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(Onze heures cinquante-huit minutes)
Le Président (M. Baril): À l'ordre, s'il vous
plaît!
Je déclare ouverte la séance de la commission de
l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation. Je vous rappelle le
mandat de la commission: procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 98, Loi modifiant la Loi sur les
courses de chevaux. M. le secrétaire, est-ce que nous avons des
remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président, on m'a
informé de trois remplacements. M. Desbiens (Dubuc) par M. Godin
(Mercier), M. Dufour (Jonquière) par M. Blais (Terrebonne), M. Houde
(Berthier) par M. Vallières (Richmond).
Projet de loi 98
Le Président (M. Baril): Merci. M. le ministre, est-ce que
vous avez des remarques préliminaires avant de commencer l'étude
du projet?
Remarques préliminaires M. Michel
Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Très
brièvement. Ce projet de loi, tel que je l'indiquais hier à
l'Assemblée nationale, fait suite à la décision du
ministre des Finances et du gouvernement, le 30 juin dernier, dans le cadre et
comme suite du règlement du dossier de Blue Bonnets. Le gouvernement
faisait sienne une des recommandations du rapport Mireault selon laquelle il
était préférable d'intervenir au chapitre de la taxation
plutôt que d'intervenir par le biais d'autres mesures de
subventionne-ment pour régler définitivement l'avenir du
principal hippodrome du Québec, soit Blue Bonnets. On se rappellera que
le règlement de ce dossier, que j'ai annoncé le 30 juin dernier,
réfère à une diminution du taux moyen de taxation de 3 %.
En ce faisant, que cela impli-que-t-il concrètement? Cela implique,
donc, un retour additionnel aux parieurs. Ce retour additionnel aux parieurs,
selon les prévisions que nous avons évaluées ou
formulées à ce moment-là, cette augmentation du montant
retourné aux parieurs était susceptible finalement - c'est
maintenant démontré - d'augmenter les montants pariés
à l'hippodrome Blue Bonnets et sur les autres hippodromes,
évidemment, qui bénéficient d'une semblable mesure. Cette
augmentation du pari augmente, par conséquent, les revenus des
hippodromes et aussi les revenus des propriétaires de chevaux de course.
Comme on le sait, il y a une négociation qui est menée entre
chaque hippodrome du Québec et l'Association trot et amble du
Québec pour un partage de la commission ainsi prélevée par
les hippodromes. Par exemple, c'est ainsi qu'à Blue Bonnets le partage
se fait 50-50 entre l'ATAQ et l'hippodrome. Si ma mémoire est
fidèle, à Québec, c'est 52-48; sensiblement la même
chose à l'hippodrome de Trois-Rivières, sensiblement aussi la
même chose à Aylmer et à la piste Connaught Park et la
même chose aussi à l'hippodrome de Jonquière.
Le but du projet de loi est de s'assurer que le taux moyen de
prélèvement d'un hippodrome sur le montant parié demeure
diminué des 3 % effectivement annoncés par le ministre des
Finances. En vertu des lois, l'hippodrome peut modifier son taux de
prélèvement. Alors, ce faisant, qu'est-ce que cela donnerait
comme résultat? Remarquez qu'il n'est pas du tout dans les intentions
manifestées par les hippodromes jusqu'à maintenant de ramasser,
si je peux utiliser le terme, ou de prendre ces 3 % de diminution. Cependant,
si jamais un hippodrome décidait, peu importe pour quel motif, de
s'approprier ce pourcentage de 3 %, cela remettrait en cause l'objectif
poursuivi par le gouvernement, qui est de faire en sorte que cette diminution
de la taxation aille bel et bien aux parieurs qui visitent les hippodromes du
Québec.
Alors, essentiellement, le projet de loi a pour but de donner à
la Commission des courses de chevaux le pouvoir de prendre une règle
pour s'assurer qu'à compter du 1er juillet 1988 le taux moyen de
commission levé, sur l'ensemble des montants pariés, par le
titulaire d'une licence de courses - donc par un hippodrome - et d'un
certificat d'immatriculation pour un appareil utilisé pour la vente,
l'enregistrement ou la compilation automatique des paris mutuels, pour
s'assurer, dis-je, que ce taux n'excède pas le taux moyen de commission
qu'elle y indique. Une telle règle prise par la commission doit
être approuvée par le ministre des Finances, cela va de soi, mais
dans le cas qui nous occupe actuellement il s'agit de faire en sorte que, si
besoin en était, la commission approuve un règlement ou
établisse une règle qui viendrait ratifier la décision
annoncée le jour même de l'entente de Blue Bonnets par le ministre
des Finances, le député de Bonaventure. C'est uniquement cela;
c'est un projet de loi qui est donc très succinct. C'est un projet de
loi qui vient confirmer la volonté du gouvernement du Québec de
s'associer à l'industrie des courses de chevaux au Québec dans
une perspective de développement, de renforcement, de rentabilité
accrue, d'augmentation des sommes retournées aux parieurs, avec comme
objectif d'augmenter, de ramener le niveau de performance ou le niveau
d'activité à ce qu'il était en 1980 et ce, dans les
meilleurs délais.
Le Président (M. Baril): Merci. M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Merci, M. le Président. On connaît la
teneur ou la nature du projet de loi. il reste peut-être à se
poser certaines questions et à espérer avoir des réponses
à ces questions au cours de l'étude du projet de loi. On sait que
le plan de relance du gouvernement pour l'industrie des courses de chevaux
repose pour l'essentiel justement sur une réduction de la taxation sur
les paris mutuels, en visant comme objectif, évidemment, en en diminuant
le coût unitaire, d'accroître le volume global des paris mutuels.
C'est cela l'objectif. On réduit la taxation, donc on espère
ainsi un accroissement du volume global des paris mutuels comme résultat
de cette baisse de la taxation et aussi évidemment de cette baisse de la
commission perçue par les hippodromes, parce que les deux peuvent se
faire simultanément.
Si je comprends bien, puisqu'on parle du 1er juillet 1988 dans le projet
de loi, les réductions sont déjà en vigueur:
réduction de la taxe et, conséquemment, diminution de la
commission perçue par les hippodromes, de sorte que, comme le
prévoyait le discours sur le budget de mai 1987, l'ensemble des
prélèvements est passé de 24,6 % qu'il était
auparavant à 19,6 %. Est-ce que l'ensemble des réductions est
complété ou si cela va se faire en certaines phases?
Une voix: C'est complété.
M. Brassard: Déjà le 2 % et le 3 % sont
complétés. C'est maintenant 19,6 % de prélèvements
plutôt que 24,6 %. Évidemment, c'est lune des
caractéristiques essentielles du plan de relance de l'industrie des
courses de chevaux. C'est en vigueur depuis le 1er juillet 1988. Je ne sais pas
si le ministre a des chiffres à ce sujet. Je ne sais pas si la
période de temps est suffisamment longue, depuis que ces mesures sont
entrées en vigueur, pour permettre d'en mesurer l'impact. Ce serait
peut-être intéressant de savoir quel effet déjà, au
moment où on se parle, ces mesures ont eu sur le volume global des paris
mutuels dans les divers hippodromes du Québec. Cela nous permettrait
d'évaluer déjà, sûrement pas de façon
définitive, l'efficacité de ces mesures.
M. Pagé: On peut faire valoir que l'effet de la diminution
du taux de taxation, annoncée le 30 juin 1988, se fait
déjà très sentir dans l'ensemble de l'industrie des
courses de chevaux au Québec. Sans se référer aux
statistiques officielles, si on prend les pages sportives du journal Le
Soleil de ce matin, on y voit que, hier soir, mercredi soir, il y avait un
programme de courses à Blue Bonnets. À la fin du détail
des résultats, on y lit toujours: assistance - 4414 personnes hier - et
paris mutuels. La moyenne de paris à Blue Bonnets était
près de 750 000 $ par programme par soir. Ce qui voulait dire, pour 212
programmes environ, un volume de paris d'environ 186 000 000 $. Si on regarde
le pari d'hier, et ce n'était pas un beau soir d'été, ce
n'était pas un beau soir d'automne, c'était un mercredi soir
où, par surcroît, les vaillants Canadiens de Montréal
étaient à la télévision, ce sont 907 000 $ qui ont
été gagés. On sait que le lundi soir est reconnu à
l'hippodrome Blue Bonnets comme étant un des soirs où il y a le
plus de spectateurs, où il se parie le plus d'argent. C'est maintenant
constant et régulier; c'est au-delà de 1 000 000 $ qui sont
pariés le lundi soir.
Globalement, on retient que depuis juillet 1988, donc, depuis l'annonce
du 30 juin dernier, le pari mutuel a augmenté de 9 % par rapport
à la période correspondante l'an dernier.
M. Brassard: À Blue Bonnets ou dans tous les
hippodromes?
M. Pagé: Globalement, sur l'ensemble des hippodromes au
Québec. On a observé des augmentations de l'ordre de 40 %
à Blue Bonnets et des hausses considérables de paris dans les
autres hippodromes à certains moments. Certains avaient augmenté
le pari mutuel de 17 % ou 20 %, voire même de 50 % pour certains
événements.
Si la tendance actuelle se poursuit - et on a tous les motifs de croire
qu'elle se poursuivra, d'autant plus que, comme on le sait, les mois de
novembre et décembre sont des mois où il y a beaucoup d'autres
activités susceptibles d'attirer ou de convier la personne qui,
autrement, se rendrait à l'hippodrome - si la tendance se poursuit, on
évalue à 30 000 000 $ les paris additionnels de cette
année par rapport à la période de janvier à
décembre 1987. Cela voudrait donc dire que notre objectif -
l'augmentation substantielle du pari - serait haussé avant même la
terminaison ou encore la mise en place du programme d'amélioration des
infrastructures qui a été annoncé en septembre 1987 et qui
vise non seulement un rafraîchissement, mais une modernisation
complète des installations offertes au public sur les hippodromes du
Québec où on investit 25 000 000 $, comme vous le savez, par
l'injection de 5 000 000 $ par année pendant cinq ans.
M. Brassard: Est-ce qu'on peut avoir des chiffres pour chacun des
hippodromes? Jonquière, par exemple, est-ce que ça s'est traduit
par une augmentation significative du pari mutuel?
M. Pagé: Je pourrais tenter de vous les obtenir - je ne
ferai peut-être pas de recherche, si je peux utiliser le terme - dans les
meilleurs délais. J'ai été en contact avec les gens de
Jonquière, plus particulièrement avec l'ancienne
administration qui s'interrogeait sur l'avenir de l'hippodrome.
L'hippodrome a été vendu à de nouveaux
propriétaires et ceux-ci y ont augmenté le nombre de programmes
de courses, ce qui risque de changer les termes de référence dans
l'évaluation des volumes d'argent qui est gagé.
Mais une chose est certaine. Cet hippodrome, comme les autres du
Québec, semble être bien engagé dans une perspective de
consolidation et de développement par la suite. Jonquière sera
aussi admissible, tel que je l'ai indiqué en septembre 1987, à
participer au plan de modernisation.
Étude détaillée
Le Président (M. Baril): Merci. Est-ce qu'on est
prêt à prendre l'article 1?
M. Pagé: Oui.
Le Président (M. Baril): M. le ministre, l'article 1 du
projet de loi 98.
Réglementation
M. Pagé: L'article 1 parle de lui-même. On vise
à modifier la Loi sur les courses de chevaux et particulièrement
l'article 103 par l'ajout d'un autre alinéa, après le paragraphe
20°, qui vient stipuler que la commission doit "s'assurer, suivant les
modalités qu'elle y prévoit, qu'à compter du 1er juillet
1988, le taux moyen de commission levé, sur l'ensemble des montants
pariés, par le titulaire d'une licence de courses - etc. -
n'excède pas le taux moyen de commission qu'elle y indique".
C'est le droit, c'est le pouvoir qui est ainsi accordé par cette
mesure à la commission d'établir une règle qui, elle, doit
être prise en vertu de l'article 20.1°. Cette règle, pour
avoir force d'application, doit être approuvée par le ministre des
Finances. Cela va de soi.
M. Brassard: M. le Président, cette disposition va
être introduite dans la Loi sur les courses de chevaux. Est-ce que c'est
parce que, à la suite des mesures prises à la fin de juin 1988,
il y a certains hippodromes qui n'ont pas, de façon simultanée,
comme c'était prévu dans le discours sur le budget,
emboité le pas en réduisant leur commission sur les paris
mutuels? C'est-à-dire, pas nécessairement en les augmentant,
mais, comme le taux moyen de commission des hippodromes devait passer de 13,5 %
à 10,5 %, est-ce que c'est parce qu'il y a des commissions qui ont
continué de prélever 13,5 % que l'on introduit cette disposition
ou si c'est pour s'assurer qu'on a une disposition dans le projet de loi qui
permettrait à la Commission des courses de chevaux, si ça
arrivait, si ça se produisait, d'avoir entre les mains un instrument
juridique pour agir? (12 h 15)
M. Pagé: D'abord, il faut bien se comprendre. On se
réfère, pour fins de compréhension, à un taux moyen
de prélèvement qui s'applique sur un dollar qui est parié.
Et pourquoi est-ce qu'on réfère à un taux moyen? C'est
très simple, c'est que le taux peut varier d'une course à
l'autre, selon le type de pari. Exemple concret: Quand une personne va gager
qu'un cheval va l'emporter, qu'il va arriver premier, deuxième ou
troisième, et qu'elle va faire un pari gagnant, le taux de
prélèvement est plus faible que lorsqu'elle va gager, par
exemple, pour une exacta, c'est-à-dire que les deux chevaux qui vont
arriver en premier vont arriver dans l'ordre choisi. Par exemple, vous gagez 3
et 4, c'est une exacta. Si vous gagez 4 et 3 et que c'est 3 et 4, vous perdez.
Si vous avez gagé pour une quinel-la, par exemple, et que c'est
inversé, vous avez plus de chances de gagner, mais vous recueillez un
montant qui est moins élevé parce que le risque était
moins élevé. Même chose pour les paris trifecta: le parieur
doit prédire exactement quels chevaux vont arriver les trois premiers et
dans quel ordre. Le taux de prélèvement est alors
évidemment plus élevé. Voilà pourquoi on parle d'un
taux moyen. Le taux moyen approuvé pour chaque titulaire en date du 30
juin était de 12,6 % pour Blue Bonnets - on parle de taux moyen - 16,1 %
à Québec, 17 % à Trois-Rivières, 17 % à
Connaught Park et 16,6 % à Jonquière. C'est donc dire qu'avec la
structure de paris de chacun de ces hippodromes, en partant du nombre de
courses qui y ont lieu et, en se référant aussi aux types de
paris pour chacune des courses, la ligne se trace.
La situation est la suivante. En diminuant cette taxe, notre
prélèvement, c'est donc dire qu'au lendemain du 30 juin les
hippodromes auraient pu ou pourraient augmenter leur taux moyen de
prélèvement de 17 % à 20 % dans le cas de
Trois-Rivières et de Connaught Park; Québec aurait pu monter son
taux de prélèvement à 19,1 %; Blue Bonnets aurait pu
augmenter son taux de prélèvement à 15,6 %. Ce qui veut
dire que les 3 %, finalement, de diminution ne seraient pas retournés
dans les poches de l'honorable Jacques Brassard qui peut gager à
Jonquière. Ils seraient retournés dans les coffres de
l'hippodrome, avec l'obligation pour celui-ci de partager, selon les contrats,
les pourcentages auxquels je faisais référence tantôt.
Vous savez comment la bourse s'établit? Disons une bourse de 2000
$, par exemple, pour une catégorie de courses à réclamer
de 4000 $ ou de 5000 $, cela s'établit à partir du volume de
paris et à partir de la commission que prélève
l'hippodrome. Par exemple, à Montréal, c'est 50-50. Quand il
rentre un dollar de revenu du pari à l'hippodrome Blue Bonnets, Blue
Bonnets en garde 0,50 $ pour son administration, sa gestion, etc., et les
autres 0,50 $ s'en vont dans les bourses pour les propriétaires, les
conducteurs, etc..
Parce que la modification n'a pas été
apportée à la loi, et vous comprenez que le
règlement du dossier de Blue Bonnets est intervenu le 30 Juin dernier,
j'ai pensé qu'il n'était pas opportun de convoquer
l'Assemblée nationale du Québec le 3 ou le 4 juillet pour les
motifs suivants: premièrement, en aucun moment les hippodromes ne nous
ont manifesté leur intention de contourner la mesure pour s'approprier
les 3 %; deuxièmement, non seulement ils ne nous ont pas
manifesté cette intention, mais la mesure annoncée par le
gouvernement et le règlement de ce dossier ont été
accueillis de façon très positive. On peut convenir, sans fausse
prétention, que l'industrie a davantage d'air dans les poumons, que
l'industrie se sent appuyée, qu'elle est beaucoup plus solidaire qu'elle
ne l'était dans le passé et que cela va bien. Mais au cas
où, pour être conformes et pour s'assurer de
l'étanchéité de la mesure, on présente le projet de
loi.
Le Président (M. Baril): Est-ce que l'article 1 est
adopté?
M. Pagé: ...pour s'assurer de
l'étanchéité de la mesure, finalement, on présente
notre projet de loi.
Le Président (M. Baril): Est-ce que l'article 1 est
adopté?
La situation des pistes de courses
M. Brassard: Est-ce qu'il serait possible, M. le ministre, de
nous faire un petit état de situation pour ce qui est de Blue Bonnets,
après les péripéties multiples qu'on a connues?
M. Pagé: Blue Bonnets va bien. Le dossier s'est
réglé de la façon suivante. On se rappellera qu'il y avait
eu différents scénarios étudiés pour le
règlement de ce dossier.
Le scénario original était que Blue Bonnets passait aux
mains d'une corporation devant être créée, une
société en commandite, ce que votre collègue, le
député de Laviolette, avait d'ailleurs déjà
appuyé. Cette solution donnait ceci comme lecture. Premièrement,
le coût évalué pour le gouvernement du Québec
était au-delà de 50 000 000 $ pour maintenir la piste ouverte
pendant dix ans. Et après dix ans, dans le cas de ce premier
scénario de gestion de la piste par une société en
commandite, la corporation Campeau demeurait toujours propriétaire des
permis et licences, du nom, du "goodwill", etc. Comme vous le savez, ce qui est
important dans le dossier du monde des courses, pour le détenteur, c'est
l'octroi d'une licence au bénéfice d'une entreprise ou d'une
personne. En vertu de la règle fédérale, on ne peut pas
avoir deux permis dans un même rayon de 80 kilomètres. Alors,
cette solution coûtait au-delà de 50 000 000 $.
La solution du club Standardbred de Mont- réal
référait à un montant de 62 000 000 $. Cela aurait
coûté 62 000 000 $ au trésor public du Québec pour
maintenir l'hippodrome ouvert avec le club Standardbred. La solution retenue
est la suivante: Blue Bonnets demeure ouvert le 1er juillet. La corporation
Campeau conserve la gestion de la piste, la propriété des
terrains. La corporation Campeau s'engage à maintenir l'activité
pour un nombre de programmes établi au contrat. Si ma mémoire est
fidèle, c'est entre 212 et... Ce n'est pas un nombre de programmes,
c'est un nombre de courses par année, à partir de la moyenne des
années précédentes. En contrepartie, le gouvernement
s'engage 1° à diminuer le taux de taxation de 3 %; 2° le
gouvernement, tel que je l'indiquais le 30 juin, garantit à la
corporation Campeau que cette diminution de la taxe va générer 3
000 000 $ de revenus additionnels bruts à Blue Bonnets. Jusqu'à
présent, selon toutes les informations qu'on a sur les paris des mois de
juillet, août, septembre, octobre et novembre, si le rythme de
croisière demeure ce qu'il est, le gouvernement du Québec
n'aurait pas à débourser un sou pour garantir le revenu
additionnel en question. Et, autre élément, Campeau s'engageait
à rénover les écuries pour 1 000 000 $ au cours de la
présente année. Comme on le sait, les écuries
étaient tout à fait inacceptables: des toits qui coulaient, des
toiles pour recueillir l'eau quand il pleuvait, etc. Blue Bonnets s'est
engagé à investir 1 000 000 $ dans le cadre du programme de
développement et d'amélioration des infrastructures qu'on avait
annoncé.
Autre élément, la corporation Campeau a jusqu'au 30 juin
1989 pour signifier au gouvernement du Québec son intention de demeurer
à Montréal, de garder l'activité de courses sur ses
terrains ou d'y mettre fin. Si la corporation Campeau décidait, à
la suite d'une mésentente par exemple avec la ville de Montréal,
d'utiliser à d'autres fins que des fins de courses de chevaux les
terrains qui lui appartiennent près du boulevard Décarie, elle
devrait nous signifier avant le 10 juillet 1989 un avis à l'effet qu'on
doit quitter les lieux. Si tel était le cas, on aurait deux ans pour ce
faire, on quitterait avec tous les permis, les licences, le nom, le "goodwill",
etc.
Si la corporation Campeau décidait, avant le 30 juin 1989, mais
toujours en le signifiant avant le 10 juillet 1989, de maintenir son
activité, elle devrait nous en aviser, auquel cas elle devra maintenir
son activité jusqu'à l'échéance du terme qui est le
1er juillet 1998, et, à l'échéance du terme, le
gouvernement du Québec deviendrait propriétaire des permis, des
licences, etc. C'est ça l'entente. C'est bon et ce n'est pas cher.
Ah! oui, dernier élément, si la corporation Campeau
demeurait à Décarie, à Montréal,
immédiatement après que l'avis serait formulé
s'enclencherait le processus de modernisation de ses équipements pour
lequel le gouvernement a prévu 13 800 000 $. Nous sommes
justifiés de le
faire, d'autant plus que, dans l'analyse et dans le programme, la
condition pour laquelle un hippodrome peut recevoir de l'aide substantielle...
À Trois-Rivières, par exemple, je pense que c'est 2 000 000 $ et
quelques ou 1 800 000 $; à Québec, c'est près de 3 000 000
$ ou 4 000 000 $. Trois-Rivières c'est au-delà de 2 000 000 $.
Bien, la condition pour recevoir un tel montant est de s'engager à
maintenir l'hippodrome ouvert pendant dix ans et, pour nous, ces
équipements sont amortissables sur une période de dix ans.
Une voix: Aylmer.
M. Pagé: Aylmer s'est vu offrir un montant de 2 700 000 $
et on doit dire, pour le bénéfice de M. le dé...
Une voix: Lac-Saint-Jean aussi.
M. Pagé: Jonquière, 1 300 000 $; Québec,
près de 3 000 000 $. D'ailleurs, l'hippodrome d'Aylmer est, selon nos
analyses, l'hippodrome du Québec qui est susceptible de connaître
le plus grand développement, pour le motif qu'ils ont un bassin de
population très appréciable avec la région d'Ottawa. Comme
on le sait, il y a deux hippodromes: il y a l'hippodrome de Rideau-Carleton, du
côté de l'Ontario, qui a les permis et licences du
fédéral pour être en activité du 1er juin au 30
novembre, et la piste d'Aylmer qui est en activité du 1er
décembre au 30 juin. Ils ont un bassin de population très
appréciable.
Une voix:...
M. Pagé: Non, parce que, encore une fois, en vertu de la
règle fédérale, on ne peut pas avoir deux licences dans le
même rayon de 80 kilomètres, et les licences sont octroyées
pour les jours de courses. Alors, le programme de courses déposé
par Rideau-Carleton s'applique de juin à décembre, et le
programme de courses déposé par Aylmer s'applique de
décembre à juin. Il faut convenir que l'hippodrome de Connaught
Park à Aylmer avait des installations pour le public mais des
installations minimales. Donc, ce qui est prévu dans le plan de
développement, là-bas, c'est l'amélioration des
infrastructures pour le paddock, les écuries et des installations
nettement améliorées pour la restauration, le logement, etc.
On prévoit une augmentation substantielle du nombre de visiteurs
et, par conséquent, du pari; donc, des revenus additionnels pour
l'industrie, l'hippodrome et le gouvernement du Québec. Et, pour nous,
c'est quoi? C'est, grosso modo, 20 000 000 $ de revenus par année qu'on
retire de cette industrie; on prévoit que ça va augmenter
substantiellement avec l'augmentation des paris. Alors, concrètement,
cela veut dire davantage d'argent dans nos coffres qui sera redistribué
à ceux qui en ont le plus besoin dans notre société.
Le Président (M. Baril): Merci. M. le député
de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: II y avait mon collègue de Terrebonne
qui...
Le Président (M. Baril): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: Juste une question de renseignement. C'est 80
kilomètres à la ronde?
M. Pagé: C'est 50 milles. (12 h 30)
M. Blais: Oui. Est-ce qu'il y a quand même des discussions
avec le gouvernement fédéral pour scinder ça ou
améliorer la situation d'Aylmer sous cette loi qui est un peu
négative pour Aylmer?
M. Pagé: II y a plusieurs discussions qui ont cours
actuellement à l'égard de la fameuse norme du 50
kilomètres. La première...
M. Brassard: Le meilleur temps pour les courses c'est
l'été, j'imagine, non?
M. Blais: L'automne est bon aussi.
M. Pagé: Pas nécessairement. C'est bon
l'été quand la piste est en bonne condition, les chevaux vont
normalement plus vite que lorsqu'ils courent dans la boue. Lorsque le temps est
humide, c'est très sain aussi. L'hiver, ce n'est pas le même
spectacle. Cependant, il y a encore des milliers de visiteurs qui se rendent
aux hippodromes. Comme je vous l'indiquais hier, l'activité sportive
professionnelle au Québec qui reçoit le plus grand nombre de
visiteurs c'est les courses de chevaux, au-delà du hockey professionnel
et au-delà du baseball professionnel. Dans les hippodromes du
Québec, on reçoit 1 825 000 personnes chaque année, alors
que dans le hockey professionnel c'est 1 500 000 ou 1 600 000 qui vont au Forum
et au Cotisée de Québec. Au baseball, c'est 1 200 000 ou 1 300
000. Au baseball, c'est quoi? C'est 92 parties qui sont jouées
localement; au hockey professionnel c'est 80 à Québec et à
Montréal, 40 dans chacun des amphithéâtres.
M. Brassard: Cela m'a un peu étonné, d'ailleurs,
dans votre discours de deuxième lecture, que l'assistance dans les
hippodromes du Québec soit supérieure à l'assistance du
hockey professionnel; il y a pourtant deux équipes, et du baseball
également.
M. Blais: II y a cinq pistes de courses, c'est peut-être
cela qui fait qu'il y a plus de monde dans ce sport.
M. Pagé: II faut dire que l'hippodrome de Connaught Park
fonctionne seulement six mois par année à Aylmer; à
l'hippodrome de Trois-Rivières, le programme annuel de rencontres va se
terminer vers le 10 ou le 15 décembre. Ils ont repris des jours parce
qu'il y avait eu une grève de l'ATAQ en début de saison. Cela,
c'est donc à peu près seulement huit mois par année.
L'hippodrome de Québec est ouvert sur une base annuelle et l'hippodrome
Blue Bonnets aussi, sauf qu'en hiver le nombre de programmes par semaine est
réduit de cinq à quatre et il n'y a pas de courses les mardi et
jeudi. L'hippodrome de Jonquière a présenté une demande
à la commission pour augmenter son nombre de programmes et maintenir ses
activités en hiver.
Pour répondre à votre question, cela se discute. Il y a
d'ailleurs eu un jugement. Il y a eu une poursuite où a
été mis en cause, cela va de soi, Agriculture Canada par un
hippodrome du sud de l'Ontario. C'est actuellement revu par les
autorités fédérales. Tout va dépendre de...
M. Brassard: Une poursuite, pourquoi?
M. Pagé: C'était une poursuite d'un hippodrome
à l'égard du gouvernement fédéral pour obtenir le
droit d'exploiter deux permis en même temps à l'intérieur
d'une région de 80 kilomètres. C'est le premier
élément. Il faut prendre en compte aussi que le gouvernement
canadien est sur le point... On prévoit qu'en l'année 1989 le
gouvernement canadien va autoriser ce qu'on appelle les
téléthéâtres. Actuellement, le pari interpiste est
permis. Cela veut dire quoi concrètement? Cela veut dire que si... Ce
qui se vit actuellement à Montréal, à Montréal le
samedi après-midi, II y a des courses qui sont présentées
sur écran géant. Il y a des paris qui se font à partir de
ces courses-là.
M. Brassard: Des courses qui ont lieu ailleurs?
M. Pagé: Elles ont lieu à Woodbine, en Ontario. Les
hippodromes de Mohawk et Woodbine, ce sont des courses au galop. C'est du
Thoroughbred, ce n'est pas du Standardbred. Cela, entre parenthèses,
attire des parieurs qui ne sont pas nécessairement les même
parieurs que ceux qui vont voir les courses de chevaux attelés. C'est le
samedi après-midi. Il se gage 350 000 $ à 400 000 $ le samedi
après-midi, alors qu'il n'y a pas un cheval à l'extérieur.
C'est sur écran géant, cela vient de Woodbine. C'est permis,
c'est légal actuellement, le pari interpiste. Pour cela, il faut un
permis de piste et il faut que tu opères ton pari dans un rayon de 900
mètres de ton hippodrome. Donc, il faut que tu sois localisé.
Cela se fait. C'est seulement Montréal qui le fait.
M. Brassard: Est ce que Québec a des intentions d'aller de
l'avant?
M. Pagé: Québec non, sauf que, exemple concret,
Jonquière pourrait être intéressée, comme
Québec pourrait l'être, de faire du pari interpiste.
M. Brassard: À partir des courses de Blue Bonnets, par
exemple?
M. Pagé: De Blue Bonnets ou de Québec. C'est donc
un premier volet qui est en développement.
Un autre volet, c'est que le fédéral s'apprête
à légaliser ce qu'on appelle les
téiéthéâ-tres. Que sera un
téléthéâtre si jamais cela se concrétisait et
que c'était accepté par l'industrie du Québec et le
gouvernement du Québec? C'est un salon de paris, qui pourrait être
à Sherbrooke...
M. Brassard: Pas de piste?
M. Pagé: ...qui pourrait être à
l'aéroport de Mirabel.
M. Brassard: Aucune piste?
M. Pagé: Aucune piste
M. Brassard: Ce n'est qu'un lieu de paris.
M. Pagé: Mais relié directement à un
hippodrome où tu as la présentation des courses, des guichets de
paris, des facilités, des repas qui sont offerts au public, etc. Ces
expériences sont conduites depuis longtemps dans certains États
américains, notamment dans l'État de New York, et cela permet
à une personne, plutôt que de se rendre à l'hippodrome, de
se rendre dans un salon, qui est peut-être plus accessible, dans un
endroit au centre-ville, etc. Sauf qu'ici...
M. Brassard: Ce qui implique pas mal moins d'investissements que
de créer une piste.
M. Pagé: Moins d'investissements, sauf que...
M. Biais: II pourrait même être international.
M. Pagé: Nous sommes à mesurer...
M. Blais: Le salon de paris pourrait venir de Paris!
M. Pagé: C'est largement répandu en Europe, avec
les PMU, les paris mutuels urbains.
M. Blais: Les PMU. oui.
M. Pagé: D'ailleurs, c'est un des mandats confiés
au comité consultatif Vous savez qu'en vertu de la loi 89 qui a
été adoptée l'année dernière le
comité consultatif a été formé et un
de ses premiers mandats c'est de formuler à la commission des
recommandations sur la politique à adopter au Québec pour tout ce
qui s'appelle les téléthéâtres. Faisons
l'hypothèse que demain matin il y a un
téléthéâtre à Montréal au
centre-ville, près de Berri-Demontigny, pas loin de la bouche de
métro. Il ne serait pas surprenant qu'il y ait moins de gens à
Blue Bonnets. Mais cela a des effets sur l'industrie, sur la rentabilité
des infrastructures qui y sont.
Tout cela devra être jaugé, mesuré et bien
analysé, et la position que nous avons adoptée entre autres celle
que j'ai adoptée, une position préliminairement formulée
auprès du gouvernement fédéral, c'est que la structure de
mise en place de tels téléthéâtres, si jamais
c'était accepté au Québec, devrait passer par une
association avec les hippodromes qui, eux, ont à supporter des actifs,
des inventaires, et qui doivent retourner une partie de leur recette aux
propriétaires. Et je termine là-dessus, parce que ce qui s'est
vécu, par exemple dans l'État de New York ou dans certains
états américains - je n'ai pas à nommer New York, je
m'excuse M. le Président, mais certains États américains -
les paris hors piste ont été légalisés, dans
certains États les revenus générés ou les
prélèvements gouvernementaux sur ces paris ont été
uniquement pour l'organisation des équipements sur place, ou encore pour
le gouvernement. C'est donc dire que les propriétaires d'une piste
à 15 ou 30 milles d'un pari hors piste n'avaient pas de commission,
même si les courses venaient de leurs hippodromes. Donc cela voulait dire
pas de commission pour les chevaux, pas de commission sur les bourses. Et notre
objectif c'est d'être structurant pour l'industrie parce que, comme vous
le savez, de la ferme au fil de départ, c'est 10 000 jobs au
Québec, et c'est beaucoup de millions d'investissements.
M. Blais: Si on revient sur les conversations, pardon...
M. Brassard: Seulement sur les salons ou les
téléthéâtres, comme vous dites, est-ce qu'à
ce moment cela pourrait être sous la juridiction exclusive du
Québec? Est-ce que des permis et des licences provenant du
fédéral seraient également requis?
M. Pagé: Oui.
M. Brassard: Étant donné qu'il n'y a pas de piste
comme telle, ce serait...
M. Pagé: Oui, parce qu'en vertu du code... 11 faut une
modification au Code criminel. Et c'est certain que le fédéral
aurait juridiction sauf...
M. Brassard: II faudrait que la loi fédérale soit
amendée.
M. Pagé: II faut que la loi fédérale soit
amendée. Deuxièmement, la position qu'on a adoptée, le
gouvernement du Québec, le gouvernement de l'Alberta et le gouvernement
de la Colombie britannique, c'est que la mise en oeuvre de cette nouvelle
formule de pari ne peut avoir cours dans une province à moins qu'on
signe une entente formelle établissant les juridictions partagées
et établissant surtout le mode d'opération et de redistribution
des revenus générés par une telle activité. Parce
que chez nous, et je vous le dis même s'il n'y a absolument rien de fait
à cet égard - ce sont seulement des discussions qui ont eu cours,
parce que la loi n'est pas adoptée - en ce qui me concerne comme
ministre responsable de l'industrie, les propriétaires d'hippodromes,
les entreprises, les hippodromes devront être associés à
cette démarche. Merci.
M. Blais: À Ottawa, de toute façon, ils ont... Je
vais laisser le ministre finir sa conversation.
M. Pagé: Un dernier élément que je veux
porter à l'attention des membres de la commission c'est ceci. Nous avons
l'intention de tenir des expériences à l'été 1989.
Vous savez que les courses de chevaux proviennent des activités dans le
cadre des expositions agricoles. Si on parle du début du siècle,
les courses de chevaux c'étaient les expositions agricoles. Au
Lac-Saint-Jean, il devait y avoir trois ou quatre places où les chevaux
couraient et c'était dans le cadre d'une exposition agricole. On veut
tenter une expérience l'été prochain, et il faut dire
aussi que c'est à partir de l'intérêt suscité sur le
plan des expositions agricoles que l'attachement aux courses de chevaux au
Québec s'est développé au cours des années. Les
courses de chevaux étant devenues presque essentiellement un
phénomène urbain dans les villes que vous connaissez, on a
l'intention de conduire des expériences dans le cadre d'expositions
agricoles qui se tiendront à l'été 1989. On ne partira pas
en peur, évidemment - à bride abattue, c'est le cas de le dire -
mais on a l'intention de conduire deux ou trois expériences sur des
hippodromes, parce qu'il y a des hippodromes amateurs dans plusieurs
régions du Québec, et de conduire des expériences avec des
paris qui seront administrés selon les règles actuelles de la
Commission des courses de chevaux du Québec pendant trois ou quatre
jours, puis un "meeting" et...
M. Brassard: II y a des expositions agricoles au Québec
qui possèdent également des pistes.
M. Pagé: Oui, c'est-à-dire qu'il y a plusieurs
villes...
M. Brassard: L'exposition a lieu dans un endroit où il y a
également une piste.
M. Pagé: Par exemple, je regarde la piste
de Monchâteau dans Vaudreuil, Brome, Ayer's Cliff. Il y en a aussi
dans l'Est du Québec, en Gaspésie, il y en a à New
Richmond, Pabos, et je suis allé cet automne, dans le cadre du sommet
économique, voir cela, et l'hippodrome de Pabos, c'est une piste d'un
demi-mille avec un record de piste de deux minutes et deux secondes. Il y a
deux hippodromes aux Îles-de-la-Madeleine aussi.
Le Président (M. Baril): M. le député de
Terrebonne.
M. Blais: J'aurais une petite question. Je ne connais pas
l'inventaire, mais je sais qu'il y en a quelques-uns au Québec, des
petits hippodromes pour les courses dites de poneys.
M. Pagé: Oui.
M. Blais: Le moins qu'on puisse dire c'est que les paris ne sont
pas tout à fait permis dans ces pistes.
M. Pagé: II n'y a pas de permis autorisés.
M. Blais: Le moins qu'on puisse dire c'est cela, mais on sait que
c'est censé être des courses récréatives. Il ne faut
tout de même pas avoir les yeux fermés devant cela, c'est
sûr que c'est récréatif, mais ce qui attire les gens, et je
le sais parce que j'ai un hippodrome dans mon comté à la ville de
Lachenaie, bien organisé d'ailleurs, mais, les paris étant
défendus, on sait que ce sont les gens qui parient qui viennent à
ces courses... J'ai l'impression que le ministre est certainement
sensibilisé à cela. Est-ce qu'il y a une ouverture
éventuelle à ce qu'il y ait des paris, ils pourraient être
minimes, ils pourraient être organisés, mais pour essayer de
légaliser ce qui se fait de fait?
Une voix: Prélever une taxe aussi.
M. Blais: II y aurait aussi une taxe pour le fonds
consolidé.
M. Pagé: C'est un des objectifs qui nous animent dans
l'expérience qu'on va conduire cet été avec par exemple,
parce que cela va nous prendre des machines, on appelle cela des "totes", les
équipements qui établissent les montants pariés, la cote,
les "odds", etc. On va conduire cette expérience et notre objectif
c'est, si c'est concluant, d'étendre de telles expériences
à d'autres hippodromes. (12 h 45)
M. Blais: Donc, ce n'est pas rejeté dans votre
étude qu'il y aurait durant l'été. Cela veut dire qu'au
début de l'automne...
M. Pagé: C'est-à-dire qu'on pourrait, d'ici
quelques années, à Lachenaie avoir des paris légaux,
autorisés, encadrés, régis par des lois, pour des courses
de poneys chez vous, si c'était le choix des gens de la région et
du secteur.
M. Blais: D'accord, mais l'étude que vous allez faire
durant l'été, c'est vers le début de l'automne qu'on va en
avoir un peu le résultat ou si cela peu prendre un plus de temps?
M. Pagé: Oui, d'ici la fin de... Cela ne prend pas de
temps, j'espère qu'on ne dérangera personne quand nous arriverons
avec nos systèmes.
M. Blais: En fait je n'ai aucune objection personnelle à
ce que ces pistes de poneys où il se fait des paris sous la table...
M. Pagé: C'est-à-dire des paris sous la table, je
crois qu'il est très difficile, et cela n'a jamais été
l'intention d'un gouvernement d'aller contrôler les gestes posés
entre deux personnes adultes et librement consentantes. Vous savez, un exemple
concret, quand en fin de saison...
M. Blais: Je suis seulement dans les courses de poneys...
M. Pagé: ...les députés du Parti
québécois perdront peut-être 2 $, 5 $ de gageure avec le
député de Portneuf et ministre de l'Agriculture, parce que les
Nordiques vont finir par battre les Canadiens en fin d'année de
façon très éclatante...
M. Brassard: La vraie saison n'est pas commencée.
M. Pagé: ...ce ne sera pas illégal.
M. Brassard: La vraie saison n'est pas commencée.
M. Pagé: La vraie saison, je pense, d'ailleurs, que le
député du Lac-Saint-Jean a les mêmes orientations
politico-sportives au Québec...
M. Brassard: Absolument.
M. Pagé: ...que le ministre de l'Agriculture. Si le
député de Lac-Saint-Jean et moi, unissons nos deniers pour vous
gager 10 $ sur la prochaine série Canadiens-Nordiques, ce n'est pas
illégal. Si deux personnes gagent entre elles...
M. Blais: Oui, on sait bien. Non, on sait que c'est
illégal ce qui se fait aux petits hippodromes, parce que c'est fait sur
une plus grande échelle que d'un individu à l'autre, parce que
sur le même principe on pourrait l'étendre à Blue Bonnets.
Vous savez bien que ce n'est pas dans cette direction que je veux engager la
conversation. Mais, vu que vous dites que vous prenez cette étude au
sérieux, j'aimerais vous demander si vers le début de l'automne
on pourrait avoir... Le rapport serait déposé au
début de l'automne et on pourrait s'attendre à au moins
des tendances qui se dégageraient.
M. Pagé: C'est-à-dire que la commission va faire
rapport...
M. Brassard: La Commission des courses de chevaux...
M. Pagé: ...sur les conclusions retenues à la suite
de l'expérience qu'on vivra l'année prochaine et, à partir
de cela, on pourra en parler ici, cela me fera plaisir.
M. Blais: D'accord. Avec plaisir, je trouve beau que vous ayez
une ouverture. Vous n'avez pas de fermeture. Cela veut dire que cela ouvrira,
il n'y a pas de fermeture.
