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Présentation de mémoires sur le projet
de loi no 107
(Neuf heures seize minutes)
Le Président (M. Laplante): La commission permanente des
affaires municipales se réunit ce matin pour l'audition de
mémoires sur le projet de loi 107, Loi instituant la Régie du
logement et modifiant le Code civil et d'autres dispositions
législatives.
A l'ordre, s'il vous plaît!
Sont membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron
(Verdun)...
M. Scowen: Non, remplacé par M. Giasson.
Le Président (M. Laplante): ... remplacé par M.
Giasson (Montmagny); M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), M. de Bellefeuille
(Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau)...
M. Scowen: Remplacé par Scowen...
Le Président (M. Laplante): ... remplacé par M.
Scowen (Notre-Dame-de-Grâce); M. Guay (Taschereau), M. Mercier
(Berthier), remplacé par M. Laberge (Jeanne-Mance); M. Ouellette
(Beauce-Nord), M. Roy (Beauce-Sud), M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif
(Crémazie).
Intervenants: M. Alfred (Papineau), M. Char-bonneau (Verchères),
M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste
(Sainte-Anne), M. Léonard (Laurentides-Labelle), M. Samson
(Rouyn-Noranda), M. Vaugeois (Trois-Rivières).
Les groupes qui seront entendus aujourd'hui sont: L'Association des
offices municipaux d'habitation du Québec, mémoire no 12;
l'Association des propriétaires de maisons mobiles de Vimont Inc.,
mémoire no 21; la Commission des services juridiques, mémoire no
5.
J'appelle maintenant l'Association des offices municipaux d'habitation
du Québec.
On vous remercie de votre coopération, messieurs. On sait que
vous étiez convoqués pour 10 heures. Il est arrivé de
petites choses qui ont fait qu'on a été obligés de vous
convoquer pour 9 heures. Vous avez acquiescé à notre demande, on
vous en remercie beaucoup.
Vous allez identifier votre organisme, les gens qui sont autour de vous
et vous-même. Vous avez 20 minutes pour présenter un
résumé de votre mémoire et 40 autres minutes pendant
lesquelles on vous posera des questions.
D'accord? Merci, messieurs!
Association des offices municipaux d'habitation du
Québec
M. Poulin (Claude): Merci, M. le Président. Je
désire me présenter: Claude Poulin. Je suis secrétaire
général de l'Association des offices municipaux d'habitation. Le
président de l'association est M. Denis Luneau et le
vice-président de notre association, M. André-B.
Côté.
On voudrait remercier la commission de l'occasion qu'elle nous donne de
venir nous faire entendre au nom des organismes qui administrent au
Québec des logements publics, des logements subventionnés, comme
nous les appelons, et on voudrait aussi souligner que, ce matin, nous savons
que doit être entendu aussi l'Office municipal d'habitation de
Montréal. Il est peut-être reporté.
Nous voulions souligner là-dessus que, compte tenu de son
importance, l'Office municipal d'habitation de Montréal a cru bon de
présenter un mémoire indépendant du nôtre. D'abord,
parce que c'est un office très important qui administre plus de 7000
logements et que cela cause des problèmes possiblement particuliers
d'administrer un tel type de logement. En fait, nous déposons notre
mémoire au nom de l'ensemble des autres offices d'habitation du
Québec et nous tenons quand même à souligner le fait que
l'office doit présenter un mémoire différent. Donc, sans
plus tarder, je cède la parole, pour la présentation de
l'association, à M. Côté qui va vous faire un bref
exposé.
M. Côté (André-B.): Messieurs, l'Association
des offices municipaux d'habitation du Québec est un organisme sans but
lucratif qui a été créé en 1972 pour favoriser
l'échange, l'information et la promotion des intérêts des
administrateurs d'offices municipaux d'habitation. Elle regroupe plus de 130
offices municipaux d'habitation au Québec.
C'est dans le but de faire valoir le point de vue des offices municipaux
d'habitation dont le mandat est d'administrer les logements publics qu'a
été rédigé ce mémoire sur le projet de loi
no 107 intitulé "Loi instituant la Régie du logement et modifiant
le Code civil et d'autres dispositions législatives." Bien que nous
traitions de l'ensemble du projet de loi, nous nous attarderons principalement
dans ce mémoire à discuter de la section VII du titre II du
projet de loi intitulée "Dispositions particulières au bail d'un
logement à loyer modique", section qui préoccupe
particulièrement notre association.
Nous désirons souligner en préambule que les
administrateurs des offices municipaux d'habitation ont le mandat d'administrer
des fonds et des immeubles du domaine public et que c'est en ayant à
l'esprit la meilleure gestion possible des biens publics que nous vous
soumettons respectueusement ce mémoire.
Lorsque la programmation 1978 de logements publics sera
complétée, 320 offices municipaux d'habitation administreront
à peu près 40 000 logements. Or, depuis l'adoption de la loi 96,
sanctionnée le 22 décembre 1977, tous les logements publics sont
soumis à la juridiction de la Commission des loyers, sauf en ce qui
concerne la fixation du loyer. Le projet de loi no 107 va plus loin et vise
à préciser les obligations des parties dans des cas particuliers,
et notamment dans une
section particulière du Code civil, les obligations des offices
municipaux d'habitation et de ses locataires.
Pourquoi utilisons-nous le terme logement subventionné? Nous
croyons que le terme logement subventionné est le plus approprié.
En effet, on ne peut plus parler de logement social, parce que le logement
subventionné actuel ne s'adresse pas à tous les citoyens dans le
besoin, comme le font des mesures sociales telles que l'aide sociale ou
l'assurance-chômage. Nous utilisons les mots logement subventionné
pour indiquer que ces logements font partie d'un programme subventionné
de logements. Les termes logements municipaux ou logements publics, bien
qu'acceptables, sont à notre avis, moins descriptifs.
Je cède la parole maintenant au président de
l'association, M. Denis Luneau.
M. Luneau (Denis): M. le Président, M. le ministre,
j'aimerais, au nom de l'Association des offices municipaux d'habitation, passer
dans un premier temps aux commentaires généraux sur le projet de
loi no 107. Les changements proposés en matière de relations
entre locateurs et locataires répondent à un besoin
exprimé depuis fort longtemps. Dans le cas des logements
subventionnés les faits peuvent se résumer ainsi. La
Société d'habitation du Québec n'a jamais
créé de bureau d'examen de griefs comme le prévoyait
l'article 63 de sa loi constitutive. De plus, avant la loi no 96 de
décembre 1977, les locataires de logement public ne pouvaient s'adresser
à la Commission des loyers. Cette situation avait engendré un
climat de méfiance qui n'était pas de nature à
améliorer les relations entre les offices municipaux d'habitation et les
locataires.
Aussi, dès 1976, notre association, dans un mémoire remis
au groupe de travail sur la révision de l'échelle des loyers
s'était montrée en faveur d'accorder aux locataires des logements
publics des droits de recours similaires aux locataires du secteur
privé. Aussi, c'est avec satisfaction et avec certitude que les
relations entre offices municipaux d'habitation et ses locataires seraient
meilleures que nous avons pris connaissance de la loi 96, loi qui accordait aux
locataires des logements publics le droit de s'adresser à la Commission
des loyers.
La Régie du logement. La Régie du logement telle que
proposée dans les chapitres 2, 3 et 4 du projet de loi no 107 nous
apparaît satisfaisante. Dotée de nouveaux pouvoirs en
matière de démolition, de subdivision ou de changement de
destination des logements et d'une juridiction totale des litiges de
première instance, la nouvelle Régie du logement devrait
permettre une accélération de la procédure et l'exercice
d'un recours plus efficace, chose qui devrait rallier tant le locateur que le
locataire. Nous désirons exprimer particulièrement notre accord
avec l'article 46 du projet de loi, permettant à la régie
d'ordonner que des demandes soient instruites en même temps.
Certains de nos administrateurs ont eu, au cours de la dernière
année, à se présenter à la
Commission des loyers pour plusieurs demandes portant sur la même
cause. Cela a entraîné des pertes de temps considérables
à nos administrateurs. En outre, nous recommandons que
l'admissibilité de chacune des demandes de recours à la
Régie du logement soit décidée dans un délai
maximal de cinq jours, suite au dépôt d'un recours par l'une des
parties (peut-être de manière à faire travailler les
administrateurs de logements subventionnés à des dossiers qui
sont fondés).
Relativement aux obligations des parties. L'article 1651.2 dit: "Le
locateur doit, lors de la conclusion du bail, remettre à tout nouveau
locataire un écrit indiquant le loyer payé par le locataire
précédent et tout autre renseignement relatif au bail du
locataire précédent prescrit par règlement, en la forme
qui y est indiquée. " Nous recommandons que cet article ne s'applique
pas comme tel aux offices municipaux d'habitation, à cause du
caractère particulier des logements subventionnés, compte tenu
évidemment que ces données, loyer payé, etc, sont
basées sur les revenus d'individus et vous comprendrez que ce sont quand
même des données confidentielles.
Un nouveau locataire d'un logement subventionné n'a pas à
connaître le loyer payé par le locataire précédent
ou tout autre renseignement relatif au bail du locataire
précédent. Le loyer est établi à partir des revenus
du locataire, dans des logements subventionnés et chaque cas est un cas
particulier.
L'article 1651.3 dit: "Le locateur doit, avant la conclusion du bail,
remettre au locataire, un exemplaire du règlement qu'il a établi
et qui concerne l'immeuble. Ce règlement fait alors partie du bail."
Cet article marque une nette amélioration par rapport à la
situation antérieure, où l'on ne savait jamais trop bien si un
règlement promulgué par le locateur était valable ou non.
On saura dorénavant que ce règlement fait partie du bail, si le
locataire en a été informé avant la conclusion du bail par
le locateur.
L'article 1657.2 dit: "Le conjoint d'un locataire ou, s'ils cohabitent
avec lui depuis au moins six mois, un parent, un allié ou son concubin,
peuvent, en continuant à demeurer dans le logement, après la
cessation de la cohabitation, succéder pour l'avenir aux droits et
obligations résultant du bail en avisant le locateur de leur intention
dans les soixante jours de la cessation de la cohabitation".
Nous recommandons que le législateur précise dans les
dispositions particulières concernant les logements à loyer
modique que, dans le cas de logements publics, seul le conjoint du locataire
séparé ou divorcé qui demeure dans les lieux avec les
enfants pourra bénéficier de plein droit, à partir de la
date de son jugement provisoire de séparation ou de divorce de tous les
droits découlant du bail. Cela, dans le but de tenir compte encore une
fois du caractère particulier de logements subventionnés qui
s'adressent à une clientèle de locataires à faible revenu.
Et une petite parenthèse, normalement, les logements sont
attribués suivant les besoins familiaux de la famille.
C'est bien sûr, dans ces cas, s'il y a séparation ou
divorce, qu'il est tout à fait normal que le logement dont les
dimensions et les services ont été attribués en fonction
des besoins puisse continuer à être habité par la
majorité des membres de la famille ou de l'ex-famille. (9 h 30)
L'article 1657.3 dit: "Une personne qui cohabite avec un locataire au
moment du décès de ce dernier et qui continue à demeurer
dans le logement succède pour l'avenir aux droits et obligations
résultant du bail, si elle donne au locateur un avis à cette fin
dans les 60 jours du décès. "Si personne ne se prévaut de
ce droit dans le délai prévu, l'héritier ou le
légataire peut à l'expiration de ce délai, résilier
le bail en donnant au locateur un avis d'au moins 30 jours".
Et l'article suivant dit: "Si personne ne cohabite avec le locataire au
moment du décès, l'héritier ou le légataire peut
résilier le bail en donnant au locateur dans les six mois du
décès un avis d'au moins trois mois".
Ces articles ne devraient pas s'appliquer aux logements
subventionnés.
M. Poulin: Une parenthèse encore une fois
là-dessus; c'est qu'il faut tenir compte ici du caractère
particulier de nos logements. Evidemment, si, par exemple, l'héritier ou
le légataire est une personne capable de se payer un logement, on ne
verrait pas pourquoi elle aurait tous les droits pour venir habiter un logement
subventionné. C'est dans ce sens qu'on dit que ces articles ne devraient
pas s'appliquer comme tels aux logements.
M. Luneau: Cela amène aussi une vacance qu'on
considère inacceptable dans du logement public. Par le fait même,
cela prive, pendant un certain laps de temps, une famille qui a besoin d'un
logement public ou subventionné de ce logement-là, à cause
des délais que l'administrateur doit respecter en vertu de cet article
de loi.
Concernant l'article 1658.2, on aimerait apporter une correction
à notre mémoire. Nous avons écrit dans le mémoire
le texte de l'article suivant, soit l'article 1658.3. Cela devrait se lire: "Le
locateur peut, pour la prolongation du bail, augmenter le loyer ou modifier la
durée ou une autre condition du bail s'il donne un avis à cette
fin au locataire." C'est le texte de l'article 1658.2
L'article 1658.18 précise que cet article ne s'applique pas "au
bail d'un logement à loyer modique au sens de l'article 1661." Est-ce
que cela veut dire que, dorénavant, un office municipal d'habitation,
dans le cas de prolongation d'un bail, qui désire soit augmenter le
loyer, parce que les revenus du locataire ont augmenté, soit modifier la
durée du bail ou toute autre condition n'aura plus aucun avis à
donner au locataire? Cela nous apparaît une faille dans le projet de
loi.
L'article 1660.2 dit: "Un locataire peut résilier le bail en
cours s'il lui est attribué un logement à loyer modique au sens
de l'article 1661 ou s'il est admis dans un centre d'accueil visé dans
la Loi sur les services de santé et les services sociaux ou dans un
foyer d'hébergement pour personnes âgées administré
par une corporation sans but lucratif. "La résiliation prend effet
dès que le logement est loué à un nouveau locataire ou
trois mois après l'envoi d'un avis au locateur si le bail a une
durée fixe de douze mois ou plus, et un mois après l'envoi de cet
avis si le bail a une durée fixe de moins de douze mois; cet avis doit
être accompagné d'une attestation de l'autorité
concernée."
Nous désirons souligner notre accord avec cet article, notamment,
concernant la modification permettant à la résiliation de prendre
effet dès que le logement est loué à un nouveau locataire.
Cela pourra accélérer, dans certains cas, l'entrée de
locataires dans les logements subventionnés. Nous recommandons donc,
dans le cas de la fin prématurée d'un bail, qu'un office
municipal d'habitation conserve le logement vacant jusqu'à ce que le
locataire puisse y aménager, et sous-entendu, bien évidemment,
cela n'excède pas une période de trois mois.
Nous aimerions également vous formuler, M. le ministre, certains
commentaires concernant les dispositions particulières au bail d'un
logement à loyer modique. Comme nous l'avons dit plus haut, nous croyons
que les locataires de logements publics doivent avoir des droits et recours
à la Régie du logement. Aussi, c'est avec satisfaction que nous
avons constaté que pour la première fois, le législateur a
introduit dans le Code civil une section particulière concernant le bail
d'un logement à loyer modique. Nous croyons que les nombreuses
spécificités du logement public justifiaient que le
législateur y consacre une section particulière du Code
civil.
Bien que nous soyons d'accord avec l'esprit de la section
consacrée aux dispositions particulières au bail d'un logement
à loyer modique, nous vous faisons part dans les lignes qui suivent de
nos remarques et recommandations. En effet, nous croyons que certains articles
sont susceptibles de causer divers problèmes administratifs aux offices
municipaux d'habitation ou de ne pas atteindre le but visé.
L'article 1661.1 dit: "Le locateur d'un logement à loyer modique
doit tenir à jour, conformément aux règlements de la
Société d'habitation du Québec, une liste des personnes
admissibles à la location d'un tel logement."
Bien que nous ne soyons pas opposés à ce qu'un office
municipal doive tenir à jour une liste des personnes admissibles, nous
devons signaler ici qu'une telle mesure nécessite un personnel
administratif, que les offices municipaux d'habitation n'ont pas toujours, et
particulièrement, les offices de petite taille. Une liste semblable
requiert un contrôle administratif très serré, presque
journalier, des personnes placées sur les listes d'attente. Aussi, nous
nous interrogeons sur la fréquence de mise à jour des listes
d'attente. Est-ce six
mois? Est-ce un an? Cela implique que toutes les personnes inscrites sur
ces listes doivent être contactées à périodes fixes
pour vérifier si elles sont toujours admissibles ou si elles
désirent toujours être inscrites sur la liste. C'est un travail
considérable si on considère que plusieurs offices municipaux
d'habitation ont des listes d'attente équivalentes au double du nombre
de logements qu'ils administrent et souvent davantage.
L'article 1661.2 dit: "Lorsqu'un logement est vacant, le locateur doit,
conformément aux règlements de la Société
d'habitation du Québec, l'offrir en location à l'une des
personnes inscrites sur la liste d'admissibilité." Rien à redire
sur cet article, si ce n'est qu'il ne fait que ratifier une pratique que tous
les offices municipaux d'habitation observent actuellement.
Troisième article: "Si le locateur refuse d'inscrire une personne
sur la liste d'admissibilité ou de lui attribuer un logement de la
catégorie à laquelle elle a droit en vertu de la loi, celle-ci
peut, dans les 30 jours du refus, s'adresser au tribunal pour faire
réviser la décision du locateur. "Le locateur doit établir
que les critères d'admissibilité et d'attribution ont
été appliqués. '
Bien que l'Association des offices municipaux d'habitation soit en
accord avec le principe d'accorder un recours à une personne qui se voit
refuser l'inscription sur la liste d'admissibilité ou l'attribution d'un
logement, nous croyons qu'une telle mesure peut engendrer des abus et de graves
problèmes administratifs.
Résumé... D'accord.
Imaginons un office municipal d'habitation qui a une liste
d'admissibilité de 600 personnes. La personne qui a le plus de points au
système de pondération et qui répond le mieux aux
critères de sélection est choisie. Toutefois, 150 candidats
locataires décident de contester la décision de l'office. Parmi
eux, on retrouvera sûrement des candidats n'ayant aucune chance
d'être sélectionnés. On notera ici les problèmes
administratifs qu'une telle situation pourrait causer.
