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Présentation de mémoires sur le projet
de loi no 107
(Dix heures sept minutes)
Le Président (M. Laplante): Veuillez prendre vos places,
s'il vous plaît! La commission des affaires municipales se réunit
aujourd'hui pour entendre les mémoires sur l'étude du projet de
loi no 107, Loi instituant la Régie du logement et modifiant le Code
civil et d'autres dispositions législatives.
Sont membres de cette commission: M. Brassard (Lac-Saint-Jean); M. Caron
(Verdun); M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes); M.
Gratton (Gatineau) remplacé par M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce);
M. Guay (Taschereau); M. Mercier (Berthier); M. Ouellette (Beauce-Nord); M. Roy
(Beauce-Sud); M. Shaw (Pointe-Claire); M. Tardif (Crémazie).
Intervenants: M. Alfred (Papineau); M. Charbonneau (Verchères); M.
Fontaine (Nicolet-Yamaska); M. Goldbloom (D'Arcy-McGee); M. Lacoste
(Sainte-Anne); M. Léonard (Laurentides-Labelle) remplacé par M.
Paquette (Rosemont); M. Samson (Rouyn-Noranda); M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce) remplacé par M. Lavoie (Laval); M. Vaugeois
(Trois-Rivières).
J'appelle maintenant les organismes qui seront entendus ce matin.
L'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec
ils seront appelés dans l'ordre qui est là. Est-ce
qu'elle est ici, ce matin? Le Barreau du Québec et l'Association des
étudiants en résidence de l'Université de Montréal.
Il n'y a qu'une petite erreur: le Barreau est le premier organisme et
l'Association des constructeurs le deuxième. C'est inversé, parce
que la première liste donnait justement le Barreau en premier. C'est une
petite erreur technique. J'appelle maintenant le Barreau du Québec.
M. Guay: M. le Président.
Le Président (M. Laplante): On vous demande de
synthétiser votre mémoire le plus possible. Je vous ferai
remarquer que l'Opposition et le ministre ont déjà lu votre
mémoire en entier. Ils ont beaucoup de notes autour d'eux. Il faut que
cela se fasse à l'intérieur de vingt minutes afin que les membres
de cette commission puissent vous poser des questions. Les mémoires ne
doivent pas dépasser une heure. Si vous voulez vous identifier,
identifier votre groupe de même que les personnes qui vous accompagnent,
s'il vous plaît!
Barreau du Québec
Mme Audette-Filion (Micheline): M. le Président, M. le
ministre, MM. les membres de la commission parlementaire, mon nom est Micheline
Audette-Filion, directeur général et directeur de la recherche au
Barreau du Québec. Il me fait plaisir de vous présenter ce matin
les représentants du Barreau. A mon extrême gauche, Me
Henri Massue-Monat, de Montréal; Me Raymond Lavoie, de
Québec; à ma droite, Me Richard Proulx, au service de recherche
du Barreau et, à ma gauche immédiate, Me Guy Pépin,
bâtonnier du Québec.
Il me fait plaisir de céder immédiatement la parole au
bâtonnier du Québec, Me Guy Pépin. J'enchaînerai par
la suite, dans la présentation du mémoire; il nous fera plaisir
de répondre à vos questions. Me Pépin.
M. Pépin (Guy): M. le Président, M. le ministre,
MM. les membres de la commission parlementaire, nous essaierons de consigner
l'essentiel de nos propos dans les 20 minutes que vous mettez à notre
disposition et espérons que nous pourrons, de toute façon, dans
la période de questions couvrir d'autres points que nous ne pouvions
couvrir dans les 20 minutes qui nous sont allouées.
Je laisserai effectivement à Mme Filion, notre directeur
général au Barreau du Québec, et à ceux qui ont
préparé le mémoire à l'intention de cette
commission parlementaire, le soin de vous présenter les aspects
techniques du mémoire et d'attirer votre attention sur certaines
recommandations de nature à améliorer le projet de loi dans
l'intérêt des justiciables qui seront appelés à y
recourir.
Pour ma part, la raison de ma présence et de mon intervention
devant cette commission parlementaire se retrouve dans deux articles du projet
de loi 107, à savoir les articles 57 et 75 qui, sous des apparences
anodines, mettent en cause deux principes fondamentaux d'importance vitale, non
seulement pour les propriétaires et les locataires, mais
également pour toutes les autres classes de citoyens ou, si vous le
préférez, pour toutes les autres relations que ces mêmes
citoyens, propriétaires ou locataires, sont appelés à
avoir dans l'avenir les uns avec les autres ou les uns et les autres avec
l'Etat.
Ces deux principes fondamentaux sur lesquels je veux attirer votre
attention ce matin sont: premièrement, l'information et la consultation
avec les organismes responsables de l'application d'une loi, lorsque cette loi
est modifiée de façon directe ou indirecte et,
deuxièmement, le droit fondamental du citoyen à être
représenté par avocat, droit consacré dans la Charte des
droits et libertés de la personne et droits déjà reconnus
par le Code des professions et la Loi du Barreau avant l'adoption de la
charte.
Ces textes, en accordant à l'avocat le droit exclusif de plaider
ou d'agir au nom d'autrui, c'est-à-dire de représenter le
justiciable, tiennent compte de la préparation spéciale à
laquelle l'avocat doit se soumettre, c'est-à-dire une scolarité
de 16 à 19 ans, sur laquelle repose un tel droit de
représentation exclusif. D'ailleurs, ce droit, de l'aveu même de
l'Office des professions dans un rapport de 1977 auquel je reviendrai un peu
plus tard, est accordé non pas à titre de privilège
à l'avocat, mais bien pour protéger le public contre
les gens qui, en dépit de leur bonne foi, n'ont pas la
préparation nécessaire pour plaider et agir au nom d'autrui. On
veut protéger le public et, à plus forte raison, contre les
charlatans de tout acabit.
Or, j'aimerais quand même faire ici quelques remarques sur les
deux points fondamentaux que soulèvent les articles 57 et 75 de votre
projet de loi. L'article 57 au premier paragraphe consacre le principe de la
représentation, permettez-moi l'expression, par n'importe qui devant la
Régie du logement. L'article 75, pour sa part, qu'on retrouve dans le
chapitre consacré au droit d'appel devant la Cour provinciale qui est
notre tribunal de droit commun au Québec pour les affaires civiles
allant jusqu'à $3,000, dont la juridiction pourrait être
augmentée à une dizaine de milliers de dollars dans un avenir
rapproché, l'article 75, donc, consacre pour sa part la
représentation encore par n'importe qui, tel que le projet de loi est
présenté actuellement, devant un tribunal de droit commun
où forcément les principes de droit et les règles de
preuve doivent demeurer plus structurés que devant une régie
administrative et, qui plus est, on lui donne une juridiction d'appel. La
règle de droit doit nécessairement primer sur
l'équité et, pardonnez-moi l'expression, sur la bonne franquette
qu'on recherche devant une régie administrative.
Or, ces deux articles 57 et 75 ont pour effet de chambarder totalement
une notion fondamentale qui est celle de l'acte exclusif. Cela intéresse
non seulement le Barreau du Québec, mais l'ensemble des corporations
professionnelles auxquelles l'exercice exclusif est reconnu et j'ajouterais
même l'ensemble des autres qui, étant reconnus pour le moment
à titre réservé seulement, aspirant à la
reconnaissance eux aussi de l'acte exclusif afin de pouvoir mieux assumer les
responsabilités qui leur sont dévolues par le Code des
professions. (10 h 15)
Je peux affirmer, M. le Président, que le Barreau n'a
été ni informé ni consulté sur les questions
fondamentales que soulèvent ces deux articles et, n'eût
été l'existence au Barreau d'un service de recherche
expérimenté et rompu à la discipline législative,
ces deux articles auraient pu être adoptés sans que jamais la
corporation professionnelle directement impliquée, le Barreau, n'ait
été mise au courant, étant ainsi placée devant une
situation de fait accompli.
Je me demande donc, M. le Président, M. le ministre, si le
ministre de l'Education, qui est responsable de l'application du Code des
professions et des lois qui en découlent, dont la Loi du Barreau, a
été informé du fait que les articles 57 et 75 venaient en
contradiction avec l'esprit du moins de l'article 128 de la Loi du Barreau et
quelle est son opinion à ce sujet.
Je me demande également si le ministère de la Justice, qui
a au moins la responsabilité d'une certaine coordination entre les
différents textes de loi qui sont adoptés, a aussi
été informé et consulté et quelle a
été sa réaction. Je me demande évidemment si
l'Office des professions, responsable de l'application du code et des lois
connexes, a été informé et consulté et quelle a
été sa réaction. Je me demande enfin si le Conseil
interprofessionnel du Québec ou l'une ou l'autre des 38 corporations
professionnelles qu'une telle question doit intéresser ou, à tout
le moins, celles à qui l'acte exclusif est reconnu, ont
été consultées et quelle a été leur
réaction.
Si ces ministères et organismes ont été
consultés, je comprends encore plus mal que le Barreau ait
été tenu à l'écart, alors que c'est lui qui
était directement impliqué par les réformes qu'impliquent
ces deux articles.
Quant à nous, au Barreau du Québec, c'est la
deuxième fois en moins de six mois, pour ne pas dire en à peine
plus de trois mois, qu'un projet de loi modifie le texte ou l'esprit de la Loi
du Barreau dans une notion aussi fondamentale que la représentation par
avocat devant les tribunaux, les régies ou les commissions, et ceci,
sans que le Barreau en ait été même informé et donc,
à plus forte raison, consulté. Les membres de cette commission
parlementaire se rappelleront sans doute le premier de ces deux incidents qui
portait sur le projet de loi 114, piloté par le ministre du Travail,
dans un projet de loi modifiant la Loi des accidents du travail, et où
vous avez tous reçu, avant Noël, un télégramme du
Barreau du Québec pour attirer votre attention sur cette façon
inacceptable de légiférer. Je dois déplorer cette
même façon de légiférer dans le présent
projet de loi aux articles 57 et 75, même si, dans le présent cas,
j'en conviens, nous avons au moins eu le temps de préparer un
mémoire et avons au moins l'avantage d'être devant vous
aujourd'hui.
Sur cette première question du droit à l'information et
à la consultation d'un organisme directement affecté par une
réforme, surtout lorsque la réforme affecte la loi constitutive
de cet organisme, comme c'est le cas dans le cas du Barreau, il me semble que,
dans la mesure où ces organismes ont des comptes à rendre au
gouvernement et à la population, je dois m'élever contre la
façon de légiférer et je fais appel à votre souci
de transparence et de concertation pour mettre un terme à de tels
procédés. C'est pourquoi, sans même étudier les
articles 57 et 75 du projet de loi à leur mérite, le Barreau vous
demande, strictement au niveau du mécanisme consultation-information, de
rayer ces articles ou, à tout le moins, d'en suspendre l'entrée
en vigueur jusqu'à ce que le gouvernement ait, par voie de consultation,
livre blanc, livre vert ou par toute autre méthode jugée
appropriée, étudié à fond les questions de la
représentation pour autrui et de l'acte exclusif qui en découle
dans la vision plus globale et plus fondamentale du professionnalisme au
Québec, ce qui implique évidemment une discussion de fond avec
l'Office des professions et avec toutes les autres corporations
professionnelles avant que de tels articles puissent devenir même
pensables au sein d'une législation particulière. (10 heures)
Ayant disposé de ces deux articles sur la forme, j'en disposerai
maintenant sur le fond.
Comme je l'ai exposé plus haut et contrairement à la
rumeur que certains se plaisent à répandre depuis quelques
années, c'est dans l'intérêt public et non par complaisance
pour les avocats qu'on accorde à ceux-ci l'exercice exclusif de certains
actes professionnels, dont celui de plaider et d'agir pour autrui, ou plus
simplement celui de représenter autrui.
La véracité de cette affirmation apparaît d'ailleurs
dans un paragraphe du rapport de l'Office des professions sur la
réglementation des honoraires professionnels dans la pratique
privée, rapport qui fut déposé devant le ministre de
l'Education en juin 1977 et où, à la page 234, on peut lire ce
qui suit: "Ainsi, si l'Office devait constater, en raison, par exemple, de la
mise au point de techniques nouvelles, que certains actes
réservés aux seuls membres d'une corporation professionnelle
pouvaient désormais être accomplis en toute
sécurité, ils n'hésiteraient pas à recommander au
gouvernement que des modifications législatives soient apportées
pour que ces actes soient exclus du champ de pratique exclusif visé.
On voit donc qu'à l'Office des professions, en 1977, on
reconnaît le principe de l'acte exclusif comme un moyen de
prévention et de protection du public. On voit également qu'en
attendant que de nouvelles techniques aient été mises au point,
aient été discutées et considérées, l'office
continue à asseoir l'hypothèse de l'acte exclusif. Pour
accéder à ce droit de pratique exclusif, l'avocat, d'ailleurs,
doit s'astreindre à des études poussées sur une
période, comme je l'ai dit tantôt, de seize à dix-neuf ans,
dont près de cinq ans sont consacrés exclusivement à
l'étude des différentes lois applicables au Québec,
études au terme desquelles de moins en moins d'avocats se sentent
prêts à voler seuls de leur propres ailes et de plus en plus
préfèrent faire leur apprentissage de la pratique, soit à
l'aide juridique, soit à la fonction publique ou dans des bureaux de
pratique privée bien organisés et structurés, où
ils pourront recevoir des conseils de toutes sortes de leurs confrères
plus âgés.
Comment peut-on concevoir dans les circonstances que le justiciable,
propriétaire ou locataire, qui n'a pas obtenu gain de cause devant la
Régie du logement, après avoir été
représenté par une personne autre qu'un avocat recevra de cette
autre personne les conseils appropriés sur l'opportunité ou
l'inutilité de porter sa cause en appel? Comment peut-il espérer
que son représentant sera mieux préparé, plus
qualifié ou aura plus de succès en appel à la Cour
provinciale qu'il n'en a eu à la régie en première
instance? La Cour provinciale, siégeant en appel d'une décision
de la régie, devra-t-elle se transformer en tribunal des petites
créances et suppléer à tous les vices de procédure
que n'aura pas vu monsieur N'importe qui, le mandataire spécial,
spécialiste en n'importe quoi. Si, d'aventure, la partie adverse est
représentée par un avocat, en appel, j'entends, et qu'elle gagne,
non pas parce que M. le juge aimait mieux l'avocat ou parce que M. l'avocat
était plus rusé, mais simplement parce que M. N'importe qui avait
conseillé d'en appeler d'une décision qui n'était pas
susceptible d'appel, une décision qui était en somme, bien
fondée, que dira M. N'importe qui à son client ou ami? Qu'il a
perdu à cause de son ignorance à lui ou que le juge et l'avocat
s'étaient arrangés ensemble? Assez curieusement, je vous le
demande, qui serons-nous tous le plus portés à croire? M.
N'importe qui qui vous dira qu'il n'y a pas de justice et que l'avocat
était de mèche avec le juge, ou l'avocat qui vous dira que M.
N'importe qui a embarqué son client n'importe comment dans une affaire
perdue d'avance?
Le juge en chef de la Cour provinciale, M. Gold, dans une entrevue
télévisée à l'émission Consommateurs Plus,
le 9 février dernier, déplorait l'absence des avocats dans le
domaine des petites créances. C'est un parallèle que je veux
établir avec ce qu'on se propose de faire à la régie. Le
juge Gold déplorait donc l'absence des avocats dans le domaine des
petites créances au niveau de la consultation. Cela éviterait,
disait-il, que des recours inutiles ne soient pris même devant la Cour
des petites créances.
Imaginez, M. le Président, la gamme des situations aberrantes
auxquelles on ferait face si l'article 75 et l'article 57 étaient
adoptés, permettant je le dis entre guillemets à M.
N'importe qui de représenter le justiciable ou le contribuable. Je ne
vois donc pas d'autre solution que le retrait pur et simple de ces deux
articles du projet de loi, d'autant plus que je sais par expérience et
par voie de consultation avec plusieurs des organismes que je citais plus haut
que le jour où l'acte exclusif, et notamment celui de la
représentation, fera l'objet d'une discussion de fond et d'une
consultation sérieuse auprès de la population, on se rendra
compte qu'il a été et qu'il reste le meilleur moyen de
contrôle de la qualité des services professionnels offerts
à la population.
Vous me permettrez un autre exemple, M. le Président, à
l'appui de ce que je viens d'affirmer. Après avoir
développé et rodé les avantages de l'acte exclusif dans
les services professionnels pendant 50 ans, sinon davantage, on l'a même
développé et rodé dans un nombre de plus en plus
considérable de métiers sous la poussée des syndicats
depuis les vingt dernières années, non sans des luttes parfois
fort agressives. C'est ainsi que, lorsque votre fournaise ne fonctionne pas,
vous vous exposez à faire affaires avec trois spécialistes,
chacun ayant le contrôle d'un acte exclusif sur une partie de votre
système. Si c'est un problème électrique, l'homme de
services le trouvera, mais refusera de le réparer même s'il en a
la capacité en donnant comme motif qu'il n'a pas la carte de
compétence appropriée. Il vous demandera de faire venir votre
électricien. Votre électricien vous demandera de faire revenir
l'homme de services pour remettre la fournaise en marche parce que cet acte
n'est pas de son ressort. Enfin, les deux refuseront de toucher à votre
système si, par malheur, il implique la pompe qui, pour
électrique qu'elle soit, est raccordée à la plomberie du
système.
Je ne contesterai pas cet état de fait, je l'ai
vécu cet hiver. A ce moment-là, je pose la question: Ne
pouvons-nous pas convenir que, s'il faut un tel respect de l'acte exclusif pour
faire fonctionner un système de chauffage, il y a peut-être lieu
d'en avoir au moins autant pour faire fonctionner l'exercice d'un droit
fondamental, surtout d'un droit d'appel comme celui qui est prévu
à l'article 75?
Je terminerai maintenant mes propos par quelques brefs commentaires sur
l'article 57, en plus de ce que j'ai dit sur l'article 75.
Disons d'abord que tout ce que j'ai dit de l'article 75 s'applique
à l'article 57 et que je me sens tout aussi justifié de demander
le retrait de l'un que celui de l'autre. Je vous avouerai cependant que je me
fais moins d'illusions sur le retrait possible, total et intégral de
l'article 57, même si je sais, au point de vue du fond, que mes arguments
sont aussi forts à rencontre de l'un que de l'autre.
Je sais que vous croyez moins au principe de la représentation
exclusive devant une régie gouvernementale; vous me répondrez
notamment qu'il existe déjà des précédents comme la
Commission des accidents du travail. C'est précisément l'autre
cas que je soulevais tantôt contre lequel nous nous sommes
élevés. On a tout simplement modifié la Loi du Barreau
sans jamais avoir consulté la corporation professionnelle
concernée et même les députés nous ont avoué
ne pas partager une pareille façon de légiférer. Vous me
répondrez donc que, parce qu'on a créé des
précédents ailleurs et parce qu'on a effectivement
toléré que des non-avocats plaident à la Régie des
loyers, vous ne pouvez faire marche arrière dans le cas de la
Régie du logement. Je pourrais sans doute vous répondre qu'avec
un pareil raisonnement le ministère de l'environnement
disparaîtrait de la carte en moins de 24 heures puisque,
précisément, il ne cherche qu'à faire des retours en
arrière dans la façon d'opérer les multinationales,
apparemment pour assainir l'air que nous respirons et l'eau que nous buvons.
C'est un gouvernement qui, il y a quelques décennies, a accordé
le droit de polluer, c'en est un autre qui l'enlève aujourd'hui. Il me
semble que, si un gouvernement, il y a quelques décennies, a
toléré, sans même accorder ce droit, que des non-avocats
plaident, il pourrait facilement aujourd'hui faire marche arrière dans
les tolérances qu'il a données à cet égard.
Qu'à cela ne tienne, je me permettrai quelques recommandations
qui, sans rallier le Barreau à l'article 57 de votre projet de loi,
pourraient au moins le rendre moins dangereux et moins nuisible à la
population qu'il ne l'est actuellement, d'une part, en respectant, d'autre
part, les objectifs que vous recherchez.
Tout d'abord, dans le premier paragraphe de l'article 57, on pourrait
à la rigueur admettre que le conjoint puisse agir comme
représentant d'une partie, locataire ou propriétaire, en vertu
d'un principe solidement ancré dans nos moeurs qui est celui du mandat
domestique. On sait en effet que la personne qui signe le bail n'est pas
né- cessairement celle qui a négocié avec le
propriétaire. Ce n'est pas nécessairement celle qui en assure le
paiement, ce n'est pas nécessairement celle qui en subit l'application
ou qui a les problèmes qui en découlent. Souvent, c'est le mari
qui a signé le bail et c'est la femme qui a eu tous les
problèmes, de la visite du logement à l'annulation du bail
je caricature, si vous voulez.
