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Version finale

30e législature, 2e session
(14 mars 1974 au 28 décembre 1974)

Le jeudi 4 juillet 1974 - Vol. 15 N° 121

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Etude des accusations portées par le député de Maisonneuve contre le député de Johnson


Journal des débats

 

Commission permanente de l'assemblée nationale

Etude des accusations

portées par le député de Maisonneuve

contre le député de Johnson

Séance du 4 juillet 1974

(Quinze heures sept minutes)

Déclaration de M. le Président

M. LAVOIE (président de la commission permanente de l'Assemblée nationale): A l'ordre, messieurs! Avant de débuter les travaux de la commission de l'Assemblée nationale, je crois que notre premier devoir, en tant que commission siégeant comme commission d'enquête à la suite d'un mandat confié par l'Assemblée nationale, en premier lieu, je crois qu'il y aurait lieu de lire ce mandat pour établir vraiment les positions ou les fondements de la commission, à la suite de la motion du député de Maisonneuve, M. Burns: "Que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse le jeudi 4 juillet 1974, en la salle 81-A, en vue de procéder à une enquête sur les faits suivants qui, s'ils étaient fondés, rendraient le député de Johnson, Me Jean-Claude Boutin, indigne de siéger à l'Assemblée nationale parce qu'inéligible et inhabile en vertu des articles 75 et 79 de la Loi de la Législature, savoir: Avoir agi avant et depuis son élection pour et au nom du procureur général du Québec et d'autres ministères du gouvernement du Québec devant les tribunaux, occupant ainsi une charge ou un office auquel des honoraires sont attachés, contrairement aux dispositions de l'article 75 de la Loi de la Législature, ou exécutant ainsi un contrat se rattachant au service public et en vertu duquel des deniers publics doivent être payés, contrairement à l'article 79 de la Loi de la Législature".

Je disais tout à l'heure que le rôle de la commission, en somme, est une, il s'agit d'un démembrement de l'Assemblée nationale qui siège comme commission d'enquête, comme nous siégeons tous, ceux qui sont membres de la commission, d'une manière je dirais collégiale, au même titre l'un que l'autre; le rôle du président, de celui qui vous parle, est de faire respecter dans les limites de ses pouvoirs de président de commission, de faire respecter l'ordre et d'interpréter le règlement de l'Assemblée. Et ce n'est pas le rôle du président, je pense bien qu'il faut immédiatement faire une distinction, ce n'est pas lui qui est le juge; nous avons un banc ici, dans cette commission, de 21 membres qui siègent ensemble et les décisions de la commission seront prisés par, justement, la commission qui, elle, devra faire rapport à l'Assemblée à la suite de l'enquête qu'elle aura tenue.

Un membre de la commission ce matin me mentionnait justement des articles de journaux ou des commentaires des media d'information. Je sais, sans être un expert, qu'il existe certaines règles d'éthique ou certaines règles de sub judice devant les tribunaux de droit commun.

Si on transpose cette commission comme une commission d'enquête quasi judiciaire ou je ne sais pas où est la délimitation, ce n'est pas, appelez ça, si vous voulez, une mise en garde ou je ne sais pas quoi contre les courriéristes parlementaires ou la presse en général, la question du sub judice, de l'interprétation des témoignages, de l'interprétation des faits qui seront établis ou non encore prouvés ou en voie d'être prouvés devant la commission, l'analyse de la preuve ou le jugement que, disons, la presse peut porter sur des témoins. Ce n'est pas des règles strictes bien établies que je veux mentionne: actuellement, mais c'est peut-être un élément de prudence vis-à-vis de la presse écrite ou parlée.

D'ailleurs, notre règlement, à l'article 81, je crois, de la loi, notre règlement de l'Assemblée nationale prévoit certains bris de privilège par les journaux ou autres contre les membres de l'Assemblée nationale. Ecoutez, mon commentaire se limite à ceci. Avant de vous donner la parole, messieurs, je voudrais mentionner, je crois, que Me Blondin, secrétaire général de l'Assemblée, pourra agir comme greffier — si vous consentez — de cette commission de l'Assemblée nationale, et si la commission accepte d'ailleurs, et j'aimerais... Est-ce qu'on m'a informé que Me Boutin est assisté d'un conseil?

M. BOUTIN: Oui, Richard Drouin.

LE PRESIDENT: D'accord, c'est les seuls commentaires que j'ai à faire au début de cette séance.

M. BURNS: M. le Président, au début, j'ai simplemer.t une remarque qui est pratiquement au niveau du règlement et ma remarque serait la suivante, et ça concerne l'enregistrement des débats. Je pense que la commission que nous commençons aujourd'hui à faire siéger ou cette première séance de la commission et toutes les autres séa ces ont une importance particulièrement grande et pour l'Assemblée nationale et pour les personnes concernées.

De sorte que je me demande si il ne serait pas important, dès le début, quant à l'enregistrement des débats, qu'un certain nombre de règles soient posées. Afin de placer tout le monde dans le portrait, si je peux dire.

On sait qu'actuellement il y a une certaine coutume de l'enregistrement des débats qui fait que parce que nous ne sommes peut-être pas tous de bons rhéteurs, de bons rhétoriciens et peut-être que parce que, aussi, nous ne maîtrisons pas toujours le français à la perfection, il y a des corrections qui se font au journal des Débats.

Les corrections se font à deux endroits et

possiblement à trois. La troisième, je ne l'ai pas vue encore. De façon courante et de façon régulière, il y a d'abord une correction qui, souvent, se fait grâce à l'expérience de nos collaboratrices du journal des Débats, qui savent, après quelques années, que tel mot sera changé lorsque ça viendra entre les mains du correcteur des épreuves, de sorte qu'il y a déjà une première correction qui se fait là. Je vais vous donner un exemple typique. L'anglicisme le plus courant que nous utilisons, par exemple, est de dire: "Je réalise que vous ne savez pas ce dont je parle". Tout le monde sait que "je réalise" n'est pas français. Probablement que la transcriptrice, à un moment donné, va dire: Je sais d'avance que le correcteur des épreuves va changer le mot "je réalise que" par le mot "je me rends compte du fait que". Il y a déjà une première correction qui se fait à ce niveau-là.

Il y en a une deuxième qui se fait pour ce qui n'a pas été filtré, tamisé par l'entremise de la transcriptrice et cela se fait chez le correcteur. Il y a une troisième possibilité, c'est vous-même, M. le Président, selon la dernière directive et c'est celle-là que je n'ai pas vu utiliser jusqu'à maintenant. J'espère ne jamais la voir utiliser; pas que je ne me fie pas à votre possibilité d'utiliser sagement votre discrétion mais la troisième possibilité est que si des mots antiparlementaires se prononcent vous avez le pouvoir, en tout cas selon la directive que vous nous avez donnée, de retirer du journal des Débats un certain nombre de choses.

J'aimerais, vu l'importance de cette commission, vu, surtout, l'importance de tout ce qui va se dire ici, vu l'importance des nuances même mal dites, mal dites au point de vue de la langue elle-même, j'aimerais que la commission s'entende qu'il n'y aura pas de correction et qu'il n'y aura aucune correction qui sera apportée à quoi que ce soit qui se dise à cette commission-ci pendant toute l'exécution du mandat qui nous concerne et qui nous a été confié par l'Assemblée nationale, vendredi dernier.

C'est une soumission que je fais tant dans l'intérêt du député de Johnson que dans l'intérêt de l'ensemble des députés ici, à l'Assemblée nationale, et qu'encore de celui qui va présider les séances de la commission. Parce que, tôt ou tard, même s'il s'agit pas d'un procès, même s'il s'agit pas d'un procès au sens courant du mot, mais qu'il s'agit plutôt d'un mandat d'enquête donné par l'Assemblée nationale, tôt ou tard les choses qui se disent ici, les énoncés qui sont déposés devant la commission vont prendre une importance et certaines nuances — peu importe la qualité de la langue utilisée — vont avoir leur importance, de sorte que moi, au départ, je demanderais le consentement de la commission, et suivi, si possible, d'une directive du président de l'Assemblée nationale qui, en l'occurrence est notre président de commission, à l'endroit du journal des Débats qu'il n'y a pas de correction à ce qui est enregistré ici. C'est ma première soumission, M. le Président, et je pense qu'elle est très importante.

M. BIENVENUE: Autant, M. le Président, l'expérience et le droit nous révèlent qu'il est essentiel que tout ce qui se dit par qui que ce soit devant les tribunaux soit pris en sténographie et rapporté fidèlement à la virgule près, autant je pense que c'est aussi essentiel ici, vu la nature de l'enquête que nous tenons. J'abonde entièrement dans les remarques du député de Maisonneuve en songeant que je ferai des efforts pour améliorer ma propre langue.

M. BURNS: Vous avez remarqué que j'ai fait un effort moi-même en exposant mon point de vue.

LE PRESIDENT: M. Lalonde.

M. LALONDE: Je me demande, M. le Président, si les remarques du député de Maisonneuve, qui sont très pertinentes quant aux témoins qui pourraient venir témoigner ici devant la commission, ne s'appliquent peut-être un peu moins aux membres de la commission qui ne sont quand même pas ni des juges, ni des procureurs de la couronne, ni des officiers de la justice dans le sens où on l'entend dans les tribunaux. Alors, j'abonderais totalement dans le sens du député de Maisonneuve quant aux témoignages, parce que là, à ce moment-là, les virgules, même les hésitations doivent être interprétées, mais quant aux membres de la commission qui ont des remarques, souvent, sans agir comme officiers de justice, ils pourraient peut-être... Je ne vois pas pourquoi on aurait une attitude différente que celle qu'on a vis-à-vis les membres de l'Assemblée ou des autres commissions quant aux membres eux-mêmes de la commission.

M. BIENVENUE: M. le Président, si on me permet, tout en respectant absolument le bien-fondé, l'à-propos de ce que vient de dire mon collègue.

Evidemment, si on se reporte à l'esprit d'un tribunal quasi judiciaire ou d'une enquête, j'ai voulu indiquer tout à l'heure que, devant les tribunaux, tout ce qui se prend à la sténographie, se prend tel quel et sans amendement, sans amélioration, sans modification par le sténographe. Pourquoi? Parce que la question peut être aussi importante que la réponse. Si un témoin devant cette commission répond à la question de l'un ou l'autre des membres de la commission, parce que tous, d'après les règlements, ont le droit d'interroger les témoins et si, évidemment, une réponse est donnée à une question suite à la terminologie employée dans cette question, mais qu'au journal des Débats, on devait corriger ou modifier les mots employés dans la question, il pourrait y avoir là une anomalie entre la question et la réponse ou un sens différent, une interprétation différente donnée à la réponse à partir d'une question qui ne serait plus, dans le journal des Débats, la même que celle qui a été effectivement posée.

M. BURNS: Je suis entièrement d'accord et je pense que j'entends mon collègue de Chicoutimi qui dit la même chose. Nous sommes d'accord avec l'interprétation du ministre de l'Immigration. Je pense que, si on ne doit pas modifier la réponse du témoin, on doit encore moins modifier la question du député. Je pense que cela nous imposera un fardeau de voir à ce que notre question soit d'autant plus précise et d'autant plus exacte que nous saurons qu'elle ne sera pas modifiée. Et la question, à mon avis — c'est là que je rejoins le ministre de l'Immigration — a autant d'importance que la réponse.

M. LALONDE: Oui. Là-dessus, j'abonde dans votre sens. C'est ce que je disais d'ailleurs, sauf quant aux témoignages, cela comprend nécessairement la question.

M. BURNS: Et j'ajoute...

M. LALONDE: Quant aux commentaires, bien cela...

M. BURNS: J'ajoute ceci. C'est que, si on commence, d'autre part, à faire des distinctions, dans le sens qu'il est possible de corriger telle partie, alors qu'il n'est pas possible de corriger telle autre, je pense qu'à ce moment-là on impose un lourd fardeau au directeur du journal des Débats, entre autres, et à ses collaborateurs et collaboratrices, en ce sens que lui, il va être obligé d'utiliser sa discrétion quant à la possibilité de corriger telle partie, alors qu'il ne peut pas corriger telle autre. Moi, je me demande si, à ce moment-là, on fait une bonne chose. Et, d'ailleurs, je ne suis pas certain qu'on rende service au directeur du journal des Débats qui nous a toujours assistés avec toute la possibilité ou du mieux qu'il pouvait.

Mais, moi je ne lui imposerais pas ce fardeau-là. En tout cas, quant à moi.

M. LEGER: M. le Président, de toute façon, je pense que ça permettra d'avoir une meilleure qualité de la langue française dans le débat pour les 21 membres, d'une part, et je pense pas qu'on ait rien à perdre à ne rien corriger mais d'avoir la vérité, même si elle est mal exprimée.

LE PRESIDENT: Est-ce qu'il s'agit du voeu de la commission?

M. BURNS: II semble que oui, M. le Président.

LE PRESIDENT: Bon. C'est le voeu de la commission?

M. BIENVENUE: ... c'est conforme à une disposition du projet de loi 22, je ne sais pas laquelle mais on me dit ça.

M. BURNS: C'est pas celle que vous vous êtes fait enlever dans votre ministère sans vous en rendre compte! ...

LE PRESIDENT: M. Massicotte étant présent, il s'agit d'une directive qui vient de la commission. Je sais qu'il saura l'appliquer strictement.

M. BURNS: Deuxièmement, M. le Président, j'aurais une autre remarque que vous avez vous-même provoquée par votre allusion au sub judice et je pense qu'il est peut-être utile, dès le départ, de donner le point de vue de l'Opposition relativement... Cela concerne peut-être plus que le sub judice. Il est exact que nos règlements empêchent les députés de se servir de remarques ou de faire des interventions qui pourraient, à un moment donné, nuire à la position de quelqu'un devant les tribunaux et c'est la seule chose que je retrouve dans nos règlements qui nous empêche, dans nos interventions, de parler de M. Untel qui est dans la cause de Untel contre Untel.

Je pense qu'il est important qu'on se dise, ici, qu'il s'agit pas d'un procès. Certaines personnes ont parlé d'un procès jusqu'à maintenant. Moi, je vous parle...

LE PRESIDENT: Dans les journaux, c'est ça qui m'a surpris un peu.

M. BURNS: Oui, mais moi, je... Bien ça, ils ont droit à leur interprétation et je pense qu'on peut pas leur nier ce droit-là. Ce qui a toujours primé, dans le sub judice, c'est qu'une personne était devant les tribunaux, qu'elle était nécessairement embarquée, si vous me passez l'expression — c'est la première qui passe là — embarquée dans un processus de... législatif qui dépendait pas d'eux, qui dépendait d'une législation et qui était aussi gouvernée par un certain nombre de règles très précises, dont les lois de la preuve, etc., que ce soit au civil ou que ce soit dans le domaine pénal.

Ici, on est à une commission parlementaire et il ne faut pas l'oublier, une commission parlementaire du même type que n'importe quelle autre commission parlementaire, sauf que c'est peut-être la commission parlementaire suprême de l'Assemblée nationale. Simplement dû au fait que c'est elle qui nomme les participants aux autres commissions parlementaires, c'est sans doute la commission parlementaire qui prime sur les autres. Mais mis à part ce fait-là, c'est une commission parlementaire comme les autres. Et à ce moment-là, à ce que je sache, il n'y a pas, concernant le problème qui nous concerne, de procédure devant les tribunaux, à moins que vous m'avisiez de quelque chose qui est arrivé dans les récentes heures.

Moi, j'en suis pas au courant en tout cas. Je pense que y faut bien se mettre dans la tête que c'est une enquête de l'Assemblée nationale, selon le mandat que l'Assemblée nous a donné, vendredi dernier. A ce moment-là, je ne vois pas comment on pourrait demander à nos amis de la Galerie de la presse de ne pas rapporter un certain nombre de choses, pas que je veuille que

ce soit rapporté ou pas rapporté, ce n'est pas du tout mon problème.

Je pense et là cependant je vais partager l'opinion du président. Si le président nous a dit qu'il voulait que la Galerie de la presse et ses représentants usent de prudence dans une certaine façon de ne pas influencer la commission, à ce moment-là je ferais...

LE PRESIDENT: C'est juste, ça.

M. BURNS: ... par analogie, je partagerais l'opinion du président et là là-dessus je serai entièrement d'accord. Mais je ne voudrais pas quand même que les journalistes qui assistent à la commission se sentent bloqués ou brimés sur leur façon de rapporter les débats. Je pense que c'est leur droit le plus strict. Il faut bien se rappeler que la grande différence qu'il y a entre un procès régulier où le sub judice s'applique, c'est-à-dire où le tribunal ne doit pas se faire influencer par des commentaires extérieurs c'est qu'on n'est pas du tout dans le même domaine. On parle de personnes qui sont élues, qui occupent des fonctions publiques, au sens vraiment large du mot, et dont on examine la conduite. C'est ça qui est le problème de cette commission-ci. Si les journalistes veulent se lancer dans des commentaires, je pense qu'ils en ont parfaitement le droit en tant qu'espèce de porte-voix de ce qui se passe à l'Assemblée nationale. C'est la seule remarque que je veux faire. Qu'ils usent de prudence, moi je pense bien que c'est à leurs conseillers de le faire, s'ils ne veulent pas provoquer des débats qui deviendraient stériles, même inutiles et même nocifs aux travaux de la présente commission. Mais, je pense qu'on ne peut pas aller plus loin que ça, il ne faudrait pas qu'ils se sentent une espèce de fardeau, une espèce de menace de notre part ou, quoique j'ai pas compris ça comme une menace ce que le président a dit.

M. BIENVENUE: Alors, si on me permet, M. le Président, je, en écoutant les dernières remarques du député de Maisonneuve, je comprends qu'il a bien perçu vos remarques ou cette espèce de mise en garde ou d'appel à la prudence que vous avez faite au début. Alors, vous avez indiqué clairement, comme vient de le faire le député de Maisonneuve et comme je le fais immédiatement, qu'il est aucunement question de brimer la presse parlée ou écrite ou de l'empêcher de quelque façon que ce soit de rapporter tout ce qui se dit ou tout ce qui se fait en cette commission qui après tout, à l'image de n'importe quel autre tribunal, est publique et si par impossible, et si la chose était possible, la commission aurait le droit de voir assister à ces séances toute la population du Québec, si l'enceinte était assez grande.

C'est beaucoup plus par analogie, si on le veut, à l'article 99 de notre règlement, mais je dis bien par analogie, qui interdit à l'un ou l'autre d'entre nous, à n'importe quel moment, que ce soit en commission ou à la Chambre, de parler d'une affaire qui est devant les tribunaux, ou devant un organisme quasi-judiciaire, ou d'une affaire qui est sous enquête; je dis par analogie parce qu'ici, on va justement être sous enquête, parce que, dans ce dernier cas, les paroles prononcées ou enfin, dans le cas de la presse, les commentaires écrits pourraient être, peuvent être préjudiciables à une personne. Et le député de Maisonneuve l'a bien saisi lorsqu'il a dit : Y'est pas question de chercher à influencer l'opinion des membres de la commission ou de la Chambre qui sera appelée à porter un jugement quand même d'une importance capitale.

Je suis d'accord avec le député de Maisonneuve que cette commission-ci siège au même titre que toutes les autres commissions, sauf quant à moi — et ça touche précisément vos remarques d'il y a un instant — sauf qu'elle est appelée à décider d'une chose extrêmement grave, soit le sort de l'un de ses membres, le sort d'un de nos collègues de l'Assemblée nationale. Et je suis, d'ailleurs — j'aime bien prendre la responsabilité de ce que je fais — je suis d'ailleurs, M. le Président, celui qui vous ai souligné, il y a quelques heures, la présence ou l'existence d'un article de journal. Je ne nommerai même pas le journal ni son auteur, pour moi c'est immatériel, c'est beaucoup plus quant au principe en cause que je me suis préoccupé qui, peut-être, justifie, je pense, les remarques que vous venez de faire et qui justifient un appel à la prudence, de sorte qu'aucun des membres de cette commission, pas plus qu'un juge, pas plus que le membre d'un jury, ne puisse être influencé dans la décision qu'il aura à prendre par des faits qui ne sont pas prouvés, qui seront peut-être jamais prouvés et qui sont des inteprétations libres et gratuites.

Et l'article en question, qui est attitré comme suit: "Le député de... le député Boutin devra — non pas pourrait mais devra — expliquer une coincidence à son procès — Parce que déjà, dans les journaux, c'est le procès du député de Johnson — Et je lis pas tout, je lis les... je lis les paragraphes qui sont... qui m'ont préoccupé." Dès la première séance, c'est-à-dire cet après-midi, ce député sera sans doute appelé à expliquer pourquoi avoir attendu au 16 avril dernier, soit six mois après son élection, pour signifier par écrit au ministre Jérôme Choquette son intention de ne plus accepter de mandat, etc." Ce qui veut dire que déjà, dans les journaux, on dit que, dès cet après-midi, il devra expliquer ça. Personne n'a déclaré à date qu'il devrait expliquer ou serait là ou tout... ou tous autres.

Et la, on fait allusion au fait que le 4 avril, justement, notre collègue le député de Maisonneuve avoit soulevé une question concernant un de nos collègues à l'étude des crédits de la Justice, soit, si l'on veut, huit jours avant la... euh! pardon, pas huit jours mais douze jours avant la date de la lettre dont il s'agit. Et

l'article continue: "On n'en parlerait même plus aujourd'hui si ce n'était du fait que c'est le 16 avril seulement que M. Boutin a confirmé par écrit son intention de ne plus accepter de mandat de la part du gouvernement du Québec. Or, le fait que ces deux dates soient si rapprochées dans le temps donne à penser que M. Choquette ou ses collaborateurs, allertés par les questions de M. Burns, ont peut-être vérifié auprès de tous les députés si aucun de ces derniers ne se trouvait pas dans des situations défendues par la Loi de la Législature. "Si tel était le cas, il faudrait alors regarder — et voilà ce que j'appelle des commentaires ou de l'interprétation libre qui pourrait être préjudiciable — il faudrait alors regarder sous un tout nouvel éclairage cette lettre du 16 avril. Ceci démontrerait, en effet, que cette lettre n'a pas été écrite de l'initiative de M. Boutin, mais bien de celle du bureau du ministre de la Justice, désormais empressé de régulariser une situation potentiellement embarrassante". Et là on va même jusqu'à suggérer les noms des témoins qui viendront éclairer la commission et régler le cas.

Quoi qu'il en soit, seuls M. Boutin et Charles Bélanger, le chef de cabinet de M. Choquette, peuvent clarifier cette affaire et lever ce doute engendré par cette coincidence des dates. Alors, je ne veux pas faire d'autres commentaires, mais je souscris à ce qu'on dit et le président et mon collègue de Maisonneuve, pour dire que ce genre de commentaire peut, sinon dans le public, sinon à la commission et même dans le public, soulever des points, laisser des points obscurs et faire croire à des gens que, si tel ou tel témoin, comme le suggère le journaliste, n'est pas entendu que cette situation là sera pas clarifiée, puisque cette lettre-là n'a pas été écrite, comme l'a affirmé le député de Johnson en Chambre, à sa propre initiative, mais à la demande de quelqu'un d'autre. Et c'est justement toutes ces choses que nous et nous seuls, les membres de l'Assemblée nationale, via cette commission d'enquête, sommes appelés à décider. Si d'autres le décident pour nous, M. le Président, nous perdons notre temps.

LE PRESIDENT: M. Bossé.

M. BOSSE: Comme nous sommes, M. le Président, à ce moment-ci, au niveau de la procédure, et tenant compte des remarques du député de Maisonneuve et de Crémazie, nous serions à une commission parlementaire ordinaire, sauf le cas exceptionnel. Je voudrais demander une directive, c'est-à-dire: Y a-t-il lieu, ici, de, permettre aux députés qui ne sont pas membres de la commission parlementaire, comme cela se fait selon la tradition dans les autres commissions, de leur permettre le droit de parole?

LE PRESIDENT: Je crois qu'en vertu de notre règlement un député qui n'est pas membre de la commission et qui désire participer puisse à l'occasion ou si c'est le voeu de la commission que ce soit autrement, mais qu'à l'occasion qu'il demande la permission à la commission de se faire entendre et je serais bien surpris que ce soit refusé.

M. BOSSE: C'est que je voulais établir; évidemment, il y avait un doute dans l'esprit de nombreux députés, étant donné le cas un peu extraordinaire de cette espèce...

LE PRESIDENT: Est-ce que vous êtes membre de cette commission?

M. BOSSE: Je ne le suis pas, justement.

LE PRESIDENT: Est-ce que c'est une permission que vous demandez?

M. BOSSE: Je demande une permission.

LE PRESIDENT: Est-ce que la permission est accordée? Accordé.

M. BOSSE: Parce que...

M. LALONDE: Rétroactivement, M. le Président. Rétroactivement, je demande une permission, parce que je ne suis pas membre de la commission, non plus.

LE PRESIDENT: II y aurait lieu, je crois, de nommer, tel que le règlement le prévoit, un rapporteur à cette commission. Est-ce qu'il y aurait lieu d'avoir une motion pour qu'un rapporteur soit nommé à la commission?

M. BURNS: Je proposerais le député de Limoilou, M. le Président.

M. HOUDE (Limoilou): Je ne suis pas membre de la commission.

M. BURNS: Pas membre de la commission. Le député de...

M. BLANK: Portneuf.

LE PRESIDENT: M. Blank propose le député de...

M. PAGE: Est-ce que je suis inscrit officiellement sur la commission?

LE PRESIDENT: Oui, oui, il y a une motion en Chambre, à l'Assemblée.

M. PAGE: D'accord.

LE PRESIDENT: M. Blank propose que le député de Portneuf, soit M. Pagé, soit rapporteur de cette commission. Est-ce que cette motion est adoptée?

M. BURNS: Adopté, M. le Président.

LE PRESIDENT: Adopté.

M. BURNS: M. le Président, j'imagine que la commission, étant donné que c'est à la suite de ma motion qu'elle siège, s'attend à ce que je fasse un certain nombre de suggestions, ce qui ne veut pas dire que ce sera limitativement par rapport à la commission. J'imagine que d'autres députés pourront faire des suggestions. Quant à un certain nombre de témoins à être entendus, il est peut-être important de mentionner au départ que comme député à l'Assemblée nationale, je n'ai pas le pouvoir, personnellement, de convoquer des témoins; je pense que c'est la commission qui peut convoquer des témoins. Si jamais les témoins refusent d'obtempérer l'ordre de la commission, en vertu de l'article 53, il y a un rapport qui est fait au président et, à ce moment-là, c'est l'Assemblée nationale qui se débrouille avec le problème. Excusez-moi, j'ai dit 53, c'est 153, M. le Président.

Dans cette optique-là, M. le Président, dans le but de faire avancer les travaux de la commission et tout en me rendant fort bien compte qu'il sera sans doute impossible d'entendre des témoins dans la journée, puisque je pense bien qu'il faut leur donner un délai normal, au moins un délai qui pourrait leur permettre... Vous verrez qu'il y a un certain nombre de documents que je demande aux témoins d'apporter avec eux, une espèce de duces tecum qu'on utiliserait en termes légaux, d'apporter avec eux un certain nombre de documents. Je pense que ça peut peut-être demander aussi une certaine collection de documents avant de se présenter de sorte que... Cela, la commission en décidera, de la date où ces gens-là pourront être assignés.

Je suggérerais à la commission — ce n'est pas à moi d'en décider, c'est la commission qui pourra en décider en définitive — d'assigner, en ce qui me concerne...

M. BIENVENUE: Si vous me permettiez... M. BURNS: ... onze personnes. Pardon?

M. BIENVENUE: Si vous me permettiez, avant, peut-être que ça ferait l'affaire de tout le monde. Sauf erreur, je pense que dans l'affaire Gabias-Hamel la commission avait convenu que pour les assignations les parties requérantes, quelles qu'elles soient, remettaient au...

M. BURNS: Je m'excuse auprès du ministre. J'appelle pas ça des assignations, j'appelle ça des convocations.

M. BIENVENUE: Oui. Oui, mais...

M. BURNS: Parce que c'est une commission parlementaire comme les autres.

M. BIENVENUE: ... remettaient la liste des noms à être convoqués au président de la commission. On remettait la liste par écrit avec tout ce dont ils avaient besoin, documents et autres, et ce dernier, au nom de la commission, expédiait les convocations ou se chargeait des convocations.

M. BURNS: D'accord, mais...

M. BIENVENUE: Je ne sais pas si ça pourrait...

M. BURNS: ... le ministre a-t-il des objections à ce que je mentionne à la commission, dans l'intérêt de nos collègues qui siègent à la commission...

M. BIENVENUE: Aucune.

M. BURNS: ... la liste des témoins et des documents que je demande qu'ils soient, qu'ils apportent avec eux.

M. BIENVENUE: Non seulement je n'ai pas d'objection, mais tout ce qui pourra se faire et devra se faire à ciel ouvert me convient.

M. BURNS: M. le Président, quitte à remettre copie de cette liste au président, je peux, dès maintenant, dire à la commission, dans l'intérêt des...

M. BIENVENUE: Voulez-vous mentionner tout de suite tous les numéros de dossiers, avec...

M. BURNS: Je mentionne les documents... M. BIENVENUE: Pour le moment...

M. BURNS: ...que je veux amener, mais pour le moment je ne mentionne pas de numéro de dossier.

M. BIENVENUE: Bon. Je veux dire par là, je n'ai aucune objection à entendre le député de Maisonneuve réservant, pour aussitôt après ou dès qu'il aura fini ce que j'appelle ses remarques préliminaires, des remarques préliminaires ou des observations préliminaires de notre côté, en droit, sur le droit, mais je n'ai aucune objection à ce que le député de Maisonneuve indique tout de suite, sous réserve de ce que je dirai après.

M. BURNS: D'accord.

Liste des témoins à être entendus

M. BURNS: Alors, le premier témoin, je pense, que j'aimerais entendre et c'est peut-être... Quand je dis le premier, c'est peut-être celui sur lequel il est important de partir une preuve. Quant aux autres, je suis prêt à parler d'accommodement au point de vue de l'ordre et de tout ça, mais le premier, en ce qui me

concerne, est le premier au point de vue chronologique, parce que c'est sans aucun doute à partir de là que l'enquête puisse se poursuivre. J'aimerais bien que nous convoquions M. Jean-F. Bilodeau ou son adjoint, qui est greffier de la paix pour le district de Saint-François. J'aimerais également, M. le Président, c'est un voeu que j'exprime à la commission, si la commission est d'accord, ou bien à moins qu'après l'énumération de mes témoins et des documents que je leur demande d'apporter avec eux, pas de mes témoins, mais des témoins de la commission, des témoins que je suggère à la commission d'entendre. Si on vous donne un mandat général, M. le Président, d'exécuter ces convocations-là, de voir à ce que ces convocations-là parviennent aux personnes, à ce moment-là, j'en discuterai avec le président, mais simplement dans le but de vous donner une indication de ces témoins-là et des documents que j'aimerais voir la commission examiner.

