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Version finale

39e législature, 1re session
(13 janvier 2009 au 22 février 2011)

Le vendredi 30 octobre 2009 - Vol. 41 N° 10

Interpellation : Le chapitre agricole de l'Accord sur le commerce intérieur


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Table des matières

Journal des débats

(Dix heures une minute)

Le Président (M. Gaudreault): Alors, bonjour à tous et à toutes. Je déclare la séance de la Commission de l'agriculture, de l'énergie et des ressources naturelles ouverte. Je demande à toutes les personnes dans la salle de bien vouloir fermer la sonnerie de leurs téléphones cellulaires, s'il vous plaît.

Je vais vous rappeler le mandat de la présente commission qui est réunie ici afin de procéder à l'interpellation de la députée d'Iberville... interpellation au ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation sur le sujet suivant: Le chapitre agricole de l'Accord sur le commerce intérieur.

M. le secrétaire, y a-t-il des remplacements?

Le Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Cloutier (Lac-Saint-Jean) en remplacement de M. Trottier (Roberval).

Le Président (M. Gaudreault): Alors, c'est deux comtés voisins, ça se remplace bien.

Je vous rappelle brièvement le déroulement de l'interpellation. Dans un premier temps, la députée d'Iberville aura un temps de parole de 10 minutes, suivi ensuite du ministre, qui disposera d'un temps de parole équivalent. Par la suite, des périodes de cinq minutes seront allouées selon la séquence qui suit: un député de l'opposition officielle, le ministre, un député du groupe qui forme le gouvernement. Tel que convenu, 25 minutes avant midi, j'accorderai un droit de parole de cinq minutes à un député du deuxième groupe d'opposition. J'accorderai par la suite un 10 minutes de conclusion au ministre, suivi d'un temps équivalent à la députée d'Iberville. Je précise que, si un intervenant n'utilise pas totalement son temps de parole de cinq ou de 10 minutes, cela ne réduit pas pour autant la durée de l'interpellation.

Enfin, je vous rappelle que le débat ne peut, à moins d'un consentement, dépasser midi. Alors, là-dessus, Mme la députée d'Iberville, vous avez la parole pour 10 minutes.

Exposé du sujet

Mme Marie Bouillé

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je souhaite remercier le ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation, ministre responsable des Affaires intergouvernementales canadiennes et de la Réforme des institutions démocratiques, leader parlementaire adjoint du gouvernement, ministre responsable de la région du Bas-Saint-Laurent, qui, malgré ses très nombreuses et lourdes responsabilités ministérielles, prend le temps ce matin de répondre aux importantes questions du monde agroalimentaire en ce qui concerne le chapitre portant sur l'agriculture de l'Accord sur le commerce intérieur, qui a été signé par le ministre du Développement économique, de l'Innovation et de l'Exportation du gouvernement québécois le 15 octobre dernier.

Nous sommes extrêmement intéressés à entendre l'opinion et les analyses du ministre. Et d'ailleurs des productrices et des producteurs agricoles se sont déplacés ce matin, et d'ailleurs je les salue, pour venir entendre sur place ici, au salon bleu de l'Assemblée nationale, les réponses du ministre, et tous, nous souhaitons que le ministre écoute. La société québécoise est anxieuse d'entendre les explications du gouvernement libéral en regard de la protection de leurs intérêts en ce qui concerne un des besoins de base les plus élémentaires, les plus primordiaux: se nourrir tous les jours avec des aliments sains et de qualité. Nous allons donc porter une grande attention aux explications du ministre. D'ailleurs, nous tenons à saluer et remercier de leur présence vos collègues du gouvernement libéral et le personnel du cabinet du ministre, qui vous accompagnent aujourd'hui pour vous soutenir et vous aider pour vous sortir de ce faux pas dans lequel vous vous êtes placé.

Nous sommes tous très inquiets, M. le ministre, car il n'y a pas d'écoute de la part du gouvernement libéral, et les consommateurs et les producteurs agricoles vont payer cher l'accord imposé par le gouvernement libéral, accord où il n'y a pas eu de consensus au Québec.

Nous vous demandons ce matin de ne pas abandonner les Québécois. Vous avez ici l'occasion de vous ressaisir, M. le ministre, et de vous tenir debout en demandant au Conseil des ministres du gouvernement de ne pas continuer dans l'Accord sur le commerce intérieur, qui a été signé par le ministre québécois du Développement économique. N'abandonnez pas les Québécois, M. le ministre. Tous sont inquiets et se questionnent sur vos agissements. Ils sont indignés et scandalisés de constater que le gouvernement actuel en place a signé l'accord le 15 octobre dernier et qu'il fera payer cher aux consommatrices, et aux consommateurs, et aux productrices et producteurs agricoles du Québec l'ambition de ce gouvernement de se garder toutes les portes ouvertes à Ottawa, même s'il faut sacrifier la population du Québec. Expliquez-vous ce matin, M. le ministre, car les agissements du gouvernement actuel dans ce dossier de l'Accord du commerce intérieur ont semé tellement de doutes dans le secteur agroalimentaire québécois que cela risque de porter atteinte à l'essor de l'industrie ? bonjour. Vos explications seront capitales pour la suite des choses. L'absence de réponse adéquate sera nécessairement interprétée comme de l'insouciance et de la négligence de la part du gouvernement libéral.

Dites-nous, M. le ministre, que vous assumez pleinement votre rôle de ministre de l'Agriculture, des Pêcheries et de l'Alimentation; de l'alimentation, M. le ministre, ce que nous mettons tous, tous les jours, dans notre assiette et qui nous permet d'être en santé. Dites-nous ce que votre gouvernement... que ce que votre gouvernement a signé le 15 octobre dernier n'est pas un désastre pour l'industrie alimentaire du Québec. Si vous avez écouté la population, M. le ministre, et que vous ne protégez pas seulement les intérêts politiques du premier ministre et les intérêts de certaines entreprises agroalimentaires multinationales, vous avez l'occasion ce matin de nous l'expliquer et de nous rassurer.

Rappelons d'abord les faits et les événements connus de notre part, et j'insiste sur ce point, parce que des étapes de ce dossier ont été effectuées dans le plus grand secret, et celles et ceux qui nous écoutent comprendront facilement que l'énumération que je vais faire n'est probablement pas complète.

En 2004, le Conseil de la fédération mis en place par le premier ministre actuel du gouvernement du Québec a décidé, derrière des portes closes, de lancer un processus de renégociation de l'Accord sur le commerce intérieur, notamment du chapitre agricole, dont la portée se limitait à certaines mesures ciblées. Dès 2005, le Conseil de la fédération a indiqué qu'il y avait consensus des ministres pour étendre la portée du chapitre neuf sur les produits agricoles et les produits alimentaires, où à l'origine quelques mesures techniques étaient incluses: mélange beurre-margarine, les succédanés de produits laitiers, etc. Et on l'a ouvert à une... où toutes les mesures techniques sont incluses: les règlements techniques, les normes, les mesures sanitaires et phytosanitaires, les procédures d'évaluation de la conformité. En 2007, le Conseil de la fédération a d'ailleurs demandé au ministre de l'Agriculture de revoir le chapitre neuf pour inclure toutes les mesures techniques. Ainsi, en incluant les mesures techniques dans l'accord, elles devenaient susceptibles de plaintes si elles créaient un obstacle au commerce. De plus, fait inquiétant, le chapitre quatre de l'accord couvre les mesures techniques et non techniques.

En juillet 2008, le ministre de l'Agriculture a refusé d'entériner une nouvelle version des dispositions agricoles de l'Accord sur le commerce intérieur parce qu'elles mettaient en danger les mesures québécoises en faveur de la mise en marché collective, la gestion de l'offre, les règles d'étiquetage et les normes de composition des aliments.

Essentiellement, le projet prévoyait que toute province ou entreprise qui souhaitait commercialiser ses produits dans une autre province pourrait dorénavant se plaindre à l'ACI lorsqu'une mesure provinciale ou fédérale lui engendrerait un coût additionnel ou donnerait l'impression, et je souligne «l'impression», d'entraver ou de restreindre les occasions de commerce. Ça pourrait viser, par exemple, les systèmes québécois, dont nous sommes très fiers, de traçabilité, les procédures d'inspection et de classement dans le sirop d'érable, les normes de composition des fromages, la certification québécoise des produits bios, et j'en passe.

Le 11 juillet, la rencontre fédérale-provinciale des ministres de l'Agriculture se terminait sur une entente à l'effet de surseoir à la signature de l'accord jusqu'au 31 octobre prochain, l'objectif étant d'apporter des modifications au texte de l'accord d'ici là. De plus, le ministre de l'Agriculture de l'époque s'était engagé à consulter les producteurs et les consommateurs de façon à ce que leurs préoccupations se reflètent dans la toute nouvelle version des dispositions agricoles de l'accord. Coup de théâtre: le 7 août dernier, dans un communiqué du Conseil de la fédération, nous apprenions que les premiers ministres en étaient arrivés à une nouvelle entente qui protégeait la gestion de l'offre et la mise en marché collective. Il n'était cependant pas question, dans le communiqué, des règles d'étiquetage et des normes de composition des aliments.

Le 11 septembre, l'UPA et l'Ontario Federation of Agriculture ont signifié, dans un communiqué conjoint, leurs appréhensions, et je cite: «L'annonce du mois dernier préoccupe donc très fortement les producteurs québécois et ontariens. Il s'agit d'un enjeu primordial non seulement pour l'industrie, mais aussi pour les consommateurs, plusieurs des mesures en jeu visant prioritairement à les protéger et à leur garantir une information juste et complète sur les produits qu'ils consomment.»

Le 30 septembre, les cinq organismes sous gestion de l'offre en Ontario demandaient par écrit à leur premier ministre de ne pas signer l'Accord sur le commerce intérieur. Le 2 octobre, Le Soleil publiait, sous le titre Accord sur le commerce intérieur: Québec capitule, et je cite: «...Claude Béchard, nouveau ministre de l'Agriculture et responsable des Relations intergouvernementales canadiennes, admet ouvertement que les négociateurs du Québec n'ont pas réussi à aller chercher des protections supplémentaires pour le secteur agroalimentaire.» Et fin de la citation.

Le 7 octobre de cette année...

n(10 h 10)n

Le Président (M. Gaudreault): Mme la députée d'Iberville, je vous demande juste de faire attention de ne pas nommer le... de nommer le ministre par son titre.

Mme Bouillé: Mais je citais, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Oui, mais...

Mme Bouillé: Ah! D'accord.

Le Président (M. Gaudreault): ...même dans les citations, les règles font en sorte qu'il faut...

Mme Bouillé: Parfait. D'accord.

Le Président (M. Gaudreault): Je vous demande de faire attention à ça.

Mme Bouillé: D'accord. Le 7 octobre de cette année, l'opposition officielle a demandé à l'Assemblée nationale qu'elle entende, dès le lendemain, les préoccupations des consommateurs et des producteurs et entende les intentions et les explications du gouvernement libéral. Compte tenu que les discussions se faisaient dans le plus grand secret, on souhaitait que l'Assemblée nationale soit mise à contribution. Cette demande a été rejetée par le gouvernement libéral en place en nous disant que le texte de l'accord qu'il s'apprêtait à signer était identique à celui de juillet 2008.

Le 15 octobre, Le Devoir titrait: Accord sur le commerce intérieur ? L'UPA a l'appui de la FTQ et du PQ. La Terre de chez nous nous indiquait à la même date que La Coop fédérée et la Fédération canadienne de l'agriculture étaient derrière l'UPA au moment même où le nouveau ministre du Développement économique signait l'ACI au nom du gouvernement du Québec, après que les ministres du Commerce aient reçu une délégation de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante lors de cette réunion, qui pourtant portait seulement sur l'agriculture, tout en refusant de rencontrer la Fédération canadienne de l'agriculture, qui représente, elle, plus de 200 000 agriculteurs.

Je vais terminer cette nomenclature en citant le président de la fédération régionale UPA de la Beauce: «Le Québec a aussi démontré quelle place il accorde au commerce en regard de l'agriculture. Il a raté l'occasion de donner un signal clair en faveur du soutien de l'agriculture et des consommateurs.» Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, Mme la députée d'Iberville. Je cède maintenant la parole au ministre pour une période de 10 minutes.

Réponse du ministre

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci beaucoup. Je veux à mon tour saluer mes collègues d'en face, mes collègues aussi du gouvernement, le député de Gaspé, le député de Huntingdon, saluer les gens qui sont avec nous et profiter de cette première intervention pour, je dirais, éclaircir un certain nombre de choses.

D'abord, évidemment, on a entendu beaucoup parler, au cours des dernières semaines, de l'Accord sur le commerce intérieur. On a entendu beaucoup d'affirmations qui visent à déformer la réalité et, je dirais même, jusqu'à effrayer les producteurs agricoles et les consommateurs. Et je tiens à souligner que, dans la plupart des affirmations de ma collègue d'en face, les phrases commencent toujours au conditionnel: Peut-être que; ça se pourrait que. Évidemment, dans un accord, il y a effectivement des choses qui peuvent arriver, mais regardons ce qu'est la réalité.

Comme je l'ai répété à plusieurs reprises, on a réussi à obtenir un consensus des premiers ministres provinciaux sur notre position concernant la gestion de l'offre et la mise en marché collective. C'est une première dans l'histoire des politiques agricoles et agroalimentaires à l'échelle canadienne. C'est un gain substantiel pour les productrices et les producteurs agricoles aussi du Québec. En effet, les premiers ministres ont clairement affirmé que le nouveau chapitre ne s'appliquera pas aux mesures liées aux systèmes de gestion de l'offre régis par les gouvernements fédéral et provinciaux ni aux offices de commercialisation provinciaux. De plus, ce consensus a été repris par les ministres fédéral et provinciaux du Commerce lors de la rencontre de Whitehorse le 15 octobre dernier. À cette occasion s'est ajoutée la voix du gouvernement fédéral, et depuis le gouvernement canadien, par la voix de son ministre du Commerce, a indiqué clairement qu'il n'acceptera pas de disposition agricole qui ne protège pas entièrement la gestion de l'offre à l'OMC.

C'est exactement ce qu'aucun autre gouvernement n'avait réussi à obtenir pour les productrices et producteurs agricoles du Québec. Jamais le Québec n'avait obtenu un engagement aussi unanime sur la gestion de l'offre et la mise en marché collective. C'est pour cette raison que nous avons signé l'accord sur le commerce intérieur dans le meilleur intérêt des productrices et des producteurs, des consommatrices, des consommateurs et de l'ensemble de la population du Québec. Depuis 1995, l'Accord sur le commerce intérieur reconnaît que... la mise en place de mesures qui permettent l'atteinte d'objectifs légitimes comme la protection des consommateurs, et ce, dans le respect des pouvoirs législatifs conférés au gouvernement fédéral et aux gouvernements provinciaux. Je tiens à le répéter, c'est faux de prétendre que le Québec a abdiqué ses pouvoirs, c'est complètement faux. Au contraire, le Québec et les autres signataires de l'Accord sur le commerce intérieur conservent leur capacité à adopter des mesures qui visent la protection du consommateur notamment par des règles relatives à la composition et à l'étiquetage des aliments.

Comme je l'ai déjà dit, le Québec est un précurseur en ce qui concerne la production d'aliments de qualité, et on entend faire en sorte que ça continue. Le gouvernement a déjà posé des gestes en ce sens et continuera de le faire lorsque les impératifs de protection du consommateur le justifieront. Il faut quand même être réaliste. Il sera plus difficile de justifier la mise en place de mesures déraisonnables en faisant appel à la protection du consommateur, par exemple, dans le cas de la coloration de la margarine.

