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Commission permanente de l'Assemblée
nationale
Sujet : Réforme électorale
Séance du mercredi 22 novembre 1972
(Dix heures seize minutes)
M. LAVOIE (Laval) (président de la commission permanente de
l'Assemblée nationale): A l'ordre, messieurs!
Liste électorale permanente
M. HARDY: L'objet de nos travaux, ce matin, est l'étude de la
liste permanente ou de la possibilité d'établir une liste
permanente des électeurs. Avant d'aborder directement le sujet, je
voudrais rappeler qu'il y aurait deux façons d'aborder les amendements
à la Loi électorale dans le cadre de nos travaux sur la
réforme électorale. On pourrait attendre de présenter des
solutions à tous les sujets qui se posent. Et on sait, on en a
discuté assez fréquemment soit au comité directeur ou lors
de nos séances plénières, qu'il y a une foule de sujets
qui concernent la réforme électorale. Et si on attendait de
trouver une solution à toutes ces questions avant de présenter
une législation ou des amendements à la loi actuelle, on
risquerait peut-être de se retrouver en 1975 encore au même point
où on en est actuellement. Dans un esprit d'efficacité, dans
l'espoir d'améliorer graduellement nos institutions électorales,
soit la loi et tout ce qui s'y rattache, je pense qu'il est
préférable d'aborder les sujets les uns après les autres
et une fois qu'une solution semble être trouvée, qu'il y ait
présentation d'une loi à l'Assemblée nationale pour
régler le problème que l'on a résolu.
C'est un peu dans cet esprit que, si on en arrivait à une
solution sur le problème des listes permanentes, il y aurait
possibilité de présenter immédiatement une loi à
l'Assemblée nationale, quitte à ce que les autres sujets qui
feront l'objet de nos travaux éventuellement pourront à tour de
rôle, au fur et à mesure que nous l'aurons décidé,
faire l'objet d'autres lois. En d'autres termes, au lieu de présenter
une seule loi pour amender la Loi électorale, on peut,
périodiquement, présenter des lois. Et d'autant plus en regard
des listes permanentes, si on veut que le système soit mis à
l'épreuve avant les élections qui, normalement, le mandat se
terminant en 1975, peuvent avoir lieu en 1974.
Mais il faudrait que cette loi soit adoptée assez rapidement si
on veut que cette première expérience de liste permanente
débute au cours de l'année 1973. Avant que tous les
mécanismes soient mis en application, il faudrait que la loi soit
votée, sinon à la présente session, tout au moins au
début de la prochaine session.
C'est pour toutes ces raisons que j'ai pensé qu'il y avait
urgence que la commission de l'Assemblée nationale se penche sur cette
question de la liste permanente, pour en discuter, avant qu'une loi soit
préparée.
J'imagine que tous les partis politiques se sont penchés...
D'ailleurs, nous avons entendu, ici à la commission, des experts nous
parler de cette question. Je pense bien que tous les partis politiques ont eu
l'occasion jusqu'à maintenant de discuter, à l'intérieur
de leurs cadres, de leurs rangs, de cette question. Quant à nous, nous
en avons discuté à différents échelons et, ce
matin, je voudrais faire part du résultat de nos pensées, de nos
discussions. Ce que je vais proposer n'est évidemment pas une loi. Ce
sont tout simplement les idées auxquelles nous en sommes arrivés,
à l'heure actuelle, pour que nous puissions en discuter. Si l'expression
n'était pas trop prétentieuse, je pourrais peut-être dire
qu'il s'agit d'une espèce de livre blanc. Mais je pense que l'expression
est un peu prétentieuse quant au contenu...
M.PAUL: Les livres blancs sont pour M. Tessier.
M. HARDY: ... de ce que je veux déposer. Mais c'est à peu
près dans l'esprit. Les propositions que je veux déposer ce
matin, à cette séance, c'est à titre de document de
travail, quitte à ce que nous en discutions et que nous poursuivions nos
études jusqu'à ce que nous en arrivions à la
préparation d'une loi définitive.
Plusieurs méthodes nous ont été
suggérées pour l'établissement de cette liste. Il y a des
méthodes qui, à prime abord, sur papier, apparaissent comme
idéales, sans faille, sans lacune, d'une rigueur scientifique presque
absolue.
Par contre, quand on examine ces méthodes et qu'on les examine
surtout en regard de la réalité bien concrète, on se rend
compte parfois qu'elles ne conduiraient peut-être pas à des
résultats si extraordinaires que leur rigueur scientifique sur papier
pourrait nous le laisser croire. Je pense, entre autres, aux méthodes
suggérées par la Société de mathématiques
appliquées ou des groupes semblables.
De toute façon ce que j'ai l'intention de proposer, ce matin, et
ce que je propose est quand même appuyé sur le dire de quelqu'un
qui a une expérience assez vaste dans ce domaine, non pas à
l'échelle mondiale, mais au Québec, je veux parler de- l'actuel
président général des élections. Ce que je veux
proposer s'inspire largement d'une opinion qu'il avait émise ici
à la commission de l'Assemblée nationale il y a
déjà un certain temps. Au fond, le mécanisme que nous
pourrions adopter, éventuellement, pour l'établissement d'une
liste permanente, serait constitué par un recensement annuel, à
une date fixe, c'est-à-dire qu'à chaque année, à
une date connue d'avance, il y aurait un recensement.
Le président des élections de chaque comté serait
tenu de faire parvenir au chef de tous les
partis reconnus cette liste d'électeurs et on pourrait
également obliger, dans la loi, le président des élections
à faire parvenir cette liste aux municipalités et aux commissions
scolaires, de sorte que cette liste pourrait servir à ces corps publics,
pour leurs propres élections, mais non pas intégralement, parce
qu'il reste quand même que cette liste que nous préparerions pour
les élections provinciales ne comporterait pas le nom des corporations,
lesquelles ont le droit de vote sur le plan municipal. En outre, sur le plan
municipal, les personnes qui ne résident pas dans un comté mais
qui y ont des propriétés ont droit de vote. Alors le nom de ces
personnes n'apparaîtrait pas sur notre liste non plus, alors qu'il doit
apparaître sur la liste électorale d'une municipalité.
Malgré cela, je pense que le fait que les municipalités et
les commissions scolaires reçoivent la liste annuelle qui serait
préparée pourrait faciliter grandement le travail des
municipalités et des commissions scolaires pour préparer leur
propre liste en vue des élections.
Il y aurait évidemment le même mécanisme à la
suite de l'annonce de l'émission des brefs, il y aurait une
révision suivant les mécanismes qui existent présentement
afin qu'il y ait correction de la liste entre le moment où la
dernière liste aurait été préparée et le
moment du déclenchement des élections.
Dans les grandes lignes, ce sont plutôt des énoncés
de principe que je viens de formuler et qui tracent un peu le cadre dans lequel
nous pourrions travailler. Bien sûr, si nous adoptions ce cadre, ces
principes, il y aurait lieu d'articuler davantage les différents aspects
pour transcrire ça dans une loi. C'est au fond un cadre très
général. Encore une fois, si on veut atteindre l'objectif sur
lequel tout le monde s'entend, c'est-à-dire avoir une liste permanente
d'électeurs, et le réaliser concrètement à des
coûts non prohibitifs, je pense que le système que nous proposons
est encore celui qui semble être le plus réaliste.
M. le Président, pour le moment, ce sont les propos que je
désirais tenir. Je serais très heureux d'entendre les opinions de
nos collègues de la commission de l'Assemblée nationale dans le
même esprit qui a toujours présidé à nos travaux,
c'est-à-dire un esprit de collégialité et de
collaboration.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): M. le Président, à quelques
exceptions près, ce travail s'est effectué, comme dit le
député de Terrebonne, dans un esprit de
collégialité. Je voudrais, avant que de me prononcer sur la
proposition qu'il a faite, vous faire une brève observation sur les
méthodes de travail qui ont été jusqu'à
présent les nôtres à cette commission de l'Assemblée
nationale où nous discutons de l'institution parlementaire.
A la réflexion, après avoir étudié le
problème du réaménagement de la carte électorale,
la question des sondages, des diverses questions qui se sont greffées au
fur et à mesure sur les questions principales, je suis à me
demander ce matin si nous avons procédé d'une façon
cohérente et si nous sommes en train de mettre sur pied, ou de donner
naissance, à un système parlementaire ou électoral qui
soit parfaitement articulé.
On a mis, au départ, l'accent sur le réaménagement
de la carte électorale sans, en même temps, se préoccuper
du mode de scrutin qui pourrait avoir des conséquences assez importantes
sur la pratique, si je peux m'exprimer ainsi, de la nouvelle carte
électorale qui fait actuellement, ou qui fera bientôt l'objet de
discussions à la Chambre puisque le projet de loi est actuellement
déposé.
Je me rends compte que nous avons procédé assez rapidement
dans certains cas, peut-être trop rapidement, et je suis à me
demander si nous avons bien procédé selon les étapes
normales qui auraient dû être celles de notre examen. A tout
événement, les choses étant ce qu'elles sont,
indépendamment de l'absence de logique de notre travail ce n'est
pas nécessairement un jugement de valeur que je porte, c'est une
réflexion que je fais en passant j'aimerais commenter la
proposition que vient de faire le député de Terrebonne. Je pense
que personne de cette commission et tous les députés en
sont membres n'a d'objection à ce que nous ayons des listes
électorales permanentes. Je crois qu'il s'agit là d'un
mécanisme nécessaire, que c'est une question de
sécurité et d'efficacité. Listes électorales
permanentes qui pourraient être confectionnées une fois pour
toutes à partir du moment où une loi en déciderait ainsi,
et qui pourraient être révisées selon des
échéanciers que le député de Terrebonne a
évoqués tout à l'heure et qui seraient, bien entendu,
révisées à l'occasion d'une élection
générale. Il n'y a donc pas, de notre côté,
d'objection à ce que nous ayons ces listes électorales
permanentes, qui dans mon esprit doivent servir lors des élections au
Québec.
Je ne crois pas qu'il serait utile à ce stade-ci de notre
étude d'encombrer le débat, de l'embarrasser en faisant
intervenir les municipalités, les commissions scolaires, etc. Tous ces
organismes ont peut-être besoin et seront peut-être
désireux, à un moment que je ne connais pas, d'établir des
listes, d'adopter ce principe de la confection de listes électorales
permanentes. Mais comme les problèmes sont différents, comme les
frontières sont souvent différentes, je ne crois pas que la liste
électorale permanente qui servirait lors d'un scrutin au provincial
puisse servir les fins des corporations municipales et des corporations
scolaires.
Il arrive toutefois, M. le Président, que le problème de
la confection d'une liste électorale permanente nous amène
forcément à poser un autre problème et, j'en discutais
privément, le député de Terrebonne me permettra d'y faire
référence, hier soir avec lui...
M. HARDY: Je vous donne l'autorisation de dévoiler le secret.
Carte d'identité
M. TREMBLAY (Chicoutimi): ... cela amène nécessairement
ce n'était pas un secret puisque tout le monde nous
écoutait la question suivante: Est-ce que la liste
électorale permanente ne nous obligera pas à envisager la
possiblité de l'établissement, ou, si vous voulez, de la mise en
place des mécanismes nécessaires à ce qu'on appelle
l'émission d'une carte ou la délivrance d'une carte
d'identité? Etant donné les déplacements très
nombreux des citoyens à travers le Québec,
particulièrement dans les grandes agglomérations, je crois qu'il
faut se départir d'un certain fétichisme, se libérer de
certains mythes qui font référence à l'Etat policier,
etc., et peut-être examiner la possibilité d'accepter cette
idée d'une carte d'identité obligatoire. D'autant plus que cela
n'apportera absolument rien de nouveau étant donné que nous
sommes codifiés de toute façon, que bientôt chacun des
membres de notre corps, des parties vitales de notre corps sera
numéroté, catalogué et placé sous la surveillance
du ministre de la Santé. Je ne crois donc pas que les mythes qui
existaient et que l'on a répandus, sur lesquels on a insisté
pendant trop longtemps, nous empêchent d'étudier cette question de
la carte d'identité.
Cela permettrait, d'autre part, à certains de nos
collègues d'avoir une définition exacte des cadavres vivants et
des cadavres morts et de bien identifier ces réalités fort
réjouissantes.
En ce qui concerne le parti dont je suis membre, nous n'avons aucune
sorte d'objection à ce qu'on confectionne des listes électorales
permanentes. Il restera, bien entendu, à déterminer les moyens
que l'on utilisera pour la confection de telles listes, les moyens aussi de
réviser périodiquement ces listes et de les revoir au moment des
élections générales.