Quant à M. Bilodeau, j'aimerais que la commission lui demande d'apporter avec lui les dossiers de toutes les causes où Me Jean-Claude Boutin apparaît comme procureur d'un ministère du gouvernement ou apparaît pour et au nom du procureur général du Québec et qui, premièrement, ont été intentées après le 1er janvier 73 et étaient pendantes le 29 octobre 1973, ou encore qui ont été retirées ou qui ont fait l'objet d'un jugement entre le 15 octobre 1973 et le 29 octobre 73, ou encore qui ont été intentées depuis le 29 octobre 1973. Egalement, je pense qu'on devrait demander à M. Bilodeau ou à son adjoint d'apporter les rôles d'audiences de la cour depuis le 15 octobre 1973. Ça, ça concerne le premier témoin.

Le second, M. le Président, toujours que je suggère à la commission de convoquer. Il s'agit de M. Louis Dufour, directeur du bureau juridique du code de la route au ministère de la Justice. Et, s'il lui était possible d'apporter toute correspondance et tout document échangés entre le bureau juridique du code de la route et Me Jean-Claude Boutin, depuis le 15 octobre 73, ça ferait bien mon affaire.

Troisième témoin, M. le Président. Je suggère à la commission de convoquer le ministre de la Justice, M. Jérôme Choquette, en lui demandant d'apporter avec lui toute correspondance et tout document échangés entre le ministre ou son cabinet et Me Jean-Claude Boutin, depuis le 15 octobre 73.

En quatrième lieu, je pense que la commission aurait intérêt à entendre M. Charles Bélanger, chef de cabinet du ministre de la Justice.

En cinquième lieu, M. Raymond Plante, directeur du service de la comptabilité du ministère de la Justice. Egalement, M. Marcellin Nadeau, directeur du service du contentieux au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche, en lui demandant d'apporter avec lui toute correspondance et tout document échangés entre le service du contentieux et Me

Jean-Claude Boutin, depuis le 15 octobre 73. Egalement, M. Raymond Larose, directeur du service de la comptabilité au ministère du Tourisme, de la Chasse et de la Pêche.

Je pense également qu'il serait d'intérêt pour la commission d'entendre Mlle Lise Lemieux, directeur du service juridique au ministère des Transports, en lui demandant d'apporter avec elle toute correspondance et tout document échangés entre le service juridique et Me Jean-Claude Boutin, depuis le 15 octobre 1973.

Il serait aussi d'intérêt à mon avis, M. le Président, d'entendre M. Pierre Michaud, chef du service de la gestion financière au ministère des Transports.

Enfin, M. Harold Hutchison, directeur du service du contentieux au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre, en lui demandant d'apporter toute correspondance et tout document échangés entre le service du contentieux et Me Jean-Claude Boutin, depuis le 15 octobre 73. Et, finalement, M. Paul Matte, directeur du service de la gestion financière au ministère du Travail et de la Main-d'Oeuvre.

C'est, M. le Président, dans l'intérêt de la commission, je pense, de convoquer ces personnes en leur demandant d'apporter les documents mentionnés en vue de faire avancer les travaux de la commission, particulièrement en vue de faire avancer l'enquête dont nous avons reçu mandat ou que nous avons reçu mandat d'exécuter par l'entremise de l'Assemblée nationale, lors de son vote de la semaine dernière.

LE PRESIDENT: Est-ce qu'il y a des remarques ou des commentaires sur cette proposition?

M. BIENVENUE: Evidemment, j'ai fait, M. le Président, il y a un instant, le commentaire, qui en était un de réserve, que je n'ai pas d'objection à entendre les demandes de convocation du député de Maisonneuve, sous réserve de points que je soulèverais en droit et qui pourraient avoir ou ne pas avoir une portée sur la demande qu'il vient de formuler devant la commission.

LE PRESIDENT: J'aurais seulement une remarque à faire, peut-être, au point de vue procédure. En vérifiant la Loi de la Législature, il m'apparaft une certaine lacune, peut-être, absence dans la motion de l'honorable député de Maisonneuve. Notre règlement dit bien, à l'article 153, qu'une commission a le pouvoir de requérir la présence d'une personne comme témoin à une commission...

M. BURNS: Et de produire des documents.

LE PRESIDENT: Oui. C'est la commission ça qui dit ça dans notre règlement.

M. BURNS: C'est ça.

LE PRESIDENT: Par contre, la Loi de la Législature dit que c'est l'Assemblée nationale qui peut assigner et contraindre toute personne à comparaître devant elle. Je crois que, à moins d'informations contraires, je crois qu'il aurait fallu, on pourrait corriger cette lacune dès demain matin, à l'Assemblée, il aurait fallu peut-être qu'on inclue dans votre motion que l'affaire est référée à la commission pour enquête, tel qu'actuellement, et que la commission puisse requérir la présence de tout témoin. Parce que je crois que si on le fait uniquement au niveau de la commission, que certains témoins pourraient s'objecter et je me demande si on aurait les moyens de les contraindre.

M. BURNS: C'est-à-dire, M. le Président, je pense que l'article 153, si on le lit au complet, est vraiment, nous donne...

M. BIENVENUE: Les pouvoirs.

M. BURNS: ... en somme les éléments de régler un tel genre de problème. Et je cite 153: "Lorsqu'une commission élue a requis une personne de se présenter devant elle pour s'y faire entendre ou pour produire des documents et que cette personne refuse de le faire, la commission fait rapport de ce refus au président et celui-ci prend les moyens nécessaires pour que la demande de la commission soit satisfaite".

Or, les moyens nécessaires seraient sans doute, M. le Président, dans l'éventualité où un des individus, que j'ai mentionnés, ou d'autres individus qui, sans doute, seront mentionnés par d'autres collègues à l'Assemblée... à la commission de l'Assemblée nationale, si ces gens refusent de se présenter ou refusent de déposer les documents requis, j'imagine, M. le Président, que vous en ferez rapport à l'Assemblée nationale et que l'Assemblée nationale fera l'assignation requise.

LE PRESIDENT: Non. Je crois...

M. BURNS: II serait peut-être bon...

LE PRESIDENT: Je crois que cela devrait...

M. BURNS: D serait peut-être bon mais...

LE PRESIDENT: Cest parce que notre règlement...

M. BURNS: M. le Président, je dois vous signaler aussi un problème qui est le suivant. C'est que nous ne pouvons pas changer le mandat qui nous est confié par l'Assemblée nationale. Il est évident dans mon esprit et probablement dans l'esprit de tous les membres de la commission que, lorsque la motion a été votée vendredi dernier, elle comportait, puisque c'était le principal, l'accessoire, c'est-à-dire si on doit faire enquête, qu'on puisse entendre des gens. Bon. C'est pour ça que j'ai parlé de convocation jusqu'à maintenant et non pas d'assignation. C'est pour ça que j'ai fait cette distinction-là. Comme, par exemple, lorsque la commission parlementaire de la justice, qui siège depuis quelques jours relativement au projet de loi no 21, Loi modifiant la Loi de la Commission de contrôle des permis d'alcool, elle n'a pas reçu de pouvoir de convoquer des témoins. Par contre, elle a entendu des témoins.

Si jamais un des membres avait convaincu la commission qu'un tel témoin devrait être assigné et qui se refusait de suivre la convocation, à ce moment-là j'imagine, M. le Président, que la commission vous aurait fait rapport et que tout le problème serait revenu à l'Assemblée nationale.

Je ne prévois pas, j'espère qu'il n'y en aura pas, de problèmes relativement aux convocations. Je pense que tout le monde se rend compte de l'importance du problème que nous aurons à discuter. Mais, à ce moment-là, je pense qu'on pourra utiliser, dans le cas où la commission ne réussirait pas à convoquer avec succès un certain nombre de témoins que les députés veulent entendre ou que la commission veut entendre, on pourrait utiliser à ce moment-là les dispositions de l'article 63 de la Loi de la Législature qui se lit comme suit: "L'Assemblée nationale peut assigner et contraindre toute personne à comparaître devant elle ou une de ses commissions ou à y produire toute pièce qu'elle juge nécessaire à ses actes ou délibérations".

Et là, M. le Président, c'est parce que, au départ, je me fonde sur la bonne foi des gens qui veulent nous éclairer dans l'enquête que l'Assemblée nationale nous a donné mandat d'exécuter. C'est rien que pour ça et c'est..., je..., en me disant que, au départ, la bonne foi se présume et que les gens à qui on va demander de venir ici avec un certain nombre de documents vont accepter de bon gré de le faire, j'ai pas cru devoir mettre dans la motion que j'ai proposée à l'Assemblée nationale: et le droit d'assignation avec toutes les peines prévues par la loi et tout ce que vous voulez.

Alors, je pense que en se disant que normalement, si on prend l'expérience du passé, si on prend..., même, le député de Crémazie a parlé, tout à l'heure, du cas de Gabias. On se souvient que, dans ce cas-là, même la personne qui était sur la brèche avait accepté de bon gré de témoigner alors qu'elle n'était même pas membre de la commission. Dans le cas de Gabias et Hamel. C'est-à-dire Hamel avait accepté.

LE PRESIDENT: Non, si je me rappelle bien, j'ai lu la motion d'envoi, à ce moment-là. Il était bien mentionné, dans la motion de l'envoi, que la commission avait le pouvoir d'assigner ou de convoquer des témoins.

M. BURNS: En tout cas, M. le Président...

LE PRESIDENT: De toute... C'est juste une mise au point de procédure pour empêcher des pépins futurs, si vous voulez.

M. BURNS: Ce que je vous dis, c'est que, s'il y a pépins, les dispositions légales, actuellement, nous permettent de les régler. Moi, j'en prévois pas. J'espère qu'y en aura, pas pis je pense c'est peut-être également l'opinion de tous les membres de la commission. Mais...

M. BIENVENUE: Mais je n'ai pas objection, moi, à ce qu'on retourne devant la Chambre pour faire ajouter ça, à ce qu'on amende la motion pour faire ajouter ça. J'y vois aucun inconvénient.

M. BURNS: Bien je vois pas pourquoi on procéderait pas normalement en convoquant, comme dans toute autre commission, les gens, en les invitant, par voie de convocation, à venir nous voir et à apporter les documents qu'on leur mentionne. Si jamais on en trouve des récalcitrants, bien à ce moment-là on utilisera les pouvoirs extraordinaires que la loi nous permet d'utiliser. Mais je pense pas que ce soit nécessaire.

Surtout que si vous regardez la liste, en tout cas jusqu'à maintenant, des personnes que je vous suggère, que je suggère à la commission de convoquer, ce sont pour la plupart ou bien des officiers publics, ou bien des hauts fonctionnaires de quelque ministère que ce soit.

M. BIENVENUE: Est-ce que, à titre d'exemple, le député de Saint-Louis me suggère une hypothèse, M. le Président, est-ce que des officiers de justice, le greffier, à titre d'exemple, ne pourrait pas s'objecter à apporter avec lui, devant nous, des dossiers de cour, des originaux des dossiers de la cour ou d'autres pièces qui ont été demandées à d'autres témoins, si ça n'est pas une convocation?

UNE VOIX: Une assignation.

M. BIENVENUE: Enfin, qu'on l'appelle assignation ou convention, la loi parle d'assignation. Le mot assignation est pas trop fort. L'article 63 auquel fait allusion le député de Maisonneuve parle d'assignation et de contrainte. Je me demande si ça donnera pas plus de poids. Je connais pas l'attitude de ces témoins-là. Je n'ai parlé à aucun d'eux.

M. BURNS: Je vas vous dire bien franchement, là, ce qui me vient à l'esprit immédiatement, M. le Président, c'est que, si vous vous lancez dans l'article 63 immédiatement, vous allez vous poser des problèmes à savoir si l'Assemblée nationale peut déléguer ce pouvoir-là à une commission et ça, je veux pas qu'on... A moins qu'on veuille faire des folichonneries légalistes, là, et non pas faire une véritable enquête selon les dires mêmes du député de Johnson, qui ferait la lumière ou qui nettoierait le problème.

M. BIENVENUE: Oui mais sauf...

M. BURNS: C'est son désir et c'est mon désir et je pense c'est le désir de la commission de le faire le plus rapidement possible.

M. BIENVENUE: Mais le pouvoir de...

M. BURNS: Si je retourne devant l'Assemblée nationale et qu'on demande d'amender la motion, qui me dit, moi, que parmi les 109 députés, à part vous, M. le Président, parmi les 109 députés qu'y en a pas un qui commencera pas à faire du chichi légal relativement au pouvoir de délégation de la commission de l'Assemblée nationale à ses commissions.

M. BEDARD (Chicoutimi): D'ailleurs, M. le Président, l'article...

M. BIENVENUE: II est pas question de délégation, ici.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... 153 est complet en lui-même...

M. BURNS: C'est l'Assemblée qui... Oui.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... et il prévoit le cas où un ordre de la commission ne serait pas respecté.

LE PRESIDENT: C'est juste une question de prudence. Je peux vous dire, je pense bien que vous allez reconnaître avec moi, notre règlement le prévoit, notre règlement ce n'est pas une loi. C'est une résolution de l'Assemblée. Et une loi a toujours plus de poids qu'une simple résolution de... C'est par mesure de prudence et, personnellement, je ne prévois pas, à moins que...

M. BURNS: C'est pour ça, M. le Président, que notre suggestion à nous, c'est de dire: Fonctionnons comme ça. Si la commission est d'avis qu'on doive convoquer ces personnes-là et d'autres personnes que d'autres membres de la commission pourront peut-être décider de convoquer, bien à ce moment-là, prenons la chance qui est en faveur de ces gens-là, c'est-à-dire en les convoquant qu'y vont être présents.

M. BLANK: Je demande une question... M. BURNS: C'est notre suggestion.

M. BLANK: ... peut-être un peu plus à la base: Est-ce que un témoin qui vient ici avec l'article 153, et pas 63, est-ce qu'il, lui, a la même immunité?

M. BURNS: Est-ce qu'il a la même immunité?

M. BLANK: Immunité. C'est ça que je me demande.

M. BIENVENUE: Imaginons, à titre d'exemple, le cas d'un greffier ou d'un employé de justice qui viendrait témoigner sous serment devant la commission pour dire que même s'il a fait telle inscription au procès-verbal de telle cour le personnage qu'il a marqué présent était absent.

Ce greffier-là, ce témoin-là pourrait s'interroger sérieusement sur l'immunité qui le protège au moment où il fait une telle déclaration.

M. BLANK: Mais c'est pas la réponse. J'ai seulement lancé le question pas certaine de la réponse. Je suis certaine qu'avec 63 il y a l'immunité.

M. BURNS: Moi je suis ici, je vous le dis tout de suite, M. le Président, je suis ici pour essayer de voir à éclairer la commission, pour aider à la commission dans son enquête si vous pensez pis si la commission pense que je, c'est préférable de les convoquer par l'Assemblée nationale je vous dis tout de suite que je suis prêt à faire une motion en Chambre demain parce que c'est la prochaine occasion, avec le consentement de la Chambre parce qu'a sera pas en avis à faire une motion pour assigner ces gens-là avec des documents.

LE PRESIDENT: Non, je je je ne crois pas qu'il s'agirait de les assigner spécifiquement, de donner le mandat à la commission de pouvoir assigner les témoins et d'apporter les pièces justificatives et tout.

M. BURNS: Moi, moi M. le Président...

LE PRESIDENT: Est-ce que vous êtes consentant, est-ce que vous pouvez vous prononcer pour le côté ministériel?

M. BIENVENUE: Je suis d'accord. LE PRESIDENT: Bon.

M. BURNS: Ben, M. le Président, moi tout ce que je veux savoir et ça je ne me suis pas penché à fond sur ce problème-là parce que vous allez, vous allez comprendre que tout le problème de la délégation de pouvoirs est quelque chose de compliqué, c'est d'ailleurs des choses qui ont noirci bien du papier en droit, particulièrement en droit constitutionnel. E... la délégation de pouvoirs dans quel cas elle peut se faire pis comment a peut se faire pis par qui pis à l'endroit de qui, etc. Tout ce que je lis moi c'est dans les premières lignes de 63 c'est que c'est l'Assemblée nationale qui peut assigner les contraintes...

LE PRESIDENT: Continuez.

M. BURNS: ... est-ce que cette Assemblée nationale...

LE PRESIDENT: Lisez tout l'article.

M. BURNS: Oui, à comparaître devant elle ou une de ses commissions.

LE PRESIDENT: Ou une de ses commissions.

M. BURNS: Mais ce n'est pas les commissions qui peuvent, selon 63, avoir ce pouvoir-là. C'est pour ça que je vous dis je ne veux pas me lancer dans un grand problème...

LE PRESIDENT: ... être légaliste.

M. BURNS: Ben, c'est ça, je veux dire ça dépend...

M. BIENVENUE: ... 153 parle...

M. BURNS: ... si vous voulez vous lancer dans ça.

M. BIENVENUE: ...153 parle du président qui lui prend les moyens nécessaires pour que la demande de la commission soit satisfaite. Le président, agissant comme tel prend les moyens nécessaires.

M. BURNS: Les moyens nécessaires, c'est celui qui est spécifié à l'article 63. Ben, le président fait rapport à la Chambre, il prend les moyens nécessaire et y dit à la Chambre: Nous avons convoqué M. X, Y ou Z et M. X, Y ou Z ne se sont pas présentés de sorte que je vous demande de régler le problème. C'est ça que le président va faire.

Alors, moi j'ai pas d'objection si c'est le problème soulevé par le député de Saint-Louis, si d'avance le représentant du gouvernement à cette commission, je pense que c'est le député de Crémazie, le ministre de l'Immigration, si d'avance le représentant du gouvernement m'assure qu'il ne me fera pas de problème demain relativement au fait que mon avis soit pas annoncé parce que...

M. BIENVENUE: Aucun, aucun.

M. BURNS: Bon, alors j'ai aucune objection à ce que ma liste de témoins soit demain soumise par voie de motion et que cette assignation et que la contrainte soit mise de l'avant par l'entremise de l'Assemblée nationale. Si c'est un problème d'immunité, je pense que c'est un problème sérieux ce que le député de Saint-Louis soulève et à ce moment-là, je je je me plierai à ça entièrement. Tout ce que je veux pas c'est que les aspects procédure de l'affaire retardent et dans... surtout dans l'intérêt je pense du député de Johnson...

UNE VOIX: Je, je je je...

M. BURNS: ... parce qu'il a mentionné lui aussi qu'il voulait que ça se fasse sans délai, qu'il y ait pas de délai inutile dans cette affaire-là, c'est rien que ça mon voeu.

M. BIENVENUE: Je me plais... je me plais à répéter les paroles que j'ai prononcées il y a quelques instants qui sont peut-être perdues dans, qui sont peut-être perdues dans les conversations que nous ont eues mais qui sont à l'effet que la partie gouvernementale que je représente à cette commission, non seulement ne bloquera pas toute démarche légale, légitime pour que la vérité éclate mais au contraire va tout faire pour favoriser la connaissance publique et l'admission devant la commission de tout fait, témoignage, présence, de tous témoins qui sont pertinents au mandat sur lequel, que nous devons, qui est le nôtre et sur lequel nous devons nous pencher.

M. BURNS: Alors, M. le Président, je me plierai à cette formalité avec l'assurance que on ne me fera pas de chichi légal relativement à ça et je je mentionne tout simplement...

Vous n'aimez pas l'expression, le député de Saint-Louis, le chichi légal?

M. BLANK: ... parle donc comme un bon avocat, le chichi légal.

M. BURNS: Oui, c'est du chichi légal, à mon avis. Parce qu'on n'est pas dans un domaine de purs et simples problèmes juridiques, on est dans un problème qui est mixte.

M. BLANK: Oui mais pas chichi.

M. BURNS: Ben oui, ben chichi, ça existe ça.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! On ne sera pas corrigés par le journal des Débats.

M. BURNS: II sera pas corrigé par le journal des Débats, puis pour... J'ai peut-être pas, j'ai sans doute pas besoin de l'épeler. Alors, M. le Président, je me plierai, semble-t-il, au voeu majoritaire de la commission et, dès demain, je déposerai une motion pour qu'ordre soit donné par l'Assemblée nationale de convoquer ces personnes-là avec les documents que je mentionne.

M. BIENVENUE: Et, lorsqu'éventuellement, si le cas se présente, nous devrons, de notre côté, en convoquer, nous suivrons la même procédure...

M. BURNS: Et...

M. BIENVENUE: ... et tout le monde sera d'accord.

M. BURNS: Et, d'avance, on vous donnera notre...

M. BIENVENUE: Merci.

M. BURNS: ... consentement...

M. BIENVENUE: Merci.

M. BURNS: ... pour la même raison. Alors, je pense que cette procédure-là, d'ici à la fin des séances de la commission, est établie. Alors, je suis bien d'accord qu'on l'utilise de façon uniforme, pas de problème.

LE PRESIDENT: Est-ce que vous aviez certaines remarques?

M. BURNS: Alors, moi, M. le Président, en ce qui me concerne, j'ai terminé les remarques que j'avais à faire à la commission. Je... je vous ai annoncé — et c'était surtout, je vous le dis, je répète, c'était surtout dans l'intérêt des autres membres de la commission que je mentionnais la liste de mes témoins et des documents que je voulais qu'ils apportent avec eux. Et il y a peut-être un autre point, M. le Président, que j'allais oublier, c'est que la motion étant... la motion étant en principe, je ne peux pas présumer des décisions de l'Assemblée nationale, mais disons qu'en principe la motion que je déposerai soit adoptée demain, y aura un problème de convocation au point de vue de la date, de ces gens-là. Et ça, peut-être, ça, ça pourrait être une chose à examiner tout de suite.

M. BIENVENUE: Encore, tout de suite ou à la fin de la séance.

M. BURNS: Puisqu'on est sur le problème des témoins, du moins des premiers témoins, j'imagine ce sera pas les seuls qui seront convoqués, alors est-ce qu'y a des... des suggestions de la part du représentant du gouvernement quant à la date où cette commission-ci pourrait siéger et... tout en respectant un délai normal pour les personnes concernées de préparer la documentation qu'on leur demande?

J'peux peut-être dans... toujours dans le même esprit là que... que ces... les travaux de la commission fonctionnent avec le plus de célérité possible, je pourrais peut-être suggérer mardi, dans le courant de l'après-midi, ou le matin, ou le soir. En tout cas, dès mardi prochain, parce qu'il semble acquis jusqu'à maintenant, si mes informations sont exactes, que nous ne siégerons pas lundi, malgré que la motion de fin de session nous y autoriserait, pour des raisons évidentes.

M. BIENVENUE: Le député de Maisonneuve est occupé lundi pour respecter son...

M. BURNS: Est-ce que vous avez pris des leçons de votre chef?

M. BIENVENUE: Non, non, non, j'ai lu les journaux.

M. BURNS: Vous m'enquiquinez.

M. BIENVENUE: Je me demande, M. le

Président, avec l'assentiment du député de Maisonneuve, si on ne pourrait pas attendre — et je m'engage à ce qu'évidemment on... on discute de cette chose-là, d'étapes, avant la dernière séance d'aujourd'hui; y'est pas question de vouloir sauter ça — que je fasse valoir certaines remarques préliminaires de droit au cas où elles pourraient avoir une influence quelconque sur la question de la date. Et je m'engage, c'est évident, à ce que nous discutions, d'ici la fin de la présente séance, celle d'aujourd'hui, de la date parce qu'il faut donner, comme vous dites, un avis suffisant à ces témoins-là, puis il faut que vous puissiez l'indiquer dans la motion, demain matin. Correct ça?

M. BURNS: Moi je pense que oui également. D'accord. Alors, j'ai pas d'autre remarque à ce stade-ci, M. le Président.

Remarques juridiques de M. Jean Bienvenue

M. BIENVENUE: Alors, M. le Président, j'indiquais, il y a un moment, qu'il n'y avait aucune objection à ce que le député de Maisonneuve indique tout de suite — d'ailleurs, on a convenu qu'on referait sous forme de motion devant la Chambre — les noms de ses témoins, mais toujours sous réserve de certaines...

M. BURNS: Pas de mes témoins, je m'excuse...

M. BIENVENUE: Les témoins de la commission.

M. BURNS: ... les témoins de la commission.

M. BIENVENUE: Les témoins de la commission. C'est une ancienne déformation professionnelle qui me revient sur les pores de la peau. Sous réserve, je disais, de ce que... de certaines observations que je voulais faire sur le plan strictement juridique. La première de celles-là est la suivante, M. le Président. Vous vous rappellerez que, dans sa question de privilège, antérieure à sa motion devant la Chambre, le député de Maisonneuve avait annoncé cette motion, en avait donné les grandes lignes, pas la preuve prima facie, mais les grandes lignes, l'aspect juridique, le contexte juridique, et avait fait allusion aux articles 75 et 79 de la Loi de la Législature.

Par la suite et je regarderai tout à l'heure dans le texte devant vous, M. le Président, les propos mêmes qui ont été employés par l'un ou l'autre des personnages qui ont participé à ce ou ces débats, lors de la question de privilège ou lors du dépôt de la motion.

Par la suite, M. le Président, lorsque le député de Maisonneuve a plaidé sa motion quant à l'aspect prima facie pour faire décider de sa recevabilité, il a été également question des articles 75 et 79. D'ailleurs le libellé original de la motion, lequel correspondait à la substance de la question de privilège invoquée par le député de Maisonneuve, parlait suivant le cas, suivant l'époque d'indignité ou d'inégibilité ou d'inhabilité basées sur les articles 75 ou 79 de l'acte de la Loi de la Législature et il y a eu comme vous le savez, une suspension de la séance, M. le Président. Vous êtes revenu en Chambre, après, en employant l'expression compromis, en disant que vous en étiez venu à un compromis avec l'auteur de la motion, le député de Maisonneuve et en conséquence de ce compromis, la motion était modifiée en par vous parlant des articles 75 et 79, alors que la seconde partie de la motion qui celle qui a résisté à vos amendements proprio motu, demeuraient, comportaient les mots toujours 75 ou 79.

A ce moment-là, M. le Président, le leader du gouvernement, le leader parlementaire du gouvernement et député de Bonaventure, a soulevé la question de la différence entre la première partie de la motion et la deuxième et je me répète, une parlant de 75 et 79, l'autre de 75 ou 79, disant qu'il était essentiel que le député de Johnson soit éclairé pour les fins de sa position de sa défense sur l'alternative qui découle de ce que je viens de dire.

Je pense qu'à ce moment-ci des procédures, M. le Président, il est essentiel que le député de Maisonneuve fasse l'un ou l'autre des choix suivants: Soit qu'il se limite à 75, soit qu'il se limite à 79, soit qu'il se limite à l'un et à l'autre, mais fasse disparaître cette option qui est 75 ou 79. On ne peut pas je pense, à ce stade-ci, laisser le député de Johnson et la commission, devant une alternative.

En matière d'infraction, M. le Président, puisque nous sommes en matière d'infraction, il serait déclaré jusqu'à nouvel ordre et c'est le texte de la motion inéligible ou inhabile en vertu des dispositions de 75 ou 79, dans les deux cas il s'agit d'une infraction. Il s'agit d'une infraction à la Loi de la Législature. On n'est pas en matière civile où un demandeur peut baser sa réclamation civile sur un, deux et même plusieurs articles du code civil. On est en matière d'infraction, où on ne peut pas être accusé d'une chose ou de l'autre et je donne des exemples qui peuvent paraître évidemment enfantins, puérils et qui illustrent ma pensée.

On ne pourrait pas accuser un individu de meurtre ou de viol. On ne pourrait pas accuser un individu de vol à main armée ou de vol à l'étalage...

M. BURNS: On pourrait l'accuser de meurtre ou d'homicide involontaire.

M. BIENVENUE: L'une étant une offense incluse...

M. BURNS: C'est ça.

M. BIENVENUE: ... 75 et 79 n'étant pas de la nature des offenses incluses. Il s'agit de deux propositions différentes. Alors le vol à l'étalage peut être une offense incluse dans le vol à main armée, parce que si la preuve révèle qu'il n'y avait pas d'arme à feu, le vol à l'étalage devient un vol non qualifié.

En d'autres termes, on ne peut pas accuser un individu d'une chose ou de l'autre, l'accusateur devant faire son lit, devant faire son choix. On ne veut pas du tout limiter le député de Maisonneuve à l'une ou à l'autre chose. Je n'ai pas d'objection à ce que la dénonciation porte sur les deux articles, mais pas l'un ou l'autre.

A ce sujet-là, lors des débats auxquels j'ai fait allusion, il s'agissait tout d'abord de la question de privilège. Le député de Maisonneuve, à la page 1321 du journal des Débats, s'est exprimé sur le sujet et a bien indiqué qu'évidemment ce n'était pas le stade prévu pour faire un tel choix, mais a indiqué que ce stade pourrait venir plus tard, et je le cite à la page 1321. "M. le Président, comme je n'ai pas, à ce stade-ci, à choisir le moyen, je vous donne les deux moyens, c'est-à-dire les articles 75 et 79". Plus loin, le député de Maisonneuve disait toujours: "Je n'arrête pas de vous en parler, M. le Président, depuis le début. Je vous dis tout simplement qu'ayant lu l'article 75 de la Loi de la Législature, ayant lu l'article 79, ayant pensé que l'un ou l'autre de ces deux articles s'applique, je pense également qu'à ce moment-là je suis en droit d'utiliser l'article 80". Par la suite, lorsqu'on en est venu au stade de la motion du député de Maisonneuve à l'Assemblée nationale, à la page 1375 du journal des Débats, au moment où le leader du gouvernement, M. Lévesque, lui demandait, comme je viens de l'indiquer, de faire une option entre l'un et l'autre ou des deux, mais non pas un ou l'autre, le député de Maisonneuve s'est empressé de dire: "C'est la commission qui va décider de ça, voyons donc ! "

Je pense que justement on est devant la commission et c'est le temps de décider de ça, pour employer l'expression du député de Maisonneuve, parce que c'est le droit absolu du député de Johnson de savoir exactement de quoi on l'accuse, et non pas de quoi ou de quelle autre chose on l'accuse.

M. BURNS: M. le Président, sur ce point-là, je vous réitère ce que j'ai dit, d'ailleurs, en Chambre. Vous l'avez acceptée, cette motion-là, ce n'est pas à nous, aujourd'hui, de la changer. Je suis même convaincu que la commission n'aurait pas autorité de changer cet ordre que la Chambre nous a donné. Cet ordre, M. le Président, vous l'avez lu au tout début, c'est celui qui apparaît à la page 251 de nos procès-verbaux à l'Assemblée nationale, et cet ordre de la Chambre mentionne bien l'alternative.

Je vous réfère également à l'article 158 de notre règlement qui nous dit qu'"une commis- sion ne peut modifier, dans son principe, une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée", de sorte que je ne vois pas comment il nous serait possible, ici aujourd'hui, de changer cette motion. Cette motion a été adoptée, son principe a été adopté et, sûrement, M. le Président, vous allez en convenir, les deux articles selon lesquels les offenses sont mentionnées font partie du principe de la motion, puisqu'on dit savoir, dans la deuxième partie, les faits suivants qui, s'ils étaient fondés, le rendraient indigne, parce qu'inéligible et inhabile. On dit: "Savoir: Avoir agi avant et depuis son élection, pour et au nom du procureur général du Québec et d'autres ministères du gouvernement du Québec devant les tribunaux, occupant ainsi une charge ou un office auxquels des honoraires sont attachés, contrairement aux dispositions de l'article 75 de la Loi de la Législature, ou exécutant ainsi un contrat se rattachant au service public et en vertu duquel des deniers publics doivent être payés, contrairement à l'article 79 de la Loi de la Législature".

