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(Dix heures treize minutes)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demanderais à chacun de prendre sa place. Nous allons
commencer les travaux.
La commission des affaires sociales se réunit ce matin afin de
procéder à des consultations particulières et de tenir des
auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 21, Loi
concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le
Code civil du Québec et le Code de procédure civile, et du projet
de règlement sur l'adoption internationale tel qu'il a été
publié à la Gazette officielle du Québec, le 11 mars
1987.
Mme la secrétaire, est-ce qu'il y a des changements ce matin, des
remplacements?
La Secrétaire: Oui, M. le Président, M. Laporte
(Sainte-Marie) sera remplacé par Mme Bleau (Groulx), M, Gauthier
(Roberval) 3era remplacé par Mme Harel (Maisonneuve). Voilà,
c'est tout pour ce matin.
Le Président (M. Bélanger): C'est tout pour ce
matin. Nou3 avons quorum. Excellent!
À l'ordre du jour, ce matin, il y a l'audition des groupes
suivants: le Barreau du Québec, l'Association Monde-Enfant. Par la
suite, nous aurons un nouvel ordre de la Chambre pour les travaux.
Je vous rappelle que la durée de chacune des auditions est d'une
heure répartie de la façon suivante: 20 minutes pour la
présentation du mémoire, 40 minutes réparties comme suit:
20 minutes à chacun des partis... C'est une enveloppe globale de temps
qui comprend les questions et les réponses: 20 minutes aux
ministériels et 20 minutes aux représentants de l'Opposition.
Avant de débuter avec le groupe du Barreau du Québec, Me
Serge Ménard, qui êtes le bâtonnier de la province, est-ce
que vous pouvez vous identifier, s'il vous plaît?
Barreau du Québec
M. Ménard (Serge): Oui, c'est moi.
Le Président (M. Bélanger): Je vous prie d'excuser
mon ignorance.
M. Ménard: Je comprends.
Le Président (M. Bélanger): Est-ce que vous pouvez
nous présenter votre qroupe et, ensuite, procéder à la
présentation de votre mémoire?
M. Ménard: Certainement. Je suis accompagné,
à ma gauche, de Me Michel Jolin, qui est actuellement
vice-président, mais qui va me remplacer comme bâtonnier du
Québec à partir de samedi prochain. C'est d'ailleurs une
première, c'est le premier avocat de la fonction publique qui devient
bâtonnier du Québec. À ma droite, Me Claude Boulanger, qui
était bâtonnier de la section de Québec cette année
et qui a présidé les travaux de ce comité qui a
préparé le présent mémoire; à la droite de
Me Boulanger, Me Marie-Michèle Daiqneault, avocate au service de la
recherche au Barreau du Québec, qui a participé à la
rédaction du mémoire; enfin, à mon extrême droite,
Me Orner Boudreau, avocat, directeur du contentieux au Centre des Services
sociaux du Montréal métropolitain, qui est un des membres dont
nous avions requis l'expertise pour préparer notre mémoire.
Je vais vous présenter ce mémoire.
M. le Président, Mme la ministre, mesdames et messieurs les
députés, mesdames et messieurs. Le Barreau du Québec est
heureux de répondre à l'invitation de ta commission des affaires
sociales et de présenter ses commentaires sur le projet de loi 21 de
même que sur le projet de règlement concernant l'adoption
internationale.
Un des rôles du Barreau, comme vous le savez, consiste à
mettre à la disposition des élus et du public son expertise comme
institution et les connaissances de ses membres en matière
législative. En ce sens, la démarche du Barreau à
l'égard des deux textes législatifs que nous sommes
appelés à commenter aujourd'hui s'est effectuée en ayant
à la fois en tête les insatisfactions des justiciables à
l'égard du processus d'adoption internationale, mais aussi les principes
fondamentaux qui doivent sous-tendre l'établissement d'un régime
juridique en ce domaine et permettre d'atteindre un juste équilibre
entre les droits des trois parties principales, l'adopté, l'adoptant et
la parent biologique.
C'est pourquoi, bien que le Barreau soit conscient de toute la
problématique entourant l'adoption internationale, il considère
comme primordial que toute démarche en ce domaine soit effectuée
dans
l'intérêt de l'enfant et dans le but d'assumer leur
égalité devant la loi québécoise, une fois que
cette nouvelle filiation est créée.
Le Barreau veut donc, dans sa présentation d'aujourd'hui, essayer
de proposer des solutions afin que le nouveau régime en ce domaine soit
établi d'une façon à assurer le plus juste
équilibre entre le droit des personnes impliquées dans ce
processus et aussi que le justiciable soit clairement informé des
rôles et fonctions de chacun des intervenants en ce domaine.
Il me fait donc plaisir de vous présenter quelques
représentants qui ont travaillé à l'élaboration du
mémoire du Barreau et qui sont autour de moi.
Avant d'attaquer la présentation du mémoire qui sera faite
par M. le bâtonnier Boulanger et Me Marie-Michèle Daigneault, je
me permettrai quelques remarques personnelles après avoir
consulté les membres de mon comité. Je suis un criminaliste et je
suis arrivé très vert, n'est-ce pas, sur le sujet de l'adoption
internationale, qui m'a beaucoup préoccupé cette année
à la suite des nombreuses discussions que nous avons eues et de
l'échange des correspondances que nous avons eu avec le
ministère.
Je pense qu'il est difficile de distinguer, pour un juriste qui ne
connaît pas le domaine, entre l'adoption simple et l'adoption
plénière. Il y a une première constatation. L'adoption
plénière, c'est-à-dire l'adoption qui rompt tout lien de
filiation avec les parents biologiques, est une des caractéristiques des
pays développés. C'est nouveau au Québec et cela
n'existait pas à l'époque où nous avions beaucoup
d'enfants à adopter. C'est donc la caractéristique des pays qui
veulent adopter des enfants et non celle des pays qui veulent en donner, qui
ont à en donner en adoption. C'est évident que cela pose certains
problèmes de droit international privé, c'est-à-dire de
droit international qui concerne les parties, mais si on en fait l'inventaire,
est-ce que cela ne tourne pas autour de trois sujets:
l'hérédité, l'obligation alimentaire et, finalement, le
droit de réclamer l'enfant qui a été adopté?
Si on regarde l'hérédité, puisque nous donnons
comme conséquence, parce que c'est ça, l'adoption
plénière, les mêmes droits à
l'hérédité d'un enfant adopté vis-à-vis de
ses parents adoptants, au fond s'il y avait encore des droits
d'hérédité dans l'autre pays, s'il pouvait hériter
de ses parents biologiques, est-ce que c'est un grand mal? À supposer
que ce soit ça, l'adoption simple. Je pense bien que non.
La plus importante est l'obligation alimentaire qui résume
l'obligation des parents de pourvoir aux besoins de l'enfant adopté
comme de tout enfant biologique. L'obligation en cas de divorce des parents
adoptants de placer l'enfant exactement sur le même pied, et ainsi de
suite. Encore là, le fait que nous accordions des conséquences
dans notre loi à l'adoption plénière, même s'il y
avait d'autres conséquences dans un ,-même pays, est-ce que
ça fait une grande différence? Encore là, je pense que
non.
Finalement, le seul droit qui nous préoccupe, et c'est le grand
souci de vos fonctionnaires et nous le comprenons, c'est de donner la
sécurité juridique, assurer les parents adoptants que personne ne
pourra venir réclamer cet enfant dans lequel ils ont tant investi sur le
pian psycholoqique et que la loi québécoise les incite, leur
commande, de conserver comme s'il était leur enfant avec un lien
biologique.
D'abord, quand on examine les principes de l'adoption simple, celle qui
ne brise pas tout lien de filiation, il y a très peu de pays qui
prévoient le droit de réclamer ces enfants. Mais y a-t-il
même un seul exemple? Il faut quand même être
réalistes. Les familles qui donnent des enfants à l'adoption
internationale sont généralement des familles qui ne les
réclameront jamais par la suite, Y a-t-il des exemples de cas où
des enfants ont été réclamés, même venant
d'un pays qui avait comme principe l'adoption simple?
L'une des critiques que nous vous avons faite au cours de l'année
- remarquez que, dans ce cas-ci, nous considérons que notre rôle
est de vous aider à exprimer le mieux possible votre volonté
politique parce que c'est vous qui êtes élus, c'est vous qui devez
prendre les décisions et qui devez en rendre compte au peuple - l'une de
nos préoccupations durant l'année à été de
bien réaliser que, si vous éliminez du monde les pays qui ont des
principes d'adoption simple, vous risquez d'éliminer la majorité
des pays qui ont des enfants à donner.
Deuxièmement, j'ai été frappé comme, j'en ai
l'impression, tout profane, par la réglementation qui vise l'adoption et
la quantité de règlements et d'intervenants. Il faut bien
réaliser qu'au fond il y a deux raisons pour lesquelles les parents
adoptent. La plupart du temps, c'est parce qu'ils ne sont pas capables d'avoir
des enfants et qu'ils en désirent. Je pense que c'est l'immense
majorité des cas.
Comment se ferait-il que moi, par exemple, qui ai 45 ans, et qui suis
capable d'avoir des enfants, je ne pourrais pas en adopter? On a
rédigé en matière d'adoption comme un code idéal du
couple idéal qui peut avoir des enfants et les élever. J'ai comme
l'impression que si l'État sonqeait a ne mettre que 5 % de la
réglementation pour avoir le droit d'avoir des enfants, on
considérerait que l'État entre dans un domaine où il ne
doit pas entrer. Comment se fait-il que je ne sois pas réqlementé
dans mon droit d'avoir des enfants parce que j'ai le pouvoir biologique d'en
avoir, mais que les pauvres parents qui n'ont pas le droit, qui
n'ont pas la capacité physique et qui ont ce geste
généreux de vouloir être sur le même pied et en
même temps de remplir un rôle utile, doivent passer par tant
d'intermédiaires, doivent être jugés par tant de personnes,
doivent être évalués pendant tant de temps?
La deuxième raison pour laquelle les gens veulent adopter, c'est
parce qu'ils vont réaliser qu'ayant eux-mêmes des enfants ils vont
avoir ce désir de donner à un enfant malheureux dans le monde,
quelque part, cette chance extraordinaire d'être dans un pays a l'aise et
d'avoir une famille correcte. Ce sont des sentiments généreux que
l'État doit encourager particulièrement quand ceux qui peuvent
faire des enfants au Québec en font de moins en moins.
Dès lors, je pense que vous voudrez éviter que le
gouvernement du Québec ait l'image de poser tant d'obstacles à
des sentiments aussi généreux que ceux qui animent les parents
qui veulent adopter. Comme je vous le dis, ce sont des remarques personnelles
mais au-delà des détails techniques, pas seulement des
détails techniques mais, des discussions juridiques que nous allons
avoir avec vous, nous avons à l'esprit ces principes quand même,
je dirais, pas juste fondamentaux mais émotifs et généreux
qui sont ceux des parents qui veulent adopter. Je suis convaincu que, vous
aussi, vous voulez leur assurer la sécurité. Mais en voulant leur
assurer une sécurité, il ne faudrait pas placer l'État
comme, hélasl dans le passé, sans le vouloir, il a
été placé, un obstacle à ces sentiments
généreux.
Cela dit, je vais laisser mes experts vous communiquer le fruit de notre
réflexion pour tenter d'améliorer le projet de loi qu'il vous
appartient de présenter et d'adopter comme vous l'entendez parce que
vous êtes les représentants du peuple. Je vous remercie.
Mme Daigneault (Marie-Michèle): À la suite des
propos de M. le bâtonnier, je résumerai aux membres de la
commission les points principaux et les règles de droit qui nous sont
apparus les plus importants justement afin, comme le disait M. le
bâtonnier, de participer aujourd'hui à l'élaboration du
choix du gouvernement en matière d'adoption internationale. Le contexte
de l'adoption internationale, comme vous le savez, nous a amenés
à deux constats. Tout d'abord, sur le plan procédural, que
l'adoption d'un enfant peut se faire à l'étranger, ou
peut-être effectuée au Québec. On peut aussi distinguer
deux genres d'adoption au niveau international, soit l'adoption simple qui
laisserait subsister, dans le temps, certains liens entre l'adopté et
ses parents d'origine, et l'adoption plénière qui rompt tout lien
avec la famille d'origine.
Le projet de loi 21 qu'on étudie aujourd'hui conserve les deux
voies procédurales, mais, quant au qenre d'adoption, désire
favoriser l'adoption plénière. Avant de vous exposer la
réaction du Rarreau à l'égard de ce choix de favoriser
l'adoption plénière, il est important de vous rappeler que le
Barreau a considéré comme primordial que toute intervention en
matière d'adoption internationale repose sur trois principes.
Premièrement, l'intérêt de l'enfant qui est
évidemment le principal intéressé dans ce processus.
Deuxièmement, l'éqalité de tous les enfants
québécois devant la loi, peu importe leur origine afin qu'ils
bénéficient des mêmes droits et des mêmes effets de
la loi. Troisièmement, quant aux parents qui désirent adopter,
que le processus d'adoption soit clairement établi et respecte les
principes de justice naturelle à leur égard.
Ces trois principes de base étant établis, attardons-nous
maintenant sur les conditions que prévoit le législateur. La loi
actuelle prévoit trois conditions principales, soit, évidemment,
l'examen d'une demande par le directeur de la protection de la jeunesse, ce que
conserve le projet de loi 21, la réalisation du projet par un
intermédiaire, ce que conserve aussi le projet de loi 21, mais en
modifiant les personnes qui peuvent être intermédiaires, et la
création d'un lien de filiation, ce que conserve aussi le projet de loi
21, mais en le qualifiant. Et le projet de loi 21 ajoute l'examen
préalable par le Tribunal de la jeunesse du projet d'adoption.
Dans cette analyse du Tribunal de la jeunesse entre, évidemment,
notre qualification du lien de filiation, qui est que le jugement
étranger rompe tout lien avec la famille d'origine ou à
défaut que l'État consente - à ce moment, l'État du
domicile de l'enfant - à l'adoption par un représentant
autorisé. Notre première remarque discute de cette exigence de
l'intervention de l'État lorsque la législation
étrangère ne crée pas de lien plénier. La
première réaction du Barreau à l'égard de cette
exiqence d'intervention de l'État dans le processus d'adoption a
été favorable, bien qu'elle soit mitigée parce qu'on a des
réserves quand même assez importantes à cet
égard.
Bien que cette intervention nous semble souhaitable afin d'assurer une
garantie en ce qui a trait au lien qui va être créé,
à ce moment-là, en regard du jugement étranqer qui ne
créera qu'un lien d'adoption simple, et bien que cette intervention nous
semble aussi souhaitable quant au contrôle des ressortissants de cet
État, il y a deux remarques importantes sous deux aspects:
premièrement, ta notion de consentement de l'État. Le terme
"consentement de l'État" a provoqué des réactions assez
vives chez les membres du comité parce que nos règles de droit
civil édictent des règles précises en matière
d'adoption internationale pour ce qui
est du consentement et des rèqles d'adoptabilité; à
cet effet, il y a l'article 7 du Code civil du Bas-Canada qui reconnaît
la validité des actes valablement faits selon les législations
étrangères; s'ajoute à cela l'article 596 du Code civil du
Québec qui nous indique que, quant aux adoptions
étrangères, les règles relatives au consentement et
à l'adoptabilité des enfants sont celles que prévoit le
domicile de l'enfant. Donc, nous croyons que dès qu'un consentement
è l'adoption est valablement donné par les parents d'un enfant
dans son pays en vertu de la législation étrangère, on ne
pourrait exiger un autre consentement sans contredire nos propres règles
de droit civil et sans alors, jusqu'à un certain point, s'ingérer
dans la législation étrangère. (10 h 30)
Ce qui nous amène à notre deuxième remarque, la
notion de représentant autorisé, qui présuppose
peut-être des ententes sur la désignation d'un tel
représentant. Il convient tout d'abord de souligner que le projet de loi
21 parle du représentant autorisé, mais qu'il ne fournit aucune
indication quant à cette personne; il laisse entrevoir qu'une entente
devrait être signée ou, à tout le moins, qu'il devrait y
avoir accord entre le Québec et les autres États afin de
prévoir les modalités de cette autorisation.
Or, le contexte de l'adoption sur le plan international nous a
amenés à exprimer des réserves quant à cette
possibilité, puisque les pays d'où proviennent les enfants vivent
souvent des situations socio-économiques difficiles; souvent, leur loi
ne prévoira pas une telle exigence de consentement par un officier
particulier et ces pays, ayant sûrement une certaine fierté,
refuseront peut-être de signer des ententes officielles qui consacreront
ouvertement leur incapacité à s'occuper de leurs enfants.
On peut donc constater que, si on peut trouver souhaitable l'exigence de
l'intervention de l'État quant au contrôle, les modalités
doivent donc en être bien définies à défaut de quoi
il y aurait peut-être des risques que cette exigence devienne plus un
obstacle à la réalisation d'un projet et que le gouvernement se
ferme des portes volontairement avec ces pays.
Compte tenu de ces facteurs, le Barreau a envisagé des solutions
sous deux aspects. Premièrement, dans les cas où il y aurait
possibilité d'arriver à des accords avec les États
étrangers. On a tout de même recommandé de s'inspirer du
mécanisme qui est prévu dans la Loi sur les aspects civils de
l'enlèvement international et interprovincial d'enfants, parce que ce
mécanisme semble nous offrir de la souplesse dans les ententes qui
peuvent être conclues et nous semble assurer le respect des lois
étrangères, car ce serait l'État du domicile de l'enfant
qui pourrait désigner son représentant selon sa propre
législation.
De l'autre côté, on a les possibilités où il
n'y aurait pas d'entente avec les États, où il serait impossible
d'en arriver à des ententes ou d'en arriver à la
désignation d'un officier avec un autre État. Dans ces
cas-là, encore là afin de ne pas se fermer des portes, on a
recommandé que le Tribunal de la jeunesse puisse alors, à sa
discrétion, apprécier la condition de l'intervention de
l'État parce que, évidemment, il est possible qu'on ait des
problèmes à conclure des ententes comme cela et parce que, nos
règles de droit civil reconnaissant, comme je l'ai dit
précédemment, les actes valablement faits à
l'étranger et reconnaissant les rèqles quant au consentement et
aux critères à l'adoptabilité, on croit à ce
moment-là que ce serait une juste reconnaissance et qu'on
éviterait donc encore une fois de se fermer des portes parce qu'on
aurait une exigence législative différente de celle d'un autre
État et peut-être à ce moment-là qu'on s'attarderait
moins aux intérêts de l'enfant qu'à l'exigence
léqislative. Donc, on croit que c'est l'intérêt de l'enfant
avant tout qui est important et on ne devrait pas, par une exigence
législative différente, en arriver à une telle
solution.
Pour les intervenants en adoption internationale, encore une fois, il
est important de voir ce que la loi actuelle prévoit, ce que le projet
de loi prévoit. La loi actuelle prévoit que le directeur de la
protection de la jeunesse va examiner les demandes d'adoption et assurer
l'intégration de l'enfant, et aussi que le directeur de la protection de
la jeunesse peut agir comme intermédiaire. Comme intermédiaires,
on a aussi, en vertu de la loi actuelle, le ministre et les organismes qui sont
reconnus.
Le projet de loi conserve le rôle d'examen des demandes au DPJ,
mais lui enlève son rôle d'intermédiaire et semble
éliminer les organismes reconnus pour ne reconnaître que le
ministre comme unique intermédiaire.
Évidemment, on a beaucoup de réticences à formuler
à l'égard de cette proposition. Premièrement, sur le plan
de la rédaction comme telle, au sujet du terme "entremise"
utilisé à l'article 614.1, proposé par le projet de loi,
quand on lit les modifications proposées à la Loi sur la
protection de la jeunesse, on peut constater que le terme "entremise" peut
être qualifié de deux façons, soit entremise dans le sens
que le ministre pourrait aqir comme coordonnateur des activités des
intervenants et, d'un autre côté, que le ministre pourrait agir
comme unique intermédiaire.
Nous croyons que les rôles que jouent le ministre et le
Secrétariat à l'adoption internationale devraient être des
rôles de coordination des intervenants, d'administration de la loi, de
néqociation des
accords dont on parlait tout à l'heure et de liens avec les
autres ministères qui pourraient être intéressés par
ce domaine dans le but de favoriser l'entrée d'enfants au Québec
et non d'essayer de contrôler les adoptants.
Le Président (M. Bélanger): Excusez-moi. Si vous
vouliez conclure, le temps serait écoulé,
Mme Daigneault: Oui? Bon! Je vais conclure avec mes
recommandations sur les intervenants, d'accord? En ce sens-là, ma
dernière remarque est assez importante. C'est que le projet de loi fait
disparaître les organismes ou semble donner un rôle moindre
d'assistance aux organismes qui sont actuellement reconnus en vertu de la Loi
sur la protection de la jeunesse.
Est-ce que le Barreau s'est mal expliqué? II nous semble que ces
organismes ont vraiment prouvé leur raison d'être et que du fait
de canaliser toutes les interventions dans les mains du Secrétariat
à l'adoption internationale, on a des craintes que peut-être le
secrétariat ne pourrait pas suffire à la tache seul en ce qui
concerne les implications dans le milieu et les implications directes.
C'est pourquoi on recommande le maintien de ces organismes et la
réaffirmation du rôle de coordonnateur du ministre, et que,
lorsqu'un organisme est désigné comme intermédiaire,
à ce moment-là, il soit intermédiaire de façon
plénière et qu'il ne dépende pas, en quelque sorte, des
appréciations du secrétariat ou du ministre, qu'il ait vraiment
un rôle défini. Et ce rôle-là serait défini
comment? On le prévoit par règlement où le rôle, les
fonctions, l'étendue des pouvoirs des organismes intermédiaires
seraient précisément délimités.
Quant au rôle de coordonnateur du ministre, il pourrait être
inscrit dans des directives qui seraient connues de tous. En ce sens, ma
dernière remarque portera sur le règlement qu'on recommande de
recommencer, parce qu'il ne concorde plus avec le projet de loi.
Si vous permettez une petite remarque... Quant au directeur de la
protection de la jeunesse et au Tribunal de la jeunesse, nos remarques
étaient quand même assez sommaires. Il y a des points importants,
mais je vous réfère au mémoire. Sur les dispositions
transitoires, de la façon dont on les a compris, Ies articles 12 et 13
ne nous semblent pas régler toutes les situations possibles. C'est
pourquoi on recommande que le Tribunal de la jeunesse, à la suite d'une
évaluation par le directeur de la protection de la jeunesse, ait une
discrétion et puisse reconnaître ou prononcer une adoption
à l'égard de tous les enfants en situation
d'irrégularité actuellement.
On pense qu'il est dans l'intérêt de ces enfants que leur
statut soit régularisé pour qu'ils ne soient pas
pénalisés, si l'on peut dire, parce que leurs parents n'auraient
pas respecté toutes les procédures prescrites.
Le Président (M. Bélanger): Me Daigneault, je vous
remercie. Me Ménard ainsi que toute l'équipe, nous vous
remercions également. Mme la ministre de la Santé et des Services
sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux remercier les
représentants du Barreau pour leur mémoire. Comme ils l'ont
indiqué, c'est leur contribution, et une contribution significative,
à l'amélioration du projet de loi 21 et du règlement,
évidemment.
Je ne reviendrai pas tout de suite sur le règlement, sauf que
nous sommes tout à fait d'accord avec vous sur le fait qu'ayant
été publié avant la présentation du projet de loi
et vu qu'il nous fallait procéder avec le projet de loi, pour ne pas
entretenir la confusion qui existait, il a besoin évidemment
d'être revu pour être en concordance avec le projet de loi 21 qui
sera adopté éventuellement.
Pendant quelques instants, je voudrais simplement reprendre les
remarques de Me Ménard. Je sais qu'il nous a indiqué que
c'étaient des remarques personnelles. De fait, mais je ne voudrais pas
vous mettre en opposition entre vous, ce n'est pas du tout l'objet, mais j'ai
été étonnée, par exemple, de son argumentation qui
voulait démontrer que l'adoption était un acte de droit
privé, alors qu'il me semble que, dans votre mémoire, il est
écrit en toutes lettres que c'est aussi un acte d'intérêt
public et de droit public.
Je comprends, et vous l'avez d'ailleurs déjà dit, que
c'est un sujet qui fait appel à beaucoup de sentiments humains, à
des sentiments de générosité, et que le rôle de
l'État doit dans cet encadrement de l'adoption internationale,
être le plus généreux possible pour permettre justement que
les désirs fort légitimes des parents, soit de devenir des
parents adoptifs et également de trouver un foyer pour des enfants qui
en ont besoin, puissent se réaliser dans les conditions les plus
faciles.
J'ai l'impression que vous êtes allé tellement loin dans
votre raisonnement que, finalement, il ne restait plus beaucoup de balises.
Mais enfin, on va laisser cela de côté. Je pense que c'est sur le
fond du mémoire qu'il est important de discuter.
M. Ménard: J'étais conscient, Mme la ministre, que
mon raisonnement menait à dire que c'était un acte privé,
mais je n'ai pas été jusqu'à le dire, parce que je suis
conscient que vous devez intervenir, mais, quant à cela, le mariage
aussi s un aspect
public. L'adoption, comme le mariage, provient d'abord de sentiments
personnels et privés. Mais je n'ai pas été aussi loin que
de dire que c'était strictement un acte de droit privé. J'en
étais conscient, moi aussi.
Mme Lavoie-Roux: Ah! D'accord. Bon! En tout cas...
M. Ménard: C'est le même esprit qui nous anime,
à savoir que l'État québécois ne doit pas
être perçu comme mettant des obstacles à des sentiments
généreux de ses citoyens. Ce n'est pas le genre de
société dans laquelle personne d'entre nous ne veut vivre. C'est
ce que je voulais dire.
Mme Lavoie-Roux: Oui. C'est cela. C'est parce que...
M. Ménard: Au contraire, vous devez créer une
atmosphère de protection et d'accueil des parents contre les gens qui
veulent les exploiter quand ils veulent l'adoption. J'ai l'impression que ces
parents veulent d'abord adopter, plutôt que d'être jugés et
d'essayer de correspondre à un modèle idéal.
Mme Lavoie-Roux: Je dois vous dire que l'exercice que nous
faisons ici aujourd'hui, c'est un exercice de consultation auprès des
principaux intéressés. Peut-être un exercice qui aurait
dû être fait depuis longtemps. Vous l'avez mentionné
vous-même, c'est un problème très complexe, c'est un
problème difficile et c'est dans cet esprit que nous avons
consulté tes principaux intéressés pour d'abord tenter
d'adopter une loi et, deuxièmement, de mettre en place sur le plan
administratif... Car il y a vraiment deux volets, vous le signalez bien, il y a
le volet législatif et le volet administratif qui éventuellement
devraient faciliter et non pas compliquer. Encore une fois, toute la
problématique est une problématique difficile compte tenu des...
Vous le savez mieux que moi. Vous êtes des juristes, alors je suis
convaincue que vous le savez mieux que moi.
Je voudrais dire, au point de départ, qu'il y a plusieurs points
sur lesquels on est d'accord avec vos recommandations et que nous les
apprécions. Par exemple, quand vous suggérez d'enlever le mot
"régularité" qui est normatif afin de laisser tout pouvoir
d'appréciation au tribunal, et de ne pas le contraindre à une
vérification de papier simplement, sans autres capacités
d'appréciation.
Également pour les articles où - c'est peut-être
plus pour la clarté - vous nous demandez des articles qui traiteraient
respectivement d'ordonnance, de placement, de vérification par le
tribunal, je pense que pour cela aussi, il n'y a pas de problème.
Approbation en lieu et place de vérification. Il y a d'autres
questions sur lesquelles, avant de dire qu'on est d'accord, on voudrait
peut-être un peu plus d'explications. Je vais reprendre, à ce
moment-ci, quelques questions. En paqe 13, le parent qui entend adopter au
Québec un enfant domicilié hors du Québec doit s'adresser
au tribunal pour obtenir une ordonnance de placement. Est-ce que le Barreau
serait favorable à la vérification par le tribunal, au moment de
l'ordonnance avant l'entrée de l'enfant au Québec? (10 h 45)
M. Boulanger (Claude C.): Je vais laisser répondre Me
Boudreau là-dessus.
M. Boudreau (Orner): Je pense, Mme la ministre, que les
ordonnances de placement déjà signifient, par exemple, comme avec
la Corée, une entente avec un pays. Dans l'ordonnance de placement, ce
que le tribunal doit vérifier c'est si les procédures relatives,
si je me fie à l'article 617.1, au consentement à l'adoption ou
à l'adoptabilité de l'enfant dans son pays ont été
suivies. À ce moment-là, ce n'est pas d'évaluer si la loi
coréenne crée ou créerait éventuellement un lien de
filiation.
Il y a donc déjà eu des ententes à propos des
ordonnances de placement. Tous les cas qui passent en ordonnances de placement
actuellement passent par l'intermédiaire du secrétariat à
l'adoption. Dans ce contexte, je ne vois pas pourquoi on créerait ou
ajouterait une troisième procédure pour les parents adoptifs qui
passent par une ordonnance, étant donné que ce que nous vous
recommandons c'est exactement l'article 617.1 actuel du Code civil qu'on a
reformulé en vous proposant 614.2. On ne voit pas quelle serait la
nécessité d'ajouter cette vérification puisque l'enfant
n'est pas rendu ici et qu'il n'y a pas eu d'ordonnance ou de procédure
quelconque dans l'État étranger, au moment où on se
présente pour une ordonnance de placement. L'État étranger
n'a fait que transmettre des documents, des documents de tutelle. Si je
reprends encore une fois l'exemple de la Corée, tous les documents sont
émis par la Corée, ils autorisent la sortie de l'enfant. Dans ce
contexte, la Corée sait pertinemment que l'enfant sort avec un projet
d'adoption au Québec; ils demandent d'ailleurs des évaluations au
directeur de la protection de la jeunesse, à la suite de
l'arrivée de l'enfant.
Je ne vois pas pourquoi on imposerait à ces parents adoptifs une
troisième procédure puisque ces gens - il ne faut pas l'oublier
-vont d'abord obtenir une ordonnance et, six mois plus tard, se
représenteront à nouveau au tribunal pour une requête en
adoption, dans un processus où ils auront déjà
été évalués par le directeur de la protection de la
jeunesse, où ils auront déjà obtenu une
autorisation du secrétariat à l'adoption, et c'est
d'ailleurs le secrétariat qui leur aura identifié l'enfant,
M. Boulanger: Je compléterais, avec votre permission. Non
seulement cela ajouterait une nouvelle procédure, mais cela augmenterait
inutilement les délais, à mon sens. Je pense qu'on parle, dans le
mémoire, d'un délai idéal de douze mois, en matière
d'adoption internationale. C'est à la toute fin...
Mme Lavoie-Roux: Vous parlez de 12 à 18 mois pour
l'ensemble du processus.
M. Boulanger: De 12 à 18 mois, selon qu'il y a ordonnance
de placement ou non; c'est pour cela qu'on a mis ce délai de 12 à
18 mois.
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous pourriez me dire, M. Boudreau,
ce qui arriverait si l'ordonnance de placement était refusée
alors que l'enfant est au Québec?
M. Boulanger: Je pense que l'enfant serait
considéré comme abandonné. Rien n'empêche qu'une
procédure d'adoption habituelle soit enclenchée à ce
moment-là par une déclaration d'adoptabilité et par tout
le processus qui va s'ensuivre.
Mme Lavoie-Roux: Comme pour un enfant au Québec.
M. Boulanger: Comme pour un enfant d'adoption interne.
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Boudreau: L'autre possibilité serait la suivante: Si
l'ordonnance de placement est refusée, le juge aura estimé que
les adoptants n'ont pas les qualités voulues pour élever
convenablement cet enfant. Cela ne peut être que pour ce motif,
étant donné que toutes les autres formalités
prévues dans la loi auraient été respectées. Encore
une fois, je reprends l'exemple de la Corée. Vous savez que noua devons
informer la Corée de tout ce qui arrive avec ses ressortissants jusqu'au
jugement d'adoption final. Ils sont très exigeants et surveillent
beaucoup leurs ressortissants qui arrivent au Québec.
Dans ce contexte, je présume que le Secrétariat à
l'adoption internationale verrait à demander au directeur de la
protection de la jeunesse d'identifier un autre couple d'adoptants pour leur
confier cet enfant, en accord avec les représentants de la
Corée.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez dit à quelques reprises, l'un
et l'autre, je pense, que c'était ajouter une nouvelle procédure
et, finalement, une autre complication. Est- ce qu'il s'agit vraiment d'une
nouvelle procédure, puisque l'ordonnance de placement se fait avant
l'entrée au lieu d'après? En fait, c'est la même
procédure.
M. Boulanger: En fait, je vois cette nouvelle procédure,
dont on n'a pas discuté au comité, comme un genre d'approbation
du projet d'adoption par le tribunal. L'ordonnance de placement serait
assimilée un peu à l'approbation du projet d'adoption.
Strictement parlant, si on le voit ainsi, je pense que ce n'est pas dramatique,
mais il ne faudrait pas ajouter de nouvelles procédures.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela. Je pense qu'on se comprend
là-dessus.