Nous recommandons que la Société d'habitation du
Québec édicte, par règlement, que toute sélection
se fasse par numéro de personne, qu'un mécanisme soit
élaboré pour limiter le nombre de personnes pouvant contester la
décision du locateur lors de l'attribution d'un logement et qu'un
système de pondération uniforme et des critères
d'admissibilité et de sélection uniformes soient mis en vigueur
dans les meilleurs délais.
Concernant l'article 4, nous recommandons plutôt qu'une personne
qui obtient raison lors de la révision par le tribunal concernant les
critères d'admissibilité, le locateur lui accorde le prochain
logement disponible à l'office correspondant à ses besoins.
On pourra peut-être expliciter davantage cette recommandation au
cours de la période de questions.
M. le Président, nous avons fait un résumé des
recommandations que nous faisons avec les pages vertes du document et, pour
accélérer notre présentation, je vais conclure.
Comme nous l'avons déjà dit dans ce mémoire,
l'Association des offices municipaux d'habitation est satisfaite que le
législateur ait placé dans le projet de loi no 107 une section
particulière relative aux logements à loyer modique. De
même, nous souscrivons dans les grandes lignes à l'ensemble de
cette loi qui tend à favoriser de meilleures relations entre locateurs
et locataires, notamment par la nouvelle Régie du logement dotée
de pouvoirs accrus.
Toutefois, nous tenons à signaler au ministre, en terminant,
quelques points particuliers. L'Association des offices municipaux d'habitation
croit qu'un système de pondération relativement à la
sélection et que des critères d'admissibilité uniformes et
qu'un processus de sélection uniforme pour l'ensemble des offices
municipaux d'habitation doivent être approuvés par le gouvernement
dans les meilleurs délais.
En outre, et même si cela n'est pas le propos direct du projet de
loi no 107, nous tenons à signaler que les offices municipaux
d'habitation attendent avec impatience la nouvelle échelle de loyers
dans les logements subventionnés. L'échelle actuelle produit des
injustices et des écarts qu'il est absolument urgent de corriger.
Enfin, nous désirons réclamer du ministre qu'il accorde
aux offices municipaux d'habitation les moyens et les effectifs
nécessaires pour répondre au surplus de travail administratif
qu'occasionnera la mise en place de ces recours aux locataires.
Nous voudrions, en terminant, remercier le ministre et tous les membres
de cette commission pour l'attention portée à ce
mémoire.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs, M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, je désire remercier M.
Luneau, président de l'Association des offices municipaux d'habitation,
ainsi que MM. Poulin et Côté, qui l'accompagnent, pour leur
mémoire. En effet, la Loi de la Société d'habitation du
Québec, ainsi qu'il a été indiqué, prévoyait
que cet organisme pouvait mettre sur pied une espèce de tribunal ou de
bureau des griefs des locataires de HLM et, malgré les prescriptions de
cette loi et la création de la société, laquelle remonte
à 1968, jamais un tel bureau n'a été créé.
On peut peut-être se demander si c'était vraiment la fonction de
la Société d'habitation, qui est responsable de bâtir, de
gérer des logements par le biais des offices municipaux, d'entendre les
griefs, surtout que la régie est là pour cela. C'est donc ce qui
nous a motivés à profiter de la refonte de la loi pour confier ce
rôle-là plutôt à des gens dont c'est la fonction de
juger les problèmes de relations locataires-locateurs; qu'ils le fassent
déjà pour le secteur privé, mais qu'ils le fassent aussi
pour le secteur public, au lieu de mettre une structure parallèle sur
pied. Je suis heureux de constater que les offices municipaux d'habitation
réclamaient une mesure semblable, étant donné qu'il
n'y avait aucun endroit où pouvaient être
référés justement les cas litigieux. (9 h 45)
C'est évident que toutes les règles qui s'appliquent dans
le secteur privé ne peuvent s'appliquer aux logements
subventionnés, la principale raison étant que c'est un logement
qui, par destination, s'adresse à une clientèle précise,
que c'est un logement dont le loyer est fixé non pas en fonction des
coûts d'exploitation, comme c'est le cas pour tous les autres immeubles,
mais en fonction du revenu des gens et, en conséquence, vous avez tout
à fait raison d'indiquer dans votre mémoire qu'il ne saurait
être question de dévoiler au nouveau locataire d'un HLM le loyer
payé par l'ancien puisque automatiquement, ce serait faire état
de son revenu. Donc, il va falloir prendre des précautions sur ce point
précis.
Je suis également d'accord, étant donné que les
logements subventionnés s'adressent à une clientèle
particulière, qu'on ne saurait étendre la "passation" du droit de
rester dans un HLM jusqu'à la cinquième génération
et même on a vu hier des gens qui nous ont dit que, même dans le
secteur privé, cela pouvait leur causer des problèmes. On va le
regarder effectivement. Ce n'était pas notre intention d'étendre
cela ad vitam aeternam, d'en faire une espèce de droit féodal,
ainsi que le mentionnait un mémoire soumis hier, mais de faire en sorte,
peut-être, qu'il y ait un certain nombre de privilèges en faveur
à tout le moins des personnes qui cohabitent avec les gens, si bien que,
dans le cas de votre recommandation 3, où on parle du locataire
séparé ou divorcé, il faudra peut-être
élargir la notion, parce qu'à un moment donné, on peut ne
pas vivre ensemble sans être ni séparé ni divorcé de
fait ou en droit. En tout cas, on va laisser les avocats fignoler cela de
façon correcte et j'aimerais avoir, cependant, vos commentaires, des
avis des offices municipaux d'habitation sur les problèmes que vous
évoquez à la fin de votre mémoire, à savoir cette
question des critères de sélection, puisque tout individu qui
n'aurait pas été choisi pourra faire appel parce qu'il croira que
les critères ont été mal utilisés dans son cas.
Vous dites: II faut donc avoir des critères très
précis puisque cela peut donner lieu à des contestations. Cette
question des critères d'admission, cette question des listes
d'admissibilité; une personne s'est qualifiée pour entrer dans un
logement subventionné, mais il n'y a pas de place... Elle est donc
inscrite sur une liste. Pendant combien de temps va-t-on garder les gens
inscrits? Là-dessus, j'aimerais avoir votre avis. C'est vous qui
gérez dans plus de 150 municipalités au Québec et, comme
vous dites: Quand la programmation 1978 sera terminée, ce sera
au-delà de 300 municipalités du Québec; donc, c'est vous
qui gérez ces projets. J'aimerais avoir votre avis sur cette question
des listes d'admissibilité, sur leur mise à jour et, si vous avez
maintenant quelques suggestions, j'aimerais bien les entendre et, à
défaut, peut-être que, plus tard, on pourrait demander à
votre association.
Enfin, il y a toute cette question de l'échelle des loyers,
où vous demandez que l'on révise cette échelle qui n'a pas
fait l'objet de révision depuis assez longtemps, l'échelle
Rogers, même s'il y a eu différentes propositions,
l'échelle du GTREL qui a été proposée, le groupe de
recherche sur l'échelle de loyer, je pense que c'était cela,
GTREL, la proposition du groupe des locataires de HLM, le contre-rapport, enfin
moult suggestions de révision de cette échelle de loyers. Je suis
prêt à procéder à une telle révision, mais
j'ai demandé deux choses, une consultation auprès des
associations de locataires de HLM et une consultation auprès des offices
municipaux d'habitation.
On a commencé les deux et les locataires nous ont demandé,
à bon droit, je pense, que l'on fasse précéder cette
révision de l'échelle des loyers d'une étude sur le profil
socio-économique des locataires. Une étude sur le profil
socio-économique de 25 000 locataires vivant dans les HLM ne se fait pas
du jour au lendemain. A cet égard, vous pourriez peut-être aussi,
vous qui gérez ces logements, nous donner un coup de main. On a
déjà commencé à procéder par
échantillonnage pour avoir une petite idée, mais le travail n'est
pas complété.
En terminant nous aurons l'occasion d'entendre les questions des
membres sur ces critères de sélection, sur la durée
en vigueur de la liste d'éligibilité, j'aimerais, si vous en
avez, s'il vous plaît, obtenir vos lumières.
M. Poulin: M. le Président, M. le ministre, je vais
essayer de répondre un peu aux questions posées. Quant aux
critères de sélection qu'on demande de rendre uniformes à
la grandeur du Québec, ce qu'on veut signaler par là, c'est
qu'actuellement, ces critères ne sont pas nécessairement
uniformes, c'est-à-dire que lorsque les offices municipaux d'habitation
ont été créés, les règles de base ont
été établies, mais il reste qu'il y a actuellement
certaines disparités selon les offices, il en existe encore,
croyons-nous.
M. Tardif: Sans nécessairement nommer les offices
municipaux.
M. Poulin: Non. Par exemple, il y a des comités de
sélection qui ne sont pas les mêmes d'un office à l'autre;
même si les critères de base ont été formulés
par la société dès 1969-1970 dans son guide administratif,
on considère que certains offices peuvent les appliquer, soit trop
à la lettre ou soit de façon trop souple et ça pourrait
être moins uniforme que les critères qui viendraient d'un
règlement, de la part du ministre. Dans ce sens, ce n'est pas assez
précis comme critères de base et comme règlement de base
au niveau de la sélection pour que l'ensemble des offices puissent se
baser là-dessus. Il reste, à notre avis, certaines marges de
manoeuvre qu'il faudrait absolument corriger.
C'est pour cette raison qu'on vous dit que c'est absolument
nécessaire que les critères soient révisés et
soient rendus uniformes et obligatoires pour l'ensemble des offices.
M. Tardif: Si vous permettez, M. le Président, vous faites
référence d'abord, j'allais dire en amont, vous dites: D'abord,
il faudrait regarder la composition des comités de sélection.
M. Poulin: Oui.
M. Tardif: On en est plus à l'acte de choisir des
candidats. Vous dites que ce sont ceux qui choisissent, qu'est-ce que vous
voulez dire par là?
M. Poulin: En fait, la composition du comité,
actuellement, a toujours été laissée un peu à la
discrétion des offices. C'est-à-dire que souvent, dans certains
cas, c'est l'ensemble du conseil d'administration de l'office qui, comme vous
le savez, est nommé par le conseil municipal qui peut choisir,
théoriquement, les locataires. Dans d'autres cas, ce sont quelques
membres du conseil d'administration de l'office, deux ou trois peuvent faire
partie d'un comité de sélection, dans certains cas, certains
offices sont déjà allés chercher des personnes à
l'extérieur d'un conseil d'administration, soit dans les organismes
sociaux, les organismes populaires ou même des locataires habitant les
offices municipaux d'habitation.
M. Luneau: On peut ajouter M. le ministre, que dans certains cas,
on a remarqué dans les comités de sélection de locataires,
la présence de conseillers municipaux. Bien que je n'ai rien contre les
politiciens, je pense que ce n'est peut-être pas la place d'un conseiller
municipal d'avoir un siège au comité de sélection et
ça peut, dans certains cas, causer des problèmes graves.
M. Tardif: On pourrait demander au député de
Saint-Hyacinthe ce qu'il pense des conseillers municipaux qui siègent
à des conseils...
M. Luneau: Des comités de sélection.
M. Tardif:... des comités de sélection de
locataires de HLM.
M. Cordeau: Je suis conseiller municipal, mais je ne siège
pas au... Je ne suis pas administrateur de la société chez nous,
mais...
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-G râce.
M. Cordeau: J'aurais une question sur le même sujet.
Aimeriez-vous que la composition du comité soit définie par le
ministère, soit qu'il y ait un représentant des locataires, un
représentant de ci et un représentant de...
M. Poulin: C'est cela. On veut que la règle soit uniforme
pour l'ensemble des offices municipaux d'habitation, parce qu'actuellement,
étant donné que le ministre, dans son projet de loi, veut donner
des recours à ces locataires, si les règles ne sont pas claires
pour tout le monde, on dit, nous, que c'est la base en fait, des
critères de sélection uniformes et une échelle des loyers
qui serait révisée. On dit que tout cela sous-tend ce que le
ministre amène dans son projet de loi no 107. Cela devrait être
fait.
M. Tardif: J'ai une dernière question, M. le
Président. Est-ce que l'Association des offices municipaux a fait tenir
ou peut faire tenir ses suggestions sur, premièrement, la composition
des comités de sélection, soit un relevé de ceux qui
existent déjà et peut-être ses recommandations sur cette
question des listes, des critères de sélection d'une part.
Vous avez déjà fait tenir des documents?
M. Poulin: Oui, c'est déjà fait, mais concernant la
composition des comités de sélection, cela va se faire sous peu
à la Société d'habitation.
M. Tardif: D'accord.
M. Poulin: Bon, je ne sais pas si j'ai été assez
clair concernant la question des critères de sélection uniformes.
Vous auriez peut-être d'autres...
M. Tardif: Si vous vouliez dire quelques mots là-dessus,
parce que là, on a parlé de critères de sélection
uniformes à travers le Québec, mais on ne sait pas encore ce que
sont ces critères.
M. Poulin: En fait, ce sont actuellement, en gros, les revenus
des gens qui sont le critère principal, de même que l'état
du logement. Ce sont les deux critères fondamentaux sur lesquels un
comité de sélection d'office doit se baser pour
sélectionner des gens. Mais ce qu'on voudrait d'abord, les propositions
qui ont été faites par les autres groupes de travail
antérieurement, par la Société d'habitation ou par
nous-mêmes c'est qu'effectivement ces deux critères demeurent
comme étant les principaux, mais qu'on s'entende sur une
pondération, c'est-à-dire le pourcentage à être
affecté, lors d'une sélection, à un candidat locataire
pour qu'il puisse devenir admissible à nos logements,
c'est-à-dire combien on donne, par exemple, à l'état du
logement, combien on donne à la personne pour ses revenus comme
tels.
M. Tardif: A l'heure actuelle, ce n'est pas défini que le
ratio loyer/revenu donne 40 points sur 100, la qualité du logement 40
points, les 20 autres points étant pour des facteurs de peuplement,
surpeuplement, sous-peuplement et autres et que ceci est déjà
pondéré.
M. Poulin: Oui, c'est vrai que c'est déjà
pondéré. Par contre, dans les derniers 20%, c'est là
peut-être que ce n'est pas assez clair et qu'il y a possibilité,
à notre avis, de manoeuvres, jusqu'à un certain point. Il y
aurait peut-être lieu de préciser davantage encore les
critères.
M. Tardif: Si on pouvait avoir vos suggestions à ce
sujet.
M. Luneau: II y a un élément, M. le ministre, que
j'aimerais vous souligner sur les critères de sélection et
peut-être que cela pourrait entrer dans les 20%, particulièrement
lorsqu'on a à sélectionner des occupants pour du logement pour
personnes âgées. Il y a une dimension santé qui n'est pas
pondérée au niveau des critères de sélection et
qui, à notre sens, devrait l'être. Il est bien sûr qu'une
personne qui est en bonne santé aujourd'hui est en mesure de subvenir
à ses besoins dans un logement normal, donc, pour nous, c'est une
clientèle qu'on recherche effectivement. Lorsqu'on a des demandes de
logement où la personne âgée ou le couple à la
retraite éprouve des difficultés de santé, à ce
moment, c'est laissé à la bonne discrétion du
comité de sélection et certains offices je ne vous dis pas
que c'est un commentaire qui est formulé au nom de l'association, c'est
simplement un commentaire que j'ai reçu cette année de la part de
certains offices souhaiteraient voir une partie du moins de la
pondération accordée à l'état de santé des
personnes âgées, dans le cas de la sélection de
logements.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Moi aussi, M. Poulin, je vous remercie de votre
présentation, vous et vos collègues, c'est très
intéressant. Je n'ai pas la connaissance du ministre dans ce domaine. Il
a vécu là-dedans depuis des années et, pour moi, chaque
expérience est quelque chose de nouveau, une formation. (10 heures)
Vous m'avez fait beaucoup réfléchir à savoir si on
doit uniformiser les règles pour les locataires dans les HLM avec celles
du secteur privé. J'aimerais vous poser des questions là-dessus.
Il y a d'autres sujets qui, je pense, sont plus importants, mais nous aurons ce
matin la présentation d'un autre groupe ici. Ce sont des conseillers
juridiques, je pense, la Commission des services juridiques, qui est partie sur
le même sujet. Je ne sais pas si vous pouvez rester pour en entendre la
présentation, mais elle a une attitude envers cette question un peu
contraire à la vôtre. Pour ma part, ce serait très
intéressant, après la séance ou la semaine prochaine,
d'avoir votre opinion sur cette présentation, parce que c'est une
perspective sur cette question qui est un peu différente. Elle veut en
effet que l'article 1658.18 soit retiré. C'est la clause qui dit que les
articles de la loi ne sont pas applicables aux HLM et aux coopératives,
mais, parce que vous êtes spécialistes là-dedans, je
préfère vous poser des questions pour ce qui concerne cette
liste, les critères et votre désir d'uniformiser.
Premièrement, sur le plan général, si vous me le
permettez, je vais vous dire que je vois dans votre attitude de standardiser
l'affaire un peu l'attitude que j'ai vécue pendant deux ans à
Ottawa, une attitude qui disait que cela ne marche pas bien dans les
régions, qu'il faut prendre le pouvoir central et uniformiser. J'avais
une tendance à Ottawa, à lutter farouchement contre cette
idée et j'ai le même esprit ici, je pense. Pour ma part, je tiens
pour acquis, j'accepte l'idée que, si je déménage de
Montréal à Trois-Rivières, je vis dans une ville
différente et qu'il faut m'attendre à des circonstances, à
des attitudes et à des règles différentes; à moins
qu'il y ait une raison énorme, prépondérante d'uniformiser
toutes les affaires je sais que le ministre est obligé de faire
face à cette question cinq ou six fois par jour dans ses relations avec
les municipalités pour ma part, je vois au moins une grande
raison d'uniformiser. Je préfère alors laisser ces
responsabilités au niveau qui est le plus proche possible de la
population, même si, dans quelques villes, il faut accepter des
règles qui ne sont pas aussi bonnes que celles du gouvernement central,
même si, de temps en temps, un conseiller municipal siège, qui
n'est pas exactement impartial, même s'il y a de petits défauts
là-dedans, et d'accepter que si les gens ont le droit de faire quelque
chose, ils ont le droit de le mal faire, c'est cela qu'un droit implique pour
moi, ou de ne le pas faire du tout. J'ai fait ces remarques, parce que
j'aimerais avoir un peu plus de précisions de votre part. Pensez-vous
que c'est essentiel pour le bien-être de la population de centraliser, de
créer une autre série globale de règlements que toutes les
municipalités du Québec seront obligées de respecter?
