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Projet de loi no 125
(Dix heures quatre minutes)
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission élue permanente des Affaires municipales est
réunie pour poursuivre l'audition des mémoires concernant le
projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.
Les membres de la commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M.
Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), remplacé par M. Goulet
(Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau), M.
Ouellette (Beauce-Nord), M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette
(Joliette-Montcalm); M. Mercier (Berthier) remplacé par M. Gendron
(Abitibi-Ouest); M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie),
remplacé par M. Léonard (Laurentides-Labelle).
Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau
(Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Goldbloom (D'Arcy McGee),
M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Vau-geois (Trois-Rivières).
Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires du Conseil
régional de développement des Laurentides, du Comité des
citoyens de Saint-Jean-de-Matha, du Conseil régional de la culture de
l'Outaouais, de l'Association des architectes-paysagistes du Québec, de
la Fédération des commissions scolaires catholiques du
Québec et de la Commission scolaire Saint-Jérôme.
Est-ce que le Conseil régional de développement des
Laurentides est arrivé? Veuillez vous approcher, s'il vous plaît,
pour nous présenter votre mémoire.
M. Boucher?
Conseil régional de développement des
Laurentides
M. Robert (Yvon): Yvon Robert...
Le Président (M. Marcoux): M. Robert.
M. Robert: ... trésorier du Conseil régional de
développement des Laurentides; M. Serge Boucher, directeur
général.
Je voudrais d'abord excuser notre président, M. Audy, qui,
à la dernière minute, n'a pu se rendre ici.
Le Président (M. Marcoux): Vous connaissez nos
règles du jeu habituelles. Vous avez une vingtaine de minutes soit pour
lire votre mémoire ou le résumer et, ensuite, une quarantaine de
minutes de dialogue avec les membres de la commission.
M. Goulet: M. le Président, si vous permettez, je m'excuse
auprès de nos invités. Dans mon cas je présume que
c'est la même chose pour les autres étant donné
qu'on doit quitter ce soir, à cause parfois des avions ou des
transports, j'aimerais savoir si les membres de la commission ont fait
consensus quant à l'heure de nos travaux aujourd'hui. On a parlé
de suspendre à midi pour une heure ou deux heures, ou terminer à
18 heures. Je vais prendre peut-être quelques secondes. Je m'excuse
auprès de nos invités, mais si on veut planifier, M. le
Président, vous savez ce que je veux dire, c'est important.
M. Chevrette: En ce qui nous concerne, on voudrait collaborer
à plein, on pourrait aller jusqu'à 13 heures et prendre seulement
une heure pour dîner pour finir à 17 heures ou 18 heures au
maximum, pour ne pas siéger en soirée.
M. Gratton: Quant à moi, M. le Président, je
concourrai à tâcher de...
M. Robert: Cela pose un problème, il devait être ici
pour 21 heures.
M. Chevrette: Monsieur dit que cela pose un problème, mais
je voudrais rappeler ici que tous les groupes sont normalement convoqués
à 10 heures le matin; donc, théoriquement, il n'est pas
censé y avoir de problème, même si les gens viennent en
soirée. Ils ont peut-être évalué, parce qu'ils
étaient cinquième ou sixième, qu'ils passeraient à
telle heure, mais, théoriquement, ils sont convoqués pour dix
heures.
M. Robert: C'est parce qu'il y a eu des communications pour faire
déplacer un groupe, la commission scolaire Saint-Jérôme, et
on nous a dit que ce ne serait pas avant 20 heures ce soir, qu'on avait
réservé toute la soirée pour les commissions
scolaires.
M. Chevrette: II peut y avoir un nouvel appel du
secrétariat pour lui demander d'être ici, c'est le dernier groupe
de la journée de toute façon. C'est le dernier groupe, la
commission scolaire de Saint-Jérôme.
Le Président (M. Marcoux): En tout cas, disons qu'on va
vérifier ce que vous dites.
M. Chevrette: Est-ce qu'on peut le demander au secrétariat
de la commission?
Le Président (M. Marcoux): Pour le moment, ce sur quoi il
serait important de s'entendre, c'est l'heure du dîner; à quelle
heure les membres de la commission désirent-ils dîner?
M. Gratton: On verra à ce moment-là.
M. Goulet: M. le Président, je ne veux pas prendre la
matinée pour discuter de cela, mais c'était pour la
soirée. Mon heure de dîner, que ce soit à midi ou à
treize heures... C'était pour savoir si on termine à 18 heures ou
à 22 heures...
Le Président (M. Marcoux): De toute façon, les
membres de la commission se sont entendus pour que ce soit une heure par
mémoire. Alors, de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à
17 heures, ou de 15 heures à 18 heures, cela...
M. Goulet: Vous n'avez pas compris, M. le Président, je
m'excuse; c'est parce que monsieur dit que le secrétariat des
commissions aurait téléphoné à un groupe pour lui
dire de venir ce soir. Ce n'est pas supposé, les groupes sont
convoqués pour dix heures. C'est ce que je veux savoir.
Le Président (M. Marcoux): On va le faire vérifier
et on va vous en informer dès qu'on le saura. De toute façon,
même si tout n'est pas clarifié, on pourra le clarifier
tantôt; je vous invite, monsieur, à présenter votre
mémoire.
M. Robert: Même s'il a tenu un total de sept
assemblées d'information et de consultation dans tous les coins des
Laurentides, le conseil régional a choisi de présenter un
mémoire qui reflète l'avis de son conseil d'administration. Il ne
prétend pas à l'expression d'un avis de la région. Les
délais de consultation étaient beaucoup trop courts et le mandat
concurrentiel de l'Union des conseils de comté et de l'Union des
municipalités du Québec rendait illusoire et irréaliste la
tenue d'une véritable consultation devant mener à un avis
régional formel.
Nous sommes convaincus cependant de la représentativité
très large de notre conseil d'administration, de la valeur de
l'expérience et de l'information qu'il avait à sa disposition sur
ce sujet, de la sagesse et du réalisme de son avis. Cet avis a
été adopté d'une façon définitive le 28
mars. C'est pour cette raison que le mémoire que vous avez probablement
entre les mains a été amendé quelque peu par le conseil
d'administration le 28 mars.
L'angle de vision choisi par le CRD des Laurentides. D'abord le
bien-fondé d'une loi de l'aménagement et de l'urbanisme dans les
Laurentides; le bien-fondé d'un schéma d'aménagement
couvrant le territoire de plusieurs municipalités, y compris les villes;
les implications d'une telle loi sur l'aménagement du territoire
régional, compte tenu de ses particularités; une discussion
très large sur les critères de délimitation des
territoires des comtés renouvelés.
A tous ces cas, le CRD des Laurentides s'est attaché avec ses
interlocuteurs à faire ressortir les besoins de sa région en
regard de la loi et son aptitude à y répondre.
Chaque guide de discussion, de même que le présent avis,
sont adaptés spécifiquement aux différents secteurs
géographiques de la région. Cette préoccupation pratique a
pris le dessus sur la discussion des modalités de la loi et même
ses grands principes qui ont fait l'objet de la part des autres
mémoires. Au fond, nous voulions savoir si la loi 125 est bonne pour les
Laurentides et nous croyons déceler un large consensus sur la
réponse qu'il faut donner à cette question.
La crédibilité de l'avis du CRD des Laurentides. Au cours
de ses sept assemblées de secteur, le conseil régional a
diffusé l'information et la documentation pertinente à 90
personnes dans tous les coins des Laurentides. Ces assemblées
étaient composées en majorité d'élus municipaux et
de membres de notre organisme plus préoccupés que la moyenne des
autres élus et des autres citoyens par les problèmes
d'aménagement.
Une discussion très franche et très libre a pu avoir cours
à chaque endroit et a donné lieu à des consensus
généralement faciles sur les éléments
soulevés par nos guides de discussion. Le conseil d'administration
traite de questions d'aménagement et d'environnement depuis plusieurs
années, a acquis avec le temps une expertise unique au niveau
régional et a fait la preuve d'une pensée et d'une action suivies
et cohérentes en ces matières. Il est consulté
fréquemment autant par les autorités gouvernementales et
paragouvernementales que par les organismes du milieu.
La loi 125. Dans l'ensemble du territoire des Laurentides, le projet de
loi 125 semble bien accueilli, sauf pour certains ajustements requis par les
particularités de notre région. Nos interlocuteurs ont reconnu la
valeur des principes qui sous-tendent le projet de loi. Son caractère
décentralisateur unique dans le contexte législatif et
administratif actuel, son aptitude à revaloriser les pouvoirs locaux
municipaux et la pertinence de l'ensemble de ces dispositions au plan de la
formation des comtés renouvelés, de l'élaboration du
schéma et des règlements d'urbanisme, de l'économie des
relations entre les trois niveaux de gouvernement impliqués et de la
participation des citoyens à tout ce processus de planification et de
l'aménagement.
La zone de villégiature des Laurentides, au nord de
Saint-Jérôme, a vécu depuis dix ans des problèmes
d'aménagement aigus auxquels la loi 125 apporte un espoir de solution
équilibrée. Qu'il suffise de mentionner la pollution, la
détérioration naturelle des lacs et de leur environnement, la
pollution des rivières, la disposition des déchets solides, le
déboisement inconsidéré, les réseaux
d'égouts incompatibles avec la villégiature et la conservation,
la pénurie de sites publics de conservation et de
récréation, les difficultés de plus en plus insolubles
d'aménagement d'un réseau régional de pistes de ski de
fond et de randonnée.
Les comtés renouvelés sont le lieu par excellence
où ces problèmes trouveront écho et recevront
progressivement leur solution. Le projet de loi 125 précise plusieurs
des pouvoirs municipaux essentiels à un meilleur contrôle de cette
zone, à l'exception du pouvoir de contrôler l'usage des bateaux
à moteur. Nous souhaiterions qu'un amendement ajoute ce pouvoir à
ceux que détiendront les municipalités. Les municipalités
du territoire aéroportuaire de Mirabel, quant à elles, ont
expérimenté un processus tout à fait analogue à
celui prévu par le projet de loi 125 et elles en reconnaissent,
d'emblée, la valeur et la nécessité en milieu
urbanisé ou en voie d'urbanisation.
Pouvoir d'aménagement et pouvoir de gestion. Deux sortes de
préoccupations ont fait
surface relativement au pouvoir de gestion que les comtés
renouvelés pourraient se voir confier à l'avenir. Les commissions
scolaires demandent à connaître les intentions du gouvernement
dès maintenant et refusent de soumettre les orientations de
l'éducation aux contraintes d'un schéma d'aménagement sur
lequel elles n'auraient pas été cosultées. Sur ce point,
le Conseil régional de développement des Laurentides appuie leur
position et demande qu'on ajoute les commissions scolaires aux organismes
consultés en vertu de l'article 22. (10 h 15)
Les municipalités du territoire aéroportuaire de Mirabel
ont déjà entrepris la gestion en commun de certains services. Le
conseil de développement voudrait que le projet de loi ouvre la porte
à toutes les initiatives qu'elles voudraient bien prendre en cette
matière. A l'heure actuelle, cna-que mise en commun exige des ententes
spécifiques qui sont laborieuses et complexes sur le plan juridique et
entraînent la création de structures de gestion nouvelles et
coûteuses. Il y aurait intérêt à consolider ces
structures de gestion au sein du conseil de comté renouvelé.
Découpage du territoire. Nos rencontres ont permis de
dégager les grandes lignes du découpage des Laurentides, en
fonction des fins du projet de loi 125, même si plusieurs choix
spécifiques concernant une ou plusieurs municipalités restent
incertains et ne se préciseront qu'au moment de l'application de la loi
dans les Laurentides.
La zone de villégiature se démarque très nettement
de la zone aéroportuaire et demande qu'on reconnaisse sa
spécificité. Elle identifie la communauté
d'intérêts économiques, la dimension assez large du
territoire, pour aborder efficacement les problèmes d'environnement, la
nécessité de mettre en commun certains services, le
découpage scolaire, comme des critères valables de
délimitation du territoire des comtés renouvelés.
La zone aéroportuaire, qui comprend les agglomérations de
Lachute, Saint-Jérôme, Saint-Eustache,
Sainte-Thérère et Terrebonne, demande de façon nettement
majoritaire que l'on reconnaisse les territoires des commissions d'urbanisme de
secteur, quitte à y apporter des modifications mineures, comme
territoires des comtés renouvelés. Ces CUS correspondent aux cinq
agglomérations du territoire aéroportuaire de Mirabel, à
l'idée que se sont faites les citoyens de leur région
d'appartenance et à l'étendue des problèmes
intermunicipaux entraînés par l'urbanisation contiguë, eau
potable, eaux usées, promotion industrielle, autres services.
Quelques cas demeurent que l'on ne peut régler avant qu'une
consultation plus systématique n'ait lieu. Il semblerait que
l'agglomération de Lachute puisse faire bon ménage avec
l'ensemble du comté d'Argenteuil à l'intérieur d'un
comté renouvelé. Il n'est pas clair, à ce moment-ci,
à quel comté se rattacheront les municipalités comme
Saint-Adolphe-d'Howard, Huberdeau, Arundel, Saint-Rémi-d'Amherst,
Lac-des-Plages, Labelle, La
Conception, Prévost, Saint-Hippolyte, Sainte-Anne-des-Plaines,
Saint-Lin, Mascouche, Lachenaie. Dans tous ces cas, nous croyons être en
mesure de dégager rapidement des consensus lorsque la loi entrera en
vigueur et pourra s'appliquer dans notre région.
Enfin, nos interlocuteurs ont fait ressortir, à bon droit, que le
territoire devra tenir compte des pouvoirs futurs que l'on voudra confier aux
comtés renouvelés, d'où l'importance de répondre
aux interrogations des commissions scolaires à ce propos. Egalement, la
capacité financière des futurs regroupements devrait être
considérée, compte tenu des disparités entre
municipalités.
La pondération du vote. Nos interlocuteurs ont très peu
insisté sur cet aspect. Dans plusieurs cas, ils se satisfont du
système actuel: un maire, un vote. Certains ont
expérimenté le vote pondéré en fonction de la
population, mais y ont renoncé à l'usage, préférant
fonctionner par consensus. Mais dans les cas où il faudra
pondérer le vote en fonction des populations, il importe de ne donner
à aucune municipalité le contrôle absolu du comté
renouvelé. Là-dessus, tous sont unanimes.
Harmonisation avec la loi spéciale du territoire
aéroportuaire, la loi 60. Le processus de planification prévu par
le projet de loi 125 a été imposé, à peu de choses
près, aux cinq agglomérations du territoire aéroportuaire
de Mirabel. Il est essentiel que le projet de loi 125 reconnaisse l'acquis de
ces cinq agglomérations, c'est-à-dire le schéma
d'aménagement, le règlement d'urbanisme, qu'il maintienne les
normes d'aménagement communes à ces cinq agglomérations en
vigueur présentement et qu'il remplace les mécanismes
centralisateurs de la loi 60 par les mécanismes décentralisateurs
de la loi 125. Nous croyons préférable de faire inclure ces
dispositions dans le projet de loi 125 plutôt que de faire amender la loi
60 plus tard. A ces conditions, la loi 125 sera très bien accueillie
dans le territoire aéroportuaire de Mirabel.
L'harmonisation avec la loi 90. La loi 90 force présentement les
municipalités agricoles du territoire aéroportuaire de Mirabel
à reprendre leur schéma d'aménagement, en tenant compte
des exigences nouvelles de la loi 90. Il ne faudrait pas que la loi 125 leur
impose un troisième exercice du genre, après la loi 60 et la loi
90. Nous répétons que ce qui sera issu de la loi 60 et de la loi
90 devra être reconnu comme point de départ valable par la loi
125.
Par ailleurs, le projet de loi d'harmonisation des lois 125 et 90,
présenté par le gouvernement à l'Assemblée
nationale, constitue une nette amélioration sur la centralisation indue
et laborieuse imposée par l'actuelle loi 90. Les municipalités et
les comtés renouvelés de notre région sont parfaitement
capables d'administrer au jour le jour le zonage agricole, sous la surveillance
générale de la Commission de protection du territoire
agricole.
Appellation. Dans les Laurentides, cette question ne préoccupe
à peu près personne. Il nous apparaît que l'Union des
conseils de comté et l'Union des municipalités s'affrontent sur
la vérita-
ble nature de ces comtés renouvelés: territoires,
pouvoirs, pondération du vote, nombre de municipalités membres,
par le biais d'une querelle de noms. Ce qui compte pour nous, c'est que la loi
125 règle les vrais problèmes d'aménagement des
Laurentides, tant dans la zone de villégiature que dans la zone
aéroportuaire. Nous croyons qu'elle peut le faire, si elle est
appliquée après consultation des intéressés. Chaque
comté renouvelé devrait pouvoir choisir l'appellation
comté ou l'appellation commission d'aménagement. Ces deux
appellations ont cours dans notre région et ont acquis l'adhésion
des citoyens, chacune dans sa zone spécifique. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais
d'abord remercier les représentants du Conseil régional de
développement des Laurentides de nous avoir présenté ce
rapport qui a été préparé avec grand soin. Je
voudrais tout de suite demander aux représentants du CRDL s'ils ont eu
une assemblée intéressante de leur conseil d'administration le 28
mars, parce qu'il me semble qu'il y a plus de jus, de substance dans la
nouvelle version du mémoire que dans la première. Est-ce que vous
pourriez je ne vous pose pas la question immédiatement, je vous
la poserai tout à l'heure; ce sera ma première question
seulement nous tracer rapidement, puisque nous avions plutôt
étudié la première version que la deuxième, les
ajouts, les différences entre la première et la deuxième
version?
Quelques remarques d'ordre général: La région que
vous représentez a vécu une des premières
expériences authentiques d'aménagement au Québec, comme
vous l'indiquez dans votre mémoire. Vous êtes, par
conséquent, parmi nos interlocuteurs les plus autorisés. Vous
avez, dans le domaine de l'aménagement régional, une
expérience dont nous entendons tirer profit. A la lumière de
votre expérience, votre mémoire nous indique que la loi 125, dans
ses grandes lignes tout au moins, paraît tout à fait
réalisable et que les questions d'application de la loi
dépendront tout simplement de la bonne volonté qu'on peut
attendre de tous les intéressés.
Vos observations sur le découpage du territoire sont
intéressantes. Nous sommes contents de voir que vous ne prévoyez
pas de problèmes majeurs là-dessus, contrairement à
certaines craintes qui ont été exprimées; quant à
vous, qui avez cette expérience, vous n'exprimez pas de crainte
particulière là-dessus.
De même, votre point de vue sur la représentation, la
pondération des votes c'est un point de vue extrêmement
intéressant, de nouveau fondé sur l'expérience. On ne va
pas s'encombrer de... Si on s'en remet à votre expérience, on n'a
pas besoin de s'encombrer de méthodes compliquées puisque,
à l'expérience, on voit que les villes les plus populeuses
acceptent de ne pas jouer un rôle dominateur, acceptent de collaborer
avec les collectivités de moindre importance. Vos considérations
sur l'appellation du conseil de comté sont pragmatiques et, à mon
avis, sages et nous en prenons bonne note.
Pour ce qui est de la loi 60, une rencontre a déjà eu lieu
avec les représentants des municipalités impliquées et le
ministre a pris bonne note de toutes les remarques qui lui ont
été faites. J'en viens, M. le Président, à ma
première question. C'est M. Robert, n'est-ce pas? M. Robert, c'est
ça?
M. Robert: Oui.
M. de Bellefeuille: Est-ce que M. Robert pourrait nous tracer,
dans les grandes lignes, les différences entre les deux versions du
texte, celle qui a été présentée au conseil
d'administration et celle qui est issue de cette réunion du conseil
d'administration?
M. Robert: Je vais vous donner un peu les raisons. M. Boucher,
qui est directeur général, pourra peut-être apporter les
points plus précis. Lorsque la première version a
été présentée, le CRD n'avait fait que deux ou
trois des sept rencontres dont on vous a parlé et n'avait pas
reçu, d'un certain nombre d'organismes, commissions scolaires ou
municipalités, des recommandations ou des résolutions. Donc, la
dernière version a permis au conseil d'administration d'inclure, par
exemple, les représentations des préfets de comté qui ont
assisté à notre rencontre, de différents maires de
municipalités, de différents groupes qui ont assisté au
dernier conseil d'administration et l'ensemble de ces recommandations a fait
l'objet d'unanimité au niveau du conseil d'administration, mais M.
Boucher pourra vous apporter les points spécifiques qui ont
été ajoutés.
M. Boucher (Serge): Essentiellement, ce qu'il y a de neuf dans la
version qu'on vous a remise ce matin, c'est surtout la question des pouvoirs
que ces conseils de comté auront dans l'avenir. Actuellement, on
prévoit le pouvoir d'aménagement, mais il est à
prévoir d'autres pouvoirs et ça s'explique facilement dans le
cadre de notre cheminement. En fait, nous avons rencontré les
agglomérations de la partie sud du territoire en dernier,
c'est-à-dire après la rédaction de la première
version et, également, nous avons eu les résolutions de la
commission scolaire après la rédaction de la première
version. Dans les deux cas, mais par un biais différent, c'est la
question des pouvoirs des futurs conseils de comté qui est le fondement
de leur préoccupation.
Par exemple, dans la partie sud du territoire, il y a déjà
des services en commun qui existent et, pour chacun de ces services, il faut se
faire une structure particulière, spécifique, sur le plan
juridique, sur le plan du contentieux avec le ministère des Affaires
municipales, c'est compliqué, ça prend un temps fou. Ce sont des
structures, en plus, qui impliquent énormément d'énergie.
Ce serait beaucoup plus simple si le conseil de comté renouvelé,
une fois mis en place, pouvait prendre
à sa charge toutes ces structures, en fait, les remplacer, ces
structures multiples, par une seule structure, qui serait le conseil de
comté, quitte à avoir des commissions, des comités,
déléguer des mandats, mais une seule structure, ce qui facilite
de beaucoup la communication et I'interrelation entre les différents
domaines de gestion de services communs qui sont l'eau potable,
l'épuration, les déchets solides, la promotion industrielle, en
fait, tous les domaines qui, dans le sud du territoire, sont très
importants et sont déjà de plus en plus mis en commun.
C'est surtout cela qu'il y a de changé. Il y a un
élément nouveau en plus, c'est l'harmonisation avec la loi 90;
dans la première version, cela avait été oublié.
Encore là, les préoccupations viennent de la partie sud de notre
territoire et on les a ajoutées.
M. de Bellefeuille: A propos de l'harmonisation avec la loi 90,
c'est à la page 7 de la nouvelle version, je crois.
M. Boucher (Serge): C'est cela. (10 h 30)
M. de Bellefeuille: Vous affirmez: "Les municipalités et
les comtés renouvelés de notre région sont parfaitement
capables d'administrer au jour le jour le zonage agricole. Je pense que cela
correspond à la pensée du législateur mais je voudrais
quand même vous poser une question à ce sujet: Est-ce que vous
croyez que les nouvelles structures dans le cadre de la loi 125 auront pour
effet, dans leur action, d'empêcher une urbanisation trop rapide? Je vais
vous dire le fond de ma pensée, il est évident que la loi 90
représente un frein par rapport à ce qui avait été
établi sous le régime de la loi 60, qui prévoyait dans
certains cas des zones d'urbanisation future assez vastes. Vous croyez que les
nouvelles structures n'ouvriront pas de nouveau la porte à une
urbanisation trop rapide?
M. Robert: Ce qu'on dit là-dessus, on ne revient pas avec
quelque chose de neuf; on revient avec une partie du mémoire qu'on a
présenté lors de l'adoption de la loi 90. On est tout à
fait d'accord qu'un frein soit mis à l'urbanisation. Je pense que si
vous reprenez le mémoire qu'on a déjà déposé
là-dessus, on n'a pas changé d'idée et les gens de la
région n'ont peut-être pas changé d'idée. Mais c'est
au niveau de la gestion ou de l'administration; on optait à ce
moment-là pour que l'administration de la loi se fasse d'une
façon décentralisée, quitte à ce que cela soit fait
sous la surveillance d'un organisme provincial qui existe en fait. Le danger
que vous soulevez ne peut pas exister à ce moment-là. Tout ce
qu'on veut, c'est que la gestion soit rapprochée de la population.
M. Boucher (Serge): D'ailleurs, dans le projet d'harmonisation
entre la loi 125 et la loi 90, si je me souviens bien, les municipalités
ne peuvent pas amender les zones agricoles protégées par la
commission du territoire agricole. Il n'y aurait pas d'expansion sans que la
commission accepte. Par ailleurs, elles vont pouvoir émettre les permis
au jour le jour dans le cadre de la loi, ce qui est de beaucoup
préférable à une référence continuelle
à la commission.
M. de Bellefeuille: Vous identifiez dans votre mémoire un
certain nombre de critères pour définir le territoire des futurs
conseils de comté; vous faites allusion à une entente avec vos
interlocuteurs pour le découpage du territoire; est-ce que vous pourriez
nous en dire un peu plus long sur cet aspect de la chose, sur cette
entente?
M. Boucher (Serge): En fait, le découpage est pratiquement
réglé. Il reste, au fond, quelques questions de limite. Les deux
gros problèmes qui restent sont justement le coin de Labelle, où
on ne sait pas encore si on va aller avec Saint-Jovite ou si on va aller avec
L'Annonciation et tenter de former un nouveau comté; c'est un des gros
problèmes qui concerne peut-être trois ou quatre
municipalités. L'autre problème qui reste, c'est Mirabel, qui est
dans votre comté, la ville de Mirabel, qui préférerait
former un comté à elle toute seule mais qui pourrait aussi, sur
un plan logique, très bien entrer dans un comté avec
Saint-Eustache.
A part ces deux problèmes majeurs, tout le reste est pratiquement
réglé, sauf pour des cas individuels, comme Saint-Adolphe ou
Morin-Heights qui pourraient changer de comté. C'est pratiquement
réglé aussi dans leur cas, ils sont prêts à changer
de comté; Saint-Colomban est prêt à changer de
comté. En gros, d'abord, la première coupure se fait entre
Saint-Jérôme et Sainte-Adèle, c'est-à-dire
qu'à Saint-Jérôme en descendant, c'est nettement les
commissions d'urbanisme de secteurs qui doivent prédominer. Reste
à savoir ce qu'on va faire avec Sainte-Anne-des-Plaines, Saint-Lin, dans
ce coin-là. C'est un peu compliqué parce qu'en fait, on ne sait
pas trop où les envoyer. Ils pourraient aller à Joliette,
à Saint-Jérôme, à Sainte-Thérèse,
à Terrebonne et, entre les quatre, c'est très difficile de
décider. La décision qui peut se prendre est finalement
impressionniste.
M. de Bellefeuille: Mais elle va se prendre à partir de
quelle sorte de considérations, à votre avis?
M. Robert: Actuellement, durant la consultation, il y a
différents facteurs qui sont énumérés à la
page 5. Ce qui a été déploré par certains groupes,
c'est qu'on a eu l'impression pas une certitude, l'impression que
ça pouvait se faire d'une façon arbitraire jusqu'à un
certain point, parce que la loi ne contenait pas les critères qui
pourraient servir. Donc, on pourrait toujours dire après à partir
de quel critère cela pouvait être fait. Il y en a
d'énumérés ici et on dit que c'est possible, à
partir de ceux-là, d'en arriver à un consensus. Entre autres, on
soulève toute la question... Vous savez tous qu'on a fait
l'opération
55 dans le scolaire, on a fait ensuite l'opération 27. On dit:
Est-ce qu'on doit en faire une autre dans quelques années? Si,
effectivement, ces futurs comtés doivent exister pour d'autres fins que
l'aménagement... Ce sont des questions posées. Est-ce qu'on devra
encore une fois recommencer? L'exemple de Mirabel est excellent. Une partie du
territoire de Mirabel est actuellement rattachée à la Commission
scolaire de Saint-Jérôme. Une partie assez importante. Vous le
savez, on a eu l'occasion de se rencontrer...
M. de Bellefeuille: Oui, en effet, je suis au courant.
M. Robert: C'est un facteur. Est-ce qu'on va tout recommencer?
Saint-Colomban aussi en fait partie. Est-ce un critère qui doit
être retenu, est-ce que cela a de l'avenir comme structure ou si c'est
pour une seule fin: l'aménagement? Selon ces critères-là,
c'est la même chose quand on parle de Sainte-Anne-des-Plaines,
Saint-Lin... Ces facteurs devraient jouer, mais le CRD s'est dit: Dans un
premier temps, on fait une recommandation, on pose des questions. Selon les
réponses obtenues à ces questions, lorsque la loi sera
adoptée, il y aura toujours... Le CRD s'engage à recommencer le
travail de consultation et à donner son avis à ce
moment-là. Mais, actuellement, on a besoin d'avoir des réponses
à un certain nombre de questions pour pouvoir faire la deuxième
partie du travail.
M. de Bellefeuille: Vous indiquez dans votre mémoire que
votre organisme traite de questions d'aménagement et d'environnement
depuis plusieurs années. Avec cette expérience acquise,
pourriez-vous nous parler des principales interventions que votre conseil a
faites dans ce domaine?
M. Robert: M. Boucher.
M. Boucher (Serge): Je pense que l'intervention la plus marquante
a été la constitution d'un règlement modèle de
zonage, lotissement, construction, qui était un véritable
règlement de conservation des lacs et de l'environnement en territoire
de villégiature. Ce règlement a été
rédigé par le CRD, sur la base de normes existantes et avec
l'aide en particulier des services de protection de l'environnement à
Montréal, pour ce qui est des normes qui étaient nouvelles par
rapport à ce que les urbanistes produisaient généralement
en ce qui concerne les lacs.
Ce règlement a été diffusé, au fond; il y a
eu une sorte d'animation des conseils municipaux, toujours dans la partie nord
du territoire et finalement, je pense que ce n'est pas la seule explication,
mais il y a eu tout un mouvement depuis ce temps-là. Cette initiative
date de cinq ans et il y a eu tout un mouvement qui s'est mis en marche depuis
ce temps-là. Actuellement, dans la partie nord de la région des
Laurentides, la partie de villégiature, il y a une très grande
sensibilisation sur les questions d'environnement. C'est pour cette raison que
la loi 125 est un facteur qui fait... je dis cela sans vouloir charrier, elle
est reçue presque avec enthousiasme, parce qu'elle va régler des
problèmes qu'on a énumérés ici. On n'a pas
élaboré, mais ils sont énumérés. Ce sont des
problèmes qu'on n'arrive pas à régler, parce que chaque
municipalité peut bien faire des choses, mais il y a un besoin essentiel
de relations intermunicipales dans ce domaine.
Par exemple, il y a des municipalités où il faut 40 000
pieds carrés sur le bord d'un lac pour protéger vraiment un lac
et s'assurer qu'on ne sera pas obligé d'amener des égouts, de
tout démolir dans dix ou vingt ans, avec en plus, des coûts, des
subventions, etc. Il y a des municipalités qui hésitent, parce
que si le voisin a 20 000 pieds carrés ou il y a certaines exceptions
où le voisin n'a aucun règlement, donc on peut bâtir sur
5000 pieds, il hésite à mettre 40 000 pieds, parce qu'il dit
qu'on va se pénaliser nous-mêmes, les voisins vont se
développer et on ne se développera pas.
Il y en a qui, malgré cela, ont quand même mis 40 000
pieds, en ayant une perspective à court terme et à long terme,
c'est sûr qu'ils vont gagner. En ayant une loi comme celle-là qui
donne aux comtés une certaine autorité morale, en plus des
pouvoirs spécifiques qui sont là-dedans, ça va permettre,
entre autres choses, de faire un consensus à l'intérieur d'un tel
organisme et de dire: Sur le bord d'un lac, à tant de distance d'un lac,
c'est 40 000 pieds, pas moins, cela peut être plus, mais pas moins. Les
gens vont s'entendre assez rapidement là-dessus. C'est un exemple de ce
que la loi va apporter dans le secteur de l'environnement où on a eu,
depuis cinq ans, de nombreuses interventions.
Donc, ça va donner un nouvel élan aux progrès
réalisés depuis cinq ans dans les Laurentides au point de vue
protection de l'environnement.
M. de Bellefeuille: II me reste deux questions pour ceux qui
penseraient que je suis un peu loin. L'avant-dernière, c'est à
propos de la confection des plans et règlements d'urbanisme pour les
municipalités rurales. Selon votre expérience, les articles de la
loi qui traitent de cet aspect, sont-ils satisfaisants? Est-ce que le contenu
minimum du plan d'urbanisme répond aux besoins des petites
municipalités?
M. Boucher (Serge): C'est sûr qu'il va falloir qu'ils
ajoutent des choses. En fait, le minimum n'est pas restrictif, ils peuvent
ajouter des choses. Je pense que dans le cadre de la loi, ils ont tous les
pouvoirs dont ils ont besoin, sauf un qu'on mentionne. On est conscient que
c'est très compliqué et que ce n'est peut-être pas possible
de le régler, mais on le mentionne, parce qu'il est très
important dans ce contexte, c'est le pouvoir de réglementer les bateaux
à moteur, qu'ils n'ont pas vraiment, ou qu'ils ont, mais avec beaucoup
de crainte sur ce qui peut arriver en cours. Il y a beaucoup de confusion
autour de cela.
M. de Bellefeuille: Merci, c'est intéressant. Ma
dernière question, qui est d'un tout autre ordre, concerne les
structures, dans leur ensemble, de décision et de consultation.
Là, nous nous acheminons vers la mise en place d'un palier
décisionnel et, évidemment, de consultation aussi, à une
échelle qui est celle des comtés.
Vous, comme les autres conseils régionaux de
développement, vous fonctionnez à un autre palier de
régions plus vastes. On s'achemine donc vers une espèce de
birégionalisation, de régionalisation à deux niveaux.
Comment voyez-vous l'avenir par rapport à cette double
régionalisation?
M. Robert: Je pense qu'il est un peu tôt pour faire des
prédictions sur l'avenir. C'est bien sûr que le problème ne
se pose pas simplement dans la question de l'aménagement. Un conseil de
développement régional comme le nôtre, a servi un peu
on ne va pas parler des autres, mais celui des Laurentides
à initier, dans un certain nombre de domaines, une planification, un
certain nombre de choses, surtout à donner des avis.
Mais depuis quelques années, surtout les deux dernières
années, le conseil régional a aussi servi de moteur pour
développer d'autres structures. Par exemple, actuellement, le conseil de
développement s'occupe de mettre en place des corporations de
développement dans des sous-régions. Quand tout cela sera fait,
les comtés renouvelés, il y aura peut-être lieu de se poser
des questions sur le rôle futur. Si des organismes à vocation plus
régionale, mais dans une région plus restreinte, sont mis en
place, soit pour le développement économique, le
développement touristique, etc., il y aurait peut-être à
revoir tout cela.
C'est dans ce sens-là qu'on trouve, pour certains, que la loi 125
est peut-être la base d'un futur centre d'échanges, soit pour la
planification on l'a abordé tout à l'heure dans la
question de planification du développement économique,
planification de certains services cela nous apparaît comme une
base. Mais ce n'est pas ce qui a été discuté d'une
façon fondamentale. Pour avoir participé à deux ou trois
des rencontres, c'était difficile de faire déborder la discussion
en dehors du problème d'aménagement. Quand on discute de ces
problèmes avec des maires ou des conseillers municipaux, on nous dit:
D'accord pour parler d'aménagement, mais le reste, on ne veut pas en
entendre parler tout de suite, bien que cela se fasse quand même, d'une
certaine façon, à l'intérieur d'autres organismes.
M. de Bellefeuille: Je vous remercie.
M. Boucher (Serge): J'ajouterais peut-être un commentaire
là-dessus. En ce qui me concerne, cela fait peut-être huit ans que
je travaille dans un CRD. J'ai été deux ans au CRD de
l'Outaouais. Il me semble qu'avec la loi 125, avec la formation des
comtés renouvelés, cela va être beaucoup plus facile et
beaucoup plus naturel d'organiser une concertation à l'échelle
des régions adminis- tratives, quelles que soient les limites futures de
ces régions administratives, parce que, là-dessus, il existe un
problème. (10 h 45)
Mais cela va se régler après que les comtés auront
été mis en place, normalement, et, à ce moment-là,
ce sera beaucoup plus facile, à mon avis, d'organiser une concertation
régionale à l'échelle de la région administrative,
parce que les comtés seront l'interlocuteur valable. Actuellement, on
rencontre les municipalités individuellement, les associations et les
organismes individuellement. Cela fait une quantité d'interlocuteurs
assez importante et c'est très difficile, alors qu'avec les
comtés, il y en aura cinq, il y en aura six, dans Laurentides ou dans
Laurentides-Lanaudiè-re, en tenant compte de l'avenir. Là, ce
sera facile de voir les intérêts communs et de former un conseil
régional avec possiblement une autre participation que celle des
comtés également. Pour moi, c'est une grosse amélioration
du point de vue du travail qu'un CRD peut espérer faire dans une
région.
M. de Bellefeuille: Votre approche est empirique, pratique et
optimiste. Je vous remercie de nous l'avoir expliquée.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je remercie le Conseil
régional de développement des Laurentides de sa
présentation. Je pense que le mémoire aussi bien que les
réponses que vous avez fournies aux questions du député de
Deux-Montagnes sont très claires et très spécifiques. Je
n'ai donc aucune question à adresser à nos invités. J'en
profiterais cependant pour demander au ministre si, lorsque le CRD souhaite que
l'on connaisse le plus tôt possible les pouvoirs futurs que pourront
avoir les comtés renouvelés, il est prêt, ce matin,
à nous dire à quel moment le fascicule 5 de la série de
fascicules sur la décentralisation pourra être disponible.
M. Léonard: Ce n'est pas la coutume de poser des questions
ou d'échanger ici sur ces questions. Je répondrai simplement
qu'on y travaille à l'heure actuelle, que, de toute façon, il
s'agit de fascicules verts et qui n'engagent pas le gouvernement. C'est un
document de réflexion, mais on y travaille présentement.
M. Gratton: Le ministre n'est pas en mesure-Ce n'est pas dans le
but de...
M. Léonard: Non, je ne suis pas en mesure de donner une
date.
M. Gratton: Merci, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Très
brièvement, comme le dit le député de Gatineau, à
la suite des questions du député de Deux-Montagnes qui
connaît très bien cette région, il en reste moins, vous
avez dit que le projet avait été bien accueilli. J'aimerais que
vous me parliez un peu des municipalités qui font partie de la zone
aéroportuaire de Mirabel. Vous parlez d'une commission d'urbanisme de
secteur pour ces... Aurait-elle envie, si vous voulez, de sortir du conseil de
comté ou d'avoir un conseil de comté à elle seule?