Je termine, parce que je n'ai pas l'intention d'insister trop longuement
là-dessus, en revenant sur ce que je disais au départ, à
savoir qu'une étude plus approfondie, une réflexion plus
sérieuse sur l'ensemble du problème de la réforme de
l'institution parlementaire et de l'institution électorale m'oblige
à me demander si nous avons procédé avec logique et
cohérence et si nos esprits ne sont pas obnubilés par les
exigences d'impératifs à très court terme, qui peuvent
satisfaire des demandes qui ont été présentées,
mais qui, à longue portée, ne produiront peut-être pas les
effets que l'on en attend. J'aimerais connaître, dès que d'autres
collègues se seront prononcés là-dessus, l'avis du
président général des élections pas celui de
Gatineau, le président général, j'entends bien sur
le coût que pourrait représenter la confection d'une liste
électorale permanente, sur le coût que représenterait
également la révision de cette liste et comment le
président général des élections entrevoit le
fonctionnement de ce mécanisme nouveau qui lui permettrait, je n'en
doute pas, d'alléger sa tâche et de procéder avec
célérité, avec équité et avec toute la
prudence nécessaire, lorsque seront tenues des élections
générales et, particulièrement, des élections
complémentaires.
M. LE PRESIDENT: M. Latulippe. Pourquoi changer?
M. LATULIPPE: M. le Président, sur le principe de la liste
permanente, nous sommes d'accord que ce serait sûrement une
amélioration valable. Dans notre parti, vous l'avez noté au
début, nous avions des réticences là-dessus. Mais,
à force d'en parler, nous avons fini par nous laisser convaincre.
Cependant, à mon point de vue, pour être valable, une liste
permanente devrait être d'utilisation facile, souple, à un
coût raisonnable, pour permettre aussi le caractère
régional et même local d'application. A ce point de vue, je me
demande jusqu'à quel point la façon de présenter la liste
avec révision annuelle, c'est-à-dire le recensement annuel dont
nous parlait le vice-président, peut constituer une liste valable.
A ce moment-là, je me demande s'il ne vaut pas mieux garder le
système actuel, qui n'est pas plus coûteux et qui rendrait
probablement les mêmes services, étant donné que cette
liste-là ne serait pas, à un moment donné dans
l'année, valable pour une municipalité qui tomberait en
élection le 15 janvier. Elle ne pourrait pas l'avoir
immédiatement sous la main parce que la révision annuelle
n'aurait pas été faite. Les groupes des corporations ne seront
pas inclus, il va manquer certains détails, en fin de compte, ils vont
être obligés de faire leur propre recensement, même sur le
plan d'une municipalité.
Et ce sera la même chose au plan des commissions scolaires,
surtout quand on pense au processus de regroupement qui s'en vient. A mon point
de vue, une liste permanente, dans ce concept-là, devient de plus en
plus une nécessité. Mais ça suppose que c'est une liste
beaucoup plus radicale que ce dont parlait le vice-président tout
à l'heure, que c'est en fait quelque chose de plus intégral et
que ça nécessite la mise en place d'ordinateurs, que ça
peut amener des délais assez coûteux et que ça
nécessite aussi une certaine façon d'obliger les gens à
donner avis des divers changements de résidence qui peuvent survenir
dans le cours d'une année.
Pour ces raisons, j'hésite un peu à souscrire à la
proposition du vice-président de la Chambre, quoique étant
valable. A ce moment-là, je me dis: Pourquoi changer? Gardons ce que
nous avons. C'est encore moins coûteux et ça rend probablement des
services tout aussi importants.
Dans ce sens-là, je me demande jusqu'à quel point une
liste annuelle, avec révision annuelle, peut être valable. Je me
demande si ça ne coûte pas beaucoup meilleur marché et que
ça n'a pas exactement les mêmes fins de faire une fois tous les
quatres ans exactement selon le processus actuel. Il y aurait peut-être
lieu de l'améliorer un peu au niveau des données techniques et,
à ce moment-là, ce serait beaucoup moins coûteux.
Dans ce concept-là, je suis d'accord sur les principes mais sur
la technique j'hésite encore et je me demande s'il n'y aurait pas
lieu... Moi, c'est un ou l'autre, ou on passe à un changement
intégral ou on garde ce qu'on a en l'améliorant quelque peu.
Merci beaucoup, M. le Président.
M. PAUL: En résumé, si j'ai bien compris l'honorable
député, il est favorable au principe et il est contre les
modalités qui pourraient...
M. LATULIPPE: C'est exactement cela. M. LE PRESIDENT: M. Laurin.
M. LAURIN: Les déclarations d'aujourd'hui du député
de Terrebonne m'ont réjoui. Il a parlé d'or, comme il lui arrive
d'ailleurs souvent de parler d'or.
M. HARDY: Est-ce que je pourrais poser une question? Cela m'intrigue. Je
n'ai pas compris.
M. PAUL: II a parlé d'or. D, apostrophe, 0, R.
Amendements successifs
M. LAUKIN: Habituellement, on dit parler d'argent et le silence est
d'or. Mais ce matin, vous avez parlé d'or. Je suis tout à fait
d'accord sur le processus que vous avez décrit. Il est
préférable d'amender la Loi électorale par morceaux, au
fur et à mesure que l'attention des membres de la commission se porte
sur tel ou tel aspect de la Loi électorale. Une fois que les
réflexions sont terminées, qu'un concensus est
dégagé, que le gouvernement prenne ensuite ses
responsabilités et amende successivement les divers secteurs ou sections
de la Loi électorale. Je pense que c'est efficace et aussi que cela
permet une mise à jour graduelle d'une loi quand même très
importante.
Je suis particulièrement d'accord en ce qui concerne la liste
permanente parce qu'après le travail qui a été fait
relativement à la carte électorale, c'est sûrement un des
aspects majeurs de toute loi électorale et un des points sur lesquels
des réformes s'imposent avec le plus de rapidité. Je suis
d'ailleurs très heureux de constater que le principe de la liste
permanente est acquis par tous les partis en cette Chambre : le Parti
libéral, le parti Unité-Québec, le Ralliement
créditiste et, également, nous l'avons dit à plusieurs
reprises, le Parti québécois. Je pense que c'est là une
condition initiale qu'il fallait dégager. Maintenant qu'elle est
acquise, je pense qu'il devrait être assez facile de pouvoir s'entendre
sur les modalités. D'autant plus que, comme le député de
Terrebonne l'a souligné, il importe d'agir avec une rapidité
relative en cette matière, puisque l'application d'une loi touchant une
liste permanente prendrait, quand même, un certain temps et qu'il serait
sûrement essentiel qu'on puisse utiliser ce mécanisme nouveau de
la liste permanente pour la prochaine consultation électorale
générale. Donc, sur ces divers points, non seulement le
député de Terrebonne a notre accord, mais c'est un accord
enthousiaste et la promesse d'une collaboration très active.
M. HARDY: Je demanderais au député de Bourget de ne pas
trop en mettre parce qu'il va me placer dans une situation très
délicate.
M. LAURIN: En ce qui concerne le projet précis que vous nous avez
présenté, vous avez fait allusion à la déposition
d'un document. Je ne sais pas si vous avez toujours l'intention de
déposer un document.
M. HARDY: Je n'ai pas parlé de déposer un document. En
fait, ce que j'avais à déposer, je l'ai fait verbalement.
M. LAURIN: Parfait.
M. LEGER: Le livre blanc, ce n'était pas ça?
M. HARDY: J'ai bien précisé que parler de livre blanc,
c'était prétentieux, parce qu'il s'agissait simplement
d'émettre quelques idées générales, un cadre
général.
M. PAUL: Vous avez exposé le problème verbalement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Sans accroc au règlement.
M. LAURIN: Nous sommes passablement d'accord sur le cadre
général qu'a proposé le député de
Terrebonne. Je pense qu'il faudrait quand même le préciser, de
façon que l'accord que nous lui donnons, quant au cadre
général, puisse être maintenu en ce qui concerne
l'applicabilité de ce cadre général.
Je pense bien que le but que le gouvernement poursuit autant que tous
les partis d'Opposition est d'en arriver à la confection d'une liste
électorale qui soit non seulement permanente mais qui soit
également complète et qui soit également impartiale,
c'est-à-dire qui ne puisse pas être utilisée,
manipulée par qui que ce soit à des fins autres que celles
qu'exige le processus démocratique. Je pense que tous les partis
s'entendent également sur les conditions que devrait respecter une liste
électorale perma-
nente ou en tout cas sur les buts qu'elle devrait visée. H s'agit
maintenant de savoir si les propositions concrètes que vous faites nous
permettront d'en arriver à la confection d'une liste permanente qui soit
non seulement permanente mais qui soit complète et qui soit
impartiale.
Je pense que ceci pose en particulier le choix des agents qui seront
chargés de la confection ou de la révision de cette liste. Par
qui, par exemple, seront-ils choisis? Seront-ils choisis par le
président général des élections? Est-ce que la loi
donnera la possibilité au président général des
élections de s'entourer d'un bureau de fonctionnaires, de personnes
qu'il pourra choisir lui-même et qui pourront procéder à ce
recensement? Car ceci est important. Selon que le choix de ces personnes,
qu'elles soient des recenseurs ou des réviseurs, est laissé
à une commission impartiale ou qu'il soit laissé à l'un ou
l'autre des partis, on sent très bien que, dans un certain cas, il peut
y avoir plus de garanties que dans tel autre. Je pense que c'est là un
point important sur lequel il faudrait que vous nous éclairiez le plus
tôt possible ou que le président général des
élections nous éclaire le plus tôt possible quant aux
intentions du gouvernement en la matière. Car un recensement annuel ou
une révision périodique ne vaudront que dans la mesure où
tous les partis et tous les citoyens seront assurés que leur droit est
reconnu, avec toutes les garanties que cela exige.
Cette réserve ou cette condition une fois faite, nous sommes
quand même absolument d'accord sur le principe de
l'énumération annuelle, malgré que nous pourrions
peut-être ajouter que, ce recensement une fois fait, une fois que tous
les électeurs sont recensés, il n'est peut-être pas
nécessaire de la répéter tous les ans. C'est là un
processus long, difficile, coûteux et une fois, au fond, que tous les
électeurs ont été recensés, ce qui s'impose d'une
façon annuelle ou bisannuelle ou même trisannuelle, c'est
plutôt le processus de révision. En fait, c'est toujours ce
processus de révision qui a toujours donné les plus grandes
difficultés aux pays qui ont tenté d'établir la liste
permanente. Certains le faisaient en envoyant des personnes sur les lieux,
d'autres le faisaient en utilisant, par exemple, les numéros de
sécurité sociale, les méthodes de recensement de certaines
grandes corporations, comme les compagnies d'électricité,
d'autres utilisaient la méthode du permis de conduire. Au fond, il
s'agit de suivre les déplacements des citoyens.
En France, comme en Angleterre, par exemple, c'est par la carte
d'identié que l'on procède lors d'un changement de logement.
Chaque fois qu'un citoyen déménage, il est forcé
d'enregistrer son déménagement quelque part s'il veut conserver
son droit de vote. Au fond, c'est là que la discussion peut s'engager,
savoir sur les diverses méthodes utilisées pour la
révision des listes. Peut-être qu'il n'est pas nécessaire,
en somme, de procéder annuellement à l'énumération,
mais il est sûrement important et essentiel de procéder au moins
annuellement, et peut-être parfois plus souvent, à la
révision des listes. Si on le faisait, peut-être qu'on pourrait
tenir compte de l'objection du député de Frontenac, qui se posait
des questions tout à l'heure sur l'efficacité du
système.
J'aimerais donc avoir l'opinion du député de Terrebonne
sur un recensement fait une fois pour toutes mais une révision qui,
elle, s'effectue plus souvent et selon un certain type de méthode
justement pour s'assurer que nous avons une liste constamment complète,
impartiale et mise à jour. J'aimerais aussi avoir son opinion sur le
choix aussi bien des recenseurs que des réviseurs lequel, â mon
avis, devrait s'éloigner sensiblement des méthodes actuellement
en usage dans ce domaine.
M. HARDY: Si vous me permettez, je parlerai avant le
député de Lafontaine, puisque le député de Bourget
m'a posé quelques questions. Parce que le député de
Lafontaine va peut-être me mélanger.
M. LEGER: Je ne pensais pas que j'avais tant de pouvoirs.
M. HARDY: Je commencerai un peu de la même façon que le
député de Bourget. Je suis entièrement d'accord avec lui
pour reconnaître que l'objectif fondamental que nous devons poursuivre,
c'est celui d'assurer à tous les citoyens, sans exception, leur droit de
vote. Il ne faut pas faire d'une liste permanente un mythe ou quelque chose...
