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Question avec débat: L'habitation au Québec
(Dix heures dix-huit minutes)
Le Président (M. Boucher): A l'ordre, s'il vous
plaît. La commission des affaires municipales est réunie ce matin
pour discuter la question avec débat du député de
Notre-Dame-de-Grâce au ministre des Affaires municipales sur le sujet
suivant: l'habitation au Québec.
M. le député de Notre-Dame-de-Grâce, vous avez la
parole, en priorité, durant les vingt prochaines minutes.
Exposé du sujet M. Reed Scowen
M. Scowen: Merci, M. le Président. Je veux d'abord
remercier le ministre et ses fonctionnaires et associés d'être
venus ce matin pour discuter de ce problème qui est assez important, et,
il faut que je l'ajoute, assez compliqué. Je veux d'abord souligner la
présence, parmi nos observateurs ce matin, de M. Klaus Bylsma qui est le
directeur général d'un groupe de locataires de
Notre-Dame-de-Grâce, mon comté, et de M. Roger Moreau qui est avec
lui. M. Moreau est de la Fédération des associations de
locataires (personnes âgées) à Montréal-Nord;
également Mme Moreau. On vous souhaite la bienvenue.
Pour commencer, M. le Président, je veux simplement expliquer mes
connaissances des règles du jeu pour ce matin. D'abord, je veux poser
des questions au ministre pour que nous puissions avoir une discussion assez en
profondeur des questions de logement, d'habitation au Québec. Je veux,
autant que possible, je suis réaliste, éviter la partisanerie. Je
pense que c'est une question à laquelle les Québécois
s'intéressent, peu importe qui les représente au gouvernement ou
dans l'Opposition ici à Québec.
A ce sujet, j'ai une petite suggestion à faire au ministre car,
depuis mon entrée à l'Assemblée, j'ai remarqué une
tendance de nos deux côtés, quelques habitudes fâcheuses et
je veux les éviter ce matin autant que possible. Alors, je
suggère, de votre côté, M. le ministre, qu'on est
prêt à vous donner trois références aux erreurs du
fédéral et du gouvernement Bourassa durant notre discussion et de
notre part, M. Lavoie et moi, nous nous engageons à nous limiter
à une seule référence à votre projet farfelu de
souveraineté-association. Si on peut s'entendre avec ces limites, vous
en avez trois, vous pouvez choisir entre Bourassa et le fédéral
trois fois et nous autres, une seule référence à la
souveraineté-association; pour le reste du temps, on peut essayer de
parler en profondeur des questions réelles de l'habitation au
Québec.
Je pense que, d'une certaine façon, c'est juste, parce que vous
êtes déjà à mi-temps dans votre mandat, vous avez eu
deux ans pour faire les gestes positifs et les erreurs. Je ne sais pas si, dans
ces conditions, vous accepterez un débat qui, je vous le promets,
portera sur les réalisations des deux dernières années de
votre gouvernement ainsi que sur vos projets pour l'avenir.
M. Tardif: Si vous le permettez, M. le Président, je suis
bien prêt à accepter un certain nombre de règles du jeu,
mais sûrement pas quand on qualifie notre projet fondamental de farfelu.
Au départ, cela me hérisse.
M. Scowen: J'ai promis une seule référence à
ce projet.
M. Tardif: Elle est faite. J'espère que c'est la
dernière.
Deuxièmement, M. le Président, qu'on me demande de parler
d'habitation, depuis deux ans, je veux bien, sauf que...
M. Scowen: M. le Président, excusez-moi. Est-ce que je
peux terminer mon intervention?
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce. Le ministre répondra après votre
intervention.
M. Scowen: Ce que j'ai fait, M. le Président, c'est une
série de questions. Je les ai divisées en trois catégories
générales. Ce que je veux faire, c'est simplement les aborder
d'une façon générale. J'ai des copies ici que je peux
donner au ministre, pour que nous puissions avoir, autant que possible, des
réponses directes à ces questions. Je pense que c'est bien
l'esprit des questions avec débat.
Les trois catégories de questions que je propose, c'est,
premièrement, une série de questions qui touchent la question
d'une politique d'habitation pour le Québec; deuxièmement, une
série de questions au sujet du progrès réel en termes de
création d'habitations qui a été fait depuis les deux
dernières années; et troisièmement, quelques questions sur
le fonctionnement de la Société d'habitation du
Québec.
Premièrement, la politique. C'est très clair que tout le
monde semble désirer une politique d'habitation pour le Québec.
Au début de 1977, même à la fin de 1976, le ministre et le
premier ministre nous disaient que c'était essentiel, que cela
n'existait pas et qu'ils avaient l'intention de le faire. S'ils ne l'ont pas
fait aussi vite qu'ils l'avaient prévu, je comprends parfaitement que
ces choses sont souvent plus difficiles à réaliser qu'à
promettre. Je pense que tout le monde sera prêt à accepter ce
point.
Je me suis souvent demandé si une politique sur une chose aussi
compliquée que l'habitation est possible. C'est un peu comme une
politique industrielle. Les gens en parlent depuis des années et des
années, mais cela ne se réalise pas.
Les questions que je veux poser sur cette
politique globale sont au nombre de quatre. La première est une
question de fond et touche la question des droits. Le premier ministre disait,
il y a quelque temps: Le droit au logement figure parmi les droits nouveaux que
le gouvernement devra établir. Dans le livre blanc, j'en cite quelques
phrases: "Un des droits essentiels de tout citoyen: le droit au logement".
Après: "Ce n'est pas suffisant d'affirmer le droit au logement. Ce
logement doit, de plus, être convenable et de bonne qualité ".
Voici la première question que je veux poser au ministre.
Pensez-vous que ce droit au logement soit vraiment un droit dans le sens
fondamental, c'est-à-dire légal? Normalement, quand on parle des
droits, on parle aussi des questions d'obligations. Je veux qu'il aborde un peu
la question, si les citoyens du Québec ont un droit dans le sens
légal à un logement convenable, etc., et nous dise à qui
ils peuvent réclamer ce droit. Est-ce des autres citoyens, des
entrepreneurs, ou peuvent-ils le réclamer du gouvernement? Est-ce qu'il
pense à ce droit dans le sens d'un droit légal par lequel le
citoyen peut réclamer, faire une poursuite, par exemple, contre l'Etat
ou contre quelqu'un, si ce droit n'est pas accordé?
Je pose cette question fondamentale, parce que, d'après mes
expériences avec la commission Pepin-Robarts, on a entendu parler de
beaucoup de droits fondamentaux. Je pense que c'est peut-être un
vocabulaire qui n'est pas très clair et à moins que vous ne soyez
prêt à définir cette question du droit à
l'habitation, vous aurez le problème de développer une politique
cohérente. Voilà ma première question.
La deuxième question touche les relations et l'importance que le
ministre veut accorder aux divers secteurs de notre société, dans
le domaine de l'habitation. Au début de mars 1977, dans une entrevue
qu'il accordait au Devoir, le ministre parlait un peu de ses idées dans
le domaine de l'habitation. Il disait, et je cite: "Le ministre réserve
pour plus tard de dresser un portrait du rôle précis que pourront
jouer les trois secteurs, privé, public, et coopératif". C'est
plus tard maintenant, cela fait déjà 20 mois. J'aimerais savoir
les idées du ministre, aujourd'hui, dans ce domaine.
Quel rôle prévoit-il pour le secteur privé, pour les
coopératives et pour le secteur public dans le domaine de l'habitation?
J'aimerais, autant que possible, qu'il accepte de chiffrer ce rôle. Par
exemple, dans le meilleur des mondes possibles, est-ce que nous aurons une
habitation pour les Québécois, à savoir 50% pour
l'entreprise privée, 25% dans le monde coopératif... C'est une
façon de mieux comprendre les intentions du gouvernement et du ministre,
que simplement des expressions un peu générales. C'est la
deuxième question que j'aimerais aborder avec le ministre.
La troisième question est un peu liée au programme
officiel du Parti québécois. Je veux dire d'abord, et je pense
que le ministre sera probablement d'accord avec moi, que, quand vous lisez le
chapitre VIII du programme officiel, ce n'est pas superbe de cohérence
comme politique de l'habitation. Je pense qu'il y a des éléments,
mais pour moi, ce n'est pas quelque chose que je trouve satisfaisant dans le
sens que ce n'est pas exactement complet. Il y a trois éléments
spécifiques là-dedans que j'aimerais que le ministre accepte de
nous expliquer un peu plus loin. Est-ce qu'il a l'intention d'expliquer les
articles suivants: l'article 2g, qui prévoit un programme
d'expropriation contre les propriétaires qui refusent ou se trouvent
dans l'incapacité d'entretenir un logement; l'article 3, qui propose de
créer un conseil consultatif à côté de la
société d'habitation, un conseil où sont
représentés les associations de propriétaires, de
locataires, des syndicats, des constructeurs d'habitation et des
coopératives. Est-ce qu'il a l'intention de le faire? (10 h 30)
Troisièmement, qu'est-ce qu'ils vont faire s'ils n'ont pas encore
commencé ce projet de nationalisation progressive du sol en
périmètre urbain?
Finalement, dans le domaine des politiques générales, je
veux simplement demander au ministre s'il pense, aujourd'hui, qu'une politique
globale de l'habitation est possible, après deux ans de
réflexion. Si oui, quand pense-t-il que cette politique sera
dévoilée aux citoyens du Québec et peut-il... Ici, nous
donnons un aperçu des éléments de base de cette
politique.
Je passe maintenant à la deuxième partie de la
série de questions. Je vous donne les questions, si vous voulez, M. le
ministre. Cela peut peut-être permettre à vos associés de
les aborder.
La deuxième série de questions touche le progrès en
réalisation qu'a fait le ministre depuis 1977 et je parle seulement de
ce qui a été fait depuis l'arrivée au pouvoir du Parti
québécois.
Il faut que je vous dise que j'ai trouvé assez compliquée
l'étude des chiffres. Vous avez les chiffres sur les projets
annoncés, sur les contrats signés, sur les mises en chantier, sur
les habitations en construction, sur les habitations complétées,
sur les maisons inoccupées et je n'ai jamais vu de ma vie un endroit
aussi fertile pour le jeu des chiffres que ce domaine de l'habitation; c'est
fascinant et, pour un débutant comme moi, je comprends comment il se
fait que personne ne sait exactement ce qui se passe. Mais je vais essayer de
faire sortir les éléments les plus essentiels, d'après
moi, et, si le ministre n'est pas d'accord, il pourra le dire.
Premièrement, j'ai remarqué qu'à la fin de 1976 et
au début de 1977, le ministre et le premier ministre étaient
d'accord pour dire qu'il y avait une grande pénurie de logements au
Québec. Je peux citer des articles, mais je pense que c'est bien
entendu, et le premier ministre et le ministre avaient l'intention de
créer 60 000 habitations par la voie du secteur privé, plus 7000
par année dans le secteur public. Ce sont des chiffres de base,
j'espère qu'ils ne seront pas contestés.
Pour essayer de comprendre la situation, je suis allé,
premièrement, aux chiffres, aux réalisations. Combien de maisons
ont été complétées durant ces années. Si je
ne me trompe pas, les chiffres sont les suivants: année 1976, total.
54 000, c'était l'année avant l'arrivée au pouvoir
du Parti québécois; 1977, à peu près 62 000, c'est
l'année passée et, cette année, il semble que le rythme
soit à peu près semblable pour les deux premiers trimestres et
que, probablement, nous arriverons à peu près à 62 000. Ce
n'est pas 67 000, mais ce n'est pas très loin; on ne peut pas dire que
c'est un écart important, ce n'est probablement pas quelque chose de
désastreux.
Quand je vois la mise en chantier... Il faut que je cite qu'il y a quand
même un écart dans les deux années d'à peu
près 20 000 de moins que nos besoins en 1976-1977 et nous aurons un
écart d'à peu près 5000 cette année, si les
chiffres continuent.
Je suis ensuite allé à la mise en chantier. Je me disais:
Les réalisations sont là, c'est parfait, mais je veux savoir
combien de maisons seront complétées l'année prochaine.
Pour moi, c'était normal d'aller voir les mises en chantier; les maisons
sont commencées, elles vont probablement se terminer un jour. Les mises
en chantier sont descendues. En 1976, il y en avait 68 000; l'année
passée, il y en avait 57 000, et, pour moi, c'est une indication qu'en
1978, il faut prévoir une baisse; pour 1978, il y a encore une baisse de
mises en chantier; elles ont baissé, pour les deux premiers trimestres,
d'à peu près 15%. Si ce rythme continue pendant l'année
complète, nous aurons moins de 50 000 mises en chantier en 1978.
Alors, l'esquisse que je vous présente, c'est un objectif de 67
000, une réalisation d'à peu près 10% de moins et une mise
en chantier d'à peu près 10% de moins que les
réalisations. C'est le portrait que je sors de ces chiffres. J'aimerais
d'abord savoir du ministre si c'est exact et si c'est une question qui le
préoccupe. Il est possible que les chiffres de base, 60 000 plus les
7000, soient plus valables, qu'il faille réviser les chiffres pour les
rendre plus réalistes. On n'a plus besoin d'autant d'habitations. C'est
peut-être qu'il ne pouvait pas mettre en marche autant d'habitations que
prévu, je ne sais pas; mais j'aimerais avoir quelques clarifications sur
ces chiffres. Je suis intéressé davantage aux 7000, les
habitations pour les personnes âgées et les personnes à
faible revenu, parce que c'est la partie qui touche directement l'Etat.
Franchement, j'ai eu de la difficulté à trouver les
chiffres. Je ne sais pas, je n'ai pas trouvé le moyen de savoir combien
d'habitations sont construites. Nous sommes inondés par les
communiqués de presse sur la mise en chantier de telles habitations,
tels logements, dans tel comté. On peut les lire presque
continuellement. Des gens m'avaient dit que souvent le même projet
était annoncé en 1975, 1976, 1977 et 1978. C'est une faiblesse de
tous les gouvernements de remettre les mêmes logements dans les chiffres
de l'année subséquente. Je ne sais pas si c'est vrai, mais je
n'ai pu trouver les chiffres nécessaires pour savoir ce qui se passe
dans le domaine des HLM.
Alors, voici la question que je pose au ministre dans ce domaine. Est-ce
qu'il peut nous dire précisément combien de HLM je pense
que 7000 HLM s'égalent combien de maisons à logements pour
les personnes à faible revenu ou pour les personnes âgées
ont été mises en chantier et complétées pour les
années 1976, 1977, 1978 et quelles sont ses prévisions pour 1979,
en comparaison de cet objectif de 7000. Je sais très bien que dans ce
domaine il y a un manque de logements. Si on construit les 7000, je suis
convaincu qu'on aura une personne si c'est installé. Il n'y a pas de
problème, mais je pense qu'une des questions les plus importantes que je
veux poser ce matin, parce que je ne pouvais pas les trouver, c'est: Quel est
le nombre de logements complétés comparé à cet
objectif de 7000 pour les années 1977, 1978 et, espérons, pour
l'année prochaine? La dernière série de questions que je
veux poser touche la société d'habitation. Est-ce qu'il me reste
quelques minutes?
Le Président (M. Boucher): Encore quatre ou cinq
minutes.
M. Scowen: C'est épuisé? Parce que j'ai seulement
deux ou trois questions sur la société d'habitation. Merci.
Cette société d'habitation... Voilà
ça, c'en est une autre sur la question des chiffres la
société d'habitation, premièrement, je me suis vite
aperçu que c'est une société qui, depuis ses
débuts, est pas mal critiquée. Je suis certain que le ministre va
prendre avantage d'une de ces trois motions de blâme concernant la
société d'habitation avant 1977, parfait, allez-y. Mais quand il
aura fini, je veux comprendre un peu ce que nous devons faire aujourd'hui parce
que, depuis deux ans, c'est notre responsabilité, la vôtre et la
nôtre. On est là.
Premièrement, je vous dis très poliment, M. le ministre,
que le rapport annuel de la société d'habitation n'est pas un
exemple parfait d'un rapport clair pour les citoyens. Je sais que ces rapports
sont souvent écrits pour les actionnaires du gouvernement, mais il me
semble que si vous avez un rapport comme tel qui touche la vie des gens, ce
serait intéressant d'essayer de sortir quelque chose de facile à
comprendre. J'ai passé la plus grande partie de ma vie à lire des
rapports annuels et c'est un des plus difficiles à comprendre que je
n'aie jamais vu de ma vie.
Mais c'est simplement une suggestion, ce n'est pas vraiment une
critique, parce que ces choses arrivent et c'est souvent une question de
priorité. Une question que je veux poser: J'ai commencé à
lire la loi qui a créé la Société d'habitation du
Québec; j'ai été surpris de voir que c'est une
société d'Etat, c'est une société anonyme d'une
façon dans la loi, une corporation de cinq membres, mais il y a des
articles dans la loi qui en font presque un ministère. Elle est
obligée, pour chaque projet, d'avoir l'approbation du Conseil des
ministres et du Conseil du trésor.
