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Version finale

31e législature, 4e session
(6 mars 1979 au 18 juin 1980)

Le jeudi 12 avril 1979 - Vol. 21 N° 42

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Auditions concernant le projet de loi no 125 - Loi sur l'aménagement et l'urbanisme


Journal des débats

 

Projet de loi no 125

(Dix heures quatre minutes)

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, s'il vous plaît!

La commission élue permanente des Affaires municipales est réunie pour poursuivre l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme.

Les membres de la commission sont: M. Brassard (Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe), remplacé par M. Goulet (Bellechasse); M. de Bellefeuille (Deux-Montagnes), M. Gratton (Gatineau), M. Ouellette (Beauce-Nord), M. Guay (Taschereau) remplacé par M. Chevrette (Joliette-Montcalm); M. Mercier (Berthier) remplacé par M. Gendron (Abitibi-Ouest); M. Shaw (Pointe-Claire), M. Tardif (Crémazie), remplacé par M. Léonard (Laurentides-Labelle).

Les intervenants sont: M. Alfred (Papineau), M. Charbonneau (Verchères), M. Fontaine (Nicolet-Yamaska), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste (Sainte-Anne), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen (Notre-Dame-de-Grâce), M. Vau-geois (Trois-Rivières).

Aujourd'hui, nous entendrons les mémoires du Conseil régional de développement des Laurentides, du Comité des citoyens de Saint-Jean-de-Matha, du Conseil régional de la culture de l'Outaouais, de l'Association des architectes-paysagistes du Québec, de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec et de la Commission scolaire Saint-Jérôme.

Est-ce que le Conseil régional de développement des Laurentides est arrivé? Veuillez vous approcher, s'il vous plaît, pour nous présenter votre mémoire.

M. Boucher?

Conseil régional de développement des Laurentides

M. Robert (Yvon): Yvon Robert...

Le Président (M. Marcoux): M. Robert.

M. Robert: ... trésorier du Conseil régional de développement des Laurentides; M. Serge Boucher, directeur général.

Je voudrais d'abord excuser notre président, M. Audy, qui, à la dernière minute, n'a pu se rendre ici.

Le Président (M. Marcoux): Vous connaissez nos règles du jeu habituelles. Vous avez une vingtaine de minutes soit pour lire votre mémoire ou le résumer et, ensuite, une quarantaine de minutes de dialogue avec les membres de la commission.

M. Goulet: M. le Président, si vous permettez, je m'excuse auprès de nos invités. Dans mon cas — je présume que c'est la même chose pour les autres — étant donné qu'on doit quitter ce soir, à cause parfois des avions ou des transports, j'aimerais savoir si les membres de la commission ont fait consensus quant à l'heure de nos travaux aujourd'hui. On a parlé de suspendre à midi pour une heure ou deux heures, ou terminer à 18 heures. Je vais prendre peut-être quelques secondes. Je m'excuse auprès de nos invités, mais si on veut planifier, M. le Président, vous savez ce que je veux dire, c'est important.

M. Chevrette: En ce qui nous concerne, on voudrait collaborer à plein, on pourrait aller jusqu'à 13 heures et prendre seulement une heure pour dîner pour finir à 17 heures ou 18 heures au maximum, pour ne pas siéger en soirée.

M. Gratton: Quant à moi, M. le Président, je concourrai à tâcher de...

M. Robert: Cela pose un problème, il devait être ici pour 21 heures.

M. Chevrette: Monsieur dit que cela pose un problème, mais je voudrais rappeler ici que tous les groupes sont normalement convoqués à 10 heures le matin; donc, théoriquement, il n'est pas censé y avoir de problème, même si les gens viennent en soirée. Ils ont peut-être évalué, parce qu'ils étaient cinquième ou sixième, qu'ils passeraient à telle heure, mais, théoriquement, ils sont convoqués pour dix heures.

M. Robert: C'est parce qu'il y a eu des communications pour faire déplacer un groupe, la commission scolaire Saint-Jérôme, et on nous a dit que ce ne serait pas avant 20 heures ce soir, qu'on avait réservé toute la soirée pour les commissions scolaires.

M. Chevrette: II peut y avoir un nouvel appel du secrétariat pour lui demander d'être ici, c'est le dernier groupe de la journée de toute façon. C'est le dernier groupe, la commission scolaire de Saint-Jérôme.

Le Président (M. Marcoux): En tout cas, disons qu'on va vérifier ce que vous dites.

M. Chevrette: Est-ce qu'on peut le demander au secrétariat de la commission?

Le Président (M. Marcoux): Pour le moment, ce sur quoi il serait important de s'entendre, c'est l'heure du dîner; à quelle heure les membres de la commission désirent-ils dîner?

M. Gratton: On verra à ce moment-là.

M. Goulet: M. le Président, je ne veux pas prendre la matinée pour discuter de cela, mais c'était pour la soirée. Mon heure de dîner, que ce soit à midi ou à treize heures... C'était pour savoir si on termine à 18 heures ou à 22 heures...

Le Président (M. Marcoux): De toute façon, les membres de la commission se sont entendus pour que ce soit une heure par mémoire. Alors, de 10 heures à 13 heures et de 14 heures à 17 heures, ou de 15 heures à 18 heures, cela...

M. Goulet: Vous n'avez pas compris, M. le Président, je m'excuse; c'est parce que monsieur dit que le secrétariat des commissions aurait téléphoné à un groupe pour lui dire de venir ce soir. Ce n'est pas supposé, les groupes sont convoqués pour dix heures. C'est ce que je veux savoir.

Le Président (M. Marcoux): On va le faire vérifier et on va vous en informer dès qu'on le saura. De toute façon, même si tout n'est pas clarifié, on pourra le clarifier tantôt; je vous invite, monsieur, à présenter votre mémoire.

M. Robert: Même s'il a tenu un total de sept assemblées d'information et de consultation dans tous les coins des Laurentides, le conseil régional a choisi de présenter un mémoire qui reflète l'avis de son conseil d'administration. Il ne prétend pas à l'expression d'un avis de la région. Les délais de consultation étaient beaucoup trop courts et le mandat concurrentiel de l'Union des conseils de comté et de l'Union des municipalités du Québec rendait illusoire et irréaliste la tenue d'une véritable consultation devant mener à un avis régional formel.

Nous sommes convaincus cependant de la représentativité très large de notre conseil d'administration, de la valeur de l'expérience et de l'information qu'il avait à sa disposition sur ce sujet, de la sagesse et du réalisme de son avis. Cet avis a été adopté d'une façon définitive le 28 mars. C'est pour cette raison que le mémoire que vous avez probablement entre les mains a été amendé quelque peu par le conseil d'administration le 28 mars.

L'angle de vision choisi par le CRD des Laurentides. D'abord le bien-fondé d'une loi de l'aménagement et de l'urbanisme dans les Laurentides; le bien-fondé d'un schéma d'aménagement couvrant le territoire de plusieurs municipalités, y compris les villes; les implications d'une telle loi sur l'aménagement du territoire régional, compte tenu de ses particularités; une discussion très large sur les critères de délimitation des territoires des comtés renouvelés.

A tous ces cas, le CRD des Laurentides s'est attaché avec ses interlocuteurs à faire ressortir les besoins de sa région en regard de la loi et son aptitude à y répondre.

Chaque guide de discussion, de même que le présent avis, sont adaptés spécifiquement aux différents secteurs géographiques de la région. Cette préoccupation pratique a pris le dessus sur la discussion des modalités de la loi et même ses grands principes qui ont fait l'objet de la part des autres mémoires. Au fond, nous voulions savoir si la loi 125 est bonne pour les Laurentides et nous croyons déceler un large consensus sur la réponse qu'il faut donner à cette question.

La crédibilité de l'avis du CRD des Laurentides. Au cours de ses sept assemblées de secteur, le conseil régional a diffusé l'information et la documentation pertinente à 90 personnes dans tous les coins des Laurentides. Ces assemblées étaient composées en majorité d'élus municipaux et de membres de notre organisme plus préoccupés que la moyenne des autres élus et des autres citoyens par les problèmes d'aménagement.

Une discussion très franche et très libre a pu avoir cours à chaque endroit et a donné lieu à des consensus généralement faciles sur les éléments soulevés par nos guides de discussion. Le conseil d'administration traite de questions d'aménagement et d'environnement depuis plusieurs années, a acquis avec le temps une expertise unique au niveau régional et a fait la preuve d'une pensée et d'une action suivies et cohérentes en ces matières. Il est consulté fréquemment autant par les autorités gouvernementales et paragouvernementales que par les organismes du milieu.

La loi 125. Dans l'ensemble du territoire des Laurentides, le projet de loi 125 semble bien accueilli, sauf pour certains ajustements requis par les particularités de notre région. Nos interlocuteurs ont reconnu la valeur des principes qui sous-tendent le projet de loi. Son caractère décentralisateur unique dans le contexte législatif et administratif actuel, son aptitude à revaloriser les pouvoirs locaux municipaux et la pertinence de l'ensemble de ces dispositions au plan de la formation des comtés renouvelés, de l'élaboration du schéma et des règlements d'urbanisme, de l'économie des relations entre les trois niveaux de gouvernement impliqués et de la participation des citoyens à tout ce processus de planification et de l'aménagement.

La zone de villégiature des Laurentides, au nord de Saint-Jérôme, a vécu depuis dix ans des problèmes d'aménagement aigus auxquels la loi 125 apporte un espoir de solution équilibrée. Qu'il suffise de mentionner la pollution, la détérioration naturelle des lacs et de leur environnement, la pollution des rivières, la disposition des déchets solides, le déboisement inconsidéré, les réseaux d'égouts incompatibles avec la villégiature et la conservation, la pénurie de sites publics de conservation et de récréation, les difficultés de plus en plus insolubles d'aménagement d'un réseau régional de pistes de ski de fond et de randonnée.

Les comtés renouvelés sont le lieu par excellence où ces problèmes trouveront écho et recevront progressivement leur solution. Le projet de loi 125 précise plusieurs des pouvoirs municipaux essentiels à un meilleur contrôle de cette zone, à l'exception du pouvoir de contrôler l'usage des bateaux à moteur. Nous souhaiterions qu'un amendement ajoute ce pouvoir à ceux que détiendront les municipalités. Les municipalités du territoire aéroportuaire de Mirabel, quant à elles, ont expérimenté un processus tout à fait analogue à celui prévu par le projet de loi 125 et elles en reconnaissent, d'emblée, la valeur et la nécessité en milieu urbanisé ou en voie d'urbanisation.

Pouvoir d'aménagement et pouvoir de gestion. Deux sortes de préoccupations ont fait

surface relativement au pouvoir de gestion que les comtés renouvelés pourraient se voir confier à l'avenir. Les commissions scolaires demandent à connaître les intentions du gouvernement dès maintenant et refusent de soumettre les orientations de l'éducation aux contraintes d'un schéma d'aménagement sur lequel elles n'auraient pas été cosultées. Sur ce point, le Conseil régional de développement des Laurentides appuie leur position et demande qu'on ajoute les commissions scolaires aux organismes consultés en vertu de l'article 22. (10 h 15)

Les municipalités du territoire aéroportuaire de Mirabel ont déjà entrepris la gestion en commun de certains services. Le conseil de développement voudrait que le projet de loi ouvre la porte à toutes les initiatives qu'elles voudraient bien prendre en cette matière. A l'heure actuelle, cna-que mise en commun exige des ententes spécifiques qui sont laborieuses et complexes sur le plan juridique et entraînent la création de structures de gestion nouvelles et coûteuses. Il y aurait intérêt à consolider ces structures de gestion au sein du conseil de comté renouvelé.

Découpage du territoire. Nos rencontres ont permis de dégager les grandes lignes du découpage des Laurentides, en fonction des fins du projet de loi 125, même si plusieurs choix spécifiques concernant une ou plusieurs municipalités restent incertains et ne se préciseront qu'au moment de l'application de la loi dans les Laurentides.

La zone de villégiature se démarque très nettement de la zone aéroportuaire et demande qu'on reconnaisse sa spécificité. Elle identifie la communauté d'intérêts économiques, la dimension assez large du territoire, pour aborder efficacement les problèmes d'environnement, la nécessité de mettre en commun certains services, le découpage scolaire, comme des critères valables de délimitation du territoire des comtés renouvelés.

La zone aéroportuaire, qui comprend les agglomérations de Lachute, Saint-Jérôme, Saint-Eustache, Sainte-Thérère et Terrebonne, demande de façon nettement majoritaire que l'on reconnaisse les territoires des commissions d'urbanisme de secteur, quitte à y apporter des modifications mineures, comme territoires des comtés renouvelés. Ces CUS correspondent aux cinq agglomérations du territoire aéroportuaire de Mirabel, à l'idée que se sont faites les citoyens de leur région d'appartenance et à l'étendue des problèmes intermunicipaux entraînés par l'urbanisation contiguë, eau potable, eaux usées, promotion industrielle, autres services.

Quelques cas demeurent que l'on ne peut régler avant qu'une consultation plus systématique n'ait lieu. Il semblerait que l'agglomération de Lachute puisse faire bon ménage avec l'ensemble du comté d'Argenteuil à l'intérieur d'un comté renouvelé. Il n'est pas clair, à ce moment-ci, à quel comté se rattacheront les municipalités comme Saint-Adolphe-d'Howard, Huberdeau, Arundel, Saint-Rémi-d'Amherst, Lac-des-Plages, Labelle, La

Conception, Prévost, Saint-Hippolyte, Sainte-Anne-des-Plaines, Saint-Lin, Mascouche, Lachenaie. Dans tous ces cas, nous croyons être en mesure de dégager rapidement des consensus lorsque la loi entrera en vigueur et pourra s'appliquer dans notre région.

Enfin, nos interlocuteurs ont fait ressortir, à bon droit, que le territoire devra tenir compte des pouvoirs futurs que l'on voudra confier aux comtés renouvelés, d'où l'importance de répondre aux interrogations des commissions scolaires à ce propos. Egalement, la capacité financière des futurs regroupements devrait être considérée, compte tenu des disparités entre municipalités.

La pondération du vote. Nos interlocuteurs ont très peu insisté sur cet aspect. Dans plusieurs cas, ils se satisfont du système actuel: un maire, un vote. Certains ont expérimenté le vote pondéré en fonction de la population, mais y ont renoncé à l'usage, préférant fonctionner par consensus. Mais dans les cas où il faudra pondérer le vote en fonction des populations, il importe de ne donner à aucune municipalité le contrôle absolu du comté renouvelé. Là-dessus, tous sont unanimes.

Harmonisation avec la loi spéciale du territoire aéroportuaire, la loi 60. Le processus de planification prévu par le projet de loi 125 a été imposé, à peu de choses près, aux cinq agglomérations du territoire aéroportuaire de Mirabel. Il est essentiel que le projet de loi 125 reconnaisse l'acquis de ces cinq agglomérations, c'est-à-dire le schéma d'aménagement, le règlement d'urbanisme, qu'il maintienne les normes d'aménagement communes à ces cinq agglomérations en vigueur présentement et qu'il remplace les mécanismes centralisateurs de la loi 60 par les mécanismes décentralisateurs de la loi 125. Nous croyons préférable de faire inclure ces dispositions dans le projet de loi 125 plutôt que de faire amender la loi 60 plus tard. A ces conditions, la loi 125 sera très bien accueillie dans le territoire aéroportuaire de Mirabel.

L'harmonisation avec la loi 90. La loi 90 force présentement les municipalités agricoles du territoire aéroportuaire de Mirabel à reprendre leur schéma d'aménagement, en tenant compte des exigences nouvelles de la loi 90. Il ne faudrait pas que la loi 125 leur impose un troisième exercice du genre, après la loi 60 et la loi 90. Nous répétons que ce qui sera issu de la loi 60 et de la loi 90 devra être reconnu comme point de départ valable par la loi 125.

Par ailleurs, le projet de loi d'harmonisation des lois 125 et 90, présenté par le gouvernement à l'Assemblée nationale, constitue une nette amélioration sur la centralisation indue et laborieuse imposée par l'actuelle loi 90. Les municipalités et les comtés renouvelés de notre région sont parfaitement capables d'administrer au jour le jour le zonage agricole, sous la surveillance générale de la Commission de protection du territoire agricole.

Appellation. Dans les Laurentides, cette question ne préoccupe à peu près personne. Il nous apparaît que l'Union des conseils de comté et l'Union des municipalités s'affrontent sur la vérita-

ble nature de ces comtés renouvelés: territoires, pouvoirs, pondération du vote, nombre de municipalités membres, par le biais d'une querelle de noms. Ce qui compte pour nous, c'est que la loi 125 règle les vrais problèmes d'aménagement des Laurentides, tant dans la zone de villégiature que dans la zone aéroportuaire. Nous croyons qu'elle peut le faire, si elle est appliquée après consultation des intéressés. Chaque comté renouvelé devrait pouvoir choisir l'appellation comté ou l'appellation commission d'aménagement. Ces deux appellations ont cours dans notre région et ont acquis l'adhésion des citoyens, chacune dans sa zone spécifique. Merci.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Je voudrais d'abord remercier les représentants du Conseil régional de développement des Laurentides de nous avoir présenté ce rapport qui a été préparé avec grand soin. Je voudrais tout de suite demander aux représentants du CRDL s'ils ont eu une assemblée intéressante de leur conseil d'administration le 28 mars, parce qu'il me semble qu'il y a plus de jus, de substance dans la nouvelle version du mémoire que dans la première. Est-ce que vous pourriez — je ne vous pose pas la question immédiatement, je vous la poserai tout à l'heure; ce sera ma première question — seulement nous tracer rapidement, puisque nous avions plutôt étudié la première version que la deuxième, les ajouts, les différences entre la première et la deuxième version?

Quelques remarques d'ordre général: La région que vous représentez a vécu une des premières expériences authentiques d'aménagement au Québec, comme vous l'indiquez dans votre mémoire. Vous êtes, par conséquent, parmi nos interlocuteurs les plus autorisés. Vous avez, dans le domaine de l'aménagement régional, une expérience dont nous entendons tirer profit. A la lumière de votre expérience, votre mémoire nous indique que la loi 125, dans ses grandes lignes tout au moins, paraît tout à fait réalisable et que les questions d'application de la loi dépendront tout simplement de la bonne volonté qu'on peut attendre de tous les intéressés.

Vos observations sur le découpage du territoire sont intéressantes. Nous sommes contents de voir que vous ne prévoyez pas de problèmes majeurs là-dessus, contrairement à certaines craintes qui ont été exprimées; quant à vous, qui avez cette expérience, vous n'exprimez pas de crainte particulière là-dessus.

De même, votre point de vue sur la représentation, la pondération des votes — c'est un point de vue extrêmement intéressant, de nouveau fondé sur l'expérience. On ne va pas s'encombrer de... Si on s'en remet à votre expérience, on n'a pas besoin de s'encombrer de méthodes compliquées puisque, à l'expérience, on voit que les villes les plus populeuses acceptent de ne pas jouer un rôle dominateur, acceptent de collaborer avec les collectivités de moindre importance. Vos considérations sur l'appellation du conseil de comté sont pragmatiques et, à mon avis, sages et nous en prenons bonne note.

Pour ce qui est de la loi 60, une rencontre a déjà eu lieu avec les représentants des municipalités impliquées et le ministre a pris bonne note de toutes les remarques qui lui ont été faites. J'en viens, M. le Président, à ma première question. C'est M. Robert, n'est-ce pas? M. Robert, c'est ça?

M. Robert: Oui.

M. de Bellefeuille: Est-ce que M. Robert pourrait nous tracer, dans les grandes lignes, les différences entre les deux versions du texte, celle qui a été présentée au conseil d'administration et celle qui est issue de cette réunion du conseil d'administration?

M. Robert: Je vais vous donner un peu les raisons. M. Boucher, qui est directeur général, pourra peut-être apporter les points plus précis. Lorsque la première version a été présentée, le CRD n'avait fait que deux ou trois des sept rencontres dont on vous a parlé et n'avait pas reçu, d'un certain nombre d'organismes, commissions scolaires ou municipalités, des recommandations ou des résolutions. Donc, la dernière version a permis au conseil d'administration d'inclure, par exemple, les représentations des préfets de comté qui ont assisté à notre rencontre, de différents maires de municipalités, de différents groupes qui ont assisté au dernier conseil d'administration et l'ensemble de ces recommandations a fait l'objet d'unanimité au niveau du conseil d'administration, mais M. Boucher pourra vous apporter les points spécifiques qui ont été ajoutés.

M. Boucher (Serge): Essentiellement, ce qu'il y a de neuf dans la version qu'on vous a remise ce matin, c'est surtout la question des pouvoirs que ces conseils de comté auront dans l'avenir. Actuellement, on prévoit le pouvoir d'aménagement, mais il est à prévoir d'autres pouvoirs et ça s'explique facilement dans le cadre de notre cheminement. En fait, nous avons rencontré les agglomérations de la partie sud du territoire en dernier, c'est-à-dire après la rédaction de la première version et, également, nous avons eu les résolutions de la commission scolaire après la rédaction de la première version. Dans les deux cas, mais par un biais différent, c'est la question des pouvoirs des futurs conseils de comté qui est le fondement de leur préoccupation.

Par exemple, dans la partie sud du territoire, il y a déjà des services en commun qui existent et, pour chacun de ces services, il faut se faire une structure particulière, spécifique, sur le plan juridique, sur le plan du contentieux avec le ministère des Affaires municipales, c'est compliqué, ça prend un temps fou. Ce sont des structures, en plus, qui impliquent énormément d'énergie. Ce serait beaucoup plus simple si le conseil de comté renouvelé, une fois mis en place, pouvait prendre

à sa charge toutes ces structures, en fait, les remplacer, ces structures multiples, par une seule structure, qui serait le conseil de comté, quitte à avoir des commissions, des comités, déléguer des mandats, mais une seule structure, ce qui facilite de beaucoup la communication et I'interrelation entre les différents domaines de gestion de services communs qui sont l'eau potable, l'épuration, les déchets solides, la promotion industrielle, en fait, tous les domaines qui, dans le sud du territoire, sont très importants et sont déjà de plus en plus mis en commun.

C'est surtout cela qu'il y a de changé. Il y a un élément nouveau en plus, c'est l'harmonisation avec la loi 90; dans la première version, cela avait été oublié. Encore là, les préoccupations viennent de la partie sud de notre territoire et on les a ajoutées.

M. de Bellefeuille: A propos de l'harmonisation avec la loi 90, c'est à la page 7 de la nouvelle version, je crois.

M. Boucher (Serge): C'est cela. (10 h 30)

M. de Bellefeuille: Vous affirmez: "Les municipalités et les comtés renouvelés de notre région sont parfaitement capables d'administrer au jour le jour le zonage agricole. Je pense que cela correspond à la pensée du législateur mais je voudrais quand même vous poser une question à ce sujet: Est-ce que vous croyez que les nouvelles structures dans le cadre de la loi 125 auront pour effet, dans leur action, d'empêcher une urbanisation trop rapide? Je vais vous dire le fond de ma pensée, il est évident que la loi 90 représente un frein par rapport à ce qui avait été établi sous le régime de la loi 60, qui prévoyait dans certains cas des zones d'urbanisation future assez vastes. Vous croyez que les nouvelles structures n'ouvriront pas de nouveau la porte à une urbanisation trop rapide?

M. Robert: Ce qu'on dit là-dessus, on ne revient pas avec quelque chose de neuf; on revient avec une partie du mémoire qu'on a présenté lors de l'adoption de la loi 90. On est tout à fait d'accord qu'un frein soit mis à l'urbanisation. Je pense que si vous reprenez le mémoire qu'on a déjà déposé là-dessus, on n'a pas changé d'idée et les gens de la région n'ont peut-être pas changé d'idée. Mais c'est au niveau de la gestion ou de l'administration; on optait à ce moment-là pour que l'administration de la loi se fasse d'une façon décentralisée, quitte à ce que cela soit fait sous la surveillance d'un organisme provincial qui existe en fait. Le danger que vous soulevez ne peut pas exister à ce moment-là. Tout ce qu'on veut, c'est que la gestion soit rapprochée de la population.

M. Boucher (Serge): D'ailleurs, dans le projet d'harmonisation entre la loi 125 et la loi 90, si je me souviens bien, les municipalités ne peuvent pas amender les zones agricoles protégées par la commission du territoire agricole. Il n'y aurait pas d'expansion sans que la commission accepte. Par ailleurs, elles vont pouvoir émettre les permis au jour le jour dans le cadre de la loi, ce qui est de beaucoup préférable à une référence continuelle à la commission.

M. de Bellefeuille: Vous identifiez dans votre mémoire un certain nombre de critères pour définir le territoire des futurs conseils de comté; vous faites allusion à une entente avec vos interlocuteurs pour le découpage du territoire; est-ce que vous pourriez nous en dire un peu plus long sur cet aspect de la chose, sur cette entente?

M. Boucher (Serge): En fait, le découpage est pratiquement réglé. Il reste, au fond, quelques questions de limite. Les deux gros problèmes qui restent sont justement le coin de Labelle, où on ne sait pas encore si on va aller avec Saint-Jovite ou si on va aller avec L'Annonciation et tenter de former un nouveau comté; c'est un des gros problèmes qui concerne peut-être trois ou quatre municipalités. L'autre problème qui reste, c'est Mirabel, qui est dans votre comté, la ville de Mirabel, qui préférerait former un comté à elle toute seule mais qui pourrait aussi, sur un plan logique, très bien entrer dans un comté avec Saint-Eustache.

A part ces deux problèmes majeurs, tout le reste est pratiquement réglé, sauf pour des cas individuels, comme Saint-Adolphe ou Morin-Heights qui pourraient changer de comté. C'est pratiquement réglé aussi dans leur cas, ils sont prêts à changer de comté; Saint-Colomban est prêt à changer de comté. En gros, d'abord, la première coupure se fait entre Saint-Jérôme et Sainte-Adèle, c'est-à-dire qu'à Saint-Jérôme en descendant, c'est nettement les commissions d'urbanisme de secteurs qui doivent prédominer. Reste à savoir ce qu'on va faire avec Sainte-Anne-des-Plaines, Saint-Lin, dans ce coin-là. C'est un peu compliqué parce qu'en fait, on ne sait pas trop où les envoyer. Ils pourraient aller à Joliette, à Saint-Jérôme, à Sainte-Thérèse, à Terrebonne et, entre les quatre, c'est très difficile de décider. La décision qui peut se prendre est finalement impressionniste.

M. de Bellefeuille: Mais elle va se prendre à partir de quelle sorte de considérations, à votre avis?

M. Robert: Actuellement, durant la consultation, il y a différents facteurs qui sont énumérés à la page 5. Ce qui a été déploré par certains groupes, c'est qu'on a eu l'impression — pas une certitude, l'impression — que ça pouvait se faire d'une façon arbitraire jusqu'à un certain point, parce que la loi ne contenait pas les critères qui pourraient servir. Donc, on pourrait toujours dire après à partir de quel critère cela pouvait être fait. Il y en a d'énumérés ici et on dit que c'est possible, à partir de ceux-là, d'en arriver à un consensus. Entre autres, on soulève toute la question... Vous savez tous qu'on a fait l'opération

55 dans le scolaire, on a fait ensuite l'opération 27. On dit: Est-ce qu'on doit en faire une autre dans quelques années? Si, effectivement, ces futurs comtés doivent exister pour d'autres fins que l'aménagement... Ce sont des questions posées. Est-ce qu'on devra encore une fois recommencer? L'exemple de Mirabel est excellent. Une partie du territoire de Mirabel est actuellement rattachée à la Commission scolaire de Saint-Jérôme. Une partie assez importante. Vous le savez, on a eu l'occasion de se rencontrer...

M. de Bellefeuille: Oui, en effet, je suis au courant.

M. Robert: C'est un facteur. Est-ce qu'on va tout recommencer? Saint-Colomban aussi en fait partie. Est-ce un critère qui doit être retenu, est-ce que cela a de l'avenir comme structure ou si c'est pour une seule fin: l'aménagement? Selon ces critères-là, c'est la même chose quand on parle de Sainte-Anne-des-Plaines, Saint-Lin... Ces facteurs devraient jouer, mais le CRD s'est dit: Dans un premier temps, on fait une recommandation, on pose des questions. Selon les réponses obtenues à ces questions, lorsque la loi sera adoptée, il y aura toujours... Le CRD s'engage à recommencer le travail de consultation et à donner son avis à ce moment-là. Mais, actuellement, on a besoin d'avoir des réponses à un certain nombre de questions pour pouvoir faire la deuxième partie du travail.

M. de Bellefeuille: Vous indiquez dans votre mémoire que votre organisme traite de questions d'aménagement et d'environnement depuis plusieurs années. Avec cette expérience acquise, pourriez-vous nous parler des principales interventions que votre conseil a faites dans ce domaine?

M. Robert: M. Boucher.

M. Boucher (Serge): Je pense que l'intervention la plus marquante a été la constitution d'un règlement modèle de zonage, lotissement, construction, qui était un véritable règlement de conservation des lacs et de l'environnement en territoire de villégiature. Ce règlement a été rédigé par le CRD, sur la base de normes existantes et avec l'aide en particulier des services de protection de l'environnement à Montréal, pour ce qui est des normes qui étaient nouvelles par rapport à ce que les urbanistes produisaient généralement en ce qui concerne les lacs.

Ce règlement a été diffusé, au fond; il y a eu une sorte d'animation des conseils municipaux, toujours dans la partie nord du territoire et finalement, je pense que ce n'est pas la seule explication, mais il y a eu tout un mouvement depuis ce temps-là. Cette initiative date de cinq ans et il y a eu tout un mouvement qui s'est mis en marche depuis ce temps-là. Actuellement, dans la partie nord de la région des Laurentides, la partie de villégiature, il y a une très grande sensibilisation sur les questions d'environnement. C'est pour cette raison que la loi 125 est un facteur qui fait... je dis cela sans vouloir charrier, elle est reçue presque avec enthousiasme, parce qu'elle va régler des problèmes qu'on a énumérés ici. On n'a pas élaboré, mais ils sont énumérés. Ce sont des problèmes qu'on n'arrive pas à régler, parce que chaque municipalité peut bien faire des choses, mais il y a un besoin essentiel de relations intermunicipales dans ce domaine.

Par exemple, il y a des municipalités où il faut 40 000 pieds carrés sur le bord d'un lac pour protéger vraiment un lac et s'assurer qu'on ne sera pas obligé d'amener des égouts, de tout démolir dans dix ou vingt ans, avec en plus, des coûts, des subventions, etc. Il y a des municipalités qui hésitent, parce que si le voisin a 20 000 pieds carrés ou il y a certaines exceptions où le voisin n'a aucun règlement, donc on peut bâtir sur 5000 pieds, il hésite à mettre 40 000 pieds, parce qu'il dit qu'on va se pénaliser nous-mêmes, les voisins vont se développer et on ne se développera pas.

Il y en a qui, malgré cela, ont quand même mis 40 000 pieds, en ayant une perspective à court terme et à long terme, c'est sûr qu'ils vont gagner. En ayant une loi comme celle-là qui donne aux comtés une certaine autorité morale, en plus des pouvoirs spécifiques qui sont là-dedans, ça va permettre, entre autres choses, de faire un consensus à l'intérieur d'un tel organisme et de dire: Sur le bord d'un lac, à tant de distance d'un lac, c'est 40 000 pieds, pas moins, cela peut être plus, mais pas moins. Les gens vont s'entendre assez rapidement là-dessus. C'est un exemple de ce que la loi va apporter dans le secteur de l'environnement où on a eu, depuis cinq ans, de nombreuses interventions.

Donc, ça va donner un nouvel élan aux progrès réalisés depuis cinq ans dans les Laurentides au point de vue protection de l'environnement.

M. de Bellefeuille: II me reste deux questions pour ceux qui penseraient que je suis un peu loin. L'avant-dernière, c'est à propos de la confection des plans et règlements d'urbanisme pour les municipalités rurales. Selon votre expérience, les articles de la loi qui traitent de cet aspect, sont-ils satisfaisants? Est-ce que le contenu minimum du plan d'urbanisme répond aux besoins des petites municipalités?

M. Boucher (Serge): C'est sûr qu'il va falloir qu'ils ajoutent des choses. En fait, le minimum n'est pas restrictif, ils peuvent ajouter des choses. Je pense que dans le cadre de la loi, ils ont tous les pouvoirs dont ils ont besoin, sauf un qu'on mentionne. On est conscient que c'est très compliqué et que ce n'est peut-être pas possible de le régler, mais on le mentionne, parce qu'il est très important dans ce contexte, c'est le pouvoir de réglementer les bateaux à moteur, qu'ils n'ont pas vraiment, ou qu'ils ont, mais avec beaucoup de crainte sur ce qui peut arriver en cours. Il y a beaucoup de confusion autour de cela.

M. de Bellefeuille: Merci, c'est intéressant. Ma dernière question, qui est d'un tout autre ordre, concerne les structures, dans leur ensemble, de décision et de consultation. Là, nous nous acheminons vers la mise en place d'un palier décisionnel et, évidemment, de consultation aussi, à une échelle qui est celle des comtés.

Vous, comme les autres conseils régionaux de développement, vous fonctionnez à un autre palier de régions plus vastes. On s'achemine donc vers une espèce de birégionalisation, de régionalisation à deux niveaux. Comment voyez-vous l'avenir par rapport à cette double régionalisation?

M. Robert: Je pense qu'il est un peu tôt pour faire des prédictions sur l'avenir. C'est bien sûr que le problème ne se pose pas simplement dans la question de l'aménagement. Un conseil de développement régional comme le nôtre, a servi un peu — on ne va pas parler des autres, mais celui des Laurentides — à initier, dans un certain nombre de domaines, une planification, un certain nombre de choses, surtout à donner des avis.

Mais depuis quelques années, surtout les deux dernières années, le conseil régional a aussi servi de moteur pour développer d'autres structures. Par exemple, actuellement, le conseil de développement s'occupe de mettre en place des corporations de développement dans des sous-régions. Quand tout cela sera fait, les comtés renouvelés, il y aura peut-être lieu de se poser des questions sur le rôle futur. Si des organismes à vocation plus régionale, mais dans une région plus restreinte, sont mis en place, soit pour le développement économique, le développement touristique, etc., il y aurait peut-être à revoir tout cela.

C'est dans ce sens-là qu'on trouve, pour certains, que la loi 125 est peut-être la base d'un futur centre d'échanges, soit pour la planification — on l'a abordé tout à l'heure dans la question de planification du développement économique, planification de certains services — cela nous apparaît comme une base. Mais ce n'est pas ce qui a été discuté d'une façon fondamentale. Pour avoir participé à deux ou trois des rencontres, c'était difficile de faire déborder la discussion en dehors du problème d'aménagement. Quand on discute de ces problèmes avec des maires ou des conseillers municipaux, on nous dit: D'accord pour parler d'aménagement, mais le reste, on ne veut pas en entendre parler tout de suite, bien que cela se fasse quand même, d'une certaine façon, à l'intérieur d'autres organismes.

M. de Bellefeuille: Je vous remercie.

M. Boucher (Serge): J'ajouterais peut-être un commentaire là-dessus. En ce qui me concerne, cela fait peut-être huit ans que je travaille dans un CRD. J'ai été deux ans au CRD de l'Outaouais. Il me semble qu'avec la loi 125, avec la formation des comtés renouvelés, cela va être beaucoup plus facile et beaucoup plus naturel d'organiser une concertation à l'échelle des régions adminis- tratives, quelles que soient les limites futures de ces régions administratives, parce que, là-dessus, il existe un problème. (10 h 45)

Mais cela va se régler après que les comtés auront été mis en place, normalement, et, à ce moment-là, ce sera beaucoup plus facile, à mon avis, d'organiser une concertation régionale à l'échelle de la région administrative, parce que les comtés seront l'interlocuteur valable. Actuellement, on rencontre les municipalités individuellement, les associations et les organismes individuellement. Cela fait une quantité d'interlocuteurs assez importante et c'est très difficile, alors qu'avec les comtés, il y en aura cinq, il y en aura six, dans Laurentides ou dans Laurentides-Lanaudiè-re, en tenant compte de l'avenir. Là, ce sera facile de voir les intérêts communs et de former un conseil régional avec possiblement une autre participation que celle des comtés également. Pour moi, c'est une grosse amélioration du point de vue du travail qu'un CRD peut espérer faire dans une région.

M. de Bellefeuille: Votre approche est empirique, pratique et optimiste. Je vous remercie de nous l'avoir expliquée.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je remercie le Conseil régional de développement des Laurentides de sa présentation. Je pense que le mémoire aussi bien que les réponses que vous avez fournies aux questions du député de Deux-Montagnes sont très claires et très spécifiques. Je n'ai donc aucune question à adresser à nos invités. J'en profiterais cependant pour demander au ministre si, lorsque le CRD souhaite que l'on connaisse le plus tôt possible les pouvoirs futurs que pourront avoir les comtés renouvelés, il est prêt, ce matin, à nous dire à quel moment le fascicule 5 de la série de fascicules sur la décentralisation pourra être disponible.

M. Léonard: Ce n'est pas la coutume de poser des questions ou d'échanger ici sur ces questions. Je répondrai simplement qu'on y travaille à l'heure actuelle, que, de toute façon, il s'agit de fascicules verts et qui n'engagent pas le gouvernement. C'est un document de réflexion, mais on y travaille présentement.

