la fois par le gouvernement du Québec, par les municipalités et par les commissions scolaires coûtent terriblement cher. On évalue, grosso modo, quelque part entre $12 millions et $15 millions le coût total de la confec-

tion des listes électorales au Québec, par toutes ces diverses instances.

Une des questions qui vient évidemment à l'esprit, c'est pourquoi on ne pourrait pas avoir une seule liste électorale permanente. Le gouvernement travaille à cette question présentement. Il y a une difficulté majeure en ce qui concerne la liste électorale municipale. C'est relié au deuxième point, c'est que le cens électoral, c'est-à-dire le droit de vote, n'est pas fondé, n'est pas le même en droit municipal que sur le plan québécois. On sait qu'au Québec et au Canada, il suffit d'être citoyen canadien, âgé de 18 ans et résidant pour pouvoir voter, alors qu'au municipal, on sait que les personnes morales ont encore le droit de vote, les compagnies ont encore le droit de vote, les propriétaires non résidants ont encore le droit de vote. Bref, autant de questions qui, comme vous pouvez l'imaginer, M. le Président, soulèvent des problèmes pour peu qu'on pense à une liste électorale unique et permanente.

La question du cens d'éligibilité également, cette fois, c'est qui peut se présenter aux élections municipales. Le mode de scrutin qui est retenu et qui est lié ou la révision du mode de scrutin qui veut qu'à l'heure actuelle... en fait, c'est une modalité du régime présidentiel qui est retenue sur le plan municipal, c'est-à-dire le maire élu au suffrage universel. Certains ont posé la question: À partir du moment où on reconnaîtrait les partis politiques sur la scène municipale, est-ce que le maire ne devrait pas, par exemple, être élu comme un régime parlementaire, enfin comme simple conseiller d'un quartier, et c'est à titre de chef de parti qu'il deviendrait, à l'instar du premier ministre, premier magistrat de sa municipalité? La question a été posée. (11 h 30)

La règle générale au Québec pour ce qui concerne le mode de scrutin, c'est encore contrairement à ce que l'on peut penser, le scrutin plurinominal à un tour, c'est-à-dire plusieurs éche-vins, plusieurs conseillers sur une liste électorale. Parfois, à Montréal, par exemple, dans les 17 quartiers, sauf Saraguay et Rivière-des-Prairies, c'est un ou deux dans ces cas, mais c'est trois généralement. Il y a 17 quartiers à trois conseillers chacun. À Québec, c'est quatre conseillers par quartier. Dans certaines municipalités, ce sont les six conseillers, il y a un maire et six conseillers qui sont élus en bloc. C'est donc le système qui prévaut présentement. C'est surtout le système plurinominal, même s'il y a eu, depuis les dernières années, à la suite des lois régissant les municipalités du Haut-Saguenay et de l'Outaouais, certains amendements qui ont eu tendance à consacrer le principe du système uninominal.

Également, pour les listes électorales, on sait pertinemment qu'il n'y a, à l'heure actuelle, aucune règle qui régit le découpage des cartes électorales municipales au Québec et à Ottawa. Au fédéral, il y a des normes qui veulent, par exemple, que chaque quartier ou chaque district électoral ait, par exemple, au Québec, une population de 32 000, avec une variation de plus ou moins 25%, sauf exception, évidemment, pour des cas d'espèces comme aux Îles-de-la-Madeleine, notamment, mais, au municipal, rien de tel n'existe, si bien qu'on retrouve présentement, dans certaines villes, des quartiers municipaux où 3000 électeurs suffisent à élire un échevin ou un conseiller, alors que, dans le quartier à côté, il en faut 10 000 ou 11 000 pour faire élire un conseiller.

De telles disparités ou disproportions existent. Évidemment, il nous a semblé important d'avoir des normes concernant le découpage des cartes électorales et aussi le nombre de conseillers par municipalité. On sait que, dans les petites municipalités rurales, la règle est un maire et six conseillers. Or, il y a des municipalités qui ont atteint presque 100 000 de population et qui ont encore un maire et six conseillers seulement. Il nous semble que, là aussi, il est important d'établir une certaine corrélation entre la population d'une municipalité et le nombre de conseillers qui devraient exister pour représenter les citoyens de cette municipalité.

Quant aux mandats, on retrouve présentement dans le droit municipal des mandats de deux, trois et quatre ans. Certaines villes ont des mandats de quatre ans. Les cités et villes ont des mandats de quatre ans. Les municipalités rurales ont des mandats de deux ans, en général, le conseil étant renouvelable pour la moitié tous les ans. Certaines des municipalités rurales pouvaient, de par la loi, se prévaloir de mandats plus longs avec l'autorisation du lieutenant-gouverneure en conseil, mandats de trois ans ou de quatre ans selon les cas.

Les partis politiques municipaux, je l'ai mentionné tantôt, le droit municipal les ignore, même s'ils existent dans les faits. Il nous semble que c'est là une anomalie qu'il y a lieu de corriger. Ils existent, que cela nous plaise ou non, que cela plaise à certaines administrations ou non; il y a des partis politiques municipaux qui existent. Qu'est-ce qu'on en fait? Il y a le financement de ces partis politiques et les dépenses électorales. La question est: Dans quelle mesure la loi 2 pourrait-elle s'appliquer, intégralement ou non, avec les adaptations nécessaires sur la scène municipale? Évidemment, il y a la question de la conduite des dépenses électorales. Voilà, en gros, pour ce qui est des mécanismes électoraux, qui sont autant de points qui ne sont pas touchés dans le rapport Hébert, à certains égards, et qu'il nous semblait important d'introduire. Encore une fois, je n'en fais pas grief à la commission Hébert; ce n'était pas son mandat, ce n'était pas une commission de réforme, c'était une commission de refonte.

D'autre part, reliée à la question des mécanismes électoraux est toute la question du processus de prise de décision. On retrouve sur la scène locale, en gros, si vous voulez la résumer: Quels sont les pouvoirs du conseil municipal? Quels sont les pouvoirs du maire? Lorsqu'il y a un comité exécutif, quels sont les pouvoirs du comité exécutif? Dans certaines municipalités, il y a des commissions du conseil. Quels sont les pouvoirs de ces commissions? De qui sont-elles formées? Relié à cela, dans les plus grands centres, il nous

semblait important de nous pencher sur la possibilité d'avoir des conseils de quartier. Quels devraient être les pouvoirs de ces instances qu'on pourrait appeler conseils de quartier? Il y a aussi certaines questions que l'on se pose concernant les consultations populaires, les référendums au niveau des municipalités. Il y a eu des amendements apportés quant au nombre de personnes qui pouvaient demander la tenue de consultations populaires ou de référendums. Il nous a semblé important de nous pencher sur cette question, de même que sur l'information aux citoyens.

En ce qui concerne le budget, les immobilisations, déjà, nous avons amendé le Code municipal pour obliger les municipalités rurales — ce sont 1250 municipalités quand même — à faire un budget annuel. Ce n'était pas le cas avant; elles n'étaient pas tenues d'en faire un. Maintenant, elles sont tenues de le faire. Il me semble qu'il faut poser des questions maintenant, à savoir s'il ne faudrait pas aller plus loin maintenant et faire en sorte que ce budget reçoive une certaine publicité auprès des populations.

Les cités et villes étaient tenues, de par la loi, de faire un budget municipal. Les amendements qu'on a apportés par la loi 54 vont plus loin et exigent des cités et villes, ainsi que des communautés urbaines, qu'elles déposent un programme triennal d'immobilisations, de sorte que les citoyens sachent vraiment l'étendue, l'envergure des immobilisations que se propose de faire la municipalité ou la communauté. Voilà autant de questions que nous nous posons.

Enfin, un dernier point sur lequel nous avons travaillé, c'est la question de l'éthique dans les affaires municipales. L'actuel gouvernement et les membres du cabinet se sont imposés eux-mêmes des règles d'éthique sur le plan de la déclaration de leurs intérêts, déclaration volontaire. Ils ont dû se départir de tout intérêt qui pouvait les mettre en conflit avec l'exercice de leur fonction. La question que nous nous posons: Dans quelle mesure devrions-nous introduire dans le droit municipal un certain nombre de dispositions relatives à l'éthique et à ces questions de conflits d'intérêt et de déclarations d'intérêts personnels?

M. le Président, ce mandat très vaste, ainsi que vous le constatez, qui a été confié à ce comité de travail, a résulté dans la remise aux deux ministres concernés, c'est-à-dire Robert Burns et moi-même, par ce groupe de travail, d'un rapport, à la fin décembre, début janvier. Nous avons décidé de scinder en deux les recommandations pour nous attacher d'abord à celles qui touchaient le processus électoral comme tel. Suite à la remise de ce document, nous avons préparé un texte qui ne portait que sur ces questions reliées au processus électoral et nous avons entamé une consultation avec les municipalités, les conseils de ville des municipalités ayant plus de 50 000 de population, ainsi qu'avec l'Union des municipalités, l'Union des conseils de comté. Ce document a fait l'objet, d'ailleurs, d'un coulage — cela me semblait normal — on leur a soumis un certain nombre de propositions. Ces consultations nous ont permis de nous rendre compte que, si certaines mesures pouvaient être adoptées à très courte échéance, d'autres étaient plus problématiques et qu'il était préférable de les remettre à plus tard, après plus amples études et consultations, si bien que ce qui a été publié dans le communiqué... et là, je reviens au souci manifesté par le député de D'Arcy McGee, à savoir les élections s'en viennent et c'est très tôt à Montréal. C'est justement en raison de ces délais très courts qu'il nous a semblé préférable de nous limiter à un certain nombre de mesures susceptibles d'accroître le fonctionnement de la démocratie. Ces mesures, essentiellement, reposent sur les huit points suivants: d'abord, les mesures s'appliqueront obligatoirement aux villes de 100 000 âmes et plus. Dans les faits, deux villes de 100 000 âmes et plus auront des élections en novembre prochain.

Deuxièmement, ces mesures s'appliqueront facultativement, pour les prochaines élections, toujours, aux villes de 20 000 âmes et plus qui, sur résolution de leur conseil, décideront de tenir leurs élections selon le nouveau processus plutôt que selon l'ancien. Donc, mesure facultative dans les autres cas.

Quant aux mesures elles-mêmes, M. le Président, elles reposent essentiellement sur les points suivants: abolition du vote des personnes morales, consécration du principe uninominal, du scrutin uninominal, c'est-à-dire d'un conseiller par quartier: reconnaissance des partis politiques municipaux, financement des campagnes électorales ou des dépenses électorales, établissement d'une échelle quant au nombre de conseillers en fonction de la taille des municipalités; calibrage des cartes électorales en fonction des principes qui seront édictés dans la loi, c'est-à-dire la population totale divisée par le nombre de conseillers avec un écart maximal de plus ou moins 15%, sauf exception, qui devront être autorisés par la commission québécoise de la refonte des cartes électorales; permission pour les municipalités a-yant plus de 15 conseillers d'avoir un conseil exécutif; et, finalement, tenue du scrutin — enfin, c'est la date de tenue du scrutin dans ces villes — le dernier dimanche d'octobre à moins que les échéanciers de chacune des villes que nous sommes en train d'examiner fassent qu'il soit trop tôt; dans ce cas-là, ce sera la date la plus proche possible de ce dernier dimanche d'octobre, compte tenu qu'à Montréal, par exemple, les élections étant prévues pour le 12 novembre, cela n'est pas plus conséquent que ça.

Voilà en gros, M. le Président, les huit points sur lesquels le Conseil des ministres a donné son accord et qui ont déjà fait l'objet d'un communiqué qui n'était peut-être pas aussi explicite que ce que je viens de mentionner; il ne l'était pas à ce point-là. Il a résulté dans ces décisions du conseil et un projet de loi est en préparation présentement, projet de loi qui devra être déposé incessamment et que l'Opposition pourra discuter à loisir.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Verdun.

M. Caron: M. le Président, au sujet du rapport Hébert, le ministre dit qu'il y a certains de ses fonctionnaires — il nous a fait un exposé — qui sont en train de le réétudier. J'aimerais demander au ministre si on a confié à certaines personnes un mandat spécifique pour étudier des parties de ce rapport en dehors de votre ministère.

M. Tardif: Non, il n'y a eu aucune étude de recommandée à l'extérieur du ministère.

M. Caron: Parfait!

Le Président (M. Marcoux): D'autres questions?

M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais revenir à cette réforme électorale au niveau municipal. Le ministre n'a-t-il pas peur d'être accusé d'afficher une volonté qu'il n'a sûrement pas, mais une volonté, une intention d'intervenir de façon à influencer les résultats électoraux dans les municipalités en question? C'est délicat, je le reconnais. Je reconnais aussi qu'à n'importe quel moment, si l'on intervient, il y aura cette année des élections dans certaines municipalités. Mais je pense que les deux cas en question sont peut-être un peu plus importants quant au nombre d'électeurs impliqués et sont des cas un peu chatouilleux. Le gouvernement n'a-t-il pas peur d'être accusé de vouloir intervenir de façon à obtenir un certain résultat électoral?

M. Tardif: M. le Président, le gouvernement n'a qu'un seul souci, s'assurer que la démocratie s'exerce sur la scène locale. L'action du gouvernement aurait pour résultat de s'assurer d'une présence de l'opposition au conseil; ce serait, pour moi, tout simplement permettre de corriger certaines distorsions du genre de celle qu'on a connue à Québec ici aux dernières élections, où l'Opposition a reçu 40% des voix sans avoir un seul représentant au conseil. Cela m'apparaît grave. (11 h 45)

Dans les cas de Montréal et Longueuil, j'ai peut-être omis de mentionner que nous avons consulté non seulement l'administration, mais également les partis d'opposition. Nous leur avons fait part à tous les deux de notre intention dans ce domaine, de sorte que les règles du jeu sont connues de tous. Il a peut-être aussi — je m excuse, mais il me semblait tantôt qu'il y avait un autre point que j'avais oublié — été question, à un moment donné, d'introduire un élément de correction dans le vote, donc un processus qui permettrait d'avoir, en sus des conseillers élus par quartiers, un certain nombre de conseillers qui viseraient à corriger la représentation ou à équilibrer autant que possible le nombre de sièges avec le nombre de voix obtenues. Cette solution a été mise de côté. Cependant, pour favoriser l'apparition de l'opposition à l'hôtel de ville, le principe de permettre au maire de se présenter à la fois à la mairie et à l'échevinage dans un quartier avec un suppléant a été retenue aussi par le Conseil des ministres.

M. Goldbloom: M. le Président, je crois que le ministre n'a pas répondu précisément aux questions que j'ai posées au sujet de l'opportunité de tenir des séances de la commission parlementaire sur la question électorale au niveau municipal en général et sur le projet de loi qu'il s'apprête à déposer pour les municipalités de 100 000 âmes ou plus et autres sur une base facultative. Aurons-nous des séances de la commission parlementaire?

M. Tardif: II n'y a pas de raison pour laquelle il ne devrait pas y avoir de séance de la commission parlementaire sur ces questions, M. le Président.

M. Goldbloom: Le ministre nous a indiqué qu'il a informé les administrations municipales des grandes lignes du contenu du projet de loi , qu'il en a discuté également avec les groupes d'opposition dans les municipalités en question. Il a dit: Les règles du jeu sont donc connues des intéressés depuis déjà un certain temps. "Connues " est une chose; "acceptées" en est une autre.

M. Tardif: D'accord.

M. Goldbloom: Est-ce que, effectivement, les municipalités, les administrations actuelles ont accepté avec joie et empressement les propositions du ministre?

M. Tardif: Je pense que ce serait beaucoup dire, M. le Président.

M. Goldbloom: C'est ce que je soupçonnais.

M. Tardif: II serait exagéré d'affirmer que les municipalités ont accepté avec joie et empressement toutes les réformes proposées. Le fait est que vis-à-vis d'un certain nombre d'élus locaux, municipaux, pour eux, il n'y a aucun besoin d'effectuer une réforme de la démocratie. La preuve que c'est démocratique, nous ont-ils dit parfois: Regardez si nous avons été élus. Dans un cas, un conseiller ou un maire m'a dit: Cela fait 25 ans que je suis élu, donc que voulez-vous de plus démocratique? Il est bien évident, cependant, que dans le cas des deux villes concernées, particulièrement Montréal et Longueuil, et des autres, on reconnaît qu'il y a des distorsions qu'il faut corriger. En principe, il y a des arguments pour et contre le système plurinominal. L'on reconnaît qu'il y a des partis politiques qui existent présentement dans les municipalités et il est peut-être important que le droit municipal les reconnaisse également. Quant à la question du financement des partis politiques, si l'Assemblée nationale du Québec l'a adoptée unanimement pour les élections au Québec, il me semble que mutatis mutandis les mêmes principes devraient pouvoir s'appliquer sur la scène municipale.

Si bien que je ne vois là-dedans rien qui aille à

l'encontre des intérêts bien sentis de la chose municipale. Il est évident que certaines habitudes de fonctionner seront peut-être changées par cela. Mais j'ai cru déceler, à défaut d'un enthousiasme délirant, de la part notamment du maire de Montréal, administration que vous avez qualifiée de chatouilleuse, un certain défi, une certaine attitude qui fait dire: Écoutez, peu importe les règles du jeu, nous sommes quasi assurés que la population montréalaise saura reconnaître ce que nous avons fait. Si bien que je ne prévois pas, de ce côté-là, de difficultés majeures non plus.

Le fait d'abolir, par exemple, le vote des personnes morales, quand on sait qu'il n'y a pas 4% des personnes morales inscrites au rôle qui se servent de leur droit de vote, il n'y a pas là de quoi révolutionner le monde, mais il reste que cela consacre un principe selon lequel le droit de vote est fondé essentiellement sur la personne et non sur la richesse.

Je pourrais ainsi continuer sur le plan des justifications de chacun des autres points mentionnés.

M. Goldbloom: M. le Président, il y a quand même une chose qui m'embête un peu. Le ministre a tracé certaines comparaisons, certains parallèles entre ce qui se fait aux niveaux fédéral et provincial et ce qui devrait se faire au niveau municipal. Il a dit que la situation qui existait à Montréal il y a un certain temps, et celle qui existe à Québec présentement, où il y a eu un bloc de votes accordés à un parti politique municipal qui n'a pas obtenu de siège, n'étaient pas normales.

Il a même laissé sous-entendre — je ne voudrais pas mal l'interpréter — qu'il y avait là des éléments de danger, que la population qui avait ainsi voté se sentirait très frustrée de ne pas être représentée. Est-ce que cela veut dire que le gouvernement actuel va faire le même raisonnement à rebours et dire, au niveau municipal, qu'il n'est pas normal qu'il y ait un pourcentage X de votes et qu'il n'y ait pas de siège et qu'il faudrait donc un mécanisme proportionnel qui permette un certain nombre de sièges soient accordés à un pourcentage donné de votes exprimés? Est-ce que le ministre est en train de nous dire qu'un régime proportionnel sera proposé pour le Québec, au niveau provincial? Si oui, le ministre est sûrement conscient du fait que le parti dont il est membre a 65% des sièges avec 41% des votes. Est-ce qu'il serait aussi heureux de modifier le régime provincial qu'il semble l'être de le modifier au municipal?

M. Tardif: M. le Président, je suis particulièrement au fait des avantages, des désavantages et des distorsions que cause le système uninominal à un tour. À ce sujet, je croyais avoir indiqué assez clairement que la décision du Conseil des ministres avait été, pour l'instant, de ne pas retenir le principe d'un facteur de correction, parce que ce n'était pas véritablement proportionnel au sens plein du terme, mais de retenir l'idée d'un facteur de correction pour les élections municipales qui viennent, justement à raison des questions que nous nous posons sur l'introduction d'un tel système à l'échelle du Québec.

Ce qui a été retenu comme formule mitoyenne pour la chose municipale, cela a été d'allier un élément du régime parlementaire à un élément du régime présidentiel. J'ai mentionné que nous conservions pour la mairie le régime présidentiel, donc le maire élu au suffrage universel.

Par ailleurs, au lieu que le maire soit élu comme simple conseiller d'un quartier, c'est à titre de chef de parti qu'il deviendrait maire. Nous avons donc gardé le maire élu au suffrage universel; par ailleurs, nous proposons que le maire puisse également se présenter, dans les villes de plus de 20 000 de population, comme conseiller dans un quartier avec un suppléant. Si bien qu'étant élu à la mairie, donc étant maire de sa ville, s'il est élu également comme conseiller, alors, c'est son suppléant qui, automatiquement, deviendra conseiller de ce quartier, ou le colistier. S'il n'est pas élu à la mairie, mais qu'il est élu comme conseiller, à ce moment-là, il pourra, à l'hôtel de ville, diriger son parti d'Opposition ou représenter l'Opposition à l'hôtel de ville.

C'est pour nous une façon d'introduire l'opposition à l'hôtel de ville, plutôt que de l'avoir dans la rue, ainsi que risquait ou peut risquer de se produire une opposition qui accorde 40% de suffrages à un parti et que celui-ci n'a aucun représentant au conseil.

M. Goldbloom: M. le Président, il me reste trois petites questions dont j'aimerais réserver la troisième pour midi, vingt-neuf minutes et demie, pour que je puisse commencer à courir immédiatement.

Je pose les deux autres. Qu'est-ce que le ministre entend faire pour permettre à un candidat indépendant, qui n'est pas membre d'un parti politique municipal, d'avoir des chances raisonnables de se faire élire? C'est, de toute évidence, plus difficile au niveau provincial et au niveau fédéral, mais, au niveau local, le citoyen qui se sent capable de représenter son quartier et qui n'est pas affilié à un mouvement politique et qui ne veut pas l'être ne devrait pas, à mon sens, être exclu de la course, à toutes fins pratiques, par les mécanismes, les contrôles et les restrictions qui pourraient être imposés.

C'est la première question que je voulais poser. Je pose immédiatement la deuxième. Est-ce que, dans la législation que le ministre a l'intention de proposer dans les tout prochains jours ou les toutes prochaines semaines, nous verrons la création, promise l'an dernier, du poste de vérificateur général pour les municipalités?

M. Tardif: M. le Président, les modifications proposées n'ont pas pour effet d'empêcher les candidatures indépendantes. La reconnaissance des partis politiques, c'est une chose, mais, au contraire, je pense que les amendements apportés pourront faciliter les candidatures indépendantes dans la mesure où le projet de loi, dont le principe a été accepté par le Conseil des ministres, recon-

naîtra le remboursement des dépenses électorales, à la fois faites par les partis et les candidats, y compris les candidats indépendants, si bien que, sans être supportés par toute une machine, par tout un appareillage ou par tout un parti, il est possible pour un candidat indépendant de se voir rembourser une partie de ses dépenses électorales, au même titre que s'il avait été membre d'un parti.

Quant à la deuxième question, je m'excuse, M. le Président.

M. Goldbloom: La création du poste de vérificateur général?

M. Tardif: La création du poste de vérificateur général n'entre pas dans la série d'amendements sur les modifications électorales. Il est prévu cependant, puisqu'on parle d'amendements aux dispositions électorales, que le directeur général du financement des partis politiques sur la scène provinciale pourra, en ce qui concerne le financement des partis politiques municipaux, exercer un certain nombre de fonctions de surveillance et de contrôle. De même, pour ce qui est du président général des élections, il pourra, sur certaines questions, superviser l'action des présidents d'élection, c'est-à-dire les greffiers municipaux, sur la scène locale.

Le poste de vérificateur général des municipalités, c'est une autre chose. Déjà, nous avons introduit cette fonction dans les amendements à la charte de Montréal, en ce qui concerne cette municipalité, mais ce n'est pas comme tel dans les amendements. C'est une chose qui sera à faire, mais ce n'est pas dans les amendements des mécanismes électoraux comme tels que cette disposition sera abordée. (12 heures)

M. Caron: M. le Président, au sujet du poste de vérificateur, est-ce que le ministre a l'intention, dans l'année qui vient, de trouver un moyen de l'avoir? Vous savez, M. le ministre, c'est important. J'ai déjà demandé ici, il y a plusieurs années, qu'il y ait une équipe volante pour aller dans les municipalités. Naturellement, cela n'avait pas semblé toucher les gens du temps. Je pense que ce serait une nécessité que les municipalités soient visitées à l'occasion, un peu comme on le fait pour les banques où des vérificateurs passent et font une vérification. Que cela plaise ou non, ils y vont. À l'occasion, on trouve de petits bobos.

Je pense que c'est la responsabilité du gouvernement. Je pense que les élus n'ont pas toujours la compétence ou le temps voulu pour pouvoir fouiller et regarder. Je suis bien à l'aise pour en parler. Un cas s'est glissé — je ne voudrais pas m'étendre là-dessus parce que c'est devant les tribunaux — dans la municipalité de Verdun qui est certainement un cas qui a passé entre les doigts de tout le monde. Personne de la municipalité ou du conseil n'en est responsable. J'imagine qu'on devrait essayer de prévenir ces choses-là. S'il y a des vérifications qui se font dans les banques, je ne vois pas pourquoi cela ne se ferait pas dans les municipalités.