J'ai également entendu à plusieurs reprises que les normes de composition du yogourt, les systèmes québécois de traçabilité des aliments et les standards du Québec en matière de certification biologique étaient en danger avec l'Accord sur le commerce intérieur. Laissez-moi remettre les pendules à l'heure à ce niveau-là. Comme vous le savez, c'est notre gouvernement qui a adopté l'actualisation des normes sur le yogourt à l'été 2008. Le Québec a actualisé ses normes pour protéger les intérêts des consommateurs en reflétant les méthodes traditionnelles de fabrication du yogourt tout en permettant des progrès technologiques dans sa production, ce que permet l'Accord sur le commerce intérieur. De plus, en plus de développer et de mettre en oeuvre ces nouvelles normes, nous avons entrepris des démarches auprès du ministre Ritz afin qu'il implante des normes similaires à l'échelle canadienne, et je vous invite d'ailleurs à appuyer nos démarches en ce sens-là.

Le Québec est en avance sur les autres provinces en matière de traçabilité des animaux d'élevage. Pour être efficace, la traçabilité doit être implantée au niveau national. Alors que plusieurs provinces étaient réticentes à s'y engager, malgré ces réticences des autres provinces, le Québec a fait des gains importants lors de la rencontre des ministres de l'Agriculture à l'été 2009. Tout en travaillant à la reconnaissance de nos efforts consentis depuis plusieurs années, le Québec a obtenu l'appui des gouvernements fédéral et des autres provinces en ce qui a trait à la mise en place d'un système national de traçabilité qui permettra de préserver la confiance des consommateurs. La traçabilité n'est pas menacée mais en plein développement.

De plus, je tiens à souligner que le Conseil canadien du porc a retenu les services d'une filiale d'Agri-Traçabilité Québec pour implanter la traçabilité à l'échelle canadienne dans le secteur porcin. C'est une reconnaissance manifeste du leadership du Québec.

J'ai aussi entendu beaucoup d'affirmations en ce qui a trait à l'avenir des normes québécoises sur les produits biologiques. Les normes québécoises sur les produits biologiques prises dans l'intérêt des consommateurs constituent sans contredit un objectif légitime dans le sens de l'Accord sur le commerce intérieur. Encore sur ce point, nous avons été précurseurs et, soyons très clairs, l'Accord sur le commerce intérieur permet ce genre de mesures basées sur des normes internationales. La réglementation québécoise est basée en effet sur les normes de la Commission du Codex Alimentarius créée en 1963 par l'Organisation mondiale de la santé et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture. Ainsi, quand on regarde ce dossier-là au niveau biologique, le gouvernement fédéral a mis en place, en juin 2009, une réglementation nationale sur les produits biologiques afin de permettre aux entreprises agricoles canadiennes de faciliter leurs ventes sur les marchés interprovinciaux et internationaux.

Ainsi, la direction prise par le fédéral converge avec celle prise par le Québec. Le cas des normes sur les produits biologiques est une illustration parfaite que l'Accord sur le commerce intérieur n'est pas un obstacle du tout à la mise en place de réglementations provinciales innovatrices.

On a également exprimé des craintes concernant les exemptions ministérielles. Les exemptions ministérielles sont une réglementation fédérale qui interdit l'achat interprovincial ou l'importation de contenants de fruits et de légumes en vrac lorsque ces produits sont disponibles dans la province. Ainsi, les exemptions ministérielles permettent de favoriser l'achat de produits provinciaux lors des récoltes. Sachez que ces exemptions sont déjà visées par l'Accord sur le commerce intérieur depuis 1997 et qu'elles existent encore. Le nouveau chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires ne change donc pas l'orientation prise il y a 12 ans. C'est le Parti québécois qui à l'époque avait accepté l'inclusion des exemptions ministérielles dans l'Accord sur le commerce intérieur. En ce qui nous concerne, on poursuit énergiquement nos interventions auprès du gouvernement fédéral afin que leur application soit maintenue de façon efficace.

Les produits agricoles et alimentaires du Québec sont reconnus par les consommateurs québécois, les consommateurs des autres provinces canadiennes et par les consommateurs de plusieurs pays d'Europe, d'Asie et des États-Unis. Dans le passé, le gouvernement du Québec a posé des gestes en ce qui a trait à la promotion et au positionnement des produits du Québec et continuera à le faire. On n'a qu'à penser à l'opération Mettre le Québec dans votre assiette!, et il faut aussi positionner, en plus de le mettre dans l'assiette de tous les consommateurs québécois, nos produits dans l'assiette des consommateurs canadiens et du monde entier, et ce, dans l'intérêt de notre secteur agricole et agroalimentaire.

n(10 h 20)n

On travaille depuis toujours en collaboration avec les producteurs agricoles en ce qui concerne les politiques, les positions du Québec en agriculture et en agroalimentaire. En ce qui concerne l'ACI et contrairement à ce qui a été avancé par l'opposition, on a rencontré les producteurs agricoles à plusieurs reprises, on les a écoutés, on a pris en considération leurs commentaires et suggestions et on va continuer de le faire sur ces questions importantes. À chaque fois qu'on a rencontré les producteurs, ils nous ont clairement demandé de protéger la gestion de l'offre. On peut dire sans hésitation qu'on a répondu à leur demande avec cette entente.

Le développement des marchés interprovinciaux est essentiel pour le secteur agricole et alimentaire avec des ventes de près de 6 milliards de dollars, incluant les produits sous gestion de l'offre. Ce sont des produits transformés au Québec à partir des produits agricoles provenant de l'ensemble des régions du Québec. Le commerce est donc nécessaire pour le revenu de nos producteurs, car il dépend en bonne partie du marché interprovincial. Est-ce qu'on peut, M. le Président, se permettre de se priver des opportunités de croissance que ces marchés offrent à notre secteur agricole et agroalimentaire? Prenons-le à l'envers; est-ce qu'on a les moyens de fermer les frontières? Qu'arriverait, par exemple, du secteur laitier si les frontières québécoises étaient fermées? La diminution des volumes; c'est à peu près l'équivalent de diminuer de moitié les capacités de production au Québec.

Alors, ce sont des choix qu'il faut faire, ce sont des choix que nous avons faits et ce sont des choix que nous assumons.

Notre gouvernement a toujours été inébranlable en ce qui a trait à la défense et à la promotion de la gestion de l'offre et de la mise en marché collective. Comme je l'ai déjà mentionné, je suis fier que notre gouvernement ait amené les premiers ministres et les ministres du Commerce à adopter la position du Québec en ce qui a trait à la gestion de l'offre, à la mise en marché collective dans un accord qui reconnaît le respect de nos pouvoirs réglementaires et la protection du consommateur. Et il s'agit, je le répète, d'un consensus historique.

Argumentation

Le Président (M. Gaudreault): Merci beaucoup. Merci, M. le ministre. Alors, nous allons maintenant entamer la période d'échange. Mme la députée d'Iberville, vous avez la parole pour un maximum de cinq minutes.

Mme Marie Bouillé

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. Je le répète, le ministre de l'Agriculture a une belle occasion aujourd'hui de se ressaisir et de réparer les pots cassés. De plus, il doit rétablir la confiance qui est brisée.

Je vous ai écouté, M. le ministre, et nous sommes déçus par les propos émis par la partie gouvernementale. Nos doutes se confirment. Vous abandonnez les Québécois. Alors, écoutez bien. Vous pouvez éviter les questions, parler pendant cinq minutes sur n'importe quel autre sujet en tentant de faire passer votre message, mais personne ici n'est dupe. Il est essentiel que vous vous portiez en défenseur des intérêts du Québec en priorité. Ce que vous dites à date n'est pas suffisant, M. le ministre. Expliquez-nous maintenant pourquoi... Ah, excusez-moi, monsieur, oui. Expliquez-nous maintenant pourquoi, au nom du commerce, le gouvernement libéral s'apprête à entériner l'accord sans avoir évalué l'impact sur la qualité et la composition des aliments offerts aux Québécois et sur la justesse des informations au consommateur sur ce qu'il mange. En vertu du texte proposé, le gouvernement libéral renoncerait à exercer ses pleins pouvoirs constitutionnels en matière d'étiquetage et de composition des aliments. Ce serait désormais le plus petit commun dénominateur en matière de réglementation pour informer et protéger le consommateur. Le gouvernement du Québec avait pourtant reconnu que le texte de cet accord devait être précisé pour s'assurer qu'il ne menace pas la spécificité de nos aliments.

Les Québécoises et Québécois ont de plus en plus de difficultés à se procurer des produits agricoles de chez nous, au profit d'aliments venus d'ailleurs sans les mêmes garanties d'innocuité, de salubrité et de satisfaction à nos exigences sociétales, dont la protection de l'environnement et l'achat local.

Nous avons les normes alimentaires les plus élevées au Canada, et c'est ce qui fait la grande qualité et la spécificité des aliments. J'aimerais que le ministre de l'Agriculture, M. le Président, nous explique quels gains nous faisons en terme d'étiquetage et de composition des aliments. Est-ce qu'on va avoir de meilleures normes de qualité pour nos fruits et légumes? Est-ce que... Le ministre dit qu'il va s'occuper des exemptions ministérielles. J'espère qu'il sait de quoi il parle, M. le Président, parce que, moi, là, moi, comme directrice de la Fédération des producteurs de pommes de terre à l'UPA pendant neuf ans, j'étais à Washington, j'ai discuté quand les Américains... j'étais partie prenante des discussions de l'enquête 332 que les Américains ont placée sur les... les exemptions ministérielles, excusez, et j'étais là, j'ai suivi tout le débat. Et, s'il veut faire un débat sur ça, on va le faire parce que je vais le planter, d'accord?

Donc, maintenant...

Le Président (M. Gaudreault): Mme la députée, on est juste au début de nos échanges. Je pense qu'il faut tout de suite, il faut tout de suite...

Mme Bouillé: M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): ...bien aligner la teneur de nos échanges. Je vous demande de faire attention à vos termes. Le terme que vous avez utilisé, là, n'est pas de nature à avoir des échanges qui sont posés. Alors, je vous demande, s'il vous plaît, de poursuivre de façon plus modérée dans vos termes.

Mme Bouillé: Je le ferai, M. le Président, avec plaisir, en autant que la partie gouvernementale le fait aussi. Merci.

Le Président (M. Gaudreault): ...

Mme Bouillé: Qu'arrivera-t-il à la composition du fromage et des yogourts? Y aura-t-il encore principalement du lait frais dans ces produits?

Et là je cite l'article de la Revue Commerce d'avril 2009: «Une loi qui indigne l'héritier Saputo ? page 35, première colonne de la Revue Commerce.» Est-ce que les normes de référence biologiques pour le Québec sont en danger? Est-ce que c'est pour ça que la filière biologique a reçu une réponse négative de la part du fédéral pour sa demande de reconnaissance d'équivalence de la norme québécoise? Vous savez très bien que cette impasse va obliger les entreprises québécoises à fonctionner avec une deuxième norme pour avoir accès au marché canadien et, comme l'écrivait Le Devoir le 18 septembre dernier, «ferait du coup du Québec le grand perdant des nouvelles règles de certification canadiennes».

Qu'est-ce qu'il en est du Règlement sur les appellations réservées? Les gens auront-ils travaillé pour rien pour faire reconnaître la spécificité de leurs produits, comme l'agneau de Charlevoix? Le gouvernement du Québec, il a pris des mesures précises au fil des années pour assurer l'intérêt public et la protection du consommateur. M. le Président, est-ce que ce n'est pas opportun et légitime constitutionnellement puis logique juridiquement quant au partage des compétences d'exiger une exemption d'application? Est-ce que le ministre va modifier les règles sur le pourcentage maximal de glucose dans les produits de l'érable pour les rendre conformes aux normes des autres provinces? Le sirop d'érable vendu au Québec va-t-il être coupé avec du sirop de glucose pour baisser les coûts?

Donc, voilà toutes les questions auxquelles on s'attend à ce que le ministre réponde ce matin. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, Mme la députée. Alors, je cède maintenant la parole au ministre, en poursuivant sur le ton des débats harmonieux.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Comme je l'ai toujours fait à date. J'insiste sur le mot «à date». Alors, M. le Président, sur un nombre d'éléments qui est soulevé par ma collègue d'en face, je pense, ça se recoupe avec ce que je mentionnais dans mes remarques, il y a, dans son ton, dans le choix de ses mots, des tentatives très claires qui pourraient s'inscrire parfaitement dans le film À soir, on essaie de faire peur au monde, parce que, bien franchement, là, je peux les prendre un après l'autre, l'Halloween, c'est demain.

Je comprends qu'on veut essayer de faire peur au monde aujourd'hui, là, mais l'Halloween, c'est demain. Et, sincèrement, si je regarde juste au niveau constitutionnel, ça fait quelques fois que je l'entends dire ça, qu'on a abdiqué nos pouvoirs constitutionnels de réglementer. Je veux juste la ramener au chapitre trois de l'Accord sur le commerce intérieur, là, au niveau de la réaffirmation des pouvoirs et responsabilités constitutionnels, c'est écrit noir sur blanc que «le présent accord ne modifie pas les compétences législatives ou autres du Parlement fédéral, des législatures provinciales, ni les compétences du gouvernement du Canada ou des gouvernements provinciaux, ni leurs droits en ce qui a trait à l'exercice [de leurs] compétences législatives ou autres qui leur sont conférées par la Constitution». Je ne sais pas où elle prend ça, je ne sais pas où elle s'en va avec ça, si ce n'est que d'essayer de faire peur au monde. C'est écrit noir sur blanc, chapitre trois de l'accord. Alors, tu sais, à un moment donné, il faut quand même essayer de se garder un minimum de crédibilité, M. le Président, dans ces débats-là.

L'autre chose, puis je vais, je veux le répéter avant d'aller dans le détail de ce qu'elle mentionne au niveau du yogourt, et tout ça, il y a deux éléments majeurs qui font en sorte que le présent accord a été accepté, qui n'étaient pas là il y a un an. Premièrement, le consensus des premiers ministres provinciaux que nous avons obtenu est un consensus historique, M. le Président, autour de la défense de la gestion de l'offre, ça n'était jamais arrivé avant. Et, juste pour faire le lien, on peut se questionner, comme le fait la députée de l'opposition, sur: Est-ce que tel élément dans le texte est assez solide, pourrait l'être plus, etc.?, mais il faut comprendre la logique d'une entente. On a beau avoir les meilleurs textes les plus sûrs dans le monde et dans l'univers, s'il n'y a personne en arrière pour les signer, ces textes-là ne valent rien, ces textes-là n'ont aucune valeur.

n(10 h 30)n

On peut bien, là, nous, se mettre une bulle, là, sur nous, une cloche puis dire: Bien, aïe, nous, on est contents du texte, puis c'est fantastique, ce texte-là, puis il est bon. S'il n'y a personne pour le signer, M. le Président, il ne vaut rien, le texte. Là, on a des textes avec un consensus des premiers ministres provinciaux qui viennent les appuyer, ces textes-là. Et il ne faut pas oublier non plus une chose: quand ils mentionnent, en face, M. le Président, qu'une mesure pourrait être contestée, toute mesure dans tout accord international intérieur, à tous les niveaux, il y a... on ne peut pas, dans un accord, brimer quelqu'un du droit de contester. Mais, je l'ai dit, et je le répète, puis je l'ai encore dit il n'y a pas plus tard que quelques minutes à des gens de l'UPA, on va défendre notre réglementation, notre capacité de réglementer et ce qu'on met sur nos étiquettes bec et ongles, on va le faire. Mais c'est sûr que, si on me demande: Est-ce que vous pouvez nous garantir que tout ça jamais ne sera attaqué par personne?, non, parce que, toutes les ententes, il y a des possibilités pour les gens de les contester. Alors ça, c'est bien important qu'on amène ça et qu'on le dise de façon très claire.