Ce n'est pas une fin en soi. Si l'on veut adopter une liste permanente, c'est
pour prendre tous les moyens humainement possibles de façon qu'aucun
électeur ne soit privé du droit de vote. Malheureusement dans la
situation actuelle, comme le recensement des électeurs se fait
présentement, il se déroule dans un climat un peu
fiévreux, d'une façon précipitée. Je ne suis pas de
ceux qui prêtent toutes sortes de mauvaises intentions. Il peut arriver,
l'homme étant l'homme, qu'à certains moments il y ait des
mauvaises intentions, mais je pense que, d'une façon
générale, les oublis que l'on remarque sur les listes
électorales sont le fruit de précipitations et du climat
général dans lequel ce recensement se fait.
Alors, je pense qu'on s'entend tous pour dire que ce que l'on veut, ce
que l'on désire, c'est que tous les électeurs du Québec
soient sur les listes électorales afin de pouvoir exercer normalement
leur droit de vote. Voilà l'objectif. Comment atteindre cet objectif?
Nous pensons qu'une liste permanente, dans l'éventail des moyens qui
nous sont offerts, est le moyen privilégié actuellement.
Le député de Frontenac dit: Qu'est-ce que cela va
améliorer soit ma proposition par rapport à la
situation actuelle?
Loin de moi la pensée que ce que je vous ai proposé est la
perfection. Je pense quand même que le député de Frontenac
est un peu sévère quand il dit que ça ne change rien. La
première chose que cela change, c'est qu'on fait d'abord un recensement
en dehors du climat électoral, dans une période de
sérénité, de calme. Donc, par voie de conséquence,
nous avons plus de chance, à mon avis, que ceux qui confectionnent la
liste électorale la confectionnent d'une façon plus
complète. Deuxièmement, au lieu d'en faire une seule, on en fait
une annuellement. S'il y a eu des erreurs commises au premier recensement ces
erreurs pourront être corrigées au deuxième. Si on fait
cette liste trois fois ou quatre fois plutôt qu'une fois, il y a plus de
chance que cette liste soit complète. Nous sommes moins restreints dans
le temps, on dispose de plus de temps.
Le député de Bourget dit: Pourquoi ne pas remplacer le
recensement annuel par une révision qui se ferait au cours de
l'année? Dans tous les systèmes que nous avons
étudiés, ce système de révision repose sur
l'électeur, le fardeau appartient à l'électeur. C'est
l'électeur qui doit se déplacer pour aller se faire inscrire.
Ici, j'en appelle au témoignage d'un politicolo-gue de grande
renommée, malheureusement décédé, Jean Meynaud, qui
disait que chaque fois qu'on adopte des modifications dans les systèmes
électoraux, si on veut être réaliste, il faut tenir compte
de la culture politique, des moeurs et des habitudes des gens.
Or, je pense que tout ceux qui ont un tant soit peu d'expérience
dans ce domaine savent bien que, pour des raisons que je ne peux pas identifier
d'une façon scientifique mais pour une foule de raisons, il y a un grand
nombre de personnes qui ne sont pas portées à surveiller
ça. Même en période électorale. A plus forte raison
si la révision se fait en dehors d'une période électorale,
je pense qu'à toutes fins pratiques, ça n'atteindrait pas son
but. On sait très bien que, même en période
électorale, les nouvelles inscriptions de noms se font habituellement
à la suite de l'incitation des organisations politiques. On n'a pas
à se le cacher, ce sont les organisations politiques qui révisent
les listes électorales et qui appellent les gens pour leur dire que leur
nom n'est pas sur la liste. C'est peut-être un peu paradoxal mais,
même malgré ça, on s'aperçoit qu'il y a des gens qui
sont motivés comme électeurs et qui, par distraction ou parce
qu'ils sont préoccupés par toutes sortes d'autres choses, ne vont
pas se faire enregistrer au bureau de révision, arrivent le jour du vote
et sont tout étonnés de s'apercevoir qu'ils n'y sont pas et sont
souvent très déçus. Pour cette raison, je pense que se
fier à une méthode de révision ne nous ferait pas
atteindre l'objectif que le député de Bourget, moi-même et
que tous nos collègues poursuivent, c'est-à-dire s'assurer que
100 p.c. des électeurs soient sur les listes. Si on se fie à une
méthode de révision, je crains fort qu'on arrive le jour du vote
et qu'un très grand nombre, de personnes ne soient pas sur la liste et,
par voie de conséquence, ne soient privées de leur droit de
vote.
Je reconnais que, comme le député de Frontenac, un
recensement annuel comme on le fait actuellement va coûter plus cher
qu'un seul recensement. C'est sûr que ça va coûter plus
cher.
Mais je pense, compte tenu de ce que cela coûte par rapport
à l'ensemble du budget de la province c'est un facteur qu'il faut
regarder et, surtout, compte tenu de l'objectif que l'on poursuit, que
le coût ne devrait pas être pris en considération. Dans une
démocratie, c'est une chose extrêmement précieuse que de
s'assurer que tout le monde puisse voter. Dans une démocratie, digne de
ce nom, on doit être prêt à débourser quelque chose
pour s'en assurer.
Nomination des recenseurs
M. HARDY: Quant à la dernière question du
député de Bourget, la question de nomination, je comprends que
c'est relié à la question qu'on étudie
présentement, mais pas d'une façon totale et absolue. Je n'ai pas
d'objection à ce qu'on en discute. Au contraire. Je pense que c'est
peut-être une question encore plus complexe que celle de s'entendre sur
la liste permanente et les mécanismes. Quand on regarde un peu ce qui se
passe ailleurs, on voit qu'il y a une foule de méthodes quant à
la nomination. Le député de Bourget faisait allusion tantôt
à une commission. D'ailleurs, j'ai déjà vu cela dans un
mémoire, je pense, qui a été présenté
récemment par M. Jacques-Yvan Morin, qui parlait d'une commission
générale, au lieu d'avoir un président
général des élections. Ceci remet en cause beaucoup
plus que la liste permanente la pierre angulaire de notre institution
sur le plan électoral, de l'organisation comme telle. C'est certainement
une question sur laquelle il faudrait se pencher. Il faudrait étudier
cette question pour savoir si on devrait conserver le mécanisme actuel
d'un président ou avoir une commission, les mécanismes de
nomination, de recommandation des différents agents électoraux,
que ce soient les gens dans les bureaux de scrutateurs, les greffiers, les
recenseurs, etc. C'est sûrement une chose sur laquelle il faudra se
pencher.
Mais, rattachant ceci à ma première observation, je dis
que, si on attend de régler tout le problème qui est un
problème global, si on décide de nommer les recenseurs de telle
façon, si on veut être cohérent, comme le
député de Chicoutimi le demande, avec l'esprit cartésien
qu'on doit lui reconnaître, je pense qu'il faudra envisager cette
question globalement, ne pas simplement s'attacher à la nomination des
recenseurs, mais aussi au processus de nomination pour tous les agents, toutes
les personnes qui jouent un rôle lors d'une élection: à
partir de la tête, du président général des
élections,
jusqu'aux présidents de comté, les scrutateurs, les
greffiers, les recenseurs, les gens qui sont dans les bureaux de
révision. Cette question devrait être étudiée
globalement parce que c'est le même problème.
M. LAURIN: Le choix de tous ces gens devrait être sorti de la
politique.
M. HARDY: Je suis d'accord qu'on devrait trouver la méthode la
plus parfaite pour assurer les élections les plus honnêtes et les
plus démocratiques possible. Je dis que, si on attend de régler
cette question-là pour régler le problème des listes
permanentes, on risque de ne pas mettre en application le système des
listes permanentes avant les prochaines élections. C'est la raison pour
laquelle je suggérerais que l'on s'entende sur le mécanisme des
listes permanentes, quitte, au cours des prochains mois, à
étudier l'ensemble du problème de la nomination des je ne
me rappelle plus du nom exact officiers d'élection, qui devrait
être étudié globalement.
Encore une fois, si on attend de résoudre le problème de
la nomination des officiers d'élection pour présenter une loi sur
les listes permanentes, on risque, à vouloir trop embrasser, de manquer
son coup.
Tenir compte du multipartisme
M. LEGER: M. le Président, je pense que, si on part avec l'esprit
d'avoir une liste électorale permanente, je suis d'accord avec le
député de Terrebonne que ce projet de loi devrait être
simple au départ, de façon qu'on puisse facilement le mettre en
place et que ce soit assez bien compris par la plupart des citoyens. Il y a
cependant certaines considérations qui doivent être faites avant
de mettre en place un mécanisme simple comme celui-là. Tout
d'abord, juste le fait de penser à une liste électorale
permanente nous amène à changer l'esprit et le mécanisme
du bipartisme, parce que tout est fait actuellement en fonction d'un
bipartisme. C'est la raison pour laquelle, dans les différentes
élections jusqu'à ce jour, on a connu des difficultés,
à cause de l'esprit bipartite qui existe dans tout ce
fonctionnement.
Si nous faisons un recensement annuel, nous pouvons quand même
dire que le lendemain d'un recensement, la liste est déjà fausse,
parce que, immédiatement après, il commence à y avoir des
déménagements, des changements, etc. C'est donc dire qu'il
faudrait au moins, même s'il y a un recensement annuel, une
possibilité de révision entre deux recensements, en ce sens qu'il
faudrait peut-être apporter un ensemble de solutions pour cette
révision, qui tiendraient compte, d'abord, du fait que le citoyen
devrait pouvoir lui-même s'enregistrer. Deuxièmement, que les
partis politiques puissent aussi avoir la possibilité de faire des
corrections entre deux recensements, parce que, justement, comme le disaient
les députés tantôt, il y a des citoyens qui sont
très politisés, d'autres le sont moins. D'eux-mêmes, les
citoyens peuvent ne pas être suffisamment motivés ou
renseignés pour le faire. Il y a un troisième point dans cet
ensemble de révision. C'est qu'on se serve, comme le disait le
député de Bourget tantôt, de tous les renseignements qui
existent à l'intérieur des mécanismes du gouvernement,
c'est-à-dire des différents ministères, et qu'on donne
peut-être à ces différents ministères une certaine
obligation supplémentaire, soit pour les permis de conduire, soit pour
les chèques d'allocations sociales, d'allocations familiales, etc. Que,
pour tout geste qui rejoint un citoyen, venant du gouvernement, il y ait une
formule attachée de changement d'adresse pour que, par les ordinateurs,
on puisse donner les renseignements à ceux qui s'occupent de cette liste
électorale permanente. Il y a aussi le fait que, dans la loi actuelle,
il n'y a, au niveau électoral, que deux partis qui
bénéficient de ces renseignements. Il faudrait
nécessairement, dans cet ensemble de corrections, inclure le
multipartisme, ou au moins les quatre partis, pour qu'ils puissent
bénéficier de ces renseignements et aussi en fournir.
Dans la loi actuelle, il est dit qu'à chaque année le
président d'élections doit recevoir des présidents de
chacun des comtés la délimitation des bureaux de scrutin. Ces
renseignements ne sont remis, selon la loi, qu'au parti au pouvoir et au parti
de l'Opposition officielle.
M. HARDY: Je peux poser une question? M. LEGER: Oui.
M. HARDY; Tantôt, dans le plan verbal que j'ai soumis, j'ai bien
précisé que le président d'élections devrait faire
parvenir cette liste annuellement à tous les chefs des partis
reconnus.
M. LEGER: C'est cela. Je suis d'accord avec vous, mais je disais, non
seulement à ce moment-là, mais dans tout le mécanisme, il
faut que ce soit reconnu. C'est l'ensemble des possibilités de
corrections. C'est donc dire que cela demanderait aussi des bureaux de
dépôt permanents, si on fait une révision annuelle, pour
que, dans l'ensemble des possibilités de révision, il y ait une
possibilité d'avoir un dépôt annuel, comme dans une
période électorale.
Le député de Terrebonne disait tantôt aussi,
après les brefs qui permettent le déclenchement d'une
élection, qu'il y ait aussi une possibilité de révision.
Encore là, il faut tenir compte qu'il y a des anomalies qui arrivent
dans chacune des élections et j'en nomme une en passant. Durant la
période du recensement, les deux partis qui étaient reconnus pour
faire le recensement ont immédiatement le renseignement, la liste
électorale étant par la suite remise aux autres partis en retard,
parce que c'est le système bipartiste.
Les autres partis durant une élection vérifient à
la hâte les anomalies de cette liste, les manques, les corrections, les
radiations, etc., et ils ont le droit d'aller déposer, à une date
bien précise, à un bureau de dépôt, ces corrections.
Mais ce qu'on ne sait pas, c'est que, quand les corrections, les annulations et
les inscriptions sont déposées au bureau de dépôt,
chaque parti n'est pas au courant de ce que les autres partis ont
déposé. Il arrive donc qu'il se fait des annulations de personnes
qui existent, par erreur ou autrement, et le jour du vote ou quelques jours
avant que les partis reçoivent la liste finale, dernière et
définitive et on ne peut pas faire de correction à ce
moment-là.