Si on me demande M. le Président, de faire un choix aujourd'hui, si on me demande de cesser cette alternative, je vous dis tout de suite que je pense même que la commission n'a pas le droit de le faire. C'est quelque chose que la Chambre a décidé. Vous-même, vous avez pris une décision préliminaire sur la recevabilité de la motion.

C'est d'ailleurs ça que je vous ai dit en Chambre, lorsqu'on m'a demandé de faire les variantes nécessaires, et quand j'ai dit, M. le Président: C'est la commission qui en décidera, j'ai pas pensé que la commission pouvait changer la motion, loin de là. La commission qui décidera s'il y a contravention à l'article 75 ou s'il y a contravention à l'article 79 ou s'il y a pas de contravention du tout ou s'il y a contravention aux deux. C'est ça que la commission va décider. Parce que la commission son rapport ne pourra être autre chose que ceci: L'accusation est fondée, l'accusation est fondée en vertu de 75, l'accusation est fondée en vertu de 79 ou l'accusation n'est pas du tout fondée. Il n'en a pas 50 possibilités, il y en a quatre. C'est celles-là que la commission pourra dire, dans son rapport à l'Assemblée nationale, de sorte que moi, M. le Président, je vous réitère l'argument que je vous ai soumis, bien respectueusement l'autre jour, et je le soumets avec autant de respect, M. le Président, aujourd'hui. Je pense que, une fois la motion décidée, quant à sa recevabilité par vous, une fois la motion décidée quant à son acceptabilité par l'Assemblée nationale, la commission n'a plus aucun pouvoir de la modifier.

M. BIENVENUE: M. le Président, à sa face même, à sa face même, suite au compromis qui est intervenu, je vous avoue, M. le Président, avec candeur que j'aurais aimé mieux qu'il y ait pas de compromis, parce que j'ai été impres-

sionné par la modification que vous avez apportée vous-même à la motion au début, par votre version amendée de la motion. Mais enfin, à la suite du compromis, à sa face même, la référence à la commission, demandée à la commission, offre l'irrégularité. Avant même qu'on la soulève ici, elle est dans le texte même. Dans une première partie on parle d'enquêter sur l'indignité basée sur l'inhabilité et l'inégibili-té sous 75 et 79. Et dans l'autre partie de la motion, qui devient notre mandat pour employer l'expression du député de Maisonneuve, on dit: ou. A la face même il y a une incompatibilité que si on peut pas la résoudre ici, M. le Président, il faudra retourner devant la Chambre pour la faire résoudre. Mais je le répète dans le texte même de notre mandat, il y a cette contradiction. Et j'ajoute à ça l'argument auquel je touchais tout à l'heure, c'est que la commission ou tout autre organisme judiciaire ou quasi judiciaire ne peut pas exercer un mandat dans l'illégalité et, dans le cas actuel, ne peut pas faire une chose que le droit commun, que le droit coutumier interdit. Et de quelque droit qu'il s'agisse, lorsqu'on est en matière d'infraction, que ce soit les offenses indictables, qu'il s'agisse des offenses sommaires, on ne peut pas être accusé d'une alternative. On peut pas être accusé d'une offense, d'une infraction ou d'une autre. L'accusateur doit faire son choix, sinon, l'accusé est en "jeopardy" pour employer l'expression britannique.

M. BURNS: M. le Président, il y a également un autre point que je pourrais ajouter sur ça. Le gouvernement avait la possibilité de l'amender la motion. N'avait-il pas le droit, M. le Président, d'amender ma motion en vertu de 80? Si c'était un si gros problème, pourquoi le gouvernement l'a pas amendée, la motion?

M. BIENVENUE: Bien, j'ai dit, il y a un instant, que le leader du gouvernement a soulevé auprès de la présidence...

M. BURNS: II n'a pas fait de motion d'amendement.

M. BIENVENUE: ... et de la Chambre, a soulevé l'importance qu'il y avait, dès ce moment-là, de faire un choix.

M. BURNS: II l'a soulevé, mais il n'a pas fait de motion d'amendement.

M. BIENVENUE: Je vois que le député de Maisonneuve, je l'ai indiqué tout à l'heure, a lui-même indiqué, c'est au journal des Débats, choix qui devait se faire à la commission.

M. BURNS: C'est ça, selon la preuve qui va être faite. C'est ça... c'est pour ça que je vous ai dit que la commission a quatre possibilités dans son rapport, c'est là que le choix va se faire.

M. BIENVENUE: Le député de Johnson ne peut pas se défendre, sans savoir de quoi on l'accuse.

M. BURNS: Permettez-moi de vous dire, M. le ministre, que c'est vraiment de la foutaise que vous dites là. Le député de Johnson sait mieux que moi s'il s'agit d'un contrat de service ou s'il s'agit d'un cas visé par l'article 75. C'est ça, M. le Président, que je trouve que c'est vraiment de la foutaise que de tenter de faire ça. Je vous dis tout de suite que je me... je vais m'appuyer sur la décision de l'Assemblée nationale, décision qui n'a pas cru bon, qui n'a pas jugé bon d'amender la motion. Je vois pas comment, moi, je viendrais l'amender ici, même du consentement de la commission.

M. BIENVENUE: Je ne puis pas à partir du principe que j'ai énoncé précédemment, puis qui n'est pas contredit.

Je ne puis pas retenir le raisonnement du député de Maisonneuve à l'effet que le député de Johnson sait mieux que lui ou mieux que nous s'il a fait ou pas fait telle chose, ou enfreint ou pas enfreint telle chose. Et je le répétais, on pourrait dire, à ce moment-là, à l'accusé de meurtre ou de viol, on pourrait lui dire: Mon ami, vous savez mieux que nous si vous avez tué ou violé. Mais, ce n'est pas à lui à décider ça. C'est à lui à décider de se défendre à l'accusation qu'on lui lance et à nulle autre chose.

M. BEDARD (Chicoutimi): De la même manière que ce n'est pas à la commission à se tracer un mandat.

M. BIENVENUE: ...

M. BEDARD (Chicoutimi): Elle a reçu un mandat de respecter l'ordre qui lui a été donné par l'Assemblée nationale et ne rétrécir en aucune façon ce mandat-là et de le limiter...

M. BIENVENUE: Si...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... en aucune façon.

M. BIENVENUE: ... le mandat est irrégulier, je regrette, mais, quel que soit le mandat, on ne peut pas agir dans l'illégalité. Si la solution, et là aussi on va coopérer, c'est de retourner devant la Chambre, je n'ai aucune objection. Mais il y a un inconvénient... il y a un inconvénient qui est infiniment plus grave que celui de retourner devant la Chambre avec les déplacements que ça occasionne, les frais ou tout ce que l'on voudra, c'est le préjudice grave que subirait le député de Johnson, tellement grave que je dis que c'est l'illégalité pure.

M. BURNS: Bien, c'est que, depuis le début, vous semblez vouloir faire de cette motion ou utiliser cette motion pour aller dans une analogie qui, à mon avis, ne tient, pas, l'analogie

étant, et c'est gros comme exemple et c'est bien le "fun" et cela frappe quand on dit: Bien, il faut accuser quelqu'un de viol ou de meurtre mais pas des deux et pas de l'un ou de l'autre. Bon. Sauf qu'on n'est pas du tout dans le même domaine. C'est ça qui est bien différent. C'est que les deux accusations, 75 et 79, emportent la disqualification du député.

M. BIENVENUE: D'accord.

M. BURNS: Et ça, c'est ça qui rend unique l'accusation et c'est d'avoir agi pour et au nom, soit en vertu de 75 ou soit en vertu de 79, et c'est ça que je dis que la commission décidera éventuellement, si c'est en vertu de l'un ou de l'autre, s'il y a preuve d'avoir agi comme tel. Cela est évident que c'est préliminaire. Il faudra quand même qu'on détermine qu'il y a eu des actes qui...

M. BIENVENUE: On peut...

M. BURNS: ... cadrent en vertu de 75 ou de 79.

M. BIENVENUE: On peut donner...

M. BURNS: La commission peut fort bien dire: II n'y a pas eu de contravention à 75 mais il y en a eu une à 79, auquel cas le sens de la motion et le principe de la motion, qui vise à faire déclarer — c'est ça le principe de la motion, il ne faut jamais l'oublier — faire déclarer le député de Johnson indigne de siéger parce qu'inéligible et inhabile, auquel cas le principe de la motion est aucunement changé. C'est la formulation, c'est le détail et le député de Crémazie sait fort bien, fort bien qu'il arrive régulièrement, régulièrement devant — je n'aime pas faire la... en tout cas, faire l'analogie avec les tribunaux parce que, encore une fois, je reviens à une chose, c'est que c'est une enquête de l'Assemblée nationale. Mais s'il veut faire des analogies, qu'il les fasse au complet. Il sait fort bien qu'il arrive très souvent qu'il y a des gens, qui sont accusés de deux choses, de deux chefs, de trois chefs, puis, finalement, il y a eu un jugement sur un des chefs...

M. BIENVENUE: Mais pas alternatif. M. BURNS: ... et les autres... M. BIENVENUE: Pas alternatif.

M. BURNS: Pas alternatif, sauf qu'on n'est pas dans le domaine des tribunaux réguliers.

M. BIENVENUE: Je...

M. BURNS: Je vous dis que l'Assemblée nationale, d'abord par le président, a jugé régulière la motion, deuxièmement, elle l'a jugée tellement régulière elle-même qu'elle l'a adoptée sans amendement. Je ne vois vraiment pas comment, moi, je viendrais aujourd'hui faire modifier cette motion en commission, elle qui n'a pas la possibilité de modifier le principe.

M. BIENVENUE: Le député de Maisonneuve parle du mandat de la commission, qui est d'enquêter et qui pourra décider, après avoir entendu les témoins, si telle ou telle infraction est prouvée. Je répète, et je n'ai aucune objection à ce que les deux infractions soient inscrites dans notre mandat, qu'on enquête sur les deux, ou que sur une, si le député de Maisonneuve décidait d'en laisser tomber une, ou la commission, mais pas l'une ou l'autre. On peut oublier l'exemple, qui peut paraître coloré, du meutre ou du viol. On peut penser à toute infraction, beaucoup plus sommaire. On peut penser au code de la route où on ne peut pas accuser un individu d'avoir fait ou du 60 milles à l'heure dans telle zone, ou du 30 milles à l'heure dans telle zone. On peut lui reprocher les deux, une des deux, mais pas une ou l'autre.

Et si on attaque l'éligibilité d'un candidat parce qu'on dit qu'il aurait, qu'il ne serait... ou qu'il ne serait pas citoyen canadien ou qu'il ne serait pas majeur, faut faire un choix. On peut lui dire qu'il n'est ni citoyen canadien, ni majeur mais on ne peut pas l'amener devant une commission d'enquête pour décider s'il manque à l'une ou l'autre des deux conditions.

J'ai pas d'objection à ce que les deux y soient et je peux assurer le député de Maisonneuve qu'y a pas d'embûche ou de guet-apens là-dessous.

M. BURNS: Mais même si vous me convainquiez, M. le ministre, je ne peux pas, je prétends et je continue à prétendre que je ne peux pas changer ma motion qui a été adoptée par l'Assemblée nationale.

M. BEDARD (Chicoutimi): Y peut pas consentir à ça.

M. BURNS: Comment voulez-vous que je consente à quelque chose? C'est un pouvoir délégué.

M. BIENVENUE: Alors, on...

M. BURNS: C'est un pouvoir délégué. Le mandat a été fixé par le pouvoir délégué.

M. BIENVENUE: Alors, on peut retourner devant l'Assemblée nationale et faire modifier le mandat.

M. BURNS: Ça veux-tu dire que vous vous en êtes aperçu juste après, quoi? Pourquoi vous avez pas fait de motion d'amendement?

M. BEDARD (Chicoutimi): Surtout que vous avez abordé le sujet lorsque cela a été présenté.

M. BURNS: Vous l'avez abordé, le sujet.

M. BEDARD (Chicoutimi): Le leader parlementaire l'a abordé. A ce moment-là, votre argumentation vient sûrement en retard. On aurait pu, à ce moment-là, faire...

M. BIENVENUE: Mon mandat...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... un amendement à la...

M. BIENVENUE: Mon mandat est devant la commission, je l'exerce devant la commission et, quel que soit le moment où ça a été soulevé ou pas soulevé, on peut pas nager dans l'illégalité et je le soumets respectueusement. On peut pas nager dans l'illégalité jusqu'à la fin du mandat.

Et le député de Chicoutimi sait mieux que quiconque qu'en matière d'infractions il serait le premier à le soulever devant les tribunaux de droit commun. Et le même principe vaut ici. Il y a infraction ou il y en a pas.

M. BURNS: Je prétends que non et je pense que le mandat qui a été donné par l'Assemblée nationale est parfaitement légal, parce que c'est une nature... c'est une offense de la même nature. Même s'il y a alternative entre les deux articles, l'offense est bien clairement spécifiée. C'est pas... Et c'est là que les exemples que le ministre peut essayer de trouver pendant tout le reste de l'après-midi, s'il le veut, que les exemples qu'il nous donne avec le droit commun pèchent sérieusement. C'est, lorsqu'il nous dit, c'est du viol ou du meurtre, bien nous autres, on vous dit pas: C'est du viol ou du meurtre. On vous dit: C'est quelque chose qui comporte la disqualification parce qu'ayant agi contre l'un de deux articles, peut-être les deux articles...

M. BIENVENUE: Non, le...

M. BURNS: ... de la Loi de la Législature.

M. BIENVENUE: Le député de Maisonneuve...

M. BURNS: Et la seule raison, la seule véritable raison — c'est pour ça que je parlais du fait que le député de Johnson est probablement mieux placé que moi pour me dire en vertu de quel article on devrait procéder — c'est que la seule raison que le ministre pourrait soulever, c'est que le député de Johnson est pris par surprise, il risque d'être pris par surprise, s'il veut continuer ses analogies. Or, cela se... Je pense que cela se vérifie pas du tout. Ou bien c'est vrai, ou bien c'est pas vrai, les actes reprochés. Et une fois qu'on dit c'est vrai... Si c'est pas vrai, c'est absolument immatériel en vertu de quel article, si c'est pas vrai.

M. BIENVENUE: Le député...

M. BURNS: Une fois qu'on a décidé que c'était vrai, la commission aura la possibilité de décider que c'est en vertu de 75 ou de 79 ou des deux.

M. BEDARD (Chicoutimi): Dans son rapport.

M. BIENVENUE: On reproche au député — ça va être très court — on reproche au député de Johnson d'être inéligible ou inhabile, soit comme fonctionnaire provincial, soit comme entrepreneur. C'est ça, les deux accusations et l'alternative. C'est pas au député de Johnson de dire s'il a été...

M. BURNS: Ça va plus loin que le fonctionnaire provincial.

M. BIENVENUE: Ah! oui, oui.

M. BURNS: Lisez comme il faut l'article 75.

M. BIENVENUE: Oui, oui. Enfin, enfin, peu importent les autres...

M. BURNS: Oui, bien, je veux dire, c'est important, les autres aussi.

M. BIENVENUE: Peu importent les autres gouvernements qui peuvent être impliqués, c'est quand même l'inhabilité des fonctionnaires qui est en cause, tandis que, dans l'autre cas, c'est l'inhabilité des entrepreneurs ou ceux qui, par analogie...

M. BURNS: Je vous dis qu'en vertu d'une certaine preuve il est fort possible que cela puisse s'appliquer en vertu des deux articles. Il est possible que quelqu'un exerce une charge...

M. BIENVENUE: Alors... M. BURNS: ... en vertu...

M. BIENVENUE: Alors, le député de Maisonneuve a-t-il objection à mettre les deux?

M. BURNS: J'ai objection parce que je respecte...

M. BIENVENUE: Y aura pas de grosse défaite pour lui.

M. BURNS: ... l'ordre de la Chambre. C'est ça que je vous dis.

M. BIENVENUE: Y aura pas une grosse défaite si la preuve se faisait pas sur un des deux.

M. BURNS: La Chambre a donné un mandat, pis moi, je considère qu'on doit fonctionner en vertu de ce mandat-là, pis pas d'autre.

M. BIENVENUE: M. le Président, je regret-

te, mais je peux pas me soumettre à une illégalité quel que soit le mandat. La commission ne peut pas faire illégalement ce que le mandat lui prescrit si, y est illégal.

M. BURNS: Moi, je vous dis que...

M. BIENVENUE: Le vice est à l'origine.

M. BURNS: ... c'est impossible que je le change et c'est impossible que même la commission, à son unanimité, le change.

LE PRESIDENT: M. Bossé.

M. BOSSE: Je suis bien conscient, M. le Président, d'intervenir dans un débat légal très intéressant, mais si je reprends les paroles du député de Maisonneuve, je comprends qu'il laisse le choix au député de Johnson du type d'accusation qu'il préfère, selon ses affirmations.

Ou ben donc, puisque c'est enregistré comme ça aux Débats, ou ben donc, ça fait deux fois au moins que j'entends: Le député de Johnson lui-même sait mieux que quiconque. J'entends par là, je crois comprendre qu'il lui laisse le choix du type d'accusation qu'il préférerait.

M. BIENVENUE: Le député de Johnson sait une chose, c'est qu'y est pas coupable ni de l'une ni de l'autre.

M. BOSSE: Le député de Maisonneuve lui laisse le choix, donc il peut dire à ce moment-là: aucune accusation.

LE PRESIDENT: Monsieur... A l'ordre, messieurs! M. Léger.

M. LEGER: M. le Président, moi je me pose juste une question, je me pose juste une question, n'étant pas avocat. N'étant pas avocat, je me pose juste une question sur l'argumentation du député de Crémazie quand y dit que le libellé de la motion est illégal. Est-ce que l'Assemblée nationale et les députés qui la forment qui sont législateurs peuvent prendre une décision qui devient illégale? Du fait qu'elle s'est prononcée est-ce que ça n'est... ça amène, est-ce que ça devient illégal? Moi, me semble que les législateurs, y peuvent faire des mauvaises lois, mais ça devient une loi pis une décision de l'Assemblée nationale, est-ce que ça peut être illégal par la suite dans une commission parlementaire? C'est une personne qui est pas avocat, qui parle.

LE PRESIDENT: M. Pagé.

M. PAGE: M. le Président, je crois que la coutume du droit s'applique à notre commission et qu'en tout temps, lorsqu'une accusation est portée en vertu de plusieurs chefs, que la défense a le droit de demander que les accusations soient scindées.

LE PRESIDENT: Soient...

M. PAGE: Soient scindées et divisées. Je pense qu'à ce moment-là, la même chose pourrait s'appliquer à notre commission et que la commission pourrait être obligée de faire suite à la demande de la part de celui qui est poursuivi.

LE PRESIDENT: M. Desjardins.

M. DESJARDINS: M. le Président, je diffère un peu d'opinion avec le député de Portneuf. La défense peut peut-être demander que ce soit scindé mais, comme avocat, je conseillerais pas à mon client devant les tribunaux de scinder deux accusations qui, à leur face même, à sa face même est irrégulière, si elle comporte deux infractions alternatives. J'appliquerais, à ce moment-là, l'article 12, paragraphe 3 de la Loi des poursuites sommaires qui mentionne bien qu'il faut mentionner une infraction par dénonciation et non pas deux. Et toute accusation qui comporte deux accusations dans une seule plainte est irrégulière à sa face même, et j'en demanderais le rejet, et le rejet serait accordé, à ce moment-là, et je ne demanderais certainement pas qu'elle soit scindée. Mais dans le présent cas, je suis, je crois que la référence de l'Assemblée nationale est irrégulière puisqu'il y a alternative, et nous n'avons pas le choix, je pense que nous devons retourner devant l'Assemblée nationale et que la motion soit amendée, et nous reviendrons ensuite pour discuter d'une motion amendée.

M. BURNS: M. le Président, c'est la première fois que j'entends un député dire qu'une référence de l'Assemblée nationale est irrégulière. C'est absolument impossible.

M. DESJARDINS: C'est pas la référence qui est irrégulière, c'est votre texte.

M. BURNS: L'Assemblée nationale a pris une décision. C'est aussi simple que ça. Et cette décision-là, qu'elle soit, comme le disait mon collègue de Lafontaine, qu'elle soit dans une forme qui plaît pas à certaines gens ou qui plaît à certaines autres, ça c'est une toute autre histoire.

L'Assemblée nationale, dans le cadre de sa juridiction, ne peut pas poser des gestes irréguliers. Qu'on me dise que c'est pas de la juridiction de l'Assemblée nationale, une telle motion, là je vais accepter que c'est irrégulier. Mais c'est parfaitement dans le cadre de la juridiction de la commiss... de l'Assemblée nationale que de référer ce problème, de faire enquête, de la façon que la motion a été faite. Et je réinsiste sur le fait, je m'excuse de revenir là-dessus, je réinsiste sur le fait qu'y avait un choix qui appartenait au gouvernement, c'était d'amender cette motion-là, s'il le voulait. Alors, franchement là, M. le Président,...

M. BEDARD (Chicoutimi): En temps opportun.

M. BURNS: En temps opportun, c'est ça, exactement, comme dit le député de Chicoutimi, en temps opportun il pouvait y avoir amendement de cette motion-là. Y en n'a pas eu. Je vois pas, je vois pas moi, actuellement, que ce qu'on vient faire ici en commission, nous qui sommes un pouvoir délégué de l'Assemblée nationale, discuter de la régularité d'une motion adoptée par l'Assemblée nationale.

Si vous voulez faire la lumière dans un cas, allons-y, pis moi je suis bien d'accord. Si vous voulez faire de la procédure, par contre, bien ça, les gens jugeront. On verra.

M. BEDARD (Chicoutimi): Légalement, M. le Président, même si le député de Maisonneuve voulait amender, il ne le pourrait pas parce que, à l'heure actuelle, on est devant un ordre de l'Assemblée nationale et on n'a pas le droit — c'est une discussion stérile — on n'a pas le droit d'amender quoi que ce soit ou d'agir de telle façon à rétrécir ou à limiter le mandat qui nous a été donné par l'Assemblée nationale. Je suis sensible à l'argumentation qui nous a été apportée par le ministre de l'Immigration, et... vient trop tard, à mon sens, parce que il y avait un temps opportun où le gouvernement pouvait faire ou l'Assemblée pouvait faire des amendements à la motion qui était présentée par le député de Maisonneuve. Le gouvernement ou l'Assemblée nationale n'a pas cru bon de faire des amendements et a voté la motion telle que nous l'avons devant nous et nous sommes liés par ce mandat et par cette motion-là. Je serais sensible aux arguments de... du ministre de l'Educa... le ministre de l'Immigration tout à l'heure qui... qui nous dit que, en toute justice, quelqu'un doit savoir d'une façon très précise de quoi il est accusé dans le sens suivant, en autant que le mandat, si j'en arrivais à la conclusion que le mandat tel qu'il est donné par l'Assemblée nationale ne donne pas toute liberté et toute possibilité au député dont il est fait mention dans la motion de se défendre, de se préparer équitablement, peut-être à ce moment-là. Mais, en aucune façon, l'accusation ou la motion telle que rédigée définit très bien le cadre d'une accusation si on emploie l'expression et, à ce moment-là, permet toute latitude et en toute justice permet toutes les possibilités au député mentionné de pouvoir apporter une défense équitable, que ce soit sous l'une ou l'autre des... des articles, sous l'un ou l'autre des articles qui sont mentionnés dans la motion.

M. BIENVENUE: Le... le député de Johnson ne doit pas ici être traité sur un plan inférieur à celui que reconnaît le droit coutumier pour la plus bénigne accusation, pour n'importe quel citoyen. Le député de Johnson, député de Johnson ou pas, ne veut pas être l'objet ici d'un traitement qui le place sur une position d'injustice par rapport au droit coutumier. Ça, c'est une règle fondamentale, sinon c'est l'illégalité totale. Si la Chambre s'est trompée, le seul préjudice qu'y aura, c'est de retourner devant la Chambre, de lui dire et qu'elle s'amende, mais c'est en... en tout cas, incomparable au préjudice incommensurable que subirait le député de Johnson et je refuserais, moi, d'être enquêté, d'être l'objet d'une enquête et je le refuse au nom du député de Johnson, et retournons devant la Chambre si c'est là le seul inconvénient, la justice est trop importante ici même...

M. BURNS: M. le Président, puis-je...

M. BIENVENUE: ... à l'Assemblée nationale...

M. BURNS: ... puis-je vous citer...

M. BIENVENUE: ... pour qu'on tergiverse.

M. BURNS: ... quelque chose? Depuis tout à l'heure, avec une espèce de magnanimité extraordinaire, j'entends le ministre de l'Immigration parler des droits brimés du député de Johnson. Or, j'ai devant moi, M. le Président, les débats de vendredi le 28 juin '74 et j'ai l'intervention du député de Johnson. Et il serait peut-être bon que le ministre relise ce que le député...

M. BIENVENUE: Quelle page?

M. BURNS: ... à la page 1384, ce que le député de Johnson nous a dit, et après que ma motion a été soumise, faut pas l'oublier, là. Je présume que le député de Johnson est un avocat capable de lire un texte. Il sait fort bien quel texte il avait à examiner et sur lequel il portait des commentaires et sur lequel, par la suite, il a voté. Il a pas voté, en somme, parce qu'y était pas présent, j'ai... j'ai remarqué d'ailleurs l'absence, la délicatesse du député de Johnson, y'a décidé de pas voter là-dessus.

M. BIENVENUE: II était obligé. M. BURNS: Bien oui, mais...

M. BIENVENUE: C'est le règlement, ce n'est pas une délicatesse, c'est le règlement.

M. BURNS: Non, non, mais, en tout cas, je... je dois dire que par son intervention, par son intervention, il exprime, il exprime comment il aurait voté s'il avait voté, n'est-ce pas? Et je vous cite, à la page 1384, ceci: "Je souhaite, maintenant plus que jamais — je l'avais formulée, ma motion — maintenant plus que jamais, après avoir entendu le député de Maisonneuve, que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse et qu'elle fasse le plus tôt possible, enquête sur cette affaire et pour que celle-ci soit vidée dans les plus brefs délais."

Un peu plus loin, on lit, toujours dans l'intervention du député de Johnson: "La commission aura à décider du fond de cette affaire

et je lui fais confiance totalement". Ça me semble pas un gars brimé, ça. Ça me semble pas un gars pogné par surprise. Ça me semble pas un gars nerveux parce qu'il ne sait pas de quel côté se "pitcher". Bon? "Et je veux dire tout simplement, presque amicalement, au député de Maisonneuve que ce n'est qu'un début". Ça pas l'air d'un gars qui sait pas sur quel mur se lancer, ça, M. le Président. Un peu plus loin, on voit, toujours dans l'intervention du député de Johnson, toujours après avoir entendu ma motion: "Je veux donc soumettre à l'Assemblée nationale mon point de vue; je leur fais confiance, et je demande que la commission de l'Assemblée nationale siège au plus tôt pour vider cette affaire".

Bon, c'est ça qu'il nous dit et, depuis tout à l'heure, j'entends le ministre de l'Immigration nous dire que c'est illégal. Bien, M. le Président, je n'ai pas soulevé la question de règlement, mais je vous dis que, depuis le début, qu'on est dans l'illégalité. On n'a pas le droit de discuter un ordre de la Chambre. Une commission a reçu un ordre. Cette commission s'appelle la commission de l'Assemblée nationale. Cet ordre-là, il est très clair; il apparaît à la page 251 de nos procès-verbaux. Il a été voté, M. le Président, à l'unanimité, moins deux abstentions. Puis là, on vient nous dire que c'est illégal! Bien, M. le Président, c'est toute la discussion. J'ai fait exprès pour pas la soulever, je ne veux pas soulever une question de règlement sur une affaire de même, parce que je partage l'avis du député de Johnson qu'il faut que, le plus tôt possible, dans les plus brefs délais, on fasse enquête sur cette affaire-là...

M. BIENVENUE: Dans la légalité.

M. BURNS: ... de sorte que les chichis légaux auxquels je faisais référence tout à l'heure, je n'y crois pas. Mais si on veut en faire, M. le Président, je dois vous dire que je soulève une question de règlement. C'est absolument illégal en commission de discuter l'ordre de pouvoir délégué qui est donné à une commission par l'Assemblée nationale. On est dans la totale illégalité, moi-même comme les autres, mais surtout à l'incitation du ministre de l'Immigration depuis le début de cette discussion-là.

Je vous demande, M. le Président, d'appliquer le règlement tout simplement.

M. BIENVENUE: On n'est pas dans l'illégalité au cours de la discussion; on est dans l'illégalité dans le cas du mandat...

M. BURNS: Comment voulez-vous qu'on discute un ordre de la commission de l'Assemblée nationale à une commission?

M. BEDARD (Chicoutimi): On est dans l'illégalité même au niveau de la commission.

M. BIENVENUE: Je vous ai laissé finir, me permettez-vous de finir? Ça va être court, court, soyons calmes. Le député de Johnson a indiqué qu'il avait hâte de faire valoir ses droits, qu'il faisait confiance à l'illégalité, qu'il avait hâte de vider cette affaire, mais toujours — ça s'infère, je ne le dis même pas — dans la légalité, dans la légalité. Tout accusé a hâte de faire triompher son innocence devant les tribunaux, mais toujours dans la légalité. On n'a même pas à le dire.

M. BEDARD (Chicoutimi): Mais, à l'heure actuelle, on est dans l'illégalité en discutant un ordre de la Chambre, parce qu'en fait toute la tradition parlementaire britannique, c'est fondé sur une base, la souveraineté du Parlement, de l'Assemblée nationale...

M. BIENVENUE: Le Parlement peut se tromper.

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, non...

M. BIENVENUE: La Chambre peut se tromper et elle peut...

M. BEDARD (Chicoutimi): Le principe, la reine ne peut pas se tromper. La reine ne peut pas se tromper.

LE PRESIDENT: La reine et le Parlement, c'est deux choses. C'est même des adversaires en droit parlementaire.

M. BEDARD (Chicoutimi): Pas toujours. On n'a pas à discuter de cette affaire-là.

LE PRESIDENT: Oui, M. Tardif.

M. TARDIF: M. le Président, je ne suis pas intervenu depuis le début, mais j'ai porté attention à tout ce qui a été dit. Un principe qui est fondamental et qui s'applique aussi bien au Parlement, en commission parlementaire ou dans une cour de justice, c'est qu'une personne qui est accusée ou dont sa conduite est mise en doute a droit à une défense pleine et entière. Au cours des discussions, on s'est rendu compte que l'ordre de la Chambre, adopté vendredi dernier, était peut-être irrégulier. Ce que le ministre de l'Immigration, député de Crémazie, a suggéré, ce n'est pas de modifier l'ordre de la Chambre. Il a suggéré plutôt de retourner devant la Chambre, afin qu'on puisse prendre en considération la régularité de l'ordre de vendredi dernier. Et lorsque le député de Maisonneuve dit qu'on va à l'encontre de l'article 158 qui dit qu'une commission ne peut modifier dans son principe une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée, tout le monde est d'accord avec ça. Mais il ne s'agit pas ici de modifier l'ordre adopté vendredi dernier; il s'agit de retourner en Chambre pour prendre en considération la régularité de l'ordre qui a été adopté vendredi dernier.