C'est le devoir, j'en suis convaincu, du gouvernement du Québec de prendre les mesures nécessaires pour que ces vérifications se fassent.

M. Tardif: M. le Président, je suis bien heureux que ce soit un député-maire qui me fasse une telle demande. Si la suggestion avait émané du ministère, on aurait pu me taxer d'impérialiste ou encore rappeler mon passé. Le fait est qu'à l'heure actuelle, la vérification comme telle est d'abord, si vous voulez, l'affaire des municipalités qui doivent produire des rapports financiers, des états financiers dûment vérifiés. Il s'agit là de vérifications comptables, évidemment, qui peuvent s'assurer que les colonnes de chiffres s'équilibrent, mais de là à aller voir ce qui est derrière cela, c'est une autre chose.

Deuxièmement, lorsque les gens de l'administration financière ont à approuver les règlements d'emprunts et qu'ils s'aperçoivent que la cote d'alarme est dépassée, ils peuvent envoyer des gens sur place. Ils peuvent, ce n'est pas fait systématiquement.

Il y a aussi la Commission municipale qui, à cet égard, joue un rôle de surveillance. Je dois vous avouer, M. le Président, que j'ai pu, au cours de ces 16 ou 17 derniers mois, recueillir assez de faits et de plaintes, non seulement des plaintes ou des allégations, mais même des faits que, justement, il m'apparaisse urgent de faire un certain nombre de gestes sur ce plan.

On parle de la fonction de vérificateur général, je voudrais même aller plus loin, M. le Président, pour dire que, par exemple, sur le plan de la loi concernant la fraude et la corruption municipale, il m'apparaît urgent de faire en sorte que le procureur général ait l'intérêt suffisant au sens de la loi. À l'heure actuelle, sauf évidemment s'il s'agit de choses carrément criminelles, il faut qu'un citoyen se mette au blanc, qu'il aille devant la cour et qu'il s'expose, avec tout ce que cela comporte, pour mettre en branle le processus d'enquête et de requête en disqualification pour des élus municipaux qui se seraient livrés à de la corruption municipale.

Il me semble que, là-dessus, c'est beaucoup demander aux citoyens. Il ne s'agit pas d'enlever ce droit aux citoyens, je pense qu'il devra toujours être là, mais il faudrait aussi que le procureur général ait un intérêt suffisant en la matière pour agir.

Il y a ces autres dispositions pour ce qui concerne les conflits d'intérêts. Vous avez fait allusion, M. le député de Verdun, à une affaire qui concernait votre municipalité. Pas bien loin, dans l'ouest, juste à côté, dans la ville de Lachine, pour ne pas la nommer, il y a eu un autre beau cas récent qui est proprement criminel, qui est devant les tribunaux présentement. J'ai présentement sur mon bureau, sur ma table de travail, les cas de deux autres municipalités importantes de la région de Montréal où, véritablement, il m'apparaît important de poser des gestes.

J'ai, d'ailleurs, eu à ce sujet un rapport du juge président de la commission municipale, me recommandant un certain nombre de mesures. J'ai

déclaré que j'étais d'accord avec ces recommandations, si bien que les choses devraient suivre leur cours. Quand vous parlez d'avoir un vérificateur général qui aille sur place faire enquête, vous savez, la loi organique du ministère des Affaires municipales est ainsi faite qu'elle donne beaucoup de pouvoirs, jusqu'à un certain point, au ministre des Affaires municipales. Cela me fait penser que j'ai l'impression parfois d'être le shérif qui remet un badge à quelqu'un et qui dit: Allez faire enquête. Le fait est que la loi organique du ministère permet au ministre des Affaires municipales de désigner des enquêteurs vérificateurs. C'est toujours dans cet esprit de vérification comptable. Je pense que ce n'est pas suffisant et que ce n'est pas uniquement par le biais d'une vérification comptable que l'on saura examiner le train de vie sans rapport avec les revenus de tel maire ou de tel conseiller. Est-ce assez clair?

M. Caron: M. le Président, vous savez, je le dis, non pas seulement au point de vue de maire et de conseiller, mais de fonctionnaires aussi. Chez nous, c'est arrivé dans un cas de fonctionnaire. Je pense que le ministre ne sera jamais assez sévère. Peu importe qui est à la tête de votre ministère, je pense que l'exemple doit partir des municipalités, si on veut que les gouvernements supérieurs marchent dans la bonne direction. Le ministre sait aussi ce que je veux dire. Je n'ai pas à lui faire un dessin ce matin. Cela me fait plaisir de le dire. J'en ai déjà parlé ici. Comme je vous le dis, cela n'a jamais donné de résultat, pour une raison ou pour une autre; je ne veux juger personne. Il faut absolument prévenir d'autre chose qui peut arriver. Vous dites qu'il y a une autre municipalité, vous en avez deux autres cas. Sur le nombre de municipalités en province, j'imagine que ce qui peut se faire dans l'île de Montréal doit se faire ailleurs aussi.

M. le ministre, j'espère que vous prendrez tous les moyens possibles pour qu'il y ait de l'ordre, ou, si des choses se sont passées, qu'elles ne se reproduisent plus.

M. Tardif: M. le Président, je voudrais ajouter seulement un mot là-dessus. Je remercie le député de Verdun d'avoir indiqué que, effectivement, il serait injuste de n'impliquer là-dedans que des élus. Le fait est que dans beaucoup de cas, d'ailleurs, dans cet autre cas que j'ai cité, des fonctionnaires municipaux étaient impliqués, des fonctionnaires non salariés, au sens du Code du travail, jouissant d'une protection particulière en vertu de la Loi des cités et villes avec droit d'appel à la commission municipale etc. C'est un fait. À ce sujet, d'ailleurs, les amendements apportés l'an dernier à la Loi des travaux municipaux rendaient inhabiles à siéger ou à occuper une charge élective ou nominative, toute personne qui se rendait coupable de. Je pense que c'était un premier pas dans cette direction.

Deuxième élément, je pense qu'on reconnaîtra ici l'importance, encore une fois, des amendements que le gouvernement se propose d'apporter sur la réforme de la démocratie, sur le financement des élections des partis politiques. Quand on reçoit des plaintes nous informant qu'il n'y a pas un clou qui s'achète dans la municipalité sans qu'il y ait une entrée dans un compte de banque à Toronto ou ailleurs, je pense que tout cela est relié au climat politique et au financement des partis politiques. Il y a beaucoup d'hommes publics qui ne demandent pas mieux finalement que de se sortir de cette dépendance vis-à-vis de ces fournisseurs, entrepreneurs et autres, sur la scène locale. Je voudrais seulement ajouter un dernier renseignement. Lorsque la Régie anti-inflation a été abolie au Québec, j'ai récupéré un fonctionnaire, un comptable qui est revenu à mon ministère et qui a été chargé avec une petite équipe d'aller vérifier périodiquement, lorsque je recevais des plaintes. Il a au moins présentement à sa liste une vingtaine de municipalités à visiter.

M. Caron: Alors, déjà, le travail est commencé?

M. Tardif: D'accord.

M. Caron: Je vous remercie.

M. Goldbloom: M. le Président, ce que dit le ministre au sujet de la démocratie municipale et de la propreté qu'il faut assurer au niveau municipale doit, de toute évidence, rallier l'appui de tout le monde.

Je reviens quand même à cette question de l'opportunité de légiférer dans ce domaine au mois de juin. Cela me préoccupe. Il me semble que, surtout pour une grande municipalité où il y aurait des transformations importantes à effectuer en peu de temps, on risque de créer une situation difficile, un fouillis même, et ce n'est pas un risque que j'aimerais voir prendre un gouvernement quand l'intérêt des citoyens municipaux est en jeu. Il me semble que c'est le genre de législation que l'on devrait présenter et faire adopter au mois de novembre, après les élections de cette année-là pour permettre l'adaptation nécessaire pendant une année entière. C'est une opinion que j'exprime et que je soumets à l'attention du ministre.

M. Caron: M. le Président, juste avant que le ministre finisse, je m'excuse, est-ce que vous avez pu consulter aussi les fonctionnaires municipaux, à savoir s'ils vont avoir le temps, dans les villes où il y aura des élections, de mettre le mécanisme en branle pour la date voulue? Si ce projet de loi est adopté à la fin du mois de juin, naturellement, il ne restera pas grand temps.

M. Tardif: M. le Président, les greffiers qui, en vertu de notre droit municipal, agissent comme présidents d'élections, ont été vus dans les deux cas où il y aura obligatoirement des réformes. Nous nous sommes intéressés, à la fois auprès des élus, des partis d'opposition et des fonctionnaires, de la "faisabilité" de ces points de réforme. Quant à la population, M. le Président, n'en déplaise au

député de D'Arcy McGee, nous allons simplifier les choses. Le citoyen n'aura plus à voter pour quatre, cinq, six ou huit noms; que le maire et son conseiller. Pour les citoyens ordinaires, on vient de simplifier les choses, je pense.

M. Goldbloom: Cela me plairait beaucoup si les choses étaient plus simples, M. le Président. Je ne partage pas parfaitement la confiance du ministre, mais l'avenir nous dira si c'est une bonne chose. Il ne faut pas présumer aujourd'hui d'un débat qu'il faudra faire au mois de juin, paraît-il.

J'aimerais prendre l'initiative d'un changement de sujet, mais pas si mes collègues...

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Hyacinthe, je crois, sur le même sujet.

M. Cordeau: Cela regarde les municipalités, bien sûr, mais cela...

M. Goldbloom: Allez!

M. Cordeau:... concerne la taxe de vente. Suite à l'entente qui devrait être ratifiée entre Ottawa et Québec concernant la taxe de vente sur certains secteurs mous, comme on les appelle communément, j'ai reçu des appels téléphoniques de municipalités voulant savoir si elles vont recevoir encore leur part de la taxe de vente et de quelle façon le gouvernement va procéder pour leur donner ce qui leur est dû. Dans certaines municipalités, l'industrie du meuble... Je connais une municipalité du comté qui a un gros marchand de meubles; donc la taxe de vente était considérable. Cela va les affecter. Pourriez-vous rassurer les municipalités sur ce problème d'actualité?

M. Tardif: M. le président, je ne sais pas si le député de Saint-Hyacinthe était présent en Chambre lorsque le ministre des Finances a fait sa déclaration sur la taxe de vente. À ce moment-là, il a dit en substance, et le député de Saint-Hyacinthe pourra aller rassurer les municipalités de son comté, que le gouvernement du Québec allait compenser le manque à gagner résultant de la disparition de la taxe sur les vêtements, les textiles, les chaussures et les meubles autres que les appareils électroménagers, et que ceci allait compenser pour les municipalités.

M. Goldbloom: M. le Président...

M. Cordeau: Allez-vous ajouter également la progression qu'il y avait normalement dans certaines municipalités, parce que... (12 h 15)

M. Tardif: Je ne suis pas au courant du mécanisme d'ajustement, mais ce qui apparaît important, c'est qu'il n'y ait pas de manque à gagner pour les municipalités.

M. Goldbloom: M. le Président, il faut quand même reconnaître le fait qu'il y a une évolution du revenu provenant de la taxe de vente qui varie de municipalité en municipalité et d'année en année. Ce n'est pas une remise automatique, ce n'est pas une remise connue d'avance. Les versements sont faits d'abord selon des barèmes, mais il y a ensuite des ajustements, parce que la performance varie justement de municipalité en municipalité. S'il y en a une, par exemple, qui fait bâtir en 1978 un centre commercial, la différence entre 1977 et 1978 sera considérable.

Selon quels barèmes le ministre va-t-il compenser le manque à gagner? Comment pourra-t-il savoir quelle aura été la performance de la taxe de vente là où celle-ci n'existera plus? Il y a évidemment des municipalités où il y a une concentration de magasins dans un domaine, disons. Il y a des municipalités où, par exemple, il n'y a pas de magasin de chaussures, mais il y en d'autres où il y en a deux ou trois. Il y aura donc une différence de performance de la taxe de vente entre ces municipalités. Comment le ministre pense-t-il rendre justice à tout le monde?

M. Tardif: M. le Président, encore une fois, je pense que je pourrais énoncer ici sans doute cinq ou six propositions qui peuvent venir à l'esprit à partir de méthodes statistiques: faire des extrapolations et présumer que le pourcentage moyen de revenus créés par les autres secteurs pourrait être appliqué à ces domaines. Je vous dis que les modalités ne sont pas arrêtées pour l'instant. Le député de D'Arcy McGee sait pertinemment que, de cette taxe de vente de 8%, la proportion redistribuée aux municipalités est l'équivalent de 2%. Sur ces 2%, il y a 50% —donc 1% —qui est distribué sur une base locale en fonction des emplettes ou des achats effectués à l'intérieur des limites de la municipalité. Il y a 40% de ces 2% qui sont distribués sur une base régionale, c'est-à-dire au prorata de la population de la municipalité dans la grande région économique, et il y a 10% de ces 2% qui sont redistribués au prorata de la population de la municipalité sur celle du Québec. En réalité, ce ne sont même plus, à ce moment-là, les 2% entiers qui sont affectés, mais uniquement 1% par les achats strictement locaux. Encore là, ces achats strictement locaux ne sont que dans les quatre secteurs mentionnés, M. le Président, et je pense qu'il est facile d'en arriver à des ajustements où personne ne serait perdant. Le grand conflit ou les grands problèmes de péréquation, de toute façon, de cette formule de redistribution de la taxe de vente, restent entiers de même que les problèmes d'ajustement quinquennaux causés par les publications du recensement du Canada qui font que, puisque le chiffre de la population importe pour beaucoup dans cette redistribution aux villes entre les périodes de recensement, on fonctionne avec des extrapolations de population et ce genre de problème est, je pense, tout aussi important sinon plus que l'autre.

M. Goldbloom: M. le Président, la taxe de vente a produit, en 1977, une certaine masse d'argent et cette masse a été utilisée au quart pour une redistribution vers les municipalités. Cette

année, cette somme sera vraisemblablement inférieure, parce qu'il y a des achats qui sont détaxés. Or, il y aura un montant additionnel qui sera accordé en compensation. On calculera que, cette année, il y aurait eu une progression de la taxe de vente et l'on donnera aux municipalités un montant équivalent.

Mais est-ce que le ministre est au courant — j'allais dire du fait, mais je ne dis pas du fait, parce que je n'ai que des chiffres qui m'ont été fournis, je ne voudrais pas m'en porter garant — je suis informé que la croissance, pour l'ensemble de la province en 1977. a été de 9%. On pourrait donc dire que l'on pourrait majorer la taxe de vente de 9% ou un chiffre analogue, sauf que, pour la ville de Montréal, la croissance n'a été que de 6%. Si ce que je viens d'avancer est vrai, si la croissance n'a été que de 6% pour Montréal, cela veut dire que, dans beaucoup d'autres municipalités, il y a eu une augmentation de 12%, 15% ou 20% pour rendre la moyenne plus élevée que la performance à Montréal, qui est le facteur le plus pesant dans le calcul, à cause de l'importance de la population. Le ministre a-t-il l'intention de tenir compte de cet écart, d'abord de vérifier que les chiffres que j'ai avancés sont véridiques et, deuxièmement, s'ils sont confirmés, d'en tenir compte dans les calculs qui se feront?

M. Tardif: M. le Président, le souci du député de D'Arcy McGee pour les effets de la réduction de la taxe de vente sur les municipalités l'honore. On va peut-être souhaiter qu'il manifeste le même souci pour les effets de la disparition de la taxe de vente sur les revenus du Québec, à cause de l'action unilatérale du gouvernement fédéral.

Ceci dit, M. le Président... Non, enfin, on me permettra d'en parler. Ceci dit, M. le Président, je peux assurer le député de D'Arcy McGee qu'avec mon collègue des Finances nous tenterons d'en arriver à combler le plus exactement possible le manque à gagner des municipalités au chapitre de la taxe de vente.

Déjà, le dernier budget contenait un certain nombre de mesures qui venaient accroître les revenus des municipalités. Je pense notamment aux subventions statutaires qui sont maintenant accessibles aux municipalités de 5000 âmes et plus; je pense à l'augmentation de la taxation sur les biens des réseaux de l'enseignement, de l'éducation et des services de santé, qui passent de $0.30 les $100 d'évaluation à $0.50; je pense au gel de l'impôt foncier scolaire qui se trouve à libérer, en quelque sorte, une potentialité ou un champ virtuel de quelque $20 millions pour les municipalités. Si bien que, tout compte fait, et après s'être assuré qu'il n'y ait pas de manque à gagner, la situation des municipalités ne s'en trouvera que mieux sur le plan financier.

Ce n'est évidemment pas la grande réforme dont j'ai parlé, mais encore une fois cette réforme, nous voulons la faire pour et avec les municipalités. La conférence sera peut-être l'occasion d'examiner en détail, non seulement les principes, mais également les modalités d'application de cette réforme.

M. Goldbloom: M. le Président, comme je l'ai dit au début de notre discussion, les sandwiches continuent d'être petits et peu remplis.

M. le Président, flèche pour flèche, je vais poser la question que j'avais gardée en réserve. Il y a quelques minutes, le ministre, en parlant d'un certain document, a mentionné le fait qu'il y avait eu un coulage, que ce document avait coulé. Il a dit que le coulage lui semblait presque normal. Alors, la petite question méchante que je lui pose est la suivante: Est-ce que les coulages normaux sont ceux qui sont voulus?

M. Tardif: M. le Président...

M. Goldbloom: Je n'exige pas une réponse.

M. Tardif: ... ce n'est même pas méchant de la part du député de D'Arcy McGee. Il est à peu près normal que lorsque vous allez consulter toutes les municipalités de plus de 50 000 habitants, et dans le cas des consultations concernant la démocratie municipale, c'était tout le conseil municipal qui était invité, y compris d'ailleurs le député-maire de Verdun... écoutez, cela m'apparaît...

M. Caron: M. le Président, je tiens à dire une chose.

M. Tardif: Non, je n'ai pas dit que cela avait coulé.

M. Caron: Je tiens à dire une chose au ministre par l'entremise du président. Même mon whip m'a dit: Comment cela se fait-il que tu ne nous aies rien dit? Vous voyez, vous m'avez fait confiance et j'ai gardé le secret. Même mon whip m'a demandé comment il se faisait que je n'en avais pas parlé.

M. Goldbloom: M. le Président, un des avantages de la télévision, quand elle sera installée, sera de pouvoir transmettre le sourire avec lequel ce genre d'échange a été fait.

Il ne nous reste que quelques minutes avant la suspension. J'aimerais poser peut-être une dernière question au ministre, pour l'instant, et elle touche un aspect un peu différent de la fiscalité municipale.

Durant, la campagne électorale de 1976, un certain nombre d'engagements ont été pris et, parmi eux, se trouvait la création d'un office du crédit municipal. J'aimerais demander en toute simplicité au ministre où nous en sommes. Allons-nous assister effectivement cette année à la création d'un tel office? Le ministre pense-t-il toujours que c'est une bonne idée?

M. Tardif: M. le Président, si je me souviens bien, le député de D'Arcy McGee avait posé la même question l'an passé, à peu près à la même date, à l'occasion de l'étude des crédits. Le fait est que j'ai passé un certain nombre de commandes aux gens de mon ministère à ce sujet. J'ai peut-être été trop ambitieux dans les commandes que

j'ai passées, en ce sens que j'ai relié le tout à une autre question qui intéresse le monde municipal, à savoir la création, pour ceux qui n'en jouissent pas déjà, de régimes de retraite, à la fois pour les élus et pour les fonctionnaires, et en imaginant qu'il pourrait être possible d'atteindre deux objectifs à la fois, c'est-à-dire la création d'une caisse de retraite, qui pourrait donner aux fonctionnaires et aux élus des rentes appropriées qui pourraient constituer un fonds à l'usage du monde municipal, caisses de retraite qui, selon moi, non seulement répondraient à un besoin, mais pourraient même, par leurs modalités, assurer une mobilité professionnelle qu'on ne retrouve pas présentement dans la fonction publique municipale, les gens quittant une municipalité et ne pouvant généralement pas faire suivre avec eux leurs bénéfices.

C'est donc l'ampleur du mandat ou de la commande que j'ai donnée qui a peut-être fait que cela n'a pas encore abouti. D'un autre côté, on m'a assuré au ministère qu'il n'y avait pas de problème de financement des municipalités et des petites municipalités, en particulier sur les marchés d'obligations, et que même dans le cas des petites municipalités, les ventes d'obligations de gré à gré, localement auprès des populations, des organismes locaux s'effectuaient très bien.

D'une part, il y a absence d'urgence en ce qui concerne les problèmes de financement, c'est-à-dire qu'il n'y a pas de problème de financement des municipalités et, d'autre part, le fait que j'aie relié cela à une autre question, qui est celle des caisses de retraite, font que le dossier est encore à l'étude.

Le Président (M. Marcoux): Nous allons ajourner les travaux de cette commission sine die.

(Fin de la séance à 12 h 30)

Reprise de la séance à 16 h 11

Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, s'il vous plaît!

La commission des affaires municipales est réunie pour poursuivre l'étude des crédits budgétaires du ministère des Affaires municipales.

Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères), M. Dubois (Huntingdon), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle), M. Saindon (Argenteuil), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières), M. Verreault (Shefford).

Je crois que la dernière question avait été soulevée par le député de D'Arcy McGee. Je ne sais pas s'il avait obtenu une réponse.

M. Goldbloom: Oui.

Le Président (M. Marcoux): Avez-vous d'autres questions?

M. Goldbloom: Oui.

Le Président (M. Marcoux): Ce n'est pas encore adopté? Pas tout à fait?

Conférence Québec-municipalités

M. Goldbloom: Non, pas tout à fait.

M. le Président, peut-être que l'on peut aborder un autre sujet. C'en est un que le ministre a déjà mentionné: La conférence avec les municipalités, qui aura lieu au mois de juin. Y a-t-il un budget qui a été établi pour la tenue de cette conférence? Le ministre peut-il nous dire à peu près combien cela devra coûter et à quel poste budgétaire la conférence émarge dans le document devant nous?

M. Tardif: M. le Président, la conférence Québec-municipalités est en préparation, non seulement au ministère des Affaires municipales, mais au secrétariat, par le secrétariat aux conférences du Conseil exécutif qui, j'imagine, ne va évidemment pas pousser la gentillesse jusqu'à assumer la note complète de cette conférence. On m'informe que ce genre d'événement ne suscite aucun problème. C'est dans le programme de la gestion interne du ministère pour lequel il est possible...

M. Goldbloom: On ne l'appelle pas "minisommet" alors?

M. Tardif: On pourrait l'appeler "muni sommet".

M. Goldbloom: Le ministre est vite sur ses patins, cet après-midi.

M. Tardif: Toujours, M. le Président.

M. Goldbloom: Je n'irai pas jusque là. La politesse a quand même ses limites!

M. le Président, y a-t-il un thème précis qui a été choisi? Y a-t-il un sujet en particulier ou est-ce une discussion un peu à la bonne franquette qui aura lieu? Y a-t-il un programme qui est déjà disponible et qui pourrait être consulté par des intéressés?

M. Tardif: M. le Président, il est bien évident qu'il y a un thème central majeur de cette conférence, soit la fiscalité municipale. Quant aux sous-thèmes, ou aux sujets mineurs de cette conférence, des projets d'ordre du jour sont en préparation en ce qui concerne la démocratie municipale, la décentralisation et un certain nombre d'autres questions connexes susceptibles d'intéresser le monde municipal. Je pense que tout ceci devra céder la place à la préoccupation majeure, la raison principale de cette conférence qui est la question de fiscalité.

M. Goldbloom: Cela veut-il dire qu'effectivement, nonobstant ce que j'ai dit ce matin, le ministre aura des annonces à faire? On connaît le point de vue des municipalités, on connaît la nature de leurs demandes; ce n'est pas un dossier nouveau. Le ministre va-t-il écouter attentivement et poliment — comme il le fait toujours — ou aura-t-il des choses à dire, à dévoiler?

M. Tardif: M. le Président, si cela devait être une conférence uniquement pour poser la question "What do the municipalities want?", je pense qu'il serait préférable de ne pas avoir de conférence.

M. Goldbloom: C'était la conclusion à laquelle je venais dans mon propre esprit. Alors, cela veut dire, même si le ministre ne l'a pas affirmé de façon précise, qu'il aura des choses à annoncer lors de cette conférence.