Pourriez-vous expliciter davantage votre idée?
M. Robert: Je ne pense pas que ce soit comme cela. Quand on parle
des commissions d'urbanisme de secteurs, ce sont des choses qui existent, mais
qui ne correspondent pas nécessairement à un comté. Ce que
cela semble vouloir dire, c'est qu'elles ont appris à travailler
ensemble à l'intérieur de ces commissions de secteurs et elles
voudraient bien continuer. C'est dans ce sens-là.
M. Goulet: Ce que je veux dire, c'est que l'aménagement va
avec le développement dans bien des cas, mais, dans le cas de Mirabel,
au niveau du développement, il y a des municipalités qui n'ont
à peu près pas le choix. Mirabel est là pour y demeurer,
je présume.
M. Robert: Oui.
M. Goulet: Au niveau de l'aménagement, cela devient plus
difficile d'avoir leur propre schéma, comme elles l'auraient voulu
peut-être avant que Mirabel ne soit là, mais, étant
donné que Mirabel est sur place...
M. Robert: II est fait actuellement, ce
schéma-là.
M. Goulet: Oui.
M. Robert: Ce travail-là est fait. C'est dans ce
sens-là qu'on peut dire que, dans le travail qu'on a fait, il y avait
deux façons différentes d'être d'accord avec la loi 125.
Pour les gens du Nord qui, avec le CRD, depuis plusieurs années, ont
travaillé à des schémas d'aménagement et des plans
de zonage pour les municipalités, la loi 125 permet de les harmoniser et
d'aller un peu plus loin que ce qu'ils auraient pu faire jusqu'ici. Il n'y a
donc pas de problème.
Pour ce qui est de la partie sud du comté, à cause de la
loi 60, le travail qui est demandé par la loi 125 est déjà
fait. Ce qu'ils demandent ici, c'est de ne pas les obliger à recommencer
une deuxième fois ou une troisième fois, selon le cas, parce que,
si on leur demande de recommencer par rapport à la loi 90, on dit: Une
minute, pas encore une fois avec la loi 125. On dit: On est déjà
regroupé dans des commissions d'urbanisme de secteur. On voudrait
continuer à peu près avec les mêmes secteurs,
peut-être avec une modification à un endroit ou à un autre,
mais, en gros, avec les mêmes pour que l'acquis soit reconnu.
M. Goulet: Autrement dit, le projet de loi 125 aurait dû
être le premier à être déposé, surtout avant
la loi 90.
M. Robert: C'est ce qu'on a dit à M. Léonard quand
on est venu pour étudier le projet de loi 90, mais ce n'était pas
lui qui était là.
M. Goulet: Ah bon! Une dernière question. A plusieurs
endroits, dans votre mémoire, vous attachez beaucoup d'importance
je vous comprends vous parlez souvent des commissions scolaires. Vous
nous en avez même parlé très souvent et, à la suite
des questions posées par le député de Deux-Montagnes,
également, à deux ou trois reprises, vous avez mentionné
les commissions scolaires. Au niveau du développement dans votre
région, le Conseil régional de développement des
Laurentides, pourquoi parler si souvent des commissions scolaires?
M. Robert: C'est peut-être une question de fait ou de
composition du conseil de développement, les commissions scolaires
participent actuellement au Conseil régional de développement des
Laurentides et aussi avec tout ce qui a pu se passer; dans la région, on
a vécu une intégration de commissions scolaires
élémentaires et secondaires, il y a quelques années. Il
s'est passé des choses. Il s'en est passé aussi depuis quelques
mois dans le domaine scolaire. Vous avez eu une conférence
Québec-commissions scolaires. Vous avez eu un Dudget encore plus
récemment. Quand on nous a présenté la loi 125 dans les
commissions scolaires, cela a été une occasion de faire le tour
des fascicules présentés par le ministère de
l'aménagement et aussi d'examiner un livre blanc qui n'a jamais paru,
celui qu'on appelait le livre blanc sur la décentralisation. Les gens
ont commencé à faire un recoupage. Les deux ont été
étudiés: les fascicules publiés par le ministère de
l'aménagement, le livre blanc qui aurait dû être
signé par le premier ministre, mais qui n'a pas paru. Pour les
commissions scolaires, il y a des documents qui ont été faits. En
parallèle, on trouve essentiellement, dans les fascicules parus,
l'esprit de la loi 125, ce qui se trouvait dans le livre blanc. On se pose la
question: Les premiers éléments étant posés, est-ce
que, dans les fascicules 5, 7 ou 9, le reste va venir? Quel est notre avenir
à l'intérieur de cela? Ce n'est pas parce qu'il y a
réticence, mais on voudrait bien savoir à quel endroit cela va
s'insérer si, au fur et à mesure... Si cela se place dans un
contexte de décentralisation, je pense que le CRD des Laurentides le
reconnaît. Un des aspects louables qui est reconnu de la loi 125, c'est
l'aspect de vouloir décentraliser les pouvoirs d'aménagement au
niveau du conseil de comté renouvelé.
Maintenant, comme on fait mention aussi que d'autres pouvoirs
éventuellement pourraient être confiés à cette
structure, quand on regarde ce qui peut exister dans les prochains fascicules
et la loi 125, il y a des questions qui sont soulevées, qui se posent,
à ce moment, au niveau du découpage et des pouvoirs.
M. Goulet: J'aurais une question personnelle, si vous me le
permettez. Quand vous dites "quel est notre avenir", vous parlez comme si vous
étiez un directeur général d'une commission scolaire.
Est-ce que je me trompe?
M. Robert: C'est vrai.
M. Goulet: Non, c'est seulement pour...
M. Boucher (Serge): Je tiens à ajouter que les commissions
scolaires dans la région des Laurentides, de même que les CEGEP,
de même que les municipalités participent au CRD. Finalement, dans
le mémoire, je pense qu'on tient compte de toutes les composantes de la
région. Effectivement, tout le monde a reconnu dans le conseil
d'administration que la question que les commissions scolaires posent est
très pertinente. Si on est pour avoir, dans cinq ans, dix ans ou vingt
ans, une intégration du scolaire et du municipal au niveau du pouvoir
local, cela va influencer énormément, même maintenant,
certaines décisions au niveau du territoire, parce qu'il y a des gens
qui sont regroupés au plan scolaire et qui sont très satisfaits
de ce regroupement, et qui ne voudront pas le remettre en question dans cinq
ans. C'est dans ce sens qu'il y a un lien pour nous qui est reconnu par
l'ensemble du CRDL.
M. Goulet: M. le Président, je remercie les... Le
Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, M. le directeur
général, je veux vous remercier d'avoir présenté ce
mémoire, de l'avoir préparé et d'avoir fait tout le
travail qui a été fait en consultation sur la loi 125. Je
voudrais simplement faire quelques commentaires et rappeler ici, pour le
bénéfice des membres de la commission, le travail qui a
été fait par le Conseil régional de développement
des Laurentides en termes d'aménagement. Je pense que ce conseil a connu
une expérience inédite d'aménagement et a
été un facteur très positif pour le développement
du nord de Montréal, en particulier dans sa partie touristique.
C'est à partir des initiatives du CRO des Laurentides qu'on a
commencé à penser des règlements de zonage en milieu
touristique. Des terrains à 40 000 pieds carrés viennent de leur
idée. Ils l'ont fait en collaboration avec les gens de
l'Université de Montréal et de l'Université McGill, un peu
partout, de sorte que, aujourd'hui, les municipalités ont hâte
d'en arriver à adopter des règlements de zonage et de se faire
des plans d'urbanisme et des schémas d'aménagement, de
façon à protéger leur développement. Je pense qu'il
y a tout lieu de féliciter cet organisme de cette initiative qu'il
manifeste depuis déjà plusieurs années et qui produit ses
résultats maintenant.
Par rapport à l'expérience que vous avez connue, je pense
bien qu'on pourrait vous poser beaucoup de questions. Je voudrais faire un
commentaire au début, en relation avec les infrastructures dans le
territoire. Quand on parle d'aménagement, je pense qu'il est important
évidemment de parler des orientations d'aménagement, des grandes
affectations du sol, des périmètres d'urbanisation, mais aussi
des équipements et des infrastructures qui sont sur le sol. Lorsqu'on en
traite dans un schéma d'aménagement, dans un plan d'urbanisme, on
se trouve à toucher et à traiter des principales composantes du
développement, dans la mesure où cela doit se spatialiser sur un
territoire donné. Dans ce sens-là, même les infrastructures
de toutes sortes d'entreprises, de toutes sortes d'institutions, y compris
celles du réseau des Affaires sociales, comme du réseau de
l'Education, prennent une importance majeure en relation avec le
développement du territoire. Cela ne se situe pas comme ça
quelque part dans le paysage. C'est parce qu'il y a une population autour.
C'est parce qu'il y a d'autres équipements autour. Tout ça forme
un tout, finalement, et par le biais des infrastructures, je pense qu'on amorce
aussi une réflexion sur le développement, et inversement.
J'aimerais vous poser une question selon ce que vous voyez ou selon
l'expérience que vous avez connue, la réflexion que vous avez
dû faire sur le développement par rapport à
l'aménagement, et inversement. Je pense bien que vous vous êtes
posé des questions sur le développement des Laurentides, de toute
cette région et cela vous a amenés à parler
d'aménagement, et inversement aussi. Vous avez réfléchi
votre aménagement en fonction du développement et le
développement en fonction de l'aménagement.
J'aimerais que vous explicitiez un peu sur cette question parce qu'il y
a des relations évidentes entre les deux.
M. Boucher (Serge): En fait, dans la partie touristique des
Laurentides, l'aménagement et le développement ne se distinguent
pas, parce que la ressource première du développement qui permet
de créer des emplois, de créer des revenus dans le territoire,
d'avoir une croissance économique, cette ressource, dis-je, c'est le
sol, le territoire avec tous les éléments naturels qu'il
comprend. C'est ça, la ressource. Quand on aménage cette
ressource, on fait du développement ou on planifie du
développement, au sens de création d'emplois, création de
revenus, création d'activités économiques. Donc, on n'a
jamais fait, au CRD, une distinction conceptuelle entre les deux choses. On
fait les deux choses en même temps et on appelle cela de la concertation
ou, parfois de l'aménagement, parfois du développement.
M. Robert: Le CRD, quand on parle de la partie sud, est en face
d'une réalité. On ne peut plus parler d'aménagement pour
la partie sud de notre territoire. Mirabel est là, les infrastructures
sont là. Il faut plutôt parler de développement. Comment
va-t-on s'y prendre? Quels sont les moyens qu'on va mettre en place, par
exemple, pour favoriser le développement d'un secteur
comme celui-là, compte tenu qu'on se situe à moins de 25
milles de Montréal et de Laval, ainsi de suite? C'est tout ce contexte
qui est étudié actuellement, soit par le CRD comme groupe, ou par
des groupes de travail à l'intérieur du CRD plus locaux. (11
heures)
C'est là qu'est le problème actuellement pour la partie
sud du CRD, tandis que pour la partie nord, M. Boucher l'a bien
expliqué, c'est une question d'aménagement et de
développement et tout est relié à l'industrie touristique.
Le problème d'infrastructures ne se pose pas du tout de la même
façon.
M. Léonard: Une dernière question, si vous me le
permettez. Je ferai un bref commentaire. En ce qui concerne les fascicules, il
nous semble qu'il était important pour nous de préciser un peu
l'approche que nous avions, en termes de décentralisation, par le
premier fascicule, de montrer aussi les expériences
étrangères en ce domaine, mais nous avons publié les
fascicules qui étaient nécessaires pour montrer tout le contexte
de la Loi de l'aménagement; c'est ce que nous avons fait. Je crois que
la réflexion n'est pas terminée encore. La perspective de la
décentralisation déborde de beaucoup l'aménagement.
Je dirais quand même une chose, lorsqu'on parle
d'aménagement et qu'on va traiter d'infrastructures, vous ne croyez pas
que par les réflexions qu'on peut se faire sur les orientations
d'aménagement, sur la localisation d'infrastructures et
d'équipement public, automatiquement, on se trouve à traiter une
bonne partie de la perspective de la décentralisation? On peut y toucher
tout au moins, on amorce une réflexion.
M. Boucher (Serge): Je dirais ceci: Effectivement, on le fait au
niveau d'une planification parce que tout cela a une concrétisation
territoriale et cela, c'est très bon, cela va déjà amener
nécessairement des rapports et des concertations intersectorielles. Ce
qu'on ne fait pas à ce moment-là et c'est l'étape
qui manque; en fait, c'est le fascicule 5 c'est qu'on ne gère pas
des équipements en commun encore mais, de plus en plus, le besoin de
gérer des équipements en commun, surtout dans la partie sud du
territoire, est urgent. De toute façon, on est pris pour en gérer
avec des instruments ad hoc qu'on bâtit comme cela, par des acrobaties
juridiques ou autrement, ou des négociations ou des arrêtés
en conseil ou des règlements de la Commission municipale, mais cette
gestion en commun d'équipement, de services, dans le sud, cela fait
longtemps qu'on est rendu là et on attend encore.
M. Robert: C'est pour cela qu'il y a une des recommandations qui
était partagée par les maires même s'il y avait des gens du
scolaire, c'était celle par rapport au comité consultatif,
paragraphe 22. Aujourd'hui, on parle de bâtir des complexes sportifs,
commissions scolaires, municipalités et des services communs et au
scolaire et aux municipalités. Pour que cela soit facile, il faudrait
peut-être que la loi prévoie, au moins la loi de
l'aménagement, que les parties se retrouvent à la même
place, à la même table. Cela n'était pas prévu et
c'est dans ce sens qu'il y a des commentaires bien précis qui ont
été apportés, mais ce qu'on sent aussi, c'est qu'il y a
plusieurs organismes qui travaillent ensemble déjà à
l'intérieur de structures ad hoc un peu partout. Que ce soit dans le
domaine des Affaires sociales, que ce soit dans le domaine du
développement économique ou autre chose, les gens se retrouvent
autour de différents organismes, mais également ailleurs.
M. Léonard: Je pense bien quand même que
l'aménagement constitue la planification du territoire. Je pense que
c'était cela qui était visé par la loi de
l'aménagement et je pense qu'elle répond aux objectifs que nous
nous étions fixés là-dessus. Je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): Je remercie le CRD des
Laurentides. J'inviterais maintenant le deuxième groupe, le
Comité des citoyens de Saint-Jean-de-Matha, mémoire 19, à
venir nous présenter son mémoire. M. Ouimet.
Comité des citoyens de
Saint-Jean-de-Matha
M. Ouimet: Oui, mais pour commencer, je pense que c'est M.
Prescott qui va nous piloter.
Le Président (M. Marcoux): Si vous voulez bien vous
présenter et présenter vos collègues, vous avez une
vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire et une
quarantaine de minutes pour le dialogue avec les membres de la commission.
M. Prescott (Normand): Merci, M. le Président. MM. les
députés, M. le ministre, nous représentons l'Association
des citoyens de Saint-Jean-de-Matha et nous avons, dans un délai assez
court, préparé un document que nous allons déposer.
Auparavant, j'aimerais vous présenter mes collègues: à ma
gauche, M. Luc Ouimet et à mon extrême gauche, M. Paul Perron.
Sur certains plans, on ne se pense pas des spécialistes, sur
d'autres plans, on se pense pas mal bons. On se pense bons en consultation et
en participation, et c'est cet aspect de notre mémoire que nous allons
peut-être mettre un petit peu en relief. C'est la partie dont M. Ouimet
va se charger. Pour établir la crédibilité de notre
association, je pense qu'il n'y a rien de mieux que de vous dire un peu comment
on a fonctionné, l'expérience qu'on a vécue au niveau de
la consultation et de la participation des citoyens.
M. le Président, c'est la semaine sainte, on va faire trois
actes: de foi, d'espérance et de charité. L'acte de foi, c'est
envers les grands objectifs généraux poursuivis par la loi 125.
L'acte d'espérance, c'est l'essentiel de notre mémoire. Nous
espérons beaucoup que la participation des ci-
toyens soit soulevée et bien agencée. C'est
peut-être la partie cruciale de notre mémoire de ce matin. Quant
à l'acte de charité, c'est de votre compréhension, parce
que le temps que nous avons pu mettre pour rédiger ce mémoire
nous amène à vous dire que c'est avec beaucoup de modestie mais
également de confiance que nous le déposons. Nous avons pour nous
accompagner des gens de Saint-Jean-de-Matha, des différents groupes,
parce que, dans notre association, il est prévu que les gens de la
Chambre de commerce sont présents de façon systématique.
Chacun des quatre groupes dont je vais vous parler est présent dans
notre association. La Chambre de commerce, les cultivateurs, des
résidents permanents de Saint-Jean-de-Matha et les
villégiateurs.
De fait, à la page 2 de notre mémoire, vous avez vu qu'il
était dans l'intention du conseil de ville de préparer et de
présenter un comité consultatif responsable évidemment
à la municipalité. A ce moment-là, c'était dans les
vues du conseil de le faire et depuis, cela s'est réalisé.
Nous avons également avec nous M. le maire de
Saint-Jean-de-Matha, M. Hervé Gravel. Pour établir cette
crédibilité quant à notre capacité de nous
inquiéter de la participation et de la consultation de la population, je
demanderais à M. Paul Perron, de vous présenter quelques
notes.
M. Perron (Paul): Merci. M. le Président, avant d'aborder
le mémoire qu'on vous a présenté, j'aimerais juste
démontrer la situation par rapport à la démarche que notre
comité de citoyens a vécue depuis à peu près un an
et demi maintenant. Nous avons eu à vivre plusieurs expériences
qui nous ont amenés plus récemment à nous
intéresser plus particulièrement au plan de développement
de Saint-Jean-de-Matha. Ces expériences n'ont pas toujours
été des plus faciles pour les citoyens, en termes de
participation, et j'aimerais vous en dire un mot.
C'est surtout la ligne électrique qui devait passer à
Saint-Jean-de-Matha qu'on a proposé de faire passer à
Saint-Jean-de-Matha il y a un an et demi qui a un peu galvanisé
les citoyens pour se regrouper et pour vraiment considérer l'impact sur
leur développement, leur cadre de vie, d'un projet important comme une
ligne électrique majeure qui passe dans un environnement de
villégiature au nord de Montréal.
Nous avons dû commencer avec peu d'information, surtout peu
d'information vulgarisée, mais on a essayé, avec des gens de la
place, comme l'a mentionné M. Prescott, des villégiateurs, des
agriculteurs, des gens du village, de reprendre le dossier et de le comprendre,
et aussi, grâce à une subvention de la part du ministre
Léger, nous avons pu concerter et coordonner notre action. Nous avons eu
gain de cause après six ou sept mois de travail intensif, mais notre
comité ne s'est pas arrêté là. On a
décidé de le continuer dans plusieurs dossiers ponctuels.
Nous avons dû nous intéresser à un problème
important de dépotoir régional, avec tout ce que ça
implique, comprendre ce que c'est, quel est l'impact, comment ça nous
affecte, quelles sortes de services cela amène. Nous avons dû
également nous intéresser à un problème
causé par un entrepreneur privé qui faisait des spectacles
à grand déploiement; malheureusement, la municipalité
n'était pas en position d'assurer la sécurité ou
l'hygiène, le camping de tous les gens que cela amenait en soirée
et en fin de semaine. On a dû aussi faire face à des
problèmes de camping sauvage. On a dû monter un dossier, depuis un
an et demi, concernant un parc intermunicipal.
Finalement, voyant la difficulté d'articuler tous ces projets
ponctuels sans un cadre général, on a pensé utile, avec la
municipalité, l'été passé, de commencer à
penser à articuler un plan d'aménagement. On a assemblé
beaucoup de gens avec l'aide de la corporation municipale, on a fait des
réunions, on a essayé de comprendre ce qu'est un plan
d'aménagement, ce que ça va nous donner, ce qu'il faut concilier,
en termes de type de développement et, là-dessus, on y reviendra.
Mais on a travaillé avec la faculté d'aménagement de
l'Université de Montréal qui a mis une équipe
d'étudiants à notre disposition. Avec la population, on a eu des
rencontres, parce que le développement, ce n'est pas seulement le
physique ou le sol, c'est le monde.
On a essayé, par diverses réunions, autant à
Montréal pour les villégiateurs... Ce qui est une exception parce
que souvent, quand on travaille dans une municipalité, on est peu sur
place, mais la municipalité a bien voulu entrer en ville pour poursuivre
sa consultation. Nous arrivons à un point où nous voulons
formaliser davantage notre plan d'aménagement.
Tout ça, c'est pour des citoyens qui ont un peu le sens civique,
si vous voulez, mais qui ne sont pas des gens à temps plein pour
étudier ces différents problèmes. Je pense que vous pouvez
vous imaginer la recherche de l'information, la vulgarisation de l'information,
pour qu'on puisse tous comprendre ce qui se passe, l'animation que cela
implique, la compréhension des structures, à qui il faut
s'adresser, et il faut s'adresser à bien du monde dans tous ces projets.
C'est compliqué, c'est laborieux, mais c'est quand même possible
d'y arriver. Je pense qu'on est un exemple de gens qui sont tenaces et qui,
malgré tout, aboutissent.
Je pense que j'ai fait le point sur notre démarche. Je vais
laisser à M. Ouimet le soin de lire le mémoire.
M. Ouimet (Luc): Etant donné les règles du jeu de
vingt minutes que vous nous avez données, si c'était possible,
nous aimerions sauter certaines parties du mémoire, quitte, si vous le
voulez, à l'inscrire intégralement; nous pourrions sauter
certaines pages pour lire l'essentiel.
Le Président (M. Marcoux): II n'est quand même pas
très long, je pense que vous pouvez courir le risque de le lire.
M. Ouimet: C'est parce qu'il y aura des répétitions
avec ce qu'on vient de dire, ce serait peut-être plus rapide.
M. Chevrette: On pourrait s'entendre pour qu'il soit inscrit au
journal des Débats et, si vous souhaitez...
Le Président (M. Marcoux): On va l'inscrire en annexe au
journal des Débats. Si vous voulez le résumer.
M. Ouimet: On va essayer de faire une lecture la plus courte
possible pour pouvoir répondre à vos questions. L'essentiel,
comme c'est dit là-dedans, c'est que nous sommes entièrement
d'accord sur les deux premiers principes tous les autres aussi de
l'aménagement rationnel, d'une part, mais qui implique la participation
des citoyens. C'est surtout sous cet angle... Parce qu'il y a beaucoup
d'aspects importants et intéressants dans le projet de loi qui est assez
complexe. Nous l'avons surtout regardé sous cet angle, à partir
de notre expérience, pour voir quelles seraient les modalités
concrètes pour qu'il puisse porter ses fruits.
Dans la situation actuelle, à la page 3, nous voulons esquisser
à grands traits quelques caractéristiques de la situation
actuelle quant au processus de la prise de décision. Cette description
s'appuie sur l'expérience vécue dans un milieu qui se trouve en
interaction avec les valeurs et les activités émanant du coeur de
la région de Montréal. (11 h 15)
Les questions que les petites municipalités et les conseils de
comté ont à traiter sont de plus en plus complexes, sans qu'ils
aient pour autant les habitudes, les instruments et la méthodologie pour
les aborder. Au mieux, ils se font orienter par le CRD. Au pire, les
décisions se prennent par les dirigeants les plus forts, en fonction de
leurs intérêts personnels seulement, ou trop souvent.
Jusqu'à maintenant, l'information sur les projets de plusieurs
ministères affectant la région, soit des autoroutes ou d'autres
projets semblables, se rend peu souvent aux instances locales, encore moins aux
citoyens.
Le prochain paragraphe ne s'applique pas à notre paroisse,
à notre municipalité.
Même si on peut assister à des réunions de conseil,
il n'y a pas souvent d'ordre du jour connu d'avance des citoyens. Il en va
ainsi des documents de référence. D'ailleurs, on est souvent
méfiant vis-à-vis d'un groupe de citoyens qui désirent
assister à des réunions de conseil. Qui sont-ils? Que
veulent-ils? Est-ce un nouveau parti? Nous feront-ils la lutte aux prochaines
élections? C'est tellement plus simple à décider en groupe
fermé, à l'abri des regards et des interrogations. C'est une
conception de la démocratie, celle qui a fait peut-être que
l'Union des municipalités du Québec, à toutes fins utiles,
a rejeté les propositions de réforme de la démocratie
locale proposées par le ministre Tardif.
Malgré les avantages, dans une société moderne,
d'associer les citoyens, on résiste à partager le pouvoir
d'orientation et de décision de la vie communautaire.
Quelques leçons tirées de notre expérience. Dans le
projet élaboré par des...
Je pense qu'on a couvert cette question sensiblement tantôt. Je
vais passer la parole à Paul Perron, à 2.2.
M. Perron (Paul): Page 5, 2.2. La technologie de la
participation. On situe souvent la participation des citoyens comme un moyen de
contrebalancer l'emprise des technocrates sur nos cadres de vie. En effet, si
ces derniers, par leur connaissance systématique, sont aptes à
mesurer les potentiels, à évaluer les possibilités,
à décrire les causes et les effets et à élaborer
des scénarios et des choix, ils sont inaptes à déterminer,
à la place des citoyens, ce qui est souhaitable,
privilégié, prioritaire, quelles sont les valeurs des groupes
particuliers des collectivités. Cela demeure la responsabilité de
ceux qui seront affectés par tel arrangement de leur cadre de vie.
L'architecte ou le constructeur ne prend pas les décisions pour
le propriétaire qui se fait construire une maison. Est-ce à dire
que pour l'expression des points de vue des citoyens, on s'en remet au gros bon
sens, au spontané, à l'inorganisé, au hasard? C'est
peut-être la tendance que l'on pourrait adopter en réaction.
Notre expérience, au contraire, nous amène à
conclure et à affirmer fortement qu'il faut, dans la participation
c'est-à-dire consultation, information, intégration des
points de vue, etc., une technologie appropriée, tout aussi
compétente et exigeante, si l'on veut atteindre sûrement les
objectifs et éviter les processus bidons. Elaborer des processus de
participation qui deviennent des rites sans efficacité, nous
amène aux risques d'une nouvelle démobilisation et d'une
justification de rejeter la participation des citoyens, de la part des
opposants.
M. Ouimet: La fabrication du schéma, toujours à la
page 6. Etant donné les éléments obligatoires et
facultatifs que comprendra un schéma d'aménagement d'un
comté, les étapes préalables à son
élaboration doivent être bien menées et à l'aide des
techniques adéquates.
En particulier, il faut prévoir l'inventaire et l'analyse du
potentiel du territoire concerné, les utilisations qui en sont faites
présentement, les contraintes par rapport à certaines
utilisations. Dans le cas des infrastructures routières ou des corridors
d'énergie, il pourrait s'agir pratiquement d'études d'impact
préliminaires pour leur localisation approximative.
Déjà, ces étapes nécessiteront une approche
scientifique rigoureuse et des instruments appropriés qui ne sont pas,
à l'heure actuelle, à la portée des conseils de
comté. De plus, c'est à cette étape, avant
l'élaboration des scénarios et même de l'analyse des
contraintes, que les points de vue de divers groupes d'intérêt
doivent se manifester, afin de préciser les orientations du cadre de vie
souhaité par les citoyens.
Inutile d'insister sur la présence de techniques d'animation
appropriées pour que soient expri-
mes que ce soit sous la forme d'ateliers, en
plénière ou à l'aide de thèmes, de choix et de
rejets les critères de qualité de ce cadre de vie. Un
schéma d'aménagement bien fait suppose donc une technologie
faisant appel aux géographes, urbanistes, biologistes, sociologues,
architectes, ingénieurs et autres spécialistes.
Nous croyons que le gouvernement devrait fournir cette assistance
technique aux conseils de comté et offrir également des
subventions ad hoc.
Nous allons à la page 8, l'assemblée publique. L'avis de
l'assemblée publique par lettre nous référons
à des suggestions du projet de loi est adéquat, parce
qu'il rejoint tous les intéressés. Si l'on veut cependant
utiliser les journaux, il y a place pour l'innovation. En louant
peut-être l'espace de une ou deux pages au complet, on pourrait faire une
présentation du schéma, même accompagnée de cartes
du territoire.
Pour l'objectivité de la consultation, nous
préférerions que le comté explique "la" plutôt que
"sa" proposition.
Quant à la tenue de l'assemblée publique, l'article 19
n'est pas assez explicite par l'expression "toute personne peut participer".
S'agit-il d'un droit de parole unique pour des questions d'information ou
d'opinion? Nous avons cru voir que ce serait durant la même soirée
qu'on expliquerait la proposition, qu'on répondrait aux questions et
qu'on entendrait les points de vue. Sous quelle forme seront-ils entendus? On
peut évidemment, selon le projet de loi, ajourner autant de fois qu'il
le faut. Pourquoi? Comment? Est-ce que chaque conseil de comté,
dépendant de son souci de la démocratie et de son
expérience, serait libre de mener la consultation, selon n'importe
quelle règle, comme il l'entend?
Comment les données exprimées, les points de vue des
citoyens seront-ils analysés? Quel poids auront ces points de vue des
citoyens? Comment se fera l'intégration de ces points de vue dans les
nouvelles propositions? Comment les citoyens sauront-ils si on a donné
suite à leurs présentations?
Nous croyons que tout ce chapitre devrait être suivi de guides, de
directives et de l'aide technique de la commission d'aménagement en
interprétant dans ce sens l'article 8b. D'ailleurs, l'article 205 du
projet de loi permet au ministre d'établir des règles de
fonctionnement de ces assemblées. Nous suggérons également
que les phases d'information et de réponses aux questions soient
séparées de celles où les citoyens et les groupes
régionaux ou locaux feront valoir leurs points de vue, afin de pouvoir
digérer l'information et que les gens puissent avoir des points de vue
plus étayés, selon des modalités adoptées
usuellement dans les audiences publiques. Il serait préférable de
réduire le nombre d'assemblées publiques ou le nombre de
consultations, si on devait faire ce choix-là, mais au profit d'un
processus plus détaillé où les citoyens seraient plus
instrumentés et auraient plus de temps pour se préparer, se
concerter et évaluer les données de la proposition.
Ces remarques valent pour l'adoption, la modification d'un schéma
d'aménagement comme pour celui d'un plan d'urbanisme.
M. Perron (Paul): On poursuit en bas de la page, adoption du
schéma. En reliant les articles 25 et 169, on s'aperçoit qu'un
schéma pourrait être adopté par le tiers des membres du
conseil et, dans d'autres domaines, les décisions peuvent se prendre au
quart des membres. Dans tous les cas, il nous semble que les décisions
devraient se prendre à la majorité absolue des membres,
c'est-à-dire la moitié plus un. Si l'on craint de ne pouvoir
arriver à ce résultat, c'est que l'on doute de la ferveur
démocratique renouvelée des conseils de comté
renouvelés. 3.6. La consultation du schéma et du plan d'urbanisme
après leur adoption. Il serait souhaitable que les documents du
schéma d'aménagement comme ceux des plans d'urbanisme soient
accessibles en permanence à toute personne qui veut les consulter et
obtenir les explications nécessaires quant à leur
interprétation dans les faits.
Je passe maintenant à la page 11, la section 3.9, la composition
du conseil de comté. Nous n'avons pas d'indication sur la composition du
conseil de comté dont nous ferons partie. Nous sommes désireux de
ne pas être isolés quant à nos préoccupations:
petite municipalité des Bas-ses-Laurentides dont le développement
est axé sur l'agriculture, le commerce, la villégiature et la
récréation. Moins notre poids sera important et que nous ferons
les frais des ententes entre "les gros", d'autant plus nous réclamerons
le droit d'appel à une instance supérieure.
Si l'on se fie aux articles 69 et 82, l'on pourrait croire que le
conseil de comté exercera une quasi-tutelle sur les activités de
la municipalité. Tel ne doit pas être l'exprit de la loi, car il
faut aussi valoriser la démocratie locale et ne pas la vider de son
essence.
Nous trouvons cependant très intéressante cette
possibilité que l'article 99 donne à toute personne de demander
à la commission un avis de conformité.
M. Ouimet: 3.10 La démocratie des conseils de
comté. Cet objectif de la participation des citoyens doit être
présent de façon permanente dans le fonctionnement du conseil de
comté et ne pas se limiter à l'adoption ou à la
modification d'un schéma d'aménagement. Il sera nécessaire
pour la réussite de l'opération de doter les conseils de
comté renouvelés de devoirs, quant à la démocratie,
selon des moyens s'inspirant de la réforme proposée par le
ministre Tardif pour les localités. Il faudrait, par exemple, multiplier
les informations venant du conseil de comté, y compris les ordres du
jour des réunions et les résolutions, favoriser l'assistance par
les citoyens aux réunions qui pourraient être fixées
d'avance se tenant, soit le soir ou les fins de semaine, et de rendre possibles
les interventions des citoyens
aux affaires du jour pour s'exprimer sur un projet ou présenter
des suggestions.
Un CRD à enlever ou à modifier. De nos expériences
avec le CRD de Lanaudière, nous retenons qu'il est composé
principalement de représentants des corps publics et des chambres de
commerce, que ces services s'adressent à ces organismes, qu'il joue
souvent le rôle de promoteur de tels types de développement,
perdant ainsi son impartialité et sa capacité de consulter, qu'il
tient souvent les corps publics en otage par son information
privilégiée et par les ressources techniques quf, quoique
modestes, sont souvent supérieures à plusieurs de ces
organismes.
Nous estimons que le projet de loi 125 propose un
réaménagement du pouvoir entre le gouvernement, les conseils de
comté, les municipalités et les citoyens. Il suggère des
mécanismes et des outils de participation et de rationalisation dans les
décisions concernant l'aménagement et le développement.
Ceci implique que, dans ce contexte, le rôle du CRD doit être
réexaminé sérieusement. Le gouvernement lui-même et
les conseils de comté doivent assumer une bonne part des tâches
qui lui étaient confiées. Si le gouvernement décide,
malgré tout, d'utiliser ce mécanisme dont les limites
géographiques sont celles des régions ou sous-régions
administratives, elles sont plus grandes que les conseils de comté,
qu'il exige des transformations importantes quant au rôle du futur CRD,
quant à sa composition, à sa philosophie d'intervention et quant
aux services aux citoyens, de façon que ces derniers soient
réellement servis et appuyés.
Conclusions et perspectives. Nous n'hésitons pas à
affirmer que le projet de loi 125 constitue une pièce législative
importante: pierre d'assise de la construction d'une démocratie moderne,
répondant aux aspirations et au défi des sociétés
nouvelles.
Nous croyons que les principes de base sont adéquats et que les
instruments pour atteindre les objectifs doivent cependant être plus
nombreux et mieux définis. Il faut que le gouvernement résiste
à ceux qui voudraient revenir dans le système où la loi du
plus fort est toujours la meilleure par rapport à ceux qui n'ont pas ou
l'information ou la voix pour exprimer leur point de vue.
Le gouvernement, dans cette entreprise, doit se sentir responsable de la
qualité du processus démocratique, et, en ce sens, il a tout
notre appui.
Le Président (M. Marcoux): Merci. M. le
député de Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais tout
d'abord remercier le Comité de citoyens de Saint-Jean-de-Matha pour la
qualité de son mémoire. Je dois vous dire au départ que je
suis heureux de constater que ce mémoire donne son appui d'une
façon pratiquement totale au projet de loi 125. J'en profiterai pour
citer deux extraits de votre mémoire qui me permettent d'affirmer ceci.
A la page 2 de votre mémoire, nous pouvons lire ceci: "Nous souscrivons
entiè- rement aux objectifs de l'aménagement harmonieux du cadre
de vie des citoyens et de l'implication de ces derniers dans ce processus".
Egalement, à la page 13, une autre citation me permet d'affirmer ce que
j'ai dit au départ: "Le projet de loi 125 constitue une pièce
législative importante: pierre d'assise de la construction d'une
démocratie moderne répondant aux aspirations et aux défis
des sociétés nouvelles".
Je dois vous dire que, tout au long de votre mémoire, ce qui m'a
frappé, et vous l'avez même souligné, c'est que vous avez
tout axé sur la participation. Comme je vis à proximité de
votre municipalité, j'ai été à même de me
rendre compte de l'excellent travail que vous avez fait lors de votre
célèbre lutte contre la ligne hydroélectrique. Quand vous
affirmez qu'il y a des difficultés pour des citoyens de s'impliquer, le
gouvernement en est très conscient, d'autant plus que motiver les gens
à s'embarquer dans une discussion pour défendre leur milieu de
vie n'est pas toujours facile, d'autant plus que les ressources, comme vous le
dites, sont très minces. (11 h 30)
Cependant, je crois que nous sommes conscients de ça et nous en
sommes d'autant plus conscients que le type d'information qui est
véhiculé par les ministères se rend difficilement ou
partiellement... Dans la masse, je vous dis qu'on est bien conscient de
ça; de toute l'information qui sort, c'est presque inconcevable le peu
de résultat qu'on obtient à l'autre bout. C'est d'autant plus
important d'avoir des groupes de citoyens qui se préoccupent de
l'organisation, justement, du cheminement de cette information jusqu'à
la base, qui peut permettre de provoquer des réactions, comme ce fut le
cas dans votre milieu. Donc, tout au cours, je pense, de cette commission
parlementaire, nous aurons la chance d'entendre une quarantaine de
mémoires et nous sommes persuadés que les parlementaires ici
pourront tenir compte de plusieurs de vos remarques et pourront faire en sorte
que cette participation, qui est désirée dans le projet de loi no
125, puisse trouver une application concrète et une application en
termes de mobilisation des gens, pour que ces derniers puissent vraiment
collaborer à l'élaboration d'un cadre de vie qui corresponde plus
au développement d'une société moderne, comme vous
dites.
Donc, je m'arrêterai là-dessus en termes de remarques, pour
vous poser quelques questions cependant. A partir de l'expérience que
vous avez vécue, moi, j'aimerais savoir, lorsque vous parlez de
technologie de la participation, quelle sorte de technique entendez-vous et
pourriez-vous nous donner certains exemples? Comment pourrions-nous, comme
parlementaires, inscrire ce type de technique à l'intérieur de la
loi?
M. Ouimet: Je commence par la fin de la question quant aux
modalités. Je pense que la loi prévoit que le ministre peut
développer des règles. Alors, il n'est peut-être pas
nécessaire de les introduire comme telles dans le projet de loi,
mais,
cependant, dans la fabrication de ces règles, on peut si
je prends l'article 205 prescrire les règles relatives à
la bonne marche et à la procédure des assemblées
prévues aux articles...