On a dit que l'Assemblée nationale ne peut se tromper. Mais par contre, lorsque des lois sont déclarées ultra vires, ça signifie tout simplement que, lorsque le Parlement a adopté cette loi-là, il a excédé sa juridiction et qu'en conséquence, de façon absolue, il a commis une erreur. C'est possible qu'on commette une erreur lorsqu'on adopte une loi et, à ce moment-là, cette loi-là est ultra vires. C'est possible également, lorsqu'on adopte un ordre de la Chambre, qu'on commette une erreur. Au cours des discussions qui ont eu lieu au cours de la dernière demi-heure, on s'est rendu compte que l'ordre adopté vendredi dernier était peut-être irrégulier et qu'il serait peut-être utile, pour permettre au député de Boutin d'avoir une défense pleine et entière, que l'on retourne devant la Chambre afin d'étudier la régularité de cet ordre.

Je pense qu'on va pas à rencontre de l'article 158 parce que le député de Crémazie et ministre de l'Immigration n'a jamais demandé à la commission de modifier l'ordre adopté vendredi dernier mais a demandé qu'on retourne à l'Assemblée nationale pour étudier cette question de nouveau, en fonction des commentaires qui ont été soulevés au cours de la dernière demi-heure.

LE PRESIDENT: M. Léger.

M. LEGER: M. le Président, la Chambre, qui est souveraine, a délégué à la commission de l'Assemblée nationale l'obligation de procéder à une enquête sur les faits suivants, etc. Le rôle de la commission, actuellement, c'est de faire enquête, d'entendre des témoins, si la commission juge de le faire, mais n'a absolument pas le pouvoir de déclarer ultra vires ce que l'Assemblée nationale a déterminé par vote. Autrement, ça voudrait dire que les lois mauvaises qui sont mal appliquées ou qui ne conviennent pas aux situations du Québec adoptées par le Parlement, parce qu'elles ne conviennent pas sont ultra vires.

Je pense que c'est absolument inacceptable de discuter actuellement sur la légalité ou l'illégalité du mandat qu'on a eu. Notre rôle est de tout simplement faire enquête actuellement. C'est à l'Assemblée nationale, si elle veut changer son mandat, de le faire, ce n'est pas à la commission parlementaire de demander à l'Assemblée nationale de reconsidérer son geste parce qu'elle, comme commission, peut juger que l'Assemblée nationale a fait un geste qui est illégal. Quand l'Assemblée nationale pose un geste, il est peut-être malheureux, il est peut-être malhabile mais il est légal.

M. BURNS: M. le Président, je vous demande d'appliquer le règlement et de passer aux travaux de la commission. Qu'est-ce que vous voulez? Je vous dis à nouveau — c'est la dernière fois que je vais en parler, j'espère — que nous tenons actuellement, nous, une discus- sion qui est absolument illégale puisque nous discutons d'un mandat que la Chambre nous a donné. Nous n'avons aucun pouvoir de le modifier. Comment pourrions-nous discuter de ce mandat-là, M. le Président?

LE PRESIDENT: Messieurs, vous observez, je l'espère, la prudence que je pratique durant ce débat parce que je considère l'importance de cette question. Je comprends également le rôle que je peux jouer ici comme président de cette commission, ce qui est un peu, peut-être, exceptionnel dans notre coutume et dans notre tradition parlementaire. Lorsqu'on fait référence au président de l'Assemblée, qui est, en l'occurrence, la même personne qui préside la commission, c'est une chose assez exceptionnelle qui... On a brisé avec la tradition et même le droit parlementaire en général.

Je pense qu'on devrait faire la distinction que, même si c'est la même personne, c'est deux personnes différentes.

M. BURNS: Je suis d'accord avec vous, M. le Président.

LE PRESIDENT: Bon. C'est un dédoublement de personnalité.

M. BURNS: Vous souffrez de schizophrénie parlementaire.

LE PRESIDENT: Nous nous sommes aventurés également, vous savez, dans la rédaction du nouveau règlement dans du droit nouveau et peut-être que je me verrai dans la position, au fur et à mesure que cette commission se déroulera, peut-être de prendre la décision de ne plus présider cette commission. J'inviterai peut-être une autre personne, un des présidents de commission, à présider. C'est une expérience nouvelle. Bon.

Quant à l'interprétation du règlement, je me limiterai à ceci parce que comme membre de cette commission je n'ai pas d'autorité supérieure à chacun des autres membres de la commission. Je fais partie du collège électoral ou du collège de la commission, je suis ici uniquement pour interpréter le règlement et faire respecter l'ordre de cette commission. Me limitant à ceci, l'argumentation de certains membres de cette Chambre, je les remercie, en passant, de la révision qu'ils me font faire de mes petites notions, déjà loin en arrière, de droit pénal ou de l'analogie qu'on a fait avec le droit pénal ou le droit criminel.

J'ai été sans doute impressionné par l'argumentation du ministre de l'Immigration sur la question d'accusation alternative. Ce qui m'a impressionné le plus, c'est que ce principe-là de défense, de moyen absolu qu'une personne qui est accusée de quelque acte que ce soit d'avoir une pleine défense et de savoir exactement à quoi répondre, je crois, a été accepté, même en principe, par le député de Maisonneuve, avec

l'expérience qu'il peut avoir devant certains tribunaux. Il a peut-être même reconnu peut-être ce droit ou cette lacune qu'il peut y avoir dans une accusation alternative.

L'argumentation contre cet avancé du ministre de l'Immigration peut-être de cette accusation alternative c'est qu'on revient justement à la procédure de la Chambre du droit parlementaire et on dit que nous avons reçu un ordre de la Chambre. Se basant sur l'article 158, on dit qu'une commission ne peut modifier dans son principe une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée. Cet argument d'ailleurs a été appuyé par le député de Chicoutimi et le député de Lafontaine.

Mais mon opinion personnelle c'est que le principe qui existe — et d'ailleurs ça a été soulevé par le député d'Anjou— le principe qu'il y a dans la motion de déférence est le suivant, à mon point de vue: Que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse le jeudi, 4 juillet 1974, dans la salle 81-A, en vue de procéder à une enquête sur les faits suivants qui, s'ils étaient fondés, rendraient le député de Johnson, Me Jean-Claude Boutin, indigne de siéger à l'Assemblée nationale. A mon point de vue, le principe de la motion c'est que la commission ici ait un mandat et siège sur certains faits qui rendraient possiblement le député de Johnson indigne.

Quant à l'autre partie, au deuxième paragraphe de la motion, à mon point de vue c'est plutôt un exposé de motifs. Le principe même n'est pas dans le deuxième paragraphe, à moins que je me trompe. Je crois que le principe c'est qu'il y a une délégation de pouvoirs et que la commission fasse enquête. Bon.

Je ne voudrais pas m'aventurer là sur ce qu'une... toutes les motions qui peuvent être passées, par tous les actes posés par une assemblée, par un Parlement c'est toujours légal, je ne m'aventurerai pas sur cette question.

Conséquemment, si la commission ici désire exprimer un voeu, désire apporter un amendement à la motion, je ne dis pas qu'elle a le droit d'amender la motion, surtout dans le principe, je dis que le principe est le premier paragraphe, mais il faudrait moi, pour que je puisse en décider, qu'il y ait vraiment une motion écrite. Je ne peux pas me prononcer sur des paroles ou des voeux exprimés. Je ne dis pas que la commission ne pourrait pas et n'aurait pas le droit de faire rapport à l'Assemblée, un rapport, même avant la fin de ses travaux, mais il faudrait quand même que je puisse prendre une décision sur un texte bien définitif. Parce qu'actuellement, tel que ce voeu ou ce désir semble exprimé, je me sens pas les moyens de me prononcer sur une motion verbale, parce que notre règlement prévoit déjà que toutes les motions doivent être écrites.

M. BIENVENUE: M. le Président, ceci m'amène à vous faire valoir par anticipation le problème suivant. Ce n'est pas le seul domaine, c'est le cas où nous prétendons bien respectueusement que le mandat est irrégulier ou illégal, et j'ai à faire valoir d'autres arguments sur d'autres sujets qui apparaissent dans le corps de la motion qui nous a été référée. La question que je me pose, M. le Président, c'est, à toutes fins pratiques, une demande d'opinion du député de Maisonneuve ou enfin de tous les membres de cette commission ou la vôtre, M. le Président. Serait-il préférable que nous vidions ces moyens, que je les invoque pour, ensuite, si la commission en décidait de cette façon, pour ensuite tout mettre nos moyens dans cette motion qui pourrait faire l'objet d'un rapport à la commission, ou si c'est l'opinion de la commission et la vôtre, M. le Président, qu'il puisse y avoir plusieurs motions basées sur plusieurs aspects ou mandat faisant l'objet de différents rapports?

J'émets pas d'opinion, je pose la question.

M. BURNS: Bien, moi, j'ai dit: Ecoutez, si vous avez des... des griginaudes à nous faire valoir avant qu'on rentre dans le coeur du sujet, allez-y tout de suite. On est aussi bien de savoir qu'est-ce que c'est qui va empêcher les travaux de la commission...

M. BIENVENUE: C'est-à-dire les retarder...

M. BURNS: ... selon...

M. BIENVENUE: ... pas les empêcher...

M. BURNS: Non, non.

M. BIENVENUE: Les retarder.

M. BURNS: Pour moi, c'est les empêcher.

M. BIENVENUE: Non, non, non. On veut...

M. BURNS: Selon votre opinion...

M. BIENVENUE: ... vider...

M. BURNS: ... vous pensez que vous en avez d'autres. Alors, allez-y, moi, je suis prêt à les entendre, si c'est l'opinion de la commission. Evidemment, je ne suis pas le seul à décider. Mais, au nom de l'Opposition, je peux vous dire qu'on est prêts à les entendre tout de suite.

M. BIENVENUE: Je pense, M. le Président, que c'est la ligne de conduite la plus sage pour éviter une multiplication de motions ou une multiplication de rapports devant l'Assemblée nationale si... si la commission devait en décider ainsi. Je pense que mieux vaut tout inclure. Tant qu'à trouver le mandat entaché, on est mieux d'avoir toutes les taches sur la même motion, une seule.

Alors, sous réserve toujours de cette motion faisant l'objet...

M. BURNS: Au fait, est-ce que je peux demander au ministre de l'Immigration s'il agit en tant que représentant du député de Johnson ou en tant que représentant du gouvernement?

M. BIENVENUE: En tant que représentant du parti ministériel à cette commission.

M. BURNS: Le parti ministériel. Et le parti ministériel se sent attaqué par la motion qui est faite par le député de Maisonneuve, si je comprends bien.

M. BIENVENUE: Le parti ministériel fait la moindre des choses, celle de s'assurer qu'un des membres de la Chambre, à quelque parti qu'il appartienne, ne soit pas traité dans l'illégalité.

M. BURNS: ... on va regarder ça.

M. BIENVENUE: M. le Président, sujet toujours à ce premier point, le deuxième point, le deuxième objet de nos observations en droit est le suivant et je l'énonce tout de suite, sujet à l'étayer par la suite.

Nous désirons faire retrancher de ce qui est devant nous, du mandat qui est devant nous toute référence aux faits allégués qui origine-raient avant l'élection du député de Johnson et qui affecteraient son cens de l'éligibilité. Et cela, pourquoi? D'abord, en vertu de la loi des élections...

M. BURNS: M. le Président, j'invoque le règlement, et là je le fais, encore une fois, dès le départ, c'est un argument, qui a été soulevé en Chambre, qui a été tranché également. Et la motion a été votée. Je répète le même argument. Je pense que la commission n'a pas le droit de changer une motion. Si on nous arrive ici, M. le Président, on peut en discuter encore pendant un autre deux heures, on va arriver avec la même conclusion: Que la commission n'a pas le droit de faire modifier quoi que ce soit à la motion. Qu'est-ce que vous voulez? Moi, c'est mon humble opinion et c'est pour cela que je soulève une question de règlement, c'est pour éviter du temps à la commission que je la soulève. Tout à l'heure, c'était pour être gentil à l'endroit du ministre de l'Immigration, je voulais lui laisser la possibilité de dire toutes sortes de choses qu'y pensait au sujet de la forme de la motion, tout en étant d'avis que ce n'est pas notre rôle, à nous, de discuter du mandat. Si on veut le discuter, le mandat, bien, il y a des procédures et qu'on les utilise.

Mais c'est sûrement pas... c'est sûrement pas la commission qui peut en discuter, de ce mandat-là.

M. BIENVENUE: Non. Mais, tout à l'heure, M. le Président, mon collègue et ami, le député de Maisonneuve, a donné son assentiment à ce que j'invoque tout de suite tout ce qui pourrait faire l'objet d'une motion de rapport à la Chambre parce que le mandat serait, ou est illégal ou irrégulier. Alors, je continue de le faire. Evidemment, il y aura une motion qui décidera par la suite si la commission a le droit ou pas, est fondé ou pas à faire rapport à la

Chambre, lui demander de redresser, j'allais dire ses torts, mais je me contenterai de dire de redresser son mandat.

Et ici, on le voit tout de suite comme dans le cas précédent, ça n'affecte pas, je retiens vos paroles, M. le Président, ça n'affecte pas le principe même, conformément à l'article 158 de la référence. Mais ça affecte des parties subsidiaires au principe et qui viennent après le principe.

Moi, je suis bien prêt à continuer, M...

M. BURNS: C'est parce que je les connais, vos arguments.

On les a entendus en Chambre, l'autre jour, pis la Chambre en a disposé, du moins le président en a disposé pis la Chambre a voté là-dessus et y a pas eu de motion d'amendement. Qu'est-ce vous voulez que je vous dise?

M. BIENVENUE: II y a ceux-là...

M. BURNS: Je suis bien prêt à les entendre encore, mais on les a entendus pis je vous dis que même si on les écoutait à nouveau, la conclusion à laquelle, la seule à laquelle on peut en arriver, c'est qu'on peut pas changer le mandat qu'on nous a donné. Depuis quand qu'un delegatus peut arriver à dire: Mon mandat est pas correct, je le change. Depuis quand qu'on peut faire ça? C'est un principe de base en droit. Pis c'est tellement de base que ce fameux adage d'où je tire le mot "delegatus", delegatus non potest delegare, s'y peut pas déléguer lui-même, qu'est-ce que vous voulez, comment vous voulez qu'y change l'autorité qu'on lui a donnée?

Moi, je vois mal qu'à un moment donné un procureur de la couronne, par exemple, qui est un substitut du procureur général... Le ministre de la Justice est ici. Je sais pas qu'est-ce qui dirait, lui, si, une bonne journée, il voyait les substituts du procureur général décider que leur mandat, ils vont l'exercer d'une autre façon que celui qu'on leur a donné, qu'ils se mettent à aller plaider des causes civiles sans mandat spécifique. C'est ça.

UNE VOIX: Vous demandez la...

LE PRESIDENT: Vous êtes membre de la commission, je crois?

M. CHOQUETTE: Je ne suis pas membre...

LE PRESIDENT: Mais vous demandez la permission. Permission accordée. Un instant. Permission accordée.

M. BURNS: Je vous attaque pas, M. le ministre.

M. CHOQUETTE: Non, non, j'ai pas considéré ça comme une attaque, mais vous avez semblé invoquer mon autorité à votre appui.

M. BURNS: J'ai pas du tout invoqué votre autorité.

M. CHOQUETTE: Bien..., oui.

M. BURNS: J'ai tout simplement dit: Je me demande ce que le ministre de la Justice aimerait ou comment il aimerait ça, lui, de voir ses substituts du procureur général se mettre à...

M. CHOQUETTE: C'est justement...

M. BURNS: ... faire toutes sortes d'autres choses et déléguer leurs propres pouvoirs pis de changer le mandat.

M. CHOQUETTE: Voici, puisque vous invoquez...

M. BURNS: Je pense que vous trouveriez pas ça drôle.

M. CHOQUETTE: Mais non, mais puisque vous invoquez cet exemple et que ça me met en cause, je dois vous dire qu'un substitut du procureur général n'est pas obligé, suivant la réglementation en vigueur, de suivre des instructions qu'il peut recevoir...

M. BURNS: C'est pas la même chose, ça. M. CHOQUETTE: ... un instant! ...

M. BURNS: C'est pas la même chose, ça. C'est pas ça que je vous ai dit.

M. CHOQUETTE: ... voulez-vous, s'il vous plaît, ne pas m'interrompre? ... n'est pas obligé de suivre des instructions reçues du ministère de la Justice si sa conscience s'y objecte, et il peut demander d'être déchargé de son mandat et, à ce moment-là, il n'est pas obligé d'exécuter les ordres qu'il a reçus.

Alors, par conséquent, votre analogie ou l'exemple que vous cherchez à donner pour illustrer le principe "delegatus non potest dele-gare" ne s'applique pas du tout, à mon sens.

M. BURNS: Sauf que ce que je vous dis... C'est pas ça que je vous ai dit du tout.

M. CHOQUETTE: Mais oui, c'est ça que vous avez dit.

M. BURNS: C'est que vous accepteriez pas pan toute que ce gars-là, à qui vous déléguez des pouvoirs comme substitut du procureur général, vous accepteriez pas qu'y se mette à changer son mandat.

M. CHOQUETTE: C'est ça, il peut me demander...

M. BURNS: Ah! ...

M. CHOQUETTE: Un instant.

M. BURNS: ... retourner avec une autre affaire.

M. CHOQUETTE: Supposons qu'à l'occasion d'une sentence, je demande à un procureur de la couronne de demander trois ans de prison et que lui, c'est contraire à sa conscience, il n'est pas obligé de se présenter devant le tribunal et il a le droit de dire, de demander d'être remplacé dans l'exécution de ce mandat-là.

M. BURNS: Comme exemple, on n'en discutera pas là...

M. CHOQUETTE: II peut demander de nouvelles instructions. Alors, votre exemple tombe complètement à plat. Je voulais faire cet aparté pour ne pas que je sois cité à votre appui. Sur ce, je me retire.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. BURNS: Vous allez l'être autrement!

LE PRESIDENT: Nous venons d'être présents d'un autre dédoublement, d'un..., possiblement d'un témoin et d'un membre de la commission.

M. Hardy voulait dire... Non, ça va.

M. BIENVENUE: Le ministre de la Justice, M. le Président, parlait justement du cas de la conscience troublée dans le cas hypothétique d'un tel procureur et on doit s'apercevoir que j'ai la conscience troublée depuis qu'on étudie ce mandat et j'invite mes collègues de la commission à avoir la conscience également troublée, comme vous l'avez eue vous-même, M. le Président, lors des débats de l'Assemblée nationale, au moment où on soulevait, où le leader de la Chambre avait soulevé la question vers laquelle je m'en viens, c'est manifeste, de l'inéligibilité en vertu de la Loi de contestation des élections. Je vous cite, M. le Président, ou enfin je cite celui qui occupait le fauteuil: "L'autre point soulevé, le premier point, que toute contestation d'élection doit se faire en vertu de la Loi de la contestation des élections, c'est encore mon opinion, quitte à ce qu'elle soit modifiée dans les jours suivants, alors que je pourrai approfondir cette question plus longuement".

Ce qui prouve qu'elle peut être modifiée pis l'opinion de la Chambre peut être modifiée et je répète ce que j'ai dit tout à l'heure, avant de reprendre mon point, si on me le permet, je répète qu'on ne peut pas entériner ici une illégalité ni agir dans l'illégalité. Il est arrivé à la Chambre de se tromper. C'est arrivé souvent et ça arrivera souvent.

C'est pour ça qu'on a des tribunaux qui déclarent des lois — et c'est encore plus grave qu'un mandat, des lois — ultra vires, mais c'est pas beaucoup plus grave que le cas actuel lorsqu'y est question de l'indignité, de l'avenir

et du sort d'un représentant démocratiquement élu de la Législature provinciale, l'Assemblée nationale. Et comme vous avez indiqué tout à l'heure, M. le Président, sujet à ce qu'on ajoute... Et c'est ce dont nous avons convenu, que le règlement nous permettait, par une motion, de faire rapport à la Chambre pour lui faire constater ses erreurs, s'il y a, pour qu'elle se reprenne, ce qui n'empêchera pas les faits, comme l'indiquait le député de Maisonneuve... Nous ne voulons pas empêcher les faits d'être connus ici, mais nous voulons qu'ils soient connus dans la légalité stricte et absolue sans exception. S'y devait y avoir un retard de trois jours pour que le député de Johnson soit jugé dans la légalité, comme tout accusé de droit commun, j'ai aucune objection aux trois jours. Y a un principe sacré qui est en cause et qui est beaucoup plus important que les vices de forme, que les erreurs de la Chambre. Qu'elle se reprenne la Chambre, si elle a erré.

M. BURNS: Est-ce que vous n'avez d'autres problèmes de droit à soulever?

M. BIENVENUE: Je veux soulever celui-là et j'en aurai peut-être un autre après.

M. BURNS: Bon, alors, moi, vous avez mon opinion là-dessus. Je n'ai pas l'intention d'en discuter.

LE PRESIDENT: Si vous voulez mon opinion, écoutez, comme principe de base, je ne préside pratiquement jamais les commissions. Nous avons... J'ai eu l'occasion de discuter et de rencontrer les membres des commissions élues y compris... D'ailleurs, je crois que le député de Chicoutimi a assisté à certaines de ces rencontres où ce n'est pas des directives ou des conseils que j'ai donnés aux présidents des commissions que où, un endroit où il n'y a pas de formalisme, c'est bien en commission parlementaire, où il doit y avoir une liberté absolue. Et même plus qu'en Chambre même, parce que la Chambre est plus rigide dans ses règles qu'en commission. Surtout dans une commission qui traite d'un sujet comme celui auquel nous traitons actuellement, sous réserve, peut-être, de questions de légalité ou autres, mais j'ai bien l'intention d'accorder à tous les membres de cette commission un droit absolu de parole et ce n'est pas mon intention d'enlever ou d'arrêter l'expression d'opinion de quelque membre que ce soit de cette commission, considérant encore plus spécialement le sujet auquel nous... lequel nous devons aborder et les... Aux seuls moments où j'interviendrai pour enlever les droits d'expression à cette commission, c'est lorsqu'il y aura des interventions partisanes ou trop politiques. Mais, dans l'exposé autant de l'accusation que de la défense, j'accorderai un droit absolu de parole à quiconque est membre de cette commission et sous réserve des décisions, d'ailleurs, qui seront prises non pas par le président sur les questions de droit, mais par la commission, c'est non pas... Ce n'est pas le président qui va trancher les questions de droit, soyez assurés de ça; ce sera la commission encore comme collège de commission, là, d'une manière collégiale. Et si le ministre de l'Immigration a des exposés de droit à faire, il les fera comme tout autre membre qui en aura à faire.

M. BURNS: C'est pour ça que je lui demande s'y a d'autres problèmes de droit à soulever.

M. BIENVENUE: Ben oui. M. BURNS: Allez-y.

M. BIENVENUE: Alors, à l'appui, M. le Président, de cette prétention qu'il faut retrancher de notre mandat toutes les références —notre mandat, évidemment, éventuellement, on y viendra plus tard ; c'est la suite logique de la preuve — toutes références aux faits allégués qui origineraient avant l'élection du député de Johnson et qui affecteraient son cens de l'éligibilité, je veux d'abord citer à l'appui l'article 132 de la Loi électorale qui se lit comme suit, à la tête et ensuite au paragraphe c): "Ne sont cependant pas éligibles à l'Assemblée nationale —paragraphe c) — les personnes mentionnées aux articles 75, 76, 77, pardon, 78 et 79 de la Loi de la Législature, etc".

Deuxièmement, à l'article 154 de la même loi, on dit ce qui suit: "Le président d'élection ne doit pas rejeter un bulletin de présentation pour cause d'inéligibilité du candidat présenté, à moins que l'inéligibilité de ce candidat n'apparaisse à la face même de son bulletin de présentation, de son consentement ou du serment prévu aux articles 150 et 151". Voilà pour la loi des élections du Québec.

En vertu d'une autre loi qui est celle de la contestation des élections provinciales, on voit dès l'article 1 la disposition suivante: "La présente loi régit toute contestation d'une élection d'un député à l'Assemblée législative et la validité d'une telle élection ne peut être autrement contestée".

M. BURNS: Juste mentionner une chose... M. BIENVENUE: Oui.

M. BURNS: ... c'est que si on lit la motion, juste pour pas que le ministre se lance trop longtemps dans cette affaire-là, on conteste pas la validité de l'élection, on conteste l'éligibilité, ce qui est bien différent.

M. BIENVENUE: Bien...

M. BURNS: Bien, vous allez voir. Non, vous allez voir que c'est ben différent.

M. BIENVENUE: La validité... M. BURNS: Non.

M. BIENVENUE: La validité de l'élection d'un député ne tient que s'il est éligible, n'est-ce pas?

M. BURNS: Pas du tout. M. BIENVENUE: Non? M. BURNS: Pas du tout.

M. BIENVENUE: Et notre prétention est à l'effet que, si le député en question...

M. BURNS: Elle est peut-être subtile mais vous allez voir qu'y a une différence.

M. BIENVENUE: ... était inéligible, son élection était nulle et la contestation d'une telle élection, ayant pour effet de la rendre nulle, ne pourrait se faire que dans le cadre de la loi des élections provinciales, sujet à ce qui suivra.

Alors, on retient que c'est cette loi qui régit toute contestation d'une élection et la validité d'une autre élection ne peut être autrement contestée. A l'article 9 de cette loi, je... ça concerne évidemment les éléments relatifs à une élection irrégulière d'un député. Et je lis: "Par une pétition, on peut se plaindre d'un rapport irrégulier, de l'absence de rapport, de l'existence d'un double rapport, etc., etc., d'une manoeuvre frauduleuse en conséquence de laquelle il est allégué qu'un député est devenu inéligible à l'Assemblée législative et inhabile à y siéger". Alors, on peut penser évidemment, dans le cas d'élection irrégulière, à l'exemple de la non-éligibilité du candidat en raison d'une charge ou d'un office incompatible.

Enfin, l'article 11, qui a son importance, a trait au délai de présentation, c'est-à-dire à la prescription qui entache un tel recours, sous réserve des dispositions de l'article suivant: "La pétition doit être présentée dans les 30 jours qui suivent le jour de la publication à la Gazette officielle de Québec de l'avis de l'élection par le président général des élections, conformément à l'article 346 de la Loi électorale", etc.

Le député de Maisonneuve, en conséquence, M. le Président, ne peut pas invoquer des faits qui affecteraient le sens de l'éligibilité du député de Johnson et qui seraient antérieurs à son élection. Premièrement, parce que c'est seulement en vertu de la Loi de la contestation des élections que de tels faits peuvent être vérifiés, à l'article 1 et 9, comme je l'ai indiqué; deuxièmement, parce que ce délai est maintenant écoulé.

Or, M. le Président, notre humble prétention est à l'effet que, par la motion actuelle, le député de Johnson ne peut pas être déclaré inéligible, l'élection ayant eu lieu, les causes d'inéligibilité, s'il en était, n'ayant pas été soulevées dans les cadres prévus par la loi et, par conséquent, doit disparaître du mandat de la commission, doivent disparaître, tout faits, toute source d'incompatibilité, qu'il s'agisse d'un mandat, d'une fonction — comme on dit à l'article 75 — qui ait été exercée à l'époque et tant et aussi longtemps que le député de Johnson n'a pas commencé à siéger ou à voter à l'Assemblée nationale.

On peut penser, M. le Président, à l'article 82 de la Loi de la Législature, de la Loi de la Législature, je dis bien, qui dit que "Si une personne déclarée inéligible, aux termes du présent paragraphe, comme député de l'Assemblée nationale ou inhabile à y siéger ou à y voter, est néanmoins élue et déclarée élue, son élection et le rapport qui en est fait seront nuls et de nul effet." Le député de Johnson n'a pas été déclaré inéligible en vertu des moyens prévus par la loi pour le faire.

M. BURNS: M. le ministre, j'peux-tu vous poser une question, une ou deux questions, juste pour bien comprendre votre argument? Vous dites que, parce que l'inéligibilité du député de Johnson n'a pas été soulevée dans le délai prévu par la loi, on ne peut pu soulever ça. C'est ça, votre argument de fond c'est ça?

M. BIENVENUE: Oui, oui.

M. BURNS: Le ministre est d'accord qu'un membre de la Chambre des communes ou un sénateur du gouvernement fédéral n'est pas éligible. D'accord?

M. BIENVENUE: Ce qui m'intéresse surtout, c'est l'Assemblée nationale.

M. BURNS: Vous êtes d'accord, non, non, mais vous êtes d'accord qu'à l'Assemblée nationale du Québec, vous êtes d'accord là-dessus, notre Assemblée nationale à nous, un sénateur puis un député de la Chambre des communes d'Ottawa, n'est pas éligible, vous êtes d'accord là-dessus.

M. BIENVENUE: N'est pas éligible, c'est une des sources...

M. BURNS: Ou...

M. BIENVENUE: ... d'inégibilité prévue par la loi.

M. BURNS: Voulez-vous dire à ce moment-là que si c'est pas contesté dans les trente jours, à la suite de ce, disons qu'il se fait élire pareil, si c'est pas contesté dans les trente jours, le sénateur du Canada et le membre de la Chambre des communes a encore le droit de siéger à l'Assemblée nationale?

M. BEDARD (Chicoutimi): Qui consacrerait l'illégalité.

M. BIENVENUE: Tout ce que l'on pourrait contester...

M. BURNS: C'est ça que vous êtes en train de nous dire?

M. BIENVENUE: Non, non ce n'est pas ça que je suis en train de vous dire, j'va vous le dire ce que je vais dire. On ne pourrait plus constater ou invoquer son inéligibilité, on ne pourrait qu'invoquer, faire la preuve de son inhabilité.

M. BURNS: On ne pourrait pas dire parce qu'inéligible à se présenter.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est ça...

M. BURNS: On ne pourrait pas dire ça. Vous êtes sûr de ça, là?

Vous dites ça sans rire?

M. BIENVENUE: Je le dis sans rire. Pour les fins du journal des Débats, je ne ris pas, M. le Président.

M. BURNS: Est-ce que je pourrais vous référer, à ce moment-là, M. le ministre, est-ce que je pourrais vous référer à l'article 24 de la Loi de la Législature qui, elle, dit: "Nonobstant toute disposition législative inconciliable, nul membre du Sénat n'est éligible ou nul membre de la Chambre des communes du Canada n'est éligible comme député de l'Assemblée nationale." Il ne parle pas d'inhabilité là-dedans.

Comment ça se fait? Qu'est-ce qu'on ferait là, à ce moment-là, selon vous, avec vos gros arguments juridiques? Il faudrait le laisser siéger parce qu'on l'a pas contesté dans les trente jours?