M. Tardif: II y aura des choses à annoncer, M. le Président, et il faut quand même se reporter... Je n'ai pas avec moi le télégramme reçu de l'Union des municipalités qui, tout en appelant la réforme de tous ses voeux, demandait au gouvernement de lui donner le temps d'aiguiser ses crayons — à l'Union des municipalités — et de calculer, d'effectuer un certain nombre d'activités. Elle nous demandait également de "dynamiser" cette réforme, c'est-à-dire de ne pas la faire une fois dans le temps, mais dire: qu'est-ce que vaudrait en cents et piastres, aujourd'hui, cette réforme, mais sur une période d'années?

Évidemment, nous sommes en train de faire ces projections et nous aurons les réponses voulues. Il ne s'agit pas de bousculer le monde municipal dans l'acceptation de cette réforme ou de ces modalités, mais bien de répondre, encore une fois, aux demandes des municipalités souven-tefois répétées et ce faisant, de tenir notre engagement vis-à-vis d'elles.

Il se produit un phénomène assez particulier, à savoir qu'après avoir revendiqué une réforme de la fiscalité et notamment l'occupation complète du champ d'impôt foncier, tout à coup, il y a une espèce de mouvement, je ne dirais pas de recul, mais d'hésitation lorsqu'on dit: Mais quand même... La pleine conséquence de cela, c'est que nous devons taxer maintenant. On dit: Oui, c'est dans la suite logique de ce que vous avez demandé pendant des années. Il est normal qu'on veuille faire un certain nombre d'activités et nous voulons, nous avons offert, d'ailleurs, aux municipalités, les services techniques du ministère des Affaires municipales et ceux du ministère des Finances pour les aider à évaluer l'impact de la réforme.

M. Goldbloom: M. le Président, quand le ministre dit que les municipalités ont demandé un temps additionnel pour étudier davantage les détails de ce qui pourrait être proposé, fait-il allusion à certaines, j'allais dire promesses, je ne sais pas si c'étaient vraiment des promesses, mais il y avait des déclarations selon lesquelles il y aurait la libération du champ de l'impôt foncier et scolaire à l'intention des municipalités et il y avait des contreparties, l'élimination de la redistribution de la taxe de vente et d'autres choses, est-ce que c'est de cela que le ministre parle? Est-ce que c'est sur ce genre de proposition que les municipalités se penchent présentement?

M. Tardif: C'est sur ce genre de proposition, ainsi que sur diverses portes que nous avons laissé ouvertes délibérément au cours de la consultation et qui sont toujours ouvertes, d'ailleurs. À titre d'exemple, puisque, encore une fois, les documents qui ont servi de consultation ont été publiés pour une large part dans les média d'information, une des hypothèses et une des demandes des municipalités, en plus de vouloir occuper en entier le champ d'impôt foncier, cela a été, pendant des années, d'exiger la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement, par exemple.

Alors, on dit: Très bien, cette taxation à pleine valeur des biens du gouvernement représenterait, grosso modo, $225 millions, c'est-à-dire à peu près l'équivalent de deux points de taxe de vente. Si les municipalités préféraient maintenir comme hypothèse des revenus provenant de la taxe de vente, quoique, par les temps qui courent, ce n'est pas très sain de le faire, puisque beaucoup de gens se permettent de venir tripoter cette source de revenus et si elles voulaient s'accrocher néanmoins à cette source de revenus, on pourrait très bien concevoir de la laisser aux municipalités et donc de ne pas donner suite à l'autre partie qui est la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement.

Ce qui est important aussi, ce qui est sous-jacent à tout cela, c'est la formule de péréquation retenue, c'est-à-dire que la péréquation se fait au moyen de ces $225 millions de la taxe de vente, par exemple, au moyen de la redistribution de l'impôt foncier qui frappe les biens du gouvernement;

l'une ou l'autre formule, je pense, exigera qu'on se penche sur cette question de la péréquation et pourrait être selon des modalités différentes, une partie pouvant très bien être distribuée dans les villes fournissant des services à ses édifices gouvernementaux et une partie étant redistribuée.

Je m'excuse M. le Président, en terminant, ceci fait partie de ces modalités que certaines municipalités voudraient jauger.

M. Cordeau: Tantôt vous faisiez allusion à la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement. Peut-être qu'il serait difficile d'appliquer ce plan également à travers toute la province parce qu'il y a des municipalités qui sont peut-être plus avantagées vu leur situation géographique. Dans certaines localités il y a plus d'édifices ou de biens appartenant au gouvernement que dans d'autres localités où il n'y en a pas du tout. Si cette taxe remplaçait une partie de la taxe de vente, peut-être qu'à ce moment, il y aurait certainement des municipalités qui s'opposeraient parce que si elles n'ont pas de biens du gouvernement dans leur municipalité, elles se trouveraient peut-être désavantagées de ce côté.

M. Tardif: C'est tout à fait juste, M. le Président, et c'est la raison pour laquelle j'ai rattaché à ceci le deuxième élément, c'est-à-dire la formule de péréquation. Il est bien évident que... Imaginons que dans une municipalité dotée d'un service public majeur, je ne sais pas, prenons la petite municipalité de Baie-Saint-Paul, avec son immense hôpital psychiatrique. On pourrait concevoir, si cet hôpital était taxé à pleine valeur, que la municipalité n'aurait plus besoin de taxer ses contribuables. Donc, qu'il y ait une partie de la taxe provenant de cet hôpital qui aille à la ville et qui lui fournisse les services d'égouts, d'aqueduc, de police, de pompier et autres et qu'une partie soit redistribuée sur une base de péréquation, si bien que toutes les municipalités du Québec auront leur petite part d'impôt provenant de l'Université de Montréal, de l'Université Laval, de l'Hôpital de Baie-Saint-Paul et d'ailleurs. Cela peut très bien se calculer.

M. Cordeau: Est-ce que cela concerne le Parc olympique? Se pourrait-il que les Beaucerons profitent de la taxe foncière sur le Parc olympique?

M. Tardif: C'est vraiment un cas assez particulier, puisque, présentement, il n'y a pas de taxe comme telle imposée sur ces équipements.

M. Cordeau: Si c'est de cette façon que la taxe doit être répartie, je crois que la province en entier va peut-être demander que les travaux soient complétés au Stade olympique. Enfin, que le gouvernement paie plus de taxes.

M. Tardif: Enfin.

M. Goldbloom: Mais présentement, le Parc olympique appartient au gouvernement.

M. Cordeau: Oui c'est cela. S'il est complété, il prendra plus de valeur.

M. Tardif: On peut aussi penser que le gouvernement est fiduciaire et administre en lieu et place de la ville de Montréal des équipements présentement, mais, je n'entrerai pas dans ces subtilités.

M. Caron: M. le Président, nous autres à Verdun, on a une usine de filtration sur notre territoire et elle appartient à la ville de Montréal. C'est un autre cas à étudier et dans le comté suivant, Marguerite-Bourgeoys, il y a aussi une usine de filtration. Je pense que...

M. Tardif: Je parlais de la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement du Québec. Évidemment, je ne parlais pas des biens des municipalités pas plus que de ceux du gouvernement fédéral qui, dans le contexte actuel, ne sont pas soumis à une évaluation.

M. Caron: Dans certains cas, ce sera assez difficile de l'équilibrer. Je ne sais pas de quelle façon... Vous avez des données, comme je l'ai déjà dit en Chambre, que nous, les municipalités, n'avons pas. Vous allez garantir aux municipalités qu'elles ne seront pas perdantes?

M. Tardif: Écoutez, le projet, tel que présenté, contenait une garantie de recette fiscale. C'est-à-dire que, pendant une période de temps, les municipalités se verraient garantir des revenus au moins équivalents. Je vous rappellerai que, dans les diverses hypothèses — et cela continue de se raffiner au fur et à mesure que nos consultations avec les municipalités progressent — dans le projet, 93,5% des municipalités étaient gagnantes et 6,5% étaient perdantes. Les perdantes se retrouvaient parmi les petites municipalités rurales de moins de 3000 habitants et même, parmi celles-ci, la plupart d'entre elles formaient des municipalités de moins de 1500 personnes qui vivaient essentiellement des produits de la taxe de vente.

M. Cordeau: ... il n'y a pas de taxe municipale?

M. Tardif: Ou à peu près pas, enfin, $0.05 ou $0.10 du $100.

M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais revenir à la question de la conférence elle-même pour deux ou trois minutes seulement. Le ministre peut-il nous dire qui, au ministère, quelle équipe ou quelle personne, est responsable de la conférence?

M. Tardif: Oui, M. le Président, mon sous-ministre adjoint — qui est à ma droite — M. Jean-Louis Lapointe, est, au premier chef, responsable de la préparation du dossier en ce qui concerne la fiscalité, à tout le moins.

M. Goldbloom: Est-ce que la liste des invités a été dressée?

M. Tardif: Concernant la liste des invités, une rencontre a eu lieu entre les gens du ministère, l'Union des municipalités et l'Union des conseils de comté. Les deux organismes se sont entendus pour une représentation paritaire d'environ 175 représentants par organisme, 175 venant des municipalités rurales, 175 venant des municipalités des cités et villes et le gouvernement, évidemment, pouvant inviter un certain nombre d'observateurs, d'experts et peut-être de gens qui n'appartiennent ni à l'Union des municipalités ni à l'Union des conseils de comté.

M. Goldbloom: Et des membres de l'Assemblée nationale?

M. Tardif: Ce n'est pas exclu, évidemment, comme d'autres ont pensé, à un moment donné, que les commissions scolaires pourraient y être invitées. Mais c'est une autre question.

M. Goldbloom: M. le Président, il y a une chose qui me tracasse un peu. Le ministre a indiqué, si j'ai bien compris, que la conférence aura lieu au tout début du mois de juin, les 2, 3 et 4?

M. Tardif: C'est cela.

M. Goldbloom: Et à Montréal?

M. Tardif: À Montréal, les 2, 3 et 4 juin.

M. Goldbloom: Le projet de loi sur la démocratisation municipale, qui touchera les villes de 100 000 âmes et plus et, d'une façon facultative, les villes de 20 000 âmes et plus, aura-t-il été déposé? Fera-t-il partie de l'ordre du jour de la conférence ou est-ce plutôt ici, à la commission parlementaire, comme l'a indiqué le ministre ce matin, que le vrai débat se fera là-dessus?

M. Tardif: M. le Président, à moins d'imprévus majeurs, le projet de loi aura été déposé. La discussion sera ouverte à ce moment-là.

M. Goldbloom: Maintenant, M. le Président...

M. Cordeau: Sur un autre sujet ou sur le même?

M. Goldbloom:... j'aimerais revenir à la fiscalité municipale mais si...

M. Cordeau: C'est sur le même sujet de la conférence.

M. Goldbloom: Certainement, oui.

M. Cordeau: M. le Président, est-ce que le programme de cette conférence sera disponible un peu avant la conférence ou à la conférence même?

M. Tardif: Je souhaite bien qu'il soit disponible avant et non seulement le programme mais, également, la documentation pertinente. (16 h 30)

M. Cordeau: Le député de D'Arcy McGee parlait de la participation gouvernementale. Serait-il possible qu'au moins un représentant — tout dépend du point de vue du ministre — des partis de l'Opposition soit invité à titre d'observateur, un de chaque parti?

M. Caron: Le gouvernement du temps, je pense, avait invité les partis de l'Opposition, si ma mémoire est bonne.

M. Cordeau: C'est parce que si on participe, peut-être que cela nous empêchera de poser beaucoup de questions par après étant donné que nous serons sur les lieux.

M. Tardif: M. le Président, personnellement, je n'y vois pas d'objection. Pour moi, cette conférence doit être la plus ouverte possible. Je ne vois donc aucune espèce de restriction, bien au contraire. Si des membres de l'Assemblée nationale, que la chose municipale intéresse, voulaient être présents, je n'y vois aucune espèce d'objection.

M. Cordeau: Des membres de la commission des affaires municipales?

M. Tardif: Je prends note de votre suggestion. M. Cordeau: D'accord.

M. Goldbloom: On doit en remercier le ministre.

M. Cordeau: Maintenant, est-ce que, dans le contenu de cette conférence, le ministre a l'intention d'apporter des suggestions concrètes, c'est-à-dire de faire connaître les politiques que le gouvernement entend adopter, libre aux participants d'en discuter ou d'apporter des suggestions, ou si, comme vous l'avez mentionné tantôt, vous n'avez pas l'intention de demander aux gens ce qu'ils veulent parce qu'à ce moment-là, déjà vos consultations vont avoir eu lieu? Quelle politique voulez-vous apporter à ce moment-là?

M. Tardif: On a l'impression, enfin, le sentiment, que les municipalités ont déjà exprimé, aux gouvernements antérieurs et au gouvernement actuel, leurs revendications. Il s'agit, pour nous, de faire un certain nombre de propositions et d'indiquer également quelles sont les modalités qui pourraient varier selon les représentations qui nous seront faites. Mais il me semble que, sur les questions principales, il y aura un énoncé des politiques gouvernementales, le reste étant des arrangements donnant effet à ces politiques. C'est là que la discussion pourra s'amorcer, sur l'application des modalités.

M. Cordeau: Merci.

Fiscalité municipale

M. Goldbloom: M. le Président, j'aimerais revenir à la question, plus générale, plus globale,

de la fiscalité municipale. J'aimerais demander au ministre ce qui suit: En ce qui concerne la fiscalité municipale, il ne suffira pas d'effectuer un réaménagement si, dans ce réaménagement, on n'augmente pas les revenus des municipalités. Les municipalités ne seront point satisfaites si elles n'ont pas une augmentation de leurs revenus. Alors, pour augmenter ces revenus, il n'y a que deux choses que l'on peut faire: ou bien augmenter le montant que le contribuable sera appelé à fournir, ou bien couper ailleurs.

Quand on parle du transfert de la taxe foncière, présentement perçue par les commissions scolaires, vers les municipalités, on donne parfois — et je ne suggère pas que c'est une intention du ministre de le faire — l'impression que le contribuable sera, en quelque sorte, soulagé; c'est-à-dire que la taxe scolaire disparaîtra et voilà que le contribuable aura moins à payer. Mais, si les municipalités sont pour augmenter leurs revenus, il faut qu'elles occupent le champ, il faut qu'elles aillent chercher le montant en question. Alors, si l'on est pour augmenter les revenus des municipalités, sans en diminuer ceux des commissions scolaires, le contribuable va payer davantage, ou bien on va couper quelque part.

J'aimerais que le ministre nous explique ce qui va arriver exactement. Les taxes vont-elles effectivement augmenter, parce qu'il faudra remplacer la taxe foncière scolaire? Il faudra la remplacer par des revenus que fourniront les contribuables. Le ministre pourra me dire que ce sera fait sur une base plus juste que celle de la taxe foncière. Je pourrai facilement accepter cette hypothèse, mais je reviens à la question fondamentale: Est-ce que l'on augmente les taxes ou coupe ailleurs?

M. Tardif: M. le Président, il y a une réserve à ce que vient de dire le député de D'Arcy McGee, en ce sens que, techniquement et théoriquement, il est possible d'effectuer une réforme de la fiscalité qui ne se traduise pas par un apport de revenus plus élevés pour les municipalités. Je dis que théoriquement c'est possible et, bien sûr, politiquement aucun gouvernement ne fera une réforme qui aurait pour effet de changer quatre $0.25 pour $1.

Il y aura donc de nouveaux revenus pour les municipalités. Ces nouveaux revenus vont provenir essentiellement de la libération d'un champ important qui pourra être occupé à 100% ou à X% par les municipalités. Ce champ — si on parle du champ d'impôt foncier scolaire — à partir du moment où il devient un champ d'impôt foncier municipal, n'est plus normalisé. Il n'y a qu'un seul rôle d'évaluation, avec une possibilité de taxation à la pleine valeur, et non pas sur la valeur normalisée.

Il y a aussi dans cette réforme des éléments qui visent à élargir le champ d'impôt à des secteurs qui en sont présentement exemptés. J'ai parlé tantôt des biens du gouvernement, mais il y a également d'autres secteurs. Déjà, dans le dernier budget, une mesure a été annoncée, qui a pour effet d'améliorer l'assiette fiscale des muni- cipalités, notamment sur le plan de la taxation des services de télécommunication et ceci, après avoir effectué une étude comparée entre le Québec, l'Ontario et le Nouveau-Brunswick, c'est-à-dire les deux provinces voisines, afin de voir, par exemple, ce que payait une entreprise donnée, une raffinerie de pétrole, une brasserie, une distillerie, une aciérie, une usine de montage d'automobiles. Donc, dans chacune de ces provinces, on a voulu voir quel était le montant de taxes réelles payé par chacune d'elles.

Nous avons commandé cette étude. J'en ai eu les résultats. Ceci nous a permis de constater des disparités assez intéressantes. Au même moment où l'Ontario, par la commission Blair, se penche sur cette question de la réforme de l'évaluation en Ontario, nous allons nous articuler sur ces modalités soit existantes, comme en Ontario ou dans les provinces voisines, soit en gestation. Donc, élargissement du champ. J'ai parlé tantôt de la taxation, à titre d'exemple, des réseaux de télécommunication qui, au Québec, étaient taxés à raison de 10% du revenu net, alors qu'en Ontario la taxation est à raison de 5% seulement, mais du revenu brut. Ceci rapportait $25 millions de plus en Ontario et cette mesure au Québec va rapporter $17 millions supplémentaires aux municipalités.

Donc, élargissement du champ, ouverture de nouveaux champs, d'une part. Maintenant, il est bien évident que la réforme de la fiscalité se présente comme un bilan avec des plus et des moins. Au chapitre des plus, nous avons dressé la liste ou l'impact des diverses mesures à la fois pour les municipalités, pour le gouvernement, pour les communautés urbaines, pour les commissions scolaires, pour les contribuables fussent-ils particuliers ou entreprises. Donc, effet pour chacun d'eux, par exemple, du transfert de l'impôt foncier scolaire. Effet, pour chacun d'eux, de la taxation des biens du gouvernement. Effet, pour chacun d'eux, de l'élargissement de l'assiette fiscale. Effet, pour chacun d'eux, de la disparition des subventions, puisque dans ce tableau, si d'une part, le gouvernement remet aux municipalités des revenus autonomes accrus, il y aura une diminution importante des revenus de transferts et ces revenus de transferts comprennent à la fois une série de subventions les unes statutaires, les autres inconditionnelles, les autres conditionnelles. Or, dans ce bilan, dans ce tableau, avec une série de plus et de moins, le résultat net se traduit par un accroissement. Divers chiffres ont été mentionnés, jusqu'à maintenant et cela pouvait se traduire par un accroissement, selon les premières estimations, d'au-delà de $200 millions, selon que l'on retienne l'une ou l'autre des hypothèses mentionnées, n'importe où entre $200 millions et $250 millions, soit en argent nouveau, soit en champ virtuel de taxation.

M. Goldbloom: La masse monétaire représentée par la taxe foncière municipale se chiffre à combien présentement? Le chiffre est-il disponible?

M. Tardif: On peut vérifier immédiatement pour avoir cette donnée, M. le Président.

M. Laplante: Est-ce que je pourrais poser une question sur le même sujet?

Le Président (M. Marcoux): Le député de Bourassa.

M. Laplante: Sur les corporations à Montréal, pour fins scolaires, il y a, grosso modo, $55 millions de ces sommes dont les commissions scolaires ne profitent pas, qui retournent au MEQ pour une plus juste distribution, après cela, de ces impôts fonciers. Combien avez-vous de prévu pour ces sommes? Parce que c'est un taux plus élevé qu'elles ont, elles. Ce n'est pas un taux uniformisé. Qu'est-ce que vous prévoyez pour ces $55 millions?

M. Tardif: Actuellement, c'est un fait et cela c'est une autre des modalités — quand j'ai mentionné tantôt, M. le Président, que nous avions tenté d'évaluer l'impact pour les municipalités, les commissions scolaires, les communautés urbaines, le gouvernement et les particuliers, enfin les contribuables, qu'ils soient particuliers ou entreprises, lorsque nous sommes arrivés au cas des communautés urbaines, notamment celle de Montréal, il y a là des modalités particulières qui ont un impact important. À titre d'exemple: les immeubles de $100 000 sur le territoire de la Communauté urbaine font l'objet, pour des fins municipales, d'une surtaxe de $0.60 du $100 d'évaluation. Pour ces immeubles situés sur le territoire de la ville de Montréal, cette fois, et non plus de la communauté, une taxe additionnelle de $0.43,5 du $100 d'évaluation frappe ces immeubles. En sus de cela, pour des fins scolaires, une surtaxe de $1.12 du $100 d'évaluation frappe, encore une fois, les immeubles d'une valeur de plus de $100 000. Si bien que, pour les immeubles d'une valeur de plus de $100 000 tant résidentiels que commerciaux ou industriels, c'est donc une surtaxe de $2.25 du $100 d'évaluation qui frappe ces immeubles à Montréal.

Ceci nous préoccupe et il nous apparaît important, dans cette réforme de la fiscalité, d'apporter certaines corrections à cette situation, particulièrement, en tout cas, en ce qui a trait aux immeubles résidentiels, car on sait, aujourd'hui, qu'avec l'inflation, il ne faut pas un gros immeuble résidentiel pour que celui-ci atteigne la valeur de $100 000 et, en conséquence, il nous semble que ceci se répercute, évidemment, sur le coût des loyers. Un des aspects de la réforme est l'élimination d'un certain nombre de ces surtaxes, à tout le moins, sur le secteur résidentiel.

Pour ce qui est des entreprises sur le territoire de la communauté urbaine, le gouvernement vise à accorder la fiscalité avec, par exemple, la décision gouvernementale annoncée par mon collègue le ministre d'État à l'aménagement en ce qui concerne l'hypothèse de la consolidation du tissu urbain de la communauté urbaine de Montréal et donc de réduire le fardeau des contribuables montréalais de la grande communauté. Sur ce plan, la réforme proposée aurait pour effet une diminution du fardeau, non seulement sur les immeubles résidentiels, mais également sur les entreprises dans cette communauté. Un des volets proposés est l'introduction d'une taxe d'affaires générale au Québec, mais à taux variables selon l'emplacement. (16 h 45)

En gros, voilà la réponse à certaines des questions qui ont été soulevées. Pour ce qui est des commissions scolaires comme telles, la réforme prévoyait et prévoit toujours d'ailleurs le maintien d'un champ d'impôt local, autonome, pour les dépenses dites inadmissibles aux fins de subvention du ministère de l'Éducation. C'est véritablement la seule partie de l'impôt foncier qui est autonome, l'impôt foncier normalisé n'étant pas autonome au sens plein du terme, puisqu'il s'agit d'un impôt encore une fois provincial, mais perçu localement.

Des modalités sont examinées présentement pour ce qui est des dépenses afférentes aux déboursés dits inadmissibles et pour ce qui est de leur mode de financement local.

M. Goldbloom: M. le Président, je ne sais pas si le chiffre est maintenant disponible.

M. Tardif: On m'informe que dans les municipalités de plus de 5000 âmes — et on va aller chercher les chiffres pour l'ensemble des autres — les municipalités de plus de 5000 âmes, pour ce qui est de la taxe foncière générale et des taxes foncières spéciales, en 1976 le total serait de $690 millions.

M. Goldbloom: La masse transférée vers les municipalités, si ma mémoire est fidèle, se chiffrait par un peu plus de $800 millions par année quand je suis parti du ministère. Je cherche des ordres de grandeur, oui.

M. Tardif: C'est à peu près l'ordre de grandeur, M. le Président.

M. Goldbloom: Cela veut dire que si le ministre veut augmenter les recettes des municipalités de quelque $200 millions — si j'ai bien compris ce qu'il a dit, à savoir que les processus de réaménagement donnerait un montant additionnel aux municipalités de $200 millions — alors si je prends les $700 millions qui sont perçus en revenus autonomes et j'ajoute les $800 millions qui sont transférés, cela donne $1 500 000 000 et si l'on calcule ce que représente par rapport à cette masse l'augmentation de $200 millions, on arrive à quelque 13%. Je fais des calculs rapidement ici, je ne veux pas induire la commission en erreur.

M. Tardif: Mais sur la base des calculs effectués par le député de D'Arcy McGee cela représenterait en effet, si la réforme se limitait à ces mesures et qu'on le calculait de cette façon, un accroissement de cet ordre.

M. Goldbloom: Tandis que s'il s'agissait du transfert de tout le produit de la taxe scolaire, ce

serait deux fois et demie cela et plus encore, parce que ce sont environ $550 millions, presque trois fois ce montant, donc 36% d'augmentation des revenus des municipalités.

