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Présentation de mémoires sur le projet
de loi no 107
(Dix heures dix-sept minutes)
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, mesdames,
messieurs! La commission des affaires municipales est réunie pour
recevoir les mémoires sur le projet de loi no 107, Loi instituant la
Régie du logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions
législatives.
Sont membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean)
remplacé par M. Lefebvre (Viau); M. Caron (Verdun) remplacé
par...
Des Voix: M. Brassard est ici.
Le Président (M. Laplante): M. Brassard (Lac-Saint-Jean)
n'est pas remplacé. M. Caron (Verdun) remplacé par M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce).
M. Scowen: II reste là.
Le Président (M. Laplante): II reste là, il y a
encore un changement. D'accord. On recommence. M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Belle-feuille
(Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Scowen, ce n'est
plus par M. Forget. Il est remplacé par M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M.
Ouellette (Beauce-Nord), M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M.
Tardif (Crémazie).
Les intervenants sont M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères), M. Dubois (Huntingdon), M. Goldbloom (D'Arcy McGee).
M. Cordeau: Remplacez M. Dubois par M. Serge Fontaine.
Le Président (M. Laplante): M. Dubois est remplacé
par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska).
M. Clair: M. le Président, au niveau des membres,
j'aimerais remplacer le député de Berthier.
Le Président (M. Laplante): M. Clair (Drummond) remplace
M. Mercier (Berthier) au niveau des membres. M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M.
Dubois (Huntingdon) remplacé par M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M.
Lacoste (Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé
par M. Paquette (Rosemont); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce) remplacé par M. Forget (Saint-Laurent); M.
Vaugeois (Trois-Rivières). C'est complet. Maintenant, je voudrais qu'on
me propose un rapporteur, s'il vous plaît.
M. Guay: Le député de Beauce-Nord serait un bon
rapporteur.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Beauce-Nord est rapporteur.
Maintenant, je voudrais faire l'appel des groupes qui sont
représentés ici aujourd'hui. Le front commun des locataires de
Montréal métropolitain est-il ici? D'accord. Vous serez le
premier groupe à se faire entendre.
Le deuxième groupe sera l'Union des ligues de
propriétaires de la province de Québec Inc. Est-ce que les
représentants sont ici? D'accord. C'est le deuxième groupe.
Le troisième groupe sera l'Association des administrateurs
Immobiliers du Québec. Est-ce qu'il est ici?
Le quatrième groupe, Immobiliare Canada Ltée et les
appartements Port Royal Inc.
Maintenant, j'appellerais le groupe numéro un, Front commun des
locataires de Montréal métropolitain.
Avant de vous identifier et d'identifier votre groupe, le ministre
aurait des commentaires sur l'étude de ce projet de loi. M. le
ministre.
Problèmes techniques, on va essayer d'y remédier. Je vous
remercie madame.
Exposés préliminaires
M. Guy
Tardif
M. Tardif: On va s'approcher peut-être plus du micro,
est-ce que ça va mieux?
M. le Président, brièvement, je pense qu'il convient de
situer ce projet de loi que cette commission s'apprête à
étudier. Divers mémoires nous le rappelleront, il s'agit d'une
loi qui vise à refondre des dispositions diverses qui ont
été adoptées au cours des années depuis 1951 et qui
l'ont été de façon temporaire, c'est-à-dire pour
une période de douze mois à la fois. Si bien que ça fait
déjà plus d'un quart de siècle que, à certains
égards, propriétaires et locataires ne savent pas plus que douze
mois à l'avance les mesures qui régiront le marché du
logement au Québec.
La présente loi, reconduite ainsi d'année en année,
avec des modifications, qui l'a été par les divers gouvernements,
quels qu'ils soient, qui se sont succédé, a été
également reconduite en 1976, peu de temps après que l'actuel
gouvernement fut arrivé au pouvoir, avec un engagement de refondre cette
loi et d'en faire une législation permanente. Ceci a été
amorcé et, en décembre 1977, le travail n'étant pas
complété autrement que par la publication ou la
préparation d'un livre blanc, cela a donc été sous cette
forme que le projet a évolué, et, en décembre 1978,
après avoir étendu le champ d'application de la loi à des
secteurs entiers qui lui échappaient, à savoir les chambres, les
terrains pour maisons mobiles, les HLM, et après avoir rendu permanentes
un certain nombre de dispositions dès lors que le projet de loi actuel
était déposé en première lecture.
Ce projet de loi, M. le Président, et je tiens à le dire
dès l'ouverture des travaux de cette commission, n'a pas la
prétention de pouvoir donner satisfaction aux groupes qui se sont
polarisés par le passé autour de certaines notions sacro-saintes,
telles que le droit au logement, qu'on revendique comme un droit absolu, ou le
droit de propriété qu'on revendique, de façon non moins
absolue. Il m'apparaît évident que si on s'attend que toutes les
parties en présence trouvent satisfaction dans ce projet de loi, c'est
illusoire et utopique.
Ce que l'Etat peut essayer de faire et tente de faire dans ce projet de
loi, et il tentera surtout de le bonifier à la lumière des
représentations qui nous seront faites, c'est la recherche d'un
équilibre face aux parties en présence. A ce sujet,
évidemment, il ne faudrait pas demander à cette loi de faire ce
qu'elle n'est pas censée faire, c'est-à-dire d'établir une
véritable politique de l'habitation.
Cependant, dans la mesure où 52% des gens au Québec vivent
à loyer, où, à Montréal, ce pourcentage atteint
80%, il est évident que, pendant un bon nombre d'années, en tout
cas, un des volets importants d'une politique d'habitation va passer par une
politique d'équilibre et de protection des droits, aussi bien des
locateurs que des locataires.
Je tenais, au début de cette commission, à
témoigner à la fois de notre ouverture face aux
représentations qui seront faites dans la recherche de cet
équilibre, de cette ligne médiane dont nous parlait encore un
journal de ce matin, même s'il peut sembler difficile de réduire
les antagonismes et de trouver cette position du juste milieu.
Je remercie à l'avance tous ceux qui nous feront des
représentations au sujet de cette loi et, présentement, d'autres
Législatures au Canada sont saisies de projets de loi semblables,
notamment en Ontario, et les mêmes arguments, les mêmes
débats sont soulevés. Nous tenterons également de nous
enrichir de ce qui sera dit là.
M. le Président, sans plus de commentaires, je vais demander si
d'autres en ont, avant d'entendre les mémoires.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le ministre. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce, avez-vous des remarques?
M. Reed Scowen
M. Scowen: Oui, merci, M. le Président. Nous voulons, le
Parti libéral, l'Opposition officielle, accueillir les personnes qui
viennent ici pour présenter des mémoires. Comme Opposition
officielle, notre rôle est d'essayer d'améliorer, de changer, de
bonifier des projets de loi. Je veux assurer toutes les personnes qui viennent
nous voir ici que nous sommes énormément intéressés
à avoir leurs commentaires et, dans la mesure où ils seront
valables, nous allons apporter les suggestions et les amendements lors de la
deuxième lecture et de l'étude article par article.
Je veux très vite encadrer un peu la position du Parti
libéral pour ce qui concerne une politique du logement pour que vous
puissiez avoir une idée de la perspective dans laquelle nous allons
travailler.
Premièrement, je pense que c'est très important de
dénoncer tout de suite et à l'avance la tendance du gouvernement
jusqu'ici de hausser les attentes, les espoirs de la population pour ce qui
concerne le logement. J'ai beaucoup de sympathie, par exemple, pour le premier
groupe devant nous ce matin. Il a cité une déclaration du
ministre au mois de novembre, quand celui-ci a dit: "Pour nous, le droit au
logement est un droit aussi fondamental que celui de se nourrir, de s'habiller,
de la santé et de l'éducation". On sait très bien que cet
usage de mots dans un sens qui n'est pas précis tend à
créer des problèmes, des confusions parmi les citoyens. C'est
clair que nous n'avons pas le droit au logement dans le même sens que
nous avons le droit à l'éducation.
Avec un grand coût, nous avons développé depuis
quinze ans un droit de logement en nationalisant le système
d'éducation en créant le ministère de l'Education avec des
milliers et des milliers de fonctionnaires avec un budget de $4 milliards etc.,
jusqu'au moment où on est prêt à nationaliser le logement,
le vêtement et la nourriture et créer des ministères pour
décider de ce que l'on doit manger, où l'on doit se loger et
comment se vêtir. (10 h 30)
Ce n'est pas possible d'avoir un droit de logement et de comparer des
choses comme le logement, comme un droit fondamental au même sens que
l'éducation, et de déclarer que c'est un objectif du
gouvernement, et après, d'arriver avec un projet de loi qui ne ressemble
aucunement à cette déclaration globale. C'est de hausser et de
créer des espoirs irréalisables qui tendent à créer
de la confusion partout. Alors, nous sommes devant une loi qui, pour nous, est
un prolongement de ce qui existe aujourd'hui déjà. Je veux
simplement vous donner trois ou quatre objectifs que nous allons chercher.
J'espère que les membres des groupes qui vont comparaître devant
nous vont partager au moins un ou deux de ces objectifs, et vont nous donner
leur opinion pour l'amélioration de cette loi, en ce qui concerne ces
objectifs.
Le premier, c'est que nous croyons que pour le bien-être de la
population et pour nous conformer à la réalité dans
laquelle nous vivons, il faut dépendre surtout du marché
privé pour l'approvisionnement de la grande majorité de nos
logements, aujourd'hui.
Deuxièmement, acceptant ce fait, il faut que le gouvernement ait
accepté d'encadrer ce système de marché avec un code de
comportements qui va régler non seulement le comportement des
propriétaires, mais aussi le comportement des locataires en ce qui
concerne le comportement quotidien et le système de régler des
conflits. Je le tiens pour acquis, le système de marché ne peut
pas fonctionner librement si un propriétaire est obligé de perdre
un locataire. C'est pour lui un inconvénient. Si un locataire perd son
loyer, c'est pour lui
un désastre. Un désastre, car c'est un besoin essentiel. A
court terme, c'est même vital... Alors, c'est certain qu'il faut avoir un
code de comportements qui équilibre et qui règle la conduite des
deux parties.
Troisièmement, je pense qu'en général, on est
d'accord avec le ministre sur le fait qu'il faut jeter un coup d'oeil sur la
démolition des logements. Ce n'est pas les interdire je pense que
le projet de loi actuel ne le vise pas mais, de toute façon, dans
ce domaine, je pense qu'on est pas mal d'accord, il faut jeter un coup d'oeil
là-dessus.
Quatrièmement, il faut respecter les pouvoirs des
municipalités. Le Québec est très vaste; les besoins de
Sept-lles, en ce qui concerne le logement, ne sont pas les mêmes
qu'à Outremont. Les besoins de l'Outaouais ne sont pas les mêmes
qu'à Valleyfield. Il ne faut pas créer une structure qui soit
trop centralisatrice.
Le Parti québécois est déjà conscient des
problèmes de centralisation et on ne doit pas l'apporter dans ce projet
de loi. Il y a des municipalités qui peuvent faire la surveillance de ce
problème d'une façon beaucoup plus proche de la population.
Finalement, nous voulons une loi qui va éviter, autant que
possible, la création d'une grande bureaucratie parce que le
gouvernement a tendance à créer de nouvelles régies, de
nouvelles structures bureaucratiques qui alourdissent énormément
le fardeau fiscal de tous les contribuables et qui ont tendance à
créer des rigidités qui ne sont pas en mesure de nous aider
énormément. Alors, on accepte la nécessité de ce
contrôle. Je pense que c'est clair. Mais on veut créer quelqe
chose qui soit souple et conforme aux besoins de la population.
En terminant, ce sont des grandes lignes, des préoccupations du
Parti libéral, de l'Opposition officielle. Nous sommes vraiment à
l'écoute et je répète: Si les intervenants, après
avoir présenté leur mémoire, ont des suggestions à
nous apporter qui touchent une de ces quatre ou cinq préoccupations que
j'ai soulevées, nous serons très heureux de vous
écouter.
Merci!
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Cinq minutes, M. le Président. M. Fabien
Cordeau
Tout d'abord, je tiens à remercier M. le ministre de nous avoir
permis d'entendre, en commission parlementaire, des intervenants d'un
côté comme de l'autre concernant ce projet de loi à
l'étude. Je crois que le ministre des Affaires municipales a
montré qu'il était plus ouvert à la consultation populaire
que le ministre de l'Agriculture lors du projet de loi no 116.
M. Guay: C'est une nouvelle session.
M. Cordeau: Pardon?
M. Guay: C'est une nouvelle session.
M. Cordeau: Une nouvelle session, mais ça ne restera pas
mort.
Maintenant, M. le Président, à cette commission, nous
aurons l'occasion, au cours des quelques jours qui viennent, de constater le
dualisme qui caractérise toutes nos sociétés occidentales,
à savoir l'opposition constante sur le plan idéologique entre
ceux qui possèdent et ceux qui ne possèdent pas. Ainsi, à
la lecture des mémoires, nous retrouvons cette dualité
idéologique entre, d'une part, les propriétaires et, d'autre
part, les locataires. Il est malheureux de constater que ce projet de loi
s'éloigne de la réforme d'envergure promise par le ministre au
début de son mandat et qui devait consister en une réforme totale
du domaine de l'habitation au Québec. Nous constatons aujourd'hui qu'il
n'en est rien. En définitive, nous n'aboutissons qu'à une
réforme qui ne semble satisfaire que très peu les principaux
intéressés. Conscient du rôle de cette commission, je ne me
livrerai pas à un discours de deuxième lecture, ce qui ne
m'empêchera pas, tout au long de cette séance, de soulever des
interrogations, de poser des questions afin que nous, de l'Union Nationale,
soyons en mesure d'apporter des amendements concrets à ce projet de
loi.
Cependant, un des points sur lequel nous voudrions insister dans le
cadre de cette intervention fait référence à la dimension
permanente du problème de l'habitation locative au Québec, bref,
dresser une toile de fond qui nous permettra de mieux saisir dans quelle
situation les parlementaires se trouvent au début de cette
première phase de l'étude de ce projet de loi, soit la commission
parlementaire. La dimension globale de ce problème est abordée de
front par M. Alain Lapointe, dans le volume intitulé "Problèmes
actuels de l'économie québécoise", dans lequel il dit:
"L'insuffisance de revenus d'une partie de la population, des ménages de
même que l'incapacité du mécanisme du marché
d'assurer une offre suffisante de logements à loyer modique constituent
la dimension permanente du problème." Voilà une dimension
très importante du problème réel de l'habitation. Or, rien
ne nous incite à croire que le projet de loi 107 tient compte de cette
réalité qui crève les yeux.
Une autre dimension importante a trait spécifiquement à un
grand nombre de ménages mal logés au Québec. Actuellement,
nous dénombrons 300 000 ménages mal logés,
c'est-à-dire qui n'ont pas l'usage exclusif d'un bain ou d'une toilette
ou qui consacrent plus de 25% de leurs revenus au logement. Ce sont des
réalités concrètes dispersées un peu partout sur le
territoire du Québec.
Par ailleurs, je m'en voudrais de passer sous silence un des points qui
fait état du contrôle des loyers. Certains prétendent que
le contrôle des
loyers découragerait la construction de nombreux logements. Une
telle affirmation semble fondée sur l'opinion exprimée par
plusieurs économistes. Le ministre peut-il nous justifier en quoi le
contrôle des loyers est nécessaire en 1979? Le ministre peut-il
nous justifier également pourquoi avoir choisi le contrôle souple?
Est-ce qu'on a étudié le contrôle des loyers des autres
provinces canadiennes et de certains pays européens? Comment sommes-nous
arrivés à déterminer le type de contrôle
préconisé par le gouvernement? De plus, la nouvelle Régie
du logement qui aura un caractère permanent saura-t-elle jouer son
rôle efficacement? On sait très bien que le taux de recours
à la régie n'est que de 5%. Est-ce à dire que les
locataires ne connaissaient pas leurs prérogatives ou si la paperasse
à remplir ou les procédures à suivre étaient trop
lourdes pour les locataires? Est-ce que cette nouvelle régie saura
répondre au désir de la population? On pourrait même se
poser la question: Est-ce que les objectifs qui ont guidé ce projet de
loi auront l'effet que l'on escomptait?
Chose certaine, M. le Président, il faudra s'attendre encore une
fois à affronter, autant pour les locataires que pour les
propriétaires, une bureaucratie encore plus lourde que par le
passé. On essaie de rendre la régie plus près des
locataires et des propriétaires alors que l'effet sera probablement le
contraire. A-t-on pensé à toute la paperasse administrative que
cette réforme entraînera?
Nous nous opposons à toute forme de législation
sassée à la bureaucratie péquiste. On prétend tout
décentraliser dans ce gouvernement alors que l'on sait très bien
que ce n'est pas le cas. Par ailleurs, nous savons très bien qu'un
projet de loi aussi vaste cache une réglementation très
importante qui ne sera pas soumise aux quelque 37 organismes, au dire du leader
du gouvernement, qui ont demandé à être entendus devant
nous au cours des prochaines séances. Pourquoi le ministre n'a-t-il pas
cru bon de soumettre aux parlementaires et aux différents groupes toute
la réglementation qui entoure ce projet de loi? Est-ce que cette
réglementation est prête ou non? Je crois que le ministre devrait
en informer les membres de cette commission. Quand cette réglementation
sera-t-elle mise à la disposition du public?
Enfin, M. le Président, le but de cette intervention est de
décrire certains problèmes de l'habitation locative au
Québec, tout en la reliant à certaines interrogations afin que
nous puissions juger du bien-fondé de cette loi et de son effet direct
sur les véritables problèmes de l'habitation locative au
Québec. Quand à nous de l'Union Nationale, parti reconnu
officiellement par la Législature, mais ce que semble oublier un chef
qui ne fait pas encore partie du gouvernement, le projet de loi 107 tel que
rédigé est loin de nous satisfaire. A moins d'amendements
majeurs, vous devrez vous attendre à une lutte acharnée sur ce
sujet, mais, pour le moment, nous sommes ici pour écouter la population,
ce qui permettra aux parlementaires de tracer la voie qu'ils croient juste, et
ce, dans le meilleur intérêt des Québécois.
Voilà pourquoi nous sommes ici, pour entendre tous les
mémoires.
Il y a un sujet sur lequel je voudrais attirer l'attention du ministre.
M. le premier ministre, hier, dans son message inaugural, nous a fait part que
le gouvernement voulait d'ailleurs, il y a un projet de loi à cet
égard créer une banque de terres pour les cultivateurs. Je
n'ai rien vu dans le projet de loi qui protégerait les locataires
éventuels de ces terres. Parce qu'il va falloir prévoir aussi des
mécanismes pour protéger les locataires de terres qui
appartiendront à la province. Ces locataires amélioreront
certainement la terre qu'ils loueront afin d'en tirer le meilleur
bénéfice possible, mais nous ne voyons aucun texte ou amendement
qui permettra aux locataires de terres du gouvernement d'être
protégés eux aussi.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Pointe-Claire.
M. William F. Shaw
M. Shaw: Quelques courtes remarques, M. le Président.
Premièrement, nous sommes ici pour étudier un projet de loi qui
essaie de généraliser une situation qui est fort difficile
à régler. On voit au Québec maintenant une
détérioration des logements partout, parce que le secteur
privé a toujours prouvé, il y a une dizaine d'années, que
c'est encore rentable d'intervenir dans un investissement comme des logements,
des appartements à louer. Aujourd'hui, nous avons les deux
côtés de la médaille qui vont présenter leur point
de vue; un côté, qui veut protéger le niveau des
coûts qu'il doit assumer chaque mois à cause de l'inflation dans
tous les domaines, et nous allons écouter aussi l'autre
côté, qui dit que si vous voulez qu'un individu ou un groupe
investisse dans les logements, ces investissements doivent être
protégés comme d'autres investissements. (10 h 45)
Que l'Etat ait une responsabilité dans ce domaine est un fait,
mais les moyens qu'il prend pour agir dans ce domaine sont très
importants. On voit, M. le Président, que cet équilibre doit
être trouvé pour assurer de nouveaux investissements dans les
logements au Québec. On voit dans la ville de Montréal, pour les
logements résidentiels, depuis deux ans, qu'il y a une diminution de
57,7%. On voit aussi la diminution de la qualité des logements, parce
que les propriétaires n'ont pas assez de revenus pour faire les
réparations demandées. On voit aussi que, de jour en jour, la
qualité des logements augmente très peu, si on considère
tous les autres facteurs dans le style de vie que nous avons connu il y a
cinquante ans.
Nous sommes prêts à examiner les deux côtés de
la médaille. Notre responsabilité est d'essayer de convaincre le
ministre que les deux côtés doivent être
protégés, sans abroger le côté des
propriétaires des logements et, en même temps, les besoins des
locataires. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Drummond, vous vouliez dire quelques mots.
Ordre des travaux
M. Clair: Oui. M. le Président, j'ai eu l'occasion de
discuter avec mes collègues de l'Opposition, notamment avec les
députés de Notre-Dame-de-Grâce, de Saint-Hyacinthe et de
Pointe-Claire, relativement à nos travaux. Et sans aucunement faire une
motion, mais simplement pour vous donner une indication de ce qui me semble
être la volonté des différents partis politiques
représentés, j'aimerais simplement vous indiquer quelques points.
Cela pourra vous aider à nous aider à être
fonctionnels.
Il semblait y avoir trois points sur lesquels nous serions d'accord pour
que vous nous aidiez, encore une fois, à faire respecter ces grandes
lignes.
Dans un premier temps, nous serions d'accord pour que vous limitiez
à 20 minutes le temps de présentation de chacun des
mémoires.
Dans un deuxième temps, nous serions d'accord également,
sans faire état de répartition du temps entre les partis
représentés nous pensons que nous serons en mesure de nous
entendre au fur et à mesure que vous considériez qu'une
période d'une heure, au total, par mémoire, incluant les 20
minutes, serait suffisante pour que les membres soient bien informés de
chacune des prétentions des groupes qui se feront entendre.
Et dans un troisième temps, en ce qui concerne les groupes
à être entendus au cours de la journée d'aujourd'hui, de
celle de demain et de celle de vendredi, il y a eu une liste qui vous a
été remise par moi-même. Chacun des membres de la
commission a eu l'occasion d'en prendre connaissance. A l'intérieur des
barèmes que je vous ai indiqués précédemment, on
viserait à entendre tous et chacun des groupes prévus à
cette liste.
Le but évident de ces trois points d'entente est, bien
évidemment, d'éviter que des groupes soient privés d'un
temps de parole, que d'autres soient forcés de revenir deux ou trois
jours après.
Ce sont trois guides qu'on voulait vous donner, dans le but de faciliter
ces travaux: Dans un premier temps, une limite de temps maximale de 20 minutes
pour la présentation des mémoires, une heure au total, les 40
minutes restant se répartissant selon les besoins des partis politiques,
au fil des mémoires, et, troisièmement, d'entendre, au cours des
trois prochains jours, les groupes indiqués.
En ce qui concerne la journée de vendredi, également, il
semblait qu'on s'entendrait assez facilement pour débuter la
journée à neuf heures, quitte à y revenir. Mais du
côté ministériel, il ne semble pas non plus qu'il y ait
d'opposition à ce qu'on commence, vendredi matin, à neuf
heures.
Pour les autres journées, en autant que faire se peut, M. le
Président, nous avons l'intention de tenir l'Opposition bien
informée du nombre de mémoires qu'on pourrait entendre par jour,
se basant à peu près sur les grandes lignes directrices que je
viens de vous donner.
M. Scowen: Oui, mais la seule réserve c'est une
nuance c'est que vous avez une liste de 14 mémoires et le
principe est d'essayer de les entendre tous cette semaine, avec la
réserve qu'il faut terminer à midi à cause des autres
affaires de vendredi après-midi. Et c'est possible que cet
après-midi, nous n'ayons pas de séance.
Sous réserve de ces deux conditions, on va essayer de tous les
entendre.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur, d'accord avec
cela. M. le ministre.
M. Tardif: Avec votre permission, M. le Président, le
député de Saint-Hyacinthe a fait état de la
réglementation prévue dans le projet de loi. Je voudrais
immédiatement informer la commission que cette réglementation
sera disponible lors de l'étude article par article et non pas à
ce stade-ci. Je pense que ce serait déjà préjuger des
représentations qui nous seront faites que d'avoir une
réglementation déjà toute prête. Il y a
évidemment du travail, elle est en voie de préparation et
l'objectif sera de la déposer devant cette commission lors de
l'étude article par article.
M. Cordeau: Merci, M. le ministre.
Le Président (M. Laplante): Merci. Maintenant, messieurs,
avant de vous identifier, je tiens à vous informer que vous avez vingt
minutes pour la présentation de votre mémoire. Si vous en prenez
moins, tant mieux, les membres de cette commission pourront vous questionner
encore plus longtemps. En débutant, j'aimerais que vous identifiiez
votre groupe et les personnes qui sont à vos côtés,
messieurs.
Mémoires
Front commun des associations de locataires de
Montréal métropolitain
M. Pelletier (Denis): Merci, M. le Président. Nous
représentons le Front commun des associations de locataires du
Montréal métropolitain. Le front commun représente une
dizaine d'associations de Montréal et son mémoire a
été appuyé par quelques groupes dont vous trouverez une
liste sur les documents qui vous ont été transmis tantôt.
Mon nom est Denis Pelletier, de Côte-des-Neiges. A ma gauche, Denis
Gervais, de Verdun, et Klaus Bylsma, de Notre-Dame-de-Grâce.
Avant de commencer notre exposé, nous voudrions d'abord remercier
les membres de la commission d'avoir accepté que le front commun soit
entendu dès le début de la commission. Nous aimerions avoir le
loisir d'utiliser les vingt premières minutes de notre temps pour vous
exposer nos revendications, après, on passera aux questions.
Le bill 107 touche directement les intérêts des locataires
et, selon le désir exprimé par nos
membres, nous nous présentons donc ici tout en étant
conscients que cette consultation ne changera pas grand-chose à la
position du gouvernement sur la question du logement. Cette position n'a
guère changé depuis que le gouvernement libéral, en 1972,
après avoir subi les pressions des propriétaires, retirait le
bill 59 qui prévoyait, entre autres, une limite de 5% sur les hausses de
loyer au-dessus de laquelle les propriétaires devaient passer par la
régie. Disons que le gouvernement conservateur de l'Ontario c'est
un gouvernement conservateur a adopté une loi similaire, en
1975.
Pour bien illustrer la politique du gouvernement actuel, on peut se
demander, devant le bill 107, ce que signifient aujourd'hui des paroles comme
celles que répétait le député Scowen, tantôt,
les paroles de M. Tardif: "Pour nous, en tout cas, le droit au logement est un
droit aussi fondamental que celui de se nourrir, de s'habiller, de la
santé et de l'éducation." On s'aperçoit que ce ne sont pas
seulement les groupes de locataires qui ont amené l'idée du droit
au logement.
D'autres paroles sorties du programme du Parti québécois,
en 1975 et 1978: "Nous nous engageons à protéger plus
efficacement le locataire en donnant à la régie le droit de
contrôler le niveau des loyers de façon à l'assujettir
à des barèmes liés au coût de la vie et au salaire
minimum." Ce sont de beaux objectifs, on n'en demande même pas tant.
D'autres paroles de M. Robert Burns, en 1971 : "II est urgent non pas
que l'on fasse de belles promesses, que l'on dise qu'il est nécessaire
d'améliorer cette loi, mais qu'effectivement une véritable
refonte se fasse de cette loi qui vise quand même une grande partie de la
population." "Une véritable refonte", on peut se demander si le bill 107
est une véritable refonte de la loi.
Nous toucherons dans notre exposé trois aspects essentiels, soit
le contrôle des loyers, les reprises de possession et le problème
des réparations et services. Le bill 107 touche d'autres aspects de la
vie des locataires et notre position sur ces aspects se retrouve dans notre
mémoire et dans le résumé que nous vous avons
distribué. Si le temps nous le permet, nous en traiterons après
la période des questions. De toute façon, nous vous invitons
à en prendre connaissance par vous-mêmes et nous répondrons
à vos questions à ce sujet.
Le bill 107 change-t-il quelque chose au contrôle des loyers? La
réponse à cette question est: "oui". Eh oui! la Presse titre, en
première page, à la fin décembre: "Les
propriétaires devront maintenant justifier leurs augmentations devant
leurs locataires." C'est cela qui change. C'est cette mesure-là qui va
assurer le droit au logement. Nous sommes assurés, nous aussi, que cette
mesure va changer du tout au tout les conditions de vie des locataires.
Messieurs les députés, soyons un peu sérieux.
D'abord, cela se fait déjà, cette chose-là. J'imagine ici
la scène du propriétaire dramatique et sérieux face
à son locataire peu informé, avec son bagage
d'insécurité, qui lui explique pourquoi il hausse son loyer: Vous
savez, monsieur, mes taxes augmentent, les réparations que j'ai faites,
le coût de la vie, la baisse du dollar pour mon voyage en Floride cet
été; c'est la vie, tout monte, votre loyer aussi doit monter.
Qu'est-ce que j'entends? Vous pensez aller à la régie? N'oubliez
pas que j'ai trois grands enfants qui seraient peut-être
intéressés à avoir votre logement. Cela coûte cher
déménager. Pensez-y, je ne voudrais pas être forcé
de retarder certaines réparations qui devaient être faites dans
votre appartement.
Le tour est joué. Le locataire a signé son augmentation de
10% ou 15%, une augmentation abusive. D'accord, je caricature peut-être
un peu, mais très peu. Ce sont des situations qu'on voit souvent.
Monsieur n'ira pas à la régie parce que cela cause des
difficultés, parce qu'il y a beaucoup de paperasse, effectivement, mais
aussi parce qu'il a peur de son propriétaire, de se faire couper des
services, de l'éviction. Le locataire coupe sur les vêtements, les
loisirs pour engraisser les profits de son propriétaire.
Le projet de loi 107 ne change rien au genre de contrôle des
loyers. Ce sera toujours au locataire à contester la hausse de loyer.
C'est le contrôle souple qui, en fait, n'est pas un contrôle. Une
récente étude de Godbout et Matthews nous montre bien que les
locataires ne sont pas protégés. Seulement 5% d'entre eux, 4% en
1978, utilisent la régie. Or, 25% des locataires subissent chaque
année des hausses abusives de plus de 10%. C'est le cas d'une
majorité de personnes âgées, craintives face à leur
propriétaire ou face à la régie. C'est le cas des
locataires des duplex qui subissent le chantage de l'éviction. C'est le
cas des nouveaux locataires et des milliers d'autres qui ignorent, qui ont peur
et qui, après réflexion, préfèrent payer. Ce
système est profondément injuste et rétrograde. Il est
d'ailleurs à noter que le Québec est la seule province du Canada
qui maintienne ce type de contrôle qui n'en est pas un.