M. Pagé: Rien n'exclut la possibilité
qu'éventuellement il y ait des paris encadrés dans la belle ville
de Lachenaie, pour des courses de poneys du dimanche après-midi. Si tel
était le cas, on ira couper le ruban ensemble.
Le Président (M. Baril): À la suite de ces belles
discussions...
M. Pagé: Si vous et moi sommes encore
députés.
M. Biais: Si nous sommes réélus.
M. Brassard: M. le Président, est-ce qu'on pourrait
débuter l'article 1?
Le Président (M. Baril): Oui. M. Blais: II reste
douze minutes.
M. Brassard: On est toujours à l'article 1, on va donner
la loi avant une heure de toute façon.
M. Blais: II n'y a pas de problème.
M. Brassard: Mais j'aimerais...
M. Pagé: On va donner la loi avant l'heure.
M. Brassard: J'aimerais poser une question sur l'élevage
des chevaux. Évidemment, ce n'est pas tout à fait une mission de
la commission, mais vous avez quand même des programmes au
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation
visant à encourager et à soutenir l'élevage des chevaux au
Québec. Est-ce qu'à ce chapitre il y a des progrès
notables, est-ce que la situation est satisfaisante?
M. Pagé: II faut dire que la commission n'a pas
juridiction sur l'élevage, mais elle a juridiction sur la
réglementation qui a des incidences sur l'élevage.
M. Brassard: Mais le ministère a quand même des
programmes d'aide.
M. Pagé: Le meilleur véhicule pour promouvoir
l'élevage, c'est d'adresser et de garantir des bourses pour le produit
de l'élevage. Par exemple, le fait d'avoir reconduit nos programmes
circuit Québec, d'avoir augmenté les budgets pour la coupe des
éleveurs, qui s'adresse aux ambleurs de deux et trois ans du
Québec, a eu comme résultat d'augmenter le prix payé aux
poulains et pouliches vendus aux encans du Québec. On doit dire que nos
prévisions pour le programme d'aide aux courses
régulières, ce sur quoi nous travaillons - je vais être
très clair, ce n'est pas une annonce que je fais ce matin, c'est ce sur
quoi nous travaillons - nous prévoyons pour les programmes d'aide aux
courses régulières... C'est ce qu'on appelle dans le jargon de
l'activité les bourses "overnight". Cela, c'est le cheval, la jument qui
a quatre ans - pas le poulin, la pouliche - le mâle ou la femelle qui a
cinq ans, six ans ou sept ans, comme on le sait, un cheval peut courir
jusqu'à l'âge de quatorze ans dans des courses
régulières. Cela, c'est la majorité des courses dans un
programme de courses.
Comment une personne va devenir propriétaire de chevaux de
course? Souventefois, pas tout le temps mais souventefois la personne va
prendre contact avec l'activité; cela lui plaît, elle aime les
chevaux, etc. Souvent, elle va acheter un cheval qu'on appelle un cheval
"âgé" qui ne part plus dans les courses de poulins et de
pouliches. Soit qu'elle va l'acheter de gré à gré, soit
qu'elle va le réclamer, parce qu'il y a des courses à
réclamer qui donnent le droit à toute personne de se porter
acquéreur à un prix donné. Le prix est établi
d'avance. Il est écrit sur le programme d'un cheval qui part dans ces
courses.
Souventefois, le premier contact va être d'acheter un cheval,
qu'on appelle un cheval fait, et les revenus générés par
ce cheval vont conduire à l'achat par la même personne d'un poulin
ou d'une pouliche à l'encan suivant. Donc, les bourses "overnight" sont
importantes. Notre prévision, c'est d'augmenter, pour la prochaine
année, de 3 000 000 $ à près de 4 000 000 $, pour environ
30 %, le montant alloué aux bourses "overnight". Dans le cadre du
circuit Québec qui s'adresse aux jeunes chevaux, aux poulins de deux ou
de trois ans, mâles et femelles, on prévoit l'augmenter d'environ
12 %, en passant de 3 200 000 $ à près de 3 700 000 $. Pour les
séries Perfecta qui s'adressent aux pouliches étrangères,
mais qui sont de propriété québécoise... Si on
regarde la génétique des chevaux du Québec ou du cheptel
chevalin du Québec dans les courses de type Standardbred, on constate
qu'on a une faiblesse pour ce qui est des pouliches, parce que l'accent a
été mis, au cours des années, sur les poulins. Alors, on a
une série qui est la série Perfecta qui vise à inciter
des
éleveurs québécois à acheter des pouliches
performantes de qualité qui nécessairement prennent le
réseau de la reproduction au Québec et, éventuellement, on
aura une qualité d'amélioration génétique aussi
bonne, aussi concluante chez les pouliches que chez les poulins. La
série Perfecta, cette année, c'était 675 000 $ qu'on y
consacrait. La prochaine année, on prévoit - sous toute
réserve que ces montants soient acceptés, mais on est
déjà en discussions avec les organismes centraux et surtout avec
l'industrie - on prévoit y dépenser près de 800 000 $.
La coupe des éleveurs, on prévoit l'augmenter
substantiellement. La coupe des éleveurs s'adresse... C'est la course
qui se tient généralement en septembre, après le prix
d'été, et on prévoit que cette course devrait augmenter
les montants affectés par le gouvernement, passant de 400 000 $ à
près de 700 000 $, si possible, un peu plus de 700 000 $. Dans le
circuit C, on prévoit... Ce sont des courses d'exposition, parce qu'il
se donne des bourses dans le circuit C, même s'il n'y a pas de pari.
L'année dernière, on donnait 60 000 $. On prévoit
près de 100 000 $ l'année prochaine. Recherche en médecine
équine, c'est assumé chez nous. Les programmes d'aide aux clubs
de courses amateurs, c'est chez nous aussi. On prévoit différents
paiements de transfert comme ça sur le plan des services à donner
à l'éleveur.
Le Président (M. Baril): Merci. Est-ce que vous avez
d'autres commentaires?
M. Brassard: Cela va. On peut adopter l'article 1.
Le Président (M. Baril): Est-ce que l'article 1 est
adopté? Adopté. L'article 2.
Sanctions
M. Brassard: À l'article 2, il s'agit de sanctions. Est-ce
que le ministre pourrait nous les rappeler, en cas de manquement par un
hippodrome à la règle?
M. Pagé: C'est une mesure qui prévoit de modifier
l'article 134 du projet de loi pour permettre que l'amende chargée
à un hippodrome qui dérogerait à cette norme soit deux
fois le montant prélevé illégalement. Exemple: Un
hippodrome décide de ne pas respecter l'article 1; s'il
prélève, dans le 3 %, 500 000 $ illégalement, l'amende
pourrait être de 1 000 000 $.
M. Brassard: Cela double? M. Pagé: Oui.
Le Président (M. Baril): Est-ce que l'article 2est
adopté?
M. Brassard: Oui, adopté
Le Président (M. Baril): L'article 3?
M. Pagé: L'article 3, la date d'entrée en vigueur
de l'article 2.
Le Président (M. Baril): C'est ça. M.
Pagé: Alors c'est pour s'assurer... Une voix: Donc c'est
rétroactif.
M. Pagé: C'est rétroactif au 18 décembre
1987, date d'entrée en vigueur de ta loi 89.
Il fallait qu'elle entre en vigueur, pour cette mesure-là, au 1er
juillet 1988, mais c'est la loi du 18 décembre 1987 qui doit habiliter
l'entrée en vigueur du 30 juin ou du 1er juillet 1988.
Le Président (M. Baril): Est-ce que l'article 3 est
adopté?
M. Brassard: C'est l'article 2 qui avait fait... Est-ce que
ça signifie quand même que, de façon rétroactive, il
y a des hippodromes qui vont se voir imposer des amendes?
M. Pagé: Non, du tout. Du tout, du tout. M. Brassard:
Non.
M. Pagé: Je le dis et je veux que ce soit bien inscrit au
Journal des débats, non. Sauf que si jamais il était
découvert que le 1er juillet... Disons que, le 30 juin et le 1er juillet
au soir, des montants n'ont pas été prélevés et que
là il y a une dualité d'opinions entre la commission des courses
et l'hippodrome en question; le pouvoir permettant à la commission
d'agir sur cette question lui aurait été accordé en
décembre 1987.
M. Brassard: C'est pour s'assurer que les assises juridiques sont
solides.
M. Pagé: C'est ça. Elles sont solides.
Le Président (M. Baril): Est-ce que l'article 3 est
adopté?
M. Brassard: Oui.
Le Président (M. Baril): L'article 4?
M. Pagé: Date d'entrée en vigueur.
Le Président (M. Baril): La date d'entrée en
vigueur.
M. Brassard: Adopté.
Le Président (M. Baril): Est-ce que le titre,
Loi modifiant la Loi sur les courses de chevaux, est adopté?
M. Brassard: Adopté.
Le Président (M. Baril): Est-ce que le projet de loi 98
est adopté?
M. Brassard: Adopté.
M. Pagé: Deux choses avant, M. le Président, si
vous le permettez.
Le Président (M. Baril): Oui.
M. Pagé: Est-ce que le député de
Lac-Saint-Jean accepterait que je lui fasse parvenir les données
concernant l'hippodrome de Jonquière par voie privée, par le
courrier ou je lui remettrai...
M. Brassard: Oui.
Le Président (M. Baril): Je vais vous les donner pour tous
les hippodromes.
M. Brassard: Parfait.
M. Pagé: Autre chose. Avec la permission de la commission,
M. le Président, est-ce que ce serait possible de recommencer nos
travaux à 15 h 30?
M. Brassard: Pas de problème, quant à nous.
Le Président (M. Baril): La commission suspend ses travaux
jusqu'à 15 h 30.
(Suspension de la séance à 12 - h - 58)
(Reprise à 15 h 53)
Projet de loi 100
Le Président (M. Richard): À l'ordre, s'il vous
plaît! Mesdames et messieurs, je déclare la séance de la
commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation ouverte.
Je vous rappelle le mandat de la commission qui est de procéder à
l'étude détaillée, je dis bien détaillée, du
projet de loi 100, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire
agricole du Québec. M. le secrétaire, je pense qu'il y a eu
l'annonce de certains remplacements.
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. On m'a
informé des remplacements...
M. Pagé: Vous avez été remplacé ce
matin, M. le Président, par l'honorable député de
Rouyn-Noranda-Témiscamingue.
Le Président (M. Richard): Oui, vous savez, j'étais
sur un dossier agricole dans ma propre région.
M. Pagé: Nous sommes honorés de vous recevoir.
C'est gentil que vous soyez de passage à notre commission.
Le Président (M. Richard): Ha, ha, ha!
M. Blais: Est-ce que vous avez fait des améliorations sur
une grande ferme ou quelque chose dans votre comté, M. le
député de Nicolet?
Le Président (M. Richard): Non, non, c'était notre
préoccupation de protéger une exposition agricole
régionale, qui est la seule exposition agricole interrégionale au
Québec d'ailleurs, l'exposition de Trois-Rivières, où il y
avait une problématique en fonction des agriculteurs exposants et du
propriétaire des bâtisses et du site, qui est la ville de
Trois-Rivières.
M. Pagé: M. le Président, il ne serait cependant
pas opportun d'annoncer le règlement du dossier tant et aussi
longtemps...
M. Blais: Demandez-le-lui donc.
M. Pagé: ...que le ministère n'aura pas
ratifié... Le Président (M. Richard): Vous avez tout
à fait raison, M. le ministre. On est en train de se "filibuster" tout
seuls, M. le ministre.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: Non, mais un instant! M. le Président, avant les
remplacements, pour rester dans la même note, est-ce que le ministre veut
dire qu'il a une annonce à faire au sujet de cette exposition-là,
qu'il la fera ce soir ou demain et qu'il est prématuré de le dire
ici cet après-midi?
M. Pagé: C'est que la compétence, la
détermination, le dynamisme, la prise de conscience des
intérêts locaux des agriculteurs et des agricultrices, tout cela
par l'honorable député de Nicolet, qui est en voie de devenir un
véritable "rocket" dans les questions agricoles au Québec comme
président de la commission. Il porte très bien le nom de son
illustre...
M. Blais: Numéro 9.
M. Pagé: Comment dit-on? Homonyme. Alors, il a
tracé la voie à un règlement utile et intéressant
de la problématique de l'avenir du volet agricole à l'exposition
de Trois-Rivières. Nous sommes...
M. Blais: Quel volet?
M. Pagé: Le volet agricole.
M. Blais: Mais dans quel volet de l'agriculture?
M. Pagé: II y avait beaucoup d'agriculture là bas,
M. le député.
M. Blais: Non, vous dites un volet agricole. L'agriculture a
plusieurs volets.
M. Pagé: Vous n'êtes certainement pas sans savoir,
M. le député, que la ville de Trois-Rivières avait
indiqué, il y a quelques semaines, son intention de mettre de
côté purement et simplement toute la section, le volet agricole de
l'exposition commerciale de Trois-Rivières. Il reste certains
paramètres à définir et, lorsque tout sera défini,
il me fera plaisir, en compagnie du président de la commission et
député de Nicolet, compte tenu du rôle éminemment
utile qu'il a joué dans ce dossier, comme dans beaucoup d'autres
d'ailleurs, d'en faire l'annonce publique avec lui.
M. Blais: J'espère que vous inviterez aussi le
député de Laviolette, parce que c'est sa région, à
participer à cette ouverture.
M. Pagé: Certainement.
M. Blais: Vous êtes d'une extrême gentillesse comme
d'habitude, M. le ministre.
M. Pagé: Merci de vos bons mots. Ils reflètent
exactement le parlementaire que je veux être.
Le Président (M. Richard): Donc, M. le secrétaire,
vous avez retenu depuis quelques minutes, j'imagine, les remplacements.
Le Secrétaire: Au nombre de trois, M. le Président:
M. Desbiens (Dubuc) par M. Godin (Mercier); M. Dufour (Jonquière) par M.
Blais (Terrebonne); et M. Houde (Berthier) par M. Vallières
(Richmond).
Le Président (M. Richard): Merci. Maintenant, nous passons
à l'étape des remarques préliminaires. J'inviterais donc
M. le ministre. Vous avez des remarques particulières, M. le
ministre?
M. Pagé: M. le Président, vous avez suivi les
débats avec beaucoup d'intérêt et d'attention, comme mes
collègues de la majorité d'ailleurs. Je pense que tout a
été dit et je suis prêt à aborder l'étude de
l'article 1 du projet de loi.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Est-ce
que vous avez des remarques préliminaires, M. le
député...
M. Brassard: Pas nous, pas nous.
Le Président (M. Richard): de Lac-Saint-Jean, M.
Brassard?
M. Brassard: Certainement, j'ai des remarques
préliminaires et je suis persuadé - je ne veux pas parler
à sa place - mais que mon collègue de Terrebonne a aussi des
remarques préliminaires.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: J'ai droit à 20 minutes, M. le
Président?
M. Pagé: Vous me permettrez, M. le Président.
Le Président (M. Richard): M le ministre.
M. Pagé: J'allais faire un impair. Vous me permettrez de
présenter les deux personnes qui m'accompagnent aujourd'hui et qui ont
été intimement, étroitement associées à la
révision de la loi pour en arriver à la présentation du
projet de loi 100. Je veux parler évidemment de Me Pierre Luc Blain, qui
est président de la Commission de protection du territoire agricole et
dont la crédibilité, la force, la connaissance, la
compétence en regard de ces questions n'est plus à faire, de Me
Robert Cavanagh, qui est avocat au contentieux du ministère de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation du Québec, et
d'autres, évidemment, qui sont avec nous aujourd'hui.
M. Brassard: M. le Président, il nous fait plaisir, quant
à nous également, d'accueillir les personnes que vient de nous
présenter le ministre, entre autres, le président de la
Commission de protection du territoire agricole, qui préside cette
instance, comme on le sait, depuis les tout débuts, depuis l'origine
même de la commission, et qui, il faut le reconnaître, accomplit
une immense besogne à la tête de cet organisme voué
à la protection du territoire agricole depuis l'adoption de la loi en
1978.
Nous sommes heureux, quant à nous - je ne parle pas pour mon
collègue, il pourra s'exprimer tout à l'heure - de l'accueillir
parmi nous. Nous sommes persuadés que nous allons entreprendre et
compléter des travaux parlementaires fructueux, et, je l'espère,
bénéfiques pour l'ensemble de la classe agricole du
Québec, à l'occasion de l'étude et de l'adoption de ce
projet de loi.
M. Blais: Moi aussi, je voudrais dire ma satisfaction de voir M.
le juge parmi nous, parce que, grâce à cette loi
créée par le Parti québécois, cela vous vaut votre
poste aujourd'hui. Si les libéraux avaient voté contre et si on
les avait suivis à l'époque, alors que le poste que vous occupez
n'existait pas.. Alors, je suis
persuadé que vous savez que nous sommes très heureux que
vous soyez là, surtout que vous êtes devenu...
M. Pagé: Une façon habile de dire que, si vous avez
une job, c'est grâce à nous.
M. Blais: ...un expert en la matière et que, que je sache,
vous n'avez jamais été, ni par les agriculteurs ni par les
législateurs, contesté dans votre fonction. M. le ministre vient
de vous rendre un vibrant hommage et je fais miens les mots qu'il a dits: vous
êtes un travailleur, un homme compétent, qui a toujours su bien
remplir le rôle qu'on lui a confié. Je suis très heureux
que vous soyez là pour entendre les côtés positifs que
l'Opposition a à apporter pour améliorer cette loi qui
améliore la loi que nous avons créée. (16 heures)
Le Président (M. Richard): C'est tout pour les remarques
préliminaires?
M. Brassard: Ce n'étaient pas des remarques
préliminaires.
M. Blais: C'étaient des salutations.
M. Brassard: C'étaient des salutations pour accompagner la
présentation que venait de nous faire le ministre. Là, on peut
passer aux remarques préliminaires. Je vous demande la parole, M. le
Président.
Remarques préliminaires
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Vous m'aviez honnêtement surpris,
je trouvais que c'était un peu court comme remarques prélimi- .
naires.
M. Brassard: Ah bon.
Le Président (M. Richard): J'aurais été
déçu, honnêtement.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Ma foi, je vous avoue que j'aurais été
déçu aussi de vous décevoir.
M. le Président, nous abordons l'étude d'un projet de loi
majeur qui, comme on le sait, modifie une grande loi qui a été
adoptée lors du premier mandat du Parti québécois, et je
pense que c'est à signaler. Je m'en souviens, d'ailleurs, puisque
j'étais déjà député à cette
époque. Cette grande loi sur la protection du territoire agricole a
été adoptée sur division, en 1978, par l'Assemblée
nationale comme mon collègue le signalait tout à l'heure. Ce fut
adopté sur division en ce sens qu'à l'époque, le Parti
libéral, qui constituait alors l'Opposition officielle, s'est
élevé contre ce projet de loi, a parlé contre ce projet de
loi, a voté contre ce projet de loi à toutes les étapes:
en première lecture et en commission parlementaire, à
l'étude article par article. Ils ont d'ailleurs fait tous les efforts
pour que cela dure le plus longtemps possible et ils ont finalement voté
contre en troisième lecture également, il n'est peut-être
pas inutile de mentionner qu'au sein de l'Opposition officielle d'alors, qui
était constituée par le Parti libéral, il y avait le
député de Portneuf, qui occupe, aujourd'hui, le poste de ministre
de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Alors, le
député de Portneuf - je pense que c'est important de le signaler
- s'est assigné une mission de protection du territoire agricole qui est
quand même relativement récente. C'est une conversion, ma foi,
intéressante, mais c'est quand même une conversion parce
qu'à l'époque où il était dans l'Opposition, comme
député de l'Opposition, il a parlé contre la Loi sur la
protection du territoire agricole et il a voté contre.
Mais, malgré l'opposition de l'Opposition officielle à
l'époque, le gouvernement du Parti québécois est
allé de l'avant et a fait adopter cette grande loi sur la protection du
territoire agricole parce que c'était devenu urgent, nécessaire
et impérieux, compte tenu de ce qui se produisait depuis des
années sur le territoire du Québec: spéculations et
développement sauvage. On voyait ainsi des centaines et des centaines
d'hectares de bonne terre être carrément accaparés pour
faire du développement urbain. Ces bonnes terres étaient, de
façon définitive et sans retour possible, enlevées
à l'agriculture. Le gouvernement libéral, de 1970 à 1976,
avait refusé de prendre le taureau par les cornes et d'agir promptement,
pour que cesse cette spéculation effrénée sur les bonnes
terres agricoles du Québec et que cessent également ces
développements urbains anarchiques un peu partout au Québec. Il a
fallu que le Parti québécois... Merci...
M. Blais: ...M. le Président.
M. Brassard: II a fallu que le Parti québécois
accède au pouvoir, en 1976, pour qu'il respecte finalement, dans un
délai relativement court, un engagement formel qu'il avait pris à
l'occasion de la campagne électorale de 1976, soit celui, s'il
était porté au pouvoir, de faire adopter une loi
protégeant efficacement le territoire agricole. Je pense que c'est
important de le signaler et de faire référence à cette
période, à cette époque et, évidemment, de
mentionner aussi que le Parti libéral, à l'époque, s'est
opposé à cette loi et a voté contre celle-ci.
Nous voilà maintenant avec un projet de loi qui modifie cette Loi
sur la protection du territoire agricole.
Il n'est peut-être pas inutile de rappeler que, depuis quelques
mois, au Québec, il y a beaucoup d'inquiétude, il y a beaucoup
d'appréhension, souventefois bien fondées, concernant
la protection du territoire agricole. Pourquoi? Parce qu'on sait
qu'à la suite des amendements qui ont été apportés
en 1985 par le député de Lévis, lesquels prévoient
un mécanisme de révision des territoires agricoles dans les
municipalités régionales de comté, la commission a
entrepris des discussions, des négociations avec les MRC, dans le cadre
du schéma d'aménagement qu'elles avaient adopté, pour en
arriver, quand cela s'avérait utile et nécessaire, à une
révision du territoire agricole protégé.
C'est à partir de ce moment-là qu'on a vu des
protestations surgir, qu'on a vu du mécontentement apparaître, je
dirais, sur le terrain, dans le milieu. Et, particulièrement dans le
milieu agricole, ce mécontentement ou cette inquétude
s'exprimait, la plupart du temps, par le canal des instances de l'UPA. On
s'inquiétait et, parfois même, on s'indignait du fait que les
territoires dézonés étaient beaucoup trop vastes et que,
dans beaucoup de cas, Ns allaient au-delà des demandes formulées,
exprimées par les MRC.
J'ai eu l'occasion de dire et de répéter - et je continue
d'en être convaincu - que ce qui s'est produit trouve son origine dans
les directives que le ministre a rendues publiques en 1986, directives qu'il a,
en quelque sorte, imposées à la commission pour qu'elle puisse
entreprendre des négociations avec les MRC. Ces directives - nous le
pensons et nous continuons à le dire - n'étaient pas
fondées sur la loi. Le député de Lévis l'avait dit,
d'ailleurs, au moment où ces directives ont été rendues
publiques. Il avait déclaré - à juste titre, à mon
avis - qu'il n'y avait aucune disposition dans la loi qui permettait au
ministre de rendre ainsi publiques des directives, de donner des directives
à la commission. Aucune disposition légale ne le lui permettait,
mais, malgré cela, le ministre l'a fait.
Ces directives allaient dans le sens d'un relâchement et d'une
souplesse qui permettaient de dézoner davantage et elles confiaient en
quelque sorte, à la commission, une espèce de mission
d'aménagement. Elles ajoutaient donc à sa dimension de protection
de territoire agricole une espèce de dimension d'aménagement, ce
qui, évidemment, est contraire à sa vocation première. La
Commission de protection du territoire agricole est une instance dont la
vocation est de protéger le territoire agricole et non pas de faire de
l'aménagement. Ce n'est pas sa fonction, ce n'est pas sa mission en
vertu de la loi. A partir des directives du ministre, on peut dire que la
mission ou que la vocation de la commission a été élargie,
diversifiée. Le résultat, c'est qu'il y a eu des dézonages
massifs qui ont mécontenté bien des producteurs agricoles, qui
ont mécontenté plusieurs syndicats de base de l'UPA ou des
fédérations régionales de l'UPA qui trouvaient que la
commission allait beaucoup trop loin et qu'elle dézonait des terres
qu'eux jugeaient propices à l'agriculture. Il y a même des
producteurs agricoles actifs qui se retrouvaient en zone blanche.
Nous pensons toujours que le problème qui a surgi il y a quelques
mois et qui a suscité du mécontentement, de l'inquiétude
et de l'appréhension chez les producteurs agricoles est issu des
directives. C'est le ministre qui est responsable de tout cela. Il a
essayé de s'en décharger publiquement et cela n'a pas
été très élégant de sa part à
l'endroit du président de la commission qu'on vient de saluer
tantôt, parce qui) avait plutôt l'air de le prendre comme une
espèce de bouc émissaire.. Vous aurez droit à vos vingt
minutes tout à l'heure, M. le ministre. Si vous voulez les prendre, on
consentirait à ce que vous les preniez...
M. Blais: De bon gré.
M. Brassard: ...de bon gré. Alors, il sert de bouc
émissaire dans le sens que le ministre a dit: Non, non, ce n'est pas ma
faute, je ne suis pas responsable de cela. C'est la faute de la commission; il
va falloir corriger les devoirs de la commission Alors, je vais prendre mes
responsabilités, et là il a imposé son moratoire sur
l'adoption des décrets, soyez tranquilles! Alors, il s'est
présenté en sauveur auprès de la classe agricole en
disant: Attention! Je suis là, comptez sur moi. Vous allez voir, je vais
vous défendre. D'abord, c'est le moratoire, ensuite, vous allez voir je
vais vous présenter un projet de loi qui va vous garantir le droit de
produire. Je vais vous présenter des mesures fiscales qui vont
contraindre les propriétaires de terres en friche à les mettre en
valeur. Fiez-vous à moi! Si la commission a plus ou moins bien fait ses
devoirs, ne vous inquiétez pas, je suis là. Le rempart de
l'agriculture, le sauveur des producteurs agricoles, c'est moi. Ne vous
inquiétez pas.
Pourtant, quand on creuse et quand on examine, on se rend compte que
c'est lui qui est vraiment le responsable parce que c'est lui qui a émis
les directives qui allaient dans le sens d'une souplesse, d'un
relâchement de la protection du territoire agricole. C'est le ministre
qui a rendu publiques et qui a imposé ses directives à la
commission. Donc, c'est lui le responsable. S'H y a des choses qui se sont
produites par la suite, c'est sur la base de ses directives que cela s'est
fait. Il a adopté, évidemment, une attitude un peu curieuse, mais
il a changé aussi son attitude. En juin dernier, quand mon
collègue de Laviolet-te l'interrogeait sur les inquiétudes des
producteurs agricoles concernant le dézonage de certaines terres, la
réponse du ministre en Chambre - je m'en souviens très bien - fut
de dire: Écoutez, la Commission de protection du territoire agricole est
un tribunal administratif. Vous ne voulez tout de même pas que Je me
mêle de son travail, vous ne voulez tout de même que je
m'ingère dans ses fonctions et dans le travail qu'elle accomplit? Il
faut respecter la neutralité et l'indépendance d'un tribunal
administratif comme la CPTA. À ce moment-là, y
avait l'air de dire: Écoutez, si la commission dézone, si
la commission fait des choses qui ne vous paraissent pas correctes sur le plan
de la protection du territoire agricole, je n'y peux rien. C'est un tribunal
administratif, autonome, indépendant. Je ne peux pas m'ingérer
dans ses affaires.
Puis, quand cela a commencé à bouger, quand le
mécontement a commencé à grandir, quand l'indignation a
commencé à monter dans le milieu, sur le terrain, là, il a
eu un changement d'attitude: Écoutez, soyez sans crainte. Je vais
refaire les devoirs de la commission s'ils sont mal faits. Fiez-vous à
moi. Il n'y a pas de problème. Donc, là, par exemple,
c'était tout le contraire. Là, le ministre avait le pouvoir et
même la volonté de s'ingérer dans le travail de la
Commission de protection du territoire agricole. Mais, dans le fond,
c'était lui le véritable responsable. Il a non seulement
émis des directives plus souples qui donnaient une plus grande marge de
manoeuvre en termes de dézonage, mais il a également nommé
des commissaires et, curieusement, des commissaires amis du régime, amis
du parti, des commissaires gagnés, forcément, on le comprendra,
à la philosophie du Parti libéral, qui est toujours la
même, il ne faut pas se le cacher. (16 h 15)
Le Parti libéral, ce n'est pas pour rien qu'il a voté
contre la Loi sur la protection du territoire agricole en 1978. Le ministre le
disait lui-même, d'ailleurs, dans son discours. Il disait: Le
gouvernement devrait y songer avant de mettre de côté des droits
aussi importants que le droit à la propriété, que le droit
à la libre disposition de ses biens. C'est le député de
Portneuf qui parlait ainsi le 4 décembre 1978. C'est toujours la
même philosophie du Parti libéral, c'est-à-dire les
sacro-saints droits individuels qui sont au-dessus, toujours, des droits
collectifs. C'est cela la philosophie du Parti libéral. On l'a vu aussi
encore en Chambre à propos de la langue. Le premier ministre, encore une
fois, pas plus tard qu'aujourd'hui, a invoqué les droits individuels
pour justifier de ne pas recourir à la clause nonobstant sur la question
linguistique. Les droits collectifs sont subordonnés aux droits
individuels. C'est évident dans la philosophie du Parti
libéral.
Les nouveaux commissaires nommés, qui en plus sont issus du Parti
libéral, dont les allégeances sont bien connues, c'est
évident qu'ils étaient et qu'ils demeurent gagnés à
la philosophie du Parti libéral selon laquelle il faut que les droits
individuels priment les droits collectifs. Le Parti libéral a toujours
été très réticent à l'égard de la Loi
sur la protection du territoire agricole, à l'égard du
caractère contraignant de la Loi sur la protection du territoire
agricole. Le Parti libéral a toujours été réticent,
pour ne pas dire résistant à l'endroit des orientations de fond
de cette loi. Évidemment, si vous nommez des libéraux à
des postes de commissaires, ils ne vont pas se départir, d'un coup de
baguette magique, de la vision libérale qu'ils ont toujours eue en
matière de protection du territoire agricole. Ils ont conservé
cette vision. Comme par hasard, ces nouveaux commissaires se retrouvent au sein
du comité issu de la commission qui a pour fonction de négocier
la révision des territoires agricoles avec les MRC. Quand vous
additionnez tout cela, les directives du ministre, d'une part, les nouveaux
commissaires issus du Parti libéral d'autre part et, par
conséquent, imbus de la vision libérale en cette matière,
vous ne vous étonnez pas de voir ce qui s'est produit sur le terrain.
Des dézonages qui ont provoqué de l'indignation, de
l'insatisfaction et du mécontentement dans le milieu, un peu partout au
Québec.
Le ministre, devant tout cela, a dit: J'impose un moratoire, sauf que
c'est un moratoire bidon, parce que, maintenant qu'il est levé, les
négociations se poursuivent, mais les négociations se poursuivent
toujours sur la même base, c'est-à-dire sur la base de ses
directives. Ses directives n'ont pas été rappelées. Elles
n'ont pas été annulées. Elles sont toujours là.
C'est toujours sur la base de ses directives que les négociations se
font.
M. le Président, j'aurais bien d'autres points à traiter,
entre autres - on aura l'occasion d'y revenir - le fait de créer des
secteurs exclusifs. J'en ai parié longuement dans mon intervention
à l'occasion de l'adoption du principe, mais j'aurai l'occasion d'y
revenir, sans aucun doute, car cela nous paraît être un concept
dont les effets risquent d'être loin de ceux qu'on recherche
véritablement.
J'aurais pu également aborder la question du tribunal d'appel
qu'on crée évidemment avec des juges, qu'on va nommer toujours
selon le même principe de nomination, c'est-à-dire par le Conseil
des ministres. On devine d'où vont venir ces membres du tribunal
d'appel, sachant comment ils seront nommés. On s'en doute. Cela va
ressembler un peu à la nomination des nouveaux commissaires. Le ministre
va en profiter pour nommer des membres très proches de son parti, parce
que cela ne les a jamais gênés d'agir ainsi. C'est regrettable.
J'aurais beaucoup d'autres choses à dire. Malheureusement, mes 20
minutes sont terminées, mais je suis persuadé que mes
collègues vont utiliser d'autres...
M. Pagé: Est-ce que c'est un cadran? M. Brassard:
Non. M. Blais: Quelle sorte?
M. Brassard: C'est un "quartz electronic timer".
M. Pagé: Pour le bénéfice du Journal des
débats, M. le Président, il faut convenir que le
député de Lac-Saint-Jean a actionné un équipe-
ment technique et mécanique ressemblant à un cadran,
probablement avec comme objectif de réveiller ses deux collègues,
le député de Terrebonne et le député de
Mercier.
M. Brassard: Non, pas du tout. Le ministre se trompe.
M. Godin: ...il peut parler, lui.
M. Brassard: C'est peut-être parce que je suis
extrêmement respectueux du règlement, M. le Président, vous
le savez très bien. Je n'avais droit qu'à 20 minutes
malheureusement; alors j'avais minuté 20 minutes et je m'en tiens
à mes 20 minutes. C'est mon respect scrupuleux du règlement qui
m'incite à utiliser cette petite pièce.
M. Blais: Je ne veux pas prendre la parole tout de suite mais, vu
que le ministre a dit que les paroles de mon confrère étaient
chloroformiques à notre endroit, je tiens à dire que je ne me
suis pas senti du tout attiré par Morphée pendant qu'il parlait.
J'ai bu ses paroles avec toute la saveur qu'elles avaient.
M. Pagé: Cela peut être dangereux pour l'ivresse de
boire ses paroles comme ça.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Terrebonne?
M. Pagé: Alors, faites-vous aller sur le pilote
automatique, parce que, pour le bénéfice de ceux qui nous
lisent...
Le Président (M. Richard): Est-ce que c'est vous qui
prenez la parole?
M. Pagé: ...je soupçonne mes collègues, M.
le Président, d'avoir amorcé, depuis l'ouverture de nos travaux,
ce qu'on appelle dans notre système parlementaire un "filibuster" ou
tout au moins une façon particulière de retarder
systématiquement les travaux de l'assemblée. Nous nous en portons
fort aise. Nous savons que c'est une technique qui est habituellement
pratiquée par l'Opposition, en fin de session. J'ai eu l'occasion d'y
être convié à quelques reprises. Je vous souhaite donc
beaucoup d'endurance et de persévérance et je vous inviterais, M.
le Président, à inviter le député de Terrebonne
à placer son vocable sur le pilote automatique et à
réciter pendant 20 minutes.
M. Brassard: M. le Président, quand même, je tiens
à rectifier les choses, à rectifier les faits. Le ministre nous
accuse à tort. Je pense que c'est un procès d'intention.
M. Pagé: Ce n'est pas une accusation. J'ai du respect pour
les "filibusters".
M. Brassard: Le ministre nous accuse de faire un "filibuster".
Nous en sommes aux remarques préliminaires.
M. Pagé: Donc, l'Opposition n'a pas l'intention...
M. Brassard: Nous avons droit, en vertu de nos règlements,
de parler, en remarques préliminaires, pendant 20 minutes sur un projet
de loi d'importance, tel que celui que nous avons devant nous. Alors, je ne
pense pas qu'on puisse nous accuser de faire de l'obstruction
systématique. Le ministre en a trop fait justement du temps qu'il
était dans l'Opposition. Il en voit partout, et je pense qu'il a tort de
nous accuser de procéder de cette façon. Après 20 minutes,
c'est quand même curieux. Cela fait à peine 20 minutes qu'on a
commencé nos travaux et, déjà, on est accusé de
"filibuster". Imaginez! C'est pour le moins étonnant. Le ministre est
pressé.
M. Pagé: Non, patient.
M. Blais: Sur une question de règlement, M. le
Président.
M. Brassard: Vous appelez ça de la patience?
Déjà, vous nous accusez après 20 minutes.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Terrebonne, avez-vous un problème au sujet du règlement?
M. Blais: Sur la question du règlement soulevée par
le ministre, M. le Président. J'ai vu après cinq heures, sept
heures, dix heures...
M. Pagé: Je n'ai jamais soulevé de question de
règlement.
M. Blais: ...dire qu'on faisait du folie-buster".
M. Pagé: Pas folie", "fili".
M. Blais: C'est un précédent dans ce Parlement
d'être accusé de "folie-buster" après 20 minutes. Je trouve
cela aberrant. Mais je vais prendre les minutes qui me sont...
Le Président (M. Richard): Vous avez droit à 20
minutes, mais vous n'y êtes pas obligé.
M. Yves Blais
M. Blais: Je vais essayer de m'en tenir à 20 minutes. J'ai
tellement de choses... M. le Président, j'ai écouté, comme
je le disais tantôt, j'ai savouré intellectuellement
l'exposé de mon confrère de Lac-Saint-Jean. Je tiens à
dire que je vais essayer de poursuivre dans la même veine. Vous savez que
nous parlons ici de la loi sur le zonage agricole établie par le
Parti
québécois en 1978. Nous avons eu le courage politique
d'amener cette loi et d'en faire une bible, comme la loi 101 des agriculteurs,
en fait. La loi du zonage agricole est à la culture ce que la loi 101
est... Excusez-moi. C'est un lapsus.
Une voix: Votre nom? Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: La loi du zonage agricole est à l'agriculture ce
que . la foi 101 est à la culture et je crois que cela se défend
très bien. Dans les deux cas, autant la loi 90 de l'époque que la
loi 101, ce sont deux lois majeures qui ont marqué le premier mandat du
Parti québécois à cette Assemblée nationale, et
tout le monde aujourd'hui dit que ces lois ont été des lois
bénéfiques. Elles ont amené la paix aux agriculteurs dans
leur zone et elles ont amené à la culture la paix linguistique
dans les autres zones. Dès qu'on leur touche, c'est bien sûr que
l'ensemble des Québécois, soit dans l'une ou l'autre zone,
frémit très facilement. Nous sommes épidermiques quand on
parle de protection du territoire agricole autant que nous sommes
épidermiques et que nous sommes à fleur de lis et à fleur
de peau lorsqu'on parle de la loi 101 et de toutes les conséquences que
cela peut avoir si des gens de l'extérieur de nos frontières
québécoises viennent y toucher.
Alors, je dis que cela prenait à l'époque une
volonté et un courage politiques. Nous l'avons fait. Même dans
l'Opposition, on l'a dit tantôt, le Parti libéral a voté en
faveur des trois étapes; il a même voté contre le principe
de la loi 90. Vous savez, c'est sérieux. Lorsqu'on vote contre le
principe d'une loi, c'est qu'on est contre l'établissement de zonages
agricoles. Nous étions en faveur parce que, premièrement, durant
le mandat de 1970 à 1976, il y avait un M. Kevin Drummond qui a
marqué dans un document extraordinaire les balises principales d'un
zonage agricole, mais ce document a été laissé sur les
tablettes, c'est malheureux. Nous l'avons repris, nous l'avons
amélioré et nous l'avons adopté en 1978. Pourquoi
avons-nous eu ce courage politique? Je n'étais malheureusement pas
à l'Assemblée nationale à cette époque, et je suis
peiné de ne pas avoir été de ceux qui ont voté
cette loi qui reconnaît d'abord et qui a comme base la valorisation des
agriculteurs et des agricultrices. En les revalorisant, en leur donnant des
territoires, ils peuvent de façon décente et assurée faire
de la terre nourricière leur principal revenu et le faire de
façon constante parce que protégés par une loi. Tout cela
est inspiré par la noblesse du métier de cultivateur que le Parti
québécois a défendu, et ce qui a été
motivant là-dedans, c'est qu'il faisait sienne la valeur de la terre, la
valeur aussi de ceux qui exerçaient le métier d'agriculteurs et
d'agricultrices.
Il y avait bien sûr, je dis là-dedans, un grand courage
politique. Pourquoi? Parce qu'il est très facile de se laisser
influencer par ceux qui ont l'appât du gain et du développement.
Et, lorsque l'on brime les développeurs, les entrepreneurs, ceux qui ont
l'appât du gain... Et on sait qu'avant 1978 il y avait dans tout le
territoire québécois des développements sauvages. On
faisait de l'étalement urbain sans planification. La population
québécoise n'a jamais augmenté d'un demi-million par
année. Cependant, on a fait un étalement urbain énorme et
cela, c'est presque irrespectueux pour les Québécois
eux-mêmes. Pourquoi? Parce que cela a été tellement lent.
Il y a au Québec actuellement encore 1 400 000 lots qui sont
dézonés, sans compter le moratoire. Il y en a là-dessus
plus de 410 000 qui sont viabilisés. Cela veut donc dire - disons trois
personnes par maison qui serait construite, nous avons 1 400 000 lots à
trois personnes, cela fait 4 200 000 - qu'il y a de la place pour 4 200 000
personnes sans toucher un iota du zonage agricole actuel. Dans les
viabilisés, il y en a plus de 400 000. Supposons trois personnes par
lot. Il y a de la place au Québec sur des lots viabilisés pour 1
200 000 personnes.