M. Luneau: J'aimerais peut-être répondre à
votre question dans le sens que je suis d'accord avec vous, lorsque vous parlez
d'une centralisation et d'une uniformisation à outrance et, bien
sûr, comme représentants d'offices municipaux, je conçois
quand même qu'on ait des règles du jeu qui soient claires et
uniformes mais qui tiennent compte aussi de l'autonomie locale pour qu'on
puisse, au niveau local, avec ces outils, parce qu'il ne faudrait quand
même pas prendre ces règles-là pour autre chose que des
outils, et avec la bonne conscience, le bon coeur d'un père de famille,
appliquer cela pour le bien-être de nos citoyens. Je pense que l'esprit
visé par notre recommandation, c'est celui-là. Ce qu'on souhaite
également, c'est qu'il y ait, par une uniformisation, une certaine
équité d'un locataire à un autre, d'un office à un
autre, parce que du logement subventionné...
M. Scowen: Pourquoi une équité entre un office et
un autre? Pourquoi une équité entre Sherbrooke et Val-d'Or? S'il
n'y a aucun lien, aucun rapport entre les deux systèmes, ce sont deux
villes différentes, pourquoi avoir une équité entre les
deux? Pourquoi comparer Sherbrooke à Val-d'Or?
M. Luneau: Je ne vous dis pas équité d'une
région à une autre, mais équité au niveau d'une
agglomération. Je dirais peut-être, sur certains points,
équité à l'échelle de la province, parce que, du
logement subventionné, c'est un bien collectif dans une certaine
mesure.
M. Scowen: Qu'est-ce que cela veut dire, le logement
subventionné, c'est un bien collectif?
M. Luneau: C'est l'ensemble des...
M. Scowen: Je vous pose la question d'une façon
très sérieuse. Qu'est-ce que cela veut dire exactement?
M. Luneau: C'est l'ensemble des citoyens qui paient pour les
déficits d'exploitation des logements subventionnés. Les
subventions sont prises à même les fonds publics. A partir de ce
principe, nous, comme administrateurs de logements subventionnés, on
pense que ces logements devraient servir aux personnes qui sont le plus dans le
besoin et qui nécessitent d'être logées d'une façon
prioritaire. Pour déterminer cela, effectivement, cela nous prend des
règles du jeu, cela nous prend des critères de sélection
qui soient équitables, en quelque sorte.
M. Scowen: En effet, votre définition, c'est que, si les
services sont payés par l'impôt provincial, cela veut dire
automatiquement, plus ou moins, qu'on doit avoir une réglementation
provinciale pour l'administration. C'est l'idée.
M. Luneau: L'idée, c'est d'avoir quand même des
règles du jeu qui soient similaires sans nécessairement
être identiques, qu'on puisse en quelque sorte dire, au niveau de la
province, que le logement subventionné sert à desservir une
clientèle bien précise, comme M. le ministre l'a mentionné
tout à l'heure.
M. Scowen: J'ai une dernière question, M. Cordeau.
J'aimerais poursuivre cette chose. Vous dites que c'est très
fédéral, c'est central, cette idée. Je n'ai jamais
accepté cette idée jusqu'à maintenant. De toute
façon, je veux vous poser une question précise sur le projet de
loi et sur les articles 1661.2, 1661.3 et 1661.4. A l'article 1661.4, si le
tribunal ordonne de loger la personne dans un logement de la catégorie
à laquelle, etc., quand je suis les trois articles, j'ai l'impression
que, si un locataire est sur la liste, il a le droit au logement. Si le
tribunal le décide, les critères des décisions du tribunal
ne sont pas énumérés, ce tribunal peut loger n'importe qui
sur la liste d'admissibilité dans un logement privé aux frais des
contribuables. C'est l'impression que j'ai de ces trois articles.
M. Tardif: Non. Les critères existent. Il existe des
critères de sélection effectivement, les handicapés
s'ajoutent à la liste des personnes admissibles qui,
présentement, accordent, comme je l'ai mentionné tantôt, un
poids, par exemple, à la charge que représente le loyer. Sur un
total de 100 points, il y en a 40 qui vont au ratio loyer-revenu. Par exemple,
si vous consacrez 50% de votre revenu au logement, vous aurez la cote 30 sur 40
points comme poids accroché à ce facteur; s'il y a une
quarantaine de points reliés à la qualité du logement,
donc caractère d'exiguïté, insalubri- té, etc.; si
évidemment d'autres critères, selon qu'il s'agit de logements
pour personnes âgées ou pour familles nombreuses, parce que ce
sont quand même des personnes à qui s'adressent les logements
sociaux, présentement, ainsi qu'aux handicapés, et un certain
nombre de points reliés à d'autres questions dans les vingt
points où on dit qu'il y a finalement une marge.
Ces critères existent présentement sous forme de
directives de la société d'habitation aux offices municipaux.
Donc, ce n'est pas fait entièrement selon la gueule du client et un
tribunal en l'occurrence, la régie pourrait très
bien prendre les règles de la société et voir si,
effectivement, elles ont été appliquées dans le cas de M.
X, Y, Z.
Maintenant, ce que j'ai cru comprendre des représentations qui
nous ont été faites, c'est que ces directives de la
société gagneraient à être précisées,
à être mieux pondérées, plus raffinées, que
leur application ou leur interprétation dans certaines
municipalités soit plus stricte ou plus souple selon les cas. Ce qu'on
nous demande, finalement, c'est une gestion locale de ces critères, mais
une définition faite peut-être à partir de...
M. Scowen: Oui, je pense que je comprends, M. le ministre. Je
sais que M. Cordeau veut poser une question, mais la question que j'ai
posée n'était pas liée à la dernière;
simplement, la façon dont les trois articles sont rédigés
me donne l'impression que le tribunal, à 1661.4, aura le droit de loger
presque n'importe qui...
M. Poulin: Ce n'est pas admis dans nos logements,
c'est-à-dire que c'est lorsqu'il y a erreur. Je comprends votre
question, M. Scowen. C'est dans le cas d'erreur qu'il y aurait de la part de
l'office dans la sélection d'un locataire. Si le tribunal juge qu'on a
fait une erreur, le locataire devrait aller...
M. Scowen: C'est ce...
M. Poulin: ... on devrait trouver un logement dans le secteur
privé au locataire...
M. Scowen: Voilà!
M. Poulin: ... et payer la différence.
M. Scowen: Parfait! C'est cette clarification, c'est cette
idée de l'erreur que je ne vois pas dans ces articles. Je posais
simplement la question, parce que, pour moi, c'est de la façon dont
c'est rédigé, ça donne l'impression que ce n'est pas en
cas d'erreur, mais c'est simplement à la discrétion de...
M. Tardif: Non.
M. Scowen: D'accord.
M. Poulin: C'est spécifiquement en cas d'erreur de la
part... Une mauvaise sélection faite par... En fait, on a donné
le logement à un locataire qui
n'aurait pas dû l'avoir et l'autre, on doit lui trouver un
logement dans le secteur privé et le payer.
M. Scowen: Je laisse la parole à M. Cordeau et je vous
remercie de votre mémoire.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président. D'abord, au nom de
l'Union Nationale, nous tenons à vous remercier pour votre participation
et vos excellentes suggestions contenues dans le mémoire.
Tantôt vous avez parlé de critères. Vous aimeriez
avoir des critères plus rigides concernant la sélection des
personnes et vous avez même fait allusion aussi au comité de
sélection qui, à un moment donné, pourrait avoir des
conseillers municipaux à l'intérieur du comité de
sélection, mais je pense que c'est le conseil d'administration qui nomme
le comité de sélection. Je crois que les conseillers municipaux
sont en minorité dans les conseils d'administration d'offices
d'habitation municipaux. Il faudrait bien clarifier ça, à savoir
que les conseillers ne sont pas en majorité dans ces conseils municipaux
d'habitation.
Par contre, le comité de sélection, vous aimeriez qu'il
soit plus défini, que les membres qui doivent en faire partie soient
plus définis, n'est-ce pas? C'est ce que vous avez
spécifié tantôt, qu'il y ait un locataire ou ainsi de
suite... Peut-être que la représentativité du milieu soit
mieux définie dans le comité de sélection.
M. Luneau: La formule actuelle n'est pas claire dans ce sens
qu'on laisse au conseil d'administration d'un office le soin de nommer son
comité de sélection comme bon lui semble. Je sais pertinemment
que nous travaillons conjointement avec la société d'habitation
à une formule qui permettrait d'uniformiser, en quelque sorte, la
question des comités de sélection. C'est à l'étude
actuellement.
Ce qu'on souhaite, c'est peut-être d'éviter qu'il y ait
partisanerie au niveau des comités de sélection, parce que le
comité de sélection nous apparaît être le
mécanisme impartial au niveau local qui assure justice à un
ensemble de citoyens, mises à part les influences politiques qu'il peut
y avoir et qui existent dans certains cas. Je ne vous dis pas que ce sont des
cas majoritaires au Québec, loin de là. Mais je pense que ce sont
encore des cas de trop lorsque l'on parle de logements subventionnés.
(10 h 15)
M. Cordeau: Oui, je partage votre opinion à ce sujet, mais
tant et aussi longtemps qu'il y aura des êtres humains qui
géreront des mécanismes, on ne peut pas blâmer cela.
M. Tardif: Pour les fins du journal des Débats, pour
consigner le fait, ai-je bien compris que le député de
Saint-Hyacinthe est d'accord avec la recommandation que les conseillers
municipaux ne devraient pas faire partie des comités de
sélection?
M. Cordeau: Aucune objection, M. le ministre. M. Tardif:
Très bien.
Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres
questions?
M. Cordeau: Oui, j'ai deux questions. Vous avez fait mention
tantôt dans votre mémoire, à la page 13, que si le tribunal
décidait qu'un locataire éventuel a été
lésé, il occuperait le futur logement. Vous avez aussi dit
tantôt que vous aimeriez donner quelques explications. Pourriez-vous
donner des explications à l'heure actuelle?
M. Luneau: MM. les membres de la commission, le contenu du projet
de loi sur cet aspect nous apparaît être une solution assez
draconienne parce que des erreurs humaines pourraient peut-être se
glisser dans l'administration des offices municipaux. La recommandation
contenue dans notre mémoire sur cette question est, nous le pensons, un
heureux compromis entre la situation qui existe actuellement et la situation
souhaitée au projet de loi. Nous pensons qu'en garantissant au locataire
ou au futur locataire lésé par une décision d'un
comité de sélection ou d'un conseil d'administration d'office le
prochain logement disponible correspondant à ses besoins, c'est,
à notre sens, satisfaisant pour compenser pour, peut-être,
l'erreur dans la plupart des cas ou peut-être aussi cela peut
arriver l'impartialité ou la partialité dans une
décision. Comme vous l'avez si bien mentionné tout à
l'heure, ces organismes ont un coeur parce qu'ils sont composés
d'humains et les humains sont souvent la cause d'erreurs. Dans ce sens, nous
pensons qu'il y aurait place au compromis au niveau du projet de loi
relativement à cette question.
M. Cordeau: II y a une autre de vos suggestions aussi à la
page 5 de votre mémoire concernant la durée du recours. Vous
suggérez que la régie pourrait entendre votre demande ou entendre
les demandes en moins de cinq jours. Pourriez-vous expliciter votre
pensée de ce côté-là?
M. Poulin: C'est l'admissibilité de la demande. M.
Cordeau: Oui, la priorité de la demande.
M. Poulin: C'est-à-dire de statuer si, effectivement, il y
a recours sur le point précis sur lequel les parties demandent à
la régie d'intervenir. On croit, à un moment donné, que
cela traîne jusqu'à un certain point et que cela pourrait causer
préjudice soit à nos administrateurs, soit aux autres locataires.
Si la régie pouvait statuer plus rapidement, si effectivement elle a
juridiction, on croit que cela pourrait être un facteur important.
M. Cordeau: Actuellement, quels sont les délais que vous
rencontrez?
M. Poulin: Les délais n'existent pas parce que la loi
n'est pas...
Le Président (M. Laplante): Une dernière question,
M. le député de Taschereau?
M. Guay: M. le Président, je vais en poser une principale
et une additionnelle dans ce cas-là parce que, effectivement, j'ai deux
questions.
La première porte sur les associations de locataires dans les
HLM. Il y a des dispositions juridiques ou administratives qui permettent la
constitution de telles associations et le financement de telles associations
par les offices municipaux d'habitation. A votre connaissance et compte tenu de
votre expérience, jusqu'à quel point ces associations
existent-elles et est-ce qu'il existe effectivement, d'une municipalité
à l'autre ou d'un office municipal à l'autre, des approches
différentes? En d'autres mots, est-ce que tous les offices municipaux
accordent concrètement ce qui est permis ou s'il y a des offices
municipaux qui le refusent? Si oui, pourquoi?
M. Luneau: A notre connaissance, le fait de l'existence
d'associations de locataires au niveau local est en général
admis. Je dois vous dire cependant que certains offices donnent plus d'appui
moral à la création d'associations de locataires que d'autres.
Certains membres d'offices vont dire, par exemple: Nous n'avons pas objection
à ce que les locataires se regroupent sous forme d'association. S'ils
veulent le faire, il y a des sommes disponibles. On va leur fournir ces
sommes-là et ils vont se constituer en association. D'autres vont
même peut-être permettre à un animateur ou à une
personne qui a une certaine connaissance dans le domaine social d'aller
rencontrer les locataires et de leur expliquer le fonctionnement de
l'association, quels sont les intérêts ou le côté
positif que pourrait avoir une association dans leur milieu, etc. Ce sont deux
approches complètement différentes et on retrouve les deux
actuellement dans l'ensemble des associations.
M. Guay: Les sommes qui sont disponibles viennent d'où, du
gouvernement du Québec ou des municipalités?
M. Poulin: Elles viennent des sociétés
d'habitation.
M. Guay: Des sociétés d'habitation. M. Poulin:
En passant par les offices.
M. Guay: Oui. Est-ce qu'il y a des offices... Vous dites qu'il y
a des offices qui disent: Voilà c'est disponible,
débrouillez-vous. Il y a des offices qui vont plus loin? Est-ce qu'il y
a des offices qui vont moins loin, qui, carrément, ne remettent pas cet
argent et l'utilisent à d'autres fins.
M. Luneau: Cela peut exister en principe, mais, à ma
connaissance...
M. Poulin: A ma connaissance non plus, je n'ai jamais vu
d'offices qui ont pu utiliser à d'autres fins...
M. Guay: Ou ne pas l'utiliser.
M. Poulin: Ou ne pas l'utiliser du tout, mais, s'il n'y a pas de
demande de la part d'associations de locataires, effectivement, l'office n'aura
pas à son budget des sommes prévues à cela et il n'y aura
pas d'association.
M. Guay: Mais il n'y en a pas qui refusent.
M. Poulin: A notre connaissance, non. Il y a peut-être eu
des réticences, mais le fait de carrément refuser, non.
M. Luneau: Je dois dire aussi pour votre information qu'il y a
quand même eu une évolution depuis 1972 dans la mentalité
des administrateurs d'offices et l'association y est pour quelque chose.
M. Guay: Oui, M. le Président, j'en conviens. Le
Président (M. Laplante): D'accord.
M. Guay: Si vous incluez là-dedans l'Office municipal
d'habitation de Montréal...
M. Cordeau: II va venir.
M. Guay: Je sais qu'il va venir, mais j'anticipe un peu. Une
deuxième question. Votre recommandation 5, que la sélection se
fasse par numéro de personne, qu'un mécanisme soit
élaboré pour limiter le nombre de personnes pouvant contester la
décision du locateur lors de l'attribution d'un logement, pouvez-vous
préciser cela davantage? Cela ne me semble pas évident.
M. Poulin: C'est un peu dans... Cette recommandation vise en fait
à éviter ce qu'on pourrait appeler à un moment
donné une parade de nos administrateurs devant la Régie du
logement. Je m'explique. Par exemple, on dit que nos listes
d'admissibilité sont assez longues à certains offices, et si, tel
que le projet de loi l'indique, tous ceux qui sont refusés dans nos
logements peuvent contester la décision, imaginez-vous s'il y a une
liste de 600 personnes en attente et qu'il y en a 150 à 200 qui
décident de contester la décision, quel mécanisme la
régie va-t-elle avoir pour entendre cela. Est-ce qu'il faudra que notre
administrateur parade pendant trois, quatre, cinq jours pour aller
répondre à ces cas-là? On voudrait qu'un mécanisme
soit trouvé soit pour limiter cette possibilité...
M. Guay: Mais vous n'en avez pas à nous proposer?
M. Poulin: Pardon?
M. Guay: Vous soulignez le problème sans pour
autant...
M. Poulin: On n'a pas de solution à cela. On voudrait que
le ministre se penche là-dessus pour
éviter qu'on ne parade trop longtemps, comme on disait, devant la
Régie des loyers, parce que, évidemment, cela prend beaucoup de
temps à des administrateurs d'aller à la régie
continuellement, et surtout si on a beaucoup de cas, parce qu'on peut
prévoir qu'au début il peut y avoir beaucoup de gens qui tentent
de contester les décisions et, effectivement, cela pourrait créer
des problèmes.
M. Guay: Mais la sélection par numéro...
M. Poulin: Oui, c'est pour garder l'anonymat autant que possible
au niveau du comité de sélection, pour qu'il y ait le moins
d'intervention possible.
Le Président (M. Laplante): ... M. le ministre, le mot de
la fin.
M. Tardif: M. le Président, je pense qu'il y a lieu de
remercier à nouveau l'Association des offices municipaux d'habitation
pour son mémoire et pour ses suggestions.
L'objectif du gouvernement est de considérer et de traiter les
locataires de logements subventionnés comme des locataires et des
citoyens à part entière, c'est-à-dire avec les mêmes
droits que les locataires du secteur privé. Il est évident qu'il
y a lieu d'adapter certaines règles de fonctionnement, comme, par
exemple, la détermination du loyer ne se fait pas en fonction des
coûts d'exploitation, mais en fonction des revenus des gens, mais, ces
différences mises à part, les mêmes règles doivent
s'appliquer. On doit donc chercher à éliminer les restrictions
tracassières et indues vis-à-vis de ces gens. Il ne faudrait pas
qu'on ait l'impression parfois que c'est une faveur qu'on leur fait et qu'on
doit donc les traiter comme des otages.