Si le gouvernement veut vraiment assurer le droit au logement, il doit
songer à instaurer un réel contrôle. Le front commun
demande que tous les propriétaires soient obligés de passer par
la régie pour obtenir une hausse de loyer. Ainsi, tous les locataires du
Québec seraient protégés contre les abus criants qu'ils
subissent chaque année. En toute logique, n'est-il pas normal que ce
soit au propriétaire de s'adresser à la régie, de faire
les démarches? C'est lui qui fait le profit, et non le locataire. Notons
que cette demande du front commun ne vient pas comme cela, dans les airs. Elle
s'inspire fortement du rapport du groupe de travail du ministre Tardif, rapport
qui est encore confidentiel et qui a précédé le livre
blanc et le projet de loi 107. Ce rapport proposait, entre autres, au sujet du
contrôle des loyers, de ne permettre les ententes que dans les duplex et
les triplex dont un des logements est occupé par le propriétaire
ou dans les immeubles de plus de six logements où un processus de
négociation collective a démarré avec l'assentiment d'au
moins la
moitié des locataires plus un. Dans tous les autres cas, la
fixation de la hausse est obligatoire. C'est donc au propriétaire de
demander à la régie la permission de hausser le loyer. C'est un
rapport gouvernemental.
On nous objecte qu'une telle mesure créerait une bureaucratie
trop grande. Nous croyons que cet argument est mal fondé. En Ontario,
où on a imposé une limite de 6% à la hausse et où
les locataires insatisfaits, de même que les propriétaires qui
estiment avoir besoin d'une plus forte hausse, peuvent s'adresser à la
régie, cette même régie employait 280 personnes en 1977,
alors qu'au Québec, on en employait 398. Est-ce parce que les
fonctionnaires ontariens sont plus efficaces que ceux du Québec? On ne
le croit pas. C'est simplement que les causes soumises sont collectives et non
individuelles comme au Québec. Le système ontarien a
naturellement ses torts, mais ce n'est rien à côté de la
profonde injustice sociale que vivent les locataires du Québec.
On objecte aussi que ce type de contrôle freinerait les
investissements dans le domaine immobilier à cause d'une perte de
profits. C'est ce que vont vous dire les trois autres groupes de
propriétaires qui vont passer aujourd'hui, j'imagine. Il y a peu
d'études officielles sur les profits des propriétaires. Notons
cependant qu'un immeuble représente un capital et que, lors de la
revente de l'immeuble, il se produit toujours un gain spéculatif. De
plus, une étude fédérale-provinciale publiée dans
la Presse du 18 septembre 1978 soulignait que les quinze plus importantes
compagnies de développement immobilier ont fait un profit de $0.35 par
dollar avant impôt. Dans les autres domaines, la même étude
estimait le profit à $0.16 sur chaque dollar avant impôt entre
1972 et 1976. C'est donc que le domaine immobilier demeure encore payant.
Le front commun considère qu'aucune objection ne tient devant les
privations que doit s'infliger une grande partie de la population qui doit
consacrer plus du quart et quelquefois près de 40% de son revenu pour se
loger. Cette situation économique a des conséquences sociales
importantes. Les locataires demandent au gouvernement de prendre ses
responsabilités et d'instaurer un véritable contrôle des
loyers. (11 heures)
Avant de passer la parole à mon ami Denis Gervais, de Verdun, qui
vous entretiendra des problèmes de reprises de possession et de
réparations et services, je tiens à vous démontrer
à quoi on en arrive avec un contrôle souple.
Le loyer médian a grimpé de 33 1/3% en 30 mois à
Montréal. Cette statistique montre qu'à l'heure actuelle,
certains propriétaires ont réalisé des profits
exorbitants, comme un propriétaire du quartier Saint-Louis qui avait
encaissé 700% de profits dans un an, que des logements sont
surévalués et qu'une politique de contrôle réel des
loyers doit aussi être accompagnée d'une révision du prix
de base pour contrer les injustices permises par le contrôle souple et
que, malheureuse- ment, le projet de loi no 107 continue toujours de
permettre.
Merci de votre attention.
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît! Aucune
manifestation n'est permise lorsqu'une commission siège.
M. Gervais (Denis): Au niveau des reprises de possession, le
projet de loi porte le délai de trois à six mois et donne au
propriétaire le fardeau de contester. Elles demeurent donc toujours
permises. Les propriétaires pourront toujours menacer d'expulsion un
locataire qui osera penser se rendre à la régie. Si on accepte le
principe du droit au logement, on doit refuser toute reprise de possession.
C'est ce que demande le front commun.
Prévoir des amendes et dommages-intérêts ne suffira
jamais à empêcher un propriétaire d'expulser de mauvaise
foi un locataire qui fait valoir ses droits.
L'abolition complète des reprises de possession existe depuis des
décennies en Angleterre. Cela n'implique pas que le locataire soit
empêché de devenir propriétaire, ce qui est quand
même limité à une petite minorité de locataires
souvent mieux nantis. Cela ne fait que limiter des choix disponibles,
c'est-à-dire à de nouvelles maisons ou à des maisons
occupées par des propriétaires ou des maisons
inoccupées.
Concernant les réparations et les services. Le projet de loi no
107 va permettre aux locataires de déposer leur loyer à la
régie après un avis de dix jours, s'ils ne reçoivent pas
les réparations et les services auxquels ils ont droit.
La régie pourra permettre aux locataires de poursuivre le
dépôt du loyer, le propriétaire s'en trouvera donc
privé, ou bien pourra permettre d'utiliser cet argent pour effectuer les
réparations nécessaires.
Encore une fois, d'un côté, on donne une chose; de l'autre,
on l'enlève. Je m'explique. Prenons le cas d'un locataire d'un logement
dont le toit coule. Il se voit accorder la possibilité de déposer
son loyer afin d'exercer une pression sur son propriétaire. Il perd
cependant le droit de demander une réduction de loyer pour le temps
durant lequel il a dû subir les inconvénients du toit qui coule.
Or, ce droit lui est présentement reconnu par la loi.
De plus, certains locataires seront encore obligés de s'occuper
des responsabilités qui incombent aux propriétaires. D'ailleurs,
à ce niveau, rien n'est clair, ce qui fait souvent l'affaire des
propriétaires qui font rénover leurs logements par les locataires
pour ensuite les évincer.
Le front commun demande depuis longtemps qu'un code
d'habitabilité soit intégré à la loi pour qu'enfin
les locataires sachent à quoi s'en tenir. Ce code était
déjà prêt en juillet 1978, selon un article de la Presse du
même mois. Qu'est-ce qu'on attend pour le rendre public?
Enfin, la régie devrait avoir le pouvoir d'émettre des
injonctions pour forcer les propriétaires négligents à
agir. A défaut de s'exécuter, ces gens auraient à subir de
lourdes amendes.
En ce qui concerne les réparations urgentes. Le projet de loi no
107 va permettre aux locataires de réduire du montant du loyer les
coûts de ces réparations, si le propriétaire ne s'en est
pas occupé.
Pourriez-vous nous dire, MM. les députés, ce que vous
entendez par une réparation urgente? Quel délai sera
accordé au propriétaire pour agir? La loi est muette à ce
sujet. De plus, qu'est-ce qu'on fait si le coût des réparations
est au-dessus des moyens du locataire? Ce n'est pas tout le monde qui peut
débourser $500, par exemple, pour des responsabilités qui
incombent au propriétaire, qui n'incombent pas, en fin de compte, au
locataire.
Le front commun demande qu'on introduise de nouvelles procédures
qui protégeraient vraiment le locataire. Dans les cas urgents, le
locataire pourrait obtenir de la régie une autorisation écrite
pour faire la réparation au plus tôt. La régie paierait la
facture, grâce à un fonds spécial et poursuivrait le
propriétaire en lui imposant une amende.
Pour les situations urgentes comme le manque de chauffage, le projet de
loi n'apporte aucune solution. Que peut faire un locataire d'un immeuble de
plusieurs unités où la fournaise se brise en plein hiver, alors
qu'il fait moins 20 à l'extérieur et dont le propriétaire
est en Floride pour plusieurs mois? Le projet de loi ne prévoit pas une
telle situation. Le front commun propose de doter la régie de pouvoirs
spéciaux pour régler immédiatement la situation et imposer
au propriétaire négligent des coûts et une amende. Un tel
service devrait être disponible 24 heures par jour.
Le projet de loi 107 continue de permettre au propriétaire
d'imposer au locataire le coût des réparations majeures et des
améliorations, même si le locataire ne désire pas ces
améliorations de peur de ne pouvoir supporter les fortes augmentations
qui s'ensuivront. On connaît le scénario. Le propriétaire
décide d'entreprendre des rénovations, ne demande pas du tout
l'avis de son locataire et s'amène, après une semaine, avec ses
ouvriers. Quelques mois plus tard, le locataire reçoit un avis
d'augmentation trop élevée pour sa capacité de payer. En
conséquence, ce locataire se voit forcé de quitter son logement
parce qu'il n'est pas capable de payer le nouveau loyer. A ce sujet, le front
commun exige que les locataires aient un droit de regard sur ce qui se fait
dans leur logement.
Le Front commun des associations de locataires de Montréal ne
peut être que très révolté du peu de changements
apportés par le projet de loi 107, un projet de loi que les locataires
se sont fait promettre depuis plus de deux ans par le gouvernement provincial
et qui devait amener des améliorations importantes dans la
défense de leurs droits.
Comme on l'a vu par maints exemples, et particulièrement dans le
chapitre sur le contrôle des loyers, le projet de loi 107
n'améliore pas du tout les recours disponibles aux locataires et ne
change pas non plus le rapport des forces ou les règles du jeu
actuelles, un rapport des forces et des règles qui favorisent nettement
les propriétaires. Le gouvernement a choisi de rejeter non seulement
presque toutes les recommandations du front commun, mais aussi les
recommandations les plus importantes de son propre groupe de travail. Notre
déception est d'autant plus grande que de nombreuses déclarations
faites par des députés du parti au pouvoir lorsqu'ils
étaient dans l'Opposition avaient donné lieu à beaucoup
d'espoir.
Nous vous remercions de votre attention et nous sommes prêts
à répondre à vos questions avant de passer aux aspects
secondaires.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, évidemment il y aurait
de multiples questions à poser aux représentants du front commun
mais peut-être, d'abord, faudrait-il répondre à l'une de
leurs questions en ce qui concerne le cas d'habitabilité. Je crois avoir
mentionné tantôt que cela fera partie de la réglementation
qui sera déposée lors de l'étude article par article.
C'est un fait qu'un tel projet est en préparation présentement.
Il sera rendu public et discuté lorsque cette commission reprendra ses
travaux.
J'aimerais, avant d'aborder un certain nombre d'affirmations qui ont
été faites, demander aux gens du front commun des locataires...
Je vois ici qu'il y a dans la salle un certain nombre de représentants,
je pense, des groupes de personnes âgées qui sont
mentionnés parmi les associations que représente le Front
cor.nnun des locataires et je pense qu'il convient peut-être de souligner
leur présence ici. On a cité des chiffres quant au volume
d'affaires qui seraient transigées devant la commission et
amorcées je ne sais pas où on a pris ces
chiffres-là quant à l'effectif de la Régie des loyers par
rapport à la situation en Ontario mais je pense qu'il y a un
certain nombre de corrections à apporter à ces chiffres. D'une
part, le personnel de la régie, contrairement à ce qui est la
situation en Ontario, a quand même un champ beaucoup plus vaste à
couvrir que la législation ontarienne qui ne s'occupe que de fixation du
loyer, alors que dans le cas de la loi au Québec, le domaine est
beaucoup plus grand. Ceci dit, l'effectif est à peu près le
même et ce, pour une population locataire beaucoup plus grande au
Québec qu'en Ontario. Pour l'instant j'aurai évidemment
des questions à poser tantôt je préférerais
laisser les membres de la commission poser des questions.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Oui, j'aurais deux ou trois questions à poser.
Premièrement, je veux vous féliciter de la liste des exemples
concrets que vous avez
apportés à la fin de votre mémoire. Je pense qu'ils
sont très utiles. J'imagine que ce sont des cas réels et c'est
très instructif d'avoir ces exemples concrets. Sur le plan personnel,
j'ai l'intention de les étudier profondément et je vous remercie
de ces exemples.
J'ai deux ou trois questions à vous poser, peut-être que
vous pourriez y répondre. Premièrement, chaque fois que je parle
à votre groupe et comme vous le savez, j'ai souvent parlé
avec M. Bylsma vous avez une perspective de la situation où,
selon moi, vous voyez une situation où les locataires et les locateurs
du Québec sont engagés dans une lutte acharnée les uns
contre les autres jusqu'à près de 100%. De l'autre
côté de la médaille, on voit la commission qui ne
reçoit que 5% ou 6% de plaintes de tout ce que nous avons de baux dans
la province. Vous expliquez ce fait en disant qu'il y a très peu de gens
qui connaissent leur possibilité d'intervenir auprès de la
commission, ainsi de suite. Je pense que, pour moi, c'est important d'avoir une
idée plus concrète. Peut-être que le ministre en a
déjà. Est-ce que les problèmes que vous décrivez et
qui sont très réels sont des problèmes qui touchent un
très petit nombre de personnes je parle par rapport au total
ou est-ce que cette guerre que vous décrivez entre
propriétaires et locataires est généralisée partout
au Québec? Je pose la question parce que, pour moi, la réponse
à cette question, c'est que nous suggérons des réponses
différentes. Vous n'apportez pas des solutions coûteuses et
globales pour régler des problèmes qui sont assez restreints.
C'est une question à laquelle j'aimerais que vous apportiez une petite
réponse. Le deuxième, je pense que vous avez
suggéré, et c'est un moment peut-être efficace et utile de
le soulever, qu'un système d'augmentation globale comme celui de
l'Ontario, de 6%, pour qu'il soit changé d'une année à
l'autre d'après l'augmentation des coûts, serait mieux pour les
locataires que le système actuel. J'ai lu pas mal d'articles qui donnent
l'indication que ce système est plus inflationniste, plus coûteux
pour la collectivité de tous les locataires que celui que nous avons
maintenant, parce que les 4%, 6% ou 8% deviennent en effet la base, le taux
d'augmentation pour tous les propriétaires envers tous les locataires.
Si c'est connu que 6% est permis cette année, c'est dans les journaux,
tous les propriétaires ont tendance à dire: Regardez, Mme ou M.
le propriétaire, 6% est permis, je vais augmenter de 6% et, dans
beaucoup de cas, ils n'ont pas l'intention d'augmenter le taux par ce moyen
dans les cas normaux.
C'est l'expérience vécue par les autres pays, si je
comprends bien, et je pense qu'avant de laisser tomber cette idée que
vous avez proposée, il convient qu'on parle un peu de ce point. J'ai
deux ou trois autres questions, mais je voudrais simplement soulever un de ces
points, parce qu'il y en a d'autres qui veulent parler, c'est la question de la
reprise de possession. Vous avez parlé de l'idée qu'on doit
absolument abolir le droit de reprise de possession d'un logement et vous avez
parlé de l'expérience en Angleterre. D'après ce que j'ai
appris de la situation en Angleterre, en effet, quand vous empêchez la
reprise de possession, c'est le locataire même qui devient le
propriétaire et il commence la sous-location de cet appartement, parce
que le locateur n'a pas le droit de le reprendre et vous avez ce système
de "Key-money", je pense que c'est appelé ainsi en Angleterre, par
lequel vous avez un bel appartement, dans lequel le locataire ne veut plus
rester, mais qu'il peut sous-louer pour l'éternité, simplement du
fait que le locateur n'a pas le droit de le reprendre. C'est un transfert du
"propriétaire-ship", si vous voulez, du locateur au locataire. Tous les
problèmes pour les nouveaux locataires reviennent par rapport au
locataire devenu locateur. En effet, je pense que cette solution rigide que
vous apportez doit être nuancée et on doit expliquer un peu le cas
de l'Angleterre. Ce sont trois questions auxquelles j'aimerais avoir un peu de
précisions. (11 h 15)
M. Bylsma: D'abord, je vais répondre aux quelques
questions de M. Tardif à propos du système de l'Ontario
comparé à celui du Québec. Au niveau des statistiques, la
comparaison qu'on fait, c'est entre les rapports gouvernementaux, comme celui
de Godbout et Matthews que vous connaissez probablement, et une publication du
gouvernement de l'Ontario, du Ministry of Consumer and Commercial Relations.
Là-dedans, on trouve toutes les statistiques sur le fonctionnement du
contrôle des loyers en Ontario. D'abord, je peux vous dire qu'il n'y a
pas plus de locataires au Québec qu'en Ontario. Il y a le même
nombre de locataires dans les deux provinces, environ un million. On ne peut
pas prétendre qu'il y a plus de locataires au Québec.
Deuxièmement, à propos du champ d'action ou de juridiction
de la régie. En fait, je crois que les causes de diminution du loyer ou
de reprises de possession sont peu nombreuses par rapport aux causes
d'augmentation du loyer. Je n'ai pas de statistiques précises devant
moi, mais je suis sûr qu'au moins 80% ou 90% des causes amenées
devant la régie sont des causes de fixation du loyer. On ne peut pas
expliquer la grande différence entre l'Ontario et le Québec
seulement par le fait que le champ de juridiction au Québec est plus
grand. En fait, c'est plus grand, mais, au niveau du nombre de causes, ce n'est
pas tellement important. Tandis qu'il y a environ 50% plus d'employés de
la régie au Québec qu'en Ontario. Je pense qu'on peut
répondre très vite à l'objection que le système du
Québec est moins bureaucratique. En fait, c'est plus bureaucratique et
moins efficace.
A propos de quelques constations de M. Scowen, comme celle au sujet du
nombre de locataires qui sont touchés par ces problèmes, par
exemple, on peut toujours prétendre, comme le fait M. Tardif, qu'il y a
seulement 5% des locataires qui ont des problèmes, parce qu'il y en a
seulement 5% qui vont à la régie. En fait, ce n'est pas du tout
vrai, comme les autres l'ont mentionné. On sait déjà,
d'après le rapport Godbout et Matthews,
que 25% des locataires subissent des hausses de plus de 10%,
c'est-à-dire des hausses abusives, et 85% ne contestent pas; pas parce
qu'ils croient que la hausse est justifiée, mais parce qu'ils ont peur
d'aller à la régie.
Cela, ce n'est pas seulement une constatation des locataires ou des
associations de locataires, c'est aussi quelque chose mentionné dans le
rapport de Godbout et Matthews. Dans ce rapport, à la page 50, ces gens
ont trouvé que 32,7% de tous les locataires qui sont allés
à la régie ont dit que leurs relations avec les
propriétaires se sont détériorées après
avoir eu recours à la régie; cela veut dire qu'au moins un
locataire sur trois a vu ses relations se détériorer.
En fait, on ne peut vraiment pas savoir complètement combien de
locataires ont concrètement des problèmes. Mais je pense que
cette statistique est assez indicative. Deuxièmement, les gens qui sont
actifs dans les associations de locataires ont eu connaissance de ces choses
régulièrement, constamment. C'est évidemment pour
ça que les associations de locataires se sont développées
et sont devenues aussi nombreuses à cette date-ci, à cause du
fait qu'il y a tellement de problèmes.
Le Président (M. Laplante): Est-ce que vous avez fini, M.
le député de Notre-Dame-de-Grâce? M. le
député de Saint-Hyacinthe.
M. Scowen: II me reste une ou deux questions. Peut-être
allez-vous répondre plus tard?
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Bylsma: Je n'ai pas fini encore.
Le Président (M. Laplante): Vous n'avez pas fini? Allez-y
monsieur.
M. Bylsma: En rapport avec l'objection de M. Scowen à
propos des reprises de possession en Angleterre, le fait que,
supposément, le locataire devient presque propriétaire a fait que
nous avons proposé une solution à ce problème. On a
proposé, comme le Code du travail l'a proposé, que si la question
comme telle disparaît, suite à l'application des baux à
durée indéterminée, cela veut dire qu'en tout temps, un
locataire peut donner trois mois d'avis avant de quitter. Il n'y aura plus de
problème de sous-location, un locataire pourrait simplement quitter et
n'être pas dans la situation de trouver un sous-locataire. Ce serait au
propriétaire de trouver un nouveau locataire, après que le
locataire s'en soit allé.
M. Scowen: Vous voulez enlever le droit de sous-location?
M. Bylsma: Mais suite à l'application d'un nouveau type de
bail, d'un bail à durée indéterminée. Le bail
à durée indéterminée fonctionne comme ceci. Il n'y
a pas de date de début ou de fin du bail. Le locataire loue le logement,
signe un bail et il n'y a pas de date finale, ce n'est pas un bail de six mois,
d'un an ou autre chose. C'est à durée indéterminée.
Quand un locataire veut partir pour n'importe quelle raison, il peut donner
trois mois d'avis. C'était aussi suggéré par le groupe de
travail de M. Tardif. Malheureusement, M. Tardif a laissé tomber cette
idée.
Quant à la dernière objection de M. Scowen à propos
du système de contrôle en Ontario, on a eu quelques discussions
avec ce dernier et il revient toujours avec la question que c'est plus
inflationniste.
Vu qu'en Ontario, on permet aux locataires qui subissent des hausses
moindres que la limite fixée par le gouvernement, de les contester,
même si c'est une hausse de 4% ou 5% qui est injustifiée, je pense
que cela élimine, d'une certaine façon, le côté
inflationniste. Je ne veux pas nier que cela n'existe pas. Mais par exemple, en
Ontario, 6% des causes sont encore apportées par des locataires qui
croient que la hausse est injustifiée.
Même si on admet qu'il y a peut-être un certain
côté inflationniste dans le système de l'Ontario, on ne
défend pas le système de l'Ontario, on défend le
contrôle universel et efficace. Mais on dit quand même que le
système de l'Ontario est beaucoup plus efficace que celui du
Québec.
Si on reconnaît, d'après Godbout et Matthews, que 25% des
locataires subissent chaque année des hausses de 10% et plus, je pense
que le système du Québec est plus inflationniste que celui de
l'Ontario. M. Pelletier a souligné la statistique qui vient aussi de
Godbout et Matthews, que les loyers ont grimpé de 33% entre l'automne
1974 et l'été 1977. Cela veut dire plus de 10% par année,
ce qui est plus inflationniste qu'un système basé sur la limite
de 6% comme en Ontario. On peut prévoir que la hausse moyenne, en
Ontario, sera peut-être de l'ordre de 6% ou 7% l'an, tandis qu'au
Québec, pendant ces trois années, la hausse moyenne était
de l'ordre de 10% ou 11%. Et cela devait être le contrôle souple,
qui est supposément un système efficace.
M. Scowen: Excusez-moi. Dans votre document, vous dites que
l'augmentation moyenne accordée, au Québec, en 1976, était
de 8,5% et en Ontario, de 11,4%...
M. Bylsma: II s'agit de causes en régie.
M. Scowen: Oui. Mais les augmentations moyennes accordées
par la régie sont à peu près de 3% plus
élevées qu'en Ontario, selon votre propre mémoire, si je
comprends bien.
M. Bylsma: La réponse à cela, c'est
qu'évidemment, en Ontario, ce sont seulement les propriétaires
qui ont subi des hausses très importantes qui amènent leur cause
devant la régie. Si un propriétaire croit qu'il serait capable de
justifier 7% ou 8%, pour le 1% il ne serait probablement pas
intéressé à passer devant la régie. Tandis que
si le propriétaire a subi des hausses très importantes,
disons de 10%, 15% ou 20%, ce qui peut bien arriver, c'est à ce
moment-là qu'il aurait tendance à aller devant la régie.
Au Québec, tout propriétaire essaie d'augmenter autant qu'il le
veut, ou qu'il le peut.
M. Scowen: D'accord, merci.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, avez-vous
quelques remarques?
Une Voix: Vas-y.
M. Tardif: Si vous permettez, M. le député, il
faudrait quand même qu'on s'entende. Il y a eu des précisions
apportées en disant finalement que ce que le front commun des locataires
disait, c'est qu'il ne voulait pas appuyer le régime qui existe en
Ontario, mais plutôt se servir de cela comme l'exemple, si vous voulez,
d'une certaine inefficacité de la régie.
J'ai maintenant les chiffres précis concernant l'effectif.
Actuellement, il y a 303 postes à la régie dont 260 seulement
sont remplis, le reste étant autorisé, mais ce sont des postes
vacants. Il y a environ 70 commissaires à la séance, donc des
gens qui entendent des causes sur une base ad hoc ils ne font pas partie
du personnel de la régie et 14 commissaires. C'est l'effectif
actuel et cela n'a pas varié tellement par rapport à l'an
dernier; au contraire, cela a même peut-être augmenté.
L'autre élément, c'est que c'est bien évident que
le système ontarien, tel qu'il existait et qu'il existe jusqu'à
maintenant, même s'il y a un projet de loi qui est présentement
devant la Législature ontarienne, à partir du moment où il
décrète un taux fixe d'augmentation jusqu'à l'an
dernier, c'était 8%, cette année, il propose 6% a pour
effet de possiblement réduire le nombre de causes, quoiqu'il faille
faire attention là, puisque, lorsqu'on dit qu'en une année, la
régie de l'Ontario a entendu environ 200 000 causes, 271 000 causes, en
1976, ceci résulte d'un fait bien simple, c'est que la loi avait un
effet rétroactif et qu'on a entendu deux années dans une. Il
faudrait peut-être dire cela aussi.
L'autre élément, c'est que le système ontarien tend
la loi est présentement devant la Législature ontarienne
à s'en aller vers une étude cas par cas. Même si on
a ce barème de 6%, on dit: Tout locataire qui subit une augmentation de
6% pourrait en appeler de cette augmentation-là, parce qu'il la trouve
quand même trop élevée et, au-delà de ce montant,
c'est le propriétaire qui pourrait en appeler, si par exemple des
rénovations justifiaient selon lui une augmentation plus
élevée.
Or, les données disponibles de l'Ontario indiquent que 95% des
demandes proviennent des propriétaires et 5% des locataires, ce qui
n'est pas tellement loin du volume que nous avons ici.
J'aimerais quand même aussi dire c'est un fait qu'au
cours des dernières années... J'aime- rais corriger un autre
chiffre. Lorsqu'on dit que 80% des causes qui viennent devant la régie
sont des fixations de loyers, cela non plus, ce n'est pas tout à fait
exact. J'ai devant moi le tableau pour l'année 1978 où, sur 57
000 causes, 57 696 causes, 25 737 étaient pour des fixations de loyers,
le reste étant de toutes sortes d'autres matières sur lesquelles,
incidemment, la régie ontarienne n'a pas juridiction, en matière,
par exemple, de résiliation de bail, de réduction du loyer pour
une diminution de services, de reprise de possession, de démolition, de
subdivision, de transformation commerciale qui sont autant de matières
qui viennent alourdir le travail de la régie ici et qui sont
peut-être plus difficiles quand même à apprécier que
certaines demandes de fixation.
Pour ce qui concerne les pourcentages accordés, on dit 33 1/3% en
trois ans. Si vous me permettez de vous donner exactement les pourcentages, je
les ai ici: Pour l'année 1977, par exemple, à titre
d'illustration, l'augmentation moyenne demandée par le
propriétaire je l'ai par type de logements globalement,
c'est de 20,7% et la moyenne d'augmentation accordée en 1977 a
été de 9,1%, ceci variant évidemment selon l'âge du
bâtiment et selon le type de construction, mais la moyenne que vous citez
d'à peu près 10% l'an, depuis trois ans, est à peu
près dans l'ordre de grandeur.
Il reste que j'aimerais m'assurer que j'ai bien compris lorsqu'on dit:
Est-ce que, finalement, on veut ou on demande au gouvernement du Québec
de s'en aller vers la fixation d'un taux uniforme d'augmentation pour une
année donnée? Est-ce que, véritablement, c'est cela on ne
fait-on encore une fois qu'utiliser l'exemple ontarien à d'autres fins?
J'aimerais quand même que ce soit bien clair, que ce soit
précisé cela. (11 h 30)
M. Pelletier: On ne fait qu'utiliser l'exemple ontarien. Notre
position est très claire, à ce niveau. On demande un
contrôle universel et efficace des loyers.
M. Tardif: On ne veut pas un taux fixe?
M. Pelletier: Non, on ne veut pas de taux fixe, à ce
niveau. On utilise l'exemple ontarien.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président. Tantôt, vous
avez fait parvenir une liste des associations faisant partie du front commun.
Quel est le nombre de locataires que représente cette liste ou que vous
représentez? Combien y a-t-il de membres dans chaque association?
M. Pelletier: Si on commence à parler de "membership",
c'est quand même fausser un peu le problème. Les locataires ont
tous les mêmes intérêts face à leurs
propriétaires. Tous les locataires de Montréal ont tous les
mêmes intérêts face à leurs propriétaires. Ce
ne sont pas tous les
locataires de Montréal qui font partie des associations de
locataires, il faut bien être conscient de cela. Ce ne sont pas tous les
propriétaires qui font partie des associations de propriétaires
non plus, il faut être conscient de cela.
M. Cordeau: Oui, mais encore là...
M. Pelletier: Pour répondre à votre question,
l'Association des locataires de Côte-des-Neiges dont je suis membre,
représente 600 membres actifs.
M. Cordeau: Non, je ne veux pas le nombre de chaque
catégorie, mais globalement.
M. Pelletier: Non, à Côte-des-Neiges, il y a des
milliers de locataires, mais c'est clair que tous les locataires ne font pas
partie de l'Association des locataires. Je pense que cette question, sans
vouloir vous offenser, n'est pas pertinente.
M. Cordeau: Réellement, elle est pertinente pour moi,
parce que je voulais savoir réellement ce que vous
représentez.
M. Pelletier: Oui.
M. Cordeau: Si une association vient ici et qu'elle
représente trois membres...
M. Pelletier: Non, ce qu'on représente, monsieur, vous
pouvez le voir en arrière...
M. Cordeau: Si vous croyez que ma question n'est pas pertinente,
ne répondez pas, et je vais garder mon opinion pour moi.
M. Pelletier: D'accord. Sans vouloir vous offenser, on est venu
en autobus avec une cinquantaine de personnes en arrière, qui se sont
déplacées aujourd'hui pour venir ici. Ces associations peuvent
représenter quelques milliers de locataires qui sont membres actifs
d'associations.