Quand on sait que la population du Québec ne croît que
très peu depuis quelque temps et qu'on fait de l'étalement urbain
et qu'on faisait à l'époque de l'étalement urbain encore
plus qu'aujourd'hui et qu'on a peur qu'if y ait un retour, cela veut dire que
les mêmes personnes ont des lots viabilisés, donc, que les
Impôts fonciers sont payés, en fait, sur les structures et les
services. On fait un étalement urbain pour projeter ces gens-là
à l'extérieur des endroits où il y a déjà
des lots qui sont prêts à recevoir des maisons mais qu'est-ce qui
arrive? Il arrive qu'on se bute à un problème de transport. On se
bute à un problème d'immobilisations dans tous les services
gouvernementaux, autant du côté des soins de santé, autant
du côté de la scolarité que de tous les services: CSST,
etc. Nommons-les. (16 h 30)
Ces gens-là, sortant des endroits où il y a de la place
viabilisée et des lots qui sont déjà
dézonés, qu'est-ce qu'ils font? Ils se reconstruisent d'autres
rues, mettent d'autres services en place, autant les égouts que
l'alimentation en eau potable. On se repaie en tant que
Québécois, malgré la population qui ne grandit pas, des
services en double. Je ne crois pas, et nous ne le croyions pas non plus
à l'époque, que les Québécois peuvent se payer ce
luxe d'avoir des lots où les services sont déjà
installés et déjà viabilisés et d'aller s'en payer
d'autres ailleurs, toujours avec le même nombre de personnes. Donc, au
prorata de la population, si on permet un étalement urbain,
automatiquement, c'est une hausse d'impôt déguisée pour la
population. Cela frôle à ce moment-là une sorte d'irrespect
envers les habitants autant urbains que ruraux du Québec. C'est sur cela
que le courage s'avérait nécessaire, pour que la loi du zonage
soit
adoptée en Chambre en 1978. On sait que cela prenait un courage
très fort, d'autant plus que nous n'avions pas à l'époque,
en aucun moment, l'appui de l'Opposition. Alors, cela prenait doublement un
courage politique. Nous avions contre nous les développeurs, les
entrepreneurs et l'Opposition.
M. Brassard: Du Parti libéral.
M. Blais: L'Opposition du Parti libéral à
l'époque, bien sûr, où nous étions au pouvoir;
c'étaient les époques glorieuses du Québec. Examinons
cela. Je vais citer seulement un exemple. J'ai dans mon comté de
Terrebonne une ville qui s'appelle Mascouche. Le territoire de cette ville est
plus grand que celui de la ville de Montréal. Cependant, au lieu
d'avoir... Je ne vous dérange pas trop, Mme la députée de
Matane? Vous m'entendez bien?
Mme Hovington: Je vous entends très bien.
M. Blais: Moi aussi, moi aussi. Sur ce territoire qui est plus
grand que celui de la ville de Montréal - merci, M. le ministre - il n'y
a que 21 000 habitants. À l'époque, avant 1978, il y a eu ce
qu'on appelait des développements sauvages; alors, cela s'appelle
Mascouche.
Une voix: Par qui?
M. Blais: Par tout le monde, jusqu'à ce que nous adoptions
la loi en 1978. Il y a eu des développements sauvages de faits. Donc, au
lieu de s'appeler Mascouche, cela devrait s'appeler "Mastouffe", parce que ce
sont des masses de touffes de monde sur un grand territoire. Imaginez le
coût pour faire la liaison entre ces touffes de monde distribuées
dans une ville aussi grande que la ville de Montréal, mais qui ne compte
que 21 000 habitants. On demande à 21 000 personnes de payer les
impôts fonciers des structures et des services qui sont
nécessaires à une population, et on les étale sur un
territoire qui est plus grand que celui de Montréal. Alors, on voit que
le développement sauvage ne peut trouver sa justification que dans la
démence négative d'un législateur imberbe et
invertébré qui n'ose pas adopter la loi agricole. Nous l'avons
adoptée en 1978. Nous sommes frileux quand on regarde... Dès
qu'il voit les mots "zonage agricole", le Parti québécois devient
frileux parce qu'il a eu le courage politique de le faire. On avait à
l'époque des remarques très acerbes venant de l'autre
côté de la Chambre, du Parti libéral; ils ont pris le
pouvoir le 2 décembre 1985 et, à l'époque, on disait
qu'ils enlèveraient le zonage, et ils ne l'ont pas supprimée, la
loi. Quand on les voit venir folâtrer avec cette loi, on sent à
l'intérieur de nous une certaine réticence à accorder de
façon aveugle notre aval à un projet de loi de cette nature. Je
vois mon confrère de Lac- Saint-Jean qui en a parlé avant et
qui...
Une voix: ...opine du bonnet.
M. Blais: Oui, il opine du bonnet et sa cravate en joue,
d'ailleurs. Alors, M. le Président, dès que je vois cela,
ça m'horripile. Donc, la base de la venue du zonage agricole en 1978
relevait du courage politique, d'abord, parce que nous avions contre nous,
entrepreneurs et développeurs, ceux qui avaient l'appât du gain et
le Parti libéral, à tous les échelons de ce projet de loi.
Nous l'avons fait. Aujourd'hui, les agriculteurs en sont ravis et les urbains
aussi parce que la densification urbaine est plus facile. Je ne dis pas qu'elle
se fait facilement, mais qu'elle est plus facile. Je tiens à dire qu'il
y a encore tellement de lots dézonés blancs au Québec: 1
400 000, ce sont des lots!
Et on irait dire dans un autre pays: Dans ce pays du Québec, il y
a 6 750 000 habitants; ils ont une zone verte et une zone blanche et, sur ce
territoire, il y a en zone blanche,1 400 000 lots prêts à
être bâtis, sans que nous ne touchions un iota du territoire vert;
donc, il y a de la place pour près de 5 000 000 d'habitants. Il y aurait
des gens qui viendraient essayer, peut-être pas directement devant la
Commission de protection du territoire agricole, mais par ricochet, par MRC
interposée, de dézoner? Pourquoi, en fait? Il n'y a pas de
justification. Il n'y a aucune justification de dézoner 100 pieds
carrés de terrain. Je ne dis pas qu'il ne peut pas y avoir une petite
exception dans des zones, par exemple, où il reste trois ou quatre lots
sur le bord d'une route, ici ou là. Il peut y avoir quelques exceptions,
ça peut arriver, et l'homogénéité du territoire
demande aussi que nous comprenions certains agissements de la sorte.
Une ville comme Westmount, par exemple, ne peut plus se
développer sur l'île de Montréal! Pourquoi? Parce que
partout autour il y a des villes qui l'empêchent de se développer.
Alors, si quelqu'un veut se bâtir à Westmount, on ne demandera pas
au gouvernement de venir exproprier les gens d'à côté,
d'Outremont, de raser, pour permettre à la ville de Westmount d'agrandir
son territoire. Cela ne nous viendrait même pas à l'esprit.
Dès qu'on parle de territoire agricole, si on arrive dans une
ville de 15 000, 18 000 ou 20 000 habitants et qu'on leur dit: Votre territoire
est complet, ils nous disent: II faut se développer. Bien, pourquoi se
développer automatiquement dans cette ville quand on sait qu'il y a 1
400 000 places où les gens peuvent s'installer? C'est donc dire - et
vous le voyez bien, M. le Président - que je suis contre tout
dézonage de quelque façon que ce soit; il nuit aux agriculteurs
et II nuit aux gens qui demeurent en ville.
II nuit et aux urbains et aux ruraux, aux deux. Aux urbains, parce que
les taxes de services et les taxes foncières décuplent si on vide
les
villes; et à ceux qui vont s'installer en campagne, parce qu'ils
prennent du territoire nourricier pour installer des maisons et, en plus, parce
qu'ils sont obligés de se repayer, dans ces nouveaux lieux où ils
ont élu domicile, tous les grands services qu'ils avaient en ville.
Tôt ou tard, ils se les paient.
Alors, je suis contre tout dézonage, de quelque façon que
ce soit. Je tiens à le souligner - et je regrette de ne pas avoir
été en Chambre, à ce moment-là, en 1978 - quel beau
moment la Chambre a vécu lorsque ce fleuron de l'agriculture a
été voté par le Parti québécois en 1978!
C'est l'un de nos beaux fleurons avec la loi 101, un de nos beaux fleurons.
Ceci, pourquoi? Pour la valorisation de l'agriculteur et le respect
intégral de la noblesse du métier d'agriculteur et
d'agricultrice. C'est pour ça que le Parti québécois a eu
ce courage reconnu par tous et aujourd'hui reconnu par le Parti libéral
qui est au pouvoir, mais pas reconnu par eux lorsqu'ils étaient dans
l'Opposition. Voter contre le principe, c'est très grave et ça ne
peut pas faire autrement que de miner la crédibilité du Parti
libéral du Québec lorsqu'on parle de zonage agricole. Parce qu'un
parti qui vote contre un principe de loi... On trouverait curieux - en tout
cas, tant mieux si le revirement est complet - que le revirement soit assez
spectaculaire pour qu'ils s'en fassent aujourd'hui les défenseurs. Si
jamais on en arrivait à cette borne, que le Parti libéral du
Québec veuille se faire le grand défenseur de l'agriculteur et de
l'agricultrice, j'en serais fort aise et j'en serais heureux aussi.
Permettez-moi de dire que je suis Québécois à fleur
de lys, à fleur de peau et à fleur de bataille quand je parle de
zonage agricole. Quand je parle de zonage agricole, c'est à fleur de
bataille et en fleur d'espoir que ce zonage agricole ne soit jamais
touché par quelque cep que ce soit. Je ne le veux pas. Alors, dans ce
projet de loi, en remarques préliminaires, tout en ayant dit que, en
parlant au gouvernement qui a voté contre un principe de loi, j'ai peur
que les paroles que nous disons, aussi convaincantes soient-elles, risquent de
ne pas ébranler le législateur qui a voté contre un
principe de loi... Cela risque; je ne dis pas que cela ne l'ébranlera
pas, mais cela risque de ne pas l'ébranler sur le socle de la
vérité dont il se croit imbu.
Cependant, dans ce projet de loi, il n'y a que trois points principaux.
Le premier, c'est l'institution d'un tribunal d'appel en matière de
protection du territoire agricole. Bon. Deuxièmement, le projet de loi
instaure un principe d'immunité pour les producteurs agricoles dans le
but de protéger leur droit de produire face aux poursuites de citadins
se plaignant des bruits, odeurs et poussières résultant de la
pratique agricole en zone verte. Troisièmement, il introduit le concept
de secteur exclusif à l'intérieur de la zone agricole. Autrement
dit, on introduit des secteurs vert foncé et des secteurs vert
pâle, deux sortes de zonages. Je disais en Chambre qu'on dirait que le
gouvernement veut installer des zones pour les adultes et des zones pour les
enfants. Ironiquement, pour qu'on se le rappelle, je disais "des adultes zones
et des bébés zones", pour qu'on se rappelle qu'il y a deux sortes
de zonages. On dirait qu'il y a des zones d'adultes et des zones d'enfants et
c'est inacceptable.
J'accepte le principe que le zonage lui-même, lorsqu'il est vert,
demeure vert sans exception, sauf... Mais, lorsqu'on classifie un zonage 1, 2
et 3 comme valeur du sol et qu'on les met là, on dit: Cela, c'est du
vrai zonage vert foncé sapin de Noël, un beau vert foncé et
à côté un autre genre de terre agricole chartreuse, vert
opale, vert pâle. Eh bien, les agriculteurs qui sont dans ces zones vert
pâle savent qu'ils pourraient être menacés. Ils peuvent
être menacés, ce sont des zones, on dirait, entredeux, je le
comprends ainsi en tout cas, des zones d'entre-deux. Entre le territoire blanc
et le territoire réellement vert, il y aurait une zone vert pâle.
Les agriculteurs qui exploitent depuis des années des fermes sur ces
territoires vert pâle voient, dans cette nouvelle façon de voir,
cette appréciation du gouvernement actuel du zonage agricole, qu'on va
faire des zones un peu moins vertes, donc, un petit peu moins reconnues comme
telles. Ils ont une ferme qu'ils développent depuis des années,
cela peut être une terre ancestrale qu'on exploite depuis des
années et on leur dit: II y a la possibilité maintenant que cette
terre vert pâle devienne à ce point pâle comme vert que cela
devienne blanc. Comment voulez-vous que l'agriculteur qui est sur ces
terres-là, en zone ambiguë, en ambivalence, en porte-à-faux
dans un entre-deux, dans l'eau tiède de la loi ne se sente pas un peu
menacé dans son développement et qu'on ne lui enlève pas,
à lui, tout esprit d'initiative et de développement à
cause de la crainte d'être un jour tellement "déverdi" qu'il en
devienne blanc?
M. le Président, vous me faites signe que cela se termine. C'est
malheureux, c'est tellement court, 20 minutes, lorsqu'on a d'énormes
choses à dire sur un projet de loi aussi important. J'ai à peine
effleuré le bout de mon argumentation. Je vous promets que dans les
jours qui viennent je vous livrerai d'autres panneaux de mon argumentation et
j'espère que vous les trouverez valables, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. Godin, député de Mercier,
vous avez la parole, si vous avez des remarques préliminaires.
M. Gérald Godin
M. Godin: Oui, j'en ai, dans la mesure où il faut
souligner, M. le Président, qu'à l'époque où on
était journaliste, je me souviens qu'on fouillait dans les
arrondissements urbains autour de
Montréal et qu'on constatait qu'il y avait des capitaux
mouillés dans la terre du Québec qui attendaient que les villes
de Longueutl, Chambly et Saint-Hubert se développent. Même M.
Aristote Onassis avait des terres en grand nombre dans ces surfaces-là.
Je suis sûr qu'il n'était pas très content de la loi sur le
zonage adoptée en 1978 et qu'H se réjouit maintenant de voir que
peut-être un jour il va pouvoir remettre la main sur des terres qui sont
de vraies mines d'or pour les spéculateurs fonciers qui abondent dans le
monde et qui cherchent des places où placer leur fric en attendant que
la terre prenne de la valeur et ainsi leur rapporte, avec le temps, quelques
millions.
L'autre aspect de la question qui me préoccupait beaucoup
à l'époque, c'était... (16 h 45)
M. Pagé: Pour le bénéfice du
député, je crois que M. Onassis est
décédé.
M. Godin: II a des héritiers, en tout cas, des
héritières, mon cher monsieur le ministre. M. le
Président, je ne vois pas du tout la pertinence des propos du ministre
dans la mesure où un holding financier appartenant à une personne
morte ou vivante existe toujours et où l'intérêt des
capitaux d'Onassis existe toujours. D'ailleurs, la preuve, c'est que la jeune
Athèna a maintenant 3 000 000 $ de capitaux à sa disposition et
je suis sûr que ses gérants, ceux qui gèrent sa fortune,
ses managers comme on dit à Westmount, seraient contents de voir qu'il y
a encore des chances de placer de l'argent dans les terres
québécoises.
Je pense qu'un autre aspect de cette dimension de la question est qu'il
y avait un étalement urbain extrêmement coûteux pour le
Québec dans son ensemble, dans la mesure où les villes se
vidaient vers les régions périphériques, autour de
Montréal. J'ai vu combien de ces villes, Saint-Hubert, Chambly,
Longueuil s'en aller en toute liberté vers les régions loin de
Montréal non pas pour favoriser la santé des citoyens dans les
régions de plein air, mais bien pour s'assurer que les capitaux
placés rapportaient du fric au millionnaire qui avait songe au
Québec comme étant un lieu paisible où placer de l'argent
et attendre que ça mûrisse. Je pense que c'était une
politique extrêmement négative et néfaste pour l'ensemble
du développement du Québec et également pour les villes
elles-mêmes. Évidemment, les villes y voyaient des taxes
supplémentaires et il n'y avait pas de frein au développement
urbain n'importe où au Québec.
Est arrivé au pouvoir un parti qui ne croyait pas au règne
des spéculateurs et qui croyait, au contraire, que les terres du
Québec étaient des choses précieuses qu'il fallait
préserver et que l'agriculture devait être mise au premier plan
comme une occupation digne de ce nom et noble dans un territoire comme le
Québec. Cela me frappe toujours quand je circule sur la route 20, je
vois de plus en plus non pas des terres en friche le long de la route, mais des
terres cultivées, des terres labourées et plantées de
maïs-grain et d'autres produits qui visent l'alimentation animale ou
humaine. Je pense que le vrai rôle de la terre, c'est ça, M. le
Président. C'est peut-être une vision un peu bucolique ou
virgilienne, comme dirait mon collègue de Lac-Saint-Jean, mais je
souhaite que le député de Portneuf, ministre de l'Agriculture,
des Pêcheries ou de l'Alimentation, soit aussi familier avec ces auteurs
que mon collègue, de manière à être plus sensible
aux beautés du métier qu'est celui de l'agriculture et surtout
à la nécessité que ce métier soit exercé sur
des terres dignes de ce nom.
Donc, je vous disais, M. le Président, que je voyais dans le
passé la route 20 entourée de terres en friche et, maintenant, de
terres cultivées et cultivables. Je pense que c'était un hommage
rendu au beau métier d'agriculteur et surtout un hommage rendu à
la sagesse de ceux qui, à l'époque, ont adopté la loi qui
protégeait ce territoire en 1978. Je constate que, tôt ou tard,
nous reviendrons à l'ancien système et que nous aurons un
développement qu'on appelle sauvage, urbanistiquement, M. le
Président, ce qui fera peut-être le bonheur des
spéculateurs et des gens qui viennent ici pour faire de l'argent, non
pas pour faire du blé, du grain, des légumes ou de l'alimentation
pour les citoyens du Québec, mais pour faire une piastre sur le dos de
l'étalement urbain et sur le dos des contribuables
québécois. C'est ce qui va revenir, M. le Président, j'en
suis convaincu, et c'est pour ça que cette loi me semble
condamnable.
Maintenant, il y a un autre aspect de la loi que je voudrais aborder, M.
le Président, qui est le mécanisme de décision de la
commission. À l'époque, deux ou trois commissaires
siégeaient et entendaient une demande. Aujourd'hui, la loi va
réduire à une seule personne l'audition d'une plainte et je pense
que ce système est injuste pour le demandeur, dans la mesure où
il y aura moins de sagesse dans une tête qu'il n'y en avait dans deux et
plus important encore, où la cohérence d'une décision
à l'autre ne sera plus du tout apparente et n'importe quel citoyen
pourra invoquer un précédent commis par un des commissaires qui
aura entendu seul une cause et ainsi faire apparaître des jurisprudences
tout à fait contradictoires dans les décisions de la CPTA. Donc,
je pense que, à cet égard, cette loi doit être tout
à fait rejetée par l'Opposition.
Quant au tribunal d'appel, on n'est guère mieux servi, M. le
Président. On a un tribunal d'appel qui n'est plus intégré
à la commission, mais qui est composé de quatre personnes qui
viennent tout droit des cabinets politiques des ministres libéraux,
donc, des gens qui, comme le disait mon collègue, sont des porte parole
et des Incarnations, je dirais, de la pensée libérale la plus
classique qui est que le profit passe avant tout et que de l'argent bien
placé, c'est un bon placement, sauf qu'en général on se
rend compte
que ce sont des visions à très court terme du
développement d'une région, d'une province ou d'un
État.
C'est contre ça qu'on en avait à l'époque et je
pense qu'on avait raison. Je me souviens très, à l'époque,
qu'il y avait des oppositions...
Une voix: Profondes.
M. Godin: ...profondes de la part des libéraux, entre
autres, de l'actuel député de Portneuf qui était le
principal critique de cette loi et qui a eu des propos en Chambre qui
étaient tout à fait délirants assimilant la loi du zonage
à la loi 101, dans la mesure où la loi du zonage brimait,
disait-il, les droits des personnes. Mais je pense qu'il y a plus important que
ça. Ce qu'il ne disait pas et ce qu'il n'osait pas dire, c'est que la
loi du zonage agricole mettait un terme à l'étalement urbain et,
surtout, qu'elle envoyait un message aux spéculateurs du monde entier
qui étaient au Québec. Il y avait des Allemands, des Hollandais,
des Grecs, des gens de tous les pays du monde. Ces spéculateurs
recevaient le message par la loi adoptée par le Parti
québécois que c'était fini, la belle époque
où on pouvait venir au Québec et acheter des terres via des
compagnies à numéros qui faisaient la joie des avocats, des
notaires de Montréal et des spéculateurs, mais pas du tout celle
des contribuables qui voyaient leur ville s'étendre à
Saint-Hubert, Chambly, Longueuil, dans toutes les directions et, surtout, avec
des menaces que des hausses de taxtes se fassent sentir.
J'ai même vu des villes comme Saint-Hubert, avec, à la
frontière, un immense terrain vacant et, passé ce terrain vacant,
un territoire qui se développait, une zone résidentielle qui se
développait et qui forçait les contribuables de la ville à
fournir des services à ces gens, trottoirs, égouts, etc., autobus
même, éventuellement, et qui voyaient monter leur compte de taxes
de façon faramineuse et inacceptable.
Au fond, il y avait beaucoup de services avant la décision de
l'époque du Parti québécois, parce que nous voulions
freiner cet étalement urbain. Les libéraux disaient: Ils freinent
les droits de la personne. On freinait l'étalement urbain et on freinait
les hausses de taxes inconsidérées pour les contribuables de ces
villes qui n'exerçaient plus aucun contrôle sur le
développement de leur ville, sauf sous forme de complaintes, de plaintes
et de pleurs en voyant que leur compte de taxes augmentait et que les villes se
développaient au détriment et aux dépens de la zone verte
du Québec qui était si essentielle à ce qu'on appelait
à l'époque l'auto-suffisance agricole.
On voulait que le Québec nourrisse son propre monde et vende ses
surplus aux provinces et aux États américains avoisinants, ce qui
a été réalisé dans une période assez courte
grâce, entre autres, au zonage agricole. Je vois que le Parti
libéral retourne à ses anciennes amours, c'est-à-dire
l'amour des spéculateurs et va rouvrir la canne de vers", la boîte
de Pandore, comme on dit en français, la botte de Pandore de la
spéculation sur les plus belles terres du Québec.
Le ministre a beau promettre qu'il ne touchera pas aux belles terres du
Québec, les zones classées 1, 2 et 3, on aimerait voir l'avenir
parce qu'en général les promesses libérales ne se
réalisent pas. Qu'on le demande aux femmes qui veulent la Régie
des rentes, elles ne l'ont pas eue, qu'on demande aux jeunes qui voulaient la
parité, ils ne l'ont pas eue. Donc, toute promesse libérale, en
ce qui me concerne, ne sent pas très bon.
Le ministre a aussi promis dans ses discours à
l'emporte-pièce à la défense de son nouveau projet de loi
qu'il remettrait en valeur les terres en friche, sauf que nous sommes dans
l'attente, comme la pièce "En attendant Godot" de Samuel Beckett. On
attend toujours que le ministre dépose le début de la queue d'une
étincelle de politique dans ce domaine. Nous en sommes encore
restés au stade des paroles verbales, comme on les appelle, et des
promesses probablement non tenues.
Donc, faute d'avoir cette politique de remise en valeur des terres en
friche, M. le Président, on doit se méfier de ce gouvernement
qui, on le sait, est beaucoup plus sensible aux charmes des spéculateurs
qu'aux charmes d'une terre bien développée et bien
cultivée. Pour cela, M. le Président, nous sommes contre ce
projet de loi parce qu'il défait ce qui a été bien fait et
ce qui donne au Québec des résultats spectulaires dans le domaine
du développement agricole. M. le Président, j'ai
terminé.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Mercier. M. le député de Lévis, M.
Garon, est-ce que vous ayez des remarques préliminaires?
M. Garon: Oui, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Vous avez donc droit à
vingt minutes.
M. Jean Garon
M. Garon: Merci, M. le Président. Je me rappelle,
lorsqu'on avait fait les travaux sur le projet de loi sur la protection des
terres en 1978, on avait été voir ce qui se faisait en Colombie
britannique et on avait constaté à ce moment-là, avec le
changement de gouvernement - le gouvernement du Nouveau Parti
démocratique avait été remplacé par le gouvernement
créditiste - que lorsqu'il s'est agi de faire disparaître la
protection des terres agricoles qui avait été instituée
par le gouvernement du Nouveau Parti démocratique, c'est évident
que tout le monde a parlé en faveur de la vertu, en faveur de la
protection des terres et qu'on a
fait, à toutes fins utiles, disparaître la protection des
terres en en vantant les mérites. De la même façon, lorsque
nous avons fait la tournée avant l'adoption de la loi, il n'y a personne
qui était contre la protection des terres, tout le monde était en
faveur, môme quand il s'agissait de spéculateurs, à la
condition de ne pas être zoné soi-même. On était pour
la protection des terres, mais ailleurs, chez les voisins. En Colombie
britannique, on a commencé par décaper les terres et, lorsqu'une
terre était protégée, après l'avoir
décapée on disait: On vous demande de la dézoner parce
qu'elle n'est pas bonne. On disait alors: Comme la terre n'est pas bonne, on va
la dézoner parce qu'elle avait été décapée,
c'est-à-dire que la surface supérieure du sol qui était
cultivable avait été enlevée. Après cela, il
était permis de dézoner la terre.
Je pense que la nouvelle formule vise la même chose,
c'est-à-dire qu'on va commencer par dire: II y aura deux genres de
terres: des terres vraiment bonnes et des terres pas bonnes. Le ministre a dit:
Les terres bonnes sont les sols 1, 2 et 3. Cela adonne bien au Québec.
On n'a pas de terre 1 au Québec, à toutes fins utiles, parce que
l'inventaire des terres du Canada a été fait en fonction de la
production céréalière, principalement du maïs-grain,
et même dans des endroits où on a du sol de première
qualité et qui serait du numéro 1, les conditions climatiques
plus sévères vont déclasser un sol qui est, en soi, un bon
sol. J'avais été surpris de constater, lorsqu'on avait permis de
développer la production, de favoriser le développement de la
production du grain au Québec, que, par exemple, dans des territoires
que les gens croyaient de mauvaise qualité, comme la vallée de la
Matapédia, il s'y était établi trois centres de grains et
que les rapports pour justifier l'établissement de ces centres de grains
disaient que les terres de la vallée de la Matapédia
étaient des sols de qualité 1. Même en Gaspésie, on
me disait que les sols de la Gaspésie étaient de première
qualité, sauf qu'il y avait des conditions climatiques plus
sévères qui faisaient que le sol était
déclassé. De sorte que, lorsqu'on regarde l'inventaire des terres
du Canada, celui-ci n'est pas fondé seulement sur la qualité du
sol, mais aussi sur une combinaison de la qualité du sol et des
conditions climatiques. À ce moment-là, à toutes fins
utiles, on n'a pas de sol 1 au Québec, peut-être un peu de sol 2
et un peu plus de sol 3. En grande partie, on a du soi 4 et 5, les sols 4
étant des pâturages qui sont principalement utilisés, comme
dans votre comté, M. le Président, pour la production du lait.
Essentiellement, la production du lait au Québec se fait sur du sol 4 et
5, au fond, c'est un soi 4 côteux, qui n'est pas aussi...
Des voix: Planche. M. Garon: ...planche...
Une voix: Homogène.
M. Garon: ...et qui peut être côteux...
Une voix: Accidenté.
M. Garon: ...accidenté. C'est un meilleur terme, un sol
accidenté. Du sol 6, on n'en a pratiquement pas et 7, c'est de la
roche.
Cela veut dire, à toutes fins utiles, quand on dit qu'on va
protéger les sols 1, 2 et 3 comme nos meilleurs sols, qu'on vient d'une
claque d'effacer de la protection des terres agricoles, comme zone vraiment
bonne, une bonne partie de nos sols. À toutes fins utiles, si on disait,
par exemple, que sur les sols 4 et 5, il ne se fera plus de production
agricole, on diminuerait - je ne sais pas de quel pourcentage-la production
laitière considérablement; elle serait en bonne partie
éliminée. Là, on dit: On va faire un zonage plus exclusif
et moins exclusif. Mais, même dans le plus exclusif, si on examine
l'article de la loi - je pense bien qu'on l'étudiera article par article
- ce n'est pas un sol exclusif non plus, car pour les sols que les gens
commencent à appeler vert foncé et vert pâle, le vert
pâle deviendra, à toutes fins utiles, les anciens zonages RX.
Avant le zonage agricole, RX était un territoire à
développement différé. Cela veut dire
qu'éventuellement, si on a besoin de territoire pour faire telle ou
telle chose, c'est mûr pour le développement. (17 heures)
C'est évident que quelqu'un qui tue son chien - vous l'avez
remarqué, M. le Président, vous qui venez d'un territoire
agricole et qui avez sûrement des gens qui ont des chiens de garde -
avant de le tuer on ne dit jamais: Mon chien, c'est le meilleur chien de chasse
qui soit. Il a un nez incroyable, c'est un chien de garde incroyable.
Une voix: II marche sur l'eau.
M. Garon: Si quelqu'un apparaît au bout de la terre,
même à 1000 pieds, il commence à "fortiller" et il avertit.
Donc, vous commencez à dire: II y a un tremblement de terre, il n'a pas
grouillé. Vous commencez à dire que c'est un chien qui ne sent
plus rien; même l'ail, il ne sent plus cela.
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: II a peur de l'eau.
M. Garon: Quand il entend quelqu'un qui arrive au bout de la
terre, il s'en va "se sacrer" en dessous du poêle pour que personne ne
sache qu'y est là. Vous commencez à dire que votre chien est
fini.
Une voix: II a la rage.
M. Garon: La deuxième étape, c'est de lui mettre
une balle dans la tête.
Alors, pour les terres agricoles, c'est la même chose. Ne nous
trompons pas; au fond, le ministre n'a pas commencé par dire cela, il a
dit: Non, on va protéger d'une façon incroyable nos meilleures
terres, tant en disant: Nos meilleures terres, vous savez, on n'en a pas
beaucoup. C'est la deuxième étape en vue d'en mettre de
côté éventuellement. C'est cela, le raisonnement. Ne nous
cassons pas la tête, cela va être cela. Les gens vont prendre le
même raisonnement quand ils vont arriver devant la commission. Ils vont
dire: Ce n'est pas bon, c'est du 4, c'est du 5, cela n'a pas de bon sens, on ne
peut pas garder cela. Ce sera dézoné, parce qu'il y aura deux
territoires, alors que c'est une mauvaise façon de faire les choses.
Vous avez remarqué, quand vous examinez toutes les directives
qu'a données le ministre, qu'il a pu s'en tirer en donnant des
directives comme cela à la commission sans devoir démissionner,
parce qu'ici on a une presse, comme le disait M. Lévesque, qui produit
à peu près de la nourriture pour bébé. Elle n'est
pas très alerte. Si un ministre d'Ottawa avait donné des
directives comme cela à une commission, il ne serait pas demeuré
48 heures en fonction. Mais ici, comprenez-vous, on a une presse qui n'a pas le
même souci de ce qu'est un tribunal. Vous savez, il est interdit de
donner des directives à un tribunal, de quelque façon que ce
soit. On n'a pas le droit, à moins d'avoir un article de loi qui dise
quoi faire. Mais, en l'absence d'un article, on n'a pas le droit de donner une
directive à un tribunal. Le ministre n'a pas le droit de donner des
directives. À un moment donné, dans sa conférence de
presse du mois de septembre 1986, intitulée "Les éléments
de la politique gouvernementale en matière de révision des zones
agricoles, il dit: "Lors de la révision d'une zone agricole, la CPTA
devra se conformer à la présente, compte tenu de son mandat de
protection du territoire agricole." Et il énonce des principes que je
vais commenter rapidement.
Si le ministre veut que la commission fonctionne de cette
façon-là, il faut amender la loi, pas donner des directives. Vous
n'avez pas le droit de donner des directives à un tribunal. La
première qualité d'un tribunal est, justement, d'être libre
de rendre ses décisions, qu'on soit d'accord ou non. Dans un tribunal,
le juge va rendre une décision à un moment donné sur un
mariage, une séparation ou un accident. Vous pouvez ne pas être
d'accord, sauf qu'il a le droit fondamental de rendre sa décision
librement. Il ne faut pas qu'il soit "achalé" par des gens qui font des
pressions sur lui. Vous savez qu'un ministre à Ottawa, M. André
Ouellet, a dû démissionner parce qu'il a appelé le juge
après le jugement pour l'engueuler, pour lui dire qu'il avait rendu un
mauvais jugement. Il a été obligé de démissionner
parce que cela ne se fait pas. On peut commenter le jugement, on peut dire
qu'on ne trouve pas que c'est la meilleure décision. Vous avez
même des professeurs d'université, je me le rappelle, qui disent:
Dans telle décision, le juge a erré; on pense qu'il a fait une
erreur. Mais, lorsqu'il prend sa décision, vous n'avez pas le droit de
l'influencer, essentiellement. Autrement, on se retrouverait devant les anciens
tribunaux anglais où celui qui faisait rendre la justice payait le juge
pour la rendre. Habituellement, le juge avait tendance à pencher plus du
bord de celui qui avait l'argent pour payer que de celui qui n'en avait pas,
parce que les plus grands utilisateurs de la justice, c'était ceux qui
payaient. Aujourd'hui, il faut faire en sorte que nos tribunaux soient
impartiaux et qu'ils puissent rendre la justice, rendre une décision de
façon judiciaire ou quasi judiciaire avec la plus grande
impartialité. Si on trouve que leurs décisions ne vont pas dans
(e sens souhaité par le législateur, alors il faut essayer de
modifier les lois. Alors on dit: "Les principes de base de la révision
de la zone agricole sont: 1) le maintien de la protection des territoires
agricoles en production ou qui présentent des possibilités
d'utilisation à des fins d'activités agricoles ou
acéricoles." Ce principe-là, au fond, fait plaisir aux
spéculateurs, car lorsqu'on a institué la protection des terres
en 1978, il y avait uniquement dans la plaine de Montréal, 1 000 000
d'acres sous spéculation. C'est évident que les
spéculateurs n'ont pas tous été découragés
d'un coup sec, il y en a qui ont gardé leurs terres. À Ilie
Bizard, par exemple, tout le monde sait que les terres en spéculation
n'ont pas été revendues. Elles sont restées entre les
mains des spéculateurs qui éventuellement voulaient faire quelque
chose avec elles, pas dans le domaine agricole. "Le maintien de la protection
des territoires agricoles en production". Ils ne sont pas en production, parce
que les spéculateurs les ont conservés et, après un
certain nombre d'années, dire que certaines terres n'ont pas
été utilisées à des fins agricoles et qu'on doit
donc maintenant les dézoner, c'est donner raison aux spéculateurs
les plus tenaces.
L'Université de Montréal a fait faire une enquête
par M. Thibodeau cinq ans après la loi sur la protection des terres, en
1983. Cette étude démontrait que plus de - je ne me rappelle pas
le pourcentage, c'était autour de 30 % ou 35 % - 30 % des terres dans le
territoire étudié dans la région de Montréal
avaient été mis en culture dans les cinq ans qui ont suivi
l'adoption de la Loi sur la protection du territoire agricole, parce qu'il y a
des spéculateurs qui se sont découragés, qui ont mis les
terres en vente et celles-ci ont été remises en valeur. Il y en a
qui ont dit: Non, nous les gardons. Il y en a qui, pour d'autres raisons, n'ont
pas été mises en valeur immédiatement.
Le ministre lui-même a été le premier à
abandonner le programme de développement des terres en friche, parce
qu'il a dit: On peut mettre en culture d'autres terres que les terres
en friche. Les terres qui n'ont pas été mises en
production pendant un certain nombre d'années sont redevenues en friche.
Dans l'Ouest, les terres ne redeviennent pas en friche, parce que c'est une
ancienne mer d'eau salée et c'étaient des prairies. Même
quand La Vérendrye est arrivé là, il n'a eu besoin de rien
défricher; c'étaient des plaines, c'était comme cela.
C'étaient des prairies avec 60 000 000 de bisons qui se promenaient.
Ici, une terre qui n'est pas en production pendant un certain nombre
d'années redevient en friche. Il y en a un certain nombre qui n'avaient
pas été mises encore en production parce que les
spéculateurs les avaient gardées.
Je continue: "2) la continuité et le développement des
activités agricoles, acéricoles ainsi que du secteur
agroalimentaire." Il n'y a pas grand-chose à dire là-dessus. "3)
le retrait de la zone agricole des territoires déjà
utilisés à d'autres fins que l'agriculture ou dont le potentiel
biophysique présente peu ou pas de possibilités de mise en valeur
agricole ou acéricole." C'est un principe qui n'est pas utile parce que,
d'abord, les territoires déjà utilisés à d'autres
fins que l'agriculture ne sont pas zonés agricole parce qu'ils
bénéficient de droits acquis en vertu de la loi. Il y a
déjà des droits acquis qui sont prévus. Il y en a qui ont
dit qu'on était dans le zonage agricole des cimetières. Vous avez
remarqué qu'actuellement il n'y a pas beaucoup de cimetières qui
ont été mis en culture, parce qu'ils bénéficiaient
de droits acquis et personne n'a eu l'idée d'aller faire de la culture
à travers les tombes.
M. Blais: Ils n'ont pas protesté, non plus.
M. Garon: La parenté n'a pas protesté, non
plus.
M. Blais: Non, les morts.
M. Garon: Pourquoi? Parce que c'était prévu dans la
loi. C'était de l'ergotage et du "placotage" à ce
moment-là de laisser entendre qu'on avait zone agricoles des
cimetières. "4) la conciliation des objectifs de conservation de
protection des territoires et des activités agricoles avec les objectifs
du schéma d'aménagement des municipalités
régionales de comté, des communautés urbaines et
régionales." Là, on commence à détourner la
commission de son rôle qui est la protection des terres. On dit: "Le
principe de base de la révision des zones agricoles est la conciliation
des objectifs de conservation de protection des territoires et des
activités agricoles avec les objectifs du schéma
d'aménagement...
M. Blais: C'est grave.
M. Garon: ...des municipalités régionales de
comté, des communautés urbaines et régionales," alors que
le rôle essentiel de la commission, c'est de protéger les terres,
non pas d'aménager. Ce n'est pas de faire un partage de
l'aménagement entre les vocations possibles. C'est de protéger
les terres qui sont bonnes pour l'agriculture. C'est cela au fond, en tenant
compte aussi d'autres critères qui sont importants, comme les facteurs
qui influencent l'environnement ou les règles de l'environnement
concernant la protection des terres agricoles.
Les directives du ministre, de septembre 1986, continuent en disant:
"Lors de la révision de la zone agricole, la CPTA devra, tout en
protégeant le territoire agricole, rechercher l'atteinte des objectifs
particuliers suivants: 1. retrancher de la zone agricole les territoires qui
sont déstructurés, irrécupérables ou
utilisés à d'autres fins que l'agriculture."
Cela équivaut un peu à commencer à faire du "spot
zoning", parce que, dans une zone agricole, il n'y a pas 100 milles
carrés de sol 1 et 100 milles carrés de sol 2. En effet si l'on
regarde une terre agricole, on se rend compte qu'il s'agit de sortes de veines,
de différents types de sols. Sur la même terre, il peut y avoir
toutes les sortes de sols: il peut y avoir des sois 1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7.
D'ailleurs, on le voit dans les terres agricoles, on le voit sur plusieurs
terres. On peut constater, en regardant le soi, qu'il y a différents
types de sois sur la même terre. Alors, on voudrait commencer à
retirer de la zone agricole les territoires qui sont
déstructurés, comme s'ils ne pouvaient jamais être
restructurés, remembrés.
Regardons seulement ce qui s'est fait. Je me rappelle qu'il y a un
certain nombre d'années nous étions allés faire un tour en
autobus et les gens nous expliquaient toute la restructuration du sol qui avait
été faite dans la Vallée du Richelieu: paroisse de
Saint-Denis et dans ces coins. Les clôtures avaient même
été enlevées parce qu'on développait une production
céréalière dans tout ce territoire; un territoire
déjà déstructuré avait été
restructuré. Un territoire déstructuré n'a pas toujours
été déstructuré. La plupart du temps même,
ils l'ont été après la guerre 1939-1945 par la
spéculation qui est venue après ce temps-là. Alors, ce
n'est pas un territoire qui a nécessairement été longtemps
déstructure. Ce n'est pas parce qu'un territoire a été
déstructuré pendant un certain nombre d'années qu'il ne
peut pas être restructuré. 'Récupérables ou
utilisé à d'autres fins que l'agriculture". Qu'est-ce que c'est
ça? Cela veut dire quoi, "utilisés à d'autres fins que
l'agriculture*? Pour un territoire agricole, c'est de savoir s'il est bon ou
non pour l'agriculture et non pas faire du "spot zoning". "2) retrancher de la
zone agricole les territoires sans potentiel ou dont le potentiel biophysique
n'est pas susceptible de servir au développement des activités
agricoles dans un avenir prévisible." Pourquoi ajouter "dans un
avenir prévisible"? Il est possible qu'une terre soit en friche
actuellement et qu'elle puisse être mise en valeur. La preuve, c'est
qu'un grand nombre l'ont été après le zonage, mais elles
ne l'ont pas toutes été. C'est quoi, "les territoires sans
potentiel"? Une terre en friche, est-ce que c'est avec ou sans potentiel? Le
ministre lui-même a aboli le programme qui était là pour
mettre en valeur les terres en friche et, après ça, il se
plaignait que les terres en friche n'étaient pas mises en valeur. Puis,
il a essayé de faire croire aux gens que les taxes pouvaient être
remboursées sur des territoires en friche, alors qu'il est bien
spécifié dans la loi que les remboursements de taxe ne se font
que pour les terres en culture, les terres cultivées. C'est pour les
terres qui sont en culture qu'il y a des remboursements de taxes
foncières, pas pour les terres qui ne sont pas cultivées. "3)
retrancher de la zone agricole les érablières non
exploitées présentant peu ou pas de possibilités à
des fins acéricoles". "4) répondre aux objectifs de
développement exprimés par les municipalités -
voilà les zones RX! - régionales de comté et les
communautés urbaines et régionales dans leur schéma
d'aménagement et identifiés, notamment, dans leur
périmètre d'urbanisation, dans la mesure où ces objectifs
ne compromettent pas de façon significative le maintien et le
développement des territoires et des activités agricoles." Alors,
là encore, on parle de façon significative; c'est un ensemble de
considérations pour faire des zones RX, des zones à
développement éventuel, alors qu'on sait que la population du
Québec est en plein vieillissement. Il s'agit de voir les projections de
la Régie des rentes du Québec qui prévoit que, dans une
trentaine d'années, les personnes de plus de 65 ans seront dans une
proportion de une sur deux comparativement aux gens qui auront entre 20 et 65
ans. Je dois vous dire que, habituellement, un si grand nombre de personnes de
plus de 65 ans ne s'éparpillent pas dans le territoire; elles ne font
pas d'éparpille-ment urbain ni de spéculation. Au contraire,
elles vivent habituellement dans des centres d'accueil ou dans des maisons qui
ne sont pas loin du centre de la municipalité, parce qu'elles ne font
normalement pas de spéculation à des fins d'étalement
urbain. (17 h 15)
Dans les autres directives, on dit: "Lors de la préparation d'un
plan revisé de la zone agricole, la CPTA doit tenir compte, notamment,
des critères suivants: 1) les conditions biophysiques du sol et du
milieu; 2) l'utilisation actuelle et potentielle du sol et du milieu à
des fins agricoles; 3) les perspectives de développement
économique du milieu à des fins agricoles; 4) le potentiel et les
possibilités économiques d'utilisation des
érablières; 5) les conséquences et les contraintes sur le
maintien et le développement des activités agricoles
découlant de l'application des lois, des règlements, des normes
et des directives, notamment en matière d'environnement; 6) les
perspectives et les orientations d'aménagement et de
développement identifiées dans le schéma
d'aménagement."