Là-dessus, toute suggestion de votre part et des autres
intervenants visant à bonifier le projet de loi, puisque, encore une
fois, c'est du droit nouveau, les locataires de HLM n'étaient aucunement
couverts, on pouvait les déplacer d'un HLM à un autre, d'un
logement à un autre sans demander leur avis... Je pense qu'il est temps
de mettre un terme à cela, c'est ce que vise le projet de loi, de
reconnaître des droits. Je serai personnellement ouvert à toute
suggestion que vous pourrez nous faire pour la meilleure gestion de cette loi,
de ces critères de sélection qu'il y a lieu d'établir de
façon plus précise.
Par exemple, à la recommandation 5, vous nous dites: Nous
attendons du ministre qu'il nous dise un peu dans quel sens nous diriger; je
vous dis l'objectif et je vous demande votre concours pour l'atteindre. Je vous
remercie.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, M. Poulin, M. Luneau
et M. Côté, les membres de cette commission vous remercient de
votre mémoire. J'appelle maintenant l'Association des
propriétaires de maisons mobiles de Vimont Inc.
Madame, messieurs, si vous voulez identifier votre groupe, vous
identifier vous-même ainsi que les personnes qui vous accompagnent. Je
vous demanderais comme faveur toute spéciale d'essayer de donner vos
commentaires sur les recommandations que vous voudriez faire pour que les
membres de cette commission puissent vous poser des questions sur ce que vous
recommandez dans le projet de loi no 107. La parole est à vous.
Merci.
Association des propriétaires de maisons
mobiles de Vimont Inc.
M. Dufour (Robert): Merci. Ce matin, Mme Carrier m'accompagne,
elle est vice-présidente de l'association; M. Gagnon à ma gauche
et M. Dagenais sont des représentants des membres de l'association.
Moi-même, je suis président, c'est un titre assez pompeux. Nous
représentons une association d'un type peut-être nouveau dans la
province, une association pas tellement nombreuse, nous comptons une centaine
de membres. Par contre, c'est une association qui illustre une situation
vécue par des centaines et des centaines de cas isolés dans la
province, nous en sommes convaincus. C'est aussi une association qui, dans un
contexte comme celui-ci, peut nous laisser dans une situation bizarre parce
qu'on est un peu à cheval sur deux situations, on est
propriétaires de maisons et en même temps locataires de terrains.
Cela crée peut-être une confusion chez certaines personnes.
Dans la première page du mémoire, nous avons
souligné, dans l'avant-demier paragraphe, que nous étions
d'accord avec la loi 107 et félicitions le gouvernement de son
initiative. Nous serions heureux de voir s'appliquer aux maisons mobiles tous
les articles cités dans les pages qui suivent. La raison est tellement
simple, c'est que, par cette loi, nous nous trouvons à passer du
régime seigneurial à 1980 en l'espace de quelque jours, parce
qu'actuellement, la situation des propriétaires de maisons mobiles est
un peu une situation de censitaires dans un régime féodal,
pratiquement. C'est la situation, en gros. (10 h 30)
Pour ce qui est des points, des suggestions, dans les pages du
mémoire en passant, ce n'est peut-être pas un
mémoire de style traditionnel, mais étant donné qu'il y en
avait tellement à dire, on a préféré le
résumer le plus possible.
A la première page, suite à l'article 3.3, on a fait une
suggestion à 3.8, de fournir au ministre les données et
suggestions sur l'implantation de parcs de maisons mobiles par des
municipalités du Québec, notamment dans les zones
densément peuplées. Actuellement, la plupart des terrains pour
maisons mobiles sont laissés au bon vouloir des propriétaires
privés qui installent les gens comme bon leur semble. Et nous trouvons
que la régie a manqué une belle occasion de faire un bon coup,
à l'occasion de cette loi, pour forcer les municipalités à
se donner une législation, une réglementation, sur l'implantation
des parcs de maisons mobiles, en tout cas, pour forcer certaines
municipalités qui ont déjà cette réglementa-
tion, à y tenir et à la faire observer. Si je regarde
notre cas nous connaissons deux autres cas dans la même
municipalité où il y a un beau règlement,
très bien fait, où tout est prévu, il y a plusieurs choses
qui ne sont pas appliquées dans ce règlement. Autrement dit, il
faut donner à la régie un rôle non seulement de
contrôle, mais un rôle incitateur au développement des
terrains, pour que ces terrains ne continuent pas à demeurer des
ghettos. Somme toute, les gens des maisons mobiles, ce ne sont pas des
"Débites" différentes des autres. On les interne, on les
barricade dans des ghettos. C'est de la façon qu'on les installe, qu'on
leur permet de s'installer, que cela devient des ghettos. Ils ne sont pas plus
gitans, pas plus romanichels que d'autres. Ce n'est pas parce que cela
s'appelle maison mobile que nécessairement, cela s'attache en
arrière d'une voiture, cette histoire, d'autant plus qu'il y a tellement
peu de parcs disponibles. Nous sommes à la merci de ces
propriétaires.
Deuxième suggestion, c'est un petit point dans les
procédures, facilement corrigible, croyons-nous. Le locateur ou le
locataire, sur demande, pourra obtenir de la régie une copie du rapport
de l'inspecteur. Compte tenu de nos démêlés avec la
régie, actuellement, par rapport au propriétaire, il est
arrivé des fois où nous n'avons pu mettre la main sur certains
documents versés ou même arriver à l'audition et se
retrouver devant un rapport fourni par le propriétaire, dont on ne
connaissait même pas la formule. On avait changé la formule sans
nous avertir et il fallait se défendre sur des points qu'on ignorait
complètement. C'est un petit point assez facile. C'est de la
régie interne, au fond.
Toujours à la même page, 27.2, on demande de prévoir
un mécanisme semblable à celui d'un changement de zonage, pour un
terrain, même vacant, de maisons mobiles. Il peut se passer, dans les
terrains de maisons mobiles, un petit phénomène qui est anodin,
mais où le propriétaire du parc décide de changer son
zonage lui-même. Il respecte le zonage de la ville, mais il fait son
petit zonage à l'intérieur, de sorte qu'il peut rapetisser les
terrains, en agrandir un autre, selon la gueule de la personne qui vient de
rentrer, et contribuer ainsi à créer un peu de jalousie à
l'intérieur des terrains. Cela fait de la chicane inutile entre les
voisins. Il peut aussi décider qu'une partie de son terrain, qui
était consacrée à un parc, pour les enfants, devient
maintenant un ou deux terrains subdivisés pour des maisons mobiles. Et
il n'en parle à personne. Il peut rezoner à l'intérieur de
son terrain, comme bon lui semble.
A la même page, l'article 43: Les pouvoirs municipaux en
matière de changement de zonage sont démesurés par rapport
aux citoyens. Dans nos interventions, lors de nos assemblées
générales, nous nous sommes rendu compte que les gens avaient une
peur bleue du changement de zonage des municipalités. En fait, quand on
voit comment cela se passe, parfois, il y a de quoi faire peur au monde. Mais
ce n'est pas parce qu'un article paraît dans un petit journal de quartier
que, nécessairement, tout le monde est censé avoir lu ce journal.
Il y a tellement de choses à lire de ce temps-là, d'ailleurs.
A la page 2, le point 56, encore là, c'est un autre point de
procédure à l'intérieur de la régie avec lequel
nous avons vécu à un moment donné. Le procès-verbal
doit être accessible aux parties entre les auditions de la régie
sur la même cause ou pour l'appel.
L'article 61, la décision devrait être motivée selon
le jugement du régisseur, mais aussi sur des critères et
barèmes sérieux et écrits. Nous nous sommes rendu compte
qu'à la régie, on a l'impression parfois que la personne coupe la
poire en deux. C'est basé sur quoi? Sur les gens qu'il y a devant elle,
je ne le sais pas. En tout cas on n'a pas trouvé de critères, on
n'a pas remarqué de critères qui analysaient vraiment
l'augmentation de loyer. Même la formule que le régisseur est
censé remplir, on se demande si elle est toujours remplie ou si elle est
complètement remplie.
L'article 86, paragraphe 3: le gouvernement devrait immédiatement
s'attaquer aux critères de détermination du loyer tout en
imposant des normes d'aménagement. Cela revient au point de la page
précédente où on demande au gouvernement, soit municipal,
soit provincial de voir un peu plus à la réglementation
concernant les aménagements de terrains.
Le reste du mémoire, ce sont des choses que nous avons
relevées et qui font notre affaire à 100%, non pas parce qu'on
n'est pas exigeants, au contraire, mais on nous donne à peu près
tout ce qu'on a demandé dans différents petits mémoires ou
dans différentes lettres. On retrouve tout ce qu'on a demandé
pratiquement intégralement. Peut-être que pour quelqu'un qui reste
en logement, la question du logement, c'est bien différent, il n'y a
peut-être pas grand-chose dans cette nouvelle loi, mais, pour nous
autres, c'est une manne qui nous tombe du ciel comme cela. Avant, la seule
protection qu'on avait, depuis un an et demi à peu près,
décembre 1977, il n'y avait absolument rien. Là, on ne peut plus
nous évincer, nous ficher dehors, parce que notre face ne revient pas au
propriétaire, cela marche un peu comme cela. Je te regarde, je t'admire,
je te déteste, c'est tant par mois, un point, c'est tout. Le mois
suivant, on revient avec une autre augmentation. Pourquoi le voisin n'en a-t-il
pas? On ne le sait pas. Là, maintenant, les gens n'ont plus cette
crainte, cette peur, parce que c'était vraiment cela qui existait,
c'était une peur, une frousse flagrante devant le grand seigneur. Il
faut dire que sur beaucoup de terrains de maisons mobiles il y a plusieurs
personnes âgées qui ont mis leurs économies dans cette
maison et qui, du jour au lendemain, peuvent se faire évincer comme cela
par un petit chantage adroit, délicat, mais tout de même
important. Cela résume en gros.
Le Président (M. Laplante): Merci de votre
coopération, monsieur. M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, je remercie l'Association des
propriétaires de maisons mobiles de
Vimont Inc. pour son mémoire. Je suis heureux de constater que,
selon le dire de son président, le projet de loi répond en grande
partie aux besoins exprimés par ces gens qui, comme ces
propriétaires de maisons mobiles de Vimont, ont choisi ce mode
d'habitat.
En fait, ils sont 100 000 Québécois qui vivent dans des
maisons mobiles, dans à peu près 37 000 maisons mobiles plus
exactement, réparties dans à peu près 180 parcs. C'est un
fait que la législation était à peu près
inexistante dans leur cas. C'était vrai sur le plan fiscal,
c'était vrai sur le plan de l'aménagement et c'était vrai
sur le plan des droits des locataires, puisque les propriétaires de
maisons mobiles, comme je vous l'ai mentionné, ont cette
particularité d'être aussi locataires du terrain sur lequel ils
sont implantés très souvent. Sur le plan fiscal, des mesures ont
été prises, sur lesquelles je ne veux pas revenir. Sur le plan de
l'aménagement, comme vous êtes peut-être au courant
je l'ai mentionné hier à un autre groupe qui est venu devant nous
mon ministère, enfin le gouvernement, a amendé la Loi des
cités et villes et le Code municipal pour permettre aux
municipalités d'édicter des normes minimales concernant
l'aménagement des terrains pour maisons mobiles.
Ces normes minimales que les municipalités peuvent exiger ont
ceci de particulier, que, si les municipalités ne les ont pas
adoptées une fois qu'elles ont été mises en demeure de le
faire par le ministre, le ministre des Affaires municipales peut le faire
à leur place. La loi a donc été amendée il y a
maintenant un an. Nous avons préparé, à l'intention des
municipalités, un projet de règlement modèle qui contient
un certain nombre de dispositions, non seulement sur les maisons mobiles;
enfin, il y a d'autres normes minimales en matière d'aménagement,
mais il y a quelques pages consacrées à l'aménagement de
parcs de maisons mobiles. Ce document a été envoyé
à toutes les municipalités, qui peuvent, évidemment, et
qui doivent s'en inspirer dans la préparation de leurs propres
règlements.
Maintenant, sur le plan des droits, évidemment, et de la loi 107,
en particulier, ce n'est donc pas dans la loi 107 que nous pourrons
répondre à cette question, à ces problèmes que vous
soulevez en matière de zonage, mais c'est bien plus par cette autre
réglementation et par les amendements à la Loi des cités
et villes et au Code municipal que je pourrai, le cas échéant, si
les mesures adoptées semblaient insuffisantes, revenir à la
charge pour encore mieux définir les critères
d'aménagement de tels parcs.
Personnellement, je prends bonne note de certaines de vos suggestions
sur ce plan de l'aménagement. J'ai pris note également du fait
que vous et la régie sembliez un petit peu désemparés face
à la fixation du loyer pour les terrains de maisons mobiles, puisque,
évidemment, par la loi 96, nous avons donné le pouvoir à
la régie de contrôler les augmentations de loyer, comme cela, du
jour au lendemain. La raison était très simple: Nous l'avons
fait, à ce moment, avant même la loi 107, parce que nous l'avions
annoncé dans le livre blanc. Il nous semblait important de
légiférer immédiatement, parce que le simple fait de
l'annoncer aurait pu provoquer évidemment une hausse des prix. En disant
dans le livre blanc: Nous comptons contrôler demain les prix de location
des maisons mobiles, ceci aurait provoqué une hausse. Si bien que la
régie s'est retrouvée du jour au lendemain avec une juridiction
sans aucune expertise, sans aucune jurisprudence, sans aucune façon
correcte de déterminer le coût de location, alors qu'elle avait
quand même dans le domaine du logement un matériel abondant. Je
pense qu'avec le temps, ceci, avec le concours des associations comme la
vôtre, pourra se corriger et que nous pourrons mieux établir des
critères d'appréciation.
Je désire témoigner de notre ouverture devant
l'association. S'il y avait des suggestions, des commentaires que vous aviez
à nous formuler quant à ces critères
d'appréciation, ils sont les bienvenus. Je vous remercie.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Je vous remercie aussi de votre intervention. Je n'ai
pas de question à vous poser, parce que c'est un mémoire qui est
très clair. J'apprécie spécialement le fait que vous avez
proposé un nombre de modifications qui sont pour le
bénéfice, non seulement des propriétaires de maisons
mobiles, mais de tous les locataires. (10 h 45)
Je pense que c'est dans cet esprit que votre mémoire est
particulièrement valable parce qu'on a très peu de
mémoires qui touchent autre chose que les intérêts des
personnes qui se présentent. Je ne pose pas de questions, non pas parce
que vos propositions ne sont pas intéressantes, mais parce qu'elles sont
très claires, très lucides, très intelligentes et, de
notre part, on va certainement en prendre note et agir en fonction de vos
recommandations.
Je vous remercie!
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe, on vous donne la parole.
M. Cordeau: Merci!
Je voudrais revenir au chapitre 2 de votre mémoire, 3.8, s'il
vous plaît. Vous mentionnez: fournir au ministre les données et
suggestions sur l'implantation de parcs de maisons mobiles par des
municipalités du Québec, notamment dans les zones
densément peuplées.
Est-ce que vous suggérez que les municipalités
acquièrent des terrains afin d'aménager un parc pour maisons
mobiles et de louer les terrains?
Mme Carrier (Nicole): Absolument! Cela existe, par exemple, vous
voyez Hauterive j'ai habité là cela existe dans
bien des places. Pourquoi, dans une ville comme Laval, par exemple, ou
ailleurs, ça n'existerait pas?
M. Cordeau: Mais je crois que les cités et villes n'ont
pas le droit d'acquérir des terrains pour fins d'habitation.
Mme Carrier: Par contre...
M. Cordeau: Ce serait peut-être une suggestion que vous
faites au ministre d'accorder le pouvoir aux municipalités
d'acquérir des terrains pour fins d'habitation.
Mme Carrier: On s'en remet à l'article 86 pour ça.
C'est écrit que le gouvernement peut, par règlement,
établir les critères et la méthode de fixation du loyer
d'un terrain destiné à l'installation d'une maison mobile;
établir des exigences minimales relatives à l'habitation et
à l'entretien d'un logement. Si, en plus, les municipalités
peuvent, par exemple, comme ça se fait ailleurs, où on demeure...
Pourquoi cela peut-il exister dans une ville et ne pas exister dans une autre
ville? C'est une suggestion qu'on faisait, oui.
M. Cordeau: Peut-être que ces villes ont obtenu le droit
par une loi spéciale.
Mme Carrier: Cela devrait, puisqu'elles le font. Alors, pourquoi
ne l'aurait-on pas dans toutes les municipalités?
M. Tardif: Oui, c'est exact que les municipalités n'ont
pas de pouvoirs, sauf quelques-unes qui les ont obtenus par bill privé,
par charte spéciale, d'acquérir des immeubles pour des fins
autres que municipales. Malheureusement, jusqu'à maintenant, le
législateur n'a jamais défini l'habitation comme une fin
municipale, hormis à l'intérieur d'un programme spécifique
fait en vertu de la Loi de la Société d'habitation, si bien que
c'est par dérogation à la loi générale que
certaines municipalités ont pu acquérir des parcs, les convertir
ou les mettre à la disposition de propriétaires de maisons
mobiles.
Je dois avouer que nous étudions présentement, au
ministère, cette question de permettre aux municipalités
d'acquérir des immeubles pour des fins autres que municipales, au sens
limité et traditionnel du terme avec, évidemment, les balises
qu'il faudra mettre puisqu'on considérait difficilement de permettre aux
municipalités d'acquérir des immeubles avec des deniers publics
pour les céder à vil prix parfois à des promoteurs ou
autres. Donc, il y a des précautions à prendre, mais c'est un
dossier sur lequel mon ministère travaille présentement, en
effet, d'une façon générale, pas uniquement pour les
maisons mobiles.
M. Cordeau: Non, mais pour fins d'habitation aussi, parce
que...
M. Tardif: C'est ça.
M. Cordeau: ... à cause des lois 101 et 90 aussi, le
zonage agricole, je crois, parce que le prix des terrains disponibles
actuellement augmente sensiblement.