Ce que je me demandais, c'est: est-ce que c'est une vraie
société d'Etat avec un mandat et les pouvoirs, les finances qu'il
faut pour faire le mandat ou est-ce que ça fait partie d'un service
dans le ministère? Ce n'est pas très clair. Parce que j'ai
une tendance à aimer les choses qui sont claires, je me disais que
peut-être une des causes des problèmes de la SHQ, c'est que si ce
n'est pas clair pour moi, ce n'est peut-être pas clair pour le
président, pour les administrateurs, pour les gens qui travaillent
là-dedans et pour le public en général.
Je pense qu'on peut justifier un ministère de l'habitation. On
peut justifier un service de l'habitation à l'intérieur du
ministère des Affaires municipales. On peut peut-être justifier
une société d'habitation autonome, comme une
société d'Etat qu'on connaît dans le monde normal.
J'aimerais que le ministre aborde un peu cette question. Est-ce que c'est
vraiment une contradiction que je vois là ou est-ce simplement parce que
je ne comprends pas les choses, parce que je suis nouveau et naïf?
Une deuxième question que je voulais poser sur la
société d'habitation et j'arrive à la fin de cette
affaire, M. le Président c'est la question des critiques qui ont
été dirigées contre la société et qui
touchaient sa complexité, sa lourdeur, sa lenteur à faire les
choses. Le ministre lui-même en est conscient. J'ai trouvé une
citation datant des six premiers mois de son mandat. On disait ceci: M. Tardif
souligne que les fonctionnaires ont la fâcheuse habitude de faire des
normes chromées qui multiplient les délais de construction. A
titre d'exemple, il a cité le cas d'un entrepreneur privé qui,
avec une dizaine d'employés, avait réussi à construire un
millier de logements, l'an dernier, alors que la SHQ, avec 250 employés,
n'avait réussi à en construire que 2000.
Je suis certain que le ministre était sérieux à ce
moment et qu'il touchait un problème aigu. Voici la question que
j'aimerais poser au ministre: Est-ce que c'est vrai que cette
société est, je ne dis pas mal administrée, mais comporte
une administration, un système lourd et difficile? Si oui, est-ce que le
ministre pense que ce problème est corrigé? Sinon, où en
sommes-nous en vue de le corriger?
L'avant-dernière question, M. le Président, c'est un tout
petit point, c'est encore quelque chose que je n'ai pas compris. Il s'agit
d'une petite chose dans le bilan de la société pour cette
année. Je suis certain que ce n'est pas important. C'est quelque chose
qui s'appelle le coût net d'exploitation des immeubles d'habitation de la
société. Si je comprends bien, c'est le coût de gestion des
immeubles qui appartiennent à la société. (10 h 45)
Pour l'année 1975, les coûts indiqués sur le bilan
étaient à zéro, de même que pour 1976. Il y avait
une note là-dessus. Mais, pour cette année, c'est rendu, si je
comprends bien, d'après toutes les notes, qu'il y a une augmentation
dans ce compte de $3 400 000 à presque $12 millions. Je suis certain
qu'il y a une raison, mais je pense que c'est la responsabilité de
quelqu'un de simplement poser en public la question de savoir ce qui est
arrivé, comment les coûts d'exploitation des immeubles de la
société ont augmenté, dans un an, de $8 millions.
J'aimerais que le ministre réponde franchement. J'avoue que je suis
presque certain que ce n'est pas quelque chose de compliqué, mais je
pose la question quand même.
Cela termine mes questions, M. le Président, sauf pour une seule.
Comme vous le savez, j'habite et je suis le représentant du comté
de Notre-Dame-de-Grâce qui a le plaisir, si vous voulez, d'avoir le plus
haut pourcentage de personnes âgées du Québec, de tous les
comtés du Québec. C'est une situation très spéciale
et c'est aussi un problème, parce que vous connaissez comme moi les
problèmes des personnes âgées de nos jours. Aujourd'hui, il
n'existe pas, à Notre-Dame-de-Grâce, un seul foyer pour les
personnes âgées, pas un seul. M. Legault vient d'annoncer une
seule habitation qui sera construite l'année prochaine ce sera
mis en chantier, cela fera partie des chiffres, l'année prochaine
qui pourra loger entre 75 et 100 personnes. Pour l'unité la plus proche
de nous, nous avons déjà une liste d'attente de 1000
personnes.
Je ne sais pas s'il y a, parmi les fonctionnaires, les aides du ministre
ici aujourd'hui, une personne qui se spécialise dans le comté de
Notre-Dame-de-Grâce, mais j'aimerais avoir, si possible, un peu
d'information sur un problème qui me touche personnellement, qui touche
mes électeurs et mes amis personnels d'une façon très
aiguë.
M. le Président, je vous remercie, ainsi que M. le ministre de
m'avoir permis de dépasser mon temps. Les questions que j'ai
essayé d'aborder étaient des questions de bonne foi, des
questions sérieuses que je voulais simplement aborder pour permettre au
ministre de s'expliquer avec, comme je le répète, le moins de
partisanerie possible, parce que c'est une question fondamentale qui touche
tout le monde et je pense que c'est une bonne occasion d'apporter des
réponses. Je vous remercie.
Le Président (M. Boucher): Merci, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce. M. le ministre.
Réponse du ministre
M. Guy Tardif
M. Tardif: M. le Président, je remercie le
député de Notre-Dame-de-Grâce de justement me donner
l'occasion de faire le point, après deux ans, sur ce domaine fort
important de l'habitation. Les questions qu'il a posées sont, je pense,
fondamentales et méritent qu'on y accorde tout le sérieux
possible dans les quelques heures que nous allons passer ensemble pour essayer
de dégager à la fois les dimensions du problème, les
difficultés rencontrées, les réalisations et
peut-être déboucher sur le problème ainsi qu'il le
demandait par sa dernière question à savoir: Est-ce que
l'organisme gouvernemental en place pour réaliser les objectifs du
gouvernement en matière d'habitation a un mandat suffisamment large dans
la loi pour lui permettre d'agir dans ce domaine?
Sa première question portait sur l'établissement ou la
mise en oeuvre d'une politique d'habitation au Québec et comportait
trois volets. D'abord, citant certains discours que j'aurais prononcés,
il demandait de quoi était fait ce que nous appelions et ce que
j'appelle toujours, d'ailleurs, le droit au logement en se demandant si
c'était un droit fondamental, un droit légal et, si oui, de qui
le citoyen pouvait-il attendre, si vous voulez, la satisfaction ou l'observance
de ce droit.
Pour nous, en tout cas, le droit au logement est un droit aussi
fondamental et répond à un besoin aussi fondamental que celui de
se nourrir, de s'habiller, de la santé et de l'éducation. Il est
bien évident que l'Etat a, à cet égard, une
responsabilité face à ses citoyens. J'aimerais cependant,
souligner que ceci n'implique pas automatiquement que l'Etat doive se
substituer entièrement aux individus et au secteur privé. De la
même manière, je pense que l'Etat, par analogie, a une
responsabilité à l'égard de la sécurité des
citoyens sur les routes, ce qui n'implique pas que l'Etat doive lui-même
fabriquer tous les véhicules moteurs qui circulent en raison du fait
qu'un véhicule moteur pourrait être dangereux. Il peut
établir des normes de sécurité que les fabricants devront
observer, et assumer lui-même une responsabilité dans la
construction des routes, par exemple, et atteindre cet objectif d'un droit
à la sécurité lorsqu'on circule en véhicule moteur,
sans, pour autant, encore une fois, se substituer entièrement au secteur
privé. Or, dans le domaine du logement, qu'implique cette notion de
droit au logement? Cela implique que les citoyens, ou enfin, c'est le droit que
possède tout citoyen, selon ses caractéristiques propres, de
jouir d'un logement et d'un environnement correspondant à un minimun
social acceptable. C'est donc parler de l'accessibilité à un
logement, d'une qualité respectant un code minimum d'habitabilité
à u prix qui peut être défini comme raisonnable, selon les
revenus des ménages, et, encore une fois, dans un environnement
respectant des critères d'équipement et de qualité.
C'est dans ce domaine, c'est dans cette perspective qu'à partir
de diverses études qui ont été effectuées au
Québec, et la plus récente, je pense, est certainement celle du
comité Legault, "Habiter au Québec", que l'on dénombrait
en 1976, date de la publication du rapport, ou qu'on énumérait un
certain nombre de problèmes liés au logement, problèmes
d'ordre quantitatif d'abord et problèmes d'ordre qualitatif.
Problèmes d'ordre quantitatif lorsque, se basant sur des tendances
historiques, on constatait au Québec, pour un parc immobilier d'à
peu près deux millions de logements, une croissance annuelle du parc qui
avait voisiné autour de 2% et 3% c'est-à-dire entre 50 000 et 60
000 logements par année pour l'ensemble du Québec, avec des
fluctuations fort importantes, selon qu'il s'agissait de maisons unifamiliales
ou multifamiliales. C'est ainsi que l'on a pu constater qu'en 1961, 51% des
mises en chantier étaient dans le secteur unifamilial, qu'en 1968, par
ailleurs, le secteur unifamilial n'était que de 28% et que, en 1975, il
avait remonté à 60%.
C'est donc un premier constat de ce parc immobilier de l'ordre de deux
millions que j'ai mentionné et dont à peu près la
moitié comprend des logements mis en location, pour l'ensemble du
Québec. Il est bien évident que ces données, lorsqu'on les
régionalise, nous révèlent des différences
appréciables. C'est ainsi que dans la région de Montréal,
le pourcentage des logements mis en location et des locataires atteint 80% et
que dans la région de Québec, le pourcentage est de l'ordre de
70%. Or, M. le Président, ce premier constat, quant au nombre de
logements existants et les tendances historiques, a servi de fondement aux
études qui ont été effectuées en 1976 à
partir du rapport Legault pour établir qu'un nombre d'à peu
près 60 000 logements par année serait requis, qui est à
peu près le rythme de production du secteur privé, auquel il
faudrait ajouter environ 7000 logements sociaux.
Je reviendrai tantôt sur ces données et les corrections
qu'il faudrait peut-être apporter, compte tenu d'un fait
indéniable qui est celui, je dirais, sinon de la diminution, à
tout le moins, du plafonnement de la population au Québec. Il est bien
évident qu'à partir du moment où les données
récentes de Statistique Canada sur la croissance démographique
indiquent un bilan négatif pour l'année 1978, on ne saurait
continuer à construire au même rythme qu'au cours des
années cinquante ou des années soixante. Je pense qu'il y a
là une donnée brutale avec laquelle il faudra composer.
Donc, du côté quantitatif, c'était la situation qui
avait servi à établir ces projections.
Il y avait également en 1976, M. le Président, une autre
donnée assez brutale relativement au nombre de vacances,
c'est-à-dire de logements vacants particulièrement dans le
logement de location, qui était, en 1975, de ,07% je pourrais
vous donner des chiffres comparés en 1971, c'était 7,2%;
en 1975, le taux était tombé à ,07%, c'est-à-dire
0,7% et, en 1976, on avait connu un accroissement à 1,3% de taux de
vacances dans les logements de location; enfin, en 1977, le chiffre atteint
à peu près 3 1/2%. Il y a donc un accroissement net du parc
immobilier et un pourcentage de taux de vacance qui tend à se rapprocher
de ce que l'on considère comme étant un seuil raisonnable,
c'est-à-dire un taux de vacance d'à peu près 4% pour
permettre au phénomène normal de l'offre et de la demande de
jouer, mais avec des restrictions fort importantes, M. le Président,
restrictions qui viennent du fait que ces taux de vacance se retrouvent non pas
dans l'ensemble du parc immobilier mais dans des sous-marchés qui
peuvent très bien faire l'affaire de personnes-cadres de compagnies, de
députés qui peuvent, comme résidence secondaire, se payer
un studio à $300, $350, $400 par mois, mais certainement pas aux
familles, tant en raison de la taille de ces logements qui sont
excédentaires que du coût du loyer. (11 heures)
II faut donc faire attention lorsqu'on parle d'augmentation du nombre de
logements disponibles; c'est vrai qu'il y en a, mais c'est vrai
également que c'est dans des sous-marchés qui ne
conviennent pas à la plupart des ménages familiaux.
Je voudrais aussi faire entrer ici une autre donnée importante
qui est due au fait que nous pourrons, pendant peut-être quelques
années, absorber encore un certain nombre de logements, même si la
population du Québec ne s'accroît pas de façon
appréciable ou même reste stationnaire, du fait de la demande des
ménages non familiaux, ces ménages qui, aux deux
extrémités du continuum, c'est-à-dire les jeunes
ménages, étudiants de CEGEP ou d'université qui pouvaient,
il y a quelques années encore, partager le toit familial et qui
décident aujourd'hui ils y sont parfois obligés parce que
la spécialité qu'il veulent poursuivre ne se donne pas dans leur
ville, ou bien pour des raisons tout à fait personnelles de louer
un appartement. C'est le cas également, à l'autre
extrémité du continuum, d'un bon nombre de personnes
âgées. Il fut un temps au Québec où les personnes
âgées demeuraient chez elles, demeuraient avec les enfants. C'est
de moins en moins vrai et c'est de moins en moins une possibilité
physique même si certaines familles pourraient le souhaiter
en raison, notamment, de l'exiguïté d'un bon nombre de logements.
Donc, il y a une demande effective pour des logements par des ménages
non familiaux, ce qui pourra continuer d'absorber une partie de la production
de logements.
Du deuxième point de vue, qui était celui de la
qualité des logements, et qui était un des points soulevés
entre autres dans le rapport Legault, on constatait qu'au Québec, sur le
parc immobilier de 2 millions de logements, environ 500 000 avaient
été construits avant 1920; 1 million avant 1945, et le rapport
Legault estimait à 360 000, le nombre de logements à
restaurer.
Là-dessus, M. le Président, il est bien évident que
des efforts considérables devront être consentis du
côté de la restauration. Je donnerai tantôt des chiffres
quant à la mise en oeuvre ou l'accroissement de la restauration à
l'intérieur du programme OSE qui vient, en quelque sorte, se greffer au
programme PAREL, qui est un programme d'aide à la restauration ou
à la remise en état des logements de laSociété
centrale d'hypothèques et de logement, mais que nous considérons
comme étant insatisfaisant, inadéquat, d'abord parce qu'il ne
s'applique pas sur tout le territoire et, deuxièmement, parce que
l'effet direct de ces programmes actuels de restauration, c'est
l'éviction de locataires qui ne peuvent plus absorber le coût des
loyers exigé suite aux rénovations.
Or, M. le Président, il est bien évident qu'un programme
de restauration, qui, tout en améliorant la qualité de l'habitat,
résulte dans l'éviction des locataires, est totalement
inacceptable socialement. Evidemment, il y avait aussi la question du prix du
logement qui était une autre considération dans les études
dont nous disposions à ce moment-là et qui nous permettait de
constater encore une fois, c'était contenu dans le rapport
Legault que plus de 300 000 ménages consacraient plus de 25% de
leurs revenus au logement.
Ces chiffres variaient et étaient plus élevés
encore, ces pourcentages étaient encore plus élevés dans
les régions plus urbanisées.
Or, M. le Président, c'est face à ces données que
le gouvernement a décidé de mettre en oeuvre, graduellement, une
politique d'habitation axée vers la satisfaction de ce que j'appellerais
des besoins prioritaires. Or, surtout dans les grands centres urbains je
pense encore une fois au cas de Montréal où 80% de la population
est locataire il nous semblait important, puisqu'on avait affirmé
le droit au logement, il nous semblait évident que, pendant des
années, ce droit devait passer par la protection des droits des
locataires. C'est la raison pour laquelle, confronté, peu après
mon arrivée au ministère en novembre 1976, avec l'obligation de
reconduire la loi de conciliation propriétaires-locataires, je
m'étais engagé, après avoir pris connaissance de cette
loi, encore une fois tout frais arrivé, loi qui remontait à 1951
et qui avait été reconduite d'année en année, je
m'étais engagé à repenser, à refondre cette loi et
à mieux équilibrer les forces en présence. Cela a donc
été une des premières actions auxquelles je me suis
attaqué; cela a donné lieu, d'abord, à la reconduction de
l'ancienne loi en bouchant un certain nombre de trous qui avaient
été trouvés par diverses personnes et à mettre tout
en oeuvre pour la refondre, ce qui a donné lieu à ce livre blanc
qui a été déposé au mois de novembre 1977, livre
blanc qui a déjà été traduit en un texte de loi.
Nous en sommes à la nième version qui devrait et qui doit
être déposée on met tout en oeuvre avant le
1er décembre prochain.
Donc, M. le Président, le premier secteur prioritaire a
été celui de cette loi sur les relations locataires-locateurs.
Parallèlement à ceci, M. le Président, le deuxième
secteur prioritaire nous semblait être, en raison notamment du
vieillissement de la population et des besoins particulièrement criants,
celui des personnes âgées. La Société d'habitation
du Québec, son mandat est d'abord destiné ou dirigé,
surtout dirigé, vers la réalisation de logements sociaux et ce,
depuis sa conception, alors qu'en 1968 elle est créée
depuis dix ans elle agissait au début essentiellement comme un
prêteur hypothécaire. Graduellement, je dirais que son rôle
s'est étendu et, en 1974, sous l'ancien gouvernement, par suite d'une
décision unilatérale de la Société centrale
d'hypothèques et de logement de court-circuiter, en quelque sorte, le
gouvernement du Québec, pour transiger directement avec les
municipalités, le gouvernement d'alors avait décidé
d'amender la loi pour faire de la Société d'habitation du
Québec le maître d'oeuvre en matière d'habitation. Si bien
que ce n'est que depuis 1974 véritablement que la société
bâtit elle-même ses logements sociaux et elle le fait
elle-même partout au Québec, sauf à Montréal
où la ville agit comme mandataire de la société pour les
fins de ces logements sociaux.