Le Président (M. Richard): M. le député de
Lévis, en conclusion.
M. Garon: Je termine, oui. "7) les conditions
socio-économiques régionales; 8) la disponibilité
d'emplacements alternatifs pour répondre aux besoins de
développement exprimés par les MRC et les municipalités
locales."
On voit, dès ce moment-là, - je vous fais grâce du
reste des stipulations qui avaient été faites, parce que le temps
est écoulé; on aura l'occasion d'y revenir - qu'il s'agit
essentiellement d'une philosophie qui était la philosophie
pré-1978, soit de ne jamais dire qu'on veut faire de la
spéculation, mais de favoriser l'étalement urbain sous toutes
sortes de formes. Je pense que, dans ce projet de loi, essentiellement, on fait
cela. Qu'on dise qu'on a l'appui de l'UPA, cela me fait penser un peu à
l'UPA qui, récemment, a appuyé la hausse des minima de production
dans le porc pour les fins de l'assurance-stabilisation pour économiser
de l'argent, et qui, quelques semaines plus tard, enlevait les maxima alors que
cela coûtait pas mal plus cher. J'avais dit, à ce
moment-là, que c'était une erreur, que l'UPA ne pouvait pas
maintenir cette position très longtemps. D'ailleurs, quelques semaines
plus tard, la Fédération des producteurs de porc, de même
que l'UPA ont dû reculer là-dessus et dire qu'elles ne
favorisaient plus ce qu'elles avaient favorisé parce qu'elles avaient
fait une erreur.
Je pense que, dans la protection des terres agricoles actuellement, il y
a trop de mollesse même de la part du président de l'UPA qui avait
déjà donné son appui alors qu'il n'avait pas eu le texte
de loi. Le texte de loi était à peine déposé
à l'Assemblée nationale qu'il avait déjà
donné son appui dans le journal du lendemain en disant: Par exemple,
après, on étudiera le texte de loi. J'ai rarement vu cela, des
gens qui appuient des . textes de loi sans les avoir lus et sans les avoir vus.
Il semble que le président actuel de l'UPA ait senti cette
volonté.
Une voix: L'amour est aveugle.
M. Garon: Comme dit mon collègue, l'amour est aveugle.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lévis. En douceur, est-ce que j'appelle
l'article 1?
M. Brassard: Non, même pas en force.
Le Président (M. Richard): Même pas en force.
M. Brassard: Non parce qu'en vertu de nos règles, M. le
Président...
M. Blais: Peut-être que M. le ministre aurait quelques
commentaires.
M. Brassard: Peut-être.
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, avez-vous
terminé?
M. Brassard: Si vous avez des remarques préliminaires.
Vous n'en avez pas fait tout à l'heure. Vous êtes le parrain du
projet de loi. Quant à nous, nous n'aurions pas d'objection à
vous laisser vos 20 minutes pour faire quelques remarques préliminaires
sur votre projet de loi. Sinon, évidemment, on a un certain nombre de
motions qui intéresseraient sans doute la commission. Mais, ma foi,
à la suite de mes commentaires, bien modestement, et de ceux de mes
collègues, y compris ceux de l'ancien ministre de l'Agriculture, le
député de Lévis, qui a été le parrain de
cette grande Loi sur la protection du territoire agricole, cela
m'apparaîtrait opportun et pertinent que le parrain du projet de loi qui
amende cette grande loi nous livre ses commentaires, le fond de sa
pensée. Je trouverais cela curieux, pour ne pas dire bizarre, que le
ministre n'ait pas de remarques préliminaires à faire sur son
projet de loi, à moins qu'il ne se prépare à le retirer ou
à en nier la paternité ou à le reléguer aux
oubliettes ou à faire en sorte qu'il meure au feuilleton. Je pense qu'il
serait opportun qu'on l'entende nous livrer ses commentaires et ses remarques
sur son projet de loi, sur un projet de loi dont il est le parrain. Sinon,
évidemment, on va poursuivre. J'ai des motions à faire, mais je
veux bien les retarder et écouter religieusement le ministre nous faire
part de ses remarques dont la profondeur n'aura d'égal que la pertinence
du projet de loi 100.
M. Pagé: M. le Président, je retiens du propos du
porte-parole du Parti québécois en matière d'agriculture
que l'Opposition me désire.
M. Blais: On désire vous entendre plutôt. M.
Brassard: On désire vous entendre. Une voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: On désire vous entendre, c'est sûr.
M. Michel Pagé
M. Pagé: C'est, évidemment, ce que je voulais dire.
Comment refuser une invitation aussi aimablement formulée par le
député de Lac-Saint-Jean de prendre quelques minutes du temps
précieux de cette commission qui est utilisé jusqu'à
maintenant de façon pleine et entière par les
députés de l'Opposition? M. le Président, je
m'arrête tout de suite Le député de Lac-Saint-Jean avait
promis de m'écouter religieusement.
M. Brassard: Et je vous écoute.
M. Pagé: Je vous en prie, continuez. Cela étant
dit, M. le Président, très brièvement, je voudrais
reprendre certains des arguments qui ont été invoqués par
mes collègues, l'honorable député de Lévis,
l'honorable député de Mercier, l'honorable député
de Terrebonne et l'honorable député de Lac-Saint-Jean, lesquels
se sont tour à tour inquiétés, interrogés sur
certaines dispositions du projet de loi.
Tout d'abord, je veux établir très clairement qu'il n'est
pas question, ni directement ni indirectement, ni de près ni de loin,
d'établir au Québec une protection des terres agricoles qui
s'adresserait à des sols à haut potentiel et aussi à des
sols que nous pourrions juger ou que vous qualifiez, selon votre perception, de
sols de second ordre. Au contraire. Pour nous, les terres agricoles du
Québec, peu importe leur classification en vertu de l'inventaire des
terres du Canada, et même, au-delà de ça, les terres qui
sont en zone agricole, dont certaines superficies, d'ailleurs, n'ont pas de
potentiel agricole identifié, doivent y demeurer pour conserver,
raffermir et maintenir le caractère important qui sous-tend la loi 90 et
qui sous-tendra, évidemment, la loi 100, soit
l'homogénéité du territoire qui est zone agricole.
Pourquoi? Qu'est-ce qui est mieux? Vous le savez, par la loi 100 - je
pense, d'ailleurs, que le numéro est très évocateur; on
passe la première génération de la Loi sur la protection
du territoire agricole, c'est la loi 90; la Loi sur la protection du territoire
agricole, renforcée et améliorée, c'est le projet de loi
100 - notre objectif, c'est de renforcer ces dispositions, c est de donner
davantage d'étanchéité aux territoires zonés
agricoles. C'est de préciser, à l'avantage de la protection du
territoire agricole, les critères sur lesquels la Commission de
protection du territoire agricole et le tribunal d'appel en matière de
protection agricole auront à juger des requêtes qui leur seront
présentées.
Je veux donc indiquer très clairement que les nombreux sols, qui
sont classifiés dans les catégories 1, 2 et 3, non seulement dans
la région de Montréal, mais presque dans la totalité du
Saguenay-Lac-Saint-Jean, entre autres, en Gaspésie, dans la Baie des
Chaleurs, en Abitibi, ces sols de catégories 1, 2 et 3 qui couvrent
l'ensemble des régions du Québec, vont recevoir une protection
très forte, très rigoureuse et, j'en conviens, très
contraignante, mais c'est là l'obligation à laquelle nous sommes
conviés
comme société, parce qu'il faut bien comprendre que la
pression urbaine, la pression pour du développement, la pression pour
des affectations de sols à d'autres fins que l'agriculture s'exercent
plus particulièrement dans ces superficies représentant quelques
milles de chaque côté du fleuve Saint-Laurent, dans la
région de Montréal, au Saguenay-Lac-Saint-Jean, en Abitibi,
etc.
Ces dispositions doivent être lues très clairement. Je veux
répondre, face à ces inquiétudes manifestées par
les députés, qu'il n'est pas question d'affaiblir la
portée de la protection des sols zones agricoles sur ce que vous
appelez, en voulant tenter, je présume, de ridiculiser un peu la
démarche, le vert pâle. Non! Ce n'est pas cela. Ni de près
ni de loin, les mesures ayant comme objet de protéger l'affectation d'un
sol zone agricole sur l'ensemble du territoire agricole du Québec, peu
importe sa catégorie, ne seront affaiblies. Non seulement, elles ne
seront pas affaiblies, mais les mesures visant la régie, la gestion du
territoire qui a un potentiel agricole de catégorie 1, 2 et 3 dans plus
de 600 municipalités du Québec, seront inspirées non
seulement par de la rigueur au niveau de l'interprétation, mais aussi
noir sur blanc par la loi, puisqu'il sera complètement interdit à
la Commission de protection du territoire agricole d'autoriser l'utilisation de
ces sols à des fins autres que l'agriculture. Elles n'ont même pas
le pouvoir d'autoriser.
Les seules constructions qui seront permises... On ne parle pas
seulement d'un petit lopin de terre près de Montréal; on parle,
évidemment, de la grande région de Montréal, on parle de
la très grande majorité des comtés le long du fleuve
Saint-Laurent, on parle de superficies importantes au Saguenay -
Lac-Saint-Jean, on parle de superficies aussi qui ne sont pas
négligeables dans le Bas-du-Fleuve, en Gaspésie, dans la Baie des
Chaleurs. Aucune autorisation sur ces sols pour des fins autres que
l'agriculture ne pourra être donnée. Les seules qui pourront
l'être, c'est pour des aménagements qui seront profitables - c'est
bel et bien identifié comme cela dans la loi - à l'agriculture,
par exemple, un centre de grains, un centre de distribution pour
l'épandage des surplus de fumier, des choses comme cela. Même
lorsqu'un requérant ou une entité publique, ministère des
Transports, Hydro-Québec, ministère de l'Énergie et des
Ressources, etc. prévoira construire, aménager un
équipement public, par exemple des bassins d'assainissement dans le
cadre du programme d'épuration des eaux au Québec, par exemple,
des sites d'enfouissement, avant de pouvoir installer un équipement
public sur de tels sols, il faudra démontrer qu'il est impossible de les
aménager ailleurs.
Alors, à moins que l'Opposition ne se borne et ne se limite
à bien vouloir donner l'interprétation qu'elle perçoit,
même si elle sait qu'elle est non fondée, ou encore que
l'Opposition officielle ne comprenne pas la portée et l'inter-
prétation donnée aux mesures législatives, j'ai la
conviction - d'ailleurs, je ne suis pas le seul à l'avoir l'Union des
producteurs agricoles, chacune des fédérations
spécialisées, les membres du congrès de l'Union des
producteurs agricoles, qui ont siégé les 30 novembre, 1er et 2
décembre dernier, l'ont manifesté très clairement et les
contacts que j'ai eue avec ces gens me permettent d'en arriver à la
même conclusion - que ce projet de loi est très bien
reçu.
Il est reçu avec beaucoup de satisfaction, parce que,
premièrement, il renforce le niveau de protection d'un sol zone
agricole. Deuxièmement, il établit très clairement un
engagement du gouvernement envers l'agriculture au Québec.
Troisièmement, ce projet de loi vient aussi régler des
problèmes qui étaient demeurés nombreux malgré la
qualité de la loi 90 adoptée en 1978. Je me réfère,
entre autres, à ces problèmes vécus par des producteurs ou
des productrices agricoles qui sont affectés ou dérangés
dans leur droit de pratiquer l'agriculture sur un sol zone agricole et selon
des méthodes, selon l'art du métier en semblable production, si
je peux utiliser le terme. Les normes de réciprocité qu'on
introduit font en sorte qu'à l'avenir les normes ne s'appliqueront plus
uniquement à rencontre du producteur ou de la productrice.
J'ai un exemple concret et je vous référais à
l'Assemblée. Souventefois, un producteur ou une productrice construisait
un aménagement, une écurie, une porcherie, etc., une
étable dans le respect des normes édictées par les
règlements ou les directives du ministère de l'Environnement.
Donc, c'était le producteur qui devait vivre la contrainte. Le
producteur respectait ces normes et, au lendemain de l'installation de cet
équipement immobilier, une autre personne, en vertu d'un droit, venait
se construire et se rapprochait de cet équipement agricole, de cette
porcherie, par exemple. Par la suite, les plaintes fusaient contre le
producteur agricole. Avec l'introduction du principe de la
réciprocité dans l'usage des droits respectifs de ces gens qui
vivent en voisinage, le projet de loi va garantir des règles du jeu plus
claires à l'avantage du producteur. (17 h 30)
Le concept d'un fonds de défense professionnelle versé au
bénéfice des agriculteurs qui sont ainsi affectés est
susceptible, lui aussi, de démontrer très clairement notre
engagement pour que le producteur puisse produire en paix sur une terre dont il
est propriétaire, dont il est l'occupant et qui est zonée
agricole et cela, pour quelque catégorie de sol que ce soit: 1, 2, 3, 4,
5, 6, 7.
Oui, monsieur, très certainement. Je vois que le
député de Terrebonne semble douter de l'interprétation que
je donne à ces dispositions. Je l'invite à relire sa loi et on
aura l'occasion d'en venir...
M. Blais: C'est à moi que...
M. Pagé: Si on peut finalement commencer l'étude du
projet de loi article par article, j'aurai l'occasion de le préciser,
cela va de soi. Un autre élément, ce projet de loi établit
très clairement la volonté du gouvernement du Québec de
protéger la ressource sol, une ressource qui est non renouvelable, j'en
conviens. C'est une ressource qui a été sérieusement
agressée dans le passé, qui est agressée quotidiennement
par la nature, le phénomème de l'érosion par les cours
d'eau, de l'érosion éolienne, par le compactage des sols, etc. On
doit la protéger tout comme on doit protéger
l'homogénéité du territoire. C'est ce qui me permet de
soutenir, même si on a, quoi, près de 3 000 000 d'hectares de
terres zones agricoles effectivement cultivés sur 6 800 000 hectares de
terres effectivement zones, que ce sont des superficies très importantes
qui vont demeurer zonées agricoles. Ce sont des millions d'hectares qui
vont demeurer zones agricoles, même si, dans certains cas, ils n'ont pas
de potentiel.
C'est un exemple concret lorsque je vous disais que cette loi doit
être lue avec une volonté de mettre en valeur le sol agricole. La
loi 90 avait des qualités et elle avait aussi des défauts. Un de
ces défauts, c'était le manque de préoccupation du
gouvernement de l'époque de mettre en valeur les sols ainsi zones. Cette
Loi sur la protection du territoire agricole actualisée,
améliorée, cette loi de deuxième génération,
qui porte le numéro 100, doit être lue en fonction d'une
volonté très claire de mettre en valeur ces sols.
Alors, je veux sécuriser les députés. Je sais
qu'ils auront des motions. Je présume qu'on va aborder l'étude du
projet de loi article par article bientôt. Je voudrais d'ores et
déjà vous donner un préavis comme quoi je n'ai pas
l'intention de proposer l'adoption de l'article 17 de la loi ce soir. L'article
17 de la loi réfère, comme on le sait, aux critères. J'ai
accepté de rencontrer demain après-midi la table
Québec-municipalités à la suite des demandes qu'on m'a
formulées via l'Union des municipalités régionales de
comté et l'Union des municipalités du Québec. Elles m'ont
prié de retarder l'adoption de cet article jusqu'à ce qu'elles
aient le plaisir et que moi, j'aie le privilège de les rencontrer
demain.
Autre élément. Peut-être que. dans vos motions
préliminaires, vous vous référerez à la
possibilité de la tenue d'une commission parlementaire. Je vous dirai
ceci, mes chers collègues, et je suis persuadé que vous abonderez
dans le même sens que moi. Ce projet de loi est le résultat
d'échanges, d'études, de rapports, d'analyses, de discussions,
d'hypothèses étudiées, de scénarios
élaborés, de validation d'informations, bon, etc., et tout cela
depuis deux ans. Vous m'avez reproché de ne pas avoir
déposé le projet de loi dans les délais que je
m'étais fixés comme jeune ministre qui arrivait en 1985,
début 1986.
Ce projet de loi aura pris deux ans. Ce projet de loi a
été conçu dans la maturité, la prudence et avec des
avis judicieux qui ont été recueillis non seulement par des
membres de comités que j'ai pu former, mais aussi, cela va de soi et je
tiens à en témoigner aujourd'hui, par le président de la
Commission de protection du territoire agricole, M. Pierre-Luc Blain, qui est
avec moi. Je suis honoré qu'il soit avec moi aujourd'hui. D'ailleurs,
vous avez vanté tout à l'heure sa contribution professionnelle et
je l'ai apprécié, je vous le dis très
sincèrement.
Ce projet de loi, donc, a été élaboré aussi
avec des fonctionnaires de mon ministère. Si cela a pris du temps, c'est
qu'on a déchiré des feuilles de papier et qu'on a
recommencé notre travail. On a repris certains volets et, aujourd'hui,
le projet de loi qu'on dépose, on peut le qualifier certainement de
très bon. C'est un bon projet de loi et cette loi va démontrer
à l'usage qu'elle permet d'atteindre l'objectif d'une protection
très très rigoureuse des sols zonés agricoles, qu'elle va
permettre la cessation de cette dualité et de ces affrontements
stériles entre le monde agricole et le monde municipal.
L'objectif qui nous anime, c'est que les agriculteurs, les
agricultrices, le monde agricole du Québec aient la paix et puissent
produire tranquillement et en paix, selon des règles, dans la zone
agricole et qu'en contrepartie les élus municipaux, qui ont des
responsabilités très importantes quant à la qualité
de la vie des citoyens du Québec, puissent avoir autant de latitude dans
la responsabilité et le devoir qu'ils ont de voir à la
définition de l'aménagement et à la gestion du territoire
qui est situé en zone blanche.
Ce projet de loi a donc fait l'objet de discussions nombreuses,
intenses, soutenues et continuelles entre le ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, le ministre de l'Environnement, le
ministre des Affaires municipales et le ministre responsable du
Développement régional, ainsi que le ministre
délégué aux Forêts. Ce projet de loi a fait l'objet,
par ailleurs, de consensus exprimés en deux étapes. Dans une
première étape, en novembre 1987, lors d'une conférence de
presse, le ministre de la Main-d'Oeuvre et de la Sécurité du
revenu, le ministre de l'Environnement, le ministre des Transports et moi
annoncions qu'on s'était entendus sur certaines choses.
Par exemple, on s'était entendus depuis novembre 1987 sur le fait
qu'il n'était pas dans l'intention, ni du gouvernement ni du
législateur, de conférer aux municipalités
régionales de comté ou encore aux municipalités du
Québec le droit de faire ce qu'on appelle du zonage de production, le
droit de définir et de déterminer que, dans la belle
municipalité X du beau grand comté de Terrebonne, il n'y aurait
pas, par exemple, de production de veaux de lait, le droit de déterminer
pour la municipalité d'Alma que,
aux limites de son territoire municipal, il n'y aurait pas de porcherie,
par exemple. Ce droit-là, il a été très clairement
établi par les quatre ministres et, à ce moment-là, il
n'était pas dans l'intention des ministres concernés, dans la
recommandation à être faite au Conseil des ministres, de retenir
cette volonté du milieu municipal de se voir doté de pouvoirs
aussi exorbitants - le terme n'est pas exagéré - pour
l'agriculture au Québec.
Il a également été établi à ce
moment-là qu'il n'était pas question de permettre, dans les
schémas d'aménagement, l'établissement de ce que les
municipalités voulaient avoir, ce qu'elles appelaient des zones tampons,
des zones qui, elles, auraient été vert pâle. Ces zones
auraient été véritablement vert pâle, des zones
tampons, un peu comme une cible et l'agriculture aurait été
continuellement repoussée vers l'extérieur de la cible dans une
perspective d'éloignement du centre urbain de la municipalité.
Cela a été établi en novembre 1987. C'est clair, c'est
net, c'est précis, c'est définitif.
Cependant, j'ai quand même eu des contacts avec le milieu
municipal. Je suis député comme vous. J'ai, dans mes fonctions de
ministre, rencontré plusieurs préfets. J'ai rencontré
plusieurs maires du Québec, entre autres dans ma tournée des
expositions agricoles, qui m'ont continuellement témoigné leur
solidarité à l'égard de l'agriculture et de l'agriculture
de demain, de son devenir et surtout de son importance pour l'économie
des régions du Québec. La très grande majorité des
maires du Québec reconnaît qu'il reste des superficies très
appréciables en zone blanche à développer; d'où
l'obligation, comme je l'ai exprimé de bonne foi cet été,
d'être rigoureux dans la révision des zones agricoles et
urbaines.
Je voudrais répondre à l'affirmation de mon honorable
collègue, le député de Lévis, pour qui j'ai
beaucoup de sympathie, vous savez. Il est un peu seul dans la région de
Québec avec nous et il est toujours tout à fait approprié
et opportun de répondre à ses interrogations. Jamais, ni de loin,
ni de près, ni directement, ni indirectement, je n'ai tenté de
donner des directives à la Commission de protection du territoire
agricole. J'ai toujours été bien conscient, à la suite de
la loi adoptée en 1985... En 1985, mon prédécesseur, le
député de Lévis, a présenté une modification
à la Loi sur la protection du territoire agricole - si ma mémoire
est fidèle, aux articles 69 et suivants - qui prévoyait que la
Commission de protection du territoire agricole était obligée,
avec toute MRC qui en faisait la demande une fois que la rédaction de
son schéma d'aménagement était avancée, de
renégocier la zone blanche et la zone verte, de renégocier
l'étendue, si je peux utiliser le terme, du gâteau blanc et du
gâteau vert, de renégocier non pas pour le plaisir de
renégocier, mais pour voir jusqu'à quel point
l'établissement de ces zones devait être revu en fonction de la
volonté d'aménagement exprimée par la municipalité
ou la MRC dans le cadre du schéma d'aménagement qu'elle avait
confectionné, dans une perspective de conciliation, si
possibilité il y avait, des dispositions contenues dans la Loi sur la
protection du territoire agricole et dans la Loi sur l'aménagement et
l'urbanisme, premièrement. Deuxièmement, la démarche
visait aussi à revoir l'évolution de l'aménagement au
Québec, parce que, malgré la loi 90 adoptée en 1978, le
Québec a quand même continué à se développer.
142 000 dossiers ont été adressés à la Commission
de protection du territoire agricole depuis 1978. Dans certains cas, ce sont
des demandes d'autorisation à des fins autres que l'agriculture, dans
d'autres cas, des demandes de reconnaissance de droits acquis; dans d'autres
cas, jusqu'en juillet 1987, l'utilisation de privilèges en vertu de
l'article 31 de la loi; déclarations à la commission par des
personnes qui se sont prévalues d'autres dispositions, par exemple, de
l'article 40 de la loi; révision de la zone en fonction de l'utilisation
de sols à des fins autres que l'agriculture, mais qui étaient
demeurés en zone verte. Un exemple concret: la piste Sanair, dans la
région de Granby, où il y a des courses d'automobiles. Ici,
à Drummondville, le parc des Voltigeurs est en zone verte. Je ne pense
pas que quiconque serait légitimé et surtout applaudi demain
matin s'il allait prétendre que le parc des Voltigeurs devrait
être complètement rasé pour être labouré, etc.
Donc, c'était normal et je fais mienne finalement cette volonté
du législateur en 1985. À cet égard, je m'inscris
pleinement et totalement dans le sillon tracé par le
député de Lévis, par la loi qu'il a adoptée ici en
1985, pour que cette négociation soit conduite. Sauf que le
député de Lévis s'inquiète. Je conviens que j'ai
peut-être prêté flanc à la critique ou à
l'interprétation. Que voulez-vous, nous, on est transparents et on veut
l'être le plus possible. En vertu de la loi, un, il suffit que la MRC en
fasse la demande et la commission doit négocier. Deuxièmement, la
négociation s'amorce et, lorsqu'une entente est signée, il y a un
projet de décret qui est acheminé au ministre titulaire de la loi
et ce projet de décret doit être adressé par le ministre au
Conseil des ministres. Le Conseil des ministres a le droit de modifier ce
décret. C'est très clair, c'est précis, c'est dans la
loi.
J'ai indiqué, j'ai rendu public ce sur quoi je m'appuierais comme
ministre pour recommander au Conseil des ministres de modifier ou non des
décrets, des projets de décrets faisant l'objet d'une entente
entre la Commission de protection du territoire agricole et les MRC du
Québec. Les négociations ont eu cours et 18 schémas
d'aménagement, c'est-à-dire 18 décrets adoptés
à la suite d'une entente entre les MRC du Québec et la Commission
de protection du territoire agricole, ont franchi l'étape du ministre et
du Conseil des ministres. Ces décrets ne donnaient aucune
inquiétude aux intervenants, au monde agricole et ne donnaient aucune
inquiétude à
l'Union des producteurs agricoles, par exemple. Cependant, 19 autres
projets ont fait l'objet d'inquiétudes. (17 h 45)
Alors, j'ai décrété un moratoire, mais pas un
moratoire à la commission, parce que je n'ai pas à lui donner de
directives. J'ai décrété un moratoire sur la signature,
cependant, que je pouvais exercer. J'ai dit très clairement qu'il
n'était pas question que je présente quoi que ce soit au Conseil
des ministres tant et aussi longtemps que, premièrement, l'Union des
producteurs agricoles ne serait pas associée à la démarche
et, deuxièmement, tant et aussi longtemps que le projet de loi que vous
étudiez actuellement n'aurait pas traversé l'étape du
Conseil des ministres. C'est ce qui est arrivé cet
été.
Or, je veux sécuriser le député de Lévis. Il
n'a pas besoin de qualifier le Québec de république de bananes.
Il n'a pas besoin d'adresser des propos sévères non fondés
aux honorables membres de la Tribune de la presse qui font leur travail avec
beaucoup de dévouement et beaucoup d'acharnement pour la cause d'une
information pleine, complète et entière. C'est ce qui est
arrivé.
Entre-temps, on a eu des rencontres avec l'Union des producteurs
agricoles. J'ai eu des rencontres avec les représentants de l'UMRCQ et
de l'Union des municipalités du Québec. J'ai eu des rencontres
avec la Commission de protection du territoire agricole. J'ai constaté
une chose. J'ai constaté que ce qui a contribué à
inquiéter et beaucoup les agriculteurs, c'est qu'ils n'étaient
pas associés entièrement et totalement au processus de
négociation entre les MRC et la Commission de protection du territoire
agricole. L'Union des producteurs agricoles était avisée des
demandes formulées par la MRC dans le document original
déposé à la Commission de protection du territoire
agricole, mais elle n'était pas associée par la suite à la
renégociation de ces zones. Je pense que tout le monde tirera la
leçon que l'Union des producteurs agricoles devra être
associée à cette démarche. Là où les
producteurs ont été associés à la démarche
de révision des zones agricoles et urbaines, il n'y a pas eu de
problème.
Par surcroît, les rencontres qui ont eu lieu entre M. Proulx et M.
Nicolet, de l'Union des municipalités régionales de comté,
et les rapports qu'on en a faits me permettent d'être relativement
optimiste pour l'avenir et pour l'adoption de tels décrets dans les
délais, j'espère, les plus brefs. J'ai rencontré - une
seule fois, j'en conviens - le président de l'UMRCQ. Je l'ai
rencontré en privé et on a convenu que la meilleure des
façons d'avoir un échange très intéressant
était dans le cadre d'une rencontre à la table
Québec-municipalités. Il était impossible de le rencontrer
le vendredi 2 décembre dernier. Je le rencontre donc demain. Je suis
persuadé qu'on aura un échange inspiré par la
civilité et le respect commun. Je suis persuadé qu'on sera en
mesure d'avoir un échange très intéressant et qui, je
l'espère, pourra être utile de part et d'autre.
Alors, voilà pour ce qui en est des inquiétudes
formulées par le député de Lévis. Je veux le
rassurer que les sols de catégories 4, 5 et 6 vont être
très bien protégés et les sois de catégorie 7
aussi, même s'ils n'ont pas de potentiel agricole. Par exemple, notre
intention est de mettre en valeur les sols de catégorie 7 via la
forestation. Vous avez pris connaissance comme moi du rapport du comité
qui a siégé sur les boisés privés au Québec
et qui a formulé des recommandations. C'est important, vous savez. La
principale industrie manufacturière au Québec, ce sont les
pâtes et papiers, le bois d'oeuvre, la transformation des produits du
bois chez nous. Pour la première fois, en 1987, on a planté plus
d'arbres au Québec qu'on n'en a coupé. Notre objectif est de
faire en sorte que des lots zones agricoles, qui doivent demeurer zones
agricoles parce qu'ils sont dans le territoire et qu'il n'est pas question de
briser l'homogénéité, que ces lots, dis-je, qui n'ont pas
de potentiel pour l'agriculture soient reboisés. Pour ceux qui ont du
potentiel pour l'agriculture, nous sommes à préparer tout un plan
d'intervention, de mise en valeur qui se réfère à plus de
production de céréales pour consommation humaine, qui se
réfère à plus de produits horticoles, notamment, les
petits fruits, les légumes et qui se réfère à
encore plus d'agriculture biologique. C'est important pour le consommateur et
la consommatrice. On a tout un pan, si je peux utiliser le terme, de la
consommation qu'on doit développer en fonction des attentes et des
besoins des consommateurs. Les gens veulent de moins en moins de produits
chimiques. Les gens sont très préoccupés par la
façon dont les aliments sont conditionnés et la façon dont
les aliments ont été préparés. J'étais,
à midi, à une conférence de presse concernant une nouvelle
façon de mettre en marché les oeufs au Québec. Encore
là, on sentait chez les journalistes très clairement que la
préoccupation doit porter au ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation sur l'aliment comme tel, sur la
façon dont il est conditionné, dont il a été
préparé, dont S est conservé, s'il y a des additifs
chimiques, etc.
C'est dans cet esprit qu'on entend profiter de cette politique de mise
en valeur pour développer l'agriculture biologique au Québec.
Comme avenue de développement de la production, on voit toutes ces
plantes médicinales, toutes ces cultures qui doivent servir aux
médecines douces au Québec et cela est en plein
développement. Tout comme aussi on veut développer des
productions qui soient susceptibles de nous renforcer. Vous savez qu'on a - je
vois que l'honorable député de Mercier, l'ex-ministre responsable
des Communautés culturelles est avec nous - des milliers et des milliers
de personnes qui sont venues enrichir notre communauté
québécoise depuis une ou deux générations.
On a quand même tout un marché de l'alimentation à
développer pour les ethnies qui s'approvisionnent aux marchés
extérieurs et on pourrait produire cela chez nous. La politique de mise
en valeur des sols, la Loi sur la protection du territoire agricole, ce ne sont
pas des slogans, ce ne sont pas des voeux pieux. C'est une expression
très clairement formulée de mettre en valeur ces sols et de les
protéger.
J'ai apprécié le commentaire aussi de l'honorable
député de Terrebonne qui était, à plusieurs
égards, pertinent. Il s'est référé à mon
intervention du 4 décembre 1978. Le 4 décembre 1978,
c'était mon anniversaire. Cette journée-là, j'étais
jeune député, j'avais 29 ans, je suis intervenu. Cependant, je
dois vous indiquer aujourd'hui, comme très probablement vous aussi vous
pouvez l'indiquer, que les années au Parlement, le contact plus
étroit avec le monde agricole et le contact plus étroit avec
certaines clientèles nous auront très certainement permis de
revoir certaines politiques. Je me rappelle, par exemple, que mon
collègue, mon ami d'en face à l'époque - parce que lui,
c'était un véritable ami d'en face, il était de
Lotbinière - M. Biron, avait évoqué un processus de
révision du cadre d'intervention à la Société des
alcools du Québec. Peu de temps après, il l'avait
révisé. Il l'avait révisé pourquoi? Pourquoi
était-il revenu sur sa position? C'était une démonstration
très claire de maturité politique.
Combien de fois avons-nous vu le gouvernement du Parti
québécois revoir des choses? Le plus bel exemple de cela, c'est
que, si aujourd'hui les députés du Parti québécois
- et je me réfère au message qu'ils ont exprimé en
décembre 1985 - avaient à revoir, à décider
à nouveau s'il était opportun en 1982-1983 de couper les salaires
des fonctionnaires de 20 % pendant trois mois, je suis persuadé que
plusieurs d'entre vous se raviseraient. C'est cela, la maturité
politique. C'est cela, le cheminement. C'est cela, l'évolution chez les
parlementaires.
Alors, vous devriez exprimer de la satisfaction plutôt que de
tenter d'adresser des reproches parfois agressifs, teintés d'un peu de
"je me complais" et de "cela me fait plaisir" à l'égard de
l'humble député de Portneuf que je suis et qui est intervenu le 4
décembre 1978.
Cela étant dit, M. le Président, c'est avec fierté
aujourd'hui que je présente ce projet de loi qui vient ajouter à
la loi 90. La loi 90, on s'en souviendra comme étant de première
génération; la loi 100, on l'appréciera comme étant
la Loi sur la protection du territoire agricole de deuxième
génération et en aucun cas on n'aura affaibli les dispositions
visant la protection.
Pour le député de Lac-Saint-Jean, je présume que
ces commentaires sont trop brefs, M. le Président, et je suis
persuadé que, si le temps nous l'avait permis, mes collègues de
l'Opposition m'auraient autorisé à continuer encore pendant
peut-être une quinzaine de minutes. Ces commentaires trop brefs, j'en
suis persuadé, auront réussi à convaincre mes
collègues de la pertinence du projet de loi. Ainsi, ils pourront amorcer
l'étude du premier article avec sérénité et
ouverture d'esprit, animés par une volonté de collaborer à
une discussion qui ne peut être que fructueuse entre nous, honorables
collègues.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le
député de Lac-Saint-Jean.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, je voudrais quand même
dire que je suis très heureux, et je suis convaincu que mes
collègues aussi le sont, de voir que le ministre a changé sa
façon de voir les choses. Au début de nos travaux, après
seulement 20 minutes, c'est-à-dire après mon intervention qui
était la première, le ministre nous a carrément
accusés d'enclencher, d'amorcer un lilibuster" sur la loi 100 et il
s'est refusé à utiliser son droit de parole légitime, tel
que le lui permet le règlement. Je suis heureux de voir qu'il est revenu
sur sa décision et qu'il a utilisé, comme c'est son droit, son
droit de parole pour nous livrer le fond de sa pensée sur le projet de
loi. Je pense que c'est important que le parrain du projet de loi le fasse. Il
nous semblait incongru que le parrain du projet de loi 100 ne dise pas un mot
sur ce projet de loi.
Alors, je suis heureux de voir que nos interventions, celles de mes
collègues et la mienne, ont eu pour effet d'inciter le ministre à
exercer son droit de parole et à nous livrer le fond de sa pensée
sur le projet de loi 100. Je prends acte aussi du fait que le ministre nous
révèle que, en décembre 1978, il avait fait preuve, dans
son intervention sur le projet de loi 90, d'immaturité politique, oui,
puisque...
M. Pagé: Vous savez, un grand premier ministre du
Québec, M. Lévesque, a déjà dit qu'il n'y avait que
les idiots qui ne changeaient pas d'idée.
M. Brassard: Oui, d'accord. M. Pagé: Boni
M. Brassard: Je prends acte de votre changement d'attitude.
M. Pagé: Alors, dans quelques années, vous le
direz, la loi 100 sera une bonne loi, elle aura renforcé la loi 90.
M. Brassard: On verra.
M. Pagé: Je ne vous qualifie pas d'idiot,
cela va de soi.
M. Brassard: On verra. Moi, non plus, je ne vous qualifie pas
d'Idiot, sauf que vous avez dit que vous aviez changé d'opinion sur le
sens de la Loi sur ta protection du territoire agricole. Vous avez
changé d'opinion par rapport au discours que vous teniez en 1978 et vous
avez indiqué - ce sont vos propres mots - que vous aviez acquis de la
maturité politique. C'est donc dire qu'il faut conclure que vous en
manquiez à l'époque.
Cela étant dit, M. le Président, il nous fait plaisir de
voir que le ministre a changé d'idée et que maintenant, pour lui,
la Loi sur la protection du territoire agricole est un fleuron exemplaire de
notre système de droit dans la société
québécoise.
M. le Président, compte tenu du temps, j'aurais une motion
importante à faire, mais je pense qu'on pourra la reporter à 20
heures. Est-ce que je pourrais poser une question au ministre concernant les
amendements possibles qu'il entend apporter au projet de loi 100? Est-ce qu'il
entend apporter des amendements au projet de loi 100? Est-ce qu'il a des
amendements? Est-ce qu'il pourrait les déposer?
M. Pagé: Ce sont seulement quelques amendements de forme,
il n'y a rien sur le fond. Ce sont quelques papillons...
M. Blais: Vous n'avez pas d'objection à les
déposer?
M. Pagé: ...qui seront déposés au moment de
l'étude de l'article 1 du projet de loi.
M. Brassard: M. le Président, je pense qu'on peut se
quitter pour revenir à 20 heures? J'aurai une motion, je pense, qui fera
l'unanimité de cette commission.
M. Pagé: Vous pourriez la déposer tout de suite, si
vous le voulez, M. le Président. Ce serait généreux de la
part du député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Je vais faire un "deal" avec le ministre: vous
déposez vos amendements et je dépose ma motion.
M. Pagé: Je n'ai pas à les déposer, je ne
les ai pas encore devant moi.
M. Brassard: Je présumais qu'on n'en viendrait pas
là...
Le Président (M. Richard): Je vais vous arrêter dans
votre échange de bons voeux. Je suspends les travaux jusqu'à 20
heures.
(Suspension de la séance à 17 h 59)
(Reprise à 20 h 24)
Le Président (M. Richard): Je suis certain que vous aviez
des échanges intéressants, mais, si vous me permettez, nous
allons déclarer la séance de la commission de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation ouverte. Je vous rappelle que nous sommes
là particulièrement pour procéder à l'étude
détaillée du projet de loi 100. Nous en étions aux
remarques préliminaires qui étaient terminées. J'ai
l'impression qu'il y avait...
M. Brassard: M. le Président, avant de passer à
l'étude article par article, j'aurais une motion à soumettre aux
membres de cette commission. Cette motion se lirait comme suit: "Que la
commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation souhaite
procéder, au besoin, à des consultations particulières et
à l'étude détaillée du projet de loi 100. Loi
modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole, conjointement avec
la commission de l'aménagement et des équipements plutôt
que selon la manière choisie par le leader du gouvernement et
qu'à cet effet, dans le but de formuler une demande conjointe en vertu
de l'article 153 de nos règles de procédure, elle Informe le
président de la commission de l'aménagement et des
équipements et ses membres de son intention en ce sens."
Le Président (M. Richard): Vous pensez que cela ne
dérangera pas mon collègue, le président de la commission
de l'aménagement et des équipements, n'est-ce pas?
M. Brassard: Pardon?
Le Président (M. Richard): Vous pensez que cela ne
dérangera pas mon collègue?
M. Brassard: Je suis sûr que non. On peut plaider la
recevabilité si vous voulez, mais...
Le Président (M. Richard): Un instant! Nous allons
vérifier s'il y a recevabilité. Là, J'ai un
problème technique majeur. Il y a un article qui dérange
peut-être ici, qui est l'article 153 qui se lit comme suit: "Avec
l'approbation de la commission de l'Assemblée nationale, sur demande
conjointe, plusieurs commissions ou sous-commissions peuvent respectivement
former une commission ou une sous-commission mixte pour l'examen d'une
affaire."
C'est aussi indiqué ceci: "Les commissions décident en
séance de travail de la possibilité de former une commission ou
une sous-commission mixte."
M. Brassard: M. le Président, je comprends bien ce que
vous me dites, sauf que la motion ne va pas dans le sens de former, dès
ce soir, une
commission mixte. Si vous la lisez correctement, c'est un souhait que la
commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation exprime
à l'endroit de la commission de l'aménagement et des
équipements de façon qu'on puisse en arriver à la mise en
place d'une commission mixte. En d'autres termes, ce n'est pas une motion qui
dit: Nous formons une commission mixte avec la commission de
l'aménagement et des équipements. C'est plutôt une motion
qui souhaite aviser la commission de l'aménagement et des
équipements que nous considérions comme intéressant et
bénéfique, pour tous ceux qui sont concernés par le projet
de loi 100, de former une commission mixte.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Lac-Saint-Jean, on est là, nous, évidemment, pour décider
si on le fait ou si on ne le fait pas. S'il y a besoin, nous le faisons, tandis
que là, dans votre formulation, il est indiqué: "souhaitons
procéder, au besoin". Je pense qu'il faudrait que ce soit plus
précis. Si nous le faisons...