M. Tardif: C'est un dossier fort important que celui de la
municipalisation du sol, comme on l'appelle au ministère, et sur lequel
nous travaillons.
M. Cordeau: On y reviendra certainement avec des questions
à l'Assemblée nationale.
Le Président (M. Laberge): Parfait! M. Dufour...
Mme Carrier: On veut que ça cesse d'être à
l'affût d'un individu.
M. Cordeau: Mais le seul moyen de contrer ça, c'est de
créer d'autres parcs pour qu'il n'y ait pas un monopole de parcs entre
les mains de certains individus.
Le Président (M. Laberge): M. Dufour, vous aviez une
question?
M. Dufour: Le fond du problème, c'est un manque de
terrains disponibles. Alors, que la solution soit du côté des
municipalités ou qu'elle soit vers l'incitation à l'entreprise
privée, en fait, les gens n'ont aucune objection. Payer un loyer
à l'un ou payer un loyer à l'autre, pour des services
équivalents, les gens ne tiennent pas nécessairement à ce
que ce soit municipal. Seulement, c'est entendu qu'étant municipal, on
aurait peut-être davantage l'impression d'appartenir à une
municipalité là où on demeure, parce qu'il se passe un
drôle de phénomène dans ces ghettos-là. Par exemple,
à Cité-parc de maisons mobiles à Laval, ne vous demandez
pas la couleur d'une gratte de la ville de Laval. On ne sait pas ce que c'est,
si c'est blanc, bleu ou rouge. On n'en voit jamais. On n'a pas l'impression
d'appartenir à une municipalité. On a l'impression d'être
dans un site temporaire qui va durer X temps. On dirait qu'il n'y a pas de
surlendemain ni même de lendemain à ces choses-là. Il y a
un phénomène de permanence, un phénomène de
disponibilité. En créant plus d'espace, il y aura
nécessairement dans l'entreprise privée un jeu de l'offre et de
la demande. Actuellement, ils ont beau jeu. C'est ce qui est le fond du
problème.
M. Tardif: Je m'excuse, mais...
M. Dufour: Oui.
M. Tardif: ... vous payer combien par mois à Laval ou
à Vimont pour louer vos terrains?
M. Dufour: A Vimont, au propriétaire lui-même, on ne
sait plus au juste si on doit payer $95 ou $130. On est en discussion.
M. Tardif: Mettons $95 par mois.
M. Dufour: $95 par mois et $10 de taxes à la ville de
Laval.
M. Tardif: Et $10 de taxes?
M. Dufour: Oui. C'est l'équivalent des médailles
pour les chiens, vous savez. $10 par mois. C'est à peu près la
même chose, le même style de taxe qu'on paie. On nous donne un
permis d'existence. C'est tout. Les gens ne sont pas contre le paiement des
taxes municipales, à condition qu'on en ait pour notre argent. C'est
tout.
M. Tardif: D'avoir les services.
M. Dufour: C'est d'avoir les services. Au fond, ce n'est pas la
charité qu'on demande. C'est uniquement quelque chose d'un peu moins
sauvage comme installation ou comme implantation. Que les terrains soient
vendus à ces gens-là, c'est une solution. La solution ne serait
pas simple, unique. Elle devrait être complexe, je crois.
Le Président (M. Laberge): Y a-t-il d'autres
questions?
M. Cordeau: Non. Je crois que cela complète, parce que
votre mémoire est assez précis. J'ai compris moi aussi les autres
points, mais j'aimais poser une question bien spécifique sur les parcs
municipaux pour les maisons mobiles.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Beauce-Nord.
M. Ouellette: Ma question s'adresse, M. le Président,
à Mme Carrier qui dit avoir vécu dans un parc municipal à
Hauterive. Selon votre expérience, est-ce que la qualité des
services offerts dans les parcs municipaux est supérieure à celle
qu'on retrouve généralement dans les parcs privés?
Mme Carrier: Monsieur, je vais vous dire que c'est la ville
à ce moment-là qui a fermé le parc Richmond. Il y avait le
parc Richmond et le parc Parent. Ils en ont fermé un parce que,
justement, c'était un dépotoir. C'est la ville qui l'a ouvert et
je vous dis qu'on était bien. On avait une grandeur de terrain qui
était raisonnable. Les services étaient adéquats. On
était bien déneigé. Les rues étaient propres. Les
gens avaient quand même... Il avait une réglementation, mais on
était bien prêts à s'y plier, parce qu'on était
considérés comme des citoyens normaux. En fait, on faisait partie
de la ville. Ce n'était pas comme dans une espèce de ghetto comme
on voit ici, par exemple, à Vimont. Et on se retrouve toujours au
Québec pourtant pour voir une si grande différence entre la
Côte-Nord et ici. Oui, le parc de maisons mobiles à Hauterive,
pour y avoir vécu, était fantastique. Et je sais qu'il en existe
à Sept-lles. On monte dans le nord et il y en a. Pourquoi n'y en a-t-il
pas dans le sud comme dans le nord?
M. Ouellette: Vous sentiez-vous à ce moment-là
suffisamment citoyens à part entière pour vous permettre de
demander à la ville d'augmenter la qualité ou la quantité
de ses services...
Mme Carrier: On les avait.
M. Tardif: ... au même titre que les autres contribuables
de la communauté?
Mme Carrier: Oui, absolument.
M. Tardif: Vous étiez vraiment chez vous.
Mme Carrier: Oui. On était sur le même pied
d'égalité que n'importe quel citoyen, parce qu'on est comme tous
les citoyens, en fin de compte. C'est une maison qui a des roues en dessous.
C'est tout. Et on était traité comme cela à Hauterive.
M. Ouellette: Je vous remercie.
M. Tardif: Juste une question. Est-ce que les locataires de
terrains et propriétaires de maisons mobiles sont des gens qui demeurent
à la même place relativement longtemps ou si, finalement...
Mme Carrier: Oui.
M. Tardif: Non, je veux dire la moyenne de roulement n'est pas
supérieure à celle qu'on pourrait rencontrer dans le stock de
logements réguliers.
Mme Carrier: M. le ministre, cela fait douze ans que je demeure
à Laval. Je ne déménage pas souvent et je ne suis pas la
seule comme cela. On est là pour y rester. Il y en a dans le même
cas que moi. Mon mari était dans la construction et était
appelé à déménager souvent; maintenant il s'est
acheté une maison. Pourquoi la vendre? C'est un chez-nous qui est
confortable. Il y en a d'autres qui sont à la retraite. Ils sont
là pour y rester. Il n'y a pas d'entretien ni de réparation,
moins que dans une maison, et pour bien des raisons, c'est accommodant.
M. Tardif: Donc, il n'y a pas de roulement plus grand là
que...
Mme Carrier: Non. Comme je vous dis, c'est pour y rester.
M. Tardif: D'accord, merci beaucoup, madame.
Le Président (M. Laberge): Quant à moi, je remercie
l'Association des propriétaires de maisons mobiles de Vimont Inc.,
spécialement M. Robert Dufour, Mme Carrier, M. Gagnon et M. Dagenais de
nous avoir fait part de leurs remarques et de leurs recommandations et
j'appelle maintenant la Commission des services juridiques à venir faire
part de son mémoire.
Bienvenue, mesdames et messieurs. Est-ce que vous auriez la
bonté, l'amabilité de vous présenter comme la coutume
s'est établie?
Commission des services juridiques
M. Lafontaine (Yves): Nous sommes tous des avocats de l'aide
juridique du Québec. A ma gauche, à l'extrême gauche, M.
Michel Lamarre, de Longueuil, Hélène Joly-Ryan, du service de
recherches de la Commission des services juridiques. A ma droite, Marion
Thibault-lezzoni, directrice d'un bureau à Montréal, et Pierre
Proulx, directeur du contentieux civil de la ville de Québec.
Moi-même, je suis Yves Lafontaine, président de la Commission des
services juridiques.
M. le Président, M. le ministre, messieurs les
députés, il me fait plaisir d'abord de venir en commission
parlementaire parce que c'est un sujet que l'aide juridique a à coeur
depuis déjà sa création. Potentiellement, l'aide juridique
peut rendre des services à deux millions de Québécois
annuellement, mais en pratique, sur les 200 000 dossiers que l'aide juridique a
ouverts l'année dernière, il y a eu 16 000 cas qui se
rapportaient à des relations locateur-locataire tant par des avocats
permanents que des avocats de pratique privée qui exercent sur des
mandats qui leur sont confiés par l'aide juridique. C'est donc dire que
nos avocats vivent quotidiennement les problèmes du logement et c'est
pourquoi il nous faisait plaisir de venir ici pour vous expliquer notre
façon de voir les choses. C'est bien sûr qu'on ne veut pas
s'immiscer dans les pouvoirs politiques, mais on veut quand même
possiblement faire des suggestions pour l'amélioration du projet de loi
qui est devant nous.
Le Président (M. Laberge): M. Lafontaine, pourriez-vous
rapprocher votre microphone d'à peu près un ou deux pouces pour
faciliter l'entendement de tout le monde. Merci.
M. Lafontaine: Par rapport au livre blanc qui est sorti il y a
déjà un bout de temps, il semble qu'il y ait une faille majeure
dans le projet de loi. Le projet de loi, on ne veut pas lui enlever ses
mérites, bien entendu, qui sont, entre autres, l'uniformité
législative, ce qui était absolument nécessaire quant
à nous, parce qu'il y avait différents textes législatifs
qui se rapportaient aux difficultés entre locateur et locataire. Il
offre aussi l'avantage, bien entendu, de créer des tribunaux
spécialisés qui sont uniformes, créer une juridiction dans
laquelle on puisse possiblement se retrouver. Cependant, on n'y retrouve pas,
quant à nous, sauf en embryon, possiblement et vers la fin de mon
entrevue j'aimerai expliquer l'embryon que j'y vois une politique
globale de logement au Québec. Il semble plutôt que ce soit une
espèce de Code pénal du logement, mais peut-être moins, du
moins à la perception qu'on en a, une politique d'ensemble du logement
au Québec. Il semble que le logement soit encore un bien de consommation
plutôt qu'être dans la catégorie des biens essen- tiels,
c'est-à-dire que le droit d'avoir un toit n'est peut-être pas
aussi important jusqu'à maintenant, du moins tel qu'il apparaît au
projet de loi, que le droit à la santé ou le droit à la
justice.
Bien entendu, il y a encore, quant à nous, des absences de
planification ou de coordination par le fait qu'il y a différents
intervenants qui vont possiblement être difficiles à coordonner.
Présentement, il est difficile pour nous de juger du projet de loi parce
qu'il n'y a pas de réglementation qui a été
déposée quant, entre autres, aux critères et aux
méthodes de fixation des loyers et au code d'habitabilité. Je
comprends que le projet de loi, je pense que c'est à l'article 86,
prévoit que c'est possible de fixer une réglementation quant aux
critères et aux méthodes de fixation des loyers, établir
des exigences minimales relatives à l'habitation et à
l'entretien, définir ce qu'est un logement impropre à
l'habitation. (11 heures)
Nous disons qu'effectivement, dans ces paragraphes, il est possible
d'avoir une politique du logement au Québec, mais on ne sait pas ce
qu'elle va être, étant donné le fait qu'on ne sait pas
quels vont être ces critères et de quelle façon on va
procéder. Nous aurions aimé, bien entendu, en savoir plus long
à ce sujet.
Encore une fois, pour résumer, notre suggestion est que les HLM
soient gouvernés par la même loi que tout le monde, quant à
nous. Si ce n'est pas cela, au moins, qu'on ajoute, tel que prévu
à la page 9 de notre mémoire, certaines règles
administratives qui puissent amener les gens à se considérer plus
comme des locataires à part entière.
Il y a aussi un aspect qu'on voulait souligner, à propos des
poursuites pénales. Il y a deux remarques là-dessus. C'est qu'en
vertu du Code civil, existaient déjà des sanctions pénales
dans le Code civil, de par la loi antérieure. Effectivement, à
notre connaissance, il n'y a jamais eu de sanctions pénales qui ont
été exercées, pour la simple et bonne raison qu'il n'y a
jamais eu personne qui était autorisé à porter des
plaintes, parce que la loi prévoyait que ça prenait des personnes
autorisées pour en porter. Nous disons: Ou bien ça prend une
personne qui va être autorisée, dorénavant, à porter
plainte et qui va le faire, ou bien permettez-nous, comme dans le cadre du
droit pénal habituel, de porter au moins des plaintes privées qui
seront entendues par le tribunal.
Une autre chose qu'on ne relève pas, puisqu'il s'agit d'une
absence, c'est l'absence de mécanismes de conciliation. Le projet de loi
actuel remplace la Loi de conciliation entre locateurs et locataires. Par
contre, tout ce qu'on retrouve, je pense que c'est à l'article 3.6, on
dit que la régie, au 5e paragraphe, "peut faire des règlements
pour favoriser la conciliation entre locateurs et locataires." C'est aussi
laconique que ça dans le projet de loi. La pratique courante nous
démontre que, dans ces relations locateurs-locataires, il y a un gros
facteur humain qui est un facteur de pression qui existe entre les personnes.
Si une personne a un
seul locataire et qu'ils demeurent tous les deux dans la même
propriété, il y a, bien sûr, un gros facteur de tension qui
fait qu'il y a des droits qu'on n'exercera peut-être pas parce qu'on se
dit: Si on est obligé d'aller devant un tribunal, ça prend des
proportions qu'on ne voudrait pas que ça prenne, parce que ça va
briser les relations qu'on peut avoir entre nous.
Notre suggestion, bien entendu, si la régie pouvait favoriser,
à l'aide de quel personnel, je ne le sais pas, parce qu'il y a la
question du budget, bien sûr, qui s'ensuit, ce serait peut-être
possible que, dans bien des cas, dans des situations où les relations
sont très directes entre locateurs et locataires, on puisse possiblement
d'abord procéder par une espèce de conciliation, essayer au moins
que les parties évitent une crispation de positions qui découle
nécessairement d'une comparution devant un tribunal ou devant une
régie.
C'est bien sûr qu'on retrouve aussi des suggestions qui sont
très intéressantes pour nous et qui vont nous donner un outil
supplémentaire dans la représentation qu'on a des locataires. Par
exemple, le fait de déposer le coût du loyer à la
régie, pour nous autres, ça règle une question, c'est bien
sûr que ça va éviter bien des problèmes. Le fait
aussi du maintien, dans les lieux loués par le conjoint ou une personne
qui habitait déjà dans l'appartement, ça va nous aider
aussi; les chambreurs, la position est réglée, bravo; les
terrains pour maisons mobiles, bravo; l'échelonnement des
arriérés, c'est la même chose, lorsque le tribunal condamne
par la suite le fait qu'on peut le répartir, enfin, le fardeau de la
preuve aussi, dans le cas de reprise de possession, la part du
propriétaire qui veut reprendre possession pour lui-même, on
trouve que c'est normal que ce soit lui qui ait le fardeau de la preuve, quand
c'est contesté.
Au niveau pratique, on retrouve ça à la page 5 de nos
commentaires, nous voudrions que la régie soit souple en ce sens qu'elle
puisse se déplacer. Au Québec, on le sait, parce qu'on a des
bureaux volants à Saglouc, dans le Grand-Nord, jusqu'à Hull, en
retournant vers Hâvre-Saint-Pierre et aux Iles-de-la-Madeleine, on sait
que la situation est très variable, au niveau des tribunaux, et variable
au niveau de la situation du logement. Ce que nous disons, c'est qu'il faudrait
que le tribunal puisse se déplacer assez souvent, de telle sorte que les
décisions puissent se prendre rapidement par des gens qui sont au
courant de la situation réelle à l'endroit où le
problème du logement se vit.
Et on suggère même de payer des frais de déplacement
quand c'est au-delà d'une certaine distance, pour que les personnes
puissent se rendre. Cela se fait déjà présentement, en
vertu de la Loi de l'assurance-maladie.
Il y a un autre sujet qu'on aimerait porter à votre attention. A
l'occasion, on a eu à le faire récemment assez souvent. On
déplore l'absence de mécanismes, de procédures devant les
tribunaux administratifs qui soient un peu uniformes entre les
différents tribunaux administratifs. Cela devient très difficile
pour nous qui sommes avocats. Imaginez-vous, pour le citoyen qui a à se
débrouiller là-dedans! Même au niveau des règles de
preuve, au niveau des règles de procédure, cela varie d'un
tribunal à l'autre. Nous croyons qu'il serait essentiel qu'à un
moment donné, le législateur se penche là-dessus et qu'il
y ait au moins des règles de procédure de base qui soient
à peu près semblables d'une régie ou d'un tribunal
administratif à l'autre.
Et en plus de cela, il ne faudrait pas oublier que cela prendrait un
budget assez fort, au niveau de la publicité ou au niveau de
l'information des citoyens, parce que la loi a beau améliorer un paquet
de situations, il faut que les gens le sachent. Et à cet effet, il faut
aussi que les décisions de la régie soient connues, non seulement
des avocats dans des rapports judiciaires, mais que ce soit aussi possible d'en
obtenir des résumés succincts, soit gratuitement ou, au moins,
à des prix très bas.
Il y a un problème, quant à nous. Nous trouvons que la
juridiction de la régie devrait s'appliquer à tous. Autrement
dit, on comprend difficilement qu'il y ait des exemptions à propos des
HLM. C'est le premier point. On en a d'ailleurs traité
préalablement. Et nous disons que les coopératives devraient
être considérées comme des propriétaires, parce que,
effectivement, les coopérants sont des copropriétaires, ni plus
ni moins, des logements qu'ils habitent et nous disons que la franchise qui est
accordée aux immeubles récents, c'est-à-dire le fait que
les immeubles qui sont bâtis depuis cinq années, où les
loyers sont fixés suivant les lois du marché, plus ou moins
libre, qui sont connues... Nous disons que ce n'est pas en donnant un
privilège à ces personnes qu'on va faire une politique du
logement. La politique du logement viendra d'incitations financières.
Les propriétaires de logements et ceux qui bâtissent des logements
sont intéressés par le rendement financier. Ce ne sont pas
et cela n'a pas raison d'être des philantropes qui sont là
pour fournir des toits aux personnes. Mais nous disons que ce n'est
peut-être pas la solution idéale, le fait d'exempter du pouvoir de
surveillance de la régie les immeubles récents. Cela irait
peut-être plutôt dans un ensemble global d'une politique du
logement avec incitation financière.
