Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
Etude du projet de loi no 107
(Dix heures et une minute)
Le Président (M. Laberge): A l'ordre, mesdames et
messieurs!
Les travaux de la commission des affaires municipales concernant le
projet de loi no 107, Loi instituant la Régie du logement et modifiant
le Code civil et d'autres dispositions législatives, ont
été commencés hier et la commission les reprend là
où ils ont été laissés.
Les membres de la commission aujourd'hui sont: M. Brassard
(Lac-Saint-Jean), M. Caron (Verdun), M. Cordeau (Saint-Hyacinthe); M. de
Bellefeuille (Deux-Montagnes), remplacé par M. Beauséjour
(Iberville); M. Gratton (Gatineau), remplacé par M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), M. Guay (Taschereau), M. Mercier (Berthier), M.
Ouellette (Beauce-Nord) sera-t-il ici aussi?
Une Voix: Oui.
Le Président (M. Laberge): M. Shaw (Pointe-Claire), M.
Tardif (Crémazie).
Peuvent intervenir: M. Alfred (Papineau).
M. Alfred: Présent.
Le Président (M. Laberge): M. Charbonneau
(Verchères) remplacé par M. Paquette (Rosemont), M. Fontaine
(Nicolet-Yamaska), M. Goldbloom (D'Arcy McGee), M. Lacoste (Sainte-Anne), M.
Léonard (Laurentides-Labelle), M. Samson (Rouyn-Noranda), M. Scowen
(Notre-Dame-de-Grâce), remplacé par M. Raynauld (Outremont), M.
Vaugeois (Trois-Rivières).
Le rapporteur qui a été désigné hier est M.
Beauséjour (Iberville).
On m'a fait part qu'au cours des travaux d'hier, trois articles avaient
été suspendus et qu'un article avait eu des paragraphes
suspendus; donc, nous y reviendrons plus tard. Pour le moment, nous en
étions à l'étude de l'article 23.
M. Cordeau: M. le Président, vous avez dit trois articles.
Il me semble que j'ai les articles 5, 6, 9, 17 et 21. Avez-vous les
mêmes?
Le Président (M. Laberge): Sur la liste que j'ai ici,
l'article 17 est rayé.
M. Cordeau: L'article 17 est rayé.
Le Président (M. Laberge): Oui. A l'article 5, ce sont
deux paragraphes qui sont suspendus, et les articles 6, 9 et 21. Il est, sur ma
liste, suspendu.
M. Beauséjour: A l'article 17, moi, c'est marqué
suspendu.
Le Président (M. Laberge): Nous y reviendrons en temps et
lieu.
M. Scowen: Quels sont les articles suspendus, d'après
vous?
Le Président (M. Laberge): II semblerait que ce sont les
articles 6, 9 et 21.
M. Scowen: Et l'article 5?
Le Président (M. Laberge): A l'article 5, ce sont deux
paragrahes qui sont suspendus.
M. Scowen: Les articles 5, 6, 9.
Le Président (M. Laberge): Et l'article 21. L'article 17 a
été mis sur la liste ici, et il a été rayé
par la suite. Il a été adopté.
M. Cordeau: C'était peut-être en fonction de la
proposition du député de Notre-Dame-de-Grâce.
Le Président (M. Laberge): Les articles 5, 6, 9 et 21,
c'est ce qu'on m'affirme. A l'article 5, il y avait deux paragraphes seulement.
On y reviendra en temps et lieu, de toute façon.
M. Cordeau: Parfait.
Constitution et fonctions de la régie
(suite)
Le Président (M. Laberge): Si vous voulez, c'est
simplement pour que ce soit clair. Nous pourrions commencer par l'étude
de l'article 23, qui se lit comme suit: "La régie peut tenir ses
séances à tout endroit, même un jour non juridique, aux
heures déterminées par le président". M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, nous avions ajourné nos
travaux sur cet article, c'était peut-être pour ne pas
siéger à des heures non parlementaires.
En guise d'introduction ce matin, je voulais dire que... nous avons
travaillé sur une reformulation des articles qui ont été
laissés en suspens, M. le Président, et cela progresse. Je pense
qu'il est possible d'essayer de faire cette dichotomie entre les fonctions
d'adjudication et celles qui sont plus proprement administratives. Mais, encore
une fois, il faut essayer d'être prudent et le faire sans que chacun ait
une définition à ce point stricte de ses tâches que ce soit
un peu comme quand on va dans un studio de télévision et que
quelqu'un demande d'apporter une chaise, sa fonction à lui, c'est
uniquement de manier la caméra et la fonction de l'autre, c'est
d'apporter uniquement des verres d'eau et la fonction d'un autre, c'est
uniquement d'apporter la chaise. Il ne faudrait quand même pas qu'on en
arrive, dans le cas de fonctions semblables, à cantonner les gens
à tel point qu'en dehors d'entendre des causes ils ne sont pas
serviables, comme dirait l'autre. Mais on travaille dans ce sens-là et
déjà il y a des ébauches de textes. Il se pourrait
qu'avant la fin de la semaine on puisse essayer d'avoir quelque chose.
Quant à l'article 23, M. le Président, pour y revenir,
c'est pour nous permettre de faire ce que souhaitait hier le
député de Notre-Dame-de-Grâce, c'est-à-dire d'avoir
inscrit dans la loi... C'est vrai qu'on va un petit peu à contre-courant
par rapport aux habitudes dans le monde judiciaire où, disons, les
causes sont entendues de 10 heures à midi et de 14 heures à 16
heures. On ne voudrait pas que ce soit le cas. C'est le but de cet article et
c'est pour cela qu'on veut l'inscrire dans la loi et non seulement dans une
réglementation que pourrait donner le président. On veut que ce
soit dans la loi, la volonté de rendre ce type de tribunal plus
facilement accessible.
M. Scowen: Je pense que cela est important parce que normalement
les clients sont plus souples dans leurs demandes et leurs besoins que ne l'est
notre bureaucratie qui a tendance à devenir de plus en plus rigide pour
standardiser. J'espère que le ministre peut nous donner aujourd'hui un
engagement je pense qu'il l'a fait hier soir, je ne me le rappelle pas
exactement à savoir qu'il va faire le nécessaire dans la
description des tâches ou demander à la régie de faire le
nécessaire dans la description des tâches pour que
l'inévitable tendance des syndicats des fonctionnaires d'insister sur le
paiement de temps supplémentaire pour les heures travaillées en
dehors de 9 heures à 17 heures ne soit pas applicable dans ce cas-ci. Je
pense que le ministre a dit qu'il croit que cela est possible, si je comprends
bien.
M. Tardif: Oui.
M. Scowen: Parfait. Dans ce cas-là, avec la seule
réserve que nous croyons que cet article doit être amendé,
à un moment donné, pour dire que les heures doivent être
déterminées par la régie et non par le président
cela est un autre aspect du problème nous sommes
prêts à adopter l'article 23.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cela va?
M. Tardif: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Adopté. L'article
24?
M. Scowen: Très bien.
Le Président (M. Laberge): L'article 24 est adopté.
L'article 25? (10 h 30)
M. Tardif: M. le Président, les articles 24, 25, 26 et 27
sont une série d'articles qui ont trait justement à
l'année financière qui est identique à l'année du
gouvernement, au rapport annuel que la régie doit rédiger pour
être déposé à l'Assemblée nationale, le ou
les rapports que le président peut fournir sur les activités de
la régie, si, par exemple, à l'occasion de travaux, comme une
commission comme celle-ci ou autrement, un ministre dit: "Je veux avoir un
relevé mensuel des causes entendues". Alors, ce sont des clauses un peu
standards qu'on retrouve quant aux exigences des régies d'Etat de se
rapporter.
M. Goldbloom: M. le Président, j'ai deux questions par
rapport à ces quatre articles. A l'article 25, il est indiqué que
si l'Assemblée nationale n'est pas en session, le rapport doit
être déposé dans les trente jours de l'ouverture de la
session suivante ou de la reprise des travaux, selon le cas. J'ai l'impression,
peut-être que ma mémoire me fait défaut, que dans d'autres
cas, c'était dans les quinze jours de l'ouverture de la session. C'est
une bagatelle, je pose la question. Si c'est une règle
générale, mais...
La raison pour laquelle je pose la question, M. le Président,
c'est qu'il me semble qu'en toute logique, si le rapport est devenu disponible
avant la reprise ou l'ouverture des travaux de la session, le
dépôt devrait normalement se faire le premier jour, le
deuxième, ou au moins dans la première semaine. Pourquoi a-t-on
besoin de trente jours?
M. Tardif: C'est tout simplement, M. le Président, qu'on a
toujours ajusté les deux dates. C'est-à-dire qu'on dit, par
exemple, le rapport, dans les trente jours de sa réception est
déposé devant l'Assemblée nationale et il est
déposé dans les trente jours de l'ouverture. Alors, dans
certaines lois, vraisemblablement, c'est quinze, quinze, trente, trente. Moi,
je n'ai aucune espèce d'objection que ce soit remplacé par
quinze, quinze. De toute façon, ces rapports, lorsqu'on les
reçoit, ils sont déjà reliés, imprimés et
tout, alors c'est souvent une question de... Il n'y a pas un iota de
changé à cela.
M. Goldbloom: Exactement, M. le Président, et il me semble
que le principe fondamental est que les députés ont le droit
d'être informés sur ce qui se passe dans les organismes
paragouvernemen-taux. Je n'insisterai pas davantage là-dessus, M. le
Président, mais j'ai voulu soulever la question.
M. Tardif: II semble qu'actuellement, dans l'ensemble de la
législation, c'est trente, trente.
M. Goldbloom: D'accord, M. le Président. Ma
deuxième question concerne l'article 27, où il est indiqué
que les livres et les comptes doivent être vérifiés chaque
année c'est normal et, en outre, chaque fois que le
décrète le gouvernement. Là, je plaide mon ignorance,
est-ce un article qui se retrouve dans de nombreuses lois?
M. Tardif: Oui. Le pouvoir qu'a le gouvernement en tout temps de
demander au Vérificateur général d'aller dans une
société, dans une régie, dans un organisme vérifier
les comptes de cet organisme-là et de le faire en vertu de la loi
constitutive de l'organisme, plutôt qu'en vertu de la Loi des commissions
d'enquête. Alors, on demande au Vérificateur d'aller
procéder à une vérification.
M. Goldbloom: Je sais pertinemment que le Vérificateur
général a été appelé à regarder
de
façon particulière les livres de certains organismes
paragouvernementaux que je ne nommerai pas. Je me demandais si c'était
en vertu d'un tel article ou si c'était quelque chose de spécial,
ici.
M. Tardif: On trouve cela dans la plupart des lois maintenant,
des organismes, des régies.
M. Goldbloom: D'accord, M. le ministre.
Le Président (M. Laberge): Alors, M. le
député de Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Le but del'article c'est bien sûr que les
députés soient informés le plus rapidement possible, du
rapport de la régie. A cause des dates qui sont mentionnées
à l'article 25, soit au plus tard au 30 juin de chaque année,
cela veut dire qu'à cause de notre calendrier de travaux session-nels,
normalement on recevrait le rapport seulement à l'automne. Et comme il
est important, par exemple on sait que l'étude des crédits se
fait au printemps, ne serait-il pas possible, de façon
matérielle, on sait que certaines régies, certaines
commissions le font de faire en sorte que les députés
aient cet outil de travail, lors de l'étude des crédits.
M. Tardif: L'année financière se terminant le 31
mars, au 30 juin, cela donne donc avril, mai et juin, donc trois mois pour
faire le rapport annuel, le rédiger, le composer, le compiler,
l'imprimer et le distribuer. Mais je ne crois pas, l'étude des
crédits se situant vers le mois de...
M. Fontaine: Cela dépend des ministères, cela va
jusqu'au mois de juin.
M. Tardif: Oui, mais la loi dit au plus tard au 30 juin. Ce qu'on
peut faire, c'est d'essayer d'insister auprès des gens, pour que le
rapport soit disponible à temps. Et en effet, ce serait un objectif, que
de faire en sorte que les rapports soient disponibles pour l'étude des
crédits.
M. Fontaine: Est-ce qu'il y a une règle qui dit qu'il faut
que l'année se termine le 31 mars? Ne pourrait-elle pas se terminer
avant?
M. Tardif: Bien là, on arrive à toutes sortes de
complications. L'année budgétaire du gouvernement fonctionne
ainsi, d'accord?
M. Guay: C'est théoriquement possible, mais on s'embarque
dans un joli paquet d'affaires, et plus qu'un article de cette loi-ci.
M. Fontaine: J'espère, en tout cas, que si on ne peut pas
l'inclure dans la loi, qu'on essaiera de faire des pressions auprès de
la régie pour que...
M. Tardif: Chose certaine, c'est que le député de
Nicolet-Yamaska étant un membre très actif au sein de la
Commission des affaires municipales, pourra très certainement, lors de
l'étude des crédits, questionner le ministre sur cet article, ou
les gens de la régie qui seront présents, en disant, à
défaut d'avoir le rapport annuel, est-ce qu'on peut, au moins, avoir,
sous forme préliminaire, le nombre de causes entendues, etc.? Il serait
peut-être possible, là, de donner pas mal d'informations, sans
arriver au rapport annuel, tel qu'imprimé et tiré en je ne sais
combien d'exemplaires.
M. Fontaine: J'ai déjà essayé d'avoir des
renseignements de ce genre-là et on nous avait fait la réponse
qu'il n'était pas d'usage de donner trop de renseignements en commission
parlementaire, parce que cela n'avait pas été
déposé à l'Assemblée nationale et que cela pourrait
frustrer le président de l'Assemblée, etc.
M. Tardif: Est-ce que je puis demander au député de
Nicolet-Yamaska si ce genre de renseignements a déjà
été demandé à la Commission des affaires
municipales?
M. Fontaine: Pas à la Commission des affaires municipales,
à la Commission de la justice, lors de l'étude des
crédits.
M. Tardif: Ah! bon, parce qu'il m'aurait fait plaisir de
transmettre au député, sur demande, tous les renseignements en ma
possession, là-dessus.
M. Fontaine: C'était la Commission des droits et
libertés de la personne.
M. Tardif: Ah! bon, d'accord, mais je dois vous dire
également, M. le Président, enfin je dois dire au
député de Nicolet-Yamaska, par votre entremise, que l'actuelle
Loi de la Commission des loyers ne prévoyait rien de tel. Il
n'était pas prévu, le rapport annuel, là aussi.
M. Fontaine: Non, c'est un exemple que je donne, pour dire que
cela se produit comme cela.
M. Tardif: D'accord.
Le Président (M. Laberge): Alors, d'autres questions?
M. Scowen: Une question sur l'article 26, M. le Président.
Nous sommes d'opinion que cet article doit être rédigé de
façon à pouvoir se lire comme suit: "La régie fournit au
ministre désigné tout renseignement que celui-ci requiert". Comme
il est écrit dans ce projet de loi, vous avez ce lien
privilégié, si vous voulez, entre deux individus. A un bout,
celui du ministre, je comprends et je pense que c'est bien compris que le
ministre doit avoir accès aux activités de la régie. Mais
je pense qu'en mettant à l'autre bout du fil, une seule personne, le
président, et tenant compte du fait que ce sont tous les
régisseurs qui sont responsables pour la régie, vous pouvez
mettre le président dans une position où il peut donner de
l'information au ministre, information qui ne serait pas disponible pour les
régisseurs. Les régisseurs peuvent protester parce qu'ils ont, en
effet, sur le plan juridique, la responsabilité de la régie; ils
sont la régie. Les régisseurs sont la régie.
Alors, je reviens, et cela reprend un peu ce que nous avons dit hier. La
suggestion que je propose là, c'est qu'on doit dire que c'est la
régie qui doit fournir et en ce cas les régisseurs ont le droit
de savoir ce que le président dit au ministre.
Le Président (M. Laberge): II y a présentement
consultation.
M. Tardif: M. le Président, je pense que si on s'entend
sur le sens général des articles 24, 25, 26 et 27, je proposerais
leur adoption, mais sujet aux ajustements de concordance qu'on fera avec les
modifications aux autres. C'est-à-dire que si on modifie le
libellé quant à la composition de la régie et au partage
des tâches d'adjudication et d'administration, je proposerais l'adoption
et les amendements de concordance qu'on pourrait faire.
M. Scowen: Est-ce que je peux vous proposer un compromis, M. le
ministre? On est passé par plusieurs articles hier dans lesquels il y
avait simplement une question de concordance et j'ai heureusement
accepté. Mais il y en avait deux ou trois où je trouvais que
c'étaient des questions assez fondamentales. Je préfère
que l'on mette celui-ci dans le groupe des articles suspendus pour le moment,
parce que...
M. Tardif: On suspend l'article 26. M. Scowen: Oui.
M. Tardif: Alors, les articles 24, 25 et 27 sont adoptés;
l'article 26 est suspendu.
Le Président (M. Laberge): Cela vous va? M. Scowen:
Oui. M. Tardif: Très bien.
M. Fontaine: M. le Président, il faudrait que le ministre
tienne compte, à ce sujet, de la proposition qu'il nous a faite hier
à l'effet de rayer tout simplement le cinquième paragraphe de
l'article 5. C'est un peu semblable à l'article 26.
M. Tardif: Non, ce n'est pas pareil. De toute façon, ce
paragraphe de l'article 5 est suspendu présentement.
Le Président (M. Laberge): Alors, on y reviendra lorsqu'on
reprendra les articles suspendus. Pour le moment l'article 24 est
adopté. L'article 25 est adopté. L'article 26 est suspendu et
l'article 27 est adopté.
Juridiction de la régie
J'appelle l'article 28.
M. Scowen: M. le Président, avant de passer au chapitre
III, je me demande si je peux poser une question au ministre, que je trouve
très importante, qui a été soulevée hier soir
après que les travaux eurent été terminés et qui
touche la question du code de déontologie et d'éthique. Je pense
que c'est quelque chose qui est important pour tout le monde et je veux
simplement poser la question. Est-ce que c'est permis?
On n'a pas discuté, hier soir, de la question du conflit
d'intérêts que peut rencontrer le régisseur en étant
soit locataire ou locateur. Je sais très bien que c'est un
problème épineux, mais parce que le monde, pas mal de monde, au
moins, a tendance à croire que si une personne est locataire ou
locateur, elle aura, par le simple fait d'être l'un ou l'autre, tendance
à être une personne ayant un préjugé favorable ou
défavorable. Je pense que le ministre doit au moins nous donner un bref
aperçu de la façon dont il voit ce problème, s'il voir par
exemple, que tous les locateurs et locataires doivent être exclus comme
régisseurs potentiels et que seulement les propriétaires de
maisons auront droit d'agir comme régisseurs, ce qui me semble une
solution pas très praticable. Si ce n'est pas le cas, s'il a
prévu quelque règlement ou norme, sinon, si vous acceptez que ce
ne soit pas le cas, il me semble évident que tous les locateurs et les
locataires peuvent être régisseurs à la condition que...
Quelles doivent être les conditions? Je pense que c'est une question
importante à soulever, parce que dès le début la
commission actuelle a été accusée de
préjugés d'un côté ou de l'autre et je pense qu'au
moins un éclaircissement et de préférence une clause ou un
article touchant cette question serait utile. (10 h 45)
M. Tardif: M. le Président, là-dessus, j'ai
abordé la question hier et ce n'est pas ici que je vais trancher ce qui
est acceptable sur le plan de l'éthique de la part de futurs
régisseurs. Peut-être qu'idéalement devrait-on exiger des
régisseurs, peut-être qu'idéalement la solution serait
qu'ils soient ni locataires, ni locateurs. C'est-à-dire qu'ils soient
propriétaires de maison unifamiliale; alors, ils ne sont ni locataires,
ni locateurs. Je pense que c'est utopique. J'ai évoqué hier que
la ligne de démarcation se situerait peut-être à partir du
moment où une personne fait de l'immobilier un commerce, a des
intérêts qui constituent une part importante et non la principale
source de revenus. Je ne veux pas trancher cette question-ci. Je pense que ce
sera dans ce code de déontologie que cela devrait être
adopté sous forme de règlement. Je pense qu'à l'article
83, il est prévu que les régisseurs collégialement peuvent
adopter des règles de procédure. Il est donc prévu une
réunion de l'ensemble des régisseurs pour des fins d'adopter les
règles de procédure. Je pense qu'il pourrait convenir, être
séant de les consulter sur ces lignes de démarcation assez
délicates, j'en conviens, qui pourraient être établies dans
un code de déontologie.
Je ne pense pas que qui que nous soyons, nous puissions adopter ceci in
vitro sans justement se référer aux expériences et aux
suggestions que ces gens pourraient nous faire. Je suis sensible à
l'argumentation du député de Notre-Dame-de-Grâce. Je
pense qu'il ne s'agit pas de faire l'ange ou la bête. On fait les deux
très mal de toute façon; si on veut faire l'un, on fait l'autre.
Je dis: A quel moment où tirer la ligne? Il me semble qu'il conviendrait
bien que, lors d'une réunion que les régisseurs auraient avec le
président, que nous tentions d'élaborer ensemble cette ligne pas
facile à établir.
M. Scowen: Pour résumer les commentaires du ministre pour
me permettre de comprendre parfaitement, si j'ai bien compris, ni les
locataires, ni les locateurs ne seront exclus de l'admissibilité comme
régisseurs simplement dû au fait qu'ils sont l'un ou l'autre et,
dans vos règlements, l'idée de base sera qu'un locateur sera
exclu si le commerce de location des logements forme une partie importante de
ses revenus totaux. En effet, c'est l'idée de base, il reste à
définir l'importance.
M. Tardif: II me semble que ce sont là les
paramètres qui devraient guider l'élaboration d'un tel code de
déontologie.
M. Scowen: Je pense que c'est raisonnable. M. Tardif: Sous
réserve de l'article 16.
M. Fontaine: D'ailleurs qui a été adopté sur
division hier.
Le Président (M. Laberge): Messieurs, avant d'aller plus
loin, je voudrais simplement demander aux membres de la commission s'ils
acceptent que le député Clair de Drummond puisse agir comme
intervenant à la place du député Lacoste de Sainte-Anne,
bien qu'il y a quelques minutes nous ayons désigné les membres de
la commission pour aujourd'hui. C'est accepté?
Des Voix: Consentement.
Le Président (M. Laberge): M. Clair (Drummond) pourra
intervenir en lieu et place de M. Lacoste de Sainte-Anne. L'article 28 est-il
adopté ou s'il y a d'autres commentaires? L'article 28 est
adopté.
M. Tardif: Adopté,
Le Président (M. Laberge): Un instant. Parfait. A moins
qu'on laisse M. le député de Notre-Dame-de-Grâce finir son
intervention. Il y a une ou deux questions encore, je crois, à
poser.
M. Scowen: Non, c'est simplement pour souligner qu'on est
d'accord avec l'article 28. Le seul point que je vais répéter ici
et qui a été souligné par le Barreau, c'est que la
régie est maintenant dotée des pouvoirs d'un tribunal assez
important et il s'impose que les procédures de nomination et de
déontologie des régisseurs soient maintenues avec la même
rigidité, avec la même impartialité qui s'impose dans le
cas des juges. Je veux le répéter simplement parce que non
seulement le Barreau, mais je pense que trois autres mémoires ont
soulevé ce fait très important qu'en effet nous créons un
tribunal et...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: On a souligné ici dans la rédaction: La
régie connaît en première instance à l'exclusion de
tout tribunal de toute demande.
M. Tardif: Oui.
M. Cordeau: Le "de" est-il nécessaire?
M. Tardif: Oui. On ne connaît pas une demande, on
connaît d'une chose. Au sujet de.
Le Président (M. Laberge): C'est la rédaction
légale.
M. Cordeau: De toute demande.
M. Tardif: Oui.
M. Cordeau: Très bien.
M. Fontaine: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Nicolet-Yamaska.
M. Fontaine: Comme le disait le député tout
à l'heure, on sait que la régie va avoir des attributions assez
importantes à la suite de l'adoption de cette loi. Je voudrais faire une
relation avec l'article 39 que nous n'avons pas encore adopté, mais qui
touche à ce sujet. On dit à l'article 39: Le locataire
évincé a droit à une indemnité de trois mois de
loyer et à ses frais de déménagement. A moins que les
dommages subis ne soient soumis à une somme supérieure auquel cas
il peut s'adresser à la régie pour en faire fixer le montant.
Supposons un cas hypothétique. Le montant qui serait demandé,
serait accordé, serait supérieur à la somme de $6000 qui
est la juridiction de la Cour provinciale.
M. Tardif: II faudrait que la personne paie $2000 par mois de
loyer.
M. Fontaine: Mais les dommages subis, cela peut être toutes
sortes de choses. Supposons un cas hypothétique. Supposons que cela
pourrait se produire et qu'on regarde cela en regard du paragraphe 1 de
l'article 28. On dit que la demande ne dépasse pas le montant de
compétence de la Cour provinciale. Qu'est-ce qui se produirait dans un
cas comme cela?
M. Tardif: Le cas soulevé par le député de
Nicolet-Yamaska, M. le Président, est réel, peut se produire.
Mais on m'informe qu'il n'y a pas qu'en vertu de cette loi que cela peut se
produire, mais
bien en vertu, par exemple, de la Loi de l'expropriation où
encore là les montants peuvent dépasser ce qui par ailleurs
serait de la compétence de la Cour provinciale. Ce sont des cas
exceptionnels que le législateur va donc accepter et j'imagine, encore
une fois, que dans les lois qui existent, je ne pense pas que cela ait
causé tellement de problèmes par le passé.
M. Fontaine: Je ne vois pas de problème, sauf que je
voulais que cela soit bien clair et que vous me disiez que c'est la Cour
provinciale qui a juridiction et non pas la Cour supérieure.
M. Tardif: Oui, d'accord.
Le Président (M. Laberge): L'article 28 est-il
adopté?
Des Voix: Adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 28 est adopté.
J'appelle l'article 29.
M. Scowen: Nous avons une question à l'article 29, M. le
Président. Peut-être un amendement. La question qui s'impose,
c'est quels sont les critères sur lesquels le président ou le
vice-président va décider d'augmenter le nombre de
régisseurs pour un cas ou l'autre?
M. Tardif: M. le Président, ceci sera à la
discrétion du président en tenant compte, par l'expérience
passée de la commission en appel, de l'intérêt public, de
l'importance des causes, de la nature, par exemple, dans le cas des
démolitions, changements d'affectation, transformations.
Il se pourrait qu'il soit utile d'avoir un banc composé, à
la fois de juristes, donc d'avocats, et d'un ingénieur ou d'un
architecte. Donc on veut laisser la pleine latitude au président de
déterminer le banc qui serait le plus apte à être saisi des
cas. Cela s'est produit où la commission a un ensemble immobilier de
700, 800, 1000 logements, donc une cause d'une ampleur considérable et
qu'on veuille avoir un banc composé de plus d'un membre. Alors ceci nous
apparaît quelque chose qui doit être décidé par le
président.
M. Scowen: La seule objection qui n'est certainement pas la plus
importante de toutes les questions qu'on va poser sur le projet de loi, c'est
qu'à moins que nous ne donnions au moins quelque chose comme
critère, c'est le président qui aura finalement la
responsabilité de choisir les régisseurs. Ils seront choisis en
rotation, je ne sais sur quelle base régulière, il sera dans la
position où, selon sa propre volonté, selon sa perception du cas,
il pourra les changer. Si on pouvait dire si l'ampleur du cas est telle,
où on suggère ici, à la demande d'une des parties...
M. Tardif: M. le Président. Encore une fois, là, il
n'y a rien de nouveau dans cet article. Actuellement les juges en chef, les
présidents d'organis- mes judiciaires ont exactement ce pouvoir de
décider de composer le banc comme ils le veulent. Et il y a, j'imagine,
des critères qui les guident dans cette action. On dit la règle
générale, c'est une régisseur qui entend, mais il se
pourrait, à l'occasion, dans une cause pouvant présenter des
difficultés que le président veuille composer un banc où
seraient des gens d'autres disciplines ou en nombre plus grand. Il a cette
discrétion et cela existe dans d'autres...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: M. le ministre, hier vous nous avez informés
que les régisseurs seraient à temps plein. Maintenant, lorsque le
président de la régie demandera à d'autres professionnels
de faire partie d'un banc, ces régisseurs vont-ils être à
temps plein ou à temps partiel?
M. Tardif: A temps plein.
M. Cordeau: A temps plein. Or cela veut dire que parmi les
régisseurs qui seront nommés, il y aura des professionnels, des
gens de différentes professions.
M. Tardif: Le gros sera choisi, évidemment, parmi les gens
de droit, mais il est prévu, en effet, que des professionnels venant des
milieux de l'architecture, du génie, des économistes puissent
aussi se joindre à la commission, surtout qu'en vertu de la section 2,
reliée à la conservation du stock de logements...
M. Cordeau: Mais, aussi, est-ce que dans leur conseil, ils
pourront aussi faire de l'adjudication?
M. Tardif: Oui, absolument.
M. Cordeau: La même chose que les avocats.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Drummond.
M. Clair: Sur la question du député de
Notre-Dame-de-Grâce à l'effet de mettre des critères pour
passer d'un régisseur à cinq régisseurs, je vais vous
indiquer, peut-être en guise de réponse, que quant à moi je
suis opposé à ce qu'on indique de tels critères pour deux
raisons: premièrement, comme le ministre l'a dit, c'est règle
courante que devant les tribunaux de droit commun que le juge en chef assigne
un juge à telle cause, sans avoir à respecter tels
critères dans la loi; c'est la prérogative du juge en chef que
d'assigner un juge à l'audition de telle cause. Il y a deux raisons
fondamentales à cela, la première, à mon sens, c'est qu'on
ne pourrait trouver facilement une formulation qui permette de couvrir tous les
cas. La nature de la cause, cela peut être un critère, le nombre
d'intéressés peut en être un autre, les sommes en cause
peuvent être un autre critère. On ne pourrait pas trouver, je
pense, de critère
suffisamment général pour couvrir tout le champ. Il
risquerait d'y avoir toujours des causes pour lesquelles il serait important
d'avoir plus d'un régisseur et que le président de la
régie ne puisse pas couvrir par plusieurs régisseurs, parce que
ce ne serait pas prévu. (11 heures)
II y a une deuxième raison qui m'apparaît tout aussi
importante, c'est le fait que si on donne ouverture à des recours
extraordinaires, par exemple, si on met des critères, on pourrait
alléguer que le juge en chef a mal exercé sa discrétion
sur la base de la nature ou sur la base de l'ampleur de la cause et on
risquerait d'ouvrir un débat juridique important pour contester la
décision du président pour dire que la cause n'en est pas une de
nature à justifier trois régisseurs, mais cinq, mais un, mais
deux, mais quatre. Alors, je pense que c'est beaucoup plus sage de laisser cela
comme ça; c'est de droit habituel que le juge en chef ne soit pas
lié par des critères et il y a deux avantages à cela, le
premier, comme je l'ai dit, c'est le fait qu'on risque de ne pas couvrir tout
le champ si on commence à mettre des critères, le deuxième
c'est qu'on risque d'ouvrir la porte à toutes sortes de recours qui
finalement ne seraient rien d'autre que des recours dilatoires.