M. Boulanger: Autrement dit, on voudrait s'assurer, avant que
l'enfant de Corée, par exemple, n'entre au pays, que l'ordonnance de
placement ne cause pas de problèmes. Si c'est dans cet esprit,
étant donné qu'on recherche l'approbation dans les autres cas, je
ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas rechercher cette même approbation
pour les pays de ce type.
Mme Lavoie-Roux: J'aimerais vous poser une question sur la
référence que vous faites au représentant autorisé
par rapport au représentant désigné. Vous favorisez le
représentant désigné plutôt que le
représentant autorisé. Quelle est exactement la différence
que vous faites entre les deux? Nous n'acceptons ni ne rejetons... Je voudrais
juste que vous nous éclairiez davantage là-dessus. C'est à
la page 11 de votre mémoire.
M. Boulanger: On a essayé d'avoir une certaine
cohérence. C'est l'appellation qu'on retrouve dans la loi sur les
aspects civils de l'enlèvement de... Je n'ai pas le titre exact...
Une voix: De l'enlèvement national et international.
M. Boulanger: De l'enlèvement national et international.
Alors, c'est un peu dans la même lignée. On se disait: Pourquoi
utiliser de nouvelles notions, alors qu'on en a déjà dans des
lois existantes? Retenons la même notion. Cela nous paraissait plus clair
aussi. Je veux bien clarifier ce point. Lorsqu'on parlait d'ententes, dans
notre esprit, ce n'étaient pas nécessairement des ententes
écrites, officielles. Cela allait beaucoup plus loin que cela. Cela
pouvait être que l'Etat désigne une personne
spécifiquement, cela pouvait être quelque chose qui n'était
pas encarcané dans un document.
M. Boudreau: Cela pouvait être aussi, Mme la ministre, que
l'État pouvait désigner
une crèche dans son pays, pouvait désigner non seulement
une personne physique, fonctionnaire de son État, mais également
des organismes sociaux de son pays. Vous savez qu'il y a des crèches
publiques au Mexique et l'État pourrait fort bien désigner le
directeur d'une crèche ou la crèche comme telle.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je vais laisser la
parole à l'Opposition et je reviendrai. Il me reste sept minutes, je
pense.
Le Président (M. Bélanger): Six minutes, Mme la
ministre.
Mme la députée de Marie-Victorin.
M. Boulanger: Mme la ministre, sur la question...
Le Président (M. Bélanger): Vous aviez un
commentaire auparavant? Excusez-moi.
M. Boulanger: Je vous en prie. Sur la question de l'adoption,
à savoir si c'est un acte privé ou un acte public, je voudrais
vous référer à une décision qui a
déjà été rendue par le Tribunal de la jeunesse et
qui ne paraît pas dans notre mémoire, décision du 29 avril
1985 dans le dossier 500-421-833. Dans cette décision, le tribunal nous
dit: "Le législateur a prévu que le placement en vue de
l'adoption d'un enfant peut cesser. Le soussigné - le juge - rappelant
que l'adoption est d'ordre public - je pense que c'est clair - soumet qu'on ne
peut renoncer aux effets d'une ordonnance de placement par simple convention ou
même par désistement en y mettant toutes les formes qui sont
prévues à l'article 476 du Code de procédure civile." Le
tribunal continue dans ce sens. Je pense que c'est réellement, en tout
cas dans notre esprit, quelque chose d'ordre public et non d'ordre
privé, un peu comme les adoptions internes qu'on retrouve au
Québec actuellement. Si vous avez un enfant et que vous voulez le donner
en adoption, vous ne pouvez pas transiger directement avec une autre personne.
Vous devez passer par un intermédiaire qui est la Direction de la
protection de la jeunesse. Pour nous, dans notre esprit, c'est très
clair que c'est d'ordre public.
Mme Lavoie-Roux: Je partage, ou nous partageons ce point de vue.
C'est parce que cela a fait, à quelques reprises, l'objet de discussions
ici, selon les intervenants qui se sont présentés.
M. Boulanger: Je ne voudrais pas être en conflit avec mon
bâtonnier, mais je comprends quand même ses réticences quand
il dit: On réglemente de façon excessive l'adoption
internationale, alors qu'on est beaucoup plus souple vis-à-vis de
l'adoption interne. Je pense que ses remarques signifiaient plutôt que si
on mettait autant de balises à l'adoption interne, est-ce qu'on aurait
autant d'adoptions internes qui se feraient, même aujourd'hui?
M. Ménardî J'irais même plus loin que cela en
ce qui concerne l'adoption interne. C'est sûr, on reconnaît que
c'est d'ordre public et qu'il vous appartient de déterminer les
règles, mais dans la façon dont vous allez établir les
rèqles, je pense que vous devez vous souvenir que cela procède de
sentiments privés et n'intervenir que... Au fond, je pense qu'il faut
rendre l'adoption le plus près possible de la filiation naturelle, en
éliminant simplement les cas où on voudrait adopter des enfants
pour des motifs qui, je ne sais pas, n'existent plus, des motifs
complètement farfelus, en faisant une réglementation qui soit le
plus près possible de ce que l'on exige pour la filiation naturelle.
Autrement dit, c'est la philosophie selon laquelle vous devez exercer cette
procédure d'ordre public.
Mme Lavoie-Roux: Écoutez! À plusieurs reprises - je
vais arrêter après, M. le Président - vous avez
parlé, et je veux y revenir tout de suite, d'une réglementation
excessive. II faut peut-être faire une différence entre certains
gestes qui ont pu être posés et qui, en tout cas,
excédaient peut-être la réglementation, quoique je n'aie
pas de geste précis en tête à vous donner, mais, entre cela
et dire que c'est beaucoup plus complexe que l'adoption interne, je pense qu'il
faudrait peut-être faire attention.
Pour l'adoption interne, on requiert l'adoption plénière.
Il y a l'évaluation du DPJ. H y a le même processus, sauf qu'il y
a, évidemment, une difficulté supplémentaire importante,
non négligeable, c'est le fait que nous nous associons à des pays
étrangers pour réaliser ces adoptions-là et qu'à ce
moment-là, le contexte des pays étrangers ajoute des
procédures supplémentaires qui nous apparaissent importantes
aussi dans un contexte où nous traitons avec des pays étrangers.
Vous avez parlé de réglementation excessive. Par rapport à
l'adoption interne, vous avez dit que c'est beaucoup plus simple.
Peut-être que l'adoption interne est aussi compliquée. Il faudrait
peut-être se poser des questions, mais je pense que c'est peut-être
un peu exagéré de dire que c'est une réglementation
excessive.
Tout de suite, je voudrais revenir sur la question du rôle des
organismes intermédiaires reconnus. Il y a, de toute évidence,
une confusion quant aux intentions du législateur là-dessus. J'ai
eu l'occasion de revenir à deux ou trois occasions ici pour dire
justement que ces organismes reconnus continueraient de remplir les
mêmes
fonctions et les mêmes responsabilités qu'ils ont
présentement et qu'une fois qu'ils seraient reconnus à la suite
d'une convention type qui serait discutée avec eux, etc., il ne serait
pas question de restreindre leur champ d'activité par rapport aux
responsabilités qu'ils remplissent aujourd'hui. Je voudrais que cela
soit bien clair, mais j'admets avec vous que la loi et certainement le
règlement ont besoin d'être clarifiés à ce
sujet.
M. Boulanger: Pour parler de cette question des organismes, les
organismes sont indispensables pour l'adoption internationale.
Mme Lavoie-Roux: Et on le sait.
M. Boulanger: Avant que le secrétariat n'existe, on
fonctionnait par l'entremise d'organismes et il y avait une personne au
ministère des Affaires sociales à cette époque qui
travaillait, qui jouait le rôle, je dirais, entre guillemets, du
secrétariat. Mais les organismes sont indispensables et il se fait, par
les organismes, un travail bénévole qui coûterait une
fortune si ce travail-là commençait à être fait par
des fonctionnaires du secrétariat à l'adoption. Là-dessus,
je dis que, si l'on restreint les pouvoirs que les organismes ont actuellement,
on va tout simplement miner le travail que vont faire les organismes et on va
les démotiver à travailler. C'est pour cela qu'il ne faudrait pas
que les organismes viennent en conflit, avec le secrétariat ou avec vous
directement, parce que s'il y a un conflit entre les deux, qui va le
régler? C'est pour cela qu'ils ont une indépendance, non
seulement qui est souhaitée, mais qui est indispensable. Et les
organismes doivent continuer exactement comme ils sont
présentement. D'ailleurs, il y en avait des contrats. Il y a
actuellement des contrats avec certains organismes, et je pense que le
ministère avait assez bien limité les pouvoirs qu'avaient les
organismes dans ce sens-là. Mais éliminer les organismes ou
vouloir restreindre leurs pouvoirs, c'est, à mon sens...
Mme Lavoie-Roux: Excusez-moi de vous interrompre, mais on me dit
que mon temps est terminé. Notre temps est conjoint dans ces commissions
parlementaires. Je peux vous rassurer là-dessus et, comme je le di3 -
j'ai eu l'occasion de le faire à plusieurs reprises - il n'est pas
question de diminuer les responsabilités présentement
assumées par ces organismes d'adoption internationale reconnus à
partir d'une convention type qui va être révisée à
l'occasion de la révision du règlement, etc. (11 heures)
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Au nom de ma formation politique, il me fait
plaisir de vous accueillir ici et de pouvoir vous poser quelques questions en
ce qui concerne l'adoption internationale pour faire la lumière et en
arriver à une meilleure loi, qui corresponde aux attentes des parents
quant aux projets d'adoption internationale. La plupart des parents ont
demandé un projet de loi clair et précis. Il est essentiel qu'une
loi soite claire et précise afin d'éviter la confusion.
Par contre, à la page 6 de votre mémoire, lorsque vous
parlez de l'article 626.1 du Code civil du Québec, vous dites: "Tel que
libellé actuellement, il cause en effet certains problèmes
d'interprétation auxquels le projet de loi 21 n'apporte pas de solution,
de telle sorte que la jurisprudence demeure incertaine sur ce point."
J'aimerais que vous nous donniez plus d'explications sur ce sujet. Est-ce que
l'article 626.1, tel que proposé, aurait pour effet de rompre des liens
de filiation avec la famille d'origine?
M. Boudreau: Selon nous, le projet de loi 21 ne touchant pas
à l'article 626.1, l'ambiquïté jurisprudentielle actuelle
que nous connaissons... Vous avez vu que nous avions comme membre-conseil...,
non, ça n'apparaît pas, mais nous avons consulté les deux
juges qui ont rendu des décisions en ce sens. Mme la juge Louise
Galipeault-Moisan nous dit: Je ne peux pa3 reconnaître un jugement
d'adoption simple au sens de l'article 626.1. Je peux donner acte à
certaines conséquences, mais je ne peux pas le reconnaître puisque
si je le reconnaissais je romprais le lien de filiation avec l'enfant dans sort
pays d'origine.
Dans une autre décision, l'honorable juge Dorion nou3 dit: Non,
moi, je reconnais ce jugement puisque l'article 626.1 ne m'oblige qu'à
considérer le fait qu'un lien de filiation a été
créé et non pas s'il a été rompu.
Pour nous, cette ambiquïté va subsister du fait que le
projet de loi 21 ne touche pas à l'article 626.1. On vous demande,
à ce moment-là, en matière d'adoption internationale, de
reculer dans le code à l'article 594 et de reprendre le libellé
même de l'article 594 qui nous parle des effets de la filiation
plutôt que des effets d'un jugement d'adoption rendu au
Québec.
Mme Vermette: Si j'ai bien lu votre mémoire, c'est
effectivement ce qu'on disait, au fond. Je ne me souviens pas trop à
quelle page vous faites référence à l'article 594 du code
où on dit que ce qui est important c'est que l'égalité des
enfants devant nos tribunaux. Finalement, une fois que les autres pays ont
reconnu l'adoptabilité de l'enfant, il faut convenir selon les us et
coutumes du pays. On ne peut pas faire la
loi dans ces pays-là ou imposer nos lois à ces
pays-là. C'est à peu près comme cela que vous avez
interprété... En tout cas, j'ai interprété
votre...
M. Boulanger: L'on croit aussi que la reconnaissance de jugement
d'adoption simple devrait être l'exception. Dans notre esprit, ce devrait
d'abord être des jugements d'adoption plénière. Lorsqu'il y
a des abandons d'enfants, lorsqu'on a besoin du consentement de l'État,
ça ne cause pas de problème, mais on ne voudrait pas que des pays
soient fermés, par exemple du fait qu'il n'y a pas d'entente avec ces
pays-là, qu'il n'y a pas de représentant qui soit
désigné. On ne voudrait pas fermer ces pays-là. Comme je
l'ai toujours demandé dans des discussions informelles, j'aimerais
connaître la nomenclature des pays qui font de l'adoption
plénière et la nomenclature des pays qui font de l'adoption
simple. On ne s'est jamais prononcé sur cette question-là. Je me
souviens du premier mémoire du Barreau en mai 1983 où
c'était la même chose. On s'était dit que, si on faisait
l'étude des pays qui permettent l'adoption plénière et
l'adoption simple, on serait peut-être surpris de voir qu'il y a
peut-être beaucoup plus de pays où il y a d'adoptions simples que
d'adoptions plénières. Je pense qu'on y va beaucoup par
suppositions parce qu'on ne les connaît pas. Il serait peut-être
important une fois pour toutes que, soit par décret ou autrement, comme
cela existe dans la Loi sur les aspects civils de l'enlèvement
international et interprovincial d'enfants, qu'on retrouve en annexe les pays
avec lesquels on peut travailler sans problème. Mais on ne voudrait pas
que les portes soient fermées pour les autres pays. On devrait laisser
à l'appréciation du tribunal le projet d'adoption dite simple,
mais en donnant tous les effets comme on le recommande à l'article 626.1
dans le mémoire.
M. Boudreau: Si vous me permettez d'ajouter, madame, à ce
que vient de dire mon collègue, Me Boulanger. Si l'adoption
plénière est un concept juridique qui est en soi fermé,
l'adoption simple n'est pas un concept juridique fermé dans le sens
d'uniforme. Reprenez toutes les lois des pays sud-américains, vous allez
constater que ces lois laissent subsister parfois des droits dans le temps,
parfois des droits personnels, parfois des droits patrimoniaux, parfois les
trois réalités. Donc, il ne faudrait pas voir le concept
d'adoption simple comme étant le même concept juridique partout,
dans tous les pays. C'est fort différent d'un pays à l'autre,
pour les avoir revus. On laisse subsister des formes de droit dans le temps.
Parfois, il n'y a aucun droit pendant la minorité et ils ne subsistent
qu'à la majorité. On laisse parfois subsister des droits
personnels, parfois des droits de nature strictement patrimoniale comme le
droit d'hériter. Donc, c'est très varié comme concept. On
a hésité beaucoup avant de utiliser à nouveau ce concept
dans notre mémoire. D'ailleurs, vous relirez. On vous dit dans le
mémoire que, quand on emploie "adoption simple", on veut dire telle
chose.
Mme Vermette: Plus loin, vous faites référence
à la Loi sur les aspects civils de l'enlèvement international et
interprovincial d'enfants où cela fonctionne par décret et
où c'est très clair finalement.
M. Boulanger; La nomenclature des pays en annexe, à tout
moment...
Mme Vermette: Tout est là, tout est clair. Est-ce que vous
en feriez une recommandation actuellement pour qu'on se penche
là-desssus pour le projet de loi sur l'adoption internationale?
M. Boulanger: Dans notre esprit, cet élément
devrait apparaître quelque part. Il est important que les parents qui
veulent adopter demain matin, s'ils désirent adopter, par exemple, avec
l'Ile Maurice, parce que leur contact est avec l'île Maurice, sachent au
départ qu'ils s'embarquent dans un projet où il n'y aura pas, en
principe, d'embûches, parce que c'est un pays qui est sans
problème.
Si on a cette nomenclature, cela permettra peut-être aux parents
aussi de choisir plus correctement les pays avec lesquels ils travaillent,
veulent travailler ou veulent adopter.
Mme Vermette: Vous avez aussi mentionné aux pages 12, 16,
26 et 27... Dans la forme actuelle du projet de loi 21 vous avez souvent
parlé du Tribunal de la jeunesse. Comment voyez-vous le rôle du
Tribunal de la jeunesse compte tenu des remarques qui ont été
faites à ces pages, à la page 12 où on parle surtout de la
procédure de vérification, on fait référence aux
articles 614.2 et 614.3? Là il me semble qu'on lui donne beaucoup plus
un rôle administratif qu'un rôle discrétionnaire.
M. Boulanger: Absolument pas. Le tribunal va devoir
apprécier des choses, des éléments tels que... Je vous
donne un exemple. Supposons que l'évaluation du directeur de ta
protection de la jeunesse est négative dans le projet d'adoption, il est
possible aux parents d'apporter en preuve d'autres évaluations que je
qualifierais de privées, pour que le juge apprécie si le projet
peut être valable ou non. On ne veut pas que le Tribunal de la jeunesse
soit considéré comme un "rubber stamp" et qu'il approuve sans
regarder. On lui donne une
discrétion, que ce soit, par exemple, quant à
l'évaluation du DPJ et aux autres éléments qu'on
mentionnait dans le mémoire.
Mme Vermette: Tel que libellé actuellement, est-ce que le
projet de loi 21 permettra aux tribunaux, parce que l'article 614.3 surtout
dit, "vérifier la régularité du projet" et "s'assure que
l'adoptant a satisfait aux obligations que lui crée la loi"...
M. Boulanger: On a justement recommandé de changer le
vocabulaire. Au lieu de parler de "s'assure", qu'on parle d'"apprécie".
Si j'ai compris, Mme la ministre dit qu'il y aurait accord sur ce point.
Mme Vermette: Est-ce que cela cela donnerait un droit de recours
aux parents, parce que, très souvent, une fois que la DPJ a rendu sa
décision, à savoir si les parents sont aptes ou non pour un
projet d'adoption, il n'y a pas de recours à l'heure actuelle pour les
parents?
M. Boulanger: Nous avons compris clairement que, lorsqu'il y
aurait une obstruction qui pourrait se faire soit au secrétariat,
è la DPJ ou ailleurs, la personne pourrait s'adresser au tribunal et
dire: À partir des éléments que je vous apporte, est-ce
que vous êtes capables d'approuver ce projet d'adoption-là? Alors,
on ne laisse pas ça dans des voies administratives, mais on laisse le
tribunal décider de la question. Cela nous apparaît important, car
le problème qu'il y a actuellement, c'est que les décisions
administratives, très souvent, traînent, traînent,
traînent et les gens n'ont pas d'autre recours que d'y aller par voie de
mandamus ou par des jugements déclaratoires, ce qui est, à mon
sens, impensable.
Maintenant, cette procédure, telle qu'on la voit dans la loi,
permet aux gens de s'adresser aux tribunaux lorsqu'il y aura des obstructions
qui se feront à une étape quelconque.
Mme Vermette: Cela m'amène à une autre question. Il
a été aussi souvent question de projet d'adoption privée;
ainsi un parent connaît un missionnaire dans un autre pays, il
réserve un enfant, il fait toute la démarche telle que
demandée par les règlements et procédures de la loi
québécoise et, finalement, dépose un projet chez vous.
Est-ce qu'à ce moment vous pourriez, si tout a été
conforme - cela ne passe pas par un intermédiaire reconnu, par exemple,
de la ministre - prendre en considération un tel projet d'adoption?
M. Boulanger: Le tribunal appréciera. Ce n'est pas au
secrétariat à décider de cela. Je pense que c'est à
la voie judiciaire de décider si le projet est réalisable ou
non.
M. Boudreau: J'ajoute, par exemple, qu'il est très clair
pour le Barreau que les gens doivent respecter les conditions que le
législateur y a mises, c'est-à-dire procéder par un
intermédiaire. Dans la mesure où vous demandaez: Est-ce que vous
êtes d'accord pour que, finalement, les qens se trouvent des connexions
dans d'autres pays, entre procureurs ou entre notaires ou entre hommes ou
femmes de loi? Là-dessus je pense qu'on a clairement dit: On vous donne,
comme indicateurs, non, parce qu'on reconnaît au ministre et aux
intermédiaires le soin d'agir comme intermédiaires.
Là-dessus, je vous rappellerai que les tribunaux ont toujours dit qu'on
ne peut pas agir comme intermédiaire de façon rétroactive,
c'est-à-dire qu'un intermédiaire, c'est quelqu'un qui sert
d"'entremise" entre un enfant qui a besoin de parents dans un pays et des
parents qui veulent adopter un enfant et qui sont au Québec.
On ne peut pas servir d"'entremise" quand, finalement, on place un
intermédiaire devant un état de fait et qu'on dit: C'est tel
enfant, à tel endroit par tel missionnaire. Ce qu'on dit, nous, c'est
que ce missionnaire donne son nom à un intermédiaire reconnu
comme Soleil des nations, ou je ne sais pas lequel, et il pourra fournir des
enfants à cet organisme intermédiaire qui, lui, pourra trouver
des parents.
M. Boulanger: Parce que ça devient trop dangereux. H faut
avoir travaillé un peu dans l'adoption internationale ou avoir vu
comment... J'ai déjà vu, moi, des transactions d'enfants sans y
participer, mais des transactions qui n'avaient aucun sens. Des personnes qui
voulaient échanger des enfants contre, par exemple, simplement des
boucles d'oreilles, alors qu'on était dans un restaurant. Il faut se
protéger. Il faut que les gens soient protégés contre
cela.
Mme Vermette: Quand je parlais d'un projet d'adoption
privée, je ne pensais pas à ce genre d'adoption. Je pensais
à des parents qui se font évaluer par la DPJ, qui ont un projet
de jumelage avec un autre projet authentifié, dont l'adaptabilité
est reconnue par le pays, selon la légalité, etc., et qui,
à ce moment-là, plutôt que de passer par un
intermédiaire reconnu, passent finalement par un intermédiaire,
peut-être par quelqu'un d'un autre pays, cela ne lèse pas les
parents du Québec, au contraire, cela fait un enfant de plus dans ce
pays qui a la chance de trouver un foyer. Autrement, il aurait peut-être
un sort plus malheureux.
M. Boulanger: À la condition que tout se soit
régulièrement passé dans le pays en question. D'où
l'importance du travail de
l'organisme. Quand l'organisme donne son accord pour l'entrée
d'un enfant, je pense que l'organisme doit prendre ses responsabilités
et doit être certain qu'il ne s'embarque pas dans un scandale qui va
déclencher quelque chose de terrible. Il faut faire attention à
cela. (11 h 15)
Mme Vermette: Ce qui est important -et j'aimerais souligner cette
idée - c'est pour un projet où finalement tout est
régulier; il a été approuvé par le sceau de l'Etat
ou par un représentant de l'État ou par la personne
désignée par l'État comme étant un projet où
l'enfant est adoptable.
M. Boulanger: Je pense qu'il est impartant de passer par
l'organisme parce que c'est la plus grande sécurité que vous avez
sur le plan international.
Mme Vermette: À ce moment-ci, est-ce que vous pensez que
les tribunaux, déjà engorgés par la complexité des
causes, dont les délais ont toujours été le
problème no 1, vont faire beaucoup plus diligence qu'actuellement et que
l'on pourra avoir des délais de douze à dix-huit mois, comme on
nous le demande?
M. Boulanger: La question des délais me paraît
surprenante parce que, oeuvrant au Tribunal de la jeunesse, pour faire
reconnaître actuellement des jugements étrangers, je vous dirais:
Vous venez me voir aujourd'hui et, dans quinze jours, la reconnaissance de
jugement devrait être concrétisée. Je ne pense pas qu'on
ajoute des délais» On ajoute seulement des sûretés
aux gens qui seront enclenchés dans un processus qui sera correct. Mais
je ne crois pas qu'on ajoute des délais additionnels. Si on les ajoute,
je vous dirais que c'est peut-être deux ou trois semaines au maximum.
M. Boudreau: Oeuvrant dans le plus grand district judiciaire du
Québec qui est Montréal, je vous dirai que, si vous vous
présentez dans la même situation que celle de mon collègue,
au bout de quinze jours, vous allez avoir votre jugement d'adoption reconnu
puisque c'est en chambre de pratique que sont inscrites ces causes. On peut les
inscrire, c'est nous qui choisissons la date. Il s'agit d'avoir tous les
éléments de preuve pour que cela puisse se réaliser. Donc,
c'est très rapide.
Je voudrais, madame, ajouter à la réponse de tout à
l'heure et vous lire tout simplement un passage de la partie VII de la loi
d'adoption du Pérou. Ils ont intégré dans leur loi
d'adoption une préoccupation qui rejoint celle qui a fait
répondre à M. le bâtonnier de Québec qu'il faut
passer par un organisme reconnu. Dans leur loi d'adoption, à cette
partie VII, on lit ceci: "Le Pérou, tout pays en voie de
développement qu'il soit, ne doit pas oublier qu'il doit une protection
efficace è ses mineurs. Si nous ne sommes pas capables de
concrétiser la protection dont nous venons de parler, nous devons renier
notre propre existence, parce que celui qui ne voit pas dans tout enfant le
présent de sa patrie avec des projections de grandeur est simplement en
train de creuser la sépulture de ses propres enfants et la disparition
de son propre pays." C'est dans le chapitre où l'on parle des adoptions
par les étrangers. Le Pérou, pour sa part, est très
préoccupé de pouvoir contrôler l'adoption par les
étrangers. J'ajoute qu'il fait faire une enquête par sa police
d'État sur tous les ressortissants québécois qui
présentent une demande d'adoption au Pérou.
Mme Vermette: À l'article 825.0.1, que pensez-vous de la
mise en cause du Procureur général? On nous a dit que cela
pourrait avoir, à un moment donné, en ce qui concerne la demande
de vérification d'un projet d'adoption...
M, Boulanger: Pour nous, ce n'est pas un problème. Si le
Procureur général, par le secrétariat, veut intervenir
dans un projet précis, il interviendra; s'il ne veut pas intervenir...
Ce n'est pas un problème majeur.
Mme Vermette: Pour terminer, pour ce qui est du rôle du
secrétariat, vous avez dit que son rôle essentiel, quant à
vous, serait un rôle qui favorise davantage... si je peux trouver...
M. Boulanger: Un rôle de coordination...
Mme Vermette: ...de coordination, qui favorise l'entrée
d'enfants au Québec. Est-ce que vous maintenez toujours cela? Â un
moment donné, on disait qu'il faudrait peut-être spécifier
davantage les rôles parce que ceux de la ministre peuvent devenir
contradictoires, soit son rôle de recommandation et celui de
coordination. Est-ce que vous pourriez expliquer davantage
là-dessus?
M. Boulanger: D'où l'importance des organismes, justement.
Pour nous, pour ce qui est du secrétariat, il devrait avoir un
rôle - comme on le dit à la page 21 - "de négociateur
d'ententes relatives à l'adoption avec les États
étrangers. Il devrait aussi servir d'intermédiaire avec les
autres ministères pouvant être intéressés en ce
domaine et plus particulièrement ceux des Communautés culturelles
et de l'Immigration, des Relations internationales et de la Justice." Et,
exceptionnellement, lorsqu'il n'y a pas d'organismes qui travaillent avec un
pays, jouer ce rôle d'intermédiaire. Mais ce
serait exceptionnellement.
M. Boudreau: Selon les mêmes règles que les autres
intermédiaires.
Mme Vermette: Oui. En fait, de toute façon, on a dit qu'on
pourrait faire un contrat type entre les organismes et les ministères et
qu'il pourrait y avoir consultation quant aux organismes.
On a aussi demandé pour le meilleur fonctionnement possible,
toujours dans cet esprit du mieux-être de l'enfant, que les parents
puissent participer au secrétariat par un conseil d'administration.
Croyez-vous qu'une telle procédure pourrait améliorer
l'état des choses actuellement, les relations entre les
différents intervenants?
M. Boulanger: Est-ce que... Si je...
Mme Vermette: Un conseil d'administration du secrétariat
d'adoption pour favoriser justement les différents intérêts
des intervenants concernés pour en arriver à un consensus quant
au processus d'adoption?
M. Boulanger: Je vous réponds que, si on laisse aux
organismes les pouvoirs qu'ils ont et l'indépendance qu'ils ont
actuellement, le secrétariat jouera son rôle, les organismes
joueront leur rôle et il n'y aura pas de conflits d'intérêts
qui pourra exister de part et d'autre.
Mme Vermette: Sur cette note d'optimisme, j'espère que
finalement on pourra régler les problèmes de l'adoption
internationale et que, surtout, les parents pourront en
bénéficier davantage, ils pourront plus rapidement...
M. Boulanger: Peut-être pas les parents, surtout les
enfants.
Mme Vermette: Bien, en fait...
M. Boulanger: Parce qu'on doit le faire en fonction des enfants
avant toute chose. C'est surtout pour les enfants qu'il faut regarder cela.
Mme Vermette: Je pense que c'est de trouver un foyer à un
enfant.
M. Boulanger: Également, justement sur cette
note-là, si vous me le permettez, M. le Président, nou3 avons
ajouté dans les dispositions transitoires: Nous sommes conscients
qu'actuellement, il y a des enfants au Québec qui sont entrés en
toute illégalité, lesquels enfants n'ont aucun jugement
d'adoption. À propos de cette amnistie qu'on veut donner actuellement,
je voudrais faire deux commentaires, d'abord qu'on devrait établir une
procédure transitoire pour pouvoir amnistier ces enfants qui n'ont pas
de jugement d'adoption étranger et qui n'ont pas été
adoptés ici au Québec. On devrait régulariser cette
situation dans l'intérêt des enfants. Vous avez des enfants qui
ont actuellement dix, onze, douze et treize ans et qui sont dans un statut
d'illégalité, qui n'ont pas de carte d'assurance-maladie. Cela
coûte des fortunes aux parents pour obtenir des soins médicaux. Je
pense que les dispositions transitoires de 12 et 13 ne couvrent pas ces
questions. On parle de reconnaître des jugements étrangers, mais
dans les cas où les enfants n'ont pas de jugement, on devrait, je pense,
tant qu'à faire, régulariser la situation de ces enfants.
Le dernier point que je vous mentionne... Le Président (M.
Bélanger): Rapidement parce que nous avons
débordé...
M. Boulanger: ...sur l'amnistie. Je suis d'accord avec des
amnisties, mais c'est la deuxième aministie qu'on donne. Il faudrait
dorénavant être ferme en ce qui concerne les amnisties pour ne pas
donner, tous les deux ou trois ans, une bénédiction à des
qens qui ont agi - entre guillemets - dans l'illégalité
comparativement à des qens qui ont été patients, qui ont
suivi le processus et qui ont été corrects. Pour l'amnistie,
qu'on prenne garde!
Le Président (M. Bélanger): M. le président,
mesdames et messieurs les maîtres... Pardon? Je vais d'abord laisser Mme
la ministre vous remercier.
Mme Lavoie-Roux: D'abord, je regrette, M. le Président,
mais ce sont les rèqles du jeu que nous n'ayons pas davantage de temps.
Je veux remercier le Barreau pour son mémoire. Il a fait allusion tout
à l'heure à des discussions informelles, je pense qu'elles
pourront se continuer parce qu'il y a énormément de points qu'on
n'a pas abordés, qu'il s'agisse de ce qui existe dans le cas de ce que
vous appelez les enlèvements, etc.
Je voudrais simplement vous dire que votre suggestion d'une liste de
pays est intéressante et qu'on examine la possibilité de rendre
publique cette information. Elle servira mieux à tout le monde. Il y
aura moins d'ambiguïté. Les gens partiront avec plus d'assurance
et, à ce moment-là, je pense que, de toute façon, le
tribunal en aura besoin pour apprécier, comme vous le dites, la valeur
d'un projet.
En ce qui touche l'amnistie, je suis totalement d'accord avec vous, sauf
ce qui m'embête - je vous le dis bien simplement -c'est là
où il n'y a jamais eu d'examens, où il n'y a pas d'autorisation,
où il n'y a pas de jugement. Vous me dites: II faut les
amnistier aussi... Mais j'ai peur que cela nous amène sur la
pente glissante contre laquelle vous nous mettez vous-même en garde.
M. Boulanger: Sauf qu'on recommande cependant qu'il y ait une
évaluation du DPJ et que ce soit le tribunal qui décide de la
question à la toute fin.
Mme Lavoie-Roux: On va examiner la chose soigneusement. Merci
beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): Bien! On vous remercie
infiniment. J'appelle le prochain groupe, l'Association Monde-Enfant. On
suspend deux minutes avant de reprendre les travaux.
(Suspension de la séance à 11 h 25)
(Reprise à 11 h 30)
Le Président (M. Bélanger): S'il vous
plaît, je demanderais à chacun de reprendre sa place. Nous
reprenons les travaux dans quelques instants.
Je demanderais à chacun de reprendre sa place. Nous allons
maintenant entendre le groupe Association Monde-Enfant,
représentée par M. Yves Bécotte, le président, Mme
Suzanne Plante, vice-présidente et Mme Danielle Marchand, directrice
à l'adoption.
Je demanderais à M. le président de nous présenter
son groupe et de bien vouloir procéder à la présentation
de son mémoire. M. le président.