Je pense qu'il devrait y avoir un mécanisme permettant, durant
ces révisions, pour que toute nouvelle correction, annulation ou
addition soient soumises aussi aux autres partis, en même temps, de
façon qu'on ne soit pas devant un fait accompli. Cela présuppose
soit que chaque parti reçoive les corrections, soit que les quatre
partis soient présents au bureau de dépôt et au bureau de
révision. Sans cela, il y a deux partis qui, n'étant pas
déjà nommés là, n'ont pas la possibilité de
vérifier et ils doivent subir, le jour de l'élection, les listes
qui ont été corrigées et qui peuvent être mal
corrigées.
Je voudrais terminer en disant aussi que ces listes électorales
permanentes, même s'il s'agit d'un recensement annuel ou d'une
révision annuelle, ne coûteront pas tellement plus cher si on peut
faire répartir le coût par ceux qui vont s'en servir par la suite,
c'est-à-dire non seulement pour les élections provinciales, mais
même municipales, même scolaires et aussi, temporairement,
même fédérales.
M. HARDY: Est-ce que vous voulez dire qu'on devrait vendre la liste que
le président des élections va envoyer aux municipalités et
leur faire payer des droits?
M. LEGER: Pas nécessairement, mais cela coûte quelque chose
quand on fait le recensement pour les élections scolaires, municipales,
provinciales...
M. HARDY: Ce serait autant d'épargné.
M. LEGER: C'est cela. Autrement dit, ce qu'il y a à payer, au
lieu de le payer quatre fois, on ne le paie qu'une fois. Il peut se trouver un
mécanisme pour que les quatre paliers puissent défrayer une
partie du coût.
M. HARDY: Je note également la suggestion du député
de Lafontaine qui s'inspire d'un fédéralisme
coopératif.
M. LEGER: C'est pour cela que j'ai dit: Temporairement.
Maintenant, M. le Président, il y a aussi la nomination des
personnes qui vont faire le recensement. C'est sûr que le
député de Terre- bonne a touché un point essentiel
tantôt quand il disait que, durant une campagne électorale, ce
recensement est fait dans une période de fièvre et, qu'on
l'admette ou non, subjectivement ou objectivement, une période
partisane. Je pense que, si c'est fait d'une façon annuelle et si
c'étaient des fonctionnaires qui faisaient le travail je sais
qu'il y a des fonctionnaires qui ont un travail intensif durant une grande
partie de l'année et dans certaines autres parties un travail moins
intensif plutôt que de nommer des personnes, à la suite des
suggestions des partis, et où il y aurait certainement de la
partisanerie organisée...
M. HARDY: Est-ce que vous voulez laisser sous-entendre qu'il y a une
garantie absolue de non-partisanerie de la part des fonctionnaires?
M. LEGER: Non, mais ce ne serait pas une partisanerie
organisée.
M. HARDY: J'espère que ce que le député de
Lafontaine dit provient d'une certaine naive-té et non pas de
machiavélisme.
M. LEGER: C'est un juste milieu entre les deux.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): On pourrait demander cela aux fonctionnaires
de la délégation du Québec à Paris.
M. LEGER: Ce que je veux dire par là, c'est que le système
actuel fait qu'on demande au parti au pouvoir, au parti de l'Opposition
officielle de nommer des personnes. Cela est sûr que ce sont des
personnes qui sont, au départ, malgré toute leur bonne
volonté, partisanes d'une formation politique. Si c'étaient des
fonctionnaires qui ont, à l'intérieur de leur ministère,
une période moins achalandée, plutôt que d'avoir tout un
personnel pour faire un travail qui peut durer uniquement un mois, à
travers tout le Québec, ce pourraient être des fonctionnaires qui
soient dirigés, durant un mois, à cette fonction.
Si les partis reconnus ont l'occasion d'obtenir ces listes
électorales permanentes immédiatement après, il y aura
moyen de revoir, dans une période de calme, le sérieux et la
réalité de cette liste électorale. Je pense qu'il serait
préférable que ce soit ainsi plutôt que ce soient des
personnes nommées par des partis où on risque d'y voir un certain
danger.
C'étaient les considérations principales que je voulais
énoncer sur la liste électorale permanente pour que ce soit
suffisamment simple et que ça tienne compte des réalités
du Québec.
M. HARDY: M. le Président, je voudrais seulement relever une
chose que le député de Lafontaine a dite. Evidemment, il a dit
bien des choses, et je vais les analyser à tête reposée
pour faire le partage entre l'ivraie et le bon grain.
Mais, à première vue, il y a vraiment de l'ivraie qui m'a
sauté aux yeux, c'est sa proposition voulant que les partis politiques
comme tels aient le droit de faire des réinscriptions.
L'histoire nous enseigne que cette méthode a été
mises de côté depuis 1945 en raison des fraudes...
M. LEGER : Si le député me permet, ce n'est pas exactement
ça que j'ai voulu dire.
M. HARDY: Non? Ah bon!
M. LEGER: Actuellement, les partis surveillant la liste
électorale, voyant des noms qui manquent, se servent de la loi pour dire
à telle personne: Voulez-vous aller... C'est dans ce sens.
M. HARDY: Mais ce sont les personnes. M. LEGER : Oui, ce sont les
personnes. M. HARDY: Mais ça se restreint...
M. LEGER: Mais que les partis puissent continuer le travail qu'ils font
actuellement, soit de vérifier les noms qui n'y sont pas et...
M. HARDY: Oui, mais ce ne serait pas le parti qui demanderait...
M. LEGER: Comme tel, non.
M. HARDY: Dans le fond, vous demandez le statu quo actuel, quant
à ça.
M. LEGER: Oui.
M. HARDY: Ah bon! Très bien. Alors, je retire ce que j'ai
dit.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Le député de Lafontaine parlait
tout à l'heure de la possibilité de confier ça à
des fonctionnaires pour des raisons d'objectivité. Disons qu'en principe
ce pourrait être acceptable. Mais étant donné aujourd'hui
que les fonctionnaires ont toute liberté d'action dans le domaine
politique, qu'ils participent activement aux élections et c'est
excellent, c'est leur droit, ils ont des droits de citoyens comme tout le monde
je n'ai pas vraiment l'impression que leur objectivité serait
plus grande que celle de ceux qui, actuellement, confectionnent les listes.
C'est une proposition qui mérite certaines considérations,
mais il nous faudrait l'examiner et voir de quelle façon il serait
possible de trouver un moyen terme et d'aménager un système qui
associerait, à la fois, des citoyens en dehors du fonctionnarisme et des
fonctionnaires à la confection des listes électorales.
On sait ce qui peut se produire même lorsque la loi est
très précise en ce qui concerne la préparation des
bulletins de vote. On se rend compte que, en dépit de toutes les
prescriptions de la loi, de toutes les exigences qui sont imposées au
président général des élections, il se glisse des
erreurs même chez les fonctionnaires les mieux intentionnés.
J'estime donc qu'un citoyen qui est intéressé à un
parti politique quel qu'il soit est, à cet égard, sur le
même pied et peut avoir la même sorte d'objectivité que le
fonctionnaire qui, lui aussi, peut être engagé dans un mouvement
politique. Ce que je retiens de ce qu'a dit le député de
Lafontaine, c'est qu'il serait peut-être utile que le président
général des élections soit entouré d'un groupe de
spécialistes, de techniciens qui préparent les documents, qui
font la publicité, qui se chargent d'établir les contacts avec
les citoyens sans que, pour autant, on dissocie les citoyens de ce travail de
préparation des listes électorales. Parce que c'est un excellent
moyen de mobiliser les citoyens, de les sensibiliser à la chose
politique et de les faire participer proprio motu à une entreprise qui
les intéresse au premier chef.
Je ne suis pas du tout disposé à admettre que, parce qu'on
est fonctionnaire, on est, à tous égards, dépouillé
de partisanerie politique.
Il y a trop d'événements qui nous ont administré la
preuve du contraire depuis un certain nombre de mois.
M. LE PRESIDENT: Le député de Lafontaine.
M. LEGER: Je voudrais simplement ajouter un commentaire à ce que
disait le député de Chicoutimi. La raison pour laquelle je
proposais que ce soient des fonctionnaires, c'est que cela pourrait d'abord
coûter moins cher. Deuxièmement, les fonctionnaires pouvant
être entraînés, on aurait une meilleure compétence
et, troisièmement, même si un fonctionnaire avait des options
politiques c'est sûr qu'ils doivent en avoir je doute fort
que ce soit une partisanerie organisée du fait qu'un parti politique
soumet des noms comme tels. Je pense que des fonctionnaires qui ont leur propre
objectivité, qui sont entraînés peuvent être
compétents, parce que dans le recensement que nous avons vu à
travers le Québec, même dans les élections que mentionnait
tantôt le député de Chicoutimi, on a vu, dans certaines
régions, une incompétence absolument crasse dans ce travail.
La proposition que j'ai avancée fait appel à la
compétence, au coût et, enfin, au fait que ce n'est pas une
partisanerie organisée.
M. HARDY: Est-ce que vous me permettez une question? Le
député de Lafontaine parle d'une partisanerie organisée.
Le député de Lafontaine craint-il davantage une partisanerie
organisée qu'une partisanerie camouflée?
M. LEGER: II y aura toujours de la partisanerie, cela est sûr.
M. HARDY: Oui, d'accord. Mais vous savez, il ne faut pas non plus se
faire d'illusion.
Une autre question que je voudrais poser. Est-ce que le
député de Lafontaine connaît le nombre de recenseurs qu'on
doit utiliser pour un recensement?
M. LEGER: C'est sûr qu'à l'échelle de tout le
Québec... Il y en a pratiquement un par bureau de vote. Je sais que cela
en fait énormément. Mais quand je parle de fonctionnaires, je ne
parlais pas de fonctionnaires qui venaient uniquement du gouvernement
provincial. Je parlais des trois paliers: le niveau provincial, le niveau
municipal et le niveau scolaire. Ce sont toutes des personnes travaillant dans
un de ces domaines. Alors, le président général des
élections, accompagné de spécialistes, verrait à
recruter du personnel parmi tous ces paliers de gouvernement qui, eux, sont
directement intéressés à la chose publique.
M. HARDY: Cela veut dire que, se basant sur la dernière
élection, on aurait dû prendre 27,000 personnes, les retirer de
leurs travaux ordinaires pour faire ce travail-là.
M. LAURIN: Puis-je faire remarquer au député de Terrebonne
que, si le recensement est étalé sur une plus grande
période, le nombre de recenseurs pourrait être moindre,
étant donné que le nombre excessif que nous avons maintenant est
dû au fait qu'ils doivent effectuer un travail très rapidement et
sur une très courte période?
M. HARDY: Mais cela revient au même. Au lieu de prendre 27,000
personnes qui travaillent pendant une semaine, si vous en avez 15,000 qui
travaillent pendant deux semaines, quant au travail qu'elles font
habituellement, cela désorganise autant leur travail.
M. LAURIN: De toute façon, il va falloir évidemment avoir
à sa disposition pas mal de personnes pour ce recensement. Au fond, vous
sentez bien que notre préoccupation, qui est partagée
sûrement par les autres partis, indique que le choix de ces recenseurs,
quel que soit le nom qu'on leur donne, puisse être laissé à
une direction impartiale, au sens où elle n'est pas
inféodée à aucun parti. C'est cela l'esprit de notre
proposition. Quelles que soient les modalités, on va laisser le
gouvernement travailler.
M. HARDY: Le plus impartial possible.
M. LAURIN: C'est cela. Le plus impartial possible. Et c'est la raison
pour laquelle on voudrait que le choix de ces personnes soit laissé
à d'autres organismes que les partis politiques; ou que les partis
politiques n'y contribuent pratiquement pas.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député d'Iberville.
M. CROISETIERE: Le député de Terrebonne soulignait
tantôt que cela pouvait peut-être représenter un montant
assez important de faire le recensement des électeurs au niveau de la
province, mais j'ai l'impression que cette liste électorale pourrait
servir non seulement à trois paliers mais également à
quatre paliers, c'est-à-dire à l'élection
fédérale. Et peut-être que le fédéral,
puisqu'il pourrait en bénéficier, pourrait aider la province
à ce moment-là, au moyen d'une contribution.
M. HARDY: Je note avec plaisir une autre suggestion de
fédéralisme coopératif.
M. CROISETIERE: D'accord.
M. LE PRESIDENT: Le député de Frontenac.
M. LATULIPPE: J'aimerais reprendre...
M. PICARD: Est-ce qu'on ne pourrait pas revenir à la suggestion
qui avait été faite tout à l'heure par le
député de Terrebonne soit de s'en tenir au mécanisme de la
liste électorale plutôt que d'essayer de parler de la façon
de faire des nominations? Cela peut revenir plus tard, quand on saura quel
genre de mécanisme on aura, on pourra discuter alors de quelle
façon on devrait nommer le personnel électoral.