M. Scowen: Je voudrais soulever deux points, en réplique.
Je suis persuadé que si nous n'acceptons pas d'établir les
critères, c'est le président qui sera obligé
d'établir des critères...
M. Clair: Oui, c'est sûr.
M. Scowen: ... parce qu'il sera face à un système
assez décentralisé avec un siège social ici à
Québec, présumément, et il va très vite
établir les critères pour que tout le monde puisse savoir le
moment quand il doit ajouter le nom. Je pense que c'est clair. Ce n'est pas une
question que le juge ou le président n'en aura pas. Ou nous acceptons de
les faire, ou il sera obligé de les faire lui-même. Alors, parce
que je préfère que dans les lois l'intention du
législateur soit claire, je préfère, si possible, qu'on
fasse le travail nécessaire pour décider nous-mêmes quels
sont les critères que nous voulons que le président adopte, parce
que c'est important.
Le deuxième point je ne sais pas si le ministre a entendu
mais j'ai dit: Si nous n'acceptons pas de développer des
critères, c'est clair que le président sera obligé de les
faire lui-même. Ce n'est pas la question d'avoir des critères ou
de ne pas avoir de critères, parce que nous aurons une régie
assez diffusée avec plusieurs bureaux etc. Deuxièmement, il y a
une question précise que je veux poser. Est-ce qu'on est prêt
à accepter qu'un des critères au moins dans la loi, qui peut
décider le président à augmenter le nombre, c'est à
la demande d'une des deux parties? Est-ce qu'on va...
M. Tardif: Normalement, le banc est déjà
constitué à ce moment-là lorsque les parties se
présentent devant le tribunal.
M. Clair: Le danger, M. le Président, c'est que dans la
mesure où on indique cela, une partie qui veut simplement gagner du
temps va le demander à qui mieux mieux. L'audition commence, on fait
face à une demande de démolition et celui qui voudrait contourner
la loi ou essayer de gagner du temps va simplement attendre le matin de
l'audition, va se présenter devant le régisseur, va dire: M. le
régisseur, je vous indique que j'ai adressé une lettre au
président de la commission demandant la nomination de trois
régisseurs plutôt qu'un seul et cela vient de prendre un moi
supplémentaire et cela vient de coûter des frais de
déplacement des avocats qui représentent les parties aux
consommateurs de services juridiques.
M. Scowen: Mais quand même, M. le Président, je
trouve, si vous voulez c'est l'essentiel de ma critique que c'est
légèrement paresseux de notre part de dire: On va permettre... Je
pense qu'on doit permettre au président d'augmenter le nombre de
régisseurs dans un cas particulier, très bien. Pourquoi? On ne le
sait pas. Alors, on n'a pas fait le nécessaire pour penser pourquoi on
veut donner ce pouvoir au président. On ne le sait pas. Alors, on va
laisser le président décider pourquoi nous avons
décidé d'installer cet article dans la loi. Je pense que ce n'est
pas tout à fait cohérent au moins de ma part.
M. Guay: M. le Président, si le député me le
permet, il me semble qu'il y a une différence fondamentale entre mettre
des critères dans une loi, c'est ce à quoi mon collègue de
Drummond fait allusion, si on met les critères dans la loi plutôt
que de les avoir comme sujets de régie interne à
l'intérieur de la régie ou dans les mains du président, il
y a une différence fondamentale, c'est qu'en autant que je sache, on ne
peut pas avoir un recours dilatoire contre la régie ou son
président quant à la composition de la régie où il
y a deux, trois, cinq régisseurs.
Si c'est une question de régie interne décidée par
le président, pour des fins administratives; si c'est dans la loi,
là cela ouvre la porte à un recours dilatoire. On peut, pour
toutes sortes de raisons, à ce moment, avoir des recours dilatoires; de
recours dilatoire en recours dilatoire, cela devient extrêmement
dangereux. Je comprends le but du député de
Notre-Dame-de-Grâce. Je suis d'accord avec lui que moins on laisse de
discrétion, mieux c'est, mais il vient un certain temps que pour ce qui
est du domaine de l'administration quotidienne, au jour le jour, chaque cas
étant, autant vous le dire, un cas d'espèce, il me semble que
là il faut vraiment faire confiance aux gens qui sont nommés
à ces postes étant donné qu'il s'agit d'un juge de la Cour
provinciale quand même et qu'il faut lui laisser une certaine marge de
manoeuvre. Si on prévoit tout pour lui, aussi bien nommer un
ordinateur.
M. Scowen: Moi, je préfère faire confiance à
la population et ne pas attendre les recours dilatoires.
M. Guay: Vous savez comme moi que cela existe.
M. Scowen: Je pense que j'ai exprimé une perspective
là-dessus. C'est adopté, si vous voulez, sur division.
Le Président (M. Laberge): L'article 29 est adopté
sur division. J'appelle l'article 30. Est-ce que l'article 30 est adopté
ou s'il y a commentaire?
M. Scowen: Nous avons une préoccupation ici qui touche un
peu les commentaires qui ont été faits par le Barreau et auxquels
j'ai fait référence tantôt à l'étude de
l'article 28.
Dans le cas des demandes visées dans la section 2 qui sont en
effet les demandes de démolition, on prévoit un régisseur
qui n'est pas un avocat et si je comprends bien qui n'est pas
nécessairement avocat. Si je je comprends bien le sens de cet article,
vous prévoyez la création d'un groupe de régisseurs qui
n'auront rien à faire à la régie, sauf d'entendre les cas
de démolition qui sont peut-être des experts dans je ne sais pas
trop quoi, l'architecture, l'urbanisme, esthétique, etc., qui n'ont pas
le droit de fonctionner à l'intérieur de la régie, sauf en
ce qui concerne les démolitions. On va reprendre cette idée de
base plus tard dans la section 2; mais la question que je veux soulever ici, M.
le ministre, et c'est une suggestion que je veux faire, c'est qu'on doit
accepter que même dans ces cas de démolition, il aura quand
même un aspect juridique important, des questions de règles, de
preuve, etc. Nous proposons que dans cet article nous disions que, oui, le
premier alinéa comme écrit peut rester, mais on ajoute le
suivant: Les demandes visées par la section 2 devront également
être entendues par les juges ou des avocats lorsqu'un seul commissaire
entend la demande. Lorsque plusieurs commissaires entendent une demande
visée par la section 2, ils devront majoritairement être des juges
ou des avocats. Pour permettre, dans les cas de démolition, d'avoir des
experts, mais ne pas perdre l'aspect juridique qui est très important de
notre régie. C'est un propos, je pense que je peux faire à titre
d'amendement, si vous voulez...
M. Tardif: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Tardif: Je pense que je suis d'accord avec l'objectif
visé par le député de Notre-Dame-de-Grâce, sauf que
j'aimerais ajouter ceci: Les régisseurs non avocats
ingénieurs, architectes, économistes, que sais-je
n'auraient pas qu'à entendre les causes de démolition, mais
également celles des avis en matière de vente d'immeubles
situés dans des ensembles immobiliers et les transformations en
copropriété. Donc, c'est un champ un petit peu plus vaste.
Deuxièmement, M. le Président, il est évident que,
concernant la latitude que nous avons donnée au président, par
l'article précédent, de pou- voir composer un banc de plus d'un
régisseur, nous avions particulièrement à l'esprit la
section II, où le banc, en plus d'être composé d'un juge et
d'un avocat, pourrait comprendre ces autres personnes ayant ces expertises. De
sorte que, pour nous dans notre esprit c'est clair que jamais un banc ne pourra
siéger s'il n'y a pas au moins une personne de formation juridique.
C'est cela. Alors c'est l'objectif et c'est cela qu'était le dessein de
la loi et je ne vois pas en quoi déjà les dispositions
empêchent de faire ce que souhaite le député de
Notre-Dame-de-Grâce et ce que nous souhaitons tous.
M. Scowen: Je veux simplement répondre au ministre, c'est
parce que j'avais un amendement à proposer. Si nous sommes d'accord sur
le principe et je pense que c'est clair que nous le sommes tout
ce que nous voulons, c'est que la loi soit amendée de façon
à rendre très clair ce principe qu'aucun cas, même dans la
section II, ne peut être entendu, sauf en la présence d'au moins
un régisseur qui est avocat ou juge.
M. Fontaine: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Nicolet-Yamaska. Est-ce qu'on pourrait lui laisser poser la question?
M. Fontaine: Avant que vous proposiez votre amendement, je
voudrais peut-être intervenir dans le même sens. Le ministre nous
dit que le but qu'il vise, c'est effectivement d'avoir, dans les cas
visés dans la section II, au moins deux régisseurs, dont l'un
sera un avocat ou un juge. Mais, à mon avis, cet objectif est tout
à fait louable et nous l'acceptons. Cependant, je pense que la loi,
telle qu'elle est rédigée, ne dit pas ce que le ministre veut lui
faire dire, parce qu'à l'article 29 on dit: "Un régisseur entend
et décide seul des demandes qui relèvent de la juridiction de la
régie" et, au paragraphe 2: "Toutefois, le président ou le
vice-président qu'il désigne à cette fin peut porter le
nombre de régisseurs jusqu'à cinq; il désigne alors, parmi
les juges et les avocats, le régisseur qui préside l'audition".
Il n'est pas clair dans la loi qu'il est obligé d'en nommer au moins
deux. Or là, je pense qu'on devrait apporter un amendement à la
loi pour faire en sorte que la pensée du ministre soit respectée
dans la loi.
M. Tardif: Est-ce qu'on peut suspendre cet article pour essayer
de trouver une formulation qui réponde aux voeux de tout le monde?
M. Fontaine: Mais le député de
Notre-Dame-de-Grâce avait un amendement à proposer.
Peut-être que cela pourrait...
M. Tardif: J'aimerais le faire regarder, de toute façon,
par nos gens...
M. Fontaine: On peut le faire déposer.
M. Tardif: Bon, si vous voulez.
M. Goldbloom: Je suis d'accord que nous suspendions l'article,
mais j'aimerais faire un seul commentaire avant cette suspension. Le ministre
nous a indiqué, il y a quelques instants, sa perspective quant à
l'emploi du temps des régisseurs qui ne sont ni juge ni avocat. Il a
ajouté, à cette question de la démolition des immeubles,
la question de la vente d'une unité à l'intérieur d'un
immeuble, d'un ensemble immobilier détenu en copropriété.
Il me semble que c'est justement là un problème qui requiert la
sagesse d'un juriste...
M. Tardif: Et l'expertise aussi d'un architecte pour savoir si,
en vendant un seul appartement ou si un seul appartement passe au feu, tout
l'immeuble ne va pas s'écrouler.
M. Goldbloom: D'accord, M. le Président, mais l'article,
tel que rédigé, indique que les juges et les avocats doivent
entendre les demandes autres que celles visées à la section II.
Et je pense que les deux compétences peuvent être requises dans
bien des cas. (11 h 15)
M. Tardif: M. le Président, je suis d'accord, si vous
voulez, pour suspendre l'article 30 et essayer de trouver une formulation. On
porte à mon attention qu'il y aurait peut-être
intérêt à relire le deuxième paragraphe de l'article
29 qui traite d'un banc de plusieurs personnes, parce qu'on dit: "Toutefois, le
président ou le vice-président qu'il désigne à
cette fin peut porter le nombre de régisseurs jusqu'à cinq; il
désigne alors, parmi les juges ou les avocats, le régisseur qui
préside l'audition." Cela veut dire que si le banc est composé de
plus d'une personne, il y a obligatoirement un juge ou un avocat qui
préside. D'accord?
M. Scowen: Entendu.
M. Tardif: Alors, pour moi, c'est déjà...
M. Scowen: Mais vous comprenez que cela ne répond pas
à notre question qui est soulevée par l'article 30.
M. Tardif: Mais oui, parce que si seuls des régisseurs
peuvent entendre des demandes autres que celles visées dans la section
II, des régisseurs, juges et avocats, c'est donc dire que tout
non-avocat ne peut entendre tout le reste. Pour celles de la section II, ce qui
est prévu, c'est un banc de plusieurs et un banc de plusieurs ne peut
être présidé que par un juge ou un avocat.
M. Scowen: Mais où trouve-t-on, dans le projet de loi,
que...
M. Tardif: Section II, peut être un banc de plusieurs
personnes.
M. Scowen: ... c'est un banc, que ça doit être un
banc.
M. Goldbloom: C'est cela qui manque.
M. Scowen: Dans le projet de loi comme tel, un seul architecte
peut entendre un cas visé dans la section II, comme c'est écrit
actuellement.
M. Tardif: On le suspend pour essayer de boucher ce... Pas tout
de suite, je préfère réfléchir à cela.
Le Président (M. Laberge): Alors, à la demande du
ministre et au consentement des membres de la commission, l'article 30 est
suspendu pour vérification des différentes suggestions qui ont
été faites. J'appelle l'article 31.
M. Tardif: A l'article 31, il y a un papillon qui vole quelque
part.
Le Président (M. Laberge): Excusez-moi. J'ai ici l'article
31, M. le ministre. Vous nous avez proposé un amendement qui change
totalement l'article, qui serait remplacé par le suivant...
M. Tardif: Non, il n'est pas proposé encore, M. le
Président. Je vais le faire. On a distribué des copies.
Le Président (M. Laberge): C'est-à-dire que comme
ils ont été portés à ma connaissance, je peux le
dire. Selon la coutume établie, lorsque ces papillons sont portés
à notre connaissance en bloc, le président appelle le nouvel
article comme n'étant pas une modification, mais comme l'article du
projet de loi. Alors, je peux...
M. Tardif: Bien, M. le Président, vous décidez.
Une Voix: Avec le consentement de...
Le Président (M. Laberge): Oui, je crois que oui. C'est
une coutume qui a d'ailleurs été établie depuis un certain
temps.
Alors, à l'article 31, il a été proposé par
le ministre un nouvel article qui est le suivant: "Si les parties y consentent,
la Régie peut charger un conciliateur de les rencontrer et de tenter
d'effectuer une entente."
M. Scowen: Fermez les guillemets, point.
Le Président (M. Laberge): Oui, si vous voulez.
M. Goldbloom: C'est une amélioration du
français.
Le Président (M. Laberge): Alors, on peut le discuter.
M. Tardif: Si M. Goldbloom le dit...
Le Président (M. Laberge): Est-ce qu'il y a des
commentaires à faire, spécialement? M. le ministre.
M. Tardif: Cela devait être un mauvais calque de l'anglais:
"At the request of."
Le Président (M. Laberge): Alors, c'est tout? Oui, M. le
député.
M. Raynauld: A moins que le ministre n'ait des...
Le Président (M. Laberge): Est-ce que vous avez des
commentaires?
M. Tardif: Non, c'est un article qui est explicite.
Le Président (M. Laberge): C'est une rédaction. M.
le député d'Outremont.
M. Raynauld: M. le Président, je voudrais d'abord
m'excuser de ne pas avoir été présent hier. Je voulais
suivre les travaux de cette commission de bout en bout et je n'ai pu arriver
que ce matin. Je m'en excuse.
Cet article 31, si vous me le permettez, me semble de ces articles que
j'appellerais du "window dressing" dans le projet de loi. Je pense même
qu'il est incompatible avec l'ensemble des dispositions du projet de loi.
Il est curieux en effet qu'on puisse penser à de la conciliation
et faire faire des ententes entre les parties lorsque tout le projet de loi
définit très clairement ce que doit être le résultat
de cette entente. Les articles sont tels, le projet de loi est tel, qu'on
demande à un propriétaire de justifier toute augmentation de
loyer suivant une formule extrêmement détaillée. J'ai pris
connaissance des règlements tout à l'heure, mais j'avais
déjà vu la formule qui avait été distribuée
auparavant et l'interprétation que je donne de cette formule c'est qu'il
y a une seule augmentation de loyer qui est possible puisqu'on établit
d'une façon factuelle quels sont tous les facteurs qui peuvent
être retenus, qui peuvent être pris en considération, et par
conséquent, s'il s'agit d'une entente, comme l'article 31 l'indique ici,
elle ne peut être que le fait d'interprétation sur des faits.
Le propriétaire dit: Mes dépenses
d'électricité ont augmenté de 10% ou de 8% cette
année et l'autre partie dit: Non, ce n'est pas vrai. Vous n'avez pas une
augmentation de frais d'électricité de 8% ou de 10%. A ce
moment-là c'est un cas vraiment d'interprétation de type que
j'appellerais juridique. On dit: On établit l'exactitude des faits et
pour cela on s'en va devant une régie. Même si je trouve que c'est
une approche que je ne partage pas, je reconnais, à ce moment-là,
que c'est dans la logique du système. Une fois qu'on établit
toutes les raisons pour lesquelles il peut y avoir une augmentation de loyer,
à mon avis, il ne peut pas y avoir d'entente en-dehors de cela. S'il ne
peut pas y avoir d'entente en-dehors de cela, on ne peut interpréter,
par exemple, à l'article 5, je crois, l'objectif de favoriser la
conciliation, on ne peut interpréter cet article 5, paragraphe 2 ou
l'article 31, que comme un voeu pieux qui en réalité contredit
l'ensemble des dispositions du projet de loi.
Je ne vois pas comment on peut imaginer qu'il puisse y avoir un
conciliateur qui fasse une action quelconque puisque les termes sont
définis à l'avance. Il n'y a pas de possibilité de s'en
sortir. On ne peut pas non plus tenter d'effectuer une entente, sinon une
entente qui serait, de toute façon, celle que la régie imposerait
à peu près sans discrétion puisque là encore elle a
la formule. Il ne reste donc que des possibilités de mésentente
sur l'exactitude des faits qui sont invoqués par l'une ou l'autre des
deux parties et à ce moment-là on ne peut pas parler de
conciliation. On parle, à ce moment-là, d'un jugement qui est
rendu sur l'exactitude des faits.
J'en profite, à l'occasion de cet article pour dire que je pense
qu'il est impossible, compte tenu des dispositions générales sur
lesquelles, d'ailleurs, on aura l'occasion de revenir, et sans doute le
ministre ne partagera pas mon interprétation générale,
mais on le verra à mesure qu'on va avancer dans l'étude des
articles, il me paraît, en toute sincérité, qu'il ne peut
pas y avoir de conciliation, il ne peut pas y avoir non plus d'incitation pour
les parties à s'entendre sur quoi que ce soit puisque le projet de loi
prévoit que le propriétaire doit donner les informations et doit
fixer, suivant une formule arithmétique quelle est l'augmentation de
loyer permise. Bien sûr, il pourrait bien y avoir, je suppose, des gens
qui pourraient, par générosité, par une attitude de bon
enfant, dire au propriétaire: Ecoutez, je vais accepter de payer cette
histoire sans un jugement de la régie, mais si le propriétaire
jugeait qu'il serait préférable de suivre cette formule, le
locataire n'a qu'à s'opposer et le propriétaire doit se
présenter devant la régie et obtenir un jugement sur sa
présentation. Par conséquent, je trouve, encore une fois, que cet
article 31 est un article qui représente un autre voeu, mais un voeu qui
ne peut pas trouver de réalisation étant donné la
structure de l'ensemble du projet de loi.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, j'aurais aimé,
peut-être, que le député d'Outremont essaie de voir la loi
dans son ensemble et non pas à travers la seule lunette de
l'énonomiste, parce qu'à ce moment, si tout le monde avait les
comportements économiques, il est fort probable que les choses ne
seraient pas ce qu'elles sont. Mais même dans les conventions collectives
de travail et même dans un paquet de secteurs, c'est faux je
m'excuse auprès du député d'Outremont de penser que
les gens ne sont mus que par des mobiles économiques.
Il y a des propriétaires que voulez-vous qui vont
demander des augmentations et demandent des augmentations, ou n'en demandent
pas même, du tout, alors que cela paraît complètement
irrationnel d'un point de vue économique. Cette attitude de
"satisfising" en anglais ou je ne sais pas. C'est ce qu'on a emprunté du
latin pour
expliquer ce comportement antiéconomique ou a, avec le a privatif
des gens, je pense que le député d'Outremont a sans doute
déjà eu l'occasion d'explorer cela plus que moi.
J'étais bien content qu'il vienne se joindre à nous pour
essayer de regarder certains des aspects de cette loi, mais à propos
d'un article qui parle de conciliation, appeler cela du "window dressing", je
le prends d'autant plus difficilement que l'ancienne loi que son parti, que
l'ancien gouvernement a pilotée, s'appelait la loi de conciliation de
propriétaires-locataires, qui est un vain mot; de toute façon, on
n'en faisait pas de conciliation.
Là, on dit: On ne l'appelle pas la loi de conciliation, c'est la
loi créant la Régie du logement. On va essayer d'en faire, et
encore là, j'ai dit que le député d'Outremont laisse de
côté une partie importante de la loi. Il n'a parlé que de
fixation de loyers. Or, on sait que les matières de fixation ne
représentent qu'une cause sur deux, à peu près. Il y a
donc 50% d'autres affaires et en termes de volume de causes l'année
dernière, c'étaient 60 000 causes. Il y a donc 30 000 causes qui
n'ont pas trait à la fixation où une approche de conciliation est
possible, premier élément.
Deuxième élément, c'est que même en
matière de fixation, premièrement, on peut argumenter sur les
soi-disant travaux qui auraient été faits, les
réparations, etc. et que le propriétaire réclame, mais que
le locataire dit: Mais non, il n'a pas remplacé la toiture, ce n'est pas
vrai. Il n'a pas fait tel travail, etc. et à ce moment-là, on
pourrait très bien avoir un conciliateur qui pourrait essayer de
concilier les évaluations du propriétaire, quant aux
améliorations qu'il a apportées et l'appréciation que le
ou les locataires en font, surtout dans de grands ensembles immobiliers, comme
la Place Frontenac à Montréal où il y a 700 locataires
où un problème similaire s'est posé et d'une
complexité telle que, par exemple, l'air climatisé ayant
arrêté de fonctionner dans cet immeuble énorme, eh bien, on
a prétendu le propriétaire a fait faire des
réparations que c'était un vice de construction qui,
à l'origine n'aurait pas dû donner lieu à ces traVaux et
finalement, est-ce qu'il y avait lieu de refiler cela à des locataires
qui avaient loué l'immeuble. Bref, problème très complexe,
700 locataires impliqués et qui sont des causes qui, même en
matière de fixation de loyers, pouvaient requérir les services
d'un conciliateur.
Deuxièmement, il y a aussi c'est vrai pour les
prétentions du propriétaire quant aux améliorations
locatives qu'il aura à apporter quant à
l'appréciation des locataires, quant à la diminution de la
qualité des services dans l'immeuble et qui, là aussi, peut
donner lieu à toutes sortes de choses que nos formules si
sophistiquées tentent-elles d'être ne pourraient rejoindre. Donc,
encore là, il y a une marge d'appréciation, même en
matière de fixation. Troisièmement, M. le Président, les
taux. C'est l'attitude qu'on a appelée tantôt, disons, non
rationnelle des offreurs sur le marché, qui fait qu'en période de
contraction du marché immobilier, on peut se retrouver avec des offreurs
qui vont demander des augmentations considérables, alors qu'en
période actuelle, eh bien, on offre même trois mois de loyer
gratuitement aux locataires qui veulent aller habiter dans tel projet
domiciliaire. Il y a donc là, de prime abord, à court terme,
peut-être, ce qu'on pourrait appeler des comportements irrationnels sur
le plan économique, mais qui, en longue ou en moyenne période,
peuvent se comprendre. (11 h 30)
La situation de l'offreur qui demande plus que ce que la formule
pourrait lui donner; on en voit tous les jours, la régie est là
pour ça. La moyenne des cas qui vont devant la régie demande
à peu près le double de ce qui est finalement accordé par
la régie. Je parle d'une moyenne, avec tout ce qu'une moyenne peut
comporter d'écarts à la moyenne justement. Il y a donc
énormément de gens qui demandent à peu près la
même chose et il y a ceux qui demandent moins que ce que la
méthode pourrait leur fournir.
Troisième élément de ceci, M. le Président,
c'est que la même disposition se retrouve dans la loi de l'Ontario qui
là, le député d'Outremont..., évidemment, il
n'y a pas beaucoup de gens qui se sont tapé la Loi sur le contrôle
des loyers, qui a été adoptée le 21 juin dernier en
Ontario a imposé un taux fixe de 6%...
M. Raynauld: Ils s'en repentent depuis ce temps.
M. Tardif: M. le Président, c'est pour ça qu'on
s'est bien gardé de la formule du taux fixe; je pense que le
député d'Outremont conviendra, là-dessus, qu'une
amélioration est apportée ici par rapport à la situation
ontarienne.
Mais ce que je veux dire c'est que, en Ontario, même avec un taux
fixe, on prévoit la conciliation; je vais vous lire l'article 102 qui
dit: "Where an application is being made to the Commission, other than an
application under Section 126, old building rent review the
Commission shall inquire into the matter and shall assist the parties to the
proceeding in attempting to settle the matter by agreement." On va plus loin
et, là-bas, il y a toutes sortes de dispositions, par exemple, on permet
aux commissaires, aux régisseurs sur place de prendre le
téléphone, d'appeler les parties chez elles et de faire de la
conciliation téléphonique pour éviter toutes sortes de
déplacements pour leur poser des questions.
M. Scowen: Est-ce que vous pouvez demander à M. Parizeau
de donner autant de respect aux lois de l'Ontario que vous leur en accordez. Je
pense que ça pourrait être un élément...
M. Tardif: M. le Président...
M. Scowen: Je suis complètement d'accord avec
ça.
M. Tardif: J'ai cru nécessaire de citer cet article parce
que, justement, on nous dit: Vous
faites du "window dressing", vous jetez de la poudre aux yeux en parlant
de conciliation; alors que vous avez une formule mathématique qui doit
arriver à un résultat connu, si vous l'appliquez
intégralement.
Je vous dis que, malgré cette formule, il y a de la place pour la
conciliation, pour tout ce qui n'est pas de la fixation de loyer et que,
même pour la fixation de loyer, il y en a parce que les gens n'ont pas
tous ce comportement rationnel et économique que l'on pourrait
peut-être souhaiter dans une société d'homo economicus,
tout le monde est bien convaincu de ces choses et, troisièmement, que
dans cette loi ontarienne où on a un taux fixe, donc
décrété par l'Etat dans tout l'Ontario, malgré
ça, on a une formule de conciliation. En fait, il y a des lois du
Québec aussi, qui prévoient la conciliation dans d'autres
domaines. La Commission des droits de la personne a le pouvoir d'amener les
parties à concilier, la Cour des petites créances a ce pouvoir,
à partir sans doute d'un sentiment que je partage que ce
que les gens veulent, c'est un règlement, pas nécessairement la
justice avec un grand J. Merci.
M. Raynauld: M. le Président, est-ce que je pourrais
répondre ou si vous faites un tour de table?
Le Président (M. Laberge): Vous n'avez pas
épuisé votre temps, M. le député d'Outremont, vous
pouvez faire un commentaire.
M. Raynauld: Si je pouvais faire quelques observations
supplémentaires sur ce que le ministre vient de dire. En somme, le
ministre nous dit qu'il peut y avoir de la conciliation en
général sur tous les cas, sauf sur le loyer. On admettra que
c'est un peu paradoxal comme position; on fait de la conciliation, mais c'est
surtout sur d'autres domaines que sur le loyer.
En ce qui concerne le loyer, ce que je peux vous dire c'est que les gens
vont devenir rationnels en diable avec votre affaire; ils vont devenir beaucoup
plus rationnels qu'avant parce que, effectivement, les propriétaires
tendaient à tenir compte de la situation économique
générale et s'ils pensaient que c'était pour conduire
à des départs, ils se contentaient de loyers moins
élevés. Maintenant, il faudrait vraiment que les
propriétaires perdent toute notion de rationalité, quand on leur
dit: La régie va vous permettre d'obtenir une augmentation a, b, c, d,
e, f, totale. A ce moment, je vous le dis, il n'y aura plus de cas comme
celui-là, ils vont tous être beaucoup plus rationnels qu'avant.
Beaucoup plus.
Enfin, lorsque vous reportez à la situation actuelle ou à
la situation de l'Ontario ou même à l'article 31 lui-même,
je voudrais bien dire que je ne suis pas opposé à la
conciliation. Au contraire, je suis en faveur de la conciliation, mais je
trouve que ce projet de loi va réduire... parce que conciliation, on
peut aussi assimiler ça à un processus d'entente, d'un commun
accord, par les parties elles-mêmes et quelquefois avec l'aide d'un
conci- liateur, ça fait partie de la même catégorie,
plutôt que par opposition à une fixation plus ou moins autoritaire
par une régie.
A ce moment-là, je dis que jusqu'à maintenant, je
né connais pas les proportions, parce que je ne connais pas les
proportions, je n'ai pas eu le temps de voir, vous savez quelle est la
proportion de loyers, de baux qui étaient signés sans
l'intervention de la régie. C'est énorme, probablement 90% ou
quelque chose comme ça, je ne le sais pas. En tout cas, c'est
énorme. Avec un projet de loi comme celui-ci, vous allez déplacer
considérablement cette proportion de baux qui étaient
signés sans l'intervention de personne et maintenant, ça va
être un recours à peu près automatique, à la
régie et on ajoute un article. C'est dans ce sens que je vous dis que
c'est du "window dressing". On ajoute un article, on dit: en dépit de
tout ça, en dépit du fait que le projet de loi a pour effet de
faire intervenir la régie, peut-être dans 75% des cas alors
qu'actuellement, elle intervient pour 10% des cas, on nous dit: il y a
l'article 31 qui nous dit quand même que si les parties veulent bien
s'entendre, il pourrait y avoir une entente de gré à gré
avec l'aide éventuelle d'un conciliateur.
Je dis que je ne suis pas opposé à ça, au
contraire, j'aurais aimé que le projet de loi vise justement la
conciliation, mais je trouve que le projet de loi ne vise pas la conciliation
puisque l'essentiel de ces dispositions a pour effet de faire intervenir la
régie dans la décision, suivant une formule qu'on va donner
à tout le monde, que les gens seraient bien bêtes de ne pas
utiliser et qui, effectivement, va être à l'avantage des
propriétaires d'un bout à l'autre.
M. Tardif: M. le Président, je ne voudrais pas que
ça devienne un dialogue, mais vraiment, c'est peut-être un point,
maintenant que le député d'Outremont nous a dit qu'il
était d'accord avec la conciliation, on a peut-être
commencé à toucher un des points que soulevait d'ailleurs le
député de Notre-Dame-de-Grâce. Le député
d'Outremont nous dit: Avec votre formule, ne vous en faites pas, les gens vont
devenir rationnels. Ils vont commencer à avoir un comportement
économique rationnel, ils vont voir ce que ça donne, ce que la
régie, avec la méthode de fixation, peut donner.
Evidemment, je pense que, encore une fois, les gens agissent de
façon rationnelle. La rationalité économique, c'est une
chose, la rationalité plus générale, le
propriétaire qui décide de louer à un membre de sa famille
à un meilleur compte a quand même un comportement rationnel,
même si c'est antiéconomique pour lui. Le propriétaire qui
décide de louer à un locataire qui est là depuis quinze
ans et qui, lorsqu'il s'en va à son chalet l'été, s'occupe
de sa maison et pour ces raisons, ne l'augmente pas, a aussi un comportement
rationnel, même s'il est antiéconomique. De sorte que, M. le
Président, je pense que les gens vont continuer, malgré tout,
à avoir des comportements très rationnels, même si à
prime abord, ils peuvent penser que c'est d'aller tout à fait à
l'encontre des lois élémentaires de l'économie.