M. BIENVENUE: On l'endurerait si on l'a pas fait déclarer inéligible dans les trente jours.

M. BURNS: C'est beau, ça.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous consacreriez l'illégalité.

M. BURNS: C'est correct, ça répond à ma question.

M. HARDY: D'autres travaux pour la réforme électorale.

M. BIENVENUE: Alors, la conséquence de ce que nous venons d'étayer, c'est évidemment, dans les faits, on le comprend, qu'en temps et lieu — et j'en avise tout de suite la commission — si le mandat que nous a donné l'Assemblée nationale est corrigé pour devenir régulier à ce titre-ci comme aux autres que j'ai énoncés précédemment, il faudrait mettre de côté — et que l'on sache bien que j'veux pas indiquer par là que dans les faits ce serait survenu, mais on doit siéger dans la légalité — il faudrait mettre de côté tout mandat, exercice de mandat, acte posé par le député de Johnson avant le moment où il a siégé et voté à l'Assemblée nationale parce qu'il était un député éligible à l'expiration des trente jours dont nous avons parlé.

Je veux que l'on comprenne bien qu'il n'est pas question par là que l'on infère que le député de Johnson aurait agi, aurait posé de tels actes pendant cette période. Ce n'est pas du tout mon propos, mais ça serait illégal que de se pencher sur la preuve de tels actes s'ils avaient été posés — ce que je n'admets pas — à l'époque en question.

M. BEDARD (Chicoutimi): Mais si on prend votre raisonnement, tout à l'heure, lorsque vous invitiez le député de Maisonneuve et que vous étiez d'accord pour consentir qu'il prenne les deux, qu'il change le "ou" par le "et", vous l'invitiez, en toute connaissance de cause, à entrer de plein pied dans l'illégalité?

M. HARDY: ... égalité.

M. BIENVENUE: Le choix n'est pas encore fait, mais j'ai indiqué...

M. BEDARD (Chicoutimi): Non, mais vous l'invitiez et vous acceptiez d'avance que...

M. BIENVENUE: C'est ça.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... qu'il accepte l'illégalité, si on prend votre raisonnement.

M. BIENVENUE: Non, non, non.

M. BURNS: Changer un mandat de l'Assemblée.

M. BIENVENUE: Non.

M. BEDARD (Chicoutimi): Voyons donc!

M. BIENVENUE: Non, non.

M. BEDARD (Chicoutimi): Et en toute connaissance de cause.

M. BIENVENUE: Non. Et c'est d'ailleurs pour ça — je l'ai dit tout à l'heure— que j'ai jugé — et le député de Maisonneuve était d'accord — qu'il était plus logique de développer tous les arguments de droit qui suivraient pour les loger dans une seule et même motion pour que ce soit complet et pour que l'Assemblée nationale sache en quoi elle a erré, si elle a erré, et en quoi elle doit corriger, si elle doit corriger. Je ne veux pas présumer de son attitude.

M. BURNS: Non, mais on s'en doute. Si vous parlez au nom du gouvernement.

M. BIENVENUE: Je parle au nom du gouvernement devant cette commission parlementaire où j'ai déjà indiqué que le député de John-

son devait être jugé dans la plus absolue légalité, rien de plus.

Au sujet de l'article 75, où on étudie l'inhabilité d'un membre de l'Assemblée nationale, on doit se poser la question: Quand commence cette inhabilité, si elle existe, évidemment? De quoi s'agit-il? Il s'agit d'incompatibilité de fonctions qui se distingue nettement — on vient d'y toucher — de l'inéligibilité d'un député ou d'un candidat à une élection. Je veux vous référer à une des bibles du droit parlementaire qui est l'ouvrage sur les Parlements de l'Union parlementaire, à la page 40, où on traite précisément des incompatibilités au chapitre de la composition du Parlement, et je cite: "L'incompatibilité est la règle qui interdit à un parlementaire d'exercer certaines occupations en même temps que son mandat. En théorie, elle se distingue nettement de l'inéligibilité. Celle-ci, l'inéligibilité, constitue un empêchement juridique à l'exercice d'un mandat".

On est éligible à une élection ou on l'est pas. Cette dernière phrase étant de l'auteur qui vous parle, M. le Président. Je reprends la citation: "Ces effets sont absolus; en revanche l'incompatibilité ne fait pas obstacle à la validité de l'élection; elle se borne à imposer au parlementaire, après son élection, un choix entre ses occupations et son mandat.

Sous réserve, M. le Président, de cette opinion que je respecte et qui nous fait bien voir le partage de l'inéligibilité et de l'incompatibilité, l'incompatibilité étant la juxtaposition de deux fonctions qui imposent à l'élu un choix, choix que, je le dis par anticipation, nous prouverons ou tenterons de prouver, je veux pas présumer de la preuve, tenterons de prouver que ce choix a été fait par le député de Johnson et fait dans le sens qui, à notre avis, le rend habile à siéger et à voter, être député, à siéger et à voter.

C'est un choix entre certaines charges ou offices, on vient de le dire, et l'exercice d'un mandat; il y a l'obligation de choisir.

L'article 75, M. le Président, nous en parle de cette incompatibilité. Et on sait que l'article 75, dans la Loi de la Législature, c'est du droit statutaire dont l'interprétation doit être stricte. Nous n'avons pas le choix.

L'article 75 interdit à un tel député qui ferait l'objet d'une telle incompatibilité, lui interdit une chose, de siéger et de voter, rien de plus, si on l'interprète strictement comme le veulent les règles de droit et à la lettre. On peut se demander la question: Pourquoi les incompatibilités de 75? et on trouve la réponse en fait à la face même du titre de la sous-section qui s'appelle l'Indépendance de la Législature, c'est le principe de l'indépendance des membres de la Législature, indépendance vis-à-vis le pouvoir exécutif et on le sait, on le constate dans le cas qui nous préoccupe, où il s'agit ici d'agir au nom du Procureur général. L'indépendance, M. le Président, d'un législateur en tant que tel, en tant qu'homme, qu'individu qui doit faire face à l'exécutif, on ne peut pas voter, siéger et voter et en même temps à cause d'une fonction, si on me permet l'expression, j'ai employé les mots "faire face à l'exécutif". On ne peut pas à la fois siéger et voter, se prononcer sur des questions de loi, sur des lois et en même temps exercer une fonction qui nous place face à l'exécutif comme c'est le cas actuel.

Un député qui représente des électeurs auprès d'un ministère n'agit donc pas à ce moment-là comme législateur, il fait face à l'exécutif, il ira devant des fonctionnaires, devant un ministère réclamer des droits pour ses électeurs, qu'il s'agisse du crédit agricole, des heures de bull ou de tout ce que l'on voudra — les mots "heures de bull" sera dans le journal des Débats, mais j'aiderai le journal des Débats à l'épellation.

M. BURNS: Ce n'est pas B O U L E S.

M. BIENVENUE: C'est pas BOULES justement comme dit le député. Alors que ce même député, lorsqu'il siège et vote agit comme législateur. Alors l'article 75, qui traite de l'incompatibilité et de l'indépendance de ce législateur, parle — je l'ai dit — de siéger et voter pendant qu'il occupe une charge ou un office, d'où l'incompatibilité chez lui.

On doit se rappeler, M. le Président, que l'article 75 date du 19e siècle, il est à peu près vieux de 100 ans ou davantage, à l'époque où les sessions étaient courtes, à l'époque où les ressources humaines pouvaient être limitées pour occuper des charges publiques.

J'ai l'impression qu'on n'aurait pas à fouiller longtemps pour retrouver, à l'époque, des députés qui étaient coroners ou qui occupaient des fonctions similaires pendant les onze mois que durait l'intersession, alors qu'aujourd'hui la vapeur est renversée: l'intersession est beaucoup plus courte, comme on le sait.

On pouvait donc et on pourrait donc conclure, je pense, avec une assez grande certitude que l'obligation de choisir entre une charge ou un office, ou un mandat, en vertu de l'article 75, n'existerait qu'à compter du jour où un membre de l'Assemblée siège et vote ou est appelé à voter. Cela reprend, d'ailleurs, les termes mêmes de l'article 75 qui dit: "...ne peut siéger ou voter en cette qualité pendant qu'il occupe cette charge, cet office et cet emploi." C'est là, selon mon humble opinion, que commence à compter la question de l'indépendance d'un membre de la Législature. Et c'est si vrai, M. le Président, qu'on sait que les immunités parlementaires, l'immunité parlementaire d'un membre de la Législature n'existe que pendant qu'il est devant la Législature, à la Chambre ou à une de ses commissions, avec les autres délais de 20 jours avant, après, etc. C'est tellement vrai qu'il n'est pas immunisé contre des poursuites...

M. BURNS: M. le Président... M. BIENVENUE: ... à l'extérieur.

M. BURNS: ... je m'excuse auprès du minis-

tre, je ne veux pas... je ne veux pas l'interrompre. Je lui ai demandé les questions de droit. Est-ce que il pense vraiment qu'il pose les questions de droit préliminaires ou s'il est en train d'argumenter sur une preuve qui n'a pas encore été faite?

M. BIENVENUE: Non, non, question de droit préliminaire.

M. BURNS: Question de droit préliminaire. C'est bien ça, là?

M. BIENVENUE: J'achève, j'achève. M. BURNS: Correct.

M. BIENVENUE: En d'autres termes, M. le Président, dans le cas précis qui nous occupe, le député de Johnson n'a commencé à siéger — cela les procès-verbaux de la Chambre l'existent, l'indiquent— siéger ou/et à voter que le 22 novembre. Alors, nous en venons à la conclusion que tout acte, signature, mandat antérieur à cette date, en vertu de l'article 75...

M. BURNS: Les 20 jours ne s'appliquent pas là?

M. BIENVENUE: ... qui fait partie.,.

M. BURNS: Ils ne s'appliquent pas, dans votre esprit, les 20 jours avant?

M. BEDARD (Chicoutimi): Les 20 jours avant?

M. BURNS: Non?

M. BIENVENUE: Non. Parce que 75 dit spécifiquement: "... siéger et voter en cette qualité".

M. BURNS: Pourquoi vous parlez des immunités alors?

M. BEDARD (Chicoutimi): Des immunités.

M. BIENVENUE: Non, non. A titre d'exemple, pour bien montrer...

M. BURNS: Ah bon!

M. BIENVENUE: ... pour bien montrer, dans le cas des immunités...

M. BURNS: Parce que là, ça fait ton affaire.

M. BIENVENUE: ... que l'indé... Non, pas question que ça fasse ou que ça ne fasse pas l'affaire. La loi, elle, doit trouver son compte. Je faisais allusion aux 20 jours...

UNE VOIX: Il a le droit à l'immunité.

M. BIENVENUE: Je faisais allusion aux 20 jours dans ce qui a trait aux immunités et non pas en ce qui a trait à l'article 75.

M. BURNS: II a droit d'être immunisé, mais on ne peut pas lui imposer les contreparties de l'immunité. C'est ça?

M. BIENVENUE: 75 dit ce qu'il dit; je ne peux pas le changer, même s'il est vieux d'un siècle.

M. BURNS: Correct. C'est correct.

M. BIENVENUE: Je ne dis pas qu'on devra pas le changer un jour...

M. BURNS: Hum, hum.

M. BIENVENUE: ... le mettre à date et le moderniser. Mais, dans le moment, il est là et je suis pris avec.

M. BEDARD (Chicoutimi): Alors, selon vous, il peut jouir des prérogatives durant... de l'immunité durant les 20 jours, mais sans aucune obligation de sa part.

M. BIENVENUE: J'ai pas dit ça.

M. BEDARD (Chicoutimi): Bien, c'est ce que ça veut dire.

M. BIENVENUE: Alors, ce qui veut dire, M. le Président...

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est à quel article?

M. BIENVENUE: ... qu'à compter du 22 novembre tout acte, signature et tout exercice de mandat implique ou impliquerait le député de Johnson, mais tout ce qui précède cette date est absolument ultra vires de la commission... de la compétence de cette commission et du mandat, à nouveau, irrégulier que lui a confié l'Assemblée nationale. Pour répondre au député de Chicoutimi, l'exemption ou l'immunisation dont je parlais est à l'article 68 et l'exemption d'arrestation et tout ce qui suit, c'est là que sont les 20 jours, pas à 75.

M. BEDARD (Chicoutimi): Toute prérogative entraîne des obligations.

M. HARDY: A condition que ce soit dans la loi.

M. BIENVENUE: Alors, et en raison... M. BEDARD (Chicoutimi): Ça s'infère.

M. BIENVENUE: ... et en raison de ce que j'ai dit sur l'inéligibilité, en vertu de la Loi électorale, de la Loi des élections et de la Loi de la contestation des élections, l'on voyait qu'il n'était pas permis de référer à des faits anté-

rieurs à l'élection du député de Johnson, qui, s'ils étaient prouvés, entacheraient son cens de l'éligibilité et le rendraient inhabile à siéger, tout simplement parce que c'est la loi, on l'a dit, des contestations des élections qui s'appliquait, et le délai pour y recourir s'est écoulé.

Pour ce qui est des faits survenus après l'élection et antérieurs au 22 novembre, l'article 75, à la face même, nous indique qu'il ne pourrait non plus faire l'objet de la preuve ou de l'étude ou du mandat de cette commission, non pas, je le dis pour la troisième fois, parce que nous voulions inférer qu'il y ait eu de tels mandats ou de tels agissements, de faits ou gestes posés par le député de Johnson, loin de là, mais parce que la loi n'en tient pas compte.

M. LEGER: Pour quelle raison vous nous présentez cela à ce stade-ci, alors qu'on n'a pas encore eu d'enquête de faite?

M. BIENVENUE: Je pense que ça a été assez clair. Je pense que ça a été assez clair. Peu importe ce que révélerait l'enquête ou ne révélerait pas l'enquête. L'enquête ne peut porter sur des faits qui, même prouvés, ne permettraient pas à cette commission et à la Chambre ensuite de conclure à l'inhabilité du député de Johnson. Le raisonnement est aussi simple que celui-là.

M. le Président, vous l'avez compris, nous émettons donc de sérieuses réserves quant aux faits antérieurs au 22 novembre, période au cours de laquelle le député de Johnson n'a pas siégé, ni voté, non plus d'ailleurs qu'aucun membre de l'Assemblée nationale.

Ce principe sacré de l'indépendance de la Législature qui coiffe l'article 75 et ensuite l'article 79 et les autres montre une fois de plus — je l'ai dit il y a un instant — que ce texte de notre Loi de la Législature, qui est vieux d'un siècle, est désuet, imparfait, corrigible, et le sera, je l'espère, si je pense à la philosophie qui animait le député Burns en faisant sa motion et en parlant d'incompatibilité ou de juxtaposition de mandat, dans le cas du député de Johnson ou de tous autres.

Alors, M. le Président, cela ferait l'objet, toujours, de cette même motion de rapport à la Chambre dans laquelle je suggère, je suggère que la commission devrait demander à l'Assemblée nationale de modifier le mandat qu'elle lui a confié, pour le rendre légal, régulier, et pourquoi légal et régulier? Légal et régulier pour qu'il soit conforme à la loi. Et quand je dis, lorsqu'on disait tout à l'heure que la Chambre peut se tromper, s'est déjà trompée et se trompera encore, on en a la preuve évidente, dans le cas actuel, la Chambre nous demandant d'enquêter sur des faits, parce que y avait des dates, et le député de Maisonneuve a cité des dossiers à l'appui de sa preuve prima facie, sur des faits qui échappent à l'étau de l'article 75, dans le temps.

M. le Président, il est six heures moins quart.

Cela m'amènerait à exposer cette fois, toujours au chapitre des questions préliminaires de droit, à faire des observations sur l'inhabilité elle-même, non pas dans le sens où nous venons d'en traiter, mais sur l'inhabilité quant aux pouvoirs qu'a l'Assemblée nationale ou, sous elle, une de ses commissions de se prononcer sur l'inhabilité dans le cadre des dates qui nous intéressent, soit après le 22 novembre, de l'inhabilité de l'un ou l'autre de ses membres basée sur 75 et sur 79...

M. BURNS: Je dirai au ministre ceci: N'est-il pas exact que la motion ne parle pas que c'est à la commission de se prononcer sur l'inhabilité ou l'inéligibilité mais que c'est un mandat d'enquête qui est donné à la commission, que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse le 4 juillet 1974 en vue de procéder à une enquête sur les faits...

M. BIENVENUE: Oui.

M. BURNS: ... qui, s'ils étaient fondés...

M. BIENVENUE: Une enquête...

M. BURNS: C'est l'Assemblée nationale qui, par la suite, recevra le rapport et le rapport dans tous ces cas-là, je réfère le ministre de l'Immigration à tous les cas qu'on puisse relever, le rapport est habituellement: Les faits sont fondés, les faits ne sont pas fondés. C'est ça, c'est ça le mandat de la commission. C'est pas de décider de l'habilité ou de l'éligibilité. Le qui, c'est l'Assemblée nationale qui l'a mis là.

M. BIENVENUE: D'accord, mais dans ce que j'ai soumis précédemment je n'ai pas demandé que toute la période couverte par la motion soit biffée et retranchée.

M. BURNS: Non, vous demandez que la période antérieure au 22...

M. BIENVENUE: C'est ça, c'est ça.

Or, si on nous demande de faire enquête sur des faits que la loi ne nous permet pas d'enquêter parce que si on en venait à la... parce que peu importe les conclusions auxquelles on en viendrait...

M. BURNS: On interpréterait le mandat de l'Assemblée nationale.

M. BIENVENUE: Oui, oui. Peu importe les conclusions auxquelles on en viendrait, ces faits, à priori, en partant, au départ, ne justifient pas l'inhabilité, ne justifient pas l'enquête elle-même.

Je parle évidemment de cet autre aspect de l'irrégularité du mandat.

M. BURNS: Je commence à comprendre. Je commence à comprendre que vous en voulez pas d'enquête du tout.

M. BIENVENUE: Prenant pour acquis... prenant pour acquis,... prenant pour acquis...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BIENVENUE: Prenant pour acquis que la dernière...

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! Un à la fois.

M. BIENVENUE: Prenant pour acquis, prenant pour acquis que la dernière remarque du député de Maisonneuve, en disant vous, s'adressait à celui qui parle, je ne répondrai pas pour les autres membres de la commission mais, répondant en mon nom, je dirai pour maintenant la quatrième fois cet après-midi que le gouvernement a voté lors de la motion...

M. BURNS: Oui, vous voulez tout changer ça, à c't'heure.

M. BIENVENUE: ... s'il n'avait pas voulu qu'y ait d'enquête, si le gouvernement n'avait pas voulu qu'il y ait enquête, il aurait voté contre.

M. BURNS: C'est t'y drôle, y veut tout changer ça.

M. BIENVENUE: II a voté pour.

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! A l'ordre!

M. BIENVENUE: Et j'ai dit à plusieurs reprises, à la suite du député de Johnson, qui l'a dit à l'Assemblée nationale à deux reprises, que le gouvernement a hâte, quelle que soit l'issue, de faire la lumière et toute la lumière sur l'incompatibilité et l'inhabilité ou pas du député de Johnson ou de l'un ou l'autre de ses membres si le cas devait se présenter dans dix ans, dans vingt ans, mais dans la légalité.

L'illégalité me répugne, je suis peut-être mal fait, M. le Président, je ne veux pas parler pour les autres membres de la commission mais je ne veux pas m'asseoir pendant X jours, un mois s'y faut, dans l'illégalité.

Je ne sais pas ce que les autres ont à dire mais...

M. HARDY: D'accord.

M. BIENVENUE: Alors, M. le Président, lorsque j'ai dit que ce serait plus long et que j'ai constaté l'heure qu'il était, au moment où je parlais de, de notre droit ou pas à nous d'étudier la question...

M. BURNS: Est-ce que vous avez voté pour la motion?

M. BIENVENUE: Oui, et ça apparaît aux procès-verbaux.

M. BURNS: Je vois ça, il me semblait aussi. Vous avez voté pour une illégalité.

M. BIENVENUE: Le nom qui est là est bien le mien.

M. BURNS: Vous êtes, vous êtes à ce point là contre l'illégalité que vous avez voté pour?

M. BIENVENUE: Je suis beaucoup plus intéressé à la question depuis que je siège à la commission parlementaire, sans compromis...

M. BURNS: Vous aviez bien l'air intéressé pendant mon intervention l'autre jour en tout cas, vous avez même demandé de répéter une série de chiffres.

M. BIENVENUE: Le président a fait, à ce moment-là, des réserves que j'ai relues tout à l'heure au journal des Débats, le leader adjoint du gouvernement a demandé les mêmes choses, y a pas eu de succès, j'dis pas que j'en aurai plus mais...

M. BURNS: II faut conclure que, depuis le 28 à aller jusqu'à aujourd'hui, vous êtes devenu un chevalier de la légalité, avant ça vous l'étiez pas.

M. BIENVENUE: Depuis 1952...

M. BURNS: Ben non, le 28, vous avez voté pour une chose illégale.

M. BIENVENUE: 1952, date où j'ai été assermenté comme membre de la même confrérie que le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Pourquoi vous avez voté pour une chose illégale, le 28?

M. BEDARD (Chicoutimi): Surtout que les arguments que vous nous apportez ont été soulevés lors... avant que le vote ne soit pris.

M. BIENVENUE: J'espère être plus heureux que ce que j'ai été.

Alors, M. le Président, on vient de voir à quel point, à quel point le législateur a jugé grave la question d'inéligibilité puisqu'il l'a... puisqu'il l'a confiée aux tribunaux, à l'occasion, deux lois, la Loi des élections et la Loi de la contestation des élections. Le législateur a considéré cette question d'inéligibilité comme très sérieuse et très grave au point qu'il a accordé un délai de 30 jours seulement pour qu'elle soit invoquée, et cela pourquoi? Parce que lorsqu'un député, quel qu'il soit, de quelque parti qu'il soit, a été élu démocratiquement et à la majorité des votes donnés par les électeurs d'une circonscription particulière, c'est le droit absolu de ces électeurs d'être représentés pendant la durée du mandat par celui qu'ils ont élu.

La question que je me pose et que je

suggérerais que je me pose davantage, M. le Président, après la suspension des travaux, c'est comment penser que le législateur aurait voulu soustraire aux mêmes tribunaux cette question aussi et même plus importante de l'inhabilité d'un député une fois élu, aussi importante que celle de son éligibilité avant d'être élu? Parce que, si on défranchise un candidat à une élection, on pourra dire, on conviendra avec moi qu'il est à tout le moins aussi grave de le déclarer non élu ou de le défranchiser ou de le bannir ou de l'expulser d'une Assemblée nationale, d'une législature quelconque, une fois qu'il est élu, dans le contexte démocratique que j'ai indiqué.

Or, M. le Président, vous comprenez que mes prochaines remarques, mes réserves sérieuses, enfin quant à moi, qui me troublent sur la juridiction que nous avons ou pas, face à la décision de la déclaration d'inhabilité ou pas, porteront justement sur cette juridiction des tribunaux versus la nôtre, juridiction des tribunaux de droit commun versus celle des Chambres législatives. Et dans le cas du Québec évidemment, de l'Assemblée nationale.

M. BURNS: On continue.

M. BIENVENUE: Hein?

M. BURNS: On continue.

M. BIENVENUE: Cinq minutes?

M. BURNS: Pour dix minutes.

M. BIENVENUE: Ça va dépasser le dix minutes.

M. BURNS: On est prêt à "tougher" ça, nous autres.

M. BIENVENUE: C'est le bout le plus long et le plus ennuyant de tout ce que j'avais à dire aujourd'hui, vous avez une idée si ça va être ennuyant!

M. BURNS: C'est-tu celui qui vient de passer qui est le plus ennuyant?

M. BIENVENUE: Non, non, celui à venir. M. BURNS: Ah! bon. Ça va être beau.

M. BIENVENUE: Je l'ai indiqué moi-même. Je l'ai indiqué moi-même.

M. BURNS: Tiens, un autre chevalier de l'illégalité. Lui aussi, tiens, le premier ministre qui a voté pour une chose illégale le 28 juin.

M. BOURASSA: La consigne d'annulation, ça c'est illégal.

M. BURNS: Ah non, c'est pas illégal. Mais vous votez pour des choses illégales, M. le premier ministre, ç'a pas de sens!

LE PRESIDENT: A l'ordre! M. BURNS: C'est terrible!

M. BIENVENUE: Je viens de lui dire que je ne voulais pas qu'il vienne faire de trouble à ma commission.

M. BURNS: Non, je dois dire que je l'ai provoqué, je fais amende honorable. D'habitude c'est le contraire, mais, là, je me suis vengé un petit peu.

M. BIENVENUE: Alors, ce pourquoi, M. le Président, ce pourquoi nous nous posons de sérieuses questions sur la question de la juridiction elle-même, sérieuses réserves... J'ai pas voulu indiquer que celle-là pourrait nécessairement faire l'objet de cette même motion dont nous parlons depuis le début de la séance, mais je voudrais quand même en faire part à la commission, de cette réserve sérieuse qui me préoccupe, sujet à tout ce qui pourrait survenir par la suite. Et, pour être sûr qu'elle a été exprimée, qu'elle a été portée à la connaissance de la commission, cette réserve se base sur la juridiction même des tribunaux versus la nôtre ou la nôtre versus celle des tribunaux, au sujet du droit de disqualifier ou pas un membre de l'Assemblée nationale.

M. BURNS: Remarquez, M. le ministre, je vais vous écouter avec toute la patience dont je suis capable, aujourd'hui —pas toujours, mais aujourd'hui— mais, encore une fois, je fais la même remarque, parce que je connais l'argument, vous l'avez déjà soulevé.

M. BIENVENUE: Non, pas celui-là.

M. BURNS: Bien oui, il a été soulevé par le président, peut-être pas vous. Mais, en tout cas, il a été soulevé à l'Assemblée nationale. Je m'excuse de vous avoir associé à cette illégalité, M. le Président, mais il a déjà été soulevé et l'Assemblée nationale s'est quand même prononcée. Alors, je fais la même réserve à l'endroit de vos remarques, puis vous entrez dans une quatrième catégorie de remarques qui ont fait l'objet de discussions à l'Assemblée nationale et par la suite desquelles il y a eu un vote à 85 contre 2. Il semble qu'actuellement il y a seulement nos amis Samson et Fabien Roy qui se sont pas lancés dans l'illégalité.

UNE VOIX: Ils se sont abstenus.

M. BIENVENUE: J'allais justement dire que mon ami, le député de Maisonneuve et ses collègues avaient voté, comme nous, pour l'illégalité et que justement...

M. BURNS: Sauf que nous autres, on trouvait que c'était parfaitement légal.

M. BEDARD (Chicoutimi): On n'a jamais prétendu que c'était illégal à venir jusqu'à maintenant.

M. BIENVENUE: Au moins nous, nous nous en rendons compte.

M. BEDARD (Chicoutimi): II faudrait aller au niveau des motifs pourquoi vous vous en rendez compte.

LE PRESIDENT: A l'ordre, un à la fois.

M. BEDARD (Chicoutimi): Si vous continuez dans votre argumentation, on pourrait peut-être le déchirer, le règlement; ça ne vaudra plus grand-chose.

M. BURNS: Vous ne trouvez pas que c'est un peu tard pour vous en rendre compte de l'illégalité?

M. BIENVENUE: Déchirer le règlement serait faire injure â ceux qui l'ont écrit...

M. BEDARD (Chicoutimi): J'ai dit: On pourrait peut-être.

M. BIENVENUE: ...aux brillants cerveaux juridiques qui l'on écrit, et parmi lesquels je me plais à reconnaître le député de Maisonneuve.

M. BURNS: Et puis je bats ma coulpe, d'ailleurs...

M. BEDARD (Chicoutimi): Si l'Assemblée nationale peut se tromper...

M. BURNS: ... à l'égard de ce règlement-là, très souvent.

Nul n'est parfait.

M BIENVENUE: C'est ce que je disais, même la Chambre n'est pas parfaite, il s'agit de...

M. BURNS: La Chambre est supposée de l'être.

M. BEDARD (Chicoutimi): ...il s'agit de tendre à la perfection.

M. LEGER: On s'en rend compte tardivement.

M. BIENVENUE: Mieux vaut tard que jamais.

M. BURNS: Vous trouvez pas que c'est un peu tard, ce soudain désir de rendre légal quelque chose d'absolument illégal?

M. BIENVENUE: II est jamais trop tard. Nos tribunaux, à tous les jours, corrigent des illégalités des tribunaux qui les ont précédés.

M. BEDARD (Chicoutimi): Tant d'argumentation tout d'un coup, alors qu'il y en a eu si peu lorsque la motion a été présentée.

M. BIENVENUE: Oui, j'ai dit que ça serait plus ennuyant et je m'en excuse, Dura lex, sed lex.

Notre loi de la Législature, au chapitre 63, commence à étudier ce qui a trait aux immunités et aux privilèges de l'Assemblée nationale, aux actes qui peuvent y être commis, qui y sont interdits, à son ordre, à la bonne conduite de ses séances, etc., etc. Ce chapitre 4 des immunités, cette section 4 des immunités et privilèges, on le sait, précède immédiatement celle qui nous concerne le plus ici, la sous-section de l'indépendance de la Législature sur laquelle je reviendrai.

On voit, M. le Président que, comme au Manitoba, qui est la cause qu'a citée lui-même le député de Maisonneuve pour appuyer sa motion devant l'Assemblée nationale et répondre au président d'alors qu'il s'agissait d'un sujet qui concernait bien l'Assemblée nationale et ses commissions, que l'Assemblée nationale était bien le forum pouvant entendre ou enquêter sur une telle affaire de disqualification. Comme au Manitoba, dis-je, on voit — et c'est à peu près le mot à mot avec un peu, comme disait M. Bellemare, de mutatis mutandis, c'est à peu près le mot à mot de la Loi de la Législature du Manitoba — notre article 66 qui dit spécifiquement que — et je cite: "Les actes suivants sont défendus et considérés comme infraction aux dispositions du présent paragraphe". A titre d'exemple, j'en prends un ou deux au fil des paragraphes. "Premièrement, commettre des voies de fait sur la personne d'un député, ou proférer des injures ou publier des écrits diffamatoires à son adresse, pendant la session, ou pendant — tiens, pour faire plaisir au député de Chicoutimi — les vingt jours qui précèdent et les vingt jours qui suivent chaque session". On comprend tout de suite, de cela, que s'il s'agissait de faits, de voies de fait impliquant un député qui seraient survenues sur la rue, dans un bar et en dehors de la période, l'Assemblée nationale n'aurait absolument aucune juridiction, et ce sont les tribunaux de droit commun qui auraient juridiction pour enquêter sur les faits reprochés à un député ou à l'assaillant d'un député, peu importe.

On voit tout de suite que l'Assemblée nationale ici, à ce chapitre, comme au Manitoba, se préoccupe elle-même de l'ordre, des immunités de ses membres, de leur dignité, etc. Il y en a d'autres et on retrouve, à peu près tout le long, la notion de l'Assemblée nationale: "Commettre des voies de fait sur la personne des officiers de l'Assemblée nationale, suborner ou tenter de suborner quelqu'un au sujet du témoignage qu'il doit rendre devant l'Assemblée

nationale ou l'une de ses commissions et cela malgré qu'il existe dans le droit commun, en l'occurrence le droit pénal canadien, une disposition interdisant la subornation des témoins, malgré que ce soit déjà dans le code pénal, la Loi de la Législature a voulu en faire une offense spécifique dans les mêmes termes, mais se rapportant à un témoin qui est devant l'Assemblée nationale, comme un de ceux que nous entendrons au cours des prochains jours.