M. CROISETIERE: Je comprends que mon intervention était dans
l'ordre.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député de Frontenac a la
parole.
M. LATULIPPE: J'aimerais revenir sur deux sujets. D'abord, sur le
principe de la réforme électorale par morcellement. Je ne l'ai
pas abordé tout à l'heure mais là-dessus nous n'avons pas
de choix pratique. Si on veut faire quelque chose, il faut commencer quelque
part et on ne peut pas régler le problème en une seule fois
partout, quoique cela serait certainement la solution la plus avantageuse, mais
je pense qu'avec cela on ne finirait jamais et on n'irait nulle part.
Je pense que le gouvernement a déjà fait son lit,
puisqu'il a déjà déposé un projet de loi qui est
une bonne tranche et un aveu d'action.
M. HARDY: Un projet de loi?
M. LATULIPPE: Le projet de loi qui a été
déposé vendredi.
M. HARDY: Concernant quoi? Etes-vous sûr? Sur la carte
électorale?
M. LATULIPPE: Oui. La réforme électorale comprend beaucoup
de choses, notamment...
M. CROISETIERE: C'est un brassement de paillasse.
M. LATULIPPE: Je voudrais revenir à ce que
le député de Terrebonne nous disait tout à l'heure.
Il a dit que le faire une fois l'an contribuait à améliorer le
climat, apportait une liste plus complète, qu'il y avait moins
d'erreurs, c'était plus restreint. Je suis bien d'accord que cela
constitue une amélioration. Mais si on veut avoir quelque chose
d'efficace, il faut avoir une liste permanente qui soit réellement
valable. Il faut qu'il y ait un processus de continuité d'introduit. Je
ne peux pas croire que ce processus de continuité puisse s'implanter
sans mettre en branle des moyens techniques importants. Donc, il faut
nécessairement faire appel aux ordinateurs. J'ai cru comprendre,
à la façon dont vous l'avez présenté, que ce que
vous vouliez faire est de prendre le processus actuel et le refaire une fois
chaque année avec les révisions qui s'imposent. Si c'est
effectivement cela, je trouve que c'est un processus qui est lourd parce que
c'est difficile de manipulation. Je n'ai pas cru comprendre que vous vouliez
faire appel à l'ordinatrice et je pense que, si vous voulez avoir
quelque chose d'efficace, il faut se rendre là. Il faut également
qu'il y ait des processus de changement d'adresse, qu'on fasse appel, comme l'a
souligné le député de Bourget, le Dr Laurin, aux
compagnies d'électricité, aux compagnies de
téléphone, au service des postes. Il y a déjà le
ministère des Institutions financières qui peut aussi produire
des avis de changement d'adresse, le ministère du Revenu, il y a le
service de la santé qui est aussi très bien structuré
à ce point de vue. Si vous regroupez tout cela, ce sont tous des
mécanismes auxquels vous pouvez faire appel pour ne pas multiplier des
servitudes pour l'individu et qui faciliteraient la tâche de ceux qui
auraient à dresser une liste permanente.
Si vous ne voulez pas aller dans un processus aussi intégral, je
me demande quelle portée vous voulez donner à la liste. La liste
devrait même comprendre tous les sujets que vous ne vouliez pas
mentionner tout à l'heure, comme les compagnies. Tout cela devrait faire
partie de la liste. C'est très facile à même un programme
de dresser une liste pour fins fédérales, pour fins provinciales,
pour fins municipales, pour fins scolaires.
M. HARDY: Je ne partage malheureusement pas l'enthousiasme du
député de Frontenac pour les ordinatrices. Je comprends que cela
joue un grand rôle dans notre monde, que beaucoup de gens sont
fascinés par ces machines. Vous savez, quand on constate que, dans
certains services gouvernementaux qui fonctionnent avec des ordinatrices, une
personne morte depuis six mois est encore considérée comme
vivante...
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Un cadavre vivant.
M. HARDY: ... je me demande si, malgré les apparences, à
s'en remettre d'une façon trop intégrale à ces machines,
on ne risquerait pas d'avoir encore beaucoup d'erreurs sur nos listes
électorales. Deuxièmement, dans toutes les études dont
j'ai pris connaissance, le rôle des ordinatrices repose toujours, en
grande partie, sur l'initiative de l'électeur, qui doit voir à
avertir que son adresse a été changée, et sur une foule
d'autres choses semblables. Encore une fois, l'expérience
démontre qu'il y a une certaine inertie de ce côté. La
machine travaille pour autant qu'on la nourrit, qu'on lui donne des
informations. Ces informations doivent venir de quelqu'un. Je pense qu'on se
fait peut-être des illusions sur le rôle des ordinatrices dans
certains domaines. Je ne voudrais pas passer pour plus arriéré
que je ne le suis et vouloir mettre de côté totalement le
rôle de ces appareils modernes mais, par ailleurs, il ne faut pas non
plus se laisser trop impressionner.
Enfin, c'est un aspect d'ailleurs que le député de
Frontenac a souligné lui-même, il y a le coût. Les
études faites par M. Castonguay, qui a quand même très
approfondi cette question-là, démontrent que la confection de
listes par ordinatrice coûterait encore beaucoup plus cher que la
méthode que nous suggérons. Encore une fois, si on se place dans
l'ordre des valeurs, je l'ai reconnu moi-même, pour assurer à tout
le monde son droit de vote, on peut dire qu'il n'y a pas de prix pour cela
mais, par ailleurs, il faut aussi être raisonnable. Il faut se donner les
instruments qu'on est capable de se payer comme collectivité.
M. LATULIPPE: M. le Président, vous avez dit tout à
l'heure que ce serait soumettre le processus de confection des listes
électorales à l'initiative de l'électeur. Mais encore
là, si, dans votre projet de loi, il y avait une mention disant qu'on
peut faire affaires avec les compagnies d'électricité,
automatiquement, quand ces gens-là reçoivent un changement
d'adresse, ils pourraient facilement référer cela à une
personne attitrée à cette fin.
M. HARDY: Je vous arrête immédiatement. Le nom qui
apparaît à la compagnie d'électricité, c'est le nom
de l'abonné. Or, dans la famille, il peut y avoir bien d'autres
personnes.
M. LATULIPPE: Vous avez raison.
M. HARDY: Les enfants ne sont pas là. Il y a la femme. Chez moi,
c'est mon nom qui apparaît à l'Hydro-Québec; alors, mon
épouse serait privée de son droit de vote, mon fils, lorsqu'il
aura atteint l'âge de voter, ne serait pas...
UNE VOIX: Cela va prendre un peu de temps.
M. LATULIPPE: Mais n'y a-t-il pas relation? Quand le soutien de famille
déménage, la famille déménage.
M. HARDY: Mais cela n'apparaît pas à la compagnie
d'électricité, à la compagnie de téléphone,
à la compagnie de gaz.
M. LATULIPPE: Mais ce serait quand même une indication pour faire
la vérification.
M. HARDY: Les chambreurs, les locataires qui ne paient pas
l'électricité, si c'est le propriétaire qui paie
l'électricité.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député de Bourassa.
M. TREMBLAY (Bourassa): II y a seulement une chose que je voulais
souligner. Le député de Lafontaine a parlé des listes
électorales qui étaient remises parfois à des partis
quelconques. Cela fait déjà trois élections que je fais et
je peux vous dire que, en 1966 ou en 1970, les candidats ont reçu les
listes électorales la même journée et le même matin.
Je ne crois pas qu'on puisse dire qu'un parti a été plus
favorisé qu'un autre. En 1970 j'ai reçu, comme le candidat de
l'Union Nationale, le candidat du Ralliement créditiste ou le candidat
du Parti québécois, le même matin, les listes
électorales. Je crois que son argument de ce côté-là
n'était pas tellement juste parce qu'un président
d'élection ne peut pas jouer avec la date des listes électorales.
Si c'est le matin du 18 que les listes sont prêtes, les candidats ou les
officiers sont là pour aller chercher leurs listes.
Deuxièmement, la liste permanente, dans certains comtés
ruraux, peut-être que cela ne peut pas tellement influencer; on
connaît les gens assez bien et on peut connaître leurs
déplacements dans les villages ou dans les paroisses, mais dans les
villes comme Montréal, Saint-Hyacinthe, Chicoutimi ou ailleurs, je crois
qu'avec cette liste, tous les ans, on peut dire: A telle
propriété il y a tant de logements, il y a tant de votants.
L'année suivante, comme mon collègue le député de
Terrebonne l'a dit au début, les partis reçoivent ces listes
peuvent les vérifier et savoir comment il se fait que, l'an dernier,
dans telle maison, il y avait 21 votants et cette année 37. A ce
moment-là, cela peut permettre à tous les partis, sans
partisanerie, d'envoyer leurs officiers vérifier pourquoi cela a
augmenté de 14 ou 15 personnes dans telle maison. Je crois que c'est
cela que la liste électorale permanente pourrait permettre à tous
les partis politiques et à tous les candidats de faire. Le coût
pourrait être un peu élevé, mais cela pourrait rendre de
grands services aux citoyens afin d'être sur les listes
électorales, alors qu'ils ne se rendent souvent pas s'inscrire. C'est
tout ce que j'avais à dire.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député d'Olier.
M. PICARD: M. le Président, dans la présentation de son
projet, le député de Terrebonne a mentionné
premièrement un recensement annuel, deuxièmement à date
fixe, et un rapport par le président des élections du
comté au président général des élections. Je
ne sais pas, mais si vous avez un nouveau recensement à date fixe et que
le président des élections du comté soit tenu, par un
texte de loi, de transmettre annuellement au président
général des élections le nouveau recensement, je me
demande s'il va le faire d'une façon consciencieuse.
J'en appelle au président général des
élections, M. Drouin, pour qu'il nous dise son expérience de
l'application de l'article 31 de la Loi électorale actuelle, où
il est bien dit que le président de l'élection du comté
doit faire parvenir cinq exemplaires de la liste des sections de vote contenant
une description des limites, qui doivent être, chaque année, au
plus tard le quinzième jour de mai adressées au président
général des élections. Entre les élections,
imaginons pour un instant, partons de l'hypothèse que nous avions
adopté cette loi en 1968 et qu'elle était applicable à
compter de 1970. Pensez-vous, un seul instant, que le président des
élections en place, en 1970, a fourni un rapport précis au
président général des élections? En 1971, quand il
sait bien qu'il n'y aura pas d'élections, il va présenter un
rapport fictif. En 1972, encore un autre rapport "paqueté". En 1973, un
autre rapport "paque-té", mais il sait qu'en 1974 on va peut-être
avoir des élections. Là, je vais faire ma révision. Parce
que je suis certain que, si on regardait les rapports annuels transmis au
président général des élections, en ce qui concerne
les numéros des bureaux de scrutin... J'aimerais voir les rapports qu'il
a reçus le 15 mai dernier, pour voir si on n'a pas tout simplement
chambardé les numéros des bureaux de scrutin. Et on a
envoyé un rapport au président des élections. Je veux en
venir à ceci : Si vous avez un nouveau recensement à date fixe et
que le président général des élections a un rapport
à faire entre les élections, il va faire son travail simplement
pour être certain de ne pas être trop critiqué. On ne pourra
jamais savoir s'il a bien fait son travail. Je vais vous dire pourquoi. Prenons
comme hypothèse qu'il doit remettre son rapport du nouveau recensement
le 15 mai de chaque année. La loi prévoit que le président
général des élections doit faire parvenir une liste de ces
numéros de bureaux de scrutin dans les soixante jours. Ce qui veut dire
que les chefs de parti vont recevoir cette liste qui sera déjà
vieille, non seulement de soixante jours, mais depuis la date où il aura
fait son travail. Tout est faussé. Je n'appelle pas ça des listes
permanentes. Une liste permanente est un bureau, un endroit ouvert douze mois
par année où l'électeur peut aller faire son changement et
non pas des recensements. Les présidents d'élection ne feront pas
les recensements. Là-dessus, j'en appelle, encore une fois, au
président général des élections, pour savoir quelle
sorte de rap-
port il reçoit le 15 mai de chaque année sur les
numéros de bureaux de scrutin dans la région.
M. HARDY: A la suite des propos tenus tantôt par le
député de Chicoutimi et le député d'Olier, il y
aurait peut-être lieu qu'on demande au président de
témoigner.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): Auparavant, M. le Président, j'aimerais
revenir sur ce que nous avons dit. De toutes les discussions que nous avons
eues se dégage le consensus que tout le monde veut des listes
électorales permanentes. Il reste évidemment à
déterminer les modalités, de quelle façon cela peut se
faire, afin que soit éliminé tout danger de ce que le
député de Lafontaine appelait le patronage. Appelons cela
n'importe comment.