Je vais expliciter un peu plus longuement cette question, cela
évitera d'avoir à y répondre dans les autres cas. Dans la
prise de décision et la possibilité d'exprimer des points de vue,
d'être consulté, l'information est la base, c'est la
première étape. Notre point de vue, nos jugements ne peuvent
être valables que dans la mesure où nous avons la bonne
information sur les données en cause. Que ce soit par rapport aux
orientations dans un schéma d'aménagement ou que ce soit dans le
choix d'un projet particulier, selon la qualité de l'information que
l'on a, les décisions qu'on va prendre et les points de vue qu'on va
adopter par rapport à la prise de décision vont être en
conséquence. On n'a qu'à lire, par exemple, ce qui se passe
actuellement à la commission Malouf pour voir que, même dans la
commission parlementaire, selon la qualité des informations que les gens
avaient, cela pouvait conditionner le type de décisions qu'ils pouvaient
prendre. On s'est aperçu, dans nos cas, que l'information, et
l'information, dans le cas, ce n'est pas simplement: Voici ce que... Il y a une
distinction entre l'information et la "vente". Les gens peuvent être
convaincus qu'ils ont fait un bon schéma, qu'ils ont fait un bon projet
de ligne, qu'ils ont fait un bon choix de site d'enfouissement sanitaire, mais,
lorsqu'on veut participer, il faut avoir l'ensemble des informations, quels
sont les critères de localisation, dans un cas, quelles sont les
données, quelles sont les possibilités? Il faut que l'information
soit un peu plus objective et présente vraiment les données du
problème. Cela est une condition.
Ce qui arrive, c'est que ces situations donnent l'impression que nous
sommes des éternels insatisfaits des efforts qui sont faits,
c'est-à-dire qu'un résumé devrait être suffisant,
que la possibilité de pouvoir parler, en soi, pourrait être
suffisante. On s'est aperçu, dans le fond, que c'est plus exigeant que
ça pour que, vraiment, des gens puissent exprimer un point de vue, et on
s'aperçoit qu'il faut plus d'effort.
On part dans une situation où ces moyens sont actuellement peu
élaborés, vers une situation où on veut que les gens
participent, sans qu'ils en aient eu l'habitude et sans qu'ils en aient
même eu la possibilité. Par exemple, dans le cas de la ligne
hydroélectrique, nous avons été obligés de faire
des efforts extraordinaires de tordage de bras pour obtenir, du ministre
Léger, une copie d'une étude d'impact qui était
déposée à ses services par l'Hydro-Québec tandis
qu'un an et demi après, avec la loi 69, ces copies sont au nombre de 25
et sont disponibles au public.
Ce sont des instruments essentiels pour qu'on puisse participer.
N'importe qui d'entre nous, si on nous demande notre point de vue sur une
question dont on ne connaît ni a, ni b, c'est difficile d'exprimer des
points de vue. Dans ce contexte, les chances de dire n'importe quoi sont
très grandes. C'est pourquoi nous trouvons que l'infor- mation, si on
l'applique par exemple au schéma, les données sur le territoire,
les contraintes, les choix, doivent être expliqués ou même
vulgarisés.
Quand on parle de vulgariser, c'est la même chose actuellement
quand on s'en va dans une modification d'un règlement de zonage. A moins
d'être un spécialiste, on ne comprendra pas la résolution,
cela réfère à une annexe, à un numéro de
règlement, le citoyen, là-dedans ne peut même pas savoir,
à travers ce jargon, de quoi il s'agit. S'agit-il de sa maison ou
bien... C'est un langage qui devient pratiquement ésotérique.
Dans ce sens, il est également important de décoder et de rendre
l'information accessible. Ce qu'on suppose, c'est qu'entre la période
où on reçoit l'information et la période où on peut
exprimer des points de vue, il faut que les gens aient le temps de dire:
Qu'est-ce qu'on fait avec cela?
Ce sont là des principes qu'on a essayé d'élaborer
à partir d'expériences vécues qui résument
l'essentiel. Je n'ai peut-être pas répondu de façon
spécifique aux modalités, mais c'était le cadre
général.
M. Chevrette: Je comprends davantage votre réponse dans le
sens suivant; vous me direz si je vous interprète bien. Quand vous
parlez de techniques ou encore de contenu, vous parlez plutôt en termes
d'accessibilité à l'information?
M. Ouimet: Pour la phase d'information, mais lorsque, par
exemple, on arrive à la phase de l'expression en assemblée
publique, n'importe qui parle, n'importe quand, en même temps. Les gens
ont demandé: Comment est-ce analysé? Comment cela entre-t-il
ensuite dans le processus de décision? Si on n'est pas assuré de
cela, dans le fond, cela risquerait de devenir un rite, c'est-à-dire
vous faites venir les gens, ils ont dit ce qu'ils avaient à dire, ils
s'en retournent et on continue à faire la même chose qu'on avait
dans notre procédé, cela ne durera pas longtemps comme
motivation.
M. Chevrette: Je pensais que vous alliez nous dire que c'est un
peu comme les commissions parlementaires.
M. Ouimet: On pense que non...
M. Chevrette: Vous ne voulez pas le dire.
M. Ouimet: ... mais le risque est toujours là.
M. Chevrette: Pour les réunions publiques, je remarque que
quand vous parlez de technologie de participation, vous arrivez dans votre
mémoire, en parlant d'assemblées publiques, encore là, en
disant que vous désirez que dans le projet de loi, on puisse marquer
d'une façon très explicite que les assemblées publiques
prévues dans le processus de consultation soient préparées
avec des guides et des directives très précises; je ne sais pas
si c'est toujours dans le même souci de la qualité de
l'intervention par après, mais on remarque à chaque phase de la
participation ou à
chaque phase d'information que vous parlez toujours de guides et de
critères; est-ce que c'est pour placer tout le monde sur un même
pied d'égalité en termes de force d'intervention ou si c'est
parce que vous voulez que les gens n'errent pas sur différents contenus,
mais s'en tiennent à des contenus bien précis?
M. Ouimet: Le gouvernement doit être responsable de la
qualité du processus démocratique mais pour cela, cela passe
quand même par des modalités précises. Comme les gens
actuellement, soit dans les conseils de comté ou ailleurs, n'ont pas
nécessairement des expériences très longues d'audiences
publiques et de processus d'assemblées publiques de ce cadre et comme il
pourrait s'agir de n'importe quoi et de tout, on se dit que selon le pouvoir
que la loi donne au ministre à l'article 205, on souhaiterait la
possibilité de décrire un guide. C'est-à-dire qu'est-ce
qu'un résumé, par exemple? Qu'est-ce qu'il comprend? Il ne s'agit
pas de l'inscrire dans le projet de loi, mais de faire savoir qu'il y aura un
guide qui doit être suivi dans les assemblées publiques de sorte
que si je reçois un résumé, que ce soit au moins un
résumé significatif sinon, après cela, je ne peux pas
participer.
Egalement, par rapport à la tenue des assemblées, parce
qu'elles pourraient évidemment se faire dans le désordre, quand
on dit un guide, ce n'est pas au niveau du contenu, mais au niveau de la
démarche et des modalités de la démarche pour être
assuré, non pas formalisé et standardisé de façon
que les contenus ou ce qui se passe à l'intérieur soient pareils
partout, que dans la démarche, on soit assuré d'un minimum
possible de processus démocratique, parce que même s'il y a
assemblée publique, il n'y a pas nécessairement un bon processus
démocratique. On a vu souvent de telles assemblées. Ce n'est pas
une contrainte, et cela en est une dans un sens, mais c'est une contrainte pour
que le processus démocratique joue bien et pour qu'il soit efficace.
M. Chevrette: Au niveau du référendum, vous
appréhendez des difficultés. Est-ce que vous appréhendez
ces difficultés-là uniquement au niveau de la possibilité
d'utilisation du référendum ou si c'est sur le
référendum lui-même? Vous voyez plus ou moins son
efficacité parce que vous suggérez et cela m'a
frappé le même processus que celui utilisé au niveau
des conseils municipaux. J'aimerais que vous expliquiez le fond de votre
pensée là-dessus et aussi que vous nous disiez si vous doutez
même de l'efficacité du référendum ou si c'est
purement et simplement difficulté d'utilisation.
M. Ouimet: Les deux. Dans ce cas-là le
référendum n'a qu'une valeur consultative. Malgré tout,
pour le tenir on imagine que ce devait être à cause de la
préoccupation des coûts selon notre expérience,
c'est pratiquement impossible, à moins d'être un parti
organisé à un échelon régional. Cela nous
amène à essayer de situer justement l'échelon local et la
participation à l'échelon local par rapport à la
participation à l'intérieur d'un conseil de comté. Il est
évident que les gens, plus spontanément et plus facilement, en
termes de motivation, en termes d'intérêt, vont participer aux
choses qui les touchent le plus immédiatement. Même si des
décisions au niveau du conseil de comté peuvent toucher leur vie,
c'est d'abord celles qui se font à l'intérieur de la
municipalité, contrairement à nos amis du CRD qui, à un
moment donné, disaient: Vous ne pouvez pas participer dans le cas de la
ligne électrique parce que vous êtes impliqués, elle va
passer chez vous, vous allez être biaisés. J'ai dit: Le
corollaire, c'est quoi? C'est qu'on va participer quand on n'est pas
impliqués? On va aller dans un autre comté ou dans un autre
cas... C'est bien évident que c'est quand on est directement
impliqué par quelque chose qu'on a la motivation suffisante pour
participer. C'est plus simple, à ce moment-là, au niveau d'une
localité. Lorsqu'on arrive au niveau du conseil de comté, c'est
déjà plus loin de son cadre de vie et, encore là,
l'expérience a été la même: nous avions
découvert que la ligne pouvait et devrait passer dans une autre
région selon des possibilités différentes.
Lorsqu'on a voulu aller rencontrer les gens des autres
municipalités, on s'est aperçu que de mettre tous ces
gens-là dans le coup, c'était beaucoup plus difficile, parce
qu'eux attendaient que la menace soit rendue dans leur cour pour commencer
à être mobilisés. De sorte que penser qu'on pourrait, par
exemple, aller chercher 100 personnes dans les deux tiers de chacune des
municipalités, c'est au-delà des moyens qui sont normalement
à la disposition des citoyens.
C'est pour cela qu'en définitive, nous croyons peu à
l'efficacité là-dessus et ce qu'on suggérait plutôt,
c'est que peu importe qu'il y ait deux tiers, dans le cas où un
fondement d'injustice à corriger ou autre est réel, peu importe
le nombre de personnes qui l'ont exprimé, qu'elles puissent se faire
valoir. C'est pour cela qu'on pensait que le gouvernement pourrait jouer,
quelle que soit la modalité, une espèce de rôle de cour
d'appel dans ces cas-là, ou même pour que des citoyens dans une
municipalité (ou une municipalité) qui se sentent vraiment
lésés, parce qu'ils ont fait les frais d'arrangement entre
d'autres, puissent faire valoir leur point de vue.
Je pense qu'on peut, à ce moment-là, opposer justement les
deux processus.
M. Chevrette: Compte tenu du temps je vais m'arrêter, mais
je voudrais vous féliciter à nouveau de travailler de pair aussi
avec votre conseil municipal. Bien souvent, les comités de citoyens se
forment en fonction de faire échec sur le plan politique au niveau
municipal. Le fait que vous ayez votre maire avec vous et quelques
échevins prouve hors de tout doute que c'est un travail positif que vous
cherchez à faire et non pas un travail d'obstruction systématique
et je vous en félicite.
M. Ouimet: Cela prouve que les municipalités peuvent aussi
trouver intérêt à avoir de l'aide technique des citoyens
dans un sens. On discutait de cela ce matin au déjeuner, il est
évident que pour les municipalités, avec les paies qu'elles ont
actuellement pour participer à toutes les nombreuses réunions
dans une année, avec la complexité des questions, avec la
perspective d'avoir aussi à débattre des sujets au niveau du
conseil de comté, cela devient une tâche considérable.
Alors, il devient avantageux pour les conseils municipaux de pouvoir compter
quand même sur cette collaboration et cette participation afin
d'élargir leur étude des questions aux citoyens alentour. Je
pense que c'est à l'avantage à la fois des conseillers et des
citoyens.
M. Chevrette: Merci.
M. Gratton: M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): Oui.
M. Gratton: Toujours sur la question du référendum,
je pense que vous avez précisé un peu en répondant aux
questions du député de Joliette. Est-ce que vous rejetez de
façon claire la possibilité ou l'utilisation du
référendum, en supposant, par exemple, qu'on simplifie la
possibilité de l'utiliser? Par exemple la valeur du
référendum comme telle. On sait que dans le projet de loi il n'a
aucune valeur décisionnelle; supposons qu'on considérerait la
possibilité de lui en donner une, est-ce qu'à ce
moment-là, vous changeriez l'optique de votre... (11 h 45)
M. Ouimet: Disons que s'il avait valeur décisionnelle,
ça pourrait être intéressant, pour que l'ensemble des gens
concernés dans la région puissent exprimer leur accord. Le
problème qu'on voit, à court terme, en tout cas, c'est que, pour
que ce soit efficace, il faudrait que les gens qui auront à se prononcer
aient, d'une part, la possibilité d'obtenir l'information et surtout, la
possibilité d'exprimer à d'autres personnes les points de vue ou
les réserves qu'ils peuvent avoir.
Dans le fond, pour que ce soit valable, il faut qu'il y ait une
interaction dynamique entre les différentes personnes qui ont des points
de vue à exprimer sur un schéma, avant son adoption. Au niveau de
la qualité, c'est beaucoup plus facile, parce qu'un règlement
d'emprunt sur une chose, on est pour, on est contre, pour telle ou telle
raison. Lorsqu'on arrive avec un schéma d'aménagement qui est
beaucoup plus complexe et qui implique un plus grand nombre de
municipalités, cette action démocratique avant un
référendum qui serait décisionnel est beaucoup plus
difficile.
Ce qu'on dit, si on doit le faire, il faut quand même donner
à ce moment-là des moyens ou des instruments, pour n'avoir pas
rien qu'une voix ou l'autre, un ténor dans la région qui puisse
s'exprimer. Cela pourrait être souhaitable, mais il y a des
difficultés, pour que ce soit valable et efficace.
M. Gratton: En d'autres mots, vous préférez de loin
la formule que vous suggérez, d'un droit d'appel quelconque au
gouvernement, d'un groupe de citoyens, quelque restreint qu'il soit.
M. Ouimet: A court terme. C'est parce que, comme je vous le
disais tantôt, ce projet de loi arrive, propose un ensemble d'approches
de gestion démocratique du milieu, mais entre la situation actuelle et
la situation idéale vécue, il est possible qu'il y ait des
difficultés de vie et d'adaptation. Compte tenu aussi du fait qu'on est
peu habitué à donner de l'information, à la recevoir,
à participer, à croire que c'est même efficace de
participer, c'est dans la mesure où les gens vont l'avoir
expérimenté qu'ils seront plus motivés à le faire.
Dans ce cadre, il ne faut pas leur compliquer la vie ou les amener dans des
processus qui risquent d'être inefficaces.
Dans ce cas-là, le référendum, tel que
proposé, risquait de demander beaucoup d'énergie, pour peu de
résultats. C'est un peu le sens... On pense qu'à première
vue, ce serait difficile à ce moment-ci. Est-ce que, dans quelques
années, ce sera plus facile, quand on aura expérimenté
mieux ces formules? Mais ce n'est pas rejeté, en principe.
M. Gratton: Dans les premières années d'application
de la loi, est-ce que vous recommanderiez qu'on ne l'inclue pas dans le projet
de loi comme tel, quitte à...
M. Ouimet: Sûrement pas sous cette forme. On n'a pas assez
étudié cet aspect pour que je puisse me prononcer au nom de tout
le comité, mais, sous cette forme, s'il devait fonctionner, ce qu'on
demanderait, c'est d'avoir la possibilité, si on a un point de vue
à formuler sur la proposition, qu'on puisse la faire parvenir à
tous les citoyens de la région. Si, à ce moment-là, il
devait y avoir un référendum, on voudrait pouvoir avoir un
accès, mais c'est impossible, à l'heure actuelle, selon les
moyens d'un comité de citoyens, à la liste des gens de toutes les
municipalités.
On voudrait, si on a un point de vue, qu'il soit aussi bien
résumé et présenté que les autres. Là, il y
a une technique à trouver. On se dit: Si on doit l'utiliser, il faut
sûrement prendre des moyens de façon qu'on puisse participer de
façon efficace.
M. Gratton: A toutes fins utiles, ce que vous nous dites, c'est
que, pour le moment, il n'y a pas de façon... et d'ailleurs,
l'expérience n'existe pas pour permettre de tenir un
référendum valable, aussi bien ne pas l'inclure dans le projet de
loi, pour le moment, quitte à trouver d'autres façons de faire
l'information qui, à vous comme à moi, semble essentielle.
M. Ouimet: Ou de l'améliorer comme processus.
M. Gratton: Oui. A ce moment-là, on ne réglerait
rien en donnant une valeur décisionnelle au
référendum, dans le processus prévu dans le projet
de loi 125, parce que ce serait aller à l'encontre de ce que vous
prétendez ce matin. On arriverait avec un résultat qui lierait le
conseil de comté et qui rejetterait ou accepterait un schéma
d'aménagement mais qui aurait été un choix que les
citoyens auraient pris sans les informations nécessaires.
M. Ouimet: Rendu là, on est dans l'évaluation de
moyens possibles pour exprimer la démocratie. Ce qu'on dit, c'est que
s'il doit être décisionnel, surtout s'il devait être
décisionnel, il faudrait qu'il y ait des moyens qui fassent en sorte que
les gens puissent vraiment, avant le référendum, pouvoir
participer en toute connaissance de cause et donner les moyens, aux gens qui ne
sont pas nécessairement d'accord avec la proposition de s'exprimer. On
se dit, surtout s'il a valeur consultative et les exigences que l'on fait, que
cela ne vaut peut-être pas la peine de dépenser cette
énergie. Mais ce sera à la fois le législateur et ceux qui
l'appliqueront qui sauront quel est le meilleur choix. Nous avons
formulé des réserves, mais on n'a pas une attitude fermée
et définitive là-dessus.
M. Gratton: Mais votre avis est que les moyens que le projet de
loi 125 met à la disposition des citoyens du point de vue de
l'information ne sont pas suffisants pour donner au référendum
une valeur décisionnelle.
M. Ouimet: Je pense, oui.
M. Gratton: Merci.
Un dernier point, M. le Président. Vous semblez avoir eu des
expériences assez difficiles avec le conseil régional de
développement chez vous et on y retrouve, à la page 13, une
allusion. Vous dites qu'avec le projet de loi 125 le gouvernement et les
conseils de comté viendront prendre certaines juridictions des CRD.
Est-ce que je me trompe en disant que vous en concluez que les conseils
régionaux de développement n'auront peut-être plus leur
raison d'être?
M. Ouimet: Ce n'est pas loin de cette conclusion, mais par souci
d'objectivité nous ne sommes pas allés jusque-là. Il est
évident qu'au moment où on a créé les conseils
régionaux de développement, c'était à
l'époque de la participation du public au Québec. Je pense que
nous sommes rendus à d'autres phases. Les projets de loi s'additionnent
dans ce sens-là. Il y a certaines mesures, et ce projet de loi, en
particulier, modifie beaucoup de choses.
Dans ce contexte-là, il est évident que le rôle du
conseil régional de développement doit être
réexaminé et réévalué. Ce n'est pas toujours
facile pour des hommes politiques, étant donné l'importance qu'un
organisme comme celui-là a, jusqu'à un certain point, dans une
région... Cela pose même en même temps, par rapport à
la participation, la notion de région. Les conseils régionaux de
développement ont épousé les régions admi-
nistratives. Les régions administratives, si elles peuvent être
intéressantes en termes d'administration, ne le sont pas
nécessairement en termes de participation ou de "oui feeling",
c'est-à-dire que, même à l'intérieur de la
région de Lanaudière, les gens de Saint-Michel-des-Saints, de
Saint-Jean-de-Matha et de Repentigny n'ont pas nécessairement les
mêmes problèmes et ils n'ont pas le sentiment d'appartenir
à la même région.
Dans ce sens-là, l'organisme, tel qu'il a été
constitué jusqu'à maintenant, effectivement, a eu des ressources
et par rapport aux municipalités qui ont peu de ressources il pouvait
jouer un certain rôle d'information, d'incitation. Je n'en suis pas sur
le principe. Mais, de facto, dans notre cas, ce dont on s'est aperçu,
c'est qu'il n'était pas à notre service. Il était au
service de ce qu'on appelait les agents de développement.
Dans ce contexte-là, les corps publics, tant à
l'échelon local qu'à l'échelon du conseil de comté
et dans la perspective d'une déconcentration du gouvernement, ont plus
de responsabilité devant leurs élus. Dans le fond, ce dont on a
besoin, c'est beaucoup plus d'une assistance au niveau des citoyens pour qu'ils
participent que d'une au niveau des organismes publics.
On se dit que par rapport aux citoyens cela ne nous est pas tellement
utile, pour autant que nous ne soyons pas dans un organisme incorporé,
soit pour représenter l'UPA, les chambres de commerce ou les
municipalités. Tout au moins, on dit que ce doit être
réexaminé sérieusement pour que la philosophie
d'intervention... Dans notre cas, ce qu'on nous a dit, c'est: Vous êtes
des individus, des citoyens et ce n'est pas en fonction de vous qu'on
travaille, c'est en fonction des organismes.
Aussi, jusqu'à un certain point, en valorisant l'action des
localités, des municipalités, des conseils de comté et des
gens qui sont responsables, parce qu'on peut leur demander des comptes, c'est
un processus démocratique, ce sont des élus qui sont à la
municipalité et au conseil de comté, c'est beaucoup plus facile
d'intervenir quand on n'est pas satisfaits du niveau de décision.
C'est dans ce contexte-là qu'on se dit que sérieusement,
quant à la participation de ces organismes, il faudra savoir exactement
quel rôle on veut leur donner.
M. Gratton: Dernière question, M. le Président. En
fait, ce n'est pas une question. Vous mentionnez, quant à l'article 19,
tout l'aspect des assemblées publiques. Vous avez d'ailleurs
mentionné vous-même que vous reconnaissiez que l'article 205
donnait au gouvernement la possibilité de répondre à vos
appréhensions quant à la tenue de ces assemblées
publiques. Est-ce que je me trompe? Est-ce que vous êtes sûr que le
gouvernement pourra, par le biais de l'article 205, de la réglementation
qui est permise à l'article 205, répondre à vos...?
M. Ouimet: Selon les guides ou selon ce qu'il y aurait dans les
règlements, mais on croit qu'elle devrait l'utiliser en disant: Voici
une consultation
publique. Cela devrait se faire de telle façon. Dans ce
sens-là, on a dit que la commission d'aménagement, parce qu'elle
est là, pourrait également se préoccuper de voir à
ce que cela fonctionne ainsi. Nous allons aussi un peu plus loin que le
règlement. On s'est demandé: Est-ce que cela vaut la peine que
chacun des conseils de comté se dote de toute la technologie
nécessaire? Ne pourrait-il pas y avoir une assistance technique venant
de la commission qui pourrait servir, parce que tous ne le feront pas en
même temps dans tout le Québec? Mais on pense qu'effectivement, on
a besoin d'assistance et on a besoin que les règles du jeu soient
précises. Selon la façon dont on libellera les règles, on
pourra être satisfait ou non.
M. Gratton: Je ne demanderai pas au ministre de vous donner des
indications ce matin, il se refuse à le faire. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. De la part des gens de
Saint-Jean-de-Matha, naturellement, moi aussi j'ai remarqué qu'ils
critiquaient très sévèrement les CRD. Vous critiquez assez
sévèrement la marche ou la tenue des séances des conseils
municipaux, peut-être pas celui de Saint-Jean-de-Matha, mais des autres.
Vous savez que, par ce qui est prévu dans le projet de loi 125, les
conseils de comté seront formés des élus municipaux et de
ces mêmes élus municipaux. Ne voyez-vous pas là un danger
à un moment donné?
M. Ouimet: C'est bien évident. Je vais seulement...
D'accord, vas-y.
M. Prescott: C'est une de nos plus grandes préoccupations,
c'est la plus grande inquiétude. Autant nous sommes d'accord avec les
objectifs et de façon très claire, autant nous avons de
très fortes inquiétudes, parce qu'à mesure qu'on va
s'éloigner du citoyen, on est à peu près certain que
l'intérêt du citoyen va se perdre un peu. Ce qui serait
malheureux, c'est qu'au niveau des conseils de comté, tout le travail
qui a été fait au niveau des comtés où les gens ont
été impliqués, etc., c'est que cela puisse être
oublié rendu à cet autre niveau-là et que ce soit
noyé dans une indifférence très grande. Il y a une
très grande inquiétude.
M. Goulet: J'aimerais que vous me disiez il y a deux
volets à ma question qui verriez-vous pour siéger à
ces conseils de comté? Deuxièmement, si, comme vous le dites, les
gens s'éloignent de la base, dans votre région, comme partout
ailleurs au Québec, il y a des élections municipales, il faudrait
le rappeler, ce serait l'occasion de rappeler à ces élus qu'ils
se sont éloignés de la base et qu'ils ne défendent pas les
intérêts de la base. Ne voyez-vous pas là un processus
démocratique qui a encore sa valeur?
M. Ouimet: Je vais essayer de répondre à la fois
à cette question et à votre première. Il est
évident qu'on n'est pas nécessairement et facilement
rassurés. Il est sûr qu'il y a des difficultés de
participation à l'échelon de ce qui va se passer aux conseils de
comté. Il est évident que, dans certains cas, le maire ne sera
pas nécessairement aussi représentatif de tous les conseils de
comté. Il n'est pas sûr que sa voix, des fois, pourra être
prédominante par rapport aux intérêts... C'est pourquoi,
même dans les décisions qui sont prises au niveau du conseil de
comté, on souhaite que les mêmes exigences qu'on faisait au niveau
local soient là également présentes pour qu'au moins
l'information circule, que la prise de décision et les décisions
soient connues de sorte que les vrais mandataires soient les gens qui viennent
du niveau local. On peut donc lui parler, lui poser des questions ou
l'appuyer.
Si on n'a pas un encadrement qui favorise le processus
démocratique, dans l'état actuel des choses, prendre le projet de
loi 125 avec un certain transfert de pouvoirs à des organismes locaux
dans le fonctionnement, tel que c'est fait à l'heure actuelle, si ce
n'était pas accompagné de mesures, c'est sûr qu'il y aurait
des risques considérables que cela foire dans certains endroits. On est
certainement préoccupé de cela, à la fois dans le type de
démarches et à la fois également dans les obligations de
la démocratie locale.
M. Goulet: Une dernière question, M. le Président.
Egalement, dans votre mémoire vous en avez fait état tout
à l'heure, suite à des questions vous parlez beaucoup de
participation. En tout cas, c'est surtout pour cette raison que vous êtes
ici, savoir nous démontrer la participation qu'il y a eue à
Saint-Jean-de-Matha. Vous parlez également de la qualité du
processus démocratique. Vous attachez beaucoup d'importance à la
qualité du processus démocratique, mais, par contre, lorsqu'on
parle de référendum, lorsque vous parlez de
référendum, tel que prévu dans le projet de loi 125, vous
avez peur qu'il y ait beaucoup d'énergie... Je vais essayer de reprendre
vos mots, afin de vous citer correctement, s'il y a lieu vous me corrigerez:
"beaucoup d'énergie pour peu de résultats". Il me semble qu'il y
a quelque chose qui accroche.
M. Ouimet: C'est-à-dire que...
M. Goulet: Si on veut une qualité d'un processus
démocratique, il me semble qu'un référendum, c'est
l'excellence pour le processus démocratique. (12 heures)
M. Ouimet: On va l'expliquer. Si j'ai bien compris le projet de
loi, pour demander un référendum, il faut, ou bien 10% des
électeurs inscrits sur le registre, ou bien 100 personnes dans chacune
des municipalités des deux tiers des municipalités. Je ne suis
pas en politique, mais trouver cela, ce n'est pas facile. Ce n'est pas
facile
de regrouper autant de gens pour demander la tenue d'un
référendum il n'est pas tenu encore et ce, pour un
référendum qui, au bout d'un processus, ne sera que consultatif.
On est toujours pour la qualité du processus, mais on dit que ce moyen
risque de consommer beaucoup d'énergie dans la participation des
citoyens pour, en fin de compte, ne même pas être
décisionnel.
M. Goulet: Par contre, vous soutenez qu'à un moment
donné, un groupe de citoyens, si minime soit-il, pourrait aller
directement au bureau du ministre et faire renverser une décision du
conseil de comté. J'ai cru vous entendre dire cela tout à
l'heure. Cela m'a surpris, parce qu'au niveau d'un processus
démocratique, normalement, la minorité, lorsque des gens se sont
prononcés, ne devrait pas aller jusqu'au cabinet du ministre et lui
demander de renverser une décision d'un conseil de comté.
M. Ouimet: Si c'était interprété comme cela,
d'accord. On s'est dit: En termes de cour d'appel. Cela veut dire qu'à
ce moment, il faut qu'il y ait un bien-fondé à la demande. On
souhaite aussi, on l'a dit, que dans ces cas, le processus soit public et que
toutes les parties aient l'occasion de se faire entendre. On n'est pas contre
un référendum. On dit simplement qu'il risquerait d'être
inopérant tel qu'il est fait là, ou du moins, peut-être
qu'on sous-estime nos efforts, mais on pense qu'on aurait peu de chances, dans
ce contexte, d'obtenir suffisamment de voix pour être capable de demander
un référendum. Ce n'est pas qu'on soit contre, en principe. On ne
veut pas dire non plus que ce soit l'arbitraire et le discrétionnaire
qu'un petit groupe demande au gouvernement de modifier. On dit: Qu'on puisse
quand même faire appel, faire valoir son point de vue, que les
règles du jeu soient claires et que le conseil de comté ou
d'autres groupes puissent se faire valoir. Encore là, ce ne sont que des
suggestions. Il peut y avoir d'autres modalités, mais à
l'intérieur de cela, c'est l'intention d'essayer de voir comment on peut
participer. D'un autre côté, je comprends ce que vous voulez dire
quand vous dites: Quand des gens se sont exprimés. Si une
majorité s'est exprimée dans un référendum pour un
schéma d'aménagement, j'imagine que dans ce cadre, ce serait
difficile que des citoyens aillent demander, parce que là, il y aurait
eu une expression claire de voeux d'une majorité, mais là
c'était dans le cas de l'absence d'un référendum.
M. Goulet: Une dernière question. Si je comprends bien,
à la suite de votre intervention, le référendum devrait
être décisionnel. Vous dites que c'est difficile d'en obtenir un,
mais le référendum devrait être décisionnel. Dans la
loi, un référendum consultatif est prévu. Au niveau de la
participation, qu'est-ce que vous voyez dans le projet de loi 125 qui va
améliorer la participation des citoyens? Depuis que j'ai
été élu, cela fait deux ans et demi, et après en
avoir parlé avec d'autres collègues, c'est comme cela... On
convo- que des réunions d'information dans nos régions. On y va
avec des hauts fonctionnaires, des gens compétents qui viennent pour
donner de l'information. On fait passer les informations à ce qu'on
appelle le prône le dimanche, on envoie une lettre à chaque
citoyen la semaine avant. On place des appels téléphoniques et on
se réunit, à un moment donné, pour des projets de
réseaux d'aqueduc et d'égouts, mais on n'est pas encore
allé au niveau de l'aménagement comme tel, et on se
réveille, dans des paroisses de 2000 ou 3000 habitants, avec 15, 20 ou
30 personnes dans la salle. Qu'est-ce que vous voyez dans le projet de loi 125
qui va améliorer cela, avec toute la bonne volonté des
élus municipaux, même s'ils veulent vraiment donner une
réunion d'information et ne pas faire, comme vous dites à la page
3: "Ils gardent cela pour eux"? Avec la meilleure volonté du monde, les
gens ne viennent pas à ces réunions d'information.
M. Ouimet: C'est une situation de fait, c'est de savoir pourquoi
ils ne viennent pas. Partons du fait qu'il n'y aura jamais 100% des gens qui
sont intéressés sur 100% des questions. Nous avons cru
concéder parce que nous aussi, nous avons eu de la
difficulté à faire de la mobilisation et à
intéresser les gens. Ce dont on s'est aperçu, c'est que les gens
ont une longue pratique de non-participation et ils n'y croient pas non plus,
parce qu'ils ont de multiples raisons de croire que c'est inefficace. Les fois
qu'ils ont participé, cela n'a pas eu beaucoup de résultats.
Alors, au départ, dans le cas de la ligne hydro-électrique, les
gens nous ont dit: Vous perdez votre temps. Le gouvernement va faire ce qu'il
veut. L'Hydro-Québec, c'est gros et cela va passer là. Cela ne
mobilise pas beaucoup les gens quand ils sont convaincus de cela au
départ. Après cela, ils nous regardent aller et ils disent: Vous
êtes bien admirables, vous perdez votre temps. Ce n'est que
graduellement. Il y a une longue pratique de non-participation.
Parfois aussi, on est dans la ville de Montréal et c'est
sûr que cela ne facilite pas la participation quand l'information ne
circule pas. Nous, ce qu'on dit, c'est que si on la rend possible, ce n'est pas
du jour au lendemain que le monde va y croire et va le faire. Mais, quand c'est
possible, il y en aura sûrement un certain nombre qui vont le faire et,
dans la mesure où ce sera efficace, d'autres seront... C'est la
meilleure forme d'éducation à la participation, à mon
point de vue, la participation elle-même, surtout quand elle est
réussie. Tous les moyens que le gouvernement met en place, que ce soit
le recours collectif, ou que ce soient d'autres formes, il y en a
peut-être pas une grande majorité mais il y en a qui vont
l'utiliser et, dans la mesure où ce sera un processus qui
s'avérera valable, vous verrez que l'éducation va se faire vite.
Mais c'est sûr que, dans l'état actuel des choses, les gens, c'est
difficile de les grouiller, mais, d'une façon générale,
même avec ce projet, c'est sûr qu'il y aura 90% des gens qui
resteront chez eux. C'est sûr que tous les gens ne sont pas
nécessairement intéressés à se faire élire
comme députés non plus.
M. Goulet: M. le Président, je vous remercie...
M. Prescott: Comme expérience extrêmement pratique,
je peux ajouter ceci: Nous-mêmes, quand nous avons constitué le
Comité des citoyens de Saint-Jean-de-Matha, lors de la première
réunion, on était à peu près 17 personnes au total,
en incluant les femmes, les enfants, la parenté, et on a eu autant de
monde que ça pour la seule et unique raison que la communication ne
s'étant pas facilement faite, les gens ont pensé qu'on voulait
paqueter quelque chose. Ils sont venus voir, ils ont dit: II faut faire
attention. Ce sera des dépenses pour la municipalité; ils s'en
viennent avec un plan d'urbanisme et de zonage. Cela va coûter une
fortune et il ne faut pas se laisser faire. Cela a été bon,
même si ce n'était pas le but, parce que les gens sont venus et
étaient très inquiets. Quand on a été rendu
là, on a dit: Ce n'est pas ça du tout. C'est une simple erreur de
communication et on a commencé à ouvrir.
On a ouvert et on a dit: Quand on tiendra des réunions, on les
tiendra en même temps à Saint-Jean-de-Matha et on les tiendra le
lendemain ou dans la même période à peu près
à Montréal également. On a commencé avec une
quinzaine de personnes, lors de la première réunion. A la
deuxième, on était une quarantaine et, à Montréal,
on a décidé... Les autorités municipales sont venues nous
rejoindre là-bas, parce qu'on travaille très ouvertement et
amicalement j'insiste beaucoup là-dessus et, lors de la
première réunion, nous attendions 50 personnes. On s'est dit: II
y a moyen. Les gens qui sont en politique savent que, trop de monde dans une
petite salle, c'est excellent. On a pris une petite salle et, il y avait trop
de monde, mais enfin, pas trop de monde, comme on pensait, parce qu'on s'est
dit: Si on en a 50, je pense qu'on rêve d'attendre 50. On en a eu 125.
Cette réunion s'est terminée à minuit et demi, je pense,
et il n'y a pas 10% des gens qui ont quitté, parce qu'on avait des
affaires à dire, des informations à donner; ce n'était pas
un paquetage en règle on ne le prenait pas ainsi on a eu
le temps de parler, poser des questions, etc. C'est important dans la
méthodologie dont on parlait tout à l'heure.
Lors de la deuxième réunion, c'était pour voir les
impacts, avec des tableaux; c'était très bien
préparé, tout le monde se reconnaissait, c'étaient de
vrais problèmes identifiables pour chacune des personnes
présentes. Cela touche chacune des personnes. On a tenu une
deuxième réunion, toujours à Saint-Jean-de-Matha, la
parallèle se faisait, parce qu'il n'est pas facile, pendant l'hiver,
d'inviter des gens à venir suivre une assemblée de conseil ou
d'assister à une réunion de citoyens à quelque 60 milles
de Montréal. Nous avons tenu nos réunions toujours au même
endroit, avec le même type d'invitation, avec un ordre du jour, des
choses très précises. La deuxième fois qu'on a tenu une
réunion, on a pris un petite salle. On s'est dit: II va y avoir plus de
monde et il faudra prévoir au moins 150 cette fois. On est allé
au-delà de 300. Encore là, les gens sont d'une
ténacité incroyable, dans la mesure où on traite des vrais
problèmes qui les touchent, avec des moyens, mais qu'ils ne sentent pas,
par exemple là-dessus, il n'y a rien de caustique dans ce que je
vais dire que des fonctionnaires, très bien organisés et
même des hommes politiques pourtant, je leur porte beaucoup de
respect qui pourraient arriver... Ils doivent se faire très
humbles dans ce genre de chose. Ils doivent être présents, sereins
et écouter. Les fonctionnaires, il y a moyen que ces gens nous
déposent de l'information, mais à la demande des gens
eux-mêmes. Quand ils le sentent bien de cette façon, ça
participe. On peut même prendre des noms... On a ramassé une
quarantaine de noms de personnes... C'est assez rare qu'il y a des gens qui,
volontairement, l'assemblée finie et aussi tard, donnent leur nom,
acceptent de collaborer et des gens ajoutent le genre, la qualité de
citoyens qui leur permet de nous rendre service. Un ingénieur en
aménagement ne veut pas nécessairement faire partie de
l'exécutif, mais il se dit: Dans ce domaine, je pense être capable
de vous rendre des services et voici mon nom; je suis en disponibilité.
Le pire, c'est que c'est vrai.
