Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.
(Quinze heures trente minutes)
Le Président(M. Richard): À l'ordre, s'il vous
plaît! Messieurs, si vous le permettez, je déclare la
séance ouverte. Je vous rappelle le mandat de notre commission:
procéder à des consultations particulières et tenir des
auditions publiques dans le cadra de l'étude détaillée du
projet de loi 100, Loi modifiant la Loi sur la protection du territoire
agricole. M. le secrétaire, est-ce que vous avez des remplacements?
Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Forget
(Prévost) remplace Mme Dionne (Kamouraska-Témiscouata) .
Le Président (M. Richard): Merci. Les groupes que nous
rencontrerons cet après-midi sont: l'Union des producteurs agricoles du
Québec et l'Union des municipalités du Québec. Selon les
ententes, nous disposerons d'une heure trente par groupe. La
présentation devrait prendre vingt minutes environ. Il n'y a
peut-être pas nécessairement de rigidité à cet
égard, mais une vingtaine de minutes environ pour !a présentation
du représentant ou du porte-parole du groupe. Par la suite, 35 minutes
réparties en deux enveloppes égales entre le parti
ministériel et l'Opposition. Maintenant, si vous avez des remarques
préliminaires, M. le représentant ou M. le ministre, vous avez la
parole. M. le ministre.
Remarques préliminaires M. Michel Pagé
M. Pagé: Merci, M. le Président. Seulement quelques
mots pour vous indiquer ma satisfaction qu'on puisse se retrouver autour de
cette table, même si nous sommes très tôt en début
d'année. L'objectif qui m'animait quand j'ai demandé au leader du
gouvernement, M. Gratton, de convoquer cette commission très tôt
en début de janvier, c'est que nous puissions obtenir de
l'Assemblée nationale l'étude du projet de loi, non seulement en
deuxième lecture mais article par article dans les meilleurs
délais, compte tenu de l'importance de ce projet de loi pour que,
dès la reprise de nos travaux, le 14 mars prochain, nous puissions
prendre en considération le rapport qui sera déposé
à ce moment-là, je l'espère bien, par le rapporteur de la
commission, et procéder à sa troisième lecture le 15 ou le
16 mars prochain.
Pourquoi une motivation animée par autant de détermination
pour que le projet de loi s'applique dans les meilleurs délais? C'est
très simple. Le projet de loi 100, comme j'ai eu l'occasion de
l'Indiquer dans mes commentaires, autant en deuxième lecture qu'ici
même en commission parlementaire, vient ajouter, vient préciser,
vient aussi modifier la loi qui a été adoptée par
l'Assamblée nationale en 1978, la loi 90 à l'époque. Dans
un premier temps, ce projet de loi vient établir très clairement,
très fermement un engagement du gouvernement du Québec pour le
développement de l'agriculture au Québec, c'est donc là
notre objectif, en arriver à une véritable mise en valeur des
sois zonés agricoles. On sait que la loi adoptée en 1978
s'appuyait plutôt sur un zonage d'espace, un zonage spatial, que sur un
zonage qui devait avoir ou qui avait comme résultat la mise en valeur
des sois ainsi affectés à l'agriculture.
Or, la loi 100 vient garantir une protection rigoureuse, une protection
forte des sols agricoles au Québec. Par surcroît, le projet de loi
doit être lu en fonction d'un pian qui sera déposé, qui
sera élaboré aussi, cela va de soi, avec les représentants
des producteurs et des productrices agricoles, un plan qui visera à
mettre en valeur les sols ainsi zonés. Un projet de loi qui
prévoit des modifications visant à préciser les
critères sur lesquels la Commission de protection du territoire agricole
ou, encore, le tribunal d'appel en matière de protection agricole pourra
s'appuyer pour prendre des décisions, des critères qui sont
refondus, des critères qui, de par leurs dispositions,
établissent l'obligation, autant à la commission qu'au tribunal,
de tenir compte, de prendre en considération certains
éléments et aussi l'obligation pour ces deux organismes de ne pas
prendre en considération certains critères ou certains
éléments du dossier. L'implantation d'un secteur exclusif,
c'est-à-dire que près du tiers des sols zonés agricoles au
Québec seront réservés exclusivement à des fins
agricoles. Ces terres sont identifiées non seulement dans ta
région de Montréal mais aussi le long du fleuve Saint-Laurent,
une superficie très . importante au Saguenay-Lac-Saint-Jean, etc.
D'ailleurs, j'ai eu l'occasion précédemment, au cours de ces
travaux, d'y référer tout comme j'aurai l'occasion, lorsque les
articles seront appelés, d'y référer encore une fois.
Ce projet de loi était attendu par nos productrices et nos
producteurs agricoles en ce qui concerne, entre autres, le droit de produire
des dispositions très claires qui viennent, encore une fois,
témoigner de la volonté du gouvernement de protéger les
activités agricoles et de modifier des règles du jeu pour
établir très clairement qu'un producteur agricole qui cultive sa
terre, qui se convie à des pratiques agricoles qui répondent aux
critères de l'art et du métier, aux usages en semblable
matière, si je peux utiliser ce terme, soit protégé contre
les agressions, trop souvent nombreuses, de la part de voisins ou de la part de
personnes qui s'opposent à de telles pratiques agricoles.
L'implantation, la
mise en oeuvre ou la mise en place d'un fonds de défense
professionnel vient donc aider nos producteurs agricoles qui sont l'objet de
poursuites. Bien souvent et plus souvent qu'autrement, ce sont des poursuites
non fondées et ça c'est entendu. Il y a aussi l'introduction
d'une norme de réciprocité pour établir, encore plus
clairement, les règles du jeu en ce qui concerne les constructions
admissibles, qui s'appuie sur les normes de l'environnement,
c'est-à-dire que ça concerne toute la question des normes de
distances auxquelles un producteur ou une productrice agricole doit se
soumettre avant de pouvoir agrandir une porcherie, construire une
grange-étable pour élever du veau de lait, du veau de grain,
etc.
Ces normes de réciprocité... C'est-à-dire
qu'antérieurement, avant que cette loi ne soit déposée et
adoptée, les normes s'appliquaient toujours à rencontre des
producteurs et des productrices agricoles. Ce projet de loi, a d'ailleurs
déjà reçu un accueil très positif de la part des
gens directement concernés par l'agriculture, mais un accueil
mitigé de la part du milieu municipal. Nous aurons l'occasion
d'échanger des avis avec l'Union des municipalités du
Québec, tout à l'heure, et avec l'Union des municipalités
régionale de comté, demain matin. Je suis persuadé que,
globalement, l'agriculture qui représente un emploi sur sept au
Québec, l'agriculture qui représente la texture... parce que la
texture socio-économique des régions du Québec s'appuie en
grande partie, dans chacune de nos régions, sur l'agriculture et
l'agro-alimentaire. Alors j'ai la conviction qu'une fois que ce projet de loi
sera adopté, ce sera un autre élément positif s'inscrivant
dans la perspective d'un Québec encore plus fort, animé par
beaucoup de vitalité dans un secteur aussi important que celui de
l'alimentation.
C'est donc avec beaucoup de plaisir que je suis avec vous, qu'on se
retrouve tous ensemble cet après-midi, et je suis persuadé que
cet échange avec l'Union des producteurs agricoles et avec l'Union des
municipalités du Québec sera très intéressant.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le ministre. M. le
porte-parole de l'Opposition, M. Brassard, député de
Lac-Saint-Jean, vous avez la parole.
M. Jacques Brassard
M. Brassard: M. le Président, je suis très heureux
de voir que le ministre est heureux lui aussi qu'on se retrouve en
consultations particulières. Vous vous rappellerez que ces consultations
particulières auraient pu et auraient dû se tenir avant les
fêtes parce que plusieurs organismes Importants du Québec
l'avaient réclamé et avaient insisté pour être
entendus par la commission parlementaire. Ou côté de l'Opposition,
nous avions également réclamé des consultations
particulières pour permettre aux groupes et aux Intervenants majeurs du
Québec qui l'exigeaient et qui le demandaient de se faire entendre et de
témoigner devant cette commission parlementaire.
M. le Président, notre opposition, comme formation politique,
à l'endroit du projet de loi 100 s'explique d'abord parce qu'un projet
de loi de cette importance ne peut pas être adopté à la
vapeur, à toute vitesse, à la dernière minute, dans la
bousculade de la fin de session. Un projet de loi de cette importance exige
d'être étudié, examiné attentivement,
sérieusement, en profondeur et surtout que les intervenants, les
organisations, au Québec, qui ont des points de vue à exprimer
sur un projet de loi de cette importance soient entendues. Ce sont là
des traditions démocratiques qui sont des coutumes, dans ce Parlement,
et qu'il est normal de respecter. Dans le cas présent, nous devons
constater malheureusement - même s'il y a eu un changement d'opinion de
la part du ministre - que, jusqu'à l'ajournement des fêtes, il y
avait un entêtement buté, de la part du ministre, un refus
systématique de ces traditions et de ces coutumes parlementaires qui
s'appuient, je pense, sur la plus saine des démocraties, qui consistent
à permettre aux groupes et aux intervenants de se faire entendre.
Nous y sommes maintenant. Ces consultations particulières, on
aurait dû, à mon avis, les faire avant I'ajournement des
fêtes, comme le réclamaient les groupes et comme nous le
réclamions nous-mêmes. C'est une des explications de notre
opposition au projet de loi 100. Je pense que c'est important de le signaler.
D'autant plus que le ministre n'a pas jugé utile et bon d'utiliser,
avant !es êtes. tout te temps qui lui était disponible pour
étudier le projet de loi 100. On a été une semaine
entière, en fin de session, une semaine au grand complet sans que le
leader n'appelle le projet de loi 100 pour étude en commission
parlementaire. On a donc perdu beaucoup de temps, avant l'ajournement, qu'on
aurait pu consacrer à l'étude du projet de loi et qu'on aurait pu
consacrer à ces auditions particulières que nous tenons
aujourd'hui.
En d'autres termes, et pour résumer sur ce point, M. le
Président, le ministre a mal fonctionné en matière
d'adoption de ce projet de loi. Il a mai légiféré. il
était de notre devoir, comme Opposition, de le lui rappeler et de
s'opposer à pareille façon de procéder et de fonctionner.
Quand il s'agit d'adopter un projet de loi de cette Importance, on ne bouscule
pas l'Opposition, on ne bouscule pas le Parlement et on ne bouscule pas les
intervenants majeurs dans la société québécoise.
Cela nous apparaissait essentiel et primordial.
Deuxièmement, nous nous opposons à ce projet de loi parce
que nous ne sommes pas d'accord avec plusieurs de ses dispositions
essentielles. Là-dessus, je tiens à être bien clair, M. le
Président. Cela ne signifie en aucune façon
que !e Parti québécois a changé ses convictions en
matière de protection du territoire agricole. Nous sommes toujours
très fiers d'avoir été Ie parti politique au Québec
qui a fait adopter, pour la première fois, une loi de protection du
territoire agricole en 1978. Le député de Lévis, qui est
à mes côtés, a été le ministre qui a
parrainé cette loi et qui !'a fait adopter par le Parlement.
Il n'est peut-être pas inutile de rappeler que l'Opposition
libérale, à l'époque, avait voté contre à
toutes les étapes, y compris l'actuel député de Portneuf.
L'histoire est là pour le démontrer. On n'a qu'à fouiller
dans le Journal des débats. Nous n'avons pas modifié, nous
n'avons en aucune façon changé nos convictions en matière
de protection du territoire agricole. Je me refuse, je refuse à
quiconque de prétendre que nous avons renié nos convictions. Nous
sommes toujours aussi persuadés, quant à nous, de ce
côté-ci, qu'il faut une loi rigoureuse de protection du territoire
agricole. Ce n'était pas le cas depuis quelques mois ou depuis quelques
années. La rigueur s'était émoussée,
atténuée. Nous pensons que c'est à cause même des
directives du ministre que cette rigueur s'est atténuée et nous
sommes toujours persuadés, de ce côté-ci, qu'il faut, de
façon rigoureuse, protéger le territoire agricole. On n'a pas
changé nos opinions. On n'a pas changé nos convictions à
ce sujet. (15 h 45)
Ce n'est pas parce qu'on s'opposa au projet de loi 100 que ça
signifie qu'on a changé nos convictions, en aucune façon. Je
reconnais cependant qu'on n'a pas la même vision du projet de loi 100 que
certains groupes. Certains intervenants sont convaincus que le projet de loi
1OO, s'il est adopté et s'il s'applique, aura pour effet de renforcer !a
protection du territoire agricole. Nous pensons le contraire. Je l'ai dit
longuement à l'occasion du débat en deuxième lecture, je
te redis, ce n'est pas la vision que nous avons du projet de loi. En
créant deux secteurs dans !e territoire agricole, un secteur vert
pâle et un secteur vert foncé, ce dernier appelé secteur
exclusif, nous pensons que, dans le secteur vert pâle, la pression au
dézonage va s'accentuer, s'aggraver, que les demandes de dézonage
dans ce même secteur vont être plus facilement acceptées et
que, par conséquent, on va assister, en fin de compte, à un
ratatinement et à un rapetissement du territoire agricole
protégé eu Québec. C'est la façon dont on voit le
projet de loi. Est-ce qu'on a tort? Est-ce qu'on a raison? D'autres ont
d'autres visions du projet de loi, nous l'admettons. On est en
démocratie, on peut avoir des opinions contraires, mais ce n'est pas
parce qu'on a cette vision du projet de loi, cette opinion du projet de loi,
que cela signifie que nos convictions en matière de protection du
territoire agricole ont changé et ont été
modifiées, que nous avons renié nos convictions et que nous avons
fait un virage comme formation politique an matière de protection du
territoire agricole. C'est complètement faux. Mais il est vrai qu'on n'a
pas du tout la même vision du projet de loi 100 que d'autres
intervenants.
Nous pensons qu'en fin de compte, l'application du projet de loi 100
aura pour effet d'affaiblir la protection du territoire agricole, de
réduire le territoire agricole protégé au Québec.
Compte tenu de sa faible superficie, on pense que c'est dangereux, que c'est
risqué et que c'est une mauvaise orientation. On s'appuie sur
l'expérience depuis trois ans, en matière de négociations
de la révision des zones agricoles des MRC, on a assisté à
des dézonages massifs, allant même au-delà des demandes des
MRC. Plusieurs intervenants, dont l'UPÂ en particulier, se sont
élevés contre cette pratique et contre ces orientations avec
raison et à juste titre; nous aussi d'ailleurs, on s'est
élevés et on s'est indignés de cette pratique et on est
d'autant plus inquiets et préoccupés que sur la base de ce qui
s'est passé depuis deux ans en matière de révision des
zones agricoles des MRC, on craint qu'avec les dispositions du projet de loi
100, cota s'accentue, que le dézonage s'accentue, que la zone vert
pâle devienne un véritable fromage gruyère, pleine de
trous, parce qu'on va accéder aux demandes de dézonage en zone
vert pâle. Cela nous apparat dangereux et risqué et on ne veut pas
prendre ce risque, on ne veut pas courir ce danger. C'est pour cette raison
fondamentale qu'on s'oppose au projet de loi 100; ce n'est pas parce qu'on a
changé nos convictions en matière de protection du territoire
agricole.
M. le Président, je tenais à faire cette mise au point
pour ne pas qu'il y art d'ambiguïté ou d'équivoque sur le
comportement de l'Opposition envers ce projet de loi. On s'y est farouchement
opposés avant les fêtes, ll est vrai, et je l'admets, nous avons
empêché son adoption finale. On s'y est opposés pour deux
raisons qu'on juge, nous, fondamentales: la première, c'est qu'il
s'agissait d'une façon inacceptable de légiférer, de la
part du ministre, sur un projet de loi de cette nature et, la deuxième,
c'est qu'on a plus que des réserves, mais des oppositions sur un certain
nombre de dispositions du projet de loi. Cela ne doit surtout pas être
interprété comme un virage de la part du Parti
québécois en matière de protection du territoire agricole.
Cela ne doit surtout pas être interprété comme un
reniement. Bien au contraire, nos convictions demeurent les mêmes, tout
aussi fermes, tout aussi fortes, tout aussi solides, et nous sommes toujours
persuadés qu'il faut une loi de protection rigoureuse du territoire
agricole.
Notre position - je termine là-dessus, M. le Président -
c'est qu'on pensait qu'on avait déjà une loi de cette nature,
soit celle qui avait été adoptée en 1978 et on ne voyait
pas du tout l'utilité de la modifier, comme on le fait avec le projet de
loi 100. On voyait cependant l'utilité, la nécessité de
l'appliquer dans toute sa rigueur, ce qui n'était plus le cas depuis
trois ans, cela
oui, mais on ne voyait pas la nécessité de modifier cette
loi. C'était cela, notre position. Donc, on n'a certainement pas
changé nos convictions en matière de protection du territoire
agricole.
Voilà, M. le Président, je suis très heureux qu'on
se retrouve enfin en auditions particulières. Avant l'ajournement des
travaux de la Chambre, nous les avons réclamées durant un mois,
sans succès. Il y a même eu des motions qui ont été
rejetées à la majorité, comme certains de mes
collègues libéraux me le faisaient remarquer tantôt, des
motions qui demandaient à l'UPA de venir témoigner, des motions
qui demandaient à l'UMQ de venir témoigner, des motions qui
demandaient à l'UMRCQ de venir témoigner. Elles ont toutes
été rejetées par cette commission. Mais nous constatons,
aujourd'hui, que nous avions raison de les présenter, ces motions, parce
qu'on se retrouve maintenant en audiences particulières avec les groupes
mêmes que nous avions désignés à l'époque.
Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
représentant de l'Opposition. Maintenant, M. le député de
Lévis, si vous avez un commentaire il dort être court puisque les
remarques préliminaires ont déjà été faites
au début de l'étude article par article. Il avait
été convenu, de part et d'autre, que seulement deux intervenants
devaient prendre la parole. Est-ce que c'est pour des remarques
préliminaires?
M. Garon: II s'agit de remarques préliminaires qui
précèdent la commission - de remarques préliminaires qu'on
fait à d'autres moments - qui va entendre des gens. C'est pour
répondre aux propos du ministre.
Le Président (M. Richard): C'est parce qu'il avait
été convenu tout à l'heure, de part et d'autre...
M. Pagé: J'ai compris de la discussion que j'ai eue avec
mon vis-à-vis, M. le député de Lac-Saint-Jean,
qu'aujourd'hui, nous nous réunissions pour entendre l'Union des
producteurs agricoles et l'Union des municipalités du Québec.
Demain, nous devons reprendre avec l'Union des municipalités
régionale de comté, à 9 heures, pour compléter
à 10 h 30, de façon qu'à compter de 10 h 30, demain, nous
puissions reprendre nos travaux de l'étude article par article. Je
présume qu'à ce moment-là, si le député de
Lévis veut venir à cette séance, demain matin, il pourra
toujours faire des remarques sur l'article 4 que nous sommes en train
d'étudier.
Vous savez que cet après-midi, il est déjà
au-delà de 15 heures et s) chacun des députés requiert le
droit d'intervenir pendant vingt minutes, nos distingués Invités
vont devoir attendre, et je ne pense pas que ce soit là le désir
du député de Lévis.
La Préskiant (M. Richard): M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: II y a eu une entente pour qu'on tienne des
audiences particulières, heureusement, mais, pour ce qui est des
remarques préliminaires, la tradition veut que les porte-parole en
fassent de façon un peu plus substantielle, mais il n'est pas de coutume
de refuser à d'autres membres de la commission, quelle qu'elle soit, de
faire quelques brefs commentaires, avant de passer à l'audience
particulière comme telle.
La Président (M. Richard): Je n'ai fondamentalement pas
d'objection, si vous êtes le plus bref possible parce qu'il y a
déjà eu, sur le même projet de loi, des remarques
préliminaires qui sont, d'une façon globale, sensiblement le
même type de remarques préliminaires puisqu'il s'agit du
même projet de loi. On Insère une consultation au moment où
l'étude du projet de loi est déjà en marche, alors que
nous avons déjà étudié quelques articles.
Alors, vous avez la parole, mais soyez le plus bref possible, s'il vous
plaît, M. le député.
M. Jean Garon
M. Garon: M. le Président, il ne s'agit pas de remarques
préliminaires au début de l'étude d'un projet de loi, mais
au début d'une commission qui entend les parties. Je veux dire,
essentiellement, que c'est normal, comme l'a dit le député de
Lac-Saint-Jean, qu'on entende des gens dans une société
démocratique. On n'est pas dans un régime fasciste ou
hitlérien; c'est normal, au Parlement, qu'on entende les gens. Je vous
ferai remarquer qu'en ce qui concerne le projet de loi de 1978 le Conseil des
ministres m'avait demandé de parcourir toutes les régions du
Québec pour entendre tous les intervenants qui le voulaient, dans toutes
les régions du Québec. Pas seulement au Parlement, pendant une
journée, mais dans toutes tas régions du Québec, et tous
ceux qui le voulaient. Ensuite, on a entendu encore d'autres Intervenants
lorsque nous avons fait le dépôt du projet de loi, qui sont venus
se prononcer sur le projet de loi lui-même.
Je vous ferai remarquer que pour les amendement" qui ont
été apportés en juin 1985, il y a eu deux ans de
consultation auprès des organismes et que, sauf l'UPA qui ne nous
félicite jamais, tous les autres organismes mont félicité
pour les consultations. L'UPA avait seulement deux points en demande et, comme
iIs avaient été accordés, j'imagine qu'elle était
contente. Mais l'Union des municipalités du Québec, l'Union des
municipalités régionale de comté, le Barreau du
Québec et la Chambre des notaires ont tous été satisfaits
des consultations qui ont été faites pendant ces deux ans,
à plusieurs reprises d'ailleurs. Tandis qu'ici, II
n'est pas normal de faire des amendements de cette importance sans
consulter les gens. Et ce n'est même pas bon pour les agriculteurs, de
légiférer alors que sont à couteaux tirés Ses
municipalités régionales de comté, les
représentants des agriculteurs et le gouvernement. Je pense qu'au
contraire, cela ne veut pas dire, parce qu'on consulte les gens, qu'on est
d'accord ou pas avec leur opinion. C'est très différent.
Mais je ferai remarquer que lorsque j'ai administré la Loi sur la
protection du territoire agricole comme ministre, j'ai même
été invité à l'assemblée annuelle de l'Union
des municipalités du Québec et j'y ai été
très bien reçu, même si à l'Union des
municipalités, dans la direction, il y avait des changements qu'on
voulait me voir faire dans la loi. J'ai été très bien
reçu, j'ai même eu l'occasion de parler pendant plus d'une heure
et j'ai été assez applaudi. Pourquoi? Parce que dans une
société civilisée, il est normal que l'Union des
municipalités du Québec, l'Union des municipalités
régionale de comté et l'Union des producteurs agricoles soient
entendues concernant un projet de loi comme celui-là et d'autres
aussi.
Le ministre, dans ses exposés, a dit que l'ancien projet de loi,
en 1978, n'avait pas fait de mise en valeur. Je regrette. Tout le monde qui est
conscient sait à quel point, à partir de 1978, il y a eu un
changement, au Québec, en termes de développement agricole
à l'aide des politiques de développement agricole. Tout le monde
avait convenu, à ce moment-là, que c'était ça qui
l'accompagnerait et qu'on aurait des politiques de développement
agricole si on protégeait les terres agricoles. Sauf que celui qui les a
mises de côté depuis quil est arrivé au gouvernement, c'est
le ministre actuel. Qu'il s'agisse des politiques de développement
où, actuellement, on accepte d'agrandir des fermes existantes mais sans
nouveaux projets de développement, ou encore de la réduction des
montants pour les programmes de développement agricole, pour lesquels ii
y avait autour de 130 000 000 $ de subventions, pour le développement de
la production. Ils sont aujourd'hui en bas de 100 000 000 $, malgré
l'inflation, malgré tout ça. Cela a apporté des
changements.
La production céréalière qui était de 800
000 tonnes, en 1978, grâce à ces politiques de
développement, était rendue à 2 600 000 tonnes, en 1985,
c'est-à-dire plus que trois fois plus. Cela a pris de l'acréage
pour le faire. Cela a pris l'utilisation de sois zonés agricoles. Une
politique d'élevage du veau de grain, il n'y en avait pas en 1976. Elle
a commencé en 1978. On était rendus à 58 000 veaux lourds
élevés, en 1984, et à 100 000, en 1985: de zéro, en
1977 ou 1978, à 100 000, en 1985. Cela a pris de I'acréage aussi.
Cela a pris de l'alimentation pour faire ça. L'autosuffisance qui
était - globalement, parce que je n'ai pas le temps, le Président
m'a demandé d'être le plus bref possible - seulement de 47 %, en
1976, était rendue à 75 %, en 1985.
Vous irez dans n'importe quel pays au monde et vous passerez, entr8 1977
et 1985, de 47 % d'autosuffisance à 75 %; on vous dira partout que c'est
un miracle économique. C'est ça qui s'est passé au
Québec.
M. Houde: Pas dans le porc. Cela ne dérange pas
ça.
M. Garon: Et je vais vous dire - parce que le ministre...
M. Houde: Le député de Berthier.
M. Garon: ...le député de Berthier me parie du porc
- qu'on a eu une politique dans le domaine du porc. Mais on n'a pas dit aux
gens, comprenez-vous, qu'on monterait les minimums pour ne pas assurer les
petits, pour économiser et, après ça, qu'on
enlèverait les maximums pour assurer les gros au maximum. J'ai
remarqué que, même si I'UPA, dans le temps, avait donné son
appui, dans le journal, par après, j'ai vu que l'appui a
été retiré, il n'y a pas eu beaucoup de brassage, mais
j'ai remarqué que l'appui avait été retiré.