M. Cordeau: Parfait. Merci. Maintenant, j'aurais peut-être
deux questions sur la démolition des logements. Croyez-vous que les
dispositions du présent projet de loi que nous étudions sont
assez restrictives ou sont assez claires pour la protection des logements
actuellement, concernant la démolition? La deuxième aussi, c'est
la même chose. Dans votre mémoire, vous donnez plusieurs exemples
concrets, des cas bien spécifiques. Croyez-vous que le projet de loi
comporte des articles pour éliminer les difficultés ou les
lacunes que vous avez mentionnées dans votre mémoire, concernant
ces projets concrets que vous avez exposés?
M. Bylsma: Notre position sur l'affaire de la démolition
est déjà indiquée dans le mémoire. On s'oppose au
fait qu'il n'y a aucune participation des locataires dans tout ce processus.
Notre position est que la démolition des maisons ne devrait pas se faire
sur le dos du locataire et que le propriétaire devrait obtenir
l'approbation préalable du locataire avant de passer en régie,
que ce ne soit pas à la régie ou à une institution
publique de légiférer là-dedans, mais que ce soit par une
autre façon d'attaquer le droit du locataire à son logement. On
insiste pour que le locataire ait au moins le droit de dire son mot
là-dedans. A part de cela, les procédures sont bien correctes. Si
le locataire est prêt à partir, on n'a pas d'objection au
processus proposé dans la loi.
Le Président (M. Laplante): Est-ce tout, M. le
député de Saint-Hyacinthe? Pas d'autres questions?
M. Cordeau: En ce qui regarde les procédures, quand il y a
démolition, c'est la municipalité qui doit premièrement
accorder... Les citoyens doivent obtenir la permission de la
municipalité pour commencer. Ensuite, le locataire peut appeler à
la régie. C'est la régie qui doit prononcer le jugement final
concernant les démolitions. Est-ce exact?
M. Bylsma: Oui.
M. Cordeau: Croyez-vous que ce soit suffisant?
M. Bylsma: On n'a réellement pas d'objection à la
procédure à la régie, mais tout ce qu'on dit, c'est qu'au
préalable, le propriétaire devrait demander l'approbation du
locataire pour ce qu'il veut faire. S'il veut que le locataire s'en aille,
qu'il récompense...
M. Cordeau: Bon! C'est votre point de vue. Parfait! Je voulais
connaître votre point de vue sur ce sujet. C'est votre point de vue.
M. Bylsma: C'est ça.
M. Cordeau: Parfait!
La deuxième question concerne les lacunes, c'est-à-dire
les exemples que vous donnez dans votre mémoire, à savoir si le
projet de loi apporte des correctifs suffisants...
M. Bylsma: Mais...
M. Cordeau: ... pour éviter ces difficultés.
M. Bylsma: Les exemples étaient pour démontrer que
les recours prévus par la loi ne sont pas suffisants dans ces cas
concrets et nous trouvons que les exemples mentionnés sont des
problèmes vécus par des milliers de locataires à chaque
année et que la loi n'a pas apporté de solution pour que ces
locataires aient droit, à court terme, aux réparations ou
à quoi que ce soit.
M. Cordeau: Bon! Tout au long de votre mémoire, on peut
constater que vous réclamez des propriétaires beaucoup de choses
c'est
normal aussi les obligations des propriétaires envers les
locataires. Croyez-vous que la loi soit assez explicite concernant les
obligations des locataires envers les propriétaires et l'entretien ou la
responsabilité du locataire face au propriétaire pour conserver
le logement le plus propre possible?
M. Pelletier: A ce niveau-là, on considère et c'est
certain que c'est absolument flou. Ce que le Code civil dit, et la Régie
du logement dit encore la même chose, c'est que le propriétaire
doit s'assurer des grosses réparations et le locataire des petites
réparations d'usage; d'accord? Ce n'est pas clair. La peinture, est-ce
que c'est une réparation d'usage, par exemple? Une poignée de
porte qui casse, des fenêtres qui laissent entrer l'air? Ce n'est pas
clair et il n'y a rien de défini et ça fait longtemps que le
front commun demande qu'un code d'habitabilité soit inscrit dans la loi
pour qu'enfin les locataires sachent à quoi s'en tenir. A l'heure
actuelle, c'est délibérément flou. Quand cela se
retrouvera dans les règlements... Vous savez comme moi qu'aller fouiller
dans les règlements dans une bibliothèque, c'est quelque chose...
C'est un contrat, comme on dit, alors qu'une loi, c'est assez facile à
trouver, pour un locataire moyen, M. Tardif.
Le Président (M. Laplante): C'est tout? M. le
député de Pointe-Claire.
M. Cordeau: Oui, M. le Président, pour tout de suite. Ce
sont les questions que j'ai à poser.
M. Shaw: Je veux parler premièrement de votre point de
vue. Est-ce que vous êtes prêts à accepter que le coût
d'entretien d'un immeuble à logements doive être
considéré quand on essaie d'avoir des augmentations?
Disons que vous avez un logement qui a besoin de réparation,
parce que vous êtes prêts à suggérer qu'on demande un
niveau de qualité du logement, cet accroissement de coût peut
être de $1500 par logement. Est-ce que vous êtes prêts
à accepter que ce montant soit réparti sur la période du
prochain bail avec le même locataire?
M. Pelletier: Sur cette question, on considère que c'est
certain qu'un locataire qui habite un logement doit participer au coût
des réparations de ce logement, mais il faut voir que les grandes
réparations doivent s'échelonner sur une certaine période
de temps, parce que le locataire va peut-être rester deux ans dans le
logement, alors que la réparation d'un toit, ça va durer quinze
ans. Pourquoi serait-ce lui qui paierait pour la réparation du toit,
alors que cette réparation va durer toute la période? On s'entend
à ce niveau-là. En fait, c'est un peu la position du front commun
à ce niveau. Au niveau des dépenses normales, ça doit se
faire, je pense, moitié-moitié.
M. Shaw: Vous avez parlé tantôt des gros profits de
certains propriétaires. 700% dans un an?
M. Pelletier: Oui, à Saint-Louis, 20
propriétaires.
M. Shaw: Est-ce que cela inclut la dépréciation qui
a été faite sur la propriété? Parce que, c'est en
effet, une subvention du gouvernement. Quand vous parlez des profits des
propriétaires de Montréal, disons, en connaissez-vous un qui fait
des profits avec sa propriété sans se prévaloir de son
droit à la dépréciation?
M. Bylsma: L'exemple de 100% est un exemple pas mal exceptionnel
d'un propriétaire qui achète à bas prix, qui
réussit à augmenter les loyers d'une façon très
exagérée et qui, par la suite, vend les immeubles le double du
prix après deux ou trois ans. D'accord?
M. Shaw: Ce n'est pas en fonction du montant des loyers qui ont
été payés par les locataires. C'est une affaire
d'entrepreneur.
M. Bylsma: Mais oui, parce que la valeur d'un immeuble se fait
à partir du revenu de l'immeuble. Si le propriétaire est capable
d'augmenter les loyers de 50% ou 75%, cela augmente aussi la valeur potentielle
de l'immeuble. Alors le propriétaire fait un grand gain de capital
à cause du fait qu'il a été capable d'augmenter les loyers
comme cela.
M. Shaw: Dans ce cas, si les locataires sont allés
à la régie, pensez-vous qu'ils n'ont pas eu un
résultat?
M. Bylsma: Oui, mais la question à poser serait: Pourquoi
n'y vont-ils pas? Ils n'y vont pas à cause de la peur de se faire
intimider, de se faire retirer des services, etc. Ce n'est pas à cause
du manque d'information. En général, nous croyons que la grande
majorité des locataires sont au courant de l'existence de la
régie et de ses fonctions, mais ils n'y vont pas à cause de
toutes les intimidations faites par les propriétaires.
M. Shaw: Parmi vos groupes, n'avez-vous pas les moyens de
communiquer avec des gens comme cela pour les aider?
M. Bylsma: Mais ce n'est pas à ce niveau-là qu'est
le problème. L'information se fait tous les jours par le gouvernement,
par la régie, par les associations de locataires. Le problème est
au niveau des recours, au niveau des procédures, le fait que c'est
toujours au locataire d'amener la cause devant la régie. En fait, je
peux citer une étude qui s'appelle: "Rent stabilization", une
étude faite par le Conseil canadien de développement social qui a
dit que le grand défaut du système de contrôle des loyers
du Québec en comparaison avec les autres provinces, c'est le trop grand
fardeau mis sur le dos des locataires. D'accord? C'est à cause de cela
que le contrôle des loyers au Québec arrive avec seulement 5% de
tous les locataires qui y vont, tandis que réellement, en rapport avec
le pourcentage des hausses abusives
qui passent à la régie, cela devrait être 25% ou
30%.
M. Shaw: Vous croyez qu'il y a autant d'abus?
M. Bylsma: Oui, d'après l'étude de Godbout et
Matthews. Oui. Il y a entre 27% et 35% de toutes les hausses en 1977 qui
étaient de plus de 10%. Cela veut dire qu'il y a seulement 5% qui y sont
allés tandis qu'environ 30% ou 35% au moins auraient dû y
aller.
M. Shaw: Mais le taux d'inflation dans les deux années
dont vous parlez était de plus de 10% aussi et vous n'êtes pas
prêt à accepter que le coût des loyers pour les logements
n'ait pas augmenté au même niveau.
M. Bylsma: Je n'ai pas de statistiques sur le taux d'inflation,
mais le taux d'inflation n'a pas nécessairement de rapport direct avec
le taux d'augmentation des dépenses des propriétaires.
M. Pelletier: Demandez-vous que le taux des loyers soit
fixé selon le taux d'inflation? Ce serait une mesure...
M. Shaw: Non, pas du tout.
M. Pelletier:... très inflationniste!
M. Shaw: Non. J'ai dit: Avec le système actuel. Avec le
système actuel, le locateur doit faire la preuve que les augmentations
sont justifiées.
M. Pelletier: Oui.
M. Shaw: Oui. Si elles ne sont pas justifiées à
cause des circonstances, il n'a pas le droit d'imposer une augmentation.
M. Pelletier: J'ai illustré la façon dont cela va
se faire, dans mon exposé. Le propriétaire ira voir son locataire
et lui dira: Mes taxes augmentent et cela augmente et c'est tout. C'est 10% ou
12%.
M. Shaw: Mais cela peut arriver ainsi. (11 h 45)
M. Pelletier: Oui, mais l'affaire, c'est qu'il faut se placer
dans le contexte. Le locataire face à son propriétaire n'est pas
dans un rapport de force. Le locataire se sent intimidé par le
propriétaire. Le propriétaire, c'est la personne qui a
réussi, qui est un peu instruite, blablabla; c'est la personne,
d'ailleurs, qui devrait se rendre à la régie pour justifier ses
augmentations de loyers, pas devant son locataire, devant la régie.
M. Shaw: D'accord, mais vous savez...
M. Pelletier: Vous êtes d'accord? C'est fantastique!
M. Shaw: ... qu'avec la Régie de l'assurance automobile,
il y a 8000 cas où on présume qu'il y a une demande
justifiée, mais où on n'a pas pris connaissance de la
disponibilité. Alors, cela démontre qu'aussitôt que le
gouvernement est impliqué, souvent le gouvernement exerce une forme
d'intimidation qui est plus forte qu'un propriétaire.
M. Pelletier: Le rôle du gouvernement, je pense, est de
protéger les citoyens. C'est de les représenter et de les
protéger, surtout les citoyens qui ne sont pas dans une position de
force. Je ne pense pas que les locataires se sentent intimidés par le
gouvernement. Les locataires demandent au gouvernement d'agir et, en ce
sens-là, une mesure de contrôle des loyers n'intimiderait pas les
locataires. Je pense que cette mesure est désirée par les
locataires, et de plus en plus.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Drummond.
M. Clair: M. le Président, pour enchafner sur ce que dit
le député de Pointe-Claire relativement au contrôle des
loyers, je pense que les questions qu'il a posées, de même que
celles du député de Notre-Dame-de-Grâce, démontrent
la difficulté, dans les réponses qu'ils ont obtenues, de trouver
une méthode juste et raisonnable de fixation des loyers. Je tiens
à dire au groupe qui est présent qu'en ce qui me concerne
personnellement on a pu sentir, à un moment donné, un peu
d'agressivité de sa part à l'endroit des députés
ministériels je dois leur dire qu'on demeure très ouvert,
en autant que je suis concerné, à l'étude de ces
problèmes.
Je pense que les questions posées, les réponses obtenues,
démontrent la difficulté de trouver une méthode qui soit
juste, efficace et aussi universelle que possible, parce qu'il faut prendre
garde de ne pas créer des problèmes plus grands que ceux qu'on
veut corriger. L'indexation automatique à un taux, un pourcentage,
l'augmentation fixée par le gouvernement, par exemple, vous l'avez
démontré, cela peut entraîner une inflation et des
augmentations chez des individus qui n'en auraient pas eu. C'est un risque.
Alors, c'est un commentaire, dans un premier temps, très
général pour vous dire qu'en autant que je suis concerné,
je n'aime pas vous voir agressifs parce que je suis bien ouvert. Ce qu'on
cherche, c'est une méthode juste, raisonnable et efficace.
Au niveau des amendes maintenant, au niveau de la reprise de possession
des loyers, vous nous dites, dans un premier temps, qu'il y a eu des amendes
pendant très longtemps et que cela a été inefficace. Vous
demandez donc l'élimination complète du droit de reprise de
possession. Cela va. Vous dites: Les amendes ont été inefficaces;
de lourdes amendes prévues n'ont jamais été très
appliquées. Il me semble que je vois une certaine contradiction quand on
arrive au chapitre des réparations et services quand, à plusieurs
endroits, uniquement au niveau du résumé de votre mémoire,
en quatre endroits différents, vous dites: Ces gens auraient à
subir de lourdes amendes... En lui imposant une amende... Des coûts et
une
amende... Il me semble qu'il y a quelque chose d'un peu répressif
dans cela. Je comprends que vous allez dire: Le propriétaire est en
position de force. D'accord, mais malgré tout, est-ce que vous ne pensez
pas que si l'approche des amendes a été inefficace au niveau de
la reprise de possession, selon vos prétentions, c'est s'avancer dans
une voie sans issue que de penser qu'on peut régler ces
problèmes, les problèmes de relations entre locataire et
propriétaire, uniquement par des amendes?
J'aime beaucoup mieux votre approche où vous parlez, à un
moment donné, d'injonction, de possibilité que la régie
puisse émettre des injonctions. Je me permettrai de vous corriger un
tout petit peu là-dessus. Des injonctions à la régie, ce
ne serait pas possible. Ce seraient des ordonnances. C'est sûrement ce
que vous vouliez dire, parce que je ne pense pas que vous souhaitiez qu'on
embarque la Cour supérieure, par le jeu des injonctions, au niveau de la
Régie des loyers. J'ai compris que c'étaient des ordonnances.
J'aime votre approche d'élargir les possibilités d'ordonnances,
mais la possibilité de voir des amendes, de lourdes amendes, il me
semble que c'est entrer dans un jeu qui risque d'agraver la "guerre", à
laquelle faisait allusion le député de Notre-Dame-de-Grâce,
entre les locataires et les propriétaires.
Je pense qu'on doit être beaucoup plus à la recherche de
solutions efficaces, soit, mais qui aient une connotation beaucoup plus de
conciliation, d'équilibre, de justice que de répression. C'est
facile de dire: On va régler cela, on va mettre de grosses amendes au
bout. Le gars va payer pour. Vous avez dit vous-mêmes qu'au niveau des
reprises de possession les amendes avaient été inefficaces. Cela
n'avait pas empêché les gens de tricher.
M. Pelletier: Pour répondre à votre première
question, au niveau des loyers, nous sommes conscients nous aussi que c'est
difficile de satisfaire tout le monde. Ce dont nous sommes encore plus
conscients, c'est que la situation actuelle à ce niveau, c'est
l'anarchie, elle ne protège personne ou presque et que le bill 107
maintient le statu quo. Si vous dites vous-même que vous êtes
d'accord et ouvert pour essayer de trouver une solution de rechange face au
contrôle des loyers, ça ne paraît pas beaucoup dans le bill
107. Je m'excuse d'être agressif, mais c'est parce qu'à un moment
donné, on en a assez. Cela ne paraît pas dans le bill 107, il
maintient le statu quo à ce niveau.
Au niveau des amendes, je vais laisser Klaus répondre à
cela.
M. Bylsma: Cela fait déjà huit ans que les
locataires viennent ici. Je peux mentionner les bills 59, 78, 79, ce n'est pas
seulement sous le gouvernement péquiste que cela s'est fait, on s'est
fait jouer les mêmes tours par les libéraux. Je pense qu'il y a
des raisons pour être agressif, parce qu'on s'est fait promettre des
choses, on attend des choses, la situation est grave, mais rien ne se fait.
C'est peut-être à cause de ça qu'on est un peu
agressif.
A propos de la deuxième question, est-ce qe les demandes seront
efficaces pour les problèmes de réparations et, si elles ne le
sont pas, est-ce que, dans les situations de reprise de possession, elles le
seront? En fait, je pense qu'on peut simplement dire que la loi dit que le
locataire a droit à des réparations et aux services, c'est une
obligation légale du propriétaire quant aux réparations.
Qu'est-ce qui arrive quand il ne les fait pas? Evidemment, le
propriétaire viole la loi, n'est-ce pas? Pour moi, c'est clair que c'est
un propriétaire qui ne respecte pas la loi. A ce moment, la loi devrait
prévoir des moyens non seulement d'obliger le propriétaire
à s'en occuper, mais aussi de le punir, parce qu'il ne respecte pas la
loi.
Le locataire a droit à un logement décent, en bonne
condition. Si un propriétaire ne fait pas de réparations,
d'après moi, on devrait pouvoir prendre les moyens pour y avoir droit. A
moins de ça...
M. Clair: Sur ce point, je regrette, mais je vais vous indiquer
que je suis personnellement en total désaccord avec une orientation pour
criminaliser, pénaliser de plus en plus de choses. Cela fait quasiment
50 ans qu'on a aboli par exemple l'emprisonnement pour le débiteur qui
ne paie pas son créancier. La loi veut qu'un individu paie ses dettes.
Si je ne paie pas mes dettes, l'emprisonnement n'existe plus. Il y a des moyens
de saisie, il peut y avoir des moyens d'ordonnance, il peut y avoir des
permissions accordées par la régie rapidement, si on
améliore les moyens de retenue de loyer, mais qu'on demeure, sur le plan
civil, c'est du "droit civil". Personnellement, je ne suis pas d'accord avec le
fait de criminaliser de plus en plus de choses. On pourrait criminaliser
combien de choses dans nos lois, si on disait que si quelqu'un ne remplit pas
ses obligations, on en fait une infraction pénale énorme; que
c'est l'amende, que si l'on ne paie pas l'amende, c'est la prison. Je ne vous
suis pas là-dessus. Je voudrais que ce soit efficace, mais non pas
criminaliser trop de choses.
Le Président (M. Laplante): Je vais permettre quelques
questions rapides par différentes personnes, puisque le temps est
écoulé, pour que vous puissiez répondre, dans un bloc, aux
questions posées. M. le député de Verdun.
M. Caron: M. le Président, je voudrais savoir si vous avez
des statistiques, vous dites que 25% des locataires ont des augmentations ou
à peu près.
M. Pelletier: Abusives.
M. Caron: Par contre, parmi ces 25%, est-ce que vous avez des
chiffres pour dire qu'il y a des propriétaires et des locataires qui
s'entendent pour qu'il y ait une augmentation parce qu'on donne des services,
qu'on fait de l'amélioration. Vous avez des secteurs de la ville
où les loyers étaient pas mal bas il y a une couple
d'années et,
naturellement, avec le coût des réparations aujourd'hui,
vous savez comment ça va vite! Est-ce que vous avez un pourcentage de
gens qui paient l'augmentation et qui sont contents? Il y a un pourcentage de
locataires qui paient, mais par contre qui ont des services additionnels, il y
a de l'amélioration dans leur logement, est-ce que vous avez ce
pourcentage?
M. Pelletier: On n'a pas de statistiques à ce niveau qui
peuvent prouver le nombre de locataires contents de leur propriétaire.
Mais on peut voir qu'il y a quand même des opinions populaires qui
disent: Tu as un bon propriétaire, tu es bien chanceux. Cela peut
peut-être noter des choses à ce niveau.
Ensuite, au niveau des 25% de hausse, je vous ferais remarquer que c'est
25% de hausses abusives.
M. Caron: C'est à part certaines autres hausses qui
peuvent avoir un autre pourcentage. Vous dites 25% abusives.
M. Pelletier: Oui.
M. Scowen: Et c'est défini par qui?
M. Bylsma: C'est défini par Godbout et Matthews, dans leur
étude.
M. Shaw: Mais cela est une...
M. Pelletier: L'étude de Godbout et Matthews, je vous
ferai remarquer que c'est une étude qui est quand même
confidentielle encore je ne sais pas si tu pourrais avoir plus
d'information qui a été demandée...
M. Bylsma: ... qui a été demandée par le
groupe de travail créé par M. Tardif. C'est une étude que
le groupe de travail a demandée.
M. Tardif: M. le Président, j'ai ici l'étude en
question, faite par l'INRS-Urbanisation, Jacques Godbout et George Matthews. On
l'a citée abondamment. Mais cela aurait peut-être
été bon de la citer en entier.
Je voudrais juste donner un exemple, quand on sort de son contexte un
certain nombre de chiffres. Par exemple, à titre d'illustration, on a
dit: II y a seulement 5% des gens qui vont à la régie. On a
avancé toutes sortes de raisons, en disant: Probablement que c'est
inefficace; probablement que les gens ont peur; c'est intimidant, cela les
achale; il y a de la paperasse. Et on a dit: C'est la preuve que cela ne
rejoint pas et cela ne protège pas la grosse majorité des
locataires.
Est-ce qu'on a aussi fait la démarche inverse,
c'est-à-dire qu'il y a peut-être bien des propriétaires qui
ne demandent pas une augmentation trop forte, pensant que leur locataire ira
à la régie? On peut se poser la question, en tout cas, à
titre d'hypothèse. Vous avez formulé des hypothèses selon
lesquelles, s'il n'y avait pas plus de gens qui allaient à la
régie, c'est parce que cela avait un effet intimidant sur l'une des
parties. On peut penser aussi que cela pourrait en avoir une sur l'autre
partie.
Mais il y a une donnée importante. C'est qu'on se rend compte
que, pour ces 5% des cas qui sont allés devant la régie, pour
lesquels il y a eu des auditions... Je vous ferai remarquer, incidemment, qu'il
n'y a pas juste 5% des locataires qui s'adressent à la régie. 5%,
cela représenterait à peine 60 000 locataires. Or, il y a 697 000
demandes de renseignements qui, par téléphone, au comptoir ou par
écrit, entrent à la régie. Et on peut penser que des gens,
une fois informés, décident d'accepter ou non, ou de demander ou
non, telle augmentation donnée. C'est une donnée qui est moins
connue, parce qu'on ne comptabilise que le nombre de causes entendues.
Mais est-ce qu'on ne pourrait pas aussi, dans le domaine des
hypothèses, faire l'hypothèse suivante et
là-dessus, Matthews et Godbout sont allés plus loin, ils ont
pensé la vérifier se demander finalement... Si la fonction
de la régie est d'éliminer les hausses abusives de loyer, la
question qu'ils se sont posée, c'est: Quelles sont les hausses, pour une
même période de temps, pour un même type de logement, qui
sont négociées librement, c'est-à-dire qui sont
négociées entre les parties, sans aller à la régie,
mais toujours avec l'idée que la régie est là quand
même?
Leur étude, à la page 62, dit ceci: L'augmentation
accordée par la régie en pourcentage du loyer est du même
ordre de grandeur que celle qui existe sur le marché. Elle se situe
autour de 9%. L'augmentation accordée par la simple application de la
formule semble légèrement plus faible que l'augmentation du
marché.
Cela veut dire quoi? Cela veut dire que les augmentations
accordées par la régie sont inférieures de 1% à
celles qui sont négociées librement. Et on a peut-être
là, finalement, une réponse possible. Puisque vous avez
ajouté beaucoup de crédibilité à ce document, on me
permettra peut-être d'en ajouter et de dire: On a peut-être
là une réponse possible. Pourquoi n'y a-t-il pas plus de causes
qui vont à la régie, puisqu'il semblerait que les loyers
négociés librement, ou les décisions rendues par la
régie, se situent dans une marge de plus ou moins 1%, même de
moins 1%, par rapport à ce qui est négocié librement? Il
serait peut-être important qu'on souligne également ce passage de
l'étude.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: M. le Président, je tiens d'abord à
féliciter le groupe qui est devant nous pour son mémoire. On a
tenu, les députés de Montréal, l'année
dernière, des auditions publiques sur le logement à
Montréal et nous avons eu l'occasion de rencontrer le groupe qui, je le
pense, est assez représentatif des revendications des locataires de
Montréal. (12 heures)
Personnellement, je suis plutôt sympathique à l'ensemble de
leurs revendications et j'en ai fait part à certains de mes
collègues. Simplement sur un point qui m'apparaît au coeur de la
question. Vous souhaiteriez que ce soit le propriétaire qui, lorsqu'il
veut une augmentation de loyer, se présente à la régie et
obtienne l'augmentation. Selon votre raisonnement, c'est sur les épaules
du propriétaire qui veut changer le contrat intervenu entre le
propriétaire et le locataire que doit reposer le fardeau de
démontrer que l'augmentation du loyer est justifiée.
Pour proposer cela, j'imagine que vous partez vous l'avez dit
tantôt de l'hypothèse qu'il y a un rapport de force
défavorable entre le locataire et le propriétaire.
Personnellement, je pense que c'est juste, mais j'aimerais qu'on y apporte des
nuances. Ne pensez-vous pas qu'on devrait distinguer entre différentes
catégories de propriétaires? Le propriétaire qui est un
ouvrier, qui s'est acheté une propriété de trois logements
et qui réside dans sa propriété, comparativement au trust
d'habitation qui peut gérer 2000, 3000, 4000 logements, est-ce que dans
le cas de ces petits propriétaires qui résident dans leur
appartement, le rapport de force n'est pas à ce point différent,
selon votre expérience, des locataires pour qu'on adopte une politique
différente face à ces propriétaires que celle qu'on
pourrait adopter face aux trusts d'habitation?
M. Bylsma: J'aimerais d'abord répondre à la
constatation de M. Tardif. Je pense qu'on peut toujours revenir aux
statistiques de Godbout et Matthews. D'accord, il y a de bons
propriétaires, on ne veut pas prétendre que tous les
propriétaires sont méchants. Il y a peut-être une certaine
proportion de propriétaires, disons 25%, 35%, 40%, qui sont de bons
propriétaires, qui sont raisonnables, qui n'augmentent pas beaucoup, qui
augmentent de 5%, 7%, parce qu'il y a eu des hausses de tel ordre, mais il faut
admettre cela en contraste avec les 27% à 35% de locataires qui ont subi
des hausses abusives. Si on arrive à une moyenne de 8% ou 9%, cela ne
veut pas dire qu'il n'y a pas eu d'abus, cela veut dire qu'il y a eu des abus
dans 27% à 35% des causes. Ce qui nous préoccupe, c'est cette
grande minorité de locataires qui subissent des pressions indues des
propriétaires. Je ne pense pas que ce soit logique de prétendre
que, vu que la moyenne générale est la même que celle
permise par la régie, il y a vraiment une conclusion à en tirer;
je pense que cette conclusion permet de voir en détail quelle est la
proportion de locataires qui acceptent, pour plusieurs raisons, des hausses
abusives.
Pour répondre à la question de M. Paquette, en fait, je
pense qu'il y a des possibilités de solutions entre ce que nous
proposons, le contrôle universel et efficace, et le contrôle
souple. On a déjà beaucoup parlé du système de
l'Ontario; à mon avis, le système de l'Ontario est beaucoup plus
efficace que celui du Québec.
Deuxièmement, il y a aussi la possibilité
suggérée par le groupe de travail qui disait qu'il n'était
pas au courant de cette étude-là, mais qui suggérerait
que, pour les immeubles de six logements et plus, la propriétaire soit
obligé de passer par la régie. En même temps, on
considère que cela, c'est plus efficace qu'un contrôle souple,
parce qu'évidemment, cela inclut probablement 70% ou 75% de tous les
locataires. S'il y a un contrôle universel, non pas un contrôle
universel, mais un contrôle obligatoire sur 75% des locataires, cela aura
quand même des effets sur les 25% où le contrôle n'est pas
obligatoire. Cela veut dire que l'effet sera d'obvier à cela.
M. Paquette: Ne pensez-vous pas que cette proposition du groupe
de travail n'est pas supérieure à celle que vous proposez? Dans
le sens suivant, si on met trop d'obligations et de difficultés sur les
petits propriétaires qui ont une seule maison dans laquelle ils
habitent, on va accélérer la concentration de la
propriété des logements entre les mains des trusts
d'habitation.
M. Bylsma: Je ne suis pas d'accord que notre système est
pire que le système proposé par le groupe de travail, je ne parle
pas au nom du front commun, mais en mon nom personnel, je crois bien que le
système proposé par le groupe de travail est beaucoup plus
efficace que le système actuel. A ce niveau-là, on est bien
d'accord.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Taschereau, une courte dernière question.
M. Guay: M. le Président, je voudrais à mon tour
féliciter le groupe qui est devant nous de son mémoire que j'ai
lu au cours de la fin de semaine, avant la réunion d'aujourd'hui. Comme
député du centre-ville de Québec, les problèmes qui
sont évoqués par le front commun sont des problèmes que
l'on retrouve effectivement dans les quartiers que je représente:
Saint-Sauveur, Saint-Roch, Saint-Jean-Baptiste et même le
Vieux-Québec.
Le ministre a bien indiqué que le projet de loi 107
n'était pas nécessairement le dernier mot en la matière.
En fait, si on ramène le projet de loi 107, quant à ses principes
et non quant à ses modalités, les principes devraient susciter
facilement une approbation générale. Je pense à
l'unification des règles de droit et à un seul tribunal qui
s'occuperait de la question du logement, finalement, le principe du
contrôle des loyers, le principe du contrôle de la
démolition, des démolitions ou des subdivisions. Le gouvernement
qui intervient par réglementation sur la question d'habitabilité,
sur la méthode de fixation des loyers, sur le principe de la chose, il
peut y en avoir qui seront, évidemment, en désaccord. Il y a
effectivement certains mémoires qui vont être
présentés au cours de cette commission, dans lesquels on conteste
même le principe du contrôle des loyers. Enfin, je pense que, de
manière générale, il y a un accord sur le principe du
contrôle des loyers.
C'est évidemment sur les modalités qu'il y a plusieurs
écoles en présence, dont celle qu'on retrouve dans le projet de
loi 107 et qui, quant à
l'approche, reprend effectivement la démarche qui a
été suivie jusqu'à maintenant au Québec, non pas
que ce soit la meilleure peut-être, mais on en cherche encore une qui
serait meilleure. C'est un peu comme ce que Churchill disait de la
démocratie: "C'est le plus mauvais de tous les systèmes, sauf
tous les autres."