M. Tardif: J'ai bien dit: Si on effectuait les calculs de la même façon que le député de D'Arcy McGee. Je pense qu'il convient de laisser de côté les revenus autonomes des municipalités présentement au chapitre de l'impôt foncier et, d'effectuer plutôt les calculs suivants: à partir du moment où on met dans la colonne des plus les revenus provenant du transfert du champ d'impôt foncier scolaire, revenus actualisés, d'une part; d'autre part, la taxation à pleine valeur des biens du gouvernement; troisièmement, de l'élargissement de l'assiette d'impôt des biens-fonds actuellement exemptés en vertu de la loi, d'une nouvelle taxe applicable aux biens-fonds industriels et commerciaux pour remplacer la très grande série de taux et de taxes d'affaires que nous rencontrons un peu partout et si nous ajoutons à cela des revenus possibles de péréquation pour les fins des communautés urbaines, à tout le moins, il s'agit là d'un apport qui dépasse le milliard. Si, d'autre part, sont éliminés ou sont enlevés les subventions gouvernementales, les revenus de transfert de taxe de vente, l'abolition de la taxe d'affaires locale et la taxe des locataires, une diminution de l'ordre de $800 millions. Je vous laisse le soin de faire le calcul rapide de la différence entre la colonne des plus et celle des moins. On arrive à quelque chose, selon les hypothèses, entre $200 millions et $250 millions de plus.

M. Goldbloom: Je m'excuse auprès de mon collègue de Saint-Hyacinthe, mais il me semble que nous venons de faire un cercle parfait. Nous sommes partis d'un calcul de $200 millions. Le ministre a dit: Je ne reprends pas les calculs du député de D'Arcy McGee, j'en fais les miens. Il a fait les siens et il est arrivé à $200 millions ou $250 millions. D'accord; si ce sont bien $250 millions, c'est une augmentation en pourcentage qui est un peu plus importante, mais ce n'est quand même pas le double des recettes actuelles des municipalités, ni même 50% d'augmentation.

M. Tardif: Non, d'accord.

M. Goldbloom: C'est seulement cela que j'ai voulu souligner. En pourcentage, les municipalités vont toucher — même avec les meilleurs calculs du ministre — une augmentation d'à peu près 15%. Réglons pour 16%.

M. Tardif: Oui, M. le Président. Réglons pour 16%. Maintenant, il reste une modalité importante qu'on appelle, dans le jargon du métier le "circuit-breaker" et qui est le crédit d'impôt qui a été annoncé dans le dernier discours du budget. Il peut contribuer aussi à accroître les revenus autonomes des municipalités, à partir du moment où une partie de l'impôt foncier peut être déduite de l'impôt sur le revenu.

M. Goldbloom: M. le Président, je ferai une dernière remarque et je passerai la parole aux autres collègues. Ce n'est pas une augmentation directe des revenus des municipalités, c'est plutôt une augmentation indirecte, dans le sens que les conseils municipaux se sentiront — parce que je présume que le gouvernement adoptera cette mesure — un peu plus libres d'augmenter les taxes foncières. Le rapport entre le revenu du particulier, du propriétaire, et la valeur de sa propriété, sera établi partiellement, pour la première fois.

Je ne serais pas objectif et pas honnête si je ne félicitais pas le gouvernement d'avoir adopté cette mesure. D'ailleurs, je l'avais recommandée au Conseil des ministres avant les élections de 1976 et le Conseil des ministres avait accepté cette hypothèse, mais les événements nous ont empêchés de donner suite à cette intention. Je pense que c'est important que cette relation soit enfin établie et que les personnes qui ont une propriété d'une certaine valeur et qui, pour une foule de raisons possibles, n'ont plus les revenus qui leur permettraient de payer facilement les taxes foncières, soient en mesure de bénéficier de cette considération. Je voudrais en toute sincérité féliciter le gouvernement d'avoir pris cette décision.

M. Tardif: Je remercie le député de D'Arcy McGee; je veux juste ajouter aussi que cette formule du crédit d'impôt est intéressante, ainsi que le mentionnait le député de D'Arcy McGee. Elle l'est non seulement pour les gens qui, ayant atteint l'âge de la retraite, voient tout à coup leurs revenus diminuer de façon substantielle, et qui voudraient continuer quand même à habiter leur maison ou leur logement, mais également pour les gens qui, au cours de leur période active, connaissent une baisse de revenus importante, tout en cours de travail. Le crédit d'impôt, à l'heure actuelle, avec la formule de 40% de l'impôt foncier moins 2% du revenu imposable, jusqu'à un maximum de $400, est accessible à la fois aux propriétaires et aux locataires. Ce qu'il est peut-être important de souligner ici, c'est que cette formule n'élimine pas le remboursement pour l'impôt foncier scolaire, qui était jusqu'à concurrence de $125 pour le propriétaire et $75 pour les locataires. Cette formule demeure, et le contribuable aura le choix entre les deux formules, celui-ci choisissant de prendre la formule la plus payante pour lui, ces formules de l'impôt foncier scolaire étant limitées d'ailleurs aux seules personnes de plus de 65 ans Or, pour une personne de plus de 65 ans, il suffira de faire un calcul rapide et de prendre la formule qui sera la plus payante pour elle.

M. Goldbloom: Quand le ministre parle de personnes qui peuvent subitement perdre leurs revenus en cours d'activité, il parle peut-être des députés qui perdent leurs élections ou des ministres qui se retrouvent députés d'Opposition. Préparez-vous!

M. Tardif: De toute façon, oui, députés et ministres ne sont pas les plus à plaindre sur ce plan et l'échelle d'impôt est plus progressive

qu'elle ne l'était, si bien que cette diminution des fardeaux des petits contribuables se fait évidemment en taxant les contribuables les mieux nantis, dont les députés et les ministres évidemment.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Verdun.

M. Caron: M. le Président, le ministre a mentionné tout à l'heure que dans les villes de banlieue les propriétés d'une valeur de $100 000 et plus payaient $0.60 les cent dollars et dans le territoire de la ville de Montréal $0.43,5. J'aimerais savoir du ministre pourquoi c'est plus cher dans les banlieues qu'à Montréal?

M. Tardif: Mais non, c'est le contraire M. le Président. Toutes les villes de la Communauté urbaine connaissent une surtaxe de $0.60 des cent dollars sur les immeubles de plus de $100 000. En plus de ces $0.60 des cent dollars, les édifices situés sur le territoire de la ville de Montréal se voient taxés de $0.43,5; donc le taux sur toutes les villes de la communauté est de $0.60; à Montréal c'est $1.03. D'accord? Pour le municipal.

M. Caron: Merci, je n'avais pas bien saisi. M. Tardif: Au scolaire, c'est $1.12 de plus.

M. Goldbloom: M. le Président, si ma mémoire est fidèle, nous avons accordé aux autres municipalités le droit de taxer pour cette somme additionnelle. Cela a été un des moyens de compenser un déséquilibre apparent, je ne me prononce pas là-dessus, mais un déséquilibre apparent dans le rôle d'évaluation de la Communauté urbaine de Montréal. (17 heures)

M. Tardif: M. le Président, je me souviens, en effet, avoir eu l'occasion de prendre connaissance, si ce n'est pas d'un arrêté en conseil, de quelque chose à ce sujet, à un moment donné, mais dont le texte était à ce point peu clair que cette mesure n'a jamais été étendue aux autres villes de la communauté. Il faudrait que je fasse ressortir le texte et les raisons qui avaient amené le retard.

M. Goldbloom: S'il vous plaît. D'accord.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, tantôt, suite à la question du député de Bourassa, M. le ministre a fait allusion à une taxe d'affaires en compensation d'autres taxes. Voulez-vous expliciter votre pensée sur ce point, s'il vous plaît? Est-ce une taxe d'affaires provinciale que vous imposeriez? Je n'ai pas saisi votre point de vue, à ce moment-là.

M. Tardif: Actuellement, les municipalités perçoivent, de plus en plus, une taxe d'affaires, taxe dont le taux varie de municipalité en municipalité et qui amène parfois même des surenchères coûteuses d'une municipalité à l'autre et qui s'est généralisée, surtout, par suite de l'adoption de la Loi d'évaluation foncière en 1972, alors que la machinerie industrielle s'est vue détaxée à raison de 6% l'an, pendant 16 ans. Si bien qu'au bout de 16 ans les entreprises ne paieront plus de taxe sur la machinerie industrielle. Or, dans beaucoup de cas, les municipalités, il y avait un manque à gagner, et elles ont substitué graduellement toutes sortes de taxes d'affaires et il nous semble que c'est la pagaille la plus complète dans ce domaine. Il nous semblait opportun de profiter de l'occasion de la réforme de la fiscalité pour établir une taxe d'affaires uniforme qui serait perçue provincialement pour les entreprises. Ceci, sans préjudice au droit de taxation des municipalités sur les biens-fonds industriels et commerciaux, évidemment.

M. Cordeau: Est-ce que le gouvernement va prendre des dispositions nécessaires afin que le revenu de ces municipalités qui actuellement ont une taxe d'affaires ne diminue pas aussi?

M. Tardif: Cela fait partie, M. le Président, de l'ensemble de la réforme qui, encore une fois, ne doit pas se traduire par un manque à gagner, mais par un gain pour l'ensemble des municipalités. C'est bien sûr qu'il y a là-dedans une série de plus et de moins. J'ai mentionné que selon la première hypothèse, 93,5% des municipalités étaient gagnantes et que les autres, surtout les petites municipalités, se voyaient offrir une garantie de recettes fiscales.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bourassa.

M. Laplante: M. le Président, je vais profiter de la grande ouverture d'esprit du ministre pour poser quelques questions peut-être un peu plus complexes sur le financement. Si on considère ce que ces $200 millions de surplus donneraient à l'ensemble des municipalités, en considérant aussi qu'il y a une centaine de municipalités au Québec où l'on ne paie à peu près pas d'impôt foncier... Dans votre réforme vous considérez aussi l'uniformisation des rôles provinciaux pour la pleine valeur des propriétés. Par contre, vous ne considérez pas un taux uniforme de taxation provinciale, ce qui fait encore un déséquilibre d'une ville à l'autre. Vous avez toute l'inflation qui va s'ajouter aux villes, d'année en année; alors ces $200 millions ne seront peut-être plus suffisants dans deux ou trois ans, après une réforme. Mais on considère aussi par la taxe de vente qu'on se trouverait à garder au complet où il y a un taux normal d'inflation qui se fera ou par le surplus des ventes, qui grossira les coffres de la province d'année en année, n'ayant pas d'uniformisation de taux provincial. Vous parlez aussi du crédit d'impôt foncier que le contribuable reçoit. Est-ce qu'il n'y aurait pas là une tentation, à un moment donné, pour les municipalités de dire: L'impôt, cela ne fait rien, on va remonter encore les taxes foncières municipa-

les; le contribuable ne sera pas trop pénalisé, il va recevoir cela en crédit d'impôt et, d'une municipalité à l'autre, à un moment donné, c'est après cela une guerre d'évaluation foncière surtout sur le taux d'imposition?

Vous n'avez pas peur qu'au bout de trois ans les municipalités se retournent et qu'on vous dise: On n'arrive plus, on est plafonné dans ce que le consommateur, le contribuable peut payer, il nous faut encore 1% ou 2% de la taxe de vente?

M. Tardif: M. le Président, la réforme de la fiscalité doit évidemment, pour entrer en vigueur, s'appuyer sur la réforme de l'évaluation foncière qui est en marche présentement et qui a été décrétée il y a maintenant un peu plus d'un an, avec l'obligation, pour toutes les municipalités du Québec, de produire des rôles d'évaluation scientifiques avant le 31 décembre 1983 et ce, avec l'aide du gouvernement, qui assume 50% des coûts de confection des nouveaux rôles d'évaluation. Lorsque le député de Bourassa parle d'une centaine de municipalités qui ne se taxent pas ou qui n'ont pas de taxe foncière, c'est un peu fort. En fait, il y a peut-être une dizaine de municipalités et même pas, qui n'ont pas de taxe foncière municipale et qui vivent uniquement du résultat du produit de la taxe de vente. Elles n'ont aucun service non plus. Il n'y a pas de service de police, il n'y a pas de service d'incendie, il n'y a à peu près rien là.

Par ailleurs, certaines ont un taux très faible, c'est un fait. Lorsque j'ai parlé tantôt de garantie de recettes fiscales pour les municipalités perdantes dans la réforme du fait que, justement, précisément, le gros de leur revenu était tiré de la taxe de vente, j'aurais peut-être dû ajouter que cette garantie de recettes fiscales ne sera pas éternelle et qu'elle sera pour une période de temps — je crois l'avoir mentionné ce matin — où le gouvernement exigera d'elles un effort fiscal en conséquence.

La deuxième question, ou le deuxième volet de la question du député de Bourassa, est plus technique; il nous reporte sur toute la question de l'élasticité du revenu de la taxe de vente par rapport au revenu provenant de l'impôt foncier. Je n'ai pas les documents avec moi, j'espère bien que nous les aurons à l'occasion de la conférence, pour pouvoir démontrer que cette croyance dans l'élasticité plus grande de la taxe de vente sur le plan des revenus est un mythe qui ne tient pas, à tout le moins en période d'inflation, où la valeur des propriétés constitue encore la valeur la plus sûre et l'accroissement des revenus créés par la taxe foncière, au cours des dernières années, dans le monde municipal, a été supérieur à celui créé par la taxe de vente. Ainsi, ce problème, à supposer que toutes choses soient égales, par ailleurs, que les tendances observées ces dernières années se continuent, et que cette situation ou les revenus créés par l'impôt foncier soient aussi stables et même offrent une garantie d'accroissement de revenus aussi importants que la taxe de vente, tout ceci sous-tend une hypothèse. Cette hypothèse, c'est que l'on ne s'embarque pas au Québec dans une normalisation des services municipaux. L'erreur fondamentale consisterait — et elle pourrait mener aux résultats indiqués par le député de Bourassa — à en venir au Québec en matière municipale, à procéder exactement comme on l'a fait pour l'éducation et la santé. En effet, à partir du moment où le gouvernement du Québec, les gouvernements antérieurs ont décidé, à juste titre d'ailleurs, que tous les Québécois, où qu'ils soient, avaient droit à la même quantité de services, que le petit Gaspésien autant que le petit citoyen d'Outremont avait droit à la même qualité d'enseignement et aux mêmes services, que le gouvernement, dis-je, du Québec, a décidé de financer l'éducation à même l'impôt sur le revenu et non pas en fonction de la richesse foncière.

Le vestige que l'on a de l'impôt foncier scolaire sur ce plan est vraiment anachronique. Cependant, rien n'indique — et c'est là que je fais le parallèle avec les services d'éducation et de santé — que nous devions procéder à cette normalisation des services. Il n'y a rien au monde qui oblige tous les citoyens du Québec... Qu'on établisse des normes selon lesquelles pour chaque tête de pipe, il y aura un aréna, deux arénas, trois arénas et que pour chaque citoyen il devra y avoir tant de policiers au mille carré et des normes semblables.

Je pense qu'il appartient, à partir d'un certain minimum de services, à la population de se doter des services qu'elle veut bien avoir, en fonction de sa capacité de payer, sans quoi, c'en est fait des gouvernements locaux. Ne nous taxons pas de mots, et ne parlons plus d'autonomie locale et de gouvernement responsable. C'est le gouvernement du Québec qui prendra charge de tout et qui décidera de la quantité et de la qualité des services de police.

Tantôt le député de Saint-Hyacinthe posait une question sur la décentralisation. Justement, et je parlais de la nécessité ne serait-ce que d'avoir en permanence un document au gouvernement qui vienne contrer les tendances centralisatrices pour faire en sorte qu'on n'en arrive pas, dans le domaine de la chose municipale, à ce qui s'est produit dans le domaine de l'éducation et de la santé, où là, on pouvait, je pense, exiger une qualité et une quantité de services identiques pour tous les citoyens. Je ne crois pas que, sur le plan municipal, cela s'impose, même s'il y a des tendances dans les ministères à vouloir se substituer. La liste serait longue des interventions des divers ministères qui, graduellement, sont venus édicter leurs normes. On pourrait penser au ministère de la Justice, avec la Commission de police, qui a émis ses normes d'embauche, de recrutement, de formation, d'uniformes, de voitures de police. On pourrait penser au Haut-Commissariat à la jeunesse, aux loisirs et aux sports qui a ses normes d'équipements de loisirs et autres. On pourrait penser au ministère des Affaires culturelles, en ce qui concerne la préservation du patrimoine. On pourrait penser au ministère de l'Industrie et du Commerce, en ce qui concerne les parcs industriels. On pourrait penser au ministère des Transports, qui tantôt établit des normes pour les auto-

routes, tantôt pour le transport en commun, et maintenant pour les pistes cyclables. Bref, on pourrait passer ainsi en revue tous les ministères, pour se rendre compte que ces tendances centralisatrices sont toujours actives et que seule une action vigilante des collectivités locales viendra contrer ces tendances.

À partir du moment où on dit: II appartient aux gens de décider de la qualité et de la quantité des services qu'ils veulent avoir et, deuxièmement, de se taxer pour ces services, je pense qu'on respecte le principe de l'autonomie locale. Mon rôle, comme ministre des Affaires municipales, est précisément non pas de me substituer aux collectivités locales, mais de créer les conditions qui permettent aux gens de s'administrer eux-mêmes.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Deux-Montagnes.

Déconcentration

M. de Bellefeuille: M. le Président, ce matin, le ministre a parlé de la déconcentration dont il est question à propos de l'effectif de son ministère. Le ministre se rappellera sans doute que je lui ai fait, il y a quelque temps, une proposition précise dans ce sens. Il s'agissait d'une mesure de déconcentration qui consisterait à implanter à Montréal une partie de son service du contentieux. L'idée n'était pas de moi. Ce sont les maires de quelques municipalités de mon comté qui avaient fait cette proposition, que j'ai transmise au ministre. Il s'agit de municipalités d'importance relativement faible qui ont, plus que les grandes villes, besoin des conseils du contentieux du ministère, comme d'autres services du ministère et cette demande visait à leur rendre ce service plus accessible. Est-ce que le ministre pourrait nous dire où en est l'étude de cette proposition dans son ministère? (17 h 15)

M. Tardif: M. le Président, je me souviens, en effet, des représentations du député de Deux-Montagnes. Cependant, c'est peut-être là le pire exemple à prendre, celui des avocats du contentieux, puisque ceux-ci peuvent être amenés à donner des avis juridiques au ministre, à l'encontre des municipalités, en tout cas, en ce qui concerne les faits et gestes posés par les municipalités.

Ceci dit, je suis bien conscient que le problème d'avoir, dans le territoire, des agents du ministère qui puissent informer les municipalités, qui puissent leur servir de support technique, de conseillers sur le plan de l'urbanisme, de l'aménagement, de l'administration financière, de même que sur l'ensemble de la législation du ministère, du moins celle qui les concerne cela m'apparaît un objectif à atteindre. C'est en ce sens-là, ce matin, que je parlais de déconcentration des effectifs, de sorte que la seule réserve que j'ai présentement, c'est en ce qui concerne les avis juridiques des avocats du contentieux, ce qui n'exclurait pas du tout que deux corps différents, l'un chargé de donner des avis au ministre, d'une part, et l'autre formé de gens peut-être plus polyvalents, d'ailleurs. Je souhaite ardemment que cette déconcentration se fasse, d'autant plus que ceia m'apparaît comme étant la meilleure école de formation pour nos fonctionnaires.

J'ai eu à déplorer au cours des 16 ou 17 derniers mois — et ceci sans préjugé à l'égard des fonctionnaires qui font bien leur boulot, je pense — le fait que lorsque je devais recevoir les membres d'un conseil municipal, parce que, n'en déplaise au député de D Arcy McGee, mes portes n'étaient pas fermées, les portes de mon bureau n'étaient pas fermées...

M. Goldbloom: Cela me plaît beaucoup, M. le Président.

M. Tardif: Lorsque je recevais les représentants d'un conseil municipal, le maire et ses conseillers qui venaient me parler de leur ville, il m arrivait de recevoir des points de vue sectoriels. J'avais parfois les urbanistes du ministère qui me donnaient le dossier des tuyaux d'égout et d'aqueduc; j'avais les analystes financiers qui me donnaient le portrait financier de la ville et j'avais les avocats qui me parlaient des problèmes de règlements d'emprunt. Mais je n'avais pas beaucoup de monde qui pouvait faire la synthèse de tout cela et me donner le portrait de la ville. Lorsque le maire venait me voir, il ne parlait pas uniquement de son bout de tuyau et de son règlement d'emprunt, mais de sa ville, qui est un tout.

Là-dessus, je pense que ce n'est pas porter un blâme à l'endroit des équipes de fonctionnaires spécialisés que nous avons au ministère, mais cette vision plus globale serait, je pense, éminemment favorisée, c'est-à-dire que ce faisant, en déconcentrant, non seulement le ministère rendrait-il service aux municipalités, mais il se rendrait service lui-même en ayant tantôt des fonctionnaires qui reviendront à la maison-mère et qui auront de la chose municipale une vision beaucoup plus englobante que celle que leur spécialité ou leur routine leur aura permis d'avoir au cours des années.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: M. le ministre, dans le même esprit, est-ce que vos intentions seraient d'imiter, en quelque sorte, ce que font un certain nombre de ministères actuellement, en particulier, je pense au ministère de l'Industrie et du Commerce qui maintient des bureaux régionaux, ou encore le ministère de l'Agriculture qui, en plus de maintenir des bureaux régionaux, en maintient au niveau de certaines localités, et de faire en sorte que ces bureaux soient en mesure de répondre à peu près à toutes les questions que se posent les municipalités au Québec?

Je comprends très bien, par exemple, que la ville de Montréal ait amplement les moyens de se payer tous les professionnels nécessaires à sa bonne administration, que certaines grandes capitales régionales aient également ces moyens, mais si on tient compte du fait qu'il y a au-delà de 1500

municipalités au Québec dont un grand nombre sont vraiment minuscules et n'ont pas les moyens de se payer des gens en permanence pour les informer de tout ce qui se passe au ministère des Affaires sociales à Québec et ainsi risquent de manquer certains bons programmes qui ont pu être mis de l'avant, surtout depuis le 15 novembre 1976, est-ce qu'il serait de votre intention d'installer de ces bureaux régionaux pour venir en aide aux municipalités qui ne peuvent pas se payer le luxe de maintenir du personnel à plein temps capable de les informer adéquatement?

M. Tardif: M. le Président, la réponse est oui. En attendant, le ministère s'est efforcé, au cours de seize derniers mois, enfin, je prends toujours comme date de référence non pas le dernier exercice financier, M. le Président, mais on me le permettra, les seize derniers mois ou à peu près, d'organiser, à diverses reprises, des séances d'information. Je vais vous donner à titre d'exemple les lois 54 et 55 qui ont été discutées ici devant cette commission et qui venaient modifier substantiellement la Loi des cités et villes et le Code municipal. Une équipe itinérante de fonctionnaires a aussi tenu des séances d'information dans différents coins du Québec. Il en a été de même pour ce qui concerne les programmes PAIRA, PAIRE, PAISI, LIQUIDATION, etc., d'une part.

D'autre part, un bulletin d'information bimensuel a été mis au point, c'est Mini-Express, pour informer les municipalités non seulement de ce qui se passe au ministère, mais aussi aux autres ministères et qui est susceptible de les intéresser. Cette question de l'ouverture des bureaux, je compte la reprendre activement avec mon nouveau sous-ministre, dès qu'il sera en poste, et j'espère encore une fois peut-être avoir l'occasion de l'annoncer avant la fin des travaux de la présente commission.

Le Président (M. Marcoux): D'autres questions?

M. Laplante: Sur un autre sujet.

Le Président (M. Marcoux): Sur un autre sujet? Le député de D'Arcy McGee.

M. Laplante: Est-ce qu'en attendant on pourrait la poser?

M. Brassard: M. le Président, concernant la question du député de Beauce-Nord, étant donné que la réponse du ministre est oui aux bureaux régionaux, est-ce que, dans son esprit, il y a un échéancier? Compte-t-il commencer à mettre en place certains de ces bureaux régionaux dès cette année?

M. Tardif: M. le Président, je croyais avoir dit que je voulais confier ce dossier comme premier mandat à mon sous-ministre, dès qu'il sera en poste.

M. Brassard: Y compris le soin de dresser un échéancier?

M. Tardif: Y compris le soin de préparer avec moi un échéancier.

Le Président (M. Marcoux): Est-ce sur la même question? Sur un autre sujet. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Laplante: Sur un autre sujet.

M. Goldbloom: M. le Président, j'ai vu le député de Saint-Hyacinthe demander la parole avant moi. Je voudrais...

Le Président (M. Marcoux): Alors, M. le député de Saint-Hyacinthe.