L'autre chose, je prends l'exemple du yogourt, puis ça me ramène à l'autre élément qui a changé depuis l'année passée: nous avons signé une entente avec l'Ontario qui fait en sorte que, le yogourt, 70 % vient du Québec, on est avec l'Ontario, c'est 92 %. Dans l'accord que nous avons, elle pense que ça prend des nouvelles normes. Ce n'est pas juste une question de nouvelles normes, la reconnaissance des normes existantes peut se faire aussi. Alors, c'est la même chose avec l'ACI, c'est de faire en sorte que les normes en place soient reconnues. Puis ce qu'il y a de nouveau aussi avec cet accord-là avec l'Ontario, c'est que, si jamais on se fait attaquer sur une de nos réglementations, il est clair dans l'entente que nous avons avec l'Ontario que, dans plusieurs de ces cas-là, le Québec et l'Ontario vont se défendre ensemble, M. le Président, vont se défendre tous les deux. Alors, ça fait une défense beaucoup plus solide.

Alors, les textes qui sont là sont maintenant appuyés par l'ensemble des premiers ministres provinciaux canadiens, sont appuyés aussi par le gouvernement ontarien. Et, la preuve, si nous étions les seuls à signer ça et que notre partenaire ontarien avec qui on a signé une entente n'était pas là, elle n'aurait pas la même valeur, puis là on pourrait dire que, oui, on est dans le champ. Mais les Ontariens avec qui on a signé une entente, avec la Fédération des producteurs de lait, travaillent, entre autres... ont signé le même accord que nous.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le ministre. J'accorde maintenant la parole à un député du groupe formant le gouvernement, c'est M. le député de Gaspé.

M. Georges Mamelonet

M. Mamelonet: Oui. Bonjour, M. le...

Le Président (M. Gaudreault): Pour cinq minutes.

M. Mamelonet: Merci, M. le Président. Écoutez, je pense qu'il est nécessaire de faire un petit peu le point sur les détails de l'Accord de commerce intérieur, le détail de ce qui a été donc ratifié le 15 octobre dernier, un nouveau chapitre sur les produits agricoles, qui en réalité ne change pas l'orientation générale sur l'Accord sur le commerce intérieur.

Je pense qu'il est nécessaire de faire le point article par article, de façon à ce qu'on comprenne bien où est-ce qu'on s'en va et la façon dont le gouvernement du Québec défend les intérêts des agriculteurs, la façon dont chacun des législateurs remplit son rôle de façon efficace.

Dans le chapitre deux, sur les objectifs légitimes et entré en vigueur en 1995, l'Accord sur le commerce intérieur reconnaît les objectifs légitimes comme la protection des consommateurs, la protection de l'environnement ainsi que la protection de la vie ou de la santé des humains, des animaux ou des végétaux. Rien de changé dans cet article-là, et il continue d'exister.

Dans le chapitre trois, Réaffirmation des pouvoirs et responsabilités constitutionnels, entré en vigueur également en 1995, l'accord réaffirme qu'il ne modifie pas les pouvoirs législatifs du gouvernement du Canada et des provinces, dont le Québec. À ce sujet, rien n'a changé non plus.

Le chapitre quatre, sur les règles générales de l'Accord sur le commerce intérieur, entré en vigueur en 1995 également, l'Accord sur le commerce intérieur reconnaît notamment que les provinces doivent accorder un traitement égal aux produits des autres provinces au traitement qu'elles accordent à leurs produits. Le fédéral et les provinces s'assurent que leurs mesures n'ont pas pour effet de créer un obstacle au commerce intérieur. Le fédéral et les provinces peuvent quand même prendre des mesures incompatibles avec les orientations précédentes, si elles ont pour objet la réalisation d'objectifs légitimes, dans la mesure où celles-ci ne restreignent pas le commerce plus qu'il n'est nécessaire pour atteindre ces objectifs légitimes. À ce sujet, rien n'a changé non plus. Et le chapitre est identique.

Chapitre huit, Mesures et normes en matière de consommation. Depuis son entrée en vigueur en 1995 également, l'accord reconnaît que les gouvernements fédéral et provinciaux peuvent, pour atteindre un objectif légitime, adopter ou maintenir des mesures établissant un niveau de protection des consommateurs qu'ils estiment approprié. Rien de changé non plus.

Chapitre sur les produits agricoles et produits alimentaires, le chapitre neuf. Depuis son entrée en 1995, le chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires de l'accord indique que les règles générales, comme la non-discrimination, l'absence d'obstacles et la possibilité de mettre en place des mesures ayant pour objet la réalisation des objectifs légitimes, s'appliquent au chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires. À ce sujet, le nouveau chapitre est identique et continue d'exister.

Portée et champ d'application, l'article 902. Depuis son entrée en vigueur en 1995, le chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires de l'accord indique que les ministres devront identifier des mesures qui comportent des obstacles techniques au plus tard le 1er septembre 1997. En 1997, on retrouvait 10 mesures spécifiquement identifiées pour le fédéral et les provinces comme des obstacles au commerce interprovincial, tels que les exemptions ministérielles, les mélanges de produits laitiers, mélanges de beurre, de margarine, et les produits laitiers d'imitation. Si on se réfère à la margarine, on retrouvait évidemment la coloration de la margarine, abrogée en 2008. On se rappellera que ça n'a pas changé grand-chose sur le commerce de margarine, si ce n'est l'augmentation des ventes de beurre de 2 % entre 2008 et 2009. Ces mesures existent encore. Comme il a déjà été dit, ce nouveau chapitre ne change pas l'orientation prise pour ces produits il y a 12 ans par le Parti québécois.

Donc, le nouveau chapitre indique que l'Accord sur le commerce intérieur s'applique aux mesures techniques. Il précise qu'aucune disposition ne doit être interprétée de façon à empêcher l'adoption ou le maintien de mesures relatives à la gestion de l'offre et la mise en marché collective, car elles ne sont pas des mesures techniques. Il faut également ajouter le consensus des premiers ministres et des ministres du Commerce quant au fait que le nouveau chapitre neuf ne s'applique pas à la gestion de l'offre et à la mise en marché collective. Et je pense qu'il faut bien insister là-dessus. On a maintenant en main une disposition qui permet au gouvernement canadien d'aller défendre de façon efficace la gestion de l'offre et les offices de commercialisation au niveau de l'Organisation mondiale du commerce qui, on se le rappelle, l'Organisation du commerce, serait... aurait des tendances... certains pays auraient des tendances à vouloir effacer la gestion de l'offre.

Le texte de l'Accord sur le commerce intérieur et les déclarations des premiers ministres et des ministres du Commerce indiquent clairement que la gestion de l'offre et la mise en marché collective ne sont pas des mesures techniques et qu'elles ne sont pas visées par l'Accord sur le commerce intérieur. Dans le chapitre neuf, au niveau d'examen des politiques, chapitre... donc article 903 de l'ancien chapitre, entré en vigueur en 1995, le chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires de l'Accord sur le commerce intérieur indique que, pour réduire ou éliminer les mesures qui constituent des obstacles au commerce intérieur, le fédéral et les provinces ont convenu d'examiner notamment le cadre de la gestion de l'offre et les programmes provinciaux de sécurité du revenu. Ça ne fait plus partie des éléments qui sont visés par le nouveau chapitre. La disparition de cet article est un gain significatif pour le Québec. On reconnaît donc par là la gestion de l'offre de façon non équivoque. Nous avons plutôt obtenu un consensus dans la gestion de l'offre et la mise en marché collective.

Au niveau de l'étendue des obligations...

Le Président (M. Gaudreault): ...

M. Mamelonet: Pardon?

Le Président (M. Gaudreault): Je vous invite à conclure.

M. Mamelonet: Déjà?

Le Président (M. Gaudreault): Oui.

M. Mamelonet: C'est tellement rapide, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Vous aurez d'autres occasions.

M. Mamelonet: On va, donc, on va essayer de conclure très rapidement. Grosso modo, on va donc défendre...

Le Président (M. Gaudreault): Terminé.

M. Mamelonet: ...au niveau de l'Accord du commerce, on va défendre notre...

Le Président (M. Gaudreault): C'est beau. Je vous invite à garder le suspense pour votre prochaine intervention. Alors, j'invite la députée d'Iberville pour entamer la deuxième séquence de cette interpellation. Cinq minutes.

Mme Marie Bouillé

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. Vous m'avez demandé d'aider à l'interpellation. Je vais être gentille, je vais donner raison au ministre sur deux points: oui, on ne peut pas empêcher personne de contester, puis, deux, l'Halloween, c'est demain.

Ça fait que, ceci étant dit, on a clairement l'impression de s'enfoncer actuellement. Les explications, les commentaires, c'est de plus en plus opaque. Donc, je vais donner une autre chance. On va parler, on va y aller sur la mise en marché des produits agricoles, à fond. Le gouvernement prétend, M. le Président, que la très grande majorité des mesures techniques de notre système de mise en marché collectif ne constitue pas un des éléments essentiels, il ne sera pas dans... Est-ce que, selon le ministre, là, les procédures d'accréditation puis d'homologation de la Régie des marchés agricoles, c'est des mesures techniques? Si c'est le cas, vous comprendrez, M. le Président, que je vais me battre pour que le gouvernement ne touche pas à ça, qu'il ne touche pas aux accréditations d'acheteurs établies par le biais des décisions de la région en vertu de la loi, ce qui permettrait à un acheteur hors Québec qui veut négocier directement puis individuellement de contester l'accréditation des acheteurs. Toutes les homologations de convention de mise en marché, est-ce que c'est des mesures techniques? J'aimerais ça l'entendre, le ministre, sur ça.

Ce que je veux souligner ce matin, c'est que les procédures visant à soumettre la Régie des marchés agricoles, dont le ministre est responsable, les principaux fondements de notre système collectif de mise en marché, ils pourraient être remis en question par l'accord qui a été signé. Il y a des normes en vigueur qui pourraient constituer des mesures techniques autant en vertu des lois, des règlements du gouvernement du Québec qu'en vertu de celles adoptées, approuvées, homologuées, décrétées par la Régie des marchés agricoles. Ces normes, ils voient souvent... ça touche souvent des questions d'intérêt public, d'intérêt du consommateur. Au surplus, ça peut être aussi des éléments essentiels de ce qui caractérise la mise en marché collective ordonnée et efficace en vigueur au Québec. Ça fonctionne.

Je vous souligne d'ailleurs, M. le Président, que la régie a été constituée par la législature du Québec. Elle est par conséquent visée par l'accord. Puis il pourrait être allégué qu'elle doit en conséquence veiller au respect de l'accord. Une telle abdication de juridiction, là, ça va être, pour nous, de l'opposition officielle, une raison de plus pour faire du Québec un pays souverain. Et vous y... et le ministre de l'Agriculture y aura contribué. Voilà. Je veux l'entendre, M. le ministre, puis j'aimerais ça qu'il nous écoute.

n(10 h 40)n

Le Président (M. Gaudreault): O.K. Alors, merci, Mme la députée. La parole est au ministre pour cinq minutes, mais cinq minutes.

M. Claude Béchard

M. Béchard: M. le Président, j'inviterais vraiment ma collègue d'en face à se calmer un peu. Je ne sais pas ce qu'elle pense que je fais ici si je ne l'écoute pas. On travaille puis on prépare des réponses, c'est tout ce qu'on fait, là. Je ne sais pas quelle mouche l'a piquée ce matin, là, en tout cas.

Juste pour revenir sur un certain nombre de choses, M. le Président, de toute façon, quand elle dit «je ne réponds pas» ou quoi que ce soit, peu importe ce que je vais répondre, c'est écrit, en commençant sa déclaration, c'est écrit à l'avance de dire que le ministre ne répond pas. Alors, elle répète, point final. Mais je pense que je réponds assez clairement. Je vais même lui répondre sur les deux autres questions qu'elle m'a posées.

En ce qui concerne la Régie des marchés agricoles et la façon dont elle fonctionne, aux éléments qui touchent, nous, on ne considère pas que ce sont des mesures techniques. Est-ce que quelqu'un quelque part peut arriver puis dire: On pense, nous, que c'est des mesures techniques? Bien oui, quelqu'un quelque part peut arriver puis dire ça. Mais on va se défendre, M. le Président. Pour nous, ce n'en est pas. Et en plus tout ce qui concerne...

Une voix: ...

M. Béchard: Non, mais c'est parce que, si le député de Lac-Saint-Jean a quelque chose à dire, qu'il prenne le micro. Pas de problème, ça s'en vient.

Mais tout ça pour vous dire, M. le Président, que je n'ai aucun doute, et nous n'avons aucun doute qu'il ne s'agit pas de mesure technique, d'ailleurs. Et après ça elle dit: Est-ce que ça pourrait être attaqué ou quoi que ce soit? C'est écrit noir sur blanc dans les documents officiels du Conseil de la fédération que la gestion de l'offre, que la mise en marché collective ne sont pas visées, qu'elles sont protégées.

Alors, on est dans le domaine, avec ma collègue d'en face, de l'hypothétique. Alors, je veux bien qu'elle tente de faire peur, qu'elle tente de dire qu'il y a telle chose, M. le Président, vous le savez, tout peut être contesté dans la vie, tout, même la couleur de la neige. Il y en a qui disent qu'elle est grise. Des fois, le printemps, ils ont raison. Mais en général de la neige, c'est blanc, mais elle peut le contester. Je ne lui enlève pas son droit à la contestation, sinon elle ne serait pas heureuse. Mais ce que je vous dis, c'est clair et net que c'est écrit: «Le nouveau chapitre sur l'agriculture empêchera le recours à des mesures déraisonnables risquant de nuire à la libre circulation des produits agricoles à travers le Canada. Il ne s'appliquera pas aux mesures liées aux systèmes de gestion de l'offre régis par les gouvernements fédéral et provinciaux, ni aux offices de commercialisation provinciaux.» C'est clair, c'est là. Alors, est-ce que ça peut être contesté? Bien oui, quelqu'un quelque part peut arriver puis dire... et le contester, mais, je l'ai dit et je le répète, nous allons nous défendre là-dessus.

Donc ça, c'est sur ces deux questions. L'autre chose qui est bien importante, M. le Président, pensons à l'effet de ne pas avoir eu de consensus et à ne pas avoir d'accord ou d'appui en ce qui a trait à la gestion de l'offre et à la mise en marché collective. On l'a vu, le 15 octobre dernier, le ministre fédéral du Commerce, Stockwell Day, dire qu'il appuyait la gestion de l'offre, qu'il allait défendre la gestion de l'offre auprès de la communauté européenne. Imaginons: s'il n'y avait pas eu de consensus, est-ce que la position du gouvernement fédéral serait aussi claire et ferme? Alors, probablement que la maison mère des gens d'en face, le Bloc, aurait posé encore plus de questions cette semaine. Ils en ont posé cette semaine deux à Ottawa. Nous, on n'en a pas eu ici sur l'accord puis sur la gestion de l'offre, alors il faut croire qu'on avait fait un bon travail là-dessus.

Mais, M. le Président, j'ai eu la chance, c'est en 2005, d'assister aux négociations de l'OMC avec d'autres collègues des autres provinces. Et d'ailleurs il va y en avoir, d'autres négociations, en décembre, d'autres rencontres, là, et je ne sais pas si je vais y aller, c'est en même temps que le congrès de l'UPA, alors on a une décision à prendre là-dessus. Mais, quand on arrive pour défendre la gestion de l'offre et que tout le monde est à la même page, la position est beaucoup plus forte que si on arrive divisés puis que si les provinces de l'Ouest ne sont pas là et que si d'autres ne sont pas là. Alors, il faut arriver ensemble. C'est pourquoi ce consensus était aussi important, M. le Président, pour défendre les intérêts, oui, du Québec, oui, du Canada. Et défendre les deux en même temps, ce n'est pas incompatible, et même dans n'importe quelle entente. Elle parle de souveraineté. Ils ne sont même pas capables, en face, de nous garantir, en cas de souveraineté, qu'est-ce qui arriverait avec les ententes internationales. Ils ne sont même pas capables de nous dire est-ce qu'on va les signer ou pas, est-ce qu'il va y avoir du monde pour vouloir les signer avec vous autres ou pas. Vous n'êtes même pas capables.