La démarche faite jusqu'à maintenant ou l'approche qui a
été retenue au Québec jusqu'à maintenant, je ne
demande pas mieux qu'on la modifie, si on peut en trouver une meilleure. La
question est de savoir quelle serait, effectivement, la meilleure. C'est
là que la thèse que vous soutenez, tout en étant
intéressante, m'apparaît poser de sérieux problèmes.
Je suis d'accord avec vous quand vous dites que le locataire, du moins dans bon
nombre de cas c'est particulièrement vrai dans les vieux
quartiers de nos centre-ville est dans une position psychologique
ne fusse que celle-là, mais elle est importante de faiblesse par
rapport au propriétaire. Que ce soit le locataire qui doive faire la
démarche implique qu'en pratique, il n'y aura pas de démarche
dans bon nombre de cas, pour les raisons psychologiques évoquées,
et aussi parce que les locataires, dans bien des cas, ne sont pas au courant de
leurs droits.
A ce point de vue, le fait que la régie mette l'accent sur
l'information relative aux droits des citoyens, c'est déjà un
grand pas en avant parce qu'une des grandes lacunes dans ce domaine, comme dans
bien d'autres domaines de l'activité gouvernementale, c'est tout
simplement que les gens ne sont pas au courant. Mais le fait d'être au
courant n'implique pas pour autant, effectivement, de faire la démarche.
C'est pour cela que l'approche qui est retenue dans le projet de loi 107
m'apparaît, à ce point de vue, imparfaite et qu'il y aurait lieu
de la bonifier, comme le ministre l'a dit. D'ailleurs, le projet de loi
c'est le but de la commission aujourd'hui peut être bonifié
et sera sans doute bonifié à maints égards.
Entre autres, plusieurs des suggestions que vous avez faites dans le
mémoire qui a été déposé en commission il y
a plusieurs jours, celui que j'ai lu en fin de semaine, sont extrêmement
intéressantes et, je pense, pourraient facilement être retenues.
C'est sur la question du contrôle des loyers, contrôle universel et
absolu. Si j'ai bien compris vous me corrigerez le cas
échéant vous ne proposez pas qu'on retienne non plus le
système en vigueur en Ontario où c'est le propriétaire qui
fait la démarche à partir d'un certain seuil, au-delà d'un
certain pourcentage. Si j'ai bien compris ce que vous nous dites, dans tous les
cas d'augmentation, le propriétaire devrait aller devant la Régie
des loyers. Est-ce que concrètement...
C'est évident que des demandes de hausses, il y en a, il va y en
avoir. Beaucoup de propriétaires, comme vous l'avez vous-même
souligné sont aux prises avec des augmentations d'impôt foncier,
de coûts de carburant, bref, effectivement, ils n'ont pas toujours la
marge de manoeuvre pour absorber ces coûts, loin de là. Donc, des
demandes, il va forcément y en avoir. Est-ce qu'on ne risque pas de se
retrouver dans une espèce de jungle judiciaire, enfin, quasi judiciaire,
un tribunal presque raminagrobien, qui va être un peu partout et avec des
effectifs... Oui?
Le Président (M. Laplante): Question de
coopération, le temps est dépassé de 20 minutes. Avez-vous
une courte question, s'il vous plaît!
M. Guay: Je suis en train de poser ma question, M. le
Président.
M. Cordeau: Est-ce une courte question?
M. Guay: M. le Président, la question venant de
l'Opposition, pour ce qui est des préambules aux questions, je pense
qu'on n'a pas de leçon à recevoir des députés de
l'Opposition.
Est-ce que ça ne risque pas, justement, si tous les
propriétaires doivent aller devant la régie pour faire une
demande d'augmentation, d'impliquer que la régie va être une
espèce de monstre bureaucratique qui, au bout du compte, ne sera pas
plus efficace à faire ça ou encore moins efficace qu'elle ne
l'est à l'heure actuelle, parce qu'il y a quand même une certaine
efficacité? Est-ce qu'il ne risque pas, au bout du compte, malgré
le principe valable de renverser le fardeau, si on le renverse de
manière absolue, de créer un tel monstre bureaucratique que,
finalement, au bout du compte, on n'en sera pas plus avancé?
Le Président (M. Laplante): Courte...
M. Pelletier: D'accord.
Le Président (M. Laplante): S'il vous plaît!
M. Guay: Je vous ferais remarquer, M. le Président, que
l'entente est une entente et non pas un ordre de la commission.
Le Président (M. Laplante): Vous avez la parole,
monsieur.
M. Bylsma: On maintient notre position d'un contrôle
universel efficace et le gouvernement maintient sa position de maintenir le
système actuel.
Je pense qu'il y a des compromis ou des solutions possibles à
l'intérieur des deux qui répondraient quand même d'une
certaine façon à nos demandes, qui ne nous satisferont pas
absolument. On voit des défauts dans le système de l'Ontario; on
voit des défauts dans le système proposé par le groupe de
travail, mais on dit quand même que ces systèmes sont mieux que le
système actuel.
On ne sera pas tout à fait satisfaits avec l'une de ces deux
solutions, mais, quand même, on croit que ce sera mieux que le
système de contrôle souple. Je pense qu'on n'appuierait pas cet
article, mais on serait plus content que si on maintenait le système
souple.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Tardif: Je pense que...
M. Lacoste: M. le Président...
Une Voix: Mon collègue de Sainte-Anne...
M. Lacoste: Une courte question.
Le Président (M. Laplante): Une courte question, allez-y,
d'accord!
M. Lacoste: Très rapide. En fait, comme vous le savez,
dans le comté de Sainte-Anne, il existe beaucoup d'habitations à
loyer modique de l'Office municipal de Montréal. Dans votre
mémoire, vous n'abordez j'ai lu le mémoire
aucunement ce type d'habitations où il y a un propriétaire
unique. Est-ce qu'il y a des raisons particulières? Serait-ce qu'il n'y
a pas de problèmes ou que la loi couvre très bien ce type
d'habitations?
M. Bylsma: Nous ne représentons pas de locataires dans les
HLM, c'est peut-être pour ça. Je pense que ce serait aux
associations de locataires des HLM à répondre à ça.
Nous représentons des locataires dans des maisons privées.
M. Lacoste: D'accord.
Le Président (M. Laplante): Merci! M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, malgré le fait que
j'aie été peut-être amené à citer un certain
nombre de chiffres et essayer de rétablir des faits, je veux dire que je
partage un bon nombre des commentaires, des observations contenus dans le
mémoire du Front commun des locataires et que je suis parfaitement
conscient que le projet de loi no 107 ne viendra pas corriger du jour au
lendemain toutes les situations décrites dans ce mémoire. On peut
penser, par exemple, qu'une des façons de changer du tout au tout la
situation, c'est de modifier le mode de tenure des logements au Québec,
de permettre l'appropriation par des groupes, par des locataires, des logements
qu'ils occupent. A ce sujet, j'ai mis au point un programme qui s'appelle
Logipop, il y a 18 mois, mais ce n'est quand même pas ma faute si,
après 18 mois, il y a 650 logements qui ont été produits
de cette façon. On ne devient pas coopérant ou sociétaire
du jour au lendemain. On n'est pas imbu nécessairement de cet esprit du
jour au lendemain. Je suis conscient que ce n'est pas non plus, la seule
formule et qu'il y en a un paquet d'autres qu'il faut chercher. Le logement
public pour certains groupes en constitue une autre. (12 h 15)
L'annonce, hier, dans le discours inaugural d'un programme de
supplément de revenu de travail constitue une autre façon
d'améliorer la capacité des ménages d'assumer une de leurs
responsabilités en matière de logement. Je voudrais quand
même qu'on situe bien ce projet de loi 107 qui ne se veut pas la
réponse finale et unique à tout le problème du logement.
C'est une mesure législative pour laquelle j'aimerais qu'on me
suggère... Et j'espère que les travaux de cette commission vont
nous permettre de déboucher sur une formule qui soit plus acceptable
à toutes les parties. Vous nous dites, en conclusion: Rejetez la
solution ontarienne. Incidemment, la solution on-tarienne est celle qui
prévaut dans huit provinces sur dix, celle d'un taux fixe. Mais vous
nous dites: Cette formule on l'aimerait quand même encore mieux que le
cas par cas. Est-ce que j'ai bien compris lorsque vous avez dit cela?
M. Bylsma: Oui.
M. Tardif: Bon! J'aimerais peut-être attendre,
réserver, attendre les autres mémoires, les autres
représentations qui nous seront faites et, s'il fallait s'orienter non
pas vers la formule miracle, mais la formule du moindre mal, peut-être
pourrait-on l'examiner. Encore une fois, ce serait préjuger,
après avoir entendu un seul mémoire et un seul groupe, si
important et si représentatif soit-il, je pense, des associations qui
viendront se faire entendre. Je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, MM. Pelletier, Gervais
et Bylsma, les membres de cette commission vous remercient de votre
mémoire.
Union des ligues de propriétaires de la
province de Québec
J'appelle maintenant l'Union des ligues de propriétaires de la
province de Québec.
Si vous voulez, s'il vous plaît, vous présenter et
présenter les membres qui vous accompagnent ainsi que votre organisme.
Les mêmes règles s'appliquent, messieurs, 20 minutes pour votre
exposé; après cela, le reste, ce sera la période des
questions.
M. Perras: Loyola Perras, médecin, président de
l'Union des lignes de propriétaires de la province de Québec. Ce
n'est pas une nouvelle association.
Entendez-vous bien?
Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur.
M. Perras: Vous entendez bien?
Le Président (M. Laplante): Oui.
M. Perras: Cela a été fondé en 1934. Vous
allez demander: II y a combien d'associations de propriétaires qui font
partie de l'union? Cela varie entre 175 et 75 associations. Cela varie
d'année en année. Ce matin, j'aurais une permission
spéciale à vous demander. Ma vue n'est pas des meilleures. Si je
lisais le mémoire que j'ai préparé en collaboration avec
d'autres, je vous endormirais. D'ailleurs, en médecine, j'étais
spécialisé en anesthé-
sie. Si vous me le permettez, je demanderais au Dr Marcel Tremblay, qui
est vice-président de l'association c'est un optométriste,
il a une très bonne vue et il est très éloquent je
demanderais au docteur Tremblay de lire le mémoire qui a
été rédigé.
Le Président (M. Laplante): Voulez-vous identifier les
messieurs qui vous accompagnent, s'il vous plaît?
M. Perras: Pardon?
Le Président (M. Laplante): Identifier les messieurs qui
vous accompagnent. Ils peuvent se présenter.
M. Perras: Oui. Il y a M. Edouard Lépine...
M. Tremblay (Marcel): M. Lépine est directeur
général de l'Association des propriétaires de
Québec et relationniste pour l'Union des ligues de propriétaires
de la province de Québec.
Le Président (M. Laplante): Et vous-même,
monsieur?
M. Tremblay: Je suis le président de l'Association des
propriétaires de Québec et en plus vice-président de
l'Union des ligues de propriétaires de la province de Québec.
Le Président (M. Laplante): Votre nom? M. Tremblay:
Marcel Tremblay.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. Tremblay. Vous
pouvez commencer.
M. Tremblay: M. le ministre...
Le Président (M. Laplante): Avez-vous l'intention de lire
le mémoire de 31 pages, monsieur?
M. Tremblay: Je n'ai pas l'intention de tout lire. Je vais en
passer; même toutes les transcriptions de journaux, je n'ai pas
l'intention de lire cela non plus.
Le Président (M. Laplante): D'accord.
M. Tremblay: Alors, M. le ministre des Affaires municipales, M.
le Président de la commission parlementaire, chers membres de la
commission parlementaire, nous vous remercions de nous avoir invités
ici. Le droit de propriété qui depuis des siècles est un
droit sacré, inviolable, est en train de subir des manipulations qui
semblent inutiles et exagérées. C'est la raison pour laquelle
l'Union des ligues de propriétaires de la province de Québec,
réalisant l'importance de la situation, considère qu'il est de
son devoir d'exprimer dans les pages incluses l'opinion des associations de
propriétaires membres. Il se doit aussi d'appuyer les mémoires
déjà remis par d'autres associations de propriétaires en
leur nom respectif à votre importante commission parlementaire sur le
projet de loi présenté sous la forme du livre blanc. Nous sommes
confiants que vous prendrez en sérieuse considération les
amendements que nous préconisons. Veuillez croire à nos
salutations respectueuses et notre esprit de collaboration.
Je vais vous lire le préambule. MM. les membres de la commission
parlementaire sur le logement, l'Union des ligues de propriétaires se
présente avec la ferme intention d'apporter des éléments
constructifs dans la recherche de l'intérêt général
sans jamais perdre de vue l'esprit de conciliation de la loi. Certains
pourraient s'étonner de ne pas trouver dans ce document tableaux,
statistiques, chiffres et graphiques. Il n'y a là rien de surprenant.
Nous n'avons pas voulu doubler le travail de différentes associations
membres de l'Union des ligues de propriétaires et d'organismes
professionnels représentant les constructeurs d'habitations. Nous
endossons ces rapports, c'est pourquoi nous avons préféré
vous soumettre un document directement tiré de la réalité
quotidienne et, bien sûr, d'en dégager des lignes directrices pour
l'avenir. C'est sans passion que nous allons tenter de vous présenter
notre point de vue, notre ligne de pensée, de même que les
principes qui nous animent dans notre action à travers le Québec.
Voilà dans quel esprit nous nous présentons devant cette
importante commission parlementaire.
Page 3. Epargne-logement scolaire. C'est ainsi que dès maintenant
nous voudrions voir l'idée nouvelle de l'épargne-logement
inculquée aux enfants d'âge scolaire, dès l'âge de 14
ans, comme on lui apprend à traverser la rue et à épargner
pour se procurer sa première bicyclette. Demander à un individu
de souscrire à une caisse d'épargne-logement à 20, 25 ou
30 ans, c'est trop tard. Il est déjà engagé dans la voie
du crédit jusqu'au cou, mariage, ameublement, automobile, etc. Ladite
caisse d'épargne-logement devrait être alimentée par les
parents, amis de l'étudiant, dès le niveau secondaire. Ces
notions relatives à l'épargne-logement feraient prendre
conscience au jeune citoyen d'une de ses premières
responsabilités, celle de se loger et de loger les siens. Ce programme
permettrait aux citoyens de demain d'être maîtres chez eux sans
s'endetter pour la vie.
Une étroite coopération entre le gouvernement par le
ministère de l'Education, les enseignants et bien sûr les parents
est essentielle à la mise en route d'un pareil programme qui
mérite selon nous la plus sérieuse attention. Il incomberait aux
banques, aux caisses populaires, aux compagnies de fiducie d'organiser des
dépôts dans les écoles mêmes. Lesdites caisses
d'épargne seraient alimentées par les parents, les amis de
ceux-ci et les élèves eux-mêmes. Un taux
d'intérêt préférentiel pourrait être
accordé grâce à l'intervention de l'Etat.
Le condominium. Nous voulons, avant de vous faire part de nos
préoccupations et voeux en matière de taxation, examiner avec
vous l'une des formes d'habitation les plus prometteuses et, à
notre avis, digne d'encouragement. Il s'agit du condominium. Cette
désignation domiciliaire est dérivée de deux mots latins
qui expriment précisément ce qu'ils décrivent
c'est-à-dire domicile en commun. Pourquoi le remplacer par
copropriété divise et indivise? Pourquoi, si le condominium
présentait des avantages pour les Romains, les Québécois
n'y trouveraient-ils pas eux aussi des avantages? La formule du condominium est
très populaire partout dans le monde, tellement que l'on prévoit
que d'ici une ou deux décennies, la plupart des locaux domiciliaires
seront convertis en condominiums.
Cette formule permet à un individu de se sentir vraiment chez
lui, de posséder une partie du pays qu'il habite. Le fait de
réaliser qu'il est légitimement propriétaire,
confère à l'individu un sentiment de fierté, de
sécurité, de prestige. Il acquiert très vite la notion de
responsabilité. Il a à coeur instinctivement la protection,
l'entretien, l'amélioration de sa propriété. Si dans les
grands centres on pouvait obtenir une population de 50% de propriétaires
par la formule du condominium, nous formerions une société
beaucoup plus solvable, donc stable. Il ne faut pas se laisser influencer par
un locataire qui se sent lésé parce qu'il doit céder un
logement qu'il occupe pour faire place à un acquéreur. L'individu
qui désire demeurer locataire doit en accepter la condition, sans
récrimination; après tout, il a lui aussi la possibilité
de se porter acquéreur, au même titre que l'aspirant occupant
acquéreur. Toutes les propriétés peuvent être
converties en condominiums. Malheureusement on impose un moratoire parce que
quelques locataires se sont plaints que quelques propriétaires ont
contourné la loi en offrant aux locataires une formule de bail sous
forme de vente.
Lesdits propriétaires sont fautifs, certes, mais le gouvernement
a aussi ses torts. S'il y a abus, c'est parce que les lois sont mal
rédigées. Il est certainement possible d'amender la
rédaction de la présente loi de façon à
éviter les échappatoires.
Enfin, en maintenant le moratoire sur le condominium, on devient plus
socialiste que le pays le plus socialiste au monde, c'est-à-dire la
Russie. En Russie, la copropriété est très à la
mode, comme en fait foi la pièce justificative en annexe à ce
mémoire et qui reproduit un article paru dans la Gazette de
Montréal le 29 juillet 1978. Le Russes ont découvert que le
logement occupé par un propriétaire est mieux entretenu qu'un
logement occupé par un locataire.
Fiscalité. Abordons ensemble la grande question de la
fiscalité pour en examiner les sources et les effets. Les seules sources
de revenus des municipalités sont: la taxe foncière, la taxe
d'affaires, la taxe scolaire (perçue par les commissions scolaires
à qui elle est remise inégalement), une partie de la taxe de
vente et une partie de la taxe d'amusement.
La taxe foncière. Le propriétaire doit percevoir du
locataire une somme d'argent incluse dans le prix du loyer et la remettre
à la municipalité sous forme de taxe foncière. De quelle
façon la munici- palité utilise-t-elle les fonds reçus? A
l'installation et l'entretien des services d'aqueduc et d'égouts, la
construction d'un fond de rue, le pavage, les installations pour assurer la
protection de son ou de ses immeubles contre l'incendie en maintenant un
service de sapeurs-pompiers et de prévention. Il assure la protection de
son ou de ses locataires contre les attentats criminels ou autres délits
par le maintien d'une force de police et assure aux locataires un service de
loisirs, création et entretien de parcs, terrains de jeux, piscines.
Donc, on veut démontrer que le propriétaire est un peu un
percepteur de taxes.
Jusqu'ici, rien de plus normal, mais analysons le paragraphe a). Qui
utilise des routes bien pavées, bien entretenues, libres de neige
l'hiver? Ce sont les véhicules automobiles, voitures privées,
véhicules de transport en commun, camions. Qui perçoit les
revenus des véhicules automobiles? C'est le gouvernement du
Québec par la perception des frais d'immatriculation des
véhicules automobiles. Il y a ici injustice. Si les revenus des
véhicules automobiles sont perçus par le gouvernement du
Québec, si les véhicules automobiles sont exclusivement sous
juridiction provinciale, les frais d'entretien des routes et des rues devraient
être entièrement payés par le Québec, à
même les fonds d'immatriculation, quitte à augmenter ces fonds
s'ils sont insuffisants, ou alors imposer une taxe à l'essence, si
nécessaire.
Il est toutefois juste et raisonnable que les dépenses
d'entretien des rues soient payées par les usagers.
En résumé, les frais d'entretien des rues sont
perçus par la province de Québec et sont payés par les
municipalités, donc par les taxes foncières. Justice pour le
moins discutable! La formule la plus honnête serait de partager les
responsabilités: que les municipalités défraient les
coûts de l'installation, première installation des services,
conduites d'eau et d'égouts, fond de rues, le premier pavage et rien
d'autre et que le Québec se charge de l'entretien et de la
réparation des rues douze mois par année.
La taxe scolaire. Dans le domaine de la taxe scolaire, des
réformes importantes s'imposent. On pourrait, sur un sujet semblable,
écrire tout un volume en émettant plusieurs théories et
opinions, mais contentons-nous d'énoncer des critères
précis sur lesquels on doit se guider.
En pays totalitaire, les enfants sont la propriété de
l'Etat; en pays démocratique, un couple qui met un enfant au monde
devrait assumer une partie des responsabilités. Ces
responsabilités portent sur les besoins essentiels: l'alimentation, le
logement, le vêtement et l'instruction.
Actuellement, l'instruction est défrayée par l'Etat. En ce
qui nous concerne, l'Etat, c'est le gouvernement du Québec;
l'instruction est encore exclusivement de juridiction provinciale. Le
financement scolaire est assuré en grande partie par la taxe scolaire
municipale. C'est toujours le locataire qui paie par l'entremise du
propriétaire, mais on a établi que chaque enfant aux
études coûte en moyenne $2000 par année. La
propriété foncière
devrait, en toute justice, être dégrevée de la taxe
scolaire. Les parents devraient assumer leurs responsabilités en
défrayant eux-mêmes les frais de scolarité suivant leurs
revenus, du moins en partie. Solution suggérée: encourager la
multiplication des écoles privées non subventionnées.
Deuxièmement, percevoir un remboursement partiel par le truchement de
l'impôt sur le revenu des parents. Autre solution à envisager:
l'école. La bâtisse pourrait être construite par la
municipalité à ses frais et louée à la province
pour fins scolaires. L'aménagement, l'ameublement devrait être aux
frais du Québec ainsi que le personnel enseignant, la bâtisse
demeurant toujours la propriété de la municipalité.
Distribution des revenus de taxes.
Le Président (M. Laplante): Je tiens à vous dire
qu'il vous reste huit minutes. Je ne sais pas si vous avez des
éléments importants en recommandation.
M. Tremblay (Marcel): De toute façon, vous avez la
distribution des revenus de taxes, alors je crois que l'union veut
réellement prouver qu'il devrait y avoir un nouveau mode de
fiscalité. Je pense bien que c'est dans ce but que tout ça a
été écrit. (12 h 30)
Vous avez un historique du contrôle des loyers, dans lequel on
décrit l'évolution de cela. On trouve que, dans le rapport Fraser
du Dr Walker, de Vancouver, la conclusion donnée, c'est que l'offre et
la demande constituent, même pour les écoles socialisées,
là où le socialisme est le plus avancé dans le monde, la
Suède, par exemple, en 1975, 675 000 locataires ont demandé
l'abolition et ils l'ont eue d'ailleurs du "rent control",
c'est-à-dire du contrôle des loyers.
De toute façon, les habitations à loyer modique, ce qu'on
appelle l'aide à la pierre, en France, c'est ce qu'on appelle, nous,
à Québec, la subvention, on était pour la subvention
famille-logement, c'est-à-dire à la famille, pour qu'elle puisse
se trouver un logement là où elle veut. L'aide à la
pierre, c'est-à-dire à la construction, on dit que c'est les
caractériser et les considérer ces gens un peu comme des gens qui
sont montrés du doigt.
En définitive, nous sommes pour la subvention à la
famille, pour qu'elle puisse se loger là où elle veut.
Un problème épineux est celui du locataire
indésirable. Bien sûr, on trouve que, dans la loi, il y a la
question de mise en demeure. Disons que la mise en demeure, dans un bail, cela
constitue, dans la négociation avec le locataire, une mise en demeure,
tout de même.
On dit qu'il devrait y avoir une mise en demeure au sujet de la saisie
des biens du locataire qu'il fallait garantir, dans le Code civil. On
enlève cela. On se dit que si, justement, le locataire a des droits, il
doit avoir aussi des responsabilités. Je pense que c'est toujours cette
dualité, droit et devoir, dont il doit être tenu compte. Je crois
que le projet de loi 107 va beaucoup plus loin. Il y a une faiblesse en ce
sens.
Le comité chargé de l'étude de la situation du
logement analyse sa crédibilité. Bien sûr, ici, on veut
démontrer que, parmi les gars qui étaient dans le comité
d'étude, il n'y en avait que deux qui étaient
propriétaires. Un était propriétaire d'une maison
unifamiliale et l'autre d'un duplex. Les cinq autres étaient des
locataires. Nous croyons à ce moment-là que l'objectivité
s'en trouvait un peu absente.
Le tribunal du logement. Nous avons actuellement des tribunaux qu'on
appelle des tribunaux civils. Nous croyons que le tribunal du logement
constitue une force donnée à des technocrates que nous trouvons
réellement au-delà de la moyenne. On donne à des
technocrates des pouvoirs, des chèques en blanc, pour ces
gars-là, qui vont juger, etc., et on voit, au chapitre des
pénalités, des amendes de $5000 à $25 000. Nous trouvons
cela outrancier.
L'expérience vécue d'Expo 67 démontre enfin que
même si on a voulu faire un genre de contrôle du prix des logements
durant le temps de l'Expo à la page 26 on s'est
aperçu que, malgré tout, cela a bien été, l'affaire
de l'Expo, et que même les spéculateurs et ceux qui ont voulu
construire des motels au-delà de la moyenne, bien sûr, se sont
trouvés eux-mêmes pris au dépourvu.
La loi de l'offre et de la demande est encore assurément la
meilleure des lois. Ce que craint le plus un propriétaire, c'est de
perdre son locataire, lorsqu'il a un bon locataire. Et lorsqu'il fait une
négociation avec lui, comme le ministre le disait si bien tout à
l'heure, il y a une première crainte, celle d'aller à la
régie, et une deuxième je pense que cela a une très
grande valeur c'est qu'on ne tient pas à perdre nos locataires,
lorsqu'on a de bons locataires.
Pour tout dire, on se tient environ au niveau du marché,
c'est-à-dire que si la régie accorde 9%, en
général, c'est peut-être 1% de plus. Vous avez parfaitement
raison, nous avons étudié le problème
également.
La restauration des logements vétustes, et en sous-titre,
Montréal s'en va chez le diable, etc., peut, bien sûr, apporter
quelque chose. Est-il normal, dans une société, qu'il y ait un
père de famille sur cinq qui soit en chômage? Est-il normal que,
parmi cette famille, il y ait aussi des enfants qui soient en
chômage?
En définitive, nous croyons que même avec une
société organisée en syndicats, une société
technocratisée, une société censément bien
organisée, on arrive à cela. Il y a donc un taux de 20% où
ni les syndicats, ni les technocrates, ni les gouvernements, ni personne, ne
peuvent régler leur point.
Dans la restauration des logements vétustes, on voudrait qu'il y
ait une zone flottante dans laquelle les syndicats font un moratoire, dans
laquelle les technocrates, le gouvernement aussi... Faites l'annexion, si vous
voulez, du bien-être social, de tout cela, parce qu'il y a une
moitié de gens en bonne santé qui vivent du bien-être
social.
C'est un peu la façon dont on procède. On finit par
conclure que c'est toujours le propriétaire qui devient le percepteur de
taxes. On ne peut pas dire que c'est lui qui paie de ses poches; il est
constamment le percepteur de taxes, d'où cette dualité dans
laquelle on veut "peser" à la page 34 c'est qu'on veut
toujours un droit et un devoir. Je crois qu'actuellement, les
propriétaires les plus découragés des plaintes que l'on
reçoit... ces plaintes proviennent de locataires indésirables.
Quand vous voyez des gars je ne veux pas "descendre" le locataire, parce
qu'il y a des propriétaires qui en font autant lorsque nous
sommes pris, par exemple, avec des gars qui ont des problèmes, des
problèmes de drogue, qu'on s'aperçoit que tous les meubles ont
été vidés du logement, à un moment donné,
dans un logement meublé, ce n'est pas drôle, c'est assez triste. A
ce moment-là, on se demande réellement quel est le pauvre diable
de la société, celui qui a ménagé toute sa vie, le
travailleur qui a un, deux ou trois logements, qui administre cela et qui est
pris avec ce problème-là. C'est un autre problème.
Tout a été dit tout à l'heure, je pense bien, sur
les 8,5%, etc. Je pense que cela a été dit, cela ne sert à
rien de le redire.
L'association de Québec dépose aussi un mémoire et
nous vous dispensons de la lecture de ce mémoire. Nous avons eu une
consultation juridique d'un gars, Me Marcel Turgeon, qui a été
pendant plusieurs années un des présidents de l'Association des
propriétaires de Québec, qui est un gars très en vue et
qui, d'une façon très élaborée, sur la question de
la loi elle-même, sur le droit au maintien dans les lieux, etc., en fait
une analyse très exhaustive dans les différentes pages de ce
mémoire-là. Nous apportons aussi les enquêtes qui viennent
de Irem et de Rand de New York où justement tous sont presque d'accord
avec la commission Fraser, c'est-à-dire que la loi de l'offre et de la
demande, c'est le meilleur argument, celui non seulement qui punit il ne
punit pas simplement mais qui récompense l'effort, la
compétence et la droiture autant du propriétaire que du
locataire.
Je vous remercie. Vous avez été très gentils de
nous souffrir quelques instants et je pense bien que les vingt minutes sont
écoulées. Est-ce bien cela? On vous remercie.
Le Président (M. Laplante): Je vous remercie de votre
coopération, messieurs. M. Perras.
M. Perras: Evidemment, cela nous joue un peu un tour, parce qu'on
a lu seulement à peu près le huitième du mémoire.
Tout de même, j'aimerais que vous le lisiez attentivement,
tranquillement, parce qu'il y a beaucoup de choses intéressantes
là-dedans. Il y a une autre chose que j'aimerais ajouter, c'est
qu'actuellement, d'après les renseignements que j'ai pris à
Montréal avant de partir, surtout ceux de BOMA, Building Owners and
Managers Association, que vous devez connaître, à Montréal,
dans les propriétés classées A ce sont les
propriétés avec des ascenseurs il y a 3,5% de logements
vacants. Dans les propriétés classés B,
c'est-à-dire celles qui n'ont pas d'ascenseurs, des
propriétés de qualité moindre, il y a 8,5% de logements
vacants. Quand il y a une telle proportion de logements vacants, j'estime qu'on
n'a pas de raisons d'avoir de contrôle des loyers. Le locataire a le
libre choix du logement un peu partout.
A part cela, il y a une autre chose que je voulais mentionner, c'est que
j'ai ici en main un exemplaire de la revue l'Habitat français. C'est un
numéro qui date du 20 juin 1978. C'est écrit par Pierre Morel qui
est président de la Chambre des propriétaires de Paris, un bon
ami à moi. Les statistiques qu'il rapporte. Le parc de logements; en
France, il y a 6 millions de logements. Là-dessus, 5 200 000 logements
relèvent du marché libre. C'est important. En France, dans toute
la France, 800 000 logements seulement restent réglementés par
des dispositions de cette loi. Il faut prendre conscience de cette nouvelle
réalité.