Peut-être que l'appui avait été donné trop
rapidement parce qu'il n'est pas normal non plus, là-dedans, de ne pas
avoir de politique pour les petits, de moins en moins pour les petits et d'en
avoir une totale pour les plus gros, sans limite pour l'assurance. On aura des
questions à poser éventuellement là-dessus, à
savoir comment est-ce que va coûter, l'assurance, pour tel et tel
producteur par rapport à tel petit producteur? Comment ça va
coûter d'assurance?
Je vais vous donner le résultat net, depuis que le nouveau
gouvernement est !à, alors qu'il n'y a pas de politique de
développement. Le résultat apparaît, par exemple. Il va
apparaître de plus en plus. En 1985, 'à y avait en moyenne, au
Québec, par année, 85 100 emplois. On sait que la production se
fait par deux formes: le travail et le capital. Tous les économistes
reconnaîtront qu'il y a deux grands facteurs de production: le capital et
le travail. Voyons ce que ça donne, maintenant, sous le nouveau
gouvernement, alors qu'on a enlevé les politiques de
développement: 85 100, en 1985; 2900 emplois de moins, en moyenne, en
1986; 5900 de moins, en moyenne, en 1987. Je viens justement de recevoir la
revue de l'emploi au Québec de décembre 1988, je l'ai
reçue aujourd'hui môme à mon bureau, il y en a 7000 de
moins, en 1988. Ce sont des chiffres encore tout chauds. Donc, de
décembre 1987 à décembre 1988, il y a 13 000 de moins dans
l'agriculture, au Québec. Vous savez, je prendrais mon temps avant de
féliciter le gouvernement devant ces résultats. En termes
d'emploi, ça veut dire exactement 15 800 emplois de moins, en moyenne,
par année, entre 1985 et 1988. (16 heures)
En 1985, il y avait 85 100 emplois au Québec en moyenne; en 1988,
69 300. Quand le
ministre parle des chiffres de l'emploi, il est mieux de ne pas trop
parler des chiffres récents parce qu'il va s'apercevoir que l'emploi est
beaucoup moins occupé dans l'agriculture. Selon les chiffres du
gouvernement publiés aujourd'hui, il y en a maintenant 69 300, au
gouvernement du Québec, ministère de la Main-d'Oeuvre et de la
Sécurité du revenu, direction de la recherche.
Si vous regardez dans le domaine des Investissements, côté
capital, vous voyez qu'avant 1980-1985, bon an mal an, c'était autour de
600 000 000 $ . On a môme vu 664 000 000 $, en 1984. Les investissements
cette année, c'est 425 000 000 $; l'an dernier, 475 000 000 $. On est
rendus, actuellement, en moyenne, pour les deux dernières années,
1987 et 1988, à 450 000 000 $. On est loin des 600 000 000 $ des
dernières années, du gouvernement du Parti
québécois. Qu'on ne vienne pas dire qu'il n'y avait pas de
politique de développement parce que ça paraît dans
l'Investissement aussi. Quand un secteur Investit moins, c'est parce que les
perspectives sont moins bonnes.
Si on regarde dans les écoles aujourd'hui, dans les
cégeps, le nombre de jeunes qui vont étudier dans l'agriculture,
on se rend compte que les jeunes vont de moins en moins étudier dans le
domaine agricole. J'en parlais justement à quelqu'un, la semaine
dernière, qui me disait: Aujourd'hui, les jeunes ne veulent plus
étudier l'agriculture. Pourquoi? Parce que les perspectives du
gouvernement actuel ne sont pas bonnes. Qu'on ne vienne pas nous dire,
actuellement, qu'on vient rétablir la sécurité quand il y
a de moins en moins d'emplois, de moins en moins d'investissements et de moins
en moins de perspectives.
Que l'UPA soit satisfaite ou non, c'est à elle de le dire. C'est
une autre affaire. Mais, quand on regarde les données de
développement du secteur économique, actuellement, avec les
baisses de revenus qu'il y a eues cette années, en 1988, et celles qui
sont anticipées en 1989, je pense bien que les cultivateurs, à
moins d'être masochistes, ne peuvent pas être très heureux.
C'est pourquoi on ne peut prétendre donner de leçons au
gouvernement du Parti québécois ou au gouvernement qui
était là entre 1976 et 1985; je pense que le bilan est facilement
comparable en termes de développement et en termes de changements dans
le domaine agricole au Québec. Tout le monde convient qu'il y a eu des
changements, mais ça a d'abord été basé sur une Loi
sur la protection du territoire agricole et un secteur qui devait être
développé.
Cette loi, le député de Lac-Saint-Jean l'a dit, pose
beaucoup plus d'inquiétudes qu'elle ne donne de réponses. Elle
pose autant d'Inquiétudes au secteur municipal qu'au secteur agricole.
Dans le secteur agricole, nous avons aussi déploré qu'il y ait
eu, dans le journal, un appui à cette loi de la part de l'UPA, alors
qu'elle n'était même pas publique. Je vais vous le dire
franchement - je n'ai jamais parlé dans le dos de l'UPA, j'ai toujours
parlé franchement - on a trouvé ça anormal. On ne l'avait
pas étudiée, elle n'était pas encore publique, l'UPA ne
l'avait donc sûrement pas étudiée non plus, elle ne l'avait
certainement pas eue comme telle, comme loi. Or, on sait ce qu'est une loi
quand on l'a vue, quand on l'a regardée et étudiée. On ne
peut pas la trouver bonne avant de l'avoir vue. Ce n'est pas possible. Il faut
la regarder, il faut l'étudier parce que, dans une loi, les mots
comptent, les virgules comptent, l'expression compte, le fonctionnement compte
et la mise en vigueur de la loi compte. Cela prend au moins quelques jours
d'étude. C'est pourquoi on a été un peu surpris, du
côté de l'Opposition, de voir que l'appui de l'UPA est venu aussi
rapidement, comme dans le secteur de la stabilisation du porc lorsqu'on a
augmenté les minimums et qu'on a fait disparaître les maximums,
quelques semaines après. On n'était pas habitués à
ce comportement. Il nous semble donc que l'UPA a changé sa philosophie,
mais, quant à nous, nous n'avons pas changé nos principes Merci,
M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lévis. M. le député de
Jonquière, vous avez quelques courts commentaires?
M. Francis Dufour
M. Dufour: Juste quelques mots, en fait, pour dire aussi, avec
mes collègues, qu'on est heureux, mais pas nécessairement pour
les mômes raisons que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries
et de l'Alimentation, que ces consultations aient lieu C'est le sens de notre
opposition, au départ, à ce projet de loi. Je pense que le fait
qu'on ait obtenu satisfaction et surtout que les groupes aient obtenu
satisfaction, nous prouve, d'abord, le bien-fondé de notre
argumentation, mais surtout qu'en démocratie, il faut faire respecter
ses droits. À mon point de vue, c'était une façon de le
faire puisque aujourd'hui, on aura l'occasion et la chance d'échanger
des avis avec ces groupes très Importants de notre
société.
Mon collègue de Lévis qui a été
l'instigateur, le père fondateur ou le créateur de la loi 90
concernant la protection du territoire agricole a pu s'exprimer. Je peux vous
dire que celui qui vous parle a travaillé énormément aussi
dans la loi 125. Les principes qui entrent en ligne de compte et qu'on a
à étudier aujourd'hui, ou qu'on aura à étudier dans
ce projet de loi, sont ces deux oppositions qu'on sent bien. D'abord, la Loi
sur l'aménagement et l'urbanisme, et la Loi sur la protection du
territoire agricole. Dans l'argumentation qu'on a présentée avant
les fêtes, on a eu l'occasion d'Insister très fortement pour que
les groupes viennent parler de cela. C'était l'une des raisons
fondamentales, pour lesquelles on devait entendre ces groupes. Cela nous
permettra peut-être d'harmoniser quelque peu ces deux lois qui peuvent
être en opposition,
à première vue. D'une part, si les municipalités
ont l'aménagement du territoire, on comprendra, d'autre part, que la
protection du territoire agricole a pour fonction fondamentale de
protéger l'agriculture, les agriculteurs dans !eur vécu.
C'est une occasion, à mon avis, importante qui se présente
à nous, par ce projet de loi, qui pourrait peut-être rapprocher
tes parties. Mais, il y a aussi des oppositions fondamentales. Je veux juste
vous rappeler le projet de loi 82 où on avait dit, à ce
moment-là, que tout le monde était heureux et que tout le monde
était content. Le temps nous a donné raison, car cette loi 82 a
été très contestée au fii du temps et même
inapplicable la plupart du temps. Ce qui nous amène à d'autres
projets de Soi. Je pense, qu'en ce qui concerne les lois, on gagne parfois
à vouloir retarder l'adoption des projets de loi parce qu'on les rend
meilleurs et à la satisfaction des parties. On serait d'autant plus
contents si on amenait des rapprochements ou une meilleure coordination dans
l'aménagement du territoire, parce qu'on ne peut subordonner les uns aux
autres.
Je ne pense pas que l'agriculture doit être au-dessus de tout, ni
que les municipalités doivent être au-dessus de tout le monde.
Mais il doit y avoir un moyen de coordonner et d'amener les différents
Intervenants à mieux s'accepter ou à mieux vivre ensemble. Je
pense que c'est le travail des législateurs. Si cette commission
parlementaire pouvait nous amener dans ce sens, j'en serais très
satisfait, en dehors des choses que je pourrais ajouter.
Auditions
Le Présiderai (M. Richard): Merci, M. te député de
Jonquière. Je demanderais à l'Union des producteurs agricoles de
prendre place, s'il vous plaît. M. le président, M. Jacques
Proulx, s'il vous plaît, vous présenterez les gens qui vous
accompagnent pour le bénéfice des membres de la commission.
UPA
M. Proulx (Jacques): Merci, M. le Président. Je pourrais
vous présenter immédiatement le premier vice-président, M.
Pierre Gaudet, à ma droite; M. Jean-Claude Blanchet, directeur
générai de l'UPA; M. Michel Lord, conseiller juridique, et Mme
Suzanne Cloutier, qui travaille au service de l'aménagement à
I'UPA.
M. le Président, je voudrais remercier la commission, dans un
premier temps, de nous recevoir pour nous permettre d'exprimer notre point de
vue relativement au projet de loi 100. Comme vous le savez tous,
j'espère, Î'UPA est l'organisme officiel qui représente les
47 000 producteurs et productrices agricoles du Québec.
L'agriculture et la forêt contribuent à 60 % du produit
intérieur brut du secteur primaire de l'économie
québécoise, ainsi qu'à 72 % des emplois
créés dans ce secteur. L'agriculture emploie directement 76 000
personnes, et l'exploitation forestière, près de 10 000
personnes. L'agriculture constitue certes une activité essentielle qui a
pour objet d'assurer l'alimentation des hommes, et son dynamisme s'exerce au
bénéfice de toute Sa collectivité. L'UPA et ses organismes
affiliés ont pour but de défendre et de promouvoir les
intérêts économiques, sociaux et moraux de ses membres. On
comprendra donc que la protection du sol agricole et les conditions d'exercice
de l'agriculture constituent une préoccupation tout à fait
centrale de l'UPA.
Depuis longtemps, les producteurs et productrices agricoles du
Québec sont conscients de la nécessité de protéger
les sols contre leur utilisation à des fins non agricoles. La
rareté relative des sois agricoles québécois et les
pressions immenses auxquelles ils sont soumis font en sorte qu'ils sont
sérieusement menacés. Loin de diminuer, les pressions de
développement, souvent anarchiques, ne cessent d'augmenter. On observe
même depuis quelques années une intensification des pressions, non
seulement dans les régions très urbanisées mais
également dans les régions de plus en plus
éloignées des grandes concentrations urbaines, en raison
notamment des besoins de villégiature sans cesse grandissants.
C'est pourquoi la protection accordée aux 6 800 000 hectares de
sols québécois est aujourd'hui plus que jamais nécessaire
et essentielle. Faisons une parenthèse pour rappeler que les sois
potentiellement aptes à l'agriculture comptent pour 7 800 000 hectares
et qu'ils représentent à peine 5 % du territoire
québécois. Les sois agricoles zones correspondent donc, à
peu de choses près, aux seuls sois agricoles cultivables du
Québec. En ce sens, l'UPA croit donc qu'il n'y a pas surzonage au
Québec et que le zonage agricole, tel qu'il existe, favorise un
développement rationnel qui contribue à protéger nos sois
agricoles en tant que ressource collective.
Par ailleurs, ces pressions croissantes et maintenant
disséminées sur tout le territoire québécois font
en sorte que les producteurs et productrices agricoles sont de plus en plus
sujets à des situations conflictuelles en raison d'une augmentation des
usages peu ou pas compatibles avec l'agriculture, il est donc impératif,
à l'heure actuelle, d'ajuster les instruments à notre disposition
aux réalités présentes.
Lors de son 63e congrès générai en 1987, l'UPA a
adopté certaines orientations en matière de protection et
d'utilisation du territoire.
Premièrement, que l'ensemble du territoire agricole du
Québec doit être protégé par une loi qui
protège non seulement les terres cultivées mais également
les terres cultivables de même que les boisés et les
érablières.
Deuxièmement, que l'application de cette loi doit continuer
d'être faite par un organisme provincial décisionnel, relevant du
ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation et
responsable d'émettre les autorisations et de
délivrer des permis, et que cet organisme se préoccupe de
travailler en consultation avec l'UPA. Troisièmement, que le
gouvernement doit maintenir et continuer à adopter des programmes et des
mesures en vue d'assurer le développement et la rentabilisation de
l'agriculture, l'assainissement et l'amélioration des sols et la mise en
valeur des terres en friche.
Ce même congrès a également adopté certains
éléments de politiques en matière d'aménagement du
territoire et de développement de l'agriculture. Le congrès de
1988 a, quant à lui, adopté une résolution visant à
accorder clairement la priorité absolue à l'agriculture en zone
verte et que ce droit ait préséance sur toute
réglementation municipale, régionale, provinciale ou autre.
C'est donc en faisant référence au contexte actuel
québécois de pressions sur les sois et en fonction des
orientations et politiques de l'UPA que sera effectuée notre
étude du projet de loi 100. Le projet de loi 100 contient une
série d'amendements à la Loi sur la protection du territoire
agricole. À des fins d'analyse, ces amendements seront regroupés
en trois volets principaux, c'est-à-dire le droit de produire, les
secteurs exclusifs et les changements administratifs.
Le droit de produire. C'est sous ce titre que l'on peut désigner
le volet le plus innovateur du projet de loi et sûrement le plus attendu
des producteurs et productrices agricoles du Québec. Toutes les
dispositions relatives à ce droit de produire auraient pu faire l'objet
d'une loi-cadre, d'une loi spécialement créée à
cette fin, à l'exemple du "Right to farm" ontarien et d'autres lois du
genre qu'on retrouve un peu partout en Amérique du Nord, notamment dans
40 États américains et, plus près de nous, au
Nouveau-Brunswick. Mais le législateur québécois a choisi
d'inclure ces dispositions dans une loi déjà existante, qui
contenait déjà, à ses articles 98 et 100, d'importantes
dispositions à cet effet. Bien que les demandes du 63e congrès
général à ce sujet fassent plutôt mention d'une
législation spécifique, nous croyons que la formule
proposée répond bien aux attentes des producteurs.
Avant d'examiner les principaux éléments de ce droit de
produire, nous tenons à préciser que la définition
d"activités agricoles', Introduite dans ce volet, devrait être
formulée de telle sorte qu'il soit évident qu'elle ne couvre
aucunement les usines de transformation des produits agricoles.
Le principe de réciprocité. Ce principe de
réciprocité à l'égard des normes environnementales
a été réclamé par les producteurs et productrices
agricoles du Québec. En le rattachant ainsi à un chapitre sur les
activités agricoles plutôt qu'à un règlement
éventuel du MENVIQ, II permet d'assurer une protection uniforme à
toutes les exploitations agricoles, animales ou autres. Ce principe
était en fait nécessaire à la survie des entreprises
agricoles et à un voisinage harmonieux. La solution proposée
devrait permettre l'atteinte de ces objectifs, sans brimer les droits de qui
que ce soit. Ainsi, dans la mesure où cette disposition n'affectera pas
le développement Futur des exploitations déjà
établies, l'UPA est donc satisfaite de retrouver cet
élément du droit de produire dans le projet de loi 100.
Le principe d'immunité. Ce principe répond
également à une demande des producteurs et productrices agricoles
et était rendu nécessaire pour contrer les poursuites judiciaires
auxquelles faisaient ou auraient pu faire face certains producteurs
exerçant pourtant leurs activités dans les règles de
l'art.
L'UPA tient à préciser qu'elle ne voit pas dans ces
articles une immunité absolue qui exempterait totalement ses membres du
respect de toute loi ou réglementation en vigueur. Il s'agit
plutôt d'une mesure visant à s'assurer que les poursuites contre
des agriculteurs ne puissent s'exercer inconsidérément, sans
fondement réel, comme trop souvent on l'a vu dans le passé.
Il importe de rappeler encore ici qu'une telle Immunité existe
déjà un peu partout en Amérique du Nord. À
l'examen, l'UPA constate que la protection offerte est disponible pour tous les
agriculteurs et qu'elle s'applique indépendamment de qui - agriculteur
ou résident - était là le premier. L'UPA croit que, sans
assurer une immunité totale, ces articles complètent les articles
98 et 100 de la môme loi. L'UPA est donc favorable à ces
amendements, tels que proposés.
Le commissaire aviseur. Les producteurs et productrices agricoles
avaient aussi réclamé que les municipalités ne puissent
pas, dans leurs plans et règlements d'urbanisme, interdire des
pratiques, usages ou constructions agricoles en zone agricole. Les pouvoirs qui
leur sont conférés en la matière sont demeurés
intacts. Jusqu'à maintenant, et d'ores et déjà, on
retrouve des réglementations municipales contraignantes pour
l'agriculture.
L'UPA considère que la nomination d'un commissaire aviseur
pourrait avoir en effet dissuasif intéressant pour limiter dans l'avenir
les réglementations municipales qui gênent la pratique des
activités agricoles. Quant aux règlements déjà
adoptés, leur examen par un Intervenant neutre et impartial saura
sûrement mener à des solutions satisfaisantes pour l'ensemble des
Intervenants concernés.
Ainsi, malgré les pouvoirs de réglementation très
vastes qui demeurent attribués aux municipalités locales ou
régionales, l'UPA est satisfaite de l'amendement proposé, qui
devrait permettre l'élimination des contraintes Indues dans la poursuite
des activités agricoles normales en zone agricole.
Le fonds de défense. Cet élément est très
associé au principe d'Immunité et permet son
"opérationalisation". Pour l'UPA, si un producteur exerçant ses
activités selon les règles de l'art
n'encourt pas de responsabilité face à un tiers, il en
découle que, lors des procédures contre lui, il n'ait pas
à défrayer seul les coûts de sa défense.
L'UPA croit que les cas visés ne présentent aucune
analogie avec ta situation d'un pollueur payé pour polluer ou pour
assumer sa défense, tel que certains groupes ou organismes le
soutiennent. D'autre part, ce sont essentiellement des individus qui seront
poursuivis, avec des revenus et des ressources limités et non des
corporations ou compagnies aux ressources juridiques et financières
importantes.
D'autre part, il s'agira d'individus exerçant leurs
activités agricoles selon les règles de l'art, ce qui est bien
loin de la notion de pollueur, à moins qu'en soi, les odeurs, bruits et
poussières générés par l'activité agricole
ne constituent, aux yeux de certains, des sources de pollution de l'air par
leur simple existence, môme en concentrations infimes.
Il faut admettre qu'il s'agit ici d'une question de perception et que
s'il est relativement facile de mesurer les atteintes à la santé
ou à la sécurité, les notions de bien-être et de
confort qui sont ici en cause sont beaucoup plus subjectives. Où
faudra-t-il tirer la ligne? Nous croyons que ce fonds spécial constitue
un complément essentiel à la mesure d'immunité qui
apparaît également au projet de loi. Nous sommes favorables
à une telle mesure, mais nous aurions souhaité que ce fonds
puisse être utilisé pour remettre en cause certaines
réglementations municipales, dans certains cas particuliers, comme, par
exemple, lorsque le commissaire aviseur aura rendu un avis défavorable
contre une réglementation d'une municipalité et que cette
dernière devra être traduite devant les tribunaux pour l'obliger
à modifier ladite réglementation.
Les secteurs exclusifs. Nous sommes Ici en présence d'une
modification importante du concept de zonage, tel qu'il a toujours
existé. Par-dessus un zonage fondamental qui préserve le sol
agricole, une ressource rare et inextensible au Québec, selon les termes
même du ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation, se rajoute aujourd'hui une notion de protection accrue pour les
sols à hauts potentiels. L'UPA croit qu'il est primordial que les
meilleurs sols agricoles du Québec fassent l'objet d'une protection
supplémentaire, car on a vu récemment qu'ils suscitent beaucoup
la convoitise. L'UPA considère qu'il est légitime que
l'application des secteurs exclusifs prévus ne survienne qu'une fois
terminée la révision des zones agricoles présentement en
cours et ce pour une question d'équité autant pour les
producteurs agricoles que pour les MRC engagées dans la démarche.
Nous souhaitons cependant que la notion même de secteurs exclusifs ne
soit pas utilisée par anticipation dans la révision en cours,
autant par la CPTAQ que par les MRC concernées, car ceci pourrait avoir
un impact très Important en termes de superficies
protégées.
Las changements administratifs. Nous regrouperons sous un même
volet diverses modifications qui ont en commun de modifier le fonctionnement
administratif de la CPTAQ. L'UPA reconnaît la difficulté
d'évaluer avec précision l'effet de ces modifications. En effet,
tout dépendra de l'application qui sera faite des nouvelles
dispositions, dont le caractère plutôt générai
permet une grande latitude d'interprétation ou une diversité de
résultats. C'est à ses fruits qu'on reconnaît l'arbre,
comme on le dit si justement chez nous. L'UPA est confiante que les
modifications proposées Iront dans le sens de l'objectif de la loi, tel
qu'il apparaît à l'article 3, et qui spécifie que la loi a
pour fonction d'assurer la protection du territoire agricole. L'UPA surveillera
avec le plus grand intérêt l'application de la portée
réelle des nouvelles dispositions et sera alors en mesure de faire une
évaluation plus précise des changements apportés et, s'il
y a lieu, des actions à entreprendre pour compléter ou remanier
les modifications actuelles.
Nous aimerions apporter toutefois ici certains commentaires ou
interrogations relatives à quelques-uns de ces changements. La refonte
des critères de décision. Deux critères en particulier
nous semblent problématiques: l'utilisation actuelle du lot et le type
et l'intensité d'agriculture. Il faudra avant tout éviter que cet
article ne soit utilisé pour dézoner des terres en friche. Il est
évident qu'il s'agit ici d'une question d'application plutôt que
de rédaction de la loi, mais nous soumettons cet élément
à votre attention et sommes confiants que les objectifs bien
différents des deux démarches, protection fondamentale ou
protection accrue, ne seront pas confondus par les commissaires ayant à
juger de ces questions. Nous espérons que la protection accrue des
meilleurs sols se s'obtiendra pas au détriment des sols agricoles de
moindre potentiel ou encore par la perte actuelle de très bons sols, en
prévision du jour où lis pourraient devenir exclusifs.
Par ailleurs, au moment de l'élaboration des critères
précis de délimitation des secteurs exclusifs, l'UPA souhaite
être associée de près à tout processus afin de
mettre en place un outil, un instrument qui soit, d'une part, très bien
adapté aux réalités des sols et des producteurs
québécois et qui, d'autre part, assure la protection des
très bons sois, partout où elle est nécessaire. À
cet égard, le fait d'utiliser un critère unique, fondé sur
une classification ancienne et ne tenant pas compte des réalités
et techniques actuelles nous apparaît plutôt restrictif et nous
considérons plutôt ce critère comme une base de discussion
à adopter aux contextes régionaux. Quant à la
délimitation même, municipalité par municipalité,
l'UPA entend s'associer de près à la démarche par le biais
de ses fédérations régionales et de ses syndicats de base.
L'UPA aborde donc l'application éventuelle de ces articles avec
ouverture, disposée à
s'impliquer activement à toutes les étapes de leur
réalisation.
Deuxièmement, les conséquences d'un refus pour le
demandeur. Il est Impératif que ce critère demeure facultatif. De
plus, il faudra s'assurer, puisqu'il va à l'encontre de l'objectif
même de la loi, qu'il revête un poids relatif moindre dans
l'évaluation au mérite, comparativement aux motifs agricoles.
La notion de conformité par la municipalité. L'UPA craint
que cet article puisse conduire à refuser l'inclusion d'un producteur
qui, par exemple, aurait été exclu par décret d'une zone
agricole, sous prétexte qu'il se situe dans une zone d'affectation
municipale qui prévoit une autre affectation. En ce sens, la
réglementation municipale deviendrait prépondérante par
rapport à la loi provinciale. Nous souhaitons que cet article soit
interprété favorablement à l'agriculture dans de tels cas
d'Inclusion.
En conclusion, M. le Président, l'UPA est satisfaite des
principes du projet de loi 100 qui raffermissent la protection du territoire
agricole comme ressource collective, mais elle considère que ses effets
seront grandement conditionnés par l'application qui en sera faite. Nous
considérons qu'il y a urgence à sécuriser les producteurs
et productrices agricoles, surtout à ce moment précis où
les plans ou règlements d'urbanisme sont en cours d'élaboration.
À cet égard, nous tenons à préciser que l'UPA est
tout à fait favorable à la démarche de planification de
l'aménagement du territoire présentement amorcée car elle
devrait amener un développement contrôlé de l'urbanisation
et éviter les développements anarchiques et en sauts-de-mouton,
extrêmement préjudiciables au maintien et au développement
de l'agriculture. Nous entendons, d'ailleurs, participer activement à
l'aménagement et au développement de nos régions, de
concert avec les partenaires concernés. Mais il demeure que certaines
étapes de cette planification peuvent Introduire des contraintes indues
et qu'il convient d'en limiter les effets le plus possible.