Avec la souveraineté, tout ça est remis en question. Ça fait que ne commencez pas votre discours souverainiste à matin, là.

Le Président (M. Gaudreault): ...moi.

M. Béchard: Oui, oui, M. le Président. Alors, qu'ils ne commencent pas leur discours souverainiste ce matin là-dessus, M. le Président. Je sais à quel point, vous, vous êtes neutre là-dedans et vous êtes capable de voir les deux côtés de la médaille.

Mais ce qu'il est important de dire: Nous avons un consensus, nous avons l'appui des autres provinces et nous allons faire en sorte que la gestion de l'offre soit défendue. Et, sincèrement, le gouvernement fédéral a les mains attachées dans la défense de la gestion de l'offre grâce au consensus que nous avons eu cet été à Regina.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le ministre. Alors, pour cinq minutes, M. le député de Huntingdon.

M. Stéphane Billette

M. Billette: Merci beaucoup, M. le Président. Je veux saluer mes collègues, M. le ministre, les collègues également de l'opposition officielle et les agriculteurs également, dont je fais partie à temps partiel.

Je pense que c'est important de continuer sur les propos que tenait le ministre au niveau de la gestion de l'offre. Lorsque la députée d'Iberville disait que le gouvernement du Québec n'a pas défendu les intérêts des producteurs dans l'accord de commerce international, je vais parler en tant qu'agriculteur, je vais vous dire honnêtement: Oui, ils ont été bien défendus. Allez dire aux gens qui ont des quotas de lait, des quotas de poulet qu'ils n'ont pas été défendus. Maintenant, on a une position claire au niveau du Canada, les 13 premiers ministres, les 10 des provinces et les trois des territoires, qui vont aller défendre la gestion de l'offre de façon solidaire, à ce moment-là, lors des rondes. Parce que, l'OMC, on est actuellement dans un point critique, je pense que les négociations avancent de façon très rapide.

Puis ce qu'il est très important de comprendre, M. le Président, c'est l'importance de la gestion de l'offre sur l'économie du Québec. On parle de beaucoup d'emplois, de revenus. La gestion de l'offre, en somme c'est 40 % des produits qui sont produits ici, au Québec, on pense au lait, aux volailles, aux oeufs, et c'est des emplois et l'industrie de transformation également qui est impliquée. C'est 2,6 milliards de retombées économiques, puis, au niveau de la transformation, c'est 5,6 milliards. D'où vient la gestion de l'offre? Où ça a été créé? Ça remonte avant notre temps, peut-être avant le... dans votre temps, mais c'était en 1970. Je pense, il faut retourner en arrière. Parce que, si on n'avait pas d'accord, on perdait, à ce moment-là, il y avait des risques de perte de la gestion de l'offre, et on retournerait en 1970. Comment ça fonctionnait, M. le Président, en 1970? On avait une surproduction au Québec. Les gens qui produisaient du lait, des oeufs n'avaient pas de limite de production. Si on ne regardait qu'au sud du Canada, à ce moment-là, aux États-Unis, c'est exactement le problème qu'ils ont actuellement. Puis comment qu'ils étaient compensés, ces gens-là? C'était le gouvernement qui rachetait les biens et produits pour en disposer de différentes manières, à ce moment-là.

En 1970 est arrivée la gestion de l'offre, une gestion qui a été approuvée par les 10 provinces et au niveau canadien, à ce moment-là, et les producteurs également se sont impliqués à ce niveau-là. Puis, je vais vous dire, on dit souvent: La gestion de l'offre, on ouvre sur les autres provinces. Il faut savoir qu'au niveau de la production de lait le Québec produit 49 % du lait via la gestion de l'offre au Canada et n'en consomme que 25 %. Donc, au niveau de ce secteur-là, on voit, à ce moment-là, que, comme disait si bien mon collègue le ministre de l'Industrie, oui, c'est le Québec dans nos assiettes mais également le Québec dans les assiettes du Canada. C'est encore plus plaisant, à ce moment-là.

Les trois objectifs de la gestion de l'offre, je pense, sont clairs. Premièrement, c'est de gérer la production. Les problèmes qui se sont produits en 1970, on ne veut pas les revivre, à ce moment-là. On veut que l'offre et la demande soient à l'équilibre. Donc, c'était le premier objectif. C'était de contrôler également les importations, très important, pour ne pas avoir, excusez le terme, du «dumping». Je ne sais pas si c'est antiparlementaire. Non? Bon, on va l'accepter. Et également avoir une politique de prix qui couvrirait les frais des producteurs agricoles, à ce moment-ci. Couvrir les coûts: très important. On voit ce qui se passe aux États-Unis actuellement. Juste pour donner un ordre d'idées, au Québec, un litre de lait va coûter environ 0,85 $; présentement, aux États-Unis, il a remonté un petit peu cette semaine, on parle de 0,21 $. Donc, on voit qu'avec un quota qu'il produit actuellement un producteur avec 50 vaches peut vivre. Aux États-Unis on parle de producteurs de 2 000, 3 000, et ils ont de la difficulté à arriver, à ce moment-là, parce qu'on a suggéré notre offre et conservé un prix.

L'historique maintenant, les négociations au niveau international, je pense qu'elles sont très importantes. Le Canada est en train de se positionner avec l'aide des 10 provinces et des trois territoires. Ça remonte à voilà très longtemps. Je me souviens, j'étais petit garçon, on parlait de l'accord de GATT, à ce moment-là. Ça a été le début, je pense, des négociations. Par la suite, en 1994, on est arrivé avec la ronde de l'Uruguay, où, à ce moment-là, oui, on a eu des petites pertes. On voit le danger, le lobby également qui est fait par les petites... les autres pays. Puis les autres pays, je vais vous le dire, on ne se cachera pas, c'est l'Union européenne et l'union... les États-Unis, qui poussent beaucoup pour faire tomber le système de gestion de l'offre, à ce moment-là. Par la suite, je pense qu'on a actualisé en 2001. Maintenant, on est tombé avec la ronde de Doha, où on voit l'alliance qui s'est créée entre les États-unis et l'Union européenne. Les objectifs de ces deux États-là, c'est une augmentation d'accès aux marchés, éliminer les subventions à l'exportation et éliminer également le soutien interne de la part des gouvernements, à ce moment-là.

En 2004, il y a un accord-cadre qui a été conclu, qui protégeait, à ce moment-là, la protection des produits sensibles. On parle, à ce moment-là, de la gestion de l'offre qui est incluse là-dedans. 30 secondes; on va faire ça très rapidement. En décembre 2008, où on est présentement, il y a un texte qui a été déposé par M. Falconer, le président des négociations de l'OMC. Le texte est très important. On est à l'heure... je pense qu'on est dans un point critique où on doit faire consensus pour aller défendre notre position de façon forte, et c'est ce que le Canada veut défendre avec d'autres. Également, le gouvernement de Hong Kong, il y a plusieurs...

Je pense que je vais continuer parce que c'est un sujet très important. Et les pertes auraient pu être majeures sans une signature de l'Accord de commerce intérieur. Je reviens sur ce sujet tantôt, M. le Président.

n(10 h 50)n

Le Président (M. Gaudreault): Oui. Merci, M. le député de Huntingdon. Alors, pour la troisième séquence, le député de l'opposition officielle, M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier: Merci, M. le Président. Alors, à mon tour de saluer les collègues et de saluer également les gens qui se sont déplacés aujourd'hui avec nous et même remercier le député de Huntingdon de nous avoir fait l'historique de la gestion de l'offre au Québec.

Je pense qu'il n'y a aucun doute dans l'esprit de personne que la gestion de l'offre doit être maintenue au Québec, mais, nous, là, la raison pour laquelle on est réunis aujourd'hui puis sans doute la raison pour laquelle il y a des gens qui se sont déplacés, c'est parce qu'il y a de l'inquiétude, puis cette inquiétude-là, elle est réelle. M. le ministre, vous essayez d'être rassurant avec la gestion...

Une voix: ...

M. Cloutier: Merci, M. le Président. M. le Président, le ministre essaie de se faire rassurant sur la question de la gestion de l'offre, mais le problème, là, c'est qu'à l'article 2 le ministre nous cite le Conseil de la fédération, le communiqué qui a été émis par le Conseil de la fédération. M. le Président, vous êtes avocat vous-même, vous savez bien qu'un communiqué de presse n'a pas force de loi. Alors, si on s'en remet au texte, qu'est-ce que ça dit? On dit que, la gestion de l'offre, là, il y aurait une clause qui protégerait dans la mesure où que ce ne sont pas des mesures qui sont techniques. Alors là, on se tourne vers le ministre puis on lui demande: Mais est-ce que les mesures en place sont des mesures techniques? Le ministre nous répond: Bien, écoutez, peut-être que certaines personnes vont penser que oui, puis peut-être que ce sera contesté devant les tribunaux. Est-ce que ça, ça s'appelle une clause béton qui... protège, pardon, la gestion de l'offre? Le moins qu'on puisse dire, M. le Président, c'est qu'on a des sérieuses raisons d'avoir des doutes.

De même, l'UPA... je pense que l'UPA, quand on parle d'agriculture, ces gens-là savent de quoi ils parlent. On émet un communiqué le 16 octobre à 16 h 3, M. le Président, et qu'est-ce qu'on écrit sur les mesures en ce qui concerne la gestion de l'offre? On dit que ces mesures apparaissent, et là je cite, là, «apparaissent [...] insuffisantes et témoignent surtout d'une capitulation en règle en faveur d'un marché pancanadien résolument orienté vers l'uniformisation des lois et normes dans le secteur agroalimentaire». Le moins que je puisse dire, M. le Président, c'est que l'UPA est loin d'être rassurée. Alors, l'UPA en ajoute. On dit que, dans la lettre... dans une lettre que le ministre a écrit le 19 août, il indiquait «que le Québec conserve sa capacité à adopter des règlements en ce qui a trait à l'étiquetage et à la composition des aliments». Bon. Ça avait l'air rassurant. Puis, «quant aux exemptions ministérielles, nous poursuivrons nos interventions auprès du gouvernement fédéral».

Alors, comme le note très justement l'UPA, rien sur le sujet n'est présent dans la version finale, M. le Président. Alors, ce sont ces inquiétudes-là qui ont été soulevées par l'UPA et ce sont ces inquiétudes-là sans doute qui sont partagées par les gens qui sont avec nous aujourd'hui, M. le Président.

Alors, qu'est-ce que fait le gouvernement du Québec? Le gouvernement du Québec laisse aller sa souveraineté législative en matière d'agriculture, laisse aller sa spécificité québécoise en matière d'agriculture au profit de quoi, M. le Président? C'est ça qu'on vous pose comme question: À qui, en bout de course, ça va satisfaire, ces nouvelles propositions là, alors qu'il y a des inquiétudes qui sont extrêmement importantes dans le milieu? Mais, M. le Président, vous comprendrez qu'on commence à être habitués avec le gouvernement libéral à laisser aller notre souveraineté. On l'a vu la semaine dernière avec le jugement de la loi n° 104 sur la protection du français, on l'a vu sur la Commission des valeurs mobilières, mais j'aurai la chance d'y revenir avec le ministre des Affaires intergouvernementales dans un autre...

Mais je serais curieux d'entendre les fonctionnaires du ministère des...

Une voix: ...

M. Cloutier: ...du SAIC, du Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes. Qu'est-ce que pensent les fonctionnaires du Secrétariat aux affaires intergouvernementales sur les pouvoirs que vous laissez aller au gouvernement canadien? Est-ce que le ministre s'engage à déposer les rapports des fonctionnaires sur les pouvoirs justement qu'on est en train de laisser aller, au gouvernement du Québec? Si le ministre dit qu'il agit en toute transparence, est-ce qu'il est prêt aujourd'hui à s'engager aux avis qui ont émis par les fonctionnaires du Secrétariat aux affaires intergouvernementales quant à la souveraineté du Québec dans le dossier de l'Accord de commerce intérieur? J'ai hâte d'entendre le ministre nous en parler tout à l'heure.

Puis même le ministre lui-même, il dit qu'il essaie de se faire rassurant, là. Dans une entrevue qu'il a donnée au journal Le Soleil, là, et je vais le citer, on dit que le «nouveau ministre de l'Agriculture et responsable des Relations intergouvernementales canadiennes admet ouvertement que les négociations du Québec n'ont pas réussi à aller chercher des protections supplémentaires pour le secteur agroalimentaire». Et là je vais le citer: «On avait la conviction que, si on étirait davantage, on avait des chances de perdre le consensus.» M. le Président, entre le consensus canadien puis le respect de nos agriculteurs, vous auriez dû choisir les agriculteurs, vous êtes le ministre responsable en Agriculture.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le député. Alors, pour cinq minutes, M. le ministre.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Merci, M. le Président. Avec beaucoup de plaisir; j'ai choisi les deux, j'ai choisi les deux, juste pour que vous mettiez ça... que, M. le Président, pour que le député de Lac-Saint-Jean mette ça dans son chapeau, là, j'ai choisi les deux: la défense des agriculteurs et la défense du consensus. Oui, oui, il a beau faire des simagrées, là.

Le Président (M. Gaudreault): Je vous invite à ne pas vous interpeller.

M. Béchard: Non, non, mais, je veux dire, il peut relaxer un peu, là. Je ne sais pas s'il y a quelque chose qui le démange quelque part, là. Mais, M. le Président, à un moment donné, là, on a choisi les deux, M. le Président.

Une voix: ...

Le Président (M. Gaudreault): Non, non, mais je vous demande de faire attention à vos propos, là.

M. Béchard: On a choisi la défense des agriculteurs, de l'agriculture québécoise, et, si je le dis puis je le répète... Mais, quand on signe un texte, ça prend quelqu'un de l'autre côté de la table, ce n'est pas plus compliqué que ça. Le texte le plus fantastique qui défendrait le plus, de la façon la plus sûre, la plus inattaquable, s'il n'y a personne pour le signer, ça vaut quoi? Et c'est pour ça qu'on a choisi les deux. Si, demain matin, là, prenons l'exemple du lait, demain matin, on parle de gestion de l'offre, ça saute, il n'y en a plus, de gestion de l'offre, il n'y a plus de consensus canadien puis il n'y a plus de gestion de l'offre, on fait quoi avec notre lait? C'est quoi, 60 %... 50 %, 60 % de notre lait qui est exporté à l'extérieur du Québec, M. le Président? 50 %? On fait quoi? On l'envoie dans les égouts?

C'est pour ça qu'il y a un consensus, c'est pour ça que c'est important de s'entendre avec les autres provinces, c'est pour ça, d'avoir, M. le Président, un accord sur le commerce qui défend ça.

Je comprends que mon collègue du Lac-Saint-Jean, là, vient de parler du communiqué de presse. Elle est facile, celle-là. Il sait fort bien, M. le Président, que, le Conseil de la fédération, les documents officiels du Conseil de la fédération, les décisions du Conseil de la fédération se prennent et s'expriment... s'expriment, c'est-à-dire, dans un communiqué de presse qui est un document officiel du conseil. Il parle d'une clause béton qui empêcherait d'être contesté. J'aimerais ça le mettre au défi: Trouvez-moi un seul accord de commerce canadien, américain, mondial qui enlève le droit à une des parties de se faire entendre puis de contester. Trouvez-moi-z-en une. Je le mets au défi. Qu'il m'en trouve une, M. le Président. Dans chaque accord, c'est là.

Le troisième élément, M. le Président, qui...

Une voix: ...

M. Béchard: Puis c'est pour ça que j'ai dit, et je le répète, que, dans le même article ou dans le même communiqué de presse du 16 octobre qu'il a cité, ils l'ont répété, et je n'aime pas m'autociter, mais je vais le faire de façon exceptionnelle: «Nous ne céderons pas les...»

Une voix: ...

M. Béchard: Pardon?

Le Président (M. Gaudreault): ...le ministre, vous n'avez pas le droit de citer votre nom.

