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Version finale

33e législature, 1re session
(16 décembre 1985 au 8 mars 1988)

Le mercredi 6 mai 1987 - Vol. 29 N° 31

Les versions HTML et PDF du texte du Journal des débats ont été produites à l'aide d'un logiciel de reconnaissance de caractères. La version HTML ne contient pas de table des matières. La version officielle demeure l'édition imprimée.

Journal des débats

 

(Dix heures huit minutes)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

Mme la greffière, nous avons le quorum et je vous informe que Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux est membre de la commission pour la durée de ce mandat.

Le mandat de la commission est le suivant. La commission des affaires sociales se réunit afin de procéder à des consultations particulières et tenir des auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 21, Loi concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le Code civil du Québec et le Code de procédure civile, et du projet de règlement sur l'adoption internationale tel qu'il a été publié à La Gazette officielle du Québec le 11 mars 1987.

Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des remplacements?

La Secrétaire: Oui, M. le Président. M. Gauthier (Roberval) sera remplacé par Mme Harel (Maisonneuve).

Le Président (M. Bélanger): Bien. Est-ce que d'autres remplacements ont été signifiés?

La Secrétaire: Non, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Bien! Notre ordre du jour pour aujourd'hui sera de procéder à l'audition, dans un premier temps, de l'Association des centres de services sociaux du Québec - est-ce qu'on nomme les représentants? - et, par la suite, du Secrétariat à l'adoption internationale. Cet après-midi, après la période des affaires courantes, c'est-à-dire vers 16 heures, ce sera l'organisme Accueillons un enfant et, en fin d'après-midi, l'Association des parents pour l'adoption internationale.

Je vais vous rappeler les ententes qui sont survenues entre les deux formations pour le meilleur déroulement des travaux et afin que tout le monde fonctionne avec les mêmes règles du jeu. Les ententes intervenues concernant le déroulement des travaux sont les suivantes: le temps alloué pour les déclarations d'ouverture sera de 40 minutes, réparti de la façon suivante: 20 minutes pour Mme la ministre et 20 minutes pour le porte-parole de l'Opposition. Par la suite, 20 minutes pour le groupe ministériel et 20 minutes pour le groupe de l'Opposition, lorsqu'il s'agira de poser des questions ou d'avoir des informations supplémentaires sur les textes qui nous seront présentés. Quant au temps de parole, sous réserve de l'alternance, chaque député peut parler aussi souvent qu'il le désire sans excéder dix minutes consécutives, selon l'article 173 du règlement de l'Assemblée nationale.

Maintenant, lorsqu'on parle de 20 minutes, c'est une enveloppe globale qui comprend aussi les temps de réponses. On devra donc demander aux gens qui nous présentent les mémoires d'avoir des réponses précises et les plus brèves possible. Donc, la durée de chaque audition sera d'une heure, c'est-à-dire 20 minutes pour la présentation du mémoire, 20 minutes pour le groupe ministériel et 20 minutes pour le groupe de l'Opposition et toujours selon la règle de l'alternance. Est-ce que les règles et procédures sont claires pour tout le monde? On s'entend bien?

Pour débuter, je demanderais donc à Mme la ministre de faire sa déclaration d'ouverture. Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Remarques préliminaires Mme Thérèse Lavoie-Roux

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. M. le Président, le gouvernement a convoqué cette commission parlementaire pour que tous les principaux intéressés puissent se pencher à la fois sur le projet de loi 21, sur le règlement touchant l'adoption internationale et sur toute autre question reliée à l'adoption internationale.

Au point de départ, je voudrais dire que le gouvernement est favorable à l'adoption internationale et, s'il subsistait quelque doute que ce soit dans l'esprit de quiconque, je veux les rassurer. Pour le gouvernement, l'adoption internationale, dans le contexte où nous vivons, et déjà depuis plusieurs années d'ailleurs, est une mesure qui doit être encouragée, favorisée, mais elle doit être bien faite. Elle doit se faire dans des conditions qui respectent, à la fois, l'enfant, les parents adoptifs, les parents biologiques et, évidemment, les pays qui, somme toute, nous confient des enfants pour adoption.

J'aimerais rappeler que c'est ta première fois qu'une commission parlementaire est appelée à se pencher sur l'ensemble du dossier de l'adoption internationale, même si, depuis 1979, c'est la quatrième occasion où le gouvernement, de façon législative, finalement, touche à l'adoption internationale. C'est la première fois que nous avons l'occasion de nous pencher ensemble sur cette problématique de l'adoption internationale.

Personne n'ignore toutes les difficultés soulevées ces derniers mois. C'est pourquoi le gouvernement propose des solutions qui sont contenues dans le projet de loi 21, dans le projet de règlement sur l'adoption internationale publié à La Gazette officielle le 11 mars 1987, et dans une convention type avec les organismes qui sont reconnus comme des organismes d'adoption internationale. Ces propositions sont le résultat des travaux d'un comité interministériel reqroupant les représentants du ministère des Communautés culturelles et de l'Immigration, du ministère de la Justice, du ministère des Relations internationales et de mon ministère. Certains de ces représentants sont d'ailleurs présents à cette commission parlementaire. Je vaudrais, en passant, remercier mes collègues et les gens des autres ministères pour le travail qui a été fait et pour l'appui qu'ils nous ont donné dans la préparation de ce projet de loi.

Des consultations ont aussi été effectuées sur diverses hypothèses de solution avec des intervenants qui sont impliqués directement ou indirectement dans l'adoption internationale. Un certain consensus semble se dégager de ces diverses consultations. La présente commission parlementaire constitue une étape essentielle dans ce processus de consultation. L'étude des divers mémoires démontre le sérieux et la qualité du travail accompli par les divers organismes, et je les en remercie. De plus, une expertise s'est développée et les acquis, de même que les difficultés, servent aujourd'hui à proposer les solutions les plus justes et les plus adéquates possible.

L'adoption internationale, comme l'adoption interne, a pour but premier de procurer, sur une base stable, une famille à l'enfant qui en est privé. L'adoption doit être considérée prioritairement en faveur de l'enfant. Ce n'est pratiquement que comme conséquence heureuse de ce premier objectif qu'elle permet de donner un enfant au foyer qui n'en a pas. Parce qu'elle est internationale, elle met en cause des systèmes de droit, des organisations de société et des conceptions de la famille qui sont différentes et posent, conséquemment, des problèmes particuliers. . L'adoption internationale est un phénomène complexe qui soulève souvent des dilemmes où s'affrontent divers courants d'idées. Ainsi, il est risqué d'évaluer les conditions matérielles de la vie d'un enfant par comparaison avec les standards de notre société nord-américaine et d'en conclure que l'enfant doit être retiré de son milieu.

Comment assurer au premier chef le respect des droits et de l'intérêt de l'enfant et les droits des parents d'origine et des parents adoptifs par des garanties administratives et juridiques, tout en simplifiant le processus et en agissant dans les meilleurs délais? Comment concilier que l'adoption internationale commande l'implication de l'État à titre de protecteur de l'enfant et le fait que la décision d'adopter un enfant constitue un engagement essentiellement personnel de la part des adoptants, sans pour autant en faire un acte privé. L'expérience de ces dernières années suggère qu'il n'y a pas de solution miracle à ces problèmes et que plusieurs États cherchent encore la façon de vivre le plus sereinement possible le phénomène.

Au Québec, les premières dispositions législatives importantes concernant l'adoption internationale sont adoptées en 1979. Elles visent surtout à mettre fin aux adoptions privées et à contrer certaines pratiques abusives en circonstanciant le rôle des organismes gouvernementaux et non gouvernementaux. Il y est prévu qu'une société d'adoption procède à l'évaluation de l'adoptant, que le ministre peut conclure une entente avec un autre gouvernement et qu'il peut signer une convention avec un organisme reconnu.

 l'hiver 1981, s'est produit l'incident de quatre Québécoises emprisonnées pendant quatre jours au Guatemala où elles étaient allées adopter un enfant. Elles ont été acquittées par le tribunal guatémaltèque, mais des questions se sont posées afin d'éviter la répétition de telles situations, et un constat de l'insuffisance des dispositions législatives a été fait.

C'est pourquoi en 1983 des modifications sont faites de nouveau en matière d'adoption internationale pour éviter que les gens, en toute bonne foi, se mettent dans des situations extrêmement délicates pour les enfants et pour eux-mêmes. Ces dispositions avaient pour objectif majeur d'édicter des rèqles sur l'adoption d'enfants domiciliés hors du Québec. Ainsi, les amendements visent notamment à soumettre l'adoption au Québec d'enfants domiciliés hors du Québec aux règles de la loi du domicile de l'enfant quant au consentement des parents biologiques et à l'adoptabilité de l'enfant. Une règle était également édictée quant à la portée et aux effets des jugements rendus hors du Québec. En outre, une clause d'amnistie générale était prévue pour les personnes qui avaient obtenu un jugement d'adoption rendu hors du Québec avant le 21 décembre 1983.

Cependant, de sérieuses difficultés d'interprétation se sont soulevées quant aux dispositions du Code civil du Québec, plus précisément l'article 622.1 relatif à la reconnaissance des jugements étrangers. Cette ambiguïté a donné lieu à des opinions juridiques et à des jugements divergents. Cette situation a placé les adoptants et les intervenants dans une position difficile et des problèmes de cohérence au niveau des décisions administratives se sont posés.

L'évaluation de la situation au Québec nous fait conclure que l'approche de la législation actuelle est un peu rigide et laisse peu de place aux ajustements nécessaires dans chaque cas particulier. Les propositions de modifications au projet de loi 21 visent à plus de souplesse. Pour certains, il n'y en a pas suffisamment, mais je veux rappeler que c'est justement l'objet de cette commission parlementaire qu'on s'ouvre à des suggestions qui pourraient ajouter de la souplesse, tout en ne renonçant pas aux principes qui doivent guider l'adoption, qu'il s'agisse d'adoptions même internes au Québec et encore plus d'adoptions au plan international.

Pour ce faire, il donne ouverture à la reconnaissance de jugements étrangers dits adoptions simples en leur conférant les effets de jugements rendus au Québec, dans la mesure où l'État du domicile de l'enfant a donné son consentement à l'adoption de ce dernier par l'adoptant. Sont visés les enfants qui pourraient ou devraient, dans leur intérêt, être adoptés: ceux dont les parents sont décédés ou inconnus et ceux qui sont abandonnés à la responsabilité de l'État par Ieurs parents. Par ailleurs, il existe dans la majorité des pays des services ou organismes d'État responsables de ces enfants. Les autorités des pays étrangers souhaitent être impliquées au premier chef dans l'identification des enfants qui peuvent être confiés pour adoption dans un autre pays. Le consentement de l'État a pour avantage de répondre à ce voeu tout en assurant le maximum de garanties quant à l'adoption de l'enfant.

Le dernier projet de convention des droits de l'enfant de décembre 19B6, en son article 20, prévoit que les placements doivent être effectués par l'intermédiaire d'autorités ou d'organismes compétents et que des garanties équivalant à celles en usage pour le droit interne devraient être appliquées.

Le projet de loi vise cet objectif et garantit le respect des droits des personnes impliquées, soit les parents biologiques, les parents adoptifs et, au premier chef, évidemment les enfants. Cette solution devrait avoir aussi l'avantage d'augmenter le nombre d'enfants étrangers qui pourraient être adoptés par des Québécois et avoir comme conséquence prévisible de réduire les délais d'attente.

Le projet de loi prévoit un contrôle gouvernemental et judiciaire plus précis sur les démarches des adoptants. Chacun de ces projets d'adoption sera vérifié par le Tribunal de la jeunesse quant à sa régularité. Cette procédure s'inspire fortement de la procédure relative à l'adoption d'enfants québécois introduite en 1983, qui s'est révélée rapide, efficace et satisfaisante pour tous. Cette mesure sera de nature à assurer une meilleure sécurité aux adoptants, car ils sauront, dès le départ, si l'adoption pourra être reconnue au Québec. Cette procédure complétée, les adoptants pourront aller chercher l'enfant, obtenir un jugement dans le pays étranger et, de retour au Québec, être assurés d'obtenir une reconnaissance de ce jugement avec tous les effets d'un jugement québécois.

D'autre part, ma responsabilité première ou la responsabilité du ministre serait de coordonner tout le processus de l'adoption internationale, d'en être le pivot central. Il faut non seulement voir à l'application des règles, mais surtout assister les adoptants dans leurs démarches visant à donner un foyer à des enfants qui n'en ont pas et les informer adéquatement. Plus de temps sera ainsi consacré à l'établissement et au maintien des liens et contacts avec les parents adoptifs, les intervenants, les organismes reconnus et les États étrangers assurant plus de souplesse et d'efficacité au processus.

En outre, le projet de loi 21 et le règlement sur l'adoption internationale auront l'effet de distinguer et de préciser les responsabilités des intervenants appelés à rendre possible un projet d'adoption. Ils remédient à la situation actuelle où les rôles de chacun ne sont pas très précisément déterminés.

Il est clair pour nous que l'adoption internationale est une affaire d'État, mais il est aussi évident que ce dernier a besoin de collaborateurs privilégiés, tels le directeur de la protection de la jeunesse et l'organisme reconnu. Le directeur de la protection de la jeunesse exerce les responsabilités qui lui sont attribuées par le Code civil du Québec et la Loi sur la protection de la jeunesse. C'est lui qui a la tâche fort délicate et importante d'évaluer les adoptants pour déterminer leur capacité d'adopter. Le directeur de la protection de la jeunesse assume la responsabilité d'assurer que la rencontre de l'adoptant et de l'enfant comportera les meilleures chances de succès. En outre, le règlement sur l'adoption internationale précise leur intervention en matière d'adoption d'un enfant domicilié hors du Québec.

Par ailleurs, l'organisme reconnu est, à toutes fins utiles, un prolonqement de la ministre dans le pays étranger. C'est

pourquoi il est à l'avantage de tous que ses devoirs, pouvoirs et responsabilités soient balisés dans une convention type approuvée par le gouvernement. Il est primordial que des liens de confiance s'établissent avec l'organisme reconnu qui a un rôle essentiel et important en matière d'adoption internationale. Cet organisme reconnu, cautionné par le gouvernement, pourra compter sur notre disponibilité et obtenir tout renseignement utile.

D'autre part, la convention peut aussi contenir des clauses particulières qui pourront tenir compte des particularités des pays où ils agissent et du champ d'intervention de chacun. Conséquemment, interlocuteur privilégié de la ministre dans ses rapports avec l'étranger, il agira dans les limites du mandat défini à la convention. Si le projet de loi ou la convention laissent subsister des ambiguïtés quant au rôle de l'organisme reconnu, elles seront clarifiées. Il n'est aucunement question de lui enlever des responsabilités qu'il exerce actuellement.

Finalement, le projet de loi contient une clause d'amnistie et une disposition transitoire. La clause d'amnistie permet aux adoptants qui ont obtenu un jugement d'adoption simple avant le 2 avril 1986 de faire reconnaître ce jugement au Québec. Leurs enfants auront ainsi les mêmes droits que les enfants québécois. Cette mesure est nécessaire pour permettre d'accorder à un certain nombre d'enfants actuellement bien intégrés à la société québécoise les pleins bénéfices de cette intégration. Est-il nécessaire de souligner que les nouvelles dispositions législatives visent à lever toute ambiguïté afin d'éviter dans l'avenir la nécessité d'une nouvelle clause visant à régulariser la situation des enfants, comme nous avons connu, plus d'une fois, dans le passé. À ce titre, l'intervention préalable du tribunal constitue une sérieuse garantie, car les parents sauront, par une autorité judiciaire, si le projet d'adoption est réalisable ou non.

La clause transitoire, quant à elle, vise les adoptants qui ont respecté toutes les étapes prévues dans nos lois actuelles, mais qui n'ont pas obtenu de jugement étranger avant l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions. Ce jugement pourra être reconnu au Québec. Ces nouvelles dispositions établissent clairement l'assise juridique de l'adoption internationale en précisant les responsabilités de chacun dans cette intervention délicate: les parents adoptifs, le tribunal, le directeur de la protection de la jeunesse, les organismes reconnus, le ministre et le pays d'origine de l'enfant.

Nous savons qu'il s'avère difficile d'évaluer ce que peut être le modèle adéquat. L'étude et l'analyse de différents systèmes étrangers nous amènent à la conclusion qu'aucun n'a, à ce jour, trouvé un système idéal. D'autre part, en considérant la question sous l'angle de l'enfant, nous percevons et acceptons que son pays d'origine et son pays d'accueil entourent son adoption de certaines garanties et exigent des conditions qui assurent qu'il peut être réellement adopté et que ses parents ont donné un consentement libre et éclairé.

L'étude en commission parlementaire nous indiquera certainement des ajustements qui permettent l'adoption internationale avec toute la sécurité nécessaire, tout en laissant place à une certaine souplesse. C'est l'objectif du projet de loi 21. Dans le cadre des principes fondamentaux qui régissent notre action en adoption internationale, nous demeurons réceptifs à toute modification visant à modifier le projet de loi, à l'améliorer, et à apporter les modifications au règlement sur l'adoption internationale ou la convention type. Les dernières réflexions que je me faisais avant de descendre ici ce matin, c'était de dire que véritablement c'est une situation que, comme collectivité, nous devons tenter de régler ensemble le mieux possible, dans le respect des principes que j'ai énoncés. Nous jouons avec la vie des enfants, avec les familles, avec même des objectifs qui peuvent rejoindre les objectifs du Québec. Tout ceci dans !e respect des uns et des autres. Je veux assurer tous ceux qui ont accepté de sérieusement faire ce devoir et de se présenter devant nous que c'est avec le plus grand accueil que nous recevrons les suggestions qu'ils peuvent nous faire. Je voudrais, en terminant, rappeler que le gouvernement du Québec est très favorable à l'adoption internationale, veut permettre des conditions plus faciles, plus adéquates pour l'adoption internationale, mais qu'il ne doit pas néanmoins renoncer au respect de certains principes qui doivent entourer le processus de l'adoption internationale. Je vous remercie, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre, je vous remercie. Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Cécile Vermette

Mme Vermette: Merci, M. le Président. En tout premier lieu, je voudrais remercier tous les participants qui se présentent aujourd'hui en commission parlementaire et qui devront se présenter les jours subséquents pour présenter leur mémoire et faire un peu la lumière sur toutes les préoccupations que doivent vivre d'une part les parents adoptants et d'autre part tous les différents intervenants et les intermédiaires dans le processus de l'adoption internationale. Au cours des derniers mois, l'adoption internationale a fait la manchette des principaux quotidiens, qu'il s'agisse des

médias électroniques, radiophoniques et même de la plupart des grands quotidiens. Pas une semaine ne s'est passée sans que finalement les parents dénoncent les attitudes du gouvernement présentement en ce qui concerne les projets de loi qu'il mettait de l'avant, parce qu'ils ne répondaient pas aux besoins et aux préoccupations des parents adoptants et à toute la problématique qui se dégageait lorsqu'on entamait un processus d'adoption sur le plan international. (10 h 30)

Effectivement, une commission parlementaire voit enfin le jour et permettra à plus d'un parent et d'un groupe de parents de pouvoir se faire entendre puisque depuis longtemps, ils demandent à se faire entendre. Pourquoi, au Québec, de nombreux parents se plaignent-ils du Secrétariat à l'adoption internationale? Je pense que l'occasion nous sera donnée de faire le point et une fois pour toutes de regarder en profondeur la problématique et toutes les conséquences qui se dégagent des attitudes des différents intervenants en présence. Nous devrons faire cette expérience avec une grande ouverture d'esprit et avec un regard humanitaire, parce que les parents, en choisissant l'adoption internationale, le font dans un geste d'engagement social et ils répondent, à leur manière, à une façon de soulager les misères que certains pays du tiers monde doivent affronter tous les jours.

La commission parlementaire devrait être entreprise avec l'esprit de vouloir aider et de trouver des moyens à ces parents qui veulent aider et aimer un enfant. Je pense que l'adoption internationale, comme on le voit dans les journaux, devient de plus en plus difficile au Québec. Si nous devons faire face à une réalité qui nous semble alarmante, donnons-nous le courage d'apporter les changements essentiels afin que les citoyens du Québec puissent jouir équitablement de tous leurs droits fondamentaux, comme tous les citoyens des autres provinces, notamment d'adopter légalement un enfant dans un pays de leur choix.

Il serait malheureux qu'on doive continuer à vivre et à faire subir aux parents des fermetures de pays à cause de directives gouvernementales et parce que nos lois ne sont pas compatibles avec les leurs. Des soixante-neuf pays avec lesquels nous pouvions faire affaire, actuellement il n'en reste que quatre ou cinq. La ministre dit que, présentement, il y en aura neuf qui s'ajouteront, mais il ne faut pas oublier que si les pays se sont fermés, c'est à la suite d'un décret ministériel du mois de novembre et que, antérieurement, l'adoption internationale était possible avec au moins 69 pays.

Je pense que c'est cette réouverture des pays et cette disponibilité que les parents souhaitent actuellement. J'ose espérer que les solutions qu'on trouvera et qu'on tentera de libeller dans un texte de loi favoriseront l'ouverture des différents pays avec lesquels les parents avaient l'habitude de faire affaire.

La majorité des couples, lorsqu'ils choisissent d'adopter un enfant, ont vraiment mûri, pendant plusieurs mois et même plusieurs années, leur décision de vouloir un enfant. À mesure que les années passent, leur désir de partager la joie de la famille se renforce. Je pense qu'il est de notre devoir d'aider ces parents à trouver les moyens, encore une fois, de fonder une famille. L'adoption internationale devrait être abordée par le biais d'un volet, d'une politique familiale, alors qu'actuellement au Québec le taux de natalité est en chute; il périclite, il est rendu à 1,4 %. On devrait faire des efforts substantiels pour encourager ces parents qui, pour une raison ou pour une autre, ne peuvent avoir d'enfants - tout le monde aimerait bien pouvoir en avoir, mais à cause de circonstances, cela leur est impossible - mais qui pensent à adopter un enfant. Au Québec, la problématique est de taille: il n'y a plus d'enfants à adopter. Les parents songent à se tourner vers d'autres pays pour, en même temps, soulager ces pays qui ont à faire face à une détresse sociale des plus grandes.

Si nous devons dénoncer des comportements au cours de cette commission parlementaire, qu'on contribue aussi, de façon positive, à l'épanouissement du mouvement pour l'adoption internationale. Il ne faut pas penser que, par l'adoption internationale et par le projet de loi que nous allons étudier, nous pouvons régler l'ensemble de la problématique des pays du tiers monde. Je pense que l'adoption internationale, c'est du cas par cas. C'est chaque parent. C'est un parent, c'est un couple qui veut adopter un enfant. Je ne pense pas que les parents, dans leur tête, lorsqu'ils font une démarche dans le but d'adopter un enfant sur le plan international, même si c'est pour des raisons humanitaires, même si c'est pour favoriser l'entraide internationale, je ne crois que, dans leur tête, ils soient convaincus qu'ils vont répondre à l'ensemble de la problématique des pays du tiers monde. Je pense qu'il y aura toujours place pour que les gouvernements, eux aussi, jouent leur rôle en ce qui concerne les échanges internationaux pour favoriser l'entraide sur le plan international.

L'adoption ne fait pas qu'alléger les souffrances d'un enfant d'un pays donné. Elle fait beaucoup plus. Par ce geste, on peut redonner un second souffle de vie à un enfant. C'est vraiment le début de l'entraide internationale.

Chez nous, de plus en plus, notre société devient cosmopolite. Dans un tel

contexte, ne devrions-nous pas considérer l'adoption internationale comme une forme naturelle d'immigration? Je pense que l'enfant est beaucoup plus facilement maniable et apprend davantage à s'intégrer à une culture dans la chaleur d'un foyer bien québécois.

En plus d'en faire un bon citoyen québécois, à l'heure où le taux de natalité est de plus en plus bas, probablement que l'adoption deviendra un des volets qui pourra solutionner, en partie, notre problème de natalité. Donc, nous devons nous réjouir lorsque des familles ont le courage de se lancer dans cette voie.

On serait en droit de s'attendre à ce que le gouvernement développe une attitude positive quant aux préoccupations des parents et des intervenants dans leurs démarches d'adoption. Il est important qu'on cesse de prendre les parents pour des voleurs d'enfants, des intermédiaires pour des trafiquants, et qu'on cesse aussi de limiter le rôle des tribunaux â un rôle bureaucratique. Le gouvernement devrait avoir un regard beaucoup plus humain sur l'adoption internationale* J'ose espérer qu'après avoir entendu les différents mémoires, nous verrons un effort significatif et une volonté ferme de la part de la ministre à faire une loi conforme aux intérêts de l'enfant.

Il ne faut pas rêver à des solutions impossibles ou à des solutions qui ne font qu'accentuer les délais, qui demandent de plus en plus de temps et qui révèlent de plus en plus de lourdeur administrative et bureaucratique. Il faut garder en tête l'avenir des enfants en attendant que les grandes personnes décident de leur sort. Quel est l'intérêt de l'enfant dans un pays où la triste réalité ne permet aucun appui à la famille et aux enfants? Dans de telles circonstances, nous devons orienter nos efforts à réduire les délais ou simplifier la procédure. C'est une question de vie.

Les parents s'attendaient à une loi simple, claire et limpide, une loi qui permette de raccourcir les délais et qui réponde à leurs aspirations, et ce, dans l'intérêt de l'enfant.

Un dernier avertissement à la lecture du projet de loi. On a l'impression que l'enfant appartient à l'État une fois que l'enfant est laissé en adoption internationale. Je me permets une mise en garde, car il deviendrait dangereux que les enfants deviennent une monnaie d'échange dans les ententes entre États. Je pense que les enfants appartiennent à la planète et c'est dans cette orientation, dans cette optique que l'intérêt de l'enfant nous demande d'être prudents dans nos engagements et dans nos orientations sur le plan juridique.

En terminant, je voudrais souligner, étant donné l'urgence de la situation, étant donné également l'angoisse que doivent vivre les enfants dans une démarche d'adoption internationale, mêlée d'espoir et mêlée souvent d'angoisse, que j'aurais préféré une commission parlementaire entre le premier projet de loi qui a été présenté au mois de décembre et le dernier projet de loi présenté actuellement. Je pense qu'il aurait été logique que la commission parlementaire se tienne avant la rédaction d'un deuxième projet de loi sur le même sujet. De mémoire parlementaire, c'est la première fois que je vois en si peu de temps, en six mois, autant de démarches juridiques pour une même orientation.

À l'intérieur de six mois, l'adoption internationale avait fait l'objet d'un décret le 9 novembre 1986, d'un projet de loi, en décembre 1986, d'un projet de rèqlement, le 11 mars 1987 et à nouveau, nous voilà devant le projet de loi 21. Les parents ont demandé à être entendus depuis bien longtemps, au moins depuis le mois d'août 1986, alors qu'il devenait de plus en plus difficile d'adopter des enfants dans des pays étrangers. Le cri d'alarme n'est pas d'aujourd'hui. Depuis longtemps, les parents demandent d'être entendus. Ils demandent de collaborer avec les personnes en place et avec le gouvernement. Je pense que ces parents ont le goût du respect. Ils veulent collaborer et travailler à l'intérieur des règles et des normes de notre gouvernement et de nos lois. Ils sont respectueux de nos tribunaux. Plus nous ferons des lois rigides -et comme on dit souvent chez nous, en bon langage: Une loi avec une ceinture et des bretelles - plus nous risquons tout simplement de faire en sorte que des mouvements parallèles ou, finalement, le marché noir d'enfants se dessine ou se pointe à l'horizon, parce que personne ne pourra empêcher légitimement des parents de vouloir fonder une famille et de partager l'amour avec un enfant.

Dans ces circonstances, au lieu d'invoquer la rigidité, il faut au contraire apporter le soutien nécessaire pour faire en sorte que ces parents puissent, dans la joie, fonder leur famille et favoriser en même temps leur apport dans notre société. C'est ce qui fait le noyau central d'une société basée sur la famille. Dans le projet de loi et dans les règlements, lorsqu'on abordera les rôles des principaux intervenants et, notamment, lorsqu'on abordera le rôle de la DPJ, nous apporterons, je l'espère, des définitions de tâches, mais - j'en conviens et je pense que les gens de la DPJ sont très conscients de leur rôle - nous aurons aussi la volonté de leur donner le financement nécessaire pour qu'ils puissent mettre en branle tout le mécanisme qu'il faut pour favoriser l'adoption Internationale et faire en sorte que les délais d'attente soient de moins en moins longs et pour qu'un plus grand nombre de parents en arrivent à réaliser leur

rêve.

Sur ce, je voudrais conclure en espérant qu'à la suite des recommandations que nous pourrons entendre des différents intervenants, nous n'aurons pas è consacrer un projet de loi qui transpire les volontés de la ministre, mais qui reflétera les préoccupations de l'ensemble des parents et des intervenants sur l'adoption internationale. Je vous remercie. (10 h 45)

Auditions

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie, Mme la députée. J'inviterais maintenant les représentants de l'Association des centres de services sociaux du Québec à se présenter. M. le président, si vous voulez bien d'abord nous présenter votre équipe et nous pourrons procéder par la suite, je vous en prie.

Association des centres de services sociaux du Québec

M. Lapointe (Miville): M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs les députés, mon nom est Mivilie Lapointe. Je suis président de l'Association des centres de services sociaux du Québec. À ma droite, Mme Lise Denis, directrice générale de l'association; à mon extrême droite, M. Florian Gaudreault, directeur de la protection de la jeunesse au CSS de Richelieu dans la région de la Montérégie; à ma gauche, M. Laurier Boucher, coordonnateur des directeurs de la protection de la jeunesse à l'association, et à mon extrême gauche, Me Paule Gaumont, avocate au CSS de Québec.

M. le Président, depuis quelques années, le recours à l'adoption d'ici ou d'ailleurs a été choisi par beaucoup de couples québécois. Cependant, la rareté des bébés à adopter et la longueur des délais à surmonter ont fait surgir un certain nombre de plaintes, quand ce n'est pas un réseau parallèle d'adoption. Aussi, les centres de services sociaux du Québec, soucieux en premier lieu du bien de l'enfant, surtout par leur secteur de la protection de la jeunesse, se réjouissent de l'initiative du ministère de la Santé et des Services sociaux, de faciliter et de réglementer l'adoption d'enfants nés hors Québec. L'Association des centres de services sociaux du Québec souscrit entièrement à ce projet d'élargir les possibilités d'adoption, de clarifier les procédures, de préciser les rôles des divers agents, de sauvegarder surtout les droits des parents et d'assurer le respect des enfants.