Par ailleurs, l'UPA constate que les mesures de remise en valeur des
terres en friche, réclamées par les producteurs et productrices
agricoles comme mesures complémentaires aux mesures de protection des
sols, sont absentes des modifications apportées à la loi. Ces
mesures sont toutefois annoncées par le ministre de I'Agriculture, des
Pêcheries et de l'Alimentation, pour les mois à venir et nous
espérons qu'elles sauront répondre aux objectifs
recherchés, c'est-àdire contribuer au développement
agricole tout en réduisant la spéculation Intensive qui existe
encore aujourd'hui. Nous comptons donc sur la collaboration de tous pour
adopter ce projet de loi le plus rapidement possible afin de procurer à
la classe agricole les outils nécessaires à l'exercice de ses
activités. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le président
de l'UPA. Maintenant, M. le ministre, avez vous des questions?
M. Pagé: Certainement, M. le Président, je vous
remercie. Je voudrais remercier M. Proulx, M. Gaudet, M. Blanchette, M. Lord et
Mme Cloutier qui sont avec nous, cet après-midi. L'Union des producteurs
agricoles est avec nous parce que j'ai accepté la demande
formulée par mes collègues, par mon leader et aussi par
l'Opposition d'entendre en particulier le milieu municipal qui demandait
d'être entendu ici. J'apprécie le mémoire qui est
présenté par l'Union des producteurs agricoles et l'expression de
satisfaction à l'égard du projet de loi 100. Vous comprendrez, M.
le Président, que ce n'est pas le premier échange de points de
vue que j'ai sur cette question avec l'Union des producteurs agricoles, parce
que, tel que M. le président le disait au nom des membres de l'UPA, il
est très clair dans mon esprit que la ressource sol est une ressource
non renouvelable et que, par surcroît, cette ressource propice à
l'agriculture représente un pourcentage très faible de la
superficie totale du territoire du Québec et représente aussi un
territoire qui est sujet, comme on en convient... Tous les observateurs sont
unanimes à le constater, les sois agricoles sont
régulièrement regardés avec un oeil très
intéressé, qui n'est pas nécessairement en conciliation
avec le développement de l'agriculture au Québec.
Vous Indiquez dans votre mémoire votre satisfaction à
l'égard du droit de produire, par les notions très claires qui
apparaissent à la page 5 de votre document et qui viennent, somme toute,
confirmer la pertinence de la décision gouvernementale d'adopter de
telles mesures. Pour nous, il devenait impérieux et nécessaire
d'établir des règles du jeu modifiées, des régies
du jeu qui sont Interprétées par certains, notamment par mes amis
du monde municipal, comme étant un droit qui peut leur sembler
exorbitant. Mats, je demeure convaincu que ces dispositions établiront,
lorsque la loi sera adoptée, des règles du jeu qui conduiront
très certainement à de meilleures conditions d'harmonie et
à de meilleures relations entre le milieu agricole et le milieu
municipal. Cette norme de réciprocité, tel que je l'indiquais
dans mes commentaires préliminaires, tout à l'heure, qu'est-ce
que c'est? C'est très simple. C'est que jusqu'à maintenant, les
normes édictées par le ministère de l'Environnement, soit
dans le cadre de règlements, soit dans le cadre de directives, viennent
toujours contraindre le producteur agricole. (16 h 30)
Si un producteur agricole décide de produire, par exemple, dans
une production animale donnée, il doit s'éloigner d'une
résidence, d'un milieu d'habitation le plus près, de tant de
mètres ou de tant de pieds, selon le nombre
d'unités animales. Et ces normes, finalement, se sont toujours
appliquées à l'encontre du producteur ou de la productrice
agricole. Une fois que !a loi sera adoptée - l'espère, dès
le 16 mars prochain - les règles du jeu qui s'appliqueront, une fois que
la loi entrera ers vigueur, sont très simples: toute personne
désirant se construire, en vertu d'un droit, en zone agricole, devra
respecter les mêmes distances.
C'est donc dire des règles qui s'appliqueront
réciproquement à un producteur ou à un
propriétaire, des règles qui ne seront plus
unilatéralement dirigées à rencontre du producteur mais
qui s'appliqueront de façon bilatérale. J'apprécie
évidemment, et je ne suis pas surpris, ça va de soi, l'appui que
vous nous donnez en ce sens.
Le fonds de défense. On sait qu'une personne peut, en vertu d'un
droit qu'elle a, construire en zone agricole, implanter un immeuble. Et j'ai
vu, moi, souventefois, depuis 1985, des gens qui sont venus s'installer en zone
agricole, et une fois installés, porter plainte contre l'activité
même, le gagne-pain, le vécu quotidien de celui ou de celle qui
est son voisin et pour qui c'est son investissement, pour qui c'est
l'uvre de sa vie, avec des déboursés très
appréciables, avec des contraintes, des inquiétudes, des frais
judiciaires, etc. Et il va de soi que la mise en place d'un fonds de
défense est tout à fait légitime et il faut, bien convenir
que le rendement sur le capital investi en agriculture, est bien en
deçà du rendement normalement prévisible ou attendu que
l'investissement qui est fait, soit dans le secteur manufacturier ou dans
d'autres secteurs de notre économie.
D'autant plus que cette norme d'immunité - et là, je veux
être très clair - n'implique pas, ni de près ni de loin, si
je peux utiliser le terme, une caution du gouvernement pour voir à la
défense de personnes, de producteurs ou de productrices agricoles qui ne
respectent pas les règles de l'art et qui ne respectent pas les
règles de l'environnement.
Sauf qu'il faut appeler les choses par ce qu'elles sont. Tout comme on
le sait, l'article 20 de la Loi sur l'environnement prévoit, accorde le
droit à toute personne, dès le moment où elle se sent
affectée dans son confort, de porter plainte pour demander aux tribunaux
que l'activité qui fait l'objet de la plainte cesse automatiquement.
Cela va de soi, M. le Président, qu'en zone agricole, il y a parfois un
peu de poussière, ii y a parfois un peu de bruit lorsqu'on fait
fonctionner un séchoir à foin à 7 heures le matin. C'est
sûr que ça cause un peu de bruit, c'est sûr que ça
peut déranger des gens qui sont venus s'Installer dans le voisinage.
Mais pour notre gouvernement, et je pense, pour une très grande
majorité de citoyens, l'agriculture doit être
considérée, non seulement comme importante, mais aussi comme
authentique, c'est-à-dire qu'elle doit se poursuivre, être
conduite dans certaines zones. Et autant les gens ne sont pas
légitimés, je pense, de vouloir se construire, d'implanter leur
résidence dans un parc industriel, autant ils doivent s'interroger une,
deux et trois fois, avant d'aspirer à aller se construire ou à
implanter leur résidence en milieu agricole. Et c'est d'ailleurs ce qui
a créé les problèmes vécus par plusieurs
producteurs.
Dans votre mémoire, vous vous interrogez à certains
égards, M. le président, au nom de vos membres, de vos adjoints
qui sont avec vous. Vous dites souhaiter qu'il ne faudrait pas que la
protection accrue qui sera conférée aux secteurs exclusifs, une
fois que la loi sera en vigueur, soit faite et réalisée au
détriment des autres sols zonés agricoles. Je veux vous
réitérer ce que je vous ai déjà indiqué et
formuler à nouveau ce que j'ai déjà formulé ici
à l'Assemblée nationale, en commission parlementaire: pour nous,
M devenait impérieux de revoir les critères - et un des
éléments précis sur lequel vous vous interrogiez
tantôt et pour lequel je vais vous répondre, je ferme la
parenthèse - lesquels se retrouvaient antérieurement dans trois
articles différents de la loi. Le projet prévoit très
clairement la refonte de ces critères dans un seul article où la
loi dira que la commission, non pas "peut", mais "doit" prendre en
considération des critères bien identifiés et que la
commission, à d'autres égards, pour d'autres critères,
sera limitée uniquement à pouvoir les prendre en
considération tout comme dans le texte original ii y a des dispositions
très claires qui prévoient que la commission ne pourra pas tenir
compte ou prendre en considération tel autre critère. Nous sommes
persuadés, de ce côté-ci de la Chambre, que ces
précisions conduiront à davantage de régularité
dans l'appréciation qui sera faite par les commissaires de la CPTAQ et,
par surcroît, par le tribunal qui siégera en appel en
matière de protection agricole. Nous sommes persuadés que ces
critères révisés par le projet de loi amèneront
davantage de constance et de régularité dans
l'appréciation des instances chargées de voir à
i'application de la loi et ce, au grand bénéfice de l'agriculture
et de l'agro-alimentaire en général.
Je voudrais vous rassurer encore aujourd'hui en vous disant qu'il n'est
pas du tout question, en ce qui nous concerne, d'apprécier des sols, qui
ne seront pas dans !e secteur exclusif, comme étant des sois de seconde
catégorie ou de seconde appréciation. Au contraire, l'ensemble
des sols zonés agricoles sont importants et d'ailleurs, c'est dans ce
sens-là que le projet doit être lu, comme je l'indiquais, en
fonction d'une véritable politique de mise en valeur, non pas seulement
quelques dollars ou quelques voeux pieux dans un programme de terre en friche
mais bien plus, avec des cibles et des objectifs bien particuliers qui devront
nous conduire à une augmentation substantielle de notre production de
céréales pour consommation humaine, de nos productions
horticoles, de la production de produits biologiques et de produits
susceptibles
de fournir toutes les médecines douces, aliments naturels, etc.
C'est ce qui sera recherché dans le pian de développement qui
sera déposé par le gouvernement du Québec.
Autre élément, donc sur ce point-là, je veux vous
sécuriser. Vous formulez un commentaire à la page 11. A la page
10 vous indiquez que deux critères en particulier nous semblent
problématiques, l'utilisation du lot et le type de l'intensité
d'agriculture. "Il faudra avant tout éviter que cet article ne soit
utilisé pour dézoner des terres en friche." Je ne veux pas porter
de jugement sur les commentaires du député de Lévis. Je
l'ai trouvé très sévère à l'endroit de ceux
avec qui il a eu le privilège de travailler pendant neuf ans. Depuis que
le projet de loi a été déposé, vous avez eu
l'occasion, M. le président, de me faire part de certaines
inquiétudes au sujet de l'interprétation qui pourrait être
donnée a ce texte. Je peux vous indiquer tout de suite que votre demande
est reçue. D'ailleurs, elle avait été endossée
aussi par la ville de Montréal au moment du comité technique.
Quand mon honorable collègue, député du comté de
Lac-Saint-Jean, indiquait qu'on avait été une semaine sans
siéger en décembre, on n'a pas été une semaine
à regarder par les fenêtres. On n'a pas dormi sur la "switch"
pendant cette semaine-là. Mes adjoints et moi avons passé la
semaine à échanger des opinions avec les gens de l'Union des
municipalités régionale de comté, avec les gens de l'Union
des municipalités du Québec pour tenter de voir s'il était
possible d'en arriver à certains rapprochements, à davantage de
consensus. Dans le cadre de ce comité technique qui a
siégé et qui a débouché sur plusieurs
échanges avec le monde municipal, la ville de Montréal s'est
inscrite en semblable matière et a demandé que cet article soit
modifié. Je vous annonce que cet article sera modifié pour
établir très clairement que l'utilisation actuelle du lot sera
bien encadrée.
À la page 11 de votre document, vous demandez que les
conséquences d'un refus pour le demandeur, comme critère, ne soit
que facultatif par la commission. C'est certain que ça demeurera
uniquement, purement et simplement facultatif. Cela ne sera pas obligatoirement
pris en considération. La notion de conformité, avec les
municipalités, en ce qui concerne le cas où un producteur aurait
été exclus et qu'il veuille être réinclus, je
m'engage à regarder ce qui peut être fait pour renforcir ces
dispositions, avant l'étude du projet de loi article par article qui
viendra demain.
Donc, ces questions, ces Interrogations que vous avez, j'y
réponds de cette façon-ci. Si vous avez d'autres questions plus
particulières à me formuler, il va me faire plaisir d'y
répondre mais, avant de terminer mon commentaire sur le mémoire
de l'UPA, je voudrais remercier ses porte-parole de leur présence Ici,
même s) ce qui a été formulé aujourd'hui l'avait
déjà été dans les échanges constants,
soutenus et continuels que nous avons, comme gouvernement, avec l'UPA. Merci
d'être tel. Merci de l'appréciation que vous faites parce que,
somme toute, ce projet de loi n'a pas été élaboré
sur le coin de la table. Il a été élaboré à
partir d'expériences que vous avez vécues, qu'on a vécues
dans le monde agricole. Je pense que la meilleure sécurité et la
plus probante des garanties de respect complet et Intégral de cette
volonté de protéger nos sols agricoles s'appuient sur le fait que
l'UPA demeurera très vigilante dans l'application de !a loi, C'est tout
à fait souhaitable qu'il en soit ainsi.
C'est le commentaire que j'avais à faire, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le ministre. M. le
porte-parole officiel de l'Opposition, M. Brassard, député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: M. le Président, après avoir eu droit
à un bal exercice d'autoglorification...
M. Pagé: Je suis gentil en début d'année. Ce
n'est pas le cas...
M. Brassard: Je ne sais pas si la ministre a déjà
été enfant de choeur. Je l'ai été pendant plusieurs
années. En tout cas, s'il l'a été, il a sûrement
été longtemps thuriféraire. Le thuriféraire, c'est
celui qui maniait l'encensoir, n'est-ce pas? Sûrement.
Alors, on va passer aux échanges puisqu'il n'y en a pas eu du
côté du pouvoir. Moi aussi, je remercie l'UPA, son
président, les membres de l'exécutif, d'avoir accepté
l'invitation de venir se faire entendre devant la commission. On les a
réclamés pendant plusieurs semaines avant les fêtes sans
succès. Maintenant, c'est chose faite.
J'aborderai d'abord la question du secteur exclusif. Dans votre
mémoire, en page 8, on peut lire ce qui suit, vous l'avez lu
tantôt mais j'y reviens, je le répète. Le dernier
paragraphe: "Nous souhaitons cependant que la notion même de secteur
exclusif ne soit pas utilisée par anticipation dans la révision
en cours autant par la CPTA que par les MRC concernées, car ceci
pourrait avoir un impact très important en termes de superficie
protégée."
Donc, c'est un voeu que vous exprimez, que vous manifestez. C'est qu'il
ne faudrait surtout pas que le concept de secteur exclusif soft pris en compte
dans le processus de révision des zones agricoles actuelles. Pourquoi?
Parce que, dites-vous, ça pourrait avoir un Impact Important en termes
de superficie protégée. Je comprends ça de la façon
suivante: à partir du moment où dans une MRC vous avez une bonne
idée de ce que pourrait être le secteur exclusif, donc le vert
foncé, et une bonne idée par conséquent aussi en
contrepartie de ce que pourrait être le vert pâle, vous laissez
entendre que les MRC pourraient être tentées, dans le processus de
révision, de réclamer du territoire dézoné dans
le
vert pâle. Cela aurait un effet négatif, évidemment,
en termes de superficie protégée. C'est comme ça que je
comprends les choses. (16 h 45)
Plus loin, vous dites, à la page 9: "Nous espérons que la
protection accrue des meilleurs sols ne s'obtiendra pas au détriment des
sois agricoles de moindre potentiel.* Au paragraphe suivant, vous dites
qu'à ces égard, le fait d'utiliser un critère unique
basé sur une classification ancienne et ne tenant pas compte des
réalités et techniques actuelles, ça paraît
plutôt restrictif. Classification ancienne, je suppose que vous faites
référence à la classification des terres en vertu de
l'inventaire des terres du Canada.
Je vous rappelle nos réserves et nos réticences. Nous
pensons - peut-être que nous avons tort, c'est une question d'opinion et
nous l'admettons volontiers - qu'en créant deux secteurs à
l'intérieur du territoire agricole, un secteur dit exclusif où,
selon la loi, la protection serait, paraît-il, renforcée et le
reste, ce qui est douteux, du territoire agricole qu'on a pris l'habitude
depuis que le projet de loi est connu, d'appeler la zone vert pâle, la
zone vert foncé, le secteur exclusif, le reste du territoire agricole,
la zone vert pâle... Nous pensons qu'en créant deux secteurs dans
le territoire agricole, ça va avoir pour effet, peut-être qu'on se
trompe, mais on le verra à l'avenir, à l'usage, de créer
une dynamique de dézonage dans la zone vert pâle, que le message
qui est lancé, en quoique sorte, c'est de dire: Écoutez, si vous
êtes en vert foncé, vous êtes bien protégés,
si vous êtes en vert pâle, faites votre demande, on va la prendre
en considération et, sous-entendu, les chances sont nettement meilleures
de vous donner satisfaction à l'occasion d'une demande de
dézonage.
Ma foi, si la commission refuse, i! y aura toujours le tribunal d'appel,
vous Irez en appel et vous aurez là une bonne chance d'obtenir un
dézonage. Donc, une espère de dynamique, de mouvement de
dézonage qui risque de se créer en territoire vert pâle.
C'est d'autant plus risqué et dangereux que, comme vous le dites, le
secteur exclusif va être déterminé et
délimité à partir de ce que vous appelez un outil
plutôt restrictif, une classification ancienne. C'est l'inventaire des
terres du Canada, c'est la loi qui le dit. Le projet de loi 100, c'est
ça qu'il dit. On va se baser sur la classification de l'inventaire des
terres du Canada pour créer le secteur exclusif. Vous nous dites: Ce
n'est pas un outil de travail tout à fait adéquat, il est ancien
d'abord et il est restrictif, effectivement, parce qu'il est fondé sur
à peu près un seul critère qui est la production
céréalière. li arrive que dans certaines régions du
Québec vous avez d'excellentes terres, de très bonnes terres,
mais en vertu de cet outil, cet instrument, elles sont classées 4, 5 ou
8. Ce sont de très bonnes terres, mais pour des raisons climatiques ou
d'autres raisons, elles ne sont pas classées 1, 2, 3. Donc, vous dites
d'une part que c'est un mauvais outil, ni adéquat, ni convenable, mais
c'est celui-là qu'on retrouve dans la loi. L'article 59.01, c'est cet
outil qu'on va utiliser pour délimiter le secteur exclusif et vous dites
que ce n'est pas un bon outil, ce n'est pas un outil trop restrictif. SI vous
ne demandez pas des changements à la loi, vous aurez beau dire que ce
n'est pas très bon comme outil pour délimiter le secteur
exclusif, c'est cet outil qu'on va utiliser. C'est cet instrument qu'on va
utiliser.
Donc, au fond, ma question est la suivante, M. Proulx. Ne craignez-vous
pas qu'en introduisant ce nouveau concept de secteur exclusif et en divisant,
autrement dit, le territoire agricole en deux zones, que la zone moins
protégée soit l'objet de convoitise, de demandes nombreuses de
dézonage, auxquelles on donnera satisfaction et que, finalement cela
aura pour effet de rapetisser le territoire agricole, de le ratatiner et qu'en
fin de compte cette introduction d'un nouveau concept qui s'appelle secteur
exclusif va se traduire par une réduction considérable du
territoire agricole, que vous jugez déjà dans votre
mémoire, comme étant exigu et qu'il ne faudrait surtout pas le
réduire davantage? J'ai l'impression, en tout cas, que certaines de vos
affirmations, en page 9 en particulier, quand vous dites, ne tenez surtout pas
compte de cela dans la révision des territoires agricoles actuels, dans
les négociations avec les MRC, j'ai l'impression dis-je - Je ne sais pas
si je me trompe - que vous sentez qu'il y a là un danger d'enclencher
une dynamique de dézonage et de réduction considérable du
territoire agricole. Est-ce que vous ne craignez pas cela? Nous, c'est notre
crainte. Peut-être que ce n'est pas le cas chez vous, peut-être que
vous n'avez pas cette crainte-là, mais est-ce que vous ne craignez pas
cela? Si, ma foi, c'est non, bien, on constatera qu'on n'a pas la même
opinion et qu'on n'a pas la même vision des choses, ce qui ne signifiera
pas évidemment que, de part et d'autre, on n'est pas persuadés
qu'il faut protéger le territoire agricole. Ne croyez-vous pas aussi que
l'outil ou l'instrument, qu'on compte utiliser pour déterminer les
secteurs exclusifs, n'est pas le bon, n'est pas adéquat, ne convient pas
au Québec, comme vous le mentionnez, mais il faut reconnaître
pourtant que c'est cet outil-là qu'on compte utiliser dans la loi?
Le Président (M. Richard): M. Proulx, vous avez la
parole.
M. Proulx: Écoutez, vous venez de le dire et je pense
qu'on l'a exprimé, c'est évident que dans n'importe quel projet
de loi, il y a toujours un certain nombre d'inquiétudes. Nous avons
été très clairs, à la fin, aussi en disant qu'on va
être en mesure de juger correctement de la loi, à sa mise en
oeuvre, de voir si c'est correct, selon l'interprétation, que les gens
qui auront à
l'appliquer quotidiennement vont le faire. Dans n'importe quelle loi, il
y a toujours une partie d'interrogation, parce qu'il y a de l'Inconnu dans
cela. C'est évident que dans le projet de loi 100, I y a certaines
inconnues, on se pose des questions: II est tout à fait normal et bon de
le faire. Tout dépend, si on regarde cela d'une façon positive ou
négative. Je rappellerai qu'en 1978 j'étais là, on se
posait des questions aussi. Cela a donné des résultats concrets
parce qu'on a appliqué cela, dans le temps, de la façon qu'on
devait l'appliquer et je pense que cela a donné des résultats
positifs. Alors, soyons positifs, regardons le côté positif. Nous
autres, on n'a pas été portés à
l'Interpréter de façon qu'il y a une zone moins
protégée. Nous autres, on ne parle pas du jaune pâle ou du
vert foncé, on part avec le principe qu'il y a une partie de ce vert
foncé qui est plus protégée. C'est notre
interprétation à nous, bonne ou mauvaise, je vais prendre vos
mots, M. le député, mais c'est la nôtre. Que voulez-vous
qu'on fasse? C'est évident qu'il peut y avoir un certain nombre
d'inquiétudes et on les soulève en disant: Faisons attention dans
l'application parce que certains pourraient avoir envie de gruger ou avoir
l'espoir qu'il va être plus facile de dézoner dans les sols 3, 4,
5 etc. Il faut vivre avec une certaine réalité et, à
l'heure actuelle, il n'y a pas d'autres mesures connues pour délimiter
les sols, selon ce qu'on nous a dit. S'il y en a d'autres, faisons-les
connaître et appliquons-ies. Cela ne se fait pas instantanément,
cela ne se fait pas du jour au lendemain. On est obligés de vivre avec
celles qu'on connaît mais c'est évident qu'on insiste très
fortement afin qu'on puisse en connaître d'autres, en sortir d'autres au
fur et à mesure qu'on pourra être en mesure d'être capable
de déterminer plus clairement, de tenir compte davantage des
modifications survenues au cours des années, des changements dans les
cultures, dans la production agricole et ainsi de suite, mais qu'on sera en
mesure de rattacher ça pour être à même de donner la
véritable valeur aux sols ou de les catégoriser à nouveau
Mais ça ne l'est pas à l'heure actuelle et on a dos
problèmes majeurs. Je pense que tout le monde l'a constaté au
cours de l'année. On a eu à crier très fort pour
arrêter l'empiètement qui se faisait.
Alors, pour nous, encore une fois, il n'y a pas une zone
sous-protégée. En tout cas, on ne veut pas que ce soit ça.
Si jamais c'était ça, vous pouvez être sûr qu'on va
être les premiers et on va prendre tous les moyens a notre disposition
pour contrer ça parce que, pour nous, il doit y avoir du zonage agricole
au Québec qui est équitable partout, partout où il se fait
de l'agriculture, qu'il y ait une infrastructure importante et qu'il faut
protéger le sol agricole qu'on ait à ajouter peut-être pour
amortir un peu les impressions qu'on peut avoir ou les idées qu'on
pourrait avoir de continuer à dézoner encore davantage dans les
parties urbaines, les parties importantes... et on sait que c'est mal-
heureusement là que sont les meilleures terres agricoles.
M. Brassard: M. le Président.
Le Président (M. Richard): Oui, M. le député de
Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Vous avez raison, M. Proulx, quand vous dites que
c'est à l'application qu'on juge une loi. Cela, j'en conviens, d'autant
plus que si on regarde ce qui s'est passé au Québec depuis 1979,
depuis l'adoption du projet de loi 90, on se rend compte de ceci: Sur le plan
de l'application Jusqu'à tout récemment... Cela coïncide pas
mal avec l'arrivée au pouvoir des libéraux, comme par hasard,
coïncidence étrange! Mais Jusqu'à ce moment-là, la
loi a connu une application rigoureuse. La preuve en est que, pendant toute
cette période, je n'ai pas, à ma connaissance, entendu l'UPA
s'élever, s'Indigner ou protester contre la façon dont la loi
était appliquée.
Nous passons à un autre gouvernement et, comme par hasard, les
plaintes, le mécontentement grandit un peu partout. L'insatisfaction
apparaît quant à l'application de la loi, particulièrement
dans le cadre de la révision des zones agricoles avec les MRC.
Là, à juste titre, des syndicats locaux de l'UPA, des
fédérations régionales s'indignent, protestent parce
qu'ils assistent à du dézonage massif de terres jugées
bonnes sur le plan de l'agriculture. Là, évidemment, la liste est
longue. Il suffisait, entre autres, de lire La Terre de chez nous pour s'en
rendre compte. (17 heures)
Donc, l'application, c'est Important. Mais ne pensez-vous pas, M.