Evaluation foncière

M. Cordeau: Merci, M. le Président. Tantôt, vous avez fait allusion à la réforme de l'évaluation foncière, qui devrait être terminée en 1983. Vous avez mentionné aussi que cette réforme était une des bases de la réforme sur la fiscalité. Est-ce à dire que la réforme de la fiscalité ne pourra être présentée en son entier avant 1984, parce qu'il peut y avoir des municipalités dont le travail sur l'évaluation foncière ne sera terminé qu'en 1983? Pourriez-vous nous faire connaître votre point de vue concernant...

M. Tardif: Non, il est évident, M. le Président, que nous ne saurions attendre que tous les rôles d'évaluation aient été refaits au Québec pour implanter la réforme de la fiscalité. Nous devons accélérer cette réforme, dans la mesure du possible, mais il est évident qu'à partir du moment où la redistribution des revenus, des formules de péréquation s'appuiera sur autre chose qu'un prorata de la population, mais voudra tenir compte de l'effort fiscal, à ce moment-là, nous devrons introduire des facteurs de normalisation dans l'évaluation foncière et des formules de correction qui nous permettent d'en arriver à une certaine parité pour fins de comparaison et de péréquation.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre a dit une chose que j'ai trouvée passablement intéressante: il a mentionné ce qu'il a appelé le mythe de l'élasticité de la taxe de vente, élasticité plus grande que celle de la taxe foncière.

Je voudrais lui demander si, en faisant ses calculs qui lui permettent d'affirmer que l'élasticité n'est pas plus grande du côté de la taxe de vente, il a tenu compte de l'évaluation foncière. Il y a beaucoup de municipalités, comme de commissions scolaires, qui ont augmenté leurs revenus à même la taxe de vente en augmentant leur évaluation. Cette évaluation avait été négligée, en quel-

que sorte, pendant une longue période de temps, mais avec un bon travail, l'évaluation ayant été portée à la valeur réelle, le revenu a été augmenté; à l'avenir, ce sera la croissance normale plutôt que ce rattrapage qui influencera le rôle d'évaluation. Donc, il me semble que dans cette récente période de quelques années — c'est une hypothèse que j'avance — des municipalités ont donné l'impression d'une plus grande élasticité et d'une croissance plus rapide de la taxe foncière, quand effectivement c'était du rattrapage sur le plan de l'évaluation.

M. Tardif: M. le Président, il est sûr que dans l'affirmation que j'ai faite de l'élasticité au moins aussi grande, sinon plus, de l'impôt foncier par rapport à la taxe de vente, il y a lieu de décomposer ce dont est fait l'impôt foncier, à savoir une valeur foncière et, d'autre part, un taux.

On sait que les municipalités, en fonction des services qu'elles veulent se donner, font et déposent un rôle d'évaluation, pouvant être ou bien à valeur normale, ou bien à tout pourcentage inférieur à la valeur marchande. Conséquemment à la déposition de ce rôle, les municipalités imposent un taux de taxe qui leur permettra de faire face aux dépenses qu'elles veulent effectuer.

Il s'est produit, en ce qui concerne les municipalités, ce qui... Nous devrons tenir compte de ces deux facteurs dans l'évaluation de l'élasticité. Il s'est produit, dans le cas des municipalités, un peu ce qui s'est produit sous l'ancien gouvernement, lorsque celui-ci disait: Nous n'augmentons pas les impôts. Comme il n'y avait pas d'indexation, finalement, ce que payait le contribuable augmentait sans cesse. C'est le même phénomène qui s'est produit sur la scène municipale.

Le ministre des Affaires municipales veut, dans des amendements à la loi d'évaluation, qui seront présentés en Chambre en temps et lieu, se faire donner le pouvoir de prescrire le contenu des comptes de taxe, de façon que le citoyen sache bien que s'il y a confection des rôles à la valeur réelle, c'est une opération, et que le taux de taxe décrété par son conseil, c'est une autre opération. La première est technique, la deuxième est politique.

M. Goldbloom: D'accord, M. le Président. Justement, le ministre reconnaîtra avec moi que la croissance de la taxe de vente se fait sans douleur, au niveau municipal comme au niveau provincial. C'est une augmentation reliée à l'activité économique, tandis que l'augmentation de la taxe foncière se fait, comme le ministre vient de le souligner, par un geste politique qui n'est pas sans douleur.

M. Brassard: ... ne se fait pas sans douleur.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais poursuivre sur une autre facette du sujet. Le ministre a indiqué que les rôles d'évaluation seront gelés cette année pour les fins de la taxation scolaire et que ce gel, mise à part l'inscription de nouvelles propriétés, permettra une augmenta- tion des revenus des municipalités, c'est-à-dire que les municipalités pourront occuper, dans une certaine mesure, ce champ. Ai-je raison de retenir un chiffre global de quelque $29 millions comme augmentation possible? Mais je reviens à ce que je disais il y a un seul instant. Il faudra que les municipalités posent un geste politique pour aller chercher ce montant-là. Il faudra que les contribuables paient ce montant additionnel. Je présume que le gel des rôles scolaires ne privera pas les commissions scolaires des revenus qui leur sont nécessaires et qui risquent de connaître une certaine augmentation cette année à cause de l'inflation et de besoins accrus; toutes sortes de raisons peuvent influencer les besoins des commissions scolaires et presque toujours vers le haut.

Alors, le ministre reconnaît-il qu'il y a quelque part là-dedans une augmentation de taxes?

M. Tardif: M. le Président, il n'y a pas, à proprement parler, une augmentation de taxe. Il y a libération d'un champ qui, s'il n'y avait pas eu de geste posé par le gouvernement, aurait été occupé par les commissions scolaires jusqu'à concurrence de $28 700 000.

Le gouvernement dit: Les commissions scolaires ne pourront pas imposer ces $28 700 000. Nous les financerons et, à la place, nous les cédons aux municipalités qui peuvent décider de s'en prévaloir ou non, de taxer oui ou non leurs citoyens.

M. Caron: Oui, mais, M. le Président, encore là, ça tombe sur le dos des municipalités. On le prend d'une main et on le donne à l'autre. C'est là-dessus que...

M. Tardif: Mais...

M. Caron: On ne peut pas dire qu'on rendra service à nos contribuables, parce que ça va leur coûter à peu près la même chose.

M. le ministre, vous savez que les municipalités, en général, diront: On peut aller chercher X. Elles vont organiser les budgets en conséquence.

M. Tardif: Mais...

M. Caron: Je pense qu'on n'épargnera pas énormément.

M. Tardif: M. le Président, c'est là tout le fond de la question et tout le principe de l'autonomie locale. Ou bien on veut être un gouvernement autonome... Or, il y a trois attributs qu'on reconnaît généralement à un gouvernement ou à un palier de gouvernement. Le premier, c'est d'être électif. Le deuxième, c'est le pouvoir de taxation et le troisième, c'est le pouvoir de réglementation. Quand on a ces trois attributs, on est généralement reconnu comme un palier d'administration de gouvernement.

Or, M. le Président, les municipalités — nous croyons beaucoup à leur autonomie — peuvent

décider du niveau de services qu'elles vont donner à leurs concitoyens, à leurs contribuables et, conséquemment, du niveau de taxation. Ce que la mesure a eu pour effet... Là, encore une fois, je reviens à la principale articulation de la réforme de la fiscaité; l'Union des municipalités, l'Union des conseils de comté, pendant des années, ont dit: Donnez-nous le champ d'impôt foncier. C'est à nous; on veut l'avoir exclusivement pour nous. Que les commissions scolaires se retirent de ce champ-là. Le gouvernement était prêt à faire la réforme tout d'un coup. Les municipalités ont demandé d'attendre un peu, mais, déjà, cette année, dans le présent budget, nous n'allons pas à l'encontre de la réforme. Nous gelons l'impôt foncier scolaire, nous permettons déjà aux municipalités d'occuper en tout ou en partie ou pas du tout un champ qui leur est libéré. Maintenant, c'est vrai, c'est un fait que cela accroît la visibilité de la taxation; c'est une taxe qui est éminemment visible.

M. Caron: Parce qu'on ne peut pas baisser les budgets, surtout à Montréal, M. le ministre; vous savez que la communauté urbaine nous coûte de l'argent, nous coûte plus cher et nous donne moins de services. Ce n'est pas croyable comme on a un service policier pourri, M. le ministre, ce n'est pas croyable. Une heure et une heure et demie avant qu'on réponde à l'appel, alors que les coûts ont triplé depuis... Vous savez celui qui payait... Au point de vue de l'évaluation, chez nous, cela a augmenté, en quatre ans, jusqu'à 85% pour une maison semi-familiale dont le propriétaire est obligé de payer et il n'a pas le service en retour. Vous savez, payer quand on a le service, ce n'est pas si mal, mais quand on n'a pas le service... Il y a une loi, qui a été adopté, je pense, en 1972, quand on a dit: On va vous enlever vos corps policiers, mais vous garderez le même nombre de personnes à votre service, et c'est passé peut-être de quinze à dix-huit. Les gens sont tannés de payer pour ne pas avoir de services.

M. Laplante: J'aimerais vous poser une question, M. le député. Vous êtes administrateur d'une ville, je vis dans une ville un petit peu plus grosse que la vôtre. Si on fait un retour en arrière avec la CUM, vous savez dans quel contexte cela a été monté, cette patente, sous un ancien gouvernement chez vous. Je sais toujours bien que chez nous on s'est promené avec des pancartes pour ne pas que cela se fasse; dans ce temps-là, le droit d'une ville, vous ne l'avez pas reconnu, mais aujourd'hui, dans le plan que le ministre propose, êtes-vous d'accord que si cette année dans votre budget à vous, on avait donné cette décentralisation — l'impôt foncier, le même plan que le ministre propose — vous auriez été capable à Verdun, aussi bien qu'à Montréal-Nord, de baisser de $0.20 à $0.30 votre taxe d'impôt foncier, avec ces revenus-là?

M. Caron: On ne l'a pas baissé, nous autres, on a été obligé de... oui...

M. Laplante: Non, vous auriez été capable si vous aviez eu ce plan-là, pouvez-vous nier cela? On l'a fait le calcul, je l'ai fait, on aurait pu diminuer de $0.20 à $0.30 la taxe foncière, avec les mêmes services.

M. Caron: Oui, si on avait eu le plan... J'espère qu'on ne se trompe pas. Parce que les gens sont tannés d'être taxés, surtout nous autres dans l'ouest, on y a goûté cette année au point de vue de l'évaluation et chez nous je peux vous dire qu'il y a environ 1100 personnes qui ont une évaluation entre 40% et 52%, 53%; je pense que vous avez eu de la documentation. J'ai des piles de lettres, j'aime autant ne pas vous les apporter, je sais que vous ne pourrez rien faire, je suis conscient du problème. Mais il faut trouver un mécanisme pour arrêter d'écoeurer, excusez l'expression, le petit propriétaire. Si on avait évalué tout le monde sur le même pied, on aurait dit: Le coût de la vie augmente de 8%, 10% ou 12%, on augmente tout le monde, alors le type qui loue un six logements, aurait une augmentation de 8%, à 10%: l'autre qui est tout seul avec un cottage — comme on disait tout à l'heure, s'il n'est pas à sa pension, il va prendre sa pension — son revenu diminue.

Ce sont eux qui ne sont plus capables de tenir le coup.

M. Laplante: Oui, l'orgueil d'une ville comme chez vous, comme dans d'autres villes...

M. Caron: L'orgueil, on met cela de côté, c'est l'argent qui compte. C'est ce qui reste dans les poches.

M. Laplante: Dans des quartiers complètement neufs, vous vous êtes payé des services d'incendie. Vous avez peut-être 10% ou 15% d'employés de ville en trop, cela se produit dans toutes les municipalités de la grosseur de la vôtre, comme chez-vous. Je peux vous en donner la preuve de cela. Pourquoi le contribuable paie toujours plus. C'est à cause des extravagances des administrateurs des villes, tant que les citoyens ne seront pas impliqués dedans...

M. Caron: Je peux dire au député, M. le Président, que chez nous on a un service d'entraide qui est...

M. Laplante: Vous ne faites pas exception, vous autres non plus.

M. Caron: ... établi et je vous dis que c'est une très bonne chose. Les villes de banlieue vont nous aider. Quand vous avez une propriété qui a 75 ou 80 années, je vous jure que quand le feu prend là-dedans...

Ce à quoi je veux en venir, M. le ministre, c'est qu'on essaie de trouver — je sais que ce n'est pas facile, d'autres avant nous n'ont pas trouvé de solutions miracles — un moyen quelconque pour arrêter d'augmenter le petit propriétaire. C'est à ce niveau-là qu'il faut protéger le petit propriétaire, si

on veut que les gens aient leur chez-soi. Vous savez quand le propriétaire demeure dans sa maison, il y a bien plus de chances que la maison reste belle, qu'elle reste propre et qu'elle soit entrenue. Cela coûte meilleur marché pour une municipalité quand c'est le propriétaire même qui demeure dans sa maison, parce qu'il s'en occupe et il va même jusqu'à nettoyer le trottoir pour garder sa devanture propre. Or, c'est pour cela qu'il faut encourager les gens à avoir leur propriété, mais s'il y a des taxes qu'ils ne peuvent pas payer, on ne les encourage pas et ils vont dire: On est aussi bien d'être locataires.

M. Laplante: J'aimerais ouvrir une porte à M. le ministre à ce moment-ci. Vous avez fait plusieurs déclarations concernant justement l'évaluation des maisons, le coût des services que cela peut occasionner. Je pense — vous me corrigerez si j'ai tort — que vous disiez qu'un petit bungalow coûtait, à un moment donné, $7000 pour cent pieds de rue, en services d'égouts et d'eau.

M. Tardif: Le ratio est de 6,5% à 1% entre le coût des infrastructures et l'évaluation foncière, c'est-à-dire que pour chaque $1000 investis en aqueduc, égouts, rues et trottoirs, il fallait $6500 d'évaluation foncière, derrière.

M. Laplante: Croyez-vous, M. le ministre qu'il y a une sensibilisation à faire là-dessus au niveau des municipalités, d'ouvrir des territoires vierges et construire des bungalows avec une valeur, à l'évaluation municipale, peut-être de $25 000 ou de $30 000? S'il en coûte encore plus, cela prend une évaluation, je crois, de $38 000 ou de $40 000 que vous avez déjà donnée. Pouvez-vous détailler là-dessus?

M. Tardif: M. le Président, on rejoint un des facteurs qui contribuent à l'augmentation des coûts pour les citoyens de (a Communauté urbaine de Montréal et de la ville de Verdun. Les coûts, en effet, dans les grandes villes, on peut tenter de les contrôler de diverses manières et déjà le gouvernement, en obligeant les communautés urbaines et les cités et villes à adopter des programmes triennaux d'immobilisation, a voulu justement mieux prévoir les augmentations et même, dans le cas des communautés urbaines, les contrôler, parce que le gouvernement du Québec défraie une large part des coûts reliés à la communauté urbaine. Je vous laisse le soin d'apprécier, M. le député de Verdun, par votre entremise évidemment, M. le Président, ce qu'il en coûterait à vos contribuables s'ils devaient payer la note réelle des services communautaires. À titre d'exemple: le gouvernement du Québec paie 50% du coût d'épuration de l'île de Montréal. Le gouvernement fédéral paie 16 2/3%, la communauté urbaine 33 1/3%. Je vous laisse le soin d'apprécier ce que cela signifierait s'il fallait que la municipalité écope de la note en entier de cela. C'est donc 50%. Or, quand on sait que pour le seul collecteur-nord et intercepteur-nord avec le col- lecteur et l'usine d'épuration et enfin le tour de l'île, on parlait d'un coût global de $1 200 000 000 mais on sait pertinemment qu'une fois fini, cela aurait coûté $1 500 000 000, le gouvernement du Québec en paie 50%. Dans le cas du métro, le gouvernement du Québec défraie 30% du coût d'acquisition de l'équipement roulant: métro et autobus. Le gouvernement du Québec défraie 60% du service de la dette du métro. C'est important cela, les immobilisations du métro.

Troisièmement, le gouvernement du Québec défraie entre 45% et 55% du déficit d'exploitation de la CTCUM. Écoutez, c'est presque, si on totalise tout cela, 75% du coût du transport en commun qui est défrayé par le gouvernement du Québec. Donc, sur ce plan, l'État apporte déjà une contribution en argent sur le plan des contrôles avec les programmes triennaux d'immobilisation. Mais, il reste une chose, c'est que — qu'est-ce que vous voulez — le mode d'urbanisation que l'on connaît au Québec, qu'on a connu dans la région de Montréal, est à mon avis le grand responsable des coûts astronomiques pour les citoyens de la communauté.

À partir du moment ou vous avez de moins en moins de citoyens sur l'île de Montréal, et dans la ville de Montréal, parce que n'en déplaise au député de Verdun, je suis résidant de la ville de Montréal, il y a donc, de moins en moins de citoyens qui paient pour des services qui coûtent de plus en plus cher. (17 h 45)

La déperdition de population, de 1971 à 1976, dans la seule ville de Montréal, est de 160 000 de population. Ces 160 000 contribuables de moins sont partis avec leurs taxes, en banlieue. Ils sont allés demander au ministre des Affaires municipales des subventions pour des égouts, des aqueducs, au ministre des Transports des réseaux d'autobus, au ministre de l'Éducation des écoles, et au ministre des Affaires sociales des hôpitaux. Pendant ce temps, l'hôpital du Sacré-Coeur a plusieurs lits vides — je parle du nord de la ville, dans mon coin — on ferme des écoles en grand nombre — la CECM annonce la fermeture de 32 écoles en septembre prochain — et on a des équipements qui pourraient accueillir beaucoup plus de gens.

Alors, collectivement — je pose la question — est-ce que nous avons les moyens de laisser faire ce développement tous azimuts, avec les coûts énormes que cela comporte? Jusqu'à maintenant, on ne s'était pas tellement interrogé sur cette relation et il faut la faire évidemment. Tant en raison des coûts astronomiques que cela suppose pour les populations des noyaux urbains centraux que pour le gouvernement de favoriser — et quand je dis le gouvernement, je pense, entre autres, aux programmes de la Société centrale d'hypothèques et de logement, qui sont des programmes d'accès à la propriété individuelle et unifamiliale pavillonnaire qui, outre le fait qu'elle engendre tout ceci, est aussi consommatrice de sol, de terre, d'énergie. Il m'apparaît que des mesures doivent être prises dans ce sens.

Le ministre d'État à l'aménagement a déjà annoncé l'option du gouvernement en faveur d'une politique de consolidation du tissu urbain pour le territoire de la communauté urbaine de Montréal. Je vous ai dit tantôt que certains volets de la politique fiscale allaient renforcer ceci en diminuant le fardeau sur le territoire de la communauté. D'autre part, par les divers programmes de subventions d'égouts et d'aqueduc, mon ministère peut freiner, jusqu'à un certain point, certains développements; ne pas les empêcher, parce que je ne crois pas qu'il faille les empêcher, mais je pense qu'il faut clairement dire à ces gens: Ne comptez pas sur l'État pour aller vous subventionner pour ce genre d'habitat. Si vous voulez y aller, développez-vous, mais selon vos moyens et à vos frais. Il ne faudrait pas demander à l'État d'apporter à la campagne les services de la ville. Si on veut aller vivre à la campagne, avoir de l'air pur, j'en suis, mais il y a des conséquences à cela et les conséquences sont de ne pas avoir les services de la grande ville.

M. Caron: M. le Président, on apprécie ce que le gouvernement fait. Je ne l'ai pas dit d'une façon désagréable tout à l'heure, soyez assuré que...

M. Tardif: Non, mais c'est que très peu de citoyens connaissent ce fait-là.

M. Caron: Soyez assuré, M. le ministre, que peu importe celui qui est à votre place, ce n'est pas facile, je vous le dis souvent et je suis conscient de cela. Mais naturellement, quand on parle d'aide pour le métro aussi bien que d'égout collecteur, ce n'est pas pour trois ans, cinq ans et dix ans, c'est pour des années, M. le ministre. C'est pour cela que c'est une responsabilité du gouvernement. En plus, s'il fallait taxer les contribuables de Montréal pour tous ces services, on ne pourrait pas leur imposer, déjà ils sont surchargés. Vous disiez que les gens de Montréal s'en vont dans les banlieues. On vit aussi la même chose à Verdun. Notre population n'augmente pas, depuis les dix dernières années elle va en diminuant. Nous aussi nous sommes bien contents qu'on se penche sur ce problème pour essayer de regagner de la population pour diminuer nos coûts de services.

Je veux dire à mon bon ami d'en face que nous, on n'essaie pas d'être trop luxueux. Le maire est très sévère pour les engagements. Pour ce qui est des pompiers, on a juste le strict nécessaire et on se sert des villes de banlieue, dans une belle collaboration que j'ai mise sur pied quand on a eu un gros feu le 6 septembre. Je pense qu'on a rendu un service à Verdun, Lasalle, Lachine, ville Saint-Pierre et Dorval. Tout le monde a été heureux de cela.

M. Brassard: ... félicitations au maire de Verdun.

M. Caron: Merci, et je les prends parce que j'ai travaillé fort là-dessus.

M. Brassard: ... on va vous les redire à part cela...

Le Président (M. Marcoux): Le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais d'abord corriger ce que j'ai cru comprendre de l'affirmation du député de Bourassa, qui attribuait au gouvernement précédent la paternité des communautés urbaines. C'est effectivement l'Union Nationale, à la fin de 1969, le ministre...

M. Tardif: L'intégration de la police en 1972 s'est faite sous les libéraux et sous M. Choquette. Je ferme la parenthèse.

M. Goldbloom: C'est vrai, et je ne fais pas de commentaire là-dessus, c'est bien sûr. Mais je voulais rappeler que le ministre des Affaires municipales du gouvernement de l'Union Nationale s'appelait le Dr Robert Lussier, qui est connu dans certains milieux.

Le ministre a parlé de 16 mois, mais il s'agit effectivement de 17, si je calcule correctement. Au cours de ces 17 mois, j'ai appris à connaître l'honnêteté intellectuelle du ministre. Je n'ai aucune hésitation à le dire. Je voudrais faire appel à cette honnêteté intellectuelle pour deux choses. D'abord le ministre a mentionné les subventions données à l'épuration des eaux et les subventions données aux transports en commun. Il se rappellera que c'est le gouvernement précédent qui en était responsable. Mais ce que je voudrais dire, parenthèse pour parenthèse, n'est-ce pas?

M. Tardif: D'accord.

M. Goldbloom: Je voudrais dire que le ministre a mentionné...

M. Laplante: II parle d'épuration.

M. Goldbloom: L'épuration s'en viendra aux prochaines élections.

M. Laplante: Attendons que le vent change de bord.

M. Cordeau: On nous a promis 90%.

M. Goldbloom: M. le Président, on voit qu'ils est 18 heures moins 8 minutes. Les esprits s'égaient un peu.

Je voulais demander ceci au ministre. Il a mentionné un chiffre de $28 700 000 comme étant mis à la disposition des municipalités ainsi qu'un programme global qui mettrait à la disposition des municipalités un montant qui se chiffrerait entre $200 millions et $250 millions. Mais il a aussi eu l'honnêteté intellectuelle de dire que peut-être les municipalités ne s'en serviront pas ou ne s'en serviront pas au complet. Or, les montants en question pourront justement ne pas être atteints. C'est un point.

Mais, deuxièmement, quand on enlève quelque chose au système scolaire, il faut le remplacer; et nous risquons de nous trouver devant une situation où les montants en question auraient été enlevés au système scolaire. C'est notamment le cas des $28 700 000, parce qu'ils sont libérés par le gel des rôles pour fins scolaires. Ce montant aura été enlevé au système scolaire, il faudra le remplacer. Mais si les municipalités ne profitent pas de ces disponibilités, on n'aura pas effectivement transféré autant d'argent vers elles. Le contribuable sera quand même obligé de payer d'une manière ou d'une autre le montant enlevé au système scolaire. Cela vient toujours du contribuable. Alors, je pense qu'il y a...

M. Tardif: Excusez-moi, mais j'essaie de suivre le député de D'Arcy McGee. Ou bien les municipalités occupent le champ ou elles ne l'occupent pas. Ou bien elles l'occupent en entier, si elles l'occupent, ou bien elles l'occupent partiellement. Si elles ne l'occupent pas, c'est un gain net pour le contribuable, localement en tout cas, c'est évident. Si elles décident de l'occuper en partie, c'est un gain partiel. Si elles l'occupent en entier, le contribuable, au lieu de payer $100 de plus ou $50 de plus dans son compte de taxes scolaires, le paiera à la municipalité.

D'autre part, le gouvernement, pour chaque dollar de revenu non perçu localement par les commissions scolaires, doit donc augmenter l'enveloppe budgétaire des commissions scolaires. C'est évident. À ce moment-là, la situation, pour ce qui est des commissions scolaires, hormis la partie des dépenses dites inadmissibles, deviendra, pour l'étendue du manque à gagner des $28 700 000, après la réforme, l'équivalent d'une enveloppe budgétaire comme celle qui est donnée aux cégeps et aux universités notamment et où les administrateurs fonctionnent avec cette enveloppe.