Si, donc, le but recherché par le projet de loi est
d'éviter de déplacer les deux conjoints au motif que l'un est
responsable en droit, alors que l'autre est un témoin actif en fait,
l'objectif est louable et mérite considération. Par ailleurs, en
permettant au conjoint d'agir pour le couple, on dispense les parties d'avoir
recours aux services d'un avocat dans les cas vraiment simples.
Quant à la représentation par M. N'importe qui, dans
l'article 57, où on dit: Une personne physique peut être
représentée par son conjoint je viens d'en disposer
par une personne qui détient un mandat écrit, spécial et
gratuit, ou par un avocat, quant à cette partie de la phrase, vous
comprendrez que j'appelle la représentation par M. N'importe qui,
même avec un mandat écrit, vous avez déjà
deviné que c'est, pour nous, totalement inacceptable, avec n'importe
quelle modification qu'on puisse imaginer. J'ajouterai que la réserve,
à savoir qu'il doit s'agir d'un service gratuit, fait preuve d'une
grande naïveté. Je pourrais, là-dessus, suggérer au
syndic du Barreau du Québec de vous adresser les dossiers de poursuites
dans lesquels il a été impliqué et qui font partie de son
lot quotidien de surveillance de l'exercice illégal. Il est
évident qu'une telle ouverture, dans un texte de loi, donnera l'occasion
à des personnes pleines d'imagination de se monter de véritables
commerces de services polyvalents et qu'on trouvera le moyen d'offrir, pour un
prix censé raisonnable, à une clientèle mal
informée, une gamme de services dont un certain nombre, ceux qui ne sont
pas contrôlés par une loi comme celle-ci, seront payés,
rémunérés, et dont quelques autres comme ceux-ci, pour
lesquels le client ira finalement rencontrer vraiment M. N'importe qui, seront
censés lui être offerts gratuitement. C'est une espèce de
"kit" du consommateur. Avec une disposition comme celle du premier paragraphe
de l'article 57, notre syndic ne pourra donc même pas porter de plainte
pour exercice illégal contre des gens qui se comporteraient de pareille
façon; comme il peut, au moins, le faire à l'heure actuelle et
comme il le fait fréquemment d'ailleurs, dans les cas de perception
où des justiciables sont harcelés illégalement par
certaines agences de collection peu scrupuleuses, que nous mettons à la
raison nous-mêmes, par des procédures prises par le syndic. Nous
ne pourrions plus le faire, contrôler l'exercice de la profession, avec
un amendement comme celui-là.
Quant au deuxième paragraphe de l'article 57, qui me paraît
un paragraphe de concordance, si je peux dire, et j'ai fini là-dessus,
M. le Président, j'en ai pour une minute, si vous me permettez de
terminer, j'en ai pour une minute.
Le Président (M. Laplante): Oui, d'accord. Il vous reste
une minute. (10 h 30)
M. Pépin: Merci. Quant au deuxième paragraphe de
l'article 57, vous connaissez suffisamment, M. le Président et M. le
ministre, la position du Barreau sur la loi des petites créances, pour
qu'il ne me soit pas nécessaire d'en reparler. Je me contenterai de vous
faire, ici, une confidence que me faisait le juge en chef, M. Gold, qu'il a
transmise, d'ailleurs, à Radio-Canada, lors de l'émission
Consommateur Plus, le 9 février, que j'ai moi-même reprise
à mon compte, à Radio-Canada, et, comme elle n'est pas sortie, je
la viole aujourd'hui. Il serait souhaitable, disait le juge Gold, qu'en
matière de petites créances, et donc dans le présent
projet de loi, parce que, par analogie, on va avoir les mêmes
problèmes comme dans toute autre affaire relevant de la
juridiction de la Cour provinciale, juridiction petites créances, que le
juge puisse, dans les cas où il le juge à propos, demander aux
parties de se faire représenter par avocat, lorsque, en dépit du
montant peu important, le problème soulevé demande l'aide
technique d'un homme de loi, dans l'intérêt des parties, de la
justice et de son image.
Je voudrais vous remercier en terminant, M. le Président, M. le
ministre et MM. les membres de la commission parlementaire, de m'avoir entendu,
sinon écouté pendant aussi longtemps. Je regrette d'avoir
à peu près pris tout le temps qui pourrait rester à Me
Filion pour vous présenter certains aspects techniques du rapport. Je ne
sais s'il y a encore du temps pour Me Filion, autrement, nous essaierons de
passer les aspects techniques du mémoire au fur et à mesure des
questions que vous pourrez nous poser. Je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. Pépin, M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, en effet il sera
peut-être bon que, lors de la période des questions on puisse
peut-être aussi toucher d'autres points contenus dans le
mémoire.
Je désire remercier le Barreau et M. le bâtonnier pour
cette présentation qu'ils ont faite à la commission. C'est
évident que, dans ce domaine de l'exercice de certains actes exclusifs
par des groupes professionnels et entre, si vous voulez, la promotion de la
protection du public et des intérêts des membres, la ligne est
parfois difficile à dresser. Le projet de loi no 107 à cet
égard visait, évidemment, à reconnaître
d'emblée la compétence des membres de la profession des avocats
dans l'application de cette loi puisque je pense qu'on sera d'accord
là-dessus à l'article 26, on lit bien que: "seuls les
régisseurs choisis parmi les juges ou les avocats peuvent entendre des
demandes autres que celles visées dans la section 2 du présent
chapitre".
C'est donc dire, à toutes fins utiles, que toute l'application de
la loi incombera à des membres de la profession d'avocat et qui seront
des gens à temps plein, chargés de cette application. C'est donc
que la loi reconnaît que le législateur voulait reconnaître
cette expertise, cette compétence des membres de la profession et ce,
même si 60% des causes entendues devant la régie ont trait
à une fixation de loyer. Donc, sur une évaluation à
caractère économique, malgré ce fait, dis-je, eh bien, le
principe énoncé à l'article 26 a été
reconnu.
Donc, sur ce plan, il n'est pas question de nier l'importance d'un
certain respect des règles de droit lors des audiences devant la
régie.
En ce qui concerne la représentation, évidemment, j'ai
pris note des nuances finalement qui ont été apportées, M.
le bâtonnier, entre les articles 57 et 75. Il y a peut-être juste
une inversion de chiffres entre 57 et 75, mais, en l'occurrence, cela implique
aussi deux paliers. Si j'ai bien compris, disons qu'idéalement le
Barreau voudrait peut-être le retrait des articles no 57 et no 75, mais
que, finalement, comme vous avez vu, on ne se fait pas beaucoup d'illusions sur
l'article no 57, cependant, sur l'article 75, pour ce qui est de la
représentation en appel devant la Cour provinciale on a beaucoup plus de
réserve et, dans ce cas, on pourrait modifier l'article 75.
Je vous avouerai que c'est là et c'était tout le
sens de ces deux articles et de la loi 107 reconnaître un peu une
situation de fait. En 1977, dernière année complète pour
laquelle les statistiques sont disponibles 1978 est en voie de
compilation le pourcentage des locataires représentés par
des avocats devant la régie a été de 3,2%. Ce n'est donc,
à toutes fins utiles, aucune représentation. Le pourcentage des
locateurs, propriétaires représentés par un avocat, a
été de 3,6%, ce qui est légèrement
supérieur.
Si je comprends bien je vais m'assurer d'une chose: Est-ce que
c'est à la fois devant les régisseurs, les administrateurs et en
appel? En première instance, en appel. On a des données On
me dit que c'est en première instance, devant les administrateurs et on
va voir si on a des données en appel. C'est donc dire que la loi 107
visait, à toutes fins utiles, à consacrer dans le texte une
situation de fait. Il y a aussi le deuxième paragraphe de l'article 57
concernant le livre huitième. Encore une fois, on prend en bloc ce qui
existe et on le transpose relativement au bail d'un logement.
En termes de questions, des mémoires ou des
représentations qui ont été faites à cette
commission, certaines disaient: II peut y avoir dans un immeuble,
particulièrement pour personnes âgées, une centaine de
locataires dont un certain nombre peuvent être plus ou moins autonomes,
plus ou moins indépendants, plus ou moins capables de se déplacer
et il y a peut-être parmi eux un autre locataire qui, lui aussi, a plus
de 65 ans, mais qui est un peu plus alerte et qui pourrait se déplacer
pour aller à la régie représenter ces gens.
C'est en ces termes, Me Pépin, que le problème nous a
été posé. Là-dessus, j'aimerais peut-être...
Quand on parle du libellé très large peut-être
du premier paragraphe de l'article 57: "... une personne qui
détient un mandat écrit,
spécial et gratuit, ou par un avocat...", ce n'est pas, dans
notre esprit, en tout cas, ouvert à n'importe qui. Ce sont des gens qui,
parfois, vivent dans le même milieu et qui peuvent représenter
d'autres locataires d'un immeuble devant la régie. C'est beaucoup plus
dans ces termes-là. Je ne sais pas si là-dessus...
M. Pépin: Je comprends bien. Je pense, M. le
Président, que Mme Filion aimerait répondre à M. le
ministre sur les questions de pourcentage, de disponibilité, si je puis
dire, et de représentation.
Mme Audette-Filion: M. le ministre, j'aimerais attirer
l'attention sur un point particulier, mais qui me semble bien fondamental.
Traditionnellement, la Régie des loyers et la commission ont
exercé une juridiction qu'on peut dire strictement administrative en ce
sens qu'elle entendait des causes d'éviction, de prolongement de baux et
de fixation des loyers. Ce n'est donc qu'une juridiction administrative avec
des incidences évidemment quasi-judiciaires, mais ce n'est que de
l'administratif. Alors que là vous faites un pas énorme dans la
juridiction que vous accordez à la nouvelle régie, et par la
suite à la Cour provinciale, en ce sens que vous donnez à la
régie du logement la juridiction, à l'exclusion de tout tribunal
en première instance, sur tous les litiges de nature civile
résultant d'un bail de logements qui ne sont pas de la compétence
de la Cour supérieure, etc., pour le reste.
En d'autres termes, vous donnez à cette régie une
juridiction non seulement pour les questions administratives, mais pour tous
les problèmes de droit qui pourront se présenter à
l'égard de ces logements-là. Ce qui veut dire que la régie
sera appelée à entendre des contestations dans le domaine
contractuel dans les relations entre les parties basées sur un contrat.
Elle sera amenée à entendre, à l'occasion, des
problèmes de droit complexe, des poursuites basées sur des
questions de droit, comme des vices cachés, des abus de droit ou
d'autres questions qui impliquent des problèmes de droit qui sont
importants. Elle pourra entendre aussi des litiges de nature délictuelle
qui seront reliés à cela.
Donc, on a une juridiction de droit civil pur, qui excède de
beaucoup la juridiction antérieure. Je pense que c'est une distinction
très importante. Il faut aussi penser que la juridiction va sans doute,
lorsqu'on prend comme point de repère la compétence de la Cour
supérieure et que l'on sait c'est un secret de polichinelle
que les juridictions vont incessamment être modifiées et
qu'on pourra se retrouver devant des litiges qui pourront peut-être
éventuellement aller jusqu'à $1000, comporter des
intérêts importants pour les justiciables ici. On demande à
une régie d'exercer cette juridiction. C'est très important,
lorsqu'on voit la juridiction beaucoup plus étendue qu'auparavant, que
l'on prétend ou qu'on veut, dans ce projet de loi, donner aux
régisseurs bien sûr, il y aura un droit d'appel qui nous
donne quand même une certaine garantie et, à cet effet, d'ail-
leurs nous nous en félicitons, c'étaient des
représentations antérieures du Barreau dans je pourrais dire nos
cinq mémoires antérieurs dans le domaine des loyers, parce que ce
n'est pas la première fois que le Barreau se présente ici.
Traditionnellement, nous avons toujours recommandé que l'on limite la
juridiction de la régie à la juridiction strictement
administrative, reconnaissant, je pense, l'intérêt qu'il y a
à remettre sous un même forum l'ensemble de la juridiction pour
des raisons surtout administratives, mais il ne faut pas perdre de vue que ce
sont vraiment des problèmes de droit qui vont y être
traités en partie.
M. Tardif: Je m'excuse, M. le Président, est-ce que...
Mme Audette-Filion: Alors, vos statistiques je m'excuse,
simplement pour compléter les statistiques que vous nous
mentionnez, évidemment, ne se réfèrent qu'à la
juridiction dite administrative.
M. Tardif: D'accord, mais est-ce que je veux m'assurer que
j'ai bien compris ce sur quoi, finalement, pourrait porter
essentiellement l'opposition du Barreau, serait de permettre la
représentation par des tiers ou d'autres membres que ceux de la
profession, pour ces matières civiles? En d'autres termes, pour les
questions administratives devant la régie, pour les questions
reliées au chapitre VIII, c'est déjà réglé
enfin, ce n'est pas par le biais de la loi 107 qu'on réglera ce
dossier, à supposer qu'il soit rouvert, mais c'est surtout pour ces
autres matières qui auparavant étaient dans le Code civil et qui
maintenant sont de la compétence de la régie.
Si je comprends bien, c'est là qu'est le point le plus...
Mme Audette-Filion: Je pense, M. le ministre, qu'on ne pourra
pas, une fois toute la juridiction rapatriée sous ce nouveau forum,
faire cette distinction et, à cet effet, le Barreau demande que les
règles normales de la représentation y soient respectées,
justement parce que ces problèmes de droit peuvent être
peut-être dans certains cas isolés, mais, dans d'autres, ils vont
devenir inhérents à de l'aspect administratif de la
régie.
Il y a une autre chose aussi, que j'aimerais peut-être ajouter;
c'est très important dans notre mémoire et elle se rattache bien
à cette question. C'est au sujet de l'article 59, où il est
question que les régisseurs, et par voie de conséquence, encore
en vertu de l'article 75, pourront suivre les règles de la preuve qui
leur sembleront opportunes. Je pense que c'est une disposition qui est
également et absolument inadmissible, je ne voudrais pas élaborer
ma pensée, mais encore pour les mêmes motifs, l'importance des
causes qui vont être entendues, les questions de droit qui engagent
l'importance des montants, je vous souligne que, même à la cour
des petites créances où on a voulu adopter la procédure la
plus expéditive, la plus facile possible et où les avocats n'y
sont pas,
l'article 973 précise très clairement que le tribunal doit
suivre les règles de la preuve. Alors, même là, les
règles de la preuve sont respectées. Si on écarte en droit
cette notion fondamentale, il n'y a plus aucune garantie de justice pour les
justiciables. C'est très important, et cet article 139 doit
également être modifié.
M. Tardif: On me souligne simplement que cet article 59 a
été pris à peu près textuellement du rapport
Dussault sur les tribunaux administratifs. Je m'excuse recommandation no
29, du groupe de travail sur les tribunaux administratifs qui dit: "Que les
tribunaux administratifs retenus puissent accepter toute preuve utile et
pertinente en l'appréciant selon les critères de l'homme prudent
agissant dans la conduite de ses affaires", etc. (10 h 45)
M. Pépin: Je pense que ça ne change pas, M. le
ministre, la position fondamentale du Barreau au niveau des principes. Je
voudrais d'ailleurs mentionner ceci: Evidemment, on est conscient qu'il y a une
situation de fait, comme vous l'avez souligné, une espèce de
tolérance, si je puis dire. C'est pour ça d'ailleurs que dans
l'intervention que j'ai faite tout à l'heure j'ai gardé une place
au conjoint pour qu'il puisse représenter une partie, nonobstant la
position fondamentale du Barreau qui va à rencontre de toute
représentation par qui que ce soit d'autre que la partie ou l'avocat,
pour des motifs de protection du public. Comme je l'ai dit, dans des cas
vraiment simples, on peut concevoir que la partie ou son conjoint soit capable
de se débrouiller elle-même. Il est vrai, comme vous le dites,
que, par exemple, dans une maison de vieillards, un locataire peut rendre le
service à quelques-uns de les représenter, d'autant plus que par
analogie on part de problèmes semblables. Mais, justement, c'est un fait
concret que la tolérance nous a permis de découvrir à
l'usage devant la Régie des loyers.
Ce qu'on discute ce matin, c'est un principe de droit qui,
consacré par l'article 57, ne limiterait plus la présence du
colocataire, de l'ami, du membre de la famille, mais de n'importe quelle
personne qui serait détentrice d'un mandat écrit et c'est
là, quand on s'intéresse aux questions de professionnalisme,
qu'on réalise comme tout est relié. Par exemple, nous, au
Barreau, ne pouvons pas faire de publicité et même, suivant les
objectifs actuels de l'Office des professions, ne pourrons faire n'importe
quelle sorte de publicité. Mais ceux qui ne sont pas régis ou
surveillés par des corporations professionnelles peuvent faire n'importe
quelle sorte de publicité. Il est évident que ces personnes
âgées, anxieuses et ayant besoin de se faire représenter,
pourront lire dans le journal que M. Untel ou que la compagnie Unetelle donne
un "kit" de services dont certains sont gratuits. L'avocat, ne pouvant le
faire, il n'est d'ailleurs pas souhaitable, dans l'état actuel du
professionnalisme, qu'une telle publicité soit faite par lui
graduellement, on aura ouvert la porte à cette pratique illégale
que je soulignais tantôt.
J'ajouterais ceci: Je pense que l'opposition fondamentale du Barreau, M.
le ministre, porte sur l'article 75. Là-dessus, je pense que notre
position est très claire et a été très clairement
perçue. Elle porte aussi sur la représentation par quiconque,
même devant la régie, autre que le conjoint. Je pense que
l'idéal serait que l'article 75 soit retiré ou qu'il soit
modifié pour qu'on annule sa relation avec l'article 57 et qu'ainsi on
conserve la représentation exclusive devant la Cour provinciale en
appel. Deuxièmement, l'article 57, en son premier paragraphe, devrait au
moins être suspendu ou son entrée en vigueur devrait être
retardée jusqu'à ce que tout le problème de l'acte
exclusif de la représentation ait été étudié
dans son ensemble. Je m'explique: Si, par exemple peu importe la
position fondamentale du Barreau la majorité des instances
consultées et le gouvernement décident qu'il doit y avoir
représentation par des tiers, il y aura au moins en même temps des
règles du jeu. Une espèce de déontologie de cette
représentation sera mise sur pied et incorporée au texte de la
loi qui viendra, ce qui n'est pas le cas dans le moment. On évitera au
moins les problèmes qu'on sait déjà devoir résulter
de l'article 57 tel que rédigé. Je veux simplement faire
comprendre, pour ce qui est de la personne détentrice d'un mandat
écrit, spécial et gratuit, que notre position est tout aussi
fondamentale sur cela qu'elle l'est au niveau de l'article 75.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci, M. le Président. Je pense que vous avez
répondu à ma première question par votre dernière
déclaration, mais, pour être absolument clair, au début
vous avez dit que non seulement sur l'article 75, mais aussi sur l'article 57
vous ne vous faisiez pas d'illusions.
Après avoir entendu Mme Filion, j'ai eu l'impression qu'un
changement important à l'article 57 était aussi essentiel, tenant
compte du rôle élargi de la régie qui est prévu pour
l'avenir.
M. Pépin: Sans aucun doute.
M. Scowen: Je pense que si je vous comprends bien, Me
Pépin vous êtes d'accord pour que les changements faits
à l'article 57 soient aussi importants que ceux faits à l'article
75?
M. Pépin: Tout à fait. J'ai dit que je ne me
faisais pas d'illusions, mais je n'en conserve pas moins ma foi.
M. Scowen: Partait! J'aimerais maintenant permettre à Me
Pépin ou à quelqu'un de votre groupe de continuer d'expliquer les
suggestions que vous faites à la page 14, s'il y a des points plus
importants sur lesquels vous n'avez pas eu le temps de parler pendant votre
présentation, parce que le document est bien écrit, bien
pondéré, bien clair et, pour moi, il s'agit simplement d'avoir
une
perception des éléments, des articles que vous croyez les
plus importants. Vous avez fait beaucoup de suggestions. Quelles sont, si on
commence, par exemple, par la page 14, les suggestions qui vous sautent aux
yeux comme étant primordiales? Nous avons pris note des articles 57 et
75 et de la question de la preuve. Vous avez soulevé des questions quant
à la copropriété, mais je pense qu'on a déjà
passé là-dessus avec les autres mémoires. Ce point de vue
est assez clair. Mais à la page 14, il y a pas mal de... je vous invite
à continuer votre présentation pendant deux ou trois minutes et
à aborder les autres éléments qui vous apparaissent les
plus importants.