Proulx, que la loi, telle qu'elle existe en matière de protection du
territoire agricole, était suffisamment claire, précise,
rigoureuse et sévère comme il a été
démontré pendant plusieurs années, mais que, à la
suite, entre autres, de la mise en vigueur de certaines directives
ministérielles, l'application s'est assouplie, la rigueur s'est - je
dirais - émoussée, avec les protestations qu'on a connues? Ne
trouvez-vous pas que ce qu'il faudrait réclamer ou ce qu'il aurait fallu
réclamer avec insistance, c'est le retour à la rigueur de la loi,
à son application rigoureuse comme ça s'est fait pendant
plusieurs années plutôt que d'accepter - en tout cas, c'est comme
ça que je le vols - avec les risques et les dangers que ça
comporte l'introduction de concepts nouveaux, celui du secteur exclusif? Et
nous avons non seulement des Inquiétudes, mais des réserves et
des réticences. Vous venez de dire qu'il y a peut-être des
inquiétudes légitimes. Ne pensez-vous pas, au fond, qu'en
matière de protection du territoire agricole au Québec, ce qu'il
faudrait réclamer, ce ne sont pas des amendements comme le ministre le
propose dans la loi 100, créer deux zones, deux secteurs, secteur
exclusif à partir
d'un outil pas tellement convenable? Il aurait plutôt fallu
réclamer l'application rigoureuse de la loi telle qu'elle existe parce
que, au fond, la loi telle qu'elle existe est suffisante, suffisamment
précise, suffisamment rigoureuse, suffisamment sévère. Ses
orientations sont suffisamment claires pour assurer pleinement, convenablement
et efficacement la protection du territoire agricole. Je fais une distinction
dans vos propos.
Il y a tout ce qui concerne l'Immunité, tout ce qui concerne le
droit de produire, toute cette partie-là, on y reviendra, et il y a la
protection du territoire agricole. En ce qui concerne précisément
la protection du territoire agricole, est-ce que vous ne pensez pas que ce qui
aurait été préférable, c'est un retour à une
application rigoureuse de la loi, telle qu'elle est?
M. Proulx: II est évident que c'est ce qui aurait
été l'idéal, sauf qu'on est en 1989. Qu'est-ce que vous
voulez que je vous dise? Après la loi de 1978, on a passé la loi
125. Quand on a mis en application la loi 125, c'est là qu'on s'est
aperçu, c'est là qu'on a commencé à être
"pogné" avec et qu'on a vu qu'il y avait des trous dans la loi. On ne
peut pas vivre éternellement avec le passé. C'est bien beau le
passé mais, à un moment donné, dix ans après, tu
réalises des choses et les choses les plus parfaites dix ans avant,
parce qu'il est arrivé un tas de circonstances, ne sont plus
complètement adéquates. La loi 125, à ma connaissance, et
je ne veux pas faire de petite politique, mais c'est votre gouvernement qui l'a
passée. Tant qu'elle n'a pas été mise en application,
ça n'allait pas si mal mais le matin qu'on l'a mise...
Deuxièmement, ce que je veux dire et je ne veux pas
défendre, c'est vrai, tout le monde est conscient qu'il s'est
créé beaucoup d'espoir ces dernières années et je
ne rappellerai pas pourquoi, pour des raisons probablement que j'imagine que
c'est Important en politique... Il s'est créé certains espoirs et
il y a peut-être eu un certain relâchement, je vais vous le donner,
sauf que je vous ai rappelé la loi 125, je vous ai rappelé aussi
que lorsque vous avez révisé la loi, chose que M. le
député de Lévis a soulevée tout à l'heure,
vous y avez inclus l'obligation de réviser tous les cinq ans. C'est
ça qu'on vit jusqu'à un certain point.
Je veux vous rappeler aussi qu'il y a eu certains problèmes
avant, tel Bell Helicopter et telle la voie de contour de Shawinigan. On a
empiété sur du zonage agricole, de bonnes terres agricoles.
Alors, si vous voulez me la ramener à 1978, sans la loi 125, je suis
d'accord avec vous. On va acheter ça tout de suite demain matin et on va
sortir dans la rue pour dire: Bravo! On appuie ça. Mais ce n'est pas
ça aujourd'hui. On est en 1989 et on a... entretemps, il s'est
passé un tas de choses. Mais, encore une fois, vous allez avoir notre
appui si vous voulez nous ramener la loi de 1978, telle qu'elle était,
sans la loi 125 encore une fois.
M. Brassard: M. le Président, peut-être quelques
rappels. Là, on ne s'entend peut-être pas mais, d'abord, en
matière de protection du territoire agricole, c'est la loi 90 qui a
préséance sur la loi 125.
M. Garon: En droit.
M. Brassard: Pour ce qui est de la protection du territoire
agricole, à ce point de vue-là, la loi 125 n'a pas
chambardé je dirais l'économie générale de la loi
90, d'une part. D'autre part, oui, on a apporté des amendements. C'est
le député de Lévis qui a apporté des amendements
pour prévoir un processus ou un mécanisme de révision de
la zone agricole dans les MRC, mais la loi 90, malgré ce
mécanisme de négociation, continue toujours d'avoir
préséance en matière de protection du territoire agricole.
Et le problème ne vient pas de là, M. le président de
l'UPA, vous le savez très bien. Le problème, vous l'avez
signalé vous-même, est venu des directives ministérielles
qui ont eu un effet d'assouplissement de l'application de la Loi sur la
protection du territoire agricole; c'est de là qu'est venu le
problème. Le ministre, par ses directives, a en quelque sorte assoupit,
amendé, modifié la loi sans passer par l'Assemblée
nationale, avec tous les problèmes que cela a provoqués. Moi, je
veux bien que... je ne suis pas un nostalgique du passé comme tel, sauf
que ce que Je recherche, c'est la protection du territoire agricole et, quand
je regarde les faits et les lois, je me dis que la loi telle qu'elle existe
comporte toutes les dispositions requises, nécessaires, utiles pour
protéger efficacement le territoire agricole, à condition que le
ministre n'interfère pas avec des directives assouplissantes comme cela
a été le cas, et détourne en quelque sorte la loi de ses
objectifs, transforme la Commission de protection du territoire agricole en
commission d'aménagement du territoire, ce qui n'est pas sa vocation du
tout. À condition que cela ne se produise pas, cela aurait pu se
dérouler pas mal mieux que depuis deux ans. Moi, je continue de
maintenir qu'en matière de protection du territoire agricole, la loi
actuelle est suffisante et elle convient parfaitement. Il suffit cependant de
l'appliquer avec toute la rigueur qu'on y retrouve, sans plus, sans
l'accompagner de directives ministérielles qu'on juge, de notre
côté, illégales, parce que la loi ne prévoit pas
ça du tout et n'a jamais prévu que le ministre donne des
directives à la commission.
On pense que l'introduction du concept de... La zone vert pâle,
vous avez raison de dire qu'elle comporte les mêmes protections que
celles contenues dans la loi actuelle. Mais notre crainte vient de la dynamique
qui risque de s'enclencher. À partir du moment où vous
créez deux zones, un secteur davantage protégé, du moins
le prétend-on, et l'autre, le reste, on pense que ça risque de
créer une dynamique de dézonage et
que, quand vous vous retrouverez en zone vert pâle, la tentation
soit très forte de faire des demandes de dézonage en ayant
quasiment à l'esprit qu'il n'y a pas de raison qu'on refuse ça,
parce qu'on est dans le vert pâle. On n'est pas dans le vert
foncé, on est dans le vert pâle, iI n'y a pas de raison qu'on nous
refuse notre demande. C'est cette mentalité qui risque de se
créer et c'est ça, la crainte qu'on a. J'espère qu'on aura
tort, M. Proulx. Si on n'a pas tort et que c'est ce qui se produit, on risque
au bout de quelques années de se retrouver avec un territoire agricole
protégé drôlement réduit, ratatiné, un
phénomène de peau de chagrin et cela risque d'être
drôlement néfaste pour l'ensemble de l'agriculture au
Québec.
Le Président (M. Richard): M. le ministre, vous aviez un
commentaire?
M. Pagé: Certainement, M. le Président. Vous savez,
nous sommes Ici pour échanger des points de vue avec nos hôtes qui
ont accepté de venir se faire entendre. Je ne crois pas que ce soit le
moment choisi ou privilégié pour nos amis de l'Opposition qui,
j'en conviens, doivent s'opposer, cela fait partie des règles du
jeu...
M. Brassard: M. le Président, je regrette.
M. Pagé: Vous savez, tantôt, quand on a dit...
M. Brassard: Question de règlement, M. le
Président.
Le Président (M. Richard): Question de règlement,
M. le député de Lac-Saint-Jean.
M. Brassard: Tantôt, le ministre a pris je ne sais combien
de temps, un quart d'heure, pour défendre ses positions et son projet de
loi et s'autoglorifler. Je ne vols pas en quoi, moi, je n'aurais pas le droit
d'exprimer les positions de l'Opposition. Vraiment!
M. Pagé: Non, non, vous avez le droit..
M. Brassard: Alors, pourquoi me le reprochez-vous?
M. Pagé: ...mais vous me permettrez très
certainement, M. le Président, en vertu de nos règles de
fonctionnement, de rétablir certains faits.
M. Brassard: Ils n'ont môme pas eu l'occasion de parler
quand vous avez parlé tantôt.
M. Pagé: Je vous ai laissé parler.
M. Brassard: Moi, je les ai laissés parler, en tout
cas.
M. Pagé: Bon, faites-en donc autant par politesse, par
délicatesse. Vous savez, on commence l'année, iI faudrait
l'amorcer du bon pied. Il ne faudrait pas vous laisser trop Influencer par le
député de Lévis qui agit un peu comme un souffleur dans
une pièce de théâtre et qui souffle les mots au
député.
M. Brassard: Non, non, je n'ai pas besoin de quiconque.
M. Garon: ...n'a pas besoin.
M. Pagé: Cela dit, vous avez dit - et c'est là
où c'est inquiétant - que la loi 90 avait primauté sur la
loi 125. Je l'ai toujours soutenu, mais c'est à partir de cette
dualité législative, de cette Interprétation donnée
à chacune des lois que les municipalités, en
référence à la responsabilité qu'elles se sont vues
accorder par le même législateur en 1979, d'aménagement sur
l'ensemble du territoire, c'est à partir de cette loi que certaines
municipalités du Québec se sont vues le droit, ont pensé
qu'elles avaient le droit de procéder à du zonage de production
et de dicter, par exemple, que dans telle municipalité, telle production
serait purement et simplement défendue.
C'est à partir de cette loi 125 et une responsabilité des
municipalités sur l'aménagement du territoire que certaines
municipalités ont voulu établir, autour du milieu urbanise, ce
qu'on appelle des zones tampons, reculant de distance à distance
certaines productions et reculant à d'autres distances certaines autres
productions. Et parce que cette démarcation n'a jamais été
établie très clairement, autant entre la loi 125 qu'avec la loi
90, autant par M. le député de Lévis que par M. le
député de Labelle, à ce moment-là qui était
ministre des Affaires municipales, nous avons dit au gouvernement du
Québec, par une déclaration du ministre responsable de
l'aménagement et du développement régional, le ministre de
l'Environnement, le ministre des Affaires municipales et moi, comme ministre de
l'Agriculture... nous avons déclaré en novembre 1987 ou octobre
1987 qu'en ce qui nous concerne, il n'était pas question d'adopter, dans
aucun schéma d'aménagement, le droit pour une municipalité
ou une MRC de procéder à du zonage de production, ou encore
à l'établissement de zones tampons.
Je comprends que vous êtes animés par une certaine
nostalgie s'inspirant de la béatification. Mais vous savez, il faut
quand même regarder les choses comme elles sont. On avait à vivre
avec un problème. Ce problème, c'était une dualité
législative parce que la ligne n'avait jamais été
tracée et tous les observateurs qui ont été
associés à cette démarche savent pertinemment qu'en aucun
temps, l'affrontement entre le milieu municipal et le milieu agricole n'a pu se
régler, alors que mon prédécesseur était
l'honorable député de Lévis.
Aujourd'hui, c'est maintenant réglé, mais malheureusement,
cela a créé des pressions, cela a créé des
problèmes et ces problèmes sont maintenant solutionnés. Et
si... Un dernier commentaire pour répliquer, notamment au
député du comté de Lac-Saint-Jean. Vous avez
indiqué tout à l'heure, d'une façon qu'on connaît
bien, vous avez dit: Ah, la coïncidence a voulu qu'au moment du changement
de gouvernement, etc. Je m'excuse. En vertu de cette loi 125, les MRC se sont
vues confier, par l'Assemblée nationale et le gouvernement, l'obligation
de confectionner des schémas d'aménagement. Et la
rédaction de ces schémas d'aménagement devait conduire,
après dix ans, à une révision des zones agricoles et
urbaines qui a impliqué ta révision d'affectation de certains
lots au Québec...
Une voix: Sans directive.
M. Pagé: ...dans une perspective d'actualisation. Il s'en
fait, de l'aménagement, depuis dix ans. Ce sont 142 000 dossiers qui ont
été présentés à la Commission de protection
du territoire agricole. Et ce débat, de toute façon, on l'a
conduit, on l'a tenu. Et je suis confiant qu'avec des règles maintenant
précises et une démarcation très nette entra la loi 90 qui
sera renforcée par la loi 100, et la loi 125, je suis persuadé
que ça va bien aller. Il faut avoir confiance en l'avenir, M. le
député.
M. Brassard: En l'avenir, j'ai confiance. C'est en vous que je
n'ai pas confiance.
M. Pagé: Soyez confiant, soyez confiant puis... Vous
savez... Ah ça, je ne vous on tiens pas grief, c'est votre rôle
dans l'Opposition. Et je suis persuadé que vous atteindrez un
degré de maturité auquel j'ai eu à être
convié. Je me suis opposé à loi 90. Aujourd'hui, je vous
dis que c'est une bonne loi. Dans quelques années, si les
électeurs vous prêtent mandat et si le premier ministre vous
prête fonction et que vous êtes ministre de I'Agricuiture,
peut-être direz-vous: La loi 100 est une très bonne loi.
M. Brassard: Le ministre admet que c'est lui qui renie ses
anciennes convictions. Alors, le cas de reniement, c'est le cas du
ministre.
M. Pagé: Alors, dans quelques années, vous direz:
C'est une bonne loi.
Le Président (M. Richard): Après ces bons voeux,
est-ce que vous avez d'autres questions? M. le député de
Lévis.
M. Garon: Oui, j'aurais une question à poser au
président de l'UPA parce que.. Vous savez, les termes... Il faut aller
en arrière des mots. Ce n'est pas écrit "vert pâle" ou
"vert foncé", mais c'est écrit "protection accrue". Mais si vous
regardez vraiment la loi, vous la regardez comme il faut, il n'y a pas de
protection accrue, ce n'est pas vrai. Mais on parie de sois meilleurs et de
sois mollis bons, par exemple. Vous me trouverez dans ce projet de
loi-là, quelque chose qui protège la production laitière.
Quand on parle des sols de classe 1, 2 et 3 ça ne fait pas
énormément de sols au Québec. L'inventaire des sols du
Canada, comme l'a dit le député de Lac-Saint-Jean, c'est
l'inventaire basé sur la production céréalière.
Mais la production herbagère, qui est une production aussi importante au
Québec, n'est pas protégée par cette nouvelle
loi-là parce qu'on parie des meilleurs sols et on parle dans la loi des
sois 1, 2 et 3. Et ça ce n'est pas rien qu'une... (17 h 15)
Le président de I'UPA regarde ça un peu. Bah! Sauf que
c'est la loi, c'est ça qui va être le fondement. C'est en fonction
de ça que les décisions vont se prendre et avec un tribunal
d'appel qui va établir maintenant sa jurisprudence, il va se baser sur
la loi. Alors, qu'est-ce que dit la loi à l'article 69.01? Elle dit: "La
commission identifie comme secteur exclusif, sur le plan de la zone agricole,
toute partie de celle-ci qu'elle détermine à partir de
l'identification des sols possédant un potentiel agricole de classe 1, 2
ou 3 et des sols organiques tel qu'inventorié..." Et on dit que les sols
organiques ce sont seulement ceux qui ont plus de 2500 unités
thermiques. Par exemple, les sols organiques de Barachois, en Gaspésie,
ne pourront pas être classés parce qu'Us ne sont pas dans 2500
unités thermiques même si ce sont d'excellents territoires
où... Encore môme Ses aboiteaux de Kamouraska sont dans des
unités thermiques en bas de 2500 même si ce sont de bons sols
organiques. Alors elle dit donc: "...1, 2, 3 et les sols organiques de 2500 et
plus." Mais si vous allez voir l'article qui parle de l'exclusivité...
On va le lire comme il le faut. Qu'est-ce qu'y dit? "À compter de
l'entrée en vigueur d'un décret approuvant un plan de zone
agricole comprenant un secteur exclusif, la commission ne peut autoriser, dans
ce secteur, l'utilisation à des fins autres que l'agriculture, le
lotissement ou l'aliénation d'un lot, la coupe des érables ou
émettre un permis d'enlèvement du soi arable, à moins
qu'il lui soit démontré qu'il n'y a pas, ailleurs dans la
région, d'espace approprié disponible aux fins visées par
la demande et que celle-ci est compatible avec l'agriculture ou sans effet sur
la protection du territoire agricole compte tenu des dispositions de l'article
62." Et quand vous allez à l'article 62, qu'est-ce que vous avez? Ce
n'est pas l'article 62 pour les zones exclusives, c'est pour n'importe quelle
zone.
Cela veut dire, au fond, que tout ça c'est un aménagement
verbal mais où il n'y a pas de zone exclusive, il n'y a pas de
territoire exclusif. Cela ne veut strictement rien dire. Et si vous allez
à l'article 62, vous avez l'article 62 avec les dispositions dont vous
parlez dans votre
mémoire à la page 10, 1, 2 et 3, qui sont: "L'utilisation
actuelle du lot et le type et l'intensité d'agriculture', vous dites:
"II faudrait avant tout éviter que cet article ne soit utilisé
pour "dézoner" des terres en friche. Les conséquences d'un refus
pour le demandeur et la notion de conformité par la
municipalité." Je vous ferai remarquer que la notion de
conformité, encore là, on retrouvait ces dispositions-là
dans les directives du ministre du 24 ou 26 septembre 1986. La loi s'ajuste
actuellement avec les directives de septembre 1986. Et là, on n'est pas
dans le placotage. On est dans le domaine légal. Et quand vous retombez
à l'article 62 où on aura, d'abord à l'article 3, je parle
de l'article 3, éliminé les critères de l'article 12,
puisque l'article 3 est remplacé par le suivant, il y avait un article
12 avant dans la loi qui établissait des critères, des facteurs
de décisions pour la commission et là ces facteurs-là
seront éliminés totalement. "Pour rendre une décision ou
émettre un avis dans une affaire qui lui est..." Facteurs à
considérer, là c'est éliminé.
On dit, en somme, que va-ton mettre à la place des facteurs?
"Pour exercer sa juridiction, la commission tient compte de
l'Intérêt générai de protéger le territoire
et les activités agricoles. Elle prend en considération tous les
faits qui sont à sa connaissance." Ce ne sont plus des facteurs. Elle
prend des faits en considération. Imaginez-vous comme principe que c'est
fort! Cela ne serait pas marqué et ça ferait pareil. Cela
s'appliquerait de toute façon parce qu'elle prend en
considération des faits, les facteurs éliminés de
l'article 12. Et là on vous ramène à l'article 62
où on établit d'autres conditions. Mais là, vous
remarquerez qu'à la fin, toutes les dispositions qu'on trouve
là-dedans concernant les restrictions dont vous parlez dans votre
mémoire... Si vous pensez qu'on va faire de la protection du territoire
avec ça, je vais vous dire une chose. En Colombie britannique, les gens
n'ont pas changé la loi. Ils ont changé les commissaires et il
n'y a plus eu de protection des terres agricoles. Si vous pensez qu'on va faire
la protection des terres agricoles avec ça, |e vous souhaite bonne
chance. Parce que, actuellement, il y a tous les facteurs pour faire n'importe
quoi avec ça mais avec aucune sécurité juridique pour
personne. De sorte qu'on va se retrouver sans doute dans quelques années
où tout le monde sera mécontent parce que personne ne saura
où il s'en va avec ça.
Alors, j'aimerais savoir sur le plan légal, pas sur le plan des
impressions, sur le plan légal sur quoi s'appuient les secteurs
exclusifs dans la loi, d'après vous. Après, sur quels facteurs la
commission va-t-elle vraiment s'appuyer pour établir les zones agricoles
permanentes? Sur quoi va-t-elle s'appuyer?
Une voix: Michel. On nous demande de parler de l'aspect
légal. On va laisser ça à notre légaliste.
Le Président (M. Richard): Vous avez la parole, M.
Lord.
M. Lord (Michel): Notre compréhension, évidemment,
il faut faire lecture de l'article 69.08 que vous lisiez. C'est là, en
fin de compte, qu'on retrouve le sens de la protection accordée au
secteur exclusif. On dit dans le premier alinéa dans "un secteur
exclusif, la commission ne peut autoriser dans ce secteur l'utilisation, etc.,
à moins qu'il lui soit démontré qu'il n'y a pas, ailleurs
dans fa région, d'espace approprié disponible aux fins
visées par la demande et - deuxièmement, et là il faut que
les deux conditions se rencontrent - que celle-ci est compatible avec
l'agriculture ou sans effet sur la protection du territoire agricole."
Au deuxième alinéa, la discrétion accordée
à la commission est un peu plus grande mais c'est pour des fins
d'utilité publique. Lorsque je fais lecture de l'article 69.08, il me
semble qu'il y a une assez bonne protection accordée aux sols sis en
secteur exclusif. Tantôt, M. Garon, j'essayais de comprendre, et
manifestement on ne lit pas l'article de la môme façon.
M. Garon: Non, on ne lit sûrement pas de la même
façon. II faut que vous lisiez l'article 62.
M. Lord: Bien oui.
M. Garon: Et l'article 62, c'est un paquet de portes de grange
qui viennent d'être ouvertes pour dézoner n'importe quoi.
Lisez-le, l'article 62.
M. Lord: Ah oui! L'article 62 c'est l'ensemble des
critères élaborés.
M. Garon: il ne reste plus rien.
M. Lord: Mais les critères de l'article 62 ne visent
qu'à déterminer si la demande est..
M. Garon: C'est pour dézoner. Ce n'est pas pour
établir les zones. Pour établir les zones, les facteurs sont
disparus à toutes fins utiles.
M. Lord: Pour établir les secteurs exclusifs? M. Garon:
Oui. Il reste...
M. Lord: Vous l'avez dit tantôt, ce sont les blocs de sols
1, 2, 3.
M. Garon: Oui.
M. Lord: Et les sols organiques.
M. Garon: Mais après ça, pour dézoner il
vous faut... dans des cas individuels, des demandes, vous vous retrouvez avec
l'article 62. Bien voyons!
M. Lord: Mais c'est complémentaire. Pour obtenir une
permission en vertu de l'article 6908, vous devrez faire différentes
preuves. Vous devrez d'abord prouver qu'il n'y a pas ailleurs dans la
région d'espace disponible aux fins que vous visez. Deuxièmement,
même après avoir prouvé ça, vous devrez prouver que
votre demande est compatible avec l'agriculture ou sans effet...
M. Garon: Oui. Vous avez ça dans votre article 69.03.
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, M. !e
député de Lévis. Une question de règlement.
M. Garon: Une question de règlement en vertu de quel
article?
M. Pagé: C'est pour inviter le député
à lire l'article 17 qui se réfère à l'article 62
qui commence et qui sa lit comme suit, à la pays 7 du projet de loi:
Sous réserve des articles 69.07 et 69.08...
M. Garon: Oui.
M. Pagé: Bien, ça dit tout. Voyons!
M. Garon: Et qu'est-ce que ça donne? C'est ce que je viens
de lire, l'article 69.08. Il se réfère à l'article 62.
Votre article 69.08 se réfère à l'article 62 et, à
l'article 62, regardez bien, à tel point qu'à l'article 69.08 on
dit: "...qu'il soit démontré qu'il n'y a pas ailleurs dans la
région d'espace approprié aux fins visées par la
demande."
Quand vous arrivez à l'article 62, on dit: Elle prend en
considération l'effet sur le développement économique de
la région. Si vous pensez qu'il n'y aura pas toute la marge de manoeuvre
pour faire n'importa quoi avec ça, il n'y aura plus de critères.
Il n'y aura pas de critères à toutes fins utiles.
Ce n'est plus la commission qui va Interpréter, ce sera le
tribunal d'appel qui fera la jurisprudence. La jurisprudence ira an tribunal
d'appel maintenant. Alors, bonne chance!
Une voix: "Good luck"!
M. Garon: Je vais vous dire une chose. Je considère que
quelques avocats pourraient se spécialiser dans le droit agricole. Cela
va être payant.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lévis. Maintenant, est-ce que vous avez des
commentaires avant de...
M. Brassard: C'est terminé, oui?
Le Président (M. Richard): En ce qui con- cerne l'Opposition le
temps est terminé. Il resterait une quinzaine de minutes au parti
ministériel. Il n'est pas obligé de le prendre.
M. Brassard: D'accord. C'est tout simplement pour remercier de
nouveau l'UPA. J'aurais évidemment aimé aborder d'autres sujets
avec elle, entre autres tout ce qui concerne le droit de produire, le
commissaire-aviseur, mais le temps nous manque. En tout cas, dans son
mémoire, sa position est clairement exprimée. Je remercie l'UPA
d'avoir accepté l'invitation de la commission et d'être venue
témoigner devant nous aujourd'hui.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Lac-Saint-Jean. M. le ministre, vous avez la
parole.