II reste que c'est une question à se poser à savoir, et
là, je pense qu'on est vraiment dans un dilemme et j'ai demandé
là-dessus, hier, aux membres de cette commission et au
député de Notre-Dame-de-Grâce, s'ils avaient des
éléments de solution. Parce que là, on dit, je ne suis
plus le député d'Outremont, votre méthode va faire en
sorte que les gens vont aller à la régie, alors qu'aujourd'hui,
ils n'y vont pas beaucoup. Je me dis que c'est le contraire, plus les gens sont
informés et qu'ils peuvent régler leurs choses entre eux, se
prendre en main, ont les outils nécessaires, moins l'intervention d'un
tiers est requise.
On en est peut-être en pleine conjecture sur l'effet que
pourraient avoir certaines... la diffusion, par exemple de la méthode de
fixation. J'aimerais, là-dessus, je ne sais pas dans quelle mesure le
député d'Outremont, peut, sur le plan économique, faire
bénéficier cette commission de commentaires sur, non pas, c'est
peut-être l'article ici pour voir clair, on est d'accord pour essayer
d'amener les gens à composer, mais sur cette autre dimension, on est
vraiment dans une situation paradoxale.
On n'informe pas les gens et, à ce moment, la seule façon
de régler le problème, c'est d'en référer à
un tiers, à un arbitre qui, lui, a l'air d'avoir la science infuse, qui
a un ordinateur à sa disposition. Tout ça a l'air
mystérieux. Il met le tout là-dedans, sort un taux et dit: C'est
ça, monsieur. Ou bien vous démystifiez cela et vous le mettez
à la portée des gens, auquel cas vous pouvez provoquer cet effet
inflationniste que vous mentionnez. Cela est un véritable
problème. Là-dessus, je voudrais avoir les vues des membres de
cette commission, peut-être celles du député d'Outremont en
particulier.
M. Raynauld: M. le Président, je veux simplement assurer
le ministre que j'aurai effectivement des suggestions, mais plus tard, quand on
procédera à l'étude des articles; pour l'instant, je
m'arrête là.
Le Président (M. Laberge): Parfait. En attendant, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce m'a demandé la parole,
je la lui cède.
M. Scowen: Mon collègue a soulevé, avec une
élégance qui me manque, malheureusement, la substance des
mêmes questions qu'on se posait hier matin, durant nos commentaires
globaux sur le projet de loi.
Pour le moment, après les commentaires du ministre, j'attends le
moment où on va discuter toute la question du contrôle des loyers.
Il me semble que, premièrement, les intentions du ministre ne sont pas
encore très claires là-dessus; j'ai eu des échos que
peut-être le formulaire ou les formules ne sont pas prêtes et, de
plus, j'avais un peu de mal à comprendre quelques articles de la loi,
à savoir l'envergure de la discrétion qui sera laissée aux
conciliateurs. J'avais un peu de problème avec votre
prédécesseur, hier, pour pour- suivre mes questions; finalement,
j'ai décidé d'attendre qu'on arrive à cette question.
Mais il y a un autre aspect de cette question, M. le ministre, que
j'aimerais aborder, simplement pour poser des questions afin de m'informer. Je
pense que l'article 31 est important, parce qu'on crée un nouvel ordre
de personnel de la régie, un conciliateur. Jusqu'à maintenant,
nous avions une loi sur la conciliation des locateurs et des locataires; cette
conciliation, aujourd'hui, est effectuée par les administrateurs dans
les deux, trois quatre et même maintenant on en a plus
bureaux de la commission.
Cette conciliation est faite après que le libre marché n'a
pas fonctionné. En effet, les deux parties en cause essaient de
s'entendre sur une augmentation de loyer basée sur les pressions des
deux côtés et des chiffres, qui pourraient être exacts ou
non, ainsi que d'autres facteurs que vous avez mentionnés. Finalement,
ils se retrouvent devant un administrateur qui est censé faire en
premier lieu la conciliation. C'est la nature de notre système
actuel.
Dans la nouvelle régie, si je comprends bien, les administrateurs
n'existeront plus et notre régie centrale deviendra de plus en plus un
tribunal où nous serons admis seulement après que les autres
recours auront échoué. L'effort de conciliation sera
dispersé dans les quartiers, de façon plus étendue
qu'actuellement, pour se rapprocher davantage de la population et des
conditions qui existent dans chaque quartier de chaque ville du
Québec.
La question que je voudrais poser au ministre est la suivante:
J'aimerais qu'il me fasse le portrait de ce genre de personne qu'on va
créer, ici, en quelques minutes et que la loi appellera un conciliateur.
(11 h 45)
Je connais passablement le bureau de l'aide sociale qui existe dans mon
comté. Il y a un bureau: gouvernement du Québec, ministère
des Affaires sociales. Tu arrives, tu prends un numéro, tu attends. Tu
vas devant une personne. Est-ce le même genre de personne? Va-t-elle
avoir quelque compétence spéciale dans le domaine de la
conciliation? Peut-être que la question la plus importante que je veux
lui poser et sur laquelle je peux même proposer un amendement, c'est: Ces
conciliateurs sont-ils tenus à un code d'éthique ou de
déontologie un peu semblable à celui auquel on va demander aux
régisseurs de se conformer? Ces conciliateurs même auront un grand
effet sur les décisions finales s'ils jouissent vraiment d'une
discrétion. J'accepte ce que le ministre a dit qu'au moins pour la
moitié des cas, c'est une question de discrétion.
S'il peut dresser je serai très bref, parce que je ne veux
pas faire perdre le temps de la commission un bref portrait du
système, quelle sera cette nouvelle création? De plus, sera-t-il
possible d'ajouter un article qui dira que la régie peut créer un
code de déontologie pour ces conciliateurs pour que nous puissions nous
assurer que leur comportement sera aussi impartial que
celui que l'on demande de nos administrateurs aujourd'hui et de nos
régisseurs à l'avenir?
M. Tardif: M. le Président, il y a d'abord une
différence de statut entre les conciliateurs. Tels qu'ils sont
énoncés-là; c'est plutôt la fonction qui est
là que ceux qui l'assumeront. On a dit que les régisseurs
pourraient en faire, que les agents d'information de la régie pourraient
en faire et, pour ceux qui en feraient à temps plein, on pense surtout
à des conseillers juridiques qui pourraient faire ce genre de
travail.
Deuxième élément, M. le Président, ces
gens-là seront régis par la Loi de la fonction publique et, donc,
comme tels, astreints aux mêmes dispositions. Il apparaissait
peut-être moins nécessaire d'élaborer pour eux
précisément un code de déontologie comme c'est le cas pour
les régisseurs qui vont échapper à la Loi de la fonction
publique, sauf pour les avantages sociaux, par exemple.
M. Scowen: Vous prévoyez des personnes avec une formation
juridique?
M. Tardif: Essentiellement pour cela.
M. Scowen: A temps plein ou à temps partiel?
M. Tardif: Pardon?
M. Scowen: A temps...
M. Tardif: A temps plein.
M. Scowen: A temps plein.
M. Tardif: A temps plein. Oui, il y a assez de matière
pour cela.
M. Raynauld: II faut qu'ils soient tous fonctionnaires.
M. Tardif: Pardon?
M. Raynauld: II faut que tout le monde soit fonctionnaire.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: Est-ce qu'à l'occasion, M. le ministre, un
régisseur pourra agir comme conciliateur?
M. Tardif: Pour amener les parties qu'il a devant lui à
composition, oui, pour concilier les parties qu'il y a devant la
régie.
Le Président (M. Laberge): L'article 31 remplacé
par un nouvel article?
M. Cordeau: M. le ministre...
Le Président (M. Laberge): Excusez-moi.
M. Cordeau:... dans le libellé tel que
présenté, on dit: Si les parties y consentent. Le
député de Nicolet-Yamaska est absent actuellement, mais il aurait
préféré que le libellé soit comme suit: "A la
demande des parties ou de l'une des parties du consentement de l'autre", parce
qu'à un moment donné il peut y avoir une partie qui demande la
conciliation.
M. Tardif: Si l'autre y consent, il n'y a pas de problème.
A ce moment-là, les parties y consentent. Si l'autre est d'accord, c'est
qu'elle y consent. Pourquoi faire cette périphrase si les parties y
consentent? Si elles n'y consentent pas, évidemment, c'est le jugement
de l'arbitre qui est rendu.
M. Cordeau: Par contre, la conciliation peut être
demandée par une partie ou par l'autre séparément, mais en
premier lieu...
M. Tardif: Qu'une la demande, si l'autre y acquiesce, très
bien, le processus est en marche. Alors, là, c'est couvert par l'article
31. S'il y a refus d'une des parties, à ce moment-là, c'est
l'arbitre qui décide.
M. Cordeau: Parfait.
Le Président (M. Laberge): Le nouvel article 31 est-il
adopté?
M. Tardif: Adopté.
Démolition d'un logement
Le Président (M. Laberge): Adopté. J'appelle
l'article 32. Aucun commentaire ou un commentaire spécifique?
M. Tardif: M. le Président, je pense qu'il faudra lire cet
article en ayant en mémoire qu'il s'agit là de conserver des
dispositions en matière de conservation, pour la plupart, ici, en tout
cas, uniquement dans le cas où les municipalités n'auront pas
décidé d'adopter un règlement. Dès lors qu'elles
ont décidé d'adopter un règlement, la compétence de
la régie cesse en matière de contrôle de
l'opportunité de la démolition. Il n'arrive, à ce moment,
que le problème du locataire déplacé.
M. Scowen: Nous n'avons pas d'objection à l'article 32.
Mais parce qu'on commence maintenant une section qui est complètement
une nouvelle loi, qui est une démarche très fondamentale dans le
projet de loi, je ne sais pas si le ministre a quelques commentaires globaux
à nous donner sur les principes de base auxquels il a tenus dans le
développement de cette politique. Sinon, on peut continuer.
M. Tardif: M. le Président, je suis en train de faire
sortir les dispositions de la loi actuelle, parce que je vois ici que dans
l'assemblage du cahier, il y a une page qui n'est pas insérée au
bon endroit. Alors, ce ne sera pas long.
M. Raynauld: En attendant, je pourrais demander au ministre s'il
pourrait nous renseigner un peu je devrais le savoir, mais je ne le sais
pas sur la portée de ces exclusions. Il s'agit donc de
municipalités où il y a déjà un règlement en
vigueur. Est-ce que, d'abord, il y en a beaucoup de municipalités
où il y a déjà des règlements en vigueur?
Deuxièmement, est-ce qu'il y a un cas récent qui s'est produit de
démolition qui est allé devant la Régie des loyers qui
implique mon comté d'Outremont? Est-ce qu'il y ne s'agissait pas d'un
cas où la ville d'Outremont avait un règlement, mais où la
régie, en vertu d'une autre disposition, avait compétence
également et a rendu jugement pour interdire la démolition? Dans
quelle mesure est-ce que ce serait vraiment exclu?
M. Tardif: M. le Président, à l'heure actuelle,
seule la ville de Montréal a un règlement antidémolition.
Toutes les autres municipalités ont évidemment des
règlements d'émission de permis pour construire, pour changer de
destination, pour modifier, etc., y compris pour raser un immeuble. Mais
là, la municipalité ne se prononce pas sur l'opportunité
de la démolition. Les pouvoirs actuels qu'elles ont ne leur permettent
pas de refuser le permis. Dès lors qu'on a payé le montant requis
pour le permis, la municipalité ne peut pas refuser.
Seule la ville de Montréal a obtenu dans sa charte le pouvoir de
refuser la démolition, même si la personne est prête
à payer le montant du permis. Alors, ce qui est prévu dans cette
loi, c'est de donner c'est plus loin; on le verra subsé-quemment
aux municipalités le pouvoir que la ville de Montréal a,
présentement, de faire un règlement pour régir les
démolitions sur leur territoire. Dès que les municipalités
auront fait un tel règlement, elles décident de
l'opportunité ou non d'accorder le permis de démolition.
On retrouve ici à l'article 32: "La présente sous-section
s'applique à l'égard de tout logement situé ailleurs que
dans une municipalité où est en vigueur un règlement
adopté en vertu de l'article 426b de la Loi des cités et
villes... et de l'article 393h du Code municipal ou du paragraphe 18 de
l'article 524 de la Charte de la ville de Montréal". La Charte de
Montréal l'a déjà.
Cette loi que nous avons devant nous donne le pouvoir aux
municipalités, modifie les articles 426b et 393 du Code municipal et de
la Loi des cités et villes pour leur donner le même pouvoir que
Montréal a. Dès qu'elles l'auront exercé, la régie
n'agira pas sur ces territoires autrement que pour, à ce
moment-là, s'occuper du problème de l'éviction du
locataire ou des dédommagements. Mais l'opportunité de
démolir à ce moment-là relèvera entièrement
de la municipalité.
M. Raynauld: Deux sous-questions, M. le Président.
Premièrement, jugez-vous plus opportun que ce soit la régie qui,
idéalement, doive s'occuper des demandes de démolition ou
pensez-vous que ce serait mieux que ce soient les municipalités?
Deuxièmement, croyez-vous que les munici- palités vont se
prévaloir du droit que vous allez leur donner...
M. Tardif: Bon!
M. Raynauld:... au cas où vous jugeriez
préférable que ce soient les municipalités qui s'en
occupent?
M. Tardif: Le premier projet de loi 107 donnait le rôle de
première instance à la municipalité et faisait de la
Régie du logement l'instance d'appel des décisions municipales.
Le monde municipal nous a fait valoir qu'il n'appréciait pas que les
décisions du conseil soient révisées en matière
d'opportunité de construire, démolir et autres par un tribunal du
genre de la régie et il a demandé d'avoir pleine et
entière juridiction sur les démolitions. En cela, le nouveau
projet de loi fait droit à la requête du monde municipal de lui
laisser voter ses règlements s'il veut le faire. Donc, pour peu que la
municipalité le veuille, elle aura pleine compétence en la
matière et la régie n'agira plus là.
M. Raynauld: Oui, mais pensez-vous que les municipalités
vont exercer ce droit ou non? D'ailleurs, vous avez fait les évaluations
de cela.
M. Tardif: C'est, je pense, la question d'autonomie municipale et
je vois que le député-maire de Verdun veut intervenir. On
pourrait peut-être le...
M. Caron: Je me demande, M. le ministre, si les
municipalités vont se prévaloir de ce droit parce que ce n'est
pas facile à certains moments quand une municipalité
décide de donner la permission de démolir. Vous savez qu'il y a
toujours des groupes qui ne veulent pas qu'il y ait de démolition. Je
l'ai vécu personnellement et, avec la société, on est venu
à bout de s'entendre, mais ce n'est pas facile. Je me demande, comme le
dit mon collègue d'Outremont, si vous ne devriez pas aussi même...
Tout en le laissant aux municipalités mais celles qui ne voudront, par
exemple...
M. Tardif: C'est prévu. C'est ce qui est prévu.
Lorsqu'il y aura un vacuum, c'est-à-dire lorsque les
municipalités auront décidé...
M. Caron: Parce que les municipalités vont
transférer la chicane à la régie.
M. Tardif: ... de ne pas adopter le règlement parce
qu'elles ne veulent pas, elles, entre guillemets, avoir "l'odieux de", à
ce moment-là, la régie sera là. Encore une fois, les
municipalités nous ont dit: Laissez-nous l'occasion d'agir si on veut
agir, et c'est ce que fait la loi. La régie jouera le rôle
supplétif.
M. Caron: Oui, si à certains moments...
M. Tardif: Mais je pense qu'on ne peut pas... Mais c'est ce qui
nous avait été demandé par l'Union des
municipalités notamment.
Le Président (M. Laberge): L'article 32 est-il
adopté?
M. Raynauld: Le ministre avait demandé...
Le Président (M. Laberge): Y avait-il autre chose?
M. Raynauld: Tout ce que je voulais dire, c'est que l'actuelle
loi de conciliation contient les dispositions suivantes: Surbordonnément
à l'application de tous les règlements municipaux alors en
vigueur et notamment les règlements ayant trait à la construction
et à la transformation des immeubles dans la municipalité,
l'administrateur peut permettre la démolition d'une maison d'habitation
en vue de sa reconstruction en une maison d'habitation ou un
établissement industriel ou commercial. A l'heure actuelle, de par la
loi, c'est la régie qui a ce pouvoir. Donc, dans un premier temps, dans
la première version, nous avions en quelque sorte partagé entre
l'instance municipale et la régie de la façon indiquée. Il
y avait la première instance et l'appel. Mais à la demande, donc,
de l'Union des municipalités notamment et de l'Union des conseils de
comté, ce pouvoir a été remis entièrement aux
municipalités, si elles veulent l'occuper, et la régie a un
rôle supplétif seulement. C'est tout ce que je voulais dire.
Déjà, la régie avait pleins pouvoirs en ces
matières, mais pouvoirs qui étaient un peu illusoires dans la
mesure où la régie n'avait pas nécessairement connaissance
de tous les cas de démolition qui se produisaient sur le territoire.
Le Président (M. Laberge): Autres questions ou
commentaires? Un instant!
M. Tardif: Adopté? Une Voix: Oui, oui.
Le Président (M. Laberge): Cela va? L'article 32 est
adopté.
M. Tardif: Adopté. (12 heures)
Le Président (M. Laberge): A l'article 33, j'ai un
papillon qui a été porté à ma connaissance qui
ajouterait, à la fin du deuxième alinéa, les mots "(et
doit être donné selon la formule prescrite par
règlements)." Ces mots s'ajoutent après le mot "éviction"
déjà dans l'article à la page 10 du projet de loi.
Discussion.
M. Tardif: M. le Président, dans cet article, on dit que,
d'une part, le droit au maintien dans les lieux connaît une exception
dans les cas de démolition, mais alors là, c'est sujet à
l'approbation par la municipalité, s'il y a un règlement
municipal, ou par la régie, s'il n'y en a pas.
Le Président (M. Laberge): Autres commentaires. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: J'ai deux questions. La première, je veux
demander, c'est quoi exactement une démolition? Une démolition,
c'est quoi?
M. Tardif: Une démolition, c'est l'opération qui
consiste à raser un immeuble.
M. Scowen: Raser. M. Tardif: Oui.
M. Scowen: Si les murs et le toit restent, c'est un changement de
destination. De plus, je veux simplement demander si une bâtisse...
M. Tardif: Je m'excuse. Ce n'est pas nécessairement un
changement de destination si on rase les quatre planchers d'un immeuble haut
comme ici, qui a huit pieds, et qu'au lieu de faire quatre étages, on en
fait six et on fait du logement. La destination logement est toujours la
même. D'accord?
M. Scowen: Oui, mais à moins que les murs et le toit ne
soient rasés, ce n'est pas une démolition, en effet.
M. Tardif: Je ne crois pas.
M. Scowen: Si on démolit la moitié d'un
édifice, c'est seulement la moitié qui est démolie dans le
cadre de cette loi-ci.
M. Tardif: L'opération démolition, c'est le fait de
détruire un logement, de détruire un immeuble d'habitation. A
partir de quel moment cela devient-il une transformation pour des fins
commerciales? Par exemple, le fait d'éliminer deux logements au
rez-de-chaussée et d'en faire un commerce, c'est une transformation ou
c'est une subdivision, mais cela aussi, c'est de pleine juridiction des
municipalités.
M. Scowen: Et si j'ai un édifice de 100 logements et je
décide de démolir le côté ouest qui comprend 50
logements, la démolition et tous les articles qui s'appliquent ici
s'appliquent seulement aux locataires qui sont dans la moitié qui est
démolie.
M. Tardif: A ceux qui sont affectés par
l'opération.
M. Scowen: Qui sont affectés directement par
l'opération. D'accord. L'autre amendement qu'on voulait apporter
à cela, c'est une question de détail. Il n'est pas clair ce qui
va arriver dans le cas d'un bail de moins de six mois et je pense que ce que
nous proposons là, c'est que, si le bail est pour une période de
moins de six mois, l'avis doit être pour la même période que
ce qui reste du bail. Je veux proposer un amendement à l'article 33. Je
ne sais pas si c'est recevable ou non. C'est simplement pour clarifier le point
sur le bail de
moins de six mois. Vous pouvez regarder. A la page 6, c'est un autre
amendement, si vous voulez. Est-ce que le ministre veut regarder cela?
Le Président (M. Laberge): J'en prends connaissance
officiellement. On suggère, à l'article 33, la modification
suivante: Le locateur peut évincer le locataire pour démolir un
logement. Il s'agirait, selon vous je vous demande une explication
du remplacement de tout l'article.
M. Scowen: C'est la partie qui est soulignée...
Le Président (M. Laberge): ... qui est la
modification.
Alors, je lis le nouvel article au complet, selon la suggestion du
député de Notre-Dame-de-Grâce. Je répète,
article 33: "Le locateur peut évincer le locataire pour démolir
un logement. "Il doit lui donner un avis d'éviction d'au moins six mois
avant l'expiration du bail s'il est de six mois ou plus et un avis identique
à la durée du bail s'il est de six mois ou moins; si le bail est
à durée indéterminée, l'avis est de trois mois.
L'avis doit indiquer le motif et la date de l'éviction."
Il ne semble pas, à première vue, que cette suggestion
soit...
M. Scowen:... six mois, pour les baux à durée
indéterminée. C'est parce qu'on n'avait pas l'intention de
changer...
Le Président (M. Laberge): L'article lui-même. M.
Scowen: ... le sens de...
Le Président (M. Laberge): Alors, vous le
suggéreriez de nouveau.
M. Scowen: II faut changer les mots, six mois.
Le Président (M. Laberge): Je reprends le deuxième
paragraphe: "II doit lui donner un avis d'éviction d'au moins six mois
avant l'expiration du bail s'il est de six mois ou plus et un avis identique
à la durée du bail s'il est de six mois ou moins; si le bail est
à durée indéterminée, l'avis est de six mois.
L'avis doit indiquer le motif et la date de l'éviction."
Il ne semble pas y avoir de difficulté à cette
proposition, donc je l'accepte pour discussion.
M. Tardif: M. le Président, il faut évidemment, en
ces matières de délai, prendre en considération l'article
1658 qui dit que "un bail à durée fixe est, à son terme,
prolongé de plein droit aux mêmes conditions et pour la même
durée ou, si ce bail excède douze mois, pour une durée de
douze mois." C'est donc dire que le bail se prolonge automatiquement et que le
locataire qui reçoit un avis disons que le bail se termine
normalement dans quatre mois du propriétaire que dans six mois,
celui-ci a l'intention de démolir l'immeuble et de l'évincer
à ces fins, peut donc décider de quitter au moment où le
bail prend fin, donc dans quatre mois, et le propriétaire peut commencer
ses travaux deux mois avant.
Ce problème ne nous paraît pas important, pour peu, encore
une fois, que ce délai minimal de six mois apparaît dans la loi.
Je ne sais pas vraiment où est la difficulté, je la cherche.
M. Scowen: Je comprends mal, si quelqu'un a signé un bail
de six mois, qu'il puisse avoir le droit d'un avis qui est plus long que la
durée du bail qu'il a consenti.
M. Raynauld: Le propriétaire n'est pas capable de donner
un avis de six mois. Pour prendre un exemple plus simple, je ne sais pas si
cela existe, un bail de trois mois: Comment le propriétaire peut-il
donner un avis de six mois au locataire? C'est ce problème technique
qu'on supposait.
M. Tardif: Est-ce qu'on pourrait d'abord demander de laisser cet
article en suspens pour permettre aux officiers légistes de prendre
connaissance des libellés, s'il vous plaît?
Le Président (M. Laberge): J'aurais une deuxième
suggestion à faire, MM. les membres de la commission. J'étais
pris avec un petit problème technique d'avoir accepté deux
amendements, sans disposer du premier. Evidemment, il y a la coutume qui fait
que le papillon présenté par le ministre, on considère
plus ou moins qu'il a été écrit dans le texte original,
mais j'aimerais quand même, pour les besoins de la cause, en disposer.
Est-ce que la modification à l'article 33 proposée par le
ministre, qui se lisait "et doit être donné selon la formule
prescrite par règlement" est acceptée?
M. Raynauld: Oui.
Le Président (M. Laberge): C'est accepté, donc
c'est adopté.
M. Tardif: Quant à la nouvelle formulation, je demande de
laisser l'article en suspens et nous reviendrons là-dessus après
qu'il aura été examiné.
Le Président (M. Laberge): L'article 33 est donc en
suspens, en y incorporant, à la fin, après le mot
"éviction", le membre de phrase que vous avez suggéré, qui
est adopté.
M. Scowen: Simplement pour préciser, sur le papillon que
j'ai donné au ministre, il y a une erreur à
l'avant-dernière ligne: Pour les baux de durée
indéterminée, l'avis est de six mois.
Le Président a corrigé cela, mais je voulais porter
ça à votre attention.
Le Président (M. Laberge): Je l'ai corrigé
officiellement, mais...
M. Raynauld: C'est parce qu'on ne voulait pas changer les
délais.
M. Tardif: Non, c'est qu'on veut garder une certaine
uniformité afin que les gens ne disent pas: Pour telle chose, c'est
trois mois; pour telle autre, c'est quatre mois; pour telle autre, c'est six
mois. Alors, les gens ne s'y retrouvent pas; il y a une espèce de souci
d'uniformité dans les délais.
Le Président (M. Laberge): Ici, on laisse l'article 33,
tel qu'il a été lu et relu, en suspens pour vérification.
J'appelle l'article 34.
M. Scowen: Je suggère que l'expression... M. Raynauld:
II y a commentaire... M. Scowen: II y a un papillon?
Le Président (M. Laberge): II y a un papillon à
l'article 34: "Le deuxième alinéa de l'article 34 serait,
à la demande du ministre, remplacé par le suivant: "La demande
d'un locataire bénéficie à tous les locataires qui ont
reçu un avis et qui, au moment de la demande, n'ont pas quitté ou
qui n'ont pas consenti par écrit, à quitter les lieux." Ce
deuxième alinéa remplacerait celui qui était au projet de
loi, le premier alinéa se lisant toujours: "Le locataire peut, dans le
mois de la réception de l'avis, demander à la régie de se
prononcer sur l'opportunité de démolir, à défaut de
quoi il est réputé avoir consenti à quitter les lieux
à la date indiquée." Et nous passons au paragraphe que je viens
de lire. Discussion.
M. Scowen: Adopté.
M. Clair: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Drummond.
M. Clair: Je m'interroge sur la nouvelle formulation du
deuxième paragraphe, parce que je me demande, dans la pratique, si on ne
risque pas d'ouvrir grande la porte à un locateur, qui veut jouer dur
avec ses locataires les plus faibles, de s'empresser le plus vite possible pour
faire signer une acceptation, un consentement à quitter les lieux. Je
m'imagine dans un immeuble de six ou sept logements, où il y a mettons
quatre jeunes couples, un couple âgé et une femme
âgée seule; pour avoir pratiqué devant cette régie
pendant un bon moment, je puis vous assurer qu'il y a de grosses chances que,
rapidement, un propriétaire, qui veut à tout le moins
régler le cas d'un locataire, s'empresse de lui tordre un peu le bras et
qu'on voie cette personne privée d'un recours exercé par un
autre. Bien sûr, le recours est exercé par un autre, mais d'un
autre côté, il ne faut pas oublier que le délai d'un mois
court toujours au moment où un des locataires formule son opposition
à la Régie des loyers.
Je mets en doute le bien-fondé de cet alinéa: "La demande
d'un locataire bénéficie à tous les locataires qui ont
reçu un avis et qui, au moment de la demande, n'ont pas quitté
les lieux n'ont pas quitté les lieux; passe encore, mais,
qui n'ont pas consenti par écrit, à quitter les lieux." Je
connais trop les pratiques qui ont cours dans ce genre de milieu, à
l'occasion, auprès des personnes les plus démunies, pour
concourir facilement à ça.
Je pense à une personne âgée, qui est seule et qui a
peur de son propriétaire; on peut facilement lui arracher un
consentement écrit et cette personne peut voir la cause gagnée
par les cinq autres locataires et, elle, parce qu'elle a eu peur de son
propriétaire, se retrouver dehors.
M. Tardif: M. le Président, je comprends le sens des
remarques du député de Drummond et je comprends qu'on pourrait
concevoir des cas où un consentement est arraché. Mais tout
l'esprit de cette loi, sur ces questions, en est un de pouvoir permettre des
ententes entre les parties, à l'intérieur de certaines
règles du jeu. Il est bien évident que le propriétaire
qui, à l'amiable, fait part à ses locataires de son intention de
démolir, s'entend avec eux sur un dédommagement, peut-être
même un relogement ou encore qu'un locataire, satisfait de l'entente
intervenue, décide de se chercher un autre logement, de signer un bail
ailleurs et que, par la suite, quelques locataires récalcitrants,
décidant de rester, contestent le projet de démolition, la cause
est entendue devant la régie ou par la municipalité. A ce
moment-là, l'autorisation de démolir étant refusée,
ces gens-là voudraient se prévaloir du droit de rester ou de
même revenir dans les lieux et il y a le problème du bail qui
aurait été signé ailleurs. Là, évidemment,
tout le problème soulevé par le député va dans le
sens que la signature aurait pu être arrachée, ce qui peut se
produire, mais ce qui n'est pas nécessairement... (12 h 15)
M. Clair: ...
M. Tardif: Pardon?
M. Clair: Ce n'est pas nécessairement toujours cela.
M. Tardif: Ce n'est pas nécessairement le cas non plus. Je
connais, pour avoir été impliqué dans un cas de
démolition d'une quarantaine de logements sur la rue Saint-Denis
à l'époque, le problème que la ville de Montréal
avait, parce que son règlement n'était pas adopté et
n'avait pas de pouvoir en vertu de sa charte, tous les problèmes qui ont
été posés pas loin du Carré Saint-Louis. C'est un
problème d'autant plus important encore une fois que c'est vraiment
l'action de tout un quartier ou la vie de tout un quartier qui était
impliquée. Je présume qu'il y a des dispositions quand même
qui existent dans les lois en général contre les consentements
arrachés sous de fausses représentations ou de façon
indue. Je ne sais pas si c'est ici qu'il faut régler cela ou par
d'autres recours que pourraient avoir les personnes, mais je vous pose la
question.
M. Clair: Les autres recours qui peuvent exister, à mon
avis, M. le Président, sont difficiles à exercer. Je comprends le
but que poursuit le ministre. Je me demande s'il n'y aurait pas avantage
à ce que plutôt que d'avoir consenti envers le propriétaire
à quitter les lieux si le locataire en question ne devrait pas faire
connaître son acceptation, son consentement à quitter les lieux
à la régie plutôt qu'au propriétaire de sorte qu'on
devrait formuler autrement "qui, au moment de la demande, n'ont pas
quitté les lieux ou qui n'ont pas consenti par écrit à
quitter les lieux" et dire "et qui, au moment de la demande, ont fait
connaître à la régie leur consentement à quitter les
lieux". S'ils ont fait connaître à la régie leur
consentement à quitter les lieux ou si une fois que la régie a
fait une vérification, leur consentement est fait à la
régie plutôt qu'au propriétaire, à ce
moment-là, le tiers que constitue la régie n'a pas forcé
l'acceptation, le consentement à quitter les lieux. Il me semble que ce
serait plus...