M. Brassard: Non, c'est-à-dire que... Écoutez, M.
le Président, la commission mixte pourrait, si elle est formée,
procéder à des consultations particulières, si elle le
juge approprié. Mais elle procéderait aussi, évidemment,
à l'étude détaillée du projet de loi 100. C'est
évident qu'elle ferait l'étude détaillée du projet
de loi 100, mais, préalablement, elle pourra juger important ou utile de
procéder à des consultations particulières - c'est
pourquoi on dit: "au besoin". Ce sera à elle, la commission mixte, une
fois formée - si on agrée à notre demande,
évidemment - de juger bon de tenir des consultations
particulières.
Le Président (M. Richard): C'est donc, M. le
député de Lac-Saint-Jean, une demande qui concerne la
possibilité de former une commission mixte.
M. Brassard: Oui. C'est un souhait qu'on exprime, à savoir
qu'on pourrait entamer des consultations avec la commission de
l'aménagement et des équipements pour envisager la
possibilité de mettre sur pied une commission mixte qui
étudierait le projet de loi 100, mais qui, préalablement,
pourrait aussi juger utile de procéder à des consultations
particulières.
Le Président (M. Richard): À ce moment-là,
dès l'instant où vous spécifiez cela - d'ailleurs,
lorsqu'on revoit votre texte, on constate que cela concerne la
possibilité de former une commission mixte - selon l'article 153 du
code, if faut absolument que ce soit fait en séance de travail et non en
commission parlementaire.
M. Brassard: C'est cela. C'est dans le but de formuler une
demande conjointe en vertu de l'article 153. Mais ma motion ne consiste pas
à créer une commission mixte en vertu de l'article 153; elle
consiste à émettre un souhait visant à enclencher le
processus pouvant nous conduire à la mise en place d'une commission
mixte. Évidemment, si les deux commissions en arrivent à la
conclusion que oui ce serait intéressant de mettre en place une
commission mixte, à ce moment-là, l'article 153 s'appliquera.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Lac-Saint-Jean, si je comprends bien la teneur de l'article 153, cela veut dire
qu'il faut s'adresser à eux lorsque nous sommes nous-mêmes en
séance de travail, et, actuellement, nous sommes en commission
parlementaire. À partir de là...
M. Brassard: II s'agit d'un souhait, c'est bien important de le
préciser.
M. Pagé: M. le Président, dois-je comprendre qu'en
vertu des dispositions de notre règlement, si l'honorable
député de Lac-Saint-Jean se limitait à demander que soient
entendus, devant notre commission, les représentants auxquels il se
réfère, la motion serait re-cevable et qu'on pourrait la
débattre tout de suite?
M. Brassard: Non, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Cela devient une
hypothèse.
M. Brassard: Cela n'a rien à voir avec une consultation
particulière; on y viendra en temps et lieu. Pour le moment, ce qu'on
dit, nous, c'est qu'il y aurait lieu d'en arriver, ultimement, à mettre
sur pied une commission mixte pour étudier le projet de loi 100. On
argumentera quand ce sera le temps pour étayer cette affirmation. Mais
le souhait qu'on exprime, c'est qu'on puisse enclencher un processus qui nous
conduise à la mise en place d'une commission mixte. Après
ça, si ça réussit, une fois que la commission mixte aura
été constituée selon les dispositions de notre
règlement, elle pourra décider s'il y a lieu de tenir ou pas des
consultation particulières.
Le Président (M. Richard): Je comprends très bien
le sens de votre demande, sauf que je dois vous spécifier qu'elle est
irrecevable en fonction de l'article 153 qui est très précis et
qui dit qu'une commission peut décider, uniquement en séance de
travail, de la formation d'une commission mixte.
Vous êtes très honnête de me dire que c'est
effectivement dans ce but-là que vous présentez cette motion,
c'est-à-dire dans l'éventualité de former une commission
mixte.
M. Brassard: M. le Président.
Le Président (M. Richard): Oui.
M. Brassard: Je m'excuse, mais l'article 153 dit: "Avec
l'approbation de la commission de l'Assemblée nationale, sur demande
conjointe, plusieurs commissions ou sous-commissions peuvent respectivement
former une commission ou une sous-commission mixte pour l'examen d'une
affaire." Mais, pour qu'il y ait demande conjointe, il faut que les deux
commissions expriment un voeu ou un souhait au départ. C'est ce que nous
enclenchons par notre motion qui constitue un souhait, de façon,
d'abord, à sensibiliser le leader du gouvernement pour qu'il
accède à cette demande et à ce voeu, parce que le leader
du gouvernement, évidemment, selon l'ordre qu'il a donné en
Chambre, indique que c'est la commission de l'agriculture qui doit se
réunir pour étudier le projet de loi 100. Donc, il faut
sensibiliser le leader, il faut lui exprimer un voeu et un souhait pour qu'il
puisse, lui aussi, de son côté, en arriver à modifier
l'ordre qu'il a donné en Chambre et le mandat qu'il a confié
à la commission de l'agriculture, c'est-à-dire celui
d'étudier le projet de loi 100.
En somme, c'est une motion, je dirais, de sensibilisation. Il faut,
d'une part, sensibiliser le leader pour qu'en Chambre il modifie son ordre et
accepte la formation d'une commission mixte et, d'autre part, il faut,
évidemment, sensibiliser l'autre commission à la
possibilité de mettre sur pied une commission mixte.
Le Président (M. Richard): Je me permettrai
d'interpréter, comme président, l'article 153. De la façon
qu'il est rédigé, je le conçois comme ceci: lorsque nous
sommes en séance de travail, nous pouvons, nous, décider de
demander à la commission de l'Assemblée nationale, conjointement
dans certains cas, de préparer et d'avoir une commission mixte, sauf
qu'il faut que cela vienne d'une séance de travail, ce que nous ne
sommes pas ici ce soir selon l'article 153.
Lorsqu'on lit l'article 153, il est écrit: "Avec l'approbation de
la commission de l'Assemblée nationale, sur demande conjointe, plusieurs
commissions ou sous-commissions peuvent respectivement former une commission ou
une sous-commission mixte pour l'examen d'une affaire." Et le paragraphe
suivant dit: "Les commissions décident en séance de travail de la
possibilité de former une commission ou une sous-commission mixte."
Donc, dès l'instant où nous sommes en séance de
travail et que nous décidons, d'un commun accord, d'aller vers une
commission mixte ou de demander à la commission de l'Assemblée
nationale la possibilité de former une commission mixte, je pense
qu'inévitablement le texte est clair en disant...
M. Pagé: C'est difficile de faire quelque chose...
Le Président (M. Richard): ..qu'il faut que cela vienne
d'une séance de travail.
M. Brassard: M. le Président, s'il s'agissait d'une motion
visant à créer une commission mixte, je comprendrais qu'à
ce moment-là le deuxième alinéa de l'article 153 nous en
empêche. Il faut que cela se fasse, il faut que cela se décide en
séance de travail. Mais ce n'est pas une motion visant à prendre
la décision de former une commission mixte; c'est une motion constituant
un voeu ou un souhait visant à sensibiliser, à la fois le leader
et la commission, c'est-à-dire l'autre commission qui pourrait
être concernée, à envisager de mettre en place une
commission mixte.
Il ne s'agit pas d'une motion visant à créer une
commission mixte. À ce moment-là, il faudrait - et vous avez
raison - être en séance de travail. Il s'agit d'une motion
constituant un souhait, c'est ta manifestation d'un souhait, d'une
préférence pour une autre méthode de travail, une autre
façon d'étudier le projet de loi 100. L'adopter ne
créerait pas pour autant la commission mixte. Par contre, le leader
serait sensibilisé à notre souhait, de même que le
président de l'autre commission, celle de l'aménagement et des
équipements.
On me signale qu'il y a deux décisions similaires, en ce qui
concerne la capacité d'une commission d'adopter une motion pour exprimer
un souhait, qui ont été rendues. Tout récemment, le
président Bélanger de la commission des affaires sociales, sur le
projet de loi 37, et le président Marcil de la commission des
institutions, sur le projet de loi 86 ont indiqué et jugé qu'une
commission avait le droit d'adopter des motions exprimant ou manifestant un
souhait, une préférence.
Le Président (M. Richard): Si vous permettez, nous
suspendrons les travaux quelques instants.
(Suspension de la séance à 20 h 39)
(Reprise à 20 h 43)
Le Président (M. Richard): Je vais porter mon jugement en
fonction de la demande de motion. Une demande de création d'une
commission mixte relève du pouvoir de notre commission, c'est exact,
saut que la commission, par motion, décide d'agir, elle n'exprime pas et
elle ne souhaite pas agir. Ici, en fait, on ne peut pas souhaiter agir, nous
avons le devoir d'agir. En me référant à l'article 153, je
maintiens que la motion est irrecevable.
M. Pagé: Je vous remercie, M. le Président. Nous
sommes donc prêts à passer à l'article 1.
Motion proposant d'entendre la
Confédération de l'union des
producteurs agricoles
Le Président (M. Richard): Voici la motion que M. le
député de Lac-Saint-Jean dépose: "II est proposé
qu'en vertu de l'article 244 de nos règles de procédure la
commission permanente de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation tienne, avant d'entreprendre l'étude
détaillée du projet de loi 100, Loi modifiant la Loi sur la
protection du territoire agricole, des consultations particulières quant
à tous les articles dudit projet de loi et qu'à cette fin elle
entende la Confédération de l'union des producteurs agricoles.
C'est recevable. M. le ministre.
M. Pagé: M. le Président, si vous le permettez,
sans être paternaliste, je me permettrai de faire un commentaire à
l'honorable député de Lac-Saint-Jean. Il apparaît
très clair, très évident, depuis, notamment, cet
après-midi, alors que les députés de Mercier et de
Terrebonne ont ajouté leur voix à celle du porte-parole de
l'Opposition officielle en matière d'agriculture, que la
procédure qui est actuellement conduite vise à vouloir gagner du
temps, ce qu'on appelle dans le jargon parlementaire - et ce n'est pas une
insulte, évidemment, adressée aux parlementaires - un
"filibuster". Vous me permettrez de lui dire, sans vouloir attiser le feu ou
quoi que ce soit, que, s'il voulait faire un vrai "filibuster" - je me le
rappelle parce que j'en ai fait normalement, après la décision
que le président vient de rendre, il avait le droit d'en appeler
à l'assemblée, à la commission pour renverser la
décision du président. Cela lui aurait donné le droit
d'intervenir pendant 20 minutes avec un vote. Je ferme la parenthèse, M.
le Président, et je me réfère à la deuxième
motion de l'honorable député. Apprenez cela. Lors de votre
prochain "filibuster", vous ferez cela.
M. Brassard: Je rouvre la parenthèse pour dire justement
au ministre qu'il n'a...
M. Pagé: Que vous ne faites pas de "filibuster".
M. Brassard: Bien voilà.
M. Pagé: Ne me faites pas rire! Pour le
bénéfice du Journal des débats, je ris à
gorge déployée.
M. Brassard: Nous ne faisons pas un "filibuster" et, justement,
la meilleure preuve que nous n'en faisons pas un, c'est que nous n'avons pas
utilisé la procédure et les motions dilatoires qu'il vient de
mentionner.
M. Pagé: Bon, alors, continuez, vous êtes bien
partis.
M. Brassard: ...et qui sont contenues dans notre
règlement. Ce que nous voulions, c'est la mise en place d'une commission
mixte; malheureusement, vous n'avez pas accédé à notre
demande. Mais là, nous revenons avec une motion, disons, plus
traditionnelle sur des consultations particulières.
M. Pagé: Au cas où, dans votre carrière dans
l'Opposition, qui, je l'espère, vous permettra d'acquérir une
bonne expérience pendant plusieurs années, vous vous
décideriez à faire un véritable "filibuster", gardez-la en
note celle-là.
M. Brassard: Nous la connaissions déjà, mon cher
député de Portneuf.
M. Pagé: Ah! Grand bien vous fasse, je m'excuse donc.
M. Brassard: Parce qu'en ce qui concerne les "filibusters", nous
en avons déjà conduit quelques-uns depuis trois ans, et des
vrais.
M. Pagé: Ah oui?
M. Brassard: Mais ils se terminent toujours par une
méprisante motion de guillotine, ou de bâillon, ou de
clôture imposée...
M. Pagé: Que vous utilisiez allègrement lorsque
vous y étiez.
M. Brassard: ...par le gouvernement, au mépris de la
démocratie...
M. Pagé: La plus élémentaire.
M. Brassard: ...et des droits fondamentaux du Parlement. Avec la
différence que - et on le verra dans le cas du projet de loi 34 - la
commission, maintenant, n'a même plus à siéger pour se
faire imposer le bâillon. Elle se fait imposer une clôture alors
même qu'elle ne siège pas sur le projet de loi concerné; ce
sera le cas pour le projet de loi 34. C'est une méthode de travail
expéditive, mais...
Alors, je pense que nous connaissons fort bien les tenants et
aboutissants de ce qu'on appelle un "filibuster", puisque nous en avons conduit
quelques-uns, mais, dans le cas du projet de loi 100, je pense que nos
intentions sont louables, que notre bonne foi ne peut être mise en doute.
Il ne s'agit pas d'un "filibuster"; il s'agit tout simplement d'exprimer, avant
d'aborder l'article 1, des exigences raisonnables et, je dirais, minimales,
quand il s'agit d'étudier un projet de loi de cette importance.
Le Président (M. Richard): Votre motion, M. le
député de Lac-Saint-Jean, est tout à fait recevable. Vous
avez donc la parole pour les 30 prochaines minutes.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: Bien. M. le Président, nous aurions
souhaité, je me permets de l'exprimer d'entrée de jeu, faire
preuve, à l'occasion du projet de loi 100, d'un peu plus
d'originalité et, à tout le moins, envisager de recourir à
l'une des possibilités que nous offre le règlement, soit celle de
mettre sur pied une commission mixte. L'idée nous vient d'ailleurs des
unions du monde municipal, l'Union des municipalités régionales
de comté du Québec de même que l'Union des
municipalités du Québec suggéraient au ministre, dans une
lettre qui lui était adressée, en date du 21 novembre 1988, de
mettre sur pied une commission mixte, regroupant les membres de la commission
de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation et les membres de la
commission de aménagement et des équipements, qui aurait
entrepris l'analyse et l'étude du projet de loi 100 à cause des
effets et des impacts de la loi 100, non seulement en matière de
protection du territoire agricole, mais également en matière
d'aménagement du territoire.
Je vous lis un extrait de la lettre de ÏUMRCQ et de l'UMQ qui
était adressée au ministre. Je cite: "La Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme a confié aux instances municipales
un mandat d'aménagement du territoire québécois, fonction
qui a prêté à divers malentendus, compte tenu des
imprécisions de la législation. Dans cette perspective de longue
date, les porte-parole du monde municipal revendiquent l'harmonisation de cette
loi et de la Loi sur la protection du territoire agricole. Le projet de loi 100
ne répond pas à cette attente." On continue en disant: "En fait,
les propositions du texte viennent cumuler les difficultés puisque la
constitution de secteurs exclusifs regroupant essentiellement les meilleures
terres agricoles est confiée à la Commission de protection du
territoire agricole du Québec sans consultation des instances
municipales et sans référence aucune au schéma
d'aménagement que le gouvernement vient pourtant de sanctionner comme
base de la planification du territoire."
Je ne vous dis pas que je suis pleinement d'accord - ce n'est pas ce que
je veux dire - avec les arguments avancés par les deux unions du monde
municipal, mais il me semble qu'il y a, de toute évidence, concernant ce
projet de loi, des dimensions de protection du territoire agricole, bien
sûr, mais aussi des dimensions d'aménagement, et on pourrait
même ajouter des dimensions environnementales. Par conséquent,
partant de là, l'idée de constituer une commission mixte
réapparaissait une piste intéressante et on aurait dû
à tout le moins envisager de s'y engager. C'était le sens de ma
première motion. J'accepte la décision du président qui la
refuse en se fondant sur le règlement. Je ne remets pas en question
cette décision, j'exprime simplement le fait que nous aurions pu nous
engager dans cette voie et que cela aurait permis une étude
peut-être plus approfondie du projet de loi 100. Puisque c'est mis de
côté, il faut maintenant en venir à l'idée fort
simple de consultation particulière.
Le ministre lui-même et nous aussi de notre côté, je
pense qu'on s'entend au moins sur une chose. Il y a au moins un consensus sur
une chose. On s'entend pour dire que le projet de loi 100 est une loi
importante, une loi majeure qui apporte des modifications à une grande
loi, la Loi sur la protection du territoire agricole. Puisque c'est une loi
importante, puisque c'est une loi qui apporte des modifications substantielles
à la Loi sur la protection du territoire agricole, il m'apparaît
plus que souhaitable, je dirais nécessaire et impérieux, qu'avant
d'aborder l'étude détaillée du projet de loi, on puisse
procéder à une consultation particulière et consacrer
quelques heures à entendre des groupes concernés directement par
cette loi, des intervenants directement touchés par cette loi et, au
premier chef, bien sûr, la Confédération de l'union des
producteurs agricoles, l'UPA.
Comment peut-on sérieusement adopter un projet de loi de cette
nature et de cette ampleur sans le faire précéder d'une
consultation, sans entendre le témoignage d'un intervenant aussi
concerné que l'UPA? D'ailleurs, le ministre le reconnaît
lui-même d'une certaine façon parce qu'il a dit cet
après-midi, dans son intervention, à propos du mécanisme
de révision des zones agricoles: Écoutez, j'ai
décrété un moratoire sur l'adoption des décrets et,
lorsque je l'ai levé, j'ai pris soin de faire en sorte qu'à
toutes les étapes de la négociation, à toutes les
étapes des discussions entre la Commission de protection du territoire
agricole et les MRC, pour en arriver à la détermination ou
à la révision de la zone agricole, on consulte l'UPA. Il faudra
que l'UPA soit consultée, N faudra que l'UPA soit partie prenante des
négociations, il faudra que l'UPA ne soit pas mise à
l'écart, écartée des négociations pour en arriver
à la révision du territoire agricole. Je trouve ça tout
à fait raisonnable, sage que, à l'occasion de la révision
du territoire agricole d'un territoire de MRC, on consulte l'UPA et on implique
l'UPA dans le processus de négociation. Je suis d'accord avec ça.
Je dis bravo, c'est très bien, M. le ministre, vous avez raison, ce
serait anormal que l'UPA ne soit pas impliquée parce qu'elle est
directement concernée. Je vous donne raison là-dessus.
L'UPA est consultée en matière de révision et de
négociation pour en arriver à la révision du territoire
agricole. Pourquoi l'UPA ne serait-elle pas consultée quand il s'agit de
modifier de façon substantielle la Loi sur la protection du territoire
agricole? Il me semble que la sagesse devrait vous inciter là aussi,
comme elle vous a inspiré dans le cas du processus de révision du
territoire agricole, et vous devriez convenir que, oui, B faudrait
procéder à une consultation particulière et, oui, il
faudrait entendre à tout le moins l'Union des producteurs agricoles.
Quand on regarde ce qui s'est passé au cours des derniers mois,
j'en parlais tout à l'heure, on a vu que ce sont des producteurs
agricoles qui ont manifesté du mécontentement ou de
l'insatisfaction à l'égard de certaines décisions de la
Commission de protection du territoire agricole ou à l'égard du
résultat ou du fruit de la négociation entre la CPTA ou telle et
telle MRC. L'UPA a manifesté du mécontentement. Par
conséquent, l'UPA, avec raison, se sent touchée, directement
concernée par tout ce qui concerne la protection du territoire
agricole.
Voilà qu'il y a une loi, le projet de loi 100, qui a pour objet
d'amender, de modifier - pas par des amendements de forme, ce sont des
modifications substantielles - la Loi sur la protection du territoire agricole,
et on ne jugerait pas utile d'entendre l'UPA, on ne jugerait pas utile de
l'inviter - pas de la convoquer, j'allais dire de la convoquer - à venir
ici s'asseoir à la table des témoins et dire ce qu'elle pense de
ce projet de loi, nous exprimer ses accords ou ses désaccords, ses
réticences, ses réserves sur l'ensemble des dispositions du
projet de loi 100? il me semble que ce serait là quelque chose de tout
à fait normal et raisonnable. Je n'arrive pas à imaginer qu'on va
rejeter cette motion. Je suis persuadé qu'elle sera adoptée
unanimement, d'autant plus qu'elle est raisonnable. (21 heures)
Vous m'excuserez, j'aurais pu, comme c'a été le souhait
exprimé dans plusieurs régions du Québec, ajouter à
la Confédération de l'union des producteurs agricoles les
fédérations régionales et cela aurait été
intéressant d'entendre les fédérations régionales,
parce que les fédérations régionales, ce sont elles qui
ont davantage vécu les problèmes de dézonage. Elles ont
vécu cela sur le terrain, elles sont en liaison plus étroite avec
les syndicats de base. Donc, elles ont vécu vraiment des
problèmes concrets dans plusieurs régions du Québec. Mais
non, je me contente d'inviter la Confédération de l'union des
producteurs agricoles qui, évidemment, est en mesure de s'exprimer au
nom de toutes les fédérations régionales.
Je sais bien que le ministre me dira sans doute: Écoutez, l'UPA a
manifesté son accord avec le projet de loi. Il l'a indiqué en
Chambre. Je pense qu'il l'a indiqué aussi cet après-midi. L'UPA,
me dira-t-il, pas besoin de la convoquer, je connais son opinion, je sais que
l'UPA est d'accord avec l'essentiel du projet de loi. Je ne veux pas mettre la
parole du ministre en doute, je ne veux pas mettre non plus la parole de M.
Proulx, le président de l'UPA, en doute, mais je ne détesterais
pas que M. Proulx et ses collègues de l'exécutif de l'UPA
viennent nous indiquer de façon plus explicite, plus
détaillée leur position sur le projet de loi 100. Peut-être
qu'ils vont exprimer leur accord général, mais peut-être
aussi qu'ils ont sur un certain nombre de dispositions du projet de loi
plusieurs réserves, plusieurs réticences et peut-être aussi
certaines recommandations à exprimer concernant les dispositions du
projet de loi 100. Je donne deux exemples: le Tribunal d'appel. Est-ce que
l'UPA est d'accord avec la mise en place d'un tribunal administratif nouveau,
autonome, distinct de la commission? Il serait peut-être
intéressant de le savoir. Quelle est son appréciation du
mécanisme d'appel qui a été mis en place en 1985 à
l'intérieur même de la commission? Quelle est leur
appréciation sur ce mécanisme? Est-ce qu'ils jugent utile de
créer un nouveau tribunal administratif complètement distinct et
autonome par rapport à la commission? Cela m'apparaîtrait
intéressant de l'interroger là-dessus et d'échanger
quelque temps sur cette question-là.
Il y a une autre question importante sur laquelle j'aimerais qu'elle se
prononce dans le projet de loi 100. On sait que désormais un commissaire
seul va examiner les demandes et en disposer contrairement aux
mécanismes de la procédure de la loi actuelle qui
prévoient au moins deux commissaires pour examiner et décider
d'une plainte, et même parfois trois commissaires, quand il s'agit d'un
dossier important. Là, dans la loi actuelle, ce ne sera plus
désormais qu'un seul commissaire qui examinera les demandes et qui
prendra une décision, tout seul. Je ne suis pas certain que l'UPA soit
d'accord avec une disposition comme celle-là. Je trouverais utile que
l'UPA nous exprime son point de vue sur les dispositions du projet de loi 100
concernant la prise de décision par un seul commissaire plutôt que
par deux.
Il y a bien d'autres dispositions. C'est un projet de loi quand
même très substantiel. Que pense l'UPA du "commissaire aviseur"?
Elle a déjà exprimé son point de vue, elle semble d'accord
avec cela. Est-ce qu'elle juge que le "commissaire aviseur" dispose des
pouvoirs suffisants? Est-ce qu'elle a des recommandations à faire
à ce sujet? Il y a également toute la question de
l'immunité. Il semble que cela donne satisfaction à l'UPA, mais
ce ne serait pas sans intérêt de lui demander ce qu'elle en
pense.
En d'autres termes, je pense que l'UPA a eu des commentaires très
brefs sur le projet de loi 100. On a évidemment décodé ces
brefs commentaires en disant qu'elle était d'accord avec l'essentiel du
projet de loi 100. Mais, à cause de la brièveté de ces
commentaires, il me semble qu'on ne peut pas entamer l'étude
détaillée d'un projet de loi de cette importance sans avoir un
échange, sans entamer, pendant quelque temps, un dialogue avec
l'organisme représentatif des producteurs agricoles, en l'occurrence,
l'UPA. Ce sont là, je pense, des raisons difficiles à
contester.
Sur des projets de loi beaucoup moins importants que celui-là, le
gouvernement ou d'autres ministres ont jugé bon de tenir des
consultations particulières, mais aussi, sur d'autres projets de loi
importants, plusieurs ministres du même gouvernement ont jugé
utile de tenir
des consultations particulières. Je pense, par exemple, au
ministre de l'Éducation, avec les projets de loi 107 et 106 concernant
l'instruction publique. On n'a pas eu besoin de faire une bataille tous azimuts
pour convaincre le ministre Ryan que c'était absolument essentiel, avant
de procéder à l'étude détaillée, d'entendre
les grands intervenants scolaires qui sont peu nombreux. C'est un monde
organisé et cela s'est fart d'un commun accord. On n'a pas eu besoin de
beaucoup d'efforts pour convaincre le ministre de l'Éducation. Il a
jugé essentiel que, pour un projet de loi de cette envergure, 700
articles, un projet de loi qui portait sur l'ensemble de l'éducation au
Québec, c'était important d'entendre les commissions scolaires,
c'était important d'entendre les directeurs généraux des
commissions scolaires, la CEQ, etc. Et cela s'est fait. Il y a eu des
consultations particulières et, une fois les consultations
particulières terminées, la commission s'est engagée dans
la voie de l'étude détaillée du projet de loi. Cela s'est
fait normalement. Je pense qu'ils ont adopté au-dessus de 300 articles
et ils ont eu le point de vue des grands intervenants scolaires. C'est comme
cela que cela s'est passé et je pense que c'est comme cela que cela doit
se passer quand on est en face d'un projet de loi important. On doit
préalablement entendre les grands intervenants concernés, c'est
la moindre des choses. Je dirais que c'est un minimum de respect qu'on doit
avoir à l'égard des intervenants concernés. Je pense que
cela fait partie de nos traditions et de nos comportements
démocratiques. On ne peut pas légiférer en vase clos. On
ne peut pas légiférer en coulisse sans permettre aux intervenants
de se faire entendre, sans qu'on puisse les écouter et connaître
leur point de vue. Cela ne veut pas dire qu'on va accéder à
toutes leurs demandes, à toutes leurs revendications. Ce n'est pas cela
que cela signifie. D'ailleurs, cela ne s'est jamais soldé de cette
façon, une consultation particulière, mais cela permet parfois de
donner un meilleur éclairage aux membres de la commission. Cela permet
parfois de mieux faire comprendre certaines dispositions du projet de loi. Et
cela permet aussi parfois de corriger, d'amender, de modifier et
d'améliorer le projet de loi qui est devant nous.
Je pense que ce serait important que l'Union des producteurs agricoles
se fasse entendre. On pourrait lui accorder une heure, une heure et demie;
ça pourrait être demain ou au début de la semaine
prochaine, et on en aurait le coeur net. D'autant plus, M. le Président,
qu'on sait que la commission de l'agriculture, des pêcheries et de
l'alimentation devait, à la suite d'un mandat qu'elle s'était
elle-même donné, examiner toute la question du zonage agricole,
toute la question de la protection du territoire agricole, et nous avions
déjà, dans une séance à huis clos, reçu et
entendu le président, M. Blais, de même que plusieurs des
commissaires de la commission, et ça avait été très
utile et très instructif, mais ça devait être suivi
également de séances publiques de la commission, comme c'est
normal qu'elle le fasse. Les séances à huis clos, je ne pense pas
qu'on doive les multiplier; c'est une façon très
particulière de fonctionner. Normalement, une commission parlementaire
doit fonctionner publiquement. Cela devait être suivi de séances
publiques de la commission où, là, on aurait entendu les
intervenants intéressés par la question du zonage agricole, y
compris l'UPA, les fédérations régionales, les unions
municipales, sans aucun doute Cela devait se faire. Ça va devoir se
faire à un moment donné parce que c'est un mandat que la
commission s'est donné unanimement. À moins qu'on ne change ce
mandat, il faudra qu'on le respecte à un moment ou à un
autre.
On n'a pas pu le faire. Si on avait pu remplir ce mandat, on aurait au
moins entendu la plupart des intervenants concernés. On n'a pas pu le
faire, de sorte qu'on se retrouve maintenant avec un projet de loi important,
modifiant la Loi sur la protection du territoire agricole, et on n'a pas eu
l'occasion, à aucun moment, d'entendre les intervenants et, au premier
chef, l'Union des producteurs agricoles.
Le ministre pourra me dire: Écoutez, je les ai consultés.
Je ne mets pas sa parole en doute, il les a sans doute consultés, il a
sans doute discuté avec la direction de l'UPA dans son bureau ou
ailleurs, mais ça s'est fait, comment dire, à huis clos,
ça ne s'est pas fait publiquement. Ce n'est pas connu, ce sont des
discussions normales qui se font quand on prépare un projet de loi de
cette importance, mais il ne faut pas que ce soit considéré par
la commission parlementaire comme étant une véritable
consultation. Le ministre a consulté, je veux bien, mais la commission
parlementaire n'a pas consulté, c'est différent. Le ministre est
détenteur du pouvoir exécutif. C'est l'exécutif qui a
consulté; le législatif, lui, en l'occurrence la commission
parlementaire, n'a pas consulté. On n'a entendu personne, sauf, à
l'occasion d'une séance à huis clos, des membres de la Commission
de protection du territoire agricole, mais on n'a entendu personne, aucun des
intervenants sur cette question.
Donc, on ne doit pas confondre les choses. Les consultations à
huis clos du pouvoir exécutif en regard d'une loi ou d'un projet de loi,
c'est une chose; les consultations publiques d'une commission parlementaire
intéressée par un projet de loi, c'est une autre chose, et cette
consultation publique n'a pas eu lieu. (21 h 15)
Je trouverais indécent, inconvenant, irraisonnable que la
commission de l'agriculture, des pêcheries et de l'alimentation
étudie et adopte le projet de loi 100 sans avoir entendu les grands
intervenants concernés par cette question. Je trouverais ça
Inconvenant et cela m'apoaraîtrart être une entorse grave à
une procédure régulière et normale en matière
d'adoption et d'étude de
projet de loi. Par conséquent, j'espère et je souhaite que
les membres de cette commission accèdent à cette demande
raisonnable et en arrivent à appuyer unanimement cette motion pour qu'on
puisse, après cela, s'entendre sur un moment où il conviendrait
de les entendre. Cela pourrait se faire très rapidement en début
de semaine. Je pense que, comme c'est une consultation particulière, il
n'est pas nécessaire de respecter les délais de 30 jours,
d'autant plus que ce sont là des organismes familiers avec le projet de
loi, avec la question; ils sont habitués à traiter de cette
question-là presque quotidiennement; alors, ils n'ont pas besoin d'un
long temps de préparation. On pourrait même les convoquer
dès ce soir et ils seraient en mesure de nous dire ce qu'ils en pensent
et d'exprimer leur opinion sur la question. Donc, on n'a pas besoin d'un long
délai entre le moment où on décide de les inviter et le
moment où on pourrait les entendre. On pourrait donc, dès le
début de la semaine prochaine, dès lundi, commencer à
échanger avec l'Union des producteurs agricoles pendant quelque temps
et, ensuite, je pense qu'on serait davantage en mesure d'aborder l'étude
détaillée du projet de loi. On serait mieux
éclairés ou, en tout cas, on connaîtrait davantage
l'opinion de l'UPA.
Je vous avoue que les quelques commentaires très brefs que M.
Proulx a exprimés sur le projet de loi 100, je vous le dis tout net, ne
me donnent pas satisfaction. C'est trop bref, c'est trop court. Je pense que je
l'ai entendu à la télévision déclarer: Oui, c'est
un projet intéressant qui répond à plusieurs de nos
attentes. Je pense que c'était à peu près le commentaire
de M. Proulx. Je le dis, c'est un peu court. C'est un signal, c'est un message.
On a une idée de ce qu'il pense du projet de loi 100, mais je pense
qu'il faut aller plus loin avec l'Union des producteurs agricoles; il faut
approfondir, il faut en savoir davantage. Il faut qu'elle nous exprime une
opinion plus étoffée, plus articulée, ce dont elle est
évidemment capable, mais encore faut-il qu'on lui donne l'occasion de le
faire. Comment peut-elle avoir l'occasion de le faire si la commission
parlementaire ne lui fournit pas cette occasion lors d'une consultation
particulière? C'est prévu dans nos règles, c'est
prévu dans nos règlements et je ne vois pas pourquoi, par
conséquent, M. le Président, on n'adopterait pas cette motion
fort raisonnable afin d'entendre la Confédération de l'union des
producteurs agricoles. Là-dessus, je vous remercie.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. Je cède la parole à M. le
député de Duplessis. Vous avez dix minutes pour vous exprimer,
s'il vous plaît.
M. Denis Perron
M. Perron: M. le Président, il est extrêmement
dommage de voir que les ministériels n'interviennent pas plus qu'il ne
le faut face aux motions que nous déposons au cours de cette commission
parlementaire. Je conviens qu'il semble effectivement y avoir un consensus
établi au Parti libéral quant au projet de loi que nous avons
devant nous et que nous devons éventuellement étudier en
commission parlementaire.
M. le Président, cette motion du député de
Lac-Saint-Jean propose que, en vertu de l'article 244 de nos règles de
procédure, la commission permanente de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation tienne, avant d'entreprendre
l'étude détaillée du projet de loi 100, Loi modifiant la
Loi sur la protection du territoire agricole, des consultations
particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et,
à cette fin, qu'elle entende la Confédération de l'union
des producteurs agricoles.
M. le Président, je dois d'abord vous avouer que le comté
de Duplessis n'est pas un comté extrêmement agricole et, si Mme la
députée veut intervenir, elle n'a qu'à s'asseoir, je lui
donne mon droit de parole et elle peut intervenir de la façon qu'elle
voudra. Je demande qu'elle me laisse parler puisque c'est moi qui ai le droit
de parole actuellement.
M. Pagé: Et qu'elle vous écoute religieusement.
M. Perron: Et qu'elle m'écoute religieusement, comme dit
le ministre de l'Agriculture. Comme je le disais tout à l'heure, il est
vrai que le comté de Duplessis n'est pas un comté
extrêmement agricole parce qu'on a surtout des zones blanches dans le
comté de Duplessis, mis à part quelques petits secteurs qui sont
identifiés comme étant des zones vertes.
Mais il reste quand même que, pour nous, dans le comté de
Duplessis, et face aux électeurs et aux électrices que je
représente, qui sont extrêmement bien informés de la
situation dans l'ensemble du Québec, je crois que ces personnes voient
avec beaucoup d'intérêt, dirais-je, que le député de
Duplessis intervienne pour que l'Union des producteurs agricoles soit
amenée devant cette commission parlementaire. Bien sûr, M. le
Président, si nous voulons que l'Union des producteurs agricoles vienne
devant cette commission parlementaire, il faut absolument ouvrir la porte pour
permettre d'entendre certains intervenants et certaines associations afin que
ces associations et ces intervenants puissent faire valoir leurs points de vue
durant la commission parlementaire et qu'on puisse définitivement
entendre ces personnes face au projet de loi qui modifie substantiellement la
Loi sur la protection du territoire agricole.
M. le Président, lorsqu'on regarde ce qui se passe actuellement
à l'Assemblée nationale, et ce depuis trois ans - peut-être
que de l'autre côté ça va rire un peu moins - et dans cet
édifice du parlement, on s'aperçoit qu'à plusieurs
reprises, lorsque nous avons demandé en tant que membres
de l'Opposition, lorsque des associations qui sont de l'extérieur
du parlement ont demandé de se faire entendre lors de commissions
parlementaires face à des projets de loi qui sont extrêmement
importants pour la collectivité du Québec, on se rend compte que,
de ta part de ce gouvernement libéral la transparence n'existe pas. On
se rend compte que de la part de ce gouvernement libéral, non seulement
la transparence n'existe pas, mais la démocratie en prend pour un
coup.
Lorsque la démocratie en prend pour un coup, on se doit, en tant
que représentants élus dans certains comtés du
Québec, en tant que membres de cette collectivité
québécoise, de se poser de sérieuses questions quant
à certaines attitudes qui sont mises en place, et ce
systématiquement, par le gouvernement. Lorsqu'on parle de l'Union des
producteurs agricoles, par exemple, qui représente plus de 40 000
personnes au Québec, qui représente plus de 90 % des quelque 47
000 ou 48 000 entreprises du Québec, je crois qu'on n'a pas le droit de
les mettre de côté, même si l'Union des producteurs
agricoles est d'accord en principe avec le projet de loi et, là-dessus,
je peux vous dire que l'Union des producteurs agricoles en étant
favorable se dit satisfaite du projet de loi communément appelé
le projet de loi Pagé.
Par contre, l'Union des producteurs agricoles mentionne dans un article
du journal du jeudi 17 novembre 1988: Nous sommes à scruter le projet de
loi. La loi nous apparaît renforcée, mais c'est évidemment
dans son application qu'on verra la volonté politique. C'est une
déclaration qui a été faite par le président de
l'UPA, M. Jacques Proulx. Moi, M. le Président, j'ai eu l'occasion
à plusieurs reprises de rencontrer le président de l'UPA, M.
Proulx, et je peux vous dire que lorsque je l'ai rencontré, il
n'était pas nécessairement d'accord avec l'ensemble des
politiques gouvernementales. Il a son propre point de vue en tant que
président de l'UPA. Cependant, cela ne veut pas dire que les quelque 40
000 membres et plus qu'il représente sont parfaitement d'accord avec le
président lui-même. Je voudrais bien entendre aussi certains
représentants et représentantes de l'UPA de différentes
régions du Québec qui pourraient nous donner leur point de vue
face à la position du président. Pour moi, comme il est
extrêmement important de voir que l'Union des producteurs agricoles
regroupe un si grand nombre de petites entreprises qu'on appelle
communément des PME, qui ont démontré au cours des quinze
dernières années la capacité de l'autosuffisance du
Québec dans certains domaines de l'agriculture, soit pour le lait, les
légumes ou les fruits qu'on retrouve dans certaines régions du
Québec, lorsqu'on regarde aussi le fait que ce sont des entreprises
dites familiales, je ne vois pas pourquoi le gouvernement libéral, en
particulier le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation ne permettrait pas que l'on puisse entendre l'Union des
producteurs agricoles lors de cette commission parlementaire.
Si on veut s'en sortir avec un projet de loi extrêmement potable,
un projet de loi qui va faire l'affaire de l'ensemble de la collectivité
du Québec et, bien sûr, de l'ensemble des producteurs et
productrices, M faut que ces personnes soient entendues et qu'on en arrive
à avoir un projet de loi qui fait l'affaire d'à peu près
tout le monde, donc, avec un consensus extrêmement
généralisé. Je ne crois pas que ce soit avec l'attitude du
gouvernement actuel qu'on va y arriver, parce que ce gouvernement, et ce en
l'espace de deux jours, nous a organisés, ce qu'on appelle dans le
jargon parlementaire, avec la guillotine sur deux projets de loi. On en a eu un
hier et on en a un autre demain. Même, je ne suis pas sûr que les
ministériels, les gens qui sont en face et qui, actuellement, font du
placotage face à ce que je dis, soient d'accord avec ce qui se passe,
mais ils marchent dans le dessein du gouvernement.
Compte tenu du fait qu'y est extrêmement important que cette
commission entende différentes instances qui... Compte tenu du fait
qu'il est nécessaire que nous entendions, lors de cette commission
parlementaire, plusieurs associations et plusieurs personnes, je suis
assuré que certains collègues du côté de
l'Opposition vont enchaîner avec moi et donner suite aux propos qui ont
été tenus par le critique de l'Opposition officielle en
matière d'agriculture, le député de Lac-Saint-Jean. C'est
pourquoi je donne la parole à M. le Président pour que vous
puissiez la donner à une autre personne de notre côté,
parce que les libéraux ne veulent pas parler.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Duplessis. Je donne donc la parole au
député de Mercier. Vous avez dix minutes, M. Godin, pour vous
exprimer.
M. Gérald Godin
M. Godin: M. le Président, je vous en remercie
profondément. Maintenant, tout à l'heure, j'ai entendu le
ministre de l'Agriculture faire état de ses nombreuses rencontres. Il me
fait penser un peu au jeune Werther dans les poèmes - est-il Goethe ou
Schiller, chers collègues - rencontrant son amoureuse...