En France, on a graduellement décontrôlé les
logements en permettant au propriétaire de faire des travaux de
rénovation dans son logement. Un logement rénové
était exempt du contrôle des loyers. De plus, on lui donnait une
subvention de 50% de la valeur de la rénovation. Je crois que c'est
éloquent. Si on se base sur l'Ontario, ce n'est pas le paradis. Il y a
aussi la Suède, où depuis 1975, on a aboli le contrôle des
loyers complètement. Je crois que c'est encore plus éloquent que
de se baser sur le contrôle des loyers qui existe en Ontario. Il faudrait
ajouter cela.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Perras: En outre, si vous permettez, la
propriété foncière constitue un placement
d'épargne, qu'il s'agisse d'un petit épargnant ou d'un gros
épargnant. A Montréal, sur la Côte-des-Neiges, dans
l'édifice Rockhill, il y a un millier d'appartements. Ce sont les fonds
de l'hôtel du CPR ou le Canadien National, je ne me le rappelle pas, qui
ont été placés là. Ce sont des épargnes dans
cette propriété. Dans cette propriété, depuis qu'on
a un contrôle des loyers rigide, sévère, il y a une
dépréciation considérable de la valeur des logements.
Autrefois, il y avait de la surveillance, les loyers étaient suffisants
pour payer l'entretien...
Le Président (M. Laplante): Si vous permettez, Dr Perras,
vous pourrez poursuivre quand M. le ministre commencera à vous poser des
questions tout à l'heure. On est d'accord?
M. Perras: Je veux simplement mentionner que le contrôle
des loyers apporte une dépréciation considérable dans
l'entretien du logement. D'ici à trois ans, on prédit une crise
dans le logement à cause du contrôle des loyers.
Le Président (M. Laplante): Merci. M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, je ne reprendrai pas toutes
les assertions de ce mémoire et ses considérations sur
l'épargne-logement, sur la copropriété et d'autres mesures
telles le financement des municipalités, si ce n'est pour dire que
déjà, un certain nombre, au moins une des requêtes du
groupe, qui est devant nous, va trouver une réponse dans la
réforme de la fiscalité, puisque, contrairement à ce qui
est dit, on dit que la majorité des fonds pour l'éducation
provient des taxes foncières... En fait, c'est présentement 25%
des montants qui proviennent de la taxe foncière, 75% provenant de
l'Etat, de l'impôt sur le revenu. Même ces 25% vont
disparaître avec la réforme de la fiscalité, laissant un
résidu de 2,5% pour des fins de dépenses dites inadmissibles
lorsqu'une collectivité décidera de se doter de services
excédentaires.
Dans ce mémoire je le relève simplement à
titre d'illustration, à la page 7 on dit: "Enfin, en mettant un
moratoire sur le condominium, on devient plus socialiste que le pays le plus
socialiste au monde, c'est-à-dire la Russie." Enfin, il ne faudrait
quand même pas charrier et lire l'article qu'on prend la peine d'annexer,
où on parle de Christina Onassis. On dit ceci: "The couple will live
with Kauzov's mother in a small Moscow apartment until they can buy their own
cooperative apartment". On parle donc de coopérative dans ce cas. C'est
une nuance assez importante entre la copropriété et les
coopératives.
Ceci dit, on a aussi cité des chiffres concernant les taux de
vacance qui seraient de l'ordre de 8% et, en conséquence, il n'est pas
nécessaire d'avoir un contrôle des loyers s'il y a un taux de
vacance de 8%. (12 h 45)
Or, M. le Président, à titre de renseignement pour les
membres de cette commission, les statistiques compilées par la
Société centrale d'hypothèques et de logement pour le
premier semestre de 1978 indiquaient un taux de vacance global à
Montréal de 3,4%, que ce taux atteignait effectivement 8,5%, mais dans
les immeubles de 200 appartements et plus, probablement de la catégorie
A, à laquelle faisait allusion celui qui est devant nous
présentement, alors que dans les immeubles de six à neuf
appartements je vous ferais remarquer que ces statistiques ne portent
que sur les immeubles de six appartements et plus il est de 1,1%. Si on
regarde la taille des logements, on se rend compte qu'il est de 7,6% pour les
studios, de 4,8% pour les logements d'une chambre à coucher, de 2,6%
pour les deux chambres et de 1,3% seulement pour les trois chambres;
c'est-à-dire que précisément dans le type de logement
familial, on a un taux de vacance extrêmement bas, surtout dans le type
de logement qui n'est pas de construction récente et, donc, à
prix abordable.
Finalement, en conclusion, beaucoup plus sous forme... On a dit:
Ecoutez! La Suède a aboli, en 1975, tout contrôle des loyers. Ce
n'est pas exact, d'une part. C'est vrai que des modifications ont
été apportées en Suède, mais le contexte est tout
à fait différent d'ici.
En Suède, 25% des logements sont des coopératives. Or,
déjà, le mode de tenure est drôlement différent. 40%
des logements construits depuis la guerre l'ont été par des
coopératives d'habitation et, troisièmement, en Suède, on
a de puissantes associations de locataires qui négocient collectivement
les baux. Cela aussi, c'est drôlement différent de la situation au
Québec.
Si on veut faire des comparaisons avec d'autres pays, il faudrait
donner, je pense, ce genre de renseignement.
M. le Président, je n'ai pas de question. J'ai pris bonne note
des représentations qui sont formulées par l'Union des ligues de
propriétaires et je laisserais plutôt les collègues de la
commission poser des questions.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci, M. le Président. Dr Perras, j'ai lu
votre mémoire d'un bout à l'autre. Vous pouvez être certain
que de notre côté, au moins, nous sommes conscients de vos
recommandations.
Je pense que je vais soulever deux questions sur lesquelles j'aimerais
avoir votre opinion.
Quand j'ai parlé tantôt, j'ai dit que le Parti
libéral, l'Opposition croit qu'à la base, notre système de
logement doit être celui de l'offre et de la demande, le marché
libre, le capitalisme, si vous voulez. En effet, je pense que vous serez
d'accord avec moi, le Parti québécois est aussi capitaliste que
le Parti libéral en ce qui concerne ce projet de loi. Il admet, à
la base, que le système de libre marché est celui qui va nous
fournir le logement. Mais nous avons dit et je le répète,
parce que c'est sur ce point que je veux poser des questions que
même en acceptant qu'on doit avoir un système de libre
marché pour régler les problèmes, il y a quand même
beaucoup de cas, peut-être pas 50% du total, je ne sais pas le
pourcentage m'échappe encore mais quand même un nombre
important de personnes qui se trouvent à l'intérieur de ce
système dans une position difficile envers le propriétaire ou, de
temps en temps, des propriétaires qui se trouvent dans des situations
difficiles envers leurs locataires. Je parle surtout au nom des locataires dans
ce sens parce que je pense que c'est plus souvent le cas.
Comme je l'ai dit, un appartement vide, c'est dommage pour le
propriétaire, c'est sérieux, mais une famille sans logement,
c'est une catastrophe. Pour moi au moins, même si on décide de
laisser le marché libre pour le grand pourcentage, il faut avoir un code
de comportement et un système de tribunal pour régler les cas
dans lesquels l'équilibre entre les forces du marché ne marche
pas. La demande pour les logements, ce n'est pas élastique. D'une part,
c'est quelque chose dont on a absolument besoin et, d'autre
part, on n'en a pas du tout besoin à n'importe quel prix. C'est
un point important. Pour le premier cas, tu es obligé de payer presque
n'importe quoi parce qu'il faut te loger. Dans le deuxième cas, à
moitié prix, ce n'est pas intéressant. Ce n'est pas
élastique. Vous comprenez la situation. Ce que vous avez proposé
aujourd'hui, en effet, c'est de laisser le marché libre, sans aucun
contrôle, aucun encadrement, aucun code de comportement des deux
côtés, aucun appel, aucune régie. Je veux simplement que
vous alliez un peu plus loin pour nous expliquer comment vous pouvez justifier
un tel arrangement.
J'ai une autre question sur un point plus précis, mais avant je
préfère vous demander d'expliquer votre point de vue
là-dessus.
M. Perras: A votre première question, il y a une solution
très facile à l'abolition complète du contrôle des
loyers par la régie. Ce département ne devrait pas être
confié au ministère des Affaires municipales. Il devrait
être confié au ministère des Affaires sociales, parce que
c'est un problème social. Comme vous le dites tellement bien, II y a des
locataires qui sont mal pris et qui ne sont pas capables de payer leur loyer.
C'est un problème social. Le service social est au courant des
conditions sociales de tout le monde, des locataires comme des
propriétaires, même qu'il y a des propriétaires qui
méritent plus de sympathie que des locataires parfois. Une veuve qui a
un logement, une propriété et qui a de la difficulté
à administrer son affaire et qui est obligée de vendre sa
propriété et devenir une assistée sociale, cela arrive
souvent. Cela devrait être confié au ministère des Affaires
sociales. Ne croyez-vous pas?
M. Scowen: Vous prévoyez une régie, mais une
régie qui va relever d'un autre ministère?
M. Perras: C'est-à-dire que les plaintes devraient
être adressées au ministère des Affaires sociales, qui est
organisé, qui a des tentacules qui peuvent aller dans l'intimité
des foyers beaucoup plus que le technocrate dans sa tour d'ivoire, qui est
assis sur son siège présidentiel et qui peut juger plus ou moins
équitablement les récriminations d'une partie ou de l'autre.
M. Scowen: II y a aussi des technocrates au ministère des
Affaires sociales, j'imagine.
M. Perras: Je comprends, mais, tout de même, il y a des
travailleuses sociales qui vont dans les familles. Je crois que ce devrait
être du domaine du ministère des Affaires sociales. D'ailleurs,
c'est un non-sens. Autrefois, c'était le ministère de la Justice
qui régissait le contrôle des loyers. C'est une suggestion.
M. Tremblay (Marcel): Est-ce que je pourrais apporter juste... Le
rapport Fraser offre une conclusion très précise à l'aide
de cinq pays: la Suède, la France, l'Autriche, les Etats-Unis et
l'Angleterre. Sa conclusion est celle-ci. Même si cela paraît
paradoxal, l'offre et la demande constituent la seule solution. Il propose tout
simplement d'enlever les "rent controls", c'est-à-dire le contrôle
des loyers dans ces pays. Vous avez des gars comme M. Friedrich Hayek, des prix
Nobel au point de vue économique. Ce sont des économistes de
grande envergure et même très socialisés, très
socialistes. Ces gars en arrivent à la conclusion que, pour
réellement offrir du logement aux locataires, il faut qu'il y ait ce
qu'on appelle de l'offre et de la demande, pour ne pas arriver dans trois,
quatre ou cinq ans à une crise réelle du logement. Le
gouvernement je crois même que, dans une émission de radio,
M. le ministre l'admettait lui-même ne peut pas prendre tout cela
à sa charge. Il faut tout de même susciter un encouragement
à la propriété, à l'accession à la
propriété, encourager les jeunes non pas à s'acheter
uniquement une maison unifamiliale, mais avoir un, deux ou trois logements. Je
crois que c'est dans l'ordre des choses. Si on ne veut pas arriver un jour
à une espèce de crise du logement... Je crois que c'est une
façon de concevoir que le Dr Perras vous présente à sa
façon, mais je pense que le rapport Fraser du Dr Walker, à
Vancouver, nous la présente d'une façon très
définie et cela à l'aide de cinq pays très importants dans
le monde.
M. Scowen: Simplement pour préciser, parce que je ne veux
pas poser d'autres questions. Je pense que celle-ci est plus importante. Je
vais ajouter une autre question à M. Tremblay. Si je vous comprends
bien, vous préférez que le jeu du marché, le
système de l'offre et de la demande règle tout à 100%, les
problèmes qui se posent entre les locataires et les
propriétaires. Je vous donne un exemple. Je ne sais pas si vous avez lu
le mémoire du groupe qui vous a précédé. Ces gens
ont donné une dizaine d'exemples de problèmes spécifiques.
Ce sont des problèmes qui, semble-t-il, à moins d'être
amateurs dans ces choses, relèvent du fait que l'équilibre des
pouvoirs entre les deux côtés n'est pas égal. Il y a le jeu
du marché, mais c'est un jeu qui, au début, est inégal,
à cause de la position des deux parties. Si je comprends bien, vous
dites: II y a peut-être quelques abus, mais c'est mieux de laisser, d'une
façon complètement ouverte, tous ces cas se régler par les
forces des deux personnes en jeu. Est-ce que c'est vrai?
M. Tremblay (Marcel): Tout en respectant le cadre du
mémoire de l'union, il y a un élément qu'un membre de la
commission a apporté tout à l'heure, lorsqu'il a posé une
question au sujet du trust du logement qui serait encouragé dans la
façon dont le front commun des locataires voulait régler le
problème et le petit propriétaire qui a un, deux, trois ou quatre
logements. Or, je pense qu'il y aurait peut-être une façon, une
nouvelle approche entre la grosse multinationale comme les compagnies Shell,
Gulf Oil, qui veulent investir dans ça et le petit gars de chez nous qui
veut faire l'accession à la propriété avec un, deux, trois
ou
quatre logements. Je pense qu'il y a toute une nouvelle approche,
même je remercie ce membre de la commission, parce qu'il m'a
éclairé à ce sujet.
Il y a une approche valable qui doit être étudiée.
Je pense que ce serait important de pressurer ça, je pense qu'on devrait
étudier ça davantage, parce que c'est un patrimoine et le
patrimoine de la propriété, c'est la seule chose qui nous a
appartenu, comme nos terres chez nous. On y tient, profondément,
à ça. Alors, assurément, entre la multinationale qui se
lance dans l'exploitation du logement, d'accord, je pense que ça demande
une certaine forme de droit de regard afin qu'on puisse regarder ça.
Mais pour le petit gars, je pense qu'on s'attaque... Moi,
écoutez, lorsqu'on vient faire des réunions avec de vieilles
gens, des personnes âgées qui n'ont pas connu le marché du
logement, les variations, qui ont toujours laissé leur logement à
$80 par mois, des six ou sept pièces, ces gens sont réellement
mal pris. Je vais vous dire, les veuves qui arrivent à nos
réunions les larmes aux yeux. C'est un problème réel,
angoissant. Je pense qu'entre cette multinationale, ces gros trusts qui font de
l'exploitation mercantiliste et le petit gars le travailleur, l'ouvrier, le
professionnel ou qui que ce soit, qui a ramassé un, deux, trois ou
quatre logements, je pense qu'il y aurait une approche à ça.
Je vais vous dire, il y a réellement un effet
démoralisateur, les gens sont démoralisés actuellement.
Les gars de 45 à 65 ans, y goûtent dans notre
société actuelle, c'est dur, ils payent pour.
M. Scowen: Je veux simplement ajouter un bref commentaire et une
courte question. Vous parlez des gros trusts et des petits gars de chez nous.
Depuis maintenant six mois, je me trouve toutes les semaines devant des
problèmes très aigus de gens de mon comté, entre les
locataires et locateurs.
J'ai constaté, d'après mon expérience personnelle,
que la majorité de ces problèmes relèvent des petits
propriétaires. Ils sont souvent dans une position personnelle avec le
locataire, les relations personnelles deviennent de plus en plus
serrées, aiguës et mon expérience, dans le comté
où j'habite, qui est un comté de moyenne classe et en bas, c'est
qu'en général, on a moins de problèmes entre locataire et
locateur dans les grandes bâtisses, où le propriétaire a
une relation impersonnelle, que dans les petites bâtisses, où le
propriétaire habite à côté ou est présent
assez souvent. Je ne dis pas que c'est le cas partout, mais c'est mon
expérience personnelle.
M. Tremblay (Marcel): Vous parlez plutôt de relations
personnelles entre locateur et locataire. Mais je parle sur le plan financier,
sur le plan de la finance, sur le plan des moyens, des gens qui peuvent
être jetés dehors, parce que l'on a trop augmenté le loyer
ou des choses comme cela.
M. Scowen: Les deux choses sont pas mal souvent
mêlées.
M. Tremblay (Marcel): C'est pas mal mixte.
M. Scowen: Les deux choses sont pas mal souvent
reliées.
M. Lépine: M. le député, on n'a aucun
pouvoir de régler les choses. Grâce à cette
démocratie qui nous permet d'intervenir à une commission
parlementaire, on laisse le législateur solutionner ces malaises.
M. Scowen: Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président, je crois que le malaise
fondamental qui existe entre le propriétaire et le locataire
réside dans l'insuffisance du revenu du locataire.
M. Tremblay (Marcel): C'est un problème de bien-être
social, c'est un problème de pauvreté. Et on ne peut pas demander
juste à une certaine classe de la société de régler
tout le problème de la pauvreté au Québec.
M. Cordeau: Non, c'est juste. Mais, par contre, le
propriétaire doit faire face à des obligations. Il est
obligé, automatiquement, d'augmenter ses loyers, si minimes soient-ils.
Le type qui a une insuffisance de revenus fait face, tout de suite, à un
problème majeur, soit le prix de son loyer.
M. Tremblay (Marcel): Autrement dit, le propriétaire est
devenu un percepteur de taxes. (13 heures)
M. Cordeau: Je crois que le gouvernement pourrait apporter
certains correctifs. Ce ne sont pas tous les foyers à faible revenu qui
peuvent se loger dans les HLM. Par contre, ceux qui ne peuvent pas entrer,
parce qu'il y a beaucoup de demandes et peu de logis disponibles à ces
classes, doivent payer le prix que les propriétaires demandent. C'est
légitime de leur part de demander un prix raisonnable pour leur
loyer.
Par contre, le locataire, à ce moment-là, doit faire face
à une dépense qui est au-dessus de ses moyens, soit par
chômage, maladie, ou autres.
Ne croyez-vous pas que le gouvernement devrait apporter des correctifs,
parce que la société, dans les loyers à prix modique, paie
une partie et paie passablement pour que ces gens puissent avoir un loyer
convenable, l'électricité payée, le chauffage,
l'entretien, etc., pour $110 par mois?
M. Tremblay (Marcel): M. Parizeau nous disait dernièrement
dans une conférence qu'il nous donnait qu'il en coûterait beaucoup
moins cher d'envoyer ces gens en Floride plutôt que de les abriter dans
certains HLM.
M. Cordeau: Je reconnais votre pensée en ce
sens-là. Ne croyez-vous pas que ce serait préférable et
souhaitable que le gouvernement apporte des mécanismes
nécessaires afin d'aider d'une
façon concrète ces gens à faible revenu ou ayant un
revenu insuffisant, s'ils reçoivent l'aide sociale, bien sûr, ou
d'autres qui travaillent au salaire minimum avec cinq ou six enfants à
faire vivre, pour que ces foyers puissent faire face aux exigences avec
lesquelles ils sont aux prises?
M. Tremblay (Marcel): Je pense que ce serait une solution
humanitaire que de subventionner la famille et substantiellement.
M. Cordeau: Mais, c'est justement...
M. Perras: Si vous permettez... Merci. Justement dans le
mémoire, il est mentionné qu'il y a l'aide à la pierre et
l'aide à la personne. L'aide à la pierre, c'est la construction
d'habitations à loyer modique, mais l'aide à la personne, c'est
de subventionner le locataire pour la différence entre ce qu'il est
capable de payer et ce que le propriétaire est en droit d'exiger pour
avoir un revenu convenable de son placement immobilier. Cela, c'est l'aide
à la personne, cela, c'est justement...
Le Président (M. Laplante): J'ai dit que je voudrais avoir
le consentement de la commission pour en finir avec le groupe.
Une Voix: II est 13 heures.
Le Président (M. Laplante): II est 13 heures,
excusez-moi.
M. Cordeau: Je crois qu'au début on s'était entendu
pour 13 h 15, pour donner une heure au groupe.
Le Président (M. Laplante): Non, mais êtes-vous
d'accord pour continuer jusqu'à 13 h 15 pour terminer avec le
groupe?
M. Clair: 13 h 15, consentement, M. le Président.
M. Lépine: Tout d'abord, je voudrais continuer la
réflexion de M. le député. Je...
Le Président (M. Laplante): II serait bon aussi, par
exemple, que vous parliez chacun votre tour.
M. Lépine: D'accord, mais on voudrait tellement se
précipiter d'une façon prudente et intelligente et essayer
d'épargner du temps. Je voudrais remercier le ministre, en tout cas, de
s'inquiéter de cette solution. Cela doit véritablement encourager
le ministre, parce que, vous savez, quand on veut aider les autres et qu'on se
sent seul, cela n'est pas très encourageant.
Je voudrais, par ricochet, féliciter le député
Guay. Lorsque l'autre front commun des locataires est venu exposer ses
revendications, il a apporté une nuance qui m'a véritablement
fait plaisir. Je voudrais, par le même ricochet, remercier je
termine et je ne parle plus, parce que je parle plus qu'une femme; je vous
dirai cela tantôt le personnel du bureau du ministre de son
efficacité et de sa courtoisie à nous fournir de l'information
et, par la même occasion je ne vous dis pas cela pour vous
être agréable, M. le ministre, je n'attends rien, sauf des
solutions aux problèmes de nous avoir informés sur la
nouvelle loi sur la Société d'habitation pour la
rénovation des...
Le Président (M. Laplante): II ne faudrait pas
s'éloigner du sujet. Il faudrait aller aux questions, parce que le temps
est déjà très limité.
M. Lépine: D'accord. Je vous remercie, c'est tout.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Une courte question simplement. Tantôt, vous
avez fait part de vos inquiétudes concernant les locataires
indésirables. Est-ce que vous voudriez expliciter votre pensée
concernant ce sujet précis?
M. Tremblay: Le propriétaire devient également un
policier dans la loi. C'est lui qui a la responsabilité de maintenir
l'ordre. Jusqu'à un certain point, nous sommes d'accord. Sur un autre
plan, assurément, celui qui écope, c'est toujours le
propriétaire. Dans une chicane de deux locataires, assez souvent, il
perd les deux locataires. Assez souvent, ce sont des conflits de
personnalité. Il n'y a pratiquement rien de prévu pour que le
tribunal puisse s'occuper de deux locataires sans que le propriétaire ne
soit constamment pris dans ce guet-apens. Il y a aussi la question des meubles,
des saisies-arrêts, c'est qu'assurément, quand vous voyez des
locataires se sauver avec les meubles, etc., il y a une loi, il y a tout cela,
mais il faut faire la mise en demeure avant, le gars part avec les meubles et
il s'en va, au point de vue pratique.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Rosemont.
M. Paquette: Si vous permettez, j'aimerais d'abord dire qu'il y a
des problèmes réels qui sont soulevés dans le
mémoire, mais, quant à leur perspective générale,
j'ai été assez scandalisé de lire certains passages, je
dois le dire. Seulement un exemple. On lit, à la page 33: "C'est le
propriétaire qui se charge de l'instruction des enfants du locataire par
voie de la taxe scolaire." "Le propriétaire fournit au locataire la
protection contre l'incendie." "Le propriétaire se charge des loisirs de
sa famille (famille du locataire), parcs, terrains de jeux, piscines, centres
communautaires."
M. le Président, il y a dans ces passages une attitude... Je
comprends que ce que vous voulez dire, c'est que c'est vous qui percevez la
taxe, mais ce sont les locataires qui paient la taxe foncière.
M. Perras: C'est le propriétaire qui paie la taxe. Le
locataire n'est pas conscient justement que le propriétaire lui rend ces
services, à cause de la taxation...
M. Paquette: II les paie lui-même. M. Perras: C'est
le locataire qui paie.
M. Tremblay (Marcel): Les percepteurs de taxes.
M. Paquette: Ce sont les municipalités qui rendent les
services à l'aide de l'impôt foncier, et l'impôt foncier est
payé par le locataire, tout le monde sait cela. Le point n'est pas
là. Vous dites que c'est un problème. On ne laisse pas assez
jouer le libre marché, l'offre et la demande. Vous voudriez qu'on laisse
jouer l'offre et la demande librement, qu'il n'y ait pas de Régie des
loyers, que ce soit le ministère des Affaires sociales qui compense
l'insuffisance de revenu des locataires. Avez-vous une idée combien cela
pourrait coûter au gouvernement par année?
M. Perras: Pardon?
M. Paquette: Avez-vous une idée combien cela pourrait
coûter au gouvernement par année pour étendre la
sécurité sociale à ce point et laisser les
propriétaires fixer les loyers comme ils veulent?
M. Perras: Mais combien coûte la Régie des loyers
avec la publicité qu'on fait de ce temps-là? Combien cela
coûte-t-il? Cela coûte énormément.
M. Paquette: Le problème que je vous amène est le
suivant. Je suis d'accord avec vous sur un point. Quand vous parlez des
habitations à loyer modique, je pense qu'on pourrait loger beaucoup plus
de personnes, malgré qu'il en faut un peu d'habitations à loyer
modique, à l'aide d'une allocation-logement, qui est un moyen de
subventionner l'insuffisance de revenu de certaines catégories de la
population.
Supposons qu'on mette sur pied un tel programme et qu'on l'étende
à toute la population, qu'est-ce qui va garantir au gouvernement que ces
budgets... Ce n'est pas le gouvernement qui va payer les hausses abusives de
loyer et les profits excessifs de certains propriétaires. M. Tremblay
parlait des trusts de logements, des multinationales du logement et il
n'était pas d'accord avec ça. Qu'est-ce qui va empêcher ces
multinationales du logement de fixer les loyers à un prix exorbitant et,
nous, les contribuables, tout ce qu'on aura à faire, ce sera de
compenser avec une allocation-logement. S'il y a un programme
d'allocation-logement, on a besoin d'un contrôle des loyers. L'Etat a le
devoir de ne pas mettre trop d'argent là-dedans pour financer des
profits excessifs et exorbitants. Vous n'êtes pas d'accord avec moi
là-dessus?
M. Perras: Que penseriez-vous de la suggestion de choisir une
région pilote? Essayer d'établir la loi de l'offre et de la
demande, abolir le contrôle complètement, simplement à
titre expérimental. Cela se fait. Ce n'est pas impossible; ce n'est pas
utopique. Cela pourrait se faire dans une région, une ville, n'importe
quelle ville, Sherbrooke, une petite ville et essayer, pour voir comment cela
va aller. Si ça fonctionne bien, mon Dieu, vous abolissez...
M. Tremblay (Marcel): Pour répondre je pense que
ça fait trois fois que je le répète les conclusions
du rapport Fraser sont très précises. Vous écrirez au Dr
Walker, il vous enverra... Même, si vous voulez, le professeur Labrecque
ici, à l'Université Laval, vous donnera toute la documentation.
L'offre et la demande constituent le seul et unique remède au
problème du logement dans le monde entier actuellement, vu par les plus
grands économistes de cinq grands pays et par plusieurs autres
également.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Perras: M. le ministre, je vais vous faire cadeau des
exemplaires.
M. Shaw: ... crise dans l'habitation qui peut se produire
à cause de l'intervention du gouvernement dans le contrôle des
loyers.
Nous avons vu, l'année dernière, une très grande
diminution de nouvelles constructions dans le secteur privé dans
l'habitation. Nous avons vu aussi un grand nombre de faillites. Dans mon
comté, il y a la grosse Self West One qui a subi une faillite. Est-ce
que nous pouvons prévoir un accroissement de ce manque de confiance dans
le logement pour le secteur privé, au Québec, s'il y a trop
d'interventions du gouvernement?
M. Tremblay (Marcel): Le marché du logement doit
être occupé, à mon sens, par l'entreprise privée
surtout et avant tout. A mon sens, vous allez arriver à une
rareté de logements, parce que vous allez avoir les petits
propriétaires et les petits constructeurs. Je suis en relation avec
à peu près 80 petits constructeurs. Sur cela, il y en a la
moitié qui sont sur le "stand by", qui attendent qu'il y ait d'autres
développements. J'ai même vu des gars qui sont partis à
l'extérieur, dont Médéric Robi-chaud, des gars qui ont
fait travailler, pendant 25 ans, 35 ans, 40 ans, des familles entières,
des gars qui engagaient 25, 30 employés constamment. Ils ont fait cela
la majeure partie de leur vie.
Or, personnellement, j'ai construit des logements et lorsque je les ai
construits, j'avais l'encouragement qu'il y avait quelque chose dans cela,
qu'il y avait un profit normal et équitable, qu'il y avait du logement
qu'on pouvait louer à un prix raisonnable également. Il y avait
l'offre et la demande qui nous contrôlaient, le marché de l'offre
et de la demande était normal. Actuelle-
ment, c'est cette petite accession à la propriété
de gars autant comme un Robichaud, un Tremblay ou un autre, ces petits gars qui
ont travaillé toute leur vie pour se ramasser quelque chose, pour se
construire un bloc à appartements de cinq ou six logements ou autre.
Définitivement, je dis qu'il y a comme un découragement de
toute autre classe de notre société, des gars de chez nous qui
n'osent plus rentrer dans cela, qui trouvent cela démoralisant.
Je me dis une chose, c'est que l'offre et la demande, cela a
déjà existé dans le passé et cela a
été bon. La régie ne prenait pas la forme d'un
contrôle des loyers. Ce n'était pas un contrôle des loyers.
C'était une régie, si vous voulez, pour empêcher les abus.
Mais là, cela s'en va définitivement vers un contrôle
très fermé et le jeune qui veut réellement faire partie de
son pays, de son coin, je me demande ce que, au point de vue encouragement, on
peut décréter, à la suite de toutes ces interventions de
contrainte. Il y a tout de même des amendes de $5000 à $25 000
dans cela.
Je vois des propriétaires qui regardent cela, qui lisent cela
tranquillement et disent: Un instant, les us et coutumes de nos gens sont
différents de l'esprit technocratique, des commissaires d'une
régie, des gars qui sont réellement surinformés
électroniquement, etc., d'avec des gars qui ne le sont pas. Le petit
père de famille qui a travaillé toute sa vie et qui a
ramassé du bien tant bien que mal paix sur la terre aux hommes de
bonne volonté ce petit gars-là s'attend réellement
à avoir la paix dans sa ville, dans son coin, mais il se demande
justement ce que le commissaire va penser, ce que va penser le technocrate
contre lequel on n'a pas droit d'appel. Je pense qu'il est temps de copier ce
qui se fait en Russie, de remettre en vigueur un système de
comité permanent pour enlever cette force qu'on donne à des
supertechnocrates qui ont tous les droits, mais contre lesquels il n'y a pas de
droit d'appel. Je pense qu'il est réellement temps, si on a quelque
chose à copier de la Russie, qu'on aille le copier. Je pense que ce
serait bon, parce qu'on donne un pouvoir technocratique très très
fort, sans limites. Il n'y a plus de Conseil législatif ici. Lorsqu'on
venait ici il y a 25 ans, il y avait un Conseil législatif. Il y avait
ce qu'on appelle la tradition, etc., dans laquelle il y avait une espèce
de moratoire pour certaines choses trop avancées. Mais je dis et je
redis qu'actuellement, si on ne forme pas un comité permanent de
députés élus par le peuple, on donne à des non
élus, des technocrates, excusez, si je sors un peu du sujet, le bill 90,
le bill 99 tantôt, des supergars informés, électroniquement
bien informés, qui, actuellement, démoralisent les petits gars de
chez nous, les petits gars qui ont gagné leur vie et qui ont
peiné comme ouvriers, comme travailleurs. Un propriétaire, ce
n'est pas simplement une espèce de gros bourgeois qui se promène
aux frais des autres. Il y a ce petit gars qui a le droit et qui administre...