M. Pagé: M. le Président, avant de remercier nos
visiteurs, l'Union des producteurs agricoles qui est comparue devant nous
aujourd'hui, je m'en voudrais de ne pas rétablir certains
éléments dans leur juste perspective, en référence,
entre autres, à l'établissement du secteur exclusif. il est
très clair, et je veux l'indiquer, je veux le réitérer,
que la protection conférée, accordée aux terres qui seront
dans le secteur exclusif est très Importante, parce qu'en vertu des
dispositions de l'article 69 A sera pratiquement Impossible d'utiliser à
des fins autres que l'agriculture de tels sols à moins qu'il ne soit
démontré, tel que cela a été Indiqué, qu'il
est impossible de procéder, par exemple, à la construction d'une
utilité publique ailleurs dans la municipalité ou encore dans la
région, dans certains cas.
Et l'article 70 s'applique et comporte une réserve. La
réserve, c'est que l'article 62 n'est pas de portée
générale pour l'ensemble des sols zonés agricoles au
Québec et il est très clairement indiqué que les articles
69.07 et 69.08 doivent être, c'est-à-dire que la disposition
à l'article 62 comporte une restriction à savoir sous
réserve de 69.07 et 69.08. En fait, toutes les dispositions relatives au
secteur exclusif s'appliquent par priorité par rapport à 62. Cela
n'a pas été lu ainsi par le député de Lévis.
Je présume qu'une analyse exhaustive de la loi lui permettra d'avoir une
compréhension plus exacte ou plus complète.
Autre élément, je l'ai indiqué ici en commission et
je n'en al jamais ou de nouvelles. J'ai mentionné au moment de
l'étude du projet de loi, au début de l'étude article par
article du projet de loi, que nous étions disponibles pour indiquer,
à titre d'exemple, comment les terres, les superficies qui
apparaîtront dans le territoire exclusif, comment ce territoire exclusif
sera établi. J'ai indiqué que notre objectif est de
négocier, de discuter avec chacune des municipalités du
Québec, en présence de l'Union des producteurs agricoles,
l'établissement d'une cartographie qui viendra définir un secteur
exclusif
à partir de certains paramètres qui auront dû faire
consensus, cela va de soi.
Je m'étais montré disponible pour que les dirigeants de la
commission puissent faire une démonstration du tableau, de l'Image que
cela pourrait donner pour une municipalité ou encore pour une MRC et
jamais l'Opposition ne m'a formulé quelque demande en ce sens. Mais,
pour être certain, M. le Président, d'une compréhension
pleine, complète et entière de la démarche à
laquelle on sera convié auprès de ces 600, 650
municipalités au moment où le projet de loi sera adopté,
je propose encore une fois, peut-être à la fin de nos travaux,
à la fin de l'étude du projet de loi article par article,
d'inviter le président de la Commission de la protection du territoire
agricole - je ne sais pas si c'est normal dans nos règles, mais je
présume que cela l'est s'il y a consentement - pour pouvoir prendre
quelques minutes et Indiquer comment la commission entend fonctionner, comment
elle entend gérer cette question.
Je suis persuadé qu'une fois que vous aurez pris connaissance de
la configuration, de la délimitation des superficies, par exemple pour
la région du Lac-Saint-Jean que le député de
Lac-Saint-Jean a le privilège de représenter ici. . Il pourra
voir exactement ce que ça va donner dans sa région, comme le
député de la région de Saint-Hyacinthe, de la
région de Berthier, si ma mémoire est fidèle. Il y a trois
ou quatre régions du Québec qui ont fait l'objet d'une telle
préparation de documents qui pourront vous être soumis. Je dis
bien à titre d'Indication seulement, parce que ça restera
à être établi sur une base définitive avec les gens
de l'Union des producteurs agricoles. Évidemment, on aura des
échanges avec les municipalités, cela va de soi.
En terminant, je veux remercier l'Union des producteurs agricoles,
saluer surtout et particulièrement la satisfaction que l'Union des
producteurs agricoles a à l'égard de cette loi qui a
été adoptée ici en 1978 - je faisais
référence à la loi de 1978, M. le député,
vous avez levé les mains trop vite - et la confiance que les gens de
l'Union des producteurs agricoles ont dans l'avenir du Québec.
Merci.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le ministre. Merci, M.
Proulx, à vous et à vos collègues. Nous allons suspendre
trois minutes pour les changements d'huile.
(Suspension de la séance à 17 h 30)
(Reprise à 17 h 36)
Le Président (M. Richard): À l'ordre, s'il vous
plaît! Mesdames et messieurs, la commission reprend ses travaux. Nous
recevons le deuxième groupe, l'Union des municipalités du
Québec. Au préalable, M. le porte-parole de l'Opposition et M. le
ministre, il faudrait sûrement que vous ayez d'un commun accord
l'Intention de dépasser 18 heures puisque notre mandat allait
jusqu'à 18 heures. Vous n'avez pas d'objection?
M. Pagé: Consentement, M. le Président. M.
Brassard: Consentement, M. le Président. Union des
municipalités du Québec
Le Président (M. Richard): Sur ce, M.
Jean-Louis Desrosiers, vice-président de l'Union des
municipalités du Québec, je vous cède la parole. Je vous
demande dans un premier temps, de présenter les gens qui vous
accompagnent.
M. Desrosiers (Jean-Louis): Merci, M. le Président.
À ma droite, M. Marc Laperrière, directeur de la recherche
à l'Union des municipalités du Québec, Jean-Louis
Desrosiers, maire de Mont-Joli et vice-président de l'Union des
municipalités du Québec; à ma gauche, M. Raymond
L'Italien, directeur général et MM. Serge Belley, permanent et
Massimo - enlevez Serge Belley - et M. Massimo lezonni, permanent.
Même s'il est un peu tard, vous me permettrez en ce début
d'année de vous présenter, au nom de l'ensemble des
municipalités du Québec, non seulement à vous mais
à tous ceux qui vous accompagnent aujourd'hui, nos meilleurs voeux de
nouvelle année. Que celle qui commence soit aussi productive que celle
qui a si bien fini. Je pense que tout le monde a compris que, lorsque le monde
municipal exprime sa satisfaction, c'est que le gouvernement a donné
suite à des choses qu'il considérait importantes. Pour cela, nous
tenons à le dire au début de l'année 1989, merci à
ceux qui ont dit oui. Cela s'adresse à l'ensemble du gouvernement du
Québec, non seulement au pouvoir mais aussi à l'Opposition.
Ces préambules étant faits, l'Union des
municipalités du Québec regroupe au-delà de 250
municipalités qui sont les plus importantes pour ce qui a trait à
la population, au point que plus des quatre cinquièmes de la population
québécoise s'y trouvent représentés. Vous le
saviez, mais il est bon de le redire, puisque de part et d'autre de cette table
nous sommes des élus démocratiques qui représentons la
population et pour laquelle nous tenons les travaux aujourd'hui, des travaux
qui doivent permettre à la population d'avoir plus de succès,
plus de sécurité et plus de plaisir à vivre dans nos
municipalités.
Notre "membership" est composé de municipalités de tailles
variées allant de moins de 5000 habitants à 1 000 000
d'habitants. La mienne n'a que 7000 habitants et j'en remercie ceux qui
m'entourent, c'est une zone verte. Je ne sais pas si elle est vert foncé
ou vert pâle mais elle est totalement verte. Nous en sommes fort aises.
Toutes les communautés font partie de l'Union des municipalités
du Québec ainsi qu'un grand nombre de municipalités
régionales de comté.
Sur le pian financier, les municipalités membres de l'UMQ
géraient en 1987 des budgets totaux de 5 000 000 000 $, employaient plus
de 75 000 travailleurs, représentaient le tiers du secteur public
provincial et investissaient 1 000 000 000 $ en Immobilisations, il est
sûr qu'à les entendre vous vous demandez pourquoi je vous ai lu
ces choses, c'est que plus tard nous vous demanderons de prendre en
considération les critères économiques quant au jugement
que nous aurons à poser sur l'application de cette loi. Nous qui sommes
- et vous voyez pourquoi - si sensibles à cet aspect économique,
nous pensons qu'il est de notre devoir, premièrement, de vous rappeler
ce que nous sommes pour vous faire les propositions souhaitables en temps et
lieu.
En tant que porte-parole du monde municipal, l'union entretient un
dialogue constant avec tous les paliers de gouvernement et organismes qui
jouent un rôle sur la scène locale et supra-locale. Au cours des
dernières années, i'UMQ est intervenue, notamment, sur les
dossiers du partage des pouvoirs entre l'État, les MRC et les
municipalités locales, de la fiscalité municipale, des relations
du travail, de l'aménagement et de l'urbanisme, et de
l'environnement.
Le conseil d'administration de Î'UMQ est formé de maires
représentant la totalité du territoire québécois.
Il comprend aussi des représentants des communautés et des MRC
membres, etc. Tout cela pour vous dire, M. le Président, que quand on a,
d'un commun accord, notre organisme et le gouvernement ou d'autres organismes
à caractère gouvernemental, travaillé ensemble, et nous
vous proposons encore aujourd'hui de continuer dans le môme sens, nous
avons obtenu des succès inégaux.
Certains derniers succès méritent que j'attire votre
attention. Nous avons, lors du différend qui gouverne ce projet de loi
qui est devant nous, demandé à M. le ministre des affaires
agricoles - ce n'est pas le bon litre, mais il s'est bien reconnu - trois
choses. D'abord de le rencontrer à la table Québec municipales et
il est venu. Deuxièmement, dans nos différends, d'avoir un
comité technique qui pourrait siéger sur les questions, cela a
été accordé. Troisièmement, une commission mixte
qu'il a réduit à une commission restreinte, mais qui là
aussi a été accordée. Voilà trois bons points de
consensus que je ne peux passer sous silence et pour lesquels nous remercions
hautement M. le ministre.
En avant-propos, l'Union des municipalités du Québec veut
tout d'abord remercier le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation de tenir des consultations particulières sur le projet de
loi 100. Comme vous le savez, l'union a demandé à plusieurs
reprises la tenue de telles consultations, parce qu'au début, ce
n'était pas accordé. Nous maintenons toujours que tous les
groupes intéressés devraient se faire entendre dans le cadre
d'une commission mixte de l'aménagement et de l'agriculture, mais noue
acceptons volontiers de présenter notre point de vue aux parlementaires
de cette commission.
C'est dans un esprit de collaboration et de concertation que l'union
vous lit aujourd'hui son opinion sur le projet de loi 100. Nous tenons
d'ailleurs à souligner que cette collaboration s'est déjà
matérialisée lors du passage du ministre à la table
Québec-municipalités et lors des travaux du comité
technique dans la recherche de modifications acceptables. Nous espérons
que ces propos, ceux d'aujourd'hui, seront reçus favorablement par les
membres de cette commission et que le ministre de l'Agriculture tiendra compte
de nos commentaires dans le cadre de l'étude article par article de cet
important projet de loi qui concerne non seulement - cela, c'est une erreur
qu'il ne faudrait pas faire - le monde agricole, mais tout le monde: le monde
municipal et l'environnement. Cette question préoccupe, au premier chef,
l'ensemble de la communauté québécoise.
Quant au projet de loi, lorsqu'il a été
déposé à l'Assemblée nationale le 15
décembre dernier, l'union avait mentionné publiquement qu'elle
n'avait jamais été consultée sur ce dossier - tel
était le cas. Pourtant, dès le mois de juillet 1988, le
président de l'UMQ avait suggéré à l'Union des
producteurs agricoles de rassembler les principaux intervenants afin
d'élaborer une solution favorisant la concertation municipale agricole.
Nous nous retrouvons maintenant avec un projet de loi qui comporte plusieurs
dispositions remettant en question les pouvoirs des municipalités en
matière d'aménagement et qui va créer des tensions entre
les citoyens. Nous trouvons cette situation regrettable.
L'Union des municipalités du Québec est pourtant reconnue
comme un organisme qui vise la concertation et non la confrontation. Comme je
l'ai mentionné dans i'avant-propos, j'espère que cuite audience
nous permettra d'apporter un point de vue constructif afin que le projet de loi
100 soit une loi qui permette le rapprochement des mondes municipal et
agricole.
Une bonne question, quels sont les objectifs de ce projet de loi? On
pourrait être ou non d'accord avec les objectifs et, dans un cas comme
dans l'autre, si on était d'accord avec les objectifs, on pourrait
être ou non d'accord avec les moyens. Je pense que c'est une bonne
façon de vous présenter la question pour que, tout à
l'heure, nous puissions échanger des idées sur le sujet, mais
j'espère que ce n'est pas cela qu'on a écrit, ce que je viens de
dire.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, j'aimerais tout d'abord
circonscrire les objectifs du projet. Ils visent, jusqu'à preuve du
contraire, à mieux protéger les terres agricoles et à
faciliter les activités qui s'y exercent. D'ailleurs, l'Union des
producteurs agricoles partage ces objectifs, puisque selon son
président, M. Proulx, le projet
de loi 100 permet de répondre à un grand nombre d'attentes
de son organisme en Introduisant des dispositions visant un territoire
généralement mieux protégé, un blindage
supplémentaire pour les sols de meilleure qualité, des structures
juridiques plus difficiles à traverser pour les dézoneurs,
certaines mesures sur le droit de produire. Telle est la parlure de M.
Proulx.
Par ailleurs, le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de
l'Alimentation indiquait, lors de l'adoption du principe du projet de loi 100
que l'un des objets de ce projet de loi est d'assurer aux agriculteurs que les
règles d'aménagement du territoire soient justes et
équitables, et ce, afin d'offrir aux entreprises agricoles des
conditions stables et similaires de production.
L'UMQ a indiqué, à plusieurs reprises, qu'elle
était et est toujours en faveur de la protection des terres agricoles -
première déclaration et donc pas de changements - et que toutes
mesures visant à assurer une protection supplémentaire devraient
être mises en oeuvre, sauf pour certains équipements publics
comme, on l'a déjà cité, les réseaux d'aqueduc et
dégoût, les lieux d'élimination des déchets
domestiques et les sites d'élimination des neiges usées. Par
contre, même si nous sommes d'accord avec l'objectif du ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation d'avoir des
régies équitables d'aménagement du territoire, nous ne
pouvons souscrire aux mesures sur le droit de produire qui sont introduites
dans le nouveau projet de loi et nous vous dirons pourquoi. (17 h 45)
Autrement dit, l'union est d'accord avec les objectifs que vise le
projet de loi 100 quant à une protection accrue des terres agricoles
sauf pour certaines exceptions, mais les dispositions touchant le droit de '
produire sont des moyens qui visent à diminuer les pouvoirs des
municipalités en matière d'aménagement. Cette situation
fait en sorte que les droits des citoyens sont brimés, puisque
l'aménagement constitue au plan local l'organisation des
activités de la population. Dans ce sens, l'UMQ considère qu'ils
ne sont pas acceptables tels que rédigés.
Le véritable objectif: la protection des terres. L'union a
toujours cru que le problème était un problème de
dézonage. Nous avons peut-être erré. On se souviendra tous
du débat public de cet été sur la révision des
zones agricoles des municipalités régionales de comté.
Beaucoup d'encre a coulé sur cette question qui se heurte à deux
philosophies, comme l'a si bien dit M. Proulx: l'une prône le
dézonage Immédiat de tout ce qui n'est pas requis pour
l'agriculture, l'autre soutient, au contraire, que tout ce qui n'est pas
nécessaire pour le développement urbain planifié
actuellement doit demeurer en zone verte.
À cet effet, nous avons mentionne que la Loi sur
l'aménagement et l'urbanisme oblige les municipalités à
rationaliser davantage l'aménage- ment du territoire et que la Loi sur
la protection du territoire agricole les oblige à respecter les terres
agricoles dans leur schéma. Toutefois, la Commission de protection du
territoire agricole doit rendre des décisions très rigoureuses et
elle ne doit pas fléchir sous les pressions du milieu. Il s'agit donc
d'une question d'équité, d'une question de rigueur et de respect
du mandat Inscrit dans la Loi sur la protection du territoire agricole. Si ces
trois conditions sont respectées, il est faux d'affirmer ou de croire
que l'urbanisation menace de façon Indue l'agriculture. En ce sens,
l'union considère que le problème majeur auquel doit se limiter
le projet de loi est de protéger efficacement les bonnes terres
agricoles du Québec. C'est très clair dans notre esprit et cela,
c'est acheté tout de suite.
Quant au droit de produire, c'est une question beaucoup plus complexe,
parce que c'est une question porteuse d'avenir, une question porteuse de
précédents et une question sur laquelle toute la réflexion
devra, doit se faire pour que ce qu'on va décider ensemble aujourd'hui -
et j'ai l'impression que nous sommes avec vous pour essayer de prendre une
décision dans le bon sens - soit fait avec toute la lumière
possible. Qu'on prenne donc le temps de bien y réfléchir.
Vous êtes bien au fait des arguments pour et contre le droit de
produire des agriculteurs. Je vais essayer d'être bref et de ne pas trop
sortir du texte. Les principaux exemples auxquels on fait
référence fréquemment sont ceux qui portent sur les
citoyens qui vont se construire à la campagne et qui vont imposer des
contraintes aux cultivateurs, puisque les citoyens font souvent des plaintes
contre le bruit, les odeurs et la pollution agricole. Selon l'Union des
producteurs agricoles, on ne peut pas mêler développement
domiciliaire et agriculture sans nuire à cette dernière, comme on
le constate à Repentigny, à Laval ou sur la rive sud. Quand on
sait bien que la réalité est tout autre, je ne comprends pas
qu'on puisse faire une affirmation en ce sens. Je pense que, jusqu'à
preuve du contraire, la ville de Laval en particulier a trouvé sans
avoir de projet de loi une mécanique qui permet de réunir tout ce
beau monde et de le faire s'entendre afin que la coexistence pacifique puisse
exister entre le monde urbain et le monde rural.
D'autres prétendent, au contraire, que dans certaines
municipalités - je dis bien "certaines", je ne voudrais pas que ab uno
dice omnes, M. le Président, qu'à partir d'un exemple on fasse
une règle générale.. Nous connaissons le nombre des
municipalités au Québec, nous connaissons celles qui ont
peut-être, semble-t-il, fait des abus de pouvoir à partir de
réglementations qu'elles avaient la capacité de faire, mais ce
n'est pas l'ensemble du territoire du Québec. Alors, je demande qu'on
lise bien le texte de la façon dont il est écrit: Dans
"certaines", les élus municipaux abusent de leur pouvoir
d'aménagé-
ment en limitant les activités des agriculteurs, ce avec quoi on
ne peut pas être d'accord. Vous comprenez bien qu'on ne peut pas
approuver des choses semblables.
Bien entendu, il y a aussi la question environnementale touchant les
pratiques en agriculture. Pour chacun de ces points, on a introduit
différentes dispositions qui sont, à notre avis, des mesures qui
vont diminuer considérablement les pouvoirs des élus municipaux
ainsi que les droits des citoyens. Et plus nous consultons d'avocats -
peut-être qu'on ne devrait pas parler aux avocats - sur cette question,
tout le monde y trouve à redire, tout le monde y trouve matière
à interprétation. Je ne sais pas qui a fait la boutade
tantôt: cela fera un beau nouveau champ de pratique pour les avocats,
peut-être, mais je pense que ce n'est pas le point de vue de
l'État.
Le point de vue municipal. Ce que je veux faire ici maintenant, c'est de
vous indiquer dans un premier temps que, dans le milieu municipal, nous ne
croyons pas que les problèmes soulevés ci-haut doivent être
résolus par voie législative. Je tiens à mentionner que
nous n'avons pas procédé à une analyse exhaustive de ces
problèmes dans chacune de nos municipalités membres - je serais
un fieffé menteur - mais que ce sont plutôt des observations et
des questions que je soumets aux membres de cette commission afin que nous
puissions bien circonscrire la nature des problèmes à
résoudre.
Est-ce qu'on sait aujourd'hui, est-ce qu'on a indiqué à
cette commission les municipalités qui sont en conflit avec les
agriculteurs sur leur territoire? Y en a-t-il beaucoup? Pouvons-nous
aujourd'hui indiquer à cette commission les types de conflit entre les
municipalités et les agriculteurs? Je ne sais pas, mais ce sont des
Informations qui sont joliment bonnes. Pouvons-nous aujourd'hui Indiquer
à cette commission le nombre de poursuites par des agriculteurs contre
les municipalités?
Avons-nous vraiment bien circonscrit la nature du problème, avant
de présenter les mesures sur le droit de produire qui sont dans le
projet de loi 100? Voilà, à notre point de vue, M. le
Président, des questions joliment importantes, qui vont nous permettre
d'avoir toute la lumière pour nous indiquer la direction dans laquelle
on doit écrire ce projet de loi, parce que nous sommes toujours d'accord
qu'il faut protéger les terres agricoles. Les seuls cas connus et
publicisés sont, bien entendu, ceux de la ville de Pintendre et de
Sainte-Anne-de-Sabrevois. Mais peut-on se baser sur deux municipalités
pour légiférer?
Nous croyons donc qu'il doit y avoir un dialogue constant entre le monde
municipal et le monde agricole et qu'il faut le dire. Le ministre nous l'a
souvent dit aussi. Pourtant, ce dialogue ne doit pas être contraint dans
un cadre législatif. C'est plutôt la voie de la concertation qui
doit primer avant tout. Une concertation qu'on établit, pas une
concertation qu'on impose, il me paraît évident que la solution
pour éviter les affrontements entre l'agriculture et Ie monde municipal
résulte dans une concertation mieux organisée provenant d'une
volonté locale. Déjà, certaines municipalités comme
Lavai, La Baie, Aylmer, se sont dotées de comités de concertation
municipale agricole et préparent ensemble les solutions pertinentes
à leurs problèmes.
Par ailleurs, il faut constater que, dans le cadre de la révision
des zones agricoles, là où il y a une concertation entre les
élus municipaux et les agriculteurs, les décisions sont prises
beaucoup plus rapidement. Dans le cadre de cette concertation, on pourrait
éventuellement penser à des règlements municipaux
particuliers à la zone verte, qui seraient basé sur les
caractéristiques de son usage, alors qu'on pourrait en créer
d'autres plus adaptés au secteur urbain non agricole d'une
municipalité, comme on le fait en zone commerciale ou
résidentielle. Nous, nous pensons que c'est possible.
Ce qu'on doit retenir ici, c'est que le palier local initie cette
concertation et, justement parce qu'il y a une volonté du milieu, les
chances de succès de celle-ci seraient excellentes. L'Union des
municipalités du Québec est prête à continuer dans
cette voie en sensibilisant son "membership" à la concertation
municipale agricole si certains moyens prévus dans le projet de loi sont
différents. Nous pensons, M. le Président, que nous avons un
rôle à jouer le et nous tenons à vous le dire.
Officiellement, nous sommes prêts à le jouer. Nous pensons que les
municipalités, au Québec, ont un rôle Important dans cette
concertation nécessaire, dans cette nécessaire concertation et
non pas légale concertation, et nous sommes prêts à y
mettre le temps et les efforts qu'il faut.
La question de l'environnement. Pour ce qui est de la question de
l'environnement, vous n'êtes pas sans savoir que, depuis l'incident de
Saint-Basile-Ie-Grand, ce dossier est d'une extrême importance non
seulement pour la population québécoise, mais aussi pour
l'ensemble du Canada. Comme le soulignait la revue MacLean's de janvier dans
son analyse annuelle de l'opinion publique canadienne, les Canadiens sont de
plus en plus Inquiets des impacts négatifs sur l'environnement. Le
sondage démontre que la population désire de plus en plus une
meilleure qualité de vie et qu'elle n'acceptera pas de voir sa
santé, sa sécurité et la planète être mises
en danger.
Pour l'union, la question de l'environnement est avant tout
sociétale. Elle n'est pas uniquement limitée à
l'agriculture. Elle s'adresse aussi aux municipalités et aux Industries.
Il nous apparaît Important de ne pas dissocier tout ce beau monde. Sauf
que, dans le projet de loi 100, on introduit de nouvelles dispositions
élargissant le champ de l'Immunité des agriculteurs en
matière d'environnement qui font en sorte qu'ils ne pourront pas
être poursuivis à cause du bruit,
des poussières ou des odeurs découlant de leur
production.
Selon l'UMQ, l'immunité ainsi accordée porte atteinte aux
droits de tout citoyen d'être entendu devant les tribunaux pour les
dommages qu'entraîne une activité agricole exercée en toute
conformité avec la Loi sur la qualité de l'environnement et de
ses règlements. Cela nous apparaît fondamental. On va
écrire du droit nouveau si on fait des choses semblables. Si c'est ce
qu'on faisait avant, pourquoi aller changer des choses qui fonctionnent? Parce
que c'est l'agriculture? Pas sûr. M. le Président. Nos
conseillers, de toute nature, nous disent: Faites attention à cet
aspect-là. Alors, ce faisant, on va aller à l'encontre de la
tendance actuelle de protéger davantage l'environnement.
La solution, à notre avis, est plutôt
d'expérimenter, comme le souligne à juste titre l'Union
québécoise pour la conservation de la nature, de meilleures
techniques de traitement du fumier, de trouver des pratiques culturales
hypothéquant moins les sots et de favoriser une utilisation moindre des
pesticides, par exemple. Ce sont des choses qu'elle citait dans son
mémoire, et nous avons senti le besoin de les rappeler.
Quels sont les droits des citoyens? Au cours de ce débat,
plusieurs intervenants dont l'UMQ ont indiqué que le projet de loi 100
remettait en question les droits des citoyens. Vous vous souviendrez qu'en 1978
l'actuel ministre de l'Agriculture... Je ne lirai pas ce qu'il a dit, I en a
suffisamment parlé, mais pas parce que ce n'était pas bien dit.