Une voix: Goethe. (21 h 30)
M. Godin: C'est Goethe. Rencontrant donc des préfets de
comté, un tas de personnes dans le paysage, mais il aurait fallu les
convoquer ici au parlement, là où la politique au Québec
se déroule. Là, nous sommes en face d'un droit nouveau, un droit
nouveau consistant à tenir des commissions parlementaires
privées. J'aimerais que vous me disiez si ça vaut autant qu'une
commission parlementaire réelle, avec l'Opposition qui s'exprime et les
deux partis au Parlement, posant des questions et interrogeant les
conseillers de ces groupes. L'UMRCQ, nous venons de voir M. Nicolet qui
nous avouait, dans l'entrée du parlement tout à l'heure, avoir
demandé au ministre une commission parlementaire. Et le ministre a dit:
Non, une rencontre privée, ça va suffire puisque je suis assez
brillant pour couvrir les questions des deux parties. Il y a une règle
en droit, Me Pagé... M. le Président, il y a une règle en
droit...
Une voix: Vous n'avez pas le droit. M. le ministre...
M. Godin: ...qui dit: Audi alteram partem, entends l'autre
partie. Je pense qu'en l'occurrence nous sommes la deuxième partie et on
devrait nous permettre de s'exprimer, nous aussi, face à l'UMRCQ, face
à l'UPA, face aux groupes que le ministre rencontre privément
dans des conditions et dans des lieux inconnus de nous, et où le
ministre a tout le loisir de couvrir tout le paysage qu'il veut sans que
personne puisse le contester, ni poser les questions qui intéressent
peut-être les gens du Québec. Dans ce sens-là, c'est non
seulement du droit nouveau, mais c'est du droit antiparlementaire, M. le
Président. C'est du droit qui met en péril l'avenir du Parlement
du Québec, à mon avis, parce que ça donne aux gens
l'impression qu'au Québec tout se règle entre le ministre et les
groupes, en dehors de l'Opposition.
Nous, si on avait fait ça à l'époque... J'ai
déjà été ministre, M. le Président, et je me
souviens qu'on avait fait une commission sur la loi 101, le projet de loi 57,
et on avait rencontré pendant des mois avant que la loi soit
déposée les groupes, Alliance Québec, et tutti quanti,
nommez-les, ils étaient tous là. Mais ça n'a pas
empêché que, le jour venu, nous convoquions une commission
parlementaire digne de ce nom avec, en face de nous, les députés
et les ministres que vous connaissez qui vont peut-être
démissionner bientôt si la Cour suprême ne leur donne pas
satisfaction. Ces gens-là ont pu s'exprimer pendant des mois face
à nos invités, comme porte-parole des groupes menacés ou
qui voulaient des changements ou pas de changement. Donc, la démocratie
s'est exercée totalement au Québec là-dessus et je pense
qu'un Parlement, c'est ça, M. le Président. Et toute autre
pratique qui consisterait en ce que le ministre rencontre privément,
dans son bureau, les gens avec lui seul comme porte-parole, loin de
l'Opposition, en cachette, je dirais, laisse prévoir le pire pour ces
groupes-là et leurs objectifs face à une loi semblable et surtout
je crains le pire par rapport au parlementarisme québécois.
Donc, je dis que cette motion a au moins l'avantage de rappeler au
ministre que nous voudrions nous aussi entendre ce que les invités de
leur côté voudraient lui dire parce qu'on a des questions à
leur poser nous aussi. Nous voulons savoir, nous aussi, s'ils sont satisfaits
du fait qu'un seul commissaire peut maintenant entendre les causes ou leur
demander si le tribunal d'appel les satisfait, le tribunal qu'on appelle
"rouge" dans mon comté de Mercier, parce qu'il est composé
d'anciens chefs de cabinet des ministres libéraux du passé, M.
Lévesque, M. Ryan, et tutti quanti encore une fois. Donc, je me demande
si un tel tribunal d'appel peut être sensible à la
réalité vécue par les fermiers du Québec, et nous
sommes sûrs que cette procédure mènera à des
impasses.
Pour avoir été ici pendant treize ans, M. le
Président, je vous dis que l'Opposition, face à toute loi, a un
rôle à jouer et le député de Portneuf le sait
très bien, il a joué ce rôle-là pendant des
années et il a aidé le gouvernement, souvent, à
améliorer ses lois. Je lui dis en toute modestie qu'il serait
peut-être temps qu'il s'ouvre les yeux. J'ai entendu cet
après-midi son cantique, regret éternel, sur sa position il y a
six ans sur la loi 90. Regret éternel, c'est bien beau, mais je dis:
Comme il est encore député aussi, il devrait se souvenir qu'il y
a des règles parlementaires qui disent que l'Opposition a un rôle
à jouer et que ce qui sort d'ici n'est pas nécessairement des
bêtises et que les questions qu'on veut poser aux groupes
convoqués par le ministre seront peut-être utiles au gouvernement
et surtout au Québec. "God bless you", M. le Président, comme on
dit à la Cour suprême.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Godin: Donc, M. le Président, je pense que cette
motion-là est fondée dans la tradition la plus profonde du
parlementarisme québécois. Et moi, j'ai appris ici, en arrivant
comme député, jeune député, moi aussi, M. le
député de Port-neuf; il y a quelques années, il y a
déjà treize ans, j'avais des préjugés, j'avais des
clichés dans la tête, j'avais toutes sortes d'idées
farfelues, comme disent certains de vos collègues, ou saugrenues, et
aujourd'hui je me rends compte que l'Opposition a un rôle essentiel
à jouer. Et je m'étonne...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: ...les agriculteurs...
M. Godin: Et je m'étonne... Le député prend
la parole sans votre permission, M. le Président, et ça
m'étonne beaucoup de sa part parce qu'avec le nom qu'il porte je sais
qu'il a beaucoup d'avenir. Je peux vous dire que, dans mon comté de
Mercier, on consomme les produits de la terre, M. le Président, en
grande partie, et qu'il y a deux abattoirs dans mon comté de Mercier
où vient se faire débiter en morceaux, pour la consommation du
ministre et de ses collègues, la viande qui est produite dans les terres
1, 2, 3, 4, 5, 6 et 7 que le ministre veut rendre aux spéculateurs
grecs, hollandais et allemands qu'on a connus dans le passé. Et, pour
toutes ces raisons-là, M. le Président, je pense
qu'H est temps que nous entendions, pas seulement le ministre... Pas du
tout, madame. Je fais un constat économique parce que je l'ai vu dans
mon comté de Mercier et autour de Saint-Hubert, Saint-Lambert et
LongueuN... Vous, à l'époque, je ne sais pas où vous
étiez, mais... Ce n'est pas nécessaire de dire qu'il y a des
spéculateurs qui achètent des terres qui viennent de
Grèce, de Hollande et d'Allemagne. Ce sont des faits connus par le
ministre lui-même. N'Importe qui qui ne sait pas ça, à mon
avis, ne sait pas ce qui se passe au Québec.
Donc, je poursuis, M. le Président, sans me laisser interrompre
par aucun membre du poulailler libéral d'en face... C'est encore
Ti-Gilles qui s'agite! Pourriez-vous, M. le Président, le ramener
à la dignité d'un Parlement parce qu'ici ce n'est pas une place
où on rote et où on pète. C'est une place où on
s'exprime. Et, s'il n'est pas sérieux, mettez-le dehors de cette
salle-ci parce que je veux travailler sérieusement.
M. Pagé: Qu'est-ce qui arrive? Tout est calme.
M. Godin: Non.
Le Président (M. Richard): II y a eu un petit
problème d'isolation. Vous avez la parole, M. le député de
Mercier.
M. Pagé: Je ne vois personne faire du trouble.
M. Godin: Le ministre est non seulement aveugle mais sourd en
plus.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Pagé: M. le Président, est-ce que je peux lui
demander ce qu'il nous dit?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Godin: Je comprends que dans sa position il a
intérêt à être sourd et aveugle, mais enfin la
vérité a ses droits. Je continuerai à faire ma part pour
tenter d'amener le ministre à un comportement démocratique dans
ce Parlement. Le passé a démontré que l'Opposition
à l'époque où il était dedans avait un rôle
à jouer et qu'on les a respectés comme Opposition officielle, M.
le Président. On les a même écoutés. On a fait des
amendements à la suite de leurs propositions quand elles étaient
valables. Et tout ce que nous souhaitons, c'est qu'à notre tour nous
soyons aussi respectés qu'ils le furent à l'époque et que,
quand nous disons que l'UPA doit être entendue ici, mais pas en
privé dans les cabinets de ministres ni dans les antichambres de
ministres sur lesquels certains poèmes furent écrits il y a
quelques années... M. le député de Lac-Saint-Jean, vous
vous en souvenez? Je ne les citerai pas ici pour ne pas déplaire aux
oreilles fragiles de mon collègue de Nicoiet, ancien maire de
Bécancour. Je ne me souviens pas. M. le Président.
Tout ce que nous souhaitons c'est que le Parlement recouvre ses droits,
c'est-à-dire entende, comme commission parlementaire, avec les droits
des uns et des autres et dans les règles généralement
admises dans un Parlement, les principaux intervenants dans ce dossier, M. le
Président, dans le respect de leurs droits, mais surtout à la
recherche des solutions les meilleures pour le peuple du Québec,
agriculteurs, producteurs agricoles, productrices et autres, également
l'UMRCQ, l'UMQ et autres intervenants dans le domaine de la zone
d'aménagement.
Pour toutes ces raisons, M. le Président, nous insistons pour que
l'UPA puisse être entendue en commission parlementaire, dans les
règles parlementaires qui, pour moi, sont aussi sacrées que
n'importe quelles règles des droits de la personne comme on dit dans ce
parti en face de nous. Les droits de fa personne passent aussi par un Parlement
démocratique, passent aussi par des commissions parlementaires et
passent aussi par le règlement de la commission parlementaire et du
Parlement du Québec. Donc, M. le Président, si on est
sérieux, il faut cesser de rencontrer des groupes privément, en
dehors de l'interrogation que l'Opposition se pose sur certaines lois et que
nous puissions enfin faire valoir ce que nous croyons être
l'intérêt supérieur du Québec, c'est-à-dire
la protection du territoire qui permet au Québec d'être autant que
possible autosuffisant et de pouvoir disposer de ses surplus sur les
marchés où ils peuvent être vendus. C'est aussi simple que
ça
Par conséquent, je rappelle au ministre actuel, qui fut
député dans l'Opposition lui aussi, qu'un Parlement fonctionne
mieux quand tout le monde y est respecté. M. le Président, je
passe la parole a un collègue. Je ne sais lequel.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député de Mercier....
Une voix: Très bien, Gérald.
M. Perron: C'est quoi le tocsin qu'on entend, M. le
Président. C'est le vôtre ça?
Le Président (M. Richard): C'est le nôtre. On a
deux, trois appareils...
Une voix: On est même contrôlés.
Le Président (M. Richard): Vous ne faites pas une motion
dans ce sens-là, M. le député de Lac-Saint Jean? Ha, ha,
ha!
M. Brassard: Non, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Je donne donc la
parole à M. le député de Lévis. Vous avez
dix minutes, M. le député de Lévis.
M. Jean Garon
M. Garon: Merci, M. le Président. Quand nous sommes
arrivés au Parlement, comme le disait le député de
Mercier, nous sommes arrivés en même temps que le président
de l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec, M. Nicolet et son épouse. Je lui ai dit qu'on
souhaiterait l'entendre en commission parlementaire et entendre les
intervenants importants au sujet de la révision de la loi que le
ministre veut faire actuellement avec sa Loi modifiant la Loi sur la protection
du territoire agricole, qui est aussi appelée An Act to amend the Act to
préserve agricultural land. M. Nicolet nous a dit, à ce
moment-là, que lui-même aurait souhaité être entendu
en commission parlementaire et si possible à une commission
parlementaire conjointe avec un autre ministère pour que le débat
soit complet.
Une voix: Une commission mixte.
M. Garon: Une commission mixte. J'ai été content
d'apprendre que c'était le voeu également de M. Nicolet,
président de l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec. J'aurai l'occasion d'en reparler tout à
l'heure.
Maintenant, je vais dire un mot sur la motion qui est actuellement
débattue et qui dit que, en vertu de l'article 244 de nos règles
de procédure, la commission permanente de l'agriculture, des
pêcheries et de l'alimentation tienne, avant d'entreprendre
l'étude détaillée du projet de loi 100, Loi modifiant la
Loi sur la protection du territoire agricole, des consultations
particulières quant à tous les articles dudit projet de loi et
qu'à cette fin elle entende la Confédération de l'union
des producteurs agricoles. Il serait très intéressant de
connaître les motifs qui font que le président de l'UPA a
donné son appui au projet de loi, alors qu'il ne l'avait pas encore vu.
Dans le journal, on a vu que le président de l'UPA était
d'accord, mais quitte à ce qu'il étudie éventuellement le
projet de loi. Je me suis dit qu'il avait sûrement une connaissance
particulière du projet de loi et qu'il serait bon qu'il nous en fasse
part, parce que j'ai rarement vu quelqu'un appuyer un projet sans l'avoir vu,
alors que, nous-mêmes, on venait de le recevoir à
l'Assemblée nationale, on venait d'avoir le dépôt, on ne
l'avait pas vu et, normalement, un projet de loi est présenté
pour la première fois devant l'Assemblée nationale avant
d'être présenté à qui que ce soit. Il serait bon que
le président de l'UPA vienne nous expliquer à quel point, pour
quelles raisons et dans quel cadre il appuie le projet de loi en
présence. J'aimerais savoir s'il l'appuie d'une façon aussi
spontannée qu'il a appuyé, par exemple, l'augmentation des minima
sur l'assurance-stabilisation dans le porc.
Le ministre voulait économiser de l'argent et l'UPA comprenait et
était satisfaite du fait qu'on augmente les minima, même si on se
trouvait à désassurer les petits producteurs. Quelques semaines
plus tard, avec la même satisfaction, le président de l'UPA
exprimait qu'on enlevait les maxima là où cela ne faisait plus
économiser de l'argent, quand cela coûtait une fortune; il
était toujours aussi satisfait. Je recherche la cohérence dans
tout cela. J'ai eu quasiment le sentiment que le président de l'UPA
était l'otage du ministre.
M. Pagé: Je ne suis pas assez gros pour cela.
M. Garon: Je me suis dit...
Une voix: C'est l'amour, M. le Président.
M. Garon: L'amour rend aveugle et cela serait bon que le
président de l'UPA vienne nous expliquer toute la motivation profonde
qui explique cet appui soudain, rapide, incandescent
Une voix: Total.
M. Garon: ...et total, mais qui fait qu'après, par
ailleurs, il faut bien le dire, l'exécutif de l'association des
producteurs de porc a dû modérer son appui. Le président de
l'UPA aussi, parce que la ferme familiale en mangeait un moyen coup, et que
toutes les raisons fondamentales qui motivent l'assurance-stabilisation,
c'est-à-dire la ferme familiale, trouveraient difficilement
justification quant aux appuis donnés. Mais, je me suis dit, il y a un
vieux proverbe américain qui dit "When you pay peanuts, you get
monkeys"... (21 h 45)
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: ...ou encore cet autre proverbe américain qui
dit "He who pays the fiddler calls the tune". Alors, je me suis dit qu'il
faudrait bien à un moment donné avoir la recette. C'est pourquoi
il est important à ce moment que les appuis soient débattus
publiquement. Pourquoi l'UPA appuie-t-elle le projet, comme l'a
mentionné le président de l'UPA? Ce serait bon de le savoir, de
savoir pourquoi, dans quelles conditions, etc. Et, si tous les articles qui
sont dans ce projet sont bien connus, comment sont-il connus? Pourquoi l'Union
des producteurs agricoles? Le ministre disait tout à l'heure: En 1978,
il y a eu protection du territoire agricole phase I et, en 1988, il y a
protection du territoire agricole phase II. Je vous ferai remarquer qu'à
la phase I il y a eu une tournée dans tout le territoire du
Québec, dans les différentes régions du Québec et
tous les gens ont pu se faire entendre et dire comment ils voyaient cela. Quand
le projet de loi a été déposé, tous les organismes
qui ont voulu venir donner leur opinion à la phase I ont pu le faire.
Tous les
gens ont pu dire publiquement, enregistré en commission
parlementaire, ce qu'ils en pensaient et il n'y a pas eu de cachette, il n'y a
pas eu de discussions de fond de corridor ou de chambre d'hôtel. Cela
s'est fait publiquement devant tout le monde, pas dans une commission
privée mais dans une commission publique. C'est pourquoi nous pensons
qu'il est absolument essentiel que tout ce débat-là se fasse pour
la plus grande sécurité du public, la connaissance du public et
la confiance du public. Le public a le droit de savoir ce qui se passe.
Je peux vous dire que, quand on a fait la révision en 1985, je
n'ai pas honte de le dire, on a rencontré tous les groupes et il y a eu
un appui de tous les groupes pour la révision de 1985. Pourquoi? Parce
qu'on a établi les règles du jeu en rencontrant l'Union des
municipalités du Québec, l'Union des municipalités
régionales de comté du Québec, le Barreau du
Québec, la Chambre des notaires du Québec, les membres de la
commission. Il y a eu plus d'une rencontre, il y a eu des discussions. Vous
avez une expérience de tant d'années maintenant, comment
voyez-vous cela, l'UPA? Je dois dire d'une façon générale
que les commissaires n'avaient pas d'affaire à vous faire de compliments
d'aucune façon. L'UPA n'en fait jamais habituellement. Je suis
étonné un peu de cette nouvelle formule, le président
félicite beaucoup. Habituellement, il ne félicitait pas, mais il
y avait deux demandes et elles avaient été satisfaites.
C'était une révision, je pense, à ce moment-là,
dans le temps en tout cas, qui répondait à la plupart des
débats qui avaient cours alors. Aujourd'hui, le ministre veut faire une
nouvelle étape, mais je pense qu'il ne serait pas sain qu'on fasse une
nouvelle étape en divisant davantage le monde rural principalement et en
divisant même le monde urbain, parce que si on regarde tout cela,
actuellement, les gens ont l'air plus divisés que jamais.
C'est pourquoi il est bon d'entendre l'Union des producteurs agricoles,
mais pas seulement l'Union des producteurs agricoles. Vous aurez
remarqué que dans la loi il y a un rôle important qui est
joué par l'Union des municipalités régionales de
comté, dans le cadre des schémas d'aménagement, et la
révision avait été prévue justement dans le cadre
des schémas d'aménagement avec une révision des zones
agricoles.
Motion d'amendement proposant d'entendre aussi
l'UMRCQ
C'est pourquoi je voudrais présenter, M. le Président, un
amendement à la motion qui pourrait se lire de la façon suivante:
La motion est amendée par l'addition, à la fin, des mots "et de
l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec".
Le Président (M. Richard): C'est recevable, M. le
député de Lévis. Vous avez donc 20 minutes pour expliciter
votre...
Une voix: 30 minutes.
Le Président (M. Richard): C'est un amendement à la
motion, donc c'est 20 minutes.
Une voix: Vous arrivez juste à temps, M. Nicolet.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le
député de Lévis, sur votre amendement.
M. Garon: Je peux vous dire que ce n'est pas arrangé avec
le gars des vues. C'est le hasard le plus complet.
Des voix: Ha, ha, ha!
Le Président (M. Richard): Cela nous fait plaisir de vous
saluer, M. Nicolet, président de l'UMRCQ.
M. Jean Garon
M. Garon: Pourquoi l'Union des municipalités
régionales de comté du Québec7 Autant la
commission a la responsabilité de protéger les terres agricoles,
autant l'Union des municipalités régionales de comté du
Québec a le rôle de faire l'aménagement du Québec.
Je pense que, dans les orientations qui ont été prises au cours
des dernières années - nous l'avons mentionné et le
député de Lac-Saint-Jean qui est critique officiel de
l'Opposition en matière agricole l'a exprimé - il y a un
mélange dans les rôles, une confusion dans les rôles,
actuellement, et que chacun ne joue pas le rôle qu'il devrait jouer. Le
rôle de l'aménagement dans le territoire, c'est le rôle des
municipalités régionales de comté. C'est leur rôle
fondamental. C'est pour cela qu'elles ont été constituées
et on pense qu'elles doivent jouer ce rôle. On pense que le rôle de
la Commission de protection du territoire agricole est de protéger les
terres; ce n'est pas de faire de l'aménagement. On l'a dit à
plusieurs reprises On a été constants dans cette opinion depuis
qu'on évalue la situation actuelle et depuis qu'il y a un changement
d'orientation dans toute la question des lois de protection des terres
agricoles et d'aménagement du territoire. On pense qu'il n'est pas bon
qu'il y ait confusion dans les rôles parce que, s'il y a confusion dans
les rôles, les choses ne seront pas bien faites.
Nous pensons que l'Union des municipalités régionales de
comté doit s'occuper d'aménagement. Cela ne veut pas dire qu'elle
a la liberté totale de le faire, mais on pense que c'est son rôle
de s'occuper d'aménagement et qu'une des contraintes dans le cadre de
l'aménagement... Je dirais qu'il y a deux grandes contraintes. Il y en a
peut-être d'autres, mais il y en a deux grandes, en tout cas, à
mon avis: une, c'est la protection des terres agricoles et l'autre, c'est la
protection de l'environnement. Ce sont deux
contraintes et, même en faisant de l'aménagement, les
municipalités régionales de comté ne peuvent pas ignorer
ces deux contraintes qui ont été voulues par des lois
particulières du gouvernement pour des fins nationales. Le gouvernement
a estimé que la protection des terres agricoles était
nécessaire parce qu'elles sont limitées et que la protection de
l'environnement était nécessaire parce que, si on ne s'en occupe
pas, on va se trouver à peu près dans la même situation que
celui qui est propriétaire d'une maison et qui ne s'occupe pas d'aller
bûcher son bois l'hiver ou d'acheter de l'huile, mais qu'au cours de
l'hiver, commence à débiter sa galerie pour chauffer la
fournaise. À un moment donné, il va se retrouver tout seul avec
la fournaise et il n'aura plus de maison. On dit qu'on ne peut pas fonctionner
de cette façon et qu'il faut que chacun joue le rôle qu'il doit
jouer.
Dans les amendements que le ministre présente comme la phase II
de la protection des terres agricoles, je pense qu'il doit y avoir la
même ouverture d'esprit qu'il y a eu lors de la phase I, afin que chacun
vienne discuter de l'ensemble de la question parce que c'est le ministre
lui-même qui l'a présentée. Le ministre n'a pas dit: II
s'agit d'amendements mineurs; on veut juste faire quelques amendements de
concordance, ce n'est pas important. Mais ce n'est pas cela qu'il a dit. Il a
dit - je reprends ses paroles - : II y a eu la phase I en 1978 et il y a la
phase II en 1988. La phase II en 1988, c'est la deuxième
génération. Il a dit: La protection des territoires agricoles,
c'est la deuxième génération. En connaissant la
capacité génétique du ministre...
Des voix: Ha, ha, ha!
Une voix: Jaloux!
M. Garon: Ha, ha, ha! Je me dis...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: ...que s'il s'agit vraiment de la deuxième
génération - et, comme c'est lui qui en parle, cela doit
être vrai - à ce moment-là, je pense qu'il serait
important, raison de plus, qu'il y ait un véritable débat avec
les principaux intervenants. On n'a pas besoin de se conter d'histoires, au
fond, quand on se parle. L'Union des producteurs agricoles est un intervenant
important, l'UMRCQ est un intervenant important et je suis persuadé que
le critique officiel a d'autres intervenants qu'il considère importants,
aussi, afin que les débats se fassent dans toute la dimension qu'ils
doivent avoir à ce moment-ci dans le temps. Cela ne serait pas correct
de vouloir limiter le débat parce que, si le ministre nous dit qu'il
veut seulement faire une commission parlementaire privée à toutes
fins utiles, où il va être le seul intervenant avec son cabinet,
donc ses conseillers particuliers - il n'y aura pas de débat - je pense
bien que tout le monde va sortir de cette expérience insatisfait. Il y a
des problèmes importants qui se posent actuellement. Il y a des
problèmes importants qui se posent. Vous savez, quand on est dans la
phase II trois ans après un changement de gouvernement et qu'on se rend
compte qu'en 1985, par exemple, il y avait 85 100 employés en moyenne
dans l'agriculture au Québec, qu'il y en a 2900 de moins en 1986, 5900
de moins en 1987... J'ai les chiffres des emplois au Québec. Les onze
premiers mois de l'année 1988, il y en a 6500 de moins. Le ministre bat
son propre record. Son propre record de 2900 en 1986, il l'a battu avec 5900 de
moins en 1987 et il est capable de le battre encore en 1988 avec 6500 de moins,
ce qui veut dire, en trois ans, 15 300 employés de moins dans
l'agriculture qu'en 1985. Il ne pourra pas me dire que c'est parce qu'il y a le
même niveau de sécurité.
Qu'on regarde les investissements. Grosso modo, les investissements ont
baissé autour de 425 000 000 $ à 450 000 000 $, alors que bon an
mal an, dans les années quatre-vingt, les investissements se situaient
autour de 600 000 000 $; actuellement, ils sont rendus, d'après les
prévisions faites pour 1988, à 425 000 000 $. L'an dernier, ils
étaient un peu en dessus, un peu plus que 450 000 000 $. Dans les
années quatre-vingt, c'était autour de 600 000 000 $ et, en 1984,
de 664 000 000 $ alors qu'on était dans une crise économique. Il
y a sûrement un malaise important pour que les investissements soient
aussi bas et que l'emploi baisse d'une façon aussi constante et
accélérée depuis trois ans. Si vous regardez cela, c'est
le secteur où les emplois baissent le plus, parmi tous les secteurs de
l'économie du Québec. J'ai les chiffres devant moi.
L'administration publique, même avec les volontés
gouvernementales, a baissé de 6,2 %. L'agriculture a baissé d'un
pourcentage de 6,5 % par rapport à l'an dernier dans les onze premiers
mois. Le commerce a baissé de 1,4 %. Vous voyez, c'est l'agriculture qui
est en avant. Les autres industries primaires: 0,6 %. C'est le secteur qui
baisse le plus en termes de développement économique. Pourquoi?
Moi, je l'ai dit au début, quand le ministre a été
nommé et qu'il a commencé à générer ses
états d'âme sur la place publique en commençant par dire:
Moi, je ne suis pas sûr que le Québec a de l'avenir dans le boeuf,
je me suis dit: Oh! bonne mère, il ne sait pas ce qu'il vient de
générer là parce que les gens qui sont dans le boeuf, qui
savent qu'ils ont besoin de l'appui du gouvernement, ils vont y penser deux
fois avant d'investir. Après cela, il a dit: Dans le mouton, je ne suis
pas sûr si on a de l'avenir là-dedans. Après cela, dans les
fruits et légumes - il a commencé à changer son fusil
d'épaule depuis quelques mois - il n'est pas sûr non plus si on
est capables de compétitionner avec la Californie ou la Floride.
Après cela, les céréales; à un moment donné,
il avait même amené les discours de l'ancien ministre de
l'industrie et du
Commerce, Guy Saint-Pierre, qui pensait qu'on avait une vocation pour
acheter les céréales de l'Ouest, mais il s'est rendu compte qu'on
était presque autosuffisants dans les céréales. Alors,
voyez-vous, quand on génère l'insécurité,
l'incertitude, le manque de confiance, ce qu'on récolte? La baisse
d'emplois, la baisse des investissements et le manque de confiance. Je vais
vous dire une chose, je vais vous dire qu'on n'a pas vu souvent sous le
gouvernement antérieur comme on l'a vu l'an dernier dans le temps des
Fêtes les gens faire leurs cretons et leurs tourtières avec du
porc importé du Danemark. Provigo, l'an dernier... Les gens m'ont
appelé au bureau. Les bouchers leur disaient ouvertement: Notre porc,
cette année, il vient du Danemark. Les gens ont dit: On trouve cela
drôle que nous, qui avons un surplus de porc au Québec, on fasse
venir le porc du Danemark. J'ai vérifié, mais c'était
vrai.
M. Pagé: ...maximum.
M. Garon: Le porc venait du Danemark, l'an dernier,
peut-être pas à 100 %, mais une quantité très
importante de porc venait du Danemark. Vous remarquerez que les porcs qu'on
avait chez Provigo, on ne les a pas vendus. J'ai refusé, avant les
élections. Ce nouveau gouvernement les a vendus et on se rend compte
qu'avec Sobeys, tranquillement, ce n'est pas le Québec qui envahit la
Nouvelle-Ecosse ou le Nouveau-Bruns-wick, c'est plutôt Sobeys, une
entreprise des Maritimes, qui est en train d'envahir le Québec. Elle
monte à Rimouski, à Rivière-du-Loup, tantôt ce sera
un peu plus haut, mais elle envahit tranquillement le Québec,
après avoir pénétré la Gaspésie. (22
heures)
On se rend compte, actuellement, que la solidarité qu'il y avait
sur le plan des affaires agro-alimentaires n'existe plus. Elle a
été brisée parce que le président de Provigo ne
croit pas beaucoup à cela, il faut le dire. Pour ce qui est des heures
d'affaires le dimanche, les employés des magasins d'alimentation sont
contre l'ouverture le dimanche à peu près à 100 %; 75 %
à 80 % des Provigo sont contre, mais le président est pour, donc,
officiellement, Provigo est pour. Le gouvernement va écouter qui? Le
président de Provigo qui parle en son nom personnel? Lui, le dimanche,
il ne travaillera pas; il s'en ira au club de golf, sans doute. Mais est-ce que
c'est lui qui parle au nom de Provigo ou si ce sont les employés ou
encore les propriétaires d'épicerie qui nous supplient de
combattre l'ouverture des Provigo le dimanche? À un moment donné,
il va falloir se parler en face et se dire la vérité. Qui parle
au nom de Provigo? Le président de Provigo, M. Lortie, ou les
propriétaires des épiceries indépendantes qui à 75
% ou 80 % disent non et les employés, à 100 %? Je peux vous dire
que j'ai passe dans des épiceries et des gens me l'ont dit. Quand il a
été question de faire la journée d'ouverture, il y a des
employés qui m'ont dit: M. Garon, chez nous, il nous ont offert double
salaire et cela a été unanime: Non On pense qu'on a le droit
à une journée avec notre femme et nos enfants. Chez les
employés, c'est unanime: Non.
Je me rappelle quand on avait des surplus de pommes de terre et qu'on
demandait aux magasins d'alimentation d'avoir une certaine solidarité,
d'acheter d'abord les produits du Québec avant d'acheter ceux d'ailleurs
On savait, de toute façon, qu'on ne produisait pas à 100 %, mais,
à ce moment-là, on avait besoin de cette solidarité
d'autant plus qu'H y avait des surplus épouvantables et que les gens
auraient maintenu des entrepôts pendant une partie de l'hiver, à
des coûts importants, alors qu'on pouvait d'abord vider nos
entrepôts. Cette solidarité, où est-elle rendue? Je vais
vous le dire bien franchement. La solidarité, plus personne ne sait
où elle est rendue là-dedans. Aujourd'hui, il va y avoir des
effets et des conséquences à cela. C'est pour cela qu'une
question comme celle de la protection des terres agricoles repose
essentiellement sur une volonté gouvernementale, sur une volonté
politique qui ne peut être autre chose que le reflet de la population, de
consensus socio-économiques importants en vue d'une politique qui dit:
Cela, c'est important ou ce n'est pas important. Il est évident que si
on dit: Ce n'est pas important que notre porc vienne du Danemark, ce n'est pas
important que notre boeuf vienne de l'Ouest, ce n'est pas important que nos
céréales viennent de l'Ouest, de la grosse Saskatchewan... Tout
le monde a parlé de l'efficacité de la Saskatchewan. Je dois vous
dire qu'en Saskatchewan, actuellement, il serait bien plus rentable d'organiser
des safaris au bison, à 5000 $ le bison, que de produire des
céréales dans des conditions de sécheresse où il y
a plus de cactus que de blé dans certains espaces du sud de la
Saskatchewan.
Actuellement, on ne se donne pas l'heure juste dans le domaine agricole.
Ne nous racontons pas d'histoire. Il y a 20 ans, c'était un monde de
famine; aujourd'hui, c'est un monde de surplus. Et l'agriculture dans l'Ouest,
dont on a vanté la capacité et la productivité
extraordinaires, je serais prêt à gager n'importe quand sur
l'efficacité de la Saskatchewan et l'efficacité du Québec,
sur la diversité de l'agriculture du Québec et sur celle de la
Saskatchewan. Et Roy Romanow peut toujours aller se rhabiller quand il vient
nous parler de ceux qui sont dépendants des autres. C'est cela, la
réalité. Aujourd'hui, il y a des gens qui vont devoir se poser
les véritables questions sur l'orientation éventuelle de
l'agriculture au Québec et au Canada aussi. Qu'est-ce que c'est
l'orientation pour les années à venir? Faire des
céréales sans limitation, avec une loi discriminatoire comme
celle qu'il y a dans le domaine des céréales au Canada, alors que
le ministre pense embarquer dans une entente tripartite où il y a
carrément deux régimes, un régime pour l'Ouest et un
régime
pour le Québec, le régime pour l'Ouest ayant
été établi à une période où il
manquait d'aliments dans le monde, alors qu'aujourd'hui les grains et le
blé nous sortent par les oreilles?
Alors que la Chine importait, aujourd'hui elle exporte. Les
États-Unis, l'Amérique du Sud et l'Europe exportent. La Russie
est la seule qui importe à cause d'un régime de production qui
n'est pas efficace. Dans les kolkhozes, les gens ne travaillent pas fort. Mais,
quand ils travaillent sur l'arpent qui leur appartient, leur profit est plus
personnel. La nature étant ce qu'elle est, quand les gens travaillent
pour leur poche, ils travaillent plus fort que les gens qui travaillent pour le
bien commun. C'est malheureux à dire...
Une voix: C'est la réalité.
M. Garon: ...mais les missionnaires sont moins nombreux que ceux
qui doivent être convertis.
Comment l'agriculture va-t-elle s'orienter en fonction de cela dans les
années à venir? La vocation du Canada, c'est de nourrir qui,
quand il est en concurrence avec d'autres qui veulent exporter et qui sont
aussi et même plus efficaces que lui? L'agriculture des prairies de
l'Ouest du Canada au XIXe siècle et ce qu'elle est aujourd'hui, ce n'est
pas la même chose. Aujourd'hui, les gens sont obligés de labourer,
et, quand ils labourent, le sel sort de la terre parce qu'il y avait une mer
d'eau salée, avant, dans l'Ouest. Ce n'est pas pour rien que même
les arbres ne poussaient pas; c'étaient des prairies. Aujourd'hui, quand
on va regarder l'avenir, déterminer l'avenir, on va le faire en fonction
de quoi? En disant qu'on a des terres improductives? La situation change
très rapidement là-dedans, il y a une vérité de
base. La vérité de base, c'est qu'un peuple doit viser à
se nourrir. Il y a un vieux principe qui disait qu'un peuple doit avoir le
goût de se nourrir et la volonté de se nourrir, d'abord. Le
Québec, dans les choix qu'il aura à faire, va devoir, dans la
phase II dont on parle actuellement, faire ces choix.
Ce n'est pas mauvais de renouveler une profession de foi. Autrefois,
l'Église catholique a trouvé une formule pas pire; on
commençait par le baptême, le jeune ne savait pas ce qu'il
voulait, mais ses parents décidaient pour lui. Quand il
commençait à connaître un peu ça, il faisait une
première communion. Il le faisait un peu en son nom, mais il
était encore jeune un peu. Après ça, il y avait la
confirmation, il renouvelait encore. Après ça, on a
inventé la formule de la profession de foi, un peu plus vieux où,
encore là, il renouvelait.
Dans la phase I, il a dû y avoir, entre tous les intervenants, un
consensus en vue de la protection des terres agricoles. Je pense qu'il ne
serait pas mauvais - le ministre dit qu'on est à la phase II
actuellement - dans la phase II, qu'il y ait la confirmation ou la profession
de foi solennelle. On pourrait, à ce moment-là, dire: On va
réunir tous les intervenants et on va établir comment on voit la
protection des terres agricoles à partir de 1988. il est possible qu'en
1988 les gens disent: C'est important, mais les mécanismes peuvent
être différents. Même dans l'Église catholique, qui
est très solide, les indulgences, on en parle moins aujourd'hui
qu'autrefois. Il y a certaines choses qui ont évolué et qui ont
changé, mais, pourtant, on est dans des domaines de
vérités très fortes.
Une voix: Des vérités de base.
M. Garon: Des vérités fondamentales. Qu'on fasse ce
consensus, qu'on le renouvelle, mais après un dialogue, après un
débat, dans des commissions parlementaires ouvertes, à la face de
la population. C'est une question fondamentale. La protection du territoire
agricole et la protection de l'environnement, ce sont des choses qui sont
très fondamentales, on le voit aujourd'hui. Le ministre de
l'Environnement a voulu "fligne-flagner" et faire du slalom politique dans
l'environnement. Actuellement, on regarde aller les dépotoirs; il
faudrait quasiment avoir une liste permanente des dépotoirs en
opération. Une journée, ils opèrent et, le lendemain, ils
n'opèrent plus. Pourquoi? Parce que l'opinion publique veut qu'il y ait
une protection; les gens sont craintifs, sont inquiets de ce qui se passe par
rapport à l'environnement. Ce sont des piliers actuellement
vis-à-vis de la nécessité d'établir comment
fonctionner.
M. le Président, vous avez dirigé le comité
d'étude sur les heures d'affaires le dimanche. C'est très
important, c'est la conception d'une société. Les heures
d'affaires le dimanche, les gens ont dit... Évidemment, ce n'est pas un
débat qui est très compliqué, on n'est pas dans le
cinquième niveau d'abstraction, excepté qu'on est capable de
discuter ensemble sur la conception de la vie en société. La vie
en société, est-ce que c'est comme aux États-Unis, dans
les endroits "rough" où la police travaille jour et nuit? Les magasins
sont ouverts jour et nuit, mais, quand vous allez à une épicerie
la nuit, je dois vous dire que c'est triste. J'en ai visité des
épiceries aux États-Unis, la nuit, cet été, j'ai
fait un grand bout aux États-Unis. Je dois vous dire que les
lumières sont plutôt fermées aux États-Unis, la
nuit, parce qu'on veut ménager l'électricité et que les
achats ne sont pas nombreux. La police n'est pas loin, non plus, pour ne pas
que trop de gens prennent l'épicerie pour une banque. Les
caissières ne sont pas nombreuses. C'est ouvert, mais la grosse
épicerie joue le rôle de dépanneur, un peu.
Ici, on a établi une formule qui est différente: des
dépanneurs et des épiceries fermées le dimanche. C'est une
conception de la société, sauf qu'il n'est pas mauvais que la
société, à un moment donné, établisse
comment elle voit les choses dans le temps. Je pense que l'occasion
privilégiée, c'est à ce moment-ci. Si le ministre
nous avait dit - II ne peut pas l'avoir dit, et il a raison de ne pas le dire -
on pense à des changements fondamentaux très importants dans la
loi actuellement... Parce qu'il veut faire ces changements-là, je trouve
que les gens de l'Union des municipalités régionales de
comté du Québec ont raison de dire: On veut être entendus
en commission parlementaire...
M. Blais: C'est normal.
M. Garon: ...on veut pouvoir s'exprimer au nom des gens qu'on
représente. Et c'est sain à part cela. Je serais plutôt
craintif à la place de l'Union des producteurs agricoles que tout cela
se fasse en catimini sans savoir comment tout le monde a fonctionné
là-dedans. C'est sain. C'est ça une société
ouverte, une société démocratique. Les gens peuvent
parler. On a souvent participé ensemble à des débats. On
n'était pas toujours d'accord. Mais il y avait un débat qui
était correct. Il y avait un débat qui était sain. Les
gens pouvaient s'exprimer. Je ne fais pas partie de ceux qui croient que
quelqu'un qui pense différemment est un nono. Je pense, au contraire,
que dans une société démocratique il y a des gens qui
privilégient des valeurs, qui défendent des valeurs et qui
défendent les gens qu'ils représentent. Mais ce qui est important
dans une société, ce sont les consensus socio-économiques
qu'on peut réussir à établir. Et la meilleure façon
de les établir, c'est que le débat se fasse entre tous les
intervenants ensemble: les ruraux et les citadins, les jeunes et les vieux, les
cultivateurs et les non-agriculteurs et ceux qui aiment le bruit et ceux qui
n'aiment pas le bruit.
Je vais vous dire que je ne crois pas qu'on va réussir à
établir longtemps certaines exclusions totales par rapport à
l'environnement et dire aux agriculteurs que cela ne s'applique pas à
eux. Cela ne pourra pas fonctionner longtemps. J'ai toujours dit aux
agriculteurs: Les plus grands défenseurs de l'environnement, ça
devrait être vous. Cela doit être vous. Il faut
éventuellement que les gens dans la société disent: Les
plus grands protecteurs de l'environnement, ceux qui ne peuvent pas vivre sans
un environnement sain, ce sont les agriculteurs. Qui vit plus dans
l'environnement qu'un cultivateur? Il n'y en a pas qui vivent plus dans
l'environnement qu'un cultivateur et qui nous disent...
Une voix: Vous avez raison.
M. Garon: ...qu'ils ont besoin d'un environnement sain.
L'agriculteur ne veut pas une réserve. J'ai l'impression que si les
Indiens avaient à choisir aujourd'hui ils ne choisiraient pas une
réserve. Demandez aux Hurons s'ils sont contents d'avoir une
réserve. Demandez-leur s'ils sont contents de vivre comme Hurons dans
une réserve. Demandez à tous les Indiens. Au con- traire! On
entend parier constamment des populations indiennes qui veulent sortir de la
réserve. Pensez-vous que les agriculteurs, en 1988, veulent avoir une
réserve pour qu'éventuellement les gens passent en automobile et
disent: Vous voyez, regardez-les, ce sont des cultivateurs, et qu'ils
continuent leur chemin après?