M. Pépin: Mme Filion.
Mme Audette-Filion: Je vais essayer d'isoler quelques points en
vous reportant au texte, article par article. Il y a quand même une
étude qui a été faite par laquelle on a essayé de
bonifier, si on peut dire, la loi, d'apporter des améliorations.
J'aimerais attirer votre attention sur la question de la permission que l'on
donne de ne pas réglementer ou de contrôler les loyers pour les
immeubles neufs, pour une période de cinq ans. Nous étions, enfin
c'est un choix politique, d'accord avec cette restriction pour des raisons
autant économiques que de respect des droits acquis. Il y a une
suggestion, ici, dans le mémoire, qui me semble intéressante.
Nous proposons que dans les baux, concernant ces logements, il soit clairement
indiqué à l'intention du locataire que cette période
existe et que le contrôle des loyers n'existe pas pour telle
période et jusqu'à telle date, un petit peu comme on voit dans le
Code de procédure civile l'avis au débiteur ou l'avis au saisi de
ses droits et de ses obligations. C'est une mise en garde, je pense, qu'il est
important de faire parvenir, si on peut dire, au locataire, qui lui permettra
de savoir à quoi s'en tenir, soit qu'il bénéficie de cette
période pendant laquelle le contrôle des loyers n'existe pas. Il
me semble que c'est une suggestion très positive. Sur les autres points,
disons que c'est vraiment technique, article par article. J'aimerais
connaître vos questions ou j'aimerais mentionner, en particulier, la
question des régisseurs.
Pour revenir à toute cette question de l'ampleur de la
juridiction de cette régie, nous pensons que les critères
relatifs à la nomination des régisseurs devraient être
établis dans la loi et non pas dans la réglementation. Au moins,
les critères de nomination devraient M. Tardif a mentionné
tantôt qu'il s'agirait généralement, en tout cas pour les
litiges de nature civile, de juges et d'avocats, mais je crois qu'il serait
utile de préciser qu'il devrait s'agir d'avocats ayant au moins cinq
années de pratique ou d'expérience équivalente... Etant
donné l'ampleur, justement, de la juridiction qu'on confère
à ces gens, il ne me semble pas suffisant que ce soit dans la
réglementation. D'autant plus qu'aucun article dans le projet de loi ne
prévoit la prépublication des règlements et que les
règlements semblent bien entrer en vigueur dès leur
dépôt et leur publication dans la Gazette officielle. Il n'y a
donc pas possibilité d'intervenir à ce niveau. On retrouve cette
possibilité dans beaucoup de projets de loi où la
réglementation devient importante. On a au moins l'occasion de faire des
suggestions.
M. Scowen: Est-ce que je peux vous demander de parler un peu de
l'article 1657.2? C'est un article dont plusieurs personnes ont parlé.
Vous avez également des commentaires là-dessus. Il y en a
plusieurs qui ont parlé de la définition du concubin, mais ce
sont d'autres questions que vous soulevez.
M. Pépin: Alors, Me Lavoie, M. le Président, va
répondre à cela.
M. Lavoie (Raymond): En fait, c'est la question du bail qui peut
être repris par quelqu'un qui cohabite, un colocataire...
M. Scowen: Oui.
M. Lavoie (Raymond): ... ou à son conjoint. Alors à
la lecture de l'article du projet, les responsabilités des partis nous
ont paru un petit peu ambiguës lorsque le locataire en titre ou celui qui
a signé le bail quitte les lieux. Ce qu'on suggère, à
toutes fins utiles, c'est de préciser dans le projet de loi la
façon dont cela doit se clarifier le plus rapidement possible, parce
qu'il peut arriver quand même, il peut survenir des situations où
le locataire quitte les lieux et l'un des colocataires reste sur place, ou
encore lorsque le locataire décède, qu'il a une succession et
qu'il cohabitait avec une personne sans être son concubin ou son
conjoint. C'est toute cette situation qui nous est apparue ambiguë et on
voudrait que ce soit précisé de sorte que l'une ou l'autre des
parties touchées par ce problème puisse s'adresser à la
régie pour revendiquer ses droits, faire une demande.
M. Scowen: Quand une telle chose se produit actuellement,
qu'est-ce qui règle cette question?
M. Lavoie (Raymond): Actuellement, la seule disposition qui
existe dans la loi de conciliation c'est que le conjoint séparé,
ou divorcé, ou séparé de fait peut demander à la
Régie des loyers la prolongation du bail en son nom.
M. Scowen: A la commission actuelle.
M. Lavoie (Raymond): Actuellement, cela existe, c'est la seule
disposition, mais un colocataire qui n'est pas un conjoint
séparé, divorcé, ou séparé de fait n'a pas
de droit.
M. Scowen: Mais s'il existe aujourd'hui un problème,
est-ce que c'est la personne qui est responsable du bail qui le règle?
Est-ce la commission?
M. Lavoie (Raymond): Actuellement, c'est celui qui a signé
le bail qui en est responsable,
même s'il quitte les lieux en laissant un colocataire.
M. Scowen: Ah bon! ce n'est pas transférable.
M. Lavoie (Raymond): C'est cela, ce n'est pas transférable
actuellement.
M. Scowen: Ah bon! Ah bon! D'accord, je vais passer la parole
à M. Cordeau, merci! Merci beaucoup, c'est une excellente
présentation. Je vous remercie.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Merci, M. le Président, tout d'abord
félicitations pour l'apport que vous apportez à cette commission
en présentant ce mémoire.
M. le bâtonnier, au début de vos remarques, vous avez
surtout mentionné le fait que le barreau n'avait pas été
consulté concernant surtout les modifications à être
apportées et vous avez posé la question bien spécifique au
ministre, je crois, et celui-ci n'a pas répondu pourquoi...
M. Tardif: Pardon!
M. Cordeau:... que le barreau n'avait pas été
consulté avant l'élaboration de ce projet de loi.
M. Tardif: Je ferai remarquer au député de
Saint-Hyacinthe que nous sommes présentement en commission
parlementaire, entre la première et la deuxième lecture,
précisément dans le but de recevoir de tous les
intéressés toutes les représentations voulues. Alors, cela
m'apparaît le processus de consultation qui a le plus de panache et qui
est le plus large possible. Nous la tenons maintenant; c'est vrai qu'il y en a
pas eu avant, mais nous la tenons maintenant.
M. Cordeau: Est-ce que cette réponse vous satisfait, M. le
bâtonnier?
M. Pépin: Voilà, M. le Président, justement
le point que j'ai voulu faire dans mon mémoire et je pense que le
ministre l'a souligné. Je l'ai dit d'ailleurs moi-même; nous avons
au moins, cette fois-ci, l'avantage d'avoir préparé un
mémoire et d'être ici.
M. Cordeau: Oui.
M. Pépin: Cela c'est un avantage que nous n'avons pas eu
lorsque la Loi des accidents du travail a modifié la Loi du barreau.
Deuxièmement, il y a un élément qui
n'apparaît pas dans mon texte et qui n'apparaît pas dans le texte
de loi comme tel. C'est que, quand vous créez l'article 57 et que vous
permettez la représentation par un tiers ou quand vous créez
l'article no 75 et que vous permettez la représentation par un tiers
jusqu'à ce que vous ayiez décidé de retrancher, de
suspendre, etc., vous vous trouvez à modifier l'esprit de l'article no
128. Dans le cas du texte de l'article no 75 c'est vraiment le texte de
l'article no 128 de la Loi du barreau que vous modifiez. Dans le cas de
l'article no 57 c'est son esprit sans qu'un avis d'amendement, si je peux dire,
soit produit au niveau même de la Loi du barreau.
C'est cela que j'appelle une façon inacceptable de
légiférer qui devrait être éliminée ou
être rendue inopérante: modifier une loi dans une autre loi,
surtout des lois d'ordre public qui donnent à des organismes des
responsabilités de rendre des comptes au gouvernement ou au public.
C'est que nous, évidemment, comme corporation professionnelle, nous
avons des comptes à rendre sur la pratique du droit, sur la pratique de
consultation juridique, de représentation. Evidemment, les comptes que
nous avons à rendre, je pense qu'ils ressemblent un peu aux mandats
qu'on donne dans la présente loi à une régie, qu'on prenne
non seulement le mandat de poursuivre quiconque commet un acte illégal,
mais aussi celui de faire au législateur des recommandations sur la
façon de rendre plus facile et plus réaliste la poursuite de
pratiques illégales et l'empêchement de pratiques
illégales. (11 heures)
Or, effectivement, les articles 57 et 75 sanctionnent, si je peux dire,
en la légalisant, une pratique par ailleurs considérée
illégale d'après les principes de la Loi du barreau et ça,
nulle part, même aujourd'hui, ne voit-on un amendement à la Loi du
barreau et nulle part ne voit-on, dans la Loi du barreau elle-même, une
loi déposée modifiant la Loi du barreau. C'est donc très
difficile, parce que ça prive d'informations et de consultations la
corporation professionnelle concernée. Cela prive également, plus
tard, le juriste, l'homme de loi ou le citoyen qui recherche une loi...
Moi, je pourrais, si je n'étais pas avocat, continuer dans trois
ans de penser que personne d'autre qu'un avocat peut plaider, alors que, en
réalité, je me tromperais. Mais en lisant la Loi du barreau,
c'est ce que je lirais, alors que si je savais que la loi 107, un jour, a eu
pour effet de modifier la Loi du barreau, là j'apprendrais que l'article
128 de la Loi du barreau ne veut pas dire tout à fait ce qu'il dit.
C'est ce processus législatif qui me paraît inacceptable et
c'est pour ça que je disais: Nous nous en prenons aux articles 57 et 75
sur deux points: au niveau de la forme, c'est-à-dire la façon
dont ils sont apportés devant vous et, deuxièmement, au niveau
même du fond, le principe qui le sous-tend.
Le Président (M. Laplante): Avez-vous d'autres questions,
M. le député de Saint-Hyacinthe?
M. Cordeau: Oui.
M. Lavoie (Raymond): M. le Président, je me permettrais
d'ajouter que j'ai remarqué, dans le projet de loi, qu'aux articles 57
et 75 on permettait une représentation élargie qu'on veut
encadrer en
parlant de mandat écrit et gratuit, mais que, dans le même
projet de loi, on ne prévoit aucune sanction à ceux qui
violeraient les articles 57 et 75. Je m'étonne de cela. Y a-t-il des
sanctions ou si tout est permis?
M. Cordeau: La dernière phrase était une question;
M. le ministre a-t-il compris?
M. Tardif: La dernière phrase était une question de
M.... Je m'excuse, mais c'est qu'on me montrait, ici, l'article 128 de la Loi
du barreau où, effectivement, c'est vrai. Je regardais si,
effectivement, il y avait une exception concernant la Cour des petites
créances qui fasse entorse à l'article 128 et il n'y en a pas et
il n'y en a pas sur ce plan. Il y a d'autres exceptions, par exemple, pour la
Loi des accidents du travail, déjà à l'article 128 comme
tel.
M. Pépin: Votre texte est plus récent que le mien,
j'ai un texte qui date de 1978, mais la modification a été faite
en décembre 1978.
M. Tardif: Mais, si on fait le parallèle avec la Cour des
petites créances, à ce point de vue, le législateur, en
votant le chapitre huitième, n'a pas cru bon de modifier l'article 128
de la même manière. Je suis conscient que c'est un problème
qu'il faudra peut-être aborder en soi, l'article 128 et le Code des
professions; d'accord. Mais ce n'est pas par le biais d'une loi comme 107 qu'on
va amender tout le Code des professions. Par ailleurs, je suis aussi conscient
que pour l'essentiel on pourra revoir l'article 75 le projet de
loi 107 consacre une situation de fait.
M. Pépin: C'est que, dans le moment, ce que nous appelons
une situation de fait, évidemment, c'est une tolérance. Tant
qu'on est dans le domaine d'une tolérance, au fond on tolère la
tolérance quand on la consacre, on légifère. Une fois
qu'on a légiféré, la nature humaine étant ce
qu'elle est, on hésite beaucoup à revenir en arrière
même si, entre temps, on découvre qu'on aurait mieux fait de
continuer à tolérer que de légiférer, avant d'avoir
été au fond de l'étude du problème. Je suis
conscient du problème que vous avez quand vous donnez les pourcentages
et quand vous donnez le cas concret de représentation de colocataires,
de gens qui vont véritablement dans la position d'allié, de
parent ou d'ami; j'en suis conscient.
Vous remarquerez d'ailleurs que, au niveau d'une tolérance, le
barreau n'a pas poursuivi, pour exercice illégal, de 1931 à 1978,
les gens qui, n'étant pas avocats, allaient devant la CAT; le barreau
n'a pas poursuivi, dans les années soixante, les gens qui, allant devant
la Commission des loyers, n'étaient pas avocats. Pourquoi? Parce qu'il
existait une tolérance, nous y étions nous-mêmes, si je
puis dire, partie, complices ou appelons-le comme on le voudra; mais,
aujourd'hui, on est devant un texte de loi, ça ne sera plus une
tolérance quand l'article aura été accepté.
M. Tardif: C'est vrai.
M. Pépin: Là, c'est évident que je suis
obligé, sur le plan des principes, de vous mettre en garde parce que
ça va faire toute la différence; là je serai vraiment pris
avec un problème de pratique illégale dans les mois qui suivront
l'adoption et je n'aurai plus les outils pour être capable de
l'assumer.
On a déjà tellement de difficultés, notamment en
matière de perception c'est un autre sujet social ou
socio-économique plus fréquent comme celui des loyers ou des
petites créances. Le nombre de poursuites qu'on prend contre les agences
de collection est quand même considérable pour exercice
illégal. Ils ont le droit de collecter de l'argent; ils n'ont pas le
droit de représenter et, malgré cela, nous avons de la
difficulté à les mettre hors d'état de nuire, si je peux
dire, quand ils font autre chose que ce que la loi leur permet,
c'est-à-dire: collecter. Plusieurs d'entre eux entreprennent de
représenter et nous essayons de les empêcher de le faire.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe, est-ce qu'il y aurait possibilité de questions courtes,
de réponses courtes, parce que notre temps est fini.
M. Cordeau: ... c'est bien intéressant. C'est comme tous
les autres mémoires.
Le Président (M. Laplante): C'est vous tous qui avez fait
les règles du jeu.
M. Cordeau: A la page 3 de votre mémoire, dernier
paragraphe, vous mentionnez: "II est cependant essentiel d'accorder et de
conserver un droit d'appel de toutes les décisions de la régie
à un tribunal de droit commun." Est-ce que vous avez couvert ce point de
vue dans vos exposés? Voulez-vous expliciter votre pensée?
M. Massue-Monat (Henri): Ce paragraphe faisait
référence à la section 2 du chapitre III, pour lequel il
n'y a pas d'appel prévu.
M. Cordeau: Est-ce que vous admettez ce point de vue ou est-ce
qu'il vous semble que c'est...
M. Massue-Monat: Non, nous n'admettons pas ce point de vue. Nous
demandons qu'un droit d'appel soit accordé à la Cour provinciale
pou r toutes les dispositions du projet de loi, y compris la section 2 du
chapitre III.
Mme Audette-Filion:... d'isoler ce paragraphe de la page 3
où il est question, effectivement, des litiges de nature civile. Ce que
nous faisons ici, c'est que nous prenons note qu'en a préservé ce
droit d'appel à la Cour provinciale et nous nous en réjouissons
et nous considérons que c'est essentiel.
A l'autre chapitre où il est question des autres questions
concernant la démolition, etc., il n'y a pas de droit d'appel
prévu, je crois. Nous mentionnions que l'on souhaitait que, dans les
questions impliquant les questions de droit, on puisse prévoir aussi un
appel à la Cour provinciale. Autrement dit, on pense que de toute la
juridiction de la régie, il devrait y avoir un appel possible.
Le Président (M. Laplante): Merci, M. le
député de Saint-Hyacinthe. M. le ministre, le mot de la fin.
M. Tardif: M. le Président, je m'excuse, j'ai...
Le Président (M. Laplante): Je ne voudrais commettre
d'injustice, parce qu'il fallait couper une question. Je ne sais pas si... avec
l'autorisation des membres, le temps est dépassé. Je suis
prêt à...
M. Guay: D'accord, quitte à ce que nous prenions plus
d'une heure avec le mémoire du Barreau; l'entente sur une heure n'avait
rien de formel et d'absolu. L'exposé du Barreau, jusqu'à
maintenant, portait presqu'exclusivement...
Le Président (M. Laplante): D'accord, M. le
député de Saint-Hyacinthe... c'est vous qui êtes
maîtres de cela. Ecoutez, je n'ai pas d'objection, pour autant que...
M. Guay: ... un peu de souplesse.
M. Scowen: Nous en avons un autre ce soir et on termine à
quelle heure?
Le Président (M. Laplante): II y a trois groupes à
part cela, deux autres... A 13 heures.
M. Scowen: On n'a pas de commission cet après-midi?
M. Tardif: Pas de commission cet après-midi, de sorte que,
si la commission était d'accord, cela ne me ferait rien de
dépasser un petit peu 13 heures, si cela pouvait être utile
à tous les groupes présents ici ce matin.
M. Scowen: On devrait respecter l'échéancier.
Le Président (M. Laplante): Non, il n'y a pas
d'unanimité. M. le ministre, le mot de la fin.
M. Guay: Je m'excuse, M. le Président, il n'y a pas besoin
d'unanimité pour cela. Il n'y avait pas d'accord de la commission. Ce
n'était pas un ordre de la commission. C'était une entente qui
n'avait rien de formel. On s'est bien entendu là-dessus. Cela n'avait
rien de formel au début.
M. Cordeau: Une question brève.
M. Guay: Si on veut en faire une entente formelle, que le
député de Notre-Dame-de-Grâce en fasse une proposition.
Pour ma part, je vais voter contre.
M. Cordeau: Alors, on est mieux d'entendre sa question que de
commencer à voter.
Le Président (M. Laplante): Question courte, M. le
député de Taschereau.
M. Guay: Ma question porte sur votre recommandation, une des plus
originales et, en même temps, des plus radicales à mon avis
de votre mémoire et à laquelle on a indirectement fait
allusion tantôt, en parlant de la section 2, sur la question des
démolitions, des changements de destination.
Vous dites à la page 11 que "les conseils municipaux ne sont pas
qualifiés pour entendre de telles demandes et sont susceptibles de se
trouver très souvent dans des situations de conflits
d'intérêts." Vous recommandez, en conséquence, "que toutes
les demandes de démolition, de subdivision ou de changement de
destination de logements se fassent devant la Régie du logement,
siégeant en première instance."
J'aurais une question à plusieurs volets, comme on dit en
Chambre, sur le sujet. Mais, d'abord, pouvez-vous expliciter ce pourquoi vous
trouvez que les conseils municipaux ne sont pas habilités à agir
en la matière, et j'inclus là-dedans les commissions d'urbanisme
dans les municipalités où il y en a?
Deuxièmement, est-ce que vous ne trouvez pas que cette
recommandation risque de provoquer un engorgement à la Régie du
logement? Et en fonction de cela, si j'ai bien compris je ne suis pas
sûr d'avoir bien compris est-ce que j'ai bien compris que vous
vouliez qu'il y ait un droit d'appel général, pas uniquement sur
les questions de droit: un droit d'appel complet, en d'autres mots, tout ce qui
est à la section 2: "On puisse en appeler de la décision de la
régie à la Cour provinciale". Pas uniquement pour des questions
de droit. En d'autres mots, la Régie du logement siégera en
première instance, il y aurait appel de ses décisions à la
Cour provinciale. Est-ce qu'à ce moment, encore là, l'engorgement
qui, me semble-t-il, risquerait de se faire en première instance
à la Régie du logement, puisqu'elle peut aussi se produire en
appel à la Cour provinciale...
Ma question a deux volets. En premier, pourriez-vous expliciter en quoi
les conseils municipaux, y inclus les commissions d'urbanisme même
si vous n'y faites pas allusion directement ne sont pas qualifiés
pour entendre de telles demandes? Et deuxièmement, est-ce qu'il n'y a
pas des problèmes sérieux qui se poseraient si nous devions
accepter votre recommandation que je trouve d'ailleurs
intéressante que ce soit la Régie du logement qui entende
en première instance des questions de subdivision, démolition et
changement de destination, et que la Cour provinciale puisse servir de tribunal
d'appel à ces questions.