Au niveau même de la juridiction du tribunal de la régie,
il y a deux questions qu'on se pose, tel qu'établi dans notre
mémoire. La première question, c'est que nous disons que cela
n'apparaît pas clairement, les pouvoirs de cette régie. On trouve
des pouvoirs dans différents articles, un peu comme s'il y avait eu
différentes théories qui avaient circulé à propos
des juridictions de ce tribunal et qu'à un moment donné, on en
trouve un bout là, un autre bout là, et un autre bout là.
On vous dit franchement que c'est très difficile à
décortiquer pour savoir exactement quelle est la juridiction de cette
régie.
Et deuxièmement, nous nous posons de grosses questions au niveau
constitutionnel, tel qu'ex-
pliqué dans notre mémoire, non pas que ce soit
agréable de se poser ces questions, mais nous disons que ce n'est pas
à l'individu qui est pris dans un problème de logement de faire
le test de la constitutionnalité d'une loi, c'est-à-dire se
rendre jusqu'à la Cour suprême, comme dans la plupart des cas de
constitionnalité. Cela serait peut-être possible de
l'éclaircir ou, du moins, qu'il y ait peut-être des
négociations qui s'entreprennent pour voir ce qu'il en est à
propos de cette
A propos du Tribunal de la famille, il semble que ce soit
réglé. Il y avait une grosse question constitutionnelle qu'on se
posait. On se demandait: juridiction provinciale, juridiction
fédérale vis-à-vis d'un tribunal intégré de
la famille? Il semble que ce soit maintenant réglé et que les
deux parties se soient entendues. C'est peut-être aussi une autre
façon de procéder. Mais nous voulons vous donner les "caveat" que
nous voyons au niveau de la juridiction de cette régie.
Il y a une autre observation que nous faisons. Nous disons qu'en
pratique, dans certaines municipalités, le fait de confier le niveau de
juridiction quant aux changements de destination des loyers, quant à la
démolition des loyers, c'est courir des risques, parce qu'il peut
s'établir toutes sortes de politiques qui vont varier d'un endroit
à l'autre, suivant les gouvernements au pouvoir dans ces
municipalités, suivant aussi les fonctionnaires, leur attitude et nous
croyons, pour notre part, que, normalement, c'est la régie qui devrait
avoir juridiction sur l'article 27 qui prévoit, autrement dit, une
juridiction des municipalités. Nous comprenons qu'il y a un droit
d'appel vis-à-vis de la régie, mais, dans le fond, la
régie pourrait très bien être structurée et
être organisée pour entendre aussi au premier palier, d'autant
plus que, pour les municipalités qui n'auront pas une telle
réglementation, ce sera la régie qui, de toute façon,
devra entendre ces causes-là.
Nous voulons souligner aussi au niveau pratique pour nous, c'est
important à la page 13 de notre mémoire, la question des
ordonnances que la régie peut émettre. Il y a une jurisprudence
assez récente qui se développe de plus en plus suivant la loi qui
existe présentement dans le sens qu'on peut prendre des injonctions en
matière de logements assez souvent, entre autres, lorsqu'il y a des
réparations urgentes, ou que les logements deviennent inhabitables, ou
qu'il y a des services essentiels qui ne sont pas rendus. On peut
procéder et on procède de plus en plus par injonction.
L'injonction est une méthode rapide qui amène des
résultats immédiats. On comprend le souci du législateur
de remplacer cela par une ordonnance qui semble, en tout cas, si on regarde
l'article, si je me rappelle bien, 43... Il semble que la régie puisse
émettre des ordonnances. Il y a d'ailleurs d'autres articles aussi qui
le mentionnent. Nous disons: II faudrait peut-être spécifier
davantage le champ dans lequel la régie peut rendre des ordonnances et
aussi, pour une sûreté légale, dire de quelle façon
on pourra obtenir ces ordonnances et de quelle façon aussi elles
pourront s'appli- quer, parce qu'il y a aussi une nécessité de
sanctions. On prend l'exemple du subpoena là-dedans. On dit
là-dedans que les commissaires, les régisseurs ont le droit et
sont comme des commissaires en vertu de la Loi des commissions
d'enquêtes, sauf qu'on ne leur donne pas le pouvoir coercitif,
c'est-à-dire le pouvoir d'emprisonnement. Nous disons: II faudrait au
moins qu'ils aient un pouvoir de détention, comme un subpoena, suivant
le Code de procédure civile, sans quoi, si on a le pouvoir de convoquer,
mais qu'on n'a pas de sanctions, si les gens ne se présentent pas, on
calcule que c'est un pouvoir illusoire, cela devient un peu comme la Cour
internationale de justice de La Haye.
Le reste comprend surtout des questions de procédure. Je veux
simplement souligner en passant que l'article 84 qui constitue une mesure
exceptionnelle du fait de dire que, si l'appel apparaît dilatoire ou
abusif, il peut y avoir une condamnation aux dommages et intérêts.
Ceci nous semble absolument contraire à toutes les théories de
droit qui se développent présentement et il ne faut pas croire
que les gens se font un sport d'aller devant les tribunaux. Même si, chez
nous, c'est gratuit, les gens ne sont pas portés à abuser, je
croirais même, j'oserais même dire qu'assez souvent, cela prend
quasiment des croisés pour aller devant les tribunaux, étant
donné le temps que cela peut prendre ainsi que toutes les
disponibilités que la personne doit avoir pour être capable de
suivre les procédures.
Je pense que, plutôt, la solution pour éviter des appels
futiles ou dilatoires, pour autant qu'il puisse y en avoir, ce serait
peut-être qu'il puisse y avoir une requête qui serait jugée
immédiatement où on pourrait demander immédiatement le
rejet de l'appel sous prétexte que c'est futile ou dilatoire, tel que
cela existe d'ailleurs présentement dans les mécanismes des
tribunaux ordinaires.
Enfin, nous voulons terminer là-dessus. Nous voyons, comme je le
disais, au début, une possibilité dans cette loi, par la
réglementation peut-être d'avoir une politique globale du
logement. Nous faisons l'option que la politique du logement est possible, si
on est capable d'établir des critères financiers quant au
rendement des immeubles, c'est-à-dire quant aux logements, quant aux
coûts qui peuvent être facturés. Nous disons qu'il est
certainement possible, présentement au Québec, d'établir
des niveaux d'augmentation de loyers basés sur une
réalité. La réalité doit tenir compte d'un ensemble
de facteurs. Il existe des hommes de science, il existe des actuaires qui sont
capables d'établir des bases d'augmentation d'une année par
rapport à une autre de tous les facteurs qui entrent en ligne de compte,
parce que, déjà actuellement, la formule qui existe à la
régie, on dit que c'est pour une application individuelle, mais, en
pratique, on tient quand même compte, la plupart du temps, seulement de
tel ou tel facteur, étant donné la facturation elle-même.
(11 h 15)
Nous disons qu'il est possible de tenir compte peut-être dans la
réglementation de critères qui pourraient être
pré-établis, qui constitueraient, ni plus ni moins, une grille
d'évaluation de l'augmentation des prix pour l'avenir. Je veux
simplement prendre un exemple c'est parce qu'il y a des facteurs dont on
ne tient pas compte. Actuellement, si on regarde les augmentations qui sont
accordées, celles-ci correspondent à peu près à
l'accroissement du coût de la vie ou du coût des dépenses.
D'un côté, le propriétaire a le droit de déduire de
son impôt sur le revenu les dépenses ainsi qu'une
dépréciation de son immeuble. Autrement dit, il paie moins
d'impôt, étant donné la dépréciation qu'il
peut prendre sur son immeuble. Or, en même temps, son immeuble
s'apprécie. La preuve: Quand il vient pour le vendre, il est
apprécié. Autrement dit, il a un double revenu. Il a d'abord le
revenu par l'impôt qu'il n'est pas obligé de payer et il a aussi
l'appréciation de la valeur de son immeuble.
D'un autre côté, le locataire, simplement par
l'écoulement du temps, a une réduction de la jouissance de son
logement, puisque celui-ci se dégrade simplement par l'usage, mais on va
lui imposer un prix en plus. Donc, nous disons qu'il y a un
phénomène de double imposition et qu'il est possible, dans des
critères d'établissement de loyers, de tenir compte de ces faits.
La question qu'on se pose par après, c'est: Est-ce que le fait de fixer,
par exemple, une norme provinciale n'aurait pas un effet d'entraînement
obligatoire vis-à-vis tous les propriétaires?
Présentement, on sait qu'il y a des propriétaires qui
n'augmentent pas les loyers, pour toutes sortes de raisons et, la plupart du
temps, pour des raisons sociales parce qu'il y a une pression sociale qui
s'exerce entre le locateur et le locataire qui fait que le locateur dit, entre
autres: J'ai un bon locataire. On s'entend très bien. Ce n'est pas pour
une augmentation de quelques dollars par mois que cela vaut la peine
réellement de l'augmenter. La crainte qu'on peut avoir ce qui
s'est d'ailleurs manifesté, d'après ce qu'on dit, en Ontario
c'est que si on fixe un chiffre global pour la province, d'augmentations
dans une année, le propriétaire la pression sociale sera
moins forte dira: La réglementation m'autorise à le faire.
Donc, on va imposer en même temps l'augmentation de tous les loyers.
Il est peut-être possible c'est simplement une question
politique que vous aurez à régler, mais je veux quand même
vous soumettre cette réflexion aussi d'avoir un facteur qui soit
régionalisé et même par quartier, autrement dit, on
pourrait tenir compte de différents incidents. L'exemple réel qui
me vient à l'esprit, c'est qu'à Murdochville,
présentement, les loyers n'ont pas la même valeur qu'ils pouvaient
avoir avant la grève de Murdochville, pour la simple et bonne raison
qu'il n'y a plus personne qui veut aller habiter à Murdochville, il n'y
a plus d'industrie, il n'y a plus rien là. Donc, il serait important, au
niveau de la régie, de fixer dans ses critères qu'il y a un
facteur local qui entre en ligne de compte ou, dans les grandes villes, un
facteur de quartier. Il serait donc possible de prévoir dans des
quartiers que l'augmentation justifiée pour l'année suivante
serait X de plus que dans d'autres quartiers. Cela permettrait peut-être
au législateur d'orienter le logement, d'avoir une politique du logement
par une politique des prix. C'est possiblement la façon de s'y prendre.
C'est trop long?
Le Président (M. Laberge): Me Lafontaine, je ne voudrais
pas vous couper la parole, parce que je sais d'abord que votre mémoire
est très étoffé. Cependant, les membres de cette
commission avaient convenu de terminer pour midi. Il est 11 h 20. Je sais que
plusieurs ont des questions nombreuses à vous poser. Je vous demanderais
de résumer rapidement si vous avez encore un ou deux points.
M. Lafontaine: En résumé, ce qu'on dit, c'est qu'il
est peut-être possible d'établir une politique du logement par une
politique d'établissement des prix des loyers. Il existe certainement
des critères financiers qui peuvent être
régionalisés pour permettre, par le biais même de cette
loi, étant donné le pouvoir réglementaire qui s'y trouve,
une certaine politique du logement qui permette d'avoir des logements d'abord,
d'avoir des logements de qualité et à un prix abordable. Donc, il
est possible avec des incitations financières, d'obtenir cela, parce que
pour nous, il n'est pas question que ce soit l'Etat qui se mette à
bâtir des logements et des appartements pour loger tout le monde, disant:
C'est un droit social, donc l'Etat va le prendre en main. Il est
peut-être possible de l'orienter d'une certaine façon par des
mesures financières. Lors des questions, il nous fera plaisir
d'élaborer sur certains points.
Le Président (M. Laberge): Je vous remercie, Me
Lafontaine. Je cède la parole au ministre.
M. Tardif: M. le Président, je remercie très
sincèrement la Commission des services juridiques pour le mémoire
qu'elle a présenté devant cette commission, de même,
d'ailleurs, que pour les autres mémoires qu'elle nous a transmis par
exemple à l'occasion du livre blanc. Il y a là matière
à réflexion et nous comptons très certainement regarder
certains des points soulevés.
J'aimerais cependant, avant peut-être de poser un certain nombre
de questions à Me Lafontaine, demander ou, en fait, d'une façon
générale, me poser la question à savoir s'il est
concevable d'établir, d'une part, une politique d'habitation
essentiellement à partir d'une politique de contrôle des prix du
logement, et surtout s'il est concevable d'avoir, dans une loi qui crée
la Régie du logement, une politique d'ensemble d'habitation.
Qu'il faille une telle politique, j'en conviens. Que l'on puisse
l'établir par le biais de la création d'une régie, c'est
un peu comme si on demandait d'établir, je ne sais pas, moi, une
politique pénale au Québec à partir de
l'établissement de la Commission des services juridiques. Je pense
que
le parallèle n'est peut-être pas si faux que ça ou
si gros que ça, que demander qu'à l'occasion d'une pièce
de législation sur la création de la Régie du logement, on
refasse entièrement tout le monde de l'habitation au Québec.
Parce qu'une politique d'habitation, c'est beaucoup plus que ça. Cela
passe, par exemple, par des programmes de restauration; ça passe par une
réforme de la fiscalité, puisque la taxation foncière est
une composante importante du coût du loyer précisément.
Cela passe par des modifications au mode de tenure dans le logement, logements
coopératifs, logements publics à certains égards, pour
certaines catégories de citoyens. Cela passe par des formules
d'accès à la propriété variée du type
copropriété sur lequel nous nous posons des questions, sur lequel
j'aimerais avoir les avis de la Commission des services juridiques. On sait les
problèmes qu'a soulevés la modification au Code civil en 1974
avec la copropriété divise et le moratoire qui a
été imposé par l'ancien gouvernement et qu'on a maintenu,
et ces problèmes juridiques qui sont, je dirais, le principal obstacle,
la principale barrière au rétablissement de ce mode
d'accès à une forme de propriété.
Une politique d'habitation passe aussi par des mesures en matière
d'aménagement et d'urbanisme et, évidemment, un projet de loi est
présentement devant l'Assemblée nationale. C'est donc dire que je
suis tout à fait d'accord avec la Commission des services juridiques
lorsqu'elle dit: On ne trouve pas dans le projet de loi no 107 une politique
d'habitation. C'est vrai, et puis, ce n'est pas là non plus, je pense,
qu'on devrait la trouver.
Nous travaillons sur des éléments de cette politique.
Déjà, une réforme de la fiscalité viendra apporter
un certain nombre de réponses sur le plan fiscal et des mesures seront
prises.
Ceci dit, si on en vient maintenant au projet de loi no 107, c'est
également vrai que la commission a raison de réserver son
jugement sur l'orientation de cette loi dans la mesure où la
réglementation n'est pas encore connue. Je pense au règlement sur
les normes minimales d'habitabilité, le code d'habitabilité, sur
ces normes-plancher qui feraient qu'un logement pourrait être
déclaré impropre à l'habitation, sur la constitution de la
régie, c'est-à-dire des régisseurs, des administrateurs
qui seront des gens à temps plein, sur la méthode de fixation du
loyer, sur le contenu des nombreux avis prévus dans la loi. Mais on
conviendra, je pense, que la loi de conciliation, enfin la loi qu'on vise
à refondre, qui existe depuis 1951 et qui a été reconduite
d'année en année, prévoyait aussi déjà des
règlements, lesquels règlements, en 25 ans, n'ont jamais
été adoptés. Il n'y a jamais eu de règlements
d'adoptés. La régie s'est donné des règles de
fonctionnement internes, mais pas connues du public.
Je me suis engagé, plus tôt dans les travaux de cette
commission, non seulement à ce que ces règlements prévus
dans la loi soient adoptés, mais à les déposer devant
cette commission lors de l'étude article par article,
c'est-à-dire après que nous aurons reçu les
mémoires qui pourraient évidemment modifier un tant soit peu
l'orientation de la réglementation. Donc, les règlements seront
déposés devant la commission lors de l'étude de ce projet
de loi, donc, avant même l'adoption du projet de loi, et on pourra
évidemment connaître véritablement l'orientation de
certains passages importants reliés à la qualité du
logement, notamment.
Ceci dit, je reconnais que, sur un certain nombre de points comme, par
exemple, l'accessibilité à la régie en termes non
seulement de lieu mais d'heures, on a tenté de couvrir cela en disant
que la régie pourra siéger à des jours et des heures non
juridiques, en dehors des heures régulières des tribunaux, mais
je pense que la régie sait mieux que moi que des dispositions semblables
existent pour la Cour des petites créances et c'est loin d'impliquer que
la Cour des petites créances, c'est toujours accessible le soir. Ceci
dit, personnellement, j'ai l'intention de faire en sorte que ce passage de la
loi ne reste pas lettre morte, dans la mesure du possible.
J'aimerais maintenant poser quelques questions en rapport avec ce que
l'on a appelé l'insistance de la loi 107 à créer des
infractions pénales. Je vous avouerai que, comme criminologue, ma
tendance est plutôt à la "décriminalisation", à la
"déjudiciarisation" et que cela me fatigue également de voir dans
une loi comme celle-ci la création d'autant d'infractions à
caractère pénal. Là-dessus, votre mémoire souligne
le fait et pose la question plutôt en termes techniques. Qui pourra
porter des plaintes, des plaintes privées ou... J'aimerais
peut-être avoir de votre commission des suggestions sur la façon
de "décriminaliser" et, néanmoins, de parvenir aux
résultats que l'on recherche, c'est-à-dire de faire en sorte que
cette loi soit observée. Je sais que ce n'est pas facile, mais vous
êtes les experts. Vous avez une expertise que je n'ai pas. Vous avez dit
que la Commission des services juridiques avait assuré l'aide juridique
dans plus de 16 000 causes, l'an dernier, impliquant la loi du logement. Je
pense que ceci vous confère une expertise fort valable et j'aimerais,
à ce sujet-là, avoir vos suggestions.