On a énormément confiance à cette participation,
mais il faut qu'elle soit à la fois très bien organisée,
mais pas organisée du tout, organisée dans deux sens très
différents. Je pense que c'est très important. On l'a vécu
et, moi-même, je suis surpris de la ténacité des gens et de
l'intérêt soutenu et constant quand ils sentent que cela les
touche.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Léonard: M. le Président, je veux vous
féliciter de cet excellent mémoire qui porte sur un point
précis qui est celui de la participation. Je voudrais vous dire au
départ que nous allons en tenir compte, nous allons étudier vos
recommandations très attentivement, comme les recommandations d'autres
mémoires avant. Nous en sommes au stade où on analyse des
mémoires qui portent sur les principes de la loi et nous allons le faire
n'ayez crainte même si des gens vous disent qu'ils n'ont
pas de réponses; c'est que ce n'est pas le moment de les donner tout de
suite, tout simplement. Je voudrais quand même vous rassurer sur ce
plan.
Je reviens à votre mémoire qui porte en particulier sur la
participation. Je pense que c'est, jusqu'ici en tout cas, le mémoire qui
a fourni le plus de détails sur ce sujet et, compte tenu de votre
expérience, je pense bien que c'est très valable que vous nous en
ayez fait part. Je vous dirai au départ qu'il me semble que la loi 125
fait le pari que les gens vont participer, qu'ils vont s'intéresser. Ce
qu'on veut, c'est leur fournir un cadre, leur fournir des moyens de le faire
qui soient efficaces. Dans cette mesure, en tout cas, j'apprécie
beaucoup vos commentaires parce que nous en sommes, encore une fois, au stade
où on peut encore bonifier la loi et vos remarques sont
particulièrement précieuses sur ce plan.
Je pense que c'est un des paris que l'on doit faire en
aménagement, c'est que les gens s'y intéressent lorsque cela
vient sur le tapis, que ce sont des décisions qui les touchent pour
très longtemps, pour toute leur génération et parfois
même pour tout le temps; lorsqu'on touche au territoire, on peut
l'affecter de façon définitive. Je dirais aussi que, sur le plan
de l'aménagement, l'appui des citoyens est particulièrement
important pour que cela s'inscrive dans le paysage, pour que les élus
municipaux se sentent aussi appuyés par les gens. A ce moment-là
je pense que vous en avez fait la preuve vous-mêmes il y a
des choses qui se passent au niveau municipal, des décisions se prennent
et le dossier avance, en général.
Je voudrais, puisque le temps avance, vous poser une question par
rapport à la page 12 de votre mémoire. Vous demandez que le
conseil de comté informe la population de ses réalisations et que
les citoyens puissent intervenir directement aux réunions du conseil. Ma
question est: Quels devraient être les principaux éléments
à intégrer dans la loi pour permettre l'information des citoyens
et de quelle manière les citoyens pourraient-ils s'inscrire dans la
démarche des conseils de comté? Est-ce qu'on peut mettre cela
dans un texte législatif? Est-ce que vous pouvez préciser
davantage là-dessus, par rapport aux réunions du conseil de
comté, puisque c'est décisionnel?
M. Ouimet: Je dois vous dire que, pour notre part, nous sommes
sur un terrain beaucoup plus fragile, parce qu'on a peu assisté à
des réunions de conseil de comté, sauf à une couple
d'occasions pour essayer d'aller exposer le problème de la ligne; nous
étions seuls dans la salle et nous avons senti que nous n'étions
pas nécessairement les bienvenus.
Je ne sais pas si c'est possible de mettre cela dans la loi. A ce
moment-ci, on ne sait pas quelles sont exactement les modalités, sauf
que, sans doute, il y aurait des documents qui sont issus du conseil de
comté, les résolutions en sont, les ordres du jour, mais il y a
peut-être également d'autres documents qui sont produits. Il
devrait y avoir une obligation de les rendre publics, qu'ils soient
accessibles. Toujours sans savoir le fonctionnement actuel des conseils de
comté, on se disait que... On n'a pas articulé cela, mais il nous
semblait qu'il serait possible, dans les cas où des discussions sur
l'ordre du jour d'un conseil de comté touchent soit une partie du
comté ou des gens en particulier, qu'il puisse y avoir une
période où les gens puissent exprimer leur point de vue. Elle
peut être limitée dans le temps. Est-ce que c'est au projet de loi
comme tel à fixer les règles ou à obliger les conseils de
comté à avoir ces possibilités? Cela devient de la
technique qui nous échappe, mais il nous semble que, pour le moment, on
pourrait peut-être craindre des abus dans ce cas. Mais je pense qu'on n'a
pas cette crainte actuellement; je pense qu'on est plutôt dans l'abus
contraire, c'est-à-dire que les réunions des conseils de
comté sont assez hermétiques par rapport à l'information.
Ce qu'on souhaite, c'est que cela puisse être possible. Sous quelle
forme? Je ne sais pas. (12 h 15)
M. Léonard: D'accord.
M. Ouimet: Seulement une chose qu'on voudrait ajouter parce qu'on
se l'est fait dire souvent, soit dans des projets ponctuels, et on risque de
dire la même chose dans les projets sur l'aménagement, que la
participation, c'est une grande consommatrice de coûts financiers pour
les municipalités, les conseils de comté et le gouvernement et
une grande consommatrice de temps. On perd du temps. On n'est pas pour
commencer à consulter le monde, il va y avoir des débats et
ça va retarder les projets. On pense qu'on gagne du temps et on
économise de l'argent en faisant participer le monde. Cela coûte
moins cher après de replâtrage, ou de restauration, ou de
technique après être rendu au bas de la côte et qu'on essaie
de remonter. On pense que bien au contraire, si on parle de gestion
harmonieuse, en fonction du cadre de vie des gens, on gagne du temps en les
invitant au départ et on épargne de l'argent aussi. On risque
d'économiser de l'argent parce qu'on pourrait citer de multiples
exemples... le Parc olympique n'est pas le plus petit où la
non-participation du public avec tous les experts n'a pas nécessairement
gagné du temps et de l'argent.
M. Léonard: Merci.
M. Prescott: Si vous me permettez de faire un dernier petit
message commercial qui serait quasiment hors d'ordre si on était dans
une autre salle, ce serait pour vous inviter au festival des sucres de
Saint-Jean-de-Matha qui se déroule actuellement et c'est d'autant plus
le temps pour vous de venir voir ça, si vous en avez le temps, car c'est
la fin de semaine Louis-Cyr, la fin de semaine des hommes forts et s'il y a un
endroit où vous pourriez venir, avec des chances de gagner, c'est
là. Alors, vous êtes les bienvenus. Mon message est
passé.
Le Président (M. Marcoux): J'en prends bonne note parce
que je vais aller passer les vacances de Pâques à
Sainte-Béatrix.
M. Ouimet: M. le Président, avec votre permission, pour
illustrer clairement ce que je disais sur la question des coûts, la ligne
hydroélectrique n'est pas encore décidée, il n'y a eu
aucune nouvelle demande déposée, il n'y a pas eu d'autres
informations; on n'a certainement pas gagné du temps dans le processus
qu'on a pris à venir jusqu'ici.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie de la
présentation de votre mémoire. J'inviterais maintenant le Conseil
régional de la culture de l'Outaouais à venir présenter le
sien. Mémoire 35. M. Bellanger, si vous voulez nous présenter
votre mémoire.
Conseil régional de la culture de
l'Outaouais
M. Bellanger: D'accord. En ce qui concerne le projet de loi 125
sur l'aménagement et l'urbanisme, le conseil de la culture
soulève une question fondamentale, en ce sens que l'été
dernier le ministre d'Etat au développement culturel avait
proposé, au sein de sa politique québécoise sur le
développement culturel, que le patrimoine pourrait être remis aux
municipalités.
Si on regarde sans parler d'historique l'aspect un peu
traditionnel ou les pouvoirs qui sont accordés aux municipalités,
elles ont une responsabilité en ce sens touchant le patrimoine,
l'environnement et également l'agriculture. D'où notre
étonnement lorsque ce projet de loi a été
présenté, de ne pas retrouver l'intention de la politique
québécoise du développement culturel à l'effet que
ce pourrait être remis à un niveau municipal ou à un niveau
un peu plus populaire et, d'autre part, les intentions déjà
manifestées en termes de responsabilités accordées aux
municipalités dans ce projet.
C'est cette question fondamentale qu'on soulève qui est d'abord
une question de logique et aussi une autre question, celle du bon sens. Cette
question également sur laquelle on insiste, ce n'est pas une
référence à notre région en particulier. C'est un
point de vue qui peut être élargi au niveau de toute la province
parce qu'elle rencontre des problèmes similaires.
Si on regarde la loi 2, la loi 4 sur les biens culturels, jusqu'à
présent le gouvernement ou du moins les instances concernées se
sont contentées de ces lois pour agir et réglementer en termes de
patrimoine. Bien souvent les mesures qui sont proposées sont d'ordre
curatif et le problème, en termes du patrimoine, c'est qu'il faut penser
dans une perspective d'aménagement et envisager que le patrimoine, ne
serait-ce que pour être protégé, doit être
travaillé; on devrait y accorder de l'attention, mais à un niveau
préventif.
Donc, cet aspect, il faudrait qu'il soit effectivement inclus au sein de
ce projet de loi. En ce qui nous concerne, à titre d'exemple, le projet
de loi, on l'a pris au pied de la lettre et nous avons fait l'exercice, en
matière culturelle générale avec le comté de
Labelle, justement de faire un travail conjoint pour instituer, élaborer
un schéma d'aménagement culturel où, bien sûr, le
côté patrimonial se trouve inclus.
D'autres considérations sont relativement importantes, c'est que
le patrimoine, en milieu rural, s'il ne suscite pas l'intérêt de
la population, risque d'être abandonné. En milieu urbain, il est
souvent sujet à des spéculations et de toutes les façons
il est menacé.
Le problème qui se pose aussi en termes d'aménagement,
c'est que dans ce cas on parle surtout d'un patrimoine bâti, d'un
patrimoine immobilier, d'un patrimoine installé dans un milieu spatial;
ce peut être un bâtiment, mais ça peut être aussi un
site archéologique. Egalement, cet élément du patrimoine
rejoint des secteurs structu- rants, lorsqu'ils peuvent être
utilisés en termes d'équipement culturel, fonctionnel, pour ce
qui est des activités, de l'animation, qui pourraient se
prévaloir de tels bâtiments.
Dans l'ensemble, ce que nous proposons, c'est que cette question
patrimoniale soit effectivement considérée dans un schéma
d'aménagement et qu'il soit harmonieux dans l'ensemble. On insiste sur
l'aspect préventif pour ne pas être toujours pris, à la
dernière minute, en termes de médecine, avec une intervention
d'ordre curatif. De plus, on remarque que le ministère des Affaires
culturelles n'a jamais déposé de politique en matière
patrimoniale.
Pour en arriver à des points beaucoup plus spécifiques, je
vais revenir au document de travail que nous avons présenté et
qui s'intitule: "La question culturelle et l'aspect patrimonial". Dans
l'ensemble, ce document contient une première partie qui concerne le
projet de loi 125. Nous avons fait un effort pour le vulgariser auprès
de nos administrateurs et de la poulation en général; le CRD,
dans notre région, en a fait autant, mais de façon plus
élaborée. Vous savez que de toute façon ce n'est qu'un
exposé de la loi sur lequel on n'a rien à dire comme tel, puisque
ce n'est qu'à titre d'information.
Dans un deuxième temps, c'est le côté beaucoup plus
patrimonial proprement dit qui nous intéresse.
Dans les argumentations générales, je sauterai la partie
de l'exposé de la loi que vous connaissez très bien, bien
sûr, et ça revient à ceci: La justification
économique prime trop souvent la considération d'autres aspects
difficilement quan-tifiables de la vie communautaire. Les multiples
transformations ou même démolitions de sites et de bâtiments
historiques en sont une preuve éloquente. Il est à la fois
significatif et malheureux que le projet de loi 125 soit muet sur la question
culturelle dans son aspect patrimonial.
Sans mettre en doute le bien-fondé d'une telle loi, il faut
s'interroger sur ses possibilités à permettre un
développement harmonieux des communautés. L'absence de toute
référence au patrimoine en confirme la fragilité, eu
égard au développement urbain. Elle consacre de plus sa
conception actuelle de l'urbanisme comme étant une suite de propositions
ponctuelles non intégrées.
On poursuit un peu plus loin: Si le projet de loi ne propose pas de
redéfinitions substantielles de la pratique actuelle de la planification
au Québec, c'est principalement parce qu'elle n'a pas été
précédée d'une analyse en profondeur de la signification
pour la communauté de l'urbanisme et de l'aménagement. Sinon,
comment expliquer le silence sur la question du patrimoine?
En gros, voici notre avis: La politique québécoise du
développement culturel indique l'intention ferme du gouvernement
québécois de remettre aux municipalités la
responsabilité de la protection du patrimoine et au surplus, cela est
capital, l'application locale ou régionale pour sa conservation et son
utilisation à des fins culturelles et communautaires.
La protection du patrimoine doit fréquemment céder devant
les impératifs du développement urbain, dont les avantages se
mesurent trop souvent en termes de l'augmentation de la valeur taxable.
Conséquemment, les municipalités n'ont pas, à ce
jour, manifesté pour le patrimoine tout l'intérêt que
sous-entend le développement harmonieux des communautés qu'elles
administrent.
Il ne faudrait pas, pour autant, laisser entièrement aux
autorités provinciales la gestion du patrimoine québécois.
S'il faut s'assurer de sa correspondance aux besoins locaux, la
prédominance des orientations provinciales de développement sur
les intérêts régionaux peut en rendre la réalisation
difficile, d'autant plus qu'elles n'impliquent pas de consultation.
En ce sens, il y aurait tout lieu de faciliter l'intégration
entre les différents niveaux de zonage: règlements municipaux et
Loi sur les biens culturels. Le règlement municipal de zonage pourrait,
entre autres, reprendre les conditions du développement des terrains
couverts par la législation provinciale.
Certaines mesures supplémentaires peuvent être
envisagées de façon à permettre une prise de conscience
par la population locale, au-delà d'une conception mercantile de la
nécessité de protéger et mettre en valeur son
patrimoine.
Au niveau des besoins, l'adoption des mesures de protection ne saurait
constituer, à elle seule, une réponse satisfaisante aux besoins
de la communauté. Le patrimoine exige aussi une insertion à la
vie communautaire. Il est donc essentiel que les documents d'urbanisme
contiennent une évaluation des besoins de la population et les
possibilités pour les sites et bâtiments patrimoniaux de les
satisfaire. Il faut dépasser cette acceptation limitée, peu
conforme à notre société.
Cependant, rien, dans le projet de loi, n'assure la satisfaction des
besoins, c'est-à-dire que leur identification n'est même pas
prévue. En fait, la seule intervention des citoyens se fait lors de la
présentation des propositions d'instruments de réalisation. Il
est, à ce moment, souvent trop tard pour leur assurer une contribution
fidèle à leurs aspirations.
A un autre niveau, en ce qui concerne l'identification des biens
patrimoniaux, c'est souvent lors d'une démolition ou d'une modification
radicale d'un bien culturel que la population prend conscience de son
existence. Il serait souhaitable de soumettre à l'avis d'une commission,
au niveau du comté, toute demande de permis de démolition ou
affectant un édifice qu'elle aurait préalablement
identifié comme étant d'intérêt pour la
communauté. Les décisions irréversibles ne doivent pas
être prises en catimini. La commission doit disposer d'un certain temps
pour mettre en place les mesures de protection qui s'avèrent
nécessaires. Ce serait même au demandeur de supporter le fardeau
de la preuve.
Elle pourrait prendre plusieurs formes, mais il s'agit essentiellement
de ne pas laisser uniquement aux gouvernements le contrôle du patrimoi-
ne. Sa protection et sa mise en valeur doivent absolument se faire en fonction
des besoins de la population. L'existence de la commission serait donc
justifiée par sa représentativité et surtout par une
activité qui devrait aboutir à l'élaboration d'une
politique patrimoniale, établissant d'abord le droit de la population au
patrimoine, quitte à ce que l'on prenne par la suite les mesures pour la
réaliser.
Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de politique patrimoniale au
Québec. Même la simple protection n'est pas une priorité.
Les critères de sélection sont ou bien inexistants, ou bien
imprécis.
Le projet de loi 125 diminue l'importance de la question du patrimoine
dans le développement des municipalités en ce qu'il ne
l'intègre pas formellement aux schémas de comté et
règlements municipaux d'urbanisme. Les procédures
proposées ne permettent pas de combler cette lacune fondamentale.
L'aspect concernant les consultations des organismes, je le laisserai
tomber pour l'occasion, car on insiste davantage sur ce côté
patrimoine et culture, et nous laissons à d'autres le soin de
développer des questions beaucoup plus larges.
Finalement, la question de notre avis proprement dit, pour ceux qui
auront une recommandation, revient à celle-ci.
Etant donné que le patrimoine est une ressource rare qu'il ne
convient non seulement de protéger, mais aussi d'insérer la vie
communautaire;
Etant donné que le patrimoine doit fréquemment
céder devant les impératifs du développement dont les
avantages se mesurent trop souvent en termes d'augmentation de la valeur
taxable;
Etant donné que la politique québécoise du
développement culturel publiée en 1978 indique l'intention ferme
du gouvernement québécois de remettre aux municipalités la
responsabilité de la protection du patrimoine;
Etant donné qu'il n'y a pas de politique du patrimoine au
Québec, le Conseil de la culture recommande: que l'identification des
biens patrimoniaux soit ajoutée au contenu obligatoire du schéma
et au contenu facultatif du plan d'urbanisme; que l'article 109 soit
modifié pour inclure de façon spécifique la protection des
biens patrimoniaux; que l'article 126b soit modifié pour attribuer au
comité consultatif d'urbanisme des pouvoirs d'étude et de
recommandations en matière de protection des biens patrimoniaux.
Concernant ce dernier article, notre position présente une
alternative qui sera de prévoir au niveau de comtés l'institution
d'une commission du patrimoine ou d'un comité spécialisé
au sein de la commission d'aménagement consultative quant à toute
demande de permis affectant un édifice d'intérêt
communautaire qu'elle aurait préalablement identifié. Elle devra
également formuler des politiques de préservation de ses biens et
arriver à l'élaboration d'un schéma d'aménagement,
de développement et de promotion de ceux-ci.
Donc, toute intervention se résume à cet avis que nous
vous avons présenté.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. M. le
ministre.
M. Léonard: Je vous remercie, M. Bellanger, je remercie le
Conseil régional de la culture de l'Outaouais d'avoir
présenté ce mémoire. Il porte sur un point, en tout cas,
il insiste, en particulier, sur un point précis qui est le patrimoine,
et il me semble que cela ressort vraiment et honnêtement de votre
mémoire.
Les recommandations que vous faites sont très
intéressantes. Je pense qu'elles sont nouvelles, d'une part parce
qu'elles sont là parmi d'autres mémoires qui ont porté sur
d'autres plans, mais c'est la première fois que cela porte sur le
patrimoine, et nous sommes très heureux d'en prendre connaissance ici.
(12 h 30)
Ces recommandations pourraient permettre un plus grand degré de
détail, disons, dans la confection des plans d'urbanisme et
peut-être même dans les schémas d'aménagement, s'il y
a lieu, parce que ça se peut que le patrimoine puisse même se
retrouver au niveau du plan d'urbanisme, s'il s'agit de la municipalité
elle-même. En tout cas, il y a une chose qui est aussi très
intéressante, c'est que cela va permettre la protection des sites et des
bâtiments historiques par les municipalités elles-mêmes,
simplement en modifiant le projet de loi; cela pourrait permettre
ça.
Je pense que votre mémoire va nous donner l'occasion de nous
interroger sur la question de la protection du patrimoine. J'aimerais bien vous
poser quelques questions en rapport avec cela, sur l'aspect patrimonial, tout
au moins. A la page 5, vous dites qu'il ne faut pas laisser entièrement
aux autorités du Québec la gestion du patrimoine. Est-ce que vous
pourriez nous dire, d'après vous, ce qui devrait relever du
Québec, des comtés et des municipalités? Est-ce que vous
auriez des exemples à nous soumettre là-dessus?
M. Bellanger: C'est peut-être plutôt par
défaut, parce que le ministère s'est appliqué, en
matière patrimoniale, autour des années soixante-douze...
C'était pour certaines responsabilités qui étaient
déjà d'ordre municipal, mais que, soit par manque
d'intérêt ou par manque d'argent, elles n'ont pas assumées
jusqu'au bout. Le ministère est effectivement entré dans ce
domaine car, justement, les cas d'urgence étaient effectivement
posés.
Lorsque le gouvernement a eu cette intention de remettre le dossier
patrimonial aux municipalités, M. Laurin, en l'occurrence, pour ce qui
était de la citation sur le chapitre qui portait sur le patrimoine,
n'était pas clair quant au contenu de cedit patrimoine. Est-ce que c'est
au niveau des responsabilités effectives, des interventions? Est-ce que
c'est un dossier général de préservation, et aussi
d'être maîtres d'oeuvre à leur niveau? Là-dessus, si
nous n'avons pas une réponse franche et directe, c'est parce que la
question préalable qui était proposée par le document sur
la politique du développement culturel elle-même n'était
pas claire, elle était beaucoup plus générale.
Cet aspect, bien sûr, nous intéresse. A un moment
donné, justement, on présentait une alternative à la
municipalité; est-ce que le patrimoine, on le lui accorde ou si c'est au
niveau du comté? Entre ces deux options, on privilégierait le
niveau du comté, parce que l'espace se trouve, en termes quantitatifs,
plus grand; en termes de schéma d'aménagement, les limites
étant poussées plus loin, ils peuvent concevoir un schéma
englobant, quitte à ce que les municipalités, au sein d'un plan
directeur, traduisent, au niveau de leur plan, les intentions du conseil de
comté là-dessus.
On se réfère également à une proposition qui
a été faite lors du dépôt du schéma de la
communauté de l'Outaouais, la CRO. Au départ, c'est une
commission qui avait été prévue et, par la suite, ces gens
ont traduit cela en comité, et il était effectivement dans leurs
intentions que cedit comité élabore un schéma
d'aménagement patrimonial. Ils n'ont pas donné de suivi
là-dessus. Si on regarde ce qui se passe dans notre région, les
actions ponctuelles sont toujours posées, même au niveau d'une
méthode, mais parfois ils ignorent qu'il en existe une au
ministère. La loi 91, qui reprend certains articles de la Loi des
cités et villes et du Code municipal, donne un certain pouvoir aux
municipalités; au niveau des intentions ou de prévenir le
ministre qui présente un avis d'intention de classement, beaucoup de
municipalités ignorent leurs propres prérogatives.
L'ensemble, on le verrait... C'est certain que ces municipalités
rurales ne sont peut-être pas en mesure d'avoir un spécialiste,
encore moins, mais même un petit service d'urbanisme simplifié,
elles ne peuvent pas en assumer la charge. Au niveau d'un conseil de
comté, je crois que ce serait le niveau intéressant pour que le
patrimoine corresponde au milieu, tout en ayant un aspect qui est relativement
large. Bien sûr, l'autre élément, ce serait de disposer de
personnes-ressources sur le sujet. Si on regarde ce que le ministère a
à offrir, simplement pour ce qui est des classements des
bâtiments, je crois qu'il n'y a que deux personnes; un étant
malade, cela veut dire que l'autre reste tout seul pour tout ce qui regarde le
classement au Québec. C'est minime comme ressource.
Récemment, il y a eu un communiqué disant qu'au niveau de
l'archéologie, le gouvernement comptait sur le bénévolat.
Lorsque vous touchez à l'archéologie, ce sont des questions
très spécialisées et vous ne pouvez pas laisser cela entre
les mains de n'importe qui, car à un moment donné, s'il y a du
pillage... C'est aussi une chose possible. Il faut faire attention à la
remise, trop compter sur la communauté qui, elle, soit n'en est pas
consciente ou bien a de bonnes intentions, ne se rend pas compte de la propre
valeur dont elle dispose. Vous avez des problèmes au niveau du
ministère qui lui, a des critères en termes patrimoniaux, si
encore, ils en ont véritablement d'identifiés, car je crains
qu'ils y aillent à la pièce,
mais tout de même ils conçoivent que, par exemple, si le
patrimoine qui est dans Charlevoix est le barème où est le
critère patrimonial, c'est celui de ce comté en particulier... Il
est certain que dans notre région, un bâtiment qui a 100 ans est
relativement jeune.
Ce sont tous ces éléments qui doivent être convenus,
qui doivent être nécessairement réfléchis. On a fait
certaines propositions un peu plus spécifiques en disant que tel
élément devrait être inclus dans cet article ou
retiré. Oui, c'est simplement une amorce pour lancer le débat;
vous avez certainement des spécialistes ou des avocats ou des personnes
qui pourront reprendre cet élément, le mûrir et y
réfléchir. Quant à nous, c'est beaucoup plus pour lancer
ce débat là-dessus, conscientiser le gouvernement que l'aspect
patrimonial, ne serait-ce qu'en termes de bâtiment, fait partie d'un
espace, que l'urbanisme et le dynamisme des villes font que lorsque le
bâtiment est coincé au sein d'un quartier, il risque d'y avoir de
la spéculation qui intervienne et les questions de zonage, la
municipalité zgne un quartier résidentiel, le gouvernement du
Québec dit que tel bâtiment est classé ou reconnu, ce qui
devient un zonage en lui-même. La municipalité ignore ou ne
reconnaît pas cette doublure de zonage, sur un même espace. Il y a
aussi une question d'intégration là-dessus. Je crois qu'il y a
beaucoup de parties qui s'ignorent mutuellement, et, à un moment
donné, le dossier échappe. Chose qui est un peu bizarre. On
parlait d'espace, mais on parle aussi de temps, ce sont des bâtiments qui
appartiennent au passé et plus on s'engage dans le futur, plus ils sont
menacés, d'où l'importance d'un schéma qui, non seulement
élabore dans l'espace mais aussi dans le temps. C'est l'aspect
préventif qui devrait être identifié. Je ne dis pas une
identification du type comme le ministère où c'est classé
ou bien reconnu. Cela pourrait être une reconnaissance à un niveau
du comté, une reconnaissance d'intérêt collectif.
C'est un point qui est peut-être passé inaperçu
parmi la commission, mais bien souvent l'individu qui est propriétaire
d'un bâtiment ou qui l'achète, demande un permis de
démolition. La municipalité l'accorde le lendemain. On dit ceci:
Si jamais il y a des citoyens qui s'intéressent à ce même
bâtiment, ils sont obligés de passer à la Commission des
biens culturels ou par la direction du patrimoine, cela prend un certain temps
et finalement ce sont les personnes impliquées dans le patrimoine qui
doivent justifier le bien-fondé de la sauvegarde de ce bâtiment.
On prétend le contraire, on dit: C'est le demandeur qui a à
supporter le fardeau de la preuve, il doit prouver le bien-fondé de
devoir démolir cette maison. En même temps, c'est une certaine
économie sur les énergies et sur le personnel, à l'heure
actuelle, sur lesquels le gouvernement peut disposer, concernant le patrimoine.
Effectivement, les effectifs sont très peu nombreux et une telle mesure
qui renverserait la vapeur donnerait un certain temps pour, effectivement,
revenir sur le dossier. Mais le bonhomme devrait prouver que c'est bien
fondé le fait de devoir démolir un tel bâtiment.
M. Léonard: Vous dites que finalement les
municipalités n'ont pas manifesté beaucoup d'intérêt
pour le patrimoine, c'est un peu absent des préoccupations, en
général, pour la plupart des gens. Vous pensez qu'avec le projet
de loi 125, ils vont être davantage sensibilisés à la
valeur du patrimoine?
M. Bellanger: Oui, en ce sens que si effectivement il y a un
schéma qui prévoit un schéma d'aménagement du
patrimoine, au sein du secteur culturel, comme l'exercice qu'on est en train de
mener avec le comté de Labelle, si les municipalités doivent
effectivement déposer un plan directeur, elles se trouvent à
être nécessairement concernées, car elles devraient donner
un certain suivi, là entre autres, sur cet aspect qui est un
équipement, c'est un bien direct, qui attend...
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je n'ai pas de questions
à poser à M. Bellanger. Je le remercie de la présentation
de son mémoire. Je lui avoue, en toute sincérité, que je
ne m'étais même pas arrêté à l'aspect
"patrimoine" lorsqu'on a parlé d'aménagement et j'ai bien
l'impression que le gouvernement non plus, puisqu'on ne retrouve aucune
disposition dans le projet de loi no 125 à cet égard.
Ce que recommande le conseil régional, en tout cas, à
prime abord, me semble répondre à toutes les
nécessités, c'est-à-dire que, d'une part, le conseil
consultatif, qui est prévu dans un projet de loi, ait comme
responsabilité d'avoir une section qui toucherait à la protection
du patrimoine et que, dans un deuxième temps, le projet de loi
prévoit, au niveau du règlement de zonage des
municipalités, la protection du patrimoine, ce qui vient dans la ligne
de la politique de M. Laurin de remettre aux municipalités la protection
du patrimoine et, finalement, que le schéma du comté
d'aménagement soit obligatoire et y fasse référence
également.
Je pense que le tout est complet et, je le répète, quant
à moi, il me semble que vos suggestions devraient être très
bien reçues par le gouvernement.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. C'est un volet
très intéressant que devrait toucher le projet de loi no 125.
A l'intérieur de votre mémoire, vous dites: S'il y a
divergence d'opinions ou d'intérêts, si vous voulez, entre les
trois niveaux, soit le municipal, le conseil de comté ou l'Etat, la
question devrait être tranchée par un arbitre qui, d'après
vous, serait une commission nationale sur l'aménagement. Le projet de
loi prévoit, lui, que si, à un moment donné, un litige
devait être tranché, l'arbitre serait le ministre.
Pourriez-vous expliciter là-dessus?
M. Bellanger: Oui, quand je parlais de la commission
d'aménagement, je ne parlais pas de la commission nationale, c'est une
commission d'aménagement au sein du comté.
M. Goulet: Au sein d'un comté.
M. Bellanger: Au sein du comté, comme les choses se
déroulent lorsqu'il y a un schéma qui est élaboré,
si je me réfère à ce qui se passe dans le comté de
Labelle, ils ont cette instance mitoyenne avec cette responsabilité,
effectivement, d'en créer un. C'est certain que lui, est consultatif
vis-à-vis des personnes élues. Si on voit les niveaux comme tels,
il est certain que c'est toujours à la discrétion du ministre, en
dernière instance, de trancher, mais c'est beaucoup plus de cette
volonté d'harmoniser, de rentrer, de pénétrer le milieu,
de voir où se situe la protection du patrimoine, si elle est à un
niveau, justement, d'un aménagement spatial, que ce soit aussi
identifié. Il a, bien sûr, la possibilité à la
direction du patrimoine, disons le gouvernement, de classer et de
reconnaître certains biens, mais la commission d'aménagement
pourrait, elle, créer une espèce de reconnaissance
d'intérêt public qui n'aurait peut-être pas la valeur ou le
statut de ces classements ou de ces reconnaissances très officielles,
mais la liste comme telle serait déjà une première base
dans laquelle, lorsque les municipalités voudraient, justement, avec un
permis de démolition, que, lorsque ça touche un bâtiment
qui est répertorié ou reconnu d'intérêt par cette
commission d'aménagement, là, la commission émette un avis
effectivement, je ne dirais pas une décision dure, mais il faudrait que
les municipalités reconnaissent vraiment la pertinence de leur
intervention et, également que, lorsqu'on est rendu au niveau de la
municipalité, notamment le gars qui lui, a fait la demande, la
municipalité, avant d'accorder ce permis, demande au demandeur d'en
prouver le bien-fondé.
Le niveau, pour moi, c'est un niveau de comté, pour
réglementer certains cas à un niveau municipal et, d'autre part,
pour cet aspect d'aménager un bien qui appartient à l'espace; ce
niveau leur revient. Bien sûr, vous avez toujours une instance qui est
suprême, qui serait vraiment en dernier ressort, et aussi pour
éviter tout le temps que cela peut prendre avec les ressources dont
dispose le gouvernement sur cet aspect patrimonial et qui est insuffisant
à l'heure actuelle. (12 h 45)
Vous savez qu'au niveau d'un comté, ils connaîtraient assez
bien leur milieu; ils le connaissent certainement très bien même
pour pouvoir intervenir en connaissance de cause.
Le Président (M. Marcoux): M. le député
d'Abitibi-Ouest.
M. Gendron: Si vous le permettez, j'aurais seulement deux petites
questions. Je pense que vous reflétez dans votre mémoire, avec
passablement d'exactitude, un silence sur la question du patrimoine. A un
moment donné, spécifiquement sur ce sujet, vous faites trois
recommandations de modification au projet de loi 125. L'une je pense que
c'est votre première touche particulièrement
l'identification des biens patrimoniaux. Dans votre première
recommandation, vous mentionnez que ce point, à savoir l'identification
des liens patrimoniaux, devrait être obligatoire pour ce qui est des
schémas d'aménagement mais facultatif pour ce qui est du plan
d'urbanisme. Est-ce que vous pourriez donner peut-être davantage de
motivations; pourquoi pensez-vous que cela devrait être obligatoire dans
le schéma d'aménagement, et facultatif dans le plan
d'urbanisme?
M. Bellanger: Pour ce qui est de l'identification comme telle, ne
serait-ce qu'au niveau d'un premier inventaire, il est certain que la
composition de cette identification doit être quasiment obligatoire,
parce que vous allez avoir une intervention dans l'espace. Le préalable
à tout cela, de tout le processus de planification voudrait donc
qu'effectivement on commence au niveau d'un contenu obligatoire de
schéma, que ce soit véritablement dit que la première
identification des biens patrimoniaux soit faite à ce niveau. Si on
regarde ce qui se passe à l'heure actuelle, pour toute la province il
n'y a que quelques comtés qui ont effectivement été
couverts quant à l'identification et l'inventaire de ces biens. Vous
avez des comtés comme celui de Labelle qui lui, ne connaît pas les
biens dont il dispose. Vous avez une municipalité du côté
d'Aylmer qui, elle, a une concentration de bâtiments très
intéressants, qui voudrait faire une certaine animation pour en tirer un
profit un peu économique parce qu'elle n'a pas de véritables
commerces ou d'industries et, en même temps, elle est assez proche
d'Ottawa pour pouvoir attirer une clientèle touristique. C'est justement
un cas de concentration. Si la municipalité procède en termes
d'aménagement au sein de sa propre municipalité, toutes les
premières contingences et les premières contraintes vont
être effectivement ces bâtiments. C'est quasiment l'aspect le plus
important dans une telle municipalité.
C'est certain qu'il faudrait qu'on soit assuré, ne serait-ce
qu'au niveau d'inventaire, que ce soit effectivement constitué et
contenu dans cet aspect de l'article. Quant au contenu facultatif du plan
d'urbanisme, on le voyait beaucoup plus en termes de plan, c'est-à-dire
en procédant dans une étape ultérieure, et,
nécessairement, du fait qu'on avait déjà répondu au
premier aspect, le second devenait facultatif, du fait qu'il était
obligatoire en premier lieu. C'est dans cet aspect.
M. Gendron: A la troisième recommandation qui touche
l'article 126b, vous suggérez que les municipalités et les
conseils de comté attribuent au comité consultatif d'urbanisme ou
encore à une commission des pouvoirs d'étude et de recommandation
en matière de protection des biens patrimoniaux. Je voudrais seulement
vérifier s'il a été possible, pour le Conseil de la
culture de l'Outaouais, de vérifier, au niveau de certaines
municipalités ou des conseils de comté, leur
réaction à la suite de cette recommandation, comment ils
se sentiraient, advenant que votre recommandation soit mise à
exécution dans un secteur comme celui-là. Est-ce qu'ils se
sentent aptes et habilités à porter des jugements
là-dessus?
M. Bellanger: Je ne le crois pas, c'est pour ça qu'on
présente une alternative, parce que, finalement, on ne veut pas
trancher, on laisse le soin à ceux qui vont réfléchir
à cette question de découvrir quelle est l'option la meilleure
qui se présente. On privilégierait la deuxième, celle au
niveau du comté. Ce n'est pas une question de confiance qui est
posée, mais, au niveau municipal, on craint que les
intérêts soient beaucoup trop économiques, ou qu'il y ait
un conflit entre un bien à être sacrifié et une valeur
imposable intéressante qui pourrait arriver si un bâtiment
était construit à sa place. C'est peut-être à cause
de cette proximité de conflit d'intérêts qu'on
privilégierait la seconde, qui serait à un niveau beaucoup plus
global.
M. Gendron: D'après vous, si les vérifications
étaient effectivement faites avec les municipalités ou les
conseils de comté, selon votre préférence, est-ce que vous
croyez qu'il y aurait un degré de réceptivité assez
accueillant à une telle recommandation?
M. Bellanger: Je ne le crois pas; à la première
option, article 126b, je crois qu'ils répondraient en disant: Ecoutez,
on n'a pas d'argent, on n'a rien de prévu pour ça, ça ne
nous intéresse pas tellement; il faudrait que quelqu'un nous
présente ce travail de façon un peu plus globale pour qu'on
intervienne de façon plus spécifique. Il y a eu des cas
où, notamment à Hull, il y avait un bâtiment qui
était à proximité d'un hôpital moderne. La
première prétention était de raser ce bâtiment
ancien parce que c'était un nid de feu, comme on le disait. La CCN, du
côté fédéral, a fait une étude par en dessous
et disait: S'il fallait raser un des deux, ce serait l'hôpital, parce
que, s'il y avait du feu, ce serait l'hôpital lui-même qui
brûlerait d'abord, du fait que l'un est en construction extrêmement
solide, alors que l'autre a du gyproc, du carton, beaucoup de choses. En plus,
comme ce sont des handicapés, ils ne seraient pas en mesure de sortir de
cet hôpital. Cela a été un problème. La question a
été soulevée au maire; pour ce qui est du conseil de la
culture, on avait invoqué la loi 91 qui donnait au maire ce
privilège d'intervenir sur cette question. Il a dit: Cela ne
m'intéresse pas du tout, je privilégie le social contre la
patrimoine.