M. Gratton: Le ministre n'est pas en mesure-Ce n'est pas dans le but de...

M. Léonard: Non, je ne suis pas en mesure de donner une date.

M. Gratton: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Très brièvement, comme le dit le député de Gatineau, à la suite des questions du député de Deux-Montagnes qui connaît très bien cette région, il en reste moins, vous avez dit que le projet avait été bien accueilli. J'aimerais que vous me parliez un peu des municipalités qui font partie de la zone aéroportuaire de Mirabel. Vous parlez d'une commission d'urbanisme de secteur pour ces... Aurait-elle envie, si vous voulez, de sortir du conseil de comté ou d'avoir un conseil de comté à elle seule? Pourriez-vous expliciter davantage votre idée?

M. Robert: Je ne pense pas que ce soit comme cela. Quand on parle des commissions d'urbanisme de secteurs, ce sont des choses qui existent, mais qui ne correspondent pas nécessairement à un comté. Ce que cela semble vouloir dire, c'est qu'elles ont appris à travailler ensemble à l'intérieur de ces commissions de secteurs et elles voudraient bien continuer. C'est dans ce sens-là.

M. Goulet: Ce que je veux dire, c'est que l'aménagement va avec le développement dans bien des cas, mais, dans le cas de Mirabel, au niveau du développement, il y a des municipalités qui n'ont à peu près pas le choix. Mirabel est là pour y demeurer, je présume.

M. Robert: Oui.

M. Goulet: Au niveau de l'aménagement, cela devient plus difficile d'avoir leur propre schéma, comme elles l'auraient voulu peut-être avant que Mirabel ne soit là, mais, étant donné que Mirabel est sur place...

M. Robert: II est fait actuellement, ce schéma-là.

M. Goulet: Oui.

M. Robert: Ce travail-là est fait. C'est dans ce sens-là qu'on peut dire que, dans le travail qu'on a fait, il y avait deux façons différentes d'être d'accord avec la loi 125. Pour les gens du Nord qui, avec le CRD, depuis plusieurs années, ont travaillé à des schémas d'aménagement et des plans de zonage pour les municipalités, la loi 125 permet de les harmoniser et d'aller un peu plus loin que ce qu'ils auraient pu faire jusqu'ici. Il n'y a donc pas de problème.

Pour ce qui est de la partie sud du comté, à cause de la loi 60, le travail qui est demandé par la loi 125 est déjà fait. Ce qu'ils demandent ici, c'est de ne pas les obliger à recommencer une deuxième fois ou une troisième fois, selon le cas, parce que, si on leur demande de recommencer par rapport à la loi 90, on dit: Une minute, pas encore une fois avec la loi 125. On dit: On est déjà regroupé dans des commissions d'urbanisme de secteur. On voudrait continuer à peu près avec les mêmes secteurs, peut-être avec une modification à un endroit ou à un autre, mais, en gros, avec les mêmes pour que l'acquis soit reconnu.

M. Goulet: Autrement dit, le projet de loi 125 aurait dû être le premier à être déposé, surtout avant la loi 90.

M. Robert: C'est ce qu'on a dit à M. Léonard quand on est venu pour étudier le projet de loi 90, mais ce n'était pas lui qui était là.

M. Goulet: Ah bon! Une dernière question. A plusieurs endroits, dans votre mémoire, vous attachez beaucoup d'importance — je vous comprends — vous parlez souvent des commissions scolaires. Vous nous en avez même parlé très souvent et, à la suite des questions posées par le député de Deux-Montagnes, également, à deux ou trois reprises, vous avez mentionné les commissions scolaires. Au niveau du développement dans votre région, le Conseil régional de développement des Laurentides, pourquoi parler si souvent des commissions scolaires?

M. Robert: C'est peut-être une question de fait ou de composition du conseil de développement, les commissions scolaires participent actuellement au Conseil régional de développement des Laurentides et aussi avec tout ce qui a pu se passer; dans la région, on a vécu une intégration de commissions scolaires élémentaires et secondaires, il y a quelques années. Il s'est passé des choses. Il s'en est passé aussi depuis quelques mois dans le domaine scolaire. Vous avez eu une conférence Québec-commissions scolaires. Vous avez eu un Dudget encore plus récemment. Quand on nous a présenté la loi 125 dans les commissions scolaires, cela a été une occasion de faire le tour des fascicules présentés par le ministère de l'aménagement et aussi d'examiner un livre blanc qui n'a jamais paru, celui qu'on appelait le livre blanc sur la décentralisation. Les gens ont commencé à faire un recoupage. Les deux ont été étudiés: les fascicules publiés par le ministère de l'aménagement, le livre blanc qui aurait dû être signé par le premier ministre, mais qui n'a pas paru. Pour les commissions scolaires, il y a des documents qui ont été faits. En parallèle, on trouve essentiellement, dans les fascicules parus, l'esprit de la loi 125, ce qui se trouvait dans le livre blanc. On se pose la question: Les premiers éléments étant posés, est-ce que, dans les fascicules 5, 7 ou 9, le reste va venir? Quel est notre avenir à l'intérieur de cela? Ce n'est pas parce qu'il y a réticence, mais on voudrait bien savoir à quel endroit cela va s'insérer si, au fur et à mesure... Si cela se place dans un contexte de décentralisation, je pense que le CRD des Laurentides le reconnaît. Un des aspects louables qui est reconnu de la loi 125, c'est l'aspect de vouloir décentraliser les pouvoirs d'aménagement au niveau du conseil de comté renouvelé.

Maintenant, comme on fait mention aussi que d'autres pouvoirs éventuellement pourraient être confiés à cette structure, quand on regarde ce qui peut exister dans les prochains fascicules et la loi 125, il y a des questions qui sont soulevées, qui se posent, à ce moment, au niveau du découpage et des pouvoirs.

M. Goulet: J'aurais une question personnelle, si vous me le permettez. Quand vous dites "quel est notre avenir", vous parlez comme si vous étiez un directeur général d'une commission scolaire. Est-ce que je me trompe?

M. Robert: C'est vrai.

M. Goulet: Non, c'est seulement pour...

M. Boucher (Serge): Je tiens à ajouter que les commissions scolaires dans la région des Laurentides, de même que les CEGEP, de même que les municipalités participent au CRD. Finalement, dans le mémoire, je pense qu'on tient compte de toutes les composantes de la région. Effectivement, tout le monde a reconnu dans le conseil d'administration que la question que les commissions scolaires posent est très pertinente. Si on est pour avoir, dans cinq ans, dix ans ou vingt ans, une intégration du scolaire et du municipal au niveau du pouvoir local, cela va influencer énormément, même maintenant, certaines décisions au niveau du territoire, parce qu'il y a des gens qui sont regroupés au plan scolaire et qui sont très satisfaits de ce regroupement, et qui ne voudront pas le remettre en question dans cinq ans. C'est dans ce sens qu'il y a un lien pour nous qui est reconnu par l'ensemble du CRDL.

M. Goulet: M. le Président, je remercie les... Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, M. le directeur général, je veux vous remercier d'avoir présenté ce mémoire, de l'avoir préparé et d'avoir fait tout le travail qui a été fait en consultation sur la loi 125. Je voudrais simplement faire quelques commentaires et rappeler ici, pour le bénéfice des membres de la commission, le travail qui a été fait par le Conseil régional de développement des Laurentides en termes d'aménagement. Je pense que ce conseil a connu une expérience inédite d'aménagement et a été un facteur très positif pour le développement du nord de Montréal, en particulier dans sa partie touristique.

C'est à partir des initiatives du CRO des Laurentides qu'on a commencé à penser des règlements de zonage en milieu touristique. Des terrains à 40 000 pieds carrés viennent de leur idée. Ils l'ont fait en collaboration avec les gens de l'Université de Montréal et de l'Université McGill, un peu partout, de sorte que, aujourd'hui, les municipalités ont hâte d'en arriver à adopter des règlements de zonage et de se faire des plans d'urbanisme et des schémas d'aménagement, de façon à protéger leur développement. Je pense qu'il y a tout lieu de féliciter cet organisme de cette initiative qu'il manifeste depuis déjà plusieurs années et qui produit ses résultats maintenant.

Par rapport à l'expérience que vous avez connue, je pense bien qu'on pourrait vous poser beaucoup de questions. Je voudrais faire un commentaire au début, en relation avec les infrastructures dans le territoire. Quand on parle d'aménagement, je pense qu'il est important évidemment de parler des orientations d'aménagement, des grandes affectations du sol, des périmètres d'urbanisation, mais aussi des équipements et des infrastructures qui sont sur le sol. Lorsqu'on en traite dans un schéma d'aménagement, dans un plan d'urbanisme, on se trouve à toucher et à traiter des principales composantes du développement, dans la mesure où cela doit se spatialiser sur un territoire donné. Dans ce sens-là, même les infrastructures de toutes sortes d'entreprises, de toutes sortes d'institutions, y compris celles du réseau des Affaires sociales, comme du réseau de l'Education, prennent une importance majeure en relation avec le développement du territoire. Cela ne se situe pas comme ça quelque part dans le paysage. C'est parce qu'il y a une population autour. C'est parce qu'il y a d'autres équipements autour. Tout ça forme un tout, finalement, et par le biais des infrastructures, je pense qu'on amorce aussi une réflexion sur le développement, et inversement.

J'aimerais vous poser une question selon ce que vous voyez ou selon l'expérience que vous avez connue, la réflexion que vous avez dû faire sur le développement par rapport à l'aménagement, et inversement. Je pense bien que vous vous êtes posé des questions sur le développement des Laurentides, de toute cette région et cela vous a amenés à parler d'aménagement, et inversement aussi. Vous avez réfléchi votre aménagement en fonction du développement et le développement en fonction de l'aménagement.

J'aimerais que vous explicitiez un peu sur cette question parce qu'il y a des relations évidentes entre les deux.

M. Boucher (Serge): En fait, dans la partie touristique des Laurentides, l'aménagement et le développement ne se distinguent pas, parce que la ressource première du développement qui permet de créer des emplois, de créer des revenus dans le territoire, d'avoir une croissance économique, cette ressource, dis-je, c'est le sol, le territoire avec tous les éléments naturels qu'il comprend. C'est ça, la ressource. Quand on aménage cette ressource, on fait du développement ou on planifie du développement, au sens de création d'emplois, création de revenus, création d'activités économiques. Donc, on n'a jamais fait, au CRD, une distinction conceptuelle entre les deux choses. On fait les deux choses en même temps et on appelle cela de la concertation ou, parfois de l'aménagement, parfois du développement.

M. Robert: Le CRD, quand on parle de la partie sud, est en face d'une réalité. On ne peut plus parler d'aménagement pour la partie sud de notre territoire. Mirabel est là, les infrastructures sont là. Il faut plutôt parler de développement. Comment va-t-on s'y prendre? Quels sont les moyens qu'on va mettre en place, par exemple, pour favoriser le développement d'un secteur

comme celui-là, compte tenu qu'on se situe à moins de 25 milles de Montréal et de Laval, ainsi de suite? C'est tout ce contexte qui est étudié actuellement, soit par le CRD comme groupe, ou par des groupes de travail à l'intérieur du CRD plus locaux. (11 heures)

C'est là qu'est le problème actuellement pour la partie sud du CRD, tandis que pour la partie nord, M. Boucher l'a bien expliqué, c'est une question d'aménagement et de développement et tout est relié à l'industrie touristique. Le problème d'infrastructures ne se pose pas du tout de la même façon.

M. Léonard: Une dernière question, si vous me le permettez. Je ferai un bref commentaire. En ce qui concerne les fascicules, il nous semble qu'il était important pour nous de préciser un peu l'approche que nous avions, en termes de décentralisation, par le premier fascicule, de montrer aussi les expériences étrangères en ce domaine, mais nous avons publié les fascicules qui étaient nécessaires pour montrer tout le contexte de la Loi de l'aménagement; c'est ce que nous avons fait. Je crois que la réflexion n'est pas terminée encore. La perspective de la décentralisation déborde de beaucoup l'aménagement.

Je dirais quand même une chose, lorsqu'on parle d'aménagement et qu'on va traiter d'infrastructures, vous ne croyez pas que par les réflexions qu'on peut se faire sur les orientations d'aménagement, sur la localisation d'infrastructures et d'équipement public, automatiquement, on se trouve à traiter une bonne partie de la perspective de la décentralisation? On peut y toucher tout au moins, on amorce une réflexion.

M. Boucher (Serge): Je dirais ceci: Effectivement, on le fait au niveau d'une planification parce que tout cela a une concrétisation territoriale et cela, c'est très bon, cela va déjà amener nécessairement des rapports et des concertations intersectorielles. Ce qu'on ne fait pas à ce moment-là — et c'est l'étape qui manque; en fait, c'est le fascicule 5 — c'est qu'on ne gère pas des équipements en commun encore mais, de plus en plus, le besoin de gérer des équipements en commun, surtout dans la partie sud du territoire, est urgent. De toute façon, on est pris pour en gérer avec des instruments ad hoc qu'on bâtit comme cela, par des acrobaties juridiques ou autrement, ou des négociations ou des arrêtés en conseil ou des règlements de la Commission municipale, mais cette gestion en commun d'équipement, de services, dans le sud, cela fait longtemps qu'on est rendu là et on attend encore.

M. Robert: C'est pour cela qu'il y a une des recommandations qui était partagée par les maires même s'il y avait des gens du scolaire, c'était celle par rapport au comité consultatif, paragraphe 22. Aujourd'hui, on parle de bâtir des complexes sportifs, commissions scolaires, municipalités et des services communs et au scolaire et aux municipalités. Pour que cela soit facile, il faudrait peut-être que la loi prévoie, au moins la loi de l'aménagement, que les parties se retrouvent à la même place, à la même table. Cela n'était pas prévu et c'est dans ce sens qu'il y a des commentaires bien précis qui ont été apportés, mais ce qu'on sent aussi, c'est qu'il y a plusieurs organismes qui travaillent ensemble déjà à l'intérieur de structures ad hoc un peu partout. Que ce soit dans le domaine des Affaires sociales, que ce soit dans le domaine du développement économique ou autre chose, les gens se retrouvent autour de différents organismes, mais également ailleurs.

M. Léonard: Je pense bien quand même que l'aménagement constitue la planification du territoire. Je pense que c'était cela qui était visé par la loi de l'aménagement et je pense qu'elle répond aux objectifs que nous nous étions fixés là-dessus. Je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): Je remercie le CRD des Laurentides. J'inviterais maintenant le deuxième groupe, le Comité des citoyens de Saint-Jean-de-Matha, mémoire 19, à venir nous présenter son mémoire. M. Ouimet.

Comité des citoyens de Saint-Jean-de-Matha

M. Ouimet: Oui, mais pour commencer, je pense que c'est M. Prescott qui va nous piloter.

Le Président (M. Marcoux): Si vous voulez bien vous présenter et présenter vos collègues, vous avez une vingtaine de minutes pour présenter votre mémoire et une quarantaine de minutes pour le dialogue avec les membres de la commission.

M. Prescott (Normand): Merci, M. le Président. MM. les députés, M. le ministre, nous représentons l'Association des citoyens de Saint-Jean-de-Matha et nous avons, dans un délai assez court, préparé un document que nous allons déposer. Auparavant, j'aimerais vous présenter mes collègues: à ma gauche, M. Luc Ouimet et à mon extrême gauche, M. Paul Perron.

Sur certains plans, on ne se pense pas des spécialistes, sur d'autres plans, on se pense pas mal bons. On se pense bons en consultation et en participation, et c'est cet aspect de notre mémoire que nous allons peut-être mettre un petit peu en relief. C'est la partie dont M. Ouimet va se charger. Pour établir la crédibilité de notre association, je pense qu'il n'y a rien de mieux que de vous dire un peu comment on a fonctionné, l'expérience qu'on a vécue au niveau de la consultation et de la participation des citoyens.

M. le Président, c'est la semaine sainte, on va faire trois actes: de foi, d'espérance et de charité. L'acte de foi, c'est envers les grands objectifs généraux poursuivis par la loi 125. L'acte d'espérance, c'est l'essentiel de notre mémoire. Nous espérons beaucoup que la participation des ci-

toyens soit soulevée et bien agencée. C'est peut-être la partie cruciale de notre mémoire de ce matin. Quant à l'acte de charité, c'est de votre compréhension, parce que le temps que nous avons pu mettre pour rédiger ce mémoire nous amène à vous dire que c'est avec beaucoup de modestie mais également de confiance que nous le déposons. Nous avons pour nous accompagner des gens de Saint-Jean-de-Matha, des différents groupes, parce que, dans notre association, il est prévu que les gens de la Chambre de commerce sont présents de façon systématique. Chacun des quatre groupes dont je vais vous parler est présent dans notre association. La Chambre de commerce, les cultivateurs, des résidents permanents de Saint-Jean-de-Matha et les villégiateurs.

De fait, à la page 2 de notre mémoire, vous avez vu qu'il était dans l'intention du conseil de ville de préparer et de présenter un comité consultatif responsable évidemment à la municipalité. A ce moment-là, c'était dans les vues du conseil de le faire et depuis, cela s'est réalisé.

Nous avons également avec nous M. le maire de Saint-Jean-de-Matha, M. Hervé Gravel. Pour établir cette crédibilité quant à notre capacité de nous inquiéter de la participation et de la consultation de la population, je demanderais à M. Paul Perron, de vous présenter quelques notes.

M. Perron (Paul): Merci. M. le Président, avant d'aborder le mémoire qu'on vous a présenté, j'aimerais juste démontrer la situation par rapport à la démarche que notre comité de citoyens a vécue depuis à peu près un an et demi maintenant. Nous avons eu à vivre plusieurs expériences qui nous ont amenés plus récemment à nous intéresser plus particulièrement au plan de développement de Saint-Jean-de-Matha. Ces expériences n'ont pas toujours été des plus faciles pour les citoyens, en termes de participation, et j'aimerais vous en dire un mot.

C'est surtout la ligne électrique qui devait passer à Saint-Jean-de-Matha — qu'on a proposé de faire passer à Saint-Jean-de-Matha il y a un an et demi — qui a un peu galvanisé les citoyens pour se regrouper et pour vraiment considérer l'impact sur leur développement, leur cadre de vie, d'un projet important comme une ligne électrique majeure qui passe dans un environnement de villégiature au nord de Montréal.

Nous avons dû commencer avec peu d'information, surtout peu d'information vulgarisée, mais on a essayé, avec des gens de la place, comme l'a mentionné M. Prescott, des villégiateurs, des agriculteurs, des gens du village, de reprendre le dossier et de le comprendre, et aussi, grâce à une subvention de la part du ministre Léger, nous avons pu concerter et coordonner notre action. Nous avons eu gain de cause après six ou sept mois de travail intensif, mais notre comité ne s'est pas arrêté là. On a décidé de le continuer dans plusieurs dossiers ponctuels.

Nous avons dû nous intéresser à un problème important de dépotoir régional, avec tout ce que ça implique, comprendre ce que c'est, quel est l'impact, comment ça nous affecte, quelles sortes de services cela amène. Nous avons dû également nous intéresser à un problème causé par un entrepreneur privé qui faisait des spectacles à grand déploiement; malheureusement, la municipalité n'était pas en position d'assurer la sécurité ou l'hygiène, le camping de tous les gens que cela amenait en soirée et en fin de semaine. On a dû aussi faire face à des problèmes de camping sauvage. On a dû monter un dossier, depuis un an et demi, concernant un parc intermunicipal.

Finalement, voyant la difficulté d'articuler tous ces projets ponctuels sans un cadre général, on a pensé utile, avec la municipalité, l'été passé, de commencer à penser à articuler un plan d'aménagement. On a assemblé beaucoup de gens avec l'aide de la corporation municipale, on a fait des réunions, on a essayé de comprendre ce qu'est un plan d'aménagement, ce que ça va nous donner, ce qu'il faut concilier, en termes de type de développement et, là-dessus, on y reviendra. Mais on a travaillé avec la faculté d'aménagement de l'Université de Montréal qui a mis une équipe d'étudiants à notre disposition. Avec la population, on a eu des rencontres, parce que le développement, ce n'est pas seulement le physique ou le sol, c'est le monde.

On a essayé, par diverses réunions, autant à Montréal pour les villégiateurs... Ce qui est une exception parce que souvent, quand on travaille dans une municipalité, on est peu sur place, mais la municipalité a bien voulu entrer en ville pour poursuivre sa consultation. Nous arrivons à un point où nous voulons formaliser davantage notre plan d'aménagement.

Tout ça, c'est pour des citoyens qui ont un peu le sens civique, si vous voulez, mais qui ne sont pas des gens à temps plein pour étudier ces différents problèmes. Je pense que vous pouvez vous imaginer la recherche de l'information, la vulgarisation de l'information, pour qu'on puisse tous comprendre ce qui se passe, l'animation que cela implique, la compréhension des structures, à qui il faut s'adresser, et il faut s'adresser à bien du monde dans tous ces projets. C'est compliqué, c'est laborieux, mais c'est quand même possible d'y arriver. Je pense qu'on est un exemple de gens qui sont tenaces et qui, malgré tout, aboutissent.

Je pense que j'ai fait le point sur notre démarche. Je vais laisser à M. Ouimet le soin de lire le mémoire.

M. Ouimet (Luc): Etant donné les règles du jeu de vingt minutes que vous nous avez données, si c'était possible, nous aimerions sauter certaines parties du mémoire, quitte, si vous le voulez, à l'inscrire intégralement; nous pourrions sauter certaines pages pour lire l'essentiel.

Le Président (M. Marcoux): II n'est quand même pas très long, je pense que vous pouvez courir le risque de le lire.

M. Ouimet: C'est parce qu'il y aura des répétitions avec ce qu'on vient de dire, ce serait peut-être plus rapide.

M. Chevrette: On pourrait s'entendre pour qu'il soit inscrit au journal des Débats et, si vous souhaitez...

Le Président (M. Marcoux): On va l'inscrire en annexe au journal des Débats. Si vous voulez le résumer.

M. Ouimet: On va essayer de faire une lecture la plus courte possible pour pouvoir répondre à vos questions. L'essentiel, comme c'est dit là-dedans, c'est que nous sommes entièrement d'accord sur les deux premiers principes — tous les autres aussi — de l'aménagement rationnel, d'une part, mais qui implique la participation des citoyens. C'est surtout sous cet angle... Parce qu'il y a beaucoup d'aspects importants et intéressants dans le projet de loi qui est assez complexe. Nous l'avons surtout regardé sous cet angle, à partir de notre expérience, pour voir quelles seraient les modalités concrètes pour qu'il puisse porter ses fruits.

Dans la situation actuelle, à la page 3, nous voulons esquisser à grands traits quelques caractéristiques de la situation actuelle quant au processus de la prise de décision. Cette description s'appuie sur l'expérience vécue dans un milieu qui se trouve en interaction avec les valeurs et les activités émanant du coeur de la région de Montréal. (11 h 15)

Les questions que les petites municipalités et les conseils de comté ont à traiter sont de plus en plus complexes, sans qu'ils aient pour autant les habitudes, les instruments et la méthodologie pour les aborder. Au mieux, ils se font orienter par le CRD. Au pire, les décisions se prennent par les dirigeants les plus forts, en fonction de leurs intérêts personnels seulement, ou trop souvent.

Jusqu'à maintenant, l'information sur les projets de plusieurs ministères affectant la région, soit des autoroutes ou d'autres projets semblables, se rend peu souvent aux instances locales, encore moins aux citoyens.

Le prochain paragraphe ne s'applique pas à notre paroisse, à notre municipalité.

Même si on peut assister à des réunions de conseil, il n'y a pas souvent d'ordre du jour connu d'avance des citoyens. Il en va ainsi des documents de référence. D'ailleurs, on est souvent méfiant vis-à-vis d'un groupe de citoyens qui désirent assister à des réunions de conseil. Qui sont-ils? Que veulent-ils? Est-ce un nouveau parti? Nous feront-ils la lutte aux prochaines élections? C'est tellement plus simple à décider en groupe fermé, à l'abri des regards et des interrogations. C'est une conception de la démocratie, celle qui a fait peut-être que l'Union des municipalités du Québec, à toutes fins utiles, a rejeté les propositions de réforme de la démocratie locale proposées par le ministre Tardif.

Malgré les avantages, dans une société moderne, d'associer les citoyens, on résiste à partager le pouvoir d'orientation et de décision de la vie communautaire.

Quelques leçons tirées de notre expérience. Dans le projet élaboré par des...

Je pense qu'on a couvert cette question sensiblement tantôt. Je vais passer la parole à Paul Perron, à 2.2.

M. Perron (Paul): Page 5, 2.2. La technologie de la participation. On situe souvent la participation des citoyens comme un moyen de contrebalancer l'emprise des technocrates sur nos cadres de vie. En effet, si ces derniers, par leur connaissance systématique, sont aptes à mesurer les potentiels, à évaluer les possibilités, à décrire les causes et les effets et à élaborer des scénarios et des choix, ils sont inaptes à déterminer, à la place des citoyens, ce qui est souhaitable, privilégié, prioritaire, quelles sont les valeurs des groupes particuliers des collectivités. Cela demeure la responsabilité de ceux qui seront affectés par tel arrangement de leur cadre de vie.

L'architecte ou le constructeur ne prend pas les décisions pour le propriétaire qui se fait construire une maison. Est-ce à dire que pour l'expression des points de vue des citoyens, on s'en remet au gros bon sens, au spontané, à l'inorganisé, au hasard? C'est peut-être la tendance que l'on pourrait adopter en réaction.

Notre expérience, au contraire, nous amène à conclure et à affirmer fortement qu'il faut, dans la participation — c'est-à-dire consultation, information, intégration des points de vue, etc., — une technologie appropriée, tout aussi compétente et exigeante, si l'on veut atteindre sûrement les objectifs et éviter les processus bidons. Elaborer des processus de participation qui deviennent des rites sans efficacité, nous amène aux risques d'une nouvelle démobilisation et d'une justification de rejeter la participation des citoyens, de la part des opposants.

M. Ouimet: La fabrication du schéma, toujours à la page 6. Etant donné les éléments obligatoires et facultatifs que comprendra un schéma d'aménagement d'un comté, les étapes préalables à son élaboration doivent être bien menées et à l'aide des techniques adéquates.

En particulier, il faut prévoir l'inventaire et l'analyse du potentiel du territoire concerné, les utilisations qui en sont faites présentement, les contraintes par rapport à certaines utilisations. Dans le cas des infrastructures routières ou des corridors d'énergie, il pourrait s'agir pratiquement d'études d'impact préliminaires pour leur localisation approximative.

Déjà, ces étapes nécessiteront une approche scientifique rigoureuse et des instruments appropriés qui ne sont pas, à l'heure actuelle, à la portée des conseils de comté. De plus, c'est à cette étape, avant l'élaboration des scénarios et même de l'analyse des contraintes, que les points de vue de divers groupes d'intérêt doivent se manifester, afin de préciser les orientations du cadre de vie souhaité par les citoyens.

Inutile d'insister sur la présence de techniques d'animation appropriées pour que soient expri-

mes — que ce soit sous la forme d'ateliers, en plénière ou à l'aide de thèmes, de choix et de rejets — les critères de qualité de ce cadre de vie. Un schéma d'aménagement bien fait suppose donc une technologie faisant appel aux géographes, urbanistes, biologistes, sociologues, architectes, ingénieurs et autres spécialistes.

Nous croyons que le gouvernement devrait fournir cette assistance technique aux conseils de comté et offrir également des subventions ad hoc.

Nous allons à la page 8, l'assemblée publique. L'avis de l'assemblée publique par lettre — nous référons à des suggestions du projet de loi — est adéquat, parce qu'il rejoint tous les intéressés. Si l'on veut cependant utiliser les journaux, il y a place pour l'innovation. En louant peut-être l'espace de une ou deux pages au complet, on pourrait faire une présentation du schéma, même accompagnée de cartes du territoire.

Pour l'objectivité de la consultation, nous préférerions que le comté explique "la" plutôt que "sa" proposition.

Quant à la tenue de l'assemblée publique, l'article 19 n'est pas assez explicite par l'expression "toute personne peut participer". S'agit-il d'un droit de parole unique pour des questions d'information ou d'opinion? Nous avons cru voir que ce serait durant la même soirée qu'on expliquerait la proposition, qu'on répondrait aux questions et qu'on entendrait les points de vue. Sous quelle forme seront-ils entendus? On peut évidemment, selon le projet de loi, ajourner autant de fois qu'il le faut. Pourquoi? Comment? Est-ce que chaque conseil de comté, dépendant de son souci de la démocratie et de son expérience, serait libre de mener la consultation, selon n'importe quelle règle, comme il l'entend?

Comment les données exprimées, les points de vue des citoyens seront-ils analysés? Quel poids auront ces points de vue des citoyens? Comment se fera l'intégration de ces points de vue dans les nouvelles propositions? Comment les citoyens sauront-ils si on a donné suite à leurs présentations?

Nous croyons que tout ce chapitre devrait être suivi de guides, de directives et de l'aide technique de la commission d'aménagement en interprétant dans ce sens l'article 8b. D'ailleurs, l'article 205 du projet de loi permet au ministre d'établir des règles de fonctionnement de ces assemblées. Nous suggérons également que les phases d'information et de réponses aux questions soient séparées de celles où les citoyens et les groupes régionaux ou locaux feront valoir leurs points de vue, afin de pouvoir digérer l'information et que les gens puissent avoir des points de vue plus étayés, selon des modalités adoptées usuellement dans les audiences publiques. Il serait préférable de réduire le nombre d'assemblées publiques ou le nombre de consultations, si on devait faire ce choix-là, mais au profit d'un processus plus détaillé où les citoyens seraient plus instrumentés et auraient plus de temps pour se préparer, se concerter et évaluer les données de la proposition.

Ces remarques valent pour l'adoption, la modification d'un schéma d'aménagement comme pour celui d'un plan d'urbanisme.

M. Perron (Paul): On poursuit en bas de la page, adoption du schéma. En reliant les articles 25 et 169, on s'aperçoit qu'un schéma pourrait être adopté par le tiers des membres du conseil et, dans d'autres domaines, les décisions peuvent se prendre au quart des membres. Dans tous les cas, il nous semble que les décisions devraient se prendre à la majorité absolue des membres, c'est-à-dire la moitié plus un. Si l'on craint de ne pouvoir arriver à ce résultat, c'est que l'on doute de la ferveur démocratique renouvelée des conseils de comté renouvelés. 3.6. La consultation du schéma et du plan d'urbanisme après leur adoption. Il serait souhaitable que les documents du schéma d'aménagement comme ceux des plans d'urbanisme soient accessibles en permanence à toute personne qui veut les consulter et obtenir les explications nécessaires quant à leur interprétation dans les faits.

Je passe maintenant à la page 11, la section 3.9, la composition du conseil de comté. Nous n'avons pas d'indication sur la composition du conseil de comté dont nous ferons partie. Nous sommes désireux de ne pas être isolés quant à nos préoccupations: petite municipalité des Bas-ses-Laurentides dont le développement est axé sur l'agriculture, le commerce, la villégiature et la récréation. Moins notre poids sera important et que nous ferons les frais des ententes entre "les gros", d'autant plus nous réclamerons le droit d'appel à une instance supérieure.

Si l'on se fie aux articles 69 et 82, l'on pourrait croire que le conseil de comté exercera une quasi-tutelle sur les activités de la municipalité. Tel ne doit pas être l'exprit de la loi, car il faut aussi valoriser la démocratie locale et ne pas la vider de son essence.

Nous trouvons cependant très intéressante cette possibilité que l'article 99 donne à toute personne de demander à la commission un avis de conformité.

M. Ouimet: 3.10 La démocratie des conseils de comté. Cet objectif de la participation des citoyens doit être présent de façon permanente dans le fonctionnement du conseil de comté et ne pas se limiter à l'adoption ou à la modification d'un schéma d'aménagement. Il sera nécessaire pour la réussite de l'opération de doter les conseils de comté renouvelés de devoirs, quant à la démocratie, selon des moyens s'inspirant de la réforme proposée par le ministre Tardif pour les localités. Il faudrait, par exemple, multiplier les informations venant du conseil de comté, y compris les ordres du jour des réunions et les résolutions, favoriser l'assistance par les citoyens aux réunions qui pourraient être fixées d'avance se tenant, soit le soir ou les fins de semaine, et de rendre possibles les interventions des citoyens

aux affaires du jour pour s'exprimer sur un projet ou présenter des suggestions.

Un CRD à enlever ou à modifier. De nos expériences avec le CRD de Lanaudière, nous retenons qu'il est composé principalement de représentants des corps publics et des chambres de commerce, que ces services s'adressent à ces organismes, qu'il joue souvent le rôle de promoteur de tels types de développement, perdant ainsi son impartialité et sa capacité de consulter, qu'il tient souvent les corps publics en otage par son information privilégiée et par les ressources techniques quf, quoique modestes, sont souvent supérieures à plusieurs de ces organismes.

Nous estimons que le projet de loi 125 propose un réaménagement du pouvoir entre le gouvernement, les conseils de comté, les municipalités et les citoyens. Il suggère des mécanismes et des outils de participation et de rationalisation dans les décisions concernant l'aménagement et le développement. Ceci implique que, dans ce contexte, le rôle du CRD doit être réexaminé sérieusement. Le gouvernement lui-même et les conseils de comté doivent assumer une bonne part des tâches qui lui étaient confiées. Si le gouvernement décide, malgré tout, d'utiliser ce mécanisme dont les limites géographiques sont celles des régions ou sous-régions administratives, elles sont plus grandes que les conseils de comté, qu'il exige des transformations importantes quant au rôle du futur CRD, quant à sa composition, à sa philosophie d'intervention et quant aux services aux citoyens, de façon que ces derniers soient réellement servis et appuyés.

Conclusions et perspectives. Nous n'hésitons pas à affirmer que le projet de loi 125 constitue une pièce législative importante: pierre d'assise de la construction d'une démocratie moderne, répondant aux aspirations et au défi des sociétés nouvelles.

Nous croyons que les principes de base sont adéquats et que les instruments pour atteindre les objectifs doivent cependant être plus nombreux et mieux définis. Il faut que le gouvernement résiste à ceux qui voudraient revenir dans le système où la loi du plus fort est toujours la meilleure par rapport à ceux qui n'ont pas ou l'information ou la voix pour exprimer leur point de vue.

Le gouvernement, dans cette entreprise, doit se sentir responsable de la qualité du processus démocratique, et, en ce sens, il a tout notre appui.

Le Président (M. Marcoux): Merci. M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: Merci, M. le Président. Je voudrais tout d'abord remercier le Comité de citoyens de Saint-Jean-de-Matha pour la qualité de son mémoire. Je dois vous dire au départ que je suis heureux de constater que ce mémoire donne son appui d'une façon pratiquement totale au projet de loi 125. J'en profiterai pour citer deux extraits de votre mémoire qui me permettent d'affirmer ceci. A la page 2 de votre mémoire, nous pouvons lire ceci: "Nous souscrivons entiè- rement aux objectifs de l'aménagement harmonieux du cadre de vie des citoyens et de l'implication de ces derniers dans ce processus". Egalement, à la page 13, une autre citation me permet d'affirmer ce que j'ai dit au départ: "Le projet de loi 125 constitue une pièce législative importante: pierre d'assise de la construction d'une démocratie moderne répondant aux aspirations et aux défis des sociétés nouvelles".

Je dois vous dire que, tout au long de votre mémoire, ce qui m'a frappé, et vous l'avez même souligné, c'est que vous avez tout axé sur la participation. Comme je vis à proximité de votre municipalité, j'ai été à même de me rendre compte de l'excellent travail que vous avez fait lors de votre célèbre lutte contre la ligne hydroélectrique. Quand vous affirmez qu'il y a des difficultés pour des citoyens de s'impliquer, le gouvernement en est très conscient, d'autant plus que motiver les gens à s'embarquer dans une discussion pour défendre leur milieu de vie n'est pas toujours facile, d'autant plus que les ressources, comme vous le dites, sont très minces. (11 h 30)

Cependant, je crois que nous sommes conscients de ça et nous en sommes d'autant plus conscients que le type d'information qui est véhiculé par les ministères se rend difficilement ou partiellement... Dans la masse, je vous dis qu'on est bien conscient de ça; de toute l'information qui sort, c'est presque inconcevable le peu de résultat qu'on obtient à l'autre bout. C'est d'autant plus important d'avoir des groupes de citoyens qui se préoccupent de l'organisation, justement, du cheminement de cette information jusqu'à la base, qui peut permettre de provoquer des réactions, comme ce fut le cas dans votre milieu. Donc, tout au cours, je pense, de cette commission parlementaire, nous aurons la chance d'entendre une quarantaine de mémoires et nous sommes persuadés que les parlementaires ici pourront tenir compte de plusieurs de vos remarques et pourront faire en sorte que cette participation, qui est désirée dans le projet de loi no 125, puisse trouver une application concrète et une application en termes de mobilisation des gens, pour que ces derniers puissent vraiment collaborer à l'élaboration d'un cadre de vie qui corresponde plus au développement d'une société moderne, comme vous dites.

Donc, je m'arrêterai là-dessus en termes de remarques, pour vous poser quelques questions cependant. A partir de l'expérience que vous avez vécue, moi, j'aimerais savoir, lorsque vous parlez de technologie de la participation, quelle sorte de technique entendez-vous et pourriez-vous nous donner certains exemples? Comment pourrions-nous, comme parlementaires, inscrire ce type de technique à l'intérieur de la loi?