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Ils ne sont pas intéressés à
ça Ils sont intéressés à vivre dans une
société comme des citoyens à part entière. Mais
comme citoyens à part entière, ça veut dire qu'il y a un
débat. Il y a des contraintes, il y a des valeurs qu'il faut respecter
qui sont les valeurs qu'ils représentent. J'ai déjà dit
que si, demain matin, quelqu'un venait établir un poulailler, par
exemple, au coin de Saint-Denis et de Sainte-Catherine, il y a des gens
à Montréal qui diraient: On n'est pas certains que vous
êtes à la bonne place.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: On n'est pas certains. Quand quelqu'un, par exemple, va
s'établir à côté d'un élevage de porcs pour
son terrain de camping, je dis que je ne suis pas certain qu'il fait un bon
choix.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Je ne suis pas certain de ça.
Une voix: II y a des poules au coin!
M. Garon: Cet été, j'étais sur un quai en
Gaspésie et il y a un pêcheur qui me demande: Connaissez-vous la
nouvelle règle du fédéral dans la pêche? J'ai dit:
Non. Il dit: On a le droit de pêcher seulement le vendredi, le samedi et
le dimanche. J'ai dit: Ouais, pis? Il dit: Bien, ça ne vous paraît
pas drôle? J'ai dit: Moi je ne pêche pas, c'est vous qui
péchez. Aimez-vous ça pêcher rien que le vendredi, le
samedi et le dimanche? Aimeriez-vous mieux pêcher les lundi, mardi,
mercredi, jeudi? Bien, & dit: II me semble que ça n'a pas de bon
sens. Bien, j'ai dit: Si vous pensez que ça n'a pas de bon sens,
dites-le. Parce que, si vous ne dites rien, les gens à un moment
donné vont dire: II aime mieux pêcher le vendredi, le samedi et le
dimanche. Pourquoi? Parce que c'est comme ça que les règles
s'établissent dans une société, par des débats
démocratiques. Avant il n'y avait personne qui avait le droit de parier.
Il y avait des autorités. Des gens qui décidaient.
M. Blais: Les Anglais.
M. Garon: Dans des domaines, c'étaient des Anglais...
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: ...dans d'autres domaines, c'en étaient
d'autres. Dans certains domaines, c'étaient les habits noirs. Dans
d'autres, c'étaient des habits rouges. Il y avait toutes sortes de gens
qui décidaient et nous étions des gens qui disaient: Bon, tout
est décidé. Pas de problème. Ce n'était pas
inquiétant de vivre dans notre société. Tout était
décidé. Et, si vous faisiez selon ce qui était
décidé, c'était correct. (22 h 15)
En 1988, ça ne fonctionne pas comme cela. Celui qui ne dit pas un
mot passe au bout du pont. Dans cette société-là, je pense
qu'il est important que les gens puissent dire ce qu'ils ont à dire.
C'est ça notre société moderne. Et c'est pourquoi j'ai
présenté cette proposition pour demander d'entendre l'Union des
municipalités régionales de comté du Québec, parce
que c'est un intervenant important, auquel le gouvernement a confié la
responsabilité de l'aménagement du territoire, qui est
fondamental. Il y a les cultivateurs, il y a la Commission de protection du
territoire agricole qui a aussi un rôle important à jouer. Il y a
d'autres intervenants et ce n'est pas à moi à l'annoncer, mais le
critique officiel en matière agricole, le député de
Lac-Saint-Jean...
Une voix: II l'annoncera en temps et lieu.
M. Garon: II le dira en temps et lieu, mais j'ai
l'impression...
M. Brassard: J'y pense. M. Garon: Pardon? M. Brassard:
J'y pense.
M. Garon: ...que les gens qui sont autour de nous s'en doutent.
Si je demandais au député de Rouyn-Noranda: Pourriez-vous me
nommer des intervenants importants qui ont droit au débat dans cette
affaire-là? Je suis persuadé qu'il pourrait en nommer.
M, Baril: Cela a été fait.
M. Garon: Je suis persuadé que la députée de
Kamouraska-Témiscouata - plus Témiscouata que Kamouraska -
pourrait en nommer également.
Mme Dionne: Au Témiscouata...
M. Garon: Même le député de
Saint-Hyacinthe...
M. Blais: Même lui. M. Garon: Même lui. Des
voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: Lui qui avait donné un chien au président
de la France.
Une voix: Au premier ministre. M. Garon: Au premier
ministre. M. Baril: Quelle sorte c'était, donc? M. Blais:
II s'appelait Mirabel.
M. Garon: C'était un chien Labrador. C'était un
chien noir.
M. Baril: C'était un chihuahua avec un derrière de
Labrador.
M. Garon: II voyage souvent. Il est venu avec le chien et le
vétérinaire pour soigner le chien. Je trouvais que c'était
un manque de confiance envers le chien, en tout cas. Mais le
député de Saint-Hyacinthe, lui...
M. Blais: C'est un petit chien qui est monté sur...
M. Garon: ...doit comprendre ces problèmes-là dans
son territoire. Le député de Gaspé, moins, parce que le
député de Gaspé...
M. Baril: Les poissons.
M. Garon: ...ne parle pas beaucoup de ces questions-là. Je
ne sais pas quelle est sa conception de la protection des terres agricoles
parce que je ne l'ai jamais entendu beaucoup s'exprimer sur ce sujet, non plus
que le député des Îles-de-la-Madeleine. Je suis content de
le voir parce que je ne savais pas qu'il faisait partie de cette
commission-là. Je suis content de le voir et j'aimerais qu'il donne son
opinion parce que je ne connais pas son opinion, a lui non plus. Il n'a pas eu
l'occasion de la faire connaître ou on ne l'a pas laissé
s'exprimer souvent. Ce serait une occasion pour lui, par exemple, dans un
débat comme celui-là, de dire, en même temps que les autres
intervenants, quelle est sa conception de la protection des terres agricoles,
de l'aménagement du territoire, de la protection de l'environnement et
des règles du jeu qui devraient être établies dans
l'avenir. Le projet que présente le ministre est un projet important, en
français et en anglais: Loi modifiant la Loi sur la protection du
territoire agricole. "An Act to amend the Act to preserve agricultural
land".
Une voix: Loi 101.
Une voix: You speak English.
M. Garon: Hein? I try.
Une voix: It's beautiful.
M. Garon: C'est un projet de loi qui n'a pas seulement trois ou
quatre pages. C'est un projet de loi de 17 pages et 31 articles, et on sait
à quel point il y a des articles importants là-dedans.
Une voix: Fondamentaux.
M. Garon: II y a toute la question de l'appel, par exemple. Il y
a toute la question d'avoir un seul commissaire.
M. Blais: La pelle, c'est pour l'hiver.
M. Garon: II y a toute la question, par exemple... Cela doit
être important puisque le ministre nous a dit qu'il ne voulait pas se
rendre à l'article 17 ce soir. Il nous a dit: Si on dépasse
l'article 17. Je ne veux pas qu'on l'adopte ce soir, parce que j'ai promis aux
gens de l'Union des municipalités régionales de comté
qu'on n'adoptera pas cet article sans que je leur aie parlé. Ils doivent
considérer que l'article est important.
Donc, il y a des modifications importantes dans la loi, des changements
importants qui sont prévus dans cette loi. Je ne les mentionne pas tous.
Il y a toute la question des zones exclusives, la question des zones vert
pâle. Il y a aussi la question des activités agricoles, comment on
conçoit ces activités. Il y a la question des plaintes qui est
traitée d'une façon particulière, qui est nouvelle. Il y a
les mesures relatives aux activités agricoles et le fonds spécial
de défense des producteurs contre une action, une procédure ou
une ordonnance en raison des poussières, des odeurs ou des bruits qui
résultent d'activité agricole en zone agricole. En tout cas, il y
a un ensemble de dispositions qui sont considérables.
Je sais, M. le Président, j'ai le compteur devant moi qui
m'indique qu'il me reste 30 secondes, que je ne pourrai pas aller plus loin
à ce moment-ci de cette intervention, mais je pense que cet amendement
est très important parce que l'UMRCQ est un intervenant majeur qui a
été prévu dans la loi dès - non pas en 1978, elle
n'existait pas - mais, dès les révisions de la loi en juin 1985,
l'UMRCQ a été prévue comme intervenant.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: L'Union des municipalités régionales de
comté est un...
Une voix: Conclusion. Des voix: Ha, ha, ha!
M. Garon: ...intervenant majeur qui doit être entendu et
non seulement par le ministre parce que, dans le fond, le ministre n'est pas le
législateur. Ce sont les députés de l'Assemblée
nationale qui sont les législateurs. C'est une loi
présentée par le gouvernement, mais les législateurs sont
essentiellement les députés. Ce sont les députes qui sont
les législateurs et ils devraient avoir l'occasion de rencontrer, en
commission parlementaire, cet intervenant majeur au plan de
l'aménagement du territoire au Québec.
M. Baril: Un rappel.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député de Lévis. Vous étiez, M. le
député, l'auteur de la motion d'amendement, donc, vous avez eu 30
minutes, ce qui va être décevant pour vos collègues qui
n'ont chacun que dix minutes pour intervenir s'ils le désirent.
Des voix: Ah!
M. Blais: Est-ce qu'on peut, sur le temps d'un autre qui n'est
pas là, prendre 20 minutes?
Le Président (M. Richard): Non. mais vous avez
sûrement d'autres trucs aussi pratiques que ça, de toute
façon.
M. Perron: Est-ce que je peux vous demander une directive, M. le
Président?
Le Président (M. Richard): Oui, M. le député
de Duplessis.
M. Perron: Compte tenu du fait que pas un seul libéral ne
s'est impliqué dans ce dossier jusqu'à maintenant, est-ce qu'on
pourrait utiliser leur temps pour aller de l'avant et leur expliquer ce qu'on a
devant nous actuellement et de quelle façon on voit que les choses
devraient éventuellement se faire?
Le Président (M. Richard): II ne peut y avoir de transfert
de temps. Toutefois, M. le ministre est effectivement intervenu tout à
l'heure, à la mi-temps.
M. Blais: Cinquante minutes.
M. Pagé: J'ai hâte. J'anticipe d'avoir l'occasion
d'intervenir de façon à rétablir certains faits et
à répondre aux inquiétudes de plusieurs de mes honorables
collègues qui nous ont dit s'inquiéter. Nous nous sommes
d'ailleurs réunis dans ce sens-là, mes collègues et moi,
entre 18 heures et 20 heures. On m'a prié avec insistance, chaleur et
conviction de formuler en leur nom les commentaires en réplique à
ces honorables collègues. J'aurai l'occasion de le faire tout à
l'heure en anticipant qu'on puisse passer à l'article 1, je
présume, M. le Président, dans les meilleurs délais, sinon
je vais en faire mon deuil.
M. Brassard: Qui sait? Qui sait?
M. Pagé: Je suis animé par beaucoup de modestie et
par un sens de la démocratie qui est inné chez moi.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre.
M. Pagé: Causez.
Le Président (M. Richard): Est-ce qu'il y a des
commentaires?
M. Perron: II prend bien ça.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Duplessis.
M. Denis Perron
M. Perron: M. le Président, je trouve extrêmement
déplorable de voir que les membres du gouvernement n'interviennent en
aucune façon face aux demandes que nous faisons concernant des
associations que nous voulons entendre à cette commission parlementaire
avant de procéder à l'étude article par article du projet
de loi.
Ce que je trouve aussi déplorable, c'est de voir que les gens
d'en face ne sont non seulement aucunement intéressés à
entendre les associations très importantes au Québec dans un
domaine tout aussi important que le territoire agricole, mais on remarque aussi
que leur intérêt fondamental est de faire en sorte que le projet
de loi 100 soit adopté à la vapeur, sans pour autant apporter de
véritables amendements substantiels qui pourraient faire l'affaire de
certaines personnes et de certains groupes.
M. le Président, une chose est remarquable dans le débat
que nous avons actuellement, c'est de voir que, pour une fois - en tous les
cas, dans le domaine agricole, je crois que c'est la première fois,
à moins que je ne me trompe - deux associations, l'Union des
municipalités du Québec ainsi que l'Union des
municipalités régionales de comté, sur un sujet aussi
important que la question du territoire agricole, se sont jointes pour en
arriver à un consensus afin de faire des représentations
auprès des membres de la commission parlementaire pour que ces deux
organismes se fassent entendre conjointement.
Vous me permettrez sûrement, M. le Président, de faire ici
lecture d'une partie de la lettre qui a été signée par les
deux présidents, M. Camille Rouillard et M. Roger Nicolet, pour faire
une demande expresse aux membres de la commission - non seulement aux membres
de la commission, mais également au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation - afin de se faire entendre. Au
deuxième paragraphe, toujours en rapport avec le projet de loi et les
diverses dispositions contenues dans ce projet de loi, les deux
présidents écrivent ceci au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation. Et on en a reçu une copie parce
qu'ils ont eu la politesse de nous en envoyer une. Ils écrivent: "A cet
effet, comme vous nous l'avez suggéré récemment - donc, le
ministre l'a suggéré - nous croyons opportun que le gouvernement
convoque une commission parlementaire mixte, comme le permettent les
règles de l'Assemblée nationale, et qui donnera l'occasion
d'analyser l'impact des différentes dispositions du projet de loi 100
sur l'agriculture, mais aussi sur l'aménagement et l'environnement. Cet
exercice doit se faire dans la plus grande transparence puisqu'il s'agit de
choix de société. "Nous devons nous y pencher avec sérieux
et avec tout l'éclairage nécessaire à une bonne
compréhension des intérêts en jeu - M. le Président,
ça continue - les élus municipaux ont largement souscrit aux
objectifs de protection des bonnes terres agricoles, auxquelles s'adresse le
projet de loi. D'autres alternatives plus souples et plus respectueuses des
particularités régionales auraient pu être
envisagées pour déterminer les meilleures terres autrement que
par la création de secteurs exclusifs, assujettis à des
dispositions qui, à plusieurs égards, sont contraires aux
intérêts des collectivités visées."
Lorsqu'on regarde les amendements qui sont apportés à la
loi-cadre, c'est-à-dire la loi 90, cette loi 100 sur la protection du
territoire agricole nous amène différentes catégories de
terres au Québec et on est en droit d'entendre vraiment et ce, sur le
fond, ce que pensent les représentants de l'Union des
municipalités régionales de comté ainsi que de l'Union des
municipalités du Québec.
On remarque qu'il y a la zone verte, il y a la zone blanche, que tout le
monde connaît, mais il y a aussi ce que nous on qualifie la zone
pâle. On est en droit de se poser de sérieuses questions sur cette
question de zone pâle. Quelle est l'opinion de l'Union des
municipalités régionales de comté par rapport à
cette zone? Quelle est l'opinion de l'Union des municipalités
régionales de comté par rapport à la zone verte qui est
actuellement substantiellement modifiée à la suite de
décisions qui ont déjà été prises par les
membres de la commission et à la suite de décisions qui
pourraient être prises face à ce projet de loi dans l'avenir? Je
considère que, contrairement...
M. Garon: M. le Président, j'aimerais ça qu'on
entende M. le député de Duplessis, sacrifice!
M. Pagé: J'ajoute ma voix à celle du
député de Lévis pour témoigner de mon
inquiétude car il est difficile d'entendre mon collègue et
très bon ami, le député de Duplessis.
M. Garon: II y a trop de conversations en même temps.
M. Blais: II parle du haut du perron et on ne comprend pas.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Duplessis, vous avez la parole.
M. Perron: Je remercie mes deux collègues d'intervenir en
ma faveur, M. le Président, parce que c'est vrai que c'était pas
mal bruyant d'un côté comme de l'autre. Je parle aussi de la part
de mon collègue de gauche, le député de Terrebonne, qui a
l'habitude, non seulement ici mais ailleurs, M. le Président, de faire
des siennes lorsqu'il le juge à propos.
M. le Président, comme je le mentionnais, lorsqu'on parte de
modifications substantielles qui pourraient venir dans le décor à
la suite de l'application des amendements de la loi-cadre, c'est-à-dire
la loi 90 par rapport à celle que nous avons en face de nous, je pense
qu'il serait extrêmement intéressant d'entendre ce qu'ont à
dire certains intervenants, certains représentants et certaines
représentantes d'associations, en particulier, l'UMRCQ. Lorsqu'on parle
de plan d'aménagement, d'une municipalité régionale de
comté, peu importe où cette municipalité régionale
de comté se trouve au Québec, comme, par exemple, sur la
Côte-Nord, que ce soit la MRC de Manicouagan, que ce soit la MRC de
Minganie, de Sept-Rivières, c'est entendu que ces gens, qui sont
actuellement impliqués dans différents domaines, ne sont pas
nécessairement touchés par le domaine de l'agriculture.
Cependant, il y a une chose qui est extrêmement
intéressante, c'est que, de plus en plus, au cours des douze ou quinze
dernières années, ces représentants élus et ces
représentantes élues ont fait valoir certains points pour attirer
certaines activités agricoles comme, par exemple, dans le domaine de
l'acériculture, de l'horticulture, etc. C'est entendu que, dans le
territoire que nous avons sur la Côte-Nord, et en particulier dans la
région de Sept-îles et plus à l'est, on ne peut pas avoir
du jour au lendemain des terres agricoles à cause du terrain
lui-même. Cependant, il y a des intérêts qui sont
démontrés. Non seulement des intérêts y sont
démontrés par rapport à la question locale et à la
question régionale ou sous-régionale, mais il y a aussi des
intérêts qui sont démontrés par les électeurs
et les électrices de cette Côte-Nord par rapport au reste du
Québec. Qu'on le veuille ou non, actuellement, il y a à peu
près 95 % de tous les produits agricoles achetés sur la
Côte-Nord qui proviennent de l'extérieur de la Côte-Nord
pour la simple raison que les territoires agricoles, qu'il serait possible
d'exploiter, ne le sont pas. (22 h 30)
II reste quand même une chose: Même si on n'a pas beaucoup
de territoires agricoles, je serais intéressé à entendre
l'Union des municipalités régionales de comté qui
représente aussi des municipalités régionales de
comté de la Côte-
Nord et du comté de Duplessis. Il y a des représentations
qui ont été faites antérieurement et qui sont toujours
faites de la part de ces secteurs, de ces régions et de ces
sous-régions auprès de l'Union des municipalités
régionales de comté pour faire valoir certains points de vue que
nous avons au niveau régional. Je peux vous assurer que, si on avait la
chance, lors de cette commission parlementaire, d'entendre des
représentants et des représentantes de diverses associations,
cela nous permettrait d'abord de mieux comprendre les situations
régionales. Cela nous permettrait aussi de mieux comprendre la position
de ces représentants et représentantes d'associations et, bien
sûr, d'apporter les amendements et les corrections nécessaires au
projet de loi 100, qui amende la loi 90, ce qui non seulement amenderait, mais
aussi bonifierait le projet de loi.
Ce n'est pas en adoptant des projets de loi à la vapeur, comme on
le fait actuellement, en "bulldozant" tout le système parlementaire pour
passer certains projets de loi qui sont prioritaires pour le gouvernement et
où, en commission parlementaire, on est aussi "bulldozé"...
À cause du processus parlementaire qui nous est imposé, on
empêche tout apport nécessaire pour permettre qu'un projet de loi
ait son étude complétée lorsqu'il est rendu au dernier
processus parlementaire, c'est-à-dire les première,
deuxième et troisième lectures, et, par la suite, la sanction;
ainsi on arrive à la sanction avec un projet de loi qui est fou raide au
lieu d'être un projet de loi potable sur lequel l'ensemble de la
collectivité du Québec soit d'accord, au moins dans l'ordre de 80
% à 90 %, afin que le consensus soit le plus large possible.
Ce n'est pas en faisant comme on le fait actuellement, en catimini, en
commission parlementaire, ou encore comme le fait le gouvernement au plan du
Conseil des ministres et de son caucus des députés
libéraux qu'on va arriver à avoir quelque chose de potable. On
est membres de l'Opposition, on a des droits dans le système
parlementaire, même si c'est le système britannique. Ces droits
doivent être respectés. Ces droits, on doit assurément, au
cours des prochaines semaines ou des prochains jours, les mettre en marche et
en vigueur pour qu'on puisse s'exprimer d'une façon correcte et avoir -
en terminant, en conclusion, M. le Président - un projet de loi qui se
tienne, qui rencontre les objectifs non seulement d'un groupe ou de l'autre
groupe politique, mais aussi de l'ensemble de la collectivité du
Québec. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député de Duplessis. M. le député de Mercier, vous
avez dix minutes pour donner votre opinion.
M. Gérald Godin M. Godin: M. le Président, j'en
saurai faire
le meilleur usage possible. Je pense que quiconque a visité le
Québec a vu que c'était un beau territoire. Pourquoi beau? Parce
qu'il y a une espèce d'équilibre entre diverses fonctions
territoriales. Quiconque a visité le Québec, comme je l'ai fait
au cours des mois passés, a constaté que le Québec, en
fait, est comme une courtepointe - vu d'en haut - avec un champ de lin bleu de
toute beauté, un champ de blé tout doré, un village tout
blanc, son église sur un cap ou sur un button, une industrie locale, un
magasin général doté de tout ce qui convient à la
population, en fin de compte, une économie d'une
microsociété, une micro-économie qui correspond aux
besoins locaux de la région, comme il y a chez vous, d'ailleurs, M. le
Président, dans la belle région de Nicolet-Bécancour, qui
est un modèle, à mon avis, de développement
équilibré, harmonieux, et qui est un lieu où les gens sont
heureux parce que c'est à l'échelle humaine et qu'ils y vivent
bien. Nul mieux que les MRC ne connaissent l'importance d'un tel
équilibre. D'ailleurs, les géographes les plus
célèbres, dont Pierre Deffontaines, l'auteur de L'homme et
l'hiver au Canada, un classique de la géographie mondiale,
même lui et ses collègues se sont extasiés devant la
beauté du territoire québécois. Je vois que le voisin de
droite du ministre me suit de très près dans mes propos.
Donc, pour que l'équilibre soit maintenu, M. le Président,
et pour que les microsociétés et les micro-économies
continuent à s'associer en village, en ensemble, il faut que l'UMRCQ
soit entendue de manière que nous nous assurions que la loi 100 qui est
devant nous - et non pas 101 - que la loi 100 soit la meilleure possible, M. le
Président. Nous visons la perfection. Pour avoir été,
comme je l'ai dit tout à l'heure, membre d'un gouvernement et avoir
constaté que l'Opposition a un rôle à jouer dans
l'amélioration des lois, je souhaite que le ministre s'ouvre enfin les
yeux, les oreilles et le coeur, et consente à recevoir devant une
commission parlementaire, à la demande, d'ailleurs, de l'Union des
municipalités régionales de comté, ces gens-là,
pour qu'ils nous disent en quoi la loi les inquiète, en quoi elle
pourrait être améliorée, en quoi nous pourrions maintenir
la beauté du Québec comme territoire aménagé dans
l'avenir. On ne peut y parvenir, M. le Président, qu'en étant
modeste face aux réalités, aux groupes sociaux, face surtout aux
institutions, comme les MRC ou les municipalités elles-mêmes. Je
m'adresse à un ancien maire qui connaît mieux la question que moi.
Les maires des municipalités et des MRC savent mieux que personne ce
qu'il faut à leur région pour qu'elle se maintienne en
santé et qu'elle se développe harmonieusement et surtout que les
lois ne viennent pas, émanant du centre qui est à Québec,
bouleverser des traditions anciennes et surtout un équilibre fort
ancien. Les Québécois ont bâti ici un pays qui, à
mon avis, est très beau, si on le compare à d'autres parties du
continent nord-américain. Il ne faut pas, donc, que cet équilibre
soit gâché, cette harmonie soit gâchée par une
intervention intempestive du gouvernement central qui est à
Québec. C'est la raison pour laquelle nous souhaitons que soit entendue
notre demande et celle de l'UMRCQ elle-même de recevoir ici des groupes
de personnes qui ont un mot à dire sur cette loi. Cette loi concerne
l'avenir de la beauté du paysage au Québec et l'avenir de la
beauté urbanistique du Québec.
J'espère me faire le plus éloquent possible pour
convaincre le ministre de convoquer ici en commission parlementaire l'UMQ et
l'UMRCQ. Ces groupes sont des intervenants majeurs dans l'équilibre et
l'harmonie du paysage québécois. Sait-on jamais ce que cette loi
peut donner dans l'avenir. On ne le sait pas. Il y a un point d'interrogation.
Pour mieux savoir de quoi il retourne précisément, pour mieux
connaître les tenants et aboutissants de cette loi, seuls les gens des
MRC et des municipalités de comté, des municipalités comme
telles, peuvent nous dire comment on peut changer la loi 90 pour en faire une
meilleure qui corresponde mieux aux intérêts profonds des
micro-économies que sont les régions du Québec, M. le
Président. Pour toutes ces raisons, nous sommes convaincus, optimistes
toujours, probablement, que le ministre va nous écouter et va .
convoquer sans restriction aucune les groupes qui veulent être entendus
par une commission parlementaire officielle digne de ce nom et conforme aux
règles de fonctionnement d'un Parlement moderne et qui respecte la
démocratie.
Pour toutes ces raisons, je me permets de suggérer à
nouveau au ministre de relire la lettre très éloquente
adressée à lui, dont nous avons eu copie, par M. Roger Nicolet et
M. Camille Rouillard, qui démontre clairement qu'eux ont un
intérêt à se faire entendre en commission parlementaire et
qu'eux tiennent et se battent pour cela. À mon avis, nous serions des
députés de piètre qualité si nous n'étions
pas derrière ces demandes, si nous ne demandions pas au ministre, dans
la foulée des demandes des présidents de ces groupes, de les
entendre publiquement et surtout de leur permettre de nous faire
connaître à nous de l'Opposition et au public en
général pourquoi ils ont des réserves et, s'ils n'en ont
pas, qu'ils le disent pour que nous sachions, s'ils sont pour, à quel
point ils le sont et, s'ils sont contre, à quel point ils le sont et
pourquoi.
Au fond, ce que nous voulons, c'est tout simplement une loi 90
améliorée, M. le Président. Le ministre a raison de dire
que les lois évoluent. Moi, pour avoir passé une loi qui a
évolué, je peux vous dire qu'effectivement, avec le temps, avec
l'expérience, les lois doivent être ie théâtre d'une
évolution certaine. Il y a une évolution qui peut se faire, mais
elle ne peut se faire qu'en pleine lumière, elle ne peut se faire qu'en
consultant les intervenants majeurs du
milieu, I'UMRCQ et l'UMQ, MM. Rouillard et Nicolet étant les
porte-parole.
Je crois que le ministre, s'il veut être à la hauteur de
ses propos d'il y a une heure en réplique à nos discours contre
la loi, doit céder sur ce point-là et les convoquer non pas
privément, mais publiquement pour que le paysage du Québec soit
protégé, préservé, et que son développement
harmonieux soit garanti pour l'avenir. Il ne peut l'être, M. le
Président, que si les intervenants majeurs dans le paysage sont
entendus, écoutés et peuvent faire connaître publiquement
leur opinion sur cette loi-là. M. le Président, c'est mon opinion
et je souhaite que le ministre y soit enfin sensible et cesse de se boucher les
yeux et les oreilles. M. le Président, je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Mercier, je vous remercie. M. le député de Terrebonne, vous
semblez avoir hâte de parier. Je vous donne donc la parole pour les dix
prochaines minutes.
M. Yves Blais
M. Blais: Je vous remercie beaucoup, M. le Président.
Lorsqu'on vient en commission parlementaire pour étudier article par
article une loi, c'est à ce moment-là que les
députés en général sentent toute la valeur du
législateur. C'est excessivement valorisant pour un député
de participer à la création et à la naissance d'une
nouvelle loi. La naissance d'une nouvelle loi porte dans son essence tout ce
que nous avons d'expérience en nous et nous nous efforçons autour
d'une table, devant une présidence neutre, d'essayer d'utiliser nos
expériences pour améliorer l'essence même du projet de loi
que nous discutons. Nous avons l'insigne honneur ici de discuter d'une loi
agricole. Nous avons aussi la chance d'avoir le ministre de l'Agriculture avec
nous et Me Blain, qui est le commissaire en chef de la CEPAQ, de la CAPAQ, de
la CPAQ, de la CPTAQ, excusez-moi, de la CPTAQ, je m'excuse, je me suis
mêlé dans mes sigles. C'est la Commission de protection du
territoire agricole du Québec. Eh bien, à travers votre personne,
M. le Président, je veux prendre à témoin ce noble juge
qui est tout ouïe devant nous depuis plusieurs heures et qui est ici pour
que nous l'ébahissions de nos connaissances et de nos
expériences.
M. Pagé: Êtes-vous sûr de cela? Des voix:
Ha, ha, ha! M. Blais: Je suis persuadé qu'il est là...
M. Pagé: Cela, c'était clair!
M. Blais: ...pour écouter ce qu'on a à dire. Qui
d'autre au Québec que le législateur peut jeter de la
lumière sur un projet de loi? Ce n'est certainement pas
Hydro-Québec ces temps-ci, elle est continuellement en panne. C'est le
législateur qui doit jeter de la lumière sur ce projet de loi. Je
reviens directement sur ce que nous discutons. Nous demandons que l'UMRCQ soit
des nôtres pour qu'elle écoute et qu'on l'écoute surtout.
Il est regrettable, de façon intrinsèque, que les
législateurs, qui sont les créateurs des MRC au
Québec...
Une voix: Ce sont les législateurs.
M. Blais: C'est nous les législateurs qui avons
créé de toutes pièces les MRC. Ce sont, comme dirait le
père Gédéon, nos créatures. Nous les avons faites
comme nous pensions qu'elles devaient l'être et nous leur avons dit: Nous
vous créons, nous vous respecterons et nous vous donnerons les pouvoirs
nécessaires pour bien agir sur le territoire québécois.
C'est presqu'un blasphème aujourd'hui, M. le Président, de voir
qu'une simple demande d'être ouï par notre commission reçoit
un non.
Des voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: Et les préfets, c'est ainsi que l'on nomme ceux
qui sont à la tête de nos MRC, doivent se dire: Mais
qu'entends-je, "qu'audiès-je"? Lorsqu'ils ont écrit, ris savaient
qu'on les refuserait. Ils disaient à leurs secrétaires: Mais que
"télétype-je"?
Des voix: Ha, ha, ha! (22 h 45)
M. Blais: Je sais pertinemment que nous y allons de la frappe de
la dactylo mais que, même en noir sur blanc, cette commission ne nous
recevra probablement pas. Quel manque de respect pour les créatures que
nous avons faites. Je m'en sens éberlué. Je rentre dans mon
siège.
M. le Président, nous avons fait des créatures qui
s'appellent les MRC en leur disant: Sur le territoire québécois,
le gouvernement central du Québec est moins près de la population
qu'il ne désirerait l'être. Vu que nous avons cette force
d'éloignement qui fait aussi notre faiblesse, nous allons vous
créer de toutes pièces. Comme vous allez être plus
près de la population, vous viendrez nous dire, à nous les
législateurs du Québec, les choses que I'on se doit d'entendre
puisqu'on est souvent coupés de la population.
Aujourd'hui, elles nous demandent avec une insistance presque
puérile, parce que cela ne devrait pas leur être nécessaire
de le demander, d'être reçues et on les considère presque
comme des persona non grata à la commission. Presque. Ce n'est pas la
bonne façon de faire pour avoir la paix entre les différents
intervenants. On leur dit: Vous des MRC, vous allez nous préparer un
schéma d'aménagement. Nous vous demandons d'essayer d'harmoniser
l'agriculture, l'urbain, mais, lorsque l'on pariera, en commission par-
lementaire, d'agriculture, nous allons vous tenir à distance.
Nous allons vous dire: Vous êtes nos créatures, mais nous ne
voulons pas savoir ce que vous pensez, même si vous nous écrivez
en nous disant qu'en ce qui concerne le projet de loi que nous avons vous
n'êtes pas d'accord sur certains articles. Il est possible que les MRC
aient tort, mais qui nous le dira et qui dira aux MRC si elles ont tort si nous
ne les recevons pas?
M. le Président, avez-vous déjà vu un homme qui
refuse de recevoir ses créatures? M. le Président, je m'adresse
à vous de façon particulière, avez-vous déjà
vu un homme qui refuse de recevoir ses créatures? Comment se fait-il que
pour un individu l'axiome serait vrai mais que, lorsque l'on tombe dans le
domaine collectif, on serait rébarbatif à être positif?
C'est incroyable, mais, à moins qu'à la suite de notre
argumentation le législateur ne change d'avis, pour le moment, on est
rébarbatif; il n'y a pas de positif.
Le législateur en chef, c'est toujours le gouvernement. Nous
sommes là, nous de l'Opposition, pour améliorer les premiers jets
gouvernementaux des lois. Le gouvernement fait le texte et nous sommes
là comme prétexte. Nous essayons d'améliorer le contexte.
C'est ce que nous essayons de faire; c'est notre devoir. Alors ici, on
intervient parce qu'on dit à ceux qui sont chargés de faire
l'aménagement territorial, le schéma d'aménagement:
Tenez-vous loin. Vous n'avez pas grand-chose à dire sur le territoire
québécois. Vous n'avez que l'aménagement complet du
territoire à faire. Ce n'est pas grand-chose. Au Québec, il n'y a
pas grand-chose à part des villes et des milieux ruraux.
Alors, si j'étais un préfet, je me sentirais vexé,
diminué et je ne sais pas de quelle façon j'agirais, mais
j'agirais peut-être comme eux, c'est-à-dire en nous
écrivant une lettre pour nous demander s'ils peuvent être
reçus. Ils nous disent aussi: À défaut d'être
reçus, nous demandons tout simplement au ministre de retirer son projet
de loi.
En conclusion, M. le Président, pour votre gouverne, j'aimerais
que vous transmettiez au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation le message des MRC et je vous remercie beaucoup.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Terrebonne, pour votre exposé. M. le
député de Lac-Saint-Jean, vous avez dix minutes pour vous
exprimer.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, voilà une motion tout
à fait sensée que celle que mon collègue de Lévis
vient d'apporter à cette commission, qui consiste à inviter
l'Union des municipalités régionales de comté à
venir témoigner devant nous sur le projet de loi 100. On l'a
déjà dit, mais je pense qu'il convient de le
répéter, les municipalités régionales de
comté, au Québec, se sont vu confier la responsabilité
extrêmement importante de faire l'aménagement du territoire via la
loi 125, Loi sur l'aménagement et l'urbanisme. Les MRC ont donc la
responsabilité d'élaborer et d'adopter un schéma
d'aménagement à l'intérieur duquel se retrouve le
territoire agricole, la zone agricole protégée. Il me semble que
cela tombe sous le sens que nous devrions entendre l'UMRCQ sur ce projet de
loi, laquelle regroupe les instances, au Québec, qui sont
habilitées à faire de l'aménagement du territoire, afin
qu'elle nous fasse part de ses opinions et de ses remarques sur le projet de
loi 100. Elle en a des opinions et certaines sont déjà connues.
Elle a ainsi fait parvenir une lettre très étoffée au
ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, de concert
avec l'autre union municipale qui est l'Union des municipalités du
Québec, lettre dans laquelle elle exprime des inquiétudes,
à mon avis, qui apparaissent fondées ou, en tout cas, des
inquiétudes que nous devrions prendre en considération.
Nous devrions permettre à l'Union des municipalités
régionales de comté de se faire entendre. Cela me semble aller de
soi. Je trouve anormal, ce soir, que tous mes collègues défilent
les uns après les autres et utilisent leur temps de parole afin
d'essayer de convaincre le ministre et les autres membres de la commission
d'une chose qui va de soi. C'est le contraire qui est anormal,
c'est-à-dire qu'on ne reçoive pas l'Union des
municipalités régionales de comté sur le projet de loi
100; ça c'est anormal, irraisonnable, insensé. Comment peut-on
étudier et adopter un projet de loi qui porte sur la protection du
territoire agricole, qui crée un secteur exclusif à
l'intérieur de la zone agricole, qui crée un poste de
"commissaire aviseur", qui a des dispositions sur l'immunité du
producteur agricole, qui crée un fonds d'indemnisation pour venir en
aide aux producteurs agricoles qui sont l'objet de poursuites - et cela, c'est
tout à fait unique, c'est vraiment une innovation juridique que ce fonds
d'indemnisation qu'on est en train de créer... Donc, il s'agit d'un
projet de loi qui introduit des nouveautés et des changements majeurs au
chapitre de la façon de protéger le territoire agricole depuis
que la loi existe, en 1978, et on conviendrait, nous, la commission
parlementaire, que ce n'est pas utile d'entendre l'Union des
municipalités régionales de comté? Je ne comprends pas, M.
le Président, je trouve cela anormal, irraisonnable, insensé.
Le ministre va me dire: Écoutez, demain, j'ai une rencontre avec
la table de concertation Québec-municipalités. Il sera
probablement accompagné de son collègue des Affaires municipales,
je ne le sais pas, je le suppose, peut-être en tout cas. Je le sais que
c'est une instance importante, la table de concertation
Québec-municipalités est une instance importante. Elle a
été créée au moment où on était au
pouvoir.
Cela a fait suite à la réforme de la fiscalité
municipale. On a créé cette table pour permettre aux intervenants
intéressés par la réforme de la fiscalité
municipale et toutes les questions touchant les municipalités de se
parler, de s'entendre, de se concerter. Mais cela va se dérouler en vase
clos. Cela va se dérouler derrière des portes closes et il y a
juste le ministre qui va rencontrer les Intervenants municipaux. C'est le
pouvoir exécutif, c'est le gouvernement qui va rencontrer les
intervenants municipaux. Ce n'est pas le pouvoir législatif. Ce n'est
pas les députés, les élus de l'Assemblée nationale,
c'est le ministre, c'est le gouvernement. Il a le droit de le faire et je ne
trouve pas anormal qu'il le fasse. Je trouve même curieux qu'il n'ait
songé à le faire qu'à ce moment-là, que demain. Il
aurait dû le faire bien avant. Il aurait dû entrer en consultation
bien avant avec les unions municipales. Mais, enfin, qu'il le fasse, je n'ai
rien contre. Je trouve cela tout à fait légitime et normal que le
gouvernement, que le pouvoir exécutif ait des pourparlers et des
relations avec le monde municipal dans le cadre d'une instance
appropriée qui existe depuis plusieurs années et qui s'appelle la
table de concertation Québec-municipalités. Mais, ce faisant,
cela ne dispense pas la commission parlementaire d'entendre l'Union des
municipalités régionales de comté de même que l'UPA.
Ce sont deux choses bien distinctes. Le ministre fait ses consultations, fait
ses rencontres, très bien. Mais, la commission parlementaire, elle,
doit, de son côté, faire les consultations qui s'imposent, les
consultations nécessaires et entendre les intervenants publiquement, en
pleine lumière, comme le mentionnaient mes collègues, de
façon transparente, en toute limpidité. Cela doit se faire
publiquement.
Ils sont là en plus, M. le ministre. Le président de
l'Union des municipalités régionales de comté est ici
présent; il est au parlement. On pourrait, dès maintenant,
aussitôt mon temps de parole écoulé, si vous étiez
d'accord, l'inviter à la table des témoins et on pourrait,
immédiatement, prendre la dernière heure pour entendre
l'UMRCQ.
M. Garon: Commencer. M. Brassard: Pardon? M. Garon:
Commencer.
M. Brassard: On pourrait commencer tout de suite. Ils sont
là. Ils sont en place. Ils sont ici au parlement. Ils
s'intéressent, évidemment, à la fois au projet de loi 90
qui est à l'étude dans l'autre salle où se tient une
commission et au projet de loi 100 que l'on étudie ici dans cette salle.
Cela ne serait pas compliqué. Comment peut-on refuser à un
Intervenant majeur comme l'UMRCQ de se faire entendre, d'exprimer son opinion
sur cette question? Je le dis, M. le Président: La table de concertation
que va rencontrer le ministre demain, c'est une chose; la commission
parlementaire en est une autre. Nous, nous devrions inviter l'UMRCQ, comme
l'UPA d'ailleurs, afin de les entendre et de discuter avec eux sur le projet de
loi 100.
Cela m'inquiète beaucoup parce que je pense que depuis plusieurs
mois nous sommes en face, de la part du gouvernement, d'une attitude
méprisante à l'égard des institutions parlementaires,
à l'égard des institutions démocratiques, une attitude
méprisante qui se traduit par l'utilisation intempestive du
bâillon, de la clôture sur des projets de loi importants, comme le
projet de loi 37 sur l'aide sociale et le projet de loi 34 sur le transport
ambulancier. Ce dernier, cela fait même trois semaines qu'il n'est pas
étudié. On nous a imposé le bâillon et la
clôture. Il y a actuellement une attitude méprisante, malsaine et
inquiétante de la part du gouvernement à l'égard des
institutions démocratiques, à l'égard du Parlement,
à l'égard de l'Assemblée nationale qui est, à mon
avis, et qui doit être l'institution démocratique par excellence
dans une société, dans une démocratie comme la
nôtre. Or, le gouvernement manifeste, de façon
régulière et constante, une attitude hautaine, méprisante,
arrogante à l'égard, non seulement de l'Opposition, mais à
l'égard des institutions parlementaires elles-mêmes, non seulement
de l'Assemblée nationale, mais des commissions parlementaires aussi, et,
ce faisant, une attitude méprisante et arrogante à l'égard
des intervenants socio-économiques de la société
québécoise. (23 heures)
Nous avons été neuf ans au pouvoir, M. le
Président. Nous avons toujours, en toutes circonstances, pris tout le
temps qu'il fallait pour entendre les intervenants, à l'occasion de
consultations générales, la plupart du temps. Ce n'était
pas des consultations particulières; la plupart du temps, c'était
des consultations générales. Même si on savait que cela
prenait plus de temps à adopter et à étudier les projets
de loi, on considérait comme étant essentiel, si on voulait
respecter la démocratie, de ne pas refuser à un intervenant qui
veut se faire entendre la possibilité d'être entendu. Cela
m'apparaît être un principe fondamental que toute commission
parlementaire à l'Assemblée nationale devrait scrupuleusement
respecter. On ne devrait en aucune circonstance et en aucune occasion refuser
d'entendre un intervenant, quel qu'il soit, qui souhaite se faire entendre sur
un projet de loi. Cela m'apparaît être un principe fondamental. Il
faudrait vraiment que les circonstances soient exceptionnelles pour qu'on ne
respecte pas ce principe.