Association Monde-Enfant
M. Bécotte (Yves): Bonjour, messieurs les commissaires, M.
le Président, Mme la ministre. J'aimerais tout d'abord vous dire que Mme
Suzanne Plante ne nous accompagne pas ce matin, parce qu'elle est retenue pour
maladie. J'aimerais aussi vous présenter les autres membres du conseil
d'administration qui font en sorte que l'Association Monde-Enfant a une
représentativité provinciale, parce que nos membres se retrouvent
dans tous les coins du Québec.
Mme Suzanne Plante est de Charlesbourg. M. Jean-Guy Provençal, de
Fleurimont, est secrétaire. M. Jean Racine, de Québec, est
trésorier. Et il y a des directeurs qui sont M. Jean Fiset, de Carignan,
Mme Lise Dionne-Bérard, de Rock-Forest, Mme Béatrix Montalvo, de
Longueuil, et notre conseiller juridique, Me Mao Chambers de
Montréal.
Mme Marchand va vous faire une présentation de l'organisme, et,
par la suite, je ferai la présentation d'une problématique ainsi
que de nos recommandations sur le projet de loi 21.
Mme Marchand (Danielle): Qui est
Monde-Enfant? Monde-Enfant, c'est un organisme sans but lucratif. Cette
association regroupe 170 familles dont 500 membres dispersés dans toutes
les régions du Québec. Un conseil d'administration de sept
membres bénévoles gère l'organisme selon les statuts et
règlements dûment adoptés.
Monde-Enfant est reconnu depuis 1983 par le ministère de la
Santé et des Services sociaux pour agir à titre
d'intermédiaire en matière d'adoption en république
Dominicaine. Monde-Enfant poursuit l'objectif d'aider des enfants
démunis de la république Dominicaine en réalisant des
projets de développement communautaire pour les enfants dominicains et
dans les situations sans espoir, en trouvant des parents adoptifs pour des
enfants déclarés adoptables par les autorités dominicaines
compétentes.
Au cours des trois dernières années, Monde-Enfant a
canalisé vers la république Dominicaine un investissement de 80
000 $ pour la réalisation de projets de développement
communautaire, tel que l'alphabétisation de 150 enfants, un dispensaire
médical, une poissonnerie gérée par les femmes
dominicaines, un puits d'eau potable dans un "bataye" haïtien et une
pisciculture.
Sur le plan de l'adoption internationale, Monde-Enfant a favorisé
l'adoption de 200 enfants abandonnés d'origine dominicaine. Monde-Enfant
a également signé, avec le représentant du
Secrétariat d'État à la Santé publique et de
l'Assistance sociale de la république Dominicaine un accord
prévoyant l'établissement d'une procédure de garde
légale d'enfants abandonnés dans le but d'une adoption au
Québec par des parents québécois.
L'association maintient un service d'entraide avant et après
l'adoption, grâce à un réseau de quinze
personnes-ressources qui sont des parents qui ont fait l'expérience de
plusieurs adoptions. Leur rôle consiste à informer et à
appuyer les parents en cours d'adoption jusqu'à leur retour avec
l'enfant au Québec.
Monde-Enfant compte également des bénévoles qui
oeuvrent dans plusieurs comités, dont les projets d'aide, l'adoption, le
financement, les statuts et règlements, la surveillance
financière et la post-adoption.
Toutes les réalisations de Monde-Enfant ont exigé depuis
quatre ans environ 28 000 heures de bénévolat, soit
l'équivalent de plus de 120 000 $ au salaire minimum d'économies
communautaires. Nous avons reçu en subventions du qouvernement du
Québec depuis deux ans 6150 $. Nous tenons à vous rappeler que
c'est avant tout le travail bénévole de nos membres qui a
contribué à aider les enfants démunis de la
république Dominicaine et à soutenir les parents en cours
d'adoption.
Je vais également vous parler de l'adoption ouverte. Depuis sa
création, Monde-Enfant poursuit une philosophie d'adoption ouverte
lorsque les parents naturels sont connus. L'adoption ouverte n'implique pas un
rejet de l'enfant par les parents naturels, mais plutôt son passage dans
une autre famille qui pourra subvenir non seulement aux besoins essentiels qui
lui manquent, mais lui prodiguer aussi l'amour et l'affection filiale d'un
enfant.
Concrètement, il s'agit d'une rencontre de courte durée
qui met en présence la personne-ressource représentant
Monde-Enfant en république Dominicaine, les parents adoptifs et naturels
de l'enfant. Elle se poursuit par l'envoi annuel de photographies et
d'informations sur l'évolution de l'enfant aux parents naturels et aux
autorités dominicaines en matière d'adoption.
Monde-Enfant favorise également les retrouvailles entre les
parents naturels et l'enfant. Quelques expériences ont
déjà été réalisées où l'enfant
rend visite à ses parents naturels en république Dominicaine en
compagnie de ses parents adoptifs. Il semble que ces rencontres créent
des événements fort heureux, à la fois pour la famille
naturelle, l'enfant et les parents adoptifs.
M. Bécotte: Maintenant, je vais vous brosser un tableau de
la problématique de l'adoption internationale, telle que nous la
percevons. Traditionnellement, dans notre société, c'est la
famille qui assure le bien de l'enfant et ce sont les tribunaux qui approuvent
légalement tout acte d'adoption fait au Québec comme à
l'étranger. Aujourd'hui, il y a un nouvel acteur qui s'impose au sein de
la famille adoptive. 11 s'agit du technocrate ou du bureaucrate qui intervient
pour appliquer un processus administratif complexe. Aussi, il est fait en sorte
que ce n'est plus le parent qui est l'acteur de l'adoption, mais plutôt
une structure administrative constituée de politiciens qui
décident des objectifs sociaux concernant l'adoption et de
fonctionnaires qui décident des procédures à imposer aux
personnes voulant adopter.
Aujourd'hui, la dépendance des parents adoptants envers
l'État et les centres de services sociaux est totale. L'adoption est
devenue un produit qu'il faut standardiser, normaliser et contrôler.
C'est ainsi que les procédures s'allongent, que le nombre d'intervenants
s'accroît et que les parents adoptifs ont à faire face a toutes
sortes d'attitudes négatives ou d'incompréhensions de la part de
la majorité des intervenants qui ne comprennent pas très bien les
fondements humains de l'adoption internationale.
Il n'y a malheureusement pas encore de politique gouvernementale
cohérente qui favorise l'adoption internationale. II n'y a que des
bribes de politique improvisées et engendrées par un courant
d'incompréhension de l'État face à l'adoption
internationale. Pourtant, l'opinion publique est aujourd'hui favorable à
l'adoption internationale. Notre gouvernement a choisi de se retrancher
derrière une théorie juridique controversée sur les liens
de filiation pléniers. Il a choisi de mettre en place un système
juridique et administratif très complexe en matière d'adoption
internationale sans avoir fait le point sur les alternatives sociales et
administratives qui permettraient plus de souplesse et une meilleure
concertation entre les intervenants.
Monde-Enfant considère que le premier besoin d'un enfant est de
vivre une existence décente dans une famille avec des parents. La
politique gouvernementale vise à décourager les adaptants et les
oraanismes d'adoption à poursuivre leurs actions en adoption
internationale.
Le secrétariat à l'adoption engendre toute une gamme de
problèmes parce qu'il agit en vertu d'un mandat mal défini. Ses
décisions se prennent sur la base de principes obscurs et changeants. Le
secrétariat à l'adoption n'a jamais donné de soutien
concret à Monde-Enfant malgré le fait qu'il y ait une convention
signée entre notre organisme et le ministère de la Santé
et des Services sociaux. Les relations que nous avons avec le
secrétariat à l'adoption sont souvent tendues parce qu'il y a un
manque de confiance qui se concrétise par l'ingérence toujours
plus grande du secrétariat dans les activités de
Monde-Enfant.
Lors d'un colloque sur l'adoption internationale, en février
1987, qui réunissait les orqanismes non qouvernementaux d'adoption
internationale, il est clairement ressorti que le secrétariat
était perçu comme une police d'adoption plutôt que comme un
service de coordination, d'information et d'assistance technique auprès
des organismes.
Dans la majorité des centres de services sociaux du
Québec, il y a un manque de ressources humaines compétentes en
adoption internationale. Les CSS ne donnent pas une information suffisamment
objective quant aux démarches à entreprendre et aux aspects
juridiques, encore moins sur les organismes intermédiaires et les pays
ouverts à l'adoption internationale. Pourtant, le secrétariat
à l'adoption avait pour rôle de transmettre cette information,
car, par ses contacts avec Ies organismes, il connaissait tous les nouveaux
développements en adoption internationale. Les communications et la
collaboration sont difficiles entre le CSS et le secrétariat à
l'adoption. Cela est causé par l'entremêlement des fonctions
des
directeurs de la protection de la jeunesse et du secrétariat.
Les méthodes d'évaluation, quant à elles, sur le
plan sociofamilial pour les adoptants varient d'un CSS à l'autre, tout
comme les approches d'information. Les critères d'évaluation sont
souvent sans fondement expérimental. Ils laissent place aux jugements de
valeur personnels du praticien social. Les aspects psychologiques relatifs au
racisme, à l'ouverture interculturelle et aux connaissances
éducatives des adoptants sont souvent oubliés.
Enfin, les personnes qui désirent adopter des enfants
étrangers sont la plupart du temps confrontées à la
solitude dans leurs démarches d'adoption, de réflexion et de
recherche de sources d'enfants abandonnés. Par le passé et encore
maintenant, plusieurs se lancent dans l'aventure de l'adoption internationale
sans information pertinente, courant ainsi les risques de se faire exploiter
par des personnes recherchant un profit financier. Plusieurs agissent sur un
coup de tête, en désespoir de cause, lorsque leurs
démarches sont bloquées par le secrétariat à
l'adoption.
Un des moyens les plus humanitaires d'éviter ces situations est
de favoriser la mise sur pied d'organismes sans but lucratif qui serviront
d'intermédiaires et de partenaires entre l'adoptant et les sources
d'enfants adoptables dans les pays étrangers.
Malgré les difficultés que pose l'organisation d'une
association gérée par des bénévoles, nous observons
une continuité, une ténacité et un dynamisme constant au
sein de ces organismes. Ceux-ci réalisent des activités aussi
variées que des cliniques juridiques, des colloques sur les
problèmes d'adoption, des projets d'aide aux enfants démunis, des
rencontres sociales; ils mettent sur pied des réseaux de
personnes-ressources qui accompagnent les parents adoptants dans les
dédales de procédures et l'attente d'une proposition
d'enfant.
Ces organismes ont démontré qu'ils sont capables de gagner
la confiance des organismes publics et privés à
l'étranger, et de maintenir des contacts avec les gouvernements
étrangers. Le présent gouvernement du Québec a entrepris
de restreindre les activités d'adoption internationale de ces organismes
en pensant pouvoir les remplacer. Le ministère de la Santé et des
Services sociaux s'est donné comme objectif de prendre totalement en
main le contrôle des organismes et de les soumettre à
l'autorité des fonctionnaires.
Quelles que soient les ressources qu'il entend mettre pour
réaliser cet objectif, nous estimons qu'il fait fausse route. Les
organismes non gouvernementaux sont nécessaires en matière
d'adoption internationale parce qu'ils sont plus facile- ment reconnus comme
interlocuteurs auprès des organismes privés et gouvernementaux
à l'étranger.
Il est important que les organismes non gouvernementaux gardent, face au
gouvernement, une relative autonomie ici même autant qu'à
l'étranger. L'imposition d'une couverture gouvernementale officielle
rendra leurs activités plus lourdes à accomplir. Nous estimons
que le mécanisme d'accréditation est plus avantageux et plus
souple que le mécanisme d'encadrement que le ministère de la
Santé et des Services sociaux veut leur imposer.
Notre organisme est disposé à vivre avec des engagements
plus serrés qu'il inscrira dans une convention avec le ministère
de la Santé et des Services sociaux. Toutefois, il n'est pas
disposé à se soumettre à l'autorité des
fonctionnaires du ministère qui cherchent à appliquer des normes
administratives plutôt qu'à être des collaborateurs
facilitant le travail à notre organisme. Les organismes n'accepteront
jamais, je crois, de devenir des sous-fonctionnaires bénévoles du
Secrétariat à l'adoption internationale.
J'aimerais dire un mot sur les associations de parents. On comprend que,
dans le contexte difficile et problématique de l'adoption
internationale, il ne faut pas se surprendre de la naissance des associations
de parents qui ont déjà adopté et des parents en attente
d'une adoption internationale. La création de telles associations est
nécessaire sur la base des régions, car elle permet aux parents
adoptants de se donner des services d'information plus adéquats. Elle
permet une entraide humanitaire entre des parents qui se retrouvent ainsi dans
des familles qui vivent des situations particulières et inédites
parce qu'il y a là un vécu culturel et psychologique qui n'est
pas le même que celui des familles naturelles au Québec. Ces
associations peuvent également apporter un appui essentiel aux
organismes intermédiaires, en particulier dans la pré-adoption et
la postadoption.
Les recommandations de Monde-Enfant. Après avoir
étudié le projet de loi au conseil d'administration, la
première recommandation qu'on fait, c'est de demander aux membres de la
commission parlementaire de ne pas recommander l'acceptation du projet de loi
21 et du projet de règlement 132 sur l'adoption internationale tels
qu'ils sont présentement formulés.
Ces projets doivent être reformulés afin de réduire
le pouvoir d'intervention direct du ministre de la Santé et des Services
sociaux. C'est un organisme parapublic autonome qui devrait coordonner les
démarches des adoptants et les activités des organismes qui
interviennent dans l'adoption des enfants domiciliés hors
Québec.
II faut réduire aussi les procédures judiciaires
préalables au projet d'adoption lorsque l'adoptant agit par
l'intermédiaire d'un organisme ou par celui du ministre dans le cadre
d'un accord international en matière d'adoption. La vérification
préalable de la régularité d'un projet d'adoption devrait
se faire uniquement pour les personnes qui font un projet d'adaptation par des
contacts privés et il faut que ce soit dans des pays où les
organismes ou le ministère n'a pas d'accord ou n'a pas de relations.
Bien sûr, cette approbation devant le tribunal pourrait, à ce
moment, faire l'objet d'une vérification, à savoir si on respecte
les règles d'adoptabilité du pays et si l'état du domicile
de l'enfant, par un représentant désigné, consent à
l'adoption de cet enfant par l'adoptant.
Il faut permettre la reconnaissance d'organismes d'adoption
internationale compétents comme intermédiaires directs dans les
pays étrangers. Il faut permettre la reconnaissance d'un jugement
d'adoption rendu hors Québec par un tribunal du Québec en
s'assurant que ce jugement crée tout simplement un lien de filiation en
vertu des lois étrangères.
Il faut réduire les pouvoirs d'intervention du directeur de la
protection de la jeunesse dans le règlement 132 en spécifiant,
particulièrement à l'article 4, que celui-ci intervient pour
assister l'adoptant au moment du jumelage de l'enfant. Il peut se faire
assister par l'organisme accrédité qui parraine le dossier de
l'adoptant. La recommandation du directeur de la protection de la jeunesse ne
devrait pas avoir d'effet obligatoire pour l'adoptant. L'adoptant doit
signifier par écrit l'acceptation ou non du jumelage au directeur de la
protection de la jeunesse et à l'organisme le cas échéant.
L'acceptation ou le refus du jumelage doit être motivé par
l'adoptant.
Il faut réduire également le pouvoir d'intervention du
directeur de la protection de la jeunesse dans le règlement 132 à
l'article 6, en spécifiant que celui-ci doit assister, peut assister les
adoptants en s'assurant de l'intégration de l'enfant auprès des
adoptants dès qu'il est informé de la date d'entrée de
l'enfant au Québec, et il peut se faire assister par un organisme
accrédité. L'adoptant informe le directeur de la protection de la
jeunesse de la date d'arrivée de l'enfant au Québec et non pas
l'organisme ou un autre intermédiaire.
Il faut également modifier la section III du règlement 132
afin d'y inscrire qu'un organisme reconnu peut intervenir en matière
d'adoption internationale lorsqu'il est également
accrédité par un organisme public à l'étranger et
autorisé è intervenir auprès d'organismes privés et
publics du pays en matière d'adoption internationale; qu'il ne peut
transmettre une proposition d'adoption d'un enfant étranger que s'il y a
consentement à l'adoption de cet enfant selon les règles
relatives à la toi où est domicilié l'enfant. De plus,
lorsque le ministre conclut un accord avec l'État où l'enfant est
domicilié en vue d'un placement au Québec de cet enfant,
l'organisme accrédité peut assister le ministre selon les
conditions prévues dans cet accord. (11 h 45)
II faut ajouter une section IV au règlement 132, de façon
à éviter qu'on ne se retrouve constamment avec des changements de
décret pour la convention type. Il faudrait déterminer par
règlement les critères qui permettront l'accréditation
d'un organisme intermédiaire. Ces critères devraient être
les suivants. L'organisme doit démontrer qu'il a une compétence
ou une expérience en matière d'adoption internationale. Il doit
identifier ses interlocuteurs. Il doit être dûment incorporé
en vertu de la troisième partie de la Loi sur les compagnies du
Québec, c'est-à-dire être sans but lucratif. Ces objectifs
doivent correspondre à la mission de défendre les droits de
l'enfant, de promouvoir ses intérêts et d'améliorer ses
conditions de vie.
L'organisme doit fournir des qaranties quant au respect des
réglementations étrangères et avoir un code
d'éthique officiel quant à l'identification des enfants
adoptables, en temps normal comme en temps de crise. L'organisme doit maintenir
un compte un fidéicommis dans une institution financière et y
déposer les sommes confiées par l'adoptant.
Deuxième recommandation, qui ne touche pas à ce projet de
loi, mais qui demande au gouvernement de déposer à
l'Assemblée nationale la politique d'adoption internationale. Le projet
de loi 21 ne découle pas d'une politique d'adoption cohérente qui
tienne compte de la réflexion concertée de plusieurs
ministères et des organismes non gouvernementaux. Cette politique
devrait être élaborée avec la collaboration de plusieurs
ministères dont les Communautés culturelles et l'immigration, la
Justice, les Relations internationales, la Santé et les Services
sociaux, bien sûr, et, s'il y en a d'autres, ils pourraient s'ajouter.
Cette politique devrait faire l'objet d'une consultation auprès des
organismes d'adoption internationale et des associations de parents, ainsi
qu'auprès du Barreau du Québec et de tout autre organisme
intéressé.
Troisième recommandation: Monde-Enfant demande au gouvernement du
Québec la création d'un organisme parapublic autonome qui
veillera à coordonner les démarches des adoptants et les
activités des organismes qui interviennent dans l'adoption des enfants
domiciliés hors Québec. Un tel organisme peut être
créé en vertu des lois du Québec et il serait
administré par un
conseil d'administration où la représentation serait un
équilibre entre les organismes accrédités en
matière d'adoption internationale, les représentants des
associations de parents et les représentants des divers
ministères concernés par l'adoption internationale.
Dans notre résumé, on fait une liste de tous les mandats
qui peuvent être consacrés à cet organisme parapublic et on
dit que le gouvernement serait assuré, de cette façon, d'une
coordination et d'une concertation cohérentes entre tous les
intervenants de manière à favoriser l'adoption internationale
dans le respect des droits de l'enfant.
Quatrième recommandation: Monde-Enfant demande au gouvernement du
Québec d'accorder, dans la prochaine réforme fiscale, des
crédits d'impôt aux parents adoptants équivalents au
coût qu'ils ont à défrayer pour une adoption
internationale.
En conclusion, Monde-Enfant réalise que les problèmes
d'adoption internationale n'ont pas été réglés par
la création du Secrétariat à l'adoption internationale. Il
existe un article datant de 1982 qui parle de problèmes d'adoption
internationale, qui fait référence à un colloque des
centres de services sociaux qui s'est tenu en 1980, qui parlait des
problèmes de coordination concernant l'adoption internationale, et on
est ici devant vous, encore aujourd'hui, pour parler des problèmes de
coordination et de la complexité des procédures en adoption
internationale. Et on n'a qu'un projet de loi, on n'a pas encore de politique
d'adoption internationale.
Au contraire, la situation se détériore de plus en plus
avec la mise en place d'un système bureaucratique de plus en plus lourd
qui engendre de la méfiance de part et d'autre. Monde-Enfant croit qu'il
est urgent d'établir une structure de concertation et de décision
qui réunisse les représentants de tous les intervenants en
matière d'adoption internationale. Monde-Enfant croit qu'un domaine
aussi humanitaire et diversifié que l'adoption internationale ne peut
être limité à sa plus simple expression, mais doit
être encadré par des règles souples et des
procédures limitées au strict nécessaire. Or, nous
estimons qu'il est possible au cours de l'année 1987 de mettre en place
un système légal et administratif à la suite d'une
réflexion impliquant l'apport de tous les intervenants. Encore une
fois...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, s'il
vous plaît!
M. Bécotte: Je termine, encore quelques lignes. Encore une
fois, nous demandons à la ministre et au gouvernement de ne pas tout
précipiter, de s'accorder le temps de prendre le recul nécessaire
afin d'étudier toutes les recommandations qui seront exprimées
à cette commission parlementaire. Nous encourageons, s'il le faut, cette
commission à demander au gouvernement un mandat d'initiative pour
étudier tous les aspects de l'adoption internationale et pour soumettre
à l'Assemblée nationale une politique d'adoption internationale.
Ce n'est qu'au prix d'un travail de réflexion qui nécessitera du
temps et notre participation que le gouvernement pourra implanter un
système légal et administratif qui favorisera l'adoption
internationale pour le bien des enfants abandonnés dans les pays
étrangers et aussi pour le bien des parents adoptifs qui désirent
offrir un foyer à ces enfants. C'est tout pour notre
présentation.
Le Président (M. Bélanqer): Bien, je vous remercie.
Avant de passer aux questions des deux partis, j'aimerais avoir le consentement
pour qu'on puisse continuer jusqu'à 12 h 30 de façon à
pouvoir terminer avec l'Association Monde-Enfant et ne pas la faire revenir
après l'ajournement de ce soir. J'ai le consentement unanime? Bien!
Vous faisiez une remarque tout à l'heure en vertu de l'article
173 du règlement prévoyant qu'on peut limiter les interventions
à dix minutes consécutives. Est-ce que vous voulez toujours vous
en prévaloir? Oui. Alors, je demanderais donc au parti
ministériel tout comme à l'Opposition si on peut répartir
en deux sections de dix minutes les interventions des groupes. Vous êtes
d'accord?
Mme Lavoie-Roux: Je trouve que... Une voix: Dix, douze
minutes...
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, cela n'a pas d'importance.
Le Président (M. Bélanger): Cela n'a pas
d'importance. Bien!
Je cède donc la parole à Mme la ministre de la
Santé et des Service sociaux.
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
l'Association Monde-Enfant pour son mémoire que j'ai lu en entier
même s'il est assez volumineux. J'ai été
intéressée, entre autres, par la lecture des procédures
d'adoption en république Dominicaine. Quoique cela ne fasse pas l'objet
d'étude de la part de la commission, actuellement, je pense que c'est
intéressant.
Brièvement, j'ai réalisé que, comme un autre groupe
qui est venu ici avant, au-delà de l'adoption internationale proprement
dite, vous vous intéressez au problème du pays lui-même et
vous avez pris des initiatives qui donnent à l'adoption internationale
une perspective encore plus large et plus
humanitaire. Il faut reconnaître que c'est une très bonne
initiative.
Je voudrais reprendre certaines de vos remarques. Évidemment, je
ne pourrai pas toutes les reprendre. Vous avez beaucoup insisté sur le
fait qu'actuellement il n'y a pas de politique sur l'adoption internationale.
Il est exact qu'il n'y a pas de politique écrite sur l'adoption
internationale, mais je dois vous dire que nous y travaillons et je peux au
moins indiquer à ce moment-ci que nous voulons favoriser l'adoption
internationale. Je pense qu'il y a dans le projet de loi 21 et dans le
règlement qui en découlera des éléments qui
devraient être modifiés. Vous faites des remarques à ce
sujet, un peu dans le même sens que le Barreau. Ces
éléments doivent être mis à jour en fonction du
projet de loi 21 qui sera finalement adopté.
Vous recommandez de ne pas accepter le projet de loi 21 et le projet de
règlement sur l'adoption internationale, tels qu'ils sont
présentement formulés. Je vais reprendre vos recommandations les
unes après les autres. Ce sera peut-être plus rapide de cette
façon-là.
Il est évident que l'objectif de la commission, c'est
précisément d'obtenir des suggestions, pour qu'on puisse
apporter, s'il y a lieu, des clarifications au projet de loi qui est devant
nous et au règlement. Je ne répète pas ce que je viens de
dire.
Je voudrais revenir encore - je pense que vous étiez ici et que
vous étiez ici la première année - sur le râle qui
devrait être joué par Ies organismes reconnus d'adoption
internationale. Evidemment, vous avez lu votre mémoire. Peut-être
qu'à la suite de ce que j'ai dit, vous êtes au moins
rassurés sur le fait que ce n'est pas l'intention du gouvernement de
vous mettre de côté ou encore de vous utiliser, pour utiliser vos
termes, comme des sous-fonctionnaires de l'État. Nous croyons que les
organismes d'adoption internationale reconnus, qui acceptent de s'associer au
gouvernementet d'être, au fond, le prolongement, je dirais, de la
ministre dans les démarches qui doivent être faites sur le plan
international dans des pays qui sont désignés et reconnus, vont
continuer d'exister. En ce sens-là, ce n'est pas du tout le désir
de la ministre, de se substituer par le secrétariat à l'adoption
aux organismes qui ont accepté de s'associer, comme je le disais tout
à l'heure, à cette convention type qui, à l'occasion de la
commission parlementaire, lors de la révision du projet de loi et du
règlement, devra également être aussi mise à
jour.
Pour nous, les organismes d'adoption internationale reconnus demeurent
des interlocuteurs privilégiés de la ministre dans ses rapports
avec l'étranger. Je l'espère; en tout cas, même si je le
répète dix fois, on pourra au moins me citer par la suite.
Comme je le disais, si le projet de loi ou la convention laisse des
doutes - je suis d'accord avec vous qu'il y a des choses qui peuvent être
ambiguës - nous nous proposons de les clarifier en conséquence.
J'aimerais vous poser une question. Vous dites, d'une façon qui
m'apparaît assez absolue, que l'adoption internationale est un acte de
droit privé. Qu'est-ce que vous entendez par "acte privé", vu que
vous reconnaissez en même temps que l'adoption internationale doit
être encadrée par une loi et des règlements, enfin avec
lesquels vous pouvez être d'accord ou en désaccord? Je veux donc
savoir quelle signification vous donnez au terme "droit privé" quand
vous l'utilisez.
M. Bécotte: C'est-à-dire que le terme qu'on
utilise, c'est un terme où il existe des lois dont nous devons rendre
compte devant les tribunaux. Par conséquent, tout ce qui est d'ordre
public et qui encadre l'adoption internationale, que ce soient des politiques
ou de3 procédures administratives, ça vient finalement enrober de
façon un peu complexe cet acte de droit qu'on fait de manière
privée, mais devant les tribunaux.
Mme Lavoie-Roux: L'acte d'adoption lui-même n'est pas un
acte de droit privé dans le sens que...
M. Bécotte: C'est-à-dire qu'on doit aller devant
les tribunaux pour...
Mme Lavoie-Roux: Cela ne regarde personne, sauf les individus
entre eux. Ce n'est pas ce que vous avez voulu dire.
M. Bécotte: Non, ce n'est pas ce que j'ai voulu dire. Pour
qu'un acte d'adoption puisse se faire entre des parents et un enfant, si les
parents sont connus, il y a des procédures établies dans les
lois. L'État intervient en légiférant et, par la suite,
son intervention est laissée à l'interprétation des
tribunaux. C'est ce que j'ai voulu dire par un acte de droit privé. En
premier lieu, c'est un acte de droit privé dans le sens où c'est
un acte qui se fait en vertu des lois d'un pays et qui se fait devant les
tribunaux.
Mme Lavoie-Roux: En page 4 de vos recommandations, vous
dîtes que la politique d'adoption internationale doit tenir compte de la
réflexion concertée de plusieurs ministères. Vous
énumérez l'immigration, les Relations internationales, la
Santé et la Justice. J'aimerais vous dire que l'élaboration de ce
projet de loi a été justement le résultat d'un effort
concerté, prolonqé et intense de ces quatre ministères et
que ce n'est pas uniquement le résultat du travail du ministère
de la Santé et des Services
sociaux. Si ceci peut corriger peut-être l'impression que vous
avez eue...
Mme Marchand (Danielle): Est-ce que je pourrais ajouter quelque
chose, Mme la ministre? Je pense qu'on ne faisait pas nécessairement
référence au projet de loi, mais aussi à toutes les
procédures administratives qui demandent, au fond, une concertation
constante entre ces ministères. Ce qui fait problème
présentement, c'est justement qu'il n'y a pas de concertation, ou, s'il
y en a, je pense qu'on l'oublie. Alors, c'est dans le fonctionnement quotidien
où on a à traiter avec les dossiers qu'on se rend compte que
finalement ces intervenants ne sont pas assis à la même table et
qu'il n'y a pas de concertation quotidienne en tout cas dans le fonctionnement
du processus d'adoption. C'était pourquoi surtout on a mis cela.
Mme Lavoie-Roux: En tout cas, c'est comme cela que je vois le
rôle du ministre. Ce rôle de coordination, entre autres, qui lui
est dévolu, c'est justement d'assurer que cette concertation se fasse.
Je vois mal comment on peut éviter d'en faire, par exemple, disons avec
le ministère des Relations internationales et le ministère de
l'Immigration et des Communautés culturelles qui, de toute façon,
ont un rôle à jouer au moment de l'arrivée des enfants ou
des ententes avec d'autres pays. Je pense que cela exige la présence de
ces deux ministères d'une façon particulière. C'est bien
notre intention qu'ils soient partie à ce que seront les règles
administratives de fonctionnement, appelons-le quotidien, de l'application de
cette loi.
Mme Marchand (Danielle): Madame la ministre, les intervenants en
matière d'adoption internationale sont laissés totalement dans
l'ignorance par rapport à toutes ces ententes ou cette façon de
fonctionner, ce qui crée de graves problèmes quant au
fonctionnement. Je tiens aussi à l'ajouter. Malheureusement, on n'est
pas au courant de ce qui se passe ni des ententes qui peuvent se faire entre
les autres ministères. (12 heures)
Mme Lavoie-Roux: J'ai lu dans votre rapport sur la
république Dominicaine - vous en faites le reproche d'ailleurs; c'est
peut-être bien justifié, je n'ai pas eu le temps d'en examiner le
bien-fondé - que vous vous opposez à ce que le secrétariat
à l'adoption puisse aller dans un pays pour préparer une entente,
entre États ou encore sur le plan administratif, et que, dans le cas de
la république Dominicaine, vous vous êtes sentis laissés de
côté par la façon dont on a procédé. Je pense
que c'est bien dans votre mémoire que j'ai vu cela.
M. Bécotte: On ne dit pas qu'on s'oppose à ce que
le secrétariat ou un représentant de la ministre se rendent en
république Dominicaine pour y négocier les termes d'un accord en
adoption internationale. Ce qu'on déplore, c'est que ces interventions
se sont faîtes en ne tenant pas compte du tout de la présence de
notre organisme dans le pays de la république Dominicaine. Nous ne
sommes pas, à l'heure actuelle, informés de la tendance que vont
prendre les termes d'un tel accord et nous allons devoir discuter avec vous ou
avec vos représentants dans quelques semaines - je sais que vous
êtes presque rendus à un accord - sur la façon dont on va
vous assister en ce qui concerne l'adoption internationale en république
Dominicaine.
II nous semble qu'avec l'expérience que nous avions là-bas
depuis trois ou quatre ans, on aurait pu, en cours de route, avoir des
rencontres avec vos représentants pour voir si les termes de l'accord
vont faciliter le travail d'un organisme ou le compliquer.
Mme Lavoïe-Roux: De toute façon, dans ce domaine
d'entente entre États, qu'elle soit d'ordre administratif ou plus
officielle, il va nous falloir examiner de quelle façon les organismes
pourront être mis à contribution parce qu'on entre peut-être
dans un autre domaine de fonctionnement. Quoi qu'il en soit j'ai pris note de
votre remarque. Mes dix minutes sont écoulées. Oui.
M. Bécotte: Je voulais juste vous dire qu'on est au
courant que vous avez avec vos fonctionnaires repris une démarche
commencée par l'organisme Monde-Enfant et par le programme de garde
légale fait en vertu de la loi 1406 de la république Dominicaine.
Nous avions demandé et offert notre collaboration au Secrétariat
à l'adoption internationale pour résoudre les problèmes de
fonctionnement qu'il pouvait y avoir à ce sujet. Mais, finalement, on
n'a eu, aucune information sur la continuité du programme de garde
légale. Encore aujourd'hui, on conaît des difficultés
quotidiennes d'application administrative concernant ce programme de garde
légale.
Mme Lavoie-Roux: Si vous me le permettez, cela me fera une minute
de moins, M. le Président. Du fond, je pense que vous reconnaissez ou
que vous êtes peut-être prêts à reconnaître
qu'en ce qui concerne la signature d'ententes, cela doit se faire d'État
à État. Vous voulez, ce que je crois comprendre, savoir s'il y a
une collaboration particulière que vous pouvez apporter afin que l'on
puisse en tenir compte.
En tout cas, je pense que toute la question doit être
examinée dans cette perspective.