M. Ouimet: Je commence par la fin de la question quant aux modalités. Je pense que la loi prévoit que le ministre peut développer des règles. Alors, il n'est peut-être pas nécessaire de les introduire comme telles dans le projet de loi, mais,

cependant, dans la fabrication de ces règles, on peut — si je prends l'article 205 — prescrire les règles relatives à la bonne marche et à la procédure des assemblées prévues aux articles...

Je vais expliciter un peu plus longuement cette question, cela évitera d'avoir à y répondre dans les autres cas. Dans la prise de décision et la possibilité d'exprimer des points de vue, d'être consulté, l'information est la base, c'est la première étape. Notre point de vue, nos jugements ne peuvent être valables que dans la mesure où nous avons la bonne information sur les données en cause. Que ce soit par rapport aux orientations dans un schéma d'aménagement ou que ce soit dans le choix d'un projet particulier, selon la qualité de l'information que l'on a, les décisions qu'on va prendre et les points de vue qu'on va adopter par rapport à la prise de décision vont être en conséquence. On n'a qu'à lire, par exemple, ce qui se passe actuellement à la commission Malouf pour voir que, même dans la commission parlementaire, selon la qualité des informations que les gens avaient, cela pouvait conditionner le type de décisions qu'ils pouvaient prendre. On s'est aperçu, dans nos cas, que l'information, et l'information, dans le cas, ce n'est pas simplement: Voici ce que... Il y a une distinction entre l'information et la "vente". Les gens peuvent être convaincus qu'ils ont fait un bon schéma, qu'ils ont fait un bon projet de ligne, qu'ils ont fait un bon choix de site d'enfouissement sanitaire, mais, lorsqu'on veut participer, il faut avoir l'ensemble des informations, quels sont les critères de localisation, dans un cas, quelles sont les données, quelles sont les possibilités? Il faut que l'information soit un peu plus objective et présente vraiment les données du problème. Cela est une condition.

Ce qui arrive, c'est que ces situations donnent l'impression que nous sommes des éternels insatisfaits des efforts qui sont faits, c'est-à-dire qu'un résumé devrait être suffisant, que la possibilité de pouvoir parler, en soi, pourrait être suffisante. On s'est aperçu, dans le fond, que c'est plus exigeant que ça pour que, vraiment, des gens puissent exprimer un point de vue, et on s'aperçoit qu'il faut plus d'effort.

On part dans une situation où ces moyens sont actuellement peu élaborés, vers une situation où on veut que les gens participent, sans qu'ils en aient eu l'habitude et sans qu'ils en aient même eu la possibilité. Par exemple, dans le cas de la ligne hydroélectrique, nous avons été obligés de faire des efforts extraordinaires de tordage de bras pour obtenir, du ministre Léger, une copie d'une étude d'impact qui était déposée à ses services par l'Hydro-Québec tandis qu'un an et demi après, avec la loi 69, ces copies sont au nombre de 25 et sont disponibles au public.

Ce sont des instruments essentiels pour qu'on puisse participer. N'importe qui d'entre nous, si on nous demande notre point de vue sur une question dont on ne connaît ni a, ni b, c'est difficile d'exprimer des points de vue. Dans ce contexte, les chances de dire n'importe quoi sont très grandes. C'est pourquoi nous trouvons que l'infor- mation, si on l'applique par exemple au schéma, les données sur le territoire, les contraintes, les choix, doivent être expliqués ou même vulgarisés.

Quand on parle de vulgariser, c'est la même chose actuellement quand on s'en va dans une modification d'un règlement de zonage. A moins d'être un spécialiste, on ne comprendra pas la résolution, cela réfère à une annexe, à un numéro de règlement, le citoyen, là-dedans ne peut même pas savoir, à travers ce jargon, de quoi il s'agit. S'agit-il de sa maison ou bien... C'est un langage qui devient pratiquement ésotérique. Dans ce sens, il est également important de décoder et de rendre l'information accessible. Ce qu'on suppose, c'est qu'entre la période où on reçoit l'information et la période où on peut exprimer des points de vue, il faut que les gens aient le temps de dire: Qu'est-ce qu'on fait avec cela?

Ce sont là des principes qu'on a essayé d'élaborer à partir d'expériences vécues qui résument l'essentiel. Je n'ai peut-être pas répondu de façon spécifique aux modalités, mais c'était le cadre général.

M. Chevrette: Je comprends davantage votre réponse dans le sens suivant; vous me direz si je vous interprète bien. Quand vous parlez de techniques ou encore de contenu, vous parlez plutôt en termes d'accessibilité à l'information?

M. Ouimet: Pour la phase d'information, mais lorsque, par exemple, on arrive à la phase de l'expression en assemblée publique, n'importe qui parle, n'importe quand, en même temps. Les gens ont demandé: Comment est-ce analysé? Comment cela entre-t-il ensuite dans le processus de décision? Si on n'est pas assuré de cela, dans le fond, cela risquerait de devenir un rite, c'est-à-dire vous faites venir les gens, ils ont dit ce qu'ils avaient à dire, ils s'en retournent et on continue à faire la même chose qu'on avait dans notre procédé, cela ne durera pas longtemps comme motivation.

M. Chevrette: Je pensais que vous alliez nous dire que c'est un peu comme les commissions parlementaires.

M. Ouimet: On pense que non...

M. Chevrette: Vous ne voulez pas le dire.

M. Ouimet: ... mais le risque est toujours là.

M. Chevrette: Pour les réunions publiques, je remarque que quand vous parlez de technologie de participation, vous arrivez dans votre mémoire, en parlant d'assemblées publiques, encore là, en disant que vous désirez que dans le projet de loi, on puisse marquer d'une façon très explicite que les assemblées publiques prévues dans le processus de consultation soient préparées avec des guides et des directives très précises; je ne sais pas si c'est toujours dans le même souci de la qualité de l'intervention par après, mais on remarque à chaque phase de la participation ou à

chaque phase d'information que vous parlez toujours de guides et de critères; est-ce que c'est pour placer tout le monde sur un même pied d'égalité en termes de force d'intervention ou si c'est parce que vous voulez que les gens n'errent pas sur différents contenus, mais s'en tiennent à des contenus bien précis?

M. Ouimet: Le gouvernement doit être responsable de la qualité du processus démocratique mais pour cela, cela passe quand même par des modalités précises. Comme les gens actuellement, soit dans les conseils de comté ou ailleurs, n'ont pas nécessairement des expériences très longues d'audiences publiques et de processus d'assemblées publiques de ce cadre et comme il pourrait s'agir de n'importe quoi et de tout, on se dit que selon le pouvoir que la loi donne au ministre à l'article 205, on souhaiterait la possibilité de décrire un guide. C'est-à-dire qu'est-ce qu'un résumé, par exemple? Qu'est-ce qu'il comprend? Il ne s'agit pas de l'inscrire dans le projet de loi, mais de faire savoir qu'il y aura un guide qui doit être suivi dans les assemblées publiques de sorte que si je reçois un résumé, que ce soit au moins un résumé significatif sinon, après cela, je ne peux pas participer.

Egalement, par rapport à la tenue des assemblées, parce qu'elles pourraient évidemment se faire dans le désordre, quand on dit un guide, ce n'est pas au niveau du contenu, mais au niveau de la démarche et des modalités de la démarche pour être assuré, non pas formalisé et standardisé de façon que les contenus ou ce qui se passe à l'intérieur soient pareils partout, que dans la démarche, on soit assuré d'un minimum possible de processus démocratique, parce que même s'il y a assemblée publique, il n'y a pas nécessairement un bon processus démocratique. On a vu souvent de telles assemblées. Ce n'est pas une contrainte, et cela en est une dans un sens, mais c'est une contrainte pour que le processus démocratique joue bien et pour qu'il soit efficace.

M. Chevrette: Au niveau du référendum, vous appréhendez des difficultés. Est-ce que vous appréhendez ces difficultés-là uniquement au niveau de la possibilité d'utilisation du référendum ou si c'est sur le référendum lui-même? Vous voyez plus ou moins son efficacité parce que vous suggérez — et cela m'a frappé — le même processus que celui utilisé au niveau des conseils municipaux. J'aimerais que vous expliquiez le fond de votre pensée là-dessus et aussi que vous nous disiez si vous doutez même de l'efficacité du référendum ou si c'est purement et simplement difficulté d'utilisation.

M. Ouimet: Les deux. Dans ce cas-là le référendum n'a qu'une valeur consultative. Malgré tout, pour le tenir — on imagine que ce devait être à cause de la préoccupation des coûts — selon notre expérience, c'est pratiquement impossible, à moins d'être un parti organisé à un échelon régional. Cela nous amène à essayer de situer justement l'échelon local et la participation à l'échelon local par rapport à la participation à l'intérieur d'un conseil de comté. Il est évident que les gens, plus spontanément et plus facilement, en termes de motivation, en termes d'intérêt, vont participer aux choses qui les touchent le plus immédiatement. Même si des décisions au niveau du conseil de comté peuvent toucher leur vie, c'est d'abord celles qui se font à l'intérieur de la municipalité, contrairement à nos amis du CRD qui, à un moment donné, disaient: Vous ne pouvez pas participer dans le cas de la ligne électrique parce que vous êtes impliqués, elle va passer chez vous, vous allez être biaisés. J'ai dit: Le corollaire, c'est quoi? C'est qu'on va participer quand on n'est pas impliqués? On va aller dans un autre comté ou dans un autre cas... C'est bien évident que c'est quand on est directement impliqué par quelque chose qu'on a la motivation suffisante pour participer. C'est plus simple, à ce moment-là, au niveau d'une localité. Lorsqu'on arrive au niveau du conseil de comté, c'est déjà plus loin de son cadre de vie et, encore là, l'expérience a été la même: nous avions découvert que la ligne pouvait et devrait passer dans une autre région selon des possibilités différentes.

Lorsqu'on a voulu aller rencontrer les gens des autres municipalités, on s'est aperçu que de mettre tous ces gens-là dans le coup, c'était beaucoup plus difficile, parce qu'eux attendaient que la menace soit rendue dans leur cour pour commencer à être mobilisés. De sorte que penser qu'on pourrait, par exemple, aller chercher 100 personnes dans les deux tiers de chacune des municipalités, c'est au-delà des moyens qui sont normalement à la disposition des citoyens.

C'est pour cela qu'en définitive, nous croyons peu à l'efficacité là-dessus et ce qu'on suggérait plutôt, c'est que peu importe qu'il y ait deux tiers, dans le cas où un fondement d'injustice à corriger ou autre est réel, peu importe le nombre de personnes qui l'ont exprimé, qu'elles puissent se faire valoir. C'est pour cela qu'on pensait que le gouvernement pourrait jouer, quelle que soit la modalité, une espèce de rôle de cour d'appel dans ces cas-là, ou même pour que des citoyens dans une municipalité (ou une municipalité) qui se sentent vraiment lésés, parce qu'ils ont fait les frais d'arrangement entre d'autres, puissent faire valoir leur point de vue.

Je pense qu'on peut, à ce moment-là, opposer justement les deux processus.

M. Chevrette: Compte tenu du temps je vais m'arrêter, mais je voudrais vous féliciter à nouveau de travailler de pair aussi avec votre conseil municipal. Bien souvent, les comités de citoyens se forment en fonction de faire échec sur le plan politique au niveau municipal. Le fait que vous ayez votre maire avec vous et quelques échevins prouve hors de tout doute que c'est un travail positif que vous cherchez à faire et non pas un travail d'obstruction systématique et je vous en félicite.

M. Ouimet: Cela prouve que les municipalités peuvent aussi trouver intérêt à avoir de l'aide technique des citoyens dans un sens. On discutait de cela ce matin au déjeuner, il est évident que pour les municipalités, avec les paies qu'elles ont actuellement pour participer à toutes les nombreuses réunions dans une année, avec la complexité des questions, avec la perspective d'avoir aussi à débattre des sujets au niveau du conseil de comté, cela devient une tâche considérable. Alors, il devient avantageux pour les conseils municipaux de pouvoir compter quand même sur cette collaboration et cette participation afin d'élargir leur étude des questions aux citoyens alentour. Je pense que c'est à l'avantage à la fois des conseillers et des citoyens.

M. Chevrette: Merci.

M. Gratton: M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): Oui.

M. Gratton: Toujours sur la question du référendum, je pense que vous avez précisé un peu en répondant aux questions du député de Joliette. Est-ce que vous rejetez de façon claire la possibilité ou l'utilisation du référendum, en supposant, par exemple, qu'on simplifie la possibilité de l'utiliser? Par exemple la valeur du référendum comme telle. On sait que dans le projet de loi il n'a aucune valeur décisionnelle; supposons qu'on considérerait la possibilité de lui en donner une, est-ce qu'à ce moment-là, vous changeriez l'optique de votre... (11 h 45)

M. Ouimet: Disons que s'il avait valeur décisionnelle, ça pourrait être intéressant, pour que l'ensemble des gens concernés dans la région puissent exprimer leur accord. Le problème qu'on voit, à court terme, en tout cas, c'est que, pour que ce soit efficace, il faudrait que les gens qui auront à se prononcer aient, d'une part, la possibilité d'obtenir l'information et surtout, la possibilité d'exprimer à d'autres personnes les points de vue ou les réserves qu'ils peuvent avoir.

Dans le fond, pour que ce soit valable, il faut qu'il y ait une interaction dynamique entre les différentes personnes qui ont des points de vue à exprimer sur un schéma, avant son adoption. Au niveau de la qualité, c'est beaucoup plus facile, parce qu'un règlement d'emprunt sur une chose, on est pour, on est contre, pour telle ou telle raison. Lorsqu'on arrive avec un schéma d'aménagement qui est beaucoup plus complexe et qui implique un plus grand nombre de municipalités, cette action démocratique avant un référendum qui serait décisionnel est beaucoup plus difficile.

Ce qu'on dit, si on doit le faire, il faut quand même donner à ce moment-là des moyens ou des instruments, pour n'avoir pas rien qu'une voix ou l'autre, un ténor dans la région qui puisse s'exprimer. Cela pourrait être souhaitable, mais il y a des difficultés, pour que ce soit valable et efficace.

M. Gratton: En d'autres mots, vous préférez de loin la formule que vous suggérez, d'un droit d'appel quelconque au gouvernement, d'un groupe de citoyens, quelque restreint qu'il soit.

M. Ouimet: A court terme. C'est parce que, comme je vous le disais tantôt, ce projet de loi arrive, propose un ensemble d'approches de gestion démocratique du milieu, mais entre la situation actuelle et la situation idéale vécue, il est possible qu'il y ait des difficultés de vie et d'adaptation. Compte tenu aussi du fait qu'on est peu habitué à donner de l'information, à la recevoir, à participer, à croire que c'est même efficace de participer, c'est dans la mesure où les gens vont l'avoir expérimenté qu'ils seront plus motivés à le faire. Dans ce cadre, il ne faut pas leur compliquer la vie ou les amener dans des processus qui risquent d'être inefficaces.

Dans ce cas-là, le référendum, tel que proposé, risquait de demander beaucoup d'énergie, pour peu de résultats. C'est un peu le sens... On pense qu'à première vue, ce serait difficile à ce moment-ci. Est-ce que, dans quelques années, ce sera plus facile, quand on aura expérimenté mieux ces formules? Mais ce n'est pas rejeté, en principe.

M. Gratton: Dans les premières années d'application de la loi, est-ce que vous recommanderiez qu'on ne l'inclue pas dans le projet de loi comme tel, quitte à...

M. Ouimet: Sûrement pas sous cette forme. On n'a pas assez étudié cet aspect pour que je puisse me prononcer au nom de tout le comité, mais, sous cette forme, s'il devait fonctionner, ce qu'on demanderait, c'est d'avoir la possibilité, si on a un point de vue à formuler sur la proposition, qu'on puisse la faire parvenir à tous les citoyens de la région. Si, à ce moment-là, il devait y avoir un référendum, on voudrait pouvoir avoir un accès, mais c'est impossible, à l'heure actuelle, selon les moyens d'un comité de citoyens, à la liste des gens de toutes les municipalités.

On voudrait, si on a un point de vue, qu'il soit aussi bien résumé et présenté que les autres. Là, il y a une technique à trouver. On se dit: Si on doit l'utiliser, il faut sûrement prendre des moyens de façon qu'on puisse participer de façon efficace.

M. Gratton: A toutes fins utiles, ce que vous nous dites, c'est que, pour le moment, il n'y a pas de façon... et d'ailleurs, l'expérience n'existe pas pour permettre de tenir un référendum valable, aussi bien ne pas l'inclure dans le projet de loi, pour le moment, quitte à trouver d'autres façons de faire l'information qui, à vous comme à moi, semble essentielle.

M. Ouimet: Ou de l'améliorer comme processus.

M. Gratton: Oui. A ce moment-là, on ne réglerait rien en donnant une valeur décisionnelle au

référendum, dans le processus prévu dans le projet de loi 125, parce que ce serait aller à l'encontre de ce que vous prétendez ce matin. On arriverait avec un résultat qui lierait le conseil de comté et qui rejetterait ou accepterait un schéma d'aménagement mais qui aurait été un choix que les citoyens auraient pris sans les informations nécessaires.

M. Ouimet: Rendu là, on est dans l'évaluation de moyens possibles pour exprimer la démocratie. Ce qu'on dit, c'est que s'il doit être décisionnel, surtout s'il devait être décisionnel, il faudrait qu'il y ait des moyens qui fassent en sorte que les gens puissent vraiment, avant le référendum, pouvoir participer en toute connaissance de cause et donner les moyens, aux gens qui ne sont pas nécessairement d'accord avec la proposition de s'exprimer. On se dit, surtout s'il a valeur consultative et les exigences que l'on fait, que cela ne vaut peut-être pas la peine de dépenser cette énergie. Mais ce sera à la fois le législateur et ceux qui l'appliqueront qui sauront quel est le meilleur choix. Nous avons formulé des réserves, mais on n'a pas une attitude fermée et définitive là-dessus.

M. Gratton: Mais votre avis est que les moyens que le projet de loi 125 met à la disposition des citoyens du point de vue de l'information ne sont pas suffisants pour donner au référendum une valeur décisionnelle.

M. Ouimet: Je pense, oui.

M. Gratton: Merci.

Un dernier point, M. le Président. Vous semblez avoir eu des expériences assez difficiles avec le conseil régional de développement chez vous et on y retrouve, à la page 13, une allusion. Vous dites qu'avec le projet de loi 125 le gouvernement et les conseils de comté viendront prendre certaines juridictions des CRD. Est-ce que je me trompe en disant que vous en concluez que les conseils régionaux de développement n'auront peut-être plus leur raison d'être?

M. Ouimet: Ce n'est pas loin de cette conclusion, mais par souci d'objectivité nous ne sommes pas allés jusque-là. Il est évident qu'au moment où on a créé les conseils régionaux de développement, c'était à l'époque de la participation du public au Québec. Je pense que nous sommes rendus à d'autres phases. Les projets de loi s'additionnent dans ce sens-là. Il y a certaines mesures, et ce projet de loi, en particulier, modifie beaucoup de choses.

Dans ce contexte-là, il est évident que le rôle du conseil régional de développement doit être réexaminé et réévalué. Ce n'est pas toujours facile pour des hommes politiques, étant donné l'importance qu'un organisme comme celui-là a, jusqu'à un certain point, dans une région... Cela pose même en même temps, par rapport à la participation, la notion de région. Les conseils régionaux de développement ont épousé les régions admi- nistratives. Les régions administratives, si elles peuvent être intéressantes en termes d'administration, ne le sont pas nécessairement en termes de participation ou de "oui feeling", c'est-à-dire que, même à l'intérieur de la région de Lanaudière, les gens de Saint-Michel-des-Saints, de Saint-Jean-de-Matha et de Repentigny n'ont pas nécessairement les mêmes problèmes et ils n'ont pas le sentiment d'appartenir à la même région.

Dans ce sens-là, l'organisme, tel qu'il a été constitué jusqu'à maintenant, effectivement, a eu des ressources et par rapport aux municipalités qui ont peu de ressources il pouvait jouer un certain rôle d'information, d'incitation. Je n'en suis pas sur le principe. Mais, de facto, dans notre cas, ce dont on s'est aperçu, c'est qu'il n'était pas à notre service. Il était au service de ce qu'on appelait les agents de développement.

Dans ce contexte-là, les corps publics, tant à l'échelon local qu'à l'échelon du conseil de comté et dans la perspective d'une déconcentration du gouvernement, ont plus de responsabilité devant leurs élus. Dans le fond, ce dont on a besoin, c'est beaucoup plus d'une assistance au niveau des citoyens pour qu'ils participent que d'une au niveau des organismes publics.

On se dit que par rapport aux citoyens cela ne nous est pas tellement utile, pour autant que nous ne soyons pas dans un organisme incorporé, soit pour représenter l'UPA, les chambres de commerce ou les municipalités. Tout au moins, on dit que ce doit être réexaminé sérieusement pour que la philosophie d'intervention... Dans notre cas, ce qu'on nous a dit, c'est: Vous êtes des individus, des citoyens et ce n'est pas en fonction de vous qu'on travaille, c'est en fonction des organismes.

Aussi, jusqu'à un certain point, en valorisant l'action des localités, des municipalités, des conseils de comté et des gens qui sont responsables, parce qu'on peut leur demander des comptes, c'est un processus démocratique, ce sont des élus qui sont à la municipalité et au conseil de comté, c'est beaucoup plus facile d'intervenir quand on n'est pas satisfaits du niveau de décision.

C'est dans ce contexte-là qu'on se dit que sérieusement, quant à la participation de ces organismes, il faudra savoir exactement quel rôle on veut leur donner.

M. Gratton: Dernière question, M. le Président. En fait, ce n'est pas une question. Vous mentionnez, quant à l'article 19, tout l'aspect des assemblées publiques. Vous avez d'ailleurs mentionné vous-même que vous reconnaissiez que l'article 205 donnait au gouvernement la possibilité de répondre à vos appréhensions quant à la tenue de ces assemblées publiques. Est-ce que je me trompe? Est-ce que vous êtes sûr que le gouvernement pourra, par le biais de l'article 205, de la réglementation qui est permise à l'article 205, répondre à vos...?

M. Ouimet: Selon les guides ou selon ce qu'il y aurait dans les règlements, mais on croit qu'elle devrait l'utiliser en disant: Voici une consultation

publique. Cela devrait se faire de telle façon. Dans ce sens-là, on a dit que la commission d'aménagement, parce qu'elle est là, pourrait également se préoccuper de voir à ce que cela fonctionne ainsi. Nous allons aussi un peu plus loin que le règlement. On s'est demandé: Est-ce que cela vaut la peine que chacun des conseils de comté se dote de toute la technologie nécessaire? Ne pourrait-il pas y avoir une assistance technique venant de la commission qui pourrait servir, parce que tous ne le feront pas en même temps dans tout le Québec? Mais on pense qu'effectivement, on a besoin d'assistance et on a besoin que les règles du jeu soient précises. Selon la façon dont on libellera les règles, on pourra être satisfait ou non.

M. Gratton: Je ne demanderai pas au ministre de vous donner des indications ce matin, il se refuse à le faire. Merci.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. De la part des gens de Saint-Jean-de-Matha, naturellement, moi aussi j'ai remarqué qu'ils critiquaient très sévèrement les CRD. Vous critiquez assez sévèrement la marche ou la tenue des séances des conseils municipaux, peut-être pas celui de Saint-Jean-de-Matha, mais des autres. Vous savez que, par ce qui est prévu dans le projet de loi 125, les conseils de comté seront formés des élus municipaux et de ces mêmes élus municipaux. Ne voyez-vous pas là un danger à un moment donné?

M. Ouimet: C'est bien évident. Je vais seulement... D'accord, vas-y.

M. Prescott: C'est une de nos plus grandes préoccupations, c'est la plus grande inquiétude. Autant nous sommes d'accord avec les objectifs et de façon très claire, autant nous avons de très fortes inquiétudes, parce qu'à mesure qu'on va s'éloigner du citoyen, on est à peu près certain que l'intérêt du citoyen va se perdre un peu. Ce qui serait malheureux, c'est qu'au niveau des conseils de comté, tout le travail qui a été fait au niveau des comtés où les gens ont été impliqués, etc., c'est que cela puisse être oublié rendu à cet autre niveau-là et que ce soit noyé dans une indifférence très grande. Il y a une très grande inquiétude.

M. Goulet: J'aimerais que vous me disiez — il y a deux volets à ma question — qui verriez-vous pour siéger à ces conseils de comté? Deuxièmement, si, comme vous le dites, les gens s'éloignent de la base, dans votre région, comme partout ailleurs au Québec, il y a des élections municipales, il faudrait le rappeler, ce serait l'occasion de rappeler à ces élus qu'ils se sont éloignés de la base et qu'ils ne défendent pas les intérêts de la base. Ne voyez-vous pas là un processus démocratique qui a encore sa valeur?

M. Ouimet: Je vais essayer de répondre à la fois à cette question et à votre première. Il est évident qu'on n'est pas nécessairement et facilement rassurés. Il est sûr qu'il y a des difficultés de participation à l'échelon de ce qui va se passer aux conseils de comté. Il est évident que, dans certains cas, le maire ne sera pas nécessairement aussi représentatif de tous les conseils de comté. Il n'est pas sûr que sa voix, des fois, pourra être prédominante par rapport aux intérêts... C'est pourquoi, même dans les décisions qui sont prises au niveau du conseil de comté, on souhaite que les mêmes exigences qu'on faisait au niveau local soient là également présentes pour qu'au moins l'information circule, que la prise de décision et les décisions soient connues de sorte que les vrais mandataires soient les gens qui viennent du niveau local. On peut donc lui parler, lui poser des questions ou l'appuyer.

Si on n'a pas un encadrement qui favorise le processus démocratique, dans l'état actuel des choses, prendre le projet de loi 125 avec un certain transfert de pouvoirs à des organismes locaux dans le fonctionnement, tel que c'est fait à l'heure actuelle, si ce n'était pas accompagné de mesures, c'est sûr qu'il y aurait des risques considérables que cela foire dans certains endroits. On est certainement préoccupé de cela, à la fois dans le type de démarches et à la fois également dans les obligations de la démocratie locale.

M. Goulet: Une dernière question, M. le Président. Egalement, dans votre mémoire — vous en avez fait état tout à l'heure, suite à des questions — vous parlez beaucoup de participation. En tout cas, c'est surtout pour cette raison que vous êtes ici, savoir nous démontrer la participation qu'il y a eue à Saint-Jean-de-Matha. Vous parlez également de la qualité du processus démocratique. Vous attachez beaucoup d'importance à la qualité du processus démocratique, mais, par contre, lorsqu'on parle de référendum, lorsque vous parlez de référendum, tel que prévu dans le projet de loi 125, vous avez peur qu'il y ait beaucoup d'énergie... Je vais essayer de reprendre vos mots, afin de vous citer correctement, s'il y a lieu vous me corrigerez: "beaucoup d'énergie pour peu de résultats". Il me semble qu'il y a quelque chose qui accroche.

M. Ouimet: C'est-à-dire que...

M. Goulet: Si on veut une qualité d'un processus démocratique, il me semble qu'un référendum, c'est l'excellence pour le processus démocratique. (12 heures)

M. Ouimet: On va l'expliquer. Si j'ai bien compris le projet de loi, pour demander un référendum, il faut, ou bien 10% des électeurs inscrits sur le registre, ou bien 100 personnes dans chacune des municipalités des deux tiers des municipalités. Je ne suis pas en politique, mais trouver cela, ce n'est pas facile. Ce n'est pas facile

de regrouper autant de gens pour demander la tenue d'un référendum — il n'est pas tenu encore — et ce, pour un référendum qui, au bout d'un processus, ne sera que consultatif. On est toujours pour la qualité du processus, mais on dit que ce moyen risque de consommer beaucoup d'énergie dans la participation des citoyens pour, en fin de compte, ne même pas être décisionnel.

M. Goulet: Par contre, vous soutenez qu'à un moment donné, un groupe de citoyens, si minime soit-il, pourrait aller directement au bureau du ministre et faire renverser une décision du conseil de comté. J'ai cru vous entendre dire cela tout à l'heure. Cela m'a surpris, parce qu'au niveau d'un processus démocratique, normalement, la minorité, lorsque des gens se sont prononcés, ne devrait pas aller jusqu'au cabinet du ministre et lui demander de renverser une décision d'un conseil de comté.

M. Ouimet: Si c'était interprété comme cela, d'accord. On s'est dit: En termes de cour d'appel. Cela veut dire qu'à ce moment, il faut qu'il y ait un bien-fondé à la demande. On souhaite aussi, on l'a dit, que dans ces cas, le processus soit public et que toutes les parties aient l'occasion de se faire entendre. On n'est pas contre un référendum. On dit simplement qu'il risquerait d'être inopérant tel qu'il est fait là, ou du moins, peut-être qu'on sous-estime nos efforts, mais on pense qu'on aurait peu de chances, dans ce contexte, d'obtenir suffisamment de voix pour être capable de demander un référendum. Ce n'est pas qu'on soit contre, en principe. On ne veut pas dire non plus que ce soit l'arbitraire et le discrétionnaire qu'un petit groupe demande au gouvernement de modifier. On dit: Qu'on puisse quand même faire appel, faire valoir son point de vue, que les règles du jeu soient claires et que le conseil de comté ou d'autres groupes puissent se faire valoir. Encore là, ce ne sont que des suggestions. Il peut y avoir d'autres modalités, mais à l'intérieur de cela, c'est l'intention d'essayer de voir comment on peut participer. D'un autre côté, je comprends ce que vous voulez dire quand vous dites: Quand des gens se sont exprimés. Si une majorité s'est exprimée dans un référendum pour un schéma d'aménagement, j'imagine que dans ce cadre, ce serait difficile que des citoyens aillent demander, parce que là, il y aurait eu une expression claire de voeux d'une majorité, mais là c'était dans le cas de l'absence d'un référendum.

M. Goulet: Une dernière question. Si je comprends bien, à la suite de votre intervention, le référendum devrait être décisionnel. Vous dites que c'est difficile d'en obtenir un, mais le référendum devrait être décisionnel. Dans la loi, un référendum consultatif est prévu. Au niveau de la participation, qu'est-ce que vous voyez dans le projet de loi 125 qui va améliorer la participation des citoyens? Depuis que j'ai été élu, cela fait deux ans et demi, et après en avoir parlé avec d'autres collègues, c'est comme cela... On convo- que des réunions d'information dans nos régions. On y va avec des hauts fonctionnaires, des gens compétents qui viennent pour donner de l'information. On fait passer les informations à ce qu'on appelle le prône le dimanche, on envoie une lettre à chaque citoyen la semaine avant. On place des appels téléphoniques et on se réunit, à un moment donné, pour des projets de réseaux d'aqueduc et d'égouts, mais on n'est pas encore allé au niveau de l'aménagement comme tel, et on se réveille, dans des paroisses de 2000 ou 3000 habitants, avec 15, 20 ou 30 personnes dans la salle. Qu'est-ce que vous voyez dans le projet de loi 125 qui va améliorer cela, avec toute la bonne volonté des élus municipaux, même s'ils veulent vraiment donner une réunion d'information et ne pas faire, comme vous dites à la page 3: "Ils gardent cela pour eux"? Avec la meilleure volonté du monde, les gens ne viennent pas à ces réunions d'information.

M. Ouimet: C'est une situation de fait, c'est de savoir pourquoi ils ne viennent pas. Partons du fait qu'il n'y aura jamais 100% des gens qui sont intéressés sur 100% des questions. Nous avons cru concéder — parce que nous aussi, nous avons eu de la difficulté à faire de la mobilisation et à intéresser les gens. Ce dont on s'est aperçu, c'est que les gens ont une longue pratique de non-participation et ils n'y croient pas non plus, parce qu'ils ont de multiples raisons de croire que c'est inefficace. Les fois qu'ils ont participé, cela n'a pas eu beaucoup de résultats. Alors, au départ, dans le cas de la ligne hydro-électrique, les gens nous ont dit: Vous perdez votre temps. Le gouvernement va faire ce qu'il veut. L'Hydro-Québec, c'est gros et cela va passer là. Cela ne mobilise pas beaucoup les gens quand ils sont convaincus de cela au départ. Après cela, ils nous regardent aller et ils disent: Vous êtes bien admirables, vous perdez votre temps. Ce n'est que graduellement. Il y a une longue pratique de non-participation.

Parfois aussi, on est dans la ville de Montréal et c'est sûr que cela ne facilite pas la participation quand l'information ne circule pas. Nous, ce qu'on dit, c'est que si on la rend possible, ce n'est pas du jour au lendemain que le monde va y croire et va le faire. Mais, quand c'est possible, il y en aura sûrement un certain nombre qui vont le faire et, dans la mesure où ce sera efficace, d'autres seront... C'est la meilleure forme d'éducation à la participation, à mon point de vue, la participation elle-même, surtout quand elle est réussie. Tous les moyens que le gouvernement met en place, que ce soit le recours collectif, ou que ce soient d'autres formes, il y en a — peut-être pas une grande majorité — mais il y en a qui vont l'utiliser et, dans la mesure où ce sera un processus qui s'avérera valable, vous verrez que l'éducation va se faire vite. Mais c'est sûr que, dans l'état actuel des choses, les gens, c'est difficile de les grouiller, mais, d'une façon générale, même avec ce projet, c'est sûr qu'il y aura 90% des gens qui resteront chez eux. C'est sûr que tous les gens ne sont pas nécessairement intéressés à se faire élire comme députés non plus.

M. Goulet: M. le Président, je vous remercie...

M. Prescott: Comme expérience extrêmement pratique, je peux ajouter ceci: Nous-mêmes, quand nous avons constitué le Comité des citoyens de Saint-Jean-de-Matha, lors de la première réunion, on était à peu près 17 personnes au total, en incluant les femmes, les enfants, la parenté, et on a eu autant de monde que ça pour la seule et unique raison que la communication ne s'étant pas facilement faite, les gens ont pensé qu'on voulait paqueter quelque chose. Ils sont venus voir, ils ont dit: II faut faire attention. Ce sera des dépenses pour la municipalité; ils s'en viennent avec un plan d'urbanisme et de zonage. Cela va coûter une fortune et il ne faut pas se laisser faire. Cela a été bon, même si ce n'était pas le but, parce que les gens sont venus et étaient très inquiets. Quand on a été rendu là, on a dit: Ce n'est pas ça du tout. C'est une simple erreur de communication et on a commencé à ouvrir.

On a ouvert et on a dit: Quand on tiendra des réunions, on les tiendra en même temps à Saint-Jean-de-Matha et on les tiendra le lendemain ou dans la même période à peu près à Montréal également. On a commencé avec une quinzaine de personnes, lors de la première réunion. A la deuxième, on était une quarantaine et, à Montréal, on a décidé... Les autorités municipales sont venues nous rejoindre là-bas, parce qu'on travaille très ouvertement et amicalement — j'insiste beaucoup là-dessus — et, lors de la première réunion, nous attendions 50 personnes. On s'est dit: II y a moyen. Les gens qui sont en politique savent que, trop de monde dans une petite salle, c'est excellent. On a pris une petite salle et, il y avait trop de monde, mais enfin, pas trop de monde, comme on pensait, parce qu'on s'est dit: Si on en a 50, je pense qu'on rêve d'attendre 50. On en a eu 125. Cette réunion s'est terminée à minuit et demi, je pense, et il n'y a pas 10% des gens qui ont quitté, parce qu'on avait des affaires à dire, des informations à donner; ce n'était pas un paquetage en règle — on ne le prenait pas ainsi — on a eu le temps de parler, poser des questions, etc. C'est important dans la méthodologie dont on parlait tout à l'heure.

Lors de la deuxième réunion, c'était pour voir les impacts, avec des tableaux; c'était très bien préparé, tout le monde se reconnaissait, c'étaient de vrais problèmes identifiables pour chacune des personnes présentes. Cela touche chacune des personnes. On a tenu une deuxième réunion, toujours à Saint-Jean-de-Matha, la parallèle se faisait, parce qu'il n'est pas facile, pendant l'hiver, d'inviter des gens à venir suivre une assemblée de conseil ou d'assister à une réunion de citoyens à quelque 60 milles de Montréal. Nous avons tenu nos réunions toujours au même endroit, avec le même type d'invitation, avec un ordre du jour, des choses très précises. La deuxième fois qu'on a tenu une réunion, on a pris un petite salle. On s'est dit: II va y avoir plus de monde et il faudra prévoir au moins 150 cette fois. On est allé au-delà de 300. Encore là, les gens sont d'une ténacité incroyable, dans la mesure où on traite des vrais problèmes qui les touchent, avec des moyens, mais qu'ils ne sentent pas, par exemple — là-dessus, il n'y a rien de caustique dans ce que je vais dire — que des fonctionnaires, très bien organisés et même des hommes politiques — pourtant, je leur porte beaucoup de respect — qui pourraient arriver... Ils doivent se faire très humbles dans ce genre de chose. Ils doivent être présents, sereins et écouter. Les fonctionnaires, il y a moyen que ces gens nous déposent de l'information, mais à la demande des gens eux-mêmes. Quand ils le sentent bien de cette façon, ça participe. On peut même prendre des noms... On a ramassé une quarantaine de noms de personnes... C'est assez rare qu'il y a des gens qui, volontairement, l'assemblée finie et aussi tard, donnent leur nom, acceptent de collaborer et des gens ajoutent le genre, la qualité de citoyens qui leur permet de nous rendre service. Un ingénieur en aménagement ne veut pas nécessairement faire partie de l'exécutif, mais il se dit: Dans ce domaine, je pense être capable de vous rendre des services et voici mon nom; je suis en disponibilité. Le pire, c'est que c'est vrai.