M. LEGER : La partisanerie organisée.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): La partisane-rie, c'est la même chose,
qu'elle soit organisée ou occulte. Il y a un problème qui
m'inquiète. Ce n'est pas le coût. Le président des
élections pourra nous en parler et répondre à la question
du député d'Olier. Ce n'est pas ce qui m'inquiète
davantage. C'est la question de l'identité de l'électeur. C'est
très beau d'avoir des listes électorales permanentes. Dans les
milieux ruraux où les citoyens se connaissent, se coudoient tous les
jours, il est très facile de dire: Le Dr Laurin qui vit à tel
endroit, c'est bien lui, il est venu au bureau de scrutin, il s'est
présenté, il a voté. C'est clair, il n'y a pas de
contestation possible là-dessus. Dans les villes, dans les grandes
agglomérations comme celle de Montréal, par exemple, et
même ici, à Québec, il y a beaucoup de gens qui se
déplacent et qui se sont déplacés depuis un certain nombre
d'années. Je me présente au bureau de scrutin. Mon nom est sur la
liste. Je suis censé être M. Jean-Noël Tremblay. Les gens
sont là. Il y a des représentants de divers partis dont les
greffiers, tous les gens qui s'occupent de l'élection. Qui peut
établir de façon précise que c'est bien moi qui suis
là, présent? D'accord, dans mon cas, on ne peut pas se tromper.
C'est une question d'intelligence.
M. le Président, c'est très sérieux au fond, il y a
le problème de l'identité de l'électeur. On peut
très bien dire que c'est M. Jean-Noël Tremblay qui demeure à
tel endroit, mais qui peut l'attester? Qui peut dire que c'est bien moi? Alors,
je reviens à ce que je disais tout à l'heure, que la supposition
de personne, cela existe, on le sait ce qu'on appelle parfois les
télégraphes alors je pense qu'il faudrait, dans l'ensemble
des modalités que nous aurons à examiner, analyser le
problème de la carte d'identité qui ne doit pas faire peur
à qui que ce soit je le répète étant
donné que nous sommes tous codifiés par A plus B avec toutes les
machines dont parlait tout à l'heure le député de
Frontenac. Je crois qu'il serait important qu'on voie la tête du client
et qu'on puisse, par une photograhie, établir que c'est bien M. Laurin,
M. Léger ou M. Latulippe qui se présente au bureau de vote, qui
est inscrit et que la description du personnage correspond exactement à
ce qu'il est.
Cela va ramener, évidemment, j'imagine qu'on va jeter les hauts
cris, l'histoire de l'Etat policier, des contrôles, etc. S'il y a un
contrôle qui doit s'exercer, c'est justement dans l'exercice des
mécanismes démocratiques et celui-là en est un. Je soumets
simplement cela comme suggestion à mes collègues pour qu'on pense
au problème. Parce que ceux qui vivent et qui ont fait des
élections dans les villes savent que la seule inscription sur une liste
électorale n'est pas une garantie de l'identité de
l'électeur qui se présente.
M. LEGER: Selon ce que vient d'ajouter le député de
Chicoutimi, M. le Président, je pense qu'il se dirige vers une carte
d'électeur; c'est peut-être en dehors du propos précis de
ce qu'on veut aujourd'hui, soit une liste électorale permanente. En
conséquence je ne suis pas opposé à l'idée
du député de Chicoutimi je ne sais pas s'il veut aller
jusqu'à fournir un appareil à chaque recenseur pour photographier
chaque personne. De toute façon, je pense que ce qui est important
aujourd'hui est la partie du recensement.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): D'accord. J'ai apporté cela, M. le
Président, si le député de Lafontaine me le permet, comme
corollaire.
Nous nous sommes entendus sur un certain nombre de choses. J'ajoute
qu'il faudra peut-être songer à apporter un mécanisme, un
cran de sécurité, beaucoup plus ferme, afin que, en même
temps qu'on s'assure que la personne est bien inscrite périodiquement
selon les méthodes que nous adopterons, on s'assure aussi de son
identité. Et les gens qui vivent dans les villes et vous en
êtes savent que ce n'est pas facile de dire que c'est M. X ou M. Y
qui est venu voter à telle heure, sous tel nom.
M. CARPENTIER: Seulement une suggestion au sujet de la carte
d'identité. En plus d'avoir la photographie sur la carte
d'identité, on pourrait avoir également le numéro
d'assurance sociale, même numéro qui apparaîtrait sur la
liste permanente. Je pense que cela éliminerait alors un tas d'erreurs.
Lorsque la personne se présente au bureau de scrutin elle a sa carte
d'identité et son numéro d'assurance sociale qui correspond
évidemment à son nom inscrit sur la liste permanente. A ce
moment-là, n'importe qui peut vérifier aisément.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le député de Bourget.
M. LAURIN: M. le Président, avant que nous n'entendions le
président général des élections,
je voudrais poser une question au député de Terrebonne
quant à la façon dont il entend procéder. Est-ce
qu'après avoir été éclairé par les divers
avis qui ont été émis aujourd'hui autour de cette table il
entend procéder immédiatement à la rédaction d'un
projet qu'il nous soumettrait à nouveau, ou entend-il rédiger un
projet que le gouvernement prendrait à son compte et nous
présenterait comme projet de loi?
M. HARDY: M. le Président, pour ma part, il est peut-être
un peu prématuré de répondre à ce stade-ci. Je
pense qu'il conviendrait d'abord d'étudier soigneusement les
délibérations de ce matin et, à la lumière de ces
délibérations, si nous nous rendons compte que nous en sommes
arrivés à un consensus suffisant, il pourrait peut-être y
avoir immédiatement rédaction d'une loi. Sinon, nous pourrions
convoquer une autre séance de cette commission pour poursuivre nos
discussions sur cette question.
Je pense que le tout est conditionné par une étude de ce
qui s'est dit ce matin.
M. LE PRESIDENT: Le député d'Olier.
M. PICARD: M. le Président, le député de Chicoutimi
a soulevé la question de la carte d'identité. Personnellement je
suis en faveur d'une carte d'identité. Le député de
Laviolette a aussi mentionné la possibilité d'avoir sur les
listes permanentes le numéro d'assurance sociale. Je pense que ce serait
déjà une grosse amélioration. On pourrait, par exemple,
sur une liste permanente, inscrire le numéro des comtés. Vous
avez remarqué que sur la galée que nous avons reçue chaque
comté porte un numéro. A ce moment-là, on pourrait
facilement, vis-à-vis du nom de l'électeur et de son adresse,
inscrire d'abord le numéro du comté et le numéro
d'assurance sociale. J'ai déjà demandé à la
commission parlementaire siégeant sur la réforme
électorale, l'an dernier, s'il n'y avait pas possibilité de
dresser les listes à l'échelle de la province, mais il serait
satisfaisant de le faire à une échelle régionale mais par
ordre alphabétique. Cela peut paraître un travail énorme.
J'aimerais cependant rappeler aux membres qu'il existe présentement
à Montréal un bottin téléphonique qui contient
800,000 inscriptions et qui est publié tous les ans à 500,000
exemplaires. On n'a pas besoin de 500,000 exemplaires de la carte
électorale. Vous le savez tout comme moi.
M. PAUL: L'honorable député conviendra que le bottin
téléphonique ne contient que le nom du chef de famille. Il ne
mentionne pas le nom de l'épouse et tous les membres de la famille.
M. PICARD: D'accord, mais je parle de 800,000 inscriptions. Dans la
province, il y aura, aux prochaines élections, environ 2,500,000
électeurs. Cela veut dire l'équivalent de trois bottins à
800,000 inscriptions. Que vous parliez du chef de famille, des enfants, du
père ou de la mère, cela n'a pas d'importance. C'est le nombre
d'inscriptions qu'il y a dans le bottin. Si on a, dans l'inscription d'une
liste électorale permanente, le numéro du comté, le nom de
l'individu, son prénom, son adresse et son numéro d'assurance
sociale, et que tout cela soit mis sur l'ordinateur, il est très facile
de demander à l'ordinateur si tel nom apparaît deux fois. S'il
apparaît dans un autre comté, l'ordinateur vous informera qu'il
est enregistré originalement dans le comté numéro 73 et
que cette personne s'est aussi enregistrée. On a eu l'expérience
en 1970 d'une personne, une seule personne à Montréal,
enregistée dans quatre comtés différents. Je le
mentionnais à certains collègues il n'y a pas tellement
longtemps, j'ai les noms et c'est même le père de famille qui a
menacé cette jeune fille, sa propre fille, que si elle se servait de son
droit de vote dans les quatre comtés où elle s'était
enregistrée, elle était mieux de ne pas venir coucher à la
maison ce même soir. C'était fini, il la mettait dehors.
M. TREMBLAY (Chicoutimi): C'est une fille polyvalente, elle voulait
voter pour quatre partis.
M. PICARD: On a eu à Montréal l'expérience au cours
de l'élection 1970 de personnes je ne les qualifierai pas
d'étudiants ou autres qui se sont fait une
spécialité pour la période du recensement, de demeurer
dans des maisons d'appartements. Elles étaient deux, trois, quatre, cinq
ou six personnes qui demeuraient dans le même appartement pour la
période du recensement, de façon à avoir leur nom sur la
liste. Malheureusement, à cause de la période très
limité que nous avons pour la vérification, soit environ quinze
jours, nous avons découvert cet état de choses à la suite
d'enquêtes mais seulement après l'élection. Si on avait sur
ordinateur le nom de chaque électeur avec le numéro du
comté, de 1 à 110, le numéro d'assurance sociale,
l'ordinateur pourrait nous dire immédiatement si cette personne
apparaît dans un autre comté et on pourrait la retracer
immédiatement.
Je ne vois aucune difficulté à dresser des listes
électorales permanentes par ordre alphabétique. Comme je l'ai dit
tantôt, le bottin téléphonique nous prouve que c'est
faisable. Je pense que si on veut réellement résoudre ce
problème, on peut le faire avec des listes par ordre alphabétique
à l'échelle de la province.
M. LATULIPPE: M. le Président, me permettez-vous une question au
vice-président, s'il vous plaît?
Est-ce que vous avez déjà tenté ou la commission
a-t-elle déjà fait faire les études pour savoir s'il n'y
avait pas possibilité à l'intérieur même des
organismes actuels par
exemple, on a le registre des populations tenu par le ministère
de la Santé d'utiliser...
M. HARDY: Le registre des populations ne contient pas d'adresse.
M. LATULIPPE: Vous dites qu'il n'y a pas d'adresse? Il y a des adresses
dans le registre des populations.
M. LE PRESIDENT (Blank): II n'y a pas d'adresse.
M. LATULIPPE: Ce serait facile à modifier.
M. HARDY: Je l'admets, mais il se pose toujours le problème que
je vous ai souligné tantôt: Qu'est-ce que vous faites des
changements? Prenez par exemple les permis de conduire. Même si la loi
prévoit, avec des pénalités quand même assez graves,
que si on change d'adresse on doit avertir, on sait que je n'ai pas de
chiffres il y a un nombre considérable de personnes, sans
mauvaise volonté, qui ne communiquent pas leur changement d'adresse au
ministère des Transports. C'est la même chose dans tous les autres
organismes. Si on établit un système où les modifications
ou les corrections reposent sur l'initiative de l'individu, on risque qu'il y
ait un très grand nombre de personnes qui ne soient pas sur les listes;
on arrive donc exactement à l'objectif contraire de celui que l'on veut
poursuivre en ayant des listes permanentes.
M. LATULIPPE: Le caractère de permanence de la liste n'existe que
si en tout temps on peut s'y référer d'une façon valable.
Mais ce qu'on propose actuellement n'a pas le caractère de permanence,
il l'aura une fois par année.
M. HARDY: Oui, mais il y a révision. Il y a révision s'il
y a élection. La liste permanente que l'on suggère, ce n'est pas
une liste permanente pour une multitude d'activités de la vie, c'est une
liste permanente pour fins électorales. Or, on dit recensement annuel
plus révision dès qu'une élection est annoncée.
M. LATULIPPE: Donc si une municipalité veut s'en servir, il faut
qu'elle fasse une révision. Si une commission scolaire veut s'en servir,
il faut une révision.
M. HARDY: II le faudra toujours, c'est bien sûr. Pour la
municipalité et la commission scolaire, notre liste permanente ne sert
que de document de travail comme point de départ, mais il faudra
toujours qu'elles la revoient pour les raisons que j'ai mentionnées
tantôt, les compagnies, les personnes qui ont des
propriétés et qui n'habitent pas la municipalité, etc.
M. LATULIPPE: Cela présuppose un nouveau recensement chaque fois
qu'il y aura une élection?