M. Raynauld: Exact.
M. Clair: Qu'on dise que le locataire peut quitter les lieux,
accepter que son logement soit démoli, mais que ce soit au
propriétaire qu'il fasse connaître ce consentement, c'est cela que
je mets en doute. Qu'il le fasse savoir à la régie et que la
régie dise: Ce locataire là consent parce qu'il nous a fait
connaître son consentement, cela va. Mais, que ce soit un consentement
communiqué au propriétaire, je pense qu'on diminue de beaucoup la
force de la demande d'un locataire au nom des autres. Peut-être que la
suggestion que je fais est mal formulée, mais il y a sûrement
moyen de trouver une façon pour que ce soit la régie qui
reçoive ce consentement à quitter plutôt que le
propriétaire, ce qui n'est pas clair dans la proposition telle que
formulée pour le deuxième paragraphe.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre, avant que vous
ne répliquiez aux paroles du député de Drummond, M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce voulait faire un
commentaire.
M. Tardif: Certainement.
M. Scowen: Je voudrais simplement faire un commentaire à
la suite de ceux du député de Drummond. De notre
côté, nous voulons que cette série d'articles qui touchent
les démolitions soit rédigée d'une façon
équilibrée. Nous sommes persuadés que la démolition
n'est pas quelque chose de mauvais en soi, mais plutôt une
évolution normale d'une ville. Nous aurons certainement des cas, et
beaucoup de cas. Nous espérons quel nous aurons des cas quand les
démolitions se feront pour construire quelque chose qui est plus utile
à la société en général.
Alors, la base de notre idée et on est d'accord avec le principe
de mettre la main sur la question de démolition, mais nous croyons qu'on
doit entrer dans tous ces articles avec la perspective que de première
vue, ni les propriétaires qui veulent démolir, ni les locataires
sont des méchants ou de mauvaise foi.
En effet, on veut permettre, comme quelqu'un a dit "capitalistic axe
between consenting adults". Moi, je suis porté à croire que si
vous avez une loi qui oblige le propriétaire d'émettre un avis
public qui démontre clairement qu'il a l'intention de le faire, que les
locataires, chaque locataire a le droit d'aller et demander au
propriétaire qui dit: Oui, j'accepte ou s'il décide de quitter
les lieux et aller ailleurs, c'est en effet, un contrat entre deux "consulting
adults" et que ces personnes ne doivent pas avoir le droit d'une
arrière-vue sur un contrat qui n'était pas à
première vue, pour leur bénéfice.
C'est la même chose, Dieu merci, en ce qui concerne les relations
entre le gouvernement du Québec et la pauvre province démunie de
Terre-Neuve et nous sommes très contents. Nous ne pouvons pas du tout
rouvrir ce contrat, même sur la base d'une justice
équilibrée aujourd'hui. Ce n'est pas quelque chose qui est
parfait.
Alors, je suis porté à appuyer l'amendement du ministre.
Je pense que ce n'est pas quelque chose qui joue contre les locataires, parce
que cela va s'appliquer seulement à ceux qui, déjà, comme
adultes ont consenti. Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'une personne qui est
âgée, n'est pas intelligente ou une personne avec quatre enfants
ou une jeune personne n'est pas assez intelligente pour écrire un
contrat de location d'une résidence, comme une personne d'un autre
âge ou avec plus ou moins d'enfants.
Nous sommes portés à croire que c'est un amendement
équilibré qui va dans un sens qui est justifiable des deux
côtés.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Drummond.
M. Clair: M. le Président, je voudrais simplement
dire...
Le Président (M. Laberge): J'avais vu le signal du
député de Taschereau. Alors, je vous donne la parole, mais je
voudrais quand même, avant que le député de Taschereau
prenne la parole, souligner qu'on m'a fait part que la commission est
maîtresse de ses travaux quant aux heures de suspension et avant qu'on
arrive à 12 h 30, je voudrais savoir... quelqu'un m'a fait part dans les
coulisses qu'hier, la commission avait repris ses travaux à 14 heures.
Maintenant, cette personne a un rendez-vous à 14 heures et aurait
préféré que la commission reprenne ses travaux à 15
heures. Donc, je laisse la porte ouverte à votre décision avant
12 h 30, si vous continuez jusqu'à 12 h 45 ou jusqu'à 13 heures,
si vous reprenez à 15 heures ou si vous faites ce qui a
été fait hier. Alors, je vous laisse une porte ouverte pour le
moment et je donne la parole au député de Taschereau.
M. Guay: M. le Président, au sujet de Terre-Neuve, je
dirais au député de Notre-Dame-de-
Grâce que pour ma part, je ne verrais pas d'objections à
rouvrir le contrat si Terre-Neuve veut rouvrir la décision de 1927. Pour
ce qui est de l'article en question...
M. Scowen: Votre opinion n'est pas partagée par votre
gouvernement jusqu'ici.
M. Guay: II n'a pas été question de rouvrir la
décision de 1927.
Sur l'article en question, je partage les préoccupations de mon
collègue de Drummond. Effectivement, on a trop vu dans les centres de
nos villes, que ce soit à Montréal ou même à
Québec, aux alentours de ce parlement, des démolitions qui
auraient pu, qui auraient dû, je pense, être évitées.
Il est exact que dans certains cas de démolition, ce sont des signes
d'une mutation urbaine de bon aloi. Mais il est également exact que dans
certains cas, les démolitions sont un signe de démolition, point,
et de saccage urbain, contre lequel on s'élève maintenant de
toute part, en disant: Cela coûte cher, parce qu'on a envoyé tout
le monde en banlieue. On a construit des autoroutes et avec la crise
d'énergie, cela ne marche plus, parce que le transport en commun n'est
pas rentable, etc.
Dans bien des cas, les gens qui sont victimes de ces démolitions
sont effectivement, les gens les moins munis pour se protéger contre ce
genre de phénomène dans notre société. Comment
concilier, par contre, la possibilité qu'il y ait des démolitions
lorsque c'est légitime et la possibilité pour les locataires de
se protéger? Je serais porté à dire à mon
collègue de Drummond qui, malheureusement, n'écoute pas...
M. Raynauld: II vous rend la pareille parce que tout à
l'heure, vous n'écoutiez pas quand il parlait.
Le Président (M. Laberge): C'est parce que tout le monde
consulte très sérieusement avant de prendre la parole.
M. Guay: C'est cela. Je serais porté à
suggérer si le ministre est d'accord et si le député de
Drummond est d'accord qu'à l'article 33, puisqu'il a été
suspendu, et puisqu'on prévoit en vertu du papillon d'amendement
proposé par le ministre qu'on ajoute: "II doit être donné
selon la formule prescrite par règlement." En plus de cela, si on
ajoutait que dans cette formule, il doit être indiqué ce
n'est pas le mot à mot, mais l'idée aux locataires
visés qu'ils ont un mois pour répondre et qu'ils peuvent se
prévaloir des services de la régie quant à
l'à-propos de la démolition tel que prévu à
l'article 34, à ce moment-là, il me semble que l'article 34, tel
que proposé par le ministre, c'est-à-dire avec la modification
qu'on serait porté à lui faire, se justifierait davantage. On
pourrait laisser l'article 34, tel que modifié, intact pourvu
qu'à l'article 33, on ajoute cette précision qui fait que si,
effectivement, recevant l'avis et voyant sur l'avis que, lui, locataire a ce
droit-là, qu'il peut s'opposer à la démolition, qu'il peut
s'opposer à l'éviction, si dans le mois il ne l'a pas fait,
là, il demeure que le libre consentement entre individus doit
prévaloir.
M. Tardif: Cette mesure serait-elle susceptible de
répondre aux appréhensions du député de Drummond
à savoir que sur l'avis même qui serait prévu par
règlement soient inscrits les recours possibles pour le locataire?
M. Clair: Que le recours possible pour le locataire soit inscrit,
c'est une chose. Cela en est une autre pour un locataire de savoir que s'il
n'est pas en position financière ou autre de se défendre que
quelqu'un dans l'immeuble à logements peut mener la cause et qu'il peut
avoir les mêmes droits et bénéficier des avantages de la
décision qui va être rendue. C'est ce qui est important et quand
le député de Notre-Dame-de-Grâce dit qu'il faut se baser
sur la bonne foi des parties, effectivement, j'accepte que c'est un principe
qu'on doit appliquer partout dans la vie parce que si on présume que les
gens sont de mauvaise foi, cela ne mène nulle part. Je veux bien qu'on
applique la présomption de bonne foi, mais dans la mesure où on
institue en quelque sorte un recours collectif. Je pense qu'il ne faut pas
être dupe de la situation. C'est un avantage important, je pense, dans le
cadre d'un recours de cette nature pour un propriétaire de pouvoir
alléguer: Moi, j'ai deux locataires qui ont accepté, qui ont
compris, qui sont d'accord avec la démolition et qu'à la limite,
ils pourraient même venir témoigner en faveur du
propriétaire ou à tout le moins qu'ils peuvent se servir
d'arguments. Si on regarde la loi sur le recours collectif, j'aimerais que
quelqu'un puisse vérifier le texte je ne pense pas que ce soit
l'une des parties qui puisse bénéficier d'un recours collectif
qu'elle puisse renoncer aux conclusions du jugement rendu sur le recours
collectif par une entente privée avec le défendeur, mais c'est en
signifiant au greffe de la cour son acceptation, sa renonciation au
privilège que lui concède la Loi sur le recours collectif qu'il
peut renoncer à ce privilège. Et à ma connaissance, la loi
québécoise sur le recours collectif se base sur les lois de cette
nature existant dans d'autres pays et nulle part on n'a considéré
que c'était d'imputer de la mauvaise foi à quelqu'un que de
demander que sa renonciation soit signifiée au tribunal plutôt
qu'au défendeur ou au demandeur. Je ne pense pas que ce soit
présumer de la mauvaise foi de quelqu'un. Cela m'apparaîtrait, en
tout cas, beaucoup plus sécurisant pour tout le monde que la
renonciation aux bénéfices que lui confère cet article que
le locataire impliqué la fasse connaître au tribunal plutôt
qu'à une partie impliquée. Cela ne m'apparaît pas du tout
présumer de la mauvaise foi. D'ailleurs, la Loi sur le recours
collectif, sauf erreur, procède de cette manière. La personne qui
veut renoncer aux bénéfices du recours collectif exercé
par un demandeur fait connaître cette renonciation non pas au
défendeur, mais la fait connaître au tribunal.
Le Président (M. Laberge): Je voudrais seulement souligner
que je voudrais qu'on s'entende sur les heures de fermeture des travaux et de
reprise.
M. Tardif: Avant 15 heures, M. le Président. Quant
à la...
Le Président (M. Laberge): Suspension.
M. Tardif: ... suspension, on peut peut-être... (12 h
30)
Le Président (M. Laberge): Continuer la discussion sur cet
article peut-être pour quelques minutes. Parfait. M. le
député de Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: Premièrement, l'essentiel de mes propos ne
touchait pas l'idée de bonne foi. Cela touchait le fait que je persiste
à croire qu'on doit présumer que deux adultes qui ont consenti
à un engagement entre eux doivent être tenus à cet
engagement et l'Etat doit donner, avoir comme préjugé que les
deux adultes étaient en pleine connaissance de cause et pouvaient agir
comme tels. Mais la question que je pose, si on ne met pas une telle clause et
on veut qu'ils aient un recours, ils bénéficient, si vous voulez,
est-ce qu'on propose que si le logement n'est pas démoli, ces locataires
qui ont déjà quitté les lieux ou qui ont accepté de
quitter les lieux et qui sont présumément déjà
engagés dans un autre bail, dans un autre logement, auront l'obligation
de retourner...
M. Tardif: Non, ceux qui ont quitté, cela va. On parle de
ceux qui sont encore là et qui auraient signé qui se rendent
compte finalement que l'immeuble ne sera pas démoli effectivement et qui
préféreraient demeurer là. Ecoutez, M. le
Président, avec votre permission, ce que vient de dire le
député de Drummond en ce qui concerne la Loi sur le recours
collectif m'incite peut-être à regarder les dispositions et vu
qu'on a suspendu l'article 33 qui tourne autour de la même
matière, je n'aurais pas d'objection à suspendre l'article 34,
à regarder les dispositions de la Loi du recours collectif et à
revenir cet après-midi ou demain, sur ce point particulier, si la
commission était d'accord.
M. Cordeau: J'aurais une petite question sur le même sujet.
Est-ce qu'un locateur peut obtenir le consentement d'un locataire sur une
formule autre ou sur un papier autre que l'avis qui doit lui être parvenu
selon l'article 33, c'est-à-dire, selon la formule prescrite par
règlement?
M. Tardif: Là on parle d'une formule obligatoire d'avis
que le locateur doit envoyer à son locataire pour dire: II y aura
démolition. C'est une chose. Pour l'instant, il n'est pas question nulle
part de formule de consentement du locataire. D'accord?
M. Cordeau: Est-ce qu'il pourrait y avoir une formule dans ce
sens?
M. Tardif: Je pense que là...
M. Cordeau: Sur l'avis même, peut-être que
l'éviction...
M. Tardif: Là on a dit possibilité, le
député de Taschereau a dit la possibilité d'inscrire sur
l'avis les recours. Cela se fait couramment. On reçoit son compte de
taxes municipales qui dit que si on n'est pas d'accord avec son
évaluation, on peut en appeler au Bureau de révision de
l'évaluation foncière. C'est sur le compte même.
M. Cordeau: Mais sur l'avis d'acceptation, on pourrait
peut-être avoir un formulaire au bas pour dire l'acceptation par le
locataire. Il va chercher une autre formule.
M. Tardif: Je pense qu'il serait peut-être bon de suspendre
l'étude de cet article, de le faire en concordance avec l'article 33
qu'on a laissé de côté également. L'objectif
étant évidemment non pas d'interdire les ententes pouvant
survenir, mais peut-être bien que les gens soient adéquatement
informés de leurs droits.
M. Scowen: Avant, M. le Président, est-ce que je peux
mentionner au ministre qu'on avait l'intention de proposer un amendement pour
changer les mots "le mois" pour "dans les 30 jours". C'est une question qu'on
avait l'intention de soulever au moment où on parlera de l'article
lui-même, mais peut-être que vous pouvez en tenir compte.
M. Tardif: On peut demander au légiste qu'il s'assure
d'une certaine conformité du "corpus".
Le Président (M. Laberge): Nous allons suspendre
jusqu'à 15 heures. Sur ces paroles, les travaux de la commission sont
suspendus jusqu'à 15 heures.
Suspension de la séance à 12 h 35
Reprise de la séance à 15 h 16
Le Président (M. Laberge): A l'ordre, s'il vous
plaît!
La commission parlementaire des affaires municipales reprend ses travaux
sur l'étude, article par article, du projet de loi no 107.
Les membres de la commission sont les mêmes que ce matin. Lorsque
nous avons suspendu nos travaux, nous avions suspendu l'étude de
l'article 34, pour les vérifications supplémentaires, et
j'appelle l'article 35.
M. le ministre.
M. Tardif: M. le Président, à l'article 35, il y a
un papillon qui vous a déjà été remis et que, si je
comprends bien, vous considérez comme étant déposé
ou reçu...
Le Président (M. Laberge): Oui, et je puis vous en faire
lecture...
M. Tardif: Et recevable.
Le Président (M. Laberge): II semble tout à fait
recevable. C'est une nouvelle rédaction de l'article 35 qui se lirait,
dorénavant, comme suit:
Une Voix: Un instant, M. le Président, un instant.
Le Président (M. Laberge): II y en aurait un nouveau, un
instant. Alors, le premier amendement qui nous a été
proposé, je n'en fais pas lecture, celui qui vient d'être
porté à ma connaissance et qui est distribué
présentement aux membres de la commission, sera considéré,
étant déposé par le ministre, comme l'article à
discuter. J'en fais lecture.
Une Voix: C'est un papillon.
Le Président (M. Laberge): C'est un papillon avec une
deuxième paire d'ailes. Alors, l'article 35 est remplacé par le
suivant: 35. "Avant de se prononcer sur une demande, la régie
considère l'état du logement." Excusez, j'attendrai vos
commentaires après ma lecture, s'il vous plaît. Alors, je
reprends; "..., la régie considère l'état du logement, le
préjudice causé au locataire, les besoins de logement dans les
environs, la possibilité de relogement des locataires, la
détérioration de l'apparence architecturale, du caractère
esthétique ou de la qualité de vie du voisinage, le coût de
la restauration, l'utilisation projetée du terrain dégagé
et tout autre critère pertinent." "Toutefois, la régie ne peut
autoriser la démolition d'un immeuble dont la démolition est
interdite par un règlement municipal adopté en vertu du
paragraphe 1d, de l'article 426, de la Loi des cités et villes ou en
vertu du paragraphe L, de l'article 392 F, du Code municipal."
Discussion.
M. Tardif: M. le Président, d'abord en ce qui concerne le
premier alinéa, qui est substantiellement la même chose que ce qui
était dans le projet de loi 107 imprimé, par rapport au premier
papillon, il y avait l'addition parmi les facteurs à considérer,
l'utilisation projetée du terrain dégagé. Cette suggestion
nous est venue du monde municipal. La ville de Montréal utilise, entre
autres, ce critère, dans l'appréciation de l'opportunité
de donner un permis de démolir. Bon, qu'est-ce que vous voulez faire,
après avoir démoli? Et cela nous apparaissait tout à fait
bon d'aligner les dispositions de la loi sur ce que la ville de Montréal
avait comme dispositions de son côté.
Quant au deuxième paragraphe qui vient d'être ajouté
par le deuxième papillon, M. le Président, c'est que les
municipalités en vertu de l'article 426.1 d ont déjà le
pouvoir et je cite l'article 426.1d: Pour interdire, pour une
période n'excédant pas douze mois, la démolition de tout
immeuble constituant un bien culturel au sens de la Loi sur les biens
culturels, chapitre 19 des lois de 1972 ou situer dans un territoire
identifié comme pouvant constituer un arrondissement historique ou
naturel au sens de ladite loi. C'est donc que les municipalités ont
déjà en vertu de cette loi le pouvoir de geler; donc il aurait
été illogique d'une part une fois un gel
décrété par les municipalités en vertu de l'article
426.1 d, que la régie aille au-delà et accorde un permis de
démolir. C'est un souci de concordance avec la Loi des cités et
villes et le Code municipal.
M. Cordeau: Qu'est-ce que dit l'article 392f...
M. Tardif: La même chose que ce que je viens de vous lire
pour 426.1 d. C'est le pendant dans le Code municipal.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Quant au deuxième alinéa qui est
maintenant proposé, je suis, pour ma part, totalement d'accord. Ce n'est
pas une simple concordance, c'est le respect d'un pouvoir accordé,
pendant que j'avais l'honneur d'être ministre des Affaires municipales,
aux autorités locales et cela parce que l'on assistait à des
démolitions intempestives par rapport à la qualité des
bâtiments ainsi perdus.
Mon commentaire sur le premier alinéa sera un peu moins
favorable. C'est-à-dire que je suis d'accord que l'on doive, avant de se
prononcer sur une demande de démolition, tenir compte d'un certain
nombre de facteurs. Je pense que rénumération faite dans ce
premier alinéa est à la fois trop complet, trop
détaillé et insuffisamment complet, parce que l'article
proposé invoque le préjudice qui peut être causé au
locataire. J'aimerais suggérer, M. le Président, qu'il y a aussi
des préjudices qui peuvent être occasionnés en ce qui
concerne les intérêts du propriétaire, et que l'on devrait
au moins demander à la régie d'en tenir compte avant de rendre
une décision. Je pense que...
M. Guay: Est-ce que le député me permettrait une
question?
M. Goldbloom: Certainement, oui.
M. Guay: Quel est le genre d'intérêt du
propriétaire qui est mis en cause hormis le fait de pouvoir
démolir et reconstruire, sinon, en quoi est-ce que le
propriétaire, surtout s'il n'habite pas l'immeuble, subit un
préjudice du même type que celui du locataire qui, lui, est
évincé de l'immeuble?
M. Raynauld: Des réparations coûteuses.
M. Goldbloom: Oui, il y a un intérêt
économique qui peut être influencé par la décision.
S'il y a refus, il peut se trouver perdant et nous aurons créé
une situation où nous aurons porté atteinte à
son droit de propriété et à son droit de disposer
à sa guise de sa propriété par rapport à la Loi sur
les biens culturels. Nous avons dit: Les intérêts de la
collectivité sont plus importants à cet égard, que
l'intérêt économique du propriétaire qui a
peut-être acheté l'immeuble avec l'intention de le démolir;
mais s'il ne s'agit pas d'un bien culturel qui peut être ainsi
classé en vertu de la loi, il me semble que si l'on ne demande pas
à la régie de tenir compte de l'intérêt du
propriétaire, que là on peut porter préjudice à
cette personne, et qu'il y a un équilibre d'intérêts qu'il
faut calculer, qu'il faut évaluer. Je n'irai pas plus loin que
cela...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: M. le Président, je ne partage pas l'opinion du
député de D'Arcy McGee en la matière. Il est exact que,
dans le cas de la Loi sur les biens culturels et notamment dans les
arrondissements historiques, on a fait prévaloir l'intérêt
de la collectivité sur les intérêts des
propriétaires. Il se peut que l'on restreigne ou que l'on porte atteinte
au droit absolu de propriété par l'article 34. Le droit de
propriété, dans le cas du logement, n'est pas seulement on
l'a dit au début de cette commission un élément
économique, mais c'est également un élément social.
Par élément social, on entend non seulement le fait qu'il y loge
des gens qui ont quand même un certain droit à habiter un logement
de manière paisible et non pas de se faire démolir, mais il y a
aussi l'intérêt de la collectivité.
Sans qu'il y ait pour autant un intérêt à
caractère historique, l'intérêt de la collectivité
peut être présent dans la simple trame urbaine, dans le tissu
d'une ville qu'on n'a pas le droit, je pense, de laisser massacrer
impunément, comme on l'a fait dans nos villes non seulement au
Québec, mais ailleurs en Amérique du Nord. Si on fait une
comparaison des villes nord-américaines et des villes
européennes, c'est une des choses qui frappent le plus:
l'intérêt absolu de la propriété en termes
d'aménagement urbain, cela donne des entrées de nos villes faites
depuis quinze à vingt ans, c'est-à-dire disparates,
inélégantes où l'utilisation du terrain est mal
rentabilisée, où on retrouve stations-service sur centre
commercial sur immeubles à appartements sur restaurant McDonald et ainsi
de suite, formant un tout incohérent et mal agencé. Les bords de
nos villes sont très souvent caractérisés par ce genre
d'aménagement ou par cette absence d'aménagement parce qu'on
s'est prévalu du droit absolu de propriété et qu'on a fait
ce qu'on voulait à peu près impunément. Je pense que ce
genre de choses est à corriger dorénavant.
On a fait, d'autre part, dans le centre de nos villes des choses qui
sont inqualifiables. La rue Sherbrooke à Montréal, pour prendre
un exemple que le député connaît sans doute, était
jadis très belle. C'est aujourd'hui une succession d'immeubles dont le
moins que l'on puisse dire, c'est qu'au mieux ils sont insipides et qu'au pire
ils sont très laids. L'ensemble passe d'édifices de quatre
à cinq étages à édifices de dix à vingt
étages, un peu comme un jeu de dominos sans qu'il y ait pour autant un
plan d'ensemble et sans qu'on ait respecté pour autant, dans bien des
cas, la trame urbaine.
Plus près de nous ici, la ville de Québec a subi ce
même genre de pseudo-culte du pseudoprogrès où on a
massacré littéralement deux quartiers, celui de Saint-Roch en
particulier, mais celui de Saint-Jean-Baptiste aussi en bonne partie pour y
aménager la soi-disant Cité parlementaire avec son grand
boulevard, l'autoroute qui passe pardessus les quartiers pour amener du monde
dans le centre-ville et aussi le faire fuir du centre-ville, avec les
problèmes que cela cause maintenant à la ville de Québec,
comme cela en cause aussi à la ville de Montréal.
C'est ce genre de considérations que l'on doit prendre en cause
avant de laisser au propriétaire le droit absolu de disposer de son
immeuble pour le démolir. Le propriétaire, dorénavant,
avec la loi 107, saura qu'il y a des restrictions, comme il peut savoir
déjà, en vertu de règlements municipaux possibles, qu'il
peut y avoir des, restrictions aux fins de démolition. S'il
achète l'immeuble dans le but de le démolir, il saura que cela
peut lui être refusé. Alors, il prendra ses précautions en
conséquence. De là à dire qu'on peut impunément
dorénavant acheter un immeuble dans le but de le démolir sans
tenir compte de la situation de cet immeuble dans l'ensemble de cette rue, de
ce quartier, de cet environnement, de cette ville, sans tenir compte de ses
fonctions sociales autant qu'économiques, il y a des limites et ces
limites sont celles qui sont prévues, il me semble, à l'article
34. Je pense que ce sont des limites raisonnables et des limites qu'une
société civilisée doit poser, à un moment
donné, au droit absolu et non contrôlé de disposer comme on
veut et de faire ce qu'on veut avec ce qu'on a.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Drummond m'a demandé la parole.
M. Clair: Peut-être que si le député...
M. Goldbloom: Si, M. le Président, le député
de Drummond me permet de réagir aux propos du député de
Taschereau, je lui en serais très reconnaissant. Je l'en remercie.
Le Président (M. Laberge): Cela semble accepté, M.
le député.
M. Goldbloom: Les arguments avancés par le
député de Taschereau sont précisément ceux qui
m'ont inspiré la modification à la Loi des cités et villes
et celle au Code municipal auxquelles le ministre actuel a fait allusion il y a
quelques minutes. (15 h 30)
Le député de Taschereau dit qu'il y a une
responsabilité sociale qui incombe à celui qui est
propriétaire d'immeubles locatifs. Je suis d'accord avec lui. Je
lui ferai remarquer, cependant, que, dans certains cas où des
démolitions injustifiées aux yeux de la majorité des
citoyens ont eu lieu, celui qui a effectué la démolition a
remplacé l'immeuble disparu par un autre qui, recevant un nombre
beaucoup plus important de locataires par la suite, ne diminuait pas la
disponibilité de logements. Il y avait, cependant, la question de
qualité de l'immeuble perdu et les observateurs de cette situation ont
exprimé l'avis que c'était une perte pour la collectivité,
exactement comme le député l'a dit. Mais invoquer la
qualité architecturale d'un immeuble et le caractère
esthétique de cet immeuble et dire que cet immeuble ne doit pas
être perdu à cause de ses qualités sans établir des
critères comme il y en a dans la Loi sur les biens culturels, il me
semble que c'est aller trop loin que c'est brimer les droits de gens qui
achètent, de bonne foi, des propriétés, avec
l'intérêt d'offrir sur le marché quelque chose qui serait,
à leurs yeux et dans leurs espoirs, intéressant pour ceux qui
pourraient louer des locaux là-dedans.
M. le Président, quand le député de Taschereau
parle de l'incongruité du développement, surtout par le
remplacement d'immeubles de qualité ou à caractère
attrayant par des immeubles modernes du genre boîtes de ciment et tout
cela, il a raison. Je partage sa réaction quant à l'aspect visuel
de plusieurs secteurs de nos importantes villes. Mais il y a la
responsabilité des élus municipaux à l'égard du
zonage de ces quartiers-là et, maintenant, les pouvoirs qui existent
dans la Loi des cités et villes pour empêcher la démolition
si les élus municipaux, ayant posé leur geste, ayant
retardé pendant douze mois la démolition proposée ont pu
convaincre le ministre des Affaires culturelles et la Commission des biens
culturels que ces immeubles ne devraient pas disparaître. Il me semble
que tout cela se tient et que nous avons essayé de créer un
régime comprenant la Loi des cités et villes et le Code
municipal, la Loi sur les biens culturels.
Maintenant, il y a dans ce nouveau projet de loi des
éléments qui s'ajoutent à cela, c'est-à-dire que,
devant une proposition de démolition, on demanderait à la
régie de se prononcer. Or, M. le Président, je ne nie rien de ce
qu'a dit le député de Taschereau, mais je lui dis que, si la
régie est appelée à jouer un rôle quasi judiciaire,
ce n'est pas ex parte qu'elle devra rendre ses jugements, ce n'est pas en
tenant compte des intérêts d'une seule des personnes
intéressées.
Je ne suggère pas que l'article disparaisse. Je ne suggère
pas que la régie ne tienne pas compte des préjudices possibles
à l'égard des locataires. Je ne suggère pas que la
régie ne tienne pas compte de l'état du logement. Je ne
suggère pas que la régie ne tienne pas compte des besoins de
logements dans les environs. Je ne suggère pas que la régie ne
tienne pas compte de la possibilité de relogement des locataires. Je ne
suggère pas que la régie ne tienne pas compte du coût de la
restauration. Tout ce que je suggère, c'est que la régie, pour
être juste, tienne compte des intérêts possi- bles du
propriétaire et que les facteurs de l'apparence architecturale et du
caractère esthétique demeurent dans le cadre de l'application de
la Loi sur les biens culturels, de la Loi des cités et villes et du Code
municipal par le régime déjà créé. Ce sont
les deux suggestions que je fais.
M. Tardif: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Tardif:... avec votre permission. Je m'excuse auprès du
député d'Outremont, mais cela se situe exactement sur ce
point-là. L'article 35 se termine par "et tout autre critère
pertinent", ce qui, en conviendra le député de D'Arcy McGee, est
assez large pour couvrir ce qu'il a mentionné, c'est-à-dire
l'intérêt du propriétaire. Deuxièmement, il faut
quand même voir l'économie générale de la loi ou de
cette partie, de cette section II de la loi. Premièrement, la loi ne met
pas un frein à la démolition si au moins un locataire ne
réagit pas. En d'autres termes, si tous les locataires sont consentants
ou que l'immeuble est évacué, il peut y avoir démolition.
Donc, c'est le premier élément. Le deuxième
élément: le propriétaire devant la régie n'a pas
à justifier la démolition. C'est au locataire ou au
représentant de justifier que le propriétaire ne devrait pas
avoir le pouvoir d'exercer son droit de démolition. Donc, cette
espèce de préjugé du droit du propriétaire à
ne pas subir un préjudice est inscrit dans l'économie même
des articles. De ce point de vue, je pense qu'il y a là les garanties
suffisantes avec les autres critères pour assurer cet équilibre
entre les parties.
M. Goldbloom: M. le Président, le ministre peut-il
m'indiquer la raison ou les raisons pour lesquelles il ne trouverait pas
convenable l'inscription dans l'article du préjudice possible
causé au propriétaire puisqu'il dit: C'est déjà
là parce que l'article se termine par "et tout autre critère
pertinent"?
M. Tardif: II y a eu aussi une autre raison, M. le
Président. Si le propriétaire s'adresse à la régie
pour demander une démolition, il est inutile d'insister sur le fait
qu'au départ il croit retirer un avantage plus grand de la
démolition de l'immeuble et peut-être de son utilisation comme un
terrain de stationnement ou en lui donnant une autre affectation. En
conséquence, s'il est empêché de le faire, au
départ, il invoque préjudice. J'ai l'impression que sa
démarche même est la consécration du fait qu'il
considère être lésé dans son droit de disposer de
son bien. Sans quoi, il n'y a pas de raison de s'opposer, de se
présenter ou de vouloir démolir. Au départ, il
considère à son avantage de procéder à la
démolition et à une réaffectation. Je ne sais pas ce
que...