Les CSS, bien sûr, s'ajusteront aux différentes modifications législatives nécessitées par le projet de loi, soit les amendements au Code civil, au Code de procédure civile et à la Loi sur la protection de la jeunesse elle-même. L'association compte enfin, par son mémoire, sensibiliser le gouvernement aux meilleures conditions d'application de la loi et à l'aide qu'il peut attendre de nous.

Trois idées maîtresses vont sous-tendre l'ensemble de nos orientations incluses dans le mémoire qui vous a déjà été transmis. D'abord, l'adoption doit être envisagée avant tout sous l'angle de l'enfant dont les intérêts doivent toujours primés. Deuxièmement, en adoption internationale, ne pas oublier que si nous avons beaucoup à offrir à ces enfants dits démunis, ces enfants n'en constituent pas moins la richesse et la relève de ces pays pauvres ou en voie de développement. Troisième élément: L'adoption internationale ne doit pas occulter notre réalité québécoise. Nous avons ici au Québec des enfants abandonnés ou en voie d'abandon, des enfants plus âgés et des enfants handicapés. Pour eux aussi, les possiblités d'adoption doivent être plus nombreuses et plus généreuses.

Nos accords ou ce qui nous apparaît être à souscrire entièrement: tout en souscrivant au principe de l'adoption plénière, l'Association des centres de services sociaux du Québec se réjouit de l'ouverture vers l'adoption simple avec les conditions que pose le projet de loi, à savoir qu'il s'agisse d'enfants adoptables et que le pays étranger donne son aval au projet d'adoption de l'enfant. L'association donne aussi son appui au projet de loi et au projet de règlement en ce qui a trait au rôle de chacun des intervenants impliqués dans l'adoption internationale, c'est-à-dire au rôle de la ministre, du directeur de la protection de la jeunesse, à celui confié au Tribunal de la jeunesse et aux organismes. Cette meilleure définition, des rôles de chacun assure à notre avis, plus d'efficacité dans l'action et privilégie la responsabilisation de chacun.

L'Association des centres de services sociaux du Québec se réjouit que le projet de loi fasse des enfants adoptés en provenance d'autres pays des enfants vraiment québécois, avec tous les droits que ce titre leur confère. Pour les enfants, c'est une question de droit et d'équité, mais aussi pour les parents adoptifs, une plus grande sécurité psychologique.

Enfin, l'Association des centres de services sociaux du Québec se rallie à la déclaration d'amnistie proposée à l'article 12 du projet de loi, malgré les imperfections de telles clauses et les dangers qui y sont inhérents, c'est évident. L'association croit qu'il y va du meilleur intérêt des enfants qui ont fait les frais des illégalités du passé. Nous nous interrogeons, toutefois, sur le nombre de cas à amnistier, la somme de travail qu'il faudra consacrer à ces amnisties et les délais que l'on se donnera pour ce faire. C'est une interrogation.

D'un autre côté, nos préoccupations

relatives au rôle du directeur de la protection de la jeunesse. Pour bien souligner son rôle dans la gestion des listes d'attente des requérants en adoption internationale, nous recommandons que l'article 2 du Règlement sur l'adoption internationale soit reformulé comme suit: "Le directeur intervient en procédant à l'évaluation de l'adoptant et en informe le ministre de la Santé et des Services sociaux."

Il nous apparaît urgent que le ministère, le nouveau grand responsable de tout le processus d'adoption, élargisse le bassin des pays susceptibles d'offrir des enfants en adoption. Cela nous apparaît important. En outre, nous croyons qu'il faut faire connaître avec le plus de diligence et le plus de clarté possible l'ensemble des ententes signées avec les pays et y joindre la liste des organismes au Québec susceptibles d'être parties prenantes dans cette politique.

Relativement aux ententes interpro-vinciales, l'association recommande vivement que, si de telles ententes doivent exister, elles doivent être, à notre avis, souples et simples. L'association insiste pour que les nouvelles dispositions mises en place, loin de ralentir et d'enrayer le mécanisme d'adoption internationale, le rendent plus clair, plus accessible, plus sain et aussi plus facile.

L'Association des centres de services sociaux demande que le ministère prévoie les crédits budgétaires requis afin de garantir l'accessibilité à des services d'évaluation pour tous les requérants en adoption internationale. En effet, les CSS ne pourront remplir convenablement leurs rôles et assumer leurs responsabilités que s'ils disposent des ressources techniques et humaines pour procéder notamment à l'évaluation des requérants.

L'Association des centres de services sociaux s'inquiète des frais accrus engendrés pour les requérants en adoption internationale, par la nouvelle procédure d'adoption, notamment en ce qui a trait aux requêtes à présenter au tribunal. Enfin, tout en nous disant prêts à explorer le principe de la tarification pour certains services, nous désirons quand même attirer l'attention des membres de la commission parlementaire, M. le Président, sur le fait qu'il ne serait, à notre avis, nullement question de faire quelque brèche que ce soit dans la gratuité et l'universalité des services tant et aussi longtemps que cette question et que tout le débat sur cette question n'aura pas été fait en entier.

En terminant, j'aimerais vous présenter peut-être un mini-portrait de l'état de la situation, quelques données qui peuvent être, en termes d'images, intéressantes à conserver à l'esprit lorsqu'on aborde cette question. Cela touche à la fois les ressources et le nombre d'adoptions réalisées. Oisons qu'au total, dans l'ensemble des centres de services sociaux du Québec, il y a 52 professionnels qui interviennent en adoption, en retrouvailles et aussi en adoption Internationale. Parmi ces 52 personnes, il y en a dix dans tout le Québec qui interviennent en adoption internationale. Je souligne que ces dix personnes de l'adoption internationale s'occupent autant de l'évaluation des requérants que de l'activité de jumelage entre les parents adoptifs et les enfants adoptés, et du suivi, une fois l'adoption démarrée.

Deuxième donnée, M. le Président, durant l'année budgétaire 1985-1986, dans l'ensemble du Québec, il s'est réalisé environ - il peut y avoir un écart d'un ou de deux cas - 200 adoptions d'enfants dans le cadre de l'adoption internationale, pour la période du 1er avril 1985 au 31 mars 1986. Nous avons également réalisé 476 adoptions régulières au Québec. On dénombre, au moment où l'on se parle, selon nos relevés faits hier, dans l'ensemble des régions du Québec, environ 1800 enfants abandonnés en date d'hier et près de 400 enfants directement adoptables dans l'ensemble du Québec.

Voilà essentiellement les faits saillants ou les éléments que nous voulions mettre en lumière dans notre mémoire et dans notre présentation initiale.

Le Président (M. Bélanger): La période des questions, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais d'abord remercier l'Association des centres de services sociaux du Québec pour la présentation de leur mémoire. Il faut, je pense, rappeler que les centres de services sociaux, qui autrefois étaient, dans le cas de l'adoption, des sociétés d'adoption, ont probablement au Québec la plus longue expérience dans tout le processus d'adoption, dans les contacts avec les parents adoptants ou biologiques, etc., et aussi dans le suivi des familles qui ont adopté des enfants.

Compte tenu de cette longue expérience que vous avez - et je voudrais, pour le moment, m'en tenir strictement à l'adoption internationale - les plaintes qu'on a entendues d'une façon plus véhémente récemment, mais qui remontent déjà à plusieurs années, à la suite du rodage qu'on devait faire avec l'adoption internationale ou encore à la suite d'interprétations juridiques différentes qui ont été obtenues, enfin tous les problèmes qui ont nécessité une amnistie en 1983 qui, à l'heure actuelle, en nécessitent une autre, me portent à vous demander quelles sont, d'après vous, les difficultés que vous rencontrez - mettons de côté pour le moment le manque de personnel, on pourra y revenir par la suite -dans le domaine de l'adoption internationale,

quelles sont celles qui sont plus caractéristiques à l'adoption internationale comparativement à l'adoption interne?

M. Gaudreault (Florian): Je vais tenter de m'attarder quelque peu sur la question qu'a posée Mme la ministre. Les plaintes reçues et les difficultés rencontrées au cours des dernières années portent principalement sur les délais que nous sommes appelés à subir dans le cadre de nos établissements. Je veux principalement souligner, par rapport à cela, la situation de ce qu'on appelle l'adoption internationale privée. Alors que, par exemple, des gens acceptent de suivre le processus de l'adoption et de se placer sur une liste d'attente, d'autres vont décider d'aller directement dans le pays d'origine sans intermédiaire, de se faire identifier un enfant, de nous arriver avec un projet qui est relativement concrétisé pour eux et de nous demander si on procède à l'évaluation.

Ces gens peuvent se trouver sur notre liste d'attente beaucoup plus tard que ceux qui normalement auraient dû être évalués. Donc, il faut procéder dans un certain nombre de cas avec beaucoup de rapidité vu que cet enfant est gardé dans le pays d'origine, que les parents paient des frais, etc. On doit laisser de côté la liste d'attente ou le processus normal d'adoption pour d'autres, et donner priorité à ceux-là. Je pense qu'il y a là une question d'équité et de justice particulièrement contraignante dans notre travail.

Il y a bien sûr aussi des difficultés qu'on rencontre dans le processus de l'adoption. On constate que les communications, par exemple, entre le Secrétariat à l'adoption internationale et les directeurs de la protection de la jeunesse ne sont pas toujours particulièrement articulées entre les organismes privés, et l'inverse existe également. Il y a là toute une série de difficultés qui sont davantage de l'ordre de la communication, de la collaboration et de la concertation qui devraient être très bien coordonnées sur le plan provincial. (11 heures)

Mme Lavoie-Roux: Oui, voulez-vous ajouter quelque chose?

M. Boucher (Laurier): Je pourrais ajouter qu'il y a aussi tout le problème général de la pénurie d'enfants. J'ai vu, dans mon expérience comme DPJ, des gens qui, dans un premier temps, voulaient probablement s'inscrire en adoption sans préciser que c'était en adoption internationale. Ces gens voulaient vraiment accueillir un enfant, d'où qu'il vienne. Mais souvent, des gens font le choix de l'adoption internationale en pensant que ce sera plus court parce que, peut-être, les listes d'attente sont un peu moins longues, ou ils s'imaginent que, ayant plus de pays d'où l'on peut faire venir un enfant, cela peut accélérer le processus. Cependant, dans les dernières années, pour diverses raisons, c'est clair que la pénurie d'enfants, même en adoption internationale, s'est fait sentir aussi. C'est certainement un grave problème, cette pénurie d'enfants. C'est pour cela que, dans notre mémoire, nous disons espérer que le développement d'ententes souples et efficaces ouvrira vraiment le bassin de pays, en tenant compte évidemment de tous les principes de base qu'on a mis en sourdine dans nos recommandations et dans notre mémoire.

Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, je pense qu'on peut déjà reconnaître que l'assouplissement vers l'adoption simple pouvant être reconnue comme adoption plénière, dans la mesure où l'enfant a été abandonné pour adoption et où le pays y consent, devrait élargir le bassin. J'aimerais tout de suite corriger ce qu'on a dit, à savoir qu'il n'y a plus que neuf ou six pays où l'on peut adopter un enfant. Je pense que, dans la mesure où les pays sont consentants, on peut adopter des enfants dans tous les pays. Normalement, cela devrait nous amener un plus grand nombre d'enfants pour adoption.

Vous mentionniez tout à l'heure qu'il y aurait 400 enfants adoptables au Québec. Est-ce que, dans votre travail avec les parents qui veulent une adoption, vous sentez une espèce de tendance à favoriser davantage l'adoption d'enfants sur le plan international que sur le plan local? Si oui, quelles en sont les raisons? Deuxièmement, cet après-midi, nous entendrons un mémoire rédigé par un groupe de parents qui nous dit: II s'exerce, de la part des centres de services sociaux ou des travailleurs sociaux, des pressions voulant que nous adoptions sur le plan local plutôt que sur le plan international. Je me demande si vous pourriez commenter ces deux points.

Mme Denis (Lise); En premier lieu, je voudrais dire que, quand on indique 400 enfants adoptables, c'est une donnée réelle. Cependant, il y a environ ici 1800 enfants abandonnés dont une partie d'entre eux pourrait devenir éventuellement adoptable. D'accord? Donc, ce n'est pas un nombre ferme de 400, dans ce sens; cela pourrait augmenter. Ce ne sont pas nécessairement des jeunes enfants non plus et ce sont des enfants qui peuvent présenter un certain nombre de difficultés. II est certain qu'il y a - je dirais - une tendance ou une volonté, de la part des centres de services sociaux, de développer des projets de famille et de vie pour les enfants qui sont chez nous et pour lesquels il n'y a pas encore eu de ce type de projet à long terme. Dans notre mémoire, on en parle un peu en disant: Oui à l'adoption internationale, mais il ne faudrait pas oublier qu'il y a, au Québec, des enfants adoptables

pour lesquels il est important que des projets se fassent. J'aimerais demander à M. Gaudreault de compléter à partir de l'expérience des DPJ sur le terrain.

M. Gaudreault: Le nombre de jeunes qui, annuellement, nous sont amenés pour des fins d'adoption, à la suite de consentements ou de déclarations judiciaires d'adoptabilité au sens de notre Code civil et de notre Loi sur la protection de la jeunesse, est quand même minime, non seulement dans notre région, mais aussi, je pense, dans tout le Québec. Par ailleurs, quant à la population des enfants adoptables pour lesquels il y a des projets à faire, à mesure que les mois et les années passent, ces enfants deviennent plus difficilement adoptables parce qu'ils sont plus âgés. C'est pour cela que, dans les centres de services sociaux, on travaille de plus en plus, avec des postulants en adoption, à concevoir des projets pour faire adopter des enfants plus âgés, qui parfois présentent des carences affectives ou des handicaps de type intellectuel ou de type physique. Je pense par exemple à des enfants qui peuvent souffrir de trisomie 21. Il y a beaucoup d'efforts qui sont faits dans les centres de services sociaux par rapport à cette jeune population et, d'ailleurs, la majorité des effectifs que l'on peut avoir en adoption régulière au Québec et internationale, est consacrée justement à ce type d'enfants. Mais on n'est plus à l'époque des petits bébés roses et je pense qu'il faut se dire que c'est terminé. Il en arrive un certain nombre chaque année, mais cette population, je ne dirais pas, se réduit, mais n'a pas tendance à augmenter.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. Merci. Je pense que je vais laisser la chance à mes collègues. Je reviendrai s'il reste du temps. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Marie-Victorin, en vertu de la règle de l'alternance.

Mme Vermette: Alors, quand on parle de la DPJ à I'ensemble des parents, il y a généralement deux volets qui ressortent très régulièrement dans leurs préoccupations. D'une part, c'est l'évaluation et d'autre part, ce sont les listes d'attente. En ce qui regarde les listes d'attente, il y a des délais de plus en plus considérables et les parents attendent énormément pour avoir une réponse, pour savoir si oui ou non ils peuvent faire une démarche d'adoption internationale. De plus, il y a des délais aussi, une fois que le feu vert est donné et qu'on leur dit que, oui, ce sont des parents aptes, et il y a toute l'évaluation qui entre en ligne de compte. À partir de là, on ne parle plus des délais parce que là ce sont des véritables délais.

Ma première question est la suivante: Est-ce que vous souhaitez une clarification en ce qui concerne les règles et est-ce qu'il n'est pas souhaitable aussi qu'on limite les délais pour qu'on puisse au moins avoir un service correspondant à ce qui se fait dans d'autres provinces ici au Canada?

M. Boucher: Quand vous dites "des règles", voulez-vous parler de règles de temps seulement?

Mme Vermette: Des critères d'admission qui feraient en sorte qu'on pourrait faire cela à l'intérieur d'un délai de trois mois, en tout cas, pour que les parents puissent savoir si oui ou non ils sont sujets à être évalués et que finalement le processus se mette en branle. Une fois tout cela fait, qu'on ait aussi des critères d'évaluation des parents faits d'une façon très objective.

M. Boucher: Je vais répondre à votre question en deux volets parce que j'y décèle effectivement deux volets. En matière d'évaluation de projets des adoptants, donc en ce qui concerne les critères dont nous nous servons pour faire les démarches d'évaluation auprès des requérants en adoption, nous avons effectivement contrairement à ce que certains ont peut-être été portés à penser, on ne nage pas ici dans l'arbitraire - préparé à l'Association des centres de services sociaux, de concert avec tous les centres de services sociaux et les professionnels qui oeuvrent en adoption, un guide de pratique en matière d'évaluation des projets des postulants en adoption, qui touchent aussi bien à l'adoption régulière qu'à l'adoption internationale. Ce guide de pratique est en application, en usage, dans nos CSS, certainement depuis mai 1985. À ce moment-là, quand on l'a préparé, on ne l'a pas inventé de toutes pièces, on l'a mis ensemble... c'est un compendium, pour ainsi dire, de la pratique qui existait déjà. Je pense que ce critère est public. Ce n'est pas quelque chose de caché et il sert essentiellement à évaluer la capacité parentale des gens qui se présentent à nous en faisant état du fait qu'ils pensent adopter un enfant.

La démarche d'évaluation est vraiment une démarche - je parle de démarche plutôt que d'une évaluation du type où on penserait à quelqu'un qui porterait un jugement sur quelqu'un d'autre - une démarche, dis-je, dans laquelle on invite les postulants en adoption à s'engager avec un ou des professionnels, seuls ou en groupe. Je pense que la plupart de nos établissements considèrent vraiment l'évaluation comme une démarche à l'intérieur de laquelle les gens s'inscrivent. Quand il y a des gens qui choisissent au cours de cette démarche ou qui réalisent que l'adoption régulière ou

internationale n'est pas pour eux - ce qui arrive le plus souvent - ce sont les gens eux-mêmes qui se retirent du processus d'adoption. Je pense qu'à l'usage ou à la pratique il est très rare que ce soit nous, à la fin du processus d'évaluation, qui présentons la conclusion suivante: Monsieur, madame, vous n'êtes pas aptes à adopter. Je ne dis pas que cela ne se peut pas, mais cela arrive rarement. Quand cela arrive - je pense qu'il y a eu un jugement récemment d'un tribunal de Montréal qui est venu nous mettre la puce à l'oreille - il faut faire en sorte - déjà on le fait et on va le faire mieux à l'avenir - que les gens auxquels on dit en conclusion qu'ils ne sont pas aptes à l'adoption de leur donner la chance aussi de nous redonner, et peut-être de faire valoir d'autres faits ou d'autres réalités pour infirmer ou nous faire changer d'avis. Ce que je peux vous dire, à notre avis, c'est quand même un processus assez transparent, basé sur la pratique qui a cours certainement en Amérique du Nord.

Pour ce qui est de l'autre point de votre question concernant les délais, nous disons qu'à partir du moment où on commence l'évaluation d'un couple qui fait une requête en adoption, en général, le tout peut se faire à l'intérieur de trois mois. C'est clair, cependant, qu'à partir de la date où les gens s'inscrivent et à partir du moment où l'adoption a réellement lieu, les délais sont immensément plus longs que cela. C'est peut-être à cela qu'il faudrait s'attaquer. Je pense qu'on a fait ressortir quelques-unes des causes tantôt, la principale étant, à notre avis, la pénurie d'enfants. Quand on sait, par exemple, que, à travers le processus qui est engagé avec le secrétariat à l'adoption, on est en train de répondre aux demandes qui ont eu lieu il y a trois ou quatre ans, on ne voit pas l'urgence de procéder immédiatement à l'évaluation de la personne qui fait une requête en adoption internationale, même à l'intérieur d'un délai de trois mois. Dans trois ou quatre ans, quand l'enfant sera disponible, peut-être qu'il faudra à ce moment-là procéder à nouveau à une autre évaluation, parce qu'il peut s'être passé diverses choses pendant cette période. Souvent les délais tiennent à cela.

Mme Vermette: Ce qui m'amène à poser d'autres questions. Je vais commencer avec la dernière partie de votre intervention. Vous avez parlé de pénurie d'enfants et c'est pour cela que les délais sont si longs. D'une part, depuis un certain temps et surtout depuis neuf ans, disons depuis le mois d'août, des pays se sont fermés. Il y a effectivement moins de pays, cela fait moins d'enfants à adopter, c'est plus difficile. Antérieurement il y avait une moyenne, à peu près, de 250 enfants qu'on pouvait adopter. Ce sont vos chiffres, jusqu'à un certain point. Actuellement, faute de pays et à cause de l'incompatibilité de nos lois, il arrive qu'il n'y a presque plus d'enfants à adopter dans différents pays. Voilà pour le manque d'enfants, une des premières questions que je me pose. L'autre aspect, ce que je voudrais aussi demander: Quelles ressources avez-vous pour répondre à tous ces besoins, ces demandes des parents? Si vous voulez faire votre évaluation telle que vous venez de me le dire, j'imagine que cela prend pas mal de ressources et que chaque ressource alloue un temps assez important à chaque cas pour apporter toute l'attention nécessaire.

M. Boucher: Le nombre de ressources, le président en faisait état tout à l'heure. On a 52 professionnels qui oeuvrent à l'évaluation des adoptants, que ce soit en adoption régulière ou en adoption internationale et qui font aussi tout le travail requis dans ce qu'on appelle les retrouvailles, la recherche des antécédents et le suivi des adoptions. De ce nombre, 52, il y en peut-être 10 qui oeuvrent en adoption internationale.

Mme Vermette: D'ailleurs, il y en a 52 justement qui font de l'adoption au mouvement "retrouvailles", mais il y en 10 autres en adoption internationale, qui, à mon avis, devient un volet important. Est-ce que 10 personnes suffisent à répondre à l'ensemble des demandes dans tout le Québec?

M. Boucher: Je ne pense pas pouvoir dire que c'est suffisant. (11 h 15)

M. Lapointe: II est évident que 10 personnes ne suffisent pas. Il y a même des centres de services sociaux qui donnaient le service autrefois, qui ne le donnent plus, parce qu'ils ont dû aussi tenir compte d'autres listes d'attente en matière de protection de la jeunesse et d'autres réalités aussi qui sont présentes. Je soulignerais toutefois que les 10 personnes dont on parle, ce ne sont pas nécessairement, non plus dans tous les centres de services sociaux, des gens qui sont uniquement spécialisés en adoption internationale. Cela peut être une partie de leur temps qui est en adoption internationale et une autre partie de leur temps en adoption régulière.

Alors, je souligne toutefois que - je sais que cette question a été abordée antérieurement - en ce qui concerne les qualifications professionnelles des intervenants on retrouve au-delà de 90 % de ces personnes qui ont au moins une formation universitaire, soit en service social ou en psychologie, et les autres 10 % sont des gens d'expérience, qui sont en adoption depuis plusieurs années.

Le Président (M. Bélanger): Vous aviez une autre question. Non, allez-y.

Mme Vermette: Non, c'est parce que je voulais juste... C'était juste pour savoir si c'était possible qu'on...

Le Président (M. Bélanger): Oui, c'est réglé.

Mme Vermette: D'accord. L'autre question que cela m'amène: vu qu'il y a des délais que tout le monde ne conteste pas, vu aussi qu'il vous manque des ressources, est-ce que vous seriez d'accord pour permettre aux parents de faire appel à des travailleurs sociaux privés pour faire leur évaluation?

Le Président (M. Bélanger): M,

Gaudreault.

M. Gaudreault: Cette question de recours à la pratique privée peut comporter des avantages, mais aussi des inconvénients. Peut-être que l'avantage, c'est d'accélérer le processus ou de raccourcir les délais. Par ailleurs, comme inconvénient sur le plan de la pratique clinique en cette matière, ça veut dire que les gens seraient appelés à être évalués par un praticien de pratique privée et que lorsque, par exemple, l'enfant est arrivé au Québec et qu'il faut assurer un suivi de cet enfant dans la famille, lui apporter aide, conseil, assistance, etc., ce serait un travailleur social du CSS qui le ferait.

On constate, dans la pratique, que si nos gens sont devenus de bons et de compétents évaluateurs, c'est parce qu'ils ont été à appelés à suivre les enfants dans les familles qu'ils ont d'abord évaluées. En constatant donc les capacités parentales des gens, en constatant également tes besoins des enfants et en faisant un jumelage, ces gens-là ont été appelés à être meilleurs dans leur pratique. À mon avis, l'inconvénient de recourir à la pratique privée se trouve sur le plan du suivi et d'une bonne et meilleure expertise dans le domaine de l'évaluation.

Le Président (M. Bélanger): Avant de passer à M. le député de Fabre, je voudrais juste faire une intervention en ce qui concerne la procédure et rappeler que l'enveloppe de temps qui est dévolue à chacune des formations peut être partagée. Elle n'est pas à des porte-parole fixes, mais vous pouvez la séparer ou chaque parlementaire peut se prévaloir de son droit de parole, ici, à la commission. II n'est pas question d'empêcher qui que ce soit de parler. Dans ce sens, il n'y a pas de problème.

Je reconnais M. le député de Fabre et, par la suite, Mme la députée de Johnson. Sur une question de règlement, je vous en prie.

Mme Juneau: Une précision, une question de règlement, s'il vous plaît, M. le Président. Est-ce que ça veut dire - vous m'avez répondu tout à l'heure quand j'allais vous le demander - que c'est 20 minutes par formation politique?

Le Président (M. Bélanger): Oui, par formation.

Mme Juneau: Mais 20 minutes une fois pour chaque mémoire ou 20 minutes répétées'

Le Président (M. Bélanger): Non, pour chaque mémoire. C'est parce que vous étiez absente au début. II y a une heure de dévolue: 20 minutes à l'organisme qui présente le mémoire, 20 minutes aux ministériels, vingt minutes à l'Opposition pour les questions. C'est une enveloppe renouvelable. M. le député de Fabre.

M. Joly: Merci, M. le Président, J'aimerais avoir de M. Lapointe ou de quelqu'un de son équipe, des commentaires sur un point. À la lecture de certains journaux, on ne semble pas retrouver un consensus sur le fait que nous, en tant que gouvernement, pouvons parfois nous ingérer -parce que c'est souvent des titres qu'on lit ou qu'on retrouve - dans le processus d'adoption internationale. Est-ce que, d'après vous, M, Lapointe, en tant que gouvernement, on doit avoir un droit de regard sur ça?

M. Lapointe: Je vais débuter. Je demanderai à mes collègues de continuer. Je pense qu'au moment où on se parle, au Québec, on entend aussi parler de politique de population, de taux de natalité. Je pense qu'on ne peut pas séparer une partie de l'ensemble du Québec, en parlant de l'enfant de l'avenir, qui peut être un enfant adopté, du tout québécois.

Alors, je pense que sur cette question, le gouvernement, me semble-t-il, a la responsabilité de planifier l'avenir, de faire en sorte que les règles du jeu soient mieux connues, que l'on puisse également être en accord avec les autres pays et en accord surtout avec les règles de droit normalement reconnues au Québec, simplifier et faciliter ces choses. Cela me paraît être une responsabilité gouvernementale. Je ne sais pas s'il y a de mes collègues qui veulent compléter.

M. Gaudreault: J'aimerais peut-être ajouter qu'il est clair que l'adoption est un geste d'amour. Je pense que cela se voit quotidiennement. Que l'on regarde dans notre histoire du Québec, dans l'histoire du Canada, que l'on regarde les législations de tous les pays du monde, c'est toujours un

geste qui a été sanctionné par un organisme d'État ou encore pour lequel l'État a établi des règles facilitant l'adoption.

M. Joly: M. le Président, avec votre permission, j'aurais peut-être une ou deux petites questions.

Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.

M. Joly: J'ai quand même été fasciné tantôt d'apprendre qu'au Québec, nous avons, toute proportion gardée, un grand nombre d'enfants qui seraient considérés comme actuellement adoptables et que plusieurs autres le seraient éventuellement, à l'intérieur du nombre des 1800 que vous mentionniez tantôt. Le volet que j'aimerais aborder est celui-ci: Vous avez dit tantôt que vous avez ou que vous êtes peut-être sur le point de préparer des programmes qui faciliteraient cette adoption par des Québécois, par des gens du Québec.

Au fond, je me dis que c'est une forme d'illogisme que d'essayer d'aller sur le marché international si, déjà, on a notre pépinière chez nous qui pourrait facilement, si vous le voulez, être adoptable. Tantôt, vous avez souligné un point. Peut-être que ce que les parents recherchent du côté national, c'est encore le bébé rose, pendant que nos jeunes adoptables sont peut-être un petit peu plus âgés. Pour ce qui est des programmes dont vous avez parlé tantôt, est-ce que c'est déjà en branle ou est-ce que c'est un projet que vous voulez mettre de l'avant?

Mme Denis: Juste une précision peut-être avant que M. Laurier Boucher complète la réponse. Sur le nombre d'enfants adoptables, les 2/3 ont plus de cinq ans. Le groupe des zéro à cinq ans est de 136 enfants. Ce n'est pas un grand nombre. Ce n'est que le 1/3. De fait, l'âge des enfants d'ici vieillit et les enfants adoptables sont donc de plus en plus vieux.

La réflexion que l'on se faisait hier en préparant cette rencontre-ci est la suivante: on se rendait compte qu'il y a au plan international et qu'il y aura vraisemblablement un vieillissement des bébés qui pourront être adoptés au plan international. La question se pose pour nous ici, mais je pense que, progressivement, on s'en va vers une situation où les bébés de deux ou de trois mois seront de moins en moins disponibles. M. Boucher, sur l'autre aspect.

M. Boucher: Oui, ce sont des programmes déjà en marche ou en vigueur, si vous voulez, à l'intérieur du grand programme de la protection de la jeunesse. La plupart ou la totalité de ces 1800 et 400 enfants dont on parle, ce sont des enfants qui sont placés, des enfants dont les parents sont décédés ou dont les parents, s'ils ne sont pas décédés, cherchent à se défaire, des enfants aussi pour lesquels, avant qu'ils soient vraiment adoptables, il faudra ou obtenir un consentement des parents, ce qui est loin d'être facile et loin d'être limpide, ou obtenir du tribunal, après tout un processus qui est souvent très long, une déclaration judiciaire d'adoptabilité.