M. le Président, pour quelqu'un arrivant, à
l'époque c'était mon cas dans un organisme comme la
société d'habitation, un certain nombre, un des premiers
documents dont j'ai été saisi, c'était la programmation de
1977 qui prévoyait la
construction de quelque 3500 logements, programmation 1977 qui avait
été lancée dans le paysage entre le 18 octobre et le 15
novembre, comme par hasard. C'était de bonne guerre d'annoncer cette
programmation à l'ensemble du Québec, en disant: On construira X
logements chez vous, dans telle municipalité. Sur à peu
près 10 000 demandes de logements à la société dans
à peu près 300 municipalités, on avait retenu une centaine
de municipalités et on avait accordé à peu près
3500 logements.
Cependant, je n'ai pas été long à constater qu'il y
avait, dans l'appareil gouvernemental, à divers stades de production,
environ 9000 à 10 000 logements on aura des chiffres exacts
tantôt qui étaient à divers stades de
réalisation et qu'il fallait, en quelque sorte, compléter. C'est
là que j'ai demandé qu'on active le processus de diverses
manières, d'une part, en regardant et là, encore une fois,
je m'ouvrais les yeux, comme le député de
Notre-Dame-de-Grâce qui arrive par exemple l'organigramme et la
liste des employés de la société pour me rendre compte
qu'il y avait, dans cette institution, une vingtaine d'architectes et une
quinzaine d'ingénieurs. Je leur ai demandé: Pourquoi est-ce qu'on
ne ferait pas parce qu'une des raisons des délais était la
préparation des plans et devis par des firmes d'architectes et
d'ingénieurs de l'extérieur la société ne
pourrait-elle pas produire des plans, modulaires ou autrement, qui pourraient
être répétés ailleurs?
Effectivement, cela a donc été une de mes demandes
à la société, de voir à produire elle-même un
certain nombre de plans et devis. Egalement, de négocier avec des gens
qui avaient travaillé à la réalisation de plans pour
pouvoir répéter ces plans et devis et, dans certains cas, pour
procéder à l'achat d'immeubles existants et, finalement, pour
tenter une expérience du côté de la préfabrication
de logements. Tout ceci, pour activer le processus de réalisation, sur
lequel je reviendrai tantôt, en donnant des chiffres précis,
surtout en axant la réalisation de logements pour les personnes
âgées.
Parallèlement à ça, j'entamais des
négociations avec la Société centrale d'hypothèques
et de logement pour permettre la location ou ce qu'on appelle le programme de
supplément de loyer qui permettrait à l'Etat de subventionner
dans les mêmes ratios, 50-40-10, des logements pour les personnes qui
étaient dans le besoin, soit le logement familial, soit le logement pour
personnes âgées, mais avec une restriction, cependant, dans cette
phase expérimentale qui n'avait jamais été utilisée
au Québec par les gouvernements ou le gouvernement antérieur et
en nous limitant aux organismes sans but lucratif et aux coopératives
d'habitation.
Egalement, il y a eu la mise en place d'un programme LOGIPOP de
coopératives d'habitation sur lequel je donnerai des indications plus
précises tantôt, ainsi qu'un programme de restauration de maisons.
C'est donc dire que ce n'est pas uniquement enfin j'avais le choix, en
quelque sorte, en arrivant au ministère, entre mettre des gens au
travail afin de rédiger, de concevoir, de concocter les
éléments d'une politique d'habitation, et tenter plutôt,
immédiatement dans l'action, de la mettre en oeuvre. (11 h 15)
Vu l'urgence des besoins, il m'a semblé préférable
immédiatement de nous mettre à l'oeuvre, aussi bien dans le
secteur du logement social, et diverses façons de le produire le plus
rapidement possible, que dans celui dans le domaine des relations
locataires-locateurs.
Voilà en gros je reviendrai sur d'autres
éléments plus loin les secteurs qui ont retenu, de
façon prioritaire, l'attention de la société pour
ce qui concerne tes relations locataires-locateurs, c'est évidemment de
la Régie des loyers dont il faut parler à ce moment au
cours de cette première partie de mon mandat.
Le député de Notre-Dame-de-Grâce a posé la
question: Qui, selon le gouvernement, devrait intervenir entre les secteurs
public, privé et coopératif? Et quelle devrait être la
proportion des logements réalisés par chacun?
M. le Président, je ne crois pas qu'il soit tellement important
de répondre à cette question d'équilibre dans la
production de logements entre les trois secteurs. Il est bien évident,
par exemple, que l'on veuille mettre l'emphase comme on l'a fait sur le secteur
coopératif, cela n'implique pas que ce sont les coopératives
d'habitation elles-mêmes qui vont bâtir. Les coopératives
pourraient très bien s'adresser à des entreprises privées
pour bâtir les logements, mais qui seront gérés par la
coopérative.
On a d'ailleurs vécu l'expérience au Québec. C'est
la raison de l'échec de bon nombre de coopératives au
Québec. Ce que nous avions n'étaient pas vraiment des
coopératives d'habitation. C'étaient des coopératives de
construction. On se formait en coopérative, on achetait des terrains, on
se les faisait céder parfois par les municipalités ou par le
pouvoir public, on regroupait son pouvoir d'achat, mais aussitôt la
maison construite, on s'empressait de dissoudre la coopérative et on
redevenait de bons petits propriétaires capitalistes. Et les exemples
pullulent au Québec de situations semblables.
Ce que nous avons voulu faire à la place, c'était, avec le
programme LOGIPOP notamment, mettre sur pied de véritables
coopératives de location où la coopérative est
propriétaire de l'ensemble des maisons de la coopérative.
M. le Président, c'est la raison pour laquelle je dis que le
partage de l'équilibre ou de la réalisation des logements, des
modes de production entre les secteurs public, privé et
coopératif, m'apparaît secondaire. Ce qui est plus important,
c'est de s'assurer, à long terme, que ces secteurs s'équilibrent
peut-être dans la gestion du parc immobilier, dans le mode de
consommation, dans le mode de tenure du logement, plutôt que dans la
production. Je ne crois pas que les coopératives ou les
sociétaires puissent acquérir, du jour au lendemain, une
expertise dans la réalisation de ces logements.
M. Scowen: Oui ou non, est-ce que cela doit être 2% ou 25%
du total? Est-ce une expérience humaine intéressante? Est-ce que
cela fait partie fondamentalement d'une politique d'habitation du
Québec? C'est la question que je posais.
M. Tardif: Si on parle de la production des logements, j'ai dit
tantôt qu'il me semblait secondaire que les logements soient produits par
un secteur ou par l'autre. Si on parle de la gestion du parc immobilier du mode
d'appropriation et d'occupation, il me semble que nous devons tendre vers un
certain équilibre dans ce que j'appellerais l'appropriation collective
du logement, du moins pour ce qui concerne le logement locatif, le logement de
location.
Or, citer un pourcentage précis, on sait pertinemment que le
secteur public présentement, avec environ 26 000 logements,
représente une partie infime du parc immobilier du Québec. J'ai
parlé tantôt de 2 millions de logements c'est une quantité
vraiment signifiante et le secteur coopératif l'est encore plus. Dans la
situation actuelle, c'est inférieur à 2%, le pourcentage de
logements publics et coopératifs. Quel devrait être ce
pourcentage? Je ne crois pas qu'il soit utile ni de le préciser, ni
d'avancer des chiffres ici. Ce qui est important...
M. Scowen: Je pose la question, parce que la première
partie de la politique du Parti québécois, c'est de mettre en
oeuvre une nouvelle politique d'habitation visant à... Les trois
premières clauses...
M. Tardif: Oui.
M. Scowen: ... disent clairement que la base principale sera une
base de coopération, des coopératives. Je peux les lire, ce n'est
pas nécessaire. Cela implique que la politique de base du Parti
québécois, c'est une politique qui vise à
développer au Québec un système d'habitation basé
sur le système coopératif.
M. Tardif: Excellent. C'est vrai. Cela demeure vrai.
M. Scowen: Si c'est vrai, cela implique 80% ou 75% du stock total
de logements. On va dans cette direction. On a l'intention de le
réaliser. Ou est-ce simplement un jeu humain intéressant de
côté? C'est la question que je pose.
M. Tardif: Non, ce n'est pas simplement un jeu humain, M. le
Président, mais c'est un constat de réalités. Le
gouvernement ne va pas imposer aux Québécois qu'ils se
transforment du jour au lendemain en sociétaires. Une autre des raisons
j'ai parlé tantôt de l'échec des coopératives
d'habitation au Québec hormis le fait qu'au départ
c'étaient des coopératives de construction plutôt que
d'habitation, c'est que, trop souvent dans certaines expériences de
coopératives d'habitation, on a d'abord bâti des maisons et on
s'est cherché des sociétaires ensuite. Je regrette, M. le
Président, ce n'est pas du tout la façon de fonctionner et c'est
lorsque les Québécois décideront, sur le plan de
l'habitation, de se prendre en main et de vraiment gérer collectivement
leurs logements que nous pourrons atteindre cet objectif. Tout ce que le
gouvernement peut faire, c'est de créer les conditions permettant de
faire ceci.
Evidemment, je déplore avec vous, par exemple, que le programme
LOGIPOP n'ait pas connu tout le succès qu'on aurait pu en attendre,
mais, encore une fois, ce programme qui permet à des coopératives
de se créer et d'obtenir une subvention de $500 en fonds de
démarrage, qui permet à des groupes de ressources techniques de
faire de l'animation et d'aider les futurs sociétaires à se
regrouper et à concevoir un projet, ce programme qui donne une
subvention de $1500 par unité de logement qui vient s'ajouter à
des modalités de financement particulières, cela prend du temps.
Il y a un travail d'animation dans le milieu qui doit se faire. Lorsque les
gens sont prêts, sont convaincus qu'ils participent de cet esprit, les
programmes sont là. Dans ce cas-là, M. le Président, ce
n'est pas une absence de programmes qui a empêché la
réalisation de plus d'habitations coopératives, mais il y a une
certaine éducation, une certaine animation d'un milieu qui doit
être faite. C'est la raison pour laquelle je ne peux pas avancer de
chiffres, de la même manière que, comme ministre des Affaires
municipales, je peux très bien amender la loi pour permettre, par
exemple, dans les municipalités, la création de conseils de
quartier, mais je ne forcerai pas les gens à fonctionner à
l'intérieur des conseils de quartier, s'ils ne veulent pas. Je
crée les conditions le permettant.
M. le Président, si je reviens à un dernier
élément important d'une politique d'habitation, c'est aussi une
autre analyse que nous avons faite des logements sociaux existants et des
centres d'accueil. Là, on me permettra d'attirer peut-être
l'attention de la commission sur un certain nombre de données.
Chaque HLM que nous construisons aujourd'hui, coûte à
l'Etat $300 par mois de déficit d'exploitation. Le déficit
accumulé, puisqu'il y a des logements qui ont été
bâtis il y a dix ans, est de l'ordre de $180 par mois
présentement. Donc, pour ceux bâtis il y a dix ans, le
déficit était de l'ordre de $100 par mois, peut-être. Pour
ceux qu'on construit aujourd'hui, il est de l'ordre de $300 par mois. En
moyenne, cela peut nous donner à peu près $180 par mois par
logement. Actuellement, le parc de logements sociaux est de l'ordre de 24 000
et coûte en moyenne, comme déficit d'exploitation, $180 par mois
par logement. C'est au-delà de $40 millions qui vont au déficit
d'exploitation des logements sociaux.
M. Scowen: C'est bien...
M. Tardif: Comme programme existant pour les personnes qui en ont
besoin, soit les familles nombreuses, soit les personnes âgées,
voilà le coût de ce programme. Par ailleurs, si on regarde
le cas des centres d'accueil que la Société d'habitation
du Québec a bâtis avant que la Corporation d'hébergement
à Québec survienne et se substitue aussi à elle, pour
chaque place pour personnes âgées en centres d'accueil
là, on ne parle plus de logements, on parle de chambres il en
coûte à l'Etat environ $600 par mois par chambre, par lit, pour
ces emplois. Evidemment, on peut se poser des questions et se dire: Est-ce que
l'Etat peut continuer ainsi à multiplier ses actions dans le domaine du
logement social et des centres d'accueil et est-ce qu'on ne doit pas envisager
des mesures qui seraient moins onéreuses et permettraient de rejoindre
un plus grand nombre de citoyens?
Si on regarde les mesures en amont, qu'est-ce que nous avons? Le premier
ministre a évoqué hier une mesure qui avait été
prise par l'ancien gouvernement et qui a été reconduite, qui est
celle d'accorder aux gens vivant chez eux un dégrèvement pour
l'impôt foncier scolaire de $125 pour les propriétaires et de $75
dans le cas des locataires. C'est une mesure minime, mais qui peut aider les
personnes âgées à la retraite. Nous avons ajouté,
toujours en amont, une mesure qui est le crédit d'impôt foncier,
dont le bénéfice maximum peut atteindre $400 par ménage,
c'est-à-dire 40% de l'impôt foncier, avec un maximum de $1000
d'impôt là, je parle de tout impôt, municipal,
scolaire et de service donc 40% de cela, c'est-à-dire $400, moins
2% du revenu imposable. On sait que les ménages âgés qui
gagnent moins de $8600 ne paient plus d'impôt au Québec, de sorte
qu'un couple de personnes âgées dont le compte de taxes serait de
$1000 a droit ou aura droit, à compter du prochain rapport
d'impôt, à un remboursement de $400. Si on divise cela par 12
mois, cela fait une mensualité qui est à peu près de
l'ordre de $30 par mois, ou un peu plus, en supposant le maximum. Entre, d'une
part, les centres d'accueil à $600 par mois, les logements sociaux
à $300 par mois, et, en fin de compte, le remboursement de l'impôt
foncier scolaire qui rapporte à peu près, dans le cas d'un
propriétaire, $10 par mois, et le crédit d'impôt qui pourra
peut-être donner une trentaine de dollars par mois, entre cela, il n'y a
rien. On s'est posé la question: Est-ce qu'il ne devrait pas y avoir des
programmes intermédiaires qui, avec une même masse d'argent,
pourraient rejoindre plus de monde? On en a examiné trois. Mon
collègue au développement social, dans le cadre d'une politique
du revenu minimum garanti, s'interroge sur la question. (11 h 30)
Je dois dire qu'ayant négocié avec la
Société centrale d'hypothèques et de logement, le
programme de supplément de loyer, que c'est aussi une mesure
intermédiaire qui peut aider des personnes âgées, surtout
celles qui vivent dans ce qu'on appelle des OSBL dans le jargon,
c'est-à-dire des organismes sans but lucratif ou des
coopératives, et qui ont été bâtis, parfois, par des
groupements paroissiaux; bien souvent aussi, il s'agit d'organismes bidons sans
but lucratif, mis sur pied par un entrepreneur qui, sans "équité"
aucune, a parfois obtenu des terrains d'organismes sans but lucratif et qui a
bâti la tour ou le foyer pour personnes âgées, a fait son
profit et s'empresse de faire faillite; donc, l'organisme sans but lucratif est
pris avec le logement et soit que la Société centrale
d'hypothèques et de logement doive le reprendre ou encore on demande au
gouvernement du Québec de l'acheter ou de le subventionner. Je vous
ferais remarquer que, sur 25 000 logements que possède la
Société centrale d'hypothèques et de logement, il y en a
20 000 au Québec qui sont souvent des cas semblables, et un des cas les
plus patents, c'est celui de la place Frontenac, notamment, Ontario, où
il y a quelque 700 logements qui ont été repris récemment
par la Société centrale d'hypothèques et de logement. On
se retrouve donc avec la possibilité d'appliquer à un certain
nombre d'OSBL, c'est-à-dire d'organismes sans but lucratif, une partie
du programme de supplément de loyer. Encore là, selon la date de
construction de ces habitations, le coût de l'Etat pourra varier.
Dans le cas des organismes sans but lucratif financés par la
Société d'habitation du Québec, au début des
années soixante-dix, en appliquant le programme de supplément de
loyer, ça devrait nous coûter à peu près $60 par
mois, donc, un supplément qui pourrait être accordé
à peu près à 1400 logements financés par la
Société d'habitation du Québec comme organismes sans but
lucratif au début des années soixante-dix. C'est encore là
une mesure intermédiaire entre la production de logements sociaux et, si
vous voulez, ces mesures de dégrèvement d'impôt
général.
Mais néanmoins, M. le Président, c'est bien évident
que ceci n'est pas suffisant, qu'il y a une contrainte à cela. D'abord,
ça rejoint très peu de gens et, d'autre part, ces programmes
privent le locataire d'une liberté de mouvement. Ce qui est
subventionné, c'est le logement, c'est la pierre, c'est le
béton.