M. Bécotte: C'est exactement cela, Mme la ministre. C'est
cela, ne pas être un sous-fonctionnaire bénévole,
participer et être pleinement reconnu, non seulement après coup,
mais en cours de travail.
Mme Lavoie-Roux: Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Alors, il me fait plaisir de vous accueillir au nom
de ma formation politique. À la lecture de votre mémoire - il est
assez volumineux - je pense que vous avez bien fait le tour de la question. On
y sent une préoccupation réelle parce que vous avez une longue
expertise. Vous avez à coeur de faire en sorte que les organismes
intermédiaires jouent leur rôle dans l'avenir, comme ils l'ont
bien assumé jusqu'à maintenant.
Il me semble que vos problèmes - vous me corrigerez s'il y a lieu
- sont apparus à partir de novembre 1986. Vous avez eu certains
problèmes au moment du décret de novembre 1986. En tout cas,
l'adoption a commencé à être plus difficile dans certains
pays. Est-ce que vous avez été touchés par ce
décret?
M. Bécotte: Oui. On a été touchés par
le décret puisque le programme de garde légale, sur lequel nous
avions une entente avec les représentants de la république
Dominicaine, n'était plus reconnu; on y disait qu'on ne pouvait faire
entrer des enfants ici que s'il y avait un accord entre États. Par
contre, d'un autre côté, nous pouvions continuer à oeuvrer
dans le pays parce que la loi de la république Dominicaine permet
d'accorder l'adoption pleine et entière aux parents qui en font la
demande.
Alors, on fonctionnait dans les deux sens, c'est-à-dire sur deux
voies: sur une voie, l'adoption plénière on pouvait fonctionner
et, sur l'autre, qui était la garde légale, on ne pouvait plus
fonctionner. On s'est fait dire, par les gens du Secrétariat à
l'adoption internationale, que notre entente ne valait rien et ce, même
avant le décret. Or, depuis 1985, le Secrétariat à
l'adoption internationale nous donnait des dossiers dans le cadre de ce
programme de garde légale. Donc, il y avait accord tacite sur ce
programme de garde légale. Pourquoi est-ce que cela a pris deux ans
avant qu'on nous dise qu'une telle entente n'était pas valable?
Mme Vermette: Est-ce que l'attitude du secrétariat, qui
cherche à signer des ententes avec les pays étrangers pour
l'adoption, peut nuire à l'autonomie des organismes? Est-ce que vous
êtes en train d'essayer de nous dire? Est-ce que l'attitude du
secrétariat de vouloir signer unilatéralement des ententes
pourrait nuire à l'autonomie des organismes?
M. Bécotte: Je crois qu'un orqanisme qui sert
d'intermédiaire ou qui peut intervenir directement dans un pays peut
avoir des accords beaucoup plus souples que s'il s'agit d'un accords officiels
entre États.
Les accords officiels entre États mettent en place des
mécanismes relativement lourds. Ils mettent en place obligatoirement une
procédure administrative et une procédure bureaucratique qui vont
nécessairement allonger les délais et qui de plus vont rendre
plus difficile le travail de l'organisme qui assistera le ministre.
Jusqu'à présent, on a démontré qu'on
était capables de s'adapter et de discuter avec le secrétariat
à l'adoption, sauf que lui, n'a pas démontré qu'il
était capable de s'adapter et de discuter avec les organismes.
Mme Vermette: Est-ce que le secrétariat à
l'adoption a conclu beaucoup d'ententes avec d'autres États à
votre connaissance?
M. Bécotte: Le secrétariat s'apprête
peut-être... est en cours de négociation pour favoriser la
signature d'ententes avec différents pays. Jusqu'à maintenant, on
sait qu'on a un accord administratif avec la Corée et que bientôt
nous aurons, semble-t~ il, un accord avec la république Dominicaine.
Mme Marchand (Danielle): II faut dire que cela n'ouvre pas de
nouveaux pays. Il se faisait déjà de l'adoption dans ces pays. Il
y avait déjà une entente avec les orqanismes dans ces pays. Donc,
on ne refait pas le travail, ce n'est pas du nouveau.
Mme Vermette: Ce qui veut dire que les démarches
entreprises dernièrement par le secrétariat à l'adoption
ce n'était pas dans le but d'ouvrir de nouveaux pays ou de favoriser
l'adoption internationale dans différents pays où cela n'existait
pas présentement.
M. Bécotte: II aurait pu commencer par des
priorités et ouvrir certains pays qui ne sont pas clairement ouverts,
par exemple, aller aux Indes. Au lieu d'aller en Amérique latine
où c'est relativement facile pour des Québécois de se
rendre pour les organismes que nous sommes, il aurait pu, par exemple, se
diriqer vers l'Asie et approfondir un voyage là-bas. Or, il n'a pas fait
cela au début. Au début il s'est dirigé vers
l'Amérique latine et les Antilles pour prendre le contrôle de la
situation, alors qu'il y avait des organismes qui oeuvraient dans ces
différents pays.
Mme Vermette: Dans votre mémoire à la page 34, vous
dites que "le projet de loi
21 abroge l'article 622.1 et le remplace par une autre orientation plus
étroite qui demande au tribunal appelé à vérifier
au préalable la régularité d'un projet de s'assurer qu'en
vertu de la loi étrangère un lien de filiation sera
créé entre l'enfant et l'adoptant, que ce lien se substituera au
lien de filiation d'origine et que ce dernier sera en conséquence rompu,
ou si la loi étrangère n'a pas pour effet de rompre le lien...
par un représentant...1'
Vous avez l'air de considérer que le projet de loi va devenir
beaucoup plus fastidieux en abrogeant l'article 622.1 tel que stipulé
par la loi 21 maintenant. Est-ce que pour vous cela devient...
M. Bécotte: Par exemple, dans le cas d'une adoption
simple, le fait de devoir obtenir l'accord d'un représentant
autorisé d'un pays étranger, cela devient fastidieux. Pourquoi
devrait-on avoir un tel accord lorsqu'on est déjà reconnu dans le
pays auprès d'un organisme public ou privé qui nous a
été désigné? Je pense que, lorsqu'il y a des
reconnaissances d'organismes, on devrait pouvoir faciliter, la reconnaissance
d'un jugement d'adoption, et dire: D'accord, cela passe par un organisme
accrédité à la fois ici et dans le pays d'origine de
l'enfant.
Le propos de notre recommandation, finalement, c'est de remettre
l'article 622.1 qui dit que le tribunal devra apprécier si le jugement
d'adoption crée un lien de filiation. On trouvait cela beaucoup plus
universel et beaucoup plus appréciable avec un juge qu'une série
de critères qui font en sorte que le juge voit réduire sa
possibilité d'appréciation pour un jugement d'adoption.
J'entendais tout à l'heure les membres du Barreau dire qu'on
devait plutôt faire en sorte d'améliorer le processus de
reconnaissance d'un jugement d'adoption, non pas pour vérifier si le
projet crée ou coupe les liens de filiation - il faut d'abord
vérifier s'il en crée - mais plutôt pour donner les effets
d'un jugement d'adoption plénier ici au Québec. Ce sont les
effets qui sont importants. Nous croyons que le Code civil
antérieurement tel qu'il est faisait en sorte d'accorder ces effets
lorsqu'il y avait reconnaissance d'un jugement. Bien sûr, on sait qu'il y
a des divergences dans la jurisprudence entre les juges. Est-ce que le jugement
qu'on reconnaît a les mêmes effets qu'ici au Québec? Il y a
une divergence là-dessus. Mais on sait qu'il y a un courant
jurisprudentiel qui est majoritaire, visant à reconnaître les
jugements d'adoption simple. C'est quand même important.
Mme Vermette: Par contre, un peu plus loin, vous demandez que la
vérification par le tribunal ne soit exigée que pour les
adoptants qui n'agissent pas par l'intermédiaire d'un organisme reconnu.
Donc, à votre avis, cela voudrait dire qu'un projet d'adoption
privé respectueux des règles et procédures du pays de
l'adoptant et du pays de l'adopté pourrait faire l'objet, justement,
d'une démarche d'adoption internationale.
M. Bécotte: Effectivement. À ce jour, vous avez au
Québec environ six organismes reconnus. Heureusement, il y a d'autres
organismes qui doivent être mis sur pied, et j'espère que la
ministre favorisera la création de ces autres organismes. Mais nous
travaillons dans quelques pays seulement. Or, il y a 69 pays au monde qui sont
ouverts à l'adoption internationale. Pour les pays où nous ne
travaillons pas, il se peut qu'il y ait des Québécois qui,
à l'occasion d'un voyaqe ou par les connaissances qu'ils ont
là-bas de missionnaires ou de fonctionnaires qui travaillent dans ces
pays et qui connaissent des parents ici, aient des contacts pour pouvoir faire
une adoption. Cela s'appellerait une adoption de type privé dans le sens
où ils sont seuls à faire ces démarches. À ce
moment-là, la vérification devrait être faite par un
tribunal. Un mécanisme devrait être mis en place pour
vérifier si le projet d'adoption est vraiment régulier et il
devrait y avoir le consentement d'une personne désignée par
l'État où l'enfant réside pour qu'il y ait adoption
internationale. Cela permettrait un mécanisme de surveillance que les
Etats désirent mettre en place. Mais lorsqu'il y a des organismes, il y
a déjà ce mécanisme de surveillance, il y a
déjà des accords qui sont conclus.
Mme Vermette! Parfait! Cela va.
Une dernière question. En fin de compte, vous mentionnez les
pouvoirs abusifs et illusoires du DPJ, à la paqe 41 de votre
mémoire. Vous dites considérer que, dorénavant, avec
l'article 4 du règlement, les pouvoirs accordés au directeur de
la protection de la jeunesse sont abusifs et illusoires. J'aimerais que vous
nous donniez un peu plus de détails là-dessus.
M. Bécotte: Oui, écoutez, quand on s'occupe des
enfants en république Dominicaine, on s'en occupe jusqu'au moment
où se fait la proposition de l'enfant. Cette proposition de l'enfant est
faite par l'organisme. Voici ce qu'on fait: on avertit le directeur de la
protection de la jeunesse, c'est-à-dire sa représentante, la
travailleuse sociale qui travaille dans le dossier, qu'on va faire une
proposition et que celle-ci est en accord avec ce que les parents
désirent. On attend de voir si la travailleuse sociale a une
recommandation à faire, s'il ne devrait pas y avoir un changement au
niveau du jumelage. Or, c'est nous qui prenons les devants. Dans le projet de
rèqlement, on dit qu"'il intervient pour s'assurer qu'il est dans
l'intérêt de l'enfant d'être jumelé à
l'adoptant". Finalement, si un DPJ désire intervenir avec ses
pouvoirs pour savoir si c'est dans l'intérêt de l'enfant, comment
va-t-il pouvoir le faire? Il va nous demander tout un "pedigree" sur l'enfant,
il va recevoir cela sur papier, il n'aura pas vu l'enfant auparavant, il aura
pris très peu de contacts avec les parents, parce qu'à partir du
moment où l'évaluation est faite et où on va faire la
proposition de l'enfant, c'est avec l'organisme que le parent chemine. Nous
avons des personnes-ressources qui sont en contact avec eux et qui voient tout
le mûrissement du projet d'adoption des parents. Donc, c'est finalement
illusoire de dire que le DPJ pourrait intervenir et pourrait intervenir. Il
pourrait, en fin de compte, décider s'il est dans l'intérêt
de l'enfant d'être jumelé à ces adoptants. (12 h 15)
Le Président (M. Bélanger): M. ledéputé de Laurier.
M. Sirros: Oui, M. le Président. Vous dites quelque part
dans votre mémoire, en parlant de l'adoption plénière et
simple, que le consentement de l'État qu'on demande dans les cas
d'adoption simple vient créer un embêtement supplémentaire,
une complication inutile. Vous dites même à un moment
donné; Si vous demandez le consentement de l'État dans les cas
d'adoption simple, pourquoi ne le demandez-vous pas dans les cas d'adoption
plénière si c'est dans le but d'éviter le trafic
d'enfants, etc.? Est-ce que je pourrais vous demander si la question, vous
l'avez examinée un peu sérieusement ou si c'était juste...
La question que je me pose, c'est: Est-ce que vous jugez que ce serait utile
dans ce cas-là, afin de contrer le trafic d'enfants, etc., d'exiger
également le consentement de l'État dans les cas d'adoption
plénière?
NI. Bécotte: Dans les pays où les organismes ne
sont pas accrédités auprès des pays étrangers,
où des organimes québécois ne sont pas
accrédités, où des organismes ne sont pas
intermédiaires, où le ministre n'est pas intermédiaire, je
crois qu'il est essentiel qu'on puisse obtenir un consentement d'une personne
désignée par l'État pour pouvoir faire une démarche
d'adoption dans ce pays-là. Et cela sécurise les parents dans le
sens où ils éviteront d'entrer dans un engrenage où il
pourrait y avoir trafic d'enfants, où il pourrait y avoir doute sur des
consentements légaux. D'accord? Dans les pays où il y a des
organismes qui oeuvrent, avec qui le ministre a des ententes, eh bien! il y a
déjà un mécanisme de contrôle qui est mis en place,
il y a une éthique officielle, il y a des accords qui sont faits, il y a
des procédures qui sont mises en place de façon à faire
cette surveillance-là. On dit que, dans les pays où des
organismes ou le ministre ne sont pas présents il pourrait y avoir des
démarches par contacts privés, mais ces démarches, pour
une adoption plénière ou simple, devraient faire l'objet du
consentement de l'État par une personne désiqnée par cet
État étranger, afin que ce pays puisse avoir un contrôle
sur ce qui se passe chez lui au point de vue de l'adoption internationale.
M. Sirros: Uniquement dans la situation où des organismes
comme le vôtre n'oeuvrent pas dans le pays.
M. Bécotte: Uniquement lorsque des organismes ou le
ministre n'oeuvrent pas dans un pays.
M. Sirros: Vous jugez è ce moment-là que, dans la
situation contraire, l'existence de l'organisme ou l'oeuvre que remplit
l'organisme dans le pays suffit pour s'assurer qu'il n'y a pas ce genre de
danger.
M. Bécotte: Oui, vous devrez voir: On présente des
rapports devant les organismes étrangers et on est soumis à une
certaine surveillance dans ces pays-là, alors qu'une personne qui agit
seule n'est pas facilement retraçable dans le pays. D'accord?
M. Sirros: Merci, monsieur.
Le Président (M. Bélanger): Mme la ministre.
Mme Lavoie-Roux: Vous avez des réserves quand même
quant à l'appel devant le Tribunal de la jeunesse pour faire
reconnaître un projet d'adoption comme possible. Vous admettez, par
contre, que c'est mieux que le tribunal ait le pouvoir discrétionnaire
plutôt que les fonctionnaires ou, en d'autres termes, que le tribunal ait
le pouvoir discrétionnaire au lieu du ministre. Là-dessus, je
suis d'accord avec vous. C'est justement dans le but d'éliminer ce
pouvoir discrétionnaire que les tribunaux ont remis en question le fait
que nous procédions de cette façon-là.
Vous voudriez que cela soit donné à l'organisme, que
l'organisme puisse exercer ce pouvoir discrétionnaire. Est-ce que le
reproche qu'on faisait au ministre d'exercer un pouvoir discrétionnaire
ne serait pas maintenant dirigé vers les organismes internationaux
reconnus? Au fond, ce serait la même chose. Pourquoi l'a-t-on
donné au tribunal? C'est parce que c'est un pouvoir judiciaire qui est
censé être trè3, très vertueux. Là, on se
remet dans la même position les uns les autres si on vous le donne.
M. Bécotte: Écoutez! La vérification d'un
projet se faisait auparavant par les gens
du Secrétariat à l'adoption internationale et avant le
secrétariat cela se faisait par les organismes.
Mme Lavoie-Roux: Mais on nous l'a reproché aussi.
M. Bécotte: Oui, mais à partir du moment où
le Secrétariat à l'adoption internationale s'est mis en place, on
vous l'a reproché parce qu'il y avait une lenteur là-dedans et il
y avait de multiples doutes sur les consentements à l'adoption. Il y a
une variété de pays, il y a une variété de lois qui
ont des mécanismes particuliers de consentement. Il y a toutes sortes de
principes aussi ou de jugements de valeur qui se basaient sur ces
consentements. Nous disons que l'organisme s'assure qu'on respecte, dans un
projet d'adoption, les règles du pays où se fait l'adoption.
Donc, que les parents puissent obtenir des consentements à l'adoption
qui soient légaux, qui respectent les lois du pays. Après avoir
travaillé par l'intermédiaire d'un organisme, lorsque la personne
se présentera devant le tribunal, celui-ci pourra vérifier si les
règles d'adoptabilité ont été suivies. Dans le cas
où la vérification est toujours faite au préalable par un
tribunal, cela va être encore un autre mécanisme judiciaire par
lequel on va devoir passer. Je ne suis pas aussi optimiste que les gens du
Barreau qui disent que cela peut être présenté très
facilement. Bien sûr, eux travaillent pour leur clocher. Ce sont eux qui
vont aider les parents; ils vont recevoir des honoraires pour présenter
ces projets réguliers. Je ne suis pas aussi sûr qu'eux que ces
projets vont être présentés aussi facilement, en trois,
quatre ou cinq jours. Ce n'est pas partout en quatre ou cinq jours.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Laurier.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, si vous me le permettez,
je voudrais juste ajouter que ce n'est pas juste une affirmation du Barreau.
C'est l'expérience qu'on vit. Les ordonnances de placement prennent de
deux à trois jours. Au début, quand on avait prévu ce
mécanisme, cela avait été fortement critiqué parce
qu'on disait: Cela va créer des retards indus et... Â
l'expérience, cela ne crée pas ce type de retard. Je pense qu'on
peut présumer que la même chose se produirait dans le cas d'un
jugement touchant l'adoption.
Je voudrais juste remercier l'association encore une fois. Je pense que
nous allons avoir à discuter à nouveau. Vous serez
consultés davantage sur la convention type et au moment d'essayer
d'éclaircir le plus possible les points qui demeurent obscurs. Je vous
remercie.
Le Président (M. Bélanger): Bien! Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Pour continuer. Â la page 43, vous remettez
en cause l'article 7 du projet de loi. L'article 72.1 sera remplacé par
72.1.1 qui spécifie que "la ministre de la Santé et des Services
sociaux doit, afin d'assurer le respect des droits de l'enfant, coordonner les
démarches des adoptants et les activités des personnes qui
interviennent à l'adoption des enfants domiciliés hors du
Québec."
Vous mentionnez dans votre mémoire que, par le libellé de
cet article, la ministre de la Santé et des Services sociaux se donne le
pouvoir de coordonner par l'intermédiaire du secrétariat toutes
les démarches des adoptants et les activités des personnes qui
interviennent dans l'adoption des enfants domiciliés hors du
Québec. Vous semblez faire des interrogations face à cette
démarche. Si vous avez certaines suggestions, est-ce que vous pourriez
expliciter davantage là-dessus?
M. Bécotte: Les interrogations qu'on a, écoutez,
avec tout le respect que je dois à la ministre de la Santé et des
Services sociaux, je pense qu'on doit faire face à la
réalité qu'aujourd'hui, en 1987, on est encore devant un
problème de coordination entre tous les intervenants en adoption
internationale. Ce problème était mentionné en 1980 dans
un colloque des centres de services sociaux. Il a été
mentionné en 1982 par l'association Soleil des nations. Lors de notre
participation à un colloque sur l'adoption internationale en
février, nous avons relevé les mêmes problèmes.
Alors, on se dit: De grâce, pourquoi ne pas mettre en place un
mécanisme de coordination un peu plus bas que la ministre, qui permet de
travailler sur le terrain à la petite semaine et de faire en sorte qu'on
puisse avoir des mécanismes de communication faciles et rapides au sein
d'un conseil d'administration d'un organisme parapublic qui, lui, serait
mandaté par le gouvernement pour s'occuper de l'adoption internationale
de façon à encadrer les démarches d'adoption
internationale.
Avec tout le respect que je dois à la ministre, je ne crois pas
que si elle garde la coordination de l'adoption internationale, elle va pouvoir
résoudre les problèmes. Elle va parler beaucoup des
problèmes, elle va en entendre parler beaucoup, mais de là
à les résoudre et à trouver d'autres solutions que celles
qui ont déjà été trouvées dans le
passé et qui n'ont pas pu être appliquées, on va être
encore devant les mêmes problèmes dans cinq ou six ans.
Mme Marchand (Danielle): Si le passé est garant de
l'avenir, je pense qu'on peut se
permettre d'être pessimiste.
Mme Vermette: C'est pour cela que vous demandez qu'il y ait un
organisme multidiscîplinaire qui soit mis sur pied, avec
différents intervenants, des parents... et qui soit pluraliste, en fin
de compte.
M. Bécotte: Exactement. Je pense que si on met en place un
organisme avec un conseil d'administration représentatif de tous les
intervenants dans le domaine de l'adoption internationale, vous venez de
régler le problème de communications entre tous ces intervenants.
D'accord? Chacun va devoir expliquer au sein du conseil d'administration les
raisons des procédures et on va pouvoir, finalement, au jour le jour et
de mois en mois, résoudre les problèmes et non pas en
créer de nouveaux. Ce n'est qu'au prix d'un tel organisme que nous
croyons pouvoir avoir un mécanisme de coordination valable pour
l'adoption internationale.
Mme Marchand (Danielle): Là-dessus, je voudrais ajouter
que le grave problème qu'il y a eu à venir jusqu'à
maintenant en adoption internationale, c'est qu'il n'y a jamais eu de
concertation et de consultation. Mot, je pense que, si on veut le régler
une fois pour toutes, il est temps qu'on agisse et il est temps qu'on mette les
mécanismes en place pour établir cette concertation. 11 n'y a pas
une expertise en adoption internationale, il y en a plusieurs. Moi, je dis
qu'il faut mettre tout ce monde ensemble -ce qui ne s'est jamais fait depuis le
début -pour que ces gens puissent trouver des solutions aux
problèmes quotidiens. Je ne voudrais pas qu'on revienne en 1990 ici
devant une autre commission parlementaire pour essayer de trouver encore des
solutions à des problèmes qui n'ont jamais été
réglés.
Si l'État a vraiment la ferme intention d'agir, une fois pour
toutes, pour apporter des solutions, je pense qu'il faut se donner les moyens
et on pense que c'est le moyen à l'heure actuelle. Je m'excuse d'avoir
pris votre temps.
Mme Vermette: Non, ce n'est pas notre temps. S'il y a une
commission parlementaire, c'est pour vous laisser le temps de vous exprimer
là-dessus et nous aider à faire la lumière sur ta
problématique.
Il y aurait beaucoup d'autres questions à poser, ne serait-ce que
sur l'évaluation. Vous dites que l'évaluation fait partie un peu
de la concertation. On dit que l'évaluation a été
interprétée, par les praticiens sociaux, assez arbitrairement et
qu'il n'y avait pas de recours à l'égard de certaines
décisions.
C'est pour cela que vous avez demandé un mandat d'initiative, ce
qui pourrait faire l'objet d'un débat très étendu sur
l'adoption internationale. N'avez-vous pas l'impression qu'actuellement, par le
projet de loi et par cette commission parlementaire, on va arriver à
trouver ta solution pour établir une politique de l'adoption
internationale?
M. Bécotte: Mme la ministre disait, tout à l'heure,
qu'ils sont en train de travailler très fort sur une politique
d'adoption internationale. J'aimerais savoir qui travaille là-dessus,
depuis quand et comment? Le projet de loi 21 est présenté ici
pour étude devant la commission, strictement le projet de loi 21. Nous
avons demandé, en compagnie d'autres organismes, d'élarqir le
débat sur l'adoption internationale, afin que l'on puisse voir tous les
aspects de la problématique. C'est pour cela qu'aujourd'hui j'ai
présenté une problématique qui touchait à tous ces
aspects. Ce n'est qu'au prix de faire un tour d'horizon sur tous les aspects de
la problématique de l'adoption internationale qu'on va pouvoir
créer un projet de loi qui permettra et favorisera l'adoption
internationale de façon efficace. Il permettra aussi une
coordination.
Je ne pense pas que juste s'attaquer, juste prendre d'abord le
mécanisme du projet de loi et l'améliorer que cela va
résoudre bien des problèmes dans le domaine de l'adoption
internationale. Cela va peut-être en régler une partie, dans le
sens qu'il va y avoir un mécanisme qui va être imposé pour
l'adoption Internationale, mais cela va laisser place à une multitude
d'autres problèmes qui stagnent encore à l'adoption
internationale. C'est pour cela qu'on encourage la commission à demander
un mandat d'initiative pour étendre la réflexion à tous
les problèmes de l'adoption internationale et, également, pour
que cette politique d'adoption internationale ne soit pas uniquement le fait
d'un ministère, mais qu'il puisse aussi y avoir des
députés qui participent à la préparation de ladite
politique, des députés qui seront sensibles à ce que vous
venez d'entendre des différents organismes sur l'adoption
internationale.
Mme Lavoie-Roux: M. le président, si vous me le permettez,
je pense que l'objet de cette commission parlementaire est justement de vous
entendre. Vous venez de le dire vous-même. Évidemment, on pourrait
toujours retarder cela mais déjà, on a eu suffisamment de
protestations indiquant qu'il y avait des lacunes profondes qui devaient
être corrigées et c'est l'exercice qu'on fait.
Est-ce qu'on arrivera à un projet parfait? Je ne pense pas qu'il
y ait de projet de loi qui soit parfait, d'autant plus qu'on est devant une
problématique très complexe-Mais je pense que les efforts sont
fournis et cela n'est pas - je le répète - le projet de loi du
ministère de la 5anté et des Services sociaux uniquement.
J'insiste là-dessus mais
je ne répéterai pas ce que j'ai dit tout à
l'heure.
Je ne voudrais vraiment pas qu'on parte avec cette idée, parce
que les ministères de la Justice, des Communautés culturelles et
des Relations internationales, d'une façon toute particulière, se
sont impliqués dans l'élaboration de ce projet de loi.
M. Bécotte: Mme la ministre, est-ce que la politique
d'adoption qu'on est en train d'élaborer est élaborée en
concertation avec d'autres ministères également?
Mme Lavoie-Roux; Oui, il y a d'autres ministères, mais
nous ne sommes pas aussi avancés que ce projet de loi là qui
devait régler des problèmes qui ne pouvaient plus tarder. Je
pense qu'avec une révision du règlement et avec une
révision de la convention type... Encore une fois, personne ne peut
prétendre que par un projet de loi, un règlement ou même
par une politique, on peut tout corriger, parce qu'il y en a des tas de
politiques qui ne sont pas appliquées non plus.
Alors, ce qui est important, c'est au moins de corriger ce qui demande
d'être corrigé le plus rapidement possible. Et c'est l'exercice
que nous faisons présentement,
Mme Vermette: II me fait plaisir de vous remercier et, en
terminant, quant à ce que vous avez demandé, un mandat
d'initiative, j'aurais trouvé fort heureux que la ministre
démontre réellement sa volonté d'arriver à trouver
des solutions par un mandat élargi, tel que nous le lui avons
demandé à la commission parlementaire, à l'heure actuelle.
Avant d'écrire ce projet de loi 21, il y aurait eu place pour une
commission parlementaire entre la rédaction du projet de loi 139, les
règlements, pour reprendre, encore une fois, tout ce qui a
été fait, et ce, depuis le mois de novembre 1985.
Effectivement, il aurait été beaucoup plus cohérent
d'entendre l'ensemble des intervenants avant de rédiger le projet de loi
21 et de refaire de nouveaux règlements qui devront être
concordants avec le projet de loi.
Mme Lavoie-Roux: Et peut-être qu'on n'en serait pas
là, Mme la députée de Marie-Victorin, si en 1979, 1980,
1981, 1982 et 1983, chaque fois qu'on a touché à l'adoption
internationale, on avait tenu une commission du type de celle qu'on tient
aujourd'hui.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie de
votre participation. La commission ajourne ses travaux sine die. On sait que
nous siégerons à nouveau à 20 heures ce soir, en principe.
Mais en pratique, je dois ajourner sine die, puisque l'ordre de la Chambre ne
nous donnait que jusqu'à ce midi.
S'il vous plaît! S'il vous plaît!
Une voix: II y aura une demi-heure sur ce sujet ce soir au
téléjournal Le Point. Je pense que cela peut être
très intéressant pour les membres de l'Assemblée.
(Suspension de la séance à 12 h 33)
(Reprise à 20 heures)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît! La commission des affaires sociales se réunit afin de
procéder à des consultations particulières et de tenir des
auditions publiques dans le cadre de l'étude du projet de loi 21, Loi
concernant l'adoption et modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse, le
Code civil du Québec et le Code de procédure civile ainsi que le
projet de règlement sur l'adoption internationale tel qu'il a
été publié à la Gazette officielle du
Québec le 11 mars 1987.
Ce soir, nous entendrons en premier lieu Me Jean-François
Francoeur et comme deuxième groupe Adoption Estrie.
Me Francoeur, les règles de la commission sont les suivantes.
Nous avons une enveloppe globale d'une heure pour l'audition de votre
mémoire, dont 20 minutes vous sont consacrées pour la
présentation même de votre mémoire et 20 minutes à
chacune des formations, les ministériels et les représentants de
l'Opposition, pour vous poser des questions. Il faut comprendre que ces 20
minutes comprennent les questions et les réponses. Alors, c'est une
enveloppe globale qui ne doit pas excéder 20 minutes que nous
diviserons, pour les besoins de la cause, en deux sections de dix minutes
chacune. Dix minutes, dix minutes, dix minutes, en vertu de la règle de
l'alternance des travaux de cette Chambre. Telle est notre procédure. Je
ne vous invite pas à présenter votre équipe puisque vous
faites cavalier seul. Me Francoeur, la parole est à vous.
M. Jean Francoeur
M. Francoeur (Jean): Mme la ministre, M. le Président,
mesdames et messieurs les députés, mesdames et messieurs. Tout
d'abord, je veux vous remercier de l'occasion que vous m'accordez de
présenter un mémoire devant la commission parlementaire sur
l'adoption internationale. Ce sujet me tient particulièrement à
coeur depuis l'adoption de mes deux enfants au Guatemala en 1976. C'est
d'ailleurs depuis cette époque que mon cabinet offre des services
spécialisés à tous les parents québécois
désirant adopter un enfant dans un pays
étranger.
Après au-delà de 100 adoptions internationales
réalisées par l'entremise de plusieurs pays, soit le Guatemala,
la Bolivie, la Colombie, le Brésil, le Pérou, les Indes, Taiwan
et plusieurs autres, notre étude a eu l'occasion d'acquérir une
certaine expérience dans ce domaine que nous sommes heureux de faire
partager avec les parents adoptants. Notre rôle consiste principalement
dans la préparation du dossier juridique d'adoption incluant les
conseils juridiques dont auront besoin les parents adoptants pour
réaliser l'adoption internationale dans les meilleures conditions, en
respectant la loi et les règlements en vigueur, tant au Canada, au
Québec et dans le pays étranger.
En effet, la complexité du droit international et l'application
des dispositions législatives québécoises, comme on le
voit d'ailleurs clairement avec le projet de loi 21, nécessitent un
soutien juridique pour permettre aux couples québécois de
réaliser leurs adoptions internationales en toute sécurité
et légalité. Notre intervention a contribué à
maintes reprises à accélérer le processus d'adoption. Le
fait de soumettre aux tribunaux étrangers des dossiers d'adoption
complets, respectant intégralement les normes requises suivant leurs
lois et coutumes est fort apprécié des autorités
concernées. Ayant vécu personnellement le chemin de croix d'une
adoption internationale, je vous assure que j'ai éprouvé comme
plusieurs parents le sentiment que les fonctionnaires québécois
étaient contre l'adoption internationale et que l'on tentait de
détruire les projets d'adoption des parents par des pratiques
administratives parfois abusives et souvent même dégradantes.
Encore aujourd'hui, en 1987, un grand nombre de parents adoptants doivent
supplier les autorités compétentes et souvent c'est en pleurant
et même à genoux qu'ils s'adressent aux fonctionnaires
québécois pour quémander la permission d'adopter un enfant
dans un pays étranger, enfant qui leur est déterminé et
réservé.
Cette situation est inacceptable et ne devrait pas exister dans une
société démocratique. La ministre de la Santé et
des Services sociaux, Mme Lavoie-Roux, sait maintenant que ce ne sont pas
seulement quelques parents qui sont insatisfaits, mais un grand nombre dans
tout le Québec, incluant même de nombreux organismes d'adoption,
tel que votre commission l'a sans doute constaté à travers les
nombreux mémoires qui lui ont été
présentés.
Même la commission Rochon, dans le rapport qu'elle a publié
récemment, mentionne à la page 26: "Les requérants en
adoption internationale soulignent te manque de collaboration des
différentes instances impliquées dans ce processus, dont plus
particulièrement les CSS, le secrétariat à l'adoption et
les services québécois et canadiens d'immigration. La lenteur
observée dans l'évaluation des données, les tentatives de
dissuasion de la part tant des travailleurs sociaux que des "fonctionnaires du
secrétariat à l'adoption, l'imposition arbitraire de quotas et
l'assujettissement des objectifs poursuivis en matière d'adoption aux
impératifs de la politique internationale des gouvernements en place
font en sorte que de nombreux parents doivent recourir à des
mécanismes privés pour adopter des enfants. Là comme
ailleurs, les couples et les familles semblent subir les contrecoups de
l'insensibilité du système gouvernemental à l'endroit de
leurs besoins propres aussi bien que du caractère inadéquat des
services existants."