Le Président (M. Laplante): Me Lavoie.
M. Lavoie (Raymond): Je ne pense pas qu'il y ait un engorgement
de demandes qui soit plus important que ce qui existe actuellement à la
régie. Il faut quand même constater que, dans la conciliation
actuelle, il existe des mécanismes ou enfin des articles qui
prévoient de telles demandes. Le nouveau projet de loi nous dit que
maintenant nous sommes obligés de faire une demande. Alors que
maintenant, l'état actuel du droit, c'est que la demande se fait
lorsqu'il y a contestation ou désaccord entre les parties. Je ne
pense pas et les gens qui représentent la Commission des
loyers pourraient me le confirmer qu'il y ait un engorgement à ce
niveau. C'est mon opinion.
Maintenant, lorsqu'on veut donner...
M. Guay: Aucune démolition. M. Lavoie (Raymond):
C'est cela.
M. Guay: Aucun changement de destination, aucune subdivision ne
sera autorisée à la grandeur du Québec...
M. Lavoie: C'est cela.
M. Guay: ... sans que la régie n'intervienne.
M. Lavoie (Raymond): C'est cela.
M. Guay: En première instance.
M. Lavoie (Raymond): C'est ce que nous proposons. Il y a une
autre raison parce que ma réponse a aussi, peut-être,
plusieurs volets, on pourrait disserter longtemps là-dessus c'est
que si on donne une espèce de juridiction à des conseils
municipaux, il ne faut quand même pas se faire d'illusions, ce ne sont
pas seulement des gestes administratifs qu'ils vont poser, mais dans leurs
décisions ils vont faire un partage de droits. C'est important, ce sont
des droits de propriété, des droits d'occupation qui sont
touchés par cela.
Alors, on demande à un conseil municipal d'exercer une fonction
quasi-judiciaire, alors que les conseillers municipaux sont des
législateurs à toutes fins utiles. Ce sont des élus qui
exercent un pouvoir législatif délégué. Alors, on
va leur donner en plus un pouvoir judiciaire comme si on vous donnait à
vous, M. le député de Taschereau, le pouvoir de prononcer un
divorce ou quoi que ce soit. C'est un peu la même chose. On donne
à un législateur un pouvoir judiciaire. A toutes fins utiles, il
faut faire des représentations, selon le projet, devant un conseil
municipal, devant des gens élus, devant des gens qui ne sont pas
toujours qualifiés et devant des gens qui, souvent, seront en conflit
d'intérêt, soit au niveau de la municipalité, en conflit
d'intérêt ou au niveau personnel, dans leurs affaires
personnelles.
M. Guay: Incluez-vous là-dedans les commissions
d'urbanisme, aussi?
M. Lavoie (Raymond): Par le fait même.
M. Guay: Parce que dans certains cas, il n'y a pas de conseiller
qui siège aux commissions d'urbanisme.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre, je vais
être obligé...
M. Lavoie (Raymond): II faut que, dans le projet de loi, on parle
de conseils municipaux, seulement.
Le Président (M. Laplante): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, c'est bien évident
moi qui rencontrais l'union des municipalités, en fin de semaine
dernière, sur la loi d'aménagement qu'à ce passage,
ils ne sont pas tout à fait d'accord avec cela, qu'ils sont
incompétents, puisque, quand même, ils votent des
règlements de zonage qui, aussi, affectent le droit de
propriété, le droit de bâtir certains types d'immeubles
dans des rues et non pas d'autres. Cela fait partie des prérogatives
d'un conseil municipal.
Ceci dit, M. le Président, je voudrais, en conclusion, remercier
le barreau pour l'ensemble de sa contribution, mais notamment pour sa
suggestion d'inclure dans le bail, pour les immeubles de moins de cinq ans, que
justement cet immeuble est inclus. Donc, les règles du jeu n'en sont que
mieux connues des parties. (11 h 15)
On s'est interrogé sur l'engagement de régisseurs à
temps plein, enfin de régisseurs comme tels en disant: On aimerait que
ce soit plus précis Vous remarquerez que, même la loi, telle
qu'elle est là, sans parler de la réglementation, est un peu plus
précise que ce que nous avons présentement, parce que dans ce que
nous avons présentement, la loi dit: "Des administrateurs nommés
selon le bon plaisir". N'importe qui, cela pourrait être un plombier, un
barbier, et on en a eu, "et nommés selon le bon plaisir" et
remerciés de la même manière. Au moins, ici, on parle
d'avocats qui seraient nommés au moins pour cinq ans et puis on dit: il
y aura une réglementation qui sortira et qui pourra s'apparenter, par
ailleurs, à d'autres procédures de nomination des gens, enfin par
exemple des juges...
M. Pépin: Comité de sélection.
M. Tardif: ... adoptées au ministère de la Justice.
Donc on va s'inspirer un petit peu de cette procédure, où le
Barreau sera invité, sans doute, à nommer des
représentants, etc., mais cela viendra dans la réglementation. On
s'en va vers cela.
Finalement, juste une question: je vais examiner la suggestion ou la
confidence du juge Gold. Je pense que ce n'est plus une confidence puisqu'elle
est rendue publique. Mais est-ce qu'essentiellement le Barreau serait d'accord
avec une règle de représentation par avocats, conjoints ou des
tiers, mais dans les limites des règles qui s'appliquent
présentement devant la Cour des petites créances, en vertu de
l'article 955, notamment du livre Ville?
M. Pépin: C'est parce qu'on est exclus à la Cour
des petites créances, M. le ministre; alors j'ai de la difficulté
à établir le parallèle que vous voulez me faire
établir là.
M. Tardif: C'est-à-dire qu'à tout le moins pour les
tiers et les conjoints, si c'était libellé de la façon que
ce l'est à l'article 955.
M. Pépin: Disons ceci: évidemment nous ne
changerions pas notre position fondamentale, mais ma première
réaction c'est que votre projet de loi serait, à ce
moment-là, moins dangereux que ce que j'ai souligné.
Actuellement, honnêtement et de bonne foi, il est dangereux et ce n'est
pas au moment de l'adopter que vous allez vous en rendre compte; ce sera quand
il aura été vécu.
Il est probable, Me Lavoie pourrait peut-être expliciter ce point,
qu'une formulation semblable à celle qui apparaît dans le chapitre
de la Loi des petites créances serait moins dangereuse. Je ne dis pas
qu'elle est souhaitable; je resterai d'avis qu'il faudra en discuter dans les
meilleurs délais, globalement et à fond. Mais en tout cas, vous
avez une formulation moins dangereuse que celle que vous avez là.
M. Tardif: Merci.
Le Président (M. Laplante): Mme Audette-Filion, MM.
Massue-Monat, Lavoie, Proulx, Pépin, les membres de cette commission
vous remercient pour votre mémoire.
M. Pépin: Merci.
Le Président (M. Laplante): J'appelle maintenant
l'Association provinciale des constructeurs d'habitations du Québec
Inc.
M. Scowen: M. le Président, simplement un point de
règlement. Quant à la décision de dépasser l'heure,
est-ce que c'est une question de consentement ou une décision du
président, ou quoi; je suis un peu confus, là-dessus?
Le Président (M. Laplante): J'essaie automatiquement,
autant que possible, d'appliquer vous relirez la première
séance qu'on a faite c'est qu'on a demandé une heure, 20
minutes, 40 minutes, mais on m'a demandé aussi d'être flexible. Je
vous réfère à ce moment-là. Moi, ma
flexibilité, je veux la donner en autant que les membres soient
d'accord. Je voudrais que lorsque le temps est dépassé, ce soit
un consensus, au moins, des membres de cette commission. Jusqu'à ce
jour, je ne crois pas que cela ait été un problème. Ce que
je voudrais partager, autant que possible, c'est le temps. C'est
là-dessus que je me base actuellement pour essayer de vous donner autant
de temps des deux côtés.
M. Scowen: C'est correct. C'est simplement que, pour cette
fois-là, je me trouvais en désaccord avec une question
additionnelle, et vous avez décidé de permettre une question
additionnelle, et je voulais savoir simplement quelles sont les règles
ou...
Le Président (M. Laplante): A ce moment-là,
j'aimerais...
M. Scowen: C'est une question de président.
Le Président (M. Laplante): Mais j'aimerais que vous en
fassiez, à ce moment-là, une question de règlement. Par
les signes, c'est difficile, pour nous... ce n'est pas enregistré au
journal des Débats, mais j'aimerais, à ce moment-là, que
vous vous opposiez fermement par une question de règlement.
M. Scowen: Je vous l'ai fait, en vous le disant...
Le Président (M. Laplante): Mais après la
suggestion de M. le député de Saint-Hyacinthe, je n'ai eu aucune
autre réaction. D'accord? Merci.
M. Guay: Sur la même question de règlement, M. le
Président. Si ma mémoire est bonne il n'y a pas eu de motion de
faite à l'ouverture des travaux de cette commission, afin de fixer le
temps.
Le Président (M. Laplante): C'est ce qu'on appelle en bon
français le gentleman's agreement qui a eu lieu autour de cette table et
j'aimerais le respecter jusqu'au bout. D'accord?
M. Guay: Sauf que si cela a pour but de faire de nous des
participants passifs à cette commission et qu'on ne puisse poser des
questions sur un sujet qui nous apparaît pertinent, on est aussi bien de
rentrer dans nos bureaux et d'aller faire des choses plus utiles.
Le Président (M. Laplante): Maintenant, messieurs,
j'aimerais que vous connaissiez la règle vous voyez
l'embouteillage que cela peut faire d'essayer de prendre le moins de
temps possible à l'intérieur de vos vingt minutes pour la
présentation de votre mémoire, pour que les membres de cette
commission puissent vous questionner. C'est le temps, actuellement, qu'on a de
la difficulté à organiser. Veuillez présenter votre
organisme, vous présenter vous-même et présenter les
personnes qui vous accompagnent.
Association provinciale des constructeurs
d'habitations
M. Crochetière (Serge): Alors, au nom de l'Association
provinciale des constructeurs d'habitations, M. le Président, je vous
présente M. Gérard Gazaille, président de l'association,
à l'extrême gauche, M. Pierre Bélanger, économiste
à l'emploi de l'association, à ma droite, M. Orner Beaudoin
Rousseau, directeur général de l'association et moi-même,
Serge Crochetière, conseiller juridique de l'association.
Le Président (M. Laplante): Est-il possible de vous
approcher du micro? Est-ce que vous voulez répéter votre nom et
le premier que vous avez nommé, s'il vous plaît?
M. Crochetière: Ca va? Le premier, il s'agit de M.
Gérard Gazaille, immédiatement à ma gauche,
qui est président de l'Association provinciale des constructeurs
d'habitations et, quant à moi, mon nom est Serge Crochetière,
conseiller juridique de l'association.
Le Président (M. Laplante): Allez-y, monsieur.
M. Crochetière: Si vous me permettez, M. Gazaille va
d'abord énoncer le principe de notre position. On verra ensuite quels
sont les principaux points sur lesquels on entend discuter. Nous pourrons aussi
vous remettre une étude économique qui ne vous sera pas lue
intégralement, mais qu'on vous demanderait d'annexer à notre
mémoire. M. Bélanger pourra faire quelques commentaires avant la
période des questions, si vous le permettez. Le tout peut se faire, je
crois, dans le délai qui nous est alloué. M. Gazaille.
M. Gazaille (Gérard): M. le Président, M. le
ministre, MM. les membres de la commission, avant de procéder à
la présentation du mémoire de l'Association provinciale des
constructeurs d'habitations, nous tenons à vous rappeler que toute
modification au régime actuel revêt une importance
considérable pour le secteur de l'industrie de la construction que nous
représentons. C'est pourquoi, depuis plusieurs années
déjà, nous nous efforçons de faire des remarques
constructives, basées sur notre connaissance concrète au milieu
de tous les gouvernements qui légifèrent en matière de
logement.
Aujourd'hui, toutefois, c'est une fin de non-recevoir claire et
précise que nous opposons au projet de loi no 107, parce que nous sommes
persuadés que la réforme proposée va à rencontre
des intérêts de notre industrie et de l'ensemble des citoyens du
Québec.
D'autre part, certains faits, comme la mise en place d'une nouvelle
structure de la Régie des loyers avant même le dépôt
du projet de loi en première lecture, nous apparaissent comme
étant soit prématurés, soit révélateurs des
intentions du gouvernement.
Malgré tout, nous vous prions d'accorder votre attention à
nos remarques concernant certaines dispositions du projet de loi, notamment
celle qui est relative à l'impartialité des tribunaux ainsi qu'au
bref exposé qui suivra sur la situation du logement au
Québec.
Avec votre permission, M. le Président, je cède donc la
parole à M. Serge Crochetière.
M. Crochetière: Nous allons procéder à la
lecture du texte, si vous le voulez bien.
L'Association provinciale des constructeurs d'habitations du
Québec regroupe, depuis plusieurs années déjà,
l'ensemble des principaux intervenants du secteur résidentiel dans
l'industrie de la construction au Québec. Elle représente en
plus, maintenant, des administrateurs d'immeubles à caractère
locatif, situés sur l'ensemble du territoire québécois.
Notre organisme prétend donc pouvoir mesurer adéquatement
l'impact réel qu'aurait l'adoption du projet de loi no 107, tant sur le
stock actuel de logements que sur la construction de nouvelles unités.
C'est à ce titre qu'il vous soumet les commentaires qui suivent.
Avant d'aborder directement l'analyse du projet de loi no 107, nous
tenons à exprimer notre attitude face au fait que la construction de
logements au Québec est affectée par une multitude
d'interventions provenant d'autant de ministères distincts, sans par
ailleurs être représentée ou même reconnue comme un
secteur d'activités en soi par aucun desdits ministères. Force
nous est de constater, encore une fois, que le législateur a l'intention
d'intervenir pour présumément assainir la situation du logement
au Québec sans toutefois s'être autrement soucié des
répercussions de son action sur l'industrie de la construction. Tout se
passe comme si le problème du logement se limitait aux relations
locataire-locateur, sans devoir tenir compte des autres éléments
de la problématique.
Nous vous rappelons donc qu'une telle attitude risque d'offrir des
solutions simplistes et mal adaptées à la dimension réelle
du problème et que nous craignons qu'à plus ou moins long terme,
elle ne génère des malaises plus profonds que ceux qu'elle
tendait à corriger.
Quant à l'esprit de la loi, le projet de loi 107 vise, comme son
nom l'indique, à instituer une Régie du logement et à
unifier les divers textes de loi concernant les relations locataire-locateur,
tout en conservant le plus possible au stock de logements ses
caractéristiques actuelles. Pour ce faire, on nous propose un
réaménagement complet de l'économie de notre droit,
où l'Etat intervient directement dans la négociation en plus
d'extirper du droit de propriété des éléments
essentiels, à partir du postulat que le locataire est
généralement le grand perdant qu'il faut défendre des
manoeuvres du locateur. C'est, du moins, l'impression qui se dégage
à la lecture du projet de loi et du livre blanc qui l'a
précédé.
Bien sûr que l'unification des lois est susceptible de clarifier
la situation; bien sûr aussi que l'habitation a une dimension sociale et
qu'à ce titre l'Etat doit intervenir, mais on ne corrige pas une
situation en créant une injustice, alors qu'on demande au locateur de
supporter seul le poids social de l'habitation. Ce n'est pas en
pénalisant le locateur, parce que le locataire éprouve certaines
difficultés, qu'on solutionnera adéquatement le problème
du logement. toutefois, là où la réforme proposée
devient nettement inacceptable, c'est dans la création projetée
d'un organisme hybride appelé Régie du logement. Car le
législateur s'apprête à sacrifier l'impartialité du
pouvoir judiciaire au profit d'un organisme à la fois juge et partie,
où des gens nommés pour un terme fixe, avec mandat de conseiller
le gouvernement quant aux mesures législatives à adopter en
matière d'habitation locative, seront appelés à juger des
cas relevant de l'application de leur loi constitutive et ce, de
préférence à tout tribunal de droit commun.
Nous pouvons déjà vous assurer que cette régie ne
pourra pas prétendre à une justice au-
dessus de tout soupçon, puisqu'on n'aura pas su assurer
l'autonomie administrative de son pouvoir judiciaire, le tout contrairement au
principe clairement exprimé au chapitre septième du programme
officiel du Parti québécois intitulé "La Justice".
Ceci dit, et sans restreindre la généralité de ce
qui précède, passons maintenant à l'étude de
certains articles du projet de loi.
Article 3, alinéa 6, qui se lit comme suit: "La régie
exerce la juridiction qui lui est conférée par la présente
loi et décide des litiges qui lui sont soumis." A l'alinéa 6:
"Elle est en outre chargée de renseigner le public sur ses droits et
obligations résultant du bail d'un logement et sur toute matière
visée dans la présente loi;" cet article doit être lu en
relation avec l'article 17 qui s'énonce comme suit: "Les membres du
personnel de la régie doivent prêter leur assistance pour la
rédaction d'une demande à une personne qui la requiert."
Il est souhaitable qu'une information de caractère
général soit diffusée au public. Par ailleurs, il est
inconvenant qu'un organisme dit impartial donne une opinion sur un cas
précis, à une personne qui demandera ultérieurement
à ce même organisme de juger du litige qu'elle lui soumet.
Nous craignons que le régisseur chargé d'entendre la cause
ne puisse, sans discréditer les membres de son organisme, aller à
rencontre de l'opinion émise au préalable par la personne ayant
préjugé du cas.
Article 24: "La régie connaît en première instance,
à l'exclusion de tout tribunal, des litiges de nature civile
résultant du bail d'un logement qui ne sont pas de la compétence
de la Cour supérieure, ainsi que des demandes visées dans la
section II du présent article. "Elle connaît aussi, en appel, des
décisions des municipalités à l'effet d'accorder ou de
refuser un permis de démolition, de subdivision ou de changement de
destination d'un logement."
Pour les raisons mentionnées au chapitre précédent,
nous considérons inacceptable que cette régie ait un pouvoir
judiciaire exclusif sur les litiges de nature civile résultant du bail
d'un logement.
D'autre part, nous nous interrogeons sur la constitutionnalité
d'une telle attribution de juridiction.
Article 27, alinéa 2: "Nul ne peut, sans l'autorisation de la
régie, démolir un logement, le subdiviser ou en changer la
destination. Toutefois, cette autorisation n'est pas requise... "Lorsque le
gouvernement, un de ses ministères ou organismes entend démolir,
subdiviser ou changer la destination d'un logement, il consulte la régie
avant d'agir."
Pourquoi le gouvernement se placerait-il au-dessus d'un texte
législatif lorsque lui-même a considéré que cette
loi était d'intérêt général?
Articles 30 et 31 : "30. Une personne qui désire conserver le
caractère locatif d'un logement peut, lors de l'audition d'une demande
d'autorisation de démolir ou de changer la destination de ce logement,
intervenir pour demander un délai afin d'entreprendre ou poursuivre des
démarches en vue d'acquérir l'immeuble dans lequel est
situé le logement." "31. Si la régie est convaincue du
sérieux de l'intervenant, elle reporte le prononcé de sa
décision et accorde un délai d'au plus deux mois à compter
de la fin de l'audition pour permettre aux négociations d'aboutir."
Ce pouvoir abusif devrait être assorti de la possibilité
pour la régie d'exiger de l'intervenant qu'il fournisse caution dans les
cas où celle-ci considère qu'il serait judicieux de le faire,
afin de s'assurer du sérieux de cet intervenant.
Article 32: "Lorsque la régie accorde l'autorisation de
démolir, de subdiviser ou de changer la destination d'un logement, elle
peut déterminer les conditions justes et raisonnables pour la protection
du locataire, notamment en ce qui concerne les conditions de relogement de ce
dernier".
Les mots "conditions justes et raisonnables pour la protection du
locataire" pourraient donner lieu à une interprétation
très vaste. Nous recommandons donc au législateur de
préciser la portée de cet article.
Article 42: "Nul ne peut enregistrer une déclaration de
copropriété en application des articles 441b à 442p du
Code civil sur un immeuble comportant un logement."
Cette interdiction va forcer les gens à vivre dans l'indivision,
même dans les cas où une majorité d'entre eux habite
l'immeuble acheté en copropriété et ce, sans justification
valable.