C'était fort joliment dit. M. le Président, nous voulons
réitérer ces mômes arguments lorsqu'on aborde la question
du droit de produire. Ainsi, le Barreau du Québec indiquait, en
correspondant avec le ministre de l'Agriculture le 12 décembre dernier,
que certaines dispositions du projet de loi portent de dangereuses atteintes au
droit civil. Ce n'est pas possible, M. le Président, que tant de gens
vous fassent des observations et vous disent attention, attention, sans qu'il
n'y ait de résultante de votre côté à l'effet que
vous preniez les moyens, via le ministre de l'Agriculture, afin que cette
attention-là soit apportée dans ce projet de loi, alors qu'une
telle limitation du droit civil nous semble inacceptable. Cela commence
à être des organismes importants, M. le Président.
Nos conseillers juridiques nous indiquent aussi que certains articles
peuvent aller à rencontre de la Charte des droits et libertés de
la personne, autant la canadienne que la québécoise. Cela aussi
est important. On ne peut pas passer cela sous silence. Ces affirmations nous
portent à réfléchir sur les conséquences que
pourrait avoir l'adoption du projet de loi sur notre société.
Peut-on accorder un statut particulier à un groupe de citoyens? Est-il
raisonnable qu'un groupe de citoyens sort au-dessus de la loi, des
règlements, de l'autorité des tribunaux? Je n'en veux pas aux
cultivateurs. Je n'en veux pas aux agriculteurs. Si on commence par eux,
après cela, les Industriels pourront venir, les tireurs à l'arc
pourront venir et les dames de Sainte-Anne pourront venir. Pourquoi pas pour
tout le monde? Je ne sais pas. C'est un précédent qu'on est en
train de créer. Je ne sais pas quand vous allez arrêter. Cela nous
apparaît dangereux, M. le Président.
Ces questions sont vraiment liées à un choix de
société, vous en conviendrez. Vivons-nous dans une
société dominée par les groupes d'intérêts
particuliers ou dans une société qui répond à
l'intérêt général de la population? À cet
égard, on ne peut répondre dans l'affirmative aux deux questions
soulevées ci-haut. L'intérêt générai de tous
les citoyens prime avant tout. Il faut rechercher d'autres formules qui ne
remettent pas en question les droits des citoyens.
Je ne vous apprendrai rien de nouveau quant à l'autonomie
municipale en disant que la municipalité est le palier de gouvernement
le plus près des citoyens, y compris les agriculteurs. C'est aussi,
comme pour vous, M. le Président, une de nos considérations de
tous les jours: comment allons-nous harmoniser ces lois avec lesquelles nous
sommes en accord, mais avec lesquelles nous avons aussi des mandats
d'exécution? (18 heures)
La municipalité répond aussi aux besoins reliés au
cadre de vie des citoyens. La municipalité a des responsabilités
qui s'adressent à l'ensemble de la collectivité et non à
un groupe particulier. Comme vous le savez, elle est redevable à ses
commettants à tous les quatre ans comme le veut la démocratie
représentative. Nous, c'est à périodes fixes, mais c'est
quand même la même méthode: il faut rendre compte.
Dans le cadre du projet de loi 100, certaines dispositions s'attaquent
au principe même de l'autonomie municipale en remettant en question le
pouvoir de réglementer des élus ainsi que les pouvoirs
d'aménagement. Ce sont des questions fondamentales. Le
législateur a déjà parlé. Il ne parle pas pour rien
dire. Il a déjà promulgué une loi, la loi 125. Dans sa
loi, il nous demandait de faire des choses, nous habilitait à faire des
choses et M nous surveille quand nous faisons ces choses. Il ne faudrait pas
nous donner un pouvoir d'une main et, de l'autre, nous le retirer. Il faudrait
quand même qu'on puisse fonctionner normalement.
Je conclus cette partie, M. le Président, en
réitérant que le monde municipal est conscient des
problèmes que le ministre veut résoudre mais, dans notre esprit,
les moyens utilisés vont à l'encontre de l'autonomie
municipale.
M. L'Italien va me permettre de me reposer ta gorge et ça va vous
reposer les oreilles.
M. L'Italien (Raymond): M. le Président, avant de
procéder à l'analyse détaillée du projet de loi, il
est important de souligner aux membres de la commission que l'UMQ et l'Union
des municipalités régionale de comté ont
rencontré
des représentants du ministère de ('Agriculture dans le
cadre d'un comité technique afin d'apporter certaines modifications au
projet de loi 100. À cet égard, nous tenons à
réitérer les mêmes commentaires que ceux que nous avions
formulés à ce comité, puisque nos positions demeurent
inchangées.
Comme nous l'avions mentionné au comité technique, l'UMQ
est d'accord avec la plupart des articles de 1 à 21 du projet de loi 100
sous réserve de certaines modifications. Comme il s'agit de
modifications techniques, j'aimerais référer les membres de cette
commission à l'annexe I des présentes qui regroupe les
recommandations de l'Union des municipalités concernant la section sur
la protection des terres agricoles.
À l'article 17, paragraphe 2 du deuxième
alinéa...
Le Président (M. Richard): Je m'excuse, M. L'Italien,
seulement un instant. Votre temps de présentation est terminé,
sauf commun accord, il peut y avoir une...
M. Pagé: Oui.
M. Dufour: Cela va enlever du temps pour les questions.
Le Président (M. Richard): Évidemment, c'est votre
choix. Alors, vous avez la parole, M. L'Italien.
M. L'Italien: M. le Président, j'aimerais attirer
l'attention des parlementaires sur l'article 17 du projet de loi, paragraphe 2
du deuxième alinéa de I'article 62, qui mentionne "l'utilisation
actuelle du lot, plus particulièrement le type et l'intensité
d'agriculture qui s'y pratique et les possibilités d'utilisation du lot
à dos fins d'agriculture". L'UMQ considère que ce critère
pourrait permettre à la Commission de protection du territoire agricole
d'autoriser d'autres utilisations que l'agriculture dans le cas des lots
laissés en friche. Il serait donc pertinent de restreindre ce
critère afin que de telles situations ne se produisent pas.
Article 17, paragraphe 3. Comme vous pouvez le constater, l'article 17
introduit une série de critères obligatoires ou facultatifs afin
que la commission puisse rendre ses décisions. Les critères
obligatoires portent sur l'incidence agricole de l'utilisation d'un lot, tandis
que lorsqu'on aborde les critères à caractère
économique ceux-ci sont facultatifs. La commission n'est pas
obligée de tenir compte de ces derniers pour rendre ses
décisions. Nous croyons que ces critères devraient être
obligatoires puisque, de toute façon, le projet de loi 100 introduit
déjà à l'article 12 la notion d'intérêt
général de protéger le territoire et les activités
agricoles. En rendant obligatoires les critères économiques, on
peut aussi s'assurer d'une certaine rigueur dans les décisions que
prendront Ses commissaires, puisque les critères seront uniformes pour
chaque dossier, ce qui ne laissera pas place à
l'interprétation.
À I'article 21 introduisant I'article 69.08, tout en étant
d'accord avec l'esprit de l'article 69 08, l'UMQ considère que certains
équipements d'utilité publique ne devraient pas être
visés par le deuxième alinéa de l'article 69.08, il s'agit
des réseaux d'aqueduc et d'égout de même que des usines de
traitement et d'épuration des eaux, des lieux d'élimination des
déchets domestiques et des sites d'élimination des neiges
usées. Nous croyons que ces équipements sont des services pour
toute la collectivité qui visent avant tout la protection de
l'environnement. Le régime ordinaire de la loi devrait s'appliquer.
Concernant les activités agricoles, à l'article 22
Introduisant les articles 79.02 et 79.12, le projet de loi 100 introduit la
possibilité pour les producteurs agricoles de recourir à un
commissaire-aviseur qui pourra entendre leurs plaintes quant à une
réglementation municipale leur imposant des contraintes indues dans la
poursuite de leurs activités en zone agricole. L'introduction d'une
telle mesure remet en question le pouvoir des municipalités de
gérer leur territoire. On propose une personne nommée par le
gouvernement pour donner une opinion sur les règlements qui ont
été adoptés par des personnes élues
démocratiquement. On accorde un pouvoir et un statut particulier
à un commissaire qui serait, à toutes fins utiles, le
représentant gouvernemental défendant un groupe
d'intérêts particuliers devant un conseil municipal élu par
la population et qui doit défendre l'intérêt de tous les
citoyens.
Le commissaire-aviseur aurait même le pouvoir de publier son
rapport dans un journal de la municipalité, ce qui mettrait !a
municipalité dans une position pour le moins délicate face
à l'opinion publique, ayant alors à s© défendre de
ses interventions en zone agricole. Cette personne nommée est ni plus ni
moins une entrave au pouvoir municipal. Elle vient créer un
échelon administratif supplémentaire entre la population et la
municipalité.
L'UMQ demande le retrait de cette section. Nous croyons que c'est par la
voie de la concertation que nous atteindrons l'objectif d'élaborer une
réglementation adéquate en zone agricole et non en
contrôlant les élus municipaux.
Nous croyons que le gouvernement municipal doit offrir aux citoyens une
administration transparente. À cet effet, le rapport Parizeau avait
d'ailleurs recommandé qu'un poste de protecteur du citoyen soit
créé pour l'administration municipale. Cette alternative
s'applique à toute la population de ta municipalité et non
à un groupe d'intérêts particuliers, soit-il celui des
agriculteurs ou d'autres. Par ailleurs, nous serions curieux de savoir combien
de plaintes formelles ont été formulées par des
agriculteurs auprès de leur municipalité.
Article 79 13 et 79.14 concernant les Immunités. Le projet de loi
100 Introduit de nouvelles dispositions élargissant le champ de
l'immunité d'un producteur agricole au chapitre des normes
environnementales. Ainsi, un producteur agricole peut exercer ses
activités en toute quiétude pour autant qu'il respecte la loi et
les règlements sur la qualité de l'environnement. Même si
ses activités agricoles dégagent des poussières, des
odeurs ou des bruits, l'agriculteur ne peut alors être
empêché d'exercer celles-ci et ne peut même pas être
poursuivi. Pourtant, il n'existe pas, à l'heure actuelle, de
règlement sur la qualité de l'environnement régissant les
poussières, les odeurs et les bruits résultant d'activités
agricoles.
L'argument souvent énoncé à l'appui de cette
disposition est d'éliminer les plaintes, qui pourraient être
abusives, logées contre des agriculteurs. Nous croyons qu'en tentant de
limiter ainsi la poursuite, le gouvernement se permet de balayer du revers de
la main toute une catégorie de recours jugés d'avance abusifs ou
irrecevables, retirant ainsi aux citoyens le droit reconnu par la Charte des
droits et libertés de la personne d'être entendus devant les
tribunaux. C'est d'ailleurs le rôle des tribunaux de juger de la
validité d'un recours et de déterminer si celui-ci est abusif ou
non. Les arguments administratifs ne doivent pas avoir préséance
sur les droits fondamentaux des citoyens. Dans ce sens, l'UMQ s'oppose à
ces articles.
Article 79.15 en matière de réciprocité, afin de
permettre aux agriculteurs d'exercer leurs activités en toute
quiétude, le projet de loi 100 indique qu'une personne désirant
ériger un bâtiment en zone agricole devra respecter de
façon réciproque la distance imposée aux exploitations
agricoles. SI la personne ne veut pas respecter cette
réciprocité, la municipalité ne pourra pas émettre
de permis de construction sauf si le propriétaire renonce au recours
qu'il aurait pu utiliser pour se défendre.
Du point de vue du citoyen, cette disposition remet carrément en
question ses droits de propriété ainsi que son droit de jouir
paisiblement de ses biens. Le projet de loi 100 énonce que, si vous
possédez un lot en zone agricole ou à proximité d'une
exploitation agricole et que vous prévoyez y bâtir votre maison,
vous devrez respecter les exigences de votre voisin sur votre propre terrain.
Autrement dit, tous les citoyens du Québec ayant un lot en zone agricole
et désirant y ériger un bâtiment seront brimés quant
au droit de propriété que d'autres citoyens auraient dans la zone
résidentielle d'une municipalité, et ce pour qu'un agriculteur ne
soit pas dérangé dans ses activités. C'est
l'Intérêt d'un groupe particulier de la société qui
prime sur l'intérêt général.
Il est absolument inconcevable qu'on fasse subir à un citoyen les
mêmes règles qu'à un agriculteur en zone agricole. Le
citoyen ordinaire n'exploite pas comme l'agriculteur une entreprise qui peut
créer des nuisances, comme les odeurs, la fumée qui se
dégage de son exploitation, à son voisinage. Il est inconcevable
aussi qu'on lui indique qu'il doive renoncer à l'avance à ses
droits Le projet de loi 100 protège l'agriculteur du reste de la
société. Nous osons croire que le législateur n'avait pas
comme objectif d'immuniser les agriculteurs qui ne prenaient pas les
précautions nécessaires pour éviter à leurs voisins
des nuisances
Du point de vue du municipal, cette disposition remet carrément
en question son pouvoir en matière de zonage et plus
particulièrement celui de déterminer les espaces libres entre les
usagers. En appliquant le projet de loi 100, la municipalité devra tenir
compte en particulier des exigences des agriculteurs avant d'être en
mesure de satisfaire le reste de la population.
La sous-section 4, fonds spécial, M. le Président, l'UMQ
considère que l'objectif de doter les agriculteurs d'un fonds d'appel
pour entreprendre des recours Judiciaires est fort louable en soi. Nous sommes
conscients qu'un certain nombre d'agriculteurs n'ont pas les moyens de se payer
les services juridiques convenables sauf, encore une fois, que ie moyen
suggéré dans le projet de loi donne à un groupe de
citoyens un statut particulier. Nous estimons qu'un tel fonds devrait
être soutenu par l'Union des producteurs agricoles, comme le fait
d'ailleurs l'Union des municipalités du Québec par l'entremise de
son propre fonds d'aide juridique. La responsabilité première
d'un tel fonds ne relève pas, à notre avis, du gouvernement, mais
bien d'un organisme représentant ses membres et dont l'objectif est
justement d'assurer leur défense et leur promotion. Par ailleurs, pour
initier ce fonds, ie ministère de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation pourrait juger à propos d'aider financièrement
l'UPA par l'entremise, par exemple, d'une subvention de démarrage. Il y
aurait donc lieu de revoir les articles concernant le fonds d'appel à la
lumière de nos commentaires.
En conclusion, M. le Président, l'ensemble des dispositions qui
concrétisent le droit de produire des agriculteurs, que ce soit
l'immunité en matière d'environnement, la
réciprocité, le fonds d'appel, le commissaire-aviseur, bouleverse
la fragile hiérarchie des valeurs sociales difficilement acquise en
donnant prépondérance à ce droit sur les droits et
libertés du citoyen et sur la protection de l'environnement. Pourtant,
ces deux dernières valeurs sont présentement prioritaires au sein
de l'opinion publique québécoise. Peut-on vraiment, à
notre époque, placer d'autres valeurs au-dessus de la protection de
l'environnement et des droits fondamentaux des citoyens? M. le
Président. l'UMQ a répondu non à cette question. Nous
osons croire que les membres de cette commission arriveront à la
même conclusion.
Le Président (M. Richard). Merci, M. L'Italien. M. le
ministre?
M. Pagé: Merci, M. le Président. Combien nous
reste-t-il de temps? Et pour mon collègue? 25 minutes.
Le Président (M. Richard): Un instant, on va vous
répondre avec plaisir.
M. Pagé: 25 minutes chacun?
Le Président (M. Richard): Cela va, 25 minutes chacun. 30 minutes
chacun, c'est magnifique. Vous venez de gagner chacun cinq minutes. Allons-y.
(18 h 15)
M. Pagé: Je voudrais remercier MM. Desrosiers,
Laperrière, L'Italien, Belley et lezonni de leur présentation
d'aujourd'hui au nom de l'Union des municipalités du Québec. Le
mémoire que vous formulez aujourd'hui et les représentations que
vous faites vont, on doit en convenir exactement, dans le sens des
représentations que vous m'aviez formulées autant à la
table Québec-municipalités qu'au comité technique qui se
sont réunis pour voir les possibilités de rapprochement entre ce
qui apparaisssait au début et ce qui apparaît encore aujourd'hui
à certains égards comme étant une divergence
d'appréciations ou d'opinions à l'égard de certains
éléments du projet de loi. Je comprends, M. le maire, je
comprends les maires du Québec et les représentants des
municipalités, de manifester à la fois un peu d'inquiétude
et aussi certains appétits, dans le cadre du projet de loi. Les
inquiétudes pour les articles 17 et suivants et un peu d'appétit
pour les motifs suivants.
Vous représentez les municipalités qui ont un territoire
donné. Il y a longtemps que Je suis bien conscient, comme ministre, que
pour les municipalités, la situation idéale commanderait d'avoir
juridiction sur l'ensemble du territoire et de pouvoir appliquer des
réglementations sur l'ensemble du territoire, en incluant
évidemment le territoire zoné agricole. Cependant, le
problème qu'on a, M. le maire et messieurs de l'Union des
municipalités, c'est un problème qui est à la fois
compliqué et très simple. Il est compliqué, en raison de
l'obligation que nous avons comme législateurs et que j'ai, comme
ministre, de formuler des propositions et d'adopter des mesures, ici, à
l'Assemblée nationale, visant à protéger
l'agriculture.
Il faut toujours avoir à l'esprit que la ressource soi est une
ressource non renouvelable, une ressource limitée. Et dès qu'un
sol est affecté à d'autres fins que l'agriculture, dans la
presque totalité des cas, sauf quelques exceptions de
réaffectation ou de réhabilitation de sol. Dans la très
grande majorité des cas, dis-je, ce sol est complètement perdu
pour tout le temps, pour des fins agricoles.
Il est compliqué donc, mais simple aussi d'un autre
côté, car vous conviendrez que, dans le passé et encore
aujourd'hui pour plusieurs municipalités, le considération ou
l'appréciation pour un sol agricole n'était pas toujours à
la dimension d'un protection adéquate des sols agricoles. Et je
m'explique. Souventefois, vous savez, et ça, je suis obligé de !e
dire, un sol zoné agricole est un sol qui l'est en attendant
d'être dézoné, purement et simplement.
N'allez pas croire que c'est le même niveau d'appréciation
pour un sol qui est zoné agricole que pour un sol qui est zoné
industriel, dans nos municipalités du Québec. D'ailleurs, si tes
municipalités du Québec - et ça, Je pense que tout le
monde est unanime à le reconnaître -avaient été
conscientes de l'importance de la valeur des sols agricoles pour une
société, peut-être qu'en 1978, le législateur
n'aurait pas été obligé d'adopter une Loi sur la
protection du territoire agricole. Peut-être qu'aujourd'hui, on ne serait
pas ici, en ce 9 janvier, si les municipalités du Québec avaient
pris leurs responsabilités à l'égard de cette protection
à donner aux sols agricoles. Mais non! Encore aujourd'hui, vous savez.
Combien de lettres ai-je reçues, depuis que je suis ministre de
l'Agriculture, m'indiquant la situation, entre guillemets, "malheureuse" que
vivent certaines municipalités qui pourraient recevoir, tantôt une
petite entreprise, tantôt un projet, et qui ne le peuvent pas parce
qu'elles ont un sol zoné agricole.
Mais cela fait référence à ce concept traditionnel
dans l'esprit de plusieurs élus municipaux au Québec, comme quoi
un sol zoné agricole l'est en attendant qu'on décide d'en faire
quelque chose d'autre. Et vous comprendrez qu'un principe comme
celui-là, le ministre de l'Agriculture et nous, au gouvernement, nous ne
le partageons pas, parce que nos sois agricoles sont importants.
À la page 11 de votre mémoire, vous posez plusieurs
questions. Pouvons-nous, aujourd'hui, indiquer à cette commission les
municipalités qui sont en conflit avec les agriculteurs sur leur
territoire? On a eu des cas que vous avez cités, le cas de Pintendre,
ici, le cas de Sabrevois. Mais je dois vous dire que n'eût
été de l'intervention du ministre de l'Agriculture au
comité ministériel permanent du développement
régional, chargé d'adopter les schémas
d'aménagement des MRC, ce sont de très nombreux cas qui
existeraient aujourd'hui. Des cas où certaines municipalités
voulaient appliquer des contraintes significatives au monde agricole, des
contraintes qui débordaient le cadre strict d'un aménagement
normal ou rationnel dans une société.
Pouvons-nous aujourd'hui indiquer à cette commission les types de
cas de conflits entre les municipalités et les agriculteurs? Mais ces
cas de conflits sont très clairs. Des municipalités au
Québec voudraient, par exemple, éliminer totalement la production
du porc sur leur territoire. Elles n'en veulent pas, ou encore elles voudraient
la limiter à un point tel que ça changerait
complètement les régles du jeu de la rentabilité
économique d'une entreprise.
Pouvons-nous aujourd'hui Indiquer à cette commission le nombre de
poursuites des agriculteurs contre les municipalités? On pourrait faire
référence évidemment aux obligations qui ont
été imparties à plusieurs agriculteurs de déposer
des procédures pour se défendre à l'égard de
certains règlements municipaux. Vous dites que les seuls cas connus et
publicisés sont, bien entendu, Pintendre et Sainte-Anne-de-Sabrevois.
Mais peut-on se baser sur deux municipalités pour
légiférer? Écoutez, si nous n'étions pas intervenus
dans le schéma d'aménagement de la MRC de l'Assomption, c'est
l'ensemble de la production porcine qui aurait été
éliminée dans cette région-là, malgré la
mise en oeuvre, depuis quelques mois, d'un programme qui vise à donner
une meilleure protection de l'environnement et à doter le monde agricole
d'Infrastructures adéquates pour protéger l'environnement.
A la page 12, vous faites référence au comité de
concertation. Et là, j'ai été surpris, M. le maire. Vous
dites que c'est la voie de la concertation qui doit primer avant tout. C'est ma
première question. Comment concilier ce commentaire ou ce voeu que vous
formulez avec ta position adoptée par les organismes municipaux du
Québec, lorsque mon collègue, M. le ministre des Affaires
municipales, en 1987, a modifié la loi 125 pour y prévoir une
section portant sur les comités de concertation? Et une fois que cette
section a été présentée ici, mon collègue,
le ministre des Affaires municipales, le président du COMPADR et
moi-même étions convaincus que ces comités de concertation
pouvaient voir le jour et que, s'ils voyaient le jour, ils pourraient jouer un
rôle utile. Mais non, les municipalités se sont opposées,
tant et si bien que, dans la loi - le député de Jonquière
y était - tout le volet du mandat du comité de concertation n'a
pas pu être adopté ici, en commission parlementaire. Et je dois
vous dire que c'est à partir de cette expérience
d'impossibilité - de cette expérience qui nous a permis de
conclure qu'il était impossible de mettre en place des comités de
concertation - qu'est née la notion du commissaire aviseur pour
régler les différends qui pourraient exister entre une
municipalité et un citoyen, un producteur ou une productrice agricole.
Je dois dire que je suis surpris. Dois-je comprendre que vous souhaiteriez voir
renaître ces comités de concertation auxquels les
représentants des municipalités se sont opposés en 1987?
Oui, oui, je vous en prie, M. le maire. Allez.
M. Desrosiers: Une première remarque sur l'intervention
que vous avez faite quant à la page 11. Je ne sais pas si mon
entendement est bon. Pour Pintendre et Sabrevois, c'est une question de
règlement; ce n'est pas une question de schéma.
M. Pagé: La question de règlement...
M. Desrosiers: Dans ces cas-là, on a passé des
règlements de nuisance...
M. Pagé: C'est ça.
M. Desrosiers: ...qui venaient Interférer. Alors, il
n'était pas question de schéma. Cela n'avait pas de rapport avec
le COMPADR.
M. Pagé: Non, mais l'un n'exclut pas l'autre.
M. Desrosiers: Je comprends bien, mais de la façon dont
vous l'avez verbalisé, ça m'a dérangé un peu parce
que j'avais l'Impression qu'on avait mis dans le même plat des choses qui
sont de caractère différent.
M. Pagé: Je m'excuse. Il a été très
clairement établi par les quatre ministres concernés au COMPADR,
en conférence de presse, que le gouvernement du Québec n'allait
pas accepter que des municipalités se donnent le droit d'établir
des zones tampons ou, encore, se donnent le droit de légiférer ou
de réglementer on matière de zonage de production.
M. Desrosiers: Bon. Comme ça, on dit la même chose.
J'avais l'Impression qu'il y avait une ambiguïté de ce
côté.
A la page 12, vous avez fait référence à la fameuse
concertation. Pour ceux qui ne sont pas informés, qui ne sont pas
initiés quant à la question, le bât blesse, parce qu'en
autre temps, il semblerait qu'on aurait tenu un autre langage. Pourtant, telle
n'est pas la réponse.
Lorsque la loi 125, dans sa nouvelle formulation, nous avait
proposé la possibilité d'un comité de concertation
agricole, premièrement, c'était une Imposition par la loi et non
pas un vouloir d'en bas. Deuxièmement, non seulement c'était une
Imposition de par la loi, mais ça donnait au monde agricole la
possibilité de contrôler les règlements municipaux, il
avait le haut du pavé. C'est pour cette raison qu'on n'a pas pu accepter
un comité à propos duquel on a aujourd'hui l'impression de
revenir en arrière. Bien oui, on revient en arrière, mais pour
faire de façon différente. Je le répète. Je pense
que c'était une bonne voie. Je pense que la façon de le faire a
peut-être besoin d'amendements. C'est peut être ce qu'on est en
train de faire aujourd'hui. S'il est imposé et si la nouvelle
proposition est encore une imposition à l'effet que MM. les agriculteurs
auront le contrôle parfait sur la réglementation municipale, on va
vous répondre encore non, M. le ministre. Mais si la question est
posée autrement, la porte est alors ouverte. Cela (n'apparaissait
Important de faire ces commentaires.