Alors, M. le Président, dans ces conditions, j'implore le
ministre, j'implore les députés ministériels de revenir
à ce principe fondamental qui consiste à entendre et à
accepter d'entendre tout intervenant qui le demande en commission
parlementaire et que cela se fasse publiquement, au vu et au su de tout
le monde, en toute limpidité et en toute transparence. Cela peut se
faire immédiatement. Les intervenants sont à l'écoute, lis
sont là. Ils sont présents, ici, physiquement, au parlement. Il
suffit de leur dire: Venez. On vous invite. Assoyez-vous à la table des
témoins. Entamons le dialogue. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. S'il n'y a pas d'autre intervenant sur
l'amendement du député de Lévis, je vais disposer,
à ce moment-ci, de l'amendement.
M. Brassard: Par appel nominal, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Par appel nominal. Alors, quels
sont ceux...
M. Pagé: M. le Président?
Le Président (M. Richard): M. le ministre.
M. Pagé: Je m'excuse. J'étais un peu occupé
à adresser des cartes de bons souhaits à la MRC Mékinac,
aux MRC de la région chez nous, aux corporations municipales de mon
milieu. Je peux, évidemment, pour le bénéfice du
Journal des débats, car pour ceux qui nous lisent - et ils sont
nombreux - il peut sembler...
M. Brassard: M. le Président, sans vouloir interrompre le
ministre, en ce qui concerne la carte de bons souhaits qu'il va,
évidemment, adresser au président de l'UMRCQ, on peut lui faire
économiser un timbre. Il peut la lui remettre en main propre; il suffit
de l'inviter à venir témoigner.
M. Pagé: Je me proposais de la lui remettre en main propre
demain. Ceci étant dit...
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le
ministre, indépendamment des voeux de Noël.
M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Pour le
bénéfice de ceux qui nous lisent, vous savez, cette
journée en aura été une où l'Opposition s'est
conviée à une stratégie de mesures dilatoires selon
laquelle chacun des députés disponibles vient faire son tour de
piste, se branche directement sur le pilote automatique de la parole et occupe
le temps. Occupe tellement le temps que - et même le Journal des
débats, à cet égard, ne peut y référer -
on a fonctionné, aujourd'hui, avec des cadrans pour être bien
certains que tout le temps soit utilisé au maximum, que la
réglementation soit utilisée au maximum, de façon à
gagner du temps. Ce que l'Opposition officielle recherche, ce n'est pas
à mener un débat de fond sur ce projet de loi important qui est
déposé devant l'Assemblée nationale actuellement, mais
plutôt à pérorer, à causer. Parfois, c'est
agréable. Je dois convenir, ce soir, que le député de
Terrebone est de commerce agréable; que le député de
Lévis est égal à lui-même et à sa
réputation, en référence au caractère pittoresque
qui l'identifie, et que le député de Lac-Saint-Jean s'est
laissé aller à dépasser un peu les limites qu'il s'impose
quotidiennement. Il nous a fait une présentation qui, à la fin,
était théâtrale. Cette argumentation ne contenait pas plus
de fondement, cependant, mais, au moins, elle avait le mérite
d'être enrubannée ou présentée de façon
agréable, ce qui lui est propre et qui va dans le sens des
activités parascolaires qu'il avait lorsqu'il étudiait au
Saguenay-Lac-Saint-Jean.
Ceci étant dit, il y a cependant des choses très
intéressantes qui ont été dites ce soir qui demeureront.
Tout d'abord, il y a la déclaration du député de
Lévis, formelle, officielle, très claire, très
évidente, comme quoi, dans son esprit, la Loi sur l'aménagement
et l'urbanisme doit avoir priorité sur la Loi sur la protection du
territoire agricole. Je suis persuadé que le profond respect que les
clientèles agricoles ont gardé pour lui sera diminué d'au
moins un cran, parce que c'est faire preuve, en disant ça, de faiblesse
en référence aux principes qu'il défendait,
"supposément", lorsqu'il avait le privilège et l'honneur, comme
moi aujourd'hui, d'administrer le ministère de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation.
En déposant de telles motions, l'Opposition officielle
témoigne et exprime de façon très éloquente le fait
qu'elle est complètement, mais complètement coupée des
groupes comme l'Union des producteurs agricoles, l'Union des
municipalités régionales de comté et l'Union des
municipalités du Québec. Le Parti québécois a
coupé tout contact avec ces organismes représentatifs, j'en
conviens. Les contacts ont été tellement coupés qu'ils se
sentent aujourd'hui obligés, en fin de course, au moment de
l'étude du projet de loi en deuxième lecture, article par
article, par acquit de conscience probablement, dans un geste qui est tout
aussi fallacieux qu'évocateur, de venir nous dire: On aurait du temps;
on pourrait même les entendre à 23 heures, à 23 h 55, en
quelque sorte. Faut-il être coupe de la réalité? C'est donc
dire que vous n'avez entretenu aucun contact avec un organisme aussi
représentatif, aussi important dans la vie économique du
Québec que l'Union des producteurs agricoles.
Non seulement, vous n'avez pas maintenu de contacts, vous n'avez pas
entretenu de relations avec ce groupe très important pour les
régions, pour les productions, etc., mais vous témoignez de
méfiance à l'égard des agriculteurs du Québec. Oui,
de méfiance. Quand j'entends le député de Lévis et
d'autres remettre en cause la représen-
tativité du président de l'Union des producteurs agricoles
du Québec, un homme qui a à coeur l'avenir de l'agriculture au
Québec, un homme qui est représentatif et qui a une assise
très solide en termes d'appui dans son groupe - et par surcroît
cela vient du député de Lévis, l'ex-ministre de
l'Agriculture - et remettre en cause la légitimité de l'appui
donné, par le président de l'Union des producteurs agricoles, au
projet de loi que j'ai déposé Ici, cela témoigne, encore
une fois, de deux choses. Premièrement, que c'est un comportement qui,
là aussi, réfère à de l'improvisation,
réfère... Je l'ai dit tantôt, le député de
Lévis a l'air un peu comme un de mes garçons qui se fâche
parfois. Il a l'air un peu jaloux de voir cette relation étroite, intime
entre le ministre de l'Agriculture, le gouvernement du Québec et l'Union
des producteurs agricoles du Québec. Comme je l'ai dit souvent, vous
savez, M. le Président, le problème de mon ami Jean, l'honorable
député de Lévis, pour qui on a beaucoup d'attention, parce
qu'il est complètement isolé ici, dans la région de
Québec, alors on a beaucoup de sympathie pour lui, beaucoup de
considération... Mais, pauvre député de Lévis, il a
l'impression que l'agriculture est née avec lui et il a l'impression que
l'agriculture est morte avec lui, avec son départ. Imaginez-vous
donc!
J'ai bien apprécié son propos. Il était
intéressant. Il était drôle à certains égards
et c'est tout à fait indiqué pour les parlementaires que nous
sommes, qui sommes obligés et conviés à écouter ses
collègues pendant autant de temps, pour des motifs purement et
simplement dilatoires. C'est là la première chose que vous avez
démontrée.
La deuxième chose que le député de Lévis a
démontrée ce soir... Et, si j'étais à sa place, je
serais réservé et même un peu gêné de venir
m'inscrire en faux contre ce projet de loi qui consacre des principes, des
droits, des pouvoirs, une considération et une appréciation
très nette à l'égard de l'agriculture. Ce projet de loi
est un engagement pour l'agriculture au Québec. Jamais, jamais - et
l'ensemble des observateurs est unanime à le reconnaître, des
observateurs objectifs; ça ne vient pas de moi, c'est une perception
qu'on a bien voulu porter à mon attention, ce sont des réactions
qu'on a bien voulu porter à mon attention - mon
prédécesseur au ministère n'aura eu assez
d'autorité, assez de "leadership" - excusez le terme, messieurs - assez
d'autorité politique au sein du cabinet, assez de sens de la
négociation, de la discussion, mais surtout assez de persuasion pour
convaincre son collègue, l'ex-ministre des Affaires municipales, M.
Léonard, d'en venir à une entente véritablement à
l'amiable entre les deux ministres, celui des Affaires municipales et celui de
l'Agriculture, auxquels s'est ajouté la voix du ministre de
l'Environnement, évidemment. Les agriculteurs le savent. Vous serez
jugé par les actes que vous posez.
Nous comprenons que, lorsqu'on siège dans l'Opposition, c'est
difficile. C'est difficile: j'y ai siégé pendant neuf ans. Le
premier mandat peut, à certains égards, être emballant.
Lorsqu'on y arrive, on sent l'obligation de se ressourcer, de revenir au
message fondamental. Il arrive parfois à certains membres de
l'Opposition, et ce, quels que soient les partis, d'être tentés de
contester le chef. Il arrive souventefois des conventions à la
chefferie, une fois que les partis se retrouvent dans l'Opposition.
Jusque-là, I peut y avoir une certaine "ambiance", entre guillemets,
sauf que, lorsque tout ça est passé et, par surcroit, lorsqu'on
voit, au fur et à mesure qu'on avance dans ce premier mandat comme
Opposition, qu'on y sera pour au moins deux mandats, si ce n'est trois, dans le
cas qui vous concerne, là, ça devient moins drôle, parce
que vous devez toujours vous inscrire en réaction.
Une voix: C'est arrogant.
M. Pagé: Non, ce n'est pas de l'arrogance, c'est un
constat.
M. Blais: On est juste au premier. Cela va bien.
M. Pagé: Vous devez toujours vous inscrire en
réaction.
Une voix: Attendez le 15, M. le ministre.
M. Pagé: Vous n'avez pas le pouvoir de prendre
l'initiative en quoi que ce soit. Vous devez toujours vous inscrire en
critique, de façon parfois un peu acerbe - aujourd'hui, c'était
agréable, il faut en convenir et je suis persuadé que mes
collègues en conviennent et que mes honorables adjoints ou
professionnels qui sont autour de moi pourraient en convenir eux aussi, s'ils
avaient l'occasion d'intervenir ici; au moins, cela a eu le mérite
d'être agréable. Mais je comprends votre frustration et cette
frustration doit être encore plus grande pour certains d'entre vous qui,
de bonne foi, légitimement, recherchaient, lorsque vous assumiez la
responsabilité de la gestion de l'État québécois,
des solutions qui passaient par ce qui est dans le projet de loi 100
aujourd'hui. Vous devez reconnaître que l'absence d'une volonté
politique visant à régler le problème de la dualité
entre la Loi sur la protection du territoire agricole et la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme, cette absence d'autorité et de
volonté politiques aura créé des situations
délicates, des situations de tension durement ressenties, tant par le
milieu municipal que par le milieu agricole. (23 h 15)
Le projet de loi 100 vient apporter des solutions à l'ensemble de
cette problématique qui, nous en avons la conviction profonde, conduira
à une cohabitation beaucoup plus pacifique, beaucoup plus motivante,
sous l'égide d'un meilleur
"voisinage", entre guillemets, entre le monde agricole et le monde
municipal du Québec.
Vous me demandez donc à la course, à la dernière
minute, d'organiser à la va comme on pourrait l'organiser des
consultations privées, des consultations restreintes plutôt. J'ai
eu des contacts. D'abord, la position du milieu municipal est connue; elle a
été débattue longuement, de façon même
répétitive pour presque la moitié, sinon un peu plus, des
schémas d'aménagement qui ont été adoptés
par le Comité ministériel permanent du développement
régional et le cabinet. L'ensemble de cette "problématique",
entre guillemets, a été l'objet de discussions nombreuses entre
le ministre de l'Agriculture, le ministre des Affaires municipales et le
ministre de l'Environnement, avec les nombreuses municipalités
régionales de comté qui ont été invitées par
le Comité ministériel permanent du développement
régional. Une rencontre formelle est intervenue avec l'Union des
municipalités régionales de comté, un beau mercredi matin,
à 8 heures du matin, où, là aussi, on a eu l'occasion de
discuter. J'ai eu une rencontre avec la table
Québec-municipalités un peu plus tôt dans mon mandat, avec
mon collègue, l'honorable ministre des Affaires municipales, M.
Bourbeau, à ce moment-là. Je me suis personnellement rendu
rencontrer, discuter et répondre aux questions de mes amis les
préfets des MRC du Québec; j'ai donné tout le temps
nécessaire à chacun de me poser des questions dans le cadre d'une
réunion qu'ils avaient organisée ici à Québec. J'ai
rencontré encore tout récemment le président de l'UMRCQ,
M. Nicolet, qui reçoit tout mon respect, toute mon appréciation,
pour une cause que, lui, défend, et que je ne partage pas à
certains égards, mais dont plusieurs des objectifs que j'ai à
faire valoir et qu'il fait valoir avec beaucoup de vigueur et de conviction se
rejoignent.
Alors, nous avons regardé tout ça, nous avons
analysé tout ça, nous en sommes venus à un consensus
très large, très clair au Conseil des ministres et, aujourd'hui,
il ne serait pas opportun ni pour le milieu municipal ni pour le milieu
agricole de nous convier à nouveau à des échanges sur les
principes fondamentaux du projet de loi 100, compte tenu qu'on a
déjà eu à plusieurs reprises l'occasion d'en discuter.
C'est d'ailleurs en ce sens que M. Nicolet et moi avons évoqué,
lors de notre dernière rencontre, le fait qu'il pourrait très
certainement être utile, je dis bien utile, d'échanger ensemble,
de discuter ensemble autour de cette table qui est la table
Québec-municipalités.
Le député de Lac-Saint-Jean va très certainement
répliquer: Oui, mais, M. le ministre, vous êtes de
l'Exécutif, mais nous, mais nous? Je vous en prie. Vous vous faisiez
"suppHcatifs", tout à /'heure, je me limiterai à dire: Je vous en
prie. Nous, de notre côté, nous avons fait notre travail. Nous, de
notre côté, nous sommes près du milieu municipal. Nous, de
notre côté, nous sommes près du milieu agricole. Si vous
avez été absents, si, pendant tous ces mois, vous avez investi
votre capital humain, investi votre intelligence dans la façon de
remplacer votre chef, dans la façon de bâtir une espèce de
politique qui veuille dire quelque chose sans vouloir nécessairement
dire ce qu'on voudrait que ça veuille dire au moment électoral,
par rapport a votre volonté politique d'en arriver à une
indépendance avant le référendum, à la suite d'une
élection qui portera peut-être là-dessus... Écoutez!
vous avez investi tellement de temps là-dessus, mes chers amis, que vous
ne vous êtes pas préoccupés de garder ce contact
étroit et constant qu'on doit avoir en démocratie. Même si
vous n'êtes pas le pouvoir, vous êtes l'accessoire du pouvoir, tout
au moins. Aujourd'hui, on ne peut pas, parce que vous n'avez pas fait votre
job, retarder systématiquement l'appareil législatif. Pour ces
motifs, M. le Président, et pour d'autres que j'aimerais soutenir...
Une voix: Consentement.
M. Pagé: ...vous comprendrez que notre groupe
parlementaire ne pourra souscrire à la motion présentée
par le député de Lévis. Je ne voudrais pas que le
député de Lévis y voie des motifs d'opposition à sa
motion parce que c'est lui qui l'a présentée. Au contraire, il a
tout notre respect, notre sympathie et notre appréciation. Mais nous
voterons quand même contre sa motion.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Brassard: C'est une vraie honte. Appelez le vote.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. Puisque
je dois disposer de l'amendement du député de Lévis et que
M. le député de Lac-Saint-Jean a demandé l'appel nominal,
M. le secrétaire, si vous voulez vous exécuter.
M. Pagé: Pas dans le sens: avec un pistolet.
Le Secrétaire: Bien. Sur l'amendement proposé par
le député de Lévis afin d'ajouter l'Union des
municipalités régionales de comté, voulez-vous vous
prononcer? M. Beaudin (Gaspé)?
M. Beaudin: Contre.
Le Secrétaire: Mme Dionne
(Kamouraska-Témicouata)?
Mme Dionne: Contre.
Le Secrétaire: M. Dubois (Huntingdon)?
M. Dubois: Contre.
Le Secrétaire: M. Farrah (îles-de-la-Made-
leine)?
M. Farrah: Contre.
Le Secrétaire: M. Messier (Saint-Hyacinthe)?
M. Messier: Contre.
Le Secrétaire: M. Pagé (Portneuf)?
M. Pagé: Contre.
Le Secrétaire: M. Brassard (Lac-Saint-Jean)?
M. Brassard: Pour.
Le Secrétaire: M. Godin (Mercier)?
M. Godin: Pour.
Le Secrétaire: M. Biais (Terrebonne)?
M. Blais: Pour.
Le Secrétaire: M. Garon (Lévis)?
M. Garon: Pour.
Le Président (M. Richard): Je sais que vous allez donner
le décompte, mais on peut facilement, sans avoir de grosses notions de
comptabilité...
Le Secrétaire: Six contre, quatre pour, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Nous revenons donc à la
motion principale. M. le député de Terrebonne, vous avez donc
droit à dix minutes.
M. Blais: Merci beaucoup, M. le Président. La motion
principale qui dit que nous devrions recevoir ici l'UPA, qui est directement
concernée par ce projet de loi, pour venir nous éclairer et pour
bonifier ce projet de loi, mes confrères en ont parlé très
largement. Je souhaiterais personnellement que l'UPA vienne, mais je sais qu'on
va refuser probablement.
Motion d'amendement proposant d'entendre aussi
l'UMQ
Alors, j'y vais immédiatement d'un amendement. "La motion est
amendée par l'addition, à la fin, des mots "l'Union des
municipalités du Québec."
M. Pagé: M. le Président, sur la
recevabilité, je suis persuadé que la motion est rece-vable,
quoique je voudrais Indiquer à mon honorable collègue de
Terrebonne que le résultat sera très certainement le même
que pour le vote précédent, à moins que vous ne changiez
d'idée.
M. Brassard: À moins qu'on ne réussisse à
vous convaincre.
M. Garon: C'est cela. N'oubliez jamais que le succès est
le fruit du dernier essai.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M. le
député de Terrebonne.
M. Yves Blais
M. Blais: Je vous remercie beaucoup. Il va de soi que je demande
que l'Union des municipalités du Québec vienne. Pourquoi? M. le
ministre vient de faire une longue diatribe. Il a parlé de notre manque
de contacts avec les élus municipaux. Je tiens à dire que je ne
veux pas mettre sa parole en jeu. Je ne veux pas douter de sa parole parce
qu'on n'en a pas le droit. Cependant, je pourrais dire que je ne crois pas que
nous manquions de contacts avec les élus municipaux. Nous les contactons
très souvent. D'ailleurs, personnellement, comme député,
je suis à peu près le seul dans ce Parlement qui ai reçu
1258 lettres des 1553 municipalités du Québec sur une cause
environnementale, avec des résolutions dûment signées. Il
n'y a pas beaucoup de députés dans cette Chambre qui peuvent le
dire. Et c'était il y a un an. Donc, on a des contacts.
Je ne doute pas de sa parole, mais je suis persuadé qu'il ne peut
pas mettre sur la table des preuves que nous n'avons pas de contacts avec eux.
Cependant, nous pouvons mettre sur la table une preuve comme quoi, si contacts
il y a eu, ils ont été infructueux, parce que les
municipalités demandent, dans une lettre: "Devant la loi 100, nous
croyons opportun que le gouvernement convoque une commission parlementaire
mixte, comme le permettent les règles de l'Assemblée nationale,
qui donnera l'occasion d'analyser l'impact des différentes dispositions
du projet de loi 100 sur l'agriculture, mais aussi sur l'aménagement et
l'environnement."
Je ne doute pas que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation, qui est lui aussi d'agréable compagnie, a
certainement des contacts avec les élus à travers le
Québec. Mais par cette demande de l'Union des municipalités et de
toutes les municipalités du Québec, si celles-ci demandent
à la commission et au ministre d'être reçues de
façon officielle, il nous est au moins loisible de croire que les
contacts particuliers ont été infructueux et que ces gens
aimeraient que leurs demandes se fassent en plein jour, ou en pleine
soirée, selon les heures, mais se fassent au moins de façon
officielle. C'est pour aider le ministre que nous demandons que ces
différentes associations viennent nous rencontrer, pour éclairer
les législateurs sur le projet de loi, parce que si les rencontres qu'il
a eues précédemment avec les municipalités et les unions
des municipalités avaient donné les fruits attendus, il aurait
été prêt, ce soir, à commencer l'étude de
l'article 1.
Mais vu que nous nous sommes rendu compte, par les échanges de
correspondance et les contacts que nous avons avec les municipalités,
que les rencontres que le ministre a eues n'ont pas donné les fruits
attendus et que les municipalités demandent à être
officiellement reçues pour dire publiquement ce qu'elles ont à
dire sur le projet de loi pour l'améliorer, et vu que le ministre
lui-même nous dit qu'il les rencontrera, et encore en privé,
demain après-midi, tout ça, je crois, plaide que, si contacts il
y a, s'il y a semence, le fruit n'a pas l'air très très...
Une voix: Mûr.
M. Blais: ...mûr ou juteux.
Notre demande de recevoir les municipalités du Québec se
justifie dans son essence, à la face même de la
présentation, du discours que le ministre nous a tenu et par le fait
qu'il rencontre les municipalités demain encore, et en privé, ce
qu'elles ne veulent pas, je crois, parce que, si elles voulaient se contenter
d'une rencontre privée avec le ministre, cela irait de soi. De
façon générale, à ce que je sache, si d'autres
élus de gouvernements urbains ou de gouvernements régionaux de
villes demandent à être reçus par les élus
provinciaux, la réponse, de façon générale, est
toujours oui. Ils savent qu'ils vous rencontrent demain. Nous le savons et eux
aussi le savent, mais ce n'est pas ça qu'ils veulent. Ils veulent
être entendus publiquement pour que leurs revendications soient
enregistrées et rendues publiques.
Je ne dis pas qu'ils ont raison, je ne dis pas qu'ils ont tort dans
leurs revendications, on n'en est pas là, on n'en est pas rendus
à l'étude article par article, mais je tiens à dire: S'ils
veulent se faire entendre - j'ai assez de respect pour eux - je voudrais que
vous leur donnassiez l'opportunité de venir à cette commission
parlementaire.
Autre chose. Il y a tout un autre aspect de l'exposé du ministre
qui me laisse pantois. Il a dit: Nous, de notre côté - en parlant
du Parti libéral, du gouvernement en place - nous avons fait nos
contacts et nous savons de quoi nous parlons. Si vous - en parlant de nous,
l'Opposition - de votre côté, ne les avez pas faits et ne savez
pas de quoi vous parlez, ce n'est pas notre faute à nous, les
libéraux qui sommes au pouvoir. (23 h 30)
Si on s'en tient au strict libellé de l'exposé du
ministre, ça voudrait, dire qu'en tout temps, quel que soit l'organisme
qui demanderait à être reçu en commission parlementaire, on
pourrait dire: Mon Dieu, le parti au pouvoir, quel qu'il soit, a
rencontré cette association. Le parti de l'Opposition n'a qu'à la
rencontrer et les auditions et rencontres publiques ne sont pas
nécessaires. Je ne crois pas que ça soit ce que le ministre
pense, mais je tiens à dire: C'est ça qu'il a dit.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: II ne pense peut-être pas que c'est ainsi que
ça devrait se dérouler, mais c'est ce qu'il a dit. Il a dit:
Nous, de notre côté, nous avons des contacts étroits,
fréquents, amiables, aimables, chaleureux avec le monde municipal. Et je
n'en doute pas! Il a même rajouté: civilisés. Et je le
crois. Il vous a rencontrés à travers le Québec, sur
différents sites, de là vient le mot "citoyen".
M. Pagé: Ce n'est pas trop drôle.
M. Blais: Je ne dis pas ça pour vous faire rire. Je dis
ça pour essayer de vous faire comprendre. Il s'est promené. Les
contacts ont été bons, fructueux, civilisés. Et il nous
dit: Vous n'aviez qu'à faire comme nous. Eh bien, si les contacts
avaient eu les fruits que les gens contactés s'attendaient à
avoir, ils n'auraient pas écrit une lettre de supplique. C'est presque
une supplique municipale que cet exposé épistolaire. Et je vais
citer quelques phrases de M. Roger Nicolet, phrases assez lourdes de sens pour
qu'un de nos grands analystes du Québec, Gilles Lesage, les reprenne en
éditorial. Cela voulait donc dire que les paroles étaient lourdes
de sens. M. Lesage intitule: "Le tapage autour du zonage agricole.
Démagogie! s'écrient les MRC. Et Bourassa, lui, jure qu'il sera
vigilant." Le titre est assez accrocheur.
Une voix: La date?
M. Blais: La date, c'est avant que vous ne les rencontriez
demain. Vous ne les avez pas vus encore. Donc, la date importe peu. Vous les
voyez demain. La date? Le 15 juillet. Je ne crois pas que la date soit
importante parce que, quels que soient les problèmes qu'il y avait au
milieu de l'été, au temps de la canicule, on voit que la chaleur
n'a pas porté fruit dans les relations parce que vous sentez
vous-même le besoin de les revoir demain et encore en privé.
Une voix: Ha, ha, ha!
M. Blais: Donc, je ne crois pas que la chaleur a fait mûrir
les relations entre le ministre et les municipalités. Alors, la date
importe peu, mais, pour le bien de la cause, je vous dis que c'est le 15
juillet et l'année c'est 1988, M. le ministre. Tandis que le premier
ministre promet plus de vigilance, l'UMRCQ estime que seule la démagogie
doit perdre du terrain - ce ne sont pas les agriculteurs qui doivent perdre du
terrain ni les municipalités, mais la démagogie - dans le dossier
du zonage agricole et du dézonage de bonnes terres arables." Au cours
d'une entrevue hier avec Le Devoir - un compte rendu
détaillé en sera fait demain - il dit qu'il en parlera
encore.
Je lis le texte, mais je vais me contenter
de ce résumé succinct ici parce qu'il parle par
lui-même. Dans son texte, le président de l'Union des
municipalités régionales de comté dit qu'il y aura
toujours des situations ponctuelles de conflit, soit des équipements
publics à localiser en milieu agricole, des concessions pour le respect
de l'environnement, parfois môme des erreurs comme des zonages trop
expéditifs. Il admet qu'il est humain... Et moi, je comprends ça.
Je ne plaide pas ici pour la perfection. Elle n'est pas de ce monde. Tout le
monde peut se tromper. Et on a tous dans notre bagage, dans notre curriculum
vitae, qui que l'on soit, quoi que l'on ait fait, toute une série
d'erreurs dans des choses qu'on n'a pas prévues. Ce qu'on veut
éviter ici, c'est qu'il n'y ait une erreur dans ce pro|et de loi - il
n'y en a peut-être pas - et que, sciemment, on refuse un éclairage
d'une personne en poste, d'une personne responsable, d'une personne qui a de
l'expérience et qui supplie, comme un pauvre gueux devant saint Antoine,
pour être reçu.
Le véritable défi, dit M. Nicolet, est de rétablir
le dialogue régional au-delà de ces difficultés. "Il est
appuyé dans cet énoncé par le maire d'Austin, près
de Magog, et préfet de la MRC de Memphrémagog." Devant de tels
choix, confrontée à une problématique qui remet en cause
ses propriétés, la société n'a que faire d'une
dialectique que d'aucuns ont voulu rabaisser au plan de la démagogie."
Je ne pousserai pas ici l'arrogance, même si je crois que je sais ce que
ça veut dire, jusqu'à définir qui, ici, est visé
par la démagogie. Je ne pousserai pas l'arrogance jusque-là,
parce que je trouverais ça arrogant. "Seule la démagogie doit
perdre du terrain, estime l'union qui représente 75 % des
municipalités et presque toutes les MRC du Québec. Elle rappelle
qu'il y a eu, en 1985, une première série de modifications
à la loi 90 - le ministre en parlait tantôt - pour permettre la
conciliation entre les objectifs nationaux de protection de l'agriculture et
une perception décentralisée de l'aménagement du
territoire et que le même gouvernement, celui du PQ, avait
concrétisée par la loi de 1979 sur l'aménagement et
l'urbanisme.
Cela veut dire qu'en 1985 on avait tenté. Il est peut-être
resté des zones grises et c'est ça que la loi 100 devrait
éclairer aujourd'hui. S'il y a des coins encore brumeux, s'il y a encore
dans la loi des coins marécageux, s'il y a encore une course à
obstacles pour observer la loi sans brimer qui que ce soit, c'est la loi 100
ici qui est censée rétablir les faits, concrétiser et
aplanir le plus de difficultés possible. Ce ne sera pas encore parfait,
mais il faut que ce soit le plus parfait possible. "L'enjeu des
négociations entre la commission et les MRC (pour la définition
du périmètre agricole protégé) doit être le
souci de définir la véritable vocation des vastes étendues
inaptes à l'exploitation agricole, dit l'union, à tous ceux qui
se préoccupent du développement du 'Québec des
régions". M. Lesage, qui n'est pas beaucoup de notre côté,
1 n'a pas encore sa carte de membre, dit que "c'est un thème cher au
Parti québécois*. C'est indiqué dans l'éditorial,
à part ça. "Seul un vice de procédure administrative une
situation rendue possible par une erreur de concept quant à la
définition du territoire agricole à protéger dans le texte
de la loi, écrit M. Nicolet, explique une situation qui, sous plusieurs
aspects, constitue une expropriation déguisée."
M. le Président, je crois Important et je crois qu'il
relève de la démocratie primaire, lorsque beaucoup d'élus.
75 % des municipalités du Québec, demandent à être
entendus, de dire oui. Nous avons la chance au Québec et en
Amérique du Nord de façon générale d'avoir un
système de développement agricole très différent de
celui de l'Europe. À cause des vastes territoires que nous avons et de
la petite densité de la population, on a choisi des systèmes
différents de l'Europe. En Europe, il y a un hameau ou un village, tout
est concentré là, tout le monde y demeure, les cultivateurs
aussi, autour d'un clocher, d'un petit hôpital, d'un service de soins,
d'une petite église. Tout est concentré dans un petit
périmètre et les cultivateurs n'habitent pas leur ferme; ils
voyagent du village à leur ferme. Nous, en Amérique du Nord,
c'est un système extraordinaire qui regroupe beaucoup de services: le
système de transport, le transport des élèves pour aller
à l'école. Tous les gens sont ensemble. Ils ont un village de
deux milles, ils sont tous ensemble. Un village de deux milles au
Québec, c'est une grande étendue, il y a du monde un peu partout.
On a le territoire pour le faire.
Il y a un prix à payer pour ça, parce qu'on aime mieux
ça; ça répond plus à nos aspirations, ça
répond plus à notre mentalité, ça répond
plus a notre culture et ça répond plus au pays que nous habitons.
J'en conviens et je suis complètement d'accord. Mais, s'il en est ainsi,
cette étendue entraîne aussi des Inconvénients; cela
entraîne qu'il y a des villages qui se forment, des hameaux qui se
forment, des petites viles et qu'à travers tout ça il y a des
cultivateurs. Contrairement à l'Europe qui a juste un rayon autour d'un
village qui peut porter ombrage à la vie agricole devant la vie urbaine,
nous, nous multiplions les contacts à cause de notre forme de
développement agricole et de la forme de notre développement
urbain.
Qui de mieux que les maires ou les préfets pour venir nous dire
quelles seraient les meilleures façons de concilier les deux sortes de
vie: la vie rurale et la vie urbaine? Je croirais normal, M. le ministre, que
vous acceptiez que les municipalités du Québec viennent à
cette commission nous dire ce qu'elles pensent de cette loi, ce qui, selon
elles, dans ce projet de loi, devrait être réécrit,
réaménagé, amendé ou bonifié. Nous
prêtons bonne foi aux élus municipaux et nous voulons
répondre à leurs demandes. C'est la raison pour laquelle nous
faisons cette motion. Nous encourageons le ministre à les
recevoir parce que nous respectons ces gens-là.
M. le Président, sur tout projet de loi sur le zonage agricole,
quel que soit le parti au pouvoir, quel que soit le ministre qui
détienne le portefeuille, quel que soit l'être humain qui
reçoive du cabinet l'autorité de gérer la chose agricole,
il y aura toujours des discussions, des gens qui ne seront pas d'accord avec
les décisions prises. Jamais on ne pourra faire une loi dans le domaine
agricole qui satisfera l'ensemble. Il y aura toujours des accrocs, il y aura
toujours des choses qui grincent. C'est pour ça qu'il est important que
tous ceux qui sont en autorité sur ie territoire québécois
- combien me reste-t-il de temps? - soient de la partie pour que le projet de
loi que l'on fait - le parti au pouvoir amène un projet de loi et
l'Opposition travaille main dans la main avec lui pour le bonifier - soit le
meilleur possible. Il faut que les intervenants de l'extérieur puissent
venir nous éclairer. La science infuse n'existe pas. "L'État,
c'est moi", ça n'existe plus en 1988. On ne peut plus dire:
"L'État, c'est moi", comme on le disait au temps de Louis XIV ou comme
le disait celui qui a dirigé - et je n'ai pas peur de le dire - le
meilleur gouvernement que le Québec ait connu, soit Jean Lesage, de 1960
à 1966. Vous allez dire: Mais c'est épouvantable pour un
péquiste de dire ça. Il n'y avait pas de PQ dans ce
temps-là. Ce n'est pas compromettant, c'était le meilleur
gouvernement.
Une voix: Et René Lévesque.
M. Blais: René Lévesque a fait mieux après,
mais, jusque-là, c'était le meilleur gouvernement que le
Québec avait connu. C'est vrai. C'est vrai à beaucoup
d'égards. Mais il a eu l'audace de dire "les non-instruits", en parlant
du peuple québécois. C'était presque synonyme de dire:
"L'État, c'est moi". Et ce qui est arrivé, c'est que les
cultivateurs, non pas les urbains, lui ont dit: On est des non-instruits? Tu
vas voir qu'on est trop instruits; tu vas t'en aller chez vous. Et il a perdu
son élection en 1966. Le meilleur gouvernement que le Québec ait
connu. il faut faire attention à la classe agricole. Il ne faut pas se
prétendre en possession tranquille de la vérité. Il ne
faut pas que nous pensions, qui que l'on soit, avoir la science infuse; cela
n'existe pas. Même si on a un doctorat en sillons, un doctorat en
microsillons ou un doctorat en n'importe quoi, il y a toujours quelqu'un qui
peut nous aider à mieux faire ce que nous avons à faire. C'est
pour ça qu'on n'a pas le droit de refuser quelque compétence que
ce soit. (23 h 45)
Ce premier ministre, M. Lesage, dans le temps, qui a été
le meilleur premier ministre, jusqu'à ce qu'on arrive, que le
Québec ait connu, nous a donné, à nous les
Québécois, et a donné aussi aux cultivateurs beaucoup de
choses. La loi 100 est censée leur apporter quelque chose de mieux
encore. Ce que M. Lesage a fait d'extraordinaire, c'est qu'à cette
époque nous n'étions pas individuellement en position d'avoir
beaucoup de richesses, nous, les francophones. Il a institué toutes
sortes de sociétés d'État pour que nous possédions
collectivement ce que la situation ne pouvait pas nous faire posséder
individuellement. C'est important, une société d'État. Il
y en a beaucoup. La Caisse de dépôt: extraordinaire. Une force qui
peut servir à tous les cultivateurs aujourd'hui, à tous les
grands projets ruraux. La SOQUEM, la SOQUIP, etc.
Bien sûr, il en est arrivé d'autres après au
gouvernement, qui ont essayé d'améliorer les richesses
collectives. Nous sommes rendus à un point où nous avons une
grosse richesse collective. La Caisse de dépôt est plus riche en
milliards que le Héritage Fund de l'Alberta. Ce n'est pas peu dire.
Hydro-Québec, par sa nationalisation en 1962, grâce à M.
Lévesque du gouvernement de M. Lesage, grâce à René
Lévesque, est devenue une grande richesse naturelle, une richesse
convoitée par tout le monde. Nous sommes plus riches en énergie
qui se renouvelle sans cesse que tous les pays arabes réunis avec leur
pétrole, et de beaucoup. C'est une richesse collective qui doit faire
notre fierté. C'est une richesse collective que nous, les élus,
devons respecter. Une très grande richesse collective a
été la loi 90, loi sur le zonage agricole. Cette loi 100 vient la
modifier et je dis et j'aime à dire que la loi 90 est à
l'agriculture ce que la loi 101 est à la culture. C'est une loi à
ne pas toucher, sinon en l'améliorant.
Quoi que l'on dise, les difficultés qu'on a eues, nous, comme le
disait le ministre, avec nos chefs, ils les ont eues aussi avec leur chef. On
sort tout de même d'un congrès extrêmement unis et nous
avons actuellement, depuis l'arrivée du nouveau chef, doublé
notre membership. Nous avons plus de 100 000 membres en règle et faites
attention, c'est exactement le même nombre qu'on avait en novembre 1976.
Attention, 100 000 membres en règle, c'est du monde qui grignote sur un
territoire. C'est important. Encore là, je ne prétends pas qu'on
va tout laver sur notre passage quand arrivera la prochaine élection,
mais il ne faut pas que les gens qui nous parlent pensent qu'ils ne sont pas
lavables non plus, parce que tout est lavable. C'est 100 000 membres. Le Parti
libéral n'a pas ça. M. le Président, de Nicoiet, je tiens
à vous dire que votre homonyme devrait être reçu pour nous
éclairer.
En conclusion, M. le Président, je tiens à dire qu'il y a
au Québec des choses sacrées, des choses qu'on palpe avec des
gants, des projets de loi ou des choses importantes qu'on ne peut toucher
qu'avec ie bout d'un pinceau législatif. La loi 90 est en soi un de ces
bijoux ciselés pour le bien-être des cultivateurs et
ciselés par la noblesse du métier qu'ils ont. À cause de
la valeur de cette loi - les changements qu'on veut y apporter, je ne dis pas
qu'ils ne sont pas bons - parce que c'est un joyau, je veux qu'on y
touche avec beaucoup beaucoup de précautions. Une voix:
C'est un bijou de famille.
M. Blais: Oui, c'est un bijou collectif. Il y a des bijoux de
famille que l'on garde précieusement sur soi parfois ou dans des coffres
de réserve, mais la loi 90 est un bijou de la collectivité
québécoise et c'est le plus grand joyau de la classe agricole
québécoise. Y toucher sans vergogne, de façon, j'oserais
presque dire cavalière, cavalière si on ne reçoit pas les
gens concernés... Les gens concernés ne sont pas seulement les
gens du milieu agricole, ce sont aussi des Québécois. Tous les
élus doivent participer à rendre ce bijou encore plus attrayant,
plus reluisant, à lui donner encore, si possibilité y y a, une
plus grande valeur. Ce serait "de valeur" qu'on ne reçoive pas les
élus municipaux pour qu'avec nous ils viennent fignoler ce bijou qui
nous tient à coeur
M. le Président vous avez vu par mon intervention que je tiens
énormément à ce que les élus municipaux viennent
nous parler sur le projet de loi et viennent nous empêcher, si jamais il
y en a, de faire des erreurs, ce que je ne crois pas. Je donne le
bénéfice du doute au ministre de l'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, mais je tiens à vous dire, M. le
Président. Même si ce projet de loi était excellent,
qu'est-ce qu'on a à perdre que les gens concernés viennent nous
dire sa valeur? Cela ne ferait que nous confirmer dans ce que nous croyons
être vrai et le législateur, le ministre actuel, devrait
être heureux que l'on permette, si ce projet est aussi bon, que les gens
de l'extérieur viennent lui dire jusqu'à quel point il a bien
fait son travail. S'il en était autrement, si parfois il pouvait
être bonifié, nous nous refuserions des choses que nous n'avons
pas le droit de nous refuser. Sur ce, M. le Président, je vous remercie
beaucoup de m'avoir écouté avec autant d'attention.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Terrebonne. M. le député de Lévis,
vous avez un maximum de dix minutes.
M. Pagé: M. le Président, je proposerais qu'on
ajourne nos travaux à ce moment-ci.
Une voix: Très bien, on serait mieux d'ajourner.
Le Président (M. Richard): On s'excuse, M. le
député de Lévis, ils donnent l'impression de vouloir
arrêter.
M. Garon: M. le Président, je pourrai prendre la parole
demain, mais entre-temps, comme la nuit porte conseil, le ministre pourra
peut-être nous arriver avec une proposition demain lorsque le leader du
gouvernement dira quels sont les travaux du jour. On pourra peut-être,
à ce moment-là, inviter les gens des deux partis politiques
à dresser une liste commune des intervenants qui pourraient être
entendus par la commission. Je pense que c'est cela qui serait souhaitable. Or,
peut-être que le ministre souhaite qu'on ajourne immédiatement,
peut-être qu'il a été touché par les interventions
qui ont été faites. Je ne veux pas être plus long Demain,
s'il le faut, j'interviendrai pour le convaincre. J'espère que cela ne
sera pas nécessaire.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lévis. Bonne nuit à chacun d'entre vous.
Les travaux sont ajournés sine die.
(Fin de la séance à 23 h 54)