Nous prétendons que ces commentaires de la commission Rochon sont
cohérents avec le contenu du mémoire que nous avons soumis, dont
le titre même résume la situation actuelle en matière
d'adoption internationale. "Le contrôle québécois
sème la panique et détruit les projets d'adoption".
C'est dans les années 1970 qu'ont commencé les
premières adoptions internationales. À l'époque, tes CSS,
regardaient d'un mauvais oeil la possibilité pour les parents
québécois d'adopter des enfants de pays étrangers.
À mesure que tes possibilités d'adopter au Québec
diminuaient, les démarches pour des adoptions internationales
augmentaient sans cesse. Un grand désarroi est survenu dans le secteur
des adoptions où les fonctionnaires en place se sont interposés
et, par différents moyens, ont tenté de diminuer les demandes
d'adoption internationale. C'est alors qu'a commencé l'enfer des parents
adoptifs québécois.
Tout d'abord, sous le prétexte que l'évaluation de foyer
était une condition essentielle et prérequise à l'adoption
d'un enfant, les centres de services sociaux se plaiqnaient ouvertement de leur
manque de personnel, comme ils le font d'ailleurs aujourd'hui. Ils se plaignent
de leur manque de personnel pour répondre aux demandes
d'évaluation. Certains se sont servi des parents adoptants comme boucs
émissaires pour justifier des budgets additionnels afin d'augmenter le
nombre de leurs travailleurs sociaux. Le manque de ressources des CSS a
toujours fait en sorte que les parents doivent attendre plusieurs années
que leurs noms atteignent le premier rang sur les listes de l'État avant
de pouvoir être évalués par un travailleur social
gouvernemental. Les parents privilégiés qui avaient la chance
d'être évalués par le centre de services sociaux devaient
même s'adresser au tribunal pour obtenir une copie de leur
évaluation de foyer. Il s'agissait d'un document secret touchant
l'intimité conjugale de la famille, mais dont le couple ne pouvait
recevoir copie.
(20 h 15)
Aujourd'hui, après des journées de bataille et de
supplication, les parents adoptants peuvent enfin obtenir une copie de leur
évaluation de foyer, mais doivent encore attendre plusieurs
années avant de pouvoir être évalués par
l'État. Pourtant, les citoyens désirant adopter un enfant
à l'étranger ne demandent pas la charité au gouvernement
du Québec. Il n'est pas nécessaire d'augmenter les budgets ou de
donner des budgets additionnels pour procéder à
l'évaluation des parents adoptifs. En effet, les parents qui s'engagent
dans un projet d'adoption internationale sont des personnes solvables. Ils ne
veulent pas quémander une évaluation aux frais de l'État.
En ce qui concerne les évaluations de foyers, les parents
suggèrent deux solutions. La première serait une
évaluation par un professionnel de leur choix, membre de la Corporation
des travailleurs sociaux du Québec ou encore de la Corporation des
psychologues. Les professionnels du secteur privé possèdent des
connaissances égales è ceux de l'État et sont en mesure
d'évaluer la motivation, les capacités et les qualités des
parents adoptants avec autant de compétence que les travailleurs sociaux
des CS5. D'ailleurs, il est évident que les centres de services sociaux
s'identifient davantage aux besoins des parents éprouvant de
sérieuses difficultés familiales et, quand il s'agit de couples
dits normaux, dont le seul désir est d'adopter un enfant, plusieurs
intervenants sociaux dans les CSS considèrent anormale cette soif
d'adoption qui les anime. Est-ce un péché ou une nouvelle
maladie? Plusieurs parents adoptants ont souvent cru avoir attrapé une
forme de SIDA de l'adoption dont on voulait les guérir en les
décourageant dans leur projet.
Les personnes en place au Secrétariat à l'adoption
internationale sont bien au courant de cette situation qui, de l'avis de
nombreux parents, est toujours existante aujourd'hui. M. Clément Laurin,
coordonnateur au Secrétariat à l'adoption internationale,
déclarait publiquement il y a quelques années dans la rubrique
"Feux sur l'actualité", qu'il lui a fallu contourner le système
québécois d'adoption pour aller adopter un enfant en Colombie.
Lorsqu'il a demandé l'autorisation d'adopter en Colombie, on lui aurait
répondu bêtement: On ne vous évaluera pas, mais lorsque
vous aurez trouvé un enfant, donnez-nous le nom de cet enfant et on le
donnera à l'un des 1400 couples inscrits sur les listes
gouvernementales, a expliqué M. Laurin, pour démontrer de quelle
façon inhumaine son projet d'adoption a été accueilli par
le centre de services sociaux. C'est alors que M. Laurin, comme plusieurs
parents québécois, a pris la décision de contourner le
système gouvernemental et selon l'article de journal il adopta son
enfant en Colombie au bout de six ou sept mois, sans attendre plusieurs
années. D'autres personnes, dans les centres de services sociaux et les
organismes gouvernementaux ont fait de même.
La deuxième solution pour l'évaluation des foyers serait
la suivante. Il s'agirait, tout simplement, si le qouvernement croit qu'il
appartient exclusivement aux centres de services sociaux d'effectuer les
évaluations de foyers, qu'il autorise les centres de services sociaux
à donner un mandat au travailleur social de leur choix. Ce dernier
pourrait, dans un délai d'une semaine à quinze jours,
évaluer les parents adoptants et comme cela se fait déjà
à Lonqueuil, à Sherbrooke et dans quelques centres de services
sociaux, les parents assumeraient les frais et les honoraires de ce travailleur
social privé qui ferait l'évaluation, mais suivant les
critères des CSS.
Parlons maintenant du Secrétariat à l'adoption
internationale. Le rôle que vous lui donnez nous apparaît
excellent, et je le cite, en espérant que c'est bien celui-ci:
Coordonner les démarches des adoptants et les activités des
personnes qui interviennent dans l'adoption des enfants domiciliés hors
du Québec. Nous croyons que le Secrétariat à l'adoption
internationale devrait agir comme centre d'information sur l'adoption
internationale, dans une première étape et ensuite comme
coordonnateur des démarches des adoptants. Il a été
démontré au cours des dernières années que,
même si on envoie des qens en mission dans différents pays, les
pays du monde ne sont pas intéressés à signer des ententes
avec le Québec ou avec, d'ailleurs, tout autre pays concernant
l'adoption de leurs enfants. D'ailleurs, dans un autre article de journal, le
responsable de l'adoption au Québec, M. Roland Guérin, le
mentionnait lui-même: "Selon le chargé de projet en adoption
internationale au ministère des Affaires sociales, Roland Guérin,
la difficulté de recruter des enfants d'origine étrangère
pour adoption au Québec, tient en partie à la réticence
des pays à officialiser des ententes d'adoption avec l'extérieur.
Sur le plan politique - remarque-t-il - ce n'est populaire pour aucun
gouvernement d'exporter ses enfants à l'étranqer." M.
Guérin écrivait cela il y a quelques années, mais
aujourd'hui en 1987, c'est encore la même chose, les pays
étrangers ne sont pas intéressés. Par contre, si cet
intérêt existait dans certains pays, nous ne voyons aucun
problème à le faire pour autant que les citoyens, le
Secrétariat à l'adoption internationale et les centres de
services sociaux - tout le monde - se donnent la main pour appuyer les parents
dans leur projet et les aider.
Il faudrait adopter ce que j'appelle une attitude positive. Encore ce
matin, en présence d'une journaliste, un fonctionnaire du
Secrétariat à l'adoption internationale nous mentionnait, en
dehors des pourparlers
de ia commission, ceci: Je n'ai rien à foutre des parents
québécois qui veulent adopter un enfant. L'adoption ne doit pas
être un moyen de contrer le problème de natalité. À
mon avis, avec une telle approche, la guerre et l'animosité des parents
vont certainement se poursuivre à l'avenir.
Le Québec, malheureusement, a le plus bas taux de natalité
au Canada et même on nous dit que c'est l'un des plus bas ou le plus bas
taux au monde. Il évident que les parents québécois
désirent trouver un moyen de combler leur famille. C'est entendu, les
gens vont travailler jusqu'à 29 ou 30 ans. Souvent la femme va prendre
la pilule. Ils rencontrent des problèmes d'infertilité et ils
vont essayer parfois la méthode in vitro ou in vivo. Cela ne fonctionne
pas. On essaie en même temps l'adoption au Québec, mais il est
notoire que l'adoption, au Québec, cela ne fonctionne pas. Nous n'avons
pas d'orphelinat, d'une part, et d'autre part, les enfants disponibles pour
adoption sont pratiquement inexistants. Lorsqu'on parle de délais
d'attente de douze à quatorze ans sans aucune possibilité de
réussir une adoption, c'est aussi bien de dire que l'adoption au
Québec est pratiquement inexistante. D'ailleurs, il n'y a certainement
pas plusieurs couples ou plusieurs organismes qui sont venus devant vous vous
démontrer que l'adoption au Québec était florissante. Cela
ne fonctionne pas.
En matière internationale, on considère que l'essentiel,
c'est l'enfant; mais pour qu'un enfant soit adopté, il faut des parents.
Il faut que les parents aient le désir d'adopter un enfant. Comme le
disait un intervenant du Barreau ce matin - et je pense également la
même chose - l'adoption c'est un peu comme le mariage et le mariage,
c'est une décision personnelle de la famille. On ne pourrait pas dire,
par exemple: II n'y a pas assez d'enfants au Québec et il y a beaucoup
de gens qui ne sont pas mariés, on va "matcher" les couples et on va
faire plus d'enfants.
On ne pourrait pas dire non plus, à Chicoutimi - si je me fie au
lapsus du ministre Bouchard, c'est une région qui n'est pas
dérangée par l'immigration - que quelqu'un qui voudrait marier
une Vietnamienne ne pourrait pas aller résider à Chicoutimi. Le
mariage, justement, c'est un acte privé, mais par contre, à
partir du moment où on veut poser cet acte privé, on doit
s'adresser à un prêtre qui joue également le rôle
d'officer d'État civil ou encore on va au palais de justice, on
vérifie si les gens sont frère et soeur, on vérifie s'ils
sont déjà mariés et l'État coordonne et
contrôle les mariages.
En matière d'adoption, c'est la même chose. Il faut
distinguer ici adoption publique et adoption privée. Moi, des adoptions
privées, j'en ai vues dans le passé. Les gens viennent nous
consulter, ils ont un enfant chez eux depuis six ou sept mois, un an, un enfant
qui vient de l'Ontario avec un consentement signé par la mère: 3e
donne mon enfant à M. Untel. Il n'y a pas de témoin, cela n'a pas
été passé devant un avocat ou devant un notaire en Ontario
ou encore c'est un enfant qu'ils ont sorti du Mexique par la frontière
sous prétexte qu'ils allaient en vacances aux États-Unis, sans
papier, avec un document en espagnol qu'eux-mêmes n'étaient pas
capables de lire.
Ces gens viennent nous voir et nous disent; Présentez cela au
tribunal; cet enfant, on l'a, voici le papier, il est è nous, il n'y a
personne qui va venir le chercher. Il y a même des missionnaires dans le
passé, à un moment donné, qui disaient aux personnes...
J'ai vu un petit bébé d'un an et demi qui est arrivé au
Québec pour étudier. Le bon missionnaire avait dit aux parents:
II n'y a pas de problème, je connais le douanier, on peut sortir des
enfants pour étude et quand il aura dix-huit ans, de toute façon,
vous pourrez l'adopter. Une fois qu'il sera sorti du Pérou,
arrangez-vous avec, il n'y aura plus de problème en ce qui concerne le
Pérou, il est parti étudier.
Cela, ce sont des adoptions privées. Ce sont des gens qui ne
demandent aucun contrôle, qui fonctionnent seuls, qui n'ont pas d'appui
juridique, qui ne passent pas par des organismes reconnus, qui ne passent pas
par l'entremise du ministère de ia Santé et des Services sociaux.
Ce sont des qens qui risquent, malgré eux, de s'engager dans un trafic
d'enfants.
Par contre, il y a d'autres sortes de couples. Il y a des gens qui font
des démarches personnelles. Vous savez, en adoption, on peut dire: Le
Québec favorise l'adoption internationale, c'est très
intéressant, on a un bas taux de natalité, on va augmenter le
nombre d'enfants au Québec, cela va être le "fun", tout le monde
va être heureux. Mais, pour favoriser l'adoption internationale, il faut
qu'il y ait des enfants. Où est-ce qu'on va les prendre? Ce n'est
certainement pas en allant signer des ententes avec des gens, comme
l'ex-président Marcos, qui enverraient 100 ou 200 enfants au Canada par
année; j'aurais bien peur du trafic entre États, à ce
moment-là. Si Marcos avait signé une entente de 200 enfants avec
le Canada, de 500 avec les États-Unis et 300 avec la France, qui nous
dit que les fonctionnaires responsables ne nous diraient pas, en échange
d'armes, de marchandise et de services entre États, par exemple: Bon!
vous autres, au Québec, votre taux de natalité est faible, eh
bien! on va vous envoyer 5000 enfants et, en échange, vous nous donnerez
des armes pour nos contras ou pour n'importe quoi d'autre.
On parle de trafic entre les parents. On peut aussi avoir du trafic
entre États.
Par contre, lorsque les parents se présentent et acceptent le
contrôle du Secrétariat à l'adoption internationale ou
veulent agir par l'intermédiaire du secrétariat ou du
ministère, je dis: II n'y a pas de problème. Ce n'est pas une
adoption privée. Si c'était une adoption privée, ce serait
un acte qui demeurerait privé. Lorsque vous achetez une automobile, vous
décidez d'acheter un Chrysler ou un Pontiac, vous ne demandez pas la
permission du gouvernement; c'est la même chose lorsque vous allez chez
Steinberg. Ce sont des actes privés.
Sauf pour la démarche personnelle et privée, les couples
sont entièrement d'accord pour passer par l'intermédiaire ou
l'entremise du ministère de la Santé et des Services sociaux pour
réaliser leur adoption. Si vous regardez à la dernière
page de mon mémoire, vous avez remarqué qu'il y a un document en
provenance du Guatemala où c'est écrit: "L'ambassade du Canada au
Guatemala est en mesure d'authentifier les documents dans les pays
étrangers," Tout le monde a peur du trafic. Lorsque les qens se
présentent au secrétariat et que l'ambassade a mis son tampon, eh
bien! tant que le Québec fera partie du Canada et que nous serons dans
une fédération... L'honorable premier ministre Bourassa l'a
mentionné, le Québec est très heureux de faire partie de
la fédération. Maintenants le Québec doit
reconnaître la compétence des consulats et des ambassades du
Canada à l'étranger. On ne peut quand même pas ouvrir au
Guatemala une maison du Québec ou encore faire le travail en double.
Lorsque les parents se présentent à l'ambassade du Canada
pour faire authentifier les signatures de leurs documents, l'ambassade peut
toujours, à tout instant, aviser le ministère de la famille ou le
ministère public que tel avocat ou tel notaire au Guatemala est en train
d'effectuer un processus d'adoption; on a le nom de la mère, son
consentement et les adresses. Soyez asurés que, s'il y a un trafic de
près ou de loin, cet enfant, qui n'est pas encore rendu au Québec
au moment où les gens s'adressent au Secrétariat à
l'adoption internationale, n'entrera jamais au Québec.
Par contre, si vous voulez contrôler le trafic et que des
personnes arrivent ici avec un enfant sans, au préalable, s'adresser
à l'ambassade ou au consulat du Canada... il suffirait de s'adresser
à l'ambassade ou au consulat du pays concerné ici à
Montréal et je vous assure qu'ils se feraient un plaisir, dans un
délai de 48 heures, de vérifier la légalité de
l'adoption dans leur pays.
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, s'il
vous plaît! Ah! vous terminiez.
M. Francoeur: Je peux conclure, est-ce que vous me donnez encore
deux minutes?
Le Président (M. Bélanger): On vous donne deux
minutes pour conclure.
M. Francoeur: En conclusion, il faut se rappeler que l'adoption
internationale est un acte privé en tant que démarche, mais un
acte public au point de vue du contrôle. Ce contrôle peut
être effectué par le Tribunal de la jeunesse; à ce
moment-là, celui-ci devra vérifier si les Québécois
adoptants ont passé par l'intermédiaire de la ministre, ont
été évalués par le DPJ et si on a
créé un lien de filiation. Si on respecte les citoyens et qu'on
accepte de leur venir en aide et d'appuyer leur projet d'adoption, ces trois
critères seront complétés facilement et le Tribunal de la
jeunesse sera heureux d'estampiller tous les projets d'adoption qui lui seront
présentés. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Je vous remercie. Mme
la ministre de la Santé et des Services sociaux. (20 h 30)
Mme Lavoie-Roux: Merci, M. le Président. Je veux remercier
M. Francoeur de son mémoire, même si, évidemment, il y a
quelques petits points qui m'ont fait un peu sursauter, mais cela fait partie
de la démarche qu'on fait présentement.
Je voudrais vous dire au point de départ que je vous trouve pour
le moins pessimiste et sévère dans vos critiques. On a entendu
jusqu'à maintenant dix à douze mémoires. Il faudrait que
je vérifie. C'est à peu près cela. Il y a eu des critiques
sévères particulièrement sur la partie administrative du
fonctionnement, notamment du secrétariat. Mais là, j'ai
l'impression, sans doute parce que vous avez eu beaucoup de clients en adoption
que, finalement, tout le monde a tort, que le Secrétariat à
l'adoption internationale est pourri, que les centres He services sociaux sont
pourris. Je lisais quelque part, et cela m'a fait un peu sourire: "Au cours des
dix dernières années, notre étude légale -
j'aimerais bien avoir une démonstration concrète de cela - a eu
connaissance d'au moins une cinquantaine de cas où les mères
naturelles ont préféré se faire avorter plutôt que
de confier leurs enfants au centre de services sociaux." Je trouve que ce sont
des affirmations pour le moins un peu fortes, je ne sais pas si vous pouvez les
étayer; si oui, je retirerai ce que je viens de dire. Que dans
l'ensemble, les gens sont mal reçus au CSS - c'est rendu de douze
à quatorze ans maintenant avant d'avoir une évaluation - cela me
semble un peu exaqéré. Les qens ont parlé de trois
à cinq ans. Quelques-uns ont parlé de sept ans. Mais là,
vous êtes rendu entre douze et quatorze ans.
M. Francoeur: Où avez-vous vu cela pour
l'évaluation?
Mme Lavoie-Roux: J'ai vu cela quelque part. Les couples
québécois qui désirent adopter un enfant doivent
maintenant attendre de douze à quatorze ans avant de réaliser
leur projet d'adoption.
M. Francoeur: ...pas d'être évalués... Mme
Lavoie-Roux: C'est à la page 34.
M. Francoeur: L'évaluation, c'est deux à trois ans
environ; cela peut aller jusqu'à quatre ans.
Mme Lavoie-Roux: Mais quand vous dites, douze à quatorze
ans, cela me semble aussi très long.
M. Francoeur: Pour une adoption au Québec?
Mme Lavoie-Roux: Oui.
M. Francoeur: Une adoption au Québec... Je l'ai
constaté personnellement au cours des dernières années.
Les adoptions qui se réalisent au Québec en trois ou quatre ans
sont rares. Les normes sont de sept, huit, neuf, dix, onze, douze et quatorze
ans.
Mme Lavoie-Roux: Vous parlez de l'adoption interne?
M. Francoeur: L'adoption québécoise. Mme
Lavoie-Roux: Ah bon! D'accord.
M. Francoeur: L'adoption internationale, mettons six ou sept
ans.
Mme Lavoie-Roux: Cela, au moins, c'est le chiffre que plusieurs
ont avancé. Vous avez peut-être entendu dire ou lu dans les
journaux, à la suite des premières auditions, qu'il y a quand
même ici, au Québec, 1200 à 1400 enfants abandonnés
qui pourraient aussi être adoptés et qui ne le sont pas, mais je
ne veux pas ouvrir le débat là-dessus. Je pense que c'est une
réalité.
Vous êtes intervenu à plusieurs reprises, M. Francoeur, sur
le fait que l'adoption est un acte privé. Vous avez évoqué
le fait que, ce matin, le bâtonnier avait tenu à peu près
le même langage. Quand j'ai voulu le faire préciser au
bâtonnier, il a dit: Écoutez, je ne suis pas allé
jusqu'à dire cela. Le reste du Barreau s'est dissocié de
l'opinion du bâtonnier là-dessus et a justement fait valoir que
c'était un acte de droit public et non seulement cela, il nous a
apporté comme témoignage - j'ai oublié les chiffres, si
vous étiez là - le jugement du tribunal qui indiquait justement
que c'était véritablement un acte de droit public.
En tout cas, j'aimerais savoir si vous êtes en désaccord
avec le Barreau là-dessus.
M. Francoeur: Non. Comme je l'ai mentionné tout à
l'heure, les démarches, le désir des parents d'adopter un enfant
est un acte privé. Je peux décider demain de m'acheter une
automobile, je peux décider de me marier et je peux décider
d'adopter un enfant. Ce n'est pas le gouvernement qui peut imposer à une
famille: Toi, tu n'as pas d'enfants, tu vas adopter un enfant. C'est un acte
privé. Maintenant, à mon avis, les parents peuvent toujours
entreprendre des démarches personnelles pour qu'un enfant leur soit
déterminé et réservé pour adoption dans un pays
étranger. À partir du moment où cet enfant est
réservé et déterminé, Mme la ministre, c'est
exactement comme dans le mariaqe. Quand vous avez une fiancée, on ne
peut pas dire: on va se marier, on va siqner un papier entre nous ou on va
aller voir un notaire. On se présente, comme je le mentionnais tout
à l'heure à un officier d'État civil et cet acte
privé, cette intention de se marier, va devenir dans une deuxième
étape un acte public. On se présente devant les fonctionnaires de
l'État. Alors lorsque les parents désirent adopter un enfant, et
qu'il n'y a pas d'enfants à adopter, à ce moment on ne fera pas
d'adoption, ce ne sera jamais un acte public. Mais si on se présente au
Secrétariat à l'adoption internationale et qu'on a la chance
d'avoir un enfant qui nous est réservé et déterminé
dans un pays étranger, parce qu'une religieuse, un missionnaire ou
encore un orphelinat privé, n'importe qui, nous a
déterminé ou réservé un enfant, eh bien, à
ce moment-là, on se présente devant les fonctionnaires de
l'État, on passe par leur entremise ou par leur intermédiaire
pour diriger et coordonner le projet d'adoption.
Cet acte privé, comme dans le mariage, devient un acte public,
parce que, si ce n'était pas un acte public, pourquoi les gens
iraient-ils s'adresser au secrétariat à l'adoption? Pourquoi
sont-ils d'accord pour passer par l'entremise du ministère? C'est
justement pour ça. Ils n'ont pas d'objection à ce que l'acte
d'adoption devienne public au moment de la coordination et au moment où
il y a un jugement de la cour qui le légalise ou encore qui le
reconnaît.
Mme Lavoie-Roux: Ce matin, on a encore entendu un
représentant du Barreau -je pense que c'est Me Boulanger, si ma
mémoire est bonne - nous dire que, pour lui, il ne s'agissait pas d'un
acte privé et que les projets d'adoption devraient passer ou être
transigés, si l'on veut, par l'intermédiaire d'un organisme
d'adoption internationale reconnu ou, dans les pays où il n'y en a pas,
par l'intermédiaire du ministre ou du délégué
du ministre. Alors, je pense que, sur ce point-là non plus, il ne
favorisait pas cette possibilité que les parents aillent chercher des
enfants et se situent en dehors des organismes officiellement reconnus pour
ça.
Quand vous faites la comparaison entre le mariage et l'adoption, je
pense bien qu'on ne fait pas passer une évaluation au marié et
à la mariée pour savoir s'ils sont compatibles l'un avec l'autre.
Je pense que c'est un acte privé. Mais quand il s'agit de l'adoption
d'un enfant, je pense que nos lois au Québec, notre Loi sur la
protection de la jeunesse, ont comme principe de base fondamental
l'intérêt de l'enfant. Je pense que c'est ce même principe
que le gouvernement, non seulement celui-ci mais aussi le gouvernement
antérieur ont voulu maintenir pour tout le processus de l'adoption.
 ce que je sache - par exemple, parlons de l'adoption interne -
les mesures prévues pour l'adoption interne qui sont très
similaires, sauf évidemment la partie de la relation avec un État
étranger, n'ont pas été remises en question. Qu'on puisse
critiquer à l'occasion, que quelqu'un soit insatisfait, je pense que
c'est une autre affaire. Mais je pense que, sur les principes mêmes qui
doivent prévaloir en adoption, qu'elle soit interne ou internationale,
c'est l'intérêt de l'enfant.
À ce moment-ci, vous semblez centrer ça... Il est
évident que c'est la décision de deux adultes d'adopter un enfant
ou même une personne seule peut décider d'adopter un enfant. Dans
ce sens-là, elle est privée. Ce qui entoure le processus de
l'adoption, en tout cas, vous semblez considérer ça comme
privé, presque essentiellement privé, sauf qu'à un moment
donné, il faut faire reconnaître un jugement d'adoption, etc.
C'est simplement à ce titre-là que vous pensez qu'il y a un
rôle d'intervention. C'est comme pour le mariage où on va chercher
un acte soit civil soit religieux. Vous semblez dire: À un moment
donné, pour l'adoption, on va chercher un jugement qui est un acte
public.
J'arrête ici mes propos, mais je me pose de sérieuses
questions, M. Francoeur, sur votre vision des choses en ce qui a trait à
l'adoption internationale et sur la façon dont on doit procéder.
Probablement, ce que vous favorisez, c'est davantage une adoption de type
privé qu'une adoption de type public.
Ceci ne remet pas en cause le fait qu'on puisse critiquer la
façon dont les choses ont fonctionné. Je l'ai dit au point de
départ. Mais votre vision des choses m'apparaît assez à
l'opposé de ce que, comme je le disais tout à l'heure, l'ancien
gouvernement et le gouvernement actuel ont voulu faire dans le domaine de
l'adoption internationale.
M. Francoeur: Le problème qu'on rencontre
présentement, c'est justement ça. Au cours des deux
dernières années, c'est ce qui a fait la manchette des journaux
et c'est ce qui a créé le désarroi chez tous les parents.
Les parents ne voulaient pa3 faire un acte privé et ne voulaient pas
être coordonnés ni vérifiés, ni subir le
contrôle gouvernemental.
Mais, par contre, lorsqu'ils s'adressaient aux organismes
gouvernementaux, on leur refusait ce droit-là. L'organisme
gouvernemental refusait d'agir comme intermédiaire. Certains ont pris
des avocats et ont décidé d'aller devant les tribunaux. Ce que
nous faisons à ce moment-là ou plutôt notre rôle
comme avocats, dès qu'une personne nous informe de son projet
d'adoption, c'est de vérifier d'abord si tout se fait légalement
et de lui dire que, pour adopter son enfant, il devra passer par
l'intermédiaire ou l'entremise du ministère de la Santé et
des Services sociaux ou par l'entremise du Secrétariat à
l'adoption internationale ou d'un organisme reconnu. Nous vous les
référons, c'est notre rôle.
Maintenant, si vous les recevez excusez l'expression - comme des chiens
dans un jeu de quilles - expression canadienne, québécoise - cela
ne fonctionnera jamais. J'en ai discuté avec Mme Bisaillon. Mme
Bisaillon de même que son conseiller juridique, Me Lucien Le Blanc,
voient le rôle du Secrétariat à l'adoption internationale
très positivement. Mme Bisaillon me disait: C'est très beau ici
nous avons de beaux locaux. On reçoit les qens avec le sourire. On leur
offre un café. On est prêts à leur apporter notre soutien.
Dans le passé, les qens bloquaient au niveau du CSS. Les CSS
étaient devenus des démons. Au cours des dernières
années, le CSS s'est retiré du dossier et c'est devenu le
Secrétariat à l'adoption internationale. Le Secrétariat
à l'adoption internationale est devenu un véritable cauchemar sur
la place publique. Ce ne sont pas seulement de nos clients ou enfin, il y a
très peu de nos clients qui se sont présentés devant vous.
On a procédé à l'incorporation de la
Fédération des parents adoptants du Québec parce qu'on
nous l'a demandé. On s'est complètement retirés du conseil
d'administration et on a assisté seulement aux réunions de
présentation. C'est un organisme qui fonctionne seul. D'autres
organismes sont également venus devant vous. Non seulement les parents
étaient insatisfaits mais également les organisations.
Si les gens vont au Secrétariat à l'adoption
internationale après l'adoption du projet de loi 21, et que ceux-ci leur
disent: On est heureux, vous voulez adopter un enfant. Cela nous fait plaisir.
On est heureux. Vous n'en avez pas. On va vous faire évaluer par le
centre de services sociaux. Cela ne prendra pas trois ans. On va donner le
mandat à quelqu'un qui va faire
votre évaluation. On va vous aider dans votre projet. D'où
viendra ce bébé? Est-ce que vous voulez envoyer votre dossier
dans tel ou tel orphelinat? On va vou3 aider. Donnez-nous une copie de tous vos
documents et on va fonctionner ensemble. Tout cela va être très
beau, mais si le Secrétariat à l'adoption internationale les
reçoit et leur dit: Bon, malheureusement, vous allez être
obligés d'attendre trois ou quatre ans avant d'être
évalués. Nous avons des ententes avec certains pays et comme vous
avez une tante qui est reliqieuse ou encore parce que vous avez un contact au
Brésil, il y a un enfant que vous pourriez adopter là-bas. C'est
une petite fille d'un an qui vous est réservée, mais vous ne
pouvez pas l'adopter. Vous allez devoir attendre sur les listes encore six ou
sept ans pour que nous réussissions à conclure une entente avec
le Brésil. Mais nous vous comprenons et nous trouvons cela très
malheureux. On trouve que la politique d'adoption du Québec est vraiment
très restrictive. Mais ce n'est pas nous, c'est la faute de la ministre
ou du ministère. On va éprouver le même problème et
le fardeau sera celui du ministère.
Le Président (M. Bélanger): Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui. Je vous remercie. Il me fait plaisir de vous
accueillir au nom de ma formation politique. Vous avez fait plus d'un
écrit sur l'adoption internationale. C'est un problème que vous
connaissez. Donc, vous avez probablement cerné les différentes
facettes de l'adoption internationale.
Effectivement, plusieurs associations se sont présentées
et des parents nous ont même démontré qu'ils auraient
préféré s'attarder davantage sur la mécanique ou le
fonctionnement du processus de l'adoption internationale que seulement sur le
projet de loi comme tel, parce que depuis longtemps on réclame une
politique sur l'adoption internationale. Peut-être qu'une fois pour
toutes, indépendamment des anciens gouvernements, je pense qu'il aurait
été justifié, dans un nouveau vent, dans un nouveau
souffle, de faire le point une fois pour toutes, dis-je, sur ce qu'est
l'adoption internationale.
Un mandat élargi aurait été
préférable, effectivement, afin que tou3 ceux qui veulent se
faire entendre puissent enfin se faire entendre. On a
préféré faire autrement. On va donc vivre avec ce qu'on a
choisi. (20 h 45)
Ceci m'amène à vous poser des questions sur ce dont vous
avez parlé en page... Je sais que voua avez beaucoup parlé d'un
projet d'adoption privé par rapport à un projet d'adoption qu'on
dit public. Il semble que la nuance que vous faites, c'est, d'une part, donner
plus de responsabilités aux parents dans la démarche et, d'autre
part, impliquez davantage l'intermédiaire. Est-ce que je me fais bien
comprendre? Est-ce cela, votre préoccupation?
M. Francoeur: C'est cela. Je crois que les parents peuvent
s'adresser seuls à un pays étranger en étant
supervisés, contrôlés et coordonnés par le
gouvernement du Québec, qu'ils peuvent passer par un organisme et qu'ils
peuvent également attendre que le secrétariat fasse des ententes
avec certains pays. Qu'on contrôle et qu'on vérifie, mais qu'on ne
bloque pas les projets d'adoption des parents québécois.
De toute façon, l'adoption internationale, ce n'est pas un gros
problème. Avec les adoptions qu'on appelle privées -j'appelle
cela toutes des adoptions publiques - il y en a à peu près 200
par année, puis il y a environ 1500 parents qui attendent. Si on laisse
les parents libres de réaliser leurs adoptions dans les meilleures
conditions et en toute légalité, c'est absolument impossible que
demain matin, au lieu d'avoir 200 adoptions par année, il y en ait 3000
ou 4000 au Québec. C'est impossible. Peut-être que cela va monter
à 250, 300 ou 350 pour environ les cinq ou six prochaines années;
ensuite cela pourra peut-être monter à 500, mais ce ne sera jamais
des nombres astronomiques. Et puis, c'est vraiment dommage...