Article 53: "Le régisseur peut visiter les lieux ou ordonner une
expertise, par une personne qualifiée qu'il désigne, pour
l'examen et l'appréciation des faits relatifs au litige. Dans ce cas,
une visite du logement ne peut avoir lieu avant neuf heures et après
vingt et une heures.
La procédure applicable à l'expertise est celle que
détermine le régisseur." (11 h 30)
II est impensable qu'un service d'inspection soit partie
intégrante du tribunal qui a à entendre la cause, car lorsque le
régisseur déléguera sur les lieux un inspecteur auquel il
est lié, nul ne pourra attaquer la crédibilité dudit
inspecteur. Ceci met particulièrement en relief les problèmes de
partialité qui surgiront sûrement d'une législation
créant un organisme administratif détenteur d'un pouvoir
juridiciaire. En outre, les procédures applicables à une
expertise devraient être préétablies et non fixées
au gré de chacun des régisseurs.
Article 57. "Une personne physique peut être
représentée par son conjoint, par une personne qui détient
un mandat écrit, spécial et gratuit..."
Il serait souhaitable de préciser qu'à l'exception des
représentations faites par les avocats le mandataire a au moins un
intérêt prouvable dans le bail. Et puisque les services de l'aide
juridique peuvent désormais fournir à quiconque le requiert une
représentation adéquate devant tous les tribunaux et organismes
administratifs de la provin-
ce, l'incapacité de payer n'est plus une excuse.
Article 59. "Un régisseur peut admettre toute preuve qu'il croit
utile au règlement du litige. "Notamment, une partie peut
présenter une preuve testimoniale, même pour contredire ou changer
les termes d'un écrit, lorsque la présente loi n'a pas
été respectée."
Les règles de preuve sont parfois contraignantes, cependant,
elles assurent la bonne marche des procès ainsi qu'une garantie que
justice sera rendue. On ne peut permettre au régisseur d'admettre toute
preuve qu'il croit utile au règlement du litige, car on crée
alors des risques évidents d'injustice beaucoup plus grands qu'en
établissant des règles de preuve déjà
éprouvées.
Quant au second paragraphe de l'article 59, il est inutile puisque, si
la loi n'a pas été respectée, il va de soi que le
régisseur peut entendre la preuve relative à ce qui s'est
passé réellement. Cependant, il sera alors tenu de juger au
préalable si la loi a ou non été respectée.
Article 60. "Un régisseur peut décider qu'un rapport
d'inspection fait sous la signature d'un inspecteur de la régie, d'un
inspecteur municipal..." il y a l'énumération des lois qui
créent des services d'inspection peut être admis et tient
lieu du témoignage de cet inspecteur.
Ce qu'on demande, c'est: Toutefois, une partie peut requérir la
présence de l'inspecteur à l'audition. Nous croyons que les
rapports d'inspection devraient obligatoirement être signifiés aux
parties en cause avant l'audition, avec avis accordant un délai pour
permettre à ces dernières de demander la présence de
l'inspecteur aux fins du contre-interrogatoire. A défaut d'une telle
demande dans les délais prescrits, le rapport pourrait tenir lieu de
témoignage. Autrement, il est impossible pour une partie, dans la
majorité des cas, de savoir qu'un tel rapport sera déposé
et de se défendre adéquatement.
Article 64. "Une décision de la régie peut être
exécutée comme s'il s'agissait d'un jugement de la Cour
provinciale si elle est signifiée à la partie adverse et
enregistrée au greffe de la cour du district où est situé
le logement."
Encore une fois, puisque nous nous opposons au pouvoir judiciaire de la
régie, à plus forte raison nous opposons-nous au caractère
exécutoire de ses jugements.
Article 69. "Il y a appel, à la Cour provinciale, des
décisions autres que celles visées dans la section II du chapitre
III du présent titre. "Cet appel est formé par le
dépôt, auprès du greffier chargé de l'application du
livre huitième..." En fait, c'est la façon de procéder
pour l'appel.
Il n'y a pas lieu de restreindre l'appel en excluant les
décisions visées dans la section II du chapitre III; de plus, si
le législateur a l'intention de créer un appel de novo, il
devrait le préciser. Si la cause doit être recommencée
entièrement, elle ne devrait pas l'être sur simple exposé
des faits ou d'après des preuves sténographiques. La loi devrait
le prévoir.
Article 77. Je vais vous le lire et vous en tirerez les conclusions
vous-mêmes. "Le greffier, si possible, fixe l'audience à une heure
et à une date où les parties et leurs témoins peuvent
être présents sans trop d'inconvénients pour leurs
occupations ordinaires."
Sans commentaire.
Article 86. "Le gouvernement peut, par règlement: 1. sous
réserve de l'article 67, prescrire ce qui doit être prescrit par
règlement en vertu des articles 1650 à 1665 du Code civil; 2.
imposer l'inclusion de mentions obligatoires dans le bail ou l'écrit
visé dans les articles 1651 à 1651.2 du Code civil et en
déterminer la forme et la teneur; 3.établir les critères
et la méthode de fixation du loyer d'un logement ou d'un terrain
destiné à l'installation d'une maison mobile; 4. établir
des exigences minimales relatives à l'habitation et à l'entretien
d'un logement; 5. définir un logement impropre à l'habitation.
Ces règlements entrent en vigueur à compter de leur publication
à la Gazette officielle du Québec ou à une date
ultérieure qui y est fixée."
Les pouvoirs contenus dans cet article sont très vastes et
peuvent modifier radicalement les relations entre locateurs et locataires,
notamment en ce qui a trait à la fixation du loyer. Nous demandons donc
au législateur de déposer un projet de règlement
conjointement avec le projet de loi no 107. En fait, on ne sait pas du tout ce
qui nous attend en matière de fixation de loyer actuellement. C'est un
principe de base, c'est-à-dire que l'on reconnaît qu'il va y avoir
une méthode de fixation des loyers, mais ce qu'elle sera, on ne le sait
pas du tout. L'impact de cette méthode de fixation, on l'ignore encore
totalement. Il serait donc très opportun qu'on fasse connaître aux
gens les grandes lignes de cette méthode de fixation, sans compter les
notions d'habitabilité et de propreté des logements.
Article 1650.4. "L'article 1616, le paragraphe 2 de l'article 1628 et
les articles 1637 à 1641, 1646 et 1647 et le premier alinéa de
l'article 1649 ne s'appliquent pas au bail d'un logement."
Comment le législateur peut-il justifier l'abrogation de la
sûreté réelle que constitue le privilège du locateur
sur les effets mobiliers de son locataire, alors qu'il ne s'est pas encore
prononcé sur les recommandations de l'Office de révision du Code
civil? Il aurait pu, très facilement, abroger le droit de saisie avant
jugement, tout en maintenant le privilège du locateur d'être
payé par préférence aux autres créanciers sur les
biens de son locataire, évidemment quand jugement était
intervenu.
D'autre part, nous ne comprenons pas la suppression de l'article 16.16
du Code civil. On y reviendra, mais c'est celui qui permet dans des cas de
réparations ou de rénovations, de demander au locateur de
reporter les délais nécessaires pour finir les travaux. A
l'article 1652: "Le locateur doit livrer et maintenir le logement en bon
état d'habitabilité". Comme nous le mentionnions
précédemment, lors de l'étude de l'article 86, il faudrait
que le législateur dépose immédiatement ses
règlements concernant l'habitabilité et la propreté du
logement.
1652.3 dit que le locateur peut déguerpir, si le logement est
inhabitable ou s'il le devient sans sa faute. Si le locataire avise le locateur
que le logement est inhabitable dans un délai raisonnable, il n'est pas
tenu de payer de loyer pour la période pendant laquelle le logement est
dans cet état. Qu'en est-il si le locataire n'avise pas le locateur et
qu'effectivement le logement soit inhabitable? Sera-t-il alors tenu de payer
quand même le lover?
L'article 1652.5 dit que le tribunal peut, à l'occasion d'une
demande, déclarer même d'office, qu'un logement est inhabitable.
Il peut alors statuer sur le loyer, fixer les conditions nécessaires
à la protection des droits du locataire et, le cas
échéant, ordonner que le logement soit rendu habitable. Lorsque
le tribunal prononce une ordonnance à l'effet que le logement soit rendu
habitable, il devrait être tenu de s'enquérir des capacités
de payer du locateur et des possibilités de financement pour cet
immeuble; autrement, il pourra en résulter des préjudices
auxquels il sera impossible de remédier par la suite.
A 1653, on dit: Une amélioration majeure ou une réparation
majeure, autre qu'urgente, ne peut être entreprise dans un logement,
avant que le locateur ait donné au locataire un avis d'au moins dix
jours, indiquant la nature des travaux, la date prévue pour leur
début et leur durée. Cet avis indique, s'il y a lieu, la
période d'évacuation nécessaire et les autres conditions
dans lesquelles s'effectueront les travaux, si elles sont susceptibles de
diminuer substantiellement la jouissance des lieux."
Cette exigence d'un avis indiquant la durée des
améliorations et des réparations majeures ne tient pas compte de
la réalité, car il est presqu'impossible de déterminer
à l'avance, la durée de ces travaux, principalement lorsque la
structure de l'immeuble est affectée il s'agit de
rénovations ici. Si on tient à garder cet article, qu'on
maintienne au moins la possibilité prévue à l'article 1616
du Code civil, de demander une extension de délai lorsque les
circonstances le justifient. Le locateur qui a effectué une
réparation ou une amélioration doit remettre le logement en bon
état de propreté. Cet article risque de créer des
problèmes, puisqu'on ne connaît pas encore la notion de
propreté. "Le locateur peut s'adresser au tribunal pour
récupérer le loyer ainsi déposé. Le tribunal peut
alors, notamment, ordonner la remise du dépôt au locateur,
permettre au locataire de continuer à déposer son loyer
jusqu'à ce que le locateur ait rempli son obligation, ou ordonner la
remise du dépôt au locataire. "
Compte tenu que l'article 1654 déclare que "le locataire doit
donner un avis préalable d'au moins dix jours avant le
dépôt, l'article 1654.1 devrait prévoir la
possibilité pour le locateur de demander au tribunal d'empêcher
justement que ce dépôt ne soit fait, sinon, même si le
locateur a raison, le préavis de dix jours devient inutile. Il faudrait
donc permettre au locateur de contester le droit de dépôt avant
qu'il ne soit effectué.
Le locataire peut aussi, si l'inexécution d'une obligation par le
locateur met en danger la santé ou la sécurité des
occupants ou du public, requérir une ordonnance enjoignant le locateur
d'exécuter son obligation. D'autre part, le locateur peut demander la
résiliation du bail si le logement devient dangereux pour le public ou
pour les occupants.
La juxtaposition de ces deux articles nous incite à croire que
peu de locateurs exerceront le recours prévu à 1663, de peur de
s'incriminer face à une demande subséquente d'un locataire,
basée sur l'article 1654.2. "Une personne qui cohabite avec un locataire
au moment du décès." Ici, il s'agit tout simplement d'une notion
de délai, de rapprocher les mêmes délais pour les
héritiers, que ce soit toujours 30 jours d'avis pour qu'ils manifestent
leur intention de ne pas continuer le bail. Dans les 30 jours d'une demande de
révision de loyer, le locataire peut s'adresser au tribunal pour faire
fixer le loyer.
Cet alinéa est inacceptable et devrait être rayé
complètement, puisque les parties sont convenues librement d'une
prévision de loyer égale et déterminée à
l'avance ou, du moins, dont les bases ont été
déterminées à l'avance, compte tenu des
éléments mentionnés au paragraphe premier de l'article
1658.13. Pourquoi, alors, la régie interviendrait-elle lorsque le
locateur doit assumer véritablement cette augmentation de prix? Il
s'agit ici d'une clause de rajustement des loyers en fonction de nouvelles
dépenses après douze semaines. Oui?
Le Président (M. Laplante): Serait-il possible de venir
à la conclusion?
M. Crochetière: D'accord, cela va. Je vais aller à
la conclusion.
Avant de terminer, nous aimerions préciser que nous sommes
conscients de représenter des intérêts particuliers.
Toutefois, nous sommes persuadés que le projet de loi 107 va à
l'encontre de la perception générale d'un grand nombre de
Québécois, face à la propriété et à
l'impartialité des tribunaux.
Nous désirons aussi vous rappeler que nous croyons
représenter ici les vrais professionnels de l'habitation qui,
jusqu'à ce jour, ont assuré aux Québécois l'un des
standards d'habitations les plus élevés au monde.
Ne serait-ce qu'à ce titre, nous prétendons
connaître le sujet au moins aussi bien que ceux qui ont
présidé à la rédaction du projet de loi no 107.
Le Président (M. Laplante): Merci, monsieur, de votre
coopération. M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, je remercie l'Association des
constructeurs d'habitations du Québec pour son mémoire qui, sans
aucun doute, nous sera éminemment utile lors de l'étude, article
par article, du projet de loi, puisque, essentiellement,
la facture même du mémoire a été
orientée vers des commentaires quant au libellé parfois de
certains articles et, sans aucun doute, qu'en revoyant la rédaction de
certains d'entre eux, nous tiendrons compte des remarques formulées,
notamment en ce qui concerne, par exemple, l'uniformisation des délais
qui, dans la mesure où ils seront le plus uniformes possible, pourront
éviter de semer de la confusion chez les parties.
Evidemment, de façon peut-être plus fondamentale, je pense
qu'il convient de souligner que le projet de loi 107 a visé, a
cherché à faire droit aux représentations du monde de la
construction en exemptant, tant par l'article 1658.18, les immeubles de moins
de cinq ans, de tout contrôle. Ceci est d'ailleurs conforme à une
espèce d'entente qui était intervenue lors d'autres amendements
de la Loi de conciliation et qui a été maintenue, ici, justement
pour permettre une période suffisante pour l'ajustement du coût du
loyer.
Cette représentation qui [n'apparaissait fondée à
l'époque et qui l'est toujours aujourd'hui m'amène cependant
à poser aux représentants de l'Association des constructeurs
d'habitations une question justement de fond sur cette relation qu'ils font
entre le contrôle des loyers, tel qu'il est préconisé dans
ce projet de loi, et non pas le contrôle des loyers comme certains
groupements qui sont venus devant cette commission l'ont demandé, et son
impact sur le secteur de l'habitation. En d'autres termes, est-ce que l'on
croit vraiment que le contrôle des loyers, tel qu'il est proposé
dans la loi et je conviens que les règlements ne sont pas faits
mais ils le seront et ils seront déposés en commission
parlementaire pour étude article par article mais est-ce qu'on
croit vraiment que la baisse actuelle de la construction de logements au
Québec et qu'on pourrait dire au Canada et aux Etats-Unis de
façon générale; j'ai des chiffres sur les Etats-Unis, et
la baisse est de moins 50% de mise en chantier, par rapport à
l'année dernière, et dans les Etats aussi bien où il y a
un contrôle que dans les Etats où il n'y en a pas
évidemment est-ce qu'on croit vraiment qu'il y a un lien de cause
à effet entre le type de contrôle proposé ici et cette
baisse d'activités dans le secteur de la construction. Si oui,
j'aimerais qu'on fasse la démonstration.
M. Crochetière: Je pense que vous venez d'abonder
exactement dans le même sens que notre intervention. M. Bélanger,
notre économiste, va vous répondre à ce
sujet-là.
M. Bélanger (Pierre): M. le Président, M. le
ministre, ce n'est pas la première fois qu'on me pose cette question. Je
pense que ce n'est pas la première fois non plus qu'on la pose à
d'autres individus qui oeuvrent directement ou indirectement dans le secteur de
l'habitation. Dans ce domaine-là, je pense que j'ai deux types de
commentaires qui vont vous paraître ne pas être une réponse
mais je pense qu'ils sont une réponse quand même. Je me permettrai
donc de les exprimer. (11 h 45)
En un premier temps, je dirai que cette question est un peu loufoque
excusez l'expression en autant que la décision d'exercer,
de mettre en force un contrôle des loyers, n'est absolument, et la
plupart du temps dans tous les pays où cela a été
essayé, pas une décision économique, mais une
décision de nature politique et sociale.
Donc, dans un premier temps, indépendamment de la méthode
de fixation, que ce soit un contrôle souple ou que ce soit un
contrôle rigide, il demeure une question de fond à trancher.
Jusqu'à quel point est-on intéressé et veut-on
évaluer l'impact d'une telle législation sur le volume de
construction. C'est la première partie de ma réponse.
La deuxième partie de ma réponse est reliée... Si
vous me le permettez, j'aimerais lire une partie de l'annexe que nous avons
jointe au mémoire, qui va vous donner dans le fond une idée de
l'évolution du secteur locatif dans la région de Montréal
à titre d'exemple, qui est très typique du Québec urbain.
A ce niveau...
M. Tardif: Je m'excuse mais vous faites allusion à une
annexe à votre mémoire...
M. Bélanger: Tel qu'il a été
précisé au point de départ par...
M. Tardif: Que les membres de la commission n'ont pas eue encore
je comprends.
M. Crochetière: Si vous le permettez je vais vous le
distribuer immédiatement. Je pensais que cela avait été
distribué avant même que l'on commence notre intervention.
M. Bélanger: Pour ceux qui voudraient suivre,
malgré que je ne suivrai pas le texte de façon intégrale,
je vais commencer la lecture de ce mémoire à partir de la page
24, je vais sauter des bouts. C'est juste pour vous dire, vous donner une
idée de l'évolution du secteur dans la région de
Montréal et jusqu'à quel point le contrôle peut être
un élément important à ce niveau.
Le Président (M. Laplante): Vous posez une question assez
embêtante pour la lecture; c'est que le temps est très
limité.
M. Bélanger: D'accord, je peux résumer si vous
voulez.
Le Président (M. Laplante): Si vous lavez
présenté actuellement, je préférerais qu'il
ressorte des questions actuellement des membres de la commission si cela
touche...
M. Bélanger: Si on examine le comportement du volume de
construction dans la région de Montréal qui est responsable
d'environ un peu plus de 50% des mises en chantier au cours des
dernières années, on va noter ce qu'on pourrait appeler des
fluctuations au niveau de la production comme telle qui sont
matérialisées générale-
ment en termes économiques par des fluctuations au niveau du
nombre de mises en chantier. A ce niveau, si on examine les données, on
va se rendre compte que les fluctuations entre ce qu'on pourrait appeler le
sommet et le creux dans un cycle, c'est-à-dire la période
à l'intérieur de laquelle va fonctionner le secteur d'habitation
dans le cas du locatif, ont produit un écart rarement supérieur
à 6000 unités, premier point.
Donc, un écart entre le haut et le bas en terme de cycle à
peu près équivalent à 6000 unités sauf en 1969-1970
où il a été supérieur à cela.
M. Tardif: Je m'excuse, mais vous faites référence
à un tableau, à un graphique précis dans votre texte?
M. Bélanger: C'est intégralement dans le texte,
c'est à la dernière section. Je vous fais un résumé
schématique de cette situation.
Si on examine par contre l'évolution de la demande au niveau du
secteur locatif dans la région de Montréal, on va se rendre
compte que l'écart entre le creux et le sommet est supérieur
à 20 000 unités.
Donc, si on regarde le graphique qui est fort éloquent à
ce niveau à l'intérieur du texte, on est passé d'un niveau
de demandes d'environ 6000 à 7000 avant 1975 à près de 23
000 pour la région de Montréal en 1975 et on se ramasse depuis
deux ans, c'est-à-dire en 1977 et en 1978 avec un niveau d'absorption
d'environ 4500 unités par année pour l'ensemble de la
région métropolitaine de Montréal, ce qui signifie que la
région métropolitaine de recensement de Montréal est
à peu près équivalente à la définition en
termes techniques de l'enquête sur les logements vacants de la
Société centrale d'hypothèques et de logements.
Donc, on note un écart entre le creux et le sommet en termes de
la demande qui est près de 20 000 unités, tandis que dans le cas
de la production il est d'environ 6000 unités.
Cela m'amène à répondre à la question du
ministre Tardif dans le sens suivant. On a généralement cru que
le comportement cyclique de la construction était relié au volume
de la construction. Si vous êtes un investisseur ou un constructeur et
que vous vous retrouvez avec une courbe de demandes du type de celle que je
viens de décrire, qui va fluctuer entre $6000 et plus de $23 000 et qui
va retomber à $4500 à l'intérieur d'une période de
cinq ans, je pense que vous avez une orientation de recherche à votre
question. Dans un sens, le comportement cyclique de la construction est une
chose. Jusqu'à quel point le contrôle va jouer au niveau de
l'offre et jusqu'à quel point... Si on regarde le rapport Legault, le
rapport Castonguay et l'ensemble des études qui ont été
faites dans le domaine de l'habitation au Québec au cours des
dernières années, on a probablement surestimé la demande
dans le secteur locatif et on se retrouve avec une interprétation qui se
situe entre deux courbes qui, depuis 1976, s'en vont de façon tout
à fait divergente. Est-ce que cela peut vous apporter quelques
éléments de réflexion?