On s'est posé la question, à savoir si on ne devait pas
avoir un programme qui soit destiné aux personnes, soit dans le cadre
d'une politique de revenu minimum garanti ou d'une formule
d'allocation-logement, une allocation-logement versée à la
personne, au ménage plutôt, et, M. le Président, j'ai
présentement divers projets qui ont été
étudiés. J'ai envoyé des fonctionnaires en
Colombie-Britannique voir comment fonctionnait le programme SAFER, qui est
Shelter Aid For Elderly Residents, ou quelque chose comme ça. J'ai
envoyé des gens au Nouveau-Brunswick voir le programme RATE. Le Manitoba
et l'Alberta étudient présentement des formules semblables et
nous avons nous-mêmes mis au point un programme qui est
présentement à l'étude quant à ses
implications.
Le problème est donc le suivant: Avec une masse d'argent ou
budgétaire X, est-ce qu'on aide uniquement 25 000 personnes
âgées qui sont dans des centres d'accueil, à peu
près, dans nos logements sociaux actuellement il y a beaucoup de
logements familiaux 13 000 à 14 000 personnes? Donc, on les aide,
j'allais dire complètement ou si, avec des sommes... On continue dans
cette
voie uniquement ou si, avec les mêmes montants d'argent, on essaie
d'aider un plus grand nombre de personnes à rester chez elles aussi
longtemps qu'elles le peuvent, en accroissant leur revenu pour des fins de
logement? Et ceci, évidemment, en essayant de faire en sorte que ces
mesures n'aient pas un effet inflationniste sur le loyer.
Voilà, en gros, l'éventail des tableaux sur lequel il nous
a semblé important d'agir et la mise au point d'un tel programme, par
exemple, à supposer que nous débouchions sur une formule
d'allocations-logement, ne devront pas empêcher c'est bien
évident la réalisation de centres d'accueil, la
réalisation de logements sociaux; il en faudra, il en faudra encore
beaucoup pour répondre aux besoins parce que si, d'une part, on augmente
le revenu des personnes âgées notamment pour leur permettre de
demeurer chez elles lorsque la qualité du logement n'y est pas, il faut
véritablement envisager d'autres formules. C'est donc sur tous ces plans
à la fois qu'il faut agir.
En gros, M. le Président, le dernier point en ce qui concerne la
politique d'habitation au Québec on m'a posé des questions
sur la municipalisation du sol en milieu urbain nationalisation en
milieu urbain, d'accord, mais, pour moi, M. le Président, nationaliser
le sol en milieu urbain, c'est le municipaliser, c'est-à-dire faire en
sorte qu'il soit la propriété de la municipalité.
Effectivement, M. le Président, j'ai passé, peu de temps
après mon arrivée au ministère, un certain...
M. Lavoie: C'est un bon synonyme.
M. Tardif: Or, j'ai passé à mon ministère un
certain nombre de commandes, peu de temps après mon arrivée, sur
cette question de la municipalisation du sol. J'ai des premiers rapports qui
m'ont été remis. Je dois vous avouer immédiatement que
cela a pris à peu près six mois avant qu'on entende mon message
au ministère, parce qu'on n'y croyait pas. Il y a beaucoup de
fonctionnaires au ministère qui étaient encore des fonctionnaires
d'un autre régime et pour qui la propriété privée
était sacro-sainte. C'est le genre de choses avec lesquelles doit
composer un ministre qui arrive dans une institution nouvelle pour s'assurer
que son message est entendu.
Depuis quelques mois, le dossier a été repris par des gens
qui comprenaient ce que je voulais. Ce dossier de la municipalisation du sol
n'est pas évidemment, sans comporter un certain nombre de
difficultés. Déjà, quelques municipalités au
Québec ont le pouvoir de créer des réserves
foncières par leur chartre ou chartre privée. C'est le cas de la
ville de Montréal, c'est le cas de la ville de Québec, c'est le
cas de la ville de Sainte-Foy, c'est le cas d'un certain nombre mais
très peu, finalement de municipalités.
De tout temps, le législateur a hésité à
confier aux municipalités des pouvoirs en matière d'appropriation
du sol. On lui a permis de le faire pour des fins municipales, un parc, des
emprises de rues, ou des choses comme celles-là, mais très peu
pour d'autres raisons, sauf la Loi constituant les fonds industriels pour les
parcs industriels.
M. le Président, c'est vrai que ceci peut comporter un certain
nombre de difficultés, notamment le fait et je serais le premier
à le déplorer que la municipalité acquérant
des immeubles ou des terrains avec les deniers des contribuables puisse les
céder à vil prix à des promoteurs ou à des
bâtisseurs; c'est donc vrai qu'il faut mettre des balises
là-dedans pour s'assurer que ceci ne se produira pas. Je ne voudrais pas
donner l'impression que j'élude la question, mais je pense qu'il serait
illusoire d'espérer que le gouvernement du Québec, depuis le
complexe G ici à côté, pourra exercer une surveillance sur
les transactions dans 1543 municipalités au Québec.
C'est pour cela que je lie tout ce dossier de la municipalisation du
sol, de l'habitation sociale et de bien d'autres, à une prise en charge
par les citoyens de ce qui se passe dans leur ville; je lie cela à la
réforme de la démocratie. Ce n'est pas le ministre des Affaires
municipales et ses fonctionnaires qui pourront aller surveiller par-dessus
l'épaule des conseils municipaux et des maires pour voir ce qui se
passe. Il faut que les citoyens en place puissent le faire. Pour faire cela, M.
le Président, il faut évidemment modifier le processus
électoral; s'arranger pour avoir un peu plus de conseillers aux tables
de conseils municipaux; accroître la présence aux conseils; avoir
des commissions du conseil; avoir, dans les grands centres, des conseils de
quartier; bref, avoir toute une série de mesures qui font en sorte que
la gestion des affaires locales est entre les mains des citoyens et non pas des
groupes d'intérêts.
Je ferme la parenthèse, M. le Président, pour dire que le
dossier de la municipalisation du sol est un des dossiers que j'espère,
après celui de la démocratie et celui de la fiscalité
municipale, pouvoir reprendre comme un des volets, d'ailleurs, d'une politique
de décentralisation gouvernementale. Il n'y a aucune raison au monde
pour laquelle l'habitation sociale, ce que fait la Société
d'habitation du Québec présentement ne puisse pas être fait
au niveau local, mais avec un certain nombre de contrôles, non pas par
l'Etat, mais par les citoyens eux-mêmes. Rien n'empêche que la
municipalisation du sol ne puisse pas devenir effective, que la gestion
même du domaine public in-tramunicipal ne puisse pas incomber y
compris dans les municipalités rurales des forêts du
ministère des Travaux publics, etc. que cela devienne une forêt
municipale je n'ai aucune espèce d'objection à cela. C'est
vers cela qu'il faut tendre.
Discussion générale
M. Scowen: II faut que les citoyens se nationalisent
eux-mêmes?
M. Tardif: Non. Qu'ils se prennent en main et que les affaires
locales ne soient pas entre les mains, encore une fois, d'un petit groupe qui
gère les choses de la collectivité, bien souvent, beaucoup plus
dans son intérêt que dans celui de la communauté.
M. Scowen: Je pensais que c'était une politique ferme du
Parti québécois.
M. Tardif: Cela l'est. Cela l'est toujours.
M. Scowen: C'est pourquoi j'ai posé cette question.
Maintenant, il semble que ce ne soit pas une politique du Parti
québécois, c'est une expression d'un voeu que les citoyens vont
faire quelque chose par eux-mêmes.
M. Tardif: Je m'excuse, M. le Président, c'est plus qu'une
expression de voeu, mais comme je l'ai dit tantôt, je lie cela à
une autre réforme qui est celle de la démocratie municipale et
cela est plus qu'un voeu puisqu'il y a une loi 44 qui a été
adoptée au mois de juin dernier et qu'il y a une loi permanente qui
devrait être déposée avant la fin de la présente
session et qui va s'étendre sur tout le territoire
québécois. M. le Président, ce ne sont pas seulement des
voeux.
M. Scowen: Mais la nationalisation va suivre la
démocratisation, comme le jour suit la nuit. C'est normal que l'un suive
l'autre, parce que...
M. Tardif: Cela m'apparaît normal, en effet, de s'assurer
qu'il y ait en place, sur le territoire...
M. Scowen: Dans une démocratie, tout est
nationalisé. C'est l'un et l'autre. Les deux vont ensemble.
M. Tardif: Là, je m'excuse. Le député de
Notre-Dame-de-Grâce s'amuse à jouer avec les mots: Dans une
démocratie tout est nationalisé. Dans une démocratie,
étymologiquement, le gouvernement est entre les mains de la population.
C'est cela l'origine étymologique du mot démocratie. Alors, si
vous appelez cela nationaliser que de permettre aux citoyens de
s'autogérer, de s'au-toadministrer, d'administrer le patrimoine public,
si vous appelez cela de la nationalisation, soit, cela en est, mais par les
gens eux-mêmes, localement.
M. Cordeau: M. le Président, sur le même sujet.
Le Président (M. Boucher): Est-ce qu'à ce stade-ci
vous désirez commencer à poser des questions, étant
donné que le temps réservé à l'exposé du
ministre est dépassé amplement? Est-ce qu'on s'entend pour
commencer les questions ou si on laisse terminer le ministre?
M. Cordeau: C'est seulement sur la municipalisation des sols. Une
simple question.
M. Tardif: Oui.
Le Président (M. Boucher): II y a consentement.
M. Cordeau: Est-ce que les municipalités ont le pouvoir
d'acquérir des terrains pour revendre à des particuliers pour la
contruction d'habitations?
M. Tardif: Actuellement, non. Seules une dizaine de
municipalités au Québec ont présente- ment ce pouvoir par
charte spéciale. La réponse est non.
M. le Président, on m'a posé des questions en ce qui
concerne la deuxième question, la production de logements depuis la fin
de 1976 jusqu'à maintenant. C'est cela?
M. Scowen: Et pour l'année prochaine si vous en avez.
M. Tardif: D'accord.
M. Scowen: Est-ce que je peux vous aider? ( 11 h 45)
M. Tardif: Non, lequel est-ce, celui-là?
M. Scowen: Le nombre d'unités achevées par
trimestre, mises en chantier et en construction.
M. Tardif: On parle de l'ensemble des logements au Canada.
M. Scowen: Non, pour le Québec.
M. Tardif: On parle de l'ensemble des logements et non pas des
logements produits par la Société d'habitation du
Québec.
M. Scowen: Non. Vous touchez seulement... tant mieux.
M. Tardif: Oui.
M. Scowen: Je ne les ai pas et j'aimerais
énormément les avoir.
M. Tardif: Pour les logements de la société...
M. Scowen: Oui.
M. Tardif: Ah bon.
M. Scowen: Pour les HLM. Sur l'objectif de 7000, combien ont
été réalisées cette année et l'année
passée, 1977. Il y avait un objectif de 7000, où sommes-nous
rendus pour chacun...
M. Tardif: On ne parle pas des HLM, pas tout de suite. M. le
député veut parler de l'ensemble de la production du parc
immobilier.
M. Lavoie: Les HLM.
M. Tardif: Non, il faudrait s'entendre.
Le Président (M. Boucher): Si j'ai bien compris, le
député de Notre-Dame-de-Grâce veut avoir les chiffres pour
les HLM.
M. Scowen: Oui. D'après moi, vous avez établi comme
objectif de construire 7000 logements de cette nature par année, c'est
l'objectif pour...
M. Tardif: Non.
M. Scowen:... 1977 et 1978. Combien en avez vous
complété en 1977, combien en compléterez vous cette
année, et combien en prévoyez-vous toujours d'après cet
objectif de 7000, pour l'année 1978?
M. Tardif: L'objectif de 7000 logements viendrait s'ajouter
à la production d'à peu près 60 000 qu'on espérait
que le secteur privé allait faire. En 1976, effectivement, le secteur
privé a produit 68 000 unités de logement. Je suis conscient
qu'en 1977, ce nombre a baissé et qu'en 1978 également, on
connaît une baisse pour les raisons que j'ai mentionnées
tantôt. Pour ce qui concerne la société d'habitation, sa
production de logements a été la suivante: le nombre de logements
livrés, j'entends ici prêts à être occupés,
entre le mois de novembre 1976 et octobre 1978, a été de
4272.
M. Lavoie: ... octobre 1978.
M. Tardif: C'est ça.
M. Lavoie: Deux ans.
M. Scowen: Cela fait deux ans.
M. Tardif: Livrés habitables.
M. Scowen: 4000...
M. Tardif: 4200...
M. Scowen: Sur un objectif de...
M. Tardif: 4272, livrés, habitables.
M. Scowen: Vous avez suggéré d'en faire 7000 par
année.
M. Tardif: Un instant, un instant. Au cours de la même
période, il y a eu 5051 mises en chantier.
M. Scowen: Cela, c'est pour 1979, probablement?
M. Tardif: Ils ont été mis en chantier au cours de
cette période, d'accord?
M. Scowen: Oui.
M. Tardif: Logements sociaux livrés: 4272. Logements
sociaux mis en chantier: 5051.
M. Scowen: Le ministre, si je comprends bien, a promis 7000 par
année et vous en avez livré 2000. C'est un écart assez
fondamental.
M. Tardif: Si vous me permettez... M. Scowen: Oui.
M. Tardif: ... au cours de l'année 1977, il n'y a rien eu
de fait, ou à peu près.
M. Scowen: Oui, parce que c'était ce qu'il y avait
avant...
M. Tardif: II n'y a rien eu de fait en 1977, en raison justement
des retards accumulés dans la programmation antérieure.
M. Scowen: Mais si vous voulez monter à 7000 par
année, il faut absolument que vous mettiez en chantier beaucoup plus...
il me semble qu'il y a un écart, si je comprends bien.
M. Tardif: M. le Président, la mise à la
disposition des personnes âgées ou des personnes dans le besoin,
de 7000 logements, qui était l'objectif que nous avions et que nous
avons toujours, à cela doit s'ajouter les logements produits par le
programme LOGIPOP. C'est combien? On me dit qu'il y a 550 logements produits
présentement en vertu du programme LOGIPOP, il y en a à peu
près 1700 en voie de réalisation.
Egalement, il faut ajouter à cela, M. le Président,
l'acquisition que nous avons faite dans un cas j'en conviens et
d'autres projets qui sont présentement devant le Conseil du
trésor pour l'acquisition de projets de la Société
centrale d'hypothèques et de logement et qui sont dans ce total. Je
n'irai pas jusqu'à ajouter les 1000 logements du Village olympique pour
compléter le comble.
M. Scowen: Est-ce que je peux simplement vous poser la question
d'une façon très directe? Pour l'année 1978, cette
année, combien de logements de ce type allez-vous compléter? Et
combien prévoyez-vous en compléter en 1979? Je veux
connaître simplement les deux chiffres. Combien cette année et
combien l'année prochaine?
M. Tardif: L'objectif de 7000 est toujours là, M. le
Président. Je pense que nous devrions peut-être nous situer
quelque part entre 6000 et 6500 pour 1978.
M. Scowen: 6000? M. Tardif: Oui.
M. Scowen: Vous en aurez 6000. Et, jusqu'à maintenant,
vous avez les chiffres pour quel mois? Vous avez les chiffres pour
septembre?
M. Tardif: Le 31 octobre 1978.
M. Scowen: Pour l'année 1978, c'est-à-dire dix
mois, combien ont été complétés?
M. Tardif: Complétés ou mis en chantier?
M. Scowen: Complétés, en 1978, pour les dix
premiers mois? Combien y en a-t-il qui ont été
complétés?
M. Tardif: Je vais vous donner les chiffres. Pour le mois
d'octobre 1978... Est-ce qu'on a inclus là-dedans la série que la
ville de Montréal a décidé, comme cela, d'ouvrir en cette
période de l'année? Tous ceux que la ville de Montréal
ouvre toutes les semaines, depuis un mois à peu près,
on voit cela dans les journaux, le centre Etienne-Desmarteau, la maison
Unetelle, la résidence... Il y a une ouverture de HLM toutes les
semaines à Montréal. Est-ce que vous avez vu cela dans les
journaux?
M. Lavoie: Est-ce qu'il y a une raison spéciale?
M. Tardif: Je demande à la société si on a
inclus ceux-là. C'est qu'il peut y avoir une différence
appréciable tout à coup. Cela fait à peu près sept
ou huit qu'on ouvre.
M. Scowen: C'est une question très simple que je vous
pose. Pour les dix premiers mois de l'année 1978, combien en aurez-vous
complété?
M. Tardif: Pour le mois d'octobre 1978, 266 logements ont
été livrés. D'accord?
M. Scowen: Oui.
M. Tardif: Pour le mois de septembre, 116; pour le mois
d'août, 121; pour le mois de juillet, 261; au mois de juin, cela a
été nul; au mois de mai, 17; au mois d'avril, cela a
été nul; au mois de mars, cela a été 197 logements;
au mois de février, 105; et au mois de janvier, cela a été
nul.
M. Scowen: Je vais faire le total pour vous.
M. Cordeau: En attendant, sur les 4272 logements livrés,
combien de logements ont été livrés pour personnes
âgées?