Egalement, sur la question du contrôle des démolitions, la
Commission des services juridiques nous dit: Nous ne croyons pas que les
démolitions et l'affectation des logements devraient être
contrôlées par des instances locales décentralisées
puisque ceci pourrait mener à toutes sortes de situations
différentes et qu'en conséquence, la régie devrait
être l'autorité suprême. Je dois vous dire que,
là-dedans, on était un peu dans une situation de conflit
d'orientation, dans la mesure où on dit: Un des objectifs du
gouvernement, c'est la décentralisation. C'est de faire en sorte que les
décisions soient prises le plus près possible des gens qui sont
concernés. Comme la décision de démolir ou non une maison,
un quartier, un pâté de maisons est une décision qui
affecte véritablement la fibre sociale, la fibre urbaine d'un quartier,
d'une ville, d'un village, et que c'est éminemment une décision
politique, il nous semblait que le lieu privilégié où
devaient s'exercer les représentations, les pressions des groupes
pour et contre, devait être le conseil de ville municipal et non pas un
organisme central, gouvernemental, complètement à
l'extérieur. (11 h 30)
C'est évidemment une approche. C'est la raison pour laquelle il
nous a semblé préférable de laisser cette question au
niveau municipal avec évidemment un droit d'appel, comme vous l'avez
mentionné, à la régie. Quant aux questions de la
juridiction, nos légistes sont d'accord qu'il faudra reformuler certains
articles de cette loi. En matière de constitutionnalité, comme
vous le dites, ce n'est pas tellement agréable de soulever ces
questions, mais l'avis du ministère de la Justice indique que ce serait
constitutionnel. Je vous avouerai que s'il y a, d'un côté, des
avocats qui me disent que c'est constitutionnel et d'un autre, certains qui
disent que cela ne l'est pas, je vais probablement les laisser discuter sur la
question, mais il semblerait qu'au ministère de la Justice, on soit
assez formel à cet égard.
J'ai lu attentivement votre mémoire. J'aimerais sur ces questions
avoir vos commentaires, s'il vous plaît.
M. Lafontaine: Je vous remercie, M. le ministre. D'abord, ce que
je voulais, par les commentaires de l'article 86, c'est-à-dire ce que
nous voulions, c'était de savoir, dans le fond, si le ministère
avait, dans ses vues prochaines, une politique de l'habitation. Je pense qu'on
a un peu répondu à la question qu'on se posait.
Le deuxième commentaire, c'est à propos de la page 29 de
notre mémoire: Des dispositions pénales. Je comprends qu'en tant
que criminaliste, vous n'aimiez pas vous voir dans un droit civil, je pense que
notre réaction de base aussi est à peu près
celle-là. Nous ajoutons, de plus, dans notre mémoire, pour
être plus complet, qu'on a autant de craintes que ne soient jamais
appliquées ces sanctions pénales, étant donné leur
grosseur, que des juges vont s'y refuser, vont chercher toutes sortes de
faux-fuyants pour ne pas appliquer cela, parce que dans certains cas, c'est
nettement exagéré étant donné qu'il y a des peines
minimales prévues dans cette loi-là.
On a vécu un régime dans lequel il n'y avait pas de
plainte pénale, même s'il y avait le pouvoir de l'avoir; quant
à nous, ce n'est pas en imposant des sanctions pénales qu'on
pense que cela peut changer le comportement des propriétaires, pour
aller jusqu'au fond. On ne pense pas que ce soit directement ce qui va se
passer. Parce qu'effectivement, il n'y aura pas de sanction pénale de
prise, on a bien l'impression, d'autant plus que si par la
réglementation on instaure un mécanisme de conciliation, comme on
essaie de le prévoir, il est peut-être possible qu'au niveau d'une
conciliation entre le locataire et le propriétaire ou un ensemble de
locataires et un gros propriétaire, on lui dise: II y a des sanctions
possibles. Mais il ne faut pas oublier aussi qu'on agit dans un tout autre
contexte à cause d'un moyen de procédure qui s'appelle la "class
action" si on peut dire. Autrement dit, on va être capable maintenant,
quand il s'agit d'un gros ensemble immobilier, parce que ces sanctions
pénales ne se prendront pas entre un locataire et un
propriétaire, du moins habituellement. Vous imaginez, ils vont
être à couteaux tirés le restant de leurs jours. C'est bien
sûr qu'ils ne prendront pas ces sanctions-là. Avec possiblement le
recours collectif, c'est peut-être possible de mettre plus de pression
qu'on pouvait avoir. Autrement dit, ce n'est peut-être pas obligatoire de
faire intervenir la société par le droit pénal pour
ajouter des sanctions additionnelles. Autrement dit, on est très
ambivalents là-dessus. Si le législateur décide que les
sanctions pénales ne sont peut-être pas nécessaires au
civil, je pense qu'on va être obligé de le suivre en pratique.
Vous avez parlé aussi de l'article 27 qui prévoit que les
municipalités, étant donné que c'est un pouvoir
décentralisé, devraient avoir le pouvoir là-dessus. Nous
ne voyons pas la régie comme un organisme central gouvernemental
établi dans la ville de Québec. Nous voyons cette régie
comme étant formée de régisseurs qui demeurent ici et
là et qui sont au courant de la situation municipale de ces
endroits-là. En fait, je pense que notre principale réticence, en
tant qu'avocats à ce que ce soit confié à une
municipalité, la municipalité n'est pas un tribunal, elle n'a pas
de règle, elle n'a pas le "due process of law" si vous excusez
l'expression elle ne se traduit à peu près pas
autrement dit, où il soit possible de faire valoir des revendications
autrement que par des pressions politiques. Comme avocats, nous ne pouvons pas
faire des pressions politiques comme telles, mais nous disons: Donnez-nous des
mécanismes judiciaires.
La meilleure façon d'avoir des mécanismes judiciaires,
nous prétendons que c'est vis-à-vis d'un quasi-tribunal qu'on
appelle une régie. D'autant plus que la régie va devenir
spécialisée, par la force des choses, on va en voir ici et
là. J'espère que les gens seront capables de s'adapter aux
circonstances réelles de chacun des endroits et être au courant de
la texture du milieu. Là, on tombe dans un autre problème qui est
le problème humain; il y a toujours en dessous d'une loi, on a beau
avoir la plus belle loi du monde, si on n'a pas des gens capables de s'adapter,
ça peut rester lettre morte. Là-dessus, on est d'accord.
Au niveau constitutionnel, si le ministère de la Justice est
d'opinion contraire à nous, ça nous fera plaisir de nous rendre
jusqu'à la Cour suprême à un moment donné, mais avec
les coûts que ça peut comporter.
Mme Joly-Ryan (Hélène): II y a une chose que
j'aimerais souligner, qui a peut-être été mal comprise dans
le mémoire, c'est pour ça que j'aimerais rétablir les
faits. Quand on parle d'une politique globale du logement, à l'aide
juridique, on n'entendait pas la trouver, bien entendu, dans la loi 107. C'est
un peu ce que vous disiez, je pense que c'est peut-être erroné de
regarder la chose comme ça. Pour nous, une politique globale du
logement,
c'est, bien entendu, au niveau de la construction, au niveau de
l'économie du Québec, les travailleurs, puisqu'une maison est
construite par les travailleurs; c'est au niveau de la Société
d'habitation du Québec et des HLM qui est déjà une
structure établie dans laquelle on met beaucoup d'argent; c'est au
niveau des subventions aux logements qui pourraient venir il y en a
déjà au fédérai, il pourrait y en avoir au
Québec.
Au niveau de la fiscalité, c'est un peu ce qu'on disait tout
à l'heure quand on parlait des cinq ans de privilège
accordé aux nouvelles constructions. Effectivement, c'est un
privilège fiscal et vous l'intégrez à une loi où on
parle des droits des locateurs-locataires. Il me semble que cette situation
devrait être couverte par une loi fiscale plutôt que par le projet
de loi 107, c'est ce qu'on entend par une politique globale du logement. Bien
entendu, on serait bien d'accord pour que soit favorisée
l'élaboration d'une politique des coopératives. Il reste que ce
n'est pas clair, la différence entre le coopérant qui soit un
propriétaire et le locataire, quand la coopérative loue à
des gens qui n'en font pas partie.
Pour nous, c'est la politique globale du logement, on est tout à
fait d'accord avec vous. Quand on parle de fixation du loyer, de code
d'habitabilité, il nous paraît que ce sont là les deux
grands moteurs de la loi et ils ne sont pas expliqués dans le projet de
loi 107, malheureusement. Tout le reste qui découle de ça, le
droit de faire réparer, le droit de déguerpir, le droit
d'évincer, ce sont tous des mécanismes qui sont mineurs par
rapport à ces deux grandes chevilles. Ce n'est pas expliqué dans
la loi. Je ne vois pas vraiment ce qu'est le changement de cette loi, d'une
façon marquée, pour le locataire québécois, si on
n'explique pas ces deux grands mécanismes.
M. Tardif: La loi n'explique pas, j'en conviens. Elle dit que des
règlements seront adoptés et ces règlements seront
effectivement déposés devant la commission et avant même
l'adoption du projet de loi. Remarquez...
Mme Joly-Ryan: Vous admettrez que pour nous, c'est dangereux,
pour la clientèle que l'on représente, quand on parle de
déguerpissement et on dit: "Si le local est inhabitable" et qu'on ne
sait pas ce que ça veut dire, un local inhabitable, et que la
jurisprudence nous dit qu'un local inhabitable pour quelqu'un...
M. Tardif: Mais vous connaîtrez, Me...
Mme Joly-Ryan:... ça peut être des rats et des
souris dans la maison, avec les coquerelles, ça reste habitable parce
que cette personne vient d'un milieu social...
M. Tardif: Vous connaîtrez la teneur des règlements
avant même que la loi soit adoptée. Vous avez soulevé un
point, les sociétaires de coopératives. Vous dites que ces gens
devraient à la page 29 de votre mémoire, vous traitez des
exclusions, c'est ça? Non, ce n'est pas ça, ce sont les
dispositions pénales qui sont là, à la page 19, pardon. A
la page 19 de votre mémoire, il est question... Non, ce sont les hausses
de loyer, celles-là.
Mme Joly-Ryan: A la page 9, les coopératives.
M. Tardif: Page 9, page 19, page 29, j'avais retenu au moins le
dernier chiffre.
Mme Joly-Ryan: J'imagine que... on vous écrit tellement
que vous devez vous perdre dans les pages.
M. Tardif: Pardon?
Mme Joly-Ryan: On vous écrit tellement que vous vous
perdez dans les pages.
M. Tardif: On vous remercie beaucoup d'ailleurs. Quand on parle
des coopératives d'habitation, vous dites: Nous croyons que celles-ci
devraient être considérées comme des propriétaires
pour les fins d'application des articles 1658 et 1659.
Mme Joly-Ryan: Oui, parce que présentement, pour nous,
c'est un problème et s'il n'y a pas de solution à ce
problème dans les années qui vont venir, il nous semble qu'elles
devraient être considérées comme des
propriétaires.
M. Tardif: D'accord, l'idée...
Mme Joly-Ryan: C'est au conseil de la coopération à
se prononcer.
M. Tardif: Elles le sont. Un instant. Elles le sont. L'exclusion
ici, est pour la fixation du loyer. On part de l'idée que les
sociétaires, les membres d'une coopérative, admettons une
coopérative d'habitation de douze personnes, sont collectivement
propriétaires d'un projet et s'entendent entre eux pour fixer le loyer.
Cela nous apparaît l'essence même du coopératisme que de se
donner à lui-même ses règles de gestion et de
fonctionnement.
On comprend donc mal que ces gens, en ayant participé à la
prise de décision dans la coopérative, puissent s'adresser
à la régie, en matière de fixation ou de
détermination.
Mme Joly-Ryan: C'est pour le non-membre. Il y a souvent, dans des
coopératives, dix coopérants, mais des logements qui sont
loués à des non-membres.
M. Tardif: Excusez-moi, madame. A ce moment-là, je vous
inviterais à relire le projet de loi. Lisez 1658.18, paragraphe 2. "Les
articles 1658.2 et 1658.15 ne s'appliquent pas: 2. Au bail d'un logement
loué par une coopérative d'habitation à l'un de ses
membres". De la sorte, les non-membres sont soumis à la loi.
Donc, votre objection là-dessus, vous en conviendrez, ne tient
plus. D'accord?
Mme Joly-Ryan: On va la retirer alors.
M. Tardif: Deuxième point. Vous dites: Quant à la
franchise accordée aux immeubles récents. Tantôt, vous avez
dit que c'est un privilège fiscal. Non. Ce n'est pas un
dégrèvement d'impôt, ce n'est pas un crédit
d'impôt qui est accordé. On se trouve devant la situation
où il y a 2 millions de logements au Québec, dont 95%
appartiennent à des particuliers. Le parc de logements immobiliers se
renouvelle au rythme d'à peu près 2% l'an au Québec,
c'est-à-dire entre 50 000 et 60 000 unités de logements qui sont
produites. La Société d'habitation, l'Etat, en produit
peut-être 5000 ou 6000, depuis peu, d'ailleurs, et le mouvement
coopératif n'en produit même pas un millier. Tout le reste est
produit par l'initiative privée. Tant et aussi longtemps que cette
réalité statistique sera telle, il faudra que ces gens-là
puissent bâtir. Et, pour pouvoir bâtir, ils demandent que...
Mme Joly-Ryan: C'est une incitation à la construction.
M. Tardif: A un renouvellement du stock de logements immobiliers.
L'Etat ne peut pas se substituer demain et bâtir les 60 000 logements. A
ce moment-là, si on veut qu'il y ait véritablement des logements
pour ces locataires que vous représentez, il faut que quelqu'un les
produise.
Mme Joly-Ryan: Mais vous conviendrez avec nous, quand on parlait
de politique globale, que cette incitation au logement peut se faire en dehors
du cadre d'une loi qui régit les relations entre locateurs et
locataires.
M. Tardif: En donnant des subventions.
Mme Joly-Ryan: Ou par toute autre forme d'incitation à la
construction de nouveaux logements.
M. Tardif: J'en conviens, ce n'est pas la seule mesure.
Mme Joly-Ryan: II y a quand même énormément
de nouveaux logements qui sont construits, en particulier dans la région
de Montréal. Cinq ans, c'est quand même une période assez
longue, et ces gens-là n'ont pas de droits quant aux augmentations de
loyer qui sont quand même souvent phénoménales.
M. Tardif: Et, là-dessus, les économistes qui se
sont penchés sur la question ont évalué entre trois et
sept ans, la période de stabilisation d'un immeuble. Certaines provinces
ont trois ans d'exemption, d'autres ont cinq ans. Et certains
économistes plus conservateurs établissaient cette période
à sept ans. On a gardé celle de cinq ans qui existait dans notre
législation.
Quant aux propriétaires de HLM, je pense que je l'ai
mentionné aussi, parce que c'est un point important,
l'universalité de l'application de la loi.
On l'a étendue aux maisons mobiles, aux maisons de chambres, aux
locataires de HLM. C'était un point important et il y a un certain
nombre de représentations qui ont été faites. Pour la
méthode de fixation, encore là, je ne puis accepter qu'on les
assimile à des logements privés sur ce fait précis, parce
que le loyer est payé en fonction du revenu des gens. Pour tout le
reste, je suis d'accord qu'ils devraient être assimilés à
des locataires ordinaires. (11 h 45)
Le Président (M. Laberge): Merci, M. le ministre. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci beaucoup de votre intervention. Pour commencer,
j'aurais une ou deux questions très brèves. Au sujet du code
d'habitabilité, vous avez suggéré que ce soit inscrit dans
la loi. Le ministre a annoncé ses intentions de le faire par
réglementation. Est-ce que, pour vous, c'est une distinction qui est
importante?
M. Lafontaine: Encore là, cela ressemble peut-être
un peu à du légalisme ou du jargon d'avocats, mais des
décisions récentes de la Cour suprême dans lesquelles nous
étions impliqués font que, si ta réglementation va changer
la loi ou va plus loin que ce qui est inscrit dans la loi, il y a de gros
risques que tu sois obligé de changer la loi postérieurement,
sans quoi ton règlement va sauter. Nous disons: Dans le fond,
peut-être qu'il y aurait obligation que la loi elle-même en dise
plus, de telle sorte que le règlement entre dans les cadres mêmes
de la loi plutôt que de devenir possiblement plus important que la loi
elle-même. Mais, encore là, c'est présumer un peu de notre
part que de dire cela. Mais, quand même, on présume que, si on se
fie au texte même de l'article 86 qui prévoit des critères
pour cela, cela, on dit que, peut-être, pour la sûreté de la
validité légale de ce règlement, il faudrait
peut-être en ajouter un peu, mais, c'est au niveau légal; cela ne
change pas le fond, bien entendu, du projet de loi lui-même.
M. Scowen: C'est quelque chose qu'on ne doit pas normalement
avoir l'occasion de changer trop souvent, je suppose. C'est quelque chose
qui...
M. Lafontaine: II faut au moins que les grands principes se
retrouvent dans la loi. La Cour suprême demande aussi que ce soit quand
même assez raffiné dans la loi, de telle sorte que les
règlements ne deviennent pas plus gros que la loi, en principe.
M. Scowen: M. Lafontaine, connaissez-vous le code
d'habitabilité de la ville de Montréal?
M. Lafontaine: Moi-même, je ne le connais pas. Des experts
qui sont avec moi le connaissent.
M. Scowen: Est-ce qu'en gros, ceux qui le connaissent croient que
c'est une bonne base?
Mme Thibault-lezzoni (Marion): Oui, effectivement, c'est assez
extensif. La difficulté, la seule observation qu'on peut faire à
l'égard de l'application du code, c'est que, à toutes fins
utiles, il n'est pas appliqué. Cela, c'est un point technique.
M. Scowen: Oui. J'aimerais vous poser...
M. Lamarre (Michel): Est-ce qu'on m'entend? Si on me permet,
avant d'aller plus loin, il me semble assez clair, par exemple, que
l'application d'un code d'habitabilité pourrait vouloir dire qu'à
un certain moment, un immeuble deviendrait complètement inhabitable, ce
qui voudrait dire que le code d'habitabilité arriverait à la
conclusion qu'un propriétaire serait, à toutes fins utiles,
incapable d'utiliser son immeuble et de le louer. Si, à ce
moment-là, la loi ne permet pas ce genre d'expropriation presque
déguisée, on arriverait finalement à un règlement
qui dépasserait presque la loi d'utilisation de sa
propriété, ce qui signifierait finalement que la loi devrait
être amendée, de façon à permettre qu'un immeuble en
arrive à pouvoir être presque mis hors d'utilisation par son
propre propriétaire qui n'aurait pas vu à le garder en
état d'habitabilité.