Ce que je voudrais dire, c'est que depuis des années, par des incitatifs comme l'aide financière à l'adoption, c'est une des mesures qui a été mise en place au Québec, pour faciliter l'adoption d'enfants peut-être plus âgés, d'enfants qui étaient déjà placés en famille d'accueil, d'enfants qui souvent ont été placés, déplacés, replacés. Ce sont donc souvent, il faut bien le dire, des enfants carencés, des enfants difficiles, des enfants souvent détériorés et pas faciles à adopter. L'aide financière a été une façon de le faire. Mais il est clair aussi que, de plus en plus, à l'intérieur des directions de la protection de la jeunesse, on essaie de minimiser les temps de placements, les fréquences de placements et de déplacements, d'en arriver le plus rapidement possible à un plan global pour l'enfant, et souvent, quand on voit finalement que cela conduit à l'abandon de l'enfant, de s'orienter le plus rapidement possible vers l'adoption de cet enfant.

Je répète que ce ne sont pas des enfants faciles à adopter. Souvent, je comprends les couples qui ne sont pas toujours prêts à relever ce défi, parce que c'est vraiment un défi difficile.

M. Joly: Merci, M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Je ne sais pas si c'est parce que c'est la semaine de l'arbre, mais c'est la première fois que j'entends traiter des enfants de pépiniéristes. En tout cas!

J'aimerais poser certaines questions. Mme Denis, vous avez répondu, tout à l'heure, à Mme la ministre qu'il y avait 400 enfants adoptables, mais est-ce que vous pouvez nous préciser, vous qui avez une expérience certaine dans le domaine, le nombre d'enfants, dans les 1800, qui deviennent par le fait même adoptables par la suite?

Mme Denis: Je pense que, malgré mon expérience, comme vous le dites, je préférerais demander à un de nos praticiens de la protection de la jeunesse de répondre à cette question.

M, Gaudreault: Vous donner un

pourcentage relativement précis, cela me paraîtrait difficile et peut-être pas nécessairement conforme à la réalité, étant donné ce qu'on vient de dire tout à l'heure.

Vous savez, il y a là-dedans des enfants qui ne seront peut-être jamais adoptables et adoptés en raison de leur âge ou d'un handicap très important. Il y en a d'autres pour lesquels on est en processus avec, par exemple, les parents d'origine ou les parents naturels en vue d'un consentement; avec d'autres, on peut être en processus par rapport à une déclaration judiciaire d'adoptabilité. Derrière ce chiffre-là, il y a toute une série de situations extrêmement particulières les unes par rapport aux autres.

Mme Juneau: Est-ce que la demande des parents est de beaucoup supérieure au nombre d'enfants adoptables?

M. Gaudreault: Si on regarde, à vol d'oiseau, la situation ou le nombre de parents qui ont demandé une adoption interne au Québec, cela peut être de l'ordre de plusieurs milliers. Si je pense à notre région, c'est de l'ordre de 450, à peu près.

Mme Juneau: Demandes? M. Gaudreault: Demandes. Mme Juneau: Annuelles?

M. Gaudreault: Non, c'est une liste d'attente.

Mme Juneau: Une liste d'attente de 400...

M. Gaudreault: D'année en année, elles s'accumulent et augmentent, parce que le nombre d'enfants disponibles pour adoption de façon immédiate et en fonction aussi de la demande des gens ne correspond pas toujours è ce que l'on a comme disponibilités.

Mme Juneau: D'accord. Vous êtes toujours, j'imagine, en présence constante de parents qui souhaitent adopter un enfant. Quels sont, d'après vous, les irritants qui reviennent le plus fréquemment par rapport à ce que vous vivez dans le moment? Je voudrais que vous me disiez si le projet de loi présenté par la ministre va enrayer les carences qui existent aujourd'hui, d'après vos rencontres quotidiennes avec ces parents?

M. Gaudreault: Je pense qu'un des irritants importants pour les parents, c'est le fait, bien sûr, qu'il n'y ait pas d'enfants disponibles et qu'ils voudraient pouvoir procéder dans les semaines et dans les mois suivant leur demande, c'est-à-dire voir se concrétiser leur projet, ce qui n'est pas le cas.

Deuxièmement, je pense que, consé-quemment à cela ou en corollaire à cela, ce sont les délais importants qui interviennent. Donc, ils se voient inscrits sur une liste d'attente, délai pour l'évaluation et délai dans tout le processus qui peut intervenir.

Pour ce qui est du deuxième volet de votre question, même si je rencontre régulièrement des parents, il est rare que j'aie à discuter avec un couple en particulier - en tout cas, ce n'est pas arrivé - à savoir si le projet de loi actuellement sur la table et en discussion les satisferait ou simplifierait les démarches qu'ils ont à faire? Mais je peux vous dire que le projet de loi, dans mon esprit et tel qu'on le dit dans notre mémoire, devrait permettre de régulariser un certain nombre de situations, d'accélérer le processus d'intervention et de faire en sorte que les enfants d'autres pays ne se retrouvent pas au Québec dans une situation dite irrégulière et sans statut.

Mme Juneau: Mais vous ne pensez pas que le fait que vous ayez un délai, comme vous l'avez dit tout à l'heure, dans l'évaluation des cas, que cette obligation de votre part - parce que vous n'avez pas d'enfants disponibles - de reculer dans le temps l'évaluation... ne pensez-vous pas que, si l'évaluation était faite, les enfants qui seraient adoptables, mais non compatibles avec certains couples le seraient peut-être avec d'autres dont vous n'avez pas pu faire l'évaluation? (11 h 30)

M. Gaudreault: C'est toujours le même processus, celui que vous illustrez, qui est suivi. Par exemple, les parents qui veulent adopter un enfant plus âgé, à partir de quatre ou cinq ans, sont considérés prioritairement dans notre liste d'attente, par exemple, d'adoption interne au Québec. Les parents qui veulent adopter un enfant handicapé, que ce soit au plan intellectuel ou au plan physique, reçoivent une considération particulière. Je peux vous dire que chez nous, dans notre région, je n'ai pas actuellement, en attente, des parents qui se sont offerts pour adopter des enfants plus âgés ou des enfants handicapés. Ceux qui sont sur ma liste d'attente de 350 dont je vous parlais tantôt, ce sont des parents qui voudraient adopter un très jeune enfant, donc dans leur esprit, un enfant de quelques mois, au maximum 18, 24 mois.

Mme Juneau: Si je comprends bien, ce n'est pas possible, parce que vous dites que cela prend trois ou quatre ans.

M. Gaudreault: C'est cela.

Une voix: Plus que cela: cela peut être de huit à onze ans.

Mme Juneau: Cela n'a pas d'allure. Je ne comprends pas. On a l'offre et la demande, je m'excuse du terme que j'utilise...

Une voix: ...

Mme Juneau: Non, vraiment pas. Je pense que si nous avons, d'une part, des parents engagés qui le souhaitent et que, d'autre part, vous ne pouvez permettre à ces parents de réaliser leur rêve ou leur désir, n'y aurait-il pas lieu, à ce moment-là, d'avoir une amélioration de ce côté? Est-ce que ce ne serait pas préférable à toute autre chose qu'on pourrait instituer?

M. Gaudreault: II n'y a pas d'enfants de disponibles pour répondre au projet de ces parents.

Mme Juneau: Des 69 pays?

M. Gaudreault: Vous parlez de l'adoption internationale en ce moment?

Mme Juneau: Les deux. On ne pourrait pas, à ce moment-là, si nous n'avons pas d'enfants disponibles ici au Québec...

M. Gaudreault: Cela m'amène, madame, à vous dire que la disponibilité dans les pays n'est pas ouverte et infinie; il y a des limites. Il y a des règles aussi dans des pays, qu'on pense à la Corée, qu'on pense au Brésil et à d'autres, il y a des règles dans ces pays qui font en sorte que n'importe quel enfant ne soit pas rendu disponible parce que des Québécois, des Suisses, des Belges ou des Français veulent l'adopter.

Mme Juneau: Je connais quelques parents qui ont attendu un certain nombre d'années pour avoir le privilège d'avoir des enfants à l'adoption internationale et, ne voyant pas le dossier aller de l'avant, ils ont pris les devants, ils sont ailés rencontrer un prêtre là-bas et ils sont revenus avec des enfants. Je n'ai rien contre cela, qu'un enfant reçoive de l'amour, une bonne maison et tout, quand celui-ci est peut-être voué à la mort. Je n'ai pas disputé ces parents, je vous en passe un papier.

Mme Denis: Je pense qu'il ne faut pas non plus se faire une fausse image de la disponibilité des enfants là-bas. Qu'on imagine s'il y avait beaucoup trop d'enfants ici et que des pays souhaitaient venir adopter nos enfants, quel genre de comportement on aurait? Je pense que, en ce sens, l'idée d'arriver à faire des ententes avec les pays va faciliter une disponibilité plus grande d'enfants d'autres pays pour adoption ici. Cependant, je ne pense pas qu'il y ait là-bas un bassin infini non plus, car les pays vont souhaiter qu'il y ait des règles du jeu et que cela se fasse dans le cadre d'ententes. Quand une personne va elle-même chercher, par exemple, un enfant et le ramène, peut-être qu'elle réalise un projet d'amour; cependant, je ne suis pas certaine qu'elle donne à cet enfant ses pleins droits lorsqu'il habite ici.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Papineau.

M. Assad: Madame, dans votre préambule, vous avez mentionné qu'il y a trois principes qui vous guident. Le deuxième c'est qu'en adoption internationale, il ne faut pas oublier que nous avons beaucoup à offrir à ces enfants, mais que ces enfants n'en constituent pas moins la richesse et la relève de ces pays où on voudrait aller les adopter.

Si je comprends bien, une des restrictions que vous voyez, c'est que, au fond, dans ces pays, c'est la relève et c'est leur richesse. Donc, on ne devrait pas aller piger dans leur richesse. C'est un des principes que vous maintenez.

Mme Denis: Je pense que le sens de ce qui est énoncé, c'est vraiment qu'il faut être respectueux de ce que les autres pays ont comme intention aussi par rapport à leurs enfants. Je pense qu'essentiellement cela veut dire qu'il faut y aller par des ententes claires avec ces pays et non pas de façon très anarchique. Je pense qu'on doit être respectueux de ce que les pays souhaitent pour leurs enfants. Beaucoup de pays ont aussi des exigences très précises par rapport aux enfants qu'ils offrent en adoption internationale.

M. Assad: D'accord. Donc, s'il y a un accord, que ce soit avec 69 pays ou je ne sais pas lequel, c'est évident que c'est parce qu'ils sont prêts à faire des ententes avec nous sur cette question. II faut dire que ces pays sont la relève et la richesse, mais il y en a très peu, dans l'ensemble, qui auront la chance d'avoir des conditions favorables pour une vie agréable.

M. Boucher: Là aussi, on peut verser dans des jugements de valeur; je pense qu'on y a fait un peu allusion. On cite le cas suivant. On dit: Pour un petit haïtien, la relation enfant-parent, même dans un contexte qui, à nos yeux, est peut-être très pauvre et très précaire, cela ne se remplace pas, même par des conditions matérielles qui nous apparaissent beaucoup plus favorables au développement d'un enfant.

Il y a autre chose aussi, à la suite de votre question. Avec le temps, et je pense que ce ne sera pas long, les pays avec lesquels on va transiger vont mettre comme condition qu'on s'occupe peut-être prioritairement de leurs enfants qui sont dans

des orphelinats, qui ont été abandonnés, qui ont peut-être été déplacés et replacés plusieurs fois, plutôt que de continuer à permettre - et je ne suis pas sûr d'ailleurs qu'ils le permettent - que des gens d'autres pays viennent hypothéquer, pour ainsi dire, les ventres des mères de leur propre pays. Je pense qu'eux aussi vont mettre des priorités. Avec le temps, ce seront les mêmes enfants pour lesquels il est difficile ici de trouver des couples d'adoptants qu'ils vont nous proposer comme enfants à adopter.

Le Président (M. Bélanger): II vous reste 30 secondes, alors, très rapidement.

Mme Vermette: C'est difficile de tout cerner en 30 secondes et de conclure en même temps. Comme je sais que ce sera impossible, je voudrais que vous m'expliquiez, en tout cas, le fait que vous mentionnez dans votre mémoire, à la page 12, qu'il n'est pas question de toucher à la gratuité et à l'universalité des services. Vous vous opposez à une tarification en ce sens. J'aimerais savoir pourquoi vous faites mention de cela dans votre mémoire?

Mme Denis: On a mentionné cela dans notre mémoire parce qu'on veut être conséquents avec l'ensemble des propos qu'on a tenus sur cette question à ce jour. Dans le cadre des travaux qu'on a effectués, notamment pour la commission Rochon, et à la suite des positions qu'on a prises à ce moment, on a indiqué que, s'il ne pouvait être passible d'assurer la gratuité dans l'ensemble de la gamme des services, il y avait peut-être certains services pour lesquels on pouvait envisager une tarification. On citait notamment en exemple l'adoption internationale. C'est pour cela qu'on a ramené ce point dans notre mémoire en indiquant toutefois que l'ensemble du débat ne semble pas être fait et qu'il nous apparaîtrait difficile de cheminer à très court terme avec une tarification pour ce service, tant qu'il n'y aura pas vraiment une politique d'ensemble là-dessus.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Il n'y a plus de temps, malheureusement. Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Très brièvement, M. le Président. II y a tout un volet qu'on n'a pas véritablement abordé et que vous avez touché dans votre présentation ou dans une de vos réponses, c'est toute la question de la communication entre - d'après ce que j'ai cru comprendre - le Secrétariat à l'adoption internationale, les organismes d'adoption internationale et les centres de services sociaux. En tout cas, je me propose certainement, et peut-être avec d'autres, d'examiner cela davantage parce que c'est une partie de la clé. On établit très bien que la pénurie d'enfants est un facteur, mais si l'on veut vraiment alléger les choses, il va falloir examiner l'autre facteur de plus près. Vous faites des suggestions, par exemple, une modification à l'article 2, justement pour accélérer peut-être ce processus puisque vous interviendriez directement plutôt que la ministre ou, enfin, son délégué. Sauf que, là, cela pourrait peut-être créer des inégalités. C'est séduisant au premier abord, mais cela pourrait peut-être créer des inégalités sur le plan régional. Il y a aussi le désir des parents qu'il y ait une liste provinciale et qu'ils puissent se situer dans cette liste provinciale.

On dit que les pays sont fermés, mais on sait que dernièrement Haïti a fermé ses frontières parce que, justement, l'adoption se faisait un peu trop à la va-comme-je-te-pousse. La Bolivie s'est fermée et il y a un autre pays qu'on mentionnait qui s'est aussi fermé à l'adoption. Cela ne veut pas dire qu'il n'y a pas moyen de retourner dans ces pays et de faire, une entente avec eux, pas nécessairement une entente entre gouvernements. Il ne faudrait pas s'imaginer que partout cela va être des ententes de gouvernement. Cela peut être des ententes administratives, comme d'ailleurs c'est le cas avec la Corée. Ce n'est pas une entente entre gouvernements. Il faudra comme condition fondamentale que le pays consente à l'adoption et qu'il y ait un geste du gouvernement du pays pour respecter ce que Mme Denis mentionnait tout à l'heure, ce qu'eux veulent pour leurs enfants et pas nécessairement ce que nous nous voulons pour les enfants, ce qui est peut-être souhaitable en soi pour les enfants des pays étrangers.

Si vous avez une seconde pour m'expliquer d'une façon un peu plus détaillée, ce que vous vouliez dire exactement sur la communication, et comme je n'aurai pas le droit de revenir, je veux vous remercier de votre présentation. S'il y a lieu, je pense que nous pourrons revenir avec vous pour clarifier certaines choses.

M. Gaudreault: Je pense, si je peux me permettre d'expliciter ma pensée, que l'adoption internationale est un rouage complexe. Du début du processus jusqu'à la fin, y compris l'intervention du Tribunal de la jeunesse, il y a des politiques et des procédures administratives qui doivent être établies, qui doivent constituer les règles d'action, que chacun des intervenants devrait être appelé à suivre, et j'oserais même dire obligé de suivre. En d'autres mots, on ne peut pas tout régler par la loi ni par un règlement; il nous faudrait, en outre, une politique qui détermine, par exemple, où le secrétariat intervient et comment cela va se passer avec le secrétariat, comment cela va

se passer aussi avec le directeur de la protection de la jeunesse et ainsi de suite. Tout cela avec une détermination et une clarté dans ces rouages-là. Par delà cela, il faudra aussi que le monde se parle et puisse avoir les moyens de se rencontrer et de discuter entre eux.

Mme Denis: Je veux juste ajouter que des communications de plus en plus grandes entre les différents intervenants, notamment entre les CSS et le secrétariat, sont amorcées. Je crois que c'est porteur d'espoir pour une amélioration de ce qui passe. On a parlé de l'article 2 et de l'ajustement qu'on propose. Il me semble qu'il serait possible, tout en faisant cet amendement, de maintenir un objectif de gestion d'une liste d'attente sur le plan provincial. Je pense que le fait que les gens se parlent pourrait nous amener à concilier des objectifs comme ceux-là.

Mme Lavoie-Roux: Merci.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Marie-Victorin, si vous désirez exprimer des...

Mme Vermette: Oui, je voulais remercier, en fin de compte, tous les gens qui se sont présentés, qui nous ont donné des explications de leur mémoire. J'ose espérer qu'on pourra cerner ceux qui devront se parler et dans quelle proportion ils devront se parler et quels seront les résultats. J'espère qu'on aura de bons résultats. Merci.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme la ministre ayant déjà exprimé ses remerciements, je me permets, au nom de la commission, de vous remercier de votre présence, de la qualité de votre intervention et de tous les efforts que vous avez consentis autour de ce thème. Je vous remercie donc et j'invite le prochain groupe, le Secrétariat à l'adoption internationale. Pour qu'il puisse s'installer, nous allons suspendre les travaux pour cinq minutes. D'accord? Alors, nous recommençons à 11 h 50.

(Suspension de la séance à 11 h 44)

(Reprise à 11 heures 53)

Secrétariat à l'adoption internationale

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plattï Je demanderais à chacun de reprendre sa place. Nous allons reprendre nos travaux. Si vous le permettez, nous allons reprendre les travaux de la commission, cette fois-ci pour entendre le Secrétariat à l'adoption internationale, dont la directrice est Mme Huguette Bisaillon.

Mme Bisaillon, auriez-vous l'obligeance, s'il vous plaît, de nous présenter votre table? Nous vous souhaitons, évidemment, la bienvenue à la commission.

Mme Bisaillon (Huguette): Merci, M. le Président. J'aimerais vous présenter, à ma droite, notre conseiller juridique, M. Lucien Le Blanc.

Le Président (M. Bélanger): M. Le Blanc, bonjour!

Mme Bisaillon: Et à ma gauche, M. André Soucy, responsable, au secrétariat, des relations internationales.

Le Président (M. Bélanger): M. Soucy, soyez aussi le bienvenu. Alors, madame, je vous répète les règles. Vous avez 20 minutes pour faire la présentation de votre mémoire et chaque parti, ministériel ou de l'Opposition, aura 20 minutes de questions pour vous. D'accord? Je vous prie de procéder à la lecture de votre mémoire.

Mme Bisaillon: M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs, le Secrétariat à l'adoption internationale est heureux de pouvoir présenter aux membres de la commission des affaires sociales son point de vue quant à la manière dont il envisage son mandat, compte tenu du projet de règlement sur l'adoption internationale et du projet de loi 21 présentement à l'étude.

Il est peut-être bon de préciser au départ que le Secrétariat à l'adoption internationale n'est pas un organisme, comme plusieurs personnes semblent le croire, mais bien un service du ministère de la Santé et des Services sociaux, qui agit au nom de la ministre et qui relève au plan administratif du sous-ministre en titre.

Par cet exposé, le secrétariat se propose de faire le point sur le phénomène de l'adoption internationale, de vous présenter les principes qui guident son action, les règles juridiques sur lesquelles il s'appuie, de même que les responsabilités qu'il exerce à l'intérieur du processus d'adoption d'un enfant domicilié hors du Québec.

Tout d'abord, pour l'état de la question, on peut dire qu'au Québec, comme partout dans le monde, le phénomène de l'adoption internationale est une réalité relativement récente. De fait, depuis les années 1970, on constate du côté des pays industrialisés une baisse générale du taux de natalité, alors que du côté des pays en voie de développement, l'amélioration relative mais certaine des conditions de vie fait que la population ne cesse de croître. Dans ce contexte, il est un peu normal de constater que des couples, surtout des couples occidentaux, se tournent

vers l'adoption transfrontalière pour combler leurs espoirs.

Il est intéressant de noter que, toute proportion gardée, le Québec se trouve à l'intérieur des mêmes paramètres que le Canada et certains pays industrialisés pour ce qui est du nombre d'adoptions qui sont réalisées d'une année à l'autre, surtout si on regarde ce qui s'est passé au cours des dernières années. Comme les statistiques l'indiquent, au Québec, l'expérience nous démontre que depuis la création du Secrétariat à l'adoption internationale, environ 250 adoptions sont autorisées chaque année pour une liste d'attente de 1200 à 1500 personnes. Pour ce qui est des délais, ils sont de trois à cinq ans. Quand on regarde ce qui se fait ailleurs, et particulièrement en Suisse et en République fédérale d'Allemagne, on nous dit que, pour compléter un projet d'adoption, les délais sont similaires. Nous nous sommes renseignés également auprès du reste du Canada. Lorsqu'il s'agit d'adoptions gouvernementales, les délais sont d'au moins trois ans et je pense qu'on peut ajouter aussi quelques mois. En ce sens, on se compare favorablement à ce qui se fait ailleurs. Maintenant, au Québec, les délais sont dus en grande partie au manque de propositions d'enfants.

On peut définir l'adoption comme un processus juridique et social qui crée un lien de filiation entre des personnes, l'adoptant et l'adopté, qui généralement n'étaient pas ainsi liés par le sang. Ce lien peut être plus ou moins complet, surtout au point de vue juridique, selon la forme d'adoption impliquée. Il existe, principalement, deux types d'adoption, l'adoption simple et l'adoption plénière. Pour décrire l'adoption plénière de façon succincte, on peut dire que c'est celle qui rompt tous les liens de filiation avec la famille d'origine et qui intègre de façon totale et inconditionnelle l'adopté à la famille de l'adoptant. Quant à l'adoption simple, elle maintient certains liens avec la famille biologique de l'adopté et apporte certaines restrictions à l'intégration de celui-ci à la famille de l'adoptant.

En termes clairs, cela veut dire que, si une famille d'adoptants a des enfants biologiques, ces enfants biologiques sont, au point de vue social, les frères et soeurs de l'enfant adopté sous la forme simple mais sur le plan juridique, ce ne sont pas ses frères et soeurs. De la même façon que les parents de l'adoptant sont ses grands-parents sur le plan social, mais non sur le plan juridique. Alors, évidemment, si on continue à se poser des questions pour savoir quel type de liens les enfants de ces enfants adoptés de cette façon auront avec leurs grands-parents, vous savez, au plan juridique cela devient un peu compliqué pour une société.

Quant aux principes qui guident le gouvernement en matière d'adoption internationale, ils sont d'ordre juridique et social, ils reposent sur des critères éthiques et moraux et s'inspirent des valeurs véhiculées par notre société, les conventions internationales et, donc, de la volonté généralement exprimée par les pays qui ont des enfants à être confiés en adoption. Alors, on peut résumer ces principes de la manière suivante. Tous les enfants qui vivent au Québec - nous l'avons vu - quelle que soit leur origine, doivent être éqaux devant la loi. C'est ainsi que les effets d'une adoption prononcée ou reconnue au Québec sont de conférer à l'enfant et à ses parents adoptifs les mêmes droits et les mêmes obligations qu'une filiation par le sang.

La politique du Québec est orientée en fonction de l'intérêt de l'enfant, du respect de ses droits et du respect de la volonté légitime des pays de décider de l'avenir de leurs enfants. Dans cette optique, l'adoption internationale est d'abord conçue comme un moyen de protection en vue de donner une famille à l'enfant qui n'en a pas, mais permet également aux adoptants de réaliser leur désir d'avoir un enfant.

En cela, on peut dire que le Québec adhère aux grands principes qui sont contenus dans la déclaration universelle des droits de l'enfant de 1959 et qui sont en partie repris pas ta résolution de l'ONU qui a été adoptée en décembre dernier.

Tout à l'heure, on a parlé des types d'adoption simple et plénière. Ce qu'il faut retenir, c'est qu'au Québec le choix du législateur s'est porté sur l'adoption plénière et que son choix a été motivé par une volonté de faire en sorte que l'enfant n'ait qu'une seule filiation et qu'ainsi, nous l'avons vu, tous les enfants puissent être éqaux devant la loi, bénéficient des mêmes droits et soient assujettis aux mêmes obligations.

Dans ce contexte, la rigueur de la règle de droit liée aux liens de filiation et le pouvoir discrétionnaire du ministre ont été remis en cause. Quant au rôle d'intermédiaire prévu dans la loi, il devenait essentiel de le clarifier. En fait, l'expérience vécue par l'ensemble des intervenants dans ce dossier au cours des derniers mois démontre clairement que la loi actuelle peut donner lieu à des interprétations divergentes et rendre possibles certaines situations qui auraient avantage à être évitées. Comme l'adoption internationale est un phénomène relativement récent, mais évidemment en constante évolution, il est tout à fait normal de constater qu'il faut faire, en cours de route, des ajustements de façon régulière.

Les problèmes reliés au déracinement culturel des enfants qui sont déplacés par l'adoption transfrontalière, comme les possibilités de trafic d'enfants, les pressions exercées par les parents adoptants anxieux

de voir leur projet se réaliser et l'inquiétude des pays face au départ de leurs enfants sont autant de réalités auxquelles sont confrontées les sociétés modernes qui ont à se pencher sur le phénomène de l'adoption internationale et, dans ce contexte, il faut convenir qu'il n'y a pas de société, à notre avis, qui a trouvé la solution miracle qui pourrait concilier les intérêts de tout le monde. Ce qui semble faire consensus au plan international, ce sont les ententes intergouvernementales.

Quant aux orientations du Québec dans le dossier, bien sûr, l'intervention gouvernementale en matière d'adoption internationale vise à favoriser l'adoption internationale tout en respectant les droits des enfants, des parents biologiques comme des parents adoptifs et aussi en respectant les principes qu'on vient d'énoncer. Et c'est dans cette optique qu'il faut considérer le projet de règlement, comme le projet de loi 21, avec ce qu'il apporte d'éléments nouveaux. On peut résumer ces éléments nouveaux en trois points: une ouverture à l'adoption simple, une intervention accrue du Tribunal de la jeunesse et un nouveau rôle confié, si l'on veut, à la ministre, celui d'être l'unique intermédiaire pour les projets d'adoption.

Pour ce qui est de l'ouverture à l'adoption simple, les jugements étrangers d'adoption simple pourront être reconnus au Québec et ils auront les mêmes effets qu'un jugement rendu au Québec dans la mesure où l'Etat d'origine de l'enfant aura donné son consentement à l'adoption. Cette mesure vise à assouplir la règle de droit et elle ouvre la porte à tous les orphelinats publics de ces pays à adoption simple.

Pour ce qui est de l'intervention accrue du Tribunal de la jeunesse, dans les cas d'adoption à l'étranger, les requérants devront faire vérifier leur projet par le Tribunal de la jeunesse. Cela aura pour conséquence de sécuriser les adoptants avant qu'ils ne partent à l'étranger chercher leur enfant, parce qu'à ce moment-là, ils seront sûrs que leur projet est valide. Cela permettra au Secrétariat à l'adoption internationale de se consacrer davantage à ses tâches puisqu'il n'aura pas à s'interposer à cette étape précise du processus et, en ce sens-là, cela lui permettra également de mettre plus de temps au profit de ses relations avec la clientèle et de l'efficacité du système.

Quant au nouveau rôle de la ministre comme unique intermédiaire dans le dossier, les modifications proposent que la ministre ait pour mandat d'élaborer la politique concernant l'adoption d'un enfant domicilié hors du Québec, de voir à sa mise en oeuvre, d'en surveiller l'application et d'en coordonner l'exécution. Cette mesure a été rendue nécessaire par la complexité du dossier et par la multiplicité des intervenants. Il nous fallait absolument trouver un moyen de mieux coordonner les activités et l'apport de ces différentes personnes.

Cela signifie qu'un adoptant domicilié au Québec ne pourra désormais adopter un enfant domicilié hors du Québec que par l'intermédiaire du ministre, par l'entremise du Secrétariat à l'adoption internationale. Le ministre, par son secrétariat, devra établir et maintenir des liens avec ses collaborateurs les plus immédiats, c'est-à-dire avec les directeurs de la protection de la jeunesse et les organismes reconnus. Dans ce dernier cas, ces organismes pourront intervenir selon une convention qui sera signée avec ta ministre et qui déterminera les conditions et les modalités selon lesquelles ils peuvent agir dans les différents pays où ils oeuvrent.

Si on tient compte de ce qui précède, le Québec s'est engagé au cours des derniers mois dans une approche assez systématique de tous les pays qui sont intéressés par l'adoption internationale, en commençant bien sûr par ceux avec qui il avait déjà créé des liens. Quant à nous, seuls des rapports de confiance qu'on pourrait établir sur une base continue avec ces pays sont susceptibles de nous conduire à des résultats positifs dans un dossier comme celui-là.

Les gouvernements étrangers, eux, voient dans la conclusion d'accords un moyen de mieux contrôler l'adoption internationale, de diminuer le rôle et l'influence des réseaux parallèles, d'assurer le respect des lois en cause et de mieux suivre l'évolution des enfants dans leur foyer respectif. Jusqu'à maintenant, on peut dire que le Québec a reçu un accueil extrêmement favorable par rapport à sa politique d'adoption internationale quand il s'est présenté auprès d'un certain nombre de pays des Caraïbes et d'Amérique latine au cours des derniers mois.