M. Tardif: Je vois, d'après votre graphique de la page 28,
une baisse importante des mises en chantier de 1974. C'est cela? Avez-vous fait
des études pour savoir à quoi est attribuable cette baisse des
mises en chantier qui est particulièrement significative dans le cas des
logements locatifs?
M. Bélanger: Si vous regardez à la page 31,
à titre d'exemple, vous allez avoir le comportement de ce qu'on appelle
l'offre, c'est-à-dire le volume des parachevés, non pas le volume
des mises en chantier, ce qui est très différent, selon moi.
C'est le volume d'unités mises sur le marché, tandis que dans
l'autre cas on a le niveau de la demande.
M. Tardif: Ceci dit, si je prends votre graphique de la page 28,
à quoi, selon vous, est attribuable cette baisse de 1974?
M. Bélanger: Je dirais, par expérience
professionnelle, pour avoir travaillé environ trois ans au niveau des
techniques de prévision, pour répondre de façon
précise à cette question... Je pense que toutes les personnes qui
ont été entendues par le service technique de la commission des
loyers de même que le vice-président de la commission des loyers
se sont posé la question. Il devient très difficile d'estimer de
façon technique l'impact relatif, par exemple, d'une modification au
niveau de la Loi de l'impôt, que ce soient des déductions fiscales
de cette nature, l'introduction d'un contrôle des loyers ou quelque autre
mesure que ce soit. Cela peut même être les éléments
reliés à ce qu'on mentionnait au début du mémoire,
c'est-à-dire la législation relative au mode de fonctionnement de
l'industrie de la construction.
Si j'essaie d'être plus schématique vous
essayez d'évaluer l'importance relative du contrôle des loyers sur
la baisse de l'activité dans la construction, vous êtes pris avec
ce que j'appellerais un problème technique d'évaluation. Il
demeure cependant le fait que tout investisseur, surtout dans le domaine
locatif, compte tenu des mises de fonds qui sont en cause, même si ce
n'était que pour la durée de l'immeuble dans certains cas, est
aussi sensible aux comportements politiques qu'aux fluctuations de la
demande.
Ce que j'ai précisé dans la première partie de ma
réponse, c'est que, si vous êtes un investisseur et que vous
faites face à un niveau de demandes qui fluctue d'une façon aussi
fantastique que celle qui a cours dans une région comme Montréal,
vous avez déjà un problème d'interprétation
à la base.
M. Tardif: Je dois donc déduire de votre réponse
qu'on ne saurait invoquer de facteur unidimensionnel pour expliquer les
fluctuations aussi importantes que celles-là. Il y a un ensemble de
facteurs qui peuvent être des mesures fiscales, et comme par hasard, il y
a eu cette année-là des dégrèvements fiscaux.
Finalement, il faut chercher les réponses dans un ensemble de variables
qui ont pu exercer une influence. C'est ce que je dois comprendre de votre
réponse.
M. Bélanger: Oui, bien que l'impact du contrôle des
loyers au niveau de l'offre soit certain. Quelle est l'importance relative du
contrôle des loyers? Est-ce qu'il est responsable de 10%, 20%, 30%, 40%
ou 50% à court terme? A long terme, quel est son impact?
Le deuxième point, si vous me permettez de le
répéter encore. Je pense qu'on a trop mis l'accent jusqu'à
maintenant sur le comportement cyclique de la production, quand peut-être
la base même de notre problème est de la nature de la demande.
C'est-à-dire que, si vous faites référence à
n'importe quel technicien qui a évalué, en 1971, la croissance
des ménages non familiaux et si vous regardez, depuis deux ou trois ans,
le taux réel d'augmentation de la clientèle du secteur locatif,
vous allez vous "ramasser", comme on dit en termes familiers, avec une "gang"
de problèmes, dans le sens que vous faites face à des niveaux de
chômage, dans la région de Montréal, qui sont très
élevés, qui ont fait en sorte de grever le niveau de la demande
et ont fait en sorte que, si vous êtes un investisseur, vous avez, au
point de départ, un problème de demande, mais vous avez aussi un
problème au niveau de l'offre. Etes-vous capables d'assurer la
rentabilité de cet immeuble à l'avenir? A ce moment, ça
devient un comportement, on en est rendu au niveau psychologique, la
psychologie d'investisseurs face à un marché quelconque.
M. Tardif: Ce que vous êtes en train de nous dire, si j'ai
bien compris, c'est que, finalement, ce n'est peut-être plus uniquement
un problème économique, mais c'est peut-être
également un problème politique et social, à savoir
d'assurer, par diverses politiques, que les gens aient les moyens de satisfaire
ou de... enfin, que la demande soit maintenue, puisque vous posez le terme
beaucoup plus de ce côté maintenant.
M. Bélanger: La demande de logements n'est pas un
phénomène qui s'accumule; c'est-à-dire que les besoins de
logements ne s'accumulent jamais, c'est un concept qui peut vous paraître
bizarre, mais ça ne s'accumule absolument pas; on mesure uniquement un
niveau d'absorption sur le marché.
M. Tardif: D'accord. Je voudrais revenir à votre graphique
de la page 28 où on voit un sommet sans précédent en 1976
avec, en chiffres absolus, environ 68 000 unités de logement mises en
chantier. A ce moment, évidemment, il y avait un facteur constant, qui
était là en 1974 et en 1976, qui était la Loi de la
régie. Je pense que ça renforce l'argument qu'il n'y a pas de
cause unique qui joue dans ce domaine et ce plateau ou ce sommet atteint
indique bien que la loi de l'existence du contrôle à ce moment n'a
pas empêché ces mises en chantier, mais elle peut peut-être
expliquer aussi, à certains égards, une baisse dans les
années qui suivent, ajustée ou accouplée au
problème de la formation des ménages non familiaux.
M. Bélanger: J'ai tenté, depuis le début de
mon intervention, d'être ouvert. Je pense que, jusqu'à un certain
point, vous cherchez à réduire le débat en disant que le
contrôle des loyers n'a eu aucun impact sur le comportement de la
production. A titre d'exemple, pour expliquer les fluctuations de l'offre, on
peut noter que l'exemption de cinq ans a été maintenue, il y a eu
un ensemble de programmes gouvernementaux qui ne sont pas de ce
gouvernement qui ont été introduits et qui ont rendu le
secteur locatif très attrayant. Jusqu'à un certain point, ils ont
été introduits dans une période de relative
inactivité, ce qui a fait en sorte qu'il y a eu de la construction. Ce
que j'essaie de vous préciser depuis le début, c'est que vous
pouvez essayer de mesurer le comportement cyclique de la production, mais il ne
faudra jamais oublier le comportement cyclique de la demande. Ce qui fait que,
jusqu'à un certain point si je le résumais encore de
façon plus précise, à titre d'exemple votre
contrôle des loyers risque d'avoir un impact autant au niveau de l'offre
qu'il risque d'en avoir un au niveau de la demande. Il peut venir un temps
où, compte tenu des dispositions du projet de loi 107, vous allez
favoriser exclusivement le statut de locataire pour l'ensemble des individus au
Québec, ce qui va faire en sorte qu'il sera plus payant de demeurer
locataire que de vouloir devenir propriétaire. En tant que
société, on peut avoir le choix de déterminer si on veut
demeurer locataire ou avoir un accès à la propriété
si possible.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci, M. le Président. Les baisses de 1977,
1978 et 1979, dans ce graphique, selon vous, sont reliées surtout
à la demande?
M. Bélanger: A titre d'exemple, dans le cas de la
région de Montréal, en 1977-1978, il y a eu plus de 12 000
unités en surplus. Il faut que vous compreniez la position qu'on a
énoncée au point de départ; je pense qu'en tant que
constructeurs, nous connaissons le système de fonctionnement de
l'industrie de la construction. Prenez comme exemple un immeuble à
appartements de 200 logements en chantier, il ne faut pas vous imaginer que,
demain matin, cet immeuble sera dans votre cour et va accueillir des personnes.
Dans ce sens, je reviens sur le même sujet; jusqu'à quel point
peut-on prévoir le niveau de la demande et jusqu'à quel point le
comportement des mises en chantier n'est-il pas décalé par
rapport à ce niveau? Dans votre cas particulier, il n'y a personne qui a
estimé la baisse de la demande depuis 1976. (12 heures)
M. Scowen: Je sors un peu de la question du projet de loi 107,
mais vous avez fait une prévision pour 1979. Vous ne prévoyez
aucune relance d'ici la fin de l'année?
M. Bélanger: Aucune, sinon encore une
détérioration du marché, c'est-à-dire un volume
peut-être même inférieur à 40 000 unités de
mises en chantier.
M. Scowen: Et le...
M. Bélanger: Le secteur unifamilial devrait en prendre 30
000, selon moi, et le secteur locatif 12 000, quelque chose comme cela.
M. Scowen: Et qu'est-ce que vous prévoyez je ne
sais pas s'il y a des chiffres là-dedans en ce qui concerne le
taux de vacance?
M. Bélanger: Le taux de vacance? Si vous regardez dans la
région de Montréal, il est passé de 0,9% en avril 1975
à le taux global de vacance à plus de 6% en octobre
1978, ce qui représente une augmentation, en termes du nombre
d'unités vacantes, de quelque chose comme 4000 à plus de 33 000
unités vacantes dans la région de Montréal.
M. Scowen: Alors, est-ce qu'on peut dire que si le taux de
vacance devient plus grand et...
M. Bélanger: II va devenir plus grand au cours de
l'année.
M. Scowen: ... et la construction devient plus petite, la
population est en train de diminuer?
M. Bélanger: Je voulais lire...
M. Scowen: C'est la dernière question que je vais vous
poser là-dessus, parce qu'il faut retourner à la loi 107, mais
est-ce qu'il y a d'autres raisons qui...
M. Bélanger: II y a un ensemble de facteurs qui
déterminent le niveau de la demande, autant sur une base globale que sur
une base par secteurs, au niveau unifamilial et au niveau locatif.
M. Scowen: Oui, oui.
M. Bélanger: Pour ce qui a trait au secteur locatif, si
vous regardez les caractéristiques majeures de cette clientèle,
elles sont grandement affectées à l'heure actuelle par des taux
de chômage élevés, par une croissance des revenus
relativement plus faible qu'au cours de la première partie de 1970, ce
qui fait en sorte qu'on peut même noter, dans certains cas, une tendance
vers le surpeuplement des logements, au lieu de la tendance inverse qu'on avait
notée jusqu'à maintenant.
M. Scowen: Simplement pour répéter, est-ce que je
me trompe si je dis que si le taux de vacance monte et si le nombre de nouveaux
logements diminue, cela va de soi que la population n'augmente pas?
M. Bélanger: Si vous regardez...
M. Scowen: II y a d'autres facteurs...
M. Bélanger: Oui, c'est un très grand facteur, pour
autant que, à titre d'exemple, tout...
M. Scowen: II faut une analyse plus profonde que cela.
M. Bélanger: C'est cela.
M. Scowen: Ce que je veux vous demander, peut-être sur le
plan de ce projet de loi, comme on sait, comme beaucoup de problèmes
dans la vie sont la cause de plusieurs facteurs, c'est toujours difficile de
sortir d'une façon scientifique le poids d'un élément
comme tel. Nous sommes, faute de scientifiques, rendus aux questions de
jugement, et c'est votre jugement que je veux avoir. Vous avez dit dans
l'introduction que tout se passe comme si le problème du logement se
limitait aux relations locateurs-locataires, sans devoir tenir compte des
autres éléments de la problématique. C'est une critique,
en effet, de la loi 107, et la question que je vous pose est la suivante:
Est-ce que vous pensez que ce projet de loi, tel que rédigé
actuellement, aura un effet néfaste, négatif sur la construction
de logements à Montréal, si 107 devient loi, si le projet de loi
est adopté comme tel?
M. Gazaille: Je pense que cela peut avoir un effet. Mais comme M.
Bélanger le mentionnait tout à l'heure, par rapport à la
diminution des logements actuellement qu'il va y avoir en construction, disons
qu'il y a un surplus, en plus de cela, si l'entrepreneur ou l'acheteur de
maisons d'appartements ne trouve pas le rendement dans une maison
d'appartements aussi bien qu'en plaçant le même argent à la
banque, automatiquement, vous n'aurez pas de bonshommes
intéressés à l'investissement. La Régie des loyers
est quand même nécessaire, nous n'avons jamais été
contre, en principe. Cela dépend de la manière dont elle sera
appliquée. Maintenant, la Régie des loyers avait un besoin en
1974, peut-être qu'il est moindre aujourd'hui. Du fait, comme M.
Bélanger nous le mentionnait tout à l'heure, que vous avez un
surplus de logements dans la région de Montréal ou pour la
province de Québec, en partie, c'est qu'une régie, dans le
moment, c'est l'offre et la demande.
Si vous regardez les journaux de fin de semaine, vous allez trouver
plusieurs pages qui annoncent trois ou quatre mois gratuits; ce qui veut dire
que l'entrepreneur se régit lui-même. Même s'il a cinq ans,
c'est régi par lui-même. Je ne sais pas si cela répond un
peu à votre question ou si...
M. Scowen: Non, je vous demande d'une façon
peut-être plus précise, si un investisseur, devant les projets de
loi et le Code civil, qui existent déjà dans ce domaine, sur le
point de construire quelque chose de nouveau dans un secteur, parce que le taux
de logements vides n'est pas égal dans toutes les catégories
du
marché... Si, par exemple, on n'avait pas de taux de vacances;
prenons l'exemple quand il y avait une demande pour une certaine
catégorie de logements, est-ce que ces changements du Code civil, les
changements de la commission qui deviendra une régie, les
contrôles, tout ce qui est élaboré là-dedans, sont
importants, comme contexte, comme vous avez un peu suggéré dans
votre introduction? Parce que je cite ce commentaire de votre propre
document.
M. Bélanger: Je pense que l'on doit dire de façon
claire, nette et précise que l'impact est certain et qu'il est quand
même important. Quelle est la mesure, comme vous le disiez, au point de
vue scientifique, de cet écart? Vous allez toujours être pris avec
un niveau, un problème technique, depuis surtout 1976. En même
temps qu'il y avait un contrôle des loyers, il y avait un programme de
construction de logements financés par la Société centrale
d'hypothèques et de logements qui était très avantageux,
parce que l'on avait découvert qu'il y avait une pénurie de
logements ce qui a même motivé l'introduction du contrôle
des loyers.
Maintenant, on doit admettre de façon claire, nette et
précise qu'il y a des fluctuations au niveau de l'office et de la
demande, quant à la situation du locateur et du locataire, selon la
période du cycle à l'intérieur de laquelle on se trouve,
favorables, dans le fond, au locateur ou au locataire. Dans cette optique, une
grande partie des problèmes qui sont reliés à la fixation
du bail ont toujours été réglés jusqu'à
l'introduction du contrôle des loyers, de façon équitable
et harmonieuse dans un très grand nombre de cas entre les deux
parties.
En ce qui a trait à d'autres motifs sur lesquels la Commission
des loyers fonctionne, j'aimerais peut-être laisser la parole à
Serge Crochetière.
M. Scowen: Avant que vous preniez la parole, simplement pour ne
pas vous avoir mal entendu, pour vous, les effets négatifs du projet de
loi tel que proposé aujourd'hui, seront certains et importants.
M. Bélanger: Oui, autant au niveau du volume qu'en termes
de la répartition des mises en chantier à l'avenir en ce qui a
trait à la location et à la propriété, parce que
vous venez d'introduire la permanence du droit au logement pour un
locataire.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Crochetière: Tout ce que j'aurais à ajouter,
c'est qu'il y a aussi certains éléments qu'il serait
nécessaire que l'on connaisse, comme: Quel va être la
méthode de fixation des loyers? Cela aussi va jouer
considérablement au niveau des investissements. Si, par exemple, il y
avait un mécanisme de fixation qui ferait en sorte que désormais
le loyer était payable en fonction des capacités de payer du
locataire, évidemment, il y aurait peut-être même plus de
construction. Alors, c'est toujours relatif aussi, à la
réglementation sous-jacente à cette loi. Plus la loi va
être dure, plus il va y avoir un fort impact sur la construction de
nouveaux logements.
Le Président (M. Laplante): Le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Concernant les demandes de location, dans quelle
catégorie de loyers la demande est-elle la plus forte? Avez-vous des
statistiques concernant...
M. Crochetière: A titre d'exemple, les données qui
existent à l'heure actuelle sont des données, soit par
région, soit par taille de logement, soit par catégorie
d'immeubles. Au niveau des grands logements, la demande est très forte,
sauf que si vous voulez construire un cinq et demi à l'heure actuelle,
avec les techniques de construction courantes, avec les coûts de
construction courants, cela me surprendrait qu'il ait été
donné aux constructeurs la science et la possibilité de
construire des logements vieux et usagés à $200 dans le
centre-ville de Montréal.
M. Cordeau: Est-ce que tantôt, j'avais d'autres
questions, vous y avez répondu vous croyez que, si la demande est
plus faible, c'est parce qu'il y a des logis qui se vident, parce que c'est un
exode des citoyens? Parce que vous avez parlé d'émigrants de la
région de Montréal vers d'autres parties du Canada ou de la
province et ainsi de suite, est-ce un des facteurs?
M. Bélanger: C'est un des facteurs parmi un ensemble, ce
qui fait en sorte que la demande, c'est un nombre d'unités, de preneurs
sur le marché si on veut le résumer de cette
façon-là, ce nombre de preneurs est directement relié au
nombre d'individus qu'il y a à l'intérieur, de même que la
mobilité qui va exister à l'intérieur de ce marché.
Dans beaucoup de cas, à titre d'exemple, les locataires, pour reprendre
un chiffre, se déplaçaient dans 20% des cas. Jusqu'à quel
point, maintenant, cette mesure n'est pas rendue à 5%, 10%, cela va
fluctuer autant au niveau de l'absorption de la production neuve. Je ne sais
pas si vous me comprenez à ce niveau-là. Je pense qu'on ne doit
pas être aussi catégorique que cela, malgré qu'avec un
nombre donné d'individus, s'il est à la baisse, vous avez une
demande qui est directement inférieure.
Le Président (M. Laplante): C'est tout? M. le
ministre.
M. Tardif: M. le Président, je suis tout à fait
d'accord sur les prévisions de M. Bélanger quant au volume de
construction à prévoir pour l'année à venir et
l'importance de la demande dans cette production de logements. Evidemment,
c'est vrai qu'il y a un taux de vacance relativement élevé,
encore qu'il faudrait voir dans quel sous-marché cela s'applique,
mais je ne sais pas s'il est d'accord sur certaines données qui nous ont
été fournies ici qui indiquent que la formation des
ménages familiaux est baissée de 2,8% à 2,3% et celle des
ménages non familiaux de 5,9% à 3,9%. Donc, il y a là une
diminution importante dans le taux de formation des ménages qui,
évidemment, se reflète dans la demande de logements. Est-ce qu'il
est d'accord sur cette tendance?
M. Bélanger: Je n'ai pas vérifié les
chiffres comme tels, mais au niveau du principe oui.
M. Tardif: Au niveau du principe.
M. Bélanger: Bien que si vous me le permettez, j'aimerais
faire un bref commentaire sur ce qu'on appelle un taux de vacance
désirable. On a toujours admis, à peu près au niveau de
l'ensemble des textes législatifs, que ce soit au Québec, au
Canada ou dans les autres pays, qu'un taux de 4% à 5% était
jugé acceptable. A ce niveau-là, je me permettrais, contrairement
aux autres individus qui ont touché au secteur, de dire que
présentement ce niveau est inacceptable. Pour autant que le niveau du
taux de vacance est relié au degré de mobilité à
l'intérieur d'une zone donnée, dans le cas présent, un
taux supérieur à 3%, selon moi, dans une zone comme
Montréal, est déjà un taux critique, si vous me permettez.
Dans ce sens, il s'agit d'être non pas strict, comme dans une loi par
exemple, mais il s'agit d'être assez ouvert d'esprit pour voir que cela
va fluctuer dans le temps.