C'est un cas. Il y en a d'autres. Ce rappel de différents
détails nous pousse à dire: Ce n'est pas possible, on ne peut pas
procéder de façon ad hoc, de façon ponctuelle, toujours
dire: C'est la dernière maison qu'on sacrifie, les autres, c'est
garanti. On dit: Encore une, parce qu'il en reste encore une centaine, encore
une parce qu'il en reste 99. Ce n'est pas possible de procéder de cette
façon, en disant qu'il en reste encore. Il faut, à un moment
donné, que les maisons soient identifiées et que même la
commission ait assez de jugement pour dire: Ecoutez, nous en avons 200, il est
certain que là-dedans, il y en a qui sont en bois. Même si elles
sont d'intérêt historique, je ne dis pas qu'on fermerait les yeux,
mais on conviendrait que si les maisons devaient être sacrifiées,
cela ne gênerait personne. Mais il faudrait que ce soit
véritablement établi, parce que c'est au sein d'un cadre, d'un
schéma, que vous pouvez arriver à ces propositions. Car,
jusqu'à présent, la municipalité elle-même ne
dispose pas d'inventaire de ses bâtiments dont elle dispose.
Une Voix: Cela va, je vous remercie.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie beaucoup, M.
Bellanger, d'être venu nous présenter votre mémoire au nom
du Conseil de la culture de l'Outaouais.
Je propose aux membres de la commission de suspendre nos travaux
jusqu'à 14 heures.
M. Chevrette: Excusez, M. le député de Gatineau.
Nous sommes unanimes à commencer à 14 heures pour tenter de
terminer à 17 heures.
Le Président (M. Marcoux): La commission reprendra ses
travaux à 14 heures.
Suspension de la séance à 12 h 54
Reprise de la séance à 14 h 48
Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!
La commission des affaires municipales poursuit l'audition des
mémoires concernant le projet de loi no 125.
J'ai le plaisir d'inviter la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec à venir nous présenter son
mémoire. Est-ce que M. Jutras est là? En tout cas,
présentez-vous et présentez vos collègues.
Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec
Mme Gervais (Ghislaine): C'est ce que je vais faire avec plaisir.
Je ne sais pas si je devrais m'excuser d'être en retard, puisque, selon
moi, je ne suis pas en retard. On nous avait dit 15 heures, mais quand
même!
Le Président (M. Marcoux): Une série de quiproquos.
Allez-y.
M. Chevrette: ... un bouc émissaire.
Mme Gervais: Je suis Ghislaine Gervais. Je suis commissaire
d'école à la Commission scolaire Montcalm de même
qu'à la Commission scolaire régionale Chauveau, présidente
de l'Association
des commissions scolaires du diocèse de Québec et
vice-présidente de la Fédération des commissions scolaires
catholiques du Québec. J'ai avec moi M. Aurèle Hudon, qui est
directeur de la gestion des affaires scolaires à la
fédération et Me Michel Beaumont, conseiller juridique à
cette même direction.
La Fédération des commissions scolaires est un organisme
provincial représentant toutes les commissions scolaires catholiques de
la province. Les commissions scolaires ont juridiction sur plus de 1 500 000
élèves des niveaux primaire et secondaire. Elles administrent des
budgets dépassant $1500 000 000 annuellement. Elles répondent
à des besoins locaux axés sur des objectifs
généraux définis au niveau du Québec par une
structure politique de représentants élus au suffrage universel
que sont les commissaires d'écoles.
Les territoires scolaires locaux sont clairement définis et sont
identifiés comme étant des territoires de municipalités
scolaires, suivant la Loi de l'instruction publique.
Historiquement enfin, je dis historiquement, mais ce n'est pas
très vieux au moment où fut créé le
ministère de l'Education, il y avait 1500 commissions scolaires. Un
mouvement de regroupement de celles-ci, amorcé par la
Fédération des commissions scolaires, en 1966 et bien accueilli
par les commissions scolaires, en a réduit le nombre à moins de
750 cinq ans plus tard. La loi 27 promulguée en 1971 portait ce nombre
à un peu plus de 250.
Aujourd'hui, il existe environ 225 commissions scolaires couvrant tout
le territoire de la province. Cela a encore diminué depuis la loi 27,
puisqu'un mouvement d'intégration des niveaux primaire et secondaire, a
été créé et a porté le nombre des
commissions scolaires à 225. Ces 225 commissions scolaires, cela
correspond aux commissions scolaires catholiques, aux commissions scolaires
protestantes, aux commissions scolaires que l'on dit locales et qui sont de
niveau primaire, aux commissions scolaires régionales qui dispensent le
niveau secondaire et aux commissions scolaires intégrées qui
dispensent les deux niveaux, soit les niveaux primaire et secondaire.
Après ces explications, je pense que vous comprendrez pourquoi
nous constatons qu'il n'y a aucune comparaison possible avec les corporations
municipales et les conseils de comté. Il est donc clair que l'on ne peut
avoir la même notion de l'aménagement de territoire, les
territoires des commissions scolaires étant différents et les
objectifs d'éducation et de formation intégrale des
clientèles desservies, étudiants voire adultes, étant
distincts.
Compte tenu de ces caractéristiques fondamentales, il devient
évident qu'il nous est difficile, pour ne pas. dire impossible,
d'accepter le projet de loi 125 sans que des amendements y soient
apportés, principalement du fait que nous sommes totalement absents du
projet de loi tel que présenté. Ou bien nous sommes totalement
exclus de façon explicite de l'aménagement du territoire
municipal dans le projet de loi 125, et alors, nous conservons nos droits et
pouvoirs de l'aménagement du territoire de la municipalité
scolaire pour les fins de l'éducation, ou bien le projet de loi 125
établit explicitement notre participation active dans les
décisions ayant trait à l'aménagement des territoires
municipaux et scolaires.
Pour mieux préciser la pensée des commissions scolaires,
je vous réfère à notre mémoire et je passe la
parole à M. Hudon, directeur de la gestion des affaires scolaires.
M. Hudon (Aurèle): M. le Président, MM. les membres
de la commission, nous allons quand même nous référer au
document et je vais donner lecture de quelques passages seulement que nous
trouvons très importants.
Le Président (M. Marcoux): Je pense qu'il serait
préférable de le lire au complet.
M. Hudon: Le lire au complet? D'accord. En guise d'introduction,
les commissions scolaires du Québec réservent un accueil
mitigé au projet de loi 125 du gouvernement du Québec sur
l'aménagement de l'urbanisme. Les réserves exprimées par
les commissions scolaires ne se rattachent pourtant pas, comme telles, au
principe du projet.
Vu que l'objectif visé par le projet de loi d'un
aménagement ordonné du territoire est un objectif louable, les
réticences que formulent les commissions scolaires ont surtout trait aux
retombées que le projet de loi pourrait avoir sur le milieu
scolaire.
Les commissions scolaires considèrent d'ailleurs que le projet de
loi s'adresse principalement aux municipalités et elles s'abstiennent,
en conséquence, de le commenter article par article. Le mémoire
reflète donc plutôt l'inquiétude des commissions scolaires
au sujet de certains points et vise à y apporter les correctifs
appropriés.
Le projet de loi no 125 a été soumis peu de temps
après la conférence Québec-commissions scolaires. Lors de
ce sommet, le caractère du gouvernement, des gouvernements locaux des
commissions scolaires fut reconnu par le gouvernement du Québec. Aussi,
c'est bien en qualité de représentantes de gouvernements locaux
autonomes et responsables que la Fédération des commissions
scolaires catholiques du Québec présente les remarques
suivantes.
Un des premiers aspects qui retiennent l'attention à la lecture
du projet de loi, c'est l'imprécision qui existe dans certains articles
relatifs à la juridiction des municipalités et des conseils de
comté dans l'aménagement du territoire. Nous entendons par
"juridiction" l'autorité sur le contenu du schéma
d'aménagement pour le conseil de comté et sur celui du plan
d'urbanisme pour les municipalités. Ces deux éléments
définissent, à notre avis, les grandes orientations en
matière d'aménagement du territoire. Cette imprécision
s'applique plus particulièrement à quelques articles, dont les
suivants: Article 5: Un schéma d'aménagement doit comprendre
paragraphe G) l'identification et la localisation approximative
des équipements et infrastructures à être mis
en place par le gouvernement, ses ministères et mandataires ainsi
que par les organismes publics.
Article 80: Un plan d'urbanisme peut comprendre la nature, la
localisation et le type des équipements et des infrastructures tant
publics que privés destinés à l'usage de la vie
communautaire. Il est pour le moins surprenant que l'on s'en tienne à
des tenues aussi ambigus et aussi larges qu'"équipements" et
"infrastructures". Pour les commissions scolaires, ces deux expressions peuvent
recouvrir deux réalités très précises.
Elles peuvent d'abord signifier l'ingérence du gouvernement
municipal dans les affaires scolaires, ou encore simplement la coexistence
entre deux gouvernements municipal et scolaire. On a jugé bon de
définir ailleurs l'expression "services publics". Bien sûr, ces
derniers termes pouvaient engendrer une certaine confusion, et nous sommes
d'avis que la même chose pourrait se produire quant à la
juridiction qu'entend accorder le législateur aux municipalités
et aux conseils de comté sur le gouvernement scolaire local.
Equipements et infrastructures: Les commissions scolaires veulent, avec
raison, savoir de quoi il s'agit lorsqu'il est question d'équipements et
d'infrastructures dans le projet de loi. S'agit-il d'équipements
sportifs ou de transport scolaire? Nous comprenons qu'il n'existe que peu de
limites à la juridiction que peuvent s'octroyer les municipalités
et les conseils de comté dans des domaines qui sont de la
compétence des commissions scolaires.
Pour illustrer ce qui précède, voici un extrait d'un
document du secrétariat à l'aménagement et à la
décentralisation: Après avoir affirmé que la
décentralisation doit conduire à une meilleure utilisation des
ressources, les auteurs du document poursuivent: Certains services non encore
établis pourront d'ailleurs acquérir une nouvelle
rentabilité. Prenons par exemple la possibilité de prendre appui
sur le réseau de transport scolaire pour rentabiliser et justifier dans
certains comtés un système léger de transport en commun.
De plus, les équipements socio-culturels, éducatifs ou sportifs
qui relèvent présentement de plusieurs autorités
pourraient être plus largement utilisés et mis à la
disposition de tous les citoyens. La bibliothèque de la polyvalente
devrait pouvoir s'ouvrir à l'ensemble de la population de la zone. Les
salles d'école devraient pouvoir servir aux rencontres sociales, aux
réunions diverses y compris les réunions du conseil municipal ou
de comté. Il s'ensuivrait une utilisation plus intensive et plus
économique de ces équipements tout en réduisant les
duplications onéreuses de locaux ou d'installations.
Dans le texte actuel du projet de loi, nous croyons que tous les sujets
mentionnés ci-dessus pourraient devenir de la compétence des
municipalités ou des conseils de comté. Nous voilà bien
loin de l'aménagement du territoire. De plus, à notre avis, le
projet de loi dans sa forme actuelle laisse la porte ouverte à une
juridiction des municipalités et des conseils de comté sur la
construction de nouvelles écoles, voire sur la fermeture de certaines
déjà existantes.
N'est-ce pas dire que l'on confie une juridiction au pouvoir municipal
en matière d'éducation? Le moins que l'on puisse exiger du point
de vue des commissions scolaires, c'est que les équipements et les
infrastructures qui relèvent de leur compétence le demeurent. Or,
il existe très peu de limites à la juridiction des
municipalités et des conseils de comté dans le schéma
d'aménagement et les plans d'urbanisme.
Les commissions scolaires ne sauraient accepter que ne soit
définie plus clairement la juridiction précise des
municipalités et des conseils de comté en cette matière.
De plus, nous demandons que les commissions scolaires soient consultées
dans la définition de cette juridiction. Quant à la juridiction
territoriale de ces comtés, les conseils de comté
renouvelés retrouveront, dans les cadres du projet de loi 125, des
territoires clairement établis et reconnus. Nous pouvons nous interroger
sur les conséquences qui découleraient de la différence
entre les territoires des conseils de comté renouvelés et ceux
des commissions scolaires déjà existantes. On peut fort bien
concevoir qu'une commission scolaire régionale pourrait ainsi être
divisée entre deux autorités territoriales et on peut facilement
entrevoir les difficultés que pourrait engendrer une telle situation
lorsqu'il s'agirait, par exemple, du choix du lieu d'implantation d'une
école. (15 heures)
La commission scolaire devrait-elle subir les pressions ou le refus de
ces deux autorités? Les commissions scolaires considèrent que
dans le découpage des territoires des conseils de comté
renouvelés, on ne doit pas apporter aucun changement aux
définitions territoriales des commissions scolaires et on ne doit pas
non plus toucher aux droits qu'elles engendrent.
Si certains critères favorables s'appliquent au découpage
du territoire dans le cadre de son aménagement, il en va de même
pour ce qui est des définitions territoriales des commissions scolaires.
Celles-ci considèrent donc que les expressions "équipement et
infrastructure" devraient être définies dans le projet de loi 125.
Il en est de même de la juridiction des municipalités et des
conseils de comté qui doit absolument être clairement et
limitativement définie puisqu'elle peut s'appliquer à des
domaines de compétence des commissions scolaires.
Les commissions scolaires considèrent également que le
découpage des territoires des conseils de comté renouvelés
ne doit en aucun moment ni de quelque façon que ce soit porter atteinte
à l'autonomie et à la compétence des commissions
scolaires.
Le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme, dans sa
forme actuelle, semble retenir comme principe de base que seuls les
municipalités et les conseils de comté ainsi que le gouvernement
du Québec ont juridiction sur l'aménagement du territoire. Une
telle perspective est, à notre avis, erronée. Le schéma
d'aménagement sera, pour employer les termes mêmes du docu-
ment sur la décentralisation, opposable aux organismes et agents
de l'Etat ainsi qu'aux municipalités et aux commissions scolaires.
En conséquence, on ne saurait prétendre que
l'aménagement soit l'attribut exclusif de ces seules autorités.
La revalorisation des pouvoirs des municipalités et des conseils de
comté ne saurait s'accomplir au détriment des pouvoirs et de
l'autonomie du gouvernement scolaire local.
La portée générale du projet de loi s'inscrit en
faux contre un de ces principes de base: la participation des agents du milieu
à son aménagement. Alors que ce projet de loi reconnaît le
droit des citoyens à une participation privilégiée
à presque toutes les étapes, alors que les pouvoirs et les
obligations des conseils municipaux et du gouvernement du Québec y sont
clairement définis, les commissions scolaires y sont totalement
ignorées, bien que ce projet puisse avoir une grande influence sur
l'essor de l'éducation sur leur territoire..
Si les commissions scolaires figuraient comme contribuables inscrits au
rôle d'évaluation, peut-être pourraient-elles
prétendre s'insérer dans la catégorie des citoyens. Mais
tel n'est pas le cas. Comme le mentionne l'article 22 du projet de loi, on doit
tenir compte des avis du ministre d'Etat à l'aménagement, des
municipalités, des résultats des consultations ou de tout autre
élément pertinent.
Serait-il présomptueux de croire que les commissions scolaires
font partie de cette catégorie? Est-il aussi besoin de rappeler
l'importance des gouvernements scolaires locaux au Québec? N'oublions
pas que dans plusieurs régions, les commissions scolaires fournissent la
majorité des locaux et des équipements du milieu. Un sondage
récent révèle qu'il y a peu de territoires municipaux
où il n'existe pas d'entente de services avec les commissions scolaires
relatives aux loisirs.
Enfin, sans vouloir entreprendre une guerre de chiffres, on remarque que
les actifs des commissions scolaires sont très importants, voire dans
certains cas supérieurs à ceux des municipalités. Les
auteurs du projet de loi n'ont pas oublié l'importance relative desdites
immobilisations puisqu'elles sont incluses dans l'aménagement. Le projet
de loi 125 supprime tout simplement l'autorité et la fonction du
gouvernement scolaire local. La mise à l'écart des gouvernements
scolaires locaux s'inscrit mal dans un projet de loi, dans lequel on
considère de première importance la cohérence et la
concertation entre les divers paliers d'autorité pour en arriver
à un aménagement rationnel du territoire.
La concertation est nécessaire entre les municipalités, le
conseil de comté renouvelé et le gouvernement. Toutefois, elle ne
semble pas aussi nécessaire avec les commissions scolaires, même
quand il s'agit de sujets qui relèvent strictement de la
compétence du gouvernement scolaire local. Il paraît pour le moins
surprenant que les décisions susceptibles d'influer fortement sur la
bonne marche de l'éducation dans une région apparte- nant aux
diverses autorités de la région, sauf celles qui sont directement
responsables de l'éducation. Dans son document sur la refonte du
gouvernement local et la décentralisation au Québec, le Conseil
de planification et de développement du Québec écrit ce
qui suit: "Le Conseil de planification et de développement du
Québec considère que le gouvernement local doit être
perçu en termes de corps politique décentralisé qui, en
vertu de lois de portée générale, assume la
responsabilité de l'administration publique de premier niveau à
l'intérieur d'un territoire défini à cette fin, est
doté de l'autorité ainsi que des moyens nécessaires pour
gouverner ledit territoire."
Aussi croyons-nous qu'une décision relative à
l'aménagement du territoire et concernant directement une commission
scolaire doit revenir à ladite commission scolaire, laquelle doit
pouvoir refuser ou accepter la proposition d'aménagement qui lui est
faite. C'est aux commissions scolaires, de concert avec le ministère de
l'Education et non pas avec le ministre d'Etat à l'aménagement,
comme le mentionne l'article 11 du projet de loi, qu'il appartient de
définir les objectifs et les orientations de l'éducation.
Les seules objections autorisées à la procédure
d'aménagement sont celles du gouvernement, voir l'article 21. La
commission scolaire n'est-elle pas en droit d'exiger les mêmes pouvoirs
relativement à ces objectifs? Les priorités de
l'éducation, tout comme les objectifs du gouvernement, ne doivent pas
être étouffées sous un schéma d'aménagement.
L'éducation ne doit, en aucun moment, être pénalisée
par une soi-disant rationalisation dans l'aménagement du territoire.
Bien que l'aménagement du territoire soit un objectif souhaitable, nous
sommes d'avis qu'il ne doit pas nuire à l'éducation.
Toutefois, conscientes du rôle qu'elles exercent dans le milieu et
des objectifs d'un aménagement ordonné du territoire, les
commissions scolaires considèrent qu'une formule d'arbitrage serait
souhaitable pour trancher les litiges possibles entre les commissions
scolaires, les municipalités et les conseils de comté
renouvelés. Une telle formule permettrait à tous les agents
intéressés de faire connaître leur point de vue et
réglerait tout litige d'une façon claire et non
équivoque.
Les commissions scolaires croient donc qu'il n'appartient pas au
ministre d'Etat à l'aménagement d'établir les grandes
orientations des commissions scolaires. De plus, le projet de loi sur
l'aménagement et l'urbanisme doit reconnaître aux commissions
scolaires le droit d'intervenir et de refuser toute proposition
d'aménagement préparée par des municipalités ou des
conseils de comté qui ne serait pas conforme aux objectifs des
gouvernements scolaires locaux. Les commissions scolaires suggèrent donc
comme solution mitoyenne un arbitrage entre les gouvernements scolaires locaux
et municipaux.
Dans sa structure, le projet de loi sur l'aménagement et
l'urbanisme ne prête aucunement attention aux gouvernements scolaires
locaux. De plus,
des pouvoirs susceptibles de réduire l'autonomie des commissions
scolaires sont accordés par le législateur à des instances
qui n'ont rien à voir avec l'éducation. Devant une telle
situation, les commissions scolaires s'inquiètent de la voie dans
laquelle le gouvernement du Québec semble s'engager.
Cette inquiétude est d'autant plus grande que le projet de loi,
à notre avis, dépasse le simple cadre de l'aménagement. En
effet, compte tenu du fait que, comme les contribuables ordinaires, les
commissions scolaires sont déjà régies par les divers
règlements de zonage et de construction des municipalités, elles
étaient déjà, de toute façon, soumises à
l'aménagement du territoire. Toutefois, le projet de loi a étendu
cette juridiction à des équipements et à des
infrastructures.
Les commissions scolaires s'opposent à ce que, sous le couvert de
l'aménagement, on s'empare d'un domaine de compétence dans des
matières telles que l'éducation, la culture et les loisirs. Les
commissions scolaires refusent qu'au nom de l'aménagement la mission
qu'on leur a confiée dans ces secteurs soit transférée
à d'autres autorités.
Une telle situation est d'ailleurs contraire au livre blanc sur la
décentralisation du gouvernement du Québec. En effet, tout en
nous abstenant de commenter ce document, nous remarquons qu'il y est clairement
établi une ligne de démarcation entre l'aménagement et
l'éducation, la culture et les loisirs. Or, telle n'est pas la situation
que laisse envisager le projet de loi 125.
Les commissions scolaires croient que l'étape de revalorisation
des municipalités et des conseils de comté que représente
le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme ne doit en aucun
moment servir de prétexte à l'intégration d'un
gouvernement scolaire local dans quelque gouvernement municipal que ce soit ou,
à long terme, dans une étatisation pure et simple de
l'éducation.
Les commissions scolaires refusent un conseil de comté
renouvelé, une corporation intermunicipale, dans la mesure où ils
entraînent un transfert des compétences propres aux commissions
scolaires.
Le projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit
reconnaître d'une façon non équivoque l'autorité, la
compétence et l'autonomie des commissions scolaires en matière
d'éducation, aussi bien les pouvoirs et la compétence accessoire
sur les équipements et infrastructures qui sont de leur ressort.
Les commissions scolaires du Québec croient que le projet de loi
125 doit reconnaître l'autonomie et la juridiction des gouvernements
scolaires locaux en matière d'éducation et leur permettre de
participer à l'aménagement avec des organismes régionaux
sans les subordonner à un "gouvernement régional" ou à une
superstructure étatique.
Dans le présent mémoire, les commissions scolaires du
Québec se sont limitées à l'examen des pr ncipales
conséquences possibles du projet de loi 125 sur l'aménagement et
l'urbanisme pour leur avenir.
Elles souhaitent, en guise de conclusion ce serait
peut-être bon de faire la correction que l'on délimite
et non pas que l'on élimine, à la page 13 de
façon précise et limitative, la juridiction des
municipalités et des conseils de comté "renouvelés" sur
les matières de compétence des gouvernements scolaires locaux,
ainsi que le droit d'intervenir dans la définition d'une telle
juridiction.
Les commissions scolaires croient également que le projet de loi
125 ne doit en aucun moment porter atteinte à leur autonomie dans sa
définition territoriale.
Les gouvernements scolaires locaux doivent pouvoir intervenir et refuser
une proposition d'aménagement et ne discuter qu'avec le ministre de
l'Education des grandes orientations de l'éducation.
Enfin, la compétence et l'autonomie des commissions scolaires en
matière d'éducation doivent être reconnues dans le projet
de loi.
Les correctifs que nous proposons, nous le croyons fermement,
permettraient aux commissions scolaires de jouer raisonnablement leur
rôle de gouvernement local et d'assumer les responsabilités qui en
découlent.
L'omission de l'un ou l'autre des correctifs suggérés par
les commissions scolaires ne saurait qu'entraîner le rejet de leur part
du projet de loi. En effet, une telle omission illustrerait mieux que mille
mots ne sauraient le faire, les intentions du gouvernement du Québec
quant à l'avenir des commissions scolaires.
De plus, comme le CPDQ, nous considérons qu'il faut respecter les
gouvernements locaux et ne pas leur imposer de superstructure qui reçoit
des pouvoirs de l'Etat. L'aménagement est une fonction locale qui
devrait être exercée en commun par les gouvernements locaux d'une
région et non leur être enlevée pour être
confiée d'autorité à une structure intermunicipale. Les
organismes régionaux devraient s'en tenir à être la
structure d'accueil des pouvoirs que les gouvernements locaux décident
de leur confier.
Les recommandations. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit
définir clairement les mots "équipements" et
"infrastructures".
Elle doit définir limitativement la marge de juridiction des
municipalités et des conseils de comté "renouvelés" sur le
milieu scolaire.
Les commissions scolaires doivent être consultées dans la
définition de ladite juridiction. La Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme doit assurer que les limites territoriales des commissions
scolaires seront respectées.
En ce qui a trait à la participation, les grandes orientations
des commissions scolaires doivent être déterminées par le
ministre de l'Education et non par le ministre d'Etat à
l'aménagement. Les commissions scolaires doivent pouvoir refuser ou
accepter toute proposition d'aménagement qui les intéresse
directement. Elles souhaitent qu'une formule d'arbitrage soit mise au point
pour régler les litiges entre les gouvernements scolaires et les
municipaux. Une structure intermunicipale ou un
organisme régional ne doit pas empiéter sur les domaines
de compétence et l'autonomie des commissions scolaires.
Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, madame et
messieurs. M. le ministre.
M. Léonard: Je vous remercie d'avoir
présenté ce mémoire, même s'il est discutable dans
certaines de ses parties. Je voudrais rappeler des choses comme commentaires.
D'abord, à propos de la tournée, j'ai tenu à rencontrer
les commissions scolaires. Je voudrais rappeler un peu ce que j'ai dit lors de
ces rencontres au cours du mois de février et du début du mois de
mars. Je voudrais rappeler une chose: d'abord, le projet de loi 125 n'est pas
un projet de loi sur la décentralisation, mais un projet de loi sur
l'aménagement et l'urbanisme. A ce titre, je voudrais aussi rappeler
qu'il n'y a pas de livre blanc sur la décentralisation. Il n'y en a pas;
je l'ai répété partout dans le Québec. Le
gouvernement ne l'a pas publié. Il y a eu un document de travail que le
gouvernement n'a pas publié. Alors, je pense qu'il faudrait rectifier
des choses sur ce plan, pour être honnête. Il me semble que c'est
l'évidence même. Je dirai, pour reprendre sur les termes du projet
de loi sur l'aménagement et l'urbanisme, que l'aménagement c'est
l'organisation du territoire, alors que la décentralisation, c'est autre
chose. Lorsqu'on parle d'aménagement, on parle de localisation,
d'infrastructure et d'équipement et on ne parle pas de gestion
d'équipement ou de gestion de tout autre pouvoir. On parle de
l'organisation du territoire, que ce soit au niveau régional
d'habitude, c'est ce que cela signifie, l'aménagement ou au
niveau local, qu'on traduit assez souvent par le terme "urbanisme", bien qu'il
y ait encore des discussions sur ce plan. (15 h 15)
Je voulais aussi rencontrer des commissions scolaires parce que je
considère qu'elles avaient acquis une expertise en ce qui concernait les
territoires. Vous avez vécu différentes expériences sur ce
plan. Je suppose bien aussi que vous avez délimité vos
territoires par rapport à la population qui l'habitait, par rapport aux
besoins du milieu scolaire. Il nous semblait que c'était une
expérience intéressante et qu'à ce titre, votre
témoignage pouvait être très intéressant aussi en ce
qui concernait le projet de loi 125, et aussi parce que les commissions
scolaires disposent de beaucoup d'équipements sur le territoire, qui
sont structurants, évidemment, qui font l'objet quant à leur
localisation d'une loi de l'aménagement.
Je voudrais rappeler également l'engagement que le premier
ministre a pris à votre sujet, soit que les commissions scolaires ne
disparaîtraient pas. Il vous l'a dit l'automne dernier au congrès
de la fédération. Si ma mémoire est bonne, je pense que
cela a été répété à la
conférence du mois de mars dernier. Sur ce plan, je voudrais aussi
relever une erreur à la première page du mémoire. Le
projet de loi 125 a été déposé le 21
décembre dernier, et non après la conférence
Québec-commissions scolaires.
Je voudrais aussi rappeler une chose, c'est que le projet de loi no 125
n'a pas pour effet de donner aux conseils de comté juridiction sur les
commissions scolaires. Dans le projet de loi de l'aménagement, il s'agit
de localisation. Je pense bien qu'il me semble abusif de dire qu'on donne
juridiction aux commissions scolaires parce qu'on légifère, parce
que les municipalités ont des pouvoirs en termes de plans d'urbanisme et
de réglementation de zonage et de lotissement de construction. De la
même façon que les commissions scolaires s'assujettissent aux
règlements de zonage de construction des municipalités, elles
seront assujetties aussi au schéma d'aménagement du comté,
tout comme le gouvernement lui-même.
A aucun moment, dans le projet de loi, un conseil de comté ne
pourrait dire à une commission scolaire de construire ou de fermer une
école. Je pense qu'il est important de bien distinguer entre localiser
et une décision qui porte sur la construction ou la fermeture d'une
école. Ce n'est pas la même chose, il me semble.
La seule chose que le comté pourra faire, c'est dire à la
commission scolaire que si elle était décidée de
construire une nouvelle école, à cause des choix faits dans
l'aménagement de l'ensemble du territoire et de l'orientation du
développement décidé, cette école devrait se situer
dans telle partie du territoire du comté. Je répète qu'il
s'agit de localisation.
Ce n'est pas parce que chacun possède un terrain
résidentiel qu'il est obligé de construire une maison. Il en va
de même pour les commissions scolaires, et, en conséquence,
j'aimerais que nos discussions soient limitées à ce qui est
l'objet du débat sur l'aménagement.
J'aurais, par la suite, quelques questions à vous poser. La
première porterait sur la définition de ces deux expressions
"équipements" et "infrastructures", qui permettrait de respecter
l'autonomie des commissions scolaires dans le domaine de l'éducation.
Quelle serait la définition que vous, vous donneriez à
"équipements" et "infrastructures"?
M. Beaumont: Quant au milieu scolaire, effectivement, ce qu'on a
exposé dans notre mémoire, c'est simplement que les termes sont
très généraux. On a cité, à titre d'exemple,
l'expression "services publics", qui peut porter à confusion, qui peut
s'appliquer à bien des choses, à bien des sujets. Nous croyons
que, dans le même sens, puisque, effectivement, on a cru bon de
définir l'expression "services publics", les mots "infrastructures" et
"équipements" devraient être définis effectivement dans le
sens de déterminer où s'arrête l'aménagement. C'est
simplement dans ce sens. La définition pourrait varier, en fait, d'un
endroit à l'autre, selon des sujets touchés. Prenons, par
exemple, l'éducation. Est-ce que ça s'adresse aux services ou
est-ce que les services sont exclus? Sur d'autres sujets, ça pourrait
être une autre définition. Effectivement, la définition,
à mon sens, donne une certaine juridiction, confère la
juridiction au conseil de comté.
M. Léonard: Vous ne pouvez pas préciser
davantage?
M. Beaumont: Non, effectivement, je n'ai pas de texte...
M. Léonard: Est-ce que, pour vous, un équipement
doit avoir une relation nécessaire avec une localisation pour se
conformer au projet de loi no 125?
M. Beaumont: Pour certains types d'équipements, on peut
penser, par exemple ou même des infrastructures à
des équipements de loisirs. Est-ce que la loi sur l'aménagement
s'adresse à ça? C'est ça qu'on veut faire
déterminer, effectivement.
M. Léonard: S'il y a des équipements de loisirs,
s'il y a une aréna, c'est un équipement public qui est
localisé quelque part.
M. Beaumont: Oui.
M. Léonard: Donc, la localisation d'une aréna peut
se situer dans un schéma ou un plan d'urbanisme à tout le moins,
les piscines et les choses comme cela.
M. Beaumont: Effectivement, comme la localisation
d'équipement sportif, mais jusqu'à quel point la localisation
d'équipement sportif ne sera pas centralisée, par exemple, et que
cela n'influencera pas les équipements de nature scolaire? Je vous donne
l'équipement sportif, je vous ai donné l'exemple d'une piscine,
jusqu'à quel point la piscine devra-t-elle être à la
polyvalente ou ne devrait-elle pas être très près d'un
complexe sportif municipal? C'est dans ce sens qu'est effectivement notre
intervention: Où s'arrêtent les équipements, à quels
équipements?
M. Léonard: J'aimerais que vous précisiez
davantage. Quelle différence feriez-vous ou quelle distinction
feriez-vous entre services et équipements?
M. Beaumont: A mon sens, des équipements s'attachent
à des équipements matériels alors que des services sont
des organisations à l'intérieur d'une commission scolaire. C'est
comme cela que je le vois, tout au moins.
M. Léonard: Dans la loi de l'aménagement, on ne
fait pas mention des services.
Vous dites aussi, à la page 5 de votre mémoire: On ne doit
apporter aucun changement aux définitions territoriales des commissions
scolaires et on ne doit pas non plus toucher aux droits qu'elles engendrent et
vous recommandez que la loi sur l'aménagement et l'urbanisme assure que
les 'imites territoriales des commissions scolaires seront respectées.
J'aimerais que vous nous disiez ce que vous entendez par cela.
M. Beaumont: Dans certains cas, vous n'êtes pas sans savoir
qu'il y a eu plusieurs propositions de découpage territorial; alors, on
peut facilement comprendre que, dans certains cas, si on prend par exemple les
propositions 1 et 2, le découpage, les commissions scolaires pourraient
être confrontées territorialement à deux entités
différentes, deux conseils de comté renouvelés. La
troisième voie s'attache plus à la définition territoriale
des commissions scolaires. C'est dans ce sens. On croit que, pour fonctionner
rationnellement, la délimitation territoriale des commissions scolaires
et des conseils de comté devrait se rapprocher. C'est dans ce
sens-là.
M. Léonard: Est-ce que je dois conclure que les
délimitations des conseils de comté devraient correspondre aux
territoires des commissions scolaires?
M. Beaumont: Vous devez comprendre qu'effectivement, à
notre avis, cela devrait se rapprocher de ces définitions.
M. Léonard: Cela signifie que ce sont les commissions
scolaires qui déterminent le territoire.
M. Beaumont: Quant à nous, c'est très
important.
M. Léonard: Vous admettez aussi que c'est important pour
les municipalités?
M. Beaumont: Oui, je n'en doute pas.
M. Léonard: Est-ce que vous ne considérez pas
qu'une commission scolaire peut aussi tirer un avantage d'un schéma
d'aménagement?
M. Beaumont: A condition qu'elle y participe.
M. Léonard: Qui fait les schémas
d'aménagement ou les plans d'urbanisme habituellement?
M. Beaumont: La commission scolaire présentement, dans le
projet de loi 125, à mon avis, est complètement
écartée. Pour qu'elle puisse en profiter, il faudrait au moins
qu'elle ait son mot à dire sur certains sujets. Présentement,
dans la forme actuelle, nous croyons qu'il y a plus imposition de certaines
choses que concertation.
M. Léonard: Vous trouvez que c'est un droit qui vous
revient?
M. Beaumont: Je calcule que, dans la perspective du projet de loi
où on s'inscrit dans une concertation, les commissions scolaires
devraient participer tout simplement, c'est un droit par rapport à
l'importance relative des commissions scolaires et par rapport aussi à
la clientèle qu'elles représentent.
M. Léonard: Est-ce que je dois conclure qu'on doit retirer
le droit de faire des plans d'urbanisme et des schémas
d'aménagement au niveau municipal pour le partager avec les commissions
scolaires?
M. Beaumont: Entre donner une juridiction totale aux commissions
scolaires, à mon avis... D'ailleurs, ce n'est pas ce qui est
réclamé dans notre mémoire, nous demandons tout simplement
une participation. A ce niveau, si nous participons, nous serons certainement
à même d'en profiter.
M. Léonard: Est-ce que vous pourriez me préciser ce
que vous entendez exactement par participation.
M. Beaumont: La participation, à notre avis, peut
être à divers niveaux. Dans le projet de loi, la participation
je vous donne cela à titre d'exemple des électeurs
ou de tout le monde se fait au niveau de certains référendums,
entre autres, où, par exemple, on peut parler de la commission
d'urbanisme, quoiqu'elle soit facultative. Alors à ce niveau-là,
nous croyons que les commissions scolaires, sur des sujets qui les touchent ou
qui influencent leur clientèle, on peut parler spécifiquement de
loisirs, par exemple, devraient avoir leur mot à dire. On peut voir
plusieurs formules possibles, soit au niveau d'avis, ou d'un comité
consultatif où les commissions scolaires seront appelées à
être consultées et à donner leur position ou même
leur refus, si ce schéma ou ce qu'on propose était contraire ou
n'allait pas dans les buts qu'elles se seraient fixés.
Je vous parle par exemple, de la localisation d'une aréna ou
d'une aire sportive. La clientèle scolaire, à mon avis, est assez
importante que la commission scolaire devrait être consultée
à ce sujet-là.
M. Léonard: Vous écrivez à la page 15 de vos
recommandations: Les commissions scolaires doivent pouvoir refuser ou accepter
toute proposition d'aménagement qui les intéresse directement. Si
cette recommandation était acceptée, est-ce que vous pensez qu'on
devrait aussi l'accepter pour d'autres organismes de la
société?
M. Beaumont: Je peux vous dire qu'effectivement cette
recommandation doit être prise avec la recommandation qui suit, savoir
que dans le cas où il y aurait mésentente, une formule
d'arbitrage pourrait être élaborée, soit un comité
paritaire qui déciderait, qui trancherait le litige entre les deux
gouvernements locaux.
M. Léonard: Mais vous l'accorderiez aussi à
d'autres organismes, par exemple du réseau des affaires sociales?
M. Beaumont: Je crois, quant à ces organismes-là,
que l'on pourrait éventuellement demander leur avis. Etant donné
les fonctions qu'ils ont dans le milieu, il faut...
M. Léonard: Vous leur demanderiez leur avis, mais est-ce
que ce serait la même chose que selon votre deuxième
recommandation quant à la participation? Pouvoir refuser ou
accepter?
M. Beaumont: A la condition qu'il puisse y avoir une formule qui
tranche...
M. Léonard: Mais est-ce que vous appliqueriez je ne
sais pas si vous pouvez me répondre cette recommandation aussi au
réseau des affaires sociales ou à certaines institutions du
réseau des affaires sociales?
M. Beaumont: En certains cas, oui, je le croirais; quoique je
suis très mal placé pour le savoir, n'étant pas au fait de
ces sujets. Je parle au nom des commissions scolaires.
Mme Gervais: J'ai l'impression que... M. Léonard:
Pardon?
Mme Gervais: J'ai l'impression que le réseau des affaires
sociales doit être capable de se défendre. Il n'a pas besoin des
commissions scolaires pour le faire.
Dans tout ceci, M. le ministre, on souhaite surtout beaucoup de
concertation municipale-scolaire. Il en existe déjà beaucoup plus
qu'on ne le croit au sein du gouvernement. Je pense que le rapport je ne
sais pas s'il a été déposé officiellement ou s'il
le sera bientôt c'est-à-dire le rapport du comité
interministériel qui a été chargé de faire le point
sur l'utilisation des équipements des commissions scolaires et des
équipements municipaux, devrait confirmer certaines choses que l'on
avance. Il y a des ententes entre les municipalités et des commissions
scolaires pour l'utilisation des locaux des commissions scolaires. On semble
laisser croire qu'il n'en existe pas. Il en existe dans plus de 90% des cas et
on voudrait... Vous parliez tantôt d'une piscine ou d'une aréna.