M. HARDY: Cela présuppose une correction, une mise à jour,
chaque fois qu'il y a une élection municipale, scolaire ou provinciale,
ça présuppose une mise à jour de cette liste permanente
que nous avons.
M. LATULIPPE: Cela va entraîner un nouveau recensement?
M. HARDY: D'ailleurs, vous n'avez jamais eu une liste permanente
parfaite. Même avec le système actuel, si quelqu'un
déménage deux jours après le recensement il y a
déjà des problèmes qui se posent, il faut qu'il aille
voter à l'endroit où il avait son domicile. J'ai lu cela quelque
part, pour avoir une liste électorale parfaite, il faudrait qu'elle soit
faite la veille de l'élection. Il faut tendre à la perfection,
mais il ne faut pas que notre souci de perfection soit tel qu'il nous paralyse
et qu'on ne fasse rien.
M. LATULIPPE: Ce qu'on nous propose, ce matin, à cause des
modalités, je trouve que ce n'est pas valable. Le député
d'Olier, a fait valoir tantôt des points essentiels, et à ce
moment-là, je me demande à quoi sert de dépenser de
l'argent si on n'a pas les résultats voulus au bout. On n'a qu'à
garder le processus actuel et à l'améliorer quelque peu et cela
va éviter des dépenses inutiles, d'autant plus que, si on ne peut
pas s'en servir, c'est seulement une référence et qu'on est
obligé d'avoir des révisions... Je dis qu'une révision,
pour être valable, doit s'accompagner nécessairement d'un
recensement parce que, dans les milieux urbains, la seule façon de le
voir serait d'aller chez les citoyens pour savoir s'ils sont réellement
résidents ou pas.
M. HARDY: M. le Président, je renouvelle ma proposition à
l'effet d'entendre le président général des
élections sur toutes ces questions qui sont soulevées, soit par
le député d'Olier ou le député de Frontenac.
M. LE PRESIDENT (Blank): Le président des élections, le
juge Drouin.
M. HARDY: Si l'honorable juge veut bien, contrairement à ce qui
existe habituellement, comparaître à la barre. Sur votre serment
d'office.
M. PICARD: M. Drouin, est-ce que vous êtes au courant du projet
élaboré par le député de Terrebonne?
M. DROUIN: Oui.
M. PICARD: Le but de la mise sur pied d'une liste permanente, à
mon avis, était aussi de réduire la période
électorale, c'est-à-dire la période qui est aujourd'hui de
46 jours au minimum.
M. DROUIN: Elle est ordinairement de 48 ou 49 jours.
M. PICARD: Oui, parce qu'on émet les brefs toujours quelques
jours à l'avance. J'espère que le député de
Terrebonne n'écoute pas, mais avec ces pseudo-listes permanentes,
à combien de jours pourrons-nous réduire la période
électorale? J'ai présentes à l'esprit des
élections, comme en France. A un moment donné, on annonce les
élections qui auront lieu 24 ou 25 jours plus tard. Est-ce qu'on peut
espérer, avec ces pseudo-listes permanentes, avoir des élections
24 ou 25 jours après l'émission des brefs?
M. DROUIN: Si M. le député me le permet, les pseudo-listes
permanentes que M. le député de Terrebonne propose...
M. PICARD: Mais là, il vous a entendu.
M. DROUIN: II ne faut pas que vous oubliiez qu'en France, on a des
listes permanentes qui ne sont pas, d'après les connaisseurs, pseu-do.
L'Angleterre a aussi des listes permanentes qui ne sont pas, aux dires des
savants, des pseudo-listes. Mais la liste en Angleterre se ferme le 16
février et elle demeure fermée pendant un an. Si vous obtenez la
qualité d'électeurs au mois de juillet, vous ne voterez pas
à une élection qui a lieu à l'automne. Et ils ont des
listes permanentes.
En France, vous avez une certaine catégorie de personnes qui ont
le droit de faire ajouter leurs noms. Cela équivaut environ à 10
p.c. des électeurs. Mais nous, avec la proposition que M. le
député de Terrebonne a faite, nous ne pouvons pas avoir des
élections à 24 jours d'avis parce que nous aurons une
révision. Mais nous pourrons avoir des élections à 35
jours d'avis au lieu de 49 ou 50. C'est-à-dire que vous diminuez
d'environ 15 ou 18 jours.
M. PICARD: Non, 35 jours comparativement à 46.
M. DROUIN: C'est-à-dire que vous diminuez le temps... Oui, mais
ce n'est jamais 46. C'est ça l'affaire.
M. PICARD: Mais ce ne sera jamais 35. Ce sera 37, 38.
M. DROUIN: Oui, je comprends. Mais, à tout
événement, vous pourrez déclencher vos élections et
vous n'aurez pas de recensement. C'est-à-dire que le recensement que
nous avons lors d'une élection, on ne l'aura pas lors de
l'élection générale tenue après le recensement fait
en mai. En plus, l'avantage, si vous me permettez de dire certains avantages,
c'est que...
M.HARDY: Est-ce que vous parlez de la pseudo-liste?
M. DROUIN: Disons que nous allons laisser de côté la
pseudo-liste pour le moment. On ne parlera pas de liste permanente, on va tout
simplement parler de recensement annuel. A ce moment-là, les recenseurs
étant nommés en dehors du temps électoral, ils pourront
être renseignés par les présidents d'élection, parce
qu'il y aura un certain laps de temps entre leur nomination et le commencement
du recensement.
Les présidents d'élection auront le devoir, et nous allons
les y obliger, de rencontrer les recenseurs, de les renseigner sur le travail
qu'ils auront à faire. Troisièmement, vous avez aussi un certain
laps de temps beaucoup plus long entre la révision et le recensement, ce
qui donnera le temps aux partis de les examiner, ce qui donnera le temps aussi
aux électeurs d'y penser, de dire: Nous n'étions pas là
pour le recensement. Nous ne sommes peut-être pas sur la liste parce que
la liste, tout le temps que va durer le rencensement annuel, je prévois
que ça va s'étendre sur six semaines...
Il ne durera pas six semaines, mais le temps du choix des recenseurs, de
la nomination des recenseurs, de l'instruction des recenseurs, du recensement
lui-même et de la rédaction des listes. Les listes, une fois
faites, resteront au bureau du président pendant quelques semaines et
les électeurs pourront aller les voir.
Quand vous demandez à un électeur de faire une
démarche pour se faire inscrire, vous ne réussissez pas. C'est le
gros défaut des listes aux Etats-Unis. On ne fait pas de recensement. Ce
qui arrive, c'est que vous avez des personnes qui, lorsque c'est le temps de
voter, disent: Si j'avais su que ça tournait comme ça, si j'avais
su qu'un tel se présenterait, j'aurais fait des démarches pour me
faire inscrire. Ils ne se font pas inscrire.
M. LEGER: S'il y avait un recensement annuel, une liste
électorale permanente, au moment du déclenchement des brefs, s'il
y avait une publication immédiate des listes électorales à
jour, cela agrandirait-il la période où l'électeur
pourrait vérifier si son nom est sur la liste? Actuellement, quand la
liste est présentée, cela fait déjà un bon bout de
temps que l'élection a été déclenchée et la
période est très raccourcie pour lui permettre d'aller
s'enregistrer. Est-ce que vous ne pensez pas que, s'il y avait une liste
permanente, au moment du déclenchement des brefs, l'électeur,
sachant qu'il y a une élection, aurait comme préoccupation
première s'il est intéressé ou pas, de voir si son nom est
sur la liste? Il aurait beaucoup plus de temps. Actuellement, il en a
très peu et comme vous savez, dans Gatineau, pour notre parti, il n'y en
a pas eu, à cause des difficultés qu'on sait. Cette
période étant donc plus longue, cela permettrait aux
électeurs de pouvoir s'enregistrer; cela permettrait aussi d'avoir une
révision.
M. DROUIN: Evidemment, j'entrevois une possibilité. Comme le
disait tantôt le député de Terrebonne, on vous attend pour
savoir si un bill sera ou non présenté, s'il y aura un projet
de loi. A tout événement, en supposant que vous auriez eu
un recensement annuel et que, trois ou quatre mois plus tard, on ordonne des
élections, à ce moment-là, dans les 24 heures ou 48 heures
qui suivent l'émission des brefs, le président des
élections verra, surtout dans un district comme le vôtre
évidemment, on ne parlera pas du district de Duplessis, parce que ce
n'est pas facile de faire cela en 48 heures à ce que les listes
soient affichées. Le président, dans les 24 heures, voit à
l'impression des listes. Dès que ces listes sont imprimées, il
les fait parvenir par courrier, tel que prévu. Le temps de la
révision commence alors.
M. LEGER: Une autre question. Est-ce que, selon votre expérience,
la liste électorale permanente pourrait permettre que le recensement se
fasse en dehors de cette période de fièvre électorale dont
vous subissez vous-même les conséquences? Les uns sont
énervés, travaillent mal, de façon plus ou moins juste.
Est-ce que cela vous permettrait d'entraîner un personnel à
l'avance dans une période hors de l'élection? Et aussi cela
éviterait-il cette partisanerie organisée du fait d'avoir un
personnel entraîné pour cela en dehors de cette
période?
M. DROUIN: Vous allez avoir énormément d'avantages que
vous ne connaissez pas, comme tous les changements qu'on apporte dans un
système électoral, comme vous allez avoir des désavantages
que vous ne connaissez pas. Il faut l'essayer pour les connaître. Mais je
connais d'avance certains avantages que nous aurons, parce que nous pourrons
avoir des recenseurs mieux choisis. Parce que c'est su à l'avance.
Actuellement, les partis politiques ne savent pas quand aura lieu le
recensement. Tandis qu'ils sauront à l'avance qu'à telle date,
tel mois, commencera le recensement annuel. Ils pourront préparer
à l'avance leurs listes et choisir les recenseurs. Ce qui arrive, c'est
qu'on nous demande même si on a encore les listes des recenseurs de
l'élection précédente?
M. HARDY: De quelle façon actuellement entrevoyez-vous
vous parlez d'instruction cette façon d'instruire? Je rattache
cette question à une observation du député d'Olier, qui
semble très pessimiste quant à la qualité de vos
présidents de comté. Rattachant cela à son
observation...
M. PICARD: Strictement dans l'application de l'article 31...
M. HARDY: ... de quelle façon prévoyez-vous,
concrètement, donner cette instruction à vos présidents de
comté et, par la suite, aux recenseurs? Deuxièmement, est-ce que
vous partagez le pessimisme du député d'Olier? Est-ce que vous
craignez que les présidents de comté fassent ce recensement
annuel un peu à la légère?
M. DROUIN: D'abord, je vous dirai que, de tempérament, je suis
optimiste. Je suis là depuis 27 ans. Si j'avais été
pessimiste, cela ferait longtemps que je serais parti. D'abord le
député d'Olier a parlé tantôt de la
délimitation que nos présidents d'élection font. J'oserai
vous dire qu'à la suite de chaque élection
générale, de toutes les élections générales,
parce que c'est toujours au pluriel, nous avertissons les présidents
d'élection qu'ils avaient des sections dépassant trois cents,
soit des A et des B. Nous les avertissons de les faire disparaître.
J'ai une personne entraînée à mon bureau qui lit
j'oserais peut-être dire en diagonale toutes les
délimitations qu'elle reçoit en comparaison avec la
délimitation de l'année précédente avant que nous
acceptions de payer le président. Etant donné que vous avez
l'intention, peut-être, de faire un recensement annuel, il faudra avancer
le temps où la délimitation doit être faite par les
présidents d'élection. Or, les présidents
d'élection, sachant qu'il y aura un recensement annuel à la suite
de chaque délimitation qu'ils font et que, s'ils commettent des
bévues, cela va tout de suite paraître au recensement, ils seront
forcés de faire un meilleur travail que celui qu'ils font en se disant:
II n'y aura peut-être pas d'élections cette année, alors...
Mais en ayant un recensement, on va s'apercevoir tout de suite s'il manque des
rues.
M. LEGER: Est-ce que vous voyez quand même une meilleure
façon de choisir les recenseurs et les réviseurs que par des
nominations par des partis politiques? En d'autres mots, si c'étaient
des fonctionnaires des différents paliers au cours de
l'année, peut-être y en a-t-il qui travaillent continuellement
à leur bureau, ils seraient bien contents de sortir un mois par
année pour faire le recensement est-ce que vous ne pensez pas
qu'il y aurait une chance d'avoir un recensement beaucoup plus impartial que de
repenser un système qui ferait appel encore au bipartisme? Parce que
c'est impossible dans la pratique d'avoir des représentants des quatre
partis qui font le recensement. Et laisser cela à un bipartisme, en ce
qui nous concerne, nous pensons que c'est absolument impensable. Est-ce que
vous ne pensez pas que cela pourrait être meilleur si c'étaient
des fonctionnaires... ou une autre formule qui ne fait pas appel à des
partis politiques comme tels pour faire le recensement?