Etre propriétaire, c'est aussi une sacrée responsabilité,
c'est un casse-tête. Quand vient le temps de la relocation des logements,
sa femme, toute la famille est dedans. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Tardif : M. le Président, j'aurais une question, en
guise de mot de la fin. Le mémoire de l'Union des ligues de
propriétaires ne se prononce pas sur la question d'un taux fixe.
Puisque, ce matin, on a eu des représentants des locataires qui nous ont
dit ce qu'ils pensaient d'un taux fixe, qu'en est-il de votre organisme? (13 h
15)
M. Perras: Un taux fixe des loyers?
M. Tardif: Un taux fixe d'augmentation, comme cela existe dans
huit provinces sur dix. On a cité le cas de l'Ontario ce matin. Quel est
votre sentiment? Est-ce que vous avez une position à ce sujet?
M. Perras: C'est assez difficile à établir. M.
Tardif: Vous n'en avez pas.
M. Perras: Un locataire qui n'a pas été
augmenté depuis trois ou quatre ans, on ne peut pas l'augmenter de 10%.
Si vous lui demandez 30%, il va tout de suite être offusqué, c'est
ce qui arrive tout le temps. C'est assez difficile d'établir un taux
fixe par année. Si tous les baux étaient annuels, mais il y a des
baux de trois ans, des baux de cinq ans.
M. Tardif: M. le Président, je n'ai pas d'autres
questions. Je remercie les représentants de la ligue des
propriétaires de leur mémoire, que j'ai lu en entier, même
s'ils n'ont pas eu le temps de tout le présenter. J'ai pris bonne note
de leurs représentations.
Le Président (M. Laplante): M. Tremblay.
M. Perras: M. le Président. M. le ministre, MM. les
membres de la commission parlementaire, merci beaucoup de nous avoir
écoutés; j'espère que vous prendrez nos revendications en
sérieuse considération.
Le Président (M. Laplante): MM. Perras, Lépi-ne et
Tremblay, les membres de cette commission vous remercient de l'apport que vous
avez bien voulu leur donner par votre mémoire.
Avant d'ajourner les travaux sine die, je voudrais aviser ceux qui n'ont
pas encore comparu de suivre ce qui va se passer à l'Assemblée
nationale cet après-midi, parce qu'on n'est pas certain de la
convocation de la commission pour cet après-midi. Ne vous
éloignez pas, vous n'avez qu'à suivre ce qui va se passer
à l'Assemblée nationale. Sur ce, j'ajourne les travaux de la
commission sine die.
Suspension de la séance à 13 h 17
Reprise de la séance à 16 h 20
Le Président (M. Laplante): A l'ordre, messieurs!
Reprise de la séance de la commission des affaires municipales
pour l'étude du projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du
logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions
législatives. A cette étape-ci, nous étudions les
mémoires présentés par différents groupes.
Les membres de cette commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau) remplacé par M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce); M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier)...
M. Clair: M. le Président, est-ce que je pourrais le
remplacer?
Le Président (M. Laplante): Oui, monsieur. M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes) remplacé par M. Ouellette (Beauce-Nord)...
non, M. Ouellette est ici, par M. Clair (Drummond).
Une Voix: C'est M. Clair (Drummond) qui remplace M. Mercier
(Berthier).
M. Clair: Si vous voulez, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): D'accord. M. Mercier
(Berthier) remplacé par M. Clair (Drummond); M. Ouellette (Beauce-Nord),
M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie).
Les intervenants sont M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères), M. Dubois (Huntingdon) remplacé par M. Fontaine
(Nicolet-Yamaska); M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste (Sainte-Anne), M.
Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par M. Paquette
(Rosemont); M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce)
remplacé par M. Forget (Saint-Laurent); M. Vaugeois
(Trois-Rivières). C'est tout. Est-ce que M. Bisaillon (Sainte-Marie)
remplace M. Vaugeois (Trois-Rivières)?
M. Bisaillon: Si vous le désirez, M. le Président,
si vous le voulez.
Une Voix: Quel est le nombre?
Le Président (M. Laplante): M. Bisaillon (Sainte-Marie. Il
nous restait deux...
M. Cordeau: Quel est le nombre? Combien?
Le Président (M. Laplante): Pardon? Le quorum est de six,
on est amplement, on est sept. Il restait, cet après-midi, à
recevoir deux organismes: L'Association des administrateurs immobiliers du
Québec et Immobiliare Canada Limitée et les Appartements
Port-Royal Inc.
J'appelle maintenant l'Association des administrateurs immobiliers du
Québec. Messieurs, selon les règles, vingt minutes pour
présenter votre mémoire, le plus synthétisé
possible. Le reste du temps, ce sera pour les questions. Veuillez bien
identifier votre groupe, vous identifier vous-même et les personnes qui
vous accompagnent, s'il vous plaît.
Une Voix: Le numéro du mémoire?
Une Voix: 3M.
Association des administrateurs immobiliers du
Québec
M. Dupont (Michel): M. le Président, M. le ministre, MM.
les membres de la commission, mon nom est Michel Dupont. Je suis procureur de
l'Association des administrateurs immobiliers du Québec. Je suis
accompagné, cet après-midi, de M. Pierre Perreault, à ma
droite immédiatement et de M. Gilles Bertrand, respectivement
président et vice-président de ladite association.
J'aimerais tout d'abord remercier la commission de l'occasion qu'elle
nous fournit de lui exposer notre point de vue sur le projet de loi 107. Comme
la plupart d'entre vous, je présume, ignoraient l'existence d'une telle
association, j'aimerais seulement, à ce stade, souligner que sa
formation remonte à 1975 et qu'elle regroupe, à l'heure actuelle,
une bonne part des individus oeuvrant sur une base professionnelle dans le
domaine de l'administration des immeubles. Elle vise principalement à
favoriser la sélection et à promouvoir la compétence des
gens qui se spécialisent dans ce secteur de la gestion
immobilière, domaine d'activités dont l'essor est relativement
récent.
Je laisserai le soin à M. Gilles Bertrand, qui est
vice-président de l'association, de nous exposer de façon plus
détaillée en quoi consiste la tâche d'un administrateur.
Vous réaliserez dès maintenant, cependant, tout
l'intérêt que nos membres portent à un projet de loi
regroupant l'ensemble des dispositions applicables au logement, puisqu'ils
auront à travailler quotidiennement à l'intérieur du cadre
fixé par le législateur et constitueront l'un des principaux
rouages de ce secteur immobilier.
J'attirerai enfin l'attention de cette commission sur le sens
général du mémoire que nous avons soumis. Vous noterez
qu'on y soulève une série de questions qui nous sont venues
à l'esprit à l'examen du projet de loi. Nous présumons que
dans le cadre de la discussion qui va suivre, les éclaircissements que
nous avons sollicités pourront nous être fournis, le tout dans un
esprit constructif d'efficacité et de justice pour tous ceux que cette
loi pourra concerner. M. Bertrand.
M. Bertrand (Gilles): Comme préambule, nous allons tenter
de brosser l'image la plus exacte des différentes tâches, des
différents rôles que peut jouer un administrateur immobilier dans
la gestion des propriétés et des immeubles. A cet effet, nous
vous présentons une analyse comportant deux éléments de ce
profil.
Vu que l'on traite ici du logement, nous allons nous en tenir à
ce secteur de l'activité immobilière, celui qui, au niveau
pratique et dans la pratique de tous les jours, est appelé à
servir d'intermédiaire et de conciliateur entre les parties d'un contrat
de louage, donc à assurer que les droits et obligations prévus
dans l'entente ou fixés par la loi soient respectés pour le plus
grand bénéfice possible, tant du locateur que du locataire.
Pour le locateur, il doit s'occuper de la préservation du capital
investi, obtenir le meilleur rendement possible et à
l'appréciation de la valeur de l'immeuble qu'il administre et, pour le
locateur, lui assurer toute la sécurité, le maximum de confort et
la complète jouissance des lieux loués.
Eu égard au rôle de l'administrateur dont nous venons de
faire état, vous comprendrez qu'il est un des mieux placés pour
réaliser la nécessité de préserver les logements,
aussi bien qu'à leur nombre et qu'à leur qualité. C'est
d'ailleurs un objectif que tout administrateur immobilier professionnel est
appelé à poursuivre et c'est pourquoi l'association endosse sans
restriction le principe de la conservation de logements énoncé
dans le projet de loi.
Je termine mon exposé. Merci.
M. Perreault (Pierre): A travers le mémoire qu'on vous a
présenté, il y a trois points principaux qui ont attiré
notre attention.
Comme on vous l'a dit, en ce qui nous concerne, c'est vraiment
l'application technique administrative entre le locateur et le locataire. On se
trouve en plein centre d'une activité administrative.
A l'article 38, sous la vente d'un immeuble, afin d'éviter toute
ambiguïté sur l'expression "ensemble immobilier", il est
suggéré de définir dans l'espace ce qu'est un ensemble
immobilier. Exemple: deux immeubles ou bâtisses et plus. Lorsque vous
parlez d'un ensemble immobilier, d'après la loi, c'est un ensemble
d'immeubles, donc, deux immeubles ou bâtisses et plus reliés par
des services communs. Je pense qu'il serait appréciable de bien
préciser "reliés par des services communs". Cela peut être
un garage souterrain. Cela peut être des services d'aqueduc,
d'électricité, de chauffage, etc.
L'idée de cette définition est de bien expliciter la loi
lorsqu'on dit: A proximité les uns des autres. Je pense qu'on pourrait
apporter là une légère précision. En fait, on vous
le propose.
On retrouve cette expression dans la loi "à proximité les
uns des autres". Si on laisse ça comme ça, ça nous semble
être un peu vague. Il faudrait peut-être lui apporter un
complément de précision qui vient rejoindre, si vous voulez, I'
"ensemble immobilier".
Nous soulevons également, dans notre mémoire, le cas d'une
unité de condominium qui serait donnée à bail. Cette
unité doit-elle être considérée comme partie d'un
ensemble immobilier lorsque l'immeuble ou les immeubles si on se
rapporte au texte du projet de loi dans lesquels se trouve cette
unité donnée à bail com- portent au moins douze autres
unités également données à bail et que
l'administration de l'ensemble du projet est confiée à une seule
personne? (16 h 30)
Dans le projet de loi, vous parlez bien de douze unités.
Lorsqu'on se retrouve dans un condominium où souvent, pour toutes sortes
de raisons, des propriétaires ont investi pour de la location, on se
retrouve avec plusieurs unités de condominium en location données
à bail. Alors, si vous dites qu'une seule personne doit administrer tout
le projet, à ce moment-là, les propriétaires
résidant dans le complexe pourraient avoir des problèmes dans le
cas d'une vente, bien sûr.
A l'article 60, dans un but d'efficacité, afin de ne pas retarder
l'audition de la cause, nous proposons qu'une copie d'un rapport d'expert soit
distribuée à chacune des parties un certain temps avant
l'audition pour que les parties, après examen des documents, puissent
décider et informer les autorités sur la nécessité
d'inviter l'expert en cause à se présenter à l'audition.
Ceci, premièrement, pour ne prendre personne par surprise, parce qu'il
arrive souvent que, s'il y a un rapport d'expert, qu'on se présente
à l'audition et qu'on nous remet un rapport, les gens doivent en prendre
connaissance. Deuxièmement, pour éviter les ajournements
répétitifs des auditions.
Bien sûr, si les personnes n'ont pas pris connaissance du texte,
elles vont vous demander de reporter l'audition. Afin d'éviter ceci, on
vous propose de déposer les rapports au préalable.
A l'article 1652.3, nous comprenons que, dans l'esprit de tout individu,
un logement habitable ou inhabitable se définit assez bien. Je pense
qu'on fait confiance aux personnes pour définir si un logement est
habitable ou non. Cependant, afin d'éviter toute ambiguïté
durant l'administration d'un bail, nous proposons, dans le cadre des
règlements, de préciser les exclusions faites entre logement
inhabitable par cas fortuit ou force majeure de nature temporaire, telle une
panne d'électricité ou interruption du service d'aqueduc, et
celle de plus longue durée comme dommages causés à
l'immeuble par un incendie important.
Alors, voilà, messieurs, en ce qui touche l'aspect technique de
l'administration comme telle, au niveau de l'immobilier. Je ne sais pas si Me
Dupont a quelque chose à ajouter.
M. Dupont: Je viens, M. le Président, de réaliser
que les 20 minutes ne sont pas encore écoulées. J'aimerais dire
ceci en conclusion. L'association endosse, de façon
générale, le projet de loi. A toutes fins utiles, c'est une
refonte des dispositions qui existaient déjà dans le Code civil,
dans la Loi pour favoriser la conciliation entre propriétaire et
locataire, sans grande modification. On a vécu déjà avec
cela depuis quelques années. Cela nous apparaît satisfaisant. On a
insisté beaucoup, ce matin, sur les notions d'équilibre et de
déséquilibre entre propriétaire et locataire.
Nous sommes d'accord avec vous sur le fait que, sur le marché
libre, le locataire est probable-
ment en position d'infériorité par rapport à un
propriétaire. Ce sont des constatations que nous avons pu faire. Nous
estimons que les dispositions qui s'appliquent à l'heure actuelle et
qu'on a reproduites dans le projet de loi viennent à toutes fins utiles
rétablir l'équilibre qui aurait pu être perdu autrement.
C'est la raison pour laquelle nous sommes d'accord sur le projet de loi. Nous
estimons qu'il y a quelques modalités qui pourraient peut-être
faire l'objet de révision ou d'une attention particulière. Nous
demandons en gros que la loi soit la plus précise possible de
façon que nos membres qui vont avoir à vivre avec elle puissent
la comprendre facilement et l'appliquer facilement aussi. Alors, nous vous
remercions de votre attention et nous sommes à votre disposition pour la
discussion.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs. M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, je voudrais remercier
l'Association des administrateurs immobiliers pour sa présentation qui a
porté tant sur des modalités techniques d'application de la loi
que sur le fond même. Je la remercie d'avoir manifesté son accord
sur le fond de la loi. Cette position, à la lumière
particulièrement des deux positions extrêmes entendues ce matin,
se situant aux deux extrémités du continuum quant à
l'attitude vis-à-vis d'un contrôle des loyers, est
évidemment réconfortante.
J'aimerais cependant peut-être poser quelques questions aux
représentants de l'association. D'une part, je ne suis pas sûr
d'avoir très bien saisi. Au début, lors de la
présentation, vous avez dit: Nous représentons la plupart des
gens qui administrent des immeubles et qui font office de courtiers, de
médiateurs, de conciliateurs entre des propriétaires et des
locataires. Dans les faits, il y a combien de membres dans votre association
qui existe depuis 1975? Est-ce qu'il y a une reconnaissance, comment devient-on
membre de l'Association des administrateurs immobiliers, enfin, comment se fait
le recrutement des gens? C'est beaucoup plus pour ma propre instruction et
celle de la commission, je pense.
Je voudrais simplement dire que sur certaines recommandations
techniques, effectivement, nous allons étudier certaines des suggestions
que vous nous faites d'améliorer le texte de certains articles; la
définition d'ensembles immobiliers en est une qui n'est pas facile, on
en conviendra. S'il y a des édifices ou des ensembles immobiliers qui
peuvent très bien se séparer, se vendre en pièces
détachées, il en est d'autres où ça ne peut pas se
faire sans difficulté. Là-dessus, je suis tout à fait
d'accord.
J'aimerais aussi avoir le point de vue de votre association,
tantôt, sur les hypothèses soulevées ce matin d'un taux
fixe. On a entendu des gens qui nous ont dit: On n'aime pas tellement
ça, mais on pense que ce serait peut-être encore mieux que du cas
par cas. Ne serait-ce qu'à titre de sondage, peut-être non
scientifique, j'aimerais, au cours de ces audiences, entendre le point de vue
des différents groupes face à l'établissement d'un taux
fixe avec, évidemment, des possibilités de dérogation
moyennant certaines conditions, un peu selon la formule ontarienne que vous
devez connaître.
M. Bertrand (Gilles): L'Association des administrateurs
immobiliers, pour répondre à votre première question, est
une association qui a été fondée en 1975 pour regrouper,
pour essayer de regrouper, d'une façon professionnelle, ceux qui
oeuvraient dans le milieu de la gestion immobilière, ceux qui avaient
suivi les cours de formation qui se donnent dans différentes
universités américaines ou par le truchement de
l'Université du Québec et de donner un titre.
Nous avons, à l'heure actuelle, une demande de reconnaissance
à l'Office des professions. Nous sommes environ 125 à 150 membres
à l'heure actuelle, qui peuvent administrer en totalité environ
20 000 logements dans le Québec. Pour ma part, j'en administre environ
750 et plusieurs édifices commerciaux.
Je vais laisser mon confrère répondre à la
deuxième question.
M. Perreault (Pierre): Je voudrais aussi ajouter ceci. En 1975,
lorsque nous avons créé l'association, nous sommes venus d'accord
avec l'Office des professions qu'un cours soit dispensé au niveau du
baccalauréat, par l'UQUAM. Nous avons commencé par
l'Université du Québec à Montréal, où le
programme, au niveau du baccalauréat en administration
immobilière, doit être donné sous peu, Présentement,
les cours se situent au niveau du certificat. Nous fonctionnons par
étapes. Nous nous sommes présentés devant l'office il y a
environ un mois, un mois et demi. Bien sûr, il a trouvé que nos
bases étaient solides. Nous prenons le temps voulu pour aller recruter
ces personnes, mais nous devons le faire à travers le Québec.
Nous avons reçu également l'assurance du ministère des
Institutions financières, au niveau du courtage immobilier qui, de son
côté également, fait de la recherche pour
différencier le courtage de l'administration. Ce sont deux secteurs tout
à fait séparés.
Nous, nous disons que l'administrateur immobilier, c'est tout à
fait différent du courtier. Le courtier représente une personne
qui veut vendre un immeuble. Nous, nous sommes là pour administrer des
biens immobiliers se situant entre deux parties, le locateur et le
locataire.
Souvent, ce n'est pas facile à comprendre dans le public, parce
qu'on se représente l'administrateur comme étant le
défenseur des biens de propriété. Mais, pour nous, ce
n'est pas cela. On développe une nouvelle philosophie que
l'administrateur est une personne qui doit représenter les
intérêts des deux parties. J'écoutais ce matin un
intervenant qui disait: Les représentants des propriétaires, il y
en a trois. Mais il y en avait deux. On ne représente ni l'une partie ni
l'autre. On est là pour faire respecter et c'est dans notre
esprit des lois, des règlements, tant au niveau
économi-
que qu'au niveau gouvernemental, sur le plan de l'administration.
C'est cette philosophie qu'on propage, parce que je pense que, si on
regarde tout ce qui se développe au niveau immobilier, vous avez les
offices municipaux où nous avons justement des rencontres avec certains
représentants pour l'administration de ces édifices. Il y en a
qui se spécialisent dans le domaine commercial, dans le domaine
industriel. Tout ce monde veut se regrouper et nous passons à travers
cette période-là. On a cru bon de venir vous présenter un
mémoire à cet effet. Est-ce que cela répond...
M. Tardif: Merci, cela me donne une meilleure idée
d'ensemble.
M. Perreault: Une meilleure idée d'ensemble.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Clair: Si mon collègue de Notre-Dame-de-Grâce me
le permettait, j'aurais seulement une petite question. Juridiquement, si je
comprends bien, vous cherchez à vous situer de plus en plus comme un
corps professionnel autonome, un peu comme un notaire. En fait, un notaire, ce
n'est le mandataire ni du vendeur, ni de l'acheteur; il est là pour
officier et, si je comprends bien, vous vous inscrivez dans une démarche
qui cherche à vous faire reconnaître comme étant de plus en
plus professionnels, parce que, juridiquement, j'ai l'impression que vous
êtes, à toutes fins utiles, à toutes fins que de droit, des
mandataires du propriétaire. Je comprends que vous n'aimez
peut-être pas cette situation, vous visez à être
considérés de plus en plus comme un corps professionnel
responsable. Est-ce que je comprends bien que, juridiquement, actuellement,
vous êtes des mandataires des propriétaires, mais que vous
cherchez cependant à être de plus en plus non pas de simples
mandataires, mais des administrateurs professionnels, un peu comme un
comptable, ou un notaire? Est-ce que je comprends bien?
M. Dupont: II est possible que, juridiquement, oui, on puisse
être considérés comme des mandataires, au sens du Code
civil, des propriétaires. Effectivement, l'administrateur immobilier,
à l'origine, est amené dans le portrait par un
propriétaire et non pas par des locataires. Ce que vous devez
réaliser, cependant, c'est de la même façon qu'un notaire
est généralement amené par un acheteur plutôt que
par le vendeur. Cela n'empêche pas qu'une fois le processus
amorcé, le professionnel en question devient un joint...
M. Clair: Est responsable.
M. Dupont: ... entre deux parties. Autant il va expliquer au
locataire les problèmes qui peuvent concerner le propriétaire,
autant il va faire des représentations pour le compte des locataires
vis-à-vis du propriétaire, de façon à concilier
tout le monde. Peut-être qu'au point de départ, on peut parler
d'un mandataire du propriétaire, mais, une fois ces fonctions en marche,
cela devient le trait d'union entre deux parties à un contrat de
louage.
M. Clair: La base de rémunération actuellement,
cela fonctionne comment pour les administrateurs immobiliers?
M. Perreault: C'est tant pour cent, normalement.
M. Clair: C'est au pourcentage. M. Perreault: C'est au
pourcentage.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce, dois-je considérer que vous avez
accepté de passer votre droit de parole?
M. Clair: J'en remercie mon collègue.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci, M. le Président. Il y a deux aspects de
votre présentation qui m'ont particulièrement
intéressé; le premier, c'est sur les commentaires qui touchent
les articles 38, 39, 40 et l'autre, c'est sur l'article 1652. (16 h 45)
Pour commencer avec l'article 38, vous avez suggéré
quelques modifications aux définitions. Je veux vous demander si vous
comprenez l'objectif, en gros, de ces quatre articles et si vous êtes
d'accord, en général, avec les objectifs, avec les quatre
articles intitulés "La vente d'un immeuble situé dans un ensemble
immobilier". Est-ce que vous avez saisi le sens...
M. Dupont: Pour en avoir discuté passablement au niveau de
la préparation du mémoire et même avant de nous être
présentés devant vous, ce que l'on comprend de cela, c'est que
l'on veut préserver des services qui sont offerts à un ensemble
de gens qui résident apparemment dans plusieurs bâtisses. On veut
éviter que ces gens soient privés de ces services en commun, qui
ont été pensés lors de la construction des bâtisses
en morcelant les droits de propriété respectifs. Si ce n'est pas
le but visé, vous voudriez bien nous dire à quoi on voulait en
venir exactement.
M. Scowen: Je vous dis franchement que j'ai parlé avec pas
mal de gens, et jusqu'ici, je n'étais pas en mesure de saisir exactement
l'objectif de ces quatre articles. Je ne sais pas si c'est ici le moment d'en
discuter, parce que nous en aurons l'occasion plus tard, mais parce que vous
avez soulevé la question...
M. Dupont: En fait, notre intervention je m'excuse, M. le
ministre visait essentiellement à ceci. Si le gouvernement
décide de restreindre des transactions dans ce qu'il appelle un
ensemble
immobilier, on aimerait que la définition d'ensemble immobilier
soit bien claire dans l'esprit de tout le monde, de façon que tout
à l'heure, on sache si dans ce cas-ci et dans ce cas-là les
transactions seront permises ou ne le seront pas. C'est strictement le
sens...
M. Scowen: Jusqu'ici, je partage votre opinion à peu
près à 200%; il y a d'autres mots en plus dans cet article que je
trouve difficile à comprendre. Je pense qu'au fond, c'était
même difficile de comprendre le sens. Est-ce que...
M. Tardif: Si on peut me permettre d'apporter un
élément d'explication. Là-dessus, je comprends que le
député de Notre-Dame-de-Grâce n'était pas membre de
l'Assemblée nationale lorsque des amendements ont été
adoptés d'abord par l'ancien gouvernement, au mois de décembre
1975, gouvernement formé par le parti auquel il appartient, et que j'ai
amendés à nouveau en 1976 et en 1977.
Le cas qui a été soulevé et qui avait amené,
encore une fois, l'ancien gouvernement à légiférer, c'est
entre autres, cette vente en pièces détachées, non pas
sous forme de copropriété, c'est-à-dire qu'on ne vendait
pas le rez-de-chaussée et le premier étage et le deuxième,
mais bien d'immeubles qui faisaient partie d'un ensemble, et à
l'intérieur desquels on pouvait trouver des sous-ensembles. Le cas
typique, c'est celui de Val-Martin où un ensemble immobilier de 580
logements construit en 1954, en vertu d'un programme à dividendes
limités, 3% ou 4% d'intérêt seulement, construit à
des fins locatives, avec des bâtiments de deux étages,
regroupés par groupes de deux, quatre, six ou même huit logements,
dotés de services communs, une seule entrée d'eau ou une seule
sortie d'égout, entrée électrique, aucun coupe-feu, toit
continu pour couvrir l'ensemble des immeubles, tout cela avec évidemment
des aires de services communes, des aires récréatives communes,
des aires de stationnement communes, le tout conçu dans un ensemble qui
faisait que même le découpage du terrain, le lotissement, posait
déjà des problèmes géométriques à peu
près insurmontables sans parler des problèmes structurels devant
lesquels on pouvait être placé si, par exemple, la même
poutre maîtresse supportait deux ou trois logements et pouvait amener
l'effondrement non seulement d'une propriété, lorsqu'elle
était vendue en pièces détachées, mais de
plusieurs.
Tout cela avait amené, encore une fois, l'ancien gouvernement
à interdire ce genre de morcellement. Le prêteur
hypothécaire, en l'occurrence, la Société centrale
d'hypothèques et de logement, avait d'ailleurs prêté
l'argent en 1954 et, par la suite, interdit la vente pendant 20 ans de
façon absolue et avec certaines conditions après 20 ans. Or,
effectivement, cela a été vendu en 1974, l'interdiction absolue a
été levée en 1974 et on a permis la vente de ces immeubles
avec des problèmes que l'on sait et, présentement, le but est
donc... On verra que le projet de loi no 107 vise maintenant à permettre
la vente au moins de ces unités qui sont autonomes du point de vue
services, c'est-à-dire qu'on pourrait vendre, par exemple, dans un
ensemble de 580 logements, un bloc de huit qui sont reliés
structurellement et fonctionnellement, mais non pas vendre chacun des immeubles
à cause, évidemment, des problèmes que ceci peut
présenter.
Donc, ce sont des cas réels, vécus qui ont amené ce
genre d'interdiction par le législateur en 1975, qui a été
reprise après et qu'on vient assouplir dans le projet de loi no 107,
mais à certaines conditions.
M. Scowen: Avez-vous une opinion à savoir si on doit
légiférer dans ce sens? Est-ce que c'est une bonne idée ou
non d'insérer ces articles? Vous avez fait des commentaires sur quelques
définitions, mais après...
M. Perreault: Oui, nous avons fait des commentaires... Vous
voulez dire sur l'ensemble du projet de loi?
M. Scowen: Oui. Est-ce que vous êtes d'accord avec le
ministre, par exemple, que c'est un domaine où l'on doit
légiférer?
M. Perreault: On l'a bien précisé, je pense, au
début de la présente assemblée. Notre rôle est
l'application des lois...
M. Scowen: Oui.
M. Perreault: ... qu'un gouvernement veut bien émettre,
pas les...
Le Président (M. Laplante): Ce que le député
veut savoir, c'est si vous êtes d'accord avec les quatre articles dont on
vient de discuter, si on doit légiférer...
M. Scowen: Avec des changements de définitions...
M. Perreault: Oui, on a demandé de préciser
certaines choses.
M. Scowen: Oui.
M. Tardif: Je vais vous poser de nouveau la question autrement,
si vous permettez, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: ...
M. Tardif: En tant qu'administrateur immobilier, si un client
allait vous consulter pour acheter une telle maison, lui conseilleriez-vous de
l'acheter en pièces détachées?
M. Perreault: II faudrait procéder à une
étude économique et on verrait si on peut lui dire de l'acheter,
mais, par principe, c'est très délicat.
M. Shaw: J'aurais une question, dans le même domaine.
Le Président (M. Laplante): Si le député de
Notre-Dame-de-Grâce veut vous céder la parole, d'accord, mais s'il
ne veut pas, c'est lui qui a la parole.
M. Scowen: J'ai une deuxième question sur un autre
article, mais si vous voulez simplement préciser quelque chose... Est-ce
que vous lui permettez?
Le Président (M. Laplante): D'accord, M. le
député de Pointe-Claire.
M. Shaw:... parce que cela implique premièrement le
concept de condominium. Vrai ou pas vrai? Est-ce qu'on a besoin d'inclure
l'article dans le projet de loi no 107 ou si nous avons besoin d'amender la Loi
sur les condominiums? C'est le problème ici, parce que si on emploie
encore un moyen qui n'est pas véritablement dans...
M. Tardif: II y a d'autres dispositions dans la loi en ce qui
concerne la copropriété. Il s'agit de vente non pas de logements,
mais d'immeubles entiers, d'immeubles qui sont reliés, d'accord?
M. Shaw: Oui.
M. Tardif: Ce sont des sections différentes qui peuvent
peut-être s'apparenter, à certains égards, à de la
copropriété, mais cela n'en est pas véritablement. La
personne qui a acheté un duplex achetait le duplex en entier, et le
premier étage et le deuxième, d'accord?
M. Shaw: Mais la situation des 540 logements dont vous faites
mention, ils ont été vendus dans le contexte de condominium.