En conclusion, on peut dire que les délais qu'implique actuellement un projet d'adoption pourraient être considérablement réduits dans la mesure où les efforts du secrétariat pour augmenter le nombre de propositions d'enfants pourront s'avérer fructueux. En ce sens, on peut aussi dire que la conclusion d'entente - et entendons-nous par le terme "entente", Mme la ministre le soulignait tantôt, il ne s'agit pas nécessairement toujours d'ententes formelles entre gouvernements, cela pourrait être des ententes plus souples au niveau d'arrangements administratifs possibles - il n'en demeure pas moins un outil essentiel pour en arriver à augmenter le nombre de propositions d'enfants. Si on se fie au résultat obtenu auprès des neuf pays des Caraïbes et d'Amérique latine que nous sommes allés rencontrer, je pense qu'il y a lieu d'envisager l'avenir avec optimisme. Et surtout que le projet de loi 21 ouvre aussi la possibilité de pouvoir compléter des projets d'adoption avec

des pays à adoption simple, ce qui élargit le bassin potentiel de pays avec lesquels on pourrait s'asseoir pour pouvoir discuter d'ententes possibles.

Enfin ce qui est prévu dans le projet de loi 21 comme dans le règlement, c'est-à-dire une meilleure coordination de tous les intervenants, une clarification de leur râle et aussi des mécanismes de concertation et de consultation plus structurés, devrait permettre une amélioration sensible du système, et aussi amener plus de Québécois et de Québécoises à pouvoir adopter à l'étranger.

Voilà, en substance, ce que le secrétariat souhaitait vous soumettre. Bien sûr, nous sommes venus ici avec une très grande ouverture et nous sommes tout à fait disponibles pour répondre à vos questions.

Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie beaucoup, madame. La parole est maintenant à Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais remercier les porte-parole du Secrétariat à l'adoption internationale. On sait qu'ils ont été sous les feux durant les derniers mois, et même durant les dernières années. Le Secrétariat à l'adoption internationale a été créé en 1979 à partir de principes auxquels on concourt toujours et dont l'application n'a pas toujours été facile. Évidemment pour des parents qui attendaient avec anxiété et voulaient adopter un enfant sur le plan international, les tensions ont été créées par les délais qui, depuis le début, semblent avoir été le lot d'un bon nombre de ces parents, comme d'ailleurs c'est le lot de parents aussi qui attendent pour adopter des enfants au Québec, comme on nous le disait tout à l'heure.

Ceci étant dit, je pense que, quant à votre fonctionnement qui a souvent été remis en question, je vais laisser cela a d'autres qu'à moi-même de vous poser des questions là-dessus, parce qu'on a quand même l'occasion d'échanger des propos là-dessus. On l'a fait et on va continuer de le faire avec intensité pour essayer de corriger ce qui a besoin d'être corrigé.

En ce qui concerne la pénurie d'enfants, c'est une pénurie qui existe aussi pour d'autres pays. Là où l'on veut formaliser les choses, il semble que cela rend les choses plus difficiles. Évidemment, avec l'interprétation qui a été donnée de l'adoption plénière, une restriction plus grande s'est appliquée; même si elle devait être là depuis au moins 198Q; elle avait été appliquée d'une façon sporadique, des fois oui, des fois non.

Mais là, avec l'ouverture vers l'adoption plénière, est-ce que, théoriquement, il y a des pays qui pourraient être exclus d'une entente administrative, ou des pays où on ne pourrait pas aller chercher des enfants? Évidemment, on ne peut pas aller dans tous les pays du monde; je pense que peut-être, physiquement, cela devient une chose impossible. Mais, théoriquement, le fait que l'on permet maintenant l'adoption simple avec le consentement du pays, est-ce qu'il y a des pays que cela exclut?

Mme Bisaillon: Enfin, j'ai entendu parler d'un pays de l'Amérique latine, je crois que c'est l'Uruguay ou le Panama - je ne voudrais pas me prononcer d'une façon décisive là-dessus - où on exige, par exemple, que l'adoptant puisse résider là-bas deux ou trois ans. Alors, il est évident qu'une exigence comme celle-là bloque l'entrée d'un pays comme celui-là. Ce sont vraiment quelques rares exceptions. Pour le reste, il est évident que cela ouvre à l'ensemble des pays l'adoption simple, surtout, comme je le mentionnais, pour ce qui est des orphelinats publics, tous les enfants qui sont sous la tutelle de l'État. À ce moment-là, cela est susceptible de nous amener... Si on pense, par exemple, au Guatemala, à Haïti - si toutefois le moratoire prend fin - et il y a d'autres pays, on peut facilement penser qu'à moyen terme on pourrait augmenter très sensiblement le nombre d'entrées d'enfants au Québec, à cause de cette ouverture.

Mme Lavoie-Roux: Maintenant, une question que je voudrais vous poser, c'est par rapport aux organismes reconnus d'adoption internationale. Devant le projet de loi et le règlement, une certaine inquiétude s'est manifestée; d'ailleurs, on la retrouve dans certains mémoires des groupes ou des organismes reconnus en adoption internationale.

Est-ce que les relations entre le Secrétariat à l'adoption internationale et les organismes reconnus pourraient être améliorées? Quels sont les points, s'il y a des problèmes, où les difficultés surgissent?

Mme Bisaillon: Les organismes reconnus sont certainement vus comme des collaborateurs par le secrétariat. De toute manière, ils effectuent un travail que le secrétariat ne serait pas en mesure de faire, compte tenu de l'organisation actuelle, par exemple en ce qui concerne la préparation des dossiers et celle des parents, et en ce qui concerne leur intervention dans les pays. Nous ne sommes pas un pays, nous n'avons pas d'ambassade; à certains endroits, on a des délégations, mais ce n'est pas un râle qui leur revient. Alors, assurément, ils jouent un rôle extrêmement précieux.

Ce qu'il y a d'intéressant avec le projet de loi 21 et la convention type qui devra être approuvée par le gouvernement et qui devra faire partie de la convention que

les organismes signeront avec vous-mêmes, c'est que les liens de collaboration devront être intensifiés. Une des modifications majeures, c'est que le ministre ou le secrétariat, selon les cas, devra présenter, d'une façon officielle, ses organismes et le représentant auprès des autorités officielles des pays et dire: Voilà, dans votre pays, ce sont ces organismes qui travailleront de concert avec nous pour l'adoption d'enfants en provenance de votre pays. À ce moment-là, il y a des liens nécessaires qui devront s'établir dans le quotidien, ce qui n'existait pas nécessairement avant. On se rencontrait d'une façon sporadique, aussi souvent que nécessaire, mais je pense que la convention type à laquelle ils devront s'engager va assurément nous amener à travailler peut-être même plus que comme des collaborateurs. On va devoir avoir besoin les uns des autres, en d'autres termes.

Mme Lavoie-Roux: Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Marie-Victorin. (12 h 15)

Mme Vermette: Cela me fait plaisir, au nom de ma formation politique, de vous recevoir à cette commission parlementaire et de vous remercier de vous prêter si facilement à nos questions.

Je commence tout de suite par un exercice mathématique. À la page 2 de votre mémoire, vous parliez du nombre, d'une moyenne annuelle de 250 autorisations, en fin de compte, dans les quatre dernières années. Un peu plus loin, on dit qu'il y a eu 2000 adoptions d'enfants au total, dans 69 pays. Dans 69 pays, c'est avant le décret. Donc, je voudrais savoir, toute proportion gardée, les statistiques depuis 1979 en adoption internationale par année, et si vous avez des chiffres qui font qu'on peut arriver à cette moyenne-là.

Mme Bisaillon: Les 2000 adoptions indiquées reposent en partie sur une étude qui s'intitule "Le vécu en adoption internationale" et qui a été faite en décembre 1982 ou janvier 1983. À ça, on a ajouté les statistiques qu'au ministère, comme au secrétariat, nous avons pour la réalisation des projets d'adoption. J'ai ici, par année de calendrier, le nombre d'adoptions qu'on a pu faire depuis...

Mme Vermette: 1979?

Mme Bisaillon: Depuis 1982. 1979, je l'ai dans ma serviette. Je pourrai vous le donner. En 1983, disons qu'on a donné des autorisations pour 331 dossiers. Je vais m'expliquer tantôt sur ce que veut dire le terme "autorisation". En 1984, 252; en 1985, 264 et en 1986, 205. Depuis le 1er janvier 1987 jusqu'au 1er mai, 46.

Alors, je sais que des journaux, des gens ont avancé des chiffres moindres que ceux-là. C'est que, à ce moment-là, eux se basent sur des statistiques relatives à des adoptions complétées, c'est-à-dire qui ont reçu une reconnaissance de jugement, ici, au Québec. Nous, nous parlons d'autorisations que nous émettons auprès des deux services d'immigration avant que le parent aille chercher l'enfant, de sorte que le parent n'entre pas toujours dans l'année avec son enfant, d'une part. D'autre part, ce qu'on pense, c'est qu'il y a beaucoup de parents qui ne demandent pas une reconnaissance de jugement. Cela pourrait expliquer l'écart qui existe entre nos chiffres et ceux qui ont paru publiquement.

Mme Vermette: Je ne voudrais pas être tout à fait méchante, mais plusieurs parents ont eu énormément de difficulté à faire entrer leur enfant. Ils ont été obligés même d'aller devant certains tribunaux. Mais indépendamment de cela, je voulais vous dire qu'en 1979, avant votre entrée en fonction... J'aimerais avoir des statistiques à partir de 1979, pour savoir exactement le nombre d'enfants adoptés depuis 1979 à 1983. Finalement, on pourrait peut-être aussi vérifier le nombre d'enfants à partir de 1983 jusqu'à aujourd'hui.

Mme Bisaillon: Une fois de plus, nos statistiques reposent sur des autorisations que nous avons données. Nous n'avons pas de statistiques relatives aux dossiers dont les projets sont totalement complétés.

M. Le Blanc (Lucien): Lorsqu'on a parlé des autorisations qui étaient données et de la différence entre le nombre d'autorisations et le nombre qui a été indiqué parfois comme étant des adoptions réalisées, on a dit que ça pouvait signifier que des parents avaient de la difficulté à revenir avec leurs enfants. J'ai cru alors comprendre que vous aviez dit que vous le compreniez, parce que des gens avaient dû se rendre devant les tribunaux. Ce que je veux dire à ce propos, c'est que, quand l'autorisation est donnée par le secrétariat, s'il y a des problèmes à revenir avec un enfant par la suite, les problèmes ne relèvent pas du secrétariat, ne relèvent pas du Québec, car, quand l'autorisation est donnée, c'est que - je pense que le terme le dit - on a autorisé la démarche; on a fait la vérification; on a donné l'accord.

Alors, on ne revient pas par la suite sur les accords qui ont été donnés. Les cas qui se sont retrouvés devant les tribunaux sont des cas où l'autorisation n'avait pas été donnée. Donc, la différence entre les deux... Quand on dit qu'on peut avoir des problèmes à revenir avec des enfants, ce ne sont pas des problèmes causés par le Québec, à ce

moment-là.

Mme Vermette: On pourra en discuter à un autre moment. Je voudrais vraiment arriver à faire sortir certaines statistiques qui pourraient nous montrer exactement l'état du dossier à l'heure actuelle. II me semble en tout cas qu'auparavant, c'était sûrement plus facile, puisque bon nombre de pays étaient ouverts. Alors, j'imagine qu'il y a une pondération qui a dû être faite à ce moment-là et que les moyennes doivent en tenir compte aussi.

Mme Bisaillon: Par année civile, je ne les ai pas depuis 1979. Je les ai par année comptable. Si vous le permettez, je vais vous donner celles-ci. Alors, d'avril 1979 à janvier 1980, j'ai le nombre 94. De 1980 à 1981, c'est 150; de 1981 à 1982, 250; de 1982 à 1983, 123; de 1983 à 1984, 330; de 1984 à 1985, 228 et de 1985 à 1986, 276.

Mme Vermette: Est-ce qu'on peut connaître la provenance de vos statistiques, s'il vous plaît?

Mme Bisaillon: Du Secrétariat à l'adoption internationale.

Mme Vermette: Du Secrétariat à l'adoption internationale''

Mme Bisaillon: Oui. Chaque fois qu'un projet est validé, nous émettons des autorisations auprès des deux services d'immigration, Canada et Québec. C'est à partir du calcul de ce nombre d'autorisations que nous en sommes venus à ces chiffres.

Mme Vermette: Vous en aviez combien en 1984?

Mme Bisaillon: Pour 1983 à 1984, c'est 330.

Mme Vermette: C'est 330. Et... Mme Bisaillon: Pardon?

Mme Lavoie-Roux: Est-ce que c'est dû à l'amnistie qui a été donnée?

Mme Bisaillon: Je ne croirais pas parce que d'après les données que nous avons par rapport à l'amnistie, on est intervenu dans une quinzaine de dossiers seulement. Pour les autres dossiers, il semblerait que les gens se soient présentés directement au greffier pour faire enregistrer l'enfant. À cause de ce qu'on entend ici et là, on peut imaginer qu'il y a peut-être eu une centaine de cas. Mais officiellement, nous sommes intervenus seulement pour quinze personnes.

Mme Vermette: De 1983 à 1984, c'est 330?

Mme Bisaillon: C'est cela, oui. Mme Vermette: De 1984 à 1985? Mme Bisaillon: C'est 228.

Mme Vermette: C'est 228. Et de 1985 à 1986?

Mme Bisaillon: C'est 276.

Mme Vermette: C'est 776. Et de 1986 à aujourd'hui, avez-vous une moyenne?

Mme Bisaillon: Là, on retombe dans les années civiles. Cela devrait tourner autour de 190. J'ai la donnée ici. C'est cela.

Mme Vermette: Maintenant, quant au projet de loi 21, est-ce que vous pensez que cela va favoriser ou augmenter le nombre d'adoptions ici au Québec?

Mme Bisaillon: Certainement.

Mme Vermette: Est-ce que cela va favoriser aussi l'ouverture de différents pays? On va arriver à notre moyenne de 69. Combien de pays seront ouverts en plus avec le projet de loi 21? Est-ce qu'on va dépasser 69 ou si on va se maintenir à 69?

Mme Bisaillon: Non, je ne pense pas qu'on puisse dépasser 69 à moins qu'on n'aille vers de nouveaux pays où on n'est jamais allé. Mais à l'intérieur de ces 69... Et nous, c'est surtout à l'intérieur de 35, parce que depuis 1982, on a dénombré environ 30 à 35 pays d'où provenaient les enfants. Ce qui est sûr, c'est qu'à moyen terme, on va vraiment augmenter très sensiblement ce nombre et dès qu'on va le pouvoir, on va pressentir les pays en question et voir comment on peut obtenir le consentement de l'État.

M. Le Blanc: Madame... Une voix: M. Le Blanc.

M. Le Blanc: En fait, en théorie en tout cas, et selon le projet de loi 21, le seul empêchement ou la seule limite, c'est le consentement du pays. Enfin, la loi québécoise ne pose plus de limite à ce moment-ci, sauf évidemment dans le cas d'adoption simple, pour obtenir le consentement du pays. Cela veut dire que tous les pays, en réalité, qui ont des enfants à faire adopter sont ouverts dans la mesure d'une seule restriction, devrais-je dire, c'est que si c'est un pays d'adoption simple, il devrait y avoir consentement de l'État. À part cela, il n'y a aucune limite.

Mme Vermette: Est-ce que dans le projet de loi, c'est inscrit qu'il n'y a aucune limite de pays? Est-ce que c'est clair dans le projet de loi?

M. Le Blanc: II n'y est pas inscrit qu'il y a des limites. Il n'y a absolument aucune limite imposée dans la loi, sauf celle que je viens d'indiquer.

Mme Vermette: Je veux toujours rester dans mes statistiques. Je reviendrai en ce qui concerne les ententes. Pour ce qui est des statistiques, est-ce que le décret n'a pas eu un impact en ce qui concerne les demandes d'adoption? Est-ce que, finalement, il s'est fait autant d'adoptions qu'antérieurement, aux mêmes moments, dans les mêmes périodes données?

Mme Bisaillon: On peut penser que, certainement, le décret a pu avoir un impact, dans la mesure où on fermait les pays à adoption simple quand on n'avait pas d'entente avec eux. Comme le décret est venu le 19 novembre, immédiatement à la fin de novembre, au début de décembre, on est allé vers ces pays à adoption simple pour voir s'il y avait la possibilité de négocier une entente. Il est évident que, durant ces quelques mois, si vous voulez, qui se sont écoulés après le décret et même avant, on n'a pas pu faire d'adoption dans ces pays. Dans ce sens, dès qu'on pourra le faire, cela va faire augmenter le nombre d'adoptions.

Mme Vermette: Finalement, la raison majeure est qu'il y avait de l'adoption simple dans ces pays.

Mme Bisaillon: C'est cela, oui.

Mme Vermette: Dans certaines circonstances, il y a même eu des cas où il y avait, bien sûr, l'autorisation des tribunaux et aussi l'autorisation du gouvernement pour qu'un enfant puisse entrer au Québec et cela a été refusé par le secrétariat à l'adoption. Oui, il y a certains cas...

Mme Bisaillon: L'autorisation du gouvernement?

Mme Vermette: Dans le cas des Brassard, si ma mémoire est bonne, ou des gens de la rive sud... Non, pas les Brassard... Dans un cas, d'ailleurs, j'avais envoyé une lettre à la ministre pour lui demander d'intervenir dans ce dossier. Tout avait été fait conformément aux normes et aux règles du pays. On respectait exactement les procédures du pays. De plus, il y avait le sceau, justement. C'est dans le cas de Marie-Sol, si ma mémoire est bonne. On demandait que l'enfant soit intégré au pays, ici, au Québec* De la part d'Emploi et

Immigration Canada, il n'y a eu aucun problème. Le seul endroit où il y a eu un problème pour que l'enfant puisse entrer au pays a été ici, au Québec. À ce moment-là, justement, il y avait une reconnaissance par le pays de l'adoption simple. Ici, en ce qui concerne la concordance de nos lois, il s'agit de passer devant le Tribunal de la jeunesse pour que l'article 622.1 du code s'applique, tel que reconnu par nos tribunaux. Pourquoi dites-vous: Maintenant, avec la loi 21, ce sera beaucoup plus facile de travailler avec les pays alors qu'antérieurement ce n'était pas facile et, déjà, les pays s'y prêtaient, sans avoir besoin de la loi 21?

Mme Bisaillon: Je ne sais pas si je comprends tout à fait votre question. M. le Président, dans ce sens, je préférerais ne pas entrer dans des cas individuels. Pour généraliser la chose, disons que, depuis le 19 novembre, il est évident que nous n'avons autorisé aucun dossier d'adoption simple, si ce n'est la levée sur les 40 cas en question, dont les dossiers étaient déjà rendus dans les pays depuis fort longtemps.

Mme Vermette: Encore là, tout cela n'est pas tout à fait clair, en tout cas, dans la procédure qui a été suivie. Quelques fois, effectivement, on a amnistié certains cas; d'autres fois, non. Par contre, dans tous ces mêmes pays, que je sache, c'était de l'adoption simple. Quelle était votre argumentation pour choisir les cas qui devaient entrer au pays à ce moment-là? Est-ce que cela faisait partie de procédures arbitraires? Est-ce que, maintenant, la loi 21 va corriger ces procédures arbitraires?

M. Le Blanc: Je peux essayer de répondre. Dans un premier temps, par le passé et malgré qu'il y ait eu - et je pense que Mme la ministre l'indiquait tout à l'heure - de temps à autre des applications différentes de la loi, c'est basé non sur l'arbitraire mais parfois sur certaines difficultés à interpréter la loi québécoise et la loi étrangère. Donc, il y a eu cette première partie. Quand on a autorisé des projets d'adoption, c'était parce qu'à l'évaluation et à l'analyse du dossier, cela nous paraissait répondre à l'interprétation et à la compréhension qu'on avait à ce moment-là de la loi étrangère et de la loi québécoise; c'était le seul critère. Quand on a refusé, évidemment, c'était exactement pour l'inverse, parce que cela ne nous semblait pas satisfaire aux prescriptions des lois étrangères et de la loi québécoise. (12 h 30)

Le problème que l'on avait ou la difficulté ou en tout cas, devrais-je peut-être le mettre en comparaison avec le changement qui se prépare maintenant, c'est qu'on avait de la difficulté avec l'adoption simple.

Lorsque l'enfant était adopté dans un pays d'adoption simple, c'est-à-dire où il reste des liens de filiation, l'interprétation que l'on faisait de la loi québécoise, c'est que cela ne pouvait pas être reconnu ici. Donc, il ne pouvait pas y avoir d'adoption simple.

La loi 21 vient changer cela et vient reconnaître qu'il sera possible d'adopter dans les pays d'adoption simple, et c'est très clair dans la loi, je pense - comme je l'ai dit tout à l'heure, la seule condition étant que ce pays d'adoption simple consente è l'adoption de cet enfant. Comme vous l'avez fait remarquer, la plupart de ces pays expriment maintenant d'une façon ou d'une autre un consentement à l'adoption des enfants dans la mesure où ils étaient prêts à les laisser partir.

L'obtention de l'approbation ou du consentement du pays devrait être relativement facile et, dans ce sens-là, devrait ouvrir, comme je l'ai dit tout à l'heure, tous les pays où il y aurait des enfants disponibles pour adoption. Je ne sais pas si j'ai répondu...

Mme Vermette: Oui. Cela n'a pas enlevé toutes les interrogations.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée, je vais permettre au député de Fabre de poser une question.

M. Joly: Merci, M. le Président. On vient de parler du décret comme ayant fermé certains pays. J'aimerais savoir autant de Mme Bisaillon que de son équipe quelle était la règle de droit avant le décret relativement à l'adoption simple aussi bien que plénière.

Mme Bisaillon: En fait, depuis 1983, cela a toujours été la règle de l'adoption plénière, sauf que, compte tenu de la volonté du législateur, en d'autres termes, on ne pouvait pas autoriser des dossiers d'adoption simple. Ce qui était en cause, c'était la question de lien de filiation, tant et si bien qu'il s'est avéré que, dans un certain nombre de dossiers, quand il s'agissait d'enfants orphelins ou nés de parents inconnus ou, en d'autres termes, dans des dossiers où il n'y avait pas de parents identifiés, comme la règle de la filiation, il ne pouvait pas y avoir de conflit puisqu'il n'y avait pas de parents à l'origine. C'est un fait que le secrétariat, même dans sa grande prudence, a accepté d'agir comme intermédiaire dans ces dossiers. Je prends l'exemple du Guatémala. Les autorités nous avaient dit et nous confirment encore que ce type d'enfants, parce qu'ils étaient sans parents, pouvaient être réadaptés au Québec au terme d'une adoption plénière. Lorsque la nouvelle administration est entrée au secrétariat à l'adoption et qu'elle a pris connaissance de trois jugements importants des tribunaux de la jeunesse qui se prononçaient sur cette question de liens de filiation, on s'est aperçu qu'il y avait quand même des divergences è l'intérieur de ces trois jugements qui nous ont amenés à dire que jusqu'à maintenant on avait été prudents et que la règle de prudence absolue voulait qu'on n'accepte plus de nouveaux dossiers d'adoption plénière, sauf qu'on a accepté de conduire jusqu'à leur terme - puisqu'on avait commencé à agir comme intermédiaires - les dossiers où on avait accepté de travailler avec le parent. Il ne s'agissait pas évidemment de pénaliser les parents pour une règle qui devenait plus rigoureuse de la part du gouvernement dans son application de la loi.

M. Joly: Y a-t-il eu plusieurs cas d'exception?

Mme Bisaillon: Vous voulez dire après?

M. Joly: Des cas qui ont été acceptés sous le principe de l'adoption simple, même si de par la loi on n'était pas censés les accepter.

Mme Bisaillon: Avec le Guatémala et Haïti, il y a eu plusieurs dossiers.

M. Joly: Merci, madame.

Mme Vermette: On dit que l'on veut corriger les lacunes actuellement et que, finalement, il est préférable que les ententes se fassent entre gouvernements. Est-ce à dire que les tribunaux de justice des autres pays ne peuvent pas remplir adéquatement leur rôle et qu'on remet en question les jugements que pouvaient rendre antérieurement les tribunaux? Pourquoi maintenant la nécessité d'une entente entre États, alors que si nous étions sur des listes d'"adoptabilité" dans les pays concernés, on suivrait la procédure normale? On n'aurait probablement pas besoin d'entente entre pays, mais tout simplement de suivre la procédure normale des tribunaux des différents pays.

M. Le Blanc: II n'est pas question évidemment de remettre en cause une décision d'un tribunal étranger. Je pense que ce serait la dernière chose qu'on voudrait faire au Québec. Quand on parle du consentement de l'état, c'est le consentement de l'Etat comme responsable de l'enfant dans la mesure et parce que c'est un pays - il faut toujours revenir à cela -d'adoption simple, c'est-à-dire où il reste un lien de filiation. Comme on veut respecter le consentement donné et comme le consentement qui pourrait être donné par d'autres ne serait qu'un consentement d'adoption simple, on demande le consentement de l'État à ce

que l'enfant soit adopté au Québec par l'adoption plénière. Ce n'est pas un rejet ou ce n'est pas un refus d'acceptation du jugement étranger. Le jugement étranger, comme tout jugement, prononce une situation de droit, mais le tribunal ne peut pas donner de consentement. Ce qu'on va chercher de l'État étranger, ce n'est pas le jugement, c'est le consentement à ce que l'enfant qui est sous sa responsabilité soit adopté au Québec en vertu de l'adoption plénière. C'est cela qu'on va chercher. Le jugement reste le même, on ne va pas le modifier et on n'a jamais cherché à le modifier évidemment.

Mme Vermette: En fin de compte, j'avais l'impression que les tribunaux représentaient leur pays aussi et que le jugement d'un tribunal ne faisait pas de jugement ou ne rendait pas de jugement sans l'interprétation des lois d'un pays qui devaient être conformes justement aux lois et aux règlements de son pays. Cela m'amène à vous poser une question. Comment un enfant adopté dans un pays qui ne reconnaît que l'adoption simple et dont le jugement d'adoption a été reconnu par le Québec a-t-il moins de droit qu'un enfant québécois adopté au Québec?

M. Le Blanc: Ce n'est peut-être pas tellement une question de droits, parce qu'il est certain que le Québec pourrait, comme d'autres pays le font, décider de rendre un nouveau jugement ici, en ne se préoccupant pas du jugement rendu à l'étranger, en ne se préoccupant pas de la loi étrangère, et en ne se préoccupant pas du consentement donné à l'étranger et faire du jugement québécois ou faire de l'adoption québécoise - c'est la seule chose qu'il pourrait faire - une adoption plénière. Quand on va chercher un consentement à l'étranger, c'est-à-dire quand il se pose une question de respect ou quand cette question se pose plutôt, c'est une question de respect du consentement tel que donné. C'est là la difficulté, c'est que le Québec veut respecter le consentement donné à l'étranger; c'est dans ce sens. Il peut très bien donner aux enfants adoptés ici au Québec tous les droits. L'enfant est ici, il est admis ici, il est sujet québécois à ce moment, il peut agir à son égard comme il l'entend. Mais parce qu'il a choisi, et c'est le Code civil du Québec qui le prévoit, de respecter les règles de consentement et d'adoptabilité rendues à l'étranger, à ce moment, il doit être conforme au choix qu'il a fait et qui est indiqué dans le Code civil, et ne pas transformer le consentement donné à l'étranger sans un nouveau consentement, si on veut, pour permettre cette transformation.

Le Président (M. Bélanger): Je passe la parole, en vertu de la règle de l'alternance, d'abord au député de Fabre, je pense.

M. Joly: Oui, en fait, moi, j'aimerais savoir une chose. On dit que le secrétariat existe quand même depuis quelques années, mais est-ce que le secrétariat a visité plusieurs pays comme tels - et non pas simplement s'entretenir au téléphone - pour savoir ce qu'ils avaient à offrir là-bas comme structures?

Mme Bisaillon: Oisons que depuis l'arrivée de la nouvelle administration au mois d'août dernier, on s'est rendu dans au moins neuf pays et j'aimerais, en ce sens, passer la parole peut-être à la personne qui est responsable chez nous des relations internationales.

M. Soucy (André): Alors, on s'est rendu effectivement dans neuf pays des Caraïbes, d'Amérique centrale et d'Amérique du Sud. Dans tous les cas, on a eu des entretiens avec les autorités compétentes de ces pays en matière d'adoption internationale. Peu importe le niveau de développement d'un pays, que ce soit le moins développé ou le plus développé, il y a toujours un organisme local qui s'occupe d'adoption internationale et qui se préoccupe des enfants qui sont abandonnés, qui sont adoptés localement ou qui sont adoptés à l'étranger. Alors, en ce sens, effectivement, et dans tous les cas, on a rencontré les organismes gouvernementaux, oui.

M. Joly: Quelle est la perception de ces pays à l'égard de l'adoption internationale par rapport au Québec, je ne parle pas "at large"?

M. Soucy: "At large", en général.

M. Joly: J'entends toujours comparativement au Québec.

M. Soucy: Oui. Il y a deux éléments à cette réponse. Le premier, c'est que le Québec, partout où on est allé, est très bien perçu. Dans tous les pays où on est allé, tous les gens à qui on a parlé de la politique d'adoption internationale du Québec ont toujours fait état de leur satisfaction à l'égard de la façon dont cela se faisait au Québec. On a comparé avec certains autres États et la comparaison nous était nettement favorable en ce sens. Cela va pour le Québec.

Maintenant, pour la perception de l'adoption internationale en général, les pays en voie de développement ont un problème sérieux avec cet aspect. Si dans les pays industrialisés il y a une baisse du taux de natalité et un manque d'enfants, dans les pays en voie de développement, c'est l'inverse qui se passe. Dans plusieurs pays, il

y a un taux de natalité très élevé,

II est évident aussi que les pays en voie de développement n'ont pas toujours peut-être les ressources nécessaires pour assurer à tous les enfants des conditions de vie comparables à celles qu'on pourrait retrouver au Québec. Donc, il y a effectivement un certain nombre d'enfants abandonnés dans les pays.

Là où les pays ont certains problèmes, c'est sur la manière que l'adoption internationale doit se faire dans l'optique du meilleur intérêt de l'enfant. Si on ne peut pas offrir dans le pays un foyer à l'enfant, confions-le à l'adoption internationale, si cela lui assure un foyer. Je pense que les pays sont tous conscients de cela. Ce qu'ils veulent s'assurer, c'est que cela se fasse selon les règles, selon les lois des pays et selon les lois du pays d'accueil de l'enfant.