Si on devait en construire, c'est bien sûr que si elles sont près
des écoles, la clientèle scolaire peut s'en servir.
Ecoutez, je ne voudrais pas qu'on prenne mon propos pour une affirmation
gratuite, il se construit présentement ou on a construit
récemment je fais une distinction parce que je ne suis pas...
sur un territoire donné dans la province, aux alentours de
Terrebonne en tout cas, c'est la commission scolaire du président
de la fédération, qui s'excuse, incidemment, il est en dehors de
la province une aréna à deux ou trois milles des
écoles. Ce qui veut dire que les écoliers devront voyager en
autobus pour s'y rendre. Dans d'autres commissions scolaires, les arenas sont
très près et les gymnases peuvent servir pour les
municipalités, il y a des ententes partout. (15 h 30)
On voudrait qu'il ne se produise plus des choses comme il s'en est
produit dernièrement à L'Ancienne-Lorette où la Commission
scolaire régionale Chauveau, que je connais très bien
puisque j'en suis la vice-présidente, a ouvert la
bibliothèque de la polyvalente de L'Ancienne-Lorette à la
population de L'Ancienne-Lorette. Bien sûr, après deux ans
d'usage, on s'aperçoit que les livres qui meublent cette
bibliothèque ne sont pas tout à fait ceux qui correspondent aux
besoins d'une population adulte de ce territoire.
Le maire de L'Ancienne-Lorette qui est aussi le président de la
Communauté urbaine de Québec, avec son conseil, adopte une
résolution pour demander au ministère des Affaires culturelles
une subvention pour l'achat de livres qui correspondent aux besoins de la
population de L'Ancienne-Lorette, livres qu'on mettrait sur les rayons de la
bibliothèque de la polyvalente. La réponse est celle-ci: Tant et
aussi longtemps que vous utiliserez la bibliothèque de la polyvalente,
on ne vous donnera pas de subvention pour l'achat de livres.
On veut peut-être donner une leçon au gouvernement et qu'on
en vienne enfin à avoir beaucoup de concertation entre chacun des
ministères pour le mieux-être de toute la population de la
province, et peut-être aussi pour épargner l'argent des
contribuables qui n'en peuvent à peu près plus, s'ils sont tous
comme moi.
M. Léonard: Je vous ferai remarquer que lorsque vous
parlez de ces ententes, il s'agit de gestion de services et non de localisation
d'équipement et d'infrastructure. Cela, je pense qu'il y a eu des
erreurs de part et d'autre là-dessus, parce qu'on a vu aussi des
polyvalentes dans les champs. Je crois que là-dessus, c'est vrai que
ça prend de la concertation, mais le schéma d'aménagement
porte justement sur la localisation des équipements, comme les plans
d'urbanisme aussi portent sur la localisation des équipements.
Cela me paraît important de rectifier sur ce plan.
J'aurais une autre question, peut-être d'information, à
poser. Par exemple, vous connaissez des commissions scolaires, est-ce que vous
pouvez nous dire si ça pose tant de difficultés que ça de
s'entendre avec la municipalité quant à la localisation des
équipements, ou que la municipalité inscrive l'équipement
dans son plan d'urbanisme? Pourquoi est-ce que ça poserait tant de
problèmes?
Mme Gervais: Actuellement, on respecte le zonage, tout ça,
ça n'a pas posé de problème jusqu'à maintenant,
mais on voudrait que cela n'en pose pas à l'avenir non plus.
M. Léonard: C'est ça.
Mme Gervais: C'est pourquoi, dans un plan d'aménagement
où on identifiera ou on localisera les équipements, que ce soit
les équipements municipaux ou même pour l'avenir, sur un
territoire donné où il n'y a pas d'école, la
municipalité dira à la commission scolaire: Si tu veux construire
une école, tu vas la construire là. Il faudrait on veut
participer avoir notre mot à dire et expliquer pourquoi elle ne
peut pas être cons- truite là. Je suis d'accord avec vous, M. le
ministre, qu'il y a eu des polyvalentes construites dans des champs et c'est
fort heureux, parce qu'à ce moment-là, on ne pouvait pas les
construire au centre-ville. Cela nous a permis, par ailleurs, de céder
des terrains de plus de 1 million de pieds carrés pour $1 aux
municipalités, qui ont été fort heureuses d'y construire
des arénas ou des piscines et qui nous les louent maintenant $40 l'heure
pour les besoins des commissions scolaires.
C'est ça, M. le ministre, les faits que nous vivons
présentement.
M. Léonard: II y a des exemples à l'inverse aussi,
remarquez!
Une dernière question, le projet de loi prévoit dans sa
formulation actuelle que les intentions des commissions scolaires sont
transmises aux comtés par le ministre de l'Education, par l'entremise du
ministre responsable de la loi, en vertu des articles 11 et 21. Mais c'est le
ministre de l'Education. Est-ce que vous ne croyez pas que ça va
permettre de garantir que les conseils de comté n'empiéteront pas
sur les compétences des commissions scolaires?
M. Beaumont: Le fait qu'on demeure quand même... il ne faut
pas oublier que nous nous présentons ici en tant que gouvernement local
qui a des responsabilités. Le fait que le ministre de l'Education agisse
en notre nom, nous sommes pour. Mais nous croyons que les agents les plus
impliqués sont les commissions scolaires elles-mêmes. Elles sont
en mesure d'évaluer la portée de certains actes ou de certains
plans ou schémas qui peuvent être faits par les
municipalités. Effectivement, nous croyons que la garantie serait
supérieure et de beaucoup, si les commissions scolaires
participaient.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, je doute fort qu'on puisse
interpréter les représentations de la Fédération
des commissions scolaires à propos d'un problème strictement de
localisation d'équipements scolaires. Quant à moi, il me semble
que les appréhensions de la fédération sont tout à
fait fondées.
Quand on constate, comme nous le faisait remarquer le Conseil
régional de développement des Laurentides ce matin, que les
commissions scolaires ne sont même pas consultées, à
l'article 22, par exemple, on se rend compte que le conseil de comté,
avant d'élaborer sa version définitive du schéma
d'aménagement, doit tenir compte, s'il y a lieu, de l'option de
l'aménagement retenue, des avis du ministre, des municipalités,
du résultat des consultations, des plans et règlements
d'urbanisme existants et de tout autre élément pertinent. C'est
à cet article qu'on retrouve la représentation des commissions
scolaires. C'est un tout autre élément pertinent. C'est faire
bien peu de cas des gouvernements scolaires. Le ministre disait
tantôt:
Iriez-vous jusqu'à dire que le réseau des affaires
sociales devrait avoir les mêmes prérogatives que réclame
la fédération?
Il faut quand même se rendre à l'évidence que les
commissions scolaires sont des gouvernements locaux élus, jusqu'à
nouvel ordre, de façon démocratique, de même façon
que les conseils municipaux et que, si tel est le cas, il y a des raisons
profondes à cela. A moins qu'on ne nous dise qu'on a l'intention de
chambarder cela, il y a lieu effectivement de donner une considération
tout à fait spéciale aux commissions scolaires.
Lorsqu'on étudie le projet de loi 125, parallèlement
à la réforme fiscale que vient d'annoncer le ministre des
Finances, où les commissions scolaires ont perdu, à toutes fins
utiles, le pouvoir de percevoir directement chez les contribuables des taxes
foncières, lorsqu'on constate que de tous les livres verts, de tous les
fascicules que le ministre d'Etat à l'aménagement a produits sur
la politique de décentralisation, est celui qui, à mon avis, est
le plus important, manque toujours et que le ministre, ce matin, refusait
même de nous donner une idée du moment où le fascicule no 5
sur le réaménagement des pouvoirs serait disponible, lorsqu'on
met tout cela ensemble et que, d'autre part, tout ce qu'on a, c'est une
déclaration du premier ministre qui dit: On s'engage à ce que les
commissions scolaires demeurent, je suis tout à fait d'accord avec la
fédération de poser énormément de questions.
Dans le cas du projet de loi 125, c'est bien sûr, le ministre nous
le rappelle assez souvent, nous ne sommes pas en train de parler de cela. On
parle, semble-t-il, strictement d'aménagement. Mais tous conviendront
que les omissions du projet de loi 125 par rapport au domaine scolaire en
disent très long. A mon avis et c'est là, je pense, la
grande faiblesse du projet de loi 125, il y a lieu pour le gouvernement de
spécifier là où il s'en va.
Quant à moi, il me semble que si les recommandations de la
fédération ne sont peut-être pas possibles à retenir
dans leur ensemble, il y en a au moins quelques-unes qui devraient avoir une
meilleure réception du ministre que ce qu'il en a fait cet
après-midi.
Vous disiez tantôt que vous n'êtes pas en mesure de formuler
un texte quant à une définition des mots "équipements" et
"infrastructures". Je vous demanderais, par contre, si vous ne pourriez pas
préciser votre pensée sur ce processus, cette formule d'arbitrage
dont vous avez parlé, sans répéter tout ce que vous avez
dit en réponse aux questions du ministre tantôt.
M. Beaumont: Effectivement, quant à la formule
d'arbitrage, on la voit facilement au niveau d'un comité consultatif
formé paritairement des municipalités, des conseils de
comté. Je le vois surtout au niveau du conseil de comté et
même au niveau de la municipalité, des municipalités et des
conseillers municipaux, ainsi que des élus scolaires, où une
décision serait prise, qui trancherait le litige entre les deux. C'est
tout simplement cela. Je crois qu'il y a quand même moyen d'arriver
à une décision par un simple comité. Le comité qui
donnerait un avis, sa décision devrait être suivie tout
simplement
On peut aussi voir, par exemple, au niveau encore là, on
parle de refonte de la commission consultative sur l'urbanisme, une
participation des commissions scolaires, toujours à condition que ce
comité soit obligatoire et qu'il siège
régulièrement. S'il n'y a pas de participation ou si ce
comité n'est pas mis en place, on ne peut pas parler d'arbitrage ou au
moins de parité sur des sujets qui nous intéressent. C'est
simplement au niveau de comités, à mon avis, dans la structure
comme telle.
On pourrait aussi dire: On va donner à la commission nationale le
pouvoir de trancher un litige, mais nous croyons que ce n'est pas
nécessaire. A notre avis, une réunion des élus locaux
serait suffisante pour trancher le litige. C'est simplement cela.
M. Gratton: Dans un autre ordre d'idées, vous
mentionnez... En fait, dois-je comprendre de vos représentations que la
délimitation des comtés renouvelés... Vous nous dites,
à un moment donné, que les commissions scolaires refusent
catégoriquement toute nouvelle délimitation de leur territoire.
Compte tenu de la nécessité, de votre souhait d'être mieux
intégré à la préparation des schémas
d'aménagement, est-ce qu'en fait, vous suggérez que les conseils
de comté renouvelés soient délimités par les
délimitations actuelles scolaires?
M. Beaumont: C'est une formule qui a été
proposée. C'est un des modèles. A notre avis, il est important
que, dans la désignation territoriale, on ne cause pas de
préjudices aux droits de la commission scolaire. Advenant le cas
où il y aurait deux comtés, la commission scolaire serait
rattachée à un seul, il faut croire, pour pouvoir exercer tous
ses droits, pour qu'elle ne soit pas continuellement ballottée entre
deux conseils de comté qui ont tels buts ou tels objectifs. C'est dans
ce sens-là.
M. Gratton: Est-ce que vous pensez qu'il serait possible, en
pratique, pour une commission scolaire, d'être rattachée à
un seul conseil de comté alors que son territoire pourrait être
partagé entre deux conseils de comté qui prépareraient
chacun son schéma d'aménagement?
M. Beaumont: C'est certainement possible, puisque, en pratique,
c'est une des propositions qui ont été faites relativement au
découpage.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Très brièvement, M. le Président.
Naturellement, les commissions scolaires se sentent exclues dans le projet de
loi 125 pour ce qui a trait à l'aménagement du territoire, mais
je me demande, en dehors des problèmes scolaires, je
veux dire des infrastructures ou des équipements scolaires,
pourquoi une commission scolaire devrait être consultée, par
exemple, pour un plan de zonage, une infrastructure, ces choses-là. Je
ne parle pas pour situer une école. Je suis d'accord que la commission
scolaire devrait être consultée, mais au niveau de
l'aménagement du territoire.
M. Beaumont: Comme on le mentionnait tout à l'heure, il y
a quand même plusieurs autres sujets. On pense, entre autres, aux
objectifs que se sont donnés les commissions scolaires relativement
à la culture, relativement aux loisirs, relativement aux sports. En
fait, ce sont tous des sujets qui intéressent grandement les commissions
scolaires. Je pourrais même aller plus loin. Je pourrais vous dire que,
pour la localisation d'un parc, en fonction peut-être de la construction
d'une école, ce serait peut-être souhaitable dans certains cas. Il
y a d'autres sujets.
Ce que nous demandons, ce n'est pas faire l'aménagement, que
l'aménagement soit transféré aux commissions scolaires,
c'est que, lorsqu'une question touchant les commissions scolaires ou touchant
sa clientèle doit être décidée, les commissions
scolaires soient consultées et aient leur mot à dire. C'est
simplement cela que nous désirons.
M. Goulet: A un moment donné, dans votre mémoire,
vous dites: Les commissions scolaires s'opposent à ce que, sous le
couvert de l'aménagement, on s'empare d'un domaine de compétence
dans des matières tels l'éducation, cela va de soi, la culture,
cela peut aller, et les loisirs. Les commissions scolaires refusent qu'au nom
de l'aménagement, la mission qu'on leur a confiée dans ce secteur
soit transférée à d'autres autorités. Je vais m'en
tenir au niveau des loisirs. Madame, tout à l'heure, vous avez
parlé de concertation, cela va, au niveau de certains équipements
telles arenas, piscines. Naturellement, la commission scolaire devrait
être consultée. (15 h 45)
Mais ce qu'on a reproché, en tout cas, dans nos comtés
ruraux je fais une distinction peut-être n'est-ce pas la
même chose en ville, parce que j'ai eu l'occasion d'enseigner dans votre
commission scolaire et de vivre d'autres problèmes dans les
comtés ruraux aux commissions scolaires, c'est d'avoir les
équipements, surtout au niveau des loisirs et des sports. Ce sont les
commissions scolaires qui les avaient, mais jamais le public ne pouvait s'en
servir ou à peu près pas. J'entends par là des gymnases,
des piscines, des patinoires. Dans nos petits villages ruraux, chaque
municipalité devait avoir deux piscines, même s'il y en avait une
de chaque côté de la clôture, deux patinoires, parce que
c'était à peu près impossible, en dehors des heures de
classe, que la population puisse bénéficier de ces
équipements. Peut-être que depuis un an ou deux, cela a
changé, mais quand vous disiez tout à l'heure, qu'on loue une
aréna $40 aux commissions scolaires, pour nous, c'était le
contraire. Ce sont des petites salles ou des petits gymnases qu'on loue
lorsqu'on en a besoin pour une heure ou deux. Les commissions scolaires nous
les louent $50 et $100.
Ce que vous déplorez, on l'a vécu tellement longtemps. Les
commissions scolaires avaient été tellement consultées au
niveau des loisirs en tout cas, en ce qui a trait au niveau des loisirs,
je m'en tiens surtout au troisième paragraphe de la page 11 de votre
mémoire que l'équipement de loisirs qu'on avait dans nos
municipalités était à l'intérieur des
écoles. C'étaient à peu près les seuls
équipements de loisirs qui existaient, mais ils n'étaient pas
disponibles à la population, sauf à la population scolaire. En
tout cas, c'est ce qu'on reprochait beaucoup. Je ne sais pas là-dessus,
si vous avez une autre philosophie...
Mme Gervais: Je remarque que vous employez le passé. Vous
dites: On reprochait. Est-ce qu'on reproche encore autant? Il faut vous dire
que les commissions scolaires sont aux prises avec certaines contraintes. Ce
n'est pas le désir qui manque d'ouvrir les portes en tout temps à
la population d'un territoire donné, qu'il soit municipal ou scolaire.
C'est le fait que quand le concierge a fait son ménage, la Commissions
scolaire n'a pas les moyens de le payer une deuxième fois après
la soirée. A ce moment, on disait aux municipalités: Le seul
moyen de vous servir de cela, c'est de vous charger de ces frais additionnels,
parce qu'on ne peut pas les payer. Cela s'est amélioré de
beaucoup maintenant, mais il reste qu'on est aux prises aussi avec des
conventions collectives pour le personnel de soutien, etc. Si vous faites
entrer ces gens passé telle heure, vous êtes obligés de
payer du temps supplémentaire, etc. Vous savez, en fait, ce que je veux
dire, surtout si vous me dites que vous avez été enseignant. Je
ne sais pas si cela existe encore dans certains milieux. Il y a même des
salles d'écoles qui servent de salles de conseil municipal dans les
vraies petites municipalités. Il ne faut pas oublier, quand on parle de
découpage de territoire et qu'on dit qu'on voudrait respecter les
territoires des municipalités scolaires, il y a chez la population un
sentiment d'appartenance à l'école je dis "à
l'école" qui était presque autrefois le sentiment
d'appartenance à la paroisse qui diminue pour se rapporter plutôt
à l'école de son quartier ou de son coin. Si, à un moment
donné vous avez un territoire qui est découpé, je vois mal
la population d'un territoire scolaire, qui se sent bien rapproché de
son école, justement parce que toute la population de ce territoire
donné va dans les gymnases, ou enfin, les clientèles de niveau
primaire, élémentaire et adultes vont dans ces écoles,
dire: Je pars du comté de l'autre côté de la rue. Cette
école n'est pas dans mon comté et je n'y vais pas. J'avais
l'habitude d'appartenir à cela.
Je pense que ce ne serait pas difficile de tenter, dans le
découpage futur, de respecter ce qui existe, en autant que faire se
peut. Bien sûr, il y aura des moments où cela ne sera pas
possible. C'est pourquoi on vous dit que nous souhaitons
participer aux décisions qui seront prises. Remarquez qu'on ne
tient pas à participer aux choses qui ne nous intéressent pas du
tout. On ne veut pas aller se mêler des choses municipales qui ne nous
regardent pas, mais on veut qu'on respecte les commissions scolaires. Je pense
qu'il faut quand même tenir compte de ce que les commissions scolaires
ont fait jusqu'à présent au niveau de la province de
Québec.
M. Goulet: Une dernière question. Au niveau des
commissions scolaires, vous avez déclaré je me souviens
d'avoir entendu cela dernièrement Nous voulons purement et
simplement être reconnus comme des véritables gouvernements locaux
et faire affaires directement avec le ministre. Dans le domaine de
l'éducation, personnellement, je reconnais que le grand maître
d'oeuvre doit être la commission scolaire, je le reconnais.
Naturellement, les conseils municipaux voulaient également faire
affaires directement avec les ministres et c'est pour ça qu'on veut
éviter les pèlerinages aux bureaux des ministres et on parle un
peu de décentralisation. Mais est-ce que vous avez pensé à
une formule je vous pose la question au niveau de la
Fédération des commissions scolaires, où, par exemple, la
commission scolaire pourrait être représentée au niveau du
conseil de comté? Ainsi, on tiendrait compte des priorités des
commissions scolaires. Est-ce que vous avez imaginé une telle formule?
Est-ce que ce serait possible, physiquement parlant, ou si vous dites: Non,
pour telle ou telle raison, ce serait tout à fait impossible que les
municipalités soient représentées, mais aussi que les
commissions scolaires pourraient être représentées à
l'intérieur de ces conseils de comté? Vous n'avez pas...
Mme Gervais: J'ai envie de vous répondre: Ce serait
presque souhaitable. Pour ce qui est de la formule, je ne sais pas si mes
collègues...
M. Beaumont: Déjà, les municipalités
s'entendent peu ou pas sur la représentativité au sein de cet
organisme. Il est assez difficile de nous inclure dans un schéma qu'on
ne connaît pas. Mais nous calculons que, dans les matières qui
touchent l'éducation, une représentativité d'élus
serait fort souhaitable.
M. Goulet: J'ai terminé, M. le Président, je vous
remercie.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Joliette-Montcalm.
M. Chevrette: M. le Président, j'ai étudié
avec un très grand souci, à la virgule près, le
mémoire de la Fédération des commissions scolaires. Je
voudrais être très franc dans mes propos, parce que,
personnellement, je considère que le menu principal qui est dans votre
mémoire se compose beaucoup plus de propos au niveau de la
décentralisation qu'au niveau de l'aménagement.
C'est rempli, à mon sens à moi, avec les yeux avec
lesquels j'ai lu votre mémoire, des appréhensions que vous avez
face à d'éventuels pouvoirs qui pourraient éventuellement
être conférés à ces structures qui visent, d'abord
et avant tout, de par le projet de loi no 125, un schéma
d'aménagement.
Ceci dit, je voudrais quand même vous poser quelques questions.
J'ai cru déceler tout d'abord une contradiction. La première,
c'est quand vous dites que vous voulez collaborer à
rétablissement du schéma d'aménagement d'une façon
conjointe ou paritaire, en tout cas, d'une façon engagée et que
vous vous réservez un droit de véto ou un droit de refus. Comment
conciliez-vous ça, dans un premier temps?
Mme Gervais: Ecoutez! On ne vous dit pas: On va refuser telle
chose. On dit que, pour faire valoir nos droits, on peut participer. Vous
dites, dans votre projet de loi: On va consulter tel organisme, tel organisme.
Jamais on ne dit: Nous consulterons également la commission
scolaire.
M. Chevrette: Mais à votre deuxième recommandation
madame, à la page 15, sous le thème "participation", vous dites:
"Les commissions scolaires doivent pouvoir refuser ou accepter toute
proposition d'aménagement qui les intéresse directement". Donc,
si ce n'est pas un droit possible de refus, je ne sais pas ce que c'est.
Mme Gervais: "Doivent pouvoir refuser", s'il n'y a pas
d'arbitrage, si on ne nous permet pas, par exemple, cette possibilité
d'un comité paritaire comme on vous disait tantôt, où on
aura le droit de se faire entendre et où... Selon moi, quand il y a
arbitrage, il y a un arbitre qui préside. L'arbitre prend sa
décision, bien sûr, mais, au moins, on se sera fait entendre et on
aura fait valoir nos droits et ce pourquoi on veut telle et telle chose. Ce
n'est pas par fantaisie. La fantaisie, on n'a ni le temps, ni les moyens de
s'en payer dans les commissions scolaires. Nous souhaitons aussi un
aménagement rationnel du territoire, mais qu'on tienne compte des
besoins de la commission scolaire, parce que la commissions scolaire a des
objectifs qui lui sont propres, qui ne correspondent pas du tout à ceux
des municipalités. C'est pourquoi on souhaite être
consultés et on souhaite participer.
M. Chevrette: Au niveau de l'élaboration du schéma
d'aménagement, on va consulter la population. Il y a différentes
phases de prévues. Ce sont les mêmes gens qui votent autant pour
un commissaire d'école que pour un échevin qui ont à se
prononcer sur la localisation des équipements et à définir
des zones industrielles, commerciales, résidentielles, c'est le
même monde qui a à vivre dans un même milieu et à
ordonner tout ça.
En quoi, ces mêmes gens, qui participent à un schéma
d'aménagement dans une région d'appartenance, pourraient-ils
venir en conflit quand il s'agit d'un palier de gouvernement, comme vous dites
vous-même, scolaire et un autre municipal?
Est-ce que l'individu parent que vous consulteriez en fonction de la
localisation d'un équipement scolaire se prononcerait
différemment s'il est consulté par une commission scolaire que
s'il était consulté par un échevin municipal?
Mme Gervais: Pas du tout, vous dites: Nous allons consulter la
population, nous allons consulter les municipalités. Si vous consultez
toute la population, la population répondra d'elle-même. Je pense
qu'il n'y a personne qui est bâillonné mais vous allez consulter
la population, les individus, individus qui votent pour s'élire des
échevins, que vous dites, qui votent également pour
s'élire des commissaires d'école, vous allez en plus consulter la
municipalité, pourquoi pas la commission scolaire? Ce sont deux
gouvernements où il y a des élus en suffrage universel de la
même façon que les municipalités et les commissions
scolaires. On représente les parents et les contribuables. On peut dire
que les municipalités représentent les contribuables, ce sont les
objectifs qui sont différents. Mais alors, ou vous consultez la
population et vous vous dites: Je n'ai pas besoin de consulter la
municipalité, les gens qui ont voté pour ces échevins sont
consultés, pourquoi irais-je consulter la municipalité? C'est la
même chose que vous me dites là.
M. Chevrette: Dans le schéma d'aménagement qui est
normalement dévolu, en termes de responsabilités, aux élus
municipaux, ils auront à définir l'endroit où,
éventuellement, il y aura des équipements scolaires. Donc, ces
gens, en se prononçant une fois sur la localisation de ces
équipements, se trouvent à donner leur opinion d'une façon
très précise.
Mme Gervais: Je ne sais pas.
M. Chevrette: II y a une autre chose qui m'a tracassé au
niveau de votre mémoire et au niveau de votre exposé
préliminaire. Vous avez utilisé quatre termes; vous avez
utilisé tout d'abord, "gouvernement scolaire", vous avez utilisé
le terme "territoire agricole", vous avez utilisé le terme
"municipalité scolaire" et vous parlez de "commission scolaire" bien
sûr aussi. Je voudrais que vous me démêliez cela au juste
parce que municipalité scolaire en fonction d'abord de
l'intégration que vous recherchez au niveau de la
fédération, est-ce que le vrai terme ne serait pas
territoire?
Mme Gervais: Le territoire d'une commission scolaire, c'est
reconnu dans la Loi de l'Instruction publique c'est le territoire d'une
municipalité scolaire qui peut être différente du
territoire de la municipalité où est située cette
commission scolaire. J'habite Les Saules, la commission scolaire Montcalm est
le regroupement des commissions scolaires Duberger-Les Saules. Duberger-Les
Sautes sont deux quartiers de la ville de Québec et on ne fait pas
partie de la Commission des écoles catholiques de Québec, c'est
la commission sco- laire Montcalm, pourquoi? Parce qu'il y a eu regroupement
scolaire avant que les municipalités se décident à
fusionner. J'étais présidente de la commission scolaire à
ce moment-là, le maire des Saules m'a dit: Mme Gervais, qu'est-ce qui
vous presse? Avant qu'une loi vienne nous trancher la question comme cela
et elle s'en venait rapidement nous allons procéder
volontairement. Ce que nous avons fait; mais remarquez qu'à ce
moment-là, les édiles des Saules, qui était une petite
municipalité, étudiaient une possibilité de fusion avec
Sainte-Foy et deux ans plus tard, deux ans après le regroupement de ces
commissions scolaires, la municipalité Les Saules fusionnait avec la
ville de Québec. Les municipalités ne vont pas vite.
M. Chevrette: De par la loi qui régit les corporations
municipales, il appartient aussi aux municipalités de bâtir ses
plans d'aménagement. Vous dites vous l'avez affirmé
vous-même que le découpage d'une municipalité
scolaire ne correspond pas au découpage d'une corporation municipale et
vous demandez au ministre de l'aménagement de donner un pouvoir
d'intervention à une commission scolaire sur un territoire qui ne
correspond pas à la corporation municipale. Autrement dit, si vous
êtes présidente d'une commission scolaire, d'une
municipalité scolaire, pour reprendre le terme que vous avez
utilisé, qui déborde le cadre de la corporation municipale, vous
voudriez avoir un droit de veto ou un droit de refuser un pouvoir qui est
dévolu depuis des centaines d'années aux corporations
municipales. C'est cela que vous dites, non? Rectifiez! (16 heures)
M. Beaumont: Si vous me permettez, on demande quand même de
conserver, autant que faire se peut, la même désignation
territoriale que celle des commissions scolaires et des municipalités.
Il y a trois propositions faites dans les documents de décentralisation.
C'est une des trois propositions. On peut, dans un découpage, tenir
simplement compte des municipalités et aussi des commissions
scolaires.
Je voudrais en revenir à ce que vous disiez tout à
l'heure, relativement aux citoyens qui vont voter, qui vont donner leur avis.
Ce sont les mêmes gens qui ont élu les commissaires et ce sont les
mêmes gens qui élisent les échevins. Je ne crois pas qu'il
y ait dualité. D'abord, dans l'élaboration, je crois que
préalablement la commission scolaire peut apporter un avis qui est
peut-être différent, qui est peut-être nuancé, qui a
peut-être certains objectifs autres que les objectifs municipaux, qui
peut être bon dans l'élaboration du schéma. Une autre
chose, c'est que, dans le cadre présentement du projet de loi, il ne
faut pas oublier que le référendum a un caractère
consultatif. C'est à ce niveau-là que c'est peut-être un
frein, si on veut.
M. Chevrette: Je prends un exemple de négociations qui
peuvent avoir lieu entre deux corporations municipales. Je suppose qu'une
corpora-
tion scolaire désire bâtir une école ou projette la
construction d'une école aux frontières d'une municipalité
bien identifiée, mais que, d'autre part, l'autre corporation a un site
industriel tout près de la frontière même, elle aussi. La
logique veut que les deux corporations se parlent pour définir quel type
de zone elles vont mettre dans ce coin-là. A ce moment-là, elles
en arrivent à la conclusion toutes les deux que le seul endroit que la
corporation possède pour placer une zone industrielle, c'est là,
mais que, par contre, il y a possibilité de transférer le site
pour la projection de l'école dans un autre endroit.
Vous autres, comme corporation scolaire, vous voudriez absolument
construire votre école là, parce que c'est près du centre
administratif, parce qu'il y a déjà quelques équipements.
Qu'est-ce qui arriverait, pour bien illustrer ce que vous dites dans votre
mémoire?
Mme Gervais: On vous a dit, M. le député, qu'on
respectait les règlements de zonage pour construire des écoles.
On ne va pas construire des écoles là où il y a un projet
de centre industriel. Cela s'est déjà fait, mais ça ne se
fait plus maintenant ces choses-là. On approche les écoles le
plus possible de la clientèle. Moins il y aura d'autobus scolaires sur
le territoire, mieux ce sera. Bien sûr, ce n'est pas tout à fait
un fléau parce que c'est utile, mais, moins il y en aura, mieux ce sera.
Qu'est-ce que ça donne à une commission scolaire de vouloir... Il
ne faut quand même pas ridiculiser l'affaire. On respecte les
règlements de zonage, et les règlements municipaux de zonage, la
commission scolaire se doit de les étudier, de les respecter et
d'étudier aussi les prochaines clientèles, la population;
à quelle place la ville a un projet domiciliaire, où la
localisation d'une école va le mieux répondre aux besoins de la
population. Ce n'est pas le projet d'aménagement, le projet de loi 125
qui va changer ce qui existait. On a toujours respecté cela. On parle de
comtés renouvelés. Si tout était si beau dans les
comtés, on ne parlerait pas de comtés renouvelés, on ne
parlerait pas de nouvelles définitions territoriales. On parle de
nouvelles définitions territoriales, de redécoupage de
comtés, c'est bien sûr qu'on veut aller vers des changements,
probablement nécessaires, je ne suis pas contre ça, ça ne
me regarde pas, je ne me mêle pas de ça. Mais je me dis: Comme il
va y avoir des changements, on souhaiterait être consultés sur les
changements, pour que cela crée le moins possible de mésentente.
Il va y avoir un nouveau redécoupage des comtés, oui ou non?
Sinon, pourquoi parler de comtés renouvelés?
M. Chevrette: Je vais vous donner, pour terminer trente
secondes une petite impression. Comme vous venez d'affirmer que vous
avez toujours respecté les règlements de zonage, c'est bien
évident, c'est quasiment implicite que vous respecteriez le nouveau
découpage. Mais ce qui vous soucie le plus, c'est de conserver
l'autonomie des commissions scolaires.
Mme Gervais: Mon grand souci, c'est qu'on reconnaisse, M. le
député, que les commissions scolaires existent. M. le ministre a
répété tantôt que le premier ministre a dit: "Les
commissions scolaires vont rester." J'ajouterai qu'il a dit: "au moins
jusqu'à la prochaine élection." Il ne pouvait pas engager les
autres gouvernements, si c'est un autre gouvernement. Il n'a même pas
engagé le sien, si c'est le sien qui est réélu. Il a dit:
"au moins jusqu'au prochain gouvernement."
Cela a été affirmé et répété,
comme dit M. le ministre, à la conférence. On s'était
opposé, M. le ministre est bien au courant on avait parlé
autrefois de possibilités de gouvernements régionaux qui auraient
juridiction sur les commissions scolaires très fermement à
ça. On s'oppose à ce que l'éducation relève des
gouvernements régionaux. On nous a dit: N'ayez crainte, on ne pense plus
à cela, c'est oublié. On dit que ces gens sont sérieux,
ils nous l'ont dit et on les croit.
Mais on veut être consulté sur certaines choses. Remarquez
qu'on ne relève pas tout le projet de loi, il y a tellement de choses
qui ne nous regardent pas, on s'arrête à quelques articles tout
simplement, pour faire valoir nos droits, de la même façon qu'il
est venu des CRD, etc., pour faire des représentations. Je pense qu'on
représente quand même à peu près 200 commissions
scolaires dans la province. Vous avez eu la générosité
d'accepter que nous venions présenter notre mémoire. Nous en
sommes très contents. On espère que vous en tiendrez compte. Ce
n'était pas pour nous amuser que nous avons préparé un
mémoire à l'intention de la commission parlementaire.
Le Président (M. Marcoux): Le député de
Gatineau.
M. Gratton: Premièrement, M. le Président, je
voudrais simplement réagir à une affirmation qu'a faite le
député de Joliette qui reprenait la même affirmation faite
à de nombreuses occasions, par le ministre. On dit à nos
interlocuteurs depuis le début de la semaine qu'il ne s'agit pas de
définir la politique de décentralisation, ce n'est pas de cela
dont on discute ici à la commission parlementaire, on parle
d'aménagement. Il faut bien se rendre à l'évidence qu'en
parlant du projet de loi 125, on parle d'une nouvelle structure. En fait, les
conseils de comté existent, on en convient. Mais on veut les renouveler,
comme madame le disait tantôt, on veut même redéfinir leurs
territoires et on veut leur donner des pouvoirs accrus en matière
d'aménagement, pouvoirs qu'ils n'ont pas présentement.
Or, une fois qu'on aura fait tout ce travail et qu'on aura monté
toute cette structure, il est bien évident que si le ministre nous
disait aujourd'hui qu'il n'est pas question de leur confier aucun autre pouvoir
que l'aménagement, je pense que vos appréhensions ne seraient
probablement pas fondées et on pourrait se laisser et parler
d'aménagement. On ne sait même pas encore si ce seront ces
conseils de comté renouvelés qui seront chargés de
l'application de la loi sur le
zonage agricole, c'est une hypothèse. Ce n'est pas encore une
certitude, personne ne le sait.
Donc, on peut supposer toutes sortes de choses. Comme dans la politique
de décentralisation, on ne connaît pas encore les intentions du
gouvernement quant au remaniement des pouvoirs, parce qu'on en parle aussi, il
faut qu'entre autres, la Fédération des commissions scolaires
soit soucieuse de ce qui peut découler de l'adoption du projet de loi
125.
Quant à moi, j'invite les membres de la fédération,
tout en les remerciant de la présentation de leur mémoire,
à demeurer très vigilants. On aura sûrement besoin de
surveiller de très près l'évolution de cette
décentralisation dont on connaît à peine les débuts
au moment où on se parle.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Beauce-Nord.
M. Ouellette: Merci, M. le Président. Deux points sur
lesquels j'aimerais revenir pour obtenir plus de précision de votre
part. D'abord, vous parlez abondamment de consultation des commissions
scolaires dans l'élaboration du schéma d'aménagement. Si
je regarde la loi, je vois qu'entre la résolution d'entreprendre un tel
schéma et le moment de sa mise en vigueur, il y a une quinzaine
d'étapes. A au moins deux occasions, on parle d'assemblées
publiques, on parle même d'une possibilité de
référendum quelque part, avant la fin, et on parle, à
plusieurs endroits, d'avis du gouvernement. J'aimerais savoir si, selon vous,
la consultation des commissions scolaires, au niveau des assemblées
publiques, vous suffirait en termes de consultation, sinon, est-ce que vous ne
pouvez pas, par l'entremise du ministre de l'Education, intervenir à
travers les étapes où on parle d'avis du gouvernement?
M. Beaumont: On peut toujours, pour employer la même
expression que tout à l'heure, faire des pèlerinages chez les
ministres et je pense que ce serait beaucoup plus simple, à mon avis,
que tout simplement, on inscrive dans la loi que les commissions scolaires
doivent être consultées. Ce serait fort simple. Effectivement,
c'est vrai et c'est ce qui est surprenant d'ailleurs. Alors qu'on porte une
très forte attention à la participation, on exclut, on ne sait
trop pour quel motif, les commissions scolaires. Pourtant, Dieu sait que leurs
immobilisations vont être affectées quand même par la
localisation, pour employer les termes du ministre, qui va être
décrétée dans ces schémas.
M. Ouellette: Vous n'avez pas l'impression qu'étant
donné que des schémas d'aménagement, il n'en existe
à peu près pas au Québec, quelques-uns à peine, que
depuis toujours, vous avez fait affaire avec les municipalités, en ce
qui regardait l'implantation du réseau scolaire. Etant donné que
vous avez toujours fait affaire avec les municipalités, croyez-vous que
la création de ces conseils de comté renouvelés devient
une entrave addition- nelle à votre planification, dans le territoire
d'une commission scolaire précise? Autrement dit, est-ce que la venue de
cette structure régionale risque d'être une entrave additionnelle
entre la façon que vous aviez autrefois de vous adresser aux
municipalités, pour implanter votre réseau?
M. Hudon: C'est peut-être important, à ce moment-ci,
de se rappeler que le territoire des commissions scolaires peut couvrir
plusieurs parties de comtés. On peut avoir, par exemple, un territoire
d'une commission scolaire qui, effectivement, touche à trois
comtés. Il me semble que ce serait important que la commission scolaire
donne son avis avec une option tout à fait différente, avec une
orientation tout à fait différente de celle que l'on peut avoir
au niveau d'un seul comté. Je ne crois pas que l'intention des
commissions scolaires serait de bloquer comme tel un projet
d'aménagement qui, en fait, correspond, à plusieurs points de
vue, à des améliorations que l'on souhaite au niveau de la
population.
Mais ce serait beaucoup plus pour donner un avis, un éclairage,
sur un projet quelconque, avec une orientation différente. Lorsqu'on est
au niveau d'une commission scolaire, que l'on touche à trois
comtés, que les véhicules de transport des écoliers
sillonnent à travers ces trois comtés, il peut arriver à
un moment donné, dans une situation quelconque, que ce soit
effectivement un éclairage très intéressant au niveau d'un
comté que d'avoir celui de la commission scolaire. Je pense que c'est
là-dessus qu'il faut regarder ce que l'on veut
précisément.