M. Goldbloom: M. le Président, je regrette de ne pas
être capable d'être d'accord avec le ministre là-dessus
parce qu'ici il y a une énumération de critères dont la
régie devra tenir compte en ren-
dant son jugement. Si la régie constate qu'il y a
préjudice causé au locataire, bien s'il n'y a pas de contrepoids
dans l'article, il me semble que la régie interpréterait cet
article comme démontrant chez le législateur, à l'automne
de 1979, l'existence d'un préjugé favorable au locataire.
Quand il s'agit d'un tribunal M. le Président, j'insiste,
c'est un tribunal il y a des décisions, des verdicts qui seront
rendus. Il me semble qu'un tribunal cherche à rendre justice. Et la
justice, dans l'esprit du législateur, devrait être une directive
législative au tribunal tenant compte de l'équilibre des
intérêts et pas des intérêts d'un seul
côté. Suivant la rédaction actuelle de l'article, la
régie pourrait dire: II y a préjudice causé au locataire;
donc, nous devons refuser la démolition et, puisque le
législateur n'a pas mentionné le préjudice causé au
propriétaire, c'est un facteur secondaire dans la prise de notre
décision.
M. Guay: Est-ce que le député me permettrait une
question?
Le Président (M. Laberge): Monsieur, j'ai...
M. Goldbloom: Moi, oui, mais le président peut-être
pas pour l'instant.
Le Président (M. Laberge): Le député de
Drummond, tout à l'heure, a cédé son droit de parole au
député de D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Oui, avec beaucoup de gentillesse.
Le Président (M. Laberge): II attend depuis treize minutes
le droit de reprendre la parole. Alors, je la lui cède.
M. Goldbloom: Ce dont je le remercie.
Le Président (M. Laberge): Ensuite, j'accorderai la parole
au député de Taschereau et au député de
Nicolet-Yamaska. M. le député de Drummond.
M. Clair: Ce n'est vraiment pas grave, M. le Président. Je
veux simplement dire au député de D'Arcy McGee que je suis
complètement en désaccord avec lui parce qu'il m'apparaît
que son raisonnement est mal fondé à la base. Le
député dit: Je voudrais que l'intérêt du
propriétaire soit mentionné au titre des critères pour la
commission avant qu'elle se prononce sur une demande de démolition. Je
pense qu'à ce moment-là, si on procédait techniquement
comme le député le propose, on réduirait un droit à
la démolition moyennant certains critères à un simple
critère. Autrement dit, si on lit l'article 33, le premier paragraphe
dit bien: "Le locateur peut évincer le locataire pour démolir un
logement." C'est donc un état de fait. L'intérêt du
propriétaire est manifesté, dès le départ, par sa
demande d'exercer un droit. Je pense que, si on libellait l'article de
façon telle que l'intérêt du propriétaire soit
réduit à un simple critère avant de se prononcer sur une
demande, on réduirait le droit de ce propriétaire à un
simple critère plutôt qu'à un droit.
On ne change pas le droit de propriété. Sans être
convaincu de l'exactitude de mon mot, je pense que le droit à la
démolition est, en quelque sorte, un démembrement du droit de
propriété. D'accord? Si le droit à la
propriété continue de respecter comme c'est prévu
dans la loi le droit à la démolition, je pense que le
député atteindrait un but exactement contraire à celui
qu'il poursuit s'il réduisait ce droit à la démolition
à un simple intérêt dans une demande. C'est un
démembrement du droit de propriété que celui de
démolir. Ce droit est respecté et on dit: Quand le tribunal se
prononce sur les modalités d'exercice de ce droit, ce n'est pas juste
une question de faire la preuve de son intérêt; il a le droit de
demander la démolition. Comme le ministre l'a dit tantôt, si aucun
locataire ne s'y oppose, le propriétaire démolit. C'est un droit.
Si on inscrivait cela, comme le député le suggère, on
réduirait un droit d'un propriétaire à une espèce
de critère.
M. Goldbloom: Est-ce que le député me permet une
question?
M. Clair: Oui.
M. Tardif: II faudrait presque donner un cours de droit.
M. Goldbloom: Oui.
M. Tardif: Je ne suis pas avocat.
M. Fontaine: Mais c'est un droit qui...
M. Goldbloom: Moi, non plus.
M. Fontaine: ... est limité au bon vouloir des locataires,
par exemple.
M. Tardif: Non.
M. Clair: Non. Cela me surprend que le député de
Nicolet-Yamaska me dise cela. C'est un tribunal.
M. Fontaine: Mais le tribunal n'est pas obligé de tenir
compte d'un critère qui favoriserait le propriétaire.
M. Clair: C'est-à-dire qu'il est obligé d'en tenir
compte, mais il est libre d'interpréter l'intérêt du
propriétaire et l'intérêt du locataire selon sa
discrétion, selon son évaluation des faits. Je m'excuse.
M. Goldbloom: M. le Président, je n'ai pas perdu mon
sourire, ni le député de Drummond, je le constate. Il avait
accepté que je lui pose une question. Croit-il qu'il y aura un fort
pourcentage de cas où un propriétaire proposera la
démolition d'un immeuble occupé par un nombre X de loca-
taires disons une vingtaine de locataires et où pas
un seul sur les 20 n'interviendra pour bloquer la démolition? Est-ce que
cela arrivera souvent? Est-ce que ce sera la règle
générale selon lui? (15 h 45)
M. Clair: Je pense que la règle sera en ce sens qu'il y en
aura au moins qui va contester.
M. Goldbloom: Oui.
M. Clair: Je pense que si on fait confiance à un tribunal,
on dit dans la loi que c'est un droit que le droit de démolir. C'est
évident que du simple fait que le propriétaire demande la
démolition, c'est là son intérêt, c'est là
son droit, mais il y a des limites à son droit, simplement, et que les
limites ou les critères pour lesquels on peut refuser la
démolition sont ceux qui apparaissent. Si on acceptait la proposition du
député de D'Arcy Mc-Gee, on pourrait aboutir à un
résultat complètement absurde. Si on indique dans les
critères l'intérêt économique du
propriétaire, le propriétaire demande la' démolition et il
juge que son intérêt économique, c'est de démolir.
Un des critères dans la loi, c'est celui où le tribunal tient
compte de son intérêt économique. Or, le tribunal dit:
L'intérêt économique du propriétaire, à notre
avis, ce n'est pas de démolir; c'est de laisser l'immeuble là. Je
pense que le tribunal se substituerait à la partie demanderesse,
à ce moment-là, en disant que l'intérêt
économique de ce demandeur, c'est de démolir. En fait, on a fait
des calculs et son intérêt, c'est de ne pas démolir.
M. Fontaine: Oui.
M. Clair: Une situation un peu baroque pour quelqu'un qui a un
droit de démolir et, tout à coup, en vertu d'un critère,
on se substitue à la partie demanderesse en disant: Vous avez mal
administré, M. le propriétaire; on pense que vous ne devriez pas
démolir. C'est dans votre intérêt économique de ne
pas démolir. C'est une situation un peu surprenante pour quelqu'un, dont
on dit à l'article 33, qu'il a un droit à la
démolition.
M. Goldbloom: Si j'étais avocat, je parlerais
peut-être différemment, mais cela me semble fendre des cheveux en
quatre, avec tout le respect que je dois à mon ami, le
député de Drummond.
M. Clair: Je pense que toute la question, M. le Président,
que je soumets au député de D'Arcy McGee, c'est: Est-ce qu'il
préfère que la démolition ne soit pas un droit fondamental
avec des limites, est-ce que l'intérêt du propriétaire dans
une démolition doit être un droit ou s'il ne doit être qu'un
critère? A mon sens, la loi dit clairement que c'est un droit et qui a
des limites et il veut en faire un critère.
M. Goldbloom: M. le Président, y aurait-il un mal
quelconque si l'article se lisait comme suit: Avant de se prononcer sur une
demande, la régie considère l'état du logement, les
préjudices possibles, les besoins de logements dans les environs, etc.?
Cela pourrait être une autre formulation, si vous voulez.
Une Voix: Est-ce un amendement?
Le Président (M. Laberge): Je pense que c'est une
question.
Une Voix: C'est une bonne suggestion.
M. Goldbloom: A cette étape, c'est une suggestion.
J'attends des réactions.
M. Tardif: Je ne suis pas avocat. Il me semble que toute cette
loi, que nous avons devant nous, est une qualification du droit de
propriété. Le droit de propriété est là. Les
personnes qui sont propriétaires ont un intérêt suffisant
pour agir en vertu de cette loi et la loi apporte une certaine qualification en
mettant des balises à l'exercice de ce droit. Le droit est là, la
démolition est permise dans des conditions qui sont
énumérées de sorte que le propriétaire n'a pas
à faire la preuve qu'il a un intérêt à
démolir. C'est là. Justement, le fardeau de la preuve est au
locataire dans ce cas-là, c'est à lui de dire: Non, ça ne
devrait pas l'être pour telles raisons. J'imagine que les
municipalités qui exerceront ces pouvoirs pourront demander à
leur service d'urbanisme un avis technique sur l'architecture et les immeubles
situés dans tel arrondissement.
Le droit est là, il peut être exercé selon certaines
qualifications et cela me paraît qu'on n'a pas à le garantir ici
par l'addition d'un critère qui permettrait, qui serait purement
illusoire d'accorder au propriétaire quelque chose que, de toute
façon, le droit lui reconnaît d'emblée à titre de
propriétaire.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Taschereau, vous êtes le suivant. Je l'ai dit à 15 h 31, que
j'accordais la parole au député de D'Arcy McGee et trois
personnes ont demandé la parole par la suite. Les suivants seront le
député de Nicolet-Yamaska et le député
d'Outremont.
M. Guay: Le député de Drummond a bien dit ce que
j'allais dire en termes à peu près équivalents. Je
céderais bien volontiers mon droit de parole aux députés
de Nicolet-Yamaska et d'Outremont quitte à revenir puisque j'imagine
qu'il y aura une réplique à fournir, éventuellement.
M. Fontaine: Le député de Drummond dit qu'il y a un
droit inscrit dans la loi et le locateur n'a qu'à l'exercer. Ce qu'il
faut bien comprendre, c'est que ce droit, même s'il est inscrit dans la
loi, est limité au bon vouloir du locataire qui va pouvoir, lui, faire
une objection automatique dans la plupart des cas. A ce moment-là, le
droit du locataire va être limité à l'application des
critères que la régie va devoir appliquer.
M. Goldbloom: Le droit du propriétaire.
M. Fontaine: Le droit du propriétaire, du locateur. Le
droit prévu à l'article 33 va être limité au bon
vouloir du locataire qui va vouloir faire une objection et il sera
également limité aux critères prévus à
l'article 35. Donc, c'est bien beau de dire "faisons confiance au tribunal",
mais s'il n'y a pas de critères pour contrebalancer le critère
dont la régie doit tenir compte, le préjudice causé au
locataire, s'il n'y a rien pour contrebalancer cela, la régie n'en
tiendra pas compte. C'est sûr que le propriétaire a un
intérêt dans la demande de démolition, mais le
préjudice qui pourrait lui être causé, si on dit non
à cette démolition, c'est ça qu'on veut faire inscrire
dans l'article 35.
M. Tardif: Mais il est tellement inscrit dans cette loi, si vous
me le permettez, M. le Président...
M. Fontaine: M. le Président, si vous me le permettez, je
vais terminer.
Le Président (M. Laberge): A qui dois-je le permettre en
premier? Vous continuez.
M. Fontaine: Merci. Le député de Drummond et les
autres ont dit: II s'agit, bien sûr, d'un effritement, d'un
démembrement des droits de propriété. Je suis d'accord
là-dessus. On passe notre temps à faire des lois pour
démembrer les droits de propriété; on l'a fait dans
différentes lois sur le zonage tant municipal qu'agricole, dans la Loi
sur les biens culturels qu'on a mentionnée tantôt, la loi qu'on
étudie présentement. La Loi sur la conciliation entre locataire
et propriétaire, celle qui existe actuellement, est une loi qui limite
les droits de propriété. Quand on donne des droits, il faut
permettre à la régie de balancer son jugement. Pourquoi le
gouvernement a-t-il si peur d'inscrire des droits pour le propriétaire?
On vous l'a dit hier dans les commentaires d'ouverture. Le député
de Saint-Hyacinthe l'a dit dans ses commentaires et je l'ai dit
également: Pourquoi le gouvernement a-t-il peur d'inscrire dans un
article de loi que le propriétaire, le locateur, a lui aussi des droits?
C'est ça qu'on veut voir inscrire dans la loi. Pourquoi avez-vous peur
de les inscrire?
M. Tardif: Parce qu'il les a de par l'ensemble de nos lois, par
le Code civil, notamment. Deuxièmement, il les a tellement que ce n'est
pas à lui de faire la preuve que la démolition est
justifiée, c'est au locataire qu'incombe le fardeau de la preuve de
démontrer que cette démolition ne devrait pas avoir lieu. Donc,
d'emblée, le législateur dit: Le droit de propriété
est là. Vous avez le droit de démolir, monsieur. C'est à
celui qui s'oppose à la démolition de démontrer que pour
les critères énoncés il ne devrait pas y avoir de
démolition. Le propriétaire n'a pas à faire la preuve
qu'il doit démolir, c'est l'inverse.
Pour moi, la présomption favorable au possesseur, au
propriétaire, elle est là.
M. Fontaine: Oui, mais selon l'article 35 tel que
rédigé, la régie ne sera pas obligée de tenir
compte d'un préjudice qui pourrait être causé au
propriétaire si on n'accorde pas la démolition.
M. Tardif: II est présumé de facto, il est
présumé au départ.
M. Fontaine: Non. M. Tardif: Oui.
M. Fontaine: Ce n'est pas comme ça que la régie va
l'interpréter.
M. Tardif: Oui, le pouvoir de disposer de son bien est
présumé.
M. Fontaine: Ce n'est pas comme ça que la régie va
l'interpréter, j'en suis sûr.
M. Raynauld: J'aimerais intervenir là-dessus, depuis un
bon moment.
Le Président (M. Laberge): C'est à votre tour.
M. Raynauld: En fait, je veux appuyer la position du
député de Nicolet-Yamaska. Je pense qu'on mélange les
choux et les choux-raves sur une grande échelle. D'abord, quand on parle
du pouvoir ou du droit de propriété, on ne peut pas
démembrer les pouvoirs, on limite l'exercice d'un certain droit dans ce
cas-ci. Cet article porte sur l'exercice d'un droit de propriété
et puis on apporte les considérations qui devront guider la régie
lorsqu'elle prendra une décision sur la limitation de l'exercice de ce
droit ou sur la limitation de l'exercice du droit de propriété et
des autres droits qui peuvent être là aussi. Par
conséquent, si le propriétaire pouvait être
lésé par une démolition, cela ne découle pas du
tout de la philosophie générale ou du droit de
propriété que la régie devra tenir compte de ce
préjudice, c'est un article qui dit: Lorsque vous ferez face à
une demande pour limiter l'exercice du droit de propriété,
c'est-à-dire du droit à démolir, voici quels sont les
critères que vous devrez suivre, vous les commissaires, pour juger de
cela.
Voici les critères: L'état du logement, le
préjudice causé au locataire; le préjudice causé au
propriétaire, on n'en parle pas. Par conséquent, ce n'est pas une
question d'économie générale, c'est l'article 35, qui dit
à la régie: Voici quels sont les critères que vous devez
suivre. Qu'on dise que l'économie du projet de loi dans son ensemble, ou
que la philosophie générale du Code civil au Québec permet
un certain droit et que cela aille de soi, je dis que c'est inopérant
aussi longtemps qu'on n'a pas mis dans un article suivant quelles conditions
d'application ces droits seront appliqués.
Dans un cas comme celui-ci, la régie ne doit pas se reporter au
Code civil. Elle doit se reporter au Code civil pour savoir, par exemple, si
un
propriétaire est vraiment propriétaire de son logement et
s'il a bien le droit de demander de démolir. On pourrait peut-être
interpréter cela ainsi. Mais il n'est dit nulle part ici que, lorsque la
régie devra dire: Je m'inspire de l'article 35 pour exercer mon
juqement, il n'est pas dit, que le préjudice causé au
propriétaire doive entrer en ligne de compte. Et tout l'article ici est
un article qui, effectivement, limite l'exercice de ce droit de
propriété. Au contraire, je pense que ce qu'on a dit que le
propriétaire pouvait être lésé, que vraiment, par
définition pratiquement, il avait un intérêt dans
l'affaire, puisqu'il ne l'aurait pas demandé s'il n'avait pas
d'intérêt, c'est évident, tout cela prouve que dans la
décision que la régie devra prendre, elle devra tenir compte de
ce préjudice. Je pense qu'il faut absolument le mentionner.
M. le Président, je voudrais arrêter ici seulement pour
qu'on parle de cela, mais j'aimerais réserver mon droit de parole pour
parler sur d'autres aspects de cet article.
M. Guay: Est-ce que le député me permettrait une
question, M. le Président?
Le Président (M. Laberge): II me semble.
M. Guay: Le député a fait valoir que l'article 35
je suis d'accord avec lui limite l'exercice du droit de
propriété et que, en conséquence, il faudrait y inclure
dans les critères de limitation d'exercice de droit de
propriété, les préjudices causés au
propriétaire. Ce que je ne comprends pas très bien c'est comment
est-ce que le préjudice causé à un propriétaire
peut limiter l'exercice par ce même propriétaire de son droit de
propriété. Cela me paraît l'aberration même.
M. Raynauld: Je ne comprends pas pourquoi il y aurait une
aberration.
M. Guay: Ce que vous êtes en train de nous dire c'est que
le préjudice causé au propriétaire viendrait limiter... En
d'autres mots, parmi les critères, parce que ce sont des critères
qui viennent limiter cet exercice du droit de propriété, si vous
ajoutez le préjudice causé à un propriétaire
pouvez-vous m'expliquer comment le préjudice causé à un
propriétaire peut possiblement limiter l'exercice absolu du droit de ce
propriétaire à disposer de cette propriété?
M. Raynauld: Non.
M. Guay: Oui, mais c'est de cela qu'il s'agit. L'article 35 vise
à énumérer un certain nombre de critères qui
viennent restreindre l'exercice du droit de propriété, d'abuser
de sa propriété, l'abusus, c'est-à-dire d'en disposer
comme bon lui semble, de le détruire s'il le veut. Ce droit est reconnu
dans l'article 33. Vous nous dites: Oui, mais dans l'article 35, voilà
un certain nombre de critères qui viennent restreindre l'exercice de ce
droit. Comment le préjudice causé à un propriétaire
peut...
M. Raynauld: M. le Président... (16 heures)
M. Guay: ... possiblement, limiter l'exercice par ce même
propriétaire de son droit de démolir sa propriété,
voyons donc, c'est un non sens absolu.
M. Raynauld: Ce n'est pas un non sens du tout, je ne vois
pas...
M. Guay: L'amendement que vous suggérez équivaut
à cela. Cela équivaut à dire que le préjudice
causé à un propriétaire pourrait possiblement limiter
l'exercice de son droit de propriété.
M. Raynauld: C'est exactement l'inverse.
M. Goldbloom: Cela ne serait pas un non sens, c'est une
proposition tout à fait valable.
M. Raynauld: II me semble qu'il est clair, clair, clair. Le
propriétaire, lui, pense qu'il a un intérêt à
démolir. Il se présente devant la régie et dit: Je veux
démolir. Là la régie dit: Moi, pour juger de cela, votre
préjudice à vous, je n'en tiens pas compte parce que ce n'est pas
marqué. Au contraire, on donne toute une série de
critères. Donc, à ce moment, automatiquement, on dit: Le
préjudice au propriétaire est une considération non avenue
dans les circonstances, sauf avec ce que le ministre a dit tout à
l'heure, à l'exception de tout autre critère pertinent, mais pour
cela, on pourra y revenir tout à l'heure si c'est cela.
M. Tardif: Mais ce n'est pas le propriétaire. Je voudrais
corriger cela tout de suite. Ce n'est pas le propriétaire qui se
présente devant la régie pour demander un permis de
démolir. Ce n'est pas comme cela que cela se passe. Ce n'est pas le
propriétaire...
M. Raynauld: Comment?
M. Tardif: Non, je m'excuse. Ce n'est pas le propriétaire
qui se présente devant la régie pour demander la permission de
démolir. Est-ce que je peux, parce que c'est important?
M. Raynauld: Là c'est le fardeau de la preuve, c'est un
autre problème.
M. Tardif: Non. La preuve est la démarche aussi. C'est que
la loi dit: Le propriétaire a le droit de démolir, de disposer de
son bien. La loi maintenant établit que la personne qui va être
affectée par cela, qui vit dans l'immeuble, a un recours. D'accord?
Cette personne qui a un recours, c'est à elle, cette personne, de
démontrer que le droit du bonhomme en question devrait être
limité et plutôt que de donner à la régie un pouvoir
totalement discrétionnaire, aucun guide, aucun critère, aucune
balise, les critères énoncés dans l'article 35, ce ne sont
pas des critères pour limiter le droit de propriété, ce
sont des critères pour limiter la discrétion de la régie
dans sa décision d'accorder ou pas la demande. Ce n'est pas du tout
pareil. On dit: Le pouvoir, le droit de propriété est là,
il est
absolu. Le propriétaire fait sa demande de démolition.
Quelqu'un s'objecte et avant de recevoir, si vous voulez, l'objection, on doit
considérer ces facteurs et le faire sérieusement. Je pense que ce
n'est pas du tout la même démarche et la preuve c'est que s'il n'y
a personne qui s'oppose, la démolition a lieu ou s'il y a une entente
à l'amiable entre les parties.
M. Raynauld: Je pense que celui qui prend l'initiative de la
démarche, dans les circonstances, je pense vraiment qu'il s'agit d'un
autre problème. J'admets tout ce que vous avez dit, mais l'un n'exclut
pas l'autre et la preuve de cela, c'est que lorsque dans tout le reste du
projet de loi, maintenant on fait obligation au propriétaire de
justifier l'augmentation du loyer, est-ce qu'à ce moment, on va dire que
les régisseurs n'auront pas à tenir compte des préjudices
des locataires lorsqu'il y aura une hausse de loyer? Renversez l'affaire, vous
voyez bien que cela n'a pas de bon sens. A ce moment, on dit: Plutôt que
de se perdre encore une fois dans des grands raisonnements, je conçois
que l'article 35, c'est l'article sur lequel la régie devra se fonder
pour justifier la décision qu'elle va prendre. Cela n'exclut pas que ce
soit, comme vous avez dit tout à l'heure, que cela vient limiter le
pouvoir discrétionnaire de la régie. Je le conçois
très bien, mais ce n'est pas cela le problème non plus. Le
problème c'est, en vertu de quoi la régie va-t-elle prendre sa
décision? La régie devra prendre sa décision sans
égard au préjudice qui peut être causé au
propriétaire par sa décision d'interdire la démolition. Il
faut s'entendre là-dessus. Autrement, elle ne cause pets de
préjudice.
Si elle autorise la démolition, le propriétaire
était d'accord, il y a quelqu'un qui est venu s'y opposer, la
régie dit: On permet la démolition. Le cas ne se pose pas. Mais
lorsqu'elle interdit la démolition, là elle cause un
préjudice. On dit: Pourquoi ne met-on pas parmi tous les autres, il y a
des préjudices qui sont causés, la régie sera
obligée de dire: Oui, c'est vrai. Il y a préjudice causé
au propriétaire, mais il y a un intérêt supérieur
qui commande que cet édifice ne soit pas démoli et parmi ces
autres intérêts dont la régie doit tenir compte, il y a la
détérioration, par exemple, de l'apparence architecturale.
M. Guay: Justement, la régie devant entendre une cause qui
porte sur le droit du propriétaire de démolir et pouvant porter
effectivement préjudice j'en conviens au
propriétaire, mais pas en vertu des critères qu'elle utilise pour
arriver à sa décision. Le préjudice, c'est la
décision de la régie et non pas les critères qu'elle
utilise.
M. Raynauld: Elle en tient compte.
M. Guay: II se peut que la décision de la régie
porte un préjudice en ce sens qu'elle vienne effectivement restreindre
ou annuler concrètement...
M. Goldbloom: ... au propriétaire.
M. Guay: Oui, mais ce que je veux dire, c'est que le
préjudice parce que quand vous disiez tantôt que cela
n'avait pas de sens, cela avait effectivement du sens ne peut pas
être un des critères retenus par la régie parce qu'il est
impossible que le préjudice causé au propriétaire limite
le droit de ce propriétaire et l'exercice de son droit de
propriété. Le préjudice vient dès lors que la
régie rend un verdict négatif à l'endroit du
propriétaire, donc, a évalué que ces critères sont
plus importants, tout compte fait dans ce cas-là, que le droit du
propriétaire qui est reconnu à l'article 33.
M. Raynauld: Cela marche.
M. Guay: Je ne vois pas pourquoi il faut absolument... Cela
devient un non-sens que de mettre dans des critères un critère
qui n'en est pas possiblement un parce que le préjudice, comme je vous
le dis, vient uniquement de la décision et c'est la décision qui
peut être un préjudice.
M. Goldbloom: Dans les deux cas.
M. Guay: Oui, mais c'est la décision elle-même qui
peut être un préjudice et non pas...
M. Raynauld: C'est toujours comme cela.
M. Guay: Le préjudice au propriétaire
jusqu'à nouvel ordre, il n'y a pas de préjudice jusqu'à ce
que la régie rende sa décision. Il n'y a pas de préjudice.
Il y a un droit.
M. Raynauld: Cela ne fait pas non plus au locataire, tant que la
décision n'est pas rendue.
M. Goldbloom: C'est cela. Il n'y en a pas à l'endroit du
locataire avant...
M. Raynauld: II n'y en a pas.
M. Goldbloom: ... que la décision ne soit rendue.
Le Président (M. Laberge): Un instant, s'il vous
plaît!
M. Goldbloom: C'est la décision qui constitue le
préjudice.
M. Guay: Oui, parce qu'il a le droit de démolir...
Le Président (M. Laberge): A l'ordre!
M. Guay:... et le droit de démolir peut causer un
préjudice au locataire. Il a ce droit-là. Le préjudice
vient uniquement si la régie lui interdit d'exercer ce droit.
M. Tardif: Le préjudice d'un propriétaire vivant
à 3000 milles d'ici contre celui d'un locataire vivant dans l'immeuble
est déplacé. Il faudrait aussi considérer cela.
M. Raynauld: Cela restera à la régie
d'évaluer. Le Président (M. Laberge): A l'ordre! M.
Goldbloom: C'est à évaluer. Le Président (M. Laberge):
A l'ordre!
M. Tardif: Tout autre critère pertinent, cela
m'apparaît assez large pour couvrir cela et c'est là...
M. Goldbloom: Je reviendrai là-dessus.
Le Président (M. Laberge): Messieurs, M. le
député de Saint-Hyacinthe m'a demandé la parole il y a
quelques minutes. Je voudrais la lui accorder pour qu'il nous apporte ses
lumières.
M. Cordeau: M. le Président, j'aurais une question
à poser au ministre. Lorsque la régie aura à se prononcer
sur le besoin de démolir ou non, elle devra attendre pour démolir
un immeuble si un locataire s'est opposé à la démolition.
Elle devra attendre le locataire qui expliquera les raisons pour lesquelles il
s'oppose à la démolition. Pour rendre un jugement, il faut
entendre les deux parties. Le locateur aura-t-il le droit aussi de faire
connaître à la régie les raisons pour lesquelles il
pourrait subir certains préjudices?
M. Tardif: C'est une règle élémentaire de
droit.
M. Cordeau: De droit.
M. Tardif: J'espère que la régie n'aura pas
à le faire à Saint-Hyacinthe.
M. Cordeau: La régie en tiendra-t-elle compte
également?
M. Tardif: Très certainement. Elle n'a pas le choix. Elle
est obligée.
M. Cordeau: Alors, pourquoi ne pas l'inscrire dans le projet de
loi?
M. Tardif: J'espère que la régie n'aura pas
à le faire à Saint-Hyacinthe puisqu'un règlement
municipal, sans aucun doute, sera adopté à Saint-Hyacinthe et que
la régie n'a pas...
M. Guay: ... des affaires municipales.
M. Cordeau: Probablement. J'espère que votre souhait va
être réalisé, mais entre-temps...
M. Guay: Ni à Verdun d'ailleurs. M. Tardif: A
Verdun.
M. Cordeau:... pourquoi ne pas l'inscrire? On dit: "Les
préjudices causés au locataire." Pourquoi ne pas inscrire aussi
dans le projet de loi "...et également au locateur."? Ce seront des
critères dont la régie devra tenir compte.
M. Tardif: Mais M. le Président...
M. Cordeau: On dit: "Le préjudice des locataires..." mais
on ne dit pas: "Le préjudice des locateurs".
M. Tardif:... au sujet de la question du député de
Saint-Hyacinthe, je l'inviterais à lire l'article 63, dernier
alinéa qui dit: "Chaque partie expose ses prétentions et
présente ses témoins."
M. Fontaine: Si la régie n'en tient pas compte, cela ne
donne pas grand-chose.
M. Tardif: Ecoutez! Vraiment! De la part d'un membre du barreau,
avocat, de la profession juridique, venir me dire que les tribunaux ne
tiendraient pas compte de la preuve présentée, vraiment, ce
sont...
M. Fontaine: Mettez-le dans la loi et ils vont en tenir compte.
Si vous ne le mettez pas, ils n'en tiendront pas compte.
M. Tardif: ... les fondements de notre système
juridique.
M. Guay: Si le député de Nicolet-Yamaska n'est pas
d'accord qu'en vertu de...
M. Fontaine: C'est bien beau faire des farces, mais...
M. Guay: ... la règle de 1963 audi alteram partem, en
vertu de cela, la régie va entendre le propriétaire venir dire
pourquoi il doit exercer son droit.
M. Fontaine: C'est bien beau faire... On peut apporter toutes les
preuves qu'on veut devant un tribunal, mais si le juge n'en tient pas compte de
la preuve qu'on apporte, parce que la loi lui interdit de le faire, c'est une
autre paire de manches.
M. Guay: Mais la loi ne le lui interdit pas. Il a le droit de
démolir. Il vient dire à la régie pourquoi il doit exercer
ce droit, pourquoi il est important, impérieux pour lui d'exercer ce
droit. Ce droit est reconnu à l'article 33. Il vient dire à la
régie pourquoi il devrait exercer ce droit. Le juge va l'entendre. C'est
bien sûr qu'il va l'évaluer. Il est reconnu, ce droit. C'est un
droit. La seule chose, c'est qu'il peut être restreint ou même
annulé le cas échéant par les critères de l'article
35. Mais les critères de l'article 35, c'est ce qui vient restreindre le
droit du propriétaire.
M. Cordeau:...
M. Fontaine: C'est pour vous dire que l'entêtement du
gouvernement à ne pas l'inscrire, c'est, en fait, vouloir prendre partie
pour les locataires.