Dans plusieurs pays, il y a une réalité qu'il faut vraiment saisir, c'est que quand on est dans un pays en voie de développement ou dans n'importe quel pays étranger, on ne peut pas nécessairement comparer ce qui se fait dans ces pays avec ce qui se fait au Québec. C'est important de saisir cela. Quand on dit qu'il y a des réseaux parallèles, qu'il y a du trafic d'enfants, etc., c'est une réalité. Si on lit les journaux, si on regarde certains reportages et si vous regardez ce que des organismes internationaux disent sur la question, pensez aux Nations unies, pensez à certaines conventions internationales, à certains séminaires, c'est une réalité de la vie.

La question est de savoir pour les pays: Comment réussir à contrôler cela, sans l'éliminer. Ils sont réalistes aussi, ils savent bien qu'ils ne peuvent pas, du jour au lendemain, éliminer tous ces réseaux parallèles, tout le trafic d'enfants, mais au moins ils voient dans la conclusion d'ententes - et c'est là que se fait le joint pour les pays avec nous - intergouvemementales un moyen de mieux contrôler cela, d'assurer certaines garanties sur l'origine des enfants qui sont placés en adoption. Est-ce que cela va?

M. Joly: Merci, M. Soucy.

Mme Bisaillon: Si vous le permettez pour compléter, M. le Président, la réponse à votre question, entre 1982 et 1986, donc avant l'arrivée de la nouvelle administration, le secrétariat s'est rendu en Colombie, au Guatemala, à Honduras, à Costa Rica, au Pérou, en Bolivie, en Corée, en république Dominicaine et en Haïti.

M. Joly: Merci, Madame.

Le Président (M. Bélanger): Mme la députée de Johnson.

Mme Juneau: Merci beaucoup. Je vais poser ma question en deux volets, étant donné que j'ai juste une minute, je vais essayer de vous jouer un petit tour avec cela.

Le Président (M. Bélanger): Allez, allez,

Mme Juneau: Merci, M. le Président. Mme Bisaillon, tout à l'heure vous avez fait état du fait que d'après la loi 21 la ministre devenait l'unique responsable des dossiers d'adoption. Il me semble avoir perçu dans votre intervention l'inquiétude suivante. Vous avez dit: II faudrait qu'il y ait une convention type avec un lien entre les intervenants. Qu'est-ce qui vous inquiète? Je ne sais pas, j'imagine que c'est la convention elle-même qui devra être mise sur pied de par la loi 21, donc par la ministre. Comment vous, les gens du secrétariat, souhaiteriez que cette convention soit mise de l'avant ou préparée?

Mme Bisaillon: Je ne sais pas pourquoi vous avez perçu de l'inquiétude. À vrai dire, je ne suis nullement inquiète de ce qui s'en vient. Au contraire, je pense que cela va préciser et cela va clarifier des choses, ce qui n'était pas nécessairement le cas dans le cadre de la loi actuelle.

Actuellement, tes organismes signent des conventions avec le ministre en ce qui a trait à leur façon de faire, à leur agir, à leur manière d'oeuvrer en pays étrangers et aussi au Québec auprès des adoptants. Alors, ce que la loi 21 et le règlement sur l'adoption internationale prévoient de différent, c'est ceci: C'est qu'on précise dans quels pays les organismes pourront travailler, à l'avenir, donc les pays à adoption plénière et les pays à adoption simple pour autant que, pour l'adoption X par M. Y, si vous voulez, on pourra obtenir le consentement de l'État; ce sont les endroits où ils pourront travailler. (12 h 45)

Quant à leur manière de faire, ils vont continuer à signer une convention avec le ministre, sauf qu'à l'intérieur de celle-ci, vous allez avoir, d'une part, tous les articles de la convention type comme tels et, d'autre part, des clauses particulières selon le pays où ils travaillent, parce que, dans chaque pays, il y a des politiques et des législations différentes et parce qu'il peut y avoir ou non une entente gouvernementale entre ce pays et le Québec. C'est pour cela qu'il faudrait être assez souple et voir à s'ajuster avec les organismes au fur et à mesure des événements.

Mme Juneau: Jusqu'à présent, avec les pays dont vous avez fait mention, est-ce que des conventions sont déjà signées?

M. Soucy: Je peux vous répondre là-dessus, si vous le permettez.

Mme Juneau: Et combien?

M. Soucy: II y en a une sur le point d'être signée, il ne reste que quelques détails à régler; elle sera signée très bientôt. Il y en a au moins deux autres en très bonne marche. Il faut aussi comprendre que la signature d'une entente ou, enfin, d'un document avec un pays étranger est une démarche qui demande un certain temps et certaines négociations. Oui?

Mme Juneau: Vous n'avez pas nommé le pays. J'aimerais savoir...

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, une question de règlement.

Le Président (M. Bélanger): Oui. Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Je m'excuse d'interrompre Mme la députée de Johnson, mais je pense qu'on est dans le domaine d'ententes au plan international. Il serait peut-être plus prudent, à ce moment-ci, avant que ces ententes ne soient officiellement formalisées, de ne pas identifier ces pays.

Mme Juneau: Je retire ma question dans ce cas-là.

Mme Lavoie-Roux: Oui, oui, j'aurais pu faire la même chose, remarquez bien.

Mme Bisaiilon: J'aimerais peut-être -excusez-moi - préciser que les conventions se signent entre les organismes et la ministre; cela couvre l'activité des organismes comme tels. Mais, les ententes ou les accords se signent entre le Québec et les pays. Est-ce que cela va? J'ai cru comprendre que votre question portait sur les conventions avec les organismes.

Mme Juneau: Mais si...

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Fabre.

M. Joly: Merci, M. le Président. Ma question s'adresse à Me Le Blanc. J'aimerais savoir, avec l'avènement de la loi 21, quel est maintenant le pouvoir de Mme la ministre là-dessus?

Mme Lavoie-Roux: Ou ministre. M. Joly: Ou du ministre.

M. Le Blanc: En fait, le pouvoir sera celui de coordonner. Je pense que la façon la plus courte et la plus réaliste de le définir, c'est que ce sera celui de coordonner l'adoption internationale au Québec. Évidemment, à cet égard, la ministre aqira, si l'on veut, pratiquement à deux niveaux: d'abord, généralement parlant, c'est elle qui sera responsable, si l'on veut, de la définition de la politique? c'est elle qui sera responsable de voir à ce que les lois, si elles doivent être changées, le soient, etc., c'est donc la politique globale de l'adoption au Québec.

Plus particulièrement, puisqu'on est dans le projet de loi 21, je pense qu'il appartiendra à la ministre et au Secrétariat à l'adoption internationale, ou autres organismes pouvant agir en son nom à cet égard, de voir à ce que les dossiers ou les projets particuliers d'adoption se réalisent. Elle le fera en maintenant des contacts et de la collaboration avec les autres intervenants du milieu, si l'on veut, c'est-à-dire le directeur de la protection de la jeunesse, le Tribunal de la jeunesse et les organismes, et en amorçant - ce dont on vient de discuter depuis quelques minutes -et en maintenant des contacts avec les pays étrangers, de façon à rendre plus facile l'adoption et à mieux répondre aux désirs des parents québécois d'adopter des enfants qui ont besoin d'être adoptés à l'extérieur.

En gros, je pense que c'est la définition de la responsabilité de la ministre.

M. Joly: Vous m'avez, en fait, parlé un peu du rôle de coordination et de tout cela. Mais, qu'est-ce qui arrive de son pouvoir discrétionnaire?

M. Le Blanc: Le pouvoir discrétionnaire dans le sens qu'il a fait des problèmes devant Ies tribunaux, il n'y en aura plus. Je pense qu'à ce niveau, c'est la réponse qu'il faut donner. C'est-à-dire qu'en ce sens-là, il n'appartiendra plus à la ministre de décider si un projet d'adoption est acceptable ou non, cela appartiendra maintenant au Tribunal de la jeunesse. Quand on parle de la vérification d'un projet d'adoption, c'est cela; il appartiendra au Tribunal de la jeunesse de prendre cette décision, donc de faire disparaître toute inquiétude d'arbitraire qu'il pourrait y avoir à cet égard.

M. Joly: Dernière question. Je ne veux pas abuser de mon droit de parole, tout de même. Pourquoi Haïti a-t-il fermé ses portes à l'adoption internationale?

Mme Bisaillon: Je pense que Mme la ministre le soulignait tantôt, il y a un moratoire à l'heure actuelle car on a tout simplement découvert un trafic d'enfants avec certains pays étrangers. C'est la raison pour laquelle ils ont décidé, à l'interne, de fermer pour l'ensemble des pays, d'ailleurs.

M. Joly: Avec une possibilité de réouverture, éventuellement.

Mme Bisaillon: Certainement.

Le Président (M. Bélanger): Bien. Alors, avant terminer, est-ce que vous voulez remercier les...

Mme Vermette: Intervenants? Je voudrais justement vous remercier pour les réponses que vous nous avez données avec tant de diligence. J'ose espérer qu'au-delà des problèmes de droit international et de droit, nous pourrons faire, au Québec, de façon civilisée, de l'adoption internationale, que les parents pourront trouver des réponses et une oreille attentive à leurs problèmes et qu'ainsi, les différents intermédiaires pourront travailler à l'oeuvre qu'ils ont toujours suivie depuis les débuts. J'ose espérer que jusqu'à ce jour, des ententes existaient entre les pays pour faire de l'adoption internationale. Autrement, je pense que cela aurait été très difficile et très irrespectueux à l'égard des pays.

Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.

Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux remercier les représentants du Secrétariat à l'adoption internationale de s'être présentés à cette commission parlementaire. Je pense que cela a permis de clarifier certaines choses. Je voudrais juste corriger un terme qui a certainement dépassé la pensée de la députée de Marie-Victorin qui a dit que désormais, on pourrait faire de l'adoption civilisée au Québec. Je pense qu'on a toujours fait de l'adoption civilisée au Québec. Qu'on ait rencontré des problèmes et des écueils dans l'interprétation des lois, c'est une chose. Comme je l'ai dit, je pense que cela a dépassé sa pensée. Quoi qu'il en soit, je pense que c'est le début d'un processus qui, je l'espère, débouchera sur des résultats positifs pour les enfants et les parents. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): Je voudrais à mon tour remercier les représentants du Secrétariat à .l'adoption internationale, Mme la directrice, Mme Bisaillon, M. Le Blanc et M. Soucy.

La commission ajourne ses travaux sine die, puisque Tordre de la Chambre nous donnait du travail jusqu'à 13 heures. Aux affaires courantes, cet après-midi, le leader du gouvernement nous donnera l'ordre pour les prochains travaux. Je vous informe quand même, parce qu'on peut anticiper déjà quel sera l'ordre, que nous reprendrons nos travaux après les affaires courantes, c'est-à-dire vers 15 heures.

Une voix: 16 heures.

Le Président (M. Bélanger): Oui, je veux dire 16 heures. Je traduisais 4 heures mais cela ne fonctionnait pas.

(Suspension de la séance à 12 h 53)

(Reprise à 16 h 20)

Accueillons un enfant

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît! Je demanderais à chacun de reprendre sa place pour que nous puissions commencer les travaux de la commission. La commission reprend ses travaux, cette fois-ci pour entendre le groupement Accueillons un enfant qui est représenté par le Dr Michel Demers, président, M. Jean-Louis Gagnon, conseiller, Mme Andrée Gilbert, coordonnatrice du centre de transit et d'adoption Cayepanou. M. Demers, si vous voulez nous présenter votre équipe d'abord.

Les règles de procédures Vous avez 20 minutes pour faire votre présentation, ensuite, chaque groupement politique, c'est-à-dire les ministériels et l'Opposition ont chacun une période de 20 minutes, questions et réponses comprises pour l'interrogation. C'est donc une enveloppe globale d'une heure que nous avons pour disposer de votre mémoire.

Dr Demers, je vous en prie. Vous pouvez rester assis.

M. Demers (Michel): Merci. M. le Président de la commission parlementaire des affaires sociales, Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux, M. le vice-président et Mme la Secrétaire de ladite commission, enfin messieurs et mesdames les députés membres de cette commission. Permettez-moi de me présenter, je suis Michel Demers, médecin, président de la corporation Accueillons un enfant et père de deux enfants adoptés hors Québec. Avec moi, ce soir se joignent tout d'abord Mme Andrée Gilbert, infirmière autorisée et ex-directrîce du centre de transît et d'adoption Cayepanou en Haïti et M. Jean-Louis Gagnon technicien en anatomo-pathologie, conseiller de notre corporation et père adoptif de deux enfants nés et adoptés hors Québec.

La corporation Accueillons un enfant est une corporation sans but lucratif, incorporée selon la troisième partie de la Loi sur les compagnies et oeuvre en matière d'adoption internationale depuis le début des années soixante-dix où elle portait alors le vocable de Welcome a Child. En février 1981, le ministère de la Santé et des Services sociaux signait avec nous un protocole d'entente nous permettant d'agir en matière d'adoption internationale. Notre

organisme compte 300 membres. Il a réalisé environ 400 adoptions de 1970 à 1981 et autant depuis 1981 jusqu'à maintenant.

En plus de ces activités d'adoption, notre organisme est impliqué au niveau de l'aide internationale. Il va sans dire que l'adoption est la mesure ultime dans tout un processus d'aide à l'enfance dans le besoin. Accueillons un enfant croit fermement qu'il vaut mieux permettre à un enfant de demeurer avec sa famille immédiate plutôt que d'être adopté. Nous savons fort bien que de nombreux enfants abandonnés, sans père et mère connus, nécessitent une intervention biopsychosociale urgente, donc, un foyer d'adoption. Il est fort immoral de retirer de leur famille des enfants dans le besoin dont les pères et mères sont connus. Notre organisme a donc mis sur pied un système d'aide sous forme de parrainage pour ces enfants. De plus, nous collaborons actuellement, pour la mise sur pied d'une école spécialisée pour les enfants de la rue, avec des organismes non gouvernementaux hautement reconnus de notre pays.

Avant de discuter du projet de loi 21 et du projet de règlement sur l'adoption internationale, permettez-moi de vous exprimer la pensée de notre conseil d'administration. Malgré le contenu des projets de loi et de règlement en matière d'adoption internationale, Accueillons un enfant aurait davantage apprécié soit une commission d'enquête ou encore soit une commission parlementaire vraiment élargie sur tout le dossier de l'adoption internationale en général. Accueillons un enfant ne remet nullement en question ici la nécessité d'un contrôle législatif en matière d'adoption internationale. En effet, il est souhaitable qu'un tel contrôle existe afin d'éviter les situations opportunistes de gens dépourvus de toute morale.

Cependant, il faut se souvenir que le rôle d'une loi en matière d'adoption internationale doit avoir pour but de freiner les abus, mais aussi de favoriser l'atteinte des objectifs. À cet égard, plus le cadre légal sera rigide, complexe et restreint, plus les réseaux d'adoption illégale se développeront. Aussi, nous croyons que plus la législation sera large, simple et efficace, plus les justiciables se conformeront à la légalité.

En outre, notre corporation reconnaît la nécessité aux adoptants d'agir par l'intermédiaire du ministère de là Santé et des Services sociaux ou d'organismes reconnus, à cet effet, par ce dernier.

À la lecture du projet de loi numéro 21, nous constatons deux éléments positifs, à savoir:

Premièrement, l'approbation d'un projet d'adoption se fera, désormais, par le tribunal plutôt que d'être laissée à l'arbitraire des fonctionnaires et deuxièmement, une ouverture relative à l'adoption simple, c'est-à-dire l'adoption qui laisse subsister un lien de filiation autre que celui qui doit exister entre les adoptants et l'adopté. Cependant, tout au long de notre étude, nous avons songé au tort qui peut survenir aux enfants abandonnés et criant d'espérance, et aux parents angoissés dans l'attente toujours et toujours prolongée d'un être cher. Les délais, plaintes de tous les parents inscrits sur une liste d'attente et/ou en procédure d'adoption, semblent encore plus marqués par ces projets de loi et de règlement, sans compter les coûts supplémentaires qui devront être ajoutés à la note finale.

De plus, l'omniprésence du ministre de la Santé et des Services sociaux en tant que seul intermédiaire exprime clairement le voeu d'exclure les organismes du tableau de l'adoption internationale. Inutile de vous rappeler ici qu'Accueillons un enfant oeuvrait sainement et honnêtement en matière d'adoption internationale bien avant la création de l'actuel Secrétariat à l'adoption internationale.

Nous nous posons de plus de questions quant à la cohérence de notre gouvernement lorsqu'il entérine les recommandations du rapport Scowen sur la politique de déréglementation et que, d'un autre côté, il crée un règlement hautement restrictif en matière d'adoption internationale.

L'un des amendements proposés par la loi 21, comme je viens de le citer, est la disparition des organismes d'adoption. Il est évident que tout le processus sera voué à l'échec puisque le ministère de la Santé et des Services sociaux, par le biais du Secrétariat à l'adoption internationale, n'a ni les ressources financières ni les ressources humaines surtout pour répondre aux besoins des parents et des enfants, et pour répondre aux problèmes vécus à l'étranger. Le bénévolat est la pierre angulaire du travail des organismes. Il est paradoxal, à notre sens, de permettre au ministre d'édicter les procédures, de contrôler les procédures et d'appliquer les procédures. Est-ce que c'est cela, l'infaillibilité? Comment peut-on être son propre juge? Évidemment, les organismes seraient, comme présentement, la solution aux problèmes du ministre.

De plus, le ministre se permettra-t-il d'édicter des normes qui ne seront pas universelles? Nous nous expliquons. Les exigences des différents pays devraient permettre à chaque organisme d'établir des procédures particulières et non au ministre. Il est évident que la loi devrait préciser davantage le rôle et les pouvoirs du ministre et de son Secrétariat à l'adoption internationale. Pour une saine mobilité du processus de l'adoption, il faudrait également préciser le rôle de tous les intervenants à partir du directeur de la protection de la jeunesse jusqu'aux organismes.

Quant à l'article 1, paragraphe 614.2 du projet de loi 21, notre organisme, dans le but ultime de diminuer les délais et les coûts, croit que le pouvoir de vérifier la régularité d'un projet d'adoption et, par conséquent, d'autoriser l'entrée d'un enfant au Canada, peut demeurer entre les mains du ministère de la Santé et des Services sociaux, mais avec une possibilité pour l'adoptant d'en appeler de cette décision ou d'une non-réponse dans les dix jours suivant la demande devant le tribunal.

Quant à l'article 614.3 de ce même projet de loi, notre corporation est consciente que cela entravera le processus d'adoption dans de nombreux pays, malgré le fait que c'est le mécanisme actuel qu'Accueillons un enfant a mis sur pied en Haïti et qui fonctionne. Nous réitérons ici la position de notre organisme au regard de l'adoption simple. Lorsque l'enfant est adopté dans un pays d'adoption simple, mais que ledit enfant est orphelin ou de parents inconnus, le lien de filiation est purement théorique, puisque les parents n'existent plus ou sont inconnus. Comment peut-on rompre ce qui n'existe pas? Ainsi, le mécanisme exprimé au deuxième alinéa de l'article 614.3 du projet de loi 21 ne devrait pas s'appliquer dans le cas d'enfants orphelins ou abandonnés, à savoir l'approbation par un représentant autorisé du pays étranger. De plus, hormis Haïti, il sera probablement hasardeux de formuler une telle exigence auprès des pays dont l'histoire, les us et coutumes permettent l'adoption dite simple.

Lorsque à l'article 7 du projet de loi 21, il est stipulé que "Le ministre de la Santé et des Services sociaux doit, afin d'assurer le respect des droits de l'enfant, coordonner les démarches des adoptants et les activités des personnes qui interviennent è l'adoption des enfants domiciliés hors du Québec", Accueillons un enfant exprime ses craintes et son incertitude, puisque depuis le mois d'août 1986, de nombreux problèmes de communication sûrement, et d'autres peut-être, existent entre les bureaux d'immigration québécoise et canadienne, la délégation du Québec, l'ambassade du Canada et, naturellement, le Secrétariat à l'adoption internationale. En effet, tous les enfants adoptés en Haïti depuis cette date ont dû demeurer quelques semaines supplémentaires, voire plus d'un mois à la crèche, puisque le secrétariat n'avait pas fait son travail en temps opportun ou a changé son mode de fonctionnement sans l'expliciter aux divers intervenants. Je puis vous citer l'exemple de trois enfants, passeport en main, qui attendent toujours en Haïti le parachèvement indûment prolongé des procédures administratives. Une mission de deux membres de notre conseil d'administration est présentement Ià-bas et attend fébrilement lesdites autorisations pour amener les enfants. Et cela continue.

Quant au projet de règlement sur l'adoption internationale publié à La Gazette officielle du Québec, en date du 11 mars 1987, notre organisme critiquera l'article 10 qui se réfère aux articles 2, 4, 5 et 6 et ainsi qu'à l'article 11. Plusieurs centres des services sociaux du Québec mettent un temps très considérable pour procéder aux évaluations nécessaires à l'adoption. Ces délais de plusieurs années sont causés par un manque de ressources et de personnel. Pour pallier ce problème, notre organisme recommande que le règlement permette aux adoptants de faire appel à des professionnels privés capables de faire des évaluations selon les normes de leurs corporations dans des délais raisonnables.

Quant aux articles 4 et 5, Accueillons un enfant ne voit nullement la pertinence de faire procéder au jumelage de l'adopté et de l'adoptant par le directeur de la protection de la jeunesse. En effet, il est absurde de croire que le directeur pourra connaître les antécédents sociaux et médicaux de l'enfant, abandonné dans la majorité des cas. De plus, il est évident que les délais s'allongeront encore de quelques semaines, que l'arbitraire pourra encore intervenir ici et qu'enfin, on demande à l'organisme de se départir du seul élément de valorisation dans ce processus hautement institutionnalisé. Il est un petit peu aberrant de confier cette tâche au directeur de la protection de la jeunesse et de forcer Ies organismes à se suicider.

Quant à l'article 11, nous ne voyons pas sa nécessité puisque les organismes reconnus en matière d'adoption internationale agiront selon la loi tout en se référant à la convention qui les lie au ministre.

Revenons effectivement maintenant sur ce projet de convention. Il est impératif d'en discuter puisque le règlement nous y réfère. Le mode de reconnaissance d'un organisme non gouvernemental ne se retrouve pas seulement en matière d'adoption internationale. En effet, le Canada et/ou le Québec se sont toujours associés et s'associent toujours aux ONG dans une foule d'activités relevant de l'aide Internationale, dont peut facilement faire partie l'adoption internationale. Cette intervention de l'État, après que l'organisme ait abattu un travail de longue haleine dans le pays où il oeuvre, travail qui ne saurait être la vocation du ministère, devrait se solder par une assistance technique, mais particulièrement financière. Aussi l'article 4 du projet de convention est une négation totale d'une partie très importante du rôle des organismes non gouvernementaux en matière d'adoption internationale. Nous croyons que le ministère ne doit intervenir qu'en concertation avec l'organisme qui aura préalablement mis sur pied une structure quelconque apte à l'adoption internationale en pays étranger.

Nous croyons que l'organisme doit continuer à travailler de concert avec le DPJ. Par contre, le rôle de l'organisme auprès des parents ayant formulé une demande ' devrait être actif, surtout à compter du moment où le ministère lui transmet le dossier des adoptants. Nous n'avons pas è nous substituer au directeur de la protection de la jeunesse.

Quant à l'article 27, il amène une paralysie complète de l'activité d'adoption de l'organisme. En effet, comment un organisme pourra-t-il faire vivre un enfant à l'étranger et procéder tant aux formalités préliminaires qu'au processus de l'adoption sans pouvoir compter sur un apport financier? Le ministère aura-t-ii un budget aussi considérable pour en faire autant?

Notre organisme fonctionne depuis plusieurs années et il a toujours administré è bon escient des sommes considérables provenant des adoptants, et la façon dont cette administration s'est faite est garante de la confiance que notre organisme peut mériter.

En conclusion, Accueillons un enfant réitère sa position quant à la nécessité d'un débat public élargi sur tout l'ensemble de la problématique de l'adoption internationale et ce, avant même d'adopter soit une toi, soit un règlement. En outre, nous nous inquiétons grandement des conséquences directes qu'auront le projet de loi 21 et le projet de règlement sur l'adoption internationale, soit le prolongement inutile des délais et les coûts qui deviendront de plus en plus exorbitants. De plus, nous répétons que l'omniprésence du ministre de la 5anté et des Services sociaux dans le domaine de l'adoption internationale en tant que seul intermédiaire aura pour effet néfaste la disparition des organismes. Bien au contraire, nous recommandons que les organismes soient reconnus comme des intermédiaires autonomes en matière d'adoption internationale.

Nous demandons au gouvernement de préciser le rôle et les pouvoirs du ministre de la Santé et des Services sociaux, donc du Secrétariat à l'adoption internationale, du directeur de la protection de la jeunesse et de tous les autres intervenants, notamment les organismes reconnus en matière d'adoption internationale. Accueillons un enfant remercie cette commission d'avoir bien voulu l'entendre dans le cadre de l'étude du projet de loi 21 et du projet de règlement sur l'adoption internationale tel que publié à La Gazette officielle du Québec en date du 11 mars 1987. Nous espérons que la commission reconnaîtra nos recommandations.

Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.

M. Deniers: Je vous remercie.

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Il me fait plaisir d'accueillir la corporation Accueillons un enfant. Je les remercie pour la présentation de leur mémoire qui vraiment a touché à tous les aspects, peut-être pas tous, mais un bon nombre d'aspects du projet de loi, du règlement et de la convention à être signée entre les organismes d'adoption internationale et le ministère.

Je voudrais également profiter de l'occasion pour vous féliciter pour l'élargissement, si je peux dire, que vous avez donné à la vocation de votre corporation. Je dois vous dire qu'au point de départ, on est certainement sur la même longueur d'onde quand vous dites que l'adoption, oui, c'est bon, etc., mais que là où il y a des parents, où les gens peuvent continuer de demeurer, ce ne sont pas certains types de considérations que nous pouvons avoir parce qu'on est d'un milieu différent, qui doivent nous inciter à faire la promotion de l'adoption de ces enfants. Je pense que c'est en ce sens que votre corporation a pris des initiatives sur place pour essayer de permettre que des parents continuent d'assumer les responsabilités qui sont les leurs comme parents naturels des enfants. Je pense que ceci est déjà un témoignage de la façon dont vous concevez votre rôle dans un pays étranger et surtout dans un pays quand même aussi pauvre qu'Haïti où, je pense, que la majorité de vos activités se retrouvent, si je ne m'abuse.

M. Demers: Uniquement en Haïti, présentement.

Mme Lavoie-Roux: Uniquement en Haïti. Bon! Cela étant dit, si vous me le permettez, il y a plusieurs de vos inquiétudes qui ont trait au rôle des organismes d'adoption internationale. Je dirais presque que cela m'apparaît quasiment central dans votre mémoire, vous qui aviez une expérience même avant que le Secrétariat à l'adoption internationale n'existe. Si bien qu'en 1979, dans les quelques articles de la loi 13, déjà on vous reconnaissait comme des intermédiaires non gouvernementaux qui agissaient dans le domaine de l'adoption internationale.

Je suis d'accord avec vous que certains articles de la convention, peut-être l'article 4 entre autres que vous signalez, créent une ambiguïté quant au rôle futur qui, selon vous, pourrait être modifié. Je ne sais pas, si vous étiez ici ce matin?

M. Demers: Non, je n'ai pas pu assister, ce matin.

Mme Lavoie-Roux: Non. Je pense que si

mes collègues me le permettent, je vaudrais simplement relire, dans mes notes d'introduction, une mise au point que j'ai faite là-dessus. Avant de vous tire ce passage, je voudrais vous dire qu'il est vrai que le ou la ministre apparaît et est le pivot de la coordination de l'adoption internationale quant aux politiques et à la mise en oeuvre des responsabilités, et à la clarification des activités de chacun des intervenants; mais, ce n'est pas dans le but de tout faire par lui-même, ou encore par son délégué, le secrétariat, mais dans le but de mieux clarifier les responsabilités et de déléguer cesdites responsabilités, si certaines sont déléguées au Secrétariat à l'adoption internationale pour certains gestes lorsque quelqu'un veut adopter un enfant et fait appel à des pays où il n'y a pas d'organisme d'adoption internationale reconnu qui fonctionne. Mais là où il y a des organismes d'adoption Internationale reconnus et qui sont prêts à signer une convention, je pense que c'est vous qui allez continuer de fonctionner, même si, à ce moment-là, le fait qu'on ait une convention nous permet, auprès des autorités en place, de vous faire reconnaître ou, comme gouvernement, de cautionner votre action justement dans ces pays.

Je voudrais juste lire ces deux paragraphes, maintenant: "Par ailleurs, l'organisme reconnu est, à toutes fins utiles, un prolongement de la ministre dans le pays étranger. C'est pourquoi il est à l'avantage de tous que ses devoirs, pouvoirs et responsabilités soient balisés dans une convention type approuvée par le gouvernement. Il est primordial que des liens de confiance s'établissent avec l'organisme reconnu qui a un rôle essentiel et important en matière d'adoption internationale. Cet organisme reconnu, cautionné par nous, pourra compter sur notre disponibilité et obtenir tout renseignement utile. "D'autre part, la convention peut aussi contenir des clauses particulières qui pourront tenir compte des particularités des pays où ils agissent et du champ d'intervention de chacun. - II se pourrait peut-être que dans certains cas, il faille des clauses particulières. - Conséquemment, interlocuteur privilégié du ministre dans ses rapports avec l'étranger, il agira dans les limites du mandat défini à la convention. Si le projet de loi ou la convention laissent subsister des ambiguïtés - et je suis d'accord avec vous qu'il en demeure au moment où nous nous parlons - quant au rôle de l'organisme reconnu, elles seront clarifiées. Il n'est aucunement question de lui enlever des responsabilités qu'il exerce actuellement."