M. Tardif: Non, du tout! On vendait le duplex au complet.
M. Shaw: Oui.
M. Tardif: On ne vendait pas le rez-de-chaussée et
l'étage. On vendait le duplex au complet, sauf que ce duplex faisait
partie, avec d'autres, de cet ensemble immobilier doté de ces services
communs, de ces aires communes et autres. Cela pouvait poser, pour toutes
sortes de raisons, lorsqu'on devenait propriétaire de cet immeuble, des
problèmes juridiques assez importants en ce qui concerne les
défauts, les dégâts qui pourraient être encourus, les
dommages et autres et c'est la raison pour laquelle, entre autres,
évidemment, le législateur a empêché ces ventes en
1975 et que cela a été repris par la suite.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Ma deuxième question touche le C52.3. Vous
allez constater que c'est peut-être un bon point de soulever
l'idée qu'on doit avoir deux définitions du mot
"inhabitabilité". J'ai été frappé par la phrase qui
disait: Le locataire peut déguerpir si le logement est inhabitable ou
s'il le devient sans sa faute.
Je me demande s'il ne serait pas juste de demander à une tierce
partie de porter un jugement en quelque sorte, avant que ce
déguerpissement ait eu lieu. Pensez-vous que quelque chose pourrait
être fait...
M. Dupont: C'est exactement le sens de notre mémoire et je
pense qu'il faut distinguer, au point de départ, entre un état
d'inhabitabilité qui survient momentanément et un état
d'inhabitabilité qui survient progressivement.
Je pense qu'il est évident que si un incendie survient dans les
lieux loués et que la bâtisse est pratiquement détruite, on
ne pourra pas demander à un tiers de venir porter un jugement sur
l'état d'habitabilité ou d'inhabitabilité avant
d'autoriser le locataire à se trouver un nouveau logement. D'accord?
M. Scowen: Au moins durant l'incendie, on a le droit de
sortir.
M. Dupont: Forcément. Bon! C'est pour cela que, dans notre
mémoire, on a dit: Distinguons entre les cas où ça
survient tout d'un coup, cette affaire-là, et les cas où
ça prend un certain temps. Parlons, par exemple, de
détérioration d'un logement ou de choses de ce type-là,
qui peuvent s'échelonner quelquefois sur plusieurs mois.
Ce que l'on suggère, c'est que, dans ces cas-là, où
l'inhabitabilité survient de façon progressive, il y ait un
tiers, qui pourrait être un inspecteur de la régie, qui porte au
moins un jugement préliminaire, qui pourrait être susceptible de
révision, avant que le déguerpissement soit autorisé.
Qu'il y ait au moins quelqu'un, à ce moment-là, qui constate un
état et qui pourra, ultérieurement, s'il y a matière
à révision, nous dire ce qu'il a vu.
M. Scowen: Oui.
M. Dupont: Nous sommes tout à fait d'accord avec les
remarques que vous avez faites.
M. Scowen: Dernière question. J'ai été
frappé par votre suggestion sur l'article 25. Vous avez dit: N'est-il
pas un peu curieux que le projet de loi actuel vienne décrire d'une
façon exhaustive les obligations de locateur, mais qu'aucun chapitre
n'ait été consacré aux obligations du locataire.
Je pense que dans la recherche d'un équilibre, votre point est
très bon. Je voulais simplement vous demander d'expliquer d'une
façon un peu plus élaborée si vous avez des idées
précises sur une charte des responsabilités des locataires qui
pourrait être insérée? Avez-vous quelques idées dans
ce sens?
M. Dupont: Ce principe est assez simple. Avec le projet de loi
107, on fait disparaître la majorité des dispositions de la loi
où il était question des obligations du locataire. A toutes fins
utiles, je
pense qu'il ne reste que l'article 2619 du Code civil, si je ne me
trompe pas de numéro, qui l'oblige à payer le loyer et à
user du local en bon père de famille. Autrefois, l'article 25 de la loi
existait pour favoriser la conciliation entre locataire et propriétaire,
qui venait apporter un certain nombre de précisions sur l'utilisation
qu'un locataire pouvait faire du logement.
On lui défendait, de façon explicite, entre autres, de
détériorer le logement. On comprend que c'est encore l'intention
du législateur de défendre une telle pratique. Vous serez
d'accord avec moi que la notion du bon père de famille, c'est une notion
très peu utilisée, qui n'est définie dans aucune
législation, sur laquelle les tribunaux se sont occasionnellement
prononcés, mais c'est définitivement une notion floue.
Pourquoi alors ne pas autant préciser les droits que les
obligations de tout le monde, de façon que la situation soit claire et
pourquoi si on veut toujours maintenir les obligations qui étaient
prévues dans l'ancien article 25, ne pas reproduire les termes de cet
article-là dans la nouvelle loi? C'est le sens de notre intervention,
strictement, pour qu'on sache à quoi s'en tenir et qu'on ne se retrouve
pas tout à l'heure, devant un des régisseurs, en train de se
demander ce que veut dire: utiliser en bon père de famille... Est-ce que
brûler un tapis c'est utiliser en bon père de famille? Et
jusqu'où va la notion de bon père de famille? (17 heures)
M. Scowen: Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Sur la même question. Merci, M. le
Président. Je vais continuer sur le même sujet. Est-ce qu'on
pourrait connaître du ministre les raisons pour lesquelles il a
enlevé l'article 25 de l'ancienne loi concernant les
responsabilités...
M. Guay: M. le Président, sur une question de
règlement; nous sommes à l'audition des mémoires et non
aux questions au ministre lors de l'étude article par article.
M. Cordeau: Mais je crois que les intervenants ont posé
une question.
M. Guay: La commission parlementaire a un but inverse.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Taschereau.
M. Cordeau: Je crois que c'est une inquiétude des
participants.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe. On se trouve entre deux eaux actuellement. Lorsqu'on
reçoit des mémoires, le projet de loi est déjà
déposé. Je vous demanderais de vous en tenir, autant que
possible, sur la ligne...
M. Cordeau: Je voudrais bien avoir des règlements. Si le
ministre peut nous le dire lui-même, je pense qu'il a de bons assistants,
mais je pense que M. le ministre a assez d'envergure, à un moment
donné, pour donner la réponse ou dire: Nous y verrons plus
tard.
M. Tardif: II y a une remarque importante d'ordre
général qui doit être faite ici. Les articles 1600 à
1650 du Code civil continuent à s'appliquer, c'est-à-dire les
dispositions générales en ce qui concerne le louage de choses.
Egalement, l'article 25 se trouve à être repris ailleurs,
notamment en ce qui concerne l'obligation pour le locataire d'observer les
conditions de location du bail. Alors, on ne retrouve peut-être pas
l'article 25 libellé tel quel, mais, à divers endroits dans le
projet de loi, j'aurai l'occasion de l'indiquer lors de l'étude article
par article, il nous semble que ce qui était l'esprit même de
l'article 25 est repris ailleurs. Si, lors de l'étude article par
article, il semblait qu'effectivement, cela ne l'est pas, on y verra à
ce moment-là.
M. Cordeau: Est-ce que vous pouvez nous mentionner quels sont ces
articles? Parce que je pense bien qu'on est au début de la commission et
que ces inquiétudes vont revenir tout au long de la commission.
Peut-être demain, s'il y a possibilité.
M. Tardif: Je me ferai un plaisir de le donner au
député en temps et lieu.
M. Cordeau: Parce que je pense que c'est un sujet qui va...
M. Tardif: Je pourrai vous faire une liste des articles qui
traitent des obligations des locataires.
M. Cordeau: Je pense que cela va revenir assez
périodiquement d'ici la fin de la commission. Merci. J'en ai une autre
aussi. A la page 5 de votre mémoire, à l'article auquel vous
faites allusion, c'est l'article 1652.3, ce sont les délais
raisonnables. Vous semblez désirer un peu plus de précision dans
la loi concernant les délais raisonnables. Lorsque le locataire doit
quitter son logis à cause d'une défectuosité majeure, il
doit aviser le locateur dans un délai raisonnable. Vous avez
mentionné tantôt que cela manquait de précision dans la
loi.
M. Dupont: En général, nous recherchons le plus de
clarté possible, je pense que c'est aussi l'intention de tout le monde.
Dans ce sens, parler d'un délai raisonnable, cela implique une certaine
élasticité et cela manque de précision. Qu'est-ce qu'un
délai raisonnable? Est-ce que, trois mois après le bris d'une
conduite de chambre de bain, le locataire avise le locateur qu'il est parti et
qu'il n'a pas l'intention de revenir parce que le logement est inhabitable,
est-ce que trois mois, c'est encore un délai raisonnable? Qui va juger
cela? Il me semble qu'on pourrait mettre des limites à
l'intérieur de cela. Cependant, on est conscient aussi que les
situations peuvent varier de l'une à l'autre, que le propriétaire
ou peu importe, celui qui administre l'immeuble, n'est peut-être pas
toujours disponible ou n'est peut-être pas toujours là
physiquement pour recevoir ce type d'avis et qu'il serait difficile de mettre
un délai fixe. Mais, quand même, il nous semble qu'on devrait
fixer les limites à l'intérieur desquelles l'avis devrait
être servi, de façon, justement, à éviter
qu'à un moment donné, il y ait des délais
déraisonnables, que le débat s'engage ensuite sur une
technicité comme celle-là et que cela prenne des mois avant de
résoudre le problème entre les parties.
Le Président (M. Laplante): C'est tout? Non, une autre
question.
M. Cordeau: Une autre question. J'en aurais eu d'autres, mais mon
prédécesseur les a posées.
A la page 6 de votre mémoire, vous parlez des privilèges
du locateur et vous dites: "Les objectifs de conservation et de maintien des
logements ne peuvent être réalisés sans financement.
Puisqu'il est important d'assurer le logement au locataire, il devient tout
aussi important de minimiser les pertes de loyers demeurés
impayés. Pourquoi alors faire disparaître le privilège
prévu aux articles 1637 et 1640 du Code civil puisqu'il n'est
sûrement pas de l'intention du législateur de diminuer les
possibilités du locateur de faire respecter ses droits..."
J'aimerais que vous explicitiez votre pensée concernant vos
avancés.
M. Dupont: Un principe a été avancé, ce
matin, sur lequel, tout le monde semblait être d'accord. Le logement est
quelque chose de plus important qu'une voiture, des vacances ou des choses
semblables. Tout le monde semble d'accord aussi pour dire qu'il faut que les
gens aient des logements, non seulement des logements en nombre suffisant, mais
des logements de bonne qualité. Tout le monde est d'accord aussi pour
dire que le maintien des logements, surtout de la qualité des logements,
ne se fait pas sans argent, c'est d'ailleurs la raison pour laquelle le
locataire doit payer un loyer.
Notre raisonnement est le suivant. S'il est important de maintenir
à la disposition des locataires des logements de bonne qualité,
en conséquence, il est tout aussi important de procurer au
propriétaire les moyens nécessaires pour satisfaire au premier
objectif. C'est dans ce sens qu'on disait que le propriétaire, pour ce
qui lui est dû en fait de loyer, devrait peut-être continuer
à être considéré comme un créancier
privilégié par rapport à d'autres créanciers, ce
qui n'affecte aucunement la situation du locataire. Cela ne donne pas plus de
droits au propriétaire contre le locataire, ça fait seulement
faire du propriétaire un créancier préféré
par rapport à d'autres et on dit que la préférence devrait
continuer d'exister eu égard au fait que le droit qu'on veut maintenir
est tellement important.
Le Président (M. Laplante): D'accord, M. le
député de Drummond.
M. Clair: M. le Président, concernant l'article 60, le
mémoire de l'association mentionne au tout début: "N'y aurait-il
pas lieu d'ajouter à cette liste prévue à l'article
60 le rapport d'un comptable et même le rapport d'un entrepreneur
général ou d'un ingénieur..."
Au niveau du rapport d'un comptable, pour avoir eu l'occasion à
titre d'avocat à l'aide juridique de voir passer pas mal de causes,
j'aimerais que vous développiez un peu plus; ça se résume
souvent à une question de chiffres et de crédibilité des
documents présentés quant à l'augmentation des frais
encourus par le propriétaire. Est-ce une solution qui serait praticable?
J'aimerais que vous explicitiez davantage. Qu'entendez-vous par un rapport d'un
comptable? A quoi pourrait ressembler l'expertise comptable, là-dedans?
C'est à l'article 60.
M. Dupont: Cela peut être, comme vous venez de le
mentionner, l'établissement sous forme de rapport, par exemple, la
rentabilité d'un immeuble, des coûts d'opération, ces
choses-là. Ce que j'entends par un rapport comptable, ce n'est pas
nécessairement le rapport d'un CA, c'est un rapport dont les conclusions
sont de nature financière, généralement chiffrées.
Légalement, autant devant la Régie du logement que devant les
tribunaux réguliers, il ne serait pas possible de déposer
purement et simplement un rapport comme celui-là, en disant à
celui qui va être appelé à rendre la décision: Voici
le témoignage de quelqu'un qui, à un moment donné, a mis
ce qu'il pensait par écrit.
C'est une hypothèse qu'on soulève. Ce que l'on dit, c'est
que la régie du logement devrait pouvoir disposer du maximum d'outils
pour rendre des décisions justes pour chacune des parties. On parlait,
dans l'article, d'un rapport d'inspecteur, d'un rapport du
préposé au service de l'environnement ou choses de ce type; ce
qu'on dit, c'est qu'en dehors de ces rapports, il peut y avoir d'autres
rapports utiles pour la régie. Alors on dit: Pourquoi ne pas en
permettre la production? Et comme il est évident que de faire venir ces
experts serait extrêmement onéreux, on suggère que le
rapport puisse purement et simplement être déposé et la
régie en tiendra compte ou pas. Cela restera son droit.
M. Clair: Dans le même sens, au point de vue du
ministère du Revenu, je me suis toujours posé la question
à savoir s'il ne serait pas possible, au niveau du Revenu et de la
Régie du logement, d'avoir une seule et même formule
uniformisée qui puisse, à un moment donné, être
utilisée par les deux. Cela pourrait, d'une part, éviter aux
propriétaires d'encourir, à l'occasion, des frais
supplémentaires pour démontrer ou pour faire une preuve de
rentabilité, de coûts à supporter, de sorte qu'on pourrait
faire d'une pierre deux coups: Uniformiser la formule pour le ministère
du Revenu, qu'elle soit utilisée par la Régie du logement et
peut-être que ce serait un biais pour éviter des tentations
de tricher. J'aimerais avoir vos réflexions là-dessus.
M. Perreault: C'est une excellente suggestion. Nous allons
même plus loin. On pense qu'un budget d'opération
immobilière devrat être uniformisé, c'est-à-dire
tous les articles des postes budgétaires d'un édifice, qu'ils se
retrouvent dans n'importe quel édifice, dans n'importe quel immeuble,
qu'il soit petit ou grand. Ce sont les mêmes postes budgétaires
qu'on rencontre. On pourrait standardiser et cela pourrait
accélérer et améliorer l'étude d'un dossier au
niveau comptable, comme l'expliquait tantôt notre conseiller
juridique.
M. Clair: Et à titre d'administrateurs, vous êtes
convaincus que c'est une solution qui est praticable?
M. Perreault: Bien sûr, définitivement.
M. Clair: J'en ai déjà parlé avec des gens
qui disaient: C'est impraticable, ce n'est pas possible, cela vaut pour les
grands ensembles, mais pour les petits ensembles, ce n'est pas praticable.
M. Perreault: Pas du tout. Prenez l'édifice de quatre
logis ou l'immeuble de 100 logis. Vous allez retrouver à peu près
les mêmes postes budgétaires. Et s'il n'y en a pas, on les laisse
en blanc. Et c'est tout.
Mais il me semble qu'on pourrait retrouver un formulaire
d'appréciation au niveau des budgets qui soit le même pour tout le
monde.
M. Clair: Mais actuellement, ce qu'on doit fournir au
ministère du Revenu pour déclarer ses revenus provenant de
logements, est-ce que cette formule qui existe, j'imagine, au ministère
du Revenu demanderait une grosse reformulation?
M. Perreault: Je pense qu'il faut séparer les deux.
L'administration, la gestion d'un immeuble, avec tous les rapports comptables
vers le ministère du Revenu, dans notre esprit, ce sont deux choses.
M. Clair: L'uniformisation des formules ne serait donc pas
possible?
M. Perreault: C'est-à-dire que dans le cas d'une
évaluation au niveau de la régie, ce serait très rentable.
Maintenant, sur l'autre plan, peut-être que là, il pourrait y
avoir des négociations en vue d'en arriver à uniformiser...
M. Clair: Des formules...
M. Perreault: Des formules, parce que c'est un fait, ce que vous
dites là. On va retrouver un bilan comptable fait par des CA et nous,
nous sommes obligés de tout le défaire pour en arriver à
reproduire vraiment notre propre budget d'opé- ration. Souvent, ils
regroupent, tandis que nous, on ne regroupe pas, des dépenses. Vraiment,
c'est divisé.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Pointe-Claire.
M. Shaw: Une question. Comme administrateurs de logements, vous
n'avez pas mentionné beaucoup de choses dans le domaine des locataires
qui ne sont pas désirables. Si vous êtes des gestionnaires de gros
et de petits logements, cela arrive que vous ayez besoin de moyens de terminer
certains baux avec certains types de locataires.
Est-ce que vous trouvez, dans le projet de loi, des pouvoirs dont vous
avez besoin pour la bonne administration de vos immeubles?
M. Dupont: Dans la même veine que la réponse que
j'ai donnée tout à l'heure, on se satisfaisait, de façon
générale, ou en tout cas, on vivait bien, avec ce qui existait
déjà comme loi. Il y avait certaines défenses qui
étaient faites aux locataires; dans la mesure où le locataire
contrevenait à ces dispositions, la loi mettait à notre
disposition des mécanismes pour obtenir leur éviction.
On ne demande pas que des interdictions additionnelles soient incluses
dans le projet de loi. On continue cependant de penser que ce qui était
interdit autrefois devrait continuer d'être interdit, la surhabitation
par des étrangers, des choses comme celle-là. (17 h 15)
Dans la mesure où on maintiendra les obligations qui existaient
déjà dans les anciennes lois et ces obligations seront clairement
précisées dans la nouvelle sous une forme ou sous une autre. Ce
sera suffisant pour éliminer ces locataires qui peuvent être
indésirables ou qui peuvent nuire aux autres.
M. Shaw: Ma deuxième question est aussi courte. Vous venez
de me dire que vous avez beaucoup de logements dont vous êtes le
gestionnaire. Ce matin, nous avons parlé de la rentabiité des
immeubles. Maintenant, avec l'intervention que le gouvernement a faite en ce
domaine, dans les propres immeubles dont vous êtes gestionnaire,
voyez-vous des pressions négatives vers une bonne rentabilité des
propriétés, des logements?
M. Perreault: Je pense que la gestion immobilière, en
général, est en train d'évoluer. Ce qu'on précisait
il y a 20, 25 ou 30 ans par une rentabilité financière
immédiate, dans notre esprit à nous et dans différentes
écoles, à l'intérieur de notre association, a
évolué. C'est pour cela que, sur ce point-là, je ne
voudrais pas apporter une réponse officielle de notre association, mais,
simplement qu'en tant qu'individu, j'ai l'impression qu'on évolue de ce
côté-là. La rentabilité peut être à
long terme ou à court terme. A court terme, pour autant que
l'édifice puisse assurer ses dépenses et un
revenu convenable, je pense que tout édifice est un placement
à long terme. Il va falloir qu'on en arrive à cette
mentalité, à cette philosophie, parce qu'autrefois, on a
passé à travers des périodes qui étaient des
périodes d'achats et de ventes rapides, ce qui a peut-être
créé une inflation aussi de ce côté-là. On
s'en va vers tout un domaine de coopératives
Le Président (M. Laplante): Y aurait-il
possibilité, monsieur, de couper court aux réponses aux
questions, parce que le temps est déjà passé?
M. Shaw: Pour être plus précis, j'accepte comme vous
qu'un placement comme tel, c'est un placement à long terme.
M. Perreault: Voilà.
M. Shaw: Avec le système qui fait maintenant que des
projets comme cela ne sont pas rentables, sauf qu'avec la
dépréciation qu'on emploie pour rendre ces investissements
rentables, cela crée une pression pour les faire vendre avant dix ans,
si on fait plus d'interventions, est-ce que cela va pousser le coût des
logements?
M. Bertrand (Gilles): C'est une question à laquelle il est
difficile de répondre, mais j'ai tendance à penser que oui. Plus
il va y avoir d'interventions, plus il va y avoir de mécanismes à
l'intérieur de la loi, plus les locataires vont être exigeants et
plus les coûts seront élevés. Ces coûts seront
transposés sur la rentabilité de l'immeuble. Ce sont les
locataires en définitive qui vont les payer.
M. Scowen: Une dernière question dans le même
domaine. Vous êtes dans le domaine de l'habitation dans les villes. On a
entendu, ce matin, des groupes de locataires parler de profits énormes
des propriétaires. On a entendu également parler d'une
pénurie de logements qui a été confirmée par le
ministre au moins concernant l'unité familiale. Il y a, pour un
économiste au moins, certaines contradictions. Est-ce que, par votre
perception des choses, par exemple à Montréal aujourd'hui, vous
avez l'impression que, pour le propriétaire, la location de logements
est quelque chose qui est très rentable ou peu rentable? Quelle est la
santé du marché aujourd'hui?
M. Bertrand (Gilles): A long terme, cela peut être
rentable, mais, à l'heure actuelle, ce n'est pas rentable. Je parle
d'après mon point de vue. Dans les propriétés que
j'administre, il y a très peu de propriétés qui donnent un
rendement positif.
M. Scowen: Si vous aviez personnellement $5 millions,
aujourd'hui, est-ce que ce serait intéressant pour vous d'investir dans
un immeuble de logements à Montréal?
M. Bertrand (Gilles): Cela dépend de l'immeuble.
M. Scowen: Oui?
M. Bertrand (Gilles): C'est-à-dire qu'on n'achète
pas un immeuble, on achète des rentabilités.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, dernier
mot.
M. Tardif: M. le Président, il me reste à remercier
l'Association des administrateurs immobiliers. Certains des points techniques
qui sont soulevés sont effectivement des points sur lesquels nous allons
nous pencher, en espérant trouver des informations qui
amélioreront encore une fois la facture même de la loi. Je n'ai
pas d'autres commentaires. Merci, infiniment, messieurs.
M. Dupont: C'est nous qui vous remercions.
Le Président (M. Laplante): MM. Dupont, Perreault et
Bertrand, les membres de cette commission vous remercient de votre
mémoire.
Immobiliare Canada Ltée et Appartements
Port-Royal Inc.
J'appelle maintenant Immobiliare Canada Ltée et les Appartements
Port-Royal Inc. Vu qu'on a jusqu'à 18 heures pour la commission, si vous
étiez capables de faire un résumé de votre dossier pour
qu'on puisse procéder à la période des questions. Si vous
voulez identifier votre organisme, mais je vois qu'il n'y a personne qui vous
accompagne.
M. Paquet (Jean-Marie): M. le Président, mon nom est
Jean-Marie Paquet, je suis avocat de l'étude Paquet, Galardo et Nantais
à Montréal. Je suis également secrétaire de la
compagnie Les Appartements Port-Royal Inc.
Le mémoire que nous avons soumis à la commission est
plutôt un mémoire technique qu'un mémoire sur les principes
philosophiques, économiques ou sociaux qui sous-tendent le projet de
loi. Il est peut-être important, pour que vous saisissiez le but de notre
intervention, que vous sachiez que cette compagnie, Les Appartements
Port-Royal, c'est un animal un peu particulier. C'est une compagnie ordinaire,
par actions, incorporée en vertu de la partie un de la Loi des
compagnies du Québec, qui a pour seul but et pour seul actif une maison
d'appartements sise au 1455 ouest, rue Sherbrooke à Montréal, qui
comporte 226 unités de logement, 227 garages et quelque 15 000 pieds
carrés d'espace commercial. Il s'agit d'une coopérative
d'habitation du type de celle que l'on rencontre aux Etats-Unis, mais pas d'une
coopérative au sens strict des principes coopératifs que l'on
connaît chez nous, en ce sens que toutes les actions de la compagnie sont
affectées par bloc à des appartements précis. Le
mémoire cite comme exemple l'appartement 2401 qui se voit attribuer, de
par les règlements de la compagnie, 226 actions. Alors, l'actionnaire
reçoit
avec ses actions, comme corollaire indispensable, le droit d'occuper le
logement pendant 99 ans, à l'aide d'un instrument qu'on appelle un bail
en propriété. L'actionnaire, si vous voulez, peut soit occuper le
logement, soit le louer sur le marché comme un logement ordinaire, mais
il ne peut transférer ses actions qu'en transférant son droit
d'occupation à l'appartement et il ne peut transférer son droit
d'occupation à l'appartement qu'en transférant ses actions. Il
convient de se rappeler que cette structure juridique a été mise
au point avant que n'existent dans notre Code civil les dispositions
particulières relatives aux condominiums. Dans une telle structure
juridique, il y a une distinction à faire avec la
copropriété, en ce sens que l'actionnaire, si vous voulez, est
propriétaire d'actions et non pas d'un appartement. Cependant, à
toutes fins utiles, si on excepte cette distinction de caractère
essentiellement juridique, on peut parler d'un propriétaire
d'appartements.
Avec une telle structure juridique qui existe depuis 1961, je pense, ou
1962, la rédaction actuelle du projet de loi nous cause certaines
difficultés qui me semblent assez importantes pour qu'il ait valu la
peine d'en faire part aux membres de la commission. Je passe
immédiatement aux points plus techniques, M. le Président.
D'abord, les articles 38 et suivants relativement à la notion d'ensemble
immobilier.
Nous constatons notre mémoire en fait état
qu'il y a un certain degré d'imprécision dans la rédaction
de l'article 38, comme les intervenants précédents vous l'ont
indiqué; en particulier, un exemple qui nous est venu à l'esprit,
c'est quand on parle d'un ensemble d'immeubles administré par une
même personne. Le concept va jusqu'où? Dans le cas d'une
copropriété, disons 50 unités, qui appartiendrait à
50 personnes différentes, mais qui, en grande partie, serait
sous-louée en location et dont l'administration serait confiée
à une personne unique, est-ce que c'est couvert par l'article 38?
Nous pensons de plus que ce qui est visé à l'article 38,
ce n'est pas nécessairement l'administration par une même
personne, mais plutôt pour le bénéfice d'une même
personne ou de personnes liées, peu importe qui, effectivement, fait
l'administration.
Le deuxième problème qui nous préoccupe de
façon particulière, c'est la question du fameux bail en
propriété. L'actionnaire de notre compagnie qui devient titulaire
d'un contrat lui donnant le droit d'occuper son appartement, comme s'il en
était propriétaire, pendant une période de 99 ans, a
charge pour lui de payer sa quote-part des frais d'opération et des
frais de financement; il y a une hypothèque sur la
propriété et le bonhomme qui devient actionnaire et titulaire de
l'appartement no untel doit payer chaque mois sa quote-part des sommes requises
pour rembourser l'hypothèque et doit payer chaque mois également
sa quote-part des sommes requises pour vaquer aux dépenses courantes de
la propriété.
Par définition, à la fin de l'année, on arrive
à un résultat de zéro. Les dépenses
équilibrent les revenus. Mais ce type de contrat, par définition,
doit être un contrat à dépenses variables, parce que les
dépenses sont déterminées d'année en année,
en fonction des besoins de l'immeuble. Ce type de contrat, à mon sens,
correspond à la majorité des critères de ce que serait un
bail de logement, de telle sorte qu'avec le projet de loi tel qu'il est
là, il devient illégal.
Comment allons-nous, demain, pouvoir continuer à administrer cet
immeuble dans le cadre de la loi proposée? Nous sommes bien convaincus
que ce cas particulier n'a probablement pas été prévu par
les rédacteurs du projet de loi, mais il nous semble que les
dispositions relatives au bail d'habitation ne devraient pas s'appliquer
à un contrat conférant un droit d'occupation sur un logement
à titre d'accessoire d'autres droits si le titulaire des droits
conférés par ce contrat et des autres droits jouit sur le
logement de droits similaires à ceux d'un propriétaire.
Quant à la rédaction que nous avons proposée dans
notre mémoire, M. le Président, nous sommes loin de la
considérer parfaite ou sacramentelle. C'est tout simplement une
tentative de couvrir, en termes généraux, ce qui est
essentiellement un cas particulier.
Maintenant, au niveau des articles 1658 à 1658.18 de la
prolongation des baux et de la fixation des loyers, autant nous sommes
conscients des nécessités sociales de droit au logement et autant
nous sommes conscients des problèmes auxquels il faut faire face, autant
nous croyons, M. le Président, que ces problèmes ne se situent
pas au niveau des logements de luxe pour lesquels, sur le marché, les
loyers actuels sont de l'ordre de $500 et davantage. Je pense que nous ne vous
apprenons rien, puisque vous semblez être parfaitement au courant de ce
qui se passe en Ontario, le projet de loi de l'Ontario prévoit
précisément exclure de la juridiction de la Régie des
loyers, au moins au niveau de la fixation du logement, les logements dont le
loyer mensuel est de $500 et plus. (17 h 30)
Finalement, M. le Président, nous faisons face également
à un autre problème de nature un peu particulière, qui est
soulevé par la rédaction de l'article 1659 du Code civil, tel que
prévu dans le projet de loi.
A l'article 1659, on prévoit la reprise de possession par le
locateur. Or, il se trouve que beaucoup de nos actionnaires ont confié
l'administration de leurs appartements, qui sont en sous-location, à un
administrateur qui signe des baux en son propre nom.
A titre d'exemple, si je suis actionnaire des Appartements Port-Royal,
détenteur du droit d'occupation de l'appartement 2401, mais je ne
désire pas l'occuper, j'ai donné un contrat à un
gestionnaire pour l'administrer, le louer, en percevoir les revenus, faire les
dépenses, etc., sous son propre nom.
Avec la législation proposée, lui seul pourrait en
reprendre possession, pas moi. Et pourtant, c'est moi qui ai
intérêt à en reprendre possession
dans le cadre de la législation proposée. Nous vous avons
soumis un projet de rédaction où aurait droit de reprendre
possession du logement, dans les conditions prévues par le texte
proposé, non seulement le locateur formellement, mais toute autre
personne qui détient sur le logement un droit d'occupation. En
l'occurrence, dans l'exemple que je vous donnais, moi, comme actionnaire.
J'ai été ici depuis le matin et si vous le permettez, M.
le Président, j'aimerais ajouter à notre mémoire trois ou
quatre réflexions qui me sembleraient de nature à peut-être
faciliter l'exercice d'un contrôle des loyers efficace, tout en
n'encourant pas des coûts astronomiques.