Municipalités en danger de faillite

M. Goldbloom: Je pense que l'on se comprend, M. le Président. J'ai une dernière question pour cet après-midi. La campagne électorale de 1976 a été marquée par certaines déclarations. C'est l'actuel premier ministre qui, au cours de cette campagne, a indiqué l'intention de son éventuel gouvernement de réaménager rapidement la fiscalité municipale afin d'éviter la faillite de nombreuses municipalités et briser le cercle vicieux qui les étouffe. Y a-t-il vraiment de nombreuses municipalités qui sont en danger de faillite? Si oui, comment les a-t-on sorties du pétrin avec des mesures — qui sont quand même en deçà de cette réforme globale de la fiscalité municipale — que l'on a pu effectuer jusqu'à maintenant?

M. Tardif: Beaucoup de municipalités, sans être nécessairement en faillite, étaient et sont dans une situation pour le moins critique. Les derniers chiffres dont je disposais au ministère, il y a de cela quelque temps, nous indiquaient que plus de 160 municipalités au Québec avaient un taux d'endettement dépassant les 20%. Il y a trois façons de considérer la situation financière des municipalités. L'une d'elles est d'établir le taux de la dette per capita; la deuxième est de considérer la proportion du budget annuel qui est consacrée au service de la dette et la troisième est de calculer la dette sur la base de l'évaluation foncière. C'est le taux d'endettement sur la base de l'évaluation.

Au-delà de 160 municipalités avaient dépassé le seuil critique. Déjà, on considère comme un seuil critique un taux d'endettement dépassant 15% selon la taille des municipalités; nous en avions au-delà d'une centaine, à tout le moins 60 qui étaient entre 15% et 20% et 100 qui étaient au-delà de 20% de taux d'endettement. Là-dessus, je dois dire que cette situation financière difficile des municipalités était en partie attribuable à un système qui faisait en sorte que les municipalités soumises à des pressions de la part de, appelons-les des vendeurs de réseaux d'acqueduc, se faisaient vendre des réseaux chromés — ce n'est pas le seul cas, il y a un certain nombre de cas que j'ai en mémoire — qui étaient nettement, mais très nettement au-dessus de leurs moyens, sans compter, parfois, des dépenses inconsidérées qui étaient faites pour toutes sortes de raisons et qui faisaient parfois que la valeur totale de la dette pour l'installation d'un seul réseau d'acqueduc et d'égout dépassait de deux, même trois ou quatre fois la valeur foncière totale de la municipalité. Ceci, selon moi, a constitué, pour un certain nombre d'entre elles, une situation difficile. C'est la raison pour laquelle, d'une part, dès le 22 décembre 1976, je faisais une déclaration ministérielle concernant les engagements pris envers un certain nombre d'entre elles, en disant: Écoutez, nous allons honorer les engagements du gouvernement antérieur, les engagements autorisés par le Conseil des ministres et le Conseil du trésor, mais de grâce, si vous n'avez pas commencé les travaux, ne vous engagez pas là-dedans. Deuxièmement, pour celles dont les travaux sont substantiellement avancés, nous allons examiner les cas un à un. C'est ce que nous avons fait et ce que j'ai continué de faire au cours de cette année jusqu'au 29 mars dernier, alors que, grattant les fonds de tiroirs pour les crédits périmés de fin d'année, j'ai accordé à un certain nombres d'entre elles, sur la foi d'engagements, non pas du gouvernement, mais d'engagements moraux — appelons-les comme cela — un certain nombre de subventions pour que le fardeau de taxation soit plus tolérable pour ces municipalités.

Entre-temps, la situation s'est un peu améliorée pour un certain nombre d'entre elles, par un resserrement du côté des dépenses; parfois la population s'est chargée elle-même d'effectuer l'épuration souhaitée en novembre 1976 dans certains cas et même 1977 dans d'autres. De plus, en accroissant les subventions statutaires aux municipalités de 10 000 âmes et plus — enfin, auparavant c'était de 15 000, cela a baissé à 10 000

l'an passé et cette année, c'est à 5000 — en ayant des programmes clairs et précis où l'on connaît les règles du jeu, je pense que la situation des municipalités commence à s'assainir et c'est mon désir le plus cher qu'on puisse faire en sorte que celles-ci, connaissant ces règles de financement, sachent qu'elles devront s'autofinancer dans leurs projets dès que ceux-ci se situent en dehors des programmes gouvernementaux précis, ne s'engagent pas dans des dépenses inconsidérées. Afin de les aider à s'assurer de ce fait, la Loi des travaux municipaux a été amendée; non seulement impose-t-elle une amende, mais elle peut rendre inhabile à siéger toute personne qui, de façon inconsidérée, engage les crédits de la municipalité.

Voilà, M. le Président, certaines des mesures prises pour tenter d'assainir le climat: aide ponctuelle, amendement à la loi, surveillance du ministère, tutelle dans certains cas, enquête administrative dans d'autres. Mais, je pense que c'est par une série de mesures et non pas en jouant nécessairement le Père Noël que la situation pouvait être assainie.

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre reconnaîtra sûrement que ce n'est que quand il a parlé de l'augmentation des subventions statutaires qu'il a parlé de fiscalité. Les autres questions sont d'un autre ordre. La vente sous pression de réseaux d'aqueduc et d'égouts exagérés par rapport aux besoins de la municipalité, ce n'est pas une question de fiscalité municipale, c'est une question de jugement.

M. Laplante: Une saine administration.

M. Tardif: Oui, M. le Président, mais on conviendra avec moi que cela se transforme vite en une question de fiscalité lorsqu'il faut imposer des taxes pour payer ces réseaux.

M. Laplante: On n'est pas pour payer cela, M. le député de D'Arcy McGee avec les lettres de créances que vous avez données.

Le Président (M. Marcoux): La commission...

M. Goldbloom: Ne commencez pas! Ne commencez pas! Cela va bien jusqu'à maintenant, et si vous voulez commencer on ira...

M. Laplante: Ah, cela va bien!

M. Goldbloom: ... jusqu'au bout.

M. Laplante: ...

M. Goldbloom: Oui, monsieur!

Le Président (M. Marcoux): La commission des Affaires municipales suspend ses travaux jusqu'à 20 heures.

(Suspension de la séance à 18 h 4)

Reprise de la séance à 20 h 15

Le Président (M. Marcoux): À l'ordre, messieurs!

La commission des Affaires municipales poursuit l'étude des crédits du ministère des affaires municipales. M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: Merci, M. le Président. L'an dernier, il y a eu certaines mesures qui ont été annoncées afin d'aider dans le domaine de la fiscalité. Il y avait — je m'excuse d'en parler — le projet de loi qui aurait donné le droit de taxer les plaques d'immatriculation, il y avait une surtaxe de 50% sur les terrains vacants et il y avait l'assimilation des maisons mobiles à des immeubles pour fins de taxation.

La surtaxe de 50% a été mise en vigueur, mise à la disposition des municipalités, mais, si j'ai bien compris, la question des maisons mobiles n'a pas été réglée parfaitement. Est-ce que je me trompe?

M. Tardif: C'est tout à fait juste, M. le Président. Ceci suppose un amendement à la Loi sur l'évaluation foncière et déjà, l'an dernier, bon nombre d'amendements ont été proposés par le ministère, mais ces amendements n'étaient pas du nombre.

Le fait est que nous étions prêts assez tôt au début de la présente session avec les amendements qui auraient donné effet à cette mesure. Cependant, connaissant les intentions du gouvernement en ce qui concerne la réforme de la fiscalité, il nous a semblé préférable d'attendre pour regrouper ces amendements à cette Loi sur l'évaluation qui avait connu par le passé moult amendements, ainsi que le député de D'Arcy McGee s'en souviendra sans doute. Il nous a semblé préférable de les regrouper avec ceux découlant de l'actuel discours du budget.

M. Goldbloom: Je ne voudrais pas aborder comme telle la question de l'évaluation foncière pour l'instant, mais dois-je comprendre que le ministre a trouvé que d'importantes modifications sont nécessaires pour rendre la loi opérante, efficace ou s'agit-il plutôt d'ajustements de la nature de ceux dont nous venons de parler?

M. Tardif: Non, M. le Président, il ne s'agit pas d'une opération majeure. Je pense qu'il s'agit beaucoup plus d'ajouts, de modifications mineures. Cependant, je vais donner un exemple. À partir du moment où on a modifié, dans le discours du budget, la taxation sur les entreprises de télécommunication, c'est un des amendements aussi qu'il faudra apporter à la Loi de l'évaluation foncière.

Je pense également tantôt aux prescriptions concernant le contenu des comptes de taxe municipaux aussi, mais ce n'est rien qui va changer la nature fondamentale de ce projet de loi.

M. Goldbloom: En ce qui concerne la surtaxe de 50% sur les terrains vacants, le ministre est-il en mesure de nous indiquer combien de munici-

palités s'en sont prévalues? Une liste est-elle disponible? Aussi, le ministre peut-il exprimer une opinion ou nous fournir certains renseignements sur l'effet de cette mesure? Le but n'était pas seulement celui d'augmenter les revenus des municipalités, il était en même temps, d'encourager un développement plus rationnel en insistant pour que les lots vacants desservis avec une infrastructure convenable soient les premiers à être bâtis, parce que l'on a assisté à un développement incohérent dans beaucoup de municipalités.

Il est peut-être tôt pour évaluer l'effet d'une telle mesure mais il serait quand même utile et intéressant que le ministre soit capable de nous donner au moins une impression de l'effet de cette mesure sur ce deuxième plan.

M. Tardif: M. le Président, je prends avis de la question en ce qui concerne le nombre de municipalités qui se seraient prévalues de cette disposition de la loi.

J'en connais au moins une dont je peux lui dire présentement qu'elle impose une surtaxe sur les terrains vacants, c'est la ville de Montréal, par suite de la taxe olympique; ce n'est pas en vertu de ces dispositions, mais je prends avis de sa question.

Quant à l'impact sur l'urbanisation, il est bien évident que ce n'est pas cette seule mesure qui peut avoir un effet. Je pense notamment aux programmes PAIRA et LIQUIDATION, dont les normes comportaient des exigences sur le plan de la densité, où des normes de deux usagers à l'acre et vingt usagers par mille pieds linéaires existaient et venaient donc encore là amener une utilisation plus rationnelle des infrastructures. Je pense également au programme de la Société centrale d'hypothèques et de logement que nous administrons et qui permet aux municipalités d'obtenir $1000 par unité de logement moyennant que des normes de densité entre dix et 45 unités de logement à l'acre soient respectées.

Comment distinguer entre l'effet des programmes PAIRA et les éléments d'identification qu'ils comportent, entre le programme de la Société centrale d'hypothèques et de logement que nous administrons, entre la surtaxe sur les terrains vacants viabilisés, à moins de faire une analyse factorielle, comment pondérer l'impact de chacune de ces mesures? Je pense qu'il serait assez difficile de le faire. Comme le député de D'Arcy McGee l'a mentionné, c'est peut-être un peu trop tôt.

Néanmoins, je vais prendre avis de cette deuxième partie pour le cas où nous serions en mesure d'indiquer si, véritablement, nous avons réussi à restreindre un tant soit peu l'étalement urbain.

M. Goldbloom: Le ministre a indiqué son intention de regrouper plusieurs modifications à la Loi sur l'évaluation foncière. Peut-être que je ne l'ai pas entendu clairement, mais a-t-il indiqué à quel moment il prévoit être en mesure de déposer un projet de loi?

M. Tardif: M. le Président, il y a les amendements qui découlent du dernier budget; il y a ceux qui découlent des impératifs reliés à l'application de la réforme de l'évaluation foncière; il y a ceux qui découlent du budget qui vient juste d'être annoncé; il y a ceux qui pourraient résulter de l'application ou de la mise en oeuvre de la réforme de la fiscalité à la suite de la conférence. Allons-nous attendre d'avoir tout le paquet ou si nous allons faire dans un premier temps ce qui est déjà, en fait, requis par les annonces dans le budget? Je ne saurais le dire à ce moment-ci. Je préférerais consulter les gens du contentieux, de la législation et aussi de la Direction générale de l'évaluation foncière, dans la mesure où je leur ai commandé cette étude comparée, Ontario-Nouveau-Bruns-wick, et où on examine attentivement ce qui se fait du côté de l'Ontario notamment, à la suite des recommandations de la commission Blair. Mais je tenterai peut-être, d'ici la fin des travaux de cette commission, d'indiquer de façon un peu plus précise à quel moment nous pourrions présenter des amendements.

M. Goldbloom: M. le Président, j'aurais l'intention maintenant de passer à une autre facette de la fiscalité. Donc, je ne voudrais pas monopoliser...

M. Cordeau: J'ai peut-être une question qui se rapporte un peu indirectement à la fiscalité des municipalités. M. le Président, lorsque M. le ministre a participé au congrès de la Chambre de commerce du Haut-Saguenay, il a été question d'une politique gouvernementale concernant le financement des infrastructures par des promoteurs, et que vous auriez peut-être l'intention de demander aux promoteurs une contribution jusqu'à 20% des projets et qu'il était aussi dans vos intentions de présenter, durant la présente année, un projet de loi à cet effet. Pourriez-vous nous faire connaître plus en profondeur vos intentions concernant ce financement des infrastructures pour aider les municipalités?

M. Tardif: Oui, M. le Président. Sur la question du financement des infrastructures, un bon nombre de municipalités nous ont demandé de pouvoir exiger des promoteurs et des bâtisseurs une partie de plus en plus grande des coûts des infrastructures. Parallèlement à cela, nous avons reçu des représentations de l'industrie de la construction demandant de freiner cette tendance des municipalités de leur refiler une partie plus grande de ces coûts. Les municipalités s'inspiraient en cela du modèle ontarien et des provinces de l'Ouest où ce sont les promoteurs, les entrepreneurs qui paient en entier le coût des infrastructures. Face à cette situation et à ce qui se développait au Québec, c'est-à-dire avoir des municipalités qui payaient entièrement, d'autres qui refilaient entièrement le coût et certaines qui en faisaient assumer 20%, 40%, 50%, 60%, 80% par les bâtisseurs, le ministère a procédé à une consultation auprès des divers intervenants: industrie de la construction, prêteurs hypothécaires, promoteurs, municipalités, greffiers, trésoriers du

monde municipal, et avait formulé une hypothèse à l'effet de faire assumer 20% des coûts par les promoteurs, 60% par les usagers, les riverains, et 20% par l'ensemble de la collectivité.

Cette hypothèse résultait de cette série de consultations avec les divers intervenants. Elle nous semblait se situer dans un lieu raisonnable entre repasser tous les coûts au bâtisseur et en dernier lieu à la clientèle. Nous ne croyions pas sage, à ce moment-là, de préconiser une formule semblable à celle de l'Ontario pour la simple raison que l'industrie de la construction, au Québec, est encore le fait de plusieurs petites entreprises québécoises francophones. Il nous semblait que permettre le financement des infrastructures à 100% par les promoteurs aurait pour effet d'augmenter le coût moyen des constructions de $6000 à $8000 et d'éliminer du marché de la construction plusieurs petits entrepreneurs qui n'auraient pas les reins assez forts pour défrayer le coût des rues, des trottoirs, des infrastructures.

D'autre part, il nous semblait qu'une contribution minimale de l'entrepreneur pouvait assurer que celui-ci voie à la surdimension des services, donc s'assure que véritablement il n'y ait pas de gaspillage de ce côté.

Évidemment, on se trouvait entre ces deux extrêmes, les municipalités voulant refiler une partie de plus en plus grande des coûts et les constructeurs s'y opposant. Cette hypothèse du ministère qui a été soumise nous apparaisait comme une solution de compromis honorable, en l'occurrence. Une fois que nous l'avons formulée, nous l'avons mise par écrit et envoyée à l'Union des municipalités, l'Union des conseils de comté, qui a pris un temps beaucoup plus long à réagir à ce document que nous l'aurions cru. (20 h 30)

Ce n'est que tout récemment que nous avons eu les réponses de l'Union des municipalités et de l'Union des conseils de comté, réponses qui sont décevantes, à certains égards, puisque ce qu'on préconise, ni plus ni moins, c'est le laisser-faire. C'est la politique de non-intervention. Laissez-nous donc décider de la façon de financer ces infrastructures.

Je résume peut-être de façon succincte, mais c'est, en gros, la situation, au moment où nous nous parlons. J'ai donc demandé, tout juste avant la fin de semaine, à mes fonctionnaires, de reprendre le dossier et de me faire des recommandations qui, tout en essayant d'atteindre les objectifs que nous souhaitions, n'aient pas les effets secondaires indésirables que l'on a constatés dans les autres provinces.

C'est la situation présentement et au moment où nous nous parlons, c'est le résumé...

M. Cordeau: Est-ce que vous croyez, M. le ministre, que vous allez avoir à votre disposition de nouvelles recommandations pour la conférence Québec-municipalités au mois de juin prochain?

M. Tardif: Pour autant que les municipalités sont concernées, j'ai l'impression que l'affaire est à peu près classée. Elles ont indiqué leur position de politique de laisser-faire, peut-être tempérée par une marge de manoeuvre qui ferait en sorte que si ce n'est pas entre 0 et 100%, cela pourrait être entre 25% et 50%, en tout cas; une marge de manoeuvre assez grande pour elles.

Nous allons voir dans quelle mesure il sera possible d'obtenir quelque chose qui puisse se défendre, sans porter préjudice, encore une fois, à une industrie qui, chez nous, a la caractéristique que l'on connaît.

J'ai été particulièrement à même de constater l'influence de cette politique de financement des infrastructures par les bâtisseurs lorsque je suis allé à Edmonton récemment, pour constater qu'une petite maison unifamiliale de cinq pièces, construite en banlieue d'Edmonton, rien de luxueux se vendait $66 000 l'équivalent de ce que nous pouvons peut-être payer $33 000 dans la région de Montréal.

Tout n'est pas directement attribuable, dans un premier temps, au seul fait que les entrepreneurs financent les coûts des infrastructures. Il y a une bonne part des coûts résultant de cela. Mais mon interlocuteur établissait la situation à Edmonton de la façon suivante: D'une part, financement des infrastructures par les promoteurs, élimination de la concurrence, monopolisation de l'industrie de la construction. Seuls les gros entrepreneurs pouvaient encore une fois avoir les reins assez forts pour payer le coût des infrastructures. Cette monopolisation de l'industrie de la construction a amené une monopolisation du sol si bien que maintenant, autour d'Edmonton, il y a deux entrepreneurs qui possèdent tous les terrains vacants et qui font les prix, littéralement. Je ne crois pas que cette situation soit souhaitable. J'aurais espéré que les municipalités en viennent à réaliser les dangers de cette situation. Je ne lâcherai pas. J'ai l'intention de reprendre le dossier avec elles et si, à un moment donné, d'un commun accord avec le monde municipal, il n'était pas possible d'établir des règles du jeu, le gouvernement prendrait ses responsabilités, le ferait.

M. Cordeau: Est-ce que vous avez toujours l'intention de présenter un projet en ce sens en 1978?

M. Tardif: Ce n'est pas nécessaire, à ce moment-là, de présenter un projet de loi, puisque le ministère a, à cet égard, beaucoup d'autres outils, notamment l'approbation de règlements d'emprunts et d'autres choses semblables qui pourraient lui permettre d'agir.

Quant à la technique, elle m'apparaissait plutôt secondaire par rapport au fond du problème.

M. Cordeau: La question était pour clarifier ce qui avait été rapporté dans le journal Le Constructo.

M. Tardif: La technique, c'est l'objectif à atteindre...

M. Cordeau: C'est l'objectif.

M. Tardif: ... la technique voulue, la réglementation aux projets de loi.

M. Cordeau: Parfait.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de D'Arcy McGee.

M. Goldbloom: M. le Président, je voudrais encore une fois féliciter le ministre de cette prise de position. Il a compris ce que certaines autres personnes n'ont pas compris la nécessité de protéger la petite entreprise québécoise contre l'effet d'une mesure qui est commune aux autres provinces. Je pense avoir dit, au cours d'un débat précédent, peut-être l'an dernier, que chaque fois que j'allais à une conférence fédérale-provinciale, sur l'habitation notamment, les collègues des autres provinces soulignaient la différence et me disaient: Ne changez pas, ne changez pas le régime que vous avez, parce que nous subissons de mauvais effets du nôtre.

Je suis heureux que le ministre poursuive cette même ligne de pensée. J'aimerais lui poser une question qui découle indirectement de cette discussion. En parlant de la fiscalité municipale, nous avons, à plusieurs reprises, parlé de l'autonomie des municipalités, de l'autosuffisance que nous voudrions donner aux municipalités. Le régime des subventions statutaires per capita a été instauré dans ce but et a été élargi, d'abord, par le gouvernement précédent et maintenant, à deux reprises, par le gouvernement actuel; sauf que, quand on baisse le plancher pour le situer à 5000 âmes de population à raison de $6 et quelques cents par...

M. Tardif: 94 cents.

M. Goldbloom: $6.94; alors, disons $7.00.

M. Tardif: C'était $6.40, mais, avec l'indexation automatique...

M. Goldbloom: D'accord. Alors, rendu à $7.00 per capita, pour une municipalité de 5000 âmes, il y aura un montant, en chiffres ronds, de $35 000 par année.

Le ministre croit-il vraiment qu'une telle municipalité pourra devenir auto-suffisante avec $35 000 de plus par année?

M. Tardif: Je pense que...

M. Goldbloom: Si le ministre me permet... Il y a un corollaire, une question corollaire à celle-ci...

Le Président (M. Marcoux): Additionnelle.

M. Goldbloom: Additionnelle, si vous voulez, supplémentaire. Est-ce l'intention du ministre de suivre la politique déjà établie par rapport aux subventions statutaires per capita, c'est-à-dire d'informer les municipalités qu'à partir du moment où de telles subventions commenceront à être versées, il n'y en aura plus pour des projets précis?

M. Tardif: M. le Président, il est bien évident que poser la question comme l'a fait le député de D'Arcy McGee, c'est presque y répondre en même temps.

C'est qu'on ne saurait faire résider l'autonomie des municipalités dans cette seule forme de revenus statutaires. Il s'agit beaucoup plus d'une mesure additionnelle qui, s'ajoutant à des revenus autonomes accrus, à une assiette fiscale élargie, à l'évacuation en ce qui concerne, par exemple, une partie de l'impôt foncier scolaire par le gel cette année, d'une mesure qui, s'ajoutant à d'autres, vient assurer ces municipalités d'un revenu qu'elles pourront affecter à toutes fins municipales qu'elles jugeront opportunes, sans l'assortir de conditions quant à son utilisation.

Il est bien évident que ce n'est pas une mesure suffisante en soi.

Le deuxième élément: Est-ce que les municipalités sont bien au fait que ceci implique la disparition d'autres formes de subventions ponctuelles ou conditionnelles à l'intérieur de certains programmes? La réponse est oui, dans la mesure où les programmes PAIRA, PAISI, LIQUIDATION, PAIRE, PAREM. PACEM, énoncent clairement les conditions d'admissibilité.

Ces conditions d'admissibilité, dans le cas de PAIRA notamment, indiquent que ces programmes d'aide à l'implantation de réseaux d'aqueduc — parce que c'est ça la signification du sigle — ne s'appliquent qu'aux municipalités rurales régies par le Code municipal et qui, à 99,9%, ont moins de 5000 de population. Il y a bien une ou deux exceptions dont celle de Saint-Louis-de-Terrebonne, qui a presque 10 000 de population. C'est l'exception qui confirme la règle. Les municipalités savent pertinemment, au moment où les programmes sont annoncés, à quelle catégorie de municipalités ces programmes s'adressent.

Dans le cas du programme PAIRE, celui-ci est accessible, peu importe la taille des municipalités, y compris les communautés urbaines. C'est celui d'aide à la confection d'un rôle d'évaluation.