Alors, j'ai pris la peine d'ajouter ces paragraphes à ma présentation, parce qu'on avait senti, non seulement dans le cas de votre organisme mais dans le cas d'autres organismes, des inquiétudes, à savoir: Bon! bien, finalement, est-ce qu'on nous met gentiment ou moins gentiment de côté? Ou enfin, que devient l'action qu'on a jouée, maintenant dans votre cas, depuis une quinzaine d'années au moins, je pense? Alors, je ne sais pas si cela peut être une certaine assurance, mais, en tout cas, je tente de vous la donner. C'est d'une façon très ouverte, comme je le disais ce matin, que nous accueillons les recommandations qui peuvent nous être faites et qui peuvent améliorer finalement tant le règlement que la convention et le projet de loi.

Une question reste quand même ambiguë et sur laquelle je voudrais vous demander des explications supplémentaires. C'est la question de la proposition d'enfants en regard du jumelage. Il est évident pour nous que, par exemple si le moratoire sur Haïti est levé - je pense qu'on a bon espoir que ceci survienne, j'espère, à assez brève échéance - vous pourrez aller comme délégué du ministre établir les contacts et faire des propositions d'enfants. Je pense que c'est ce que vous avez fait dans le passé également. Maintenant ce que vous demandez me semble être quelque chose de supplémentaire par rapport à ce que vous avez exercé jusqu'à maintenant comme responsabilité, c'est - si je comprends bien - une fois rendus ici, de procéder également au jumelage des enfants. Est-ce que je comprends bien? Non, j'ai mal compris. Bien tant mieux! Cela va être plus simple.

M. Demers: Enfin, ce qu'on veut exprimer ou enfin peut-être qu'on a mal interprété aussi la...

Mme Lavoie-Roux; C'est peut-être moi qui ai mal compris.

M. Demers: On a peut-être mal compris le projet de règlement. Enfin, ce qu'on voudrait, c'est lorsqu'on reçoit le dossier d'un parent, qui est en attente et qui, à un moment donné, devient premier sur la liste d'attente pour un enfant de tel âge, par exemple de zéro à deux ans, de tel sexe, lorsqu'il nous arrive un enfant à notre crèche en Haïti, que les procédures préliminaires sont faites et que l'enfant est adoptable, que nous puissions dire au parent: Voici, on a un enfant à vous proposer et c'est cet enfant. C'est ce qu'on appelle le jumelage. C'est ce qu'on faisait avant. C'est ce qu'on a toujours fait.

Mme Lavoie-Roux; C'est correct, il n'y a pas de problème.

M. Demers: Sauf que dans le projet de loi on dit que le jumelage devrait être fait par le directeur de la protection de la jeunesse, où on a mal interprété le règlement. En fait, c'est ce palier qui nous

inquiétait un petit peu.

Mme Lavoie-Roux: Oui et je pense qu'il faut faire une différence entre la proposition de l'enfant qui, elle, se fait dans le pays d'adoption, tandis que le jumelage se fait ici au Québec. Écoutez, est-ce qu'on l'appelle le pays d'adoption? En tout cas, le pays d'où originent les enfants par opposition au Québec, au pays, ou aux parents qui sont au Québec. Je pense qu'il y apeut-être une ambiguïté dans la compréhension, mais cette responsabilité que vous aviez de faire une proposition d'enfants pour un parent donné dans le pays d'où origine l'enfant, vous pouvez continuer de l'exercer, il n'y a pas de problème avec cela.

M. Demers: La question qu'on se pose c'est: Est-ce que ce sera l'organisme qui va aviser les parents qu'on a une proposition pour eux? (16 h 45)

Mme Lavoie-Roux: Je pense qu'il faudra indiquer dans la convention justement cette responsabilité qui est la vôtre, là où il y a un organisme qui peut l'assumer.

Il y aurait quelques petites questions que je voudrais vous poser. Vous dites à l'article... Ah oui! Je voudrais revenir - c'est quand même fondamental et c'est un des objectifs principaux de la commission - dans votre exposé général en page 7: "Nous nous inquiétons cependant de certaines conséquences que peut avoir ce projet de loi sur les procédures d'adoption. En effet nous constatons que les nouvelles procédures qu'on y propose peuvent occasionner des délais supplémentaires et parfois très longs pour les adoptants."

J'ai un objectif et si les gens peuvent m'aider à le réaliser, je suis prête à aller de l'avant, car justement, il y a eu beaucoup de plaintes à propos des délais, etc. Là, vous nous dites: Écoutez, faites attention parce qu'il nous semble que, d'après ce que vous présentez, vous allez ajouter de la lourdeur et vous prétendez que c'est ce que vous voulez éliminer. Ce matin, on a rencontré seulement deux organismes. Il semble qu'une grande partie des délais et, probablement, la plus grande partie, soit occasionnée par la pénurie d'enfants. Je pense qu'une certaine correction devrait être faite, si on est plus ouvert vis-à-vis de la reconnaissance de l'adoption simple.

L'autre facteur est, sans doute, une complexité trop grande des démarches, appelons-les démarches administratives ou procédures administratives. J'aimerais que vous me précisiez, par rapport à ce qui existe présentement, là où vous voyez de3 délais supplémentaires. C'est vrai qu'il y a une démarche supplémentaire qui est la reconnaissance par le Tribunal de la jeunesse que toutes les procédures ont été suivies et que les gens peuvent aller en toute confiance chercher leur enfant. Enfin, c'est déjà une première reconnaissance d'adoption, à toutes fins utiles. C'est une démarche supplémentaire, mais c'est pour éviter, comme vous le signaliez fort à propos vous-même, que ce qu'on a appelé le pouvoir discrétionnaire de la ministre elle-même ou de son délégué s'exerce de façon indue. Il y a cela et on me dit que c'est actuellement ce qui existe dans la Loi sur la protection de la jeunesse pour les demandes d'adoption au Québec et que cela ne s'est pas révélé une procédure qui allonge les choses. Cela s'obtient à l'intérieur d'un délai - m'a-t-on dit - de deux à trois jours. Mais il pourrait y avoir là un élément supplémentaire. Je voudrais que vous me signaliez les autres endroits où vous voyez que des délais supplémentaires pourraient être occasionnés.

M. Demers: Tout ce que je peux répondre à votre première question ou à votre première inquiétude, c'est que, de décembre 1985 à février 1986, nous avions huit enfants proposés, mais aucun parent. On n'avait aucun dossier du secrétariat. Pendant presque au-delà de deux mois, on a dû garder des enfants sans parents au centre; c'étaient huit garçons. Le 7 février 1986, c'était le départ...

Mme Lavoie-Roux: Ces garçons avaient quel âge? Juste par curiosité.

M. Démers: De zéro à un an.

Mme Lavoie-Roux: De zéro à un an.

M. Demers: On avait huit enfants. On a poussé beaucoup. On a poussé sur les CSS pour qu'ils puissent faire rapidement les évaluations. Vu qu'Haïti était à ce moment-là un peu en période de crise puisqu'en février M. Duvalier avait quitté, c'est dans les deux ou trois mois qui ont précédé son départ que l'on avait beaucoup d'enfants. On avait 60 enfants dans notre crèche et on manquait de parents.

Mme Lavoie-Roux: De quelle date à quelle date, m'avez-vous dit?

M. Demers: C'était de décembre 1985 à février 1986. Cela fait quand même près d'un an et demi.

Mme Lavoie-Roux: C'était avant le décret. Alors, cela ne pouvait pas être occasionné par le décret.

M. Demers: Non, mais c'était occasionné par le manque de parents évalués par les CSS.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela, mais

je voulais juste Être bien sûre.

M. Demers: D'accord? Pour ce qui est des délais, en fait, la procédure de se rendre au tribunal, de passer, de faire reconnaître la procédure d'adoption et de faire approuver notre projet d'adoption au tribunal, on voyait que, pour certains, ce serait peut-être une démarche un peu plus longue. On se disait qu'une semaine, ce n'est pas beaucoup, mais on se demandait si, dans des régions éloignées où le Tribunal de la jeunesse ne siège pas nécessairement toutes les semaines, c'était un élément supplémentaire d'attente. C'est la question qu'on s'est posée à propos de la procédure. C'est pour cela qu'on se demandait... Étant donné que la ministre pourrait quand même continuer à vérifier la validité du projet d'adoption, si cela n'est pas conforme à ce que les parents attendent, à ce moment-là, elle pourrait avoir recours au tribunal. On voyait là une façon pondérée de faire la part des choses.

Mme Lavoie-Roux: Votre remarque quant à une prolongation peut-être plus longue - excusez la répétition - plus accentuée du côté des régions éloignées est fondée. À ce moment-là, nous allons devoir, avec le Tribunal de la jeunesse, faire certains réaménagements - comme vous te dites, même si cela peut juste signifier cinq jours de plus, en tout cas au lieu de trois, cela ferait huit ou neuf - et voir à ce que les personnes ne soient pas pénalisées - sûrement pas du simple au double - parce qu'elles sont de régions éloignées. Cela pourrait vouloir dire une journée de plus ou quelque chose comme cela. Nous en prenons note.

M. Demers: Merci madame.

Mme Lavoie-Roux: C'était vraiment le point le plus important; quant à l'autre, il semble que de toute façon il y a quelque chose qui n'a pas fonctionné quelque part dans l'évaluation des enfants.

M. Demers: Des parents.

Mme Lavoie-Roux: Oui, l'évaluation des parents, pardon. C'est une question de fonctionnement de la protection de la jeunesse. Je ne peux pas vous donner de réponse sur le champ. L'autre, c'était vraiment relié à la demande au Tribunal de la jeunesse.

M. Demers: C'est cela. Oui, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Bon! d'accord. Une voix: II vous reste cinq minutes.

Mme Lavoie-Roux: II me reste cinq minutes? Je pense que je vais laisser la parole à mes collègues. On va peut-être passer à l'Opposition et revenir.

Le Président (M. Bélanger): Oui, en vertu de la règle d'alternance, Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: À mon tour, il me plaisir de vous accueillir au nom de ma formation politique. Effectivement à la lecture de votre mémoire, c'est une présentation de qualité que nous avons fort appréciée. En ce qui concerne votre convention type où vous avez fait des recommandations en fin de compte, notamment en ce qui concerne l'article 27, vous demandez tout simplement que cet article soit éliminé. Est-ce que vous pouvez nous dire exactement sur quoi vous vous basez pour considérer cet article comme étant de trop?

M. Demers: En fait on se base un peu sur l'interprétation des sommes qu'on doit mettre en fidéicommis et sur la façon dont on peut retirer ces sommes. On se demande si, lorsque les parents versent le montant pour l'adoption, on peut utiliser ces sommes seulement lorsque l'enfant est arrivé. C'est la question qui était plus ou moins bien expliquée au sujet de l'article, quant au mécanisme de la saisie de ces sommes pour les envoyer dans le pays, et poursuivre l'adoption ou les procédures. Il faut dire qu'avant de proposer un enfant en adoption, il faut qu'on garde l'enfant au centre, à la crèche. Je laisserais la parole à Mme Andrée Gilbert qui pourra peut-être vous répondre sur ce qui arrive à un enfant lorsqu'il arrive à notre crèche.

Mme Gilbert (Andrée): Quand les enfants arrivent à la crèche, vous imaginez tous dans quel état ils sont. Ils ne sont pas proposables à l'adoption quand ils arrivent. Les enfants sont pour la plupart abandonnés dans les hôpitaux, quelques-uns dans des ravins et c'est l'Institut du bien-être social et de recherches qui nous les amène. Les enfants, qu'ils aient un mois ou un an, sont toujours dans des états déplorables. J'ai déjà eu un enfant de quatre mois qui pesait quatre livres. Je pourrais vous donner des exemples comme cela. Avant d'être proposés, ils ont besoin de soins. En partant, cela nous prend les fonds nécessaires là-bas pour garder les enfants, les nourrir, puis tes examens médicaux, pour les médicaments, enfin tout. Ensuite, cela nous prend un préliminaire médical de base pour pouvoir proposer l'enfant. Donc, cela nous prend des fonds en partant pour pouvoir avoir un enfant à la crèche.

Mme Vermette: On a entendu dire que parfois cela coûtait très cher pour adopter un enfant et qu'il fallait toujours dépenser des sommes additionnelles pour différentes raisons. Que ce soit par le biais d'un organisme privé ou par le biais d'un intermédiaire reconnu par le secrétariat, cela revenait à peu près aux mêmes problèmes tout compte fait, parce qu'on est soumis à la mécanique des pays avec lesquels on a à transiger.

M. Demers: Je peux vous répondre là-dessus que même lorsqu'on perçoit le montant de l'adoption des parents, on calcule que cela prend environ six mois pour la pension de l'enfant au centre, et tout cela. Si pour des raisons hors de notre contrôle, soit ici par des retards indus, soit à l'immigration, soit qu'on ait des problèmes politiques dans le pays, comme on a vécu dernièrement, et que l'enfant doit séjourner plus de six mois dans le pays, à ce moment-là on demande aux parents de payer la pension hebdomadaire de l'enfant, tout simplement. Il n'y a pas d'autres frais que la pension de l'enfant. Si l'enfant était ici au pays et qu'on le mettait en garderie, cela nous coûterait plus cher au Québec que de le garder en Haïti, à l'exception du lait "maternisé" qui coûte excessivement cher en Haïti. Pour une caisse de lait, c'est au moins 150 $ U.S. Ceci veut donc dire que cela coûte, quand même, assez cher pour donner une bonne qualité de vie à nos enfants et, surtout, préserver en fait, leur santé, en leur procurant les soins pour qu'ils puissent demeurer en santé. Le coût est à ce niveau-là. Cela peut représenter, présentement pour un parent, de 40 $ U.S. à 60 $ U.S. par semaine, pour la pension d'un enfant en Haïti.

Mme Vermette: Lorsque vous avez donné un projet de convention type, est-ce qu'on pourrait inclure les montants approximatifs parce que justement on dit qu'on n'a pas de garantie en tant que parents. Est-ce que ce sont vraiment les sommes ou est-ce qu'on est exploité? Cela fait effectivement partie des préoccupations, des parents.

M. Demers: On a parlé de la convention type entre le ministère et l'organisme. Mais, lorsque l'organisme fait une proposition d'enfant à un couple ou à un requérant, on a aussi une convention qui lie les deux parties et les coûts sont clairement indiqués. Si les parents nous demandent combien cela coûte exactement pour leur enfant, on peut leur dires C'est 8 $ pour les prises de sang, pour le laboratoire c'est tant, tant, tant. Et, on garde un 100 $ de réserve au cas où il arriverait qu'un enfant soit malade et qu'on doive le faire hospitaliser, ce qui nécessite des soins encore plus que ce qu'on peut donner, nous, à notre crèche.

C'est, quand même, clairement expliqué. En tout cas, avec Haïti Accueillons un enfant n'a jamais eu de problème. Cela n'a jamais été aussi exorbitant qu'on le dit un peu partout. Les parents sont, quand même, toujours d'accord avec ce principe.

Mme Vermette: C'est difficile pour vous de me parler des autres associations. Effectivement, vous connaissez bien la vôtre, mais, en général, vous devez sûrement avoir des échanges de vues à un moment donné entre les différents intermédiaires. Est-ce que vous travaillez à peu près tous sur les mêmes bases ou si c'est variable?

M. Demers: Je pense que c'est variable d'un organisme à l'autre.

Mme Vermette: Est-ce qu'à ce moment-là, même si je sais que la convention type se fait entre l'organisme et l'État, pour le gouvernement, ne serait pas intéressant d'exploiter cet aspect de sorte qu'avec toutes ces garanties - parce que votre convention type, c'est une garantie finalement - les parents auraient le choix entre un organisme privé et un intermédiaire reconnu par le secrétariat?

M. Demers: Oui, je pense que ce serait, peut-être, une excellente suggestion. Je me demande même s'il ne serait pas possible pour nous d'inclure la convention qu'on signe avec les parents à l'intérieur de notre protocole d'entente et avec le ministère aussi. Cela serait aussi une garantie supplémentaire pour les parents, enfin, pour le ministère. II faut dire que tous les ans on envoie le rapport annuel de la corporation et on envoie également notre rapport financier au secrétariat, comme cela existait déjà dans notre ancienne convention.

Mme Vermette: C'est un aspect d'ailleurs qui a été mis en évidence: le contrôle au niveau des organismes. On dit que c'est assez aléatoire actuellement, que cela fait partie du rôle du secrétariat qui devrait voir à ce que les organismes travaillent d'une façon conforme aux conventions établies. Malheureusement, ce n'est pas toujours le cas et cela ne s'est pas toujours produit ainsi, ce qui a causé certains malaises.

Tantôt dans votre mémoire, au début, vous disiez que, d'après la situation actuelle, il est nécessaire d'avoir les deux formules. Vous disiez aussi, c'est à la page 7: Nous constatons que le cadre légal de l'adoption internationale est encore trop restreint pour éviter complètement l'adoption privée.

M. Demers: Oui, oui.

Mme Vermette: Qu'est-ce que vous vouliez dire à ce moment-là?

M. Demers: Ce qu'on entend par adoption privée, en fait, c'est un peu l'adoption illégale, c'est lorsqu'on passe par des réseaux à côté du réseau officiel ou à côté de la loi. C'est un peu ce qu'on entend par adoption privée ou illégale, lorsque l'enfant rentre illégalement au pays, sans avoir passé par aucune formalité auparavant, comme on a eu le cas l'an dernier en Haïti avec deux enfants qui sont entrés de façon spectaculaire au Québec et, en même temps, cela était diffusé sur les ondes de Radio-Canada en Haïti.

Mme Vermette: Oui, mais ce ne sont pas les raisons du moratoire en Haïti?

M. Demers: Oui, je ne peux pas m'avancer sur ce sujet.

Mme Vermette: D'accord. (17 heures)

Mme Lavoie-Roux: Là-dessus, enfin, si l'information que j'ai est juste, je la donne sous toute réserve, et je pense qu'on l'a d'ailleurs mentionné ce matin, ce ne sont pas des problèmes avec le Québec, mais ce serait peut-être davantage des problèmes avec d'autres pays que le Québec qui expliqueraient la raison de ce moratoire. Il y a évidemment eu cet incident regrettable, je suis d'accord avec vous, mais il ne semble pas que cela soit? selon les informations*..

M. Demers: Pour Haïti, oui, il y a eu un ensemble de problèmes, mais ce que je peux vous dire pour vous rassurer, c'est qu'en Haïti, à moins que le secrétariat n'ait dit des choses contraires ce matin, Accueillons un enfant et le Québec sont très bien vus en matière d'adoption internationale et on nous a réaffirmé encore lundi, par le biais du ministre des Affaires sociales, que le Québec et Accueillons un enfant étaient des gens modèles et exemplaires à Haïti en matière d'adoption internationale et on voudrait que tout le monde fonctionne comme nous ou à peu près.

Mme Vermette: Vous avez parlé, en page 7 de votre mémoire, des délais énormes. D'après vous, un délai raisonnable, cela représente combien de mois? Est-ce qu'on pourrait parler de semaines? Finalement, est-ce possible et envisageable que l'ensemble des organismes puisse prendre à peu près trois mois pour répondre aux besoins? Est-ce que c'est faisable? Parce qu'on demande souvent des délais de trois mois.

Mme Gilbert: Quand vous parlez de délais de trois mois, c'est à partir...

Mme Vermette: Le processus a déjà été enclenché, une reconnaissance a été faite. Dès que tout cela est fait et qu'ils sont reconnus parents capables d'adopter un enfant, bon! ça y est.

Mme Gilbert: D'accord. Cela peut être assez long, ce délai. Nous nous faisions une moyenne de six mois comme délai. Parfois, c'était quatre, parfois, c'était six et parfois, c'était sept, selon les pays. On ne peut jamais fixer un délai. Comme en Haïti, avec la politique, le ministre change aux trois mois, les directeurs généraux changent également aux deux, trois ou quatre mois, et chaque fois qu'une personne part, elle part avec toute sa documentation. Donc, on recommence. Selon les changements, c'est difficile pour nous de fixer un délai. Par contre, on s'est toujours tenu dans une moyenne de six à sept mois et on ne considère pas cela très long, si on le compare avec les délais qu'il y a au Québec à partir du moment où le couple fait la demande et le moment où le dossier est acheminé à notre bureau. À notre avis, c'est là que le délai est immense. C'est là que c'est très long.

M. Demers: Le délai aussi est augmenté - et ce sera peut-être des ententes à négocier avec le ministère, en fait - en ce qui concerne l'examen médical d'immigration. Auparavant, l'entente qu'on avait avec le secrétariat était que, dès qu'on faisait une proposition d'un enfant à des parents, on émettait immédiatement une instruction médicale et la réception pour l'instruction médicale, l'examen fait de l'enfant en Haïti. Vous savez, cet examen médical doit être expédié à Kingston en Jamaïque, être approuvé par le médecin s'il n'est pas parti en congé ou s'il n'est pas parti dans les îles pour faire une tournée de ses bureaux de santé, une tournée médicale et cela doit revenir en Haïti et là, on dit: Oui, l'enfant peut entrer au pays au point de vue médical. Cela peut prendre trois mois, cela peut prendre un mois. Et c'est un délai important. Mais nous disons que, si les instructions médicales sont émises lorsque l'enfant est prêt à entrer, cela pénalise l'enfant d'au moins deux à trois mois dans le pays. Et on l'a vécu encore dernièrement.

Mme Lavoie-Roux: Si vous me le permettez, M. le Président, à ce sujet, nous sommes conscients de cette espèce de double délai parce que, ici, on exige de nouveau l'examen médical et il y aurait peut-être moyen que le même examen médical serve pour les deux, ce qui éviterait...

M. Demers: Non. On exige seulement un examen médical, Mme la ministre.

Mme Lavoie-Roux: Oui?

M. Demers: Seulement celui de l'ambassade du Canada en Haïti par un médecin autorisé par le ministère canadien de la Santé nationale et du Bien-être social. Et c'est cet examen qu'on doit expédier en Jamaïque pour être approuvé par le médecin. Si on me l'envoyait, je l'approuverais, c'est bien sûr, mais enfin...

Mme Vermette: Tantôt, puisqu'on parle toujours des délais, j'aimerais que vous m'entreteniez de vos rapports avec le Secrétariat à l'adoption internationale. Il serait peut-être intéressant de savoir pourquoi, alors que vous avez des enfants, ici, tous les parents se plaignent de ne pas avoir d'enfants. Vous nous éclaireriez un petit peu là-dessus.

M. Demers: À cette période-là, si on parle de décembre 1985 au moment où on manquait d'enfants, les rapports avec le secrétariat étaient excellents, on a toujours de bons rapports avec celui-ci et je pense qu'on en a encore et c'étaient d'excellents rapports. Cependant, on nous disait que c'était dans les CSS que l'évaluation ne se faisait pas assez vite. C'est sûr qu'on essayait de respecter une liste provinciale mais il y avait des CSS qui travaillaient plus vite que d'autres ou qui avaient plus de ressources. C'est toujours dans les CSS où il se faisait le moins d'évaluations que cela traînait un petit peu la patte et que cela retardait un peu indûment tout le monde. On a quand même fait des pressions avec le secrétariat sur les CSS pour pouvoir sortir le plus rapidement des évaluations. On sait que dans un CSS si la travailleuse sociale est à demi-temps et qu'elle en a plusieurs... Il est sûr qu'on ne veut pas adopter seulement en Haïti, mais à ce moment-là c'était pour nous une situation d'urgence. Ce n'était pas parce que les rapports n'étaient pas bons avec le secrétariat. On a eu à un moment donné beaucoup d'enfants qui sont entrés ensemble. C'est ce qu'on appelle en fait le "boom du carnaval"; au mois de novembre, ce sont les enfants de février. C'est un peu cela.

Mme Vermette: Finalement, on débouche sur le rôle que les CSS doivent jouer en ce qui concerne l'évaluation. On dit que là aussi le délai est excessivement long le délai est déjà long pour avoir l'autorisation d'entreprendre une démarche -mais une fois que c'est fait, il y a un autre délai qui s'ajoute, c'est l'évaluation des parents. Souvent, les CSS manquent de personnel, mais ce n'est pas le plus gros problème. Le plus gros problème, c'est le manque d'enfants. S'ils ne font pas d'évaluation, c'est parce qu'il n'y a pas d'enfants disponibles. Je ne le sais plus, j'en perds mon latin.

M. Demers: Je peux vous dire qu'actuellement c'est peut-être vrai pour Haïti parce que c'est un peu en suspens là-bas pour des raisons politiques. Là-bas on est en train de refaire la loi un peu comme ici. C'est à ce moment-là qu'a eu lieu le départ de M. Duvalier. Cette dernière année, on a eu un peu plus de problèmes à cause de ce qui s'est vécu dans le pays. Auparavant, on n'avait pas vraiment de problèmes et les enfants entraient et sortaient, mais on n'avait pas assez de dossiers en attente à ce moment-là. Si un parent veut avoir une fille de deux à quatre ans, si on n'a que des garçons et qu'ils ne veulent pas avoir de fille, il est sûr qu'ils vont attendre plus longtemps. Ce qui va faire que des parents vont attendre plus longtemps, c'est le type d'enfants qu'ils veulent avoir, c'est-à-dire l'âge et le sexe.

Mme Vermette: Oui et surtout des bébés jeunes.

M. Demers: Présentement, nous, ce qu'on a en Haïti, en majorité, ce 3ont des enfants de zéro à un an et je dirais à 70 % des garçons.

Mme Vermette: II y a un autre aspect. Vous avez parlé de l'évaluation, mais il y a une problématique particulière avec Haïti à cause de la coloration des enfants. Lorsque vous faites des rencontres d'information auprès des parents qui contactent votre association parce qu'ils en ont entendu parler, est-ce qu'il vous arrive aussi par votre rôle, parce que vous avez une expertise et que vous avez peut-être vécu l'expérience en tant que parents, est-ce que vous faites des mises en garde aux parents pour qu'ils soient au courant du fait que l'enfant - ce n'est pas comme au Guatémala où la peau est beaucoup plus pâle - risque d'avoir une peau plus foncée?

M. Demers: C'est cela. Effectivement, nous mettons les parents au courant de ce que c'est, de ce qu'est une adoption, de ce que c'est l'adoption d'un enfant étranger, d'un enfant de couleur et spécialement d'un enfant de race noire. Je pense qu'on les met bien en garde là-dessus. On a même produit un document il y a deux ans en collaboration avec le CSS de Québec parce qu'on est tout près. D'ailleurs, on a une très bonne collaboration du CSS de Québec. On a rassemblé comme organisme ou comme parents qui ont déjà adopté, comme organisme qui va souvent dans le pays, un peu ce qu'on devrait demander aux parents ou ce sur quoi on devrait faire réfléchir les parents lorsqu'on fait l'évaluation d'un couple

ou des requérants. Ce sont des éléments qu'on a ressortis effectivement et qu'on a soumis au CSS. On en tient compte. D'ailleurs une fois qu'un enfant est arrivé, le rôle de notre organisme ne s'arrête pas là. On a aussi la postadoption comme vous avez pu le voir dans notre mémoire, on fait de la postadoption, c'est-à-dire qu'on s'assure avec les parents ou avec nos familles ressources que tout va bien dans la famille. On fait des rencontres de groupes et on donne un service aux parents qui ont adopté.

Mme Vermette: Je voulais aussi vous poser une autre question. Dans votre mémoire, vous faites référence, justement, à l'évaluation des parents. Je pense que c'est un volet important et qu'on devrait mettre l'accent là. On en parle souvent. Les parents se sont beaucoup plaints. Au lieu de faire l'évaluation pour savoir si le parent est capable d'assumer la différence d'avec son enfant, on met souvent l'accent sur d'autres problématiques comme la capacité affective des parents dans leur relation de couple et on va beaucoup dans l'intimité du couple.

À cet égard, vous avez aussi fait une recommandation à savoir que l'évaluation, pour gagner du temps, pourrait aussi être faite en cabinet privé, parce qu'il y a un manque de ressources dans les CSS. Ne voyez-vous pas là un certain danger? Finalement, est-ce que vous pensez que l'on touche un peu à l'accessibilité?

M. Demers: Enfin, si on a recours au secteur privé, on croit que ce devrait être des gens reconnus par le ministère ou par les CSS. Certains CSS l'ont fait pour gagner du temps. C'est peut-être un petit peu dans ce sens... Lorsque l'on a dit "une évaluation qui est quand même selon les normes de leur corporation", je pense, si on se fie à leur corporation, que cela devrait être important. Enfin, je n'ai pas de données statistiques, mais je ne crois pas que le refus des parents se fasse sur leur capacité parentale. II faut amener les parents à prendre conscience du geste qu'ils vont poser et de ce qu'il va arriver dans leur vie après. Je pense que c'est plus à ce niveau que doit se jouer l'évaluation. Il faut s'assurer que les parents sont stables; une fois que c'est prouvé, il faut quand même être capable de faire mûrir le projet des parents. Peut-être qu'il faudra le faire mûrir avant de faire immédiatement une évaluation; avant de faire l'évaluation finale, il y aura peut-être une certaine transition pendant les quelques mois d'attente. Quand tu t'inscris, on te place sur une liste d'attente, et un an après, tu reçois une lettre qui dit: Si tu ne réponds pas, on t'enlève. C'est tout ce que l'on te demande. Cela peut prendre deux ou trois ans avant que l'on t'évalue. Pendant tout ce temps, rien ne se passe. C'est là qu'est, en partie, la première angoisse des parents. Pendant deux ou trois ans, tu ne sais pas ce qui va arriver, tu n'es au courant de rien. Je pense qu'il faudrait qu'on entretienne ces parents. C'est à partir de ce moment-là qu'on peut au moins faire mûrir leur projet d'adoption.

Mme Vermette: Avant de terminer, j'espère qu'on va me laisser poser ma question, j'ai une minute pour vous la poser. Elle me brûle les lèvres et je la trouve assez importante. Est-ce qu'il y a eu beaucoup de parents qui ont eu affaire avec votre organisme et qui, une fois l'enfant arrivé au pays, n'ont pas été capables d'assumer cette responsabilité? qui ont remis l'enfant et vous avez été obligés de le replacer ailleurs.

M. Demers: La première chose que je vais vous répondre là-dessus, c'est que nous n'avons aucun contrôle sur la capacité parentale. On nous donne un dossier et on le fait procéder en Haïti. À la première question, je peux vous dire que le gouvernement d'Haïti a refusé des dossiers du Québec parce que la travailleuse sociale avait fait certaines recommandations. On a quand même soumis le dossier à l'adoption, alors que la travailleuse sociale avait écrit, par exemple: On ne croit pas que ces parents vont être capables de garder un enfant de couleur. Quand même, on nous a transmis le dossier pour l'envoyer en Haïti. C'est sûr que là-bas, ils lisent les dossiers et la travailleuse sociale a dit: Non, on bloque ces couples. C'est le seul cas où les parents ont été bloqués là-bas. Maintenant, où les parents ont rejeté l'enfant...