M. Tardif: Là... Un instant!
M. Scowen: Bon! Pour les dix premiers mois, vous en avez
complété 1085. Vous en prévoyez 6000 pour l'année
1978. Cela veut dire que vous avez l'intention d'en compléter encore
à peu près 6000 pendant les mois de novembre et de
décembre.
M. Tardif: Non. Ce n'est pas la façon de calculer cela,
monsieur.
M. Scowen: Pardon?
M. Tardif: Je vous parle du nombre de logements mis en
chantier.
M. Scowen: Non, je parle du nombre de logements
complétés. On ne peut pas habiter un logement mis en
chantier.
M. Tardif: Un logement ne se bâtit pas en un jour. Il y a
un processus très long de réalisation. Ce que je peux faire,
monsieur, c'est de les mettre en chantier, en espérant qu'ils se
réaliseront dans des délais raisonnables.
M. Scowen: Quel est le délai?
M. Tardif: Quand je suis arrivé au ministère, il y
avait des logements qui dataient de 1973 et nous étions en 1976. Il y en
a de l'année 1974 qui traînent encore dans le paysage, et il y en
a de l'année 1975 qui traînent encore dans le paysage. Si vous me
le permettez, on va s'entendre là-dessus. La Société
d'habitation n'est pas responsable de tout cela. Et je ne mettrai pas le
blâme non plus, quoi que vous en pensiez, sur le gouvernement
fédéral. Je vais essayer de vous expliquer comment cela se fait,
un HLM. D'accord?
Il y a d'abord un groupe de citoyens qui s'adressent à la
municipalité et qui disent: On voudrait avoir X logements pour personnes
âgées ici. La municipalité s'adresse à la
Société d'habitation et fait sa demande. Ces demandes,
présentement, nous en avons, bon an mal an, à peu près
entre 12 000 et 15 000, c'est-à-dire non pas 15 000 demandes, mais des
demandes pour 15 000 logements à peu près. Le gouvernement, le
Conseil du trésor détermine son enveloppe et dit: On pourra
investir tant dans le logement social cette année. Je pense que je ne
vous apprends rien en vous disant comment se prend ce genre de
décision-là. Il y a la Société centrale
d'hypothèques et de logement qui, elle aussi, établit son budget.
Si on a programmé plus que ce que nous avons comme enveloppe
budgétaire de prêts ce ne sont pas des cadeaux de la
Société centrale d'hypothèques et de logement, dans ce
cas-là, c'est un prêt si on a budgétisé plus,
il faut nous réajuster ou le financer nous-mêmes ou autrement. On
verra tantôt les modalités qui sont enfin changées.
A ce moment-là, une fois que c'est autorisé au Conseil des
ministres, j'envoie une lettre c'est ce que j'ai fait pour
l'année 1978 aux municipalités en disant: Le gouvernement
a retenu, dans sa programmation de 1978, l'inscription de 6000 logements.
D'accord? Concernant ces 6000 logements, j'ai envoyé une lettre à
chacune des municipalités en disant: Chez vous, il y en aura tant.
A la ville de Montréal, c'est une enveloppe globale de 800
logements. C'est elle qui décide de l'emplacement. Incidemment, s'il n'y
en a pas plus dans le comté de Notre-Dame-de-Grâce, il faudra que
le député s'adresse à la ville de Montréal. C'est
elle qui choisit les emplacements à Montréal.
Ces 6000 logements, dans les semaines qui suivent, le président
de la Société d'habitation écrit à la
municipalité et dit: Donnez-nous trois hypothèses de
terrains.
Une Voix: Oui.
M. Tardif: Un instant! Si vous voulez me laisser finir, vous
allez voir que c'est là que commence le "fun". Trois hypothèses
de terrains. Evidemment, je vous passe les pressions qu'il peut y avoir au
conseil municipal pour pousser tel terrain plutôt que tel autre, mais
à tel point que, dans certains cas, six mois, un an après, le
terrain n'est pas encore choisi. Je vais aller plus loin que cela. Dans
certains cas, j'ai eu, je ne dirai pas la
preuve, mais à peu près la conviction morale que des
terrains avaient quelquefois changé de main, si bien que, cette
année, j'ai arrêté la procédure et j'ai
demandé à la Société d'habitation d'envoyer,
après sa lettre demandant trois choix de terrains, une lettre circulaire
à toutes les municipalités en demandant de nous indiquer les
transactions dont ces terrains avaient fait l'objet depuis cinq ans, à
qui cela a été vendu et le prix.
M. Scowen: Bonne idée.
M. Tardif: II y a des municipalités qui ont retiré
leurs projets de terrains.
M. Lavoie: Mais il n'y a rien qui se bâtit pendant ce
temps-là.
M. Tardif: Je m'excuse, mais je n'irai pas favoriser l'achat du
terrain de M. Tartempion.
M. Lavoie: Non, d'accord, mais il y a d'autres formules.
M. Tardif: D'accord.
M. Lavoie: Je suis bien d'accord avec vous d'ailleurs sur cela,
mais le mécanisme est trop lourd.
M. Tardif: J'en conviens. Dans un deuxième temps, M. le
Président, la société, jusqu'à maintenant, croyant
à l'entreprise privée, remettait tout à des professionnels
de l'extérieur pour tout faire. On faisait faire des plans et, chaque
fois, des plans nouveaux par des architectes et des ingénieurs. Ces
gens-là avaient des délais pour réaliser cela. Il y avait
trois phases dans la préparation des plans, j'ai appris cela. Ils
avaient, je ne sais, 60 jours pour faire les esquisses préliminaires, 90
autres jours pour faire les plans et devis et 90 autres jours pour faire les
plans et devis complets avec le cahier de charges et tout cela. Or, il y a des
firmes qui, après six mois, n'avaient pas terminé la phase I,
seulement. On recevait des plans. Nos gens regardaient cela et, après
six mois, parfois le délai était expiré, ils approuvaient
ou pas les esquisses, retournaient cela à la firme qui pouvait faire la
deuxième étape, etc.
Nous avons essayé de resserrer ces délais et, je l'ai dit
tantôt, mis en branle la réalisation de nos propres plans. Nous en
avons bâtis incidemment. Dans le secteur Hertel, à
Trois-Rivières, ce sont les plans de la société faits par
les ingénieurs, et les architectes de la boîte, qui sont
réalisés là. On est à nouveau allé en appel
d'offres, à quel endroit avec ces plans? Nous sommes en appel d'offres
sur nos plans à nous.
L'autre point: naïvement, j'avais cru qu'on pourrait
répéter des projets faits ailleurs, jusqu'à ce
qu'évidemment l'Ordre des architectes et des ingénieurs insiste
pour négocier des tarifs particuliers pour la répétition
de leur projet. Ces procédures, ces négociations ont
été faites et nous avons effectivement négocié,
sauf qu'on s'est heurté à un deuxième problème qui
est celui de la réaction, par exemple, de l'ingénieur et de
l'architecte de Hull quand ils ont vu que c'était un projet de
Valleyfield c'est un cas réel que je vous donne qu'on
répétait un projet de HLM qui a été bâti
à Valleyfield. (12 heures)
Ils n'aiment pas beaucoup qu'on répète un projet de HLM
qui a été bâti à Valleyfield, à ce moment,
ils n'aiment pas cela beaucoup. Ils auraient aimé travailler au projet.
Evidemment, il y a l'acquisition des plans auprès de la firme qui l'a
conçu originellement et il y a la surveillance des travaux qui peut
être confiée aux firmes locales, tout ceci, évidemment,
s'étale sur une période de temps. Finalement, il y a la
procédure des appels d'offres et des soumissions publiques. C'est la
raison pour laquelle il nous a semblé, à moins qu'on ne veuille
complètement changer la façon de procéder,
c'est-à-dire ne pas avoir cette procédure de soumissions
publiques, que les délais soient beaucoup plus longs que ce qu'ils
devraient être normalement.
Il y a d'autres problèmes qui viennent se poser à cela,
par exemple lorsqu'il s'agit de construction de HLM à l'intérieur
de programmes PAO, c'est-à-dire les programmes d'amélioration de
quartiers, où là, c'est tout un quartier qu'il faut
démolir, ou bien il faut conserver certaines maisons, refaire les
infrastructures, les rues, etc., et il faut exproprier, il faut reloger les
gens. Alors, il y a des délais considérables, et nous devons
aussi, prioritairement, reloger ces gens qui pourraient être
déplacés dans un programme PAQ et autres.
Lorsque le député de Notre-Dame-de-Grâce me demande
quels sont les délais, je dis qu'ils sont beaucoup trop longs.
M. Scowen: Je sais qu'il y a deux intervenants qui veulent
parler, mais je veux simplement insister sur ce point. J'admets que ces
complications sont énormes. Elles étaient là il y a deux
ans, elles sont encore là, mais, si je comprends bien, M. le ministre,
cette année, pour 1978, par rapport à un objectif de 7000 HLM,
nous allons en réaliser 1085 pour les premiers dix mois, plus quelque
chose pour les deux derniers mois que vous ne pouvez pas prévoir.
Probablement que, cette année, dans le domaine des constructions des
HLM, nous serons à peu près à 1500. C'est mon estimation.
Si vous en faites 250 pour les mois de novembre et de décembre, nous en
serons à 1500 par rapport à un objectif de 7000, dans la
deuxième année de votre gouvernement. Peut-être que vous
préférez que les autres interviennent, parce qu'ils vont
certainement soulever des questions, mais il y a certainement un rattrapage
à faire pour les années 1979 et 1980, si ces chiffres sont
vrais.
M. Tardif: En réponse à cela, je voudrais seulement
ajouter deux mots pour dire que c'est en termes de nombre de projets
démarrés et mis en chantier pour l'année 1978 que notre
objectif doit être mesuré, c'est-à-dire de sortir du moulin
ou de la machine à saucisse ce qui y était depuis
un certain nombre d'années; cela suit son cours normalement. Je
parle de mises en chantier de logements au cours de l'année. On ne sera
pas tellement loin de l'objectif de 7000. On ne l'atteindra pas. On sera
peut-être beaucoup plus près de quelque 6000 mises en chantier.
D'accord?
Le Président (M. Boucher): II est déjà midi.
Il y a trois intervenants qui ont demandé la parole, soit le
député de Saint-Hyacinthe, le député de Rimouski,
le député de Laval.
M. Lavoie: M. le Président, je ne voudrais pas en faire
une question de règlement, mais vous comprendrez qu'il s'agit de
questions avec débat et, dans l'esprit du règlement, la
préférence est accordée nécessairement au
député ou au parti qui pose la question. En somme, je pense qu'on
a une discussion positive. Je ne veux pas brimer du tout le
député de Rimouski.
Le Président (M. Boucher): Dans le règlement, on
mentionne le député qui pose la question, non pas le parti.
M. Lavoie: J'ai travaillé avec le président de
l'Assemblée lorsque la rédaction du règlement a
été faite. Je ne priverai personne. Si ce n'est pas trop long, je
n'ai pas d'objection à ce que le député de Rimouski
intervienne, parce que... Je suis prêt à donner la parole au
député de Saint-Hyacinthe, mais je voudrais être reconnu.
Est-ce que le député de Rimouski...
M. Marcoux: Je n'en ai pas pour très longtemps, d'autant
plus qu'autant que possible, je voudrais prendre l'autobus à 13 h
15...
M. Lavoie: Je voudrais bien avoir le temps...
M. Marcoux: De toute façon, l'esprit
général... Je suis d'accord avec le leader que l'esprit
général...
M. Cordeau: Moi aussi, je veux bien collaborer si le
député de Rimouski n'en a pas pour longtemps... Je veux bien,
pour être sûr qu'il prenne son autobus à 13 heures, si c'est
pour cinq minutes, et je prendrai la parole après.
Le Président (M. Boucher): Du consentement, est-ce qu'on
donne la parole au député de Rimouski?
M. Lavoie: Cela va.
Le Président (M. Boucher): D'accord. M. le
député de Rimouski.
M. Marcoux: Comme les questions d'ordre général sur
l'ensemble de la politique ont été posées, j'aurais des
questions plus précises sur trois ou quatre sujets.
Ma première question portera sur les suppléments de loyer.
Il y a un an et demi déjà, le ministère et la
Société d'habitation du Québec annonçait que ce
nouveau programme entrerait en oeuvre et il y avait déjà $2
millions de prévus au budget de 1977/78; il y a $2 millions additionnels
de prévus au budget de 1978/79. Je voudrais savoir, jusqu'à
maintenant, combien d'organismes sans but lucratif ont eu accès à
ce programme? Combien de logements ont été touchés, etc.?
Voilà ma première question.
Ma deuxième question concerne les coopératives
d'habitation locatives. Dans le programme diffusé depuis un an et demi,
il y a trois aspects. Il y a des subventions de $500 pour la
coopérative, jusqu'à $50 000 pour le groupe technique. Il y a une
chose qui est très précise, on mentionne qu'il y a une subvention
qui peut aller jusqu'à $1500 par logement soit rénové ou
construit pour les coopératives.
Actuellement, il y a plusieurs coopératives qui sont en voie de
formation ou qui sont déjà formées dans ma région
et qui éprouvent un problème très grave, qui est le
suivant, c'est-à-dire de ne pas savoir ce qui en est exactement. Lorsque
ce programme a été annoncé, sous les anciens programmes de
la SCHL, il n'y avait pas de problème. Maintenant, ils sont soumis
à des informations contradictoires. Dans le courant de
l'été, la Société d'habitation du Québec
disait: Les $1500, vous y avez droit, de toute façon, et, depuis
quelques semaines, on dit parfois: Non, vous n'y aurez plus droit; parfois:
Oui, vous aurez droit aux $1500 de subvention dans le cadre des nouveaux
programmes de la SCHL.
Je voudrais savoir si, maintenant, il y a une disposition
définitive qui pourrait même être publiée pour
sécuriser, pour que tout soit clair, en tout cas, si c'est oui ou si
c'est non, pour les coopératives de notre région qui sont dans le
brouillard actuellement, ce qui ne facilite pas le développement des
coopératives.
Ma troisième question. Je la formulerai le plus brièvement
possible. Vous avez annoncé, en juin, une programmation de 6000
logements à être construits dans l'année, dans les deux ans
ou dans les trois ans à venir, selon le taux d'efficacité. Je
voudrais savoir où est rendue cette programmation de 6000 logements
annoncée en juin. Je veux vous faire part d'un problème
j'essaie de ne pas poser la question inutilement dans mon comté.
On fait face à un problème précis. J'ai réuni,
à plusieurs reprises, les quatre municipaltés touchées
pour faire en sorte qu'elles soient le plus rapides possible et que, dans le
choix des terrains, ça ne retarde pas de dix ou de cinq mois, etc. Je
dois dire qu'elles ont coopéré; elles l'ont fait entre quatre et
six semaines au maximum, et dans au moins deux des quatres cas, ce sont des
terrains déjà publics, ce ne sont pas des
propriétés privées. Je dois dire que deux mois et demi
à trois mois après, elles n'ont encore eu la visite de personne,
après de multiples appels à la Société
d'habitation du Québec pour se faire dire: Votre terrain convient
ou ne convient pas, ou, commencez à faire les transactions entre le
ministère de l'Éducation ou des Affaires sociales dans deux des
cas. Cela commence à m'inquiéter et à inquiéter ces
municipalités, parce que je leur avais dit qu'avant, la moyenne,
c'était trois ans avant de construire un HLM. Je leur avais dit: On veut
essayer de ramener ça à un an et demi, deux ans, mais là,
je crains d'avoir à ravaler des paroles ou à oublier des souhaits
et des objectifs qu'on avait fixés.
Je voudrais savoir, de façon générale, dans
l'ensemble du Québec, où on en est rendu dans les étapes
il y a huit étapes à franchir avant qu'un projet soit
livré pour ces 6000 logements dans l'ensemble, mais, entre
autres, s'il y a des régions spécifiques sur lesquelles vous avez
des chiffres, ça me ferait plaisir de les avoir.
Je poserais quand même une question globale. Si vous trouvez
qu'elle est trop globale pour l'aborder aujourd'hui, on la retiendra et on
l'abordera à nouveau. C'est un peu la conception globale du
logement.
Actuellement, dans plusieurs localités où il y a de gros
blocs de logements à loyer modique, où il y a des personnes
âgées, on commence à constater qu'il y a de graves
problèmes sociaux qui s'en viennent, en ce sens que c'est presque en
train de devenir souvent des centres d'accueil déguisés, et comme
il n'y a pas suffisamment de place dans les centres d'accueil, il y a toutes
sortes de problèmes humains et sociaux qui en découlent.
Etes-vous en train de faire une évaluation des effets sociaux de
la politique actuelle de construction de HLM? Je ne parle peut-être pas
des petits HLM, mais des gros HLM où on place 100, 200 ou 90 personnes
âgées ensemble et où il y a un vieillissement de la
population, un isolement social souvent et les conséquences que cela
suppose, comparativement à des expériences d'autres pays qui
visent plutôt à réserver 10% des logements privés
répartis sur l'ensemble du territoire d'une municipalité pour ne
pas faire de l'isolement social. Je sais que c'est une question très
longue. Si vous préférez ne pas l'aborder, d'accord, mais je la
soulève quand même pour plus tard, c'est-à-dire pour un
autre débat qui pourrait avoir lieu sur l'habitation. Disons que, pour
le moment, je m'en tiendrai à ces questions limitées...