J'entendais le Barreau, ce matin, dire: Si un missionnaire dans un pays
étranqer veut faire de l'adoption, veut agir comme intermédiaire
et veut aider un couple, il n'a qu'à donner son nom au gouvernement du
Québec puis dire: Je deviens un intermédiaire de l'État
pour faire de l'adoption, par exemple, en Bolivie pour le Québec. Mais
il ne peut pas faire cela dans la réalité, parce que les
missionnaires nous disent: On est en Bolivie depuis 75 ans et on ne comprend
pas encore la mentalité. Il y a un missionnaire qui me disait: Si je
siqnais une telle entente pour agir comme intermédiaire pour le
Québec, je vous garantis que, deux semaines après, je me
retrouverais en prison parce que le gouvernement de ce pays-là
m'accuserait d'envoyer des enfants de Bolivie, de détruire la Bolivie,
de les envoyer au Québec et d'être une espèce d'agence
d'adoption. Ce n'est pas mon rôle. Je peux en fait le faire trois,
quatre, cinq, six par année pour aider des parents quand il y a des
dossiers qui me sont présentés, mais je ne peux pas devenir une
agence d'adoption.
Alors,- c'est un privilège d'adopter un enfant, parce que dans
les orphelinats publics à l'étranger, alors qu'ils ont 2000
demandes, il y a à peine une dizaine d'enfants disponibles pour
adoption. Vous savez, vous avez des enfants maintenant de deux ans et demi
à trois ans qui sont abandonnés dans
les rues et une mère ne peut pas dire: J'ai deux enfants qui sont
chétifs, qui sont en train de mourir et là je suis enceinte d'un
troisième. Qu'est-ce que je vais faire? Il va mourir, lui aussi, et
ensuite je ne suis même pas capable de l'allaiter, parce que j'ai un
problème, etc. Si elle se présente à l'orphelinat public,
on va lut dire: C'est bien dommage, mais retourne chez vous, occupe-toi de ton
enfant. Donne-le à quelqu'un de ta famille, parce que, si les pays
étrangers décidaient demain matin de prendre tous les enfants qui
meurent de faim chez eux et dont les parents sont incapables de s'occuper, on
n'aurait pas de problème d'adoption internationale et le
secrétariat à l'adoption ne parlerait pas de
non-disponibilité. On voudrait en faire, mais il n'y en a pas d'enfants
disponibles. C'est bien simple, il y en aurait 100 000 dans les orphelinats du
Brésil demain matin, puis on pourrait faire des ententes et en envoyer
5000 au Québec. Il n'y aurait aucun problème. On en aurait
seulement 1500, on nous en offrirait 5000, on manquerait de couples. Le
problème, c'est qu'il n'y en a pas d'enfants dans les orphelinats
publics.
Adopter un enfant, ce n'est pas une affaire d'État, c'est une
entente, c'est un gouvernement étranger qui accorde le privilège
à un couple québécois ou à un couple de France, ou
à un couple des États-Unis d'adopter un enfant devant son
tribunal, suivant ses normes et ses coutumes. Je vous assure qu'au Guatemala,
en Colombie, on a des travailleurs sociaux. Ces gens-là sont
compétents» On a des juges. Par exemple, quand les Brassard sont
allés au Guatemala, excusez l'expression, ils avaient des journalistes
aux fesses. Les gens qui s'en vont dans un pays étranger avec une
équipe de télévision, qui vont interroger le juge et qui
vont interroger les orphelinats, qui se promènent avec eux alors qu'ils
ont le bébé dans les bras, ce ne sont pas des gens qui font du
trafic d'enfants. C'est ce que l'on appelle une adoption publique. Je n'appelle
pas cela une adoption privée, j'appelle cela une adoption publique.
L'ambassade du Canada est au courant, le secrétariat à l'adoption
est au courant, le tribunal québécois donne l'autorisation, le
tribunal guatémaltèque donne l'autorisation: Qu'y a-t-il de
privé là-dedans? Ils n'ont pas été chercher un
enfant que Mme Unetelle leur a donné, ils l'ont chez eux dans leur cour.
Ils sont passés par les organismes publics. Avec le projet de loi 21, on
va le voir, ce sont les tribunaux. On avait le tribunal pour reconnaître
le jugement d'un pays étranger, maintenant on va avoir au
Québec... Pour nous, les avocats, faites des lois comme cela; cela fait
notre affaire. On va encore retourner à la cour, on va travailler encore
plus, mais cela ne nous fait rien de travailler, c'est notre travail. C'est
comme si vous demandiez à un médecin d'aller voir si le foie est
sain avant d'opérer pour l'appendicite. Il va opérer pour le foie
pour voir s'il est sain, si le ministère de la santé lui demande
cela. Il va être payé pour le foie et pour l'appendicite. Cela va
lui faire deux opérations. Alors, nous allons nous rendre devant le
tribunal pour vérifier la légalité du projet d'adoption et
nous allons nous y rendre à nouveau pour faire reconnaître le
projet d'adoption. Qu'y a-t-il de privé dans cela? Tout est public et
les gens sont d'accord avec cela pour autant, par exemple, que le
ministère accepte de collaborer. Si on se présente devant le
ministère et que celui-ci dit: Non, vous ne pouvez pas adopter cet
enfant, cela ne se peut pas, un peu comme on a dit à M. Laurin: Nous
avons une liste de 1500, donnez votre enfant à celui qui est le premier
sur la liste. Cela n'a pas d'allure. Vous ne pourrez jamais l'adopter.
Malheureusement, nous les avocats, nous allons dire aux gens de respecter la
loi. C'est notre devoir. Mais si les citoyens bafouent la loi et vont chercher
des enfants à l'étranger, cela ne sera pas notre faute.
Je voudrais vous parler aussi des orphelins. Sur la question
d'orphelins, j'ai un couple qui, il y a environ un mois, me disait: Nous avons
un enfant de déterminé en Colombie. Ces gens nous ont
consultés. Je leur ai dit: Voici, par le projet de loi 21, il faudrait
vous présenter au secrétariat à l'adoption, les informer
et leur dire que cet enfant ne provient pas d'un orphelinat public. Ce sont des
religieuses qui s'occupent d'un petit... Ce n'est même pas un orphelinat.
Dans leur maison mère, les religieuses avaient environ une dizaine
d'enfants. Le couple a communiqué avec le secrétariat à
l'adoption. On leur a dit: On met déjà en application le projet
de loi 21. Ce sont les religieuses qui ont cet enfant. Ce n'est pas un
orphelinat d'État reconnu par le gouvernement de Colombie. Par
conséquent, vous ne pourrez pas l'adopter. J'ai rencontré le
même couple la semaine dernière et le couple avait simplement
résolu son problème. Quelqu'un pour eux là-bas - je
présume que c'est la reliqieuse - s'est présenté à
un orphelinat d'État et on leur a dits Voici au Québec, on veut
que l'enfant passe par un orphelinat, il faut que ce soit un orphelin.
L'orphelinat de là-bas leur a simplement répondu: Cela va
coûter 500 $ US en donation et on va faire un "in-and-out". On va entrer
l'enfant dans les livres de l'orphelinat et demain, on va le ressortir. Mais
par contre, pour faire cela, on va détruire l'identification de la
mère, son histoire médicale, on va détruire l'histoire
médicale de la mère. On va détruire son adresse. On va
considérer qu'on a trouvé cet enfant sur le trottoir et qu'il est
à notre orphelinat. Cet enfant va être considéré
comme étant de parents inconnus.
Alors, avec un procédé comme cela, si on détruit
l'histoire médicale de la mère, si on détruit son
"pedigree", on ne sait plus d'où elle vient et c'est l'orphelinat public
qui décide de faire un "by-pass" pour satisfaire un projet de loi
québécois. Ce n'est pas avec un système comme cela qu'on
va agir de bonne foi et que les gens vont réussir des adoptions dans les
meilleures conditions. On trouve cela malheureux.
Mme Vermette: Je pense que vous nous avez fait un
exposé... Vous m'avez enlevé certaines questions que je voulais
vous poser. Vous êtes allé en profondeur et je pense que c'est
important. C'est un peu le fond du problème en ce qui concerne
l'adoption internationale. D'une part, on nous a souvent dit qu'il manquait
d'enfants. C'est un des problèmes. D'autre part, on a dit que
c'était surtout un problème de filiation, d'adoption simple et
d'adoption plénière. Dans votre mémoire, vous attestez que
c'est un faux débat.
M. Francoeur: Je dis que c'est un faux débat. Vous avez vu
que même les avocats y perdent leur latin. Je me dis que cela devient une
"avocasserie", pour les juges aussi. Vous avez un juge de Québec qui dit
une chose et un juge de Montréal, l'honorable juge Pierre-G. Dorion, qui
est une compétence en matière d'adoption - c'est à lui
d'ailleurs au Québec, dans la région de Montréal du moins,
qu'on confie les causes les plus complexes en matière d'adoption - n'y
voit pas de problème. Il dit: Même au Québec, autrefois, on
avait l'adoption simple. Celle-ci est un concept juridique. C'est simplement un
concept. Je me dis que, si j'étais à la place des pays
étrangers, il n'y aurait pas d'adoption plénière.
Supposons que je suis le Brésil ou le Guatémala, si
c'était seulement de moi et que j'étais une autorité dans
ces pays, il y aurait seulement des adoptions simples. Par l'adoption simple,
on maintient le lien de filiation avec les parents naturels et on crée
un nouveau lien de filiation avec les parents adoptifs, ce qui veut dire que
les pays étrangers, par ce moyen, respectent l'enfant. C'est
l'intérêt de l'enfant que vous voulez, le respect de l'enfant.
Avec l'adoption simple, c'est ce qui arrive. Le Brésil va dire tout
simplement: Avec le petit bébé qu'on donne à des
Québécois à l'âge de trois mois, on n'est pas pour
faire une adoption plénière. Nous, les Brésiliens, cela
nous répugne. Vous les Québécois, vous avez une
mentalité. Nous, nous avons une autre mentalité. On se dit:
À 18 ans, s'il veut revenir ici, il pourra demander que cette adoption
au Québec soit révoquée. Il avait une peau basanée,
il était dans la région de Rimouski, dans une région moins
cosmopolite. Il n'était pas heureux et il va retourner au Brésil.
À 18 ans, il pourra demander la révocation de l'adoption et on va
lui redonner tous ses droits. Maintenant, on crée un nouveau lien de
filiation et c'est ce qui compte. Dans les registres de l'état civil,
tout ce qu'on a à vérifier - cela ne sert à rien de se
fendre en quatre et de chercher le Messie partout - c'est de savoir si les
parents adoptants sont les parents de l'enfant. On répond: Oui. C'est
cela que les parents veulent savoir. Va-t-il pouvoir nous appeler papa et
maman? Oui, c'est cela. Dans les registres du pays d'origine de l'enfant,
est-ce que cet enfant va être à mon nom ou vais-je être
seulement le tuteur? On répond: Oui, l'enfant va être à
votre nom, il va porter votre nom dans les registres. C'est tout ce que les
citoyens veulent savoir. Maintenant, dans certains pays, il y a simplement
l'adoption plénière, il n'y a pas d'adoption simple; dans
d'autres pays, il y a l'adoption simple et un autre lien de filiation
créé au Québec.
Je vous assure, il y aura peut-être une nouvelle commission
parlementaire d'ici à 10 ans, et c'est ce qui s'en vient au
Québec parce qu'on s'en va dans cette voie-là où les
cachettes qu'on a connues au cours des dernières 25 années sont
finies. C'est pour cela qu'il n'y a plus d'adoption au Québec, c'est
fini ces cachettes et on aura aussi l'adoption simple. Pourquoi le lien de
filiation ne resterait pas au Québec avec la mère biologique? On
ne peut pas l'exclure, elle existe la mère biologique. Pourquoi ne
pourrait-elle éventuellement aussi dans un projet d'adoption ouverte
conserver le droit de revoir son enfant? On n'aurait pas de problèmes
très émotifs, des problèmes comme on en retrouve avec le
mouvement Retrouvailles. On pourra avoir l'adoption ouverte à l'avenir.
À mon avis, on aura également une l'adoption simple au
Québec d'ici à quelques années.
Le Président (M. Bélanger): Nous revenons au
côté ministériel. J'aurais peut-être une question,
comme député de Laval-des-Rapides. Je vais enlever mon chapeau de
président, car j'ai une question à vous poser. J'ai lu avec
attention votre mémoire. J'ai suivi aussi un peu votre travail dans le
passé et les différentes interactions que vous avez eues avec
différents organismes - je pourrai vous dire à quel titre, si
vous le voulez, à ce moment-là. Ce qui me frappe dans la lecture
de votre mémoire, c'est que finalement vous êtes à peu
près contre toute structure qui peut mettre un minimum de normes sur
l'organisation des adoptions. Vous n'êtes pas sans savoir que certains
pays actuellement refusent de laisser aller leurs enfants en adoption parce que
beaucoup de gens n'adoptaient pas un enfant, ils achetaient un rein pour le
greffer à un autre enfant. Il y a un trafic qui s'est fait dans
certains pays et qui était carrément inacceptable et
inhumain. Ces pays-là exigent des autres pays à qui on veut
donner des enfants en adoption un minimum de règles et de
procédures qui donneront des garanties quant à la qualité
de vie qu'on va donner à ces enfants» Comment pouvez-vous offrir
ces garanties en n'ayant aucune structure sûre, sauf votre parole: "je
suis Me Jean Francoeur, j'habite au Québec et moi, je vais vous faire
cela". J'ai beaucoup de mal à vous suivre quand je lis votre
document.
M. Francoeur: D'abord, il faut mentionner que les ventes
d'organes ont fait la manchette au Honduras et au Guatemala. On a appris d'un
côté par oui-dire que c'étaient des parents qui adoptaient
des enfants pour vendre des reins. On a appris aussi par oui-dire que des
fonctionnaires, en vertu d'un programme d'État, prenaient des enfants
supposément pour adoption, mais que ce3 enfants n'étaient jamais
confiés à l'adoption par les fonctionnaires et qu'ils
étaient vendus à des hôpitaux américains, parce que
les parents riches qui ne voulaient pas adopter, mais dont l'enfant avait un
problème de rein ou de tympan, prenaient le rein ou le tympan de ces
enfants. Par contre, quels sont les médecins qui ont été
condamnés? Ce n'étaient pas des couples qui voulaient adopter des
enfants. On n'a jamais vu de condamnation d'ailleurs au Québec depuis 20
ans. On n'a jamais vu de couples condamnés pour ces choses-là.
C'est du oui-dire. C'est du oui-dire en ce qui concerne les adoptions par des
parents. C'est peut-être aussi du ouï-dire en ce qui concerne les
ventes d'enfants pour des organes par des fonctionnaires. (21 heures)
Maintenant, je vous le répète depuis une heure, je suis
entièrement d'accord, à 150 %, sur la coordination, le
contrôle, la vérification des projets d'adoption. Les citoyens du
Québec sont d'accord. Ils veulent adopter des enfants de pays
étrangers et ils sont d'accord pour soumettre leurs projets à la
ministre, au secrétariat, au Procureur général, au
Tribunal de la jeunesse, à Immigration Canada, à
Immigration-Québec, aux tribunaux des pays étrangers. Ils ne sont
pas d'accord pour faire des petites choses entre eux en cachette. Ils acceptent
le contrôle. S'ils acceptent le contrôle, donc, il n'y a pas de
problème. C'est la structure gouvernementale qui crée le
problème en refusant d'exercer son rôle de contrôle.
Maintenant, si les parents se présentent, que le secrétariat dit
aux parents: Voici, dès que vous voulez adopter un enfant,
présentez-vous chez nous et inscrivez-vous au secrétariat
à l'adoption, et que celui-ci dit au couple: Boni nous avons une entente
avec le Brésil, d'ici à un an, on va vous avoir une petite
Brésilienne ou un petit Brésilien. Il n'y en a pas de
problème. Le secrétariat va dire: Vous voulez adopter au
Honduras. Il y a un orqanisme qui va vous aider, cela va prendre six mois. II
n'y a pas de problème. Mais si le couple dit: Je veux adopter tel enfant
en république Dominicaine, enfant qui m'est donné par le pays,
enfant qui m'attend, je me dis que, dans ce cas également,
accéder à sa demande, c'est la liberté. À mon avis,
le gouvernement ne devrait pas agir comme chercheur d'enfants et envoyer des
fonctionnaires en mission dans les pays chercher des enfants. Mais s'il veut le
faire, qu'il le fasse et, s'il en trouve, tant mieux! Mais si le couple a un
enfant qui lui est déterminé par un pays étranger, bien,
qu'on respecte ce choix!
Le Président (M. Bélanger): Si je comprends bien,
vous me dites que vous êtes d'accord pour les contrôles s'ils
viennent de l'État. Le titre de votre mémoire ne dit pas cela du
tout. Il dit: "Le contrôle québécois sème la panique
et détruit les projets d'adoption." En tout cas, on ne s'arrêtera
pas là. Si vous êtes d'accord sur toutes ces normes, le projet de
loi présente ces normes. Après consultation avec une série
de qens, après vérification, après des expériences
vécues, on a bâti un projet de loi. Mais là, je ne fais pas
la défense du projet de loi. J'essaie seulement de voir sur quels
éléments en particulier vous avez des divergences. Plusieurs
groupes nous ont dit: II n'y a pas de problème avec le projet de loi. Ce
qui nous embête, ce sont les délais, et on n'a pas de garantie sur
les délais. Je pense que Mme la ministre a été très
réceptive là-dessus en disant: Oui, on va chercher les moyens de
diminuer ou d'éliminer le plus possible les délais pour permettre
que cela se fasse rapidement. Si vous aviez à résumer en une
phrase ce que vous voudriez voir changer dans le projet pour atteindre les
objectifs dont vous nous avez parlé, qu'est-ce que vous me diriez en une
phrase?
M. Francoeur: Que tous les projets d'adoption soumis à la
ministre par le secrétariat, soumis à la ministre par des
organismes, soumis à la ministre par des parents eux-mêmes, que
tous les projets d'adoption soient reçus positivement, dans un esprit de
soutien aux parents et non pas dans un esprit négatif, et qu'on ne leur
dise pas: Non, vous ne pourrez pa3 adopter. Que tout le monde collabore. Je
pense que les organismes ont les mêmes problèmes que les parents
adoptants. Les organismes vous disent: On a des enfants. Par contre, quand on
se présente au secrétariat, on ne nous donne pas de dossier, on
ne s'occupe pas de nous, on n'est pas bien reçus. Qu'on respecte, par
exemple, l'organisme quand il arrive et qu'il dit: J'ai deux enfants au
Honduras. Dans nos listes, on a deux couples.
On lui apporte notre appui, on l'aide. On vérifie le projet dans
un délai raisonnable. Pour moi, un délai raisonnable pour une
adoption internationale, ce n'est pas six ou sept ans quand les couples ont 30
ans et ce n'est pas huit ans non plus, ce n'est pas quatre ans. Une adoption,
c'est comme un accouchement naturel et, à mon avis, cela doit prendre
trois mois au Québec, six mois à l'étranger, soit neuf
mois.
Le Président (M. Bélanger): Si vous me permettez
une dernière question. Allez-y donc. Il nous reste le temps d'une
question. Alors, allez-y.
M. Sirros: J'aurais deux courtes questions. Premièrement,
est-ce que vous avez personnellement appris l'existence de quotas par les
différents intervenants en ce qui concerne l'adoption internationale? II
semble que cela circulait et que vous avez parlé de l'existence de
quotas par rapport à l'adoption internationale. Est-ce que vous en avez
eu personnellement connaissance?
M. Francoeur: Je ne suis pas le seul à en parler. Au
moment où je vous ai parlé de quotas, cela a été
mentionné publiquement. Au moment où j'en parlais dans mon
exposé, au début, j'étais en train de vous citer la page
26 de la commission Rochon.
M. Sirros: Qui étaient des plaintes de parents. Mais
est-ce que c'est quelque chose comme une situation de fait dont vous connaissez
quelque chose?
M. Francoeur: À un moment donné, je crois que c'est
l'an passé, on disait par exemple aux parents, au secrétariat
à l'adoption et dans les centres de services sociaux: bon! maintenant il
est entré assez d'enfants du Brésil. On a apporté la
question d'adoption simple. Peu après, on disait que c'étaient
des quotas, qu'on ne voulait plus d'enfants du Brésil.
M. Sirros: De façon officieuse. La deuxième, si
je...
Le Président (M. Bélanger): Si vous le permettez,
il nous resterait 30 secondes pour notre formation.
M. Sirros: D'accord, bon! De façon générale,
si je comprends bien ce que vous avez dit: en résumant, vous seriez pour
une libéralisation, en quelque sorte, de l'adoption, en disant: laissez
les parents, entre autres, aller chercher les enfants et, ici, on va
entériner l'adoption, ni plus ni moins. On va légaliser la
procédure. Si je comprends bien, vous dites: Libéralisons
ça. Les parents, qu'ils trouvent leur enfant dans un pays
étranger et, ensuite, on va légaliser cela.
M. Francoeur: Non, ce n'est pas ce que j'ai dit.
M. Sirros: Ce n'est pas ça?
M. Francoeur: J'ai dit que les...
M. Sirros: Mais vous êtes pour ce que vous appelez
l'adoption privée en ce sens qu'un parent qui désire adopter peut
faire les démarches pour trouver son enfant et l'adopter...
Une voix: ...et le faire entériner.
M. Sirros: ...et le faire entériner. Ce n'est pas
ça?
M. Francoeur: Non. Il est très important, au moment
où un enfant est réservé, pour éviter tout trafic.
Ce qu'on veut, c'est l'intérêt de l'enfant - au moment où
l'enfant est réservé et déterminé à
l'étranger, avant même que cet enfant-là arrive au Canada,
avant même que le couple aille le chercher, dès que le couple
commence des démarches, dès qu'il entreprend des démarches
dès qu'il désire communiquer lui-même avec un orphelinat de
pays étranqer, avec un ministère de la famille dans un pays
étranger, avec des religieuses, il est important qu'il s'inscrive au
secrétariat à l'adoption...
M. Sirros: Avec une famille directement?
M. Francoeur: Ce peut être avec une famille, ce peut
être avec n'importe qui. Mais le secrétariat à l'adoption
doit vérifier si l'adoption qui va avoir lieu à l'étranqer
est léqale. Il peut le faire vérifier par l'ambassade du Canada
sur place. Il peut faire vérifier par les ambassades et les consulats
des pays étrangers ici au Québec si le processus d'adoption est
légal.
Le Président (M. Bélanger): ...on
arrête...
M. Sirros: Pardon? II faut que j'arrête?
M. Francoeur: ...et coordonner le processus et non pas...
M. Sirros: Je ne pourrais pas avoir le consentement, M. le
Président, pour continuer cinq minutes? Finalement, je pense que ce
à quoi je voulais en arriver... Est-ce que je l'ai, d'abord? Je ne sais
pas.
Mme Vermette: M. le Président, je suis bien prête
à lui donner cinq minutes, pour autant qu'on m'accorde cinq minutes.
Le Président (M. Bélanger): Absolument.
Vous êtes d'accord avec ça? Alors, allez-y. Mme
Vermette: Voilà.
M. Sirros: D'accord, il n'y a pas de problème? Vous dites,
finalement, que ce pourrait même être le parent qui trouve une
famille, n'importe qui... Je pense que c'étaient les mots que vous avez
utilisés.
Il y a deux choses qui m'inquiètent à ce sujet et
j'aimerais savoir si cela vous inquiète aussi. Voua ne trouvez pas,
d'une part, qu'on ouvre ainsi la porte à toutes sortes de
possibilités d'abus, selon les moyens financiers du parent qui
désire adopter? C'est-à-dire que celui qui a les moyens
financiers va s'arranger, je suis certain, par l'entremise de personnes qui
voudraient bien l'aider à trouver une façon de décrocher,
si je peux utiliser ce mot-là, un enfant qui serait adoptable par
n'importe qui, un intervenant dans le pays étranger.
Est-ce que, d'une part, cela ne vous inquiète pas, cette
ouverture qui est faite par rapport à des possibilités d'abus qui
dépendent des moyens financiers? Deuxièmement, dans le cas du
parent qui n'a pas les mêmes moyens financiers, quelle est votre position
sur l'équité sociale qu'un système comme cela pourrait
avoir?
M. Francoeur: D'abord, je pense qu'en matière d'adoption
internationale, ça prend des moyens financiers minimaux. Même si
vous voulez adopter un enfant au Guatemala, Air Canada ou Pan American ne vous
donneront pas un billet d'avion gratuit. Puis, si les gens passent par un
organisme reconnu - vous allez entendre l'organisme Les Enfants de
l'arc-en-ciel de Sherbrooke - ça coûte 6000 $ en partant.
Maintenant, ce que vous dites, c'est très bien. C'est justement
pour cela que les gens ne doivent pas s'organiser une adoption entre
eux-mêmes. D'abord, le gouvernement ne doit pas, a priori - il n'y a
jamais eu de Québécois qui ont été condamnés
pour des abus dans ce domaine - manquer de confiance dans les citoyens du
Québec, premièrement.
Deuxièmement, c'est pour cela que les couples doivent produire
une évaluation et que le gouvernement du Québec doit être
au courant de leurs démarches dans le pays étranger, pour avertir
le ministère de la famille du pays étranger qu'il va se produire
une adoption dans son pays, pour exiger un juqement d'un tribunal et pour
exiger certains documents. Dans les pays étrangers, ils ont des
travailleurs sociaux. Ils ont un contrôle. Mais là, vous
présumez que le parent va aller voir... Je sais ce que vous voulez dire.
Vous dites: Le parent va aller voir Mme Unetelle dans la rue. Il va lui offrir
2000 $ pour son enfant.
M. Sirros: Est-ce inconcevable?
M. Francoeur: Là, à ce moment-là...
M. Sirros: Est-ce que cela ne se peut pas?
M. Francoeur: Bon! qu'est-ce que vous voulez?
M. Sirros: Est-ce que vous affirmez que cela ne se peut pas?
M. Francoeur: Mon enfant va s'en aller dans une polyvalente au
mois de septembre. J'ai appris qu'il y avait de la drogue dans les
polyvalentes. Est-ce que je vais l'empêcher d'aller à
l'école publique? Est-ce qu'on va mettre un couvre-feu parce qu'il y a
de la prostitution chez les adolescents? Cela ne veut pas dire que ces actes
vont être commis. Je pense qu'il y a des centaines de milliers d'enfants
abandonnés dans les rues; même maintenant, on en voit à
partir de deux ans ou deux ans et demi. Lorsque les gens procèdent, vous
savez... Écoutez, vous parlez de loi. Allez devant le tribunal avec le
projet de loi 21. Avant l'adoption ou après l'adoption, vous n'avez
qu'à exiger... Comme cela se fait actuellement, les gens fonctionnent
par l'intermédiaire des hommes de loi. Vous avez des consentements; pas
des petits consentements signés sur le coin de la table, mais des
consentements notariés. Vous avez l'évaluation de la mère
biologique par la travailleuse sociale du pays étranger. À ce
moment-là, il n'y a pas de risque.
Mais ce qui a fonctionné pour l'adoption au Québec, parce
que voyez-vous au Québec... J'ai justement eu un cas il n'y a pas
tellement longtemps qui va vous intéresser. II s'agit d'un couple. Je ne
vous donnerai pas la région. En fait, c'est une jeune fille de
l'extérieur de Montréal qui voulait donner son enfant en adoption
à un couple de la région de Longueuil. J'ai communiqué
avec la jeune fille. Comme il n'y avait pas de lien de parenté entre la
jeune fille de l'extérieur de Montréal et le couple de Lonqueuil,
je lui ai dit: En fonction de la loi du Québec, vous ne pouvez pas
donner votre enfant en adoption à ce couple-là parce que c'est
interdit. Allez voir les centres de services sociaux et dites-leur que vous
avez un enfant que vous voulez faire adopter. Elle est allée voir des
gens au centre de services sociaux, selon ma recommandation. On lui a dit: Nous
favorisons la mère biologique. Elle a dit: Où ira cet enfant?
Est-ce que ce sont des professeurs qui l'auront? Est-ce que ce sont des
techniciens? Dans quelle sorte de famille ira-t-il? On lui a répondu: Ce
ne sont pas tes affaires. Nous avons des listes et on va s'en occuper. Elle a
décidé qu'elle se faisait
avorter. Pourquoi? Les parents voulaient prendre l'enfant sans
procéder par adoption. Je leur ai déconseillé de le faire.
Je leur ai dit: Vous n'êtes pas protégés. Après un
an, la mère naturelle peut revenir prendre son enfant et vous allez
vivre un drame incroyable.
En adoption internationale, on ne vivra pas cela parce qu'il va y avoir
un jugement d'adoption et qu'il va y avoir une évaluation de foyer par
le centre de services sociaux du pays étranger, un jugement de la cour
et la mère biologique ne pourra jamais reprendre son enfant. Alors, il
n'y aura pas de problème.
Le Président (M. Bélanger); Si vous le permettez,
on va passer à l'autre formation. Mme la députée de
Marie-Victorin.
Mme Vermette: Si on continue un peu, on vous a posé des
questions et vous étiez en train de dire que l'évaluation qu'on
peut faire au moment d'une démarche des parents en adoption
internationale, peut être quelquefois assez arbitraire ou, en tout cas,
manquer de soutien envers les parents. Ceci peut faire que certains parents
trouvent que le rôle du secrétariat ou le rôle des
évaluateurs ou des travailleurs sociaux n'est pas tout à fait
adéquat. Finalement, pour les règlements en tout cas, Mme la
ministre nous assure qu'il y aura une révision de l'ensemble des
règlements parce qu'ils n'auront plus de concordance avec la loi. Est-ce
que vous croyez qu'il serait important que l'on révise d'une part la
mentalité des travailleurs sociaux en ce qui concerne l'adoption
internationale et qu'on aborde ce volet de la démarche des parents avec
beaucoup plus de compréhension?
M. Francoeur: L'adoption d'un enfant relève de
l'intimité conjugale de la famille. Comme elle relève de cette
intimité, on doit respecter cette intimité conjugale. Vous savez
maintenant que même les homosexuels ont droit à une vie
privée. On ne leur pose pas de questions sur ce qu'ils font dans
l'intimité. Pourtant, j'ai été fort troublé
d'entendre une travailleuse sociale à la télévision lors
de l'émission "Droit de parole", où j'étais
présent, dire publiquement que, lorsque les couples désirent
adopter un enfant, elle les questionnait sur leur vie sexuelle.
Je pense que les couples qui veulent adopter des enfants ont droit
à autant de respect que les homosexuels. Si vraiment le gouvernement
désire que leur vie sexuelle soit vérifiée pour leur
donner le droit d'adopter un enfant, eh bienï à ce
moment-là, qu'on la fasse vérifier par un professionnel du
secteur privé, au choix des parents, et non pas par un professionnel de
l'État. On ne l'accepterait même pas pour des homosexuels, alors
qu'on le fait pour des parents adoptifs. (21 h 15)
Mme Vermette: Il y a eu des associations qui étaient
justement pour l'évaluation par des professionnels privés et on a
soulevé un danger parce qu'on disait justement que ce n'était pas
tout le monde qui pouvait payer pour cette évaluation et c'est pourquoi
on la remettait en question. Est-ce que vous auriez d'autres solutions,
étant donné ce problème que les parents ont à
débourser pour faire faire leur évaluation?
M. Francoeur: Je vous l'ai dit. Les gens qui décident
d'adopter des enfants à l'étranger ne désirent pas
quémander une évaluation de foyer. Si le gouvernement a des
budgets - vous savez, à Montréal, je pense qu'il y a un ou deux
travailleurs sociaux pour toute l'île de Montréal et il y en a un
autre à Longueuil qui fait de Longueuil jusqu'à Granby - si le
gouvernement veut donner un service gratuit, qu'il le fasse. Par contre, il y a
des travailleurs sociaux dans le secteur privé qui sont capables de le
faire et les parents n'ont aucune objection à payer pour ce service. Il
y a quelques années, j'ai eu justement une discussion avec quelqu'un au
secrétariat à l'adoption qui me disait ceci: Ce n'est pas juste,
les gens qui bénéficient de l'aide sociale ne seront pas capables
d'avoir le même service. Je vous réponds: Les qens qui
bénéficient de l'aide sociale au Québec n'ont pas besoin
d'adopter des enfants dans des pays étrangers. On a déjà
une charge qui est assez lourde, au moins qu'on les bloque à ce niveau.
Une adoption internationale coûte cher: qu'on passe par le
secrétariat ou qu'on fasse des démarches personnelles, il y a des
frais juridiques, il y a des frais d'avion, il y a quelquefois des frais
d'accouchement, des frais d'orphelinat. À ce moment-là, qu'il y
ait, en plus, des frais pour une évaluation de foyer, le couple va le
comprendre. Le couple veut être évalué dans un délai
raisonnable et, à mon avis, un délai raisonnable après que
la demande a été faite, c'est un maximum de trente jours, si
l'enfant n'est pas réservé et si l'enfant est déjà
déterminé, quinze jours.
Mme Vermette: Vous venez de dire, je vous le mentionne, parce que
j'ai vu plusieurs réactions des gens en arrière de vous et aussi
parmi les gens autour de la table: Les bénéficiaires de l'aide
sociale, quant à eux, qu'on leur enlève ce privilège, ce
pouvoir d'adopter un enfant sur le plan international. Pourquoi affirmez-vous
une telle...
M. Francoeur: Pourquoi? Disons, si dans une famille vous avez
déjà monsieur et madame et un enfant qui sont à la
charge
de l'État, je ne vois pas pourquoi on aurait monsieur, madame et
deux enfants. Cela fait quand même trois personnes à la charge de
l'État. Pourquoi en aurait-on quatre?