Une voix: Carrément.

M. Demers: ...il y en a au moins un ici que je connais, il y en a même un deuxième. L'enfant est arrivé, il a été placé dans un hôpital et le médecin a dit que l'enfant était malade mental. Les parents n'ont pas pris l'enfant, tout simplement, mais le diagnostic n'était pas juste, l'enfant va très bien présentement. On a travaillé avec le CSS pour qu'il soit dans une famille et il a été adopté par une autre famille; cet enfant se développe très bien. Enfin, il y a eu deux cas et ils se sont présentés dans le même CSS. On se demande si...

Une voix: Le même médecin et le même hôpital.

M. Demers: Oui, c'est le même médecin au même hôpital qui a porté de faux diagnostics pour les deux enfants; c'était le même CSS. Ce sont les deux seuls cas qu'on a eus sur 800.

Mme Vermette: Écoutez, il ne me reste

plus qu'à vous remercier de vous être si bien prêtés à la série de questions qu'on vous a posées. Je vous en remercie beaucoup. Je pense que vous allez apporter un grand éclairage pour nos décisions.

M. Demers: Merci.

Le Président (M. Bélanger): M. le député de Laurier.

M, Sirros: Merci, M. le Président. J'aurais une question très brève. À un moment donné, vous dites dans votre mémoire que, dans les pays d'adoption simple où les enfants sont des orphelins ou de parents inconnus, cela ne devrait pas être nécessaire d'avoir un représentant du pays qui entre dans le processus. Qui pourrait, à ce moment-là, vous certifier ou prouver qu'ils sont véritablement de parents inconnus? (17 h 15)

M. Demers: Bien, nous, pour Haïti, c'est l'hôpital d'où vient l'enfant. En ce qui concerne Haïti, pour nous, le problème ne se pose pas parce que de, toute façon, on a mis en place une mécanique avec Haïti de telle sorte qu'on a toujours l'autorisation de l'Institut du bien-être social et de recherches d'Haïti. Pour nous, le projet de loi tel quel ne cause aucun problème. On nous aurait dit: Qu'est-ce que vous faites en Haïti, on va l'écrire dans le projet de loi et cela aurait été cela. Mais on pense aux autres organismes. Enfin, je pense que c'est l'organisme et c'est la personne, l'officier d'État civil ou celui qui dit que l'enfant est abandonné, celui qui signe l'acte de naissance, je pense, qui devient un petit peu la personne qui mandate, d'autant plus que l'organisme aussi est là.

Mme Gilbert: Si l'enfant est abandonné dans un hôpital, c'est le directeur général de l'hôpital qui signe le certificat d'abandon, attestant que l'enfant a vraiment été abandonné ou est orphelin. Si l'enfant est abandonné dans la rue, il peut être placé à la crèche pendant X temps et si personne n'est venu le réclamer après un mois ou deux, c'est le juge de paix qui signe le certificat d'abandon. En tout cas, c'est cela pour Haïti. Donc, dans plusieurs pays, cela devrait être similaire.

M. Demers: Parce que cela évite des délais pour ces enfants.

Mme Lavoie-Roux: Je voudrais juste revenir très brièvement sur trois points, et ce pour l'information générale. On me transmettait l'information que, sur 100 demandes de parents pour des enfants, il n'y en a que cinq ou six qui vont accepter des enfants noirs, les autres préfèrent des enfants de l'Amérique latine ou d'Asie. Cela veut dire qu'il y en a qui doivent être plus longtemps sur la liste d'attente.

La deuxième chose que vous avez dite dans vos remarques tout à l'heure, c'est: Ecoutez, on aurait aimé avoir une commission beaucoup plus large et même, une commission d'enquête sur l'adoption...

M. Demers: Ce ne sont peut-être pas les bons termes que nous avons employés. Enfin, c'est une commission élargie ou...

Mme Lavoie-Roux: Mais pas une commission d'enquête?

M. Demers: Non, une commission parlementaire.

Mme Lavoie-Roux: Je me demandais si derrière cela il y avait des préoccupations qui peut-être même dépassaient les nôtres. Ce n'était pas dans ce sens?

M. Demers: Ah non! excusez. C'est une commission parlementaire élargie en fait.

Mme Lavoie-Roux: Oui, d'accord. Je voudrais juste revenir une dernière minute sur les montants mis en fidéicommis que vous recevez des parents. En tout cas, on va réexaminer cela dans la perspective où vous dites que c'est la façon dont vous fonctionnez. Mais il semble que déjà, un certaine nombre d'organismes reconnus le font. La seule garantie, c'est que l'argent est versé par des parents, par le parent A, et est utilisé pour l'enfant qui est réservé au parent A. Ce n'est pas du tout pour multiplier des consentements ou faire un contrôle; c'est simplement une garantie. Je ne sais pas si, à ce sujet, vous avez véritablement des objections?

M. Demers: Non, enfin, pour autant qu'on puisse s'assurer d'un mécanisme qui va nous permettre de retirer ces sommes...

Mme Lavoie-Roux: Ah! que vous puissiez l'utiliser.

M. Demers: ...au fur et à mesure que... Mme Lavoie-Roux: C'est cela.

M. Demers: ...le dossier des parents progresse dans le pays. C'est à ce niveau surtout que notre...

Mme Lavoie-Roux: Non, sur cela, je pense qu'il n'y aura pas de problème du tout. C'est vraiment juste une assurance aux parents que l'argent va pour l'enfant qu'ils -enfin, je ne sais pas si on peut parler de "patronner", mais en tout cas - parrainent dans le pays.

M. Demers: Ce que je pourrais vous dire, Mme la ministre, c'est un petit peu ce qu'on fait déjà. Lorsqu'on a l'argent des parents, en fait, on l'envoie au fur et à mesure en Haïti, au fur et à mesure du développement, de l'évolution du dossier. Mais il faut dire aussi qu'on profite de nos... Ce n'est pas facile d'envoyer quelque chose comme un dossier confidentiel ou des sommes d'argent en Haïti. Il faut avoir quand même des personnes fiables et il faut profiter des occasions où quelqu'un se rend dans le pays, habituellement, pour pouvoir transmettre soit des dossiers ou des sommes d'argent, des traites bancaires, en fait, pour les enfants.

Mme Lavoie-Roux: Alors, écoutez, je veux vous remercier et on va tenir compte de vos remarques. Je pense que déjà on a peut-être apaisé certaines de vos inquiétudes. Évidemment, il va y avoir des corrections apportées aux trois, au projet de loi, au règlement et au... Le règlement, de toute façon, n'était plus en concordance avec le projet de loi.

M. Demers: Avec la loi, oui, c'est cela.

Mme Lavoie-Roux: II avait été déposé et on ne voulait pas retarder les choses. La raison pour laquelle on n'a pas eu de commission élargie, c'est qu'il existait, avec l'interprétation de la loi, la nécessité d'intervenir le plus rapidement possible, au plan législatif, pour modifier d'abord dans le Code civil les dispositions qui avaient donné lieu à des interprétations diverses et qui nous avaient amenés dans un cul-de-sac ou, enfin, nous y serions arrivés à plus ou moins long terme. Cela aurait pu vouloir dire un processus qui nous aurait menés à l'automne prochain. Alors, c'a été la raison principale. Je vous remercie beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Alors, M. Demers, Mme Gilbert et M. Gagnon, nous vous remercions infiniment de votre apport à la commission.

J'appelle la prochaine association, soit l'Association des parents pour l'adoption internationale. Si vous le voulez, on va suspendre les travaux pour cinq minutes, le temps de changer de groupe et de bouger un petit peu, en ce qui nous concerne.

(Suspension de la séance à 17 h 20)

(Reprise à 17 h 24)

Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il vous plaît!

Je demanderais à chacun de reprendre sa place. À l'ordre, s'il vous plaît!

Nous allons entendre maintenant l'Association des parents pour l'adoption internationale représentée par le président, M. Edmond Venne, M. Bertrand Ahier et M. André Perreault qui sera le porte-parole. M. Perreault, si vous voulez avoir l'obligeance de nous présenter votre équipe, d'abord.

Association des parents pour l'adoption internationale

M. Perreault (André): D'accord. M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les députés, mesdames et messieurs, d'abord, j'aimerais vous présenter, immédiatement à ma droite, M. Edmond Venne, qui est le président de l'Association des parents pour l'adoption internationale, qui a déjà adopté un enfant de république Dominicaine en ]985 et qui est également parent naturel d'un autre enfant. J'aimerais aussi vous présenter, à mon extrême droite, Jean-Jacques Gauthier, qui est administrateur de l'APPAI et également qui est en attente d'évaluation depuis un an et deux mois exactement. À ma gauche, vous retrouvez Bertrand Ahier, secrétaire trésorier de l'association, ayant adopté un enfant de république Dominicaine en 1985. Je suis André Perreault, président du comité du mémoire, également en attente d'évaluation depuis deux ans et trois mois et je tiens à signaler que c'est pour n'importe quel pays, pour n'importe quel sexe et que j'étais en attente, à ce moment-là, entre décembre 1985 et février 1986.

Si vos règlements me le permettent, j'aimerais produire aux personnes qui sont autour de cette table ce dont on se servira pour la présentation de nos points saillants durant cette brève allocution de 20 minutes.

Le Président (M. Bélanger): Mme la secrétaire va vérifier. Est-ce qu'il y aurait consentement des deux côtés pour le dépôt de documents' Oui.

M. Perreault: Je m'excuse, je dois signaler que c'est un document de deux pages. Il n'y a rien d'ajouté, c'est du...

Le Président (M. Bélanger): II n'y a pas de problème. Le document est donc considéré comme déposé à la commission.

M» Perreault: Merci. L'Association des parents pour l'adoption internationale recommande la formulation de règles claires favorisant l'adoption internationale. Plus spécifiquement, l'APPAI suggère l'adoption des mesures suivantes. La première, c'est la préparation d'un préambule à la loi dans lequel est indiqué, et ce, dans l'intérêt de l'enfant, l'intention de favoriser l'adoption internationale en l'absence d'un milieu familial stable en pays d'origine. On a été habitué à l'ancienne - ce qui est encore, aujourd'hui, le processus - philosophie du

secrétariat qui ne s'affichait en faveur de l'adoption internationale que lorsque tous les recours avaient été épuisés. Cette philosophie ne nous semble pas refléter le désir autant du gouvernement que de la société québécoise d'aujourd'hui. À ce sujet, le projet de loi tombe dans le mutisme complet et je pense que les règles d'interprétation de la loi font qu'une telle indication pourrait faire pencher l'interprétation des tribunaux en faveur de l'adoption internationale dans les cas où il y a mésentente entre les intervenants. Je pense également que ce préambule saurait valoriser la responsabilité sociale méritoire des parents qui décident d'adopter un enfant hors frontière.

Quant au deuxième point, l'APPAI suggère la considération de l'adoption internationale comme une mesure de choix dans le cadre d'une politique familiale efficace et de la lutte à la dénatalité. On a récemment pris connaissance de statistiques indiquant que le taux de croissance au Québec était de 1,6 %, un des taux les plus bas au Canada, et on croit qu'on peut retrouver dans l'adoption internationale une mesure efficace.

Le troisième point, c'est la reconnaissance des jugements d'adoption simple et plénière. Nous sommes heureux de voir que le projet de loi reconnaît maintenant l'adoption simple. Cependant, nos inquiétudes ne se limitent pas à cette simple déclaration. Il est indiqué dans le projet de loi que l'on reconnaîtra l'adoption simple lorsqu'un représentant de l'État pourra conclure à l'adoptabilité de l'enfant. Pour nous, il y a un problème. Il y a un problème parce qu'on n'arrive pas à identifier qui sera la personne, selon notre propre loi, autorisée dans l'État à décider de l'adoptabilité d'un enfant. Il n'y a rien qui prévoit que telle ou telle personne de l'État en particulier puisse donner cette autorisation et, en fonction de la connaissance qu'on a de l'appareil administratif de certains pays, on peut se demander dans quelle mesure quelqu'un pourrait brandir une autorisation donnée effectivement par écrit par un représentant ordinaire de l'État, mais qui ne serait pas nécessairement autorisé à donner une telle autorisation en matière d'adoption internationale précisément. On pense donc qu'il y a là une lacune. On pense également que la loi manque en ce qu'elle n'arrive pas à établir à quel moment l'État doit donner son consentement. Est-ce avant ou après le jugement a intervenir en pays étranger? Est-ce que je dois m'adresser au tribunal en pays étranger et ensuite m'adresser à l'État ou est-ce que je dois m'adresser à l'État et, suite à cela, m'adresser au tribunal pour obtenir un jugement d'adoption?

Le quatrième point est la supervision effective, par le secrétariat, des intervenants plutôt que la simple coordination de ceux-ci.

Le terme "coordination" a été puisé directement dans le projet de loi et dans les articles suggérés. Il ne faudrait pas croire que l'on voit là une tâche répressive à l'endroit des intervenants. Au contraire. Selon nous, cela va mettre fin à l'anarchie qui fait actuellement que le manque de discipline et de règles établies mène à un chaos complet. Il est important que l'on retrace, parmi tous les intervenants, quelqu'un qui soit en mesure de mettre un point final à des directives, à des décisions... Les parents sont trop souvent confrontés aux opinions des intervenants, alors qu'ils n'arrivent pas à distinguer à qui ils doivent se référer. Je peux avoir une opinion du secrétariat qui va différer de celle de mon travailleur social relativement à un certain point et je ne sais plus qui croire. Je traite avec mon travailleur social, mais je sais que le secrétariat est l'organisme mandaté par le gouvernement.

Le cinquième point est la création d'une liste d'attente provinciale gérée par le secrétariat, permettant que chacun d'eux puisse en tout temps consulter son rang. Il est important que l'on puisse établir cette liste et que cette liste soit publique, non pas dans le sens de la connaissance de tous les noms qui s'y retrouvent, mais il est important que quelqu'un puisse s'assurer qu'il n'y a pas de passe-droit, que son dossier évolue normalement et qu'à chaque adoption qui se fait il gagne un rang sur l'échelle. Ce qui n'est pas le cas actuellement. On n'arrive pas, avec les listes locales, à savoir où on se retrouve, si effectivement on est la prochaine personne à être traitée ou après combien de personnes on va être traité.

Il faut également qu'il y ait de l'encouragement et qu'on respecte les contacts privés. J'aimerais apporter une distinction à ce qu'on a dit ce matin lorsqu'on a parlé de l'adoption privée. Il y a une différence entre les contacts privés et l'adoption privée. Nous ne recommandons pas l'adoption privée parce que, selon nous, elle peut mener aux filières mercantiles, mais nous recommandons les contacts privés. Lorsqu'une personne peut avoir un lien avec une personne en autorité dans un pays et qu'elle peut par la suite passer par le gouvernement et remplir le processus qui est prévu pour tout adoptant, cette personne devrait pouvoir adopter cet enfant qui lui est réservé dans un autre pays.

Nous aimerions également qu'on observe rigoureusement le délai maximum de trois mois entre l'inscription et l'évaluation des parents, selon une grille commune, connue, des critères appliqués par les travailleurs sociaux. On en a déjà parlé. Je vais passer rapidement, sauf qu'il me semble que les trois mois ont été acceptés, ou presque, ce matin par les centres de services sociaux. Cela semblait être quelque chose de faisable.

On se retranche derrière l'impossibilité pour les organismes de suffire à la demande pour dire que cela prend trois ans ou à peu près. La grille connue des critères est importante en ce qu'elle permet aux adoptants d'avoir un contrôle sur l'approbation ou le refus de leur demande, bien que les refus, on l'admet, soient très rares à notre connaissance.

Il y a un point important. L'article 72.3.1 envisagé dans la Loi sur la protection de la jeunesse traite du mot "besoins". II est important pour nous que les besoins ne soient pas ceux déterminés par les capacités des centres de services sociaux, mais ceux déterminés par la demande des parents adoptants et par le respect du délai prévu et demandé de trois mois.

Au septième point, nous demandons la fin heureuse, dans l'année qui suit, des dossiers ouverts depuis deux, trois ou quatre ans. Il y a des gens qui, après quatre ans, attendent encore aujourd'hui une adoption. À notre avis, c'est inacceptable. Je pense qu'il est de règle de dire qu'en 1980, une adoption prenait de neuf mois à un an. En 1985, quelqu'un qui allait s'inscrire se faisait dire par le travailleur social qu'il en avait pour deux ans à attendre une évaluation. Au bout de ces deux ans, en 1987, cette même personne, inscrite en 1985, se fait dire par le travailleur social qu'il y a déjà un an de plus à ajouter au délai. En 1987, quelqu'un qui s'inscrit se fait dire qu'il doit attendre trois ans avant une évaluation. Cela nous fait penser que ce sera probablement dans le temps cinq ans à cause des délais qui se seront ajoutés et que ce sera probablement, en réalité, sept ans, si on ajoute le délai que cela prendra à l'organisme pour trouver un enfant.

Il faut également qu'il y ait implantation du recours au Tribunal de la jeunesse - et on est fier que ce soit reconnu - en simplifiant la procédure, en affichant les sanctions de non-respect de la procédure et en permettant aux parents de prendre connaissance des rapports les concernant et de présenter leur projet au tribunal, même si le DPJ n'approuve pas le projet.

Quand on dit simplifier la procédure, actuellement, le projet de loi prévoit deux étapes au Tribunal de la jeunesse: une première, avant de partir et une deuxième, au retour. Il y en a une qui doit sauter. Si on dit que l'étape préliminaire est très importante, à ce moment-là, pourquoi revenir et retourner devant le tribunal? Si l'on dit: Non, je regrette, mais la deuxième étape est la plus importante parce que c'est là que c'est complété, à quoi sert-il de se présenter une première fois devant le tribunal pour se faire dire que c'est correct?

Également, il est important, quand on parle de simplification de la procédure, de vous reporter à des exemples où l'on a simplifié la procédure dans le but de favoriser certaines mesures. Par exemple, aux petites créances, le rôle du greffier est élargi. On emploie des formulaires faciles à remplir. Sinon, les coûts augmentent et, quand les coûts augmentent, ce sont toujours les parents qui paient la note au bout. En prévoyant l'utilisation du tribunal, si on n'arrive pas à en faire un tribunal administratif favorable à l'intervention populaire, les coûts augmenteront parce que les parents devront avoir recours à des avocats pour se présenter devant le tribunal.

Le neuvième point: la disponibilité des services d'adoption internationale dans tous les CSS du Québec, avec recours au travailleur social privé, lorsque cela s'impose pour le respect des délais. Je pense qu'on en a déjà parlé. D'autres intervenants avant nous ont fait valoir ce point et nous endossons le recours au travailleur social privé, avec supervision des CSS, dans les cas où c'est nécessaire pour respecter les délais.

Le dixième point: l'obligation de la convention type pour les organismes reconnus d'agir sans but lucratif, ce qui n'est pas prévu actuellement. À notre connaissance, ils agissent tous sans but lucratif, mais la possibilité qu'une personne morale se présente et obtienne une charte pour faire de l'adoption internationale avec but lucratif, ce n'est pas interdit actuellement, que l'on sache.

Fournir des renseignements écrits et les documents dont la liste fait mention à ladite convention type, pour faire en sorte que les parents puissent se préparer dès le début à leur projet d'adoption.

Un traitement juste et équitable de tous les parents en attente. J'aimerais apporter une mention quant à l'amnistie qui a été accordée. Plusieurs de nos membres ont sursauté. Quant à nous, on avait toujours encouragé nos membres à suivre le processus pour qu'ils aient une adoption claire et de qualité. Ce dont on s'est aperçu, c'est que ceux qui attendaient depuis deux, trois ou quatre ans dans la légalité attendent aujourd'hui, alors que ceux qui se sont prévalu d'une inscription dans l'illégalité il y a un an se trouveraient amnistiés. Je vous dirai que la pilule ne passe pas auprès des parents adoptants et que si on n'arrive pas à trouver un autre moyen, il est évident qu'on se retrouvera avec de plus en plus de cas où on aura à penser à des sanctions ou à l'amnistie.

On y indique également la disparition de pratiques discriminatoires quant à ceux qui entendent se prévaloir de l'adoption internationale. Cela implique certains aspects. On a refusé à des parents d'être famille d'accueil en attente d'adoption internationale, alors qu'on ne le refuse pas à des parents en attente d'adoption au Québec. On a invité des parents à adopter au Québec et on leur a fait des incitations à adopter au

Québec, alors que ces personnes étaient intéressées, au début, à adopter hors frontières. S'il est dit qu'il y a une banque où il y a une pépinière d'enfants au Québec, je vous dirai qu'il n'est sûrement pas dans les capacités de tout le monde de s'occuper, dès l'entrée d'un enfant dans la maison, d'un adolescent. Il n'est sûrement pas non plus dans les capacités de tout le monde de s'occuper de mésadaptés sociaux affectifs ou de handicapés. Il faut également que l'appui technique, juridique et financier soit reconnu aux adoptants. Un simple exemple au point de vue d'appui technique, c'est un service de traduction. La traduction des documents dont on demande la production en français ou en anglais cause des problèmes énormes aux parents. Également l'appui juridique rendu obligatoire à notre avis par l'intervention bienvenue du Tribunal de la jeunesse et l'appui financier. Je pense que le gouvernement doit se pencher sur des mesures fiscales permettant d'encourager les parents à recourir à l'adoption internationale.

Le quatorzième point touche la reconnaissance des associations de parents comme intervenants faisant partie d'un comité consultatif permanent à être créé. C'est presque historique pour nous de pouvoir nous adresser aux personnes qui ont un pouvoir décisionnel, aujourd'hui, et on espérerait être beaucoup plus souvent plus prêts de ces pouvoirs décisionnels et de pouvoir faire valoir les expériences qui sont vécues chez nous. J'aimerais signaler un petit calcul que j'ai effectué tantôt lors de l'audition des intervenants qui nous ont précédés. On nous a dit au centre des services sociaux qu'un délai de trois mois était suffisant pour régler le cas d'une évaluation et qu'on attendait les organismes, parce que cela ne peut pas aller plus vite de toute façon dans les pays. C'est pour cela que cela prend trois ans. On nous a dit d'un autre côté chez les organismes que cela prend à peu près six mois à débloquer un dossier à l'extérieur du pays lorsque le dossier leur est acheminé. Je dois conclure que trois mois plus six mois, cela donne quatre ou cinq ans. Il me manque trois ans et trois mois ou quatre ans et trois mois quelque part. Je ne pense pas que le projet de loi réponde à ce manque de quatre ans et trois ans. On ne l'explique pas, et on n'entend pas y pallier définitivement. Je vous remercie.

Le Président (M. Bélanger): M. le président, nous vous remercions. Mme la ministre. (17 h 45)

Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier les porte-parole de l'Association des parents pour l'adoption internationale. Je pense que vous avez préparé un mémoire fouillé et vous avez essayé de couvrir de nombreux aspects, non seulement du projet de loi, mais également des préoccupations qui sont les vôtres comme parents. Vous semblez - si j'interprète mal, vous me corrigerez - reconnaître ces principes de base à savoir que l'adoption internationale doit être encadrée. On ne peut pas la laisser aller à la va-comme-je-te-pousse. C'est quand même encourageant parce qu'il faut comprendre que toute cette discussion qui a eu lieu, et vous l'avez signalé, c'est peut-être parce que nous sommes des optimistes de part et d'autre, mais elle a, au moins, amené sur la place publique un sujet qui, probablement, aurait dû l'être déjà depuis longtemps. Si cela n'avait pas abouti à l'occasion du décret et de sa publication à La Gazette officielle du Québec, je pense que cela aurait été simplement partie remise et cela aurait éclaté à un autre moment avec ce qu'on sent aussi être des modifications dans le comportement des pays qui laissent aller leurs enfants pour adoption. Ils commencent à être plus sensibilisés aux problèmes et ils se posent, peut-être, plus de questions qu'ils s'en posaient à l'origine quant à ce qu'il arrivait aux enfants qui partaient pour adoption dans d'autres pays.

Vous soulevez beaucoup de questions. Je vais essayer d'en reprendre quelques-unes. Ce ne seront peut-être pas nécessairement celles qui vous touchent le plus.

D'abord, je voudrais commencer par le début. Vous parlez d'un préambule à la loi qui indiquerait les intentions véritables de l'État quant à l'adoption internationale. Ce matin, j'ai eu l'occasion de dire que nous favorisons l'adoption internationale, mais dans des conditions qui soient acceptables. La raison pour laquelle il est pratiquement impossible d'introduire ce préambule dans un projet de loi comme celui-ci, c'est que c'est un projet de loi qui vient modifier le Code civil. Alors, le Code civil ne contient pas ce genre de formulation. Par contre, je pense qu'on pourrait le retrouver dans ce qui serait un énoncé de principes à l'intérieur d'une politique qui n'a peut-être pas besoin d'avoir 300 pages, mais qui pourrait être une politique officielle du ministère de la Santé et des Services sociaux. Je pense que c'est encore une suggestion qui pourrait être retenue pour que vraiment il n'y ait pas d'ambiguïté ou de confusion, à savoir si l'État veut de l'adoption internationale, si il y accède comme un pis-aller; où il se situe. En tout cas, je retiens votre suggestion.

Vous voulez l'inscrire dans le cadre d'une politique familiale de la lutte à la dénalité. Ce sont des aspects qu'on pourrait examiner. À la page 4, vous parlez de la supervision effective par le secrétariat des intervenants plutôt que de la simple coordination de ceux-ci. L'impression que vous m'avez donnée, c'est qu'il y a

confusion... Vous avez dit: Je suis un peu partagé entre ce que mon travailleur social peut dire de mon côté, certaines représentations qui peuvent être faites par le secrétariat à l'adoption de l'autre côté, et peut-être par l'organisme reconnu en troisième lieu. Je pense que l'objet du règlement, l'objet de la convention type - et évidemment de la loi pour clarifier l'Interprétation juridique qu'on fait de l'adoption - c'est de clarifier les responsabilités de chacun et c'était, au point de départ, l'objectif du règlement - qui lui aussi va devoir être corrigé en fonction du projet de loi qui a suivi au lieu de précéder justement de mieux clarifier les responsabilités de chacun pour permettre aux gens - et c'est le cas des parents - qui font appel aux différentes instances de s'y reconnaître et de ne pas se retrouver dans des situations de confusion parce que, peut-être, la main gauche ignore un peu ce que fait la main droite ou encore qu'il y a chevauchement entre les deux.

En tout cas, je pense que l'un des objectifs principaux du travail qu'on tente de faire, c'est de clarifier ces choses. Concernant la création d'une liste d'attente provinciale gérée par le secrétariat, je pense que c'est une bonne suggestion et qu'il y aurait moyen d'établir cette liste provinciale. Je vous assure que cela faciliterait peut-être même... C'est plutôt à l'état d'accident, mais les pressions mêmes qui s'exercent sur la ministre pour qu'elle exerce des pressions sur tel CSS ou tel autre endroit pour qu'eux aient préséance sur un autre, je peux vous dire, à ce moment-ci, que je n'y succombe pas, mais je pense que, s'il y avait cette liste plus officielle à laquelle on pourrait se référer d'une façon anonyme, mais quand même avec un code quelconque, cela permettrait justement de contrer... Et s'il se fait des pressions auprès de la ministre, j'imagine qu'il peut s'en faire ailleurs aussi.

Alors, je pense qu'à ce moment-là, ce que vous trouvez inéquitable, pourrait être facilement, à mon point de vue, corrigé. Ce n'est pas par pessimisme ou parce que je ne le souhaiterais pas, mais quand vous dites "l'observance rigoureuse d'un délai maximum de trois mois entre l'inscription et l'évaluation des parents" - je voudrais bien que ce soit comme cela. Ce matin, on a parlé assez longuement de la pénurie d'enfants. On pense que la loi va permettre d'ouvrir, d'avoir un plus grand nombre de propositions d'enfants et, d'une certaine façon, d'accélérer le processus. Je me demande, d'une façon réaliste.... On peut les évaluer en trois mois: je pense qu'il y aurait possibilité de faire cela. Mais si, après cela, le délai d'attente est de - parce qu'il y a pénurie d'enfants ou il n'y a pas suffisamment de propositions d'enfants - 18 mois, je me dis: Est-ce que la frustration ne sera pas encore plus grande à ce moment-là? En tout cas, je vous pose la question.

M. Perreault: Mme la ministre, ce qu'on ne comprend pas, quant à nous, c'est justement que l'on affirme qu'après ce délai de trois mois, un délai de six mois devrait être suffisant pour que les organismes puissent trouver un enfant aux parents qui ont déjà été évalués. À ce moment-là, on se dit: II semble y avoir double emploi ou on semble se renvoyer la balle. Le délai existe du fait que chacun croit que l'autre ne peut pas fournir à la demande plus rapidement, alors que les deux intervenants nous disent qu'ils le peuvent. Je mentionnais un délai maximum de trois mois. Évidemment, on peut se demander l'utilité que cela a, lorsque l'on sait que le délai peut être beaucoup plus long avant que la proposition d'enfant arrive. Mais, je pense que les parents ont à coeur de savoir rapidement, lorsqu'ils s'inscrivent s'ils sont un couple admissible et acceptable pour l'adoption internationale. Pourquoi dois-je attendre trois ans avant de savoir que les travailleurs sociaux ne m'estiment pas acceptable pour l'adoption internationale? On aurait pu me le dire...

Mme Lavoie-Roux: Au bout de trois mois.

M. Perreault: ...au tout début. Peut-être que j'aurais fait d'autres démarches à d'autres niveaux, par exemple aux niveaux des foyers d'accueil. Souvent, il faut se placer dans la perspective des parents, qui ont recours à l'adoption internationale et qui ont connu des problèmes d'infertilité et qui ont souvent tenté, par tous les moyens, d'avoir naturellement un enfant. Ils se sont souvent rendus à des délais extrêmes, de sorte qu'ils se retrouvent dans le processus de l'adoption internationale à un âge où ce projet est sur la ligne: ou on a une adoption internationale ou on ne pense plus du tout à avoir un enfant. Malheureusement, évidemment, les gens retardent. Il peut y avoir des tentatives pendant quelques années dans les centres de fertilisation, etc., pour essayer d'en arriver à une solution; finalement, quand on passe à l'adoption internationale, c'est la mesure ultime qui se présente et il est tard pour penser à des délais de deux, trois, quatre et cinq ans.