Le Président (M. Boucher): D'accord. Merci, M. le
député.
M. Marcoux: ... sauf la dernière, si vous trouvez qu'elle
est trop vaste.
Le Président (M. Boucher): Est-ce que M. le ministre veut
répondre tout de suite ou si...
M. Marcoux: Brièvement.
M. Tardif: Je vais essayer de faire vite. Globalement, pour le
programme de supplément de loyer, M. le Président, qui va
s'appliquer au départ je l'ai dit aux coopératives
et aux organismes sans but lucratif, il y a deux types d'organismes sans but
lucratif; il y a ceux de la Société d'habitation du Québec
et il y a ceux de la Société centrale d'hypothèques et de
logement. En ce qui concerne la Société d'habitation du
Québec, le projet est en marche pour un certain nombre de logements qui,
déjà, bénéficient du programme de supplément
de loyer. En ce qui concerne la SCHL, nous avons écrit, le 6 avril 1978,
à la SCHL de nous faire connaître l'emplacement de chacun des OSBL
financés par elle, les locataires qui y habitaient et la proportion
d'aide qu'ils recevaient déjà de la SCHL. Nous avons eu cette
réponse de la société centrale le 30 octobre 1978
seulement. Donc, le projet va suivre son cours. Nous avons une restriction,
à savoir que seulement 25% des logements dans un immeuble pourraient
être admissibles au programme de supplément de loyer et nous
sommes en train de demander de revoir cette norme.
Deuxièmement, en ce qui concerne le programme LOGIPOP, encore
là, c'est vrai qu'il y a une certaine inquiétude de la part des
coopératives qui nous ont écrit et envoyé des
télégrammes. Nous pouvons les assurer d'une chose, c'est que le
programme LOGIPOP, lui, continue, c'est-à-dire la subvention de $1500
par unité de logement produite. Cependant, il est bien évident
que cela ne suffit pas pour permettre aux coopératives de produire du
logement. C'était intéressant pour elles dans la mesure où
elles pouvaient bénéficier de deux choses: le financement
à titre d'organismes sans but lucratif, c'est-à-dire, donc, avoir
un prêt à 100%, une remise gracieuse de 10% du prêt, et un
financement à 8% d'intérêt remboursable sur 50 ans.
Or, au gouvernement fédéral, présentement, la
société centrale a décidé de modifier les
règles du jeu et ne veut plus fonctionner de cette façon. A la
place, elle demande à tous les organismes, quels qu'ils soient,
municipalités, provinces, coopératives, de se financer sur le
marché privé et propose à la place un programme de
bonification du taux d'intérêt qui pourrait le réduire soit
à 2%, soit à 1%. Mais il y a des restrictions dans ces
programmes, à savoir que les locataires ou les membres des
coopératives devraient consacrer 25% de leurs revenus au logement. Or,
on pense que c'est tuer les coopératives au départ, puisque les
gens dans les coopératives, généralement, ne contribuent
pas nécessairement 25% en argent, mais contribuent par leur travail soit
à terminer le logement eux-mêmes, soit à le peindre, soit
à l'aménager, soit à le gérer. Il y a donc, de la
part des sociétaires, une contribution autre que cette contribution en
argent qui s'évalue.
J'ai donc fait des représentations avec mes collègues des
autres provinces, d'ailleurs, pour que ce programme des coopératives ne
soit pas aboli par le fédéral et que cette clause de 25% ne soit
pas implantée. En ce qui nous concerne, notre programme continue.
M. Marcoux: La subvention de $1500 par logement? Le nouveau
programme fédéral, à partir du 1er janvier, fait qu'un
organisme sans but
lucratif ou une coopérative peut avoir la déduction de 2%
ou de 1% d'intérêt s'il y a emprunt de 100% ou de 90%. Dans ce
cas-là, est-ce que la subvention de $1500 qui était
supposément offerte dans cela va être maintenue? C'est là
le problème précis. Est-ce qu'elle tombe ou si elle est
maintenue? C'est la question à laquelle on doit répondre?
M. Couture (Jean-Marie): Dans les premières offres du
fédéral, ces $1500 auraient réduit d'autant la
contribution du fédéral et c'est pour cela qu'on a
protesté. On ne le sait pas encore exactement parce que le
fédéral ne nous a pas dit quelles modifications il va apporter
à son programme, mais nous voulons le maintenir dans la mesure où
cela va profiter aux coopératives et non pas réduire la
contribution du fédéral. (12 h 15)
M. Tardif: Je m'excuse, mais j'aurais dû le faire avant. M.
Couture, le président de la société, M. Serge Carreau,
vice-président sont là également pour apporter des
précisions dans les aspects techniques, s'il y en avait.
M. Marcoux: J'aurais une troisième question. M.
Cordeau: C'est plus de cinq minutes... M. Lavoie: Cela fait
déjà dix minutes.
M. Marcoux: Si on veut faire une question de règlement, on
essaie de connaître nous aussi les règlements. Selon l'esprit
général, celui qui soulève la question avec débat a
droit à la majorité du temps; de 10 h 15 à 12 heures, nous
avons été rigoureusement silencieux. Jusqu'à maintenant,
nous avons utilisé dix minutes de ce côté-ci.
M. Lavoie: Mais le ministre aussi a répondu.
M. Marcoux: Oui, mais il n'a pas été interrompu non
plus. Il avait droit à 20 minutes et on l'a laissé aller. J'avais
une troisième question que je ne jugeais quand même pas farfelue
et qui vous intéresse, savoir les 6000 logements qui ont
été annoncés en juin, je pense que cela entre dans le
prolongement des questions du député de...
M. Cordeau: Mais je pense que le ministre a donné des
statistiques tantôt.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Saint-Hyacinthe, le député de Rimouski a posé quatre
questions, si je me souviens bien. On était rendu à la
réponse de la deuxième question et on en est à la
troisième.
M. Tardif: Deux mots pour donner des statistiques. Cela pourrait
vous intéresser de savoir où les 6000 en sont rendus, tout le
monde.
M. Scowen: D'accord.
M. Tardif: Sur les 6000 logements programmés pour 1978,
c'est-à-dire à compter de l'exerci- ce financier du gouvernement,
donc le 1er avril, dans 47 projets représentant 1601 logements, les
dossiers en sont encore aux étapes préliminaires. On a
informé la municipalité, et on attend d'avoir des nouvelles d'eux
dans 47 projets. Dans 112 projets pour 3151 logements, nous sommes à
l'étape de l'acquisition de terrains. Dans douze projets pour 258
logements nous en sommes à l'étape préparation des plans
et devis; dans deux projets, nous sommes à l'étape des
soumissions; cela était au 31 octobre. Maintenant, en date
d'aujourd'hui, on m'informe qu'il y en a un en construction déjà.
Cela est assez exceptionnel. C'est un projet dans le comté de
Bellechasse à Saint-Gervais qui est en construction présentement.
Voilà l'état de ces dossiers-là. Pour ce qui concerne,
rapidement, le comté de notre collègue, je dois vous dire que
pour toute la partie de la Gaspésie et du Bas-Saint-Laurent, j'ai un
mémoire qui est présentement au Conseil du trésor pour
obtenir la permission de procéder par ce que j'appelle la formule de
gérance de projets, c'est-à-dire qu'au lieu d'avoir des
chargés de projets à l'interne dans la société
d'habitation qui pourraient s'occuper de cela, on confie à un
gestionnaire extérieur la réalisation des quelque 450 logements
de tout le Bas-du-fleuve.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président, étant donné
l'heure tardive, nous allons couper les préambules pour aller un peu
plus dans le sujet. Comme le disait hier le premier ministre, lorsqu'on est
d'un côté de la table ou de l'autre, à l'Assemblée
nationale, des fois les opinions changent. J'aimerais rappeler une des
priorités que M. Marc-André Bédard, critique du Parti
québécois, lorsqu'il était dans l'Opposition,
suggérait au gouvernement du temps. Premièrement, il
suggérait qu'une subvention directe de $1000 par habitation neuve soit
allouée. Est-ce que le ministre a envisagé cette situation? Bien
sûr qu'actuellement le gouvernement fédéral accorde $1000
par logement, mais c'est une question. Ensuite, la promulgation d'un
authentique code du bâtiment. Ce serait une autre chose à
considérer. Troisièmement, le relancement des coopératives
d'habitation essentielles à la santé du logement. Bien sûr
qu'actuellement, le gouvernement a touché à ce point et
probablement qu'au fur et à mesure cela évolue; je crois que ce
point a été couvert. Finalement, l'instauration d'une politique
vigoureuse et sévère contre la spéculation foncière
en milieu urbain. Je crois que tantôt, M. le ministre, en réponse
aux questions du député de Notre-Dame-de-Grâce, en a
parlé lorsqu'il a parlé de la municipalisation des sols en milieu
urbain. Par contre, suite à ma question, il a répondu qu'il n'y
avait qu'environ dix municipalités qui avaient ce pouvoir. A-t-il
l'intention de modifier le code municipal afin d'accorder aux autres
municipalités ce pouvoir?
Au début de son mandat, M. le premier ministre avait
également parlé de 7000 logements sociaux par année. Il
avait spécifié, dans le temps,
que ces logements seraient accordés en priorité aux
personnes âgées et aux jeunes couples de 25 ans à 35 ans.
Il voulait aussi établir des contrôles concernant les
démolitions de logements de façon à réduire le
nombre d'au moins de moitié.
J'aimerais avoir des explications concernant ces politiques que le
premier ministre voulait réaliser. Dans un autre domaine, tout à
l'heure, le député de Rimouski a mentionné que, souvent,
les logements vieillissants, les HLM ou des constructions
réalisées par des particuliers deviennent des ghettos pour ceux
qui y habitent. C'est un peu vrai dans la société. Je crois qu'il
faudrait apporter une attention spéciale de ce côté afin
que ceux qui habitent ces logis ne soient pas considérés comme
des gens habitant des ghettos. Peut-être que la façon de
construire les logements serait une façon d'améliorer cette
pensée qui circule parmi la population et qui est souventefois non
réelle.
M. Tardif: En ce qui concerne le programme de $1000 par logement,
M. le Président, le député de Saint-Hyacinthe a
lui-même mentionné que le gouvernement fédéral avait
un tel programme, que nous administrons d'ailleurs, de $1000 par unité
de logement, qu'on considère une prime à la densité,
moyennant qu'il y ait entre 10 et 45 unités de logement à l'acre
qui soient construits. Il ne nous semblait pas souhaitable de faire double
emploi à ce sujet. Néanmoins, il se pourrait qu'effectivement,
dans les zones plus fortement urbanisées, nous repensions ce programme,
d'autant plus que le gouvernement fédéral met un terme à
ce programme, qui se termine le 31 décembre prochain.
Les programmes PAQ se sont terminés le 31 mars dernier, le
programme de primes à la densité se termine le 31 décembre
prochain et celui des égouts et des aqueducs, qui est aussi du
fédéral. Tout ceci devait être remplacé par les
programmes d'équipements communautaires, les programmes PEC, mais
c'était avant l'annonce des coupures par M. Trudeau, si bien qu'il se
pourrait que, pour l'année en cours et dans les mois qui vont suivre,
pour remplacer les programmes existants, on n'ait pas un rond.
Deuxièmement, le député de Saint-Hyacinthe demande
si on va adopter un code du bâtiment. Il y a un code du bâtiment.
Il y a le code fédéral, le code national du bâtiment, et il
y a un code québécois du bâtiment qui existe
déjà. Ce qui est prévu dans la Loi pour favoriser les
relations entre locataires et locateurs, c'est un code minimal
d'habitabilité qui prévoit des normes minimales en
deçà desquelles aucun logement ne pourra être loué
ou habité. Ce projet de code va être adopté sous forme de
règlement, suite à la loi de conciliation, il est prêt,
j'ai déjà la première ébauche du règlement
en question, de normes minimales d'habitabilité.
Troisième question, lorsqu'il parle de la spéculation
foncière et qu'il lie ça au projet de permettre aux
municipalités de municipaliser le sol, la réponse est oui, j'ai
l'intention d'agir dans ce domaine, oui, j'ai l'intention de confier aux
municipalités la gestion du patrimoine foncier, mais pas à
n'importe quelle condition, après m'être assuré
qu'effectivement les citoyens pourraient être en mesure d'exercer un
contrôle sur ce qui se passe à l'hôtel de ville. C'est pour
ça que j'ai relié ça à certaines réformes de
la démocratie.
Quatrièmement, en ce qui concerne le contrôle des
démolitions, M. le Président, la réponse est oui, nous
avons déjà donné à la ville de Montréal,
l'an dernier, dans sa charte, le pouvoir de contrôler les
démolitions et dans le projet de loi sur les relations
locataires-locateurs, il y a un chapitre sur la conservation du stock
immobilier. C'est notre intention de permettre à la loi de
contrôler les démolitions, non seulement les démolitions,
mais les changements d'affectation, les subdivisions de logements et les
démolitions.
Finalement, en ce qui concerne le phénomène de
"ghettoïsation" que peut représenter le fait pour un certain nombre
de personnes âgées d'être concentrées, enfin pour des
logements sociaux de présenter une certaine concentration,
là-dessus, la réponse est double: Le stigmate est où? Chez
les gens ou dans l'esprit de ceux qui les regardent comme le
député de Saint-Hyacinthe?
Je ne dis pas cela pour être méchant mais il y a des gens
qui, contre toute attente, même des gens relativement à l'aise,
demandent d'aller vivre dans ce genre de truc-là. Je m'excuse, mais dans
mon comté de Crémazie, il y a un HLM en construction sur
Henri-Bourassa et il y a des gens, des rentiers qui avaient des revenus
passablement élevés, qui sont venus me voir et qui voulaient s'en
aller là. Il y a une espèce de communauté, il y a une
salle communautaire. Les gens sont seuls maintenant dans leur grand logement et
ils veulent participer à cette vie. Ils appartiennent au même club
de l'âge d'or, au même club de bridge, etc.
Il y a une demande chez les gens et ce qu'on peut considérer
comme un ghetto pour un certain nombre des usagers, cela ne l'est pas du tout.
Je suis d'accord qu'il y a des gens qui ne veulent rien savoir de cela et qui
veulent continuer à vivre dans la maison où ils ont
élevé leur famille. C'est tout à fait normal. On peut les
aider à faire cela.
C'est pour cela que je dis qu'il faut faire attention lorsqu'on parle de
ghettos, particulièrement en ce qui concerne les personnes
âgées. Quant à cela, mon comté s'en vient pas mal
ghetto, autant que celui du député de Notre-Dame-de-Grâce,
puisque j'ai 30% de ma population qui a plus de 60 ans.
Sur ce plan...
M. Scowen: Je suis supposément le champion dans ce
domaine.
M. Tardif: On ne doit pas être loin l'un de l'autre.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval.
M. Lavoie: Je vais essayer d'être le plus concis
possible.
Une Voix: II vous reste trente minutes.
M. Lavoie: Cela va. Je voudrais laisser un peu de temps au
ministre pour répondre à certains commentaires que je vais faire.
Je suis parfaitement d'accord avec le ministre que c'est un milieu très
difficile à cause de la mouvance des fluctuations qui est reliée
à une multitude de facteurs. Je pense que le ministre s'en rend compte.
Je l'ai connu à la fin de 1976, au début de 1977, alors qu'il
était rempli de bonne foi, fringant et qu'il voulait apporter une
contribution des plus valables dans le domaine du logement.
Je pense qu'aujourd'hui, avec les propos qu'il nous tient, il se rend
compte que la réalité est souvent différente des
intentions, des voeux ou des programmes qu'on peut avoir, entre autres, et sans
vouloir faire de la politique, lorsqu'on dit, dans le programme du Parti
québécois, édition 1968, où je décèle
certaines erreurs: "Les Québécois sont, parmi les occidentaux,
ceux qui paient le plus cher pour se loger", j'ai des doutes sur cela. Je crois
qu'il y a des doutes. D'ailleurs, on sait qu'actuellement, dans d'autres
provinces canadiennes, le loyer est plus élevé. Je ne parlerai
pas de l'Europe, parce qu'actuellement, les loyers et le coût des
condominiums ou des logements en Europe sont souvent le double ou le triple de
ceux d'ici. D'ailleurs, je suis endossé dans ce domaine par le ministre
d'Etat au développement économique qui disait, le 8 septembre
1978, et je cite le ministre Landry: "Quoique des études
récentes, rapport Legault, rapport Castonguay, soient venues identifier,
au cours des dernières années, certaines dimensions
particulières des problèmes de logement au Québec, nous
croyons qu'on a grandement surestimé la nature et l'importance de
ceux-ci. La situation du logement au Québec, dans son ensemble, n'est
pas pire que celle prévalant dans le reste du Canada et ce, tant au
point de vue des coûts, des normes, de la variété et de la
disponibilité."
C'est sûr que c'est normal et je crois que c'est de bonne
guerre lorsqu'un parti politique se présente... Je me rappelle du
Parti libéral, en 1960 et du Parti québécois en 1976. On
veut chambarder, on veut tenter d'améliorer la situation.
Je vois, dans le programme du Parti québécois:
Préserver l'environnement humain et naturel du milieu concerné.