On a énormément confiance à cette participation, mais il faut qu'elle soit à la fois très bien organisée, mais pas organisée du tout, organisée dans deux sens très différents. Je pense que c'est très important. On l'a vécu et, moi-même, je suis surpris de la ténacité des gens et de l'intérêt soutenu et constant quand ils sentent que cela les touche.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Léonard: M. le Président, je veux vous féliciter de cet excellent mémoire qui porte sur un point précis qui est celui de la participation. Je voudrais vous dire au départ que nous allons en tenir compte, nous allons étudier vos recommandations très attentivement, comme les recommandations d'autres mémoires avant. Nous en sommes au stade où on analyse des mémoires qui portent sur les principes de la loi et nous allons le faire — n'ayez crainte — même si des gens vous disent qu'ils n'ont pas de réponses; c'est que ce n'est pas le moment de les donner tout de suite, tout simplement. Je voudrais quand même vous rassurer sur ce plan.

Je reviens à votre mémoire qui porte en particulier sur la participation. Je pense que c'est, jusqu'ici en tout cas, le mémoire qui a fourni le plus de détails sur ce sujet et, compte tenu de votre expérience, je pense bien que c'est très valable que vous nous en ayez fait part. Je vous dirai au départ qu'il me semble que la loi 125 fait le pari que les gens vont participer, qu'ils vont s'intéresser. Ce qu'on veut, c'est leur fournir un cadre, leur fournir des moyens de le faire qui soient efficaces. Dans cette mesure, en tout cas, j'apprécie beaucoup vos commentaires parce que nous en sommes, encore une fois, au stade où on peut encore bonifier la loi et vos remarques sont particulièrement précieuses sur ce plan.

Je pense que c'est un des paris que l'on doit faire en aménagement, c'est que les gens s'y intéressent lorsque cela vient sur le tapis, que ce sont des décisions qui les touchent pour très longtemps, pour toute leur génération et parfois même pour tout le temps; lorsqu'on touche au territoire, on peut l'affecter de façon définitive. Je dirais aussi que, sur le plan de l'aménagement, l'appui des citoyens est particulièrement important pour que cela s'inscrive dans le paysage, pour que les élus municipaux se sentent aussi appuyés par les gens. A ce moment-là — je pense que vous en avez fait la preuve vous-mêmes — il y a des choses qui se passent au niveau municipal, des décisions se prennent et le dossier avance, en général.

Je voudrais, puisque le temps avance, vous poser une question par rapport à la page 12 de votre mémoire. Vous demandez que le conseil de comté informe la population de ses réalisations et que les citoyens puissent intervenir directement aux réunions du conseil. Ma question est: Quels devraient être les principaux éléments à intégrer dans la loi pour permettre l'information des citoyens et de quelle manière les citoyens pourraient-ils s'inscrire dans la démarche des conseils de comté? Est-ce qu'on peut mettre cela dans un texte législatif? Est-ce que vous pouvez préciser davantage là-dessus, par rapport aux réunions du conseil de comté, puisque c'est décisionnel?

M. Ouimet: Je dois vous dire que, pour notre part, nous sommes sur un terrain beaucoup plus fragile, parce qu'on a peu assisté à des réunions de conseil de comté, sauf à une couple d'occasions pour essayer d'aller exposer le problème de la ligne; nous étions seuls dans la salle et nous avons senti que nous n'étions pas nécessairement les bienvenus.

Je ne sais pas si c'est possible de mettre cela dans la loi. A ce moment-ci, on ne sait pas quelles sont exactement les modalités, sauf que, sans doute, il y aurait des documents qui sont issus du conseil de comté, les résolutions en sont, les ordres du jour, mais il y a peut-être également d'autres documents qui sont produits. Il devrait y avoir une obligation de les rendre publics, qu'ils soient accessibles. Toujours sans savoir le fonctionnement actuel des conseils de comté, on se disait que... On n'a pas articulé cela, mais il nous semblait qu'il serait possible, dans les cas où des discussions sur l'ordre du jour d'un conseil de comté touchent soit une partie du comté ou des gens en particulier, qu'il puisse y avoir une période où les gens puissent exprimer leur point de vue. Elle peut être limitée dans le temps. Est-ce que c'est au projet de loi comme tel à fixer les règles ou à obliger les conseils de comté à avoir ces possibilités? Cela devient de la technique qui nous échappe, mais il nous semble que, pour le moment, on pourrait peut-être craindre des abus dans ce cas. Mais je pense qu'on n'a pas cette crainte actuellement; je pense qu'on est plutôt dans l'abus contraire, c'est-à-dire que les réunions des conseils de comté sont assez hermétiques par rapport à l'information. Ce qu'on souhaite, c'est que cela puisse être possible. Sous quelle forme? Je ne sais pas. (12 h 15)

M. Léonard: D'accord.

M. Ouimet: Seulement une chose qu'on voudrait ajouter parce qu'on se l'est fait dire souvent, soit dans des projets ponctuels, et on risque de dire la même chose dans les projets sur l'aménagement, que la participation, c'est une grande consommatrice de coûts financiers pour les municipalités, les conseils de comté et le gouvernement et une grande consommatrice de temps. On perd du temps. On n'est pas pour commencer à consulter le monde, il va y avoir des débats et ça va retarder les projets. On pense qu'on gagne du temps et on économise de l'argent en faisant participer le monde. Cela coûte moins cher après de replâtrage, ou de restauration, ou de technique après être rendu au bas de la côte et qu'on essaie de remonter. On pense que bien au contraire, si on parle de gestion harmonieuse, en fonction du cadre de vie des gens, on gagne du temps en les invitant au départ et on épargne de l'argent aussi. On risque d'économiser de l'argent parce qu'on pourrait citer de multiples exemples... le Parc olympique n'est pas le plus petit où la non-participation du public avec tous les experts n'a pas nécessairement gagné du temps et de l'argent.

M. Léonard: Merci.

M. Prescott: Si vous me permettez de faire un dernier petit message commercial qui serait quasiment hors d'ordre si on était dans une autre salle, ce serait pour vous inviter au festival des sucres de Saint-Jean-de-Matha qui se déroule actuellement et c'est d'autant plus le temps pour vous de venir voir ça, si vous en avez le temps, car c'est la fin de semaine Louis-Cyr, la fin de semaine des hommes forts et s'il y a un endroit où vous pourriez venir, avec des chances de gagner, c'est là. Alors, vous êtes les bienvenus. Mon message est passé.

Le Président (M. Marcoux): J'en prends bonne note parce que je vais aller passer les vacances de Pâques à Sainte-Béatrix.

M. Ouimet: M. le Président, avec votre permission, pour illustrer clairement ce que je disais sur la question des coûts, la ligne hydroélectrique n'est pas encore décidée, il n'y a eu aucune nouvelle demande déposée, il n'y a pas eu d'autres informations; on n'a certainement pas gagné du temps dans le processus qu'on a pris à venir jusqu'ici.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie de la présentation de votre mémoire. J'inviterais maintenant le Conseil régional de la culture de l'Outaouais à venir présenter le sien. Mémoire 35. M. Bellanger, si vous voulez nous présenter votre mémoire.

Conseil régional de la culture de l'Outaouais

M. Bellanger: D'accord. En ce qui concerne le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme, le conseil de la culture soulève une question fondamentale, en ce sens que l'été dernier le ministre d'Etat au développement culturel avait proposé, au sein de sa politique québécoise sur le développement culturel, que le patrimoine pourrait être remis aux municipalités.

Si on regarde — sans parler d'historique — l'aspect un peu traditionnel ou les pouvoirs qui sont accordés aux municipalités, elles ont une responsabilité en ce sens touchant le patrimoine, l'environnement et également l'agriculture. D'où notre étonnement lorsque ce projet de loi a été présenté, de ne pas retrouver l'intention de la politique québécoise du développement culturel à l'effet que ce pourrait être remis à un niveau municipal ou à un niveau un peu plus populaire et, d'autre part, les intentions déjà manifestées en termes de responsabilités accordées aux municipalités dans ce projet.

C'est cette question fondamentale qu'on soulève qui est d'abord une question de logique et aussi une autre question, celle du bon sens. Cette question également sur laquelle on insiste, ce n'est pas une référence à notre région en particulier. C'est un point de vue qui peut être élargi au niveau de toute la province parce qu'elle rencontre des problèmes similaires.

Si on regarde la loi 2, la loi 4 sur les biens culturels, jusqu'à présent le gouvernement ou du moins les instances concernées se sont contentées de ces lois pour agir et réglementer en termes de patrimoine. Bien souvent les mesures qui sont proposées sont d'ordre curatif et le problème, en termes du patrimoine, c'est qu'il faut penser dans une perspective d'aménagement et envisager que le patrimoine, ne serait-ce que pour être protégé, doit être travaillé; on devrait y accorder de l'attention, mais à un niveau préventif.

Donc, cet aspect, il faudrait qu'il soit effectivement inclus au sein de ce projet de loi. En ce qui nous concerne, à titre d'exemple, le projet de loi, on l'a pris au pied de la lettre et nous avons fait l'exercice, en matière culturelle générale avec le comté de Labelle, justement de faire un travail conjoint pour instituer, élaborer un schéma d'aménagement culturel où, bien sûr, le côté patrimonial se trouve inclus.

D'autres considérations sont relativement importantes, c'est que le patrimoine, en milieu rural, s'il ne suscite pas l'intérêt de la population, risque d'être abandonné. En milieu urbain, il est souvent sujet à des spéculations et de toutes les façons il est menacé.

Le problème qui se pose aussi en termes d'aménagement, c'est que dans ce cas on parle surtout d'un patrimoine bâti, d'un patrimoine immobilier, d'un patrimoine installé dans un milieu spatial; ce peut être un bâtiment, mais ça peut être aussi un site archéologique. Egalement, cet élément du patrimoine rejoint des secteurs structu- rants, lorsqu'ils peuvent être utilisés en termes d'équipement culturel, fonctionnel, pour ce qui est des activités, de l'animation, qui pourraient se prévaloir de tels bâtiments.

Dans l'ensemble, ce que nous proposons, c'est que cette question patrimoniale soit effectivement considérée dans un schéma d'aménagement et qu'il soit harmonieux dans l'ensemble. On insiste sur l'aspect préventif pour ne pas être toujours pris, à la dernière minute, en termes de médecine, avec une intervention d'ordre curatif. De plus, on remarque que le ministère des Affaires culturelles n'a jamais déposé de politique en matière patrimoniale.

Pour en arriver à des points beaucoup plus spécifiques, je vais revenir au document de travail que nous avons présenté et qui s'intitule: "La question culturelle et l'aspect patrimonial". Dans l'ensemble, ce document contient une première partie qui concerne le projet de loi 125. Nous avons fait un effort pour le vulgariser auprès de nos administrateurs et de la poulation en général; le CRD, dans notre région, en a fait autant, mais de façon plus élaborée. Vous savez que de toute façon ce n'est qu'un exposé de la loi sur lequel on n'a rien à dire comme tel, puisque ce n'est qu'à titre d'information.

Dans un deuxième temps, c'est le côté beaucoup plus patrimonial proprement dit qui nous intéresse.

Dans les argumentations générales, je sauterai la partie de l'exposé de la loi que vous connaissez très bien, bien sûr, et ça revient à ceci: La justification économique prime trop souvent la considération d'autres aspects difficilement quan-tifiables de la vie communautaire. Les multiples transformations ou même démolitions de sites et de bâtiments historiques en sont une preuve éloquente. Il est à la fois significatif et malheureux que le projet de loi 125 soit muet sur la question culturelle dans son aspect patrimonial.

Sans mettre en doute le bien-fondé d'une telle loi, il faut s'interroger sur ses possibilités à permettre un développement harmonieux des communautés. L'absence de toute référence au patrimoine en confirme la fragilité, eu égard au développement urbain. Elle consacre de plus sa conception actuelle de l'urbanisme comme étant une suite de propositions ponctuelles non intégrées.

On poursuit un peu plus loin: Si le projet de loi ne propose pas de redéfinitions substantielles de la pratique actuelle de la planification au Québec, c'est principalement parce qu'elle n'a pas été précédée d'une analyse en profondeur de la signification pour la communauté de l'urbanisme et de l'aménagement. Sinon, comment expliquer le silence sur la question du patrimoine?

En gros, voici notre avis: La politique québécoise du développement culturel indique l'intention ferme du gouvernement québécois de remettre aux municipalités la responsabilité de la protection du patrimoine et au surplus, cela est capital, l'application locale ou régionale pour sa conservation et son utilisation à des fins culturelles et communautaires.

La protection du patrimoine doit fréquemment céder devant les impératifs du développement urbain, dont les avantages se mesurent trop souvent en termes de l'augmentation de la valeur taxable.

Conséquemment, les municipalités n'ont pas, à ce jour, manifesté pour le patrimoine tout l'intérêt que sous-entend le développement harmonieux des communautés qu'elles administrent.

Il ne faudrait pas, pour autant, laisser entièrement aux autorités provinciales la gestion du patrimoine québécois. S'il faut s'assurer de sa correspondance aux besoins locaux, la prédominance des orientations provinciales de développement sur les intérêts régionaux peut en rendre la réalisation difficile, d'autant plus qu'elles n'impliquent pas de consultation.

En ce sens, il y aurait tout lieu de faciliter l'intégration entre les différents niveaux de zonage: règlements municipaux et Loi sur les biens culturels. Le règlement municipal de zonage pourrait, entre autres, reprendre les conditions du développement des terrains couverts par la législation provinciale.

Certaines mesures supplémentaires peuvent être envisagées de façon à permettre une prise de conscience par la population locale, au-delà d'une conception mercantile de la nécessité de protéger et mettre en valeur son patrimoine.

Au niveau des besoins, l'adoption des mesures de protection ne saurait constituer, à elle seule, une réponse satisfaisante aux besoins de la communauté. Le patrimoine exige aussi une insertion à la vie communautaire. Il est donc essentiel que les documents d'urbanisme contiennent une évaluation des besoins de la population et les possibilités pour les sites et bâtiments patrimoniaux de les satisfaire. Il faut dépasser cette acceptation limitée, peu conforme à notre société.

Cependant, rien, dans le projet de loi, n'assure la satisfaction des besoins, c'est-à-dire que leur identification n'est même pas prévue. En fait, la seule intervention des citoyens se fait lors de la présentation des propositions d'instruments de réalisation. Il est, à ce moment, souvent trop tard pour leur assurer une contribution fidèle à leurs aspirations.

A un autre niveau, en ce qui concerne l'identification des biens patrimoniaux, c'est souvent lors d'une démolition ou d'une modification radicale d'un bien culturel que la population prend conscience de son existence. Il serait souhaitable de soumettre à l'avis d'une commission, au niveau du comté, toute demande de permis de démolition ou affectant un édifice qu'elle aurait préalablement identifié comme étant d'intérêt pour la communauté. Les décisions irréversibles ne doivent pas être prises en catimini. La commission doit disposer d'un certain temps pour mettre en place les mesures de protection qui s'avèrent nécessaires. Ce serait même au demandeur de supporter le fardeau de la preuve.

Elle pourrait prendre plusieurs formes, mais il s'agit essentiellement de ne pas laisser uniquement aux gouvernements le contrôle du patrimoi- ne. Sa protection et sa mise en valeur doivent absolument se faire en fonction des besoins de la population. L'existence de la commission serait donc justifiée par sa représentativité et surtout par une activité qui devrait aboutir à l'élaboration d'une politique patrimoniale, établissant d'abord le droit de la population au patrimoine, quitte à ce que l'on prenne par la suite les mesures pour la réaliser.

Il n'existe pas, à l'heure actuelle, de politique patrimoniale au Québec. Même la simple protection n'est pas une priorité. Les critères de sélection sont ou bien inexistants, ou bien imprécis.

Le projet de loi 125 diminue l'importance de la question du patrimoine dans le développement des municipalités en ce qu'il ne l'intègre pas formellement aux schémas de comté et règlements municipaux d'urbanisme. Les procédures proposées ne permettent pas de combler cette lacune fondamentale.

L'aspect concernant les consultations des organismes, je le laisserai tomber pour l'occasion, car on insiste davantage sur ce côté patrimoine et culture, et nous laissons à d'autres le soin de développer des questions beaucoup plus larges.

Finalement, la question de notre avis proprement dit, pour ceux qui auront une recommandation, revient à celle-ci.

Etant donné que le patrimoine est une ressource rare qu'il ne convient non seulement de protéger, mais aussi d'insérer la vie communautaire;

Etant donné que le patrimoine doit fréquemment céder devant les impératifs du développement dont les avantages se mesurent trop souvent en termes d'augmentation de la valeur taxable;

Etant donné que la politique québécoise du développement culturel publiée en 1978 indique l'intention ferme du gouvernement québécois de remettre aux municipalités la responsabilité de la protection du patrimoine;

Etant donné qu'il n'y a pas de politique du patrimoine au Québec, le Conseil de la culture recommande: que l'identification des biens patrimoniaux soit ajoutée au contenu obligatoire du schéma et au contenu facultatif du plan d'urbanisme; que l'article 109 soit modifié pour inclure de façon spécifique la protection des biens patrimoniaux; que l'article 126b soit modifié pour attribuer au comité consultatif d'urbanisme des pouvoirs d'étude et de recommandations en matière de protection des biens patrimoniaux.

Concernant ce dernier article, notre position présente une alternative qui sera de prévoir au niveau de comtés l'institution d'une commission du patrimoine ou d'un comité spécialisé au sein de la commission d'aménagement consultative quant à toute demande de permis affectant un édifice d'intérêt communautaire qu'elle aurait préalablement identifié. Elle devra également formuler des politiques de préservation de ses biens et arriver à l'élaboration d'un schéma d'aménagement, de développement et de promotion de ceux-ci.

Donc, toute intervention se résume à cet avis que nous vous avons présenté.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie. M. le ministre.

M. Léonard: Je vous remercie, M. Bellanger, je remercie le Conseil régional de la culture de l'Outaouais d'avoir présenté ce mémoire. Il porte sur un point, en tout cas, il insiste, en particulier, sur un point précis qui est le patrimoine, et il me semble que cela ressort vraiment et honnêtement de votre mémoire.

Les recommandations que vous faites sont très intéressantes. Je pense qu'elles sont nouvelles, d'une part parce qu'elles sont là parmi d'autres mémoires qui ont porté sur d'autres plans, mais c'est la première fois que cela porte sur le patrimoine, et nous sommes très heureux d'en prendre connaissance ici. (12 h 30)

Ces recommandations pourraient permettre un plus grand degré de détail, disons, dans la confection des plans d'urbanisme et peut-être même dans les schémas d'aménagement, s'il y a lieu, parce que ça se peut que le patrimoine puisse même se retrouver au niveau du plan d'urbanisme, s'il s'agit de la municipalité elle-même. En tout cas, il y a une chose qui est aussi très intéressante, c'est que cela va permettre la protection des sites et des bâtiments historiques par les municipalités elles-mêmes, simplement en modifiant le projet de loi; cela pourrait permettre ça.

Je pense que votre mémoire va nous donner l'occasion de nous interroger sur la question de la protection du patrimoine. J'aimerais bien vous poser quelques questions en rapport avec cela, sur l'aspect patrimonial, tout au moins. A la page 5, vous dites qu'il ne faut pas laisser entièrement aux autorités du Québec la gestion du patrimoine. Est-ce que vous pourriez nous dire, d'après vous, ce qui devrait relever du Québec, des comtés et des municipalités? Est-ce que vous auriez des exemples à nous soumettre là-dessus?

M. Bellanger: C'est peut-être plutôt par défaut, parce que le ministère s'est appliqué, en matière patrimoniale, autour des années soixante-douze... C'était pour certaines responsabilités qui étaient déjà d'ordre municipal, mais que, soit par manque d'intérêt ou par manque d'argent, elles n'ont pas assumées jusqu'au bout. Le ministère est effectivement entré dans ce domaine car, justement, les cas d'urgence étaient effectivement posés.

Lorsque le gouvernement a eu cette intention de remettre le dossier patrimonial aux municipalités, M. Laurin, en l'occurrence, pour ce qui était de la citation sur le chapitre qui portait sur le patrimoine, n'était pas clair quant au contenu de cedit patrimoine. Est-ce que c'est au niveau des responsabilités effectives, des interventions? Est-ce que c'est un dossier général de préservation, et aussi d'être maîtres d'oeuvre à leur niveau? Là-dessus, si nous n'avons pas une réponse franche et directe, c'est parce que la question préalable qui était proposée par le document sur la politique du développement culturel elle-même n'était pas claire, elle était beaucoup plus générale.

Cet aspect, bien sûr, nous intéresse. A un moment donné, justement, on présentait une alternative à la municipalité; est-ce que le patrimoine, on le lui accorde ou si c'est au niveau du comté? Entre ces deux options, on privilégierait le niveau du comté, parce que l'espace se trouve, en termes quantitatifs, plus grand; en termes de schéma d'aménagement, les limites étant poussées plus loin, ils peuvent concevoir un schéma englobant, quitte à ce que les municipalités, au sein d'un plan directeur, traduisent, au niveau de leur plan, les intentions du conseil de comté là-dessus.

On se réfère également à une proposition qui a été faite lors du dépôt du schéma de la communauté de l'Outaouais, la CRO. Au départ, c'est une commission qui avait été prévue et, par la suite, ces gens ont traduit cela en comité, et il était effectivement dans leurs intentions que cedit comité élabore un schéma d'aménagement patrimonial. Ils n'ont pas donné de suivi là-dessus. Si on regarde ce qui se passe dans notre région, les actions ponctuelles sont toujours posées, même au niveau d'une méthode, mais parfois ils ignorent qu'il en existe une au ministère. La loi 91, qui reprend certains articles de la Loi des cités et villes et du Code municipal, donne un certain pouvoir aux municipalités; au niveau des intentions ou de prévenir le ministre qui présente un avis d'intention de classement, beaucoup de municipalités ignorent leurs propres prérogatives.

L'ensemble, on le verrait... C'est certain que ces municipalités rurales ne sont peut-être pas en mesure d'avoir un spécialiste, encore moins, mais même un petit service d'urbanisme simplifié, elles ne peuvent pas en assumer la charge. Au niveau d'un conseil de comté, je crois que ce serait le niveau intéressant pour que le patrimoine corresponde au milieu, tout en ayant un aspect qui est relativement large. Bien sûr, l'autre élément, ce serait de disposer de personnes-ressources sur le sujet. Si on regarde ce que le ministère a à offrir, simplement pour ce qui est des classements des bâtiments, je crois qu'il n'y a que deux personnes; un étant malade, cela veut dire que l'autre reste tout seul pour tout ce qui regarde le classement au Québec. C'est minime comme ressource.

Récemment, il y a eu un communiqué disant qu'au niveau de l'archéologie, le gouvernement comptait sur le bénévolat. Lorsque vous touchez à l'archéologie, ce sont des questions très spécialisées et vous ne pouvez pas laisser cela entre les mains de n'importe qui, car à un moment donné, s'il y a du pillage... C'est aussi une chose possible. Il faut faire attention à la remise, trop compter sur la communauté qui, elle, soit n'en est pas consciente ou bien a de bonnes intentions, ne se rend pas compte de la propre valeur dont elle dispose. Vous avez des problèmes au niveau du ministère qui lui, a des critères en termes patrimoniaux, si encore, ils en ont véritablement d'identifiés, car je crains qu'ils y aillent à la pièce,

mais tout de même ils conçoivent que, par exemple, si le patrimoine qui est dans Charlevoix est le barème où est le critère patrimonial, c'est celui de ce comté en particulier... Il est certain que dans notre région, un bâtiment qui a 100 ans est relativement jeune.

Ce sont tous ces éléments qui doivent être convenus, qui doivent être nécessairement réfléchis. On a fait certaines propositions un peu plus spécifiques en disant que tel élément devrait être inclus dans cet article ou retiré. Oui, c'est simplement une amorce pour lancer le débat; vous avez certainement des spécialistes ou des avocats ou des personnes qui pourront reprendre cet élément, le mûrir et y réfléchir. Quant à nous, c'est beaucoup plus pour lancer ce débat là-dessus, conscientiser le gouvernement que l'aspect patrimonial, ne serait-ce qu'en termes de bâtiment, fait partie d'un espace, que l'urbanisme et le dynamisme des villes font que lorsque le bâtiment est coincé au sein d'un quartier, il risque d'y avoir de la spéculation qui intervienne et les questions de zonage, la municipalité zgne un quartier résidentiel, le gouvernement du Québec dit que tel bâtiment est classé ou reconnu, ce qui devient un zonage en lui-même. La municipalité ignore ou ne reconnaît pas cette doublure de zonage, sur un même espace. Il y a aussi une question d'intégration là-dessus. Je crois qu'il y a beaucoup de parties qui s'ignorent mutuellement, et, à un moment donné, le dossier échappe. Chose qui est un peu bizarre. On parlait d'espace, mais on parle aussi de temps, ce sont des bâtiments qui appartiennent au passé et plus on s'engage dans le futur, plus ils sont menacés, d'où l'importance d'un schéma qui, non seulement élabore dans l'espace mais aussi dans le temps. C'est l'aspect préventif qui devrait être identifié. Je ne dis pas une identification du type comme le ministère où c'est classé ou bien reconnu. Cela pourrait être une reconnaissance à un niveau du comté, une reconnaissance d'intérêt collectif.

C'est un point qui est peut-être passé inaperçu parmi la commission, mais bien souvent l'individu qui est propriétaire d'un bâtiment ou qui l'achète, demande un permis de démolition. La municipalité l'accorde le lendemain. On dit ceci: Si jamais il y a des citoyens qui s'intéressent à ce même bâtiment, ils sont obligés de passer à la Commission des biens culturels ou par la direction du patrimoine, cela prend un certain temps et finalement ce sont les personnes impliquées dans le patrimoine qui doivent justifier le bien-fondé de la sauvegarde de ce bâtiment. On prétend le contraire, on dit: C'est le demandeur qui a à supporter le fardeau de la preuve, il doit prouver le bien-fondé de devoir démolir cette maison. En même temps, c'est une certaine économie sur les énergies et sur le personnel, à l'heure actuelle, sur lesquels le gouvernement peut disposer, concernant le patrimoine. Effectivement, les effectifs sont très peu nombreux et une telle mesure qui renverserait la vapeur donnerait un certain temps pour, effectivement, revenir sur le dossier. Mais le bonhomme devrait prouver que c'est bien fondé le fait de devoir démolir un tel bâtiment.

M. Léonard: Vous dites que finalement les municipalités n'ont pas manifesté beaucoup d'intérêt pour le patrimoine, c'est un peu absent des préoccupations, en général, pour la plupart des gens. Vous pensez qu'avec le projet de loi 125, ils vont être davantage sensibilisés à la valeur du patrimoine?

M. Bellanger: Oui, en ce sens que si effectivement il y a un schéma qui prévoit un schéma d'aménagement du patrimoine, au sein du secteur culturel, comme l'exercice qu'on est en train de mener avec le comté de Labelle, si les municipalités doivent effectivement déposer un plan directeur, elles se trouvent à être nécessairement concernées, car elles devraient donner un certain suivi, là entre autres, sur cet aspect qui est un équipement, c'est un bien direct, qui attend...

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je n'ai pas de questions à poser à M. Bellanger. Je le remercie de la présentation de son mémoire. Je lui avoue, en toute sincérité, que je ne m'étais même pas arrêté à l'aspect "patrimoine" lorsqu'on a parlé d'aménagement et j'ai bien l'impression que le gouvernement non plus, puisqu'on ne retrouve aucune disposition dans le projet de loi no 125 à cet égard.

Ce que recommande le conseil régional, en tout cas, à prime abord, me semble répondre à toutes les nécessités, c'est-à-dire que, d'une part, le conseil consultatif, qui est prévu dans un projet de loi, ait comme responsabilité d'avoir une section qui toucherait à la protection du patrimoine et que, dans un deuxième temps, le projet de loi prévoit, au niveau du règlement de zonage des municipalités, la protection du patrimoine, ce qui vient dans la ligne de la politique de M. Laurin de remettre aux municipalités la protection du patrimoine et, finalement, que le schéma du comté d'aménagement soit obligatoire et y fasse référence également.

Je pense que le tout est complet et, je le répète, quant à moi, il me semble que vos suggestions devraient être très bien reçues par le gouvernement.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. C'est un volet très intéressant que devrait toucher le projet de loi no 125.

A l'intérieur de votre mémoire, vous dites: S'il y a divergence d'opinions ou d'intérêts, si vous voulez, entre les trois niveaux, soit le municipal, le conseil de comté ou l'Etat, la question devrait être tranchée par un arbitre qui, d'après vous, serait une commission nationale sur l'aménagement. Le projet de loi prévoit, lui, que si, à un moment donné, un litige devait être tranché, l'arbitre serait le ministre.

Pourriez-vous expliciter là-dessus?

M. Bellanger: Oui, quand je parlais de la commission d'aménagement, je ne parlais pas de la commission nationale, c'est une commission d'aménagement au sein du comté.

M. Goulet: Au sein d'un comté.

M. Bellanger: Au sein du comté, comme les choses se déroulent lorsqu'il y a un schéma qui est élaboré, si je me réfère à ce qui se passe dans le comté de Labelle, ils ont cette instance mitoyenne avec cette responsabilité, effectivement, d'en créer un. C'est certain que lui, est consultatif vis-à-vis des personnes élues. Si on voit les niveaux comme tels, il est certain que c'est toujours à la discrétion du ministre, en dernière instance, de trancher, mais c'est beaucoup plus de cette volonté d'harmoniser, de rentrer, de pénétrer le milieu, de voir où se situe la protection du patrimoine, si elle est à un niveau, justement, d'un aménagement spatial, que ce soit aussi identifié. Il a, bien sûr, la possibilité à la direction du patrimoine, disons le gouvernement, de classer et de reconnaître certains biens, mais la commission d'aménagement pourrait, elle, créer une espèce de reconnaissance d'intérêt public qui n'aurait peut-être pas la valeur ou le statut de ces classements ou de ces reconnaissances très officielles, mais la liste comme telle serait déjà une première base dans laquelle, lorsque les municipalités voudraient, justement, avec un permis de démolition, que, lorsque ça touche un bâtiment qui est répertorié ou reconnu d'intérêt par cette commission d'aménagement, là, la commission émette un avis effectivement, je ne dirais pas une décision dure, mais il faudrait que les municipalités reconnaissent vraiment la pertinence de leur intervention et, également que, lorsqu'on est rendu au niveau de la municipalité, notamment le gars qui lui, a fait la demande, la municipalité, avant d'accorder ce permis, demande au demandeur d'en prouver le bien-fondé.

Le niveau, pour moi, c'est un niveau de comté, pour réglementer certains cas à un niveau municipal et, d'autre part, pour cet aspect d'aménager un bien qui appartient à l'espace; ce niveau leur revient. Bien sûr, vous avez toujours une instance qui est suprême, qui serait vraiment en dernier ressort, et aussi pour éviter tout le temps que cela peut prendre avec les ressources dont dispose le gouvernement sur cet aspect patrimonial et qui est insuffisant à l'heure actuelle. (12 h 45)

Vous savez qu'au niveau d'un comté, ils connaîtraient assez bien leur milieu; ils le connaissent certainement très bien même pour pouvoir intervenir en connaissance de cause.

Le Président (M. Marcoux): M. le député d'Abitibi-Ouest.

M. Gendron: Si vous le permettez, j'aurais seulement deux petites questions. Je pense que vous reflétez dans votre mémoire, avec passablement d'exactitude, un silence sur la question du patrimoine. A un moment donné, spécifiquement sur ce sujet, vous faites trois recommandations de modification au projet de loi 125. L'une — je pense que c'est votre première — touche particulièrement l'identification des biens patrimoniaux. Dans votre première recommandation, vous mentionnez que ce point, à savoir l'identification des liens patrimoniaux, devrait être obligatoire pour ce qui est des schémas d'aménagement mais facultatif pour ce qui est du plan d'urbanisme. Est-ce que vous pourriez donner peut-être davantage de motivations; pourquoi pensez-vous que cela devrait être obligatoire dans le schéma d'aménagement, et facultatif dans le plan d'urbanisme?

M. Bellanger: Pour ce qui est de l'identification comme telle, ne serait-ce qu'au niveau d'un premier inventaire, il est certain que la composition de cette identification doit être quasiment obligatoire, parce que vous allez avoir une intervention dans l'espace. Le préalable à tout cela, de tout le processus de planification voudrait donc qu'effectivement on commence au niveau d'un contenu obligatoire de schéma, que ce soit véritablement dit que la première identification des biens patrimoniaux soit faite à ce niveau. Si on regarde ce qui se passe à l'heure actuelle, pour toute la province il n'y a que quelques comtés qui ont effectivement été couverts quant à l'identification et l'inventaire de ces biens. Vous avez des comtés comme celui de Labelle qui lui, ne connaît pas les biens dont il dispose. Vous avez une municipalité du côté d'Aylmer qui, elle, a une concentration de bâtiments très intéressants, qui voudrait faire une certaine animation pour en tirer un profit un peu économique parce qu'elle n'a pas de véritables commerces ou d'industries et, en même temps, elle est assez proche d'Ottawa pour pouvoir attirer une clientèle touristique. C'est justement un cas de concentration. Si la municipalité procède en termes d'aménagement au sein de sa propre municipalité, toutes les premières contingences et les premières contraintes vont être effectivement ces bâtiments. C'est quasiment l'aspect le plus important dans une telle municipalité.

C'est certain qu'il faudrait qu'on soit assuré, ne serait-ce qu'au niveau d'inventaire, que ce soit effectivement constitué et contenu dans cet aspect de l'article. Quant au contenu facultatif du plan d'urbanisme, on le voyait beaucoup plus en termes de plan, c'est-à-dire en procédant dans une étape ultérieure, et, nécessairement, du fait qu'on avait déjà répondu au premier aspect, le second devenait facultatif, du fait qu'il était obligatoire en premier lieu. C'est dans cet aspect.

M. Gendron: A la troisième recommandation qui touche l'article 126b, vous suggérez que les municipalités et les conseils de comté attribuent au comité consultatif d'urbanisme ou encore à une commission des pouvoirs d'étude et de recommandation en matière de protection des biens patrimoniaux. Je voudrais seulement vérifier s'il a été possible, pour le Conseil de la culture de l'Outaouais, de vérifier, au niveau de certaines municipalités ou des conseils de comté, leur

réaction à la suite de cette recommandation, comment ils se sentiraient, advenant que votre recommandation soit mise à exécution dans un secteur comme celui-là. Est-ce qu'ils se sentent aptes et habilités à porter des jugements là-dessus?

M. Bellanger: Je ne le crois pas, c'est pour ça qu'on présente une alternative, parce que, finalement, on ne veut pas trancher, on laisse le soin à ceux qui vont réfléchir à cette question de découvrir quelle est l'option la meilleure qui se présente. On privilégierait la deuxième, celle au niveau du comté. Ce n'est pas une question de confiance qui est posée, mais, au niveau municipal, on craint que les intérêts soient beaucoup trop économiques, ou qu'il y ait un conflit entre un bien à être sacrifié et une valeur imposable intéressante qui pourrait arriver si un bâtiment était construit à sa place. C'est peut-être à cause de cette proximité de conflit d'intérêts qu'on privilégierait la seconde, qui serait à un niveau beaucoup plus global.

M. Gendron: D'après vous, si les vérifications étaient effectivement faites avec les municipalités ou les conseils de comté, selon votre préférence, est-ce que vous croyez qu'il y aurait un degré de réceptivité assez accueillant à une telle recommandation?

M. Bellanger: Je ne le crois pas; à la première option, article 126b, je crois qu'ils répondraient en disant: Ecoutez, on n'a pas d'argent, on n'a rien de prévu pour ça, ça ne nous intéresse pas tellement; il faudrait que quelqu'un nous présente ce travail de façon un peu plus globale pour qu'on intervienne de façon plus spécifique. Il y a eu des cas où, notamment à Hull, il y avait un bâtiment qui était à proximité d'un hôpital moderne. La première prétention était de raser ce bâtiment ancien parce que c'était un nid de feu, comme on le disait. La CCN, du côté fédéral, a fait une étude par en dessous et disait: S'il fallait raser un des deux, ce serait l'hôpital, parce que, s'il y avait du feu, ce serait l'hôpital lui-même qui brûlerait d'abord, du fait que l'un est en construction extrêmement solide, alors que l'autre a du gyproc, du carton, beaucoup de choses. En plus, comme ce sont des handicapés, ils ne seraient pas en mesure de sortir de cet hôpital. Cela a été un problème. La question a été soulevée au maire; pour ce qui est du conseil de la culture, on avait invoqué la loi 91 qui donnait au maire ce privilège d'intervenir sur cette question. Il a dit: Cela ne m'intéresse pas du tout, je privilégie le social contre la patrimoine.