Mme Lavoie-Roux: En fait, il y a deux volets que vous invoquez dans votre réponse. Le premier: Il y aurait moins de frustrations à se faire dire tout de suite: Oui, vous êtes admissibles, vous êtes des parents capables d'assumer les responsabilités, etc., quitte à ce que l'attente soit dans la deuxième phase, si l'on veut. Je regarde les statistiques - si je me trompe, tant mieux - qui m'ont été données pour l'Allemagne fédérale, la Suisse,

la France. On y fait quand même de l'adoption selon les règles internationales et on parle de délais de trois à cinq ans. Je veux bien que les délais tombent à neuf mois, ou même à un an. Je pense qu'on serait tous contents si cela allait entre un an et dix-huit mois.

M. Perreault: C'est exact.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que c'est déjà un progrès énorme.

M. Perreault: C'est cela.

Mme Lavoie-Roux: Je pense que l'on doit faire tous les efforts pour en arriver à cela. En tout cas, je comprends votre désir; je comprends que, pour vous autres, cela arrive à une époque de la vie où, finalement, vous avez fait ce choix parce qu'il y a eu une foule d'autres circonstances qui ont fait que vous en arrivez à ce choix. D'un autre côté, je ne voudrais pas non plus vous promettre que, désormais, c'est douze mois, que tout le monde est heureux. Je pense qu'il faut aussi être prudent. Notre responsabilité, c'est de tout mettre en oeuvre pour que les propositions d'enfants soient beaucoup plus nombreuses et les faciliter.

Vous parlez - je vais arrêter après cela, M. le Président - de l'implantation du recours au Tribunal de la jeunesse. Vous avez exprimé une crainte à ce sujet. Si vous y allez dans un premier temps, vous craignez qu'on vous dise oui, que tout est correct et que normalement cela devrait se faire. Mais, dans un deuxième temps, vous craiqnez, en y retournant une deuxième fois, que là, on vous dise que votre affaire ne marche plus. Je pense que ce qu'il faut se dire, c'est que, au fond, le premier jugement favorable serait rendu dans le sens que oui, que tout est en règle, que vous allez chercher votre enfant, etc., ce serait une confirmation officielle à 99,8 %. Je vois cela comme raison. Si dans un deuxième jugement, on contredit le premier jugement en raison de causes importantes tel, par exemple, qu'entre-temps, il y aurait un rapport fait comme quoi les parents qui ont reçu cet enfant en abusent ou... Enfin, je pense que ce serait vraiment très, très occasionnel et l'idée de le faire dans un premier temps, c'est justement pour donner cette sécurité aux parents. Ils ne reviendront pas pour se mettre à poser des questions pour savoir si les choses sont faites en bonne et due forme et si elles sont correctes ou non. C'est vraiment l'objectif.

Maintenant, la question de voir le rapport du DPJ qui pourrait être un rapport contradictoire, je pense que c'est déjà dans les règles de la Loi sur la protection de la jeunesse. Justement, ces rapports doivent être disponibles pour les personnes qui sont mises en cause au moment où le tribunal doit rendre un jugement.

Je vais arrêter ici pour laisser la chance aux autres. Si je le peux, je reviendrai plus tard.

M. Perreault: Si vous me le permettez, M. le Président, je voudrais revenir sur un point que vous avez mentionné.

Le Président (M. Bélanger): Juste auparavant, deux petites secondes.

M. Perreault: D'accord.

Le Président (M. Bélanger): Étant donné qu'il sera bientôt 18 heures et que l'ordre de la Chambre nous dit que nous siégeons jusqu'à 18 heures, j'aurais besoin du consentement unanime des deux côtés pour que l'on puisse prolonger d'au moins une quinzaine de minutes, avec votre accord évidemment, comme intervenant. Cela vous évitera de revenir demain. Pardon?

Mme Lavoie-Roux: Cela dépend du temps qu'il nous reste.

Le Président (M. Bélanger): Cela dépend de nos besoins. Jusqu'à 18 h 24, disons? Alors, on s'entend pour ne pas... Je sais qu'on aura un problème de quorum si on fait cela, car il y a quelque chose d'organisé après*

Mme Lavoie-Roux: Mettez donc 18 h 25, M. le Président, cela sera plus facile.

Le Président (M. Bélanger): On va s'entendre; disons qu'à 18 h 25, on ajourne les travaux, finis ou non. D'accord?

M. Perreault: J'aimerais, si vous me le permettez, M. le Président, revenir sur un point que vous avez soulevé, Mme la ministre. Vous avez parlé du fameux trois mois. Pour nous, c'est quelque chose qui est quand même très important. Il y a une lacune qu'on a soulevée dans le projet de loi. Un des articles du projet de loi, l'article 622.1 projeté au Code civil prévoit que lors du retour... Je m'excuse, je ne suis pas certain que ce soit cet article. Bon, c'est l'article 622.1.

Mme Lavoie-Roux: Oui, c'est cela.

M. Perreault: On dit que le tribunal s'assure que les conditions ont été respectées. Cela n'en dit pas beaucoup sur les pouvoirs du tribunal. J'expose un cas qui me semble évident et j'espère que vous ne verrez pas là celui d'un membre de l'APPAl: un individu se fait autoriser par le tribunal

l'adoption d'un enfant X avant son départ, iI s'en va mais quand il revient, il a dans ses bras quatre enfants lorsqu'il se présente au tribunal à son retour, dont l'enfant X. Un problème se pose pour les trois autres enfants et le tribunal ne veut pas accepter les jugements d'adoption qu'il a pourtant obtenus à l'extérieur du pays pour ces quatre enfants. Qu'est-ce que le tribunal va pouvoir faire à l'égard de ces trois enfants? La question peut sembler théorique, mais s'il n'y a pas de sanction effective, on va retomber dans le même débat dans lequel on était auparavant et tes gens vont se défendre en disant: Vous n'avez pas le pouvoir de renvoyer l'enfant. Et on va vivre avec cet enfant qui va être refusé par le tribunal jusqu'à ce qu'il y ait un amendement à la loi et qu'on procède à une amnistie. (18 heures)

Mme Lavoie-Roux: Je vais maintenant répondre à votre question ou tenter d'y répondre. Normalement les trois autres enfants ne seraient pas reçus à l'immigration et les accords ou les arrangements faits avec le ministère de l'Immigration sont que les personnes qui ne reviennent pas avec le jugement du Tribunal de la jeunesse comme quoi leur démarche pour l'enfant X a été adopté et qui ne reviennent pas avec le consentement du pays d'où origine l'enfant, normalement, ne devraient pas être capables de passer avec quatre enfants aux frontières. S'ils en passent quatre, comme vous le dites, cela peut être une question théorique. Cela peut être une question qui devienne aussi réelle. Je ne peux pas en juger. Normalement les trois autres ne devraient pas passer à l'immigration.

Cela m'amène, si vous le permettez, même si j'avais cédé mon droit de parole, à la question de l'amnistie. Vous l'avez mentionné tout à l'heure. Remarquez bien que vous avez raison quand vous soulevez ce qui est certainement une part d'inéquité par rapport à une amnistie qu'on doit décréter. C'est la troisième fois qu'on le fait. J'espère qu'un autre ministre n'aura pas à le faire une quatrième fois, mais dans les circonstances où nous nous trouvions, il fallait balancer cela d'un côté contre, de l'autre côté, des enfants. On a fait allusion tout à l'heure à deux enfants qui sont entrés d'Haïti dans des circonstances spectaculaires sans la bénédiction ni d'ici ni du pays d'origine et pourtant les enfants sont restés. Il est évident que c'était un encouragement à passer à côté des canaux réguliers et des canaux qu'on essaie de privilégier, sur lesquels je pense, en dehors de certains détails, on peut être en désaccord mais au moins sur les principes de fond les gens sont en accord. Je le regrette, mais dans les circonstances où nous nous trouvions je n'avais pas le choix de faire autre chose, comme mes prédécesseurs n'ont pas eu le choix de faire autre chose au moment où des amnisties ont été données. On essaie avec la loi, d'une certaine façon en la rendant plus souple, d'une autre façon en clarifiait les rôles et les responsabilités de chacun, d'éviter qu'on s'achemine dans trois, quatre ou cinq ans vers une autre amnistie. La question est ouverte et elle n'est pas sans fondement, M. Perreault, malheureusement.

Le Président (M. Bélanger): Bien! Nous passons à Mme la députée de Marie-Victorin.

Mme Vermette: II me fait plaisir au nom de la formation politique que je représente, le Parti québécois, de vous accueillir ici et de vous souhaiter la bienvenue. Effectivement, j'ai eu plaisir à lire votre document parce qu'il représente les préoccupations des principaux concernés, c'est-à-dire les parents. Ce sont vraiment les parents adoptants qui doivent subir les tracasseries administratives et juridiques, et malheureusement comme on vit dans un monde où on ne peut pas vivre sans encadrement, vous en subissez les coups et les conséquences. Par ailleurs, je pense qu'il est important de prendre en considération vos préoccupations parce que vous le vivez de l'intérieur et vous y donner beaucoup d'énergie, beaucoup de temps. J'imagine que ce n'est pas facile à vivre, le cheminement que vous avez démontré en ce qui concerne l'adoption internationale.

M. Perreault: C'est une longue grossesse.

Mme Vermette: C'est une longue réflexion, à mon avis, très mûrie. On a vraiment envisagé différentes alternatives, mais celle-ci semblait être l'ultime, étant donné les circonstances. C'est pourquoi il est important que nous nous penchions sur vos problèmes et que nous nous y attardions d'une façon particulière. C'est dans votre quotidien que vous le vivez et je pense que c'est ce que vous avez voulu faire ressortir. Il y a tout le côté administratif et juridique qui est sujet à interprétation d'une part par les tribunaux, d'autre part, par tout le monde administratif. Par contre, ce que vous devez vivre, vous le subissez à différentes étapes du processus de l'adoption. D'une part, la première angoisse est au moment où vous déposez votre demande, à savoir si, oui ou non, vous pouvez faire le cheminement en vue d'une adoption internationale. D'autre part, votre plus grosse préoccupation, une fois que cela est fait, ce sont les délais que vous devez subir et qui provoquent de t'angoisse, bien souvent, chez les parents. Et, comme vous l'avez dit, c'est surtout que vous êtes en pleine incertitude. Ce qui est important à retenir actuellement, c'est cette partie-là. En ce qui concerne le juridique, il

sera toujours passible par l'entremise des tribunaux ou par des projets de loi de répondre à ces attentes d'une façon plus adéquate, c'est la capacité juridique de l'État. Mais en ce qui concerne vos préoccupations, si nous ne sommes pas capables de nous laisser sensibiliser par vos préoccupations, je pense que nous passons à côté du débat et peu importe le reste, nous aurons toujours à recommencer le même débat.

C'est pourquoi cela m'amène à vous poser une question. Tantôt, la ministre parlait de certaines statistiques. Elle parlait de l'Allemagne, je pense. Cela me semble bizarre parce que, normalement, du côté du gouvernement, on se compare toujours à l'Ontario. En Ontario, pour une fois, mondou, il paraît qu'ils font de l'adoption et que cela ne prend vraiment pas beaucoup de temps. Alors, peut-être qu'on pourrait regarder de ce côté-là encore une fois et peut-être arriver à prendre cette province comme modèle et d'essayer, ici aussi, d'abréger les délais.

D'autre part, vous avez démontré que pour une reconnaissance d'adoption filiale ou toute reconnaissance, vous devez vous soumettre au jugement des tribunaux et, finalement, vous n'avez pas grand-chose à faire à l'intérieur de ce processus. Mais, par contre, en ce qui concerne les délais d'attente, oui, vous êtes directement concernés. Quels sont les moyens qu'on va mettre à votre disposition pour qu'on fasse le plus humainement possible votre évaluation? Cela fait partie de vos préoccupations et on l'a bien ressenti à l'intérieur de votre mémoire. Notre première préoccupation est de trouver un encadrement humain qui fasse que l'adoption internationale soit reconnue chez nous comme un processus humain qui répond à la volonté des parents de partager de l'amour et d'aider les autres aussi. Dans ce sens, je me demande si vous croyez qu'une augmentation des ressources dans les CSS pourrait répondre davantage aux listes d'attente qui risquent de s'allonger parce qu'on va passer devant les tribunaux, car j'estime que les tribunaux vont rendre des décisions sur le banc, cela ne prendra pas des délibérations indues. Finalement, on risque d'avoir de plus en plus de demandes d'adoption et des listes d'attente qui vont s'allonger de plus en plus. Est-ce que vous considérez que l'augmentation des ressources ou simplement une liste telle que vous la demandez - une liste provinciale d'attente -serait suffisante pour répondre aux besoins des parents adoptants?

M. Perreault: J'aimerais que M. Venne, le président, réponde à cette question.

M. Venne (Edmond): Effectivement, on demande une liste, mais cela n'a pas d'impact pour nous, en tout cas. On fait une demande, techniquement, au CSS de la région. Si on a un travailleur social efficace, il n'y a pas de problème, l'évaluation va se faire plus rapidement. Dans certaines autres régions du Québec, il peut y avoir des délais vraiment importants. Mais à la suite de cette évaluation, qu'on retrouve la liste provinciale, pour nous, s'il y a des enfants, cela ne pose pas de problème. S'il n'y en pas, tu risques d'attendre fort longtemps. Donc, les mesures à envisager pour diminuer les délais... Bien sûr, quand je fais une demande au centre des services sociaux, je me dis que si l'évaluation vient dans les trois mois, parfait!, si on a des enfants, parfaitî, maïs techniquement, ce qui pourrait nous permettre, comme parents, justement en termes d'efficacité, d'alléger au maximum les exigences...

Une voix: Les délais.

M. Venne: Les délais? Je n'ai pas saisi clairement votre question. Vous nous demandez...

Mme Vermette: Je peux peut-être la reformuler. Finalement, on dit qu'actuellement il y a seulement dix travailleurs sociaux qui couvrent l'ensemble des demandes. On risque, en passant devant les tribunaux, que les juges rendent des décisions sur le banc et qu'il y ait une accumulation de demandes et aussi une accumulation de la liste d'attente. Est-ce que vous croyez que dix travailleurs sociaux vont suffire à répondre à ces demandes? Est-ce que ça va être suffisant? Ou tout simplement, pensez-vous que le fait de créer la liste d'attente provinciale va répondre justement à cette accumulation et si ça va changer quelque chose finalement dans les délais des listes d'attente?

M. Venne: Les listes, non. Mais au niveau des travailleurs sociaux, il faut qu'on augmente les effectifs, c'est pour ça que dans le mémoire on demande même d'avoir recours à des travailleurs sociaux privés. Quand on parle de la liste provinciale, ce qu'on a aussi envisagé, c'est qu'actuellement, quand on fait une demande au centre de services sociaux, dans l'évaluation, on nous demande, en tout cas, chez nous, de choisir un pays. De cette façon, on prive des parents. Ça fausse un peu la liste d'attente provinciale, de demander à un parent, tout de suite après son évaluation: Tu choisis un pays. Concrètement, bon! on demande ça. On dit: Pour différentes raisons, je veux aller en Corée. Entre-temps, ça s'en va au secrétariat. C'est pour la Corée. Si la Corée ferme pour une raison ou une autre, quel contrôle a le parent sur une liste qui pourrait être provinciale? Il faut qu'il

retombe quasiment à zéro. Donc, les délais fluctuent considérablement. Je me dis: Que l'évaluation soit faite et, quand on fait comme tantôt on l'exprimait Accueillons un enfant... En tout cas, nous, dans la région, au niveau de l'association, on a 125 parents en attente et je suis persuadé qu'on aurait trouvé des parents pour les enfants haïtiens qui ont été mentionnés tantôt. Mais les parents n'étaient pas évalués. On ne pouvait pas leur accorder ces enfants. Je suis persuadé qu'ils ne seraient pas restés en Haïti.

Mme Vermette: Maintenant, au niveau de l'évaluation, il manque, à un moment donné, des communications quelque part, finalement. Vous allez me dire: Bon, c'est sûr, eux disent qu'on avait des enfants; d'autres disent, surtout aux CSS, très souvent... J'ai même entendu, une fois, une personne du secrétariat dire: II manque des enfants. Même Mme la ministre dit qu'il n'y a plus d'enfants ou que pratiquement c'est très difficile d'avoir des enfants pour adopter sur le plan international. On dit: Si on était au courant, si on était évalué rapidement, je vous garantis qu'on aurait les familles, qu'on aurait les parents, les couples nécessaires pour répondre aux besoins des enfants qui sont là - je m'excuse de l'expression - mis en disponibilité.

Moi, je me pose la question: Est-ce que c'est voulu qu'on ait moins de ressources au niveau de l'évaluation dans les CSS parce que finalement ça diminue le processus d'adoption? Ou simplement, ce qui est important, au fond, est-ce de mettre l'accent sur l'augmentation des ressources ou des CSS pour permettre à beaucoup plus de parents de pouvoir accéder au processus de l'adoption internationale?

M. Venne: Une chose est certaine, si on calcule que, sur le nombre de travailleurs sociaux, une dizaine font de l'adoption internationale, et si on estime qu'ils ne font que de l'adoption internationale et qu'il y a 200 cas qui sont étudiés ou complétés par année pour l'évaluation, on arrive à la conclusion qu'il y a 20 personnes qui sont évaluées par année par travailleur social. Ce qui veut dire deux semaines et demie de travail-homme pour une évaluation. Cela mène à 100 heures d'évaluation d'un couple. Cent heures, c'est beaucoup de travail pour l'évaluation d'un couple. Quand on sait que devant le même Tribunal de la jeunesse, devant lequel on nous propose de nous présenter maintenant, dans le cas où quelqu'un est accusé d'avoir abusé ou violenté ses enfants, on va peut-être lui accorder une audition de trois heures. Lui est déjà accusé de ça.

Nous, simplement pour savoir si on est des parents, pas nécessairement de bons parents, mais si on est des parents acceptables, on demande 100 heures à un travailleur social. Je suis convaincu qu'en recourant au service de travailleurs sociaux privés, j'arriverais probablement, en-dessous de 100 heures, à faire en sorte qu'il y ait une évaluation produite, et à un coût moindre que les 100 heures de travail de ce travailleur.

Le Président (M, Bélanger): Ce que j'aimerais préciser là-dessus, connaissant un peu le domaine, celui-là particulièrement...

M. Venne: Oui, je le sais, M. le Président, vous êtes bien impliqué. (18 h 15)

Le Président (M. Bélanger): ...et aussi parce que cela a été bien expliqué ce matin. Le travailleur social qui fait l'évaluation, ne fait pas que l'évaluation, il fait aussi le suivi des familles une fois qu'elles ont les enfants. Cela explique que, lorsqu'il y a un poste, par exemple, la personne est souvent débordée.

Mme Vermette: M. le Président, je trouve cela un peu...

Le Président (M. Bélanger): Bien quoi?

Mme Vermette: Je sais que vous avez le droit, en termes d'alternance, mais en tout cas.

Le Président (M. Bélanger): Madame, je suis un parlementaire au même titre que vous. Je ne vois pas pourquoi...

Mme Vermette: D'accord.

Le Président (M. Bélanger): Je ne vois pas pourquoi, je m'excuse.

Mme Vermette: Non, d'accord.

Le Président (M. Bélanger): Je trouve cela même inacceptable de votre part. Je m'excuse. Vous avez le droit de parole, vous pouvez y aller, Mme la députée.

Mme Vermette: Merci. Si on en revient à la question où on en était effectivement, on parlait du travailleur social et du nombre d'heures qu'il pouvait passer à évaluer un cas. Finalement, on prend tel nombre d'heures pour l'évaluation. C'est 100 heures pour nous évaluer. Est-ce que c'est avant et vous y incluez le suivi ou si c'est tout simplement le temps et les délais nécessaires que prend un travailleur social pour faire strictement l'évaluation pour dire que vous êtes un parent apte à adopter un enfant?

M. Perreault: Le manque de communication entre les intervenants m'oblige à vous répondre que je ne le sais

pas. Je ne sais pas ce que le travailleur social fait de ses heures de travail. En cela, je n'attaque pas sa compétence et son assiduité au travail. Je comprends facilement qu'il n'a pas qu'à faire l'évaluation des couples. Si l'on considère que, lorsqu'on parle de l'évaluation d'un couple, cela comprend tout le processus, on peut arriver à ce calcul. Je comprends facilement qu'il ne peut pas se consacrer pendant deux semaines et demie à un couple, et, au bout de ce temps, tirer la ligne et recommencer deux semaines et demie avec un autre couple. Sauf qu'il faut en arriver à la conclusion que, pour une adoption, le processus complet suivi par le travailleur social, mènerait à - je ne sais pas une centaine d'heures et c'est très approximatif.

Mme Vermette: Quand vous dites que ce serait préférable que, tout compte fait, ce soit fait par des travailleurs sociaux privés ou par un cabinet privé, à la rigueur, des psychologues pourraient faire l'évaluation en cabinet privé, - n'y voyez-vous pas certains dangers puisque, si vous payez votre consultation, vous aurez probablement un rapport favorable?

M. Perreault: Si on en arrive à cette solution, on aimerait que, pour éviter ce problème, on puisse ne pas payer. Si on veut en arriver à cette solution, il est important qu'on passe par les centres de services sociaux. Si cette mesure n'est pas disponible en ne payant pas et en ne défrayant pas les coûts, et qu'on doit avoir recours à des frais pour ce faire, je pense qu'il est important que le montant soit fixe et qu'il soit payé aux centres de services sociaux, quitte a ce que les centres de services sociaux s'acquittent de la tâche de trouver le travailleur social privé compétent pour mener ce travail au taux horaire qu'ils auront déterminé entre eux, mais, que l'intervenant soit hors du processus de paiement entre le travailleur social privé et lui, que le parent n'ait pas de lien de paiement entre le travailleur social privé et lui. Évidemment, on peut dire: Bien, écoutez, il va peut-être pouvoir payer le travailleur social en-dessous de la table. Sauf qu'on n'est pas à l'abri de cela, même à l'intérieur de la machine gouvernementale. Cela pourrait arriver aussi si c'était un travailleur social du gouvernement. Je pense qu'il y a moyen de prendre les précautions qui s'imposent et qui peuvent respecter certains principes de sauvegarde des droits et des intérêts de l'enfant autant que des parents.

Mme Vermette: En ce qui concerne les critères d'évaluation, on en parle beaucoup, et je pense que cela dépend souvent de la personne qui vous évalue. Est-ce qu'il y a certains aspects qui vous sembleraient importants, dans l'évaluation, pour que l'on fasse ressortir - je ne sais pas - vos capacités d'adoptants? Cela revient souvent dans les doléances des parents.

M. Perreault: J'irais peut-être a contrario de votre question pour dire qu'il y a certains sujets qu'on aimerait ne pas mettre en relief. Les conditions économiques d'un couple, la fréquence de ses relations sexuelles, je ne pense pas que ce soient des éléments très importants dans l'évaluation psychosociale d'un couple et dans ses aptitudes à être parent. Je comprends que si cela en vient à soulever le problème de la mésentente dans un couple, cela peut avoir de l'importance. Je veux être prudent parce que je me vois avec un travailleur social devant moi qui surgirait en disant: Bien, voyons donc! Qu'est-ce qu'il avance là? Mais on a eu des cas exceptionnels où on s'est aperçu que des questions posées, selon nous, n'avaient pas affaire dans le décor et elles n'étaient pas du tout compatibles avec d'autres évaluations qui avaient été faites. Donc, on se dit qu'on n'a pas d'objection à ce que le travailleur social exerce sa compétence et sa discrétion à l'intérieur de sa profession et des règles de l'art, de la façon dont il l'entend. Mais je pense qu'on doit tendre à ce que le travailleur social, dans son évaluation, puisse se prononcer sur des points déterminés. S'il survient un élément qui n'est pas sur cette grille,je pense qu'il est du devoir du travailleur social de le mentionner et de mentionner la raison de son intrusion dans la vie privée sur un aspect particulier, dans chaque cas, in concreto.

Mme Vermette: Vous avez dit aussi assez régulièrement qu'on devrait vous donner du soutien au moment où vous faites votre démarche comme parent adoptant et que, malheureusement, c'est très difficile de retrouver cela si vous ne faites pas partie d'un organisme. Vous avez demandé des appuis techniques, juridiques et financiers dans ce domaine-là. À quel niveau?

M. Perreault: Pour nous, il est évident, dans un premier temps, que l'appui technique doit provenir des centres de services sociaux et du secrétariat à l'adoption. Quand je dis "et du secrétariat à l'adoption", on comprend facilement que les directives puissent émaner du secrétariat à l'adoption et que des informations juridiques puissent émaner du secrétariat à l'adoption à l'intention des centres des services sociaux pour que tout le monde puisse en bénéficier localement.

D'un autre côté, quant à l'aspect juridique, je pense qu'il est important que l'appareil judiciaire puisse fournir lui-même cette aide. J'ai mentionné tantôt les cas des petites créances et les cas de recouvrement

des pensions alimentaires. Dans ce genre d'organismes où on a voulu favoriser l'accès social à ces mesures, on a prévu des mécanismes simples. On a dévolu au greffier de la Cour des petites créances un rôle important, celui de rencontrer la personne qui a l'intention de poursuivre quelqu'un. C'est lui qui le conseille, c'est lui qui lui dit de quelle façon instituer sa procédure, quelle procédure il doit remplir et c'est lut qui l'assiste. À notre avis, si on ne veut pas que l'adoption se fasse à un coût exhorbitant, ce qui est presque déjà le cas, si on oblige en plus les parents à obtenir et à requérir les services d'un avocat, je pense que plusieurs parents devront abandonner l'idée simplement à cause de l'aspect financier, alors que l'État pourrait facilement dispenser l'aide nécessaire à cette personne.

Mme Vermette: En terminant, j'aurais une dernière petite question. Combien représentent les frais d'une adoption...

Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, madame, le temps est écoulé. Est-ce que vous pouvez faire rapidement?

Mme Vermette: Oui. Une dernière. Combien cela représente-t-il, en termes monétaires, adopter un enfant actuellement au Québec?

M. Perreault: Je vais laisser la parole au président. Brièvement, M. Venne.

M. Venne: Personnellement, ce n'est pas complété. Cela fait sept ans et il reste le cordon à couper, étant en attente d'un jugement de la république Dominicaine. Mais, jusqu'à maintenant, on est rendu à 5700 $. Cela peut aller jusqu'à 15 000 $ ou 20 000 $. C'est illimité, selon les démarches ou le processus qu'on a entrepris, s'il est légal ou non, si on passe par un organisme privé ou par un organisme reconnu par le ministère de la Santé et des Services sociaux; cela varie beaucoup.

Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre, un dernier commentaire.

Mme Lavoie-Roux: Très brièvement. Il y a plusieurs suggestions que vous avez faites et sur lesquelles je n'ai pas eu le temps de revenir, entre autres toute la question de votre analogie avec les petites créances dans d'autres domaines. On va essayer, de notre côté, de trouver un processus qui faciliterait peut-être... On a déjà, pour l'adoption interne, certaines formules de requête ou autres. En tout cas, je pense qu'on la retient, car cette préoccupation a son importance et il ne faudrait pas que les gens s'engagent dans des coûts importants.

Vous avez fait plusieurs remarques aussi quant aux pressions qu'on faisait pour vous pour l'adoption locale, que vous ne pouviez pas être utilisé comme famille d'accueil dans une période d'attente. Ce sont des points sur lesquels on va obtenir plus d'informations. Quant à votre liste, j'aimerais savoir si cette liste serait établie par le secrétariat, si ce serait une liste unique, ou si on dresserait une liste selon les pays? En tout cas, je ne voudrais pas que cela devienne trop compliqué, mais je pense qu'on va s'y pencher davantage.

Il y a une seule question à laquelle j'aimerais que vous répondiez avant qu'on se quitte. Peu importe la page, c'est: "Les contacts prévus avec les personnes qui détiennent l'autorité dans d'autres pays doivent être encouragés. Il y a espoir de nouveaux débouchés, ces contacts ne préjudicient à personne, car il sont très personnels et on ne peut ainsi y substituer des parents éventuels". Je comprends le sens de votre intervention. Le problème que cela me cause, c'est du point de vue de l'équité parce que vous dites que ces personnes-là devront se soumettre aux mêmes exigences que les autres parents. Vous ne voulez pas qu'ils passent à côté, mais vous dites: Ils auront une évaluation, ils iront devant le tribunal, etc. Mais il y a l'aspect d'inéquité ou d'équité, si on veut, que cela soulève. J'aimerais que vous commentiez très brièvement.

M. Perreault: II n'y a aucun de nos membres - cela a été vérifié en assemblée -qui aurait objection à ce que celui qui est membre avec lui, qui est un parent en attente, puisse bénéficier d'un contact privé, alors que lui-même ne pourrait pas de toute façon avoir cet enfant. Dans le cas de contacts privés, c'est tellement intimement lié aux personnes impliquées - par exemple te parent et la bonne soeur qui est de la famille et qui se trouve dans un orphelinat dans un autre pays - que, si cela ne se produit pas entre ces personnes, entre cet enfant et ce parent, cela ne se produira avec personne d'autre. II n'y a donc pas de préjudice et cela ne cause aucun préjudice aux autres qui sont en attente. Au contraire, cela en enlève un de la liste et, de toute façon, si lui ne réussit pas, personne d'autre en avant sur la liste ne profitera de cet enfant.

Mme Lavoie-Roux: D'accord. On va y réfléchir plus longuement. Je voudrais en terminant vous remercier, on aurait pu discuter plus longuement sur les nombreux points que vous avez soulevés. Au besoin, on peut vous contacter à nouveau.

M. Perreault: Mme la ministre, merci M. le Président.

Le Président (M. Bélanger): M. le président, la commission vous remercie de votre participation à ses travaux et elle ajourne ses travaux au jeudi 7 mai 1987, à 10 heures.

(Fin de la séance à 18 h 27)

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