M. Tardif: Là, de la part d'un avocat, membre du barreau,
cela me dépasse.
M. Fontaine: Vous me dites cela toutes les fois que vous me
répondez: Un avocat qui dit cela. Oui.
M. Tardif: Ecoutez! Je n'ai pas besoin de vous donner...
M. Fontaine: Je suis ici en tant que député et
parlez-moi en tant que député.
M. Tardif: Ecoutez! Ce n'est pas à moi à faire un
cours de droit ici, mais je pense que c'est assez clair...
M. Fontaine: Vous auriez de la misère à en faire
un.
M. Tardif:... que, de la part de tous les juristes ici
présents, et d'ailleurs également, on n'a pas ici à
augmenter le droit de propriété qui existe. Je pense que cela est
une chose élémentaire.
M. Fontaine: Oui.
M. Tardif: Qu'on veuille faire de la démagogie avec cela,
qu'on veuille se faire passer pour l'apôtre de la
propriété, de la libre entreprise et de tout ce que vous voudrez,
nous en sommes également. Mais il n'est pas question de cela ici et
c'est vraiment chercher des problèmes et des difficultés
là où il n'y en a pas. Là-dessus, M. le Président,
s'il n'y a pas d'autres problèmes, je vais demander qu'on vote sur cet
article-là dès maintenant.
Une Voix: Très bien.
M. Fontaine: Un instant.
M. Goldbloom: M. le Président.
M. Tardif: Je suis prêt à discuter...
M. Fontaine: On peut apporter des amendements. On est encore en
démocratie, j'espère.
M. Goldbloom: M. le Président...
M. Tardif: ... de choses sérieusement. Mais dès
lors qu'on brandit des épouvantails, alors qu'il n'y en a pas...
M. Fontaine: Vous n'en voyez pas...
M. Tardif: Alors, si on veut...
M. Fontaine:... et vous ne voulez pas en voir.
M. Tardif: ... suspendre cet article pour aller se renseigner du
point de vue strictement juridique, je suis prêt à le faire.
Une Voix: Ce serait une bonne suggestion.
M. Tardif: Nous avons nos renseignements sur le plan juridique.
Je me fie aux légistes qui ont travaillé là-dessus et qui
nous disent qu'une addition de cette nature viendrait même...
Une Voix: Réduire.
M. Tardif: ... réduire le droit de
propriété.
M. Fontaine: Au contraire.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee avait demandé la parole. Je pense que cela va aider tout le
monde à se calmer.
M. Goldbloom: M. le Président...
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: Je suis convaincu que le ministre a permis à
ses paroles de dépasser sa pensée quand il a demandé le
vote immédiatement, parce qu'il y a quand même une discussion
calme et sérieuse que l'on doit poursuivre sur cet article.
M. le Président, le ministre et ses collègues disent: Le
droit du propriétaire est déjà là dans la loi et,
parce qu'il est là dans la loi, il n'est pas nécessaire de le
mentionner de nouveau à l'article 35. C'est là où je ne
suis pas d'accord.
Si l'insistance du gouvernement est sur le fait que le droit existe
déjà dans la loi, je ne vois pas de mal à ce que mention
en soit faite à l'article 35. C'est la première chose. D'autant
plus que le premier argument offert par le ministre à l'encontre de ma
suggestion a été que mention est déjà faite dans
les mots "et tout autre critère pertinent", mais, a-t-il dit en quelque
sorte, je ne veux pas le dire en autant de mots. De deux choses l'une, M. le
Président, ou les préjudices possibles à l'endroit du
propriétaire sont reconnus dans l'article 35 comme critère dont
la régie devra tenir compte, ou ces préjudices ne le sont pas. Si
non, très bien, disons-le carrément. Si oui, et si l'on dit:
C'est parce qu'il y a les mots "et tout autre critère pertinent"... Il
faudrait dire que quelque chose est implicite est reconnaître que l'on
pourrait l'exprimer en autant de mots de façon explicite dans le
même article.
M. le Président, là où les paroles du ministre ont
dépassé sa pensée, à mon avis, c'est là
où il a prêté à l'Opposition une volonté,
caractérisée hier par le député de Taschereau de
fétichisme de l'entreprise privée, de défendre
l'intérêt du propriétaire à tout prix. Non, pas du
tout, M. le Président. La proposition n'est pas de renforcer ou de
protéger davantage le droit du propriétaire. Elle n'est pas
d'imposer des contraintes plus sévères à l'exercice par le
locataire de son droit d'appel devant la régie. (16 h 15)
Mais l'article 35 est une directive donnée par le
législateur à la régie et la régie, tenant
compte
du texte éventuel de cette loi quand elle aura été
adoptée et sanctionnée, l'examinera à la loupe pour se
demander de quelle façon devrons-nous, les régisseurs, exercer
notre fonction.
Par rapport à ce genre de décision, les régisseurs
vont regarder l'article 35 et vont se demander: De quoi devrons-nous tenir
compte? Je peux m'imaginer, M. le Président, et ce n'est pas une
exagération que je veux faire, je veux être pratique... Il me
semble logique que la régie produise un formulaire et, sur ce
formulaire, chacun des éléments mentionnés à
l'article 35 trouverait sa case. Il me semblerait possible que la régie
établisse même des valeurs mathématiques à ces
éléments, qu'une liste soit faite et que l'on accorde tant de
points pour l'état du logement, tant de points pour les
préjudices possibles à l'égard des locataires, tant de
points pour les besoins de logements dans les environs, et tout cela. L'on
additionnerait tout cela, l'on arriverait à un chiffre et l'on dirait:
Ce chiffre dépasse le chiffre x établi comme critère
global pour accorder ou refuser la démolition et l'on dirait: Bien,
c'est dommage, le total dépasse le seuil que nous avions établi
et, pour cette raison, nous refusons la démolition.
S'il n'y a pas de case pour l'intérêt du
propriétaire, s'il n'y a pas de soustraction qui peut être faite
de ce total de calcul et surtout si la régie, regardant l'article 35,
dit: Nous devons tenir compte de telle chose, telle chose et telle chose, mais
qu'aucune mention n'est faite du préjudice possible à
l'égard du propriétaire sauf qu'il y a un sac dans lequel on peut
mettre n'importe quoi, qui s'appelle "tout autre critère pertinent"; il
me semble, M. le Président, que cette directive donnée par
l'article 35 devrait normalement, comme toute directive donnée par le
législateur à un tribunal, se résumer en deux mots: Soyez
justes, bien, il me semble que l'expression de ce critère fondamental
"Soyez justes" n'est pas traduit par le déséquilibre que je
trouve dans la rédaction actuelle de l'article 35.
Je reviens au début de mes remarques. Puisque le ministre et ses
collègues nous disent: Le droit du propriétaire est
déjà reconnu dans la loi, ils devraient ajouter: Mais nous ne
voulons pas l'exprimer en autant de mots à l'article 35. Puisque le
ministre et ses collègues nous disent: Le préjudice, possible
à l'égard du propriétaire est mentionné parce que
les mots "et tout autre critère pertinent" paraissent à la fin de
l'article, ils devraient ajouter: Mais nous ne voulons pas l'exprimer en autant
de mots. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Vous avez pris exactement les
20 minutes auxquelles vous aviez droit, en cinq occasions. Vous êtes
comme un... M. le député de Rosemont, vous m'aviez demandé
la parole.
M. Paquette: Bien, M. le Président, je vous avoue que j'ai
de la misère à voir où est le débat
là-dedans. Il me semble qu'avec une formulation ou l'autre, on arrive
à peu près au même résultat, c'est-à-dire
qu'il y a un droit lié au droit de propriété qui est
reconnu de démolition d'un logement, mais ce droit est limité par
des critères qui sont les besoins des individus en cause et les besoins
communautaires en termes de trame urbaine, d'apparence architecturale, de
qualité de vie, tout cela.
Le débat n'est pas nécessairement entre les besoins du
locataire et les besoins du propriétaire uniquement. Il y a aussi tous
les besoins de la communauté environnante qui sont en cause. Puis, il me
semble qu'avec l'une ou l'autre formulation l'on arrive au même
résultat. Je vous avoue que, personnellement, j'aurais tendance à
me fier à des avis juridiques en termes de rédaction. Qu'est-ce
qui est le plus clair? Je me demande si on ne devrait pas tout simplement
reformuler l'article 35 en disant: Avant de se prononcer sur une demande, la
régie soupèse les intérêts individuels et les
intérêts communautaires en cause, notamment. Il me semble que ce
serait peut-être plus clair comme cela. Il me semble que c'est ce que la
régie doit faire: regarder si le patrimoine, si le stock de logements
doit être maintenu. C'est essentiellement un débat entre les
droits collectifs des citoyens, de la communauté, et les besoins
individuels et des locataires et du propriétaire. C'est ce qui est en
cause dans la décision de la régie. Je vous avoue que, pour moi,
cela m'apparaît largement un faux débat et je me demande si on ne
devrait pas suspendre l'article et y réfléchir à
nouveau.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce.
M. Scowen: M. le Président, merci. Je suis prêt
à élargir le débat sur l'article 35 un peu parce que j'ai
deux ou trois autres questions que je veux poser. Ayant suivi attentivement le
débat ici, je veux simplement ajouter une autre perspective qui peut
légèrement aider l'affaire. Je pense que la préoccupation
de notre côté c'est que je parle maintenant en profane, je
ne suis pas juriste, j'essaie d'appliquer le gros bon sens des Cantons de l'Est
dans ces cas le tribunal est, finalement, dans le domaine des
comparaisons. Il est obligé de comparer les préjudices d'un
côté et les préjudices d'un autre ou, si vous voulez, les
droits d'un côté et le préjudices d'un autre. Je pense que
c'est parce que les critères de comparaison n'étaient pas
explicites dans cet article que le problème est soulevé.
A titre d'illustration simplement, parce que ce n'est pas une
proposition d'amendement, si on disait: Avant de se prononcer sur une demande,
la régie compare d'un côté le préjudice causé
au propriétaire tenant compte de son droit de propriété,
et les autres critères. Nous serons en mesure d'illustrer en effet ce
que les deux côtés ont l'intention d'exprimer, ce que les deux
côtés veulent vraiment.
Je me demande, à titre d'exemple, si on changeait l'article 35
pour quelque chose comme le suivant, si on pourrait régler le cas.
"Avant de se
prononcer sur le droit du propriétaire de démolir le
logement en question, la régie considère..." et ainsi va suivre
une liste des critères incluant le préjudice causé au
locataire. On commence avec quelque chose plus explicite qui démontre
dans l'article que ce droit que vous avez tenu pour acquis et moi
j'accepte votre raisonnement qui était dans un préambule,
si vous voulez, avant de se prononcer sur le droit du propriétaire de
démolir le logement en question, d'un autre côté on va le
comparer avec tel et tel critère. Je le suggère simplement
à titre d'exemple parce que je pense que cela rejoint un peu...
M. Paquette: Est-ce que je peux vous poser une question?
Supposons qu'on prenne votre formulation: La régie doit comparer
je n'ai pas la formulation...
M. Scowen: Je n'ai pas le mot "comparer"... M. Paquette:
Ah! bon.
M. Scowen: ... dans ma proposition d'amendement. J'ai
donné cette idée de comparaison simplement à titre
d'exemple.
M. Paquette: Et dans les critères que la régie doit
prendre en considération et confronter avec l'intention de
démolition du propriétaire, vous mettriez en gros ceux qui sont
là. Vous ne sentez pas le besoin d'indiquer le préjudice
causé au propriétaire.
M. Scowen: Non.
M. Paquette: Bon! Alors, je vous dis...
M. Scowen: C'est ma suggestion qu'on va
répéter.
M. Paquette: ... qu'à ce moment-là, vous donnez
raison aux interprétations qui ont été faites de ce
côté-ci de la table. Cela est déjà implicite avec
les autres articles.
M. Scowen: Je n'ai pas dit que les arguments qui ont
été soulevés de votre côté sont sans
fondement. Je pense qu'il y a quelque chose là-dedans. Tout ce que je
voulais suggérer, c'était l'idée d'insérer dans
l'article une répétition si vous voulez de ce que
vous avez constaté et qui existe: les droits du propriétaire de
démolir. En effet, ce que je propose je vais le
répéter c'est ceci: Avant de se prononcer sur le droit du
propriétaire de démolir le logement en question, la régie
va considérer... Je ne suis pas persuadé que c'est la solution,
mais...
M. Tardif: D'accord. C'est intéressant et je voudrais bien
qu'on regarde cette approche, sauf que la régie ne se prononce pas sur
le droit du propriétaire de démolir son logement.
Une Voix: II l'a.
M. Tardif: II l'a. D'accord? Il faut peut-être essayer de
trouver une autre formulation qui puisse atteindre cet objectif-là, mais
la régie ne se prononce pas sur ce droit-là, il l'a.
M. Scowen: Mais cela s'exprime un peu au moins au coeur du
débat parce que je pense que...
Une Voix: ...
M. Paquette: C'est cela.
M. Scowen: Vous dites que c'est déjà là.
Nous disons que cela n'est pas explicite. Si on peut trouver un mot afin
d'expliciter ce qui est là sans qu'on mette dans...
M. Paquette: Si on disait: Avant de se prononcer sur une demande
visant à limiter le droit.
M. Guay: Ils ne disent pas cela. Il faut quand même se
référer à...
M. Scowen: Comme cela.
M. Paquette: Oui, une demande du locataire visant à
limiter.
M. Guay: Oui, mais lis l'article 34 ensuite.
M. Fontaine: La formulation du député de D'Arcy
McGee serait idéale.
M. Tardif: Je pense que...
M. Guay: C'est un article de droit, ce n'est pas...
M. Tardif: ... rédiger sur le coin de la table avec les
indications que ceci peut avoir dans d'autres lois, je
préférerais, dans ces circonstances je ne forcerai pas les
choses qu'on suspende l'étude de cet article pour essayer de
concocter une formulation qui tente de rejoindre les objectifs que nous
poursuivons tous.
M. Guay: Juste avant la suspension. M. Tardif: Soyez
justes, mes frères.
M. Scowen: M. le Président, est-ce que je peux
continuer?
Une Voix: ...
M. Guay: Juste là-dessus.
Le Président (M. Laberge): Un instant.
M. Tardif: Est-ce que vous avez quelque chose d'écrit
là-dessus? Pardon, M. le Président, est-ce que je peux demander,
par votre entremise, au député de Notre-Dame-de-Grâce s'il
a quelque chose d'écrit? Vous pourriez nous remettre une...
Le Président (M. Laberge): D'après ce que j'ai
compris jusqu'ici, il a fait une suggestion de modification, mais il ne m'a pas
déposé d'amendement.
M. Tardif: Je suis sûr qu'il voudra peut-être essayer
de...
M. Scowen: Je peux répéter ma suggestion...
Le Président (M. Laberge): II collaborera
probablement.
M. Scowen: ... qui n'est pas très éloignée
de celle du député de Rosemont. C'est l'esprit qu'on recherche et
je ne sais pas du tout si mes collègues sont d'accord, mais c'est sous
toute réserve, on n'a pas tenu un caucus là-dessus: Avant de se
prononcer sur le droit du propriétaire de démolir le logement en
question. Vous avez dit que le droit existe. Je reconnais que ma proposition
n'est pas valable dans ce sens, mais pour vous expliquer l'esprit d'inclure
dans le préambule de cette phrase une répétition du fait
qu'il existe ce préjudice causé au propriétaire qui
pourrait être dit d'une façon par "un droit au
propriétaire", si vous voulez. Alors, les deux formulations ne sont pas
exactement les mêmes, mais elles sont très liées dans les
faits parce que je suis persuadé que, dans les faits, le juge sera
obligé de comparer les préjudices des deux côtés.
C'est cela qu'il va faire: il va faire la comparaison. Si on pouvait
écrire une phrase, une expression dans la première partie qui
répète, si vous voulez, l'existence de ce droit ou la
possibilité d'un préjudice contre le propriétaire parce
que cela existe...
M. Tardif: M. le Président, j'accepte qu'on suspende.
M. Guay: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Taschereau.
M. Guay: Brièvement. J'aime mieux l'approche je
dois dire au député de Notre-Dame-de-Grâce que celle
du député de D'Arcy McGee, sauf tout le respect que je lui dois,
pour les raisons suivantes.
Une Voix: ...
M. Guay: Oui. Pour les raisons suivantes: Si on lit les articles
33, 34 et 35, le premier paragraphe de l'article 33 énonce le principe
juridique, le droit à la démolition. Le deuxième
paragraphe énonce la procédure; il porte sur la procédure;
il faut qu'il envoie un avis. Le premier paragraphe de l'article 34
énonce, en fait, la procédure également, mais la
procédure dans l'autre sens. Que peut faire le locataire sur le plan,
qu'est-ce qu'il y a comme procédure? A ce moment-là, l'article 35
est, en quelque sorte, le principe opposé ou le principe qui nuance le
premier paragraphe de l'article 33. (16 h 30)
Le premier paragraphe de l'article 33 et l'article 35 cela demeure,
jusqu'à un certain point, de la procédure. Peut-être que la
numérotation pourrait être faite autrement. Le principe juridique,
le premier paragraphe de l'article 33, sa nuance, c'est le paragraphe de
l'article 35 Dans l'article 35, ce qu'on cherche à faire, c'est de dire:
A l'appui, en quelque sorte, de la demande de se prononcer sur
l'opportunité de démolir. La défense si on peut l'appeler
ainsi, au fait, cela se trouve à être la poursuite, peut
évoquer et la régie doit donc considérer ces
éléments. Mais elle ne peut pas considérer, elle ne peut
pas avoir, d'une part, de propriétaire qui, comme partie devant la
régie, ayant été convoqué devant la régie
grâce à la demande du locataire qui vient énoncer son droit
de propriété et dire pourquoi il doit l'exercer, trouver
également dans l'argumentation opposée dans l'article 35 le
même intérêt. En d'autres mots, l'intérêt du
propriétaire se retrouverait aux deux endroits. Il est
déjà à un endroit et c'est pourquoi il me semble que la
preuve du député de Notre-Dame-de-Grâce va plus dans le
sens de l'économie dans le cas de ces trois articles.
Si la première ligne de l'article 35 se lisait quelque chose
comme avant de se prononcer sur l'opportunité de démolir
puisqu'il s'agit de cela ici, c'est la demande, c'est cela, la demande qui est
faite par le locataire, c'est une demande sur l'opportunité de
démolir. Le droit de démolir est là. Le
propriétaire va venir dire pourquoi c'est opportun effectivement qu'il
démolisse. On ne peut pas mettre l'avantage du propriétaire comme
argument du côté du propriétaire et le
répéter ensuite comme argument au fond du côté du
locataire parce qu'on se trouve à avoir le même argument deux fois
de suite et si on introduisait l'élément que veut introduire le
député de D'Arcy McGee dans l'article 35, aussi bien abolir
l'article 35 puisque le préjugé causé au
propriétaire, s'il prend considération au même titre que
les autres, il prend en considération en défense en quelque sorte
ou à l'encontre de l'idée de démolir. Cela vient quasiment
annuler l'article alors que si on fait une introduction du genre que
propose...
M. Tardif: Mon confrère savant juriste...
Le Président (M. Laberge): Un instant. J'ai justement une
demande de droit de parole du député de Rosemont, du
député de Nicolet-Yamaska et du député de
Drummond.
M. Fontaine: M. le Président...
M. Scowen: Question de règlement.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce sur une question de règlement.
M. Scowen: J'aurais simplement d'autres sujets à aborder
touchant l'article 35. Je pose la question seulement. Est-ce qu'on veut laisser
au ministre le temps nécessaire pour reformuler quelque chose? Est-ce
qu'on doit continuer le débat
sur le point en question? Est-ce que je dois continuer mon intervention
sur les autres aspects de cet article que je trouve aussi importants. Je vous
pose la question si on va rester sur cette question et donner plus
d'argumentation, argumenter plus le ministre dans ce point précis? Bien
sûr, je cède la parole à un autre, sinon, je veux continuer
sur les autres aspects.
M. Tardif: M. le Président, je croyais que
c'étaient les seules modifications apportées à l'article
35. Il est bien évident que s'il y en a d'autres, j'aimerais les
entendre avant qu'on s'escrime autour d'un nouveau texte. Maintenant, avant
d'aborder d'autres aspects de l'article 35, s'il y a encore une ou deux
interventions, c'est vous qui êtes maître, M. le Président,
sur ce point, après quoi peut-être que nous pourrions entendre les
autres points reliés à l'article 35 et là, nous, on va
prendre cela et on va essayer de faire nos devoirs.
Le Président (M. Laberge): J'aimerais savoir si le
député de Drummond avait des suggestions additionnelles?
M. Clair: M. le Président, la question qu'on a mise au
point qui pourrait peut-être éventuellement régler la
situation...
Le Président (M. Laberge): Je crois que le ministre
voudrait l'entendre.
M. Clair: Je soumets au ministre simplement, on pourrait libeller
le début de l'article 35 comme suit: Avant de permettre l'exercice du
droit prévu à l'article 33, la régie considère,
etc.
M. Tardif: C'est élégant. Cela ne nous embarque pas
dans des... Cela reconnaît que c'est un droit... Permet l'exercice du
droit prévu à l'article 33: La régie doit... On ne
répète pas tout le Code civil.
M. Raynauld: M. le Président, j'ai toujours tiqué
lorsque mes savants confrères me disent que l'article 33, c'est le
principe. L'article 33 donne un pouvoir au locateur d'évincer un
locataire pour démolir, mais c'est d'abord un pouvoir...
M. Guay: II faut démolir.
M. Raynauld: II faut démolir, mais c'est d'abord un
pouvoir d'évincer un locataire.
M. Guay: On le trouve ailleurs, ce pouvoir-là.
M. Raynauld: Ah! Donnez-le moi ailleurs, mais à ce
moment-là, ce n'est pas l'article 33.
M. Guay: Non, non. Le pouvoir d'évincer existe ailleurs
pour d'autres raisons.
M. Raynauld: Je comprends, mais je veux dire...
M. Guay: Là, c'est pour le motif de démolition.
M. Raynauld: Oui, mais...
M. Guay: Le pouvoir d'évincer, par exemple, pour y loger
son père ou sa mère, existe ailleurs.
M. Raynauld: Je comprends, mais je pense que strictement parlant
l'article 33 énonce un principe qui se rapporte à une
circonstance particulière en ce qui concerne la démolition d'un
logement. C'est pour évincer un locataire. Je ne pense pas qu'on puisse
dire que l'article 33 est un principe qui sanctionne l'existence d'un droit de
démolir. Implicitement, oui, mais...
M. Tardif: M. le Président...
M. Raynauld: Le locateur peut évincer le locataire. Si,
justement, il n'y a pas de locataires...
M. Paquette: S'il n'y a pas de locataires dans la
bâtisse.
M. Tardif: II n'y a pas de problème. La démolition
a lieu.
M. Guay: II a le droit d'abuser de sa propriété en
vertu du...
M. Raynauld: Pas en vertu de l'article 33. Il faudrait que ce
soit ailleurs.
M. Clair: M. le Président, le Code civil continue à
s'appliquer.
M. Guay: II a toujours le droit de... M. Clair: On
dit...
M. Tardif: Je m'excuse. Je voudrais quand même qu'on situe
cet article à l'intérieur de la section 2, "Dispositions
particulières de la conservation des logements 1, démolition d'un
logement". Cet article doit se lire dans le contexte de cette section et s'il
n'y a aucun locataire qui s'oppose à la démolition, celle-ci a
lieu.
M. Raynauld: Je suis bien disposé à faire confiance
aux juristes dans ces matières. Je ne veux pas continuer le
débat; si les juristes sont d'accord sur une formule ou sur l'autre, je
me rallierai. Je voulais cependant peut-être je ne sais pas si
c'est le moment soulever quelques questions plus générales
à propos de cet article 35. Il me semble que ce serait important si le
ministre veut examiner les différents autres aspects relatifs à
cet article.
La première chose que je voudrais dire là-dessus, c'est
que je suis entièrement d'accord pour reconnaître la
nécessité d'avoir des garde-fous et d'avoir des limites à
la démolition comme je me suis toujours prononcé en faveur de
règles d'aménagement urbain dans le passé. Mais je
voudrais
faire remarquer en particulier au député de Taschereau que
la liberté absolue qui a existé jusqu'à maintenant
en tout cas, jusqu'à quelques années en matière de
démolition, je voudrais lui faire remarquer que la même
liberté absolue a existé pour construire des choses et je ne suis
pas prêt à penser que l'intérêt public consiste
toujours à empêcher la démolition d'un logement. On
pourrait se trouver dans des situations où l'intérêt public
commanderait qu'on démolisse. On a laissé effectivement
construire n'importe quoi, n'importe où et on a l'impression à
lire un article comme celui-ci que l'intérêt public est presque
toujours identifié à l'arrêt de la démolition de
logements tandis que...
M. Clair: L'impression seulement.
M. Raynauld: Justement, on revient un peu à ce qu'on vient
de dire tout à l'heure. On dit: Le propriétaire a le droit de
démolir. Par conséquent... Mais on ne dit pas qu'il pourrait y
avoir un intérêt public à ce qu'un propriétaire
démolisse. On le laisse comme cela. On dit: Le droit existe en principe.
Par conséquent, on n'a pas besoin d'en parler. Là, on en parle
seulement d'un côté. On dit qu'est-ce qu'on fait si on veut
empêcher la démolition. Or, je pense qu'il y aurait beaucoup de
circonstances où il serait avantageux et dans l'intérêt
public de démolir des comptoirs de patates frites ou des taudis infects
qu'on veut transformer trop rapidement au Québec et bien souvent, en
monuments historiques. Je pense qu'il va falloir prendre quelques distances
vis-à-vis de ces choses-là. Je pense que dans l'opinion publique,
à l'heure actuelle, il y a une force, il y a une dynamique qui fait
qu'à chaque fois qu'on touche à un logement, ah! on touche au
patrimoine et on touche à des choses fondamentales. Je dis qu'il
faudrait peut-être, là aussi, retrouver un certain
équilibre. Je ne vois pas cet équilibre dans l'article 35, mais
je n'ai pas de suggestion concrète à offrir puisque j'admets la
nécessité qu'on puisse juger de cas particuliers et qu'on ait des
pouvoirs pour le faire.
La deuxième chose, là non plus, ce n'est pas une
suggestion pour changer l'article, mais je le trouve curieux et je ne sais pas
si on lit cet article de la même façon. Le deuxième
paragraphe qui a été ajouté, c'est un paragraphe
où, somme toute, on dit: La démolition est déjà
interdite. Là, on se donne une double assurance que la régie ne
va pas permettre une démolition qui a été interdite en
vertu de... C'est cela que ce paragraphe fait. On dit, que la régie ne
peut pas autoriser la démolition d'un immeuble dont la démolition
a déjà été interdite.
M. Tardif: Sur lequel il y a un gel en vertu de la Loi des biens
culturels.
M. Raynauld: Oui, un gel disons de douze mois.
C'est cela, un gel de douze mois. Ce que je trouve un peu curieux, c'est ceci:
Lorsque la municipalité aura permis la démolition, à ce
moment-là, il n'y aura pas de recours puisqu'on a dit que lorsqu'il y
avait un règlement municipal, à ce moment-là, c'est la
municipalité qui prend sa responsabilité.
M. Tardif: Oui.
M. Guay: Je l'ai trouvé plus loin.
M. Tardif: Le recours s'exerce au niveau de la
municipalité. Dès qu'il y a un règlement municipal, le
recours s'exerce au niveau de la municipalité.
M. Raynauld: Mais la régie ne se prononce pas.
M. Tardif: Elle ne se prononce plus, autrement que sur
l'indemnité possible au locataire évincé, mais c'est tout.
Elle ne se prononce plus du tout sur le fond de la question.
M. Raynauld: Mais comment se fait-il qu'on se sente obligé
de dire dans ce paragraphe que la régie ne peut pas autoriser une
démolition qui a déjà été interdite?
M. Tardif: Mais ce n'est pas en vertu de la même loi et ce
n'est pas une interdiction.
M. Raynauld: Non, je comprends.
M. Tardif: C'est en vertu de la Loi des biens culturels...
M. Raynauld: Oui.
M. Tardif: ... les pouvoirs qu'ont les municipalités pour
des fins de préservation. J'ai lu l'article tantôt.
M. Raynauld: Oui, j'ai compris cela.
M. Tardif: Si une instance, à savoir qu'une
municipalité en vertu de ses pouvoirs a décrété un
gel sur ces biens qui ont une valeur historique et pour la protection du
patrimoine...
M. Raynauld: Oui.
M. Tardif: ... on dit qu'il serait tout à fait inconvenant
qu'une autre instance se prononce sur cette démolition.
M. Raynauld: Oui.
M. Tardif: A ce moment-là, s'il y a cette procédure
au niveau de la municipalité, on dit que cette procédure prime au
niveau local. C'est le principe de l'autonomie locale ici qui est
consacré.
M. Raynauld: Oui. Lorsque la municipalité permet la
démolition, vous dites que le recours se fait au niveau de la
municipalité.
M. Tardif: C'est cela. C'est elle qui décide.
M. Raynauld: A ce moment-là, la régie...
M. Tardif: Elle n'a plus d'affaires là-dedans, sauf pour
ce qui est du relogement ou de l'indemnité au locataire. Point.
M. Raynauld: Je ne comprends pas. En tout cas... Je laisse tomber
celui-là, je ne comprends pas exactement. Le troisième
commentaire est un commentaire qui va dans le sens de ce que mon
collègue tout à l'heure a dit. Est-ce qu'on n'élargit pas
considérablement ce qui était déjà prévu
dans la Loi sur les biens culturels lorsqu'on parle de
détérioration de l'apparence architecturale, du caractère
esthétique ou de la qualité de vie du voisinage? Est-ce qu'on est
bien certain qu'on ne va pas causer effectivement des préjudices
considérables sans que vraiment cela soit exigible en vertu d'une loi
qui a été créée justement pour faire cela?
M. Tardif: Une chose, M. le Président, avec votre
permission.
M. Raynauld: Oui, mais on l'étend. Il me semble qu'on
étend énormément la portée.
M. Tardif: Oui, c'est vrai, M. le Président. En vertu de
la Loi des biens culturels, un monument, un immeuble peut être
classé monument historique et cela est une fin. Il existe cependant des
immeubles qu'il convient de préserver dans un quartier, dans un
arrondissement sans que ce soient des immeubles qui doivent être
classés monuments historiques. Je me souviens de la ville de
Montréal à remarquer qu'en cela nous nous sommes
inspirés de la réglementation de la ville où sur la
rue Saint-Hubert, au coin de la rue DeMontigny, l'hôtel Royal Roussillon
voulait démolir un certain nombre d'immeubles de la rue Saint-Hubert
pour, d'une part, s'agrandir et, d'autre part, faire un terrain de
stationnement. Tous les services de la ville de Montréal étaient
tout à fait opposés à une telle démolition de ces
immeubles qui, sans être des monuments à classer, gardaient ou
donnaient à cette rue et à cet endroit un caractère
architectural et esthétique qui aurait été
complètement détruit par ce trou qui aurait été un
parc de stationnement. (16 h 45)
De nombreux exemples nous ont été fournis par la ville
des exemples semblables et c'est vrai que c'est un
élargissement. C'est voulu. Les municipalités qui adopteront un
règlement décideront vraiment si elles préfèrent
conserver ce caractère résidentiel à certains quartiers ou
à des rues ou les convertir en terrains de stationnement ou en immeubles
en béton. Ce sera une décision que les autorités
municipales prendront. Ce n'est, ces articles-là, qu'en cas de
non-intervention des municipalités, c'est-à-dire que, si elles ne
voulaient pas adopter un règlement, à ce moment-là, la
régie pourrait en être saisie. C'est vrai que c'est un
élargissement et pour ces raisons-là.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
D'Arcy McGee.