Si le comté comme tel n'a pas cet éclairage qui peut venir
de la commission scolaire dont le territoire couvre, en tout ou en partie, un,
deux ou trois comtés, je vous assure qu'on peut se retrouver
éventuellement dans des situations embarrassantes et dans des situations
de conflit.
Je pense qu'il va falloir situer très bien ce qu'on veut
précisément, par rapport à un projet quelconque.
M. Ouellette: Ce que je voulais dire, c'est que depuis toujours,
c'est avec les municipalités que vous avez fait affaire. Malgré
la venue de la nouvelle structure, les municipalités demeurent et
demeurent seules maîtresses sur leur territoire, en ce qui a trait au
plan directeur d'urbanisme.
Quant à moi je peux être dans l'erreur mais
j'ai l'impression que c'est avec les municipalités que vous allez
continuer à négocier. A ce niveau-là, il n'y a rien de
changé. Quant au schéma d'aménagement, je me pose la
question à savoir s'il risque vraiment d'affecter vos orientations quant
à l'implantation de votre réseau, à son
développement à venir.
M. Hudon: On est un peu dans les nuages, à savoir qu'on
n'a pas de définition précise actuellement, des
équipements, par exemple. On ne le sait pas. Les infrastructures, c'est
quoi? Est-ce que cela touche des commissions scolaires ou si cela ne les touche
pas? Si, par exemple, dans une
définition d'équipement, on dit: Ce ne seront que les
équipements qui appartiennent aux municipalités, aux corporations
municipales, on dit: II n'y a pas de problème. Mais si cela touche
également les équipements qui appartiennent aux commissions
scolaires, on dit: Attention, on a quelque chose à dire. Cela pourrait
être une définition d"'équipements". (16 h 15)
Dans les infrastructures, on mentionne, par exemple, le transport des
écoliers. On en a une infrastructure, on en a une actuellement. On en a
des services de transport. Si cela concerne également le transport des
écoliers, on a quelque chose à dire. Nos horaires, par rapport
à l'industrie, il faut quand même qu'il y ait quelqu'un à
un moment donné qui s'en mêle. Je suis bien d'accord que le
citoyen va aller voter, mais, avant tout cela, il y a peut-être un moment
ou une étape qui seraient très importants dans le
développement éventuel des infrastructures, des
équipements, tant au niveau municipal qu'au niveau scolaire, et c'est
là qu'on pense en tout cas qu'on a quelque chose à dire.
M. Ouellette: Ma deuxième question rejoint le
découpage. Tout à l'heure, vous disiez qu'il serait souhaitable
que les conseils de comté coïncident le plus possible avec le
territoire des commissions scolaires. Si on répondait à votre
voeu, je pense qu'on massacrerait littéralement l'esprit fondamental de
ce projet de loi, qui est de ne pas imposer de Québec, sur la tête
des citoyens en régions, un plan bien précis, comme on a fait
à l'opération 55, par exemple.
Vous faisiez allusion également aux territoires ou aux
régions d'appartenance. Je peux vous dire que j'ai vécu
l'opération 55 en tant qu'enseignant, dans une région où
il y avait un sens très développé de l'appartenance. On
s'est même débattu farouchement pour que le gouvernement modifie
son plan des territoires scolaires, parce qu'on se rendait compte qu'en
l'appliquant tel qu'imposé de Québec, on venait mettre la hache
dans notre territoire d'appartenance. Si vous voulez un exemple précis
madame le connaît peut-être lorsqu'on a
décidé de prendre la région de Sainte-Marie-de-Beauce, qui
avait toujours vécu avec les régions de Saint-Joseph,
Beauceville, Saint-Georges, et de la rattacher à la Commission scolaire
régionale Louis-Fréchette, c'est bien de valeur, mais on venait
de mettre la hache carrément dans notre région
d'appartenance.
Vous savez tout aussi bien que moi les conséquences
négatives de cela. Vous disiez tout à l'heure que les gens
s'identifiaient de plus en plus au territoire scolaire et c'est très
vrai. La loi 125 vient dire aux citoyens: Entendez-vous donc entre vous et
délimitez ce territoire d'appartenance selon la profondeur du sens
d'appartenance que vous avez dans vos régions.
Si on répondait à votre voeu, d'une part, on
répéterait, à mon sens, les erreurs de l'opération
55. Je ne fais de reproche à personne, mais on l'a vécue quand
même. Cela a été à ce point douloureux que quinze
ans après, on regrette encore, dans certains coins, l'imposition de
Québec sans consultation.
On est mieux de sacrifier l'uniformité des deux territoires,
scolaires et comtés municipaux, pour permettre aux gens de
redéfinir leur territoire d'après l'évolution qu'ils ont
connue depuis quinze ans. Je pense qu'on commettrait une erreur. Il vaut mieux
vous obliger, même si ce n'est peut-être pas agréable,
d'avoir affaire à deux ou trois comtés municipaux que de
massacrer les régions d'appartenance qui, pour moi, sont essentielles,
en milieu rural en tout cas. J'aimerais avoir vos commentaires
là-dessus.
M. Hudon: J'aurais peut-être un commentaire à
formuler, c'est le suivant: II faut se rappeler que l'opération 55 avait
été mise de l'avant après des rapports d'étude de
l'éducation au niveau du Québec. A ce moment-là, on a cru
bon, au niveau provincial, d'ajouter de nouvelles structures administratives et
de couper, au niveau du secondaire, le niveau sur lequel on voulait
régionaliser.
A ce moment-là c'est un peu cela que vous relevez en fait
on n'a pas tenu compte des structures administratives des commissions scolaires
existantes. On en a ajouté, au lieu de procéder, comme on le voit
présentement, à une certaine forme d'intégration dans le
temps, ce qui aurait probablement été une étape
très intéressante à vivre. On a ajouté tout
simplement des structures administratives aux commissions scolaires
existantes.
Actuellement, le mouvement que nous avons, c'est l'intégration de
l'élémentaire, du primaire, dis-je, au secondaire, qui aurait
probablement été une étape avant celle de la
régionalisation dans la logique des choses.
Effectivement, on n'a pas tenu compte ou, enfin, on n'a pas fait, je
pense, toute la consultation nécessaire au niveau des commissions
scolaires avant d'implanter les 55 régions. C'est un peu cela qui nous
amène ici. On dit: II y a quelque chose d'important au niveau de la
province qui se décide. Les gouvernements locaux scolaires sont
là et on est en train de passer à côté.
En ce qui a trait à la question des territoires, je ne crois pas
même si on a émis tout à l'heure une opinion, à
savoir que ce serait peut-être souhaitable que les comtés
rejoignent, jusqu'à un certain point, les limites telles qu'elles sont
définies au niveau scolaire... On peut émettre ce voeu, mais je
pense qu'on est bien d'accord avec vous qu'il est préférable de
faire affaires avec deux ou trois comtés que d'avoir des structures
abracadabrantes. Là-dessus, on pourrait peut-être faire une petite
marche arrière de notre côté, mais tout de même.
Lorsqu'on décidera de ces différentes limites territoriales, il
faudrait dire: La commission scolaire, qu'est-ce que vous pensez de cela? C'est
cela, l'affaire. A ce moment, avec notre expérience de gouvernements
régionaux, jusqu'à un certain point, passez-moi l'expression, au
niveau d'une commission scolaire régionale, et même au niveau
d'une commission scolaire locale qui peut avoir deux ou trois
comtés, on pourra peut-être dire, simplement au niveau du
rôle de l'évaluation ou simplement au niveau de l'entretien des
chemins d'hiver, par exemple: Au lieu de faire une virée en plein milieu
d'un rang, passez à côté de l'école, ou enfin... On
procédera à une entente, par exemple, pour la virée de
l'autobus au milieu d'un rang.
On a apporté des exemples tout à l'heure de concertation
municipale et scolaire. Il y a peut-être aussi des exemples qui sont
regrettables. Il arrive, dans un endroit donné, que la commission
scolaire n'utilisera pas l'aréna de la place où est située
l'école, mais va préférer aller dans une
municipalité voisine, parce qu'il y a un coût horaire moindre et
aussi parce qu'on subventionne le transport. Ce qui veut dire qu'on ne paiera
pas $40 l'heure près de l'école, mais on va transporter les
élèves pour payer $20 l'heure dans la municipalité
voisine. Finalement, nous nous retrouvons avec un coût horaire de $60
l'heure, mais, parce qu'il y a une partie de subventionnée, on ne fait
pas cette distinction. A $20, cela nous permet d'avoir deux fois plus d'heures.
Il faut corriger des situations comme cela. Je me dis: En tant que commission
scolaire, avec notre expérience qui déborde les limites
territoriales des municipalités et des comtés, on pourrait
peut-être dire: Si la municipalité voisine est capable de le faire
à $20 et vous autres à $40, il y a peut-être un ajustement.
Au lieu d'aller payer $60, finalement, parce que le transport est
subventionné, on pourrait peut-être s'organiser pour avoir moins
de transport, quitte à ce qu'on fasse une entente quelconque. C'est
beaucoup plus en fonction d'une expérience qui dépasse le cadre
actuel des municipalités et des comtés que nous voulons apporter
quelque chose aux divers projets.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Léonard: Avant de terminer, très
brièvement, je voudrais simplement relever une chose qui a
été dite autour de la table, à savoir que les fascicules
verts étaient les fascicules du ministre. Je voudrais simplement citer
des choses qui sont écrites noir sur blanc dans ces documents verts. A
la deuxième page, on dit ceci: Ces fascicules sont des documents de
travail qui visent à susciter la réflexion et la discussion sur
divers aspects de la décentralisation. Ils ont été
préparés par le secrétariat à la
décentralisation ou groupe ad hoc relevant du ministère d'Etat
à l'aménagement du Conseil exécutif. Dans de nombreux cas,
leur préparation a fait appel à la collaboration du personnel
d'autres organismes ou ministères du gouvernement.
A la page IV, deuxième paragraphe, il y a un texte que je signe,
qui dit ceci: "Ces fascicules ne définissent pas une position
gouvernementale. Il aurait été anormal que ce soit de
Québec que soit définie une politique de décentralisation.
Ce sont des documents de soutien qui analysent différentes
perspectives." J'aimerais qu'on en tienne compte, parce que c'est bien
écrit, noir sur blanc.
M. Gratton: ... de tenir compte de celui sur le
réaménagement des pouvoirs, si vous pouvez nous...
M. Léonard: Là-dessus, nous avons publié ces
fascicules qui servent d'éléments à la réflexion et
nous avons publié ceux qui étaient nécessaires à
l'aménagement. Les autres viendront en temps et lieu, plus tard. Je l'ai
déjà dit ce matin, je le répéterai encore
aujourd'hui. Je vais remercier les représentants de la
Fédération des commissions scolaires de leur mémoire et
leur dire que nous allons prendre ce qu'ils nous ont dit en
considération. Nous verrons ultérieurement ce que nous en ferons.
Je pense bien que nous avons connu de bons échanges ici. Je vous
remercie beaucoup.
Mme Gervais: M. le ministre, au nom des commissions scolaires, la
fédération et ses représentants de cet après-midi
vous disent merci. Bonjour, messieurs!
Le Président (M. Marcoux): Bonjour. Je vous remercie au
nom de tous les membres de la commission.
Maintenant, j'inviterais les représentants de la commission
scolaire de Saint-Jérôme M. Robert, si vous voulez nous
présenter votre collègue.
Commission scolaire de
Saint-Jérôme
M. Robert (Yvon): Yvon Robert, directeur général;
M. Marcel Gibeault, directeur général adjoint. D'abord, excusez
l'absence d'un délégué officiel, M. Pierre Haché,
qui, compte tenu du changement d'horaire, n'a pu se joindre au groupe tel que
prévu.
Le Président (M. Marcoux): Alors, allez-y pour la
présentation de votre mémoire.
M. Robert: Un document a déjà été
adressé au ministre, que vous avez probablement entre les mains;
c'était un document de travail préparé rapidement pour
sensibiliser les commissaires et les invités, pour qu'ils se prononcent
sur le dossier.
Les remarques de la commission scolaire ne sont pas nombreuses, parce
que tout le mécanisme prévu dans le projet de loi
intéresse d'abord les municipalités et les conseils de
comté.
Lesdites remarques ne sont pas moins importantes dans l'esprit des
commissaires d'école et nous apprécions l'occasion qui nous est
offerte de venir en discuter avec les membres de la commission
parlementaire.
M. Gibeault va continuer à vous présenter le texte
rapidement, il y a seulement quelques pages.
M. Gibeault (Marcel): Oui, j'allais dire qu'il est très
court. Je passe directement aux principales remarques.
A la page 1.5 du document de travail qui vous a été
adressé, on peut lire: Si le projet de loi
prévoit la possibilité de créer un comité
consultatif d'urbanisme au niveau municipal, il n'en prévoit pas au
conseil de comté. Par conséquent, la commission scolaire ne peut
participer officiellement aux discussions que lors d'assemblées
publiques, encore que la loi n'accorde pas à la commission scolaire les
mêmes privilèges qu'aux électeurs. Je me
réfère aux articles 14 et 16 principalement.
En effet, dans les notes explicatives précédant le projet
de loi, on peut lire: Des mécanismes de consultation de la population
sont prévus à différents stades de l'élaboration et
de l'adoption du schéma d'aménagement et, plus loin, les
mécanismes d'élaboration et d'adoption du plan d'urbanisme
prévoient l'information des citoyens et la tenue d'assemblées
publiques.
La consultation semble réservée aux personnes inscrites
sur la liste électorale. De nouveau, je cite l'article 16. Donc, elle
exclut la commission scolaire, peut-être le principal propriétaire
foncier et un important contribuable, avec une évaluation
foncière, dans le cas de la Commission scolaire
Saint-Jérôme, de plus de $30 millions et des taxes
foncières d'environ $350 000 en 1980, première année de la
réforme de la fiscalité municipale.
On voit également dans le document de travail qui vous a
été adressé que les inconvénients
créés par les nouveaux intervenants dans les projets de
construction de la commission sont compensés, à notre avis, par
la planification d'un territoire agrandi. On peut se demander quel sera le
rôle de SATRA ça, c'est particulier à notre
région advenant la création d'une corporation de
comté et l'adoption par cette dernière d'un schéma
d'aménagement.
La première partie de cette remarque est un acte de foi dans la
planification sur une plus grande échelle. La deuxième est une
interrogation, puisqu'il existe déjà sur notre territoire un
organisme supramunicipal je viens de le nommer, c'est SATRA. Alors, on
se pose la question, à savoir quel sera le rôle de SATRA
après l'adoption de la loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Quel
sera également le rôle du conseil de comté si SATRA
continue d'exister après l'adoption du présent projet de loi?
Le projet de loi no 125 pourrait être la pièce
maîtresse dans le projet de création de gouvernements
régionaux et de remplacement des commissions scolaires par des
commissions de développement éducatif et culturel. Cela nous
apparaît être la grande question.
Le projet de loi est déposé en même temps que les
fascicules sur la décentralisation et les commissaires d'écoles,
qui ont vécu la régionalisation des années soixante, mais
surtout des années soixante-trois à soixante-cinq, ont l'odorat
sensible et croient reconnaître dans les conseils de comté
renouvelés de nouvelles régionales qui pourraient très
bien déborder l'aménagement du territoire et envahir d'autres
domaines ou juridictions.
Sur ce point particulier, la commission scolaire ne s'est pas encore
prononcée, puisqu'il s'agit d'une impression et non d'une certitude, et
c'est pourquoi nous posons la question aujourd'hui: Y a-t-il un rapport entre
le présent projet de loi et la création éventuelle de
gouvernements régionaux? (16 h 30)
C'est déjà le moment de la conclusion pour nous. Sous
réserve des remarques déjà citées relativement
à la nécessité de prévoir une participation de la
commission scolaire dans le processus de décision et de l'assurance que
le ministre voudra bien nous donner qu'en appuyant ce projet de loi, la
commission scolaire n'endosse pas la création d'un organisme
destiné à l'absorber, la commission donne un appui de principe
aux règles d'aménagement et d'urbanisme en fait, toute la
première partie du projet de loi et j'espère que des
amendements seront apportés au chapitre I, titre II, section I.
Première recommandation: La commission scolaire propose que le
chapitre I, titre II, section I soit amendé par l'addition de
règles relatives à la délimitation du territoire d'un
conseil de comté.
Deuxième recommandation: Que les règles mentionnées
dans la première recommandation, favorisent un partage équitable
des richesses et qu'en conséquence, la variable "capacité
financière" constitue un point majeur dans la détermination des
règles.
Ensuite, la commission demande qu'un délai suffisant soit
accordé à la population pour réagir sur les amendements.
On suppose qu'il pourrait y avoir certains amendements et on voudrait avoir un
autre délai pour pouvoir réagir.
La commission insiste également pour que le gouvernement infirme
ou confirme la prétention de la commission scolaire à savoir que
les conseils de comté "élargis" se verront éventuellement
confier d'autres responsabilités jusqu'à devenir la pierre
angulaire des gouvernements régionaux. Merci.
Le Président (M. Rancourt): M. le député de
Deux-Montagnes.
M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Cela a
été très agréable de s'entretenir ce matin avec M.
Robert, je suis sûr que ce sera tout aussi agréable cet
après-midi et je suis heureux d'accueillir avec lui M. Gibeault.
Comme nous sommes dans un véritable bain de questions scolaires,
je pense qu'on continue, en quelque sorte, l'entretien déjà
commencé avec les représentants de votre
fédération.
Votre commission scolaire a un territoire qui englobe une partie de mon
comté et M. Robert et moi avons eu l'occasion, à plusieurs
reprises, de discuter certaines questions de construction scolaire qui sont
reliées à toute la longue histoire de Mirabel et,
malheureusement, comme toute la longue histoire de Mirabel, c'est marqué
par des lenteurs administratives, je le reconnais M. Robert, de notre
côté, au ministère de l'Education, on n'a pas réussi
encore à tout débroussailler ce qu'on aurait voulu
débroussailler mais comme vous le savez, vous avez l'appui du
député en ce qui concerne ces problèmes.
Vous faites état de SATRA. Sauf erreur, je pense que SATRA
n'existe plus. En tout cas, si SATRA existe sur papier, de fait, il n'y a
personne dans la maison et la responsabilité de SATRA est passée
en héritage essentiellement au ministère des Affaires
municipales.
Cependant, comme nous l'avons bien dit lorsque nous avons parlé
de questions d'aménagement et du développement de la
région ce matin, il y a là un héritage
d'aménagement qu'il est très important de préserver. Si,
un jour, les dispositions prévues par la loi 125 et d'éventuelles
dispositions relatives à la décentralisation proprement dite,
dispositions qui, comme le ministre l'a bien dit à plusieurs reprises,
feront l'objet de discussions ultérieures, cet ensemble devait
recueillir l'héritage de SATRA, je serai le premier à vouloir
m'assurer que, dans ce processus, tout l'acquis valable venant des travaux de
SATRA soit conservé. Je pense que là-dessus, nous sommes tout
à fait sur la même longueur d'onde; il y a là un acquis
important qu'il faut conserver.
Vous parlez dans votre mémoire de la question de la
délimitation des territoires; vous la reliez à un partage
équitable des richesses. A première vue, c'est séduisant
comme hypothèse, mais je voudrais vous demander comment ce
critère se concilie avec d'autres critères, comme, par exemple,
un critère dont il est souvent fait mention, celui du respect ou de la
reconstitution des régions d'appartenance. Il n'est pas du tout acquis
que si on délimite les territoires selon un partage équitable des
richesses, on va retrouver les régions d'appartenance. Auriez-vous
quelques observations là-dessus?
M. Robert: On n'a pas avancé ce critère pour le
mettre en contradiction avec celui que vous avancez. C'est dans ce sens qu'il y
a une remarque qui est assez importante. On dit: si, effectivement, on
accédait à notre demande et que des critères devaient
être inscrits, il devrait y avoir une période
supplémentaire pour permettre une réaction. Parce qu'on comprend
que les critères... Pour nous, ce qui est important, en fait, c'est
qu'il y en ait des critères, et comme l'autonomie est reliée
jusqu'à un certain point à un pouvoir de taxation, et quand un
conseil ou un groupe de municipalités qui seraient regroupés
aurait comme caractéristique d'ensemble d'être un milieu pauvre,
c'est bien sûr que leur autonomie serait restreinte par le pouvoir de
payer ou la capacité de payer du milieu. C'est dans ce sens que, pour
nous, c'est un facteur, à moins qu'il existe des règles de
péréquation pour permettre un partage des richesses.
Si on considère la réforme qui vient d'être faite de
la fiscalité municipale, ce critère devient pas mal plus
important, ou bien une partie de l'infrastructure, une plus grande partie de
l'infrastructure régionale devrait être financée à
même la taxe foncière. Donc, pour nous, c'est un critère
important, mais qui n'est pas limitatif, c'est-à-dire au sens qu'il
devrait y en avoir d'autres; par exemple, le territoire actuel de la commission
scolaire intégrée et un certain nombre d'autres facteurs qui
pourraient être débattus un peu comme l'intervention qui a
été faite tout à l'heure par un député, en
tenant compte aussi du désir d'appartenance de la population. Il ne
serait pas bon pour la commission scolaire de Saint-Jérôme de
garder de force une partie ou l'autre du territoire qui voudrait s'en
détacher, compte tenu d'un sentiment d'une plus grande appartenance et
de penser recevoir des services meilleurs, compte tenu de la distance et d'un
certain nombre d'affinités. Ce n'est pas dans ce sens.
M. de Bellefeuille: Je comprends, vous voulez mettre ce
critère en évidence sans diminuer l'importance que les autres
critères pourraient avoir.
M. Robert: Oui, et on voulait insister pour qu'il y en ait des
critères qui pourraient être débattus pour éviter
que la subdivision ait un certain sens d'arbitraire.
M. de Bellefeuille: Je ne voudrais pas du tout vous mettre dans
une position délicate alors que vous parlez immédiatement
après les représentants de votre fédération qui
sont d'ailleurs encore présents dans ce salon, mais vous les avez
entendus nous proposer que la délimitation des territoires s'inspire,
dans une mesure qui a été discutée, du découpage
des commissions scolaires. Vous n'en faites pas état dans votre
mémoire. Sans vous mettre dans l'embarras, vous avez peut-être
discuté de ça?
M. Robert: M. Gibeault l'a étudié, il va vous
répondre.
M. Gibeault: Pour nous, bien sûr, ce serait la situation
idéale, sauf que, dans les fascicules sur la décentralisation, on
retrouve trois hypothèses. Dans les trois hypothèses, dans la
première seulement probablement une qui ne serait pas retenue,
parce que ça représenterait 43 municipalités on
retrouve le territoire actuel de la commission scolaire, mais agrandi. Dans les
deux autres hypothèses, la commission scolaire se voit amputée
d'une partie importante en nombre de municipalités, une, deux ou
trois selon le cas sauf qu'en richesse relative, en évaluation,
c'est une part très importante, par exemple, la municipalité de
Mirabel qui, selon nous, fait partie du territoire d'appartenance.
Je vais donner comme exemple qu'avant la régionalisation, les
commissions scolaires de ville donnaient des services au secondaire, à
la suite d'ententes. Cela veut dire que les gens était tout à
fait libres de venir dans le territoire qu'ils choisissaient et le territoire,
la majeure partie de ce territoire de la ville de Mirabel avait, dans les
années 1960 à 1964, signé des ententes avec la Commission
scolaire Saint-Jérôme et les services du secondaire se donnaient
à Saint-Jérôme.
Pour nous, c'est un signe que le territoire d'appartenance, c'est la
situation actuelle quant au territoire actuel de la Commission scolaire
Saint-Jérôme. Cela s'est fait tout naturellement, ce
sont les gens qui l'avait choisie. On y revient après onze ans de
régionalisation et, encore là, tout le monde est tout à
fait satisfait, les gens ont demandé de revenir à ce territoire,
alors que, pour celui qui était plus grand et qui englobait, dans la
régionalisation scolaire, le territoire Lachute, les gens se sont
plaints, autant les gens de Saint-Jérôme que de Lachute, qu'ils
n'avaient pas de sentiment d'appartenance.
On y revient à un milieu naturel. Bien sûr que c'est
l'hypothèse qui est retenue par la commission. Mais, dans le rapport qui
a été déposé, on a travaillé surtout
à partir de ce qui était connu, en fait, de ce qui avait
été non pas annoncé, mais des hypothèses qui
avaient été avancées. D'ailleurs, cela revient à la
même chose. On dit: Tenez compte d'un paramètre important, celui
de la richesse d'une région. Si vous tenez compte à la fois du
territoire d'appartenance et des richesses relatives, on retrouve là le
territoire de la Commission scolaire de Saint-Jérôme, même
si on ne l'a pas dit.
M. de Bellefeuille: L'exemple de Mirabel que vous citez est
intéressant. Je ne suis pas sûr si nous disons la même
chose, mais nous nous trouvons face à une municipalité de
création récente, créée par un regroupement
forcé, qui se divise très nettement entre deux régions
d'appartenance. C'est bien ça que vous reconnaissez, que Saint-Janvier,
Saint-Canut sont dans la zone d'influence de Saint-Jérôme, tandis
que.... Saint-Co-lomban, bien sûr, mais ce n'est pas dans Mirabel. Pour
ce qui est de Mirabel proprement dit, l'ancien Saint-Janvier, l'ancien
Saint-Canut, c'est dans la zone d'influence de Saint-Jérôme, alors
que le reste de la ville de Mirabel, c'est un tout autre monde.
M. Robert: Le territoire opérationnel se trouve dans la
zone d'influence de Saint-Jérôme.
M. Gibeault: De toute façon, je pense que
l'infrastructure, les routes...
M. de Bellefeuille: A la frontière des deux. Vous exprimez
des inquiétudes par rapport aux possibilités pour les commissions
scolaires d'être consultées, d'avoir voix au chapitre. Auriez-vous
des modalités à évoquer pour établir des modes de
consultation qui seraient plus satisfaisants à votre point de vue?
M. Robert: II existe des modalités ou, si vous voulez, des
structures informelles dans notre milieu, depuis quelques mois, quelques
années. On a des comités scolaires municipaux, ce qu'on ne
retrouve pas dans la loi actuellement; c'est informel, c'est-à-dire que
cela a été mis en place de par la volonté des
municipalités, par le fait aussi qu'une commission scolaire comme la
nôtre fait affaires avec plusieurs municipalités d'importance
différente. Depuis quelques mois, il existe une structure; on se
retrouve avec le préfet de comté, avec les représentants
de certaines municipalités et le président de la commission
scolaire; tout ça pour essayer de voir comment on peut améliorer
des échanges de service. C'est surtout en fonction du service
d'implantation.
C'est un mécanisme de ce genre, on le croit, qui devrait exister
au niveau de la loi 125. C'est dans ce sens que la première remarque est
faite au sujet du comité consultatif dont il est question à
l'article 126 pour le niveau municipal. Il n'en est pas question au niveau du
comté renouvelé, parce que, si un territoire correspond à
peu près au territoire d'une commission scolaire, ce serait
intéressant qu'il existe, à ce niveau, un comité
consultatif. D'abord, pour parler de problèmes d'implantation de
services ou, si vous voulez, d'aménagement, surtout pour des services
qui devraient être utilisés en commun par les commissions
scolaires et les municipalités, et peut-être à d'autres
fins, éventuellement, comme on en a discuté ce matin au niveau du
Conseil de développement régional des Laurentides. On pourrait
aborder d'autres problèmes au niveau des services.
Il y aurait peut-être d'autres secteurs où il existe, d'une
façon informelle, actuellement, des échanges qui pourraient
être favorisés ou amplifiés à ce niveau. (16 h
45)
M. de Bellefeuille: Dans une certaine mesure, formalisés,
reconnus?
M. Robert: Dans ce sens-là.
M. de Bellefeuille: Je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: M. le Président, comme la Commission scolaire
de Saint-Jérôme, l'Opposition officielle ne considère pas
normal non plus que les commissions scolaires ne puissent participer, en aucune
façon, à l'élaboration d'un schéma
d'aménagement, sauf si ce n'est que par une participation à une
assemblée publique. Et, comme le souligne votre mémoire, encore
là, la loi n'accorde même pas aux commissions scolaires les
privilèges qu'elle accorde aux citoyens.
Il est inutile d'élaborer plus longuement là-dessus, sauf
que j'aimerais remercier la commission scolaire, quant à moi, de m'avoir
fourni copie de ce livre blanc sur la décentralisation qui, on le sait,
n'a jamais été publié, mais dont je n'avais jamais pris
connaissance.
M. Brassard: Vous demanderez au député de
Lotbinière.
M. Gratton: C'est parce que je ne le vois pas de façon
régulière, le député de Lotbinière.
Le Président (M. Marcoux): Vous ne faites pas partie de
son caucus encore?
M. Gratton: Non, je ne fais pas partie de son caucus.
Une Voix: Question avec débat le 21 avril.
M. Gratton: M. le Président, la seule question que
j'adresse à M. Gibeault touche à la conclusion c). Vous dites que
le projet de loi 125 pourrait être la pièce maîtresse dans
le projet de création des gouvernements régionaux et le
remplacement des commissions scolaires par des commissions du
développement éducatif et culturel. Vous référez au
livre blanc.
Est-ce qu'il y a quoi que ce soit qui s'est produit dernièrement,
qui vous pousse à modifier ou à qualifier un tant soit peu cette
affirmation aujourd'hui?
M. Gibeault: Non, quelque chose, peut-être, mais c'est une
question qu'on posait. Ce n'est pas une affirmation. On pose la question: Y
a-t-il un rapport entre le présent projet de loi et la création
éventuelle des gouvernements régionaux? Il y a une
référence à ce livre blanc, qui n'en est peut-être
pas une, en ce sens que c'est un document de travail aussi.
Mais il faut penser que c'est plus qu'une hypothèse. Il y a entre
autres la fiscalité municipale, ce qui est assez récent, et qui
enlève, qu'on le veuille ou non, de l'autonomie aux commissions
scolaires, en faveur des municipalités. C'est le mnistre Parizeau qui le
dit dans son budget. C'est la revalorisation du conseil municipal que de
retransférer et c'est aussi une plus grande autonomie que de
retransférer un champ de taxation, élargir un champ de taxation.
Si c'est vrai dans un sens, cela l'est aussi dans l'autre, que c'est une perte
d'autonomie pour les commissions scolaires. Pour nous, c'est un
élément qui fait que cela justifie peut-être
l'hypothèse qu'on s'en va vers des gouvernements régionaux. Vous
remarquerez aussi que la commission ne s'est pas prononcée sur les
gouvernements régionaux, parce qu'il n'en est pas question,
officiellement. Elle se prononcera en temps et lieu. Pour le moment, elle pose
la question.
M. Gratton: Je ne suis pas commissaire scolaire et je me la pose
également. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Bellechasse.
M. Goulet: Merci, M. le Président. Si on avait le temps,
je dirais au représentant du Parti libéral qu'il aurait avantage
à consulter l'Union Nationale plus souvent.
Une courte question. Est-ce que vous manifestez une certaine
appréhension quand vous songez que vous pouvez éventuellement
vous situer à l'intérieur de deux conseils de comté, avec
deux schémas d'aménagement différents, deux objectifs
différents, etc.? Ou est-ce qu'au niveau d'une commission scolaire, cela
ne dérange pas, ou plus ou moins?
M. Gibeault: Oui, cela dérange un peu, mais je pense que
ce n'est pas l'essentiel.
M. Goulet: Ce n'est pas l'essentiel.
M. Gibeault: Non. Si, dans les deux cas, il y avait deux conflits
de comté et si la commission était consultée dans les deux
cas, je pense qu'on peut suivre les travaux les plus importants de deux
schémas d'aménagement et de deux commissions. Non. Ce n'est
vraiment pas l'essentiel.
L'idéal, ce serait d'avoir un conseil de comté et un
territoire pour la commission scolaire. Ce serait la situation
idéale.
M. Robert: Après avoir travaillé avec 22
municipalités dans notre région, chercher des mécanismes
de consultation pour travailler avec 22 municipalités, vous nous
demandez si cela pourrait nous déplaire de travailler avec deux conseils
de comté, ce serait déjà une amélioration.
Compte tenu des problèmes que peut poser l'aménagement tel
que défini par le projet de loi 125, c'est difficile, parce qu'on est
devant une structure qui n'a pas encore fonctionné. On ne connaît
pas quels sont les rapports de force qui seront établis et quelle sera
la place, parce que, là, on demande une place pour la commission
scolaire à l'intérieur de la structure, du moins la structure
consultative. C'est difficile de répondre à votre question, parce
que c'est quelque chose à venir. Cela n'a pas beaucoup de
références par rapport à ce qu'on a pu vivre, parce que
dans le comté actuel, même si c'est un comté qui est
très grand, je pense qu'on touche à plus d'un comté, on
travaille avec trois comtés actuellement. Dans la situation actuelle, on
travaille dans les comtés de Terrebonne, de Deux-Montagnes et, pour une
partie de notre territoire, dans Argenteuil.
M. de Bellefeuille: Plus Prévost.
M. Robert: Pardon?
M. de Bellefeuille: Plus Prévost.
M. Robert: Prévost, oui, mais je pensais au conseil de
comté avec préfet. Il n'y a plus personne qui se retrouve
là-dedans. Concernant la question qui a été
soulevée sur les limites territoriales, quand on travaille dans une
commission scolaire, on devient très patient, parce qu'on travaille avec
les commissions de formation professionnelle qui n'ont pas le mêmes
limites que nous autres, que notre direction régionale. On travaille
avec le ministère des Affaires sociales qui n'a pas aussi les
mêmes limites. C'est un problème qu'on ne peut pas résoudre
tout seul. Je pense bien que si on doit former de nouveaux comtés
renouvelés, ce serait d'autres choses qu'il faudrait mettre dans la
marmite pour brasser, parce qu'on ne se retrouve plus. Le citoyen, au bout de
la ligne, ne sait plus s'il fait partie de la 6 nord ou de la 6 sud, selon
qu'il est avec le ministère des Affaires sociales, ou de l'Education ou
je ne sais pas trop quoi. S'il est avec une commission de formation
professionnelle, s'il est un adulte qui cherche à prendre des cours,
c'est un autre problème, les territoires ne
sont pas les mêmes. Ce n'est pas facile, parce qu'une commission
scolaire peut avoir plus que deux comtés. Elle peut avoir affaire
à plus de deux structures sociales. Il y a des problèmes de
territoire.
M. Goulet: Cela va, M. le Président.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Léonard: Je remercie le président de la
Commission scolaire de Saint-Jérôme et son directeur
général. Je vais simplement faire quelques brefs commentaires.
Evidemment, tout à l'heure, j'en ai fait sur la distinction pour nous
qui était très importante entre l'aménagement et la
décentralisation, la décentralisation étant une
perspective alors que l'aménagement, c'est un projet de loi très
concret sur la table. La décentralisation, c'est un autre débat
en termes tout au moins de gestion d'équipement ou de services, tout ce
qu'on voudra.
Je note une chose ici. Vous parlez de découpage territorial. Nous
en avons parlé, je pense, passablement, depuis que vous êtes assis
à cette table. Vous notez, en fait, toutes les incohérences de
ces différents territoires. Il me semble finalement que la conclusion,
c'est peut-être au citoyen à dégager son propre sentiment
d'appartenance et plus même qu'à des organismes et à des
corps intermédiaires à le faire. Enfin, il y a peut-être un
certain nombre de préoccupations, mais je pense que le citoyen
lui-même, là-dedans, a un intérêt primordial à
se prononcer, à participer à cette définition.
En tout cas, je note votre intérêt sur toute cette question
de la décentralisation. Ce n'est pas le débat du moment, en tout
cas, c'est autre chose. Je pense que nous l'avons assez dit. Je constate
même que vous avez un intérêt... Vous avez peut-être
une certaine hâte à ce qu'on en arrive à cela. Pour nous,
encore une fois, c'est l'aménagement. C'est conçu dans une
perspective de décentralisation vers les municipalités. Je pense
que vous avez employé souvent le terme "gouvernement régional".
Pour nous, il s'agit de comtés et non pas de gouvernement
régional. Je tiens à souligner la distinction entre les mots, ce
n'est pas la même chose. Je tiens aussi à dire une chose qui est
importante, c'est que la décentralisation, cela ne se fait pas
nécessairement seulement vers des comtés, cela doit se faire vers
des municipalités locales, le plus possible. La décentralisation,
cela doit aller le plus près possible des citoyens. C'est une
perspective. Quand on parle de décentralisation, on ne doit pas
résumer cela à une structure.
Je m'arrête là. Je vous remercie beaucoup de votre
participation. Cela a été très riche d'enseignement. Nous
en tiendrons compte au cours des débats ultérieurs. Je vous
remercie beaucoup.
Le Président (M. Marcoux): J'inviterais maintenant
l'Association des architectes paysagistes du Québec à venir nous
présenter son mémoire.
Association des architectes paysagistes du
Québec
M. Sauvé (André): André Sauvé,
président de l'Association des architectes paysagistes...
Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous pourriez
répéter votre nom plus fort?
M. Sauvé: André Sauvé...
Le Président (M. Marcoux): André Sauvé.
M. Sauvé: ... président de l'Association des
architectes paysagistes. Je vous remercie beaucoup d'avoir reçu notre
mémoire. Je voudrais présenter ici quelques-uns des
collègues: M. le vice-président, Marcel Piuze; Cécile
Poirier, Serge Forêt. Nous avons fait une correction. Le premier
mémoire avait été envoyé très rapidement.
Nous avons fait quelques corrections. J'espère que vous avez la copie
avec la couverture blanche. Maintenant, je vous prie d'excuser deux des
principaux membres qui ont préparé ce rapport. Ils n'ont pas pu
venir aujourd'hui; ils étaient engagés. M. le
vice-président va nous faire la lecture.
M. Piuze (Marcel): Sans plus de préambule, je vais
entreprendre la présentation de notre mémoire. C'est avec un
très vif intérêt que les architectes paysagistes du
Québec ont pris connaissance du projet de loi 125 sur
l'aménagement et l'urbanisme. Nous avons suivi jusqu'à maintenant
les différents efforts consentis depuis 1963 pour tenter de mettre de
l'avant des politiques permettant d'aménager notre territoire
québécois de façon plus concertée,
équilibrée, et consciente. Ces efforts étant restés
lettre morte depuis seize ans, nous souhaitons vivement qu'enfin une loi mette
un terme à trop d'incertitude et de décisions prises sans que
leurs conséquences n'aient pu être envisagées à
moyen et long termes, lorsqu'il s'agissait d'aménager une région
par rapport à son territoire environnant ou une municipalité par
rapport à sa région.