M. Pagé: Dois-je comprendre qu'à défaut pour
vous de voir des comités de concertation
constitués selon vos critères, vous*
préférez le commissaire aviseur?
M. Desrosier»: J'aimerais avoir votre habileté,
parce que vous m'avez posé une question que je trouve très
pertinente. Vous me faites choisir entre deux maux. Je devrais choisir le
moindre, mais je vous ferai remarquer que ce sont deux maux.
Ma position est toujours la même. Nous faisons une affirmation sur
laquelle tout le monde est d'accord. Il y a nécessité de
concertation agricole-urbaine. Sans ça, c'est le monde à
l'envers, n'en parlons plus, on est tous d'accord.
M. Pagé: Cela, c'est la vertu.
M. Desrosiers: Bon. Comment allons nous faire les choses? Il y a
eu une proposition, dans le passé, qu'on a refusée. Je vous al
dit pourquoi. Vous en faites une nouvelle aujourd'hui, qui nous agace un peu,
et on vous a dit pourquoi. On ne connaît pas la solution. Il en faut une.
On est d'accord pour en trouver une ensemble. Vous nous proposez le commissaire
aviseur. On a fait un certain nombre de commentaires sur le commissaire
aviseur. On a dit: Non seulement on propose un commissaire aviseur, mais on
propose aussi un fonds de défense et on propose aussi une
immunité, on propose aussi la réciprocité. M. le ministre,
je ne peux pas accepter uniquement le commissaire aviseur sans savoir ce qui va
arriver après avec les autres. Vous comprenez bien que ça se
tient. C'est là le droit de produire.
Alors, concernant la protection des terres agricoles, il y a une
certaine problématique, une certaine façon de voir avec laquelle
nous sommes d'accord. Il est sûr que l'on a, de façon spatiale,
peinturé le Québec en partie vert et en partie blanc, et
aujourd'hui on a une partie vert pâle. Peut-être que les gens qui
sont dans l'agriculture disent: C'est encore chez nous, et que les gens qui
sont dans le monde urbain disent: C'est à la veille d'être chez
nous. Vous avez dit: C'est en attendant. C'est peut-être ça le
vert pâle, le vert foncé.
Pour nous, ce n'est pas notre point de vue. Notre point de vue est le
suivant: N'allons pas sortir le bazooka pour tuer une mouche et profiter du
boum-boum pour passer le droit de produire. Le droit de produire est un droit
neuf qui comporte des éléments que vous avez bien
identifiés, sur lequel nous avons attiré l'attention, sur lequel
le Barreau a attiré l'attention, sur lequel beaucoup de gens attirent
l'attention, parce qu'ils disent que, dans sa facture même, on ne
connaît pas ce qu'il sera demain J'ai envie de reprendre les paroles que
vous avez dites, lors du témoignage précédent. Faites
confiance un peu plus. Je veux bien faite confiance mais peut-on ensemble
avancer un pas de plus pour clarifier, de façon telle qu'on soit
sécurisés?
C'est dans ce sens.
Je reviens à ce que vous m'avez demandé. Lequel des deux
voulez-vous, le commissaire aviseur au le comité de concertation?
M. Pagé: Voulez-vous? (18 h 30)
M. Desrosiers: M. le ministre, je prends le comité de
concertation qu'on va faire ensemble mais qui ne sera pas imposé et qui
ne sera pas nécessairement édicté avec les règles
que l'union va vous proposer. Il sera édicté avec les
règles que nous allons faire ensemble - ce n'est pas pareil - que nous
allons faire avec le monde agricole, que nous allons faire avec le monde
législatif et avec le monde municipal, parce que ce sont les trois
parties qui ont un rôle à jouer dans cela. Nous sommes ouverts
à cela de façon très officielle.
M. Pagé: Je note votre ouverture. Toujours à la
page 12, vous dites: "Dans le cadre de cette concertation, on pourrait
éventuellement penser à des règlements municipaux
spécifiques à la zone verte, qui seraient basés sur les
caractéristiques de son usage, alors qu'on pourrait en créer
d'autres plus adaptés aux secteurs urbains... etc.* Le problème
fondamental se situe à ce niveau. Vous savez que l'agriculture au
Québec ne peut pas se développer au rythme de
réglementations ou de règles du jeu variables d'une
municipalité à l'autre. Vous savez que, lorsqu'on parle
d'agriculture aujourd'hui, on doit parler d'entreprises économiques. On
doit parler de grosses entreprises. Et ce qui a fait que l'agriculture ou
l'entreprise agricole est devenue ce qu'elle est aujourd'hui, c'est
l'application de normes universelles ou des programmes, des politiques qui
étaient universellement adressés à certaines productions,
peu Importe où elles sont situées sur le territoire du
Québec.
D'abord, dans chaque cas et dans chaque province, dans chaque cas au
Québec, dans chaque province au Canada et dans tout le Canada, dans tous
les pays industrialisés, les programmes de développement, les
programmes de consolidation d'entreprises, les programmes de structuration,
vraiment structurants quoi, c'est-à-dire qu'ils partent de la production
jusqu'au développement industriel et à la transformation des
produits, ces programmes font toujours référence à des
modèles économiques donnés. Un exemple concret. Une ferme
laitière aujourd'hui qui aurait neuf vaches, je pense qu'elle aurait des
difficultés économiques à assumer les coûts. Le
coût de production serait tel que l'entreprise ne pourrait probablement
pas survivre longtemps. C'est donc dire qu'on ne peut pas se permettre, ici
comme ailleurs, qu'une entreprise porcine voit sa possibilité de
développement ou sa capacité de production modifiée d'une
municipalité à l'autre. C'est pourquoi les normes doivent
demeurer sous une juridiction de nature provinciale.
C'est le pourquoi des règlements voulant
limiter ta production, voulant faire du zonage de production, voulant
régir le nombre d'unités animales si elles sont trop près
de la zone blanche. Voilà pourquoi ce n'est pas acceptable. Ce n'est pas
parce que le législateur va dire: Je considère les élus
municipaux au Québec comme des gens de second ordre. Non. Ce n'est pas
cela. C'est qu'il faut bien être conscient que le développement de
l'agriculture doit passer par des mesures applicables à chacune des
productions pour l'ensemble du territoire. C'est ce qui nous distingue. C'est
ce qui va toujours constituer le fossé, si je peux utiliser le terme,
entre la perception agricole, la position du monde de l'agriculture et du
ministre de l'Agriculture - et ça traditionnellement - et le monde
municipal.
Je voudrais maintenant répondre plus spécifiquement
à certaines de vos interrogations. Vous avez beaucoup parlé de
l'environnement. On est préoccupé par l'environnement. Vous
semblez croire que la notion d'Immunité serait une autorisation de la
part du gouvernement du Québec à une pollution agricole
légalisée et cautionnée. Est-ce que je me trompe?
M. Desrosiers: À un certain niveau, je suis tenté
de répondre oui. Il y a un vide qui existe quand môme
présentement dans la loi qui gouverne la qualité de
l'environnement. Il n'y a pas de prévision concernant la pollution par
les odeurs, etc. Ce n'est pas couvert. C'est une zone grise. Il y a un vide
là.
M. Pagé: C'est-à-dire qu'il y a des directives. Il
y aura bientôt des règlements.
M. Desrosiers: C'est justement. Je suis obligé de
considérer, M. le ministre, une chose que j'ai devant moi, et vous, vous
savez ce que vous allez faire demain. Vous êtes plus sûr que moi.
Je vous comprends, mais vous comprenez bien que je ne peux pas l'être
aujourd'hui. J'ai l'impression qu'il me manque un élément pour
m'asseoir correctement.
M. Pagé: À cet égard, je vais vous dire
ceci. La notion d'immunité s'adresse à l'activité agricole
selon les règles de l'art et selon les normes qui seront
édictées dans la réglementation. Et cela, même
l'Union des producteurs agricoles le dit dans son mémoire. Ces
gens-là sont conscients des enjeux de notre société, ils
sont solidaires d'une société qui veut être de plus en plus
propre, de moins en moins polluée, etc., et l'immunité vise
à protéger le producteur et la productrice qui suivent chez eux,
les règles d'usage dans cette production, qui sont universellement
reconnues. Cette immunité a pour objet de faire en sorte que ce
producteur ne soit pas obligé d'aller se promener devant les tribunaux
tous les lundis matins, parce quelqu'un dans le voisinage est venu s'Installer
légalement et dit qu'en vertu de l'article 20 de la Loi sur
l'environnement, vous dérangez sa quiétude. Vous dérangez
son confort. C'est définitif qu'en zone agricole, il y a des
activités, et ces activités-là, c'est de maîtriser
le sol, de travailler le sol, c'est d'utiliser des engrais. Soit dit en passant
- vous parliez d'utilisation des pesticides - on a adopté une politique
sur l'utilisation des pesticides et l'objectif des agriculteurs, comme le
nôtre, est de réduire l'utilisation des pesticides. Donc, cette
mesure ne vise pas à légaliser la pollution. Elle vise à
donner un droit à des gens qui doivent avoir cette Immunité,
parce qu'ils sont régulièrement l'objet d'agressions. Je vais
vous retourner une question. Demain matin, je laisse la politique et je
décide d'aller m'installer à Mont-Joli, votre
municipalité. Je suis certain que vous allez dire que je suis le
bienvenu chez vous, que vous êtes bien heureux que j'aie choisi
Mont-Joli. Mais si Je vous dis: M. Desrosiers, j'aimerais installer ma
résidence dans le parc Industriel. Vous allez me dire: Je vous aime
beaucoup, mais vous n'Irez pas là parce que vous n'avez pas d'affaire
là.
C'est un peu cela qui arrive en zone agricole. Au nom d'un concept de
retour vers la terre, au nom d'un concept de milieu environnemental un peu plus
vert, dos gens, conscients du geste qu'ils posent, vont s'installer en zone
agricole et peu de temps après qu'ils sont arrivés -
l'expérience nous enseigne que c'est généralement
après le mois de juillet, quand c'est un peu humide - ils se plaignent
des odeurs. La personne veille un peu tard le vendredi soir - ce qui n'est pas
un mal en sol - mais le samedi matin, le séchoir à foin ta
dérange. Alors, on porte plainte à l'environnement. C'est cela le
droit de produire et c'est cela le problème de fond.
M. Desrosiers: Cela me semble malheureux, M. le ministre, parce
qu'il me semble qu'on peut atteindre l'objectif que vous visez, et nous le
partageons, c'est-à-dire qu'on doit, d'une façon ou d'une autre,
avoir une capacité de zoner les activités qu'on veut y faire, que
ce soit des activités à caractère industriel ou agricole.
Pourquoi ne pourrait-on pas Se faire? Je ne sais pas pourquoi. Dans la ville de
Mont-Joli, on est entouré d'une zone verte. La municipalité qui
nous entoure est totalement verte. Bravo!
M. Pagé: C'est de l'or.
M. Desrosiers: C'est une ville à la campagne.
M. Pagé: Vous êtes entouré d'or.
M. Desrosiers: Sauf qu'il y a quatre propriétaires pour la
bande verte qui nous entoure, pour la municipalité voisine. C'est
à ces quatre propriétaires, que vous considérez des
agriculteurs - mol aussi. Je les considère comme des industriels
agricoles parce qu'ils ne résident même pas dans la
municipalité, mais iIs sont
propriétaires des terres et Ils les cultivent. Bravol - que vous
fournissez l'Immunité, vous fournissez le commissaire aviseur, vous
fournissez les quatre choses qu'on a mentionnées tantôt, la
réciprocité et l'autre, je ne m'en rappelle pas.
M. Pagé: Le fonds de défense.
M. Desrosier*-. Cela fait pas mal de choses. Il est pas mal
protégé, ce beau monde. On pense que ce n'est pas par cette
protection... Revenons à la base. La base est qu'il y a cohabitation de
deux mondes. Chez moi, le cultivateur qui est mon voisin a payé pour
faire réparer ma pelouse parce que ses vaches ont passé à
travers la barrière. Je demeure justement près de la zone
agricole. Je n'en fais pas un drame, c'est cela. Je veux bien accepter cela.
C'est le jeu de l'un et de l'autre, mais je ne vols pas pourquoi on ne ne se
ferait pas des concessions l'un et l'autre, mais pas l'un qui impose à
l'autre. C'est cela un peu qu'on a l'impression d'avoir. Présentement,
il y a une imposition par un groupe au détriment de l'autre groupe.
Quand vous me demandez si je vous laisserais vous installer dans le parc
industriel, je vous dis non, parce qu'il y a un zonage qui le prévoit.
Mais pourquoi ne pourrait-on pas faire la même chose? Il ne s'agit pas de
zoner la production. Il s'agit de zoner l'urbanisation. Mais si je zone bien
mon urbanisation, je pense bien qu'on devrait être capable, de l'autre
côté, de bien zoner la partie verte aussi. Si on avait le
comité de concertation agricole non imposé par l'État
mais, par exemple, auquel on souscrirait entièrement et à
l'intérieur duquel on pourrait élaborer les matières qu'on
devrait édicter, les règlements qu'on entendrait suivre, je pense
qu'on marquerait des points.
Tantôt, quand vous avez souligné le fait que l'agriculture
n'est pas comme les autres, comme l'industrie, que l'agriculture doit
être protégée par l'État, vous avez affirmé
que l'agriculture devait avoir des règles uniformes dans l'ensemble du
Québec. Je pense que l'agriculture n'est pas tellement différente
de l'industrie ou du commerce, laquelle s'accommode aussi de
réalités différentes dans l'ensemble du Québec et
sait très bien tirer son épingle du jeu. Je ne pense pas qu'on
doive, et je vous retourne encore la même chose, édicter des
règles générales uniquement pour l'agriculture. C'est un
passe-droit que vous faites à ces gens.
Je pense qu'ils sont assujettis aux mêmes règles, aux
mêmes normes et aux mêmes désirs de la population que les
industries et que les commerces. C'est absolument la même chose. Et on
trouve que c'est normal que ce soit comme ça. On ne pense pas qu'on
n'est pas corrects de vous le dire de cette façon. Nous sommes d'accord
pour protéger le potentiel agricole, nous sommes d'accord pour mettre en
place des mécanismes pour le protéger et nous sommes d'accord
pour que la partie urbaine et la partie rurale cohabitent, mais nous voulons le
faire ensemble. On n'a pas l'impression d'être appelés à
faire cela. On a l'impression qu'on est "câlés" pour la "shot" et
que c'est par là qu'il faut passer. Je m'excuse, mais c'est comme
ça qu'on le ressent. On a peut-être tort mais c'est ça
notre réalité, notre perception, je devrais dire; c'est plus
juste.
M. Pagé: Avant de conclure - il me reste deux minutes? -
à l'article 17, vous recommandiez certaines propositions. D'ailleurs,
l'Union des producteurs agricoles demandait aussi de telles modifications ici.
Au paragraphe 2 du deuxième alinéa de l'article 62 qui stipule
que l'utilisation actuelle du lot plus particulièrement le type et
l'intensité d'agriculture qui s'y pratique et les possibilités
d'utilisation du lot à des fins d'agriculture", vous demandez de
restreindre ce critère afin que de telles situations ne se produisent
pas. C'est accepté. On apportera les modifications dans ce sens.
À l'article 17, paragraphe 3. On va voir s'il est possible
d'aller dans le sens de vos représentations.
Article 21 qui introduit l'article 69.08. Vous dites: Tout en
étant d'accord avec l'esprit de l'article 69.08, l'UMQ considère
que certains équipements d'utilité publique ne devraient pas
être visés par le deuxième alinéa de l'article
69.08. Il s'agit des réseaux d'aqueduc et dégoût, y compris
les usines de traitement et d'épuration des eaux, les lieux
d'élimination des déchets domestiques et les sites
d'élimination des neiges usées. On verra. Il y aura
peut-être des modifications, mais ce ne seront pas des modifications
allant dans le sens de l'ensemble.
Enfin, la norme de réciprocité. Vous évoquez
à la page 24 que le rapport de M. Parizeau avait recommandé qu'un
poste de protecteur du citoyen soit créé pour l'administration
municipale. Mon collègue, le ministre des Affaires municipales, a
été saisi de ça.
Vous dites ensuite qu'en matière de réciprocité...
Ici, vous semblez assez farouchement contre. Je note cependant que l'UMRCQ est
d'accord.
Vous dites à la page 26: "Du point de vue du citoyen, cette
disposition remet carrément en question ses droits de
propriété ainsi que son droit de jouir paisiblement de ses biens
(Charte des droits, article 6). Le projet de loi énonce que si vous
possédez un lot en zone agricole et à proximité d'une
exploitation agricole et que vous prévoyez bâtir votre maison,
vous devez respecter les exigences de votre voisin sur votre terrain." Oui,
à moins de renoncer au droit de poursuivre le producteur pour les
activités qu'il conduit, toujours selon la réglementation et les
règles de l'art.
Un exemple concret. Supposons que la norme pour une production animale
donnée est de 700 mètres. Cet établissement de production
animale doit être à 700 mètres de la résidence
la
plus proche.
Une voix: À 600 mètres. (18 h 45)
M. Pagé: Bon. À 600 mètres. Prenons
l'exemple de 600 mètres. Peut-être qu'avec la révision...
J'installe mon entreprise agricole à 600 mètres de la
résidence la plus proche. Six mois après ou l'année
suivante, une personne, en vertu d'un droit, vient Installer sa
résidence à 400 mètres. Qu'arrivait-il dans le
passé? Des plaintes. Des démarches auprès du conseil
municipal pour que le conseil municipal adopte un règlement pour limiter
le producteur dans l'augmentation de sa production et c'est ça qui fait
des problèmes et du contentieux. Alors qu'à l'avenir, la
personne, si elle le veut, si des senteurs, quelques odeurs, quelques
poussières volatiles à l'occasion, cela ne la dérange pas,
un peu de bruit, cela ne la dérange pas, elle pourra venir s'y
construire sauf qu'elle devra renoncer, elle devra, via l'inscription d'un
droit réel sur sa propriété, renoncer très
clairement - je termine là-dessus - elle, son successeur ou la personne
qui achètera, à porter plainte contre le producteur visant
à limiter sa production ou à limiter ses activités, etc.
On n'annule pas un droit. Ce droit sera encadré.
M. Desrosiers: M. le Président, avant de demander à
Me Laperrière de faire un commentaire sur cet aspect légal, parce
qu'on en a parlé longuement de ça, j'ai attiré votre
attention lorsque j'ai fait la lecture du mémoire sur le fait que
beaucoup de conseillers juridiques nous ont dit: Faites attention, ça
touche aux droits de la personne, etc. Je voudrais que la verbalisation soit
faite par Me Laperrière. Mais avant de lui donner la parole, je voudrais
dire à M. le ministre que j'étais farouchement opposé
à la réciprocité; peut-être que je serais un peu
moins farouche si j'avais une monnaie d'échange. Si vous me dites que
vous me donnez la réciprocité et que le commissaire aviseur,
l'immunité et le fonds de défense, on enlève ça,
là je suis prêt à vous concéder beaucoup de choses,
mon cher ami.
M. Pagé: Je comprends, M. le vice-président, de
l'UMQ...
M. Desrosiers: ...qu'on est vraiment ouvert, je vous l'avais
dit.
M. Pagé: Non seulement vous semblez ouvert à la
négociation, vous voulez la conduire ici. Je vous remercie beaucoup de
vos représentations.
Le Président (M. Richard): M. Laperrière.
M. Laperrière (Marc): Merci, M. le Président.
Simplement un commentaire relativement à la réciprocité.
Légalement, ça nous apparaît tout à fait Inutile
parce que la référence à la réci- procité
fait toujours appel à un terrain qui est non bâti pour ainsi dire
puisque c'est un propriétaire qui, un jour, aura à se construire,
iI va y avoir un immeuble qui va se construire. On sait très bien que
les tribunaux, lorsque quelqu'un veut poursuivre un agriculteur, par exemple,
pour des odeurs ou quoi que ce soft, et qu'il s'installe après que
l'agriculteur eut construit son bâtiment à l'intérieur des
600 pieds et qu'il l'empêche lui-même de construire, d'accord, il
peut signer une renonciation à poursuivre, mais, cette renonciation nous
apparaît inutile parce que, de toute façon, même s'il ne
signait pas une telle renonciation et construisait à l'intérieur
de la distance prévue ou ta réciprocité, un tribunal, dans
sa sagesse, va examiner les faits et va dire: Oui, mais monsieur, vous
êtes venu vous Installer après la porcherie. Donc, vous vous
êtes installé en connaissance de cause. On ne vous accorde pas de
dommages à cet égard. Le tribunal va tenir compte de ces
faits.
Cela m'amène à un deuxième point relativement
à l'immunité. On sait que la disposition de la loi ou du projet
de loi dit: Nui n'encourt de responsabilité. Cela n'empêche pas un
tiers d'aller devant les tribunaux pour se faire entendre, mais ce qui est
malheureux, c'est que le tiers qui va devant les tribunaux, qui prend le temps
d'aller devant les tribunaux pour permettre au tribunal d'évaluer les
dommages qu'il pourrait encourir résultant des poussières, des
odeurs et du bruit, conformément aux lois et règlements de
l'environnement, la seule chose, le tribunal va l'entendre, mais va dire: Je ne
peux pas me prononcer sur ces dommages. Je ne peux pas accorder de dommages
pour cela, la loi me l'interdit. Pourtant, on enlève au tribunal cette
appréciation alors qu'on sait que tout probablement, si les
règlements sont faits adéquatement, les dommages vont être
minimes. Donc, finalement, pour quelque chose de mineur, on enlève ce
droit Le tribunal va entendre la personne, et, de toute façon, va
prendre en considération les faits. La seule chose, c'est qu'il ne
pourra pas se prononcer et tout probablement que les dommages seraient mineurs.
C'est pour cela que ça nous apparaît une entrave aux droits des
citoyens pour pas grand-chose. Administrativement, l'agriculteur va aller de
toute façon devant les tribunaux.
M. Pagé: Me Laperrière, je ne veux pas enlever de
temps à l'Opposition, mais la référence que vous faites au
fait que le tribunal va statuer, va dire: Vous répondez à la
norme, ce n'est pas toujours le cas Me Laperrière. Il y a des cas de
jurisprudence où le tribunal a Indiqué: Vous êtes construit
selon une norme, vous êtes producteur agricole, vous êtes
arrivé le premier, cependant, le voisin a le droit de prétendre,
en vertu de certaines dispositions, à une limite de vos
activités, à des dommages-Intérêts à lui
payer parce que, exemple, dans la loi sur l'environnement, II y a l'article 20
et il y a eu des
cas de jurisprudence devant les tribunaux différents de ce que
vous venez d'évoquer. Alors, ce que va faire cette disposition, c'est de
clarifier la situation. Cela va établir des règles du jeu plus
précises et cela va éviter des recours devant les tribunaux
autant pour ces citoyens que vous voulez défendre, et vous en avez le
droit, et les citoyens que le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et
de l'Alimentation et le gouvernement veulent défendre.
M. Laperrière: M. le Président, est-ce que les
recours qui ont été portés devant les tribunaux, auxquels
vous faites référence, ont été abusifs? S'ils
l'étaient, les tribunaux vont certainement les avoir balayés du
revers de la main. S'ils ont donné des dommages, sans doute qu'ils ne
l'étaient pas. Et là, avec de telles mesures, on empêche
les citoyens d'avoir leur journée en cour tout simplement.
Le Président (M. Richard): M. le représentant de
l'Opposition.
M. Pagé: On n'a pas la môme appréciation.
Alors, en terminant, avant de passer à l'Opposition, je voudrais
remercier bien sincèrement M. Desrosiers. Je suis persuadé que,
de toute façon, il y a plusieurs des amendements qui vont aller dans le
sens des représentations que le monde municipal a faites au
comité technique. Vous ne serez peut-être pas entièrement
et totalement satisfait, mais je suis persuadé que S'échange
d'idées aura été à tout le moins utile en ce qui me
concerne.
Le Président (M. Richard): Merci. M. le
député de Lac-Saint-Jean?
M. Brassard: Une première question pour être bien
clair. Lors de la réunion du comité technique, j'ai bien compris
que le ministre vous a donné l'assurance qu'un amendement serait
introduit à l'article 17, paragraphe 3, de façon que les
critères économiques qui sont facultatifs actuellement dans le
projet de loi deviennent obligatoires et que le "peut" soit remplacé par
"doit".
M. Desrosiers: Est-ce que Je comprends bien la question? Vous me
demandez si, à l'occasion du comité technique, le ministre a
donné son assentiment à cette affirmation.
M. Brassard: À l'occasion des échanges d'opinions
que vous avez eus au sein du comité technique, est-ce que vous avez eu
l'assurance que ce qu'on appelle les critères économiques, qui
sont actuellement facultatifs quand ii s'agit, pour la commission, de prendre
une décision ou d'émettre un avis... Il y a un certain nombre de
critères qui sont obligatoires mais les critères qu'on peut
qualifier d'économiques sont facultatifs dans le sens que le projet de
loi dit: Elle peut prendre en considération, alors que votre
revendication était de les rendre également obligatoires, donc do
remplacer le verbe "peut" par "doit*. Elle doit prendre en considération
l'effet sur le développement économique de !a région. Si
j'ai bien compris. Est-ce que vous avez eu une assurance du ministre à
l'effet que cet amendement serait introduit?
M. Desrosiers: M. le Président, je ne saisis pas pourquoi
on a pu comprendre ce genre d'affirmation, parce j'ai dit que l'Union des
municipalités, c'est un paquet de monde. Cela emploie 75 000 personnes.
Cela a une activité économique de 2 000 000 000 $. Et j'ai dit:
Remarquez bien ce que je vous dis parce que, plus tard, je vais vous demander
de mettre des critères économiques obligatoires en place. Vous me
demandez si le ministre l'a dit. Non, je lui demande aujourd'hui de le
dire.