M. Goldbloom: M. le Président, vous avez
déclaré que mon temps de parole était épuisé
sur cet article. Puis-je demander le consentement des membres de cette
commission pour une minute additionnelle?
Une Voix: Consentement.
M. Goldbloom: J'aimerais revenir à une suggestion...
Le Président (M. Laberge): Je participe au
consentement.
M. Goldbloom: ... que j'ai faite et donner une raison
additionnelle pour la justifier. C'est que l'article se lise: "les
préjudices possibles". Il y a d'autres intérêts; je veux en
donner un exemple, et c'est un exemple que je connais pertinemment.
Un immeuble a été démoli. Le lot demeure vacant.
C'est depuis maintenant trois années que le lot demeure vacant. Le
propriétaire qui a obtenu l'autorisation de démolir n'a pas par
la suite trouvé un nouveau locataire. Il s'agit ici d'un immeuble
commercial, mais la même situation vaudrait pour un immeuble à
caractère résidentiel parce que ce n'est pas la destination de
l'immeuble qui est en jeu. Le fait est que le lot demeure vacant et que les
voisins subissent un préjudice important parce que leurs frais de
chauffage sont beaucoup plus importants; il s'agit d'une rue où les
immeubles sont en rangée. S'il y avait un immeuble entre les deux
autres, de chaque côté, le coût du chauffage et le confort
de ces personnes... Parce que, même en payant plus cher le chauffage, ce
n'est pas très confortable d'être dans des immeubles de chaque
côté en hiver. Il me semble que c'est un préjudice dont on
devrait tenir compte également. Pour cette raison, j'aimerais
suggérer la formulation "des préjudices possibles".
M. Guay: M. le Président, là-dessus, je ferai
remarquer au député de D'Arcy McGee que la qualité de vie
du voisinage est un des critères qui est prévu. C'est
marqué à l'avant-dernière ligne, "la qualité de vie
du voisinage". C'est exactement ce à quoi il fait allusion.
M. Goldbloom: C'est toujours la même chose. Les
ministériels invoquent une expression d'ordre général pour
refuser de préciser quelque chose.
M. Guay: Essayez donc de préciser davantage
"qualité de vie du voisinage"! Je vous en souhaite.
Le Président (M. Laberge): L'article 35 sera-t-il
adopté? C'est la question que j'ai à poser.
M. Tardif: M. le Président, je pense que, si tout a
été dit sur cet article, pour l'instant, je demanderais qu'on en
suspende l'étude.
M. Fontaine: M. le Président, j'aurais un autre
commentaire à faire.
Le Président (M. Laberge): Un instant! Il y a seulement
une chose qui est restée en suspens. Le député n'est plus
ici, mais on pourrait peut-être me renseigner. Le député de
Drummond a fait une suggestion de modification du début de l'article,
mais je pense que c'est resté à titre de suggestion.
M. Tardif: A titre de suggestion. On l'a retenue parmi une foule
d'autres.
Le Président (M. Laberge): Bon! Alors...
M. Scowen: Puis-je vous dire, M. le ministre, que notre
précieux adjoint ici avait formulé un amendement? Il m'avait
montré cela. C'était exactement dans le sens de l'amendement du
député de Drummond et il disait: Je trouve que la formulation du
député de Drummond est plus élégante que la mienne.
Elle va exactement dans le même sens. Je suggère que vous appuyiez
celle du député de Drummond. Je trouve que la sienne...
M. Tardif: Ah! Alors, le problème est réglé.
Une Voix: C'est exactement la même chose. M. Tardif: On en
prend note. On le suspend...
M. Scowen: C'est peut-être nécessaire de
réfléchir un peu.
M. Tardif: ... et on va essayer de travailler autour de cette
formulation qui semble...
Une Voix: Plus élégante. M. Tardif: ... plus
élégante.
M. Scowen: J'ai encore, malheureusement, deux points que je veux
soulever sur l'article 35 et qui ne touchent pas les droits du locataire et du
propriétaire, mais les autres éléments.
M. Tardif: Alors, allons-y.
Le Président (M. Laberge): Vous avez le temps
légal, en tout cas, de le faire.
M. Scowen: Le temps légal, tant mieux. La première
chose, c'est en guise de commentaire et peut-être que le ministre pourra
répondre. Je trouve en effet que la nature même de l'article est
un peu bizarre, dans le sens qu'on veut protéger les villes contre les
démolitions qui peuvent causer des préjudices dans le domaine des
besoins de logement, la possibilité de relogement des locataires, le
coût de restauration, etc., mais on laisse à la volonté
d'un seul locataire la possibilité de jeter un regard sur une
démolition; si aucun locataire ne fait objection, c'est bien possible
que cette démolition puisse se faire. En effet, un logement pourrait
être démoli parce qu'il n'y a pas d'objec- tion et un autre ne
pourrait pas être démoli parce qu'il y a objection. Vous comprenez
le sens? J'imagine que vous espérez au moins que quelqu'un
d'intéressé mette un peu de pression sur un locataire pour lever
l'objection, même si lui, personnellement, ne subit pas de
préjudice. On va lui dire: Ecoute, c'est un édifice très
agréable, on ne veut pas que ce soit démoli; voulez-vous,
même si cela ne vous intéresse pas, prendre l'initiative, au nom
de la collectivité, d'arrêter l'affaire, au moins de demander une
décision? Mais vous voyez, je ne dis pas que j'ai une solution à
ce problème, mais, si on veut vraiment mettre un contrôle sur les
démolitions injustifiées des logements, c'est bizarre qu'on ait
donné...
M. Tardif: Je comprends le député de
Notre-Dame-de-Grâce lorsqu'il nous dit que non seulement le locataire,
mais toute personne dans le voisinage pourrait avoir un intérêt
suffisant pour agir ou s'opposer à une démolition.
M. Scowen: Ce n'est pas ma suggestion, je n'ai pas formulé
une seule réponse. Je pense que cela...
M. Tardif: Est-ce que je peux ajouter ceci? C'est qu'en vertu de
l'article 426f, qui donne aux municipalités régies par la Loi des
cités et villes et, plus loin dans un autre article, à celles
régies par le Code municipal, le pouvoir de réglementer les
démolitions; cette possibilité existe puisqu'on dit, à
l'article 426f: "Toute personne qui veut s'opposer à la
délivrance d'un permis de démolition doit, dans les dix jours de
la publication de l'avis public ou à défaut, etc., faire
connaître par écrit son opposition motivée au greffier de
la municipalité." Dès lors qu'un règlement municipal
existe, ce pouvoir d'intervention de tiers existe. Pourquoi ne le retrouve-t-on
pas dans les cas où il n'y aura pas de règlement municipal? Tout
simplement parce que ce n'est pas une loi sur l'aménagement, ce n'est
pas une loi sur l'urbanisme, c'est une loi de régie du logement
protégeant les locataires. D'accord?
M. Scowen: Je comprends très bien. Alors, je
soulève la question sans aucune possibilité de la
résoudre. Je pense que vous en êtes aussi conscient que moi.
M. Tardif: D'accord.
M. Scowen: Le dernier point que je veux soulever touche la partie
de l'article qui dit "la détérioration de l'apparence
architecturale, du caractère esthétique ou de la qualité
de vie". Si je comprends bien, le député de D'Arcy McGee, pendant
mon absence, a déjà soulevé cette question. Je crois qu'on
ne doit pas laisser ces critères dans l'article. J'accepte qu'une telle
série de critères, si je comprends bien, existe
déjà dans la Loi des biens culturels, mais, pour moi, c'est une
affaire qui est de nature complètement différente. C'est bien
clair que, quand ce groupe s'est pro-
noncé sur le droit de démolir un édifice, il a tenu
compte de la nature historique. Il faut que ce soit presque une "land mark", si
vous voulez, dans la province.
Mais quand vous arrivez à la question d'un groupe de logements,
il faut accepter que, depuis le début des premiers résidents de
l'Amérique du Nord, il y a eu un changement du caractère
esthétique du paysage, tenant compte des exigences de construction, des
coûts de construction, des préférences architecturales
d'une période ou d'une époque. Je crois qu'à moins que
nous n'ayons une politique d'habitation ou d'urbanisme assez précise,
sur laquelle vos régisseurs peuvent baser une opinion sur le
caractère esthétique et surtout de la qualité de vie du
voisinage, ils sont devant une situation non pas presque impossible, totalement
impossible parce que, même si quatre personnes autour d'une table peuvent
se mettre en accord sur tel ou tel maison d'appartements, ou tel ou tel duplex,
répondre à ces critères, je ne suis pas du tout
persuadé qu'ils seront du même avis deux semaines après ou
que la majorité des personnes qui sont dans le quartier sont d'accord.
C'est très difficile, ces choses. Je ne parle pas des sites historiques.
Absolument, on a besoin de protéger ces choses et je pense qu'il existe
des moyens de choisir, même si cet aspect est difficile.
Ici, vous dépassez de loin la possibilité d'agir dans
l'intérêt des locataires et propriétaires quand vous
insérez de tels aspects, de tels critères.
M. Guay: Si le député ne peut pas voir ce
critère dans l'article, il suggère quoi? Que la régie ne
puisse se prononcer sans même avoir de balises tout approximatives
qu'elles puissent être? Parce que je lui donne un exemple qui n'est pas
dans un arrondissement historique et qu'il connaît peut-être, ici,
la rue Saint-Jean. Cet exemple me vient à l'esprit, la rue Saint-Jean
qui a une trame urbaine assez continue et où un jour on a permis la
démolition d'un logement, la construction de l'édifice qui
s'appelle Le 640 Saint-Jean, qui a quatorze étages, en plein milieu
d'édifices qui en ont quatre et qui jette par le fait même de
l'ombre sur la rue d'en arrière où c'est une autre trame urbaine
analogue de trois ou quatre étages. Le moins qu'on puisse dire, c'est
que la qualité de vie dans le voisinage, sans parler de l'apparence
esthétique, s'est détériorée. Je pense qu'il se
ferait une unanimité assez facilement là-dessus. Si la
régie est appelée à se prononcer sur ce genre de
démolition en vue de ce genre de reconstruction et qu'on se dit: Vous
vous prononcez là-dessus, mais sans dire quoi que ce soit de plus, au
fond, est-ce qu'on ne lui donne pas un mandat en blanc pour faire à sa
guise?
M. Scowen: Pour moi, je serais la dernière personne
à dire qu'on ne doit pas considérer les aspects
esthétiques dans nos villes. D'un autre côté, je suis
persuadé que, dans la nature des choses, quelques quartiers
résidentiels auront, d'ici cinq, dix, quinze ans, une destination
commerciale. C'est révolution normale d'une ville. C'est certain que,
quand vous changez, par exemple, un quartier résidentiel en un quartier
commercial, vous avez des effets sur la vie de voisinage. C'est clair. Pour moi
et je répète ce que le ministre a dit tantôt, dans
une loi locataire-locateur au moins, dans les critères de cette
régie, si on accepte de considérer l'état des logements,
c'est aussi une question de préjudice. L'état du logement, le
coût et la possibilité de restauration, c'est très
important, et les besoins des logements dans les environs, avec ces trois
critères, qui sont étroitement liés avec la
possibilité de loger la population, je pense qu'on a donné assez
de critères à une régie qui a pour responsabilité
de garantir, si vous voulez, un droit de logement ou d'encourager un droit de
logement. Quand vous commencez à ajouter les autres affaires, je ne les
répète pas. On est dans un problème qui est en dehors des
considérations d'un projet de loi qui touche la question. (17
heures)
M. Guay: Je serais tenté de servir au député
l'argument que son collègue de D'Arcy McGee utilisait tantôt. Ce
qui arrive, si on autorise la démolition et que comme cela arrive
souvent dans nos villes, malheureusement, cela demeure un champ vacant, ce qui
implique une hausse c'est exactement l'argument que j'utilisais
tantôt dans ces propres termes. Le fait que ce soient des maisons en
rangée et qu'il y a un trou qui se fasse dorénavant au milieu et
qui est censé se combler, mais qui ne l'est pas, en d'autres mots, si
vous avez une série de maisons en rangée...
M. Tardif: Dont les systèmes de chauffage ont
été construits de façon à tenir compte qu'il s'agit
de murs mitoyens et non pas exposés à...
M. Guay: Du jour au lendemain vous avez un trou, vous faites une
démolition qui fait que la maison à gauche comme la maison
à droite se retrouvent avec des factures de chauffage, en plus, les deux
maisons se retrouvent généralement avec un champ vide et
rapidement plein de détritus comme qualité de vie dans le
voisinage, encore faut-il que la ville veuille, d'autre part, y aménager
un parc ou toute autre chose.
M. Tardif: Remarquez, M. le Président...
M. Scowen: Je préfère des questions qui sont et je
pense que l'exemple que vous donnez est probablement "quantifiable". Pour moi,
c'est la règle. S'il y a des moyens d'une façon ou de l'autre de
quantifier le chauffage, la question de chauffage, c'est quelque chose, on peut
faire face à cela. La question d'augmentation du coût de chauffage
qui est causée par une démolition n'a rien à faire avec la
question d'apparence architecturale, le caractère esthétique, la
qualité de vie du voisinage. C'est finalement une question de coût
d'huile.
M. Guay: A ce moment, je reviens à ma question de
tantôt, Le 640 Saint-Jean. On a pris un logement, un immeuble dans lequel
je présume qu'il y
avait des logements. On le démolit, un immeuble de quatre
étages dans une trame urbaine de quatre étages. On a
laissé construire quatorze étages. Bien sûr, on a
logé davantage de monde peut-être dans des appartements plus
modernes, sûrement, que des appartements aux alentours qui étaient
construits il y a plus longtemps et qui étaient donc plus vieux à
moins qu'ils aient été rénovés ou restaurés
récemment. Sur le plan esthétique, cela a singulièrement
endommagé, amoché une trame urbaine.
M. Scowen: Je peux admettre que cela pourrait être un
changement qui touche les besoins de logements, le coût et la
possibilité de rénovation des vieux. Je ne suis pas
persuadé qu'un régisseur peut donner une opinion sur la valeur
architecturale ou esthétique d'un immeuble à logements multiples
de 20 étages comparé avec un duplex. Je ne suis pas
persuadé que cette considération doive s'ajouter aux autres
critères parce qu'il y a des gens qui préfèrent des
immeubles à logements multiples, et il y a des gens qui
préfèrent des duplex. On est dans le subjectif. Je sais que le
ministre a l'intention de formuler l'article. Je veux simplement ajouter cette
opinion qui, je pense, est partagée par le groupe. On avait
préparé un amendement dans ce sens. On va laisser l'affaire. Je
pense que je comprends le sens.
M. Tardif: M. le Président, je prends note des
commentaires qui ont été formulés. Je voudrais juste
ajouter que la formulation de ces articles sur la démolition s'est
basée aussi, comme j'ai dit, sur des cas concrets, vécus,
notamment à Montréal qui, dans ce domaine,
bénéficie d'une longueur d'avance puisqu'il y a plus de 18 mois
maintenant que ce pouvoir est inscrit dans sa charte et où des cas se
sont posés. Je pense, entre autres, aux édifices Clairmont, rue
Saint-Denis, où pour des fins d'agrandir le garage, 40 logements
étaient affectés. On a eu plein d'autres cas ailleurs,
l'hôtel Roussillon, et où ces raisons qu'on retrouve à peu
près mot à mot dans la charte de Montréal et les
règlements ont servi d'appui. Ce n'est pas, comment dirais-je,
tiré complètement du fruit de l'imagination des légistes
qui sont partis de cas concrets, de raisons sur lesquelles la
municipalité croyait devoir s'appuyer pour apprécier les demandes
qui lui étaient formulées et on a repris ici substantiellement
les mêmes dispositions.
Cela dit, j'ai pris bonne note des commentaires. Je sais, l'idéal
serait que toutes les municipalités adoptent leur réglementation,
mais que la régie n'ait pas à intervenir, de sorte que ce soit
localement que se fassent les arbitrages en matière d'utilisation de
l'espace urbain. C'est mon souhait, mais je ne peux pas contraindre les
municipalités à adopter un règlement.
M. Caron: Normalement, les gens savent ce qui se passe. Ils sont
bien plus aptes à prendre une décision.
M. Tardif: Que les arbitrages se fassent localement, je pense que
c'est l'idéal.
Le Président (M. Laberge): Tel que l'a
suggéré le ministre, l'article 35 reste-t-il suspendu?
M. Tardif: Oui.
Le Président (M. Laberge): L'article 35 est suspendu, mais
je continue à tenir compte du temps de discussion qui a
déjà été épuisé. Je pense qu'il a
permis d'amender des suggestions d'amélioration. J'appelle l'article 36
auquel on ne m'a pas apporté de papillon. Donc, l'article 36 tel qu'il
apparaît au projet de loi.
M. Tardif: C'est un article qui s'inscrit dans la politique de
conservation des logements. Donc, si un tiers s'offre pour dire: Non, je suis
prêt à me porter acquéreur de ces logements et à les
restaurer, à les rénover, c'est tout simplement de permettre de
le faire.
Le Président (M. Laberge): Cela va?
M. Scowen: Nous avons des légères modifications
à suggérer ici. Je vous dis dès le début qu'on
n'est pas dans une question aussi fondamentale que l'article 35, mais je pense
que c'est quand même important pour l'administration. Si vous me le
permettez, M. le Président, j'aimerais parler à la fois des
articles 36 et 37 parce qu'ils sont en effet des articles qui...
Le Président (M. Laberge): Et vos recommandations de
modifications s'appliquent aux deux à peu près?
M. Scowen: Je pense que l'inquiétude qui...
Le Président (M. Laberge): Si la commission est
consentante, nous entendrons votre argumentation sur les deux, ce qui semble
être le cas.
M. Tardif: D'accord. M. Raynauld: Cela va.
M. Scowen: Je pense que l'argumentation qui a été
faite lors des audiences publiques était une crainte que ces articles
pouvaient donner lieu à une certaine décision de la régie
qui pourrait être rapportée par les personnes qui voudraient
prendre avantage des procédures légales pour arrêter les
démolitions et les délais d'ordre technique. La suggestion
je le répète, c'est simplement pour donner le sens de nos
réserves quant à cet article et je vais lire nos articles 36 et
37: "Une personne qui désire conserver à un logement son
caractère locatif peut, lors de l'audition d'une demande, produire une
offre en vue d'acquérir l'immeuble dans lequel est situé le
logement." Produire une offre. "Si la régie article 37
estime que les circonstances le justifient, elle continue d'enquêter,
mais rapporte le prononcé de la décision à la demande de
l'intervenant pour une période d'au plus 60 jours c'est la
même période pour permettre un acte de vente d'intervenir.
Une telle remise ne peut être accordée qu'une
seule fois." En effet, si quelqu'un veut acheter le logement, qu'il
trouve les moyens de faire une offre sérieuse, ce n'est pas
nécessaire que ce soit une offre acceptable, mais au moins une offre que
la régie peut juger sérieuse et si elle arrive devant le tribunal
avec une offre sérieuse, le tribunal peut juger sur le sérieux de
l'offre tenant compte des moyens financiers de la personne. Si une personne
arrive avec une offre de $5, ce n'est pas acceptable. Si elle arrive avec une
offre de $5 millions et n'a pas les moyens de les trouver, ce n'est pas
sérieux. A l'article 37, la régie continue les auditions parce
qu'il y aura probablement d'autres intervenants et la période de 60
jours est donnée à l'intervenant pour continuer ses
démarches auprès du propriétaire pour finaliser l'offre,
et finalement, que cette remise soit accordée une seule fois. Si cinq ou
six personnes arrivent avec cinq ou six offres, bien sûr, on peut
s'attendre à ce qu'elles essaient toutes de faire l'achat, mais une fois
que cette période de 60 jours est terminée, la régie ne
sera pas obligée d'attendre une autre offre d'une autre personne.
L'essentiel de nos amendements, c'est premièrement de demander
à cette personne de produire une offre concrète que la
régie peut justifier comme sérieuse et, deuxièmement, de
ne pas permettre une deuxième performance, un deuxième cycle
d'intervention de cette nature. Cela n'est pas du tout fait pour empêcher
l'idée de base de l'article qu'on trouve bonne, mais c'est pour
empêcher les abus possible qui ont été soulevés par
deux ou trois des intervenants au moment de nos auditions publiques.
Le Président (M. Laberge): Je ne voudrais pas créer
de précédent, mais j'ai des doutes sur l'attitude que je dois
avoir, à savoir que vous n'avez pas présenté vos
amendements comme étant officiels. Vous m'avez dit que vous en faisiez
une suggestion. Maintenant, je me réfère à la commission,
à savoir si... Je vous ai laissé en discuter comme
présentation. Maintenant, je ne permettrai pas d'autres discussions
avant de savoir si on reçoit vos amendements et si vous voulez les
présenter officiellement ou non. C'est pour cette raison que je ne
voudrais pas d'autres interventions avant de savoir si vous en faites
officiellement une présentation.
M. Tardif: M. le Président, évidemment, il faudra
décider de la recevabilité de cet amendement...
Le Président (M. Laberge): Pour le moment, on ne me l'a
pas demandé.
M. Tardif:... à partir du moment où il sera
déposé officiellement.
Le Président (M. Laberge): C'est cela, demandé.
M. Tardif: Je voudrais, avant qu'il ne le soit, attirer
l'attention de la commission sur la première ligne de l'article 37 qui
dit: Si la régie estime que les circonstances le justifient. Je pense
qu'il faut faire, et cet article le fait, confiance à la régie
pour apprécier, en quelque sorte, s'il s'agit d'une intervention
dilatoire, folichonne et qui a peu de sérieux. Imaginons un complexe du
type des 40 logements de Clermont Motor rue Saint-Denis dont 20 logements sont
vacants parce que les locataires ont décidé de quitter, dont
certains n'ont pas été chauffés pendant quelques mois
d'hiver, dont la plomberie dans les murs peut être fendue et, bref,
causer des dommages considérables. Cela n'est pas facile pour un
acquéreur éventuel de faire une offre d'achat, de mettre un signe
de piastre à côté des 40 logements. Je comprends
l'intention du député, mais il me semble qu'on viendrait bloquer
la possibilité pour la régie de se donner le temps, si elle ne
considérait que les interventions de tiers qui s'accompagneraient d'une
offre en bonne et due forme, ces offres pouvant, dans des cas semblables,
surtout lorsqu'il s'agit d'un pâté de maisons comme
celui-là, dont une partie peut être encore habitée et
l'autre partie abandonnée depuis un certain temps avec des dommages
considérables, entraîner une expertise, une évaluation, et
tout cela. Je me demande si on ne se lierait pas trop en assujettissant cela,
pour ces raisons, à une offre formelle d'achat.
M. Scowen: Ecoutez! Votre opinion n'est pas sans fondement. Je
pense qu'il sera possible de trouver quelque chose entre une offre
concrète je ne sais pas si on a dit une offre concrète ou
une offre sérieuse... L'expression qui existe dans l'article "une
personne qui intervient pour demander un délai afin d'entreprendre ou de
poursuivre des démarches en vue d'acquérir l'immeuble"... En
effet, la régie, devant cette expression, sera presque obligée,
si le gars est un bon gars... Elle ne sera pas obligée de par la loi
d'entreprendre des enquêtes sérieuses sur la possibilité
réelle de ces personnes de réaliser l'achat qu'elles veulent
faire. En effet, je pense qu'il s'impose au moins qu'on dise que la
régie doit s'assurer que la personne qui propose d'acheter l'immeuble
est une personne qui a les moyens, les connaissances, qu'elle a la
possibilité réelle de le réaliser. (17 h 15)
M. Tardif: M. le Président, c'est une question de fait. On
dit: "Si la régie estime que les circonstances le justifient." Pour
estimer si les circonstances justifient le délai demandé, la
régie va poser des questions: Monsieur, qui êtes-vous? Vous avez
entrepris des démarches, paraît-il, pour vous porter
acquéreur; quelles sont ces démarches? Est-ce que vous avez
retenu les services d'un évaluateur pour procéder à
l'évaluation? Avez-vous communiqué avec le propriétaire
pour voir s'il était intéressé à vendre? Je
prête à la régie un minimum de sérieux pour
s'enquérir justement des démarches entreprises. Cette
évaluation des démarches qui est une question de fait, la
régie devra l'apprécier. Elle va dire: Ecoutez, ce n'est pas
sérieux, vous n'avez rien fait, vous êtes venu, vous vous
êtes levé ce matin et avez décidé de
venir devant la régie. Si le bonhomme dit: Bien non, voici, j'ai
posé trois gestes précis: je suis allé à la ville
de Montréal pour voir l'évaluation, je suis allé ici et je
suis allé là et voici ce que j'ai fait. Je pense qu'à ce
moment-là la régie peut apprécier ces faits.
M. Raynauld: M. le Président, je voulais soulever une
question un peu plus générale là-dessus.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que les deux suggestions
que le député de Notre-Dame-de-Grâce a faites sont
présentées comme... Un instant! M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce...
M. Scowen: Je...
Le Président (M. Laberge): ... faites-vous,
c'est-à-dire les suggestions que vous avez faites, les transformez-vous
en proposition d'amendement, ou les laissez-vous en suspens, ou les avez-vous
seulement portées à la considération du ministre? Je
voudrais savoir avant de rendre jugement, si...
Une Voix: Si on peut continuer de citer.
Le Président (M. Laberge): ... nous considérons que
les articles 36 et 37 sont amendés ou si on discute ceux qui sont
à la page 10 du projet de loi.
M. Scowen: Ce que j'aimerais faire...
Le Président (M. Laberge): Parce que là, je peux
créer des précédents.
M. Scowen: ... j'accepte que, même si cette partie de
l'article 36 n'est pas très claire, "les circonstances le justifient",
c'est un aspect à moins que mes collègues ne soient pas
d'accord l'explication que vous avez donnée est acceptable pour
moi, au moins. Quand même, j'aimerais proposer comme amendement
précis qu'on ajoute à l'article 37 "une telle remise ne peut
être accordée qu'une seule fois." Je pense que c'est cette partie
de l'affaire qui était... C'est vrai que même si le
bien-fondé de l'argument n'est pas solide, au moins on n'est pas
obligé d'attendre plus de 60 jours. Mais la possibilité
qu'à la 59e journée on arrive devant une autre offre, à
cause de cela, je veux proposer un amendement à l'article 37 puisqu'on
étudie les deux ensemble.
Alors, je veux proposer l'amendement suivant à l'article 37:
Qu'on ajoute la phrase...
Le Président (M. Laberge): Je vais juste vous retenir pour
être en bonne et due forme. Donc, on avait accepté bona fide, si
on veut, de discuter les articles 36 et 37 en même temps. Comme votre
amendement s'appliquera à l'article 37, nous allons disposer de
l'article 36, si vous le voulez bien.
M. Scowen: Si vous voulez procéder de cette façon,
je pense que je dois attendre. Je croyais qu'on pouvait continuer à
discuter des deux, après.
Le Président (M. Laberge): C'est parce que si...
M. Raynauld: Je voudrais soulever une question de principe
à propos des articles 36 et 37.
Le Président (M. Laberge): Sur les deux?
M. Raynauld: Oui.
M. Scowen: Peut-être attendre un peu...
Le Président (M. Laberge): Si vous ne faites pas...
autrement dit, si l'amendement que vous proposiez aux articles 36 et 37, vous
le remplacez par un amendement que vous apporterez à l'article 37
seulement, gardez-le en suspens pour le moment; nous allons disposer de
l'article 36 et nous reviendrons avec votre suggestion à l'article 37,
qui deviendra un amendement proposé à ce moment-là.
M. Scowen: Très bien.
Le Président (M. Laberge): Alors, article 36.
M. Raynauld: M. le Président, sur l'article 36, si je
comprends bien, une intervention de cette nature prévue à
l'article 36 se produit simultanément aux procédures qui ont
été prises en vertu de l'article 35, de l'article 33 ou de
l'article 34. Je voudrais poser une question au ministre, s'il peut
m'éclairer à ce sujet. La question est la suivante: Supposons que
la régie, en vertu de l'article 35, ait reçu une demande, qu'elle
examine la situation et trouve qu'il n'y a pas de raison suffisante pour ne pas
accorder le permis de démolition. Pourquoi alors introduire un article
36 qui fait intervenir un autre facteur extérieur à ceux que la
régie est chargée d'étudier ou d'examiner et qui a pour
effet, en fait, d'annuler le jugement que la régie aurait pu porter en
vertu de l'article 35?
M. Guay: L'avant-dernière ligne de l'article 37.
...pendant l'audition.
M. Raynauld: Ce n'est pas du tout cela le problème. Je
sais bien...
M. Guay: C'est parce que vous évoquez le jugement de la
régie.
M. Tardif: II n'est pas rendu encore. M. Guay: II n'est
pas rendu.
M. Raynauld: II est en train de rendre le jugement. Grand dieu!
ne vous forcez pas.
M. Cordeau: ... établir le jugement de...
M. Raynauld: A l'article 35, on dit que la régie est
appelée à se prononcer. Est-ce que la démoli-
tion est justifiée ou non? Pour examiner cette demande et avant
de vous prononcer sur cette demande, comme le dit l'article 35, vous tiendrez
compte des facteurs suivants. Elle arrive à la conclusion, en vertu de
l'article 35, qu'il n'y a pas de raison de refuser la démolition. A ce
moment-là, elle est en train de délibérer.
M. Guay: Elle n'est pas arrivée à une conclusion
dans ce cas-là.
M. Raynauld: Oui, elle a examiné tous les critères
prévus à l'article 35 et, tout à coup, on dit: Avant de
donner le permis de démolition, en vertu de l'article 36, une personne
intervient. A ce moment-là, je trouve que cela fait intervenir un autre
facteur qui est étranger à ceux qui sont mentionnés
à l'article 35 et en vertu desquels la régie aurait pu permettre
la démolition. Pourquoi, à ce moment-là, restreindre une
deuxième fois, en dehors des critères prévus par l'article
35, le droit du propriétaire de démolir, compte tenu du fait que,
tout à coup, il pourrait venir une offre d'une tierce personne pour
maintenir le logement en état et qui pourra supposer, à ce
moment-là, que le propriétaire pourrait subir une perte
supplémentaire et qui aurait été justifiée
seulement si la régie avait décidé qu'il ne fallait pas
démolir? Mais si la régie était d'accord ou avait
été d'accord en l'absence de cette offre, si en l'absence de
cette offre elle avait été d'accord pour donner le permis,
pourquoi faut-il donner un sursis supplémentaire ou, tout à coup,
introduire un facteur extérieur à ceux qui devaient guider la
régie dans sa décision?