C'est un cas. Il y en a d'autres. Ce rappel de différents détails nous pousse à dire: Ce n'est pas possible, on ne peut pas procéder de façon ad hoc, de façon ponctuelle, toujours dire: C'est la dernière maison qu'on sacrifie, les autres, c'est garanti. On dit: Encore une, parce qu'il en reste encore une centaine, encore une parce qu'il en reste 99. Ce n'est pas possible de procéder de cette façon, en disant qu'il en reste encore. Il faut, à un moment donné, que les maisons soient identifiées et que même la commission ait assez de jugement pour dire: Ecoutez, nous en avons 200, il est certain que là-dedans, il y en a qui sont en bois. Même si elles sont d'intérêt historique, je ne dis pas qu'on fermerait les yeux, mais on conviendrait que si les maisons devaient être sacrifiées, cela ne gênerait personne. Mais il faudrait que ce soit véritablement établi, parce que c'est au sein d'un cadre, d'un schéma, que vous pouvez arriver à ces propositions. Car, jusqu'à présent, la municipalité elle-même ne dispose pas d'inventaire de ses bâtiments dont elle dispose.

Une Voix: Cela va, je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie beaucoup, M. Bellanger, d'être venu nous présenter votre mémoire au nom du Conseil de la culture de l'Outaouais.

Je propose aux membres de la commission de suspendre nos travaux jusqu'à 14 heures.

M. Chevrette: Excusez, M. le député de Gatineau. Nous sommes unanimes à commencer à 14 heures pour tenter de terminer à 17 heures.

Le Président (M. Marcoux): La commission reprendra ses travaux à 14 heures.

Suspension de la séance à 12 h 54

Reprise de la séance à 14 h 48

Le Président (M. Marcoux): A l'ordre, messieurs!

La commission des affaires municipales poursuit l'audition des mémoires concernant le projet de loi no 125.

J'ai le plaisir d'inviter la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec à venir nous présenter son mémoire. Est-ce que M. Jutras est là? En tout cas, présentez-vous et présentez vos collègues.

Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec

Mme Gervais (Ghislaine): C'est ce que je vais faire avec plaisir. Je ne sais pas si je devrais m'excuser d'être en retard, puisque, selon moi, je ne suis pas en retard. On nous avait dit 15 heures, mais quand même!

Le Président (M. Marcoux): Une série de quiproquos. Allez-y.

M. Chevrette: ... un bouc émissaire.

Mme Gervais: Je suis Ghislaine Gervais. Je suis commissaire d'école à la Commission scolaire Montcalm de même qu'à la Commission scolaire régionale Chauveau, présidente de l'Association

des commissions scolaires du diocèse de Québec et vice-présidente de la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec. J'ai avec moi M. Aurèle Hudon, qui est directeur de la gestion des affaires scolaires à la fédération et Me Michel Beaumont, conseiller juridique à cette même direction.

La Fédération des commissions scolaires est un organisme provincial représentant toutes les commissions scolaires catholiques de la province. Les commissions scolaires ont juridiction sur plus de 1 500 000 élèves des niveaux primaire et secondaire. Elles administrent des budgets dépassant $1500 000 000 annuellement. Elles répondent à des besoins locaux axés sur des objectifs généraux définis au niveau du Québec par une structure politique de représentants élus au suffrage universel que sont les commissaires d'écoles.

Les territoires scolaires locaux sont clairement définis et sont identifiés comme étant des territoires de municipalités scolaires, suivant la Loi de l'instruction publique.

Historiquement — enfin, je dis historiquement, mais ce n'est pas très vieux — au moment où fut créé le ministère de l'Education, il y avait 1500 commissions scolaires. Un mouvement de regroupement de celles-ci, amorcé par la Fédération des commissions scolaires, en 1966 et bien accueilli par les commissions scolaires, en a réduit le nombre à moins de 750 cinq ans plus tard. La loi 27 promulguée en 1971 portait ce nombre à un peu plus de 250.

Aujourd'hui, il existe environ 225 commissions scolaires couvrant tout le territoire de la province. Cela a encore diminué depuis la loi 27, puisqu'un mouvement d'intégration des niveaux primaire et secondaire, a été créé et a porté le nombre des commissions scolaires à 225. Ces 225 commissions scolaires, cela correspond aux commissions scolaires catholiques, aux commissions scolaires protestantes, aux commissions scolaires que l'on dit locales et qui sont de niveau primaire, aux commissions scolaires régionales qui dispensent le niveau secondaire et aux commissions scolaires intégrées qui dispensent les deux niveaux, soit les niveaux primaire et secondaire.

Après ces explications, je pense que vous comprendrez pourquoi nous constatons qu'il n'y a aucune comparaison possible avec les corporations municipales et les conseils de comté. Il est donc clair que l'on ne peut avoir la même notion de l'aménagement de territoire, les territoires des commissions scolaires étant différents et les objectifs d'éducation et de formation intégrale des clientèles desservies, étudiants voire adultes, étant distincts.

Compte tenu de ces caractéristiques fondamentales, il devient évident qu'il nous est difficile, pour ne pas. dire impossible, d'accepter le projet de loi 125 sans que des amendements y soient apportés, principalement du fait que nous sommes totalement absents du projet de loi tel que présenté. Ou bien nous sommes totalement exclus de façon explicite de l'aménagement du territoire municipal dans le projet de loi 125, et alors, nous conservons nos droits et pouvoirs de l'aménagement du territoire de la municipalité scolaire pour les fins de l'éducation, ou bien le projet de loi 125 établit explicitement notre participation active dans les décisions ayant trait à l'aménagement des territoires municipaux et scolaires.

Pour mieux préciser la pensée des commissions scolaires, je vous réfère à notre mémoire et je passe la parole à M. Hudon, directeur de la gestion des affaires scolaires.

M. Hudon (Aurèle): M. le Président, MM. les membres de la commission, nous allons quand même nous référer au document et je vais donner lecture de quelques passages seulement que nous trouvons très importants.

Le Président (M. Marcoux): Je pense qu'il serait préférable de le lire au complet.

M. Hudon: Le lire au complet? D'accord. En guise d'introduction, les commissions scolaires du Québec réservent un accueil mitigé au projet de loi 125 du gouvernement du Québec sur l'aménagement de l'urbanisme. Les réserves exprimées par les commissions scolaires ne se rattachent pourtant pas, comme telles, au principe du projet.

Vu que l'objectif visé par le projet de loi d'un aménagement ordonné du territoire est un objectif louable, les réticences que formulent les commissions scolaires ont surtout trait aux retombées que le projet de loi pourrait avoir sur le milieu scolaire.

Les commissions scolaires considèrent d'ailleurs que le projet de loi s'adresse principalement aux municipalités et elles s'abstiennent, en conséquence, de le commenter article par article. Le mémoire reflète donc plutôt l'inquiétude des commissions scolaires au sujet de certains points et vise à y apporter les correctifs appropriés.

Le projet de loi no 125 a été soumis peu de temps après la conférence Québec-commissions scolaires. Lors de ce sommet, le caractère du gouvernement, des gouvernements locaux des commissions scolaires fut reconnu par le gouvernement du Québec. Aussi, c'est bien en qualité de représentantes de gouvernements locaux autonomes et responsables que la Fédération des commissions scolaires catholiques du Québec présente les remarques suivantes.

Un des premiers aspects qui retiennent l'attention à la lecture du projet de loi, c'est l'imprécision qui existe dans certains articles relatifs à la juridiction des municipalités et des conseils de comté dans l'aménagement du territoire. Nous entendons par "juridiction" l'autorité sur le contenu du schéma d'aménagement pour le conseil de comté et sur celui du plan d'urbanisme pour les municipalités. Ces deux éléments définissent, à notre avis, les grandes orientations en matière d'aménagement du territoire. Cette imprécision s'applique plus particulièrement à quelques articles, dont les suivants: Article 5: Un schéma d'aménagement doit comprendre — paragraphe G) — l'identification et la localisation approximative des équipements et infrastructures à être mis

en place par le gouvernement, ses ministères et mandataires ainsi que par les organismes publics.

Article 80: Un plan d'urbanisme peut comprendre la nature, la localisation et le type des équipements et des infrastructures tant publics que privés destinés à l'usage de la vie communautaire. Il est pour le moins surprenant que l'on s'en tienne à des tenues aussi ambigus et aussi larges qu'"équipements" et "infrastructures". Pour les commissions scolaires, ces deux expressions peuvent recouvrir deux réalités très précises.

Elles peuvent d'abord signifier l'ingérence du gouvernement municipal dans les affaires scolaires, ou encore simplement la coexistence entre deux gouvernements municipal et scolaire. On a jugé bon de définir ailleurs l'expression "services publics". Bien sûr, ces derniers termes pouvaient engendrer une certaine confusion, et nous sommes d'avis que la même chose pourrait se produire quant à la juridiction qu'entend accorder le législateur aux municipalités et aux conseils de comté sur le gouvernement scolaire local.

Equipements et infrastructures: Les commissions scolaires veulent, avec raison, savoir de quoi il s'agit lorsqu'il est question d'équipements et d'infrastructures dans le projet de loi. S'agit-il d'équipements sportifs ou de transport scolaire? Nous comprenons qu'il n'existe que peu de limites à la juridiction que peuvent s'octroyer les municipalités et les conseils de comté dans des domaines qui sont de la compétence des commissions scolaires.

Pour illustrer ce qui précède, voici un extrait d'un document du secrétariat à l'aménagement et à la décentralisation: Après avoir affirmé que la décentralisation doit conduire à une meilleure utilisation des ressources, les auteurs du document poursuivent: Certains services non encore établis pourront d'ailleurs acquérir une nouvelle rentabilité. Prenons par exemple la possibilité de prendre appui sur le réseau de transport scolaire pour rentabiliser et justifier dans certains comtés un système léger de transport en commun. De plus, les équipements socio-culturels, éducatifs ou sportifs qui relèvent présentement de plusieurs autorités pourraient être plus largement utilisés et mis à la disposition de tous les citoyens. La bibliothèque de la polyvalente devrait pouvoir s'ouvrir à l'ensemble de la population de la zone. Les salles d'école devraient pouvoir servir aux rencontres sociales, aux réunions diverses y compris les réunions du conseil municipal ou de comté. Il s'ensuivrait une utilisation plus intensive et plus économique de ces équipements tout en réduisant les duplications onéreuses de locaux ou d'installations.

Dans le texte actuel du projet de loi, nous croyons que tous les sujets mentionnés ci-dessus pourraient devenir de la compétence des municipalités ou des conseils de comté. Nous voilà bien loin de l'aménagement du territoire. De plus, à notre avis, le projet de loi dans sa forme actuelle laisse la porte ouverte à une juridiction des municipalités et des conseils de comté sur la construction de nouvelles écoles, voire sur la fermeture de certaines déjà existantes.

N'est-ce pas dire que l'on confie une juridiction au pouvoir municipal en matière d'éducation? Le moins que l'on puisse exiger du point de vue des commissions scolaires, c'est que les équipements et les infrastructures qui relèvent de leur compétence le demeurent. Or, il existe très peu de limites à la juridiction des municipalités et des conseils de comté dans le schéma d'aménagement et les plans d'urbanisme.

Les commissions scolaires ne sauraient accepter que ne soit définie plus clairement la juridiction précise des municipalités et des conseils de comté en cette matière. De plus, nous demandons que les commissions scolaires soient consultées dans la définition de cette juridiction. Quant à la juridiction territoriale de ces comtés, les conseils de comté renouvelés retrouveront, dans les cadres du projet de loi 125, des territoires clairement établis et reconnus. Nous pouvons nous interroger sur les conséquences qui découleraient de la différence entre les territoires des conseils de comté renouvelés et ceux des commissions scolaires déjà existantes. On peut fort bien concevoir qu'une commission scolaire régionale pourrait ainsi être divisée entre deux autorités territoriales et on peut facilement entrevoir les difficultés que pourrait engendrer une telle situation lorsqu'il s'agirait, par exemple, du choix du lieu d'implantation d'une école. (15 heures)

La commission scolaire devrait-elle subir les pressions ou le refus de ces deux autorités? Les commissions scolaires considèrent que dans le découpage des territoires des conseils de comté renouvelés, on ne doit pas apporter aucun changement aux définitions territoriales des commissions scolaires et on ne doit pas non plus toucher aux droits qu'elles engendrent.

Si certains critères favorables s'appliquent au découpage du territoire dans le cadre de son aménagement, il en va de même pour ce qui est des définitions territoriales des commissions scolaires. Celles-ci considèrent donc que les expressions "équipement et infrastructure" devraient être définies dans le projet de loi 125. Il en est de même de la juridiction des municipalités et des conseils de comté qui doit absolument être clairement et limitativement définie puisqu'elle peut s'appliquer à des domaines de compétence des commissions scolaires.

Les commissions scolaires considèrent également que le découpage des territoires des conseils de comté renouvelés ne doit en aucun moment ni de quelque façon que ce soit porter atteinte à l'autonomie et à la compétence des commissions scolaires.

Le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme, dans sa forme actuelle, semble retenir comme principe de base que seuls les municipalités et les conseils de comté ainsi que le gouvernement du Québec ont juridiction sur l'aménagement du territoire. Une telle perspective est, à notre avis, erronée. Le schéma d'aménagement sera, pour employer les termes mêmes du docu-

ment sur la décentralisation, opposable aux organismes et agents de l'Etat ainsi qu'aux municipalités et aux commissions scolaires.

En conséquence, on ne saurait prétendre que l'aménagement soit l'attribut exclusif de ces seules autorités. La revalorisation des pouvoirs des municipalités et des conseils de comté ne saurait s'accomplir au détriment des pouvoirs et de l'autonomie du gouvernement scolaire local.

La portée générale du projet de loi s'inscrit en faux contre un de ces principes de base: la participation des agents du milieu à son aménagement. Alors que ce projet de loi reconnaît le droit des citoyens à une participation privilégiée à presque toutes les étapes, alors que les pouvoirs et les obligations des conseils municipaux et du gouvernement du Québec y sont clairement définis, les commissions scolaires y sont totalement ignorées, bien que ce projet puisse avoir une grande influence sur l'essor de l'éducation sur leur territoire..

Si les commissions scolaires figuraient comme contribuables inscrits au rôle d'évaluation, peut-être pourraient-elles prétendre s'insérer dans la catégorie des citoyens. Mais tel n'est pas le cas. Comme le mentionne l'article 22 du projet de loi, on doit tenir compte des avis du ministre d'Etat à l'aménagement, des municipalités, des résultats des consultations ou de tout autre élément pertinent.

Serait-il présomptueux de croire que les commissions scolaires font partie de cette catégorie? Est-il aussi besoin de rappeler l'importance des gouvernements scolaires locaux au Québec? N'oublions pas que dans plusieurs régions, les commissions scolaires fournissent la majorité des locaux et des équipements du milieu. Un sondage récent révèle qu'il y a peu de territoires municipaux où il n'existe pas d'entente de services avec les commissions scolaires relatives aux loisirs.

Enfin, sans vouloir entreprendre une guerre de chiffres, on remarque que les actifs des commissions scolaires sont très importants, voire dans certains cas supérieurs à ceux des municipalités. Les auteurs du projet de loi n'ont pas oublié l'importance relative desdites immobilisations puisqu'elles sont incluses dans l'aménagement. Le projet de loi 125 supprime tout simplement l'autorité et la fonction du gouvernement scolaire local. La mise à l'écart des gouvernements scolaires locaux s'inscrit mal dans un projet de loi, dans lequel on considère de première importance la cohérence et la concertation entre les divers paliers d'autorité pour en arriver à un aménagement rationnel du territoire.

La concertation est nécessaire entre les municipalités, le conseil de comté renouvelé et le gouvernement. Toutefois, elle ne semble pas aussi nécessaire avec les commissions scolaires, même quand il s'agit de sujets qui relèvent strictement de la compétence du gouvernement scolaire local. Il paraît pour le moins surprenant que les décisions susceptibles d'influer fortement sur la bonne marche de l'éducation dans une région apparte- nant aux diverses autorités de la région, sauf celles qui sont directement responsables de l'éducation. Dans son document sur la refonte du gouvernement local et la décentralisation au Québec, le Conseil de planification et de développement du Québec écrit ce qui suit: "Le Conseil de planification et de développement du Québec considère que le gouvernement local doit être perçu en termes de corps politique décentralisé qui, en vertu de lois de portée générale, assume la responsabilité de l'administration publique de premier niveau à l'intérieur d'un territoire défini à cette fin, est doté de l'autorité ainsi que des moyens nécessaires pour gouverner ledit territoire."

Aussi croyons-nous qu'une décision relative à l'aménagement du territoire et concernant directement une commission scolaire doit revenir à ladite commission scolaire, laquelle doit pouvoir refuser ou accepter la proposition d'aménagement qui lui est faite. C'est aux commissions scolaires, de concert avec le ministère de l'Education et non pas avec le ministre d'Etat à l'aménagement, comme le mentionne l'article 11 du projet de loi, qu'il appartient de définir les objectifs et les orientations de l'éducation.

Les seules objections autorisées à la procédure d'aménagement sont celles du gouvernement, voir l'article 21. La commission scolaire n'est-elle pas en droit d'exiger les mêmes pouvoirs relativement à ces objectifs? Les priorités de l'éducation, tout comme les objectifs du gouvernement, ne doivent pas être étouffées sous un schéma d'aménagement. L'éducation ne doit, en aucun moment, être pénalisée par une soi-disant rationalisation dans l'aménagement du territoire. Bien que l'aménagement du territoire soit un objectif souhaitable, nous sommes d'avis qu'il ne doit pas nuire à l'éducation.

Toutefois, conscientes du rôle qu'elles exercent dans le milieu et des objectifs d'un aménagement ordonné du territoire, les commissions scolaires considèrent qu'une formule d'arbitrage serait souhaitable pour trancher les litiges possibles entre les commissions scolaires, les municipalités et les conseils de comté renouvelés. Une telle formule permettrait à tous les agents intéressés de faire connaître leur point de vue et réglerait tout litige d'une façon claire et non équivoque.

Les commissions scolaires croient donc qu'il n'appartient pas au ministre d'Etat à l'aménagement d'établir les grandes orientations des commissions scolaires. De plus, le projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit reconnaître aux commissions scolaires le droit d'intervenir et de refuser toute proposition d'aménagement préparée par des municipalités ou des conseils de comté qui ne serait pas conforme aux objectifs des gouvernements scolaires locaux. Les commissions scolaires suggèrent donc comme solution mitoyenne un arbitrage entre les gouvernements scolaires locaux et municipaux.

Dans sa structure, le projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme ne prête aucunement attention aux gouvernements scolaires locaux. De plus,

des pouvoirs susceptibles de réduire l'autonomie des commissions scolaires sont accordés par le législateur à des instances qui n'ont rien à voir avec l'éducation. Devant une telle situation, les commissions scolaires s'inquiètent de la voie dans laquelle le gouvernement du Québec semble s'engager.

Cette inquiétude est d'autant plus grande que le projet de loi, à notre avis, dépasse le simple cadre de l'aménagement. En effet, compte tenu du fait que, comme les contribuables ordinaires, les commissions scolaires sont déjà régies par les divers règlements de zonage et de construction des municipalités, elles étaient déjà, de toute façon, soumises à l'aménagement du territoire. Toutefois, le projet de loi a étendu cette juridiction à des équipements et à des infrastructures.

Les commissions scolaires s'opposent à ce que, sous le couvert de l'aménagement, on s'empare d'un domaine de compétence dans des matières telles que l'éducation, la culture et les loisirs. Les commissions scolaires refusent qu'au nom de l'aménagement la mission qu'on leur a confiée dans ces secteurs soit transférée à d'autres autorités.

Une telle situation est d'ailleurs contraire au livre blanc sur la décentralisation du gouvernement du Québec. En effet, tout en nous abstenant de commenter ce document, nous remarquons qu'il y est clairement établi une ligne de démarcation entre l'aménagement et l'éducation, la culture et les loisirs. Or, telle n'est pas la situation que laisse envisager le projet de loi 125.

Les commissions scolaires croient que l'étape de revalorisation des municipalités et des conseils de comté que représente le projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme ne doit en aucun moment servir de prétexte à l'intégration d'un gouvernement scolaire local dans quelque gouvernement municipal que ce soit ou, à long terme, dans une étatisation pure et simple de l'éducation.

Les commissions scolaires refusent un conseil de comté renouvelé, une corporation intermunicipale, dans la mesure où ils entraînent un transfert des compétences propres aux commissions scolaires.

Le projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit reconnaître d'une façon non équivoque l'autorité, la compétence et l'autonomie des commissions scolaires en matière d'éducation, aussi bien les pouvoirs et la compétence accessoire sur les équipements et infrastructures qui sont de leur ressort.

Les commissions scolaires du Québec croient que le projet de loi 125 doit reconnaître l'autonomie et la juridiction des gouvernements scolaires locaux en matière d'éducation et leur permettre de participer à l'aménagement avec des organismes régionaux sans les subordonner à un "gouvernement régional" ou à une superstructure étatique.

Dans le présent mémoire, les commissions scolaires du Québec se sont limitées à l'examen des pr ncipales conséquences possibles du projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme pour leur avenir.

Elles souhaitent, en guise de conclusion — ce serait peut-être bon de faire la correction — que l'on délimite — et non pas que l'on élimine, à la page 13 — de façon précise et limitative, la juridiction des municipalités et des conseils de comté "renouvelés" sur les matières de compétence des gouvernements scolaires locaux, ainsi que le droit d'intervenir dans la définition d'une telle juridiction.

Les commissions scolaires croient également que le projet de loi 125 ne doit en aucun moment porter atteinte à leur autonomie dans sa définition territoriale.

Les gouvernements scolaires locaux doivent pouvoir intervenir et refuser une proposition d'aménagement et ne discuter qu'avec le ministre de l'Education des grandes orientations de l'éducation.

Enfin, la compétence et l'autonomie des commissions scolaires en matière d'éducation doivent être reconnues dans le projet de loi.

Les correctifs que nous proposons, nous le croyons fermement, permettraient aux commissions scolaires de jouer raisonnablement leur rôle de gouvernement local et d'assumer les responsabilités qui en découlent.

L'omission de l'un ou l'autre des correctifs suggérés par les commissions scolaires ne saurait qu'entraîner le rejet de leur part du projet de loi. En effet, une telle omission illustrerait mieux que mille mots ne sauraient le faire, les intentions du gouvernement du Québec quant à l'avenir des commissions scolaires.

De plus, comme le CPDQ, nous considérons qu'il faut respecter les gouvernements locaux et ne pas leur imposer de superstructure qui reçoit des pouvoirs de l'Etat. L'aménagement est une fonction locale qui devrait être exercée en commun par les gouvernements locaux d'une région et non leur être enlevée pour être confiée d'autorité à une structure intermunicipale. Les organismes régionaux devraient s'en tenir à être la structure d'accueil des pouvoirs que les gouvernements locaux décident de leur confier.

Les recommandations. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit définir clairement les mots "équipements" et "infrastructures".

Elle doit définir limitativement la marge de juridiction des municipalités et des conseils de comté "renouvelés" sur le milieu scolaire.

Les commissions scolaires doivent être consultées dans la définition de ladite juridiction. La Loi sur l'aménagement et l'urbanisme doit assurer que les limites territoriales des commissions scolaires seront respectées.

En ce qui a trait à la participation, les grandes orientations des commissions scolaires doivent être déterminées par le ministre de l'Education et non par le ministre d'Etat à l'aménagement. Les commissions scolaires doivent pouvoir refuser ou accepter toute proposition d'aménagement qui les intéresse directement. Elles souhaitent qu'une formule d'arbitrage soit mise au point pour régler les litiges entre les gouvernements scolaires et les municipaux. Une structure intermunicipale ou un

organisme régional ne doit pas empiéter sur les domaines de compétence et l'autonomie des commissions scolaires.

Le Président (M. Marcoux): Je vous remercie, madame et messieurs. M. le ministre.

M. Léonard: Je vous remercie d'avoir présenté ce mémoire, même s'il est discutable dans certaines de ses parties. Je voudrais rappeler des choses comme commentaires. D'abord, à propos de la tournée, j'ai tenu à rencontrer les commissions scolaires. Je voudrais rappeler un peu ce que j'ai dit lors de ces rencontres au cours du mois de février et du début du mois de mars. Je voudrais rappeler une chose: d'abord, le projet de loi 125 n'est pas un projet de loi sur la décentralisation, mais un projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme. A ce titre, je voudrais aussi rappeler qu'il n'y a pas de livre blanc sur la décentralisation. Il n'y en a pas; je l'ai répété partout dans le Québec. Le gouvernement ne l'a pas publié. Il y a eu un document de travail que le gouvernement n'a pas publié. Alors, je pense qu'il faudrait rectifier des choses sur ce plan, pour être honnête. Il me semble que c'est l'évidence même. Je dirai, pour reprendre sur les termes du projet de loi sur l'aménagement et l'urbanisme, que l'aménagement c'est l'organisation du territoire, alors que la décentralisation, c'est autre chose. Lorsqu'on parle d'aménagement, on parle de localisation, d'infrastructure et d'équipement et on ne parle pas de gestion d'équipement ou de gestion de tout autre pouvoir. On parle de l'organisation du territoire, que ce soit au niveau régional — d'habitude, c'est ce que cela signifie, l'aménagement — ou au niveau local, qu'on traduit assez souvent par le terme "urbanisme", bien qu'il y ait encore des discussions sur ce plan. (15 h 15)

Je voulais aussi rencontrer des commissions scolaires parce que je considère qu'elles avaient acquis une expertise en ce qui concernait les territoires. Vous avez vécu différentes expériences sur ce plan. Je suppose bien aussi que vous avez délimité vos territoires par rapport à la population qui l'habitait, par rapport aux besoins du milieu scolaire. Il nous semblait que c'était une expérience intéressante et qu'à ce titre, votre témoignage pouvait être très intéressant aussi en ce qui concernait le projet de loi 125, et aussi parce que les commissions scolaires disposent de beaucoup d'équipements sur le territoire, qui sont structurants, évidemment, qui font l'objet quant à leur localisation d'une loi de l'aménagement.

Je voudrais rappeler également l'engagement que le premier ministre a pris à votre sujet, soit que les commissions scolaires ne disparaîtraient pas. Il vous l'a dit l'automne dernier au congrès de la fédération. Si ma mémoire est bonne, je pense que cela a été répété à la conférence du mois de mars dernier. Sur ce plan, je voudrais aussi relever une erreur à la première page du mémoire. Le projet de loi 125 a été déposé le 21 décembre dernier, et non après la conférence Québec-commissions scolaires.

Je voudrais aussi rappeler une chose, c'est que le projet de loi no 125 n'a pas pour effet de donner aux conseils de comté juridiction sur les commissions scolaires. Dans le projet de loi de l'aménagement, il s'agit de localisation. Je pense bien qu'il me semble abusif de dire qu'on donne juridiction aux commissions scolaires parce qu'on légifère, parce que les municipalités ont des pouvoirs en termes de plans d'urbanisme et de réglementation de zonage et de lotissement de construction. De la même façon que les commissions scolaires s'assujettissent aux règlements de zonage de construction des municipalités, elles seront assujetties aussi au schéma d'aménagement du comté, tout comme le gouvernement lui-même.

A aucun moment, dans le projet de loi, un conseil de comté ne pourrait dire à une commission scolaire de construire ou de fermer une école. Je pense qu'il est important de bien distinguer entre localiser et une décision qui porte sur la construction ou la fermeture d'une école. Ce n'est pas la même chose, il me semble.

La seule chose que le comté pourra faire, c'est dire à la commission scolaire que si elle était décidée de construire une nouvelle école, à cause des choix faits dans l'aménagement de l'ensemble du territoire et de l'orientation du développement décidé, cette école devrait se situer dans telle partie du territoire du comté. Je répète qu'il s'agit de localisation.

Ce n'est pas parce que chacun possède un terrain résidentiel qu'il est obligé de construire une maison. Il en va de même pour les commissions scolaires, et, en conséquence, j'aimerais que nos discussions soient limitées à ce qui est l'objet du débat sur l'aménagement.

J'aurais, par la suite, quelques questions à vous poser. La première porterait sur la définition de ces deux expressions "équipements" et "infrastructures", qui permettrait de respecter l'autonomie des commissions scolaires dans le domaine de l'éducation. Quelle serait la définition que vous, vous donneriez à "équipements" et "infrastructures"?

M. Beaumont: Quant au milieu scolaire, effectivement, ce qu'on a exposé dans notre mémoire, c'est simplement que les termes sont très généraux. On a cité, à titre d'exemple, l'expression "services publics", qui peut porter à confusion, qui peut s'appliquer à bien des choses, à bien des sujets. Nous croyons que, dans le même sens, puisque, effectivement, on a cru bon de définir l'expression "services publics", les mots "infrastructures" et "équipements" devraient être définis effectivement dans le sens de déterminer où s'arrête l'aménagement. C'est simplement dans ce sens. La définition pourrait varier, en fait, d'un endroit à l'autre, selon des sujets touchés. Prenons, par exemple, l'éducation. Est-ce que ça s'adresse aux services ou est-ce que les services sont exclus? Sur d'autres sujets, ça pourrait être une autre définition. Effectivement, la définition, à mon sens, donne une certaine juridiction, confère la juridiction au conseil de comté.

M. Léonard: Vous ne pouvez pas préciser davantage?

M. Beaumont: Non, effectivement, je n'ai pas de texte...

M. Léonard: Est-ce que, pour vous, un équipement doit avoir une relation nécessaire avec une localisation pour se conformer au projet de loi no 125?

M. Beaumont: Pour certains types d'équipements, on peut penser, par exemple — ou même des infrastructures — à des équipements de loisirs. Est-ce que la loi sur l'aménagement s'adresse à ça? C'est ça qu'on veut faire déterminer, effectivement.

M. Léonard: S'il y a des équipements de loisirs, s'il y a une aréna, c'est un équipement public qui est localisé quelque part.

M. Beaumont: Oui.

M. Léonard: Donc, la localisation d'une aréna peut se situer dans un schéma ou un plan d'urbanisme à tout le moins, les piscines et les choses comme cela.

M. Beaumont: Effectivement, comme la localisation d'équipement sportif, mais jusqu'à quel point la localisation d'équipement sportif ne sera pas centralisée, par exemple, et que cela n'influencera pas les équipements de nature scolaire? Je vous donne l'équipement sportif, je vous ai donné l'exemple d'une piscine, jusqu'à quel point la piscine devra-t-elle être à la polyvalente ou ne devrait-elle pas être très près d'un complexe sportif municipal? C'est dans ce sens qu'est effectivement notre intervention: Où s'arrêtent les équipements, à quels équipements?

M. Léonard: J'aimerais que vous précisiez davantage. Quelle différence feriez-vous ou quelle distinction feriez-vous entre services et équipements?

M. Beaumont: A mon sens, des équipements s'attachent à des équipements matériels alors que des services sont des organisations à l'intérieur d'une commission scolaire. C'est comme cela que je le vois, tout au moins.

M. Léonard: Dans la loi de l'aménagement, on ne fait pas mention des services.

Vous dites aussi, à la page 5 de votre mémoire: On ne doit apporter aucun changement aux définitions territoriales des commissions scolaires et on ne doit pas non plus toucher aux droits qu'elles engendrent et vous recommandez que la loi sur l'aménagement et l'urbanisme assure que les 'imites territoriales des commissions scolaires seront respectées. J'aimerais que vous nous disiez ce que vous entendez par cela.

M. Beaumont: Dans certains cas, vous n'êtes pas sans savoir qu'il y a eu plusieurs propositions de découpage territorial; alors, on peut facilement comprendre que, dans certains cas, si on prend par exemple les propositions 1 et 2, le découpage, les commissions scolaires pourraient être confrontées territorialement à deux entités différentes, deux conseils de comté renouvelés. La troisième voie s'attache plus à la définition territoriale des commissions scolaires. C'est dans ce sens. On croit que, pour fonctionner rationnellement, la délimitation territoriale des commissions scolaires et des conseils de comté devrait se rapprocher. C'est dans ce sens-là.

M. Léonard: Est-ce que je dois conclure que les délimitations des conseils de comté devraient correspondre aux territoires des commissions scolaires?

M. Beaumont: Vous devez comprendre qu'effectivement, à notre avis, cela devrait se rapprocher de ces définitions.

M. Léonard: Cela signifie que ce sont les commissions scolaires qui déterminent le territoire.

M. Beaumont: Quant à nous, c'est très important.

M. Léonard: Vous admettez aussi que c'est important pour les municipalités?

M. Beaumont: Oui, je n'en doute pas.

M. Léonard: Est-ce que vous ne considérez pas qu'une commission scolaire peut aussi tirer un avantage d'un schéma d'aménagement?

M. Beaumont: A condition qu'elle y participe.

M. Léonard: Qui fait les schémas d'aménagement ou les plans d'urbanisme habituellement?

M. Beaumont: La commission scolaire présentement, dans le projet de loi 125, à mon avis, est complètement écartée. Pour qu'elle puisse en profiter, il faudrait au moins qu'elle ait son mot à dire sur certains sujets. Présentement, dans la forme actuelle, nous croyons qu'il y a plus imposition de certaines choses que concertation.

M. Léonard: Vous trouvez que c'est un droit qui vous revient?

M. Beaumont: Je calcule que, dans la perspective du projet de loi où on s'inscrit dans une concertation, les commissions scolaires devraient participer tout simplement, c'est un droit par rapport à l'importance relative des commissions scolaires et par rapport aussi à la clientèle qu'elles représentent.

M. Léonard: Est-ce que je dois conclure qu'on doit retirer le droit de faire des plans d'urbanisme et des schémas d'aménagement au niveau municipal pour le partager avec les commissions scolaires?

M. Beaumont: Entre donner une juridiction totale aux commissions scolaires, à mon avis... D'ailleurs, ce n'est pas ce qui est réclamé dans notre mémoire, nous demandons tout simplement une participation. A ce niveau, si nous participons, nous serons certainement à même d'en profiter.

M. Léonard: Est-ce que vous pourriez me préciser ce que vous entendez exactement par participation.

M. Beaumont: La participation, à notre avis, peut être à divers niveaux. Dans le projet de loi, la participation — je vous donne cela à titre d'exemple — des électeurs ou de tout le monde se fait au niveau de certains référendums, entre autres, où, par exemple, on peut parler de la commission d'urbanisme, quoiqu'elle soit facultative. Alors à ce niveau-là, nous croyons que les commissions scolaires, sur des sujets qui les touchent ou qui influencent leur clientèle, on peut parler spécifiquement de loisirs, par exemple, devraient avoir leur mot à dire. On peut voir plusieurs formules possibles, soit au niveau d'avis, ou d'un comité consultatif où les commissions scolaires seront appelées à être consultées et à donner leur position ou même leur refus, si ce schéma ou ce qu'on propose était contraire ou n'allait pas dans les buts qu'elles se seraient fixés.

Je vous parle par exemple, de la localisation d'une aréna ou d'une aire sportive. La clientèle scolaire, à mon avis, est assez importante que la commission scolaire devrait être consultée à ce sujet-là.

M. Léonard: Vous écrivez à la page 15 de vos recommandations: Les commissions scolaires doivent pouvoir refuser ou accepter toute proposition d'aménagement qui les intéresse directement. Si cette recommandation était acceptée, est-ce que vous pensez qu'on devrait aussi l'accepter pour d'autres organismes de la société?

M. Beaumont: Je peux vous dire qu'effectivement cette recommandation doit être prise avec la recommandation qui suit, savoir que dans le cas où il y aurait mésentente, une formule d'arbitrage pourrait être élaborée, soit un comité paritaire qui déciderait, qui trancherait le litige entre les deux gouvernements locaux.

M. Léonard: Mais vous l'accorderiez aussi à d'autres organismes, par exemple du réseau des affaires sociales?

M. Beaumont: Je crois, quant à ces organismes-là, que l'on pourrait éventuellement demander leur avis. Etant donné les fonctions qu'ils ont dans le milieu, il faut...

M. Léonard: Vous leur demanderiez leur avis, mais est-ce que ce serait la même chose que selon votre deuxième recommandation quant à la participation? Pouvoir refuser ou accepter?

M. Beaumont: A la condition qu'il puisse y avoir une formule qui tranche...

M. Léonard: Mais est-ce que vous appliqueriez — je ne sais pas si vous pouvez me répondre — cette recommandation aussi au réseau des affaires sociales ou à certaines institutions du réseau des affaires sociales?

M. Beaumont: En certains cas, oui, je le croirais; quoique je suis très mal placé pour le savoir, n'étant pas au fait de ces sujets. Je parle au nom des commissions scolaires.

Mme Gervais: J'ai l'impression que... M. Léonard: Pardon?

Mme Gervais: J'ai l'impression que le réseau des affaires sociales doit être capable de se défendre. Il n'a pas besoin des commissions scolaires pour le faire.

Dans tout ceci, M. le ministre, on souhaite surtout beaucoup de concertation municipale-scolaire. Il en existe déjà beaucoup plus qu'on ne le croit au sein du gouvernement. Je pense que le rapport — je ne sais pas s'il a été déposé officiellement ou s'il le sera bientôt — c'est-à-dire le rapport du comité interministériel qui a été chargé de faire le point sur l'utilisation des équipements des commissions scolaires et des équipements municipaux, devrait confirmer certaines choses que l'on avance. Il y a des ententes entre les municipalités et des commissions scolaires pour l'utilisation des locaux des commissions scolaires. On semble laisser croire qu'il n'en existe pas. Il en existe dans plus de 90% des cas et on voudrait... Vous parliez tantôt d'une piscine ou d'une aréna. Si on devait en construire, c'est bien sûr que si elles sont près des écoles, la clientèle scolaire peut s'en servir.