M. Béchard: Oui, c'est ça. Problème de syndrome du mini-wheat.

Le Président (M. Gaudreault): Un peu schizophrénique.

M. Béchard: Donc, je disais: «Nous ne céderons pas les pouvoirs du gouvernement à un tribunal extérieur. S'il y a quoi que ce soit, on va défendre ça bec et ongles. Oui, on vient de se doter d'un mécanisme où les gens peuvent aller porter plainte, mais on va défendre nos règles, nos règlements, la gestion de l'offre et nos offices de commercialisation.» Nous n'avons rien cédé là-dessus, M. le Président, au contraire.

Autre chose bien importante que je veux rappeler et qui est fondamentale: quand on arrive avec des ententes comme nous avons et la défense de la gestion de l'offre, on ne peut pas faire de la gestion de l'offre seuls. J'ai donné l'exemple tantôt du lait. Demain matin, la gestion de l'offre saute ou tout simplement on ne réussit pas à s'entendre avec les autres provinces, on fait quoi avec 50 % de notre lait? Et c'est un de mes collègues de la région de l'Estrie qui me dit: C'est l'équivalent de tuer une vache sur deux. Alors, ça prend ces marchés-là, il faut ouvrir. Le Québec est une société, une nation qui exporte notamment dans les produits laitiers. C'est 6 milliards de dollars de produits agroalimentaires qui sont exportés à l'extérieur du Québec, alors c'est fondamental de pouvoir garder ça. Et d'ailleurs c'est sans doute pour ça que nos fédérations, par exemple la Fédération des producteurs de lait, ont une entente sur la mise en commun de tout le lait, la P5, qui regroupe quatre autres provinces: l'Ontario, le Nouveau-Brunswick, la Nouvelle-Écosse et l'Île-du-Prince-Édouard.

Alors, il y a des ententes comme ça qui ouvrent les marchés. Le consensus nous permet de protéger la gestion de l'offre.

Et il devrait savoir, mon collègue du Lac-Saint-Jean, parce qu'il a eu la chance d'étudier avec mon prédécesseur ou d'avoir comme prof mon prédécesseur, Benoît Pelletier, il devrait savoir parce qu'il a sans doute lu qu'au chapitre trois on réaffirme les pouvoirs et les responsabilités constitutionnels du Québec dans cet accord-là et on démontre clairement que nous gardons nos compétences, notre pouvoir de réglementer, M. le Président. Et je ne sais pas s'il le fait d'une façon volontaire ou pas, mais c'est là, c'est écrit et c'est faux de dire, M. le Président, que l'on a abdiqué nos pouvoirs de réglementation.

C'est complexe parfois, un accord de commerce intérieur. C'est simple de prendre des choses, des paragraphes à part et de les dire, mais, avec un petit peu de rigueur, je pense que, si on met tout ensemble, on se rend compte qu'on défend bien la gestion de l'offre au Québec avec cette entente-là...

n(11 heures)n

Le Président (M. Gaudreault): Merci.

M. Béchard: ...et surtout l'avenir de l'agriculture.

Le Président (M. Gaudreault): Merci. Alors, M. le député de Huntingdon.

M. Stéphane Billette

M. Billette: ...important, je vais poursuivre un petit peu, j'avais commencé tantôt la gestion de l'offre. Je pense que c'est un impact majeur ou un avantage majeur qu'avec... avoir un consensus pancanadien, à ce moment-là, pour aller défendre, et déposer, et dire notre mot dans le texte qui est présentement négocié.

En 2008, M. Falconer, le président de l'OMC, a déposé un texte. Ce qu'on retrouvait dans ce texte-là principalement, c'était la diminution d'environ 70 % des tarifs douaniers, donc l'ouverture des barrières entre les pays. Un yogourt pourrait rentrer ici à 0,50 $, un litre de lait, à 0,20 $. Je ne pense pas que perdre la gestion de l'offre, comme disait tantôt mon collègue, serait heureux. Oui, c'est... il faudrait tuer une vache sur deux, mais pensez aux agriculteurs qui ont investi. J'ai une ferme à côté de chez nous qui vient de se construire. Ils vont tirer 500 vaches. Imaginez l'investissement que ce producteur laitier là a fait, l'endettement pour pouvoir réaliser un projet. Donc, c'est laisser tomber tous ces producteurs-là, ne pas avoir de texte pour aller défendre la gestion de l'offre, à ce moment-là. Et on est à un point, je pense, très important. Au mois de décembre, à Genève va se tenir une rencontre. Et l'échéancier présentement: très, très, très serré et très rapide également. Les volontés de l'OMC, au moment où on se parle, c'est de convenir au premier trimestre de 2010 sur les différentes modalités pour l'agriculture et d'arriver à la fin de 2010 avec un accord qui va fonctionner ou un accord qui ne fonctionne pas, donc d'où l'urgence et l'importance d'avoir un consensus canadien pour aller défendre. Puis, je vais vous dire, Hong Kong regarde sur nous, les autres pays qui ont un système de gestion de l'offre s'appuient beaucoup sur le Canada pour aller les défendre.

Un Canada uni, fort va pouvoir aller défendre. Un Canada déchiré, on oublie ça, on laisse tomber tout le monde, à ce moment-là, et on laisse également tomber nos producteurs aussi bien d'oeufs, de volaille, de lait, ceux qui régissent sous la gestion de l'offre, à ce moment-là. Donc, c'est important, on est à un point majeur du tournant de l'agriculture, et... fait en sorte qu'en ayant un consensus comme ça... va nous permettre de faire des gains très, très, très importants pour l'agriculture québécoise.

Puis, en parlant d'agriculture québécoise, je pense que le système, le modèle de gestion de l'offre, il faut le souligner, apporte beaucoup au Québec. Si on a regardé l'association des acériculteurs, l'an dernier, qui ont mis également un système de gestion de l'offre, ça a été bénéfique pour l'industrie. On regarde la filière porcine que le gouvernement libéral a mise. Ils ont rencontré la Fédération des producteurs de porcs cette semaine. C'est un genre de système de gestion de l'offre également où on va régir, à ce moment-là, en ayant une offre, et une demande, qui va être équilibrée.

Donc, ce sont des principes, je pense, qui sont propres à l'industrie québécoise, à l'industrie québécoise des agriculteurs, qui fait en sorte qu'on a des produits de qualité en quantité suffisante et à un prix rentable au niveau des agriculteurs, à ce moment-là.

Nous, on est à un point tournant dans l'agriculture, puis, je pense, c'est ma dernière intervention, c'est important de le souligner à mon collègue le ministre. Je vais parler également comme agriculteur. Je pense qu'on est à un point où maintenant il va falloir regarder à l'avant l'agriculture, où on en est. Il y a plusieurs rapports qui ont été déposés. On a tous lu le rapport Pronovost, le rapport Ouimet. On a parlé également du rapport Saint-Pierre pour le dossier de La Financière. Oui, il est important, le dossier de La Financière également pour nos agriculteurs, dont j'en fais partie. On parle de difficultés, à ce moment-là, pour pouvoir... On a rencontré la Fédération des producteurs de porcs. Il y a d'autres produits également émergents qui aimeraient en avoir, La Financière.

Je vais vous dire, j'ai rencontré les agriculteurs chez nous, ils sont venus me rencontrer à mon bureau en délégation, des centaines, et je pense qu'on a eu un bon échange. Puis c'est important que des gens le sachent. Je pense que le gouvernement va devoir continuer. Puis je vais vous parler comme agriculteur, M. le Président: La Financière agricole, 305 millions, on oublie ça, ce n'est pas suffisant. Et je vais défendre, à ce moment-là, auprès de mon parti, auprès des instances gouvernementales, et on va sûrement avoir l'appui de nos collègues de l'opposition, des agriculteurs. Donc, 305 millions, on vise beaucoup plus, c'est un 600 millions qu'il faut. Il ne faut pas se le cacher, c'est là qu'il faut aller. Penser également à notre relève agricole, je pense, c'est important. D'acquérir une ferme, à moins que tes parents te donnent un coup de main, c'est de plus en plus difficile. J'ai eu la chance, moi, de l'avoir, un parent qui m'a transféré la ferme, à ce moment-là. Mais c'est difficile pour un jeune d'avoir le prix ou de pouvoir payer la juste valeur, à ce moment-là. Puis également il va être très important, ça va être de soutenir nos cultures émergentes.

Donc, l'agriculture en somme est à un point tournant, important. On parle de la gestion de l'offre. On parle également du renouvellement de La Financière, on parle du zonage agricole. C'est important, je pense, de travailler ensemble, de façon concertée, pour défendre nos dossiers de l'agriculture et que tout le monde pousse dans le même sens. Le prochain dossier, il est simple, c'est d'aller négocier notre gestion de l'offre. Il y a le renouvellement de La Financière et le zonage agricole. Et il va falloir planifier cette agriculture-là, ce qui est très, très important, où on va être dans 20 ans, 30 ans. Comme agriculteur, pour moi, et comme représentant également d'une circonscription probablement des plus agricoles au Québec, c'est très important.

On est à un point tournant, et il faut bien défendre notre agriculture et travailler ensemble. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le député. Alors, quatrième séquence de cette interpellation. Cinq minutes pour M. le député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier: Merci, M. le Président. Alors, le député de Huntingdon nous dit que l'agriculture est en train de faire un virage, mais le problème, M. le Président, c'est qu'on n'est pas en train de tourner du bon bord.

C'est drôle, mais, moi aussi... moi, je ne suis pas agriculteur, M. le Président, puis c'est vrai que j'ai une formation en droit constitutionnel, puis j'ai même remplacé M. Pelletier, quand il a quitté à l'Université d'Ottawa, comme chargé de cours, sauf que ce que j'ai fait avant de venir ici puis ce que j'ai fait dans les dernières semaines, c'est que j'ai parlé à mon monde de l'UPA, puis j'ai parlé à mon président régional, puis j'ai essayé de comprendre un peu quelles étaient les négociations sur l'Accord de commerce intérieur. Puis ce qu'eux me disent encore ce matin, là, juste avant de rentrer ici, là, c'est que le Québec va perdre des pouvoirs pour la mise en marché de ses produits, va perdre des pouvoirs pour la spécificité des aliments québécois, va perdre des pouvoirs pour la gestion de l'offre.

Tout à l'heure, on en a parlé, là, de la gestion de l'offre. Le ministre nous dit: Je mets au défi le député de Lac-Saint-Jean de nous sortir un article où le gouvernement s'engage par une clause béton. Alors, le ministre admet lui-même, admet lui-même que la clause en question, où on exclut...

Une voix: ...

Le Président (M. Gaudreault): ...tout à l'heure. Vous aurez du temps tout à l'heure, M. le ministre.

M. Béchard: ...je n'ai pas dit ça. On me prête des propos. Ce n'est pas ce que j'ai dit. Il le sait très bien. C'est sa tentative régulière. Je n'ai pas dit ça.

Le Président (M. Gaudreault): Écoutez, M. le ministre, le droit de parole est au député de Lac-Saint-Jean. Vous aurez encore deux droits de parole qui vont suivre, plus vos propos en conclusion, alors vous aurez l'occasion de corriger, si vous le voulez. Mais pour l'instant je donne... je demande au député de Lac-Saint-Jean de poursuivre.

M. Cloutier: En tout cas, peu importe, la clause de gestion de l'offre, là, ce qu'il faut retenir, là, c'est qu'elles peuvent être... les mesures techniques, là, il y a une exception à l'espèce de clause générale, c'est que ces clauses... ces mesures techniques là pourront être contestées devant les tribunaux. C'est ce que le ministre, à mon sens, a admis tout à l'heure. Il aura la chance de s'expliquer s'il pense le contraire.

Mais, ceci dit, en ce qui a trait aux règles d'étiquetage puis au normes de compositions des aliments, selon mes conversations que j'ai avec les gens de chez nous, c'est que, ces mesures-là aussi, le Québec perdrait, perdrait des pouvoirs. Les gens de chez nous m'expliquaient aussi qu'au Québec le lait se vend le même prix partout à travers le Québec, mais vous comprendrez que, quand on fait de la production de lait au Lac-Saint-Jean puis qu'on l'exporte à Saint-Hyacinthe, il y a des coûts qui sont reliés à ça puis que ces coûts-là sont protégés grâce à la gestion de l'offre.

Le gouvernement du Québec est en train d'abdiquer ces pouvoirs acquis à un tribunal, à un tribunal qui va gérer l'Accord de commerce intérieur. C'est le tribunal qui aura à interpréter, entre autres, l'article 2 et quelles sont les mesures techniques là. Ce sont des tribunaux qui auront à nous dire, bon, bien, finalement, c'était quoi, ces mesures-là. Et évidemment ces gens-là sont des gens non élus. Mais, plus important, M. le Président, là, comment se fait-il qu'on se ramasse, une fois que l'accord est signé par le gouvernement du Québec, dans une situation où il y a toujours autant d'ambiguïtés dans l'air? Comment se fait-il que ceux qui connaissent ça... Il me semble que ceux qui connaissent ça, l'agriculture au Québec, c'est les agriculteurs. Il me semble que ça aurait été les premières personnes qui auraient dû être consultées. Comment se fait-il, lorsqu'on a tendu la main au gouvernement, qu'on a dit: On va faire une commission parlementaire à l'Assemblée nationale, on va entendre qu'est-ce que les gens ont à dire, on va entendre qu'est-ce que le milieu a à nous dire puis on va prendre les suggestions puis, à partir de ces suggestions-là, on va bonifier l'accord?

Comment se fait-il qu'on a boycotté toute procédure d'échange avec le milieu? Comment ça se fait qu'on a fait ça derrière des portes fermées? Comment ça se fait qu'on a négocié durant l'été avec le Conseil de la fédération au mois d'août, que l'UPA était plus ou moins informée des négociations qui allaient avoir lieu? Comment se fait-il qu'on n'a pas eu accès à l'accord en soi durant les négociations ou au moins, grosso modo, ce qui était en train d'être négocié? Comment se fait-il qu'on a fait ça derrière des portes closes?

n(11 h 10)n

Je pense que c'est assez élémentaire en matière de communications. M. le Président, quand il manque de communication, bien ça amène nécessairement des inquiétudes, et c'est exactement dans cette situation-là que le gouvernement nous a volontairement placés. Parce qu'en bout de course qu'est-ce qu'il y a derrière ça, M. le Président? À mon sens, là, ce n'est rien d'autre que de la stratégie politique. On s'est dit: Le milieu, s'il est informé réellement de ce qui est en train d'être négocié, le milieu va être contre. Alors, la meilleure façon de ne pas créer d'incertitude et de ne pas diviser le milieu: Négocions entre nous, négocions derrière des portes closes, nous avons le monopole de la vérité, et, lorsque l'accord sera signé, lorsque l'accord sera signé, bien là les gens en prendront acte puis là s'exprimeront. Bien, c'est exactement dans cette situation-là qu'on a placé les agriculteurs du Québec. Puis, moi, comme député de Lac-Saint-Jean, où, sur mon territoire, les gens vivent d'agriculture, je peux vous dire que ce n'est certainement pas la façon de procéder que les agriculteurs s'attendent de leur gouvernement.

Alors, comme ministre des Affaires intergouvernementales et comme ministre de l'Agriculture, non seulement il laisse aller les pouvoirs du Québec, mais en plus il ne défend pas les agriculteurs.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le député. Alors, pour cinq minutes, M. le ministre.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, je comprends par son emportement que la cause est moins bonne qu'il pensait, M. le Président, parce qu'il le sait, je l'ai invité à le lire, le chapitre trois réaffirme les pouvoirs et les responsabilités constitutionnels. Je vais lui relire: «Le présent accord ne modifie pas les compétences législatives ou autres du Parlement fédéral, des législatures provinciales, ni les compétences du gouvernement du Canada ou des gouvernements provinciaux, ni leurs droits en ce qui a trait à l'exercice des compétences législatives ou autres qui leur sont conférées par la Constitution du Canada.»