M. Brassard: D'accord, c'est ce que je voulais savoir pour bien
se comprendre. M. le Président, avant de passer la parole à mon
collègue de Jonquière qui a beaucoup de questions à poser,
je voulais signaler que relativement à toute cette question de ce qu'il
est maintenant convenu d'appeler le droit de produire, les questions que vous
posez à Sa page 11 sont on ne peut plus pertinentes dans le sens que,
avant, à mon avis, d'introduire des dispositions nouvelles et dans bien
des cas de créer du droit nouveau, il faut prendre la mesure du
problème. Il faut évaluer l'ampleur du problème. Il faut
avoir une idée exacte de la problématique et de problèmes
vécus. Les questions que vous posez sont pertinentes sauf que je n'ai
pas de réponse. Pouvons-nous aujourd'hui, par exemple, je les reprends,
indiquer à cette commission les municipalités qui sont en conflit
avec les agriculteurs sur leur territoire? Il y a 1200 municipalités au
Québec. Combien ont des conflits devant les tribunaux avec les
producteurs agricoles? Pouvons-nous aujourd'hui indiquer à cette
commission les types de cas de conflits entre les municipalités et les
agriculteurs? Les conflits réels, non pas hypothétiques.
Tantôt le ministre en a parlé dans une intervention, il disait:
Prenons l'hypothèse, supposons que. Ce sont des conflits
hypothétiques, des exemples. Mais réellement, combien y en
a-t-il? Pouvons-nous aujourd'hui indiquer à cette commission le nombre
de poursuites des agriculteurs contre les municipalités? il m'apparait
important de le savoir avant d'adopter des dispositions relatives à un
problème de cette nature. Combien y a-t-il de producteurs actuellement
qui sont poursuivis devant les tribunaux par des individus qui les accusent ou
qui ont porté plainte pour odeurs, poussières, etc.,
reliées aux activités agricoles? Combien y en a-t-il? Combien y
a-t-il de municipalités qui sont en conflit?
Je pense que ce sont des questions importantes, des questions
pertinentes que vous posez
là. Le problème, c'est que la commission n'a pas de
réponse. Je suppose, j'espère et je souhaite ardemment que quand
on abordera ces articles le ministre aura des réponses et qu'H sera en
mesure de déposer un bilan précis pour qu'on connaisse l'ampleur
du problème. Peut-être que le problème n'est pas si grave
que ça et peut-être qu'il n'y a pas tant de conflits que ça
entre agriculteurs et municipalités ou entre agriculteurs et tierces
personnes qui ont porté plainte sur des questions d'environnement. Ce
sont des problèmes qui sont évoqués souvent. On invente
des exemples à l'exception de quelques cas bien précis mais, dans
la plupart des cas, on invente des exemples, on imagine des exemples. Mais
concrètement, quel est le bilan de problèmes de cette nature, en
termes de quantité? Je pense que ça va nous Indiquer, à
partir de ce moment, si on a un bilan exact de ce que ça veut dire, les
moyens qu'on doit prendre pour essayer de résoudre des
problèmes.
On parle beaucoup de Pintendre et de Sabrevois, mais je n'ai jamais
entendu parler d'autres municipalités que ces deux là sur 1200 et
quelques municipalités. Ce sont toujours ces deux-là qui
reviennent: Pintendre, Sabrevois. Mais est-ce qu'il y en a d'autres? Deux sur
1200.
Une voix: Sur 1500. (19 heures)
M. Brassard: On me dit 1500. Deux sur 1500. Si c'est juste
ça, je vous dis que ce n'est pas un gros problème. Jusqu'à
maintenant, on n'a pas réussi à nous fournir une réponse.
On cite toujours ces deux exemples mais ça se limite à ça.
On sait qu'il y a 1500 municipalités au Québec. Cela fait pas mal
de monde et pas mal d'organismes et d'instances municipales. Je ne sais pas si
vous avez des réponses à nous donner là-dessus, je ne sais
pas si vous avez des bilans, une évaluation que vous avez pu faire de
votre côté, mais en tout cas, je pense que, comme
législateur, avant d'adopter toute une série de dispositions dont
certaines sont tout à fait nouvelles, ça me semble aller de sol
qu'on devrait avoir une connaissance la plus exacte possible de la
problématique.
C'est un peu ça ma première question. Je ne sais pas si
vous avez des réponses mais II me semble que ce serait important qu'on
en ait.
M. Desrosiers: Je n'ai peut-être pas une grande
réponse mais j'ai un commentaire, M. le Président, que j'aimerais
faire.
Justement, vous avez repris les questions de la page 11 auxquelles M. le
ministre a répondu tantôt d'une certaine façon. Je pense
que les réponses devraient être encore plus grandes, plus
exhaustives mais tel n'est pas l'objet de mon propos. Dans notre cas, on a
cité ces questions parce qu'elles sont les Interrogations fondamentales
qui font que, devant un projet de loi, on apparaît très
réticents et pas beaucoup coopérants, alors que ce n'est pas
là notre point de vue. Nous ne sommes pas des gens qui voulons tourner
en rond. Nous sommes d'accord pour protéger le territoire agricole. Nous
sommes d'accord pour prendre des moyens qui conviennent aux parties sauf qui ne
faudrait pas se servir du bazooka alors que... Est-ce que c'est juste Pintendre
et Sabrevois? Je ne sais pas la réponse moi non plus. C'est ça
qui nous apparaît important et c'est dans ce sens que je réponds
à votre question. Nous n'avons pas les réponses. Si nous les
avions, nous vous les aurions données.
M. Brassard: M. le Président, avant de passer la parole
à mon collègue de Jonquière, il y a juste un autre
commentaire que je ferais. Je vous dis tout de suite que j'ai de la
difficulté à accepter, à adhérer à votre
argumentation relativement à la réciprocité. Je comprends
mal votre argumentation. J'ai de la misère à y adhérer. Il
me semble à moi aussi là-dessus... Cela n'arrive pas trop
souvent, mais je rejoins le ministre. Il me semble, moi aussi - notez-le,
notez-le - normal, légitime, régulier, allant de soi qu'on impose
les mêmes normes et les mêmes règles à tout le monde.
SI un producteur de porc est obligé de construire sa porcherie à
600 mètres de toute habitation et que, par la suite, quelqu'un vient
établir sa résidence dans le même secteur, il devrait
normalement respecter les mêmes normes que le producteur de porc,
c'est-à-dire ne pas s'établir à moins de 600 mètres
de la porcherie qui est là.
Je vous dis juste ça en passant. J'ai de la difficulté
à adhérer à votre argumentation relativement à la
réciprocité.
Le Président (M. Richard): M. le député de
Jonquière.
M. Dufour: J'avais juste quelques points à soulever. C'est
évident que le mémoire ne me surprend pas dans sa teneur pour
avoir vécu longtemps parmi ces gens. Je ne pense pas que cela ait ouvert
des appétits, par exemple, tel que le disait le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation. Il a dit que votre
mémoire semble susciter de nouveaux appétits par rapport au
vécu ou aux volontés des municipalités. À mes yeux,
ce qui ouvre des perspectives différentes ou des prises de position plus
directes, c'est justement la nature du projet de loi qu'on a devant nous qui
fait que les municipalités se sentent possiblement plus agressées
par rapport à ce qui se passait auparavant. Elles parlent d'un monde
connu pour aller à un monde quelque peu inconnu.
Le sens de mes questions, c'est quand on parlait tout à l'heure
de comité de concertation. Je pense aussi que la loi 82 voulait former
des commissions d'urbanisme agricole, c'est un peu ça qu'on voulait
faire dans le temps. À mes yeux, ce n'était pas de la
concertation, c'était vraiment obligatoire, à caractère
obligatoire. C'est
dans ce sens que j'ai compris que les municipalités se sont
opposées par rapport à cette commission d'urbanisme agricole
qu'on voulait introduire dans les municipalités.
Croyez-vous, M. le vice-président, que les expériences qui
ont été vécues d'une façon volontaire à
Aylmer... Est-ce que vous pouvez nous faire part de plus de détails sur
ces commissions qui ont été mises sur pied à Laval. Aylmer
et La Baie? De quelle façon est-ce que ça fonctionne? Quelles
sont les possibilités pour d'autres municipalités de
s'appauvrir?
M. Desrosiers: M. le Président, la réponse est en
deux temps. D'abord, parce que votre "pré-opinant" a dit qu'il ne
comprenait pas notre argumentation face a la réciprocité, je
voudrais clarifier la situation avant de répondre à votre
question. Premièrement, on a dit; La coexistence devra se faire;
deuxièmement, la coexistence pacifique devra s'écrire dans les
faits; troisièmement, comment allons-nous arriver à
réaliser cette coexistence? Le ministre a dit: Vous êtes en train
de négocier directement. Nous, on disait: Si on crée une nouvelle
classe de citoyens par l'immunité, par le commissaire aviseur, par le
fonds de défense, par la réciprocité, c'est trop. Est-ce
que c'est clair? Nous pensons que s'il faut vivre ensemble, allons-y pour la
réciprocité, mais n'allons pas remettre toutes les autres choses.
Alors, ça permettra à votre voisin, le député de
Lac-Saint-Jean, de savoir pourquoi on est pour telle chose.
Deuxième question. Dans le vécu actuel, nous nous sommes
opposés au premier comité de concertation parce qu'il
était imposé et parce qu'il faisait des agriculteurs les rois et
maîtres de la législation municipale, ce qui nous paraissait
aberrant. On est d'accord pour des comités volontaires et on est
d'accord pour que l'union fasse les efforts nécessaires pour les mettre
en place. Sur quoi se base-ton pour faire une telle affirmation? On se base sur
La Baie, Aylmer et sur la ville de Lavai qui ont des problèmes
semblables à ceux dont on discute présentement et qui ont mis en
place des comités agricoles et urbains. Depuis ce temps-là, la
coexistence est une réalité, la coexistence pacifique est
vécue et tout le monde ne s'en porte que mieux. Alors, pourquoi
voulons-nous enferrer dans un projet de loi une chose qu'on peut faire si
facilement quand on y met un peu de bon sens?
M. Dufour: ici, je vous donne une perception que j'ai eue tout
à l'heure lorsque j'ai écouté le président de l'UPA
qui est venu s'exprimer. J'ai cru comprendre qu'il y avait un commencement ou
une continuité de concertation ou de discussion entre le monde municipal
et le monde agricole. La venue de la loi semble vouloir cristalliser les
positions les unes par rapport aux autres. Ma question est directe: Est-ce que
vous pensez que cette loi-là qu'on apporte va être de nature
à améliorer les relations et, comme vous le dites, la coexistence
pacifique qui semble vouloir s'établir entre les deux mondes?
M, Desrosiers: On va gagner du temps, M. le Président, la
réponse est non. Est-ce assez clair? C'est parcs qu'on va braquer au
départ des gens qui auraient avantage à mettre leurs
intérêts ensemble. On va les braquer de telle façon que
chacun va mesurer son pouvoir et, quand on aura mesuré nos armements, on
décidera si on fait une guerre chimique ou une guerre atomique. C'est ce
qu'on veut. On a le bon moyen, prenons-le. Quant à nous, notre
prétention est tout à fait contraire. Si je n'avais pas de preuve
à l'appui, je pourrais être tenu sous caution et me faire dire:
Vous parlez haut et fort. Mais ce n'est pas si sûr que cela, mais on a
les preuves.
M. Dufour: En ce qui concerne la venue d'un commissaire aviseur
sur le terrain -je ne sais trop son titre - comment les pouvoirs qui pourraient
lui être accordés et les décisions qu'il pourrait prendre
vont-ils s'interférer par rapport aux municipalités? Vous
comprenez un peu le système. La personne va se promener sur le terrain,
va y aller sur des plaintes et on sait que cela va être sous la
responsabilité du ministre de la Justice, mais i! y a un paquet
d'inconnus qui, à travers lesquelles fonctions, peuvent faire des
recommandations sur le territoire. Vous en pariez un peu dans votre
mémoire, mais comment voyez-vous la venue de cette personne?
M. Desrosiers: Sur plaintes, sur hypothèses de plaintes,
sur "peut-être que je devrais faire une plainte", parce que tout es!
possible. Ces messieurs qu'on traite au-dessus de la loi pourront avoir leur
commissaire aviseur qui, lui, pourra convoquer tout le monde, tous ceux qu'il
veut. Il les entendra et, après, il fera rapport aux parties mais aussi
au public. Cela veut dire que le commissaire aviseur vient dans la
municipalité, convoque tous ceux qu'il pense avoir besoin de consulter.
Après avoir analysé la question, il rédige son rapport et
i le rend public. Alors, il dit que la personne qui a porté plainte a
été entendue, que le commissaire a pris en
délibération les questions, il fait son rapport public dans le
journal local et dit que la municipalité X a erré dans ses
règlements et que cela devrait être fait autrement. Une personne
nommée viendra chez nous dire à des élus, élus
démocratiquement, que les autres ont édicté des
règlements qui sont aussi assujettis aux règles et aux lois
provinciales.
M. le commissaire aviseur viendra nous dire que non seulement nous avons
erré mais, politiquement, il fera son "splash* dans le journal et
là on n'aura seulement qu'à remettre nos démissions et
cela permettra de changer les visages plus rapidement. Les édiles
municipaux sont-ils des débiles légers en liberté
surveillée? Telle est la question que notre ancien président
posait
souvent. Nous, on a envie de la reposer encore. Nous pensons que le
commissaire aviseur, même si ce peut être une bonne chose d'avoir
quelqu'un qui se penche sur les problèmes que peut subir un citoyen, non
pas seulement un citoyen agriculteur, mais un citoyen qui est assujetti
à des règles et à des règlements municipaux,
à ce compte, l'idée de la commission Parizeau était
meilleure, qu'on lui donne un ombudsman municipal et n'importe quel citoyen
à l'égal de l'agriculteur pourra y faire appel s'il se sent
lésé dans ses droits. Là, on aura une formulation avec
laquelle on est habitué à vivre, mais dans laquelle tout le monde
va se reconnaître et personne ne se sentira lésé l'un par
rapport à l'autre.
M. Dufour: Vous êtes sûrement au courant que la ville
de Québec, l'avant-veille de Noël, le 23 décembre, justement
par sa charte spéciale, s'est assujettie à l'ombudsman du
Québec, selon une entente. Cela veut dire que ça pourrait
peut-être se faire d'autre façon. La suggestion que vous faites
n'est pas dépourvue de bon sens. Est-ce que vous croyez, M. le
vice-président... parce que j'ai laissé le monde municipal depuis
quelques années, je ne suis plus sur le terrain autant que je
l'étais, malgré que, parfois, mes collègues pensent le
contraire...
M. Garon: II a laissé le monde municipal, mais le monde
municipal ne l'a pas laissé.
M. Dufour: Est-ce que vous pensez que la venue du commissaire
aviseur sur le terrain pourrait donner prise à d'autres groupes de
citoyens qui, eux aussi, pourraient vouloir avoir leur propre commissaire
aviseur?
M. Desrosiers: Vous avez parfaitement raison de poser la
question, parce que si on édicté, de la façon qu'on est en
train de vouloir le faire, immunité, commissaire aviseur, fonds de
défense, réciprocité, que je suis prêt à
réexaminer, moyennant certains accords, surtout les trois premiers, on
donne accès à une catégorie de citoyens à des
mécanismes, à des moyens qui ne sont pas accessibles aux autres.
En vertu de quel principe pourra-ton prétendre que les autres n'auront
pas ces mômes droits?
Les industriels vont pouvoir venir vous demander la môme chose,
d'avoir leur commissaire, d'avoir leur fonds de défense, d'avoir une
certaine forme d'immunité et non seulement les Industriels, mais aussi
d'autres catégories de citoyens, parce que, à moins qu'on ait
changé les règles dans cette province, nous sommes tous
égaux devant la loi et les lois qu'on édicté ont toujours
cette préoccupation de ne pas créer d'iniquité. On a une
rigueur Intellectuelle à laquelle on s'astreint, de telle façon
que tout le monde soit traité sur le môme pied et que si on est
susceptible de se sentir outragé par des règles, des
règlements ou des directives qui viennent d'en haut, là, on
pourrait faire appel à quelqu'un d'en haut pour se défendre. On
peut faire appel au tribunal et que le tribunal dise: Tu as toujours le droit
d'être entendu. On ne veut pas que ces règles soient
changées, c'est aussi simple que ça. C'est ça, parce que
c'est ça notre façon de vivre.
M. Dufour: J'aurais suffisamment d'autres questions pour vous
retenir plusieurs minutes encore, mais je ne vous retiendrai pas
indûment, à moins que mon collègue de Lévis ait une
ou deux questions à poser avant de conclure.
M. Garon: Je ne sais pas si vous avez lu la revue Time du 2
janvier. La personnalité de l'année, c'est la terre en danger de
pollution. Ce n'est pas une personne mais la planète qui a
été choisie cette année. Là-dedans, on parle
beaucoup des sites d'enfouissement, des milliers de sites d'enfouissement qui
ont contaminé la nappe phréatique. Dans votre mémoire,
vous parlez de lieux d'élimination des déchets domestiques ou des
sites d'élimination des neiges usées. Les agriculteurs ne sont
pas intéressés à avoir des terres agricoles comme
dépotoir des municipalités. Mais je pense bien qu'il faudrait
regarder ça. L'enfouissement est dépassé et que les neiges
usées.. Je pense bien que les bélugas ne sont pas apparemment
amateurs de calcium et il va falloir penser davantage en termes
d'élimination plutôt qu'en termes d'enfouissement ou en termes de
déversement dans la nature de produits contaminés qui, en trop
forte dose, deviennent des contaminants. La solution, ce n'est pas d'aller dans
les terres agricoles, ni d'aller ailleurs, mais d'éliminer les
déchets sans les enfouir.
Je pense que la revue Time est très
révélatrice quand elle indique à quel point la nappe
phréatique a été contaminée, à quel point,
dans plusieurs pays, les problèmes, on les crée de toutes
pièces, en disant: Cela doit être bon pendant tant
d'années. De toute façon, le problème va revenir
après tant d'années, parce que., ou les barils. On peut bien
mettre certaines choses dans des barils mais, à un moment donné,
les barils vont rouiller et tout ça va aller dans la nature.
Il faut penser autrement. Je pose la question. Le Parti libéral
avait comme slogan 'Maîtriser l'avenir", mais on a le sentiment qu'il a
pris comme devise, une fois élu, 'Gérer le passé*. Si on
regarde vraiment en termes d'avenir, les solutions du passé ne sont pas
les solutions de l'avenir et il faudrait que les municipalités et le
gouvernement trouvent ensemble des moyens d'éliminer les déchets
sans emmerder personne avec ces déchets-là. J'emploie
volontairement ce mot qui n'est peut-être pas complètement
parlementaire, mais qui décrit vraiment la réalité.
M. Desrosiers: M. le Président, cela ne tombe pas dans
l'oreille d'un sourd parce que le hasard veut qu'au dernier sommet
économique
qu'on vient de vivre, il y a des MRC au Québec qui ont des
problèmes particuliers concernant le développement. Certaines ont
des problèmes plus graves que cela, elles sont carrément mal
foutues. Je ne veux pas donner l'Impression de faire pitié, mais la
mienne est mal foutue. Nous avons des fichus problèmes concernant le
développement. Je veux bien qu'on se préoccupe aussi de
l'environnement en môme temps, mais on a des problèmes à la
base même. On n'a pas de site d'enfouissement sanitaire; on en cherche et
on n'en trouve pas. On en trouve, mais c'est en zone verte et en zone verte, on
ne peut pas temporairement faire un trou, les mettre dedans, les enterrer et
après, continuer à cultiver, c'est défendu. C'est ce qu'on
nous a dit: ce n'est pas possible. Cela va coûter 400 000 $ à la
MRC La Mitis pour aller porter ses déchets à Matane, mais cela
n'a pas d'Importance, les critères économiques ne sont pas
Importants. Les critères économiques sont Importants, M. le
Président, II faut les mettre sinon, cela n'a pas d'allure, vous allez
faire monter la pression du Québec et cela va faire que le couvercle va
sauter.
Je vais redevenir calme parce que M. le ministre va me demander de
redevenir calme. On vit cela tous les Jours, cela coûte 100 000 $ de plus
à la ville de Mont-Joli pour aller porter ses déchets à
Matane, 40 milles plus loin. On est complètement tombé sur la
tête. Pendant ce temps, on est sur le chômage, sur le
bien-être social, on est aussi handicapé et quand on a le temps,
on est vice-président de l'Union des municipalités. C'est
à peu près cela, le décor.
Quand vous me parlez des municipalités de concert avec le
gouvernement, je soupçonne, M. le député de Lévis,
que le gouvernement veuille nous amener aussi dans cet espace, à savoir
qu'à l'avenir on envisage davantage le recyclage. D'ailleurs, il y a des
gens chez nous qui essaient de travailler dans ce sens-là. Mais vous
comprenez, quand on est aussi peu nombreux que nous le sommes dans l'Est du
Québec, quand on veut cueillir, trier, recycler des déchets, on
n'a pas assez de gens, on n'en fait pas assez. On en fait trop parce que
là, on ennuie les voisins avec cela, mais on n'en fait pas assez pour
les recycler, c'est presque un cercle vicieux.
Vous me demandez quelle est l'opinion de l'Union des
municipalités présentement concernant les déchets, qu'au
lieu de les éliminer en les mettant quelque part, on les élimine
en les transformant. La réponse est oui, on est d'accord pour travailler
là-dessus et on pense que c'est une voie d'avenir, surtout qu'on paie
drôlement cher pour ce qui se passe présentement. Et cela veut
dire, M. le Président, que les critères économiques, ce
n'est pas "peut", c'est "doit".
M. Dufour: En terminant, je voudrais remercier les
représentants de l'Union des municipalités pour la qualité
de leur mémoire. Je pense que, de ce côté-là, il
faut s'attendre que cet organisme nous présente des mémoires
toujours musclés, avec du contenu. Il faut l'apprécier. Un
certain nombre de questions importantes ont été soulevées
et, je vous dis honnêtement, des questions que l'Opposition
s'était aussi posées auparavant, ce qui justifie votre
présence Ici et notre présence pour pouvoir bien vous
entendre.
J'avais envie, en terminant tout à l'heure de vous poser cette
question, et je terminerai mon commentaire par cette question que j'aurais pu
vous poser et pour laquelle je n'aurais pas exigé de réponse:
Dans votre propre opinion, vous qui avez déjà eu des contacts
privilégiés avec le ministre à la table
Québec-municipalités, donc qui avez eu connaissance de ses prises
de position par rapport à celles de l'union - j'espère que vous
êtes venus ici avec l'idée que ceia pourrait faire évoluer
ou changer le ministre selon la valeur des arguments qui ont été
apportés - pensez-vous que votre mémoire a pu faire
évoluer le ministre dans ce sens-là? Je vous le souhaite et je
nous le souhaite. Je pense que le ministre a une chance en or d'approcher ou de
rapprocher le monde municipal et le monde agricole. Cela fait trois ans que je
le prêche, je le prêchais sur d'autres tribunes auparavant. Et je
souhaite qu'il saute sur cette occasion. On n'a aucune raison d'opposer les
deux mondes. Je pense que l'agriculture a sa place, le monde municipal a sa
place. Mon collègue de Lévis me soufflait tout à l'heure,
au début: N'y aurait-il pas moyen d'avoir des voies parallèles
qui fassent que chacun occupe son espace et chacun dans son milieu? Et quand il
y a des arbitrages de temps en temps, qu'on puisse regarder ce qui se passe. Je
pense qu'on l'a fait jusqu'à maintenant, ça a
évolué dans ce sens. Peut-être que la loi telle qu'elle
nous est présentée est prématurée dans le sens
qu'il y avait déjà ces discussions obligatoires qui
étaient en train de se faire, de l'arbitrage qui était en train
de se faire, et cette loi va peut-être faire, justement, comme vous
l'avez dit tout à l'heure en réponse à cette question, que
les deux mondes vont se braquer de nouveau, ce qu'on n'a aucun
intérêt à rechercher, ni vous, ni nous. Je vous remercie,
encore une fois, pour votre mémoire.
Le Président (M. Richard): Merci, M. le
député de Jonquière. M. le ministre, qu'est-ce que vous en
pensez?
M. Pagé: Je veux remercier les membres de la commission,
l'Union des municipalités du Québec, qui nous a
présenté un mémoire bien préparé, avec une
argumentation assez exhaustive, des représentations, des demandes qui,
pour certaines, ne peuvent être partagées par le ministre de
l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, mais qui, pour
d'autres, ont un intérêt certain. Je suis persuadé que les
discussions qu'on a eues, entre autres, à la table
Québec-municipalités, au comité technique, vous
permettront d'améliorer d'un cran ou deux peut-
être votre acceptation au projet de loi. Je suis persuadé
qu'on va se revoir et je suis persuadé que l'expérience va nous
enseigner que les dispositions du projet de loi veulent établir non pas
deux catégories de citoyens, mais des règles du jeu plus claires,
les hors-jeux à la bonne place, etc. Je suis persuadé que cela va
favoriser l'harmonie entre le monde agricole et le monde municipal et que cela
va développer un respect mutuel qui va conduire, j'en suis
persuadé, à davantage de concertation, comme vous le souhaitez.
Merci de votre présence.
Le Président (M. Richard): Merci. Sur ce, je tiens
à aviser les gens de la commission que nous reprendrons nos travaux
demain matin, à 9 heures, au môme endroit, alors que nous
recevrons l'UMRCQ, l'Union des municipalités régionale de
comté du Québec. Sur ce. nous ajournons les travaux à 9
heures précises.
(Fin de la séance à 19 h 22)