Ecoutez, je ne voudrais pas qu'on prenne mon propos pour une affirmation gratuite, il se construit présentement ou on a construit récemment — je fais une distinction parce que je ne suis pas... — sur un territoire donné dans la province, aux alentours de Terrebonne — en tout cas, c'est la commission scolaire du président de la fédération, qui s'excuse, incidemment, il est en dehors de la province — une aréna à deux ou trois milles des écoles. Ce qui veut dire que les écoliers devront voyager en autobus pour s'y rendre. Dans d'autres commissions scolaires, les arenas sont très près et les gymnases peuvent servir pour les municipalités, il y a des ententes partout. (15 h 30)

On voudrait qu'il ne se produise plus des choses comme il s'en est produit dernièrement à L'Ancienne-Lorette où la Commission scolaire régionale Chauveau, que je connais très bien

puisque j'en suis la vice-présidente, a ouvert la bibliothèque de la polyvalente de L'Ancienne-Lorette à la population de L'Ancienne-Lorette. Bien sûr, après deux ans d'usage, on s'aperçoit que les livres qui meublent cette bibliothèque ne sont pas tout à fait ceux qui correspondent aux besoins d'une population adulte de ce territoire.

Le maire de L'Ancienne-Lorette qui est aussi le président de la Communauté urbaine de Québec, avec son conseil, adopte une résolution pour demander au ministère des Affaires culturelles une subvention pour l'achat de livres qui correspondent aux besoins de la population de L'Ancienne-Lorette, livres qu'on mettrait sur les rayons de la bibliothèque de la polyvalente. La réponse est celle-ci: Tant et aussi longtemps que vous utiliserez la bibliothèque de la polyvalente, on ne vous donnera pas de subvention pour l'achat de livres.

On veut peut-être donner une leçon au gouvernement et qu'on en vienne enfin à avoir beaucoup de concertation entre chacun des ministères pour le mieux-être de toute la population de la province, et peut-être aussi pour épargner l'argent des contribuables qui n'en peuvent à peu près plus, s'ils sont tous comme moi.

M. Léonard: Je vous ferai remarquer que lorsque vous parlez de ces ententes, il s'agit de gestion de services et non de localisation d'équipement et d'infrastructure. Cela, je pense qu'il y a eu des erreurs de part et d'autre là-dessus, parce qu'on a vu aussi des polyvalentes dans les champs. Je crois que là-dessus, c'est vrai que ça prend de la concertation, mais le schéma d'aménagement porte justement sur la localisation des équipements, comme les plans d'urbanisme aussi portent sur la localisation des équipements.

Cela me paraît important de rectifier sur ce plan.

J'aurais une autre question, peut-être d'information, à poser. Par exemple, vous connaissez des commissions scolaires, est-ce que vous pouvez nous dire si ça pose tant de difficultés que ça de s'entendre avec la municipalité quant à la localisation des équipements, ou que la municipalité inscrive l'équipement dans son plan d'urbanisme? Pourquoi est-ce que ça poserait tant de problèmes?

Mme Gervais: Actuellement, on respecte le zonage, tout ça, ça n'a pas posé de problème jusqu'à maintenant, mais on voudrait que cela n'en pose pas à l'avenir non plus.

M. Léonard: C'est ça.

Mme Gervais: C'est pourquoi, dans un plan d'aménagement où on identifiera ou on localisera les équipements, que ce soit les équipements municipaux ou même pour l'avenir, sur un territoire donné où il n'y a pas d'école, la municipalité dira à la commission scolaire: Si tu veux construire une école, tu vas la construire là. Il faudrait — on veut participer — avoir notre mot à dire et expliquer pourquoi elle ne peut pas être cons- truite là. Je suis d'accord avec vous, M. le ministre, qu'il y a eu des polyvalentes construites dans des champs et c'est fort heureux, parce qu'à ce moment-là, on ne pouvait pas les construire au centre-ville. Cela nous a permis, par ailleurs, de céder des terrains de plus de 1 million de pieds carrés pour $1 aux municipalités, qui ont été fort heureuses d'y construire des arénas ou des piscines et qui nous les louent maintenant $40 l'heure pour les besoins des commissions scolaires.

C'est ça, M. le ministre, les faits que nous vivons présentement.

M. Léonard: II y a des exemples à l'inverse aussi, remarquez!

Une dernière question, le projet de loi prévoit dans sa formulation actuelle que les intentions des commissions scolaires sont transmises aux comtés par le ministre de l'Education, par l'entremise du ministre responsable de la loi, en vertu des articles 11 et 21. Mais c'est le ministre de l'Education. Est-ce que vous ne croyez pas que ça va permettre de garantir que les conseils de comté n'empiéteront pas sur les compétences des commissions scolaires?

M. Beaumont: Le fait qu'on demeure quand même... il ne faut pas oublier que nous nous présentons ici en tant que gouvernement local qui a des responsabilités. Le fait que le ministre de l'Education agisse en notre nom, nous sommes pour. Mais nous croyons que les agents les plus impliqués sont les commissions scolaires elles-mêmes. Elles sont en mesure d'évaluer la portée de certains actes ou de certains plans ou schémas qui peuvent être faits par les municipalités. Effectivement, nous croyons que la garantie serait supérieure et de beaucoup, si les commissions scolaires participaient.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, je doute fort qu'on puisse interpréter les représentations de la Fédération des commissions scolaires à propos d'un problème strictement de localisation d'équipements scolaires. Quant à moi, il me semble que les appréhensions de la fédération sont tout à fait fondées.

Quand on constate, comme nous le faisait remarquer le Conseil régional de développement des Laurentides ce matin, que les commissions scolaires ne sont même pas consultées, à l'article 22, par exemple, on se rend compte que le conseil de comté, avant d'élaborer sa version définitive du schéma d'aménagement, doit tenir compte, s'il y a lieu, de l'option de l'aménagement retenue, des avis du ministre, des municipalités, du résultat des consultations, des plans et règlements d'urbanisme existants et de tout autre élément pertinent. C'est à cet article qu'on retrouve la représentation des commissions scolaires. C'est un tout autre élément pertinent. C'est faire bien peu de cas des gouvernements scolaires. Le ministre disait tantôt:

Iriez-vous jusqu'à dire que le réseau des affaires sociales devrait avoir les mêmes prérogatives que réclame la fédération?

Il faut quand même se rendre à l'évidence que les commissions scolaires sont des gouvernements locaux élus, jusqu'à nouvel ordre, de façon démocratique, de même façon que les conseils municipaux et que, si tel est le cas, il y a des raisons profondes à cela. A moins qu'on ne nous dise qu'on a l'intention de chambarder cela, il y a lieu effectivement de donner une considération tout à fait spéciale aux commissions scolaires.

Lorsqu'on étudie le projet de loi 125, parallèlement à la réforme fiscale que vient d'annoncer le ministre des Finances, où les commissions scolaires ont perdu, à toutes fins utiles, le pouvoir de percevoir directement chez les contribuables des taxes foncières, lorsqu'on constate que de tous les livres verts, de tous les fascicules que le ministre d'Etat à l'aménagement a produits sur la politique de décentralisation, est celui qui, à mon avis, est le plus important, manque toujours et que le ministre, ce matin, refusait même de nous donner une idée du moment où le fascicule no 5 sur le réaménagement des pouvoirs serait disponible, lorsqu'on met tout cela ensemble et que, d'autre part, tout ce qu'on a, c'est une déclaration du premier ministre qui dit: On s'engage à ce que les commissions scolaires demeurent, je suis tout à fait d'accord avec la fédération de poser énormément de questions.

Dans le cas du projet de loi 125, c'est bien sûr, le ministre nous le rappelle assez souvent, nous ne sommes pas en train de parler de cela. On parle, semble-t-il, strictement d'aménagement. Mais tous conviendront que les omissions du projet de loi 125 par rapport au domaine scolaire en disent très long. A mon avis — et c'est là, je pense, la grande faiblesse du projet de loi 125, il y a lieu pour le gouvernement de spécifier là où il s'en va.

Quant à moi, il me semble que si les recommandations de la fédération ne sont peut-être pas possibles à retenir dans leur ensemble, il y en a au moins quelques-unes qui devraient avoir une meilleure réception du ministre que ce qu'il en a fait cet après-midi.

Vous disiez tantôt que vous n'êtes pas en mesure de formuler un texte quant à une définition des mots "équipements" et "infrastructures". Je vous demanderais, par contre, si vous ne pourriez pas préciser votre pensée sur ce processus, cette formule d'arbitrage dont vous avez parlé, sans répéter tout ce que vous avez dit en réponse aux questions du ministre tantôt.

M. Beaumont: Effectivement, quant à la formule d'arbitrage, on la voit facilement au niveau d'un comité consultatif formé paritairement des municipalités, des conseils de comté. Je le vois surtout au niveau du conseil de comté et même au niveau de la municipalité, des municipalités et des conseillers municipaux, ainsi que des élus scolaires, où une décision serait prise, qui trancherait le litige entre les deux. C'est tout simplement cela. Je crois qu'il y a quand même moyen d'arriver à une décision par un simple comité. Le comité qui donnerait un avis, sa décision devrait être suivie tout simplement

On peut aussi voir, par exemple, au niveau — encore là, on parle de refonte — de la commission consultative sur l'urbanisme, une participation des commissions scolaires, toujours à condition que ce comité soit obligatoire et qu'il siège régulièrement. S'il n'y a pas de participation ou si ce comité n'est pas mis en place, on ne peut pas parler d'arbitrage ou au moins de parité sur des sujets qui nous intéressent. C'est simplement au niveau de comités, à mon avis, dans la structure comme telle.

On pourrait aussi dire: On va donner à la commission nationale le pouvoir de trancher un litige, mais nous croyons que ce n'est pas nécessaire. A notre avis, une réunion des élus locaux serait suffisante pour trancher le litige. C'est simplement cela.

M. Gratton: Dans un autre ordre d'idées, vous mentionnez... En fait, dois-je comprendre de vos représentations que la délimitation des comtés renouvelés... Vous nous dites, à un moment donné, que les commissions scolaires refusent catégoriquement toute nouvelle délimitation de leur territoire. Compte tenu de la nécessité, de votre souhait d'être mieux intégré à la préparation des schémas d'aménagement, est-ce qu'en fait, vous suggérez que les conseils de comté renouvelés soient délimités par les délimitations actuelles scolaires?

M. Beaumont: C'est une formule qui a été proposée. C'est un des modèles. A notre avis, il est important que, dans la désignation territoriale, on ne cause pas de préjudices aux droits de la commission scolaire. Advenant le cas où il y aurait deux comtés, la commission scolaire serait rattachée à un seul, il faut croire, pour pouvoir exercer tous ses droits, pour qu'elle ne soit pas continuellement ballottée entre deux conseils de comté qui ont tels buts ou tels objectifs. C'est dans ce sens-là.

M. Gratton: Est-ce que vous pensez qu'il serait possible, en pratique, pour une commission scolaire, d'être rattachée à un seul conseil de comté alors que son territoire pourrait être partagé entre deux conseils de comté qui prépareraient chacun son schéma d'aménagement?

M. Beaumont: C'est certainement possible, puisque, en pratique, c'est une des propositions qui ont été faites relativement au découpage.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Très brièvement, M. le Président. Naturellement, les commissions scolaires se sentent exclues dans le projet de loi 125 pour ce qui a trait à l'aménagement du territoire, mais je me demande, en dehors des problèmes scolaires, je

veux dire des infrastructures ou des équipements scolaires, pourquoi une commission scolaire devrait être consultée, par exemple, pour un plan de zonage, une infrastructure, ces choses-là. Je ne parle pas pour situer une école. Je suis d'accord que la commission scolaire devrait être consultée, mais au niveau de l'aménagement du territoire.

M. Beaumont: Comme on le mentionnait tout à l'heure, il y a quand même plusieurs autres sujets. On pense, entre autres, aux objectifs que se sont donnés les commissions scolaires relativement à la culture, relativement aux loisirs, relativement aux sports. En fait, ce sont tous des sujets qui intéressent grandement les commissions scolaires. Je pourrais même aller plus loin. Je pourrais vous dire que, pour la localisation d'un parc, en fonction peut-être de la construction d'une école, ce serait peut-être souhaitable dans certains cas. Il y a d'autres sujets.

Ce que nous demandons, ce n'est pas faire l'aménagement, que l'aménagement soit transféré aux commissions scolaires, c'est que, lorsqu'une question touchant les commissions scolaires ou touchant sa clientèle doit être décidée, les commissions scolaires soient consultées et aient leur mot à dire. C'est simplement cela que nous désirons.

M. Goulet: A un moment donné, dans votre mémoire, vous dites: Les commissions scolaires s'opposent à ce que, sous le couvert de l'aménagement, on s'empare d'un domaine de compétence dans des matières tels l'éducation, cela va de soi, la culture, cela peut aller, et les loisirs. Les commissions scolaires refusent qu'au nom de l'aménagement, la mission qu'on leur a confiée dans ce secteur soit transférée à d'autres autorités. Je vais m'en tenir au niveau des loisirs. Madame, tout à l'heure, vous avez parlé de concertation, cela va, au niveau de certains équipements telles arenas, piscines. Naturellement, la commission scolaire devrait être consultée. (15 h 45)

Mais ce qu'on a reproché, en tout cas, dans nos comtés ruraux — je fais une distinction peut-être n'est-ce pas la même chose en ville, parce que j'ai eu l'occasion d'enseigner dans votre commission scolaire et de vivre d'autres problèmes dans les comtés ruraux — aux commissions scolaires, c'est d'avoir les équipements, surtout au niveau des loisirs et des sports. Ce sont les commissions scolaires qui les avaient, mais jamais le public ne pouvait s'en servir ou à peu près pas. J'entends par là des gymnases, des piscines, des patinoires. Dans nos petits villages ruraux, chaque municipalité devait avoir deux piscines, même s'il y en avait une de chaque côté de la clôture, deux patinoires, parce que c'était à peu près impossible, en dehors des heures de classe, que la population puisse bénéficier de ces équipements. Peut-être que depuis un an ou deux, cela a changé, mais quand vous disiez tout à l'heure, qu'on loue une aréna $40 aux commissions scolaires, pour nous, c'était le contraire. Ce sont des petites salles ou des petits gymnases qu'on loue lorsqu'on en a besoin pour une heure ou deux. Les commissions scolaires nous les louent $50 et $100.

Ce que vous déplorez, on l'a vécu tellement longtemps. Les commissions scolaires avaient été tellement consultées au niveau des loisirs — en tout cas, en ce qui a trait au niveau des loisirs, je m'en tiens surtout au troisième paragraphe de la page 11 de votre mémoire — que l'équipement de loisirs qu'on avait dans nos municipalités était à l'intérieur des écoles. C'étaient à peu près les seuls équipements de loisirs qui existaient, mais ils n'étaient pas disponibles à la population, sauf à la population scolaire. En tout cas, c'est ce qu'on reprochait beaucoup. Je ne sais pas là-dessus, si vous avez une autre philosophie...

Mme Gervais: Je remarque que vous employez le passé. Vous dites: On reprochait. Est-ce qu'on reproche encore autant? Il faut vous dire que les commissions scolaires sont aux prises avec certaines contraintes. Ce n'est pas le désir qui manque d'ouvrir les portes en tout temps à la population d'un territoire donné, qu'il soit municipal ou scolaire. C'est le fait que quand le concierge a fait son ménage, la Commissions scolaire n'a pas les moyens de le payer une deuxième fois après la soirée. A ce moment, on disait aux municipalités: Le seul moyen de vous servir de cela, c'est de vous charger de ces frais additionnels, parce qu'on ne peut pas les payer. Cela s'est amélioré de beaucoup maintenant, mais il reste qu'on est aux prises aussi avec des conventions collectives pour le personnel de soutien, etc. Si vous faites entrer ces gens passé telle heure, vous êtes obligés de payer du temps supplémentaire, etc. Vous savez, en fait, ce que je veux dire, surtout si vous me dites que vous avez été enseignant. Je ne sais pas si cela existe encore dans certains milieux. Il y a même des salles d'écoles qui servent de salles de conseil municipal dans les vraies petites municipalités. Il ne faut pas oublier, quand on parle de découpage de territoire et qu'on dit qu'on voudrait respecter les territoires des municipalités scolaires, il y a chez la population un sentiment d'appartenance à l'école — je dis "à l'école" — qui était presque autrefois le sentiment d'appartenance à la paroisse qui diminue pour se rapporter plutôt à l'école de son quartier ou de son coin. Si, à un moment donné vous avez un territoire qui est découpé, je vois mal la population d'un territoire scolaire, qui se sent bien rapproché de son école, justement parce que toute la population de ce territoire donné va dans les gymnases, ou enfin, les clientèles de niveau primaire, élémentaire et adultes vont dans ces écoles, dire: Je pars du comté de l'autre côté de la rue. Cette école n'est pas dans mon comté et je n'y vais pas. J'avais l'habitude d'appartenir à cela.

Je pense que ce ne serait pas difficile de tenter, dans le découpage futur, de respecter ce qui existe, en autant que faire se peut. Bien sûr, il y aura des moments où cela ne sera pas possible. C'est pourquoi on vous dit que nous souhaitons

participer aux décisions qui seront prises. Remarquez qu'on ne tient pas à participer aux choses qui ne nous intéressent pas du tout. On ne veut pas aller se mêler des choses municipales qui ne nous regardent pas, mais on veut qu'on respecte les commissions scolaires. Je pense qu'il faut quand même tenir compte de ce que les commissions scolaires ont fait jusqu'à présent au niveau de la province de Québec.

M. Goulet: Une dernière question. Au niveau des commissions scolaires, vous avez déclaré — je me souviens d'avoir entendu cela dernièrement — Nous voulons purement et simplement être reconnus comme des véritables gouvernements locaux et faire affaires directement avec le ministre. Dans le domaine de l'éducation, personnellement, je reconnais que le grand maître d'oeuvre doit être la commission scolaire, je le reconnais.

Naturellement, les conseils municipaux voulaient également faire affaires directement avec les ministres et c'est pour ça qu'on veut éviter les pèlerinages aux bureaux des ministres et on parle un peu de décentralisation. Mais est-ce que vous avez pensé à une formule — je vous pose la question — au niveau de la Fédération des commissions scolaires, où, par exemple, la commission scolaire pourrait être représentée au niveau du conseil de comté? Ainsi, on tiendrait compte des priorités des commissions scolaires. Est-ce que vous avez imaginé une telle formule? Est-ce que ce serait possible, physiquement parlant, ou si vous dites: Non, pour telle ou telle raison, ce serait tout à fait impossible que les municipalités soient représentées, mais aussi que les commissions scolaires pourraient être représentées à l'intérieur de ces conseils de comté? Vous n'avez pas...

Mme Gervais: J'ai envie de vous répondre: Ce serait presque souhaitable. Pour ce qui est de la formule, je ne sais pas si mes collègues...

M. Beaumont: Déjà, les municipalités s'entendent peu ou pas sur la représentativité au sein de cet organisme. Il est assez difficile de nous inclure dans un schéma qu'on ne connaît pas. Mais nous calculons que, dans les matières qui touchent l'éducation, une représentativité d'élus serait fort souhaitable.

M. Goulet: J'ai terminé, M. le Président, je vous remercie.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Joliette-Montcalm.

M. Chevrette: M. le Président, j'ai étudié avec un très grand souci, à la virgule près, le mémoire de la Fédération des commissions scolaires. Je voudrais être très franc dans mes propos, parce que, personnellement, je considère que le menu principal qui est dans votre mémoire se compose beaucoup plus de propos au niveau de la décentralisation qu'au niveau de l'aménagement.

C'est rempli, à mon sens à moi, avec les yeux avec lesquels j'ai lu votre mémoire, des appréhensions que vous avez face à d'éventuels pouvoirs qui pourraient éventuellement être conférés à ces structures qui visent, d'abord et avant tout, de par le projet de loi no 125, un schéma d'aménagement.

Ceci dit, je voudrais quand même vous poser quelques questions. J'ai cru déceler tout d'abord une contradiction. La première, c'est quand vous dites que vous voulez collaborer à rétablissement du schéma d'aménagement d'une façon conjointe ou paritaire, en tout cas, d'une façon engagée et que vous vous réservez un droit de véto ou un droit de refus. Comment conciliez-vous ça, dans un premier temps?

Mme Gervais: Ecoutez! On ne vous dit pas: On va refuser telle chose. On dit que, pour faire valoir nos droits, on peut participer. Vous dites, dans votre projet de loi: On va consulter tel organisme, tel organisme. Jamais on ne dit: Nous consulterons également la commission scolaire.

M. Chevrette: Mais à votre deuxième recommandation madame, à la page 15, sous le thème "participation", vous dites: "Les commissions scolaires doivent pouvoir refuser ou accepter toute proposition d'aménagement qui les intéresse directement". Donc, si ce n'est pas un droit possible de refus, je ne sais pas ce que c'est.

Mme Gervais: "Doivent pouvoir refuser", s'il n'y a pas d'arbitrage, si on ne nous permet pas, par exemple, cette possibilité d'un comité paritaire comme on vous disait tantôt, où on aura le droit de se faire entendre et où... Selon moi, quand il y a arbitrage, il y a un arbitre qui préside. L'arbitre prend sa décision, bien sûr, mais, au moins, on se sera fait entendre et on aura fait valoir nos droits et ce pourquoi on veut telle et telle chose. Ce n'est pas par fantaisie. La fantaisie, on n'a ni le temps, ni les moyens de s'en payer dans les commissions scolaires. Nous souhaitons aussi un aménagement rationnel du territoire, mais qu'on tienne compte des besoins de la commission scolaire, parce que la commissions scolaire a des objectifs qui lui sont propres, qui ne correspondent pas du tout à ceux des municipalités. C'est pourquoi on souhaite être consultés et on souhaite participer.

M. Chevrette: Au niveau de l'élaboration du schéma d'aménagement, on va consulter la population. Il y a différentes phases de prévues. Ce sont les mêmes gens qui votent autant pour un commissaire d'école que pour un échevin qui ont à se prononcer sur la localisation des équipements et à définir des zones industrielles, commerciales, résidentielles, c'est le même monde qui a à vivre dans un même milieu et à ordonner tout ça.

En quoi, ces mêmes gens, qui participent à un schéma d'aménagement dans une région d'appartenance, pourraient-ils venir en conflit quand il s'agit d'un palier de gouvernement, comme vous dites vous-même, scolaire et un autre municipal?

Est-ce que l'individu parent que vous consulteriez en fonction de la localisation d'un équipement scolaire se prononcerait différemment s'il est consulté par une commission scolaire que s'il était consulté par un échevin municipal?

Mme Gervais: Pas du tout, vous dites: Nous allons consulter la population, nous allons consulter les municipalités. Si vous consultez toute la population, la population répondra d'elle-même. Je pense qu'il n'y a personne qui est bâillonné mais vous allez consulter la population, les individus, individus qui votent pour s'élire des échevins, que vous dites, qui votent également pour s'élire des commissaires d'école, vous allez en plus consulter la municipalité, pourquoi pas la commission scolaire? Ce sont deux gouvernements où il y a des élus en suffrage universel de la même façon que les municipalités et les commissions scolaires. On représente les parents et les contribuables. On peut dire que les municipalités représentent les contribuables, ce sont les objectifs qui sont différents. Mais alors, ou vous consultez la population et vous vous dites: Je n'ai pas besoin de consulter la municipalité, les gens qui ont voté pour ces échevins sont consultés, pourquoi irais-je consulter la municipalité? C'est la même chose que vous me dites là.

M. Chevrette: Dans le schéma d'aménagement qui est normalement dévolu, en termes de responsabilités, aux élus municipaux, ils auront à définir l'endroit où, éventuellement, il y aura des équipements scolaires. Donc, ces gens, en se prononçant une fois sur la localisation de ces équipements, se trouvent à donner leur opinion d'une façon très précise.

Mme Gervais: Je ne sais pas.

M. Chevrette: II y a une autre chose qui m'a tracassé au niveau de votre mémoire et au niveau de votre exposé préliminaire. Vous avez utilisé quatre termes; vous avez utilisé tout d'abord, "gouvernement scolaire", vous avez utilisé le terme "territoire agricole", vous avez utilisé le terme "municipalité scolaire" et vous parlez de "commission scolaire" bien sûr aussi. Je voudrais que vous me démêliez cela au juste parce que municipalité scolaire en fonction d'abord de l'intégration que vous recherchez au niveau de la fédération, est-ce que le vrai terme ne serait pas territoire?

Mme Gervais: Le territoire d'une commission scolaire, c'est reconnu dans la Loi de l'Instruction publique c'est le territoire d'une municipalité scolaire qui peut être différente du territoire de la municipalité où est située cette commission scolaire. J'habite Les Saules, la commission scolaire Montcalm est le regroupement des commissions scolaires Duberger-Les Saules. Duberger-Les Sautes sont deux quartiers de la ville de Québec et on ne fait pas partie de la Commission des écoles catholiques de Québec, c'est la commission sco- laire Montcalm, pourquoi? Parce qu'il y a eu regroupement scolaire avant que les municipalités se décident à fusionner. J'étais présidente de la commission scolaire à ce moment-là, le maire des Saules m'a dit: Mme Gervais, qu'est-ce qui vous presse? Avant qu'une loi vienne nous trancher la question comme cela — et elle s'en venait rapidement — nous allons procéder volontairement. Ce que nous avons fait; mais remarquez qu'à ce moment-là, les édiles des Saules, qui était une petite municipalité, étudiaient une possibilité de fusion avec Sainte-Foy et deux ans plus tard, deux ans après le regroupement de ces commissions scolaires, la municipalité Les Saules fusionnait avec la ville de Québec. Les municipalités ne vont pas vite.

M. Chevrette: De par la loi qui régit les corporations municipales, il appartient aussi aux municipalités de bâtir ses plans d'aménagement. Vous dites — vous l'avez affirmé vous-même — que le découpage d'une municipalité scolaire ne correspond pas au découpage d'une corporation municipale et vous demandez au ministre de l'aménagement de donner un pouvoir d'intervention à une commission scolaire sur un territoire qui ne correspond pas à la corporation municipale. Autrement dit, si vous êtes présidente d'une commission scolaire, d'une municipalité scolaire, pour reprendre le terme que vous avez utilisé, qui déborde le cadre de la corporation municipale, vous voudriez avoir un droit de veto ou un droit de refuser un pouvoir qui est dévolu depuis des centaines d'années aux corporations municipales. C'est cela que vous dites, non? Rectifiez! (16 heures)

M. Beaumont: Si vous me permettez, on demande quand même de conserver, autant que faire se peut, la même désignation territoriale que celle des commissions scolaires et des municipalités. Il y a trois propositions faites dans les documents de décentralisation. C'est une des trois propositions. On peut, dans un découpage, tenir simplement compte des municipalités et aussi des commissions scolaires.

Je voudrais en revenir à ce que vous disiez tout à l'heure, relativement aux citoyens qui vont voter, qui vont donner leur avis. Ce sont les mêmes gens qui ont élu les commissaires et ce sont les mêmes gens qui élisent les échevins. Je ne crois pas qu'il y ait dualité. D'abord, dans l'élaboration, je crois que préalablement la commission scolaire peut apporter un avis qui est peut-être différent, qui est peut-être nuancé, qui a peut-être certains objectifs autres que les objectifs municipaux, qui peut être bon dans l'élaboration du schéma. Une autre chose, c'est que, dans le cadre présentement du projet de loi, il ne faut pas oublier que le référendum a un caractère consultatif. C'est à ce niveau-là que c'est peut-être un frein, si on veut.

M. Chevrette: Je prends un exemple de négociations qui peuvent avoir lieu entre deux corporations municipales. Je suppose qu'une corpora-

tion scolaire désire bâtir une école ou projette la construction d'une école aux frontières d'une municipalité bien identifiée, mais que, d'autre part, l'autre corporation a un site industriel tout près de la frontière même, elle aussi. La logique veut que les deux corporations se parlent pour définir quel type de zone elles vont mettre dans ce coin-là. A ce moment-là, elles en arrivent à la conclusion toutes les deux que le seul endroit que la corporation possède pour placer une zone industrielle, c'est là, mais que, par contre, il y a possibilité de transférer le site pour la projection de l'école dans un autre endroit.

Vous autres, comme corporation scolaire, vous voudriez absolument construire votre école là, parce que c'est près du centre administratif, parce qu'il y a déjà quelques équipements. Qu'est-ce qui arriverait, pour bien illustrer ce que vous dites dans votre mémoire?

Mme Gervais: On vous a dit, M. le député, qu'on respectait les règlements de zonage pour construire des écoles. On ne va pas construire des écoles là où il y a un projet de centre industriel. Cela s'est déjà fait, mais ça ne se fait plus maintenant ces choses-là. On approche les écoles le plus possible de la clientèle. Moins il y aura d'autobus scolaires sur le territoire, mieux ce sera. Bien sûr, ce n'est pas tout à fait un fléau parce que c'est utile, mais, moins il y en aura, mieux ce sera. Qu'est-ce que ça donne à une commission scolaire de vouloir... Il ne faut quand même pas ridiculiser l'affaire. On respecte les règlements de zonage, et les règlements municipaux de zonage, la commission scolaire se doit de les étudier, de les respecter et d'étudier aussi les prochaines clientèles, la population; à quelle place la ville a un projet domiciliaire, où la localisation d'une école va le mieux répondre aux besoins de la population. Ce n'est pas le projet d'aménagement, le projet de loi 125 qui va changer ce qui existait. On a toujours respecté cela. On parle de comtés renouvelés. Si tout était si beau dans les comtés, on ne parlerait pas de comtés renouvelés, on ne parlerait pas de nouvelles définitions territoriales. On parle de nouvelles définitions territoriales, de redécoupage de comtés, c'est bien sûr qu'on veut aller vers des changements, probablement nécessaires, je ne suis pas contre ça, ça ne me regarde pas, je ne me mêle pas de ça. Mais je me dis: Comme il va y avoir des changements, on souhaiterait être consultés sur les changements, pour que cela crée le moins possible de mésentente. Il va y avoir un nouveau redécoupage des comtés, oui ou non? Sinon, pourquoi parler de comtés renouvelés?

M. Chevrette: Je vais vous donner, pour terminer — trente secondes — une petite impression. Comme vous venez d'affirmer que vous avez toujours respecté les règlements de zonage, c'est bien évident, c'est quasiment implicite que vous respecteriez le nouveau découpage. Mais ce qui vous soucie le plus, c'est de conserver l'autonomie des commissions scolaires.

Mme Gervais: Mon grand souci, c'est qu'on reconnaisse, M. le député, que les commissions scolaires existent. M. le ministre a répété tantôt que le premier ministre a dit: "Les commissions scolaires vont rester." J'ajouterai qu'il a dit: "au moins jusqu'à la prochaine élection." Il ne pouvait pas engager les autres gouvernements, si c'est un autre gouvernement. Il n'a même pas engagé le sien, si c'est le sien qui est réélu. Il a dit: "au moins jusqu'au prochain gouvernement."

Cela a été affirmé et répété, comme dit M. le ministre, à la conférence. On s'était opposé, M. le ministre est bien au courant — on avait parlé autrefois de possibilités de gouvernements régionaux qui auraient juridiction sur les commissions scolaires — très fermement à ça. On s'oppose à ce que l'éducation relève des gouvernements régionaux. On nous a dit: N'ayez crainte, on ne pense plus à cela, c'est oublié. On dit que ces gens sont sérieux, ils nous l'ont dit et on les croit.

Mais on veut être consulté sur certaines choses. Remarquez qu'on ne relève pas tout le projet de loi, il y a tellement de choses qui ne nous regardent pas, on s'arrête à quelques articles tout simplement, pour faire valoir nos droits, de la même façon qu'il est venu des CRD, etc., pour faire des représentations. Je pense qu'on représente quand même à peu près 200 commissions scolaires dans la province. Vous avez eu la générosité d'accepter que nous venions présenter notre mémoire. Nous en sommes très contents. On espère que vous en tiendrez compte. Ce n'était pas pour nous amuser que nous avons préparé un mémoire à l'intention de la commission parlementaire.

Le Président (M. Marcoux): Le député de Gatineau.

M. Gratton: Premièrement, M. le Président, je voudrais simplement réagir à une affirmation qu'a faite le député de Joliette qui reprenait la même affirmation faite à de nombreuses occasions, par le ministre. On dit à nos interlocuteurs depuis le début de la semaine qu'il ne s'agit pas de définir la politique de décentralisation, ce n'est pas de cela dont on discute ici à la commission parlementaire, on parle d'aménagement. Il faut bien se rendre à l'évidence qu'en parlant du projet de loi 125, on parle d'une nouvelle structure. En fait, les conseils de comté existent, on en convient. Mais on veut les renouveler, comme madame le disait tantôt, on veut même redéfinir leurs territoires et on veut leur donner des pouvoirs accrus en matière d'aménagement, pouvoirs qu'ils n'ont pas présentement.

Or, une fois qu'on aura fait tout ce travail et qu'on aura monté toute cette structure, il est bien évident que si le ministre nous disait aujourd'hui qu'il n'est pas question de leur confier aucun autre pouvoir que l'aménagement, je pense que vos appréhensions ne seraient probablement pas fondées et on pourrait se laisser et parler d'aménagement. On ne sait même pas encore si ce seront ces conseils de comté renouvelés qui seront chargés de l'application de la loi sur le

zonage agricole, c'est une hypothèse. Ce n'est pas encore une certitude, personne ne le sait.

Donc, on peut supposer toutes sortes de choses. Comme dans la politique de décentralisation, on ne connaît pas encore les intentions du gouvernement quant au remaniement des pouvoirs, parce qu'on en parle aussi, il faut qu'entre autres, la Fédération des commissions scolaires soit soucieuse de ce qui peut découler de l'adoption du projet de loi 125.

Quant à moi, j'invite les membres de la fédération, tout en les remerciant de la présentation de leur mémoire, à demeurer très vigilants. On aura sûrement besoin de surveiller de très près l'évolution de cette décentralisation dont on connaît à peine les débuts au moment où on se parle.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Beauce-Nord.

M. Ouellette: Merci, M. le Président. Deux points sur lesquels j'aimerais revenir pour obtenir plus de précision de votre part. D'abord, vous parlez abondamment de consultation des commissions scolaires dans l'élaboration du schéma d'aménagement. Si je regarde la loi, je vois qu'entre la résolution d'entreprendre un tel schéma et le moment de sa mise en vigueur, il y a une quinzaine d'étapes. A au moins deux occasions, on parle d'assemblées publiques, on parle même d'une possibilité de référendum quelque part, avant la fin, et on parle, à plusieurs endroits, d'avis du gouvernement. J'aimerais savoir si, selon vous, la consultation des commissions scolaires, au niveau des assemblées publiques, vous suffirait en termes de consultation, sinon, est-ce que vous ne pouvez pas, par l'entremise du ministre de l'Education, intervenir à travers les étapes où on parle d'avis du gouvernement?

M. Beaumont: On peut toujours, pour employer la même expression que tout à l'heure, faire des pèlerinages chez les ministres et je pense que ce serait beaucoup plus simple, à mon avis, que tout simplement, on inscrive dans la loi que les commissions scolaires doivent être consultées. Ce serait fort simple. Effectivement, c'est vrai et c'est ce qui est surprenant d'ailleurs. Alors qu'on porte une très forte attention à la participation, on exclut, on ne sait trop pour quel motif, les commissions scolaires. Pourtant, Dieu sait que leurs immobilisations vont être affectées quand même par la localisation, pour employer les termes du ministre, qui va être décrétée dans ces schémas.

M. Ouellette: Vous n'avez pas l'impression qu'étant donné que des schémas d'aménagement, il n'en existe à peu près pas au Québec, quelques-uns à peine, que depuis toujours, vous avez fait affaire avec les municipalités, en ce qui regardait l'implantation du réseau scolaire. Etant donné que vous avez toujours fait affaire avec les municipalités, croyez-vous que la création de ces conseils de comté renouvelés devient une entrave addition- nelle à votre planification, dans le territoire d'une commission scolaire précise? Autrement dit, est-ce que la venue de cette structure régionale risque d'être une entrave additionnelle entre la façon que vous aviez autrefois de vous adresser aux municipalités, pour implanter votre réseau?

M. Hudon: C'est peut-être important, à ce moment-ci, de se rappeler que le territoire des commissions scolaires peut couvrir plusieurs parties de comtés. On peut avoir, par exemple, un territoire d'une commission scolaire qui, effectivement, touche à trois comtés. Il me semble que ce serait important que la commission scolaire donne son avis avec une option tout à fait différente, avec une orientation tout à fait différente de celle que l'on peut avoir au niveau d'un seul comté. Je ne crois pas que l'intention des commissions scolaires serait de bloquer comme tel un projet d'aménagement qui, en fait, correspond, à plusieurs points de vue, à des améliorations que l'on souhaite au niveau de la population.