M. Tardif: Mais si on reste dans cette ligne de raisonnement, le
nombre de causes amenées devant la régie cette année
devrait diminuer de façon importante puisque, finalement, le
marché va s'ajuster à des conditions raisonnables.
M. Bélanger: D'une part oui, dépendant aussi de la
campagne de publicité entreprise par la Commission des loyers.
M. Crochetière: De plus, le fait de faciliter les
procédures et les recours aux locataires et même, jusqu'à
un certain point, de les inciter tout simplement en cautionnant leur refus de
répondre peut être aussi une explication à la croissance
des demandes devant la Régie des loyers.
M. Tardif: J'ai ici une citation du Ontario Economic Council qui
affirme que, finalement, le contrôle des loyers suit la baisse de
production plutôt qu'il ne la provoque. Mais en fait, on voit: "The most
dramatic drop during the recent slowdown in residential construction activity
has been in the construction of multiple units for rental. The resulting upward
pressure on rents is already evident. It is likely to continue. Rent control is
therefore frequently suggested as a response to this."
Si on se place dans la ligne présentée par l'Association
des constructeurs d'habitations, on dit, par exemple: Si l'imposition d'un
contrôle des loyers réduit présumément l'offre
nouvelle de logements locatifs, son abolition devrait logiquement provoquer une
reprise dans ce secteur. Or, toutes les expériences, tant au Canada
qu'aux Etats-Unis, dans ce domaine-là et ailleurs en Europe
n'ont pas produit ce résultat. Je pense qu'il serait temps de
confirmer que la relation cause à effet n'est peut-être pas si
directe que cela, évidemment, selon le type de contrôle. Et
là, on rejoint ce que Me Crochetière disait, que, finalement, il
faudrait peut-être attendre d'avoir la méthode de fixation pour
savoir si celle-ci, justement, va avoir un effet indiqué. (12 h 15)
M. Crochetière: Entre autres choses, oui, et aussi quant
à l'esprit de la loi, ça peut avoir un effet, étant
donné les mécanismes rigides qu'elle contient. C'est la raison
pour laquelle on s'oppose, en principe, à cette loi; c'est qu'elle est
trop rigide et aussi, qu'il s'agit d'une action parcellaire sur le milieu de la
construction, sans aucune concertation avec les autres éléments
du problème.
M. Bélanger: De plus, si vous permettez, pour
répondre de façon directe à la question de M. Tardif, il
existe une différence de législation qu'il s'agit de
considérer au point de départ, qui, je pense, explique beaucoup
le phénomène. En ce qui a trait à l'aspect de suivre ou de
provoquer des fluctuations au niveau de la production, je me place dans la peau
d'un politicien et je me dis que, quand le taux de vacance va être
très faible, j'ai une possibilité d'intervenir et, une fois que
je suis intervenu, je ne peux pas me retirer de ce secteur. Dans ce cadre, la
loi, dès son introduction, était peut-être justifiable par
rapport à une évolution au niveau de l'offre et de la
demande.
Maintenant, elle me paraît totalement inacceptable, en ce qui a
trait strictement au point de vue économique.
M. Tardif: Je n'ai pas d'autre question, M. le Président.
Encore une fois, je remercie l'Association des constructeurs d'habitations du
Québec.
Le Président (M. Laplante): MM. Bélanger, Rousseau,
Gazaille, Crochetière, les membres de cette commission vous remercient
de votre participation. J'appelle maintenant l'Association des étudiants
en résidence de l'Université de Montréal.
Veuillez identifier votre organisme et les personnes qui vous
accompagnent.
Association des étudiants en résidence
de l'Université de Montréal
M. Paul (Denis): M. le Président, permettez-moi de vous
présenter d'abord Mlle Renée Tremblay,
déléguée de l'Association des étudiants en
résidence de l'Université de Montréal; M. André
Paquin, président de l'association; à ma gauche,
M. Jacques Thisdale, responsable aux affaires externes de l'association
et, à l'extrême-gauche, Me Jean Perreault, conseiller de
l'association. Mon nom est Denis Paul.
Je voudrais d'abord remercier les gens de la commission de la
possibilité qui nous est offerte de présenter à votre
commission un mémoire touchant les problèmes auxquels ont
à faire face les étudiants en résidence de
l'Université de Montréal. Si vous le permettez, vous constaterez
d'abord que notre mémoire est très court, nous avons voulu vous
produire un mémoire le plus court possible, étant donné
que votre commission est déjà chargée, et nous avons
préféré retenir trois recommandations. Si vous le
permettez, nous allons procéder à la lecture dudit rapport.
L'utilisation d'un recours à portée sociale, dans le cadre
de la vie étudiante, peut soulever de vives polémiques. D'une
part, les étudiants sont tributaires des conditions qui leur sont
consenties par le ministère de l'Education et, d'autre part, ils ont le
privilège d'exercer les recours ouverts à tous les citoyens.
Ainsi, les étudiants des résidences de l'Université de
Montréal se sont prévalus de certaines dispositions de la loi
pour favoriser la conciliation entre locataires et propriétaires pour
contester une hausse de loyer décrétée par
l'administration des résidences de l'Université de
Montréal.
C'est dans ce contexte et à la suite de cette expérience
que l'Association des étudiants en résidence de
l'Université de Montréal regroupant 1176 étudiants tient
à présenter les quelques recommandations qui suivent aux membres
de la commission parlementaire chargée d'étudier le projet de loi
no 107.
Tout d'abord, au niveau de la juridiction, nous ne pouvons que nous
réjouir en constatant que l'article 1 du projet de loi no 107
référant aux articles 1650 à 1650.3 du Code civil place
toujours les chambres sous la juridiction de la Régie du logement.
Cependant, l'article 27.2 du même projet de loi vient mettre en danger la
conservation des logements en prévoyant qu'une chambre vacante peut
être affectée à une autre utilisation sans que soit requise
l'autorisation de la Régie du logement.
De plus, l'article 27, dernier paragraphe, impose un simple devoir de
consultation au gouvernement et à un de ses ministères ou
organismes. En conséquence, l'Association des étudiants en
résidence de l'Université de Montréal recommande la
suppression de l'exception des chambres vacantes à l'article 27.2.
L'article 27.2 se lit de la façon suivante: "Nul ne peut, sans
l'autorisation de la régie, démolir un logement, le subdiviser ou
en changer la destination. Toutefois, cette autorisation n'est pas requise dans
le cas d'une chambre vacante ou d'un terrain destiné à
l'installation d'une maison mobile, s'il est vacant."
A l'Université de Montréal, suite à l'action
entreprise à la Régie des loyers en septembre dernier, il semble
que la direction des résidences de l'Université de
Montréal ait l'intention, afin de rentabiliser les trois immeubles qui
sont actuellement occupés par des étudiants résidents, que
l'université semble avoir l'intention de transformer une partie des
chambres actuellement utilisées par les étudiants, en bureaux.
Dans ce cadre-là, les dispositions prévues à la loi
pourraient être modifiées afin de préserver ces logements
dans la même optique que le reste de la loi.
La recommandation: La suppression de l'exception visant une chambre
vacante à l'article 27.2., ou: Une addition d'une disposition
spécifique visant les chambres d'étudiants, et ce, pour le niveau
collégial ou universitaire. De plus, nous recommandons la suppression du
paragraphe dernier de l'article 27.
Le deuxième chapitre de notre mémoire concerne le recours
collectif. Les articles 45 et 46 du projet de loi no 107 prévoient la
jonction ou l'instruction commune des demandes présentées
à la Régie des loyers. Nous croyons que c'est au niveau
préliminaire que devrait opérer une disposition visant à
permettre à une personne morale dûment constituée de
représenter tous ses membres en une seule procédure.
Nous considérons que la loi, ici, semble être
hésitante et je ne crois pas que l'on règle, par ces
dispositions, le problème de la multiplicité des demandes. Nous
avons eu l'occasion de vivre une expérience à la Régie des
loyers où nous avons dû faire compléter, à nos
étudiants, 738 demandes, lesquelles ont été jointes, comme
le proposent les articles 45 et 46, en une seule audition.
M. Thisdale va vous faire un résumé de la situation
là-dessus, afin de vous expliquer la complexité et la
multiplicité des procédures que nous avons dû suivre,
étant donné que, dans la loi et dans le projet de loi, il n'y a
aucun recours collectif prévu.
M. Thisdale (Jacques): M. le Président, M. le ministre,
MM. les membres de la commission, mon intervention va se situer à deux
volets. Dans un premier temps, je vous exprime un peu l'historique de la
situation que nous avons vécue en résidence, à
l'Université de Montréal. Dans un second temps, je vais vous
exprimer les formalités auxquelles on a dû s'astreindre et
l'ampleur des coûts que cela peut représenter face aux fonds
publics.
Dans un premier temps, en février dernier, l'administration des
résidences nous annonçait une hausse des prix des chambres de
l'ordre de 28,5% pour ce qui avait trait aux chambres simples et de 33,3% pour
ce qui avait trait aux chambres doubles. Bien entendu, dès l'instant
où on a eu l'annonce de cela, on s'est interrogé à savoir
quels recours s'offraient à nous. On s'est présenté
à la Régie des loyers, question de prendre des informations. A ce
moment-là, on nous a dit qu'il fallait revenir en septembre et se
prévaloir des dispositions de la loi de conciliation, article 29b et
29d, soit le recours du nouveau locataire. Alors, en septembre 1978,
l'Association des étudiants en résidence de l'Université
de Montréal, via le comité s'occupant de la question de la
hausse, décide de faire remplir des formules de demande du
locataire. Bien entendu, notre association regroupe 1176
étudiants et le fait de faire remplir 1176 fois la formule pouvait poser
de graves problèmes. En effet, des problèmes se sont posés
et l'inévitable est un peu arrivé. Il y a des formules qui se
sont perdues en cours de route. Autant elles ont pu se perdre chez nous, autant
elles ont pu se perdre en cours de route ou à la Régie des
loyers.
Cependant, en expédiant nos formules à la Régie des
loyers, il faut admettre qu'on a eu un peu de chance en pouvant les
expédier directement à la Régie des loyers ce qui nous a
évité d'envoyer chaque demande de réduction de loyer par
voie de courrier recommandé.
Suite à cela, au mois de janvier, chacun des étudiants en
résidence ayant fait une demande de réduction de loyer a
reçu un avis d'audition du bureau de l'administrateur. Cette même
journée, l'association elle-même avait reçu un avis
d'audition. On avait, d'une part, un avis d'audition au nom de l'association et
un avis d'audition au nom des locataires ce qui nous porte à croire
qu'on voulait peut-être faire appel à un certain recours pour
l'ensemble de la population.
Le 22 janvier, on a une première audition au palais de justice de
Montréal. Conformément à l'esprit de la loi,
l'administrateur nous recommande la conciliation. Bien entendu que la
conciliation avait été tentée dans les huit mois
précédents, mais on n'avait pu arriver à une entente.
Mais, pour se conformer à la loi, pour se conformer à l'esprit de
la loi par recommandation de l'administrateur, on s'est encore
présenté à une rencontre de conciliation. Il a
été impossible de s'entendre à nouveau.
Le 5 février, on s'est rendu encore à la Régie des
loyers pour une seconde audition et, le 14 février, nous avons
reçu le jugement de Me Michel Bolduc de la régie qui nous
accordait une baisse de loyer de l'ordre de $1 par semaine. Bien entendu que,
dans le jugement, il y avait certains problèmes qui se posaient, tel le
fait qu'on ignorait complètement la question des chambres doubles.
Depuis, on avait placé une demande en appel à la
Commission des loyers et, encore là, on a pu constater qu'il y avait une
certaine confusion qui pouvait régner à la Commission des loyers,
une confusion qui se traduisait, d'une part, par la réception d'une
lettre de M. Gaston Massé, directeur des questions d'appel à la
Commission des loyers qui nous disait que notre appel était non
recevable et, d'autre part, on recevait un avis d'audition pour se
présenter devant la Commission des loyers. Il y avait un certain
paradoxe et cela a semé une certaine confusion.
Dans un deuxième temps, j'aimerais vous faire part des
formalités et un peu des coûts que cela peut représenter au
niveau des deniers publics. Dans un premier temps, on devait remplir une
formule de demande du locataire. A 1176 demandes, en supposant qu'il y en avait
1000 qui partaient, le prix que cela coûtait, c'était quasiment
$2500 seulement pour le courrier recommandé, les formalités, etc.
C'est $2500 que cela coûte à l'association étudiante via
les contributions de ses membres.
Cependant, une fois ces formules envoyées, le gouvernement doit
nous renvoyer des avis d'audition sous recommandation. Quand on sait le prix
que coûte une lettre qui est envoyée provenant du gouvernement, on
peut parler de quasiment $5 la lettre.
Ensuite de cela, suite aux demandes du locataire, les gens dont les
formules étaient perdues ou qui ont décidé de faire une
demande ont fait des demandes en extension de délai. Encore le
même manège qui recommence et encore de l'argent
dépensé d'une drôle de manière.
Ensuite, on se présente devant la Commission des loyers pour des
formalités d'appel, les mêmes formalités qui recommencent.
Encore là, il y a de l'argent qui est dépensé.
Présentement, on a évalué les coûts
impliqués: ils sont de l'ordre d'environ $19 000 en termes de lettres
qui ont été envoyées à l'association et à
ses membres. (12 h 30)
On croit que par rétablissement d'un recours collectif, on
minimise les coûts et, d'autre part, on facilite l'audition des demandes.
En cour, on s'est entendu sur un cas type, cas type qui a été
sélectionné au travers des 738 demandes. Donc, il y a eu double
emploi de la question. On a un cas type et un jugement est appliqué
à l'ensemble des gens qui en ont fait la demande. Donc, pour notre part,
il nous semble qu'il y a un mauvais emploi à ce niveau. Cela pourrait
faciliter de beaucoup les procédures tant pour le gouvernement que pour
l'association.
M. Paul: Dans cette optique, l'Association des étudiants
en résidence du campus de l'Université de Montréal
recommande l'adoption d'une disposition prévoyant la possibilité
pour tout groupement ou toute association dûment constituée, et
ce, en vertu d'une loi de la Législature, de présenter une
demande pour le compte et l'avantage de chacun de ses membres. Nous
considérons qu'une telle recommandation s'inscrit dans les principes,
les buts et les visées de la loi actuelle.
Notre troisième recommandation touche le droit
d'ancienneté. L'article 1660.6 est le seul qui fasse mention
spécifiquement du cas des résidences d'étudiants. Son
principe nous semble d'ailleurs bien fondé. Une institution
d'enseignement qui loue un logement à un étudiant peut demander
la résiliation du bail si ce dernier cesse d'être étudiant
à cette institution. Le principe de cet article nous semble bien
fondé. Cependant, nous voudrions voir ajoutée à la loi une
disposition pour que l'étudiant voie consacré son droit
d'ancienneté pour la prochaine période scolaire et qu'il puisse
ainsi être assuré de pouvoir signer un nouveau contrat de
location. Dans le même sens qu'un locataire est protégé de
l'éviction et peut demander à la Régie des loyers un
renouvellement de son bail, nous recommandons à la commission l'adoption
d'une disposition prévoyant que sur avis d'un mois, avant la fin du bail
ou de l'année scolaire, selon le cas, l'étudiant puisse signifier
au locateur sa volonté d'être à nouveau locataire, et ce,
pour l'année scolaire suivante, et, de ce fait, en
obtienne automatiquement le privilège. Le privilège est
donné à un locataire de demander le prolongement ou le
renouvellement de son bail, mais la loi semble ignorer le cas des
étudiants qui se retrouvent devant une période de location de
huit mois, soit l'année scolaire.
M. Tremblay: Ce droit de renouveler le bail, tous les gens qui
louent un appartement l'ont. Les étudiants vivent leurs années
scolaires avec peu de moyens. Ils doivent régulièrement
s'endetter. Alors, on considère qu'ils devraient avoir le même
droit que tout le monde, soit de pouvoir renouveler leur bail quand il vient
à terme pour la prochaine année scolaire et que la
particularité de la vacance scolaire ne porte pas préjudice
à l'étudiant. Que le fait qu'on ait des vacances de quatre mois
c'est le système qui l'a décidé ainsi, on est
obligé de s'y plier ne nous cause pas d'ennui pour le
logement.
Donc, socialement, tout le monde a le droit de renouveler un bail.
Pourquoi ne l'aurait-on pas nous aussi d'année en année.
D'autre part, cette année, on a entrepris une contestation
à la Régie des loyers. On a eu une baisse de loyer. Cela
représente quand même un montant assez important, si vous
considérez qu'il y a 1176 résidents. C'est de l'ordre de $40 000.
Ajoutez à cela les frais d'avocats, etc. Evidemment, on peut
considérer qu'on a causé un certain problème aux
administrateurs des résidences, du fait qu'on ait fait cette
contestation. Il n'y a rien qui oblige le gérant des résidences,
à l'heure actuelle, à me reprendre l'année prochaine. Cela
constitue inévitablement un rapport de force lors des
négociations avec le locateur. Merci.
M. Paul: M. le Président, en conséquence, nous
recommandons de plus à la commission ce n'est pas à
l'intérieur de notre mémoire que la loi prévoie
l'obligation pour un locataire de donner un avis, dans le cas d'un bail de
moins d'un an, dans les trente jours signifiant son intention de ne pas
renouveler le bail. Alors, on se retrouve avec des locataires qui ont un bail
du mois de septembre au mois d'avril. Est-ce qu'actuellement, selon les
dispositions de la loi, l'étudiant doit donner avis parce que
c'est un locataire au même titre que le locataire de l'entreprise
privée qu'il ne renouvelle pas son bail? Sinon la loi
prévoit-elle que le bail est renouvelé, et ce, aux mêmes
conditions pour la même période?
Dans le cas des résidents étudiants, la vocation de ces
immeubles est différente durant la période estivale, durant la
période où les étudiants ne sont pas occupants des
immeubles en question. Par contre, nous recommandons que, pour le cas
d'étudiants, universitaires ou de niveau collégial qui sont
résidents, ces derniers ne soient pas obligés d'envoyer l'avis de
non-renouvellement de bail dans le cas d'un étudiant, de sorte que les
étudiants qui n'auraient pas envoyé d'avis de non-renouvellement
de bail ne se voient pas liés par un nouveau bail comme le serait la
personne sur le marché public.
C'est l'ensemble de nos recommandations et, si vous avez des questions,
il nous fera plaisir d'y répondre.
Le Président (M. Laplante): Merci, messieurs, madame!
M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, je tiens à remercier
l'Association des étudiants en résidence de l'Université
de Montréal pour son mémoire et j'aimerais peut-être
aborder les trois points couverts dans ce mémoire.
C'est évident qu'à partir du moment où la
décision a été prise par le gouvernement et le
législateur d'inclure les chambres dans le champ de compétence de
la régie, on taillait un petit peu dans du droit nouveau. La loi, en
fait, a dit: Toute chambre dans un local d'habitation qui comprend trois
chambres et plus sera soumise au contrôle de la régie. Elle n'a
pas fait de cas particulier des ensembles comme ceux que vous habitez,
où on retrouve une très forte concentration d'étudiants ou
de chambreurs dans des immeubles spécialement conçus à
cette fin, si bien que c'est pour ça qu'il faut relire l'article 27, tel
qu'il est, et qui dit: "Nul ne peut, sans autorisation de la régie,
démolir un logement, le subdiviser ou en changer la destination
dans le cas des chambres, c'est ça que touche votre mémoire
toutefois, cette autorisation n'est pas requise: 2. dans le cas d'une
chambre vacante..."
Cela a été mis là pour couvrir le cas du
propriétaire d'un duplex dont les enfants sont partis, qui décide
de louer trois, quatre chambres et qui, tout à coup, à un moment
donné, vend la maison ou la loue à un locataire qui, veut
l'occuper en entier avec sa famille. Donc, dans ce cas-là, il nous
apparaissait abusif, comment dirais-je, d'interdire le changement
d'affectation.
Je reviens maintenant au cas particulier que présentent des
résidences d'étudiants ou un très grand nombre de chambres
qui ont été conçues expressément à ces fins
et ce n'est pas un accident qu'on loue des chambres. Je pense qu'il y aurait
lieu, effectivement, de regarder ce cas précis pour essayer d'adapter le
projet de loi à cette situation particulière que présente
ce type de résidence.
Je ne voudrais pas discuter du mérite de la cause, d'autant plus
qu'elle peut, à certains égards être
considérée comme étant sub judice présentement,
étant donné qu'il y a un appel. Je voudrais cependant aborder ie
deuxième point qui, encore là, est dû à la nature
même de vos préoccupations. Je m'excuse, oui, vous avez une
question peut-être?