Je ne sais dans quelle langue je dois lui dire pour qu'il comprenne. D'où vient le problème de l'incertitude? Il vient justement du fait que, correctement, c'est leur rôle dans l'opposition de vouloir le faire, d'alimenter ces inquiétudes-là puis cette incertitude-là. Je ne peux pas accepter qu'il vienne nous dire qu'on parle derrière des portes closes, là. On a rencontré les agriculteurs, on leur a parlé, l'UPA, d'autres agriculteurs aussi, je les ai rencontrés dans mon comté aussi, expliqué tout ça. Et, moi, ma définition de «portes closes», c'est que, quand quelqu'un va rencontrer, par exemple, la FTQ, qu'ils ferment les portes...

Une voix: ...

M. Béchard: ...que c'est un huis clos puis qu'il ressort puis il dit d'autre chose, ça, c'est une forme de portes closes. Je pense sincèrement que c'est pas mal la nouvelle définition de «portes closes». Tu sais, tu t'en vas à la FTQ, tu dis: Ah, juste deux, trois, inquiétez-vous pas, là, inquiétez-vous pas. Là, tu sors de là, tu déchires ta chemise puis tu traites tout le monde de voleur puis de bandit au Québec. Ça, c'est...

Le Président (M. Gaudreault): M. le ministre...

M. Béchard: ...une différence entre «portes closes», et autres.

Le Président (M. Gaudreault): ...je vous demande de rester sur le sujet et de faire attention aux propos.

M. Béchard: Je suis pas mal dessus, je suis dans la définition de «portes closes», M. le Président.

Des voix: Ha, ha, ha!

Le Président (M. Gaudreault): Oui, mais on est à une interpellation sur l'agriculture, alors je vous demande de revenir sur le sujet, s'il vous plaît.

M. Béchard: On va revenir. Mais, M. le Président, je le répète et je le dis, les règles, on n'a pas abdiqué notre pouvoir de réglementer, notre pouvoir d'étiquetage, notre pouvoir de définir ce qui doit entrer dans les ingrédients ou pas.

Il donnait l'exemple du transport du lait. Le transport du lait, là, est-ce qu'il sait, par exemple, qu'avec la nouvelle entente avec l'Ontario il est possible... une entente signée par la Fédération des producteurs de lait, qu'il est possible que du lait du Québec parte pour aller se faire transformer en Ontario? Est-ce qu'il sait ça? C'est une des choses qui a été négociée et qui peut arriver. Alors, ça fait partie des choses que, par exemple, la Fédération des producteurs de lait a négociées. C'est une des raisons qui fait en sorte, par exemple, qu'il n'y a pas ou peu de transformation du lait au Saguenay, au Lac-Saint-Jean, qu'il y en a peu ou pas dans le Bas-Saint-Laurent. Alors, ce sont des ententes que les fédérations ont signées entre eux.

L'autre chose. Je lui avais demandé, et c'est pour ça que je suis intervenu tantôt, de dire un seul accord de commerce intérieur ou de commerce international dans lequel on enlève dans une clause le pouvoir de l'une des deux parties ou des parties concernées directement ou indirectement de pouvoir se faire entendre et de contester une réglementation. Ça existe dans toutes les ententes, M. le Président. Alors, c'est sûr que, si on se sert de cet angle-là pour venir dire: Bien, écoutez, tout ce qu'on peut mettre en place peut être contesté, c'est ça, tout peut être contesté, je n'ai pas une grosse révélation à lui faire, il le sait. Ils le savent, en face, ça fait trois semaines, un mois qu'ils prennent cet angle-là pour inquiéter les gens, mais, je le répète, on va se défendre.

Une voix: ...

M. Béchard: On va défendre...

Une voix: ...

M. Béchard: On va défendre...

Une voix: ...

M. Béchard: Ce n'est pas indigne.

Le Président (M. Gaudreault): Parfait. Merci, Mme la députée. Je vous demande de faire attention.

M. Béchard: Oui. Mais on ne peut pas, M. le Président, se servir de ça pour venir tenter de mettre de l'inquiétude puis de l'incertitude.

Mais je veux revenir, M. le Président, sur ce qu'a dit mon collègue, parce que... mon collègue de Huntingdon, parce qu'effectivement il y a beaucoup de choses importantes qui s'en viennent en agriculture.

D'abord, au niveau de la Financière agricole, c'est un dossier qu'on a promis de régler cet automne et c'est un dossier qu'on va régler cet automne. Je comprends bien les demandes des agriculteurs, de l'UPA, entre autres, sur le montant. On parle de 650 millions. On ne fera pas d'annonce ce matin, mais je peux vous dire que nous sommes dans les temps et que les objectifs soulevés par mon collègue de Huntingdon sont les bons, c'est-à-dire, oui, de protéger les cultures, d'assurer un revenu aux agriculteurs mais aussi de permettre le développement de nouveaux secteurs, de nouvelles productions, de les protéger aussi et également, parce que, moi aussi, ça me tient beaucoup à coeur, de nous assurer de permettre, par des outils reliés à La Financière agricole, des outils pour permettre le transfert des fermes. Et, moi, j'y crois beaucoup parce que nous sommes présentement, entre autres, grâce à la gestion de l'offre, face à des industries, des entreprises qui valent plusieurs millions de dollars, et ce n'est pas vrai que ça se transfère comme ça sur le coin d'une table.

Alors, je veux des outils, et nous allons avoir des outils dans La Financière agricole pour ces trois éléments-là. Merci.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Gaspé, cinq minutes.

M. Georges Mamelonet

M. Mamelonet: Merci, M. le Président. J'aimerais simplement revenir un petit peu sur les propos du député de Lac-Saint-Jean au niveau du communiqué de presse.

Écoutez, on s'est basé sur un communiqué de presse pour obtenir un avis légal. Ce communiqué de presse est terminé. On a un accord qui a été signé, un accord qui entérine de façon significative la défense de la gestion de l'offre, des offices de commercialisation à l'intérieur des accords de commerce intérieur du Canada. Ça nous permet aussi d'entrevoir l'avenir avec beaucoup plus, je dirais, de couleur dans la mesure où le Canada sera là pour défendre, d'une voix très nette et très forte, ces principes, ces principes essentiels à l'agriculture québécoise, gestion de l'offre et offices de commercialisation, au niveau de l'office mondial du commerce. Maintenant, je pense qu'il est important aussi. Et je crois que les propos qu'on tient en fait dans cette interpellation se devraient, je dirais, se devraient d'être rassurants pour l'ensemble de nos communautés d'agriculteurs et les orienter, savoir un petit peu où est-ce qu'on s'en va, où est-ce que le gouvernement s'en va, où est-ce que l'opposition est capable d'aider le gouvernement à évoluer dans les changements que l'agriculture québécoise se doit d'attendre pour le futur, comment est-ce qu'on va évoluer, comment est-ce qu'on va faire.

En 2006, une commission sur l'avenir de l'agriculture a été mise en place et cette commission-là a tiré certaines conclusions, des conclusions qui se sont, je dirais, confortées après ça, M. le Président, par le rapport Pronovost et les deux autres rapports, Ouimet et Saint-Pierre, qui ont été déposés récemment.

L'agriculture est à un tournant, je pense, de son évolution. On a des façons de faire qui sont en place depuis 40, 50 ans, on regarde l'agriculture québécoise évoluer, et surtout, je dirais, l'agriculture est évidemment destinée à un marché de consommation, et je crois qu'il faut regarder de quelle façon les consommateurs évoluent, de quelle façon l'offre et les besoins des consommateurs... l'offre qu'on fait aux consommateurs et les besoins des consommateurs puissent rentrer en adéquation et puissent rentrer en adéquation avec le monde. L'évolution de l'agriculture au Québec aussi doit se faire nécessairement, nécessairement par l'ouverture de marchés extérieurs. Ne pas oublier qu'au Québec on est simplement 7 millions. On parlait tout à l'heure, évidemment, de l'ensemble des chiffres qui sont reliés aux produits qui sont protégés par nos programmes de gestion de l'offre. Alors, on remarque très facilement que le Québec est un exportateur majeur: 2,6 milliards de consommation au Québec, 6 milliards d'exportations.

Le Québec est aussi un leader en termes de produits agroalimentaires. Le Québec est le leader nord-américain des fromages en particulier, des fromages de qualité. Le Québec est un leader en gastronomie, je dirais, et j'en sais quelque chose comme propriétaire de restaurant, et c'est un domaine, je dirais, où les évolutions se doivent d'être faites de façon assez rapide. L'accord du 15 octobre, lui, il signe et il scelle deux piliers importants de l'agriculture québécoise et canadienne. Il est essentiel que les agriculteurs puissent le comprendre aujourd'hui, M. le Président: la gestion de l'offre, les offices de commercialisation sont scellés. On parle évidemment de la possibilité toujours évidente de pouvoir contester, mais ça, ce sont des points de vue légaux. Il faut donc faire autrement, M. le Président. Il faut donc faire en sorte que les choses changent pour nos agriculteurs et qu'on puisse les accompagner dans ces changements-là.

Les enjeux changent, les consommateurs changent, les consommateurs évoluent, la consommation de produits agroalimentaires évolue également. Le Québec est en... et je le disais tout à l'heure, est un leader dans ce domaine-là, le Québec est en avance dans ce domaine-là. On parlait de traçabilité tout à l'heure. Ce sont les exemples québécois de traçabilité qui sont utilisés par le Canada pour pouvoir répandre la traçabilité à la grandeur du Canada. Et je dirais, M. le Président, qu'il est essentiel de rassurer nos agriculteurs, notre population dans la mesure où les orientations que le gouvernement prend dès aujourd'hui et les orientations qui sont... je dirais, qui originent des différents rapports des différentes commissions, de l'ensemble des gens qui ont été entendus à travers ces commissions-là, nous amènent vers une modification profonde de la loi sur le... de la loi agricole, donc l'intégration, je dirais, de toutes les lois qui régissent le marché agricole, à l'heure actuelle, l'intégration de ces lois-là, donc la Loi sur la protection du territoire agricole, la Loi sur la mise en marché des produits, la Loi sur... les différentes lois sur l'agriculture, les différentes lois sur la production, les productions agricoles.

Donc, je dirais qu'il faut rassurer nos agriculteurs dans la mesure où on leur dit: Le gouvernement est conscient de vos difficultés, le gouvernement est conscient des enjeux qui sont à l'heure actuelle sur la table, et il est essentiel qu'on puisse travailler tous ensemble, l'ensemble des unions agricoles. Et je dirais qu'il n'y a pas simplement l'UPA, mais aussi il y a l'Union paysanne, il y a d'autres organisations. Il est essentiel qu'on puisse travailler tous ensemble pour faire évoluer ce monde de l'agriculture et que le Québec puisse garder...

n(11 h 20)n

Le Président (M. Gaudreault): Merci.

M. Mamelonet: ...actuellement son leadership.

Le Président (M. Gaudreault): Merci beaucoup, M. le député de Gaspé. Alors, je redonne la parole pour cinq minutes au député de Lac-Saint-Jean.

M. Alexandre Cloutier

M. Cloutier: Merci, M. le Président. Alors, le ministre a terminé son allocution en nous disant qu'il ne fallait pas s'en faire parce que tout le monde avait été consulté, les gens de l'UPA avaient été consultés. On n'a pas... Il a beurré large, là, en disant que, semble-t-il, pour lui, les consultations avaient été suffisantes.

Alors, comment se fait-il que «M. Lacasse a dénoncé le manque de transparence entourant les négociations du volet de l'Accord de commerce intérieur, affirmant qu'aucune consultation officielle n'est prévue pour connaître les impacts d'éventuelles modifications de l'accord, en vigueur depuis 1995»?

«On demande au gouvernement de la transparence, qu'on ait de l'information, qu'on fournisse des études pour qu'on soit en mesure d'être consultés.»

Communiqué de presse émis par l'UPA le 16 octobre 2009, c'est assez récent, 16 octobre 2009. Alors: «"Les ministres du Commerce, hier à Whitehorse, ont ajouté l'insulte à l'injure en acceptant de rencontrer sur place une délégation de la Fédération canadienne de l'entreprise indépendante alors que la Fédération canadienne de l'agriculture, qui représente plus de 200 000 agriculteurs canadiens ? il me semble, ça fait du monde, ça ? a essuyé [elle] une fin de non-recevoir."»

C'est-u ça, de la transparence puis l'écoute du milieu de l'agriculture, M. le Président?

L'autre chose que je m'explique mal... Il me semble que, quand tu es ministre de l'Agriculture, ton rôle, c'est de représenter le monde agricole puis de les défendre. À ce que je sache, il n'y a pas urgence. Elle est où, là, l'urgence, là, de procéder, là, à la signature puis que tout doit se régler, là, cet automne? Comment se fait-il que vous avez... vous n'êtes pas engagés dans une démarche de collaboration, dans une démarche de bonne entente avec le milieu? Comment se fait-il que vous avez décidé de rejeter du revers de la main l'idée d'avoir une commission parlementaire, hein, la Commission sur l'agriculture? Il me semble que ça aurait été à propos que ça se passe là, puis qu'on entende des agriculteurs, puis que les gens viennent nous exprimer leurs craintes. Puis ensuite, bien, tu as des experts du gouvernement, des avocats puis des hauts fonctionnaires qui viennent répondre aux questions. Puis ensuite, bien, suite à cet exercice-là, il me semble que la situation aurait été clarifiée. Là, on a choisi la méthode de force, on a choisi l'imposition. On se souviendra que le ministre des Affaires inter a un passé en ce qui a trait aux mandats qu'il reçoit des premiers ministres. On l'a vu aller dans le dossier du Mont-Orford, on l'a vu aller dans le dossier du nouveau régime forestier. Puis là maintenant c'est l'Accord sur le commerce intérieur, là, qu'il veut imposer aux agriculteurs.

Malheureusement, ce manque de transparence là contribue à cette situation qu'on est en train de vivre, une situation où clairement il y a des questions qui se posent.

M. le Président, encore une fois, là, je vais me fier aux gens qui connaissent ça mieux que moi, le 14 octobre, une lettre publiée qui s'intitule Québec se prépare à vendre son âme aux industriels! Bon, la lettre est signée par qui? Marcel Groleau, président de la Fédération de producteurs de lait; Christian Lacasse, président de l'UPA; François Décary... Gilardeau, pardon, Option Consommateurs. Bon, je me dis que c'est gens-là doivent savoir de quoi ils parlent. Ils écrivent que «les aliments québécois répondent déjà à des normes et des exigences bien supérieures à celles qu'on retrouvent ailleurs en Amérique du Nord. Les nouvelles dispositions, quant à elles, permettent à des aliments hors Québec ne respectant pas les normes québécoises d'apparaître sur nos tablettes d'épicerie. Ce serait l'ère du n'importe quoi alimentaire. Est-ce vraiment le Québec que nous voulons dans [nos assiettes]?»

M. le Président, je pourrait continuer, là, avec un autre article qui s'appelle Le Québec capitule; un autre, c'est le 7 octobre, La grogne s'amplifie. À un moment donné, il me semble, M. le Président, là, c'est qu'on doit écouter le milieu, on doit écouter les gens qu'on représente. On le voit bien aussi dans le dossier aussi de la commission d'enquête publique, là, il y a 80 % des Québécois qui dit au gouvernement...

Une voix: ...

M. Cloutier: ...qui dit au gouvernement que vous devez...

Une voix: ...

M. Cloutier: Eh, M. le Président, j'ai le droit d'élargir quand même, là.

Le Président (M. Gaudreault): Oui, mais je vous demande d'élargir rapidement et revenir sur le sujet.

M. Cloutier: ...le Président...

Le Président (M. Gaudreault): Bien, c'est... comme vous avez élargi rapidement tout à l'heure, alors je vous demande de vous en tenir au sujet de...