Mme Vermette: À la page 2 de votre mémoire...
M. Francoeur: On peut tout se payer. Si notre
société est prête à se payer des adoptions
internationales pour ses bénéficiaires de l'aide sociale et est
prête à favoriser celles-ci, à ce moment-là, cela va
peut-être grossir notre taux de natalité. Allons-y! Qu'on ouvre
des budgets additionnels pour que les assistés sociaux adoptent à
l'étranger. Je suis bien content pour eux.
Mme Vermette: Vous dites en page 2 de votre mémoire que la
loi devrait être adaptée au contexte social actuel. Le contexte
social actuel, cela veut dire quoi? Quand vous parlez du projet de loi 21,
est-ce que vous faites référence au taux de natalité ou au
problème démographique?
M. Francoeun Dans le contexte social actuel, on ne peut pas se
permettre de faire les difficiles. On a un taux de natalité très
bas au Québec. Le secrétariat à l'adoption, les organismes
nous disent: Le nombre d'enfants disponibles pour adoption dans les pays
étrangers est très bas. Donc, en tenant compte de ces
prémisses, je me dis: Si un couple québécois a la chance
d'adopter un enfant à l'étranger parce qu'il y en a un qui lui
est réservé ou déterminé, qu'on l'aide. Par contre,
si un organisme veut entreprendre des démarches et négocier des
ententes avec des orphelinats, qu'on l'aide également, mais qu'on ne lui
mette pas de bâtons dans les roues. Plus on va rattacher l'organisme au
ministère, plus on va rattacher l'organisme au secrétariat
à l'adoption, moins l'organisme va avoir de pouvoir dans un pays
étranger pour obtenir des enfants disponibles.
Croyez-le ou non, les pays étrangers ne semblent pas du tout
intéressés à faire des ententes entre États pour
envoyer des enfanta au Québec comme on le ferait pour des automobiles ou
des régimes de bananes. Ils ont trop peur de se voir accuser par leur
population de vendre leurs enfants au Québec ou à d'autres pays,
en échange d'armes ou de marchandises. Dans ces pays, les gouvernements
n'ont pas ta confiance de leur population. Ce sont des régimes
militaires qui n'ont pas la confiance de leur population. Ils savent que ces
populations sont opprimées, qu'elles sont très pauvres, qu'elles
vont accepter les adoptions internationales au compte-goutte. Dans des cas
déterminés, lorsqu'un couple est envoyé par le
secrétariat, lorsqu'un couple y va seul, lorsqu'un couple a
été envoyé par un organisme ou encore lorsqu'un orqanisme
privé qui n'est pas trop gouvernemental y va, on va accepter de donner
des enfants comme cela, mais par contre on a trop peur, dans ces
pays-là, que leur population croie qu'il y a eu des ententes entre
États pour des échanges d'enfants et on ne veut pas rendre un
grand nombre d'enfants disponibles pour le Québec ou pour d'autres pays.
Alors, c'est pour cela qu'il faut laisser les démarches personnelles,
tout en faisant des adoptions publiques. Pour moi, une adoption publique, ce
n'est pas une démarche personnelle. Le secrétariat en fait, les
organismes en font, les couples en font et l'adoption est publique au moment
où on effectue la coordination et le contrôle.
Les gens sont d'accord pour qu'il y ait coordination et contrôle.
La preuve, vous avez justement un document à la fin de mon
mémoire qui porte l'estampille de l'ambassade du Canada. Quand les gens
font du trafic, ils ne veulent pas être contrôlés. Eh bien!
ils passent la frontière et ils ne se présentent pas à
l'ambassade du Canada. C'est déjà commencé d'ailleurs. On
a dit à un couple, il y a à peine deux semaines: Cela va bien au
Secrétariat à l'adoption internationale présentement.
Présentez-vous, allez faire votre demande. On va vous donner les
autorisations. Il y a le couple Baillargeon et le couple Sanfaçon qui
devaient passer devant la cour et on leur a donné l'autorisation. Il
semblerait qu'avec la commission parlementaire, tout le monde est beau, tout le
monde est qentil et vous allez être bien reçus. Ils ont
téléphoné au secrétariat et on leur a dits Vous
n'avez pas été à la cour? vous n'avez pas fait de
procédure contre nous, donc, on ne peut pas vous aider tout de suite.
Venez nous voir dans trois mois. On leur a conseillé d'attendre trois
mois, mais ils sont partis chercher leur enfant quand même. Que se
passe-t-il alors? Ils n'ont pas le visa de l'ambassade du Canada. Ce qu'ils
font? Les parents ont un jugement d'adoption qui est valide pour tous les pays
du monde. Ils ont un passeport de leur enfant: ils s'en vont au Costa Rica ou
au Mexique et ils prennent un autre avion et on les retrouve à Dorval
avec un enfant. Je demandais à ces parents: Que s'est-il passé
quand vous êtes arrivés à Dorval avec votre enfant? Ils ont
dit: On arrivait des États-Unis. On était en vacances aux
États-Unis. Je leur ai dit: Vous auriez dû déclarer cet
enfant. Ils ont répondu: Cela aurait pris deux heures, mais on va aller
les voir dans quelques mois.
Que va-t-il arriver dans un an ou deux? On aura combien d'amnisties? Je
me dis: Si les citoyens veulent se présenter au secrétariat et
veulent être reçus, à ce moment-là, qu'on ne les
retourne pas au téléphone et qu'on les accueille
positivement.
Alors, il n'y aura plus de problèmes d'adoption au Québec.
Tout le monde sera heureux: les organismes seront heureux, les parents seront
heureux et on aura un contrôle parfait parce que les gens s'inscriront au
gouvernement et adopteront des enfants è l'étranger par
l'entremise ou l'intermédiaire du gouvernement qui pourra effectuer le
contrôle légal de l'adoption simple et de l'adoption
plénière, le contrôle des consentements et surtout le
contrôle des origines de l'enfant: D'où vient-il cet enfant? Qui
vous l'a donné? Est-ce que le gouvernement étranger est au
courant qu'il y a un petit Mexicain qui vient d'arriver ici? Où
l'avez-vous pris cet enfant-là? Est-ce une madame qui vous l'a
donné 9ur le bord de la rue?
Ce contrôle ne doit pas se faire a priori lorsque l'enfant est
arrivé au Québec. C'est pour cela que je dis: Si tout le monde
collabore avant même que les gens aillent chercher leur enfant à
l'étranger, ils vont se présenter au secrétariat puis ils
vont offrir toutes les coordonnées et il n'y en aura pas de
problèmes parce que cela se fera publiquement. Ce seront des adoptions
publiques qui seront connues et si jamais il y a du trafic, eh bien! ce sera
facile pour le secrétariat de le dénoncer au pays étranger
concerné, parce qu'il sera au courant du projet d'adoption. Pour ma
part, c'est ce que je favorise et non pas des adoptions secrètes et
privées.
Le Président (M. Bélanger): Le temps est
écoulé. Si vous voulez de part et d'autre procéder. Mme la
ministre, si vous désirez remercier...
Mme Lavoie-Roux: Je veux remercier M. Francoeur. On aurait
peut-être pu profiter même d'une discussion plus longue sur le
fond. Je dois vous dire, M. Francoeur, qu'il y a certaines de vos affirmations
qui m'inquiètent un peu en ce qui a trait d'abord à l'adoption
privée. Les gens vont là-bas, reviennent ici, se font
entérinés et par la suite, vous avez dit: Non, il va y avoir les
consentements, etc. Je ne suis pas sûre qu'il n'y ait pas eu à
certains moments certaines contradictions dans ce que vous avez avancé.
Mais, quoi qu'il en soit, je retiens de votre message - et c'est un message que
d'autres nous ont donné - qu'il y a des difficultés
administratives et même d'interprétation juridique en ce qui
concerne l'adoption internationale au Québec à ce moment-ci.
C'est le but de la commission - nous l'espérons - de pouvoir
remédier à ces problèmes qui nous ont aussi
été signalés par d'autres. Je vous remercie.
M. Francoeur: Merci beaucoup.
Le Président (M. Bélanger): M.
Francoeur, je retiens particulièrement un message de votre
intervention. Ce n'est peut-être pas sur la loi, comme telle, qu'il faut
s'interroger, mais sur l'attitude des gens qui l'appliquent. En tout cas, cela
semble davantage un problème d'attitude envers les gens. Cela me semble
généralisé et cela m'inquiète parce qu'il me semble
que beaucoup de gens seraient déviants. Il faudrait peut-être que,
dans l'application de la prochaine loi, on arrive à corriger cela. Mme
la députée de Marie-Victorin, vous voulez...
Mme Vermettet Je voulais vous remercier. Je pense que vous avez
fait ressortir ce soir par vos déclarations, qu'il faut s'adapter au
contexte actuel du Québec. Il faut élargir notre vision. Ce qui
est important, tout le monde s'entend pour le dire, c'est
l'intérêt de l'enfant. Il faudrait peut-être arriver
à faire concorder nos perceptions par rapport à
l'intérêt de l'enfant et faire en sorte que plus d'enfants soient
heureux et aient une famille. Je vous remercie bien, monsieur.
Le Président (M. Bélanger): Bien. Nous allons
suspendre nos travaux pour quelques instants, histoire de permettre au prochain
groupe, qui est Adoption Estrie Inc., de se préparer.
(Suspension de la séance à 21 h 27)
(Reprise à 21 h 29)
Le Président (M. Bélanger): À l'ordre, s'il
vous plaît!
Je demande à chacun de reprendre sa place. La commission va
reprendre ses travaux dans quelques instants.
Nous recevons le groupe Adoption Estrie inc. représenté
par Mme Nicole Marchand, qui en est la présidente. Est-ce que Mme
Marchand veut bien s'identifier? C'est vous, avec le beau sourire?
Adoption Estrie inc. Mme Marchand (Nicole): Exactement.
Le Président (M. Bélanger): Mme
Marchand - pourrait-on fermer la porte, s'il vous plaît -
auriez-vous l'obligeance de nous présenter les gens qui vous
accompagnent? Vous connaissez nos règles de procédure ou est-ce
que vous voulez que je vous les explique?
Mme Marchand (Nicole): Si cela ne vous prend pas trop de temps,
j'aimerais cela...
Le Président (M. Bélanger): Deux minutes.
Mme Marchand (Nicole): ...parce que c'est ma première
expérience.
Le Président (M. Bélanger): Bon! Voici. Nous avons
une enveloppe globale de temps d'une heure. Cette enveloppe est divisée
en trois périodes de 20 minutes. Les premières 20 minutes vous
sont accordées pour faire le résumé ou pour
présenter votre mémoire. Ensuite, le parti ministériel et
le parti de l'Opposition ont une période de 20 minutes d'intervention
chacun, normalement divisée en deux sections de dix minutes en vertu de
la règle de l'alternance.
Mme Vermette: M. le Président, j'ai l'impression que si on
commence... Cela fait une demi-heure. Il est déjà 21 h 30. Est-ce
qu'on peut demander de prolonger jusqu'à ce qu'ils fassent leur heure
ou...
Le Président (M. Bélanger): On va filer et,
à 22 heures, techniquement, on va en faire la demande à ce
moment-là. C'est à l'heure précise qu'il faut le
faire.
Mme Vermette: Parfait!
Une voix: II ne faut pas voir disparaître le temps.
Le Président (M. Bélanger): Au cas où on
aurait fini avant. Donc, grosso modo, ce sont les règles de
procédure. C'est aussi simple que cela. Les gens de votre équipe
peuvent intervenir pour répondre, s'ils le jugent à propos ou, si
vous le jugez à propos, vous pouvez le leur demander. Sentez-vous
très à l'aise. Mme Marchand, je vous prie...
Mme Marchand (Nicole): J'aimerais vous présenter Mme
Sylvie Hallé, qui est vice-présidente de l'association, M. Guy
Achim, à ma gauche, qui est également vice-président et
Mme Jocelyne Laçasse, qui est aussi vice-présidente.
Moi-même, je suis la présidente de l'association.
M. le Président, Mme la ministre, Mmes et MM. les
députés, je dois vous signaler que nous sommes heureux de
participer à la commission parlementaire concernant l'adoption
internationale. Nous vous remercions d'avoir porté une attention
particulière à notre mémoire.
Le Président (M. Bélanger): Pouvez-vous vous
approcher davantage du micro? On vous entend très mal. Est-ce que vous
pouvez monter le volume? Non? II reste une solution, approchez-vous.
Mme Marchand (Nicole): Oui, parce que le micro est fixe. Si ce
n'est pas adéquat, vous me le dites et je me reprends. Je signalais que
nous étions heureux de participer à la commission parlementaire
concernant l'adoption internationale et que nous vous remercions d'avoir
porté une attention particulière au mémoire que nous avons
déposé.
Dans un premier temps, je vais faire une brève lecture de
certains points de notre résumé du mémoire. Par la suite,
nous allons parler de deux points plus précis: le projet de loi 21 et la
situation particulière que nous vivons en Estrie. Nous conclurons par la
suite.
Adoption Estrie inc. est un organisme sans but lucratif qui regroupe
l'ensemble des parents adoptants de l'Estrie. C'est un organisme qui a pour but
de reqrouper les parents adoptants, de les informer et de défendre
également leurs intérêts auprès des
différentes instances politiques et gouvernementales afin
d'accélérer le processus de l'adoption internationale.
Les parents adoptants voulant un enfant sont conscients d'un temps
d'attente inexplicablement long. Un manque de ressources dans les centres de
services sociaux est à signaler. Après quelques années
d'attente, leurs dossiers parviennent au Secrétariat à l'adoption
internationale. Nous avons, en moyenne, trois à quatre ans de
délai d'attente dans la réqion de l'Estrie.
Depuis novembre 1986, le dépôt du projet de loi 139
modifiant la Loi sur la protection de la jeunesse et concernant l'adoption
internationale limitait et limite toujours l'accès aux pays ayant
l'adoption plénière seulement. La ministre de la Santé et
des Services sociaux doit légalement permettre la reconnaissance des
juqements d'adoption simple au même titre que ceux He l'adoption
plénîère quand, pendant ce temps, les parents adoptants
attendent toujours qu'un enfant leur soit désiqné. Les parents
devront attendre longtemps, car actuellement il y a peu de pays
répondant aux exiqences du Secrétariat à l'adoption
internationale. Pendant ce temps, les enfants disponibles pour l'adoption sont
dirigés vers d'autres provinces ou vers d'autres pays qui ont une
volonté politique ouverte à l'adoption internationale. Nous
devons être conscients que l'adoption internationale est une solution au
problème de la dénatalité sans cesse croissant au
Québec, et qui fait quand même la manchette des journaux depuis
quelques mois. Cette solution est aussi valable que l'arrivée,
souhaitée par le gouvernement, d'immigrants adultes.
Nous tenons aussi à souligner que l'association Adoption Estrie
inc. pense avant tout au bien-être des enfants qui vivent en
Amérique centrale, en Amérique du Sud ou dans d'autres pays.
Quand nous pensons au bien-être de l'enfant, nous y pensons en termes de
bien-être physique, psychique et pour tout l'ensemble du volet affectif.
Nous voulons leur donner une stabilité familiale et
résidentielle afin de leur permettre un développement
à tous les niveaux, au maximum de ce que les parents, qui ont toute
l'affection et l'amour voulus, peuvent leur donner. Pour nous, c'est
très important de le souligner.
J'aurais le goût de passer tout de suite au projet de loi 21. Mon
confrère, Guy, va vous faire une brève présentation de
notre compréhension et aussi des interrogations que nous avons à
ce sujet.
M. Achim (Guy): Dans un premier temps, le projet de loi 21 nous
semble une amélioration importante de la situation actuelle. L'article
614.3, de la façon dont nous le comprenons, va permettre la
reconnaissance, au Québec, de jugements étrangers qui seraient
normalement d'adoption dite simple, si l'État étranger donne son
consentement par l'entremise d'un représentant. Ce qui nous
inquiète, c'est de savoir s'il existe déjà dans plusieurs
pays des organismes ou des représentants autorisés qui pourraient
remplir ce rôle; ce n'est pas évident.
Actuellement, la situation que nous vivons est la suivante: II y a
environ quatre ou cinq pays qui sont accessibles, si on parle d'adoption
simple. Si le projet de loi 21 a pour seule conséquence d'en augmenter
le nombre à six, sept ou huit - parce que cela n'existe à peu
près pas, des pays où il y a un représentant ou un
organisme autorisé permettant que l'État étranger donne
son consentement par son entremise - nous ne serons guère plus
avancés. C'est une interrogation importante pour nous.
Si, par ailleurs - comme cela a été dit dans certains
milieux il y a des représentants autorisés ou des organismes
pouvant agir comme représentants autorisés dans plusieurs pays,
dont le Brésil, par exemple, la situation serait évidemment
différente, quant à nous. C'est une première
interrogation. Cela semble ouvrir la porte à une amélioration
importante de la situation actuelle.
Cependant, nous soulevons une interrogation très importante
également en vertu de l'article 72.3 de la Loi sur la protection de la
jeunesse, tel qu'il apparaît dans le projet de loi. Dans cet article, on
parle d'organisme reconnu. On se pose la question suivante: Est-ce que par
"organisme reconnu" on entend substituer le secrétariat et lui donner,
à ce moment-là, encore plus de pouvoirs? Si c'est le cas, nous
croyons que ce n'est absolument pas la solution, et qu'au contraire, cela va
à l'encontre de tous les espoirs des parents quant à l'adoption
internationale. Si ce n'est pas le cas et que c'est bien la reconnaissance
officielle et plus organisée, si l'on veut, d'organismes qui existent
déjà, d'organismes efficaces, à ce moment-là, pour
nous, c'est vraiment une amélioration. Le projet de loi apportera
également sur ce point-là une amélioration. Finalement, la
question fondamentale que l'on se pose à la lecture du projet de loi est
de savoir si l'on renforce les pouvoirs du secrétariat et si l'on
complique davantage une situation qui est de plus en plus difficile et de plus
en plus inextricable? Cela, on ne peut pas le dire. On ne connaît pas la
réglementation qui accompagnera le projet de loi et on pense que c'est
dans la réglementation que cela va vraiment se jouer. Les principes en
soi nous apparaissent acceptables, nous apparaissent être une
amélioration. Mais c'est l'application qui nous laisse vraiment
incertains, et totalement. D'une part, notre position en ce qui concerne les
organismes est que ces organismes se sont révélés et se
révèlent certainement beaucoup plus efficaces que le
secrétariat peut l'être. Ils ont des contacts sur le terrain. Cela
peut varier évidemment d'un organisme à l'autre, mais les
orqanismes qui fonctionnent déjà et qui sont efficaces sont des
organismes qui mériteraient d'avoir un meilleur sort quant à la
collaboration qui leur est réservée au secrétariat. Ce
point-là ayant déjà été traité par
d'autres, je ne veux pas m'y attarder davantage.
Ce que l'on reconnaît d'abord et avant tout, et cela a
été mentionné par l'intervenant qui nous
précédait, c'est la question du contrôle. Nous
reconnaissons totalement le bien-fondé, la nécessité d'une
forme de contrôle très efficace par l'État. Tous les gens
que nous avons rencontrés sont d'accord avec cela. Là où
nous ne sommes pas d'accord, c'est vraiment sur l'application quotidienne au
point de vue administratif qui a été vécue dans les
dernières années. Nous sommes en désaccord profond sur ce
point. Nous croyons que cela doit changer et que cela doit se refléter
dans la réqlementation. Â ce point de vue, le Secrétariat
à l'adoption internationale doit avoir un rôle diminué du
côté de ses pouvoirs, et ce doit être vraiment un rôle
de coordination. Que l'on donne des règles du jeu claires et
précises à des organismes, que l'on reconnaisse ces orqanismes,
qu'on exige d'eux des performances de qualité et des standards de
qualité, et nous croyons qu'à ce moment-là nous allons
régler une partie importante, et très rapidement, du
problème de l'adoption internationale en ce qui concerne, par exemple,
ce qu'on appelle, entre guillemets, le manque d'enfants.
Simplement, et je redonnerai la parole à Mme Marchand
après cela, je vous rappelle que le Secrétariat à
l'adoption internationale, en ce qui concerne son mandat initial, ne s'est
malheureusement pas révélé à la hauteur du mandat
qu'il lui avait été confié. Entre autres, quand on parlait
de négocier des ententes avec des pays étrangers ou de s'assurer
de la coordination et de la
cohérence des initiatives gouvernementales en matière
d'adoption. Je ne veux pas non plus m1 attarder davantage
là-dessus. Nous croyons que le rôle du secrétariat n'est
pas de décourager les organismes ou les parents et de faire obstacle,
mais, bien au contraire, de coordonner et de faciliter, ce qui, je le
répète, n'est pas le cas.
Nous croyons que les gens du secrétariat devraient d'abord et
avant tout croire eux-mêmes à l'adoption internationale. Et nous
prétendons que ce n'est pas non plus le cas actuellement. En terminant
sur le projet de loi, quant à son contenu, la formalité qui
s'ajoute, celle du Tribunal de la jeunesse, sera efficace dans la mesure
où les ressources nécessaires seront disponibles pour qu'on ne se
retrouve pas devant une procédure additionnelle qui va, elle, engendrer
des délais additionnels. C'est finalement notre principale
réserve ou commentaire pour l'ensemble du projet de loi. Nous croyons
qu'il y a ce qu'il faut dans ce projet de loi pour trouver les solutions, mais
que la réglementation et son application seront déterminantes. Il
faut d'abord et avant tout éliminer le goulot d'étranglement que
constitue te Secrétariat à l'adoption internationale., Mme
Marchand? Merci.
Mme Marchand (Nicole): Merci. Donc, ce qu'il faut retenir, c'est
que nous sommes des parents qui avons de l'affection et de l'amour à
donner à des enfants. On aimerait finalement que le système mis
en place facilite les principes d'adoption et diminue les délais
d'adoption. Actuellement, lors de nos réunions de parents adoptants, ce
qui ressort" beaucoup, c'est que c'est lonG à attendre. On ne sait pas
trop comment cela se passe, pourquoi c'est si compliqué. Au fond, tout
ce qu'on veut, c'est avoir un enfant, l'aimer, pourvoir à ses besoins
vitaux, etc., et on ne comprend pas pourquoi cela prend du temps.
Il y a aussi une situation problématique en Estrie. Depuis le 1er
mai 1987, le Service d'adoption internationale du Centre de services sociaux de
l'Estrie, de la région 05 donc, n'existe plus. Actuellement, un couple
qui veut faire une demande d'adoption internationale ne sait pas où
s'adresser. Les dossiers des couples qui ont déjà adressé
leur demande d'adoption internationale sont? en suspens. On ne sait pas ce qui
va arriver à la suite de cela. On ne sait pas non plus qui va nous
donner de l'information sur les démarches à entreprendre, sur les
pays qui sont ouverts, sur les pays qui ne le sont plus; qui va assumer le
suivi du dossier psychosocial d'un enfant qui est accueilli au Québec
pour répondre aux exigences du pays et, surtout, qui va faire les
évaluations psychosociales des parents qui font des demandes d'adoption
internationale.
Ce sont quelques questions, il y en a d'autres également, ce qui
fait qu'actuellement on considère que notre situation est tragique. Nous
avons été surpris que Mme la ministre ait accepté la
disparition du Service d'adoption internationale pour la région 05. Nous
croyons qu'elle n'a pas reçu toute l'information requise concernant
l'implication de la fermeture de postes afin de combler le déficit
budgétaire du centre de services sociaux et qui, dans les faits,
signifiait la disparition totale du service. II est sûr que, quand on
parle de fermeture de postes ou de coupure de postes, si on parle d'un poste,
on peut croire qu'il reste peut-être un ou deux postes. Mais dans les
faits, il n'y avait qu'une seule et unique personne pour couvrir toutes les
demandes et la même personne, malgré un bon travail, n'arrivait
pas à rencontrer les parents, autant en ce qui concerne les
évaluations psychosociales qu'en ce qui concerne le suivi des
enfants.
Nous espérons que les informations que je viens de transmettre
à Mme la ministre permettront une révision de la situation afin
que nous obtenions une équité interrégionale. Nous sommes
convaincus que l'étude globale actuellement menée par le
ministère de la Santé et des Services sociaux et portant sur
l'évaluation de la richesse relative des régions confirmera que
la région 05 est un parent pauvre par rapport à l'ensemble du
Québec. Ce qui est plus dangereux, c'est qu'on peut créer un
précédent en ce qui concerne la province de Québec pour
l'adoption internationale. Nous espérons que cette position pourra
être corrigée lors de la distribution des budgets pour
l'année 1987-1988. Nous soulignons qu'il y a d'autres réqions qui
sont beaucoup plus avancées au chapitre des études
psychosociales, en ce sens qu'elles en sont rendues au début de
l'année 1985. Nous, quand le service a été fermé,
nous en étions au début de l'année 1984, je crois. (21 h
45)
Nous voudrions également suggérer à la ministre de
l'Immigration et également à la ministre de la Santé et
des Services sociaux de mettre en place un mécanisme de concertation
dans la mesure où l'adoption internationale et l'immiqration ont des
liens très étroits.
Cette concertation pourrait amener plus d'adoptions internationales en
réponse aux besoins d'immigration pour combler la
dénatalité québécoise. 3e pense qu'il n'est pas
nécessaire de souligner que le fait d'inclure l'adoption internationale
à l'intérieur de l'immigration permet de rajeunir une population,
de lui fournir une culture qui est la nôtre et une meilleure
intégration dans la société.
Nous irions jusqu'à recommander que des sommes provenant du
ministère de l'Immigration soient partagées avec le
ministère de la Santé et des Services sociaux
uniquement dans le cadre de l'adoption internationale afin de permettre
une mise à jour permanente des demandes d'adoption internationale autant
dans les centres de services sociaux qu'à l'organisme reconnu par le
ministère de la Santé et des Services sociaux qui est
actuellement le Secrétariat à l'adoption internationale.
Nous avions un poste, nous n'en avons plus. Le poste que nous avions
était à peine suffisant pour répondre aux demandes et nous
avions, de façon permanente, des retards de trois ou quatre ans. C'est
ce type de retard que nous aimerions voir combler par une concertation entre
les deux ministères.
Nous sommes également très inquiets quant à
l'avenir des parents adoptants qui ont déjà fait leur inscription
au centre de services sociaux advenant l'adoption du projet de loi 21. Nous
aimerions savoir où les parents s'insèrent dans ce processus et
quel type de processus également nous aurons dans le cadre du projet de
loi 21.
C'est l'ensemble de notre problématique dans la région 05.
Je tiens à vous souligner que plusieurs, sinon la totalité des
parents sont très inquiets et très malheureux de la situation. Il
y a également des nouveaux couples qui ont décidé de faire
une demande d'adoption internationale et qui ne savent plus très bien
où ils doivent s'adresser.
Je dois dire, au risque de répéter ce que vous avez
peut-être déjà entendu, que les mécanismes
d'adoption internationale, c'est compliqué, c'est long. Il y a plusieurs
procédures. Pour monsieur et madame Tout-le-Monde qui n'ont jamais
pataugé à l'intérieur de cela, ce n'est pas facile de
comprendre tout ce qui se passe. Quand on perd sa seule personne-ressource en
région, c'est encore plus compliqué de savoir ce qui se passe
parce qu'on n'a plus personne pour répondre à nos questions.
Il y a un autre aspect aussi que j'aimerais vous souligner: notre
inquiétude et notre désapprobation quant au temps d'attente et
à la lourdeur administrative du système. Nous doutons qu'une
structure, quelle qu'elle soit, puisse fonctionner adéquatement sans que
des ressources humaines et financières y soient ajoutées. Nous
souhaiterions que des sommes additionnelles permettent un mode de
fonctionnement adéquat et réceptif à l'adoption
internationale.
Il ne faut pas oublier que les parents adoptants investissent de
l'énergie, de l'amour et des sommes importantes pour permettre à
un enfant de s'épanouir dans notre contexte, de recevoir de l'affection
et aussi permettre que nous ayons l'occasion de répandre à ses
besoins en ce qui concerne l'affection, l'instruction, etc. Ce qui, dans les
faits, est une prise en charge globale.
Je crois que les parents, peut-être, répondent à un
besoin personnel aussi d'avoir un enfant et je pense que personne ne peut
contredire ce besoin. Je pense qu'en même temps ils veulent faire leur
part dans la société québécoise dans
différents domaines. Nous aimerions vivre l'adoption internationale non
pas comme une course à obstacles dont on ne connaît jamais la fin,
mais comme un acte simple et humanitaire qui, en plus, je pense, peut servir
autant des enfants en besoin d'affection que des parents qui ont la
disponibilité pour le faire. Pas juste la disponibilité...
Le Président (M. Bélanger): En conclusion, Mme
Marchand.
Mme Marchand (NicoIe): En conclusion -si je peux retrouver ma
petite feuille - on demande une clarification du rôle, des fonctions, des
responsabilités du secrétariat à l'adoption ou de tout
organisme reconnu par la ministre.
Nous proposons qu'un représentant des organismes et un
représentant des associations de parents siègent à un
conseil d'administration qui serait formé afin de faire valoir nos
opinions dans cet orqanisme reconnu et que - pour nous, c'est un point majeur -
nous n'ayons pas à attendre plus d'une moyenne de dix-huit mois entre la
date où nous faisons notre inscription à un centre de services
sociaux, si toutefois nous pouvons récupérer la personne que nous
avions en région, et l'arrivée de l'enfant.
Il ne faut pas oublier que nous avons vécu plusieurs
années en ce qui a trait à l'investigation médicale; je
pense qu'à un moment donné on a également envie de vivre
une vie familiale. Je vous remercie.
Le Président (M. Bélanger): Bien madame, je vous
remercie.
Mme la ministre de la Santé et des Services sociaux.
Mme Lavoie-Roux: M. le Président, je veux remercier les
représentants d'Adoption Estrie pour leur mémoire. Vous avez fait
état de plusieurs préoccupations. Je vais peut-être prendre
celle sur laquelle vous êtes revenue le plus souvent, en disant qu'il n'y
avait plus au CSS dans les Cantons de l'Est de personne particulièrement
affectée, comme ceci avait été le cas dans le
passé, à l'adoption internationale et à
l'évaluation des parents qui demandent une adoption internationale. Ceci
est présentement examiné. Évidemment, il faudrait
peut-être rappeler que les centres de services sociaux avaient
reçu l'an dernier, je pense que cela s'appliquait également au
CSS de l'Estrie, un certain montant pour le redressement de leur base
budgétaire. Évidemment, ils font des choix administratifs, mais
il semble bien que le choix qui a été fait - c'était un
demi-poste qui restait pour l'adoption
internationale, si ma mémoire est bonne -soit d'éliminer
le poste, a été présenté au ministère et
accepté comme tel. Dans ce sens-là, vous avez raison, mais on me
dit que, présentement, on est en pourparlers avec le centre de services
sociaux pour voir comment on peut remédier à cette situation qui
pénalise certainement les parents de votre région.
Je voudrais que vous me disiez la différence entre votre
organisme et l'organisme connu sous le nom Les Enfants de l'arc-en-ciel. Est-il
de la même région? Mais enfin, c'est peut-être moins
important dans tout le débat.
Vous avez soulevé une question relative à la
disponibilité de travailleurs sociaux pour faire les évaluations,
mais aussi au manque d'information concernant l'adoption internationale. Je
pense que vous la situiez même en dehors de la question du personnel.
C'est une remarque qui nous a été faite par plusieurs
intervenants qui nous ont dit que l'information n'était pas suffisante
et qu'elle était peut-être donnée au compte-goutte et cela,
depuis longtemps. Il semble bien que, si finalement on adopte un projet de loi
qui est satisfaisant, des règlements, etc., il faudra faire une plus
grande publicité ou enfin mieux les faire connaître et trouver des
moyens et des canaux d'information plus adéquats que ceux qu'on
connaît actuellement et qui semblent peut-être trop
réservés aux gens qui sont un peu plus initiés, ou aux
parents qui se sont eux-mêmes impliqués dans des organismes comme
le vôtre.
Je voudrais vous parler d'une autre de vos inquiétudes, c'est le
fait que le dépôt de la loi 139 a limité l'accès aux
pays ayant l'adoption plénière. Je voudrais vous faire remarquer
qu'il n'y a pas eu de modification par rapport à ce qui existait
antérieurement. Cette disposition d'adoption plénière
était dans le Code civil du Québec, mais avait été
interprétée un peu différemment selon certaines pressions,
selon certaines considérations quelquefois. En ce sens-la, la loi 139
visait davantage à faire connaître au public quel était
vraiment le fond de la loi sur l'adoption internationale au Québec.
Deuxièmement, cela visait éqalement l'adoption d'un
règlement qui viendrait clarifier les responsabilités respectives
du secrétariat à l'adoption, du directeur de la protection de la
jeunesse et également des organismes en adoption internationale
reconnus. À l'heure actuelle, ce projet de règlement va devoir
connaître d'autres modifications de toute façon, parce qu'il a
été publié avant le projet de loi 21 et on ne voulait pas
retarder indûment, vu les attentes de la population et des parents en
particulier, pour clarifier la situation sur le plan juridique.