Tout cela est très limitatif, et je l'ai dit, et ce n'est pas de droit commun. A titre d'exemple justement, cette disposition sur la subornation des témoins.

On retrouve la même... les mêmes offenses, les mêmes interdictions devant... à la Loi de la Législature du Manitoba. Mais on verra tout à l'heure qu'il y a entre la Loi de la Législature du Manitoba et la nôtre certaines différences auxquelles j'attache une importance particulière, et qui ont joué dans la décision de Steinkopf auquel a fait allusion le député de Maisonneuve.

Alors à la suite de cette énumération d'offenses dont je viens de parler qui sont spécifiques à l'Assemblée nationale, on voit que le législateur a voulu indiquer clairement dans cette même loi que l'Assemblée nationale non seulement pouvait mais devait agir, avait une juridiction exclusive dans le cas de ces offenses à l'exclusion de tout autre tribunal de droit commun, pénal, civil ou autres. Quant au jugement, quant au droit de juger une de ces offenses et quant à la sanction, quant à la punition, et c'est l'article 70 qui nous dit: Quiconque commet une infraction aux dispositions du présent paragraphe devient passible d'un emprisonnement pour telle période n'excédant pas un an, qui est déterminée par l'Assemblée nationale. H est pas question de tribunal, comme on le verra plus loin, s'occupant du recouvrement d'amendes contre un député à la demande de n'importe quel justiciable; c'est l'Assemblée nationale elle-même qui juge, qui sanctionne et qui juge après avoir enquêté comme on le voit à 71: Toutes les infractions aux dispositions du présent paragraphe peuvent être l'objet d'une investigation sommaire de la part de l'Assemblée nationale, de la manière et en la forme qu'elle juge à propos. Pour les fins du présent paragraphe, l'Assemblée nationale est investie, voilà! est investie de tous les pouvoirs et de toute la juridiction nécessaire pour examiner, juger et punir ces infractions et pour infliger et faire exécuter la peine prescrite par le présent paragraphe pour ces infractions.

On a, je l'ai dit presque mot à mot, les mêmes dispositions dans la loi du Manitoba, qui indiquent, comme ici, clairement qui a juridiction et qui, seul, a juridiction.

Lorsqu'on arrive aux articles 75, j'allais dire ou 79, je vais dire et 79, qui sont ceux qui nous préoccupent, sujet à la motion dont j'ai parlé précédemment, tout ce que l'on retrouve...

LE PRESIDENT: Est-ce que vous avez une objection qu'on mentionne qu'il soit six heures?

M. BIENVENUE: Bien au contraire, M. le Président.

LE PRESIDENT: La commission suspend ses travaux jusqu'à...

M. BURNS: Huit heures quinze. LE PRESIDENT: ... vingt heures quinze. (Suspension de la séance à 17 h 59)

Reprise de la séance à 20 h 23

M. LAVOIE (président de la commission de l'Assemblée nationale): A l'ordre, messieurs!

M. BIENVENUE: Au moment de la suspension, M. le Président, j'avais indiqué que, à la suite des autres moyens de droit que nous voulions voir inscrits dans une motion à venir pour, motion afin de faire préciser, ou améliorer, ou légaliser notre mandat par l'Assemblée nationale, j'avais indiqué que même si cette dernière partie, que j'avais qualifiée avec au moins un sourire, que j'avais qualifiée de plus ennuyante mais que je devrais plutôt qualifier de plus aride, que cette, même cette dernière partie était, comme je l'ai dit, ennuyante ou aride et ne devait pas nécessairement elle, conduire à la même motion ou faire l'objet d'une demande à la Chambre au sujet du mandat, je tenais quand même à faire part à cette commission, à nos collègues de l'inquiétude que j'avais sur le droit même de la Chambre et de la commission d'enquêter, d'arriver à des conclusions quant à l'inhabilité du député de Johnson ou de l'un quelconque de ses membres dans le cas des articles, et surtout de ceux-là, je ne parle pas de toute la Loi de la Législature mais dans le cas des articles 75 et 79 de la Loi de la Législature. Et j'avais commencé, M. le Président, à démontrer, à la face même de notre Loi de la Législature, aux articles 66, qui indiquait des infractions bien spécifiques à la conduite des travaux parlementaires de la Chambre, à la dignité qui devait entourer ces travaux, aux privilèges des membres de la Chambre et subséquemment aux articles 70 et 71, que la Chambre ici, que l'Assemblée nationale au Québec, par sa Loi de la Législature, avait indiqué spécifiquement, avait insisté pour indiquer dans la loi quelle était seule exclusivement compétente pour entendre des litiges s'y rapportant et pour juger, pour juger, enquêter, juger et pénaliser ses membres, ses propres membres ou tous autres qui auraient pu enfreindre les règlements en question.

Et j'avais dit également que cette partie de notre loi, mutatis mutandis, était exactement la même que celle du Manitoba.

On a constaté, M. le Président — et je pense que c'est là que nous étions rendus ou à peu près au moment de la suspension — qu'à 75, à cette section différente qui ne traite plus des immunités et privilèges de l'Assemblée, mais bien de l'indépendance de la Législature, aux articles 75, dis-je, et les suivants et notamment 79, qui nous intéresse aussi, on ne parlait pas de juridiction, ni exclusive ni autre, on ne reconnaissait pas de cours ou de tribunaux et on se limitait, on se bornait à dire que, dans le cas de 75, on se bornait à dire: "N'est éligible comme député à l'Assemblée nationale, et ne peut voter en cette qualité..." et dans le cas de 79, "ne peut-être élu député ni siéger ou voter en cette qualité".

On parle, plus loin, j'y arrive, de la procédure lorsqu'on dit: "Nul, s'il a été déclaré inéligible..." C'est d'ailleurs l'article 81 qui se rapporte à ceux, aux articles que je viens de nommer. On ne parle pas cette fois de la juridiction non seulement exclusive de la Chambre mais on ne parle pas de la juridiction de la Chambre, on ne nomme pas la Chambre, on ne nomme pas l'Assemblée nationale. C'est d'ailleurs à 81 que l'on fait allusion, pour la première fois, aux sanctions et à la procédure pour arriver aux sanctions. On dit, et c'est absolument, c'est peu éloquent, ça dit peu de choses, quant à la juridiction de la cour ou du forum, on dit: "Quiconque, déclaré inéligible ou inhabile à siéger ou à voter par les articles 75, 77, 78 ou 79, siège ou vote", etc. Alors on dit bien déclaré inéligible mais on ne dit pas par qui, contrairement à la juridiction que l'on attribuait à la Chambre de façon exclusive un peu plus tôt.

Alors, déjà ça permet de se poser des questions et je reviendrai dans un... dans un instant à la Loi de la Législature du Manitoba, à laquelle j'ai fait allusion cet après midi.

Mais on dit tout de même, M. le Président, à 81, que quiconque a été déclaré — je viens de le dire — inéligible ou inhabile, etc. siège ou vote encore encourt une amende de $1,000 pour chaque jour qu'il siège ou vote ainsi; cette somme peut être recouvrée par quiconque — donc pas par la Chambre comme on l'a vu à 70 lorsqu'on disait que la Chambre pouvait prononcer un emprisonnement pour telle période n'excédant pas un an, cette fois-ci on ne parle plus de la Chambre, on parle d'un tribunal et — quiconque peut être le demandeur, le dénonciateur.

Je remarque tout de suite, M. le Président, qu'on peut se dire, on peut penser qu'il s'agit évidemment, quant à la déclaration d'inéligibili-té, ou d'inhabilité, qu'il s'agit évidemment, qu'il peut s'agir évidemment d'un autre tribunal que l'Assemblée nationale. Car même si le raisonnement peut paraître simpliste je dirai que cet article 81 serait inutile quant au recouvrement de l'amende pour un député qui aurait quand même siégé après avoir été déclaré inhabile.

Cet article serait inutile parce que si un député qui aurait quand même siégé après avoir été déclaré inhabile, cet article serait inutile parce que, si un député était déclaré inéligible ou inhabile par la Chambre elle-même, il est évident qu'elle l'empêcherait elle-même, cette même Chambre, de siéger puisqu'elle aurait été le tribunal de dernière instance, qu'elle aurait eu une connaissance juridique de cette condamnation, l'ayant elle-même prononcée. Je vois fort bien le sergent d'armes, sous vos directives, expulsant ou empêcher de siéger le député dont il s'agit, puisque nous l'aurions nous-mêmes condamné. D'ailleurs, il serait illogique que l'Assemblée nationale, après avoir elle-même statué dans le cas de 75 ou de 79, après avoir elle-même statué, il serait illogique de la voir

confier à un tribunal de droit commun la poursuite en recouvrement de l'amende, alors que, pourtant, et on l'a vu à 71, elle a le pouvoir de statuer elle-même sur les sanctions, allant d'ailleurs plus loin que l'amende, allant jusqu'à l'emprisonnement, quant aux infractions ou interdictions qui sont jugeables par elle et seulement par elle.

Tout ça pour dire, M. le Président, que la lecture de ces articles jusqu'à date n'a pas pour effet de calmer mes réserves, mes inquiétudes ou mes préoccupations quant à la juridiction ou conflit de juridiction, Chambre versus tribunaux, dans les cas qui nous occupent.

Nous allons voir un peu plus loin, M. le Président, que les articles qui suivent n'ont pas pour effet de calmer davantage nos inquiétudes. A l'article 83, dans le cas d'un député devenu inhabile, la Loi de la Législature dit ce qui suit: "Si un député devient inhabile, aux termes du présent paragraphe, à siéger ou à voter dans l'Assemblée nationale, son élection devient nulle et son siège vacant, et un nouveau bref est émis immédiatement pour une nouvelle élection". On pense, M. le Président, à peu près automatiquement à la cour Supérieure ou à un autre tribunal de droit commun, quand on dit "son élection devient nulle et son siège vacant", à une cour de droit commun et non pas à une décision de la Chambre, comme on le verra dans le cas de 88 qui va suivre.

A 88, ou comme à 70 et à 71, le législateur a confié la juridiction à l'Assemblée nationale de poursuivre, de juger et de punir. Et il le dit, le législateur. Dans le cas de 83, qui réfère toujours à 81, à 75, à 79 et aux autres articles qui sont dans une sous-section séparée, l'indépendance de la législature, on dit que dès que le député devient inhabile, et toujours on ne dit pas par qui, à cause de qui et, suite à la décision de quel tribunal, on dit: Immédiatement, son élection devient nulle et son siège vacant.

Et on ne dit pas que c'est la Chambre qui le fait, contrairement aux articles que j'ai cités.

Par ailleurs — et ça n'a pas pour effet, une fois de plus, de calmer mes inquiétudes — à 86 et à 87 qui sont des offenses qui, elles, se rapportent directement à la Chambre et à ses membres et à des opérations auxquelles il ne peut pas se livrer : récompense interdite à 86 et le cas de l'associé d'un député qui intervient à 87, on dit — et je le lis rapidement — à 86: "II est interdit à un député d'accepter ou de recevoir directement, ou indirectement, quelques frais, honoraires ou récompenses quelconques au sujet d'un projet de loi, d'une résolution ou d'une matière quelconque soumis ou qui doit être soumis à la considération de l'Assemblée nationale ou d'une de ses commissions, soit pour appuyer ou ne pas appuyer, soit pour repousser ou ne pas repousser ce projet de loi, cette résolution ou cette matière quelconque".

Je viens de le dire, c'est une matière qui concerne directement la Chambre, comme les infractions auxquelles j'ai fait allusion à 70 et 71, celles où l'ordre de la Chambre est enfreint par des personnes qui se livrent à des voies de fait, qui molestent qui subornent les témoins, etc. Et de même, à 87, "II est interdit à quiconque exerce sa profession avec un député —on pense à un associé légal, un associé dans une société légale — de donner ou de signer de son nom un avis concernant un projet de loi, de comparaître devant une des commissions, etc. etc." Même chose. Alors, dans ces accusations précises, qui comme à 68 concernent la Chambre, que la Chambre, exclusivement la Chambre et pas les tribunaux de droit commun, la loi est précise. Qu'est-ce qu'elle dit? 88: "Une infraction par un député à l'article 86 — celui que je viens de lire — est considérée comme un acte illégal portant atteinte à l'indépendance de la Législature et, lorsqu'elle est établie, la Chambre doit décréter l'annulation du mandat du député, déclarer son siège vacant et ordonner son expulsion", contrairement à 83. Je m'excuse pour cette partie aride, M. le Président, mais je voudrais tellement que les membres de cette commission comprennent mes préoccupations, pour ne pas dire plus. Comme à 83 j'avais indiqué que le siège devenait automatiquement vacant, le bref était émis immédiatement et on ne disait pas par qui; dans ce cas-ci, on dit que la Chambre doit faire ces choses et la Chambre, pas les tribunaux. 90 va plus loin et continue de tracer à la Chambre son devoir, ses missions.

Je lis: "L'infraction prévue par l'article 86 doit être établie devant l'Assemblée nationale ou devant l'une de ses commissions — exemple, la nôtre— et si l'enquête a lieu devant une commission, son rapport est soumis à l'approbation de l'Assemblée nationale." En bref, en résumé, ce qui s'en dégage, M. le Président, c'est qu'il s'agit là de la même chose, du même traitement, de la même solution dans la loi que pour les articles 70 et 71 lorsque le législateur, au Québec, veut que l'Assemblée nationale soit le seul tribunal ou organisme qui juge, qui enquête, qui juge et qui pénalise un de ses membres, la loi le dit carrément. Elle le dit expressément et on en a la preuve à certains des articles que je viens de lire.

Ceci m'amène, M. le Président, comme je l'avais annoncé, à cette décision du Manitoba sur laquelle s'est appuyé, de façon moins prioritaire, le député de Maisonneuve à l'appui de sa motion l'autre jour, à l'appui de sa demande à la Chambre de reconnaître que cette commission pouvait enquêter, à l'exclusion des tribunaux, comme vous aviez semblé le penser ou au moins y faire allusion. Je dis que précisément au Manitoba, ce n'est pas la même chose. Le savant juge qui a rendu la décision dans la cause de Steinkopf aurait pu abréger sa décision, faire fi d'un tas de considérations et de considérants juridiques et dire clairement —et c'eût été plus simple — qu'en vertu de la Loi du Manitoba il n'est pas question d'autres

tribunaux, d'autres forums, d'autres juridictions parce que seule l'Assemblée nationale, l'Assemblée législative du Manitoba, seule, a juridiction pour entendre tout cas d'inhabilité ou d'inégibilité d'un de ses membres, pas seulement sur les articles qui, comme les nôtres ou par analogie aux nôtres, portent sur les règles ayant trait à sa conduite interne, etc., je répète, 66 et suivants ou encore 88 et suivants, pas seulement sur ceux-là.

Toute la Loi de la Législature du Manitoba, chaque fois qu'il est question de la disqualification d'un de ses membres, toute la loi, pas seulement certaines parties comme dans notre cas, est soumise à la juridiction exclusive de la Chambre au Manitoba. Les tribunaux de droit commun ne peuvent pas y toucher et c'est l'article 41, paragraphe 2.

Au Manitoba, après avoir énuméré, comme je l'ai dit cet après-midi et il y a un instant, que dans le cas des articles précis où il est question d'assaut, de lésions, d'ordre en Chambre, de subornation de témoin, où j'ai dit que, comme nous, c'est à la Chambre, le Manitoba n'a pas voulu rien échapper, n'a pas voulu que rien n'achoppe aux pouvoirs de sa Législature et a fait une espèce de paragraphe, article de loi omnibus, qui ramasse tout, puis qui dépouille, qui éloigne les tribunaux de droit commun. Et je lis — c'était la loi telle qu'elle s'appliquait au moment de la décision Steinkopf; elle a été amendée depuis, mais la même disposition se retrouve à un article qui porte le numéro suivant — "For the purposes of this Act, the Assembly shall possess all such powers and jurisdiction as may be necessary or expedient for inquiring into, judging and pronouncing upon the commission or doing of any of the acts, matters or things, and awarding and carrying into execution the punishment thereof provided by this Act. (Statuts revises du Manitoba, chapitre 116, article 42).

Donc, au Manitoba, on a été plus clair que dans notre Loi de la Législature dont j'ai dit ce que j'ai dit cet après-midi, j'ai dit, notamment, qu'elle avait grandement besoin d'un ménage. On l'a dit clairement. C'est la Législature, point. Que la cour Supérieure, que la cour d'Appel, que les tribunaux de droit commun restent chez eux; nous restons chez nous. Ce n'est pas le cas ici, comme on a pu le voir.

M. le Président, j'avais dit avant la suspension qu'il y avait cette partie plus aride qui pourrait prendre plus de temps, imposer aux membres de cette commission l'obligation plus ou moins intéressante de m'entendre plus longuement. J'avais raison, M. le Président. J'ai relu pendant les heures de suspension la jurisprudence, les auteurs, la doctrine. C'est la partie la plus aride, et c'est aride effectivement. Les auteurs sont partagés. La jurisprudence est partagée. Il est amusant de lire ces volumes. Je pense à May, M. le Président, je pense à Bourinot où, pendant quatre lignes, on me donne raison et puis, les quatre lignes suivantes, on me donne tort, c'est-à-dire raison, par anticipation, à mon ami, le député de Maisonneuve. Un des auteurs ou un des savants juristes s'exprimant, je pense, a bien résumé le tout, en disant que ce fameux litige, ce fameux combat entre les cours, d'une part, et les Chambres législatives, de l'autre, est à peu près ou, à toutes fins pratiques, impossible à résoudre.

Alors, je n'imposerai pas, M. le Président, à cette commission la lecture des auteurs.

Je le ferai, évidemment, si mon ami, le député de Maisonneuve, en cite certains qui sont en sa faveur; je ferai le petit jeu, pas nécessairement intéressant pour les membres de la commission, d'en citer qui sont en ma faveur, mais c'est du quatre lignes en quatre lignes, cette affaire-là. Mais cela n'a pas pour effet, pour tout ça, de calmer mes inquiétudes. Cela n'a pas pour effet de me faire croire que, de façon certaine et absolue, nous avons juridiction au Québec, et surtout face au silence, à la confusion ou à l'imprécision de notre loi.

Cependant, j'ai trop dit, et si je le fais une nouvelle fois, ce sera la cinquième fois, que, nonobstant l'exigence de légalité que j'ai formulée, nous n'avions rien, ni ne voulions rien cacher. Nous ne cacherons rien. M'arrêter à vouloir inscrire ce point de droit dans la motion qui est à venir, avec la possibilité d'une référence aux tribunaux, ce pourrait être un moyen qui réglerait, qui calmerait mes inquiétudes. Mais je sais fort... je sais trop bien, je sais fort bien qu'en certains milieux on pourrait dire: Un autre délai, un autre moyen dilatoire pour fuir les faits, pour ne pas mettre les faits à la portée du grand public. Cela irait, j'en suis convaincu, à rencontre des idées du député de Johnson, et je le présume et je l'espère à l'encontre des idées des membres de ce côté-ci de la commission et, j'en suis sûr, de ceux de l'autre côté de la commission, des membres du parti de l'Opposition à la commission.

Mais je voulais quand même, M. le Président, que ces réserves, ces inquiétudes soient formulées. Je ne sais trop pourquoi. On ne connaît pas l'avenir et je ne caresse pas de dessein obscur ou illicite en disant cela. Il n'y a pas de stratégie là-dedans. Je voulais au moins que l'on sache que nous nous posons des questions. Si ça peut être bénéfique pour l'avenir, pour une nouvelle... pour une refonte de cette loi, tant mieux. Si la loi veut être plus claire à l'avenir, tant mieux. Mais je voulais faire part de mes inquiétudes à la commission, mais pas du tout pour en arriver à une conclusion du genre de celle que je viens de décrire.

Aussi, sous les circonstances, M. le Président, je pense que ça complète les observations que je voulais faire en loi et, nonobstant ces réserves et ces inquiétudes, j'ai hâte — et je parle à titre bien personnel — autant que tous les membres de cette commission, autant que le principal intéressé, autant que ceux qui l'ont accusé, autant que le public qui a droit de savoir comment agissent ses représentants, s'ils sont

dans la légalité ou pas, s'ils ont été dans la légalité ou pas... C'est le droit de tout contribuable ou justiciable au Québec de savoir ce qui en est de ceux qu'il a élus.

Par conséquent, ces dernières réserves ne me conduiront à aucune conclusion devant faire la base de cette motion omnibus à laquelle j'ai fait allusion.

Evidemment, M. le Président, ça apporte une dernière observation. C'est que la question de droit, une fois que l'on en aura disposé par cette motion dont j'ai parlé et j'ai hâte, autant que n'importe qui, que nous en arrivions aux faits, à la preuve, à toute la preuve, à tous les faits, limités par un seul barème ou critère: la légalité. Je crois l'avoir dit assez souvent.

Le député de Johnson a le droit d'être traité ou jugé au moins aussi légalement que le dernier des criminels de bas étage.

M. BURNS: Est-ce que vous faites une motion?

M. BIENVENUE: Bien si..., à moins que le député de Maisonneuve ait des remarques ou des observations à faire.

M. BURNS: Bien, c'est parce que je vous ai entendu argumenter une série de choses depuis cet après-midi, pis j'écoute, pis je présumais...

M. BIENVENUE: II y aura une motion mais je veux dire, avant...

M. BURNS: ... qu'une motion...

M. BIENVENUE: ... que de la faire, si le député de Maisonneuve...

M. BURNS: ... viendrait éventuellement.

M. BIENVENUE: ... a des choses préliminaires à dire, j'ai aucune objection. Sinon, j'arriverai à l'histoire de la motion.

M. BURNS: Bien, écoutez, j'ai dit cet après-midi, je pense bien, de façon assez claire, que je considère d'une part que la commission n'a pas la compétence pour corriger une motion qui lui donne un mandat pour changer le mandat qui lui est donné. En ce qui me concerne, jusqu'à nouvel ordre, le mandat qui nous a été donné apparaît aux procès-verbaux de l'Assemblée nationale que le président a cités, d'ailleurs, au début de cette séance.

Je pourrais, M. le Président, élaborer longuement sur tous ses éléments qui ont été soulevés par le député de Crémazie, par le ministre de l'Immigration, principalement sur les quatre points. Si je les résume, c'est: il s'objecte, d'une part, à l'alternative qui est laissée entre la possibilité de trouver une contravention à l'article 75 ou à l'article 69 de la Législature, de la Loi de la Législature. En second lieu, il prétend que l'aspect inéligibilité n'est pas une chose que nous pouvons examiner alors qu'encore une fois, et ça participe du même argument, encore une fois, c'est un mandat que nous avons reçu de l'Assemblée nationale. Troisièmement, il argumente aussi qu'avant de siéger, ça ne concerne pas du tout l'Assemblée nationale, et là-dessus, on pourra y revenir également, et qu'enfin, quatrièmement, et progressivement, ça arrive à une déclaration, à toutes fins pratiques, que l'Assemblée nationale n'a même pas compétence pour juger de la motion. C'est...

M. BIENVENUE: Non. M. BURNS: Bien, écoutez. M. BIENVENUE: Non.

M. BURNS: Bien, c'est pas ça que vous nous avez dit, la quatrième, votre quatrième aspect?

M. BIENVENUE: Que je m'inquiétais... M. BURNS: Ah! Vous vous inquiétez!

M. BIENVENUE: ... que je me souciais, que j'étais pas sûr mais que, sûr ou pas sûr, on resterait ici, et j'étais pas en mesure de trancher, et j'ai pas dit que j'avais raison. Les auteurs sont partagés — excusez l'anglicisme — "half and half".

M. BURNS: Ben, écoutez, je pense que si vous pouvez me citer un cas on va vous en citer 20. Je ne pense pas que les auteurs soient aussi partagés que ça. On va partir, si vous voulez, je me refusais, M. le Président, à faire de tels genres d'argumentations parce que j'ai l'impression que j'embarque dans quelque chose qui ne nous concerne pas. J'aurai mes propres conclusions et je le fais comme n'importe quel avocat qui s'objecte à une question. Si la question est permise par le tribunal, ben l'avocat ne se prive pas du droit de contre-interroger quand même à ce moment-là toujours sous la réserve de l'objection.

Je pense qu'il est important d'abord de se dire que, simplement sur l'aspect de la compétence, c'est peut-être ça que j'aimerais calmer au point de vue des inquiétudes si je peux...

M. BIENVENUE: Je ne demande pas mieux. Je ne demanderais pas mieux, mais je suis inquiet.

M. BURNS: ... les inquiétudes du député de Crémazie. Le député de Crémazie a peut-être pas pris connaissance et d'ailleurs il n'a pas été tellement friand d'autorités dans son argumentation; il a été plus friand de ses propres interprétations, que je respecte mais que je ne partage pas.

M. BIENVENUE: J'ai bien dit que j'en avais mais que ça serait le débat "half and half".

M. BURNS: Oui.

M. BIENVENUE: II peut être long et aride. Je ne sais pas ce que ça donnera mais j'les ai.

M. BURNS: Ben, M. le Président...

M. BIENVENUE: De toute façon, je veux rester ici moi.

M. BURNS: Ben, moi aussi.

M. BIENVENUE: Bon bien à ce moment-là il n'y a pas de problème alors.

M. BURNS: C'est pour ça que j'ai sauté la lecture...

M. BIENVENUE: Je l'ai dit clairement. M. BURNS: O.K. ça va.

M. BIENVENUE: J'ai le droit d'être inquiet mais de rester ici.

M. BURNS: Moi je reste ici, alors ça va bien.

M. BIENVENUE: Tout le monde reste ici.

M. BURNS: Parfait.

M. LEGER: Procédons à l'enquête.

M. BURNS: Alors, faites votre motion.

M. BIENVENUE: Alors, au sujet de la motion, M. le Président, j'aimerais avoir une période de suspension, et je dis clairement pourquoi. La motion elle est commencée mais elle n'est pas finalisée, elle n'est pas prête, elle n'est pas dans sa forme définitive et j'aimerais avoir une période de suspension pour la compléter. Je détesterais arriver devant cette commission avec une motion imparfaite, mal faite, j'ai assez parlé d'illégalité que je ne veux pas faire la même chose. J'aimerais avoir une période de suspension, M. le Président, de d'au moins une heure, je répète toujours que ces heures-là, des heures ce sont des heures, c'est rien comme inconvénient à côté de celui que pourrait subir le député de Johnson si...

M. BURNS: Avant que vous fassiez votre motion est-ce que... et je ne... je n'insisterai pas là-dessus je vais tout simplement soulever la question. Le député de Johnson étant présent, le député de Johnson ayant dit ce qu'il a dit le 28 juin, est-ce que je peux demander, même s'il n'est pas membre de la commission, au député de Johnson, s'y partage le point de vue soulevé par... les points de vue soulevés par le ministre en ce sens qu'y veut restreindre la portée de la motion, il veut que une partie de l'argumentation soit mise de côté quant à la preuve à être soumise à cette enquête? Est-ce que...

M. BIENVENUE: En droit on appellerait ça une "leading question". Je n'aurais pas d'objection si mon ami le député de Maisonneuve voulait demander au député de Johnson, j'espère qu'y m'écoute, s'il voulait demander au député de Johnson, son avocat est d'ailleurs présent, s'il est en faveur d'être jugé dans la légalité ou pas. Je n'ai pas d'objection à ce qu'il lui pose cette question-là.

M. BURNS: Non, je n'ai pas demandé ça.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... à ce moment-là.

M. BURNS: J'ai tout simplement, je demande...

M. BIENVENUE: Je n'ai pas d'objection.

M. BURNS: Je demande tout simplement au député, au député de Johnson, s'y veut me répondre, s'y veut pas me répondre, c'est pas plus grave que ça, j'veux dire, c'est grave mais j'ai pas à l'interpréter. Si après avoir...

M. BIENVENUE: ... c'est grave, vous venez de l'interpréter.

M. BURNS: Ben, c'est grave, dans le sens que c'est lourd de conséquences. C'est ça que ça veut dire, grave. Bon, alors, dans ce sens-là, c'est grave.

M. BIENVENUE: Bon.

M. BURNS: Mais je n'ai pas interprété, cependant, son intention et quoi que ce soit. Je vais m'en abstenir, d'ailleurs. Mais je dis que c'est lourd de conséquences. Je dirai pour qui éventuellement. Mais, après avoir lu, à la page 1384, le désir apparemment enthousiaste du député de Johnson de faire la lumière dans les plus brefs délais possible relativement au problème que je venais de soulever et relativement à ce que lui-même qualifie, dans son intervention, de "cette affaire"... Or, cette affaire, qu'est-ce qu'y avait devant l'Assemblée nationale, à ce moment-là? C'était ma motion. Bon. Je veux savoir, j'aimerais savoir, si le député de Johnson veut me répondre, s'il est d'accord avec la restriction du corridor de l'enquête que semble vouloir suggérer le ministre de l'Immigration. Et, en particulier, y'est peut-être pas inutile de rappeler certains propos, même si je l'ai cité après-midi, pour simplement rafraîchir la mémoire de tout le monde, rafraîchir certain... la mémoire de tout le monde sur les propos du député de Johnson. Et, en particulier, je lis ceci: "Je dirai simplement ceci — c'est le député de Johnson qui parle — 1 ) Je souhaite, maintenant plus que jamais, après avoir entendu le député de Maisonneuve, que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse et qu'elle fasse, le plus tôt possible, enquête sur cette

affaire et que celle-ci — cette affaire — soit vidée dans les plus brefs délais". Je m'interromps ici dans ma citation, M. le Président. Cette affaire, c'était la motion que j'avais déposée et qui a été adoptée à 85 contre 0.

Plus loin, le député de Johnson — je le rappelle encore une fois — nous dit: "Si nous avons bien entendu — donc il m'a écouté — nous avons vue que, déjà, bien des failles existent dans la motion telle que présentée, et la commission aura à décider — et j'insiste sur les mots qui viennent — du fond de cette affaire" ; non pas de la forme. Le député de Johnson en est conscient.

M. BIENVENUE: Totalement d'accord.

M. BURNS: "... du fond de cette affaire et je lui fais confiance totalement". Et finalement, il termine en disant: "Je veux donc soumettre à l'Assemblée nationale mon point de vue, je leur fais confiance, et je demande que la commission de l'Assemblée nationale siège au plus tôt pour vider cette affaire". M. le Président, si j'ai bien entendu l'argumentation du ministre de l'Immigration cet après-midi, il veut faire certaines restrictions à la motion. Il veut restreindre le corridor de l'enquête, chose que, moi, je n'avais pas compris comme étant dans l'optique du député de Johnson. J'aimerais savoir, si le député de Johnson veut me répondre, si je l'ai mal interprété quand je l'ai lu ou bien encore s'il a changé d'idée depuis.

M. BIENVENUE: Bon, alors, si vous me permettez, avant que le député de Johnson réponde, je relis ce que vous venez de lire qui, sauf erreur, est bien de lui, selon le journal des Débats. Et je le cite, et c'est lui qui parle: "Si nous avons bien entendu, nous avons vu que déjà..." Alors, en voilà au moins un, ma foi du bon Dieu, qui aurait vu l'illégalité de la Chambre et je lui rends hommage.

M. BURNS: Bien, il y a le leader, il y a le leader du gouvernement, il y a le leader du gouvernement qui a soulevé des points de vue et le président de l'Assemblée nationale a décidé de mettre aux voix la motion comme telle.