M. Paul: Si vous permettez, M. le ministre, dans notre
recommandation à l'article 1, concernant la juridiction et le changement
d'affectation d'une chambre vacante, il est évident que, socialement,
cette disposition s'explique très bien. Par contre, vous avez, en face
de vous un organisme particulier et notre recommandation pourrait être
dans le sens suivant: Une disposition spéciale,
spécifique, visant les chambres d'étudiants et, que ce
soit au niveau collégial il y a certains CEGEP ou
universités qui disposent de résidences d'étudiants
ou au niveau universitaire et on pourrait quand même considérer
l'article 27.2 dans le sens que vous l'avez expliqué
précédemment.
M. Tardif: Bon! Je pense qu'il y a une distinction à
faire. Est-ce que c'est en fonction du type de locataires, c'est-à-dire
des étudiants par rapport à des non-étudiants, ou si c'est
par rappport au type d'immeubles conçus comme essentiellement chambres
d'étudiants et autres types d'immeubles. Evidemment, on pourrait
concevoir enfin, j'habite un comté du nord de la ville et il y en
a d'autres aussi qui ont des CEGEP, à Saint-Hyacinthe et autre le
cas où des étudiants demeurent en chambre chez des
propriétaires privés qui louent une pièce ou deux à
ce titre.
Il me semble qu'il y a quelque chose à regarder. L'autre
problème qui découle de la nature même du type de
"clientèle" que vous représentez, c'est le fait dans votre
deuxième point des recours collectifs. Vous dites qu'il y a eu
1175 demandes à la régie, ce qui veut dire 1175 demandes ou
formulaires à remplir... Pardon?
M. Paul: C'est 738 sur 1176.
M. Tardif: 738. Je m'excuse, donc sur à peu près
1100. Bon! Cela pose tout le problème des recours collectifs. On sait
qu'une loi au Québec régit cela, mais, par ailleurs, des
problèmes constitutionnels se posent, me dit-on, en ce qui concerne
cette utilisation des recours collectifs par un groupe de locataires. Etant
donné que la compétence des tribunaux se situe jusqu'à
$500 pour les petites créances, $3000 pour la Cour provinciale et
au-delà de $3000 pour la Cour supérieure, ce n'est pas long, avec
un groupe de locataires ou de chambreurs qu'on atteigne des montants qui,
automatiquement, font que la cause est du type qui relève de la Cour
supérieure, avec les problèmes constitutionnels qui sont
posés. Le problème est réel, mais ce n'est pas par le
biais de la loi 107 qu'il peut être réglé comme tel.
Par ailleurs sur votre troisième point, en ce qui concerne le
droit à l'ancienneté, il m'apparaît que c'est une demande
justifiée dans la mesure où un étudiant, qui s'en va
pendant quatre ans étudier à Saint-Hyacinthe ou à
l'extérieur de chez lui, qui doit demeurer en chambre pendant quatre
ans, ne voudrait peut-être pas être obligé au mois de mai de
chaque année de sortir tous ses effets et d'assurer une certaine... Cela
m'apparaît une demande justifiée.
Comment pourrait-elle être reconnue par la loi? Je vous avoue que
là-dessus je vais devoir consulter, mais j'en prends bonne note. C'est
quelque chose qui, de prime abord, ne me répugne pas, au contraire.
M. Paul: Si vous me permettez, quant à la
compétence de la Régie des loyers, c'est quand même une
question que je me pose: Est-ce que la compétence de la Régie des
loyers se situe au niveau d'un montant? J'ai l'impression que la Régie
des loyers a eu à l'occasion à juger, par exemple, les immeubles
Rockhill à Montréal et le montant en jeu pouvait quand même
dépasser la juridiction de la Cour provinciale. A ce moment-là,
est-ce que ce même problème de compétence constitutionnelle
se pose au niveau de l'organisme de la Régie des loyers? C'est ma
première question.
Seulement une remarque concernant le droit d'ancienneté. Il est
évident que les étudiants qui terminent au mois de mai, quittent
la chambre et sortent leurs effets. Cependant, il y a des gens, cette
année, qui ont travaillé à une cause, celle de la
Régie des loyers, et qui craignent ces dispositions quoi que
là, on s'en va vers un protocole d'entente, pour faire inclure ces
dispositions quant à la loi, de ne pas voir leur bail se
renouveler par la direction de l'université puisque rien n'oblige
justement la direction des résidences à reprendre ces
personnes-là, qui, pour eux, ont pu être une source de
tracasserie. Est-ce une source de tracasserie que de faire appliquer la loi?
Quant à nous, nous considérons que cela ne peut pas être
justifié.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Merci M. le Président. Je vous remercie de
votre mémoire très intéressant. En ce qui concerne les
chambres, votre suggestion m'a fait rappeler que j'avais l'intention de poser
une brève question au ministre. Vous me permettrez. C'est simplement
pour savoir si vous avez calculé le coût et le nombre de personnes
qui seront impliquées dans la nouvelle régie? Avez-vous une
idée du nombre de personnes et du coût total annuel qu'il faut
prévoir? Si oui, est-ce que ce sera possible pour le
député de Saint-Hyacinthe et moi-même d'avoir ces chiffres?
Je m'en suis rappelé quand...
M. Tardif: Nous avons effectivement un certain nombre de
données. Si la loi était adoptée telle quelle, qu'est-ce
que cela implique? Nous pourrons certainement en parler à un moment
donné, mais cela m'apparaît, pour l'instant en tout cas, hors du
mémoire qui est devant nous. Mais en gros...
M. Scowen: Oui. Dans le sens que... Je me le suis rappelé
parce que l'idée de contrôler également toutes les chambres
me paraît comme quelque chose d'assez dispendieux sur le plan des
coûts. (12 h 45)
M. Tardif: Mais je rappellerai tout simplement que ce n'est pas
la loi 107 qui introduit cela. Le contrôle de la fixation du loyer des
chambres a été introduit dans la loi en décembre 1977.
M. Scowen: Je parle spécifiquement de la suggestion des
étudiants en ce qui concerne
l'article 27.2, mais c'est tout simplement... Vous n'avez pas, pour le
moment, de prévision sur le nombre de personnes?
M. Tardif: A la lumière d'une seule année
d'expérience, il y a eu à peu près 1000 demandes faites
à la régie cette année par des chambreurs, dont un
très grand nombre étaient des étudiants. C'est tout ce que
je peux dire.
M. Scowen: Si je comprends bien, pour mettre en vigueur cette
prévision que vous proposez, le changement de destination, il sera
nécessaire non seulement de changer l'article 27.2, mais aussi de rendre
les organisations gouvernementales et pa-ragouvernementales assujetties
à ce projet de loi. Ce n'est pas une mauvaise idée. Si le
gouvernement ne peut pas accepter le même test, ce sera aussi difficile
pour le secteur privé. Est-ce que je comprends bien que vos
résidences appartiennent actuellement à un organisme qui ne sera
pas lié à cette loi parce que c'est un organisme
paragou-vernemental ?
M. Paquin (André): Pendant l'été les
chambres sont vacantes. Alors, on peut en faire ce qu'on veut. A
l'université, il y a maintenant 20 ans que le pavillon des Sciences a
été prévu; les plans sont faits, sont tirés et tout
et c'est sur la tablette parce qu'on manque de fonds. Alors, il en
découle qu'il y a un manque de locaux. Dans ce temps-là, on va
chercher un peu partout. On cherche à gauche et à droite des
locaux. On achète sur le boulevard d'en face des immeubles. Quand il y a
pénurie, nous regardons, il y a les chambres d'étudiants qui sont
là.
M. Scowen: Je pense que j'ai mal posé la question. Le
dernier paragraphe dit que lorsque le gouvernement, un de ses ministres ou un
organisme entend démolir, subdiviser ou changer la destination d'un
logement... les résidences que vous habitez, relèvent d'un
organisme du gouvernement...
M. Thisdale: Les chambres en question appartiennent à
l'Université de Montréal.
M. Scowen: Est-ce qu'elles sont assujetties, oui ou non?
M. Tardif: Ce n'est pas compris comme étant un organisme
du gouvernement, pas plus que l'Université McGill ou une autre. C'est
une corporation privée même si c'est financé à
même les fonds publics.
M. Scowen: Alors, ces résidences sont assujetties, comme
n'importe quel secteur privé. Je ne le savais pas. Je pense que les deux
autres sont assez clairs. Je n'ai plus de question. La seule question que je
voudrais poser au ministre est celle-ci: Est-ce que vous avez, à ce
moment-ci, la possibilité de nous donner une prévision du nombre
de personnes qui seront affectées, enga- gées par la régie
quand elle fonctionnera à pleine capacité?
M. Tardif: M. le Président, c'est bien évident
qu'une fois la loi adoptée et les crédits votés par
l'Assemblée nationale, lors de l'étude de mes crédits, je
donnerai l'ensemble... mais il est vrai, c'est un fait que nous avons
établi des prévisions quant aux besoins d'effectifs. Par exemple,
ici, il y a 74 "administrateurs" de la régie, c'est-à-dire des
avocats engagés sur une base ad hoc, qui une fois par semaine, entendent
des causes. On dit: Maintenant, il y aura des régisseurs à temps
plein; on a prévu que pour faire ce travail cela nous prendrait une
trentaine de régisseurs à temps plein, avec ce que cela implique.
Ce ne sont pas nécessairement des coûts nouveaux.
M. Scowen: Non, c'est correct.
M. Tardif: Parce qu'on ne paiera plus les autres sur la base
d'honoraires comme c'était le cas. D'accord? Mais on a effectivement
fait des prévisions là-dessus.
M. Scowen: Mais, globalement, les régisseurs, le service
de soutien, les inspecteurs, tout le monde, cela va impliquer combien de
personnes? Quel sera le personnel total de la régie?
M. Tardif: Je n'ai pas ces données ici avec moi, M. le
Président, mais le moment venu je pourrai tenter de...
M. Scowen: Est-ce que vous pouvez nous les donner maintenant?
Cela pourrait être intéressant. Merci.
Le Président (M. Laplante): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: A titre d'information, quel montant payez-vous pour
une chambre simple actuellement?
M. Thisdale: A l'heure actuelle, le prix d'une chambre simple est
de $17 par semaine et le prix d'une chambre double est de $15.
M. Tardif: Seulement une sous-question, comment est-ce que cela
se compare avec le coût d'une chambre sur Edouard-Montpetit ou dans le
secteur privé autour de l'université?
M. Thisdale: Tout dépend des services qu'offre la chambre
en question. Le taux se situe entre $16 et $24. Une chose qu'il faut
considérer, c'est qu'à l'heure actuelle une chambre aux
résidences de l'université, par pied carré, est plus
dispendieuse qu'un appartement au Rockhill, au pied carré.
M. Cordeau: Quels sont les services auxquels vous avez droit avec
votre chambre; avez-vous le droit de faire un peu de cuisine?
M. Thisdale: Non, la cuisine est interdite aux
résidences.
M. Paul: J'ai ici un résumé, il y a les services de
réception 24 heures par jour, les services de literie aux semaines, il y
a la possibilité de téléviseurs à tous les deux
étages, il y a des fours sur les étages, une espèce de
salle commune face aux ascenseurs. Mais j'ai l'impression... est-ce vraiment le
but de notre...
M. Cordeau: Non, non, c'est seulement un aperçu pour mieux
juger de l'ensemble du problème.
M. Paul: II y a un document qui a été donné
par l'Université de Montréal à la Régie des loyers
qui résume et qui explique très bien. Remarquez que cela a
été fait par l'Université de Montréal et on fait
une énumération exhaustive des services, mais si vous êtes
intéressés, nous allons pouvoir vous en laisser une copie.
M. Cordeau: C'est parce qu'on sera peut-être appelés
à un moment donné à comparer des données, alors, ce
sont des renseignements qui peuvent intéresser la commission.
Maintenant, M. le ministre, il serait peut-être bon d'abonder dans
le sens de leur demande concernant l'ancienneté ou le renouvellement de
leur loyer. Par contre, ce serait peut-être autre chose, dans les maisons
privées, que le type qui trouve un locataire, durant
l'été, à temps plein, comme on dit; il y aurait
peut-être une nuance à apporter de ce côté.
M. Tardif: Je suis d'accord pour regarder la question, je l'ai
mentionné. Maintenant, je ferai remarquer au député de
Saint-Hyacinthe que ça ne s'applique pas qu'aux chambres dans des
résidences privées. Il y a des cours d'été à
l'université qui se donnent aussi et l'université peut utiliser
également les résidences d'étudiants. Mais sous
réserve de tout ça, je dis que je suis prêt à le
regarder pour voir comment ça pourrait être reconnu.
M. Paul: II faut tenir compte que les résidences comme
telles ont deux vocations différentes. Durant la période
académique, c'est rempli d'étudiants et durant
l'été, c'est loué à des organismes de l'âge
d'or, AFEAS, des congressistes, le tour cycliste. Ces gens vont à
l'université et ont un tarif différent de celui des
étudiants. Notre proposition évidemment, nous avons un
bail de huit mois par année notre proposition est de donner les
mêmes avantages que l'on donne aux locataires dans l'entreprise
privée, c'est-à-dire un renouvellement de bail pour
l'étudiant ou pour le locataire qui répond aux conditions, mais
avec un espace de quatre mois les vacances où la vocation
est totalement changée.
Et puis, au niveau de l'avis...
M. Tardif: Cela ressemble plus à de
l'hôtellerie.
M. Paul: ... je reviens là-dessus, si vous permettez. La
loi prévoit que le locataire qui ne veut pas que son bail se renouvelle
donne un avis. Dans le cas actuel, est-ce que chaque étudiant de
l'Université de Montréal et d'autres résidences
universitaires ou collégiales devra donner un avis à son
propriétaire, afin que ce bail ne se renouvelle pas dès le
lendemain de la date où il se termine? Ce serait peut-être bon de
prévoir, dans la loi, des dispositions qui tiennent compte de ces
circonstances particulières et c'est un peu dans ce sens que nous avons
présenté un mémoire ce matin.
M. Cordeau: Quelles sont les procédures que vous devez
suivre actuellement pour avoir un autre bail pour une deuxième
année?
M. Paul: Les années passées, les étudiants
qui étaient intéressés à renouveler leur chambre
pour l'année académique suivante, donnaient un avis avant la fin
de leur bail et étaient automatiquement acceptés pour une chambre
l'année suivante, avec un dépôt quand même assez
minime. Cette année, la loi s'applique aux chambres, la loi
prévoit l'avis. Actuellement, nous sommes en négociation avec
l'université et relativement à la question d'appliquer le
jugement de la régie qui a diminué de $1 l'augmentation
demandée, on doit rencontrer les gens de l'université
là-dessus et ce sera un des éléments qui sera dans le
protocole d'entente et qui sera présenté à la commission
des loyers, le fait que l'université renonce à cette obligation
du locataire, parce que la loi le prévoit.
M. Tardif: Deux questions. Est-ce que vous le permettez, M...
Le Président (M. Laplante): Le député de
Notre-Dame-de-Grâce voulait poser une courte question.
M. Tardif: Je m'excuse.
M. Scowen: Simplement pour être certain de ce que vous avez
dit, les résidences des collèges et des universités du
Québec seront assujetties à tout ce projet de loi comme si
c'était une affaire privée?
M. Tardif: C'est cela.
M. Scowen: A titre d'exemple, dans les obligations et conditions,
j'ai vu une clause qui dit: En garantie du paiement du loyer, le locataire
engage généralement ses effets personnels situés dans la
chambre louée. En cas de défaut de paiement du loyer, ils
pourront être retenus par le locateur.
C'est une clause existante dans les conditions générales
du logement et j'imagine que ce sera aboli.
M. Tardif: Cela fait partie des clauses spéciales.
J'imagine que si c'est dans le bail...
M. Scowen: Je pense que c'est défendu dans le projet de
loi, actuellement.
M. Tardif: C'est exact.
M. Scowen: Mais je le prends simplement à titre
d'exemple.
M. Tardif: C'est exact. M. Scowen: D'accord.
M. Paul: Dans le cas des étudiants, vous vous souvenez que
le bail est particulier et c'est un bail qui respecte quand même les
dispositions de la loi, mais où il y a eu peut-être... C'est un
contrat de louage de choses. On peut vous en laisser une copie. Vous pourrez
voir quelles sont les obligations des parties là-dedans. C'est
évident que cela respecte la loi. Mais, avec le projet de loi 96, qui a
soumis ces chambres à la juridiction de la Régie des loyers, on
arrive, à un moment donné, à ne plus savoir lequel doit
être interprété. Est-ce que c'est la loi ou si c'est le
bail qui a été signé quelques mois avant le
dépôt du projet de loi, ou après le dépôt du
projet de loi et qui contient des dispositions particulières?
Le Président (M. Laplante): Dernière intervention,
M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, une question qui
découle de représentations qui m'ont été faites par
les associations d'étudiants des CEGEP, qui demandent que les
résidences d'étudiants soient exclues de l'application de la loi
et qui demandent également que les chambres situées dans les
résidences d'un locateur, lorsque celui-ci loue quatre chambres ou moins
soient également exclues. D'une part, ils craignent que si les
locateurs, dans des maisons privées, louent une chambre, deux chambres,
trois chambres, même quatre chambres, sont assujettis à la loi,
ils auront de la difficulté à se trouver une chambre. J'aimerais
avoir votre avis là-dessus.
Deuxièmement, pourquoi veulent-ils que même les
résidences d'étudiants soient exclues? C'est qu'il leur
apparaît... Je m'excuse. Ce ne sont pas les étudiants incidemment,
ce sont les fédérations de CEGEP, dont les directions.
Voici une des questions posées: Est-ce que, dans le cas des
résidences, il ne serait pas pensable plutôt de s'orienter plus
vers une espèce de formule de négociation collective des
conditions de logement des étudiants, entre l'association des
étudiants et l'université, par exemple, à cause du
caractère assez particulier que vous représentez?
M. Paul: Oui, c'est un choix que le gouvernement a à
faire. Mais nous, on travaille avec ce qu'on avait comme loi et comme
directive. La loi s'applique et la Régie des loyers a juridiction, dans
le cas d'une chambre. Qu'est-ce qu'une chambre? On en a la définition.
Et la chambre d'étudiant correspond, si vous voulez, avec les
définitions qu'on en a faites, au niveau du texte de loi.
Il y a quand même et c'est dans le livre blanc 230
000 chambreurs au Québec. Il ne faut donc pas négliger cette
clientèle au niveau de la Régie des loyers.
Quant à la crainte qu'ont certains étudiants de ne pas
trouver de chambre si le locateur qui en loue plus que trois ou quatre
était soumis à la Régie des loyers, je pense que ces
craintes sont, quant à nous, injustifiées. Si un locateur dispose
de locaux et est intéressé à louer, c'est au même
titre qu'un locateur qui dispose de logements est intéressé
à les louer. Dans ce sens, je ne vois pas pourquoi lui serait exclu de
l'application de la loi, étant donné qu'il faut considérer
que le cham-breur, au même titre qu'un locataire, a des droits qui sont
prévus à la loi. Si on leur enlève cette
possibilité, on pourra se retrouver dans la même situation qu'on
avait avec les loyers avant, où il y a eu des abus. La loi est bienvenue
dans ce sens.
(13 heures)
Par contre, on doit faire face à une situation
particulière et c'est là-dessus que le projet de loi 107 pourrait
prévoir des dispositions dans le cas de groupes d'étudiants ou
d'immeubles, comme vous le disiez, à vocation locative, de chambres.
M. Tardif: M. le Président, en terminant, je voudrais
remercier une nouvelle fois l'association. C'est précisément en
raison du fait qu'il y a presque un quart de millions de personnes qui vivent
en chambre au Québec qu'on a pensé qu'il était important
de les inclure. J'avoue qu'on est dans du droit nouveau et, si l'association
avait à nous faire tenir des documents, bail type, conditions, etc.,
j'apprécierais énormément les avoir.
M. Paul: On peut les envoyer au ministre.
M. Thisdale: M. le ministre, on pourrait, avant de quitter, vous
remettre le document en question avec les chiffres concernant la cause dont on
s'est occupé.
M. Tardif: D'accord. Merci.
Le Président (M. Laplante): Sur ce, Mlle Tremblay, M.
Paquin, M. Thisdale, M. Perreault et M. Paul, les membres de cette commission
vous remercient de votre participation.
La commission ajourne ses travaux sine die.
Fin de la séance à 13 h 1