Cette préoccupation est inhérente à notre
profession d'architecte paysagiste, puisque nous sommes impliqués aux
divers niveaux de l'aménagement urbain, périurbain,
régional et territorial, avec les compétences et les objectifs
plus particuliers de rétablir un meilleur équilibre entre le
milieu construit et naturel dans les villes, d'utiliser au mieux le patrimoine
naturel dans les régions et de mettre ce patrimoine à la
disposition des communautés concernées, dans les régions
et de mettre ce patrimoine à la disposition des communautés
concernées, tout en le préservant d'interventions susceptibles de
l'hypothéquer de façon négative.
C'est donc dire que nous nous sentons directement concernés et
impliqués par ce projet de loi et c'est avec cette préoccupation
que nous vous soumettons les questions et les recommandations qu'il nous a
suggérées.
Volontairement, nous sommes restés très
schématiques et nous livrons ici des commentai-
res généraux, englobant les grandes questions qui se
posent à nous, ainsi que quelques réflexions et recommandations
plus spécifiques sur certains articles du projet de loi.
Nous espérons que les préoccupations qui suivent feront
l'objet de votre attention, notre intérêt pour le projet de loi
soumis égalant le vôtre un but conjoint de progrès.
Un des aspects les plus positifs du projet de loi réside pour
nous dans son orientation de décentralisation des pouvoirs et de
concertation et de participation de la population au processus de planification
et d'aménagement.
Nous ne saurions trop mettre l'accent ici sur notre totale
adhésion à de tels principes conscients du fait qu'une politique
d'aménagement parachutée se révèle le plus souvent
inappliqua-ble, parce que promulguée et émise par des personnes
non directement concernées et possédant une connaissance trop
théorique du milieu biophysique et socioculturel dans lequel il est
nécessaire d'intervenir.
Même si cela constitue un plus ou moins long processus
d'apprentissage, savoir que dorénavant des élus municipaux et des
représentants des collectivités auront à s'asseoir
ensemble pour décider de leur avenir nous paraît être une
orientation responsable et positive. Savoir aussi que les utilisateurs seront
appelés à prendre des positions sur les développements de
leurs terroirs nous paraît être un grand pas en avant et nous
souhaitons que le gouvernement puisse accorder beaucoup d'attention et d'aide
à leur travail de réflexion.
Ceci dit, nous voulons aussi attirer votre attention sur certains
aspects généraux du projet de loi qu'il y aurait lieu de
préciser pour en faciliter l'application. Ces aspects
généraux sont au nombre de trois. D'abord, le pouvoir
ministériel et les structures d'application, deuxièmement, la
liberté des conseils de comté de préparer ou non un
schéma d'aménagement, et, enfin, le support technique dans le
processus de planification et d'aménagement. (17 heures)
II est bien évident que le ministre responsable et le
gouvernement doivent avoir non seulement un droit de regard sur les politiques
d'aménagement émises aux niveaux régionaux et locaux, mais
également qu'il leur faut pouvoir préciser à ces
organismes responsables de la planification quelles sont les grandes lignes de
la mise en valeur territoriale dont ils auront à tenir compte pour leur
propre développement.
A ce sujet, les questions suivantes nous préoccupent
particulièrement. Quels mécanismes permettront au ministre et au
gouvernement de donner aux comtés les grandes orientations de
développement territorial dans lesquelles ils devront se situer? Quelles
structures, quels outils se donnera le ministre responsable pour satisfaire
à ce type d'obligation? Comment le ministre et le gouvernement
entendent-ils procéder dans cette voie? Quel ministre sera responsable
de l'application de la loi?
Pour notre part, nous ne pensons pas que de telles directives
d'aménagement du territoire pourront émaner de rencontres
interministérielles, selon les structures actuelles extrêmement
compartimentées des divers ministères impliqués.
Pour parvenir à établir de telles directives, il faudra
effectuer une réflexion de fond exigeant une très étroite
collaboration de spécialistes expérimentés afin que les
orientations choisies soient cohérentes et efficaces dans les domaines
de l'amélioration de nos conditions de vie et d'une saine exploitation
de nos richesses naturelles.
Nous recommandons donc que le ministre de l'aménagement se dote
des structures et des outils nécessaires pour parvenir à orienter
de façon conséquente le développement territorial et,
à travers lui, régional et urbain.
Ce peut être par le biais d'un ministère de
l'aménagement, assisté d'un groupe de professionnels praticiens,
expérimentés dans les différents domaines de
l'aménagement, incluant les problèmes de réalisation.
Le deuxième aspect général que nous voulons aborder
est lié à la liberté des conseils de comté de faire
ou non des schémas d'aménagement. Nous comprenons que le
législateur veut garder une certaine flexibilité en
matière d'aménagement et n'exige pas que tous les comtés
entreprennent obligatoirement, dès la promulgation de la loi, un
schéma d'aménagement. Cela pourrait être extrêmement
lourd à administrer, coûteux à gérer et n'est
probablement pas nécessaire actuellement pour certaines régions.
Toutefois, nous désirons attirer votre attention sur les questions
suivantes.
Les conseils de comté étant libres de faire ou non un
schéma d'aménagement régional, sauf si le ministre le leur
demande, qu'arrive-t-il si les conseils de comté ne voulaient rien faire
ou s'ils mettaient un laps de temps très étiré pour y
parvenir? D'autre part, si les municipalités continuent à faire
des plans d'urbanisme en l'absence de schémas de comté, ne
risquent-elles pas, comme par le passé, de commettre des erreurs?
Exemples: dédoublement d'équipements et d'installations,
implantation de zones industrielles, de centres commerciaux, de terrains de
camping pour chaque petite municipalité, etc.
Ceci nous paraît d'autant plus dangereux que ces mêmes
municipalités qui peuvent avoir de réels problèmes
à résoudre et qui sont décidées à faire les
sacrifices financiers nécessaires pour y parvenir, devront à plus
ou moins brève échéance se réajuster à un
schéma d'aménagement de comté pour satisfaire à la
loi.
Aussi, nous recommandons que le ministre responsable de
l'aménagement fixe le plus rapidement possible les priorités et
les échéanciers pour les cinq années à venir dans
le domaine de l'élaboration des schémas de comté et les
fasse connaître aux intéressés; qu'en règle
générale, l'élaboration des schémas
d'aménagement de comté constitue un préalable à
celle des plans d'urbanisme; que dans le cas spécial où une
municipalité fait face à des problèmes d'organisation
urgents à résoudre en l'absence d'un schéma
d'aménagement de comté, le ministre responsable de
l'aménagement et ses organismes techniques de soutien lui prêtent
assistance pour la politique de développement à suivre, de telle
manière que cette municipalité n'ait pas à revenir
ultérieurement sur les grandes décisions prises pour le
développement et l'organisation de son territoire.
Le dernier aspect général est lié au support
professionnel et technique qui interviendra dans les processus
d'aménagement régionaux et locaux. Nous savons que le point
soulevé ici est extrêmement délicat et n'est pas
traditionnellement abordé dans une loi de ce genre. Toutefois, nous
jugeons que les questions qui suivent sont particulièrement importantes
par rapport à leur répercussion dans le domaine concret et
tangible de la réalisation. Quelles sont les équipes de travail
qui seront appelées à oeuvrer en relation avec les
municipalités, les conseils de comté, le gouvernement et le
public concerné selon le cas?
A-t-on pensé à choisir la composition des équipes
en fonction des problèmes spécifiques à régler et
selon le potentiel particulier et la vocation de la région? A-t-on
pensé à faire intervenir, selon le cas présenté,
des spécialistes et techniciens qui maîtrisent
particulièrement bien ces types de problèmes spécifiques,
de façon à éclairer au mieux les choix politiques qui
devront suivre? Exemple: Dans des comtés à vocation plus
particulièrement rurale, participation active, dans le bureau
d'urbanisme, d'ingénieurs, d'agronomes, de forestiers, de
spécialistes en rendement de production agricole, etc. D'autre part,
dans les comtés où la protection du milieu naturel, la
préservation et la mise en valeur d'un potentiel visuel attrayant, riche
et varié, et la présence d'espaces propices aux
développements récréatifs et touristiques de tous genres
semblent être, pour les années à venir, une
priorité, participation active d'architectes paysagistes au sein de
l'équipe de planification.
Nous suggérons qu'en annexe au projet de loi ces questions
fassent l'objet d'une étude et de décisions pour que les
interventions faites sur un territoire donné collent exactement au
potentiel spécifique et au besoin de développement de ce
territoire pour les années à venir, en termes biophysiques,
socio-culturels et économiques, tout en préservant l'autonomie
des gouvernements locaux.
Suite à ces réflexions, questions et recommandations
d'ordre général, nous souhaitons, ici, soulever avec vous
quelques points plus spécifiques du projet de loi que nous aimerions
voir préciser. Nous aborderons donc ces points un à un.
D'abord, le chapitre I, section 2, contenu du schéma: à
l'article 5, paragraphe d), le mot "intentions" nous semble vague. Nous
proposons son remplacement par "directives" et souhaiterions compléter
la phrase de la manière suivante: Les "directives"
générales d'affectation du territoire pour l'ensemble du
comté, "en tenant compte de ses potentiels biophysiques et de son
insertion dans les territoires environnants." Les articles 109q et 112d font
déjà référence au milieu biophysique mais
plutôt en termes de contrainte. Nous aimerions que le schéma
d'aménagement tienne compte également du potentiel du milieu. Il
serait très important, entre autres, de prendre davantage en
considération l'aspect morphologique et visuel du territoire avant de
procéder à des choix de développement. Ceci a trop souvent
été sous-estimé dans le passé, conduisant à
des développements niant ou détruisant le paysage, au lieu de
chercher à s'y intégrer le plus possible.
Rappelons également à ce propos qu'un ensemble paysager,
tel un corridor ou un bassin visuel, pourra chevaucher les limites de plusieurs
comtés.
Les caractéristiques biophysiques du territoire devraient
également être considérées dans la
détermination des territoires des corporations de comtés.
Il est donc nécessaire de tenir compte de cet aspect dès
le début des études d'aménagement. Nous désirons
porter à votre attention d'autres phénomènes qui se
produisent et qui doivent également faire l'objet de notre attention
lors de la confection des schémas d'aménagement régionaux.
Il s'agit de l'aménagement par régénération d'un
paysage.
Exemple: un paysage atteint par l'érosion due à un
déboisement ou à un développement
inconsidéré sur des pentes assez prononcées.
L'utilisation spontanée et souvent anarchique qui a
été faite du milieu naturel a, dans certains cas, amené
des perturbations devant être corrigées chaque fois que possible.
Rappelons que de telles perturbations peuvent aussi survenir suite à
l'apparition de phénomènes naturels.
Dans tous les cas, qu'il s'agisse de dégradations dues à
une mauvaise intervention humaine, à un processus naturel ou à un
événement naturel exceptionnel, il est nécessaire
d'intervenir pour restaurer ce territoire qui est le support actuel et futur de
nos activités.
Concernant l'article 5, les paragraphes e), f) et g), ici les "normes
minimales", "l'identification", la "localisation approximative" ne devraient
pas uniquement toucher les équipements et infrastructures, mais
également tous les aspects de sauvegarde, préservation et mise en
valeur du patrimoine naturel et socio-culturel.
A l'article 6, nous pensons qu'un schéma d'aménagement
"doit" comprendre, plutôt que "peut" comprendre, particulièrement
pour les paragraphes a), b), c) et e) de l'article 6: la densité
approximative d'occupation du sol, les grandes affectations du sol à
l'intérieur du périmètre d'urbanisation, le tracé
approximatif des principales voies de circulation et les normes
générales dont devraient tenir compte les règlements de
zonage, de lotissement et de construction des municipalités.
Concernant plus particulièrement le paragraphe a de l'article 6,
la densité approximative d'occupation qui est admise, sera
établie à partir de quels critères? Economiques, sociaux,
culturels ou politiques? Qu'est-ce qui constituera le principal objectif dans
cela?
Nous ajoutons à ces critères relativement classiques, un
autre jusqu'ici beaucoup moins considéré, soit celui de tenir
compte de la capacité d'accueil physique d'un territoire au-delà
de laquelle le milieu naturel se dégrade ou ne permet pas à
l'aménagement de fonctionner convenablement.
En milieu rural, hors des municipalités structurées, un
sol peut très bien avoir une capacité portante suffisante pour
recevoir une certaine densité de résidences tandis qu'il ne peut,
de par sa composition, satisfaire à la mise en place du nombre de fosses
septiques nécessaires à cet ensemble résidentiel.
Passons maintenant au contenu du plan d'urbanisme, chapitre 3, section
2. A l'article 79, paragraphes a et b, nous voulons faire un rappel des
recommandations faites pour les articles 5 et 6 afin que les grandes
orientations deviennent plutôt des directives et que les grandes
affectations tiennent aussi compte d'aspects tels: la conservation, la
préservation, la récréation et la capacité
d'accueil du milieu.
Aux paragraphes a, b, c et d de l'article 80, nous recommandons que ces
paragraphes soient intégrés à ceux
développés à l'article 79, tout en rectifiant le contenu
du paragraphe a de la manière suivante: les zones construites à
rénover, restaurer ou à protéger et les zones du paysage
naturel à protéger, à régénérer ou
à mettre en valeur.
Chapitre 4, section 1, le règlement de zonage: l'article 101,
paragraphe i: La lecture de cet article laisse entendre que le terrain bordant
les voies de circulation sera modifié et adapté au niveau de ces
voies de circulation. Si tel est le cas, nous proposons, au contraire, que les
voies de circulation s'intègrent le plus possible au paysage environnant
et que leur niveau soit établi en fonction de ceux du paysage.
A l'article 109 toujours, paragraphe m, nous proposons de le
compléter par la mesure suivante: prescrire, sous certaines conditions,
des plantations d'arbres et d'arbustes.
Chapitre 4, section 2 et 3, règlements de lotissement et de
zonage. Les règlements de lotissement et de construction devraient
être souples et continuellement adaptés au caractère
particulier que représente toujours une municipalité. Nous avons
souvent remarqué dans le passé que l'application trop
standardisée de normes, insuffisamment revues en fonction des
différents contextes auxquels on les applique, conduit à des
aberrations sur le plan d'une bonne utilisation des potentiels biophysiques et
visuels des milieux.
Ces règlements et normes de lotissement et de construction
devraient être assez souples pour ne pas entraver la mise en oeuvre d'un
bon design au niveau du détail.
Il ne devrait pas conduire, comme c'est trop souvent le cas, à la
mise en place d'un développement rigide, impersonnel, monotone et non
intégré visuellement et écologiquement aux formes et aux
grandes structures du paysage.
En d'autres termes, il ne devrait pas hypothé- quer les
possibilités de développement collant à la
réalité d'un terroir.
Parmi les composantes de cette réalité, il est notamment
primordial de tenir soigneusement compte du genre de sol, du type de relief, du
drainage naturel à perturber le moins possible, du type plus ou moins
dense et fragile de la végétation existante, de l'orientation des
terres à développer par rapport à l'ensoleillement, aux
vents dominants, etc.
L'aspect visuel et esthétique du paysage est aussi à
considérer et toute intervention de l'homme devra en tenir compte,
particulièrement dans le cas des nouvelles expansions urbaines et dans
celui de la réorganisation ou de la création de villages en
milieu rural.
Nous ne pouvons malheureusement apporter aucune réponse
spécifique sur les moyens légaux qui permettraient d'assurer
cette souplesse à travers les règlements de lotissement et de
construction.
Toutefois, nous déplorons que le projet de loi actuel n'apporte
pas d'alternatives dans ce domaine et nous souhaitons qu'un travail de fond
soit entrepris dans les mois à venir pour donner aux
municipalités des moyens nouveaux qui leur permettraient d'intervenir de
façon souple dans l'aménagement de leur territoire, en tenant
compte des caractéristiques biophysiques et socioculturelles de chacun
des sites faisant l'objet d'un développement.
A ce titre, les zones d'intervention spéciale nous apparaissent
comme une ouverture dans ce sens et il y aurait peut-être lieu
d'envisager la possibilité d'accorder de tels pouvoirs aux gouvernements
locaux. (17 h 15)
Concernant plus particulièrement l'article 112, paragraphe d). Il
s'agit d'un article important auquel nous souhaitons voir s'ajouter une
référence aux zones fragiles comme suit: "Protéger des
sites présentant pour la collectivité une valeur
particulière, telle historique, culturelle, scientifique,
esthétique ou récréative." Nous retrouvons cette
préoccupation de la part du gouvernement dans le chapitre VII traitant
des zones d'intervention spéciale.
Concernant l'article 112, paragraphe h), traitant des fins de parc,
à propos de la cession de terrains pour fins de parc, nous proposons de
modifier l'énoncé de la façon suivante: remplacer
"n'excédant pas 10%" par "ayant une superficie minimale de 10%." Nous
désirons également compléter cet article par les
spécifications suivantes: "Ces terrains devront être bien
situés par rapport au bassin de population à desservir et ne
seront pas des zones non propices aux aménagements
récréatifs et sportifs nécessaires au bien-être de
la population." En ce qui concerne les 10% de terrains réservés
à des parcs ou espaces publics, l'expression "n'excédant pas"
ouvre la porte à trop de latitude, y compris celle d'obtenir un
pourcentage d'espace libre si ridicule qu'il devient inefficace.
En ce qui a trait à la seconde recommandation, elle provient des
constatations suivantes: Les
terrains cédés aux collectivités par les promoteurs
sont trop souvent constitués de petites zones marginales et impropres
à la construction par leur nature biophysique, que ce soit le sol, les
pentes, le drainage ou autre. Rappelons que, dans ce cas, on oublie la plupart
du temps qu'ils sont également impropres à la détente,
à la récréation et aux terrains de sport et que leur
aménagement en devient extrêmement coûteux. De plus, ces
laissés-pour-compte, pompeusement baptisés parcs, sont parfois
très mal situés et peu accessibles à l'ensemble de la
population.
Chapitre V, comité consultatif d'urbanisme. Nous proposons de
changer la phrase: "Une municipalité peut" par "Une municipalité
doit". Quant au paragraphe 126b, nous proposons, à la fin de la phrase,
l'ajout suivant: "et d'aménagements paysagers ou d'architecture de
paysage", c'est-à-dire la planification et l'aménagement des
espaces libres publics et privés, tels les places publiques, les mails,
les parcs, les terrains de sport et de jeu, les réseaux skiables,
piétonniers ou cyclables qui participent à structurer le tissu
urbain et à en faciliter la perception.
Chapitre VII, la zone d'intervention spéciale. Nous
désirons ajouter à ce paragraphe b) la protection,
l'amélioration, le renouvellement ou l'exploitation des corridors ou
bassins d'intérêt visuel particulier."
Tout au long de nos recommandations, nous nous sommes efforcés de
mettre l'accent sur certains aspects de l'aménagement du territoire
régional ou urbain qui, selon nos expériences vécues, ont
été souvent méconnus ou négligés. Ayant foi
dans la volonté de tenir compte désormais de ces aspects, nous
désirons conclure ici par une dernière remarque
synthétisant notre pensée. Il nous paraît essentiel
d'adapter continuellement les directives d'aménagement au potentiel et
au caractère particulier des différents espaces que nous avons la
responsabilité collective de mettre en valeur et d'utiliser pour notre
progrès et notre mieux-être collectif. Il nous appartient à
tous d'être très vigilants, inventifs et ouverts à cet
égard, à l'opposé de normatifs rigides ou
stéréotypés. C'est avec l'espoir que cette loi permettra
une telle évolution en cours de route, à travers tous les niveaux
de décision, que nous désirons clore cette présentation de
nos remarques et propositions.
Le Président (M. Marcoux) Je vous remercie. M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Merci, M. le Président. Je voudrais, tout
d'abord, remercier l'Association des architectes paysagistes du Québec
d'être venue ici devant la commission présenter son point de vue
sur le projet de loi et nous faire des commentaires fort intéressants.
Votre mémoire est intéressant, d'ailleurs, à plus d'un
titre, à plusieurs points de vue, ne serait-ce d'abord que par la
préoccupation qui s'en dégage et qui est celle de votre
association pour le milieu naturel et sa préservation. C'est un peu
votre vocation aussi en tant que professionnels.
Il est tout à fait normal que cela se dégage de votre
mémoire. Il est intéressant également de constater que
vous aussi, de votre côté, comme nous d'ailleurs, vous pensez et
vous êtes convaincus qu'il faut, qu'il convient de confier à des
instances décentralisées la responsabilité de
l'aménagement. C'est également la conviction du gouvernement.
Nous pensons, comme vous, que les instances décentralisées, soit
les municipalités ou les conseils de comté renouvelés,
sont beaucoup plus aptes à définir leur cadre de vie et à
veiller à la protection de leur environnement naturel.
Vous avez aussi des suggestions intéressantes quant à
l'échéancier en vue de la formation des conseils de comté,
de même qu'en ce qui a trait à l'élaboration des
schémas d'aménagement. Vous semblez craindre on remarque
cela dans votre mémoire que ça s'étire un peu trop
dans le temps, la mise en place de ces conseils de comté et
l'élaboration des schémas d'aménagement.
Il y a cependant quelques points ambigus dans votre mémoire, j'en
signale deux entre autres, vous pourrez peut-être vous expliquer par la
suite. Vous manifestez votre accord d'abord quant aux principes qui sont
sous-jacents à ce projet de loi. Par exemple, vous êtes pleinement
d'accord pour dire que revient aux élus municipaux et aux
représentants des collectivités locales le soin de s'asseoir
ensemble pour décider de leur avenir et de l'aménagement de leur
territoire. Par contre, vous proposez que le gouvernement transmette aux
comtés et aux municipalités des directives en matière
d'aménagement du territoire vous pourrez peut-être vous
expliquer par la suite il y a peut-être là un point qui
m'apparaît ambigu. Une autre ambiguïté, également,
votre association est d'accord quant aux principes que les collectivités
locales ou régionales sont les plus aptes à définir leurs
besoins et leur cadre de vie. Par contre, vous proposez un contenu obligatoire
exhaustif par la fusion des articles 5 et 6, par exemple, des schémas
d'aménagement et des plans d'urbanisme, pour tous les conseils de
comté, au lieu de permettre aux municipalités de choisir comme
instrument ce qui leur convient le mieux.
Partant de là, j'aurais évidemment quelques questions plus
précises à vous poser. Vous proposez d'abord que le gouvernement
fixe les priorités et l'échéancier pour les cinq ans
à venir dans le domaine de l'élaboration des schémas de
comté. Pourriez-vous expliquer un peu une telle proposition? Pourquoi
souhaitez-vous qu'on fixe un délai précis dans le temps? Comment
devraient être déterminés les priorités et
l'échéancier par le gouvernement?
M. Piuze: Je pense que priorité devrait d'abord être
donnée aux régions où la pression de développement
sera la plus forte dans les années à venir, que ce soit au niveau
de l'urbanisation, du développement touristique, industriel, minier ou
autre, pour éviter que des municipalités à
l'intérieur d'un comté, en l'absence de schéma de
comté on en fait mention dans notre mémoire aient
à prendre des décisions qui ne seraient
pas intégrées. Qu'on pense à des centres
commerciaux ou à des équipements, comme on l'a mentionné
tantôt, parcs industriels, où, peut-être, on n'aurait besoin
que d'un parc industriel dans ce comté-là, et qu'en l'absence de
schéma de comté, qu'en l'absence d'une volonté
régionale de mettre sur pied, de faire un consensus quant à
l'aménagement, les municipalités qui veulent intervenir ne soient
pas pénalisées par la suite lors de l'apparition du schéma
d'aménagement de comté. C'est pour cela qu'on pense qu'il y a des
régions où déjà, cela a trop tardé et
où les élus locaux devraient s'asseoir ensemble pour
décider ce qu'ils vont faire.
M. Brassard: Pourquoi ce délai de cinq ans que vous
recommandez? Vous craignez que, si cela demeure, comme c'est
présentement au projet de loi, facultatif, l'élaboration d'un
schéma d'aménagement, il n'y ait pas beaucoup de conseils de
comté qui amorcent l'élaboration d'un tel schéma.
M. Piuze: En tout cas, c'est tout au moins une
possibilité. Je pense qu'il existe plusieurs régions où
les rivalités, pour ne pas dire l'esprit de clocher, persistent encore
et où il sera peut-être difficile d'asseoir tout le monde
ensemble, de façon volontaire, pour s'entendre sur un schéma de
développement. Maintenant, on a mis cinq ans. C'est un chiffre auquel on
ne tient pas plus que cela. D'accord? Cela peut être dix ans; cela peut
être trois ans. Mais on voudrait quand même qu'il y ait un
échéancier de fait et que les régions qui seront
appelées à connaître un développement important,
avant même que ce développement intervienne, aient un
schéma d'aménagement de préparé. En fait, c'est
là l'essence de cette recommandation.
M. Brassard: Si je comprends bien, est-ce que vous recommandez,
à ce moment-là, que le ministre utilise le pouvoir qui lui est
reconnu par l'article 4...
M. Piuze: Evidemment...
M. Brassard: ... d'émettre des ordonnances, qu'il utilise
assez largement ce pouvoir?
M. Piuze: En fait, c'est une façon de l'utiliser.
Plutôt que d'arriver à tel moment et dire: Tel comté, vous
devez vous mettre à table pour préparer un tel schéma, on
pense que ce serait plus souple, d'une certaine façon, de
préparer un échéancier et de dire aux régions: Vous
avez cinq ans, vous avez six ans, vous avez trois ans pour vous entendre et
pour vous mettre à la préparation du schéma de
comté. Il ne faudrait pas attendre cela risque de se produire
souvent dans des cas d'urgence de percevoir des problèmes
importants. Si le ministre intervient à ce moment-là, c'est parce
qu'il y aura des problèmes importants. Politiquement, il me semble que
ce ne serait quand même pas quelque chose de souhaitable que le ministre,
à tout bout de champ, intervienne pour dire à telle
région: Assoyez-vous, assoyez-vous, assoyez-vous! Je pense qu'il vaut
mieux que ce soit fait en dehors de toute précipitation.
M. Brassard: De façon exceptionnelle. L'utilisation du
pouvoir prévu à l'article 4...
M. Piuze: Oui, mais cela doit demeurer exceptionnel.
M. Brassard:... doit demeurer exceptionnelle. Vous proposez
également un contenu obligatoire très exhaustif autant pour le
schéma d'aménagement que pour le plan d'urbanisme. Pour le
schéma d'aménagement, vous recommandez, en fait, la fusion des
articles 5 et 6 et tous les éléments seraient obligatoires. La
même chose également pour le plan d'urbanisme aux articles 79 et
80. Je signalais tantôt que cela m'apparais-sait un point ambigu, quant
à moi. Pourquoi justement à l'échelle du Québec
tous les schémas d'aménagement et tous les plans d'urbanisme se
doivent-ils d'être identiques alors que vous-même, vous proposez et
vous affirmez dans votre mémoire que l'on doit tenir compte des
particularités locales et régionales? Cela m'apparaît un
peu contradictoire. Pouvez-vous vous expliquer un peu là-dessus?
M. Piuze: Au risque de vous contredire, cela ne nous
apparaît pas du tout contradictoire, au contraire. Il ne s'agit pas de
dire aux gens dans les régions: Vous allez mettre une école
à tel endroit ou vous allez mettre des écoles ou vous allez
mettre des parcs à tel endroit et vous allez mettre une aréna
à tel endroit. Mais il s'agit simplement de demander aux gens,
lorsqu'ils préparent un schéma, de bien indiquer dans le
schéma toutes les intentions qu'ils ont. Je pense, par exemple, que
demander aux gens d'indiquer... Malheureusement, je n'ai pas l'article devant
moi. (17 h 30)
M. Brassard: Les articles 5 et 6. Mais ce que je veux dire...
M. Piuze: Les articles 5 et 6. On dit "peut comprendre". Par
exemple, que les grandes affectations du sol, à l'intérieur d'un
périmètre d'urbanisation, cela ne veut pas dire qu'on oblige les
gens à avoir tel type d'utilisation. Cela veut simplement dire que s'ils
en ont, ils devraient les mettre dans le schéma d'aménagement.
S'il y a une aréna prévue, elle devrait apparaître dans le
schéma d'aménagement. De même, plus loin, les coûts y
afférents.
M. Brassard: Ce que je veux dire je me suis
peut-être mal expliqué c'est que vous recommandez que les
articles 5 et 6 n'en deviennent qu'un seul, en fait. A l'article 5: Un
schéma d'aménagement doit comprendre; c'est un contenu
obligatoire. A l'article 6: Un schéma d'aménagement peut
comprendre; c'est un contenu facultatif. Le conseil de comté qui
décide de faire un
schéma d'aménagement est obligé d'inclure les
éléments de l'article 5, mais il n'est pas obligé
d'inclure les éléments de l'article 6. Il peut, s'il le veut, en
inclure dans son schéma, faire un choix, afin de permettre au conseil de
comté de particulariser, en quelque sorte, son schéma
d'aménagement. Vous reconnaissez, dans votre mémoire, qu'il est
important de respecter ces particularités locales et régionales.
Le fait qu'il y ait un contenu obligatoire et un contenu facultatif, c'est
justement pour en arriver à permettre une reconnaissance de ces
particularités.
Vous recommandez que tous les éléments soient obligatoires
au schéma d'aménagement.
M. Piuze: II faut distinguer la forme et le fond du contenu du
schéma. Nous sommes d'avis que le fond du schéma,
c'est-à-dire les décisions quant à l'aménagement,
doivent relever de chacune des régions et doivent faire l'objet d'une
décentralisation la plus grande possible. Cependant, quant à la
forme du schéma, nous pensons qu'il devrait y avoir une certaine
uniformité et que les schémas d'aménagement
régionaux montrent bien les intentions du conseil de comté quant
au fond du schéma, à savoir tracé approximatif et les
types de voies principales de circulation; s'il y a des voies, elles devraient
apparaître, à notre avis. Quant à donner le choix au
conseil de comté de les mettre sur le plan ou non, le choix fondamental
n'est pas là. Doit-il y avoir des routes ou ne doit-il pas y en avoir?
Je pense que c'est là l'essence de la décentralisation. Quant
à la forme, ce point nous paraît secondaire.
M. Brassard: Je comprends très bien. Merci.
Le Président (M. Marcoux): M. le député de
Gatineau.
M. Gratton: Premièrement, M. le Président,
j'aimerais remercier l'Association des architectes paysagistes d'avoir
sensibilisé la commission à l'aspect de la protection du
patrimoine naturel dans ce projet de loi sur l'aménagement du
territoire, et tout simplement l'assurer que, comme c'est le rôle de
l'Opposition officielle de le faire, nous serons très vigilants à
faire les représentations qui s'imposent quant à vos
recommandations d'ordre spécifique, le moment venu, c'est-à-dire
au moment de l'étude article par article du projet de loi après
la deuxième lecture.
Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.
M. Léonard: Je vous remercie de votre mémoire
très fouillé. Je pense que vous l'avez fait très
sérieusement. Cela correspond à vos préoccupations et cela
correspond aussi à des préoccupations que beaucoup de gens ont.
Je me permettrai simplement de faire un rappel de ce que nous a dit, par
exemple, mardi matin, le maire de Granby, lorsqu'il a parlé de la
beauté du paysage qui est parfois en train de devenir moins beau qu'il
ne l'était à l'origine. Je pense que cela entre tout à
fait dans vos préoccupations et cela devrait être poursuivi. Il
est bon de sensibiliser les gens, la population, les citoyens en
général, à ces réalités. Ils n'en parlent
probablement pas assez et ils s'habituent à des décors qui sont
pour le moins discutables. Le territoire pourrait, sans beaucoup d'efforts,
devenir beaucoup plus beau et agréable à habiter. En tout cas, je
pense bien que cela fait partie de vos préoccupations.
Je vais vous poser une seule question ce n'est pas une colle,
mais...
M. Chevrette: Ce n'est pas une colle, mais ça ressemble
à cela.
M. Léonard: Non, non! Votre proposition de permettre aux
municipalités de prescrire sous certaines formes des plantations
d'arbres et d'arbustes peut donner des résultats intéressants;
c'est dans la ligne de ce que nous venons de dire. J'aimerais que vous nous
précisiez en quelles occasions et sous quelles conditions une
municipalité pourrait se prévaloir de ce droit. Est-ce que, par
exemple, ça pourrait s'appliquer pour les ravages de chevreuil?
M. Chevrette: Je connais des braconniers qui...
M. Piuze: On ne pensait pas aux ravages de chevreuil lorsqu'on a
écrit cela.
M. de Bellefeuille: Vous pensiez aux ravages des humains.
M. Piuze: II y a l'article du projet de loi qui rappelle, ici,
une modification qui a été apportée récemment au
Code des cités et villes et qui permet, entre autres, aux
municipalités de régir l'abattage des arbres sur les
propriétés privées; c'est un amendement qui est assez
récent. En fait, cela donne quand même beaucoup de moyens aux
municipalités; encore faudrait-il qu'elles s'en prévalent. Il
demeure quand même un problème, celui d'obliger un
propriétaire à planter, dans certains cas, des arbres sur sa
propriété privée. Il ne s'agit évidemment pas, de
façon générale, des petits propriétaires, je pense
aux propriétaires de maisons unifamiliales dans les quartiers
résidentiels où, généralement, on retrouve une
préoccupation assez forte de ce côté-là.
Je pense plutôt aux centres commerciaux, à
l'aménagement des immenses aires de stationnement où on ne
parvient pas à forcer les gens à faire un traitement de cela. On
n'a qu'à passer sur le boulevard Laurier, à Sainte-Foy je
pense que ce n'est pas loin pour se rendre compte du résultat.
Cela pourrait être différent si une municipalité pouvait,
toujours en respectant le genre de législation qu'on a actuellement,
selon certaines normes applicables à tous, forcer certains
propriétaires, au moment de l'émission du permis de construction,
à respecter certaines règles minimales quant à
l'aménagement des espaces extérieurs. C'est dans ce sens que la
proposition est faite.
M. Léonard: J'aurais peut-être une dernière
question, si vous permettez. Lorsque vous rendez obligatoires les
éléments que nous voulions facultatifs dans le schéma par
l'article 6, les éléments facultatifs de l'article 80 à
l'intérieur du plan d'urbanisme l'article 81 aussi, mais surtout
l'article 80 est-ce que vous ne trouvez pas que ça pourrait venir
en contradiction avec le respect de l'autonomie locale? Parce que la
municipalité pourrait avoir beaucoup plus de flexibilité en
jouant sur les deux, et le comté aussi, concurremment, en ce sens qu'il
y a des éléments qui sont facultatifs au schéma de
comté et qui pourraient se retrouver aussi dans le plan d'urbanisme,
mais selon la volonté des municipalités. C'est un
élément de flexibilité, à mon sens, qu'il y a dans
la loi et si vous rendez tout cela obligatoire, vous l'enlevez, finalement.
M. Piuze: Je vais vous apporter à peu près la
même réponse que j'ai apportée tantôt, à
savoir: Est-ce qu'il s'agit d'une flexibilité au niveau de la forme du
schéma ou du fond? On pense que l'important, c'est qu'il y ait une
flexibilité au niveau du fond, mais de façon qu'on puisse voir ce
qu'est le fond, il faudrait quand même que la forme nous permette de le
voir. Si, par exemple, les municipalités peuvent prévoir des
parcs industriels un peu partout et qu'elles ne sont pas obligées de
l'indiquer sur le schéma, comment, par exemple, le ministre pourra-t-il
juger de la conformité avec les objectifs qu'il a émis s'ils
n'apparaissent même pas au plan?
Je pense que ces équipements majeurs qui impliquent, de toute
façon, des dépenses importantes, doivent apparaître au
plan, être soumis à des consultations, afin que tout le monde
puisse se prononcer là-dessus, parce que ça implique des
interventions importantes sur le milieu et des dépenses importantes.
Nous pensons que c'est nécessaire. Concernant plus
particulièrement la question des plans d'urbanisme... 80...
M. Léonard: Oui, ce sont les articles 79, 80 et 81.
M. Piuze: Bon! Un schéma d'aménagement peut
comprendre... Il y a quatre aspects qui nous semblent importants, qui devraient
être inclus dans le schéma d'aménagement: c'est la
densité approximative d'occupation qui est admise dans les
différentes parties du territoire du comté. On parle bien de
densité approximative d'occupation. Quant aux grandes affectations du
sol à l'intérieur du périmètre d'urbanisation, cela
nous apparaît comme un minimum. Quels seront les endroits qui seront
réservés à la récréation, à
l'industrie, au transport? Cela nous apparaît comme essentiel, comme un
élément déterminant du schéma d'aménagement,
le tracé approximatif des principales voies de circulation; il ne s'agit
pas du réseau local, il s'agit pratiquement des artères
régionales. Ce sont là certaines normes générales
dont devront tenir compte les règlements de zonage, de lotissement et de
construction.
Ce sont là des éléments qui devraient
apparaître, s'il y en a, au schéma d'aménagement.
M. Sauvé: Je voudrais ajouter un point là-dessus.
Après avoir félicité le gouvernement nous sommes
d'accord sur la décentralisation on a peut-être un certain
regret et on craint que certaines municipalités oublient trop de
considérer des choses importantes.
On a remarqué l'expérience américaine à cet
égard. On inscrit des choses dans la loi et si on ne les applique pas,
on ne doit pas les mettre; mais si elles s'appliquent, on ne peut les cacher
sous la table.
M. Léonard: Merci.
Le Président (M. Marcoux): Après ces propos sur le
paysage, je pense que vous serez heureux, tout comme nous, d'aller voir le
paysage en fin de semaine. Au nom de tous les membres de la commission, je vous
remercie de la présentation de votre mémoire. Je remercie tous
mes collègues de leur participation aux travaux de cette journée,
particulièrement ceux qui ont posé des questions précises,
claires et brèves en même temps, ce qui nous a permis de suivre
l'horaire assez facilement.
Avant d'ajourner les travaux, je voudrais vous faire part des
mémoires que nous entendrons à la reprise de nos travaux le 24
avril, à 10 heures. Je vous donnerai simplement les numéros des
mémoires pour abréger: Les mémoires 18, 29, 17, 20, 9, 14
et 24. Nous entendrons sept mémoires mardi le 24, donc, nous devrons
commencer à l'heure si nous voulons compléter notre travail.
La commission ajourne ses travaux au mardi 24 avril à 10
heures.
Fin de la séance à 17 h 43