M. Scowen: Quelqu'un nous a suggéré, hier ou
avant-hier, qu'il faut avoir deux ou trois codes, un pour les affaires
d'urgence, parce qu'une maison pourrait être inhabitable sur la base de
quelque chose qui arrive, comme un incendie, un cas où c'est clairement
inhabitable. Par contre, c'est possible d'avoir un problème de rats dans
la maison, ce qui est désagréable. Si j'avais des rats dans ma
propre maison, je ne serais pas du touT content. Je quitterais ma propre maison
immédiatement jusqu'à ce que le dernier rat soit
exterminé. C'est un autre aspect d'un code d'habitabilité qui va
un peu plus à long terme. Est-ce qu'il y a quelque chose dans cette
idée?
M. Lafontaine: Quant à nous, les situations d'urgence, on
ne fait pas cela dans un code d'habitabilité, parce que l'urgence, ce
sont des choses incroyables qui se présentent rapidement. Le biais que
nous suggérons pour régler cette question, c'est à la page
13, au niveau des ordonnances que la régie peut émettre. On dit
que, quant à nous, la régie pourrait émettre des
ordonnances quand il s'agit de cas d'urgence. Les cas d'urgence, on les
qualifie. C'est lorsque cela concerne les services essentiels. On dit que les
services essentiels sont le chauffage, le gaz, l'électricité,
l'eau et les services d'hygiène ou les services destinés à
assurer la santé et la sécurité des occupants. Autrement
dit, plutôt que de passer par un code d'habitabilité, on dit: La
régie devrait avoir un pouvoir rapide, qu'on appelle des ordonnances,
pour se prononcer là-dessus.
M. Scowen: Vous savez autant que moi, on peut prendre, par
exemple, le cas du chauffage. J'apprécie vos commentaires
là-dessus. Je veux passer à une autre question, parce que notre
temps est limité.
Vous avez tous eu l'expérience de la commission actuelle,
beaucoup, j'imagine. Le projet de loi apporte des changements importants. Plus
d'administrateurs et commissaires à temps partiel, une équipe
permanente... Quelle était votre expérience avec le
système actuel? Est-ce que cela fonctionne bien? Est-ce que cela
fonctionne mal? Est-ce que l'idée de changer pour quelque chose de
permanent, d'après vous, va vous apporter une amélioration
sensible? Est-ce que le système d'appel prévu dans le projet de
loi est mieux que celui que nous avons actuellement? Je pense que c'est
intéressant de savoir la réaction sur ces questions des personnes
qui se trouvent dans ce milieu sur une base quotidienne.
Mme Thibault-lezzoni: En réalité, notre
expérience nous a montré que le rendement du système
actuel est très variable. Il tient beaucoup aux individus qui sont
impliqués dans un processus, soit de conciliation ou purement de faire
le travail, de trancher le débat relativement à une fixation de
loyer ou autrement. Il nous est apparu que ce que vous aviez proposé
dans le projet de loi représentait certainement une amélioration
très sensible. Nous attendons beaucoup de ces modifications. C'est bien
entendu, à l'usage, qu'on pourra peut-être rajuster et faire de
nouvelles observations.
M. Scowen: Est-ce que vous pensez que ce manque
d'uniformité, c'est quelque chose qui sera réglé
probablement par la présence de personnes permanentes? Je vis dans mon
comté avec deux bureaux de l'aide sociale. L'un marche très bien
et l'autre marche très mal. Je ne connais pas du tout les raisons, mais
toute la population... les plaintes de l'un et de l'autre, je n'en ai jamais.
Pour moi, ce n'est pas évident à première vue que le
changement à un système de fonctionnaires permanents va vous
donner plus d'uniformité. Est-ce que vous avez des expériences
dans ce domaine?
M. Lamarre: Ecoutez! Si vous parlez d'uniformité, il est
bien sûr que, finalement, en particulier quant aux règlements
à être appliqués, le projet de loi est un grand pas si,
finalement, tous les documents sont dans le même volume, voyez-vous.
Les deux problèmes que nous avons à contrer sont, d'une
part, dans les régions éloignées, la proximité des
bureaux où ces gens-là ont à faire appel. A certains
endroits, ils ont à faire jusqu'à 40 milles, ce qui veut dire
finalement qu'on est plutôt porté, à ce moment-là,
à une espèce de règlement de jungle à
l'intérieur d'un endroit et que ce ne sont que les cas extrêmes,
où vraiment il n'y a plus de conciliation possible, qui se rendent
devant la régie.
Lorsqu'on se retrouve dans des milieux de grande agglomération,
il faut, à ce moment-là, un problème de conciliation et
elle devient d'autant plus facile qu'elle est décentralisée. Elle
devient d'autant plus facile que les gens, dans certains cas même,
pourraient avoir à se rendre sur les lieux pour voir ce qui se passe et
c'est à ce moment-là que, peut-être, les
municipalités pourraient offrir
de meilleurs services de vérification des lieux, de façon
que, dans le quotidien, les disputes puissent se régler d'une
façon plus équitable pour tout le monde. Cela nous semble
extrêmement important qu'au niveau de la conciliation,
c'est-à-dire au moment où les problèmes commencent
à se régler, ce soient les problèmes dont vous avez
parlé vous en êtes, semble-t-il, bien conscients les
problèmes d'habitabilité, tels que la température, tels
que ces problèmes qui sont tout à fait embêtants si on les
amène devant une haute cour, mais ce sont des problèmes
réels et c'est à ce niveau-là, au moment de la
conciliation, finalement, que ces problèmes doivent être
réglés et ils doivent être réglés au niveau
local.
Une petite enquête que j'ai faite autour, de mon bureau, sur la
rive sud je n'entre pas plus loin dans les détails me
permet de dire, par exemple, que sur les sept municipalités où
j'ai appelé, il n'y a que trois personnes qui, à temps partiel
encore, voient à aller dans des endroits où on les appelle pour
dire: Ecoutez! Il y a des rats chez nous, il y a des bibites, je ne sais pas
quoi faire avec. Il faut améliorer un peu cette histoire. Autrement,
ça devient des problèmes graves et c'est à ce
moment-là que la régie en est touchée.
M. Scowen: Une dernière question, peut-être pour M.
Lafontaine. Vous avez beaucoup parlé de ce système de
contrôle d'augmentation des loyers. Il ne reste que cinq minutes et je
vais passer la parole à M. Cordeau.
M. Tardif: On peut vous permettre de dépasser de cinq ou
dix minutes, si...
Le Président (M. Laberge): Excusez-moi. Si la commission
est consentante, étant maîtresse de ses travaux, on pourrait
prolonger en oubliant que les aiguilles de l'horloge continuent à
fonctionner, mais pour un certain nombre de minutes.
M. Scowen: Malheureusement, je suis obligé de partir
à midi. Je vais laisser tomber ma question. J'ai une brève
question à poser au ministre en ce qui concerne notre travail la semaine
prochaine. J'ai l'impression que c'était un peu mal
préparé cette semaine. J'ai prévu plutôt une
période de questions et réponses avec les intervenants dans la
période très courte qu'on a et, ce matin, j'avais l'impression
d'avoir écouté au début ou à la fin de votre
intervention un bref discours sur les politiques actuelles ou les
réalisations du gouvernement dans le domaine des maisons mobiles et des
HLM, et tout entièrement, sur la politique d'habitation. Si vous avez
l'intention de continuer de cette façon la semaine prochaine, je pense
que cela m'impose de préparer à chaque fois une espèce de
réplique. Je voulais simplement savoir si vous prévoyez une
continuité de cette tendance ou si vous aurez plutôt la tendance
de procéder par une période de questions et de réponses.
Moi, cela m'est égal. Je suppose que j'ai un peu plus une
préférence pour une période concentrée sur les
questions, mais j'aimerais avoir votre attitude simplement pour me permettre de
me préparer un peu mieux la semaine prochaine.
M. Tardif: M. le Président, je ne sais même pas s'il
vaut la peine de répondre à cette question. Si le
député de Notre-Dame-de-Grâce veut profiter de la
période de la commission pour effectivement parler de la politique
d'habitation, libre à lui de le faire. Je ne l'aborde pas, sauf lorsque
des intervenants venant devant nous nous disent: La loi 107, on la trouve bonne
en général, mais on pense qu'elle n'apporte pas une politique
d'habitation. Je dis: C'est vrai. Elle n'apporte pas cette politique mais on
travaille sur cette politique. Mais si les intervenants se limitent à
l'intérieur du cadre du projet de loi 107, je poserai des questions
uniquement à l'intérieur de cela, je n'entends pas du tout
limiter mes interventions uniquement à ce projet mais plutôt
vraiment tenter de répondre aux mémoires qui nous sont
présentés. C'est le droit également du
député de Notre-Dame-de-Grâce.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Je vous ferai remarquer, M. le Président, si vous
le permettez, sur une question de règlement, puisque c'est un peu ce qui
a été soulevé, que le député de
Notre-Dame-de-Grâce, je l'ai écouté chaque fois qu'il est
intervenu, ne s'est pas gêné lui non plus pour intervenir et faire
des exposés à l'issue desquels il a pu poser des questions, et
c'est ce que le ministre fait également. C'est la procédure
prévue.
M. Scowen: J'ai simplement posé la question au ministre.
On ne va pas commencer un débat là-dessus. Est-ce que c'est
pertinent, parce que...
M. Guay: C'est certainement aussi pertinent que ce que vous avez
dit.
M. Scowen: Alors, je pense que je dois maintenant commencer
à citer des exemples sur ce qu'on a vécu ce matin, parce
que...
M. Cordeau: M. le Président, si on veut faire une
récapitulation, je ne veux pas...
M. Scowen: J'ai parlé de choses très
précises, un énoncé du ministre au sujet de la politique
du gouvernement sur les maisons mobiles.
M. Tardif: Le projet de loi en parle, il contient des articles
sur les maisons mobiles.
M. Scowen: Un deuxième énoncé des politiques
et réalisations dans le domaine des HLM, ce matin, au premier et au
deuxième exposé. Un était au début, l'autre
à la fin. Cela a pris à peu près cinq minutes chacun. Cela
ne relevait pas du tout des questions posées par les intervenants...
M. Guay: Ah non!
M. Scowen: C'était le moment d'expliquer, avant que les
gens partent, ce que le gouvernement faisait ou voulait faire ou avait fait, et
je veux simplement savoir si, au début ou à la fin, vous avez
l'intention de continuer de cette façon; si oui, je vais demander une
réplique. Je ne veux pas du tout faire un débat là-dessus,
c'est simplement pour connaître votre intention.
M. Tardif: M. le Président, sur cette question de
règlement, l'Association des propriétaires de maisons mobiles de
Vimont, dans sa première recommandation, nous recommande d'adopter des
normes de zonage, pour les terrains de maisons mobiles, qui ne sont pas dans le
projet de loi 107. Que le député de Notre-Dame-de-Grâce
trouve exagéré que je dise que mon ministère a un document
que je suis prêt à mettre à sa disposition, cela
m'apparaît tout à fait enfantin, ce genre de commentaire.
M. Scowen: De toute façon, vous avez l'intention de
continuer la semaine prochaine, plus ou moins, de la même façon
que vous avez procédé cette semaine.
M. Tardif: Exactement, je n'ai pas l'intention de changer.
M. Scowen: Parfait.
Le Président (M. Laberge): Alors, vous n'avez pas d'autres
questions, M. le député de Notre-Dame-de-Grâce?
M. Scowen: C'est parfait.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président. On est bien quand on
n'est pas sujet à une discussion. Messieurs, je dois vous
féliciter du mémoire que vous nous avez présenté.
Il est très substantiel, mais, étant donné que je n'ai pas
de formation juridique, c'est plus difficile pour moi d'en saisir toutes les
nuances. Par contre, tantôt, vous avez dit que les propriétaires
pouvaient bénéficier de certains avantages fiscaux concernant la
dépréciation sur leur immeuble. Il faut rappeler aussi, pour
être juste, que, lorsqu'ils vendent leurs immeubles, ils se font attraper
par l'impôt. (12 heures)
M. Lafontaine: Sauf s'ils placent l'argent dans un autre
immeuble.
M. Cordeau: S'ils gardent encore le logement, mais s'ils vendent
leur immeuble, à un moment donné, l'Etat peut aller chercher ce
qui lui revient.
A la page 2 de votre mémoire, vous spécifiez "sachant que
les municipalités ont déjà failli à cette
tâche", concernant la démolition, vous ajoutez: "concernant le
manque d'intérêt pécuniaire des propriétaires
à rénover de vieux logements", dans la pratique quotidienne,
est-ce qu'on vous a fait valoir les intérêts qui manquent aux
propriétaires pour rénover? Est-ce parce que le coût des
rénovations est trop élevé et qu'ils doivent se soumettre
à tellement de règles de rénovation, soit le code
d'habitation, ou les plombiers, les électriciens, ainsi de suite? A un
moment donné, le gars peut faire faire une évaluation de ce que
coûterait la rénovation de ses immeubles ou de son immeuble et il
dit: Cela va me coûter trop cher, je ne peux jamais
récupérer le prix de ma rénovation. Est-ce que vous
pourriez donner quelques explications?
M. Lafontaine: C'est simplement une constatation qu'on fait. Nous
ne sommes pas des actuaires ni des experts en construction. Tout ce qu'on peut
vous dire, c'est qu'on pense que ça doit être parce qu'il n'y a
pas de rentabilité pour eux de le faire, s'ils ne le font pas, soit que
les coûts sont trop élevés ou soit que le terrain vaut plus
cher que la bâtisse qui s'y trouve; donc on la laisse aller pour
bénéficier du terrain, soit pour en faire un parc de
stationnement, soit pour permettre de revendre à un autre qui
bâtira un gratte-ciel. Il peut y avoir différentes raisons, je ne
me sens pas du tout habilité, on n'a pas fait d'enquête
économique, on n'a pas le personnel non plus pour faire des
enquêtes économiques et pour savoir pour quelle raison cela peut
être. On fait une simple constatation.
M. Cordeau: Parfait. Vous avez mentionné au début
que les règles de procédure sont différentes dans
différents tribunaux et que vous vous en plaignez, c'est une
constatation. Est-ce que vous avez des suggestions ou est-ce que vous les avez
déjà fait parvenir au ministère concerné pour
uniformiser ces règles qui vous aideraient dans votre travail?
M. Lafontaine: Le ministère de la Justice lui-même,
dans son livre blanc publié en 1975, avait fait cette recommandation,
2.24, en 1975 et le sous-ministre actuel, Me Dussault, avait fait les
mêmes recommandations dans son traité de droit administratif qu'il
avait fait alors qu'il était enseignant. Dans le fond, on n'invente
rien, on cite des choses qui viennent du ministère lui-même en
disant ça.
M. Cordeau: Une autre question concernant le projet de loi 107,
pour ne pas s'en éloigner trop. Concernant les locataires,
propriétaires d'une coopérative. Si j'ai bien saisi, lorsqu'une
coopérative décide d'augmenter les loyers, les coopérants
n'ont pas recours devant la régie pour leur augmentation. Si je vous
demande cela, c'est que toute coopérative est administrée par un
conseil d'administration, bien sûr, et les augmentations doivent
être fixées par leur conseil d'administration et soumises aux
coopérants à une assemblée générale. Mais,
par contre, il se peut que dans le stock de logis que détient la
coopérative, il y ait des logis de différentes grandeurs, des
logis qui ont été rénovés, d'autres qui n'ont pas
été rénovés
et qui le seront et peut-être qu'un locataire, à ce
moment-là, pourrait se sentir lésé par l'augmentation de
son logis, une augmentation consentie par l'assemblée
générale, mais à l'assemblée
générale, il peut être dissident.
A ce moment-là, si j'ai bien saisi, ce locataire ne pourrait pas
aller devant la régie se faire entendre. Pour une raison ou pour une
autre, l'assemblée générale aurait pu le léser.
M. Tardif: M. le Président, c'est la règle de la
majorité. Et cela procède de l'essence même du
coopératisme que les membres administrent et gèrent leur
coopérative. C'est la raison pour laquelle nous avons fait la
distinction entre les membres et les non-membres. Les non-membres qui seraient
locataires dans une coopérative auraient les recours normaux, alors que
les autres fixent collectivement leur loyer.
M. Cordeau: II me semble qu'un locataire d'une coopérative
pourrait, même s'il est copropriétaire, avoir le droit d'aller
à la régie, parce que là aussi, c'est administré
par des hommes, par des êtres humains et il peut y avoir...
M. Tardif: Ce n'est pas une compagnie, c'est une
coopérative. Ce n'est pas pareil.
M. Cordeau: Alors, les coopératives ne peuvent pas faire
d'erreur. Une compagnie peut faire des erreurs, mais une coopérative ne
peut pas faire d'erreur...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: ... concernant le prix à être
fixé pour un logis.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe, je vous remercie. On me fait part que selon l'expression
latine, tempus fugit. Je donnerais la parole au ministre pour la
conclusion.
M. Tardif: M. le Président, je désire, encore une
fois, remercier la Commission des services juridiques pour son mémoire
et ses représentations. J'ai pris bonne note des autres points,
même de ceux qui n'ont pas été évoqués ce
matin, notamment sur la publicité qu'il y a lieu de faire autour de la
loi, de la réglementation. D'ailleurs, à ce sujet-là, je
désire remercier la Commission des services juridiques qui, à
l'intérieur de sa minute juridique, fait une large part à la loi
de conciliation présentement et j'imagine, éventuellement,
à la loi 107.
D'ailleurs, j'ai souventefois cité en exemple la publicité
de la Commission des services juridiques auprès de la régie en
disant: Voilà ce qu'on devrait faire. A ce sujet, je suis donc tout
à fait d'accord non seulement avec la suggestion, mais même avec
la façon dont elle se pratique à la commisson et,
là-dessus, je remercie encore une fois la commission.
Le Président (M. Laberge): J'en profite pour remercier les
membres de la Commission des services juridiques qui se sont fait entendre.
Sans plus tarder, je déclare que cette commission des affaires
municipales ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 12 h 08