M. Cloutier: Bon, bien, je vais...

Le Président (M. Gaudreault): ...du chapitre agricole.

M. Cloutier: Le sujet là, le sujet c'est que le gouvernement, le gouvernement ne respecte pas la volonté du peuple québécois dans le dossier de l'enquête publique tout comme il ne respecte pas la volonté des agriculteurs dans le dossier sur l'Accord de commerce intérieur. Alors, j'invite le ministre qui représente les agriculteurs au Québec et l'ensemble de l'industrie agroalimentaire à faire preuve de plus d'écoute, de plus de transparence et à répondre aux interrogations des agriculteurs.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le député de Lac-Saint-Jean. Alors, pour cinq minutes, M. le ministre.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président. M. le Président, ça me fait un grand plaisir. Ça fait une heure et demie qu'on répond aux questions, aux attentes. On peut continuer pendant encore longtemps, je n'ai aucun problème avec ça, M. le Président, et on va tout faire pour rassurer et éteindre chacun des feux que mon ami d'en face aime bien allumer, M. le Président. On va tous les éteindre, mais...

Une voix: ...

M. Béchard: Je l'invite à faire attention à ce...

Le Président (M. Gaudreault): Il faudrait que le président consente aussi, je vais vous dire bien franchement.

Des voix: Ha, ha, ha!

M. Béchard: M. le Président, je ne veux pas...

Le Président (M. Gaudreault): Alors, je vous invite, pour l'instant...

M. Béchard: ...je ne veux pas vous mettre...

Le Président (M. Gaudreault): On va prendre cinq minutes par cinq minutes. M. le ministre.

M. Béchard: ...je ne veux pas vous mettre dans l'embarras, mais je comprends que vous ne retournez pas au Saguenay?Lac-Saint-Jean ensemble.

Alors, je veux, M. le Président, revenir sur deux, trois points qui ont été soulevés par mon collègue et aussi par mon collège adjoint parlementaire et quasi-ministre des Pêches, le député de Gaspé. Je veux...

D'abord, sur l'élément d'urgence, oui, dans ce cas-là, je crois sincèrement qu'il y a urgence, oui, parce que nous sentions, nous avons senti qu'il y avait, chez nos collègues des autres provinces, notamment dans l'Ouest, beaucoup, beaucoup de questionnements sur leur position face à la défense de la gestion de l'offre et nous avons senti très clairement que cette position-là risquait, notamment chez certaines provinces, de changer. Et la question, même si les gens d'en face ont le droit de ne pas nous croire ou quoi que ce soit, c'est de savoir est-ce que le consensus des premiers ministres des provinces pouvait tenir encore longtemps. Le sentiment que nous avions, c'est que ça ne pouvait pas durer encore très longtemps. Premier élément d'urgence.

Deuxième élément d'urgence: il y a, en décembre prochain, des discussions face à la gestion de l'offre, sur la gestion de l'offre à l'OMC. Je l'ai mentionné, c'est dans la première semaine de décembre, en même temps que le congrès de l'UPA. Alors, on va savoir où on va décider d'être à ce moment-là. Mais il y a urgence, oui, parce que d'arriver à ces négociations-là sans une position forte des provinces derrière la gestion de l'offre, derrière les offices de commercialisation, la mise en marché commune, c'est un danger qui est réel, et ? mon collègue et prédécesseur me racontait l'historique des deux dernières séances, je l'ai vécu aussi ? si on n'est pas tous ensemble, si on ne sert pas la position canadienne tous ensemble, il risque d'arriver dans ce dossier-là la même chose qui arrive, par exemple, dans le dossier environnemental, où le gouvernement fédéral, vu qu'il n'y a pas de position claire des provinces, décide de prendre une des positions qui fait son affaire, et ça pourrait ne pas être celle du Québec.

Quand il revient sur l'élément consultation officielle, bien franchement, M. le Président, là, sur ce dossier-là, il y a eu, depuis des mois et des mois, des consultations régulières, des discussions régulières, des consultations, des échanges. Mais à la fin, M. le Président, il faut être bien clair sur une chose: Le rôle du gouvernement, c'est quoi? C'est aussi de décider. C'est aussi qu'à un moment donné tu as entendu tout le monde, tu as entendu les positions de tous, puis il faut quelque part prendre des décisions pour le meilleur intérêt, dans ce cas-ci, du secteur agroalimentaire et de l'agriculture au Québec, et c'est ce que nous avons fait.

Et, sincèrement, moi, je crois que nous avons pris la bonne décision, parce que sinon c'est l'ensemble de la gestion de l'offre au Québec qui risquait d'être menacé. Et, je l'ai dit tantôt, les implications dans le secteur laitier, on peut en parler dans d'autres domaines, mais c'était extrêmement important et dramatique.

Pour revenir aux propos de mon collègue député de Gaspé, adjoint parlementaire et quasi-ministre des Pêches, je veux amener un point qui est bien important, puis c'était dans La Terre de chez nous... la chance de donner une entrevue la semaine dernière à La Terre de chez nous, tout ce qui concerne la modernisation des lois agricoles et de la loi agricole, on parle des suites de plusieurs rapports. On a eu le rapport Pronovost, le rapport Saint-Pierre, le rapport Ouimet, et là, sincèrement, je l'ai dit et je le répète, je crois que nous avons une opportunité unique de façonner l'agriculture pour les 25, 30 prochaines années au Québec, et, M. le Président, je vous dis: On va le faire. Et on a de beaux scénarios. Ce n'est pas juste une politique agricole, mais c'est vraiment de façonner les lois, le secteur agricole pour les prochaines années.

Un point sur lequel je veux terminer en conclusion. Quand mon collègue de Gaspé parlait de l'exemple des fromages, fromagers... et c'est le cas dans plusieurs de nos produits agricoles au Québec, nous sommes une société d'exportation, nous vivons dans un marché de 33 millions de Canadiens et nous sommes les voisins de 250 millions de personnes, il faut faire connaître nos produits, il faut exporter. L'avenir de l'agriculture, oui, est au Québec mais est aussi au Canada et aux États-Unis, et il n'y a aucune raison pour faire en sorte que le Québec ne devienne pas, par exemple, dans le secteur des fromages, mais le secteur des boissons alcoolisées aussi, une référence et vraiment, là, la France de l'Amérique du Nord...

n(11 h 30)n

Le Président (M. Gaudreault): Oh, terminé, M. le...

M. Béchard: ...dans l'exportation de ce qu'on fait et dans la place qu'on va prendre sur les marchés canadien et nord-américain.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le ministre. Alors, M. le député de Huntington, pour cinq minutes.

M. Stéphane Billette

M. Billette: Merci beaucoup, M. le Président. Je pense que le mot «urgence», également qu'«il n'y avait pas urgence» m'ont fait sursauter également, tout comme le ministre, à ce moment là.

Je l'ai dit précédemment, je pense que c'est très important d'écouter, en décembre, il y a une rencontre de l'OMC où le Canada devra déposer un texte. Et l'échéancier de l'OMC est clair: à la fin de 2010, ils veulent qu'il y ait une entente signée ou non, mais qu'il y ait un texte qui soit affirmé. Donc, il est important. Puis Stockwell Day l'a dit, excusez... on peut... Le ministre des Affaires... du Commerce international, à la Chambre des communes, lors d'une commission du 8 octobre dernier, il l'a bien dit. Et maintenant il y a une position forte pour aller le défendre. Puis c'est ça qui est important puis c'est ça qui ressort de l'Accord de commerce intérieur qu'on a signé. Les textes... le texte est clair. Il n'acceptera pas de dispositions qui ne protégeront pas la gestion de l'offre, donc notre système québécois qui représente plus que 40 % de nos produits agricoles ici, au Québec.

Je pense que l'article 902, M. le Président, de l'Accord de commerce intérieur est très important. Je vais vous en lire ? ça va mettre, je pense, en place plusieurs propos qui ont été tenus: «Il est attendu qu'aucune disposition du présent chapitre ne doit être interprétée de façon à empêcher une partie d'adopter ou de maintenir en vigueur des mesures relatives aux systèmes de gestion de l'offre réglementés par les gouvernements fédéral et provinciaux et aux offices de commercialisation régis par les gouvernements provinciaux...» Donc, ça n'inclut pas du tout au niveau de la gestion de l'offre, à ce moment-là, mais ça va beaucoup aider au niveau de la gestion de l'offre.

On sort beaucoup de textes tantôt de l'UPA. Je pense que le monde agricole est beaucoup plus large également, je pense que c'est important. J'en ai un également, un syndicat affilié, la Fédération de producteurs de lait, un document que j'ai ici en ma main: «Le Canada supporté par les provinces ? on a 10 provinces et trois territoires ? doit devenir le promoteur de l'exception agricole et de la souveraineté alimentaire ? "souveraineté", c'est un mot que vous connaissez bien, on la perd avec la gestion de l'offre, malheureusement, si on perd la gestion de l'offre ? auprès des pays de l'OMC.» On ne peut pas avoir une position plus claire que ça. Jean Brodeur, dans un article de La Presse qui est sorti au mois de... le 16 octobre 2009, Jean Brodeur, porte-parole d'Agropur... Qu'est-ce qu'Agropur? C'est le modèle coopératif au Québec, c'est 3 000 producteurs qui se sont regroupés ensemble, producteurs laitiers, pour faire en sorte qu'on ait une industrie de transformation forte et bien représentée au Québec. «Coopérative [...] ? comme j'ai dit ? Agropur transforme le lait du Québec en yogourts et en fromages de marques aussi connues que Sealtest, Oka et Yoplait.» Il y a bien des joueurs, comme vous dites tantôt, qui sont interpellés. Vous avez parlé de l'industrie de la transformation. Je pense qu'Agropur, c'est le joueur majeur au Québec.

«Pour les producteurs québécois, la condition essentielle pour profiter de ce plus grand marché est l'adoption de normes de qualité élevées et non l'inverse.» Donc, on voit... Et, Claude Garcia, maintenant, de la chaîne Argent, je pense qu'il a fait une bonne réflexion, il a bien évalué et regardé plus loin que le bout des souliers, regardé en avant ce que l'accord était pour apporter au Canada: «...les dispositions qui portent sur le ? je cite son texte ? règlement des différends pour mettre en échec la politique de gestion de l'offre. La gestion de l'offre pour les produits laitiers, le poulet et les oeufs est partie intégrante de la politique agricole canadienne et le Canada la défend avec vigueur dans les négociations internationales sur l'ouverture du commerce international.»

Et, l'important, je le citais tantôt, encore de M. Garcia: «La position que défend l'UPA dans ce dossier n'est pas à l'avantage du développement de l'industrie agroalimentaire québécoise et nuit à l'émergence de la relève agricole. Voici pourquoi.» Ce n'est pas mes termes. Je suis membre également de l'Union des producteurs agricoles, je cite ce que M. Garcia a apporté à ce niveau-là.

Donc, on voit... On parlait beaucoup des gens qui sont contre, tantôt je pourrais vous en lister beaucoup d'autres. Malheureusement, le temps nous resserre. Puis, M. le ministre, je vais vous dire en terminant: J'ai été très heureux de... vous êtes à l'écoute des propos des producteurs.

Une voix: ...

M. Billette: M. le Président, peut-être mentionner à M. le ministre: J'étais très heureux de voir tantôt que M. le ministre a bien pris note de mes préoccupations au niveau de La Financière agricole et je suis convaincu que mon collègue ministre saura y répondre de façon aussi bien que le portrait agricole devra se porter dans les prochaines années. Merci beaucoup, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Merci beaucoup, M. le député de Huntingdon. Alors, considérant qu'il n'y a pas d'intervention du député du deuxième groupe d'opposition et qu'il nous reste encore un peu de temps jusqu'à 11 h 40, tel que convenu lors des règles de procédure, on va... j'accorde pour trois minutes la parole au député d'Iberville... à la députée d'Iberville.

Mme Marie Bouillé

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. Je vais me servir de ce droit de parole pour certaines répliques aux allégations de la partie gouvernementale.

Je vais commencer avec les propos que le député de Huntingdon vient de tenir il y a à peine quelques minutes. Ce serait intéressant qu'il... Je vais vous lire le texte au complet, qu'il a escamoté il y a quelques minutes, de l'article 902. Malheureusement, le député de Huntingdon a arrêté où ça faisait son affaire.

«Il est entendu qu'aucune disposition du présent chapitre ne doit être interprétée de façon à empêcher une partie d'adopter ou de maintenir en vigueur des mesures relatives aux systèmes de gestion de l'offre réglementés par les gouvernements fédéral et provinciaux et aux offices de commercialisation régis par les gouvernements provinciaux...» Il s'est arrêté là, mais ce n'est pas ça, le texte. Le texte dit: «...qui ne sont pas des mesures techniques ? ah. Sont notamment visées par les mesures concernant le droit d'investir dans la production», et là on continue, la volaille, les oeufs, le lait et produits laitiers. Il a omis ça. Et il n'a pas parlé de l'article 903, parce que, là, on va embarquer sur du détail technique mais qui est de haute importance, M. le Président. L'étendue des obligations, ça non plus, la partie gouvernementale n'en parle pas. «Aux termes de l'article 102 ? Étendue des obligations ? il incombe à chaque partie de veiller au respect du présent chapitre par ses autres organismes gouvernementaux, dont les sociétés d'État, et par les organismes non gouvernementaux exerçant les pouvoirs que leur confère la loi.»

Mais on énerve le monde, ah oui, quand on parle de la Régie des marchés agricoles, de ses pouvoirs. Pourquoi il ne nous parle pas de l'article 903, que c'est... ça se trouve à être la régie qui devra donc respecter et faire respecter l'accord? Mais, ça, on n'en parle pas, de l'autre côté.

D'autre part, et peut-être que le député de Huntingdon a oublié ses... je ne sais pas trop, mais tantôt... Ou c'était peut-être un lapsus. Mais, un lapsus, il y a toujours quelque chose en arrière, à ce qu'a dit Freud. Il a dit: On ouvre aussi... Je vais vous dire, prochaine étape, négocier la gestion de l'offre, prochaine étape, négocier la gestion de l'offre. J'espère que ce n'est pas ça qu'il voulait dire. Il revérifiera dans les galées parce qu'il a dit ça tantôt. Donc, si la prochaine étape, c'est négocier la gestion de l'offre, on est drôlement inquiet.

D'autre part, quand on parle de... Je ne suis pas une experte en économie, mais j'en sais quand même un petit peu. L'exportation, on est déficitaires dans notre balance commerciale, M. le Président, depuis des années. En 2008, on est déficitaires, dans le secteur bioalimentaire, entre le Québec puis les autres provinces, de 770 millions. On exporte moins qu'on importe. Donc, voilà. D'autre part, on fait le commerce nord-sud, c'est là qu'est le commerce, qu'est le commerce avec les Américains.

Le Président (M. Gaudreault): Merci.

Mme Bouillé: Donc, on commerce surtout avec les Américains, c'est là que se fait le commerce. Voilà.

Conclusions

Le Président (M. Gaudreault): Merci. Merci, Mme la députée...

Une voix: ...

Le Président (M. Gaudreault): Merci, Mme la députée d'Iberville.

Une voix: ...

n(11 h 40)n

Le Président (M. Gaudreault): Merci. Merci, merci. Alors, pour les remarques de conclusion, nous allons commencer avec le ministre pour une durée de 10 minutes.

M. Claude Béchard

M. Béchard: Oui. Merci, M. le Président.

Je veux remercier ma collègue d'en face pour ses derniers propos; c'est exactement ça: il faut exporter davantage, il faut en faire davantage. Il faut faire en sorte que nos produits, que les produits québécois se retrouvent encore plus dans l'assiette des Canadiens, encore plus aux États-Unis. C'est ça qui va permettre le développement de l'agriculture. Juste dans le secteur laitier, c'est 50 % qui est exporté à l'extérieur du Québec.