M. DROUIN: Tout d'abord, vous touchez une question qui relève de
votre commission et non pas de moi. Deuxièmement, lorsque par le
passé pour ne parler que du passé on a choisi les
recenseurs, c'est-à-dire un recommandé et non pas
nécessairement accepté par le président d'élection
parce qu'il peut toujours le refuser s'il croit qu'il y a des raisons
valables et il peut demander aussi une autre recommandation et un autre
par le parti de l'Opposition
officielle, c'était fait de façon à avoir dans les
secteurs urbains deux personnes de partis opposés. C'est là le
but. C'est non pas dans l'intention qu'un parti ait un représentant pour
faire la liste ou qu'un autre parti ait un représentant pour faire la
liste. C'est la même chose pour la révision. Ce n'est pas parce
qu'un candidat recommande un réviseur urbain qu'il représente ce
candidat. Parce qu'une fois qu'il est nommé, ce réviseur urbain
perd son droit de vote, il perd son droit de prendre part à la campagne
et il devient une espèce de membre d'un tribunal. Alors, il n'est pas
là pour représenter un parti. Simplement, vous en avez deux de
partis opposés. Ils ne devraient pas s'entendre. Le moyen de les
recommander ne relève pas de ma compétence. Cela relève de
la vôtre.
M. LEGER: Je vous demande votre opinion. Selon votre expérience,
est-ce que cela ne serait pas idéal que cela soit en dehors de la
nomination d'un ou deux partis?
M. HARDY: Je pense que c'est très dangereux ce que nous faisons
là. Nous demandons à un juge de la cour Provinciale
d'émettre une opinion qui a de fortes contingences politiques. Au nom de
la liberté, de la suprématie de l'objectivité de la
magistrature, je ne peux faire autre chose que de m'opposer à ce genre
de questions. L'honorable juge Drouin est ici pour répondre à des
questions d'ordre technique et non pas à des questions qui ont des
contingences ou des incidences politiques...
M. LEGER: Je voudrais reformuler ma question...
M.HARDY: ... parce qu'encore une fois il faut respecter
l'impartialité d'un juge de la cour Provinciale.
M. LEGER: ... pour ne pas placer le juge Drouin dans une mauvaise
situation. Est-ce que vous pensez que cela serait faisable et souhaitable, au
niveau du résultat, que ce soient des fonctionnaires au palier, soit
provincial, soit municipal ou scolaire, etc. qui pourraient être
entraînés, en dehors d'une période électorale, pour
faire ce recensement?
M. DROUIN: Pour faire le recensement au Québec, actuellement, un
peu plus ou un peu moins, ce sont 27,000 personnes. Il ne faut pas oublier que
notre province est assez étendue. Quand vous parlez de prendre un
fonctionnaire pour lui faire faire le recensement, il faut penser à
l'île d'Anticosti, à Blanc-Sablon, à des endroits
très éloignés.
Deuxièmement, si vous prenez dans un centre urbain, je vous dirai
que je sais personnellement que la ville de Montréal a
déjà essayé cela. Cela lui a coûté une
fortune parce que ce n'était pas prévu dans la convention
collective. Il a fallu payer temps double ou temps et demi.
M. LEGER: Quand vous parlez de 27,000 noms, c'est parce qu'actuellement
les gens doivent faire cela en dedans de cinq jours. Si on fait cela sur une
période d'un mois, cela se divise par quatre.
M. DROUIN: Non, je ne partage pas votre opinion, parce qu'il ne faut pas
étendre le recensement.
M. LEGER: Oui, mais ce n'est pas en période
électorale.
M. DROUIN: D ne faut pas étendre le recensement lui-même,
même s'il a lieu en dehors du temps électoral, pas plus qu'on ne
peut étendre ceux qui font le dénombrement lors d'un recensement.
Parce que si vous étendez cela même à quinze jours, vous
donnez le temps, pendant le recensement, à des gens de
déménager. Actuellement, on a quatre jours, au
fédéral pour cinq jours, et c'est le premier jour qui compte.
M. LEGER: M. le Président, vous admettrez que le lendemain
ce que je disais tantôt de n'importe quel recensement fait en cinq
jours, il est déjà vieux. La personne visitée les premiers
cinq jours peut aussi bien être déménagée le
sixième jour qu'une personne qui peut être visitée à
la fin du mois.
M. DROUIN: Je vous comprends, mais vous avez plus de risque d'avoir des
déménagements dans l'espace d'un mois que vous en avez dans
l'espace de cinq jours, parce que vous multipliez quand même le tout par
cinq, même par six. Si vous calculez, dans un district urbain, les
mutations et les mortalités, c'est énorme. Ici, à
Québec, dans la ville même, les mutations et les mortalités
par mois s'élèvent à tout près de 600.
M. LAURIN: Si les candidats au recensement et à la
révision étaient proposés par un organisme neutre, par
exemple par les bureaux de main-d'oeuvre du Québec, est-ce que ce serait
techniquement possible?
M. DROUIN: II y a un danger, M. le député; à ce
moment-là, ils sont recommandés, très bien, mais ce qui
peut vous arriver, c'est que vous ayez deux personnes du même parti.
Alors, ils se regardent et disent : Toi, tu es de tel parti, moi aussi. C'est
dangereux et on ne le sait pas.
M. HARDY: C'est de la partisanerie organisée.
M. LEGER: Désorganisée.
M. PICARD: M. Drouin, présentement dans les sections urbaines,
vous avez deux recenseurs et dans les sections rurales un seul.
M. DROUIN: Oui.
M. PICARD: Je n'ai jamais bien digéré cela.
M. DROUIN: Je vous comprends.
M. PICARD: Surtout si l'on considère que, quand arrive la
révision, chaque section de vote est un bureau de révision avec
deux personnes nommées par le président.
M. DROUIN: Non, sur recommandation et comme des recenseurs.
M. PICARD: Est-ce qu'il n'y aurait pas possibilité d'avoir dans
les sections rurales exactement le même système que dans les
sections urbaines?
M. DROUIN: Non, vous ne pouvez pas, je le regrette.
M. PICARD: Quelles seraient les objections?
M. DROUIN: C'est toujours la même chose. Lorsque vous avez un
centre rural avec un bureau de scrutin et que l'autre centre rural est à
dix milles, vous ne pouvez tout de même pas...
Sur la Côté-Nord, vous avez la ville de la Côte-nord
du Golfe Saint-Laurent, elle a 200 milles de longueur. Nous avons
été obligés, par la loi, de la déclarer rurale
parce qu'on ne pouvait pas mettre une commission de révision qui aurait
révisé des listes électorales sur 200 milles de
longueur.
M. PICARD: Est-ce que vous auriez objection à avoir deux
recenseurs?
M. DROUIN: C'est assez difficile parce qu'il y a des endroits où
on a de la misère a en avoir un. Il faut même le transporter en
avion pour aller faire faire le recensement.
M. PICARD: Je vais vous expliquer. J'ai un cas précis que j'ai
vécu.
M. DROUIN: II y a des cas comme cela qui sont malheureux, mais est-ce
que l'ensemble est toujours malheureux?
M. PICARD: Le recenseur, un seul, avait fait le recensement dans une
famille donnée et il savait pertinemment qu'un des fils résidait
et travaillait à Montréal et venait chez lui à la campagne
une fois par mois. Il l'inscrit sur la liste parce qu'il était du bon
bord. Lorsqu'est arrivée la révision, il n'a jamais voulu le
rayer de là. C'est un autre point que je voudrais soulever plus tard
lors de la réforme électorale.
M. DROUIN: Je vais vous répondre que, si
l'énumérateur qui a fait cette inscription n'a jamais voulu la
radier, très bien. Il y a un autre réviseur avec lui, qui est de
l'autre parti. Lorsque les deux ne s'entendent pas, c'est le président
d'élection qui décide.
M. PICARD: II aurait fallu prendre des procédures
judiciaires.
M. DROUIN: Pas nécessairement.
M.PICARD: Dans le cas que je vous mentionne, c'est ce qu'il aurait fallu
faire. Comme la loi ne prévoit pas qu'il y a obligation de prendre des
procédures judiciaires, c'est une chose que j'aimerais changer dans la
loi.
M. DROUIN: Je vous comprends.
M. PICARD: Ce n'est plus que les personnes peuvent prendre...
M. DROUIN: M. le député, écoutez bien. Une personne
est sur la liste électorale illégalement. J'admets ça.
Lorsqu'à la révision on demande de faire radier son nom et que
son nom demeure-là, vous pouvez encore l'empêcher de voter. Vous
avez le greffier, vous avez le scrutateur, vous avez les représentants.
Vous pouvez encore l'empêcher de voter. Ce n'est pas parce qu'on est sur
la liste électorale qu'on a nécessairement le droit de vote, si
on n'a pas les autres qualifications requises.
M. PICARD: On peut aller jusqu'à lui faire faire un faux
serment.
M. HARDY: M. le Président, on est dans un cas particulier.
Normalement, notre séance se termine à midi. Je ne veux
empêcher personne de parler, quitte à ce que nous écoutions
le témoignage du juge Drouin à une autre séance. Mais nous
aurions dû ajourner la séance depuis quinze minutes.
M. LEGER: M. le Président, est-ce que je peux faire une
recommandation si nous sommes censés terminer? Est-ce que je pourrais
proposer aux autres membres de la commission que nous adoptions la proposition
suivante: Que le gouvernement présente un projet de loi sur une liste
électorale permanente en tenant compte du multipartisme dans l'esprit de
ce projet de loi et que les partis puissent en discuter sur le parquet de
l'Assemblée nationale, devant le projet de loi présenté
par le gouvernement?
M. HARDY: Je vais vous donner la même réponse que j'ai
faite tantôt à votre chef parlementaire. Je pense qu'il est
peut-être prématuré de prendre une décision
immédiate. Il conviendrait que chaque parti étudie à
tête reposée le texte des délibérations de la
commission de ce matin. Nous verrons par la suite. De toute façon,
même s'il y avait une loi présentée, on pourrait
étudier la loi . Chaque parti pourra apporter tous les amendements qu'il
jugerait à
propos. Je ne pense pas qu'il y ait lieu de voter une motion quelconque.
Nous prenons acte de votre suggestion. Elle sera sûrement
étudiée à son mérite.
M. LE PRESIDENT: Encore une courte question du député de
l'Assomption.
M. PERREAULT: Vous avez parlé des gens qui ne vont pas
s'inscrire. C'est la même chose après le recensement, vous publiez
vos listes. Les listes sont affichées. Les gens ne vont pas voir s'ils
sont sur la liste. Ne serait-il pas utile qu'après la dernière
liste disons qu'il y a déjà eu trois recensements et qu'il
y a un déclenchement d'élections à ce moment-là
le président d'élection envoie aux électeurs
inscrits sur la dernière liste une carte d'électeur? Les gens
sauraient qu'ils sont inscrits.
M. DROUIN: Par le fait qu'on envoie la liste électorale, ils
savent qu'ils sont inscrits. On envoie la liste électorale dans toutes
les sections urbaines, par courrier. On envoie une copie de la liste
électorale de la section de vote où la personne est inscrite,
dans chaque foyer.
M. PAUL: Le problème n'est pas pour celui qui reçoit
l'avis que son nom est sur la liste, le problème est pour celui qui n'en
est pas informé.
M. DROUIN: II y a évidemment celui qui est dans la maison et qui
ne reçoit pas de liste. Je crois qu'il y aurait moyen d'améliorer
le système en publiant dans les journaux des avis: "Nous avons
expédié par la poste les listes électorales". Pour ceux
qui ne l'ont pas reçue, c'est le signe qu'ils ne sont pas sur la liste
électorale. Faites les démarches voulues. Cela pourrait se
faire.
M. LATULIPPE: Moi, je proposerais qu'on ait encore une séance sur
ce sujet. Pour ma part, j'aurais quelques questions à poser, et je pense
que cela prolongerait le débat. Quitte à ce qu'à
l'intérieur il y ait une espèce d'étude qui soit faite sur
le coût, parce que c'est un problème qui n'a pas encore
été abordé. Tout ce qu'on a fait ce matin a
été d'échafauder des structures et non de les
étudier à fond. Je pense que la commission aurait
intérêt à faire une étude là-dessus.
M. HARDY: M. le Président, nous prenons note de la suggestion et
du député de Lafontaine et du député de
Frontenac.
M. LATULIPPE: S'il n'y a pas d'autre séance, j'ai des questions
à poser.
M. HARDY: Alors, M. le Président, je propose l'ajournement de la
séance.
M. LE PRESIDENT: Adopté. La commission ajourne ses travaux sine
die.
(Fin de la séance à 12 h 15)