M. Tardif: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): M. le ministre.
M. Tardif: Je pense qu'il faudrait relire attentivement l'article
36. Il se lit comme suit: "Une personne qui désire conserver à un
logement son caractère locatif peut, lors de l'audition de la
demande..." La régie n'est pas en délibéré, elle
n'a pas fini d'entendre la preuve, elle n'a pas commencé à
réfléchir sur ce qu'elle fera avec la preuve qui lui a
été présentée, elle est en train de la recueillir.
Dans ce sens-là, le député d'Outremont a raison: Comme
autre élément à ceux énoncés à
l'article 35, il y a maintenant quelqu'un qui s'offre pour conserver le
caractère locatif de ces logements. Il se peut fort bien que l'affaire
convienne au propriétaire qui, finalement, trouvant à vendre, ne
veut pas s'embarquer dans des rénovations; il serait consentant à
vendre ses immeubles à un autre qui veut les restaurer. Ce n'est donc
pas à la suite, une fois que la régie s'est fait une idée
sur cela, mais c'est un élément additionnel à
considérer dans sa prise de décision.
M. Raynauld: Je trouve qu'on ajoute encore une restriction
supplémentaire. Prenons le cas suivant: II y a un propriétaire
qui veut détruire deux duplex, qui veut construire une tour de dix
étages.
Il dit: Pour ma part, il est bien clair que je vais faire plus d'argent
en faisant cela, je vais utiliser mon terrain d'une façon plus efficace.
Il se présente devant la régie et, là, il dit: Y a-t-il
des oppositions à ce que je démolisse ces deux duplex, oui ou
non?
M. Tardif: Ce n'est pas comme cela que les choses se passent.
M. Raynauld: Je le sais bien, mais je veux justement faire la
preuve de cela pour vous faire réaliser qu'à ce moment-là
vous mettez le propriétaire dans une situation impossible. Je vais
supposer qu'il n'y a aucun obstacle à démolir ces deux duplex et
que la régie en serait arrivée à ce jugement-là. Et
tout à coup, pendant l'audition de la preuve, de la demande, il y a
là une tierce personne qui dit: Moi, je suis intéressée
à conserver les deux duplex, savez-vous? A ce moment-là, on va
donner priorité à une demande qui est faite pour conserver deux
duplex quand, objectivement parlant, il n'y a aucun obstacle pour
démolir. Je vous dis que c'est une restriction abusive et excessive qui
est apportée dans les circonstances.
M. Tardif: M. le Président...
M. Raynauld: Non. Je n'ai pas terminé, M. le
Président. Je voudrais ajouter un élément avant que le
ministre ne fasse un jugement sur l'observation que je fais. Je veux ajouter un
élément. Je veux aussi souligner que... On dit qu'il n'y a pas
d'obstacle à démolir, mais il faut bien savoir que le
propriétaire ne sait pas à ce moment-là si la régie
va dire oui ou non. Le propriétaire ne sait pas si la régie va
dire oui ou non. A ce moment-là, le propriétaire fait face
à un risque considérable. Tout à coup cela lui serait
refusé? Tout à coup la régie dirait: Non, vous n'avez pas
le droit de démolir? Il aurait beaucoup mieux fait d'accepter l'offre de
la tierce personne, mais si la permission lui était donnée, il y
a un très grand avantage à conserver et à ne pas vendre
à la tierce personne. Vous mettez le propriétaire dans
l'alternative suivante: Vous pouvez faire un gain de $1 million, mais vous
pouvez aussi tout perdre, puisque la régie peut vous interdire de
construire et entretemps, il y a un gars qui s'amène et qui vous dit: Je
vous offre $40 000 pour les deux duplex. Là, la régie attend et
dit: Si l'offre est bonne, à ce moment-là, je suspends
l'audition. Le propriétaire se dit: Je prends les $40 000 qui me sont
offerts parce que je risque de n'avoir rien du tout puisque la régie
pourrait me refuser et, à ce moment-là, je peux perdre $1
million. Vous trouvez cela correct lorsqu'on ne sait pas encore s'il y a des
raisons pour lesquelles le propriétaire ne devrait pas démolir.
On ne le sait pas. On est en cours d'audition et on lui met une autre
épée de Damoclès sur la tête en disant: S'il y a une
tierce personne qui s'amène et qui lui offre comme dans mon exemple $40
000, alors qu'il pourrait en faire $1 million, à ce moment-là, il
est obligé, en tout cas, de soupeser les choses et de prendre une
décision dans une incertitude considérable. J'appelle cela
une chose excessive. Que veut-on conserver au juste là-dedans?
M. Tardif: Les logements. C'est clair. Cela devrait être
clair, si le député d'Outremont a lu la loi.
M. Raynauld: Ah! oui. Je sais cela, mais ce n'est pas en disant
cela que vous le justifiez cependant. Vous mettez en place un mécanisme
qui s'appelle la régie et qui devra se prononcer sur le besoin de
conserver les deux logements qui sont là. A ce moment-là, les
articles 36 et 37 me paraissent une complication supplémentaire,
inutile, abusive, et qui pourrait être très injuste pour le
propriétaire en question.
M. Tardif: M. le Président, je m'excuse, mais en
réaction à ce que vient de dire le député
d'Outremont, il a campé vraiment le problème en des termes
presque caricaturaux. Donc, un propriétaire de deux logements pourrait
recevoir une offre de $40 000 et, s'il démolit, il ferait $1 million. A
moins qu'il y ait une mine d'or en-dessous des deux logements en question, je
pense que c'est vraiment une situation caricaturale. Ce qui est en cause ici,
c'est le fait que pendant une audition une personne puisse se présenter
à la régie et dire: Moi, je suis intéressée
à acheter. J'ai fait des démarches et consulté
l'évaluation de la municipalité. Je suis prête
certains de ces immeubles peuvent avoir besoin d'être restaurés
à les restaurer, à investir cela et voici ce que j'entends
faire bref, présenter son histoire. A ce moment-là, le
propriétaire a deux choix. Il n'en a pas une infinité. Il accepte
l'offre qui lui est faite, auquel cas la demande ou l'affaire devant la
régie tombe, ou il refuse et l'affaire continue son cours et la
régie rend une décision. (17 h 30)
II n'y a rien là qui entraîne les calamités dont a
parlé le député d'Outremont. Si les deux parties
s'entendent, l'affaire est réglée, il n'y a plus de
problème. Si les deux parties ne s'entendent pas, la cause continue son
cours.
M. Raynauld: Mettez-lui le cou sous une guillotine! Vous dites:
Qu'ils s'entendent, c'est tout.
M. Tardif: Mais non, c'est que la loi n'est pas cachée,
elle est connue avant...
M. Raynauld: Je sais.
M. Tardif: Elle est connue.
M. Raynauld: Si vous voulez, M. le ministre, je vais ajouter un
élément qu'on m'a rapporté pour continuer la petite
histoire. Supposons maintenant que l'acheteur, qui a fait l'offre pendant
l'audition, devienne propriétaire. Un mois après, il demande la
démolition et celle-ci lui est accordée. C'est lui qui fait le $1
million. Ne trouvez-vous pas cela injuste pour le premier?
M. Tardif: J'imagine qu'il y aura une certaine cohérence
dans les décisions de la régie.
M. Raynauld: C'est parfaitement cohérent. La régie
n'avait pas à se prononcer puisqu'il y a eu une offre entre-temps et
qu'elle a été acceptée par les deux parties.
M. Guay: A ce moment-là, c'est que le propriétaire
était prêt...
M. Raynauld: II n'y a pas d'incohérence du tout.
M. Guay: ... à vendre, demande de démolition ou non
devant la régie. D'ailleurs, ce n'est pas une demande de
démolition. Le propriétaire était prêt à
démolir mais était également prêt à vendre.
Si l'acheteur s'est manifesté pendant l'audition...
M. Raynauld: Non, il n'était pas prêt.
M. Guay: ... de la régie, il aurait pu aussi bien se
manifester quatre jours avant la demande à la régie de
vérifier l'opportunité de démolir.
M. Raynauld: C'est cela, et là il refusait parce qu'il a
demandé...
M. Guay: Qu'est-ce que vous en savez? S'il était si
prêt que cela à vendre, c'est peut-être qu'il n'avait pas
trouvé d'acheteur avant l'audition et il en trouve un maintenant. Sinon,
de deux choses l'une: ou bien il est prêt à vendre ou bien il
n'est pas prêt à vendre. S'il n'est pas prêt à
vendre, il ne vendra pas pendant l'audition; s'il était prêt
à vendre, cela lui fournit un acheteur. C'est tout! Ou alors, ce qui est
plus probable comme cas non pas le cas de la mine d'or c'est le
cas de la personne qui, ayant un immeuble, perd de l'argent avec cet immeuble,
elle n'en fait pas suffisamment.
M. Raynauld: C'est ce qui va arriver avec cela, oui.
M. Guay: M. le Président, si le député
d'Outremont, à l'époque où il dirigeait le Conseil
économique du Canada, faisait ses prévisions de manière
aussi fantaisiste que son hypothèse de tantôt, je comprends
pourquoi l'économie canadienne est dans cet état. Cela
étant, dans le cas où la personne perd de l'argent avec des
logements vétustes, qu'elle n'a pas les moyens de rénover, elle
peut demander de démolir. Il peut arriver quelqu'un qui, lui, a les
moyens de rénover, n'est-ce pas?
M. Raynauld: La question ne se pose pas, elle ne serait pas
allée devant la régie. Si elle voulait vendre, elle aurait vendu,
grand Dieu! Mais c'est le cas où elle avait décidé de
démolir c'est le cas qu'on a ici...
M. Guay: Si elle décide de démolir et si elle ne
veut pas vendre...
M. Raynauld: ... elle se présente pour ne pas
reconstruire...
M. Guay:... belle cave, elle va bien attendre la décision
de la régie!
M. Raynauld: ... donc, elle ne voulait pas vendre!
M. Guay: II n'y a personne qui la force à vendre!
M. Raynauld: Bien non, à ce moment-là, pourquoi
l'article 36?
M. Guay: Au cas où elle serait intéressée
à vendre plutôt que de démolir.
M. Raynauld: Elle n'est pas intéressée par
définition.
M. Guay: Alors, elle ne vendra pas!
M. Raynauld: A ce moment-là, pourquoi lui imposer un
délai supplémentaire de deux mois?
M. Guay: On ne lui impose pas un délai... M. Raynauld:
Oui.
M. Guay: ... c'est à la discrétion de la
régie, c'est si "les circonstances le justifient". A la fin de
l'audition, la régie peut laisser un délai de deux mois.
M. Raynauld: C'est la régie qui décide, on le lui
impose.
M. Guay: Elle peut, elle peut. M. Raynauld: Oui, elle
peut.
M. Guay: Mais il faut que la personne se manifeste pendant
l'audition.
M. Raynauld: Enfin, si vous n'avez pas compris avec les
simplifications que j'ai données, vous ne comprendrez jamais. Alors, ce
n'est pas la peine.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Saint-Hyacinthe, vous avez une question ou un commentaire?
M. Cordeau: Oui, merci, M. le Président. M. Guay:
II va bien dans le parti.
M. Cordeau: Vous jugerez après. Lorsque, à
l'article 36, M. le ministre, vous dites: "Une personne qui désire
conserver...", est-ce que le terme "personne" signifie un individu ou un
individu au nom comme d'une coopérative? Est-ce que vous faites allusion
à une coopérative à ce moment-là dans
l'article?
M. Tardif: Personne s'entendant de personne physique, une
personne morale, une coopérative d'habitation, un organisme sans but
lucratif au sens du...
M. Cordeau: C'est dans ce sens? M. Tardif: Oui.
M. Cordeau: C'est aussi général que cela.
Maintenant, si on se reporte à l'article 37: "La personne doit, lors de
l'audition de la demande par la régie, faire valoir sa volonté
d'acquérir l'édifice en question". Maintenant, la régie,
avant de continuer à entendre la demande du locataire, qui, lui, ne veut
pas être évincé de son logis, ou d'entendre les raisons du
locateur, doit entendre en préséance cette demande?
M. Tardif: Non, non, ce n'est pas dit.
M. Cordeau: Ce n'est pas dit, mais est-ce que c'est ce que cela
suppose?
M. Tardif: Non, lors d'une audition d'une demande, la
régie peut décider d'entendre les parties, les témoins qui
avaient déjà été assignés et s'il y a un
autre témoin qui se présente, il sera à la fin des
autres.
M. Cordeau: Correct, bon.
M. Tardif: II n'est pas dit qu'elle arrête, qu'elle fige la
situation parce que quelqu'un s'est présenté en disant: Moi, j'ai
de l'argent et je veux acheter, et qu'elle dit aux autres: Taisez-vous, c'est
lui qui parle. Ce n'est pas cela du tout. Il y a quelqu'un qui pourra se faire
entendre devant la régie.
M. Cordeau: Elle fait valoir sa volonté d'acquérir
l'immeuble. Maintenant, la régie doit décider si les
circonstances le justifient, si la personne a assez de capital et si la
personne est sérieuse, qu'elle doit entendre tout de suite l'intervenant
lors de la séance, de l'audition.
M. Tardif: II n'est pas prévu lors de la séance. Si
quelqu'un arrive pendant que les séances existent comme si maintenant
nous étions...
M. Cordeau: Si la régie estime que si les circonstances le
justifient pour accorder les 60 jours...
M. Tardif: Oui, mais transformons-nous en régie du
logement présentement. Imaginons-nous que quelqu'un se présente
ici et on est en train d'étudier le cas de la démolition de
l'immeuble abritant le député d'Outremont sur la rue je ne sais
pas quoi à Outremont et que quelqu'un se présente et dise: Moi je
veux l'acheter.
M. Cordeau: Continuez votre raisonnement.
M. Tardif: II n'est pas question de bousculer les témoins.
La régie continue d'entendre les témoins qu'elle avait
assignés pour cette journée.
M. Cordeau: Oui.
M. Tardif: Et si l'audition se continue le soir ou le lendemain,
par exemple, monsieur, vous reviendrez, il y a peut-être quelqu'un qui va
prendre un minimum de renseignements. Vérifier le bien-fondé en
quelque sorte de l'intervention et le sérieux de la demande.
M. Cordeau: Le régisseur qui préside l'audition
devra questionner le type qui veut acheter la bâtisse pour voir s'il est
sérieux.
M. Tardif: Oui. .
M. Cordeau: Avant d'accorder les 60 jours.
M. Tardif: Oui, mais pas séance tenante, d'accord?
M. Cordeau: Combien de temps ce processus va-t-il prendre avant
qu'une décision soit rendue?
M. Tardif: Le temps normal de l'audition. Une fois que l'audition
est, disons, terminée, la régie peut effectivement accorder un
délai. Si par exemple, la personne a manifesté son intention
d'acheter, est en train de négocier un emprunt avec les Caisses
populaires ou avec la Société centrale d'hypothèques et de
logement, que sais-je, et qu'il a des papiers en bonne et due forme, cela
s'évalue. Combien de gens signent des offres d'achat de maisons
actuellement et l'offre d'achat est conditionnelle à l'approbation du
prêt par les Caisses populaires? C'est courant. Sur ce plan, le
délai est maximal. Il pourrait être trois jours, une semaine, on
dit: Pas plus que... D'accord?
M. Cordeau: II faut faire attention qu'il n'y ait pas de
délai indu ou des cas abusifs.
Le Président (M. Laberge): M. le député de
Notre-Dame-de-Grâce a demandé la parole.
M. Scowen: J'apprécie les soucis de mon collègue,
je pense que je peux me permettre d'être en léger désaccord
avec lui en ce qui concerne les moyens. Si je comprends l'idée, les
articles 36 et 37, sont un peu l'aboutissement normal de la
nécessité pour la régie de tenir en considération
le besoin de logements dans les environs, par exemple. Il peut arriver le cas
où il existe un besoin de logements, mais mon Dieu, c'est difficile
à empêcher le propriétaire de démolir son
bâtiment parce que les conditions financières sont importantes.
Finalement, je suis porté à croire que si c'est une seule
rémission qui est permise de 60 jours, la majorité des
propriétaires sont avec ce projet de loi très conscients qu'il
existe des problèmes de démolir un logement locatif vite, c'est
un délai de 60 jours. Si je comprends bien, tout ce que la régie
peut faire, c'est d'inviter le groupe de locataires ou l'acheteur d'aller voir
le propriétaire et essayer de s'entendre. Le propriétaire, s'il
ne veut pas vendre la maison, le bâtiment, peut refuser. Ce processus ne
peut pas s'entreprendre pour une période de plus de 60 jours et ce ne
sera probablement pas un éloignement de l'audition de 60 jours parce que
pendant cette période, les autres mémoires que vous avez
entendus, etc.
Alors, le propriétaire sera soumis à un délai
maximun de 60 jours au cours duquel il peut, s'il le veut, considérer
une offre de vente de ce bâtiment d'un autre propriétaire ou d'un
groupe de locataires selon le cas. Si on accepte à la fin de dire que
tout ce processus peut se réaliser une seule fois, je pense
à moins que je ne comprenne pas non plus exactement l'intervention du
député, mon collègue ici que cela ne peut pas
causer de préjugés énormes à un
propriétaire. Il a le droit d'accepter ou non ou même de
négocier ou non s'il ne veut pas, mais il peut au moins consacrer une ou
deux heures à écouter quelqu'un qui veut conserver l'affaire.
M. Tardif: Puis-je demander au député de
Notre-Dame-de-Grâce de nous dire ce qu'il ajouterait à l'article
37? A-t-il une formulation?
M. Scowen: Oui. Me permettez-vous, M. le Président, de...
Sans que je fasse d'amendement officiel... Tout ce que je veux ajouter, ce sont
les mots je ne sais pas si les mots sont-exacts "une telle remise
je décrirai la remise, c'est tout ce processus ne peut
être accordée qu'une seule fois."
M. Raynauld: "Ce délai ne peut être
accordé..."
M. Tardif: "Un tel délai parce qu'on parle de
délai... C'est cela?
M. Raynauld: "Un tel délai ne peut être
accordé...
M. Tardif: ... ne peut être accordé qu'une seule
fois."
M. Scowen: Oui. Au maximum, le propriétaire sera soumis
à une entrevue d'une heure ou deux avec un acheteur éventuel dans
un délai qui sera d'un maximum de 60 jours parce que dans plusieurs cas,
ce sera moins que cela tenant compte du fait qu'il y a un délai...
M. Tardif: J'imagine que... M. Scowen: En ce cas,
je...
M. Tardif:... si le propriétaire était consentant
à ce que le délai soit prolongé, il n'y a plus de
problème s'il y a consentement des parties.
M. Scowen: Cela va de soi, je pense, mais...
M. Tardif: Cela va de soi? Est-ce que cela va de soi parce que
tout à l'heure, on parlait de choses qui allaient de soi et l'Opposition
n'était pas d'accord.
M. Raynauld: M. le Président... M. Caron: M. le
ministre...
M. Raynauld: ... il peut toujours étirer sa demande devant
la régie.
M. Caron: ... pourrais-je savoir combien de temps l'audition...
Les gens seront-ils avisés 30 jours avant?
Le Président (M. Laberge): Les travaux sont toujours en
cours, mais il y a consultation.
M. Tardif: M. le Président, j'essaie de relire cela avec
nos gens et le sens des interventions du député de
Notre-Dame-de-Grâce ont pour but... Enfin, que les interventions ne
soient pas des mesures dilatoires pour retarder le processus ou l'exercice du
droit par le propriétaire de démolir l'immeuble.
M. Scowen: II faut que je vous interrompe là. Il s'agit
aussi de ne pas permettre à une série d'acheteurs
éventuels sérieux de le faire un après l'autre.
M. Tardif: D'accord, j'y arrive. Or, M. le Président, si
effectivement un intervenant se présente et dit: Je veux acheter
l'immeuble. Il a un délai de deux mois et au bout de deux mois moins un
jour, un autre intervenant se présente et dit: Je veux acheter
l'immeuble et ainsi de suite, les 22 locataires font cela et on est bon pour 48
mois de cette façon-là? (17 h 45)
Ce n'est pas cela que l'article dit. L'article dit que lors de
l'audition, un tiers peut se présenter, la régie l'entend et si
elle... "estime que les circonstances le justifient, elle reporte le
prononcé de sa décision et accorde à l'intervenant un
délai d'au plus deux mois à compter de la fin de l'audition"...
Or, l'audition prend fin, on est tous ici et on dit: On a fini d'entendre les
deux ou trois acquéreurs qui ont pu se présenter
simultanément ou seul. Nous tous, la commission, décidons de
reporter notre décision à deux mois pour permettre aux parties ou
aux intervenants, s'il y en a plusieurs, de rencontrer le propriétaire
et à celui-ci d'accepter la meilleure offre. Il n'y a pas d'autre
délai. Personne d'autre ne peut se présenter au cours de ces deux
mois pour demander de rouvrir le dossier. Il n'y a plus d'audition.
D'accord?
M. Scowen: C'est bien, mais je préfère ne pas
laisser à la régie la possibilité d'étendre les
auditions parce que personne...
M. Tardif: D'accord.
M. Scowen: ... ne peut dire à la régie: Vous devez
terminer l'audition une semaine après le début.
M. Tardif: Non, d'accord.
M. Scowen: La régie peut continuer l'audition. Avec une
telle clause, il devient clair pour la régie qu'il n'y a rien à
gagner en ne terminant pas l'audition. C'est ce processus qu'on veut encourager
afin que la décision soit vite rendue. Il faut se rappeler qu'il y a
déjà eu six mois avant, dès la demande.
M. Raynauld: Cela fait quarante ans que le logement est là
et que les gars auraient pu l'acheter.
M. Tardif: D'accord, mais...
M. Scowen: L'avis a été donné il y a
déjà six mois, et les auditions commencent.
M. Raynauld: Cela fait quarante ans que le logement est là
et il aurait pu être acheté et, tout à coup, parce qu'il va
être démoli, les gens disent: Ouf!...
M. Tardif: Je peux dire au député d'Outremont
qu'après avoir été locataire quatre ans dans un immeuble,
j'ai décidé de l'acheter le jour où le propriétaire
m'a dit: Je veux le vendre.
M. Paquette: C'est comme les fins de session.
M. Tardif: Moi, je ne voulais pas déménager. C'est
bête de même.
Une Voix: M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Excusez-moi, M. le
ministre.
M. Tardif: On dit: Un délai d'au plus deux mois à
compter de la fin de l'audition. L'audition n'est pas un processus qui dure,
dans le temps, éternellement. On sait qu'à l'heure actuelle les
auditions sont des affaires qui se font assez rapidement. Supposons qu'une
cause de démolition avec plusieurs intervenants pourrait prendre une
séance complète, deux séances je ne sais pas. Les
parties ont été entendues, c'est fini, l'administrateur ou le
régisseur dit aux gens: Allez chez vous, je vous ferai part de ma
décision. Sauf que cette décision, parce qu'il y a un intervenant
ici, ne pourra être rendue avant deux mois, si les parties s'entendent
avant. Le souci du député de Notre-Dame-de-Grâce, ce n'est
pas que dans ce délai de deux mois, c'est de faire durer l'audition
longtemps. Je pense que c'est là que...
M. Scowen: C'est une possibilité.
M. Tardif: Parce que le délai de deux mois, c'est un
délai d'au plus deux mois. Ce ne peut être plus que cela.
D'accord?
M. Scowen: Non.
M. Tardif: Oui. "Mais elle accorde à l'intervenant un
délai d'au plus deux mois à compter de la fin de l'audition".
L'audition se termine aujourd'hui et dans deux mois il faut que la
décision soit rendue.
M. Scowen: C'est cela. Mais l'audition dont vous parlez dans le
projet de loi n'est pas l'audition avec ses témoins. C'est l'audition
sur le cas.
M. Tardif: Non, c'est l'audition des témoins. C'est la
cause.
M. Scowen: Très bien, dans ce cas-là. Sur le
cas.
M. Tardif: Oui, sur le cas.
M. Scowen: C'est cela. Alors, ce cas pourrait être
poursuivi pendant une période assez longue et, à un moment
donné, on peut recevoir... Je comprends, M. le ministre, pourquoi vous
n'acceptez pas. Je pense que le sens de cet amendement est clair. Cela va
rendre beaucoup plus clair pour tout le monde qu'on peut avoir plusieurs offres
d'intervenants, mais une telle remise de 60 jours ne peut-être
accordée qu'une seule fois.
M. Tardif: C'est cela qui est dit. Mais là ce que vous
nous demandez, c'est de limiter dans le temps l'audition.
M. Scowen: Pas du tout.
M. Tardif: Mais oui.
M. Scowen: De savoir combien de temps.
M. Tardif: C'est le temps d'audition que vous voulez limiter ou
le temps de délibérer.
M. Raynauld: Tout à coup l'audition serait
ajournée. Tout à coup la régie déciderait de
rouvrir le cas au bout de deux mois parce qu'elle pense que peut-être
là il y aurait un arrangement qui s'en viendrait, mais cela prendrait
plus que deux mois. Qu'est-ce qui empêche la régie de rouvrir le
cas? C'est cela le problème.
M. Scowen: Ce qu'on veut, c'est que lors de l'audition...
M. Raynauld: On pourrait dire qu'il faut compléter
l'audition.
M. Tardif: Si c'était du consentement des parties, je ne
vois aucun problème. Si le propriétaire disait: Ecoutez, ne
rendez pas votre décision tout de suite, j'ai un autre acheteur qui est
intéressé. Rien n'empêche quelqu'un en tout temps, pendant
que la régie délibère et réfléchit au cas,
de se présenter au propriétaire avec une offre plus
alléchante de vendre son immeuble. C'est toujours présent
là dans le paysage.
M. Raynauld: Si le locataire, par hypothèse, ou l'acheteur
se présente à la régie et dit: L'autre partie n'est pas
consentante. A ce moment, la régie pourrait peut-être dire: On va
rouvrir le cas. S'ils s'entendent, il n'y a pas de problème. D'ailleurs,
le propriétaire, je pense bien, pourrait même retirer sa demande
devant la régie.
M. Tardif: Non, il faut qu'il ait une raison pour rouvrir un cas,
on ne rouvre pas une histoire comme cela. Je me vois mal dicter à un
tribunal, à une régie le temps qu'elle devra consacrer à
une audition, à l'audition d'une affaire. C'est comme si quelqu'un
nous...
M. Raynauld: II n'y a pas à ajourner là, ajourner
l'audition. Vous ne pouvez pas l'ajourner.
M. Tardif: Elle pourrait ajourner au lendemain, oui, comme je ne
sais pas moi, on va ajourner nos travaux pour étudier un dossier. Mais
à un moment donné, on dit: C'est fini. On a fini et on se
rapporte, un rapporteur fait rapport à l'Assemblée nationale.
M. Scowen: L'élément clé ce sont les mots:
Reporte le prononcé de sa décision.
M. Tardif: Oui.
M. Scowen: Ce que nous cherchons, c'est une phrase qui va dire
qu'elle peut faire ce reporta-tion...
M. Tardif: Ce report.
M. Scowen: Merci.
M. Tardif: C'est plus court.
M. Scowen: ... ce report de prononcé sur sa
décision, un seul point. En effet, ils font l'option s'il y a un ou deux
ou trois, le président dit: Aujourd'hui, on a décidé de
reporter notre décision pour deux mois maximum pour permettre à
un ou deux ou trois ou cinq, ou je ne sais pas combien de personnes
d'entreprendre des négociations. Il peut faire ce report une seule fois.
Un tel report ne peut être accordé qu'une seule fois. C'est le
sens précis de notre amendement et je pense que le mot report qui se lie
directement avec le deuxième...
M. Caron: Pour faire suite à ce que dit mon
collègue de Notre-Dame-de-Grâce, l'audition, les gens vont faire
la demande, elle va être affichée, ils ont dix jours pour faire
rapport à la régie. La régie va prendre combien de temps
avant de faire l'audition, d'inviter les gens à l'audition s'ils ont
des témoins? Dans le fond, c'est pour sauver le locataire. Ce
n'est pas pour sauver Pierre, Jean, Jacques.
M. Tardif: M. le Président, c'est bien difficile de dire
combien de temps la régie va prendre pour entendre les causes.
M. Caron: Vous ne pouvez pas dire aux commissaires quoi faire? Ce
sont eux qui auront à prendre leurs responsabilités.
M. Tardif: M. le Président, le volume de travail et
d'affaires traités à la régie n'est pas un processus
régulier tout au long de l'année. Il y a des pointes dans la
distribution des affaires dont est saisie la régie.
Par exemple, la période de renouvellement des baux, elle
connaît une montée assez considérable et puis il y a une
accalmie. Alors, vous dire que si une demande de démolition arrive en
pleine période de renouvellement des baux, c'est sûr qu'il y en a
beaucoup et cela pourrait prendre plus de temps. En période d'accalmie,
c'est contraire. Alors, cela m'est difficile de dire combien de temps une cause
pourra prendre et plus particulièrement s'il s'agit d'un immeuble, d'un
duplex ou de 40 ou 50 logements. Ce sont autant de données ou
d'impondérables ici.
Ecoutez, je suis presque persuadé que cela n'ajoutera pas
grand-chose, mais si c'est de nature à satisfaire les membres de cette
commission, je proposerais d'ajouter, à la fin de l'article 37: "La
régie ne peut reporter le prononcé de sa décision pour ce
motif qu'une seule fois". Cela va?
M. Cordeau: La période serait...
M. Raynauld: Ce serait pour ce motif...
M. Tardif: Pour ce motif de démolition. Il pourrait y
avoir d'autres motifs qui pourraient... D'accord? "La régie...
M. Scowen: C'est clair que le motif c'est le...
M. Tardif: C'est cela, l'intervention d'un tiers. D'accord? "La
régie ne peut reporter le prononcé de sa décision pour ce
motif qu'une seule fois". Si ceci devait entraîner immédiatement
l'adoption des articles 36 et 37, M. le Président, je propose que ce
soit ajouté à l'article 37.
Le Président (M. Laberge): Vous me transmettez copie de
l'article ou de votre modification pour que je puisse ratifier? L'article 36,
demeurant tel quel, et l'article 37... Ce que vous demandez serait
ajouté à la fin de l'article actuel?
M. Tardif: Serait ajouté à la fin de l'article 37,
c'est cela, M. le Président.
Le Président (M. Laberge): Alors, à la fin de
l'article 37 actuel, après le mot "aboutir." point On
ajoute "La régie ne peut reporter le prononcé de sa
décision pour ce motif qu'une seule fois".
Une Voix: Qu'une fois! M. Tardif: Qu'une fois.
Le Président (M. Laberge): Pardon, "qu'une fois". Je
laisse quand même... je l'ai présenté à la table, je
dis qu'il est recevable mais je voudrais qu'on rende décision
actuellement parce qu'on a toujours pris les articles 36 et 37 ensemble
sur l'article 36...
M. Tardif: Adopté.
Le Président (M. Laberge):... et l'article 37 en
même temps.
M. Tardif: Adopté.
Le Président (M. Laberge): Est-ce que cela vous va?
M. Tardif: Articles 36 et 37, adopté.
Le Président (M. Laberge): L'article 36 est donc
adopté. Adopté. L'article 37 est amendé et
adopté.
Il sera 18 heures dans quelques secondes, donc les travaux de cette
commission merci, messieurs sont ajournés à demain,
10 heures, dans la même salle.
Fin de la séance à 17 h 58