Donc, y'avait un autre moyen tant par le député de Johnson que par, peut-être, le leader du gouvernement, c'était de proposer un amendement à la motion, chose qui n'a pas été faite.

M. BIENVENUE: Je reprends. Si nous avons bien entendu et c'est lui qui parle, nous avons vu que déjà bien des failles existent dans la motion telle que présentée, sous-entendu évidemment par le député de Maisonneuve, et la commission aura à décider du fond de cette affaire, je lui fais confiance totalement. Bien des failles existent dans la motion telle que présentée et la commission aura à décider du fond de cette affaire.

M. BURNS: Du fond.

M. BIENVENUE: Oui. M. BURNS: C'est bien ça.

M. BIENVENUE: Je n'ai pas vu nulle part que le député de Johnson, qui a souligné les failles, ait dit qu'il se soumettait à ces failles, qu'il les acceptait et souhaitait être jugé, même dans l'égalité, même dans l'illégalité. J'ai pas tout lu, mais j'ai pas vu ça à date. Et, de toute façon, je vous avoue que je serais surpris que le député de Johnson, avocat, membre du Barreau, aime l'illégalité, souhaite être jugé dans cette illégalité. Je veux pas présumer de ce qu'il pense, je peux pas présumer qu'il aime ou qu'il aime pas l'illégalité, mais moi je l'aime pas, puis j'en veux pas, puis on n'en aura pas.

M. BURNS: Puis-je vous dire, M. le ministre, qu'au départ, ça c'est votre prétention concernant l'illégalité et ça, je suis bien d'accord à l'argumenter éventuellement aux bons endroits et aux bons moments. Mais moi, je partage pas du tout votre avis concernant l'illégalité. Il y a un tas d'autorités que vous ne nous avez pas citées, comme j'ai dit tout à l'heure. Vous avez pas été tellement friand, vous avez pas été tellement volubile sur vos autorités, sauf...

M. BIENVENUE: C'était pas sur la même question.

M. BURNS: ... la seule chose que je vous ai entendu citer, ç'a été l'ouvrage qui s'appelle Parlement, j'en prends à témoin le président de la commission, qui est un ouvrage qui a un caractère beaucoup plus descriptif qu'un caractère d'autorité en matière de droit parlementaire. Et ça me surprend, ça me surprend très sérieusement que le leader adjoint du gouvernement ne sache pas que l'ouvrage qu'il nous a cité, qui a été préparé par l'Union parlementaire, n'est jamais considéré comme une autorité. Et, bien au contraire, c'est simplement un ouvrage qui se veut un petit peu historique, un petit peu descriptif de ce qui existe dans les Parlements mais qui n'a aucune autorité, qui sûrement n'arrive même pas à la cheville de quelque autorité qu'on peut habituellement citer en droit parlementaire, tel Bourinot, tel Erskine May tels tous les autres auteurs que nous avons entendus...

M. BIENVENUE: Je les ai ceux-là. M. BURNS: Oui.

M. BIENVENUE: C'est dire qu'on perdrait notre temps, parce qu'on veut rester ici.

M. BURNS: Louis-Philippe Pigeon, par exemple, on peut prendre des autorités québécoises aussi, qui même...

M. BIENVENUE: Mon ancien professeur de droit constitutionnel.

M. BURNS: Oui, on voit que ça n'a pas porté fruit sous cet aspect-là, mais de toute façon, de toute façon, en tout cas, éventuellement, je suis bien...

M. BIENVENUE: Je l'ai pris à la blague. Ce que je veux dire au député de Maisonneuve, c'est que je n'ai pas cité tout le travail en question. J'ai trouvé bien à mon goût, parfaitement logique ce court passage sur les incompatibilités, qui correspond d'ailleurs à notre loi. Il y a au moins ce bout-là qui est bon dans notre loi, qui correspond à notre loi et qui dit que ça se distingue de l'inéligibilité — je pense que personne va contredire ça — et qui dit que lorsqu'un député cumule deux fonctions dont l'une serait incompatible avec l'autre, celle de député, il doit faire un choix. Je pense qu'il y a rien de choquant dans tout ça, je pense que c'est vrai. J'ai d'ailleurs ajouté que le député de Johnson s'était plié à ça sans l'avoir lu, il a fait un choix, la preuve, il est député.

M. BURNS: Le ministre parle constamment d'illégalité et jusqu'à maintenant, la seule autorité que je l'aie entendu citer, ça a été cet ouvrage-là. Moi, si je citais cet ouvrage-là en droit parlementaire, je me sentirais à peu près comme quelqu'un qui cite la famille Plouffe, de Roger Lemelin, devant la cour Suprême. Ce serait à peu près ça.

M. BIENVENUE: Ça aurait au moins l'avantage de faire rire les gens comme c'est le cas actuellement.

M. BURNS: Bien non, mais je vous dis que c'est à peu près la valeur de cette autorité-là. Elle n'est même pas signée, à part de ça, c'est un ouvrage de collaboration. Elle est pas signée.

M. BIENVENUE: Je l'ai pas citée comme autorité.

M. BURNS: Bien non mais...

M. BIENVENUE: Je l'ai pas citée comme autorité.

M. BURNS: Ecoutez, c'est parce que vous m'avez parlé tout l'après-midi, pas juste à moi, à tout le monde ici, vous nous avez parlé d'illégalité, c'est la seule autorité que vous avez été capable de nous citer.

M. BIENVENUE: Mais l'illégalité...

M. BURNS: Je vous dis tout de suite que je suis réfractaire à m'embarquer dans une argumentation sur l'illégalité quand je sens que c'est un mandat de la Chambre que nous discutons actuellement et que ce mandat-là, à mon avis, est absolument non discutable. Si la Chambre veut le rediscuter, ce mandat-là, bien on verra.

M. BIENVENUE: Si le député me permet, l'illégalité n'a pas besoin d'être appuyée sur des autorités. Je vais en donner des exemples criants, immédiats et patents.

M. BURNS: Vous avez dit vous-même que la loi que vous interprétiez était à ce point pas claire que vous pensiez que c'était peut-être...

M. BIENVENUE: Oui, mais ce n'est pas là-dessus.

M. BURNS: ... l'occasion, à un moment donné...

M. BIENVENUE: Les illégalités dont j'ai parlé...

M. BURNS: ... de revenir devant... M. BIENVENUE: ... n'ont rien à voir. M. BURNS: ... l'Assemblée nationale.

M. BIENVENUE: Les illégalités n'ont rien à voir avec ça. On a parlé d'illégalité au chapitre du mandat qui nous est confié. Si le président me permet d'emprunter un exemple à sa profession, on va parler de mandat, et de mandat au sens du code civil; et je ne citerai pas d'autorité, le code civil va me suffire. Si je confie à mon notaire le mandat de vendre ma propriété pour la somme de $100,000 et pas moins, et que je quitte, après avoir donné le mandat, pour aller me reposer sous des deux plus cléments, et que mon notaire, au moment où il a un acheteur pour le prix convenu et doit respecter son mandat, découvre, au même moment, que je ne suis pas propriétaire de la maison que je lui demande de vendre. Le mandat est illégal; est-ce qu'il doit vendre? Je dis que non. Il ne doit pas respecter le mandat.

Si la Chambre, et on l'a connu ou on aurait pu le connaître sous d'anciens gouvernements, où le chef était tout-puissant et contrôlait ses troupes d'un regard, d'un signe de l'oeil, avait décidé de confier à cette commission le mandat d'enquêter sur le comportement d'un député qui était bigame...

M. BURNS: Sauf que ce n'est pas le chef, c'est la Chambre, là. •M. BIENVENUE: Non, non. M. BURNS: C'est ça qui est...

M. BIENVENUE: Le chef, à ce moment-là, contrôlait la Chambre. Correct?

M. BURNS: C'est pas... En tout cas. M. BIENVENUE: Oui. Oui.

M. BURNS: C'est pas ça qui est en discussion actuellement.

M. BIENVENUE: Non, non mais...

M. BURNS: Je vous dis qu'un Parlement...

M. BIENVENUE: ... je donne des exemples pour prouver...

M. BURNS: ... normalement constitué...

M. BIENVENUE: ... qu'un mandat de la Chambre peut être illégal.

M. BURNS: ... qu'un Parlement normalement constitué, à moins que vous nous disiez que ça aussi c'est illégal, qu'un Parlement normalement constitué comme l'Assemblée nationale ait donné un mandat, moi, je me sens pas d'autorité, comme membre d'une commission, et puis même si j'étais la commission au complet et si je la contrôlais, je me sens pas d'autorité à discuter de ce mandat-là. C'est aussi simple que ça.

M. BIENVENUE: Mais moi, je me sens l'autorité pour ne pas participer à une chose nettement illégale, peu importe l'ordre de la Chambre. Ça, c'est mon raisonnement.

M. BURNS: Vous revenez avec votre illégalité et j'attends toujours que vous nous citiez des autorités à ce sujet-là.

M. BIENVENUE: Le député de Chicoutimi pourra instruire son collègue, le député de Maisonneuve, qui le sait d'ailleurs déjà, qu'on, ne veut pas être accusé d'une infraction alternative. Il n'y a pas d'autorité qui dit ça, c'est la loi.

M. BURNS: Sauf qu'on est en droit parlementaire et citez-moi une loi qui vous dit ça. C'est ça qui est la grosse différence. Le droit parlementaire est fait d'usages et de coutumes, est fait également lorsque la loi, comme vous l'avez si bien dit et si bien argumenté après-midi, et c'est la seule partie de votre argumentation sur laquelle je n'ai pas d'objection lorsque vous dites que la Loi de la Législature comporte des ambiguïtés, je dis. D'accord.

Maintenant, qu'est-ce qu'on fait devant ces ambiguités-là? Moi, je vous dis que le Parlement est souverain. Je vous dis également que ça me surprend, M. le ministre... Je ne veux pas politiser le débat, je ne veux pas le rendre partisan, mais ça me surprend, comme parlementaire, de voir un ministre, membre d'un cabinet, membre de l'Exécutif, venir devant une commission parlementaire et faire tout le contraire de ce qu'un parlementaire devrait faire, c'est-à-dire de tenter de restreindre l'autorité du Parlement, alors que la tendance normale d'un parlementaire devrait être tout au contraire — et ça, les autorités le disent — ...

M. BIENVENUE: Un parlementaire...

M. BURNS: ... c'est-à-dire d'élargir l'autorité de l'Assemblée nationale le plus possible.

M. BIENVENUE: Un parlementaire quel qu'il soit, avocat ou pas, ne devra jamais être parlementaire au point de souscrire et de participer à l'illégalité et je défie qui que ce soit de contredire cette affirmation.

M. BURNS: En tout cas, M. le Président.

M. BIENVENUE: Et les ambiguïtés de la loi ne feront pas que je permette — j'espère que je parle au nom de mes collègues — que je permette qu'un député risque d'être trouvé indigne, avec toutes les conséquences que ça comporte, au nom des ambiguïtés d'une loi ou d'un mandat, c'est trop grave.

M. BURNS: C'est pas.., C'est justement ça. Le problème de base ici n'est pas une question d'ambiguïté des lois ou pas; ici, nous avons mandat d'exposer des faits. Je vous ai dit, j'ai fait... j'ai posé le premier geste. J'ai dit que j'étais prêt à collaborer avec la commission, si la commission décidait — moi, je la respecte la commission; je sais bien que c'est pas moi qui va convoquer des témoins— si la commission décide de convoquer des témoins, je suis prêt à collaborer avec elle et je vous en ai donné une liste de onze. Si la commission décide de convoquer ces témoins-là, moi, je suis prêt à aider à la commission à rendre ou à remplir son mandat, c'est-à-dire de faire enquête sur la preuve prima facie qui a été énoncée, le 28 juin, à l'Assemblée nationale.

M. BIENVENUE: Je suis également prêt.

M. BURNS: Maintenant, si vous voulez faire une motion...

M. BIENVENUE: Non, je suis également prêt, j'ai indiqué...

M. BURNS: ... faites-en une et, si vous voulez suspendre pendant une heure, on va attendre.

M. BIENVENUE: ... j'ai indiqué qu'on s'opposerait pas, demain, à la motion que va faire le député de Maisonneuve; j'ai indiqué qu'on s'opposerait pas ni par des moyens de forme, ni autrement et qu'on allait tout faire pour faciliter, pour rendre, pour faire un fait réel de cette motion qui aura pour fin d'assigner des témoins qu'a suggérés, de convoquer les témoins qu'a suggérés le député.

M. BURNS: M. le ministre, puis-je vous dire avec tout le respect que vous êtes illogique dans cet énoncé-là? Parce que, d'une part, vous argumentez de façon telle que, si l'Assemblée nationale partageait votre opinion, ma motion, telle qu'elle sera formulée et avec ce que je vous

ai lu après-midi, serait en grande partie ou devrait en grande partie être amendée. Et vous dites, vous me dites tout de suite, là, qu'il n'y a pas lieu de combattre une motion que je ferai éventuellement. Vous allez la combattre, vous êtes en train de la restreindre.

M. BIENVENUE: Pas la restreindre, la rendre légale.

M. BURNS: Vous êtes en train de la restreindre.

M. BIENVENUE: La rendre légale.

M. BURNS: Vous avez droit à votre opinion.

M. BEDARD (Chicoutimi): Je pense qu'on peut pas se cacher derrière les ambiguïtés de la loi, tel que vous le dites, parce que nul n'est censé ignorer la loi; à plus forte raison, l'Assemblée nationale. Et si l'Assemblée nationale est censée connaître la loi, c'est qu'en dépit des ambiguïtés qu'elle est censée connaître, elle a quand même donné un mandat très clair à une commission qui est celui...

M. BIENVENUE: Elle s'est déjà... s'est déjà fait casser...

M. BEDARD (Chicoutimi): ... que nous avons devant nous.

M. BIENVENUE: Elle s'est déjà fait casser souvent.

M. BURNS: Quand ça?

M. BIENVENUE: La cour Supérieure s'est déjà fait casser...

M. BURNS: Dans des cas...

M. BIENVENUE: Des lois ultra vires.

M. BURNS: Oui, à quel sujet?

M. BIENVENUE: Si elle avait tort une fois...

M. BURNS: Sur des compétences fédérales utilisées au niveau provincial.

M. BIENVENUE: Si elle avait tort une fois...

M. BURNS: Citez-moi donc d'autres cas maintenant. Quand est-ce?

M. BIENVENUE: N'entrons pas dans les autres cas.

M. BURNS: Dites-moi donc un cas où une loi de l'Assemblée nationale...

M. HARDY: La loi du cadenas.

M. BURNS: Pourquoi? Parce que c'était pas de sa compétence; c'était de compétence fédérale.

M. HARDY: Oui, oui. M. BURNS: C'est ça.

M. BEDARD (Chicoutimi): ... minute, c'est pour la compétence.

M. BURNS: Bien oui. C'est ça qu'on vous dit. Les seuls cas, les seuls cas où une Législature, ou une Assemblée nationale, ou un Parlement s'est fait casser des lois, c'est parce qu'il exerçait une compétence qui n'était pas sienne. Or, je n'ai pas entendu, moi, jusqu'à maintenant, je n'ai pas entendu le ministre nous dire qu'on exerçait une compétence qui n'était pas la nôtre.

M. HARDY: Une loi ultra vires, c'est une loi qu'un Parlement adopte alors qu'il n'a pas le droit de l'adopter.

UNE VOIX: C'est ça.

M. HARDY: Parce que, actuellement...

M. BURNS: Pas de sa compétence. Moi, si je passe une loi... Disons, qu'on est le Parlement du Québec et on passe une loi au nom de l'Etat du Maine, il y a de fortes chances qu'on nous dise qu'on n'a pas d'affaire...

M. HARDY: Or...

M. BURNS: ... à la passer.

M. HARDY: Or, mu...

M. BURNS: Et on aurait bien raison...

M. HARDY: ... mutatis...

M. BURNS: ... sauf qu'à ce moment-là c'est une question de compétence.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est seulement...

M. HARDY: Mutatis mutandis...

LE PRESIDENT: Un à la fois, messieurs...

M. HARDY: Alors, mutatis mutandis lorsque l'Assemblée nationale adopte une motion, comme elle l'a fait le 28, cette motion, si vous... si vous respectez les mêmes... les mêmes comparaisons, cette motion doit être conforme aux lois auxquelles cette motion réfère. De même qu'une loi peut être déclarée ultra vires parce qu'elle va à l'encontre de la constitution, la même chose: Une motion qui est adoptée par l'Assemblée nationale peut être déclarée illégale parce qu'elle va à l'encontre des lois qui régissent cette motion.

M. BIENVENUE: Mais, me permettez-vous une remarque? On va...

M. BURNS: Est-ce peux vous lire... M. BIENVENUE: ... laisser faire...

M. BURNS: ... juste pour le "fun"... J'peux-tu vous lire quelque chose?

M. BIENVENU: Ecoutez, j'ai parlé une seconde avant.

M. BURNS: Cela n'a pas de sens de discuter de même.

M. BIENVENUE: Un cas vécu, un cas vécu... Bien vous allez voir que ça a un peu de sens, Un cas vécu, qui n'aura pas trait aux parties dramatiques de l'ultra vires, de l'empiétement sur l'autorité fédérale, que j'ai vécu en cette Chambre, que mon ami, le député de Maisonneuve, et tous ceux qui m'entourent, qui étaient au précédent Parlement, ont vécu. Il n'a peut-être pas fait la manchette des journaux mais là elle pourra le faire parce que, si cela n'a pas été su, je la révèle pour la première fois. Tout le monde se rappellera de ce débat, cette motion sur le jour du drapeau au Québec. Je ne demande pas au président de réagir, je parle en mon nom personnel.

Il y a eu des amendements de faits à cette motion, qui sauf erreur, avait été faite par le député de Chicoutimi, si j'ai bonne mémoire. Je peux me tromper, M. le Président, mais je ne m'adresse même pas à vous. Le député de Ahuntsic dans le temps, le ministre de l'Education, a fait un amendement, qui était illégal. Le député...

M. BURNS: Mais ce n'est pas du tout la...

M. BIENVENUE: Non, non, non.

M. BURNS: ... même chose.

M. BIENVENUE: Laissez-moi finir.

M. BURNS: Ce n'est pas la même chose...

M. BIENVENUE: Laissez-moi finir.

M. BURNS: ... c'est en vertu du règlement de...

M. BIENVENUE: Laissez-moi...

M. BURNS: ... la Chambre...

M. BIENVENUE: Laissez-moi...

M. BURNS: ... que ce n'était pas recevable...

M. BIENVENUE: Laissez-moi...

M. BURNS: ... ces amendements-là.

M. BIENVENUE: Laissez-moi finir. Le député...

M. BURNS: Bien, j'étais là certain.

M. BIENVENUE: ... de Saint-Jacques a fait un sous-amendement qui était aussi illégal. 20 ou 25 députés se sont prononcés. Toute la Chambre a participé au débat. On a voté et tout cela était dans la plus stricte illégalité. La Chambre s'était trompée, pas seulement le président, tout le monde. La Chambre peut...

M. BURNS: C'a...

M. BIENVENUE: ... se tromper.

M. BURNS: C'a été tout simplement jugé, par le président, irrecevable et je vous rappelle que c'était avant le vote. C'est ça qui est la grosse différence.

M. BIENVENUE: II y a eu des amendements et des...

M. BURNS: Bien oui...

M. BIENVENUE: ... sous-amendements...

M. BURNS: ... il y a eu un amendement de déposé et il y a eu...

M. BIENVENUE: Et on a voté.

M. BURNS: ... un sous-amendement. On n'a pas voté. On a débattu ces sous-amendements-là. On a tout simplement, tout simplement, au cours du débat, pendant que la motion était encore en délibération, on a soulevé la question auprès du président et le président a dit: Oui, je suis d'accord, c'est irrecevable, cette motion-là et, en tout temps du débat, je peux dire qu'elle est irrecevable, sauf qu'y avait pas eu de vote là-dessus, M. le ministre. Il faudrait que vous révisiez vos informations.

M. BIENVENUE: Toute la Chambre s'est comportée...

M. BURNS: Est-ce que je peux vous lire...

M. BIENVENUE: ... en ignorants et sans se rendre compte qu'elle était dans l'illégalité.

M. BURNS: Sauf qu'il n'y avait pas eu de vote. C'est ça qui est la...

M. BIENVENUE: En fait...

M. BURNS: ... grosse différence.

M. BIENVENUE: Enfin, la Chambre s'était trompée. Il y aurait eu vote, qu'elle serait...

M. BURNS: M. le Président...

M. BIENVENUE: ... restée dans l'illégalité.

M. BURNS: ... tout simplement, j'peux-tu vous lire, juste vous référer... C'était une époque où, malheureusement, on n'avait pas de journaux des Débats à l'Assemblée nationale, c'est-à-dire en 1965.

DES VOIX: Hein?

M. BURNS: En commissions, excusez. Oui. Mais vous avez... Non...

M. KENNEDY: Officiel à part ça.

M. BURNS: A ce moment-là?

M. HARDY: Cela existe depuis 1962.

M. BURNS: De toute façon, s'y en avait, je retire ce que je viens de dire là, j'étais pas là, qu'est-ce vous voulez? Mais, en tout cas, je vais vous citer une source qui, elle, était là et qui s'appelle, entre autres, les journaux de l'Assemblée législative du Québec de 1965, où on rapporte, aux pages 211 et suivantes, un certain nombre de choses qui se sont passées le 18 mars 1965.

On dépose aux journaux de la Chambre, à ce moment-là, qui s'appelait l'Assemblée législative, une demande d'opinion légale de la part de l'orateur du temps — on l'appelait l'orateur — M. Hyde et qui écrivait à Me Louis-Philippe Pigeon, conseiller juridique du gouvernement, à ce moment-là, lequel posait le problème relativement à une demande d'injonction de prise par M. Gabias. Je pense que ça, les gens, j'ai pas besoin de raconter des faits, se souviennent, c'est à la suite de la mise en accusation de M. Hamel.

Et Me Pigeon, à ce moment-là, qui est maintenant juge de la cour Suprême, qui a été le professeur du député de Crémazie, comme il l'a mentionné tout à l'heure, répond ceci. Je vous fais grâce d'une série de ses affirmations puisque son opinion se répartit sur trois pages, trois pages et demie, en fait, de ce journal que je cite.

A un moment donné, à la page 216, on lit ceci: "Ayant fait une revue de la doctrine et de la jurisprudence sur les questions soumises — c'est-à-dire sur l'indépendance de la Législature — j'en suis venu à la conclusion que votre devoir — il s'adresse au président de la Chambre, qui s'appelait l'orateur à ce moment-là — votre devoir, en l'occurence, est de ne rien faire qui implique de quelque manière que l'Assemblée législative est justiciable devant les tribunaux. "En effet, c'est l'un des privilèges les plus fondamentaux du Parlement que l'immunité absolue de poursuite en raison d'un acte quelconque de procédure parlementaire. Ce privilège a été reconnu par l'article 9 du Bill of Rights de 1688 dans les termes suivants:

Article 9: "That the freedom of speech and debates or proceedings in Parliament ought not to be empeached or questioned in any Court or place out of Parliament."

De sorte que quand j'entends le député de Crémazie me parler d'illégalité depuis le début, de possibilité que les tribunaux jugent illégaux nos actes, parce que si vous parlez d'illégalité, vous allez parler de contrôle des tribunaux, je me demande comment une autorité comme M. le juge Louis-Philippe Pigeon, de la cour Suprême du Canada, pas plus tard qu'en 1965, ait pu, ait pu prendre des décisions comme celle-là et aller jusqu'à dire à l'orateur du temps ceci, et c'est quand même un conseiller juridique du gouvernement auprès de l'Assemblée législative du temps qui parle, je cite à la page 218: "A titre d'orateur, l'un de vos devoirs est de défendre les privilèges de l'Assemblée. Vous vous y êtes engagé formellement en acceptant ce poste. Vous devez donc vous abstenir de poser un geste susceptible d'être préjudiciable aux privilèges que vous devez défendre".

Et au cours de cette opinion...

M. BIENVENUE: Je suis d'accord avec tout ça.

M. BURNS: ... Au cours de cette opinion, la cause du Manitoba est citée, il y en a d'autres qui sont citées. Un arrêt semblable, dit Me Pigeon, un arrêt semblable a été rendu il y a quelques années par la cour d'Appel d'Ontario dans "The King ex rel Tolfree vs Clark, 1943 -3DLR, c'est-à-dire Dominion Law Report 684. Et il continue, ces arrêts suivent la décision de la cour d'Appel d'Angleterre dans Bradlaw vs Gossit, 1884, 12 Queen's Bench 271, où l'on a statué ce qui suit: "The House of Commons is not subjet to the control of Her Majesty's Courts in its administration of that part of the Statute Law which has relation to its internal proceedure only".

M. BIENVENUE: Je suis entièrement d'accord.

M. BURNS: "What is said or done within its walls cannot be enquired into in a Court of law".

M. BIENVENUE: "Within its walls".

M. BURNS: C'est ça. Et si vous voulez que je remonte, si vous voulez que je remonte...

M. BIENVENUE: J'vas sortir les miennes.

M. BURNS: Si vous voulez que je remonte un peu plus loin dans l'opinion de Me Louis-Philippe Pigeon, on lit ceci: "Plus précisément encore, la cour du Banc de la reine du Manitoba — celle à laquelle le ministre a fait référence et moi aussi — cette cour-là, dit-il, a décidé que les tribunaux n'avaient pas compétence pour sta-

tuer sur le droit d'un député de siéger à une assemblée législative. Elle a déclaré que c'est l'assemblée elle-même qui devait trancher cette question. C'est la cause de Steinkopf qui a été citée et si vous voulez qu'on l'analyse, la cause, la cause du Manitoba, j'y vois pas du tout la même interprétation que le ministre semble vouloir y trouver.

J'peux pas le convaincre, M. le Président, y m'écoute pas.

M. BIENVENUE: Alors, j'ai lu ces autorités déjà, entre autres, l'opinion de M. Pigeon et davantage la décision du juge Casgrain à la suite des procédures à laquelle a fait allusion, auxquelles a fait allusion le député de Maisonneuve et, par conséquent, j'suis pas pris par surprise, j'avais lu ça, je l'ai entre les mains justement dans cette cause de Steinkopf, je le répète...

M. BURNS: Depuis combien de minutes vous l'avez entre les mains?

M. BIENVENUE: En fin de semaine. Prenez moi à ma parole.

M. BURNS: Citez-le.

M. BIENVENUE: Alors, précisément dans la cause de Steinkopf, et ça je l'ai dit après-midi, j'ai pas attendu que mon savant ami cite le juge Pigeon, j'ai dit que c'était clair dans le cas du Manitoba, la loi que j'ai lue, j'ai relue, dit expressément que seule — c'est dit mais pas dans notre loi — seule la Législature du Manitoba peut entendre ces choses-là sur l'article 41-2.

M. BURNS: Excepté, excepté quoi? Est-ce que vous avez lu la cause du Manitoba au complet?

M. BIENVENUE: Ah bien! Je l'ai tellement lue la cause du Manitoba que...

M. BURNS: Que je peux vous citer...

M. BIENVENUE: ... à un moment donné celui qui représentait devant cette Législature et qui était l'équivalent du député de Maisonneuve, c'était M. Campbell, de l'Opposition, était tellement inquiet, lui comme moi, malgré que je répète que je veux rester ici, M. Campbell, qui était l'équivalent du député de Maisonneuve, a fait une motion pour retarder les procédures devant la Chambre et je lis: "That all the words after "that" on the said motion be struck out and the following substituted therefore: the further consideration of this bill be deferred until the Lieutenant-Governor in Council shall have refer to the Court of Appeal the question of may be Steinkopf s elidgibility as of the 20th of November 62 to be nominated for a Member of the Legislative Assembly and until the said Court shall have certified its opinion on the question referred". Y faisait, M. le Président, ce que j'aurais pu...

M. BURNS: Qu'est-ce qu'y est arrivé de la motion?

M. BIENVENUE: Y est pas arrivé grand-chose parce que le député a démissionné mais celui-là démissionnera pas.

Alors, M. le Président... M. le Président... J'aurais pu, M. le Président... Nous aurions pu ici, nous aurions pu ici — et c'est prévu par la Loi de la Législature, par notre règlement — nous aurions pu faire une motion pour que cette commission recommande à la Chambre de demander au lieutenant-gouverneur en conseil un référé, comme l'Opposition du Manitoba l'a fait, une référence à la cour d'Appel pour avoir son opinion. Nous aurions pu le faire. Je renonce à ce moyen-là parce que, peu importe l'issue, ça retarderait l'inventaire et l'enquête sur les faits, de plusieurs mois et j'ai trop dit, depuis cet après-midi, que nous avons hâte, comme le député de Johnson, de faire la lumière sur les faits.

Alors, je l'ai lue, la cause, comme vous voyez, au Manitoba, mais je reprends ce qu'a dit le député de Maisonneuve au sujet de M. Pigeon qui était avocat à l'époque et... et je le reprends, j'ai hâte de passer aux faits, moi aussi.

M. BEDARD (Chicoutimi): Vous avez pas l'air d'avoir si hâte que ça!

M. BIENVENUE: Mon ami, le député de Maison...

M. BEDARD (Chicoutimi): Laissez le droit et passez aux actes.

M. BIENVENUE: Laissez-moi finir, puis ça va aller plus vite. Mon ami, le député de Maisonneuve, me cite M. Pigeon et j'ai retenu sa phrase, disant au président Hyde, à l'époque, que il ne doit se soumettre à aucun contrôle des tribunaux, etc. Mais justement, parce que nous ne nous soumettons à aucun contrôle des tribunaux, parce que nous y renonçons, nous, malgré mes sérieuses inquiétudes, raison de plus parce qu'y aura pas de tribunaux qui sont impartiaux, qui sont objectifs, qui sont dirigés par des règles de loi, pour nous contrôler, nous censurer ou intervenir, raison de plus pour nous assurer nous-mêmes qu'y aura pas d'illégalité dans cette commission ou à la Chambre. J'en tire un argument pour dire: Parce qu'y a pas de tribunaux, au moins, de notre côté, de nous-mêmes, faisons l'impossible pour être dans la légalité.

M. BURNS: Et là, vous allez aller plaider cette illégalité-là devant la majorité gouvernementale et moi, je vais aller plaider la majorité devant la minorité de l'Opposition. C'est ça que vous êtes en train de me dire?

M. BIENVENUE: Par la motion que nous ferons, nous demanderons à la Chambre de se placer dans la légalité.

M. BURNS: Ah! bon. M. BIENVENUE: Point.

M. BURNS: Pis c'est vous qui allez juger de la légalité?

M. BIENVENUE: Non, la Chambre, comme a dit le juge Pigeon, qui est souveraine de ces choses, la Chambre se prononcera.

M. BURNS: D'accord, j'attends... j'écoute votre motion, on va suspendre.

M. BIENVENUE: Est-ce que le député de Maisonneuve aimerait mieux, parce qu'il est encore temps, que nous demandions un référé à la cour d'Appel?

M. BURNS: Pas du tout. M. BIENVENUE: Je lui offre. M. BURNS: Au contraire, je... M. BIENVENUE: Je lui offre. M. BURNS: Au contraire...