L'an dernier, M. le Président, nous avions établi, sur le plan des infrastructures notamment, le programme PAIRA pour les municipalités rurales, les municipalités de 10 000 âmes et plus qui recevaient un per capita de $6.40, qui a été indexé au cours du dernier budget à $6.94; elles recevaient donc automatiquement un chèque à toutes fins qu'elles jugeaient utiles. Il y avait, entre les deux, un vacuum entre les municipalités rurales d'une population de 3000 et moins ou à peu près et les municipalités admissibles au per capita. Ce vacuum de municipalités qui, parfois, avaient connu une croissance rapide, nous avons donc pensé le combler à l'aide du programme LIQUIDATION, dont le nom symbolique impliquait que nous voulions liquider un certain nombre de situations

difficiles sur le plan de l'éclatement qu'avaient connu ces villes. Ce programme avait été instauré pour elles. Je dois dire qu'en gros nous avons pu régler un certain nombre de cas et que, s'il s'avérait nécessaire pour ces villes qui, somme toute, et là, c'est important de le souligner, M. le Président, sont déjà dotées de réseaux d'aqueduc et d'égout, lorsqu'on parle de municipalités d'entre 5000 et 10 000 âmes à peu près, et où une croissance plus ou moins rapide exige parfois pas tellement un développement de leur propre réseau, mais bien posent des problèmes d'intermunicipalisation de réseaux et de raccordements... C'est une autre donnée, une autre dimension du problème sur lequel nous nous penchons. Il est bien évident que l'introduction ou le fait de mettre le plancher à 5000 âmes pour les subventions statutaires ne dispensent pas de se préoccuper des autres mesures visant à accroître l'autonomie des municipalités.

M. Goldbloom: M. le Président, il y a une autre facette que j'aimerais examiner avec le ministre — nous en avons parlé un peu cet après-midi, je pense — c'est l'endettement des municipalités.

Dans la revue du ministère, Municipalité 78, du mois de février, il y a des statistiques sur les obligations municipales qui indiquent qu'en 1976 les administrations municipales du Québec ont négocié un total de 532 émissions d'obligations pour une valeur totale de $748 147 000.

Il n'y a pas de tableau pour nous indiquer comment cela se compare aux années précédentes. Y a-t-il des chiffres déjà disponibles pour 1977? M. le Président, ce chiffre de $750 millions représente-t-il une diminution suffisante pour permettre au ministre de dire qu'il est satisfait que l'on ait réussi à rétablir le rythme de l'endettement des municipalités? (20 h 45)

M. Tardif: M. le Président, les chiffres dont je dispose m'indiquent que pour l'année 1976/77 le montant des obligations émises s'élevait à $743 millions; en 1977/78, il s'élevait à $1 187 000 000 et l'estimation pour l'année 1978/79 s'élève à $841 millions.

L'année 1977/78, avec ce sommet et ce nouvel affaissement en 1978/79, provient entre autres du financement de la dette olympique de la ville de Montréal de $214 millions ou $224 millions.

M. Goldbloom: Or, à part ce sommet, il n'y a vraiment pas de changement significatif dans le rythme des emprunts des municipalités? On émet des obligations à un rythme qui est à peu près constant si l'on tient compte de l'inflation, de l'augmentation des coûts des travaux et tout cela?

M. Tardif: Si l'on défalque les $224 millions — opération que je vais essayer de faire tout de suite — en effet, la situation progresse à peu près normalement si on fait la part de l'augmentation des coûts des infrastructures.

On me signale également une autre donnée importante qui ferait qu'il est peut-être imprudent de s'attarder au nombre d'obligations émises au cours d'une seule année, puisque le nombre d'obligations autorisées ou de règlements autorisés non vendus s'élève à $1 800 000. Bien souvent, il y a des délais entre le moment où les règlements d'emprunt ont été autorisés par le ministre et la commission municipale, puisque ce sont les deux qui doivent autoriser, et le moment où ces règlements sont effectivement vendus sur le marché, des délais pouvant s'échelonner entre 12 et 24 mois et même davantage.

M. Goldbloom: Le ministre pourrait-il répéter ce chiffre?

M. Tardif: De règlements d'emprunt autorisés non vendus: $1 800 000 000.

M. Goldbloom: Ce chiffre représente-t-il surtout des délais de procédure? Est-ce un montant qui finira par se vendre en majeure partie?

M. Tardif: Sur le $1 800 000 000, environ $7 millions à $8 millions sont pour la seule communauté urbaine de Montréal avec les infrastructures, le métro, les immobilisations diverses. Maintenant, étant donné que ce sont les municipalités qui ont la maîtrise d'oeuvre des travaux et qu'elles viennent chercher des autorisations tant chez le ministre qu'à la commission municipale et que parfois elles peuvent décider de retarder elles-mêmes la réalisation de ces projets, il nous est difficile d'apprécier à quel moment elles décideront d'aller sur le marché des obligations. Ce n'est pas une décision qui relève du ministère.

M. Goldbloom: Néanmoins, M. le Président, j'ai cru comprendre que le ministre exprimait au cours de la journée une certaine inquiétude quant à la masse financière représentée, quant au fardeau financier assumé par les municipalités. Est-ce une inquiétude générale ou en est-ce une qui porte sur les quelques cas qu'il a mentionnés où l'endettement semble dépasser les normes raisonnables?

M. Tardif: Je crois, M. le Président, qu'il ne faudrait pas exagérer. Si j'ai mentionné que, sur 1600 municipalités au Québec, 160 d'entre elles avaient à l'occasion d'un relevé effectué il y a quelques mois dépassé la cote de 15%, cela reste quand même 160 municipalités sur 1600, moins de 10% des municipalités. C'est donc dire que, dans 90% des cas, et bien souvent pour les plus populeuses et les mieux pourvues, le seuil d'endettement est encore à un niveau raisonnable. Le fait est qu'aucune des municipalités ou à peu près n'éprouve de difficultés à écouler ses obligations sur le marché. Il reste que ces cas d'endettement doivent faire l'objet d'une attention et la Commission municipale s'arrête, aussi bien que le ministère, sur ces cas particuliers.

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre a mentionné plus tôt dans la journée les trois critères qui peuvent être utilisés pour évaluer le degré d'endettement d'une municipalité. Un de

ces critères, c'est le rapport entre l'endettement et l'évaluation totale. Cela me ramène à une question que j'ai posée dans un autre contexte, c'est-à-dire que, la réforme de l'évaluation foncière n'étant pas encore réalisée, il y a sûrement des municipalités dont le rôle n'est pas à la valeur réelle. Or, sur papier, la valeur totale de la municipalité, valeur contre laquelle la municipalité peut emprunter, valeur contre laquelle il faut calculer l'endettement n'est pas réaliste. Dans l'évaluation de l'endettement, a-t-on tenu compte de cela?

M. Tardif: La réponse est oui, M. le Président. De telles études se font généralement à partir des rôles d'évaluation scolaire qui, eux, sont normalises.

M. Goldbloom: D'une certaine façon.

M. Tardif: Oui, enfin de la façon prévue par la loi.

M. Goldbloom: Disons d'une façon controversée.

M. Tardif: Oui, si l'on veut, mais, enfin, qui est mieux de ne tenir compte d'aucun facteur de correction du tout, puisque c'est tout à fait juste de dire qu'un taux d'endettement qui serait basé sur une valeur foncière évaluée à 10%, à 20%, à 30% de la valeur et une autre à 80% ne permettraient pas une base comparée, enfin comparative.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, ce matin...

M. Tardif: Juste une remarque additionnelle, si on me permet aussi. L'amendement que nous avons apporté à la Loi des cités et villes en obligeant les municipalités à nous fournir un programme triennal d'immobilisations nous aide également dans ce sens-là à avoir une meilleure idée et à questionner les municipalités face à ces règlements d'emprunt autorisés non vendus. Nous nous efforçons, chaque fois qu'on nous présente des règlements d'emprunt, avant d'en autoriser de nouveaux, d'essayer avec elles de liquider les anciens à la lumière, évidemment, de leur taux d'endettement. Je m'excuse.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: Ce matin, il a été question de l'endettement des municipalités avec $3 485 000 000. Je vois depuis tantôt que vous avez une bible, est-ce que vous avez aussi l'endettement des municipalités à la même date, pour 1976?

M. Tardif: M. le Président, à la suite de la question qui a été posée ce matin par le député de Saint-Hyacinthe, on m'informe que, jeudi matin, nous devrions pouvoir lui donner les chiffres exacts de l'endettement au 28 février 1978.

M. Cordeau: Est-ce que vous pouvez me dire, par la même occasion, pour quelle date était le chiffre de $3 485 000 000?

M. Tardif: C'était le 31 décembre 1975, mais nous avons reçu votre document et nous nous arrangerons pour que les données qu'on vous fournira, quant aux chiffres pour les années 1976/77, soient comparables à celles que vous avez.

M. Cordeau: S'il vous plaît!

M. Goldbloom: M. le Président, quant à celui qui vous parle, je serais prêt à changer de sujet et à aborder celui qui est l'élément 1 du programme 1, c'est-à-dire la restructuration municipale. Je ne veux toutefois pas priver mes collègues de l'occasion de poser d'autres questions.

M. Cordeau: Si d'autres questions nous viennent à l'esprit, même si cela concerne le programme 3 et qu'on est rendu au programme 1, serait-il possible de les poser? Je serais prêt à procéder, à ce moment-là.

M. Tardif: Tout à fait.

Restructuration municipale

Le Président (M. Marcoux): Élément 1 du programme 1; Restructuration municipale.

M. Goldbloom: J'ai d'abord une question technique, M. le Président. Je constate que, selon les chiffres qui nous sont fournis, il y a une diminution du total des hommes-année de 83 à 69 et pourtant il y a une augmentation des traitements de presque $300 000.

M. Tardif: M. le Président, deux raisons expliquent ce phénomène. La première, ce sont évidemment les augmentations de salaires prévues dans les conventions collectives de travail, en raison du vieillissement du système, du fait qu'on gravit les échelons. Quant à la diminution des effectifs comme telle, elle n'est pas aussi réelle que celle qui apparaît dans ce document, puisque tous les postes d'occasionnels ont été regroupés dans un autre programme et que l'on trouvera, je crois, au programme 4.

M. Goldbloom: M. le Président, je me permets un commentaire que je ne voudrais pas désobligeant: ce genre de question pourrait être évité, s'il y avait un peu plus d'explications dans le cahier. C'est peut-être beaucoup demander à chaque ministère de fournir de telles explications, de façon écrite, dans un cahier, mais quand même, je me demande s'il n'y a pas moyen de fournir un peu plus de détails. Il y a toujours une explication et elle est presque toujours bonne. On pourrait parler de choses plus fondamentales, s'il y avait un peu plus de renseignements.

M. le Président, pour aller dans le vif du sujet, y a-t-il eu des regroupements cette année, des

annexions de territoires, des choses comme cela? Si oui, combien? (21 heures)

M. Tardif: M. le Président, il y a eu en effet quelques fusions de municipalités en 1977/78, mais très peu: En fait, j'en dénombre huit, grosso modo, si cela intéresse la commission: Sainte-Hélène-de-Bagot, paroisse et village; Shipshaw et l'ancien village de Saint-Jean-Vianney; Sainte-Claire paroisse et Sainte-Claire municipalité et la municipalité de Louis-Joliette; les municipalités de Fiedmont et Barraute, municipalités sans désignation avec Barville; Pointe-du-Lac et la municipalité de La Visitation de la Pointe-du-Lac, municipalité sans désignation également; de la même manière je ne sais pas si cela s'est produit avant le 31 mars dans le cas de Sainte-Marie village et paroisse, ainsi que dans le cas de Brassard et Notre-Dame-du-Sacré-Coeur. C'était pendant devant le Conseil des ministres, de sorte que je ne sais pas à quel moment précis ces fusions ont eu lieu, soit avant ou après le 31 mars.

M. Goldbloom: Le ministre a-t-il décrété des unités de regroupement au cours de la dernière année?

M. Tardif: Aucune, M. le Président, de mémoire.

M. Goldbloom: Y a-t-il des unités de regroupement, décrétées dans le passé, qui ont été modifiées?

M. Tardif: II y a beaucoup de demandes pour en avoir, notamment dans l'Outaouais, M. le Président, mais il n'y en a pas eu encore.

M. Goldbloom: Puisque le ministre a abordé le sujet, qu'est-ce qui arrive? Quelles sont les intentions du ministre dans le célèbre cas de Buckingham?

M. Tardif: M. le Président, évidemment, je me suis avancé en quelque sorte en parlant de l'Outaouais. Il s'agit évidemment du cas de Buckingham, lequel cas a été soumis au ministère il y a déjà quelques mois. Nous avons reçu des requêtes de divers groupes de citoyens, ceux des anciennes municipalités d'Angers et de Masson, ceux de Notre-Dame-de-la-Salette, ceux de quelques-unes des autres municipalités anciennement autonomes qui ont été fusionnées à la ville de Buckingham par la loi régissant les municipalités du Haut-Saguenay et de l'Outaouais.

M. le Président, ces requêtes de citoyens visaient, dans le cas de Buckingham, à prier le ministre des Affaires municipales à décréter la tenue d'un référendum sur la question de ce qu'on a appelé le dégroupement.

J'ai expliqué à tous les groupes concernés que la loi ne permettait pas au ministre des Affaires municipales de décréter un tel dégroupement ou un tel référendum, que le conseil municipal avait, de par la Loi des cités et villes, tous les pouvoirs voulus pour décréter un tel référendum.

Le conseil municipal de Buckingham, il y a de cela plusieurs mois, a passé une première fois une résolution en ce sens, mais par la suite en a passé une autre pour s'opposer à la tenue d'un tel référendum.

Des groupes de citoyens sont venus me voir et ont, à nouveau, insisté auprès de moi. Je les ai à nouveau renvoyés à leur conseil en disant que celui-ci était, dans le contexte actuel, de par les lois de droit municipal, le seul habilité à décréter la tenue d'un tel référendum. Les citoyens ont décidé, après des études possibles de réaménagement du territoire, de se cotiser entre eux, parce que le conseil refusait de tenir le référendum en invoquant une question de coûts. Les citoyens se sont cotisés, ont ramassé l'argent requis et je suis informé à l'instant même qu'ils ont obtenu, hier soir, du conseil de ville de Buckingham que ce dernier adopte une résolution décrétant la tenue d'un référendum qui serait payé par ces cotisations des citoyens. Il y aura donc tenue d'un référendum. À la lumière de cela, nous verrons quelle sorte de dégroupement ou de nouveau découpage du territoire s'imposera. Je pense qu'il n'est pas question de retourner aux huit municipalités qui ont été regroupées dans la ville de Buckingham, mais il est bien évident que des municipalités sises tout à fait au nord de cette ville qui fait, de mémoire, environ 35 milles de long, quand on pense à Notre-Dame-de-la-Salette tout à fait en haut au nord et à des municipalités sises sur le bord de l'Outaouais, comme Masson et Angers, il est tout à fait concevable d'avoir des unités de regroupement différentes. Selon le résultat du référendum, nous examinerons la situation.

M. Goldbloom: M. le Président, je ne veux pas être désagréable à l'endroit du ministre, mais il m'a donné une réponse, il y a quelques instants — le problème n'est pas majeur — et il m'a dit qu'il n'avait pas décrété de modifications à des unités de regroupement. Or, je viens d'en trouver...

M. Tardif: Je l'ai dit à ma connaissance, de mémoire.

M. Goldbloom: ... une dans Municipalité 1978... M. Tardif: II y en a une.

M. Goldbloom: ... du mois d'avril: Rivière-du-Loup, paroisse de Saint-Patrice et...

M. Tardif: Cacouna.

M. Goldbloom: ... Cacouna, oui, les deux Cacouna qui ont été ajoutés. Ce n'est pas grave, M. le Président.

M. Tardif: Je m'en excuse auprès du député.

M. Goldbloom: Ce n'est pas plus grave que cela, M. le Président.

Il y a eu certains projets de regroupement qui ont été mentionnés l'an dernier par le ministre. Notamment, la ville de Québec était intéressée à

absorber Lac-Saint-Charles et Saint-Émile. Y a-t-il des développements dans ces deux dossiers?

M. Tardif: On m'informe, M. le Président, qu'effectivement une étude technique avait été commandée au ministère par suite de ce que nous percevions comme certains désirs d'une ou des municipalités concernées d'effectuer et de voir à effectuer ce regroupement.

Or, on m'informe qu'il n'y a eu aucun développement de ce côté. Comme chacun le sait, il y a eu des élections à Québec. Peut-être qu'il y a eu d'autres priorités. Est-ce que le dossier sera repris à un moment donné? Je ne saurais le dire à ce moment-ci.

M. Goldbloom: Le nombre de projets de regroupement — ce sont, maintenant, à ma connaissance, des projets volontaires de regroupement — accuse-t-il une baisse ou s'il y a encore plusieurs dossiers qui sont entre les mains de la direction générale?

M. Tardif: À l'oeil, M. le Président, je dirais qu'il y a une baisse. Quant au nombre de cas à l'étude, j'ai déjà signifié publiquement que nous n'avions pas l'intention d'imposer des regroupements. Peut-être cela a-t-il eu cet effet à la baisse. C'est ce que je constate dans les dossiers qui sont à l'étude au ministère.

M. Goldbloom: Y a-t-il un travail qui se fait présentement, de la part des fonctionnaires, pour préparer des ententes, des protocoles d'entente entre municipalités? Y a-t-il d'autres dossiers qui requièrent présentement l'aide technique du ministère?

M. Tardif: La situation, en ce qui concerne la Direction générale des structures municipales, a été, jusqu'à maintenant, de procéder à des analyses ou à des études sur demande soit de municipalités, soit de divers groupements, et il n'y a pas eu systématiquement d'entreprises, au ministère, des études motu proprio de fonctionnaires voulant, ou croyant regrouper des municipalités. Cela a été beaucoup plus, encore une fois, d'attendre, d'agir à l'initiative des municipalités.

M. Verreault: M. le Président, il y a environ un an, la municipalité d'Adamsville avait souligné l'intention de se désannexer de la municipalité de Bromont. Est-ce qu'il y a eu des développements ou si la demande a été rejetée?

M. Tardif: Aucun dossier, ici en tout cas, m'apprend-on, n'est à l'ordre du jour. Je pourrais me renseigner de façon plus précise sur ce cas et essayer de répondre au député de Shefford au cours des travaux de cette commission.

Il serait peut-être bon de souligner qu'au cours de ces derniers mois, si nous n'avons pas étudié les cas de fusion autrement qu'en nous penchant sur ces cas à la suite des requêtes des municipalités, nous avons mis l'accent sur l'étude des structures supramunicipales que constituent les communautés, et notamment la Communauté urbaine de Québec, et ce, sur les instances du député de D'Arcy McGee qui, lorsque, l'an dernier, j'apportais des amendements à la loi de la CUQ, me posait la question: Quand allez-vous repenser les structures de cette communauté?

Le fait est qu'un projet de modification aux structures de la Communauté urbaine de Québec a été adopté au Conseil des ministres, que j'ai rencontré toutes les municipalités membres de la Communauté urbaine de Québec, que le projet de loi est rédigé, qu'il est présentement au comité de législation et devrait être déposé en Chambre incessamment.

M. Goldbloom: C'est une nouvelle intéressante, M. le Président.

J'aimerais parler un peu des communautés, mais, avant de le faire, j'ai un cas d'espèce sur lequel j'aimerais avoir des renseignements. Quel est l'état actuel du dossier Lévis-Lauzon-Saint-David-de-l'Auberivière?

M. Tardif: Statu quo, M. le Président, dans la mesure où Lévis n'est pas du tout intéressée à partager sa taxe de vente avec la municipalité de Lauzon.

M. Goldbloom: Bon, M. le Président. L'an dernier...

M. Tardif: On pourra peut-être reprendre le dossier après la réforme de la fiscalité.

M. Goldbloom: Je ne fais pas de commentaire. J'attendrai tout simplement.

L'an dernier, le ministre nous a permis d'examiner avec lui une hypothèse avancée dans le programme électoral du Parti québécois pour 1976, c'est-à-dire celle de la création de municipalités régionales, je pense que c'est le terme qui a été employé.

Les réflexions du ministre et du gouvernement ont-elles accusé un certain progrès? Si oui, où seront créées les premières municipalités régionales au Québec?

M. Tardif: M. le Président, je regrette de devoir décevoir le député de D'Arcy McGee, mais je ne pourrais pas lui annoncer en primeur la création d'une communauté régionale dans l'un quelconque des coins du Québec. (21 h 15)

Je dois dire néanmoins que, puisque, ce matin, nous avons parlé brièvement du dossier sur la décentralisation, cette question de la création d'organismes supramunicipaux dans les endroits autres que les communautés urbaines, celle de Montréal et celle de Québec, une communauté régionale, celle de l'Outaouais, qu'il existe le Conseil métropolitain du Haut-Saguenay, et je dois peut-être faire ici, également, une parenthèse pour dire que nous avons, dans le cas de la rive sud de Montréal, travaillé sur une hypothèse de création d'un organisme supramunicipal à vocation polyvalente, notamment en matière d'adduction d'eau,

de fourniture d'eau, d'égout et d'aménagement, organisme qui pourrait s'apparenter, quant aux territoires couverts, aux sept ou huit municipalités qui sont déjà desservies par une commission de transport.

Hormis ces cinq cas d'organismes supramunicipaux, quatre existants et un cinquième en gestation, le comité sur la décentralisation s'est penché sur cette question, à partir non pas de la création d'organisme de novo, mais bien de structures municipales existantes, à savoir les conseils de comté, structures municipales qui datent, d'accord, et dont il faudra peut-être revoir les frontières qui ont été dessinées à une autre époque, mais qui nous apparaissent être ou devoir être la structure porteuse d'une éventuelle décentralisation de compétences gouvernementales, d'une part, et, d'autre part, de regroupements de certaines fonctions qui seraient ou sont présentement accomplies localement. C'est beaucoup plus dans une approche plus globale que de songer à la création, dans un endroit du territoire donné, d'une communauté régionale, c'est donc dans une approche beaucoup plus globale que nous avons abordé cette question. Le document sur la décentralisation, qui est un document de travail, a posé non seulement la question de la décentralisation de fonctions gouvernementales, mais aussi de structures supramunicipales, appelons-les comme ça.

M. Goldbloom: Ce n'est pas la première fois que le ministre parle des conseils de comté comme l'éventuelle structure administrative porteuse pour l'élargissement de la chose municipale, en reconnaissance de la nécessité d'une collaboration structurée entre des municipalités sur un territoire donné.

J'aimerais lui demander, surtout en ce qui concerne la redistribution de la carte des conseils de comté, s'il a carrément obtenu le consentement de l'Union des conseils de comté à la refonte de la carte du Québec à cet égard.

M. Tardif: Non, M. le Président, on n'en est pas là. On en est présentement à examiner quelle est cette carte des conseils de comté municipaux, laquelle, comme chacun le sait, est différente de celle des comtés électoraux, des districts électoraux du Québec, laquelle est aussi différente et recoupe les régions administrations du gouvernement du Québec; elle diffère également de la carte des commissions scolaires locales, régionales ou intégrées, et on pourrait ainsi faire le tour de tous les ministères et se rendre compte que chacun s'est découpé le territoire en autant de morceaux que ça faisait son affaire.

C'est donc un vaste travail, et serait bien malin celui qui croirait pouvoir trouver ou avoir trouvé le découpage idoine. Il reste qu'un premier effort a été fait de ce côté-là, et nonobstant les décisions ultimes et les négociations qui pourraient avoir lieu en temps et lieu avec l'Union des conseils de comté, il existe dans notre droit municipal depuis 1855 une structure supramunicipale qui s'appelle le conseil de comté. Cet organisme, qui a été considéré par certains de nos prédécesseurs com- me étant moribond, est revenu à la surface il y a quelques années et s'est vu en mesure d'occuper une place de plus en plus grande. Je pense à la Loi sur l'évaluation foncière, qui leur confie un rôle que les conseils de comté n'avaient pas auparavant; je pense à la Loi sur les mutations immobilières, qui permet aux conseils de comté de substituer aux municipalités pour la perception de leurs droits; je pense aux amendements à la loi 55, qui permet aux conseils de comté d'établir des systèmes de gestion des déchets solides; je pense aux normes minimales d'urbanisme qui ont été adoptées aussi en vertu de la loi 55, loi qui permet aux conseils de comté d'adopter ces normes en lieu et place des municipalités rurales.

Bref, les conseils de comté jouent de plus en plus — ou tentent de jouer de plus en plus — un rôle, et il m'apparaît que, en tout cas, le gouvernement, au lieu de vouloir créer de toutes pièces une structure nouvelle dans le paysage québécois, songe à utiliser cette structure et à élaborer avec ces organismes l'avenir en quelque sorte de compétences qui pourraient être confiées à des organismes supramunicipaux.

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre sait sûrement que, quand il parle de l'élargissement du rôle des conseils de comté, quand il parle de confier aux conseils de comté des responsabilités au lieu de créer de nouvelles structures administratives, en ce qui me concerne, il prêche à un converti. Je suis tout à fait d'accord avec lui.

Il y a deux ombres au tableau. J'en ai mentionné la première, c'est-à-dire le découpage. Il est vrai qu'il existe depuis 1855, mais il est également vrai que les conseils de comté, depuis que je les connais, résistent vigoureusement à toute tentative de modification de leurs frontières. C'est pour cela que j'ai posé la question tout à l'heure: Le ministre a-t-il obtenu ce consentement? Le ministre m'a répondu qu'il n'est pas rendu à cette étape.