Autre chose, juste encore une fois on voit des fois... mon collègue a bien présenté le fait qu'il y avait urgence parce qu'il fallait protéger la gestion de l'offre dans la négociation qui s'en vient à l'OMC. C'est exactement ce que mon collègue de Huntingdon a défendu et c'est exactement ce qu'on défend. C'est exactement pour ça qu'il y a urgence. Mais, M. le Président, ça fait 14 ans que l'Accord sur le commerce intérieur est en vigueur et que le Québec poursuit ses interventions pour permettre aux entreprises agricoles et agroalimentaires de se développer dans un environnement d'affaires propice à fournir des produits de qualité pour les consommateurs.

Depuis 14 ans, cet accord reconnaît que les signataires, dont le Québec, peuvent prendre des mesures visant notamment la protection des consommateurs, et ça va se poursuivre. Depuis 14 ans, l'Accord sur le commerce intérieur réaffirme les pouvoirs et les responsabilités constitutionnels des gouvernements. Ainsi, le Québec et les autres signataires gardent leur liberté de choisir leurs politiques, et ça se poursuit. L'accord initial comportait un engagement de réviser le chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires. Le résultat de cette révision converge avec les priorités du Québec visant l'élargissement de l'espace économique dans lequel nos entreprises évoluent. La mise en oeuvre de l'ACI fait partie des grands chantiers qui ont été identifiés pour réaliser cet espace. Pour les secteurs agricole et agroalimentaire, l'ouverture des marchés interprovinciaux est particulièrement importante, car ces marchés représentent des ventes actuellement qui avoisinent les 6 milliards de dollars, incluant les produits sous gestion de l'offre. Ces ventes contribuent de façon importante aux revenus des producteurs agricoles québécois.

Les travaux de révision du chapitre sur les produits agricoles et les produits alimentaires durent depuis toutes ces années. Dans le cadre de ces travaux, nous avons rencontré les producteurs agricoles à plusieurs reprises, nous avons écouté, nous avons pris en considération leurs commentaires et suggestions. À la fin, le rôle du gouvernement est de prendre une décision dans l'intérêt de l'ensemble des producteurs mais aussi de l'ensemble de la population québécoise, et c'est ce que nous avons fait.

Je veux réitérer qu'il est faux de prétendre que le Québec a abdiqué à ses pouvoirs constitutionnels. Au contraire, le Québec conserve sa capacité à adopter des mesures qui visent notamment la production du consommateur par des règles relatives à la composition et à l'étiquetage des aliments. L'objectif d'un accord comme l'ACI n'est pas d'enlever toute possibilité de contester les mesures en place mais de prévoir un espace pour aborder les différends éventuels et les mécanismes pour régler ces différends. On ne peut pas enlever le droit de contester. Comme cela a déjà été mentionné, l'élément le plus contraignant de l'Accord sur le commerce intérieur, ce sont les contestations éventuelles des gouvernements, pas des entreprises. Cependant, le Québec a obtenu un consensus inédit afin que l'accord ne s'applique pas à la défense de la gestion de l'offre et à la mise en marché collective. Advenant une contestation, M. le Président, nous allons nous défendre avec vigueur et sans compromis. Ils ont l'air surpris, en face, d'entendre qu'on peut se faire contester. Bien oui, je l'ai toujours dit, ce n'est pas une nouvelle, ce matin. Ça, je ne sais pas s'il pense que c'est son élément de nouvelle, M. le Président, ça fait des mois qu'on dit ça: il n'y a pas d'entente dans laquelle on peut priver des gens du droit et du pouvoir de contester, mais la différence, c'est qu'on va se défendre, et on va se défendre avec vigueur, et on va continuer de faire nos réglementations.

Même qu'advenant une contestation nous allons non seulement nous défendre, mais nous allons nous défendre avec un partenaire qui est l'Ontario, avec lequel nous avons signé un accord sur le commerce et de coopération en septembre dernier. Nos deux provinces partagent les mêmes objectifs et pourront donc se défendre ensemble. Je rappelle que le Québec et l'Ontario comptent pour 60 % de la population canadienne et représentent 67 % de la gestion de l'offre au Canada. De plus, le Québec pourra se prévaloir lui aussi du droit de contester une province qui déciderait de prendre des mesures qui iraient à l'encontre des intérêts de la population, des consommateurs et des consommatrices ainsi que des entreprises agricoles et agroalimentaires.

En parlant de l'accord Québec-Ontario, je tiens à souligner à nouveau que c'est un accord qui a été négocié dans un contexte différent de l'Accord sur le commerce intérieur. En effet, cet accord regroupe deux provinces et est surtout centré sur la collaboration et la coopération, tandis que l'Accord sur le commerce intérieur regroupe toutes les provinces et territoires ainsi que le gouvernement fédéral et vise principalement les engagements en matière de commerce. L'accord Québec-Ontario permettra de développer davantage de stratégies communes afin d'accompagner nos secteurs agricoles et alimentaires respectifs dans les nombreux défis auxquels ils font face.

Dans cet accord et dans l'Accord sur le commerce intérieur, il est clair, pour nous, que la gestion de l'offre et la mise en marché collective sont protégées et que les signataires préservent notamment leur pouvoir de mettre en place des règles pour protéger le consommateur.

Le Québec est un précurseur en ce qui concerne la production d'aliments de qualité et il le demeurera, M. le Président. Les produits agricoles et alimentaires du Québec sont reconnus partout par les consommateurs. Le Québec pose déjà des gestes pour appuyer ses produits agricoles et agroalimentaires et nous continuerons de le faire. Pour le Québec, le commerce interprovincial des produits d'ici est plus élevé que les exportations à l'extérieur du Canada. Il est donc dans l'intérêt du Québec de s'impliquer avec les autres provinces pour préserver l'accès de nos produits agricoles et agroalimentaires à ces marchés, car les revenus de nos agriculteurs et agricultrices, M. le Président, en dépendent pour une bonne partie. Comme je l'ai mentionné, en plus de mettre le Québec dans notre assiette, on veut positionner les produits du Québec dans l'assiette de tous les consommateurs canadiens et du monde entier. Nos campagnes de promotion sont un succès. Même dans les chaînes d'alimentation... Même les chaînes d'alimentation embarquent dans notre promotion et mettent en place des campagnes de promotion à partir des aliments d'ici.

On s'occupe de nos affaires et de la place de nos produits dans le meilleur intérêt de l'agriculture du Québec.

Les entreprises agricoles et agroalimentaires, incluant celles sous gestion de l'offre, dépendent en bonne partie des marchés hors Québec, et l'ACI leur permettra de se développer davantage et de consolider leur présence sur les marchés du Québec et des autres provinces. Je tiens à réitérer que la promotion et la défense de la gestion de l'offre demeureront... demeurent et demeureront une priorité pour notre gouvernement. Nous avons témoigné d'un engagement constant à cet égard. Notre gouvernement se fait un devoir d'intervenir auprès de nos homologues fédéraux. Il faut également se rappeler les motions que nous avons fait adopter à l'unanimité par l'Assemblée nationale en 2004 et en 2005 pour réitérer notre appui indéfectible à la gestion de l'offre. Le gouvernement du Québec a toujours été inébranlable en ce qui a trait à la défense et à la promotion de la gestion de l'offre et de la mise en marché collective. La gestion de l'offre et les mécanismes de mise en marché collective permettent au secteur agricole et agroalimentaire de tirer profit de son plein potentiel sur les marchés d'ici et d'ailleurs, et soyez donc assurés de notre volonté que d'élargir l'espace économique ne se fait aucunement au détriment des piliers de la politique agricole et de leur rôle crucial dans la mise en valeur des particularités de notre agriculture.

Je suis donc fier que le gouvernement du Québec ait amené les premiers ministres et les ministres du Commerce intérieur à prendre clairement position de façon officielle pour la gestion de l'offre et la mise en marché collective dans un accord qui reconnaît le respect de nos pouvoirs réglementaires et la protection du consommateur, un consensus historique, M. le Président. Le 7 août dernier, les premiers ministres ont convenu que ce nouveau chapitre ne s'appliquera pas aux mesures liées aux systèmes de gestion de l'offre régis par les gouvernements provinciaux et fédéral ni aux offices de commercialisation. Le 15 octobre, les ministres du Commerce auxquels s'est joint le gouvernement fédéral ont approuvé ce protocole. Et, M. le Président, je peux vous dire qu'aujourd'hui la gestion de l'offre est mieux protégée qu'elle ne l'a jamais été auparavant au Québec et au Canada.

En conclusion, M. le Président, je veux tout simplement réitérer que ce nouveau chapitre protège la gestion de l'offre, la mise en marché collective tout en permettant de prendre des mesures relatives à la protection du consommateur. De plus, nous sommes allés chercher l'appui de l'ensemble des provinces et du gouvernement fédéral, ce qui va raffermir la position canadienne lors des négociations au niveau international, comme notamment à l'Organisation mondiale du commerce. Le Québec, ses consommatrices, ses consommateurs, ses producteurs et ses productrices agricoles, nous en sommes convaincus, sont gagnants avec ce nouveau chapitre qui permettra de continuer de développer l'agriculture au Québec, au Canada en faisant connaître nos produits en les exportant sur les marchés canadien et nord-américain mais surtout en protégeant et en faisant la promotion de ce qui est la base de plusieurs secteurs agroalimentaires au Québec, c'est-à-dire la gestion de l'offre et les offices de mise en marché. Merci.

Le Président (M. Gaudreault): Merci, M. le ministre. Alors, pour une période de 10 minutes, votre conclusion, Mme la députée d'Iberville.

Mme Marie Bouillé

Mme Bouillé: Merci, M. le Président. D'entrée de jeu, je veux souligner qu'on peut rassurer le secteur agricole puis agroalimentaire quand la confiance existe. Actuellement, il y a bris de confiance. Le ministre a soulevé tantôt qu'il voulait façonner l'agriculture du Québec. La seule façon qu'il va pouvoir la façonner, c'est de rétablir la confiance parce qu'il y a bris de confiance.

n(11 h 50)n

Et le ministre disait qu'il y avait... le fédéral ne savait pas, imposait parce que, quand il n'y a pas de position claire des provinces... bien il y en avait une, position claire, au Québec, tellement claire que l'ex-ministre de l'Agriculture, son prédécesseur, l'ex-ministre de l'Agriculture libéral, il n'a pas voulu, lui, signer l'accord il y a un an. Donc, le ministre nous demande d'appuyer ses démarches, oui, quand ça a de l'allure, puis, non, quand ça n'a pas d'allure. Le ministre de l'Agriculture nous a démontré ce matin, M. le Président, qu'il persiste puis qu'il signe dans son rôle de celui qui n'arrive pas à faire de consensus au Québec puis qui va faire payer cher aux consommateurs puis aux producteurs la signature de l'accord imposé par le gouvernement libéral.

Nous avons cependant... Ce matin, il y a eu quelque chose d'intéressant, on a eu quand même la confirmation que le gouvernement Charest a échangé notre modèle québécois agroalimentaire...

Le Président (M. Gaudreault): Mme la députée.

Mme Bouillé: Euh, que le gouvernement libéral...

Le Président (M. Gaudreault): Parfait.

Mme Bouillé: ...excusez-moi, a échangé notre modèle québécois agroalimentaire. Je suis une nouvelle députée, M. le Président, je m'excuse.

Le Président (M. Gaudreault): ...ça.

Mme Bouillé: Le gouvernement libéral a échangé notre modèle québécois agroalimentaire contre un consensus canadien artificiel.

Le ministre vient à peine d'arriver à la tête du ministère de l'Agriculture que déjà il a réussi à faire l'unanimité contre lui, comme pour Orford. Avec les défis puis les enjeux qui secouent le monde agricole, ça augure très mal. Le ministre avait une belle occasion ce matin, M. le Président, de faire amende honorable puis de rajuster le tir. Ça demande du courage, mais il aurait eu au moins notre sympathie. Malgré ce que la partie gouvernementale dit, la population, elle est contre cet accord. Le gouvernement libéral ne nous a pas fait ce matin la démonstration qu'il ne mettait pas en danger le modèle agroalimentaire québécois en signant l'accord. Le ministre n'a pas eu le courage ce matin d'affirmer qu'il défendra le secteur agroalimentaire contre les contestations qui surviendront en vertu de l'application de l'accord que son gouvernement a signé. Il ne nous a pas démontré qu'il ne touchera pas aux mesures techniques mises en place pour faire fonctionner une mise en marché collective et ordonnée.

Le ministre ne nous a toujours pas expliqué pourquoi le gouvernement a, dans le plus grand secret, puis c'est son choix, c'est son choix... comment il va défendre l'agriculture québécoise s'il s'isole de cette façon. Qu'on parle de sécurité alimentaire, de souveraineté alimentaire, d'une reconnaissance minimale d'une certaine autonomie dans les champs de compétence provinciale. Prenez note, M. le Président, qu'une pareille abdication des pouvoirs en matière d'intérêt public nous apparaît illégitime et indéfendable pour le Québec. C'est triste que le ministre n'écoute pas. Il n'a pas non plus d'écoute de la part de son gouvernement. Pourquoi le ministre, il n'a pas tenu parole en consultant les producteurs puis les consommateurs, malgré ce que le ministre de l'Agriculture précédent promettait aux groupes concernés lors du premier dépôt du texte, en juillet 2008? On ne le sait pas. La partie gouvernementale parle d'un consensus canadien, mais il n'a pas été en mesure d'établir un consensus québécois. Le ministre a même affirmé qu'il a dû reculer pour conserver ce consensus fabriqué de toutes pièces. Le gouvernement libéral a même l'audace de prioriser un consensus canadien avant un consensus québécois. Ce n'est pas pire. Il a échangé les intérêts des consommateurs et des producteurs québécois pour ceux du conseil de la fédération canadienne. Il a même soumis la capacité de légiférer de l'Assemblée nationale en matière agroalimentaire à un tribunal de non-élus de l'Accord sur le commerce intérieur. Il faut le faire!

Le ministre a abdiqué, M. le Président. Est-ce que le gouvernement libéral impose le nouveau chapitre agricole de l'ACI pour niveler vers le bas les règles agroalimentaires au Québec de façon à ce que le projet que pilote le premier ministre pour que son image avec l'Union européenne soit facilitée... Il y a lieu de se poser de sérieuses questions là-dessus. Le ministre de l'Agriculture, il n'écoute pas, M. le Président, le gouvernement libéral non plus. Il a bradé en plus la protection des consommateurs dans un de leurs besoins les plus fondamentaux: se nourrir avec des aliments sains, de qualité et à proximité, l'achat local.

Il semble que, selon toute vraisemblance, avec l'application de ce nouveau chapitre agricole de l'ACI, les consommatrices et les consommateurs québécois pourraient se retrouver avec une foule de produits d'imitation, de bas de gamme sur les tablettes de leurs détaillants en alimentation. On le dit haut et fort, on ne veut pas de yogourt et de fromage appelés tels quels mais qui ne contiennent pas ou peu de lait frais. Or, c'est ce qui nous attend. Il faut s'assurer que les produits bas de gamme de certaines multinationales ne prennent pas la place de nos produits de qualité locaux.

Les consommateurs et les producteurs agricoles vont payer cher pour cet accord, cet accord imposé par le gouvernement libéral, accord où il n'y a pas eu de consensus au Québec. Que le gouvernement libéral se donne donc le temps de négocier avec les autres provinces un accord qui respecte vraiment les fondements de la mise en marché collective québécoise. C'est ce qu'on attend. Et malheureusement on termine cette interpellation en sachant qu'on n'a pas de garantie sur ça. Merci, M. le Président.

Le Président (M. Gaudreault): Merci beaucoup, Mme la députée d'Iberville. Merci, chers collègues des deux côtés, merci aux collaborateurs ici présents.

Alors, la commission, ayant accompli son mandat, ajourne ses travaux sine die. Merci.

(Fin de la séance à 11 h 55)


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