M. BIENVENUE: Je lui offre; la cour d'Appel pourrait se prononcer plutôt que la majorité...

M. BURNS: Le référé...

M. BIENVENUE: ... de la Chambre.

M. BURNS: ... a été fait, le référé a été fait...

M. BIENVENUE: On pourrait le faire.

M. BURNS: ... vendredi dernier. Il a été fait à l'Assemblée nationale...

M. BIENVENUE: Mais on pourrait encore le faire.

M. BURNS: ... et cette Assemblée nationale là s'est prononcée et c'est ça qui a été le référé à l'autorité possible. Cette autorité-là s'est prononcée à 85 contre 0, en faveur d'une enquête dans les termes de la motion et c'est ça que je dis. Si vous avez changé d'idée en fin de semaine, c'est peut-être que vous avez vérifié la preuve. Je le sais pas, je peux pas présumer, mais est-ce que c'est ça? Est-ce que c'est ça...

M. BIENVENUE: J'ai manqué la dernière phrase aimable...

M. BURNS: ... que je dois me poser comme question?

M. BIENVENUE: ... là, qu'est-ce que c'était?

M. BURNS: Je dis... Ben, c'est pas une phrase aimable, au contraire.

M. BIENVENUE: Bien, c'est ce que j'ai pensé, mais j'ai employé aimable par... Quelle était la question?

M. BURNS: J'ai dit que si vous avez changé d'idée depuis la fin de semaine, alors que la Chambre, le référé lui-même a été fait à la Chambre, est-ce que c'est... est-ce que c'est tout simplement qu'on doit conclure qu'à un moment donné on veut restreindre certaines preuves, alors qu'on avait dit, au contraire, qu'y fallait faire toute la lumière là-dessus et le plus vite possible et sans délai? C'est une question que je suis en droit de me poser.

M. BIENVENUE: C'était l'opinion pas de n'importe qui, du leader du gouvernement. Ce que j'ai repris aujourd'hui n'était que ce qu'a dit le leader du gouvernement. Pour des raisons qui concernent la Chambre ou le président, les textes sont là, ses raisons, son plaidoyer n'a pas été reçu. J'ai repris, c'est de la continuité, c'est de la pure continuité.

M. BURNS: Ça pas été reçu, mais il avait fortement la possibilité de faire un amendement à la motion.

M. BIENVENUE: On va le faire si on l'a pas fait.

M. BURNS: Ouais.

M. BIENVENUE: Et pour ce qui est du référé à la cour d'Appel, je répète qu'en vertu du chapitre 11 des Statuts de '64, si l'on craint qu'il y ait partialité, si on craint... si on craint qu'y ait partialité, je sais qu'y a des gens qui disent: Avec 102 députés libéraux, on n'a qu'à balayer du revers de la main, pis faire ce qu'on veut. Je pense que le député de Maisonneuve, comme moi, a confiance dans le plus haut tribunal du Québec, la cour d'Appel. S'il préfère que nous fassions un référé, je dis pas qu'on le fera pas. Mais moi, j'y tiens pas; moi, je veux que le député de Johnson...

M. BURNS: Un référé sur la motion que nous avons adoptée vendredi, sur...

M. BIENVENUE: Un référé sur...

M. BURNS: ... la légalité de la motion?

M. BIENVENUE: ... sur la question de droit de savoir si nous devrions, nous, ou les tribunaux de droit commun entendre cette chose-là. Et si la cour d'Appel devait décider, ce sont les tribunaux de droit commun, le député de Maisonneuve serait pas inquiet de l'impartialité.

J'ai pas recours à ça mais j'y ai pensé, et j'aime mieux, comme le député de Johnson et

la députation libérale, ministérielle, qu'il soit jugé devant ses pairs, je le dis pour maintenant la septième fois, le plus tôt possible, mais légalement. Ça me paraît assez clair.

M. BURNS: Alors, M. le ministre, puisqu'on veut avancer, faire avancer les travaux, puisque c'est clair que vous vous apprêtez à nous faire une motion, puisque c'est clair également que vous avez besoin d'une heure pour le faire, je suggère qu'on suspende nos travaux immédiatement pour vous donner le temps...

M. BIENVENUE: Jusqu'à dix heures et demie.

M. BURNS: ... de préparer votre motion dans l'heure qui suit, jusqu'à dix heures et demie.

LE PRESIDENT: La séance est suspendue jusqu'à dix heures et trente.

(Suspension de la séance à 21 h 26)

Reprise de la séance à 22 h 43

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs!

M. BIENVENUE: M. le Président, je livre à la commission le fruit de nos modestes efforts pour rédiger la motion suivante.

M. BURNS: Vous n'avez pas eu le temps de faire de copie pendant une heure et quart?

M. BIENVENUE: C'est pas le temps qui manquait, c'était les sténographes.

LE PRESIDENT: On va en faire faire des copies. Est-ce qu'il y a des machines à polycopier qui sont encore en fonctionnement?

M. BIENVENUE: J'aimerais mieux une secrétaire.

M. LEVESQUE: M. le Président, il peut faire sa motion et s'occuper de la faire faire...

LE PRESIDENT: Oui, oui. Faites la motion et nous allons prendre les moyens d'avoir des photocopies sans délai.

M. BURNS: On va l'avoir après le vote, M. le Président.

LE PRESIDENT: Non, je ne prévois pas. Il n'y a rien qui presse. S'il faut attendre, on attendra pour le vote, c'est tout. Personne ne va être brusqué.

M. BIENVENUE: Je vais lire lentement, à haute et intelligible voix, pour qu'au moins on comprenne la partie que je Us, M. le Président.

Motion de M. Bienvenue

M. BIENVENUE: Je propose que cette commission fasse rapport à l'Assemblée nationale afin que cette dernière amende la motion adoptée le 28 juin 1974, laquelle motion avait pour but de confier un mandat à cette commission, pour que cette motion se restreigne aux éléments suivants: "Que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse à sa prochaine séance en la salle 81-A en vue de procéder à une enquête sur les faits suivants qui, s'ils étaient fondés, rendraient le député de Johnson, Me Jean-Claude Boutin, indigne de siéger à l'Assemblée nationale parce qu'inhabile en vertu des articles 75 et 79 de la Loi de la Législature, savoir: "Avoir siégé et voté à l'Assemblée nationale alors qu'il agissait pour et au nom du Procureur général du Québec devant les tribunaux occupant ainsi une charge ou un office auquel des honoraires sont attachés contrairement aux dispositions de l'article 75 de la Loi de la Législature, et exécutant ainsi un contrat se

rattachant au service public et en vertu duquel des deniers publics doivent être payés contrairement à l'article 79 de la Loi de la Législature."

Je m'empresse de dire, M. le Président, d'abord parce que j'ai reconnu que nous n'avions pas de copie, on va y remédier dans les meilleurs délais et, ensuite, pour rappeler que cet amendement... pas cet amendement, mais cette motion n'a de différence avec la motion originale à laquelle nous avons fait allusion que les points suivants qui sont conformes rigoureusement aux arguments de droit que j'avais soulevés, et je veux les souligner. Quant au reste, c'est littéralement, et à la virgule, la même motion: parce qu'inhabile et non pas parce qu'inéligible et inhabile, mais uniquement parce qu'inhabile, comme je l'ai indiqué plus tôt. Avoir siégé et voté à l'Assemblée nationale au lieu de "avant et après son élection", donc avoir siégé et voté à l'Assemblée nationale, et le fameur "et" du deuxième paragraphe confirmant le "et" du premier paragraphe qui avait fait l'objet, M. le Président, de votre amendement à la suite du compromis. Ce sont les seules différences. ...C'est ma dernière remarque, M. le Président, tous les autres faits, tout le reste du mandat, les deux articles; dans le cas de 75, le mandat ou la charge; dans le cas de 79, le contrat s'il en est, l'inhabileté, tout cela demeure. Et je redis, si c'est nécessaire, qu'en autant que nous sommes concernés, nous ferons tout; non seulement nous nous abstiendrons de faire quoi que ce soit pour faire obstacle ou retarder, mais nous ferons tout pour hâter et expédier sujet à la... à la restriction, si je peux employer le mot, sujet aux modifications que nous venons d'apporter et qui sont conformes à ce que nous avons invoqué aujourd'hui, rien de plus.

M. BURNS: M. le Président, je vous demande simplement si vous avez considéré la recevabilité de la motion.

LE PRESIDENT: J'aimerais bien en avoir une copie, avoir vos textes.

M. BIENVENUE: Avoir la copie.

LE PRESIDENT: J'ai, je pense, les grandes idées. Sans aucun doute, je préférerais le consentement unanime de la commission, sans aucun doute. Mais, j'aimerais peut-être être éclairé par quelque membre que ce soit de la commission sur la question de recevabilité.

M. BURNS: Bien, M. le Président, c'est tout simplement qu'il s'agit, il n'y a pas doute, d'une motion de faire rapport. Cette motion de faire rapport est, à toutes fins pratiques, accompagnée d'une suggestion à l'Assemblée nationale, dans le texte. Normalement, c'est plutôt l'Assemblée nationale qui fait des suggestions aux commissions, par ses mandats. Si je lis, M. le Président, l'article 157 de notre règlement, on y lit entre autres qu' "En commission plénière un député peut proposer de rapporter à l'Assemblée nationale que la commission n'a pas fini de délibérer— 157 — ...

LE PRESIDENT: Oui, oui.

M. BURNS: ... n'a pas fini de délibérer et qu'elle demande la permission de siéger à nouveau. En commission élue, un député peut proposer que la commission ajourne ses travaux". Je pense que ce que le député de Crémazie est en train de faire, dans le fond, c'est qu'il est en train d'essayer de nous convaincre qu'on a de bonnes raisons d'ajourner les travaux. Et l'argumentation qu'il a présentée — c'est d'ailleurs, je m'excuse de me répéter, c'est d'ailleurs la position que j'ai tenue toute la journée à ce sujet — elle ne nous concerne pas, elle concerne l'Assemblée nationale.

Alors, que, lui, donne ces raisons-là pour demander l'ajournement des travaux, c'est possible. Mais est-ce que ça doit apparaître dans la motion? Je me le demande très sérieusement, je vous le demande, M. le Président, très sérieusement.

LE PRESIDENT: Je suis prêt, si y a pas d'autres personnes qui... d'autres membres de la commission...

M. BIENVENUE: ... très court, M. le Président.

LE PRESIDENT: J'ai étudié la question, nécessairement, pendant l'heure ou l'heure et quart que... la suspension. J'ai étudié cette question et je suis prêt à me prononcer sur la recevabilité, à moins que d'autres députés désirent, d'autres membres désirent prendre la parole.

M. BIENVENUE: Ce que j'aurais à dire serait court, M. le Président, mais je ne veux pas empêcher qui que ce soit de s'exprimer. J'aurais une remarque... une ou deux remarques très courtes à faire.

LE PRESIDENT: Allez.

M. BIENVENUE: Alors, M. le Président, on a, à l'article suivant de celui qu'a cité le député de Maisonneuve, l'article 158 qui n'aurait pas sa raison d'être s'il voulait rien dire, c'est-à-dire après 157 où l'article disait ce que vient de lire le député de Maisonneuve. Alors, si 158 était inutile, il ne serait pas au règlement. 158 se lit comme suit, M. le Président: "Une commission ne peut modifier, dans son principe, une proposition qui a déjà été acceptée par l'Assemblée". Je retiens les mots "dans son principe". Si tout ça est inutile, je répète que je ne vois pas l'utilité de cet article du règlement. Mais, puisqu'on dit "dans son principe", ça sous-tend — c'est manifeste, c'est évident, c'est

restrictif — ça sous-tend qu'en dehors du principe une commission peut modifier, et cela à la face même de l'article.

Et je soutiens respectueusement que ce qui se retrouvait dans la motion originale —et j'ai pas besoin de relire — "soit déclaré indigne", etc., pour autant que tel et tel fait soit prouvé, le mot "indigne" y est toujours. Vous l'avez indiqué, d'ailleurs, précédemment, M. le Président, au cours d'une de nos réunions d'aujourd'hui, que le principe portait justement sur l'indignité du premier paragraphe.

Et j'insiste pas davantage. Dans tous les cas, M. le Président, sauf erreur, où le nouveau règlement est muet, paraît muet ou pourrait être partiellement muet, il est de bonne guerre, et je pense que c'est logique, que l'on se réfère à l'ancien règlement, qui est un peu le père de l'actuel, mais père plus gros, plus long, plus énorme, plus pesant. Et, à 407, M. le Président, on parlait d'un comité spécial qui était la commission actuelle, mais qui était, à ce moment-là, un comité spécial; 407 se lisait comme suit: "Tout comité spécial qui a le pouvoir d'envoyer quérir des personnes, des pièces et des dossiers, est autorisé à faire à la Chambre un rapport de ses opinions et de ses observations, ainsi que de la preuve qu'il a recueillie, et aussi un rapport spécial — ça, c'est vaste — sur toute matière qu'il juge à propos de porter à la connaissance de la Chambre".

Alors, je soumets respectueusement que cette commission, par cette motion, si elle l'adopte, juge à propos de porter à la connaissance de la Chambre un rapport spécial sur toute matière et sur la matière qui fait l'objet précis de cette motion, de cette motion dont, en vertu du nouveau règlement, à l'article 158, je dis que nous n'attaquons pas le principe, mais une partie accessoire qui s'y rattache. C'est tout.

LE PRESIDENT: M. Léger.

M. LEGER: Je voulais simplement demander au président, avant qu'il se prononce, de me rappeler, si je me trompe, mais est-ce que, cet après-midi, le président n'avait pas donné comme opinion que le premier paragraphe représen- tait le principe et que le deuxième paragraphe représentait les modalités?

LE PRESIDENT: J'avais dit un exposé de motifs, je crois, au lieu de modalités.

M. LEGER: C'est ça. Et le premier paragraphe était un exposé du principe et le mot "inéligible" qui disparaît dans la motion; on enlève le mot "inéligible" pour laisser inhabile...

LE PRESIDENT: Je m'excuse parce que j'ai souligné, à ce moment-là, exactement ce que j'ai dit et j'arrêtais mon principe après "Assemblée nationale". "Que la commission de l'Assemblée nationale se réunisse le jeudi 4 juillet 1974 en la salle 81-A en vue de procéder à une enquête sur les faits suivants qui, s'ils étaient fondés, rendraient le député de Johnson, Me Jean-Claude Boutin, indigne de siéger à l'Assemblée nationale".

M. LEGER: Vous avez arrêté là.

LE PRESIDENT: Vous pourrez vérifier au journal des Débats.

M. LEGER: J'avais cru que c'était le premier paragraphe au complet.

LE PRESIDENT: Non.

M. LEGER: Alors, comme il y a des changements au premier paragraphe, là...

LE PRESIDENT: Non. Vous pourrez vérifier...

M. LEGER: D'accord.

LE PRESIDENT: ... sous toute réserve, au journal des Débats. Messieurs, sur la...

M. BURNS: M. le Président, j'aimerais quand même avoir une copie de la motion.

LE PRESIDENT: D'accord. (Suspension de la séance à 22 h 56)

Reprise de la séance à 22 h 57

LE PRESIDENT: A l'ordre, messieurs! M. Burns.

M. BURNS: M. le Président, je vous emprunte la copie que vous avez, parce que je l'ai pas encore, je vous la remettrai. C'est pour ça que je vous dis que je l'emprunte. Il y a à sa face même, c'est malheureux qu'on soit rendu dans un débat de procédure alors que ça devrait être un débat de faits, mais en tout cas, on est rendu dans un débat de procédure. A sa face même, y'a je pense une irrégularité à cette motion, mis à part le fait que je vous mentionnais tout à l'heure après lecture de l'article 157, oui, que il s'agissait plutôt d'une motion d'ajournement. Maintenant, ça, je vous ai posé la question mais maintenant que j'ai eu la possibilité de lire la motion de façon plus précise, je vois que on demande, nous, à la commission, en faisant rapport, on suggère dans le fond à la commission... à l'Assemblée nationale d'amender la motion du 28 juin '74. Or, je prétends et ça, là-dessus, M. le Président, je vois mal comment on pourrait s'en sortir. Je prétends qu'il est absolument impossible d'amender une motion qui est déjà adoptée. On amende une motion qui est devant la Chambre pour fins de délibérations, qui est débattue devant la Chambre. On ne peut pas amender quelque chose qui est déjà adopté par l'Assemblée nationale. On révoque une motion qui est devant l'Assemblée nationale et là-dessus je vous cite entre autres l'article 89 de notre règlement qui nous dit que seul un ministre peut proposer par motion non annoncée la révocation d'un ordre ou d'une résolution de l'Assemblée; le débat peut porter tant sur le fond de l'ordre ou de la résolution à révoquer que sur cette motion.

Alors, ça change un petit peu l'approche de toute l'affaire. Je suis pas plus d'accord, remarquez, mais je vous dis que c'est sûrement pas une motion d'amendement que la Chambre aura à adopter éventuellement si jamais la commission décide de faire rapport selon la motion du député de Crémazie. Ce serait peut-être une motion de révocation ou... je vous dis que peut-être, mais c'est sans doute pas une motion d'amendement. C'est la remarque que j'ai à faire et à cet égard-là, M. le Président, je vois pas comment cette motion-là puisse être recevable.

M. BIENVENUE: Première brève remarque, M. le Président, c'est qu'évidemment y'a une règle qui est presque hebdomadairement à l'effet que lorsqu'il y a unanimité à l'Assemblée nationale, lorsque l'Assemblée nationale veut bien être unanime, faut le vouloir pour ça, tout article du règlement... tout article du règlement peut ne pas subir, ne pas être soumis à l'application qu'il préconise. Je puis assurer immédiatement, je parle pas personnellement mais au nom du gouvernement que je représen- te ici, que si le député de Maisonneuve demandait l'unanimité de la Chambre pour lui, sans être ministre de la couronne, pour lui amender, proposer un amendement à la motion dans le sens de la résolution de cette commission, nous ferons l'unanimité.

M. BURNS: Non...

M. BIENVENUE: Si le...

M. BURNS: ... je peux vous dire que...

M. BIENVENUE: J'ajoute rapidement un dernier point,-si le député de Maisonneuve, dans le même souci qu'il a et que nous avons tous de faire procéder les travaux de cette commission le plus rapidement possible pour que nous puissions enfin, je le souhaite comme lui, étudier les faits, les faits au grand jour, si le député de Maisonneuve suggère, s'il est inquiet par la disposition de 89, suggère une autre formule, un amendement à ce rapport, à ce texte que nous venons de déposer qui puisse le rendre conforme aux dispositions de la Chambre, nous allons abonder, nous voulons tout faire nous aussi pour que l'étude des faits se fasse le plus tôt possible.

M. BURNS: Le ministre ne m'embarquera pas là-dedans, ce n'est pas moi qui suggère quelque chose, c'est lui qui suggère quelque chose. Depuis cet après-midi que je lui dis que moi, je suis prêt à procéder sur la motion telle qu'elle a été adoptée par la Chambre. Je n'ai pas de suggestion à lui faire, sinon de lui dire que sa motion est irrégulière.

M. BEDARD (Chicoutimi): C'est votre responsabilité.

M. BURNS: Je n'ai pas du tout l'intention de voir cette motion-là amendée, je vous le dis tout de suite. C'est, d'après moi, l'ordre que la Chambre a donné quand j'ai exposé un certain nombre de faits et elle s'est faite, je pense, après une discussion assez élaborée. Et c'était aussi, j'ai compris, moi, le désir du député de Johnson de voir la motion le plus vite possible véhiculée à la commission.

M. BIENVENUE: Tout le monde.

M. BURNS: Alors, cette motion-là a été adoptée, puis là, demandez-moi pas de vous faire des suggestions. C'est vous qui en faite une, c'est vous qui prétendez que cette motion-là, déjà adoptée par l'Assemblée nationale, est illégale. Alors, moi je ne partage pas du tout votre avis, premièrement. Deuxièmement, je n'ai pas du tout l'intention de l'amender, cette motion-là, et je pense que normalement le député de Johnson devrait même pas avoir l'intention de la voir amendée de par ce qu'il a dit le 28 juin, lui-même.

LE PRESIDENT: S'il n'y a pas d'autres députés qui désirent parler sur la recevabilité de la motion...

M. BIENVENUE: M. le Président, je pourrais peut-être, toujours sur la recevabilité, pour bien montrer notre souci, comme je viens de l'indiquer, d'éliminer tous les obstacles de procédure, de règlement à arriver un jour, le plus tôt possible, à l'étude des faits, je suis prêt, et je le fais séance tenante, à modifier cette motion pour que, et là les députés ont des copies entre les mains, et pour régler le problème que vient de soulever le député de Maisonneuve pour qu'elle se lise dorénavant comme suit, et c'est sur une simple question de forme, ça ne touche pas au fond: Je propose que cette commission fasse rapport à l'Assemblée nationale afin que cette dernière amende l'ordre de la Chambre du 28 juin...

M. BURNS: C'est impossible d'amender la motion.

M. BIENVENUE: ... article 74 qui avait pour but de confier un mandat à cette commission — je continue de lire — qui avait pour but de confier un mandat à cette commission pour que cet ordre se restreingne aux éléments suivants.

M. BURNS: M. le ministre, voulez-vous une autre heure pour y penser?

M. BIENVENUE: Non, non, non, non. Avant que le député de Maisonneuve dise que c'est impossible, je lui dis que la Chambre qui donne un ordre peut modifier cet ordre et que tout organisme qui donne une directive peut modifier cette directive, et à l'infini. La Chambre est maîtresse de ses décisions. Elle peut décider, elle est maîtresse et il n'y a personne au-dessus d'elle.

M. BURNS: Ah, il y a personne au-dessus d'elle!

M. BIENVENUE: II y a personne au-dessus de la Chambre pour ce...

M. BURNS: II y a personne au-dessus d'elle, sinon son propre règlement qu'elle s'est donné.

M. BIENVENUE: Non.

M. BURNS: Puis quand on fait un amendement, on fait un amendement à quelque chose qui est en délibération. C'est tellement vrai qu'on voit à l'article 69, M. le ministre on voit que, sauf les exceptions prévues au règlement, un député, s'il a le droit de parler sur une motion — correct? — peut y proposer un amendement par une motion non annoncée et, tant que l'Assemblée ne s'est pas prononcée définitivement, le droit d'amendement existe," c'est-à-dire que l'Assemblée s'est prononcée définiti- vement, vendredi le 28 juin. Comment voulez-vous amender quelque chose contrairement au règlement, vous qui alléguez la légalité depuis cet après-midi?

M. BIENVENUE: L'Assemblée...

M. BURNS: II y a une des légalités qui nous concerne plus que les autres, c'est notre règlement.

M. BIENVENUE: L'Assemblée qui est souveraine et qui a lancé un ordre demeure souveraine et peut modifier cet ordre-là aujourd'hui et peut le remodifier demain.

M. BURNS: Non, elle doit le révoquer, M. le ministre. Elle doit le révoquer.

M. BIENVENUE: Ah, je n'anticiperai pas sur les travaux de la Chambre...

M. BURNS: Non et puis...

M. BIENVENUE: ... mais je dis qu'un ordre...

M. BURNS: ... vous serez poigné avec le problème quand il sera révoqué.

M. BIENVENUE: ... n'est jamais péremptoire.

LE PRESIDENT: Messieurs, sur la question de la recevabilité de cette motion, sous réserve de la rédaction exacte des trois ou quatre premières lignes, des quatre premières lignes, et à la fin de ma décision de principe, je me permettrai peut-être de faire une suggestion. Sur la question même de la recevabilité d'une motion qui a pour but de faire un rapport, pour une commission élue de faire un rapport spécial à l'Assemblée nationale, je voudrais porter à votre attention, premièremement... Ici, je fais une parenthèse. Je pense bien qu'il est accepté par tout le monde que dans le cas de silence ou d'ambiguïté dans notre règlement, pas mal réduit, pratique, le règlement actuel de l'Assemblée nationale, à plusieurs occasions nous sommes retournés à notre ancien règlement en vertu de l'article 3, je crois, du règlement actuel qui dit que, cinquième paragraphe: "La procédure de l'Assemblée nationale du Québec est réglée — cinq — par les précédents établis par suite de l'inteprétation des lois et du règlement". Et également à l'article 4: "Dans un cas non prévu par les règles de procédure ou dans un cas de divergence d'opinions sur l'interprétation d'une règle de procédure, le président décide en tenant compte des usages de l'Assemblée depuis son origine". Ce qui nous couvre, je pense bien, qui nous permet de retourner à l'ancien règlement. Je voudrais citer l'article d'abord, 407, qui a été invoqué. "Tout comité

spécial — et on sait que dans l'ancien règlement les règles qui s'appliquaient aux comités spéciaux s'appliquaient aux comités permanents comme celui qui est formé et qui siège actuellement — qui a le pouvoir d'envoyer quérir des personnes, des pièces et des dossiers est autorisé à faire à la Chambre un rapport de ses opinions et de ses observations, ainsi que de la preuve qu'il a recueillie, et aussi un rapport spécial sur toute matière qu'il juge à propos de porter à la connaissance de la Chambre".

Egalement, l'article 446 de l'ancien règlement qui dit que "si la Chambre l'y a autorisé — immédiatement, il peut se soulever quelque point, autorisation de la Chambre — un comité spécial peut, de temps à autre, faire un rapport de ses travaux avec ou sans les dépositions ou seulement un rapport des dépositions".

Je voudrais souligner également Beauchesne, quatrième édition, à la page 187, où il est dit: "Les comités peuvent, dans les cas douteux, demander des instructions à la Chambre sur la conduite à suivre au sujet des questions dont ils sont saisis".

Et, enfin, Erskine May, 17th édition, à la page 664, au paragraphe intitulé "Special reports": "Besides the report properly so called relating to the subject-matter referred to the committee, it is frequently necessary for a committee to make what is termed a special report in reference to some matter incidentally arising relating to the powers, functions or proceedings of the committee. Such reports are similar in point of form to, and are proceeded upon in the same manner as, the principal report of the committee".

Je continue le paragraphe suivant: "A report from a committee desiring the instructions of the House as to the authority of the committee or the proper course for it to pursue". Et un paragraphe suivant: In the Commons a select committee having power to send for persons, papers and records, may make a special report of any matters which it may think fit to bring to the notice of the House without obtaining the leave of the House"

Ce qui couvre peut-être la permission qui semble exigée dans le 446 de notre ancien règlement. Il semble ici qu'il n'y aurait pas besoin de la permission de l'Assemblée.

M. BURNS: M. le Président, ce n'est pas des instructions qu'on s'en va demander; on s'en va demander un amendement.

LE PRESIDENT: Je n'ai pas l'intention de discuter durant... Quand même, c'est déjà pas trop facile de rendre une décision; je voudrais avoir...

M. BURNS: Vous avez dit vous-même, M. le Président, après-midi, les choses devaient se passer à la bonne franquette.

LE PRESIDENT: Certainement. Ah oui.

M. BURNS: C'est ça qu'on fait.

LE PRESIDENT: Je le vois. Continuez, puis ça va être de la bonne franquette.

M. BURNS: Sauf que les tentatives de "cover up" — et ça ne vous vise pas du tout, M. le Président — ça commence à me mettre un petit peu, certaines réactions, M. le Président, assez... En tout cas... Je m'excuse, M. le Président.

LE PRESIDENT: A l'ordre!

M. BIENVENUE: J'interviens, M. le Président, pour dire... non mais juste pour dire, comme je le ferais à la Chambre, que je ne fais aucune tentative de "cover up". Je veux que ce soit clair et dans le journal des Débats.

M. BURNS: Vous avez beau le dire, ça parait pas comme ça pantoute.

M. BIENVENUE: J'ai aussi confiance en...

M. BURNS: Vous êtes en train d'essayer de noyer le poisson depuis après-midi.

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! s'il vous plait. Vous continuerez le débat après.

M. BURNS: II est temps que vous connaissiez mon opinion, je vous le dis là.

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. BIENVENUE: Restez agréable comme vous l'avez été...

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre! S'il vous plaît.

M. BIENVENUE: ... et ça va bien aller. On ne règle rien dans la colère.

LE PRESIDENT: A l'ordre! A l'ordre!

M. BURNS: Je ne suis pas en colère, je me maîtrise très bien, M. le Président, et je m'excuse.

LE PRESIDENT: Je pense bien que l'économie générale, c'est qu'un comité spécial qui semble, en vertu soit des règles et des auteurs, et là, je dis que l'économie générale semble donner l'autorisation à un comité de retourner à l'autorité suprême qui est l'Assemblée nationale. Et je dis donc que, sur le principe même du rapport spécial à l'Assemblée, je crois que ce principe est acceptable.

Et je sais, avec l'expérience que nous vivons, et je n'ai pas l'intention de revenir sur les décisions qui ont été prises à l'Assemblée, vendredi dernier, vous comprendrez que maintenant que... même lorsqu'il semble y avoir un

consentement unanime apparent sur certaines motions, je crois que la présidence devra, à l'avenir, avoir encore beaucoup plus de prudence sur la recevabilité des motions.

C'est la raison pour laquelle je disais, même s'il y avait unanimité, ce qui n'est pas le cas actuellement, que j'ai certaines réticences sur les quatre premières lignes de la motion qui est devant la commission actuellement. Et ce que je voulais proposer, d'ailleurs, lorsque j'ai mentionné que j'avais une certaine suggestion à faire, ça aurait été une rencontre entre un représentant peut-être du côté ministériel et un représentant du côté de l'Opposition pour que nous puissions nous entendre sur la formulation ou la rédaction des quatre premières lignes.

S'il n'y a pas lieu de tenir une telle rencontre, avec la prudence que je crois que je devrais adopter à partir de maintenant, à la suite de l'expérience peut-être de vendredi dernier, euh... je vous demanderais — il est déjà onze heures et vingt... Je vais prendre... je préfère la prendre en délibéré jusqu'à demain matin, la motion, et vous proposer, quant à la rédaction, une nouvelle rédaction, ou peut-être la même, des quatre premières lignes de la motion qui est devant la commission actuellement.

M. BURNS: M. le Président, j'ai trop de respect pour vous pour vous faire perdre votre temps. Je vous dis tout de suite que si votre intention est de convoquer une réunion d'un représentant de l'Opposition et d'un représentant du gouvernement pour modifier, ajuster cette motion, je vous dis tout de suite que vous n'aurez pas mon consentement.

Alors, c'est par respect pour vous, M. le Président, que je vous dis ça. Je ne veux pas vous faire perdre votre temps. Je vous dis tout de suite que je n'accepte pas, même, que cette motion-là soit sur la table. Je ne vois pas comment je consentirais à ce qu'on en modifie des mots et qu'on revienne avec un consensus.

Alors, je m'excuse, votre suggestion est de bonne foi, M. le Président, mais je ne peux pas l'accepter.

LE PRESIDENT: Bon. Dans ce cas-là, je réserve ma décision sur la recevabilité finale de la motion jusqu'à la prochaine séance de la commission. Il faudrait faire une motion peut-être.

M. BLANK: Sine die.

M. BIENVENUE: Sine die.

LE PRESIDENT: Sine die. La commission ajourne ses travaux sine die.

(Fin de la séance à 23 h 16)

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