L'autre problème, qui a été majeur dans le passé, c'est que, pour faire administrer un territoire donné par un conseil de comté, il faut, dans la majorité des cas, tenir compte de la présence sur ce même territoire d'au moins une municipalité régie par la Loi des cités et villes. Les conseils de comté ont souvent exprimé la volonté d'accueillir les cités et villes, mais les cités et villes n'ont pas répondu à cette invitation accueillante, sauf dans de rares cas où des villes ont voulu siéger aux conseils de comté, parce qu'étant relativement isolées et étant à caractère disons presque semi-rural. Mais c'est une minorité.

Si ma mémoire est fidèle, il y a 32 agglomérations au Québec, en dehors des trois communautés, où il y a chevauchement d'un territoire urbain, d'une municipalité régie par la Loi des cités et villes sur le territoire d'au moins un conseil de comté. Dans plusieurs cas, une ville chevauche sur deux conseils de comté actuels. Si ma mémoire est fidèle, il y a un cas où il y a trois conseils de comté qui sont touchés par une seule ville; je me demande si ce n'est pas Saint-Hyacinthe. De toute façon, ce problème est de taille, à moins que le

ministre ne puisse me dire ce soir que ses consultations ont aplani les difficultés et que les villes seront, dès demain, dans les bras des conseils de comté.

M. Tardif: Non, M. le Président, je ne peux donner au député de D'Arcy McGee cette assurance. Le fait est que c'est vrai que dès qu'une municipalité rurale cesse d'être régie par le Code municipal et devient une municipalité relevant des cités et villes, elle sort automatiquement du conseil de comté. Si bien que les conseils de comté se retrouvent toujours avec les municipalités qui n'ont pas acquis de développement ou un développement qui leur permettrait de passer aux cités et villes. Ce problème de l'intégration de l'urbain au rural, ou vice versa, n'est pas du tout réglé. Il pose un problème de représentation et de poids démographiques. C'est bien évident que je n'irai même pas jusqu'à dire, comme le député de D'Arcy McGee, que le conseils de comté sont prêts à accueillir les cités et villes comme telles puisqu'un certain nombre de conseils de comté ont évidemment peur d'être écrasés sous le poids démographique des villes et que, par ailleurs, ils vont dire que si les villes ont la population, les conseils de comté, eux, ont le territoire. Alors, cette querelle du pot de fer et du pot de terre, pour rappeler LaFontaine, est loin d'être réglée. Je pense néanmoins que c'est peut-être par le biais de nouvelles compétences gouvernementales qui pourraient être confiées à ces organismes que sont les conseils de comté que nous pourrions envisager, tout en leur confiant une compétence accrue, un rapprochement entre les deux. Dans le document sur la décentralisation, diverses hypothèses étaient soulevées pour résoudre ce problème. Je pense qu'il est illusoire de vouloir concocter une solution magique en vase clos et que c'est en s'assoyant avec le monde rural aussi bien que le monde urbain que nous pourrons tenter d'en arriver à des éléments de solution à ce problème.

M. Goldbloom: Le ministre est sûrement conscient de l'ampleur du problème. S'il s'agissait tout simplement de trouver un mécanisme de coordination entre des municipalités rurales et des cités et villes, le problème ne serait pas insurmontable, à mon sens. C'est justement à cause de l'envergure des propositions du gouvernement, contenues dans le document en question, le document sur la décentralisation, et contenues dans le programme électoral du parti qui constitue actuellement le gouvernement... Il y a toute une perspective d'élargissement des responsabilités municipales pour englober le domaine scolaire, le domaine de la santé, du bien-être. Ces hypothèses ont été avancées et l'on a même parlé d'une structure assez importante où un nombre de 25 ou de 50 personnes seraient élues, ou en partie élues et en partie nommées, et ainsi de suite. Cela est beaucoup plus qu'une refonte des structures des conseils de comté comme nous les connaissons et implique absolument, inévitablement, la participa- tion active de cités et de villes. Autrement, il n'y aura pas moyen d'administrer tout cela. (21 h 30)

J'aimerais savoir si la pensée du ministre a évolué devant toute cette perspective complexe. Le gouvernement, étant un parti politique, ayant pris des positions, mais ayant maintenant la responsabilité du pouvoir, se trouvant donc face à des problèmes d'ordre pratique, maintient-il ses visées? La politique du Parti québécois devenu gouvernement du Québec est-elle toujours la même?

M. Tardif: M. le Président, la politique du gouvernement en ce qui concerne la décentralisation est, en effet, toujours la même. Il y a eu une décision du Conseil des ministres, à l'occasion d'une réunion spéciale tenue au mois de mars dernier à Montréal, de considérer le document de travail, précisément comme son nom l'indique, un document contenant diverses hypothèses, et de s'aligner, dans un premier temps, sur des fonctions qui, tout en étant moins contentieuses, parce que non remplies par personne, je pense notamment à l'aménagement du territoire où on ne va pas sabrer les fonctions des municipalités, lorsqu'on parle d'aménagement, ni celles des conseils de comté, ni celles du gouvernement du Québec, personne n'en fait, donc, en commençant par ce genre de fonctions d'une part et, pour le reste, en nous assoyant à une table avec les gens de l'Union des municipalités, l'Union des conseils de comté, afin de tenter d'en arriver à des formules de fonctionnement qui tiennent compte de cette réalité.

Que cela nous plaise ou non, diverses instances oeuvrent dans le territoire québécois, comme si elles étaient sans aucune relation avec le reste du monde, le monde scolaire a son réseau, ses institutions, ses équipements qui sont défrayés et payés par les mêmes contribuables qui ne peuvent pas les utiliser, le réseau des affaires sociales, c'est une autre histoire, le réseau des affaires municipales, c'en est une autre également. Il nous semble qu'il est important d'avoir un minimum de concertation.

Le résultat net de cette décision du Conseil des ministres ne serait que d'obtenir de tous ces intervenants qu'ils consentent à s'asseoir à une même table et à discuter des problèmes en commun, que ce serait déjà un pas dans la bonne direction. Il n'est pas question de plaquer bêtement des structures à un milieu qui n'est pas prêt à les recevoir, il s'agit de travailler ensemble à trouver une structure porteuse qui sera la plus près possible des clientèles desservies. Je pense que c'est tout ce que je puis dire au député de D'Arcy McGee. Je veux bien m'employer à réaliser cette concertation avec le monde municipal, à tout le moins.

M. Goldbloom: M. le Président, il y a un paradoxe majeur dans ce dossier. J'aimerais amener le ministre à l'éclaircir pour nous. Je retourne

en arriére, à la campagne électorale de 1976. Le Parti québécois disait, d'une façon très simple: Nous voulons abolir la taxe foncière scolaire, nous voulons ouvrir ce champ aux municipalités.

À cause de cela, maintenant que le Parti québécois est devenu le gouvernement du Québec, il y a eu, on le sait, des réactions de la part du milieu scolaire. Des inquiétudes ont été exprimées, le ministre de l'Éducation, collègue solidaire du ministre des Affaires municipales, a rassuré les commissions scolaires en leur disant: Vous ne disparaîtrez pas.

Pourtant, l'an dernier, le ministre des Affaires municipales — je crois que c'était lui, c'était le gouvernement de toute façon — a dit: Oui, nous allons transférer l'impôt foncier du réseau scolaire vers le réseau municipal, mais nous donnerons aux municipalités une responsabilité dans le domaine scolaire, ce qui n'avait pas été compris pendant la période électorale où l'on parlait tout simplement...

M. Tardif: Le gouvernement n'a jamais dit cela, M. le député.

M. Goldbloom: Je crois...

M. Tardif: Si vous me le permettez, le ministre des Affaires municipales a, à l'occasion d'une entrevue avec un journaliste du journal Le Soleil à Québec qui lui posait la question, répondu: Quand le gouvernement allait-il ou non transférer l'impôt foncier scolaire aux municipalités? Le ministre des Affaires municipales s'est permis, à l'endroit de ce journaliste, une question, qui était la suivante: Pourquoi est-ce que le gouvernement, au même moment où il se pencherait sur cette question du transfert du champ de l'impôt foncier ne se pencherait-il pas également sur le transfert aux municipalités de certaines compétences en matière scolaire, ou, à tout le moins, sur les équipements?

C'était une question que se posait et que se pose toujours, d'ailleurs, le ministre des Affaires municipales.

M. Goldbloom: Je remercie le ministre de cette explication qui donne une allure différente de ce que nous avions compris à l'époque. Or, nous constatons que le gouvernement s'apprête à transférer l'impôt foncier aux municipalités, sans pour autant abolir les commissions scolaires. Le ministre a précisé, avec raison dans l'ensemble, que le taux normalisé ne représente pas vraiment une autonomie pour les commissions scolaires. Ces commissions perçoivent le montant au nom du gouvernement et s'en servent pour l'administration de la chose scolaire.

Pourtant, il y a toujours cette question très vaste qui se pose: Pouvons-nous envisager et créer une structure qui ait une responsabilité plus large que celle de la municipalité d'aujourd'hui, responsabilité qui pourrait englober la chose scolaire?

C'est moins paradoxal depuis la précision que vient de fournir le ministre, mais il me semble que, si le gouvernement a rassuré tout récemment les com- missions scolaires, il y a une modification qu'il faudra apporter quelque part à cette visée, à cette notion de créer une structure qui soit plus vaste et qui ait une responsabilité plus grande pour l'administration de la chose locale.

M. Tardif: M. le Président, il n'y a en tout cas pas de contradiction. Je pense avoir répondu clairement au député de D'Arcy McGee. Le ministre de l'Éducation a déclaré que les commissions scolaires allaient continuer d'exister. La décision du gouvernement là-dessus est ferme.

Je voudrais cependant lui souligner que ce n'est pas incompatible, ni contradictoire d'une part, de dire que les commissions scolaires vont continuer d'exister, ainsi qu'il l'a d'ailleurs souligné lui-même, et de transférer le champ d'impôt foncier normalisé à tout le moins aux municipalités.

D'autre part, je vous ferai également remarquer qu'il existe sur le territoire de l'île de Montréal le Conseil scolaire, qui est un organisme supra-commission scolaire, qui remplit un certain nombre de fonctions également et qu'il est tout à fait concevable d'imaginer que, si ce n'étaient pas des commissions scolaires, de tels organismes pourraient être polyvalents. Là, on est dans la pure conjoncture, dans de pures hypothèses. Ce que je pense qui est important, c'est finalement d'éviter peut-être un certain éparpillement, un certain émiettement. Les hypothèses contenues dans le document de travail produit par les fonctionnaires contenaient peut-être un hypothèse maximaliste, j'en conviens.

Je pense que, ce travail ou cet exercice ayant été fait, nous avons peut-être une certaine perspective, une certaine idée de l'ampleur des problèmes que pourrait soulever l'application d'une telle hypothèse ou de telles hypothèses et que, maintenant, il nous appartient de nous asseoir avec le gens du milieu et d'essayer de trouver une solution qui ne soit pas uniquement faite, enfin qui ne soit pas même du tout faite in abstracto, en laboratoire, par des techniciens.

M. Goldbloom: Le ministre n'a pas l'intention de régler tous les problèmes de la Communauté urbaine de Montréal en la remplaçant par un conseil scolaire de l'île élargi avec de nouveaux pouvoirs?

M. Tardif: Absolument pas, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Saint-Hyacinthe.

M. Cordeau: M. le Président, tantôt, il a été question de structures paramunicipales. Est-ce que, pour la région de Trois-Rivières, il est question aussi d'une telle structure?

M. Tardif: La réponse est non, dans l'immédiat, M. le Président. Même si nous recevons régulièrement les doléances du maire de Trois-Rivières quant à l'étalement urbain dans les villes avoisi-nantes, tant de la rive nord que de la rive sud du

fleuve, non, ce n'est pas pour l'instant dans les dossiers du ministère.

M. Goldbloom: Notre collègue de Saint-Hyacinthe se rappelle sûrement que l'actuel député de Johnson était autrefois député de Champlain et est toujours très vigilant en ce qui concerne les intérêts de cette région.

M. Cordeau: Et du Cap. Je crois qu'il y a des intérêts aussi. Je suis prêt à adopter l'élément 1, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Élément 1, adopté.

M. Goldbloom: Une dernière question, M. le Président. Le ministre a-t-il des nouvelles sur les dossiers Beauport et Charlesbourg? S'il veut tout simplement me répondre non, j'accepterai la réponse.

M. Tardif: La réponse est non. En effet, M. le Président, j'ai soumis un document au Conseil du trésor et il n'est pas revenu.

M. Goldbloom: Espérons qu'il revienne avec une approbation.

Le Président (M. Marcoux): L'élément 1 du programme 1, adopté. L'élément 2.

Urbanisme et aménagement du territoire

M. Cordeau: À l'élément 2, j'aurais une question. Concernant les transferts, j'ai constaté qu'il y avait une augmentation sensible à cet article de $775 000.

Peut-on en connaître la raison?

M. Tardif: L'augmentation n'est pas à l'élément 2 comme tel, mais bien à l'élément 1 et correspond aux nouveaux calculs de subventions pour l'aide aux regroupements.

Je crois avoir donné l'an dernier, à l'occasion du budget, des explications concernant les formules de financement des regroupements. On sait que la loi favorisant le regroupement des municipalités prévoit une subvention de $3 par année pendant cinq ans et que, traditionnellement, le ministère des Affaires municipales donnait un coup de pouce à la conclusion d'ententes de fusion ou d'annexion de ces municipalités en doublant presque le montant des subventions aux regroupements. Je dis "doublant presque"; cela dépendait des régions, des endroits, des circonstances, enfin d'un paquet de facteurs. (21 h 45)

J'ai donc tenté d'établir une formule mathématique qui puisse me permettre d'utiliser ce montant additionnel en tenant compte de la taille des municipalités regroupées, des anciennes et de la nouvelle résultant de la fusion. C'est donc dire que le montant additionnel a été établi de la façon suivante: la population totale des villes fusionnées, moins la population de la ville la plus popu- leuse, sur la population de cette même ville plus populeuse et ceci nous donne un ratio. Si ce ratio est égal ou supérieur à un, le taux additionnel de la subvention est de $9 la première année, de $6 la deuxième et de $3 la troisième; si le ratio est inférieur à un, par exemple, si le ratio est de .5, donc un demi pour cent, la subvention serait la moitié de cela, $4.50, $3 et $1.50 et ce, en sus des $3 par année pendant cinq ans. Si bien que le résultat net d'une opération qui peut sembler complexe a pour effet de ne pas accorder de subvention ou à peu près rien à une ville comme Montréal qui annexerait le village de Saraguay, par exemple — en fait, cela est déjà fait, mais prenons-en un autre tout petit — cela ne paraît vraiment pas dans l'administration d'une ville comme Montréal, alors que pour une ville comme Lévis, Lauzon ou Saint-David, on changerait d'ordre de grandeur. La fusion de deux villes de 5000 âmes chacune ou de trois villes de 5000 âmes chacune pour n'en faire qu'une seule de 15 000 âmes suppose la mise en place d'un équipement, d'un support administratif à peu près inexistant dans les trois villes. Donc, c'est selon la taille d'origine et d'arrivée des villes fusionnées que cette formule a été établie.

Ce montant additionnel qui apparaissait avant dans un autre poste budgétaire est tout simplement là maintenant.

M. Cordeau: Est-ce que cette augmentation de subvention, d'après ce nouveau barème, s'adresse aux municipalités qui ont été fusionnées il y a deux ans?

M. Tardif: Non, cela n'a pas d'effet rétroactif.

M. Cordeau: C'est pour les nouvelles. Ce n'est pas rétroactif. Je pensais à Saint-Hyacinthe.

M. Tardif: À Saint-Hyacinthe, les gens ont été gâtés là-dedans. Il faudrait que je fasse les calculs...

M. Cordeau: C'est parce qu'on avait reçu beaucoup de promesses, M. le ministre.

M. Tardif: Écoutez! Connaissant la générosité de l'ex-ministre des Affaires municipales, je suis convaincu que cette...

M. Cordeau: II n'a pas eu le temps de remplir ses promesses!

M. Tardif: Je n'ai pas le montant exact ici. M. Cordeau: Les élections sont arrivées.

M. Tardif: On m'informe que, lorsque... Cette formule que je vous énonce ici, j'en avais parlé au dernier budget; on m'informe que, dans les dossiers de fusion qui étaient à l'étude...

M. Cordeau: D'accord, ce n'est pas nouveau.

M. Tardif:... au mois de novembre 1976, cela a déjà été appliqué.

M. Cordeau: D'accord.

M. Goldbloom: M. le Président, en consultant le journal des Débats, je constate que demain, ce sera le premier anniversaire d'une déclaration faite par le ministre...

M. Tardif: Peut-on connaître cette déclaration?

M. Goldbloom: ... et je la cite. Elle n'est pas très compromettante, sauf qu'une année s'est écoulée et j'aimerais savoir si nous avons fait des progrès.

Je cite le ministre: "Ma préoccupation est une loi-cadre sur l'urbanisme".

M. Tardif: Ah oui! Il y a un avantage que j'ai sur le député de D'Arcy McGee, ex-ministre des Affaires municipales, et cet avantage, c'est d'avoir un collègue ministre d'État à l'aménagement. Voici que ce dernier s'est vu confier, par le Conseil des ministres — puisque les ministres d'État, qu'on se plaît à appeler parfois les superministres, n'ont de mandats que ceux que leur confie le Conseil des ministres — ce ministre d'État, dis-je, s'est vu confier le mandat de préparer un projet de loi-cadre sur l'aménagement et, par la même occasion, finalement, on s'est rendu compte que certains des aspects touchés dans ce projet de loi, évidemment, débordaient sur le contenu ou sur ce que pouvait contenir une loi-cadre sur l'urbanisme. J'ai donc consenti que des fonctionnaires de mon ministère travaillent de concert avec ceux de l'aménagement pour préparer ce qui pourrait être une loi-cadre de l'aménagement et de l'urbanisme, qui sera parrainée par le ministre d'État à l'aménagement.

M. Goldbloom: M. le Président, effectivement, nous avons fait, il y a dix jours, un débat, dans le cadre de cette nouvelle formule Question avec débat le vendredi matin, avec le ministre d'État, et sa préoccupation a été plus large que ce que l'on peut appeler l'aménagement du territoire; c'était la décentralisation administrative qui le préoccupait. Mais, il y a des problèmes aigus. Il y a un développement désordonné, incohérent, sauvage qui se poursuit, faute de plans directeurs d'urbanisme, faute de notions de l'aménagement d'un territoire donné. Il me semble que l'urgence que je croyais déceler dans cette déclaration du ministre... Sa préoccupation était tout à fait valable et nécessaire. Il y avait eu un projet de loi qui n'avait pas été adopté, mais qui avait quand même des éléments qui auraient pu être modifiés; il y avait quand même un canevas, un échafaudage sur lequel le nouveau ministre aurait pu ériger un système d'aménagement du territoire — au moins pour amener les municipalités et les conseils de comté à poser des gestes, à prendre des décisions, à donner des affectations au sol, à déterminer où serait la zone industrielle, où serait la zone résidentielle plutôt que de permettre aux promoteurs d'acheter une ferme et nous faire perdre du sol arable etc.

Il me semble donc que l'urgence est telle que nous ne pouvons être tout à fait satisfaits — nous ne pouvons pas être satisfaits du tout malgré le respect que nous devons avoir pour le ministre des Affaires municipales — d'une perspective qui ne nous assure pas qu'il y aura, cette année, à brève échéance, une Loi sur l'aménagement des territoires.

M. Tardif: M. le Président, premièrement, à cet égard, le discours inaugural indiquait bien l'intention du gouvernement de déposer cette loi au cours de la présente session. Deuxièmement, le grand problème, c'est vrai qu'il y avait beaucoup de choses bien faites et intéressantes dans le projet de loi no 12 présenté à l'Assemblée nationale par le député de D'Arcy McGee, à l'époque ministre des Affaires municipales. C'est aussi vrai que ce projet de loi non seulement parlait d'urbanisme, mais introduisait, créait de toutes pièces une structure municipale nouvelle appelée les conseils d'agglomération.

M. Goldbloom: M. le Président, le ministre m'a interrompu il y a quelques minutes pour apporter une précision. Je me permets de faire la même chose. Il est vrai que le texte comprenait la création de cette nouvelle structure, mais la réaction a été très vive de la part des municipalités, notamment de celle des conseils de comté. J'avais indiqué clairement et publiquement mon intention de laisser tomber cette notion de structure nouvelle pour la remplacer par un mécanisme de coordination entre les conseils de comté et les cités et villes, avec un arbitre qui trancherait les litiges qui pourraient exister entre les deux afin que des décisions puissent se prendre. Je voulais apporter cette précision.

M. Tardif: Le geste posé par l'ex-ministre des Affaires municipales indique bien que si les dispositions de son projet de loi qui touchaient l'urbanisme comme tel ne soulevait pas tellement de réactions, il n'en était pas de même des structures prévues, et c'est là justement où le bât blesse et où il nous semble important de revenir à cette question non seulement de loi-cadre sur l'aménagement, mais ce dossier sur la décentralisation, et cela a été une des raisons pour lesquelles le dossier a été confié à mon collègue à l'aménagement. C'est bien beau d'énoncer que quelqu'un quelque part doit avoir une compétence en matière d'aménagement, c'est une chose, et c'en est une autre de décrire des compétences de façon assez claire et précise, et cela en est encore une autre que de rallier un certain consensus sur le citus même de cette compétence, et c'est à la solution de ce problème, beaucoup plus qu'au problème finalement technique de la loi-cadre d'urbanisme ou d'aménagement, que s'en prend mon collègue présentement.

M. Goldbloom: M. le Président, j'ai eu l'impression l'an dernier que le ministre faisait une certaine distinction, peut-être une différence d'échelle, entre l'expression "aménagement du terri-

toire" et le mot "urbanisme", et qu'il laissait entendre — je ne veux pas lui prêter des mots qu'il n'a pas prononcés — que la notion d'aménagement du territoire était vaste et était confiée à son collègue le ministre d'État, tandis que la notion d'urbanisme était une fonction administrative d'une municipalité et qu'il allait s'en occuper dans l'exercice de ses propres fonctions.

M. Tardif: Le problème ne se situe pas au niveau de la définition des tâches entre mon collègue le ministre d'État à l'aménagement, et moi, mais bien au niveau des organismes porteurs ou des structures porteuses ou des institutions qui auront cette compétence sur le territoire. Mon collègue et moi nous pouvons très bien nous entendre sur qui va faire quoi, mais lorsqu'il s'agit d'élaborer un projet de loi et de savoir dans la réalité des faits qui, sur le territoire des municipalités rurales, des municipalités de cités et villes, des organismes supramunicipaux existants, va accomplir telle fonction, c'est là, je pense, qu'il y a des problèmes et c'est à la solution de ces problèmes que nous nous employons beaucoup plus qu'à une définition ou un problème de définition de compétences entre mon collègue et moi.

M. Goldbloom: M. le Président, quant à celui qui vous parle, je voudrais aborder d'autres facettes du sujet, mais il ne nous reste que quatre minutes. Je ne protesterais pas s'il y avait une suggestion d'ajournement ou si peut-être le député de Saint-Hyacinthe...

M. Cordeau: J'aurais une question avant de terminer. Est-ce que le zonage agricole va être compris dans cette loi-cadre de l'aménagement et de l'urbanisme?

M. Tardif: Non, le zonage agricole est une chose différente, il s'agit d'un ensemble de lois qui sera présenté par le ministre de l'Agriculture, mais qui, évidemment...

M. Cordeau: Oui, mais...

M. Tardif: ... a des liens...

M. Cordeau: ... c'est bien près.

M. Tardif: ... très directs avec l'aménagement. C'est la raison d'ailleurs pour laquelle le COMPAT, le comité ministériel permanent de l'aménagement du territoire regroupe le ministre de l'Agriculture, en plus de celui des Affaires municipales et les autres intervenants sur le territoire.

M. Goldbloom: Le ministre a bien dit qu'il y aura plusieurs projets de loi sur le zonage agricole?

M. Tardif: Enfin, il y a un train de lois prévu, oui.

M. Goldbloom: M. le ministre de l'Agriculture semble avoir pris l'habitude de présenter des projets de loi, six à la fois.

M. Tardif: C'est toujours assez impressionnant.

M. Goldbloom: Question d'appréciation, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): La commission ajourne ses travaux à demain. L'élément 2 n'est pas adopté, si j'ai bien compris?

M. Goldbloom: Non, pas encore, mais il ne pose pas de problèmes.

Le Président (M. Marcoux): La commission ajourne ses travaux à demain, dix heures.

(Fin de la séance à 22 heures)

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