Je crois que tous les partis politiques sont en faveur de cela. Je ne connais
pas grand monde qui est contre la vertu. Impliquer les gens dans la conception
et la réalisation des projets d'habitation, c'est déjà
plus difficile. C'est encore un des voeux du ministre, mais je pense que dans
notre mentalité un peu nord-américaine, dans notre conception,
dans nos traditions assez individualistes, ce n'est pas toujours facile
d'impliquer le milieu et demander au milieu de la consultation où il
veut un site, quelle sorte de logements il veut. On sait quel temps cela prend
pour mettre un projet en chantier. Sans exagérer dans le dirigisme, je
pense qu'il faut vraiment du leadership de la part de ceux qui ont la
responsabilité de la chose publique.
Tout à l'heure, je vous dirai pourquoi j'ai des réserves
sur une autre intention dans le programme du Parti québécois:
Favoriser le système coopératif sous toutes ses formes et bannir
toute construction de type spéculatif, etc. Ce sont des voeux! (12 h
30)
Vous savez qu'avec un bout de papier et un crayon on peut régler
à peu près tous les problèmes du monde, mais lorsqu'on
arrive dans la réalité du quotidien, c'est un peu plus difficile
et je pense que le ministre s'en rend compte, surtout dans ce milieu du
logement, de l'immobilier où la mouvance et certaines périodes de
prospérité commandent plus de logements. S'il y a une
prospérité dans certains pays, il y a plus d'immigration, il y a
plus de logements. S'il y a un ralentissement dans l'activité
économique manufacturière ou s'il y a des problèmes
politiques ou autres, au lieu d'avoir de l'immigration, il y a parfois de
l'émigration. Cela libère certains logements et tout.
J'ai des chiffres ici qui prouvent justement cette mobilité,
cette fluctuation du marché. J'ai le cas de la ville de Laval qui est la
deuxième ville en importance au Québec. Dans le locatif, il s'est
mis en chantier je vous donne les chiffres des quatre dernières
années dans cette ville de 260 000 habitants, en 1975, 855
logements locatifs; en 1976, 3654 logements, pratiquement quatre fois plus; en
1977, 2479 logements il y en a eu trop, c'est aussi clair que cela
et, en 1978, cette année, jusqu'à maintenant, au 30
septembre, 992. Vous voyez la dégringolade. Il y a des vacances pour les
logements parachevés dans le cours de 1977. C'est pour cela qu'il y a
des chiffres qui varient tellement.
Lorsque le ministre mentionnait qu'on se dirige vers 5% de vacances,
c'est peut-être à l'échelle du Québec. Vous avez
mentionné que c'était 3,5%, mais qu'on se dirige vers 4% qui est
un taux assez idéal de vacances, mais il y a des régions. Prenez
le locatif, à Laval, c'est de l'ordre de 35% les vacances actuellement
des logements qui ont été mis en chantier en 1976 et 1977. Il y
a, par contre, une reprise actuellement à Laval.
A Montréal, c'est passé de 9000 à 3000 environ,
cette année. Cela veut dire qu'il y a beaucoup moins de vacances. Cela
fluctue énormément. Le ministre le reconnaît lui-même
et ses fonctionnaires également, ainsi que la société.
On peut avoir une belle politique d'habitation, mais la réaliser,
c'est une autre paire de manches. Ici, dans le Droit d'Ottawa, on mentionne, le
24 octobre, des propos du vice-président de la SHQ je crois que
M. Carreau est ici qui disait les difficultés qu'il y a. Je vais
le citer. "Dans son entrevue avec M. Lacroix, le ministre Tardif explique, en
effet, qu'on a renoncé pour l'instant à établir une
politique d'ensemble, parce qu'on a affaire présentement à une
situation mouvante dont le principal élément est sans doute la
modification de tous les programmes d'habitation fédéraux. Pour
le vice-président de la SHQ, ce geste qui a l'heureuse
conséquence de remettre aux
provinces tout le leadership de l'habitation, oblige, d'autre part, la
mise sur pied d'un tout autre alignement de la part de la SHQ." Un peu plus
loin, je crois que c'est M. Carreau encore: "Nous avons
préféré établir un certain nombre d'objectifs qui
vont servir de cadre d'orientation à des interventions de nature plus
ponctuelle, à des genres de programmes qui s'orienteront vers ces
objectifs."
Là, je vous poserai des questions justement. J'avais une question
à vous poser: Quels sont les critères de la Société
d'habitation qui vous ont, entre autres, permis d'autoriser dans vos programmes
récents quatre projets dans la ville de Laval? Alors que, dans ce
milieu-là, dans le centre de Laval, dans Chomedy, il y a des vacances de
30% ou 35%, vous mettez en chantier actuellement cent logements au coin de
Cartier et 15ème avenue à Laval-des-Rapides. Vous en avez un
autre en construction de 119 logements sur le boulevard Chomedey. Vous avez une
extension de 50 autres logements également à cet endroit et une
autre de 102 logements sur la rue Château dans les plans
préliminaires. S'il y a vraiment un surplus tout le monde dit que
le stock résiduel en 1979-1980 sera de 800 logements il y a une
compétition exagérée quelque part et l'entreprise libre ou
d'autres ne pourront pas louer leurs logements et vous aurez peut-être
vous-même de la difficulté à remplir les vôtres.
Votre politique d'habitation, on va en venir à cela tout à
l'heure, sur les rabais ou autres. Entre autres, en passant, il y a des
difficultés de parcours. Sur le boulevard Cartier, entre autres, la
Société d'habitation est rendue au quatrième étage.
Il semble que vous êtes pas mal dans l'illégalité parce que
la ville n'a pas encore émis son permis de construction, et vous
êtes rendu au quatrième étage. Je pense que vous aurez des
difficultés avec la ville, parce que la société ne veut
pas payer le fonds des parcs, et le constructeur n'a pas encore eu son permis
de construction.
M. Tardif: Est-ce que je peux répondre à cela?
M. Lavoie: Tout à l'heure, ce n'est pas grave. M. Tardif:
D'accord.
M. Lavoie: II y a un autre cas où, sur le boulevard
Chomedey, vous avez 119 logements au centre-ville de Laval, près de
l'hôtel de ville. Or, la municipalité vous a fait des
représentations, à savoir que votre revêtement
extérieur n'était pas acceptable, que cela pourrait
défigurer le quartier où il y a une très bonne
construction. Vous voulez terminer l'extérieur de la bâtisse en
acier émaillé, alors que tout l'environnement présente une
qualité supérieure de construction, mais ce sont de petits
détails.
Les solutions que vous semblez apporter, j'ai beaucoup de réserve
à leur égard. Je diffère peut-être d'opinion avec
mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce sur les chiffres que vous avez
présentés tout à l'heure, où il y a des
déficits énormes dans des logements sociaux. Quand vous dites que
la moyenne actuellement du déficit par logement social au Québec
le nombre se chiffrant par 24 000 logements est de $180 par mois,
vous me donnez un chiffre de $40 millions par année. J'ai fait le
calcul, la vérification. J'ai multiplié 24 000 par $180,
multiplié par 12, parce qu'il y a douze mois dans un an, et j'obtiens
$51 840 000.
M. Tardif: Je veux seulement corriger cela
immédiatement.
M. Lavoie: Oui.
M. Tardif: $41 millions, c'était à mon budget de
l'an passé.
M. Lavoie: Cette année, cela va augmenter.
M. Tardif: Cette année, avec ceux qui viennent
d'être livrés habitables, ils n'encourent pas un déficit
tout de suite, parce qu'ils viennent d'être livrés. L'Office
municipal commence à les louer et il va nous réclamer le
déficit l'an prochain.
M. Lavoie: C'est pour cela que je pense que vous devriez prendre
une autre formule que des logements sociaux bâtis par la
Société d'habitation du Québec. Je suis pratiquement
heureux que vous n'atteigniez pas vos objectifs, parce que je me demande
où on se dirige avec de tels déficits. On sait la lenteur que
cela apporte. Vous l'avez expliqué vous-même. Vous demandez aux
municipalités trois sites. Vous faites votre enquête. Vous y avez
parfaitement droit pour qu'il n'y ait pas de spéculation ou de
passe-passe dans cela, etc.
M. Tardif: Heureusement qu'on ne remonte pas dans le
passé, par exemple, pour les enquêtes.
M. Lavoie: Ecoutez...
M. Tardif: Non, mais je vous dis cela. J'essaie de
prévenir pour l'avenir.
M. Lavoie: C'est une accusation un peu gratuite
peut-être.
Ces projets ne démarrent plus. On sait qu'un projet de
construction qui, normalement, doit se faire, soit par l'entreprise libre dans
trois ou quatre mois, ou dans six mois, dans votre cas, cela vous prend un an
ou un an et demi à le mettre en marche. On sait ce que coûte le
financement durant la construction, alors qu'il n'y a pas de revenu, et les
coûts inflationnistes de la construction et tout. J'ai des doutes
énormes justement sur le coût des logements sociaux. Je voulais
vous demander quelle est la moyenne du coût de vos logements sociaux.
M. Tardif: $30 000.
M. Lavoie: $30 000. J'ai, ici, le Mini-Express, un bulletin
d'information du ministère des Affaires
municipales, du 15 mai 1978, où vous annoncez la mise en chantier
de 110 logements pour personnes retraitées pour un montant global de $3
805 000, ce qui fait une moyenne de $34 600. Ce sont des prévisions.
C'est vrai qu'il y a des constructions dans des milieux assez
éloignés du Québec, où la construction peut
être plus cher. Je vous donne des chiffres.
M. Tardif: Où est-ce, celui-là?
M. Lavoie: Je vais vous les donner en détail. Il s'agit de
quatre ou cinq projets. Je vais vous les donner. Princeville, Arthabaska, on ne
peut pas dire que c'est dans le fin fond du Québec, là vous
arrivez avec une moyenne de $26 400. Dans le comté de Duplessis, vous
arrivez avec un projet de $642 000 pour 16 logements, ce qui fait $40
125...
M. Tardif: Où, à Duplessis?
M. Lavoie: Laissez-moi terminer, je vais vous le dire. Prenez un
autre moyen de construction. Laissez-moi terminer.
M. Tardif: Ceux à Fort Chimo vont me coûter $100 000
le logement pour les Inuit.
M. Lavoie: A Maniwaki, $36 250 par logement. Beauce-Nord,
Saint-Frédéric, $33 000 par logement et on sait qu'un logement
qui coûte $33 000, il faut le louer, en général, si on veut
simplement... Ce sont des loyers de $450 par mois. C'est là que je
reconnais votre déficit de $300 par mois. Où s'en va-t-on avec
ça?
Je connais un peu ce milieu, M. le ministre, et je vous dis que c'est
exagéré, $30 000 par logement. Je peux vous assurer que
l'entreprise libre peut bâtir à bien meilleur compte que
ça. J'ai eu des chiffres de la Société d'habitation du
Québec ou autres où on reconnaît que l'entreprise libre
peut bâtir au moins à un tiers meilleur marché. J'aurai
peut-être des éléments de solution tout à
l'heure.
Le système coopératif: Encore là, j'ai des doutes
énormes. D'ailleurs, je voudrais rappeler l'expérience que la
Société d'habitation du Québec a connue lors de sa
naissance, dans les années soixante-cinq, soixante-six, où il y a
eu des projets coopératifs, autant à Québec qu'ailleurs en
province, où cela a été des fiascos, des échecs et
même du scandale éhonté de certains mouvements. D'ailleurs,
le ministre a fait mention de coopératives bidons, peut-être. Vous
en avez eu une à Laval, la Coop de Laval, qui est une honte. Le prix que
cela a coûté dans les années soixante-six, soixante-sept
d'ailleurs, je ne mentionnerai pas quel gouvernement était
là; ce n'était pas le nôtre cela a été
un objet de scandale. C'est bâti depuis à peine dix ans et je ne
sais pas combien vous avez dépensé dernièrement pour un
contrat de... C'étaient déjà des taudis après dix
ans, alors que cela a coûté, à ce moment-là,
peut-être 50% trop cher; aujourd'hui, ça vous a coûté
quelques millions pour remettre en état, récemment, la
Coop de Laval. Vous avez aussi mentionné d'autres
coopératives dans la région de Québec.
M. Cordeau: M. le Président... Une Voix: Oui.
M. Cordeau: ... ce n'est pas une question de privilège,
puisqu'on n'y a pas droit, mais c'est que je connais aussi certains HLM
construits à Saint-Hyacinthe sous d'autres gouvernements...
Une Voix: D'accord, très bien.
M. Cordeau: ... qui ont coûté aussi cher
peut-être que ceux que vous venez de mentionner.
M. Lavoie: Bon! Un à un.
Le Président (M. Boucher): D'accord! Les faits sont
rétablis.
M. Lavoie: Bon! Très bien! On va continuer. Je ne crois
pas aux formules coopératives pour des logements locatifs. Je croirais
beaucoup plus aux condominiums, si vous voulez, où l'individu est
propriétaire de son logement, pour plusieurs raisons. On sait que la
mobilité des travailleurs, en général, ici au
Québec ou au Canada... Vous ne pouvez pas demander à des
locataires de participer peut-être intensément à
l'administration et à la construction de logements locatifs à
cause de cette mobilité. Les jeunes couples, souvent, sont de passage.
Au début, ils vont aller dans un logement je n'aime pas ce mot
HLM; c'est un mot que je n'aime pas, mais on ne l'a pas encore remplacé
à prix moyen, si vous voulez...
M. Tardif: On traitera tantôt peut-être de logements
municipaux.
M. Lavoie: Si vous voulez, mais là, c'est encore l'Etat.
Quand l'Etat se mêle de tout, on voit souvent le résultat que cela
amène. Bon!
Le jeune couple qui s'en va dans ces logements est souvent là de
passage pour les premières années de son ménage et, au
bout de trois ou quatre ans, s'il a un enfant ou si sa situation
économique s'est améliorée, il se dirige vers l'achat
d'une maison ou autre chose, ou un logement un peu plus luxueux... L'adulte
moyen, le travailleur moyen, la mobilité... Il peut être
appelé ailleurs. J'aimerais avoir des statistiques sur la longueur, la
durée de résidence des locataires je n'ai pas ça
dans les logements. Pour les personnes âgées, souvent, il y
a des décès ou quoi que ce soit et vous ne pouvez pas demander
à des personnes d'administrer des projets locatifs, de voir à la
construction, de voir à l'administration, de voir aux
réparations. Je crois qu'il n'y a pas assez d'appartenance à ce
milieu-là pour les locataires et je doute fort de votre formule
coopérative dans le locatif.
Nationalisation des sols; cela est encore beau, ce sont encore de beaux
voeux. Je vais vous
donner un exemple. L'ancien gouvernement Bourassa a fait le parc
industriel de Mirabel pour développer, par l'Etat, un centre industriel.
Cela fait trois ans. On disait: Après Mirabel, il va y avoir des
industries, etc. Je pense qu'ils n'ont pas vendu un emplacement encore pour une
industrie. (12 h 45)
Nationalisation des sols pour l'habitation et une industrie, cela se
compare. Je connais des municipalités qui, pour empêcher la
mauvaise spéculation sur des sois industriels, ont fait des parcs
industriels. A des places, cela a réussi à Laval, entre
autres, cela a réussi mais à d'autres places, plus ou
moins. Il y a beaucoup d'endroits où les municipalités ont des
stocks de terrains depuis cinq ou dix ans et, si on calcule que la
municipalité, pour acheter le terrain, est obligée d'emprunter
à des taux de 10%, qu'elle a un manque à gagner pendant ce
temps-là parce que ce n'est pas imposable et que ce n'est pas taxable,
souvent, au bout de cinq ou dix ans, le coût est tellement
élevé qu'elle ne peut plus le vendre au prix coûtant. Cela
peut se présenter fort bien pour des sols à vocation
résidentielle, la même chose.
M. le ministre, à mon point de vue, nous sommes dans une
société libre, nous sommes dans un contexte nord-américain
où le marché libre fonctionne; nous avons un exemple aux
Etats-Unis. Laissez donc l'entreprise libre, souvent peut-être, se casser
la gueule elle-même. L'entreprise libre est le meilleur
élément pour le contrôle des prix. Il y en a qui voyagent
de temps à autre en Floride, s'ils apprennent, à un certain
moment, qu'il manque 1000 logements en Floride, tous les constructeurs se
jettent là; il en manque 1000, mais ils en bâtissent 10 000. C'est
cela. Mais cela empêche la hausse parce qu'il y a une saine
compétition. C'est cela, le meilleur contrôle des coûts.
Pour les logements locatifs, c'est la même chose. Allez dans Laval,
actuellement, où l'entreprise libre en a trop bâti, où il y
a 35% de vacances; les locataires en profitent parce qu'ils ont des deux et
trois mois de loyer gratuits et souvent, au lieu de payer $225, ils payent $210
ou $190. Laissez donc le marché libre fonctionner.
Quand je vois des déficits de $600 par lit dans des centres
d'accueil, je trouve cela exagéré.
M. Tardif: Je m'excuse, il ne faudrait pas parler de
déficit. Il y a quand même des services qui sont donnés
dans les centres d'accueil.