Mais ce serait beaucoup plus pour donner un avis, un éclairage, sur un projet quelconque, avec une orientation différente. Lorsqu'on est au niveau d'une commission scolaire, que l'on touche à trois comtés, que les véhicules de transport des écoliers sillonnent à travers ces trois comtés, il peut arriver à un moment donné, dans une situation quelconque, que ce soit effectivement un éclairage très intéressant au niveau d'un comté que d'avoir celui de la commission scolaire. Je pense que c'est là-dessus qu'il faut regarder ce que l'on veut précisément.

Si le comté comme tel n'a pas cet éclairage qui peut venir de la commission scolaire dont le territoire couvre, en tout ou en partie, un, deux ou trois comtés, je vous assure qu'on peut se retrouver éventuellement dans des situations embarrassantes et dans des situations de conflit.

Je pense qu'il va falloir situer très bien ce qu'on veut précisément, par rapport à un projet quelconque.

M. Ouellette: Ce que je voulais dire, c'est que depuis toujours, c'est avec les municipalités que vous avez fait affaire. Malgré la venue de la nouvelle structure, les municipalités demeurent et demeurent seules maîtresses sur leur territoire, en ce qui a trait au plan directeur d'urbanisme.

Quant à moi — je peux être dans l'erreur — mais j'ai l'impression que c'est avec les municipalités que vous allez continuer à négocier. A ce niveau-là, il n'y a rien de changé. Quant au schéma d'aménagement, je me pose la question à savoir s'il risque vraiment d'affecter vos orientations quant à l'implantation de votre réseau, à son développement à venir.

M. Hudon: On est un peu dans les nuages, à savoir qu'on n'a pas de définition précise actuellement, des équipements, par exemple. On ne le sait pas. Les infrastructures, c'est quoi? Est-ce que cela touche des commissions scolaires ou si cela ne les touche pas? Si, par exemple, dans une

définition d'équipement, on dit: Ce ne seront que les équipements qui appartiennent aux municipalités, aux corporations municipales, on dit: II n'y a pas de problème. Mais si cela touche également les équipements qui appartiennent aux commissions scolaires, on dit: Attention, on a quelque chose à dire. Cela pourrait être une définition d"'équipements". (16 h 15)

Dans les infrastructures, on mentionne, par exemple, le transport des écoliers. On en a une infrastructure, on en a une actuellement. On en a des services de transport. Si cela concerne également le transport des écoliers, on a quelque chose à dire. Nos horaires, par rapport à l'industrie, il faut quand même qu'il y ait quelqu'un à un moment donné qui s'en mêle. Je suis bien d'accord que le citoyen va aller voter, mais, avant tout cela, il y a peut-être un moment ou une étape qui seraient très importants dans le développement éventuel des infrastructures, des équipements, tant au niveau municipal qu'au niveau scolaire, et c'est là qu'on pense en tout cas qu'on a quelque chose à dire.

M. Ouellette: Ma deuxième question rejoint le découpage. Tout à l'heure, vous disiez qu'il serait souhaitable que les conseils de comté coïncident le plus possible avec le territoire des commissions scolaires. Si on répondait à votre voeu, je pense qu'on massacrerait littéralement l'esprit fondamental de ce projet de loi, qui est de ne pas imposer de Québec, sur la tête des citoyens en régions, un plan bien précis, comme on a fait à l'opération 55, par exemple.

Vous faisiez allusion également aux territoires ou aux régions d'appartenance. Je peux vous dire que j'ai vécu l'opération 55 en tant qu'enseignant, dans une région où il y avait un sens très développé de l'appartenance. On s'est même débattu farouchement pour que le gouvernement modifie son plan des territoires scolaires, parce qu'on se rendait compte qu'en l'appliquant tel qu'imposé de Québec, on venait mettre la hache dans notre territoire d'appartenance. Si vous voulez un exemple précis — madame le connaît peut-être — lorsqu'on a décidé de prendre la région de Sainte-Marie-de-Beauce, qui avait toujours vécu avec les régions de Saint-Joseph, Beauceville, Saint-Georges, et de la rattacher à la Commission scolaire régionale Louis-Fréchette, c'est bien de valeur, mais on venait de mettre la hache carrément dans notre région d'appartenance.

Vous savez tout aussi bien que moi les conséquences négatives de cela. Vous disiez tout à l'heure que les gens s'identifiaient de plus en plus au territoire scolaire et c'est très vrai. La loi 125 vient dire aux citoyens: Entendez-vous donc entre vous et délimitez ce territoire d'appartenance selon la profondeur du sens d'appartenance que vous avez dans vos régions.

Si on répondait à votre voeu, d'une part, on répéterait, à mon sens, les erreurs de l'opération 55. Je ne fais de reproche à personne, mais on l'a vécue quand même. Cela a été à ce point douloureux que quinze ans après, on regrette encore, dans certains coins, l'imposition de Québec sans consultation.

On est mieux de sacrifier l'uniformité des deux territoires, scolaires et comtés municipaux, pour permettre aux gens de redéfinir leur territoire d'après l'évolution qu'ils ont connue depuis quinze ans. Je pense qu'on commettrait une erreur. Il vaut mieux vous obliger, même si ce n'est peut-être pas agréable, d'avoir affaire à deux ou trois comtés municipaux que de massacrer les régions d'appartenance qui, pour moi, sont essentielles, en milieu rural en tout cas. J'aimerais avoir vos commentaires là-dessus.

M. Hudon: J'aurais peut-être un commentaire à formuler, c'est le suivant: II faut se rappeler que l'opération 55 avait été mise de l'avant après des rapports d'étude de l'éducation au niveau du Québec. A ce moment-là, on a cru bon, au niveau provincial, d'ajouter de nouvelles structures administratives et de couper, au niveau du secondaire, le niveau sur lequel on voulait régionaliser.

A ce moment-là c'est un peu cela que vous relevez en fait — on n'a pas tenu compte des structures administratives des commissions scolaires existantes. On en a ajouté, au lieu de procéder, comme on le voit présentement, à une certaine forme d'intégration dans le temps, ce qui aurait probablement été une étape très intéressante à vivre. On a ajouté tout simplement des structures administratives aux commissions scolaires existantes.

Actuellement, le mouvement que nous avons, c'est l'intégration de l'élémentaire, du primaire, dis-je, au secondaire, qui aurait probablement été une étape avant celle de la régionalisation dans la logique des choses.

Effectivement, on n'a pas tenu compte ou, enfin, on n'a pas fait, je pense, toute la consultation nécessaire au niveau des commissions scolaires avant d'implanter les 55 régions. C'est un peu cela qui nous amène ici. On dit: II y a quelque chose d'important au niveau de la province qui se décide. Les gouvernements locaux scolaires sont là et on est en train de passer à côté.

En ce qui a trait à la question des territoires, je ne crois pas même si on a émis tout à l'heure une opinion, à savoir que ce serait peut-être souhaitable que les comtés rejoignent, jusqu'à un certain point, les limites telles qu'elles sont définies au niveau scolaire... On peut émettre ce voeu, mais je pense qu'on est bien d'accord avec vous qu'il est préférable de faire affaires avec deux ou trois comtés que d'avoir des structures abracadabrantes. Là-dessus, on pourrait peut-être faire une petite marche arrière de notre côté, mais tout de même. Lorsqu'on décidera de ces différentes limites territoriales, il faudrait dire: La commission scolaire, qu'est-ce que vous pensez de cela? C'est cela, l'affaire. A ce moment, avec notre expérience de gouvernements régionaux, jusqu'à un certain point, passez-moi l'expression, au niveau d'une commission scolaire régionale, et même au niveau

d'une commission scolaire locale qui peut avoir deux ou trois comtés, on pourra peut-être dire, simplement au niveau du rôle de l'évaluation ou simplement au niveau de l'entretien des chemins d'hiver, par exemple: Au lieu de faire une virée en plein milieu d'un rang, passez à côté de l'école, ou enfin... On procédera à une entente, par exemple, pour la virée de l'autobus au milieu d'un rang.

On a apporté des exemples tout à l'heure de concertation municipale et scolaire. Il y a peut-être aussi des exemples qui sont regrettables. Il arrive, dans un endroit donné, que la commission scolaire n'utilisera pas l'aréna de la place où est située l'école, mais va préférer aller dans une municipalité voisine, parce qu'il y a un coût horaire moindre et aussi parce qu'on subventionne le transport. Ce qui veut dire qu'on ne paiera pas $40 l'heure près de l'école, mais on va transporter les élèves pour payer $20 l'heure dans la municipalité voisine. Finalement, nous nous retrouvons avec un coût horaire de $60 l'heure, mais, parce qu'il y a une partie de subventionnée, on ne fait pas cette distinction. A $20, cela nous permet d'avoir deux fois plus d'heures. Il faut corriger des situations comme cela. Je me dis: En tant que commission scolaire, avec notre expérience qui déborde les limites territoriales des municipalités et des comtés, on pourrait peut-être dire: Si la municipalité voisine est capable de le faire à $20 et vous autres à $40, il y a peut-être un ajustement. Au lieu d'aller payer $60, finalement, parce que le transport est subventionné, on pourrait peut-être s'organiser pour avoir moins de transport, quitte à ce qu'on fasse une entente quelconque. C'est beaucoup plus en fonction d'une expérience qui dépasse le cadre actuel des municipalités et des comtés que nous voulons apporter quelque chose aux divers projets.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Léonard: Avant de terminer, très brièvement, je voudrais simplement relever une chose qui a été dite autour de la table, à savoir que les fascicules verts étaient les fascicules du ministre. Je voudrais simplement citer des choses qui sont écrites noir sur blanc dans ces documents verts. A la deuxième page, on dit ceci: Ces fascicules sont des documents de travail qui visent à susciter la réflexion et la discussion sur divers aspects de la décentralisation. Ils ont été préparés par le secrétariat à la décentralisation ou groupe ad hoc relevant du ministère d'Etat à l'aménagement du Conseil exécutif. Dans de nombreux cas, leur préparation a fait appel à la collaboration du personnel d'autres organismes ou ministères du gouvernement.

A la page IV, deuxième paragraphe, il y a un texte que je signe, qui dit ceci: "Ces fascicules ne définissent pas une position gouvernementale. Il aurait été anormal que ce soit de Québec que soit définie une politique de décentralisation. Ce sont des documents de soutien qui analysent différentes perspectives." J'aimerais qu'on en tienne compte, parce que c'est bien écrit, noir sur blanc.

M. Gratton: ... de tenir compte de celui sur le réaménagement des pouvoirs, si vous pouvez nous...

M. Léonard: Là-dessus, nous avons publié ces fascicules qui servent d'éléments à la réflexion et nous avons publié ceux qui étaient nécessaires à l'aménagement. Les autres viendront en temps et lieu, plus tard. Je l'ai déjà dit ce matin, je le répéterai encore aujourd'hui. Je vais remercier les représentants de la Fédération des commissions scolaires de leur mémoire et leur dire que nous allons prendre ce qu'ils nous ont dit en considération. Nous verrons ultérieurement ce que nous en ferons. Je pense bien que nous avons connu de bons échanges ici. Je vous remercie beaucoup.

Mme Gervais: M. le ministre, au nom des commissions scolaires, la fédération et ses représentants de cet après-midi vous disent merci. Bonjour, messieurs!

Le Président (M. Marcoux): Bonjour. Je vous remercie au nom de tous les membres de la commission.

Maintenant, j'inviterais les représentants de la commission scolaire de Saint-Jérôme M. Robert, si vous voulez nous présenter votre collègue.

Commission scolaire de Saint-Jérôme

M. Robert (Yvon): Yvon Robert, directeur général; M. Marcel Gibeault, directeur général adjoint. D'abord, excusez l'absence d'un délégué officiel, M. Pierre Haché, qui, compte tenu du changement d'horaire, n'a pu se joindre au groupe tel que prévu.

Le Président (M. Marcoux): Alors, allez-y pour la présentation de votre mémoire.

M. Robert: Un document a déjà été adressé au ministre, que vous avez probablement entre les mains; c'était un document de travail préparé rapidement pour sensibiliser les commissaires et les invités, pour qu'ils se prononcent sur le dossier.

Les remarques de la commission scolaire ne sont pas nombreuses, parce que tout le mécanisme prévu dans le projet de loi intéresse d'abord les municipalités et les conseils de comté.

Lesdites remarques ne sont pas moins importantes dans l'esprit des commissaires d'école et nous apprécions l'occasion qui nous est offerte de venir en discuter avec les membres de la commission parlementaire.

M. Gibeault va continuer à vous présenter le texte rapidement, il y a seulement quelques pages.

M. Gibeault (Marcel): Oui, j'allais dire qu'il est très court. Je passe directement aux principales remarques.

A la page 1.5 du document de travail qui vous a été adressé, on peut lire: Si le projet de loi

prévoit la possibilité de créer un comité consultatif d'urbanisme au niveau municipal, il n'en prévoit pas au conseil de comté. Par conséquent, la commission scolaire ne peut participer officiellement aux discussions que lors d'assemblées publiques, encore que la loi n'accorde pas à la commission scolaire les mêmes privilèges qu'aux électeurs. Je me réfère aux articles 14 et 16 principalement.

En effet, dans les notes explicatives précédant le projet de loi, on peut lire: Des mécanismes de consultation de la population sont prévus à différents stades de l'élaboration et de l'adoption du schéma d'aménagement et, plus loin, les mécanismes d'élaboration et d'adoption du plan d'urbanisme prévoient l'information des citoyens et la tenue d'assemblées publiques.

La consultation semble réservée aux personnes inscrites sur la liste électorale. De nouveau, je cite l'article 16. Donc, elle exclut la commission scolaire, peut-être le principal propriétaire foncier et un important contribuable, avec une évaluation foncière, dans le cas de la Commission scolaire Saint-Jérôme, de plus de $30 millions et des taxes foncières d'environ $350 000 en 1980, première année de la réforme de la fiscalité municipale.

On voit également dans le document de travail qui vous a été adressé que les inconvénients créés par les nouveaux intervenants dans les projets de construction de la commission sont compensés, à notre avis, par la planification d'un territoire agrandi. On peut se demander quel sera le rôle de SATRA — ça, c'est particulier à notre région — advenant la création d'une corporation de comté et l'adoption par cette dernière d'un schéma d'aménagement.

La première partie de cette remarque est un acte de foi dans la planification sur une plus grande échelle. La deuxième est une interrogation, puisqu'il existe déjà sur notre territoire un organisme supramunicipal — je viens de le nommer, c'est SATRA. Alors, on se pose la question, à savoir quel sera le rôle de SATRA après l'adoption de la loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Quel sera également le rôle du conseil de comté si SATRA continue d'exister après l'adoption du présent projet de loi?

Le projet de loi no 125 pourrait être la pièce maîtresse dans le projet de création de gouvernements régionaux et de remplacement des commissions scolaires par des commissions de développement éducatif et culturel. Cela nous apparaît être la grande question.

Le projet de loi est déposé en même temps que les fascicules sur la décentralisation et les commissaires d'écoles, qui ont vécu la régionalisation des années soixante, mais surtout des années soixante-trois à soixante-cinq, ont l'odorat sensible et croient reconnaître dans les conseils de comté renouvelés de nouvelles régionales qui pourraient très bien déborder l'aménagement du territoire et envahir d'autres domaines ou juridictions.

Sur ce point particulier, la commission scolaire ne s'est pas encore prononcée, puisqu'il s'agit d'une impression et non d'une certitude, et c'est pourquoi nous posons la question aujourd'hui: Y a-t-il un rapport entre le présent projet de loi et la création éventuelle de gouvernements régionaux? (16 h 30)

C'est déjà le moment de la conclusion pour nous. Sous réserve des remarques déjà citées relativement à la nécessité de prévoir une participation de la commission scolaire dans le processus de décision et de l'assurance que le ministre voudra bien nous donner qu'en appuyant ce projet de loi, la commission scolaire n'endosse pas la création d'un organisme destiné à l'absorber, la commission donne un appui de principe aux règles d'aménagement et d'urbanisme — en fait, toute la première partie du projet de loi — et j'espère que des amendements seront apportés au chapitre I, titre II, section I.

Première recommandation: La commission scolaire propose que le chapitre I, titre II, section I soit amendé par l'addition de règles relatives à la délimitation du territoire d'un conseil de comté.

Deuxième recommandation: Que les règles mentionnées dans la première recommandation, favorisent un partage équitable des richesses et qu'en conséquence, la variable "capacité financière" constitue un point majeur dans la détermination des règles.

Ensuite, la commission demande qu'un délai suffisant soit accordé à la population pour réagir sur les amendements. On suppose qu'il pourrait y avoir certains amendements et on voudrait avoir un autre délai pour pouvoir réagir.

La commission insiste également pour que le gouvernement infirme ou confirme la prétention de la commission scolaire à savoir que les conseils de comté "élargis" se verront éventuellement confier d'autres responsabilités jusqu'à devenir la pierre angulaire des gouvernements régionaux. Merci.

Le Président (M. Rancourt): M. le député de Deux-Montagnes.

M. de Bellefeuille: Merci, M. le Président. Cela a été très agréable de s'entretenir ce matin avec M. Robert, je suis sûr que ce sera tout aussi agréable cet après-midi et je suis heureux d'accueillir avec lui M. Gibeault.

Comme nous sommes dans un véritable bain de questions scolaires, je pense qu'on continue, en quelque sorte, l'entretien déjà commencé avec les représentants de votre fédération.

Votre commission scolaire a un territoire qui englobe une partie de mon comté et M. Robert et moi avons eu l'occasion, à plusieurs reprises, de discuter certaines questions de construction scolaire qui sont reliées à toute la longue histoire de Mirabel et, malheureusement, comme toute la longue histoire de Mirabel, c'est marqué par des lenteurs administratives, je le reconnais M. Robert, de notre côté, au ministère de l'Education, on n'a pas réussi encore à tout débroussailler ce qu'on aurait voulu débroussailler mais comme vous le savez, vous avez l'appui du député en ce qui concerne ces problèmes.

Vous faites état de SATRA. Sauf erreur, je pense que SATRA n'existe plus. En tout cas, si SATRA existe sur papier, de fait, il n'y a personne dans la maison et la responsabilité de SATRA est passée en héritage essentiellement au ministère des Affaires municipales.

Cependant, comme nous l'avons bien dit lorsque nous avons parlé de questions d'aménagement et du développement de la région ce matin, il y a là un héritage d'aménagement qu'il est très important de préserver. Si, un jour, les dispositions prévues par la loi 125 et d'éventuelles dispositions relatives à la décentralisation proprement dite, dispositions qui, comme le ministre l'a bien dit à plusieurs reprises, feront l'objet de discussions ultérieures, cet ensemble devait recueillir l'héritage de SATRA, je serai le premier à vouloir m'assurer que, dans ce processus, tout l'acquis valable venant des travaux de SATRA soit conservé. Je pense que là-dessus, nous sommes tout à fait sur la même longueur d'onde; il y a là un acquis important qu'il faut conserver.

Vous parlez dans votre mémoire de la question de la délimitation des territoires; vous la reliez à un partage équitable des richesses. A première vue, c'est séduisant comme hypothèse, mais je voudrais vous demander comment ce critère se concilie avec d'autres critères, comme, par exemple, un critère dont il est souvent fait mention, celui du respect ou de la reconstitution des régions d'appartenance. Il n'est pas du tout acquis que si on délimite les territoires selon un partage équitable des richesses, on va retrouver les régions d'appartenance. Auriez-vous quelques observations là-dessus?

M. Robert: On n'a pas avancé ce critère pour le mettre en contradiction avec celui que vous avancez. C'est dans ce sens qu'il y a une remarque qui est assez importante. On dit: si, effectivement, on accédait à notre demande et que des critères devaient être inscrits, il devrait y avoir une période supplémentaire pour permettre une réaction. Parce qu'on comprend que les critères... Pour nous, ce qui est important, en fait, c'est qu'il y en ait des critères, et comme l'autonomie est reliée jusqu'à un certain point à un pouvoir de taxation, et quand un conseil ou un groupe de municipalités qui seraient regroupés aurait comme caractéristique d'ensemble d'être un milieu pauvre, c'est bien sûr que leur autonomie serait restreinte par le pouvoir de payer ou la capacité de payer du milieu. C'est dans ce sens que, pour nous, c'est un facteur, à moins qu'il existe des règles de péréquation pour permettre un partage des richesses.

Si on considère la réforme qui vient d'être faite de la fiscalité municipale, ce critère devient pas mal plus important, ou bien une partie de l'infrastructure, une plus grande partie de l'infrastructure régionale devrait être financée à même la taxe foncière. Donc, pour nous, c'est un critère important, mais qui n'est pas limitatif, c'est-à-dire au sens qu'il devrait y en avoir d'autres; par exemple, le territoire actuel de la commission scolaire intégrée et un certain nombre d'autres facteurs qui pourraient être débattus un peu comme l'intervention qui a été faite tout à l'heure par un député, en tenant compte aussi du désir d'appartenance de la population. Il ne serait pas bon pour la commission scolaire de Saint-Jérôme de garder de force une partie ou l'autre du territoire qui voudrait s'en détacher, compte tenu d'un sentiment d'une plus grande appartenance et de penser recevoir des services meilleurs, compte tenu de la distance et d'un certain nombre d'affinités. Ce n'est pas dans ce sens.

M. de Bellefeuille: Je comprends, vous voulez mettre ce critère en évidence sans diminuer l'importance que les autres critères pourraient avoir.

M. Robert: Oui, et on voulait insister pour qu'il y en ait des critères qui pourraient être débattus pour éviter que la subdivision ait un certain sens d'arbitraire.

M. de Bellefeuille: Je ne voudrais pas du tout vous mettre dans une position délicate alors que vous parlez immédiatement après les représentants de votre fédération qui sont d'ailleurs encore présents dans ce salon, mais vous les avez entendus nous proposer que la délimitation des territoires s'inspire, dans une mesure qui a été discutée, du découpage des commissions scolaires. Vous n'en faites pas état dans votre mémoire. Sans vous mettre dans l'embarras, vous avez peut-être discuté de ça?

M. Robert: M. Gibeault l'a étudié, il va vous répondre.

M. Gibeault: Pour nous, bien sûr, ce serait la situation idéale, sauf que, dans les fascicules sur la décentralisation, on retrouve trois hypothèses. Dans les trois hypothèses, dans la première seulement — probablement une qui ne serait pas retenue, parce que ça représenterait 43 municipalités — on retrouve le territoire actuel de la commission scolaire, mais agrandi. Dans les deux autres hypothèses, la commission scolaire se voit amputée d'une partie importante — en nombre de municipalités, une, deux ou trois selon le cas — sauf qu'en richesse relative, en évaluation, c'est une part très importante, par exemple, la municipalité de Mirabel qui, selon nous, fait partie du territoire d'appartenance.

Je vais donner comme exemple qu'avant la régionalisation, les commissions scolaires de ville donnaient des services au secondaire, à la suite d'ententes. Cela veut dire que les gens était tout à fait libres de venir dans le territoire qu'ils choisissaient et le territoire, la majeure partie de ce territoire de la ville de Mirabel avait, dans les années 1960 à 1964, signé des ententes avec la Commission scolaire Saint-Jérôme et les services du secondaire se donnaient à Saint-Jérôme.

Pour nous, c'est un signe que le territoire d'appartenance, c'est la situation actuelle quant au territoire actuel de la Commission scolaire Saint-Jérôme. Cela s'est fait tout naturellement, ce

sont les gens qui l'avait choisie. On y revient après onze ans de régionalisation et, encore là, tout le monde est tout à fait satisfait, les gens ont demandé de revenir à ce territoire, alors que, pour celui qui était plus grand et qui englobait, dans la régionalisation scolaire, le territoire Lachute, les gens se sont plaints, autant les gens de Saint-Jérôme que de Lachute, qu'ils n'avaient pas de sentiment d'appartenance.

On y revient à un milieu naturel. Bien sûr que c'est l'hypothèse qui est retenue par la commission. Mais, dans le rapport qui a été déposé, on a travaillé surtout à partir de ce qui était connu, en fait, de ce qui avait été non pas annoncé, mais des hypothèses qui avaient été avancées. D'ailleurs, cela revient à la même chose. On dit: Tenez compte d'un paramètre important, celui de la richesse d'une région. Si vous tenez compte à la fois du territoire d'appartenance et des richesses relatives, on retrouve là le territoire de la Commission scolaire de Saint-Jérôme, même si on ne l'a pas dit.

M. de Bellefeuille: L'exemple de Mirabel que vous citez est intéressant. Je ne suis pas sûr si nous disons la même chose, mais nous nous trouvons face à une municipalité de création récente, créée par un regroupement forcé, qui se divise très nettement entre deux régions d'appartenance. C'est bien ça que vous reconnaissez, que Saint-Janvier, Saint-Canut sont dans la zone d'influence de Saint-Jérôme, tandis que.... Saint-Co-lomban, bien sûr, mais ce n'est pas dans Mirabel. Pour ce qui est de Mirabel proprement dit, l'ancien Saint-Janvier, l'ancien Saint-Canut, c'est dans la zone d'influence de Saint-Jérôme, alors que le reste de la ville de Mirabel, c'est un tout autre monde.

M. Robert: Le territoire opérationnel se trouve dans la zone d'influence de Saint-Jérôme.

M. Gibeault: De toute façon, je pense que l'infrastructure, les routes...

M. de Bellefeuille: A la frontière des deux. Vous exprimez des inquiétudes par rapport aux possibilités pour les commissions scolaires d'être consultées, d'avoir voix au chapitre. Auriez-vous des modalités à évoquer pour établir des modes de consultation qui seraient plus satisfaisants à votre point de vue?

M. Robert: II existe des modalités ou, si vous voulez, des structures informelles dans notre milieu, depuis quelques mois, quelques années. On a des comités scolaires municipaux, ce qu'on ne retrouve pas dans la loi actuellement; c'est informel, c'est-à-dire que cela a été mis en place de par la volonté des municipalités, par le fait aussi qu'une commission scolaire comme la nôtre fait affaires avec plusieurs municipalités d'importance différente. Depuis quelques mois, il existe une structure; on se retrouve avec le préfet de comté, avec les représentants de certaines municipalités et le président de la commission scolaire; tout ça pour essayer de voir comment on peut améliorer des échanges de service. C'est surtout en fonction du service d'implantation.

C'est un mécanisme de ce genre, on le croit, qui devrait exister au niveau de la loi 125. C'est dans ce sens que la première remarque est faite au sujet du comité consultatif dont il est question à l'article 126 pour le niveau municipal. Il n'en est pas question au niveau du comté renouvelé, parce que, si un territoire correspond à peu près au territoire d'une commission scolaire, ce serait intéressant qu'il existe, à ce niveau, un comité consultatif. D'abord, pour parler de problèmes d'implantation de services ou, si vous voulez, d'aménagement, surtout pour des services qui devraient être utilisés en commun par les commissions scolaires et les municipalités, et peut-être à d'autres fins, éventuellement, comme on en a discuté ce matin au niveau du Conseil de développement régional des Laurentides. On pourrait aborder d'autres problèmes au niveau des services.

Il y aurait peut-être d'autres secteurs où il existe, d'une façon informelle, actuellement, des échanges qui pourraient être favorisés ou amplifiés à ce niveau. (16 h 45)

M. de Bellefeuille: Dans une certaine mesure, formalisés, reconnus?

M. Robert: Dans ce sens-là.

M. de Bellefeuille: Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: M. le Président, comme la Commission scolaire de Saint-Jérôme, l'Opposition officielle ne considère pas normal non plus que les commissions scolaires ne puissent participer, en aucune façon, à l'élaboration d'un schéma d'aménagement, sauf si ce n'est que par une participation à une assemblée publique. Et, comme le souligne votre mémoire, encore là, la loi n'accorde même pas aux commissions scolaires les privilèges qu'elle accorde aux citoyens.

Il est inutile d'élaborer plus longuement là-dessus, sauf que j'aimerais remercier la commission scolaire, quant à moi, de m'avoir fourni copie de ce livre blanc sur la décentralisation qui, on le sait, n'a jamais été publié, mais dont je n'avais jamais pris connaissance.

M. Brassard: Vous demanderez au député de Lotbinière.

M. Gratton: C'est parce que je ne le vois pas de façon régulière, le député de Lotbinière.

Le Président (M. Marcoux): Vous ne faites pas partie de son caucus encore?

M. Gratton: Non, je ne fais pas partie de son caucus.

Une Voix: Question avec débat le 21 avril.

M. Gratton: M. le Président, la seule question que j'adresse à M. Gibeault touche à la conclusion c). Vous dites que le projet de loi 125 pourrait être la pièce maîtresse dans le projet de création des gouvernements régionaux et le remplacement des commissions scolaires par des commissions du développement éducatif et culturel. Vous référez au livre blanc.

Est-ce qu'il y a quoi que ce soit qui s'est produit dernièrement, qui vous pousse à modifier ou à qualifier un tant soit peu cette affirmation aujourd'hui?

M. Gibeault: Non, quelque chose, peut-être, mais c'est une question qu'on posait. Ce n'est pas une affirmation. On pose la question: Y a-t-il un rapport entre le présent projet de loi et la création éventuelle des gouvernements régionaux? Il y a une référence à ce livre blanc, qui n'en est peut-être pas une, en ce sens que c'est un document de travail aussi.

Mais il faut penser que c'est plus qu'une hypothèse. Il y a entre autres la fiscalité municipale, ce qui est assez récent, et qui enlève, qu'on le veuille ou non, de l'autonomie aux commissions scolaires, en faveur des municipalités. C'est le mnistre Parizeau qui le dit dans son budget. C'est la revalorisation du conseil municipal que de retransférer et c'est aussi une plus grande autonomie que de retransférer un champ de taxation, élargir un champ de taxation. Si c'est vrai dans un sens, cela l'est aussi dans l'autre, que c'est une perte d'autonomie pour les commissions scolaires. Pour nous, c'est un élément qui fait que cela justifie peut-être l'hypothèse qu'on s'en va vers des gouvernements régionaux. Vous remarquerez aussi que la commission ne s'est pas prononcée sur les gouvernements régionaux, parce qu'il n'en est pas question, officiellement. Elle se prononcera en temps et lieu. Pour le moment, elle pose la question.

M. Gratton: Je ne suis pas commissaire scolaire et je me la pose également. Merci.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Bellechasse.

M. Goulet: Merci, M. le Président. Si on avait le temps, je dirais au représentant du Parti libéral qu'il aurait avantage à consulter l'Union Nationale plus souvent.

Une courte question. Est-ce que vous manifestez une certaine appréhension quand vous songez que vous pouvez éventuellement vous situer à l'intérieur de deux conseils de comté, avec deux schémas d'aménagement différents, deux objectifs différents, etc.? Ou est-ce qu'au niveau d'une commission scolaire, cela ne dérange pas, ou plus ou moins?

M. Gibeault: Oui, cela dérange un peu, mais je pense que ce n'est pas l'essentiel.

M. Goulet: Ce n'est pas l'essentiel.

M. Gibeault: Non. Si, dans les deux cas, il y avait deux conflits de comté et si la commission était consultée dans les deux cas, je pense qu'on peut suivre les travaux les plus importants de deux schémas d'aménagement et de deux commissions. Non. Ce n'est vraiment pas l'essentiel.

L'idéal, ce serait d'avoir un conseil de comté et un territoire pour la commission scolaire. Ce serait la situation idéale.

M. Robert: Après avoir travaillé avec 22 municipalités dans notre région, chercher des mécanismes de consultation pour travailler avec 22 municipalités, vous nous demandez si cela pourrait nous déplaire de travailler avec deux conseils de comté, ce serait déjà une amélioration.

Compte tenu des problèmes que peut poser l'aménagement tel que défini par le projet de loi 125, c'est difficile, parce qu'on est devant une structure qui n'a pas encore fonctionné. On ne connaît pas quels sont les rapports de force qui seront établis et quelle sera la place, parce que, là, on demande une place pour la commission scolaire à l'intérieur de la structure, du moins la structure consultative. C'est difficile de répondre à votre question, parce que c'est quelque chose à venir. Cela n'a pas beaucoup de références par rapport à ce qu'on a pu vivre, parce que dans le comté actuel, même si c'est un comté qui est très grand, je pense qu'on touche à plus d'un comté, on travaille avec trois comtés actuellement. Dans la situation actuelle, on travaille dans les comtés de Terrebonne, de Deux-Montagnes et, pour une partie de notre territoire, dans Argenteuil.

M. de Bellefeuille: Plus Prévost.

M. Robert: Pardon?

M. de Bellefeuille: Plus Prévost.

M. Robert: Prévost, oui, mais je pensais au conseil de comté avec préfet. Il n'y a plus personne qui se retrouve là-dedans. Concernant la question qui a été soulevée sur les limites territoriales, quand on travaille dans une commission scolaire, on devient très patient, parce qu'on travaille avec les commissions de formation professionnelle qui n'ont pas le mêmes limites que nous autres, que notre direction régionale. On travaille avec le ministère des Affaires sociales qui n'a pas aussi les mêmes limites. C'est un problème qu'on ne peut pas résoudre tout seul. Je pense bien que si on doit former de nouveaux comtés renouvelés, ce serait d'autres choses qu'il faudrait mettre dans la marmite pour brasser, parce qu'on ne se retrouve plus. Le citoyen, au bout de la ligne, ne sait plus s'il fait partie de la 6 nord ou de la 6 sud, selon qu'il est avec le ministère des Affaires sociales, ou de l'Education ou je ne sais pas trop quoi. S'il est avec une commission de formation professionnelle, s'il est un adulte qui cherche à prendre des cours, c'est un autre problème, les territoires ne

sont pas les mêmes. Ce n'est pas facile, parce qu'une commission scolaire peut avoir plus que deux comtés. Elle peut avoir affaire à plus de deux structures sociales. Il y a des problèmes de territoire.

M. Goulet: Cela va, M. le Président.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Léonard: Je remercie le président de la Commission scolaire de Saint-Jérôme et son directeur général. Je vais simplement faire quelques brefs commentaires. Evidemment, tout à l'heure, j'en ai fait sur la distinction pour nous qui était très importante entre l'aménagement et la décentralisation, la décentralisation étant une perspective alors que l'aménagement, c'est un projet de loi très concret sur la table. La décentralisation, c'est un autre débat en termes tout au moins de gestion d'équipement ou de services, tout ce qu'on voudra.

Je note une chose ici. Vous parlez de découpage territorial. Nous en avons parlé, je pense, passablement, depuis que vous êtes assis à cette table. Vous notez, en fait, toutes les incohérences de ces différents territoires. Il me semble finalement que la conclusion, c'est peut-être au citoyen à dégager son propre sentiment d'appartenance et plus même qu'à des organismes et à des corps intermédiaires à le faire. Enfin, il y a peut-être un certain nombre de préoccupations, mais je pense que le citoyen lui-même, là-dedans, a un intérêt primordial à se prononcer, à participer à cette définition.

En tout cas, je note votre intérêt sur toute cette question de la décentralisation. Ce n'est pas le débat du moment, en tout cas, c'est autre chose. Je pense que nous l'avons assez dit. Je constate même que vous avez un intérêt... Vous avez peut-être une certaine hâte à ce qu'on en arrive à cela. Pour nous, encore une fois, c'est l'aménagement. C'est conçu dans une perspective de décentralisation vers les municipalités. Je pense que vous avez employé souvent le terme "gouvernement régional". Pour nous, il s'agit de comtés et non pas de gouvernement régional. Je tiens à souligner la distinction entre les mots, ce n'est pas la même chose. Je tiens aussi à dire une chose qui est importante, c'est que la décentralisation, cela ne se fait pas nécessairement seulement vers des comtés, cela doit se faire vers des municipalités locales, le plus possible. La décentralisation, cela doit aller le plus près possible des citoyens. C'est une perspective. Quand on parle de décentralisation, on ne doit pas résumer cela à une structure.

Je m'arrête là. Je vous remercie beaucoup de votre participation. Cela a été très riche d'enseignement. Nous en tiendrons compte au cours des débats ultérieurs. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Marcoux): J'inviterais maintenant l'Association des architectes paysagistes du Québec à venir nous présenter son mémoire.

Association des architectes paysagistes du Québec

M. Sauvé (André): André Sauvé, président de l'Association des architectes paysagistes...

Le Président (M. Marcoux): Est-ce que vous pourriez répéter votre nom plus fort?

M. Sauvé: André Sauvé...

Le Président (M. Marcoux): André Sauvé.

M. Sauvé: ... président de l'Association des architectes paysagistes. Je vous remercie beaucoup d'avoir reçu notre mémoire. Je voudrais présenter ici quelques-uns des collègues: M. le vice-président, Marcel Piuze; Cécile Poirier, Serge Forêt. Nous avons fait une correction. Le premier mémoire avait été envoyé très rapidement. Nous avons fait quelques corrections. J'espère que vous avez la copie avec la couverture blanche. Maintenant, je vous prie d'excuser deux des principaux membres qui ont préparé ce rapport. Ils n'ont pas pu venir aujourd'hui; ils étaient engagés. M. le vice-président va nous faire la lecture.

M. Piuze (Marcel): Sans plus de préambule, je vais entreprendre la présentation de notre mémoire. C'est avec un très vif intérêt que les architectes paysagistes du Québec ont pris connaissance du projet de loi 125 sur l'aménagement et l'urbanisme. Nous avons suivi jusqu'à maintenant les différents efforts consentis depuis 1963 pour tenter de mettre de l'avant des politiques permettant d'aménager notre territoire québécois de façon plus concertée, équilibrée, et consciente. Ces efforts étant restés lettre morte depuis seize ans, nous souhaitons vivement qu'enfin une loi mette un terme à trop d'incertitude et de décisions prises sans que leurs conséquences n'aient pu être envisagées à moyen et long termes, lorsqu'il s'agissait d'aménager une région par rapport à son territoire environnant ou une municipalité par rapport à sa région.