Je veux vous dire à ce moment-ci qu'il y a une
préoccupation quelque part en ce qui a trait à l'adoption
plénière et à l'adoption simple. Le projet de loi 21
élargit dans le sens d'une reconnaissance des adoptions simples dans les
pays où il y a eu consentement de l'État par une personne
autorisée ou un organisme autorisé. Déjà, dans un
certain nombre de pays, il existe de tels organismes qui ont une reconnaissance
de l'État et qui peuvent remplir des responsabilités sur le plan
de l'adoption internationale avec des pays étrangers.
Votre question était: Est-ce que cela élargit ou
rétrécit? Je pense que vous pensiez que ça
élargissait, mais, théoriquement, ça ne limite pas le
nombre de pays dans lesquels il pourrait se faire des adoptions, même
s'il s'agit de pays à adoption simple. Évidemment, il s'agira
quand même, dans ces pays-là, d'établir certaines
règles qui vont permettre d'élargir le cadre de l'adoption et de
ne pas le limiter strictement à des pays d'adoption
plénière, là où le nombre est le plus restreint,
selon l'interprétation que l'on fait du Code civil.
Vous parlez également d'une plus grande concertation entre le
ministère des Communautés culturelles et celui de la Santé
et des Services sociaux. Je dois vous dire qu'il est impossible de fonctionner
en adoption internationale pour le ministère de la Santé et des
Services sociaux, à moins que ne s'établisse une concertation,
étant donné que le ministère de l'Immigration et des
Communautés culturelles a des responsabilités, forcément,
dans le domaine de l'immigration.
D'ailleurs, je l'ai indiqué ce matin -vous n'y étiez
peut-être pas - ce projet de loi a été
élaboré en étroite concertation avec la Justice,
l'Immigration - il m'en manque un - les Relations internationales et le
ministère de la Santé et des Services sociaux.
Un dernier mot sur le rôle qui devrait être joué ou
l'inquiétude, je dirais, qui a été manifestée par
la totalité des cinq ou six groupes d'adoption internationale reconnus,
à savoir ce que seraient leurs responsabilités à l'avenir.
Est-ce que le projet de loi ou de règlement vient limiter leurs
responsabilités ou si, au contraire, ils sont appelés à
continuer de remplir les responsabilités qu'ils remplissent
présentement?
J'ai eu l'occasion de l'affirmer à plusieurs reprises. Il y a des
ambiquïtés, dans la loi ou dans le règlement, qui devront
être éclaircies avant la présentation finale. Je voudrais
simplement vous rassurer en disant que, là où ces organismes sont
reconnus et fonctionnent dans des pays désignés, il y a une
convention signée avec le gouvernement.
De toute évidence, ils sont le prolongement du ministre quant aux
interventions qu'ils peuvent faire dans ce pays à titre d'organismes
reconnus. Alors, il n'est aucune-
ment question de diminuer leurs responsabilités.
Je pense que votre organisme n'est peut-être pas encore reconnu.
Je pense que...
Mme Marchand (Nicole): Noua sommes une association de parents
adoptants et nous n'avons pas de contact avec des pays. Nous n'avons...
Mme Lavoie-Roux: Ahi vous n'avez pas de contact avec des pays,
vous?
Mme Marchand (Nicole): Non.
Mme Lavoie-Roux: Mais vous avez soulevé la question des
organismes reconnus tout à l'heure.
Mme Marchand (Nicole): Exactement.
Mme Lavoie-Roux: Alors, là où ils fonctionnent
comme étant le prolongement du ministre, ce sont eux qui interviendront
dans les pays désignés où ils oeuvrent présentement
et le ministre ou son délégué intervient dans les pays
où il n'y a pas d'organismes d'adoption internationale reconnus qui y
oeuvrent. Alors, j'espère que cela peut clarifier certaines choses.
Le Président (M. Bélanger): Si vous me le
permettez, Mme la ministre, compte tenu de l'heure, je dois demander le
consentement des membres si nous voulons continuer nos travaux au-delà
de 22 heures. Alors, nous pourrions continuer jusqu'à 22 h 20 ou 22 h 25
environ. Est-ce que j'ai le consentement des deux côtés?
Mme Lavoie-Roux: D' accord.
Le Président (M. Bélanger): Oui? Bien. Alors, je
présume que j'ai aussi le vôtre, mais nos règlements ne
prévoient pas que je vous le demande. Mme la ministre. (22 heures)
Mme Lavoie-Roux: Je retiens vos représentations en ce qui
a trait à la lourdeur, aux difficultés ou à votre course
à obstacles, comme vous l'avez indiqué tout à l'heure,
dans vos démarches d'adoption internationale. J'ose croire que le
travail que nous faisons ensemble ici permettra, en tout cas, d'en corriger une
bonne partie. On vise évidemment à tout corriger, mais
peut-être qu'aussi la perfection n'est pas de ce bas monde. C'est
certainement avec cet objectif d'aplanir les difficultés que les parents
éprouvent dans tout ce domaine de l'adoption internationale.
Le Président (M. Bélanger): Très bien! Vous
vouliez répondre, madame?
Mme Marchand (Nicole): Oui, j'aimerais préciser certains
points.
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
Mme Marchand (Nicole): Comme je le disais tout à l'heure,
nous ne sommes pas un organisme...
Mme Lavoie-Roux: J'avais pris l'exemple sur Les Enfants de
l'arc-en-ciel. Je m'excuse.
Mme Marchand (Nicole): C'est cela. Eux, c'est un organisme. Nous,
nous représentons...
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Mme Marchand (Nicole): ...une centaine de parents de la
réqion de l'Estrie.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Mme Marchand (Nicole): Nous nous sommes formés en
association justement pour mieux comprendre les mécanismes de l'adoption
et faire valoir nos délais d'attente que tout le monde trouvait
incroyables et inhumains, entre guillemets.
Vous parliez de manque d'information. Quand on avait notre praticienne
sociale en Estrie, nous avions quand même des rencontres mensuelles
où elle pouvait nous fournir de l'information. On pouvait s'en sortir.
Mais je pense que c'est davantage du côté des délais. Quand
on dit qu'on fait une demande en 1983 et qu'on est rendu en 1987... Ce sont les
trois ou quatre ans d'attente que cela nous prend avant même d'avoir un
petit signe de quelqu'un, un petit appel téléphonique pour nous
dire: On aimerait vous rencontrer pour savoir quelles sont vos incitations
à devenir parents. C'est ce que nous trouvons incroyable et
impensable.
Ensuite, que notre dossier soit acheminé au secrétariat et
qu'on n'ait seulement pas d'accusé réception pour nous dire: Oui,
votre dossier est arrivé... Je pense qu'on vit tout le temps un
phénomène d'insécurité et on ne sait pas trop ce
qui se passe avec notre dossier. Est-il perdu dans le courrier? Est-il bien
rendu ou pas? Qu'il y ait des délais d'attente dans un pays, je pense
qu'il faut s'y attendre. Il y a des mécanismes avec les notaires, les
avocats. On peut comprendre cela. Mais avoir à attendre trois ou quatre
ans pour une évaluation psychosociale... Ensuite, attendre que notre
dossier arrive sur le bureau de la bonne personne, qu'elle voit que notre
évaluation est valable et qu'un enfant est disponible, nous trouvons
impensable d'avoir à attendre tout ce temps-là, quand on sait
qu'à l'extérieur du Québec, cela prend 18 mois en moyenne.
Je l'ai
vérifié à l'extérieur du Québec. On
l'a vérifié avec des personnes des États-Unis.
Effectivement, c'est un délai qui nous paraîtrait beaucoup plus
raisonnable.
Mme Lavoie-Roux: Voua avez soulevé ce point dans votre
mémoire et il est vrai que dans les autres provinces et probablement aux
États-Unis, ils n'ont pas les mêmes règles concernant
l'adoption internationale. Le Québec a décidé d'agir en
matière d'adoption internationale en s1 inspirant des
principes ou des fondements de notre Loi sur la protection de la jeunesse. Il y
a quelqu'un qui a mentionné tout à l'heure - c'est
peut-être vous, dans votre mémoire - que j'avais dit à un
moment donné que c'était plus rigoureux au Québec que dans
d'autres provinces. C'est exact. Mais nous pensons que la question du respect
du droit de l'enfant ou l'intérêt de l'enfant est un principe
fondamental. On aurait pu faire le même raisonnement dans le cas de la
Loi sur la protection de la jeunesse, où on a aussi été
à l'avant-garde, eu égard aux autres lois canadiennes.
Mme Marchand (Nicole): Nous sommes entièrement d'accord
sur le respect des droits de l'enfant.
Mme Lavoie-Roux: C'est cela.
Mme Marchand (Nicole): Je pense que personne ne peut nier cela,
mais, parallèlement à cela, nous savons également qu'il y
a des enfants qui sont dans des orphelinats, dans des grands dortoirs, dans des
grandes cafétérias où ils n'ont aucune nourriture
affective. C'est à peine s'ils ont une nourriture substantielle chaque
jour. Là-dessus, j'ai des faits véridiques de parents qui sont
allés dans des pays pour chercher leurs enfants. Il y avait
peut-être 100 ou 110 enfants entre zéro et six ans qui ne
demandaient qu'à être adoptés. C'est dans un contexte comme
celui-là, quand on pense au bien-être de l'enfant, qu'on est
entièrement d'accord là-dessus. On voudrait que cela soit aussi
accordé à des enfants qui n'ont personne finalement pour les
représenter dans d'autres pays, sauf peut-être nous, finalement,
qui sommes prêts à collaborer à ce niveau.
Mme Lavoie-Roux: D'accord.
Le Président (M. Bélanger): Je vais
reconnaître Mme la députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Oui, M. le Président. Il me fait plaisir au
nom de ma formation politique de vous accueillir ici ce soir. Je sais que vous
passez un petit peu plus tard, à des heures indues, mais je pense que le
sujet demeure toujours aussi intéressant. Je pense que vous apportez
réellement un vécu personnel puisque vous êtes des parents
adoptants. Cela se sentait lorsque vous avez fait votre exposé, en tout
cas, lors de la présentation de votre mémoire. On voyait que
c'était vraiment d'une grande sincérité. C'est tout
à votre avantage» C'est pourquoi il est important qu'on prenne vos
recommandations au sérieux et qu'on leur accorde toute l'attention
qu'elles méritent parce que tout ceci est fait en fonction du
mieux-être de l'enfant. Au cours de cette commission on s'aperçoit
que ce n'est pas tout le monde qui a les mêmes perceptions quant au
mieux-être de l'enfant. Il faudra qu'on tente d'avoir plus
d'homogénéité, quant à la conception du
mieux-être de l'enfant et à partir cela peut-être qu'on
pourra élaborer des règles de procédure qui correspondront
davantage et qui seront beaucoup plus conformes aux attentes et au respect de
l'enfant, des parents et des pays étrangers avec lesquels nous devons
faire affaire pour l'adoption internationale.
D'autre part, on sait qu'avec le projet de loi tel que libellé,
des associations ont montré certaines réticences. Il reste
certains points à éclaircir parce que ce n'est pas tout à
fait clair. Le projet de loi pourrait limiter les droits de certains
organismes. 11 pourrait aussi causer une accumulation de délais avec la
nouvelle procédure de faire vérifier le projet par le tribunal.
Il y aura aussi le jumelage du projet qui sera fait maintenant par les DPJ et
non plus par les différents organismes intermédiaires qui le
faisaient antérieurement. On espère que la révision ne
causera pas de délais indus. Vous avez aussi mentionné dans votre
mémoire un élément assez substantiel, en tout cas à
mon avis: ce sont les ressources financières. On aura beau parler du
problème judiciaire, si on n'a pas la volonté ferme
d'accroître certains budgets, je ne pense pas qu'on pourra
répondre aux besoins et qu'on apportera les véritables solutions
aux problèmes que vivent actuellement l'ensemble des parents adoptants
du Québec. M. le Président, maintenant, ma collègue de
Johnson voudrait poser quelques questions parce qu'elle semble directement
concernée par la problématique de l'Estrie.
Le Président (M. Bélanger): Alors Mme la
députée de Johnson, je vous en prie.
Mme Juneau: Est-ce que vous n'allez pas...
Le Président (M. Bélanger): Aucun problème,
je vous en prie.
Mme Lavoie-Roux: On a une très bonne commission.
Mme Juneau: Je remercie beaucoup ma collègue. Étant
donné qu'il s'agit des gens de l'Estrie, il me fait plaisir d'avoir la
chance d'intervenir. Je pense qu'on a enlevé l'adoption internationale
aux services sociaux, mais on a conservé quand même le maintien du
planning familial. Je trouve spécial qu'on ait maintenu le planning
familial qui, en fait, comporte aussi l'avortement. On a tant besoin d'enfants
au Québec. Je me pose de sérieuses questions. Pourquoi
n'avons-nous pas enlevé le planning familial dans le cas de la
région de l'Estrie? On est la seule région qui n'a pas ce service
d'adoption internationale...
Mme Lavoie-Roux: Est-ce que vous permettez, Mme Juneau, juste une
petite seconde?
Mme Juneau: Oui, je voudrais bien savoir...
Mme Lavoie-Roux: Ces choix sont faits localement. Je ne sais pas
si toute la question de planning familial était au CSS, souvent c'est
rattaché à un hôpital, au DSC et au CLSC. À ce
moment-là ce sont des choix qui sont faits localement.
Mme Juneau: On a rapporté dans le journal à ce
sujet, Mme la ministre, qu'on leur a demandé de couper dans leurs
dépenses et de proposer certaines choses et il semblerait qu'ils ont eu
la directive de couper justement l'adoption.
Mme Lavoie-Roux: On a dû leur proposer différents
choix.
Mme Juneau: Oui. Quatre choix. Il semblerait qu'on leur a dit que
c'était là qu'on devait couper. Je connais les besoins des gens
de l'Estrie; il ya 111 couples qui attendaient d'être
évalués à Sherbrooke au centre de services sociaux et qui
n'ont pas pu l'être à cause de cela. Tel que madame le disait dans
son exposé tout à l'heure: Où allons-nous? Qu'est-ce
qu'ils vont faire? À qui vont-ils s'adresser. On est vraiment les
enfants pauvres en Estrie concernant l'adoption internationale. Si j'ai bien
saisi les propos de M. Achim tout à l'heure, vous avez parlé de
goulot d'étranglement concernant le secrétariat international,
à ce moment-là vers qui les parents adoptants de chez-nous
vont-ils se retourner?
Mme Lavoie-Roux: J'ai répondu à cela tantôt,
Mme Juneau.
Mme Juneau: Oui, mais je trouve cela un peu spécial.
Mme Lavoie-Roux: Mme la députée de Johnson, je
m'excuse.
Mme Juneau: Ce n'est pas grave. Je voulais aussi vous demander
quelque chose par rapport à cela. Vous avez dit tout à l'heure
que vous souhaitiez qu'il y ait au conseil d'administration du
secrétariat un membre des associations reconnues au Québec.
Est-ce que vous voulez dire par région ou quoi?
Mme Marchand (Nicole): Au même titre que dans les CRSSS,
dans les CSS ou dans les CLSC, il y a toujours des représentants des
organismes communautaires comme on peut avoir des représentants de
centres hospitaliers ou d'autres orqanismes. Nous aimerions également
qu'à l'intérieur du Secrétariat à l'adoption
internationale, nous ayons la possibilité d'avoir un représentant
des orqanismes et un représentant de associations des parents du
Québec pour y siéger et faire valoir finalement nos
intérêts et nos droits aussi.
Mme Juneau: Cela vous donnerait à ce moment-là une
personne-ressource auprès de qui vous pourriez aller chercher de
l'information, tel que vous l'avez mentionné tout à l'heure.
J'imagine que c'est dans ce sens-là que...
Mme Marchand (Nicole): C'est un droit acquis aux CRSSS, aux CSS,
aux CLSC, et aux centres hospitaliers. Pourquoi cela ne le serait-il pas
également au Secrétariat à l'adoption Internationale, qui
est quand même un organisme relevant du ministère de la
Santé et des Services sociaux?
Mme Juneau: Mme la ministre, vous avez dit tout à l'heure
que la loi a été préparée en étroite
collaboration avec le ministère de l'Immigration et le ministère
des Relations internationales. Est-ce que cela veut dire, aussi pour le
bénéfice des gens qui viennent nous présenter des
mémoires, qu'ayant participé à l'élaboration du
projet de loi, ces deux ministères vont être étroitement
reliés dans les coûts que pourrait occasionner la mise sur pied de
certains services pour les parents et pour les associations? Est-ce que cette
étroite collaboration va aller jusque-là?
Mme Lavoie-Roux: Cela dépend à quel service vous
faites allusion. Par exemple, il y a des services sur tout ce qui touche les
dispositions relatives à la protection de la jeunesse:
évaluation, etc., qui relèvent de la responsabilité du
ministère de la Santé et des Services sociaux. À quelle
responsabilité faites-vous allusion exactement? À ce
moment-là, si eux assument des responsabilités - mais je ne vois
pas dans l'immédiat quelles responsabilités sont strictement
reliées à ces ministères - il serait concevable qu'on leur
demande d'assumer les
coûts reliés à leurs propres fonctions. Mais, quand
j'ai parlé de l'étroite collaboration, c'est sur le plan d'une
cohérence juridique entre les responsabilités de chacun et les
opinions juridiques de chaque ministère.
Mme Juneau: Mais il me semble que tous les organismes en
général qui se sont présentés ici ont tous
été unanimes à dire: On manque de ressources. Il n'y a
personne pour répondre à nos attentes. C'est une lenteur qui est
quasi...
Le Président (M. Bélanger): Je m'excuse, Mme la
députée de Johnson.
J'aimerais qu'on s'en tienne à l'analyse du mémoire du
groupe...
Mme Juneau: Oui, mais justement, ils ont parlé de
lenteur.
Le Président (M. Bélanger): ...et que l'on puisse
par la suite faire un débat parlementaire entre nous, si vous le
permettez.
Mme Juneau: Je m'excuse, M. le Président. Je comprends
bien, mais en demandant des réponses à la ministre, cela donne
aussi des réponses à ces gens-là qui s'interrogent.
Mme Marchand (Nicole): J'ai deux personnes à
côté de moi qui auraient peut-être des réflexions
à faire sur les derniers propos de Mme la députée.
Le Président (M. Bélanger): Très bien,
monsieur. (22 h 15)
M. Achim: Avec votre permission, dans un premier temps, ce que
Mme la députée de Johnson mentionne c'est un fait. On a besoin de
ressources, c'est clair, mais ce qui nous importe davantage c'est vraiment un
allégement du carcan administratif devant lequel on se trouve
aujourd'hui. C'est la chose primordiale. On a besoin d'un cadre clair,
fonctionnel et qui permette de réaliser les projets d'adoption. On a
besoin d'un minimum de ressources, mais on a d'abord besoin surtout et avant
tout d'une volonté politique d'adoption internationale au Québec.
C'est ce que nous prétendons et ce qu'on ne retrouve pas actuellement.
C'est même à l'encontre. Nous croyons que le secrétariat
à l'adoption, à toutes fins utiles, dans les faits, pose des
gestes qui vont à l'encontre de cela. Je vous le mentionnais tout
à l'heure et je vous le répète, je laisserai la parole
à d'autres ensuite. À titre d'exemple, il y a, non pas des
associations, mais des organismes comme Les Enfants de l'arc-en-eiel, etc., qui
fonctionnent très bien, qui n'ont pas la collaboration requise du
secrétariat. Il y a même dans certains cas - je ne parle pas de
cet organisme en particulier, je dis dans certains cas - presque de
l'intimidation, en ce sens que, si on ne se plie pas ou si on ne fait pas
certaines choses, il y a un durcissement des positions. Je crois qu'on doit
alléger la structure administrative des organismes et permettre à
ceux qui sont efficaces et qui fonctionnent bien de le faire pleinement. C'est
pour cela que je vous dis que l'encadrement administratif est tout aussi
important que les ressources financières qui peuvent être
accordées. Merci.
Mme Juneau: Je ne sais pas si c'était tout à
l'heure, mais vous avez parlé des standards de qualité pour les
orqanismes existants. Quels sont, pour vous, les standards de qualité
requis pour que ce soit vraiment un organisme représentatif des
besoins?
M. Achim: Pour nous, actuellement, c'est impossible de le dire.
D'une part, on n'a pas vraiment la compétence. Ce n'est pas parce qu'on
est des parents adaptants qu'on devient aptes à dire; C'est un organisme
correct et efficace. Mais on souhaite que les règles du jeu, pour les
organismes, justement ce qu'on appelle les standards de qualité, soient
établies. Il y en a des organismes privés et ils sont efficaces.
Dans la mesure où ils respectent les critères établis dans
les règlements, qu'on laisse ces organismes fonctionner. Ce n'est pas
à nous d'établir ces critères, mais nous demandons qu'ils
soient établis clairement. Une fois qu'ils seront établis et une
fois que ces organismes auront fait la preuve qu'ils les respectent, qu'on les
laisse fonctionner.
Sans endosser les positions de M. Francoeur - et cela, vraiment sur
plusieurs points - je pense qu'une chose est vraie. Le contact de ces
organismes et des parents désireux d'adapter est souvent beaucoup plus
efficace qu'une structure administrative, à moins que cette structure
soit vraiment dotée d'un budget très important, ce qui,
manifestement, ne sera pas le cas demain matin. L'adoption internationale ne
deviendra jamais à ce point une priorité que l'on mettra toutes
les ressources financières à sa disposition. Je dis, à ce
moment-là, qu'il y a des gens qui sont prêts à faire le
travail, qu'il y a des organismes compétents pour le faire. Donnons-leur
la possibilité de le faire et soulageons au maximum le fardeau
administratif. C'est un point essentiel si on veut que la réglementation
réponde aux demandes des parents dans le respect des droits des enfants.
On insiste là-dessus, et je pense que vous le comprenez, cela doit
refléter cela.
Mme Juneau: Est-ce que la fermeture du poste au centre de
services sociaux de l'Estrie va provoquer, chez les parents qui étaient
en attente pour une évaluation, une
dépense nouvelle? Pour être évalués»
est-ce qu'il va falloir qu'ils aillent dans le secteur privé? Qu'est-ce
qui va arriver?
Mme Hallé (Sylvie): Actuellement, puisqu'il n'y a pas
d'argent au CSS de i'Estrie pour rétablir le service à l'adoption
internationale, la solution qui nous est proposée est de faire affaire
avec des travailleurs sociaux privés, moyennant des sommes tournant
facilement autour de 300 $ et 400 $, ce qui est très réaliste,
simplement pour faire la démarche de l'étape de
l'évaluation sociale. À partir de ce moment, la coordination du
dossier, semble-t-il, va se compléter au secrétariat du CSS pour
être acheminé au Secrétariat à l'adoption
internationale à Montréal. Déjà, à cette
étape, on nous demande un déboursé additionnel de 300 $
à 400 $ pour pallier le manque de budgets que le centre de services
sociaux a actuellement.
Mme Juneau: Et l'évaluation qui... Pardon, je vous en
prie.
Mme Marchand (Nicole): Je voulais juste ajouter ceci. Quand les
parents font une demande d'adoption internationale, que nous ayons des
coûts supplémentaires de 300 $ à 400 $ en cours de route,
quand on investit quelques milliers de dollars, ce n'est pas cela, le point
majeur. Le point majeur, c'est qu'on n'aura plus de coordination, en Estrie, de
la liste d'attente. Je me dis: Qu'on puisse aller dans le privé et faire
faire nos évaluations psychosociales, répondre aux
critères gouvernementaux et que le dossier soit acheminé à
Montréal, tant mieux. Mais, notre liste d'attente, qui va la coordonner?
Qui va s'assurer qu'il y a finalement un suivi en ce qui concerne les enfants?
Qui va vérifier avec le secrétariat à Montréal que
les dossiers sont bien complets, que tous les papiers sont en règle,
etc., et qui va transmettre l'information entre Montréal et le parent?
C'est là le point majeur. Qu'on ait à débourser, cela peut
arriver.
M. Achim: Si vous me le permettez, Mme la députée.
Si, en dépensant 200 $ ou 300 $, on peut accélérer le
processus d'un an, je ne connais pas un seul parent dans notre association qui
va dire non. Déjà la personne qui tentait de faire son travail
là-bas était nettement débordée. Cependant, son
poste, comme Mme Marchand te disait, dans la coordination et le suivi, etc.,
était un élément essentiel.
Mme Juneau: Est-ce que, si vous allez en situation privée,
ce sera officiellement accepté par le secrétariat?
L'évaluation qui sera faite de ces parents par des gens du secteur
privé, est-ce que le secrétariat va accepter cette
évaluation ou est-ce qu'il faudra des personnes reconnues par...
Mme Marchand (Nicole): Actuellement, le conseil d'administration
du centre de services sociaux a reconnu trois intervenants psychosociaux aptes
à faire des évaluations psychosociales. Il va peut-être y
avoir des intervenants dans le secteur privé aussi qui vont se proposer
pour faire des évaluations, mais il y a au moins trois personnes
reconnues qui peuvent faire des évaluations psychosociales et les
acheminer à Montréal.
Même si on a le droit d'avoir des évaluations
psychosociales dans le secteur privé, cela ne change rien à notre
liste d'attente. Quand on défraie des coûts, on s'attend à
avoir des services et à ne pas attendre quatre ans. Si je vais voir un
avocat, je n'ai pas envie d'attendre quatre ans.
Mme Laçasse-Fontaine (Jocelyne): L'autre...
Mme Juneau: Oui, je vous en prie, madame.
Mme Laçasse-Fontaine: J'ajouterais peut-être ceci
à ce que Mme Marchand vient de dire: Sur une base d'équité
par rapport aux autres régions, l'Estrie se trouve
défavorisée non seulement en ce qui concerne la perte de service,
mais également du côté du manque d'information. Où
les parents vont-ils se rendre avec leur évaluation? La question que
vous posez reste entière. On sait qu'il y a des gens reconnus, mais on
ne sait pas si ce processus va être accepté par la suite par le
secrétariat. On est devant un mur, on ne sait pas.
Mme Marchand (Nicole): On est en attente de réponse.
Mme Juneau: Est-ce que c'est de là que part votre
suggestion d'avoir un membre du conseil d'administration qui
représenterait les parents et un autre, les organismes qui ferait le
lien ou...
Mme Marchand (Nicole): Nous avions déjà la
suggestion d'avoir un représentant de parents adoptants au
Secrétariat à l'adoption internationale avant même que la
fermeture du service ne soit formulée en Estrie.
Mme Hallé: Si je peux me permettre...
Le Président (M. Bélanger): Je vous en prie.
Mme Hallé: ...une remarque additionnelle. Mme la
députée de Johnson tout à l'heure mentionnait le travail
de concertation qui pourrait se faire entre le ministère des
Communautés culturelles et de l'Immigration et celui de la
Santé et des Services sociaux. Pour ce qui est du CSS, il est
évident qu'il relève directement de la juridiction du
ministère de la Santé et des Services sociaux. Par ailleurs, on
pourrait peut-être penser qu'à un autre niveau,
c'est-à-dire au niveau du Secrétariat à l'adoption
internationale, il y a également un grand besoin de ressources
financières et humaines. À ce niveau-là, peut-être
qu'un budget commun, venant du ministère des Communautés
culturelles et de l'Immigration et du ministère de la Santé et
des Services sociaux, pourrait augmenter l'efficacité de ces gens qui
travaillent au secrétariat, tant au point de vue budgétaire qu'au
point de vue du personnel. Dans ce domaine, je pense que ce terrain pourrait
être envisagé.
Mme Juneau: Je vous remercie. Merci, M. le Président.
Le Président (M. Bélanger); Je vous en prie,
madame. En conclusion, vous pourriez peut-être les remercier.
Mme Vermette: Ah bon!. Je pensais à une alternance. Mme la
ministre, vous voulez le faire ou...
Le Président (M. Bélanger): Ah bon! Mme la
ministre, d'accord.
Mme Lavoie-Roux: II ne me reste que quelques minutes. Je voudrais
quand même nuancer, pas ce que vous avez dit - peut-être dans une
certaine mesure - mais aussi l'impression que j'ai pu créer. J'ai dit
qu'il y avait plusieurs organismes d'adoption internationale reconnus qui
avaient aussi exprimé des réserves et parlé des
difficultés d'ordre administratif dans leur relation avec le
Secrétariat à l'adoption internationale.
De fait, cinq organismes d'adoption internationale reconnus sont venus
ici. Je dois vous dire - cela, on peut le retrouver dans le Journal des
débats - que dans deux cas, soit le groupe Accueillons un enfant,
qui travaille en Haïti en particulier, et le groupe Enfants d'Orient, nous
ont dit que le rapport avec le Secrétariat à l'adoption
internationale était très bon. Je pense que, en toute justice
aussi pour le Secrétariat à l'adoption inernationale, il est
important de faire cette mise au point.
Des trois autres qui restaient, il y en a deux qui ont exprimé le
genre de réserves qu'on a entendues à plusieurs reprises. Le
dernier, évidemment, était Les Enfants de l'arc-en-ciel qui,
n'étant pas encore un organisme officiellement reconnu se trouve aussi
dans une situation probablement difficile parce que de toute façon c'est
difficile pour le secrétariat de le reconnaître comme un organisme
officiel. Alors je pense qu'il faut le traiter à part,
celui-là.
Finalement dans le cas des quatre autres, cela s'est dit à demi,
il y a beaucoup d'autres personnes ou groupes qui sont aussi venus nous dire
leurs réserves. Je voulais simplement faire cette mise au point, M. le
Président, parce qu'il faut quand même faire la part des choses
dans ces questions. Encore une fois, je veux vous remercier. Pour le
bénéfice de notre collègue du comté de Johnson, je
vais lui dire - et il nous fait plaisir de l'accueillir d'ailleurs - que nous
nous penchons présentement sur le problème du Centre de services
sociaux de l'Estrie. En ce qui a trait aux choix qui ont été
faits, pour mon propre bénéfice, je vais m'informer de quelle
façon ces choix ont été faits. Généralement,
ce sont des recommandations qui viennent des centres de services sociaux ou des
différents établissements eux-mêmes. Je vous donnerai la
réponse d'une façon plus positive. Encore une fois, je vous
remercie d'être venus nous faire part de vos préoccupations.
Le Président (M. Bélanger): M. le
député de Sherbrooke.
M. Hamel: Très brièvement.
Le Président (M. Bélanger): II reste quatre
minutes.
M. Hamek Évidemment, je suis très-heureux aussi
d'avoir participé et de vous avoir entendus. Je vous avais d'ailleurs
rencontrés. J'avais aussi signalé ce très sérieux
problème du CSS de l'Estrie au bureau de Mme la ministre Lavoie-Roux et
comme elle vous l'a mentionné, c'est en train d'être
évalué pour voir s'il n'y aurait pas moyen de rendre justice
à l'Estrie de façon équitable. Merci, votre mémoire
est tout à fait pertinent.
M. le Président.
Le Président (M. Bélanger): Merci. Mme la
députée de Marie-Victorin.
Mme Vermette: Je vous remercie de vous être si bien
prêtés à nos questions. D'une part, vous avez
soulevé des faits qui s'avèrent fondés dans bien des cas.
Cela a été relevé par différents autres organismes.
On n'est pas ici pour protéqer un organisme, quel qu'il soit, mais pour
essayer de faire la lumière pour trouver les véritables
solutions, pour faire en sorte qu'on puisse vivre plus harmonieusement et plus
humainement l'adoption internationale. D'autre part, vous avez ausi
démontré que l'attitude du secrétariat - parce qu'on
manquait de ressources dans les CSS - était favorable jusqu'à un
certain point à une évaluation dont vous devrez défrayer
les frais. Je pense qu'on vient de créer un précédent.
Par
contre, c'est la reconnaissance du précédent par le
même secrétariat, parce que le manque de fonds vous a
orientés vers une solution et qu'il faudra se pencher là-dessus
pour vérifier maintenant ce qu'on va faire avec ce
précédent qu'on a évidemment établi à
l'heure actuelle et dont vous faites les frais. Il y a aussi le problème
fort important que vous avez soulevé: le manque de ressources du C5S
concernant le volet de l'adoption internationale, ce qui fait
qu'indépendamment de l'évaluation des parents, il n'en demeure
pas moins qu'il n'y a personne qui coordonne actuellement les démarches
des parents. Il n'y a personne qui peut entrer en interrelation avec le
secrétariat ou finalement faire en sorte que le projet que vous voulez
entreprendre en ce qui concerne l'adoption puisse avoir une fin à un
moment donné et même enclencher le processus normal pour une
démarche d'adoption. Quand on connaît les délais,
actuellement, je pense que vous pouvez être très anxieux
face à ce manque de ressources.
Le Président (M. Bélanger): Conclusion, s'il vous
plaît!
Mme Vermette: En conclusion, je pense qu'il faut plus
qu'évaluer la possibilité de trouver une solution à votre
problème. Si on le veut vraiment et si on croit réellement
à l'adoption internationale, on va trouver les sommes d'argent
nécessaires pour combler cette lacune. Merci.
Le Président (M. Bélanger): Mme
Lacasse-Fontaine, M. Achim, Mme Hallé et Mme la présidente
Marchand, on vous remercie de votre participation à nos travaux et sur
ce, la commission ajourne ses travaux au mercredi 13 mai 1987, à 10
heures.
(Fin de la séance à 22 h 30)