Je ne réfère pas uniquement à ce moment-là
aux Appartements Port-Royal, mais à notre expérience comme
avocats de propriétaires qui allons quand même assez
fréquemment devant la régie. Il y a des intervenants de ce matin
plusieurs même à qui on a demandé ce qu'il
pensait de la possibilité d'un taux d'augmentation fixe, comme mesure de
contrôle. Je répète ici une représentation que
j'avais déjà faite, à savoir que le projet de loi devrait
prévoir, pour un propriétaire, la possibilité d'aller
volontairement devant la régie avec ses états financiers, ses
justifications, déposer tout cela devant la régie et demander
à celle-ci, par une espèce de jugement déclaratoire ou par
une espèce d'ordonnance administrative qui n'aurait pas force de
jugement: Voici mes étals financiers, voici mes dépenses, voici
tous les renseignements dont vous pouvez avoir besoin. Je réponds
à vos questions, dites-moi avec cela, de façon
préliminaire, quel serait le pourcentage d'augmentation ou la fixation
de loyer qui, à première vue, serait justifié.
Les chances sont que le locateur en possession d'un tel instrument,
après l'exercice de tous les contrôles voulus, se satisferait de
cette augmentation et ne demanderait pas plus à ses locataires. Le tout
sujet, M. le Président, à ce que le locataire qui n'est pas
d'accord avec cela conserve son droit d'appel devant la régie. Mais
ça aurait l'immense avantage que tout le dossier serait
déjà présent, aurait déjà été
analysé et que le locateur de plusieurs unités ne serait pas
obligé de refaire la même preuve cinq fois, dix fois ou vingt-cinq
fois dans le cours d'une année.
Un deuxième élément au niveau des règlements
qui vont prévoir la fixation des loyers. Je comprends que ce sera
couvert par règlement, que ce n'est pas dans le projet de loi, mais nous
souhaiterions que les critères de fixation des loyers soient d'abord et
avant tout des critères de fixation de loyers et non pas uniquement des
critères d'augmentation de loyers d'une année par rapport
à l'autre. Nous souhaiterions aussi que dans rétablissement de
ces critères, la réglementation tienne compte des
réalités économiques et de la façon normale
d'administrer un immeuble.
Si j'ai un immeuble à administrer en 1979, M. le
Président, je vais prévoir un budget d'opération, je vais
prévoir ce que seront les taxes cette année avec des
données raisonnables. Je vais prévoir ce que me coûtera mon
huile avec des données raisonnables, je vais prévoir des
dépenses, je vais prévoir des revenus et je vais faire un budget,
alors que nous avons l'impression que les critères actuels de fixation
des loyers reposent plutôt sur l'augmentation de 1978 par rapport
à 1977 que sur les perspectives économiques de 1979. Nous
souhaiterions voir les critères de fixation de loyers encore une fois
tenir compte de la façon normale et quotidienne dont on administre un
immeuble par budget vers l'avenir, vers les dépenses que nous avons
à assumer cette année plutôt que de regarder vers le
passé. Il y a un troisième élément qui nous
inquiète un peu dans le projet de loi.
Je dois vous indiquer, M. le Président, que l'immeuble des
appartements Port-Royal a été construit de façon que,
physiquement, on puisse en faire un condominium. C'est d'ailleurs prévu
dans les règlements de la compagnie, la possibilité d'en faire un
condominium, et cela a été construit de façon qu'on puisse
faire un cadastre vertical et en faire un condominium. Or, nous retrouvons dans
le projet de loi une prohibition absolue de toute conversion en condominium sur
un immeuble qui comporte un logement. Je comprends fort bien que le condominium
a été utilisé comme moyen détourné de
contourner certaines prescriptions de la loi par certains propriétaires
pour se débarrasser de locataires, mais on se pose vraiment la question:
Pourquoi une prohibition absolue du condominium, surtout si on songe qu'un
condominium peut s'adresser à des logements qui sont déjà
vacants?
Pourquoi la loi ne dirait-elle pas tout simplement que la conversion en
condominium ne peut se faire sur un logement occupé sans la permission
de la région, mais peut se faire sur des logements vacants? Pourquoi
est-ce qu'on ne soumettrait pas la possibilité de convertir en
condominium un logement occupé à des autorisations et à
des conditions fixées par la régie, mais laisser une porte de
sortie, pas une prohibition absolue comme celle que l'on retrouve dans le
projet de loi.
Finalement, une dernière réflexion qui, cette
fois-là, M. le Président, je tiens à le souligner, est
toute personnelle. Vous avez entendu, depuis le début de la
journée, des interventions qui font état d'une rareté de
logements, de la nécessité de mécanismes gouvernementaux
pour contrebalancer les rapports de force propriétaire et locataire, je
pense que ce sont des choses que personne qui est le moindrement bien
informé, ne peut nier aujourd'hui.
Il reste que l'objectif à long terme de préserver ou
d'augmenter le stock de logements de qualité implique que l'offre de
logements doit être augmentée et cela implique donc, dans une
économie de marché comme la nôtre, une motivation de
profits pour l'entreprise privée et, par conséquent, cela
impliquerait, à mon sens, des mesures incitatives. Il y en a certaines
que vous connaissez vraiment, comme la section 31 ou 32 de la Loi de
l'impôt, qui permet de construire des immeubles, qui donne un subside et
qui permet de les dépré-
cier contre d'autres sources de revenus. Il y a peut-être d'autres
formules auxquelles il faudrait songer pour que le contrôle des loyers,
qui est sans doute nécessaire, tout en ayant des effets positifs,
n'entraîne pas les effets négatifs qu'on a invoqués devant
vous. Il y a une autre solution qui a été soumise ce matin et qui
était la possibilité dans le cadre d'une politique globale de
permettre des allocations pour permettre aux gens qui n'ont pas la
capacité de payer de se loger décemment, et je conçois
parfaitement que si le gouvernement verse une allocation à quelqu'un
pour lui permettre de se loger, il doit y avoir un contrôle du loyer pour
que ce ne soit pas un trou sans fin. Cela me semble normal. Mais, finalement,
je vous soumets que, parallèlement au contrôle des loyers, dans le
cadre d'une politique globale du logement, il faudrait songer à agir
également sur l'offre de logements et sur la capacité de payer.
Je termine, M. le Président, en soulignant à la commission que,
sur le projet de loi 59, en 1972, il y avait un mémoire qui avait
été déposé, dont j'ai une copie ici, par la
Corporation des courtiers en immeubles du Québec dans le temps des
chambres d'immeubles BOMA, etc. Je ne veux pas revenir sur les prises de
position qui étaient là-dedans, mais il y avait, annexé
à cela, sûrement que vous avez ce document, une série
d'études sur des villes américaines, New-York et Boston en
particulier, et l'effet du contrôle des loyers. Je ne veux pas sortir ici
un épouvantait, mais peut-être insister sur la
nécessité des autres éléments d'une politique du
logement, à part le contrôle des loyers, c'est-à-dire
l'incitation et peut-être l'allocation au logement. Je vous remercie, M.
le Président.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur. M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, je remercie Me Paquet qui nous
a évidemment fait part du problème d'un immeuble en particulier.
D'ailleurs, j'aimerais lui demander si, à sa connaissance, cette
structure de propriétaires sociétaires d'un organisme dit
coopératif existe à d'autres exemplaires au Québec. Et
pourquoi on a pris cette formule plutôt que celle de la
coopérative en bonne et due forme ou celle de la
copropriété en bonne et due forme.
M. Paquet (Jean-Marie): Est-ce que cela existe ailleurs au
Québec? Je pense que les appartements Saint-Georges à
Montréal sont régis un peu de la même façon, mais je
vous le donne sous toutes réserves, ce n'est pas une information que
j'ai vérifiée personnellement. Pourquoi cela a été
fait comme ça plutôt que sous forme de coopérative ou de
condominium? Je pense que, pour le condominium, la réponse est claire,
la loi n'existait pas, le cadastre vertical n'existait pas, les
possibilités de financement étaient inexistantes. De la
propriété sous forme de condominium sans législation
à l'appui, c'était économiquement impensable. Pourquoi
cela n'a pas été fait sous forme de coopérative
d'habitation traditionnelle? La coopérative d'habitation traditionnelle
implique, selon les principes de coopération que je connais, un
locataire, un vote ou un homme, un vote, peu importe la grandeur des logements,
leur valeur relative. Cette entreprise des Appartements Port-Royal a
été conçue comme des logements de luxe mis en chantier par
des personnes qui étaient habituées au système capitaliste
et qui voulaient que le poids relatif de chacun dans l'administration soit
fonction de la valeur de son unité et de sa participation aux
charges.
Je pense que c'est une question de philosophie relative à l'habit
juridique.
M. Tardif: Pour revenir à certains des problèmes
particuliers soulevés, il y a évidemment le problème de la
rédaction de l'article 38; dans la façon de le rédiger, il
se peut qu'il couvre un condominium neuf où, en attendant de vendre des
unités, on les aurait louées. Ce n'était sûrement
pas l'intention de s'adresser à ce type de cas et on va donc tenter de
mieux préciser l'objectif visé et de reformuler cet article.
Maintenant, il en est de même d'un certain nombre d'autres
questions soulevées dans le mémoire et c'est peut-être plus
sur les commentaires personnels formulés par l'intervenant, sur les
incitations qui pourraient être faites à la construction et sur
les effets du contrôle des loyers. Je pense qu'on pourrait engager un
long débat sur les effets positifs, négatifs; on a entendu toutes
sortes de choses, ce matin, vraiment deux séries de présentation
à cet égard, où on nous a cité le rapport de Fraser
Institute. Tout d'abord, ce n'est pas un rapport, c'est un recueil d'articles,
une collection d'articles, un "reader" en bon français...
Une Voix: ... je ne connais pas.
M. Tardif: Enfin, je mentionne celui-là, parce qu'on l'a
évoqué ce matin, où on nous dit: II y a des
économistes de renom qui ont travaillé là-dedans, dont
deux prix Nobel, évidemment, deux prix Nobel qui se sont vu octroyer ces
prix pour l'ensemble de leur oeuvre et pas particulièrement pour leur
contribution à l'étude de l'économie du logement.
Or, dans les deux cas, les deux économistes ont fait des
études très marginales, un en 1929, si ma mémoire est
bonne, et l'autre, en 1936, sur la situation du logement après la
guerre, en Europe, entre les deux guerres et immédiatement après
la guerre. (17 h 45)
On part de cela, pour nous dire que c'est la preuve que tout
contrôle des loyers n'est pas bon, regardez, cinq économistes de
renom nous disent que... Evidemment, en France, c'est un fait qu'après
la guerre, on avait enlevé tout contrôle des prix, sauf sur les
logements, si bien qu'en 1946, on se retrouvait dans la situation où la
part du revenu consacré par un ménage à son logement
était de 1,46%.
A toutes fins utiles, on était logé gratuitement. Or,
partir de cela et extrapoler pour dire: La situation en Autriche et la
situation en Angleterre, et la
situation en France, au lendemain de la guerre, regardez, c'est la
preuve que le contrôle des loyers amène des pénuries de
logements, je pense qu'il n'y a aucune commune mesure entre le type de
contrôle c'était vraiment un gel des loyers, à
toutes fins utiles, qui existait et le type de contrôle qui est
préconisé ici, qui, finalement, d'une part, sur le plan de la
construction, permet, pendant une période de cinq ans, une absence de
contrôle pour justement promouvoir cette espèce
d'intérêt que pourraient avoir certains groupes de se lancer dans
la construction et, par la suite, qui tient compte, ou qui tente de tenir
compte, dans la mesure du possible, des frais d'opération et de maintien
des logements.
Je pense que ce n'est évidemment pas par cette seule loi 107,
comme je l'ai mentionné ce matin, que l'on peut régler l'ensemble
des problèmes de l'habitation au Québec, non plus qu'ailleurs, et
la formule imagée de la subvention à la personne plutôt que
la subvention à la pierre ou au béton, elle fait peut-être
image, mais vous avez tout à fait raison, ce serait un gouffre sans fond
pour l'Etat, que de dire: Augmentez les loyers tant que vous voudrez, de toute
façon, l'Etat sera là pour combler la différence entre ce
qui est demandé et les capacités de payer des gens.
Je pense que précisément, c'est dans la mesure même
où on aura un programme d'allocation-logement, raison de plus, je pense,
pour avoir un contrôle des loyers efficace. Les deux mesures vont de
pair. J'arrêterai là pour l'instant et je laisserai aux autres
membres de la commission le soin d'intervenir, à moins que Me
Paquet...
M. Paquet (Jean-Marie): M. le Président, je veux
uniquement souligner que je ne me référais évidemment pas
au rapport qui a été cité ce matin.
M. Tardif: D'accord.
M. Paquet (Jean-Marie): Je pense que vous avez sûrement, ou
la régie a sûrement des copies du rapport auquel je
référais, qui comportait des études qui me semblent pas
mal plus sérieuses et pas mal plus proches de nous, sur des effets
possibles du contrôle des loyers. Et aussi, il ne faut pas brandir des
épouvantails, aussi bien, je vous soumets bien respectueusement qu'il ne
faut pas se mettre la tête dans le sable et dire: II n'y a pas d'effets
négatifs possibles.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Parce que cette question de condominium est si
importante et que la question que vous avez posée sur la
nécessité d'avoir une prohibition absolue est très
intéressante, je veux vous demander de nous décrire
brièvement comment vous procédez, dans votre édifice, dans
le domaine de conversion en condominiums. Si je comprends bien, la
société même est propriétaire de plusieurs immeubles
et loue aux personnes, mais vous essayez quand même de vendre des
condominiums selon la formule que vous avez décrite. Si vous avez
quelqu'un qui habite, comme locataire, un appartement, quelle est la
procédure que vous suivez pour le convertir dans cette autre forme de
copropriété? Est-il permis à la personne de rester
jusqu'à la fin du bail? Peut-elle renouveler le bail sur la base de
locataire? Quelle est votre procédure?
M. Paquet (Jean-Marie): Je dois d'abord apporter une
précision, M. le Président, c'est que la société,
les Appartements Port-Royal n'est propriétaire que d'un seul immeuble,
l'appartement en question. Cet immeuble-là comporte 225 appartements et
à chaque appartement est affecté un bloc d'actions. Chaque
appartement a un bloc d'actions en fonction de la valeur de l'appartement par
rapport à la valeur du tout, de telle sorte que si je veux acheter un
appartement, pour parler au sens large, l'actionnaire qui détient les
actions affectées à cet appartement me vend ses actions et me
cède, comme accessoire, un bail en propriété,
"proprietary-lease", qui me donne un droit d'occuper le logement pendant 99
ans. Si ce logement-là était déjà loué
à un tiers, je me ferais céder également les droits du
locateur au bail et je ne pourrais reprendre possession du logement que dans le
cadre d'une reprise de possession permise par les dispositions de la loi. Le
condominium n'existe pas actuellement, c'est une possibilité qui est
prévue au règlement, mais la conversion n'a pas encore
été faite et, avec le projet de loi tel qu'il est là, elle
ne pourra jamais se faire. Est-ce que cela répond à votre
question sur la façon dont nous procédons pour vendre les
appartements?
M. Scowen: Oui, je comprends parfaitement.
M. Cordeau: En quelle années les Appartements Port-Royal
ont-ils été construits?
M. Paquet (Jean-Marie): Je vais vous donner cela de façon
exacte. Les lettres patentes ont été émises en septembre
1960. La construction s'est terminée, de mémoire, en 1964.
Une Voix: Vers 1964.
M. Cordeau: Vous avez dit tantôt que vous avez 225
appartements et dans votre mémoire, vous dites 226 appartements.
M. Paquet (Jean-Marie): Nous avons 226 appartements, 227 espaces
de garage, 15 000 pieds d'espace commercial.
M. Cordeau: Combien de sociétaires avez-vous maintenant
qui forment la compagnie?
M. Paquet (Jean-Marie): II existe actuellement, je pense, une
quinzaine de sociétaires dont le principal actionnaire qui
détient plusieurs des appartements, parce qu'il n'a pas réussi
à les vendre encore, est la société Immobiliare Canada
Limitée, qui est coauteur du mémoire.
M. Cordeau: Combien avez-vous dit qu'il y avait de
sociétaires qui font partie de la société?
M. Paquet (Jean-Marie): Environ unequinzaine d'actionnaires.
M. Cordeau: Une quinzaine.
M. Paquet (Jean-Marie): La majorité des actions est encore
détenue par le promoteur original, Redbrook Estates Limitée ou
Immobiliare Canada, qui a tenté depuis le début de vendre des
appartements, mais il s'est trouvé, si on se reporte à 1964, 1965
et 1966, que le marché n'était pas prêt à accepter
d'acheter des appartements dans un grand ensemble. La situation
économique a changé. Aujourd'hui, le marché serait
meilleur, mais reportez-vous à il y a quinze ans, ce n'était pas
possible de les vendre. C'est pour cela qu'on les a loués.
M. Cordeau: Maintenant, est-ce que les sociétaires sont
venus rejoindre les premiers sociétaires durant les dernières
années?
M. Paquet (Jean-Marie): Je vous ai dit quinze, mais cela peut
aller jusqu'à 20 ou 25. Je n'ai pas apporté de statistiques avec
moi. Durant les dernières années, je dirais qu'il y en a entre
cinq et dix nouveaux qui sont arrivés.
M. Cordeau: Quelle est la moyenne des loyers de vos
logements?
M. Paquet (Jean-Marie): La moyenne des loyers, je ne peux pas
vous la donner, à cause de la sructure particulière, dans le sens
suivant...
M. Cordeau: Ce sont non pas des sociétaires, parce qu'ils
ont payé des actions au début pour devenir propriétaires.
Ce sont presque des propriétaires. Lorsque le type achète ses
actions, il est presque propriétaire. C'est presque comme s'il achetait
un condominium.
M. Paquet (Jean-Marie): C'est exact. Dans la pratique, c'est
cela. Ce que vous appelez le loyer, j'imagine que vous visez plutôt la
sous-location quand un actionnaire loue son appartement à un tiers.
M. Cordeau: Oui, ou bien les logis qui n'ont pas
été vendus à des...
M. Paquet (Jean-Marie): D'accord.
M. Cordeau: Elles sont détenues par la compagnie qui
administre la bâtisse.
M. Paquet (Jean-Marie): Elle sont détenues par le
promoteur. Toutes les actions ont été vendues originairement au
promoteur. C'est le promoteur qui a revendu des actions à des
appartements, à des tiers. Ceux qui ne sont pas vendus, ils les
détient encore.
M. Cordeau: Oui. Quel est le prix moyen de ces locations?
M. Paquet (Jean-Marie): Cela va de $300 à $1300 par
mois.
M. Cordeau: Est-ce dans ce but que vous suggérez, dans
votre mémoire, que les loyers de plus de $500 soient peut-être
enlevés du contrôle de la régie?
M. Paquet (Jean-Marie): C'est tout simplement que nous pensons
que, quand on parle de logements de luxe, $300, c'est un studio.
M. Cordeau: Oui...
M. Paquet (Jean-Marie): Quand on est rendu au logement de luxe
à $500, $600, $1000, $1200 par mois, la fameuse inégalité
entre le locataire et le propriétaire est pas mal moins importante et il
ne me semble pas y avoir de nécessité sociale particulière
de protéger des bien-nantis qui peuvent se permettre de payer $1100 ou
$1200 par mois pour un logement de luxe qui, soit dit en passant, comporte un
paquet de services qui sont autre chose que la fourniture de quatre murs et du
chauffage.
M. Cordeau: Oui.
M. Scowen: Me permettriez-vous une question, M. le
Président? Vous avez dit qu'une partie de votre immeuble a une vocation
commerciale. Est-ce que la structure que vous avez décrite pour les
logements est exactement pareille dans le cas des appartements des
unités commerciales?
M. Paquet (Jean-Marie): La structure est identique. Il y a des
actions qui ont été affectées aux parties commerciales en
fonction de leur valeur par rapport à la valeur de l'ensemble et
l'actionnaire qui détient ces actions loue les parties commerciales
à des tiers sur le marché de location normal. Par exemple, pour
la compagnie Immobiliare, qui détient les actions commerciales, il y en
a une partie qui est louée à la Compagnie de fiducie
canadienne-italienne; Immobiliare est actionnaire et il loue sur le
marché normal des locaux commerciaux à la Fiducie
canadienne-italienne.
Le sens de notre intervention, M. le Président, ce n'est pas au
niveau de la location normale que j'appelle, moi, une sous-location, parce
qu'il y a d'abord un bail en propriété, c'est au niveau de la
structure même du bail en propriété.
M. Scowen: Est-ce que le propriétaire du fameux 2401 a le
droit de convertir cette unité pour des fins commerciales ou s'il est
obligé de respecter la qualité, la vocation du logement?
M. Paquet (Jean-Marie): Non, les vocations à
l'intérieur de l'immeuble sont déterminées par les
documents corporatifs et ne sont pas convertissables.
M. Scowen: Ils ne le sont pas.
Un dernier petit commentaire sur vos propos, M. le ministre, sur la
question de contrôle de loyer. La question a été
soulevée par l'intervenant ici. Pour moi, je pense que c'est très
important, quand on pense à ce problème global, d'éviter
l'idée d'établir un contrôle de loyer global.
J'ai eu l'occasion malheureuse d'essayer de contrôler les prix de
la plupart des produits et services canadiens pendant un an et demi. Un
contrôle global dans un domaine où le marché existe encore,
je suis persuadé que même si vous avez les économistes les
plus intelligents, même si vous changez les règles à toutes
les deux semaines, les distorsions créées deviennent de plus en
plus aiguës, de plus en plus difficiles et vous arrivez finalement
à un point où rien ne marche.
On avait ce système pendant trois ans et même à
l'intérieur de ces trois ans, on voyait très vite les
problèmes. J'espère que quand on pense à
légiférer dans ce domaine-là, on tente de
développer un cadre et des règlements pour maintenir un
équilibre afin de régler les cas aigus, les cas extrêmes et
les cas spéciaux.
Si on commence à penser à un contrôle des loyers
général ou global, je pense qu'on va en payer le prix ou sinon,
nos enfants le paieront.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Etant donné l'heure, très
brièvement, M. le Président. Sur la remarque que vous avez faite
au sujet de l'abolition du contrôle sur les logements de $500 et plus.
Est-ce que cela ne risque pas d'avoir un effet qu'on pourrait qualifier de
"bumping" par en haut ou par en bas? C'est-à-dire que d'abord beaucoup
de propriétaires risquent de vouloir arriver à franchir le seuil
de $500 pour avoir la liberté d'action. Ceux donc qui seraient en bas de
$500 et qui voudraient aller vers les $500, ça risque de provoquer des
relations conflictuelles plus poussées entre locataire et
propriétaire, au détriment de ceux, parmi les
propriétaires, qui paient des logements, à l'heure actuelle, de
l'ordre de $200 à $400. Est-ce qu'il ne risque pas d'y avoir une
pénurie de logements dans cet échantillonnage? Il me semble que
tout ce que cela va provoquer, c'est une distorsion
accélérée. (18 heures)
Vous allez avoir un effet d'accélération vers le haut.
Tout le monde va vouloir franchir le seuil de $500 et, d'autre part, ceux qui
paient effectivement $500 ou $600 à l'heure actuelle même
$700 n'ont pas nécessairement envie de payer $1000 ou $1200. Je
comprends qu'on n'a pas à pleurer sur leur sort lorsqu'ils paient des
loyers de ce niveau-là, mais il risque d'y avoir quelque part dans
l'échelle des loyers, des vides. Soit parce que les logements qui sont
actuellement à $600 vont grimper sans aucun contrôle, soit parce
que les logements qui sont en bas de $500 iront peut-être les remplacer.
Il y aura d'autres logements disponibles pour cette catégorie-là,
mais ce sera à ce moment-là, au détriment de ceux qui,
actuellement, paient de $200 à $400 par mois.
M. Paquet (Jean-Marie): Je dois vous répondre de deux
façons, M. le Président. Dans un premier temps, pour en avoir
vécu l'expérience, je sais que le marché existant, le
locataire qui paie $600, $700, $800, $1000, $1200 par mois a beaucoup plus les
moyens de choisir et de ne pas payer plus que ce que le marché peut
justifier. Mais dans un deuxième temps, je dois également vous
dire, M. le Président, que la crainte manifestée par M. le
député, de deux choses l'une: ou le contrôle des loyers n'a
pas d'effet négatif probable et, à ce moment-là, cette
crainte n'est pas fondée ou, si le contrôle des loyers doit avoir
un effet négatif probable sur l'offre de logements, peut-être que
M. le député a raison, mais il faudrait regarder également
les effets négatifs probables du contrôle des loyers.
M. Guay: C'est l'effet négatif sur le rendement. Il est
évident que le contrôle des loyers a un effet négatif sur
le rendement. Cela va de soi. Si vous avez le contrôle à partir de
$500, votre rendement sur le capital risque d'être beaucoup plus
élevé qu'il ne l'est sur des loyers contrôlés. Cela
va de soi. Si vous limitez les hausses à 8% par année à
cause du contrôle et que s'il n'y avait pas de contrôle il pourrait
théoriquement y avoir un rendement de 12%, le contrôle des loyers
aurait effectivement un effet négatif sur le rendement. C'est bien
connu. C'est d'ailleurs une des raisons pour lesquelles cela existe.
M. Paquet (Jean-Marie): La seule réponse que je peux vous
donner, basée sur mon expérience, c'est que les hausses
absolument faramineuses de loyers dans les logements de luxe, je n'en ai pas
vues parce que, précisément, il y a beaucoup d'offres sur le
marché et les gens ont le choix. Est-ce que de limiter à $500
cela peut être $550, cela peut être $600, cela peut
être fixé par règlement mais le but qui est
visé est d'exclure le logement de luxe du contrôle des loyers et
si vous dites: Cela va plutôt inciter les gens à se rendre
là rapidement, pour se rendre là rapidement, il faudra d'abord
avoir passé par le contrôle de la régie. A ce
moment-là, si dans trois ans ou dans quatre ans, ou dans cinq ans, on se
rend compte qu'il y a trop de logements rendus à plus de $500 et que
cela crée une rareté pour les logements inférieurs, c'est
que les $500 sont trop bas et qu'il va falloir les monter. Tout cela est au
niveau des concepts, M. le Président.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, le mot de la
fin.
M. Tardif: Une simple question. Est-ce qu'il y a de vos clients
à Immobiliare Inc. qui sont déjà allés à la
régie pour une fixation de loyer?
M. Paquet (Jean-Marie): Oui.
M. Tardif: II y en a qui sont déjà allés.
Bien.
M. Guay: Si vous permettez, M. le Président, juste un
détail. Est-ce qu'il vous serait possible de
faire parvenir au secrétariat des commissions, je serais
très curieux de voir si c'est public, la forme de contrats que vous
avez, le document juridique qui fait que des actionnaires ont droit à...
Si cela vous était possible, pour le bénéfice de la
commission, je serais très intéressé à voir
comment, juridiquement, tout ça s'articule.
M. Paquet (Jean-Marie): M. le Président, ces documents ont
été déposés au complet la semaine dernière
entre les mains des officiers de la Régie des loyers en
préparation pour l'étude du projet de loi. Si c'est suffisant,
très bien, sinon, ça me fera plaisir d'en faire parvenir d'autres
photocopies à la commission.
M. Tardif: Etait-ce dans le cadre d'une cause pendante devant la
régie ou bien si ça fait partie de la preuve
déposée?
M. Paquet (Jean-Marie): Cela a été
déposé, M. le ministre, pour aider les officiers de la
régie à l'étude du mémoire.
M. Tardif: D'accord. Très bien, on pourra à ce
moment-là en faire des copies. M. le Président, en guise de
conclusion, je ne voudrais évidemment pas faire de parallèle
entre les études citées ici ce matin, entre autres pour dire que
tout contrôle des loyers est mauvais, je pense que ce n'était pas
du tout ça le sens de l'intervention de l'intervenant
présentement. Ce matin, on disait que le contrôle des loyers
amène une détérioration du stock, une baisse de la
construction, une pénurie de logements, tout ça. Je dis qu'il y a
contrôle et contrôle. Il n'en est pas question, le projet de loi
107 ne parle pas du tout d'un contrôle absolu, universel, qui serait
l'équivalent d'un gel des loyers.
J'aimerais, à ce sujet, attirer votre attention, puisqu'on dit
qu'il doit y avoir des effets négatifs. Les dispositions de la loi
visant à amener un contrôle des loyers ont été
introduites au Québec. Or, tout le monde sait que, en 1973, il y a eu 59
000 unités de logement construites au Québec. Ceci est nettement
supérieur aux dix années antérieures. En 1974, il y a eu
51 000 unités de logement, en 1975, 75 000 et en 1976, 68 700, toutes
catégories, mais si on faisait la répartition entre les maisons
individuelles, unifamiliales, les duplex, les appartements, on verrait une
progression identique.
Pourtant, il y avait à ce moment-là un contrôle des
loyers au Québec. Maintenant, la véritable différence qui
s'est produite, du moins si on regarde les dégrèvements fiscaux
et ce qu'on appelle le capital "cost allowance" qui a été
modifié en 1972 dans la Loi de l'impôt, on se rend compte que ceci
a eu un impact beaucoup plus grand sur les mesures fiscales que le
contrôle des loyers qui est une donnée permanente dans le temps,
en ce qui nous concerne, beaucoup plus près de nous, au Québec.
Je pense que c'est assez important ici pour voir que, toutes choses
étant égales par ailleurs, le contrôle des loyers n'a pas
empêché ces mises en chantier très nombreuses, le
contrôle des loyers tel que nous l'avons, alors que des mesures fiscales
ont vraiment modifié la situation du tout au tout.
Là-dessus, M. le Président, je voudrais encore une fois
remercier Me Paquet de sa présentation. Nous allons très
certainement regarder le problème de l'immeuble et de la structure
très particulière qu'il présente. Je pense que ce
n'était vraiment pas notre objectif de viser un certain nombre de choses
qui sont mentionnées, mais j'en ai pris bonne note et nous allons y
voir.
Le Président (M. Laplante): Me Paquet, les membres de
cette commission vous remercient de votre mémoire.
Avant d'ajourner les travaux, j'aimerais vous donner la liste des
organismes qui seront entendus demain, à 10 heures: le Comité des
citoyens du quartier Saint-Sauveur, M-22; la Fédération des
associations des personnes âgées en résidence du
Québec et le Front commun des locataires, M-11; la Ligue des
propriétaires de Montréal Inc., M-9; l'Association des
propriétaires des maisons mobiles, M-17; Région de
Montréal-Centre du Parti québécois, M-15; Centres locaux
des services communautaires et le Centre des services sociaux du
Montréal métropolitain, M-10.
Sur ce, les travaux sont ajournés à demain, 10 heures.
Fin de la séance à 18 h 10