Cette préoccupation est inhérente à notre profession d'architecte paysagiste, puisque nous sommes impliqués aux divers niveaux de l'aménagement urbain, périurbain, régional et territorial, avec les compétences et les objectifs plus particuliers de rétablir un meilleur équilibre entre le milieu construit et naturel dans les villes, d'utiliser au mieux le patrimoine naturel dans les régions et de mettre ce patrimoine à la disposition des communautés concernées, dans les régions et de mettre ce patrimoine à la disposition des communautés concernées, tout en le préservant d'interventions susceptibles de l'hypothéquer de façon négative.

C'est donc dire que nous nous sentons directement concernés et impliqués par ce projet de loi et c'est avec cette préoccupation que nous vous soumettons les questions et les recommandations qu'il nous a suggérées.

Volontairement, nous sommes restés très schématiques et nous livrons ici des commentai-

res généraux, englobant les grandes questions qui se posent à nous, ainsi que quelques réflexions et recommandations plus spécifiques sur certains articles du projet de loi.

Nous espérons que les préoccupations qui suivent feront l'objet de votre attention, notre intérêt pour le projet de loi soumis égalant le vôtre un but conjoint de progrès.

Un des aspects les plus positifs du projet de loi réside pour nous dans son orientation de décentralisation des pouvoirs et de concertation et de participation de la population au processus de planification et d'aménagement.

Nous ne saurions trop mettre l'accent ici sur notre totale adhésion à de tels principes conscients du fait qu'une politique d'aménagement parachutée se révèle le plus souvent inappliqua-ble, parce que promulguée et émise par des personnes non directement concernées et possédant une connaissance trop théorique du milieu biophysique et socioculturel dans lequel il est nécessaire d'intervenir.

Même si cela constitue un plus ou moins long processus d'apprentissage, savoir que dorénavant des élus municipaux et des représentants des collectivités auront à s'asseoir ensemble pour décider de leur avenir nous paraît être une orientation responsable et positive. Savoir aussi que les utilisateurs seront appelés à prendre des positions sur les développements de leurs terroirs nous paraît être un grand pas en avant et nous souhaitons que le gouvernement puisse accorder beaucoup d'attention et d'aide à leur travail de réflexion.

Ceci dit, nous voulons aussi attirer votre attention sur certains aspects généraux du projet de loi qu'il y aurait lieu de préciser pour en faciliter l'application. Ces aspects généraux sont au nombre de trois. D'abord, le pouvoir ministériel et les structures d'application, deuxièmement, la liberté des conseils de comté de préparer ou non un schéma d'aménagement, et, enfin, le support technique dans le processus de planification et d'aménagement. (17 heures)

II est bien évident que le ministre responsable et le gouvernement doivent avoir non seulement un droit de regard sur les politiques d'aménagement émises aux niveaux régionaux et locaux, mais également qu'il leur faut pouvoir préciser à ces organismes responsables de la planification quelles sont les grandes lignes de la mise en valeur territoriale dont ils auront à tenir compte pour leur propre développement.

A ce sujet, les questions suivantes nous préoccupent particulièrement. Quels mécanismes permettront au ministre et au gouvernement de donner aux comtés les grandes orientations de développement territorial dans lesquelles ils devront se situer? Quelles structures, quels outils se donnera le ministre responsable pour satisfaire à ce type d'obligation? Comment le ministre et le gouvernement entendent-ils procéder dans cette voie? Quel ministre sera responsable de l'application de la loi?

Pour notre part, nous ne pensons pas que de telles directives d'aménagement du territoire pourront émaner de rencontres interministérielles, selon les structures actuelles extrêmement compartimentées des divers ministères impliqués.

Pour parvenir à établir de telles directives, il faudra effectuer une réflexion de fond exigeant une très étroite collaboration de spécialistes expérimentés afin que les orientations choisies soient cohérentes et efficaces dans les domaines de l'amélioration de nos conditions de vie et d'une saine exploitation de nos richesses naturelles.

Nous recommandons donc que le ministre de l'aménagement se dote des structures et des outils nécessaires pour parvenir à orienter de façon conséquente le développement territorial et, à travers lui, régional et urbain.

Ce peut être par le biais d'un ministère de l'aménagement, assisté d'un groupe de professionnels praticiens, expérimentés dans les différents domaines de l'aménagement, incluant les problèmes de réalisation.

Le deuxième aspect général que nous voulons aborder est lié à la liberté des conseils de comté de faire ou non des schémas d'aménagement. Nous comprenons que le législateur veut garder une certaine flexibilité en matière d'aménagement et n'exige pas que tous les comtés entreprennent obligatoirement, dès la promulgation de la loi, un schéma d'aménagement. Cela pourrait être extrêmement lourd à administrer, coûteux à gérer et n'est probablement pas nécessaire actuellement pour certaines régions. Toutefois, nous désirons attirer votre attention sur les questions suivantes.

Les conseils de comté étant libres de faire ou non un schéma d'aménagement régional, sauf si le ministre le leur demande, qu'arrive-t-il si les conseils de comté ne voulaient rien faire ou s'ils mettaient un laps de temps très étiré pour y parvenir? D'autre part, si les municipalités continuent à faire des plans d'urbanisme en l'absence de schémas de comté, ne risquent-elles pas, comme par le passé, de commettre des erreurs? Exemples: dédoublement d'équipements et d'installations, implantation de zones industrielles, de centres commerciaux, de terrains de camping pour chaque petite municipalité, etc.

Ceci nous paraît d'autant plus dangereux que ces mêmes municipalités qui peuvent avoir de réels problèmes à résoudre et qui sont décidées à faire les sacrifices financiers nécessaires pour y parvenir, devront à plus ou moins brève échéance se réajuster à un schéma d'aménagement de comté pour satisfaire à la loi.

Aussi, nous recommandons que le ministre responsable de l'aménagement fixe le plus rapidement possible les priorités et les échéanciers pour les cinq années à venir dans le domaine de l'élaboration des schémas de comté et les fasse connaître aux intéressés; qu'en règle générale, l'élaboration des schémas d'aménagement de comté constitue un préalable à celle des plans d'urbanisme; que dans le cas spécial où une municipalité fait face à des problèmes d'organisation urgents à résoudre en l'absence d'un schéma

d'aménagement de comté, le ministre responsable de l'aménagement et ses organismes techniques de soutien lui prêtent assistance pour la politique de développement à suivre, de telle manière que cette municipalité n'ait pas à revenir ultérieurement sur les grandes décisions prises pour le développement et l'organisation de son territoire.

Le dernier aspect général est lié au support professionnel et technique qui interviendra dans les processus d'aménagement régionaux et locaux. Nous savons que le point soulevé ici est extrêmement délicat et n'est pas traditionnellement abordé dans une loi de ce genre. Toutefois, nous jugeons que les questions qui suivent sont particulièrement importantes par rapport à leur répercussion dans le domaine concret et tangible de la réalisation. Quelles sont les équipes de travail qui seront appelées à oeuvrer en relation avec les municipalités, les conseils de comté, le gouvernement et le public concerné selon le cas?

A-t-on pensé à choisir la composition des équipes en fonction des problèmes spécifiques à régler et selon le potentiel particulier et la vocation de la région? A-t-on pensé à faire intervenir, selon le cas présenté, des spécialistes et techniciens qui maîtrisent particulièrement bien ces types de problèmes spécifiques, de façon à éclairer au mieux les choix politiques qui devront suivre? Exemple: Dans des comtés à vocation plus particulièrement rurale, participation active, dans le bureau d'urbanisme, d'ingénieurs, d'agronomes, de forestiers, de spécialistes en rendement de production agricole, etc. D'autre part, dans les comtés où la protection du milieu naturel, la préservation et la mise en valeur d'un potentiel visuel attrayant, riche et varié, et la présence d'espaces propices aux développements récréatifs et touristiques de tous genres semblent être, pour les années à venir, une priorité, participation active d'architectes paysagistes au sein de l'équipe de planification.

Nous suggérons qu'en annexe au projet de loi ces questions fassent l'objet d'une étude et de décisions pour que les interventions faites sur un territoire donné collent exactement au potentiel spécifique et au besoin de développement de ce territoire pour les années à venir, en termes biophysiques, socio-culturels et économiques, tout en préservant l'autonomie des gouvernements locaux.

Suite à ces réflexions, questions et recommandations d'ordre général, nous souhaitons, ici, soulever avec vous quelques points plus spécifiques du projet de loi que nous aimerions voir préciser. Nous aborderons donc ces points un à un.

D'abord, le chapitre I, section 2, contenu du schéma: à l'article 5, paragraphe d), le mot "intentions" nous semble vague. Nous proposons son remplacement par "directives" et souhaiterions compléter la phrase de la manière suivante: Les "directives" générales d'affectation du territoire pour l'ensemble du comté, "en tenant compte de ses potentiels biophysiques et de son insertion dans les territoires environnants." Les articles 109q et 112d font déjà référence au milieu biophysique mais plutôt en termes de contrainte. Nous aimerions que le schéma d'aménagement tienne compte également du potentiel du milieu. Il serait très important, entre autres, de prendre davantage en considération l'aspect morphologique et visuel du territoire avant de procéder à des choix de développement. Ceci a trop souvent été sous-estimé dans le passé, conduisant à des développements niant ou détruisant le paysage, au lieu de chercher à s'y intégrer le plus possible.

Rappelons également à ce propos qu'un ensemble paysager, tel un corridor ou un bassin visuel, pourra chevaucher les limites de plusieurs comtés.

Les caractéristiques biophysiques du territoire devraient également être considérées dans la détermination des territoires des corporations de comtés.

Il est donc nécessaire de tenir compte de cet aspect dès le début des études d'aménagement. Nous désirons porter à votre attention d'autres phénomènes qui se produisent et qui doivent également faire l'objet de notre attention lors de la confection des schémas d'aménagement régionaux. Il s'agit de l'aménagement par régénération d'un paysage.

Exemple: un paysage atteint par l'érosion due à un déboisement ou à un développement inconsidéré sur des pentes assez prononcées.

L'utilisation spontanée et souvent anarchique qui a été faite du milieu naturel a, dans certains cas, amené des perturbations devant être corrigées chaque fois que possible. Rappelons que de telles perturbations peuvent aussi survenir suite à l'apparition de phénomènes naturels.

Dans tous les cas, qu'il s'agisse de dégradations dues à une mauvaise intervention humaine, à un processus naturel ou à un événement naturel exceptionnel, il est nécessaire d'intervenir pour restaurer ce territoire qui est le support actuel et futur de nos activités.

Concernant l'article 5, les paragraphes e), f) et g), ici les "normes minimales", "l'identification", la "localisation approximative" ne devraient pas uniquement toucher les équipements et infrastructures, mais également tous les aspects de sauvegarde, préservation et mise en valeur du patrimoine naturel et socio-culturel.

A l'article 6, nous pensons qu'un schéma d'aménagement "doit" comprendre, plutôt que "peut" comprendre, particulièrement pour les paragraphes a), b), c) et e) de l'article 6: la densité approximative d'occupation du sol, les grandes affectations du sol à l'intérieur du périmètre d'urbanisation, le tracé approximatif des principales voies de circulation et les normes générales dont devraient tenir compte les règlements de zonage, de lotissement et de construction des municipalités.

Concernant plus particulièrement le paragraphe a de l'article 6, la densité approximative d'occupation qui est admise, sera établie à partir de quels critères? Economiques, sociaux, culturels ou politiques? Qu'est-ce qui constituera le principal objectif dans cela?

Nous ajoutons à ces critères relativement classiques, un autre jusqu'ici beaucoup moins considéré, soit celui de tenir compte de la capacité d'accueil physique d'un territoire au-delà de laquelle le milieu naturel se dégrade ou ne permet pas à l'aménagement de fonctionner convenablement.

En milieu rural, hors des municipalités structurées, un sol peut très bien avoir une capacité portante suffisante pour recevoir une certaine densité de résidences tandis qu'il ne peut, de par sa composition, satisfaire à la mise en place du nombre de fosses septiques nécessaires à cet ensemble résidentiel.

Passons maintenant au contenu du plan d'urbanisme, chapitre 3, section 2. A l'article 79, paragraphes a et b, nous voulons faire un rappel des recommandations faites pour les articles 5 et 6 afin que les grandes orientations deviennent plutôt des directives et que les grandes affectations tiennent aussi compte d'aspects tels: la conservation, la préservation, la récréation et la capacité d'accueil du milieu.

Aux paragraphes a, b, c et d de l'article 80, nous recommandons que ces paragraphes soient intégrés à ceux développés à l'article 79, tout en rectifiant le contenu du paragraphe a de la manière suivante: les zones construites à rénover, restaurer ou à protéger et les zones du paysage naturel à protéger, à régénérer ou à mettre en valeur.

Chapitre 4, section 1, le règlement de zonage: l'article 101, paragraphe i: La lecture de cet article laisse entendre que le terrain bordant les voies de circulation sera modifié et adapté au niveau de ces voies de circulation. Si tel est le cas, nous proposons, au contraire, que les voies de circulation s'intègrent le plus possible au paysage environnant et que leur niveau soit établi en fonction de ceux du paysage.

A l'article 109 toujours, paragraphe m, nous proposons de le compléter par la mesure suivante: prescrire, sous certaines conditions, des plantations d'arbres et d'arbustes.

Chapitre 4, section 2 et 3, règlements de lotissement et de zonage. Les règlements de lotissement et de construction devraient être souples et continuellement adaptés au caractère particulier que représente toujours une municipalité. Nous avons souvent remarqué dans le passé que l'application trop standardisée de normes, insuffisamment revues en fonction des différents contextes auxquels on les applique, conduit à des aberrations sur le plan d'une bonne utilisation des potentiels biophysiques et visuels des milieux.

Ces règlements et normes de lotissement et de construction devraient être assez souples pour ne pas entraver la mise en oeuvre d'un bon design au niveau du détail.

Il ne devrait pas conduire, comme c'est trop souvent le cas, à la mise en place d'un développement rigide, impersonnel, monotone et non intégré visuellement et écologiquement aux formes et aux grandes structures du paysage.

En d'autres termes, il ne devrait pas hypothé- quer les possibilités de développement collant à la réalité d'un terroir.

Parmi les composantes de cette réalité, il est notamment primordial de tenir soigneusement compte du genre de sol, du type de relief, du drainage naturel à perturber le moins possible, du type plus ou moins dense et fragile de la végétation existante, de l'orientation des terres à développer par rapport à l'ensoleillement, aux vents dominants, etc.

L'aspect visuel et esthétique du paysage est aussi à considérer et toute intervention de l'homme devra en tenir compte, particulièrement dans le cas des nouvelles expansions urbaines et dans celui de la réorganisation ou de la création de villages en milieu rural.

Nous ne pouvons malheureusement apporter aucune réponse spécifique sur les moyens légaux qui permettraient d'assurer cette souplesse à travers les règlements de lotissement et de construction.

Toutefois, nous déplorons que le projet de loi actuel n'apporte pas d'alternatives dans ce domaine et nous souhaitons qu'un travail de fond soit entrepris dans les mois à venir pour donner aux municipalités des moyens nouveaux qui leur permettraient d'intervenir de façon souple dans l'aménagement de leur territoire, en tenant compte des caractéristiques biophysiques et socioculturelles de chacun des sites faisant l'objet d'un développement.

A ce titre, les zones d'intervention spéciale nous apparaissent comme une ouverture dans ce sens et il y aurait peut-être lieu d'envisager la possibilité d'accorder de tels pouvoirs aux gouvernements locaux. (17 h 15)

Concernant plus particulièrement l'article 112, paragraphe d). Il s'agit d'un article important auquel nous souhaitons voir s'ajouter une référence aux zones fragiles comme suit: "Protéger des sites présentant pour la collectivité une valeur particulière, telle historique, culturelle, scientifique, esthétique ou récréative." Nous retrouvons cette préoccupation de la part du gouvernement dans le chapitre VII traitant des zones d'intervention spéciale.

Concernant l'article 112, paragraphe h), traitant des fins de parc, à propos de la cession de terrains pour fins de parc, nous proposons de modifier l'énoncé de la façon suivante: remplacer "n'excédant pas 10%" par "ayant une superficie minimale de 10%." Nous désirons également compléter cet article par les spécifications suivantes: "Ces terrains devront être bien situés par rapport au bassin de population à desservir et ne seront pas des zones non propices aux aménagements récréatifs et sportifs nécessaires au bien-être de la population." En ce qui concerne les 10% de terrains réservés à des parcs ou espaces publics, l'expression "n'excédant pas" ouvre la porte à trop de latitude, y compris celle d'obtenir un pourcentage d'espace libre si ridicule qu'il devient inefficace.

En ce qui a trait à la seconde recommandation, elle provient des constatations suivantes: Les

terrains cédés aux collectivités par les promoteurs sont trop souvent constitués de petites zones marginales et impropres à la construction par leur nature biophysique, que ce soit le sol, les pentes, le drainage ou autre. Rappelons que, dans ce cas, on oublie la plupart du temps qu'ils sont également impropres à la détente, à la récréation et aux terrains de sport et que leur aménagement en devient extrêmement coûteux. De plus, ces laissés-pour-compte, pompeusement baptisés parcs, sont parfois très mal situés et peu accessibles à l'ensemble de la population.

Chapitre V, comité consultatif d'urbanisme. Nous proposons de changer la phrase: "Une municipalité peut" par "Une municipalité doit". Quant au paragraphe 126b, nous proposons, à la fin de la phrase, l'ajout suivant: "et d'aménagements paysagers ou d'architecture de paysage", c'est-à-dire la planification et l'aménagement des espaces libres publics et privés, tels les places publiques, les mails, les parcs, les terrains de sport et de jeu, les réseaux skiables, piétonniers ou cyclables qui participent à structurer le tissu urbain et à en faciliter la perception.

Chapitre VII, la zone d'intervention spéciale. Nous désirons ajouter à ce paragraphe b) la protection, l'amélioration, le renouvellement ou l'exploitation des corridors ou bassins d'intérêt visuel particulier."

Tout au long de nos recommandations, nous nous sommes efforcés de mettre l'accent sur certains aspects de l'aménagement du territoire régional ou urbain qui, selon nos expériences vécues, ont été souvent méconnus ou négligés. Ayant foi dans la volonté de tenir compte désormais de ces aspects, nous désirons conclure ici par une dernière remarque synthétisant notre pensée. Il nous paraît essentiel d'adapter continuellement les directives d'aménagement au potentiel et au caractère particulier des différents espaces que nous avons la responsabilité collective de mettre en valeur et d'utiliser pour notre progrès et notre mieux-être collectif. Il nous appartient à tous d'être très vigilants, inventifs et ouverts à cet égard, à l'opposé de normatifs rigides ou stéréotypés. C'est avec l'espoir que cette loi permettra une telle évolution en cours de route, à travers tous les niveaux de décision, que nous désirons clore cette présentation de nos remarques et propositions.

Le Président (M. Marcoux) Je vous remercie. M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Brassard: Merci, M. le Président. Je voudrais, tout d'abord, remercier l'Association des architectes paysagistes du Québec d'être venue ici devant la commission présenter son point de vue sur le projet de loi et nous faire des commentaires fort intéressants. Votre mémoire est intéressant, d'ailleurs, à plus d'un titre, à plusieurs points de vue, ne serait-ce d'abord que par la préoccupation qui s'en dégage et qui est celle de votre association pour le milieu naturel et sa préservation. C'est un peu votre vocation aussi en tant que professionnels.

Il est tout à fait normal que cela se dégage de votre mémoire. Il est intéressant également de constater que vous aussi, de votre côté, comme nous d'ailleurs, vous pensez et vous êtes convaincus qu'il faut, qu'il convient de confier à des instances décentralisées la responsabilité de l'aménagement. C'est également la conviction du gouvernement. Nous pensons, comme vous, que les instances décentralisées, soit les municipalités ou les conseils de comté renouvelés, sont beaucoup plus aptes à définir leur cadre de vie et à veiller à la protection de leur environnement naturel.

Vous avez aussi des suggestions intéressantes quant à l'échéancier en vue de la formation des conseils de comté, de même qu'en ce qui a trait à l'élaboration des schémas d'aménagement. Vous semblez craindre — on remarque cela dans votre mémoire — que ça s'étire un peu trop dans le temps, la mise en place de ces conseils de comté et l'élaboration des schémas d'aménagement.

Il y a cependant quelques points ambigus dans votre mémoire, j'en signale deux entre autres, vous pourrez peut-être vous expliquer par la suite. Vous manifestez votre accord d'abord quant aux principes qui sont sous-jacents à ce projet de loi. Par exemple, vous êtes pleinement d'accord pour dire que revient aux élus municipaux et aux représentants des collectivités locales le soin de s'asseoir ensemble pour décider de leur avenir et de l'aménagement de leur territoire. Par contre, vous proposez que le gouvernement transmette aux comtés et aux municipalités des directives en matière d'aménagement du territoire — vous pourrez peut-être vous expliquer par la suite — il y a peut-être là un point qui m'apparaît ambigu. Une autre ambiguïté, également, votre association est d'accord quant aux principes que les collectivités locales ou régionales sont les plus aptes à définir leurs besoins et leur cadre de vie. Par contre, vous proposez un contenu obligatoire exhaustif par la fusion des articles 5 et 6, par exemple, des schémas d'aménagement et des plans d'urbanisme, pour tous les conseils de comté, au lieu de permettre aux municipalités de choisir comme instrument ce qui leur convient le mieux.

Partant de là, j'aurais évidemment quelques questions plus précises à vous poser. Vous proposez d'abord que le gouvernement fixe les priorités et l'échéancier pour les cinq ans à venir dans le domaine de l'élaboration des schémas de comté. Pourriez-vous expliquer un peu une telle proposition? Pourquoi souhaitez-vous qu'on fixe un délai précis dans le temps? Comment devraient être déterminés les priorités et l'échéancier par le gouvernement?

M. Piuze: Je pense que priorité devrait d'abord être donnée aux régions où la pression de développement sera la plus forte dans les années à venir, que ce soit au niveau de l'urbanisation, du développement touristique, industriel, minier ou autre, pour éviter que des municipalités à l'intérieur d'un comté, en l'absence de schéma de comté — on en fait mention dans notre mémoire — aient à prendre des décisions qui ne seraient

pas intégrées. Qu'on pense à des centres commerciaux ou à des équipements, comme on l'a mentionné tantôt, parcs industriels, où, peut-être, on n'aurait besoin que d'un parc industriel dans ce comté-là, et qu'en l'absence de schéma de comté, qu'en l'absence d'une volonté régionale de mettre sur pied, de faire un consensus quant à l'aménagement, les municipalités qui veulent intervenir ne soient pas pénalisées par la suite lors de l'apparition du schéma d'aménagement de comté. C'est pour cela qu'on pense qu'il y a des régions où déjà, cela a trop tardé et où les élus locaux devraient s'asseoir ensemble pour décider ce qu'ils vont faire.

M. Brassard: Pourquoi ce délai de cinq ans que vous recommandez? Vous craignez que, si cela demeure, comme c'est présentement au projet de loi, facultatif, l'élaboration d'un schéma d'aménagement, il n'y ait pas beaucoup de conseils de comté qui amorcent l'élaboration d'un tel schéma.

M. Piuze: En tout cas, c'est tout au moins une possibilité. Je pense qu'il existe plusieurs régions où les rivalités, pour ne pas dire l'esprit de clocher, persistent encore et où il sera peut-être difficile d'asseoir tout le monde ensemble, de façon volontaire, pour s'entendre sur un schéma de développement. Maintenant, on a mis cinq ans. C'est un chiffre auquel on ne tient pas plus que cela. D'accord? Cela peut être dix ans; cela peut être trois ans. Mais on voudrait quand même qu'il y ait un échéancier de fait et que les régions qui seront appelées à connaître un développement important, avant même que ce développement intervienne, aient un schéma d'aménagement de préparé. En fait, c'est là l'essence de cette recommandation.

M. Brassard: Si je comprends bien, est-ce que vous recommandez, à ce moment-là, que le ministre utilise le pouvoir qui lui est reconnu par l'article 4...

M. Piuze: Evidemment...

M. Brassard: ... d'émettre des ordonnances, qu'il utilise assez largement ce pouvoir?

M. Piuze: En fait, c'est une façon de l'utiliser. Plutôt que d'arriver à tel moment et dire: Tel comté, vous devez vous mettre à table pour préparer un tel schéma, on pense que ce serait plus souple, d'une certaine façon, de préparer un échéancier et de dire aux régions: Vous avez cinq ans, vous avez six ans, vous avez trois ans pour vous entendre et pour vous mettre à la préparation du schéma de comté. Il ne faudrait pas attendre — cela risque de se produire souvent dans des cas d'urgence — de percevoir des problèmes importants. Si le ministre intervient à ce moment-là, c'est parce qu'il y aura des problèmes importants. Politiquement, il me semble que ce ne serait quand même pas quelque chose de souhaitable que le ministre, à tout bout de champ, intervienne pour dire à telle région: Assoyez-vous, assoyez-vous, assoyez-vous! Je pense qu'il vaut mieux que ce soit fait en dehors de toute précipitation.

M. Brassard: De façon exceptionnelle. L'utilisation du pouvoir prévu à l'article 4...

M. Piuze: Oui, mais cela doit demeurer exceptionnel.

M. Brassard:... doit demeurer exceptionnelle. Vous proposez également un contenu obligatoire très exhaustif autant pour le schéma d'aménagement que pour le plan d'urbanisme. Pour le schéma d'aménagement, vous recommandez, en fait, la fusion des articles 5 et 6 et tous les éléments seraient obligatoires. La même chose également pour le plan d'urbanisme aux articles 79 et 80. Je signalais tantôt que cela m'apparais-sait un point ambigu, quant à moi. Pourquoi justement à l'échelle du Québec tous les schémas d'aménagement et tous les plans d'urbanisme se doivent-ils d'être identiques alors que vous-même, vous proposez et vous affirmez dans votre mémoire que l'on doit tenir compte des particularités locales et régionales? Cela m'apparaît un peu contradictoire. Pouvez-vous vous expliquer un peu là-dessus?

M. Piuze: Au risque de vous contredire, cela ne nous apparaît pas du tout contradictoire, au contraire. Il ne s'agit pas de dire aux gens dans les régions: Vous allez mettre une école à tel endroit ou vous allez mettre des écoles ou vous allez mettre des parcs à tel endroit et vous allez mettre une aréna à tel endroit. Mais il s'agit simplement de demander aux gens, lorsqu'ils préparent un schéma, de bien indiquer dans le schéma toutes les intentions qu'ils ont. Je pense, par exemple, que demander aux gens d'indiquer... Malheureusement, je n'ai pas l'article devant moi. (17 h 30)

M. Brassard: Les articles 5 et 6. Mais ce que je veux dire...

M. Piuze: Les articles 5 et 6. On dit "peut comprendre". Par exemple, que les grandes affectations du sol, à l'intérieur d'un périmètre d'urbanisation, cela ne veut pas dire qu'on oblige les gens à avoir tel type d'utilisation. Cela veut simplement dire que s'ils en ont, ils devraient les mettre dans le schéma d'aménagement. S'il y a une aréna prévue, elle devrait apparaître dans le schéma d'aménagement. De même, plus loin, les coûts y afférents.

M. Brassard: Ce que je veux dire — je me suis peut-être mal expliqué — c'est que vous recommandez que les articles 5 et 6 n'en deviennent qu'un seul, en fait. A l'article 5: Un schéma d'aménagement doit comprendre; c'est un contenu obligatoire. A l'article 6: Un schéma d'aménagement peut comprendre; c'est un contenu facultatif. Le conseil de comté qui décide de faire un

schéma d'aménagement est obligé d'inclure les éléments de l'article 5, mais il n'est pas obligé d'inclure les éléments de l'article 6. Il peut, s'il le veut, en inclure dans son schéma, faire un choix, afin de permettre au conseil de comté de particulariser, en quelque sorte, son schéma d'aménagement. Vous reconnaissez, dans votre mémoire, qu'il est important de respecter ces particularités locales et régionales. Le fait qu'il y ait un contenu obligatoire et un contenu facultatif, c'est justement pour en arriver à permettre une reconnaissance de ces particularités.

Vous recommandez que tous les éléments soient obligatoires au schéma d'aménagement.

M. Piuze: II faut distinguer la forme et le fond du contenu du schéma. Nous sommes d'avis que le fond du schéma, c'est-à-dire les décisions quant à l'aménagement, doivent relever de chacune des régions et doivent faire l'objet d'une décentralisation la plus grande possible. Cependant, quant à la forme du schéma, nous pensons qu'il devrait y avoir une certaine uniformité et que les schémas d'aménagement régionaux montrent bien les intentions du conseil de comté quant au fond du schéma, à savoir tracé approximatif et les types de voies principales de circulation; s'il y a des voies, elles devraient apparaître, à notre avis. Quant à donner le choix au conseil de comté de les mettre sur le plan ou non, le choix fondamental n'est pas là. Doit-il y avoir des routes ou ne doit-il pas y en avoir? Je pense que c'est là l'essence de la décentralisation. Quant à la forme, ce point nous paraît secondaire.

M. Brassard: Je comprends très bien. Merci.

Le Président (M. Marcoux): M. le député de Gatineau.

M. Gratton: Premièrement, M. le Président, j'aimerais remercier l'Association des architectes paysagistes d'avoir sensibilisé la commission à l'aspect de la protection du patrimoine naturel dans ce projet de loi sur l'aménagement du territoire, et tout simplement l'assurer que, comme c'est le rôle de l'Opposition officielle de le faire, nous serons très vigilants à faire les représentations qui s'imposent quant à vos recommandations d'ordre spécifique, le moment venu, c'est-à-dire au moment de l'étude article par article du projet de loi après la deuxième lecture.

Le Président (M. Marcoux): M. le ministre.

M. Léonard: Je vous remercie de votre mémoire très fouillé. Je pense que vous l'avez fait très sérieusement. Cela correspond à vos préoccupations et cela correspond aussi à des préoccupations que beaucoup de gens ont. Je me permettrai simplement de faire un rappel de ce que nous a dit, par exemple, mardi matin, le maire de Granby, lorsqu'il a parlé de la beauté du paysage qui est parfois en train de devenir moins beau qu'il ne l'était à l'origine. Je pense que cela entre tout à fait dans vos préoccupations et cela devrait être poursuivi. Il est bon de sensibiliser les gens, la population, les citoyens en général, à ces réalités. Ils n'en parlent probablement pas assez et ils s'habituent à des décors qui sont pour le moins discutables. Le territoire pourrait, sans beaucoup d'efforts, devenir beaucoup plus beau et agréable à habiter. En tout cas, je pense bien que cela fait partie de vos préoccupations.

Je vais vous poser une seule question — ce n'est pas une colle, mais...

M. Chevrette: Ce n'est pas une colle, mais ça ressemble à cela.

M. Léonard: Non, non! Votre proposition de permettre aux municipalités de prescrire sous certaines formes des plantations d'arbres et d'arbustes peut donner des résultats intéressants; c'est dans la ligne de ce que nous venons de dire. J'aimerais que vous nous précisiez en quelles occasions et sous quelles conditions une municipalité pourrait se prévaloir de ce droit. Est-ce que, par exemple, ça pourrait s'appliquer pour les ravages de chevreuil?

M. Chevrette: Je connais des braconniers qui...

M. Piuze: On ne pensait pas aux ravages de chevreuil lorsqu'on a écrit cela.

M. de Bellefeuille: Vous pensiez aux ravages des humains.

M. Piuze: II y a l'article du projet de loi qui rappelle, ici, une modification qui a été apportée récemment au Code des cités et villes et qui permet, entre autres, aux municipalités de régir l'abattage des arbres sur les propriétés privées; c'est un amendement qui est assez récent. En fait, cela donne quand même beaucoup de moyens aux municipalités; encore faudrait-il qu'elles s'en prévalent. Il demeure quand même un problème, celui d'obliger un propriétaire à planter, dans certains cas, des arbres sur sa propriété privée. Il ne s'agit évidemment pas, de façon générale, des petits propriétaires, je pense aux propriétaires de maisons unifamiliales dans les quartiers résidentiels où, généralement, on retrouve une préoccupation assez forte de ce côté-là.

Je pense plutôt aux centres commerciaux, à l'aménagement des immenses aires de stationnement où on ne parvient pas à forcer les gens à faire un traitement de cela. On n'a qu'à passer sur le boulevard Laurier, à Sainte-Foy — je pense que ce n'est pas loin — pour se rendre compte du résultat. Cela pourrait être différent si une municipalité pouvait, toujours en respectant le genre de législation qu'on a actuellement, selon certaines normes applicables à tous, forcer certains propriétaires, au moment de l'émission du permis de construction, à respecter certaines règles minimales quant à l'aménagement des espaces extérieurs. C'est dans ce sens que la proposition est faite.

M. Léonard: J'aurais peut-être une dernière question, si vous permettez. Lorsque vous rendez obligatoires les éléments que nous voulions facultatifs dans le schéma par l'article 6, les éléments facultatifs de l'article 80 à l'intérieur du plan d'urbanisme — l'article 81 aussi, mais surtout l'article 80 — est-ce que vous ne trouvez pas que ça pourrait venir en contradiction avec le respect de l'autonomie locale? Parce que la municipalité pourrait avoir beaucoup plus de flexibilité en jouant sur les deux, et le comté aussi, concurremment, en ce sens qu'il y a des éléments qui sont facultatifs au schéma de comté et qui pourraient se retrouver aussi dans le plan d'urbanisme, mais selon la volonté des municipalités. C'est un élément de flexibilité, à mon sens, qu'il y a dans la loi et si vous rendez tout cela obligatoire, vous l'enlevez, finalement.

M. Piuze: Je vais vous apporter à peu près la même réponse que j'ai apportée tantôt, à savoir: Est-ce qu'il s'agit d'une flexibilité au niveau de la forme du schéma ou du fond? On pense que l'important, c'est qu'il y ait une flexibilité au niveau du fond, mais de façon qu'on puisse voir ce qu'est le fond, il faudrait quand même que la forme nous permette de le voir. Si, par exemple, les municipalités peuvent prévoir des parcs industriels un peu partout et qu'elles ne sont pas obligées de l'indiquer sur le schéma, comment, par exemple, le ministre pourra-t-il juger de la conformité avec les objectifs qu'il a émis s'ils n'apparaissent même pas au plan?

Je pense que ces équipements majeurs qui impliquent, de toute façon, des dépenses importantes, doivent apparaître au plan, être soumis à des consultations, afin que tout le monde puisse se prononcer là-dessus, parce que ça implique des interventions importantes sur le milieu et des dépenses importantes. Nous pensons que c'est nécessaire. Concernant plus particulièrement la question des plans d'urbanisme... 80...

M. Léonard: Oui, ce sont les articles 79, 80 et 81.

M. Piuze: Bon! Un schéma d'aménagement peut comprendre... Il y a quatre aspects qui nous semblent importants, qui devraient être inclus dans le schéma d'aménagement: c'est la densité approximative d'occupation qui est admise dans les différentes parties du territoire du comté. On parle bien de densité approximative d'occupation. Quant aux grandes affectations du sol à l'intérieur du périmètre d'urbanisation, cela nous apparaît comme un minimum. Quels seront les endroits qui seront réservés à la récréation, à l'industrie, au transport? Cela nous apparaît comme essentiel, comme un élément déterminant du schéma d'aménagement, le tracé approximatif des principales voies de circulation; il ne s'agit pas du réseau local, il s'agit pratiquement des artères régionales. Ce sont là certaines normes générales dont devront tenir compte les règlements de zonage, de lotissement et de construction.

Ce sont là des éléments qui devraient apparaître, s'il y en a, au schéma d'aménagement.

M. Sauvé: Je voudrais ajouter un point là-dessus. Après avoir félicité le gouvernement — nous sommes d'accord sur la décentralisation — on a peut-être un certain regret et on craint que certaines municipalités oublient trop de considérer des choses importantes.

On a remarqué l'expérience américaine à cet égard. On inscrit des choses dans la loi et si on ne les applique pas, on ne doit pas les mettre; mais si elles s'appliquent, on ne peut les cacher sous la table.

M. Léonard: Merci.

Le Président (M. Marcoux): Après ces propos sur le paysage, je pense que vous serez heureux, tout comme nous, d'aller voir le paysage en fin de semaine. Au nom de tous les membres de la commission, je vous remercie de la présentation de votre mémoire. Je remercie tous mes collègues de leur participation aux travaux de cette journée, particulièrement ceux qui ont posé des questions précises, claires et brèves en même temps, ce qui nous a permis de suivre l'horaire assez facilement.

Avant d'ajourner les travaux, je voudrais vous faire part des mémoires que nous entendrons à la reprise de nos travaux le 24 avril, à 10 heures. Je vous donnerai simplement les numéros des mémoires pour abréger: Les mémoires 18, 29, 17, 20, 9, 14 et 24. Nous entendrons sept mémoires mardi le 24, donc, nous devrons commencer à l'heure si nous voulons compléter notre travail.

La commission ajourne ses travaux au mardi 24 avril à 10 heures.

Fin de la séance à 17 h 43

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