M. Lavoie: $600 par mois.
M. Tardif: II y a des services médicaux, des services de
physiothérapie, il y a des salles communautaires, des centres de jour
pour les personnes âgées de la communauté qui viennent
là. Je parle du coût à l'Etat par lit. Si on parle de
déficit à ce moment-là, nous, l'Assemblée
nationale, nous sommes déficitaires, parce que nous coûtons de
l'argent à l'Etat. N'utilisons pas cet exemple.
M. Lavoie: Mais il y a d'autres formules, M. le ministre. Quand
vous dites que les HLM que vous bâtissez actuellement sont en
déficit de $300 par mois par logement, il doit y avoir d'autres
formules. Je ne dis pas qu'on doit faire disparaître le rôle de
l'Etat; mais il faut que le rôle de l'Etat soit contrôlé
uniquement dans des cas vraiment nécessaires. Je me rappelle des
exemples: A Montréal, il y a quelques années, dans la Petite
Bourgogne ou quoi que ce soit, c'est fantastique, des rénovations de
logements coûtaient, il y a dix ans, $30 000 ou $35 000 par logement; je
ne sais pas combien cela coûterait avec les prix d'aujourd'hui.
Le Président (M. Boucher): M. le député de
Laval...
M. Lavoie: Je termine, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): ... si vous voulez terminer
parce que votre collègue a quand même demandé deux ou trois
minutes.
M. Lavoie: Bon, je termine. Il y a eu des mesures qui ont
été apportées, entre autres, pour les personnes
âgées qui sont propriétaires, $125 par mois et, pour les
locataires, $75 par mois. Mais cela laisse le marché libre. Ces
gens-là se trouvent un logement dans le marché libre. S'ils sont
éligi-bles, je crois que c'est...
M. Tardif: Pour l'année.
M. Lavoie: Pour l'année $125, cela représente $10
par mois. D'ailleurs, c'est comme un rabais de taxes, c'est un subside. Les
$125 et $75, c'était une mesure qui avait été
adoptée avant votre arrivée au pouvoir, même s'il y
a...
M. Tardif: Qu'on a reportée.
M. Lavoie:... beaucoup de députés du Parti
québécois qui, dans leur petit dépliant d'envoi sans
adresse, prennent le crédit de cette mesure alors que c'est une mesure
qui a été adoptée en 1976 par l'ancien gouvernement. Vous
avez ajouté à cela le crédit d'impôt et je vous en
félicite, M. le ministre. Vous devriez trouver une formule, je crois,
d'allocation de loyer; laissez donc les gens remplir les loyers libres qui sont
bâtis par l'entreprise libre à bien meilleur compte et, si vous
évaluez le loyer à $200 et que d'après leurs revenus ils
ne sont pas capables de payer plus de $150, je vous garantis que cela
coûterait beaucoup moins cher à l'État de les subventionner
à $50 par mois que d'attraper des déficits de $300 par mois pour
des logements que vous bâtissez vous-mêmes.
J'aurais voulu traiter également aujourd'hui d'accès
à la propriété dans la maison unifamiliale, les questions
de taxes énormes, aujourd'hui, à cause des services. J'aimerais
connaître la politique, rapidement, du ministre lorsqu'on sait que dans
certaines municipalités, pour une maison de $30 000, cela peut
coûter jusqu'à $1300 par année avec les services
d'égouts d'aqueduc, pavage, trottoirs, etc. Pour des maisons de $40 000,
c'est rendu à $1700 de taxes par année. Est-ce que vous
auriez une formule d'aide, soit sur les taxes ou autrement, pour
encourager l'accès à la propriété. Je vous donne
cela assez rapidement. J'ai terminé, M. le Président.
Le Président (M. Boucher): II reste dix minutes. M. le
ministre, si vous voulez répondre brièvement.
M. Tardif: Écoutez, rapidement. Les chiffres cités,
qui sont dans notre programme effectivement, étaient basés sur
une étude de l'Office de coopération et de développement
économiques de 1971. Qu'ils aient besoin d'une révision, cela
m'apparaît évident puisque la situation du logement au
Québec, en ce qui concerne le coût de l'habitat, n'est pas de loin
aussi élevée que ce qu'elle pourrait être ailleurs. Mais
là, il faut faire attention. Il faut s'assurer qu'on compare des choses
identiques. Par exemple, lorsque je suis allé à Edmonton,
à la conférence des ministres des Affaires municipales et de
l'habitation, je pouvais constater qu'un petit bungalow de cinq pièces
et demie, fini de tout ce qu'il y a de plus modeste, coûtait $64 000
alors qu'on pouvait ici obtenir presque la même chose pour à peu
près $35 000. Évidemment, il y a une raison fondamentale à
cela: c'est que, dans toutes les autres provinces, c'est l'entrepreneur qui
assume le coût des infrastructures, c'est-à-dire les
égouts, la rue, le trottoir, l'aqueduc et ceci est refilé au
consommateur propriétaire de la maison qui le paie dans son
hypothèque plutôt que sous forme de taxe. Mais le résultat
de cela, c'est évidemment d'éliminer une quantité de
petits entrepreneurs en construction dans ces autres provinces pour garder
seulement les gros entrepreneurs ayant les reins assez forts pour assumer les
coûts de ces infrastructures. On a éliminé et on a
monopolisé, en quelque sorte, l'industrie de la construction et
également monopolisé le sol. En fait, on me dit qu'autour
d'Edmonton il y a à peu près trois propriétaires fonciers
qui détiennent tous les terrains et aujourd'hui, évidemment, cela
coûte $64 000 pour un petit bungalow à Edmonton. Donc, je dis que
lorsqu'on analyse le coût de l'habitat, il ne faut pas considérer
uniquement ce que coûte la production de la maison comme telle, mais
également les taxes pour des fins, par exemple, d'aide à
certaines catégories de nos concitoyens, le coût du chauffage, de
l'électricité, de l'assurance et autres.
Tantôt, le député de Laval a dit: Les
coopératives d'habitation, ça ne marche pas, les gens n'ont pas
d'intérêt là-dedans. Je dis qu'il faut évidemment
développer un esprit sociétaire, les programmes sont là
pour ceux qui veulent s'en servir. Je suis d'accord avec vous qu'il ne s'est
pas réalisé autant de logements que je l'aurais souhaité
avec ce programme. Pour votre renseignement, 101 coopératives se sont
formées et ont obtenu une subvention de démarrage de $500, 33
d'entre elles ont produit jusqu'à maintenant 550 logements, il y en a
1710 en voie de réalisation.
M. Lavoie: Je pense que ce sera un succès une fois
terminé. S'il y a trop de mobilité...
M. Tardif: Ce que ça témoigne, c'est ceci: 33
coopératives ont produit 550 logements; ça veut dire que ce sont
des petites coopératives avec une quinzaine de logements. Ce ne sont pas
de grosses affaires, ce sont des petites unités et je pense que c'est
dans cette voie qu'il faut aller.
Le député de Laval a parlé du problème des
migrations. Effectivement, c'est un problème considérable. On
sait que la ville de Montréal a perdu à peu près 150 000
habitants entre les deux derniers recensements, 1971-1976; ces gens-là
sont allés quelque part, notamment à Laval, notamment sur la rive
sud, avec toutes sortes de problèmes que cela a causé au point de
vue de l'agriculture. On a bouffé des terres. On bouffe
l'équivalent d'une ville comme Sherbrooke à tous les ans au
Québec, dans la région de Montréal, pardon en
étendue, j'entends.
Donc, on consomme des terres, on consomme de l'énergie parce
qu'il faut se déplacer pour se rendre à son bungalow de banlieue,
on consomme de l'énergie, parce que c'est un type d'habitat qui est
exposé aux quatre vents et qui coûte cher en chauffage. On demande
au ministre des Affaires municipales, pourquoi ça ne coûte pas
cher de se bâtir en banlieue? Entre autres, c'est que le gouvernement a
subventionné, de tout temps, les infrastructures d'égouts et
d'aqueduc et autres et n'a pas fait supporter, aux gens qui s'en allaient en
banlieue le véritable coût de ça.
Les politiques d'habitation...
M. Lavoie: ... banlieue, on ne paie pas le véritable
coût...
M. Tardif: Les gens de banlieue n'ont jamais payé le
coût...
M. Lavoie: Je voudrais bien que leurs taxes...
M. Tardif: ... véritable des infrastructures; le
gouvernement a toujours aidé la réalisation des projets
d'égouts, d'aqueduc et autres. Le ministère des Transports a
fourni une infrastructure routière et a fait des sorties d'autoroute
à tous les demi-mille ou à peu près. Evidemment, on a
financé, en quelque sorte, des développeurs qui ont fait du
développement en banlieue. Par la suite, on demande au ministre des
Transports, en plus de subventionner les systèmes de transport en commun
qui sont déficitaires parce que ce n'est pas assez dense...
Tantôt, on demandera au ministre de l'Education de bâtir des
écoles quand les marmots arriveront, alors qu'on en ferme 32 à
Montréal.
M. Lavoie: Je ne parle pas d'écoles nouvelles.
M. Tardif: II s'en bâtit encore quelques-unes,
malgré qu'il s'en ferme encore plus. C'est cela tout le drame. Nos
noyaux urbains, nos centre-ville se dépeuplent, se taudifient; les gens
s'en vont en banlieue. La question est donc: Comment est-ce qu'on peut les
ramener et avoir des formules autres que ces formules dites d'accès
à la propriété, formules qui ont été
traditionnellement mises
de l'avant par la Société centrale d'hypothèques et
de logement?
Là-dessus, M. le Président, quand le député
de Laval dit: A Laval présentement, il y a des surplus de 35% dans
certaines catégories de logements, d'une part, je dois dire que ce sont
là des données relativement récentes dues au surplus de
constructions de 1976 et 1977. Ce ne sont pas des logements sociaux pour les
personnes âgées qui sont bâtis là, pour la plupart.
On n'a pas cherché à répondre aux besoins de cette
clientèle spécifique. Il y a des caractéristiques propres
aux logements pour les personnes âgées, que celles-ci veulent
retrouver et qu'on ne retrouve pas nécessairement dans ces logements
qu'on trouve en très grand nombre.
Dans le cas de la ville de Laval, effectivement, la deuxième
ville en importance au Québec n'a pas d'office municipal d'habitation,
ne s'est jamais souciée d'habitations sociales. Or, que la
Société d'habitation ait décidé de faire un effort
et de construire 400 logements, particulièrement pour les personnes
âgées à Laval, cela m'apparaît tout à fait
normal.
Il y a des problèmes, j'en conviens, des problèmes de deux
sortes. D'une part, à Laval, il n'y a pas de règlement qui dit
que les revêtements métalliques en aluminium émaillé
sont interdits. La ville dit: On aimerait mieux que ce soit bâti
autrement. On a aussi des contraintes de coûts que le
député a mentionnées tantôt.
Le deuxième élément, c'est qu'il y a un article,
dans la Loi des cités et villes, qui dit que tout promoteur doit donner
à la municipalité 10% du terrain pour des fins de parcs. Or, la
ville de Laval assimile la Société d'habitation qui fait des HLM
pour ces personnes âgées à un promoteur qui fait du
lotissement. J'ai mon voyage! Jamais on ne va le payer, le 10%. Est-ce que
c'est assez clair? Cela n'a pas d'allure. Assimiler la Société
d'habitation à un promoteur qui achète une terre et qui
décide de lotir, la ville lui demande des emprises de rues et 10% pour
des parcs, c'est normal. Mais assimiler la Société d'habitation
qui va faire du logement social pour loger les vieux de Laval à un
promoteur et exiger 10% de plus du coût, c'est charrier.
M. Lavoie: C'est un incident.
M. Tardif: Je le mentionne, parce que...
M. Lavoie: C'est le fait que vous bâtissiez dans
l'illégalité, même si la loi est mal faite.
M. Tardif: II faudra voir.
M. Lavoie: Mais quel est le coût moyen d'un logement pour
personnes âgées?
M. Tardif: $30 000.
M. Lavoie: Et un HLM ordinaire, c'est combien?
M. Tardif: Pour logements familiaux?
M. Lavoie: Oui, il y a une différence.
M. Tardif: Pour les logements familiaux, oui. Pour trois ou
quatre chambres à coucher, à peu près $33 692 serait le
coût moyen.
M. Lavoie: Savez-vous que l'entreprise libre peut le bâtir
à $10 000 meilleur marché?
M. Tardif: Encore là, qu'est-ce que produit l'entreprise
libre? Il faudra y voir deux fois. Je ne sais pas si le député de
Laval se rappelle le temps où il exerçait sa profession de
notaire; le coût des maisons était cela, mais, aujourd'hui, ce
n'est plus la même chose tout à fait.
M. Lavoie: Des coûts d'aujourd'hui. Je peux vous monter des
coûts d'aujourd'hui de logements de très bonne qualité
à $22 000 le logement au lieu de votre coût étatique de $33
000.
M. Tardif: Là, il faudrait s'assurer de ce qu'on compare.
Est-ce qu'on compare le coût de construction ou le coût de
réalisation?
M. Lavoie: Clef en main.
M. Tardif: A ce moment-là, il faut s'assurer qu'on compare
des choses comparables, en termes de qualité de construction. C'est bien
évident que la Société d'habitation, par exemple...
M. Lavoie: Chauffage électrique et tout, ne vous en faites
pas, le stationnement et tout.
M. Tardif: Le chauffage électrique, cela coûte moins
cher, cela coûte $1000 de moins par logement que le chauffage
conventionnel, à la construction. Mais, ceci dit, M. le
Président, je pense que l'Opposition serait la première à
blâmer le gouvernement, et à bon droit, si jamais une
résidence pour personnes âgées passait au feu et que les
personnes périssaient. Il y a donc des normes de sécurité
qui sont plus grandes là qu'ailleurs, c'est évident. On exige que
les poignées de portes aient une résistance au feu de 45
minutes...
Une Voix: Cela ne se peut pas.
M. Tardif: C'est quelque chose comme cela. Ce sont des normes que
vous n'avez pas chez vous, M. le député de Laval, ni moi non plus
chez moi. On considère que, dans le cas des personnes
âgées, c'est normal qu'il y ait de telles normes de
sécurité. Enfin, j'essaie d'expliquer qu'il y a une partie de la
composante coût qui est causée d'abord par le fait qu'on ne
bâtit pas des logements qui vont durer la durée du prêt
hypothécaire, c'est-à-dire 25 ans ou 30 ans ou à peu
près, et qui, après cela, vont devenir des taudis; ce sont des
logements qui, pour la plupart, auront une vie passablement plus longue et
sécuritaire.
Lorsqu'on prenait comme exemple le cas de Mirabel pour dire qu'il ne
faut pas faire de la
municipalisation du sol, là, le député de Laval, je
dirais presque à la décharge de son gouvernement, a
été poigne avec une décision fédérale de
bâtir cet aéroport là où on sait, alors que son
gouvernement aurait voulu l'avoir ailleurs.
M. Lavoie: Non, c'est l'Union Nationale qui voulait l'avoir
ailleurs.
M. Tardif: En tout cas! Ceci dit, que cet aéroport...
M. Cordeau: Ce n'était pas bête.
M. Guay: C'est près de Saint-Hyacinthe, d'ailleurs.
M. Tardif: Je voudrais seulement terminer.
Le Président (M. Boucher): II faudrait terminer, il vous
reste seulement quelques secondes. Je suis obligé de mettre fin au
débat à 13 heures. (13 heures)
M. Tardif: Je voudrais seulement rappeler au député
de Laval que, quand il dit: Laissez donc le marché libre agir,
laissez-le se casser la gueule, s'il faisait seulement se casser la gueule,
après tout, ce serait acceptable, mais si, en se cassant la gueule,
comme vous dites, le résultat net, ce sont des problèmes pour les
locataires je prends l'exemple d'un paquet d'entreprises qui font
faillite, dont les logements sont repris par la Société centrale
d'hypothèques et de logement ou encore par la Société
d'habitation qui posent énormément de problèmes
présentement.
M. Lavoie: C'est le consommateur qui en profite.
M. Tardif: Là-dessus, je voudrais seulement...
M. Lavoie: C'est le locataire qui en profite et j'en suis
très heureux.
M. Tardif: ... signaler un chiffre. L'Ontario a 90 000 logements
sociaux et 10 000 logements loués en vertu du programme de
supplément de loyers, donc, au-delà de 100 000 logements,
c'est-à-dire à peu près quatre fois ce que nous avons au
Québec. Il n'a pas quatre fois la population du Québec. C'est
pourtant un des endroits où les principes mis de l'avant par le
député de Laval de la libre enterprise ont libre cours.
M. Lavoie: Cela ne veut pas dire qu'ils ont raison.
M. Tardif: J'en conviens, pour terminer avec le
député de Laval, qu'il faut avoir...
Le Président (M. Boucher): Messieurs, je regrette... M. le
ministre, je regrette...
M. Tardif: ... d'autres formules que celles-là. Il faut
quand même faire des logements sociaux. Il faut aussi avoir d'autres
formules et j'y travaille.
M. Lavoie: Oui, le strict minimum.
Le Président (M. Boucher): Messieurs, je regrette. La
commission est obligée de mettre fin à ses travaux.
Fin de la séance à 13 h 2